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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Wednesday, November 20, 2019 - Vol. 45 N° 84

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Rendre hommage à M. Cassien Pagé pour son engagement communautaire

M. Vincent Caron

Souligner le succès du projet sur la santé Apni Sehat Apni Parvah

M. Carlos J. Leitão

Rendre hommage à trois athlètes de la Mauricie ayant participé à un événement de soccer
unifié à l'Université Laval

M. Jean Boulet

Souligner la Grande Semaine des tout-petits

Mme Jennifer Maccarone

Rendre hommage à M. Clément Dubois, ex-maire de la ville de Nicolet

M. Donald Martel

Souligner le 30e anniversaire de La Maison d'aide et d'hébergement L'Accalmie inc.

M. Joël Arseneau

Souligner le 30e anniversaire de l'organisme Espace Suroît

M. Claude Reid

Demander l'accès aux soins de santé universels et aux services de garde subventionnés
pour les enfants de parents ayant un statut migratoire précaire

M. Andrés Fontecilla

Souligner la tenue du Forum Mercier-Est en mouvement

M. Richard Campeau

Souligner la Semaine mondiale de l'entrepreneuriat

M. Monsef Derraji

Féliciter le cycliste Hugo Houle pour ses performances sportives

M. Sébastien Schneeberger

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 495 — Loi autorisant la captation de sons et d'images lors des séances publiques
d'un conseil municipal ou d'un conseil d'une communauté métropolitaine

Mme Isabelle Melançon

Mise aux voix

Dépôt de documents

Rapport annuel du Vérificateur général

Questions et réponses orales

Organisation et gouvernance scolaires

M. Pierre Arcand

M. François Legault

M. Pierre Arcand

M. François Legault

M. Pierre Arcand

M. François Legault

M. Pierre Arcand

M. François Legault

Partage des ressources entre l'école publique et l'école privée

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Mesures pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre

M. Monsef Derraji

M. Simon Jolin-Barrette

M. Monsef Derraji

M. Pierre Fitzgibbon

M. Monsef Derraji

M. Simon Jolin-Barrette

Entente avec la Fédération des médecins spécialistes

M. Pascal Bérubé

Documents déposés

M. François Legault

M. Pascal Bérubé

M. François Legault

M. Pascal Bérubé

M. François Legault

Réforme de la gouvernance scolaire

Mme Christine Labrie

M. Jean-François Roberge

Mme Christine Labrie

M. Jean-François Roberge

Mme Christine Labrie

M. Jean-François Roberge

Aide aux itinérantes et aux femmes en difficulté

Mme Hélène David

Mme Danielle McCann

Mme Hélène David

Mme Isabelle Charest

Mme Hélène David

Mme Isabelle Charest

Modification de la gouvernance scolaire

Mme Véronique Hivon

M. Jean-François Roberge

Mme Véronique Hivon

M. Jean-François Roberge

Mme Véronique Hivon

M. Jean-François Roberge

Programme de remboursement des lunettes et lentilles cornéennes pour enfants

M. Sol Zanetti

M. Lionel Carmant

M. Sol Zanetti

M. Lionel Carmant

M. Sol Zanetti

M. Lionel Carmant

Services gouvernementaux offerts aux Québécois d'expression anglaise

M. Gregory Kelley

M. Simon Jolin-Barrette

Services gouvernementaux offerts aux anglophones du Québec

M. Gregory Kelley

M. Simon Jolin-Barrette

Motions sans préavis

Souligner les Journées d'action contre la violence faite aux femmes

Mme Hélène David

Mme Isabelle Charest

Mme Christine Labrie

Mme Méganne Perry Mélançon

Mise aux voix

Souligner la Journée mondiale de l'enfance et la Grande Semaine des tout-petits

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Affaires du jour

Projet de loi n° 40 —  Loi modifiant principalement la Loi sur l'instruction publique
relativement à l'organisation et à la gouvernance scolaires

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Mme Marwah Rizqy (suite)

M. Alexandre Leduc

Mme Hélène David

Mme Méganne Perry Mélançon

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée mandate la Commission de la santé et des services sociaux
afin qu'elle procède à des consultations particulières concernant les services offerts
aux personnes autistes

Mme Jennifer Maccarone

M. Lionel Carmant

M. Sol Zanetti

M. Sylvain Gaudreault

Mme Marguerite Blais

Mme Christine Labrie

Mme Marilyne Picard

Mme Nancy Guillemette

Mme Geneviève Hébert

Mme Jennifer Maccarone (réplique)

Vote reporté

Projet de loi n° 43 —                    Loi modifiant la Loi sur les infirmières et les infirmiers et d'autres
dispositions afin de favoriser l'accès aux services de santé

Adoption du principe

Mme Danielle McCann

M. André Fortin

M. Sol Zanetti

M. Jean Rousselle

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante minutes)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bon mercredi. Vous pouvez vous asseoir.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Alors, nous allons débuter nos travaux aux affaires courantes, à la rubrique de déclarations de députés. Et, M. le député de Portneuf, la parole est à vous.

Rendre hommage à M. Cassien Pagé pour son engagement communautaire

M. Vincent Caron

M. Caron : Mme la Présidente, je souligne aujourd'hui l'implication exceptionnelle de M. Cassien Pagé, résident de Donnacona.

Depuis plusieurs années maintenant, M. Pagé s'implique activement dans différents organismes comme les Chevaliers de Colomb, le marché de Noël d'antan à Cap-Santé, ou encore l'Opération Nez rouge dans Portneuf et l'entretien de nos cimetières. Aussi et surtout, M. Pagé est un véritable pilier du Relais de la pointe aux Écureuils à Donnacona. Situé dans l'ancienne église Saint-Jean-Baptiste, le relais s'est donné une mission sociale en permettant à la population de se rassembler lors d'activités, en offrant au public un musée ou encore en imaginant des animations pour les enfants. Mais, au sous-sol, on retrouve Le Relais du meuble, un organisme qui permet aux personnes les moins favorisées d'acquérir du mobilier à un prix modique. Avec sa conjointe Janice, M. Pagé contribue grandement au succès de cet organisme.

Au nom des Portneuvoises et des Portneuvois, je salue M. Pagé et je lui exprime mes remerciements les plus sincères pour son engagement hors du commun au sein...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, nous allons poursuivre avec M. le député de Robert-Baldwin.

Souligner le succès du projet sur la santé Apni Sehat Apni Parvah

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Merci, Mme la Présidente. Alors, c'est avec plaisir que je souligne la huitième édition de Apni Sehat Apni Parvah, ou ASAP, une action communautaire en santé destinée à une population multiculturelle de Montréal, qui a eu lieu le mois dernier dans mon comté.

Founded in 2011, ASAP is a free and public seminar that promotes healthy lifestyles and raises awareness on health issues like diabetes and mental health. I had the pleasure of discussing these issues with Drs. Vasudha Gupta and Harmanjit Singh, the pioneers behind this excellent activity. Today, I am proud to say that their ambitious and inspiring project has become a mainstay of the community calendar.

Je tiens donc, en terminant, à souligner la générosité des Drs Vasudha Gupta et Harmanjit Singh. Bonne continuation.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, nous allons procéder... M. le député de Trois-Rivières, la parole est à vous.

Rendre hommage à trois athlètes de la Mauricie ayant participé
à un événement de soccer unifié à l'Université Laval

M. Jean Boulet

M. Boulet : Mme la Présidente, un premier événement de soccer unifié avec l'Assemblée nationale a eu lieu le 7 novembre dernier au Stade Telus de l'Université Laval. Je tiens à souligner la participation de tous les athlètes, particulièrement celle de Félix Berthiaume, de Samuel Charron et de Keven Dupont, trois athlètes de la Mauricie.

Olympiques spéciaux Québec organise des activités sportives jumelant des athlètes qui vivent avec une déficience intellectuelle à des partenaires sportifs, dans ce cas-ci à des députés. Les deux personnes sont partenaires de jeu au sein de la même équipe afin de créer une expérience d'inclusion sociale unique. L'organisme permet à des personnes présentant une déficience intellectuelle de développer de saines habitudes de vie, d'améliorer la confiance et l'estime de soi et d'acquérir une plus grande autonomie par le sport.

Je veux, une fois de plus, honorer les athlètes et mes collègues de l'Assemblée nationale qui ont participé à la partie de soccer unifié, et j'en profite pour faire un clin d'oeil à la prochaine édition, qui aura lieu à Trois-Rivières. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis, la parole est à vous.

Souligner la Grande Semaine des tout-petits

Mme Jennifer Maccarone

Mme Maccarone : Merci, Mme la Présidente. Cette semaine et jusqu'au 23 novembre se déroule la quatrième édition de la Grande Semaine des tout-petits.

Cet événement est l'occasion de participer à différents événements un peu partout au Québec afin d'informer, de sensibiliser et de mobiliser la population autour de la petite enfance. Je profite de l'occasion pour souligner l'implication des ambassadeurs de l'événement, des gens de tous horizons, mais aussi des différents partenaires de la Grande Semaine. Sans vous, rien ne serait possible.

En terminant, j'invite la population à porter fièrement ce petit carré en signe d'appui aux tout-petits. Au nom de 530 000 petites Québécoises et petits Québécois de zéro à cinq ans, merci de prendre soin d'eux et de veiller à leur avenir.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le député de Nicolet-Bécancour, nous vous écoutons.

Rendre hommage à M. Clément Dubois, ex-maire de la ville de Nicolet

M. Donald Martel

M. Martel : Mme la Présidente, occuper le poste de maire ou de mairesse d'une localité située en région rurale demande un mélange bien dosé de générosité, de passion et d'engagement. Je tiens aujourd'hui à souligner la contribution d'une de ces personnes, passionnée pour sa ville, M. Clément Dubois, de Nicolet, décédé tout récemment.

M. Dubois a occupé les fonctions de maire de la ville de Nicolet de 1987 à 1994 et ensuite de 2001 à 2005. J'ai eu à le côtoyer alors que j'étais directeur général de la MRC de Nicolet-Yamaska et j'ai reconnu en lui un homme qui aimait profondément sa ville et qui en était très fier.

Au nom de mes concitoyens de Nicolet-Bécancour, je transmets mes sympathies à sa famille et en particulier à sa fille, Mme Geneviève Dubois, qui a suivi les traces de son père comme mairesse de Nicolet, et je veux rendre un hommage très sincère à M. Clément Dubois pour sa contribution à sa collectivité. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Nous vous écoutons.

Souligner le 30e anniversaire de La Maison d'aide et d'hébergement L'Accalmie inc.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Merci, Mme la Présidente. Depuis 30 ans cette année, La Maison d'aide et d'hébergement L'Accalmie aux Îles-de-la-Madeleine offre aux femmes victimes de violence un refuge, une écoute et surtout un accompagnement vers un nouveau départ en eaux plus calmes.

Permettez-moi aujourd'hui de saluer le précieux travail et l'engagement de toute l'équipe de L'Accalmie et de sa directrice, Mme Linda Turbide, ici présente dans nos tribunes.

Il y a 30 ans, pour décrire la réalité des violences dont les femmes sont victimes, on parlait de femmes battues. On sait aujourd'hui que le phénomène est beaucoup plus complexe et insidieux. La violence est multiforme : violences physique, psychologique, verbale, sexuelle, économique. Ce sont ces violences que les victimes elles-mêmes n'arrivent pas toujours à identifier, à nommer ou à admettre. L'Accalmie les aide à y voir plus clair. Pour un trop grand nombre de femmes, et à tout âge, la violence conjugale ou familiale fait encore partie du quotidien. Pour celles de ma communauté, et parfois leurs enfants, L'Accalmie représente, depuis 30 ans, le calme après la tempête, mais aussi une escale en route vers une vie meilleure. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, M. le député de Beauharnois.

Souligner le 30e anniversaire de l'organisme Espace Suroît

M. Claude Reid

M. Reid : Mme la Présidente, aujourd'hui, en ce 20 novembre, les Nations unies célèbrent la journée internationale de l'enfance, ayant pour objectif de commémorer l'adoption de la Convention relative aux droits de l'enfant.

En cette journée, je souhaite souligner le travail exceptionnel de l'organisme Espace Suroît, qui fête cette année son 30e anniversaire de fondation. Très présent dans notre communauté, cet organisme offre des ateliers de sensibilisation et de prévention de la violence aux enfants de trois à 12 ans, aux parents et aux membres du personnel éducatif, le tout dans une approche basée sur le développement du pouvoir d'agir. Au fil du temps, l'équipe d'Espace Suroît a ainsi rencontré près de 30 000 jeunes et 5000 parents de la région du Suroît. Aujourd'hui, Espace Suroît est d'ailleurs présent à l'école primaire Edgar-Hébert pour créer avec les étudiants une gigantesque fresque illustrant un ruban bleu, symbole de cette journée.

En mon nom personnel et au nom des citoyens du comté de Beauharnois, je tiens donc à saluer et féliciter tout le travail accompli par Espace Suroît au sein de la communauté depuis les 30 dernières années. Longue vie à Espace Suroît! Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. M. le député de Laurier-Dorion.

Demander l'accès aux soins de santé universels et aux services de garde subventionnés
pour les enfants de parents ayant un statut migratoire précaire

M. Andrés Fontecilla

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. En ce 20 novembre, Journée internationale des droits de l'enfant, j'aimerais bien humblement prendre la parole au nom de tous ces enfants du Québec pour qui l'égalité des chances n'existe pas.

À l'heure actuelle, tous les enfants québécois n'ont pas accès aux soins essentiels de notre système de santé, pourtant universel, ou à des services de garde subventionnés, où ils peuvent socialiser, apprendre, se développer, être soutenus très tôt s'ils éprouvent des difficultés d'apprentissage. La plupart de ces enfants sont nés ici, ils sont Québécois et, pourtant, pour des questions bureaucratiques, ils n'ont pas accès à la couverture de la Régie d'assurance maladie du Québec ou aux services de garde à contribution réduite. Tout simplement parce que leurs parents ont un statut d'immigration précaire, ces enfants sont privés de services essentiels. Nous avons la responsabilité de nous assurer que tous les enfants du Québec grandissent dans des conditions favorables à leur plein épanouissement.

J'appelle donc mes collègues de l'Assemblée nationale à prendre acte de cette situation alarmante et à s'engager à assurer une véritable égalité des chances pour tous les enfants de notre société. Merci.

 • (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, nous poursuivons avec M. le député de Bourget.

Souligner la tenue du Forum Mercier-Est en mouvement

M. Richard Campeau

M. Campeau : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais souligner la démarche de la table de quartier Solidarité Mercier-Est pour mettre en place leur sixième forum, forum qui a fait ses preuves au cours des 30 dernières années. Grâce à lui, on a vu naître La Maison des familles de Mercier-Est ainsi que le SESAME, un organisme de dépannage alimentaire dans Mercier-Est.

Le forum a pour but de définir collectivement les propriétés de développement social, urbain et communautaire. Il sera question de sensibiliser les citoyens sur l'impact qu'ils peuvent avoir sur le bien-être dans leur communauté. La préparation du forum a permis à plus de 800 citoyens d'être consultés depuis mars dernier. Une quinzaine d'organismes de Mercier-Est ont été consultés, des miniforums ont été conçus afin de donner une voix aux élèves des quatre écoles de Mercier-Est ainsi que des cafés urbains, qui ont permis de rassembler une trentaine de citoyens à chaque fois. C'est donc un grand bal de réflexions amorcé il y a plusieurs semaines qui prendra fin ce samedi 23 novembre.

Félicitations à l'équipe de Solidarité Mercier-Est pour ce bel effort de concertation! Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. M. le député de Nelligan, la parole est à vous.

Souligner la Semaine mondiale de l'entrepreneuriat

M. Monsef Derraji

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Du 18 au 24 novembre, nous célébrons la Semaine mondiale de l'entrepreneuriat. Il s'agit de faire la lumière sur le monde entrepreneurial, ses différentes facettes et surtout ses différents visages.

Cette semaine, ce sont surtout les entrepreneurs que je vous invite à célébrer avec moi. Ils portent en eux des projets porteurs d'innovation, de croissance et de richesse pour le Québec. Ils agissent avec coeur, car on ne le dira jamais assez, à quel point le parcours de la majorité d'entre eux est difficile, truffé d'embûches et de recommencements.

J'appelle aujourd'hui l'ensemble de la société à rendre hommage à ces talents qui sont partout autour de nous. Que vous soyez des entrepreneurs, intrapreneurs, repreneurs, que vous soyez jeunes, hommes, femmes ou issus de la diversité, que vous agissiez dans les secteurs dits traditionnels, celui de l'économie sociale, du développement durable ou encore dans les hautes technologies, manifestez-vous et partagez avez nous vos succès et vos défis, car, cette semaine, notre objectif est de vous fêter.

Aujourd'hui, je salue nos PME, nos entrepreneurs partout au Québec. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a consentement pour permettre à M. le député de Drummond—Bois-Francs de faire une 11e déclaration de députés?

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, vous pouvez y aller, M. le député.

Féliciter le cycliste Hugo Houle pour ses performances sportives

M. Sébastien Schneeberger

M. Schneeberger : Alors, merci, Mme la Présidente. Alors, aujourd'hui, c'est un honneur pour moi. Je veux rendre hommage au cycliste drummondvillois, Hugo Houle, originaire de Sainte-Perpétue, dans le comté de Nicolet-Bécancour.

Après avoir pratiqué le triathlon à partir de neuf ans, Hugo s'est tourné vers le cyclisme à 14 ans. Ayant complété une technique policière en 2011, il entreprend une carrière comme cycliste professionnel. Parmi ses nombreux exploits, trois titres de champion canadien du contre-la-montre des moins de 23 ans ont fait de lui un spécialiste en cette discipline. Il a participé au Tour d'Italie en 2015, 2016, et au Tour d'Espagne en 2017. Membre de l'équipe Astana, il est devenu le troisième Québécois à courir sur le Tour de France en juillet dernier. C'est le premier Québécois à avoir fait les trois grands tours d'Europe. Pour 2020, je lui souhaite de devenir le premier Québécois à disputer deux fois le Tour de France.

Félicitations, Hugo Houle! Tu es vraiment un champion, tu es vraiment un grand du cyclisme canadien!

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Merci, M. le député. Ceci met fin à la déclaration de députés.

Je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 54)

(Reprise à 10 h 2)

Le Président : Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Mmes et MM. les députés, nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Tanguay : Oui, M. le Président. Je vous prierais d'appeler l'article...

Le Président : A.

M. Tanguay : ...a, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 495

Le Président : À l'article a du feuilleton, Mme la députée de Verdun présente le projet de loi n° 495, Loi autorisant la captation de sons et d'images lors des séances publiques d'un conseil municipal ou d'un conseil d'une communauté métropolitaine. Mme la députée.

Mme Isabelle Melançon

Mme Melançon : Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, vous allez me permettre de saluer Marie-Ève Martel, qui est auteure du livre Exctinction de voix qui m'a inspiré ce projet de loi. Merci et bienvenue à l'Assemblée nationale.

Alors, M. le Président, je dépose aujourd'hui le projet de loi n° 495, Loi autorisant la captation de sons et d'images lors des séances publiques d'un conseil municipal ou d'un conseil d'une communauté métropolitaine.

Ce projet de loi réaffirme le caractère public des séances d'un conseil municipal ou d'un conseil d'une communauté métropolitaine.

De plus, le projet de loi précise qu'une personne ne peut pas être empêchée d'assister à une telle séance au motif qu'elle ne réside pas sur le territoire de la municipalité ou de la communauté métropolitaine.

Enfin, le projet de loi autorise expressément la captation de sons et d'images par une personne qui assiste au conseil municipal ou au conseil d'une communauté métropolitaine, tout en permettant au conseil d'encadrer ce droit.

Merci, M. le Président.

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle.

M. Tanguay : Oui, merci, M. le Président. Très brièvement, j'aimerais savoir si le leader du gouvernement va partager, quant à ce projet de loi, l'enthousiasme exprimé déjà par sa collègue des Affaires municipales pour appeler ledit projet de loi et faire en sorte qu'il soit loi du Québec. Et, une fois exprimé ce souhait-là, M. le Président, je vous demanderai un vote par appel nominal.

Le Président : M. le leader du gouvernement? Appel par vote nominal demandé. Que les députés...

Une voix : ...

Mise aux voix

Le Président : Bien sûr. Je ne le ferai pas à votre place, madame, assurément.

Que les députés qui sont pour veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

La Secrétaire adjointe : M. Arcand (Mont-Royal—Outremont), M. Tanguay (LaFontaine), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Nichols (Vaudreuil), Mme David (Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun), Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé), M. Derraji (Nelligan), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Ciccone (Marquette).

M. Legault (L'Assomption), M. Jolin-Barrette (Borduas), Mme Guilbault (Louis-Hébert), M. Laframboise (Blainville), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay), M. Girard (Groulx), Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy (Montarville), M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Roberge (Chambly), Mme LeBel (Champlain), M. Bonnardel (Granby), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Caire (La Peltrie), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Samson (Iberville), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est), M. Lacombe (Papineau), Mme Charest (Brome-Missisquoi), Mme Girault (Bertrand), M. Julien (Charlesbourg), M. Boulet (Trois-Rivières), Mme Proulx (Côte-du-Sud), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger (Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin (Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf), Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean), Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava), M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé), Mme Guillemette (Roberval), M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).

Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), M. Nadeau-Dubois (Gouin), Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont), Mme Labrie (Sherbrooke), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau), M. Zanetti (Jean-Lesage).

M. LeBel (Rimouski), M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette), M. Gaudreault (Jonquière), Mme Perry Mélançon (Gaspé).

M. Ouellette (Chomedey), Mme Fournier (Marie-Victorin).

Le Président : Que les députés qui sont contre veuillent bien se lever. Y a-t-il des abstentions?

M. le secrétaire général, pour le résultat.

Le Secrétaire : Pour :  110

                     Contre :               0

                     Abstentions :       0

Le Président : L'Assemblée accepte donc d'être saisie de ce projet de loi.

Dépôt de documents

Rapport annuel du Vérificateur général

À la rubrique Dépôt de documents, je dépose le rapport du Vérificateur général du Québec à l'Assemblée nationale pour l'année 2019‑2020, tome de novembre 2019.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions ni dépôt de pétitions.

Il n'y a de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole au chef de l'opposition officielle.

Organisation et gouvernance scolaires

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, après les maternelles quatre ans, après la réforme sur les étudiants étrangers, après le projet de loi sur les tarifs d'Hydro, on s'enligne pour rejouer dans le même film, version commissions scolaires. Encore une fois, la CAQ a présenté en grande pompe un projet de loi imprécis et brouillon. Et devinez quoi, M. le Président. Encore une fois, ce matin, il y a une manifestation devant le ministère de l'Éducation. 6 000 enseignants ont déposé des lettres signalant l'incohérence du projet de loi.

M. le Président, le projet de loi n° 40 doit supposément réduire la bureaucratie et redonner du pouvoir aux gens qui connaissent les élèves par leurs noms, mais, dans les faits, la CAQ a simplement choisi d'investir temps et énergie dans un brassage de structures. Et pendant ce temps les parents du Québec attendent des services pour leurs enfants et surtout des enseignants.

Le projet de loi n'apporte rien pour la réussite éducative de nos jeunes. Les commissions scolaires peuvent certainement être bonifiées, doivent être modernisées. Y a-t-il moyen de faire un travail constructif? Nous sommes prêts à travailler en ce sens, sans perdre de vue cette réussite importante. Pour ce faire, il faut savoir écouter et s'ajuster.

Ce matin, M. le premier ministre, vous avez dit que vous étiez prêt à ralentir certains dossiers.

Est-ce que, dans ce dossier-ci, vous allez faire encore la sourde oreille aux critiques constructives qui sont formulées?

• (10 h 10) •

Le Président : M. le premier ministre... Je vous demande évidemment, et vous connaissez la règle, je ne le dirai pas mille fois, de vous adresser à la présidence, s'il vous plaît. Merci. M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. M. le Président, le chef de l'opposition officielle a assez d'expérience pour se rappeler — en tout cas, moi, je m'en rappelle — que le ministre de l'Éducation libéral, M. Bolduc, avait déposé un projet de loi pour abolir les commissions scolaires, pour abolir les élections scolaires. Et M. Bolduc disait à l'époque : Ça n'a pas de bon sens qu'il y ait seulement 5 % de taux de participation aux élections scolaires. Et, M. le Président, ce qui est arrivé par la suite, c'est qu'il y a eu un lobby des ex-présidents, présidentes de commission scolaire qui remplissent les bancs du Parti libéral pour que le gouvernement libéral recule sur son projet de loi.

M. le Président, je pense que, quand on parle d'un taux de participation de 5 % à des élections, ce n'est pas de la démocratie. Donc, M. le Président, ce qu'on propose, c'est qu'à l'avenir, entre autres, les conseils d'établissement des écoles, les gens qui sont impliqués quotidiennement avec leurs enfants dans les écoles du Québec participent à nommer leurs représentants, donc le nouveau conseil d'administration qui va remplacer les commissaires qui sont malheureusement élus par seulement 5 % de la population.

Je sais que le Parti libéral tient à garder les élections scolaires. M. le Président, à 5 %, ce n'est pas défendable. Je ne le sais pas, si le chef a quelque chose à proposer. Ce serait le temps de le faire.

Le Président : Première complémentaire, la parole au chef de l'opposition officielle.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, même le Directeur général des élections a dit que le projet de loi, il est carrément antidémocratique. M. le Président, ce qu'on constate, en fait, c'est que la CAQ semble avoir comme priorité de jouer dans les structures. C'est ça, le problème. On prévoit mettre tous les efforts, les sommes d'argent dans les structures plutôt que dans les services aux élèves.

Est-ce que le premier ministre pourrait refaire ses devoirs et mettre tous ses efforts sur les services aux enfants?

Le Président : M. le premier ministre... Toujours prudence dans le choix des termes. M. le premier ministre, à vous la parole.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, c'est exactement ce qu'on essaie de faire, de décentraliser vers les écoles. Les meilleurs experts pour choisir les meilleurs moyens pour nos enfants, ce sont les gens dans les écoles, directeurs, directrices d'école, les équipes, enseignants, ce ne sont pas des commissaires d'école élus par 5 % seulement de la population. Donc, M. le Président, ce que mon collègue ministre de l'Éducation essaie de faire, c'est justement donner plus de pouvoirs à ceux qui connaissent les besoins des enfants. Il y a actuellement des budgets beaucoup trop importants dans les commissions scolaires, des centaines de millions de dollars qui sont trop centralisés.

Le Président : En terminant.

M. Legault : Nous, on va décentraliser.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, en fait, le seul gagnant de ce brassage de cartes, c'est le ministre. Il se donne tous les pouvoirs. L'Institut de la gouvernance est sans nuance, la proposition du ministre ne passe pas le test. Selon eux, la réforme caquiste n'a pas prévu des mesures crédibles pour les dirigeants des centres de services. M. le Président, ce n'est pas sérieux. Les fils dépassent de partout, il n'y a rien d'attaché.

Est-ce que le premier ministre peut éviter une autre réforme brouillonne?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, on ne fera pas une réforme brouillonne comme l'ancien ministre libéral Bolduc, qui avait retiré son projet de loi tellement c'était brouillon.

M. le Président, les libéraux veulent protéger les commissaires d'école parce que ce sont leurs petits amis qui sont...

Le Président : Là, je vais vous demander de faire...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Vous savez qu'il y a des termes... Soyons prudents sur les termes. Vous les connaissez également, alors évitez... je ne les rappellerai pas, mais, M. le premier ministre, «petits amis», je vous demande de le retirer. Ça fait partie aussi des propos non parlementaires, vous le savez, M. le premier ministre. Je vous demande votre collaboration.

M. Legault : M. le Président, je vais retirer «petits amis des libéraux». Mais je vais dire : Nous, nos petits amis, ce sont les enfants.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Sans commentaire sur les réponses. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, les enseignants le disent, et, en fait, ce qui anime le ministre de l'Éducation, c'est d'abolir ce qu'il appelle les contre-pouvoirs. Il l'a dit lui-même, il ne veut plus entendre des gens sortir sur la place publique pour parler contre le gouvernement. Donc, évidemment, les commissions scolaires, elles sont contre, les communautés anglophones sont contre, le personnel enseignant est contre, les OBNL sont contre, il y a des parents qui sont contre.

Alors, au lieu de vouloir faire taire ceux qui pensent autrement, le premier ministre va-t-il encore se précipiter...

Le Président : M. le premier ministre, la réponse. À vous.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, pour une fois, le chef de l'opposition officielle a raison, les anglophones tiennent à avoir une élection générale de leurs représentants. Par contre, si le Parti libéral était proche des francophones, il saurait très bien que la grande majorité des francophones n'en veulent plus, des élections scolaires. Il est temps que le Parti libéral se rebranche sur le terrain avec les francophones.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Saint-Laurent.

Partage des ressources entre l'école publique et l'école privée

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : La réforme en éducation, c'est vraiment un autre exemple très patent à quel point on veut tout centraliser. Quand j'entends le premier ministre dire que son ministre essaie de décentraliser, qu'est-ce qu'il essaie de décentraliser, c'est l'exécution des décisions, mais clairement il s'arroge, à toutes fins pratiques, tous les pouvoirs.

Je vais vous donner un exemple, M. le Président. L'article 102, pouvez-vous croire qu'ils sont allés écrire noir sur blanc que les écoles publiques, notre système public va être au service des écoles privées, vont devoir prêter des ressources humaines? Qui qu'on va prêter? La technicienne? Le concierge? On va prêter aussi des locaux, peut-être, des gymnases?

Est-ce qu'on peut avoir plus de précisions? Parce que plusieurs intervenants ont demandé qu'est-ce que le ministre de l'Éducation a derrière la tête lorsqu'il veut vraiment que notre système public soit au service des écoles privées.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, on va... Elle s'intéresse à l'article 102? Ça me fait plaisir de le faire connaître à l'ensemble des citoyens du Québec.

Article 102, on modifie l'article 215.1, on va le comprendre ensemble : «Les centres de services scolaires doivent favoriser le partage de ressources et de services, notamment de nature administrative, entre eux ou avec d'autres organismes publics, dont des municipalités, ou des établissements d'enseignement régis par la Loi sur l'enseignement privé lorsque cela permet — il ne faut pas arrêter de lire ici, hein? — dans le cadre de leur mission — là, on parle de la mission des centres de services — de répondre à des besoins d'efficacité — un nouveau concept pour vous autres — [...]de rentabilité — ça en fait deux — dans la gestion des ressources humaines, financières et matérielles.»

Y a-tu beaucoup de Québécois qui se lèvent le matin en disant : J'espère qu'ils ne feront rien pour améliorer l'efficacité dans la gestion des ressources humaines, financières et matérielles, j'espère qu'ils vont garder le statu quo, j'espère qu'on va continuer de dépenser des millions de dollars pour élire des gens? Non, les Québécois ne nous disent pas ça. Les Québécois nous disent : Soyez efficaces, décentralisez la prise de décision, partagez les ressources...

Le Président : En terminant.

M. Roberge : ...dans l'intérêt des élèves. C'est ce qu'on va faire.

Si vous avez d'autres articles, ça va me faire plaisir.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Première complémentaire, Mme la députée de Saint-Laurent. La parole n'appartient qu'à vous.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Les intervenants qui sont venus en consultation, bonne nouvelle, ce sont des Québécois, la FTQ, la Fédération autonome de l'enseignement, le Comité de parents de la CSDM — c'est un gros comité — le Mouvement L'École ensemble, tous des Québécois qui ont interpelé le ministre, qui ont dit : Êtes-vous tombé sur la tête? Comment ça se fait que vous voulez que notre système public soit au service des écoles privées? Qu'est-ce que vous avez derrière la tête? Pouvez-vous préciser? Il n'a jamais été capable de répondre.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, on a vu que ça lui tentait peut-être moins de s'attarder sur les articles pour une compréhension fine. On est allés...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Attention aux propos. Attention aux propos qu'on utilise, tout simplement.

M. Roberge : Ça lui tente moins qu'on lise les articles pour une compréhension fine. On va plutôt continuer des «spins», des mauvaises compréhensions. Écoutez, la Fédération des comités de parents...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Je viens... Non, je pense que, là, je viens d'aviser, je viens de porter à l'attention du ministre l'utilisation de certains termes. Je vous demande d'être prudents dans les mots utilisés, histoire de faire en sorte qu'on poursuive une saine période de questions. M. le ministre, continuez votre réponse.

M. Roberge : M. le Président, on a, c'est vrai, plusieurs commissaires qui sont venus nous dire que ce n'était pas une bonne idée d'abolir les postes de commissaire. On n'a pas fait le saut, on n'a pas fait le saut. Mais il y a même des commissaires qui sont venus nous dire : C'est une bonne idée, aussi, les présidents de deux commissions scolaires, des élus, des commissaires qui sont venus nous dire : Écoutez, de l'intérieur, là, on constate que ça ne marche pas puis on fait des suggestions pour le réformer.

Le Président : En terminant.

M. Roberge : On devrait peut-être les écouter, ceux-là aussi.

• (10 h 20) •

Le Président : On s'adresse toujours à la présidence. Mme la députée de Saint-Laurent.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : C'est inquiétant, il centralise des pouvoirs puis il ne comprend même pas les pouvoirs auxquels il se donne. Aïe! La FTQ, FAE, comités de parents, Mouvement L'École ensemble, ce n'est pas des commissaires, ce sont pour la très grande majorité des Québécois et même des parents. Ils sont inquiets, ils veulent savoir qu'est-ce que le système public gagne à donner des services au système privé.

Et la question qu'on s'est aussi posée : L'article 102, comment ça se fait que ça ne va pas dans l'autre bord? Pourquoi que le système privé, lui, ne donne pas des services aux services publics?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation, en réponse.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, en aucun cas le système public ne va donner des services au système privé, il faut faire attention à ce qu'on dit, là, il faut faire attention, ce n'est pas vrai. On parle de partager des ressources, des infrastructures dans un souci d'efficacité de ressources financières et humaines, pour donner plus de services directs à nos élèves, pour aider nos professeurs à aider les élèves, plus de décentralisation, impliquer les gens qui connaissent les élèves par leurs noms dans les décisions d'ordre pédagogique et leur faire une place dans le conseil d'administration du centre de services scolaires. C'est une petite révolution qui va faire du bien et qui est attendue par ceux qui font l'école à tous les jours.

Le Président : Question principale, M. le député de Nelligan.

Mesures pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre

M. Monsef Derraji

M. Derraji : M. le Président, nous avons à maintes reprises fait état de problèmes de plus en plus importants de pénurie de main-d'oeuvre qui frappent le Québec. Il y a 140 000 postes à pourvoir. Le secteur de la transformation alimentaire, secteur névralgique de l'économie québécoise, subit cette pénurie de plein fouet. C'est un secteur pour lequel la compétition est mondiale, mais aussi la compétition avec les autres provinces canadiennes.

Pendant ce temps, le gouvernement fédéral, lui, agit. Le fédéral a mis sur pied un programme pilote qui assouplira les règles en vigueur pour aller recruter les travailleurs de cette industrie. Malheureusement, ce programme pilote ne s'applique pas au Québec. Il fera en sorte de désavantager nos entreprises face aux entreprises dans le reste du Canada.

Est-ce que le ministre de l'Immigration, M. le Président, lui, mettra sur pied un programme pilote pour les entreprises québécoises qui n'y ont pas accès?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Alors, M. le Président, c'est intéressant d'entendre le député de Nelligan faire l'apologie du gouvernement fédéral. S'il souhaite supporter davantage le gouvernement fédéral que le gouvernement québécois, c'est son choix. Mais il y a une chose qui est sûre : son rôle, en tant que député de l'Assemblée nationale, ça devrait être de supporter le gouvernement du Québec dans ses démarches avec le gouvernement fédéral relativement, notamment, M. le Président, au Programme des travailleurs étrangers temporaires.

Ça fait plus d'un an que je suis en discussion avec le gouvernement fédéral justement pour répondre aux besoins de main-d'oeuvre des différentes entreprises. Le député de Nelligan est supposé, censé connaître les besoins des entreprises du Québec. Eh bien, M. le Président, dans toutes les régions du Québec, il y a beaucoup d'entreprises qui souhaitent avoir recours à des travailleurs étrangers temporaires pour une durée plus longue d'une année, pour faire en sorte aussi qu'il y ait un déplafonnement et surtout aussi pour assouplir les règles relativement aux études d'impact sur le marché du travail.

Alors, M. le Président, c'est la position du gouvernement du Québec, qui est supportée aussi par la Commission des partenaires du marché du travail à l'unanimité. Et savez-vous quoi? Dans cette commission-là, M. le Président, il y a à la fois des syndicats, il y a des gens de l'enseignement, il y a des gens du domaine patronal également, et je les ai consultés, ces gens-là, et ils me supportent.

Alors, M. le Président, le travail a été fait. Il faut que le gouvernement fédéral entende raison.

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : Et j'espère que le député de Nelligan va m'appuyer dans cette démarche-là avec le gouvernement fédéral.

Le Président : M. le député de Nelligan, pour votre complémentaire.

M. Monsef Derraji

M. Derraji : En août dernier, en commission parlementaire, le P.D.G. d'Olymel était venu pour expliquer que la transformation alimentaire subissait un manque criant de main-d'oeuvre. Le ministre a le pouvoir de satisfaire les besoins de l'industrie en faisant un programme équivalent. Or, il ne fait rien. Le ministre s'est peinturé dans le coin avec un objectif de 40 000 immigrants, chiffre arbitraire, sorti d'un chapeau.

Pourquoi refuse-t-il d'appliquer un pouvoir qu'il possède si ce n'est pour atteindre le chiffre arbitraire de 40 000 par an?

Le Président : M. le ministre de l'Économie.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Pierre Fitzgibbon

M. Fitzgibbon : Alors M. le Président, je veux juste rassurer le député de Nelligan qu'au MEI nous avons rencontré le CTAQ à plusieurs reprises et qu'historiquement, effectivement, l'implication financière d'Investissement Québec était absente, c'est La Financière agricole qui était en rendez-vous, et on s'est engagés, avec mon collègue le ministère de l'Agriculture, qu'Investissement Québec aurait un segment pour aider l'innovation au niveau de la transformation alimentaire qui est requise pour pouvoir pallier à la pénurie de main-d'oeuvre. Donc, il va y avoir un programme pour aider les transformateurs à être plus efficients. Et, pendant ce temps-là, mes collègues de l'Immigration et du Travail vont s'assurer...

Le Président : En terminant.

M. Fitzgibbon : ...qu'on a des gens qui sont formés adéquatement pour la cause.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Nelligan.

M. Monsef Derraji

M. Derraji : M. le Président, le P.D.G. d'Olymel a indiqué que le manque de travailleurs a eu des impacts notamment à l'usine de transformation de porc de Saint-Henri, dans Bellechasse. Et vous savez quoi? Il a fallu refuser de la... Ils refusent de la croissance maintenant. Il ne peut plus, il ne peut plus parce qu'il a besoin de votre réponse.

Alors, M. le Président, je me dirige maintenant à la ministre responsable du Développement économique régional. Est-ce qu'elle trouve ça normal que le ministre de l'Immigration n'a aucunement l'intention, aujourd'hui, de répondre à cette problématique? Est-ce qu'elle va se lever et rappeler à l'ordre son collègue ministre de l'Immigration?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, c'est ironique. C'est ironique que le député de Nelligan se lève parce que ce qu'on vise à faire, c'est justement à répondre aux besoins du marché du travail, avec la réforme en matière d'immigration. Et, vous savez, la pénurie de main-d'oeuvre, là, elle n'est pas arrivée soudainement. Elle a été léguée par le Parti libéral...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Jolin-Barrette : ...qui n'a pas réussi notamment à s'assurer de sélectionner les personnes immigrantes en fonction des besoins du marché du travail.

Je comprends que le fait de faire des réformes, ça ne plaît pas au Parti libéral, mais il y a des réformes qui sont nécessaires justement pour répondre aux besoins de l'économie du Québec. Et notamment lorsqu'on sélectionne les personnes immigrantes, bien, il faut qu'elles soient sélectionnées avec les emplois qui sont disponibles. Alors, le cas qui est présenté, M. le Président, si le Parti libéral ne m'appuie pas dans ma réforme...

Le Président : Question principale... En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...voyez-vous la conséquence que ça a? Il faut faire en sorte de répondre aux besoins du marché du travail.

Le Président : Question principale, M. le chef du troisième groupe d'opposition.

Entente avec la Fédération des médecins spécialistes

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : M. le Président, le premier ministre tente de nous faire croire qu'il n'a jamais parlé de réduire de 1 milliard la rémunération des médecins spécialistes. J'ai cinq déclarations pour lui. La première : «...le gouvernement paie 1 milliard de dollars de trop par année...» «...les contribuables paient 1 milliard de dollars de trop...» «On va réduire de 1 milliard de dollars la rémunération des médecins spécialistes.» «...c'est 1 milliard de dollars de trop qu'on aurait pu investir dans les services aux citoyens.» «...1 milliard de dollars de trop par année.» Je dépose le verbatim exact des déclarations du premier ministre, avec le contexte.

Le premier ministre a souvent dit : Nous, on ne va pas céder devant aucun lobby. Sauf les médecins spécialistes en négociation.

J'ai deux questions pour lui : Est-ce qu'il peut concéder qu'il n'a obtenu que la moitié de son engagement? Et la deuxième : Est-ce qu'il peut s'engager à déposer l'entente avec les médecins spécialistes avant la fin de la session parlementaire pour qu'on puisse le questionner là-dessus?

Documents déposés

Le Président : Consentement pour le dépôt des documents? Il y a consentement. M. le premier ministre, votre réponse.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le chef du Parti québécois sait très bien qu'il y a un an il y avait une étude qui montrait qu'il y avait un écart de 1 milliard entre le salaire qui est payé, au Québec, aux spécialistes puis ce qui aurait dû être payé si on avait le même écart que pour les autres travailleurs.

Durant la campagne électorale, on a promis de faire une nouvelle étude. Dans notre cadre financier, on n'a pas pris de risque, on a mis zéro comme récupération. Il y a une nouvelle étude qui a été faite, qui montre que l'écart, maintenant, est d'environ 500 millions de dollars, et c'est de l'argent qu'on va récupérer, de l'argent qui a été gaspillé par le gouvernement libéral.

Donc, M. le Président, quand l'entente va être signée, finalisée, tous les documents vont être rendus publics.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : M. le Président, on est en train de se faire faire le coup des trop-perçus. Des trop-perçus par les médecins spécialistes, c'est le même argumentaire. Pourquoi la présidente de la Fédération des médecins spécialistes, elle, elle le dit avec grande assurance, qu'on n'est certainement pas en bas de la moyenne canadienne? Est-ce que c'est elle qui a raison? Est-ce que c'est le premier ministre? Est-ce que c'est le journaliste qui a rapporté les paroles, hier, et le premier ministre lui a dit qu'il avait mal fait son travail?

Je lui redemande à nouveau : Est-ce qu'il peut déposer avant la fin de la session parlementaire l'entente pour qu'on puisse tous juger de ce qu'il a obtenu dans sa négociation?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, l'ensemble des travailleurs québécois gagnent en moyenne 9 % de moins que les travailleurs dans le reste du Canada. Nous, on pense que, par équité, les médecins spécialistes devraient gagner 9 % de moins que les spécialistes du reste du Canada. M. le Président, c'est ça, la justice. C'est ça, l'équité. C'est ça que les libéraux n'ont pas fait, c'est ça qu'on va faire. Quand ça va être conclu, on va rendre ça public.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du troisième groupe d'opposition.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Résumé des épisodes précédents. Le premier ministre s'engage pour 1 milliard, il obtient 500 millions. Là, il arrive avec une autre version qui est 9 %. J'ai de la misère à comprendre. Si je lui emprunte 100 $, est-ce que je peux juste lui redonner 50 $, puis ça va être correct? M. le Président, ça ne fonctionne pas. Pour la troisième fois, je lui demande de déposer l'entente avant la fin de la session parlementaire.

Est-ce que c'est ses responsables des communications qui lui ont dit : Ce ne serait pas une bonne idée de finir la session avec la vérité sur l'entente avec les médecins spécialistes?

Le Président : Attention avec les propos, vous le savez, des termes comme celui que vous venez d'utiliser. Soyez prudents. C'est un rappel, s'il vous plaît, qui s'adresse à tout le monde.

M. le premier ministre, réponse.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, il y a une étude indépendante qui a été commandée par le syndicat et par le gouvernement. Cette étude va être déposée lorsque la négociation sera terminée, que l'entente sera signée. C'est comme ça qu'on négocie avec les syndicats. Il me semble que le chef du PQ devrait avoir assez d'expérience pour comprendre ça.

• (10 h 30) •

Le Président : Question principale, Mme la députée de Sherbrooke.

Réforme de la gouvernance scolaire

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : M. le Président, le ministre de l'Éducation a de la chance parce que les problèmes dans son projet de loi sur les commissions scolaires sont aussi graves que ceux de la réforme en immigration, mais, comme son collègue a monopolisé l'attention médiatique, il a échappé jusqu'à maintenant aux critiques. Pourtant, on constate que son projet de loi est rempli de vices cachés. Il a été rédigé sans réfléchir, au point où même le choix des mots laisse à désirer, alors que chaque mot compte dans un projet de loi.

Le ministre lui-même a concédé qu'en donnant le droit aux directions d'école de majorer les notes il s'était trompé et qu'il aurait dû inscrire «modifier». C'est grave. Ça montre à quel point le projet de loi est brouillon. Et, même s'il change un mot, c'est une mauvaise idée de laisser les directions jouer avec les notes. Jamais, dans un cégep ou une université, les enseignants n'accepteraient qu'on modifie leurs notes, et ceux du réseau scolaire ne l'acceptent pas non plus. Ils sont plus de 6 000 à avoir écrit au ministre dans les dernières semaines pour lui dire qu'ils se sentent insultés par le projet de loi. Ils font un sit-in en ce moment devant le bureau du ministre. Au moment où on a plus que jamais besoin de recruter des nouveaux enseignants et de retenir ceux qui restent, c'est inquiétant.

