(Neuf
heures quarante minutes)
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Bon mercredi. Vous pouvez vous asseoir.
Affaires courantes
Déclarations de députés
Donc, nous débutons
nos travaux aux affaires courantes, à la rubrique de déclaration de députés, et
je cède la parole immédiatement à Mme la députée de Huntingdon.
Féliciter trois cavalières de la
circonscription de Huntingdon pour
leurs performances à la compétition équestre West Feria
Mme Claire IsaBelle
Mme IsaBelle :
Bonjour, Mme la Présidente. La circonscription de Huntingdon regorge de
formidables centres équestres dédiés aux loisirs et à la formation.
D'ailleurs, au mois
d'août dernier, à Tracy-Sorel, se tenait la 45e édition de West Feria, la
finale interrégionale d'équitation western
organisée par Cheval Québec. Près de 200 cavaliers ont participé à cette
compétition, dont 15 formaient l'équipe du Sud-Ouest, sous la direction
de Jacky-Lee Parent et Josée Fortin.
Trois jeunes
cavalières de chez nous se sont fait remarquer pour leurs talents : Audrey
Laplante de Napierville, Marie-Hélène Thibault de Lacolle, Riley Saint-Onge de
Hemmingford.
Félicitations, les
filles! Vous symbolisez des modèles de courage et de détermination pour tous
les jeunes qui pratiquent ce sport. Qui plus est, vous représentez une grande
fierté pour notre circonscription. Félicitations!
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la députée.
Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Verdun.
Souligner le départ à la
retraite de Mme Patricia Bossy, directrice
de l'organisme J'apprends avec mon enfant
Mme Isabelle Melançon
Mme Melançon :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, j'aimerais aujourd'hui rendre hommage
à Mme Patricia Bossy, qui a
dirigé l'organisme verdunois J'apprends avec mon enfant, qu'on appelle JAME,
pendant les 14 dernières années.
Après un parcours
jalonné d'épreuves et de succès, Patricia quitte pour la retraite. Elle peut
partir la conscience tranquille, car, grâce à son travail acharné, JAME se
trouve aujourd'hui dans une situation très enviable.
L'ingrédient clé de
cette réussite est certainement la passion de Patricia. Quiconque l'entend
parler de JAME ne peut qu'être convaincu de l'importance de cet organisme.
C'est ce que j'ai ressenti la toute première fois que j'ai rencontré
Patricia, et c'est probablement ce qui explique la présence d'une armée de
bénévoles impliqués au sein de JAME.
Ta
passion est contagieuse, Patricia. Peu importe quels seront tes futurs projets,
je ne te souhaite que le meilleur pour cette retraite. Bonne retraite,
Patricia!
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le député de Chauveau, la
parole est à vous.
Rendre hommage à M. Roger
Barbeau pour son
engagement bénévole et communautaire
M. Sylvain Lévesque
M. Lévesque
(Chauveau) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Aujourd'hui, je désire remercier M. Roger Barbeau
pour ses nombreuses années de bénévolat au sein de notre communauté.
C'est en 1952 que
M. Barbeau a commencé à faire du bénévolat. Il a d'abord été secrétaire à
la commission scolaire. Ensuite, il a fondé la Caisse populaire Desjardins
de Saint-Émile dans sa résidence. Il a siégé sur différents comités, il
a été marguillier, et j'en passe.
Toujours
impliqué auprès des Chevaliers de Colomb, M. Barbeau est un guide et un
mentor d'exception pour tous les chevaliers du comité paroissial de
Saint-Émile et du conseil Laval.
Comme
on dit, derrière chaque grand homme se cache une femme extraordinaire. Je tiens à saluer le soutien indéfectible de sa femme,
Mme Aline Drouin, tout au long de ces années et encore aujourd'hui.
M. Barbeau,
merci d'avoir consacré une partie de votre vie à notre communauté et merci
d'être encore engagé. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Laval-des-Rapides.
Souligner le Mois du patrimoine
hispanique
M. Saul Polo
M. Polo :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Depuis 2018, le mois d'octobre est
officiellement le Mois du patrimoine hispanique du Québec. Il s'agit d'une
occasion de souligner la richesse de l'apport que représentent les quelque
175 000 Québécois d'origine
latino-américaine et hispanique, autant dans le développement économique,
social et culturel du Québec. Ces
Québécois apportent avec eux la richesse de leur bagage culturel, favorisant
les échanges interculturels harmonieux et stimulant la créativité propre
face à notre société diversifiée.
Présents
dans toutes les sphères de notre marché du travail, que ce soit la culture, les
arts, les sports, le développement économique, ces Québécois sont, à
part entière, membres de notre société.
D'ailleurs,
je salue notre collègue de Viau, qui remettra, cette semaine, la Médaille de
l'Assemblée nationale à un modèle, un
exemple de notre communauté, l'architecte Oscar Ramirez. J'ai la conviction
profonde que le Québec s'enrichit à chaque fois qu'il accueille les
espoirs et les rêves des personnes venues d'ailleurs ici même.
À
tous les Québécois d'origine
latino-américaine et hispanique, je nous souhaite un bon mois de l'héritage
hispanique. (S'exprime en espagnol). Merci beaucoup.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant,
je cède la parole à M. le député de Sainte-Rose.
Souligner la Semaine lavalloise
des aînés
M. Christopher Skeete
M. Skeete : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Je prends le temps de ma déclaration, aujourd'hui, pour honorer
la 32e édition de la Semaine lavalloise
des aînés, qui débutera le 1er octobre prochain, à l'occasion de la Journée
nationale, bien sûr, des aînés.
C'est important pour
moi de souligner l'apport de nos aînés à la collectivité. Célébrons-la,
montrons-leur notre gratitude. Nos aînés
constituent une richesse inestimable. C'est notre devoir de nous assurer qu'ils
aient la reconnaissance qu'ils
méritent. Après tout, ils ont construit le Québec. Les personnes âgées
sont les piliers de notre société. Une grande majorité d'entre elles aussi assurent le bénévolat dans de nombreux
organismes partout à travers le Québec et apportent un soutien nécessaire à leurs
familles respectives.
Prenons un moment
pour penser à eux, pour se souvenir de tout ce qu'ils ont fait, et célébrons
ensemble leur contribution à travers le Québec. Merci beaucoup, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, M. le député. Mme la députée de Sherbrooke,
la parole est à vous.
Souligner la mobilisation des
Sherbrookois dans la lutte
contre les changements climatiques et pour
la protection de l'environnement
Mme Christine Labrie
Mme Labrie : Merci, Mme
la Présidente. Je veux souligner aujourd'hui le travail des organismes et des citoyens qui sont mobilisés
depuis longtemps à Sherbrooke sur les enjeux environnementaux.
Il
y a la Coalition étudiante pour un virage environnemental et social qui a
organisé la manifestation du 24 septembre dernier. Il y a aussi Urgence climatique Sherbrooke qui tient une
activité de mobilisation tous les jeudis devant l'hôtel de ville. Il y a les citoyens du groupe Vélo urbain Sherbrooke
et la Coop La Déraille qui font pression depuis des années pour faciliter le
cyclisme utilitaire. Il y a l'Association citoyenne des espaces verts de Sherbrooke
qui participera bientôt à La Grande marche pour la protection des
forêts, l'association citoyenne pour la protection des boisés et des parcs qui
se mobilise pour protéger nos boisés
urbains. Des citoyens s'impliquent aussi dans des associations pour la
protection de nos cours d'eau et le nettoyage des berges.
Ça
fait vraiment beaucoup de monde qui s'engage bénévolement, depuis des
années, pour influencer les décisions politiques
ou même compenser l'inaction des élus, et je veux les remercier aujourd'hui pour leur travail essentiel parce
qu'ils contribuent vraiment à améliorer notre qualité de vie et à nous
faire avancer comme société.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la députée.
Maintenant, je cède la parole à M. le député de Saint-Jean.
Souligner
l'ouverture d'une deuxième usine par l'entreprise
Les Plastiques Évolupak inc. à Saint-Jean-sur-Richelieu
M. Louis Lemieux
M. Lemieux :
Merci, Mme la Présidente. Plastiques Évolupak a inauguré cette semaine sa toute
nouvelle usine, sa deuxième, à
Saint-Jean-sur-Richelieu, et j'y étais en compagnie de ma collègue la ministre
déléguée à l'Économie et députée de Les Plaines, qui a annoncé un
montage financier de 10 millions de dollars pour épauler l'entreprise avec
le programme Essor, Investissement Québec et Fondaction pour équiper la
nouvelle usine.
Oui,
je le devine, il y a le mot «plastiques» dans le nom de la compagnie, et tout
de suite votre fibre environnementale s'est
froissée. Mais, justement, c'est tout le contraire. Michel Berger et toute sa
famille, qui l'accompagne dans cette aventure manufacturière 2.0, sont
tout ce qu'il y a de plus conscients de l'environnement, puisqu'à terme il s'agit d'économie circulaire. Et ils n'ont rien ménagé pour innover en créant
l'usine de demain, qui fabrique aujourd'hui des barquettes et des emballages
de plastique récupérés et recyclés. C'est
rien de moins que l'incarnation de la nouvelle économie et de l'économie verte
réunies. Et vous savez quoi? Ça marche. Avec de l'équipement de pointe et des
emplois de qualité.
Bravo et merci à la
famille Berger et à tous ses employés!
La Vice-Présidente
(Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole
à Mme la députée de Louis-Hébert.
Rendre hommage au Dr Pierre
Ferron,
oto-rhino-laryngologiste
Mme Geneviève Guilbault
Mme Guilbault : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Ce matin, je
désire rendre hommage à un grand homme et citoyen de Louis-Hébert, le Dr Pierre Ferron, décédé le
22 juin dernier, à son domicile, à l'âge de 83 ans. Il était entouré
de ses proches, à qui je souhaite mes plus sincères condoléances.
Dr Ferron
était un brillant oto-rhino-laryngologiste, qui a consacré une grande partie de
sa carrière à venir en aide aux
personnes sourdes ou malentendantes, qui ont pu profiter de son talent et de
son grand dévouement. On lui doit, entre autres, de nombreuses avancées
technologiques, dont l'implant cochléaire, au Canada.
En
1984, le grand chirurgien a réalisé pour la première fois au Canada l'opération
consistant à insérer un implant cochléaire
dans le crâne d'un patient. L'intervention avait duré plus de six heures.
En 2000, il a également réalisé l'exploit chez un enfant de
cinq mois, une première mondiale.
Son
travail exceptionnel lui a valu de nombreux prix et distinctions tout au long
de sa carrière, et il tirait une grande fierté de son titre de chevalier
de l'Ordre national du Québec, reçu en 2004.
En
terminant, je tiens aussi à souligner l'immense soutien de ses proches lors de
ses dernières années de vie, vécues en pleine pandémie, surtout son
épouse Francine, qui lui a témoigné douceur, amour et patience jusqu'à la toute
fin.
• (9 h 50) •
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la députée.
M. le député de Viau, la parole est à vous.
Féliciter M. Wolf Thyma,
récipiendaire d'une bourse destinée
à la relève dans le domaine des sciences de la santé
M. Frantz Benjamin
M. Benjamin :
Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, je tiens à rendre hommage à un jeune
homme extraordinaire, un jeune résident de la circonscription de Viau.
Il s'appelle Wolf Thyma.
Il n'a que
26 ans. Juriste, il est diplômé en droit avec mention d'excellence, et
dans quelques mois il sera aussi médecin, il sera diplômé en médecine.
Et,
Wolf Thyma, je veux saluer aujourd'hui l'excellence de son parcours, mais aussi
son implication dans la collectivité, car, comme étudiant-chercheur, il
a déjà contribué à plusieurs recherches visant les enjeux de santé et de
justice sociale.
J'ai
eu le bonheur, cette semaine, de lui remettre la bourse du député de Viau dans
le domaine des sciences de la santé, en partenariat avec le Sommet
socioéconomique pour le développement des jeunes des communautés noires, pour
saluer son parcours, pour saluer aussi son implication dans la collectivité.
Wolf,
tu es, pour les jeunes de la circonscription de Viau, tu es, pour l'ensemble
des jeunes du Québec, un modèle d'excellence
et surtout un modèle d'implication. Bonne chance dans ton parcours, monsieur le
docteur. Merci. À bientôt.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le député.
Ceci met fin à la rubrique de déclarations de députés.
Et je suspends les
travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à
9 h 51)
(Reprise à 10 h 4)
Le
Président : Mmes et MM. les députés, je vous souhaite un très
bon mercredi. Prenons quelques instants pour nous recueillir.
Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
Nous poursuivons les affaires courantes.
Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations
ministérielles.
Présentation de projets de loi
À la rubrique Présentation de projets de loi,
M. le leader de l'opposition officielle.
M. Fortin :
Oui, merci, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article a du règlement.
Projet de loi n° 897
Le Président :
Et, à l'article a du feuilleton, M. le député de LaFontaine présente le
projet de loi n° 897, Loi modifiant la
Loi sur les services de garde éducatifs à l'enfance afin de garantir le droit
de recevoir des services de garde. M. le député.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay : Merci beaucoup, M. le
Président. Donc, c'est avec une très grande fierté que je dépose aujourd'hui,
au nom de ma formation politique, le projet
de loi n° 897, Loi modifiant la Loi sur les services de garde éducatifs à
l'enfance afin de garantir le droit de recevoir des services de garde.
Les notes explicatives, toutes simples : Ce projet de
loi modifie donc la Loi des services de garde éducatifs à l'enfance afin
de garantir le droit de recevoir des services de garde. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le
Président : Et, en application de l'ordre spécial, j'invite les
leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur la
présentation de ce projet de loi, suivi des députés indépendants. M. le leader
de l'opposition officielle?
M. Fortin :
Pour.
Le Président : M. le leader
du gouvernement?
M. Jolin-Barrette : Pour.
Le Président : M. leader du...
Mme la leader du deuxième groupe d'opposition?
Mme Labrie : Pour.
Le Président : M. le leader
du troisième groupe d'opposition?
M. Ouellet : Pour.
Le Président : M. le député
de Chomedey?
M. Ouellette : Pour.
Le Président : M. le député
de Bonaventure?
M. Roy : Pour.
Le Président : Mme la députée
d'Iberville?
Mme Samson : Pour.
Le
Président : Je vous remercie. En conséquence, cette motion est
donc adoptée. M. le leader de l'opposition officielle.
M. Fortin : Oui, merci, M. le Président. Je profite de
l'occasion pour souligner que c'est le 14e projet de loi déposé par l'opposition officielle depuis le début de la
législature et pour relancer l'invitation au leader du gouvernement d'en
appeler un seul au cours de cette session.
Le
Président : M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, généralement, ce n'est pas
le forum pour faire cette intervention-là, M. le Président, mais on est toujours ouverts à discuter des différents
projets législatifs qui sont soumis par l'ensemble des députés ici. La preuve, M. le Président, c'est
qu'on a appelé et on a adopté le principe du projet de loi n° 197 du
député de Chomedey, M. le Président.
Le Président :
Vous aviez raison. Et on poursuit.
Dépôt de documents
Nous
en sommes maintenant à la rubrique Dépôt de documents. D'abord, M. le ministre
de la Santé et des Services sociaux.
Rapports annuels du CIUSSS—Nord-de-l'Île-de-Montréal,
du CIUSSS—Capitale-Nationale
et du CHUM, rapport sur l'application de la procédure d'examen des plaintes de
l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec,
et rapport annuel et rapport sur l'application de la procédure
d'examen des plaintes du CISSS-Laurentides
M. Dubé :
Alors, oui, M. le Président, je dépose les rapports annuels de gestion 2020‑2021
des CIUSSS du Nord-de-Montréal, de la
Capitale-Nationale, du CHUM, du CISSS des Laurentides, ainsi que les rapports
annuels 2020‑2021 sur
l'application de la procédure d'examen des plaintes et de l'amélioration de la
qualité des services du CISSS des Laurentides et de l'Institut
universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec. Merci, M. le
Président.
Le
Président : Ces documents sont déposés. M. le ministre de
l'Environnement et de la lutte contre les changements climatiques.
Rapport annuel de RECYC-QUÉBEC
M. Charette :
Merci, M. le Président. Je dépose le rapport annuel de 2020‑2021 de
RECYC-QUÉBEC.
Le Président :
Ce document est déposé. M. le ministre des Transports.
Rapport annuel de la Société des
traversiers
M. Bonnardel :
M. le Président, je dépose le rapport annuel de gestion 2020‑2021 de la
Société des Traversiers du Québec.
Le
Président : Ce document est déposé. Mme la ministre responsable
de l'Administration gouvernementale et présidente du Conseil du trésor.
Rapport annuel de la Société
québécoise des infrastructures
Mme LeBel :
Merci, M. le Président. Donc, je dépose le rapport annuel 2020‑2021 de la
Société québécoise des infrastructures. Merci, M. le Président.
Le
Président : Merci. Ces documents sont déposés. M. le ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Rapport annuel de
La Financière agricole
M. Lamontagne :
Oui, M. le Président. J'ai le plaisir de déposer le rapport annuel 2020‑2021
de La Financière agricole du Québec. Merci.
• (10 h 10) •
Le Président :
Et ce document est déposé. M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la
Solidarité sociale.
Rapport annuel du Tribunal
administratif du travail
M. Boulet :
M. le Président, je dépose le rapport annuel de gestion 2020‑2021 du
Tribunal administratif du travail. Merci, M. le Président.
Le Président :
Et ce document est donc déposé. M. le leader du gouvernement.
Réponses à des pétitions
M. Jolin-Barrette : M. le Président, je dépose la réponse du
gouvernement aux pétitions présentées en Chambre le 27 mai 2021 par la
députée de Mercier. Merci.
Le Président : Merci. Ce
document est déposé.
Il n'y a pas de dépôt de rapports de
commissions.
Il n'y a pas de dépôt de pétitions.
Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni
d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.
Questions et réponses orales
Nous en sommes maintenant à la période de
questions et de réponses orales, et je cède la parole à la cheffe de
l'opposition officielle.
Femmes stérilisées sans
consentement libre et éclairé
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade :
Merci, M. le Président. M. le Président, je vais vous lire l'extrait d'un
article : «Après la naissance de
son septième et dernier enfant, en 2019, un médecin aurait insisté pour [que
Joyce Echaquan] subisse une ligature des trompes, une opération irréversible qui la rendrait stérile. Encore une
fois, Joyce Echaquan aurait cédé sous la pression. [...]Elle aurait
voulu une autre fille.»
Nous sommes,
au Québec, des millions de femmes à avoir accouché, et on sait à quel point ce
moment-là, il est intense, il est intime, et on peut sentir une très grande
vulnérabilité. Au Québec, aujourd'hui, il y a des femmes qui, pendant leur accouchement, se font stériliser alors
qu'elles ne l'ont pas demandé. Il y a des femmes qui subissent une pression
pour qu'elles acceptent de se faire stériliser alors qu'elles sont en train
d'accoucher. Cette pratique-là, M. le Président, elle est intolérable,
elle est intolérable.
Et
aujourd'hui je demande au premier ministre de se lever puis de nous dire qu'en
cette Chambre on est capables de
prendre une décision qui a un impact sur ces femmes qui sont touchées. Je lui
demande s'il peut se lever et nous confirmer qu'au Québec ces
pratiques-là sont désormais terminées.
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M. Legault :
M. le Président, ça me donne froid dans le dos, d'entendre ce genre
d'intervention. De demander à une femme en plein accouchement la
permission de ligaturer, donc qu'elle ne puisse plus jamais avoir d'enfants,
c'est totalement, mais totalement inacceptable. C'est même barbare.
M. le
Président, le Collège des médecins est intervenu auprès de ses membres, auprès
de tous les médecins pour plus jamais
que ça ne se reproduise. Puis, avec le ministère de la Santé, on va s'assurer aussi de ça, donc on va s'assurer
que le message soit passé partout.
C'est inacceptable. Puis, oui, j'accepte de dire un gros oui à la demande de la
cheffe de l'opposition
officielle.
Le Président : Première
complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : Je suis contente d'entendre le premier ministre nous dire qu'il dit un gros oui et que dorénavant cette pratique-là, elle est terminée, parce que, oui,
elle est barbare, cette pratique.
Aujourd'hui, nous déposons une motion qui va directement en ce sens. Est-ce que
le premier ministre va donc accepter cette motion, qui, je
l'espère, sera unanime?
Le Président : M. le premier
ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le
Président, la motion qui a été
déposée par le Parti libéral, on est d'accord avec toute la motion, sauf une phrase où on
demande que ce soit le premier
ministre qui rencontre le président
du Collège des médecins. Bon,
d'abord, le Collège des médecins a déjà dit que c'était inacceptable puis a
envoyé l'information à tous les membres. Deuxièmement, c'est la responsabilité du ministre délégué à la Santé de s'assurer, avec le Collège des médecins, avec le
ministère, que jamais ça n'arrive.
Le Président : En terminant.
M. Legault :
Donc, malheureusement, le Parti libéral a refusé d'enlever ce petit bout de
phrase.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Mme Dominique Anglade
Mme Anglade : M. le
Président, c'est un enjeu qui
m'apparaît essentiel, fondamental, et de haute importance, et qui nécessite
l'implication directe du premier ministre. Il nous a dit, dans sa première
réponse, qu'il trouvait ça barbare. Quelque chose de barbare, pour moi, requiert
l'intervention du premier ministre.
Est-ce que, oui ou
non, il va s'impliquer et s'assurer que, lui-même, ces pratiques-là n'aient
plus...
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le
Président, la cheffe de l'opposition officielle connaît personnellement le ministre
délégué à la Santé. Elle sait que son épouse, en plus, est
obstétricienne. Elle sait que c'est un sujet, là, qui le touche beaucoup.
Et il est beaucoup plus, 100 fois plus compétent que moi pour
discuter de ça avec le Collège des
médecins, discuter de ça avec les
P.D.G. de CISSS, discuter de ça avec tous
les médecins qui font des accouchements. Donc, M. le Président, je ne vois
pas pourquoi le Parti libéral insiste pour ne pas enlever ce petit bout
de phrase pour dire...
Le Président :
En terminant.
M. Legault :
...au lieu du premier ministre, c'est la responsabilité du ministre délégué.
Le Président :
Troisième complémentaire, Mme la députée de Verdun.
Mme Isabelle Melançon
Mme Melançon :
Il faut qu'on ait une assurance, aujourd'hui, en cette Chambre, que plus jamais
ça ne va se reproduire. Il s'agit d'une façon de faire qui est scandaleuse, et
ça se produit chez nous en 2021.
Moi,
ce que je demande au premier ministre, c'est aussi de convoquer la ministre
de la Condition féminine pour qu'elle
puisse faire le suivi, parce que, sur ce dossier-là, on a besoin d'avoir du
leadership, il faut qu'on puisse avoir un enlignement très clair, et, s'il
vous plaît, on veut savoir qui sera, dans ce cabinet, responsable...
Le Président :
M. le premier ministre.
M. François Legault
M. Legault : M. le
Président, je pense, là, qu'il doit y
avoir moins de 10 000 médecins
qui font des accouchements au Québec.
Il faut que ces 10 000 médecins aient un ordre clair que plus jamais ce
ne soit fait au Québec. Puis la meilleure personne pour le faire, là, puis la cheffe de l'opposition officielle le
sait très bien parce qu'elle le connaît, c'est le ministre délégué à la
Santé. Il va le faire.
Le Président :
Question principale, M. le leader de l'opposition officielle.
Mesures pour contrer la pénurie
de main-d'oeuvre
M. André Fortin
M. Fortin : Oui, merci, M. le Président. Je veux revenir sur l'enjeu qui a été
discuté longuement hier, celui de la pénurie de main-d'oeuvre.
En
2016, le premier ministre du Québec, actuel, nous disait essentiellement qu'il
n'y en avait pas, de manque de personnel.
En 2018, il nous disait que ce n'était pas l'enjeu le plus important au niveau
économique, au Québec. Et même hier, même hier, le premier ministre répétait
qu'il voyait du positif là-dedans, que c'était positif, la pénurie de
main-d'oeuvre.
Mais ce qu'il fait,
en disant que c'est positif, M. le Président, c'est de dire que ce n'est pas
important pour lui, c'est de dire aux
travailleurs qui sont stressés, qui sont épuisés, qui sont démotivés que ce
n'est pas grave, que ce n'est pas grave
qu'ils soient en temps supplémentaire continuel, que ce n'est pas grave qu'ils
manquent du temps avec leurs enfants. Ce
qu'il fait, en niant la pénurie de main-d'oeuvre, M. le Président, c'est dire
aux entrepreneurs : Ce n'est pas grave si vous devez fermer votre entreprise, celle que vous avez bâtie
vous-mêmes, parce que vous n'êtes plus capables de la tenir ouverte seuls. Ce qu'il fait, en niant la pénurie
de main-d'oeuvre, M. le Président, c'est dire aux préposés et aux infirmières...
Le Président :
M. le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.
M. Jean
Boulet
M. Boulet :
Merci, M. le Président. Je pense qu'il faut redire à quel point la pénurie de
main-d'oeuvre est une priorité économique
pour notre gouvernement. Nous sommes en action avec les partenaires du marché
du travail. On fait... Ça s'appuie sur
des piliers : l'intégration des personnes issues de la diversité, au sens
général, dans le marché de l'emploi, les personnes en situation de
handicap, les jeunes, les personnes âgées, fait partie de ces personnes-là; la
formation en alternance travail-études, les formations de courte durée, la
requalification, on a permis à plus de 20 000 personnes de se
requalifier dans des secteurs prioritaires; l'augmentation de la productivité,
c'est un défi que nous devons relever avec l'ensemble
des entreprises du Québec, et ça, ça passe par la robotisation,
l'automatisation et l'intelligence artificielle; et, enfin, l'immigration, bien sûr, les personnes
issues de l'immigration qui sont qualifiées, les travailleurs étrangers
temporaires, pour des besoins pressants et urgents, on a fait une
entente avec Ottawa, le 4 août dernier, qui a été...
Le Président :
En terminant.
M. Boulet :
...dont on a rendu hommage partout. Merci, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.
M. André Fortin
M. Fortin : M. le
Président, ce que j'entends de la
bouche du ministre, c'est qu'on ne saisit pas l'ampleur de la
situation encore aujourd'hui et qu'on nous présente des demi-mesures
continuellement. Hier, là, hier, le Manoir Victoria, à Victoriaville,
c'est une résidence de personnes aînées où il y a 47 résidents, qui opère
depuis 40 ans, cette résidence-là, elle a dit à tout le monde, à toutes les familles : On n'a plus de
monde, on va fermer les portes, 47 résidents abandonnés. Nier la pénurie
de main-d'oeuvre, ne rien faire pour la pénurie de main-d'oeuvre, c'est
abandonner les Québécois.
• (10 h 20) •
Le Président :
Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais
(Prévost) : M. le Président, j'aimerais réagir. C'est toujours triste quand une résidence privée pour aînés
ferme ses portes. Il y a une personne,
préposée, qui a décidé de quitter, mais il y a quand même trois préposés qui
quittent parce que ces personnes ne
veulent pas se faire vacciner, sur 15 employés dans la résidence. Or,
c'est important de protéger nos personnes âgées et de se faire vacciner quand
on travaille avec les personnes les plus vulnérables.
Qui
plus est, depuis le 23 septembre, 96 % des personnes qui vivent dans cette résidence sont accompagnées
par l'établissement...
Le Président :
En terminant.
Mme Blais
(Prévost) : ...et on va voir à ce que toutes les personnes soient bien
relocalisées.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.
M. André Fortin
M. Fortin : M. le Président, en prenant des demi-mesures sur l'enjeu, on
n'abandonne pas juste les services aux Québécois,
on abandonne les travailleurs, on abandonne les employeurs, on abandonne les
gens qui sont supposés d'être des créateurs de richesse au Québec, qui
veulent être des créateurs de richesse au Québec.
Hier,
les manufacturiers ont dit très clairement au gouvernement que ces
demi-mesures, ça ne fonctionnerait pas, que ça empêchait de créer de la
richesse au Québec. Comment on peut se permettre ça?
Le Président :
M. le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.
M. Jean Boulet
M. Boulet :
Merci, M. le Président. D'un parti qui a peu fait en matière de pénurie de
main-d'oeuvre, c'est quand même assez
étonnant. On l'annonce depuis la fin des années 90. En 2007‑2008, les
démographes, les économistes l'anticipaient.
Écoutez, on a permis
de former au-delà de 250 000 travailleurs l'an dernier. 46 000
entreprises ont profité de nos mesures de
formation. En requalification, on a investi des sommes d'argent colossales, qui
ont donné des résultats. On a permis, en 2019, d'intégrer 138 000 personnes
dans le marché de l'emploi...
Le Président : En terminant.
M. Boulet :
...85 000 l'année dernière. Merci, M. le Président.
Le Président : Question
principale, M. le député de Nelligan.
Effets de la pénurie de main-d'oeuvre sur
le développement économique
M. Monsef Derraji
M. Derraji : La réponse au
ministre du Travail : Ce n'est pas assez. Avez-vous entendu les cris de
coeur, hier, des Manufacturiers et exportateurs du Québec? Est-ce que vous avez
devant vous le bilan des postes vacants? 200 000.
M. le Président, parlons en gage d'entreprise.
Quand tu recrutes quelqu'un et tu lui donnes le mandat de régler un problème, il doit le régler. Le problème n'est
pas réglé, la pénurie a doublé pendant l'ère caquiste. C'est ça, l'effet. Donc,
c'est bien beau que le ministre du Travail
relate l'ensemble des programmes, ça ne fonctionne pas. Vous savez pourquoi
ça ne fonctionne pas? Parce qu'hier, la
sortie des Manufacturiers et exportateurs du Québec, ils auraient dû saluer vos
mesures, ils auraient dû vous dire
bravo, au gouvernement caquiste. Par contre, ce qu'ils ont dit : On perd
18 milliards de dollars à cause de votre inaction.
Donc, M. le
Président, ce n'est pas à moi que le ministre doit me répondre, il doit
répondre aux Manufacturiers et exportateurs du Québec, qui perdent des
contrats aujourd'hui.
Le Président : M. le ministre
de... de l'Économie. M. le ministre de l'Économie.
M. Pierre Fitzgibbon
M. Fitzgibbon : On est en
harmonie, alors c'est correct.
Alors,
M. le Président, on a discuté, hier, de ça. Mettre un contexte à tout ça.
Le 18 milliards qui a été évoqué hier, qui frappe l'imaginaire, je
dois le concéder, est sur un sondage de 400 entreprises. Quand on regarde
les gens qui ont mentionné des pertes de
contrats sur un an, deux ans ou trois ans, ce qu'on peut accepter, c'est de
l'extrapolation. Maintenant, quand on regarde l'effet sur le PIB, il est
relativement modeste.
Ceci étant
dit, nous convenons qu'il y a une pénurie de main-d'oeuvre. Quand on regarde,
sur les 150 000 postes vacants,
il y en a entre 20 000 et 25 000 au niveau manufacturier. Mme Proulx,
du MEQ, a mentionné qu'elle aimerait voir ça réduire à 16 000. Donc, on parle d'entre 5 000 et 9 000 personnes
qu'on remet sur le marché du travail. Mon collègue, ministère du Travail, est à
l'oeuvre. Il y a 265 000 chômeurs, présentement, et, sur les employés
qu'il manque au niveau manufacturier,
la plupart n'ont pas besoin de bac universitaire. Donc, on peut régler ça à
l'intérieur. Les programmes qu'on a
en place sont bons. Et je parle aux entrepreneurs sur une base régulière, ils
sont satisfaits nos programmes. Évidemment, nous voulons les accélérer.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Nelligan.
M. Monsef Derraji
M. Derraji :
M. le Président, ce qui est fascinant, avec le ministre de l'Économie, quand je
l'entends répondre à mes questions, la vie est belle, tout va bien, il
n'y a pas de problème. Je l'invite à revoir l'étude des Manufacturiers et exportateurs du Québec. Je l'invite à aller voir
sur le terrain le dégât et l'ampleur de leur inaction. Ce sont les faits. Il
peut bien relater l'ensemble des problèmes... des programmes, mais,
monsieur, aujourd'hui, nous sommes devant un fait : l'inaction du
gouvernement caquiste, les programmes qui ne marchent pas met à mal notre
économie. Ce sont les faits. Quand allez-vous agir?
Le Président : M. le ministre
de l'Économie et de l'Innovation.
M. Pierre Fitzgibbon
M. Fitzgibbon : Encore
une fois, quand on regarde les faits,
nous notons que le PIB du Québec, sur une base réelle, a repris sa valeur
avant la pandémie. Les exportations au dernier trimestre sont à la hausse de 17 %.
Certes, on pourrait mieux faire. L'économie
du Québec est fondamentalement en bonne santé. La croissance économique qui va
arriver requiert de la main-d'oeuvre,
nous sommes d'accord. Encore une fois, 150 000 postes vacants,
265 000 chômeurs. On peut travailler à l'intérieur de ça. Et, sur les postes vacants, 87 % ne requièrent
pas de bac universitaire. Donc, les programmes qu'on a avec le ministère
du Travail est bon...
Le Président : En terminant.
M. Fitzgibbon : ...et en plus,
au niveau de l'économie, on investit dans l'innovation...
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le député de Nelligan.
M. Monsef
Derraji
M. Derraji :
M. le Président, en tout respect, je me permets de rectifier au ministre un
chiffre. Ce n'est pas 150 000, c'est 200 000 emplois vacants,
200 000, M. le ministre. Donc, j'espère qu'il va mettre à jour ses
informations. L'attente du gouvernement,
l'absence de réponse, c'est une stratégie en or pour l'Ontario, le Vermont, New
York, qui vont recevoir la croissance de nos entreprises.
Est-ce
que c'est ça, le nationalisme économique de la CAQ, pousser les entreprises du
Québec, de nos régions à aller grandir ailleurs?
Le Président :
M. le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale.
M. Jean Boulet
M. Boulet :
Merci, M. le Président. Les Manufacturiers et exportateurs, c'est un de nos
partenaires avec qui nous travaillons
et qui est un organisme qui est complètement conscient de l'importance de
l'automatisation. D'ailleurs, à chaque fois que j'en parle avec
Mme Proulx, la conciliation travail-famille, les conditions de travail et
l'automatisation, on a lancé une offensive
de transformation numérique, on fait de la formation, on est véritablement en
action. Puis je ne veux pas parler
des montants d'argent, mais on accompagne beaucoup d'entreprises qui cherchent
à améliorer non seulement leurs conditions de travail, se donner des
avantages sociaux...
Le Président :
En terminant.
M. Boulet :
...et se permettre de mieux recruter. Merci, M. le Président.
Le Président :
Question principale, M. le député de Laurier-Dorion.
Création d'un registre national
des loyers
M. Andrés Fontecilla
M. Fontecilla :
Merci, M. le Président. Face à la crise du logement, Valérie Plante et Denis
Coderre n'ont pas attendu la CAQ pour agir,
ils vont instaurer un registre des loyers à Montréal. Je salue aujourd'hui leur
leadership, M. le Président. Mais il
est aussi temps de faire preuve de leadership ici, à Québec. Il est temps
d'arrêter de pelleter la crise du logement dans la cour des villes. Un
seul registre national, c'est plus efficace et plus économique que plusieurs
registres différents. Tous les Québécois,
pas juste les Montréalais, ont le droit de savoir s'ils sont victimes de
hausses de loyer abusives.
Je présente une
motion aujourd'hui pour instaurer un registre national des loyers. Est-ce que
la ministre de l'Habitation va voter du bord des 3 millions de locataires
du Québec?
Le Président :
Mme la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation.
Mme Andrée Laforest
Mme Laforest :
Oui, merci, M. le Président. Puis je suis quand même réconfortée, parce qu'on
est quand même le 29 septembre.
On parlait du 1er juillet, on disait qu'il y avait une crise du logement.
On est rendus le 29 septembre, première question, je suis heureuse
de répondre, tout le monde a été logé, c'est important. Il y a des gens quand
même en attente, quelques-uns, mais ils sont
à l'hôtel, alors dites-vous qu'il n'y a personne à la rue. Et, le
1er juillet, ça a quand même été très, très bien de mon côté.
En
ce qui concerne le registre des loyers, je salue quand même les candidats,
parce qu'on voit quand même que l'habitation
est au coeur de leurs priorités, c'est important, je félicite leurs
engagements. Maintenant, ce que je peux dire au niveau du registre des loyers, on a travaillé avec la Société
d'habitation du Québec, avec le ministère des Affaires municipales, avec Revenu Québec pour établir
combien coûterait un registre des loyers et quel serait le mécanisme. Il y a un
travail qui se fait, présentement. Par contre, si je peux vous rassurer, tous
les mécanismes, présentement, fonctionnent. On a des mécanismes qui sont tout à fait à l'écoute pour ceux qui
veulent savoir combien coûtait le loyer. Et même, dans le projet de loi
n° 16, on a obligé la divulgation des prix payés...
Le Président :
En terminant.
Mme Laforest :
...dans les dernières années passées. Merci, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, M. le député de Laurier-Dorion.
M. Andrés Fontecilla
M. Fontecilla : Je demande à la
ministre de répondre à la motion, qui est très simple, je propose à la ministre
de reconnaître la nécessité d'un registre des loyers dans la situation actuelle
de grave crise du logement. On peut parler de coûts, on peut parler d'échéance, mais, à la
base, c'est de reconnaître le besoin. Ça fait consensus, on le voit à
Montréal.
La ministre peut-elle
nous expliquer pourquoi ne s'engage-t-elle pas à instaurer un registre des
loyers d'ici le 1er juillet prochain?
Le Président :
Mme la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation.
Mme Andrée Laforest
Mme Laforest :
Oui. Alors, au niveau du registre des loyers qui est demandé par certaines
municipalités, par exemple, j'ai demandé un
avis juridique à mon ministère. Ce que je peux vous dire, c'est que toutes les
municipalités au Québec ont déjà la possibilité, si elles le veulent, de
mettre un régime des loyers en place. Alors, si la ville de Montréal s'engage et elle veut elle-même avoir son propre
registre des loyers, alors, oui, elle peut le faire, c'est légal. Et c'est sûr que, considérant l'autonomie de Montréal, et aussi
avec son réflexe en habitation, je vais laisser la ville de Montréal décider
par rapport à un registre des loyers. Mais,
en ce qui nous concerne, présentement, tous les mécanismes sont en place, et
on a même amélioré la situation...
Le Président :
En terminant.
Mme Laforest :
...vous étiez avec moi, dans le projet de loi n° 16. Merci.
• (10 h 30) •
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de Laurier-Dorion.
M. Andrés Fontecilla
M. Fontecilla :
La réponse de la ministre, c'est qu'elle en train d'abdiquer de sa
responsabilité d'un gouvernement national.
En pelletant ses responsabilités dans la cour des villes, la CAQ crée deux
classes de locataires : ceux qui seront davantage protégés par un
registre et les autres.
Comment
la ministre peut-elle accepter que des locataires aient moins de droits parce
qu'ils habitent en dehors de Montréal?
Le Président :
Mme la ministre de l'Habitation et des Affaires municipales.
Mme Andrée Laforest
Mme Laforest :
Oui. Merci, M. le Président. C'est important de le spécifier, parce qu'on a
obligé, justement... Dans le bail, la case G
doit être inscrite, sur le montant du loyer payé dans les 12 mois, et,
s'il n'y a pas eu de location, même pour les dernières années passées.
Si
vous voulez, je pourrais mettre à jour une étude qu'on a faite, qu'on a eu les
résultats dernièrement. Vous verrez combien coûte un registre des loyers et,
pour le garder à chaque année en fonction, combien ça coûterait à tous les Québécois du Québec. Sauf que ce que je veux vous
dire, c'est que, tous les locataires et même tous les propriétaires, il faut
qu'il y ait un équilibre entre les deux. Et, avec le ministère de l'Habitation,
je crois que l'équilibre est vraiment atteint.
Le Président :
En terminant.
Mme Laforest :
Et je pourrai mettre à jour cette étude, si vous la voulez, bien entendu.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Duplessis.
Mesures
pour lutter contre la maltraitance envers les aînés
Mme Lorraine Richard
Mme Richard : Merci, M. le Président. M. le Président, depuis plusieurs années, il y
a eu un grand nombre de rapports qui
concernent, là, les aînés au Québec. En 2019, l'Institut de la statistique du
Québec disait que 80 000 aînés avaient déclaré subir de la maltraitance. Ce n'est pas rien. En 2018, c'était le
Comité national d'éthique sur le vieillissement qui présentait un rapport sur la maltraitance
financière, parce que ça aussi, ça existe. Le mois dernier, c'était le rapport
Dubuc à l'Institut du Québec qui faisait l'état des lieux pour les aînés
et leurs soins en santé, rapport extrêmement préoccupant. Malheureusement, tous ces rapports finissent par
être tablettés. La ministre n'agit pas beaucoup dans ce dossier. Pour dire,
elle n'agit pas du tout.
Aujourd'hui
je demande à la ministre de démontrer de l'ouverture, du leadership, de
l'humanisme et de nommer un protecteur des aînés qui sera véritablement
responsable et imputable, afin de combattre la maltraitance envers nos
aînés au Québec.
Le Président : Mme la
ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais
(Prévost) : M. le Président, la députée de Duplessis dit qu'on n'a pas
travaillé en amont pour contrer la maltraitance envers les personnes aînées.
Écoutez, en 2009, il y a eu le dépôt du premier plan d'action pour combattre
la maltraitance envers les personnes aînées.
On est rendus au troisième plan d'action pour combattre la maltraitance. Il y a
même eu des consultations. Donc, c'est faux
de prétendre qu'il n'y a rien qui a été fait. On a des coordonnateurs, il y a une équipe spécialisée à la Commission des droits de
la personne et des droits de la jeunesse, il y a une chaire universitaire
à Sherbrooke pour contrer la maltraitance.
Puis
là on dépose une deuxième mouture. Il y a eu la loi n° 115.
Vous voyez toutes les avancées. Là, on dépose une deuxième mouture pour aller plus loin. On va
couvrir non seulement les CHSLD, mais les RI, les RTF, les RPA. Il y a
plusieurs nouveautés dans ce projet de loi. On a même modifié une loi pour les
commissaires aux plaintes et à la qualité des services. Et le Protecteur du
citoyen nous avait dit : Je suis le protecteur des aînés. Ça fait qu'à un
moment donné ça existe.
Et
dans la loi... Je suis fière de cette loi qui a été déposée. On est en commission parlementaire, on l'étudie. Une commission parlementaire
c'est fait...
Le Président :
En terminant.
Mme Blais
(Prévost) : ...pour bonifier une loi.
Le Président :
Je vais vous demander de faire attention aux propos et aux mots tenus que vous
savez être non parlementaires, je fais seulement vous le dire, là, sur la
notion de faux, et tout ça, là.
Mme la députée de
Duplessis, à vous pour la première complémentaire.
Mme Lorraine Richard
Mme Richard : Merci. Les aînés, M. le Président, ce qu'ils désirent, c'est avoir une
personne qui serait responsable et imputable
de combattre la maltraitance. Ils désirent une personne qui va veiller à leur
sécurité, qui va défendre leurs droits. Les aînés, au Québec, devraient
pouvoir compter sur un protecteur des aînés.
Est-ce
que la ministre peut nous dire ce qui l'empêche de nommer un protecteur des
aînés? Est-ce parce que l'idée ne provient pas de la Coalition avenir
Québec qu'elle ne veut pas?
Le Président :
Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît!
Mme Marguerite Blais
Mme Blais
(Prévost) : M. le Président, le Protecteur du citoyen va venir en
commission parlementaire, on va l'écouter par rapport à son mémoire, ce qu'il a
à dire par rapport à ça.
Tout
le monde devrait être imputable par rapport à la maltraitance faite non
seulement envers les personnes aînées, mais
aussi les personnes majeures en situation de vulnérabilité, des personnes qui
vivent avec un handicap. C'est toutes et tous notre responsabilité. Il y a 34 commissaires aux plaintes dans
le réseau de la santé et des services sociaux qui veillent justement à
contrer la maltraitance, à rapporter. On a nommé un commissaire-conseil au
ministère de la Santé et des Services sociaux...
Le Président :
En terminant.
Mme Blais
(Prévost) : ...par rapport aux cas de maltraitance. Donc, c'est faux
de prétendre qu'on n'agit pas.
Le Président :
S'il vous plaît...
Mme Blais
(Prévost) : Oui, j'enlève le terme.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Duplessis.
Mme Lorraine Richard
Mme Richard : M. le Président, la ministre, elle avait une belle occasion, avec le
projet de loi n° 101, là, qui, soit dit en passant, est très mal ficelé dès le départ, là. C'est vraiment
une occasion ratée de la part de la ministre de nommer un protecteur du
citoyen.
Quand
on se targue d'être un gouvernement qui veut réellement changer les choses,
peut-être qu'elle devrait en discuter
avec le premier ministre, puis vraiment changer les choses, et nommer un
protecteur des aînés. Ils en ont réellement besoin, au Québec, en ce
moment. Merci, M. le Président.
Le Président : Mme la
ministre responsable des Aînés et Proches aidants.
Mme Marguerite
Blais
Mme Blais
(Prévost) : M. le Président, je pense que le premier ministre est bien
au courant du projet de loi qui a été déposé, hein? Ici, on travaille
ensemble, en équipe.
Écoutez, il y
a 22 articles, donc il y a une bonification qui s'est faite. Et c'est aux
parlementaires, en commission parlementaire,
à faire en sorte qu'on puisse bonifier un projet de loi. On a commencé dans le
calme, on écoute les groupes, on
prend des notes. Et c'est fait pour ça, pour bonifier un projet de loi, quand
on est en commission parlementaire, avec la population qui accepte, les
groupes qui acceptent de venir en commission pour nous livrer leurs
commentaires.
Alors, oui, on est à l'écoute. Oui, on est
action.
Le Président : En terminant.
Mme Blais
(Prévost) : Et j'ai même
avisé qu'il y aurait des amendements de déposés avant même le début des
consultations.
Le Président : Question
principale, M. le député de LaFontaine.
Projet de loi visant à
garantir le droit de
recevoir des services de garde
M. Marc
Tanguay
M. Tanguay : M. le
Président, en 1997, il y a maintenant 25 ans, au Québec, nous nous dotions
des centres de la petite enfance. Leur importance pour le développement et
l'épanouissement de nos tout-petits n'est plus à démontrer. Nous
avons déposé ce matin un projet de loi afin qu'au Québec on garantisse maintenant
le droit pour tous les enfants à l'accès aux
services de garde, comme c'est le cas actuellement au droit à l'éducation. Aujourd'hui, le prochain pas, donc, est de garantir ce
droit par le projet de loi, parce que c'est important pour nos tout-petits.
Aucun parent, M. le Président, n'accepterait aujourd'hui,
par exemple, de se faire dire, pour son enfant qui est d'âge primaire :
Bien, écoutez, on n'a pas de place, on va mettre son nom sur une liste
d'attente. Ce serait inacceptable. En 2021, ça l'est tout autant, inacceptable,
de se faire dire : Votre enfant n'a pas de place en service de garde.
Alors,
va-t-il appeler le projet de loi afin que ce droit existe et soit garanti?
Juge-t-il qu'en 2021, au Québec, on est rendus là, M. le Président?
Le Président : M. le ministre
de la Famille.
M. Mathieu
Lacombe
M. Lacombe : Merci, M.
le Président. Bien, d'abord, je veux
saluer le député de LaFontaine, qui a effectivement
déposé ce projet de loi là, dont j'ai
pris connaissance dans les dernières minutes. Ça n'a pas été très long, il y a
deux articles. Évidemment, c'est très, très précis. Le député de LaFontaine
propose donc qu'on enlève tout encadrement qui est relatif au droit des
enfants d'avoir une place.
Évidemment,
quand on dit ça comme ça, on ne peut pas être contre la vertu, on veut que
chaque enfant au Québec ait une place, on s'est engagés à le faire. Par
contre, c'est très hasardeux de faire la comparaison avec le réseau scolaire,
qui est un réseau qui est opéré par l'État, qui est un réseau public.
Les services de garde éducatifs à l'enfance sont basés sur un modèle géré par la communauté, notamment. C'est ça, l'essence
même des centres de la petite enfance. C'est aussi basé sur la présence, ils ont ouvert la porte grand à cette possibilité-là, la présence d'entreprises qui offrent, et c'est bien correct, des services
de garde, aussi, de qualité sur le terrain.
Donc, ce que
le député de LaFontaine propose implicitement, avec ce projet de loi là, c'est
de nationaliser l'ensemble du réseau, donc de faire perdre aux CPE leur
essence, de nationaliser les entreprises qui sont présentes et aussi, je dois
le dire, de mettre en péril le milieu familial.
