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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Thursday, May 30, 2019 - Vol. 45 N° 47

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Rendre hommage aux bénévoles des inondations printanières de 2019 pour leur engagement
envers leur communauté

M. Mathieu Lévesque

Rendre hommage au jeune Loïc Girard pour son engagement dans la collecte de fonds au
profit d'Opération Enfant Soleil inc.

Mme Claire IsaBelle

Souligner le 40e anniversaire de l'organisme Entraide Sainte-Foy

M. Sébastien Proulx

Féliciter cinq entreprises de la circonscription de Beauce-Nord lauréates du Gala de l'entreprise
beauceronne et des Grands Prix du tourisme Desjardins de la Chaudière-Appalaches

M. Luc Provençal

Souligner le 35e anniversaire de la Fondation de l'Hôpital de Matane inc.

M. Pascal Bérubé

Rendre hommage à M. Robert Perreault pour sa contribution à l'essor du monde agricole

M. Louis-Charles Thouin

Présenter des mesures prises par les villes en matière de transport

Mme Catherine Dorion

Souligner le 40e anniversaire du Centre de la petite enfance du Bois-Joli inc.

M. Marc Picard

Rendre hommage à Mme Patricia Gauthier pour ses 45 années de service au sein du réseau
de la santé et des services sociaux

Mme Geneviève Hébert

Souligner le 40e anniversaire du Comité de protection de l'environnement de Saint-François

Mme Francine Charbonneau

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 26— Loi concernant le Réseau structurant de transport en commun de
la Ville de Québec

M. François Bonnardel

Mise aux voix

Projet de loi n° 391— Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement afin d'affirmer
la primauté de la compétence du Québec en cette matière

M. Sylvain Gaudreault

Mise aux voix

Dépôt de documents.

Réponses à des pétitions et à des questions inscrites au feuilleton

Rapport annuel du Vérificateur général

Rapport annuel 2017-2018 de la Fondation Jean-Charles-Bonenfant

Dépôt de pétitions

Clarifier la notion de dangerosité pour les ordonnances de traitement obligatoire

Installer des stations de remplissage de liquide lave-glace

Modifier la Loi sur l'assurance automobile afin que les victimes de la négligence de fabricants
et de réparateurs d'automobiles puissent intenter des recours en responsabilité civile

Mettre en pratique la démarche de santé intégrative

Modifier la Loi sur l'assurance automobile afin que les victimes de la négligence de fabricants
et de réparateurs d'automobiles puissent intenter des recours en responsabilité civile


Questions et réponses orales

Traitement des demandes d'immigration

M. Pierre Arcand

M. François Legault

M. Pierre Arcand

M. François Legault

M. Pierre Arcand

M. François Legault

M. Pierre Arcand

M. François Legault

Intégration des immigrants au marché du travail

Mme Dominique Anglade

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Dominique Anglade

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Dominique Anglade

M. Simon Jolin-Barrette

Aide aux victimes outaouaises des inondations printanières de 2019

M. André Fortin

M. Simon Jolin-Barrette

M. André Fortin

Mme Andrée Laforest

M. André Fortin

Mme Andrée Laforest

Allocations de départ de gestionnaires du réseau de la santé

M. Vincent Marissal

M. Christian Dubé

M. Vincent Marissal

M. Christian Dubé

M. Vincent Marissal

M. Christian Dubé

Plan de déploiement des maternelles quatre ans

Mme Véronique Hivon

M. Jean-François Roberge

Mme Véronique Hivon

M. Jean-François Roberge

Mme Véronique Hivon

M. Jean-François Roberge

Impact de l'implantation de la maternelle quatre ans sur les services de garde

Mme Marwah Rizqy

M. Jean-François Roberge

Mme Jennifer Maccarone

M. Jean-François Roberge

Mme Jennifer Maccarone

M. Jean-François Roberge

Impact de l'implantation de la maternelle quatre ans sur le réseau de services de garde

Mme Christine Labrie

M. Jean-François Roberge

Mme Christine Labrie

M. Jean-François Roberge

Mme Christine Labrie

M. Jean-François Roberge

Droits et libertés de la personne abordés dans le projet de loi sur la laïcité de l'État

M. Marc Tanguay

M. Simon Jolin-Barrette

M. Marc Tanguay

M. Simon Jolin-Barrette

M. Marc Tanguay

M. Simon Jolin-Barrette

Financement de l'innovation en région

M. Monsef Derraji

Mme Marie-Eve Proulx

Votes reportés

Motion proposant que l'Assemblée reconnaisse l'importance du crédit d'impôt RénoVert
et qu'elle demande au gouvernement sa reconduction

Adoption du projet de loi n° 7 — Loi concernant certaines conditions de travail applicables
aux cadres du réseau de la santé et des services sociaux


Motions sans préavis

Rappeler au gouvernement l'urgence de compléter la route 138 en Basse-Côte-Nord
en y associant les sommes et l'échéancier requis

Mise aux voix

Proposer que l'Assemblée se réunisse le lundi 3 juin 2019, à compter de 13 h 40

M. Sébastien Proulx

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Martin Ouellet

M. Simon Jolin-Barrette

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Affaires du jour

Projet de loi n° 19 —      Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des
membres de l'Assemblée nationale à la suite de l'adoption de certaines
mesures fiscales par le Parlement du Canada

Reprise du débat sur l'adoption du principe

M. Gabriel Nadeau-Dubois (suite)

Document déposé

M. Sébastien Proulx

M. Martin Ouellet

Mme Émilise Lessard-Therrien

M. Alexandre Leduc

Mme Ruba Ghazal

Mise aux voix

Renvoi à la Commission des institutions

Mise aux voix

Projet de loi n° 21 — Loi sur la laïcité de l'État

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Mme Hélène David (suite)

M. Sol Zanetti

M. Carlos J. Leitão

Mme Catherine Dorion

M. David Birnbaum

M. Andrés Fontecilla

M. Joël Arseneau

Débats de fin de séance

Aide aux victimes outaouaises des inondations printanières de 2019

M. André Fortin

Mme Andrée Laforest

M. André Fortin (réplique)

Financement de l'innovation en région

M. Monsef Derraji

Mme Marie-Eve Proulx

M. Monsef Derraji (réplique)

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante minutes)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Bon jeudi à tous et toutes. Vous pouvez prendre place.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Et nous débutons notre séance avec la rubrique des déclarations de députés. Et, sans plus tarder, je cède la parole à M. le député de Chapleau.

Rendre hommage aux bénévoles des inondations printanières
de 2019 pour leur engagement envers leur communauté

M. Mathieu Lévesque

M. Lévesque (Chapleau) : Merci, Mme la Présidente. Je tenais à m'exprimer en cette Chambre afin d'offrir mes pensées et mes voeux de rétablissement les plus sincères à tous les sinistrés des inondations, qui vivent une situation dramatique depuis plusieurs semaines, particulièrement dans mon comté de Chapleau, à Gatineau.

Je souhaite également remercier et féliciter tous les bénévoles qui ont donné de leur temps et qui se sont engagés envers nos concitoyens dans le besoin. Vous avez fait preuve d'abnégation de vous-mêmes et d'empathie. Pour cela et pour votre solidarité, je vous remercie.

Ensemble et avec l'appui des intervenants publics, comme la ville de Gatineau, le ministère de la Sécurité publique et l'armée canadienne, nous avons réussi un tour de force. Cet accomplissement n'aurait pas été possible sans votre incroyable générosité. J'ai été touché par l'appui et l'humanité dont vous avez fait preuve envers les sinistrés. C'est pour cette raison que je tenais à vous rendre hommage à l'Assemblée nationale.

Je suis conscient qu'il reste encore à faire, et c'est pour cela que je désire vous remercier d'avance pour votre générosité lors de la grande corvée de nettoyage, à Gatineau, du 1er et 2 juin prochain. Merci pour vos actions et votre beau travail. À tous les bénévoles, merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Chapleau. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de Huntingdon.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Si vous n'êtes pas prête, je peux passer à la prochaine...

Mme IsaBelle : Non, c'est beau, c'est beau.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Non, ça va? Alors, Mme la députée, la parole est à vous.

Rendre hommage au jeune Loïc Girard pour son
engagement dans la collecte de fonds au
profit d'Opération Enfant Soleil inc.

Mme Claire IsaBelle

Mme IsaBelle : Mme la Présidente, en 2017, il n'avait que sept ans lorsque Loïc Girard, de Lacolle, a décidé de participer à la levée de fonds d'Opération Enfant Soleil, qui vient en aide aux enfants malades au Québec. Il a remis 350 $.

Deux ans plus tard, Loïc est très fier de solliciter des dons en argent ou en bouteilles et cannettes consignées pour atteindre son objectif de 2019, soit de remettre 6 000 $.

Il est vaillant, notre Loïc, car, pour y arriver, il a participé à différentes activités : déjeuners du club de l'âge d'or, dîners communautaires. Il a même organisé une journée barbecue, sollicité des grandes entreprises de la communauté, et surtout il a ramassé des cannettes, des cannettes et des bouteilles consignées.

Loïc mérite toute notre admiration pour son dévouement et pour sa conscientisation à aider d'autres jeunes. D'ailleurs, dimanche le 2 juin, Loïc a été invité à remettre son chèque lors du téléthon Opération Enfant Soleil, à Québec. Félicitations à Loïc Girard!

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la députée. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de Jean-Talon.

Souligner le 40e anniversaire de l'organisme Entraide Sainte-Foy

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais féliciter un organisme bien présent dans Jean-Talon qui célèbre cette année son 40e anniversaire. C'est l'organisme Entraide Sainte-Foy.

Fondé en 1979, Entraide Sainte-Foy a pour mission d'aider des gens à maintenir leur autonomie en véhiculant et en accompagnant des personnes en perte d'autonomie, notamment aînées, pour l'obtention de leurs soins de santé dans un environnement qui est sécuritaire, de courtoisie et de discrétion.

Alors, c'est des visites d'amitié qui sont rendues possibles pour briser la solitude. Du répit-gardiennage est offert aussi afin d'offrir un répit aux aidants naturels. C'est dire à quel point c'est un organisme qui peut compter sur des bénévoles, Mme la Présidente, qui sont extraordinaires.

Je désire aujourd'hui rendre hommage à tous ces bénévoles ainsi qu'aux membres du personnel d'Entraide Sainte-Foy, qui, au fil des ans, ont fait preuve d'un dévouement qui est remarquable afin d'aider de nombreuses personnes à maintenir leur autonomie. Qu'ils reçoivent ma reconnaissance la plus vive et toutes mes félicitations. Mme la Présidente, merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Jean-Talon. Maintenant, je reconnais M. le député de Beauce-Nord.

Féliciter cinq entreprises de la circonscription de Beauce-Nord lauréates
du Gala de l'entreprise beauceronne et des Grands Prix du
tourisme Desjardins de la Chaudière-Appalaches

M. Luc Provençal

M. Provençal : Mme la Présidente, lors des dernières semaines, deux importants événements visant à récompenser des entreprises de la Beauce et de la Chaudière-Appalaches ont eu lieu. Je profite de cette tribune pour féliciter les différents lauréats de Beauce-Nord.

D'abord, le 27 avril dernier se tenait la 31e édition du Gala de l'entreprise beauceronne. Trois entreprises de mon comté ont mérité des prix : Revtech Systèmes, de Saint-Joseph-de-Beauce, Nouvelle entreprise; Safari Condo, de Saint-Frédéric, Investissement, industriel; et le Woodooliparc, de Scott, Tourisme et Jarret d'or, c'est-à-dire le grand prix de la soirée toutes catégories confondues.

Quelques jours plus tard, soit le 2 mai, lors du Gala des Grands Prix du tourisme, Chaudière-Appalaches, la maison d'Élyse, de Beauceville, remportait le prix de la catégorie Hébergement, gîtes, et le Village Aventuria, de Saint-Jules, méritait le titre d'attraction touristique de l'année.

Mes plus sincères félicitations à vous cinq pour ces reconnaissances, et bon succès pour vos projets futurs! Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Beauce-Nord. Et maintenant je cède la parole à M. le député de Matane-Matapédia.

Souligner le 35e anniversaire de la Fondation de l'Hôpital de Matane inc.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Mme la Présidente, aujourd'hui, je tiens à souligner le 35e anniversaire de la Fondation de l'Hôpital de Matane, un organisme qui contribue à l'amélioration et la qualité des soins de santé offerts en Matanie.

C'est le 5 juin 1984, sous la présidence de M. Gérard Lavoie, que la fondation commença ses activités. Depuis sa création, les bénévoles, le personnel et les administrateurs travaillent activement afin de conserver des soins de santé de proximité et de qualité pour les gens de chez nous, un besoin et un enjeu toujours d'actualité dans notre région. Par l'organisation d'événements et de campagnes de financement et par l'engagement de l'ensemble des bénévoles et partenaires de la fondation, c'est près de 3 millions de dollars qui furent réinvestis dans notre milieu afin d'acquérir de nouveaux équipements médicaux et de bonifier l'aménagement des infrastructures de santé.

À tous celles et ceux qui, au cours de ces 35 dernières années, ont contribué au succès de la Fondation de l'Hôpital de Matane, je tiens à vous remercier et à saluer votre dévouement. Bon 35e anniversaire! Et continuons ensemble à veiller au bien-être des gens de chez nous. Et surtout continuons à donner pour notre santé chez nous. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député. Et maintenant je vais reconnaître M. le...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Pardon? Ça va? M. le député de Rousseau.

Rendre hommage à M. Robert Perreault pour
sa contribution à l'essor du monde agricole

M. Louis-Charles Thouin

M. Thouin : Mme la Présidente, ma déclaration de député, aujourd'hui, vise à souligner l'apport remarquable d'un citoyen d'exception de la municipalité de Saint-Alexis qui a contribué de façon exceptionnelle, et ce, pendant plus de 30 ans, à l'essor du monde agricole dans ma circonscription. Il s'agit de M. Robert Perreault.

M. Perreault a quitté ses fonctions d'administrateur et de président qu'il occupait depuis 2006 à La Coop Novago, le 27 mars dernier. Son expérience, sa vision, son expertise du monde agricole ont contribué au succès de la coopérative pendant 31 ans.

Maire de la municipalité de Saint-Alexis, agriculteur, avec à son actif de grandes cultures de blé, de soya et de maïs, il est depuis deux ans également acériculteur, souhaitant poursuivre la tradition familiale.

Cher Robert, de Québec je te lève mon chapeau et je te remercie sincèrement pour le legs exceptionnel que tu laisses pour le monde agricole ainsi que pour les générations futures. Rousseau, Montcalm, Saint-Alexis, soyons fiers.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député de Rousseau. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de Taschereau.

Présenter des mesures prises par les villes en matière de transport

Mme Catherine Dorion

Mme Dorion : Merci, Mme la Présidente. Je voudrais simplement rappeler des choses intéressantes à cette Chambre qui se passent ailleurs dans le monde.

À Copenhague, la moitié des citoyens vont travailler à vélo. Berlin construit des autoroutes à bicyclettes.

À Bruxelles, le transport en commun est gratuit les jours de smog. Dans plusieurs autres villes d'Europe, d'Amérique du Nord et d'Asie, des petites et des grandes, c'est en tout temps que le transport en commun est gratuit.

À Madrid, seuls peuvent circuler au centre-ville les voitures des résidents du centre-ville, le transport en commun et les taxis, les camions de marchandises, les véhicules scolaires et les forces de sécurité et d'urgence. À Londres, à Stockholm, à Milan, les automobilistes doivent payer pour accéder au centre historique des villes.

À Tallinn, le transport public gratuit a permis à la ville de faire de l'argent parce que ça a attiré de nouveaux résidents. Ça a boosté ses taxes. Le trafic a significativement diminué, et donc la pollution de l'air aussi, et tout ça a contribué à attirer encore plus de monde.

San Francisco a démantelé une autoroute, Séoul en a démantelé une autre pour créer des places publiques. Ce n'étaient pas des petites villes, mais c'est des villes qui se sont adaptées et qui ont donné une meilleure qualité de vie à tous les gens qui y vivaient.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Taschereau. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

Souligner le 40e anniversaire du Centre de la petite enfance du Bois-Joli inc.

M. Marc Picard

M. Picard : Merci, Mme la Présidente. Le Centre de la petite enfance du Bois-Joli célèbre cette année son 40e anniversaire.

Située dans le quartier Saint-Nicolas, la garderie a ouvert ses portes officiellement en janvier 1979 et recevait à l'époque une quarantaine d'enfants. Depuis 2003, 110 enfants fréquentent annuellement ce CPE. L'implication du conseil d'administration, la participation des parents, conjuguées au travail dévoué du personnel, permettent d'offrir aux enfants un milieu de vie de qualité, sécuritaire, stimulant et respectueux des valeurs qui déterminent les actions éducatives du CPE.

Je veux souligner la présence de Mme Sylvie Nadeau, directrice générale, Mme Audrey Charbonneau, présidente du conseil d'administration, et tout particulièrement Mme Sylvie Carrier, éducatrice depuis 38 ans, et Mme Sylvie Leclerc, depuis 40 ans, que je félicite pour leur dévouement exceptionnel auprès de tous les enfants du CPE du Bois-Joli. Merci.

• (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Merci, M. le député. Et nous vous souhaitons la bienvenue à l'Assemblée nationale.

Pour la prochaine déclaration, je me tourne vers Mme la députée de Saint-François. Et la parole est à vous.

Rendre hommage à Mme Patricia Gauthier pour ses 45 années
de service au sein du réseau de la santé et des services sociaux

Mme Geneviève Hébert

Mme Hébert : Merci, Mme la Présidente. Je souhaite souligner le parcours exceptionnel d'une gestionnaire chevronnée du réseau de la santé et des services sociaux. Mme Patricia Gauthier tire sa révérence après 45 ans de dévouement au sein du réseau. Quelle brillante carrière!

Elle a laissé sa marque en Estrie et ailleurs au Québec par son approche humaine, sa grande capacité à rassembler et son leadership. Elle a pu démontrer son professionnalisme notamment au cours des 10 ans comme directrice générale du centre hospitalier de Sherbrooke et de ses quatre ans comme P.D.G. du CIUSSS de l'Estrie-CHUS.

De belles réalisations, elle en a beaucoup à son actif. Elle a initié la mise en oeuvre du projet OPUS AP visant la réduction d'antipsychotiques chez les personnes âgées. Elle a brillamment piloté plusieurs projets d'agrandissement, de partenariat, de valorisation de la recherche et d'amélioration de la performance.

Merci, Mme Gauthier, d'avoir tant donné, ces dernières décennies, pour améliorer la santé et le mieux-être de la population. Bravo pour vos réalisations et bonne retraite!

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée. Maintenant, pour clore cette rubrique de déclarations de députés, je cède la parole à Mme la députée de Mille-Îles.

Souligner le 40e anniversaire du Comité de protection
de l'environnement de Saint-François

Mme Francine Charbonneau

Mme Charbonneau : Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, l'environnement est un sujet très discuté dans la société d'aujourd'hui. Depuis plus de 40 décennies, le comité de protection de Saint-François innove et s'investit, font la promotion de la préservation et de la restauration de milieux naturels. C'est avec beaucoup de fierté que je souligne le 40e anniversaire d'existence du Comité de protection de l'environnement de Saint-François, de Laval.

Ainsi, grâce au travail de toute l'équipe, ils sont devenus un pilier environnemental incontournable et font rayonner notre région. Je rends hommage tout particulièrement à Mme Lyne Moreau, la présidente, qui s'implique avec beaucoup de coeur pour la réussite du comité depuis tant d'années avec sa formidable équipe. Leur persévérance devrait être un exemple à suivre.

Merci au comité de protection de Saint-François de protéger et de s'investir pour l'environnement. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée. Alors, ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés.

Et je suspends nos travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 52)

(Reprise à 10 h 4)

Le Président : Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir. Bonne journée à toutes et à tous.

Nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Bonjour, M. le Président. Je vous demande d'appeler l'article a, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 26

Le Président : À l'article a du feuilleton, M. le ministre des Transports présente le projet de loi n° 26, Loi concernant le Réseau structurant de transport en commun de la Ville de Québec. M. le ministre.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : M. le Président, je suis très heureux de déposer le projet de loi n° 26, Loi concernant le Réseau structurant de transport en commun de la Ville de Québec.

Ce projet de loi vise à permettre la réalisation, par la ville de Québec, du projet de transport collectif annoncé publiquement par celle-ci comme le Réseau structurant de transport en commun de la ville de Québec, lequel inclut un tramway.

À cette fin, le projet de loi donne compétence exclusive à la ville pour qu'elle réalise le réseau et précise qu'elle devra consulter la Société de transport de Québec avant de prendre certaines décisions.

Le projet de loi prévoit plusieurs allègements concernant les formalités à accomplir en vue d'acquérir par expropriation les biens nécessaires à la réalisation du réseau. Il contient aussi certains allègements en matière contractuelle. Par ailleurs, il impose à la ville, lors de l'acquisition de véhicules de transport en commun, l'obligation d'exiger du fournisseur que 25 % de la valeur du marché soient confiés en sous-traitance au Canada.

Le projet de loi prévoit également l'établissement de servitudes en faveur du réseau lorsqu'une route ou un immeuble sous la gestion du ministère des Transports ou d'une municipalité est traversé ou longé par les voies ferrées du tramway de ce réseau.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit les modalités de transfert du réseau à la Société de transport de Québec afin qu'elle l'exploite. En conséquence, il énonce expressément que cette société a pour mission d'exploiter un tramway et, à cet égard, lui applique un cadre juridique similaire à celui applicable à la Société de transport de Montréal pour l'exploitation du métro.

Le projet de loi énonce certaines règles en matière de financement, notamment en précisant que tout emprunt à long terme nécessaire au financement de la réalisation du réseau doit être contracté par la Société de transport de Québec lorsque son paiement fait l'objet d'une subvention octroyée par le gouvernement du Québec ou l'un de ses ministres.

Le projet de loi stipule qu'aucuns frais, de quelque nature que ce soit, ne sont opposables à la ville et à la Société de transport de Québec pour la délivrance d'un certificat d'approbation, d'un permis de construction ou d'un permis d'occupation à l'égard du réseau.

Le projet de loi précise que les travaux accessoires nécessaires à la réalisation du réseau, à son exploitation, à sa modification ou à son prolongement sont des matières qui intéressent l'ensemble formé par les municipalités liées de l'agglomération de Québec.

Le projet de loi prévoit que la Loi sur les chemins de fer et la section portant sur les travaux de construction de la Loi sur la sécurité du transport terrestre guidé ne s'appliquent pas au réseau. Il maintient toutefois l'obligation pour la ville et pour la Société de transport de Québec de transmettre au ministre des Transports, à la fin de tous travaux de construction, une déclaration de l'ingénieur responsable des travaux attestant qu'ils ont été réalisés en conformité avec les normes d'ingénierie reconnues.

Le projet de loi énonce enfin qu'un terrain est, en certaines circonstances, protégé par droits acquis lorsqu'il constitue le résidu d'un terrain dont une partie a été acquise par la ville ou par la Société de transport de Québec aux fins de la réalisation, de l'exploitation, de la modification ou du prolongement du réseau. Merci, M. le Président.

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Proulx : Merci, M. le Président. Bien entendu, nous acceptons d'être saisis du projet de loi. Est-ce que le leader du gouvernement peut s'engager à ce que nous puissions tenir des consultations particulières sur ce projet?

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Il y aura des consultations particulières. Nous attendrons la liste des groupes des différentes formations politiques avant de pouvoir convoquer les consultations particulières.

Mise aux voix

Le Président : Alors, l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix : Adopté.

Le Président : Adopté. M. le leader du troisième groupe d'opposition.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Je vous demande d'appeler l'article c du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 391

Le Président : À l'article c du feuilleton, M. le député de Jonquière présente le projet de loi n° 391, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement afin d'affirmer la primauté de la compétence du Québec en cette matière. M. le député.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi affirme la primauté de la compétence du Québec en matière d'environnement afin que l'État du Québec exerce pleinement les pouvoirs liés à sa compétence sur le territoire québécois.

Pour ce faire, le projet de loi accorde une priorité d'application aux règles découlant de la compétence législative et constitutionnelle du Québec en matière d'environnement.

Enfin, le projet de loi prévoit que le gouvernement peut désigner un projet, une activité ou une entreprise, notamment des secteurs du transport, des ressources naturelles et de l'environnement pour lequel, en matière d'environnement, le Québec a compétence exclusive.

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.

À la rubrique Dépôts... M. le leader du troisième groupe d'opposition.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Je vous demande de procéder au vote par appel nominal pour se saisir de ce projet de loi, s'il vous plaît.

• (10 h 10) •

Le Président : Le vote par appel nominal est donc demandé.

Que les députés qui sont pour se lèvent, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint : M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette), M. Gaudreault (Jonquière), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).

M. Legault (L'Assomption), M. Jolin-Barrette (Borduas), M. Laframboise (Blainville), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay), Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy (Montarville), M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Roberge (Chambly), Mme LeBel (Champlain), M. Bonnardel (Granby), M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est), Mme Proulx (Berthier), Mme Charest (Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme Girault (Bertrand), M. Boulet (Trois-Rivières), Mme Proulx (Côte-du-Sud), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger (Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin (Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf), Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean), Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava), M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé), M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).

M. Arcand (Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme David (Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun), Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols (Vaudreuil), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Ciccone (Marquette).

M. Nadeau-Dubois (Gouin), Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont), Mme Labrie (Sherbrooke), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau), M. Zanetti (Jean-Lesage).

Mme Fournier (Marie-Victorin).

Le Président : Y a-t-il des députés qui sont contre? Y a-t-il des abstentions? M. le leader du troisième groupe d'opposition.

M. Ouellet : M. le Président, je demanderais le consentement pour enregistrer le vote de mon chef, s'il vous plaît.

Le Président : Consentement? Consentement accordé.

Le Secrétaire adjoint : M. Bérubé (Matane-Matapédia).

Le Président : Les trois questions ayant été posées, le résultat, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  110

                     Contre :               0

                     Abstentions :       0

Le Président : Donc, adopté à l'unanimité.

Dépôt de documents.

M. le leader du gouvernement, à la rubrique Dépôt de documents.

Réponses à des pétitions et à des questions inscrites au feuilleton

M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, je dépose les réponses du gouvernement aux pétitions présentées en Chambre le 3 avril par la députée de Repentigny et le député de Beauharnois, le 1er mai par le député de Drummond—Bois-Francs ainsi qu'aux questions inscrites au feuilleton le 9 avril par le député de Jonquière et le 1er mai par la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

Le Président : Ces documents sont déposés.

Rapport annuel du Vérificateur général

Pour ma part, je dépose le rapport du Vérificateur général à l'Assemblée nationale pour l'année 2019‑2020, tome de mai 2019.

Rapport annuel 2017-2018 de la Fondation Jean-Charles-Bonenfant

Je dépose enfin le rapport d'activité 2017‑2018 de la Fondation Jean-Charles-Bonenfant.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, Mme la députée de Repentigny.

Clarifier la notion de dangerosité pour les
ordonnances de traitement obligatoire

Mme Lavallée : Merci beaucoup, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 205 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que la notion de dangerosité lors de l'application de la Loi sur la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui doit être bonifiée davantage par le Code civil du Québec;

«Considérant que la notion de dangerosité n'est pas perçue de la même façon par tous les professionnels de la santé, qui ne l'appliquent pas de manière uniforme et systématique;

«Considérant qu'il en va de la responsabilité des psychiatres d'appliquer l'ordonnance de traitement obligatoire, qui permet d'obtenir les meilleurs soins, comme la thérapie fermée, d'une durée maximale de trois ans;

«Considérant que, lors d'une ordonnance de traitement, on doit demander le témoignage d'un membre de la famille, si le patient est inapte, et celle de deux psychiatres;

«Considérant que le nombre de personnes ayant des problèmes de santé mentale et souffrant de troubles concomitants augmente. Souvent, la psychose affecte la personne qui, parfois, devient suicidaire et se suicide;

«Considérant qu'avec la légalisation du cannabis l'Association des médecins psychiatres du Québec prévoit une hausse importante [des] consultations suite à des psychoses chez les personnes vulnérables;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec d'inclure, dans le Plan d'action en santé mentale 2020‑2025, un volet dans le Code civil du Québec pour assurer une application systémique concernant l'ordonnance de traitement obligatoire émise par un juge de la Cour supérieure du Québec.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Cet extrait de pétition est déposé. Mme la députée de Maurice-Richard.

Installer des stations de remplissage de liquide lave-glace

Mme Montpetit : Merci, M. le Président. Donc, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 833 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que, selon la SAAQ, il y a 5 490 000 véhicules automobiles au Québec sur la route et en estimant que chaque véhicule utilise [entre] quatre à cinq bidons de lave-glace par année — donc 22 à 25 millions de bidons par année — si l'on mettait bout à bout ces bidons, nous parcourrions la distance de 4 068 kilomètres, soit plus que la distance entre Québec et Calgary;

«Considérant que nous utilisons trop de plastique à usage unique;

«Considérant que nos nombreux emballages plastiques ne rejoignent pas le recyclage, se retrouvant ainsi à la poubelle ou, pire encore, dans notre environnement;

«Considérant que nous utilisons de nombreux bidons de lave-glace chaque hiver;

«Considérant qu'il existe des systèmes de remplissage de lave-glace, évitant ainsi l'usage de bidons;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au gouvernement d'obliger les bannières de produits pétroliers à installer une station de remplissage de lave-glace en vrac accessible pour tous en facturant au remplissage ou à la quantité, selon l'installation choisie.»

Et je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Cet extrait de pétition est maintenant déposé. M. le député de Chauveau.