Qu'est-ce que le ministre va faire pour rétablir la confiance avec les enseignants?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, je visite des écoles fréquemment, je vais les voir. Je parle, bien sûr, aux leaders syndicaux, mais je parle aussi à leurs membres. Je m'en vais avec ma boîte à lunch, je dîne avec des profs d'école du primaire et du secondaire, et on jase, et il n'y a pas personne sur le terrain qui nous parle d'une crise de confiance. Ce qu'ils nous disent, c'est que l'espoir est revenu enfin dans le réseau de l'éducation. Ce qu'ils nous disent, c'est que c'est comme si on avait ouvert les fenêtres, puis qu'enfin on avait changé l'air qui était vicié par les 15 dernières années, et qu'il y a de l'espoir qui s'en vient.

Donc, oui, c'est vrai, on a déposé un projet de loi. Qu'est-ce qui arrive après? On tient des auditions. On écoute les gens avec sérieux et respect. Il va y avoir des propositions d'amendement qui vont venir de notre côté, qui vont probablement venir aussi des oppositions, qui vont nous permettre de bonifier ce projet de loi là. Est-ce que quelqu'un va être surpris de ça? Absolument pas. Est-ce qu'il y a une crise avec les enseignants? Absolument pas. J'invite ma collègue à se promener dans les écoles, à aller dans des forums, à discuter avec les associations. Les enseignants sont contents, sont rassurés de ce qui se passe dans le réseau scolaire et par la nouvelle direction que prend l'ensemble du gouvernement.

Le Président : En terminant.

M. Roberge : Branchez-vous sur les Québécois.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Encore une fois, prudence dans les propos. Vous le savez. Vous les connaissez, ces propos. Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : On ne fait pas des sit-in quand on est rassurés. À part le maquillage de notes, la liste des vices cachés est longue : centralisation des pouvoirs au ministère de l'Éducation, possibilité de conflits d'intérêts, discrimination envers les francophones. Le ministre demande même aux centres de services de partager leurs ressources avec les écoles privées, comme si on ne donnait pas déjà assez de ressources du public au privé, avec 548 millions juste cette année. Ça, c'est 10 fois plus que ce que le ministre espère récupérer en quatre ans avec sa réforme.

Si, sa priorité, c'est vraiment financer les services, il devrait commencer par aller chercher cet argent-là. Est-ce qu'il est prêt à le faire?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, on a des oppositions qui s'opposent. Ils sont convaincus que c'est la bonne façon de faire de la politique. On dénonce, peu importe ce qui arrive.

Écoutez, si on a la Fédération québécoise des directions d'établissement qui sont venus nous dire que c'était une bonne chose, si on a Mme Hogue, présidente de la commission scolaire des Laurentides, une commissaire, si on a M. Demers, président de la commission scolaire des Navigateurs, si on a la fédération des comités de parents, les deux associations professionnelles de direction d'école, si on a autant de gens qui sont venus nous dire...

Une voix : ...

Le Président : Je m'excuse. M. le député. Continuez, M. le ministre.

M. Roberge : ... — c'est bon — qui sont venus nous dire que c'était un bon projet de loi, qui sont venus nous proposer des amendements pour l'améliorer, bien, peut-être qu'on devrait se rebrancher, du côté de l'opposition, avec ceux et celles qui font l'école à tous les jours puis qui attendent juste qu'on les écoute.

Une voix : ...

Le Président : M. le député! M. le député de D'Arcy-McGee, vous n'avez pas la parole. En principe, je ne devrais pas vous entendre. Elle appartient à ceux qui posent des questions et à ceux qui répondent. Merci de votre collaboration. Question, Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Il y a quelques mois, j'avais dû retirer mes propos en Chambre quand j'ai comparé les façons de faire du ministre de l'Éducation à celles de l'ancien ministre de la Santé. Depuis ce temps-là, les groupes qui ont défilé devant nous en commission parlementaire ont fait exactement le même parallèle. Et le ministre... et le député de La Pinière a reconnu lui-même que la CAQ copiait ses méthodes, et je le cite : «Ils vont vite et imposent, pour empêcher la résistance de se mettre en place. C'est ce que j'ai fait.» On connaît les dommages que ça a faits en santé.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Labrie : Est-ce que le ministre de l'Éducation peut prendre le temps d'écouter et de travailler en collaboration pour réformer le réseau de l'éducation comme tout le monde veut le faire? Mais on veut le faire ensemble.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation. Tous attentifs à la réponse, s'il vous plaît.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : D'abord, je trouve cette remarque assez insultante pour notre réforme qu'on tente de faire. D'ailleurs, Mme Malorie Flon, directrice du développement à l'Institut du Nouveau Monde, qui est arrivée et qui nous a dit : «...le dernier gouvernement a réformé la gouvernance des établissements de santé, [...]en en réduisant le nombre. [En plus,] les membres des C.A., tout comme les P.D.G., sont désignés par leurs pairs ou nommés par le ministre — là, elle parle de la réforme en santé. Les citoyens n'y ont plus leur place. Les établissements de santé — selon plusieurs observateurs — [...]ont perdu leur proximité avec les communautés. Le p.l. n° 40 ne va pas [...] là...»

Et l'Institut du Nouveau Monde ne travaille pas pour la Coalition avenir Québec. Je rassure les gens ici.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Aide aux itinérantes et aux femmes en difficulté

Mme Hélène David

Mme David : Bonjour, M. le Président. M. le Président, la situation des femmes sans abri et itinérantes est très préoccupante. Elles sont parmi les plus négligées de notre société. La situation est urgente. Les besoins sont criants. Doit-on rappeler qu'en 2018-2019 uniquement ce sont 40 458 nuitées dans cinq centres d'hébergement pour femmes itinérantes qui ont dû être refusées, à Montréal seulement, faute de place? 40 458, M. le Président, c'est deux fois le Centre Bell rempli à craquer.

Les femmes itinérantes sont les plus vulnérables de notre société. Elles vivent dans une pauvreté extrême. Elles sont souvent aux prises avec des problèmes de santé mentale, de consommation, de violence chronique, mais elles sont invisibles. Elles marchent dans les lieux publics avec leur vie dans leurs chariots d'épicerie, tentant de se fondre à la foule. L'aide récente annoncée de 1 million de dollars est nettement insuffisante.

M. le Président, est-ce que la ministre de la Condition féminine entend enfin agir pour améliorer...

Le Président : Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Danielle McCann

Mme McCann : M. le Président, ma collègue soulève effectivement un dossier très important, et d'ailleurs je veux tout de suite dire que nous avons rencontré la semaine dernière, mes collègues et moi, la ministre de la Sécurité publique, la ministre de la Condition féminine aussi est très impliquée dans le dossier, la ministre de la Justice... Nous avons rencontré les regroupements des personnes qui s'occupent de l'hébergement des femmes itinérantes ou des femmes victimes de violence conjugale. Effectivement, il y a eu un investissement de 1 million de dollars pour les maisons de deuxième étape, les maisons, hein, pour des femmes qui sortent de la crise et qui ont besoin évidemment d'être logées, qu'on s'occupe d'elles et de leurs enfants aussi pour une certaine période de temps. On nous a dit que ça a vraiment aidé. Mais il faut aller plus loin, M. le Président. Et la première chose à faire dans ce dossier-là, c'était de rencontrer ces femmes qui s'occupent de tout cet hébergement pour les femmes violentées, itinérantes...

Le Président : En terminant.

Mme McCann : ...bien prendre connaissance des problématiques, et il y aura un plan d'action.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Hélène David

Mme David : M. le Président, je m'adresse encore à la ministre de la Condition féminine. Les solutions sont connues. Il faut augmenter les places en hébergement, rendre plus équitable le financement de toutes ces places, revoir le Programme de soutien aux organismes communautaires, revoir les budgets en tenant compte des nouvelles réalités de l'itinérance, dont la proportion plus importante de femmes. Le travail à faire est énorme.

Quelle est votre feuille de route, Mme la ministre de la Condition féminine?

Le Président : On s'adresse toujours à la présidence. Mme la ministre de la Condition féminine, en réponse.

Mme Isabelle Charest

Mme Charest : Oui, merci, M. le Président. Je suis entièrement d'accord avec les propos de ma collègue de Marguerite-Bourgeoys. Il y a énormément de travail à faire. Il y a énormément de moyens financiers qu'il faut déployer aussi pour pouvoir contrer cette situation qui est encore excessivement déplorable et malheureuse. C'est pour ça qu'on doit travailler en synergie. Et, ma collègue ministre de la Santé, c'est elle qui est responsable de ces budgets-là. Alors, mon travail est de coordonner ce travail avec aussi la ministre de la Sécurité publique, la ministre de la Justice. J'ai rencontré les organisations, les regroupements, l'alliance, et j'ai rencontré ces groupes de femmes...

Le Président : En terminant.

Mme Charest : ...pour pouvoir coordonner ce travail et je continue de coordonner ce travail.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Hélène David

Mme David : La rencontre, la semaine dernière, elles avaient 20 minutes pour présenter, M. le Président. Ce n'est pas beaucoup devant des problématiques aussi importantes. La ministre de la Condition féminine était représentée par des attachés politiques. Et finalement il y a encore énormément de questions. Les nuits sont déjà glaciales. L'hiver sera très long. Les refuges déborderont encore et encore. Il manque de tout, M. le Président. La ministre de la Condition féminine doit se faire entendre. Elle doit s'occuper des femmes vulnérables. Elle doit se battre pour elles. Il reste quelques mois avant le prochain budget.

• (10 h 40) •

Le Président : Mme la ministre de la Condition féminine.

Mme Isabelle Charest

Mme Charest : Oui, merci, M. le Président. Donc, effectivement, la rencontre a eu lieu la semaine dernière. Ce sont mes attachés qui étaient présents parce que j'étais en mission à Paris. Et, voyant l'urgence de la situation, je n'ai pas voulu retarder cette rencontre-là, qui est si importante, parce que je n'étais pas présente. Puis, encore une fois, mon travail, c'est de, justement, organiser ces rencontres, et je me suis assurée que ce moment-là était disponible et que ma collègue à la Santé, à la Justice et à la Sécurité publique puissent rencontrer ces groupes. Pour ma part, j'ai rencontré tous ces groupes. On a eu beaucoup plus que 20 minutes. J'ai visité des centres d'hébergement aussi. Alors, je peux vous assurer que nous faisons le travail et que ma voix est entendue auprès de mes collègues...

Le Président : En terminant.

Mme Charest : ... de tous les ministères. Merci.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Joliette.

Modification de la gouvernance scolaire

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Alors, en ce qui concerne le projet de loi n° 40, ce qui est assez fascinant, ce n'est pas ce que le ministre dit, c'est ce qu'il ne dit pas. Il y a des tonnes d'éléments dans ce projet de loi qui ne sont pas connus et qui portent des réformes assez spectaculaires pour la suite des choses en matière d'éducation.

Le ministre nous dit que c'est un projet de loi qui vise la décentralisation. Or, il y a une page complète de nouveaux pouvoirs pour le ministre, qui sont centralisés dans ses mains, jusqu'à celui de pouvoir communiquer directement avec les parents, les enseignants, les élèves dans toutes les écoles du Québec. Et par ailleurs, les organismes qu'il nous mentionne, les directions d'école qui seraient celles qui connaissent les élèves par leurs noms et vers qui on décentraliserait, quand on leur demande quels nouveaux pouvoirs elles acquièrent, silence total, elles sont incapables de nommer un seul pouvoir.

Pourquoi tenir ce discours qui ne tient pas la route, M. le ministre de l'Éducation?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation, vous êtes le seul à avoir la parole.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, je plaide coupable au fait qu'il y a un article, dans le projet de loi n° 40, qui permettra à l'avenir au ministre d'écrire une lettre aux enseignants du réseau. Ça va peut-être arriver qu'on écrive une lettre au début de l'année pour les encourager, pour les remercier, ou peut-être à la fin de l'année pour les remercier encore, pour leur souhaiter de prendre du repos.

Une voix : ...

Le Président : Monsieur, s'il vous plaît!

M. Roberge : Ça se peut aussi que le gouvernement et le ministre, moi ou un autre, écrivent une lettre aux gens qui travaillent dans le réseau scolaire ou aux parents pour les informer de ce qui s'en vient, pour les tenir au courant des modifications, notamment pour ce qu'on va faire avec le cours d'éthique et culture religieuse.

Est-ce que c'est de la centralisation? Bien non, M. le Président. Si vraiment le seul argument qu'ils ont pour dire qu'on fait supposément une centralisation, c'est de dire que le gouvernement, dans un article bien clair, se donne le droit de communiquer avec les gens qui font le réseau scolaire, c'est qu'ils n'ont vraiment aucun argument.

Le Président : Je rappelle simplement que j'entends des mots qui sont prononcés, qui ne devraient pas l'être, par ceux qui n'ont pas la parole. Qu'ils se reconnaissent, sinon je les indiquerai. Mme la députée de Joliette, à vous la parole.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Je n'ai toujours pas entendu les nouveaux pouvoirs des directeurs d'école vers qui cette décentralisation est supposée aller.

L'autre chose, c'est qu'aux dernières nouvelles ceux qui connaissent les élèves par leur nom, la petite ligne de communication du gouvernement, ce sont les enseignants. Or, les enseignants, ils s'opposent viscéralement au projet de loi du ministre, tellement qu'aujourd'hui ils sont en sit-in au ministère de l'Éducation. Une des raisons : parce que le ministre donne le pouvoir aux directions d'école — en voilà un, nouveau pouvoir — de majorer les notes contre l'avis des enseignants.

Qu'est-ce qu'il a à répondre à ça, le ministre de l'Éducation?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation. Nous sommes tous attentifs. Je demande votre collaboration.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, ma collègue nous demande : Mais quels pouvoirs y aura-t-il davantage dans les écoles, dans les conseils d'établissement? Bien, il y a des articles qui précisent que les conseils d'établissement pourront maintenant adopter les projets éducatifs. Ce n'est pas rien, ça. Les conseils d'établissement pourront aussi adopter les plans de lutte contre l'intimidation. Ce n'est pas rien, ça...

Des voix : ...

M. Roberge : M. le Président, j'ai enseigné 17 ans à des préados, je n'ai jamais eu un groupe qui manquait autant de maturité...

Le Président : Non, je m'excuse, non. M. le ministre de l'Éducation, vous êtes appelé à répondre à la question. Je me chargerai... Non, je me chargerai de faire en sorte... et je l'ai déjà fait, le rappel.

Une voix : ...

Le Président : M. le leader du gouvernement, d'abord, je suis debout. Je vais vous demander... vous vous relèverez. Je vous demande de vous asseoir. Ça fait partie de nos règles.

Une voix : ...

Le Président : Non, M. le leader du gouvernement. M. le leader du gouvernement, je vous demande d'être prudent et je vous demande de vous calmer, tous.

M. le leader du gouvernement, on ne se parlera pas de cette façon-là. J'ai demandé et je demande au ministre de l'Éducation de poursuivre sa réponse, d'être attentif, d'être prudent aux propos. Il me semble que c'est très clair. M. le ministre de l'Éducation, je m'adresse à vous, je me chargerai de faire taire ceux et celles qui parlent trop fort. Je l'ai dit il y a quelques secondes, je pense que les gens auront compris, sinon je les pointerai. M. le ministre de l'Éducation, vous poursuivez votre réponse.

M. Roberge : Eh bien, M. le Président, donc il y a des nouveaux pouvoirs aux conseils d'établissement. Les gens qui veulent les voir les voient. Les gens qui ne veulent pas les voir regardent ailleurs.

Le Président : Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : C'est quoi, ce nouveau pouvoir? C'est le fait de pouvoir adopter sans avoir la signature de la commission scolaire. Wow! C'est toute une révolution pour nos directions d'école, M. le Président.

Je veux savoir ce qu'il a à dire aussi à toute cette question du magasinage d'écoles, qui va devenir exponentiel parce qu'il enlève toute notion de territoire. Donc, on va mettre nos écoles publiques, nos écoles de quartier qui vont disparaître — ça va devenir une vue de l'esprit — en compétition les unes avec les autres.

Est-ce que c'est ça, l'égalité des chances aux yeux du ministre de l'Éducation?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Malheureusement pour ma collègue, ce n'est pas ce que fait le projet de loi. Tout ce que ça dit, c'est que, si un parent est sur un territoire d'un centre de services scolaires et qu'il souhaite aller peut-être tout près de chez lui... Parce que les limites des commissions scolaires, surtout en milieu urbain, c'est des limites qui sont artificielles. Eh bien, s'il souhaite inscrire son enfant dans une école du centre du service scolaire juste à côté, s'il y a de la place de disponible, s'il est prêt à transporter son élève, bien, il faut que ce soit simple. On prend soin des gens, on écoute les parents, on offre le meilleur aux élèves. Sincèrement, il n'y a aucun scandale là-dedans.

Le Président : Question principale, M. le député de Jean-Lesage.

Programme de remboursement des lunettes
et lentilles cornéennes pour enfants

M. Sol Zanetti

M. Zanetti : Merci, M. le Président. Le remboursement des lunettes et des lentilles pour les enfants, c'est une excellente idée, tout le monde s'entend, mais cet argent-là devrait aller aux familles et pas aux fraudeurs.

Ce matin, Le Journal de Montréal nous apprenait un petit truc malhonnête pour faire un 250 $ facile. Ce n'est pas compliqué : on va sur le site de la RAMQ, on met notre numéro d'assurance maladie, le numéro d'assurance maladie d'un enfant, n'importe lequel, on met le numéro de TVQ d'un optométriste, n'importe lequel, et paf! un chèque de 250 $.

Même pas besoin de facture avec la CAQ, là. Frauder le gouvernement, là, c'est simple, simple, simple. On sait que la CAQ n'aime pas beaucoup la... bien, la démocratie, je n'irais pas là tout de suite, la bureaucratie...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Zanetti : ...voir les fonctionnaires...

Une voix : ...

Le Président : M. le leader du gouvernement, effectivement, à plusieurs reprises... Je vais vous laisser aller, mais, rapidement, je viens de faire ce rappel à maintes reprises, alors, M. le... soyez prudent. Effectivement, M. le leader du gouvernement, c'est bien compris.

Je pense que vous l'avez compris en le disant également, M. le député. Alors, je prends ça pour acquis. Continuez.

M. Zanetti : Je confesse le lapsus.

Combien de demandes de remboursement est-ce qu'on a effectuées depuis ce matin, à cinq heures?

Le Président : M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : M. le Président, je remercie le député de Jean-Lesage de me laisser parler de notre programme de lunettes. On parle souvent ici de ce que les citoyens nous parlent quand on est dans notre comté, mais ça, c'est un programme dont ils aiment me parler, et la plupart me remercient, puis les citoyens de Taillon, c'est des gens honnêtes, des travailleurs honnêtes et qui sont contents de ce programme-là.

Premièrement, il faut savoir pourquoi on a développé ce programme-là. Ce programme-là fait partie de notre mission Agir tôt, que je porte avec le ministre de la Famille et le ministre de l'Éducation, pour la réussite scolaire de nos enfants. Parce que, pour réussir à l'école, c'est important d'être capable de voir, de lire et de reconnaître les gens autour de nous, et, pour ça, il y avait des gens qui étaient évalués par l'optométriste, ils ne pouvaient pas payer des lunettes, hein, puis c'est ça qu'on est venus régler avec ça.

Ce que le député de Jean-Lesage ne sait peut-être pas, c'est que la RAMQ, elle a les données des optométristes, elle est capable de croiser les données. Ce qu'on a eu depuis le début du programme, c'est 31 000 demandes de remboursement. Il y a eu seulement une quarantaine de demandes qui ont levé un drapeau rouge, qui ont dû être vérifiées. Puis on a eu une seule plainte dans ce programme. M. le Président, c'est un programme dont on est très fiers, qui, encore une fois, vient aider nos enfants.

Le Président : Première complémentaire.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Sans commentaire sur les réponses. C'est la règle. M. le député de Jean-Lesage. S'il vous plaît!

M. Sol Zanetti

M. Zanetti : Sur le fond, tout le monde s'entend, on est d'accord qu'il faut rembourser ces choses-là, pas de problème. Mais ce que je comprends de la réponse du ministre, au fond, c'est qu'il nous dit : Le système fonctionne bien, pas besoin de plus de vérifications. Même si ça fait la première page du Journal de Montréal, là, puis que ça va attirer énormément de gens mal intentionnés, il n'y a pas de problème, on laisse ça aller.

Est-ce que c'est ce que je dois comprendre, M. le Président?

Le Président : M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : M. le Président, on va vers une ère nouvelle. On aurait pu mettre une cinquantaine de fonctionnaires pour vérifier, regarder les factures, regarder la TVQ. Nous, on a des systèmes informatiques. On a de l'intelligence artificielle. On a les données qu'on veut demander aux citoyens. On n'a pas besoin de leur demander. Nous, les systèmes se croisent, les systèmes se parlent. Le taux de l'inquiétude, ce ne serait à peu près... même pas 1 % des demandes. Je ne pense pas que 50 fonctionnaires feraient mieux le travail que ce qu'on a actuellement sur le terrain.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Jean-Lesage.

M. Sol Zanetti

M. Zanetti : C'est quand même hallucinant, là. La différence entre hier puis aujourd'hui, c'est que, là, aujourd'hui, ça a fait la première page du Journal de Montréal. Je ne m'attendais pas à ce que...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Zanetti : Je ne m'attendais pas à ce qu'on fasse ça.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Je suis obligé de vous le demander encore une fois. La règle est que celui qui pose la question est le seul à avoir la parole, celui qui répond également. C'est la règle à observer. Nous allons tous l'observer. M. le député.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le...

• (10 h 50) •

M. Zanetti : Mais où est le shérif de La Peltrie lorsqu'on a besoin de lui? La question que je me pose, c'est la façon un peu amateur dont est né... les enjeux numériques entourant ces remboursements-là.

Est-ce que ça satisfait le député et ministre délégué à la Transformation numérique? Est-ce que c'est avec cette rigueur-là qu'il va aussi protéger nos données personnelles?

Le Président : M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : M. le Président, première page du Journal de Montréal... Faire la bonne chose pour nos enfants, hein, c'est quoi, le choix, exactement, ici? Moi, ce que je veux, c'est faire le bon choix pour nos enfants, leur permettre d'aller à l'école, leur permettre de réussir à l'école, leur permettre de contribuer à la société de façon adéquate. Tout est là pour que les données soient vérifiées. On a même un système où, si jamais il le faut, dans cinq ans, on peut faire les vérifications, comme à Revenu Québec. S'il le faut, surtout pour les citoyens qui prennent leurs prescriptions d'optométriste ailleurs qu'au Québec, on leur demande de garder leurs prescriptions parce qu'eux seront vérifiés. Tout est là, dans le système, pour éviter la fraude, M. le Président. Nous, ce qu'on veut, c'est aider nos enfants d'abord et avant tout.

Le Président : Question principale...

Des voix : ...

Le Président : Sans commentaire. Question principale, M. le député de Jacques-Cartier.

Services gouvernementaux offerts aux Québécois d'expression anglaise

M. Gregory Kelley

M. Kelley : M. le Président, le 4 novembre dernier, le ministre responsable de la langue française a affirmé dans une mêlée de presse vouloir restreindre les services en anglais aux seuls membres de la communauté anglophone historique et qu'il va créer une liste. Dans la communauté, beaucoup se sont questionnés au sujet de cette liste. Comment on détermine qui est membre de la communauté historique? Le premier ministre a été questionné sur un autre dossier mal ficelé de son ministre et il a dit : Comment? Comme par la loi 101. Si vos parents ont étudié dans le système anglophone, vous pourrez avoir des services en anglais.

Je ne sais pas si le ministre a lu The Gazette ou les autres médias anglophones, mais les gens sont inquiets, et le gouvernement ne fait rien pour les rassurer. Le ministre nous répond depuis mardi que les immigrants doivent avoir des services en français. Ce n'est pas ce principe-là qui est en jeu.

Ma question est simple, M. le Président : Comment le gouvernement fera-t-il pour distinguer un anglophone historique parmi la communauté anglophone du Québec? Quels sont les critères pour être sur sa liste?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, pour être clair, et on a eu cet échange-là avec le député de Jacques-Cartier la semaine dernière, et je pense que c'est important de relater adéquatement mes propos, il n'a jamais été question de liste, M. le Président. Ce qu'il est question dans le cadre de la discussion, M. le Président, c'est le fait que l'État québécois communique en français avec les nouveaux arrivants. C'est le sens de mes propos et ça a toujours été le sens de mes propos. Alors, la question qui se pose ici, M. le Président, c'est : Est-ce que le Parti libéral est en désaccord avec le fait que, pour les nouveaux arrivants, l'État québécois s'adresse en français à eux dans le cadre des communications gouvernementales? C'est fondamental, M. le Président.

Du côté du gouvernement, nous croyons que, dans le cadre des communications que nous avons avec les personnes immigrantes, elles doivent se faire en français, parce que, l'État québécois, la langue officielle du Québec, la langue de l'État, la langue commune au Québec, c'est le français. Et donc, lorsqu'on accueille une personne immigrante, c'est un engagement partagé. La société québécoise accueille une personne immigrante, qui fait le choix du Québec, en français, et, en contrepartie, cette personne-là décide de s'intégrer au Québec en français, et le gouvernement du Québec développe des cours de francisation, un parcours d'accompagnement personnalisé...

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...pour s'assurer que la personne puisse exprimer tout son talent en français au Québec.

Le Président : Question principale, M. le député de Jacques-Cartier.

Services gouvernementaux offerts aux anglophones du Québec

M. Gregory Kelley

M. Kelley : M. le Président, tout le monde a vu le topo de CTV où on voit clairement le ministre déclarer qu'il y aura une liste. «That will be on the list», il a dit, entre guillemets. M. le Président, le ministre parle de quelle liste? Depuis cette déclaration de 5 novembre dernier, le ministre n'a rien fait pour expliquer son idée.

If he is the one that is saying that he's cited out of context, he needs to clarify the situation. But you know what, Mr. President? He has not, and he is not taking the time. The journalist asked a follow-up question, he refused to answer.

I give him the opportunity right now in this House to clarify, «What does he mean by a list and what does he mean by "historic Anglophone?"» The people deserve to know.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Encore une fois, la règle est claire, on ne commente pas sur les questions. La parole n'appartient qu'au ministre. M. le ministre, votre réponse.

Une voix : ...

Le Président : M. le député de La Pinière, je vous entends encore une fois. S'il vous plaît. La parole n'appartient qu'au ministre.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, il n'y a pas de liste, il n'est pas question de liste. Ce que j'ai souligné en mêlée de presse, c'est le fait que, l'État québécois, la langue officielle de l'État québécois, c'est le français. Tous les nouveaux arrivants que nous accueillons doivent être accueillis en français, et, dans le cadre des communications avec l'ensemble de l'État québécois, les ministères, les organismes, ça doit se passer en français.

Depuis que je suis arrivé comme ministre de l'Immigration, M. le Président, on a développé des cours de francisation, un parcours d'accompagnement personnalisé. On a donné des allocations supplémentaires en francisation pour que les personnes immigrantes s'intègrent en français à la société québécoise. Je pense que le député de Jacques-Cartier devrait nous appuyer sur ce point.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Cela met fin à la période de questions et réponses orales. Merci.

Motions sans préavis

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. En fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je reconnais maintenant un membre formant l'opposition officielle. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Souligner les Journées d'action contre la violence faite aux femmes

Mme David : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la ministre responsable de la Condition féminine, la députée de Sherbrooke, la députée de Gaspé, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale souligne les journées d'action contre la violence envers les femmes, qui se tiennent du 25 novembre au 6 décembre 2019;

«Qu'elle dénonce la violence faite envers les femmes, puisque dans toute société libre et égalitaire, aucune violence ne doit être tolérée;

«Qu'elle salue et qu'elle soit solidaire de l'implication des organismes, groupes de femmes, bénévoles qui oeuvrent chaque jour pour contrer toute forme de violence à l'égard des femmes, dont la violence conjugale, l'exploitation sexuelle et les agressions sexuelles, et qui soutiennent les personnes qui en sont victimes.»

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui. Alors, il y a consentement pour un débat de deux minutes par intervenant, en commençant par la députée de Marguerite-Bourgeoys, la ministre responsable de la Condition féminine, la députée de Sherbrooke et la députée de Gaspé.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, je comprends qu'il y a consentement pour qu'il y ait quatre intervenants et pour que la durée des interventions se limite à une durée de deux minutes. Et nous allons entendre Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Hélène David

Mme David : Merci beaucoup. Et merci que ça soit avec débat parce que c'est extrêmement apprécié d'avoir ne serait-ce que deux minutes par intervenant pour parler de cette condition épouvantable qu'est la violence envers les femmes.

Alors, des journées pour quoi? Parce qu'il y en a trop, de violence. Des journées pour qui? Alors, est-ce qu'on a besoin de parler de violence conjugale, dans les derniers jours, dans les dernières semaines? Est-ce qu'on a besoin encore d'insister pour dire qu'il y a eu un meurtre, un homicide perpétré il y a quelques jours? Encore un conjoint qui a avoué avoir tué sa femme. Il y en a eu deux autres précédemment. Est-ce qu'on a besoin d'insister sur le fait que c'est une situation absolument épouvantable? Doit-on dire aussi qu'il y a des milliers, des milliers de refus d'hébergement en maisons pour les femmes victimes de violence conjugale? Les maisons débordent, vous le savez tous. Il faut agir.

La semaine dernière, par exemple, il a fallu pas moins de 15 appels, 15 — c'est pire que les urgences, Mme la ministre de la Santé — 15 appels par SOS Violence conjugale pour trouver une place pour une femme, quelque part au Québec, pour se réfugier avec ses enfants. Ce n'est vraiment pas une situation qui est drôle.

On vient de parler, tout à l'heure, de l'itinérance au féminin. Elle est invisible, cette itinérance. Tous ceux et celles qui se penchent le moindrement sur cette question, l'image qui vient de l'itinérance, ce sont des hommes. L'argent qui vient malheureusement trop souvent pour l'itinérance, on pense encore aux hommes. Quand il y a des journalistes qui vont dans les maisons, c'est très, très rare qu'on aille dans des maisons pour itinérance au féminin. Il faut s'en occuper, les centres sont débordés. Et j'ai parlé tout à l'heure de 40 000 nuitées, seulement à Montréal, seulement dans cinq centres, qui avaient été, donc, refusées.

Les violences à caractère sexuel, est-ce qu'on a besoin d'en parler? On est deux ans après #metoo. On l'a souligné. Il y a 50 % des femmes qui disent avoir au moins vécu un épisode — 50 %, c'est une sur deux ici, dans cette enceinte — au moins un épisode de violence physique ou sexuelle depuis l'âge de 16 ans. Les violences sexuelles, évidemment, visent les femmes les plus vulnérables, les chambreuses dans les logements, victimes de propriétaires abusifs, victimes d'autres chambreurs. On n'en parle pas assez souvent.

La loi n° 151, oui, et on en est fiers, notre gouvernement, j'en suis personnellement très fière, pour contrer les violences, les prévenir, accompagner les victimes dans les collèges et les universités. Mais il faut aller beaucoup plus loin. J'invite mes collègues du gouvernement à réfléchir à élargir beaucoup. La violence intersectionnelle, ça, c'est un mot pour dire que, si on est autochtone, si on a un handicap, si on est immigrante, si on est réfugiée ou sans statut, les femmes de la communauté LGBTQ, ce sont les premières victimes de violence.

On ne parle jamais du harcèlement de rue. On en a parlé en France, il y a même eu une loi. Mais, ici, il y en a, du harcèlement de rue, et ceux qui prennent les transports en commun ont vu des belles publicités par rapport à ça. Et que dire évidemment, pour terminer, Mme la Présidente — je sais que je prends trop de temps, je suis désolée, ça vaut tellement la peine — des 30 ans de commémoration, vendredi le 6 décembre, de la commémoration de la tuerie de Polytechnique? C'est vraiment un drame, un geste posé contre les femmes, contre leur place dans la société. Malheureusement, et je termine là-dessus, nous avons encore besoin de ces journées contre la violence envers les femmes.

• (11 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, nous allons poursuivre avec Mme la ministre de la Condition féminine.

Mme Isabelle Charest

Mme Charest : Merci, Mme la Présidente. Je suis heureuse d'intervenir aujourd'hui sur un sujet qui me préoccupe et qui concerne toute la population. Je tiens d'ailleurs à remercier ma collègue la députée de Marguerite-Bourgeoys pour cette motion.

Le 25 novembre débuteront les 12 jours d'action contre la violence faite aux femmes. C'est l'occasion de réitérer notre engagement dans la lutte contre la violence. Et je suis persuadée que nous partageons tous cet engagement.

Il faut le répéter et le répéter souvent, la violence fait toujours et encore des victimes, les femmes en particulier, et c'est inacceptable. La violence faite aux femmes est souvent graduelle et insidieuse avant d'être physique, de laisser des traces et de faire des victimes. C'est pourquoi il faut poursuivre nos efforts de sensibilisation pour nous assurer de faire prendre conscience à toute la population que toute forme de violence est inacceptable et que les filles et les femmes apprennent à reconnaître les signes, à les dénoncer et à aller chercher de l'aide.

En plus de la sensibilisation, il faut que les ressources d'aide et le soutien soient au rendez-vous. C'est d'ailleurs pourquoi nous avons rencontré les regroupements des maisons d'hébergement, la semaine dernière, afin de les entendre et de chercher des solutions pour mieux les soutenir dans leur mission d'accueil et de soutien aux victimes. Je tiens aussi à rappeler les travaux du comité non partisan et la mise sur pied du comité d'experts et d'expertes sur l'accompagnement des personnes victimes d'agressions sexuelles et de violence conjugale.

Je remercie mes collègues parlementaires de toutes les allégeances de leur travail ainsi que les membres du comité d'experts et d'expertes. Je tiens aussi à saluer le travail des membres de la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs, menée par mon collègue député de Vachon. De plus, il faut reconnaître le travail de ma collègue ministre des Affaires autochtones, avec qui je collabore, et d'autres collègues ministres afin que les recommandations de la commission Viens et de l'ENFFADA ne demeurent pas sans suite. Il est essentiel de passer par-dessus la partisanerie pour lutter contre les violences.

En plus des travaux que je viens de nommer, notre gouvernement poursuit la mise en oeuvre de la Stratégie gouvernementale pour prévenir et contrer les violences sexuelles 2016‑2021 et le Plan d'action gouvernemental en matière de violence conjugale. Nous lancerons d'ailleurs une nouvelle campagne de sensibilisation à l'hiver 2020.

J'aimerais aussi rappeler qu'il y a de l'aide disponible. Les lignes d'aide téléphonique SOS Violence conjugale au 1 800 363-9010, la ligne téléphonique d'écoute, d'information et de référence destinée aux victimes d'agression sexuelle, à leurs proches ainsi qu'aux intervenants et intervenantes, 1 888 933-9007, les maisons d'hébergement pour femmes victimes de violence conjugale et leurs enfants, les CALACS, les CAVAC. Tous ces organismes terrain et toutes ces initiatives démontrent bien la mobilisation du Québec, de notre gouvernement, mais aussi de l'ensemble des partis présents dans cette Chambre afin de lutter contre les violences faites aux femmes.

Alors, je profite de l'occasion aujourd'hui qui m'est offerte pour lancer un message aux femmes québécoises. Si vous êtes victime de violence, peu importe la forme, parlez, dénoncez. Le Québec est derrière vous. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la ministre. Maintenant, Mme la députée de Sherbrooke, la parole est à vous.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Merci, Mme la Présidente. Chaque année, on se lève tous ensemble ici, à l'Assemblée nationale, pour dénoncer les violences faites aux femmes, et c'est très important de le faire parce que l'ampleur du problème mérite d'être soulignée et que la première étape pour régler un problème, c'est de le nommer.

Au Québec, les données montrent qu'il y a plus de 20 000 infractions contre la personne dans le contexte conjugal et plus de 5 800 infractions sexuelles par année. C'est énorme, et pourtant c'est la pointe de l'iceberg parce qu'il y a seulement 30 % des victimes de violence conjugale et 5 % des victimes d'agression sexuelle qui portent plainte. On a à peine un portrait de la situation.

Donc, oui, je me lève aujourd'hui, comme je le fais très souvent d'ailleurs, pour dénoncer toute cette violence, mais je me lève surtout pour demander plus d'action, plus de fonds, plus de soutien réel aux organismes et aux personnes qui se lèvent, elles, tous les jours pour soutenir les femmes victimes de violence. Elles le font avec des conditions de travail et des salaires qui ne rendent pas justice à leurs compétences et à leur expertise, mais elles le font parce que la cause leur tient à coeur, et on a le devoir de les soutenir davantage.

Et je m'en voudrais de ne pas utiliser une minute pour nommer d'autres formes de violences vécues par les femmes. On pense d'emblée aux violences sexuelles et conjugales. C'est normal et c'est fondamental d'en parler. Mais on oublie qu'il y a des milliers de femmes... vivent aussi d'autres formes de violence comme la violence institutionnelle.

On sait, par exemple, que la majorité des personnes qui subissent le temps supplémentaire obligatoire dans nos services publics, ce sont des femmes, que la majorité des personnes qui ont subi des coupures dans les dernières années et qui sont poussées vers l'épuisement, ce sont aussi des femmes. Et ça, c'est une forme de violence. On pourrait parler de la violence économique aussi et des milliers de femmes qui se battent encore aujourd'hui pour l'équité salariale. La liste des violences subies par les femmes est longue.

Alors, oui, il faut dénoncer toutes les formes de violence faites aux femmes. Et, pour atteindre notre objectif d'une société libre et égalitaire, comme on s'apprête à le voter ensemble, tous les ministères doivent faire leur part et poser des gestes concrets. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Nous poursuivons avec Mme la députée de Gaspé.

Mme Méganne Perry Mélançon

Mme Perry Mélançon : Mme la Présidente, au nom de ma formation politique, j'ajoute ma voix à celles de mes collègues des autres partis pour dénoncer toutes les formes de violence visant les femmes.

Quel que soit leur âge et leur origine, partout dans le monde des femmes subissent des injustices, de l'oppression et voient leurs droits, leur intégrité et leur liberté bafoués. On ne peut rester insensibles face à cette situation. Qu'elle soit physique, psychologique, sexuelle, conjugale, financière, la violence faite aux femmes ne sera jamais acceptable. Il s'agit d'un problème de société très préoccupant qui nous concerne tous, car le Québec n'est à l'abri de rien. Ensemble, nous devons travailler en amont pour prévenir les actes de violence et transformer peu à peu les mentalités. Nous devons collectivement éduquer nos jeunes, garçons et filles, non seulement pour qu'ils cessent de reproduire les gestes abusifs commis envers les femmes, mais également pour qu'ils soient en mesure de les identifier et de les dénoncer.

Je tiens aussi à souligner le travail exceptionnel des organismes de soutien qui accompagnent les femmes souhaitant mettre fin au cycle infernal de la violence. De part et d'autre, ça prend du courage et de la détermination. À tous ces artisans, ces intervenants, je dis merci. Tout ce que vous faites au quotidien est important et change la donne. Merci d'affirmer haut et fort qu'être née femme ne doit en rien constituer une raison d'accepter l'inacceptable ou encore un frein à l'épanouissement et au bonheur. Vous pouvez être assurés de notre soutien total aujourd'hui et pour le futur, jusqu'à ce que, permettons-nous de rêver, votre mission soit achevée et votre action ne soit plus requise.

Du 25 novembre au 6 décembre, unissons-nous, Québécoises et Québécois, et faisons front commun contre toute forme de violence visant les femmes. Soyons conscients que nous avons tous un rôle à jouer dans l'évolution des sociétés vers plus d'égalité et plus de justice. Ne remettons pas à demain les combats que nous pouvons mener aujourd'hui. Ne soyons pas de simples spectateurs, agissons. En matière de violence faite aux femmes, soyons totalement intolérants. Merci, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, motion adoptée à l'unanimité. Maintenant, nous poursuivons. Je suis prête à reconnaître un membre du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

Mme Lessard-Therrien : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais d'abord souligner la présence dans les tribunes d'Ugo Lapointe, de la Coalition Pour que le Québec ait meilleure mine!, et de Louis St-Hilaire, porte-parole du Regroupement pour la protection des lacs de la Petite-Nation.

Alors, je demande le consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec le député de Laval-des-Rapides, le député de Jonquière, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de s'engager à développer une politique de production et de consommation responsables des minéraux stratégiques visant l'électrification des transports dans le cadre du Plan d'électrification et de changements climatiques;

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de prioriser : la réduction à la source, l'économie circulaire, la protection de l'environnement, le respect des populations locales et l'application du principe pollueur-payeur.»

Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Il n'y a pas de consentement.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Comme il n'y a pas de consentement, je suis prête à reconnaître un membre du troisième groupe d'opposition. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

• (11 h 10) •

M. Arseneau : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la députée de Taschereau, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale exprime sa profonde préoccupation à la suite des résultats d'une récente étude du Conseil supérieur de la langue française, faisant état de la non-conformité des pratiques linguistiques des ministères et organismes eu égard au statut du français comme seule langue officielle du Québec;

«Que l'Assemblée nationale dénonce ces pratiques qui sont contraires au devoir d'exemplarité de l'État en matière linguistique, et qui nuisent à l'atteinte des buts de la Charte de la langue française en plus de miner les efforts consacrés à la francisation et ceux visant à faire du français la seule langue commune au Québec;

«Que l'Assemblée nationale réitère que, conformément à la Charte de la langue française, l'État du Québec ne peut exiger, sauf si nécessaire, des membres de son personnel ou des candidats à une charge publique, qu'ils connaissent une langue autre que la langue officielle; et

«Que l'Assemblée nationale exige que toutes les mesures soient prises afin de garantir que l'administration communique uniquement dans la langue officielle avec les usagers des services publics, sous réserve des droits de la communauté québécoise d'expression anglaise et de ceux reconnus aux peuples autochtones, et sauf circonstances exceptionnelles.»

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui, il y a consentement, sans débat.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Tanguay : Mme la Présidente, nos amendements ont été refusés, pas de consentement.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, comme il n'y a pas de consentement, je suis prête à reconnaître un membre du groupe formant le gouvernement. M. le ministre de la Famille, la parole est à vous.

Souligner la Journée mondiale de l'enfance
et la Grande Semaine des tout-petits

M. Lacombe : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le député de Pontiac, la députée de Sherbrooke, la députée de Joliette, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale souligne la Journée mondiale de l'enfance qui est célébrée aujourd'hui, le 20 novembre;

«Qu'à cette occasion, elle souligne la nécessité de défendre et de garantir les droits de l'enfant, tels que stipulés par la Convention relative aux droits de l'enfant, qui a été adoptée par l'Organisation des Nations unies en 1989;

«Qu'elle profite de l'occasion pour remercier les différents acteurs de notre société qui sont engagés envers le bien-être des enfants, notamment les parents, les services de garde éducatifs à l'enfance et les éducatrices, les organismes communautaires famille, les haltes-garderies communautaires, les centres de pédiatrie sociale en communauté, ainsi que tous les intervenants qui oeuvrent en petite enfance;

«Que cette Assemblée souligne également la Grande Semaine des tout-petits, qui se tient à travers le Québec, du 17 au 23 novembre;

«Qu'elle reconnaisse l'importance d'agir tôt et de manière concertée, afin que chaque enfant, au Québec, puisse développer son plein potentiel, peu importe ses conditions socio-économiques;

«Qu'elle mette en lumière la nécessité d'unir nos forces pour joindre tous les enfants et de travailler tous ensemble pour améliorer leur bien-être et favoriser leur épanouissement à tous les plans.»

Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Il y a consentement, sans débat.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Motion adoptée.

Avis touchant les travaux des commissions

Maintenant, à la rubrique Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui. Alors, merci, Mme la Présidente. Alors, j'avise cette Assemblée que la Commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 16, Loi visant principalement l'encadrement des inspections en bâtiment et de la copropriété divise, le remplacement de la dénomination de la Régie du logement et l'amélioration de ses règles de fonctionnement et modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec et diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 27, Loi concernant principalement l'organisation gouvernementale en matière d'économie et d'innovation, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 à 18 heures, à la salle Pauline-Marois;

La Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 34, Loi visant à simplifier le processus d'établissement des tarifs de distribution d'électricité, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

Et la Commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 37, Loi visant principalement à instituer le Centre d'acquisitions gouvernementales et Infrastructures technologiques Québec, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle du Conseil législatif, et de 15 à 18 heures, à la salle Marie-Claire-Kirkland. Voilà, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le leader. Maintenant, à la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée...

Affaires du jour

Alors, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Caire : Mme la Présidente, je vous demande d'appeler l'article 4 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 40

Reprise du débat sur l'adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Donc, à l'article 4 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat, ajourné le 19 novembre 2019, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 40, Loi modifiant principalement la Loi sur l'instruction publique relativement à l'organisation et à la gouvernance scolaires. Nous avions Mme la députée de Saint-Laurent. Je ne sais pas si vous voulez terminer votre intervention. Alors, la parole est à vous.

Mme Marwah Rizqy (suite)

Mme Rizqy : Certainement que je vais terminer mon intervention, Mme la Présidente. Vous comprendrez que ce projet de loi, la réforme scolaire, nous préoccupe grandement, surtout lorsqu'on entend les réponses ou quasi-réponses ou non-réponses du ministre de l'Éducation à plusieurs interrogations que non seulement l'opposition officielle soulève, mais que les autres partis d'opposition soulèvent, mais aussi les différents intervenants.