De notre côté, on a le même objectif,
c'est-à-dire que chaque enfant ait une place...
Le Président : En terminant.
M. Lacombe :
...mais on aura une méthode, une proposition qui sera différente de celle du
député de LaFontaine.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de LaFontaine.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
M. le Président, heureux de voir que le ministre a lu le projet de loi,
heureux de voir qu'il comprend les
implications. Le droit à l'accès à un service de garde ne serait plus
conditionnel aux ressources que le gouvernement veut bien y consacrer,
ferait en sorte qu'ultimement, M. le Président...
Puis
il parle que c'est un acte de vertu. Ce n'est pas un acte de vertu, on est
rendus là, au Québec, en 2021. Puis ce qui
est en péril présentement, bien, c'est le développement puis l'épanouissement
des 51 000 enfants qui sont sur la liste d'attente. C'est ça
que ça réglerait, M. le Président.
Le Président :
M. le ministre de la Famille.
M. Mathieu Lacombe
M. Lacombe :
La proposition du député de LaFontaine, ce qu'elle implique, c'est que ce
réseau qui a été bâti depuis 1997 ne peut
plus être opéré de la façon dont il est opéré aujourd'hui. Parce que,
concrètement, qu'est-ce qu'on fait la journée ou la semaine où six milieux
familiaux ferment dans la circonscription de LaFontaine, à
Rivière-des-Prairies, par exemple?
Comment le gouvernement peut assurer ce droit-là lorsque le service est offert
par des travailleuses autonomes, dans
ce cas-ci les services de garde en milieu familial? Vous comprenez, c'est une
incohérence, ça ne peut pas fonctionner.
Donc,
la proposition, je le répète, du député de LaFontaine, telle qu'il la présente
aujourd'hui, c'est de nationaliser l'ensemble du réseau, donc de signer
la disparition des milieux familiaux...
• (10 h 40) •
Le Président :
En terminant.
M. Lacombe :
...sur quelques années, à toutes fins pratiques, et de nationaliser les CPE et
les entreprises. On n'est pas d'accord.
Le Président :
Deuxième complémentaire, M. le député de LaFontaine.
M. Marc Tanguay
M. Tanguay :
M. le Président, le ministre de l'Éducation n'abandonnerait jamais des élèves,
des étudiants, des enfants pour une école primaire, M. le Président, il
n'accepterait pas ça. Son ministère ferait en sorte qu'une école primaire qui serait sur le point de fermer
trouverait une solution, M. le Président. C'est ce qu'on s'attendrait du
ministre de l'Éducation. C'est la même chose que l'on désire recevoir du
ministre de la Famille, M. le Président.
Et,
encore une fois, le parcours éducatif débute dans les services de garde, et il
faut maintenant l'assurer par un droit.
Le Président :
M. le ministre de la Famille.
Des voix :
...
Le Président :
S'il vous plaît! On est attentifs aux réponses.
M. Mathieu Lacombe
M. Lacombe :
M. le Président, je le répète, on est d'accord sur l'objectif, c'est-à-dire
offrir une place à chaque enfant. Par
contre, de ce côté-ci de la Chambre, nous ne sommes pas d'accord avec une
nationalisation massive du réseau. Je pense, le gouvernement croit que
les CPE doivent continuer d'être gérés par la communauté, c'est-à-dire par les
parents, les membres de la communauté
également. On pense que les entrepreneurs qui travaillent fort à chaque jour
pour faire vivre ce réseau-là ont le droit de continuer d'exister et que les
travailleuses autonomes que sont les responsables de services de garde en milieu familial doivent continuer
d'exister, parce que, pour bien des parents, c'est aussi une préférence, c'est
aussi de leur laisser le libre choix.
Donc,
on a le même objectif, on n'est pas d'accord sur les moyens. Mais, puisqu'on a
ce même objectif, cet objectif commun...
Le Président :
En terminant.
M. Lacombe :
...je l'invite à travailler avec moi sur le projet de loi que je déposerai dans
les prochaines semaines.
Le Président :
Question principale, M. le député de Jonquière.
Investissements
dans le secteur de l'aluminium
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault :
Oui. M. le Président, depuis 2007, l'industrie de l'aluminium nous sert les
mêmes raisons pour éviter d'annoncer de gros investissements en
augmentation de la production : les prix sont bas, les inventaires sont hauts. Or, depuis
quelques mois, c'est l'inverse. Les prix sont hauts, et les inventaires sont
bas. Mieux encore, l'aluminium produit au Québec est le plus vert au
monde, avec notre hydroélectricité. Ça aussi, c'est du nationalisme économique.
Le premier ministre aime bien dire que son
ministre de l'Économie est un «deal maker». Il est où, son ministre, pour faire
atterrir des investissements structurants pour le Québec et ses régions?
Avec la
conjoncture favorable, est-ce que le «deal maker» a pris son téléphone pour
dire au patron de l'industrie que le
Québec et le Saguenay—Lac-Saint-Jean
sont prêts à accueillir une nouvelle
usine, comme on l'attend depuis longtemps?
Le Président : M. le ministre
de l'Économie et de l'Innovation.
M. Pierre
Fitzgibbon
M. Fitzgibbon : M. le Président.
Merci pour la question, qui est très pertinente. Non seulement j'ai pris mon
téléphone, en fait, les gens de Rio Tinto ont pris l'avion pour nous
rencontrer.
Alors, effectivement, on regarde aujourd'hui la
situation de l'aluminium et les prix, le LME, qui est le prix de référence, est
à un niveau historiquement élevé, qu'on n'a jamais vu depuis 25 ans. Par
contre, il faut comprendre que la raison
principale de cette hausse est la capacité en Chine qui a été réduite depuis un
an, et aucune nouvelle capacité ne va être
encourue. Certes, Alcoa, Rio Tinto réalisent que... si les prix vont rester ce
qu'ils sont, ils sont intéressés à faire des projets soit d'expansion ou des projets de décarboniser les alumineries
existantes, deux projets pour lesquels nous sommes ouverts. Et j'ai
offert toute l'assistance requise, et on travaille intensément sur ça.
Je dirais, par contre,
en même temps, que les règles d'engagement, en 2018, qui ont été modifiées par
le Parti libéral, sont respectées. Donc, aujourd'hui, Rio Tinto respecte toutes les règles qui ont été établies. Ce n'est
pas une raison pour laquelle nous ne sommes pas agressivement impliqués.
Et, certes, aujourd'hui, à cause de l'avantage...
Le Président : En terminant.
M. Fitzgibbon : ...comparatif
du Québec en termes d'hydroélectricité, on veut encourager les sociétés.
Le Président : Première
complémentaire, M. le député de Jonquière.
M. Sylvain
Gaudreault
M. Gaudreault : Est-ce que le
ministre défend les intérêts chinois ou les intérêts des travailleurs et des
régions du Québec? On a besoin d'investissements massifs pour augmenter la
production de métal primaire. AP60 à Jonquière, phase II d'Alma, usine d'anodes inertes pour Elysis, c'est des
projets qui sont attendus depuis longtemps. Le marché est bon, la demande est là, le prix est bon aussi.
Qu'est-ce que le ministre attend? Quand va-t-il faire des annonces positives?
Le Président : M. le ministre
de l'Innovation et de l'Économie.
M. Pierre
Fitzgibbon
M. Fitzgibbon :
M. le Président, je rappellerais au député que, pour faire pousser une plante,
on ne tire pas dessus. Alors, il faut qu'elle pousse d'elle-même.
Le rôle du
gouvernement est de mettre des conditions précédentes pour que les entreprises
veuillent investir. Nous avons un
paquet de programmes au niveau de l'innovation. Elysis, j'ai fait une annonce
au printemps dernier. Le monde est réceptif pour investir au Québec.
La décision
ultime de Rio Tinto et d'Alcoa, considérant les Chinois... Est-ce qu'ils vont
remettre de la capacité? Il faut comprendre qu'au Québec ça coûte plus cher,
bâtir des usines. Par contre, nous avons été clairement audacieux de
suggérer des pistes de solution où nous pourrions intervenir, considérant que
la plateforme est déjà...
Le Président : En terminant.
M. Fitzgibbon : ...propice pour
les investissements.
Le Président : Deuxième
complémentaire, M. le leader du troisième groupe d'opposition.
M. Martin
Ouellet
M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. L'aluminium est un produit d'avenir afin
d'atteindre la carboneutralité. La technologie d'Elysis permet de
produire de l'aluminium plus vert que vert, de l'aluminium sans carbone.
À ce jour,
le gouvernement du Québec a mis 80 millions dans Elysis. Avec les conditions favorables
actuelles, il semble que le ministre
ne devrait pas se gêner pour exiger auprès des grandes entreprises,
Alcoa, Rio Tinto, des investissements concrets au Saguenay—Lac-Saint-Jean
et en Côte-Nord pour créer des emplois payants.
Le Président : M. le ministre
de l'Économie.
M. Pierre Fitzgibbon
M. Fitzgibbon : Je suis 100 % d'accord avec le commentaire. Elysis, on en parlait dans mon
bureau pas plus tard qu'hier matin. Et
Elysis est la seule technologie carboneutre pour l'aluminium. Effectivement,
l'anode inerte doit être un des catalystes.
Maintenant,
la technologie ne sera pas commercialisable probablement avant trois, quatre
ans. On travaille avec Rio Tinto
et avec Alcoa, qui sont les deux partenaires d'Elysis, pour voir comment on
peut précéder cette implantation-là et peut-être même se servir des
cuves existantes et les convertir.
Alors, on est 100 % d'accord, mais il faut
comprendre qu'il y a un processus. Mais la beauté, c'est qu'aujourd'hui,
dans le monde, incluant les Russes et les
Chinois, Elysis est probablement la technologie la plus avancée. Et,
certainement...
Le Président :
En terminant.
M. Fitzgibbon :
...on a mis en place des conditions précédentes pour que l'investissement se
fasse ici, au Québec.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.
Services
aux élèves handicapés ou en difficulté
d'adaptation ou d'apprentissage
Mme Jennifer Maccarone
Mme Maccarone :
M. le Président, hier, le Journal de Québec rapportait l'histoire de la
petite Anaïs, qui a quatre ans et qui
fréquente la maternelle quatre ans. L'an dernier, un orthophoniste a identifié
des difficultés de langage pour Anaïs.
C'est là, à ce moment précis, que le gouvernement aurait dû agir tôt, mais ce
n'est pas arrivé, l'école n'a pas offert les services. Alors, les
parents ont dû se tourner vers le privé et payer de leur poche pour aider leur
fille.
Hier, le ministre a
dit d'être choqué et de mauvaise humeur après avoir lu l'article. Il a dit, et je
le cite : On va carrément rembourser les frais au privé pour la famille.
Mais le cas d'Anaïs n'est pas unique. Ils sont une tonne de familles ayant des enfants avec des besoins
particuliers qui font face à des absences de services et qui doivent se tourner
vers le privé pour avoir des services.
M. le Président, où
doivent-ils envoyer leurs factures?
Le Président :
M. le ministre de l'Éducation.
M. Jean-François Roberge
M. Roberge :
M. le Président, ma collègue aborde deux questions très, très importantes :
le déploiement des maternelles quatre ans
pour agir tôt, un travail que je fais de concert avec mon collègue le ministre
délégué à la Santé, et les services aux élèves qui ont des besoins
particuliers, parfois on les appelle les élèves handicapés ou en difficulté
d'adaptation ou d'apprentissage.
Dans
les deux cas, on a fait des pas de géant, en trois ans. On donne plus de
services professionnels qu'on en a jamais
donnés. On a travaillé très fort pour réembaucher des professionnels qui,
malheureusement, avaient été mis à la porte par le gouvernement libéral. Je
pense d'ailleurs même que ma collègue elle-même avait dénoncé son propre parti
et le gouvernement précédent, elle avait pris position contre ses mauvaises
décisions. On est en train de réparer un réseau qui a été malmené en embauchant des gens puis, oui, en déployant des
services dans les maternelles quatre ans, parce que c'est important d'agir tôt, c'est important de donner le
meilleur service aux enfants puis d'offrir davantage de choix aux
parents.
Quand
survient un problème comme ça, on
agit tout de suite. On n'a aucune tolérance pour des élèves qui sont en
bris de service...
Le Président :
En terminant.
M. Roberge :
...pour des élèves qui n'ont pas les services professionnels nécessaires.
Le Président :
Première complémentaire, question de la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Jennifer Maccarone
Mme Maccarone :
Je reviens aux faits, M. le Président. Hier, le ministre a dit : C'est un
cas où il y a eu brisure de service,
c'est inacceptable, ce n'est pas toléré, ça va être corrigé dès aujourd'hui.
Bien, sur ça, je suis d'accord avec le ministre, mais Anaïs n'est pas
seule.
Dans
son rapport parcellaire déposé le printemps dernier, on apprend qu'il y a au
moins 1 500 enfants handicapés ou sous le spectre de l'autisme qui vivent des ruptures de services ou
qui sont renvoyés à la maison et qui ne sont même pas scolarisés. Est-ce
que le ministre...
Le Président : M. le ministre
de l'Éducation, à vous la parole.
M. Jean-François Roberge
M. Roberge :
M. le Président, des ajouts de services professionnels, on les fait de
plusieurs manières, d'abord en déployant
un cycle préscolaire, en déployant des services pour agir tôt. Ensuite, on
embauche des professionnels pour les élèves
qui sont inclus, intégrés en classe régulière, soit des professionnels,
orthopédagogues, psychologues, psychoéducateurs, ou des enseignants ressources. Je me souviens, je pense qu'il y a deux
semaines je visitais une école primaire où il y avait un professeur,
Simon, qui était dédié à aider dans plusieurs classes, une ressource qui avait
été embauchée grâce aux investissements
supplémentaires. On n'avait pas ça il y a deux, trois ans, on avait ça
maintenant. Et on a aussi augmenté d'une manière exceptionnelle le nombre de classes spécialisées, parce qu'il y
a des élèves qui ne peuvent pas être en classe régulière...
Le Président :
En terminant.
• (10 h 50) •
M. Roberge :
...qui ont besoin de ressources spécialisées. On les aide aussi de cette
manière.
Le Président :
Deuxième complémentaire, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Jennifer Maccarone
Mme Maccarone :
Voyons donc, M. le Président! Des bris de service, c'est inacceptable. Je n'ai
pas eu une réponse.
L'année
dernière, j'ai déposé un mandat d'initiative en ce qui concerne la
non-scolarisation des enfants autistes et handicapés qui ont été renvoyés à la maison. Puis savez-vous quoi? Vous
avez refusé d'étudier le mandat d'initiative. J'ai redéposé le mandat
d'initiative. On parle d'un minimum de 1 500 enfants non scolarisés.
Est-ce que le
ministre va maintenant dire à tous ses collègues d'accepter d'étudier le mandat
d'initiative ou est-ce qu'il faut appeler les journalistes pour se faire
entendre?
Le Président :
M. le ministre.
Des voix :
...
Le
Président : S'il vous plaît! Je vous demande de ne pas
commenter. C'est nos règles, vous les connaissez. La réponse pour M. le...
délégué à la Santé et aux Services sociaux.
M. Lionel Carmant
M. Carmant :
Merci, M. le Président. J'aimerais intervenir auprès de la députée de Westmount—Saint-Louis pour expliquer ce qu'on est en train
de faire actuellement. Effectivement, plusieurs d'enfants aimeraient... Ce
qu'on veut, c'est vraiment que les
enfants puissent avoir leurs services en amont, avant l'entrée à l'école. On
sait que l'âge important pour intervenir,
c'est avant l'âge de trois ans. On sait qu'on peut changer des trajectoires
quand on agit avant l'âge de trois ans. Donc, ce qu'on veut faire, c'est
vraiment les dépister le plus tôt possible.
La plateforme
informatisée d'Agir tôt est déployée dans tout le Québec, dans tous les CISSS
et les CIUSSS du Québec. Maintenant, on est en train d'implanter l'évaluation des enfants systématiquement à l'âge de 18 mois, comme ça on va
pouvoir dépister ceux qui sont à haut risque...
Le Président :
En terminant.
M. Carmant : ...intervenir le plus rapidement
possible et s'assurer que tout le
monde ait des services avant d'entrer
à l'école. Merci, M. le Président.
Le Président :
Question principale, Mme la députée de Maurice-Richard. À
vous la parole.
Ruptures
de services dans le réseau de la santé et des services sociaux
Mme Marie Montpetit
Mme Montpetit :
Je vous remercie, M. le Président. Depuis le printemps, on vit des fermetures
de service de santé partout, au Québec,
comme on ne l'a jamais vu, des fermetures d'urgence à Gatineau, à Valleyfield,
à Saint-Eustache, en Abitibi, des fermetures de service en Estrie, à
Roberval, à Matane, à Chicoutimi, sur la Côte-Nord.
Il y a deux
semaines, le ministre de la Santé s'est engagé à ce qu'il n'y ait plus de bris
de service à compter du 15 octobre. Ça,
c'est dans deux semaines, M. le Président. Depuis ce moment-là, ni le premier
ministre ni aucun des ministres du
gouvernement n'a répété cette affirmation. Même le ministre de la Santé n'a pas
réitéré sa garantie aux Québécois.
Alors, je veux lui
donner l'occasion, en cette Chambre, de répéter cet engagement, cette promesse
qu'il a faite à l'ensemble des Québécois il
y a tout juste deux semaines. Est-ce que le ministre peut nous confirmer ici
que sa garantie tient toujours et qu'il s'engage à ce qu'il n'y ait plus
de rupture de services au Québec?
Le Président : M. le ministre
de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
Alors, M. le Président, je suis content d'avoir l'opportunité de revenir sur
cette question-là, parce que je pense que les gens réalisent très bien
ce qui frappe notre réseau de santé présentement.
Je pense que c'est
important aussi de rappeler à la députée de Maurice-Richard
que ce qu'on fait présentement, notamment
avec nos mesures pour les ressources humaines que nous avons annoncées jeudi
passé... sont excessivement importantes pour ramener du personnel, pour
nous aider, justement, à avoir le personnel nécessaire pour notre réseau.
Ce
que j'aimerais, par exemple, aussi faire remarquer à toutes les infirmières qui
nous écoutent, d'être très, très sensibles
à cet appel que nous avons fait au cours des derniers jours, parce que j'ai
plusieurs collègues ou plusieurs personnes, par exemple, dans le réseau
qui ont fait déjà des appels, puis on a une très, très bonne réaction.
Donc,
je pense, la première chose, pour avoir une approche constructive au cours des
prochaines semaines puis d'être capables
de minimiser l'impact sur notre réseau, M. le Président, c'est d'être capables
d'aller rechercher des infirmières qui avaient laissé le réseau au cours
des dernières années. Et j'apprécie beaucoup si l'opposition peut prendre, elle
aussi...
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
...une approche constructive au programme que nous avons annoncé la semaine
dernière, M. le Président.
Le Président :
Première complémentaire, Mme la députée de Maurice-Richard.
Mme Marie Montpetit
Mme Montpetit : Je note que le ministre, encore une fois, ne
réitère pas son engagement. Donc, est-ce que c'était de la poudre aux
yeux, quand il a dit ça? Est-ce qu'il a parlé trop vite? Ce sera à lui de le
dire.
Parlant d'approche constructive, il y a quelqu'un
qui attend le téléphone du ministre de la Santé, et c'est le maire de
Senneterre. Donc, je l'invite aussi à prendre contact avec le terrain. Il a
annoncé dans une conférence de presse, du jour au lendemain, qu'il allait fermer l'urgence de Senneterre. Les médecins
locaux ont dénoncé cette décision. Il sabre dans les services qui
fonctionnent bien...
Le Président :
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé : Bien, écoutez, M. le Président, ce que j'aimerais
rappeler à la députée de Maurice-Richard, puis je vais le rappeler en cette fin de session, aujourd'hui, c'est que je pense que
l'opposition peut faire partie de la solution et non faire partie du
problème.
Ce qu'on veut, c'est
une discussion constructive. On doit aider le personnel infirmier à revenir
dans le réseau. Et je pense que... J'en ai
parlé avec le syndicat. Le syndicat a déjà apprécié le... J'apprécie le
changement de ton qui s'est fait au
niveau du syndicat au cours des derniers jours. Je pense qu'on peut demander la
même chose à l'opposition. Puis c'est tous ensemble qu'on va réussir à
passer à travers la crise, M. le Président.
Donc, je pense que
c'est important de prendre...
Le Président :
En terminant.
M. Dubé :
...la mesure de l'importance de ce qui est en train d'arriver. Puis tant mieux
si l'opposition...
Le Président :
Et cela met donc fin à la période de questions et de réponses orales.
Motions sans préavis
Nous allons passer,
sur ce, à la rubrique des motions sans préavis. Je reconnais Mme la députée de
Duplessis.
Mme Richard : Merci, M. le Président. M. le Président, je sollicite le consentement
des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la députée
de Fabre, le député de Jean-Lesage, le député de Bonaventure, le député
de Chomedey, la députée de Marie-Victorin et le député de Rimouski, la motion
suivante :
«Que
l'Assemblée nationale rappelle que 80 000 aînés vivant à domicile ont
affirmé avoir subi de la maltraitance en 2019, selon l'Institut de la
statistique du Québec;
«Qu'elle
souligne que de nombreux cas de maltraitance ont été mis [à] jour lors des
dernières vagues de la pandémie, et ce, tant dans les CHSLD, dans certaines
résidences pour les personnes aînées que dans d'autres lieux d'hébergement;
«Qu'elle rappelle que
la maltraitance peut survenir en tout lieu et qu'elle prend plusieurs formes,
notamment psychologique, physique, sexuelle, organisationnelle et financière;
«En conséquence, que l'Assemblée nationale
demande au gouvernement de nommer un protecteur des aînés spécifiquement dédié à prévenir, combattre et [à]
documenter toutes les formes de maltraitance dont ils sont victimes, et de lui donner le mandat
de veiller à la sécurité des aînés et de conseiller la ministre sur l'adoption
des meilleures pratiques en la matière.»
Merci, M. le Président.
Le Président : Y
a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Jolin-Barrette : Pas de consentement, M. le Président.
Le
Président : Pas de consentement. M. le ministre responsable des Affaires autochtones, la
parole est maintenant à vous.
Souligner l'anniversaire
du décès de Mme Joyce Echaquan et observer
une minute de silence à sa mémoire ainsi qu'à celle des victimes
et des survivants des pensionnats autochtones
M. Lafrenière : Oui. Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, je sollicite le consentement de cette
assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de
Jacques-Cartier, la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques,
le leader du troisième groupe d'opposition, le député de Chomedey, le député de
Bonaventure, le député de Rimouski et la députée de Marie-Victorin :
«Que
l'Assemblée nationale se souvienne du décès de Joyce Echaquan, survenu dans des
circonstances tragiques le
28 septembre 2020 au centre hospitalier de Joliette, décès nous ayant
tous ébranlés et mettant en images la discrimination que vivent des
membres des communautés autochtones;
«Qu'elle réitère son soutien à son conjoint,
M. Carol Dubé, sa famille et l'ensemble de la communauté;
«Qu'elle
rappelle toute l'importance de poursuivre la mise en application des fondements
du Principe de Joyce qui vise à
garantir à tous les autochtones un droit d'accès équitable, sans aucune
discrimination, à tous les services sociaux et de santé;
«Qu'elle souligne qu'il est de notre
responsabilité à tous, de lutter contre le racisme dans notre société, comme le rappelle aussi le rapport de la commission
d'enquête portant sur les relations entre les autochtones et certains services
publics;
«Qu'au nom du devoir de mémoire elle reconnaisse
également le 30 septembre comme étant une journée de commémoration en
hommage aux survivants et victimes des pensionnats autochtones;
«Qu'en signe
de solidarité avec les nations autochtones du Québec, l'Assemblée nationale
s'illumine à la couleur orangée;
«Qu'enfin,
elle observe une minute de silence à la mémoire de
madame [Joyce] Echaquan ainsi que des victimes et des
survivants des pensionnats autochtones.»
«Meegwetch.» «Tshinashkumitin.» «Nia:wen.»
«Nakurmiik», M. le Président.
Le Président : Y a-t-il
consentement pour débattre de cette motion?
M. Jolin-Barrette :
Consentement, sans débat, M. le Président.
Mise
aux voix
Le
Président : Consentement, sans débat. Je vais vous demander vos
votes respectifs, bien sûr. M. le leader du gouvernement?
M. Jolin-Barrette : Pour
Le Président : M. le
leader de l'opposition officielle?
M. Fortin :
Pour
Le Président : Mme la leader
du deuxième groupe d'opposition?
Mme Labrie : Pour
Le Président : M. le leader
du troisième groupe d'opposition?
M. Ouellet : Pour
Le Président : M. le
député de Chomedey?
M. Ouellette : Pour
Le Président : M. le député
de Bonaventure?
M. Roy :
Pour
Le Président : Mme la députée
d'Iberville?
Mme Samson : Pour
Le
Président : Cette motion est donc adoptée. Je vais vous
demander de vous lever pour observer une minute de silence.
• (10 h 59
—
11 heures)
•
Le Président : Je vous
remercie. Veuillez vous asseoir.
Toujours dans la rubrique Motions sans préavis,
Mme la cheffe de l'opposition officielle.
Condamner le recours à
des procédures de stérilisation chez des femmes sans
consentement libre et éclairé et demander au premier ministre de convoquer
le président du Collège des médecins afin que soient pris tous les
moyens nécessaires pour faire cesser cette pratique
Mme Anglade : Oui, merci, M. le Président. Alors, je
sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la députée
de Sainte-Marie—Saint-Jacques, le chef du troisième groupe
d'opposition, le député de Chomedey, le député de Bonaventure, le député
de Rimouski et la députée de Marie-Victorin :
«Que l'Assemblée nationale prenne acte des graves et
douloureux témoignages révélés pas l'émission Enquête de Radio-Canada à l'effet que des femmes autochtones
ou racisées ont fait l'objet, au Québec, de procédures de stérilisation
sans leur consentement libre et éclairé;
«Qu'elle condamne sans équivoque de telles pratiques et
qu'elle déclare qu'une telle situation porte atteinte aux droits et libertés garantis par la charte
québécoise des droits et libertés de la personne et la Charte canadienne des
droits et libertés;
«Qu'elle affirme que le droit des femmes à disposer de leur
corps ne saurait être mis en cause [d'autre] façon que ce soit et qu'une
atteinte au droit d'une femme est une atteinte au droit de l'ensemble des
femmes du Québec;
«Qu'elle reconnaisse qu'une procédure de stérilisation sans
consentement a pour effet des séquelles psychologiques importantes chez les femmes qui y sont soumises et
qu'elle peut entraîner une méfiance envers le réseau de la santé ayant
un impact négatif sur la santé des femmes;
«Qu'enfin, elle exige du premier ministre qu'il convoque
sans délai le président du Collège des médecins afin que soient pris
tous les moyens nécessaires pour faire cesser immédiatement cette pratique
révoltante.»
Le Président :
Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Jolin-Barrette :
Consentement, sans débat, M. le Président.
Mise aux voix
Le Président : Consentement, sans débat. Je
vous demande vos votes respectifs. D'abord, M. le leader de l'opposition
officielle?
M. Fortin :
Pour.
Le Président :
M. le leader du gouvernement?
M. Jolin-Barrette :
Pour.
Le Président :
Mme la leader du deuxième groupe d'opposition?
Mme Labrie :
Pour.
Le Président :
M. le leader du troisième groupe d'opposition?
M. Ouellet :
Pour.
Le Président :
M. le député de Chomedey?
M. Ouellette :
Pour.
Le Président :
M. le député de Bonaventure?
M. Roy :
Pour.
Le
Président : Mme la députée... En conséquence, cette motion est donc adoptée. Je reconnais maintenant
M. le député de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla : M. le
Président, je demande le consentement de cette Assemblée pour débattre de la motion suivante
conjointement avec la députée de Joliette et le député de Chomedey :
«Que l'Assemblée nationale accueille positivement l'engagement
des principaux candidats et candidates à la mairie de Montréal à
instaurer un registre des loyers sur le territoire de la ville;
«Qu'elle souligne qu'un registre des
loyers permettrait aux locataires de suivre l'évolution du montant des loyers
payés pour les logements qu'ils occupent et,
ainsi, de pouvoir exercer leur droit à demander une fixation du loyer devant
le Tribunal administratif du logement;
«Qu'elle reconnaisse qu'un registre
national serait plus efficace que la multiplication de registres dans
différentes municipalités du Québec;
«Que
l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'instaurer un registre national
des loyers.»
Le
Président : Y a-t-il consentement pour débattre de cette
motion?
M. Jolin-Barrette :
Pas de consentement, M. le Président.
Le
Président : Pas de consentement.
Une motion sans préavis ayant déjà été
présentée par le groupe parlementaire formant le gouvernement, je demande
s'il y a consentement pour permettre la
lecture d'une autre motion sans préavis. Consentement. M. le leader
du gouvernement.
Procéder à des consultations
particulières
sur le projet de loi n° 92
M. Jolin-Barrette :
M. le Président, je fais motion, conformément à l'article 146 du règlement
de l'Assemblée nationale, afin :
«Que
la Commission des institutions, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 92, Loi
visant la création d'un tribunal spécialisé en matière de violence
sexuelle et de violence conjugale et portant sur la formation des juges en ces
matières, procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques le mardi
19 octobre 2021, de 9 h 45 à 12 h 35 et
après les affaires courantes jusqu'à 19 heures ainsi que le mercredi
20 octobre 2021 après les affaires courantes jusqu'à
12 h 30 et de 15 heures à 18 h 30;
«Qu'à cette fin la
commission entende les organismes suivants : Mme Louise Riendeau, du
Regroupement des maisons pour femmes
victimes de violence conjugale, Mme Manon Monastesse, directrice de la
Fédération des maisons d'hébergement pour femmes, Me Elizabeth
Corte, [ancienne] juge en chef de la Cour du Québec de 2009 à 2016 et coprésidente du rapport Rebâtir la confiance,
conjointement avec Mme Julie Desrosiers, chercheuse et professeure
titulaire à la Faculté de droit de l'Université Laval et coprésidente du
rapport Rebâtir la confiance, le Réseau des centres d'aide aux victimes d'actes criminels, M. Sylvain
Guertin, enquêteur spécialisé en matière d'agressions sexuelles et de crimes
majeurs et directeur adjoint de la Direction
des enquêtes criminelles à la Sûreté du Québec, conjointement avec le Service
de police de la ville de Montréal et
le Service de police de la ville de Québec, Me Roxanne Roussel,
spécialiste en droit familial, le Barreau du Québec, Me Maude Cloutier,
détentrice d'une maîtrise sur l'étude comparée des tribunaux spécialisés — Dubé Gravel avocats — conjointement avec Angela Campbell,
professeure de droit à l'Université McGill, Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les
agressions à caractère sexuel — le RQCALACS — Me Sophie
Gagnon, de Juripop, Mme Mélanie Walsh, directrice générale de l'Auberge
Madeleine et partenaire dans le Partenariat
pour la prévention et la lutte à l'itinérance des femmes regroupant
5 maisons, le Directeur des poursuites criminelles et pénales;
«Qu'une période de
12 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, répartie de la manière
suivante : 5 minutes 34 secondes
pour le groupe parlementaire formant le gouvernement,
3 minutes 43 secondes pour l'opposition officielle,
56 secondes au deuxième groupe d'opposition, 56 secondes au troisième
groupe d'opposition et finalement 51 secondes au député indépendant;
«Que
sous réserve de l'audition conjointe de Me Maude Cloutier et de
Mme Angela Campbell, la durée maximale de l'exposé de chaque
organisme soit de 10 minutes et l'échange avec les membres de la
commission soit d'une durée maximale de
35 minutes partagées ainsi : 16 minutes 15 secondes
pour le groupe parlementaire formant le gouvernement,
10 minutes 50 secondes pour l'opposition officielle,
2 minutes 43 secondes pour le deuxième groupe d'opposition,
2 minutes 43 secondes pour le troisième groupe d'opposition et
2 minutes 30 secondes pour le député indépendant;
«Que la durée
maximale de l'exposé conjoint de Me Maude Cloutier et de Mme Angela
Campbell soit de 10 minutes et l'échange avec les membres de la commission
soit d'une durée maximale de 50 minutes partagées ainsi : 23 minutes 13 secondes pour le
groupe parlementaire formant le gouvernement,
15 minutes 29 secondes pour l'opposition officielle, 3 minutes 52 secondes
pour le deuxième groupe d'opposition, 3 minutes 52 secondes pour
le troisième groupe d'opposition et 3 minutes 30 secondes
pour le député indépendant;
«Que les témoins
auditionnés puissent l'être par visioconférence;
«Qu'une suspension de
10 minutes soit prévue entre les échanges avec chaque personne et
organisme; et
«Que le ministre de
la Justice soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»
Le Président :
Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?
M. Jolin-Barrette : Consentement,
sans débat.
Mise aux voix
Le Président : Consentement,
sans débat. Vos votes respectifs. M. le leader du gouvernement?
M. Jolin-Barrette : Pour.
Le Président : M. le leader
de l'opposition officielle?
M. Fortin :
Pour.
Le Président : Mme la leader
du deuxième groupe d'opposition?
Mme Labrie : Pour.
Le Président : M. le leader
du troisième groupe d'opposition?
M. Ouellet : Pour.
Le Président : M. le député
de Chomedey?
M. Ouellette : Pour.
Le Président : M. le député
de Bonaventure?
M. Roy : Pour.
Le Président : Cette motion
est donc adoptée.
Avis touchant les travaux des
commissions
Nous passons à la rubrique Avis touchant les
travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.
M. Jolin-Barrette : M. le
Président, j'avise cette Assemblée que
la Commission de l'économie et du
travail poursuivra l'étude détaillée
du projet de loi n° 100, Loi sur l'hébergement touristique, aujourd'hui, après les affaires courantes
jusqu'à 12 h 45 et de 15 heures à 18 h 45, à la salle
du Conseil législatif;
La Commission de la culture et de l'éducation poursuivra les consultations particulières
sur le projet de loi n° 96, Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, aujourd'hui, après les affaires courantes, pour
une durée de 45 minutes, et de 15 heures à 18 h 30, à la
salle Pauline-Marois;
La Commission des relations avec les citoyens
poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi n° 101, loi visant à
renforcer la lutte contre la maltraitance envers les aînés et toute personne
majeure en situation de vulnérabilité ainsi que la
surveillance de la qualité des services de santé et des services sociaux,
aujourd'hui, après les affaires courantes, pour une durée de 45 minutes, et
de 15 heures à 18 h 30, à la salle Marie-Claire-Kirkland;
La Commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 49, Loi modifiant la Loi sur les élections et les référendums dans
les municipalités, la Loi sur l'éthique et la déontologie en matière municipale
et diverses dispositions législatives,
aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à
12 h 45 et de 15 heures à 18 h 45, aux salles Louis-Joseph-Papineau
et Louis-Hippolyte-La Fontaine. Merci.
Le Président : Merci. Nous en
sommes à la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
Affaires du jour
La période d'affaires courantes étant terminée,
nous allons maintenant passer aux affaires du jour.
Et je suspends les travaux pour quelques
instants. Merci pour votre collaboration.
(Suspension de la séance à 11 h 8)
(Reprise à 11 h 19)
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, nous poursuivons aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.
M. Schneeberger : Bonjour, Mme la Présidente. Alors, je vous
demanderais d'appeler l'article 10 du feuilleton.
Projet
de loi n° 59
Adoption
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Donc, à l'article 10 du feuilleton, le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale propose l'adoption du projet de loi n° 59, Loi modernisant le régime de santé et de
sécurité du travail.
Y
a-t-il des interventions? M. le ministre? M. le ministre du Travail, de
l'Emploi et de la Solidarité sociale, je vous cède la parole.
M. Jean
Boulet
M. Boulet :
Oui. Merci, Mme la Présidente. Nous entamons effectivement la dernière étape
menant à l'adoption du projet de loi n° 59, Loi
modernisant le régime de santé et de sécurité du travail. C'est une
étape importante, car elle permettra de présenter le projet de loi dans son
ensemble. Notre gouvernement avait une responsabilité envers tous les Québécois, celle de livrer une réforme qui
répondrait aux réalités du marché du travail d'aujourd'hui. Je suis fier de
dire que nous avons atteint notre objectif.
• (11 h 20) •
Le
coeur de notre réforme reposait sur la prévention. Une forte culture en
prévention de la santé et de la sécurité du travail est primordiale pour s'assurer que le Québec puisse compter sur
tous ses talents. Malheureusement, en 2019, on comptait 107 000 lésions professionnelles,
190 travailleurs sont décédés cette année-là. Je ne veux plus de ces
drames humains.
Près
de 75 % des travailleurs ne sont pas couverts par des mécanismes de
protection adéquats dans le régime actuel. Avec le projet de loi, nous
corrigeons cette erreur du passé. Tous les secteurs d'activité économique
seront maintenant couverts par des mécanismes de prévention et de participation
des travailleurs.
Nous avons présenté
le projet de loi n° 59 à l'Assemblée nationale le
27 octobre 2020. Les consultations particulières
se sont déroulées du 19 au 22 janvier 2021 et ont permis d'entendre
30 groupes. En tout, 76 mémoires portant sur le projet de loi ont été reçus. Ces
consultations ont permis de recueillir plusieurs commentaires dans l'objectif
commun d'améliorer le régime de santé et de sécurité du travail actuel.
Je remercie tous les groupes et toutes les personnes qui ont pris le temps de
nous faire parvenir leurs commentaires et leurs suggestions. Chaque suggestion
a été analysée.
La modernisation de
ce régime est un vaste chantier qui touche tous les acteurs de la société
civile. D'ailleurs, deux motions présentées
à l'Assemblée nationale du Québec et demandant le dépôt d'un projet de loi ont
été adoptées à l'unanimité. Le Vérificateur général du Québec faisait
également état, dans deux rapports, de la nécessité de revoir la Loi sur la
santé et la sécurité du travail et la Loi sur les accidents de travail et les
maladies professionnelles. Finalement, deux
avis du Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre présentaient des
consensus pour une modernisation du régime.
Bref, nous avons entendu cette volonté commune que le Québec retrouve son
leadership en matière de santé et de sécurité.
Mme
la Présidente, j'aimerais revoir les trois grands volets de ce projet de loi,
soit la gouvernance, la réparation et l'indemnisation, la prévention.
Mais d'abord revenons à l'objectif de la Loi sur la santé et la sécurité du
travail.
Dans
sa forme actuelle, la loi a pour objet l'élimination à la source des dangers
pour la santé, la sécurité et l'intégrité physique des travailleurs. Cet objectif est fondamental, mais il a été
négligé pendant 40 ans en faisant aussi abstraction de la protection de
l'intégrité psychique des travailleurs. C'est pourquoi nous souhaitons que
l'objet de la loi soit maintenant d'éliminer
à la source les dangers pour la santé, la sécurité, l'intégrité physique et
psychique des travailleurs. Ce changement reflétera l'importance que
nous devons consacrer à la santé mentale au travail.
Mme
la Présidente, lors de la première séance en étude détaillée, nous avons
discuté de l'ensemble des dispositions du
projet de loi touchant la gouvernance de la CNESST. J'ai senti que les parlementaires
partageaient tous le même respect du paritarisme dans les matières
relevant du droit du travail. La CNESST est d'ailleurs administrée par un
conseil d'administration paritaire, et nous
conservons cet acquis. Cependant, une même personne occupe le poste de président du conseil d'administration et de
chef de la direction. Le projet de
loi n° 59 prévoit donc la
séparation de ces postes, tel que recommandé
dans le rapport du Vérificateur
général de 2015. L'actualisation de
la gouvernance de la CNESST favorisera une gestion efficace de la résolution
des conflits. Cela facilitera la prise de décision concernant l'évolution du
régime.
Le
projet de loi prévoit également la création d'un comité de
gouvernance et d'éthique et d'un comité de vérification et de ressources
humaines. Il s'agit de bonnes pratiques reconnues dans la Loi sur la
gouvernance des sociétés d'État.
La CNESST doit
continuer d'exercer son leadership et de fournir un service sans faille aux
travailleurs et aux employeurs du Québec. Je compterai sur le C.A., la
présidence et la direction générale pour ce faire, en mettant toujours l'humain
au coeur des décisions.
Mme la Présidente, le
deuxième grand volet de notre réforme touchait la Loi sur les accidents de
travail et les maladies professionnelles. L'un des plus grands reproches que
l'on pouvait faire à cette loi était sans aucun doute la stagnation de la liste
des maladies professionnelles présumées.
La
LATMP définit la maladie professionnelle comme une maladie contractée par le
fait ou à l'occasion du travail et qui est caractéristique de ce travail
ou reliée directement aux risques particuliers de celui-ci.
L'absence
de présomption ne prive pas un travailleur de la possibilité de présenter une
réclamation et de faire reconnaître le caractère
professionnel de sa lésion. Il appartient alors au travailleur de faire la
démonstration d'un lien de causalité.
Malheureusement, comme le législateur a prévu cette liste à même la loi, elle
n'a pas évolué depuis 1985, elle ne reflète plus l'état des
connaissances scientifiques.
La solution proposée
par le projet de loi n° 59 consiste à abroger l'annexe I de la loi et
à la remplacer par un règlement. Un
règlement sera beaucoup plus facile à faire évoluer. Nous avons saisi
l'occasion pour ajouter certaines maladies à la liste. Ce faisant, nous allégeons davantage le fardeau du
travailleur et nous réduisons l'attente. Encore une fois, l'humain reprend sa place au coeur du processus, et la vie
des personnes ayant subi une lésion professionnelle s'en trouvera facilitée.
La
CAQ s'était engagée à reconnaître plusieurs cancers chez les pompiers. Le
projet de loi ajoute donc, pour les pompiers
combattants, les cancers suivants : le cancer du rein, le cancer de la
vessie, le cancer du larynx, le cancer du poumon, le cancer de la prostate, le cancer de la peau, le mésothéliome
non pulmonaire, le cancer pulmonaire ou le mésothéliome pulmonaire, le
myélome multiple et le lymphome non hodgkinien.
Au
cours de l'étude du projet de loi, un amendement a également été adopté afin d'ajouter la maladie de Parkinson
provoquée par l'exposition aux pesticides à
la liste des maladies
professionnelles. Je tends maintenant la main à tout le milieu agricole. Nous devons travailler ensemble
pour sensibiliser les agriculteurs et les producteurs à l'importance de la
prévention dans leurs milieux de travail,
leurs milieux de vie. Vous nourrissez le Québec. Votre santé, c'est la santé de
la nation.
Nous avons également
ajouté le contact avec le parasite responsable de la maladie de Lyme dans les
conditions particulières de la parasitose, maladie déjà présente dans la liste
et bénéficiant d'une présomption.
Une autre grande
avancée qui me tient à coeur concerne la reconnaissance du trouble de stress
post-traumatique pouvant faire l'objet d'une
présomption de maladie professionnelle. Il est grand temps d'en faire plus pour
prendre soin de ceux qui nous
protègent. Le travailleur qui est exposé, de manière répétée ou extrême, à une
blessure grave, à de la violence sexuelle,
à de graves menaces ou à la mort n'aura plus à assumer le fardeau de la preuve.
Sur l'ensemble des réclamations pour une lésion psychologique
attribuable au stress aigu, 67 % sont en lien avec des diagnostics de
trouble de stress post-traumatique. La
modernisation facilitera donc le processus de réclamation pour de nombreux
premiers répondants au Québec.
Mme
la Présidente, afin de faire en sorte que la réglementation suive l'évolution
des connaissances scientifiques, le
projet de loi a proposé la création d'un comité scientifique sur les maladies
professionnelles. Il s'agit d'un comité indépendant, dont les membres sont nommés par le gouvernement.
Il pourra toutefois s'adjoindre tout expert qu'il juge pertinent pour
mener à bien son mandat.
• (11 h 30) •
Ce comité scientifique
aura pour fonction de faire des recommandations quant aux relations causales
entre les maladies, aux contaminants ou aux
risques particuliers du travail. Pour ce faire, il recensera et analysera les
recherches ainsi que les études en
matière de maladies professionnelles. La transparence comme l'accessibilité
sont des objectifs primordiaux du
gouvernement. Ses avis et recommandations seront publiés sur le site Internet
de la CNESST. Le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité
sociale ainsi que la CNESST seront dès lors imputables de la décision de les
suivre.
De plus, nous
confierons au comité le mandat d'étudier de manière prioritaire les sujets
suivants : les maladies psychologiques,
tous les cancers qui affectent les pompiers qui sont reconnus dans les autres
provinces, y compris le cancer du
sein chez les pompières, les maladies prévues à la liste de l'Organisation
internationale du travail qui ne se retrouvent pas dans le règlement sur
les maladies professionnelles, les maladies qui affectent plus régulièrement
les femmes, les autres maladies susceptibles
d'être causées par l'exposition aux pesticides, notamment le lymphome non
hodgkinien, les caractéristiques
médicales de la surdité professionnelle et le seuil à partir duquel l'audition
est considérée comme anormale.
Il
est ambitieux d'introduire un tel comité au sein de la loi, mais je suis
persuadé qu'il assurera un rôle majeur pour l'évolution de la liste des
maladies professionnelles présumées.
Mme
la Présidente, les lésions professionnelles ont des conséquences importantes
aux plans personnel, social et économique.
La LATMP actuelle structure le processus de réparation d'une lésion
professionnelle de façon séquentielle. Tout
d'abord, il y a l'indemnisation, puis la consolidation et, au besoin, la
réadaptation en vue d'une réinsertion sociale et professionnelle.
Pourtant, la littérature scientifique et l'évolution des connaissances énoncent
clairement que le temps passé en dehors du
marché du travail est souvent plus dommageable que la lésion elle-même. La loi
ne comporte pas de levier pour
permettre à la CNESST d'offrir des mesures de réadaptation avant que
l'existence de séquelles permanentes ne soit démontrée. Il fallait y remédier. Certains travailleurs présentent
des facteurs de risque de chronicité et nécessitent du soutien pour réintégrer le travail, et ce, le plus
tôt possible au cours du processus de réparation. Avec ce projet de loi, la CNESST pourrait offrir
des mesures de réadaptation en collaboration avec le travailleur et
l'employeur. Les mesures de réadaptation
seraient également approuvées par le professionnel de la santé qui s'occupe du
travailleur. Cela permettra au travailleur de rester actif et ainsi de
réduire les risques de chronicité des lésions professionnelles.
Un autre élément à
considérer est l'assignation temporaire. L'assignation temporaire constitue un
moyen pour favoriser le retour en emploi
prompt et durable des travailleurs ayant subi une lésion professionnelle,
notamment en protégeant le lien d'emploi.
Cependant, le manque de connaissances de l'employeur sur les limitations
fonctionnelles temporaires du travailleur peut constituer un frein à
cette assignation.
Le
projet de loi propose l'utilisation d'un formulaire
d'assignation temporaire prescrit par la CNESST. Ce formulaire contiendra l'identification des limitations
fonctionnelles temporaires du travailleur. Par conséquent, les employeurs
auront en main toutes les informations nécessaires pour accommoder leurs
travailleurs.
Tous
ces éléments permettront de faciliter la réadaptation du travailleur et de
diminuer le temps passé en dehors du marché
du travail. Cette approche centrée sur les besoins du travailleur se garante
d'un rétablissement plus rapide et d'un retour sur le marché du travail plus
harmonieux.
Mme la Présidente, la LATMP
prévoit une période de recherche d'emploi lorsque le travailleur ayant subi une
lésion professionnelle n'est pas en mesure de réintégrer ses
fonctions en raison de séquelles permanentes. En revanche, les démarches
de recherche d'emploi sont souvent
laborieuses et le soutien offert était insuffisant. Étant ministre du Travail et de l'Emploi, je
devais formaliser une entente entre la CNESST et mon ministère.
Ainsi,
les deux organisations vont conclure une entente prévoyant les services publics
d'emplois dont les travailleurs victimes d'une lésion professionnelle
pourront bénéficier. Les ressources de mon ministère seront mises au service
des travailleurs. Comme société, on ne peut
pas laisser tomber ces gens et les laisser à eux-mêmes. Je souhaite que tous
puissent exprimer leur potentiel et retrouver un emploi à la hauteur de
leurs ambitions.
Mme
la Présidente, tout ce soutien envers les travailleurs doit également se
traduire par la qualité des biens et des services offerts par les fournisseurs de la CNESST. Advenant des
irrégularités dans la prestation de service d'un fournisseur de soins, la CNESST est actuellement dans
l'impossibilité d'intervenir pour demander des rectifications. Cette situation
empêche la CNESST d'assumer pleinement sa
responsabilité en termes de contrôle et de vérification. Par exemple, elle
ne disposait pas des moyens efficaces pour
éviter la surfacturation par des fournisseurs mal intentionnés. Le projet de
loi vient donc doter la CNESST d'un levier adéquat pour assurer cette
qualité.