Modifier la Loi sur l'assurance automobile afin que les victimes de
la négligence de fabricants et de réparateurs d'automobiles
puissent intenter des recours en responsabilité civile

M. Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 265 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Attendu que les victimes de la route au Québec sont privées de tout recours civil en responsabilité depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur l'assurance automobile le 1er mars 1978;

«Attendu que les victimes d'accident de la route découlant de la négligence des fabricants automobiles ou des réparateurs de véhicules ou de leurs pièces constituantes n'ont aucune raison de bénéficier de l'interdiction de recours en responsabilité applicables aux victimes — "no-fault";

«Attendu que ces entreprises sont parfaitement solvables et que les recours de leurs victimes seraient, en général, de nature à permettre la réparation intégrale des dommages rattachés aux blessures et aux décès;

«Attendu[...], entre autres, Mme Nancy Leblond vit une injustice du fait qu'elle n'a jamais pu poursuivre le fabricant automobile responsable de blessures graves et permanentes causées lors d'un accident et qui ont ruiné sa vie;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec de modifier la Loi sur l'assurance automobile pour réviser le mode de cotisation des fabricants automobiles et [des] pièces d'automobile ainsi que des réparateurs de celles-ci afin qu'il reflète fidèlement le risque qu'ils représentent sur les routes du Québec; permettre aux victimes de ces fabricants et réparateurs de poursuivre ces derniers en responsabilité civile pour tout dommage découlant d'une mauvaise conception, construction ou réparation d'un véhicule ou d'une pièce.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Cet extrait de pétition est déposé. Mme la députée de Soulanges.

Mettre en pratique la démarche de santé intégrative

Mme Picard : Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 9 176 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que des enquêtes documentées ont démontré que les approches complémentaires axées sur la santé globale et la prévention permettent de traiter plus efficacement la douleur et les maladies chroniques;

«Considérant qu'un travail de collaboration interdisciplinaire entre la médecine conventionnelle et les approches alternatives, tel que préconisé en santé intégrative, est fortement recommandé par l'Organisation mondiale de la santé afin d'offrir des soins de santé plus pertinents;

«Considérant qu'une majorité des Québécois utilise déjà des approches de santé complémentaires;

«Considérant la législation de provinces canadiennes, dont le Medicine Act 1991 de l'Ontario, amendement n° 33-11, a permis l'instauration réussie de la démarche de santé intégrative;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec d'amender la loi régissant les soins de santé afin que soit respectée l'autonomie du patient concernant [les] objectifs de soins de santé et décisions de traitement; les médecins ne puissent pas être reconnus coupables de faute professionnelle ou d'incompétence parce qu'ils recommandent ou pratiquent une thérapie non conventionnelle ou qui s'écarte de la pratique médicale en vigueur, sauf s'il est démontré que la thérapie complémentaire pose un plus grand risque pour la santé du patient que la pratique de la médecine conventionnelle; les associations de thérapeutes formés de façon rigoureuse en santé intégrative puissent obtenir plus facilement justice pour la reconnaissance d'un statut professionnel qui permettrait ainsi de mieux protéger le public; les soins de première ligne puissent être décentralisés et administrés par d'autres groupes de praticiens de médecine intégrative formés en ce sens.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

• (10 h 20) •

Le Président : Cet extrait de pétition est maintenant déposé. J'ai reçu une demande de M. le député de Chauveau pour la présentation d'une pétition non conforme. Y a-t-il consentement pour la présentation de cette pétition?

Des voix : Consentement.

Le Président : Consentement. M. le député de Chauveau.

Modifier la Loi sur l'assurance automobile afin que les victimes de la
négligence de fabricants et de réparateurs d'automobiles puissent
intenter des recours en responsabilité civile

M. Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 18 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Attendu que les victimes de la route au Québec sont privées de tout recours civil en responsabilité depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur l'assurance automobile le 1er mars 1978;

«Attendu que les victimes d'accident de la route découlant de la négligence des fabricants automobiles ou des réparateurs de véhicules ou de leurs pièces constituantes n'ont aucune raison de bénéficier de l'interdiction de recours en responsabilité applicables aux victimes — "no-fault";

«Attendu que ces entreprises sont parfaitement solvables et que les recours de leurs victimes seraient, en général, de nature à permettre la réparation intégrale des dommages rattachés aux blessures et aux décès;

«Attendu que, entre autres, Mme Nancy Leblond vit une injustice criante du fait qu'elle n'a jamais pu poursuivre le fabricant automobile qui l'a blessée grièvement, de façon permanente, et qui a ruiné sa vie;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale de modifier la Loi sur l'assurance automobile pour réviser le mode de cotisation des fabricants automobiles et de pièces d'automobile ainsi que les réparateurs de celles-ci afin qu'il reflète fidèlement le risque qu'ils représentent sur les routes du Québec; permettre aux victimes de ces fabricants et réparateurs de poursuivre ces derniers en responsabilité civile pour tout dommage découlant d'une mauvaise conception, construction ou réparation d'un véhicule ou d'une pièce.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Et permettez-moi, M. le Président, de saluer Mme Leblond et son conjoint, qui sont ici présents à l'Assemblée nationale. Merci.

Le Président : Cet extrait de pétition est maintenant déposé.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période de questions et réponses orales seront tenus les votes reportés sur la motion du député de Robert-Baldwin débattue hier aux affaires inscrites par les députés de l'opposition puis sur l'adoption du projet de loi n° 7.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole au chef de l'opposition officielle.

Traitement des demandes d'immigration

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, je tiens à remémorer au chef de la CAQ l'objectif d'une commission parlementaire. Elle constitue le forum tout désigné pour examiner en détail les projets de loi, et les députés y jouent un rôle de contrôle de l'activité gouvernementale et de consultation publique. Dans le cas du projet de loi sur l'immigration, c'est plutôt un monologue auquel on assiste. C'est un projet de loi qui a été présenté dans la précipitation et l'improvisation. Le ministre de l'Immigration agit d'ailleurs de façon doctrinaire. Rappelez-vous l'abandon des 18 000 dossiers en immigration. Tout le monde lui disait que ça n'avait pas de bon sens, mais il a fallu l'intervention du tribunal pour corriger la situation. Notre porte-parole en matière d'immigration a formulé trois propositions au ministre pour bonifier son projet de loi : assurer le traitement des 18 000 dossiers, préciser le test des valeurs et faciliter la vie des entreprises. Actuellement, ce projet fait tout le contraire et impose un fardeau administratif supplémentaire. Le milieu des affaires partage nos inquiétudes.

Est-ce que le premier ministre, qui refuse d'entendre nos voix dans ce dossier, peut au moins entendre celle du milieu des affaires?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le système actuel d'immigration ne fonctionne pas bien.

D'abord, je rappelle qu'on parle des immigrants économiques. 60 % des immigrants qui arrivent au Québec sont des immigrants économiques. Déjà, on pourrait se poser la question : Est-ce que ça devrait être plus que 60 %? Mais restons avec le 60 %.

Actuellement, dans le système, il y a une série de critères, entre autres la connaissance du français, entre autres les qualifications, et il y a un système de points qui sont accordés, et c'est un système de premier arrivé, premier servi. Or, actuellement, il y a beaucoup d'entreprises qui sont en pénurie d'employés qualifiés. Donc, ce qu'on souhaiterait, c'est de mettre en place un nouveau système qui permettrait de choisir en premier les employés qui répondent aux besoins des entreprises. Bon, malheureusement, le Parti libéral veut qu'on continue à traiter les 50 000 personnes qui sont dans les 18 000 dossiers selon la formule premier arrivé, premier servi.

Donc, M. le Président, je pense que notre projet de loi répond à une nécessité. Bon, je comprends que le milieu des affaires ne souhaite pas qu'on mette en place un test de français puis un test de valeurs, dans un deuxième temps. Moi, je pense, c'est important que les nouveaux arrivants apprennent le français, apprennent nos valeurs et réussissent ce test. Donc, je comprends que les libéraux sont contre le test de français, contre le test des valeurs. C'est leur choix, mais moi, je suis très à l'aise...

Le Président : En terminant.

M. Legault : ...avec notre position.

Des voix : ...

Le Président : Première complémentaire. La parole n'appartient qu'au chef de l'opposition officielle.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, les conditions d'embauche de ces nouveaux arrivants, a-t-il dit hier, ça va être connu dans un règlement ultérieur. C'est assez fondamental, il me semble, les conditions d'embauche de nouveaux arrivants.

Ma question est simple : Est-ce que vous pouvez demander à votre ministre de mettre de côté son intransigeance bien connue et enfin de faire preuve d'ouverture et de flexibilité?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le système qu'on propose, c'est un système qui avait même commencé à être mis en place par le gouvernement libéral, le système Arrima.

En gros, c'est qu'on dit, c'est que, si, dans les 100 000 personnes — il y en a 100 000 actuellement qui ont déposé leurs candidatures — il y en a trois qui répondent aux besoins spécifiques d'une entreprise, ces trois personnes-là, on veut qu'elles passent devant tout le monde parce que c'est ça qui devrait être la priorité : répondre aux besoins des entreprises. Malheureusement, actuellement, il y a 40 000 personnes qui attendent à Ottawa, un autre 50 000 personnes qui sont dans les 18 000 dossiers, qui attendent au ministère de l'Immigration.

Le Président : En terminant.

M. Legault : Il faut accélérer. Il faut changer les critères. C'est ça qu'on veut.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : Il me semble que nos propositions sont raisonnables, M. le Président. Il me semble qu'il n'y a pas juste nous qui avons dit ça. Plusieurs groupes sont venus également dire la même chose. On dirait que les commissions parlementaires, pour le gouvernement, c'est une mise en scène.

Ma question est simple : Est-ce que le premier ministre peut nous dire à quoi, selon lui, servent ces commissions parlementaires?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le Parti libéral pose deux conditions qui ne sont pas acceptables pour nous.

D'abord, le Parti libéral demande qu'on traite premier arrivé, premier servi les 18 000 dossiers, 50 000 personnes. Il y en a déjà 40 000 en attente. Ça veut dire que, pour répondre aux besoins du marché du travail, il va falloir attendre deux ans avant de commencer à se concentrer là-dessus. Il y a une urgence d'agir. Les groupes patronaux le disent.

Puis, dans un deuxième temps, on veut un test de français puis un test de valeurs. Ce n'est pas important pour les libéraux, le test de français puis le test des valeurs. C'est important pour les Québécois.

Le Président : Troisième complémentaire.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Toujours votre attention. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : Il me semble qu'on fait valoir des points importants qui sont appuyés, M. le Président, par les entreprises. Le premier ministre nous répond toujours de la même façon. Il ne nous donne jamais, en fait, de vraies réponses.

Je vais lui donner un choix de réponses : a, est-ce qu'il souhaite adopter un projet de loi mal ficelé par une idéologie ou, b, un projet de loi où les ingrédients gagnants pour la prospérité du Québec sont réunis?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, les ingrédients gagnants pour la prospérité économique, c'est de commencer le plus vite possible à choisir les candidats qui répondent le mieux au marché du travail, pas y aller comme c'est proposé par les libéraux, traiter 18 000 dossiers, 50 000 personnes premier arrivé, premier servi.

Deuxièmement, le français sera toujours vulnérable au Québec. On veut exiger, dans les trois premières années, un test de français puis un test de valeurs. Ce n'est pas important pour le Parti libéral. C'est important pour les Québécois. Les Québécois sont avec nous.

• (10 h 30) •

Le Président : Question principale, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Intégration des immigrants au marché du travail

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Oui. Merci, M. le Président. Alors, vous savez, M. le Président, dans un bon projet de loi, il y a d'abord un objectif qui doit être clair puis des moyens qui vont avec. Et, dans le projet de loi sur l'immigration, l'objectif qui est d'avoir plus de régionalisation, plus d'intégration des immigrants, on est d'accord. Mais c'est dans les moyens qu'il y a véritablement un problème.

Et là, hier, on a vu à quel point le ministre souhaite imposer un fardeau aux milieux économiques. Et les milieux économiques — ils sont venus nous rencontrer il y a plusieurs semaines — l'avaient déjà dénoncé. Et là, hier, ils ont été obligés de sortir pour dire que ça n'avait pas de sens. Et ce qu'ils disent, la Fédération des chambres de commerce du Québec : Ça va être contre-productif. Le Conseil du patronat et les Manufacturiers et exportateurs sont sortis pour dire que ça allait être un alourdissement non nécessaire, que ce n'était pas dans la bonne direction que l'on allait. Les milieux se sont réunis pour dire que ça ne tenait pas la route.

Alors, quand est-ce que le ministre va sortir de son entêtement pour comprendre que, dans les moyens dont il se dote, il nuit à l'économie du Québec?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, il y a quelques rectificatifs à apporter ici. Il y a une chose que je vais faire, par contre, je vais donner raison au chef de l'opposition officielle sur l'intransigeance sur mes principes. Effectivement, je suis intransigeant sur mes principes. L'objectif que j'ai, en politique, c'est de réussir à faire en sorte d'améliorer les choses, et c'est ce que je fais dans le cadre du projet de loi n° 9. Et surtout je vais toujours servir les Québécois, fidèlement à mes valeurs, et là-dessus je peux vous assurer que je serai, en tout temps, intransigeant.

M. le Président, pour ce qui est de la question de la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, il y a une chose qu'il est important de mentionner. On est en commission parlementaire sur le projet de loi n° 9 depuis plus de 35 heures. L'article auquel elle fait référence, M. le Président, vise à faire en sorte d'avoir une assise législative pour que les employeurs participent, eux aussi, à l'intégration des personnes immigrantes, notamment en matière de francisation. Est-ce que le Parti libéral est contre le fait que tous les acteurs de la société québécoise participent à l'intégration des personnes immigrantes? Honnêtement, je suis un peu surpris.

Deuxièmement, M. le Président, à la fois la Fédération des chambres de commerce, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, le Conseil du patronat demandent au Parti libéral que le projet de loi soit adopté...

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...le plus rapidement possible pour répondre aux besoins de main-d'oeuvre dans toutes les régions du Québec. Vous nuisez à l'économie.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. On est attentifs et aux questions et aux réponses. Madame.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, clairement, il n'a pas vu la sortie qu'ont faite hier les trois organismes auxquels il fait référence. Je l'invite à lire ce qu'ils ont dit. Mais nous, on veut aider le ministre, M. le Président, et c'est la raison pour laquelle, hier, on a proposé un amendement qui disait la chose suivante : On aimerait que, dans les pouvoirs dont il se dote, il puisse y avoir une perspective d'allègement réglementaire pour les entreprises. Le ministre a dit quoi par rapport à l'allègement réglementaire? Il a dit non à cet amendement. La nuit porte conseil, M. le Président. Je suis sûre qu'en se levant il pourra nous dire qu'il va être d'accord avec l'amendement qu'on propose dans l'intérêt économique.

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, savez-vous où j'étais ce matin avant de venir ici? J'étais à l'Association des économistes du Québec. Savez-vous qui était assis à ma gauche? Le président de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Et que m'a-t-il dit? Il m'a dit : Simon, il faut que le projet de loi soit adopté le plus rapidement possible. Alors...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Évidemment, vous-même ne pouvez vous appeler par votre nom.

Des voix : ...

Le Président : Avec le sourire. M. le ministre de l'Immigration, poursuivez, s'il vous plaît, votre réponse. Attention, tout le monde, s'il vous plaît!

M. Jolin-Barrette : M. le Président, la Fédération des chambres de commerce souhaite que le projet de loi soit adopté. Le Parti libéral nuit à l'économie du Québec en refusant de faire en sorte de passer d'un système d'immigration qui va prendre en compte les besoins du marché du travail. Ce n'est pas dur à comprendre, M. le Président, il faut que le projet de loi soit adopté pour aider les entreprises du Québec.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, il faut que le ministre de l'Immigration se ressaisisse. Il faut qu'il se ressaisisse parce qu'honnêtement c'est lui qui nuit présentement à l'économie du Québec. Dans sa forme actuelle, dans sa forme actuelle, le projet de loi fait en sorte que le Québec est moins concurrentiel.

Alors, est-ce que le ministre pourrait faire preuve, je ne veux pas lui en demander beaucoup, mais d'un peu, d'un peu d'humilité et de reconnaître qu'il doit faire des modifications pour faire en sorte que le projet puisse être adopté dans l'intérêt de tous les Québécois?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration. Encore une fois, votre collaboration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, moi, je pense à toutes les régions du Québec, je pense à toutes les entreprises, je pense à tous les entrepreneurs qui ont des offres d'emploi qui ne sont pas comblées dans toutes les régions du Québec. Le projet de loi n° 9, il a été déposé le 9 février pour faire en sorte d'accompagner les personnes immigrantes pour qu'elles se trouvent un emploi à la hauteur de leurs compétences.

M. le Président, cet été, la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne va probablement faire la tournée de toutes les régions du Québec pour aller rencontrer les membres du Parti libéral à la recherche d'appuis. M. le Président, je serais gêné à sa place. Si jamais le projet de loi n'est pas adopté, le projet de loi n° 9, qu'est-ce qu'elle va dire aux différents entrepreneurs du Québec qu'elle va rencontrer? Elle va se présenter comme une candidate économique, alors qu'elle nuit elle-même à l'économie en refusant de faire l'adoption du projet de loi n° 9.

Joignez-vous à nous, pensez aux intérêts supérieurs du Québec et faisons en sorte d'adopter le projet de loi.

Le Président : Question principale. M. le député de Pontiac, à vous maintenant la parole.

Aide aux victimes outaouaises des inondations printanières de 2019

M. André Fortin

M. Fortin : M. le Président, les gens de l'Outaouais affectés par les inondations sont fatigués, ils sont épuisés. Depuis des semaines, ils vivent chez des parents, chez des amis avec leurs enfants, leurs animaux, couchent sur des divans inconfortables, reviennent épuisés du travail en pensant constamment à l'état de leur résidence qui est encore inondée, à où la famille va habiter et à comment ils vont vivre les prochains mois. Et, devant eux, il y a la tâche brutale du nettoyage. Installer des sacs de sable avec des bénévoles pour tenter de sauver la maison, c'est une chose, mais enlever des centaines, des milliers de sacs de sable pesants, mouillés, contaminés, qui sentent mauvais, qui sont déchirés, le faire seuls parce qu'il n'y a plus de bénévoles... Pour des gens forts mais affaiblis, pour des gens résilients mais épuisés, enlever ces sacs de sable là sans aide, c'est impensable, c'est impossible. D'apprendre aujourd'hui que les Forces armées n'aideront pas à enlever ces sacs de sable, pour tous ces gens, c'est comme si le ciel leur tombait sur la tête une deuxième fois.

Est-ce que quelqu'un, au gouvernement, va intervenir?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration, leader du gouvernement.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, la situation à laquelle fait face l'ensemble des sinistrés relativement aux plus récentes inondations est difficile, et le gouvernement est là, en support aux sinistrés des différentes régions du Québec. D'ailleurs, ma collègue ministre de la Sécurité publique est actuellement à pied d'oeuvre sur le terrain, à Rigaud, pour rencontrer les différents intervenants. Vous pouvez être sûr que le gouvernement du Québec va accompagner les sinistrés. Déjà, on l'a fait avec le programme qui a été mis en place par ma collègue, avant les inondations de cette année, justement en termes de prévisibilité, pour s'assurer qu'on puisse accompagner le mieux possible les personnes qui se retrouvent dans cette situation-là.

Il y a une chose qui est sûre, M. le Président, présentement, la ministre de la Sécurité publique aussi est en discussion avec la brigadière-générale, au niveau des Forces armées, et les discussions se poursuivent. Mais la volonté du gouvernement du Québec est très certainement d'accompagner toutes les personnes qui font face à ces difficultés-là. Il faut savoir que le fait d'être inondé, de perdre sa maison, de devoir effectuer des travaux, c'est une charge physique et mentale extrêmement importante, et sachez que le gouvernement du Québec est là pour accompagner toutes les personnes. Et d'ailleurs... et je dois, à ce titre, souligner le travail de ma collègue qui a été présente sur le terrain...

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...jour et nuit et elle va continuer de le faire. J'ai confiance qu'elle va le continuer.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Pontiac.

M. André Fortin

M. Fortin : Aujourd'hui, là, ce qu'on dit aux sinistrés, ce qu'on dit aux inondés, c'est que l'armée ne les aidera pas à nettoyer leur terrain, l'armée ne sera pas là pour les aider. On les comprendra, M. le Président, quand ils disent qu'ils se sentent abandonnés par leur gouvernement parce que les priorités des Forces armées, ce sont celles qui sont établies avec le ministère de la Sécurité publique. La ministre des Affaires municipales a entendu l'appel, l'appel des municipalités rurales de l'Outaouais pour que l'armée soit disponible pour aider ces gens-là.

Puisqu'elle n'a pas été entendue par son gouvernement, qu'est-ce qu'elle dit à ces gens-là? Comment ils sont supposés nettoyer leur terrain?

Le Président : Mme la ministre des Affaires municipales.

Mme Andrée Laforest

Mme Laforest : Je remercie mon collègue pour sa question puis les questions concernant la Croix-Rouge. Je crois que notre vice-première ministre s'en est très...

Des voix : ...

Mme Laforest : ...oui, pour ce qui s'est passé avec les inondations. Concernant votre région, l'Outaouais, j'étais là la semaine passée, il y a deux semaines en fait. J'ai visité les lieux, j'étais en discussion avec votre maire, d'ailleurs, et ce que je peux vous dire, c'est que, pour la région de l'Outaouais — je suis d'ailleurs allée à Pontiac rencontrer la mairesse — ce que je peux dire, c'est que les deux, et la mairesse et le maire, m'ont dit qu'ils étaient très entendus, très bien écoutés. Ils m'ont même remerciée pour les nouvelles places qu'on a octroyées en hébergement pour la région de l'Outaouais. En ce qui concerne l'habitation, pour l'Outaouais, on a pris le contrôle et on a eu des remerciements de la part de la mairesse.

Le Président : Deuxième complémentaire.

Des voix : ...

• (10 h 40) •

Le Président : S'il vous plaît, votre attention! La parole appartient au député de Pontiac.

M. André Fortin

M. Fortin : On ne parle pas de Croix-Rouge. On ne parle pas d'hébergement. On parle de sacs de sable. À Waltham, là, M. le Président, la population, c'est 384. Au bureau municipal, il y a un seul employé à temps partiel. À Waltham, près de la moitié des gens sont soit sinistrés, inondés, isolés ou évacués, et l'autre moitié les hébergent, et ce, depuis six semaines. C'est des gens forts, des gens fiers, des gens qui n'aiment pas demander de l'aide, qui ne veulent pas être un fardeau, mais ils sont épuisés. M. le Président, tout le monde est épuisé, les 384. Ils ont besoin de l'armée.

Qu'est-ce que la ministre va faire?

Le Président : Mme la ministre des Affaires municipales.

Mme Andrée Laforest

Mme Laforest : Bien, je vais redire encore qu'est-ce que je dis. J'ai très bien joué mon rôle. Mon rôle est l'habitation, évidemment. En ce qui concerne l'armée, vous le savez, on a eu des annonces de semaine en semaine pour soutenir les sinistrés. Alors, ceci étant dit, ne soyez pas inquiets. On est tout à fait à l'écoute. On a notre comité d'action qui est fait avec la vice-première ministre. On prend notre rôle au sérieux. Qu'est-ce que je pourrais vous dire au niveau de l'hébergement pour votre région, on a octroyé des PSL, les PSL d'urgence pour reloger les gens inondés. Et, pour les PSL d'urgence, on a doublé le nombre de PSL d'urgence. Alors, en habitation, on a répondu à la demande.

Le Président : Question principale, M. le député de Rosemont.

Allocations de départ de gestionnaires du réseau de la santé

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Oui, merci, M. le Président. On s'apprête ici, en cette Chambre, éventuellement, à voter le projet de loi n° 7, qui va faire passer de 24 mois à 12 mois les allocations de départ des gestionnaires du réseau de santé qui ont perdu leur job à cause de la réforme. On est d'accord avec ça, malgré le côté rétroactif de la loi. Pourquoi? Parce que la norme, normalement, c'est 12 mois. C'est comme ça que ça devrait fonctionner. C'est comme ça qu'on traite bien les gens.

Or, la norme, elle ne s'applique pas pour tout le monde. La Vérificatrice générale nous apprend ce matin que, pour certains vice-présidents de certaines sociétés d'État, c'est un véritable bar ouvert, M. le Président : gros salaires, bonis de signature, primes de rendement automatiques et, la cerise sur le sundae, des primes de départ plantureuses, hors normes selon la Vérificatrice générale, jusqu'à 18 mois de salaire.

Ça, M. le Gouvernement, est-ce que... M. le Gouvernement!

Est-ce que le gouvernement reconnaît qu'il entérine ainsi et encourage la pratique des bars ouverts avec sa politique de business?

Le Président : M. le Président du Conseil du trésor.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, M. le Président, moi, j'apprécie beaucoup la question du député de Rosemont. Je pense que la plupart de nous ont soit déjà pris connaissance du rapport du Vérificateur général... Et moi, je l'ai regardé pas mal en détail et j'aimerais rappeler la période qui est couverte par ça, par ce rapport-là, qui est la période de 2016 à 2018. Qui était au gouvernement à ce moment-là? C'est le Parti libéral. Puis je pense que les pratiques qui sont soulevées par le vérificateur... par la Vérificateur général, pardon, c'est gênant. C'est excessivement gênant pour des gens qui, par exemple, étaient au Conseil du trésor pendant les dernières années, n'avaient pas la rigueur nécessaire de regarder, M. le Président, qu'est-ce qui se faisait en matière de transparence et d'encadrement.

Alors, moi, je souscris exactement avec le point du député de Rosemont que ces pratiques-là sont totalement inacceptables. Et c'est pour ça, notamment, que nous avons annoncé, dans les dernières semaines, que nous allons travailler très fort sur la Loi de l'administration publique pour mettre en place des pratiques de transparence et d'encadrement qui respecteront la Loi de l'administration publique.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Rosemont.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : M. le Président, les sociétés d'État visées cachent de l'information volontairement. Ce n'est pas nous qui le disons. Elles cachent de l'information, c'est la Vérificatrice générale qui l'a dit. On peut ne pas la croire, mais elle a fait des audits. Ces sociétés d'État cachent des informations volontairement.

Alors, au-delà des belles paroles, est-ce que le gouvernement va mettre fin au bar ouvert des fonds publics dans les sociétés d'État?

Le Président : M. le président du Conseil du trésor.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Écoutez, en fait, je pourrais répondre 12 fois à la question du député de Rosemont. Je suis d'accord avec lui, c'est inacceptable, ce qui a été fait dans les dernières années. Il y avait notamment un Conseil du trésor qui devait être responsable, M. le Président, de s'assurer qu'il y avait de la transparence, mais qu'il avait aussi... dans toutes les publications, que l'information était là... Qu'on décide de payer des primes de départ, c'est une chose, mais il ne faut pas avoir la peur ou la crainte de divulguer cette information-là.

Alors, je vais vous dire, je peux répondre encore plusieurs fois, je suis d'accord avec vous. Ces pratiques-là sont inacceptables, et on est train de mettre en place tout ce qu'il faut pour que l'information soit divulguée dans les différents rapports annuels de gestion.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Rosemont.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : C'est bien mal parti, M. le Président, si on considère la nomination du chum du ministre de l'Économie à Investissement Québec. Alors, visiblement, les babines n'ont pas suivi les bottines ici ou les bottines n'ont pas suivi les babines. Ça ne marche pas. Alors, on ne peut pas juste prendre la parole du président du Conseil du trésor comme ça. Ça va prendre des résultats.

Qui doit dicter? Qui doit dicter les bonnes pratiques en matière de fonds publics? Est-ce que c'est des sociétés d'État cachottières qui cachent de l'information à la Vérificatrice générale ou le gouvernement, dictées par la Vérificatrice générale?

Le Président : M. le président du Conseil du trésor.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Écoutez, là, on tombe dans une deuxième question, M. le Président, et ce que j'aimerais dire au député de Rosemont, c'est très clair. J'en ai parlé avec mon collègue le ministre de l'Économie. Je pense qu'il est important de comprendre comment les règles sont faites, c'est-à-dire qu'il y a des sociétés d'État qui ont des conseils d'administration, qui doivent s'occuper de la rémunération, mais ça n'empêche pas d'avoir la transparence et l'encadrement.

Donc, par exemple, ce qui est dans le cas d'Investissement Québec, ici, il y aura toute la transparence et l'encadrement nécessaires pour que l'information, en termes de rémunération, de bonification et de conditions de travail, soit clairement déclarée avec les objectifs de performance qui auront été mis en place par le ministre de l'Économie.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Joliette.

Plan de déploiement des maternelles quatre ans

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : On a tous constaté, au cours de derniers mois, que d'un projet de maternelle quatre ans qui devait inclure tous les enfants avec 5 000 classes, on est passés à 3 300 et, maintenant, à 2 600 classes.

Ce n'est pas surprenant, parce que les données probantes de la science pour soutenir l'idée d'une généralisation de la maternelle quatre ans ne sont tout simplement pas là. D'ailleurs, des experts ont été très éloquents, à cet égard, en commission parlementaire. Les spécialistes, les enseignants, les classes ne sont pas là, et la demande et l'intérêt des parents ne sont pas là non plus. D'ailleurs, même Égide Royer, l'architecte derrière l'idée du gouvernement, est venu hier nous dire que les conditions actuellement pour le succès du projet des maternelles quatre ans ne sont pas réunies.

Aujourd'hui, les deux grands syndicats qui représentent les enseignants demandent carrément, vont demander, en commission, au gouvernement de mettre de côté son projet et son projet de loi. C'est l'inverse du corporatisme, je ne pense pas qu'on est face au lobby des CPE quand on parle des enseignants.