À l'heure actuelle, il y a la Fédération autonome de l'enseignement qui manifeste devant les bureaux du ministère de l'Éducation. Je vous rappelle que la Fédération autonome de l'enseignement, ce sont les frères d'armes, hein, étaient les frères d'armes, aussi, du ministre de l'Éducation, parce que, dans une autre époque pas si lointaine, il était lui-même enseignant et il se vantait vraiment d'avoir eu de belles années à titre d'enseignant, et de bien comprendre la nature et la fonction d'un enseignant, et que c'est la première fois que nous avons un ministre de l'Éducation qui est enseignant. Alors, on s'attendait à ce que son projet de loi soit chaudement accueilli par ses ex-collègues. C'est une douche froide, Mme la Présidente. Ils sont assis... en anglais, on dit un sit-in, donc ils sont vraiment assis devant les bureaux, ils regardent avec des pancartes qui disent : Ça ne passera pas, ça ne passera pas, la réforme du ministre de l'Éducation — je ne peux pas le nommer, hein? Mais vous comprendrez que sa réforme, elle heurte.

Et souvent le ministre dit : Moi, je ne cède pas aux lobbys. Le premier ministre aussi le dit souvent : On ne cédera pas. Mais est-ce qu'ils entendent les enseignants comme des lobbys quand, la dernière fois que nous avons regardé, c'est quand même eux qui sont là tous les jours dans nos classes, qui s'occupent de nos tout-petits, qui, avec eux, développent des liens, les aident dans leur parcours scolaire à réaliser leurs idéaux, leurs ambitions, leurs rêves, à les aider malgré certaines difficultés? Certains ont des déficits d'attention, d'autres ont des troubles d'apprentissage. Et, dans tout cela, ce sont eux, au coeur de l'enseignement, qui sont présents, accompagnés des professionnels, le personnel de soutien aussi. Tout ce monde-là travaille avec une très grande cohérence pour aider nos tout-petits. Puis aujourd'hui, bien, le projet de loi n° 40, les professeurs... pardon, les enseignants sont vraiment inquiets. Puis je vais vous dire pourquoi.

Allons à l'article 34 : «Les normes et modalités d'évaluation des apprentissages visées au paragraphe 4° du premier alinéa ne peuvent avoir pour effet de permettre la majoration automatique d'un résultat. Elles peuvent toutefois permettre exceptionnellement au directeur de l'école, après consultation de l'enseignant, de majorer le résultat d'un élève s'il existe des motifs raisonnables liés à son cheminement scolaire.» Ça, ça s'appelle du tripotage de notes, pour reprendre l'expression utilisée par Sylvain Mallette, le président de la Fédération autonome de l'enseignement.

Et là-dessus, le ministre, il faut se rappeler qu'avant d'être ministre et d'être de l'autre côté, bien, il était ici, dans l'opposition. Il a fait ses classes pas mal ici, là, en arrière, tout comme moi. Mais la différence, c'est que lui déchirait sa chemise puis dit : Ça suffit, le gonflage de notes. C'est terminé, le gonflage de notes. Par la suite, il est devenu ministre et il a envoyé une directive pour dire : On ne fait plus le gonflage de notes automatique. Par exemple, si quelqu'un a 58, bien, ce n'est pas arrondi à 60 et c'est terminé. Parfait. J'en suis. Par contre, il a fait la tournée des médias au mois de mai dernier, là, mai 2019, et il a dit : Vous allez voir, avec moi à titre de ministre de l'Éducation, c'est terminé, le tripotage de notes, il n'y en aura plus, de gonflage de notes.

• (11 h 20) •

Alors, pourquoi qu'après l'été le ministre de l'Éducation inscrit noir sur blanc à l'article 34 de son projet de loi, paragraphe 2°, que, oui, au Québec maintenant, on va pouvoir gonfler artificiellement des notes? Et il dit pour se justifier : Oui, mais l'enseignant va être consulté.

Mme la Présidente, nous, on a déposé une décision arbitrale. Dans cette décision, il y a un enseignant... l'histoire mérite d'être racontée. L'enseignant, c'est le soir, il accueille les parents. Dans son cours, il a donné des notes. Certains parents étaient fâchés, visiblement fâchés, alors ils ont fait part de leur mécontentement à l'enseignant. Toute la soirée, évidemment, l'enseignant devait justifier ses résultats auprès des parents qui étaient bien, bien fâchés. Et l'enseignant, il dit : Bien, écoutez, ce sont mes critères d'évaluation. On est en début d'année, vos enfants, on va les faire progresser. Mais l'enseignant était secoué.

Or, le directeur d'école est allé le voir à ce moment précis. Il est allé le voir après qu'il soit secoué par plusieurs parents qui n'étaient pas contents. L'enseignant, bien que visiblement secoué, le directeur le consulte, dit : Bien, rentre à la maison, si tu veux. Moi, demain, je vais continuer, je vais rencontrer les autres parents. Il a dit : Es-tu d'accord? On va peut-être changer tes notes. Ça te convient-u? Puis là il lui dit : O.K. Par la suite, l'enseignant en question est en retrait de travail. Il reste à la maison pour s'en remettre et se remet en question. Est-ce que j'ai été trop difficile? Mon directeur d'école me dit que oui, certains parents me disent oui. Il est secoué, donc il reste à la maison en arrêt de travail.

Pendant ce temps-là, l'histoire ne s'arrête pas là. Le lendemain, le surlendemain, des enseignants apprennent ce qui est arrivé à leur collègue. Ils disent : Voyons donc! On ne peut pas accepter qu'un de nos collègues se fasse brasser par des parents puis que le directeur d'école, au lieu de l'accompagner là-dedans, puisqu'il est visiblement secoué, le retourne à la maison puis dit : Regarde, on va changer tes notes, fais-toi-z-en pas, les parents vont se calmer. Les enseignants ont dit : Mais on va faire une réunion. Sur environ 110 enseignants dans cette école, un peu plus de 80 se sont présentés. Ça, c'est un haut taux de participation. C'est aussi riche que le lait que le ministre veut boire des fois, n'est-ce pas? Alors, très, très riche en participation. Et là les enseignants ont dit : Si on commence à accepter de se faire dicter par l'appréciation des parents les notes attribuées, de surcroît celle du directeur d'école, on n'est pas sortis de l'auberge.

Et là la suite des choses, le directeur d'école envoie aux élèves une lettre qui dit : Toutes vos notes, on va les modifier, inquiétez-vous pas. Les parents reçoivent la lettre. Bien, dans les autres cours, qu'est-ce que vous pensez qui est arrivé, Mme la Présidente? La pression est arrivée. Alors, certains enseignants se faisaient dire par des élèves : Eh, eh, eh! Attention! Si vous ne voulez pas qu'il vous arrive la même affaire qu'à votre collègue, là, vous allez me donner une meilleure note. C'étaient les élèves qui ont dit : Bien, si ça a marché avec l'autre, ça peut marcher avec toi maintenant, puis toi, puis toi, puis toi. Alors, le climat, vous comprendrez, a été détérioré.

La décision arbitrale là-dessus, Mme la Présidente, elle est non équivoque. L'autonomie professionnelle des enseignants... c'est seulement eux qui peuvent attribuer les notes aux élèves, pas la direction d'école. Et là-dessus elle a aussi... la décision arbitrale fait aussi mention de la notion de consentement puis de consultation et là-dedans, dans sa décision, elle met entre guillemets le terme «consentement». Elle dit : Un instant! «Consentement», là, est-ce qu'on peut parler de consentement lorsqu'on peut se sentir intimidé? Est-ce qu'on peut parler de consentement lorsqu'on nous accuse de manquer de jugement? Est-ce qu'on peut parler de consentement lorsqu'on reçoit de la pression, pression du directeur d'école, pression des parents? Est-ce qu'on peut parler véritablement de consentement, Mme la Présidente, à l'ère 2.0, où est-ce que des fois on peut même se faire humilier sur les réseaux sociaux?

Pensez-y. Ça, là, c'est un appel... L'article 34, là, c'est un appel pour que les parents disent : Si vous voulez faire changer vos notes, allez voir votre direction d'école. Ils iront consulter le professeur puis, après ça, ils feront bien qu'est-ce qu'ils voudront, ils l'auront consulté, hein, dire : Aïe! je ne suis pas content. Je veux juste te dire, les parents ne sont pas contents. Donc, après t'avoir consulté, je t'informe que ça ne sera pas 65 %, la note de quelqu'un, ça va être 75 %. D'ailleurs, Mme la Présidente, l'article 34, là, il ne met pas de balise. Est-ce que c'est faire passer l'élève ou est-ce que des fois c'est même carrément pour faire augmenter des moyennes? 65 %, ce n'est pas assez. Montons ça à 80 %? Aïe! 80 %, bien non, on sait... toi, là, on sait que tu as quelque chose d'important parce qu'il faut savoir... Le ministre nous dit souvent : Lisez tous les mots de mon article : «s'il existe des motifs raisonnables». Bien, savez-vous quoi? On l'a questionné lors des consultations. Il a été dans l'incapacité de nous dire c'est quoi, des motifs raisonnables. Est-ce qu'un motif raisonnable, c'est, lorsqu'on a un élève qui veut appliquer pour un programme très contingenté, que ses parents disent : Bien, écoute, moi, là, 85 %, ça ne sera pas assez, ça me prendrait un 92 %, pouvez-vous modifier ma note? Est-ce que ça, c'est un motif raisonnable?

À un moment donné, il s'est hasardé dans sa compréhension de la Loi sur l'instruction publique. Il a dit : Écoutez, l'article 34, là, finalement, là, du projet de loi n° 40, bien oui, on va pouvoir majorer des notes, mais c'est vraiment, vraiment pour des cas d'exception, là, des cas humanitaires. Et là on l'a tous regardé, incluant certaines intervenantes, pour lui dire : Bien, M. le ministre, bien, les exceptions pour des cas humanitaires, mais ça existe déjà dans la Loi sur l'instruction publique, donc pas besoin d'ajouter l'article 34. Finalement, lorsqu'il a vu, après plusieurs semaines, qu'effectivement l'article 34 dérangeait énormément de monde, il a dit la chose suivante : Ah! bien, vous n'auriez pas dû lire le terme «majoration» ni le verbe «majorer», on va marquer «modifier».

Mme la Présidente, ça ne fait aucun sens. On comprend qu'il ne veut pas gonfler vers le haut, mais on ne veut pas qu'il dégonfle non plus. On ne veut juste pas qu'il se donne le pouvoir ou qu'il attribue le pouvoir à un directeur d'école d'aller jouer dans les notes. Faisons confiance à l'autonomie professionnelle de nos enseignants.

Et, lorsqu'il arrive des questions exceptionnelles, humanitaires, savez-vous quoi? Bonne nouvelle, la Loi sur l'instruction publique a déjà été réfléchie par ses prédécesseurs, qui, eux, avaient déjà mis une mesure pour s'assurer qu'effectivement, s'il arrivait quelque chose, par exemple, un décès, la perte d'un être cher, un accident où est-ce que l'enfant, malheureusement, doit manquer l'école, tout ça, c'est déjà prévu. On peut ajuster les notes. On peut faire des moyennes. On peut l'exempter d'une évaluation. Par exemple, si l'enfant a fait une évaluation puis que, finalement, on se rend compte que, malheureusement, lorsqu'il a fait son évaluation, il n'était pas en état de s'asseoir en classe, visiblement secoué, par conséquent on peut annuler cette évaluation et prendre la moyenne de d'autres évaluations. On est capables de s'ajuster.

Alors, ne donnons pas un nouveau pouvoir aux directions d'école. L'expression suivante a été utilisée lorsque nous avons reçu certains intervenants : L'enseignant marche sa classe, la direction marche son école, les commissions scolaires marchent leur territoire. Et ça, c'est une belle image à garder, mais ce n'est pas juste pour ça que les enseignants sont devant le ministère de l'Éducation en train de manifester silencieusement, assis, et qu'ils disent : Ça ne passe pas, votre réforme.

Il a écrit dans son livre qu'il voulait mettre un ordre professionnel pour les enseignants. Il a aussi écrit, là, que ce n'était pas souvent la crème de la crème qui s'inscrivait au bac en enseignement. Ça, Mme la Présidente, je ne sais pas si, un jour, il va refaire un autre livre, mais je l'invite à être prudent parce que ceux qui décident d'aller en enseignement, c'est parce que ça leur tente vraiment. Puis ce n'est pas parce qu'ils ont des mauvaises notes au cégep, contrairement à ce que lui, il prétend.

Moi, j'ai été professeure à l'université. J'en ai côtoyé, des étudiants, oui, à la maîtrise en fiscalité puis au bac en droit. Mais j'ai aussi côtoyé des étudiants en enseignement, en éducation, et je peux vous dire qu'ils ont de l'amour, puis de la passion, puis de l'énergie débordante. Ce sont ça, les critères qu'on regarde, et c'est ça qu'on voit lorsqu'on se promène dans nos universités, ce sont, oui, des étudiants en enseignement dévoués. Alors, lorsqu'il mentionne le niveau de la crème de la crème par rapport aux étudiants en enseignement, il manque énormément de respect à tous ses anciens collègues et ses camarades de classe lorsque lui-même était au baccalauréat en enseignement, si je ne me trompe pas, à UQAM.

• (11 h 30) •

Mais maintenant revenons là-dessus, sur son ordre professionnel. Après avoir écrit qu'il voulait un ordre professionnel, il a rencontré différents syndicats puis il a réalisé que, non, on n'en voulait pas, d'ordre professionnel. Savez-vous quoi? Il passe par la porte de derrière avec son projet de loi n° 40, un projet de loi mammouth, il faut prendre le temps de le lire, et il dit : Bien oui, je vais vous en mettre un, ordre professionnel. Ça ne sera pas écrit «ordre professionnel», mais je vais vous imposer... Moi, à titre de superministre de l'Éducation qui s'approprie presque tous les pouvoirs, je vais vous dire quelles formations vous allez suivre. Si jamais vous ne les suivez pas, attention, grande première au Québec, on range les carottes, on sort le fouet puis on met des sanctions et des pénalités à nos enseignants. Ça, c'est quand même assez incroyable. C'est du jamais-vu.

Moi, je peux vous dire que... si le ministre mentionne en Chambre que ça a été accueilli par les enseignants, grandement et chaudement applaudi, je peux vous dire que c'est le contraire de la vérité.

Oui, ça a déjà été testé, ça, cette phrase. Je vous vois sourire, Mme la Présidente. Oui, ça a été testé, cette phrase.

Oui, c'est le contraire de la vérité parce qu'il y a, en ce moment, plus de 6 000 enseignants qui lui ont écrit, au ministre de l'Éducation, puis qu'ils ont expliqué : Bien, votre réforme de l'éducation, on ne l'aime pas, mais pas du tout. Retirez votre projet de loi. Vous faites mal à vos ex-collègues. Vous nous insultez. 6 000 enseignants — puis ça vient juste de commencer — en une semaine, qui écrivent au ministre.

Évidemment, ces lettres... on ne s'attend pas qu'il réponde à chacune de ces lettres, mais à tout le moins qu'il aille un peu plus loin puis qu'il se dise que, finalement, après avoir regardé le calendrier législatif, je me rends compte qu'effectivement, 319 articles, pour la plupart très mal ficelés, mal réfléchis, pas certain qu'on va être capables de passer à travers. Les journées législatives ici, il nous en reste à peu près 15 jours. Comment qu'on va faire pour essayer de réparer tous les pots cassés, tous les vices cachés de son projet de loi? En 15 jours, je vous le dis, Mme la Présidente, ça va être assez impossible. Juste pour la maternelle quatre ans, déjà que ça, ça n'était pas très bien ficelé, il y avait 18 articles, on a passé plus de 80 heures en étude article par article. Ici, à 319 articles, je peux vous dire tout de suite, ça ne fonctionnera pas, on ne sera pas en mesure de le faire, surtout que, souvent, nous devons reprendre le ministre de l'Éducation quand il dit que, dans son projet de loi, ce n'est pas prévu ce que nous, on mentionne. Clairement, il ne l'a pas bien lu, son projet de loi.

Il se donne beaucoup de pouvoirs, mais il y en a un qui est vraiment assez particulier : «Le gouvernement peut, par règlement, [...]avant [...] (indiquer ici — entre parenthèses — la date qui suit de 18 mois celle de la sanction de la présente loi) toute mesure utile à l'application de la présente loi ou à la réalisation efficace de son objet.

«Un tel règlement peut, s'il en dispose ainsi, s'appliquer à compter de toute date non antérieure au», puis... on peut inscrire.

Ça, c'est l'article 310. Ça, Mme la Présidente, c'est une disposition fourre-tout où est-ce que le ministre peut tout faire par règlement. Bien que son article soit inscrit dans les dispositions transitoires et finales et que, dans d'autres projets de loi, il y a effectivement un libellé qui dit que, pour la mise en oeuvre, le ministre peut procéder par règlement pour la mise en oeuvre de son projet de loi, ici, ce n'est pas pour la mise en oeuvre de son projet de loi, c'est une disposition, là, vraiment, là, importante qui lui donne, à toutes fins pratiques, tous les pouvoirs : «Le gouvernement peut, par règlement, prendre [...] toute mesure utile à l'application de la présente loi ou à la réalisation efficace son objet.» Ça, c'est ce qu'on appelle un superpouvoir. Et là-dessus nous, on va débattre, nous, là-dessus, sur quoi? Parce qu'on n'a aucune indication. Il ne nous mentionne absolument rien là-dedans, mais il se dit : Faites-nous confiance, puis, par règlement, dans mon bureau, je vais pouvoir vous dire comment on va fonctionner, quels pouvoirs le ministre va pouvoir davantage se donner.

Puis je comprends parce que son projet de loi est tellement mal ficelé qu'il manque d'éclairage, qu'il est obligé de se donner un article, dans sa loi, qui lui permet de venir corriger toutes les lacunes, tous les vices cachés de son projet de loi à travers l'article 310, qui, lui, dit : Bien, oui, vous pouvez vous corriger par vous-même à l'article 310. Faites-le dans votre bureau, loin des lumières, derrière les portes closes, faites ce que vous voulez avec un règlement.

Ça, c'est totalement inacceptable, Mme la Présidente. L'article 310, là, il doit être carrément retiré. Qu'il prenne le libellé qui existe déjà dans plusieurs autres projets de loi et d'autres lois qui vont être adoptés. On peut, évidemment, par règlement, mettre une disposition pour la mise en oeuvre de son projet de loi, mais pas pour corriger, rectifier et remodifier à plusieurs reprises son projet de loi. Là-dessus, c'est totalement inacceptable.

Mais savez-vous quoi d'autre qui est tellement inacceptable? Le service public au service du privé. Et aujourd'hui, en cette Chambre, questionné encore une fois, le ministre de l'Éducation ne semble pas saisir la gravité du geste qu'il pose en inscrivant noir sur blanc, dans la Loi sur l'instruction publique, que désormais les services publics de notre système d'éducation seront dans l'obligation de servir le privé. Permettez-moi de vous refaire la lecture de l'article. Alors, si on retourne à l'article : «Les centres de services scolaires doivent favoriser le partage de ressources et de services, notamment de nature administrative, entre eux ou avec d'autres organismes publics, dont des municipalités — et là c'est ici que le bât blesse — ou des établissements d'enseignement régis par la Loi sur l'enseignement privé lorsque cela permet, dans le cadre de leur mission, de répondre à des besoins d'efficacité ou de rentabilité dans la gestion des ressources humaines, financières et matérielles.»

Deuxième paragraphe : «À ces fins, le ministre peut demander à un centre de services scolaire de produire une analyse visant à évaluer les possibilités de partage de ressources et de services avec un [...] centre de services scolaire.

«Le ministre peut, à la suite de cette analyse, faire des recommandations ou exiger [...] des mesures favorisant le partage de ressources ou de services soient mises en oeuvre entre deux [services] de services scolaires.»

Mais c'est surtout 102, paragraphe un, qui est inquiétant, lorsqu'on exige de notre système d'éducation public d'être au service des écoles privées. C'est du jamais-vu. Et plusieurs intervenants... et contrairement à ce que le ministre prétend, je ne parle pas ici que des commissaires, je parle de la FTQ, la fédération des travailleuses et travailleurs du Québec, qui représente aussi le personnel de soutien. Eux sont inquiets. Pourquoi qu'eux autres sont inquiets? Un, c'est une très grande majorité des corps d'emploi, 81 corps d'emploi. Mais là-dedans, oui, vous avez des concierges, secrétaires, mais vous avez aussi des techniciennes en éducation. Vous avez ceux aussi qui... leur tâche n'est pas toujours à temps complet. Plusieurs d'entre eux et d'entre elles, parce qu'il y a plusieurs femmes là-dedans, vivent en précarité d'emploi, dans le sens que leur travail n'est pas à temps complet. Alors, imaginez si, eux, on leur dit : Hum! Je te donne un poste, mais aujourd'hui, on est lundi, tu vas travailler à telle école, mardi à l'autre école, puis mercredi, bien, je vais te prêter à l'école privée parce que, pour rentabiliser, bien, ton trois heures qui manque dans ta tâche, bien, elle s'en va là. C'est ce que des intervenants sont venus nous dire. Leurs inquiétudes étaient palpables. Et le ministre de l'Éducation avait très peu de mots pour expliquer l'article 102, alors que, clairement, il y avait une inquiétude qui a été soulevée par des travailleurs et travailleuses.

La salle, lorsque la FTQ est arrivée, elle était bondée de monde, des Québécois, des travailleurs qui, derrière le titre de travailleurs, c'est aussi des familles, ils ont des bouches à nourrir. Et, lorsqu'on leur demande de prêter leurs services puis aller dans une autre école, bien, ça change, eux, leur quotidien parce que... Lorsque vous, là... Vous et moi, on sait où est-ce qu'on vient travailler. On se présente ici, à l'Assemblée nationale, puis, oui, on a notre bureau de comté. Quand j'étais professeure, j'allais à l'Université de Sherbrooke, 2 500, boulevard de l'Université. Puis, oui, j'allais soit à l'École de gestion ou à la Faculté de droit, mais 2 500, boulevard de l'Université, c'était clair.

Maintenant, pour un technicien en éducation ou, par exemple, parce que ce n'est toujours pas clair, une personne qui travaille à la comptabilité ou en informatique dans une commission scolaire qui va désormais porter le nom de centre de services, elle, sa journée, elle commence où puis elle termine où? Sa semaine, elle commence où puis elle termine où, sa semaine? Alors, non seulement précarité aux termes d'heures de travail, mais maintenant précarité en matière de lieu de travail.

C'est quoi, l'impact? Je vais vous le dire, c'est quoi, l'impact, parce qu'ils nous l'ont communiqué, puis nous, on n'a pas juste écouté, on a entendu leur message. Ils disent la chose suivante : Moi, si je commence ma journée, puis que je suis, par exemple, à Chambly, puis qu'on me demande d'aller un peu plus loin, à Granby, bien, O.K., j'embarque dans mon auto, mais après ça, si je dois aller chercher ma fille à la garderie, bien, ça me rallonge, ça change mon quotidien. Est-ce qu'il y a quelqu'un qui a pensé à moi?

• (11 h 40) •

Ça, ça, là, c'est des cas concrets qui nous ont été rapportés par des travailleurs et des travailleuses, des personnels de soutien, ceux, là, qui, présentement, nous regardent, puis qu'eux, là... juste pour que ça soit très clair, ces gens-là ouvrent l'école et ferment l'école. On a besoin d'eux. Et, si on veut vraiment les attirer dans notre réseau public, on ne peut pas commencer à les prêter au privé. On ne peut pas commencer à jouer dans leur tâche horaire. On ne peut pas commencer à leur dire : On ne peut pas vous assurer de votre lieu de travail. Ça peut juste occasionner un stress supplémentaire, alors qu'on a besoin d'eux toute la journée et que, sincèrement, ici, à l'article 102, il manque gravement des précisions. En fait, l'article 102 devrait être complètement retiré. Le terme «Loi sur l'enseignement privé», c'est inacceptable.

Et savez-vous qu'est-ce qui est encore plus inacceptable? C'est lorsque le ministre de l'Éducation — on entendait M. Vigneault, qui est à la tête du Mouvement L'école ensemble, poser des questions sur l'article 102 — il a donné un petit peu la leçon à un invité, pour faire changement. Il a dit : Non, non, non, l'article 102, il faut le lire complètement. Bien, on l'a tous lu complètement puis on est tous tombés en bas de notre chaise. Puis le ministre continuait, persistait à dire : Bien non, l'article 102, il n'y en a pas, de problème. Qui qui est contre l'efficacité? Qui qui est contre la rentabilité?

En ce moment, là, je peux vous assurer d'une chose, on ne gagne absolument rien pour le système public à donner des services au système privé, ils sont bien capables d'avoir leurs ressources. Alors, on va laisser le système public tranquille, on va consolider tout ce qu'on a besoin de faire dans le système public puis on ne commencera certainement pas à déshabiller notre système d'écoles publiques pour commencer à habiller davantage le système privé, voyons donc.

Je comprends que le ministre, lorsqu'il a terminé le projet de loi sur les maternelles quatre ans, est parti sur une grande envolée en disant : Bien, moi, là, le moratoire sur les agréments — donc les subventions pour les écoles privées — bof! ce n'est pas parce que ça fait 12 ans que les ministres de l'Éducation précédents de tous les gouvernements précédents qui m'ont précédé, eux, ne donnaient plus de subventions aux écoles privées que moi, je vais aller dans la même veine. Donc, on a déjà une indication, là, que le ministre de l'Éducation est en train de faire son nid, qu'il apprécie beaucoup le système privé — mais pas nous — au point tel qu'on doit immédiatement dire : Bien, savez-vous quoi? Venez piger dans nos ressources.

Les questions suivantes lui ont été posées : Qu'il nous explique, quand il écrit «ressources humaines», on parle de qui? «Financières», on parle de quoi? «Matérielles», on parle de quelles bâtisses, de quels gymnases? Est-ce que, là-dessus, il peut nous préciser? Est-ce que c'est la piscine? Est-ce que c'est le terrain de basket, de soccer? Qu'il précise. Il n'a jamais été capable de le faire. Et là la question qui a été encore plus difficile pour lui de répondre, on lui a dit la chose suivante : M. le ministre, vous dites que les écoles publiques doivent être au service du privé, mais est-ce que les écoles privées devraient être, elles aussi, au service des écoles publiques? Aïe! Silence radio. Il a gelé. Pas de réciprocité. On dit : Donc, vous, vous dites que ça va juste dans un sens, hein? Donc la rentabilité, bien gérer les ressources, ça va juste dans un sens. Le public, vous servez le privé, mais le privé, non, vous, on ne vous achalera pas. Gardez vos gymnases, gardez vos services comptables, vos techniciens en informatique. Non, non, non, pas de service de réciprocité. Franchement, si le ministre veut être cohérent, lorsqu'il s'est levé en cette Chambre, lors de la semaine J'appuie mon école publique parce que je l'aime, bien, qu'il retire cette disposition, Mme la Présidente, parce que ça, non, ça ne peut pas être écrit par quelqu'un qui aime sincèrement son école publique.

Et je vais continuer, parce qu'il y a plusieurs affaires dans ce projet de loi que... vous comprendrez, nous fait énormément craindre son projet de loi. Le magasinage d'écoles, prochain thème. On a appris au ministre de l'Éducation, lors des consultations publiques, que son projet de loi prévoyait la fusion de territoires. Le ministre de l'Éducation dit : Bon, bon, les intervenants disent n'importe quoi, les oppositions disent n'importe quoi, ça sort les épouvantails, les oppositions s'opposent. Si je devais être en mesure de fusionner les territoires, je devrais écrire un nouveau projet de loi. Je n'ai pas le pouvoir, dans mon projet de loi n° 40, de pouvoir fusionner les territoires. Alors là, on a invité le ministre de l'Éducation à prendre le p.l. n° 40, aller à l'article 46. Nous lui avons fait la lecture de son article 46. Alors, Mme la Présidente, si vous permettez : «Le gouvernement peut, par décret — donc, ça, c'est le ministre — à la demande d'un centre de services scolaire, d'une majorité de parents d'un élève ou d'électeurs, le cas échéant, domiciliés sur le territoire d'un même centre de services scolaire, ou de sa propre initiative — ça, c'est lui, là, sa propre initiative — après consultation — puis on sait ce que ça vaut, hein, lui, ses consultations — des centres de services scolaires intéressés, apporter toute modification au territoire des centres de services scolaires.»

Ouf! Ça, c'est le premier paragraphe. Donc, ici, c'est clair, au premier paragraphe de l'article 46, le ministre, seul dans son bureau, peut agir par décret et fusionner des territoires.

«Le gouvernement détermine le centre de services scolaire compétent sur tout territoire modifié ou nouveau territoire et peut, à cette fin, prescrire qu'un centre de services scolaire cesse d'exister ou instituer un nouveau centre de services scolaire. Il détermine, après consultation des centres de services scolaires intéressés — donc, si vous n'êtes pas intéressés, laissez faire — le nom du nouveau centre de services scolaire, le cas échéant.»

Je pourrais vous lire la plupart des autres paragraphes, mais le dernier est encore plus intéressant : «La cessation d'existence d'un centre de services [...] décrété en application du deuxième alinéa prend effet à la date de l'entrée en vigueur des modifications territoriales.»

Donc, tout ça ici, l'article 46, c'est clair, on peut fusionner et on peut abolir. Et là-dessus le ministre a répondu, lorsque nous lui avons fait la lecture de l'article 46 : Ah! je n'avais pas bien compris, moi. Puis il était fort surpris de l'article 46. Je peux vous assurer d'une chose, plusieurs mâchoires ont été disloquées à ce moment-là sur le côté des partis d'opposition. On a dit : Voyons donc, est-ce qu'il est vraiment arrivé en consultations sur son projet de loi sans l'avoir lu? Ma parole, bien, certain. Puis là, après ça : Bien, écoutez, écoutez, ce n'est pas mon intention, ce n'est pas mon intention de fusionner. Ce n'est pas mon intention d'abolir des centres de services. Ce n'est pas mon intention de fusionner les territoires. Là, c'était du rattrapage, là. Mais, M. le ministre, vous l'avez écrit noir sur blanc dans votre projet de loi. Vous vous donnez encore un pouvoir. Vous avez un mégapouvoir. Puis parlez-nous pas de votre intention, vous avez dit pendant des mois, pour vous justifier, que vous avez été élus de façon démocratique puis qu'on fait ce qu'on dit.

Bien, j'espère que vous faites ce que vous dites parce que, si vous êtes conséquent, je ne comprends pas quand le ministre nous dit, en consultations, qu'il n'ira pas de l'avant avec l'article 46. Bien, s'il ne va pas de l'avant avec son article 46, bien, premièrement, qu'il le retire, cet article-là. Mais je sais pourquoi il ne veut pas le retirer, Mme la Présidente. Vous vous rappelez, janvier 2018, ce document-là a déjà été déposé, c'est le Plan de gouvernance scolaire  Remettre l'école entre les mains de sa communauté. C'est une super de belle phrase, évidemment, une ligne de com. Et là on lui a dit : M. le ministre — non seulement je lui ai dit en cette Chambre, lors de la période de questions, nous sommes en consultations — ça, c'était votre plan, votre photo, et ici, à la page 5, vous l'avez déjà inscrite, votre intention. Elle est claire, votre intention : Avoir des centres de services «moins coûteux et éventuellement moins nombreux».

Mme la Présidente, j'ai de la misère à le suivre. J'ai beaucoup de difficultés à le suivre. D'une part, il dit qu'il n'était pas au courant de l'article 46 de son projet de loi, d'autre part, il vient se justifier en disant : Bien, ce n'est plus mon intention de les abolir. Et on lit son plan. Ça, ce n'est pas le mien, je vous le jure. Ce n'est pas ma photo, là, qui est ici, là, c'est sa face. Je n'en reviens pas. Pour quelqu'un qui dit qu'il fait ce qu'il dit, bien, en ce moment, on a de la misère à le suivre, là. Ce n'est pas facile. Ce n'est vraiment pas facile, je peux vous le dire, parce qu'on a fait les maternelles quatre ans, puis maintenant on est en train de perdre déjà le fil avec... on essaie de ne pas perdre le fil avec lui parce qu'il ne sait même plus qu'est-ce qu'il y a dans son projet de loi.

• (11 h 50) •

Mais savez-vous quoi? Il y a d'autres affaires qui nous inquiètent, et le temps file. Ce que moi, je n'ai particulièrement pas aimé des consultations, je vais vous dire c'est quoi, que plusieurs intervenants voulaient participer, on a reçu plusieurs mémoires; à la fin, si ma mémoire est bonne, c'est environ 25 mémoires qui ont été déposés de gens qui n'ont malheureusement pas pu être entendus. Ce que nous avons constaté, ce sont les choses suivantes. Plusieurs d'entre eux devaient parler très vite, ils se sentaient bousculés. On avait des regroupements par régions, mais des grosses régions. Et savez-vous quoi? Ces gens-là partaient d'Abitibi. On a le préfet de Val-d'Or. Tout le monde voulait intervenir pour parler, mais manquait de temps. On a regroupé aussi les Îles, Gaspésie, qui, eux, nous ont dit : Bien, vous savez quoi? On a chacun nos propres réalités, nos propres spécificités, puis en ce moment, bien, on manque de temps pour parler, donc on va aller à l'essentiel. Et l'essentiel, c'est la chose suivante, la très grande majorité ont dit : Mais, rappelez-vous d'une chose, M. le ministre, dans la Loi sur l'instruction publique, les commissions scolaires ont aussi comme mission le développement économique régional, vous éliminez cette mission. Ce n'est pas par hasard que certains maires et préfets sont venus en appui avec leurs commissions scolaires. Ils disent : Nous, si vous fermez une commission scolaire, qui va se tenir debout pour maintenir nos toutes petites écoles en vie? Parce que ce n'est certainement le ministre puis ses fonctionnaires, dans un fichier Excel, qui vont dire : Bien oui, c'est rentable, c'est efficace d'avoir une école avec trois élèves. Je n'exagère pas. Oui, nous avons des écoles de trois élèves au Québec. C'est un choix de société que nous avons fait parce que, si on ferme l'école, on ferme le village.

On a aussi eu d'autres beaux cas où des écoles ont commencé avec 11 élèves, puis maintenant ils sont 25, 26, 27, 30. Mais c'est ça, la réalité au Québec. On a un grand territoire. On a décidé de l'occuper, notre territoire. Et, si le ministre, du haut de sa tour d'ivoire, ne réalise pas l'impact négatif qu'il fait en fermant des commissions scolaires, en disant aux autres : Taisez-vous, comme a si bien dit le shérif de la CAQ, je vous dirais une chose : Qui va se lever maintenant pour ces voix, toutes ces voix? Parce que, la vérité, dans les grands territoires, ils ne seront pas assez nombreux pour lever la main puis dire : Nous, on a besoin de notre école. Ils ne seront pas assez nombreux pour dire : Ça ne nous tente pas de mettre nos enfants dans un autobus le matin puis qu'ils fassent une heure de trajet pour qu'ils se rendent à l'autre école. Ça ne nous tente pas de savoir que, maintenant, au Québec, on va pouvoir magasiner nos écoles parce qu'on n'a plus de territoires, il y a juste le Québec au complet. Ça ne nous tente pas. On veut avoir des gens qui, oui, ont été élus démocratiquement, que, oui, ces gens-là se battent pour sauver les petites écoles.

Et ici, Mme la Présidente, j'en ai plusieurs. Dans la revue de presse, vous comprendrez que le ministre, lui, sélectionne qu'est-ce qui lui tente. Nous, on a tout imprimé, hein, tout, ce qui est bon, ce qui est mauvais, parce que ça nous permet de comprendre les arguments pour, les arguments contre. Mais plusieurs écoles existent à ce jour parce qu'il y a des commissaires qui se sont levés. L'école Saint-Philémon va rester ouverte, une autre école sauvée. Quand j'ai rencontré différents commissaires scolaires et différents maires lors de ma tournée en régions, en Mauricie on m'a parlé de l'école... pardon, Félix-Leclerc. Ça, c'est une commissaire qui a dit : Hé! pourquoi qu'on n'a pas une école de musique, nous autres, en Mauricie? Puis évidemment le commissaire, au début, a dit : Non, il n'y a pas de demande, vous ne rentrez pas dans le fichier Excel, déficit de bâtiments, ça ne marche pas, le pourcentage n'est pas rencontré. Finalement, la commissaire et d'autres parents se sont mobilisés, puis ils l'ont eue, leur école. Un an plus tard, il y a trop de demandes. Alors, en ce moment, non seulement au début on leur disait qu'il n'y avait pas assez de places, pas assez de demandes, maintenant il y a trop de demandes. Et je peux vous dire qu'en Estrie c'est l'histoire de plusieurs petites écoles qui, aujourd'hui, sont toujours ouvertes parce qu'il y a des commissaires qui se sont battus puis qui ont dit : Non, on en a besoin, et que ce n'est pas vrai qu'on va commencer à mettre nos élèves dans des autobus pour leur faire du voyagement très tôt le matin, surtout nos tout-petits. Et là-dessus c'est clair que le ministre n'a pas réalisé la portée de son projet de loi.

Et, lorsqu'on parle, dans un autre sujet, le magasinage d'école, pensez-y, Mme la Présidente, quand j'ai rencontré les commissaires de Chaudière-Appalaches et aussi Rivière-du-Loup, leur inquiétude, c'est la suivante : les plus petites écoles, qui, eux, là, ont fait le choix de ne pas avoir de projet pédagogique particulier, qui disent : Non, nous, on y croit, à l'école publique où est-ce qu'on peut, à travers différents programmes, avoir des enrichissements, puis on n'ira pas faire une équipe de hockey, une équipe de basketball, bien, eux, là, qu'est-ce que qui va arriver avec eux? Parce qu'il y a de la compétition, quand même, là, on va se le dire, là, bien franchement, là, il y a de la compétition. Il y a d'autres écoles qui, eux, offrent plusieurs autres projets pédagogiques particuliers. Alors, qu'est-ce qui va arriver si jamais une école qui avait 20 élèves, tranquillement pas vite, bien, les parents disent : Bien, pour moi, c'est pas mal plus facile de déposer mon enfant sur le chemin du travail, à cette école-là, donc je vais la changer d'école, je vais la mettre là-bas? Ah! puis tant qu'à faire, j'amène aussi sa soeur. Donc, on passe de 20 élèves à 18 puis, à un moment donné, à 15. Est-ce que, là, les fonctionnaires vont dire : C'est encore rentable de garder cette école en vie, ouverte? Qu'est-ce qui va arriver dans les endroits où, en ce moment, étant donné du poids de la population, il y a une liste très importante? C'est quoi, la priorité? Comment qu'on va faire pour sélectionner les élèves? Puis ça, on ne le sait toujours pas.

Donc, une personne qui habite à Laval pourra aller à l'école à Montréal. Une personne qui habite à Saint-Jérôme pourra aller à l'école à Laval. Une personne qui habite à Trois-Rivières, bien, elle aura l'embarras du choix, en Mauricie, pour aller à l'école. En Estrie, tout dépendamment d'où est-ce que le parent travaille, on va pouvoir choisir nos écoles, du gros magasinage.

Alors, l'école de quartier, celle que moi, j'ai connue et que plusieurs d'entre nous avons connue ici, vous savez, celle qu'on a juste besoin de traverser une rue puis que nos parents, le matin, lorsqu'ils s'en vont nous porter, ont le temps de parler avec nos enseignants ou avec la technicienne de garde, si jamais on arrive plus tôt, pour savoir comment ça va à l'école, vous savez, cette école de quartier, alors on en fait quoi maintenant au Québec? Est-ce qu'elle va continuer d'exister avec le projet de loi n° 40? J'en doute fortement.

Et permettez-moi de terminer sur l'élément le plus important, la démocratie. Au Québec, le fait français, c'est une bataille de tous les jours. Au Québec, nous avons une obligation d'être les leaders en français, chefs de file, de protéger notre langue, mais aussi de donner l'exemple à toutes les autres provinces où est-ce que nous avons des francophones et des francophiles hors Québec. Plusieurs d'entre eux ont dit la chose suivante : Comment un projet de loi qui discrimine les francophones, qui leur enlève un droit de participation à la vie démocratique peut aider les francophones hors Québec dans leur bataille à eux qui sont une minorité linguistique francophone dans les autres provinces et territoires? Ils sont inquiets parce que c'est à nous, à nous, au Québec, nous, les Québécois, de donner le ton, de dire qu'effectivement ce n'est pas vrai que les francophones vont avoir moins de droits qu'un anglophone. On est tous des citoyens à part entière.

Et le fait français, aujourd'hui, en prend pour son rhume avec le projet de loi n° 40. Ça n'aidera pas la cause des francophones hors Québec. Ainsi, je ne peux pas concevoir que le ministre de l'Éducation ne réalise pas à quel point qu'il nous fait mal à notre image. Nous allons devenir... Ici, au Québec, on va maintenant enseigner à nos enfants qu'au lieu de promouvoir la participation à la vie démocratique on veut l'abolir, et on fait même des blagues au passage. Moi, quand j'entends le directeur des élections du Québec, je ne suis pas réjouie. Lui-même est inquiet. Le ministre a parlé de plusieurs intervenants, mais il a oublié de nous dire une chose : la quasi-totalité des intervenants ont dit qu'effectivement, en matière de démocratie, là, ce n'est pas un exemple, ce projet de loi.

Alors, Mme la Présidente, vous comprendrez que nous ne pourrons jamais voter en faveur de ce projet de loi. Nous allons voter contre parce que ce n'est pas vrai qu'au Québec nous allons avoir une société avec deux classes de citoyens. Ce n'est pas vrai qu'au Québec nous allons faire reculer des droits. Ce n'est pas vrai qu'au Québec nous allons retirer des droits à des francophones, c'est inconcevable. Et, Mme la Présidente, j'espère sincèrement que les collègues du gouvernement, de la Coalition avenir Québec réalisent que ce projet de loi omnibus a plusieurs vices cachés. Mais le plus grave dans tous les vices cachés, c'est l'atteinte à des droits fondamentaux et aussi une attaque directe au fait français québécois et aussi au fait français partout dans le reste du pays. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

• (12 heures) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Alexandre Leduc

M. Leduc : Merci, M. le Président. Je trouve ça dommage qu'on n'ait pas adopté la motion, hier, de report parce qu'à la lumière de ce que j'entends, des groupes, des consultations particulières... qui se sont donc exprimés pendant les consultations particulières, bien, ce n'était pas très, très positif. Et puis on entend, d'ailleurs, ce matin, une occupation, je pense, donc, visiblement, ce n'est pas la joie par rapport à ce projet de loi là. C'est encore le temps de reculer. Il y aura peut-être d'autres motions cette semaine sur le même sujet. On verra ce que ça donne.

J'aimerais intervenir sur la question, d'abord, évidemment, de la démocratie. Moi, j'ai fait des études en histoire, M. le Président, à l'UQAM. Puis je pense que c'est assez clair, quand on étudie dans ce domaine-là, que ce n'est jamais souhaitable, des reculs, en démocratie, aussi petits soient-ils, ce n'est pas souhaitable. Et puis avec le projet de loi n° 40, le ministre vient mettre la hache dans un palier de gouvernement local. Ce n'est pas la même chose qu'une ville, ce n'est pas la même chose qu'une entité comme le Québec ou voire que le Canada, bien sûr, mais c'est un recul qu'il faut noter, qu'il faut dénoncer, je pense, aussi.

Nous, on participe, M. le Président, à vouloir renforcer cette démocratie-là. Je pense que l'État de fait des commissions scolaires, ce n'est pas quelque chose qui est parfait, peu de personnes vont réclamer la perfection actuelle du modèle des commissions scolaires, mais quelque chose qui n'est pas parfait, c'est qu'il est perfectible. Et plutôt que de mettre la hache dedans, nous, on aurait préféré un projet de loi qui travaille à rendre perfectible cette institution, comme les gouvernements scolaires.

L'abolition des élections scolaires, ça vient effriter l'exercice démocratique et l'engagement citoyen, et moi, je veux vous parler un peu, dans les quelques minutes qui me sont imparties, de l'expérience que j'ai des commissions scolaires dans ma réalité d'Hochelaga-Maisonneuve, un quartier de l'est de Montréal.

D'abord, je veux le souligner, les élus scolaires sont directement redevables à la population. Nous le sommes, tous et toutes, ici, dans cette Chambre, on a été élus. Alors, de la même manière, les élus scolaires l'ont été. Plus tôt aujourd'hui, à la période des questions, le premier ministre évoquait le pourcentage de participation aux élections scolaires comme un argument pour délégitimer le processus. Il disait : Il y a à peine 5 % de gens qui votent aux élections scolaires. Bon, il y aurait tout un débat à faire sur le processus électoral scolaire, qui serait à réviser de fond en comble. Les gens connaissent bien la question des listes : on tombe de facto dans la liste des francophones et non nécessairement des anglophones. C'est un bordel sans nom, la gestion des listes scolaires. Donc, une raison de ce faible taux de pourcentage se trouve là.

Il y a aussi toutes sortes de choses qui expliquent ça. Ce n'est pas quelque chose qui est très bien couvert. Médiatiquement, on n'a pas la coutume de couvrir médiatiquement les élections scolaires. En Ontario, par exemple, ils ont décidé de les jumeler avec les élections municipales, de faire les deux en même temps, la même journée. Alors, les gens se déplacent déjà, dans un processus électoral municipal qui, lui, est mieux couvert médiatiquement, mieux compris aussi peut-être. Mais bref, ils ont l'occasion de voter au même moment, peut-être sur le même bulletin de vote, là, j'avoue, je ne connais pas les subtilités de ce processus-là, mais, au même moment, votent pour leur commissaire scolaire et, devinez quoi, sans grande surprise, le taux de participation est dramatiquement plus élevé en Ontario, aux élections scolaires, qu'il l'est ici, au Québec, entre autres pour cette raison-là.