La
mise en place d'un régime d'accréditation et de vérification des fournisseurs
permettra d'atteindre cet objectif et
d'assurer une plus grande cohérence dans les pratiques. L'intervention proposée
imposera donc l'obligation pour ces partenaires essentiels d'obtenir une
reconnaissance en bonne et due forme de la CNESST.
La
CNESST pourrait également déterminer les documents nécessaires au dépôt d'une
demande d'accréditation, identifier
les critères de reconnaissance d'un fournisseur, établir des conditions permettant de mettre fin à
l'accréditation avec un dispensateur fautif et prévoir des conditions de
recouvrement, le cas échéant. Évidemment, tout comportement inadéquat de la part d'un professionnel pourra
toujours être signalé aux différents ordres professionnels. Nous atteignons
deux objectifs : assurer les meilleurs
soins aux travailleurs et garantir que les fonds de la CNESST soient bel et
bien consacrés à sa mission fondamentale.
Je tiens maintenant à
rassurer les employeurs quant à l'encadrement de la notion d'obérer injustement
proposée initialement par le projet de loi. Les employeurs pourront continuer
de faire valoir qu'ils sont obérés injustement pour justifier un partage des coûts en imputation avec d'autres employeurs
comme cela se fait présentement. De plus, les précisions apportées à la
notion d'handicap préexistant d'un travailleur ayant subi une lésion
professionnelle ont été retirées elles aussi.
Nous avons éliminé les effets potentiellement préjudiciables et non souhaités.
En résumé, nous revenons, à cet égard, au statu quo.
Mme la Présidente,
l'un des objectifs du projet de loi était la déjudiciarisation. Plusieurs
mesures prévues par le projet de loi
permettront d'atteindre ce but. Je pense plus particulièrement aux
modifications apportées à la Direction de la révision administrative, ce qu'on
appelle la DRA. Pour plusieurs
associations d'employeurs et représentants de travailleurs, la révision
administrative constitue une étape dont les résultats sont mitigés.
Ainsi, ceux qui le
souhaitent pourront contester directement au Tribunal administratif du travail
une décision sans avoir recours à l'étape de
la révision administrative. Les sujets visés incluent les décisions
rendues à la suite d'un avis du Bureau d'évaluation médicale, d'un avis du comité spécial des présidents qui
analysent les maladies professionnelles pulmonaires, d'un avis d'un comité des maladies professionnelles
oncologiques et les décisions en matière de financement, dont celles liées aux
dispositions d'exception en matière d'imputation. La diminution du nombre de
paliers de contestation pour les employeurs et les travailleurs
permettront encore de réduire les délais pour y accéder.
Mme la Présidente, la
prévention est la clé du succès pour prévenir les accidents du travail et les
maladies professionnelles. J'ai constamment
été guidé par ma volonté de protéger davantage les travailleurs. Le projet de
loi prévoit donc que tous les secteurs d'activité économique seront couverts
par des mécanismes de prévention et de participation. L'introduction de ces nouveaux outils permettra de couvrir l'ensemble
des 272 000 établissements québécois. Il s'agit d'une première au Québec, une première attendue depuis
plus de 40 ans. Concrètement, cela veut dire qu'on retrouvera, dans les
établissements d'au moins
20 travailleurs, un programme de prévention, un comité de santé et de
sécurité et un représentant en santé et en sécurité.
• (11 h 40) •
Pour les
établissements de moins de 20 travailleurs, il y aura l'obligation de
faire un plan d'action en santé et en sécurité du travail. Un agent de liaison
devra être désigné parmi les travailleurs. Il s'agit ici de faire en sorte que
les mécanismes soient adaptés à la réalité des petites entreprises.
Cette
approche a aussi l'avantage d'assurer une plus grande égalité entre les femmes
et les hommes puisque tous les
secteurs d'activité seront assujettis aux mêmes obligations. En effet, il ne
faut pas oublier que la grande majorité des femmes, 85 %, se retrouvent dans les secteurs d'activité économique
qui ne sont actuellement pas soumis aux obligations relatives aux mécanismes de prévention et
participation des travailleurs. On retrouve plusieurs secteurs d'activité
économique à prépondérance féminine dans les groupes prioritaires 4,
5 et 6, notamment l'enseignement, les services médicaux et sociaux et le commerce de détail. Les nouvelles
mesures auront aussi un effet direct sur les jeunes travailleurs, notamment
par le fait que des secteurs comme l'hébergement, la restauration et le
commerce de détail seront maintenant couverts.
Plus
de la moitié des jeunes travailleurs se retrouvent dans des groupes
prioritaires qui ne sont pas actuellement visés par les mécanismes de prévention et de participation. Pourtant, ils
représentent une part importante des personnes ayant subi des lésions
professionnelles. Il est temps de tourner la page sur cette approche d'une
autre époque.
Un
règlement sur le fonctionnement des mécanismes de prévention devra être
développé et adopté par le conseil d'administration paritaire de la CNESST dans
un délai de trois ans, à défaut de quoi le gouvernement en adoptera un dans
l'année suivante.
Je veux
toutefois insister sur la grande confiance que j'ai en la capacité des parties
à s'entendre sur le contenu du règlement.
Les responsabilités qui incombent aux administrateurs de la CNESST sont à la
hauteur de leur expertise. Ils peuvent et ils doivent relever ce défi.
Entre-temps, un régime intérimaire sera déployé. Dans les six mois suivant la
sanction de la loi, il permettra
notamment de préparer les établissements à la mise en place des mécanismes complets de prévention et de participation
des travailleurs.
Mme la
Présidente, l'une des façons retenues
pour assurer l'efficacité des mécanismes de prévention et de participation est la possibilité d'implanter des programmes
multiétablissements. En effet, l'approche multiétablissement permet à un
employeur de déployer un même programme
de prévention à plusieurs endroits sous sa responsabilité. Cela lui
permet d'être plus efficient s'il
possède plus d'un établissement dans son entreprise. La décision d'utiliser le multiétablissement
revient à l'employeur puisque
c'est lui qui est responsable de la gestion de la santé et de la sécurité dans
ses établissements. Il en est imputable.
Des critères précis permettront toutefois
d'encadrer son utilisation tels que la distance entre les établissements. Cependant,
le critère principal retenu pour le regroupement d'établissements demeure celui de retrouver des activités
de même nature. Aux fins de déterminer si les activités sont de même nature,
il faudra prendre en considération l'exécution de fonctions comparables
par les travailleurs et les conditions d'exercice de celles-ci. Les employeurs
devront prendre en compte le guide d'application qui sera élaboré par la CNESST
et rendu public.
Lorsqu'un
employeur décidera d'implanter un programme de prévention multiétablissement, un comité de
santé et de sécurité et au moins un représentant en santé et en sécurité seraient déployés. Des comités et des représentants additionnels pourraient être
ajoutés à la suite d'une entente entre l'employeur et les travailleurs. L'employeur devra également prendre en
considération les établissements de moins de 20 travailleurs dans le déploiement de son programme. De plus, la CNESST aura le pouvoir d'imposer un programme
de prévention, un comité et un représentant dans les établissements qu'elle désigne lorsqu'elle le juge nécessaire
pour protéger la santé, la sécurité et l'intégrité physique et psychique des travailleurs.
Mme la Présidente, un sujet très important qui a guidé nos réflexions est celui de la
santé mentale des travailleurs québécois. Nous avons, au cours des dernières décennies,
assisté à l'émergence de risques en santé et sécurité du travail, notamment
ceux liés à la santé psychologique au travail. Ce sont les risques
psychosociaux. Ces risques, moins visibles que
les risques physiques, sont plus difficiles à identifier. Ils demeurent, même
encore aujourd'hui, un tabou dans certains milieux.
Le projet de loi propose que l'identification des risques psychosociaux soit spécifiée
dans le contenu du programme de prévention. Une analyse de risque permet de
mieux comprendre le risque et ses
possibles conséquences. Elle permet aussi de déterminer les mesures à
mettre en place pour éliminer ou contrôler ces risques dans le respect du droit
de gestion de l'employeur. Le représentant
en santé et en sécurité aura aussi un rôle à jouer car il pourra recommander
des mesures qu'il juge opportunes pour les contrôler.
C'est une première au Québec. Depuis notre
élection, la CAQ a augmenté les budgets consacrés aux services de santé mentale. Il y a un vrai redressement qui
s'est opéré sous notre gouvernement. Le projet de loi répond lui aussi à cette
priorité qu'est la santé mentale.
L'identification spécifique des risques psychosociaux liés au travail
contribuera à sensibiliser les employeurs et les travailleurs et fera
une réelle différence.
Mme la Présidente, j'aimerais maintenant parler
du secteur de la construction. Rappelons que les dispositions sur les
mécanismes visant les chantiers de construction n'ont jamais été promulguées
depuis leur adoption en 1979. Pourtant, le
secteur de la construction constitue l'un des secteurs les plus à risque pour
les travailleurs. En 2018, il s'agissait du secteur dans lequel sont survenus le plus de décès à la suite d'une
lésion professionnelle, soit 70 des 226 décès survenus au Québec. Je ne veux plus de tels décès au
Québec. C'est pourquoi le projet de loi prévoit que tous les établissements
devront élaborer un programme de
prévention ou un plan d'action afin de couvrir l'ensemble de leurs activités,
même celles en chantier.
De plus, le
projet de loi prévoit la mise en place d'un comité de chantier sur les
chantiers de 20 travailleurs ou plus, prévoit également la présence
d'un représentant en santé et en sécurité sur les chantiers qui occupent
10 travailleurs ou plus, à temps
partiel ou à temps plein. L'agent de sécurité sera remplacé par un
coordonnateur en santé et sécurité, présent à temps plein sur les chantiers de
100 travailleurs et plus, ou s'il s'agit d'un chantier d'une valeur supérieure
à 12 millions de dollars. Le coordonnateur devra réussir une
formation théorique de 240 heures, en plus d'une formation pratique.
Les mesures
prévues par le projet de loi sont nécessaires et attendues depuis plusieurs
décennies. Elles nécessiteront la
collaboration des employeurs et des travailleurs. Mon ministère et la CNESST
seront là pour les accompagner, mais il est fondamental d'améliorer la culture de prévention sur les chantiers
de construction. Cette culture de prévention devra prendre en compte
l'intérêt des femmes. Les femmes sont trop souvent poussées à quitter le
domaine de la construction. L'une des
raisons : le harcèlement, les menaces, l'intimidation. Le taux d'abandon
des femmes, au cours d'une période de cinq ans, s'élève à 55 %. Il
faut penser aussi en termes de capacité de rétention du secteur de la
construction.
Les
dispositions sur le harcèlement sexuel, combinées à la présence de
représentants en santé et en sécurité, pourront contribuer à réduire ce risque lié au travail. Le harcèlement à
l'endroit des femmes est simplement inacceptable. Les femmes ont le droit d'occuper un emploi sans être
victimes de harcèlement, et ce, peu importe le secteur. Je suis donc résolument
convaincu que les dispositions du projet de loi n° 59
sont un pas important dans la bonne direction.
Mme la Présidente, un élément majeur du projet
de loi demeure l'élargissement du
rôle d'intervention des directeurs de
santé publique. Actuellement, les intervenants du réseau de la santé publique au travail ne peuvent intervenir que dans quelques
secteurs économiques précis se trouvant dans les groupes prioritaires 1, 2
et 3. Comme les mécanismes de prévention et
de participation s'appliqueront maintenant à plus de 272 000 établissements, il était primordial
de repositionner le réseau pour assurer sa force d'intervention. Avec le projet
de loi, nous confions l'autonomie nécessaire au réseau pour collaborer à
l'élaboration et à la mise en oeuvre des éléments de santé des programmes de
prévention élaborés par les employeurs. Il
pourra faire les recommandations appropriées. Les intervenants du réseau
seraient également autorisés à intervenir sur le lieu de travail à la
demande de la CNESST ou d'un directeur de santé publique. De plus, toute
personne qui offre des
services en santé au travail à un employeur devrait dénoncer une situation de
danger. Je tiens à saluer le réseau pour son expertise et sa grande
collaboration. La pandémie que nous vivons aura mis en lumière l'importance de
leurs interventions dans les lieux de travail.
• (11 h 50) •
Avec notre
réforme, la loi santé et sécurité du travail confierait désormais au réseau
deux responsabilités majeures : la gestion de la
prévention en santé, que nous venons de passer en revue, et l'évaluation des
dangers dans le cadre du programme Pour une
maternité sans danger. Le programme Pour une maternité sans danger a pour
objectif le maintien en emploi sans
danger de la travailleuse enceinte ou qui allaite. Généralement, il est possible de protéger la santé de la mère et celle de l'enfant tout en permettant à celle-ci
de poursuivre ses activités professionnelles. Dans le cas où l'employeur ne
peut modifier le poste ou les tâches de la
travailleuse, celle-ci a le droit de cesser temporairement de travailler et de
recevoir des indemnités de la CNESST.
L'objectif du programme et les droits de la
travailleuse demeurent les mêmes avec le projet de loi. Il n'existe cependant pas de protocole pour l'application du
programme Pour une maternité sans danger au niveau national, si bien que
la gestion du programme varie selon la
région et parfois même au sein d'une même région. Cela entraîne une iniquité
dans le traitement des dossiers et de
retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite. Nous confions donc
au réseau la responsabilité d'établir un protocole qui pourra se
décliner par secteurs.
De plus, une mise à jour régulière des
protocoles visant l'identification des dangers et des conditions de travail qui
y sont associés est prévue. Le directeur national de santé publique pourra
consulter tout expert ou tout organisme public
pour l'élaboration et la mise à jour de ces protocoles. Ce sera une occasion de
suivre l'évolution des connaissances scientifiques et de bonnes
pratiques puisque le protocole sera rendu public.
Mme la Présidente, le régime de santé et de
sécurité actuel ne prévoit aucune disposition spécifique concernant la violence. C'est l'un des sujets qui a motivé
mon désir de mener à terme cette ambitieuse réforme. Le projet de loi permet
de corriger cette situation et de
reconnaître explicitement la violence physique ou psychologique qui se
manifeste sur les lieux du travail, incluant la violence conjugale,
familiale ou à caractère sexuel. L'employeur sera tenu de prendre des mesures s'il sait ou devrait savoir qu'une de ses
travailleuses ou qu'un de ses travailleurs est exposé à une telle situation sur
les lieux de travail. À titre d'exemple, un
employeur pourrait changer le numéro de téléphone au travail d'une travailleuse
victime de menaces d'un ancien compagnon de
vie. Il s'agit ici d'une autre des nombreuses initiatives de notre gouvernement
pour lutter contre la violence conjugale.
J'ai la
conviction que ces précisions à la loi serviront à ouvrir un dialogue
concernant la violence et ses répercussions sur le travail. Mme la Présidente, si le projet de loi est adopté, le
Québec deviendra un leader en ce qui a trait à la protection des
travailleuses et des travailleurs domestiques. Ces personnes ne sont protégées
qu'à certaines conditions seulement, que par
les régimes de santé et de sécurité du travail de l'Ontario, du Manitoba et de
la Colombie-Britannique. Le travail domestique,
nous le savons tous, est principalement exécuté par des femmes, souvent issues de groupes minoritaires. Pour
bénéficier d'une protection en cas de
lésions professionnelles, les travailleuses domestiques peuvent certes
souscrire à une protection
personnelle auprès de la CNESST et en assumer les coûts. Cependant, seulement
55 travailleuses domestiques se sont prémunies de cette protection
en 2019. La couverture automatique des travailleuses domestiques au régime de santé et de sécurité du travail contribuerait à
réduire les risques de vulnérabilité. Nous estimons qu'il y aurait un potentiel
de plus de 18 400 travailleuses qui pourraient être ainsi couvertes
par notre projet de loi.
Le texte de
loi que nous soumettons permettra de couvrir les travailleuses qui gagnent leur
vie grâce à cette activité, tout en excluant l'ensemble du travail
sporadique. C'est une avancée majeure dont nous pouvons être fiers.
Mme la Présidente, je suis très heureux du travail de collaboration que fait notre gouvernement avec les diverses associations
étudiantes. Lors d'une rencontre de travail avec des représentants étudiants, ils m'avaient exprimé leurs préoccupations quant à l'encadrement des stages d'observation dans le
régime de santé et de sécurité. En effet, plusieurs étudiants en stage
n'effectuent pas les tâches des salariés, mais puisqu'ils observent et se
trouvent dans le milieu de travail, ils
sont exposés à des risques eux aussi. Le projet de loi permet donc de
venir confirmer que la protection offerte par la Loi sur les accidents de travail et les maladies
professionnelles couvre aussi les stages d'observation. Ces stages se déroulent
principalement dans des secteurs à prépondérance féminine, tels que l'enseignement et les sciences de la santé. En effet, c'est près de 75 % des
stages d'observation qui sont effectués par des femmes. Nos jeunes méritent que
la loi soit adoptée et que cette mesure entre en vigueur dès que
possible.
Les
associations sectorielles paritaires sont constituées en vertu d'ententes entre
des associations d'employeurs et des associations syndicales d'un secteur
d'activité économique. Elles ont le mandat d'offrir de la formation, de
l'information, du soutien et de
l'accompagnement aux employeurs et aux travailleurs afin de favoriser la prise
en charge de la prévention. Toutes les associations sectorielles
paritaires sont financées par la CNESST. On dénombre 10 associations, soit
sensiblement le même nombre que lors de
l'entrée en vigueur de la loi, alors que l'objectif initial était de doter tous
les secteurs d'activité économique d'une telle association paritaire.
En 2018, près de 61 % de l'ensemble des
travailleurs n'étaient pas couverts par une convention collective ou représentés par une association syndicale et
conséquemment ne profitaient pas des services de formation d'une association
sectorielle paritaire. La révision proposée
dans le projet de loi n° 59 permettra d'améliorer l'offre de services,
notamment de formation, et d'élargir l'accès à diverses clientèles. Le
projet prévoit que d'autres groupes, tels qu'une association professionnelle, par exemple, pourraient conclure
une entente et constituer une association sectorielle paritaire. C'est une
modification concrète qui ajoute un outil de prévention à la portée de tous les
secteurs.
Mme la
Présidente, la pandémie a amené les milieux de travail à s'adapter rapidement
lors du premier confinement que nous
avons vécu. C'est un effort collectif remarquable qui a été fait par les
employeurs et les travailleurs québécois pour s'adapter. Une des adaptations principales fut de recourir au
télétravail. Au Québec, environ 40 % de la population active a basculé en mode
télétravail, tout un changement si on considère qu'avant la pandémie à peine
15 % des salariés travaillaient depuis
leur résidence. C'est pourquoi j'avais mandaté, le 16 octobre 2020, le
comité de vigie du Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre
afin d'émettre un avis sur le télétravail.
Or, le comité
de vigie a conclu que le télétravailleur était assujetti aux lois du travail,
notamment la Loi sur les normes du
travail, la Loi sur la santé et la sécurité du travail, la Loi sur les
accidents de travail et les maladies professionnelles et la Charte des
droits et libertés de la personne.
Cependant,
pour donner suite à des représentations de groupes et de députés de différentes
formations politiques, nous avons décidé d'apporter une précision pour
le régime de santé et sécurité. En effet, la loi s'appliquera dorénavant au
travailleur qui effectue du télétravail ainsi qu'à son employeur. Nous nous
sommes également assurés que le travail de l'inspecteur de la CNESST soit mieux
encadré afin d'assurer le respect du droit à la vie privée du travailleur.
Cette modification reflétera donc la réalité des organisations du travail
contemporaines.
• (12 heures) •
Mme la
Présidente, comme mentionné précédemment, la motivation première de ce projet
de loi était d'améliorer la prévention dans les milieux de travail.
Au début de mon mandat, nous nous sommes
rapidement consacrés à la publication du Règlement sur les agences de placement de personnel et les agences
de recrutement de travailleurs étrangers temporaires. Il est entré en vigueur
le 1er janvier 2020. Ce règlement encadre les pratiques des agences et
prévoit les moyens pour faire respecter les droits de leurs employés et des travailleurs
étrangers temporaires. Bien que ce règlement découle de la Loi sur les normes du travail,
j'ai été sensible aux préoccupations soulevées concernant le régime de santé et
de sécurité. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement
qui vise à prévoir à la Loi sur la santé et sécurité les obligations qui
incombent à l'employeur qui loue ou prête
les services d'un travailleur. Nous avons exclu la possibilité pour ce dernier de s'en soustraire de manière contractuelle. Le gouvernement déploiera tous les outils pour assurer la
protection des travailleurs d'agences et pour faire connaître leurs
droits.
Mme la
Présidente, le projet de loi prévoit que le ministre devra faire rapport sur
l'application et la mise en oeuvre
de la loi dans cinq ans de son adoption. D'ici là, je me suis engagé à dresser un
bilan des mesures qui concernent les travailleuses domestiques. Nous
rendrons le processus de mise en oeuvre de la loi le plus transparent possible.
Nous assumerons les bons coups de cette
réforme comme les moins bons. Mais, plus que jamais, les travailleurs n'auront
plus à attendre 40 ans avant
qu'un gouvernement prenne ses responsabilités. C'est des lois qui étaient
devenues sclérosées. On avait un bilan, en termes de nombres et de gravité d'accidents de travail, qui était
extrêmement anémique. Il faut redresser la situation, corriger le tir et
s'intéresser à la santé des travailleurs et des travailleuses et de leurs
familles.
Mme la
Présidente, avant de conclure ce discours, je dois prendre le temps de faire
certains remerciements — un projet de loi d'une
telle ampleur n'aurait jamais pu voir le monde sans l'apport de plusieurs
personnes — d'abord
à tous les membres de notre
gouvernement, qui ont cru en cette ambitieuse réforme, et à notre premier
ministre, ensuite aux collègues de
l'opposition, les collègues de Nelligan, Hochelaga-Maisonneuve, Jonquière mais
également de Bonaventure et Robert-Baldwin,
ainsi que leurs recherchistes, Marc-Antoine, Guillaume, Jean-Sébastien, sans
oublier Viviana, aussi, qui accompagnait mon collègue de Nelligan pour
une bonne partie de l'étude détaillée.
Moi, j'ai
développé, au-delà des débats, des discussions, un respect, aussi une
fraternité avec mes collègues, pour qui j'ai énormément d'estime, parce que
j'ai senti que les collègues des partis d'opposition savaient... Puis ce projet
de loi là, je l'avais dit au départ, était
perfectible, il le demeure, mais c'est tous ensemble qu'on va s'assurer que
l'objectif de prévention et de
réduction des accidents de travail soit atteint. Et je les invite, je les ai
invités souvent à travailler en collaboration avec moi, ils savent que ma porte
est ouverte, que je travaille de manière transparente. Et, à chaque fois qu'ils me demandent une information, je m'assure, dans la mesure de sa disponibilité, de la partager avec eux. Et moi, je veux continuer
de construire un régime de santé et sécurité au travail en équipe, avec tous
les acteurs. Et ce n'est pas uniquement pour
les employeurs et les syndicats, qu'on fait une réforme de cette nature-là,
c'est d'abord et avant tout, je le répète souvent, pour les travailleurs
et pour les travailleuses.
Je veux
remercier aussi l'équipe de mon ministère, Anne Racine, Antoine Houde,
sous-ministre pour Mme Racine, le directeur général des politiques et de
la recherche pour Antoine. C'est des personnes qui ont été constamment à
côté de moi, qui ont appris à me connaître,
qui ont appris à partager avec moi, qui ont été des supports indéfectibles, qui
m'ont aidé, qui ont aidé les partis
de l'opposition à parfois faire les nuances qui s'imposaient et qui nous ont
aidé à faire cheminer ce projet de
loi là et le faire aboutir à sa conclusion. Leurs équipes aussi, Audrey
Pichette, Janika Tardif, Nicolas Beauchemin. Aux équipes de la CNESST
qui m'entouraient constamment, qui n'ont pas eu peur d'intervenir, personnes à
l'égard desquelles, parfois, je mettais beaucoup de pression parce qu'on avait
des amendements à faire puis on voulait respecter l'institution parlementaire,
parce qu'on sait qu'il y a des Québécois, des Québécoises, il y a des acteurs,
il y a des partenaires, il y a des syndicats, des employeurs qui nous
écoutaient, et je voulais qu'ils soient fiers de la commission parlementaire,
qu'ils réalisent qu'on travaille avec efficacité, du mieux qu'on pouvait, en
respectant les ressources humaines puis les capacités de chacun et chacune
d'intervenir. Mais je veux, à cet égard-là, remercier Carole Bergeron, Mylène
Rivard-Demers, Geneviève Lapierre, Annick Marcoux, Tatiana Santos de Aguilar,
également Louise Gravel, Guylaine Bourque,
Jean-Pierre Jobin, Sophie Morais, des personnes qui ont joué un rôle, encore
une fois, prépondérant. Et plusieurs, évidemment, ont la même formation que moi
en droit, donc ça aidait, puis ils étaient constamment en contact avec nos conseillers en législation et ils se sont
assurés que nos textes soient cohérents et respectueux du corpus législatif
québécois. Me François Lamoureux, qui
est président du Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre. Les
partenaires, les syndicats, les employeurs.
Je le sais,
que c'est un projet de loi qui ne répond pas aux attentes de tout le monde,
mais il y a des voies de passage. Puis
en relations de travail puis en santé et sécurité du travail, on ne fait jamais
l'unanimité, il y a toujours des insatisfactions, il y a toujours des attentes qui ne sont pas rencontrées. Puis
ça, les personnes parlementaires le comprennent aussi, mais c'est sûr que parfois tu réponds à des intérêts
externes, puis il y en avait beaucoup dans le régime de santé et sécurité au Québec, Mme la Présidente, qui avaient des
intérêts puis des préoccupations, parfois au maintien du statu quo, parfois au
changement de tel article ou de telle
section, parfois à des changements plus radicaux, puis parfois à des
changements plus souples. On ne fait
pas l'unanimité quand on travaille en santé et sécurité. Mais il y a une chose
qui est certaine : tout le monde veut l'amélioration du régime, tout le
monde souhaite ardemment et profondément qu'on fasse plus de prévention
et que nos lois ne restent pas encarcanées dans le béton pendant 40 ans
encore.
S'il y a une
grande leçon à tirer, c'est que n'attendons pas, adaptons-nous. Et le rapport
de mise en application dans cinq ans, il faut déjà commencer à le
préparer puis s'assurer qu'on remplit nos obligations envers les Québécois, les
Québécoises. Et moi, je suis convaincu qu'en
travaillant ensemble on va réussir, on va s'adapter, on va corriger le tir. Et
je me souviens d'avoir parlé au ministre de
l'époque, en 1979, Pierre Marois, du Parti québécois, qui était le parrain de
la loi sur la santé et sécurité du
travail, puis à l'époque on était un peu des révolutionnaires, on est devenus
des leaders en santé et sécurité, puis lui, il me rassurait, il me
disait : Il n'y aura pas personne de content. Les syndicats, pas
totalement, puis les patrons, pas
totalement. Il faut trouver une voie de passage. Puis il m'a nommé, évidemment,
les leaders syndicaux et les leaders
patronaux de l'époque, et ils avaient des positions diamétralement opposées.
Certains en veulent plus, d'autres en veulent moins. Mais je pense que,
si on travaille ensemble, on va, tout le monde, en faire beaucoup plus.
Je veux
remercier l'équipe de mon cabinet, Denis, Stéphane, Maude, Brigitte, mais
particulièrement Fanny Cantin. Je vais y revenir.
Le succès de cette réforme, Mme la Présidente,
repose maintenant dans sa mise en oeuvre. Chaque acteur devra jouer son rôle et assumer ses responsabilités.
Nous avons le devoir collectif de mieux
protéger nos travailleurs et de faire baisser le nombre de talents dont le Québec se prive chaque année.
Cette réforme demandera l'implication des travailleurs, des employeurs, des syndicats, de la CNESST et des
autres partenaires du marché du
travail. Nous devons rester vigilants
et mettre les efforts de collaboration nécessaires.
• (12 h 10) •
Nos objectifs
étaient clairs, je pense que je viens de les exprimer aussi, mais c'est
augmenter la prévention des risques en milieu
de travail, faciliter l'accès aux
régimes d'indemnisation, apporter un
meilleur soutien aux travailleurs ayant subi une lésion professionnelle
ainsi qu'à leurs employeurs, améliorer la gouvernance et déjudiciariser.
Aujourd'hui, je suis fier de dire aux
Québécois que ces objectifs sont enfin atteints. Voter en faveur de l'adoption
de la loi, c'est voter pour donner au régime les outils dont il a besoin
pour faire face aux défis de demain.
Mme la
Présidente, donc, Fanny Cantin, une compagne depuis le tout début, en fait
depuis mon élection. Je me souviens encore, à la cérémonie d'assermentation
elle m'avait été présentée, elle avait exprimé son intérêt pour les relations
de travail, pour la réforme du régime. Je dois cette réforme-là beaucoup à
cette personne-là. Elle m'a accompagné. Puis on n'est pas bon, quand on
est ministre ou député, on le sait tous, si on n'a pas du monde avec nous
autres, si on n'a pas du talent puis de
l'intérêt humain qui nous côtoie. Fanny, elle est ce capital-là, elle est
l'humanité, pour moi. Puis dans tout ce que je fais elle est là, à mes côtés, elle
comprend mes sentiments, mes anxiétés, mes préoccupations et mes ambitions,
donc je les partage totalement avec elle.
Puis mes
collègues, encore une fois... Puis je l'ai souvent dit au collègue
d'Hochelaga-Maisonneuve, il m'a permis d'être
meilleur, il a permis au régime d'être meilleur. Puis je sais qu'il en aurait
voulu plus, puis j'en suis conscient. Puis les personnes puis les organisations avec lesquelles il travaille en
voudraient beaucoup plus. Il faut toujours rappeler que les cotisations sont assumées totalement par les
employeurs, puis, je le répète, ce n'est pas que pour les syndicats et les
employeurs, c'est pour les travailleurs. Le
collègue de Jonquière, qui s'est joint en cours de route, a fait un travail
exceptionnel. Il est arrivé en
courant dans notre commission parlementaire. Il a été un atout. Et je pense que
le collègue de Nelligan, qui représente d'autres intérêts, je pense,
mais... il y a des intérêts autres qui en auraient voulu moins. Mais c'est
peut-être un signe qu'on a trouvé une voie
de passage, c'est peut-être un signe qu'on est au bon endroit. Mais je vous tends la main. Puis je vous tends
la main pour l'avenir. Puis je sais que vous avez à coeur la santé, la sécurité
des travailleurs. Donc, moi, je vous tends la main. Puis le collègue de Jonquière... Puis je l'ai dit en commission
parlementaire, n'hésitez pas, frappez
à ma porte. Moi, mes portes vont être
ouvertes, les portes de la CNESST vont être ouvertes, puis on va s'améliorer
tous ensemble en se respectant puis en travaillant dans la civilité et
la collaboration.
Mme la Présidente, j'invite donc tous les
collègues de cette Assemblée à voter en faveur du projet de loi, Loi
modernisant le régime de santé et de sécurité du travail. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le
ministre. Maintenant,
je suis prête à entendre un autre intervenant, et ce sera M. le député
de Nelligan.
M. Monsef Derraji
M. Derraji : Merci,
Mme la Présidente. Je remercie le ministre.
J'ai écouté attentivement son discours, plus d'une cinquantaine de minutes,
mais il a très bien pris le temps d'exposer le fruit de plus de sept
mois de travaux parlementaires.
Et je vais
commencer par parler de l'ambiance au niveau de la commission parlementaire, et ça m'a extrêmement touché, les mots
que le ministre a dits sur une personne qui a accompagné le ministre,
mais le ministre, il est chanceux parce qu'il travaille
avec cette personne chaque jour, mais cette personne était aussi à la disposition
des autres formations politiques, donc je
parle, en l'occurrence, les oppositions, que ce soit opposition officielle ou
autres. Donc, je tiens, moi aussi, à
remercier Fanny, qui nous a accompagnés depuis le début, mais pas uniquement le
cabinet du ministre, les gens de la CNESST, qui ont fait un travail
exceptionnel, qui étaient là. Ce n'est pas un projet de loi facile, c'est un
projet de loi très
complexe, le ministre l'a mentionné. J'espère que ça va être la dernière fois
qu'on ne va pas toucher à des lois... et qu'on oublie, surtout, que ça
fait 42 ans qu'on n'a pas touché à ces lois.
Donc, je lui lève mon chapeau, aujourd'hui,
parce qu'il a fait un travail nécessaire, très important. À certains moments, il faut — je vais utiliser un langage de soccer — jongler entre les intérêts, ce n'est pas
facile. Oui, il y avait des intérêts
parfois partagés, intérêts des personnes qui contribuent dans le régime, à
savoir les employeurs, mais aussi les intérêts des personnes qui représentent
les travailleurs, mais les travailleurs à la fois syndiqués et non syndiqués.
Mme la Présidente, le 19 janvier dernier,
lorsque nous entamions, à la Commission de l'économie et du travail, les consultations particulières par rapport au
projet de loi n° 59, la loi
modernisant la santé et la sécurité du travail, j'ai noté la longue attente des travailleuses et des
travailleurs mais aussi des employeurs, de la communauté médicale et des Québécoises et des Québécois pour cette
modernisation du régime. Il y avait un consensus, un consensus sur l'aspect de
la modernisation. Tout le monde voulait la
modernisation. Et, sur ce point, encore une fois, je pense que la modernisation
était nécessaire, importante, pas uniquement
pour le régime, qui est un régime exceptionnel, mais aussi pour voir l'avenir
de ce régime. Et, quand on dit «l'avenir»,
les trois blocs que le ministre nous a présentés, le bloc de la gouvernance, le
bloc de la prévention, le bloc de l'indemnisation, c'est ces blocs-là
qui nous ont guidés.
Et, quand j'ai commencé mon intervention en
remerciant l'équipe du ministre, ça a été un travail, oui, difficile à l'intérieur de la commission mais aussi à
l'extérieur de la commission. Nous avons eu toute l'aide nécessaire de la part
de l'équipe du ministre, et je tiens,
aujourd'hui, à le dire, parce qu'il faut toujours, quand on a des bons coups,
les souligner. Aujourd'hui, je tiens
à lever mon chapeau à toute l'équipe du ministre, au niveau de la CNESST, mais
l'équipe qui nous a accompagnés, parce que c'était un projet de loi très
technique. Ce n'est pas un projet de loi comme les autres projets de loi.
Et c'est vrai, le ministre était un bon joueur
d'équipe. Je ne sais pas quel sport il aime, mais, si j'ai à parier un 10 $ aujourd'hui, j'en suis sûr et certain,
que, parmi les jeux que le ministre aime, c'est sûr que c'est un sport d'équipe
et pas un sport individuel. Je ne
sais pas s'il aime le tennis, comme le premier ministre, mais j'en suis sûr et
certain, que c'est un bon joueur de hockey, sinon de soccer. Donc, ça a été un
bon joueur d'équipe avec l'ensemble des membres de l'opposition, que ce
soit l'opposition officielle ou les autres collègues.
Je vous ai
dit que c'était un projet technique parce que ça touchait plusieurs aspects.
Les maladies professionnelles, Mme la
Présidente, ça nécessite beaucoup d'expertise. Il y avait aussi, à un certain
moment, les représentants de la Santé publique,
et je sais que les gens de la Santé publique étaient là, ils ont exprimé leurs préoccupations par rapport à leur rôle, la médecine au
travail. Il y avait pas mal, pas mal, pas mal d'enjeux. Donc,
depuis le début, Mme la Présidente, il y avait beaucoup de préoccupations, des préoccupations de groupes représentant les travailleurs syndiqués, des préoccupations de groupes représentant les travailleurs non syndiqués et des préoccupations de groupes patronaux. Et il faut le dire, il
faut le dire, parce que, dans cette équation de modernisation de ce régime, il y a
une équation extrêmement importante, c'est la capacité de ce régime de rester
fiable pour l'intérêt des travailleurs.
La seule
remarque que je dis au ministre, parce qu'il a dit que je représentais des
groupes qui en voulaient moins, ce
n'est pas vrai, ce n'est pas vrai que les groupes avec qui je parlais ont voulu
moins, au contraire, j'ai eu l'occasion de travailler avec des groupes représentant
des syndiqués et non-syndiqués, mais aussi les employeurs, parce qu'au bout de la ligne... j'en suis sûr et certain, que
l'expert en droit du travail est conscient de ça, M. le ministre, qu'au bout de la ligne les
employeurs, ils contribuent, d'une manière importante dans ce régime. Et
donc l'équation qu'on avait depuis le début, depuis le début, Mme la
Présidente, c'est : Est-ce que les décisions qu'on va prendre pour ce
régime vont être... premièrement, vont aider nos travailleurs à avoir des
milieux sécuritaires de travail mais aussi, un élément important, garder la
fiabilité de ce régime pour l'avenir de nos travailleurs?
• (12 h 20) •
Je l'ai dit, au tout début, Mme la Présidente,
je voulais faire une motion de scission de ce projet de loi. Ça a été très difficile de naviguer dans l'ensemble
des articles. Encore une fois, avec la bonne collaboration, nous avons
essayé quand même, après neuf mois... J'enlève les mois où nous
n'avons pas pu siéger en commission, j'ajouterais les rencontres à l'extérieur
de la commission où on a vu la bonne collaboration. C'est quand même une longue
période où nous avons eu l'occasion
de travailler ce projet de loi, un projet
de loi qui, au tout départ, quand il
a été déposé, les gens se posaient des questions, se posaient des questions sur : Est-ce
que ça fait suite aux travaux de 2017 du comité consultatif sur le CCTM?
Est-ce qu'on va aller plus loin? C'est quoi,
l'impact? Il y a des études d'impact réglementaire. Il y avait
des articles où il y avait un impact sur les travailleurs. Donc, tout au
long de cet échange ou tout au long de l'échange dans cette commission,
il y avait cet élément qui était important.
Le premier,
premier bloc, Mme la Présidente, au niveau de la gouvernance, je pense qu'avec
cette modernisation on vient de mettre la Loi sur la gouvernance des
sociétés d'État en application. Donc, dorénavant, la CNESST va avoir un président de C.A. et une présidente-directrice
générale ou un P.D.G. pour gérer ses affaires. Et j'ai bien hâte à voir le
nouveau plan, la nouvelle planification de
la CNESST, parce que j'imagine qu'avec la nomination d'un nouveau C.A., un
conseil d'administration, on va commencer à voir sur quoi la CNESST va
travailler pour les prochaines années. Et je pense
qu'une mise à jour de la planification stratégique de la CNESST est obligatoire
avec l'adoption de ce projet de loi, parce
qu'aujourd'hui, en date d'aujourd'hui, oui, il y a des
enjeux de performance, vous avez vu récemment
les enjeux liés au traitement de
certaines réclamations, et le projet de loi, qui modernise, rajoute d'autres
éléments. Et, sur ce point, j'offre mon entière collaboration, au
ministre, de travailler ensemble, parce que ce qu'on veut tous, en tant que
parlementaires, c'est l'excellence au niveau de la CNESST. Nous sommes très
chanceux d'avoir un organisme, au Québec, comme la CNESST. Et, donc, donnons tous les moyens à la CNESST pour réussir cette
transition que le ministre a entamée au niveau de la gouvernance. Moi,
je pense, ces problèmes que nous sommes en train de voir, au niveau du
fonctionnement, probablement, avec un
conseil d'administration indépendant, avec un suivi de ses comités... Et on
sait c'est quoi, les problèmes, les
choses où on doit travailler. Avec une synergie entre le président ou la
nouvelle présidente de C.A., avec la P.D.G. en place, je pense qu'on va atteindre les résultats escomptés.
Et, sur ce point, je salue le ministre par rapport à cette première
action ou par rapport à ce premier résultat, qu'aujourd'hui on doit tous se
réjouir de ce gain.
Les deux
autres blocs, Mme la Présidente, et là je souscris entièrement dans la réflexion
du ministre, c'est deux blocs où il y
avait beaucoup de détails techniques, la prévention et l'indemnisation. Et
c'est là où on a vu, encore une fois je le dis, une excellente
collaboration, parfois des suspensions de certains articles, parfois des
interventions, parfois même des présentations
pour voir... Écoutez, on nous disait que, le régime, avec une étude
actuarielle, il y a des problèmes au niveau de la fiabilité du régime. Sur ces deux aspects, je tiens encore à
préciser que nous avons eu l'entière collaboration du ministre dans ce
sens.
Au tout
début, Mme la Présidente, la plupart des commentaires visaient le niveau de
risque. Et les niveaux de risque, ça
a été une chose qui a été soulevée surtout parce qu'au Québec, à l'époque, bon,
à l'époque, toujours, on avait les enjeux de la COVID qui frappaient le réseau
de la santé. Et, à l'époque, je me rappelle que les gens se posaient la
question sur le pourquoi de ces niveaux de risque. Et, encore une fois, avec la
pression, avec les commentaires des groupes, le ministre a retiré le
niveau de classification des risques.
Je vous
rappelle, Mme la Présidente, que les réflexions de ce projet de loi, qui ont
mené au projet de loi, en demandant aux
tables paritaires du marché du travail de se mettre d'accord, d'avoir un
consensus pour les modifications des lois... je tiens encore une fois à rappeler que ces réflexions ont commencé en
2018, parce que notre ancienne collègue, Dominique Vien, avait lancé ce chantier et ces réflexions. Les
tables paritaires en sont venues à un consensus, ce qui a donc permis le dépôt
du projet de loi.
Je ne vais
pas aller, aujourd'hui, en profondeur au niveau d'est-ce que le ministre est allé
beaucoup trop loin que le consensus.
Et, comme je vous ai dit, je vais essayer de ne pas aller trop dans les
détails, surtout que ça fait neuf mois que nous étudions ce projet de
loi et je n'ai pas envie de perdre les gens qui suivent notre intervention.
Certains
éléments sont bons, dans le projet de loi, mais malheureusement le consensus
initial s'est effrité, et les différents
groupes sont maintenant contre le projet de loi. Je l'ai dit, il y avait
beaucoup de travail qui a été fait pour améliorer la prévention au niveau de
plusieurs secteurs. Il y avait un besoin aussi, au niveau de la Santé publique,
de les rassurer par rapport à leur rôle, rôle que la Santé publique veut
toujours continuer à jouer. Et je prends quelques secondes pour remercier l'ensemble
des directeurs de santé publique qui nous ont contactés tout au long de ce
projet de loi parce qu'il y avait une
inquiétude et parce qu'eux aussi se posaient la question sur leur rôle à
l'intérieur de la santé et sécurité
sur les milieux de travail. Mais je tiens quand même à le dire, que,
leurs préoccupations, leurs questions, on les a entendues en commission
parlementaire, et nous avons eu l'occasion de partager avec le ministre leurs
préoccupations.
Juste me permettre, Mme la Présidente, de boire
un peu d'eau.
Au niveau des
maladies professionnelles, au début, j'avais une petite déception... ou, je
dirais — il
n'y a pas de «petite» — j'avais
une déception. J'avais une déception parce qu'une année avant le dépôt du projet
de loi plusieurs collègues à l'intérieur de cette Assemblée ont eu
l'occasion d'étudier l'impact des pesticides et l'impact sur les agriculteurs,
vous-même, Mme la Présidente, vous venez
d'une très belle région, que j'aime, malheureusement le plus beau comté, c'est à Nelligan, mais, je vous le dis, vous venez d'une très
belle région, Mme la Présidente, et vous avez pas mal d'agriculteurs dans votre belle région, et les agriculteurs, et
les agricultrices, et les agronomes, et les applicateurs de pesticides
voulaient avoir dans ce projet de loi enfin une reconnaissance de
l'effet et du lien de causalité entre l'application des pesticides et la maladie de Parkinson. Je remercie le ministre, parce
qu'il a mentionné que, suite à ce dépôt d'amendement... Mais aujourd'hui, du
moment que nous sommes vers la fin de ce long parcours d'étude de ce projet de
loi, je tiens à rendre à César ce qui
revient à César. Et il y avait beaucoup d'échanges, il y avait beaucoup
d'échanges avec l'équipe du ministre,
avec le ministre. Nous avons eu beaucoup de points de vue, y compris par
Parkinson Québec, lors de la consultation. On
a vu une étude qu'on avait sur la table. Ce que j'ai aimé, c'est que le ministre,
il est allé faire ses devoirs, rencontrer d'autres personnes, parler avec d'autres personnes. Et
finalement, aujourd'hui, nous sommes très heureux de dire que, finalement,
la maladie de Parkinson a été ajoutée comme
maladie professionnelle, donc une très bonne nouvelle, très bonne nouvelle
pour nos agriculteurs, nos agricultrices, nos agronomes et les applicateurs de
pesticides.
• (12 h 30) •
Ça, ça a été un gain énorme, Mme la Présidente,
pour notre... au nom de notre formation politique, parce qu'on a mené la bataille pour que le parkinson soit
reconnu comme une maladie professionnelle, pour les raisons que vous savez.
Et aussi ça donnait suite au beau travail
des membres de notre... d'une commission qui a travaillé sur l'effet des pesticides
sur les agriculteurs.
L'autre aspect qui nous a interpelés, Mme la
Présidente, c'est qu'au tout début, au tout début de l'étude de ce projet de loi, il y avait beaucoup de commentaires concernant l'impact de ce projet de loi sur les femmes. J'ai été le premier à soulever ce point tout au long des consultations. Et, vous savez, Mme la Présidente, au niveau de la condition
féminine, il y avait une recommandation depuis plusieurs années, ça revient à notre formation
politique, que toute analyse d'impact des lésions professionnelles doit être accompagnée d'une ADS, analyse différenciée selon les sexes. Maintenant,
on parle même de l'ADS+. Ça a été une
des demandes premières de plusieurs groupes. Et j'ai devant moi le premier
communiqué de presse rédigé à la fin des consultations, en échangeant
avec les groupes, qui nous ont dit clairement que ça prenait l'ADS ou l'ADS+. Parce qu'à l'époque, souvenez-vous, Mme la
Présidente, on parlait des niveaux de risque, et, dans le projet de loi,
avant le recul, ces niveaux de risque
ciblaient les femmes. Et donc les femmes se sont... les groupes qui
représentaient les femmes se sont posé la question : Mais comment
vous pouvez utiliser ou analyser ce projet de loi sans avoir à côté de vous l'analyse différenciée selon le sexe? Et,
comme vous le savez, la plupart des personnes qui siégeaient au niveau des
commissions, que tout projet de loi est
accompagné par une analyse d'impact réglementaire, c'est obligatoire, analyse
d'impact réglementaire, c'est obligatoire, dans le cas qui concerne les
lésions professionnelles ça a été une des recommandations, d'avoir l'ADS avant de penser parler d'un projet
de loi qui va avoir un impact sur les femmes. Bon. Ça a été ça, le début
de nos consultations avec les groupes. Malheureusement,
devant le fait accompli, on n'avait pas l'ADS ni l'ADS+ qui accompagnait ce projet de loi. Encore une fois,
avec l'excellent échange que nous avons eu avec le ministre et son équipe,
nous avons eu quelques ajouts, mais plus tard, pour davantage de considérations
pour la réalité des femmes.
Donc,
oui, ça n'a pas été fait avant le début du projet de loi, ça n'a pas accompagné
le début du projet de loi, mais, au
moins, ce qu'on a gagné pour ces travailleuses et pour les femmes, c'est que,
dorénavant, pour les cinq prochaines
années, on doit avoir une lecture ou davantage de considération pour les
réalités des femmes, surtout au niveau des lésions professionnelles.
Donc, les lésions
professionnelles, il y avait beaucoup de détails, surtout au niveau des
cancers. Le ministre le mentionnait tout à l'heure, le cancer au niveau des pompières, des pompiers, cancer du sein et
d'autres maladies que c'est très complexe. On ne peut pas se prononcer s'il
n'y avait pas l'étude différenciée selon les sexes.
Ceci étant dit, ce qui est très important aussi dans le projet de loi, c'est les
comités scientifiques. Les comités scientifiques, Mme la Présidente, c'est que c'est des comités scientifiques où, quand on va voir qu'il y a
un impact sur un groupe qui travaille dans un secteur x, bien, on ne va
pas attendre plusieurs années avant d'avoir un avis. Donc, le ministre,
et nous, c'est notre rôle, en tant que législateurs, de suivre cela, c'est qu'avec ce comité
scientifique le ministre peut donner des mandats. Et ce que nous avons conclu, au niveau de la commission,
c'est que la lettre, elle est déjà prête, c'est que j'espère que le comité se penche, et dès maintenant,
dès l'adoption du projet
de loi, sur l'atteinte auditive,
l'atteinte auditive qui a soulevé beaucoup, beaucoup, beaucoup de questionnements à la fois au niveau des travailleurs et à la fois au niveau des employeurs.