Est-ce que le ministre peut prendre acte et reculer?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci bien, M. le Président. La liste des gens qui sont venus nous dire d'appuyer et d'adopter le projet de loi n° 5 pour déployer de manière accessible, mais non obligatoire... de le déployer, le projet de maternelles quatre ans, c'est incroyable : le Conseil supérieur de l'éducation, l'Association des directions générales des commissions scolaires, la Fédération des comités de parents, l'association québécoise du personnel de direction d'établissement, la fédération québécoise des directions d'école, l'association des orthopédagogues, Pierre Potvin, prof de l'UQTR; Michel Janosz, prof de l'Université de Montréal, et des sommités reconnues par tout le monde dans le réseau de l'éducation, qui viennent de l'Université Laval, de l'UQAC, de l'Institut national de recherche scientifique, de l'UQAM, je parle de M. Égide Royer, M. Michel Perron, une sommité reconnue au Saguenay, M. Guy R. Brisson, M. Joël Monzée, Mme Yolande Brunelle, M. Richard Leonard, qui est venu faire un témoignage incroyable, Mme Huguette Drouin, Danielle Boucher, Monique Brodeur. La science, les spécialistes, ceux qui administrent le réseau, ceux qui l'utilisent. Qu'est-ce que vous voulez de plus?

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Ça serait le fun que le ministre soit un petit peu à l'écoute parce qu'il y a au moins la moitié des groupes ou des personnes qu'il a nommés qui sont venus dire : Bien, ça peut être une bonne idée, les maternelles quatre ans, mais il ne faut surtout pas oublier les centres de la petite enfance, il ne faut surtout pas oublier la complémentarité. Puis, quand on leur dit : Où vous investiriez le 2 milliards en priorité?, c'est drôle, la plupart nous disent : Dans le 0-4 ans parce qu'il ne faut pas juste régler une vulnérabilité ou un problème, il faut le prévenir.

Alors, est-ce que le ministre peut arrêter de foncer tête baissée dans cette idée fixe à 2 milliards et mettre la priorité au bon endroit?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, c'est vrai qu'il y a certaines des personnes qui nous disent : Nous appuyons le projet de loi n° 5, nous appuyons la volonté du gouvernement, qui nous suggère des façons de réussir l'implantation. C'est ça, l'objectif des auditions, d'écouter les gens, d'améliorer notre projet, de faire mieux pour nos enfants. Alors, on est très contents de voir que les gens appuient notre politique et nous suggèrent des façons de mieux faire les choses pour les enfants. On accueille ces commentaires-là avec beaucoup d'ouverture.

Et j'invite les collègues à arrêter d'opposer les bonnes idées. Pourquoi il faudrait soit investir chez les 0-3 ans, 4 ans, comme on fait avec Agir tôt et mon collègue, et opposer ça à investir pour les quatre ans?

Le Président : En terminant.

M. Roberge : On est capables de prendre soin de tous nos enfants.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Il n'y a pas juste les chiffres qui ont changé, hein, il y a aussi le discours. On est passé d'un discours où tous les enfants devraient aller en maternelle quatre ans au libre choix. Bien, parlons-en, du libre choix des parents. Comment il peut s'exercer, le libre choix des parents, quand, en ce moment, on en connaît tous, des parents qui attendent depuis des années une place en CPE, 42 000 enfants en attente sur le guichet unique?

Est-ce que le ministre de la Famille peut nous dire aujourd'hui si le libre choix, et le premier choix des parents qui, oui, est pour les CPE, va être au rendez-vous et qu'il a le mandat de compléter le réseau et de développer des dizaines de milliers de places?

• (10 h 50) •

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : C'est bien. Alors, oui, c'est vrai, on veut le libre choix. Pour ça, ça veut dire qu'il faut qu'il y ait de la place dans les deux réseaux. Savez-vous ce qu'on va faire? On va déployer les deux réseaux. Mon collègue s'est engagé à déployer plus de 10 000 places, plus de 10 000 places dans le réseau des CPE au cours des prochaines années. Ça, c'est les bottines qui suivent les babines. On va le faire. Puis on va déployer aussi le réseau des maternelles quatre ans pour offrir le choix aux parents entre deux services de qualité parce qu'on pense que c'est ça qui est le mieux pour les parents, c'est ça qui est le mieux pour les enfants.

Puis j'invite les collègues à travailler à améliorer le système pour les parents, pour les enfants, et en respectant la science, la science qui nous dit d'aller de l'avant. Je vous invite à relire l'avis du Conseil supérieur de l'éducation.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Saint-Laurent.

Impact de l'implantation de la maternelle quatre ans sur les services de garde

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : M. le Président, le problème, c'est que nous, on a sérieusement lu l'avis du Conseil supérieur de l'éducation, puis ce n'est pas aussi tranché que le ministre de l'Éducation le prétend. Au contraire, il y a des bémols.

Le problème qu'on a, c'est que le ministre de l'Éducation prend congé de la réalité québécoise. Il refuse de voir l'étendue de la situation du Québec. Il refuse d'entendre le Dr Chicoine et Dre Drouin. Il refuse d'entendre la CSDM, alors que la CSDM est la première commission scolaire qui a implanté les maternelles quatre ans au Québec et qu'elle est la plus grande commission scolaire. Il refuse d'entendre les centrales syndicales des enseignants. La CSQ reprend même leur slogan : En prendre moins, en prendre soin. Ils ne sont même pas capables d'entendre leur propre slogan. Il faut le faire!

M. le Président, nous, la seule chose qu'on demande... pas du mur-à-mur, on veut du sur-mesure, on ne veut pas avoir 2 milliards que pour les quatre ans, la vie commence bien avant quatre ans, on veut qu'on prenne soin aussi de nos tout-petits en complémentarité. Le problème que nous avons, c'est que ce n'est pas la Pre Côté qui a un billet, c'est le ministre de l'Éducation qui a un billet pour ses maternelles quatre ans.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Oui, bien, j'invite la collègue à être des nôtres après-midi parce qu'on va les entendre, les syndicats, ils sont là cet après-midi, alors soyez au rendez-vous, ils vont être là, hein, il n'y a pas de... il n'y a pas personne qui sera bâillonné là.

Écoutez, il faut arrêter, c'est important, là, il faut arrêter d'opposer les bonnes idées, il faut arrêter d'opposer notre réseau de services de garde avec les maternelles quatre ans, il faut arrêter d'antagoniser les oppositions comme ça, d'antagoniser les réseaux. Ce n'est pas comme ça qu'on va faire avancer les choses, ce n'est pas comme ça qu'on va améliorer les services aux enfants puis qu'on va répondre aux besoins des parents. La Fédération des comités de parents nous a dit : Nous autres, là, on est en faveur du déploiement, on veut avoir le choix. Il y a certains de nos parents qui disent : Non, non, nous autres, on n'enverra pas notre enfant en maternelle quatre ans. Il y en a d'autres qui disent : Oui, oui, oui, on veut l'envoyer. La Fédération des comités de parents dit : Est-ce qu'on pourrait avoir le choix, s'il vous plaît?

Il y a plus de 42 000 enfants qui sont sur des listes d'attente en ce moment à cause de la négligence des vieux partis. C'est quand même quelque chose de se faire faire la leçon par ces gens-là.

Le Président : Première complémentaire.

Des voix : ...

Le Président : Je vous demande également d'être attentifs, toujours et en continu. Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.

Mme Jennifer Maccarone

Mme Maccarone : Merci, M. le Président. Le ministre de la Famille, il a dit qu'il n'y aura pas de maternelle quatre ans à côté des garderies. Pourtant, plus que la moitié des classes qui vont ouvrir en septembre sont à un kilomètre d'un CPE ou d'une garderie. Je comprends que le ministre, il n'est pas au courant, M. le Président, il est absent des commissions, son ministère, il est absent des discussions, et il est absent de la place publique.

Que répond le ministre d'un gouvernement au réseau...

Des voix : ...

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je pense que le leader de l'opposition devrait indiquer à sa collègue qu'on ne peut pas faire référence à l'absence ou à la présence ou non d'un collègue ici, hein, au salon bleu, ça fait partie de nos règles, M. le Président.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! On entend. Je vous demande, madame, de poursuivre votre question.

Mme Maccarone : Que répondent le ministre et le gouvernement au réseau des services de garde qui sont à la veille de fermer leurs portes? Ce n'est pas de fermer nos yeux, c'est d'ouvrir nos oreilles.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Oui. Alors, le travail de collaboration entre Famille et Éducation n'a jamais été aussi grand. Peut-être qu'ils font de la projection parce que ça travaillait plus en silo ces dernières années. Ce n'est pas notre façon de travailler. On travaille Santé, Famille, Éducation, les ministres se rencontrent, les cabinets se rencontrent et les sous-ministres se rencontrent, donc les fonctionnaires aussi, les ministères travaillent en collaboration. On nous dit qu'on ne se rencontre pas. Écoutez, on ne fait pas des procès-verbaux à chaque rencontre, hein, qu'on rendrait publics, mais je peux vous dire qu'on travaille ensemble. Et il y a un document conjoint qui a été fait, et je pense que c'est une des rares fois que l'analyse d'impact réglementaire pour un projet de loi a été faite par deux ministères à la fois. Mais, dans le cas de Famille-Éducation, ça a été fait ensemble lors du dépôt du projet de loi n° 5. C'est une des preuves qui montre bien qu'on travaille en complémentarité.

Le Président : Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.

Mme Jennifer Maccarone

Mme Maccarone : Merci, M. le Président. Le gouvernement ne croit pas dans la complémentarité. Ce que vous voyez ici en jaune sont toutes les maternelles quatre ans qui vont ouvrir dès le 1er septembre qui sont à une minute de marche d'un CPE. Il y en a plusieurs. Qu'une maternelle quatre ans s'ouvre en face d'un CPE à Amqui, à Saint-Fulgence et à Chambord, ça fait mal, M. le Président. Et le ministre de la Famille, il est absent, il n'est pas à l'écoute de son réseau. Personne n'a évalué l'impact des maternelles quatre ans sur le réseau de services de garde.

Qui, au gouvernement, va défendre le réseau de services de garde?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, c'est vrai, ça se peut qu'il y ait des maternelles quatre ans proches de là où sont les familles, ça se pourrait que ça arrive. Ça se pourrait qu'il y en ait dans les écoles, c'est là qu'elles vont être, M. le Président. Et, si on veut laisser le libre choix aux parents, bien, il faut que les deux soient accessibles. On ne va pas bâtir un CPE à 50 kilomètres dans le bois ou une école à 50 kilomètres dans le bois pour protéger des marchés. On ne parle pas d'une entreprise avec un contrat d'exclusivité, on parle d'une offre de services publics. Une offre de services publics pour les parents et pour la réussite scolaire de nos enfants. J'invite tout le monde à se rappeler à l'essentiel : la réussite scolaire de nos jeunes.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Sherbrooke.

Impact de l'implantation de la maternelle quatre ans
sur le réseau de services de garde

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Merci, M. le Président. On sait déjà que les maternelles quatre ans universelles ne passent pas le test de la réalité. Et, en plus de tout le reste, on apprend même que les enfants de quatre ans posent déjà problème dans les autobus parce qu'ils s'endorment puis qu'ils glissent en dessous des bancs. Pire, hier, en commission, un des seuls spécialistes en faveur de la maternelle quatre ans, Égide Royer, est venu défendre son point, et on a constaté que tout l'argumentaire repose sur un énorme raccourci intellectuel. On nous dit qu'entre 2012 et 2017 les enfants sont devenus plus vulnérables quand ils entrent à l'école. C'est vrai. Mais M. Royer et M. le ministre concluent que c'est parce qu'on n'offre pas les bons services éducatifs et qu'on a besoin de la maternelle quatre ans. Mais d'où ça sort, ce raisonnement-là? Nulle part. Ça pourrait aussi bien être à cause de l'austérité ou de la réforme en santé, qui sont justement arrivées pendant ces années-là, et une experte l'a même dit, que l'austérité était l'explication la plus probable. C'est un projet de milliards de dollars qui repose sur un raisonnement absurde.

Avant d'imposer une solution, on ne serait pas mieux de s'assurer d'avoir compris le problème comme il faut?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : M. le Président, une des études, une des données probantes qui a été mise sur la table par M. Égide Royer, c'est incontestable, c'est les résultats des évaluations à cinq ans pour vérifier si les jeunes sont vulnérables ou pas à cinq ans dans un des domaines de développement. De notre côté, au Québec, malheureusement, le statu quo nous fait régresser. Ces dernières années, il y a de plus en plus d'enfants qui arrivent à cinq ans vulnérables dans un domaine de développement, et ça, ça compromet leur réussite scolaire, rien de moins. Ce qui s'est passé en Ontario, c'est que, dans les dernières années... Du côté francophone, ça fait plus de 20 ans qu'ils font la maternelle quatre ans. Du côté anglophone, s'inspirant de ce qui se fait de bon, ils l'ont développée. Le résultat, aux mêmes évaluations qu'on a passées ici, au Québec, et en Ontario, c'est qu'on a vu que la vulnérabilité des enfants qui ont bénéficié de ce service-là a été coupée de moitié. Ça, c'est les faits. On s'inspire de ce qui se fait de bon. On ne fait pas copier-coller. On s'inspire de ce qui se fait de bon et on l'interprète à notre façon pour offrir le meilleur à nos enfants. Qui pourrait nous reprocher ça?

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Ce n'était pas le statu quo, ici, c'est les coupures. Hier, il y a une spécialiste qui est venue nous présenter la courbe de Heckman, qui nous apprend que plus on investit tôt pour le bien-être de nos enfants, mieux c'est. Et je vais le répéter pour le premier ministre. 1 $ investi dans la première année de vie d'un enfant a plus de retombées pour le bien-être de cet enfant-là et pour la collectivité que 1 $ investi n'importe quand dans la vie d'un enfant. Ça tombe bien. On a un réseau de CPE ici qui a fait ses preuves et qui nous permet d'agir vraiment, vraiment tôt.

Pourquoi on n'investit pas au moins autant dans notre réseau de CPE que dans le projet de maternelles quatre ans?

Le Président : M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Ce tableau présenté par ma collègue est très pertinent. J'étais content de le voir hier. Ça renforce notre conviction puis notre nécessité de travailler en équipe, Famille, Santé, Éducation. Ça renforce encore une fois la légitimité de ce que fait mon collègue de la Famille, qui fait un excellent travail, de ce que fait mon collègue le ministre délégué à la Santé, qui fait un excellent travail, pour qu'ensemble on arrive à éliminer les vulnérabilités de nos enfants, pour qu'ils arrivent le plus préparés possible pour réussir leur parcours scolaire en étant confiants, en étant appuyés, puis en ayant diagnostiqué ou repéré les vulnérabilités, puis en commençant à agir tôt, parce que diagnostiquer pour diagnostiquer, ça ne sert à rien. Il faut outiller nos gens à aider nos jeunes.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Merci. L'attitude du ministre rappelle de très, très mauvais souvenirs aux Québécois. On a déjà vu ça ici, un ministre qui veut imposer une réforme malgré tous les signaux d'alarme. L'arrogance, le manque d'écoute des besoins du milieu, on reconnaît ça.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

• (11 heures) •

Mme Labrie : Le ministre nie la réalité. Il refuse de voir de ce que les études nous disent et il persiste à imposer sa promesse électorale. Et pourtant tout nous montre qu'on pourrait utiliser beaucoup plus efficacement les milliards qu'on veut investir en petite enfance.

M. le Président, est-ce que le ministre est en train de devenir un Gaétan Barrette 2.0?

Des voix : ...

Le Président : Je m'excuse...

Des voix : ...

Le Président : Non, je m'excuse...

Des voix : ...

Le Président : Non. Laissez-moi...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Du calme. Vous ne pouvez nommer les gens que par le titre. Je vous demande votre calme.

Des voix : ...

Le Président : Du calme, s'il vous plaît! Je vous rappellerai cependant...

Des voix : ...

Le Président : Est-ce que vous pouvez, s'il vous plaît, avoir quelques secondes d'attention? Nous n'avons pas terminé. Je rappellerai cette règle que l'on connaît tous : nous ne pouvons nommer quelqu'un ici que par son titre. Je pense que je suis tellement clair. M. le leader du...

M. Proulx : Vous avez répondu, M. le Président.

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Oui. M. le Président, je pense que tout un chacun, on se doit respect ici, en cette Chambre. Tout le monde a été élu par ses concitoyens, et je pense que, dans ce cas-ci, la députée de Sherbrooke devrait retirer ses propos et s'excuser auprès du député de La Pinière. Je crois que ça serait tout à fait de bon ton que l'ensemble des collègues parlementaires se respectent ici, dans cette Chambre.

Le Président : Vous connaissez la règle. Honnêtement, il ne faut pas blesser un collègue. Les excuses seraient souhaitables. Mme la députée.

Mme Labrie : Je m'excuse auprès du député de La Pinière.

Le Président : M. le ministre de l'Éducation, en réponse...

Des voix : ...

Le Président : Votre attention, s'il vous plaît! On continue de belle façon.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci bien. M. le Président, je veux rassurer les gens, on travaille en concertation. Les 250 classes qu'on ajoute au réseau, parce qu'il y en a 394 en ce moment, les 250 classes ont été choisies vraiment dans un esprit de collaboration avec chacune des commissions scolaires, qui nous ont dit qu'ils avaient les locaux nécessaires, les enseignants nécessaires, les professionnels nécessaires. C'est en travail de collaboration que les 250 places ont été ciblées et c'est de cette façon-là qu'on veut travailler.

C'est pour ça, je pense, que nos partenaires, comme l'Association des directions d'école, comme l'Association des comités de parents, comme les syndicats, avec qui on discute fréquemment, aiment le ton qu'on utilise et la façon dont on débat et dont on gouverne.

Le Président : Question principale, M. le député de LaFontaine.

Droits et libertés de la personne abordés dans le
projet de loi sur la laïcité de l'État

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Oui. M. le Président, la ministre de la Justice préside le Comité de législation. À ce titre, elle doit comprendre la portée et les conséquences de tous les projets de loi, et elle a la responsabilité de s'assurer, à terme, de la cohérence législative et juridique de toutes les lois du Québec. Elle doit en répondre en cette Chambre.

En regard, par exemple, du projet de loi n° 21, sur une question toute simple d'application ou pas de la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi, la ministre a refusé de répondre à nos questions. Sur cet important enjeu, mardi, après plusieurs appels, la ministre s'est finalement levée pour uniquement répondre, et je la cite : «...sur les concepts juridiques, je ne peux intervenir ici, en Chambre...» Fin de la citation.

La ministre ne peut pas s'absenter d'un débat qui touche les droits et libertés des Québécois, Charte des droits et libertés pour laquelle elle est la ministre responsable de l'application, elle est la gardienne.

Pourquoi a-t-elle abdiqué son rôle?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, le projet de loi n° 21, la Loi sur la laïcité de l'État, qu'est-ce que ça fait, le projet de loi? Ça vise à faire en sorte d'insérer, premièrement, dans le corpus législatif la laïcité de l'État, mais, deuxièmement, de l'inscrire dans la Charte des droits et libertés de la personne, le fait qu'au Québec la laïcité, c'est une valeur fondamentale de la société québécoise.

Ça me surprend que le Parti libéral ne soit pas en accord avec cela, M. le Président, le fait de faire en sorte que tous les citoyens et toutes les citoyennes québécois soient traités équitablement, peu importent leurs appartenances religieuses, peu importe leur foi, peu importe leur liberté de conscience, M. le Président. On place toutes les religions sur le même pied d'égalité.

Aussi, M. le Président, pour certains postes particuliers en situation d'autorité, durant les heures de travail, certaines personnes ne pourront pas porter de signes religieux. Ça s'applique autant aux femmes qu'aux hommes. Ça s'applique à tout le monde et à toutes les religions de la même façon. Même chose, M. le Président, le service public à visage découvert et la réception de service à visage découvert pour des motifs de sécurité et d'identification. Est-ce que le député de LaFontaine est en désaccord avec ce qu'on fait dans le cadre du présent projet de loi?

Le Président : Première complémentaire, M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Alors, M. le Président, si c'est le leader qui se lève sur ma prochaine, ça va être gênant. Je parle de quoi? Je parle de la charte des droits et libertés des Québécoises et Québécois, c'est la ministre de la Justice qui est responsable. Je parle de la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi, article 34, c'est la ministre de la Justice qui est responsable; lorsque la ministre de la Justice dit : À toutes les fois que vous allez poser une question qui implique un concept juridique, ne venez pas me voir, je ne répondrai pas.

M. le Président, si elle ne répond pas sur les concepts juridiques, qu'est-ce qu'elle fait assise ici un micro devant elle?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, les parlementaires peuvent poser les questions qu'ils veulent en cette Chambre. Le député de LaFontaine décide d'aller dans ce sens-là et dans l'expression qu'il choisit. Une chose est sûre, c'est que nous, on travaille en équipe, ici, au gouvernement du Québec, et le projet de loi n° 21 fait en sorte de clarifier le concept de laïcité de l'État parce que, dans nos lois, M. le Président, ce n'était pas prévu.

Souvent, il y a des politiciens, il y a des formations politiques qui disent que l'État québécois, il est laïque. Bien, M. le Président, ce n'était pas vrai jusqu'au dépôt du projet de loi n° 21. Le député de LaFontaine devrait être fier qu'on inscrive la laïcité de l'État dans nos lois et qu'on puisse tourner la page sur ce débat qui a divisé le Québec pendant plus de 10 ans.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : M. le Président, une personne, ça ne fait pas une équipe. C'est juste le leader qui se lève pour répondre à nos questions. Le collègue de Jean-Lesage, le 1er mai dernier, a posé la question suivante à la ministre de la Justice : Est-ce que vous considérez que la Charte des droits et libertés de la personne est un élément essentiel de l'identité québécoise? Très facile. Réponse : Je n'ai pas d'opinion ou de réponse à formuler à cette question-là. Alors, M. le Président, on ne peut pas lui parler de droits. On ne peut pas lui parler de libertés. On ne peut pas lui parler de concepts juridiques.

Qu'est-ce qu'elle fait assise ici, en cette Chambre?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

Des voix : ...

Le Président : Votre attention à tous, s'il vous plaît! La parole n'appartient qu'au ministre de l'Immigration. S'il vous plaît!

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, le projet de loi n° 21 vise à s'assurer de séparer l'État des religions, de modifier la Charte des droits et libertés de la personne pour inclure le concept de laïcité de l'État. Est-ce que le député de LaFontaine considère que ce n'est pas important, la laïcité de l'État, autant que l'égalité entre les femmes et les hommes?

Le Président : M. le leader de l'opposition officielle.

M. Proulx : M. le Président, c'est la troisième occasion qu'a le leader du gouvernement de prendre la place de la ministre de la Justice pour répondre. Vous connaissez l'article 79. On lui a posé une question très simple. À micro fermé, la ministre a dit : Qu'est-ce que je fais ici? Je fais du temps. Bien là, le même temps, là, le temps qui reste, peut-être qu'on pourrait lui donner, M. le Président.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le leader, veuillez poursuivre.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, l'égalité entre les femmes et les hommes, c'est inscrit à notre charte. La laïcité, c'est tout aussi important, M. le Président. Alors, ce qu'on fait, c'est qu'on modifie la loi, la Charte des droits et libertés de la personne, pour faire en sorte d'ériger en termes de valeur fondamentale la séparation entre l'État et les religions. Ça m'étonne que le Parti libéral soit contre ça, d'autant plus qu'il y a plusieurs personnes chez vous qui sont d'accord.

Le Président : Question principale, M. le député de Nelligan. Vous êtes le seul à avoir la parole ici en ce moment.

Financement de l'innovation en région

M. Monsef Derraji

M. Derraji : Merci, M. le Président. Je ne pense pas devoir rappeler le nombre de fois que j'ai intervenu en cette Chambre pour m'assurer que la ministre soit consciente de la force d'impact que pouvait représenter le Réseau national des pôles régionaux d'innovation. L'accueil que j'ai reçu de la part de la ministre était une fin de non-recevoir. Eh bien, M. le Président, jeudi dernier, nous avons su pourquoi. La ministre, pour des raisons politiques, a préféré mettre la hache dans un modèle, un modèle bénéfique pour les régions du Québec et qui a fait ses preuves, en France notamment. Actuellement, le Digihub de Shawinigan, le pôle national d'innovation par excellence, est en France. Malheureusement, la décision insensée de la ministre a pour conséquence que l'ensemble des régions du Québec ne pourront pas profiter de ce partenariat et de leur expertise.

M. le Président, ma question à la ministre est simple : Pourquoi mettre à mal le développement économique des régions pour des raisons politiques qui ne trouvent aucune justification d'un point de vue économique?

Le Président : Mme la ministre des Affaires municipales? Non. Mme la ministre du Développement régional.

Mme Marie-Eve Proulx

Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Merci, M. le Président. J'ai presque complété ma tournée des régions au Québec. J'ai pu être à même de constater tout le dynamisme et la volonté des régions de prendre leur développement en charge, chose que l'ancien gouvernement n'a jamais faite.

Donc, ce qu'on a fait cette semaine, c'est de mettre fin à une centralisation du mouvement sur le développement régional. Ce qu'on veut, c'est respecter les spécificités de chacune des régions. Donc, on va continuer d'investir dans chacun des pôles, dans chacune des régions, puis l'argent qui était prévu au niveau national va être redistribué en région. Il ne sera pas centralisé, chose que l'ancien gouvernement faisait.

Qui est politique dans cette histoire? C'est l'ancien gouvernement, puisqu'en février 2018 ils ont décidé qu'ils allaient créer les pôles régionaux d'innovation comme stratégie électoraliste pour vite se sauver la face face aux régions. C'est inacceptable, cette attitude-là. Nous, ce qu'on fait, c'est réparer les pots cassés, on réinvestit, on écoute, on développe des partenariats avec les acteurs des régions pour travailler avec eux pour vraiment qu'on investisse dans les régions puis qu'on occupe notre territoire au Québec, qu'on s'assure que même la ruralité... — est-ce qu'ils savent c'est quoi, la ruralité au Québec? — donc pour que même la ruralité soit représentée...

• (11 h 10) •

Le Président : En terminant...

Mme Proulx (Côte-du-Sud) : ...puis qu'il puisse y avoir des concertations qui se fassent pour assurer un développement économique cohérent au Québec.

Le Président : Cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Votes reportés

Motion proposant que l'Assemblée reconnaisse l'importance du crédit d'impôt
RénoVert et qu'elle demande au gouvernement sa reconduction

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Nous en sommes maintenant à la rubrique des votes reportés et, comme annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de M. le député de Robert-Baldwin débattue hier aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, qui se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse l'importance du crédit d'impôt RénoVert pour la rénovation domiciliaire et sur le plan de l'efficacité énergétique;

«Qu'elle demande au gouvernement caquiste de revenir sur sa décision et de reconduire dès maintenant le crédit d'impôt RénoVert pour l'année financière 2019-2020.»

Et que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Arcand (Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme David (Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun), Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols (Vaudreuil), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Ciccone (Marquette).

M. Nadeau-Dubois (Gouin), Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont), Mme Labrie (Sherbrooke), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), Mme Dorion (Taschereau), M. Zanetti (Jean-Lesage).

M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette), M. Gaudreault (Jonquière), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).

Mme Fournier (Marie-Victorin).

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Maintenant, que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Legault (L'Assomption), M. Jolin-Barrette (Borduas), M. Laframboise (Blainville), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay), Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy (Montarville), M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Roberge (Chambly), Mme LeBel (Champlain), M. Bonnardel (Granby), M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est), Mme Proulx (Berthier), Mme Charest (Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme Girault (Bertrand), M. Boulet (Trois-Rivières), Mme Proulx (Côte-du-Sud), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger (Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin (Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf), Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean), Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava), M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé), M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Y a-t-il des abstentions? Pour le résultat du vote, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  44

                     Contre :           65

                     Abstentions :     0

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, la motion est rejetée. Oui, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Proulx : Je sais que le vote est terminé, mais il y a deux élus qui sont sur le côté. Est-ce que c'est possible d'enregistrer après coup leurs votes, même si je comprends que le vote a été donné? Avec votre permission, j'en vois de deux formations politiques, le député de D'Arcy-McGee de ma...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Vous savez qu'avec un consentement nous pouvons tout. Alors, y a-t-il consentement pour permettre l'enregistrement de ces deux votes? Consentement. Alors, vous pouvez prendre place. Alors, je comprends que c'est un vote en faveur de cette motion, de la part des deux députés?

Le Secrétaire adjoint : M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve).

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, pour le résultat du vote, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  46

                     Contre :           65

                     Abstentions :     0

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, la motion est rejetée.

Adoption du projet de loi n° 7

Et nous allons maintenant procéder au vote sur la motion de Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux proposant que le projet de loi n° 7, Loi concernant certaines conditions de travail applicables aux cadres du réseau de la santé et des services sociaux, soit adopté.

Et que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Legault (L'Assomption), M. Jolin-Barrette (Borduas), M. Laframboise (Blainville), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay), Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy (Montarville), M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Roberge (Chambly), Mme LeBel (Champlain), M. Bonnardel (Granby), M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Lefebvre (Arthabaska), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est), Mme Proulx (Berthier), Mme Charest (Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme Girault (Bertrand), M. Boulet (Trois-Rivières), Mme Proulx (Côte-du-Sud), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger (Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin (Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf), Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean), Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava), M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé), M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Maintenant, que les députés contre cette motion veuillent bien...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Pour? Pardon. Excusez-moi

Le Secrétaire adjoint : M. Arcand (Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme David (Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun), Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols (Vaudreuil), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Ciccone (Marquette).