Mais, M. le Président, là où je veux arriver avec cet argument-là, c'est que, même si on gardait le système actuel, même si on n'avait que 5 % de gens qui participent aux élections scolaires, bien, ça sera toujours bien mieux qu'une nomination, soit directement de la part du ministre, comme on la connaît maintenant dans le réseau de la santé pour les P.D.G. des CIUSSS, ou d'une élection interne de comités de parents, qui est valable en soi, là, j'entends, là. Je ne veux pas dénigrer, bien loin de là l'idée, le travail des parents puis des comités de parents dans les différentes écoles. Mais on peut-u imaginer qu'il y a pas mal moins que 5 % de la population qui vont participer à ce processus d'élections là, internes, scolaires et des comités de parents? On risque d'être dans les 0,01 % de participation.

Alors, de me dire qu'on va remplacer un processus qui n'est pas assez populaire, à 5 %, par un processus qui le sera nécessairement encore moins, moi, je n'achète pas cet argument-là, M. le Président. J'aurais préféré qu'on cherche une alternative, j'aurais préféré qu'on étudie un scénario comme celui de l'Ontario, qui a donné des résultats. On aime ça, des fois, se comparer à l'Ontario sur toutes sortes de sujets. Bien, là-dessus, voilà, pourquoi on n'a pas été piger une bonne idée chez nos voisins ontariens, qui ont appliqué cette solution-là et qui fonctionne?

Le travail des commissaires, lui, participe à une répartition équitable et nuancée des ressources. Ils sont la voix des élèves, ils sont la voix des parents, ils sont la voix d'une communauté, et c'est là-dessus, peut-être, que je trouve qu'on perd le plus, parce que, bien sûr, des parents qui seront élus à l'intérieur de la structure du comité de parents auront leur légitimité. Ils vont parler au nom de leurs parents, bien sûr, mais n'auront pas nécessairement la légitimité de parler au nom d'une communauté, et l'école, elle n'appartient pas juste aux élèves, pas juste aux parents, elle appartient à une communauté. Elle a une influence sur une communauté.

Et moi, je veux vous parler de ce que j'ai connu dans Hochelaga-Maisonneuve. Ma première tentative d'élection était en 2012, M. le Président; j'ai fait celle de 2014 par la suite aussi. Bref, tout ça pour vous dire que, dans ma première élection, en 2012, tout jeune candidat que j'étais, on vivait un drame à Hochelaga-Maisonneuve, qui était le désert scolaire de la rue Adam. Alors, coup sur coup, trois écoles primaires ont dû fermer à cause de champignons, de l'air vicié. Donc, c'était invivable. Il y avait des problèmes de santé, le Dr Julien constatait ça chez les jeunes qui fréquentaient son centre. Ils passaient leurs journées à l'école, à respirer des moisissures.

Bien, sans grande surprise, ils avaient des maux de tête et des problèmes en arrivant dans les activités parascolaires au centre de pédiatrie sociale du Dr Julien. Le syndicat des enseignants notait les mêmes problèmes, bref, la santé publique s'en est mêlée. Sans grande surprise, il fallait faire ce qu'il fallait faire, il fallait fermer l'établissement.

Ça a nécessité tout un chambardement, parce que, là, on a envoyé les écoles dans un autre quartier plus à l'est. On a mis des écoles primaires dans une école secondaire. Il a fallu subdiviser, avec des clôtures, la cour pour pouvoir garder un espace. On ne mélangera pas ça, hein, des élèves de primaire puis de secondaire dans la même cour d'école. Ça serait une très mauvaise idée. Bref, on a séparé la cour d'école en deux. Donc, ça a nécessité une cohabitation, et les enfants de l'école secondaire ont perdu un peu au change. Bien sûr, il y avait une cohabitation à faire. Ça a chambardé tout, des enfants qui se rendaient à pied à l'école ou avec leurs parents, bien là, ils se faisaient envoyer en autobus à plusieurs kilomètres. Et là on a perdu... il y a des écoles qui ont été fermées jusqu'à sept ans, M. le Président. Il y en a d'ailleurs une qui est toujours fermée, l'école Hochelaga est toujours fermée pour cause de moisissures. On a réouvert, cette année, l'école Saint-Nom-de-Jésus. On a réouvert, il y a un an et demi, bientôt deux ans, l'école Baril. Alors, deux sur trois sont fonctionnelles, ont été reconstruites. Ça a été tout un travail.

Là, où je veux atterrir avec ça, M. le Président, c'est que tout ce travail-là ne s'est pas fait uniquement par le ministère de l'Éducation, par la ville avec le comité d'urbanisme. Il s'est fait, d'abord et avant tout, par le travail de la commissaire scolaire qui a su mobiliser une communauté alentour de ce projet-là de reconstruire rapidement nos écoles. Il y avait des enjeux de patrimoine, c'étaient des écoles qui étaient presque centenaires, alors, de la raser... parce que, là, c'était tellement vicié, M. le Président, là, qu'il fallait la raser. On a été seulement capable de garder la devanture de l'école Baril. Tout le reste a été jeté à terre, et on a reconstruit à partir de zéro. On a réussi à garder la coquille de l'école Saint-Nom-de-Jésus; donc, d'un point de vue patrimonial, architectural, on est correct. Pour l'école Hochelaga, j'attends de voir la suite des choses.

Mais tout ça pour vous dire à quel point on partait de loin, des années de déficit zéro, des années de sous-investissements en éducation qui ont fait en sorte qu'on a coupé à quelque part, c'était dans la bâtisse, puis on s'est retrouvé avec le désastre scolaire de la rue Adam, un drame de mon quartier pendant presque une décennie, qui n'est pas tout à fait terminé, comme je vous le disais. On attend toujours des nouvelles de la troisième école Hochelaga.

Tout ça pour vous dire que la commissaire scolaire a joué un rôle central là-dedans. Ma prédécesseure, Mme Carole Poirier, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, aussi a joué un rôle central là-dedans, mais elle n'aurait jamais pu jouer ce rôle-là seule. C'était d'abord à la base que ça se mobilisait. Il y a eu des marches, il y a eu des lettres, il y a eu des rencontres, il y a eu des campagnes publicitaires, il y a eu des tournées de médias pour mettre de la pression sur le ministre de l'Éducation. Bien, la commissaire scolaire, là, était au centre de tout ça, elle organisait tout ça, elle mobilisait tout ça. C'est elle qui avait l'information, c'est elle qui la faisait circuler, l'information. Et, sans ce rôle central de la commissaire scolaire, que je vais nommer, elle s'appelle Diane Beaudet, commissaire d'Hochelaga à la commission scolaire de Montréal, bien, je suis convaincu qu'on ne serait pas arrivé à rouvrir ces deux écoles-là dans un délai assez rapide.

La commissaire, elle est là également pour les élèves et les familles qui se sentent délaissés par le système. Dans mon quartier, M. le Président, je peux vous confirmer qu'il y a plusieurs personnes qui sont délaissées par le système et, encore plus, qui se sentent délaissées par le système pour toutes sortes de raisons, mais ces personnes-là ont quand même des besoins, ces personnes-là ont quand même des inquiétudes sur l'avenir de leurs enfants, sur la qualité de l'école, sur la qualité de l'enseignement qu'on va leur offrir. Où peut se canaliser cette inquiétude-là, outre que par la commissaire scolaire qui est présente sur le terrain, qui a une page Facebook ouverte jour et nuit, je vous dirais? On a des horaires parfois assez alambiqués, vous en conviendrez avec moi, M. le Président, comme député. Bien, l'horaire de la commissaire scolaire, même si elle est libérée puis elle est payée pour faire ce travail-là comme une demi-tâche, moi, je peux vous garantir qu'elle travaille toute la semaine, la fin de semaine y compris, les soirs de semaine aussi. Le téléphone, il ne dérougit pas, là. Des parents inquiets, là, ils ne s'attendent pas à un service de 9 à 5 d'une commissaire scolaire. Alors, ça appelle, ça manifeste des inquiétudes : Comment ça se fait que la cour n'est pas rénovée? Comment ça se fait que c'est toujours une remplaçante dans la classe de mon fils? Est-ce qu'il y aura encore un repas à 1 $ l'année prochaine, malgré les annonces faites par la ministre? Alors, toutes ces inquiétudes-là, bien, elles se manifestent à quelque part. C'est la commissaire scolaire qui joue ce rôle-là.

• (12 h 10) •

Moi, je suis vraiment fâché qu'on ait, à travers les années, autant dénigré ce travail-là des commissaires scolaires. Je ne sais pas si elles sont toutes aussi vaillantes que celles que je connais dans Hochelaga-Maisonneuve, M. le Président, mais je suis convaincu que la grande majorité le sont. Et c'est un travail essentiel, puis je vous dirais que je suis assez inquiet par rapport à nos définitions de tâches de nous, ici présents, là, les députés de cette Assemblée, parce que, quand on aura aboli les commissaires scolaires, M. le Président, cette inquiétude-là, elle ne va pas avoir disparu. Autant le ministre de l'Éducation met beaucoup d'efforts pour investir dans les communautés, investir dans les écoles, puis, je veux dire, on peut saluer ce travail-là, mais l'inquiétude ne disparaîtra pas. Cette manifestation citoyenne de vouloir prendre en charge l'avenir de son éducation dans son quartier, pour sa famille, elle va se canaliser où, si c'est un centre de services partagés qui gère ça? Ils vont aller à la direction de l'école? La direction de l'école, ce n'est pas un rôle public ou un rôle politique dans un quartier, c'est un administrateur. Elles vont aller où, ces personnes-là, pour poser des questions, pour demander à un élu de faire quelque chose? Ce n'est pas un directeur d'école qui va se mobiliser pour sauver la mesure alimentaire, M. le Président. Lui, il reçoit ses budgets. Il peut émettre des... bien, c'est-à-dire, pas des revendications, mais des recommandations au ministre, aux directions de services de centres partagés, mais ce n'est pas lui qui va se mobiliser pour sauver la mesure alimentaire, pour reconstruire une école. Ce n'est pas son travail. C'est un cadre. Il fait bien son travail, puis on le remercie.

Mais ce mouvement-là, populaire, alentour de l'avenir de l'éducation, où est-ce qu'il va s'exprimer si on fait disparaître le commissaire scolaire? Est-ce que ça va être au conseiller municipal, au maire d'arrondissement, au préfet d'une MRC... Ça n'a pas vraiment rapport. Ce n'est pas lui qui contrôle les budgets de l'éducation. Il contrôle une fonction publique municipale. Il a un rôle à jouer sur l'école, par rapport à l'urbanisme, par rapport à où ce qu'elle est située. Mais ce n'est pas un conseiller municipal qui décide ou qui devrait décider de l'avenir scolaire d'une région, ou d'une municipalité, ou d'un arrondissement. Moi, je pense qu'où ça va retomber, ça va être chez nous, M. le Président. Ça va être nos bureaux de circonscription qui vont avoir à gérer ce nouveau flux d'appels, d'inquiétudes.

Et, laissez-moi vous le dire, je ne sais pas pour vous, là, et pour mes collègues, mais, moi, mes collègues qui travaillent au bureau de circonscription d'Hochelaga-Maisonneuve, eh bien, ils en ont par-dessus là avec tout l'enjeu des problèmes sociaux qu'on gère déjà, M. le Président. Alors, s'il faut rajouter en plus la question scolaire, l'entièreté de la question scolaire, parce qu'on en gère déjà une bonne partie, là, s'il faut rajouter en plus l'entièreté du dossier scolaire dans nos définitions de tâche, bien là il va falloir qu'on prépare des budgets supplémentaires, là, pour les bureaux de circonscription. Il va falloir qu'on puisse embaucher un quatrième ou un cinquième attaché politique. On n'y arrivera pas, là.

En tous cas, moi, je n'y arriverai pas, dans Hochelaga-Maisonneuve, parce que les besoins sont criants, parce que la communauté a besoin d'appui, et puis la commissaire scolaire fait ce travail-là, occupe ce rôle-là. Puis, si elle disparaît, qui va faire ça? Ça va être nous. Nécessairement, c'est nous, les députés de l'Assemblée nationale. Même si je ne suis pas au pouvoir, même si je ne suis pas ministre à l'Éducation, ou ministre délégué à l'Éducation, ou député dans le caucus parlementaire... gouvernemental, pardon, bien, c'est vers moi que les gens vont se retourner quand ils auront des enjeux avec leur école. Même si c'est des microenjeux, bien, je n'aurai pas nécessairement le temps, moi, dans mon agenda prévu, de gérer ça. Je vais le faire pareil, M. le Président, parce que c'est important, parce que c'est fondamental, mais il va falloir que j'aie de l'aide supplémentaire, là, parce qu'avec les budgets actuels on n'y arrive pas.

Un commissaire scolaire ou une commissaire scolaire... Je devrais toujours dire «une», en fait, parce que c'est un des seuls paliers de gouvernement qui est majoritairement féminin. La majorité des personnes qui oeuvrent, qui sont des élues scolaires, à la grandeur du Québec, sont des femmes. C'est le seul palier décisionnel majoritairement féminin. Ce n'est pas le cas ici. Ça ne l'a jamais été. Ça va prendre un petit bout avant que ce ne le soit, peut-être, encore. Ce l'est encore moins... le cas au fédéral. Ça progresse, hein, on va se le dire. Parfois, il y a des tendances à la hausse. Il faut les saluer, mais on est loin du compte. On n'est même pas proche de la zone paritaire, M. le Président.

Mais le gouvernement de proximité, le gouvernement scolaire, lui, il l'est, paritaire. C'est le seul. On devrait s'en réjouir. On devrait le favoriser, en quelque sorte, lui dire : Bravo! Vous avez réussi à mobiliser des femmes à occuper des sièges de responsabilité publique. Des fois, les gens dénoncent ça comme étant un tremplin pour une carrière politique par la suite. Bien, c'est quoi, le problème? Si des femmes ont commencé leur implication publique au niveau scolaire, c'est quoi, le problème qu'après ça elles puissent vouloir devenir députées à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des communes, ou maires, préfètes de MRC? C'est quoi, le problème? C'est tout à fait normal. C'est tout à fait sain d'avoir des expériences d'élue à un autre niveau, qu'on puisse ensuite transposer à un autre palier.

Les gens qui composent l'Assemblée nationale, ici, là, on vient de toutes sortes de milieux. Moi, c'est le milieu syndical. J'ai été un élu syndical dans mon milieu. Bien, je bénéficie de cette expérience-là, de cette connaissance-là dans l'ensemble des travaux qu'on fait. Quand il y a un projet de loi du ministre du Travail, bien, je connais un peu ça parce que j'ai été là-dedans. Donc, je ne parle pas à travers mon chapeau. Je suis capable de voir des trucs assez pointus. Je connais un peu plus le détail de ces projets de loi là et de l'univers dans lequel ils évoluent. Bien, c'est la même chose pour des gens qui sont des collègues ici députés puis qui pourraient provenir de la filière des élus scolaires. On en a. Bien, tant mieux, ils nous amènent leur éclairage. On n'est pas obligés d'être d'accord avec ça, mais leur expérience est valable en soi, tout autant qu'elle l'est pour l'ensemble des provenances de tous les députés ici, M. le Président.

Et la présence des femmes, elle est importante dans les commissions scolaires. Il y en a qui parlent de tremplin. Moi, je le salue. Mais elle est importante en soi parce que la plupart des recherches en sciences politiques vous le diront, c'est toujours plus difficile de recruter une femme comme candidate qu'un homme. Les hommes, souvent, on a tendance à dire : Oui, je suis capable, ne pas trop se questionner, puis on saute dans l'arène, pour le meilleur ou pour le pire. Les femmes ont tendance à un peu plus se poser la question, des fois trop se poser la question, pour être honnête. Suis-je compétente, suis-je capable de faire ça? Elles le sont dans l'écrasante majorité des cas, M. le Président, mais elles ont tendance à se retenir un peu avant de faire le saut.

Le palier scolaire offre cette possibilité-là, parce qu'il y a peut-être des responsabilités moins publiques, moins de présence à la télévision, par exemple, en direct, moins de pression, donc. Et ce palier scolaire là offre, quand même de l'expérience de gestion importante, qu'il faut saluer, qu'il faut préserver... Et je sais que plusieurs femmes ont commencé leur expérience et leur implication citoyenne et politique au palier scolaire et je trouverais ça vraiment dommage qu'il disparaisse parce qu'il y aura nécessairement une répercussion sur les autres paliers d'élus si celui-là disparaît.

Je veux aussi saluer le rôle important de la commissaire scolaire comme étant celui d'une personne indépendante d'esprit. La commissaire scolaire sera remplacée vraisemblablement par soit une direction, un P.D.G., on ne sait pas trop comment on va l'appeler, là, à la tête des comités de services partagés, et de toutes sortes de personnes alentour d'un C.A. Mais il n'y a rien de plus indépendant d'esprit pour défendre une institution qu'une personne qui a été élue par la population. Il en retourne de la même logique pour l'État du Québec par rapport à l'État du Canada. Rien de plus indépendant pour défendre les intérêts du Québec que des gens qui ont été élus par les Québécois pour le faire. Alors, c'est la même logique qui devrait s'appliquer au niveau des commissaires scolaires.

Il y a un autre enjeu sur lequel je veux souligner l'importante collaboration qu'on a eue dans Hochelaga-Maisonneuve par rapport aux commissaires scolaires. Je l'ai évoqué par bribes dans les quelques minutes qui ont précédé, c'est la question de la mesure alimentaire. La mesure alimentaire, c'est le repas qu'on offre à 1 $ dans certaines écoles, et les collations aussi, gratuites, qu'on offre dans certaines écoles. Et comment on fait pour choisir quelles écoles ont droit à la mesure alimentaire? Bien, c'est en fonction d'un indice de défavorisation, toutes sortes de... un paquet de calculs, là, qui sont mis dans une machine, là, puis on décide, telle, telle, telle école font partie d'un endroit, d'une zone qui est défavorisée, en dessous d'un certain pourcentage, et elles ont donc droit à une subvention spéciale pour offrir cette collation et ce repas à 1 $. Bon. L'an dernier, une révision de cette carte a été faite, et, dans d'Hochelaga-Maisonneuve, M. le Président, j'ai perdu trois écoles : Saint-Nom-de-Jésus, Maisonneuve, Notre-Dame-de-l'Assomption et Saint-Anselme. Saint-Anselme, c'est dans le secteur Sainte-Marie, mais c'est dans la circonscription d'Hochelaga-Maisonneuve. Donc, quatre écoles perdent leurs mesures alimentaires... l'année passée.

C'est un drame. Savez-vous pourquoi? Parce que, quand on perd la mesure alimentaire, c'est parce qu'il y a eu un changement démographique. C'est un secret de polichinelle qu'il y a un processus de gentrification en ce moment en cours dans plusieurs quartiers centraux de Montréal, dont Hochelaga-Maisonneuve. On construit beaucoup plus de condos que de logements sociaux, si je veux le résumer comme ça. Sauf qu'en construisant des nouveaux condos, M. le Président, ça amène des nouvelles familles qui ont des plus grands revenus, ça hausse la moyenne, ça hausse la médiane nécessairement aussi. Mais, quand on refait la carte puis le calcul, woups! des écoles qui étaient dans une situation de défavorisation, parce que le quartier avoisinant a des nouveaux arrivants plus aisés, woups! on sort de la zone dite de défavorisation, on perd la mesure alimentaire. Mais les familles qui étaient dans le besoin, qui habitent dans la zone, là, elles, elles ne sont pas disparues. Ce n'est pas des familles qui sont toujours remplacées. Oui, ça existe, des rénovictions, où est-ce qu'on prend un triplex qui n'est pas super en bon état mais qui a un logement pas trop cher, on sort le monde, on retape ça, mais on revend à fort prix. Ce n'est pas supposé être légal, mais ça se fait souvent, M. le Président. Oui, ça existe, puis certaines familles moins aisées sont évacuées au profit de familles plus riches. Mais la réalité, c'est que c'est surtout des nouvelles constructions, donc des nouveaux riches qui s'en viennent, mais les familles moins aisées ne disparaissent pas, elles sont encore là. Et leurs enfants auraient tout autant besoin de mesures alimentaires à l'école, mais, parce qu'une communauté plus riche s'est installée, la mesure alimentaire disparaît.

• (12 h 20) •

C'est un problème fondamental, ça, M. le Président, il faut s'y opposer. Qui s'y est opposé? Bien, les commissaires scolaires. Ils ont levé le drapeau rouge rapidement, ils nous ont informés, au bureau de circonscription, ils nous ont dit : Regardez, les chiffres sont sortis, on va perdre telle, telle, telle mesure. Bien, ensemble, on a réussi à se mobiliser, ensemble, on a réussi à trouver d'autres façons de le calculer, on a fait des pressions sur le ministre, on a trouvé des solutions. Bien, qui va faire ça si ça disparaît? Ce ne sera certainement pas le directeur d'école, ce n'est pas dans sa définition de tâche. Ce ne sera certainement pas le P.D.G. du Centre des services partagés, ce n'est pas dans sa définition de tâche. Qui va faire ça, M. le Président? Moi, je le ferais tout seul, à la limite, mais je n'aurais peut-être pas accès à ces chiffres-là aussi facilement que l'avait la commissaire scolaire. Et ça, ça a un impact fondamental sur l'avenir de l'école au Québec, sur l'avenir de l'école dans mon quartier, sur l'avenir des familles, parce que l'adage le dit bien, hein, on n'apprend pas le ventre vide. Bien, en attendant d'avoir trouvé une solution, là, la mesure alimentaire universelle, plusieurs pays le font, les pays scandinaves, entre autres, avec des intérêts sur plusieurs plans, l'intérêt nutritionnel, notamment, l'intérêt socioéconomique, l'intérêt de l'estime de soi. Ce n'est pas évident non plus d'être un enfant puis de dire que, moi, mon lunch, il est à 1 $, puis tous mes petits amis, eux, ils ont leur lunch qu'ils amènent de la maison. Le fait d'avoir un lunch pour tout le monde fait en sorte d'éliminer cette stigmatisation-là qui peut être héritée, M. le Président.

Mais qui va se battre pour ça? Qui va lever le drapeau aussi rapidement que le faisait ma commissaire dans Hochelaga-Maisonneuve et dans plein d'autres quartiers, le quartier Ville-Marie, notamment, avec Stéphanie Heng, avec qui je collabore également? Bien, ça va avoir un impact, et cet impact-là, moi, je le crains énormément parce que je ne fais pas confiance nécessairement à la nouvelle structure qui va être mise en place pour être aussi vigilante puis être aussi mobilisée sur ces causes sociales là qui sont fondamentales pour l'école, notamment à Montréal.

Je vous ai parlé des trois écoles de la rue Adam, le désert scolaire de la rue Adam, qu'on est en train de reconstruire. Il y a plein d'autres enjeux avec lesquels on a travaillé et où la commissaire scolaire s'est illustrée. Je pense, entre autres, à l'enjeu de l'école Irénée-Lussier, qui a un projet de construire une plus grande école. C'est une école pour les personnes qui sont avec des handicaps, M. le Président, et qui ont besoin d'adaptation. Ils sont dans un vieux bâtiment. Il y a des escaliers quasiment en pente, en pente glissante... qui n'est pas du tout adapté à leur réalité. Il faut qu'il y ait quelqu'un qui puisse coordonner à long terme ces projets-là. Oui, il y a un comité de parents, oui, il y a une direction. Mais, pour assurer une pression sur la commission scolaire, une pression sur le ministère de l'Éducation, il faut une personne qui a une visée large de l'éducation d'un secteur, et, à mon sens, ça ne pourra être autre qu'une commissaire scolaire.

Ça fait que c'est le genre de travail qui est fait au niveau du terrain. C'est un genre de travail qui est fait au quotidien par la commissaire scolaire, qui n'est payée qu'une demi-tâche, M. le Président, mais qui en accomplit beaucoup plus, qu'une demi-tâche, qui pourrait largement être payée à temps plein, puis il y aurait encore du travail à faire pour le scolaire.

Je voudrais terminer mon intervention, entre autres, sur la question de l'avenir de l'éducation au sens plus large. On a demandé un report du débat à l'année prochaine, et ça a été refusé. Moi, je pense que ma collègue de Sherbrooke, la députée de Sherbrooke, a évoqué quelque chose d'intéressant en début d'année, l'année dernière, qu'on était dus pour une nouvelle commission Parent 2.0 pour faire le tour du dossier de l'éducation. Il y a plusieurs choses qui ne vont pas super bien dans le dossier de l'éducation. Et là de penser que l'abolition des élections scolaires va amener un quelconque bénéfice aux enjeux réels du secteur de l'éducation, c'est se bercer d'illusions, M. le Président, c'est se magasiner des déceptions et surtout magasiner des déceptions pour les Québécois et les Québécoises.

Nous, ce qu'on demande, c'est une commission d'enquête large. On verra combien de temps, combien de commissaires, là. Tout ça est à discuter, bien sûr. Mais le principe est le même, de se dire : Prenons un temps d'arrêt. C'est réclamé par une foule d'acteurs dans le milieu de l'éducation, autant des syndicats que des personnalités, des chercheurs, qui disent : Prenons un temps d'arrêt. Il y a eu plusieurs ratés dans le réseau dans les dernières années. Et là il faut mettre une pause et voir, dans une vue d'ensemble, ce qui pourrait être fait et en débattre intelligemment, à la hauteur de ce que mérite ce réseau-là.

Visiblement, ce n'est pas ce qui est dans les cartons. Visiblement, on préfère prendre des actions très rapides, voire trop rapides, peut-être même précipitées, notamment sur les maternelles quatre ans. Il n'y a pas de panique, là, à mettre des maternelles quatre ans partout. C'est un bon projet, une maternelle quatre ans, tout le monde est d'accord avec ça. Mais est-ce qu'il faut en mettre partout, dans toutes les régions? Est-ce qu'il faut vider les CPE pour faire ça? Est-ce qu'il faut abolir les élections scolaires? Ça presse? Ça va remettre le réseau scolaire en bon état? Je ne comprends pas, là. Ce sens des priorités, il me semble complètement à côté de la track.

Je le disais en entrée de jeu, une commission scolaire, ce n'est pas parfait, c'est perfectible. Il y a certainement des choses qu'on aurait pu faire dans le passé pour l'améliorer. Le jumelage des élections scolaires aux élections municipales, ça fait des années que c'est réclamé par plusieurs personnes. Ça serait très simple à faire, pas mal sûr que le DGEQ aurait une opinion favorable avec ça aussi, lui-même qui s'est déjà positionné très en défaveur de l'abolition des élections scolaires.

Puis ça a été déjà dit, mais je vais le répéter, on a des voisins... Je parle de l'Ontario, mais on a des voisins, au Nouveau-Brunswick, qui ont eu des débats similaires dans les années 90, qui ont dit qu'il fallait, pour faire avancer le dossier de l'éducation, abolir les commissions scolaires. C'était ça, la solution. Bien, grande surprise, quelques années plus tard, ils les ont réinstaurées. Ils les ont remises en place parce qu'ils se sont rendu compte que c'était la meilleure façon de faire en sorte que la communauté s'implique dans son école, pas juste la communauté des gens qui utilisent l'école, l'ensemble de la communauté. Moi, M. le Président, j'ai une petite fille de deux ans et quelques mois maintenant, quelques semaines, devrais-je dire plutôt. Elle est encore loin d'aller à l'école. Elle le sera assez vite, probablement trop vite à mon goût, évidemment, mais elle le sera bientôt, mais je suis déjà intéressé par l'avenir de mes écoles dans mon quartier. Je l'étais même quand j'étais un étudiant qui venait d'arriver dans Hochelaga-Maisonneuve. L'avenir des écoles de mon quartier m'intéressait. Ça devrait intéresser tout le monde.

Victor Hugo disait : Quand on ouvre une école, on ferme une prison. Ça date du XIXe siècle, mais ça tient toujours. Plus on va mettre de l'accent sur l'éducation, plus on va faire en sorte que la communauté au sens large va s'émanciper. Et là j'utilise l'émancipation, là, vraiment d'un point de vue politique. Dans la vie, là, on va avoir toutes sortes de défis comme individus. On va avoir des interactions, on va avoir un employeur, on va avoir à négocier un loyer, on va avoir à faire appliquer des normes du travail. Il y aura peut-être des gens qui vont essayer de nous avoir avec des hypothèques. Il y aura tellement de choses à faire, tellement de défis à faire face qu'il faut qu'il y ait une école solide qui soit vraiment présente très, très tôt dans l'éducation citoyenne de notre jeunesse, celle qui va grandir, celle qui va prendre les commandes du Québec dans quelques années pendant que nous, on va bénéficier de nos pensions et qu'on va espérer avoir la maison des aînés qui sera construite d'ici là. On verra bien.

Mais là où je veux en venir, c'est que l'école doit être au centre de nos préoccupations, mais la gestion communautaire de cette école-là doit être au centre de nos préoccupations. Toutes sortes de mondes sont présents dans une école. Il y a des profs, il y a des parents, mais il y a des utilisateurs aussi, des citoyens qui viennent, qui aident. Il y a des bénévoles, il y a toutes sortes de personnes dans le personnel scolaire. On n'en parle presque jamais. On parle toujours des professeurs. Ils sont au centre, bien sûr, mais il y a une foule de personnel. C'est selon des interactions. Comment on va faire en sorte de faire que l'école soit au centre du développement du Québec dans les prochaines années? Je doute, M. le Président, que ça soit en abolissant les élections scolaires. Bien au contraire, c'est central. C'est quelque chose qui peut être amélioré, bien sûr, mais abolir, faire reculer la démocratie, ça n'a jamais rien causé de bon. Ça a toujours créé soit des fausses illusions, soit des déceptions.

Et moi, je fais le pari, M. le Président, que, si le projet de loi va de l'avant, que, peu importe la couleur du prochain gouvernement... je le souhaite, en tout cas, qu'il y ait un retour de la démocratie scolaire, que ça ne disparaisse pas de manière permanente du paysage québécois. On l'a vu au Nouveau-Brunswick, c'est revenu. C'était la raison même, il fallait qu'il y ait une prise en charge de la communauté de l'école. Bien, je fais le souhait, M. le Président, d'abord qu'on n'aille pas jusqu'au bout de ce projet de loi là, que le gouvernement recule, comme il l'a fait sur le Programme de l'expérience québécoise, qu'il réfléchisse, qu'il fasse une pause, qu'il appelle un états généraux.

Mais, si jamais il va de l'avant, que ça soit ici, ou par bâillon, ou peu importe, j'émets le souhait que le prochain gouvernement, quelle que soit sa couleur, ramène la démocratie scolaire, fasse la promotion de la démocratie scolaire, fasse la promotion du rôle des commissaires scolaires au sein des communautés, parce qu'ils sont importants. Elles sont importantes, M. le Président. Je tiens à les remercier pour leur travail, je tiens à saluer leur mobilisation passée, présente et future et je veux qu'elles sachent qu'on est avec eux et elles. Merci, M. le Président.

• (12 h 30) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. D'autres interventions? Oui, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Hélène David

Mme David : Merci, M. le Président. Je suis heureuse de parler après le député d'Hochelaga-Maisonneuve, hein, qui a eu des propos extrêmement pertinents et je dirais que je vais continuer sur beaucoup d'éléments qu'il a apportés.

Dans le mot «démocratie scolaire», il y a le mot «démocratie». Et est-ce que c'est parce qu'on est dans une société extrêmement privilégiée qu'on est dans une société où on n'a jamais à remettre en question le fait que nous sommes démocratiques? On est dans un pays démocratique. On est nés avec ça et on ne se pose plus la question : Que veut dire le mot «démocratie»? C'est rarissime qu'on aille vers moins de ce mot «démocratie» et de ces instances démocratiques. Habituellement, on veut en ajouter. Ce n'est pas pour rien.

Il faut vraiment connaître un peu son histoire, connaître l'histoire non seulement de notre province, l'histoire du droit de vote des femmes qui a été acquis, ma foi, tellement longtemps après celui des hommes. On l'oublie, il faut le dire et le redire, mais non seulement la démocratie de notre province, la démocratie de notre pays, la démocratie de notre continent, qui est malmenée dans certains pays et qui est malmenée dans tellement d'endroits au monde qu'on se surprend aujourd'hui à parler de démocratie et à en parler en disant : N'enlevons pas des droits démocratiques. C'est surréaliste. Ne serait-ce que pour ça, il est extrêmement difficile de comprendre le gouvernement dans des finalités qui sont, on peut le comprendre, l'efficacité, le rendement, la gestion. Mais arrêtons-nous, comme société, faisons un peu de sociologie aussi et demandons-nous : Mais qu'est-ce que ça veut dire que ces instances démocratiques?

Et, oui, il y aura toujours les gens qui vont dire, et c'est vrai : Il n'y a pas assez de gens qui participent au vote, c'est une couche démocratique de trop dans notre société. Ça, il y a tellement de pays où des gens perdent leur vie pour avoir plus de démocratie qu'entendre ça, c'est vraiment épouvantable. Il y a trop de démocratie, il y a trop de structures, il faut en enlever. Mais prenons un peu de recul, prenons un peu de temps de réflexion historique, sociologique, démographique, j'oserais dire, planétaire pour se dire : À quoi est-on en train de toucher? Et prenons-nous la question, je pourrais dire, les problèmes qui sont soulevés... parce qu'ils ne sont pas tous mauvais, ces problèmes-là qui sont soulevés, mais les prenons-nous par le bon côté de la lorgnette? Les prenons-nous dans le bon angle?

Et le député d'Hochelaga-Maisonneuve disait aussi : Bien, peut-être qu'on aurait pu regarder ça autrement, peut-être qu'on devrait le regarder autrement. Et le DGEQ dit la même chose. Pourquoi... Ne le regardons pas en disant : Il y a un problème de participation démocratique. C'est vrai. Les chiffres parlent par eux-mêmes, comme dirait le premier ministre, et je ne pensais pas le citer. Souvent, les faits sont têtus. Mais des faits, un pourcentage de votes, ça ne veut pas dire qu'on ne peut pas travailler à une meilleure participation citoyenne de ce vote en matière de démocratie scolaire. Mais, non, on dit : On va enlever la démocratie scolaire, ça va régler le problème. C'est sûr que ça va régler le problème. Si tu as mal à un orteil puis tu coupes l'orteil, tu n'auras peut-être plus mal à l'orteil, mais tu n'auras plus d'orteil, puis ça va être autrement plus compliqué après pour continuer à faire tes activités quotidiennes.

Est-ce que le remède est le bon remède? Je pense qu'il n'y a personne en Chambre ici qui ne dit pas : Il faudrait peut-être améliorer la participation citoyenne. Ça n'a pas de bon sens, le 5 %. Oui, mais pourquoi on ne rêverait pas plus grand, justement? Pourquoi de 5 % il faut aller à zéro, en disant : De toute façon, c'est juste 5 %? Est-ce qu'on s'est posé la question nous-mêmes, comme citoyens? Est-ce qu'on s'est posé la question : Pourquoi je ne suis pas allé voter moi-même aux élections, disons, scolaires? Pourquoi ci, pourquoi ça? Quand on se met à se poser des questions, il y a bien des choses qu'on ne fait pas qu'on devrait faire. Puis, quand on se fait sensibiliser à ça ou, mieux encore, que, comme Assemblée nationale, on décide de prendre les bons moyens pour favoriser cette participation démocratique, bien, on serait étonnés, M. le Président, on serait étonnés comment les gens iraient voter plus.

Par exemple, évidemment, il y a toujours deux façons qui reviennent, mais qui auraient le mérite d'être regardées. On n'y pense même pas. On coupe l'orteil, c'est réglé, c'est fini. Non, on pourrait passer de 5 % à 15 %, 20 %, 25 %, 30 %, 40 %, je ne sais pas, mais en faisant énormément, un, de sensibilisation, deux, en jumelant ça avec des élections municipales. Par exemple, tu vas voter pour ton maire ou ta mairesse, pour tes conseillers municipaux... Ça aussi, tant qu'à faire, on pourrait dire : Bof! Finalement, ce n'est pas bien, bien important, le niveau municipal. On va tout mettre ça au provincial puis on va sauver beaucoup d'argent. La démocratie n'a pas de prix. Je suis désolée, la démocratie n'a pas de prix. C'est très important. Oui, il faut qu'elle soit efficace, qu'elle soit bien organisée, que les citoyens soient sensibilisés, comprennent ce que ça veut dire. On parle beaucoup, beaucoup de technologie en ce moment. Il y a des technologies, maintenant, de vote qui sont vraiment beaucoup plus faciles qu'elles ne l'étaient. Pourquoi on se refuse à regarder des meilleures façons de passer d'un 5 % à un 25 %, ou à un 30 %, ou un 40 %, je ne sais trop, mais qu'on voit en rétrécissement plutôt qu'en agrandissement? Et ça, je trouve que c'est capituler, M. le Président, sur la démocratie dans notre société.

Il y a une chose que le député d'Hochelaga a dite et avec laquelle je suis tout à fait d'accord, je pense que tous, collectivement, nous ne savons pas suffisamment ce que fait un commissaire scolaire, à quoi ça sert, à quel point ils sont dévoués, à quel point ils travaillent fort et pourquoi ils sont là. Et là-dessus, évidemment, on est tous députés, on a tous notre circonscription. On a probablement, oui, je suis sûre, tous des écoles dans nos circonscriptions. Ces écoles-là relèvent évidemment d'une commission scolaire. Et, moi, c'est la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys dans ma circonscription et c'est une commission scolaire, comme tout le monde sait, extrêmement surchargée d'élèves, extrêmement... avec des défis énormes de nouveaux arrivants, de réfugiés, de conciliation, avec beaucoup, beaucoup d'écoles multiculturelles, avec de la surpopulation dans les écoles. Vraiment, je la voyais encore, la présidente de la commission scolaire, il y a trois semaines, j'étais à ses bureaux à ville Saint-Laurent, et, c'est incroyable, elle dit : Chaque semaine encore, on a au moins 10 nouveaux arrivants que nous devons placer quelque part, et il n'est pas question de les laisser à la maison. Mais il y en a qui doivent être laissés à la maison tant qu'on ne leur trouve pas de place en classe d'accueil, francisation, etc.

Ce n'est pas simple, ces questions-là. C'est déjà énorme comme gestion, je dirais, non seulement des ressources humaines pour enseigner, mais aussi pour placer ces enfants-là puis leur donner les services auxquels ils ont droit. Alors, la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys se casse la tête, mais à tous les jours, pour savoir qu'est-ce qu'elle va faire. Mais, si, justement, la notion de territoire n'existe pas, voulez-vous bien me dire qu'est-ce que va faire un nouvel arrivant, qui est souvent un peu perdu dans tout ça et, là, bon, se fait dire : C'est l'école de la commission scolaire, tu es sur tel territoire? S'il n'a plus ces repères-là, je ne peux même pas imaginer cette catégorie d'enfants et de parents qui vont être complètement démunis, dépassés par rapport à cette question-là.

Maintenant, je reviens à la question de la démocratie. Puis là vous allez reconnaître mes intérêts, évidemment, c'est la question des femmes. On le dit, tout le monde le sait, les chiffres sont là, c'est le seul palier, j'oserais dire, de gouvernance publique et d'élus, le palier de la démocratie scolaire, où il y a plus de 50 % qui sont des femmes. Pourquoi? Pourquoi? J'étais avec — je peux la nommer, c'est une ex de nos collègues — Marie Malavoy dans le Groupe Femmes, Politique et Démocratie. Marie Malavoy m'avait invitée à aller avec elle donner une conférence dans un club qui a été inauguré au mois de juin dernier, ici, au cercle de la garnison, Les Elles du pouvoir. C'est bien trouvé comme nom, E-l-l-e-s, Les Elles du pouvoir. Ce sont celles qui veulent et... qui sont intéressées par la politique.

Par la politique, on pense toujours : Ah! fédéral, provincial. Mais, non, il y a aussi le municipal, il y a aussi le scolaire. Le parent pauvre, et on le voit bien, là, c'est le niveau de démocratie scolaire, alors qu'étonnamment... Et là j'y vois vraiment un grand, grand problème de dénigrement, je dirais, de ce qu'on fait au niveau scolaire avec le retrait éventuel de tout ce palier électif. Je pourrais dire, bien, on vient de dire à au moins 51 % des élus scolaires : Vous n'êtes pas des élus importants finalement et vous n'êtes pas élus suffisamment avec un grand intérêt de la population, un grand pourcentage, alors vous ne valez pas la peine d'exister comme élus.

Mais, oui, comme dit le premier ministre... ou même le ministre de l'Éducation qui dit : Mais ce n'est pas grave, ce n'est pas vrai qu'on enlève aux femmes la gouvernance scolaire. Le ministre dit : La réforme ne touchera pas la parité. Mais, attention, là, la parité, il dit : «Je ne suis pas inquiet du tout de ça.» Je pense qu'il dit ça le... bien, il n'y a pas très longtemps, là. Je n'ai pas la date exacte, là, mais ce n'est pas... le 26 septembre, alors il dit : «Je ne suis pas inquiet du tout de ça. On va remettre les écoles dans les mains des communautés, on va valoriser les gens qui sont sur les conseils d'établissement, et c'est déjà pas mal des femmes qui sont sur les conseils d'établissement.»

• (12 h 40) •

Bien oui, c'est des femmes. C'est des femmes qui sont enseignantes aussi. Bien oui, c'est des femmes qui sont infirmières depuis toujours et, Dieu merci, les religieuses qui ont formé tant de femmes à être infirmières. Bien oui, c'est des femmes qui sont dans beaucoup de milieux de soins. Les femmes, on est tellement bonnes à prendre soin des autres, à être des proches aidantes, à se dévouer, etc. C'est correct, on est plein de femmes là-dedans, puis ça va les rassasier, les femmes, là, sur leur besoin de pouvoir, si tant est qu'elles ont envie d'avoir du pouvoir.

Ce n'est pas la même chose, se présenter en politique, même au niveau scolaire. Et n'ayons pas de sentiment que c'est moins important et puis n'ayons surtout pas une attitude qui peut être méprisante par rapport à ce niveau-là. Les femmes peuvent commencer là et elles sont très contentes, il faut qu'elles se fassent élire. Évidemment, si on améliorait la participation citoyenne, ça serait encore plus intéressant pour ces femmes-là, qui diraient : Il y a pas mal de monde qui a voté finalement, puis, oui, on a fait ça en même temps que les élections municipales, puis, oui, on pouvait faire un vote électronique. C'est drôle, les partis politiques, ils mettent ça beaucoup, le vote électronique dans leurs élections à la chefferie, élection de ci, élection de ça. Pourquoi on n'est pas capable de le faire pour des élections au niveau scolaire? Donc, je reviens à ma question, de dire : On pourrait peut-être regarder le problème par l'autre bout de la lorgnette et de dire : On va pouvoir élire des commissaires scolaires en augmentant la participation parce que ça va être jumelé à d'autres choses. Ce n'est pas honteux de dire ça, de «jumeler à d'autres choses», c'est peut-être que les gens, ils sortent pour un, ils sortent pour l'autre, ils sortent pour l'autre, et puis là, finalement, ils sont tannés. C'est comme si on disait : Bien là, il y a une élection partielle, on n'en fera pas, d'élection partielle, parce que ça coûte trop cher — c'est un des arguments pour les commissions scolaires — parce que ça prend trop de temps, puis finalement ça ne sera pas nécessaire, on va s'en sortir sans député jusqu'à la prochaine élection. Ça ne marche pas de même, M. le Président.

Alors, les femmes, quand je suis allée avec Marina Lavoie donner une conférence sur pourquoi les femmes ont de la difficulté à faire ce fameux saut en politique, tout le monde est d'accord, tout le monde qui a participé à du recrutement de candidates... Et c'est souvent des femmes à qui on demande, qui ont une certaine expérience politique : Peux-tu approcher telle femme, telle femme, telle femme? Et ça a été vraiment le branle-bas de combat aux dernières élections provinciales parce que, là, tous les chefs de parti voulaient — et grâce au Groupe Femmes, Politique et Démocratie d'ailleurs — dire : On a la parité, on a la parité, on a la parité. Et, tout le monde, tout à coup, c'était la course à la parité. Mais là, de reléguer la parité à dire : Bien, de toute façon, il va y avoir pas mal de femmes dans les conseils d'établissement... Bien oui! Il y en a toujours eu, ça a toujours été des femmes dans les écoles, pour enseigner, pour être sur les conseils d'établissement, etc.

Alors, ce n'est pas un progrès de société et surtout pas de démocratie que de dire : Bien, ce n'est pas grave s'il n'y a pas de poste élu, elles sont là «anyway». Effectivement, elles vont rester là parce que c'est souvent les femmes qui se dévouent à ce genre de choses là et qui s'y intéressent, à l'éducation, M. le Président. Depuis toujours, ce sont des femmes qui s'intéressent. Marguerite Bourgeoys, qui est ma célèbre référence, parce que je suis la députée de Marguerite-Bourgeoys, bien, on est bien contents qu'elle ait été là et que d'autres religieuses, entre autres, se soient impliquées... puis enseigné à des femmes à devenir des enseignantes, des maîtresses d'école, comme on disait dans le temps, et puis des infirmières. Et puis qu'est-ce que les médecins auraient fait s'ils n'avaient pas eu leurs infirmières à leurs côtés, souvent pour les servir un petit peu, d'ailleurs?