Il y a des gens qui
disaient que c'était un bar ouvert, au niveau des remboursements au niveau de
la CNESST. On prescrivait, on faisait... on
donnait une référence à un appareil et on se ramassait avec un autre qui
coûtait beaucoup plus cher,
et parfois la personne ne l'utilisait pas; de l'autre côté, des travailleurs qui disaient qu'on n'a pas à notre disposition des moyens de
prévention nécessaires pour diminuer l'impact du bruit dans le milieu
de travail sur notre performance auditive. Ça a été un blocage pendant plusieurs
semaines. Aujourd'hui, le constat est que c'est un statu quo et qu'on va
attendre le comité scientifique. Et c'est extrêmement important, dorénavant, face à un blocage, que le ministre responsable ne doit pas attendre plusieurs
années avant d'agir, parce qu'au bout
de la ligne il s'agit de la santé et la sécurité au travail de nos
travailleurs et de nos travailleuses.
Donc, pourquoi je
ramène ces points? Comme je l'ai dit, Mme la Présidente, il y a plusieurs
éléments, mais ce que je vais faire,
aujourd'hui, c'est essayer de résumer quelques éléments qui m'ont marqué, parce
que nous avons décidé, en tant que
formation politique, le Parti libéral, de travailler en collégialité avec le
ministre pour améliorer le projet de loi pour le bénéfice des
travailleuses et des travailleurs.
Et donc le point qui était important, au niveau des
maladies professionnelles, c'est qu'il n'y avait pas un mécanisme où le
législateur ou le ministre pouvait donner le mandat d'agir pour régler une
situation problématique.
Un
autre point, Mme la Présidente, que nous avons gagné, et cette fois-ci c'est
pour les PME du Québec... Vous savez que, pour les PME, maintenant, dans le
contexte que vous connaissez tous... Vous êtes tous des représentants du
peuple et vous êtes tous responsables d'une
circonscription, j'en suis sûr et certain, sans assumer quoi que ce soit, que
vous recevez des messages qui vous
présentent l'état de la situation au niveau de la rareté, de la pénurie de
main-d'oeuvre. Et, quand on
échangeait avec le ministre, il y avait une problématique réelle que, parfois,
au niveau des comités de prévention pour
en bas de 20 employés et au-delà de 20 employés... il y avait une
problématique que, parfois, pour une courte durée, on risque de passer d'un représentant à un comité,
et on doit, et on doit avoir ce comité pour toute l'année. Mettez-vous à la
place d'un jeune entrepreneur qui, pour une raison, une activité saisonnière,
il passe de 19 à 25 employés pendant une courte durée. Bien, mettez-vous à la place de ce jeune entrepreneur,
qui, déjà, il souffre de l'aspect réglementaire des choses... Parce que,
vous savez, on parle beaucoup de la paperasse et l'impact réglementaire pour la
petite et moyenne entreprise. Bien, il doit
ajouter un comité, même si la présence au-delà de 20 employés au sein de
son entreprise ne dépassait même pas quelques jours.
Ça, encore une fois,
je remercie le ministre et je remercie les collègues, qui ont posé pas mal de
questions par rapport à cet aspect, de permettre à certaines PME, dans le
contexte prescrit dans la loi, d'avoir une certaine flexibilité, pendant un certain moment dans le temps, de ne pas
être assujetties à la même réglementation pour les entreprises au-delà de
20 employés. Et ça, ça a été un gain énorme, surtout pour éviter la bureaucratie
pour nos PME.
Mme la Présidente, aujourd'hui, après l'analyse de l'ensemble des amendements,
après analyse de tout notre beau travail,
malheureusement, j'ai quelques points qui me laissent perplexe par rapport à tout ce beau travail. Il
n'y a rien qui est parfait.
Le
ministre l'a mentionné, qu'à la fois il y a
des représentants, que ce soit du côté patronal ou du côté
syndical, encore une fois je le
dis, même des représentants des travailleurs non syndiqués, avaient des points
de vue et une divergence. Et c'est pour cela
que j'insiste sur le dialogue social, j'insiste sur le paritarisme, qui est un
peu le socle de notre démocratie et de notre plateforme d'échange entre
le patronat et le syndicat.
• (12 h 40) •
Mes
premières remarques au niveau de l'efficacité vont s'adresser à la CNESST. Je veux vraiment
que la CNESST continue à jouer son
rôle. Je fais confiance à l'ensemble des employés de la CNESST, de la haute direction
jusqu'au dernier employé.
Nous avons besoin de la CNESST, nous avons besoin d'un régime fiable. Mais, Mme la Présidente, force est de constater, malheureusement, que, les deux
dernières années, la CNESST a accumulé beaucoup de retard. Et vous savez
pourquoi? Par rapport aux lésions et les dossiers de certains employés. Donc,
l'un des points les plus importants, c'est que
je lève un drapeau rouge, aujourd'hui, sur la charge de travail que le ministre,
avec le projet de loi, malgré la nécessité de la modernisation...
que la CNESST a les moyens de remplir son mandat.
La CNESST
souffre d'une pénurie de main-d'oeuvre,
on l'a vu lors de notre étude de
crédits. Ils vont avoir beaucoup
de choses à réaliser. Il va y avoir une
pression énorme, sachant que déjà, présentement, il y a des enjeux qui empêchent le fonctionnement de la CNESST. Donc, en mode, toujours, de suggestion,
en mode suggestion, Mme la Présidente, des améliorations notables dans le mode
de fonctionnement de la CNESST sont donc souhaitables avant que de nouvelles responsabilités lui soient conférées. Et je sais
qu'au niveau de... le projet de loi, on s'est donné, le législateur s'est donné
le moyen d'avoir un délai, avoir un délai avant la rentrée en vigueur de
certains aspects.
L'autre
problème, Mme la Présidente, c'est que la question des problèmes de santé
mentale, dans notre société, est une
question très importante, primordiale. J'avais personnellement, avec plusieurs
groupes, soulevé la question de la définition des risques psychologiques,
qui menace le droit de gestion des employeurs. Et, je vous le dis, je ne pense
qu'aucun travailleur ou employeur va faire
quelque chose pour ne pas accepter l'état de santé d'une partie, que ce soit
dans une relation de travail à
l'intérieur d'une entreprise ou PME. Force est de reconnaître que la CNESST n'a
pas l'expertise nécessaire pour évaluer
les réclamations en matière de lésions psychologiques. Vous avez vu, Mme la Présidente, que nous avons déjà un problème de liste d'attente par rapport à la
santé mentale, par rapport à la détresse psychologique. Et, tous ces aspects,
tous ces aspects, tous ces aspects, il faut les prendre en
considération.
Le point qui me préoccupe le plus : Combien
ça va nous coûter, l'ensemble des points soulevés dans son projet de loi?
L'applicabilité. Le rôle de la CNESST à l'aube de l'ajout de nouvelles
responsabilités conférées par le projet de
loi n° 59. Et, je sais, le ministre a accepté un amendement de mon
collègue par rapport à un rapport de mise en application. Et, tout à l'heure, il nous a mentionné qu'il veut
continuer le travail. Moi, je tiens, aujourd'hui, à dire au ministre qu'on doit
continuer à travailler, parce que ce beau
travail qui a été réalisé pendant les sept ou neuf derniers mois est un
début de la modernisation.
On peut rêver
d'une modernisation parfaite. J'ai moi-même travaillé sur l'applicabilité des
réformes. Vous savez quoi, même, j'ai
eu l'opportunité de faire un doctorat sur la mise en forme d'un protocole de
soins. Mais vous savez, le détail, il est où, le point important, il est où,
Mme la Présidente? C'est lors de la mise en oeuvre. Et c'est la mise en oeuvre,
aujourd'hui, que j'essaie de nous
sensibiliser tous que c'est ça qu'on doit suivre. C'est très important que tout ce qui a été ajouté, amendé, amélioré dans ce projet de loi doit être suivi à la lettre. Et c'est là où j'offre mon entière
collaboration au ministre, parce que,
oui, il y a un rapport de mise en application, mais il ne faut pas attendre
cinq ans avant d'agir. Faisons ça par
étapes, faisons ça par étapes, parce qu'au bout de la ligne ce que nous sommes
en train de dire, Mme la Présidente, c'est que toutes les dispositions
dans ce projet de loi vont avoir un impact sur un travailleur.
Aujourd'hui,
il y a un manque de 200 000... il y a 200 000 postes vacants.
J'entends bien que les gens nous disaient qu'on voyait ça venir,
excusez-nous, en 2014, il y avait un taux de chômage très élevé, et je me rappelle
de notre campagne à l'époque, à l'aube de la
défaite du gouvernement Marois, 250 000 emplois. On oublie
cela, Mme la Présidente. Aujourd'hui, nous sommes dans une situation
économique, oui, importante, mais il y a une pression, une pression énorme sur nos employeurs mais aussi sur nos
employés, qui voient l'augmentation des heures de travail, la charge de travail
impacter leur vie. Et donc il ne faut pas, il ne faut pas, dans le contexte
actuel, attendre plusieurs années avant de faire un état des lieux ou un
rapport d'étape, avant la fin des cinq dernières années.
Mme la
Présidente, le projet de loi amène des avancements et des gains pour les
travailleurs. Tant les employeurs que les syndicats craignent que sa mise en
oeuvre, telle qu'elle nous est présentée, risque de dégrader les relations
de travail et de coûter cher, deux éléments,
deux éléments que je considère importants dans n'importe quel dialogue social.
Si ça coûte cher, c'est les employeurs qui vont payer le prix. S'il y a
une dégradation des relations de travail, les deux parties vont payer le prix, les employeurs et les
travailleurs. Plus les nombreuses failles que nous avons constatées tout au
long du p.l. n° 59, malheureusement, Mme la
Présidente, tout cela nous empêche aujourd'hui de voter pour ce projet de loi.
Mme la
Présidente, aujourd'hui, je vais prendre aussi quelques secondes pour
remercier l'équipe qui m'a accompagné depuis le début de ce projet de loi. Je tiens à remercier mes collègues au cabinet du leader, la recherche,
la recherchiste qui m'a accompagné
tout au long avec un excellent travail. Viviana, merci beaucoup
pour tout le beau travail. Comme je l'ai dit, ça a été un projet de loi technique, très complexe, 300 articles, beaucoup
d'heures de rencontre en commission mais aussi à l'extérieur de commission. Ça a été un travail que nous avons
mené avec professionnalisme. On s'est donnés corps et âme pour améliorer
et moderniser la santé et sécurité au travail pour nos travailleurs.
Je tiens aussi à remercier Marc-Antoine, qui a
pris la relève en plein été pour finir le projet de loi. Je tiens à remercier
toute l'équipe de la recherche, parce que, comme vous avez pu le constater,
tout au long de ce projet de loi, beaucoup d'autres collègues, beaucoup
d'autres secteurs ont été touchés par ce projet de loi et il y avait de
l'impact sur leurs dossiers respectifs.
Je tiens aussi à remercier l'équipe de communication
dans notre aile parlementaire. Je tiens aussi à remercier l'ensemble des collègues qui m'ont supporté,
accompagné, qui sont venus en commission défendre leurs points de vue par rapport à la condition féminine, ils m'ont posé des questions par
rapport... pourquoi il n'y avait d'ADS, pourquoi
il n'y avait pas d'ADS+, réseau de
l'éducation, mes collègues au niveau de l'éducation, ma collègue au niveau de
la santé, l'aspect de la santé mentale, l'aspect économique avec mes
collègues porte-parole au niveau de l'économie et des finances.
• (12 h 50) •
Aujourd'hui, je tiens juste à envoyer un message
aux travailleurs et aux travailleuses qui nous suivent et aux employeurs. Le projet de loi, il sera adopté
par le gouvernement. Le gouvernement est majoritaire, il est capable de le passer.
Mais aujourd'hui je me lève et je
vous dis que, certes, le projet de
loi est adopté, mais c'est à nous de
suivre l'applicabilité de ce projet de loi. L'avantage de notre démocratie, c'est que, un projet de loi, il est là pour changer les choses et pour moderniser.
J'ai entendu
vos commentaires, j'ai entendu vos doléances, j'ai entendu les points que vous
avez soulevés. Notre porte sera toujours ouverte pour questionner le gouvernement sur les points que vous avez vus qui ne faisaient aucun sens par
rapport à votre vie. Aujourd'hui, je veux envoyer le message que, oui, on veut des
milieux de travail sécuritaires. Aujourd'hui, j'envoie le message qu'en 2021 on
ne peut pas faire aucun, aucun retour en arrière sur la santé et la
sécurité des travailleurs et des travailleuses au Québec.
Aujourd'hui,
aussi, je veux rassurer les PME, qui m'ont envoyé des milliers de messages, qui
pensaient que c'est catastrophique
pour eux, l'applicabilité de ce projet de loi. Je vous ai entendus. Et c'est
pour cela qu'aujourd'hui, au nom de ma formation politique, on va voter
contre ce projet de loi, mais on va continuer le travail pour ramener votre
voix à l'intérieur de l'Assemblée nationale.
Merci pour vos commentaires. Et continuez à nous alimenter, parce que c'est
avec vous qu'on va vraiment moderniser la Loi sur la santé et la sécurité au
travail. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le député. Et
maintenant je suis prête à céder la parole à M. le député
d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Alexandre Leduc
M. Leduc :
Merci, Mme la Présidente. D'emblée, je vous annonce que je dépasserai les sept
ou huit minutes qu'il nous reste avant la pause du dîner. Mais, bon,
commençons maintenant.
Évidemment, je ne répéterai pas pour une
troisième fois tous les remerciements qui devraient être faits pour l'ensemble des gens qui ont travaillé sur ce
projet de loi, mais je voudrais faire un peu de chemin sur celui qu'a commencé
mon collègue de Nelligan pour remercier toutes les personnes qui ont contribué
à la discussion et au débat.
Hier, je
faisais une analyse assez froide du peu de couverture que nous avons eu
alentour de ce projet de loi là, par rapport
à l'importance qu'il a pour la société québécoise, donc j'émettais une forme de
déception, mais sans lancer de blâme à quiconque. Cela étant dit, au-delà de
l'absence, ou de la relative absence, de grands débats publics que nous n'avons
pas eus sur la SST au Québec, il y a quand
même vraiment beaucoup de personnes qui s'y intéressent et qui nous ont
communiqué, aux différentes oppositions,
et, j'imagine, au gouvernement également, des mémoires, des lettres, des
commentaires, des suggestions
d'amendement, des arguments, des articles, des témoignages personnels, même,
parfois, de leur calvaire qu'ils puissent
avoir vécu avec leur aventure ou leur mésaventure au travail et parfois aussi à
la CNESST. Et vraiment, pour nous, les députés de l'opposition, c'est vraiment
une mine d'or, ces témoignages, ces contributions des différentes personnes
qui nous ont écrit tout au long de cette commission,
et je tenais de prendre un temps pour les remercier, pour les saluer, parce
que sans eux et elles, évidemment, le travail que nous faisons ici n'aurait pas
autant de sens.
J'ai divisé
mon intervention, Mme la Présidente, en quatre morceaux. Espérons qu'une heure
sera suffisant, du moins. Je n'aurai pas le droit à des extensions. Ça, je le
sais d'avance. Donc, quatre grands morceaux. Le premier morceau, c'est les bonnes nouvelles du projet de loi, parce
qu'il faut être bon joueur, c'était quand même quelques éléments intéressants.
Deuxième morceau : les grands absents
du projet de loi, donc ce que nous n'avons pas traité malheureusement, à mon
avis, à l'intérieur du projet de loi.
Troisième section : les reculs, les grands reculs du projet de loi. Et,
là-dessus, ce sera peut-être la plus
longue, malheureusement. Et finalement les gains, les gains que j'ai réussi à
arracher au ministre, avec l'appui, bien sûr, des deux autres partis
d'opposition.
Alors,
commençons par les bonnes nouvelles. Le projet de loi en avait quelques-unes,
quand même, il faut le saluer. Et, à chaque moment où on arrivait à ces
sujets-là, je me prenais... je n'avais aucune honte à le dire, je n'avais aucun
problème à le souligner, qu'il y avait des
avancées intéressantes dans le projet de loi, particulièrement la disposition
sur l'obligation de prévention de la
violence conjugale en milieu de travail. C'était quelque chose qui était
réclamé par plusieurs groupes de
femmes avec qui j'étais en communication, plus particulièrement des groupes de
femmes qui avaient fait des recherches
avec le Service aux collectivités de l'UQAM, avec qui j'ai eu l'occasion de
travailler assez étroitement dans mon
passage dans le milieu syndical avant d'être élu, en 2018. Et, bref, une grande
recherche avait été faite pour comparer ce qui se fait dans d'autres provinces, ce qui se... les effets
bénéfiques qu'il pourrait y avoir avec une telle disposition ici. Moi,
j'avais un peu appuyé cette démarche-là. J'en avais parlé au ministre dans des
fameux brouhahas avant que ça commence, la période des questions, ici. Il
m'avait semblé ouvert. Je ne savais pas trop s'il irait de l'avant en le
mettant carrément dans le projet de loi. Je
savais qu'il y aurait beaucoup de crainte de la part des patrons. Et il a eu...
il a osé, il l'a fait.
Ça a suscité plusieurs discussions. Les groupes
patronaux qui sont venus en commission sont venus nous dire à quel point ils avaient des angoisses par rapport
à cette nouvelle disposition là. Peut-être qu'ils avaient la crainte d'être
associés indirectement à ce qui
allait pouvoir se passer. Bien sûr, on n'enverra personne en prison, comme
patron, si une femme est victime de
violence conjugale à la maison, là, on comprend bien ça. Mais ça peut avoir une
répercussion de travail très sérieuse, et ce n'est pas la lune, de
demander à un patron d'inclure ça dans son plan de prévention. Alors, c'est
fait.
On comprend
que la commission va faire un accompagnement, ce qui est souhaitable, bien sûr.
Et on comprend que les patrons auront un certain délai, là, mais qu'au final
ils devront faire ça dans leurs différents milieux de travail. C'est des
bonnes nouvelles. Ce ne sera pas simple. Il va falloir en faire un suivi très
serré. Je sais qu'il y a des groupes qui m'ont
déjà approché pour faire des rencontres, notamment avec la CNESST, notamment
avec le ministre, pour s'assurer qu'il
y a des bonnes ressources, entre autres, avec les maisons d'hébergement, et que
cette application-là ne soit pas de façade ou ne génère pas d'autres
types de problèmes, parce qu'on aura pelleté ces enjeux-là dans la cour de
groupes communautaires, par exemple. Alors, violence conjugale, bravo de
l'avoir rajouté dans le projet de loi.
Autre
élément, c'est le télétravail. Le télétravail fait maintenant partie de nos
vies, c'est là pour rester. C'était déjà existant avant, bien sûr, mais
là ça a pris une place beaucoup plus grande, beaucoup plus massive.
Il
y a des ministères qui réfléchissent à ramener les fonctionnaires à temps
partiel au travail, physiquement dans la bâtisse du ministère, je veux dire.
Alors, vraiment, c'est un nouvel enjeu d'application de la santé et sécurité au
travail, en particulier le volet prévention. Évidemment, la
jurisprudence disait déjà de manière assez claire que l'obligation de prévention de l'employeur s'appliquait également
en contexte de télétravail. Par contre, il y avait des défis, notamment sur
l'inspection d'un milieu de travail. Si vous travaillez dans le bureau
d'une entreprise et que je suis responsable de santé et sécurité, que je suis responsable de la prévention, bien, évidemment
que, si vous vous blessez, je vais aller inspecter votre bureau
de travail puis je vais aller y faire des correctifs, pour ne pas que ça se
reproduise. Même, idéalement, vous feriez une inspection préalablement
pour ne pas du tout qu'il y ait d'accident. Or, si vous êtes en contexte de
télétravail à la maison, dans un lieu privé,
un lieu personnel, est-ce que l'employeur peut commencer à venir décider si
votre table à cuisine est appropriée
ou si votre bureau est dans les bonnes dispositions, s'il y a un fil qui
dépasse, etc., si votre chaise n'est pas... Alors, il y avait un certain flou là-dessus. On l'a clarifié, on a
précisé dans la loi que le télétravail est tout à fait compris dans le
paramètre d'application de la prévention de la santé et sécurité au travail.
C'était quelque chose qui était déjà clair, à mon avis, dans la jurisprudence, mais là on vient le
cimenter dans la loi. Il n'y a plus aucun doute. La jurisprudence ne pourrait
plus, en fait, évoluer différemment.
Il
y a quand même des incomplets, là. Moi, j'aurais voulu qu'on aille un peu plus
loin pour la question des outils de
travail, qui doit les fournir, qui doit les préciser, qui doit les entretenir,
à quels frais, etc. Donc, ça, il resterait du travail à faire, mais, au
moins, on a précisé, donc, que ça s'applique.
Et on a aussi précisé
que, justement, pour préserver le droit à un espace privé, qui est un droit
tout à fait normal et qu'on doit protéger,
il y a un compromis qui existe, et que ce n'est pas, évidemment, le patron qui
vient inspecter votre maison
n'importe quand, à son propre chef, à son propre désir. C'est un inspecteur de
la commission qui le ferait, en prenant rendez-vous ou avec un ordre de
la cour.
C'était
une disposition qui existait en Colombie-Britannique, que j'ai pointée du doigt
au ministre en disant : Regarde, c'est quelque chose qui est en place
là-bas, qui est intéressant. Ça aussi, ça faisait partie d'une étude que
j'avais eu l'occasion de regarder,
qu'on m'avait transmise par des collègues qui s'étaient penchés sur la
question, notamment dans le milieu syndical, et c'est donc grâce à ces
recherches-là... J'ai souligné plus tôt, là, malheureusement, le départ de
Mme Lippel la semaine dernière. Alors, des chercheurs de ce calibre-là, il
y en a plusieurs au Québec qui font des bonnes
études, des bonnes recherches, et ça nous a aidés. Ça nous aide, ça nous a
aidés et ça nous aidera encore, en tout cas, à faire du bon travail législatif et du bon travail de suivi sur le
projet de loi n° 59 et sur la réforme de la santé et sécurité de
manière plus générale.
L'autre
enjeu qui était attendu, c'était la question des travailleuses domestiques.
Là-dessus, c'est mi-figue, mi-raisin. Je le mets quand même dans les bonnes
nouvelles parce qu'il fallait qu'il se passe quelque chose et il s'est passé
quelque chose.
La
Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le député, vous pourrez
poursuivre votre intervention à la reprise des travaux.
Alors,
compte tenu de l'heure et afin de permettre, cet après-midi, le débat sur une
affaire inscrite par les députés
de l'opposition, les travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à
13 heures)
(Reprise à 15 heures)
Le Vice-Président
(M. Picard) : Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Affaires inscrites par les
députés de l'opposition
Motion
proposant que l'Assemblée demande au gouvernement de mettre sur pied une
cellule de gestion de crise pour mettre fin aux ruptures de services et de
s'engager
à apporter les correctifs réclamés par les acteurs du réseau de la santé
Aux
affaires du jour, à l'article 70 du feuilleton, aux affaires inscrites par
les députés de l'opposition, Mme la
députée de Maurice-Richard présente la motion
suivante :
«Que l'Assemblée nationale prenne acte
que depuis maintenant près de 3 ans, le Québec enregistre une importante
dégradation de ses délais d'attente dans l'accès aux services de première
ligne;
«Qu'elle déplore que les ruptures de
services qui se multiplient sont des facteurs de stress pour les patients en
attente de suivis médicaux ainsi que pour l'ensemble de la population;
«Qu'elle constate que les délais
d'attente aux urgences augmentent, et ce, malgré une diminution de
1 million de visites ambulatoires;
«Qu'elle déplore
qu'actuellement, au Québec, 146 000 patients sont en attente de
services de chirurgies;
«Qu'elle constate que le nombre de
personnes en attente d'un médecin de famille au Québec a augmenté de près
de 60 % au cours des deux dernières années pour se chiffrer à plus de
830 000 personnes en juillet dernier;
«Qu'elle rappelle que le gouvernement
caquiste avait pris l'engagement ferme d'offrir un médecin de famille à tous
les Québécois avec un délai d'accès en moins de 36 heures, de réduire
l'attente à 90 minutes en moyenne avant de voir un médecin à l'urgence, de poursuivre les
17 projets pilotes sur les ratios patients-infirmière et d'augmenter le
taux d'utilisation des blocs opératoires;
«Qu'elle constate que l'accès aux
soins de santé au Québec a reculé depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement
caquiste;
«Qu'elle exige que le gouvernement
mette sur pied une cellule de gestion de crise pour mettre fin aux ruptures de
services dans le réseau;
«Qu'enfin,
elle demande au gouvernement caquiste de s'engager à apporter rapidement les
correctifs nécessaires réclamés par
les différents acteurs du réseau de la santé, notamment la fin du temps
supplémentaire obligatoire pour les infirmières ainsi que l'implantation
de ratios infirmières-patients sécuritaires.»
Je vous informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur la motion inscrite par Mme la députée de Maurice-Richard s'effectuera comme suit : 10 minutes sont
réservées à l'auteure de la motion pour sa réplique,
51 min 15 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 31 min 53 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition
officielle,
11 min 23 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition,
7 min 58 s sont allouées au troisième groupe d'opposition, 7 min 30 s sont
allouées à l'ensemble des députés indépendants, sous réserve d'un maximum de
deux minutes par député.
Dans
le cadre de ce débat, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par
l'un des groupes parlementaires
sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment. Mis
à part ces consignes, les interventions
ne sont soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle aux députés indépendants
que, s'ils souhaitent intervenir au cours du débat, ils ont 10 minutes
à partir de maintenant pour en aviser la présidence.
Et je cède maintenant
la parole à Mme la députée de Maurice-Richard.
Mme Marie
Montpetit
Mme Montpetit : Je vous
remercie, M. le Président. J'ai déposé cette motion aujourd'hui pour qu'on puisse prendre le temps de discuter plus amplement de ce qui est
en train de se passer présentement dans le réseau de la santé. Le gouvernement de la CAQ avait pris des engagements — je
ne sais pas s'il faut les qualifier d'ambitieux — durant la campagne électorale, vous les avez nommés, on les a mis dans la motion,
qui étaient, entre autres, d'avoir... que tous les Québécois
aient accès à un médecin de famille
dans un délai de 36 heures. J'y reviendrai plus tard, mais non seulement
on est à des années-lumière de ça,
mais le bilan s'est détérioré, depuis l'arrivée au pouvoir de la CAQ, sur l'accessibilité aux médecins de famille. Ils avaient
pris comme engagement aussi que le délai pour voir un médecin à
l'urgence soit de 90 minutes. Même chose. Non seulement ils ne se sont pas
rapprochés de ce délai-là, ils se sont éloignés de l'excellent bilan qu'on
avait mis en place, nous, sous notre gouvernement.
Donc,
le ministre commence à me connaître, hein, ça fait un an
qu'on échange ensemble régulièrement sur différents dossiers. Je lui ai toujours donné l'heure juste,
avec le moins de partisanerie et le moins de politique possible. Je suis
très préoccupée, je suis très inquiète de ce qui est en train de se
passer dans le réseau de la santé en ce moment. Et ce qui m'inquiète encore davantage, c'est qu'on
n'entend absolument pas, mais absolument pas les députés
caquistes ni les ministres caquistes,
qui ont des hôpitaux, des soins
intensifs, des urgences, des unités de néonatalogie, des unités d'obstétrique
qui ferment dans leurs comtés, et on ne les entend absolument pas
prendre la parole publiquement pour venir rassurer leur population, pour leur dire à quel moment la situation va s'améliorer,
quel est le plan du gouvernement, justement, pour mettre une fin à cette
situation-là. Et ça, c'est doublement préoccupant, parce qu'ils devraient être
extrêmement inquiets de ce qui est en train de se passer présentement.
Donc, la motion qu'on
dépose aujourd'hui, c'est pour faire le constat, justement, qu'il y a un recul
vraiment important depuis l'arrivée au
pouvoir de la CAQ, depuis trois ans, et qu'il est antérieur à la pandémie,
parce que j'entends déjà le ministre
me dire que peut-être qu'on n'est pas au courant qu'il y a eu une pandémie
pendant les 18 derniers mois. Évidemment,
on l'est. Évidemment, on mesure les pleines conséquences de tout ça. Mais la
détérioration de l'accès aux services de
santé, elle a débuté dès l'arrivée au pouvoir du gouvernement, et ce, bien
avant la pandémie, et aujourd'hui elle est encore en train de
s'exacerber. Et c'est vraiment de l'accès à des soins de base, des soins de
santé de base, en ce moment, qui sont en
jeu, et c'est de ça dont je veux qu'on prenne le temps de discuter aujourd'hui,
parce que ça concerne tous nos citoyens à chacun d'entre nous, comme
députés, qui sont inquiets, qui sont préoccupés de la situation.
Je vais commencer sur
la question des ruptures de services. Puis j'ai eu l'occasion de questionner le
ministre lors de la période de questions,
aujourd'hui, sur l'engagement qu'il a pris il y a deux semaines, et je ne l'ai
toujours pas entendu réitérer de façon claire, de façon affirmée
l'engagement et la garantie qu'il a donnée aux Québécois il y a deux semaines.
Il l'a dit très fermement, avec aucune nuance, avec aucune ambiguïté sur
l'interprétation que l'on peut faire de ses paroles, il a dit : Je
m'engage et je garantis à tous les Québécois qu'il n'y aura plus de rupture de
services, qu'il n'y aura plus de bris de
service à partir du 15 octobre. Depuis ce jour, il a refusé, à chaque fois
qu'il a été questionné, de réitérer
cet engagement-là. Donc, je vais lui donner encore l'occasion aujourd'hui. Il
prendra la parole tout à l'heure. Je m'attends
à ce que très clairement il nous donne un bilan, il nous donne l'heure juste. Est-ce
qu'il réitère cet engagement-là? Est-ce
qu'il garantit aux Québécois qu'il n'y aura plus de rupture de services ou
est-ce qu'il a fait un faux chemin lorsqu'il a affirmé ça? Et qu'il nous
donne l'heure juste, qu'il nous dise exactement ce qui va arriver.
Et je l'invite aussi
à ne pas faire des débats de sémantique comme on l'a entendu faire lors du
colloque... du congrès de la CAQ, à dire :
Ce ne sont pas des bris de service, ce sera de la réorganisation. Moi, il peut
appeler ça comme il veut, mais le fait est que, pour les citoyens, ça
revient à la même chose. Une urgence qui est fermée, elle est fermée. Qu'il appelle ça un bris de service ou une réorganisation,
quand il n'y a pas de soins d'urgence, par exemple, à Senneterre, quand on a une urgence à Gatineau qui est fermée
depuis 100 jours, le bilan, il est le même, les gens n'ont pas accès aux
soins et services. Donc, je l'invite à s'éloigner d'un débat sémantique et à
donner l'heure juste sur la situation.
Donc,
juste au cours des dernières semaines, M.
le Président, on le voit, là, c'est
la multiplication des fermetures au
niveau des différents services. On a vu... Bon, l'hôpital de Senneterre, j'ai
eu l'occasion de l'aborder. On a l'Hôpital Ville-Marie,
dans le comté du ministre régional... dans l'Abitibi-Témiscamingue, pardon, le service d'obstétrique, il est fermé depuis plus de quatre mois déjà, depuis même
cinq mois. Les femmes doivent aller accoucher, pour certaines, en Ontario. Et, de semaine en semaine, la réouverture
du service d'obstétrique est reportée. On parle maintenant du 19 novembre,
donc encore un mois et demi, avec aucune
garantie que la solution va être... qu'elle rouvrira. Donc, on se retrouve dans
une situation où des femmes doivent
parcourir des centaines de kilomètres pour pouvoir aller accoucher dans une...
avec tout le stress que comporte déjà un accouchement...
• (15 h 10) •
Le
Vice-Président (M. Picard) : Excusez, Mme la députée. Je rappelle que tous les députés doivent porter
leurs masques s'ils n'ont pas la parole. Mme la députée, vous
pouvez reprendre.
Mme Montpetit : Avec plaisir.
Merci. Pour notre sécurité à tous, c'est bien apprécié, M. le Président.
Donc, comme
je le disais, l'unité d'obstétrique de Ville-Marie qui est fermée depuis déjà
cinq mois, sur lequel je n'ai pas encore entendu le ministre de la Santé nous informer et informer la population de la date précise à laquelle
ça rouvrira, parce que cette date-là, elle est reportée de fois en fois,
et ce qu'on répond, c'est : Bien, de toute façon, il y a d'autres unités d'obstétrique à côté, donc essayez de
prévoir — aussi,
j'imagine, ça va rentrer dans sa réorganisation — essayez
de prévoir à l'avance la date et l'heure exacte à laquelle vous allez
accoucher. Mais j'ai des nouvelles pour le ministre : malheureusement, ça
ne fonctionne pas toujours comme ça, quand on accouche.
Le CLSC de
Montbeillard, en Abitibi, aussi, dont on vient d'annoncer la fermeture aujourd'hui, nouvelle fermeture qui est
annoncée, d'un CLSC, pour une communauté. L'Hôpital de Matane qui a vu des lits
fermer, il y a eu des ruptures de services à plusieurs reprises aussi. Des
salles en hémodynamie à l'IUCPQ, ici. Il y en a eu à l'Hôtel-Dieu. Il y en a à Gatineau, mon collègue aura l'occasion d'y
revenir aussi. L'hôpital de Sept-Îles, on est rendu à 13 bris de service, sur
la Côte-Nord, au cours des dernières semaines. À l'hôpital
Coaticook, l'urgence qui est fermée. L'Hôpital de Saint-Eustache, il y a eu des bris. Il y en a eu, M. le Président, dans presque toutes les régions. Des salles d'opération qui sont
fermées à Saint-Jérôme. L'Hôpital du
Suroît, on en a discuté ici, l'urgence qui s'est retrouvée à être fermée en
catastrophe, avec tout ce que ça peut impliquer pour les gens qui sont
en Montérégie-Ouest.
Donc, quand
je dis que la situation, elle est très préoccupante, sur l'accès aux services,
les exemples se multiplient. Et on a
un ministre qui nous a annoncé, finalement, qu'il allait y
avoir... là, je ne sais pas, là, il va pouvoir nous corriger, mais dans une phrase il nous disait qu'il n'y aurait
plus de bris de service, puis dans l'autre il nous disait, il nous annonçait
qu'il abdiquait puis que, finalement, il fallait que les Québécois se
préparent à d'autres fermetures. Donc, je lui demanderais d'avoir la
transparence déjà ici, lors de ce débat, de nous donner l'heure juste. À quoi
peut-on s'attendre? Tous les Québécois veulent savoir ça. Tous les députés qui sont dans
cette Chambre-là veulent savoir ça aussi. Qu'est-ce qui va fermer? Quand ça va fermer? Combien de temps ça va
fermer? C'est sa responsabilité de nous donner l'heure juste là-dessus.
Il est imputable de ces décisions-là. Il est imputable de ce qui va arriver
aussi.
Parce que, je
le répète, j'avais déjà donné cet exemple-là, mais moi, quand je dis que je
suis préoccupée, là... Par exemple,
la Montérégie-Ouest, je le rappelle, l'hôpital de Valleyfield qui est fermé. Il
y a deux hôpitaux qui sont près de Soulanges, qui sont près de
l'adjointe parlementaire du ministre de la Santé, qui connaît bien la région,
c'est son comté, il y a deux hôpitaux :
l'hôpital de Valleyfield, l'urgence est fermée; l'hôpital de Lakeshore, pas accessible parce qu'il y a une éclosion. Les gens, ils font quoi quand ils
font un AVC, une crise cardiaque, un enfant qui avale des médicaments, qui
doit se rendre à l'urgence? Bien, ce qui
reste comme choix, c'est soit l'Ontario soit de faire 1 h 30 min
pour venir à Montréal. Vous réalisez
les conséquences que ça peut avoir quand c'est quelqu'un qui est dans une
situation où il a besoin de voir un médecin d'urgence.
Donc, ça, c'est
la réalité. Et je m'attends, je le répète, je m'attends, aujourd'hui, à ce que
le ministre nous donne l'heure juste là-dessus, ne fasse pas des débats
de sémantique et dise exactement ce qui va arriver, dans quelles régions ça va
fermer, quels services il va fermer et comment il va s'organiser. Parce que,
là, il nous a dit aussi : La vaccination obligatoire,
le 15 octobre, ça s'en vient, dans deux semaines. J'imagine qu'aujourd'hui
il pourra aussi nous donner... Il doit avoir les chiffres. On les attend, là,
les chiffres. On a vu les chiffres pour le public, mais on n'a pas les chiffres
entiers. Qu'est-ce que ça va avoir
comme conséquences exactement? Est-ce qu'il a un plan de contingence en place?
Est-ce qu'il va fermer certains services? Les citoyens sont en droit de
savoir, et les élus qui sont en cette Chambre sont en droit de savoir
également.
Pour ce qui
est, toujours, de l'accès aux services, donc, je parlais tout à l'heure de
l'engagement qui avait été fait par
le gouvernement de donner accès aux citoyens en 90 minutes aux urgences du
Québec. Vous comprendrez bien qu'on n'est
vraiment pas là. Je regardais les chiffres de ce matin puis je vous ai pris des
régions, quelques régions, mais j'aurais pu faire le tour de l'ensemble des régions administratives ou
sociosanitaires. Juste à Lanaudière, par exemple, deux hôpitaux à
Lanaudière, l'Hôpital Pierre-Le Gardeur, en ce moment, il est à 164 %
d'occupation à l'urgence, puis le Centre hospitalier régional de Lanaudière est
à 148 %. Ça va bien, hein? Dans les Laurentides, Saint-Eustache est à
131 % d'occupation; Saint-Jérôme,
121 %; l'Hôpital Laurentien, 167 %; puis l'Hôpital de Mont-Laurier
est à 220 % d'occupation. Ça,
c'est les chiffres de ce matin. J'aurais pu prendre ceux d'hier, ceux de la semaine
passée, honnêtement ce n'est pas guère mieux, là. La Montérégie,
Charles-Le Moyne, 123 %. L'Hôpital du Haut-Richelieu, 124 %.
Anna-Laberge est à 153 % d'occupation.
L'hôpital de Valleyfield, 169 % d'occupation. Puis, à Montréal, l'Hôpital
de Verdun, 204 % d'occupation aujourd'hui. L'Hôpital général de
Montréal, 152 %.
Donc, quand
on parle d'accès aux services essentiels, les urgences en font partie. Donc, en
ce moment, les délais pour avoir
accès sont vraiment importants, les taux d'occupation sont vraiment très
préoccupants. Et, en plus de ça, à ça s'ajoutent
des décisions du gouvernement caquiste, du ministre de fermer certaines
urgences, avec comme conséquence de mettre de la pression supplémentaire
sur les urgences des hôpitaux avoisinants.
Sur un autre... Deux autres éléments, M. le
Président, sur les questions d'accès. Les chirurgies, la question des chirurgies, on l'a vu, 149 860 personnes,
149 860 patients, aujourd'hui, qui sont en attente d'une chirurgie. Juste pour
refaire un peu l'historique... parce qu'on a eu ce débat-là je ne sais
plus combien de fois avec le ministre de la Santé, qui, au mois d'août, donc, 2020, nous disait : J'ai
un plan en chirurgie, plan qui ne comprenait absolument rien, là, soyons
clairs, et le nombre de personnes en attente d'une chirurgie ne fait que
croître depuis ce temps-là. Il n'a jamais été capable de nous présenter un plan
concret de comment il envisageait mettre des actions qui allaient permettre de
diminuer la liste d'attente, d'accélérer les
chirurgies, de reprendre un niveau de chirurgies, justement,
qui allait permettre de baisser cette liste-là. Au début de l'été, il nous a annoncé,
trompettes et tambours sortis, qu'il allait nous présenter un plan, mais finalement il a fait à peu près ce qu'il fait tout le temps dans ses points de
presse, il a fait un point de presse
pour nous annoncer, finalement, qu'il
allait prochainement nous présenter un plan et qu'il travaillait un plan. Donc,
ça fait quand même un petit peu plus qu'un an qu'il est en place, et on n'a
toujours pas vu l'ombre d'un iota d'un début de quelque chose où il va nous
expliquer exactement, concrètement
comment il entend non seulement rattraper le nombre de chirurgies, rattraper le
niveau aussi qui est en place.
Et ce n'est pas les solutions qui manquent,
hein? Parce qu'après ça... J'entends bien le ministre, tout à l'heure, qui va sûrement me dire qu'il s'attend à des
approches constructives. Les solutions, elles sont sur la table. L'Association
des chirurgiens, entre autres, est sortie je ne sais combien de fois pour dire :
Voici comment on pourrait s'organiser différemment
dans les salles d'opération, comment on pourrait réorganiser le travail avec
les infirmières qui sont en place, comment
les instrumentalistes pourraient venir nous donner un coup de main pour gérer
ça autrement, comment on pourrait utiliser
le privé, aussi, différemment. Donc, les solutions, elles sont connues, elles
sont sur la table, et ce qu'on reproche, justement, c'est que ces
solutions-là, elles ne sont pas utilisées par le ministre qui est en place.
Et ça, ça
m'amène, justement... ça me fait penser à la question de l'annonce qui a été
faite jeudi dernier par le ministre puis
le premier ministre, sa grande révolution. Il faut vraiment avoir beaucoup d'audace,
je trouve, et une immense confiance en
soi, comme premier ministre et comme ministre de la Santé, pour appeler une
révolution ce qui nous a été présenté, alors que ça se résume à de
l'argent, ça se résume à un deal, à simplement des chèques. On n'a probablement
pas la même notion de ce qu'est une
révolution organisationnelle dans un milieu. Et vous avez vu comme moi la revue
de presse, vous avez vu comme moi les
réactions. Puis on peut se dire : Ah! il y a des réactions qui étaient
syndicales, oui, c'est une chose, mais ce qu'on a entendu beaucoup plus, c'est
des réactions de travailleurs de la santé, de travailleuses de la santé.
Combien vous avez lu... Vous les avez lues comme moi, que ce soit sur Facebook,
que ce soit dans les médias, des infirmières, des inhalothérapeutes qui sont
venus témoigner en disant : C'est une gifle en plein visage, ce n'est pas
une question d'argent, ça n'a jamais été une
question d'argent, ce n'est pas ce que nous avons demandé, et ça ne nous fera
pas revenir dans le réseau public, ça ne nous fera pas passer de temps partiel
à temps plein, parce que ce qu'elles demandent, c'est du respect, c'est de la reconnaissance, c'est de
mettre des conditions en place qui permettent la conciliation travail-famille,
c'est de mettre fin, à terme... de prendre un engagement qui est ferme
pour mettre fin au temps supplémentaire obligatoire. Et moi, je les comprends très bien dans leur cri du coeur quand elles
disent... par exemple, celles qui sont mamans, de dire : Moi, je ne suis pas capable, comme maman
infirmière, de savoir si à la fin de mon chiffre je vais être capable d'aller
chercher mon enfant à la garderie. Je ne peux même pas imaginer à quel
point ça doit être une souffrance psychologique, de ne pas être capable de contrôler son horaire. Je veux dire, on l'a tous
vécu ici, ceux qui ont des enfants, quand il y a des bâillons de
dernière minute, ce que ça peut représenter, mais ce n'est pas une réalité que
l'on vit tous les jours. Et on doit se réorganiser pour trouver quelqu'un qui
va aller chercher l'enfant, qui va s'en occuper et tout, mais, elles, c'est
leur quotidien, c'est tous les jours. Tous
les jours on leur dit : Bien, je ne le sais pas quand est-ce que tu vas
ressortir d'ici. Donc, on comprend
très bien que, quand on leur dit : Bien, je te donne de l'argent, mais je
ne viens pas régler tout le problème qui affecte ta santé mentale, ta
qualité de vie, ta conciliation famille-travail, bien, la réponse, c'est :
Non, merci. Et ça, ça démontre à quel point
le niveau d'écoute du ministre de la Santé, je suis bien désolée d'avoir à dire
ça, mais il n'est pas au rendez-vous.
Donc, soit il n'a pas écouté, soit il n'a pas voulu y répondre, parce que,
encore là, les solutions, elles sont sur la table.
• (15 h 20) •
On parle toujours
de la question des ratios. Je ne comprends pas encore que le gouvernement n'avance pas plus rapidement
dans ce dossier-là. Il y a des projets pilotes qui ont été faits, mis en place
sous notre gouvernement par notre collègue ministre de la Santé qui ont eu un succès, qui ont démontré que
ça avait une efficacité, évidemment, sur la rétention, sur le recrutement des
infirmières. Bien évidemment, quand on est dans un CHSLD puis qu'on dit :
Bien, écoute, tu vas avoir 50 patients
de jour puis un maximum de tant de patients de nuit, bien, ça leur permet
d'avoir une satisfaction dans leur
travail, ça leur permet de rentrer à la maison puis de dire : Moi,
professionnellement, je me suis respecté dans mon intégrité, j'ai
respecté mes patients aussi, versus le cas qu'on a vu encore dernièrement en
Estrie, dont je n'ai entendu aucun député caquiste parler, ni le dénoncer, ni
les cinq députés qui sont en Estrie ni le ministre régional de l'Estrie non
plus, d'avoir un infirmier qui s'est
retrouvé avec 155 résidents à sa charge. Moi, je ne sais pas si vous êtes déjà
rentré dans un CHSLD, M. le Président, mais la plupart des patients sont
grabataires, donc ne se déplacent pas, plus de 70 % ont des problèmes cognitifs, de l'alzheimer avancé, ont besoin d'une prise en charge
qui est extrêmement importante, on est presque dans du un pour un en
termes de soins, et on demande à cet infirmier-là de prendre en charge
155 personnes pendant plus de
20 heures. Et l'infirmier en question a appelé son ordre en disant :
Je ne suis plus en état de travailler, et on lui a dit : Tu dois rester parce que ton gestionnaire ne te
permet pas de quitter. Et il a appelé son
gestionnaire, et on lui a dit : Non, tu vas continuer à faire du
temps supplémentaire obligatoire parce que c'est comme ça. Plus capable de
prescrire, plus capable de prendre des décisions, 20 heures de travail
consécutives. Et c'est ça qu'on demande aux infirmiers et aux infirmières qui sont sur le terrain, mais on va
aller leur donner de l'argent. C'est ça, la solution du gouvernement. Donc,
c'est sûr que ça n'aidera pas ni pour le
recrutement et ça ne viendra pas aider sur la question de l'accès aux soins non
plus.
Dernier
élément aussi sur — puis
là je pourrais passer la journée ici, mais je vois le temps qui file — la
question des médecins de famille. Sous notre gouvernement, il y avait
1,1 million de Québécois de plus qui ont eu accès à un médecin de famille, et ça, on en était extrêmement fiers, et c'était une très bonne nouvelle. Je regarde en ce moment ce
qui est en train de se passer, puis
je suis convaincue que tous les députés qui sont ici, de la partie
gouvernementale, pourraient témoigner de la même chose que moi, depuis plusieurs mois on se remet à avoir des
courriels, des appels, dans nos bureaux de comté, de gens qui disent :
Je ne trouve pas de médecin de famille, j'en ai besoin, je suis dans une
situation où j'ai vraiment besoin d'un
médecin de famille, je suis sur une liste d'attente depuis je ne sais pas
combien de jours et je ne vois pas la lumière au bout du tunnel. Et,
quand on regarde... Encore là, j'en reviens aux engagements de la CAQ, qui
étaient d'assurer à
tous les Québécois l'accès à un médecin de famille en 36 heures. Bien,
j'ai bien hâte d'entendre le ministre nous dire comment il va parvenir à
ça d'ici la fin de son mandat, dans un an, quand on voit que le délai moyen, au
Québec, d'attente pour un médecin de famille est de 600 jours — on se
rappellera, une année, 365 jours, donc on dépasse une année — que
le nombre de Québécois qui sont en attente d'un médecin de famille a augmenté
de 60 % juste dans les deux dernières
années. On est à 830 000 Québécois qui sont en attente, présentement,
d'avoir un médecin de famille, c'est très
préoccupant. Et là j'entends déjà le ministre dire : Oui, mais il y a plus
de Québécois qui ont un médecin de famille. On peut bien faire des grands débats de comptabilité ici, mais je veux
juste lui rappeler qu'un nombre absolu, c'est une chose; un pourcentage, c'en est une autre. Donc, je vais
lui demander de tenir compte du fait que la population du Québec aussi,
elle augmente. Donc, en termes de pourcentages, le pourcentage de Québécois qui
ont accès à un médecin de famille diminue,
les délais augmentent, le nombre de gens qui attend augmente aussi, donc tout...