M. Nadeau-Dubois (Gouin), Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont), Mme Labrie (Sherbrooke), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau), M. Zanetti (Jean-Lesage).

M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette), M. Gaudreault (Jonquière), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).

Mme Fournier (Marie-Victorin).

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Y a-t-il des députés contre cette motion ou des abstentions? Alors, pour le résultat du vote, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  111

                     Contre :               0

                     Abstentions :       0

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, la motion est adoptée, et, en conséquence, le projet de loi n° 7 est adopté.

Motions sans préavis

Nous en sommes maintenant à la rubrique des motions sans préavis. Et, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation, je vais céder la parole à Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

• (11 h 20) •

Mme Lessard-Therrien : Merci, Mme la Présidente. Je demande le consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec la députée d'Acadie, la députée de Marie-Victorin et le député de Chomedey :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse que le désastre survenu à Sainte-Marthe-sur-le-Lac a été provoqué par le bris d'une infrastructure, ce qui lui confère un caractère exceptionnel;

«Qu'elle prenne acte qu'une nouvelle cartographie en préparation par la Communauté métropolitaine de Montréal place le territoire de cette municipalité en zone inondable;

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'offrir à tous les sinistrés de Sainte-Marthe-sur-le-Lac la possibilité de quitter leur propriété, et ce, en bénéficiant d'un dédommagement suffisant tenant compte de la valeur foncière de leur propriété avant les inondations du printemps 2019.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Schneeberger : Pas de consentement.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Il n'y a pas de consentement. Maintenant, pour la prochaine motion, je vais reconnaître un membre du troisième groupe d'opposition, et ce sera Mme la députée de Duplessis.

Rappeler au gouvernement l'urgence de compléter la route 138 en
Basse-Côte-Nord en y associant les sommes et l'échéancier requis

Mme Richard : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le député de La Pinière, la députée de Mercier, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale rappelle au gouvernement qu'encore aujourd'hui, aucune route terrestre ne relie la Basse-Côte-Nord au reste du Québec;

«Qu'elle lui rappelle également que les élus, les chefs autochtones ainsi que les maires et mairesses de la Côte-Nord sont unanimes : il est urgent de compléter la route 138 jusqu'à Blanc-Sablon;

«En ce sens, qu'elle demande au gouvernement de fournir rapidement un échéancier ambitieux associé aux sommes requises pour terminer la route 138 dans un délai raisonnable.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Alors, M. le leader du troisième groupe d'opposition.

M. Ouellet : Oui, merci, Mme la Présidente. Je vous demanderais d'appeler le vote par appel nominal, s'il vous plaît.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Alors, nous sommes prêts pour le vote, et que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Bérubé (Matane-Matapédia), M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette), M. Gaudreault (Jonquière), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).

M. Jolin-Barrette (Borduas), M. Laframboise (Blainville), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay), Mme McCann (Sanguinet), M. Fitzgibbon (Terrebonne), Mme Roy (Montarville), M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Roberge (Chambly), Mme LeBel (Champlain), M. Bonnardel (Granby), M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Lefebvre (Arthabaska), Mme Laforest (Chicoutimi), Mme Rouleau (Pointe-aux-Trembles), M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est), Mme Charest (Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme Girault (Bertrand), M. Boulet (Trois-Rivières), Mme Proulx (Côte-du-Sud), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger (Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin (Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf), Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean), Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava), M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé), M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).

M. Arcand (Mont-Royal—Outremont), M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Barrette (La Pinière), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme David (Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Melançon (Verdun), Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols (Vaudreuil), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), M. Benjamin (Viau), M. Derraji (Nelligan), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), Mme Rizqy (Saint-Laurent), M. Ciccone (Marquette).

M. Nadeau-Dubois (Gouin), Mme Ghazal (Mercier), M. Marissal (Rosemont), Mme Labrie (Sherbrooke), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), Mme Lessard-Therrien (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau), M. Zanetti (Jean-Lesage).

Mme Fournier (Marie-Victorin).

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Maintenant, y a-t-il des députés contre cette motion ou des abstentions? Alors, M. le secrétaire général, pour le résultat du vote.

Le Secrétaire : Pour :  108

                     Contre :               0

                     Abstentions :       0

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, très bien, la motion est adoptée.

Pour la prochaine motion, je vais reconnaître un membre du groupe formant le gouvernement, et ce sera M. le député de Rousseau.

M. Thouin : Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi d'abord de saluer les membres du conseil d'administration ainsi que le P.D.G. du CEFRIO, qui sont avec nous aujourd'hui.

Je demande le consentement de cette Assemblée pour déposer la motion suivante conjointement avec le député de Rosemont, le député de René-Lévesque, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale souligne l'apport inestimable du CEFRIO et le rôle clé qu'il joue depuis plus de 30 ans en matière de développement économique, de démocratisation des technologies numériques ainsi que dans l'avancement de l'innovation sociale au Québec;

«Que l'Assemblée [nationale], au moment où le gouvernement du Québec s'apprête à enclencher une transformation numérique sans précédent, souligne l'importance des approches collaboratives et transversales qui visent à optimiser les services numériques de proximité;

«Qu'elle salue son rôle de pionnier en matière de soutien à l'appropriation et à la valorisation des services numériques par les milieux publics et privés ainsi qu'auprès des partenaires de l'État.» Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Avant de demander s'il y a consentement pour débattre de cette motion, je crois que M. le leader du troisième groupe d'opposition aimerait intervenir.

M. Nadeau-Dubois : Oui. Il y a probablement eu une erreur de communication, mais simplement aviser que le député de Rosemont n'est pas conjoint sur la motion. C'est des choses qui arrivent.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Proulx : Pas de consentement.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je n'ai même pas eu besoin de le demander. Alors, il n'y a pas de consentement.

Nous allons maintenant passer à la prochaine motion sans préavis, et ce sera au tour de Mme la députée de Vaudreuil de présenter la motion.

Mme Nichols : Merci, Mme la Présidente. Alors, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, le député de Chomedey et la députée de Marie-Victorin :

«Que l'Assemblée nationale rappelle que plus de 10 000 personnes ont été évacuées dans la foulée des crues printanières [...] 2019;

«Qu'elle rappelle que, faute d'entente avec la Croix-Rouge et le gouvernement du Québec, et [ce,] contrairement à 2017, les municipalités doivent prendre des ententes particulières avec la Croix-Rouge pour assurer des services aux personnes sinistrées;

«Qu'elle rappelle que les coûts d'hébergement, d'alimentation et de prise en charge de ces personnes représentent des dépenses et une pression logistique importante pour les municipalités sinistrées du Québec;

«Qu'elle demande au gouvernement caquiste de prendre en charge l'entièreté des dépenses liées à la logistique de l'hébergement et de l'alimentation des personnes victimes des crues printanières [...] 2019.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Schneeberger : Il n'y a pas de consentement.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, il n'y a pas de consentement.

Maintenant, je vais céder la parole à M. le leader du gouvernement.

Proposer que l'Assemblée se réunisse le lundi 3 juin 2019, à compter de 13 h 40

M. Jolin-Barrette : Oui, Mme la Présidente. Conformément à l'article 21 de notre règlement, je présente la motion suivante :

«Que l'Assemblée se réunisse le lundi 3 juin 2019, à 13 h 40.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie. Est-ce que cette motion est adoptée? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui, Mme la Présidente. Je pense que, vu la nature de cette motion, on peut faire quelques représentations, puisque c'est une motion qui pourrait être contestée. J'ai quelques représentations à faire, Mme la Présidente, je pense que je ne serai pas le seul, mais je vais parler pour moi et ma formation politique d'entrée de jeu.

D'abord, Mme la Présidente, sur le fond de la motion, sur cette convocation, c'est la prérogative du gouvernement, et je ne la conteste pas. Nous serons ici, à l'Assemblée nationale, lundi pour travailler au salon bleu et en commission lorsque les commissions seront convoquées. C'est sur la forme, Mme la Présidente, que j'ai des questions, interrogations, non pas sur la motion, parce que c'est le moyen procédural pour le faire, mais c'est sur ce qui devrait accompagner une telle motion.

Vous savez, Mme la Présidente, je l'ai dit à plusieurs occasions puis je vais le répéter, pour le succès d'une bonne collaboration, il y a des ingrédients. C'est un peu comme faire de la pâtisserie, il y a des ingrédients qui sont essentiels, sinon le gâteau, il ne lèvera pas. Dans le cas actuel de notre collaboration, il manque, Mme la Présidente, je pense, un ingrédient essentiel. Il y en a qui pourraient s'améliorer, de tous bords tous côtés, mais il y a un ingrédient qui, pour moi, est essentiel, qui n'est pas présent, c'est la prévisibilité pour de la préparation.

J'ai entendu et on m'a rapporté... pardon, je ne l'ai pas entendu, on m'a rapporté que le leader du gouvernement, pour donner un exemple, tout à l'heure, à la population, a dit : Les Québécois, ils travaillent le lundi, l'Assemblée peut travailler le lundi. D'abord, Mme la Présidente, s'il y a quelqu'un ici, dans cette Assemblée, qui pense qu'un député, ça ne travaille pas le lundi quand ce n'est pas ici, sincèrement, c'est malheureux, je trouve, ces propos-là qui sont imagés. Je comprends que c'était une image pour faire comprendre que ce n'était pas inhabituel ni extraordinaire de convoquer le lundi, je l'entends. Maintenant, Mme la Présidente, vous le savez, vous êtes députée, le leader du gouvernement l'est également, les députés, ça travaille souvent, presque tout le temps. Ça, je pense que c'est très clair.

• (11 h 30) •

Deuxièmement, les Québécois qui vont aller travailler lundi, ils savent ce qu'ils vont faire lundi. Moi, je ne suis pas capable de dire à mon groupe parlementaire ce qu'ils vont faire lundi, j'ai de la misère à savoir ce qu'on va faire demain puis je ne suis même pas sûr de l'horaire de cet après-midi. Alors, sincèrement, Mme la Présidente, comment voulez-vous vous préparer adéquatement si on n'a pas l'ensemble des informations pour pouvoir travailler?

Vous souhaitez, les gens souhaitent, Mme la Présidente, des débats qui sont étoffés, veulent que les gens ici prennent la parole de façon constructive, ils veulent qu'on débatte d'arguments de fond et qu'on laisse de côté la forme, pour reprendre des exemples du leader du gouvernement. Alors, j'en appelle à cette collaboration qui doit être présente. Il faut, Mme la Présidente, avoir ce temps nécessaire pour se préparer. Les collègues, ils viennent de l'extérieur pour la grande majorité d'entre eux. On n'est pas nombreux à habiter Québec, Mme la Présidente. Ce n'est pas le cas de ma formation politique seulement, c'est le cas de l'ensemble des députés ici, à l'Assemblée nationale.

Alors là, les gens savent qu'ils doivent être ici lundi. Parfait, nous y serons pour travailler, Mme la Présidente. Mais j'invite le collègue à être le plus prévoyant possible avec les autres parce que lui, il le sait, ce qu'il va faire lundi. Il sait ce qu'il veut faire demain. Il sait ce qu'il va faire cet après-midi. Mais nous, Mme la Présidente, on ne le sait pas. Alors, si on ne peut pas bien se préparer, si on ne peut pas se préparer adéquatement, bien, on ne peut faire un travail à la hauteur des attentes des gens. C'est vrai pour l'opposition officielle. C'est vrai pour les autres groupes d'opposition. C'est aussi vrai pour le gouvernement. Alors, ça fait partie de cette bonne collaboration. Ça fait partie des éléments essentiels pour qu'on puisse travailler avec tout le respect nécessaire pour notre institution. Le leader du gouvernement l'a dit à plusieurs occasions, c'est important, cette institution-ci. Bien, il faut en faire la démonstration. Il faut y vivre dans une vraie cohabitation.

Alors, qu'il nous convoque lundi, pas de problème pour moi. Que les commissions siègent le lundi et le vendredi, on a déjà fait des représentations à cet égard-là. Nous sommes ici pour travailler, mais maintenant il faut de la disponibilité, de la préparation et du sérieux dans notre collaboration. Voilà.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader. Maintenant, je cède la parole à M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Évitez de vous interpeler d'un côté et de l'autre, s'il vous plaît! M. le leader.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Je ne répéterai pas ce que le leader de l'opposition officielle a dit. Je vais ajouter trois choses.

La première, les motivations du gouvernement dans le dépôt de cette motion-là, elles sont dures à comprendre et surtout elles ne nous sont pas annoncées. Donc, on nous dit : On va siéger lundi. C'est, en effet, la prérogative du gouvernement. Mais il n'y a aucun des trois partis d'opposition qui sait dans quel objectif, pour faire avancer quels projets de loi et surtout qu'est-ce qui justifie une telle mesure qui sort de l'ordinaire. Donc, il y a un enjeu ici de savoir quelles sont les motivations du gouvernement. On aimerait bien les connaître.

Deuxièmement, cette décision... bien, cette motion du gouvernement, je me permets de dire qu'elle a un aspect relativement paradoxal dans la mesure où, si le salon bleu n'était pas convoqué lundi, les commissions pourraient siéger de 14 heures à 18 heures, donc faire leur travail, et, comme le souhaite et le répète souvent le leader du gouvernement, faire avancer les projets de loi. En appelant le salon bleu, on ampute 1 h 30 min sur le travail des commissions. Donc, très dur à comprendre en quoi ça va faire cheminer plus vite les projets de loi si les commissions commencent après les affaires courantes plutôt que simplement à 14 heures. Donc, on va perdre du temps de commission. Je me demande en quoi ça aide l'avancement de l'agenda législatif du gouvernement.

Et, troisième élément, puis c'est peut-être le plus important, Mme la Présidente, je veux revenir également sur cette déclaration du leader du gouvernement qui nous dit que, si les gens ordinaires travaillent, si les Québécois, Québécoises travaillent le lundi, bien, les parlementaires devraient le faire aussi. Moi, quand j'entends cette déclaration-là, je me dis : Il y a deux interprétations possibles. La première, c'est que le ministre ne travaille pas le lundi, et ça, ça m'apparaît une interprétation complètement loufoque parce que je suis convaincu qu'il travaille le lundi.

La deuxième interprétation, c'est : Donc, il juge que, si on n'est pas au salon bleu, on ne travaille pas. Et ça, ça m'apparaît une déclaration vraiment problématique, qui me semble diminuer la valeur du travail des députés lorsqu'ils ne sont pas au salon bleu, notamment en circonscription. Je me permets même de me tourner vers les députés de la majorité gouvernementale en me disant : Comment interprètent-ils le fait que le leader du gouvernement leur dit : Bien, venez lundi pour travailler? Donc, quand ils ne sont pas ici, ils ne travaillent pas. Je veux dire, ce n'est pas juste un problème pour les oppositions. Ça me semble être une déclaration problématique pour l'ensemble des députés. On peut même faire l'hypothèse que, pour certains députés, leur circonscription, ça nécessite de travailler aussi fort, voire plus fort lorsqu'ils sont en circonscription que lorsqu'ils sont au salon bleu.

Alors, je pense que c'est une très mauvaise manière de mettre la table, pour cette motion-là et pour les débats de lundi, que de dire que c'est pour travailler, sous-entendant implicitement que, si ce n'était pas le cas, on ne travaillerait pas.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader. Maintenant, je cède la parole à M. le leader du troisième groupe d'opposition.

M. Martin Ouellet

M. Ouellet : Merci, Mme la Présidente. Je serai très bref, mais je m'inscris en collaboration avec les deux autres leaders sur la discussion que nous avons sur la pertinence d'obtenir cette motion. Oui, c'est la prérogative du gouvernement. Mais j'ai les mêmes préoccupations quant au fait que, ce lundi, nous serons ici. Et je suis convaincu que les 125 députés ici ont dû annuler des rencontres, des rendez-vous, des groupes de citoyens qu'on devait rencontrer dans nos circonscriptions.

Mme la Présidente, il ne reste que deux semaines à notre calendrier parlementaire. On a beaucoup de pression en circonscription justement pour attacher les dernières ficelles avant que tout le monde reparte dans leur circonscription, que ça soit plus difficile, dans certains cas, d'avoir accès aux différents cabinets ministériels pour régler certaines problématiques qui causent, dans certains cas, des préjudices et qui indisposent nos concitoyens et concitoyennes.

Mme la Présidente, ma formation politique est beaucoup aussi dans l'Est du Québec, et vous comprendrez que ces déplacements-là, aussi, nous amènent, dans certains cas, à ne pas juste canceller la journée de lundi, mais à être aussi peut-être sur la route dimanche pour être prêts dès lundi.

Alors, mon commentaire sera le dernier et le suivant : J'aimerais juste savoir qu'est-ce que j'ai à dire aux gens que je vais appeler aujourd'hui. Pourquoi je dois être à Québec lundi? Qu'est-ce qu'il y a de si urgent, alors que la session intensive commence dès la semaine prochaine? Nous allons siéger tard en soirée jusqu'à aller vendredi. Donc, j'aimerais avoir la réponse rapidement parce que je vais faire les appels pour canceller tout ça. Je veux savoir pourquoi, quelle est l'urgence et quel en sera le sujet. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader du troisième groupe d'opposition. Maintenant, je cède la parole à M. le leader du gouvernement.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, plusieurs choses ont été dites par mes collègues. Et, Mme la Présidente, j'ai l'impression de vivre un bal de l'hypocrisie. Mme la Présidente...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant! M. le leader, vous avez beaucoup d'expérience en cette Chambre et vous savez très bien que c'est un mot inapproprié que vous venez d'utiliser. Inapproprié. Alors, est-ce que vous allez le retirer?

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Bien, vous connaissez les règles, M. le leader. Alors, j'aimerais, s'il vous plaît... Vous avez...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Premièrement, assoyez-vous, s'il vous plaît.

Vous connaissez nos règles, M. le leader. Vous avez un cinq minutes, vous disposez d'un temps de parole de cinq minutes. Alors, nous sommes disposés à vous entendre, mais j'espère que vous allez choisir les bons termes et je vous demande de retirer le mot que vous venez de prononcer.

M. Jolin-Barrette : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie.

M. Jolin-Barrette : ...démonstration de ce que j'affirme, Mme la Présidente. À la fois le leader de l'opposition officielle, à la fois le leader du deuxième groupe d'opposition ont souligné qu'ils n'étaient pas informés. Mme la Présidente, hier, leurs chefs de cabinet respectifs ont été informés de l'horaire de la semaine prochaine jusqu'à jeudi prochain, Mme la Présidente. Avez-vous entendu la même chose que moi? Mme la Présidente, lorsqu'on affirme des choses en cette Chambre et que ce n'est pas vrai, ça m'amène des questionnements parce qu'ils ont l'information et ils disent à la population québécoise : On n'est pas au courant. Or, c'est faux, Mme la Présidente, ça a été envoyé par courriel. Ayez l'honnêteté de le dire.

Mme la Présidente, vous ne trouverez personne en cette Chambre qui va défendre plus que moi le travail des députés et pour m'assurer que les députés soient outillés dans leur fonction. Le rôle du député, c'est de représenter sa population, c'est d'être législateur et c'est d'être contrôleur de l'action gouvernementale. Deux des trois rôles s'exercent principalement ici. On a un calendrier, on a un règlement qui permet de siéger jusqu'à la fin de la session, au 14 juin, le lundi. La population québécoise nous a tous élus pour qu'on améliore le Québec, pour qu'on modernise le Québec. Et ça se fait, Mme la Présidente, notamment, au-delà des politiques gouvernementales, au-delà de l'argent qu'on dépense, au-delà des budgets, ça se passe...

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, j'ai cinq minutes, je crois.

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, M. le leader du troisième groupe d'opposition.

M. Nadeau-Dubois : ...en fait, je vous demande de juger si le leader du gouvernement a induit la Chambre en erreur dans la mesure où il mentionne que nous avons reçu, disons... appelons ça le menu de la journée de lundi. C'est vrai dans le cas des commissions parlementaires, mais ce n'est pas vrai dans le cas des travaux au salon bleu. Or, les interventions des leaders de l'opposition portaient spécifiquement sur les travaux au salon bleu, et, de ça, nous n'avons pas reçu l'horaire.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, M. le leader, vous pouvez poursuivre.

• (11 h 40) •

M. Jolin-Barrette : ...Mme la Présidente. Sur la question rattachée au travail des députés, les députés travaillent tout le temps, Mme la Présidente, vous le savez comme moi. Mais le rôle de législateur est fort important. Et, si on veut avancer les travaux parlementaires ici, bien, ça se passe à l'Assemblée nationale. Les Québécois s'attendent à ce qu'on vote des lois, et nous le ferons.

D'ailleurs, Mme la Présidente, j'invite à ce que tous les collègues aient la réflexion ici, dans cette Chambre, dans toutes les formations politiques, sur les outils que les parlementaires doivent avoir à leur disposition pour faire leur travail de député adéquatement et les ressources au soutien de leur travail. Je crois que c'est pertinent que tous les députés aient les moyens d'exercer leurs fonctions de député parce que la majorité des députés et, je crois, même la totalité des députés se dévouent corps et âme à leurs électeurs, à la nation québécoise et à l'adoption des lois québécoises pour qu'on puisse les adopter.

Mme la Présidente, l'objectif est de faire en sorte qu'on puisse, d'ici le 14 juin, faire avancer différents projets de loi : la loi sur l'immigration, la Loi sur la laïcité, la loi sur le cannabis, la loi sur le taxi. Alors, Mme la Présidente, on donne toujours l'horaire à l'avance, et les leaders...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Proulx : Oui, très rapidement, ça sera une question de règlement, Mme la Présidente. Je m'inscris dans la même veine que l'a fait le collègue de la deuxième opposition. La question qui vous a été posée et la réponse qu'il doit nous donner, c'est : Avons-nous reçu hier, ce matin, dans la nuit, l'horaire du salon bleu? La réponse, c'est non, Mme la Présidente.

Alors, il reste 30 secondes. Je ne le coupe pas par plaisir, c'est parce que, si je le fais à frais, son cinq minutes est terminé. Il lui reste 30 secondes pour dire la vérité.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader du gouvernement, il vous reste encore 30 secondes.

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, on vote sur la motion, ça va nous faire plaisir d'envoyer l'horaire de lundi, mais ayez la décence de dire aux Québécois que vous avez l'horaire plus d'une semaine à l'avance des commissions parlementaires.

Et autre point, Mme la Présidente, le député de Gouin nous disait tout à l'heure : Écoutez, je ne comprends pas, on coupe du temps de commission. Mais savez-vous quoi, Mme la Présidente? Pour le bénéfice du député de Gouin, le processus législatif, ce n'est pas juste les commissions parlementaires. Après autant d'années ici, il devrait le savoir, hein? Présentation, adoption des projets de loi, l'étude détaillée, prise en considération, adoption finale, puis ensuite le lieutenant-gouverneur. C'est ça, le processus législatif.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, je vous remercie. Ceci met fin à ce débat.

Mise aux voix

Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Très bien.

Avis touchant les travaux des commissions

Nous en sommes maintenant à la rubrique des avis touchant...

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : S'il vous plaît! Nous n'avons pas terminé.

Alors, nous en sommes maintenant aux avis touchant les travaux des commissions, et je vais céder la parole à M. leader adjoint du gouvernement et demander aux membres qui doivent quitter le salon bleu de le faire en silence, s'il vous plaît.

M. Schneeberger : Oui, alors, Mme la Présidente, sur un air un peu plus léger, j'avise cette Assemblée que la Commission des relations avec les citoyens poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 à 18 heures, à la salle du Conseil législatif;

La Commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 16, Loi visant principalement l'encadrement des inspections en bâtiment et de la copropriété divise, le remplacement de la dénomination de la Régie du logement et l'amélioration de ses règles de fonctionnement et modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec et diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission de la culture et de l'éducation poursuivra les consultations particulières et auditions publiques du projet de loi n° 5, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et d'autres dispositions à l'égard des services de l'éducation préscolaire destinés aux élèves âgés de 4 ans, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 à 18 h 15, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission de la santé et des services sociaux poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 2, Loi resserrant l'encadrement du cannabis, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 à 18 heures, à la salle des Premiers-Ministres, ainsi que le vendredi 31 mai 2019, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est moi qui vous remercie, M. le leader adjoint du gouvernement. Alors, y a-t-il consentement pour déroger à l'article 143 du règlement, concernant l'horaire des travaux des commissions? Il y a consentement? Très bien.

Maintenant, pour ma part, je vous avise que la Commission de la culture et de l'éducation se réunira en séance de travail aujourd'hui, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, à 13 heures pour une durée d'environ 45 minutes, afin de statuer sur la possibilité que la commission réalise le mandat conféré par la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire puis, à partir de 13 h 45 ou dès la fin de la première séance de travail jusqu'à 14 h 45, afin d'organiser le mandat d'initiative portant sur l'avenir de l'information;

Je vous avise également que la Commission de l'aménagement du territoire se réunira en séance de travail aujourd'hui, de 13 heures à 13 h 45, à la salle Louis-Joseph-Papineau, afin de procéder à l'organisation des travaux de la commission.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous en sommes maintenant à la rubrique des renseignements sur les travaux de l'Assemblée, et, s'il n'y a pas de demandes de renseignements, je vous rappelle que, lors de l'interpellation prévue pour demain, vendredi 31 mai 2019, M. le député de Laurier-Dorion s'adressera à Mme la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation sur le sujet suivant : L'absence du plan global du gouvernement caquiste pour lutter contre la crise du logement.

Affaires du jour

Maintenant, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. Et je vais céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui. Alors, Mme la Présidente, afin de débuter nos affaires du jour, je vous demanderais d'appeler l'article 6 du feuilleton.

Projet de loi n° 19

Reprise du débat sur l'adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. Alors, à l'article 6 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 29 mai 2019 sur l'adoption du principe... Monsieur? Oui, non, je n'ai pas terminé la lecture. Très bien. Parce que c'est seulement les membres de l'Assemblée qui peuvent... Je vous remercie.

Alors, je reprends la lecture. C'est parce qu'il y avait une personne qui n'est pas membre de l'Assemblée qui désirait entrer ici, au salon bleu, et c'est interdit. Alors, c'est pour ça que je me suis interrompue. Je reprends la lecture. Voilà.

L'Assemblée reprend le débat ajourné le 29 mai 2019 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale à la suite de l'adoption de certaines mesures fiscales par le Parlement du Canada. Et je crois que, lorsque nous avons interrompu ce débat, c'était M. le leader du deuxième groupe d'opposition qui avait la parole. Il vous reste encore 45 min 26 s. Alors, la parole est à vous.

M. Gabriel Nadeau-Dubois (suite)

M. Nadeau-Dubois : Merci, Mme la Présidente. Lorsque mon intervention a été malheureusement interrompue par l'horaire de nos travaux, j'étais en train de faire, je dirais, le bilan de 40 ans de débats au Québec sur la rémunération des élus de l'Assemblée nationale, parce qu'une erreur qu'il ne faudrait pas faire en adoptant ce projet de loi là, c'est penser que c'est un débat purement conjoncturel, purement ponctuel, un débat qui se présente à nous ces jours-ci, et c'est tout. Dans les faits, c'est seulement, en fait, le nouvel épisode d'une longue série de débats qui ont eu lieu ici sur la question de la rémunération des députés québécois.

Et, lors de cette intervention, donc, je vous avais parlé des différents comités qui ont été mis sur pied à partir du début de notre institution pour revoir cette question-là. Je vous avais parlé notamment du comité Bonenfant, qui, en 1974 déjà, recommandait que la rémunération des députés soit confiée à un comité indépendant, donc externe, un comité qui permettrait donc que les députés ne soient plus juge et partie quand arrive le moment de fixer leur rémunération. Un comité qui permet donc aux députés de se retirer de la situation d'apparence de conflit d'intérêts quand ils se trouvent... lorsqu'ils sont en train de voter des lois qui fixent leur propre rémunération et leurs propres conditions de travail.

Ce comité, donc, Bonenfant, a remis son rapport en 1974, mais ce n'est pas le seul. Je vous ai également parlé du comité Lavoie, qui, en 1987, a émis des recommandations très similaires, le comité Lavoie qui était, encore une fois, un comité extraparlementaire mandaté par le bureau de l'Assemblée nationale pour faire une étude du mode de rémunération des députés et pour faire des recommandations. Et une des recommandations de ce comité Lavoie en 1987, c'était de fixer la rémunération des députés, de l'arrimer, en fait, à celle, la rémunération, des cadres supérieurs de la fonction publique. Et c'était motivé, donc, dans le rapport du comité Lavoie, par les mêmes arguments que ceux qui motivaient le comité Bonenfant une quinzaine d'années plus tôt, c'est-à-dire l'idée selon laquelle, si on arrime le salaire des députés à un indicateur externe, bien, on permet encore une fois aux députés de se retirer de la situation d'apparence de conflit d'intérêts dans laquelle ils se trouveraient en votant leur propre rémunération. Donc, j'étais rendu là.

• (11 h 50) •

On a parlé du comité Bonenfant en 1974, du comité Lavoie en 1987, mais je reprends donc où je l'avais laissé. Ce n'est pas la fin de cette série. Il y a d'autres épisodes. Il y aura, en 1992, donc cinq ans après le comité Lavoie, en 1987, une loi qui va venir modifier le régime de retraite des députés de l'Assemblée nationale du Québec, une loi spécifique qui vient modifier le régime de retraite, mais qui ne touche pas au reste des paramètres de rémunération.