Alors là, je reviens toujours à cette fameuse conférence sur Les Elles du pouvoir. Il y avait beaucoup de femmes qui étaient là, on était à Sherbrooke, et il y avait beaucoup d'élues de commission scolaire qui étaient déjà inquiètes. On est au mois d'août. Ça sentait le dépôt d'un projet de loi. On le savait. Et elles étaient vraiment très inquiètes parce que ces femmes-là disaient : Nous, on est mobilisées. Nous, on y croit, aux commissions scolaires. Les gens ne savent peut-être pas suffisamment ce qu'on fait, mais on est très engagées dans ce qu'on fait. Et juste de dire : Je suis une élue, même si ce n'est pas payé très, très cher, là... Ce n'est pas le 20 millions d'économies, ça, on y reviendra sur ce 20 millions qui est vraiment à la marge complètement. Et, je suis convaincue, avec, de toute façon, les budgets dont dispose le gouvernement, ce n'est certainement pas la raison principale, ce genre d'économie. Mais ces femmes-là y croyaient à leur travail.

Et, quand on dit que c'est un palier politique... c'est le seul palier où il y a plus que 50 % des élues, de dire, et ça, on l'a entendu, le premier ministre, de dire : On sait bien, le Parti libéral, il est pour ça parce que c'est son club-école, mais, écoutez, bien, ce n'est pas, ça, très, très gentil pour les dames qui ont été présidentes de commission scolaire et qui... Après, comme disait le député d'Hochelaga, c'est normal, elles peuvent avoir le goût d'aller plus loin, de s'investir au niveau provincial, ou au niveau fédéral, ou au niveau municipal, etc. C'est tant mieux, on a tous un club-école quelque part. On a tous été quelque chose quelque part avant de venir en politique, pour l'immense majorité des gens. On a pu être professionnel, on a pu être enseignant, on a pu être dans les syndicats. On a tous notre club-école. Savez-vous quoi? Le club-école — puis c'est valable pour vous, M. le Président, je suis sûre — le club-école de la politique, c'est la vie, tout simplement. Puis la vie, bien, ça veut dire que tu as une job, puis ça veut dire que tu as des aspirations, puis, tout à coup, tu te dis : O.K., je vais aller, pour toutes sortes de raisons, aider mes concitoyens, concitoyennes, je me présente.

Mais, quand tu es commissaire scolaire, tu t'es présentée. Ça t'a donné une belle, belle façon d'avoir quelque chose à dire et un regard sur une communauté qui est la communauté scolaire. Et puis ce n'est pas vrai que c'est la même chose que d'être membre d'un comité, d'un conseil d'établissement. Tu es une élue, puis une élue, ça veut dire quelque chose. Si ça ne voulait rien dire, bien, on n'est plus des élus ici, appelons-nous conseil d'administration de la province de Québec. Ce n'est pas la même chose, là. On a des commettants. On retourne dans nos comtés les fins de semaine. On sait que, si on veut se représenter aux prochaines élections, on a des comptes à rendre, qu'on va devoir aller devant la population, puis qu'ils vont sortir, ils vont aller faire un x sur notre nom, et c'est très, très important.

Alors, quand les femmes, à cette rencontre où j'étais avec Mme Malavoy, disaient : Oui, mais comment vous faites, c'est tellement dur, la politique, ça n'a pas de bon sens?, bien, la politique, c'est dur, mais la vie, c'est pas mal dur aussi par bouts, hein? Alors, il y a des moments où, vraiment, on trouve ça difficile. Les règles du jeu sont de plus en plus instantanées, je dirais, des fois violentes, effectivement. Mais il y a beaucoup d'humanité aussi dans ce qu'on fait. Et il faut expliquer aux femmes que, oui, elles ont le droit de prendre leur place dans la société, puis, en prenant leur place dans la société, M. le Président, ça veut dire qu'elles osent s'afficher — puis on dit toujours les affiches électorales... — bien oui, qu'elles osent s'afficher pour la démocratie scolaire.

Alors, c'est un peu triste, c'est un peu beaucoup triste, ce projet de loi là. Je ne prends pas tous les aspects. J'aurai plein de collègues qui pourront prendre d'autres angles. Mais cet angle de cette attaque sur le droit des femmes à vouloir s'investir à un niveau de palier démocratique, cette attaque à la démocratie en disant : On va enlever un palier, c'est d'une grande tristesse, et puis c'est même assez inquiétant. Mais, M. le Président, je tenais donc à aborder particulièrement ce point-là. Je vous remercie d'avoir écouté.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Gaspé. Allez-y, Mme la députée de Gaspé.

Mme Méganne Perry Mélançon

Mme Perry Mélançon : Merci, M. le Président. Alors, c'est à mon tour, en fait, là, de m'exprimer par rapport au principe, là, qui conduit le projet de loi n° 40 sur l'abolition des commissions scolaires. Ce n'est pas le titre exact, là, du projet de loi, mais, bon, c'est, finalement, essentiellement ça, le principe, là, du projet de loi, donc abolir. Abolir, mais on aurait dû retrouver dans le titre aussi pour abolir les commissions scolaires... pour l'ajout d'une énième structure qui va gouverner finalement de la même façon, qui va probablement avoir des améliorations, des améliorations que les élus... Les commissaires élus étaient très conscients qu'on avait à travailler sur certaines problématiques, là, au niveau du système de gouvernance des commissions scolaires.

Je me suis entretenue avec les commissaires de ma région, donc, bien, des trois régions de l'Est du Québec, qui sont venues déposer un mémoire la semaine dernière, je crois, durant les consultations particulières, et c'était très intéressant. Et je pense que tout le monde l'a interprété de la même façon, qu'on apportait une réalité qui n'a pas été prise en considération par le ministre de l'Éducation. Eh bien, d'entrée de jeu, nos commissaires ont tout de suite déploré le fait qu'il n'y ait pas eu de consultation dans l'Est du Québec. Et j'imagine qu'il y a d'autres régions aussi qui n'ont pas été consultées dans le processus, là, d'élaboration du projet de loi, et ça, c'est très, très dommage.

• (12 h 50) •

Parce qu'on sait que le gouvernement qui est au pouvoir, le parti qui est au pouvoir est très campé dans les régions urbaines. Alors, ce ne serait pas mauvais que, de temps en temps, il aille consulter plus loin que Québec et les grands centres et qu'il aille voir c'est quoi, la réalité des commissions scolaires dans les plus petits milieux, les régions dites éloignées, isolées, bon, bref, on connaît les termes utilisés pour ces régions-là. Parce que nos commissaires nous disaient : Est-ce qu'on prend en considération tout le travail que font les commissions scolaires pour sauver les petites écoles, les écoles du village? Moi, je suis en politique depuis 2014, élue depuis seulement un an, mais quand même on a eu beaucoup de cas de petites écoles qu'on a dû travailler fort pour les maintenir en vie, là, dans certains villages. Et on parle de la vitalité de ces villages-là, là. Ça passe par une école, des services financiers. Ça prend vraiment les outils de base pour qu'un village puisse demeurer en vie.

Alors là, ça, ce n'est vraiment pas pris en compte, alors que les commissions scolaires, eux, travaillent très fort, travaillent très fort pour les maintenir en vie et pour le recrutement, par exemple, du personnel. On a besoin d'enseignants, on a besoin, bon, de soutien particulier pour certains étudiants. On le sait, que la CAQ veut régler le problème des troubles d'apprentissage, et là je ne vois rien, dans cette réforme et dans cette abolition des commissions scolaires, qui va venir pallier à ces vrais problèmes là auxquels on doit s'attaquer en priorité.

J'ai un cas citoyen en ce moment... Je me permets de le partager ici parce qu'il va falloir qu'on trouve une façon, là, de pallier à ce problème-là. Il n'y a pas d'orthophoniste en ce moment chez nous, à Gaspé, et toutes les écoles autour, dans les plus petits villages, bien, ils se font dépister par une orthophoniste qui descend de Rimouski. Alors, ces jeunes-là, une fois qu'on sait qu'ils ont des problèmes de diction, ou peu importe, doivent se faire suivre par des orthophonistes qui sont à l'extérieur, au privé. Il y a trois postes en ce moment, au CSSS de la Gaspésie, qui sont à combler, qui sont vacants, pour avoir le service d'orthophonie dans nos écoles.

Alors, ça, c'est de réels problèmes. Ça, c'est de vouloir, comme les commissions scolaires, améliorer la réussite scolaire, la persévérance scolaire, et on ne peut pas savoir comment s'y prendra la prochaine structure, les centres de services, qu'on appelle, gérés par des gens qui ne sont pas nécessairement liés à l'éducation comme c'est le cas présentement. Nos commissaires ont de réelles expériences, qui datent de plusieurs années, là. La commissaire, justement, de la Côte-Nord, par exemple, était depuis une trentaine d'années directrice, professeure, et tout. Donc, c'est de l'expertise qu'on perd.

Et ces commissaires-là sont vraiment en contact direct avec les gens. Ce n'est pas vrai que, parce qu'ils ne connaissent pas le nom de tous les élèves, ils ne se rendent pas disponibles quand les parents appellent pour des conseils, pour savoir comment gérer un cas plus particulier. Les commissaires, ils répondent à ces appels-là. Ils sont vraiment en proximité, là, avec la communauté et jouent un rôle majeur à ce niveau-là.

Toutes les décisions aussi qui ont été prises par les commissions scolaires dans le passé, par exemple pour s'assurer qu'il y ait une offre de programmes diversifiée dans nos centres de formation professionnelle... À Sainte-Anne-des-Monts, on a ça. Donc, ça va vraiment au-delà de seulement gérer et coordonner, mais ça va aussi dans le développement d'infrastructures, des gymnases où il n'y en a pas. Ils font vraiment un... Ils jouent un très grand rôle à ce niveau-là et sont en collaboration directe aussi avec nos élus municipaux. Il y a beaucoup d'élus, là, qui sont préoccupés en ce moment, à savoir comment ce sera géré avec les centres de services, qui ne sont pas du tout composés de la même façon que nos C.A. de commission scolaire.

Alors, il y a toutes sortes d'autres enjeux. Si on prend juste, par exemple, la centralisation, bon, là, le ministre nous dit que c'est parce qu'il veut décentraliser, là, qu'il s'y prend de cette manière-là, alors que tout le monde s'entend... en tout cas, une bonne majorité des gens s'entendent pour dire qu'encore une fois on va centraliser toutes les décisions. Ça va être le ministre qui va pouvoir vraiment prendre des décisions que nous, on considère dangereuses, là. Par exemple, le ministre, lui, il est d'accord pour que les directeurs puissent contredire un enseignant et rehausser une note ou réviser, finalement, les notes. Le tripotage de notes, ça a pris beaucoup... ça a fait l'objet de beaucoup de discussions, en ce moment, et avec raison, là. On connaît tous, les enseignants, comment ils sont dévoués, comment ce n'est pas facile pour eux, là, parfois, de voir... mettre à échec un étudiant, ou un jeune, ou... Bon, ils sont maîtres de leurs classes, ils connaissent les besoins, ils font tout pour arriver à ce que ces jeunes-là réussissent. Donc là, de leur enlever cette confiance-là qu'on a en eux en disant : Bien, le directeur va pouvoir trancher, lui, puis avoir la décision finale sur vos notes, c'est quel message qu'on envoie à nos enseignants, qui sont tellement dévoués, qui font tellement des miracles avec le peu de ressources?

On en manque et là on va encore leur enlever des pouvoirs qui sont importants, à nos enseignants. Ce n'est pas pour rien qu'on avait des manifestations devant le bureau du ministre de l'Éducation, alors qu'il dit que les Québécois sont en faveur. On ne parle clairement pas aux mêmes personnes, là, parce que, là, c'est vraiment... C'est illusoire, là, de dire que les Québécois sont d'accord avec ça. O.K., le principe, il y en a qui sont d'accord, il y en a qui ne sont pas d'accord. Mais c'est dans ce qu'on nous offre, là, c'est... Le projet de loi, il offre une nouvelle structure qui centralise puis qui donne des pouvoirs au ministre encore une fois, qui sème le doute avec les élus municipaux, avec nous, parce qu'on a des cas à gérer, puis je suis certaine que le volume va s'accentuer avec cette réforme-là. Alors, moi, je ne vois pas du tout ça d'un bon oeil, on est plusieurs à le dire, puis, sincèrement, là, le principe de ce projet de loi là ne tient pas la route. Alors, voilà.

Le projet de loi n° 40, comme il est adopté, bon, les représentants des commissaires scolaires... des commissions scolaires qu'on a rencontrés... ça ouvre la voie à la fermeture de petites écoles dont le maintien pourrait être perçu comme un fardeau financier, alors qu'on parle de vitalité de nos régions, qui jouent un rôle beaucoup plus important que seulement d'enseigner à ces jeunes-là. Savez-vous que, dans ma région, par exemple, à titre d'exemple... bien, en fait, les trois régions... On va y aller avec l'Est du Québec. Les trois régions qui étaient représentées durant les consultations particulières occupent 21 % du territoire québécois. Seulement à eux seuls, les trois régions ont 21 %, couvrent 21 % du territoire, de la superficie du Québec, et puis il y a à peu près 43 000 jeunes élèves, là, si on ne considère pas ceux qui sont à l'éducation pour adultes. Donc, c'est l'équivalent d'un aller-retour Gaspé-Ottawa avec à peu près 17 jeunes par kilomètre carré. Donc là, là, vous voyez comment ça peut être difficile à gérer si, justement, ce sont des centres de services qui n'ont pas, eux, à préserver, finalement, là, la représentativité territoriale.

Donc, il y a beaucoup d'autres éléments. Je ne sais pas si je dispose encore de... Je peux consulter... je peux continuer. Bon, j'ai perdu mon idée. Dans les centres de services, ce n'est pas, comme je le disais, la même composition, il y aura des parents membres, il y aura des gens de la communauté. Est-ce qu'on va tenir compte des particularités vraiment de chacun des petits milieux? Le centre de services, il va être implanté à quelque part, souvent dans les plus grands centres. Moi, chez moi, on a un bel exemple, il y a la ville de Gaspé, qui est une beaucoup plus grande ville que toutes les autres municipalités qui se retrouvent dans la MRC de La Côte-de-Gaspé. Bien, c'est sûr qu'elle tire souvent la couverte sur des subventionnements. Donc, les élus ont toujours à tenter de trouver des moyens de bien répartir le financement, les investissements, et tout, mais il y a encore beaucoup, là, de disparités dans les régions. Alors, si le centre de services est inscrit à... se situe à un endroit en particulier, bien, les besoins des autres villages, et tout, ne seront peut-être pas tenu en compte, là, dans cette réforme-là.

Alors, je vais poursuivre. Je regarde beaucoup le temps parce que je sais qu'on est à la veille, là, de terminer les travaux... Ça, c'est dit, la représentation territoriale.

Il y a aussi tout l'aspect bureaucratie. Ça, le changement de structure, ne va pas pallier au fait qu'il y a beaucoup trop de bureaucratie, et ça, ça avait été mentionné par les commissions scolaires, et elles étaient prêtes à tendre la main au gouvernement, au ministre pour alléger, finalement, le fardeau bureaucratique, là, qu'on demande aux commissions scolaires. Alors, il n'y aura pas de différence dans la reddition de comptes, et, la transformation des écoles en leaders de la réussite, bon, ça sera plutôt des établissements qui sont encore assujettis aux exigences bureaucratiques du ministère.

Il y a aussi l'aspect économique. Bon. Le Québec prévoit économiser 45 millions de dollars. Si on regarde plus particulièrement ces chiffres-là, on voit que c'est à peu près...

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Gaspé...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée de Gaspé, il est maintenant 1 heure, et, avant d'ajourner le débat, je dois vous demander si vous voulez poursuivre votre intervention lorsque le débat va reprendre.

• (13 heures) •

Mme Perry Mélançon : Est-ce que je dois vraiment vous dire si ce sera nous... ce sera moi...

Le Vice-Président (M. Picard) : Bien, à titre indicatif. Mais, si vous n'êtes pas là lorsque nous allons reprendre le débat, bien, nous allons considérer que vous ne poursuivez pas.

Donc, compte tenu de l'heure et afin de permettre cet après-midi le débat sur une affaire inscrite par les députés de l'opposition, le présent débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 40 est ajourné.

Les travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 1)

(Reprise à 15 heures)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Veuillez vous asseoir.

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée mandate la Commission de la santé et des services
sociaux afin qu'elle procède à des consultations particulières concernant
les services offerts aux personnes autistes

Alors, toujours aux affaires du jour, les affaires inscrites par les députés de l'opposition. À l'article 48 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis présente la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale mandate la Commission de la santé et des services sociaux afin qu'elle procède les 22 et 23 janvier 2020 à des consultations particulières et auditions publiques concernant les services offerts aux personnes autistes, notamment lorsqu'elles atteignent l'âge de la majorité;

«Que la commission entende les personnes et organismes suivants ainsi que [toute personne ou organisme] qu'elle jugera nécessaire de convoquer : Autisme Québec conjointement avec Autisme Montréal, Réseau pour transformer les soins en autisme, Autisme sans limites, M. Charles Lafortune, vice-président Contenu et réalisation, Pixcom, The Little Red Playhouse, Autism Speaks, Dre Srividya Lyer, professeure adjointe au Département de psychiatrie à l'Université McGill et chercheure au Centre de recherche de l'Hôpital Douglas, l'Association de médecins psychiatres du Québec, l'Association des directions générales des commissions scolaires, Association of Directors General of English School Boards of Québec, Saccade, Mme Brigitte Harrison, l'école À pas de géant, Dr Alexis Beauchamp-Châtel, psychiatre, chef de service médical du programme de psychiatrie neurodéveloppementale adulte [à] l'IUSMM, professeur adjoint de clinique au Département de psychiatrie de l'Université de Montréal, la Fédération québécoise de l'autisme, la Coalition Autisme Québec, [Dr] Tung Tran, directeur du programme Santé mentale et dépendance au CIUSSS du Centre-Ouest-de-l'Île-de-Montréal, conjointement avec Mme Geneviève Chabot, directrice adjointe de la réadaptation au CIUSSS du Centre-Ouest-de-l'Île-de-Montréal;

«Qu'une période de 12 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, répartie de la manière suivante : 6 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 4 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 1 minute au [...] groupe d'opposition et 1 minute au troisième groupe d'opposition;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 10 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 35 minutes partagées ainsi : 17 minutes 30 secondes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 11 minutes 40 secondes pour l'opposition officielle, 2 minutes 55 secondes pour le deuxième groupe d'opposition et 2 minutes 55 secondes pour le troisième groupe d'opposition;

«Que l'organisation des travaux soit confiée au comité directeur de la commission, notamment l'aménagement de l'horaire selon les éventuelles demandes de changements des personnes et des organismes.»

Je vous informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur la motion inscrite par Mme la députée de Westmount—Saint-Louis s'effectuera comme suit : 10 minutes sont réservées à l'auteur de la motion pour sa réplique, 53 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 31 min 52 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 11 min 23 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, 10 min 15 s sont allouées au troisième groupe d'opposition; que chaque député indépendant dispose d'un temps de parole de 1 min 30 s. Toutefois, lorsqu'un seul député indépendant participe à un débat, il dispose d'un temps de parole de deux minutes. Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par les députés indépendants ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle aux députés indépendants que, s'ils souhaitent intervenir au cours de ce débat, ils ont 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser la présidence.

Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.

Mme Jennifer Maccarone

Mme Maccarone : Merci, Mme la Présidente. Je suis contente d'être entourée par mon équipe. Mes amis, ma famille savent que je suis un peu nerveuse; pas parce que ce n'est pas un sujet que je maîtrise, mais parce que c'est un sujet qui est personnel pour moi.

Je regrette de me lever encore une fois à ce sujet, mais je sais que, si je me lève pour moi, pour Samuel et Bianca, mes amours, c'est parce qu'il y a 1 000 familles derrière moi qui sont en train de m'épauler, qui sont en train de me tenir debout, qui osent espérer que le gouvernement aura un coeur tendre, qu'ils vont accepter de faire entendre ces familles, parce que c'est un sujet qui nous interpelle tous.

J'aurais voulu vraiment parler à ce sujet apolitiquement. Je me suis levée ici, dans cette Chambre, pour interpeler les 125 députés. Je connais plusieurs collègues, l'autre bord de la salle, il n'y a personne, personne, personne au Québec qui ne connaît pas une personne autiste, qui ne connaît pas une famille qui a une personne autiste dans leur entourage. On sait les statistiques, Mme la Présidente, c'est une personne sur 64 ici, au Québec, ça représente à peu près 150 000 personnes, et c'est en croissance. Il faut agir.

Je sais que le gouvernement va dire qu'ils sont en train de regarder des choses. C'est ça que nous avons partagé quand on a étudié ceci, quand j'ai déposé le mandat d'initiative, qui a été refusé. Mais j'ai l'impression que peut-être on a mal exprimé, moi et mon collègue le député Marquette, qu'est-ce qu'on voulait accomplir pour la communauté des personnes autistes, puis c'était vraiment d'étudier la transition. Ce n'était pas d'entendre qu'est-ce que nous sommes en train de faire, mais c'est de faire faire entendre ces familles qui sont en train de vivre de la détresse, les personnes autistes eux-mêmes qui sont en train de vivre quelque chose qui est spectaculaire, parce qu'ils ne font pas partie de ce dialogue-là, parce qu'ils ne font pas partie de ce film, ils ne sont pas là, aux alentours de cette table-là, pour savoir qu'est-ce qui se passe. Puis ils se sentent non seulement isolés, ils se sentent rejetés, ils ne se sentent pas importants puis pas pris en considération.

Le 13 septembre dernier, oui, j'ai déposé le mandat d'initiative avec le député de Marquette, puis, oui, c'était pour étudier la transition de l'âge mineur à l'âge majeur, parce que ce n'est pas rendu à ta 18e année, à ta fête, que tu n'es plus autiste. Puis, oui, c'est vrai, Mme la Présidente, je parle au nom des personnes autistes parce que ça m'interpelle personnellement, parce que je sais que ça fait partie de mes dossiers. Puis, chose intéressante pour tout le monde, pour tous mes collègues ici, je suis la seule porte-parole au Canada, que ce soit au parti de gouvernement ou à l'opposition, à avoir «autiste» dans son titre, c'est unique. Je remercie encore le chef de l'opposition pour avoir... m'accorder ce titre-là, cette responsabilité, parce que je pense que c'est quelque chose qu'il faut changer dans notre façon de voir ce diagnostic-là, ces personnes-là.

Puis tout ce qu'on va faire pour aider des personnes sous le spectre de l'autisme, ça va aider toutes les personnes qui souffrent d'un handicap, qui souffrent d'un déficit ou une difficulté, parce que, j'ose croire, tout ce qu'on peut entendre, dans une commission, tout ce qu'on peut discuter, tout ce qu'on va entendre, ça va être quelque chose qui pourrait être réapproprié pour les autres. C'est un départ, puis il faut commencer quelque part. Mais il faut commencer quelque part à entendre la communauté, les personnes sur le terrain, les chercheurs, les experts, les groupes communautaires, les parents, les personnes autistes eux-mêmes. Je serais ravie de partager mes expériences au bénéfice de la population, au bénéfice des personnes qui eux-mêmes sont en train de souffrir, si j'aurais la possibilité d'aider leur vie.

Je dis souvent que je n'ai jamais rêvé d'être députée, c'est vraiment un changement de vie total pour moi, mais je suis fière d'être une porte-parole pour ma communauté de Westmount—Saint-Louis, mais je suis fière d'être la porte-parole en matière de famille pour la clientèle à handicap et les personnes autistes. C'est une richesse pour moi, ça m'amène énormément à ma vie, et je veux bien faire ça. I don't want to let anybody down. Je veux réussir dans mes dossiers. Mais ce que je veux réussir, d'ici les trois prochaines années, c'est de bouger le système même un peu pour faire réaliser les déficits, pour aider ces personnes-là.

• (15 h 10) •

Je sais que j'ai l'appui des deuxième et troisième groupes de l'opposition, je suis contente de ça. Et aujourd'hui je vois que peut-être nous avons une deuxième chance, une deuxième chance de se faire entendre, ces familles-là, comme je dis, pas moi mais ces familles-là, toutes les personnes sur le terrain. C'est ça, une commission parlementaire. C'est ça, être porte-parole. Être porte-parole, être parlementaires, ça veut dire que nous sommes à l'écoute de la population. Ce n'est pas des décisions que nous prenons personnellement, c'est des décisions que nous prenons parce que la population, les Québécois et Québécoises nous interpellent. Et je me suis fait interpeler. Je ne suis pas seule.

Mais, si je partage un peu l'expérience, pour moi, personnellement, qui m'a quand même donné l'idée... Je ne vous le cache pas, Mme la Présidente, le parcours avec mes enfants, comme parent, ça a été hyperdifficile. Je n'aurais pas pu imaginer ma vie autrement, mais je ne pouvais pas imaginer comment que ça a pu être difficile de voir ton enfant souffrir, de voir ton enfant qui s'automutile, de voir ton enfant avec qui tu ne peux pas communiquer, que tu ne peux pas toucher. Ça, c'est difficile, Mme la Présidente. Mais on se rend à un moment où on dit... Puis ça, c'est vrai pour chacun d'entre nous qui sont parents. Il y a des moments où on dit : C'est un bon moment, puis : Un moins bon moment, à chaque âge de nos enfants. C'est la même affaire quand on a des enfants autistes ou handicapés.

J'ai passé une passe où j'ai dit : Ah! ça va s'améliorer, ça commence. J'ai travaillé des heures et des heures, j'ai des semaines derrière moi, des nuits blanches. J'ai dû lâcher mon emploi pour rester à la maison, pour prendre soin de mes enfants. Il n'y avait pas des services pour moi puis mes enfants. Mes enfants ont 16 et 18, alors, au moment où ils ont eu leur diagnostic, il y avait beaucoup moins de diagnostics, et j'étais isolée. Alors, j'ai dû bâtir quelque chose moi-même, à mon sous-sol, parce que je savais qu'agir tôt, à trois ans, c'était l'âge. Quatre ans, c'était trop tard. Cinq ans, c'était trop tard. J'ai dû agir au moment que j'avais le diagnostic. Puis juste d'avoir un diagnostic, ça a été vraiment hallucinant, le travail qu'il faut faire, pour les parents, pour trouver ce chemin-là, parce que ça prend cinq disciplines, ce n'était tellement pas facile. Puis c'était 40 heures par semaine de thérapie, c'étaient deux hypothèques sur ma maison, je paie encore mon hypothèque. Mais j'ai dit : Si c'est la seule chose que je fais pour investir pour mes enfants, non seulement que mes enfants vont en bénéficier pour le futur, mais la société québécoise aussi, ils vont en bénéficier, parce que ça va être des enfants adultes qui vont être indépendants. Alors, je voyais vraiment ça comme le plus gros cadeau que j'aurais pu faire pour mes enfants.

Ça fait que j'en ai fait, des choses. Je les ai mis dans des situations difficiles. Je suis allée au cinéma, je m'en souviens, c'étaient des semaines où je suis allée au cinéma, puis ma fille, elle ne pouvait pas tolérer des bruits, ma fille, elle ne pouvait pas tolérer être entourée par du monde qu'elle ne connaissait pas, c'étaient des lumières, c'était tout nouveau pour elle. Puis, chaque fois que j'y allais, elle vomissait sur moi. Et moi, j'allais à la salle de bains, puis laver dans la toilette, parce que je ne pouvais pas faire ça devant tout le monde, puis je pleurais, puis je pleurais. Puis il y avait le gérant de cinéma qui est venu puis il m'a donné plein de laissez-passer, parce que je ne pouvais pas regarder un film en entier, et il m'a dit : Madame, revenez n'importe quand, vous êtes la bienvenue. C'est ma communauté. C'est ça que je veux apporter à ces personnes ici aujourd'hui, c'est le même sens d'ouverture, c'est le même effet. Des fois, juste de se faire entendre, ça change la vie des gens, d'avoir une oreille ouverte qui dit : Je comprends. J'ose croire qu'il y a quelque chose qu'on peut faire qui est petit.

Quand mon enfant, mon fils Samuel a fait le saut à l'âge majeur, c'était le mois d'avril, puis j'ai dit : Je pensais que, mon Dieu! les choses vont s'améliorer. Je suis chanceuse, les choses vont s'améliorer, c'est bon, il est adulte. Il était superexcité. Mais la transition du secteur jeunesse de l'éducation... Puis j'ai de la chance, lui, il a de la chance, il a été accepté au cégep. Il a été refusé aux deux cégeps, tous les programmes, mais finalement j'ai appelé le cégep, puis ils ont dit : Oui, on pense qu'on a un programme qui serait bien pour lui. Parfait. Mais la transition, pour lui, c'était tellement lourd que je ne reconnais plus mon enfant. Je ne sais pas c'est qui, Samuel. Samuel est revenu comme un enfant de trois ans. Samuel, il est revenu... il s'automutile, il passe sa journée dans sa tête à faire des gros bruits, il a zéro focus. Il ne dort pas, il parle à lui-même, il se frappe sur le mur. Je me dis : C'est qui, cette personne-là? Mon Dieu! Je pensais que j'avais dépassé toute cette étape-là dans ma vie, parce qu'on a fait la thérapie du ICI. Puis, je dis souvent, c'est un enfant que, quand on a commencé la thérapie, juste pour qu'il vienne, il avait juste à s'asseoir à la table puis... La thérapeute a dit : «Do this.» Ça a pris trois heures. Il a craché dans sa face, il a essayé de la mordre, il a crié, il a hurlé. Il faisait ça : Maman, viens, viens à ma rescousse. Eh boy! Puis moi, j'ai passé trois heures à regarder : Tu es capable, tu es capable, tu es capable. Ça a été la pire... une des pires journées dans ma vie. Puis je voyais cet enfant-là encore. On l'a brisé puis on l'a rebâti, mon fils, puis c'était hallucinant.

Ça fait que j'ai dit : Bon, bien, on a besoin d'un médecin, on va aller le voir. Puis la pédiatre a dit : Désolée, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis — mais elle ne m'a pas appelée de même — je suis désolée, là, mais je ne peux plus prendre votre enfant, il a 18 ans. Je peux continuer des médicaments s'il a des prescriptions. À ce moment-là, il n'avait pas de prescription. Je peux vous référer à quelqu'un. J'ai dit : Oui, bien, il a besoin de consulter, il a absolument besoin de voir un médecin, sinon il va falloir que je l'amène à l'urgence, parce que je ne sais pas quoi faire, il est plein de bleus sur son corps. Je ne sais plus quoi faire puis je m'inquiète, je ne dors plus, je ne dors plus. Puis j'ai dit : Bon, bien, je vais m'inscrire sur la liste d'attente pour un médecin, mais je ne peux pas... Ça fait que j'ai pris un rendez-vous avec mon médecin de famille, puis elle a dit... Ce n'est pas parce qu'elle ne voulait pas, mais c'est parce qu'elle a une liste de patients, puis c'était plein. J'ai dit : Bon, bien, tu enlèveras mon nom puis tu mettras le nom de mon enfant, parce que mon enfant a besoin de consulter. Ça fait que, finalement elle a accepté, elle a vu mon fils. Puis c'était urgent non seulement parce qu'il avait besoin de soins médicaux, mais parce que maintenant il a commencé le cégep, il n'est plus autiste. Tous les anciens diagnostics que j'avais pour lui, ça ne comptait plus. Puis, pour qu'il ait du service, ça prenait un document qui était rempli par le médecin, mais je n'avais pas de médecin. Ça fait que j'ai dit : Mon Dieu! tu sais, «catch-22», je ne peux pas gagner. Qu'est-ce que je vais faire? Puis entre-temps il attend, il attend. And the situation gets worst, and worst, and worst.

Ça fait qu'il n'a eu aucun service parce que, le réseau de l'éducation puis le réseau des cégeps, universités, il n'y a rien qui se passe. Je veux dire, je trouve ça donc bien bizarre. Pourtant, je viens du milieu de l'éducation. La raison que je suis ici aujourd'hui, c'est parce que j'ai milité pour mes enfants au niveau scolaire, parce que j'ai commencé un conseil d'établissement, comité de parents, conseil de commissaires. Puis je suis fière d'être parmi ma formation politique parce qu'elle rejoint mes valeurs. Puis j'ai dit : Vous savez quoi? Je dis : C'est à cause d'eux, c'est à cause du scolaire que je suis ici, c'est donc bien un réseau que je connais bien. Mais évidemment que non, parce que j'étais la première à être surprise que ces réseaux-là ne se parlent pas. J'ai dit : Oui, mais mon fils, il a un code 50, vous avez toute la documentation. Elle dit : Non, non, non, les réseaux, ça ne se parle pas du tout. J'ai dit : Bien, je peux vous donner son plan d'éducation individualisé. Oui, mais, tu sais, ça... il faut recommencer à nouveau. Mais il a commencé l'école au mois d'août, puis ce n'était pas avant la mi-octobre qu'il a pu avoir de l'accompagnement scolaire, ça fait qu'il échoue, il est en train d'échouer chacun de ses cours, à part de l'éducation physique, qu'il aime beaucoup, mais... Puis il adore aller à l'école, il adore être entouré par du monde.

• (15 h 20) •

Quand il a eu son premier rendez-vous avec le médecin, je comprends, c'est un premier rendez-vous, mais là j'étais face avec le secret professionnel. Il a 18 ans. Ce n'est pas parce que... Vous n'avez plus le droit de rentrer. Oui, certainement, si le patient demande d'être accompagné, on va prendre ça en considération, mais, étant donné que c'est une première rencontre, ça va être important qu'on fait ça tout seuls. C'est un enfant. C'est un enfant majeur, mais c'est mon bébé. C'est un enfant qui ne peut pas s'exprimer, il ne peut pas s'exprimer pour expliquer tout ce qui se passe d'une façon qui va être claire et logique. Il ne maîtrise pas l'anglais, il ne maîtrise pas le français. Il a des déficits de compréhension et expressifs, linguistiques, alors je savais bien que ce n'était pas pour bien aller. Mais, O.K., je comprends, c'est un autre âge, on va voir, on va essayer de vivre avec ceci. Puis il a quitté avec une prescription pour quelque chose que j'ai dit : Bon, je ne sais pas. Je n'ai pas eu le pouvoir de donner mes conseils, mon opinion là-dessus. Ça fait qu'encore une fois il y a eu un déficit d'attente pour changer ceci, parce que, là, j'ai dû essayer d'aller dans mon réseau. Puis j'aurais pensé que, comme j'ai dit, quelqu'un comme moi qui a toujours milité pour mes enfants, j'ai milité pour ma communauté, je connais la communauté des personnes autistes, je devrais être bien connectée, mais ce n'est pas le cas. Puis, si j'ai de l'information, aujourd'hui, de comment ça fonctionne, c'est parce que je suis députée. Ça, ce n'est pas correct, Mme la Présidente. Ça, ce n'est vraiment pas correct. On ne devrait pas être dans une position de pouvoir pour être éligible pour avoir de l'information de comment ça fonctionne, le système. Ça, ça devrait être sur la place publique, prêt pour tout le monde, mais, c'est malheureux, ça ne fonctionne pas comme ça. Puis ce n'est pas un reproche. Si je partage ce que je partage, ce n'est pas un reproche, je vous dis comment ça se passe sur le terrain, c'est tout, parce que j'ose croire qu'il y a des façons de s'améliorer, ceci.

J'ai perdu toutes les subventions financières puis, oui, je suis dans une situation de ma vie... je suis monoparentale, alors peut-être je n'ai pas une deuxième source de revenus qui rentre dans la famille, mais ça reste que, je comprends, en comparaison avec plein de familles québécoises, je suis dans une situation... je suis chanceuse, je suis très chanceuse. Mais vous pouvez imaginer que le 200 $ par mois, le 300 $ par mois que plusieurs familles québécoises perdent lors du 18e anniversaire de leur bébé, hein, qui est toujours un bébé, qui est toujours autiste parce qu'on ne perd pas le diagnostic avec une fête, pour eux, là, oh mon Dieu! ça, là, c'est du répit, c'est les services que je prends pour mes enfants, c'est la liberté pour moi d'aller faire du magasinage toute seule, ça représente vraiment toutes les choses qu'on peut imaginer pour des familles qui en ont un besoin. Mais ils ne sont pas au courant, ils ne sont pas au courant qu'il y aura une perte. Puis, même s'il y a un «fast track» qui existe aujourd'hui, si je n'étais pas ici, à l'Assemblée nationale, je n'aurais pas su qu'il y avait un «fast track». Il y a des familles qui ne sont pas au courant de ceci du tout, du tout.

Mme la Présidente, je pense énormément à l'avenir de mes enfants, qu'est-ce qui arrive après 21 ans. Comme j'ai dit, j'ai de la chance; mon fils, il a eu un accès au cégep. Aucune idée qu'est-ce qui attend pour ma fille. Je me suis fait demander souvent, souvent, souvent : Vous espérez quoi pour vos enfants? Bien, savez-vous quoi? J'espère juste qu'ils vont être heureux, parce que je ne peux pas rêver de qu'est-ce qu'ils vont vivre, je ne peux pas rêver qu'ils vont choisir de marier, ou choisir d'avoir des enfants, ou choisir... ou qu'il y aura de gens qui vont dire : J'aimerais être ton ami, parce qu'ils sont souvent très isolés, mes enfants, malgré qu'eux, ils ne voient pas ça, ce qui est une bonne chose. Mais, rendu à 21 ans, qu'est-ce qu'on va faire? Parce que le réseau de l'éducation, ça aussi, ça change. Et, oui, il y a une évolution dans qu'est-ce qu'on offre à cette communauté-là. Ça peut aller jusqu'à la trentaine. Et souvent les personnes ne sont pas au courant. Il n'y a pas assez de places, puis ce n'est pas ouvert pour tout le monde.

Et j'ai des témoignages que je vais lire à ce sujet-là, parce que le réseau, il n'est pas prêt pour accueillir ces personnes-là, puis ces personnes-là qui aimeraient trouver un emploi, des personnes, là, qui aimeraient avoir un hébergement à part, les mamans qui aimeraient que les enfants quittent la maison, pas parce qu'on ne les aime pas, mais parce que nous aussi, on aimerait peut-être avoir un peu notre vie. Et je pense à vendre ma... personnellement, je pense à vendre ma maison pour acheter un duplex, parce que comme ça je vais pouvoir surveiller. Ils pourront vivre en haut... ou moi, je vivrai en haut, mais ça donne une surveillance puis, je pense, peut-être ça va me donner un peu de liberté, s'ils n'ont pas de clé pour ma porte. Mais ça, c'est un rêve pour moi. Il y a plein d'autres familles qui rêvent juste d'avoir du répit, parce qu'ils savent clairement que leurs enfants ne pourront jamais avoir ce sens de liberté. Mais c'est des personnes, c'est des êtres humains, ils ont le droit de contribuer à la société. On a le devoir de travailler là-dessus, on a devoir d'entendre ces familles en commission, on a le devoir de leur aider. Les personnes vulnérables puis les personnes en situation de vulnérabilité, ils ont besoin de nous. Je suis ici pour ça.

Je pense à qu'est-ce qui arrive si moi, je ne suis pas là. C'est qui qui va s'occuper de mes bébés quand je ne suis pas là? Je prends la route, c'est trois heures aller, c'est trois heures pour le retour, c'est l'hiver. Qu'est-ce qui arrive si moi, je ne suis pas là. Puis je ne suis pas dans une situation où je peux préparer mes enfants on mon entourage pour dire : Bien, voici qu'est-ce que tu peux faire si je ne suis pas là, parce que même moi, je ne sais pas. Puis on peut bien me montrer plein de tableaux, mais, si moi, je ne le sais pas, puis je suis députée de l'Assemblée nationale, j'ose croire que, toute la communauté qui est derrière moi, eux aussi ne savent pas. Eux, ils ont besoin de se faire entendre. Eux, ils ont besoin d'avoir l'information. Ils ont besoin de partager leur expérience sur le terrain, ils ont besoin de partager leurs parcours personnels, ils ont besoin d'expliquer qu'est-ce qui fonctionne puis qu'est-ce qui ne fonctionne pas.

Parce que, c'est sûr, il y a des choses qui fonctionnent. J'étais présente pour le lancement du plan d'action, en 2017, avec Mme Charlebois, puis j'étais supercontente parce que c'était un plan d'action... c'était un départ, c'était une première ici, dans notre province. Puis je comprends que le gouvernement prend la balle au bond puis continue, ça fait que je suis contente de l'entendre. Mais on ne sait pas où est-ce qu'on est rendu là-dessus.

J'ai toujours milité pour un intervenant pivot, «a navigator», pour le système, c'est un rôle hyperimportant, mais, quand je rencontre les gens sur le terrain, le CIUSSS de l'Ouest ou autres, ça n'existe très plus ou très pas... pas du tout. Il y a du monde qui ne sont pas formés là-dessus, c'est presque inexistant. Alors, pourquoi? «Again», ce n'est pas un reproche, c'est pour comprendre puis pour que la communauté eux-mêmes aussi, ils comprennent, pas juste moi.

Quand j'ai demandé... quand j'ai déposé le mandat d'initiative, ce n'était pas pour me faire entendre, mais c'était pour faire entendre ces personnes-là. Pour moi, c'était très important. Puis, je dis encore, pour moi, c'était vraiment une idée d'avoir une démarche non partisane, je croise mes doigts qu'on peut toujours aller vers l'avant de cette façon-là. Je vois mes collègues du gouvernement, eux, qui étaient présents en commission. Quand on a reçu le refus, je ne vous cache pas, mes collègues le sachent, je me suis cachée dans la salle de bains pendant un bon bout de temps parce que j'étais hyperémotionnelle, hyperémotionnelle parce que, oui, j'étais fâchée, oui, j'étais insultée, j'étais déçue, mais je ne savais pas qu'est-ce que j'étais à dire aux familles, les milliers de familles qui sont derrière moi, qui m'appellent, qui m'envoient des courriels, qui font ça avec mes collègues puis, j'ose croire, à vous aussi, ils doivent en parler pour dire : Comment ça se fait que c'est un non? J'étais la première à être surprise.

Ça fait que, si je suis ici aujourd'hui, je ne parle pas avec ma voix, je parle avec leurs voix. Puis... I don't want to beg. Je ne veux pas dire ça. It's not what it is. But they need to be heard, they deserve to be heard.

What I've shared is just a small snippet of one personal experience. There are thousands of personal experiences, some that are significantly more touching than mine, more emotional than mine, more difficult than mine. I'm lucky because I have my family. Moi, je suis entourée par ma famille. And they hold me up when I don't think I can stand all by myself, so I'm lucky. Merci.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oh! Excusez-moi. Alors, poursuivez.

• (15 h 30) •

Mme Maccarone : Puis j'avoue que j'avais beaucoup d'espoir quand j'ai vu l'émission Autiste, bientôt majeur. Ça m'a évidemment énormément touchée, parce que j'ai dit : Mon Dieu! C'est ma vie. C'est ma vie, c'est exactement comme ça que je me sens. C'est comme si quelqu'un est venu chez moi, puis ils ont filmé moi, ma famille puis comment ça se passait. Puis j'ai vraiment eu de l'espoir quand j'ai vu notre premier ministre dire à Charles Lafortune qu'il a été sensible à ceci puis qu'il voulait, lui aussi, aider ces personnes-là. Alors, j'avoue, j'ai été très surprise d'avoir un refus. Ça fait que, pour cette raison-là, on est ici avec la motion de mercredi, encore une fois, je répète, pour avoir une deuxième chance, pour peut-être changer cette idée-là.

Puis parce que je dis souvent que je ne parle pas seulement en mon nom, je veux... j'ai sorti juste quelques témoignages, parce que, mon Dieu! on en a eu vraiment une tonne, quelques témoignages des gens qui se sont mis en contact avec nous par rapport à la démarche. Alors, si vous permettez, Mme la Présidente, je vais lire quelques-uns.

Je vais débuter avec M. Jean-Daniel Genest, qui dit : «Je parle rarement de mon syndrome d'Asperger et plus rarement au sérieux. Mais je trouve [ça] désolant que le gouvernement de la Coalition Avenir Québec n'ouvre la commission d'enquête proposée par la députée [de] Westmount—Saint-Louis. Un des gros problèmes que je vois chez les personnes qui, comme moi, ont, un, le syndrome d'Asperger ou l'autisme est de se faire abandonner. [...]beaucoup, à l'âge adulte, ne sont ni suivis ou ne savent pas ce qu'ils peuvent avoir. Les syndromes et troubles ne partent pas à la majorité ou à l'obtention d'un diplôme. Ils restent toute notre vie. Il faut que ça cesse et qu'on revoie notre modèle de soutien envers nous et/ou nos proches. Car un crédit d'impôt n'est pas utile quand on n'a ni le moyen ou la connaissance de l'obtenir. Ce n'est pas en laissant les adultes neurodivergents sur le parquet qu'on va les intégrer.»

Suite au refus de l'étude d'un mandat d'initiative, il y a une maman qui a écrit un blogue. Écoute, c'est très long, Mme la Présidente, je ne pourrai pas le lire parce que le temps file, mais j'ai sorti juste quelques extraits parce que ça m'a énormément touchée. Puis le blogue, ça s'appelle Je suis une maman, puis c'est écrit Cri du coeur d'une maman : «Je lisais jeudi soir un article paru dans La Presse concernant le refus du gouvernement [caquiste] de tenir une commission parlementaire sur les services offerts aux personnes autistes, notamment lorsqu'elles atteignent la majorité. Services qui sont, outre la précieuse collaboration de nos écoles, quasi inexistants au moment opportun et qui, pour être mis en place, relèvent des efforts soutenus des parents d'enfants différents dans ce parcours du combattant.

«[...]Permettez-moi d'être claire : l'autisme ne se guérit pas. C'est une condition permanente. On ne peut qu'aider les autistes à développer leur plein potentiel en tenant compte de cette condition et en les dotant d'outils pour "survivre" en société.