Puis le nombre de personnes qui est en attente depuis plus d'un an,
aussi, a doublé.
Donc,
c'est des données qui sont toutes extrêmement préoccupantes sur l'accès. Puis
on parle d'accès, on parle de soins
sécuritaires, puis ça, j'ai souvent entendu le ministre parler de l'importance,
pour lui, d'avoir des soins qui sont accessibles
et qui sont sécuritaires, je ne peux que faire, factuellement, le constat qu'on
s'en éloigne et que, depuis l'arrivée au
pouvoir de la CAQ, il y a un recul sur l'accès aux soins de santé pour
l'ensemble des Québécois dans toutes les régions. Merci, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux.
M. Christian Dubé
M. Dubé :
Merci beaucoup, M. le Président. Alors...
Le Vice-Président
(M. Picard) : M. le ministre, vous allez vous lever, on n'est pas
le vendredi matin.
M. Dubé :
Ah! Bien, avec plaisir. Avec plaisir, avec plaisir.
M.
le Président, d'entrée de jeu, puis je le dis avec beaucoup de... Ce que je
veux dire, M. le Président, c'est que je réalise, avec la lecture des
statistiques que la députée de Maurice-Richard vient de nous faire, qu'elle
réalise maintenant, elle aussi, comme
bien des Québécois l'ont réalisé depuis très longtemps, justement, qu'on est
dans une pandémie depuis près de
deux ans. Puis ça, M. le Président, il y a beaucoup de cette réalité-là
qu'il faut tenir compte lorsqu'on entend toutes ces statistiques-là,
puis, je pense, M. le Président, ça, c'est important de le réaliser.
N'en
déplaise à l'opposition, je pense que la population a énormément apprécié,
énormément apprécié la gestion de la
pandémie que l'on a faite depuis le début de la pandémie, énormément apprécié.
Que ce soit lorsqu'on a annoncé notre plan pour maîtriser la deuxième
vague, qui a été beaucoup moins pire que la première, de la façon dont on a
géré la troisième vague, de la façon dont on
se démarque, dont on se démarque dans la quatrième vague, comparé à, même,
d'autres provinces au Canada. Je pense que la population apprécie, M. le
Président, comment nous avons géré la pandémie, en parallèle avec toutes les
difficultés qu'elle apportait.
Par
contre, M. le Président, il est difficile... puis ça on l'a annoncé, puis je
pense que c'est difficile pour le Parti libéral de l'accepter, c'est difficile de réparer les 15 dernières années,
M. le Président, encore plus dans un contexte de pandémie, difficile de réparer cette gestion libérale des
médecins, ce qu'on appelait les médecins ministres, puis il y en a eu plusieurs
au cours de ces 15 années là, pour qui
la priorité, M. le Président, c'étaient les médecins, ce n'était pas le
personnel infirmier, M. le Président. Soyons clairs, là, on l'a vu, les
augmentations de salaire qui avaient été données aux médecins. Ce
n'était pas le personnel infirmier qui était la priorité de nos ministres médecins,
c'étaient leurs collègues, M. le Président. Et ça, il faut que le Parti
libéral accepte, aujourd'hui, que c'est un choix que le parti a fait. Qu'ils l'aiment ou qu'ils ne
l'aiment pas, M. le Président, c'est un choix qu'ils ont fait, et ils en paient le prix aujourd'hui, parce que la population leur
a dit : C'est assez, et ils ont mis un nouveau gouvernement au
pouvoir, M. le Président.
Donc,
je suis très content d'entendre la députée qui dit qu'elle va pouvoir aller
avec positivisme, puis tout ça, mais, quand
j'entends le discours, je pense que, comme on dit souvent chez nous, les
babines ne suivent pas les bottines, ou c'est le contraire, je pense que
c'est les bottines qui ne suivent pas les babines.
Maintenant,
on est très conscients, M. le Président, des enjeux auxquels on fait face, on
en est très conscients. Et en fait ce
qu'on a annoncé la semaine dernière, puis ça, je pense que c'est important,
puis je le réexplique aux gens qui nous écoutent aujourd'hui, puis je profite de ce forum-là aujourd'hui, puis
on a le temps de le faire, M. le Président. L'annonce qu'on a faite la semaine dernière pour intéresser
le personnel infirmier à revenir nous aider dans le réseau public, elle est
excessivement importante. Et là je ne parle pas de prime, M. le Président, je
parle du style de gestion qu'on a annoncé, qui est effectivement à des lieues
de la gestion des ministres libéraux dont je parlais tout à l'heure.
M.
le Président, ce qu'on a annoncé pour nos infirmières la semaine dernière,
c'est de leur dire : Écoutez, on est très conscients de la problématique,
on s'engage à avoir un système de gestion qui va être différent. Et ça, comment
c'est important, M. le Président, c'est que, pour moi, c'est un préalable.
Puis, quand je dis «un préalable», c'est qu'on le sait, qu'il faut
améliorer notre gestion des urgences, qui a été laissée de côté par les
libéraux, on le sait, qu'il faut rattraper les
chirurgies, on le sait, qu'il faut améliorer les soins à domicile. Ça, c'est ce
qu'on doit améliorer. Mais, pour être capables de faire différemment ce qui a été fait dans les 15 dernières
années, il faut avoir ces préalables-là. Et le plus important dans les
préalables, c'est comment on gère les ressources humaines, comment on gère
notre personnel infirmier, et ça, je crois, M. le Président, qu'on a
démontré clairement, la semaine dernière, qu'on voulait le faire.
• (15 h 30) •
Maintenant,
le Parti libéral, aujourd'hui, je l'entends parler des primes, parler des
primes, mais ce n'est pas ça qu'on a
annoncé la semaine dernière, M. le Président. On a dit : En priorité, avec
les discussions que ma collègue la présidente du Conseil du trésor, qui négocie avec les différents syndicats depuis plusieurs mois, M.
le Président, ce qu'on a entendu,
c'est : Le gouvernement précédent n'a pas arrêté le TSO, il l'a augmenté, le gouvernement précédent n'a pas arrêté l'utilisation aux agences
extérieures, il l'a augmentée. Toutes les demandes qu'on a eues de la FIQ,
entre autres, et des autres syndicats, ma
collègue la présidente du Conseil du
trésor les a incorporées dans une convention collective qui, grâce au travail des deux parties, et je le dis, qui a été long,
difficile en pandémie, pas facile de
faire des négociations de convention collective durant une pandémie... bien,
justement, la présidente du Conseil du trésor avec toutes les équipes et avec
l'aide des syndicats ont fini par
trouver un arrangement pour avoir une convention collective. Et ça, M. le
Président, ce qui est dans la convention, c'est exactement, exactement ce qui a été demandé par les syndicats, et,
dans ça, je tiens à vous le dire, il n'y avait pas de primes. Alors, ce
qu'on a livré durant la pandémie, cette nouvelle convention là, respecte les
demandes du syndicat.
Maintenant,
je voudrais expliquer que ce qu'on a réussi à faire en ajout, en ajout à la
convention qui a été signée par le Conseil du trésor, c'est de dire :
Maintenant, qu'est-ce que ça nous prend, M. le Président, pour être capables, justement, d'avoir plus d'infirmières qui vont
être dans les urgences, plus d'infirmières qui vont nous aider, par exemple,
à aller faire les chirurgies dont nos spécialistes attendent les infirmières au
bloc opératoire? C'est pour ça que j'appelle ça un préalable. Là, maintenant,
ce qu'on a dit, c'est que, oui, on va vous trouver une passerelle qui va
permettre à des infirmières, M. le
Président, qui auraient peut-être laissé le système public pour une foule de
raisons... Puis je ne reviendrai pas
sur les 15 années libérales, M. le Président, je ne reviendrai pas comment
c'est difficile d'avoir travaillé dans le réseau de la santé durant la pandémie, on le sait tous. Ce qu'on sait
maintenant, c'est qu'il faut les aider à revenir pour donner un coup de
main à celles qui sont restées. Il y en a plus de 60 000 qui sont restées,
même durant les temps difficiles de la pandémie.
C'est ce qu'il faut trouver. Alors, non seulement la convention adresse les
demandes de ces infirmières-là, qui sont restées, mais les mesures incitatives que nous avons annoncées, ces mesures
qu'on appelle des mesures passerelles, sont maintenant en place pour
qu'on puisse inciter des personnes à revenir plus rapidement.
Mais le
changement de culture, M. le Président, que nous avons annoncé... Moi, j'étais,
hier... C'était la plus belle satisfaction que je ne pouvais pas avoir, hier
matin, quand je suis allé, pour le premier matin... On a annoncé les mesures
jeudi, on a parlé avec nos P.D.G. vendredi, on a déjà commencé à avoir un
groupe qui s'occupe spécifiquement de ça à
l'intérieur de l'équipe de la sous-ministre. Puis savez-vous ce que j'ai fait hier matin? Je
suis allé à l'Hôpital Pierre-Boucher, puis je suis allé aux urgences,
puis je suis allé rencontrer une infirmière. Puis là j'ai dit : Là, il n'y
a pas personne, là, il n'y a pas de sous-ministre, il n'y a pas personne, là,
on est tous les deux, on va s'asseoir, puis vous allez me dire ce qu'est-ce que vous pensez qui a été annoncé la
semaine passée. Pourquoi il y a un doute dans vos collègues? Bien, il y a
un doute parce que, le bris de confiance, M. le Président, il a
été brisé à travers toutes ces années de gestion libérale. Alors, nous, on arrive aujourd'hui avec un plan qui se
tient, qui va être difficile à implanter parce que c'est difficile la situation
qu'on vit, mais ce que cette
infirmière-là m'a dit : Je vous fais confiance, je vous fais confiance,
M. Dubé, je suis sûre que vous allez
réussir, mais, s'il vous plaît, venez nous voir régulièrement. Puis c'est ça
qu'on s'est engagés à faire, et je vais le faire dans plusieurs hôpitaux
au cours des prochaines semaines.
Alors, notre
travail de livrer la marchandise, je le répète, M. le Président, on l'a fait,
on a démontré qu'on pouvait penser,
qu'on appelle, en dehors de la boîte, avec la vaccination. Moi, ma plus grande satisfaction,
c'est quand des citoyens nous appelaient puis disaient : Mon Dieu! on
regarde les centres de vaccination, M. le Président, puis les gens sont heureux de nous accueillir, ils nous servent avec
le sourire. Puis ça, c'est des infirmières à la retraite, M. le Président, qui
sont venues nous aider, entre autres. On
voit comment le service est là. On n'a pas de file d'attente, les gens sont
heureux de nous servir. Pourquoi qu'on
ne pourrait pas faire la même chose avec le reste du système de la santé, M. le
Président? C'est ça qu'on pose comme question, puis je pense qu'on va le
démontrer.
Maintenant,
on peut penser que c'est un choix, que ça va être excessivement difficile. M.
le Président, moi, je regarde, puis,
lorsqu'on veut changer une culture dans une organisation, qu'elle soit publique
ou privée... (Interruption) Excusez-moi. M. le Président, quand on veut changer une culture, une culture
d'organisation, la première chose qu'on doit faire, c'est établir des
mesures, puis des mesures comparatives au niveau des meilleures pratiques de
gestion. Bien, savez-vous, M. le Président,
où sont ces meilleures pratiques là qu'on va mettre en place, là, dans les
prochains jours, prochaines semaines, pour livrer la marchandise? Pour
la plupart du temps, elles sont dans nos propres hôpitaux.
Puis je vais vous en nommer juste quelques-unes,
là, dont je suis très, très fier, qui ont été nommées récemment, comme étant dans les meilleurs hôpitaux à travers
le monde, par le fameux magazine Newsweek, de New York, qui dit que
les meilleurs hôpitaux... parmi les
meilleurs hôpitaux du monde, on compte le Centre hospitalier universitaire de
Sainte-Justine, on compte le Centre
universitaire de santé McGill, l'Institut universitaire de cardiologie et de
pneumologie, ça, c'est ici, à Québec, et au Centre hospitalier
universitaire de Québec, L'Hôtel-Dieu de Québec, l'Hôpital Saint-Sacrement puis
l'Hôpital L'Enfant-Jésus.
Alors, quand
on parle aux P.D.G. de nos CISSS et CIUSSS, on leur dit : Écoutez, oui, ça
a été difficile la pandémie. Peut-être que le modèle de gestion qui
était préconisé par l'ancien gouvernement, où beaucoup de priorités a été mises
sur les médecins, il faut se reculer puis de
dire, maintenant, comment on va tenir compte du reste du personnel infirmier.
Et, quand je regarde ça puis je
regarde le nombre d'hôpitaux qui sont dans cette liste-là, M. le Président,
bien, ces meilleures pratiques-là,
elles sont à côté de chez nous. On n'a pas besoin d'aller voir ailleurs, ils
sont chez nous. Alors, dans les équipes de travail, M. le Président, qu'on est
en train de mettre en place, ce sont ces gens-là qui vont venir nous aider pour
nous assurer que, le plus rapidement possible, les infirmières, les
inhalothérapeutes, les différentes personnes qui sont dans les catégories qu'on
a visées dans notre première phase du plan vont pouvoir s'inspirer de ces
meilleures pratiques là.
Maintenant, je pense qu'on est conscients aussi
des défis qu'on a. Moi, je ne me mets pas la tête dans le sable, M. le Président, en disant, un peu comme en 2007,
M. le Président, en 2007, le ministre de l'époque, qui était le ministre de
la Santé, qui est
devenu premier ministre, avait dit, en 2007 : Écoutez, temps
supplémentaire obligatoire et les recours aux agences privées, on va mette fin à ça dans la prochaine année. Ça, c'est
en 2007. Puis c'est pour ça que je vous dis qu'on est conscients des défis, parce qu'il y a bien des
choses qui ont été promises qui n'ont pas été données, puis c'est pour ça
qu'il y a eu un bris de confiance.
Maintenant,
ce que je pense, c'est qu'il va falloir, puis je l'ai expliqué... Puis ça, ça
prend du courage pour le faire, notre gouvernement a eu ce courage-là, on l'a
dit, M. le Président : Ça va être difficile dans les prochains mois, puis
on l'a dit, qu'il va arriver des
endroits où ça va être encore plus difficile. Puis on peut parler de
Senneterre, on peut parler d'Outaouais, on peut parler de Matane, on peut parler de ces endroits-là. On a été
transparents. Puis, savez-vous, M. le Président, c'est que je pense que les Québécois apprécient cette
transparence-là, de le dire : Bien, écoutez... puis encore mieux quand on
est en mesure de l'annoncer d'avance,
je pense, M. le Président, que les Québécois l'apprécient, parce que le manque
de personnel, là, ce n'est pas
quelque chose qui nous fait plaisir, c'est un manque de personnel qui est dû à
tout ce que je viens d'expliquer, puis maintenant dont il faut traiter.
Mais on l'adresse.
• (15 h 40) •
Alors,
écoutez, M. le Président, je crois que les Québécois s'attendent que la hauteur
des défis que nous avons sera à la hauteur aussi des engagements que
nous sommes en train de prendre. Moi, j'aime bien mieux dire aux Québécois,
puis c'est ce qu'on fait en ce moment : Écoutez, on se relève
tranquillement, tranquillement d'une pandémie qui a été excessivement difficile pour tout le monde, premièrement difficile pour les Québécois, qui ont connu des
moments très difficiles, mais qui ont quand
même accepté de faire leur effort
avec la vaccination, difficile pour les gens du réseau de la santé, mais je crois que les gens s'attendent qu'on ne prendra pas, nous,
15 ans pour régler un problème. Ça, les Québécois
s'y attendent. Et c'est pour ça qu'au cours
des prochaines semaines on va voir déjà les différences. Et c'est ça qui va aider ce qu'on appelle des petits succès, qu'on va
réaliser, M. le Président, dans les prochaines semaines. C'est ces petits
succès là, lorsqu'on va être capables de ramener du personnel dans nos institutions,
qui vont pouvoir nous permettre de régler le problème de Senneterre, de régler les enjeux qu'on a en Outaouais,
les enjeux qu'on a à Matane. Il faut le regarder avec réalisme, avec transparence,
M. le Président. Et c'est ça qu'on est en train de faire.
Maintenant,
j'aimerais aussi donner des exemples très concrets sur... Encore une fois, lorsqu'on
dit, puis je l'ai entendu, ce commentaire-là, je l'ai encore entendu aujourd'hui : Oui, mais ce que le gouvernement a mis, c'est des primes, des
dollars, puis ce n'est pas ça que les infirmières demandaient. On en est très
conscients, M. le Président. Vous savez, dans les mesures qu'on a
annoncées, puis ça, c'est quelque chose avec laquelle je suis familier, c'est
une gestion des horaires locaux. Vous savez,
l'infirmière que j'ai rencontrée hier matin, là, bien, c'est exactement
ce qu'elle m'a dit. Vous savez, là, c'est
correct, si vous êtes capable d'aller les chercher avec les primes, les gens
pour accélérer leur retour, on apprécie ça puis on comprend pourquoi vous l'avez fait, mais, ce que je veux savoir — parce qu'elle me le disait hier — comment
je vais faire, moi, pour être capable de gérer mon horaire avec mon
équipe, avec la flexibilité que ça prend?
Vous savez, dans la
grande réorganisation du gouvernement libéral passé, on a enlevé des
gestionnaires locaux. C'est des
gestionnaires locaux. Vous savez ce qu'ils faisaient entre autres, M. le
Président? C'est qu'ils faisaient des horaires localement qui tenaient
compte des besoins de l'hôpital, qui tenaient compte des besoins du CHSLD, qui
tenaient compte des besoins locaux. Par
souci d'économie, par souci d'économie, M. le Président, on a enlevé ces
gestionnaires-là, locaux, qui ne sont
plus là. Alors là, nous, ce qu'on dit maintenant aux infirmières :
Écoutez, on va organiser, on va vous aider à organiser pour que vous soyez
capables de faire vos horaires localement pour tenir compte des changements
qui peuvent arriver. C'est tout à fait normal qu'une infirmière, un infirmier
peut tomber malade, peuvent avoir une raison de
rester à la maison parce qu'ils ont un enfant malade, ou peu importe. Mais ça,
lorsqu'on est pris avec un gestionnaire qui est à distance, M. le
Président, qui ne sait même pas c'est
quoi, le nom du personnel qui est sur un plancher d'urgence ou à une table de
console où on suit les gens, c'est tout
à fait normal, M. le Président, qu'on ne soit pas capables d'avoir une agilité qu'on doit avoir
dans une organisation comme ça.
Vous
savez, la première chose qu'on a faite lorsqu'il y a eu les grands problèmes de
la première vague au niveau des CHSLD, c'est de réaliser la même chose, qu'il y
avait bien des gestionnaires locaux qui avaient été enlevés par l'ancienne
administration, puis qui ne permettait pas de savoir ce qui se passait, d'avoir
le pouls sur le terrain, M. le Président.
Alors,
moi, je pense que, oui, il y a des mesures qui sont incitatives, qui permettent
d'intéresser des gens à revenir ou à
rentrer, mais, par contre, je pense que l'essentiel des mesures, notamment, là,
une gestion des horaires locaux, permet, M. le Président, de démontrer au
personnel infirmier que les choses vont être différentes. Et, encore une fois,
je le dis, ce que j'ai demandé à nos
P.D.G. dans les derniers jours, c'est de me dire : Donnez-moi des exemples
au cours des prochaines semaines où
la gestion des horaires va se faire localement et on va être capables de voir
rapidement un intéressement, une satisfaction, de la part des
infirmières, qu'on s'attend de faire les choses différemment.
Bon,
maintenant, je pense qu'on a démontré comment il est possible pour les
Québécois de suivre lorsqu'on est transparents
dans l'information. La campagne de vaccination, vous savez, M. le Président, je
pense qu'une des raisons, je ne dis
pas que c'est la seule, parce qu'il y en a plusieurs mais une des raisons pour
laquelle je pense qu'on a eu un si grand succès puis qu'on est parmi les nations où on a le plus de personnes vaccinées,
on a eu 89 %, là, dans les derniers jours pour la première vague,
vous savez pourquoi? C'est parce qu'on s'est mesuré. Puis à chaque jour, à
chaque semaine, cette information-là, on la
partageait avec le grand public, parce qu'on leur disait : Écoutez, si on
vous donne cette information, au
moins les gens peuvent savoir puis s'ajuster. Il y a des gens qui ne sont pas
encore vaccinés aujourd'hui, mais, lorsqu'on voit comment l'ensemble de la population s'est fait vacciner, lorsqu'on
voit comment on est capables de mesurer chaque étape qu'on a faite, autant dans les files d'attente que dans la
vaccination, M. le Président, je pense que les gens réalisent, les
Québécois réalisent qu'on n'a pas eu peur d'être transparents puis de mettre
l'information publique pour que les gens voient puis, ça, d'ailleurs, je pense,
c'est une des raisons pour laquelle ils apprécient la vaccination.
Pourquoi je parle de ça aujourd'hui, M. le
Président? C'est parce qu'on va faire la même chose avec les ressources humaines, la même chose. Savez-vous une chose? Moi, lorsqu'on m'a parlé de TSO puis que j'ai eu la
discussion avec ma collègue présidente du Conseil du trésor, j'ai dit : Pouvez-vous me
dire si... Écoutez, le TSO, c'est tellement évident comme problème, puis
il n'y a pas une infirmière qui aime se faire imposer à la dernière minute,
après son quart de travail, de continuer à
travailler. C'est ça, du temps supplémentaire obligatoire. On ne lui donne pas
le choix, on lui dit : Vous allez rester
parce qu'il y a quelqu'un qui n'est pas là, bon. Première question que j'ai
posée, j'ai dit : Est-ce que vous pouvez me donner le nombre
d'heures en TSO par hôpital, par établissement, de façon globale? Non, on n'a
pas ça, on n'a pas ça, M. le Président. Mais
là j'ai dit : Écoutez, vous me dites que c'est le plus grand problème
qu'on a avec nos infirmières, puis on
n'a pas de statistiques, on n'a pas de données sur le TSO, on ne les a pas.
Écoutez, M. le Président, je ne vois pas comment des gestionnaires peuvent régler un problème quand ils n'ont pas accès
aux données qui donnent l'information du plus grand problème qu'on a, c'est-à-dire
le temps supplémentaire obligatoire.
Alors,
moi je m'engage, M. le Président, puis je l'ai dit en point de presse la
semaine dernière, je me suis engagé envers les différents gestionnaires,
on va vous donner tous les outils, tous les outils qu'il faut, les tableaux de
bord, appelez-le comme vous voulez, mais je
veux avoir un suivi du temps supplémentaire obligatoire au cours des prochaines
semaines. C'est ça qui est en train d'être
préparé, là, parce que ça n'avait pas de bon sens qu'on ne soit pas capables
d'avoir cette information-là pour
mieux gérer. Puis ça, écoutez, ça va prendre une collaboration de tout le
monde, parce que c'est sûr que ça va
changer les habitudes de bien des gens, autant au niveau du syndicat, des
employés et des gestionnaires. Parce que lorsqu'on s'entend, puis c'est
ça je pense qu'on est en train de faire, M. le Président, lorsqu'on s'entend
sur une problématique, bien, c'est bien plus
facile de tous aller dans la même direction, la bonne direction, parce qu'on
reconnaît le problème. Alors, moi, ce
que je vous dis aujourd'hui, c'est qu'on va s'entendre très rapidement pour ce
qui va être mesuré, puis savez-vous quoi? Comme on l'a fait pour la
vaccination, comme on l'a fait pour des statistiques dans les deuxième, troisième et quatrième vagues, maintenant,
on va rendre ces données-là publiques, M. le Président. Comme on l'a fait pour
les autres améliorations que nous avons
faites, et je pense que les Québécois s'attendent à ça, ils ont vu qu'on était
capables de le faire, on va le faire
même si c'est un gros changement. Maintenant, je dirais quelques mots sur les incitatifs
financiers. Écoutez, on est très
conscients...Puis je pense qu'il faut faire attention de la part de
l'opposition parce que ça fait plusieurs fois que je leur demande, et
j'aimerais le répéter, parce que je veux être très clair, oui, on peut
critiquer, mais de dire que c'est
juste de l'argent qui a été tiré la semaine passée puis qu'on n'a pas annoncé
d'autres mesures, ça, je ne pense pas que c'est une critique constructive, M. le Président. Je pense que ce qui
est important de dire, c'est qu'on a trouvé, après avoir discuté avec les infirmières, après avoir mis en
place la convention, de dire : Oui, voici la liste des mesures sur lesquelles
on va s'améliorer, et c'est ça que les infirmières ont demandé.
Maintenant,
il y a une raison pour les incitatifs financiers,
il faut être certain, puis c'est ça que je reviens à dire, que la
passerelle que nous avons annoncée, il faut aller chercher des gens à
l'extérieur. Les gens qui sont à l'intérieur, ils sont fatigués, ils ont besoin
d'aide, ils ont besoin d'une bouffée d'air, ils ont besoin que des gens
viennent les aider. Alors, c'est sûr qu'il a
fallu mettre une prime pour inciter des gens, puis il y aura d'autres mesures
aussi dont le ministre des Finances est en train de travailler, mais des
mesures qui vont inciter... Puis c'est des primes quand même importantes qu'on a faites, particulièrement dans les régions
qui sont encore plus difficiles, donc a nommé cinq régions dans lesquelles
les primes sont encore plus importantes.
Mais, vous savez, on n'aurait jamais été capables, M. le Président, d'annoncer
des primes pour que des gens
reviennent de l'extérieur sans donner des primes équivalentes à ceux qui ont
gardé le fort pendant la pandémie. Il fallait être équitable, et,
lorsqu'on a parlé à nos différents représentants syndicaux, à notre personnel, aujourd'hui, on met beaucoup plus d'argent au
personnel qui est resté que ceux qui viennent, mais il fallait avoir une
équité. Puis ça, je pense qu'il ne faut pas avoir peur de le dire.
• (15 h 50) •
Et,
maintenant que nos P.D.G., que nos gestionnaires ont les moyens de leurs
ambitions, parce que, là, on va donner tous
les outils qui peuvent faire, autant dans le style, le modèle de gestion que
l'accès à ces primes-là pour être capable d'avoir accès à du personnel, moi, je pense... Puis je
l'ai vu au cours des deux derniers jours, écoutez, on a annoncé, jeudi, les
mesures, jeudi; vendredi, nos P.D.G.,
avec leurs équipes, étaient sur les appels, pour appeler des gens sur des
listes de rappel, des gens qui ont
été dans Je contribue, sur la vaccination. Depuis hier, j'entends parler de
certaines discussions qu'ils ont, de suggestions
qu'ils vont nous faire. Moi, je leur parle encore demain matin. Je pense, M. le
Président... Puis je me fie à la créativité,
à l'agilité de nos gestionnaires, qu'ils ont démontrés depuis deux ans à gérer
la pandémie, puis je pense qu'on va
être capables de démontrer aussi aux infirmières que ce ne sont pas uniquement
des souhaits mais que c'est une réalité qu'on veut mettre ce nouveau
système de gestion là.
En fait, M. le
Président, je vous dirais, en conclusion, que je crois que le changement de
culture, et je pèse bien mes mots, le
changement de culture qu'on a annoncé, de donner beaucoup plus d'autonomie au
personnel, pour moi, il est fondamental. C'est un changement fondamental.
Ce n'est pas ce qui avait été préconisé par l'ancien gouvernement. Ils ont essayé une recette. Elle n'a pas
fonctionné, malheureusement, puis on en paie le prix aujourd'hui. Ce que je dis, c'est que la
démarche que l'on fait aujourd'hui, M. le
Président... Et c'est pour ça que je
pense que tout le monde, tout le
monde doit se mettre ensemble pour dire :
Là, là, il n'en reste plus beaucoup, de chances, M. le Président, pour être
capables de sauver notre système de santé, particulièrement lorsqu'on est rendu où on est rendu dans la pandémie. Il
n'en reste plus beaucoup, de chances. Là, je pense que le temps de la
critique, là, il est terminé. Là, ce qu'il est le temps, là, c'est de se
mettre ensemble puis de dire : Oui, il y a
eu des erreurs qui ont été faites, oui, il y a eu des choses qui ont
été peut-être mal gérées,
d'accord, mais est-ce
qu'on peut aujourd'hui se mettre ensemble et d'être capables de renforcer rapidement
notre réseau de la santé?
Et, nous, ce qu'on
s'engage à faire, M. le Président, ce qu'on s'engage à faire, c'est d'être
capables de mesurer ces changements-là qu'on
va vivre pas dans un an, pas dans deux ans, dans les prochaines semaines, M. le Président. Je veux qu'on soit réalistes. Mais il va y avoir des gains
qu'on est capables de faire dans les prochains jours, les prochaines semaines, qui vont encourager des gens à revenir
travailler avec nous, qui vont encourager ceux qui ont tenu le fort depuis si
longtemps de nous aider à le faire.
Puis, M. le Président, je pense que
si tout le monde fait sa part, tout le monde, puis je le
répète, si tout le monde fait sa,
part dans un contexte constructif, je suis certain qu'on va réussir. Notre réseau de la santé, on lui doit. Et il veut être performant,
il veut être humain. Et c'est ça qu'on va essayer de faire, M. le Président, dans les prochaines semaines. Merci
beaucoup.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le ministre. Merci. Je
cède la parole à M. le député de Rosemont. Vous disposez de
11 min 34 s.
M. Vincent Marissal
M. Marissal : 11 min 34 s. Merci, M. le Président. Chers collègues, j'en profite pour vous saluer, parce qu'il y en a un certain nombre d'entre vous que je n'ai pas vus depuis très longtemps,
puisque nous ne siégeons pas à pleine capacité. Ça fait plaisir de vous revoir. Il y en a que j'ai vus par Zoom depuis
des semaines et des semaines que je vois en présence. Ça me fait plaisir
de vous voir aussi, je le dis sincèrement.
Ce
qui ne me fait pas plaisir, par contre, c'est ce que je viens d'entendre, en
tout cas certaines parties, par exemple que le temps de la critique est terminé. Bon, bien, voilà. Nous voilà
dans une nouvelle ère. Voulez-vous que je rentre chez nous, peut-être, aussi? On sauverait un salaire de député, tu
sais. Bien non, le temps de la critique n'est pas terminé, bien non.
Mais il ne faut pas confondre critique et chialage.
Ça
fait des années qu'ici, là, ma formation politique, là, Amir Khadir, là, qui
était ici, là, il y a plus de 10 ans, quand même, et après ça les suivants de ma formation
politique... ça fait des années qu'on critique, oui, j'ose le terme, qu'on
critique le recours systématique au temps supplémentaire obligatoire, qui est devenu un mode de gestion.
Ça fait des années qu'on critique ça. Bien, savez-vous quoi? Le gouvernement est arrivé à la même conclusion que nous. Il avait même promis
d'abolir aussi le temps supplémentaire obligatoire. Ça n'a pas été fait, d'ailleurs.
Est-ce que le ministre de la Santé, le premier
ministre et le gouvernement de la CAQ critiquent? Est-ce qu'ils sont... non pas constructifs,
est-ce qu'ils sont chialeux? Est-ce que... Bien non. Ils avaient fait le
même constat que nous. Nous aussi, on a fait ce constat-là.
Alors,
je suis désolé pour le ministre, mais on va continuer de faire notre boulot. Moi,
je n'ai pas l'habitude de laisser des
chèques en blanc traîner, là, pré-signés, je ne m'appelle pas «rubber stamp»,
puis je ne déjeune pas de ragoût de couleuvres. Je n'accepte pas n'importe quoi et tout ce qui se dit parce que le ministre
a déclaré que c'est une révolution et que c'est un changement de
culture. En fait, c'est une révolution autoproclamée qui s'est réalisée, aux
yeux du ministre, dès qu'il a prononcé ce
mot. Mais, avant de crier au changement de culture et à la révolution, il faut quand même
bien arriver avec des solutions puis attendre les résultats.
Ça
fait penser à mon garçon quand il était petit. La première fois qu'on est allés
jouer au hockey dans la rue, on est revenus à la maison, puis il a dit :
Papa, je veux être le prochain Carey Price. Oui, bien oui, bien sûr.
Bien sûr, mon garçon. On va laisser aller quelques années, on va retourner jouer une couple de
fois au hockey puis on verra ce que ça donnera, là. Mais les prophéties
autoréalisatrices, c'est bien connu, se réalisent assez rarement, et, les
révolutions autoproclamées, on les
jugera une fois qu'elles auront eu lieu. Je comprends que le ministre
croit à son affaire, puis c'est correct, puis on lui souhaite de réussir parce que ça réussirait à tout le monde. Je veux revenir sur deux, trois trucs qui ne marchent pas dans
sa révolution, mais, enfin, bref. Ça, c'est pour la révolution autoproclamée.
À
part ça, le ministre nous dit toujours : Je veux du monde de
bonne humeur, je veux ramener le bonheur, je veux ramener la fierté. De un, le
personnel soignant, en particulier les infirmières, c'est du monde fier. C'est
du monde fier. Ils n'ont pas besoin de se faire dire par le gouvernement
qu'il faut qu'ils soient fiers. Ils sont fiers. Ils sont fiers en maudit, à les
voir travailler, en tout cas, puis avoir sauver du monde dans des conditions
extrêmement difficiles. Bon, pour le bonheur,
là, j'avoue que c'est un peu plus compliqué. C'est un peu plus compliqué d'être
de bonne humeur, là, puis d'être toujours,
là, superheureux, hop la vie quand, à chaque fois que tu rentres travailler, tu
ne sais si dans une demi-heure, dans deux heures,
dans quatre heures, ton boss va venir te voir pour dire : Finalement,
il va falloir que tu restes, il va falloir que tu fasses 16 heures. C'est difficile d'être super de bonne humeur
puis hop la vie quand ça fait 14, 15, 16 heures de suite que tu travailles. Ça fait que c'est beau le bonheur,
là, mais on ne va pas tomber dans le jovialisme non plus, là. En ce moment,
nos infirmières ne sont pas dans le bonheur,
là, sont dans la survie. Elles essaient de survivre dans leur job puis de
sauver du monde à travers ça dans des conditions épouvantables.
Le
ministre, lui, fait un parallèle avec les cliniques de vaccination. Puis c'est
vrai que ça a bien marché la vaccination. Bravo! Bravo collectif, en passant. Ça a bien marché, la vaccination, et
on continue. On continue d'aller se faire vacciner, deux puis trois fois
s'il le faut, puis on continue le temps qu'on n'aura pas vaincu cette affreuse
pandémie. Très bien. Mais il y a quand même
une différence entre les cliniques de vaccination dont il parle puis un
département de soins intensifs. Il y a quand même une sacrée différence,
là. Je comprends qu'il y a des gens qui sont revenus. J'en ai rencontré moi. Moi, j'ai rencontré, assez récemment dans
Rosemont, un médecin. Il était en vélo, il m'accroche, il me reconnaît, il se
met à me parler. Il venait de prendre sa retraite, deux ans plus tôt, il
est revenu pour piquer. Il était supercontent. Il ne comprenait même
pas, d'ailleurs, pourquoi on le payait, parce qu'il voulait faire ça, puis, en
tout cas, à cause des ententes, il fallait le payer pareil. Tu sais, oui, il
était superheureux, oui, mais on ne peut pas comparer une clinique de
vaccination au Stade olympique ou à la
clinique sur Christophe-Colomb, à Montréal, avec un département de soins
intensifs qui manque de monde, qui manque de lits, qui manque de
matériel, qu'il fait 38° aux étages de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont. «Come on», le bonheur, là! On n'est pas dans le
bonheur, là. Alors, on ne peut quand même pas comparer une clinique de
vaccination où des gens reviennent travailler volontairement à un milieu de
travail que les gens fuient parce qu'on les oblige à faire du temps
supplémentaire, puis on ne leur donne pas des conditions de travail saines et
décentes. Alors, permettez-moi de critiquer. Bien sûr que je vais critiquer.
• (16 heures) •
La motion du Parti libéral, que
j'appuierai, que nous appuierons, après une tentative d'amendement, néanmoins,
se lit ainsi pour le premier paragraphe — je ne vous lirai pas tout :
«Que
l'Assemblée nationale prenne acte que depuis maintenant près de 3 ans, le
Québec enregistre une importante dégradation de ses délais d'attente
dans l'accès aux services de première ligne.»
Je
voudrais quand même... Maintenant que j'ai dit que j'appuierai la motion de
l'opposition officielle, je voudrais juste
quand même rappeler que les problèmes du système de santé au Québec ne sont pas
nés de génération spontanée dans les trois dernières années. Ça fait
quand même des années que les gouvernements successifs s'emploient à maganer notre système de santé. Je ne referai pas toute
l'histoire, je n'ai absolument pas le temps de faire ça, mais ne soyons pas
naïfs, là, ne soyons pas dupes, il y a eu des réformes, et une en
particulier qui porte le nom d'un député qui siège toujours ici,
qui a fait mal puis qui fait encore mal, et puis on en entend encore parler.
Alors, oui, je veux bien, je veux bien reconnaître certains manquements du côté du gouvernement, mais disons qu'ils n'ont pas le monopole des problèmes du réseau de la santé.
Cela
dit, je l'ai dit, je le répète, la CAQ ne pourra pas toujours
se sauver puis se camoufler derrière les problèmes causés par le précédent gouvernement ou par la pandémie. La CAQ a manqué à ses engagements, puis je vais
vous donner juste trois exemples rapidement, parce que le temps file.
D'abord,
la rémunération des médecins. C'est vrai que le gouvernement précédent les
avait payés bien trop, surtout les
spécialistes. Mais ce gouvernement, qui est maintenant au pouvoir, avait dit : On va aller
rechercher 1 milliard. Ils sont
allés chercher la moitié, même pas tout à
fait. Puis, encore, selon certaines études, dont une qu'on a vue ce matin, ce
n'est pas clair qu'ils sont allés chercher même pas la moitié de ce
qu'ils avaient promis. Et le ministre de la Santé, à l'époque, était président
du Conseil du trésor. Je me souviens, il s'était levé pour dire qu'on devrait
être fiers de ça. Je présume qu'il ne
voulait pas qu'on critique non plus, mais, quand tu vas
chercher la moitié de ce que tu as promis, ce n'est pas une réussite,
c'est une moitié de réussite au mieux, c'est peut-être même une moitié d'échec,
quant à moi. Alors là, là-dessus, le gouvernement a ses responsabilités.
Ratio
infirmière-patients, ça avait été promis par le gouvernement, ça n'a pas été
fait, ça n'a pas été fait, pas du tout. Ça avait été promis par la
précédente ministre.
Le temps
supplémentaire obligatoire aussi, je l'ai dit tout à l'heure, ça avait été
identifié, ça devait disparaître. Trois ans plus tard, toujours pas, puis on
est même pogné avec ça plus que jamais.
Par
ailleurs, le ministre est devenu assez habile avec les mots, avec les termes.
Il ne veut plus entendre parler de bris
de service. Bon, il ne veut plus entendre parler de critique, il ne veut plus
entendre parler de bris de service, alors, bien, il a changé ça pour réorganisation. Parlez-moi pas de bris de service,
dit-il, parlez-moi de réorganisation. Bien, allez en parler à une femme qui va accoucher, là, puis,
avec sa famille, qui sont obligés de rouler 120 kilomètres pour se
déplacer de sa propre région pour
aller accoucher ailleurs. Allez la voir, là, quelques minutes après son
accouchement, là, ayez le guts d'aller
lui dire : Tu sais, hein, tu n'as pas subi un bris de service, tu es
l'heureuse bénéficiaire d'une réorganisation. Je vous suggère de sortir
assez vite de la chambre une fois que vous aurez dit ça, parce que ça pourrait
assez mal tourner.
Après,
le ministre nous dit : Je ne veux plus de mauvaise surprise. Ce n'est pas
lui qui a des mauvaises surprises, c'est la population, parce que lui,
il devrait savoir ce qui se passe dans son département puis dans son ministère.
Puis, il y a deux semaines, il nous a fait
l'immense surprise de nous dire qu'il était surpris de constater à quel point
on est en pénurie de personnel. Là,
il dit : Bien non, ce n'est pas de ma faute, c'est
parce que les P.D.G. des CIUSSS et des CISSS me font des cachotteries, puis ils ne me disent pas tout; ça fait que je
ne veux plus de surprise; puis je les
ai appelés puis je leur ai dit : Je veux des solutions.
On leur parle aussi,
hein, aux CIUSSS puis aux CISSS, puis ce qui sort de ça, c'est qu'ils n'ont pas
de pouvoirs surnaturels, M. le Président. Ce
n'est pas parce que la commande vient, là, «top-down», trouve-moi des
solutions, je ne veux plus entendre parler des problèmes, que tout d'un
coup tu trouves des infirmières au coin des rues puis que tu es capable de rouvrir tes salles opératoires. Bien
non, ça ne marche pas comme ça. Ça fait qu'on ne parle plus de bris de service,
on parle de réorganisation : Je ne veux
plus de surprise, je veux que les P.D.G. fassent leur job. Alors, on va se
réveiller, un matin, puis on va avoir encore les mêmes problèmes.
Même
chose pour les listes d'attente en chirurgie. On le sait, là, le passage, en ce
moment, vers le privé, on le sait, on
le voit aller. Je le sais de première main... ou de première hanche, en fait,
elles ne sont pas premières, elles sont vieilles, il faut que je me fasse changer les deux hanches,
moi. Je les vois, les orthos, là, qui essaient de me pousser vers le privé,
là, ils essaient de me pousser vers le
privé. Ils se disent : Ce gars-là, il est en forme, il travaille, il a un
peu d'argent. Bon, ce qu'il ne sait pas, c'est que j'ai quatre enfants,
donc je n'ai pas d'argent. Mais ils doivent se dire : Bon, bien, on va le pousser vers le privé, il va se faire opérer, puis
hop! ça va être réglé. Mais, non, je n'irai pas au privé. Puis je ne pense pas
que les gens devraient aller au privé.
Alors,
je vais terminer là-dessus, parce que malheureusement je n'ai plus de temps.
J'étais bien parti, pourtant, j'aurais aimé
ça avoir plus de temps, mais je vais m'arrêter là-dessus, sur une chose en
particulier : la CAQ met le doigt sur le bobo, sur un des bobos, c'est-à-dire le temps
supplémentaire et les agences, mais, pourtant, ils arrivent avec une moitié de
remède, ou même un quart de remède,
parce qu'on dit : On va essayer de changer la structure, puis le temps
supplémentaire va se liquéfier dans
l'air ambiant, ça va disparaître. Non, il faut en finir avec ça, il faut en
finir. Il faut avoir le courage de dire : On n'a pas besoin de ça, c'est une nuisance, on met fin au temps
supplémentaire obligatoire, on ramène les infirmières dans le giron. Je
n'ai plus de temps, je m'arrête là-dessus.
J'aurai
des amendements, en fait un, que je vais résumer en un, avec mes collègues de
l'opposition officielle, comme ça je ne perdrai pas de temps ici, M. le
Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Rosemont. Est-ce que je comprends que vous
déposez un amendement? Oui? Donc, vous savez que l'auteure de la motion
devra donner sa permission pour amender.
Donc, je cède maintenant la parole à... Qui veut
prendre la parole? Mme la députée de Soulanges.
Mme Marilyne Picard
Mme Picard : Merci, M. le Président. Premièrement, je tiens à
remercier ma collègue la députée de Maurice-Richard de nous donner l'occasion de débattre de la saine gestion du système de
santé québécois, les défis auxquels nous faisons face, de nos réalisations. J'aimerais la remercier de me donner
l'occasion de parler des moyens qui sont déployés présentement pour améliorer le système qui a été amoché par des
réformes, des virages, des centralisations. Vous savez, quand j'ai décidé
de m'impliquer en politique avec la Coalition avenir Québec, une de mes
préoccupations principales était d'améliorer l'accès aux soins de santé,
d'améliorer la qualité de vie des personnes parmi les plus vulnérables de notre
société. Et aujourd'hui, trois ans plus tard, j'ai le privilège d'être au
coeur de l'action en tant qu'adjointe parlementaire du ministre
de la Santé et des Services sociaux. J'ai le privilège de prendre la parole à l'Assemblée nationale pour débattre du système de santé avec les formations politiques qui ont mis en
place les réformes, les virages et les centralisations.
Comme je l'ai
souvent dit, j'ai tout d'abord été utilisatrice du système de santé. Je ne suis pas neurochirurgienne, omnipraticienne, gériatre ou
radiologiste, mais mon rôle de maman, de proche aidante et mon engagement
auprès des parents et des enfants vivant
avec un handicap m'ont permis d'avoir une compréhension différente des problématiques d'accès aux soins, une
compréhension plus terre à terre, plus proche des gens, plus proche de leur
souffrance, de leurs défis, mais plus
proche de leur quotidien, de leur bonheur aussi, on pourrait dire plus proche
des ratés du système et consciente du chemin qu'il reste à
faire.
C'est aussi
une position qui me permet de voir les solutions qui ont des impacts réels dans
le quotidien des utilisateurs du système de santé et de leurs familles, de voir comment le travail dévoué des parlementaires peut faire une différence dans la vie de milliers de personnes, comme dans le cas de la Loi visant à
reconnaître et à soutenir les personnes proches aidantes, la loi sur les infirmières praticiennes
spécialisées ou la loi qui étend le champ d'action des pharmaciens.
Je comprends
que le travail des députés de l'opposition, c'est de poser des bonnes
questions, de trouver des failles dans
les projets de loi. Cependant, je crois sincèrement que le portrait dressé dans
le libellé de la motion d'aujourd'hui est incomplet. Il est incomplet
parce qu'il occulte volontairement les réalisations et les progrès qui ont été
faits en santé depuis 2018, et ce, malgré la persistance de la plus importante
crise sanitaire depuis plus d'un siècle.
Et ces progrès, M. le Président, sont nombreux
et considérables. Par exemple, notre gouvernement en est à son troisième budget aîné avec des investissements
historiques en soins à domicile. Pour le budget 2021-2022, nous avons
alloué des sommes de
1 870 000 000 en soutien à domicile pour les personnes aînées et
personnes handicapées. Au total, l'ensemble du soutien à domicile, toutes clientèles confondues, atteint
2,4 milliards de dollars. Avec une injection de 530 millions de
dollars annuels récurrents depuis 2019-2020,
cela représente une augmentation de 67 % depuis 2018-2019. Nous avons
aussi agi sur le front fiscal avec une bonification de 394 millions
de dollars du crédit d'impôt remboursable pour le maintien à domicile des
aînés.
Voilà le choix que nous avons fait, favoriser le maintien à domicile des personnes qui souhaitent recevoir des soins chez eux, dans le confort de leur foyer, avec le
réconfort de leurs proches. Voilà ce qui distingue notre approche, une approche
basée sur l'expérience des usagers, orientée sur leurs besoins, et non sur les économies
d'échelle ou les rationalisations budgétaires.
En bout de ligne, nous offrons plus de soins à domicile et nous avons amélioré le contexte dans lequel ces soins sont
prodigués. De 360 000 usagers, en 2018-2019, nous sommes passés à
400 000 personnes recevant des soins à la maison. En heures travaillées, cela représente une augmentation de près
de 20 %, passant de 19,5 millions d'heures à plus de
24,5 millions d'heures.
• (16 h 10) •
Mais,
contrairement au gouvernement précédent, nous ne mettons pas tous les oeufs
dans le même panier. Pour ces personnes qui sont en perte d'autonomie,
qui font face à des problématiques plus complexes et dont les soins à domicile
ne sont pas envisageables, nous avons mis en chantier des maisons des aînés. Celles-ci
viendront s'ajouter aux services d'hébergement
existants. Notre gouvernement a pris l'engagement ferme de livrer
2 600 nouvelles places d'ici l'automne 2022. Ce sont 2 600 personnes qui pourront
bénéficier d'un milieu de vie qui répond aux exigences et aux besoins
d'aujourd'hui en hébergement.
En ce qui
concerne les difficultés rencontrées lors de la première vague, nous
travaillons aussi à améliorer la gestion des établissements existants. Nous avons embauché plus de
280 gestionnaires, qui permettront un meilleur suivi de l'utilisation des ressources et qui sauront réintroduire les
notions de responsabilité, de proximité et d'imputabilité, qui s'étaient
perdues dans les centralisations abusives caractéristiques de l'ère
libérale.
Nous avons recruté et formé plus de
8 000 préposés aux bénéficiaires. En pleine pandémie, cela relève
d'un exploit, M. le Président. D'autres cohortes sont d'ailleurs en formation.