Le prochain épisode, je dirais, significatif dans la saga entourant la rémunération des députés, il a lieu en 2000. En 2000, c'est le comité Godin qui est mis sur pied, qui est, disons, à peu près sur le modèle du comité Lavoie et du comité Bonenfant. Et ce comité Godin va faire encore une fois une analyse globale de la rémunération des députés, va en venir à plusieurs recommandations, mais il va arriver à... je ne ferai pas la liste, quand même, de toutes les recommandations, mais, vous me voyez venir, je vais insister sur une des recommandations. Il y a, à la fin du rapport du comité Godin, un plaidoyer franchement convaincant, j'invite mes collègues à le lire. Mais le comité Godin, son rapport se termine par un plaidoyer en faveur, devinez quoi, en faveur d'un comité indépendant permettant un examen périodique des conditions de travail des députés.

Donc là, on a un premier rapport, en 1974, du comité Bonenfant, un deuxième rapport, en 1987, du comité Lavoie et un troisième rapport, en 2000, du comité Godin. Et ces trois rapports-là ont des différences, là, mais ils ont tous un point en commun, et ce point en commun, c'est quoi? C'est de mettre le doigt sur le gros bobo et de dire : Oh! il y a un problème avec le fait que les députés votent leur propre rémunération à travers une loi. Il faut régler cette apparence de conflit d'intérêts. Il faut un comité indépendant pour examiner la rémunération des députés. Donc, trois comités qui, trois fois, font des recommandations très, très, très similaires.

Et tout cela, cette série de comités de travail, de recommandations, tout ça culmine, si j'ose dire, Mme la Présidente, par un quatrième comité en 40 ans, le comité L'Heureux-Dubé de 2013, qui est probablement le plus connu de cette longue série de comités qui se sont penchés sur cette question-là. Et, avant de vous parler des recommandations du comité L'Heureux-Dubé, en même temps, je suis sûr que tout le monde me voit venir avec mes très, très gros sabots, mais, juste avant de vous parler des recommandations du comité L'Heureux-Dubé, un des travaux qu'a faits le comité L'Heureux-Dubé, c'est justement de se pencher sur les travaux précédents. Et je vous lis un extrait du rapport :

«L'évolution des recommandations formulées par tous les comités précédents sur les conditions de travail du député québécois permet de dégager un fil conducteur important. Les changements proposés ont toujours été guidés par la volonté d'offrir aux élus une rémunération globale juste.» Mais, et là ça devient intéressant, «pour des raisons conjoncturelles ou à cause du malaise que les législateurs ont toujours éprouvé à fixer eux-mêmes leur rémunération, les propositions de ces comités n'ont été que partiellement appliquées».

Donc là, l'historique que je viens de vous faire et puis l'analyse que je viens de vous partager, Mme la Présidente, à l'effet qu'il y a un malaise lancinant dans l'histoire de nos débats sur notre rémunération, ce n'est pas mon analyse, ce n'est pas l'analyse des méchants radicaux ou, comme on l'entend parfois du côté du gouvernement, des méchants communistes de Québec solidaire, c'est l'analyse du comité L'Heureux-Dubé.

Le comité L'Heureux-Dubé, en 2013, nous refait l'histoire et nous dit : Ce n'est pas la première fois, là, les amis, que vous mandatez un comité. À chaque fois, ces comités-là vous ont proposé la même affaire ou à peu près, puis, à chaque fois, vous avez eu, je les cite, un malaise à aller de l'avant avec cette recommandation-là.

Alors, vous comprendrez, Mme la Présidente, que cette analyse du fait qu'on a historiquement pelleté le problème de notre rémunération vers l'avant, là, on n'en est pas propriétaires, à Québec solidaire, on ne l'a pas sortie de notre chapeau. On s'inspire de l'histoire des débats qui ont eu lieu ici et qui ont tous dit à peu près la même chose. Et malheureusement le projet de loi n° 19, si la tendance se maintient, va n'être qu'un épisode de plus dans ce long historique de malaises et d'indécisions de la part de l'Assemblée nationale du Québec.

Mais, avant de parler du projet de loi n° 19, parlons justement de ce comité L'Heureux-Dubé, qui, en 2013, reprend du service, refait une analyse encore une fois globale de l'ensemble des composantes de la rémunération des députés. Et ce comité, mandaté en juin 2013 par le Bureau de l'Assemblée nationale, accouche, lui, d'une trentaine de recommandations. Encore une fois, je vais épargner à mes collègues la liste et l'analyse de toutes ces recommandations-là, mais, au travers de toutes ces recommandations-là, il y en a une qui retient mon attention. Cette recommandation, c'est quoi? C'est de créer un comité indépendant et exécutoire, donc un comité qui aurait les pouvoirs de décréter les conditions de travail des députés.

Donc là, on est rendus, si je calcule bien, au quatrième rapport qui dit exactement la même chose. D'ailleurs, le comité regrette l'inaction du passé. Le comité dit : «Il eut pourtant été souhaitable que les autorités politiques [donnent suite aux rapports précédents], évitant ainsi les exercices périodiques de rattrapage sur le plan de leur rémunération.» Les exercices périodiques de rattrapage sur le plan de leur rémunération. Si je voulais définir la nature du projet de loi n° 19, je pourrais citer le rapport L'Heureux-Dubé et dire : C'est un projet de loi qui constitue un exercice périodique de rattrapage sur le plan de notre rémunération.

Mais donc, quand est publié le rapport L'Heureux-Dubé, comment réagissent les partis politiques toujours représentés en cette Chambre? Ça, c'est intéressant. On pourrait se dire : C'est un rapport qui a été reçu avec une volée de bois vert. Hein, les députés de la Coalition avenir Québec, du Parti québécois, de Québec solidaire, du Parti libéral ont dû dire : On ne veut pas ça, un comité indépendant exécutoire. Mais non. Agnès Maltais, à l'époque leader parlementaire adjointe de l'opposition officielle : «Les membres du Parti québécois ont toujours voulu faire applique le rapport L'Heureux-Dubé. [...]On a toujours cru que le rapport L'Heureux-Dubé était la véritable solution[...]. [...]Il fallait avoir un comité indépendant. C'était le rapport L'Heureux-Dubé.» Leader de l'opposition officielle, à l'époque, du Parti québécois.

Un autre du Parti québécois, Marjolain Dufour, à l'époque whip, donc, de cette formation politique : «...le comité recommande [...] un comité permanent et décisionnel[...]. [C'est] la position qu'on a, M. le Président[...]. Voilà.»

François Legault... Oh! pardon. La personne qui est actuellement premier ministre du Québec et qui, à l'époque, était chef de la deuxième opposition, qui, par voie de communiqué, dit : Pas d'augmentation de salaire pour les députés sans retour à l'équilibre budgétaire.

Et bien sûr Françoise David, ma prédécesseure dans Gouin. Je vous épargne la citation, elle est pas mal plus longue. C'est souvent comme ça à Québec solidaire. Mais grosso modo elle dit : Le rapport L'Heureux-Dubé, c'est une bonne affaire, il faudrait l'appliquer. Il faudrait absolument aller de l'avant là-dessus plutôt que morceau par morceau, départ par départ, prime par prime. Il est vraiment temps qu'on donne suite au rapport L'Heureux-Dubé. On va contribuer à la discussion à cet effet.

Bon, ça fait qu'à l'époque tous les partis ici disent : L'Heureux-Dubé, c'est une bonne base de discussion. Alors là, on se dit : Bien, si tous les partis étaient d'accord, on est allés de l'avant. Mais non, ce n'est pas arrivé. Et je ne distribuerai pas les blâmes, à savoir c'est la faute exactement de qui qu'on ne soit pas allé de l'avant, mais, dans les faits, on n'est pas allé de l'avant. On n'est pas allé de l'avant avec L'Heureux-Dubé.

• (12 heures) •

À l'époque, dans la foulée, disons, dans les années suivant le dépôt du rapport, il y a eu deux projets de loi qui ont été déposés pour donner suite au rapport L'Heureux-Dubé : le projet de loi n° 78, déposé le 12 novembre 2015, dans lequel le gouvernement libéral à l'époque dit : On va retirer l'allocation de transition à un député qui démissionne s'il n'y a pas de raisons de santé ou... en fait, s'il n'y a pas de raisons de santé, ce qui était un pas dans la bonne direction. À l'époque, je ne sais pas si on se rappelle, mais il y avait beaucoup de scandales dans l'espace public, il y avait beaucoup d'indignation parce que les primes de départ étaient utilisées, en tout cas... bien, il y avait eu beaucoup de démissions dans les derniers mois, les députés démissionnaires empochaient des grosses primes de départ. Ça a créé un malaise dans la population. L'Assemblée nationale en a pris acte puis a adopté un projet de loi qui disait : On va modifier les critères qui permettent à un député de bénéficier d'une telle allocation de départ. Et ça a été adopté, et je pense que tout le monde reconnaît aujourd'hui que c'était un pas dans la bonne direction.

Mais il y avait un deuxième projet de loi, le projet de loi n° 79, qui, lui, met en application, met en application... en fait, aurait mis en application le rapport L'Heureux-Dubé. Ce projet de loi là, malheureusement, malheureusement, est mort au feuilleton. On avait l'occasion, là, avec ce projet de loi là de tourner la page sur 40 ans de débats stériles. Et, si ce projet de loi là avait été adopté, le projet de loi n° 19 n'existerait pas. Pourquoi? Parce qu'il y aurait un comité indépendant exécutoire qui aurait pris acte de la modification de la fiscalité au fédéral, qui aurait dit : Oh! ça pose un enjeu quand même, révisons la rémunération, ou, en tout cas, ce comité-là aurait pris une décision sur la situation qui nous occupe actuellement, et on n'aurait pas eu le malaise, que je présume que je ne suis pas le seul à avoir, de devoir voter un projet de loi sur notre propre salaire. On aurait été libéré de ce fardeau-là. Un comité indépendant exécutoire aurait examiné ça en toute indépendance et, si vous voulez mon humble avis, Mme la Présidente, aurait probablement jugé que baisser le salaire brut... le salaire net des députés, ce n'est pas une bonne chose. Probablement qu'un comité indépendant exécutoire en serait venu à cette conclusion-là.

Le problème, c'est que ce projet de loi, il est mort au feuilleton et qu'aujourd'hui, rebelote, les députés de l'Assemblée nationale doivent à nouveau se prononcer sur leur propre rémunération. Et ça, Mme la Présidente, vous me voyez venir, ça pose un problème sur le processus, sur la forme beaucoup plus que sur le fond, hein? Sur la forme, il y a un problème, puis ce problème de forme là, on ne l'a jamais réglé après 40 ans. Donc, nous, à Québec solidaire, on se dit : Bien là, un moment donné, il serait peut-être temps de donner un petit coup, de la faire, cette réforme globale, de le créer, ce comité indépendant exécutoire et qu'on en finisse avec cette situation d'apparence de conflit d'intérêts. Je le répète, l'idée d'apparence de conflit d'intérêts, ce n'est pas mon opinion, c'est ce que la Commissaire à l'éthique a dit en 2015. Bon, la Commissaire à l'éthique, en 2015, disait : C'est un conflit d'intérêts, le fait que les députés votent leur propre salaire. Bien, on n'aurait pas à faire ça si on avait donné suite au rapport L'Heureux-Dubé, si on avait adopté le projet de loi n° 79. On n'est pas allés de l'avant.

Ce qui s'est plutôt produit, c'est qu'en décembre 2017, quelques jours avant la fin des travaux parlementaires, le gouvernement de l'époque... en fait, pardon, en décembre 2017, donc, quelques jours avant la fin des travaux parlementaires, il y a deux scénarios qui avaient été proposés pour essayer de régler le problème qui, à l'époque, s'en venait, celui, donc, des changements de la fiscalité au fédéral. Et un de ces scénarios-là était de dire : On va neutraliser la perte de rémunération à court terme et on verra pour la suite de L'Heureux-Dubé plus tard.

Donc, vous voyez, Mme la Présidente, là, quand on dit : On va régler ce problème-là tout de suite puis on verra plus tard pour le comité indépendant exécutoire, qu'est-ce qu'on est en train de faire? Exactement la même chose qu'ont faite les parlementaires au Québec depuis le premier débat sur la question en 1974. On rejoue le même film constamment. C'est ça qu'on a fait à l'époque, donc, pas plus tard qu'en 2017. Et à l'époque Québec solidaire s'était objecté, donc, à ce qu'on fasse ce qu'on est en train de faire ici, c'est-à-dire faire une réforme à la pièce en pelletant la réforme plus globale par en avant.

Janvier 2018, maintenant, donc quelques semaines plus tard, Jean-Marc Fournier, qui est à l'époque leader parlementaire du gouvernement libéral à l'époque, écrit une lettre. Il dit : Bon, là, là, on a un problème, il va y avoir une baisse de salaire au net pour les députés, qu'est-ce qu'on fait avec ça? Et il propose, à ce moment-là, deux scénarios. Le premier, donc, nouvelle tentative, étudions le projet de loi n° 19 L'Heureux-Dubé, adoptons-le, créons ce comité indépendant et décisionnel et on en sera quittes pour ce débat.

Mais, il fait aussi une deuxième proposition, et je vais vous lire, Mme la Présidente, la lettre que Jean-Marc Fournier... une lettre ouverte qui est bien connue, lettre ouverte que M. Fournier, donc, envoie à l'ensemble des députés. Premier scénario, il dit que c'est son préféré. M. Fournier dit : Moi, mon scénario préféré, c'est : on étudie L'Heureux-Dubé, on adopte le projet de loi n° 79 et enfin on se libère de ce débat franchement agaçant. Mais, il fait une deuxième proposition, il dit : «Une autre approche envisageable — je le cite, donc — serait d'ajouter, dans cette législation ciblée...» En fait, je vais mettre en contexte la citation. Il dit : L'autre approche, on pourrait faire un projet de loi pour compenser l'effet de la fiscalité fédérale, donc exactement ce que fait le projet de loi n° 19, mais en même temps, en fait, du même coup, on crée tout de suite le comité indépendant et décisionnel. Comme ça, bon, on corrige l'impact de la fiscalité fédérale, mais c'est la dernière fois, tu sais. C'est comme si on dit : Là, on va le faire, mais après on ne le fait plus, puis dans la loi, on met le comité indépendant exécutoire, comme ça, c'est vraiment la dernière fois qu'on se met les mains dans notre rémunération puis, pour la suite, on donne ça à un comité indépendant exécutoire pour en être débarrassé.

Et donc je vous lis la citation dans laquelle il fait cette proposition : «Une approche envisageable serait d'ajouter, dans cette législation ciblée qui se limite à neutraliser les effets de la nouvelle règle fiscale fédérale sur la rémunération, des dispositions établissant pour l'avenir un comité indépendant et permanent avec force exécutoire.» Donc, à ce moment-là, M. Fournier essaie de trouver un compromis. Bon, probablement que M. Fournier, à ce moment-là, commence un peu à faire le deuil de l'application globale du rapport L'Heureux-Dubé, alors il dit : Bien, au moins, on va prendre la dernière et ultime recommandation et, si vous voulez mon avis, la plus importante de L'Heureux-Dubé, on va mettre ce comité indépendant et décisionnel sur pied dans le même geste, dans le même projet de loi que l'on compense l'effet de la fiscalité fédérale. Et cette proposition-là, M. le Président, c'est intéressant, parce que, dans les discussions qui ont eu lieu au Bureau de l'Assemblée nationale dans les derniers mois, devinez quelle formation politique a repris à son compte la proposition de Jean-Marc Fournier? C'est Québec solidaire. C'est Québec solidaire, Mme la Présidente. C'est Québec solidaire.

Jeudi le 14 février 2019, la députée de Mercier écrit au comité qui est en charge de réviser les conditions de travail des députés. Et, dans cette lettre, la députée de Mercier dit : «Québec solidaire acceptera donc...» En fait, il y a une phrase avant qui dit : «...dans [un] esprit de compromis [...] Québec solidaire acceptera la majoration temporaire des allocations de dépenses pour compenser les effets de l'imposition fédérale à condition que soit mis sur pied un comité indépendant de révision des conditions de travail des député-e-s et que ce dernier respecte les paramètres minimaux suivants : le comité doit avoir un caractère exécutoire — donc, ça, c'est L'Heureux-Dubé; la nomination des membres du comité doit être approuvée par le Bureau de l'Assemblée nationale à l'unanimité — c'est plutôt normal comme manière de procéder; [troisièmement,] le comité doit avoir un échéancier clair durant la législature, avec une date [préétablie pour remettre son rapport] — bon, on lui donne un échéancier, dans le fond, à ce comité-là, ce n'est pas la fin du monde; et — dernière condition — [que cette] transition vers une rémunération transparente et juste [se fasse] à coût nul...»

On aurait pu discuter de cette proposition de compromis là, mais cette proposition de compromis, Mme la Présidente, elle a été refusée par les autres formations politiques. Et là je le répète, là, cette proposition de compromis là, elle ne sort pas de l'esprit machiavélique du politburo de Québec solidaire, là, comme le disent certains, cette proposition de compromis, elle est inspirée de ce que Jean-Marc Fournier, le leader libéral du gouvernement, proposait. Je veux juste dire une... Je ne m'étendrai pas sur ce que des députés de Québec solidaire ont déjà dit de Jean-Marc Fournier, il y a des déclarations bien connues à cet effet. Mais, je veux dire, vous n'entendrez pas souvent Québec solidaire dire : Bonne idée de M. Fournier sur le plan de l'éthique, disons ça comme ça. Ce n'est pas des déclarations qu'on a entendues souvent. Or, dans le cas du débat sur le projet de loi n° 79, on dit : Reprenons son idée de compromis, et cette idée de compromis a été refusée par les autres formations politiques.

• (12 h 10) •

Donc là, moi, la question que je me suis posée quand ma collègue de Mercier m'a dit : J'ai envoyé la lettre au BAN... D'ailleurs, je peux la déposer pour le loisir des membres de l'Assemblée, il n'y a pas de problème, là. Et même ça, ça a été refusé. Parce que ce n'était pas la position de départ de Québec solidaire. La position de départ de Québec solidaire, c'était la même position qu'en 2017, une position, disons, un peu plus ferme qui disait : On ne touche pas à la rémunération des députés s'il n'y a pas de réforme globale, point final. Entre 2017 et le dépôt du projet de loi n° 19, on a fait un compromis, on a pris un pas de recul, on a dit : O.K., on n'est pas en guerre pour que les députés voient leur salaire diminuer. Ce n'est pas ça qu'on veut, nous autres, dans la vie, là, que les députés fassent moins d'argent, là. Ça fait qu'on va accepter qu'il y ait une compensation de l'effet de la fiscalité fédérale, mais on va au moins mettre en application une et la plus importante des recommandations de L'Heureux-Dubé, c'est-à-dire, au moins, assurons-nous que ce soit la dernière fois qu'on le fasse.

Ça fait que, vous voyez, Mme la Présidente, là, que, contrairement à ce qu'on pourrait le penser, là, la position de Québec solidaire, là, ce n'est pas une position dogmatique, populiste. J'ai même entendu, à micros fermés, certains élus du gouvernement qualifier la proposition de démagogique. Vous le voyez, là, ce n'est pas une démarche démagogique ou populiste de la part de Québec solidaire, au contraire, c'est une démarche empreinte de compromis puis empreinte de pragmatisme, c'est-à-dire : Aïe! Là, ça fait 40 ans qu'on répète les mêmes erreurs, on peut-u ne pas, encore une fois, rejouer dans cette série-là? On peut-u avoir la fierté de dire : Bon, O.K., on compense l'effet de la fiscalité fédérale, mais c'est la dernière fois?

Et, Mme la Présidente, si nous faisions ça comme Assemblée, là, moi, je suis convaincu qu'on en serait fiers, qu'on en serait fiers d'avoir eu le courage que nos prédécesseurs n'ont pas eu, il faut le reconnaître, là, de mettre fin à la situation de conflit d'intérêts qui nous rend mal à l'aise. En tout cas, elle me rend mal à l'aise et elle rend le caucus de Québec solidaire mal à l'aise. Et j'ai tendance à croire qu'il y a d'autres députés qui partagent ce malaise-là, parce qu'on le sait bien que les gens normaux, au Québec, ils ne peuvent pas voter leur propre salaire. Même s'ils sont syndiqués, il faut qu'ils négocient avec un patron. De la même manière, quand les gens normaux, là, les gens ordinaires, les travailleurs, les travailleuses, quand l'impôt change, ils subissent l'effet de l'impôt. Le changement fiscal qui est annoncé par le fédéral, il ne touche pas juste les députés, il touche aussi certaines catégories de travailleurs et de travailleuses. Ces travailleurs et travailleuses là, on a-tu adopté une loi pour les exempter? Non. Or, on va le faire pour nous. Et ça, Mme la Présidente, ça crée, à Québec solidaire, un réel malaise sur la forme, sur le processus démocratique, d'où notre compromis de dire : O.K., on va le faire, mais on va le faire une dernière fois et on va se doter d'un comité indépendant exécutoire.

Et là je sais ou, en tout cas, je présume que des collègues des autres formations politiques vont dire : Bien, il y en a un, comité indépendant exécutoire dans le projet de loi n° 19. C'est vrai, mais il est dans le préambule. C'est un souhait, c'est une déclaration d'intention, mais ça n'a pas de force légale. Le préambule des projets de loi n'a pas force légale, c'est un fait. Il suffisait de le mettre en article dans le projet de loi, et Québec solidaire joignait le consensus. Et je vous le dis tout de suite, Mme la Présidente, en étude détaillée, nous allons déposer cet amendement, et je vais continuer à essayer de convaincre les autres formations politiques d'accepter l'amendement. Et, s'il est accepté, on va voter pour ce projet de loi là avec grand, grand enthousiasme, pour vrai, je le dis ici, tout le monde pourra reprendre mes propos par la suite, parce qu'on n'est pas en guerre pour faire baisser le salaire de personne, on refuse que l'Assemblée continue de répéter les erreurs du passé.

Avant de conclure, j'aimerais ajouter quelques arguments en faveur, donc, de cette manière de procéder, c'est-à-dire le fait de dire : On le fait une dernière fois, mais on met un comité indépendant exécutoire. Une des bonnes raisons de procéder comme ça, c'est que le Québec... en fait, le Parlement québécois est à la traîne par rapport à ce qui se fait dans d'autres Parlements similaires. Il y a, au Canada, plusieurs Parlements qui se sont dotés de ce type de comité là. On pourrait s'en inspirer et on devrait s'en inspirer. Ce n'est pas un modèle qu'on a à inventer de toutes pièces. Il y a quatre rapports qui ont été déposés au courant des dernières années, il y a des exemples dans le reste du Canada. Il y a aussi des exemples à l'international. Ces exemples-là existent, il faut aussi s'en inspirer. On n'a pas, bref, à inventer un modèle un peu byzantin, là, on peut s'inspirer de pratiques, de bonnes pratiques de gouvernance qui existent ailleurs. Ils existent, ces comités, au Royaume-Uni, en Australie, en Nouvelle-Zélande, des Parlements, donc, qui sont sur le même modèle, celui du parlementarisme britannique. Pas que ce soit un modèle pour lequel j'ai une affection débordante, mais c'est quand même notre modèle. Et donc, quand on regarde ces Parlements-là qui fonctionnent à peu près comme nous, on se dit : Bien, c'est possible d'appliquer cette recommandation de L'Heureux-Dubé. Au Canada, ça existe à l'Île-du-Prince-Édouard, ça existe au Manitoba, ça existe en Nouvelle-Écosse, hein, des comités. Au Manitoba, il s'appelle le Comité sur les traitements, les allocations et les prestations de pension des députés. Ces comités-là sont indépendants, sont décisionnels, révisent périodiquement les rémunérations des députés, leurs différentes conditions de travail, rendent des recommandations qui sont appliquées.

Évidemment, ce comité-là, Mme la Présidente, là, il ne déciderait pas ça, tout seul dans son coin-là, c'est un comité qui consulterait les parlementaires : C'est quoi, vos difficultés? C'est quoi, vos défis? C'est quoi, les éléments de votre rémunération qui fonctionnent mal? Et les parlementaires pourraient dire : Bien, écoutez, moi, je suis le député, par exemple, d'une circonscription éloignée, très grande, tels mécanismes de rémunération, c'est complètement décalé par rapport à ma réalité. Et ce comité-là, certainement, tiendrait en considération ces représentations-là de la part des députés.

Je vois ma collègue de Rouyn-Noranda—Témiscamingue se joindre à nous. Bien, ma collègue me parlait, l'autre fois, du fait qu'étant députée d'une circonscription plutôt loin du Parlement, ayant un jeune enfant, elle trouve que, par exemple, le nombre de déplacements entre sa circonscription et Québec, un nombre de déplacements qui sont permis pour sa famille... Quand on a des jeunes enfants, c'est cinq déplacements, si je ne me trompe pas, ce n'est pas assez. Comment on peut demander à un jeune père ou une jeune mère de famille, de dire : Tu vas amener juste cinq fois dans l'année ta famille avec toi à Québec? Ça, c'est le genre de chose qu'il faudrait revoir. Mais quelle est la meilleure manière de le revoir? Est-ce que c'est de se voter ici, nous-mêmes, une loi pour bonifier juste ce petit morceau-là? Bien sûr que non. La bonne manière de revoir ça, c'est quoi? C'est de mettre sur pied un mécanisme indépendant, périodique et décisionnel de nos conditions de travail, de notre rémunération.

Alors, le fait que Québec solidaire s'oppose à ce projet de loi là, ce n'est pas parce qu'on aime le mode de rémunération actuel, puis qu'on le trouve bien, puis qu'on le trouve parfait, puis qu'on trouve que tout va bien pour les députés, notamment les députés qui font face à des défis de conciliation travail-famille. Et là je prends la conciliation travail-famille, c'est un exemple, mais il y a d'autres aspects problématiques dans notre rémunération. Donc, ce n'est pas un appui à comment ça marche, notre opposition au projet de loi, c'est, bien au contraire, un souhait qu'on le réforme, ce mode de rémunération là, mais qu'on le réforme de manière transparente, de manière indépendante et, pour reciter encore la Commissaire à l'éthique, de manière à éviter l'apparence de conflit d'intérêts.

Donc, oui, il y a des choses à revoir. Je parlais de la conciliation travail-famille, je pourrais parler du régime de retraite. Il y a eu plusieurs députés, dans les dernières années, qui ont émis un malaise. Est-ce que le taux de cotisation actuel pour le régime de retraite, qui est de 21 %, je crois, si je ne me trompe pas... Est-ce que c'est équitable par rapport aux autres travailleurs, travailleuses que, comme députés, on cotise juste à 21 %? Beaucoup de députés, je pense, seraient tentés de dire : Oh! ce n'est pas beaucoup par rapport aux gens qu'on représente, ceux qui ont des régimes de retraite, hein? Même chose sur les assurances collectives. On cotise à peu près à hauteur de 12 % à notre régime d'assurance. Bon, je pense que, si on faisait un sondage anonyme en demandant aux députés : Trouvez-vous que c'est représentatif de la population?, je pense que plusieurs membres de l'Assemblée diraient : Bien, c'est vrai que ça pourrait être un petit peu plus équitable.

• (12 h 20) •

Bien, ce genre de débats là, c'est des débats importants. Je vous parle de l'assurance collective, je vous parle du régime de retraite, je vous ai parlé des mesures de conciliation travail-famille, ces débats-là sont importants. Bien, est-ce qu'on va les régler un après l'autre en adoptant à chaque fois un projet de loi à la pièce qui va nous rendre super mal à l'aise parce qu'on va être en train de décréter nos propres conditions? Nous, on pense que c'est une mauvaise manière de fonctionner. De un, ça va être très long; de deux, à chaque fois, ça va créer des controverses, des malaises, des inconforts. Quelle est la manière de faire cette réforme dont on a tant besoin, je dirais même, en fait, cette modernisation dont on a tant besoin dans notre mode de rémunération? C'est par un comité indépendant, périodique et décisionnel. Et ce n'est rien d'autre, Mme la Présidente, que propose Québec solidaire. Ce n'est pas une solution farfelue, ce n'est pas une solution radicale, ce n'est pas une solution saugrenue, comme diraient certains, c'est une solution qui nous vient, dans l'ordre, de Jean-Marc Fournier, du rapport L'Heureux-Dubé, du comité Godin, du comité Lavoie et du comité Bonenfant. Donc, j'espère ne pas entendre des gens dire : Québec solidaire sont radicaux, sont populistes, sont démagogiques, ils sont en guerre contre la classe politique. Ce n'est pas ça, là. Je ne l'ai pas entendu encore, puis j'espère que je ne l'entendrai pas, parce que, je veux dire, on n'est pas là-dedans, là, on n'est pas là-dedans du tout, bien au contraire.

Mme la Présidente, pendant que j'ai encore une capacité physiologique de m'exprimer à vous, je vais aller vers la conclusion. Le volume... J'entends quelqu'un me dire «ça baisse». Je dirais : Le volume de ma voix, mais la force des arguments, par contre, est ascendante, est ascendante. En terminant, donc, j'aimerais sérieusement faire un appel, je dirais, à deux choses, puis c'est des thèmes que j'ai entendus de la part du gouvernement, et là je l'entends ici sans aucune ironie, sans aucune mauvaise foi et sans aucune volonté d'embarrasser quiconque, là, vraiment. Moi, j'ai entendu un gouvernement parler de courage et de fierté. J'ai aussi entendu un gouvernement parler de changement et j'ai entendu un gouvernement dire : Le 1er octobre, les Québécois, là, ont choisi de tourner la page sur beaucoup de choses, notamment sur des manières de faire de la politique, sur des comportements éthiques douteux qui ont malheureusement marqué la vie politique québécoise dans les dernières décennies. Et on est assez peu souvent d'accord avec le parti politique qui forme le gouvernement, mais, sur ça, Mme la Présidente, on l'est et l'on a été à l'époque où nous étions tous deux de ce côté-ci de la Chambre. On a mené des batailles ensemble, le gouvernement et Québec solidaire, sur les enjeux d'éthique, sur les enjeux de moeurs politiques et on peut encore continuer à en mener, j'en suis convaincu. Et ce gouvernement, donc, qui se prétend... bien, qui se prétend... non, qui se réclame, à juste titre, d'une forme de changement, moi, j'aurais tendance à faire une parenthèse et dire : Il y a certains changements qu'on n'aime moins que d'autres dans l'agenda de changement, mais, certes, il y a du changement sur plusieurs choses.