«[...]Ah, puis je n'ouvrirai même pas la canne de verre de ce qui se passe après 21 ans pour les autistes! Rien. Il ne se passe rien. C'est le néant. Nos enfants, rendus grands, et nous vieillissants, qui s'occupera d'eux?

«M. [le premier ministre], des enjeux de société plus importants que vos intérêts restreints refoulent à vos hautes barrières : l'État doit rapidement trouver une solution concrète pour encadrer les services offerts à la population dans le besoin pour une période permanente.

«La population qui n'est pas touchée par l'autisme ne fera pas de ceci un combat, puisqu'elle ne se sent pas visée. Ce combat doit être relayé à vous, les politiciens, qui êtes responsables de faire entendre la voix du peuple.»

Et elle termine en disant : «Je souhaite que ce message soit lu, que la population non touchée par l'autisme se joigne aux familles bleues pour faire entendre notre voix. Merci de faire circuler sur les réseaux sociaux.»

Puis je rajouterais une famille, puis j'ai déjà parlé avec le ministre délégué à leur sujet, la famille Falcone, ils ont un enfant, Julian, puis je sais que le ministre essaie d'aider, le ministre délégué essaie d'aider ces personnes-là, mais ça m'a tellement frappée, parce qu'elle a milité au sein du réseau, que ce soit l'éducation, santé ou services sociaux. Son fils a maintenant 19 ans. Ça fait plus qu'un an qu'elle essaie d'aider cet enfant-là, et là elle est face à un problème où elle sait qu'il va falloir qu'elle place son fils. C'est une famille qui ne va jamais... they'll never recover. Tu ne rebondis pas de ça. Tu ne rebondis pas de ça. Mais elle a dit : «Il est important de savoir que nous avons été de fervents défenseurs de notre fils, qui a maintenant 19 ans. Julian a été diagnostiqué à l'âge de deux ans, et nous avons commencé le programme d'autisme à l'Hôpital Douglas.» Puis elle a dit qu'elle a fait presque toutes les thérapies. Elle a payé ça de sa poche. «Et maintenant je suis maintenant confrontée à la réalité que mon fils sera institutionnalisé le reste de sa vie, à 19 ans. Pour cette raison, ma famille pleurera toujours. Mais je crois fermement que son dossier a été traité et géré avec un minimum d'attention. Il n'y a pas de réponse bureaucratique qui ne me convaincra jamais du contraire. Les actions du CRDI l'ont prouvé. Je suis devenue cynique là où je pense maintenant que leur but premier est de décourager les familles d'arrêter de plaider. Mon mari et moi sommes tous des citoyens canadiens de 50 ans, chacun d'entre nous travailleur à temps plein depuis plus de 30 ans. Julian est né au Québec. Nous sommes fiers d'être Québécois et Canadiens.»

Mme la Présidente, avant de m'asseoir, j'espère d'avoir une bonne nouvelle des membres du gouvernement. Je me prépare pour un non. J'ose croire... J'ai de l'espoir parce que je suis une personne qui... J'ai beaucoup d'espoir, je suis juste faite de même, ça fait que j'ai de l'espoir. J'espère que ce ne sera pas un non parce qu'il y a des familles, des milliers de familles, des personnes autistes et moi-même qui comptent sur vous d'agir en leur nom et à dire oui, d'avoir une commission tenue le mois de janvier pour faire faire entendre la communauté des personnes autistes. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. Maintenant, nous poursuivons avec M. le ministre délégué, Santé et Services sociaux.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : Merci, Mme la Présidente. Chers collègues, je comprends tout à fait la motivation de la députée de Westmount—Saint-Louis, ma collègue, et partage avec elle le désir d'améliorer les choses. Et, comme elle, je n'aurais jamais rêvé être député, mais j'aimerais quand même partager avec elle ma motivation dans ce dossier-là.

Comme vous le savez, moi, j'étais neurologue pour enfants et je me suis occupé, pendant des années, des enfants qui avaient les formes les plus sévères d'épilepsie. On m'envoyait des patients du Québec, des États-Unis, d'un peu partout, c'est moi qui les voyais. Et parmi ces formes très sévères d'épilepsie, il y avait un fort pourcentage qui développaient un trouble du spectre de l'autisme. Puis, même si j'étais capable de les guérir de leur épilepsie, plusieurs demeuraient avec les problèmes au niveau du neurodéveloppement. Ça causait vraiment une limitation fonctionnelle à ces enfants-là et à ces familles. Et pour ce point-là, j'ai lancé une étude pancanadienne pour, justement, un essai thérapeutique pour améliorer le trouble du spectre de l'autisme chez ces enfants et changer la vie de ces familles-là.

Par la suite, plusieurs de mes patients, ils nous racontaient, comme l'a mentionné la députée, que beaucoup avaient des difficultés à se trouver des camps d'été, beaucoup étaient refusés parce qu'en plus de l'épilepsie il y avait le trouble de socialisation, il y avait souvent les troubles de comportement. J'ai moi-même créé un camp pour ces enfants où j'étais moi-même moniteur pendant l'été au lieu de faire ma job à l'hôpital parce que c'était important pour moi que ces enfants-là et que ces familles-là aient un peu de répit. Puis l'accès aux services, c'est quelque chose de tellement important pour moi et notre gouvernement que c'est pour ça que j'ai fait le saut en politique.

Donc, je suis ici pour aborder avec vous un sujet très important pour moi, soit celui des services offerts aux personnes vivant avec un trouble de spectre de l'autisme et leurs proches. Nous savons toutes et tous à quel point il est crucial d'offrir les meilleurs soins et services possible aux personnes vivant avec un TSA, à leurs familles et à leurs proches. Il en va de leur santé, certes, mais également de leur mieux-être global, incluant le développement de leur plein potentiel, chose dont on parle beaucoup ici. C'est ce que nous nous devons de favoriser en tant que société, autant du côté des intervenants, des experts, des élus que de la population. Il s'agit, à mes yeux, vous le savez, d'une priorité.

• (15 h 40) •

Depuis plusieurs années, nos équipes du ministère de la Santé et des Services sociaux, de concert avec différents partenaires, qu'ils soient gouvernementaux ou du milieu des différents organismes, sont à pied d'oeuvre pour changer les choses et améliorer l'offre de services pour ces personnes. Puis c'est pour ça que j'ai été surpris tantôt quand la députée a mentionné le forum de 2016. Le fait est que nous sommes actuellement en plein milieu du plan d'action 2017‑2022 et que ce forum-là a été organisé par ma prédécesseure, Lucie Charlebois. Je vous rappelle que, dans ce forum, on réunissait des gens atteints du trouble du spectre de l'autisme, leurs familles, les acteurs clés de ce secteur, les experts et les partenaires, les mêmes personnes dont on parle aujourd'hui qui veulent se faire entendre mais qui ont été entendues à l'époque. Ensemble, ils ont eu l'occasion de discuter de leurs préoccupations. Les sujets abordés incluaient : évaluation des besoins et diagnostics, petite enfance, enfance et adolescence, adultes et projets de vie, famille, résidentiel et milieu de vie, diversité des profils, complexité des problématiques, recherche, formation et transfert des connaissances. Suite au forum, ils ont voté pour déterminer 10 grandes priorités visant à guider le gouvernement dans les actions à mener pour mieux répondre aux besoins de ces clientèles et assurer la pérennité et l'amélioration de la gamme des services offerts.

En mars 2017, le Plan d'action sur le trouble du spectre de l'autisme 2017‑2022 a été... des actions structurantes pour les personnes et leurs familles. Et c'est le plan d'action qui prévaut actuellement, et ce, pour les trois prochaines années, puis les actions ont déjà débuté. Ce plan d'action est élaboré avec la collaboration des ministères et des organismes suivants : ministère de la Famille, ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, ministère de la Justice, ministère de la Sécurité publique, Société d'habitation du Québec et l'Office des personnes handicapées du Québec, donc vraiment un plan interministériel qui voulait toucher à toutes les parties et à tous les points qui avaient été soulevés. Un comité consultatif formé de représentants des établissements de santé et des services sociaux, la Fédération québécoise de l'autisme, l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux et du Réseau national d'expertise en TSA a aussi été mis à contribution pour la rédaction du plan.

Ce plan d'action regroupe des mesures coordonnées au profit des personnes ayant un TSA et de leurs familles et a pour objectif de favoriser le développement de leur plein potentiel tout en soutenant leurs proches. Il se décline, Mme la Présidente, en 35 mesures concrètes visant à rehausser les services en matière de TSA et à réduire les listes d'attente. Puis ce que j'ai entendu de la députée, c'est... en fait, il y a sûrement un manque de communication dans l'évolution de ces travaux, et ça, c'est quelque chose qui devrait... qui, j'ai compris, va devoir être amélioré parce que plusieurs de ces travaux sont en cours. Nous, on a des niveaux d'évolution de ces travaux-là par rapport à ce qui était attendu, et c'est sûr que je comprends la frustration des personnes dans le réseau, des familles, et tous ces gens qui ont participé à ces travaux s'ils n'ont pas eu le suivi requis.

L'objectif numéro un de ce plan d'action est de définir, de mettre en place des trajectoires d'évaluation diagnostique pour tous les groupes d'âge, tant pour les enfants, les adolescents que les adultes, qu'ils soient à 18 ans ou 21 ans et plus. Voilà pourquoi les deux premières mesures du plan d'action sont les suivantes : «Définir [les] balises nationales pour une trajectoire d'évaluation diagnostique au sein du [réseau]; mettre en place une trajectoire territoriale d'évaluation diagnostique intégrée à l'intérieur d'une trajectoire de services.» Notre priorité est que personne ne soit oublié dans le cadre de ces actions. Toutes les personnes ayant un TSA doivent être soutenues, et ce, peu importe leur âge. Un financement non récurrent de 11 millions a été attribué pour l'année 2017‑2018 au réseau de la santé et des services sociaux afin d'améliorer l'accès à ces services et réduire l'attente par l'ajout de ressources temporaires et permanentes.

De plus, dans le cadre de plan d'action, un financement récurrent annuel de 29 millions de dollars a également été annoncé, réparti dans les établissements du réseau : 5 millions pour les enfants et adolescents de six à 17 ans, 9,8 millions alloués à l'ensemble des clientèles, puis là où je rejoins la députée de Westmount—Saint-Louis, 3 millions avaient été alloués aux adultes de 18 ans et plus. Puis je pense que c'est une des causes des difficultés que l'on entend aujourd'hui, le financement, à cette époque-là, avait été probablement insuffisant. Les mesures entreprises à la suite de ce plan d'action ont, en partie, porté leurs fruits, comme je le disais, puis nous, on a un suivi de ces différents 35 points là et on va les communiquer. On a constaté, par exemple, une augmentation de 26 % du nombre d'usagers en adaptation, réadaptation ou en stimulation intensive entre mars 2017 et le 31 mars 2019.

Depuis 2017, les ministères et les organismes engagés dans la mise en oeuvre du plan d'action TSA travaillent ensemble pour l'actualisation des mesures concrètes qui couvent tout le continuum de services, de l'évaluation à la réadaptation, et ce, pour tous les groupes d'âge. Je suis très fier d'offrir mon soutien à la poursuite de ces démarches, car j'ai à coeur de poursuivre les efforts entrepris jusqu'à maintenant et d'en faire encore davantage pour soutenir ces personnes qui sont précieuses pour notre société. En effet, elles constituent une richesse pour nous tous. Leurs différences s'avèrent une force pour le Québec, et la neurodiversité, c'est important, et l'inclusion, c'est important. Cette richesse, il faut bien sûr la préserver, mais également la développer, et c'est ce que j'ai à coeur de faire au cours de ce mandat et pour les prochaines années.

De notre côté, on a vu, d'entrée de jeu, plusieurs points à bonifier. Puis évidemment, avec mon expérience de vie, la première chose qui m'a sauté aux yeux, c'est l'importance au niveau de la jeune enfance. Et c'est pour ça qu'on a inclus, évidemment, dans le programme Agir tôt, d'importantes directives et initiatives pour les jeunes avec un trouble... une suspicion, en fait, de trouble du spectre de l'autisme.

Comme le nom du projet le dit, il nous faut intervenir le plus en amont possible auprès des jeunes et des enfants si on veut leur offrir les meilleurs outils de développement. En fait, on a même démontré que, si on agit assez tôt en amont, dès qu'il y a les moindres petits troubles de suspicion d'un trouble de la communication — ça, c'est avant l'acquisition du langage, là — on peut intervenir dès l'âge de quelques mois chez un enfant chez qui on voit des anomalies dans la communication sociale, et là on est capables de modifier le devenir de cet enfant-là, et cet enfant pourra poursuivre une scolarisation tout à fait normale. Donc, pour nous, le premier point clé, c'est de s'améliorer le plus en amont possible, de suivre aussi les enfants qui ont une histoire familiale de ce trouble du spectre de l'autisme pour essayer de prévenir les difficultés scolaires et sociales qui pourront survenir chez ces jeunes enfants là.

Agir tôt a été un engagement-phare de notre gouvernement. Nous y avons investi 48 millions de dollars dès 2019‑2020, et ces investissements atteindront progressivement 88 millions de dollars d'ici 2023‑2024. Il est certain qu'une telle approche profitera à l'ensemble des personnes ayant un TSA et à leurs familles. On va également installer une façon d'intervenir qui va permettre aux intervenants d'aller dans les milieux familiaux, d'aller dans les services de garde pour non seulement favoriser le parcours de l'enfant et de la famille, mais de tous ceux qui l'encadrent. Puis par ça, ça va être superimportant parce que nous, on croit que ça va être une façon de diminuer tous les troubles de comportement qui sont associés avec des attentes qui ne sont pas en lien avec ce qu'on devrait rechercher chez ces enfants-là, ce qu'on devrait valoriser chez ces enfants-là. Donc, c'est important pour nous.

D'ailleurs, il y a un autre programme dont on a fait la promotion qui s'appelle Au-delà du TSA : des compétences parentales à ma portée. C'est un programme qui a été lancé dans la région de Trois-Rivières et que l'on compte diffuser à travers la province, parce que c'est important d'outiller les parents, puis ça leur prend des... C'est sûr que le fait d'envoyer des psychoéducateurs, des psychologues dans les familles, dans les services de garde, ça va faciliter ce processus-là.

J'ai également participé à l'annonce, tout récemment, il y a quelques jours, du projet Q1K, pour 1 000 familles, du CHU Sainte-Justine, un projet multidisciplinaire qui rassemblera des cliniciens et des chercheurs qui possèdent des expertises exceptionnelles reconnues et, surtout, complémentaires pour maximiser la force de frappe dans chacun des domaines de recherche en autisme. Puis le message que je leur ai lancé, c'est de regarder particulièrement les enfants qui ont un trouble de comportement associé, parce que partout où je suis allé à travers la province cet été, c'était un problème qui m'est intervenu. Ces enfants qui ont des problèmes de comportement associés sont ceux qui ont des problèmes d'intégration scolaire, sont ceux qui ont des problèmes dans les activités récréatives, sont ceux qui ont des problèmes au niveau de l'hébergement également. Puis ça, c'est un petit peu la suite des travaux que j'avais effectués quand j'étais à Sainte-Justine, et ça, c'est important pour moi que cette initiative unique et novatrice qui mettra à contribution 1 000 familles d'ici et qui ne peut que donner lieu à des avancées... aura un impact positif majeur pour toutes les personnes vivant avec un TSA et leurs proches.

• (15 h 50) •

Pour la transition vers la vie adulte, là, qui est le projet principal dont on... la partie principale dont on parle aujourd'hui, j'aimerais aussi rappeler que nous sommes soucieux d'offrir des services résidentiels adaptés aux besoins de la réalité des personnes vivant avec un TSA ou une déficience physique ou intellectuelle. Depuis l'année 2018‑2019, notre gouvernement a investi de façon récurrente une somme annuelle de 8,5 millions de dollars pour soutenir le développement de projets résidentiels pour ces clientèles. Ainsi, nous souhaitons soutenir le réseau dans le développement de projets novateurs et modernes basés sur les meilleures pratiques cliniques. En plus, je pense que toute la communauté aussi s'est mobilisée. On a plusieurs donateurs, philanthropes qui veulent aider dans ce sens-là, et nous, on veut les aider à réussir ces projets-là pour qu'il y ait du résidentiel dans toutes les régions du Québec pour que tout le monde ait accès à des services appropriés, quel que soit leur code postal. Ceci s'inscrit d'ailleurs dans le cadre de nos efforts pour doter le Québec d'une toute première politique en matière d'hébergement et de soins de longue durée, laquelle proposera une approche novatrice encore mieux adaptée aux besoins de différentes clientèles, dont les jeunes et adultes ayant un TSA ou une déficience. N'oubliez pas non plus que de nombreux services sont en place au sein de notre réseau pour mieux soutenir ces clientèles.

Puis j'en ai déjà parlé ici, je pense qu'on a vraiment quatre grands besoins à combler pour ces jeunes et leurs familles. Le premier grand besoin, c'est le répit et l'hébergement. Ce qu'on est en train de faire, actuellement, au ministère, puis je sais que ça prend du temps, je fais tous les efforts possibles pour faire sortir les résultats le plus rapidement possible, mais c'est d'avoir une liste régionale de ce qui est offert dans chaque région du Québec pour pouvoir le bonifier et s'assurer que toutes les familles aient accès à des ressources en répit et en hébergement et que ceux qui veulent nous aider, comme je parlais tantôt, au niveau de la philanthropie puissent s'installer dans les différentes régions et s'assurer qu'il n'y ait pas de redondances ou de régions qui ne sont pas bien couvertes à ce niveau-là.

Au niveau des activités socioprofessionnelles, ça, c'est pour ceux qui veulent continuer, après 18 ans, vers des activités professionnelles et qui veulent continuer au niveau d'ateliers de travail, 15 millions de dollars sur cinq ans a été ajouté au dernier budget par le ministère du Travail, et donc auquel nous avons également contribué au niveau du ministère de la Santé. Et, encore une fois, comme pour l'hébergement, j'ai demandé un décompte des programmes pour les enfants qui sont non seulement moins aptes dans ces activités-là, mais qui pourraient bénéficier d'ateliers pour les plus sévèrement atteints.

Un autre point qui était superimportant, c'est que certains parents nous ont dit également que... moi, à 18 ou à 21 ans, mon enfant, il a encore un potentiel éducatif. On voit que, dans ses dernières années, il continue à s'améliorer, je pense qu'il peut faire plus. Moi, j'aimerais qu'il puisse rester dans des ressources éducatives. Puis ça aussi, c'est important de donner cette opportunité-là. Puis il y avait un projet qui avait été adopté en 2018, le projet SASEFA, qui n'est toujours pas sur pied, que je suis en train de travailler très fort pour trouver des locaux appropriés pour ces jeunes qui veulent continuer au niveau éducatif.

On a mis sur pied également, avec le ministère de l'Éducation, le projet TEVA pour qu'aucun enfant qui présente une déficience intellectuelle, physique, un trouble du spectre de l'autisme... qui finissent leurs activités scolaires puissent... soient sans plan, sans plan de vie, pour que tous les enfants soient évalués à la fin de leur parcours scolaire et qu'on puisse déterminer d'emblée un plan de vie pour ces enfants-là. Puis le ministère du Travail a également mis sur pied un plan de soutien à la préemployabilité qui va venir faire exactement la même chose.

On a également du travail à faire au niveau du soutien à domicile et résidentiel. On a injecté 280 millions de dollars dans ce programme-là. On vient tout juste d'élargir le chèque emploi-service, puis une des choses qu'on a demandées, c'est d'élargir, justement, à la famille. Puis je pense que, pour les personnes vivant avec un trouble du spectre de l'autisme, c'est un phénomène clé parce que les parents, les gens avec qui ils sont familiers seront beaucoup plus aptes à leur offrir des services que d'autres formes de déficits intellectuels ou physiques. Et ça, c'est important parce qu'il y a seulement 10 % des personnes qui sont sur le... qui, potentiellement, ont besoin de ces services qui en bénéficient, actuellement. Donc, ça, c'est important aussi à mentionner.

L'accompagnement pour développer les habiletés, réduire les obstacles des personnes ayant une déficience, c'est des projets qui sont en cours. On veut équiper mieux également nos professionnels qui interviennent au maintien des acquis des personnes ayant une certaine vulnérabilité. Les services aux familles doivent être améliorés, services socioprofessionnels, et également la transition entre l'école et la vie active.

Ce ne sont là que quelques exemples, mais ceux-ci démontrent que nous sommes bien actifs et que nous avons à coeur de fournir aux personnes ayant un TSA les services auxquels ils ont droit de s'attendre dans une société inclusive telle que la nôtre. Les besoins de ces personnes de tous âges sont grands, variés et évoluent avec le temps, on en est bien conscients. Nous voulons les soutenir dans leur besoin de s'accomplir et de participer activement à la société. Cette volonté, nous la partageons, heureusement, avec l'ensemble des Québécoises et des Québécois. De nombreux efforts de sensibilisation sont en place et contribuent à nous mobiliser pour les personnes ayant un TSA et leurs proches.

J'aimerais remercier nos équipes du réseau, qui font, de plus, un travail remarquable. Et j'ai à coeur, dans le cadre de mes fonctions de ministre délégué, de leur offrir mon soutien. Je me suis attelé à cette tâche il y a un peu plus d'un an et je mets tout en oeuvre pour répondre le mieux possible aux besoins de toutes les personnes ayant un TSA et leur famille.

Pour conclure, j'aimerais dire que je comprends la demande de la députée de Westmount—Saint-Louis et que nous allons continuer à discuter avec elle pour s'assurer que ses aspirations soient entendues. Encore une fois, comme je vous dis, si c'est une question, simplement, de mise à jour des progrès, je m'engage à voir avec elle ce que notre ministère peut faire. Si c'est par l'entremise d'autres membres du gouvernement également, on veut voir ce qu'il est possible de faire.

Donc, oui, on veut améliorer la qualité de vie de tous nos citoyens. On a à coeur le devenir de tous les jeunes qui ont un déficit, que ce soit intellectuel, physique ou un trouble du spectre de l'autisme. Puis, Mme la Présidente, soyez assurée qu'on va continuer tous nos efforts pour que ces jeunes soient inclus dans la société. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre délégué. Maintenant, je suis prête à entendre un autre intervenant. M. le député de Jean-Lesage.

M. Sol Zanetti

M. Zanetti : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je tiens à dire d'entrée de jeu que je soutiens entièrement la demande de ma collègue de Westmount—Saint-Louis pour le mandat d'initiative. Et j'espère que le gouvernement va dire oui et aller dans ce sens-là, et je vais expliquer pourquoi.

L'enjeu, là, pour moi, là-dedans, là, c'est ce qu'il en est devenu de nos institutions démocratiques. On est supposés être dans la maison du peuple. C'est dur de se rendre ici. Moi, des fois, même, je me demande... J'habite à Québec, je ne fais pas beaucoup de train, d'autobus, de voiture, je n'ai pas d'enfants non plus, même moi, je trouve ça difficile. Imaginez une mère monoparentale qui a des enfants autistes et qui habite à Montréal. Juste le fait d'avoir milité comme ça si longtemps pour la situation de ses enfants, mais de tous les autres enfants et de leurs parents, et d'avoir réussi, là, pas juste à écrire à son député pour le rencontrer, pas juste à avoir fait une pétition, pas juste à être venue... je ne sais pas, avoir écrit des lettres, avoir fait une lettre, on parle de... elle a mis l'effort jusqu'au point de se faire élire pour faire mettre de l'avant cet enjeu-là. Non seulement ça, c'est un exploit extraordinaire de détermination, de persévérance, mais là, rendue députée, bien là, elle amène... elle demande au gouvernement, pour dire les choses simplement : Cette question-là, on doit l'étudier, et là le gouvernement, avec des raisons... on dit : Bon, le mandat n'est peut-être pas assez large, etc. On dit : il y a des choses qui se font de toute façon, etc. Mais, quand on regarde les services qu'il y a, là, on ne peut pas nier le fait qu'il y a un besoin d'entendre les gens du milieu, spécifiquement du milieu, des gens qui donnent des services aux enfants autistes ou qui sont des parents. Et là le gouvernement dit non à ça. Et là la députée amène ça jusque dans une motion du mercredi. On parle quand même de l'artillerie lourde de la démocratie, là. C'est-à-dire que, si ça, cet après-midi, ça ne donne rien, quel message on envoie aux gens au sujet de la maison du peuple? Ça veut dire : Écris à ton député, cause toujours. Ça veut dire : Fais une pétition, cause toujours. Ça veut dire : Fais-toi élire, cause toujours. Ça veut dire : Propose un mandat d'initiative, cause toujours. Ça veut dire : Viens-t'en faire une motion du mercredi, la réalité, c'est que tu n'en as pas, de pouvoir.

• (16 heures) •

Si on décide de faire ça, là, c'est ça, le message qu'on envoie. Et on ne peut pas envoyer ce message-là aux parents qui ont des enfants autistes, aux gens qui travaillent avec eux et qui les voient passer à la majorité et tomber dans un vide de services dans une société si riche. Dans une société si riche et qui partage par ailleurs, beaucoup, déjà, pas assez, évidemment. C'est de ça que je m'inquiète en plus de la situation qu'on ne réglera peut-être pas.

Je pense que, pour envoyer un message positif par rapport à ce qu'on fait ici, par rapport à ce que veulent dire ces institutions, par rapport au pouvoir que le peuple est supposé avoir, il faut que, quand une mère monoparentale qui a des enfants autistes non seulement elle écrive à son député, non seulement elle fasse des pétitions, mais non seulement elle se fait élire, puis elle fait des mandats d'initiative, puis elle s'en vient à la motion du mercredi, là, pour avoir un débat, il faut que ça donne quelque chose, il faut que ça donne quelque chose. Est-ce qu'après ça on peut dire : Ah! élargissons le mandat? Bien sûr, si c'est ce qu'elle voulait proposer, à un moment donné. Oui, oui, tu sais, oui, oui. Je suis certain qu'elle va sûrement être d'accord, là, mais surtout pas juste fermer la porte en disant : Il y a des choses parallèles qui se font, puis on le traite dans d'autres sphères. Il faut un message qui donne plus d'espoir que ça pour tous les gens qui font de cet enjeu-là leur vie et puis pour les enfants et les adultes, particulièrement, que ça concerne.

C'est l'essentiel du message que je voulais livrer ici aujourd'hui. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Je reconnais maintenant M. le député de Jonquière.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, ça me fait plaisir de me lever aujourd'hui pour cette motion qui a été inscrite par la députée de Westmount—Saint-Louis.

Je voudrais commencer par une citation qui m'interpelle particulièrement : «L'autisme n'est pas une maladie. C'est une condition neurologique permanente avec laquelle il faut apprendre à vivre. Dans certains cas, des autistes devenus adultes acquièrent la maturité correspondante et peuvent vivre de façon autonome avec un minimum d'assistance.»

Moi, je pense que tout est là, tout est là. Ça vient d'un article, un blogue de Pierre Martin dans Le Journal de Québec, Le Journal de Montréal, jeudi 22 août dernier, Pierre Martin, un blogueur qui vit avec un enfant autiste qui est maintenant adulte. Et, vous savez, dans la portion de la citation qui dit «une condition neurologique permanente avec laquelle il faut apprendre à vivre», la personne elle-même doit apprendre à vivre avec cette condition permanente, la personne elle-même qui est dans le trouble du spectre de l'autisme, je ne veux pas dire qui souffre, mais, bon, qui vit avec cette réalité, mais apprendre à vivre avec cette condition neurologique aussi pour les proches puis la société. C'est à nous à apprendre à vivre avec cette condition neurologique permanente partagée, M. le Président, par un adulte sur 64. C'est comme s'il y en avait deux ici, en cette Assemblée nationale, M. le Président. Donc, c'est une condition neurologique permanente importante et présente de façon importante dans notre société.

Donc, moi, je me retrouve ici à intervenir sur cette motion qui a été testée en commission parlementaire pour un mandat d'initiative. C'est très frustrant quand on est député de l'opposition parce qu'on arrive souvent avec des motions pour des mandats d'initiative en commission parlementaire, et le gouvernement, avec sa majorité, les rejette rapidement ou facilement. Il y a certaines motions de mandats d'initiative qui ont été acceptées, je le reconnais, mais il pourrait y en avoir plus parce que notre travail de députés, oui, c'est un travail de législateur, mais c'est aussi un travail d'intermédiaire entre la population et l'appareil administratif, l'appareil gouvernemental. Et être un intermédiaire, c'est aussi être capable de rendre compte d'enjeux de société comme celui de la condition des gens qui vivent avec la réalité du spectre de l'autisme et qui arrivent à l'âge adulte. Je pense que c'est un enjeu de société dont l'Assemblée nationale doit se saisir. Et c'est pour cette raison que notre formation politique, ici, va appuyer cette motion de la députée de Westmount—Saint-Louis, parce que c'est un enjeu de société dont nous devons nous saisir à l'Assemblée nationale et étudier l'ensemble des contours et des questions qui relèvent de cet enjeu-là.

En gros, moi, j'en vois quatre, des enjeux sur cette situation. D'abord, la question de l'emploi. Si on veut éviter qu'une personne qui vit avec un trouble du spectre de l'autisme tombe entre deux chaises quand il arrive à l'âge de 18 ans... je veux dire, il y a quelque chose d'arbitraire, là, avec le 18 ans. Avant, à l'âge de mes parents, là, la majorité était à 21 ans. Bon, alors, il y a quelque chose d'arbitraire là-dedans. Mais toujours est-il que, parce que cette personne qui vit avec la réalité de l'autisme arrive à l'âge de 18 ans, bien là, elle tombe entre deux chaises, elle tombe dans un système qui fait en sorte qu'elle est un peu pas mal perdue.

Et le premier enjeu pour moi, c'est celui de l'emploi parce que l'emploi, c'est aussi une question de confiance, c'est aussi une question d'estime de soi. Et il y a différents niveaux, je dirais, dans le spectre de l'autisme qui font en sorte que, par exemple, dans le secteur de l'emploi, des personnes autistes autonomes ont des aptitudes particulières, des aptitudes singulières, je dirais, qui peuvent faire en sorte qu'ils sont très employables dans différents milieux de travail. Alors, il faut rendre ça attrayant pour eux, mais aussi pour les employeurs. Alors, ça prend des programmes spécialisés. Je sais que le ministre a parlé de tout ça, mais est-ce qu'on ne pourrait pas l'aborder de façon plus exhaustive, de façon plus complète dans une commission parlementaire? La réponse, c'est oui.

Même chose pour les personnes qui vivent avec un trouble du spectre de l'autisme, mais qui sont dans une situation moins autonome ou plus défavorisée. Alors là, ça prend des programmes d'intégration à l'emploi encore plus précis, encore plus accompagnants, encore plus aidants, particulièrement dans des milieux ruraux ou des milieux plus isolés, pour permettre à ces personnes de mettre en valeur aussi leurs compétences particulières, mais surtout, surtout, au-delà de l'apport économique en termes de main-d'oeuvre, surtout contribuer à l'estime de soi et à la confiance des personnes qui vivent avec le trouble du spectre de l'autisme.

Le deuxième enjeu après l'emploi, c'est celui du répit. Alors, je peux comprendre très facilement et simplement que, pour les proches des personnes qui vivent avec l'autisme, c'est important d'avoir des périodes de répit pour les parents, pour les proches, pour les familles, donc il faut du soutien, et que ce soutien, ces activités de répit, ça peut être des camps de vacances, ça peut être des fins de semaine, ça peut être des aidants ou des éducateurs spécialisés qui viennent à la maison. Il faut que ça soit disponible partout sur le territoire. Et moi, très franchement, M. le Président, j'aimerais pouvoir évaluer ça dans une commission parlementaire parce que je ne suis pas convaincu, loin de là, que les ressources en répit sont disponibles de façon égale, de façon équitable partout sur le territoire du Québec. Et des enfants vivant avec le trouble du spectre de l'autisme, il y en a partout à travers le Québec. Donc, des ressources de répit, il faut l'avoir également partout à travers le Québec.

Troisième enjeu, c'est celui de l'hébergement. Et là il y a des parallèles à faire avec l'emploi autant au niveau de la construction de la personnalité en termes d'estime de soi, en termes de confiance envers la personne elle-même... pour la personne elle-même, mais aussi au niveau de l'adaptation parce que, que ce soit une personne qui vit avec l'autisme et qui est autonome ou l'autre qui est semi-autonome, il faut être capable de prévoir de l'hébergement qui va contribuer justement à faire en sorte que cette personne construise davantage son autonomie. Il faut être capable de comprendre qu'il faut prendre les personnes là où elles sont et les amener à plus d'autonomie, à plus de liberté, à plus de confiance en soi comme personnes humaines. C'est un enjeu de dignité. Ça passe par l'emploi, j'en ai parlé tout à l'heure, mais ça passe aussi par l'hébergement parce que la capacité de vivre dans un appartement de façon autonome ou semi-autonome, puis j'en ai visité dans ma circonscription, pour un certain nombre de personnes, c'est tout un geste de libération puis un geste important de prise en charge d'eux-mêmes. Donc, c'est important de soutenir l'hébergement avec des programmes qui sont adaptés et, encore une fois, partout sur le territoire, M. le Président. Puis ça, j'ai besoin, moi, d'avoir de l'information là-dessus et d'avoir une commission parlementaire qui se pencherait sur le sujet, nous permettrait d'aller plus loin.

• (16 h 10) •

L'autre enjeu, et là, c'est une question que je pose parce que je n'ai pas la réponse, c'est l'enjeu que j'appellerais du long terme. Bon, moi, je n'ai pas d'enfant, mais j'essaie de me mettre dans la peau d'un parent d'enfant autiste, puis j'entendais tout à l'heure la collègue de Westmount—Saint-Louis, il doit y avoir un peu d'anxiété, là. Tu te dis : Quand je ne serai plus là, qu'est-ce qui va arriver à mon enfant qui est autonome ou semi-autonome, mais qui vit avec l'autisme? Et ça, c'est important de trouver des solutions à ça. On ne veut pas que ça soit des personnes qui soient confinées dans un CHSLD avec des conditions parfois qui ne sont pas adaptées à leur réalité parce qu'ils sont avec d'autres personnes qui vivent d'autres problèmes de santé physique plus lourds, mais pour lesquels ils ont besoin de soins. Alors, il faut aussi avoir une vision sur le long terme. Et là-dessus je me sens démuni, moi, comme parlementaire. Donc, j'aimerais être capable d'entendre les spécialistes là-dessus.

Donc, vous voyez, M. le Président, on va appuyer cette motion. La seule chose, si elle passe, je comprends que la commission parlementaire aura un mandat, là, moi, j'aimerais qu'on soit capable d'identifier des groupes en région parce qu'il y a beaucoup d'organismes associés à la région métropolitaine, ce qui est tout à fait correct, mais des associations en région, ça serait important également de les entendre. Alors, M. le Président, merci. On va appuyer ça.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Je cède la parole à Mme la ministre responsable des Aînés et des Proches aidants. Je vous indique qu'il reste 31 minutes à votre groupe.

Mme Marguerite Blais

Mme Blais (Prévost) : Merci beaucoup, M. le Président. En principe, je ne devais pas prendre la parole aujourd'hui, mais j'ai été touchée par le témoignage de la députée de Westmount—Saint-Louis. Je dois lui dire que je suis grand-mère d'un enfant autiste, et cet enfant autiste est rendu adolescent. Alors, tout comme la députée de Westmount—Saint-Louis, je me pose énormément de questions par rapport à ce moment de vie quand il va devenir adulte et comment ma fille, cette fille-là que j'ai accueillie dans ma vie, sera en mesure de pouvoir bien vivre sa vie de femme, parce qu'elle vieillit elle aussi, elle a aujourd'hui 50 ans, comment elle sera en mesure de pouvoir s'occuper de son enfant. J'ai tendu la main à la députée de Westmount—Saint-Louis pour lui dire que j'étais prête à la rencontrer. Vous le savez, M. le Président, je suis revenue en politique parce que toute la question des proches aidants, c'est une question qui me touche particulièrement à coeur. Et, comme on va faire une politique nationale des proches aidants qui va toucher l'ensemble des proches aidants, il est évident que toute la question des parents qui ont des enfants en situation de handicap adulte va faire partie de cette politique.

Alors, je réitère à la députée de Westmount—Saint-Louis ma volonté de l'écouter. Et comment nous allons pouvoir intégrer ce qu'elle vit, comme ce que vivent d'autres parents qui ont des enfants autistes... ou des parents qui ont des enfants trisomiques qui vieillissent aussi, parce qu'auparavant l'espérance de vie d'un enfant trisomique était de 21 ans et, aujourd'hui, c'est de 65 ans.

De plus, je voudrais rassurer le député de Jonquière, M. le Président. Actuellement, on travaille aussi sur de l'hébergement, de l'hébergement différent. On travaille sur des maisons de répit. On s'est engagé à faire, au cours du premier mandat, huit maisons de répit avec la Fondation Gilles-Carle. Nous avons déjà, à l'intérieur d'un an, annoncé quatre maisons de répit. Il y en a d'autres. Et, dans ces maisons de répit, il n'y a pas de discrimination au niveau de la maladie. Il y a aussi un centre de jour où les proches aidants peuvent tout simplement amener, aller reconduire ou en autobus la personne qui est l'aidée pour se permettre d'avoir plus de répit.

Alors, je ne veux pas prendre du temps, parce que mes collègues ont tant de choses à dire, mais je veux rassurer sincèrement à la députée de Westmount—Saint-Louis que ce que vous vivez, en tant que grand-mère, je le vis, moi, chez moi, avec mon petit-fils et je sais combien c'est difficile pour vous. Et, dans la politique, il y aura une pensée pour vous, c'est évident.

Alors, ma main est tendue. J'espère que vous saurez la prendre parce que, si vous ne la prenez pas, j'irai vous chercher parce que j'ai besoin de vous pour réussir à faire une belle politique nationale des proches aidants qui va au-delà de la partisanerie politique. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre. Je cède la parole à Mme la députée de Sherbrooke. Il vous reste six minutes.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Merci, M. le Président. Ma collègue de Westmount—Saint-Louis nous propose aujourd'hui de mandater une commission de tenir des consultations sur les services offerts aux personnes autistes, en particulier ceux qui ont atteint la majorité, et c'est le genre de sujet dont on s'attend vraiment que ça fasse l'unanimité.

Vous savez, au Québec en 2015, il y avait un jeune sur 64 qui vivait avec un trouble du spectre de l'autisme, et c'est en augmentation constante, au point où il faut vraiment se questionner sérieusement sur les causes profondes de cette augmentation de l'autisme parce que ce n'est clairement pas seulement dû au fait qu'on diagnostique plus souvent.

Mais, en attendant, on a en ce moment un sérieux problème d'accès aux services. Et, vous savez, pour avoir accès à des services dans le réseau de la santé en autisme, ça prend très souvent un an, un an et demi d'attente, en tout cas, c'est le cas dans ma région, et parfois les familles, quand elles obtiennent enfin des services, ça va être une heure, deux heures par semaine de soutien.

Il y a vraiment très peu de services spécifiques pour les personnes autistes, et souvent ce sont les mêmes que ceux offerts aux personnes ayant une déficience intellectuelle, alors qu'il y a seulement le tiers des personnes autistes qui ont une déficience intellectuelle. Il manque aussi des services pour les personnes autistes de haut niveau.

Mais le pire, c'est vraiment le trou noir des services pour les adultes autistes, qui est l'objet de la motion. La transition entre l'école et la vie active est vraiment un moment très, très difficile dans leur trajectoire de vie, et il existe en ce moment certaines solutions. Il y a des plateaux de travail adapté, par exemple. Mais, moi, ce que je peux vous dire pour ma région, c'est que le temps d'attente pour avoir une place, c'est plus d'un an et demi. Et, quand ils réussissent à avoir une place, ça les occupe une ou deux journées par semaine. Et, malgré tous leurs talents, tout leur potentiel, les personnes autistes ont de la difficulté à trouver leur place et à trouver une manière de contribuer à la société.

Et il y a aussi beaucoup de personnes autistes qui ont de la difficulté à subvenir seules à leurs besoins de base, en particulier financièrement. Il y a 69 % des adultes autistes qui vivent avec leur famille. Il y a très peu de familles d'accueil spécialisées et il y a aussi très peu de logement adapté et supervisé pour leur permettre de développer leur autonomie. Et ça, ce que ça veut dire, c'est que la vaste majorité d'entre eux vivent avec leurs parents. Ce sont les parents qui en prennent soin au quotidien. Et souvent un des deux parents doit arrêter de travailler. Et, même avec tout l'amour qu'on peut avoir pour son enfant, c'est une charge quand même lourde à supporter, surtout avec la rareté des services, et les familles se sentent souvent laissées à elles-mêmes.

Moi, j'en ai rencontré, dans ma circonscription, des familles qui vivent ça, des familles qui ont un enfant adulte devenu autiste, qui sont inquiètes parce qu'ils vieillissent, comme parents, et ils ne savent pas ce qui va arriver avec leur enfant quand ils ne seront plus en mesure d'en prendre soin eux-mêmes. Et, sincèrement, moi, ça me brise le coeur de voir leur détresse parce que j'ai le privilège d'avoir des enfants qui sont en train de devenir autonomes et qui, éventuellement, vont quitter la maison et aller faire leur vie. Et éventuellement je vais pouvoir vieillir l'esprit tranquille parce que je n'aurai pas à m'inquiéter pour eux. Ils seront autonomes.

Mais, quand je me mets dans la peau de ces parents qui ont peur de devenir malades ou de vieillir parce qu'ils s'inquiètent pour leur enfant, je trouve ça très difficile et je trouve ça d'autant plus difficile en tant que députée que je ne sais pas quoi leur dire quand ils viennent me voir, quand ils m'interpellent, parce que les ressources de soutien, elles sont rares et elles ne fournissent pas du tout à la demande. Même si je les réfère à des ressources, je le sais, qu'elles n'obtiendront pas nécessairement de l'aide ou pas au moment où elles en ont besoin.

Et ça, c'est très préoccupant parce qu'on a un très grand nombre de personnes autistes mineures en ce moment. Elles sont dans le réseau scolaire, elles ne reçoivent évidemment pas assez de services, on en parle régulièrement, mais elles en reçoivent quand même plus que les personnes adultes. Et on a une vague immense de personnes autistes qui vont atteindre la majorité dans les prochaines années, et la réalité, c'est qu'on n'est pas prêts du tout pour ça.

On ne fournit déjà pas pour soutenir les personnes autistes qui sont majeures en ce moment, et la vague, elle n'est pas arrivée. Et ma collègue a raison de s'inquiéter et de vouloir qu'on se penche là-dessus comme société ici, à l'Assemblée nationale. Et je vous dirais que refuser de documenter la situation, de tenir des consultations pour entendre les groupes et se préparer pour ça, c'est un peu refuser de voir la réalité en face, c'est laisser dans la détresse des milliers de familles et des milliers de personnes autistes qui vivent des défis au quotidien qu'on ne peut même pas imaginer. Et je trouve ça complètement irresponsable, en fait.

Alors, sincèrement, j'aimerais ça que le gouvernement arrête d'essayer de nous faire croire qu'il en fait déjà assez parce que c'est faux. Les familles nous le disent que c'est faux. Les personnes autistes nous disent que c'est faux. Ce qu'on sait, c'est qu'on n'en fait pas assez. Et il n'y a pas de mal à ça, on peut simplement le reconnaître. C'est une problématique qui est en émergence depuis les dernières années et c'est correct de s'adapter et de reconnaître que, bon, jusqu'à maintenant, on n'en a pas fait assez, mais on veut en faire plus. Donc, j'aimerais ça qu'on le reconnaisse et qu'on se mette au travail.

Et, même si le ministre nous a dit qu'on n'avait pas besoin de tenir ces consultations-là, j'aimerais ça l'inviter à y penser encore un peu et à se reconnecter avec le médecin qui s'est fait élire parce qu'il voulait offrir le mieux aux enfants du Québec. Je le sais, que le ministre est là avec toutes les meilleures intentions du monde. Je le crois sincèrement. Et j'aimerais vraiment l'inviter à écouter ce qui se passe au fond de lui... de cet enjeu-là. Il connaît très bien l'autisme. Il connaît très bien la problématique et le niveau des services qui existent en ce moment. J'aimerais l'inviter à sensibiliser son caucus à ça et à considérer sérieusement d'appuyer la motion de ma collègue de Westmount—Saint-Louis. Je pense que c'est ce qu'on devrait faire : d'abord, écouter les familles, les chercheurs, les organismes concernés par l'autisme pour améliorer nos services. Et c'est comme ça qu'on va savoir comment mieux répondre aux besoins, en les écoutant nous parler de leurs inquiétudes. Ces familles-là, on doit les soutenir, et ce qui s'en vient en ce moment si on ne se prépare pas, ça va être vraiment difficile.

• (16 h 20) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Soulanges.

Mme Marilyne Picard

Mme Picard : Merci, M. le Président. Je souhaite commencer mon intervention en remerciant la députée de Westmount—Saint-Louis de son engagement et de nous permettre aujourd'hui de discuter sur ce sujet pendant deux belles longues heures. Je sais que notre collègue de Westmount—Saint-Louis parle de l'autisme... elle ne le fait pas seulement en tant que députée, elle le fait en tant que non seulement politicienne, mais elle le fait surtout avec son coeur de maman. Je sais que son engagement est sincère. Je sais qu'elle s'est impliquée en politique pour ça et je tenais à la saluer d'entrée de jeu. Nous sommes souvent réunis ici, au salon bleu, pour faire de la politique. Nous parlons souvent comme des adversaires. Aujourd'hui, nous sommes ici comme mères, comme pères de famille. Nous sommes ici pour parler de choses sensibles. Nous sommes tous ici pour aider les gens.