Nous sommes
en démarche afin de conventionner les CHSLD privés et nous avons déposé la
Politique d'hébergement et de soins
et services de longue durée. Nous avons investi 20 millions de dollars en
amélioration de l'offre alimentaire dans les CHSLD et nous travaillons
présentement à la réfection et la reconstruction de 23 CHSLD vétustes,
inspirée par la philosophie des maisons des
aînés. Pour la première fois, nous avons inclus les comités de résidents en
leur confiant un budget de
5 millions de dollars afin de compter les petits travaux, comme les
jardins, les achats d'équipement ou l'amélioration des lieux communs.
Je pourrais
aussi parler de soins de première ligne dans les hôpitaux. Ma collègue la
députée de Maurice-Richard nous parle de délais aux urgences et d'accès aux
soins hospitaliers. J'aimerais prendre l'occasion pour lui rappeler la
réalité des gens de Soulanges. Les libéraux
ont été au pouvoir de façon quasi ininterrompue de 2003 à 2018. Malgré un
contexte de croissance démographique
soutenue et du vieillissement d'une partie importante de la population attendu,
ils ont tardé à construire un nouvel hôpital
dans ma région. Le résultat? Aujourd'hui, les gens de Soulanges doivent se déplacer
pour se faire soigner. Souvent, ils
se présentent dans les hôpitaux les plus occupés du Québec, l'Hôpital
du Suroît ou l'Hôpital général du Lakeshore.
J'ai même parlé à certains citoyens de ma circonscription qui ont fait
le choix de se rendre en Ontario pour
se faire soigner. Pourquoi les gens de Soulanges et de Vaudreuil-Dorion
ont-ils dû attendre un gouvernement de la CAQ pour pouvoir voir enfin ce
projet d'hôpital se concrétiser?
À l'opposé
des libéraux, notre gouvernement ne s'affaire pas à démanteler le système de santé, au contraire, nous l'agrandissons,
nous le modernisons, M. le Président. Avec un investissement considérable de 1,7 milliard de dollars, c'est la première fois depuis une trentaine d'années que le CISSS de la
Montérégie-Ouest verra le nombre de lits net augmenter sur son territoire. Le nombre de villes et de
régions qui verront apparaître de nouveaux hôpitaux, des travaux
d'agrandissement et de modernisation
dans les prochaines années est impressionnant : Amos, La Malbaie,
Montréal, Gatineau, Le Gardeur, Thetford
Mines. Nous agissons aux quatre coins du Québec pour augmenter la capacité
hospitalière et la qualité des soins.
Comme je l'ai
dit plus tôt, nous ne mettons pas tous les oeufs dans le même panier, nous
souhaitons aussi agir en amont des
soins hospitaliers. La modification substantielle que nous avons apportée à la
Loi sur la pharmacie en est un bel exemple.
Dans la même
optique, cet été, nous avons annoncé le déploiement d'un projet qui permettra
de diminuer le recours systématique à l'urgence en Montérégie. Ce projet
est piloté par les services préhospitaliers d'urgence du CISSS de la Montérégie-Centre en collaboration avec le centre
de communication santé et le CISSS de la Montérégie-Ouest. L'objectif est de réduire le nombre de transports
ambulanciers jugés non urgents et ainsi optimiser les ressources ambulancières
et hospitalières afin qu'elles
répondent plus efficacement aux urgences vitales. Les citoyens de Soulanges
savent que la desserte ambulancière
est un défi dans la région. Depuis juin, la stratégie se déploie sur tout le territoire
de la Montérégie-Ouest, va
graduellement s'étendre à l'ensemble de la Montérégie au cours de l'automne.
Avec cette approche novatrice, les usagers en situation de détresse
vitale pourront recevoir une prise en charge ambulancière et hospitalière plus
rapide. En bout de ligne, tous les usagers
bénéficieront de services mieux adaptés à leurs besoins. Ce projet reflète
l'esprit d'innovation des gens de la
Montérégie et la volonté de notre gouvernement d'améliorer l'accès aux soins de
première ligne partout au Québec. C'est
en optimisant les services déjà disponibles en dehors des urgences que nous
favoriserons un meilleur accès aux soins de santé.
Nous travaillons fort afin de déployer des
mécanismes efficaces et adaptés à la réalité de chacune des régions du Québec.
Il s'agit d'un bel exemple de collaboration interprofessionnelle entre les
techniciens ambulanciers, paramédics et les infirmières. M. le Président, je crois sincèrement que le travail
effectué par notre gouvernement est considérable. Certes, il reste du chemin à
faire. Un gouvernement responsable sait qu'on peut toujours
faire mieux, surtout lorsqu'il est question
de la santé des gens.
Encore une
fois, je remercie ma collègue la députée de Maurice-Richard de nous donner l'occasion de débattre de la question. C'est en
travaillant tous ensemble, sans partisanerie, que nous pourrons améliorer
l'accessibilité aux soins de santé
pour tous les citoyens et citoyennes du Québec. Le gouvernement de la Coalition
avenir Québec en fait un des piliers de
son engagement politique. J'ai pleinement confiance que les Québécois et les
Québécoises sauront reconnaître et apprécier la collaboration de tous
les parlementaires afin de bâtir une nation prospère et en santé. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président
(M. Picard) : Merci,
Mme la députée de Soulanges. Je cède maintenant la parole au chef de la
troisième opposition et député des Îles-de-la-Madeleine. Vous disposez de
8 min 6 s.
M. Joël Arseneau
M. Arseneau : Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, un
gros huit minutes pour discuter de cette motion-fleuve de l'opposition
officielle, c'est bien peu. Mais je vais essayer de faire bon usage du temps
qui m'est imparti pour faire un plaidoyer en faveur de la motion mais
surtout en faveur de l'action, l'action résolue du gouvernement.
Même si on a pu entendre le ministre, tout à
l'heure, présenter, là, un certain nombre de voeux pieux, ce qu'il est un petit peu lassant d'entendre dans le
discours du ministre, je vais le dire d'emblée, là, c'est qu'il y a essentiellement deux raisons pour lesquelles
on vient de se réveiller avec surprise pour voir que le système de santé, le
réseau était en lambeaux, deux raisons :
il y un gouvernement qui l'a précédé qui a fait une réforme, et,
deuxièmement, il y a une pandémie, évidemment, qui nous frappe depuis un an et demi. Je pense
que ces explications-là peuvent être valables jusqu'à un certain
point mais ne peuvent excuser le fait qu'à l'heure actuelle, l'heure, évidemment,
est grave, le navire coule.
Et, depuis
trois ans, effectivement, on n'a jamais senti la volonté résolue du gouvernement de s'attaquer aux problèmes de
la santé, qui étaient déjà présents au moment de l'élection de la CAQ en
2018. On a maints et maints exemples du fait qu'on était, semble-t-il,
bien contents de la réforme qui avait été réalisée, au point, même, où une
promesse électorale de la CAQ, dès les
premiers mois, a été rompue, lorsqu'il avait été question de créer un CISSS tout à fait sur mesure pour la région du
Centre-du-Québec. On a reculé
là-dessus, on n'a jamais voulu aller... La réforme faisait tout à fait notre
affaire.
On a aussi mis de côté la question
des ratios sécuritaires. Des projets pilotes étaient en cours. Lorsqu'il est
venu le temps de mettre, évidemment, ces projets pilotes là en oeuvre pour les
appliquer, on a mis ça de côté, et encore aujourd'hui on se demande si
le gouvernement les mettra en vigueur. C'est l'une des
demandes de la FIQ notamment, après avoir négocié les conventions collectives.
La convention collective, le ministre en a parlé à de nombreuses reprises, comme quoi
il fallait, après l'avoir négociée longuement, la mettre en oeuvre, et ça
prendrait du temps. Mais ça a pris énormément de temps aussi pour convenir
d'une convention collective, plus d'un an après la fin, justement, de la
précédente convention, du précédent contrat de travail. Alors que la pandémie frappait, on peut se demander pourquoi le
gouvernement n'a pas justement accéléré la cadence.
On a évidemment
travaillé à mettre en place des mesures pour former les préposés aux
bénéficiaires, mais, parallèlement, il ne fallait pas
négliger non plus les anges gardiens, dont on félicitait le travail sans nécessairement,
plutôt, s'attaquer à
leurs conditions de travail, qui étaient décriées à tous les jours dans les
médias. Et les seules choses... en fait, la seule façon pour le gouvernement d'empêcher la critique à l'intérieur du ministère, à l'intérieur des
rangs des infirmières, notamment,
mais de bien d'autres catégories de personnel de la santé, c'était d'imposer
l'omerta, qu'on a décriée depuis deux ans et qui est toujours en vigueur.
• (16 h 20) •
Et
c'est la raison pour laquelle, moi, j'ai beaucoup de difficultés,
malgré les bonnes intentions qui sont manifestées aujourd'hui par le ministre,
à croire qu'on a enfin compris et qu'on va agir. On agit, évidemment, tellement
tard, après avoir, un peu comme la cigale, chanté tout l'été, qu'on se demande
si véritablement les choses vont changer.
Et
c'est précisément le sentiment qu'on sent actuellement dans le réseau.
Ce bris de confiance, on peut dire qu'il remonte à des années, mais, dans les trois dernières années, et particulièrement depuis le début de la pandémie, jamais le gouvernement n'a manifesté de sensibilité particulière envers les conditions de travail des infirmières, jusqu'à ce qu'il voie que le réseau soit en train véritablement
d'imploser, il y a de cela quelques jours. Et preuve en est que le ministre
lui-même, après nous avoir raconté tout l'été que les choses allaient
s'améliorer de par elles-mêmes avec l'automne qui arriverait, révèle, il y a une dizaine de jours, sa surprise
de voir qu'il manquait 4 000 infirmières
dans le réseau, une information que tous
connaissaient déjà, évidemment, à plus forte raison les infirmières du réseau
elles-mêmes qui croulaient sous le travail, quand ce n'était pas,
évidemment, celles qui avaient déjà quitté le navire.
Alors,
cette épiphanie-là, pardonnez-nous, mais il est difficile pour nous d'y croire
aujourd'hui, surtout lorsqu'on nous
présente ce qui est décrit comme une petite révolution, alors que tout ce qu'on
a à mettre sur la table, de concret,
je dis bien de concret, ce sont des
primes, des primes pour faire revenir celles qui ont quitté, pas parce que les
conditions salariales, les conditions
financières étaient inadéquates, parce que les conditions de travail étaient
inadéquates. On n'a actuellement
que des promesses, que des engagements à agir éventuellement. On parle du temps supplémentaire obligatoire
comme une pratique qui dure depuis des années et des années. Aujourd'hui,
on semble réaliser que c'est absolument inacceptable. Mais, plutôt que de fixer une date, un échéancier où on va dire :
Le temps supplémentaire sera maintenant interdit dans le système de santé à partir
de telle date, mais, non, on dit : On va le réduire au mieux possible.
Même
chose pour les agences. On semble dire qu'on va réduire cette dépendance envers
les agences privées sans pourtant non plus mettre une date sur la fin de
ce recours aux agences qui gangrènent le système, qui cannibalisent les ressources, qui vont les chercher à coup de
1 milliard de dollars par année. On vient de décider d'injecter
1 milliard de dollars dans le
système de santé, alors qu'on injecte déjà 1 milliard de dollars dans le
système de santé privé qui vient miner le système de santé public. Alors, qu'est-ce que le système de santé
privé... que les agences vont faire s'ils voient un jour les infirmières quitter tranquillement vers le privé?
On a des doutes à l'effet que ces primes-là vont fonctionner. Mais, si on
commence à perdre des ressources, du côté du
privé, qu'est-ce qu'on va faire? On va améliorer encore les conditions de
travail, les conditions financières puis on va refiler la facture au gouvernement? Le gouvernement qui est complètement
dépendant des agences privées, il va faire
quoi? Il va payer davantage, va passer de 1 milliard à
1,2 milliard, 1,5 milliard? Cette
façon de faire là, où on tolère qu'un système vienne comme un ver dans la pomme
miner nos efforts, il faut y mettre fin.
Tant et aussi longtemps que le gouvernement n'aura pas décidé de façon résolue d'arrêter
d'être dépendant du système des agences de placement privées, on n'en
sortira pas. C'est le serpent qui se mord la queue.
Maintenant, on parle
aussi de modifier les conditions de travail et d'organisation sur le terrain,
mais on peut se permettre de douter,
évidemment, de l'effet d'une promesse comme celle-là lorsqu'on n'a absolument
rien de concret à se mettre sous la dent pour prouver effectivement que,
cette fois-ci, c'est la bonne, que, cette fois-ci, on va changer.
Je ne voudrais pas
finir mon intervention sans parler du fait que le gouvernement agit à la pièce,
il a une action qui est ciblée sur un
élément en particulier. Le gouvernement ne peut pas marcher et mâcher de la
gomme en même temps, et ça, c'est dramatique pour le système de santé.
On n'en a eu que pour les préposés aux bénéficiaires pendant le printemps 2020.
Les infirmières pouvaient se plaindre et pouvaient quitter le réseau à pleine
porte, le gouvernement n'y voyait que du
feu. Cet automne, on s'est réveillé, on a dit : Les infirmières quittent, il faut agir. On met 1 milliard de
dollars pour les infirmières. Pendant ce
temps-là, tout le personnel professionnel et technique est aux abois, il est
négligé, il demande, lui aussi,
d'être considéré. On les ignore. C'est ça, la prochaine crise dans le système
de santé, M. le Président.
Le
Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Prochaine intervention, Mme la députée de Roberval.
Mme Nancy Guillemette
Mme Guillemette :
Merci, M. le Président. Chers collègues, merci d'être ici cet après-midi. Une
salutation particulière à ma collègue
la députée de Maurice-Richard. Merci de nous
permettre de discuter d'un sujet si important pour nous tous ici aujourd'hui.
Qui aurait prévu, il
y a un an et demi, qu'on devrait passer à travers quatre vagues de COVID-19, au
Québec? On en était à notre première vague,
on disait : Peut-être une deuxième. On est maintenant
dans une quatrième vague. Cette fameuse
pandémie a mis notre système de santé
à mal, à rude épreuve, autant sur le système lui-même que sur le personnel.
Le bilan de la première vague a été
difficile. Il a fallu qu'on cible les problèmes les plus pressants et qu'on s'y
attarde très rapidement.
Vous
me permettrez, M. le Président, à ce moment-ci, de prendre quelques minutes
pour remercier tout le personnel soignant et tout le personnel du
réseau, qui a été si important et qui, dans les conditions qu'on connaît, a
fait un travail extraordinaire pour soigner, soutenir et, bien entendu,
réconforter les patients.
Vous savez ce
qu'on disait à ce moment-là? C'est que les failles de système qui venaient
finalement de nous rattraper, l'état
du réseau de la santé, la lourdeur du ministère, la désuétude des moyens de
communication, les fameux fax — oui, les fax,
M. le Président — un
bateau, un radeau, un paquebot pas très agile, pas très souple, très dur à
virer, mais on a quand même réussi à faire en sorte que cette grosse machine là
puisse prendre en charge et puisse rapidement prendre la vague pour... et réagir de façon efficace et rapide. Donc, notre
ministre a établi les priorités dans son plan d'action pour la deuxième vague,
et on a constaté par la suite que les mesures qui avaient été prises, bien, ils
nous ont permis d'aider tout le
Québec à passer au travers de la première vague et de la deuxième... de la
deuxième vague et de la troisième vague.
La
pandémie sévit chez nous et partout ailleurs dans le monde, là. Notre système
de santé est encore sous pression. On se doit d'être très, très prudent
encore. La pandémie nous aura prouvé, une fois de plus, la capacité du
gouvernement à rebondir dans l'adversité, à
refuser le statu quo et à repousser ses limites. On a pu réaliser au cours des
derniers mois qu'on est capables
d'atteindre les objectifs qu'on se donne, aussi importants qu'ils soient. Notre
premier ministre a affirmé que sa plus grande réalisation,
sa plus grande fierté, ça a été l'opération de formation accélérée des PAB, des
préposés aux bénéficiaires. Ici, chez nous,
la formation accélérée et l'embauche massive des préposées aux bénéficiaires,
ça a littéralement sauvé les CHSLD
durant la deuxième vague, Mme la
Présidente. Cette opération a été
faite dans un temps record. On peut être fier de la solidarité des Québécois
au plus fort de la pandémie.
On
travaille fort pour améliorer les conditions de vie des gens du réseau, des
gens qui oeuvrent en première ligne. Cette
valorisation, elle n'est pas que pécuniaire, malgré tout ce qu'on entend ici
cet après-midi, c'est pour faire en sorte de leur offrir une meilleure qualité de vie et d'enlever le temps
supplémentaire obligatoire et tout ce qui vient avec. Mais, pour ça, ça
nous prend plus de personnel, plus de monde, plus de personnel soignant pour
être en mesure de leur offrir ces conditions
de travail là. Le recrutement massif des préposés a limité aussi le transfert
du personnel soignant, un vecteur important de contagion durant la
première vague.
Un
autre exemple de succès de notre système de santé, ça a été notre campagne de
vaccination. Et, au-delà de ce qui se
passe dans le Québec, je peux constater ce qui a été vécu chez nous. Ce que
j'ai vu dans mon comté, j'en suis très fière.
J'ai vu des gens qui voulaient bien faire, des gens qui voulaient que la
campagne de vaccination soit une réussite, soit un wow, et ils ont réussi. On a vu plein de belles idées se déployer
pour inciter les gens à se faire vacciner : les vaccin-o-bus, les
brigades de vaccination mobiles. Et merci au responsable, chez nous, de la
vaccination, au CIUSSS Saguenay—Lac-Saint-Jean, M. Marc Thibault, et toute
son équipe. Un merci spécial, également, à tous nos retraités, qui ont répondu
en un si grand nombre à la plateforme Je
contribue et qui sont venus prêter main-forte aux équipes pendant la
vaccination. Nous sommes la région avec le plus haut taux de vaccination
au Québec, et ça me rend très fière, Mme la Présidente.
• (16 h 30) •
Les
chiffres que la collègue a partagés dans son libellé, ce n'est pas le bilan
d'un seul gouvernement. Derrière le système
de santé, on peut voir les gouvernements qui ont passé avant nous. Il y a eu
des bonnes mesures, des moins bonnes mesures.
Par contre, on ne me fera pas croire qu'au gouvernement... que c'est avec
l'arrivée de notre gouvernement que la dégringolade
s'est précipitée. Je crois plutôt que le partage de ces chiffres, Mme la
Présidente, c'est la manière qu'a ma collègue de nous inciter à travailler ensemble
pour régler ces problèmes, qui ont pris de l'ampleur depuis plusieurs
années, plusieurs décennies, et qui ont été exacerbés pendant la pandémie.
La
santé, c'est véritablement quelque
chose qui doit être transpartisan.
Nous sommes tous ensemble dans le même bateau et nous avons tous la même volonté d'offrir à nos citoyens
et nos citoyennes, notre population, des services de
qualité. Le changement positif, on y
croit, on y contribue et on se serre les coudes ensemble pour y arriver, mais
pour ça, on a besoin de tout le monde, de tous les partenaires. Autant ici que dans tout le réseau, on a
besoin de se serrer les coudes présentement.
Donc,
on parle beaucoup de santé au Québec parce qu'on investit beaucoup en santé. Vous savez, 43 % de notre budget est consacré à ce portefeuille, presque la moitié de nos
dépenses. Nous avons les moyens, autant financiers qu'humains, pour réussir à améliorer notre système de santé.
C'est notre devoir de travailler ensemble pour aller dans cette direction-là,
pour une meilleure qualité de vie pour les
patients et une meilleure qualité de vie également pour le personnel de soins
et le personnel du réseau. Merci, Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la
députée de Roberval. Et maintenant je vais céder la parole à M. le
député de Pontiac. Et votre formation politique dispose d'un temps de parole de
11 min 15 s.
M. André Fortin
M. Fortin : Merci, Mme la Présidente. Avant de vous parler de ce qui se passe dans
ma région, dans notre région, Mme la
Présidente, je vais prendre quelques instants puis revenir sur ce que le
ministre de la Santé a avancé dans son allocution.
C'est
comme si le ministre de la Santé nous avait dit : Oui, je travaille
là-dessus, là, mais 15 ans de gouvernement libéral... Puis tout de suite après, là, en fait, dans le même discours,
il nous dit : Aïe! on a les meilleurs hôpitaux au Québec. Aïe! on est vraiment, là... on a le top des
hôpitaux, l'Enfant-Jésus, là, un des meilleurs hôpitaux au Québec. Tu sais, ils
n'ont pas fait ça en trois ans, là, désolé. Ça vient de ce qui s'est passé
avant. Ça fait des années, et des années, et des années qu'il y a du monde qui
travaille là-dessus pour qu'on ait des bons hôpitaux au Québec.
Il
nous dit : Oui, oui, oui, je travaille là-dessus, mais la pandémie... Moi,
j'ai le souvenir, Mme la Présidente, du premier ministre du Québec qui
faisait la tournée des régions pendant la pandémie puis qui disait à tout le
monde qui voulaient l'entendre, dans toutes les régions, là : On va tenir
toutes nos promesses électorales malgré la pandémie. Aujourd'hui, c'est comme si la pandémie pouvait être utilisée par
n'importe quel ministre, à n'importe quelle sauce, pour dire : Ah! bien, savez-vous, je ne réalise
pas mes engagements. Ce n'est pas ce qu'on avait entendu du premier ministre.
Le premier ministre s'est déplacé
dans toutes les régions du Québec pour dire : Pandémie, pas pandémie, on
va régler les enjeux, on va remplir nos promesses.
Aujourd'hui,
là, question en logement? Pandémie. Question
en habitation? Pandémie. Question en transport? Pandémie. Question en santé? Pandémie. Ce n'est pas ça qu'on avait
entendu, Mme la Présidente. Oui, ça cause des enjeux. Oui, ça rend les choses
plus difficiles. Mais le premier
ministre du Québec
s'était engagé formellement auprès des Québécois
à remplir l'ensemble de ses engagements, pandémie pas pandémie.
Le
ministre de la Santé nous dit : Moi, j'ai réussi la vaccination, donc je vais être capable d'appliquer la même formule à tout le reste du réseau de la santé. C'est
gros, là. Le député de Rosemont a fait la démonstration que ça ne marche peut-être pas exactement pareil. Mais il
dit : J'ai réussi la vaccination. Mais il a fait deux choses. Il n'a pas
juste implanté la vaccination, il n'a pas juste mis la vaccination de l'avant, il a
mis le dépistage de l'avant aussi. Puis le dépistage, je ne peux pas vous dire que ça fonctionne aussi bien que la vaccination, Mme la Présidente. Pour être allé moi-même dernièrement, là, ça, c'est son initiative,
c'est lui qui l'a mis en place, c'était nécessaire, c'est long
attendre, dans certaines régions, pour avoir un test de dépistage.
Moi,
je suis allé, expérience personnelle, là, 15 h 30, un dimanche, ça
ferme à 18 heures. 15 h 30, tout le monde attend. Il y a
des enfants qui sont là, évidemment, le retour à l'école. Les enfants qui sont là,
les parents avec leurs enfants, tout
le monde attend, puis, à un moment donné, ah, on n'a
plus de place aujourd'hui. Vous reviendrez demain, puis allez en ligne,
prenez un rendez-vous. Allez en ligne, Mme la Présidente. Le lundi, il n'y a pas de rendez-vous avant 17 heures. 24 heures plus
tard.
Ça,
c'est des gens qui n'envoient pas leurs enfants à l'école, des gens qui ne vont
pas travailler. Pas parce qu'ils n'ont
pas leur résultat, parce qu'ils ne sont pas capables d'avoir un test de
dépistage. Ça, c'est la réalité dans votre comté à vous, Mme la
Présidente. Donc, quand le ministre nous dit : Moi, je peux prendre la
même formule que j'ai appliquée à la vaccination, le mettre à l'ensemble du réseau, il peut-u au minimum l'appliquer à
la deuxième affaire qu'il a mise en place lui-même?
Depuis quelque temps,
Mme la Présidente, il y a des fermetures à répétition un peu partout au Québec,
des fermetures de services. Et je vais
utiliser les termes, disons, qui ont été utilisés par les deux derniers députés
qui se sont exprimés, qui ont fait référence à un navire, vous savez.
Puis du député des Îles-de-la-Madeleine, je m'attends à ça, un paquebot, une barque. Puis à chaque fois qu'il y
avait un enjeu, à Ville-Marie, hein, l'obstétrique a fermé à Ville-Marie
pendant un temps, fissure dans la barque, bien, on dirait que le gouvernement
colmatait la brèche, là, comme il pouvait, hein? Ah! on va trouver quelques infirmières de Montréal, on va les envoyer
là. On va prendre un petit morceau de notre gomme, là, on va la mettre
dans la brèche, puis ça va régler tout ça. Le navire, il n'y aura pas d'eau qui
va rentrer, bien correct.
Il y a
un autre enjeu à Amqui? Ah! tiens, découverture médicale à Amqui, on ne pourra
pas faire de l'obstétrique. On va
envoyer... La présidente de la fédération des médecins qui va se déplacer. On va prendre
l'autre morceau de gomme qu'on a dans
la bouche, on va colmater l'autre brèche. Mais ça, ça marche pendant un temps. À un moment donné, on n'a plus de gomme, Mme la Présidente. À un moment donné, on n'a plus assez de ressources pour colmater
toutes les brèches.
Puis
dans mon comté, ce que ça veut dire, c'est que ça fait 600 jours,
600 jours que l'obstétrique, elle est fermée. Ce n'est jamais arrivé avant, ça, Mme la
Présidente. Puis là, en Outaouais, il y a un endroit pour accoucher, un dans
tout l'Outaouais. Ce n'est pas petit, l'Outaouais. Moi, j'habite dans mon
comté, me rendre à l'autre bout de mon comté, c'est deux heures et demie
de route. Il y a un endroit où accoucher. Et qu'est-ce que ça veut dire, ça?
Que les femmes vont accoucher en Ontario. Déjà, il
y a en avait beaucoup, des femmes de l'Outaouais qui accouchaient en
Ontario, mais dans mon comté, là, c'est presque tout le monde qui va en
Ontario maintenant.
Le
gouvernement nous avait dit, main sur le coeur... Je me
souviens encore du jour où le premier ministre s'est pointé en Outaouais pour faire ses grandes
promesses électorales, en août 2018. Il était dans un parc à Gatineau, il y
avait les trois députés actuels de la
CAQ et les deux autres candidats, une infirmière qui s'est présentée dans le
comté de Hull, et la candidate qui
s'est présentée dans Pontiac qui, aujourd'hui, ne se gêne pas trop pour dire ce
qu'elle pense du gouvernement de la CAQ. On pourra vous ressortir les citations,
il y en a une puis une autre, M. le député. Mais le jour où ils se sont
pointés, ils nous ont dit : Nous, on veut rapatrier les soins en
Outaouais. Nous, on veut ramener les soins...
Les
gens qui se font soigner en Ontario, là, on en veut moins, on veut ramener les
gens en Outaouais pour qu'ils puissent
se faire soigner chez nous. C'est le contraire qui est en train de se passer,
c'est l'inverse. On envoie des gens, davantage de gens en Ontario, puis des fois, c'est bien correct. Des fois, là, il
n'y a pas de problème avec ça, des fois c'est plus simple, les gens veulent avoir accès à des services
là-bas, mais pour des choses de base, comme l'accouchement, quand on veut
avoir accès à des services de qualité dans
notre région, avec des gens qui nous soignent qu'on connaît, parce que c'était
ça, la réalité à l'hôpital du Pontiac, des gens qui nous soignent qu'on
connaît, mais ça fait 600 jours que c'est fermé.
Puis
le ministre, il peut bien appeler ça une réorganisation au lieu d'un bris de
service. C'est vrai que 600 jours, ça commence à être long pour un bris de service. Mais, quand il appelle ça
une réorganisation, il est en train de dire à tous les gens du Pontiac qu'il
fait le choix de fermer ce service-là. Il le réorganise, il fait le choix que
ce service-là ne soit plus disponible aux gens du Pontiac. Mais ce qu'il
dit, Mme la Présidente, aussi, c'est : Bien, ce n'est pas la fin du monde,
parce qu'essentiellement les gens le savent
que c'est fermé, hein? Une fermeture annoncée d'avance, bien, les gens le
savent, c'est mieux qu'une fermeture
annoncée à quelques heures d'avance. Mais pour la mère qui est en train
d'accoucher, qu'elle l'ait appris
quatre heures avant, six heures avant, deux semaines avant, deux mois avant, un
an et demi avant, elle est quand même
obligée d'aller en Ontario. Elle est quand même obligée de faire une heure de
route. Elle ne trouve pas ça drôle, que ce soit prévu ou pas prévu, là.
Ça veut dire qu'il n'y a plus le service dans son comté, dans son village.
C'est la même chose à
l'urgence à Gatineau, Mme la Présidente. En juin, le gouvernement a fermé
l'urgence à Gatineau. Au début, c'était
fermé, là, tout le temps pour tout le monde. Après ça, c'était fermé, sauf pour
les femmes enceintes puis les enfants. Après ça, c'était fermé, mais
juste certaines heures de la journée. Là, c'est fermé de façon permanente
14 heures par jour. Il est quelle heure, là, Mme la Présidente?
Pointez-vous pas à l'urgence de Gatineau, ça ferme dans 1 h 30 min. Tournez-vous vers Hull. Tournez-vous vers
l'Ontario, encore une fois, comme beaucoup de résidents de nos circonscriptions
choisissent de faire en ce moment. C'est ça qui se passe.
Puis là on dirait que, parce que cet enjeu-là
n'est plus juste en Outaouais, parce qu'il y a d'autres régions du Québec qui
sont en train de vivre la même réalité que le gouvernement a laissé se produire
dans notre région, là... Quand c'était juste l'hôpital de Shawville, quand c'était juste
l'urgence de Gatineau, pas grave. Mais, maintenant que c'est un peu partout, ah, là, ça nous prend une
révolution dans le système. Là, ça nous prend quelque chose de
complètement différent. Beau message pour les gens de l'Outaouais qui
vivent ça depuis un certain temps.
• (16 h 40) •
Vous savez ce que les infirmières de la région
chez nous ont dit en fin de semaine à propos de la révolution du ministre de la Santé? Elles ont dit, et
c'était le titre dans Le Droit en fin de semaine : Je ne
reviendrai pas pour 15 000 $. Je ne reviendrai pas pour 18 000 $. Parce que, quand même, vous le
savez, Mme la Présidente, les conditions de travail sont très différentes en Ontario qu'elles le sont au Québec.
Les conditions de travail, là, qu'on demande dans la motion de ma collègue
de Maurice-Richard, pas de temps
supplémentaire obligatoire, l'implantation de ratios infirmière-patients
sécuritaires, ça, c'est des choses
qui sont déjà en place dans d'autres juridictions. Les infirmières qui quittent
l'Outaouais et qui s'en vont en Ontario, elles nous disent : Je suis
vraiment contente, je ne fais plus de temps supplémentaire obligatoire. Donc,
au-delà du salaire, qui est déjà plus grand en Ontario qu'au Québec, elles nous
disent très clairement, là : Moi, ce qui fait la différence dans ma vie, ce n'est pas le 18 000 $ du
gouvernement, c'est le temps supplémentaire obligatoire que je ne ferai
plus, que je ne fais plus.
À travers tout
ça, Mme la Présidente, il y a une chose qui vient m'interpeler dans chacun des
discours du gouvernement, c'est quand
le ministre de la Santé nous dit : On peut-u juste se mettre ensemble? On
peut-u juste travailler ensemble? Il
dit : On n'a plus le droit à la critique, là. Plus personne n'a le droit à
la critique, ça n'existe plus, ça, il faut travailler ensemble. Il se permet de critiquer les anciens gouvernements
en le disant, mais ce n'est pas grave, tout le monde se met ensemble.
Je ne sais
pas si le ministre a lu la motion de la députée de Maurice-Richard. Je ne sais pas s'il a entendu les questions de l'opposition
libérale depuis un certain temps. On lui demande de mettre sur pied une cellule
de gestion de crise. On lui demande de se
mettre ensemble avec les syndicats, avec la gouvernance du réseau, avec les
travailleurs. On peut y être, nous
aussi, s'il veut bien, là. Il veut qu'on en fasse partie? Pas de problème. Mais
il nous dit : On a déjà une cellule de crise, mais il l'a fait indépendamment.
Il nous a montré une photo de sa cellule de crise sur ses réseaux sociaux, il
n'y a pas longtemps, c'était tout le monde du gouvernement. Après ça, il nous
dit : On veut travailler ensemble.
Franchement,
Mme la Présidente, il veut une approche constructive, voilà l'approche
constructive : Mettez en place une
cellule de crise avec... où vous ne vous parlez pas juste entre vous, où il y a
du monde qui connaissent le réseau qui peuvent prendre part. Ça, ce
serait constructif. Merci.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député
de Pontiac. Et maintenant je cède la parole à M. le député de Beauce-Sud.
Et vous disposez d'un temps de parole de 5 min 55 s.
M. Samuel Poulin
M. Poulin :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. C'est un plaisir pour moi d'intervenir
aujourd'hui sur cette motion, parce qu'on ne parlera jamais trop des
enjeux de santé, ici, à l'Assemblée nationale.
D'ailleurs, je pense que ce n'est pas la
première fois qu'on parle des enjeux de santé, à l'Assemblée nationale. De
gouvernement en gouvernement, il y a des sujets récurrents qui sont revenus,
que ce soit le temps d'attente, que ce soit la couverture, que ce soit le
virage ambulatoire, que ce soit la réforme du député de La Pinière. On
aura la chance d'y revenir, mais chaque
cycle, chaque législature même a eu ses enjeux entourant la santé. Maintenant,
il y a une chose que nous, nous avons et qu'aucun autre gouvernement n'a
eue, c'est bel et bien une pandémie. Alors, je peux bien comprendre que la pandémie, selon certains, a le
dos large, mais il faut bien se placer dans nos bottines, dans des yeux de
gestionnaire pour comprendre ce que c'est la gestion du plus grand défi qu'un
gouvernement a eu à vivre dans son histoire.
Avant de vous
parler de tout ça, Mme la Présidente, j'aimerais vous parler du ton, parce que
vous, vous êtes une gardienne du ton
ici, à l'Assemblée nationale, et vous le faites vraiment d'une façon
magistrale, je tiens à vous le mentionner, mais le ton est aussi très important dans notre réseau de la santé. Et
je me souviens de l'assermentation de la précédente ministre de la Santé, la
députée de Sanguinet, lorsqu'elle est entrée en fonction, combien les gens du
réseau de la santé nous ont dit :
Ça fait donc bien du bien d'avoir quelqu'un en charge du ministère de la Santé
qui respecte les médecins, qui respecte les infirmières, qui respecte les préposés, qui a un ton agréable sous
la collaboration. Et je vous le dis, ça a été instantané. Dès que la députée de Sanguinet se rendait dans
les hôpitaux, c'était une «rock star», parce qu'ils disaient : Enfin, on
a quelqu'un qui nous comprend et qui vit réellement nos préoccupations.
Lorsqu'il y a
eu un remaniement, Mme la Présidente, et c'est l'actuel ministre de la Santé
qui a été nommé, bien, c'est la même chose, parce que notre collègue a un ton
sur la base du respect, du respect des infirmières, du respect de nos préposés, des gens qui oeuvrent dans les CHSLD. Et ça, Mme la Présidente, c'est la clé,
pour les gens qui travaillent dans le
réseau, de se sentir respectés. Et ça n'a pas toujours été le cas, dans le
passé, à la fois au niveau des conditions de travail, à la fois au
niveau des horaires, mais surtout au niveau du ton et de la considération. Et,
vous savez, l'annonce de jeudi dernier de
notre gouvernement, Mme la Présidente, oui, il y a de l'argent, oui,
il y a des programmes, oui, il y a des enjeux, mais il y a aussi un ton, le ton que l'on vous considère, les
infirmières, dans la réussite de notre réseau
de la santé. Et ce qu'ils nous disent... Parce qu'évidemment je pense qu'on a une
responsabilité, comme parlementaires, et je n'entends pas beaucoup mes
collègues lancer un appel au retour des infirmières. On fait de la politique,
on dit comment c'est difficile, comment
c'est dur, mais on a une responsabilité, parce que ça pourrait être vous à
l'urgence, ça pourrait être un de vos proches à l'urgence, et on veut
des infirmières, on veut des gens pour soigner notre population.
Alors,
je comprends qu'on utilise toutes les minutes qui nous sont imparties, Mme la
Présidente, pour faire de la politique,
mais il faut aussi travailler ensemble et s'élever au-dessus de la mêlée. Puis
j'espère que tous les parlementaires ici vont travailler pour que le programme
historique qu'on a lancé la semaine dernière soit connu, soit bien communiqué
auprès des potentielles infirmières et fasse
en sorte qu'on puisse recruter. Parce qu'on a un message positif aussi à lancer
aux gens : On a besoin d'eux dans le réseau de la santé. Puis ça, il n'y a
pas de politique, Mme la Présidente, là. Les infirmières, quand ils arrivent, là, ils ne disent pas :
Ah! je vous choisis ou je ne vous choisis pas. Au contraire, ils soignent tout
le monde au Québec. Et puisqu'ils
soignent tout le monde, puisqu'on est les députés de tout le monde, on se doit
de faire la promotion de ce
programme-là, Mme la Présidente, qui, oui, est une révolution. Puis il est une
révolution parce que l'histoire nous dicte
qu'il n'y a jamais eu un gouvernement qui en a fait autant pour investir dans
le recrutement à la fois de nos préposés, qui a été un succès
incroyable, et à la fois au niveau de nos infirmières.
Et,
quand j'entends dire : Ah! bien là, les préposés, vous en aviez promis
10 000, actuellement ils sont à peu près 8 000, évidemment, il y a d'autres formations qui se
poursuivent, mais c'était zéro il y a quelques mois. On est partis de
zéro à 8 000, Mme la Présidente. On
devrait entendre les oppositions être contentes, nous féliciter parce que ça
soigne le monde dans leurs comtés,
mais, non, on critique les programmes. Quand on va recruter des infirmières...
puis on le connaît l'objectif, Mme la Présidente.
4 300 infirmières, c'est notre objectif, et on souhaite l'atteindre,
mais disons que demain matin on en a
2 000, on est toujours bien partis de zéro à 2 000. On a-tu
les raisons d'être fiers de ça? Oui, puis tous les parlementaires ici
ont raison d'être fiers de ce programme-là même si c'est
2 000 infirmières.
Puis
attendez, là, je ne recule pas sur notre objectif, entendez-moi bien. On en
veut 4 300 en Outaouais, en Beauce, dans toutes les régions du Québec. Mais 2 000, là, c'est mieux que
zéro, Mme la Présidente. Puis ça, là, j'aimerais comparer les bilans des précédents gouvernements comparés à
nos actions qu'on vient de mettre en place. Alors, cette responsabilité-là, de recruter, d'être positifs face au réseau de la
santé, c'est aussi une question de ton et une question de confiance que l'on
doit envers le réseau.
J'ai
visité, la semaine dernière, Mme la Présidente, et je termine là-dessus parce
que j'en aurais long à vous dire sur
le réseau de la santé, et des tweets, et bien des choses, là, qui entourent le
réseau de la santé, mais la semaine dernière j'ai visité le CHSLD
Richard-Busque, chez nous, en Beauce. J'ai rencontré des préposés passionnés,
nouvellement diplômés. J'ai rencontré des
infirmières qui se sentent enfin considérées et qui ont hâte, dans l'espace
public, qu'on puisse dire que c'est
le fun et que c'est agréable, être infirmière. J'ai rencontré des médecins qui
nous disent : Vous venez nous donner
l'aide dont on a tant besoin. Puis j'ai rencontré aussi des patients qui demeurent
là, qui disent : Moi, j'en ai encore pour quelques années, et je sens que
votre gouvernement est à l'écoute et agit. Et c'est ce qu'on va voir au cours
des prochains jours et des prochaines semaines. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Beauce-Sud.
Il est maintenant temps de permettre à
l'auteur de cette motion de faire sa réplique. Et il faudra aussi que vous nous
disiez si vous acceptez ou non l'amendement déposé par M. le député de Rosemont.
Alors, à votre tour de faire votre réplique de 10 minutes.
Mme Marie Montpetit
(réplique)
Mme Montpetit :
Merci, Mme la Présidente. Simplement pour ne pas oublier, d'entrée de jeu, par
rapport à l'amendement qui a été déposé par mon collègue
de la deuxième opposition, malheureusement on ne pourra pas le recevoir. Mais je le
félicite quand même pour l'excellente allocution qu'il a faite.
Je
ne suis pas très surprise des échanges qu'on vient d'avoir, mais ça me fascine...
je ne sais pas si «fascine» est le bon
mot, mais de voir à quel point il y a une déconnexion entre le discours de la
partie gouvernementale et ce qui se
passe sur le terrain. Puis ils
peuvent parler de ton, ils peuvent parler... les collègues en ont bien fait
référence, je pense qu'il ne faut pas mélanger critique et attaque.
• (16 h 50) •
Quand on nous parle
de collaboration, premièrement, moi, je ne recevrai pas de leçons, ici, de
collaboration. Mon collègue l'a bien
mentionné, on a proposé il y a deux semaines déjà au ministre de la Santé de
mettre sur pied une cellule de crise, parce que la situation nous
inquiète, et de toute évidence le gouvernement n'a pas le contrôle de cette situation-là, on le voit encore aujourd'hui, il y
a des fermetures qui sont annoncées. Et on a tendu cette main-là en disant :
Nous avons une expertise, nous pouvons
collaborer. Il faut réunir les syndicats, il faut réunir les différents ordres.
Et cette main tendue là, elle a été
refusée par le premier ministre du Québec et elle a été refusée par le ministre
de la Santé. Donc, c'est bien beau
dire que le gouvernement souhaite de la collaboration, mais je vais retourner à
ce que le ministre disait, il faut que les bottines suivent les babines.
Nous, on est prêts à
collaborer, et c'est ce qu'on fait tous les jours ici quand on souligne des
propositions, des recommandations qui
devraient être mises en place. On en a fait, des propositions pour améliorer le
réseau de la santé. On vous a parlé
de la question des ratios. C'est des projets que nous-mêmes, on avait mis en place, que le gouvernement a décidé de ne pas poursuivre, avec les conséquences que ça a.
Et,
quand je parle de déconnexion, puis mon collègue aussi y a fait
référence, j'entendais le député de Beauce-Sud... — nord, sud? — Beauce-Sud,
c'est ça, exactement, Beauce-Sud, qui nous ramène sur le fait qu'il y a une pandémie, mais je l'inviterais à refaire sa
revue de presse et à revoir, effectivement, les nombreux discours qui ont été faits par le premier ministre du Québec, effectivement, qui a répété à plusieurs
reprises à qui voulait bien
l'entendre, durant l'été 2020, à travers tout le Québec, que ce
n'est pas la pandémie qui allait l'empêcher de réaliser tous ses engagements. Donc, ses engagements en santé, là, il reste un an pour les réaliser.
Je les ai nommés : 36 heures pour avoir accès à un médecin de famille, 90 minutes
d'attente à l'urgence. On est à des années-lumière de ça.
Donc, on ne
peut parler des deux côtés de la bouche puis avoir deux discours, d'un côté,
dire : La pandémie ne nous
empêchera pas de réaliser nos engagements, puis d'un autre côté, à chaque fois qu'on
soulève un enjeu, se faire répondre par
la partie gouvernementale : Bien, vous n'avez pas vu, il y a eu une
pandémie depuis deux ans. Donc, c'est deux discours qui sont absolument irréconciliables. Donc, il va falloir qu'ils en
choisissent un. Soit c'est : Nous allons réaliser les engagements
qu'on a pris durant la dernière campagne
électorale, soit c'est : On se
cache derrière une pandémie à chaque fois que ça fait notre affaire. Tu
sais, je veux dire, on ne peut pas dire les deux choses.
Et,
quand je parle de déconnexion, j'entendais, encore là, le ministre
qui nous disait qu'il est allé voir une infirmière — et
j'espère qu'il en a rencontré plus qu'une sur le terrain, puis je l'invite peut-être
à y retourner le plus souvent possible — ça me fascine, encore là, de voir à quel point la
réponse gouvernementale, elle est à des années-lumière de la réalité. J'ai passé l'été à rencontrer des
infirmières, que ce soit en Estrie, que ce soit en Mauricie, comme
la plupart de mes collègues
ici, de l'opposition. Ce qu'elles nous disent, c'est dramatique. Je
veux dire, encore en Estrie, il y a quelques semaines,
des infirmières me disaient mot pour mot, puis je ne veux pas avoir l'air
alarmiste ou catastrophiste, c'est les mots
qu'elles m'ont prononcés, c'est : Pour sauver notre peau, à l'heure actuelle, il faut quitter le réseau de
la santé. C'est ça, la réalité. Et on
devrait... Au lieu d'être dans ce genre d'échange là, de dire : L'opposition, elle n'est pas constructive, je suis bien désolée, ce qu'on vous
rapporte, c'est ce que les infirmières disent sur le terrain tous les jours.
Puis je dis «les infirmières», mais les travailleurs de la santé, de façon générale, soulèvent... Tu sais, je veux
dire, faites votre revue de presse, allez leur parler. Ce sont elles, ce sont
eux qui disent ça et qui lancent des cris du coeur au gouvernement en disant :
Il faut absolument qu'il y ait des gestes
concrets, des engagements concrets qui soient faits pour réorganiser la façon
dont on travaille à l'heure actuelle.
Et
je me serais attendue, en cette Chambre... J'entendais les députés qui sont
intervenus, puis je le dis très respectueusement,
mais j'entendais, entre autres, la députée de Roberval, qui est venue nous
parler de vaccination, alors que dans sa propre circonscription elle a
neuf infirmières qui ont démissionné, six préposés aux bénéficiaires qui ont démissionné, les soins intensifs de l'hôpital qui
sont fermés. Je me serais attendue à
ce que ça fasse partie d'une allocution, d'un échange sur la question
qui nous occupe ici comme motion, parce que c'est très préoccupant. Puis je
suis certaine qu'elle suit le dossier de
façon étroite, mais, dans la situation dont on parle, à Roberval, les
gestionnaires l'ont dit sur place, ils ont dit mot pour mot : La
crise était prévisible, ça fait des mois qu'on anticipe cette situation.
Donc,
quand le ministre nous dit, il y a deux semaines : «My God», on ne le
l'avait pas vu venir, on pensait que les fermetures étaient seulement
reliées aux vacances d'été des infirmières, puis qu'on a des gestionnaires sur
le terrain qui disent : Non, non, non,
ça fait des mois qu'on voit cette crise arriver... On savait qu'à Roberval ça
allait arriver, et là on se retrouve
avec des infirmières, justement, qui sont épuisées et qui démissionnent en
bloc. Avec la réalité que ça apporte à la
région, je me serais attendue à ce que ce soit le genre d'élément qui fasse
l'objet de nos échanges, et non la vaccination, parce qu'on parle
d'accès aux services.
La
députée de Soulanges, même chose, qui nous a parlé de vaccination. Puis on est
contents que la campagne de vaccination
ait bien été, on est tous heureux de ça, mais ce n'est absolument
pas l'objet des échanges ici. La députée de Soulanges, qui nous fait des grands laïus aussi sur la vaccination alors
que l'accès aux médecins de famille, l'accès aux services d'urgence, dans sa région, je le mentionnais tout à l'heure,
avec la situation à l'hôpital de Lakeshore, à l'hôpital de... voyons, excusez-moi, de Valleyfield, du Suroît,
est extrêmement précaire aussi, je ne l'ai pas entendue
manifester aucune préoccupation par
rapport à ça. Puis, à un moment donné, il ne faut pas vivre dans un monde de
licornes, là. Je veux dire, on la sait, la réalité, on fait tous la même revue
de presse tous les matins. On parle tous aux mêmes infirmières, on parle
tous aux gens sur le terrain. On voit ce qui se passe en ce moment. Il y a des
ruptures de services, il y a des fermetures.
Et,
encore une fois, le ministre avait l'occasion, aujourd'hui, de venir donner l'heure juste aux Québécois. Il aime
ça nous dire qu'il est transparent, mais je
ne l'ai pas entendu répondre à la question principale, qui est : Qu'est-ce
qui va se passer dans les prochaines semaines? Parce qu'il a dit deux
choses, dans les dernières semaines, il a dit... encore là, on ne peut pas dire tout et son contraire, il a dit :
Je garantis qu'il n'y aura plus de bris de service, mais il a aussi dit :
Je demande aux Québécois d'être prêts parce qu'il va falloir faire des
choix sur les services que nous allons fermer. Donc, s'il anticipe fermer de nouveaux services, bien, il va
falloir qu'il soit honnête, qu'il soit transparent, qu'il annonce de façon
claire dans quelles régions il va
fermer les services, quels services il va fermer aussi et pendant combien de
temps il va les fermer.