Bien, un des changements dont on a besoin, là, c'est le changement par rapport à cette quarantaine d'années d'une classe politique qui, malheureusement, n'a pas osé faire le pas, n'a pas osé rompre avec la situation de conflit d'intérêts. Et, nous, c'est ce qu'on propose et, je vous le répète, on propose ça sans qu'il n'y ait aucun impact financier sur aucun député en cette Chambre parce qu'on est d'accord de bonifier de manière provisoire l'allocation afin d'annuler les effets de la fiscalité fédérale. On est d'accord. Donc, il n'y a pas personne qui perd d'argent, Mme la Présidente, si l'amendement de Québec solidaire est adopté et qu'on dit : O.K., on règle ça, mais à condition qu'on mette en place un comité décisionnel périodique indépendant.

Donc, ce qu'on propose, là, ce n'est pas désavantageux pour personne. En fait, c'est avantageux pour tout le monde et surtout c'est avantageux pour l'institution, pour la confiance que les gens nous portent. Et un parti porté au pouvoir par un vent de fatigue à l'égard de la classe politique traditionnelle devrait comprendre ça. Un parti porté au pouvoir par un vent, même d'une certaine écoeurantite devant certains privilèges, devant certaines attitudes devrait, je pense, être sensible à la proposition que Québec solidaire fait. Et je m'adresse à eux en priorité, bien sûr, parce qu'ils détiennent la majorité en cette Chambre, et, en dernière instance, ce sera à eux de décider du sort de ce projet de loi. Donc, le changement... Je pense qu'en termes de changement, tout y est dans la proposition de Québec solidaire pour qu'on aille de l'avant.

Mais j'ai parlé aussi de courage et de fierté. Quel courage? Bien, le courage, justement, de poser le geste que nos prédécesseurs n'ont pas eu le courage de poser. Le courage de dire : On va se sortir les mains de notre propre rémunération, on va cesser d'être, comme le disait la Commissaire à l'éthique, en position d'apparence de conflit d'intérêts, on va cesser d'être juge et partie. Et ça, tous nos successeurs en cette Chambre vont nous en remercier parce qu'ils vont dire : Enfin, on a un comité indépendant décisionnel qui prend ça en charge puis qui ne nous impose pas le fardeau éthique de devoir nous-mêmes décider sur notre rémunération. Ce courage-là, je pense qu'on en est capables en cette Chambre. Je souhaite qu'on en soit capables, Mme la Présidente. Et, en terminant, la fierté, bien, la fierté de se dire : Aïe! Ça fait depuis 1974 au moins, depuis le comité Bonenfant de 1974, que cette question-là est discutée. Et puis vous savez quoi? Bien, c'est notre législature, la 42e, qui a fait le pas, qui a fait le saut puis qui a mis fin à ce malaise de plusieurs décennies. Moi, si on allait de l'avant, là, je ressentirais cette fierté-là, de dire : On a été capables.

Et les circonstances, elles sont là, Mme la Présidente. On est en début de mandat. On peut faire une compensation temporaire sur l'allocation des députés. Tout est en place, là, c'est la tempête parfaite. Il faut saisir l'occasion. Et, je le répète, le fait qu'il y ait un comité indépendant exécutoire dans le préambule, ce n'est pas suffisant. Oui, c'est un beau souhait, oui, c'est un engagement moral et symbolique, certes, mais ayons le courage, je dirais, de s'attacher nous-mêmes les mains. Votons-nous un projet de loi qui va nous contraindre nous-mêmes à se lancer dans ce processus de réforme indépendant, périodique et exécutoire. Mais ayons le courage de le mettre dans le projet de loi puis de le dire à la population du Québec : Vous voyez, on l'a prise, la décision, puis on en a discuté en caucus, puis on s'est dit : Crime! On est capables de se contraindre nous-mêmes dans ce processus-là, duquel on va sortir grandis, au final, comme classe politique, j'en suis convaincu.

Et je sais que, quand on parle de ces choses-là, la rémunération des députés, et tout ça, rapidement il y a des malaises, des inconforts, rapidement il y a des craintes aussi. On va-tu se faire traiter de pourris? On va-tu se faire traiter d'hypocrites? On va-tu se faire traiter de plein de soupe, tu sais? Bon. Je les comprends, ces craintes-là, et c'est justement pour nous en libérer que la proposition de Québec solidaire est pertinente, parce que cette proposition-là, elle dit : On n'aura plus jamais à vivre ce qu'on vit en ce moment.

Alors, Mme la Présidente, je vais m'arrêter ici, mais simplement dire, donc, réitérer une dernière fois que nous allons déposer un amendement à ce projet de loi lors de l'étude détaillée, et cet amendement sera calqué sur la proposition qu'avait faite la députée de Mercier au Bureau de l'Assemblée nationale par lettre le 14 février 2019, une proposition qui dit oui à la majoration des allocations de manière provisoire, en attendant qu'un comité indépendant, décisionnel et périodique fasse son examen, nous arrive avec des recommandations qui seront appliquées. On donne au comité un mandat, on donne au comité un échéancier, et, comme ça, personne ne voit ses conditions de travail détériorées, parce que ce n'est pas ce qu'on souhaite, et en même temps on a des garanties d'avoir une réforme globale de la rémunération. Et on discutera du mandat de ce comité-là, Mme la Présidente, on trouvera un consensus au Bureau de l'Assemblée nationale. Mais nous allons déposer cet amendement au projet de loi, et je ne perds pas espoir de convaincre les autres formations politiques d'appuyer un tel amendement qui ferait du projet de loi une pièce législative historique qui permettrait de tourner la page sur 40 ans de débats malheureusement improductifs sur le sujet de la rémunération des députés. L'Assemblée nationale du Québec joindrait ainsi le rang des Assemblées les plus transparentes à travers le Canada, parce que je vous ai parlé plut tôt d'autres Parlements canadiens qui ont de tels comités, comme le proposait le comité L'Heureux-Dubé.

Donc, les circonstances sont les bonnes, les recommandations des différents comités sont claires, la proposition est raisonnable et pragmatique. Il manque un ingrédient pour que la recette soit réussie, et c'est la volonté politique, Mme la Présidente. Et je vais utiliser les occasions qui vont m'être présentées dans le cheminement de ce projet de loi pour tenter d'inspirer cette volonté politique aux autres formations représentées en cette Chambre. Merci.

Document déposé

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader du deuxième groupe d'opposition. Alors, d'abord, est-ce qu'il y a consentement pour permettre à M. le leader de déposer son document auquel il faisait référence tout à l'heure? Il y a consentement.

• (12 h 30) •

Et, avant de poursuivre ce débat, je vais vous informer que deux débats de fin de séance se tiendront aujourd'hui : le premier débat sur une question adressée par M. le député de Pontiac à la ministre de la Sécurité publique concerne l'absence d'entente entre le gouvernement et l'armée pour enlever les sacs de sable des terrains des gens sinistrés en Outaouais; et le deuxième débat portera sur une question adressée par M. le député de Nelligan à la ministre déléguée au Développement économique régional, concerne l'abolition insensée et antiéconomique du réseau national des pôles d'innovation.

Maintenant, nous revenons à notre débat, et je vais céder la parole à M. le leader de l'opposition officielle.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. Vous me permettrez d'abord de remercier le collègue leader de la deuxième opposition, qui avec de plus en plus de difficultés me semblait vouloir terminer son propos. Je lui concède, et je lui ai déjà dit, de toute façon, qu'il n'y a pas d'enjeu au niveau de ses convictions, il les défend toujours très bien, avec beaucoup d'éloquence. Et sincèrement je veux le remercier parce que, moi, ça m'a permis de me remémorer une partie de ce débat-là autour de la rémunération, et c'est bien qu'il en soit ainsi. Je pense, ça fait partie du travail qu'on doit faire ici, dans cette Assemblée.

Maintenant, qu'on soit d'accord ou pas sur les finalités, je pense qu'il était nécessaire, puis c'est intéressant pour ceux et celles qui nous écoutent mais pour nous aussi, de voir également qu'un jour ou l'autre il faudra convenir, là, d'une façon de déterminer ces conditions de travail, ce salaire et de faire en sorte que, c'est vrai, on ne se retrouve plus avec la situation dans laquelle nous évoluons, c'est-à-dire décider soi-même, soit, mais en même temps se voir imposer des moments où il faut réagir comme nous le faisons actuellement.

Le projet de loi qui est déposé, qui a été déposé et qui sera vraisemblablement débattu dans les prochaines heures ou dans les prochaines journées, Mme la Présidente, ne vise qu'une chose, je pense qu'il faut le rappeler. Bien sûr, il est porté par des formations politiques. Bien sûr, c'est de l'initiative du gouvernement de le présenter, mais appuyé également par notre formation politique. C'est de dire quoi? Il y a un régime d'imposition fédéral qui fait en sorte que nous serons désavantagés, pénalisés, vu la structure ou la façon dont nous sommes rémunérés. Le collègue leader de la deuxième opposition a dit : Bien, c'est vrai pour vous, c'est vrai pour nous, ce n'est pas vrai pour d'autres. Il a raison, nous ne sommes pas soumis à la même structure de rémunération que d'autres dans la société. Et moi, je n'accuse pas ni Québec solidaire ni ceux et celles qui porteront un jugement sur ce projet de loi de quelconque chose. Ce que je dis, par rapport à ça, c'est que j'entends que, de tous et chacun, il y a cette volonté que cette iniquité ou cette situation très particulière où nous nous retrouvons imposés sur cette allocation non imposable qui fait partie de notre structure de rémunération et de conditions de travail change. Et, dans ce contexte-là, nous devons, je pense, pour maintenir cette rémunération, poser un geste comme celui-là.

Alors, je comprends et j'entends, Mme la Présidente, que, sur le fond, d'agir maintenant pour pallier à cette situation, qui était théorique, même si on savait qu'elle arrivait l'an dernier, aujourd'hui nous touche directement. Je n'ai pas les statistiques, Mme la Présidente, mais je sais que, dans plusieurs lieux de débats chez les municipalités ou dans d'autres lieux où il y a une démocratie, il y a cette structure. Ce n'est pas tout le monde qui est payé pareil, vous allez me dire, mais il y a dans d'autres lieux, dans le milieu municipal et d'autres, des allocations comme celles-ci qui sont touchées par Revenu Canada également. Et je sais que, dans plusieurs lieux, dans plusieurs conseils municipaux ailleurs, ils ont fait ce que nous allons faire. Certains différemment, certains de la même façon, mais ce que j'entends et ce qu'on me dit, Mme la Présidente, c'est que, dans plusieurs endroits, on s'est gouverné en conséquence et on a préservé la rémunération des élus en ajustant ainsi cette allocation, si elle n'est pas transformée, en l'ajustant en fonction de la partie qui sera imposable, donc de cette somme que nous devrons verser en impôt, plutôt que la conserver librement et entièrement.

Alors, c'est ce qu'il fait, le projet de loi. Il n'y a pas un député, Mme la Présidente, qui va s'enrichir de la situation, qui va voir sa rémunération augmenter. N'eût été de cette situation, de l'imposition par le gouvernement fédéral de cette allocation, allocation qui, en passant, est en partie sous l'autorité et la responsabilité de la Loi de l'Assemblée nationale et une autre partie sur la réglementation qui émane du Bureau de l'Assemblée nationale, bien, n'eût été de cette situation, Mme la Présidente, ce projet de loi là ne serait pas devant nous et devant vous aujourd'hui.

La preuve en est, c'est que, de ce que je comprends... Et c'était le cas, à l'époque, et la volonté du ministre des Finances de l'époque, qui est à mes côtés, mais je pense que c'est le cas également d'une décision prise par le ministre des Finances aujourd'hui et Revenu Québec, de ne pas imposer celle allocation-là. Donc, le projet de loi, il vise que... La situation créée par Revenu Canada, et non par Revenu Québec. Pourquoi? Parce qu'il n'y a pas eu de décision prise d'appliquer les mêmes arguments ou les mêmes façons de faire par Revenu Québec. Donc, c'est de cette situation qu'il est question.

J'ai dit d'entrée de jeu, Mme la Présidente, je ne parlerai pas pour les autres formations politiques, je vais parler pour la nôtre et je vais parler pour moi, j'ai dit d'entrée de jeu que cette situation ne pouvait pas durer dans le temps. Je l'entends, je la conçois. Je connais aussi l'historique. Je siège dans cette Assemblée de façon intermittente depuis assez longtemps pour comprendre la situation dans laquelle on vit. Une chose qui, pour moi, est certaine, Mme la Présidente, c'est qu'il faut s'engager dans un processus, il faut s'engager dans ce processus où on va mettre en place les conditions pour qu'on puisse régler cette situation-là une fois pour toutes.

L'enjeu, Mme la Présidente, c'est le suivant. C'est qu'actuellement les conditions pour y arriver, bien, elles ne sont pas inscrites sur la table. Il n'y a pas entente sur ce que serait cette nouvelle tentative, quelles seront les conditions qui amèneraient tous et chacun ici à s'engager autour de ça. Même de L'Heureux-Dubé, il sort, oui, le début de quelque chose, mais il ne sort pas unanimité des parlementaires autour des solutions qui ont été proposées. Alors, c'est la preuve, encore une fois, qu'il reste du travail à faire pour y arriver. Quelle sera cette solution optimale qui sera mise de l'avant, acceptée par tous, et qui aura des conditions, imposées ou non, mais qui se retrouvera étant la formule choisie par les élus pour arriver à ce que plus tard, dans l'avenir, nos conditions de travail ne soient pas déterminées aux aléas des députés, selon leur bonne volonté, ou en réaction comme on le fait actuellement?

Alors, les considérants qui se trouvent au projet de loi, bien, ils sont importants. Puis, moi, Mme la Présidente, c'est ma proposition, les considérants, c'est la proposition que j'ai faite au gouvernement, d'inscrire les considérants, en disant : Je pense que ça vient donner force de loi... je comprends les arguments du collègue, mais vient donner la force à ce projet de loi là en disant d'abord, d'entrée de jeu, qu'on le fait pour «ajuster, par la présente mesure, l'allocation que reçoit chaque député dans l'exercice de ses fonctions afin de tenir compte de la décision en matière fiscale adoptée par le Parlement du Canada». Donc, ce n'est pas un enrichissement. C'est une situation pour régler une conséquence, je dirais, de la situation créée par le Parlement du Canada, par Revenu Canada. Mais le deuxième considérant, c'est : «...que les parlementaires conviennent de la nécessité que le Bureau de l'Assemblée nationale soit mandaté afin de mettre sur pied un processus visant à assurer périodiquement, en toute indépendance, la détermination de l'ensemble des conditions de travail des députés.» Ce que le collègue souhaite, ça se retrouve dans les considérants du projet de loi. Et, pour ma formation politique, Mme la Présidente, c'est notre volonté qu'on soit en mesure, dans cette législature... Et les gens, chez nous, qui siègent au Bureau de l'Assemblée nationale, ont cette volonté également, qu'on soit capables de s'entendre sur cette formule qui nous amènera dans l'avenir à faire les choses différemment. Mais aujourd'hui nous avons la capacité de travailler sur cette situation que le collègue qualifie de temporaire, qui, quant à moi, je ne sais pas lorsqu'elle terminera, mais, pour l'instant, ne peut pas être qualifiée de temporaire parce que c'est le présent. Nous pouvons tous ensemble travailler sur cette situation et nous pouvons nous engager effectivement à le faire devant vous, le faire publiquement pour que le Bureau de l'Assemblée nationale y travaille très sérieusement.

Le défi est le suivant, c'est que les conditions qui entoureraient ce comité, les conditions qui sous-tendent ce que serait cette entité qui prendrait en charge les conditions de travail des députés ou sa détermination, bien, ça, ce débat-là, ici, on ne l'a pas fait dans la 42e législature. Les députés qui sont ici, autour de nous, là, n'avons pas eu ces discussions-là. Puis il y a des gens qui siègent ici pour la première fois, d'autres qui sont là depuis longtemps. Bien, les débats du passé, oui, nous inspirent, mais moi, je ne suis pas en mesure de dire que ces débats-là ont été faits dans toutes les formations politiques, que, chez nous, ce débat-là est terminé à l'égard des façons dont on voudra convenir dans l'avenir de la rémunération des députés. Alors, Mme la Présidente, pourquoi mettre en péril ce que nous pouvons faire aujourd'hui, alors que cette volonté est exprimée autant dans le projet de loi que verbalement par l'ensemble des députés?

Alors, je serai très bref en vous disant, Mme la Présidente, qu'on va, bien sûr, appuyer le projet de loi, que, pour nous, c'est une question d'équité, dans ce cas-ci, parce qu'il y a une conséquence directe, que, de notre côté, on veut travailler à cette réflexion, à cette élaboration des conditions qui, dans l'avenir, nous amèneront à voir les choses différemment, et que, dans ce contexte, pour nous, ce projet de loi là doit être adopté et assez rapidement, Mme la Présidente, vu la fin de cette session.

Alors, je réitère mon appui au gouvernement et au leader du Parti québécois, qui, tous les deux, ont dit vouloir aller de l'avant dans ce débat-là. Et j'invite le collègue de la deuxième opposition à ne pas bloquer ce projet de loi là ou à ne pas s'inscrire en faux avec le projet de loi alors que, sur le fond, il est d'accord sur ce que nous faisons. Mais il nous invite, Mme la Présidente, et je le vois et je l'entends, comme cette invitation, à ce qu'on puisse, dans cette législature, dans la 42e, faire les choses différemment que ce qui s'est fait dans le passé. Alors, je l'ai entendu, cet appel. Il se trouve dans les considérants, c'est notre contribution à ce débat. Et nous souhaitons qu'il soit adopté, Mme la Présidente, pour, je le rappelle, ne pas créer un enrichissement chez les élus, ne pas modifier de notre propre chef notre rémunération, mais de faire face à une situation, Mme la Présidente, qui fait que, dans la structure actuelle de rémunération, nous sommes pénalisés par cette décision de Revenu Canada. Voilà.

• (12 h 40) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader de l'opposition officielle. Et maintenant je vais céder la parole à M. le leader du troisième groupe d'opposition.

M. Martin Ouellet

M. Ouellet : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, à mon tour de prendre la parole à cette adoption de principe pour le projet de loi n° 19.

Tout comme le collègue leader parlementaire de l'opposition officielle, je veux aussi saluer le travail historique fait par le leader de la deuxième opposition officielle. Ça nous a permis, effectivement, d'avoir un exhaustif retour en arrière sur ce qui a été fait et de nous permettre d'apprécier ce pourquoi on en est rendus, aujourd'hui, à avoir à prendre une décision sur nos conditions de travail. Et je suis content aussi parce que le collègue en question a parlé d'évolution de positions à travers les différentes années. Et le collègue de Québec solidaire ne m'en voudra pas, effectivement, si je surligne que, dès 2013, lorsque le rapport Claire L'Heureux-Dubé a été déposé, la chef, à l'époque, Mme Françoise David, avait dit qu'elle était d'accord avec les mesures d'équité et de transparence, mais qu'elle rejetait les augmentations suggérées sur le revenu disponible. Donc, je crois comprendre que la position ou la réflexion a évolué, du côté de Québec solidaire, et c'est la même chose, Mme la Présidente, du côté du Parti québécois.

Lorsque j'entendais, tout à l'heure, le député de... le leader parlementaire, pardon, du deuxième groupe d'opposition, il faisait référence, dans certains cas, à un comité décisionnel et, dans d'autres cas, à un comité exécutoire. La nuance, elle est importante, alors j'aimerais... Puis probablement qu'on pourra approfondir lors des discussions en étude article par l'article, quelle est la différence qu'il voit ou si c'est juste peut-être une erreur de choix de mot, mais moi, je vois une différence entre un comité exécutoire et un comité décisionnel parce que les deux ne sont pas pareils. Le comité exécutoire va nous lier, nous, ici, à l'Assemblée nationale, et je vois difficilement, comme le leader de l'opposition officielle, de quelle façon on peut arriver à ça présentement dans les lois qui nous gouvernent, parce que, oui, notre rémunération est sous la gouverne de la Loi sur l'Assemblée nationale et, dans certaines allocations, sous le Bureau de l'Assemblée nationale, donc, tôt ou tard, peu importe ce qui sera recommandé, décidé ou exécutoire, il va falloir, tôt ou tard, remettre ça dans les mains de l'Assemblée nationale et procéder à un vote. Donc, il y aura aussi un travail si on veut effectivement aller plus loin dans cette volonté d'avoir un comité indépendant, oui, permanent, oui, évaluation périodique, oui, mais, dans ses recommandations, qu'elles soient décisionnelles ou exécutoires, vous aurez compris que, tôt ou tard, peu importent les décisions qui seront prises, elles devront être resoumises à l'Assemblée nationale, aux 125 députés. Donc, peu importe ce qu'on fera, il pourrait y avoir un député sur les 125 qui décide de se lever contre, et ce sera dans son droit, malgré le fait que les recommandations soient exécutoires ou, dans certains cas, décisionnelles.

Je n'ai pas une longue expérience ici, à l'Assemblée nationale, mais j'étais là lors des dernières discussions pour la mise en application du rapport Claire L'Heureux-Dubé et je me souviens d'une chose, je me souviens effectivement du malaise des gens, qu'ils avaient, d'avoir à légiférer sur leurs propres conditions de travail. Mais il y avait quand même quelque chose d'intéressant, lors de la dernière législature, c'est qu'on allait légiférer pour des conditions de travail qui allaient toucher les collègues de la 42e législature. Donc, techniquement, personne des 125 élus qui auraient voté ces recommandations-là n'était garanti d'avoir eu un impact, puisque nous allions tous être en élection. Et je suis convaincu, Mme la Présidente, que personne n'a prétendu, lors de la 41e législature, être encore garanti d'être assis ici lors de la 42e.

Donc, dans certains cas, il est faux de prétendre que, lorsqu'on légifère, on peut légiférer pour nous. On peut légiférer pour les autres qui suivront. Et donc ça donne effectivement, dans certaines proportions, une notion de... oui, de transparence, mais pas nécessairement de conflit d'intérêts direct, puisque les conditions qui seront votées seront appliquées à une autre législature qui... pour laquelle aucun des 125 n'ont été décidé avant l'élection.

C'est important de le souligner, Mme la Présidente, puisque... — et j'aimerais utiliser le terme «les règles d'engagement», puisque, lorsqu'on s'est tous présentés à l'élection du 1er octobre dernier, nous avions tous ou pour la plupart pris connaissance, effectivement, des conditions de travail, la rémunération, les allocations, les indemnités, bref, quelles seraient les sommes qui nous seraient attribuées pour faire notre travail. Alors, en connaissance de cause, les 125 ont décidé de s'engager à faire de l'action politique, en connaissant ces règles-là qui allaient nous gouverner.

Or, arrive, le 1er janvier, une décision émanant d'un autre gouvernement, le gouvernement canadien, qui vient avoir un impact direct sur les allocations qui nous sont offertes pour faire notre travail, donc d'où la pertinence de se poser ici la question, en Chambre, de quelle façon nous devons réagir à ce changement de règles d'engagement.

Donc, techniquement, il y a des gens qui se sont engagés en fonction de faits, de rémunération offerte, et là ce ne sont plus les mêmes. Et, dans certains cas, Mme la Présidente, ça peut causer une certaine disparité de traitement, notamment pour des circonscriptions comme la mienne qui sont couvertes par un groupe plus grand, qui fait qu'on a des sommes supplémentaires pour faire le travail dans une grande circonscription qui nous amène à nous déplacer, qui nous amène aussi, comme députés de circonscriptions dans l'Est du Québec... Donc, on doit se rendre à Québec ou à Montréal pour rencontrer des groupes, rencontrer des gens qui veulent nous faire valoir leurs positions sur les différents projets de loi. Bref, ça nous amène à nous déplacer, et ces déplacements-là nous amènent effectivement à dépenser des sommes pour être présents.

Donc, les allocations qui nous sont offertes, que ce soit celle de déplacement en circonscription mais celle aussi qui nous permet de faire notre travail, évidemment, elle est impactée, présentement. Et, dans certains cas, ça peut représenter, dans les circonscriptions... je ne veux pas dire un manque à gagner, mais une dépense, un déboursé supplémentaire de 10 000 $.

Mme la Présidente, il est évident que ces allocations-là sont non imposables, et les députés en question n'ont pas à présenter des pièces justificatives, mais je suis convaincu, Mme la Présidente, que les 125 députés ici pourraient fournir leurs factures d'essence, leurs factures de repas, leurs factures de pneus, leurs factures d'assurances, bref, tout ce que ça a coûté pour faire leur travail dans leurs circonscriptions, et la plupart de nos citoyens et citoyennes du Québec verraient qu'au final, cette allocation qui nous est versée, elle est en deçà de ce que ça peut nous coûter pour faire notre travail.

Et donc, sur ces règles d'engagement là, sachant que, lors de l'élection, il avait été convenu qu'une certaine allocation nous serait offerte pour faire notre travail, je pense qu'il est convenable, aujourd'hui, d'avoir cette discussion-là franche et ouverte devant les caméras à l'Assemblée nationale pour se poser la question : Est-ce qu'effectivement il est opportun de corriger cette anomalie qui est apparue lors du 1er janvier et qui change la façon de faire les compensations pour le travail qu'on a à faire en circonscription?

Alors, je m'inscris effectivement dans la même logique du leader parlementaire de l'opposition officielle, à savoir de la pertinence d'avoir à colliger aujourd'hui cette situation-là pour être certains que les députés qui sont touchés, dans certains cas, ne voient pas un certain appauvrissement pour faire notre travail en circonscription ou de se déplacer sur le territoire.

Une chose importante que le leader de l'opposition officielle a soulevée, c'est qu'effectivement, dans la loi en question, dans les principes, il est effectivement inscrit que les parlementaires conviennent de la nécessité de mandater le Bureau de l'Assemblée nationale pour «mettre sur pied un processus visant à assurer périodiquement, en toute indépendance, la détermination de l'ensemble des conditions de travail des députés». Mme la Présidente, j'ai fait plusieurs projets de loi par le passé, et, à chaque fois qu'on s'assoit en étude article par l'article, on discute et on entérine l'ensemble des dispositions qu'il y a dans le projet de loi. Et ça va même jusqu'au titre, Mme la Présidente. Donc, si on pouvait avoir des amendements au titre, on pourrait le faire. Donc, chacune des dispositions qui sont inscrites, que ce soient des articles, ou des considérants, ou des titres, peuvent être amendées, discutées. Et c'est ce qui fait, Mme la Présidente, que, présentement, comme le soulignait le collègue de l'opposition officielle, leader parlementaire, il est à propos pour nous, à cette étape-ci, dans les considérants, d'inscrire notre volonté de la création de ce comité-là et de commencer les discussions, effectivement, sur la composition de ce comité, sur son mandat, sur sa durée, sur sa périodicité mais aussi et surtout se poser la question, sur la volonté qu'il soit exécutoire ou décisionnel, si c'est la volonté des parlementaires qu'il en soit ainsi, quelles seraient les autres modifications législatives que nous devrions apporter, notamment les lois à modifier qui nous gouvernent à l'Assemblée nationale mais aussi les lois issues du Bureau de l'Assemblée nationale.

• (12 h 50) •

Donc, il reste encore un certain travail à faire, parce que moi, je n'ai pas la réponse. Je l'ai cherchée, Mme la Présidente. Si un comité exécutoire ou décisionnel nous imposait des conditions de travail, est-ce qu'on serait tenus tout de même de le soumettre à l'Assemblée nationale? Et les réponses que j'ai, présentement, la réponse, c'est oui. Donc, en rien un des 125 ou une des 125 députés, aujourd'hui, ne pourrait s'inscrire en faux et décider de voter contre les recommandations. Qu'est-ce qui se passerait à ce moment-là? Bien, la majorité, effectivement, pourrait s'appliquer, mais, dans certains cas, il y aurait une dissension. Et je pense que tout le monde ici, à l'Assemblée nationale, lorsque vient le temps de discuter des conditions de travail, des conditions d'exercice, leur rémunération... Je pense qu'il faut aller chercher l'unanimité des 125 collègues ici, à l'Assemblée nationale, puisque nous faisons à peu près tous le même travail avec le même degré d'intensité, le même degré de fierté, le même degré de volonté. Et je pense que, dans l'espace public, la seule façon de trancher un trait définitif sur le passé et garantir une façon différente, pour l'avenir, de travailler, c'est d'y aller de façon unanime pour la suite.

Donc, Mme la Présidente, vous ne serez pas surpris, on a demandé un consentement pour apparaître, nous aussi, notre formation politique, comme étant codépositaire du projet de loi en question, donc nous allons être effectivement pour ce projet de loi. Nous allons voir... Nous allons quand même étudier... Nous allons prendre le temps, pardon, d'étudier quand même l'amendement du député de Gouin sur les propositions, et peut-être, à force de discuter, nous aurions peut-être une façon de trouver des terrains d'entente pour que toutes les formations politiques arrivent au même constat, mais il devra me faire la démonstration ou du moins m'expliquer en toute honnêteté quelle est la différence entre le comité décisionnel ou le comité exécutoire. Et effectivement, lorsqu'on prend le dernier projet de loi, le projet de loi n° 79 qui avait été déposé lors de la dernière législature, on n'en faisait pas mention, de la qualité exécutoire ni décisionnelle.