M. le Président, notre gouvernement est à l'écoute. Je sais que le ministre délégué des Services sociaux rencontre des gens et des groupes chaque semaine. En tant qu'adjointe parlementaire, je rencontre aussi régulièrement des parents, des proches aidants et divers regroupements de personnes en situation de handicap. Il ne se passe pas une journée depuis que je suis élue où je ne parle pas avec un citoyen, avec une mère de famille ayant un enfant avec un handicap, avec un collègue député et parfois avec un collègue de l'opposition. Il n'y a pas une journée où je ne travaille pas à faire avancer la cause des enfants et des adultes en situation d'handicap ou autistes et celle de leurs parents et proches aidants. Notre gouvernement est à l'écoute, mais il est aussi surtout dans l'action. Nous avons déjà agi et nous continuons de le faire, M. le Président. Nous continuons de travailler sans relâche pour aider le plus de gens possible, qui en ont le plus de besoin.

M. le Président, dernièrement, j'ai rencontré un groupe qui représente des personnes handicapées, et on m'a dit qu'on en a fait déjà beaucoup plus en... 13 derniers mois qu'il s'en était fait depuis des décennies. On m'a confirmé qu'on était sur la bonne voie, que nous sommes proactifs.

Oui, M. le Président, dernièrement, nous avons choisi de ne pas se saisir d'un mandat d'initiative proposée par notre collègue la députée de Westmount—Saint-Louis et par notre collègue le député de Marquette. Je tiens à leur souligner que nous ne manquons pas de sensibilité ou de considération, loin de là. Et je veux les rassurer. Chers collègues, je suis votre amie.

L'accès à des soins adaptés à la réalité des adultes autistes majeurs est un enjeu réel et préoccupe fortement notre gouvernement. Je le dis sincèrement, nous avons un plan, nous sommes dans l'action, mais nous prenons le temps de bien faire les choses. D'ailleurs, notre porte est ouverte pour en discuter avec vous.

M. le Président, ce n'est pas un secret pour personne, mais je vais quand même aborder le sujet. Je suis la mère d'une belle petite cocotte lourdement handicapée, Dylane, qui a maintenant sept ans. Dans ses quatre premières années de vie, elle avait fait plus de 27 trajets en ambulance et elle avait été hospitalisée une trentaine de fois. M. le Président, dans mon cellulaire, ici, j'ai une application qui me permet de voir ma petite fille dans son lit quand je veux et grâce à la magie d'Internet. Je le fais plusieurs fois par jour. Je le fais parce qu'évidemment je l'aime, parce que je suis inquiète quand je ne suis pas là. Je le fais aussi parce que c'est bien que je me rappelle pourquoi je suis à Québec, loin d'elle.

M. le Président, chaque lundi soir, quand je pars pour Québec pour venir représenter mes citoyens à l'Assemblée nationale, je ne sais pas si je vais revoir ma petite fille le jeudi. Dans les quatre derniers mois, trois de mes amies proches, Marie-Ève, Karine et Anouk, ont perdu leur enfant qui avait un lourd handicap.

Alors, vous comprendrez que je n'oublierai jamais pourquoi je suis ici en politique. Je n'accepterai jamais que quelqu'un prétende que je suis insensible au sort des enfants et adultes handicapés ou autistes ou encore au sort de leurs parents. J'ai fait des levées de fonds. J'ai aussi calculé les articles de mon panier d'épicerie en ne sachant pas trop si mon compte vide serait... après la transaction. J'ai accompagné ma fille trop souvent à l'hôpital. J'ai dû m'acheter une voiture adaptée et adapter mon domicile. Je sais très bien qu'à 21 ans ma vie sera bousculée parce que l'école s'arrête. Je suis aussi très craintive à l'idée que ma cocotte me survive. C'est ma réalité, c'est mon quotidien. Je suis des vôtres.

Pendant des années, je me suis impliquée avec le regroupement Parents jusqu'au bout! et maintenant je suis ici pour changer les choses. Vous savez, lorsque j'ai fait des multiples rencontres avec le parti au pouvoir en 2015‑2016, nous avons poussé pour que les adultes aussi reçoivent un meilleur soutien financier. Cette demande a été rejetée catégoriquement. Et je suis très fière de faire partie d'un gouvernement qui, justement, est en train de changer les choses pour de vrai et comme il faut.

Je suis venue en politique pour ceux qui ont un lourd handicap, comme celui de ma fille, mais aussi pour toutes les personnes, enfants et adultes, qui ont besoin de nous : Naomi, la tornade de Geneviève, André, le poussin de Marie-France, Kieran, Célia, Laurence, Joanie, Mélo.

Encore une fois, je répète à mon collègue de l'opposition : Je suis votre alliée, nous sommes vos alliés. Il n'y a pas ici de camp adverse. Oui, on peut différer d'opinion sur certains moyens à adopter, oui, on peut être en désaccord sur certaines façons de procéder, mais, fondamentalement, nous voulons tous la même chose : aider les personnes qui ont besoin de nous. Elles comptent sur nous.

M. le Président, les anciens gouvernements ont placé tous les handicaps dans des petites boîtes séparées, si bien qu'aujourd'hui il n'est pas superfacile de s'y retrouver. Notre gouvernement a le souci de bien faire les choses. Concrètement, ça veut dire quoi? Ça veut dire de mieux épauler les parents qui ont présentement du mal à se retrouver dans de trop nombreux programmes existants, faire un gros ménage dans les programmes, les harmoniser, les rendre équitables entre les régions.

Et maintenant, si nous faisons un tour de tout ce qui est fait en moins de 13 mois... mes collègues l'ont mentionné tantôt, mais je tiens à les redire. Nous travaillons à faire avancer le projet de loi n° 18, qui aidera nos familles ayant un besoin de protection et d'assistance. Nous avons lancé une stratégie nationale d'intégration en emploi pour les personnes handicapées. Nous déposerons bientôt la politique nationale pour les proches aidants. Nous avons instauré un deuxième palier au SEHNSE. Nous continuons notre plan d'action sur le TSA. Nous avons injecté 7,8 millions au programme de soutien à la famille, qui n'avait pas eu de financement supplémentaire depuis des décennies. Nous avons fait l'ajout de personnel dans le réseau, ergos, orthos, etc., dans le cadre du programme Agir tôt.

Nous sommes en travaux pour offrir l'école aux 21 ans et plus. Nous aurons de l'hébergement pour personnes handicapées dans une aile alternative des maisons des aînés. Nous avons ouvert un programme chèque emploi-service pour les membres de la famille n'habitant pas à la même adresse. Nous avons injecté des nouvelles sommes pour les programmes d'adaptation à domicile. Nous avons injecté 280 millions en soins à domicile. Nous avons ajouté de l'aide aux enfants handicapés pour les soutenir dans leur milieu de garde. Nous avons injecté 3 milliards supplémentaires aux programmes de transport adapté. 70 millions ont été investis pour l'accompagnement des élèves en difficulté, handicapés. Nous avons rehaussé le programme de l'organisme Kéroul pour améliorer l'accessibilité des établissements touristiques aux personnes à mobilité réduite. M. le Président, je vous l'ai dit plus tôt, nous sommes proactifs, nous le sommes plus que nos prédécesseurs. Depuis le 2 octobre 2018, nous avons fait plus que dans les dernières décennies.

• (16 h 30) •

Notre plan, c'est de proposer une approche globale. La transition d'enfant en situation de handicap qui devient adulte concerne plusieurs handicaps différents. Un regroupement pour personnes vivant avec une déficience intellectuelle me disait dernièrement qu'avec l'ancien gouvernement les budgets ont principalement été dirigés vers les personnes atteintes du trouble du spectre de l'autisme et qu'eux ont été coupés, ils ont été mis de côté. Nous ne voulons pas aller dans cette direction. Ce que nous voulons, c'est créer une trajectoire de vie à tous et à toutes les personnes handicapées, déficience intellectuelle, déficience physique, trouble du spectre de l'autisme, en améliorant l'ensemble des mesures, les activités socioprofessionnelles, dont l'école 21 ans et plus, réduire l'écart entre les familles naturelles et les familles d'accueil et créer des places d'hébergement adaptées aux besoins des usagers, des mesures qui ont été en souffrance depuis trop longtemps. Nous ne regardons pas en arrière, à savoir c'est la faute de qui, mais nous travaillons en avant pour améliorer les choses le plus rapidement possible pour nos familles. Nous sommes conscients que les besoins sont criants et nous sommes déjà dans l'action.

M. le Président, ce matin, dans Le Quotidien, Sylvain Lirette, de l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux, publie une lettre ouverte. D'entrée de jeu, il nous implore de nous entendre et de travailler ensemble. Sur certains points, il est en désaccord avec nous, sur certains points, il nous appuie. Et, si j'en parle aujourd'hui, c'est justement parce que nous ne sommes pas ici pour faire de la politique partisane, mais nous sommes ici pour travailler ensemble et pour aider ceux qui ont besoin de nous. Dans sa lettre, M. Lirette mentionne que les besoins sont criants et que, si l'Assemblée devait tenir un mandat d'initiative, le mandat devrait inclure les personnes avec une déficience intellectuelle, qui elles aussi se voient privées de services une fois sa majorité atteinte. Il dit aussi que, bien qu'il s'agisse de deux populations vivant des réalités différentes, elles ont tout de même certains points communs, dont le manque d'autonomie dans de nombreuses circonstances. M. le Président, nous sommes d'accord sur ce point. C'est précisément pour ça que nous voulons une approche globale. Ce n'est pas parce qu'on ne tient pas maintenant un mandat d'initiative qu'on ne pose pas des actions, au contraire. Ce n'est pas parce qu'on ne tient pas des consultations publiques qu'on ne consulte pas les familles et les groupes d'experts. Je tiens à le réitérer encore une fois : nous sommes à l'écoute.

En terminant, je l'affirme pour ma collègue de Westmount—Saint-Louis, ma porte est ouverte pour discuter. Son expérience de mère compte beaucoup pour moi, ses idées aussi. Je lui tends la main. Je tends la main aussi à toutes les familles et les proches aidants. Nous avons le devoir de travailler tous ensemble pour aider ceux qui en ont le plus de besoin. Et être à l'écoute, aider les autres, ça peut prendre plusieurs formes. Je sais que nous avons des désaccords sur ce point, mais nous devrions miser sur ce qui nous unit, soit le désir d'aider et de changer les choses. J'espère sincèrement que la discussion que nous avons présentement nous aidera toutes et tous à mettre nos énergies en commun, et je le dis avec une grande sincérité. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. D'autres interventions? Mme la députée de Roberval, je crois que vous voulez intervenir.

Mme Nancy Guillemette

Mme Guillemette : Tout à fait, M. le Président. Merci, M. le Président. Merci, M. le ministre, de me permettre de m'exprimer cet après-midi sur ce sujet, sujet auquel nous sommes tous sensibles. Moi-même mère de trois enfants et grand-mère de deux petits-enfants, ça me touche beaucoup d'être ici aujourd'hui. Je peux imaginer les inquiétudes de mes deux collègues pour leurs enfants qui ont une différence. Je dis que je peux imaginer, mais personne ne peut imaginer l'inquiétude de ces parents, personne ne peut se mettre à leur place, à moins de le vivre au quotidien. À chaque jour, j'exprime ma gratitude d'avoir la chance d'avoir des enfants en santé.

Nous sommes tous ici interpelés par cette réalité. Dans nos bureaux de comté, on ne peut en faire fi, M. le Président. On comprend un peu plus ces personnes courageuses qui doivent composer avec des situations difficiles, qui finissent par perdre espoir à force d'avoir entendu, année après année, la même ritournelle. Il faut aussi penser aux parents qui vivent avec la réalité d'enfants handicapés ou atteints de déficiences. Pour eux, il n'est jamais question d'abandonner. La preuve, M. le Président, la présence ici de deux d'entre elles, mes collègues de Soulanges et de Westmount—Saint-Louis, qui se battent corps et âme pour elles, mais aussi pour les familles québécoises touchées.

Je me demande quand même à quoi ils pensent quand ils se remémorent tout ce qui a été discuté, tout ce qui a été promis, toutes les consultations qui ont été tenues par le passé. Afin de faire un petit survol historique des mesures promises par les gouvernements qui se sont succédé, laissez-moi vous ramener à une date récente, M. le Président, celle d'avril 2018.

Ça ne fait pas si longtemps, à peine un an et demi. Ce 12 avril 2018, l'ancien député de Mercier, Amir Khadir, déposait une motion, conjointement avec l'actuel ministre de l'Éducation, qui se lisait comme suit : «Que l'Assemblée nationale rappelle l'importance des impacts sociaux des troubles du spectre de l'autisme au Québec[...];

«Qu'elle prenne acte des difficultés rencontrées par les parents[...];

«Qu'elle souligne le travail essentiel de ces parents auprès de leurs enfants, notamment lorsqu'ils se voient souvent forcés de diminuer, voire [même] de quitter leur travail;

«Qu'elle s'engage à diminuer le temps d'attente pour l'obtention d'un diagnostic du [...] spectre de l'autisme;

«Qu'elle reconnaisse la nécessité d'augmenter le nombre d'orthophonistes et de professionnels dans le réseau des écoles publiques.»

Pour ceux qui avaient déjà le privilège de siéger à ce moment, savez-vous quel fut le résultat de cette motion, M. le Président? Eh! bien, l'actuel leader de l'opposition officielle, à l'époque leader adjoint du gouvernement, a pris la parole pour indiquer à l'Assemblée : «Pas de consentement, M. le Président.» Au nom de ces collègues, et ce, à peine un an et demi, il a expressément refusé de débattre d'une motion qui traite du même point que du sujet dont nous traitons aujourd'hui. Aujourd'hui, les rôles sont inversés. C'est un peu particulier, M. le Président, qu'on veuille coincer le gouvernement actuel en le mettant devant le fait accompli, alors qu'il n'y a pas si longtemps on préférait s'en tenir au statu quo.

En 2016, un forum a été tenu sur le spectre de l'autisme pour identifier des solutions, et améliorer, et pérenniser les services, comme le mentionnait le ministre tout à l'heure. Le plan d'action sur le spectre de l'autisme 2017‑2022, Les actions structurantes pour les personnes et leurs familles, a été déposé au printemps 2017. Il comporte de bonnes choses et nous l'avons conservé. La réalisation d'un bilan à mi-parcours est prévue pour faire le point sur la mise en oeuvre et effectuer des ajustements nécessaires. Ce plan d'action possède 35 actions, réparties sur huit axes d'intervention touchant l'évaluation, l'habitation, l'emploi, les services et autres. Entre autres, au chapitre 5 de ce plan d'action, nous pouvons lire une gamme variée de services pour répondre aux besoins des adultes et à leurs projets de vie.

Quelques exemples de mesures, M. le Président : celle d'assurer une offre de services coordonnée et concertée aux jeunes à la fin de la scolarisation; accroître les services socioprofessionnels et communautaires pour les adultes ayant terminé leur scolarisation; renforcer les services de répit, de dépannage et de gardiennage dans chaque région afin de mieux répondre aux besoins; réviser le programme de soutien aux familles pour améliorer l'accès, la qualité et l'équité de l'offre de services.

Du côté du soutien au revenu, des travaux sont en cours en lien avec le futur programme de revenu de base, qui vise à offrir un soutien plus important aux adultes qui ne peuvent intégrer le marché du travail d'ici 2023, notamment en raison d'un handicap. À cet égard, un comité de travail composé de représentants de personnes handicapées présentera au ministre, d'ici la fin de l'année, des recommandations visant à assouplir l'accès au futur revenu de base et les programmes d'assistance sociale.

• (16 h 40) •

Dans le même plan d'action, à la mesure 26, «favoriser l'accès à des logements sociaux et communautaires aux adultes présentant un TSA». 12 unités de logement du programme ACL volet III se trouvent à l'étape en voie de réalisation. Ces unités sont situées dans la région du Bas-Saint-Laurent et dans la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Nous avons eu la visite de la ministre des Proches aidants pour annoncer chez nous, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, une maison Gilles-Carle. Merci, Mme la ministre. Nous travaillons à créer une trajectoire de vie à toutes les personnes handicapées en améliorant les activités socioprofessionnelles, en réduisant l'écart entre les familles d'accueil et les familles naturelles et en créant des places d'hébergement adaptées aux besoins des usagers.

C'est un enjeu très important pour ces familles et leurs jeunes adultes. C'est pourquoi il faut travailler ensemble pour améliorer les services qui leur sont offerts. Il faut rendre les services plus faciles, plus humains. Ça va peut-être prendre un peu plus de temps, pas beaucoup quand même, mais nous y arriverons avec des programmes beaucoup plus humains et beaucoup plus fonctionnels qui vont réellement faire une différence dans leur vie.

En ce sens, la ministre vient de leur tendre la main en préparation de sa politique nationale sur les proches aidants en invitant ma collègue, la députée de Westmount—Saint-Louis, à une rencontre en sa compagnie et celle du ministre délégué à la Santé et des Services sociaux pour discuter ensemble des enjeux, des vrais enjeux, pour parler de la vraie vie et de sa réalité, de celle des autres familles qu'elle défend. C'est un pas de géant, un pas dans la bonne direction. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant Mme la députée de Saint-François.

Mme Geneviève Hébert

Mme Hébert : Merci, M. le Président. Nous avons l'opportunité aujourd'hui d'échanger sur un enjeu sensible. Au-delà des politiques et des commissions parlementaires, il ne faut pas oublier les milliers de familles qui vivent au quotidien avec la réalité engendrée par les troubles du spectre de l'autisme. Et cette réalité est de plus en plus commune, comme nous a partagé notre collègue la députée de Westmount—Saint-Louis avec coeur et émotion, sa réalité en tant que maman de deux enfants vivant avec un TSA.

M. le Président, la société québécoise fait face à de nombreux défis. Et il faudra travailler avec l'ensemble des acteurs impliqués dans la vie des personnes vivant avec un TSA pour améliorer leur qualité de vie et aussi pour leur permettre de s'épanouir pleinement. J'aimerais aussi prendre l'occasion pour saluer tout le travail et le dévouement des organismes de soutien aux personnes atteintes d'un TSA et à leurs familles. Ce sont souvent des institutions portées à bout de bras par des gens dévoués et dont le travail est indispensable. Par exemple, dans ma région, en Estrie, je pense au centre La Libellule, qui a pour mission d'accueillir et d'accompagner au quotidien les enfants aux besoins particuliers qu'ils aient un diagnostic ou non, ainsi que leur entourage. D'ailleurs, les fondatrices, Keila et Véro, travaillent présentement avec acharnement et passion au développement de ce centre qui accueille de nombreux enfants aux besoins particuliers afin de leur offrir stimulation, soutien et répit.

Je pense aussi à la Société de l'autisme et des TED de l'Estrie qui est une source d'accompagnement indispensable pour les parents d'enfants atteints d'autisme, mais aussi pour les adultes qui vivent eux-mêmes avec différents troubles envahissants du développement. Il y a aussi Autisme Estrie, qui organise un camp d'été chaque année ainsi que des activités de loisir, d'intégration, d'information pour les autistes de haut niveau et Asperger en plus de conférences et d'activités de sensibilisation à la réalité des personnes vivant avec un TSA. Bref, je pense à tous les acteurs du milieu de la santé et des services sociaux aussi bien dans le réseau public que communautaire et privé, qui ont à coeur l'épanouissement des personnes autistes et le bien-être de leurs familles.

M. le Président, au gouvernement, nous croyons qu'il faut mettre de l'avant des actions concrètes et des mesures spécifiques. Si la Commission de la santé et des services sociaux a choisi de ne pas se saisir du mandat d'initiative présenté par le collègue de la circonscription de Westmount—Saint-Louis, c'est aussi parce que la tenue d'une commission parlementaire n'est pas l'unique façon de faire avancer ce type de dossier.

D'ailleurs, comme ma collègue la députée de Roberval l'a mentionné avant moi, en avril 2018, le Parti libéral du Québec a refusé de débattre d'une motion portant sur l'importance des impacts sociaux des troubles du spectre de l'autisme au Québec, pas en 2003, pas en 2014, mais bien en 2018. Alors, quand on nous dit qu'il y a une urgence d'agir et qu'on nous accuse, le gouvernement, d'insensibilité à l'égard des personnes autistes et de leurs familles, permettez-moi, M. le Président, de rappeler qu'il y avait déjà urgence d'agir en avril 2018.

Depuis notre élection, le Québec s'est remis en marche. C'est aussi vrai dans ce dossier, M. le Président. Nous avons agi. Notre gouvernement a pris connaissance du manque de services pour les personnes ayant un TSA âgés de 21 ans et plus et du stress que cela occasionne aux parents. Nous travaillons de concert avec les gens du ministère de la Santé et des Services sociaux pour identifier des pistes de solution viables et adaptées à la réalité du terrain. Les personnes autistes et leurs familles peuvent compter sur notre gouvernement, et nous sommes déjà en action pour qu'il y ait une continuité des services à la fin de la scolarisation.

D'ailleurs, il y a, en vigueur, un plan d'action étalé sur cinq ans, que nous avons amélioré de plusieurs mesures de financement. On parle ici, M. le Président, de 3 millions par année à compter de 2019‑2020 pour bonifier la Stratégie nationale de l'intégration et le maintien en emploi des personnes handicapées. L'enveloppe budgétaire servira à diversifier l'offre de services socioprofessionnels et communautaires aux adultes ayant une déficience intellectuelle, une déficience physique ou un TSA. Voilà une démonstration flexible dans l'adaptation des programmes de financement qui viendra agir directement et concrètement dans la vie des personnes.

Il ne s'agit pas d'une initiative élaborée par les parlementaires, ou d'une commission, ou d'une séance de travail, mais une mesure que nous avons élaborée en collaboration directe avec les groupes de parents. M. le Président, c'est là une autre preuve que nous sommes un gouvernement qui est près des Québécois et des Québécoises, un gouvernement qui travaille avec les acteurs concernés qui ont une connaissance pratique de la situation. Vous savez, ce n'est pas toutes les solutions qui peuvent émaner de la colline Parlementaire. Il faut savoir adapter notre gouvernance et être à l'écoute des gens au sein de leurs milieux. C'est ainsi que nous pourrons contribuer à améliorer leurs conditions de vie de façon concrète et tangible.

D'ailleurs, nous croyons que cela passe aussi par une meilleure insertion sociale des personnes vivant avec un TSA. À ce titre, le ministère de l'Éducation élabore présentement un nouveau programme de participation sociale dans le cadre de la formation générale des adultes. Ce programme aura pour but de permettre à l'adulte en situation de handicap de développer son plein potentiel et ses compétences à partir d'un projet qui, lui, prépare à la vie active. Des mesures sont aussi à prévoir, dans les prochaines années, pour mieux encadrer et financer le développement d'activités communautaires et de ressources d'hébergement. C'est de cette façon que nous serons en mesure d'assurer un service continu et stable à travers les différents stades de la vie des personnes vivant avec l'autisme.

M. le Président, notre gouvernement connaît la situation et est déjà dans l'action. Nous sommes porteurs d'une vision d'inclusion sociale et de développement du plein potentiel des personnes vivant avec un TSA. Soyez assuré que les différents ministères vont travailler conjointement et mettre tout en oeuvre pour leur permettre une trajectoire de vie stimulante et d'aspirer à la pleine réalisation de leurs rêves et de leurs ambitions. Merci, M. le Président.

• (16 h 50) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Westmount—Saint-Louis pour sa réplique.

Mme Jennifer Maccarone (réplique)

Mme Maccarone : Merci, M. le Président. Plein de choses à partager. Je vous ai tous entendus, merci pour vos interventions. Merci aux collègues des deux autres partis de l'opposition pour leur appui.

Moi, j'ai parlé de la transition de l'âge mineur à l'âge majeur. Je n'ai pas entendu ça du tout. J'ai entendu le collègue de Saint-François... dise qu'on est en train de travailler avec nos ministères, mais vous n'êtes pas en train de travailler avec les gens sur le terrain. On est un gouvernement près de la communauté, mais vous avez refusé un mandat d'initiative, qui aurait duré deux jours d'auditions, avec peut-être deux jours de travail. C'est ça, un mandat d'initiative. C'est supposé d'être restreint, c'est supposé d'être rapide. J'ai entendu... ma collègue de Roberval dit que ma formation politique, quand ils étaient au pouvoir, ont refusé un mandat d'initiative qui était assez similaire. Mais, quand vous étiez à l'opposition, vous avez appuyé cette motion; maintenant que vous êtes au gouvernement, vous refusez. Alors, la seule chose qui passe en ma tête, c'est «shame on you», parce que moi, j'ai l'impression que vous êtes en train de le refuser parce que maintenant vous êtes au gouvernement puis vous voulez passer une leçon. C'est ça que j'entends.

J'ai entendu, la députée de Soulanges dit qu'il n'y a pas un jour que je ne travaille pas pour aider les familles des personnes autistes, mais, le 7 novembre, vous n'étiez pas là. Parce que ça a été le jour du refus d'un mandat d'initiative. Notre gouvernement est à l'écoute. Car, preuve... Vous avez tout le pouvoir, vous avez le pouvoir de dire oui pour une commission de deux jours.

Je remercie la ministre des Aînés et Proches aidants qui se tend la main. Merci beaucoup. J'ai eu le courriel qui disait qu'ils voulaient parler de leur refus du mandat d'initiative. Je reconnais l'invitation, mais ce n'est pas avec moi que je veux que vous... intervenir, c'est avec les gens du terrain, c'est avez les gens de la communauté. Je ne suis qu'une voix, M. le Président. Il y en a une armée, de familles, derrière moi, et des personnes qui aimeraient partager leur histoire, partager leur connaissance, partager leur expertise, partager leurs idées avec les 125 députés de l'Assemblée nationale.

Moi-même, j'ai une idée, encore une fois, je parle de la transition de l'âge mineur à l'âge majeur, puis je comprends qu'on est en train d'étudier la question, on est en train de mettre plein d'affaires ensemble. Pas une fois, M. le Président, j'ai parlé de l'argent. Moi, j'ai parlé de la rupture de services. Pas une fois, je n'ai pas voulu mettre ça au niveau politique, alors je suis déçue que c'est un peu la réponse que j'ai eue, que nous n'avons pas assez fait dans le passé. Je n'ai pas abordé ce sujet-là, j'ai même dit, mes paroles n'étaient... ce n'est pas un reproche, c'est parce que je veux travailler ensemble pour améliorer.

Je comprends même que, pour un gouvernement qui est en pouvoir pour quatre ans, huit ans, 15 ans, je n'étais pas toujours ici. Le Parti libéral du Québec m'a recrutée parce que j'étais maman des enfants autistes. Ils savaient d'où je venais puis ils savaient qu'est-ce qui était important pour moi, personnellement. Je n'ai jamais abordé ça comme niveau politique, puis j'ose croire qu'à l'intérieur d'un mandat de quatre ans ou huit ans, ce serait impossible de tout faire. Ce n'était pas mon but.

Mon but, aujourd'hui, c'est de militer pour ces milliers de familles, les 150 000 personnes qui aimeraient se faire faire entendre. Ce n'est pas ma voix, c'est leur voix qu'il faut faire entendre. Encore une fois, je dis : Deux jours. J'ai entendu mon collègue le ministre délégué, qui a dit : On a déjà fait la consultation en 2016. C'est quatre ans plus tard, il y a plein de choses qui ont évolué. Je n'ai pas demandé pour une politique, je n'ai pas demandé pour faire une étude profonde. J'ai compris ma collègue du troisième groupe de l'opposition qui parlait de plein, plein, plein de choses qu'on aura pu étudier, j'aurais pu interpeler la commission pour parler d'emploi, de l'éducation. J'ai choisi une commission que j'ai dit : Ce serait un départ. Je suis déçue et insultée parce que je sais que ce que moi, j'ai entendu, c'est un non.

J'ai compris que le ministre, le délégué, a parlé d'un plan interministériel, puis oui, il a dit qu'il y a un manque de communication. En effet, c'est peu connu. Alors, pourquoi ne pas tenir une commission de deux jours avec des gens sur le terrain qui peuvent dire : Savez-vous quoi, M. le ministre? Ce que nous pouvons faire, c'est peut-être envoyer une lettre aux familles quand leurs enfants ont 16 ans ou 17 ans pour leur préparer. Voici une idée qui sort, juste de même. Mais ça ne devrait pas venir de moi, ça devrait venir des gens du terrain, les groupes qui sont sur la liste. Puis, oui, je serais prête à rajouter des noms des gens pour incorporer plus qu'est-ce qu'il se passe sur le terrain dans la région. J'ai bien entendu ceci, et je serais très ouverte, je pense même que c'est une bonne idée. Mais ce n'est pas à continuer à discuter avec moi, c'est à continuer à discuter avec eux, c'est eux qui veulent se faire faire entendre. J'ai mis 16, 16 groupes sur la liste. Ce n'est pas nombreux.

Et il y a... on a du temps. On a du temps, on est ici pour ça. Puis, oui, je sais qu'une commission parlementaire, ce n'est pas la seule façon qu'on va interagir avec les membres de la communauté, mais c'est une de leurs façons de communiquer avec nous, effectivement, tous les membres de l'Assemblée nationale, pas dans mon bureau de comté, pas que j'écris quelque chose, puis que je partage une lettre, puis que je dis : Il faut aider cette personne-là, pas à la miette, mais en groupe, ensemble.

Agir tôt, oui, mais il faut agir plus tard aussi. J'étais un des parents qui a dit : Il faut agir tôt. J'ai agi tôt, puis c'est superimportant. Puis le ministre a dit qu'il a ça à coeur, puis j'y crois, je crois que le ministre délégué, il a ça à coeur. Mais j'aimerais qu'il fasse preuve en acceptant une commission de deux jours.

Il a abordé le sujet, là, le Q1K, les 1 000 familles. Mais il y a zéro argent du gouvernement pour ce projet-là. Le 10 millions de dollars, c'est venu de Jean Coutu. C'est pour TACC, Transforming Autism Care Consultancy. J'étais consultante avec eux, c'est un organisme que je connais très, très bien. J'ai travaillé avec eux, je vais continuer à travailler avec eux, je suis fière de qu'est-ce qu'ils sont en train de faire, et, oui, en effet, je suis d'accord, c'est un projet qu'on va étudier, qui va aider ces familles-là. Mais ça n'aborde pas la transition de l'âge mineur à l'âge majeur. Ça n'aidera pas ces familles-là qui sont en train de vivre cette expérience-là pour les personnes autistes. Mais, comme j'ai dit... Parce qu'une commission parlementaire, quand on dit «un mandat d'initiative», c'est supposé d'être restreint. J'aurais pu marquer : toutes les personnes handicapées, autistes, déficit intellectuel, j'aurais pu mettre ça large. Mais j'ai dit : C'est une commission parlementaire, mandat d'initiative, je veux que ça soit court. Je veux que ça soit accepté, je veux commencer quelque part, parce que j'ose croire que qu'est-ce que nous allons discuter ensemble entre députés, ça va être quelque chose qui pourrait être reproduit pour toutes les autres personnes en situation de vulnérabilité, handicap.

On aurait pu discuter d'autres idées comme... En commission parlementaire, j'entends les gens derrière moi qui disent : Quand les gens sont en train de faire la transition, pourquoi ne pas leur assigner un travailleur social? Pourquoi ne pas faire ça? Pourquoi ne pas faire signe? Mais je suis triste, parce qu'ils ne se feront pas entendre.

It's a sad, sad day. We're elected to listen to the community. We're elected to be their voice, but most of all we're elected to give them our time. I'm very, very disappointed that this turned into a more political discussion, when everything that I was trying to do was to avoid that, because it shouldn't be a political discussion, it should be apolitical.

La communauté et les personnes autistes méritent ça. Ils méritent ça, parce que, oui, c'est en croissance. Puis ce n'est pas parce qu'il n'y a jamais été assez qui a été fait dans le passé... Je n'étais pas là, je n'étais pas là. Le plan d'action qui a été déposé en 2017, c'était un gros pas vers l'avant, puis on est en plein milieu. Le ministre délégué, il a dit : On ne sait pas où est-ce qu'on est rendu, on n'est pas rendu à la fin. Mais il n'y a rien qui nous empêche d'entendre la communauté à mi-chemin, il n'y a rien qui nous empêche de dire : Ça se peut qu'il va falloir qu'on change ou qu'on s'améliore, parce qu'on ne sait pas vraiment c'est quoi, la réalité de ces familles-là actuellement.

Puis, si vous votez contre cette motion, c'est vous qui êtes en train de dire non à ces familles-là, c'est vous qui sont en train de dire que vous ne voulez pas leur faire entendre, c'est vous qui disent que ce n'est pas un sujet qui est important. Pour moi, c'est important, puis ça devrait être important pour les 125 députés à l'Assemblée nationale.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. M. le leader du gouvernement.

 • (17 heures) •

M. Schneeberger : M. le Président, au début de son intervention, la députée de Westmount—Saint-Louis a tenu un propos blessant ici, en cette Chambre. Je ne suis pas intervenu, compte tenu du caractère émotif de nos discussions cet après-midi. Par contre, j'aimerais ça qu'elle retire cette expression en anglais.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader, le terme employé est blessant, mais il n'est pas antiparlementaire. Puis je n'ai pas voulu interrompre non plus, mais, à l'avenir, il faudrait faire attention tout simplement.

Donc, je vais maintenant mettre aux voix la motion de Mme la députée de Westmount—Saint-Louis, qui se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale mandate la Commission de la santé et des services sociaux afin qu'elle procède les 22 et 23 janvier 2020 à des consultations particulières et auditions publiques concernant les services offerts aux personnes autistes, notamment lorsqu'elles atteignent l'âge de la majorité;

«Que la commission entende les personnes et organismes suivants ainsi que toutes les personnes ou organismes qu'elle jugera nécessaire de convoquer : Autisme Québec conjointement avec Autisme Montréal, Réseau pour transformer les soins en autisme, Autisme sans limites, M. Charles Lafortune, vice-président Contenu et réalisation, Pixcom, The Little Red Playhouse, Autism Speaks, Dre Srividya Lyer, professeure adjointe au Département de psychiatrie à l'Université McGill et chercheure au Centre de recherche de l'Hôpital Douglas, l'Association de médecins psychiatres du Québec, l'Association des directions générales des commissions scolaires, Association of Directors General of English School Boards of Québec, Saccade, Mme Brigitte Harrison, l'école À pas de géant, Dr Alexis Beauchamp-Châtel, psychiatre, chef de service médical du programme de psychiatrie neurodéveloppementale adulte de l'IUSMM, professeur adjoint de clinique au Département de psychiatrie de l'Université de Montréal, la Fédération québécoise de l'autisme, la Coalition Autisme Québec, M. Tung Tran, directeur du programme Santé mentale et dépendance au CIUSSS du Centre-Ouest-de-l'Île-de-Montréal, conjointement avec Mme Geneviève Chabot, directrice adjointe de la réadaptation au CIUSSS du Centre-Ouest-de-l'Île-de-Montréal;

«Qu'une période de 12 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, répartie de la manière suivante : 6 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 4 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 1 minute au deuxième groupe d'opposition et 1 minute au troisième groupe d'opposition;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 10 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 35 minutes partagées ainsi : 17 minutes 30 secondes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 11 minutes 40 secondes pour l'opposition officielle, 2 minutes 55 secondes pour le deuxième groupe d'opposition et 2 minutes 55 secondes pour le troisième groupe d'opposition;

«Que l'organisation des travaux soit confiée au comité directeur de la commission, notamment l'aménagement de l'horaire selon les éventuelles demandes de changements des personnes et des organismes.»

Cette motion est-elle adoptée? Oui, Mme la leader adjointe de l'opposition officielle.

Mme Melançon : M. le Président, je vous demanderais un vote par appel nominal, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. M. le leader.

M. Schneeberger : Je vous demande de reporter ce vote à demain, jeudi, lors des affaires courantes.

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Picard) : Donc, le vote est reporté à demain lors de la période des affaires courantes.

M. le leader du gouvernement, pour la suite de nos travaux.

M. Schneeberger : Oui. Alors, pour la suite de nos travaux, je vous demanderais d'appeler l'article 5 du feuilleton.

Projet de loi n° 43

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Picard) : À l'article 5 du feuilleton, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 43, Loi modifiant la Loi sur les infirmières et les infirmiers et d'autres dispositions afin de favoriser l'accès aux services de santé. Mme la ministre, je vous cède la parole.

Mme Danielle McCann

Mme McCann : Merci, M. le Président. Alors, Mmes et MM. les ministres, Mmes et MM. les députés, M. le Président, le 9 octobre dernier, j'ai présenté à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 43, Loi modifiant la Loi sur les infirmières et infirmiers et d'autres dispositions afin de favoriser l'accès aux services de santé. Ce projet de loi vise à bonifier l'exercice des infirmières praticiennes spécialisées dans une optique d'amélioration de l'accès aux soins et aux services de santé, et cela, au bénéfice de toutes les Québécoises et de tous les Québécois.

Je tiens d'entrée de jeu à souligner la collaboration exceptionnelle de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, du Collège des médecins du Québec ainsi que de l'Office des professions du Québec dans cette démarche. Afin de relever le défi que représente l'amélioration de l'accès aux services de santé, il est nécessaire de pouvoir compter sur la contribution optimale de tous les professionnels de la santé et à favoriser une pratique collaborative orientée sur le patient partenaire.

Les infirmières praticiennes spécialisées font partie des acteurs clés qui doivent être davantage mis à contribution pour améliorer l'accessibilité aux soins et services et, conséquemment, la qualité de l'offre de services du réseau de la santé. Pour ce faire, les infirmières praticiennes spécialisées doivent pouvoir exercer en toute autonomie et être en mesure d'occuper pleinement leur champ d'exercice et que celui-ci soit bonifié à la hauteur de leurs compétences.

Les infirmières praticiennes spécialisées possèdent une formation universitaire de haut niveau. Elles sont titulaires d'une maîtrise en sciences infirmières et d'un diplôme d'études supérieures spécialisées. Elles possèdent des compétences de niveau expert qui leur permettent de répondre aux besoins de la santé de la population. Leurs compétences en font des expertes en soins infirmiers et des partenaires incontournables pour l'accès aux soins.

Ce projet de loi autorise les infirmières praticiennes spécialisées à exercer trois nouvelles activités cliniques, soit diagnostiquer les maladies courantes, déterminer les traitements médicaux et effectuer le suivi de certaines grossesses. Rappelons que, dans un communiqué diffusé le 22 février dernier, le Collège des médecins du Québec annonçait que les membres de son conseil d'administration avaient adopté, le 21 février 2019, une résolution visant à améliorer l'accès aux soins en modifiant sa position à l'égard du diagnostic. Le Collège des médecins annonçait que les infirmières praticiennes spécialisées seraient autorisées à diagnostiquer. Le projet de loi s'inscrit dans cet engagement.

Des changements introduits en 2016 à la suite de la révision des règlements encadrant la pratique des IPS ont permis des avancées. Néanmoins, on constate que des restrictions imposées par le cadre législatif et réglementaire qui régit l'exercice des IPS les empêchent de mettre à profit toutes les compétences qu'elles détiennent. Nous sommes conscients que ce projet de loi doit éviter de reconduire des entraves à l'exercice des IPS qui limiteraient leur exercice et, conséquemment, l'accès aux soins.

Notons aussi que le Québec accuse un retard sur les juridictions des autres provinces du Canada en termes d'étendue des activités professionnelles à la portée des infirmières praticiennes spécialisées. Le diagnostic des maladies courantes constitue une avancée majeure pour l'accès aux soins. À cet effet, l'évaluation de la condition physique et mentale de la personne qui est au coeur de l'exercice infirmier est une activité centrale dans un système de santé. La conclusion de cette évaluation permet de poser le diagnostic et d'établir le plan de traitement approprié. Il importe donc que cette évaluation et le plan de traitement soient établis rapidement afin de réduire des risques de détérioration de l'état de santé et les allers-retours entre les professionnels de la santé.

Rappelons que présentement au Québec plus de 536 000 personnes sont en attente d'un médecin de famille. Rappelons aussi que le Québec est en queue de peloton, parmi les pays développés, pour l'accès à une consultation le jour même ou le lendemain, selon le Commissaire à la santé et au bien-être, dans un écrit de 2017.

Aujourd'hui, il est plus que temps d'avancer avec des solutions qui permettent d'optimiser l'exercice des IPS, dans tous les milieux où elles oeuvrent, afin d'offrir à la population du Québec un meilleur accès aux soins et aux services au moment opportun. Il serait irresponsable de ne pas agir en ce sens si nous en avons la possibilité. Or, cette possibilité est bien réelle, et nous devons saisir l'occasion, sans plus attendre.

Les changements législatifs que je soumets à l'Assemblée nationale visent à agir concrètement en ce sens. Afin d'améliorer l'accès aux soins, on doit compter sur des professionnels de la santé qualifiés qui peuvent agir au bon moment pour évaluer l'état de santé, établir des plans de traitement, faire des suivis requis. Tout comme c'est le cas dans les autres provinces canadiennes, en autorisant les IPS à diagnostiquer des maladies courantes, elles seront en mesure d'établir des plans de traitement sans délai. Ceci aura également pour effet de libérer des ressources médicales.

L'accès aux soins signifie d'avoir un plan de traitement dans les meilleurs délais afin d'éviter des complications et de répondre aux besoins de santé. Le projet de loi vise notamment à autoriser les IPS à déterminer des plans de traitement médicaux, élargissant ainsi leur champ d'exercice et optimisant l'utilisation de leurs compétences.

De plus, permettre aux IPS d'effectuer le suivi de grossesse normale ou à faible risque sans contrainte réglementaire donnera aux femmes enceintes un meilleur accès aux soins requis. Le projet de loi propose d'élargir le champ d'exercice des IPS pour ce faire.

Par ailleurs, les conditions et les modalités d'exercice des activités des IPS sont actuellement déterminées par un règlement adopté par le Collège des médecins du Québec. Le projet de loi propose que l'exercice des IPS soit dorénavant déterminé par un règlement adopté par l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec. Le Collège des médecins du Québec en a fait la demande. Le projet de loi propose donc que l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec soit habilité à déterminer, par voie réglementaire, les conditions et les modalités selon lesquelles les activités de l'IPS seront exercées.

• (17 h 10) •

Conséquemment, toutes les activités des IPS seront dorénavant des activités infirmières comprises dans la Loi sur les infirmières et infirmiers, et la surveillance de ces activités sera ramenée sous la responsabilité des soins infirmiers. À cet effet, le projet de loi modifie certaines lois du domaine de la santé, notamment pour ajuster les fonctions des directeurs des soins infirmiers des établissements de santé et des services sociaux. Le rapatriement des activités des IPS dans la loi des infirmières et infirmiers représente une occasion pour lever des contraintes et revoir la gouvernance de leurs activités. En bref, les nouvelles activités autorisées aux IPS leur permettront de prendre en charge plusieurs personnes actuellement en attente au guichet d'accès aux médecins de famille et d'en assurer le suivi.

Le projet de loi propose également de modifier la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec afin de prévoir la prise en charge médicale de patients inscrits au guichet par des infirmières praticiennes spécialisées. Il est proposé d'élargir les lieux de pratique où peut être utilisé le Rendez-vous santé Québec afin que les infirmières praticiennes spécialisées n'exerçant pas en groupe de médecins de famille puissent également utiliser ce système.

Enfin, le projet de loi suggère diverses dispositions de concordance. Il modifie également plusieurs lois et règlements pour, entre autres, permettre aux infirmières praticiennes spécialisées d'effectuer certains examens ou d'accomplir certains actes réservés jusqu'à maintenant aux médecins, notamment en matière de santé et de sécurité au travail, d'aide aux personnes et aux familles, d'assurance automobile, de santé et de services sociaux et de services de garde éducatifs à l'enfance.

Comme déjà mentionné, les besoins sont grands en santé, et y répondre représente un défi de taille. On ne saurait donc manquer l'occasion de mettre à contribution pleinement tous les professionnels de la santé à la hauteur de leurs compétences, ce qui inclut les infirmières praticiennes spécialisées. Nous avons ici l'opportunité de mettre à profit les compétences des IPS. Leur permettre de poser des diagnostics et d'établir des plans de traitement appropriés fera en sorte que les IPS contribueront davantage à l'offre de service du réseau.

Encore une fois, j'insiste là-dessus, il s'agit d'une occasion qu'il ne faut pas manquer parce qu'elle permettra, entre autres, d'apporter des éléments de réponse aux doléances de longue date des Québécois face aux délais d'accès au système de santé.

Alors, je vous offre, M. le Président, de même qu'à mes collègues parlementaires, toute ma collaboration dans le cadre de l'exercice législatif que nous entreprenons. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la ministre. Je reconnais maintenant M. le député de Pontiac.

M. André Fortin

M. Fortin : Merci, M. le Président. Bonsoir. Je commence en disant à la ministre, et à vous, et à l'Assemblée, M. le Président, que le projet de loi n° 43, c'est un bon projet de loi, M. le Président. C'est un projet de loi positif. Et je n'ai pas de problème à le dire. Il faut le dire, hein? Il faut le dire. Quand il y a des choses positives qui se font au gouvernement, il ne faut pas avoir peur de le dire.

Ce n'est pas parce qu'on est l'opposition officielle qu'il faut systématiquement s'opposer. Il faut systématiquement s'assurer que les choses sont bien faites. Il faut systématiquement s'assurer que les choses sont faites dans l'ordre, que les préoccupations de tout le monde sont prises en compte, qu'on a bien entendu les gens qui sont venus faire des représentations en commission parlementaire. Et ça va être ça, notre travail d'opposition dans ce dossier-là. Notre travail d'opposition va être de s'assurer que le projet de loi qui est devant nous, c'est le meilleur projet de loi possible dans le contexte où on ouvre des lois qu'on n'ouvre pas souvent, où on a fait des consultations avec certains groupes, et il y a une ouverture qu'on ne voit pas toujours. Alors, notre travail d'opposition, ça va être celui-là, M. le Président.