Et je ne l'ai pas
entendu non plus répondre, parce qu'on est dans une question d'accès, et, notre
motion, ce qu'elle fait, c'est qu'elle
déplore le fait que l'accès aux services de base, donc médecins de famille, les
chirurgies, l'urgence... que l'accès aux services a reculé, au cours des
dernières années, a reculé, depuis l'arrivée en poste du gouvernement de la CAQ. J'ai entendu le ministre sur plein de choses mais pas là-dessus.
Je ne l'ai pas entendu nous dire de quelle façon il entendait, de façon précise et structurée, arriver, justement, à
corriger ces questions-là d'accès, de quelle façon... Il nous a parlé de ces données, très bien, parfait. C'est
certainement une bonne chose. Mais ça ne m'explique pas de quelle façon
l'accès aux médecins de famille va arrêter de reculer, comment il va
s'organiser, justement, pour que le temps d'attente aux urgences arrête d'augmenter, comment il va s'assurer, justement, que
les 140 000 patients qui sont en attente d'une chirurgie
soient opérés, dans quel délai aussi.
Et
c'est toutes des réponses auxquelles il n'a pas... ce sont toutes des questions
auxquelles il n'a pas répondu, et c'est
à ça que les Québécois veulent des réponses. Et je trouve ça très malheureux
qu'échange après échange, après échange, le ministre soit dans l'incapacité de nous présenter avec clarté ce qui
va arriver au cours des prochains mois — il
reste 12 mois au mandat de la CAQ — de
nous dire précisément c'est quoi, la direction qui va être prise, de quelle
façon ils vont régler les enjeux en
santé et de quelle façon, justement, on va arrêter de reculer pour l'accès des Québécois. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente
(Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Maurice-Richard.
Mise aux voix
Alors,
je vais maintenant mettre aux voix la motion de Mme la députée de Maurice-Richard, qui se lit comme suit :
«Que
l'Assemblée nationale prenne acte que depuis maintenant près de 3 ans,
le Québec enregistre une importante dégradation de ses délais d'attente
dans l'accès aux services de première ligne;
«Qu'elle déplore que les
ruptures de services qui se multiplient sont des facteurs de stress pour les
patients en attente de suivis médicaux ainsi que pour l'ensemble de la
population;
«Qu'elle
constate que les délais d'attente aux urgences augmentent, et ce, malgré une
diminution de 1 million de visites ambulatoires;
«Qu'elle déplore qu'actuellement au Québec,
146 000 patients sont en attente de services de chirurgies;
«Qu'elle
constate que le nombre de personnes en attente d'un médecin de famille au
Québec a augmenté de près de 60 % au cours des deux dernières
années pour se chiffrer à plus de 830 000 personnes en juillet
dernier;
«Qu'elle rappelle que le gouvernement caquiste
avait pris l'engagement ferme d'offrir un médecin de famille à tous les Québécois avec un délai d'accès en
moins de 36 heures, de réduire l'attente à 90 minutes en moyenne
avant de voir un médecin à l'urgence,
de poursuivre les 17 projets pilotes sur les ratios patients-infirmière et
d'augmenter le taux d'utilisation des blocs opératoires;
«Qu'elle
constate que l'accès aux soins de santé au Québec a reculé depuis l'arrivée au
pouvoir du gouvernement caquiste;
«Qu'elle
exige que le gouvernement mette sur pied une cellule de gestion de crise pour
mettre fin aux ruptures de services dans le réseau; et
«Qu'enfin,
elle demande au gouvernement caquiste de s'engager à apporter rapidement les
correctifs nécessaires réclamés par
les différents acteurs du réseau de la santé, notamment la fin du temps
supplémentaire obligatoire pour les infirmières ainsi que l'implantation
de ratios infirmières-patients sécuritaires.»
En application de l'ordre spécial, j'invite
maintenant les leaders parlementaires à m'indiquer le vote de leurs groupes sur
cette motion, en commençant par M. le leader de l'opposition officielle.
• (17 heures) •
M. Fortin :
Pour.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
M. le leader adjoint du gouvernement?
M. Schneeberger :
Contre.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
M. le député de Rosemont?
M. Marissal : Pour.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
M. le chef du troisième groupe d'opposition?
M. Arseneau : Pour.
La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) :
Alors, je vous remercie. En conséquence, la motion est rejetée.
Maintenant, pour connaître la suite de nos
travaux, je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Schneeberger :
Oui, Mme la Présidente. Je vous demanderais de rappeler l'article 10 du
feuilleton.
Projet de loi n° 59
Reprise du débat sur l'adoption
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, c'est très bien. À l'article 10 du feuilleton, l'Assemblée
reprend le débat ajourné plus tôt aujourd'hui sur l'adoption du projet de
loi n° 59, Loi modernisant le
régime de santé et de sécurité du travail.
Et, lors de
l'ajournement de ce débat, M. le
député d'Hochelaga-Maisonneuve, c'est
vous qui aviez la parole, et vous aviez utilisé 8 min 6 s
de votre temps de parole. La parole est à vous.
M. Alexandre Leduc (suite)
M. Leduc : Merci, Mme
la Présidente. Alors, on en était, ce
midi, à faire la liste, trop courte, à mon avis, bien sûr, mais la liste
quand même des bonnes nouvelles du projet de loi, parce qu'il y en avait.
J'avais mentionné l'enjeu de la disposition
de prévention de la violence conjugale en milieu de travail, j'avais parlé de
l'enjeu du télétravail, qui était reconnu maintenant nommément dans le projet
de loi, et j'en étais rendu à parler des travailleuses domestiques.
Alors,
c'était une grande attente que, dans le cadre du projet de loi sur la réforme
de la santé et sécurité au travail du
Québec, on fasse ce qui n'était pas le cas depuis des années, c'est-à-dire qu'on assujettisse, qu'on couvre l'ensemble des travailleuses domestiques. Les attentes ont quand même
été déçues. Je l'ai quand même mis dans les bonnes nouvelles, parce qu'il
fallait que ça se fasse.
Il y avait
des grandes faiblesses dans cet assujettissement-là. On a réussi à en corriger
quelques-unes, notamment la question du seuil, le nombre d'heures faites à
partir duquel on était assujetti, notamment le droit du retour au travail, qui était interdit, selon ce que le ministre voulait
originalement, on a réussi à le réintroduire, et finalement l'obligation pour
un employeur de tenir un registre des
accidents, ce qui est l'obligation de tous les employeurs en vertu de la loi,
mais on voulait
exempter les employeurs de travailleuses domestiques de ce faire, ce qui était
un peu absurde, à mon avis. Alors, ça
aussi, on a réussi à le faire bouger. Mais, au final, je le mets quand même
dans les bonnes nouvelles parce que c'était attendu depuis longtemps. Donc,
c'est loin d'être satisfaisant, mais, au moins, il y a un petit pas qui est
fait.
Une autre
bonne nouvelle du projet de loi, c'est, en fait, la couverture de tout le monde,
de manière générale, en matière de
prévention. Vous savez, Mme la
Présidente, il y a deux grandes lois
en santé et sécurité, la loi sur la prévention, qu'on appelle la Loi sur la santé et la sécurité du travail, la LSST, et
la loi en réparation. Une fois que vous vous êtes bien cassé la gueule, c'est celle-là qui vous
intéresse, c'est la LATMP, Loi sur
les accidents du travail et les maladies professionnelles. Or, la
loi sur les réparations, la LATMP, couvre déjà tout le monde ou à peu près,
là, à quelques exceptions près. La loi, par contre, sur la prévention couvrait
à peine 15 % des salariés. Et
ça, c'était un enjeu historique. D'ailleurs, c'était la motivation de
base derrière les appels répétés depuis des années à une réforme de la santé et
sécurité au travail du Québec.
Moi, Mme la Présidente, vous le savez, je suis
un ancien syndicaliste, j'ai fait mon parcours dans le milieu syndical à différents niveaux, puis, dans tous les
congrès auxquels j'assistais, en particulier ceux de la FTQ, qui était la
centrale à laquelle j'appartenais à
l'époque, tous les congrès avaient une motion pour demander qu'on élargisse
l'application de la LSST à l'ensemble des salariés du Québec. Parce que quand
on a adopté la LSST, dans les années 70, on a décidé de découper le milieu du travail en six grands
secteurs puis on a dit : On va commencer par appliquer la loi aux deux
premiers secteurs, qui étaient dits
des secteurs prioritaires, des secteurs de grosses jobs de gars. Ce n'était pas
dit comme ça, bien sûr, mais c'est ce
que c'était. Et on s'était dit : Progressivement, à chaque cinq ans,
mettons, on va couvrir un nouveau secteur jusqu'à couvrir l'ensemble des
salariés du Québec.
Or, depuis
40 ans, on est restés exactement au point de départ. Cette idée de
progresser, qui aurait pu se faire par n'importe quel gouvernement
précédent, par un décret, par une évolution, donc, de cette couverture-là, est
restée lettre morte par des pressions
patronales, bien sûr, mais reste que c'était ça qu'on attendait. On va couvrir
tout le monde. Tous les mécanismes de prévention s'appliqueront à tous
les salariés. C'était d'ailleurs la nature d'une motion que j'avais déposée ici il y a presque deux ans de cela, qui
avait été adoptée par l'Assemblée nationale ici, par le salon bleu, qui disait
qu'il fallait donc qu'un projet de
loi soit déposé bientôt, on savait que la réforme s'en venait et que l'impact
principal de ce projet de loi soit la
couverture de tout le monde. Alors, ça, je le classe dans les bonnes nouvelles
parce qu'en effet pas mal tout le monde maintenant va être assujetti à
la LSST.
Plus loin, dans les mauvaises nouvelles, je
dirai en quoi la couverture sera probablement insuffisante, parce qu'évidemment on n'a pas repris textuellement tous
les mécanismes qui étaient déjà prévus pour les secteurs prioritaires, on ne les a pas élargis tels quels à tout le
monde. On les a modulés beaucoup à la baisse. Mais, bon, au final, pour être de
bonne foi, je l'ai mis dans les bonnes nouvelles. La couverture de tout le
monde en prévention, c'est fait maintenant. Est-ce que c'est suffisant? Non,
certainement pas, mais tout le monde est couvert. C'est une bonne nouvelle en
soi.
L'autre bonne
nouvelle, c'était la question des stagiaires. Vous savez, il y a tout un débat
dans la société québécoise, qui a eu
des échos ici, à savoir qu'il est complètement injuste qu'à travers les années
on ait exclu les stagiaires de plein de lois. Beaucoup de ces lois concernent les droits du travail, donc les
normes du travail, la santé et sécurité au travail, alors qu'il reste à couvrir la question de la Loi des
normes du travail. D'ailleurs je soupçonne, et j'ai taquiné à quelques reprises
le ministre du Travail durant l'étude
détaillée, je le soupçonne donc qu'un projet de loi s'en vient pour couvrir les
stagiaires en matière de loi des normes
du travail. J'ai même fait adopter une motion il y a quelques semaines, il y a
deux semaines, d'ailleurs, là, à ce sujet, pour qu'une loi soit déposée ici
d'ici la reprise des travaux de l'hiver, donc d'ici février. Donc, logiquement, si on veut qu'elle soit déposée, il
faut que ce soit en décembre, logiquement, maximum. J'espère qu'elle sera
déposée plus tôt, mais tout ça pour vous dire que ça, c'est plus le volet
normes du travail. Mais, dans le cadre de ce projet de loi n° 59, où on
touchait les deux lois, LSST et LATMP, il y avait à couvrir là un certain angle
de l'enjeu des stagiaires, et ça a été fait.
Maintenant, les stagiaires sont nommément précisés autant dans le volet
prévention que dans le volet
réparation. C'était une évidence. En fait, ça aurait été un scandale que ce ne
soit pas le cas. Mais, bon, ça l'a été. On le salue, on le souligne. On
a évidemment voté pour ces dispositions.
Et une autre
bonne nouvelle, qui n'était pas dans la mouture originale du projet de loi, qui
est rajoutée plus tard, c'était la question de deux maladies en
particulier qui ne figuraient pas à la liste des maladies professionnelles.
Bon, qu'est-ce que ça fait, ça, la liste des
maladies professionnelles, Mme la Présidente? C'est fondamental, parce que ça
renverse le fardeau de preuve. Si vous avez un accident ou une maladie
professionnelle, plus précisément, dans ce cas-là, une maladie professionnelle, et que vous allez vouloir vous la
faire reconnaître, vous voulez avoir réclamé une indemnité à la commission,
vous allez devoir prouver que la maladie que
vous avez a été contractée au travail et en raison du travail. C'est assez
difficile de faire ça parce que le fardeau de preuve est sur vos
épaules.
Or, il y a
des maladies qui sont tellement communes et qui ont fait le fruit de beaucoup
de recherches scientifiques qu'on décide de rajouter à une liste de
maladies professionnelles, qui fait en sorte que, si vous vous qualifiez pour
cette maladie-là, on renverse le fardeau de
la preuve. C'est donc à votre patron de prouver que ce n'est pas au travail ou
en raison du travail que vous avez
contracté cette maladie. Très intéressant pour un salarié, parce que c'est pas
mal plus aisé, plus logique d'aller se présenter au tribunal et
d'espérer obtenir gain de cause.
Toute une batterie de travaux avait été faite
sur la question des pesticides au Québec en cette Chambre, avec des rapports qui avaient été déposés, qui avaient
fait couler beaucoup d'encre, avec raison. Une des recommandations fortes de ce rapport était de reconnaître la
maladie de Parkinson dans la liste des maladies professionnelles. Ce n'était
pas dans la mouture originale du projet de loi. Malheureusement, le ministre,
je pense, se rangeait à des arguments qu'il n'y avait peut-être pas assez de science
ou, en tout cas, alors que les études étaient abondantes, alors qu'il y avait
une recommandation même de cette Chambre de le faire, et il a fallu
travailler. Je pense que toutes les oppositions, on a travaillé, on a demandé
ça. Je dois par contre
saluer l'insistance de mon collègue de Nelligan, qui en a fait un engagement personnel, qui a
mis beaucoup, beaucoup
d'énergie là-dessus et qui a certainement contribué, donc, à ce que le ministre
change son fusil d'épaule. Il y avait beaucoup
d'associations... L'UPA était bien contente. La société québécoise
de la maladie de Parkinson, avec qui on
discutait beaucoup, était bien contente, elle aussi. Alors, ça, ça a
été une bonne nouvelle, pas dans la mouture originale, mais qui est
venue en cours de route, et on l'a appréciée à sa juste valeur.
• (17 h 10) •
Et la même chose est arrivée pour la maladie de Lyme. Ça, c'était aussi une maladie
qu'on aurait voulu voir se retrouver
dans la liste, elle n'y était pas. C'est le collègue de Bonaventure qui a fait un peu plus cette bataille-là en particulier. Je le
salue. Et puis, voilà, ça aussi, c'était une bonne nouvelle, pas dans la
mouture originale, mais on l'a rajoutée.
Alors, quelques bonnes nouvelles qui étaient
dans le projet de loi, qu'on était contents de voir et qui pouvaient avoir l'air... en fait, pas... qui étaient des
bonnes nouvelles et qui peuvent donner un portrait sympathique à ce projet de loi
là dans sa première lecture. Je me
rappellerai d'ailleurs, ici quand j'ai entendu les notes explicatives, il y avait
beaucoup d'emphase qui était mise sur ces éléments, et
c'est plus tard, quand on a lu les petits caractères du projet de loi, qu'on a commencé à être un peu plus inquiets. Mais, bon, au final, il
y avait des bonnes nouvelles. Je me
suis fait un devoir de les souligner
et de commencer par ça, parce que, bien que je vais évidemment voter contre, comme
je l'ai annoncé, bien que je vais
faire beaucoup de critiques sur d'autres aspects du projet de loi, ce n'est jamais complètement
tout noir ou tout blanc, et je voulais prendre le temps de le saluer.
Il y a aussi
des grands absents dans ce projet de loi là. C'est des thèmes qui n'étaient pas
couverts par le projet de loi, qu'on a tenté de soulever de différentes
manières, par des amendements, par des questions, par des débats, par des interventions dans les médias, et qui auraient dû,
à mon avis, se retrouver dans le projet de loi, mais qui n'y étaient pas. Alors,
c'est ce que j'ai appelé la section des grands absents.
La première, c'est la question des maladies
psychologiques. L'épuisement professionnel, pour le nommer, le burn-out, en bon
français, est une maladie endémique, la maladie du siècle, qu'on appelle
parfois, qui touche plein de personnes, qui
touche beaucoup d'employés de l'État dans le secteur de la santé, de
l'éducation et qui ne figure pas à la liste des maladies professionnelles.
Alors, je vous rappelais tantôt, hein, l'importance du fardeau de preuve qui
peut être renversé, donc l'importance
qu'une maladie comme ça puisse se retrouver sur une liste de maladies
professionnelles. Alors, on a mené bataille pour que ce soit le cas. Ça
a été évidemment complètement refusé. Est-ce que c'est en raison d'une crainte de voir les coûts exploser à la CNESST? Peut-être que ce serait en effet le cas, parce qu'il y a beaucoup de gens qui
sont dans une situation d'épuisement professionnel au Québec. La plupart du temps, ils se ramassent avec
l'assurance salaire quand c'est le
cas, mettons, d'employés de la fonction publique, de salariés de l'éducation ou
de la santé. Ça provoque d'ailleurs
aussi, le fait qu'ils soient sur l'assurance salaire, un phénomène de
sous-déclaration qui peut être invoqué pour dire : Bien, ce n'est pas un si grand problème que ça en matière de
santé et sécurité. Mais c'est sûr que, si on ne dépose pas une requête
parce qu'on est presque certain de la perdre parce que ce n'est pas sur la
liste des maladies professionnelles, vous
comprenez, là, tout est dans tout, là, bien, on se retrouve avec un problème.
Il y a un phénomène qui est endémique, qui
est un véritable enjeu de société, je pense, en particulier pour l'État
employeur. Et on ne l'a pas traité de front. On a rajouté des références dans la loi, là, sur le
fait de pouvoir faire de la prévention sur la santé psychique. Mais évidemment
que la santé psychique, c'est important,
mais ce n'est pas la même chose que la santé psychologique. Alors, pas de
maladie psychologique dans la liste des maladies professionnelles de la
LATMP, malheureusement.
Toujours sur
la question de la liste, un des grands absents du débat, c'est la mise à jour
de cette liste avec celle de l'Organisation
internationale du travail, l'OIT. C'est une organisation officielle qui
regroupe les États, les employeurs et les syndicats, donc une
organisation tripartite qui cherche à dégager des grands consensus de société
et internationaux et qui met à jour, sur son
site Web, une liste impressionnante de maladies professionnelles reconnues à
l'international. Et vous vous
imaginez qu'avec à peu près aucun changement depuis sa création, dans les
années 70, le retard qu'on avait pris avec notre propre liste et
celle de l'OIT.
Alors, moi,
j'aurais voulu qu'on ait un mécanisme de renouvellement, à la limite
automatique, de cette liste des maladies
professionnelles en lien avec celle de l'OIT parce que, quand une maladie se
retrouve sur la liste de l'OIT, ce n'est
pas par hasard, c'est parce qu'elle a fait le fruit d'une énorme recherche
scientifique et d'un énorme consensus politique tripartite et
international. Alors, c'est des balises assez sécuritaires, à mon avis, pour
nous permettre de faire confiance à cette
liste-là. Ça n'a pas été... Ce n'était pas dans le projet de loi, bien sûr. On
aurait voulu que ça le soit. Ça ne l'a pas été malheureusement.
L'autre enjeu
qui a attiré mon attention, et ça a été évoqué dans les discours, c'est la
question de l'analyse différenciée selon
les sexes, la fameuse ADS+. Vous savez, c'est cette méthode de recherche et
d'analyse qu'on a développée à travers le
temps et qui vise à faire en sorte de produire une lecture d'un programme,
d'une loi, d'un ministère, même d'une organisation,
à la limite, en vertu de l'égalité des sexes, des genres. Est-ce que l'ADS+
aurait dû être appliquée sur le projet de loi
n° 59? Oui. Ça nous aurait évité beaucoup de problèmes, en particulier de
pénibles débats sur les niveaux de risque,
faible, moyen, élevé. Vous vous en rappelez peut-être, il y avait eu des débats
ici, en cette Chambre, au début, quand le projet de loi a été déposé. Pourquoi
est-ce qu'à la santé et l'éducation, quel hasard, où l'État est employeur, est
considéré comme un niveau de risque faible où on offre des grenailles en
matière de libération pour faire du travail de prévention.
Si on avait
fait une ADS+, on se serait rendu compte que le modèle qui nous était présenté,
avec les différents secteurs qu'on
nous proposait au gouvernement, bien, tous les niveaux faibles étaient à
prédominance féminine et pas mal tous les niveaux élevés étaient à prédominance
masculine. Quel hasard! Si on avait fait une ADS+, on aurait évité cette,
j'oserais dire, cette humiliation, parce que
le gouvernement a dû reculer dans l'humiliation et complètement, complètement, jeter aux poubelles tout ce travail-là qui
avait été préparé pour arriver avec un système 100 % différent.
Alors, on
s'est dit : Bon, ça n'a pas été fait à la base, c'est une chose.
Maintenant assurons-nous que la batterie de règlements que la CNESST devra adopter dans les prochaines années fasse
l'objet, eux aussi, d'ADS+. Assurons-nous que le rapport de suivi à
l'issue des cinq ans d'application de la loi qu'on a été arracher au ministre...
assurons-nous que ce
rapport soit fait en fonction de l'ADS+. Fin de non-recevoir. On a rajouté des
éléments qu'il fallait tenir compte de la différence entre les hommes et les femmes, bref, un principe qui allait
de soi, à mon avis, mais un refus obstiné de considérer l'ADS+ comme
méthode d'outil, comme méthode d'évaluation, ce qui est bien regrettable,
d'autant plus qu'on avait démontré qu'une ADS+ aurait évité bien des problèmes
à ce projet de loi.
Un autre élément qui
était absent du projet de loi, c'est les droits de visite. C'est peut-être un
peu plus technique, plus une culture. Moi,
j'ai voulu en faire un argument, un amendement, qui a été battu, vous le
devinez. Mais, moi, il y a quelque chose d'absurde que les inspecteurs
de la CNESST prennent des rendez-vous pour venir faire une inspection. Évidemment que, si vous appelez, vous prenez un
rendez-vous, vous venez faire une inspection, peut-être qu'on va se mettre
un petit peu plus propre, puis qu'on fera un
petit peu le ménage, puis on va s'assurer que tout est beau avant que
l'inspecteur arrive.
Pas
que je suis contre dans l'absolu de faire un appel. Il peut arriver qu'un appel
de courtoisie soit pertinent, un appel
pour vérifier que telle machine soit bel et bien en fonction ou que tel... Il y
a plein de raisons qui pourraient justifier qu'on prenne un rendez-vous,
qu'on fasse un appel. Le problème, c'est que, de ce qu'on entend du terrain,
c'est devenu pratique courante de faire ce
genre d'appel de courtoisie pour prendre rendez-vous avant une visite. Moi, je
pense, ça devrait être l'exception
plutôt que la règle. Donc, c'est un changement de culture à laquelle on
conviait la CNESST et le ministre. Là aussi, on n'a pas eu de réponse.
En fait, on n'a pas eu de réponse positive. Ça a été refusé.
Autre
enjeu. Il me reste deux enjeux dans les grands absents du projet de loi. Le
premier, c'est l'équipe volante. Dans le
domaine de la construction, il y a eu tout un débat sur la hauteur... le nombre
de millions que doit avoir un chantier de construction pour se qualifier avec
certains mécanismes de prévention, donc être couvert par la loi et, en deçà de
ça, de ce chiffre, donc, on était à
l'extérieur de la loi en quelque sorte. Mais les petits chantiers sont légion
au Québec. Et les petits chantiers,
évidemment, font l'objet d'un petit peu moins de vérification syndicale. Pour des raisons évidentes de nombre,
ils vont concentrer leurs efforts, les
ressources syndicales, sur les gros chantiers, ce qui fait en sorte qu'il y a
quand même des accidents graves sur les petits chantiers, qu'il n'y a
pas beaucoup de prévention, qu'il n'y a pas beaucoup de travail qui est fait. Alors, pour éviter qu'ils soient
encore laissés sur la ligne de côté, on a proposé qu'il y ait une équipe
volante qui ait la tâche d'aller se
promener spécifiquement sur les différents petits chantiers. Fin de
non-recevoir encore une fois.
Finalement,
un des derniers grands absents de ce projet
de loi, c'est que le représentant en santé et sécurité puisse effectuer lui
aussi un droit de refus. Qu'est-ce qu'un droit de refus? C'est un article
fondamental de la LSST. C'est assez... c'était assez avant-gardiste à
l'époque, quand on l'a adopté. Ce l'est encore en bonne partie aujourd'hui. Si
on vous demande de faire une tâche
dangereuse et que vous considérez qu'elle est trop dangereuse et que vous
n'avez pas soit la formation, soit l'équipement nécessaire, la condition
physique pour le faire, vous avez le droit d'exercer un droit de refus. C'est-à-dire : Je refuse de faire cette tâche
parce que je la considère dangereuse et que je ne suis pas bien protégé ou
autres raisons. Et ça vous permet
d'éviter une sanction disciplinaire, par exemple. Ça vous protège, et là il y a
un inspecteur de la commission qui va
venir vérifier si, en effet, la tâche est dangereuse ou pas, proposer des
correctifs. Bref, ça met sur pause, dans
les faits, le travail et ça force une espèce de temps de recul, un moment de
recul et un temps de réflexion pour vérifier que la tâche est vraiment
sécuritaire.
Donc,
ce droit de refus là, dans la loi, il est important, il est fondamental, mais
il ne peut être exercé que par le salarié. Je ne sais pas si vous imaginez à
quel point ce n'est pas évident d'appliquer un droit. Et là-dessus on a, moi et
le ministre, on a eu 150 fois la
même discussion. C'est bien beau d'avoir un droit sur papier, c'en est une
autre de voir s'il est effectif. Moi, c'est
un concept qui m'intéresse beaucoup, c'est le concept de l'effectivité du
droit. Est-ce que le droit fonctionne? Est-ce que le droit est appliqué? Qui
est responsable de l'application? Est-ce qu'il amène des résultats? Et, dans le
domaine du droit de refus, de tout
mettre sur les épaules uniques du salarié cette tâche d'effectuer un droit de
refus, c'est énorme. Imaginez ce que ça représente dans sa relation avec
son employeur en particulier dans un contexte non syndiqué. Alors, d'imaginer que c'est la solution miracle et que tout le monde
va pouvoir librement et facilement exercer son droit et être un justiciable
dans le système, c'est naïf, à la limite.
• (17 h 20) •
Moi,
ce que je proposais c'est de donner au représentant santé et sécurité un rôle
qui est bien défini dans la loi, qui est
une personne qui est choisie parmi les pairs pour faire ce travail de
prévention là, de donner au représentant en santé et sécurité le pouvoir, lui aussi, d'exercer un
droit de refus au nom d'un salarié. Alors, ce serait une tierce personne qui
viendrait dire : Oh! un instant. Cette tâche qu'on vous demande,
qu'un patron vous demande de faire, je la considère trop dangereuse, j'exerce le droit de refus. Ça
libérerait le salarié de ce poids, de ce fardeau de devoir appliquer ce
droit-là et de devoir se lever debout et de faire face potentiellement à
des représailles, si ce n'est pas direct, en tout cas, c'est indirect. Proposition innovante, ça aurait été assez nouveau.
Ce n'était évidemment pas dans le projet
de loi, mais ça aurait été du droit
nouveau. Malheureusement, ça a été refusé, comme à peu près tout le droit
nouveau qu'on a proposé. On y reviendra certainement, parce que cette réforme, évidemment, vous l'avez compris,
je la trouve incomplète, et elle ne me satisfait pas.
Alors,
ça, c'étaient les grands absents du projet
de loi, c'est des thèmes qui
n'étaient pas présents dans la première mouture du projet de loi, qui...
aurait souhaité qu'ils soient couverts par le ministre.
Passons
maintenant au plus gros morceau de mon allocution, à savoir les reculs du projet de loi. Il y en a plusieurs, des
reculs dans le projet de loi. Je vais
les parcourir, j'en ai plusieurs. Vous voyez, j'ai quelques pages. C'est un document
qui a été préparé par un groupe très
important qui s'appelle l'UTTAM, l'Union des travailleurs et travailleuses
accidentés de Montréal, qui ont suivi de manière passionnée et
méthodique la commission, l'étude détaillée de la commission. C'étaient des gens qui étaient fidèles au
rendez-vous, qui avaient plein de bonnes idées, plein de bonnes analyses, avec
qui on a eu une très bonne relation
de travail avant, pendant et, j'espère, après aussi la commission et qui ont
ramassé, donc, cette liste des principaux reculs à l'issue de l'étude
détaillée, liste que j'ai parcourue et que, dans l'essentiel, je fais mienne.
Je partage l'essentiel de cette analyse et
je vais vous en énumérer quelques éléments. Mais, avant de plonger à
l'intérieur de ça, deux analyses, plus générales.
La
première, dans l'étude d'impact réglementaire qui a été déposée par le ministre
sur le projet de loi n° 59, qui est
une obligation, hein, qu'on a ici, dans ce parlement, de faire lorsqu'on dépose
un projet de loi, c'était très clair, il y avait, si ma mémoire est bonne, 2 milliards sur
10 ans d'économies de prévu à l'issue de ce qui allait avoir comme
modifications, comme réforme. Je vais
utiliser les termes qui étaient prévus dans l'analyse d'impact réglementaire.
Alors, ça, c'est beaucoup, beaucoup, beaucoup d'argent.
10 milliards d'économies sur 10 ans, c'est vraiment des gros sous.
C'est des sous qui étaient essentiellement
des indemnisations, ce qu'on appelle le remplacement de revenu, l'IRR. Et,
comme on sait que c'est 100 % des
cotisations des employeurs qui financent la CNESST, on devine que, si on fait
des grandes économies de millions, et de millions, et de millions de dollars,
qu'est-ce qu'on recherche au bout de l'équation, c'est invariablement une
baisse de cotisations. C'est qu'on
trouve... les employeurs et en bonne partie le gouvernement trouvent que ça
coûte trop cher. Ça coûte trop cher,
indemniser les lésionnés du Québec, les malades du Québec. Ça coûte trop cher.
Alors, le projet de loi, certainement dans son volet sur la réparation,
sur la LATMP, visait essentiellement à réduire les coûts.
Comment on réduit les coûts? Il y a deux
manières. Soit on serre la vis en matière de prévention pour s'assurer qu'il y ait moins d'accidents, qu'on met plus de
mécanismes, qu'on oblige les patrons à être plus vigilants, il y avait un
petit bout de fait là-dedans dans le volet LSST, on y reviendra tantôt, mais ce
n'était pas la chose la plus incroyable, ou, l'autre
aspect, et c'est ce que je regrette et c'est ce qui est arrivé, on serre la vis
aux salariés qui veulent réclamer. On rend ça plus compliqué, on met des nouveaux critères d'exclusion, on lève la
barre plus haute pour se qualifier à telle ou telle réclamation. C'est à ça qu'on a assisté
essentiellement avec le projet de loi n° 59. C'était ça qu'on a observé
tout au long de la première moitié,
j'oserais dire, du projet de loi, la première moitié de l'étude détaillée du
projet de loi, c'était le sabrage, à plusieurs égards, à des droits des
travailleurs. Et je vais vous en faire la lecture dans quelques instants.
L'autre
analyse plus générale, c'est les pouvoirs réglementaires, et ça cadre
exactement à ce que je viens de vous expliquer. Le pouvoir réglementaire, ça
sonne bien correct. Bien oui, la CNESST va pouvoir adopter tel ou tel règlement
sur tel ou tel sujet. Le problème, c'est que
l'objet de la loi, c'est réparer les maladies ou les lésions professionnelles
des salariés qu'ils se sont faites en raison du travail. Puis, n'oubliez
pas, il y a un principe de base en droit du travail, en santé et sécurité du
travail, c'est le principe de Meredith. C'est un auteur, là, qui — puis,
si ce n'est pas le XIXe, c'est début
XXe — avait
dit la chose suivante : Nous proposons un grand compromis. Les salariés ne
pourront plus poursuivre au civil,
voire au criminel leur patron s'ils se sont blessés au travail. En échange, le
patron devra fournir — dans le cadre d'un régime socialisé, en quelque sorte, avec
l'ensemble des patrons — un régime de réparation généreux et facilement accessible.
C'est ça, le compromis de base. Je ne peux plus te poursuivre, mais tu me
proposes un bon régime pour me protéger,
payer des indemnités si je me blesse à cause de toi, à cause de ton manque de
prévention. C'est une question de... on dit souvent le «no fault», en
bon français. Donc, on ne cherche pas à voir si c'est la faute du patron et à
le poursuivre. Inversemenent aussi, le patron ne visera pas à dire que c'est la
faute personnelle du salarié.
Alors, il y a
quelque chose d'un peu brisé par rapport à ce compromis-là avec la réforme du
ministre où à plusieurs moments on
est venu serrer la vis à l'endroit du
travailleur puis on lui a compliqué l'accès à ses droits, c'est-à-dire celui d'obtenir une pleine réparation en fonction de blessures
ou de maladies qu'il a eues en raison du travail ou au travail.
Alors, je me plonge dans cette longue liste, Mme
la Présidente, je verrai le temps qu'il me reste quand je l'aurai terminé, mais elle est fondamentale puis elle fait
vraiment un tour très complet de tout ce qui s'est dit dans le cadre de ce
projet de loi.
Alors, c'est
parti. En réparation, recherche d'emploi obligatoire. Suite à la détermination
d'un emploi convenable ou à une perte d'emploi suite à la lésion, les
services de soutien en recherche d'emploi deviennent systématiques, et la participation à ces démarches devient obligatoire
sous peine de suspension de l'indemnité de remplacement de revenu, l'IRR.
Alors, bien sûr, le ministre disait :
Vous n'êtes pas obligé de le faire. Il faut qu'il le veuille. Si on n'est pas
obligé de le faire, mais qu'en
conséquence on perd son indemnité de revenu, on est pas mal dans une situation
d'obligation, si vous voulez mon avis.
Retour au
travail forcé avant la consolidation. La CNESST pourra imposer des mesures de
réadaptation avant la consolidation,
incluant l'imposition de retour au travail. L'accord du médecin traitant ne
sera nécessaire que si la CNESST juge
que la mesure a un effet sur l'état de santé. Dans aucun cas l'accord de la
victime n'est nécessaire, et l'IRR est suspendu en cas de refus.
La mesure de
réadaptation, bien sûr, qu'on en souhaite, bien sûr que c'est souhaitable,
encore faut-il qu'il y ait... Il y a
comme trois parties là-dedans, là. Il y a la commission qui paie,
évidemment, puis qui souhaiterait que le salarié revienne en emploi, le patron
aussi, évidemment, mais il y a le salarié puis il y a le médecin traitant. Il
est supposé d'avoir un accord tacite
dans tout ce beau monde là. Et là, visiblement, parce qu'on trouve peut-être
qu'il y a de l'abus, bien, on serre la vis puis on décide de passer
par-dessus le médecin traitant, par-dessus le salarié, et puis, chop-chop, on
ira en réadaptation si la CNESST juge que
c'est la bonne chose à faire, nonobstant l'avis du salarié, nonobstant l'avis
du médecin traitant. C'est en soi, évidemment, Mme la Présidente, un net
recul.
• (17 h 30) •
Restriction de la réadaptation sociale et
professionnelle. Les listes de mesures de réadaptation deviennent limitatives. On perd le droit à toute mesure de
réadaptation sociale ou professionnelle qui n'est pas explicitement prévue par la loi ou un règlement. C'est un exemple de ce
que je vous expliquais à l'instant sur les pouvoirs réglementaires. Comme
l'objet de la loi est large, il a été historiquement interprété ainsi par les
tribunaux. Alors, souvent, si un salarié voulait telle mesure de réadaptation qui était recommandée par son médecin et
que la CNESST disait : Non, ça ne me tente pas de payer ça, je
refuse, toute décision de la commission est contestable au Tribunal du travail,
bien, le Tribunal du travail pouvait, selon
la preuve qui lui était présentée, selon l'appréciation des faits, renverser la
décision de la commission. Et ça
arrivait très fréquemment. La commission avait tendance à être pas trop
dépensière, mettons, et les salariés qui avaient un peu d'accompagnement
par différents groupes, notamment l'UTTAM ou les centrales syndicales,
pouvaient décider d'aller
contester. Et, avec une
interprétation large de la loi, ils gagnaient souvent. Mais là si on ne peut
pas rien faire et on ne peut pas rien donner de ce qui est nommément
écrit dans la loi ou dans le règlement à venir, la portée d'interprétation du juge, elle est complètement réduite à peau de
chagrin, là. On est en train, et
c'est le reproche que j'ai fait souvent au ministre, on est en train de télégraphier d'avance le résultat d'une contestation
devant le tribunal. Le juge ne pourra que se baser que sur la liste qu'on lui aura fournie, il n'aura pas grand-chose
à interpréter, ça devient quasiment une perte de temps, d'aller au
tribunal. Alors, là-dessus, ça aussi, c'est un très net recul du projet de loi
n° 59.
Retour forcé chez l'employeur. Chaque fois que
c'est possible, la CNESST imposera le retour au travail chez l'employeur, même contre la volonté de la victime.
Elle n'aura pas l'option de ne pas exercer son droit à l'accommodement. On placera ainsi des travailleurs et des
travailleuses dans une position de vulnérabilité face à un employeur devenu
hostile suite à sa lésion. Ça risque d'être catastrophique pour les
non-syndiqués en général, les employés d'agences de placement en particulier.
C'est comme si, parfois, on oubliait ou M. le ministre oubliait qu'il y a un
rapport de force dans la vie, il y a rapports de force entre un employeur et un
salarié, et que fondamentalement ça n'a pas vraiment changé depuis l'invention du capitalisme, si j'oserais dire.
Bien sûr, maintenant il y a des syndicats, bien sûr, maintenant il y a les
normes du travail, bien sûr, maintenant il y a des lois, mais ce rapport de
force là existe toujours et s'applique, je dirais, au final, en dépit, souvent, des lois. Et d'espérer que bien
naturellement tout s'équivale et puis que ça fonctionne bien, c'est encore une
fois, à mon avis, une grande naïveté et ça
constitue un recul, ça, également, de ne pas permettre... de forcer, pardon, le
retour chez l'employeur.
Assignation temporaire sous-payée. On légalise
la pratique de sous-payer les travailleurs et travailleuses en assignation temporaire. Alors que l'employeur doit
actuellement payer 100 % du salaire, il pourra désormais ne payer que
les heures faites, et la CNESST ne
compensera qu'à la hauteur de l'IRR, et le maximum annuel assurable s'applique.
Ça, c'était une demande patronale,
évidemment. Quand on fait une assignation temporaire, ça veut dire que vous
êtes blessé, mais vous pouvez
continuer à travailler quand même dans d'autres tâches, alors je vous resitue
ailleurs dans l'entreprise, mais il
est possible que cette tâche-là ou ce poste-là n'avait pas le salaire
équivalent à la fonction que vous occupiez avant. Dans la loi actuelle, on ne vous rétrograde pas de
salaire, là, si vous faisiez 100 000 dans l'emploi A, que vous vous
faites blesser en raison du travail mais que vous pouvez encore
travailler puis qu'on vous propose des tâches d'un emploi B, vous gardez votre salaire de l'emploi A, bien
évidemment, parce que ce n'est pas de votre faute si vous êtes blessé, là,
c'est la faute de l'employeur. Mais
là on vient tout changer ça, là, on vient dire que, maintenant, ce ne sera que
les heures faites par la CNESST qui
compensera à l'IRR et le maximum annuel assurable. Donc, ça aussi c'est un net
recul, concernant plus par...
évidemment les gens qui faisaient un salaire plus intéressant mais, quand même,
un net recul, surtout sur le concept.
Nouveau
formulaire d'assignation temporaire. Changements au formulaire d'assignation
temporaire qui remettent en question
la possibilité pour un médecin de refuser l'assignation pour le motif qu'elle
n'est pas favorable à la réadaptation. Le médecin devra dorénavant identifier
les limitations fonctionnelles temporaires. Il y avait donc, on le comprendra,
une beaucoup plus grande liberté de
décision, d'action du médecin traitant. C'est vraiment un principe de base, ça
aussi, du régime de santé et sécurité, la primauté du médecin traitant,
c'est lui qui doit être, au final, celui qui tranche, celui qui recommande,
celui qui vous connaît, de toute façon, dans toutes vos coutures, avec votre
dossier, qui fait votre suivi. Et
historiquement les patrons ont toujours voulu contester le médecin traitant,
vouloir imposer un bon vieux médecin de l'employeur. Il y a eu tout un
débat alentour du Bureau d'évaluation médicale, le BEM, que le ministre n'a pas
voulu remettre en question. Tiens, ça aurait pu être dans ma liste des grands
absents, ça, la remise en question du BEM. Mais, là-dessus, on vient encore une fois limiter un peu la liberté d'action
du médecin traitant, et ça aussi, ça constitue un recul.
Abolition de
la présomption d'incapacité pour les victimes de maladies professionnelles de
55 à 59 ans. Disparition de la
présomption d'incapacité de travail pour les victimes d'une maladie
professionnelle âgées de 55 à 59 ans qui conservent des limitations fonctionnelles. Ils perdent leurs
droits à l'IRR jusqu'à la retraite en cas de congédiement de la part de leur
employeur. C'était quelque chose qui
existait, dans le fond, pour donner une espèce de répit aux salariés qui
avaient une blessure ou une maladie,
qui étaient âgés de 55 ans et plus, pour faire le pont jusqu'à la
retraite, à 65 ans. Parce qu'on... pour des raisons évidentes, à
ces âges-là, c'est beaucoup plus compliqué, sur le fond et sur la forme, de se
trouver un nouvel emploi. Et le ministre avait proposé de tout balayer ça, et
on a réussi à le garder, à ne perdre que les 55-59 ans. Mais évidemment ça constitue en soi, ça aussi, un
énorme recul qui, à mon humble avis, manque beaucoup de coeur mais ça,
j'ai déjà eu l'occasion de le dire au ministre.
Des emplois dits convenables, même si on ne peut
pas faire toutes les tâches. La CNESST peut déterminer un emploi convenable sans
tenir compte de la capacité de la travailleuse ou du travailleur à exercer les
tâches secondaires de cet emploi. Des
victimes devront donc chercher et trouver un emploi qu'elles ne peuvent, en
réalité, exercer, et le tribunal ne
pourra pas renverser la décision si l'incapacité d'exercer l'emploi dit
convenable ne repose que sur l'incapacité d'exercer des tâches secondaires. Encore une fois, on vient
télégraphier d'avance ce que le tribunal va dire. On ne lui laisse plus la
marge interprétative qui devrait normalement faire partie de toute bonne
pratique judiciaire dans un tribunal, avec les faits qui nous sont exposés, avec les grandes lignes de la loi mais une
marge interprétative en fonction d'un objet de la loi, qui est celui de
la réparation d'une lésion. Bien, on vient contre ce sens-là complètement ici,
avec cet article-là aussi, et on essaie de
télégraphier d'avance ce que le tribunal pourra dire ou ne pas dire, dans
l'objectif, évidemment, toujours, de réduire les coûts, réduire les
coûts sur le dos des travailleurs, faut-il le préciser.
Discrimination des travailleuses domestiques.
Création d'une catégorie discriminatoire pour les travailleuses domestiques, qui devront atteindre un seuil
d'heures de travail pour être couvertes, ce qui ne s'applique à aucune autre
catégorie d'emploi. Tantôt, je vous
ai dit que j'avais quand même mis une partie du sujet des travailleuses
domestiques dans les bonnes nouvelles,
parce qu'il fallait qu'elles apparaissent enfin dans la loi, mais encore une
fois, c'était aigre-doux, comme nouvelle, parce qu'évidemment on a mis un critère d'un nombre d'heures que... En
effet, personne d'autre dans la loi ne doit travailler un certain nombre d'heures pour se qualifier, sauf
les travailleuses domestiques. Là, ça, on a décidé que, oui, si tu fais en bas
de tant d'heures, tu
ne te qualifies pas, fin de l'histoire. C'est, je pense, à toutes fins
pratiques, une discrimination, il n'y a pas beaucoup de doutes à mon égard. J'ai bien l'impression que ça va
être contesté en vertu de la charte. J'ai hâte de voir ce que ça va donner. Ça me semble tellement clair
que c'est un élément discriminatoire que je... Bref, on verra comment ça
évolue, mais on devine que c'est ce qui va arriver.
Une liste des
maladies que la CNESST pourra modifier à sa guise. La liste des maladies
présumées professionnelles ne sera plus protégée par la loi. Elle se
retrouve dans un règlement que la CNESST pourra modifier pour ajouter des
conditions ou des seuils d'exposition ou retirer des maladies. Tantôt, je vous
ai parlé, Mme la Présidente, du fait que la
liste des maladies n'avait pas bougé pendant 40 ans. C'était un problème,
c'est vrai. Il y avait déjà des dispositions de la loi qui permettaient
au ministre d'en rajouter, ce qui n'avait jamais été fait. Là, le ministre
décide de ne pas procéder par la loi, de
procéder par le règlement. Je vous ai dit tout ce que j'en pense, des
règlements de la CNESST. Ici, l'enjeu, ce n'est pas tellement de rajouter des nouvelles maladies, parce que ça,
c'est une bonne nouvelle, puis on imagine qu'il n'y en a aucune qui va être retirée. L'enjeu, c'est de
rajouter des nouvelles conditions. Pour pouvoir avoir la présomption de telle
ou telle maladie, la CNESST, maintenant, peut faire des nouvelles conditions à
sa guise, par la voie réglementaire, qui est beaucoup plus simple et rapide que
par la voie d'un projet de loi, comme vous le savez bien. Or, c'est très
inquiétant. Évidemment, ce n'est pas écrit d'avance, mais il y aura des grosses
batailles, ça, au C.A. de la CNESST, entre la partie syndicale et patronale, j'en suis convaincu, pour être certain que des
révisions ne mènent pas à des limitations trop fortes, voire pas de
limitations du tout, à ce qui se contient comme critères d'admissibilité pour
les maladies professionnelles.
Conditions particulières pour faire obstacle à
la reconnaissance des maladies. C'est une suite logique du point précédent. Alors qu'il suffisait d'avoir exercé un
genre de travail — c'étaient
les mots utilisés dans la loi — correspondant à la maladie professionnelle
pour bénéficier de la présomption, il faut désormais rencontrer des conditions
particulières, qui peuvent concerner
des facteurs n'ayant rien à voir avec le travail, comme le comportement de la
victime, par exemple, la cigarette, la durée de l'emploi, etc., et de
telles conditions ne sont prévues, pour le moment, que pour des cancers de pompier ou pour la maladie de Parkinson causée par
les pesticides, mais la CNESST pourra en rajouter pour toutes les autres
maladies. D'ailleurs, je me rappelle, on a eu tout un débat avec le ministre,
parce que, si je me souviens bien, le premier libellé,
c'était «n'avoir consommé aucun
produit du tabac dans les derniers 10 ans». C'est pas mal intense, là,
comme condition limitative, n'avoir
consommé aucun produit du tabac depuis 10 ans. D'une part, c'est intense. D'autre part, qu'est-ce que ça va
provoquer, ça, Mme la Présidente? Ça va provoquer une enquête de l'employeur,
qui va aller fouiner chez vous, dans vos
amis, dans vos photos Facebook, dans votre passé pour peut-être
essayer de dénicher une photo d'un party où est-ce qu'à côté de vous, il y a quelqu'un qui avait une cigarette... ou
avez-vous une tante ou un ancien copain qui a déjà fumé la cigarette? Vous avez été dans une... Vous
avez habité avec ou vous avez été fumeur, fumée indirecte... C'est un bordel. Alors, là-dessus, on a réussi à le faire
quand même baisser un peu, l'intensité de cette référence-là à la cigarette,
mais elle demeure quand même dans la loi, et c'est en soi un net recul.