Donc, je comprends que la pensée a évolué. Je comprends qu'effectivement nous devons légiférer pour le bien de nos concitoyens, pour offrir une meilleure transparence, une meilleure équité. Et je pense que, pour le moment, considérant qu'on a changé les règles d'engagement suite à l'élection... je pense qu'il est opportun d'abord de circonscrire cette première allocation et de décider de procéder à son rehaussement pour compenser son imposition par le gouvernement fédéral, qui amène à coût nul pour les citoyens et citoyennes du Québec, pour nous aussi amène à coût nul... pas à coût nul, pardon, mais amène une certaine égalité dans les dépenses que nous aurons à faire pour faire notre travail en circonscription.

Donc, je ne serai pas plus long, Mme la Présidente. Donc, nous allons avoir assurément des débats intéressants, assurément, subséquemment sur ce projet de loi. Alors, là-dessus, merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le leader du deuxième groupe... troisième groupe d'opposition, pardon. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

Mme Émilise Lessard-Therrien

Mme Lessard-Therrien : Merci, Mme la Présidente. Comme mon collègue de Gouin l'a mentionné précédemment, les membres de notre formation politique ressentent un profond malaise face au projet de loi n° 19. Comment on peut accepter, en cette Chambre, d'être juge et partie de ses propres conditions de travail et surtout de manquer cette fenêtre d'opportunité pour parler de ces conditions de travail là en général?

Mme la Présidente, il est temps qu'un sujet prenne une plus grande importance dans cette Assemblée, et c'est celui de la conciliation travail-famille. Vous savez, depuis que je suis élue, la question qui m'est la plus fréquemment posée, c'est : Et puis comment gères-tu ta conciliation famille-travail? Comment va ton coeur de maman? Ce que je réponds, Mme la Présidente? Que je gère bien la situation parce qu'à la maison j'ai un conjoint formidable et un entourage qui me soutient au quotidien. Toutefois, depuis mon entrée en poste, inutile de vous dire que les défis de conciliation sont considérables, particulièrement lorsque j'exerce mes fonctions à Québec, à 950 kilomètres de chez moi.

Vous n'êtes pas sans savoir que les membres de la nouvelle génération, qui prennent une place de plus en plus grande sur le marché du travail et dans notre société, accordent une très grande valeur à la flexibilité de leur horaire professionnel et à des conditions de travail leur permettant de remplir leurs responsabilités familiales et maintenir leur qualité de vie. Également, considérant les aléas et les exigences de notre travail de parlementaire, il serait, à notre avis, bien temps d'ajuster les conditions de travail des députés pour rendre possible une réelle conciliation entre les responsabilités familiales et les responsabilités de député. Il n'y a aucune raison pour que l'Assemblée nationale ne prenne pas acte de ce nouveau contexte et agisse en ce sens. Doit-on rappeler que les conditions de travail des députés, tout comme l'organisation des travaux parlementaires, d'ailleurs, a été pensé à une époque pendant laquelle l'implication des deux parents dans la gestion familiale était bien différente? Avec le projet de loi n° 19, nous avons une fenêtre d'opportunité tout à fait à propos pour réfléchir à l'ensemble des conditions de travail des députés. Et pourquoi s'arrêter uniquement à la rémunération? Il serait temps de s'atteler à une réelle réforme globale des conditions de travail et de la rémunération des membres de cette Chambre, et ce, à travers un processus adéquat et surtout transparent.

À Québec solidaire, plus de la moitié de notre caucus est composé de parents, et même très majoritairement de parents ayant de jeunes enfants. Ma petite fille n'a pas encore deux ans, et, si la nature le veut bien, je souhaite bien avoir un autre enfant avant la fin de la présente législature. Mais je ne vous cacherai pas que les mesures de conciliation sont un élément clé dans ma prise de décision. À ce chapitre, je ne peux m'empêcher de penser à toutes ces femmes que je rencontre et qui me partagent leurs appréhensions à faire de la politique avec des jeunes enfants. L'enjeu de la conciliation, c'est un des facteurs les plus déterminants dans la prise de décision à s'engager en politique ou pas.

En ce sens, il serait à propos qu'un éventuel comité indépendant au pouvoir exécutoire se penche sur les conditions de travail des députés sous un axe de conciliation travail-famille. Et pourquoi un comité indépendant? Non seulement parce que nous ne devrions pas être juge et partie d'une telle décision, comme on l'a abondamment répété, mais aussi parce que nous avons besoin de recul pour réfléchir aux meilleures mesures à adopter en termes de conciliation. Les situations et les besoins peuvent tellement différer d'un député à un autre. Et nous avons besoin que les mesures déployées soient durables dans le temps et pas uniquement en fonction des besoins du moment.

Par exemple, actuellement, mon collègue de Gouin en a parlé, les députés disposent d'une banque de déplacements payés selon leur type de circonscription. Dans mon cas, je dispose d'une possibilité de 60 déplacements pour moi-même et seulement cinq déplacements pour les membres de ma famille. Vous comprendrez qu'avec une enfant en bas âge, une circonscription éloignée et des obligations à Québec il est nécessaire de faire régulièrement voyager ma famille jusqu'à moi. Ainsi, un comité indépendant pourrait se pencher sur la possibilité de permettre un plus grand nombre de déplacements payés pour les députés avec des jeunes enfants.

D'ailleurs, au chapitre des déplacements, vous comprendrez qu'en cas de grossesse il y a des enjeux de santé dont il faut tenir compte lors de longs déplacements. Or, cette expertise-là, moi, je ne l'ai pas. C'est pourquoi il est fondamental d'impliquer des gens compétents dans le processus. Vous comprendrez que je vous présente un exemple bien personnel pour illustrer des besoins qui pourraient concerner bien d'autres députés.

Aussi, des meilleures conditions de conciliation travail-famille pourraient encourager des jeunes parents et des jeunes mères à faire leur entrée en politique, définitivement. Il faut donc le voir comme une manière d'améliorer l'accès à ce Parlement à un plus grand nombre de Québécoises et de Québécois. Ou même des meilleures conditions pourraient permettre à plus de femmes de prendre de plus grandes responsabilités dans cette Chambre et faire craquer graduellement le persistant plafond de verre. N'est-ce pas ça, la démocratie, Mme la Présidente?

En terminant, je souhaite réitérer l'opposition de notre groupe parlementaire à ce projet de loi, qui manque de légitimité et qui passe à côté d'une vraiment belle opportunité de revoir l'ensemble de nos conditions. Et j'espère, pour l'avenir, que les parlementaires feront de meilleurs choix, qui reflètent une volonté de transparence et de hauts standards éthiques. Cela me semble être une forme de respect élémentaire envers les citoyennes et les citoyens qui nous ont élus. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

M. Alexandre Leduc

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Étant moi-même un jeune parent, je ne peux que souscrire entièrement aux propos de ma collègue de Rouyn-Noranda—Témiscamingue. C'est quelque chose sur lequel j'aimerais qu'on travaille également.

L'essentiel de ma présentation, qui ne sera pas très longue, va faire... ou en tout cas tenter de faire un parallèle entre le projet de loi n° 19 et le dossier d'ABI. Surprenant, peut-être, mais, vous allez voir, on va s'amuser ensemble.

En effet, les parallèles sont nombreux à faire, à commencer par le fait que, dans un conflit de travail comme celui-là, on s'attend à ce que le gouvernement et son premier ministre en particulier fassent preuve d'une certaine neutralité ou, en tout cas, jonglent avec ce concept de neutralité. Et, dans le cas du projet de loi n° 19, le premier ministre refuse, en quelque sorte, de confier la rémunération des députés à un comité neutre comme on le demande. Et, dans le cas d'ABI, on l'a vu, malheureusement ça n'a pas été facile pour le premier ministre de faire preuve de neutralité.

Et mes collègues du Service de la recherche m'ont sorti quelques exemples de citations qui démontrent, en quelque sorte, cette absence de neutralité, et je vais vous les lire. Donc, il a été dit, soit en cette Chambre soit ailleurs dans les médias, en référence, bien sûr, au dossier d'ABI : «Ça n'a pas de bon sens.» «Un syndicat qui en demande trop.» «Il y a un problème.» «Il y a exagération du côté syndical.» «On joue avec le feu.» «C'est important d'être raisonnable.» Et : «Le syndicat devrait faire plus de compromis.» Et là, Mme la Présidente, ce que je vais faire, c'est que je vais faire un discours alentour du projet de loi n° 19 en insérant ces expressions qui ont été utilisées par le premier ministre. C'est parti.

Mme la Présidente, ce que plusieurs de nos concitoyens trouvent qui n'a pas de bon sens, c'est que ce soient les députés qui fixent eux-mêmes leur propre rémunération. S'ils voyaient un employeur conférer une telle prérogative à ses travailleurs, on est pas mal sûrs qu'avec sa philosophie le premier ministre qualifierait ça de stoff de junior. Déjà, avec une rémunération de plus du double de la moyenne de leurs commettants, certains citoyens considèrent que ce sont les députés qui en demandent trop. Comment ne pas comprendre nos citoyens qui considèrent qu'il y a un problème avec le mode de fixation actuel de rémunération des députés et qui craignent qu'il y ait exagération?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le député, compte tenu de l'heure, je me dois de vous demander si vous avez terminé votre intervention. Vous ne l'avez pas terminée?

Alors, je vais suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures, et vous pourrez terminer à notre retour.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 1)

Le Vice-Président (M. Picard) : Bon après-midi à tous. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

L'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale à la suite de l'adoption de certaines mesures fiscales par le Parlement du Canada. Il reste maintenant 17 min 50 s à M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve. Veuillez poursuivre.

M. Leduc : Merci, M. le Président. Pour remettre un peu en contexte, j'étais en train de faire un parallèle, du moins essayer de faire un parallèle entre l'adoption du projet de loi n° 19 et le dossier ABI alentour du concept de la neutralité. Parce que ce qu'on cherche à faire, évidemment, avec le projet de loi n° 19, du moins dans notre intention, à Québec solidaire, en y attachant un amendement avec le comité indépendant exécutoire, c'est d'apporter un élément de neutralité. Et le parallèle à faire avec ABI, le dossier ABI, c'est que le premier ministre s'est sorti lui-même d'une position de neutralité qu'il aurait dû avoir alentour du dossier. Alors, ce qu'on s'est amusés à faire, on est allés chercher des citations qui ont été dites soit ici en Chambre ou ailleurs, là, dans ses différentes prises de position alentour de ce dossier-là et on les a remis en contexte alentour, donc, d'arguments pour valider notre position quant au projet de loi n° 19.

Donc, je fais la liste des citations et ensuite je vous ferai le discours. Bon, ce qui a été dit en matière de déclarations du premier ministre sur le dossier ABI, les voici : «Ça n'a pas de bon sens!» «C'est du stoff de junior.» «Un syndicat qui en demande trop.» «Il y a un problème, il y a exagération.» «On joue avec le feu.» «C'est important d'être raisonnable.» Et «le syndicat devrait faire plus de compromis».

Alors, M. le Président, ce que plusieurs de nos concitoyens trouvent qui n'a pas de bon sens, c'est que ce soient les députés qui fixent eux-mêmes leur propre rémunération. S'ils voyaient un employeur conférer une telle prérogative à leurs travailleurs, on est pas mal sûrs qu'avec sa philosophie, le premier ministre qualifierait ça de stoff de junior. Déjà, avec une rémunération de plus du double de la moyenne de leurs commettants, certains citoyens considèrent que ce sont les députés qui en demandent trop. Comment ne pas comprendre nos concitoyens et concitoyennes qui considèrent qu'il y a problème avec le mode de fixation actuel de rémunération des députés et qui craignent qu'il y ait exagération? Avec le niveau de confiance actuel envers les élus, on joue avec le feu, M. le Président. Et, pour les travailleurs d'ABI, le PM ne trouve pas raisonnable de vouloir conserver sa rémunération par le biais d'une entente négociée dans un contexte équitable, alors comment peut-il aujourd'hui nous dire qu'il est raisonnable que les députés fassent la même chose pour ajuster leurs salaires au taux octroyé?

M. le Président, nous ne nous opposons pas à ce que le salaire des députés soit révisé, mais peut-être lui, le premier ministre, peut-il faire un compromis et se rallier à notre proposition de confier la question à un comité neutre indépendant et dont les recommandations seraient exécutoires? Voilà pour le petit exercice, M. le Président.

J'aurais deux autres points en lien avec l'intervention aujourd'hui sur ce dossier-là. Le premier, c'est : une des premières choses que j'ai eu à faire ici, lorsque je suis arrivé en novembre, peu après notre élection, ça a été d'aller écouter les détails d'une présentation sur un rapport qui concernait la rémunération des juges. Et ça a été assez instructif, je ne connaissais pas ce système-là. Et on s'est fait expliquer assez bien qu'il y a donc évidemment séparation des pouvoirs entre le pouvoir législatif exécutif et le pouvoir judiciaire. Pour cette raison, ce n'était pas le législatif, c'est-à-dire nous, ici présents, qui votons le salaire des juges. En même temps, ce ne sont pas, donc, les juges eux-mêmes qui se décrètent leurs propres salaires, leurs propres conditions de travail. Donc, qu'est-ce qu'il se passe? Bien, il se passe quelque chose d'intéressant. Il se passe qu'il y a un comité d'anciens juges, des ex-juges à la retraite, qui est formé, qui ont la tâche d'entendre des représentations de l'association des différentes cours, des différents types de juges qui leur font des représentations en lien avec leurs conditions de travail, ce qu'ils souhaiteraient, etc. Ils font des comparaisons et ensuite ils font un rapport où ils décrètent les conditions de travail des juges. Donc, ce ne sont pas les juges eux-mêmes, malgré la séparation des pouvoirs, qui décident de leurs propres salaires, de leurs propres conditions de travail.

Et, dans cette Chambre, alors que je suis responsable du dossier de la justice pour ma formation politique, j'étais appelé à commenter ce dépôt-là, cette motion-là qui était déposée par la ministre de la Justice. Et, dans mon intervention, j'ai fait un parallèle, donc je disais que c'était un système intéressant, qui pourrait nous faire réfléchir sur la façon dont nous-mêmes, ici, les députés, déterminons notre salaire. Et, au moment où je faisais ce parallèle-là, plusieurs des collègues des différentes formations politiques ont hoché de la tête en disant : C'est vrai, c'est intéressant. C'est quelque chose qui pourrait nous alimenter dans notre réflexion. C'est un peu triste qu'aujourd'hui ces hochements de tête là ne se transforment pas en une conversation plus en détail sur la proposition qu'on met sur la table, parce qu'il y a lieu, en effet, de se poser la question de l'indépendance des députés quant au décret de leurs conditions de travail.

Et mon deuxième exemple que je veux utiliser, M. le Président, parvient de mon expérience. Avant d'être élu ici, le 1er octobre, j'étais un conseiller syndical, c'est l'essentiel de mon parcours professionnel jusqu'à aujourd'hui, M. le Président, j'étais dans le milieu syndical. Et les grandes centrales, bien sûr, sont des employeurs, j'étais, donc, moi-même un employé de la centrale syndicale, de la FTQ, pour la nommer, et, à titre de conseiller syndical, j'avais un syndicat. Bon, ça commence à être un peu kafkaïen, mais les conseillers syndicaux ont un syndicat, eux autres aussi, et on avait, donc, une relation patron-employé avec les élus, le président, le secrétaire général de la FTQ. Donc, tout ça, c'est normal, c'est assez standard dans plusieurs milieux de travail. Mais donc il y avait une relation, une convention collective, il y avait un échange. Mais qui détermine les conditions de travail de la tête de la centrale syndicale, des élus de la FTQ? Bien, je vous apprends peut-être, M. le Président, que ce ne sont pas eux-mêmes qui se lèvent le matin, le président, le secrétaire général de la FTQ, et qui décrètent eux-mêmes leurs conditions de travail. Il y a un processus, avec des membres du syndicat, soit nommés de la base ou avec des gens de l'externe qui sont à la retraite et qui entendent des représentations, qui font des comparatifs et qui déposent un rapport concernant la hausse de rémunération des dirigeants en séance, dans les instances, pour que ça soit ratifié par les membres.

Donc, dans une organisation démocratique comme celle-là, comme un syndicat l'est, les élus, qui sont élus par la base, ne décrètent pas eux-mêmes leurs conditions de travail. Donc, un parallèle intéressant qui est à faire ici, avec des adaptations, bien sûr, ce n'est pas la même réalité. Mais, encore une fois, nous, comme élus du peuple québécois, auquel nous sommes redevables, il y a quelque chose à se poser comme question que nous soyons tout seuls à décréter nos conditions de travail. Il faudrait certainement s'intéresser à d'autres manières de faire. On a un amendement qui est sur la table, on a des choses qui sont débattues, je pense qu'il y a là une porte ouverte, mon collègue de Gouin tantôt parlait de la tempête parfaite, je suis d'accord avec lui, bien sûr.

Et je terminerais en faisant un petit clin d'oeil au passé. On a référé au fait que ça faisait depuis les années 70, si je ne me trompe pas, que ce débat-là est dans cette enceinte et qu'on n'arrive jamais à la conclure à la direction que tout le monde pense consensuelle, c'est-à-dire un comité indépendant et exécutoire.

Mais moi, je demeure un optimiste, M. le Président, et alors que je prenais conscience de la vie politique et de ses enjeux, je m'étais fait à l'idée que, de mon vivant, je ne verrais jamais le nouveau CHUM. Or, il est construit à Montréal, on peut y aller, j'y suis d'ailleurs allé il y a quelques semaines pour une intervention d'une personne que je connais. Je ne pensais pas, de mon vivant, voir la 30. Or, en Montérégie, la 30 est bel et bien construite, je l'utilise régulièrement pour aller voir ma famille dans le Suroît. Donc, on ne pensait jamais voir le mode de rémunération des députés être réformé, j'y crois, M. le Président, je le verrai de mon vivant, alors j'espère que ce sera peut-être pendant cette législature. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. D'autres interventions? Mme la députée de Mercier.

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Merci, M. le Président. J'espère qu'aussi de mon vivant on va pouvoir voir peut-être des lignes de métro bleue, et rose, et d'autres couleurs.

Donc, quelque temps après mon élection, j'ai eu le plaisir d'être nommée whip par ma formation politique, et ce plaisir-là s'accompagne par le fait que je siège au Bureau de l'Assemblée nationale. Et, très rapidement, après quelques réunions au Bureau de l'Assemblée nationale, donc à l'automne passé, on a commencé à discuter de la question des allocations des députés, donc de les compenser, de compenser l'imposition fédérale de la portion des allocations qui ne l'était pas. Et, en tant que nouvelle députée, honnêtement, ça ne faisait pas très longtemps que j'ai appris qu'on recevait un montant dans notre compte en banque régulièrement et que ce montant-là, bien, il n'était pas imposé. J'étais extrêmement étonnée et je suis certaine de ne pas avoir été la seule. C'est la même chose, il y a beaucoup, dans cette législature, de nouveaux députés, de nouvelles députées qui ont eu la même surprise que moi, parce que, dans la population, même si on parle du salaire des députés dans les médias de temps en temps, souvent de façon négative, ce genre de détail là échappe à la population et échappait même à moi-même avant d'être élue.

• (15 h 10) •

Et donc, même juste pour illustrer cette incompréhension-là de ces montants-là, ne sachant pas exactement à quoi ça sert, je me rappelle, lors de la journée d'accueil, il y avait... donc, on était là puis on se faisait expliquer nos conditions de travail, et il y avait même des collègues qui, aujourd'hui, sont ministres, à l'époque, ils ne savaient pas qu'ils allaient l'être, ils ont posé beaucoup de questions pour comprendre à quoi servait ce montant-là. Pourquoi est-ce qu'on l'a? Pourquoi, par exemple, on ne le déclarait pas comme une dépense? Parce que, venant du monde de travail ordinaire, si je peux dire, bien, c'était tout à fait normal que, quand on a des dépenses, qu'on les déclare puis, après ça, qu'on réclame le remboursement, c'était dans la logique des choses, c'était habituel.

Mais, avec le temps, après ça, bien, on s'est habitués, on a des montants qui sont destinés à des dépenses particulières, que ce soit le transport ou d'autres dépenses de représentation que notre travail nous amène à faire, et qui ne sont pas imposés, pas du tout. Même qu'au fédéral, si le fédéral a décidé maintenant de dire : Bien, on va arrêter cette vieille pratique là puis on va l'imposer... parce que, pour eux, la logique, c'est que ce n'est pas juste des dépenses, que des dépenses directes, mais c'est un salaire, c'est considéré comme un salaire.

Donc, on peut comprendre que ce soit une surprise aussi pour la population générale, qui ne le savent pas d'ailleurs qu'on ne se fait pas imposer, peut-être que ce débat-là qu'on a va allumer une lumière dans la tête des gens en disant : Oups! O.K. Les salaires... reçoivent des montants d'argent pour lesquels ils ne sont imposés.

Donc, ça, ce n'est pas une anomalie. Tout à l'heure, j'entendais le leader du troisième groupe d'opposition qui disait que c'était une anomalie, le fait qu'on reçoive moins d'argent et qu'il fallait la corriger. En fait, ce qui est une anomalie, c'est plutôt le contraire, c'est le fait qu'on ne soit pas imposés pour un montant qu'on reçoit dans notre compte en banque.

Donc, pour me préparer à cette discussion-là, j'ai pris connaissance des débats, des discussions qui ont eu lieu dans la législature passée, et je ne vais pas les résumer, mon collègue le député de Gouin l'a très bien fait tout à l'heure. J'ai aussi eu le plaisir de lire le rapport L'Heureux-Dubé, et j'invite vraiment sincèrement tous les députés que cette question-là intéresse, qui se demandent pourquoi aujourd'hui on est encore à discuter de notre salade et pourquoi est-ce qu'on est imposés au fédéral, pas au provincial, et tout ça, de le lire parce que ça trace vraiment un très, très bel historique, ou peut-être aussi d'écouter l'enregistrement de l'allocution du député de Gouin.

Donc, suite à ces discussions-là, c'est là que j'ai déposé une lettre, et je vous invite aussi à en prendre connaissance, ceux qui ne sont pas membres du Bureau de l'Assemblée nationale n'ont peut-être pas lu cette lettre-là, dans laquelle on disait : Très bien, on va faire ce compromis-là d'accepter d'augmenter nos salaires pour ne pas avoir à subir l'effet de l'impôt du fédéral, mais à une condition, une condition dans laquelle on va être très, très sérieux, c'est de mettre en place ce comité exécutoire, décisionnel et pas seulement de dire : On aimerait bien le mettre en place, parce que ça, ça a été nommé, ça a été nommé aussi dans les anciennes législatures, ça a été nommé dans tous les rapports d'experts qui ont étudié la question, mais pas seulement une intention, mais que ce soit réellement un comité qui soit mis en place.

Puis, si ce n'est pas possible légalement à cause des lois actuelles... parce que, si ce comité-là prend des décisions, comme aussi je l'ai entendu tout à l'heure dans les autres interventions, le comité prend des décisions, il arrive en Chambre, et il va falloir que nous, on décide si on entérine ces décisions-là ou pas, bien, il est possible qu'on n'ait pas à toucher à ces décisions-là, ne serait-ce qu'en changeant la législation, et, dans le projet de loi n° 19, de mettre explicitement un article qui dit que ce comité-là sera mis en place et que les députés, nous n'aurons plus de droit de regard une fois qu'il aura émis ses décisions et ses recommandations, parce qu'il sera exécutoire. Mais, évidemment, avant, ce comité va faire tout le travail de consultation qui doit être fait pour comprendre la réalité du travail des députés.

Et d'ailleurs, moi, je tenais aussi à prendre la parole aujourd'hui parce qu'il y a quelques députés, sachant que je suis intervenue quand je siégeais au bureau... bien, pendant que je siégeais au Bureau de l'Assemblée nationale et que ce sujet-là était à l'ordre du jour, qui sont venus m'interpeler, qui m'ont dit : Mais nous, on habite dans des circonscriptions très, très grandes. On fait énormément de kilométrage, et même le montant qu'on reçoit actuellement, non imposé, c'est-à-dire même s'il n'y avait pas l'impôt fédéral, il n'est pas suffisant, il n'est pas suffisant, on dépasse largement. Et honnêtement je le dis, en toute honnêteté : Moi, j'ai beaucoup d'empathie pour cette situation-là, et je la comprends, même si, moi, je vis dans une circonscription à Montréal, j'ai aussi notre députée, la collègue de Rouyn-Noranda—Témiscamingue, qui, aussi, vit la même chose, qui a beaucoup de déplacements à faire, parce qu'elle a une très, grès grande circonscription avec deux bureaux, donc c'est tout à fait compréhensible. Même, je dirais même qu'il faudrait peut-être même augmenter ce montant-là s'il n'est pas suffisant pour les députés qui vivent cette situation-là.

Donc, l'idée, ce n'est pas de faire de la démagogie, de dire que nous, bien, on va juste politiser le sujet, pas du tout, ça fait 40 ans qu'on vit avec ce sujet-là. Malheureusement, comme je l'ai dit à mes collègues qui m'ont interpelé, il y a peut-être des décisions, pour toutes sortes de raisons, je ne vais pas jeter le blâme aux députés des anciennes législatures ou au ministre, je ne vais pas leur jeter le blâme pour toutes sortes de raisons comme ce qu'on est en train de vivre en ce moment, mais ils repoussaient cette décision-là, cette responsabilité-là à plus tard, et c'est ce qui fait qu'aujourd'hui on est encore en train d'en parler.

Donc, l'idée ici, derrière ça, c'est de le régler parce que, là, aujourd'hui, ça va être l'impôt fédéral, demain, ça va être, peut-être, autre chose, après-demain, ça va être une autre situation. Il va toujours avoir des raisons qui vont faire...

On a parlé aussi de la conciliation travail-famille, parce que ça évolue, on a beaucoup plus de femmes dans cette législature. Les pères aussi, les nouveaux jeunes pères aussi vont vouloir en bénéficier. Et, à chaque fois, il va y avoir des besoins différents parce que, dans une législature à travers les années, la réalité change, et nos conditions de travail n'en tiendront pas compte. Et il va falloir que nous, on décide à la pièce de les changer pour qu'on en tienne compte à chaque fois.

Et, à chaque fois, il va avoir ce malaise. Il va avoir aussi cette incompréhension dans la population. Parce que, dans la population, quand ces genres de décisions là sont prises, à moins que quelqu'un regarde textuellement tous les débats qu'on a eus, qu'il voit que tout le monde est de bonne foi, ce que moi, je suis sûre, ça passe très mal, très, très, très mal. Essayez d'expliquer, dans un souper de famille, votre salaire, essayez de l'expliquer, puis les gens ne comprendront pas pourquoi nous, on n'est même pas imposés au niveau provincial, alors que... Hier, je me rappelle, pour RénoVert, lors de la discussion sur la motion du mercredi, on parlait aussi que RénoVert, un des avantages qu'il avait, c'est qu'il permettait d'éviter le travail au noir, et donc pour que l'État puisse percevoir des taxes. Donc, on s'attend... et le ministre des Finances avait dit : Bien, on s'attend à ce que les citoyens... on n'a pas besoin d'un programme RénoVert pour que les citoyens fassent leur devoir de citoyen qui est de payer leurs taxes. Ça, c'est leur obligation, et je m'attends à ce que les citoyens le paient. Bien, c'est la même chose, les citoyens s'attendent à ce que nous aussi, on ait les mêmes conditions puis qu'on n'ait pas de privilège qu'eux n'ont pas. Eux, le seul pouvoir qu'ils ont, c'est de négocier leur salaire pour améliorer leurs conditions, mais ce ne sont pas eux et elles à la fin qui prennent la décision, et c'est tout à fait une question de transparence, et de justice, et d'équité avec le reste de la population.

Quand on fait des sondages, j'en parlais aussi tout à l'heure avec un collègue député, par rapport au métier, on n'arrive pas en haut de la liste, et ce n'est pas pour rien. Ce n'est pas pour rien. Et, malheureusement, ce genre de décision là qu'on va prendre maintenant, même si elle est explicable puis on peut l'expliquer, le fait qu'on ne veuille pas mettre dans le projet de loi... et qu'on se contraigne dans le projet de loi que ce comité exécutoire soit mis en place puis que nous, on enlève les mains des conditions de travail, bien, si on ne le fait pas, ça ne démontre pas notre sérieux, bien, le cynisme dans la population ne va faire que s'agrandir, s'agrandir et s'agrandir, et ce n'est pas une bonne chose pour nous et pour notre démocratie.

Je voudrais terminer avec un dernier point, qui est la fierté, la fierté qu'on a de siéger, ici, au salon bleu. Je suis sûr que les nouveaux comme les anciens députés, vous sentez cette fierté-là de dire que nous, on est des représentants du peuple, qu'on est là, qu'on a une charge, une fonction qui est très, très humble, qu'on ne fait pas ça uniquement pour l'argent ou pour la gloire, j'espère, mais on le fait vraiment pour les bonnes raisons. Et moi, je la sens, cette fierté, je la sens aussi auprès de mes collègues de tous les partis. Et ce qui est important, c'est que... c'est important aussi, si on veut que les gens aussi soient aussi fiers de nous, de notre travail, il faut que nous aussi, on soit fiers de ce qu'on fait puis qu'on le démontre. Et c'est par des gestes comme ceux-là qu'on peut le démontrer.