Et disons que le projet de loi n° 43, comme le projet de loi n° 31, d'ailleurs, parce que ce sont deux projets de loi, disons, avec le même principe, principe de base sur qui fait quoi dans le réseau de la santé et l'élargissement des pouvoirs pour certains groupes, certains professionnels, certains des professionnels de la santé que, comme patients, on voit régulièrement, disons qu'il tombe au bon moment, parce que j'ai beau dire que le projet de loi n° 43 est positif, je dis qu'il arrive au bon moment parce que je ne peux pas dire que tout va bien dans le réseau de la santé en ce moment, M. le Président.

Juste cette semaine, juste cette semaine, on apprend des choses, disons, qui sont frappantes, qui sont décevantes, qui sont... Pour le citoyen, là, pour celui qui veut avoir accès à des services, pour celui qui se dit : Bien, j'espère qu'il y a des gens au gouvernement du Québec qui s'assurent qu'on fait tout en notre possible pour que moi, pour que mes enfants, pour que mes parents, pour que mes proches reçoivent les meilleurs services possible, bien il y a des nouvelles alarmantes cette semaine, entre autres. Les soins palliatifs à domicile n'ont pas lieu, n'ont pas lieu. Il y a 32 groupes qui devraient être reconnus, qui devraient être sur le terrain, qui devraient donner des soins, qui ne le sont pas. Ça, ça veut dire que les gens ne peuvent pas mourir chez eux avec toute la dignité qu'ils voudraient avoir, avec probablement ce qui est leur dernier souhait, de décéder à la maison. Bien, dans bien des cas, ça ne se passe pas. Et ça ne se passe pas pourquoi? Parce que le ministère de la Santé, la ministre de la Santé n'arrive pas à s'entendre avec la Fédération des médecins omnipraticiens.

Juste cette semaine, M. le Président, on apprend qu'une personne sur cinq qui est passée par la DPJ va aller dans la rue, va vivre dans la rue au cours des années où la DPJ ne suit plus cette personne-là. Une personne sur cinq, c'est immense, M. le Président, c'est beaucoup. Ça veut dire que collectivement, la direction de la protection de la jeunesse et collectivement, nous, comme société, là, on n'outille pas de façon appropriée ces enfants-là, ces adolescents-là pour qu'ils arrivent à un âge adulte et qu'ils retrouvent les ressources nécessaires pour ne pas se retrouver dans la rue. Et une fois qu'on est dans la rue, je ne peux pas vous dire que les problèmes diminuent, M. le Président.

Juste cette semaine, si on regarde le taux d'occupation aux urgences, M. le Président, dans la Capitale-Nationale, ici, au Centre hospitalier de l'Université Laval, 140 %; à Saint-François d'Assise, 121 %; à l'Hôtel-Dieu de Québec, 127 %; à L'Enfant-Jésus, 123 %; à Saint-Sacrement, 109 %; Sainte-Anne de Beaupré, 150 %; à Baie-Saint-Paul, c'est 100 %, ils sont chanceux, ils ont des lits pour tout le monde; et à l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec, c'est 135 %. Et je ne peux pas vous dire que c'est la pire région.

Dans le Centre-du-Québec, on atteint 150 % à l'Hôtel-Dieu d'Arthabaska. Sur la Côte-Nord, on atteint 190 %, M. le Président, il y a 19 patients pour 10 lits à Hôpital Le-Royer. En Estrie, c'est 168 % à l'Hôpital Fleurimont. Dans Lanaudière, 179 % au Centre hospitalier régional de Lanaudière, 178 % à Hôpital Le Gardeur. Dans les Laurentides, 240 % à l'Hôpital de Mont-Laurier, 151 % à Laval. M. le Président, je pourrais continuer. Je pourrais continuer. Il y a des 200 % à Douglas, 238 % à l'Hôpital général juif. 238 %, ça veut dire qu'il y a plus du double de patients pour le nombre de lits disponibles.

Ça, c'est sans compter, M. le Président, toutes les heures de temps supplémentaire obligatoires auxquelles doivent faire face les infirmières. Combien d'infirmières aujourd'hui, là, pensent que leur quart de travail se termine dans 40 minutes, à 6 heures? Combien d'entre elles vont avoir la mauvaise surprise de se faire dire : Bien, je m'excuse, tu ne peux pas quitter — bien, le «je m'excuse», en fait, on espère qu'il va y avoir un «je m'excuse» — mais tu ne peux pas quitter, on a besoin que tu restes, on n'a pas assez de monde. Tu es pognée pour faire un autre quatre heures, six heures, huit heures, 12 heures, peu importe, M. le Président.

Combien d'infirmières manque-t-il en ce moment dans le réseau de la santé? Si vous le savez, M. le Président, j'aimerais ça le savoir. Nous, on a fait des demandes d'accès à l'information, on attend encore, mais combien d'infirmières manque-t-il en ce moment? Je vais vous donner un petit aperçu, là, c'est probablement dans les quatre chiffres. Combien de préposés aux bénéficiaires manque-t-il? Il manque des préposés aux bénéficiaires dans le système de santé, qui font en sorte que, dans les CHSLD, il y a des gens qui ne reçoivent pas les services qu'ils aimeraient avoir, que leur famille s'attendrait à ce qu'ils reçoivent. J'aimerais ça vous dire que tout va bien dans le réseau de la santé, M. le Président, mais avec des choses comme ça, je ne peux pas vous le dire. Je ne peux pas vous dire que tout va bien dans le réseau de la santé.

• (17 h 20) •

Alors, quand je vous dis que le projet de loi n° 43 arrive à point, c'est parce que ça prenait une bonne nouvelle, disons. Ça prenait une bonne nouvelle dans le réseau de la santé, parce que les premières actions du gouvernement, les premiers projets de loi, les premiers jalons, les premiers jets, les premières actions du gouvernement en santé ici ont été le projet de loi n° 2... Disons qu'il allait probablement... enfin, pas probablement, qu'il allait, selon tous les experts, à l'encontre de ce qui est bon pour la santé publique des Québécois.

Le projet de loi n° 28, je sais que le député de Nicolet s'en souvient parce qu'on en a débattu abondamment, le député de Drummond aussi, en commission parlementaire, il me dit que c'est un bon projet de loi. Pas de problème à le croire. J'ai voté pour. Mais, M. le Président, ce n'était pas le projet de loi qu'il avait présenté aux Québécois en campagne électorale, hein? C'était un recul total. Alors, peut-être que ça a ajouté du cynisme. Mais le député de Nicolet me dit : Ce n'est pas moi qui avais promis ça. Il a raison. C'est son premier ministre, M. le Président. Alors, s'il veut me corriger comme ça, il peut le faire toute la journée, ça va me faire plaisir, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : ...à moi.

M. Fortin : Bien, je m'adresse à vous...

Le Vice-Président (M. Picard) : Il y a seulement vous qui a le droit de parole. Donc, les...

M. Fortin : ...M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : C'est bon. On continue.

M. Fortin : Je remercie le député de Nicolet-Bécancour à travers vous, M. le Président. Il y a peut-être une mauvaise influence dans cette Assemblée.

Enfin, M. le Président, quand je vous disais qu'on a besoin de symboles, d'actions positives, de la part du gouvernement, en santé, bien en voilà une qui s'inscrit dans la foulée de ce qui était déjà amorcé, disons, par le précédent gouvernement. C'est quelque chose qui s'en venait. Je pense, tout le monde le sait. Le ministre de la Santé de l'époque en avait déjà parlé.

Mais je dois vous dire une chose, par exemple, M. le Président. Si on arrive avec le projet de loi n° 43 aujourd'hui, et je tiens à le dire d'entrée de jeu, si on arrive avec le projet de loi n° 43 aujourd'hui, si on a pu arriver avec le projet de loi n° 31 à propos des pharmaciens, c'est en grande partie, et je les en remercie, je l'en remercie en particulier, grâce au Collège des médecins.

Le Collège des médecins, au cours des derniers mois, au cours de la dernière année, démontre une très grande ouverture face au décloisonnement de certaines tâches de certaines professions. Et je crois et je pense que c'est accepté par beaucoup de monde que le Dr Mauril Gaudreault a un grand rôle à jouer là-dedans, M. le Président. Alors, je l'en remercie. Je le remercie de son ouverture parce que ça peut mener à des actions comme celle-là. Ça peut permettre à la ministre de la Santé... Ça peut simplifier son travail qui est complexe. Le travail de la ministre de la Santé, là, il n'y a rien de facile là-dedans, M. le Président. Ça peut permettre à la ministre de la Santé d'avancer plus facilement. Alors, je crois sincèrement que le Dr Gaudreault a un grand rôle à jouer dans ce qui se passe aujourd'hui, ce qu'on a pu présenter aujourd'hui. Je le remercie de sa collaboration, de la collaboration du Collège des médecins. Et, pour nous, M. le Président, c'est très simplement de la collaboration qui, on l'espère, devrait se faire de la part de tous les ordres professionnels.

Et on en a entendu plusieurs se prononcer à propos du projet de loi n° 43. Et, à ce stade-ci, disons, de notre débat, M. le Président, à ce stade-ci de l'évolution du projet de loi n° 43 dans les différentes instances parlementaires, bien on a eu la chance d'entendre beaucoup de monde se prononcer sur le projet de loi n° 43. Et, quand je vous dis qu'on est pour, mais qu'on a très certainement des bonifications, des améliorations qu'on va suggérer, bien je veux vous en faire part, aujourd'hui, de certaines d'entre elles, de certaines choses qu'on a entendues, qui nous ont fait dire : Oui, on est d'accord avec le projet de loi, mais on a des améliorations certaines qu'on entrevoit, qu'on va proposer. Et la ministre pourra s'inspirer de ce que j'ai dit aujourd'hui ou elle pourra même, M. le Président, se préparer pour la commission parlementaire à venir, pour l'étude article par article du projet de loi. Elle pourra comprendre exactement où on va, où notre formation politique, où le Parti libéral du Québec va cibler ses interventions, où le Parti libéral du Québec voudra intervenir, où l'opposition officielle voudra faire avancer certains points, et elle pourra se préparer en conséquence.

Mais je vous le dis, M. le Président, c'est sûr qu'on a beaucoup de choses à faire valoir, mais on est pour le projet de loi n° 43 parce que le projet de loi n° 43 fait en sorte que les infirmières praticiennes spécialisées, les 600 infirmières praticiennes spécialisées qu'on a en ce moment au Québec et toutes celles qui vont suivre, toutes celles qui sont en formation en ce moment, toutes celles qui se disent... Et j'utilise le féminin parce que c'est une très grande majorité de femmes, M. le Président. Toutes celles qui considèrent la profession, qui se lanceront dans les études pour se rendre à la profession d'infirmière praticienne spécialisée, toutes celles qui sont sur les bancs d'école en ce moment et toutes celles qui vont pratiquer au cours des prochaines années, bien elles vont pouvoir le faire avec un cadre qui reflète beaucoup, beaucoup mieux les études qu'elles font. Parce qu'aujourd'hui les infirmières praticiennes spécialisées font des études, et elles ne peuvent pas utiliser certaines de leurs connaissances. Elles sont tout à fait formées pour faire des actes supplémentaires, mais elles ne peuvent pas le faire parce que le cadre légal, le cadre législatif les empêche de le faire.

Et, pour le patient, ce que ça veut dire, c'est que le patient est obligé d'aller voir un médecin pour pas mal de ces choses-là. Et aller voir un médecin, pour un patient, ce n'est pas toujours facile. Ce n'est pas toujours facile dépendamment de la région où on est. Ce n'est pas toujours facile dépendamment de si on a un médecin de famille ou on n'a pas de médecin de famille. Ce n'est pas toujours facile parce qu'on n'est pas toujours malade aux heures où la clinique est ouverte, aux heures où le médecin est disponible, entre autres dans le milieu rural, où ce n'est pas nécessairement évident d'aller voir un médecin, où il n'y en a pas beaucoup, et, si ce médecin-là n'est pas disponible cette journée-là, bien c'est difficile de le voir. Quand il y a des urgences qui sont bondées, comme c'est le cas en ce moment, dans la région de Québec, dans la région de Montréal, dans les banlieues un peu partout, chez nous en Outaouais, ce n'est pas toujours facile de voir un médecin.

Et, si ce projet de loi là, en permettant aux infirmières praticiennes spécialisées de référer les patients aux médecins spécialistes, hein, de ne pas nécessairement être obligées de passer par un médecin omnipraticien pour pouvoir référer quelqu'un à un médecin spécialiste... Si les infirmières praticiennes spécialisées peuvent diagnostiquer les maladies courantes, si les infirmières praticiennes spécialisées peuvent déterminer des traitements médicaux, si les infirmières praticiennes spécialisées peuvent effectuer le suivi de certaines grossesses, si elles peuvent prescrire des médicaments et d'autres substances, si elles peuvent prescrire des examens diagnostiques, si elles peuvent ordonner un internement de 72 heures à un patient qui pose un danger pour lui-même ou pour les autres, M. le Président, bien, ce qui va arriver, c'est qu'il y a des gens, il y a des patients qui vont pouvoir avoir accès à des services sans nécessairement être obligés de passer par un médecin. Et ça, pour le patient, c'est une bonne chose. Pour le papa qui arrive à la clinique avec sa petite fille qui est malade, qui a une otite, qui ne file pas bien, M. le Président, bien c'est une bonne affaire d'être capable de voir une infirmière praticienne spécialisée au lieu de nécessairement passer par un médecin. C'est une bonne chose.

Alors, il y a du bon dans le projet de loi parce que les infirmières praticiennes spécialisées aujourd'hui, au Québec, elles en font moins que dans toutes les autres provinces canadiennes. Et je vous le disais tantôt, il y en a 600 au Québec. On en veut pas mal plus que ça. L'objectif, c'est d'en avoir 2 000 d'ici 2024‑2025. 2024‑2025, ça s'en vient vite, c'est dans quatre, cinq ans, M. le Président. Alors, si on veut passer de 600 à 2 000 sur cette période-là, bien ça prend nécessairement une certaine attractivité à la profession, qui passe bien sûr par des salaires compétitifs, qui passe bien sûr par des horaires à temps complet, qui passe bien évidemment, M. le Président, par des conditions de travail adéquates, appropriées, mais qui passe aussi par un rehaussement de la valorisation de la profession. Et ça, pour les infirmières praticiennes, de ne pas toujours être obligées de se référer à un médecin omnipraticien, d'être capable de faire des actes supplémentaires, bien, ça fait partie des mesures qu'on doit mettre de l'avant pour rendre la profession plus attractive.

Mais, M. le Président, elles ont quand même... et ça, ce n'est pas le Parti libéral du Québec, ce n'est pas l'opposition officielle, les infirmières praticiennes spécialisées ont quand même certaines bonifications, certaines améliorations à proposer au projet de loi, et certaines d'entre elles, M. le Président, font beaucoup de sens, font énormément de sens.

Et je veux commencer par la question de la définition de la maladie courante, parce qu'on a des groupes, en commission parlementaire, qui sont venus nous voir, et c'était la première question que, systématiquement, la ministre de la Santé posait aux groupes, là : Est-ce qu'on devrait définir la maladie courante? Est-ce que ça devrait être «maladie» plutôt que «maladie courante»?

Et je ne sais pas ce que les autres parlementaires ont compris de cette intervention-là, peut-être que le député de Jean-Lesage pourra nous en parler dans son intervention un peu plus tard, mais moi, j'ai compris que la ministre de la Santé elle-même n'était pas certaine de ce qu'elle voulait faire avec ces mots-là qui sont dans son projet de loi. C'est comme si on avait laissé quelqu'un d'autre écrire le projet de loi et que là on se posait la question : Bien, c'est-u vraiment la bonne affaire à faire, maladie courante, pas maladie courante? Qu'est-ce qu'ils font dans le reste du Canada? Qu'est-ce que vous en pensez? C'était un peu la question de la ministre à chacun des groupes qui venait nous voir.

Et là il y a des groupes qui ont dit : Il faut restreindre ça le plus possible, hein? On a entendu, entre autres, là, des groupes qui se disent en faveur du projet de loi parce que c'est écrit «maladie courante» dans le projet de loi. Les infirmières ont le droit... Les IPS, les infirmières praticiennes spécialisées pourraient diagnostiquer la maladie courante, traiter la maladie courante. On parlait du diabète, des choses comme ça, M. le Président.

Au Canada, dans plusieurs autres provinces à tout le moins, on ne parle pas de maladie courante, on parle simplement de maladie. Alors, il y a des groupes, comme les médecins résidents, qui sont venus en commission parlementaire et qui nous ont dit : Bien, on appuie le projet de loi, mais ne changez surtout pas ça parce que vous n'aurez plus notre appui au projet de loi.

• (17 h 30) •

Il y a des groupes, comme les infirmières praticiennes spécialisées, qui nous ont dit : On ne veut pas avoir de définition de «maladie courante» dans le projet de loi, il faut harmoniser la législation avec celle des autres provinces. On veut avoir essentiellement les mêmes droits que partout au Canada. Et, quand on sait que les études pour être infirmière praticienne spécialisée sont aussi, sinon plus importantes ici que dans les autres provinces, on peut comprendre pourquoi elles ont cette demande-là à la ministre de la Santé. Mais il y a des groupes comme le Collège des médecins qui a dit que c'était important de définir le mieux possible c'est quoi, une maladie courante.

Alors là, on a à peu près quatre positions. On a les infirmières praticiennes spécialisées qui veulent la même chose que les autres provinces en disant : Ne définissez pas c'est quoi, une maladie courante. On a des groupes qui nous disent : Bien, ça devrait être inscrit juste «maladie». On a des groupes qui nous disent : Il faut définir le plus possible c'est quoi, une maladie courante. Puis il y a des groupes qui nous disent : Bien, nous, on va retirer notre appui au projet de loi si vous ne gardez pas le libellé actuel.

Alors, on aura beaucoup de questions pour la ministre sur la définition qu'elle a. Si la volonté politique de la Coalition avenir Québec, c'est de ne pas définir c'est quoi, une maladie courante, de le laisser le plus large possible, bien on va quand même avoir des questions, à savoir à quoi exactement elle fait référence. Si la volonté de la ministre de la Santé, c'est de le définir davantage, bien il faudra voir c'est quoi, cette définition-là, M. le Président.

Alors, je pense que c'était la première vraie intervention de l'Association des infirmières praticiennes spécialisées. Mais il y a deux, trois choses sur lesquelles on a très clairement, nous, accroché, sur lesquelles on a très clairement compris leur point de vue.

Les infirmières praticiennes spécialisées viennent en commission parlementaire et nous disent : M. le Président, on aimerait avoir le pouvoir d'admettre les patients et de leur donner un congé hospitalier. Ça, vous savez c'est quoi, là. Moi, le congé hospitalier, je me souviens de ça. Entre autres, là, quand ma femme a accouché de mes... hein, le congé hospitalier... Et là on était dans une chambre avec deux lits, évidemment un lit pour mon épouse, un lit pour la patiente qui était dans le... qui venait également d'accoucher et qui était avec son petit enfant. Et éventuellement, là, le médecin nous dit : O.K., c'est beau, vous pouvez aller à la maison, on pense que tout est beau pour vous, madame, on pense que tout est beau pour le bébé également. Vous recevez votre congé, vous pouvez aller à la maison.

Est-ce qu'il y a une raison... Je m'adresse à vous, M. le Président. Est-ce qu'il y a une raison à laquelle vous pouvez penser qui ferait en sorte qu'une infirmière praticienne spécialisée, avec toutes les années d'études qu'elles ont, ne serait pas en mesure de dire : On peut donner le congé hospitalier à des patients, à des patientes partout à travers le Québec? On a beau se questionner et, depuis l'intervention de l'Association des infirmières praticiennes, on a beau essayer de penser à un contexte dans lequel ce ne serait pas approprié, compte tenu du fait que, partout ailleurs au Canada, elles ont ce pouvoir-là, pourquoi les infirmières praticiennes spécialisées ne pourraient pas donner un congé hospitalier aux patients? Au nombre d'études qu'elles font, M. le Président, ça nous apparaît quelque chose qui serait évident. Si, réellement, on veut redonner plus de temps aux médecins pour que, réellement, ils s'adonnent à la médecine, à voir le plus de patients possible, à désengorger nos salles d'urgence, nos hôpitaux, nos lits aux étages, dans les hôpitaux, les infirmières praticiennes spécialisées peuvent aider avec ça.

Question plus délicate, M. le Président. Les infirmières praticiennes spécialisées demandent le pouvoir d'administrer l'aide médicale à mourir. L'aide médicale à mourir, c'est un dossier qu'on a étudié ici, à l'Assemblée nationale, de long en large. On était les premiers au Canada à vraiment faire une étude aussi poussée, aussi détaillée, les premiers au Canada à arriver avec une pièce législative autour de cette question-là, et le gouvernement canadien l'a fait par la suite. Et il y a certains critères très précis pour administrer l'aide médicale à mourir.

Alors, on aura l'opportunité au cours des prochaines semaines, lorsqu'on en débattra, de comprendre le point de vue de la ministre de la Santé, qui ne s'est pas vraiment avancée sur cette question-là. Et, je vous le dis d'entrée de jeu, aux infirmières praticiennes spécialisées qui ont fait cette demande-là, on va poser la question à la ministre de la Santé ne serait-ce que pour comprendre son point de vue autour de tout ça. Et on sait que, suite au jugement sur... le jugement Gladu-Truchon, M. le Président, il y aura nécessairement des changements, la ministre de la Santé l'a déjà annoncé, à la réglementation et à la législation sur l'aide médicale à mourir. Alors, peut-être que le contexte, c'est celui-ci pour avoir la discussion, parce que la proposition nous vient en ce moment, peut-être que le contexte viendra plus tard. Mais on voudra quand même avoir une certaine indication de ce que pense la ministre de la Santé par rapport à cette question-là, qui est quand même importante.

Les infirmières demandent également de pouvoir faire des suivis de grossesse, incluant celles à risque. M. le Président, les suivis de grossesse, au Québec, devraient pouvoir être faits par les infirmières praticiennes spécialisées. Maintenant, pour celles qui sont à risque, peut-être que ça nous prend des balises, M. le Président. Peut-être que ça nous prend un certain niveau d'études avant de savoir dans quelle situation ce suivi-là peut être fait par une infirmière praticienne spécialisée et à quel moment un patient doit voir un médecin. Et ça, c'est la raison pour laquelle... On a beau dire, M. le Président, qu'on est en faveur du projet de loi, mais c'est ce type de demande là qui fait en sorte qu'il faut prendre le temps d'étudier le projet de loi comme il faut, qu'il va falloir prendre le temps de vraiment comprendre chacune des répercussions du projet de loi, parce qu'elles sont importantes. Elles sont importantes pour les patients, pour les patientes du Québec, entre autres pour les femmes qui sont enceintes et qui pourraient bénéficier des services additionnels des infirmières praticiennes spécialisées, mais dans un contexte bien particulier et dans un moment bien particulier.

Je dois vous dire, M. le Président, on a entendu, de la part des fédérations et des médecins également... Et je vous ai donné mon point de vue un peu plus tôt par rapport au Collège des médecins, que je trouve très constructif dans le dossier des pouvoirs additionnels tant aux pharmaciens qu'aux infirmières praticiennes spécialisées. La Fédération des médecins omnipraticiens est également intervenue en commission parlementaire. Et je dois vous dire, M. le Président, qu'ils avaient... qu'ils s'opposaient à certains points qui, pour nous, nous apparaissent plutôt logiques, plutôt simples. La Fédération des médecins nous dit : Bien, on est pour le projet de loi, hein, on est en faveur. Mais, à chaque fois qu'il y a un autre dossier qui apparaît, comme ceux que je viens de discuter, M. le Président, disons qu'ils étaient beaucoup moins réceptifs aux demandes additionnelles.

Par exemple, la question des maladies courantes. La Fédération des médecins omnipraticiens nous dit essentiellement que les infirmières devraient seulement pouvoir diagnostiquer les maladies courantes et que c'est fait dans un souci de sécurité du public. Bien humblement, je trouve qu'ils vont loin un peu. Un souci de sécurité du public, là? Le public devrait avoir confiance aux infirmières praticiennes spécialisées. Si on savait collectivement au Québec les études que ça prend pour se retrouver infirmière praticienne... Souvent, ce sont des femmes qui, déjà, étaient... — des femmes et des hommes — qui, souvent, étaient déjà infirmières, qui ont dit : Je vais prendre un pas de recul dans ma carrière pour revenir de l'avant un peu plus tard, qui ont dit : Je vais prendre du temps que je pourrais passer autrement, que je pourrais passer avec ma famille, que je pourrais passer avec mes amis, je vais le prendre pour étudier, pour avoir une spécialité, celle d'infirmière praticienne spécialisée.

Et ce n'est pas un programme d'études qui a été fait à la va-vite, ce n'est pas un programme d'études qui a été fait sur le coin d'une table. C'est un programme d'études qui est très complet, et ce, même, M. le Président, même si ce qu'on a entendu de la part des médecins résidents était, sur le coup, à tout le moins, inquiétant. Les médecins résidents, là, sont venus en commission parlementaire et ils nous ont dit : Ah bien, on a des préoccupations par rapport au projet de loi parce que, quand il y a des stages avec les infirmières praticiennes spécialisées, c'est nous autres qui les supervisons, et disons qu'il y a différents niveaux, hein, selon où les infirmières sont allées à l'école. Selon quelle université... selon l'université qu'elles ont fréquentée, bien, il y en a qui sont bonnes à certaines tâches, il y en a qui sont bonnes à d'autres choses, mais on ne voit pas une uniformité.

• (17 h 40) •

M. le Président, on l'a regardé par après, on en a discuté avec l'ordre des infirmiers, ce n'est pas ça pantoute qu'ils nous ont dit. Ils nous ont dit d'ailleurs : Un, les médecins résidents n'ont pas le droit de supervision lors du stage, et, deux, le programme de formation pour les IPS, il est standardisé, il est établi selon certains critères bien précis et il devrait être le même un peu partout à la grandeur du Québec. Et je vous avoue, M. le Président, pour avoir fait les recherches subséquentes nécessaires, qu'on est pas mal d'accord avec l'ordre des infirmiers et des infirmières dans ce dossier-là, parce que ces programmes-là sont faits correctement, M. le Président.

Dernière chose que je tiens absolument à aborder : la question de la rémunération. On en a beaucoup parlé lors de l'étude du projet de loi, et l'IRIS est venu en commission parlementaire, hein, l'Institut de la recherche d'informations socioéconomiques, nous a parlé pas nécessairement de l'organisation des soins, mais nous a parlé de la question de la rémunération pour les médecins. Parce que, vous le savez, M. le Président, en ce moment, les médecins, disons qu'ils pratiquent en GMF, par exemple... je prends un exemple, là, ça pourrait être ailleurs, mais disons qu'ils pratiquent en GMF, et il y a des infirmières praticiennes spécialisées qui pratiquent à leurs côtés, qui font partie de la clinique, bien, les médecins reçoivent une prime pour superviser les infirmières praticiennes spécialisées. Mais, si celles-ci ont des tâches additionnelles, si elles sont beaucoup plus autonomes, si ce lien de supervision là n'existe plus, est-ce que la rémunération aux médecins est nécessaire? Selon nous, non, M. le Président. Le médecin n'a pas à être rémunéré pour quelque chose qu'il n'a plus à faire.

Alors, très clairement, on voudrait entendre la ministre se proposer... se positionner par rapport à cette proposition-là d'abolition de cette rémunération additionnelle. Et là on va vouloir une vraie abolition de la rémunération, M. le Président. On va vouloir s'assurer que ce qui est dit est vrai, qu'on ne fera pas une demi-mesure, qu'on ne partira pas de 1 milliard pour arriver à 500 millions, là. Dans ce cas-ci, M. le Président, il va falloir s'assurer que la rémunération des médecins reflète effectivement leurs tâches. Et les gens de l'IRIS nous ont dit que, si on ne faisait pas ça, c'était très clairement un gaspillage de fonds publics. Alors, la ministre ne s'est pas prononcée clairement sur le sujet, et il va falloir qu'elle le fasse. Elle pourra le faire lors de l'étude détaillée du projet de loi. Mais, pour nous, c'est très clairement quelque chose qu'il faudra aborder.

Enfin, M. le Président, je ne peux pas outrepasser le fait que la Fédération des infirmières nous a dit une chose, la Fédération des infirmières nous a dit : Vous avez l'opportunité en or, vous avez un projet de loi qui fait en sorte d'ouvrir une loi qu'on n'ouvre pas à tous les jours, M. le Président, et de donner des pouvoirs additionnels aux infirmières praticiennes spécialisées pour que l'accès soit simplifié aux patients. Et, à la base, c'est pour ça qu'on appuie le projet de loi, c'est pour ça qu'on va être en faveur du projet de loi. Mais la FIIQ nous a aussi dit : Vous pouvez aller beaucoup plus loin; si vous adoptez le projet de loi tel quel, vous allez quand même être en retard par rapport à toutes les autres provinces canadiennes, par rapport à ce que toutes les autres provinces canadiennes permettent aux infirmières praticiennes spécialisées de faire. Ça veut dire qu'un patient au Québec va continuer d'avoir des difficultés d'accès parce qu'il y a des professionnels de la santé qui, à formation égale ou supérieure, et fort probablement supérieure, n'ont pas les mêmes droits, n'ont pas les mêmes responsabilités, ne peuvent pas voir les mêmes patients pour les mêmes maladies qu'ailleurs au Canada. Alors, il faudra très certainement, M. le Président, lors de l'étude article par article, regarder ce qui se passe dans le reste du Canada et ce qui se passerait au Québec suite à l'adoption du projet de loi, si adoption il y a, on ne le présume pas, mais on y serait favorable.

Qu'est-ce qui va se passer? Est-ce qu'il va quand même demeurer une immense disparité entre le reste du Canada et le Québec pour nos infirmières praticiennes spécialisées? Si on veut les respecter, il faut faire un paquet de choses, M. le Président. Il faut les payer de façon adéquate, il faut leur donner des horaires de travail convenables, il faut leur donner des milieux de travail adéquats, où elles peuvent réellement traiter des patients avec humanité et avec soin comme elles veulent le faire, mais il faut aussi leur donner la possibilité d'utiliser tout ce qu'elles apprennent dans leurs cours, dans leur formation universitaire, et, M. le Président, ce sera au coeur des discussions qu'on aura avec la ministre de la Santé au cours des prochaines semaines. Et on souhaite que le gouvernement... et je le dis pour donner un argument de plus à la ministre de la Santé auprès de son leader, on souhaite que le projet de loi soit appelé rapidement, parce que c'est un projet de loi qui aura un impact positif s'il est adopté, mais s'il est adopté correctement, avec des correctifs nécessaires. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Pontiac. D'autres interventions? M. le député de Jean-Lesage.

M. Sol Zanetti

M. Zanetti : Merci, M. le Président. Alors, évidemment, on est favorables à ce projet de loi là qui amène des choses extrêmement importantes puis qui vont faire du bien. Il y a beaucoup de conséquences de ce projet de loi par contre qui vont découler de réglementations qui vont être faites après coup puis qui ne sont pas incluses dans le projet de loi. Alors, évidemment, disons qu'on place beaucoup d'espoir là-dedans. On va essayer de faire en sorte que ce soit modifié de manière à donner le plus d'autonomie possible, évidemment, aux infirmières praticiennes spécialisées puis également de permettre la plus grande amélioration possible de la réponse en première ligne, parce qu'au Québec, on sait, on a beaucoup besoin de ça.

Je souligne au passage le moment historique auquel on a assisté en voyant... bien, on n'y a pas assisté en direct, là, mais auquel on assiste, disons, de façon générale, en voyant justement le Collège des médecins assis à la table avec les infirmières praticiennes spécialisées pour consentir puis s'entendre sur une délégation d'actes importante. C'est quelque chose qui indique vraiment un changement. Je pense que c'est un changement qu'il faut saluer, puis il faut saluer aussi cette nouvelle prise de direction, là, du Collège des médecins. On en prendrait plus souvent des choses comme ça. Et donc voilà.

Donc, la plupart des nouveaux actes, maintenant, ce sont des actes que... bon, ça fait 13 ans, là, qu'elles sont formées pour le faire, et puis, là, bien, on commence à le reconnaître. Donc, effectivement, on peut dire que ça a pris vraiment beaucoup de temps avant qu'on en arrive là. Ça explique aussi notre enthousiasme. On l'a attendu longtemps, et c'est peut-être un pas, justement, vers une nouvelle ère de collaboration interprofessionnelle intéressante. C'est ce qu'on souhaite et c'est dans ce sens-là qu'on va travailler.

Toutefois, à cause de considérations qui ne relèvent pas entièrement du projet de loi, on demeure quand même dans une dynamique, au Québec, où ces infirmières-là praticiennes spécialisées ont quand même demeuré sous une certaine forme de surveillance par les médecins, et ça, c'est problématique, et on aimerait, pour nous, qu'il y ait un véritable... une plus grande autonomie, un plus grand affranchissement. On sait que les médecins sont bel et bien rémunérés présentement pour superviser les IPS. Elles reçoivent aux alentours de... Ils reçoivent aux alentours, ils ou elles, de 30 000 $ pour la supervision, justement, des IPS et un autre 30 000 $ pour le matériel et le bureau qu'ils leur donnent. Ça, on peut considérer que c'est normal.

En 2017, les médecins de famille se sont partagé 7 millions pour cette surveillance générale, et la Coalition avenir Québec elle-même dénonçait la situation l'an dernier. Selon le cabinet de la ministre, cette rémunération-là n'est plus justifiée et sera abolie dans les meilleurs délais possible. Alors, ça, c'est une bonne nouvelle. Par contre, on est soucieux d'exiger, là, que les choses soient mises en place pour ne pas que ça fasse comme la prime jaquette, parce qu'on sait ce qui s'est passé avec la fameuse prime jaquette, là, cette prime que les médecins anesthésiologistes touchaient pour mettre, disons, une paire de gants, un masque et une jaquette pour voir un patient isolé. Ça coûtait à l'État 66 $ le jour et 170 $ lorsque c'était la nuit, puis c'était facturé près de 10 000 fois par année. Alors, cette prime jaquette là, bien sûr, on l'a annulée, mais l'argent n'a pas été économisé, il a été redistribué autrement dans la rémunération. Alors, est-ce que l'argent issu de la supervision des IPS, est-ce qu'il va être véritablement sauvé ou est-ce qu'on va simplement le redistribuer? Ça, c'est des choses qui ne sont pas détaillées encore et qu'on espère qui seront réglées dans le sens de l'intérêt de la population, c'est-à-dire qu'on fasse des économies puis qu'on puisse mettre cet argent-là à engager d'autre personnel dans le milieu de la santé, qui en a tellement besoin, on le sait.

Ce qu'on souhaite donc, c'est une réelle autonomie professionnelle pour les IPS, évidemment, et on souhaite qu'il y ait une plus grande ouverture, je dirais, aux cliniques d'infirmières, dont il a été question, qui ont été réclamées par plusieurs personnes qui sont venues nous voir en commission parlementaire. Ces cliniques-là, dont certaines ont été très connues, comme la clinique SABSA à Québec, elles font des choses qui sont extrêmement importantes, elles soulagent énormément le réseau de la santé. Alors, si on pouvait avoir une plus grande ouverture du côté du ministère de la Santé pour pouvoir en avoir davantage et puis... bien, ce serait vraiment très apprécié, et je pense que ça donnerait un coup de main à l'ensemble du réseau.

Donc, il y a beaucoup de règlements à suivre qui vont nous indiquer et nous faire connaître la portée réelle de ce projet de loi sur l'autonomie professionnelle des IPS. Alors, on trouve donc que ça va dans la bonne direction, et en même temps il faut voir jusqu'où ça va aller, puis on ne pourra pas le savoir tout de suite. On espère, entre autres, que les règlements qui vont encadrer les ententes de partenariat entre les IPS et les médecins vont respecter l'autonomie des IPS et ne viendront pas limiter l'accessibilité aux soins, non plus limiter les conditions d'exercice des infirmières spécialisées. Alors, c'est des sujets sur lesquels on aura le temps de... par rapport auxquels on aura le temps de discuter, évidemment, puis on va s'arranger pour faire un travail très constructif et, aussi, expéditif, parce que, comme disait le collègue de Pontiac, on a besoin que ce projet-là soit appliqué le plus tôt possible, en même temps qu'il aille le plus loin possible. Je vous remercie, M. le Président.

• (17 h 50) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. M. le député de Vimont. Mais normalement ça serait à M. le député des Îles-de-la-Madeleine, si on suit la rotation normale, je crois.

M. Arseneau : ...je suis prêt à céder mon droit de parole, si je ne le perds pas. Je peux le reprendre plus tard? Parce qu'il...

Le Vice-Président (M. Picard) : Vous allez le reprendre, pas aujourd'hui, à moins que M. le député de Vimont soit très court.

M. Arseneau : À un autre moment, c'est ça. Bien, monsieur était prêt. Je vais l'écouter et puis moi, je reviendrai la prochaine fois.

Le Vice-Président (M. Picard) : O.K. M. le député de Vimont, allez-y.

M. Jean Rousselle

M. Rousselle : Merci. Merci, M. le Président. Écoutez, comme mon collègue de Pontiac le mentionnait, c'est vraiment un très bon projet, un bon projet... une bonne loi, parce qu'il faut toujours penser aux patients, il faut toujours penser à la population, et peu importe où on est, je veux dire, l'accessibilité à la santé, je pense, c'est le plus important. Je le sais, parce que, de un, quand tu gagnes en âge, tu le sais encore plus, c'est encore plus important. Vous devez en savoir quelque chose, vous aussi. Bien, je le sais, vous êtes... Mais on le sait d'une manière ou de l'autre, peu importe, et puis je pense que c'est important.

Même, j'aurais pensé même que ce projet de loi là aurait été appelé plus de bonne heure. Parce que, là, c'est le projet de loi n° 43, il me semble que j'aurais mis ça à la place du numéro 2, comprenez-vous, le numéro 2, que j'ai participé, au numéro 2. Je trouvais ça même drôle qu'il soit là, le numéro 2, déjà là. Donc, le numéro 2, je l'aurais mis peut-être au numéro 43, mais, peu importe, ça, c'est un choix gouvernemental, mais... parce que c'est un projet de loi tellement important, puis je pense que ça presse qu'on accentue, justement, le pouvoir des infirmières praticiennes dans le milieu. Je le sais... Puis c'était une promesse, aussi, électorale du gouvernement : 90 minutes. Donc, je m'aurais attendu effectivement qu'elle arrive plus vite, mais ils ont tenu promesse. 90 minutes, on y est arrivés, mais peut-être dans l'autre sens. Donc, c'est pour ça que je pense que ça aurait dû arriver plus vite, ce projet de loi là.

Quand on parle... Puis d'ailleurs, le fait que les infirmières praticiennes spécialisées aient plus de pouvoirs, je pense que notre gouvernement, avec l'ancien ministre de la Santé, avait pavé pas mal le chemin pour en arriver là. C'est sûr qu'il fallait... Je sais qu'il y a eu des échanges avec le Collège des médecins pour en arriver à là et je pense que... Et, comme mon collègue de Pontiac le mentionnait, bien, c'est tout en leur honneur, justement, qu'ils ont décidé d'améliorer la situation, parce que c'est toute la population qui va en gagner. D'une manière ou l'autre, ici, on travaille tous pour la même population.

Les infirmières praticiennes ont des études... D'ailleurs, je peux vous en parler, je suis entouré, moi, chez moi, d'infirmières, mais aussi d'amis omnipraticiens. Donc, il y a des échanges, des fois, divergents, c'est certain, mais je pourrais juste vous dire : Que ça soit le médecin ou que ça soit l'infirmière, ils ont juste une idée dans la tête, c'est de donner un bon service et de s'occuper de la population. Ils l'ont vraiment dans l'âme, puis je pense qu'on peut reconnaître ça facilement.

Les études d'une IPS, d'une infirmière... Je vais dire une IPS, mais c'est une infirmière praticienne spécialisée. La candidate doit détenir un grade de bachelière en sciences infirmières avant de... et avoir pratiqué comme infirmière au moins deux ans. Donc, ce n'est pas n'importe qui qui peut arriver... ou se lancer dans ces études-là. Il faut que tu aies une connaissance du terrain et il faut que tu aies un niveau, aussi, de scolarité, donc, puis être dans le domaine, on s'entend, c'est certain.

Par la suite, la candidate entreprend une formation universitaire du deuxième cycle. Donc, elle obtient une maîtrise en la matière. Donc, je peux vous dire que... Et, comparativement... Mon collègue de Pontiac le mentionnait tantôt, j'ai des chiffres ici, côté enseignement théorique, en heures, c'est le Québec qui en a le plus, 630 heures au Québec, comparativement à celui qui suit, je vous dirais, c'est la Colombie-Britannique, avec 492. Mais ça, je vous parle enseignement théorique. Après ça, on peut s'en aller de l'enseignement clinique... parce que les deux s'additionnent, hein, pas besoin de vous le dire. Bien, au Québec, dans toutes les universités qu'on a au Québec, c'est 910 à 980 heures, comparativement à... je vous dirais, le plus proche, c'est le Manitoba.

Donc, nos infirmières praticiennes, je vous dirais qu'elles ont une formation encore meilleure que partout au Canada. Donc, je pense qu'il faut le reconnaître, mais avec... Elles ont plus d'heures de formation, mais elles ont moins d'autonomie professionnelle. Juste pour vous dire, c'est que, dans les autres provinces, je regarde, j'ai une grille devant moi, et la seule chose que le Québec n'a pas comparativement aux voisines, Nouveau-Brunswick, Nouvelle-Écosse, toutes les autres provinces, dans le fond... poser le diagnostic, on ne l'a pas, communiquer le diagnostic, on ne l'a pas non plus, puis amorcer un traitement pour une maladie chronique, on ne l'a pas non plus, et toutes les autres l'ont. Moi, je pense qu'on devrait vraiment s'enligner... On n'est pas obligés de copie-coller avec les autres provinces. Mais, je pense, l'important, c'est de leur donner la capacité de pratiquer avec les connaissances qu'ils ont. Quelque part, je lisais dans des mémoires justement que ça se peut qu'une praticienne soit formée dans une autre université qui n'a pas exactement... ou le stage... n'ont pas eu la même formation, mais qu'on leur donne la possibilité justement de pouvoir pratiquer avec les connaissances qu'ils ont.

C'est comme la même chose qu'un omnipraticien qui va être dans son cabinet et qui va être à la clinique, et puis que, lui, il y a une maladie qu'il ne connaît pas, ou quoi que ce soit, il va s'informer. Il va s'informer à un chirurgien ou il va s'informer à un spécialiste. Donc, c'est la même chose. Donc, je pense que, si chacun pratique dans son domaine où il a été formé, c'est la population qui va en gagner.

C'est sûr que, quand je vous disais tantôt que, les échanges que je participe, temps en temps, avec ma famille, justement, chacun tire sa couverte un petit peu sur son côté, bien, ça, c'est normal, c'est correct, là. Comprenez-vous? Chacun veut protéger sa zone un peu. Mais l'important là-dedans, c'est que tout le monde travaille dans le même sens pour protéger, justement, le citoyen puis donner le plus de services possible aux gens.

Les IPS pourront maintenant, avec le projet de loi n° 43, justement... elles vont avoir un champ de compétence plus élargi. On parle ici... Elles pourraient dorénavant exercer des tâches qui étaient réservées aux médecins. Donc, grâce à l'ouverture des médecins, justement, du Collège des médecins, bien, on est arrivés là. Ainsi, non seulement les superinfirmières pourraient recommander des patients à un médecin spécialiste, mais elles pourront diagnostiquer aussi les patients en cas de maladie courante ou chronique.

Là, je viens de dire le mot «courante». Mon collègue en parlait tantôt, justement, dans les consultations, et même la ministre ne semblait pas savoir où exactement statuer sur c'est quoi, «courante». Mais ça, que ça soit les omnipraticiens ou les infirmières, les deux voudraient... une voudrait que ça soit plus large, dans le fond, que ça soit vraiment élargi, et c'est certain que les médecins et le Collège des médecins voudraient que ce soit comme... qu'on pourrait vraiment le cadrer vraiment, cette zone-là. Il va falloir en parler, ça va être article par article qu'on va pouvoir, justement, regarder ça. Mais, je vous dirais, l'important, c'est d'encore une fois déterminer à quel endroit que la protection de la population se trouve. Donc, chacun a sa zone.

Donc, dans leur mandat, il va y avoir aussi des pouvoirs qui vont s'ajuster, comme déterminer des traitements médicaux, effectuer le suivi de certaines grossesses, prescrire des médicaments et d'autres substances, prescrire des examens diagnostiques puis ordonner un internement de 72 heures à un patient qui présente un danger pour lui-même ou pour les autres.

On peut en donner d'autres. Mon collègue en parlait justement, donner le congé aux patients. Souvent, ça m'est arrivé d'être à l'hôpital, pour moi ou pour ma famille, puis effectivement... — excusez, j'ai un petit problème de gorge — d'attendre le médecin. Mais, si l'infirmière, elle a la capacité et les connaissances pour donner le congé, je ne vois pas là pourquoi qu'on attendrait le médecin.

Moi, je pense que l'intérêt là-dedans, c'est que le médecin et l'infirmière peuvent se communiquer entre eux autres, faire une équipe.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le député, il est 6 heures. Je voudrais savoir si vous allez vouloir poursuivre votre intervention lors de la reprise du débat. Est-ce que vous allez poursuivre?

M. Rousselle : ...

Le Vice-Président (M. Picard) : Oui? O.K., c'est parfait.

Ajournement

Donc, compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont ajournés à demain, jeudi 21 novembre 2019, à 9 h 40.

(Fin de la séance à 18 heures)