• (17 h 40) •
La CNESST pourra mandater un nouveau comité, le
comité scientifique, pour examiner toutes les maladies de la liste n'ayant pas de conditions particulières
au-delà du travail exercé afin qu'il vérifie s'il y a lieu de recommander
l'ajout de nouvelles conditions. De plus, l'autorisation des dépenses du comité
doit tenir compte des priorités de la CNESST, à qui le comité doit rendre des comptes. Ça, on a eu des
longs débats là-dessus. C'était la stratégie du ministre pour éviter de faire le lien avec la liste des maladies de l'OIT
qui se renouvelle automatiquement dont je vous ai parlé tantôt. Alors, pour
éviter de faire ça, il a dit : Ah bien!
je vais créer un comité scientifique maison qui va faire soit les mêmes études
que d'autres ou qui va compiler des
études qui existent déjà et qui va nous faire des recommandations pour mettre à
jour les listes de maladies. Mais ce
comité scientifique là doit fonctionner en fonction des priorités de la CNESST.
Alors, l'indépendance de ce comité-là,
il est questionnable. On n'est pas en train de dire qu'il est complètement
inféodé, mais il est questionnable, et on a bien hâte de voir comment ça
va fonctionner dans le réel.
Obstacles à la reconnaissance des cancers
professionnels. Dès le dépôt d'une réclamation pour un cancer professionnel, le médecin traitant sera dessaisi
du dossier de la victime, qui sera soumis à l'évaluation d'un comité d'experts
sur le même modèle que ceux existant pour les maladies pulmonaires. Un comité
des maladies professionnelles oncologiques nouvellement créé par le projet de
loi donnera un avis dont les conclusions seront... lieront, pardon, la CNESST à la place de l'opinion du médecin
traitant. Une nouvelle fois, on vient limiter la capacité d'action du médecin traitant,
et c'est regrettable.
Élimination
de toute rétroactivité du droit à l'IRR avant la réclamation. Pour toute lésion
professionnelle, la date d'incapacité
du travail devient la date du dépôt de la réclamation, et, à moins de déposer
sa réclamation dans les 14 premiers jours de la lésion, les
journées d'IRR seront donc nécessairement perdues, et ce, même si la date de
connaissance de l'existence d'une maladie
professionnelle est postérieure. Tout un jeu de dates ici qu'on vient jouer
dans l'unique but ou, en tout cas, qui aura certainement l'unique conséquence de limiter les gens dans leur
réclamation. On ne vient certainement pas leur faciliter la vie, là, ça,
c'est très clair.
Aucune rétroactivité pour une lésion survenue
plus de trois ans avant la réclamation. Alors, pour une lésion survenue plus de trois ans avant la réclamation,
aucun frais avant la réclamation ne
peuvent être payés rétroactivement, que ce soit la réadaptation, l'assistance médicale ou autre. C'est quelque chose qui était possible avant, si on faisait la démonstration, puis si un juge, devant la démonstration, trouvait
qu'on avait raison, il donnait... Ça ne fonctionnait pas comme ça, là. Il fallait faire toute la démarche juridique, faire
toute la démonstration, mais on pouvait l'obtenir. Là, ce n'est plus possible.
On vient encore une fois télégraphier ce que le juge pourra dire ou ne pas
dire.
Disparition
du droit aux prothèses et orthèses. Le droit aux prothèses et orthèses qui
était garanti par la loi disparaît du droit à l'assistance médicale. Désormais
les victimes n'auront droit qu'à ce qu'accordera un éventuel règlement de la CNESST, que la CNESST pourrait adopter
sur l'équipement adapté, lequel pourrait comprendre la liste... les limites,
pardon, et restrictions que la commission jugera
bon d'imposer. Gros morceau, celle-là aussi, qui fait le lien avec le pouvoir réglementaire que je critiquais tantôt. C'est
quand même un gros morceau, là, le droit
aux prothèses et orthèses. Et ça aussi, c'était interprété au sens large par les tribunaux, par la loi. Et là, vraiment,
là, avec une liste qui sera à déterminer dans un futur règlement, ce qui n'est pas dans la liste n'est pas
remboursable, point à la ligne. Personne ne pourra aller contester ça. Ce n'est pas dans la liste? Vous n'êtes plus dans
le régime. Vous êtes hors du régime. Et c'est complètement regrettable parce que ça ne respecta pas l'objet de la
loi qui est la réparation complète et entière d'une lésion, d'une maladie du
travail.
Élargissement du rôle du BEM, le Bureau
d'évaluation médicale, aux dépens de celui du médecin traitant. Dorénavant, un
médecin du BEM pourra se prononcer sur la consolidation d'une lésion, même si
cette question n'est pas en litige, et il
devra déterminer les séquelles permanentes s'il juge la lésion consolidée, sans
possibilité de laisser le médecin traitant établir l'atteinte permanente et les limitations
fonctionnelles. Il y a beaucoup de termes techniques, ici, Mme la Présidente, mais l'essentiel est, ici, de constater qu'encore une fois la liberté du médecin traitant est mise à mal. Le Bureau
d'évaluation médicale, pour vous donner un exemple clair, là, l'entièreté de la
partie syndicale réclame son abolition pure
et simple parce qu'il ne sert que comme outil pour les patrons, et trop souvent
la CNESST aussi, afin d'aller contester
l'opinion du médecin traitant, aller gruger la volonté du salarié d'obtenir
gain de cause, de faire peser le poids du système de la CNESST et du système judiciaire, du périple que représente
une réclamation. Pour beaucoup de personnes, et tous nos bureaux de
circonscription, je suis certain que c'est votre cas aussi, Mme la Présidente,
reçoivent, de temps à autre, des témoignages
de gens qui ont eu des mésaventures incroyables avec le système de la santé et
sécurité au Québec, avec le système
de la réclamation, en particulier, de la CNESST, des histoires d'horreur de
réclamations, et d'étapes, et de poursuites
qui n'en finissent plus, qui s'étalent sur des années. Alors, là-dessus,
vraiment, encore une fois, qu'on vienne donner un plus grand pouvoir au
BEM aux dépens du médecin traitant, c'est un recul qui est inacceptable.
Des pouvoirs
réglementaires exorbitants sur l'assistance médicale. Non seulement la CNESST
pourra déterminer par règlement les médicaments, traitements et équipements
adaptés auxquels auront droit les victimes, mais elle pourra aussi
déterminer des cas et conditions pour limiter ces droits. Dans bien des cas, ce
n'est plus le médecin traitant qui déterminera
l'assistance médicale que recevra la victime, mais un règlement
de la CNESST. Même argument que sur le règlement
que je vous ai évoqué tantôt.
Une prescription pour les indemnités de décès.
Il ne sera plus possible de réclamer pour un décès causé par le travail sept ans après qu'il se soit produit, même
si l'origine professionnelle du décès n'est connue qu'après cette
période. Actuellement, une telle limite absolue n'existe pas. Encore
une fois, un recul, qui, cette fois-ci, en plus touche très peu de personnes, mais qui représente bien l'idéologie
derrière ce projet de loi là, qui est de limiter le plus de manières
possible les coûts et les dépenses, nonobstant
si les cas étaient pertinents ou pas, nonobstant... C'est comme, en fait, Mme la Présidente, là, si la CNESST et le ministre
avaient regardé toutes les causes qu'ils ont perdues depuis des années au
tribunal puis qu'ils ont dit : Ah! Ha! on va s'arranger pour ne plus
perdre ces causes-là. On va aller changer ça dans la loi, puis on va
écrire d'avance que le tribunal ne pourra
plus aller nous donner tort. C'est vraiment à ça que ça ressemble comme projet de loi, en tout cas, dans le volet
réparation.
Un dernier, Mme la Présidente, le pouvoir d'exclure par règlement certaines surdités professionnelles. Le projet de loi accorde le pouvoir à la CNESST d'exclure, par règlement,
certaines atteintes auditives causées par le bruit, du régime. La commission
pourra ainsi établir par règlement des critères devant être rencontrés pour que la
réclamation soit admissible. Le ministre
a d'ailleurs mandaté le nouveau
comité scientifique pour se pencher sur cette question. Les surdités qui
ne rencontrent pas ces éventuels critères ne seront pas indemnisables, une
première depuis 1979.
Ça me permet
de faire le pont, Mme la Présidente, cet enjeu de la surdité, avec les gains.
Là, je terminerais le volet des
grands reculs, d'ailleurs il me reste peu de temps, pour essayer de conclure
sur les gains, parce que du travail, j'en ai fait. On a évoqué un total de, je pense,
180 quelques heures de commission. Je pense, sans fausse modestie, avoir
occupé la majorité de ces heures de commission avec le ministre. J'avais
beaucoup de choses à dire, j'avais beaucoup de matière. Ça a été un exercice intéressant, mais heureusement ça a mené à des
résultats. Le plus grand, celui dont je suis le plus fier, c'est
celle-là, c'est la question de la santé auditive. Le ministre faisait quelque
chose de complètement inacceptable. Il proposait de disqualifier une personne
qui avait une perte auditive d'une seule oreille ou une perte auditive qui
n'était pas la même d'une oreille à l'autre.
Il disait : À partir de 0,5 %... 0,5 décibel de différence de perte
auditive, vous êtes en dehors du
régime, vous êtes exclu. Ça n'avait complètement aucune base scientifique,
c'était hallucinant. C'était un recul sans
nom. C'était évidemment chiffré, là, c'était plusieurs millions, dans l'étude
d'impact, qu'on allait récupérer avec ça. Ça allait vraiment mettre dans
une situation de pauvreté et de détresse des centaines de travailleurs et de
travailleuses au Québec. Et je suis particulièrement fier de l'avoir fait
reculer sur ce point-là. La solution élégante, là, c'est d'envoyer ça au comité
scientifique, qui verra s'ils peuvent faire de quoi, mais, dans les faits,
c'est un recul sur un recul. Si vous avez
manqué le début de mon intervention, hier, je me demandais si un recul sur un
recul constitue un gain. J'en encore de débats à avoir sur cette
question existentielle. Mais certainement ce recul-là, j'en suis
particulièrement fier.
Il n'est pas
seul, par contre, parce qu'il y avait un règlement qui dormait sur le bureau du
ministre depuis des mois, de manière tout aussi inadmissible à mon avis,
pour faire en sorte qu'un des vieux retards du Québec par rapport à d'autres
législatures nord-américaines quant au
niveau de décibels, en matière de prévention, qu'on autorise... À peu près
partout en Amérique du Nord, c'est 85 décibels, ici c'est 90. Ça
faisait des années que tout le monde réclamait de le baisser à 85, ça dormait sur le bureau du ministre. Ça dormait,
ça dormait, je ne sais pas s'il attendait la fin du projet de loi pour l'appliquer. Toujours est-il que non seulement on l'a fait
reculer sur la surdité, ça a fait hérisser le poil de beaucoup d'associations patronales. Je ne pas surpris d'apprendre que
c'est une des raisons pour laquelle, par exemple, certaines associations ont
décidé de refuser d'appuyer le projet de loi finalement. Mais en plus on a forcé le ministre à adopter plus tôt que
prévu cette nouvelle norme. Il l'a
fait en Conseil des ministres, je pense, en juin et maintenant la nouvelle
norme est à 85 dB au Québec, et j'en suis particulièrement fier.
Autre
gain majeur, l'instauration d'un régime intérimaire. Les heures de libération,
le nombre de fréquences de réunions,
combien de personnes sont sur votre comité de santé et sécurité, c'est vraiment
la moelle osseuse de la prévention, Mme
la Présidente. C'est beau d'avoir des
beaux règlements, mais, si personne n'est là sur le terrain pour
les appliquer, ils ne serviront à rien, ils ne seront pas effectifs. Or,
les fameux niveaux de risque qu'on nous proposait au début étaient complètement
ridicules. Ça a été démoli. Le ministre, après ça, voulait tout envoyer ça à la
CNESST et judiciariser complètement la prévention. C'était tout aussi
inadmissible.
Son troisième
scénario, que je trouve un peu ridicule également, mais bon, c'est le
dernier qu'on a adopté, c'est celui de remettre toute la patate chaude
dans les mains des patrons et des syndicats. Le ministre a dit : Vous n'êtes pas capables de vous entendre? Je vous renvoie ça.
Puis adoptez un nouveau règlement d'ici trois ans. Bon, bien, là, on allait se retrouver bredouille pendant un autre trois
ans, en plus d'une année supplémentaire s'ils ne sont pas capables de le faire
puis que ça revient dans les mains du ministre.
Alors, on allait se retrouver avec un autre quatre ans sans nouvelles normes.
C'était inadmissible. Alors, moi, j'ai vraiment
poussé en coulisse. Et ça a fonctionné. À la fin des études détaillées, le ministre l'a accepté, un régime intérimaire, loin d'être suffisant à mon avis,
mais quand même alentour de 25 % des seuils qui sont actuellement appliqués dans les secteurs
prioritaires. Et ça va servir de bonne base de négociation pour la partie
syndicale, qui va avoir la lourde tâche, la tâche sinistre de négocier
avec les associations patronales dans le C.A. pour ce fameux règlement qui doit
être adopté d'ici trois ans.
• (17 h 50) •
Autre gain fondamental, Mme la Présidente, c'est
le maintien intégral des fonctions d'inspection et d'enquête du représentant en santé et sécurité. Le
représentant, c'est vraiment les yeux et les oreilles de la prévention pour les
salariés. C'est un salarié. Dans un environnement de travail, il avait
deux pouvoirs fondamentaux, c'était celui de pouvoir faire enquête et de pouvoir faire une inspection. Le
ministre voulait transférer ces pouvoirs-là au comité de santé et sécurité. Le
comité, c'est paritaire, moitié patron, moitié syndicat. En d'autres mots, pour
faire une inspection ou une enquête, le représentant allait devoir attendre le
O.K., l'approbation du patron. C'est complètement inadmissible. Ça, ça a été
une grosse bataille. Je l'ai gagnée. J'en
suis très content. On l'a fait reculer. Alors, c'est le maintien des pouvoirs
d'inspection et d'enquête pour le RSST.
Finalement,
la question du multiétablissement. Toute une marotte et je vais devoir conclure là-dessus parce qu'il
reste peu de temps. Et j'aurais beaucoup
d'autres pages, j'avais trois autres pages de gains, Mme la Présidente, et
on mettra ça sur les réseaux sociaux, j'imagine, mais le
multiétablissement, c'est important.
Il ne s'est
rien passé en prévention pendant des années pour 85 % des salariés, et il
ne s'est particulièrement rien passé
pour deux grands secteurs de l'État-employeur, la santé et l'éducation. Et
là, tout d'un coup, maintenant que tout le monde est assujetti, l'État employeur panique : Ah mon Dieu! Il va
falloir que je fasse un comité de santé et sécurité, un plan d'intervention, un programme de santé, ah! Et
là il se dit : Je ne peux pas faire ça dans tous les établissements que je
représente. Alors, il y avait un fort
courant à l'intérieur de l'État, qui s'est certainement exprimé au Conseil des ministres, de dire : Bien là, on va tout fusionner ça,
on va faire un seul gros comité pour le même employeur, pour un CIUSSS complet,
pour un centre de services scolaire complet,
nonobstant la grosseur, la quantité, la diversité des emplois. Ça, c'était la
mouture originale.
C'est encore ça, le concept du
multiétablissement. Pourtant, le multiétablissement, ça devrait être paritaire,
il devrait y avoir les deux parties qui sont
d'accord, mais ça, le ministre n'a pas voulu entendre, pourtant, le consensus
du CCTM. Mais on a réussi à le faire
reculer, on a réussi à préciser que c'était en fonction de la nature de
l'emploi, que c'était en fonction des
tâches, qu'il y avait toutes sortes de critères qui pourraient être pris en
compte pour l'appliquer, notamment la question de la distance. Et j'ai,
entre autres, en tête la circonscription de mon amie la députée de
Rouyn-Noranda—Témiscamingue, qui a des établissements d'une
distance équivalente entre Montréal et Québec, alors vous vous imaginez que la distance doit être un critère aussi. Et on
a surtout permis à une partie syndicale de contester ce multiétablissement-là
et de tenter de le défaire à travers la CNESST, en fonction des différents
critères qu'on a mis en place.
Il y aurait
vraiment beaucoup, beaucoup d'autres choses à dire, Mme la Présidente, je
savais qu'une heure ne serait pas suffisant pour compléter tout ce qu'on
a fait dans cette commission-là, mais je suis particulièrement fier de mon travail. Il y a un parti à l'Assemblée nationale
qui défend les travailleurs et travailleuses, je proviens de ce milieu-là,
c'était pour moi un grand moment, une
grande fierté, de faire ce travail-là. Je suis fier du travail accompli. J'ai
hâte de voir ce rapport d'application dans cinq ans. J'espère être
encore ici, Mme la Présidente, pour en lire tous les menus détails et en faire des propositions de modification, et, qui
sait, peut-être occuper la place et le siège de mon collègue le député de
Trois-Rivières et ministre du Travail, et
faire une véritable réforme de la santé et de la sécurité au travail, dans
l'intérêt de tous les travailleurs et travailleuses du Québec. Merci,
Mme la Présidente.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le
député d'Hochelaga-Maisonneuve. Et maintenant je cède la parole à
M. le député de Jonquière.
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault :
Oui. Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir également, à mon tour,
de reprendre la parole dans ma cabine téléphonique sur le projet de loi
n° 59 pour cette adoption finale, la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail.
Alors, je commence en vous disant tout de suite
que nous voterons contre, mais ce n'est pas une grosse nouvelle parce que je l'ai déjà dit et je l'ai déjà
répété. Mais, vous savez, moi, je pense que la répétition a une valeur
pédagogique, alors je répète que nous
allons voter contre. J'ai eu l'occasion déjà de le dire à plusieurs
reprises, notamment lors des travaux en commission, les remarques finales de l'étude
détaillée, également dans plusieurs manifestations qui ont eu lieu, par exemple
avec des travailleurs et des travailleuses,
je l'ai dit à des groupes dans ma circonscription, parce qu'on voyait bien, au
fur et à mesure que les travaux
évoluaient, que le ministre et le gouvernement, sur un certain nombre d'enjeux, n'allaient pas
bouger et ne voulaient pas bouger.
Est-ce que le
ministre lui-même aurait été prêt à faire parfois quelques concessions
supplémentaires? Peut-être, mais, vous savez, quand on fait un projet de loi et qu'on est ministre, on a une certaine marge de manoeuvre mais, sur
des enjeux plus fondamentaux, si on veut modifier le projet de loi qui a
été présenté, qui a été convenu par le Conseil des ministres, bien, il faut se faire valider par le Conseil des ministres
sur un certain nombre de principes plus fondamentaux, et je pense que, là-dessus, le gouvernement n'a pas donné son aval, que ce soit, par exemple, sur le
multiétablissement, sur l'analyse
différenciée des sexes, sur la question des lésions d'ordre psychique par
exemple. Je pense que le gouvernement
ne donnait pas la marge de manoeuvre
nécessaire au ministre pour arriver avec des propositions dans ce sens, de
modifications profondes sur le projet de loi quand nous étions lors de l'étude détaillée. Donc, dans ce contexte-là,
évidemment, on voyait bien, là, que
le ministre n'allait pas bouger, donc j'ai déjà annoncé que nous allions
voter contre, et je le répète aujourd'hui, je le confirme aujourd'hui.
Donc, c'est
un projet de loi, vous le savez, tout à fait substantiel, un projet de loi qui était attendu également depuis plusieurs années. Le premier
régime de santé, sécurité au travail est un héritage du gouvernement du Parti
québécois de 1979, c'était un gain tout à
fait majeur pour les travailleuses et les travailleurs, je l'ai mentionné
également hier lors de la prise en considération du rapport de la commission.
Moi, je situe cette réforme de la santé et sécurité au travail, qui était
déjà à l'époque imparfaite mais, quand même,
qui constituait un gain important pour l'époque, je la situe dans la longue
lignée des avancées du Québec moderne issue de la Révolution tranquille.
Et, vous savez, moi, je suis historien de
formation et, souvent, je... bien, lors de mes études, j'ai eu à travailler beaucoup
dans les journaux, dans les archives, dans les archives des journaux, et je le
fais encore pour m'amuser à l'occasion, présentement. Et c'est fou de
voir comment, au XIXe siècle, au XXe siècle, à l'époque industrielle,
à l'époque du développement industriel des régions et du Québec, il y
avait des accidents de travail absolument atroces qui n'étaient pas
indemnisés. Et là il y avait des articles dans les journaux, par exemple, je
vois encore des articles du Progrès du Saguenay, début
XXe siècle, fin XIXe, début XXe siècle, puis là on raconte des
histoires abracadabrantes de travailleurs qui sont blessés, puis on fini l'article en disant : Bien, on souhaite que
le travailleur puisse retourner au travail rapidement. Bien oui, il a
perdu un bras dans une machine. Il s'est fait estropier de façon importante
dans une scierie. C'est fou.
• (18 heures) •
Moi, quand
j'étais étudiant au Saguenay, j'étais guide, l'été, pour le site historique de
La Pulperie de Chicoutimi. Je ne sais
pas si vous avez déjà visité ça, Mme la Présidente, mais, si vous ne l'avez pas
fait, il faut absolument le mettre dans
votre liste pour l'été prochain. Donc, La Pulperie de Chicoutimi, qui est une...
on l'appelle une pulperie parce qu'elle produisait de la pulpe, qui était la pâte à papier, puis quand je
faisais la visite, c'était toute la chaîne de production de la pulperie. Puis, à un moment donné, il y avait une
étape, évidemment, qui était la scierie, puis, après la scierie, les billots
étaient amenés par un genre de convoyeur... bien, en fait, une glissoire à bois
avec de l'eau, puis là ça arrivait dans ce qu'on
appelait le «slasher». Le «slasher», c'était une invention pour écorcer les
billes de bois, un genre d'écorceur finalement. Puis le surnom que les travailleurs avaient donné à cette machine,
c'était la machine qui coupe des pouces ou la coupe-pouces, quelque chose du
genre, parce qu'il fallait que les travailleurs fassent littéralement pivoter
les billes de bois sur une mégalame qui tournait à une vitesse folle
devant eux pour écorcer les billes de bois. Là, qu'est-ce que vous pensez qui
arrivait? Les pouces partaient avec
l'écorce. Bien, c'étaient des accidents de travail, mais après, il arrivait
quoi? Bien, le travailleur, s'il
perdait ses deux pouces, il s'en allait chez eux, puis la compagnie continuait
de produire. Alors, c'était ça à l'époque, alors imaginez. Puis mon grand-père a travaillé là, dans cette usine-là.
Ça fait qu'on ne remonte pas à Mathusalem, là, je veux dire, c'est
quelques générations à peine.
Donc, c'est quand même toute une évolution de
sorte qu'avec l'arrivée du Québec moderne dans les années 60, bien, on a pris conscience de l'importance de
l'État pour équilibrer les choses puis intervenir pour protéger les plus
vulnérables. Ça a été vrai pour l'éducation, ça a été vrai pour le
régime d'assurance maladie, ça a été vrai pour la protection du consommateur, ça a été vrai aussi pour la
protection des travailleurs, pour leur santé, sécurité au travail. Donc, il ne
faut pas oublier à quel point, ce qu'on est en train de faire là, là, comme
législateur, comme parlementaire, c'est de jouer dans un héritage fondamental que construit le Québec
moderne qui est la protection de la santé, de la sécurité des travailleurs.
Alors, moi,
j'arrive comme parlementaire humblement pour étudier ce projet de loi, mais
avec toute cette charge historique pour nous assurer qu'on ne commettra pas
d'erreur, pour nous assurer qu'on ne reculera pas. On ne reculera pas à l'époque des «slashers» de la pulperie, je
suis bien conscient de ça, on n'est pas là, mais il ne faut quand même pas
reculer à quelques années ou quelques décennies derrière.
Et, quand je regarde l'économie générale du
projet de loi, malgré quelques gains, malgré, puis je vais en parler tout à l'heure, malgré quelques avancées, il reste
que c'est insuffisant par rapport à là où on est présentement, en 2021, au
Québec, et par rapport également à la
réalité du monde du travail aujourd'hui, et par rapport aussi à l'occasion
unique que nous avons de réformer cette loi... de réformer ces lois, en
fait, et de réformer ce régime de santé et sécurité au travail et d'indemnisation qui va avec. Ça n'a pas été
fait depuis 1979. Ça veut dire que ça fait une quarantaine d'années. Il y avait
eu une première réforme en 1985, mais,
disons, on n'y avait pas touché substantiellement depuis 1985, certainement.
Donc, ça fait pas loin de 40 ans qu'on n'a pas touché
substantiellement à ces lois-là.
Puis je le
disais hier, lors de l'étude... pas de l'étude, mais de l'adoption du rapport
de la commission, de la prise en considération, moi, c'est arrivé
rarement, dans des projets de loi qu'on a étudiés ici, que j'ai vu des articles
qu'on modifiait puis qui n'avaient pas été
modifiés depuis la toute première loi, en 1979, des articles intégraux, je ne
sais pas si ça se dit, mais écrits
encore intégralement selon la version de 1979. Ça veut dire qu'il y avait tout
un dépoussiérage à faire.
Puis
je reconnais quand même que le ministre a déposé une réforme ambitieuse, de
nombreuses pages qui retournaient quand
même beaucoup de pierres, la plupart des... voire toutes les pierres. Puis je
sais aussi comment ça marche dans les ministères.
Je veux dire, ce n'est pas le ministre tout seul, en arrivant, là, en 2018,
comme ministre, qui a fait ça. Je veux dire,
c'est le résultat de plusieurs années, là, je veux dire, de travail à
l'intérieur du ministère ou de la part de la fonction publique, et c'est lui qui a eu l'occasion de le déposer.
Mais, si c'est lui qui a eu l'occasion de le déposer, ça veut dire que c'est
lui aussi qui aurait pu lui donner
une impulsion différente, sur un certain nombre d'enjeux puis de sujets, par
rapport à ce qui a été fait à
l'intérieur de sa machine administrative, la machine de son ministère, au
moment où il l'a déposé. Donc, c'est ça, le contexte.
Et je vous
rappelle... En tout cas, les derniers chiffres... je ne sais pas si vous avez
les mêmes que moi, Mme la Présidente,
là, puis je ne les ai pas notés lorsque la présidente de commission nous l'a
dit, mais en fait, ce que j'ai noté, là, c'est, de mémoire, vous me corrigerez si je me trompe, mais c'est
minimalement 37 séances en commission parlementaire,
122 heures de débats en étude détaillée. Alors, c'est vraiment substantiel
comme travail.
Alors, vous
savez, les gens qui disent : Ah! les parlementaires n'ont pas assez
travaillé, les parlementaires auraient pu travailler davantage... Écoutez, on a
passé des heures, et des heures, et des heures sur ce projet de loi. Et s'il y
a des choses insatisfaisantes ou s'il
y a des réformes, des amendements ou des orientations du projet de loi
insatisfaisants, ce n'est pas parce
qu'on n'a pas essayé, ce n'est pas parce qu'on n'a pas voulu. C'est parce qu'il
a manqué de volonté politique du côté
du gouvernement pour faire une vraie réforme de la santé et sécurité au travail
digne de ce nom, une réforme qui correspond
réellement aux besoins d'aujourd'hui. C'était ça, l'objectif, puis je reconnais
qu'il y a des gains qui ont été faits, mais malheureusement, ça ne va
pas à la totalité de ce que nous aurions pu faire aujourd'hui en matière de
santé et sécurité au travail.
Tout à l'heure, je vous disais qu'en 1979, lors
de l'adoption du premier projet de loi qui a implanté le régime, il y avait
des principes, il y avait des idées derrière ce régime, il y avait
des postulats, il y avait une idéologie pour protéger la santé
et la sécurité des travailleurs. Il y en a plusieurs, mais je pourrais les
résumer, grosso modo, en trois éléments.
Évidemment, la prévention. La meilleure façon
d'éviter des accidents puis des lésions professionnelles, c'est de faire de la prévention. C'est d'être capable de
voir que, par exemple, ici, au salon bleu, il y a
toutes sortes de fils qui traînent partout à terre, là, hein, si on
prend cet exemple-là. Bien, si on agissait vraiment avec de la prévention,
bien, on dirait : Il y a quelqu'un qui va s'enfarger dans les fils, on va
les enlever. Bon, je sais qu'il y a des projets, Mme la Présidente, de rénovation du
salon bleu, puis ça va faire du bien. C'est un bel exemple, là. Tu sais,
c'est de la prévention : Ah! il
y a des fils qui traînent, c'est dangereux d'avoir des accidents de travail,
donc on va enlever les fils, puis les députés, puis les pages, puis le personnel vont pouvoir se promener sans le risque
de s'enfarger dans un fil. Un exemple bête que je vous donne, mais c'est
la prévention.
Quand on est
dans une usine, mon «slasher» qui tourne comme ça, super rapidement,
puis je fais pivoter des billots pour
enlever les écorces, bien, la prévention, c'est d'avoir des gants, par exemple, en métal pour éviter de couper les doigts, c'est de voir une
approche différente, moins d'humidité sur la plateforme, etc. Bon, alors, c'est
ça, c'est d'être capable d'anticiper les
risques, d'anticiper les problèmes du poste de travail et du milieu de travail
puis de travailler en amont... agir, plutôt,
en amont pour éviter les accidents. Alors, ça, c'est le premier principe, la
prévention. Comment je pourrais dire? J'allais
dire : Le meilleur accident, c'est celui qui n'arrive pas. Ça ne se
dit pas. Mais la meilleure chose, c'est qu'il n'y en ait pas,
d'accident. Puis, pour s'assurer qu'il n'y ait pas d'accident ou de problème de
santé au travail, bien, c'est justement d'agir en matière de prévention.
Puis le
deuxième postulat ou le deuxième principe, qui découle de celui-ci et qui est à
la base ou dans la philosophie de la
loi à l'origine, c'est de cibler la source des dangers. Puis ça, le mieux placé
ou la mieux placée pour cibler la source des dangers, pour pouvoir agir en prévention, bien, c'est la personne
elle-même qui est au poste de travail, c'est le travailleur ou la travailleuse. De n'est pas le patron qui est
dans son bureau, qui parfois est dans un bureau, en plus, éloigné du milieu de
travail. C'est de reconnaître que le spécialiste ou la spécialiste de son poste
de travail, c'est la personne qui est
au poste de travail.
Alors, moi,
en étant député ici, par exemple, je constate que j'ai deux fenêtres de chaque
côté de moi, je n'ai pas beaucoup d'espace derrière parce que la chaise
est bloquée. Donc, si j'ai à sortir pour urgence, je ne sais pas comment je vais faire parce que j'ai un plexiglas à côté
de moi, ce serait compliqué. C'est moi le spécialiste de mon poste ici, parce
que je l'utilise. Bien, c'est la même chose
pour le travailleur ou la travailleuse qui est dans son usine, qui est dans son
poste de travail, qui passe sa
journée assis avec un ordinateur, c'est le spécialiste. Donc, c'est le deuxième
principe qui découle de la
prévention, c'est de s'assurer de cibler la source des dangers à partir de la
réalité intime, je dirais, presque, du travailleur ou de la
travailleuse.
• (18 h 10) •
Et de ça
découle le troisième principe, qui va invariablement avec les deux premiers,
c'est celui de la parité. Donc, la parité, vu qu'il faut prévenir, vu
que le mieux placé pour prévenir et identifier les risques, c'est le
travailleur ou la travailleuse qui connaît son poste, bien, quand on établit un
plan de prévention dans une entreprise, quand on établit un système de prévention dans un milieu de
travail, bien, il faut que le travailleur soit partie prenante. Alors, ça,
c'est la logique, là, c'est comme une pyramide inversée ou un entonnoir,
prenez-le comme vous voulez, pour dire : Prévention, meilleure analyse du risque à partir du lieu de
travail et parité, donc le travailleur et la travailleuse, d'un côté,
paritairement, avec les employeurs, ils vont établir la meilleure façon
de procéder.
D'ailleurs,
vu que moi, j'ai un bagage d'historien, c'est un réflexe, je n'ai pas le choix
de retourner toujours dans la source même du projet. Et je suis
retourné au livre blanc, le livre blanc qui a été déposé par le ministre à
l'époque, Mme la Présidente, Pierre Marois, qui a déposé le livre blanc sur une
politique québécoise de la santé et la sécurité des travailleurs, 1978, qui a conduit au projet de loi de 1979. Alors,
j'ai la page couverture ici, on... demain, peut-être si je me prends de bonne heure,
là, avec la bibliothèque, je pourrai sortir le livre blanc en lui-même. Je
pense, ce serait intéressant qu'on le voie. Et le ministre Pierre Marois le
disait, dans ce livre blanc en 1978, que l'un des fondements de la Loi
sur la santé et sécurité au travail se
basait, écoutez bien, j'ouvre les guillemets, sur «une participation active et
volontaire du milieu de
travail lui-même», et c'est basé aussi sur un État qui prend ses
responsabilités en mettant à la disposition des milieux de travail des outils et des moyens «leur permettant de trouver
eux-mêmes les solutions», à leurs problèmes. Donc, je répète, une participation
active et volontaire du milieu de travail lui-même et mettre à la disposition
des milieux de travail des outils et
des moyens leur permettant de trouver eux-mêmes des solutions à leur travail...
à leurs problèmes. C'est pour ça que, je
vous dis, c'est de la parité. Si on veut que le milieu de travail identifie
lui-même ses risques reliés à la santé, ça veut dire qu'il faut qu'il participe, qu'il réfléchisse. Et
c'est là qu'il y a un os par rapport à la réforme actuelle, et, pour moi, c'est
la pierre d'angle, c'est le fondement qui base la réflexion ou la décision du
vote que nous devons prendre.
Je
viens de vous le dire, en 1978, c'était crucial, c'était le fondement, la
parité. Mais dans sa réforme, le ministre, avec le projet de loi n° 59, vient briser un principe fondamental,
celui de la parité, entre autres sur la question du multiétablissement, donc des plans et des comités
de santé et sécurité au travail qui peuvent couvrir plusieurs établissements
d'un même employeur. Et ça, j'aurai
l'occasion d'y revenir dans mon allocution, mais c'est tellement important. Puis,
vu que le principe de parité est au coeur du régime, si on vient permettre un
comité de santé et sécurité multiétablissement, il ne faut pas que ce soit entre les mains d'une seule partie, parce
que, là, on vient briser le principe de la parité. Les mieux placés pour déterminer le risque relié à une
fonction ou à un poste de travail, c'est celui ou celle qui est dans cette
fonction-là. Alors, si on vient dire, bien, ce
sera juste entre les mains de l'employeur de décider s'il va y avoir un comité
de santé et sécurité multiétablissement,
bien, on vient briser ce principe de parité qui m'apparaît absolument
fondamental.
Donc, ça, c'est le
contexte de création du régime au Québec, en 1979, héritage de la période de la
Révolution tranquille et qui fait en sorte
que les travailleurs doivent être impliqués au premier chef, en premier lieu
des mesures qui sont mises en place pour la santé et sécurité dans leurs
milieux de travail.
Donc, vous voyez où
je m'en vais, Mme la Présidente, c'est ma logique. Et pour moi, cet
élément-là... puis il va y avoir d'autres
choses, là, mais pour moi, cet élément-là est tellement fondamental que, vu que
le gouvernement a refusé de changer
ça, bien, on ne peut pas appuyer le projet de loi. On ne peut pas l'appuyer,
mais on a essayé jusqu'à hier, là, parce
que vous savez que... je ne sais plus c'est quel article de nos règlements, on
peut, à la prise en considération, proposer des amendements. Vous êtes bien au courant de ça. Donc, on l'a essayé.
Tu sais, moi, je suis un optimiste, un gars s'essaie. Alors, j'ai essayé encore une fois de proposer que
le multiétablissement soit décidé de façon paritaire. Malheureusement, ça
a été refusé, là, en amendement. Donc, c'est la réalité. Donc, voilà pour ce
qui est du contexte, Mme la Présidente.
Je
vais vous parler des manquements qui nous apparaissent fondamentaux, qui nous
apparaissent tellement importants qu'on
ne peut pas appuyer le projet de loi.
Je veux continuer encore, quand même, un peu sur le multiétablissement, qui est comme
le premier. Je vous en ai parlé amplement, mais je pense que c'est important
de vous donner un petit peu plus
de contexte sur l'enjeu du
multiétablissement. Donc, comme je vous le disais, le projet de loi, sur la question du multiétablissement, vient autoriser la mise sur pied de programmes
de prévention multiétablissement sans l'accord des syndicats ou des employés.
Donc, on vient briser l'idée ou le principe du paritarisme.
Cet
enjeu du multiétablissement fait en sorte qu'on éloigne l'analyse du risque à
la source. Si, par exemple, ce n'est qu'un employeur qui décide si le même
comité de santé et sécurité va couvrir
plusieurs établissements, bien... et qu'il décide lui-même, bien, ça veut dire qu'il ne tiendra pas
compte de l'opinion d'un travailleur ou d'une travailleuse qui connaît bien
son milieu de travail. L'exemple classique,
et celui que je connais le mieux, c'est celui de l'industrie de l'aluminium,
parce que c'est dans ma région, parce
que c'est dans ma circonscription. Il n'y a personne, je pense, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, qui n'a pas au moins quelqu'un dans son entourage qui travaille en lien
avec l'industrie de l'aluminium, tellement que c'est important.
Vous savez que la
bauxite arrive des fournisseurs, du côté de l'Afrique ou du côté des Antilles, par
bateau au port de Port-Alfred, et là, bien,
il y a des débardeurs, il y a des gens qui travaillent pour décharger les
bateaux de la bauxite, empiler ça.
Après ça, on met ça dans des trains. Ça, c'est l'autre étape, un chemin de fer
Roberval-Saguenay et qui amène la
bauxite jusqu'aux installations de l'usine d'alumine, qui est dans ma circonscription, ce qu'on appelle l'usine
Vaudreuil, qui n'est pas à Vaudreuil.
Il y a bien des gens qui disent : L'usine Vaudreuil, ça doit être à
Vaudreuil. Non, l'usine Vaudreuil est à Jonquière et produit de
l'alumine à partir de la bauxite, et ça, c'est une quatrième dimension.
Si
un jour vous avez l'occasion de visiter une usine d'alumine, là, allez-y, Mme
la Présidente. Moi, quand je suis rentré
là, je ne pensais jamais de voir ça, c'est comme dans un film de
science-fiction. Il n'y a que des tuyaux, des petites allées étroites, de la poussière, énormément de
bruit. C'est ce qu'on appelle aussi les usines d'hydrate. Alors, c'est vraiment
particulier, il n'y a pas un milieu comme ça. Il y a une usine d'alumine au
Québec, donc c'est forcément le seul milieu qui est comme ça au Québec.
Mais
là on est toujours dans la production d'aluminium. Gardez-vous ça en tête,
parce que c'est de ça que je vais parler.
Alors là, après l'alumine, bien là, on s'en va dans les salles de cuve, avec
les anodes, pour pouvoir produire l'aluminium à une température extrêmement élevée, puis ensuite l'aluminium, bien,
est expédié en lingots par camion, par train, sur les marchés. Puis annexe à ça, bien, évidemment, on a
un centre de recherche et de développement de l'industrie de l'aluminium
pour savoir comment on peut améliorer la production d'aluminium, avoir une
pureté plus importante, par exemple, de l'alumine.
C'est une des forces, d'ailleurs, de l'aluminium au Québec puis du Saguenay—Lac-Saint-Jean, c'est que la pureté de
l'alumine est reconnue mondialement. C'est une alumine très, très pure qui
vient rentrer dans la fabrication de l'aluminium.
Donc, le centre de recherche est là pour améliorer les procédés, puis
évidemment on a toute la chaîne administrative, des cadres, etc., de la
compagnie.
• (18 h 20) •
Mais tout ça, ce que je viens de vous décrire,
bien, on produit un même produit qui s'appelle l'aluminium, les lingots
d'aluminium. Mais là, Mme la Présidente, entendez-moi bien, là, entre le
travailleur ou la travailleuse au port, puis l'autre qui
travaille dans le centre de recherche, et l'autre qui travaille dans une salle
de cuve, et l'autre qui travaille dans ma quatrième dimension, là, l'usine
d'alumine, l'usine Vaudreuil, c'est des risques tellement différents, tellement
différents. Et le critère que le ministre a mis dans loi, c'est : il
pourrait y avoir du multiétablissement quand ce sont des activités de même nature.
Alors,
quel est le sens de la même nature? Est-ce
que la même nature, c'est la
production d'aluminium? Bon, déjà
là, cela voudrait dire qu'on aurait un
comité de santé et sécurité au travail qui couvrirait l'ensemble de l'oeuvre.
Mais vous voyez tout de suite les différences entre les différentes fonctions. Est-ce qu'on peut segmenter? La même nature, c'est
le transport, bon, mais le transport,
est-ce que c'est le port avec les bateaux et le chemin de fer? C'est du
transport. Est-ce que c'est de la
recherche? Est-ce que c'est du développement, aussi, qui sont de la même
nature? Alors, vous comprenez, puis là, en plus, je viens juste de vous
parler de la chaîne pour l'usine d'Arvida puis le complexe Jonquière, mais il y
a
aussi, du même employeur, une usine à Alma, il y en a une à Laterrière
puis il y en a une à Grande-Baie, mais qui ont des
technologies différentes.
Alors,
c'est extrêmement complexe. C'est extrêmement complexe, puis je
comprends le ministre qui dit : Ah! non, non, ça ne couvrira pas
les secteurs de l'aluminium, soyez assurés de ça. Mais moi, je veux que ça
apparaisse dans la loi, et ça n'apparaît
pas dans la loi. On a essayé, nous, au moins d'amener la dimension que, pour
décider du multiétablissement... et
là on parle, disons, l'exemple
que je vous donne, c'est Rio Tinto qui a plusieurs établissements, des installations portuaires jusqu'à l'expédition en
passant par l'alumine et les salles de cuves. Bien, ça, c'est plusieurs établissements
d'un même employeur. On
a essayé d'amener cette dimension de tenir compte et de décider du
multiétablissement avec les travailleurs, avec
l'accord des travailleurs et des travailleuses.
Ça nous a été refusé. Donc là, c'est un accroc fondamental à ce que je vous disais tout à l'heure, qui est le principe de
la parité à l'intérieur même du régime plus large de la santé et sécurité au
travail.
Donc, moi, comme vous
tous ici, Mme la Présidente, avec les collègues, je suis d'abord le
représentant des électeurs puis des
électrices de Jonquière, dont plusieurs travaillent dans des usines ou dans des
installations, entre autres, de Rio Tinto en matière d'aluminium, qui
sont extrêmement préoccupés par ça. Alors, moi, je peux bien, là, travailler des heures... on a parlé de 122 heures en
commission parlementaire puis ici. Puis j'essaie d'amener des amendements, mais,
quand je retourne chez moi... puis j'en ai
encore eu aujourd'hui, là, des citoyens de ma circonscription qui m'ont écrit. Quand je
retourne chez moi, puis que je rencontre un travailleur de chez Rio Tinto
à l'épicerie, puis qu'il est profondément
inquiet parce qu'il n'a pas eu les
garanties ou les assurances du ministre que le multiétablissement ne
s'appliquera pas pour l'ensemble de la filière de l'aluminium, bien, je ne peux
pas retourner ici puis dire : Non, non, il n'y en aura pas de problème.
Il y en a un problème puis, en plus, il y a
un problème parce qu'on ne tiendra pas compte de celui ou de celle qui le
connaît, le risque, parce qu'il
travaille dans la quatrième dimension de l'usine d'hydrate pour produire
l'alumine. Ça fait qu'il sait, il est où, le risque.
Et moi, Mme la
Présidente, je comprends, là, qu'il peut y avoir différentes conditions ou
différents milieux où il pourrait
s'appliquer, le multiétablissement, que ce soit dans le commerce, par exemple,
même dans le manufacturier, mais avec des tâches moins complexes. Je le
comprends. L'idée, ce n'est pas d'être contre le multiétablissement de facto. L'idée, c'est d'être contre le fait que les
travailleurs puis les travailleuses, qui sont les mieux placés pour connaître
le risque, ne peuvent pas se prononcer avec l'employeur pour décider si
ça va être multiétablissement ou pas.
C'est là-dessus que
je fais la bataille, puis c'est là-dessus que j'ai essayé d'amender le projet
de loi hier, puis c'est là-dessus que j'ai
essayé de l'amender aussi durant l'étude détaillée, puis c'est là-dessus,
malheureusement, que le ministre a refusé de faire des changements. Puis
je lui avais dit, à micro fermé comme à micro ouvert, je n'ai qu'une seule parole, je lui ai dit : Nous, c'est un
élément très, très important. Puis il y en a d'autres, là, des éléments, je
vais vous en parler, mais il n'a pas voulu changer son fusil d'épaule
là-dessus, ce qui est regrettable, Mme la Présidente.
D'ailleurs,
l'amendement, je l'ai ici, là. C'est en... Ah! je l'ai. Tantôt, je vous disais,
je ne me souvenais plus c'était quel article
du règlement de l'Assemblée. C'est l'article 252 du règlement de
l'Assemblée nationale qui nous permet d'amener des amendements lors de la prise
en considération. Donc, nous, on s'est prévalu de cet article-là pour modifier
l'article 58.1 de la Loi sur la santé
et sécurité au travail, pour insérer les mots «avec l'accord des travailleurs»,
donc que l'employeur peut décréter un multiétablissement, si on veut,
puis je n'ai pas le texte précis de la loi, là, mais l'idée de notre amendement, c'était d'ajouter les mots «avec
l'accord des travailleurs». Puis, hier encore, le gouvernement l'a refusé.
Alors, ce n'est pas
qu'on n'aura pas essayé. On y croit, on y croyait, on va y croire encore que ça
prend l'accord des travailleurs dans un
contexte de multiétablissement. Je suis sûr que vous avez plein, plein
d'exemples, vous, Mme la Présidente,
et tous les collègues ici, dans chacune de nos circonscriptions, sur ce que
pourraient représenter les risques
dans un contexte de multiétablissement, puis je ne comprends pas qu'on ne
puisse pas permettre aux travailleurs de se prononcer avec l'employeur sur la pertinence ou non de décréter un
multiétablissement. Ça, je ne comprends pas ça et je ne le comprendrai
pas. Ça me prendrait des fichus bons
arguments, puis le ministre, il est bon, il en a sorti plusieurs,
mais ça ne m'a pas convaincu. Alors, on n'a pas le choix d'être contre
le projet de loi, notamment en raison de cet élément sur le multiétablissement.
L'autre
élément, Mme la Présidente... Après le multiétablissement, un des autres
éléments qui fait en sorte qu'on veut voter contre ce projet de loi, c'est les lésions d'ordre psychique. Le projet de loi introduit, dans
la loi sur la santé et la sécurité
des travailleurs, les facteurs de risque psychiques qui
pourraient aboutir à des maladies d'ordre psychologique. Bon, d'arriver
avec les facteurs de risque psychique, c'est une avancée réelle, on le
reconnaît. Vous comprenez qu'en 1979, lors
de l'élaboration du premier projet de loi puis lors de l'élaboration même, en 1978, du livre blanc qui a conduit au projet de
loi, à cette époque-là, la dimension
des risques ou des problèmes de santé mentale reliés au milieu du travail, je
veux dire, c'était du chinois. Ça, on
n'en tenait pas compte, de ces risques-là psychiques reliés au milieu du
travail. Donc, évidemment, ce n'était pas dans la loi.
Donc, quand je vous dis qu'il y a une avancée parce
qu'il y a des... on tient compte des facteurs de risque qui pourraient aboutir à des maladies d'ordre
psychologique ou de santé mentale, il y a une avancée là, mais c'est comme...
le ministre
puis le gouvernement ont fait un pas puis ils se sont arrêtés là, alors qu'il
aurait fallu qu'ils fassent un deuxième pas, c'était de modifier la loi sur les
accidents et les maladies professionnelles. Parce que vous savez qu'il y a deux
lois, hein, qui sont concomitantes, là, la loi sur la santé et sécurité
des travailleurs puis la loi sur les accidents et les maladies professionnelles, qui, elle — c'est là que le deuxième pas n'a pas été
fait — ne
reconnaît pas les lésions d'ordre psychique, donc on ne peut pas être indemnisé. On reconnaît qu'il peut y avoir des
facteurs de risque psychique, mais on ne reconnaît pas qu'ils peuvent
être indemnisés, les travailleurs.
La
Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député de Jonquière,
alors, à cette heure-ci, je me dois de vous demander... J'imagine que vous n'avez pas terminé votre intervention et
je vais vous inviter à poursuivre lors de la reprise de ce débat.
Ajournement
Et, compte tenu de l'heure, j'ajourne nos
travaux au jeudi 30 septembre, à 9 h 40.
(Fin de la séance à 18 h 30)