Si on regarde ce qui se fait ailleurs, neuf parlements sur 14 au Canada disposent d'un comité de rémunération qui soit indépendant et exécutoire. Il y en a d'autres qui ont d'autres sortes de comités qui sont mis en place de façon temporaire. Moi, j'aimerais ça qu'on fasse partie... qu'on soit à l'avant-garde, qu'on ne soit pas parmi les derniers et qu'on suivre... qu'on regarde ce que les autres font et qu'on ne soit pas fiers. J'aimerais ça que nous, on fasse, cette fois-là, avec ce projet de loi, de le modifier, de ne pas le voter tel qu'il est mais de mettre la condition que j'ai adressée au Bureau de l'Assemblée nationale, avec ce comité exécutoire, qu'on le mette en place puis qu'on soit fiers puis qu'on soit à l'avant-garde dans notre Assemblée nationale. Je pense que les gens s'attendent à ça.

Donc, après 40 ans de tergiversations, cette Chambre a l'occasion de marquer l'histoire en étant la première à légiférer pour qu'une fois pour toutes on n'ait plus jamais à décider à la pièce de nos conditions de travail. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, je vais mettre aux voix.

Donc, le principe du projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale à la suite de l'adoption de certaines mesures fiscales par le Parlement du Canada est-il adopté? Oui, M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Nadeau-Dubois : On va demander un vote par appel nominal, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Picard) : Que l'on appelle les députés.

• (15 h 20    15 h 30)

Le Vice-Président (M. Picard) : À l'ordre, s'il vous plaît! Merci.

Mise aux voix

Nous allons maintenant procéder à la mise aux voix du principe du projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale à la suite de l'adoption de certaines mesures fiscales par le Parlement du Canada.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Jolin-Barrette (Borduas), M. Laframboise (Blainville), Mme D'Amours (Mirabel), Mme Chassé (Châteauguay), M. Lemay (Masson), M. Simard (Montmorency), Mme Lavallée (Repentigny), M. Martel (Nicolet-Bécancour), M. Roberge (Chambly), M. Bonnardel (Granby), M. Lévesque (Chauveau), Mme Lachance (Bellechasse), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Lamontagne (Johnson), M. Carmant (Taillon), Mme Blais (Prévost), M. Dubé (La Prairie), Mme Laforest (Chicoutimi), M. Skeete (Sainte-Rose), Mme Hébert (Saint-François), M. Dufour (Abitibi-Est), Mme Proulx (Berthier), Mme Charest (Brome-Missisquoi), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme Proulx (Côte-du-Sud), M. Lafrenière (Vachon), M. Poulin (Beauce-Sud), M. Émond (Richelieu), M. Bachand (Richmond), Mme IsaBelle (Huntingdon), M. Chassin (Saint-Jérôme), Mme Foster (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. Bélanger (Orford), Mme Picard (Soulanges), Mme Jeannotte (Labelle), M. Tardif (Rivière-du-Loup—Témiscouata), M. Asselin (Vanier-Les Rivières), M. Reid (Beauharnois), Mme Dansereau (Verchères), M. Lévesque (Chapleau), M. Thouin (Rousseau), M. Tremblay (Dubuc), Mme Blais (Abitibi-Ouest), M. Campeau (Bourget), Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice), M. Caron (Portneuf), Mme Grondin (Argenteuil), M. Girard (Lac-Saint-Jean), Mme Lecours (Les Plaines), M. Lemieux (Saint-Jean), Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac), M. Lamothe (Ungava), M. Bussière (Gatineau), M. Allaire (Maskinongé), M. Provençal (Beauce-Nord), M. Jacques (Mégantic).

M. Proulx (Jean-Talon), M. Leitão (Robert-Baldwin), Mme Thériault (Anjou—Louis-Riel), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), Mme St-Pierre (Acadie), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), M. Tanguay (LaFontaine), Mme David (Marguerite-Bourgeoys), M. Rousselle (Vimont), Mme Montpetit (Maurice-Richard), Mme Ménard (Laporte), Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne), M. Fortin (Pontiac), Mme Nichols (Vaudreuil), Mme Charbonneau (Mille-Îles), Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé), Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis), M. Derraji (Nelligan), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), Mme Sauvé (Fabre), M. Ciccone (Marquette).

M. Ouellet (René-Lévesque), M. LeBel (Rimouski), M. Roy (Bonaventure), Mme Hivon (Joliette), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).

Le Vice-Président (M. Picard) : Que les députés contre veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Nadeau-Dubois (Gouin), Mme Ghazal (Mercier), Mme Labrie (Sherbrooke), M. Fontecilla (Laurier-Dorion), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dorion (Taschereau), M. Zanetti (Jean-Lesage).

Le Vice-Président (M. Picard) : Y a-t-il des abstentions? M. le secrétaire général.

Le Secrétaire : Pour :  83

                     Contre :             7

                     Abstentions :     0

Le Vice-Président (M. Picard) : Le principe est adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la Commission des institutions

M. Schneeberger : Oui. Alors, M. le Président, conformément à l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que le projet de loi n° 19, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale à la suite de l'adoption de certaines mesures fiscales par le Parlement du Canada, soit déféré à la Commission des institutions pour son étude détaillée.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Picard) : Adopté. M. le leader du gouvernement, pour la suite de nos travaux.

M. Schneeberger : Oui. Alors, M. le Président, veuillez appeler l'article 8 du feuilleton.

Projet de loi n° 21

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Picard) : À l'article 8 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 29 mai 2019 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 21, Loi sur la laïcité de l'État. Y a-t-il des interventions?

Je vais suspendre les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 34)

(Reprise à 15 h 35)

Le Vice-Président (M. Picard) : Donc, nous reprenons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 21, Loi sur la laïcité. Hier, lorsque nous avons terminé, il restait 21 min 13 s à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. La parole est à vous, Mme la députée.

Mme Hélène David (suite)

Mme David : Merci beaucoup, M. le Président. Effectivement, hier, on a quand même fait un 40 minutes pour un projet de loi d'une très, très, très grande importance. On a parlé des signes religieux, juste pour se remettre un peu en mémoire, des imprécisions, des incohérences, du manque de balises du projet de loi n° 21, de l'inapplicabilité du projet de loi au réseau de l'éducation, aux fonctionnaires, de l'interdiction aux enseignants et enseignantes, évidemment de la notion de prosélytisme, d'endoctrinement, de la Loi sur l'instruction publique, du Programme de formation de l'école québécoise, qui balise et sanctionne les enseignants qui tenteraient d'endoctriner les élèves. On a touché à beaucoup, beaucoup de points. Nous étions rendus à un point important, et non le moindre, qui est le recours à la disposition de dérogation.

Alors, il est clair, M. le Président, que nous ne sommes pas d'accord avec de nombreux aspects de ce projet de loi, mais le plus choquant et inquiétant demeure l'utilisation, aux articles 29 et 30, de ce qu'on appelle la clause dérogatoire. Alors, ce faisant, le ministre choisit de soustraire son projet de loi au contrepoids essentiel des tribunaux. Le gouvernement aime dire que son projet de loi est démocratique, car appuyé par la majorité, mais la démocratie comme nous la connaissons, ce n'est pas que le pouvoir de la majorité, c'est aussi la protection des minorités et le droit fondamental — fondamental — de s'adresser aux tribunaux.

Le gouvernement banalise l'utilisation de cet outil exceptionnel en répétant le plus souvent possible que ce genre de clause fut maintes fois utilisée par le passé. Mais il passe trop souvent sous silence que les exemples donnés par le gouvernement réfèrent à des dérogations techniques préventives qui ne sont pas contestées et qui passeraient le test de l'article 1 de la charte. Plusieurs estiment d'ailleurs que l'adoption d'une clause dérogatoire de cette importance, sans l'unanimité, je le répète, sans l'unanimité de l'Assemblée nationale, marquerait un précédent très, très important.

«De même, la Commission [des droits de la personne et de la jeunesse] a précisé que le recours à la clause dérogatoire de la charte constituait un geste grave — ce sont leurs mots — qui ne doit être entrepris qu'avec la plus grande circonspection et qui n'est justifié que dans des circonstances exceptionnelles.

«[...]Le recours à la clause dérogatoire devrait notamment être justifié par la nécessité de protéger d'autres droits ou libertés reconnus. Ce fut d'ailleurs le cas de la majorité des dérogations à la charte québécoise survenue depuis son adoption. La commission a ainsi répertorié 35 lois qui, depuis l'adoption depuis 1975, ont inclus une clause permettant de déroger à la celle-ci.

«[...]Pour les fins de son application, le projet de loi n° 21 envisage plutôt la suspension des droits protégés aux articles 1 à 38 de la charte sans qu'on ait démontré que la situation exigeait un geste d'une telle gravité. Au contraire, les données dont dispose la commission eu égard aux demandes relatives à la liberté de religion, au droit à l'égalité ou à l'obligation d'accommodement raisonnable démontrent que la charte répond adéquatement aux problèmes qui peuvent survenir ponctuellement en cette matière et assure la protection du droit à l'égalité comme des autres droits qu'elle garantit.

«Le recours à la clause dérogatoire apparaît en outre difficilement justifiable en regard des objectifs poursuivis par le projet de loi n° 21. [...]le principe de laïcité est au Québec interprété comme un moyen visant deux finalités, à savoir la protection du droit à l'égalité puis la liberté de conscience et de religion protégés par la charte. L'article 2 du projet de loi n° 21 le confirme d'ailleurs. Devoir déroger aux droits protégés par la charte afin d'assurer la laïcité de l'État québécois semble donc contradictoire avec les finalités mêmes de ce principe. Cela illustre plutôt que les moyens choisis pour mettre en oeuvre la laïcité de l'État ne correspondent pas à ses finalités et qu'ils le traduisent de façon erronée. Le même commentaire s'applique d'ailleurs à propos de la primauté des dispositions du projet de loi n° 21 prévue à l'article 11 de celui-ci. Les articles 11 et 29 du projet de loi permettraient ainsi de faire prévaloir ses dispositions sur toutes lois postérieures à son adoption ainsi que sur la charte. L'effet pratique de ces articles serait d'écarter les dispositions de la charte qui ont permis d'assurer la laïcité de l'État et de confirmer l'effectivité juridique de celle-ci. En fait, le projet de loi propose d'affirmer la laïcité de l'État de façon concurrente au modèle actuel de laïcité respectueux des droits et libertés, sans égard aux problèmes de cohérence que cela pourrait entraîner quant à la mise en oeuvre des principes sur lesquels elle se fonde.»

• (15 h 40) •

Le Pr Louis-Philippe Lampron indique aussi avec justesse : «...ce que je tente de mettre de l'avant — je le cite — [c'est qu'il] est insuffisant de référer à la simple majorité de la population pour être capable de justifier toutes les mesures législatives. Ça, c'est l'esprit même des droits et libertés fondamentaux, et les droits et libertés fondamentaux, ça ne se résume pas à la Charte canadienne des droits et libertés. Alors, on peut, bien sûr, avoir des problèmes avec la légitimité d'application de la charte canadienne au Québec en raison du fait que le Québec n'a toujours pas signé la Constitution de 1982, mais les droits et libertés de la personne, ça va beaucoup plus loin que ça et ça s'inscrit dans un processus international qui implique un socle de légitimité en deçà duquel on n'est pas censé être capable d'aller, même si on a l'appui de la population, et ça, ça implique l'examen des décisions par un tiers indépendant.» Cette citation devrait être mûrement réfléchie, M. le Président.

Dans son mémoire présenté à la commission, le professeur de droit Pierre Bosset faisait remarquer que les articles 29 et 30 ne faisaient pas que déroger au droit à la liberté religieuse, mais également à l'entièreté des droits et libertés protégés par la charte québécoise. «Québécoise». Comme il le souligne si bien : «La liste des droits et libertés touchés par cette dérogation donne le vertige.» «Donne le vertige». Je le cite : «L'ampleur des dérogations prévues dans le projet de loi est hors de proportion par rapport à l'objectif de celui-ci : "affirmer la laïcité de l'État et préciser les exigences qui en découlent". Elles affectent des droits ou libertés dont l'exercice, on le voit, ne menace aucunement de compromettre la laïcité. Il n'est pas inutile de noter que, lorsque des dérogations ont été faites dans le passé au nom d'intérêts jugés supérieurs, en l'occurrence la protection du visage français du Québec dans l'affichage commercial — on y réfère souvent — ces dérogations se sont limitées aux droits les plus pertinents et ne visaient pas alors l'ensemble des droits auxquels il serait théoriquement possible de déroger. Le projet de loi n° 21 n'a pas ce sens de la mesure.» Je cite toujours Pierre Bosset.

 Le Pr Pierre Bosset nous disait, sagement, que recourir à la clause dérogatoire était une forme de monologue, que le gouvernement refusait ainsi tout dialogue entre le pouvoir politique et judiciaire. Comme plusieurs groupes entendus ou experts qui se sont exprimés depuis le dépôt du projet de loi, nous considérons que l'inclusion de ces clauses dans le projet de loi est l'aveu de son inconstitutionnalité. Si ce n'est pas le cas, que le gouvernement accepte de redonner ces droits aux citoyens et soumette rapidement son projet de loi à la Cour d'appel par le processus de renvoi. Sinon, nous considérons que le ministre admet qu'il viole les droits fondamentaux que cette même Assemblée a votés pour ses citoyens et ses citoyennes, et ce, à l'unanimité en juin 1975.

Vous savez, faire le choix du vivre-ensemble, de l'acceptation et de l'ouverture, c'est probablement un choix plus exigeant que celui de prôner l'interdiction, M. le Président. Oui, s'ouvrir à l'autre dans tout ce que cela implique de nouveauté, de curiosité, mais aussi d'inconfort, voire quelquefois de malaise, c'est probablement un choix plus exigeant que prôner l'interdiction, mais c'est un noble choix. Alors que beaucoup de sociétés sont actuellement traversées par des positions d'exclusion et d'intolérance, les choix que nous faisons ne sont pas banals. Les opinions passent, mais les chartes et leurs droits fondamentaux traversent le temps et les décennies.

Dire que le gouvernement est légitime de légiférer sur la laïcité, c'est une démarche de laquelle on peut tous convenir, mais c'en est une autre de prétendre que c'est légitime de le faire de façon précipitée, sans cohérence épistémologique ni fondement solide avec un recours à la disposition de dérogation.

Je suis inquiète des conséquences qu'aura ce projet de loi sur les minorités. Je suis très inquiète. Certaines dispositions risquent de contribuer à une détérioration du climat social déjà difficile par moments. Il envoie des messages inquiétants sur la place que notre société accorde aux femmes. La CSN nous a dit s'inquiéter d'un repli, un retour à la maison de certaines femmes qui participent actuellement pleinement à la société, et, finalement, à une certaine forme de ghettoïsation de certaines communautés.

Donc, ce que le projet de loi essaie de combattre, il risque fort bien de l'accentuer lui-même. Le projet de loi du ministre a d'ailleurs commencé à produire des effets. Le groupe Justice Femme a constaté une augmentation anormale des incidents ainsi qu'une détérioration du climat social. Elle a reçu un nombre inquiétant de plaintes et d'appels depuis le dépôt du projet de loi n° 21, allant des regards méprisants ou agressions verbales, passant par des cas de harcèlement au travail, allant jusqu'à l'agression physique, et ce, même dans des milieux de travail qui ne sont pas visés par le projet de loi. La CSN, en commission parlementaire, a mentionné que plusieurs de leurs membres leur ont rapporté que, quand le débat sur la laïcité recommence, elles sont stigmatisées, elles reçoivent des injures, et c'est très difficile à vivre.

Donc, juste le fait d'en débattre crée une stigmatisation de ces femmes, imaginons quand la loi sera adoptée et que des femmes vont se faire refuser certains emplois ou quand, et je le crains fort, il y aura confusion dans la population quant à savoir quels types d'emplois couvre le projet de loi.

L'introduction de mesures discriminatoires additionnelles à l'entrée en emploi en éducation aura pour effet de créer une fracture sociale et du ressentiment dans les communautés ainsi marginalisées pour des décennies à venir. Même si le projet de loi ne vise que certains secteurs d'emploi, il semble ouvrir la porte à beaucoup plus d'hostilité à l'égard des femmes qui portent le voile et qui ont déjà beaucoup de difficultés à trouver un emploi à la hauteur de leurs compétences. Il est indéniable que ce projet de loi aura des impacts majeurs pour très longtemps.

J'interpelle à nouveau le ministre et la ministre de la Condition féminine — j'ai bien essayé — pour qu'ils prennent conscience de l'importance que leur projet de loi aura sur les femmes du Québec. L'emploi est le meilleur facteur d'intégration sociale et d'autonomie. Pourtant, le gouvernement s'apprête à en limiter l'accès. Je réitère encore une fois que je demande, comme plusieurs groupes, d'ailleurs, notamment la CSN et la ville de Montréal, que le gouvernement réalise une ADS, une analyse différenciée selon les sexes, sur le projet de loi.

Qu'est-ce que l'ADS? Petite parenthèse. Le Secrétariat à la condition féminine définit l'analyse différenciée selon les sexes comme «un processus d'analyse favorisant l'atteinte de l'égalité entre les femmes et les hommes par l'entremise des orientations et des actions des instances de la société [tant] sur le plan local, régional, national».

La définition ajoute que l'analyse différenciée selon les sexes «a pour objet de [cerner] de façon préventive les effets distincts sur les femmes et les hommes que pourra avoir l'adoption d'un projet à l'intention des citoyennes et [...] citoyens, et ce, sur la base des réalités et des besoins différenciés des femmes et des hommes.

«L'analyse différenciée selon les sexes est [...] un outil qui vise la prévention des inégalités entre les sexes en proposant une lecture plus éclairée des phénomènes sociaux.

«Le traitement identique des individus — et ça, c'est important — n'assure pas nécessairement des résultats similaires : les lois, les politiques et les pratiques, malgré leur apparente neutralité, produisent ou maintiennent des inégalités entre les hommes et les femmes. L'objectif de l'analyse différenciée selon les sexes est d'aller au-delà de l'égalité de droit pour atteindre l'égalité de fait par la mise en lumière des réalités et des besoins différenciés des femmes et des hommes.

«[L'analyse différenciée selon les sexes] est utilisée pour comprendre et prévenir le fait que les contextes socioéconomiques, les politiques et institutions ainsi que les règles organisationnelles peuvent avantager ou désavantager certains groupes.»

Alors, on est exactement dans cette situation ici, du projet de loi n° 21, qui... On l'a dit et redit, et ce n'est pas que nous, beaucoup de groupes sont venus le dire, particulièrement en enseignement, que les femmes vont être beaucoup plus touchées que les hommes, parce qu'en partant 75 % du corps enseignant, c'est un corps d'enseignantes. Et les enseignantes sont donc beaucoup plus touchées, et il y a beaucoup plus, évidemment, de femmes qui, entre autres, portent des signes plus visibles, et on pense évidemment au hidjab.

• (15 h 50) •

Le gouvernement nous dit vouloir passer à autre chose, qu'il faut procéder rapidement, sous prétexte que le débat a assez duré. D'autres acteurs de la société parlent d'un débat qui a assez traîné. Et le vivre-ensemble, c'est le fondement même de ce projet de loi, le vivre-ensemble, c'est vieillir ensemble, c'est rire ensemble, c'est pleurer ensemble, c'est être fier ensemble du Québec que nous construisons pour l'avenir. Au contraire d'utiliser l'expression, comme on l'entend trop souvent — plus souvent en dehors de la Chambre qu'ici, d'ailleurs — d'un «débat qui traîne», utilisons plutôt celle de «débat qui construit», qui devrait construire. Et, pour cela, aucune date de péremption ne doit être fixée. Le vivre-ensemble est et a été, de tout temps, à toutes les époques et partout sur la planète, un défi colossal, le défi de l'humanité, celui du passé, mais aussi, et cruellement souvent, celui de l'avenir. Faisons en sorte que le Québec soit du côté du rapprochement, de l'écoute et de l'humanité, comme il l'a toujours fait.

Le projet de loi, tel que présenté, apporte une foule de nouvelles questions sur lesquelles la société et les parlementaires ne se sont pas penchés jusqu'ici. Il est profondément faux de prétendre que l'adoption de ce projet de loi dans la hâte va mettre fin au débat. Le gouvernement sait très bien qu'il s'engage dans des années de débats judiciaires.

Le gouvernement est majoritaire. Le ministre est décidé. Ce projet de loi sera adopté coûte que coûte. Nous allons jouer notre rôle de parlementaires adéquatement et jusqu'au bout. Nous avons entendu la voix des gens inquiets. Nous savons que ce projet de loi comporte des lacunes importantes. Nous ferons tout, tout en notre pouvoir pour amoindrir ses effets, pour faire de ce projet de loi un projet de loi le moins restrictif possible pour nos droits fondamentaux, pour protéger l'égalité hommes-femmes, pour s'assurer que notre État demeure un endroit accueillant et ouvert à l'autre, où tous les enfants ont une chance égale et peuvent partager les mêmes rêves. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Jean-Lesage.

M. Sol Zanetti

M. Zanetti : Merci, M. le Président. Ce projet de loi là, ce n'est pas un projet de loi sur la laïcité, en fait. Je ne suis pas le seul à dire ça. Certains intervenants l'ont dit aussi. C'est un projet de loi sur l'interdiction des signes religieux. Du point de vue de la laïcité de l'État, ce n'est pas un projet de loi qui va changer quelque chose de concret, qui va loin, qui fait quelque chose de significatif pour éloigner le pouvoir politique des institutions religieuses. C'est un projet de loi qui vise principalement à interdire les signes religieux en prétendant que cela aura un impact sur la laïcité au Québec, ce qui est une erreur.

Ce projet de loi là est aussi présenté comme un projet de loi qui est modéré. Dans la réalité, c'est un projet de loi qui est radical. Il n'est pas modéré, ce projet de loi là, d'une part parce qu'il se soustrait à la charte québécoise des droits et libertés de la personne, et pas à l'unanimité, là, et, clairement, il y aura des dissensions là-dessus. Il est très loin de ce que proposait le rapport Bouchard-Taylor, duquel par ailleurs il tente de se réclamer aussi souvent que possible. Il impose une interdiction de porter des signes religieux qui touchera beaucoup de Québécoises et de Québécois. Il va modifier la charte sans l'unanimité de la Chambre, et, s'il était adopté sous bâillon, on ne peut pas le présumer, mais ce serait un précédent inquiétant pour le Québec.

Ce projet de loi là ne fait pas consensus non plus, malgré que ce soit présenté comme ça. Je vais faire une liste des groupes qui sont venus en audition nous dire qu'ils étaient contre ce projet de loi là. Évidemment, on pourrait en nommer bien plus. Mais il n'y a pas eu tous les groupes possibles qui sont venus non plus dans les consultations, les audiences publiques. Mais, si on se restreint à la courte liste de ceux qui sont venus nous exprimer leur désaccord, bien, on peut nommer la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, le Centre consultatif des relations juives et israéliennes, l'Association des musulmans et des Arabes pour la laïcité au Québec, les Prs Charles Taylor et Jocelyn Maclure, M. Gérard Bouchard, Pr Louis-Philippe Lampron également, l'Organisme de communication pour l'ouverture et le rapprochement interculturel, la Centrale des syndicats du Québec, l'Association provinciale des enseignantes et des enseignants du Québec, la ville de Montréal, la Fédération autonome de l'enseignement, l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, la Confédération des syndicats nationaux, Me Pierre Bosset, la Fédération des femmes du Québec, la Coalition Inclusion Québec et la Ligue des droits et libertés. Et j'ajouterais aussi la Fédération des commissions scolaires du Québec, qui émettait des réserves importantes à l'égard du projet de loi.

Ces personnes et ces groupes représentent beaucoup de monde, et, si le projet de loi du ministre faisait consensus, bien, il ne susciterait pas tant d'opposition. Si c'était vraiment là qu'était rendue, là, la société québécoise, de dire : On va faire ça, il n'y aurait pas eu toute cette opposition.

Un sondage Léger, par ailleurs, publié récemment nous informait qu'une majorité des Québécois et des Québécoises n'appuieraient pas l'interdiction des signes religieux si celui-ci brimait les droits de la personne et contrevenait à la charte québécoise. Or, cette interdiction brime les droits de la personne et contrevient à la charte québécoise. Et une preuve même que le ministre reconnaît ça, bien, c'est qu'il veut soustraire son projet de loi à l'application de la charte des droits québécoise, des droits et libertés.

Alors, ce projet de loi là, il a l'air consensuel, il est représenté comme s'il était modéré, il ne l'est pas. Et, si on le montrait vraiment sous son vrai jour, bien, ses appuis fondraient énormément. Dans le sondage, ce que ça dit, c'est... quand on dit : Êtes-vous pour l'interdiction des signes religieux si ça va à l'encontre de la Charte des droits et libertés, là, des droits et libertés de la personne?, bien, l'appui descend de 20 %, et on se retrouve donc avec quelque chose qui n'a absolument pas les caractéristiques nécessaires pour être appelé un consensus ou même un mandat fort, ou quoi que ce soit. On dit que, bon, ça va brimer les droits de la personne et donc qu'il va y avoir des contestations judiciaires qui vont nous en faire prendre conscience collectivement, même si, en ce moment, il y a des gens qui prétendent que ce n'est pas le cas.

Si c'était un projet de loi sur la laïcité, au lieu de focaliser sur ce que les gens portent, sur les signes religieux, bien, on aurait parlé d'autre chose. On aurait mis dans ce projet de loi quelque chose qui est vraiment en lien avec la laïcité, c'est-à-dire qu'on aurait remis en question le financement public qu'on accorde à 138 écoles religieuses subventionnées au Québec, qui ont une mission de faire un enseignement confessionnel, payé par des fonds publics. C'est un non-sens qu'un État laïque subventionne un enseignement qui est religieux. Mais, évidemment, bon, ce n'est pas un projet de loi qui, nécessairement, vise la laïcité, donc on ne va pas dans cette direction-là.

C'est vrai que le débat sur les signes religieux au Québec dure depuis longtemps — donc je n'ai pas dit ici «laïcité», mais «sur les signes religieux» — et beaucoup de gens sont tannés d'en entendre parler, et on comprend ça parfaitement. On aimerait que ça arrête, on aimerait que la chicane cesse, on aimerait que les clivages se dissolvent, et ce projet de loi est présenté comme un antidote à la chicane, comme si on allait adopter ce projet de loi, et que, là, on allait mettre ce débat-là derrière nous, et qu'on allait pouvoir passer à autre chose. Mais la réalité est complètement autre.

D'abord, bien, il y a plein de groupes qui appuient ce projet de loi là qui disent que c'est une excellente première étape. Ensuite de ça, on va pouvoir aller plus loin, étendre l'interdiction des signes religieux et étendre aussi la privation des droits qui va en découler. Alors, il y aura des débats qui vont continuer. Ceux qui veulent l'interdiction des signes religieux aujourd'hui, il y en a beaucoup qui vont dire : C'est quoi, la prochaine étape? Et par ailleurs ceux qui vont voir leurs droits brimés par ce projet de loi là, bien, ils ne vont pas s'arrêter là, ils vont, à juste titre, contester devant les tribunaux, ce projet de loi qui leur enlève des droits importants. Alors, ça ne se terminera pas là.

Ce qu'on va faire, là, c'est qu'on va justifier une atteinte aux droits, et puis on va faire pourrir davantage un débat duquel, au Québec, tout le monde est tanné. Et, si ce projet de loi là n'avait pas été déposé, là, bien, il ne se serait pas rien passé de particulier, on n'aurait pas particulièrement parlé de signes religieux parce qu'il n'y a pas de menace posée au Québec par les signes religieux. Quand je demandais, dans les audiences publiques, aux groupes qui soutenaient le projet de loi de me dire quelle était la menace, là, au Québec, qui est liée aux signes religieux, qu'est-ce qui se passe si on n'interdit pas les signes religieux, bien, les réponses étaient souvent confuses et pas très concrètes. On me parlait des autres pays où il y a des théocraties, on me parlait de choses qui sont déjà interdites au Québec, on nous a parlé d'excision, de mariage forcé et, quoi d'autre encore, de crime d'honneur. C'est surréaliste, je pense qu'il y a eu une exagération énorme, ou, disons, une panique par rapport à la question des signes religieux. C'est comme si on avait répandu, là, cette insécurité, ici, au Québec, là, que l'égalité entre les femmes et les hommes était atteinte, alors qu'elle est protégée par les lois.

• (16 heures) •

Et, à cause que cette peur-là qui est, tu sais, je veux dire... L'attachement à l'égalité entre les femmes et les hommes, c'est essentiel, tout le monde partage ça, ça, c'est un vrai consensus au Québec, mais, à cause qu'il y a du monde qui fait miroiter que ça, c'est en danger, bien là, tout à coup, on se dit : On se range derrière l'interdiction de signes religieux, mais c'est une illusion, parce que ça ne menace pas rien. Et tout ce que les gens qui sont venus en auditions ont dit qui était menacé, là, un retour du religieux, une reconfessionnalisation du Québec, bien, ce sont des choses qui ne nous menacent pas et qui ne menacent pas la laïcité de l'État québécois. Donc, on dit que c'est ce que ça va faire. On dit que ça mettre fin à ce débat-là, mais ça ne mettra pas fin au débat, il va y avoir des contestations judiciaires.

Il y a aussi des choses qu'on nie, par rapport à ce projet de loi là, du côté du ministre, là, c'est qu'il va dire que ce projet de loi là ne touche pas particulièrement les femmes. Il dit : Bien non, regardez, dans le texte, ça s'applique à tout le monde égal, cette loi-là ne va pas viser en particulier une religion ni un genre. Bien, c'est faux de dire ça. C'est vrai que le texte, il est écrit comme ça, mais, si on analyse les conséquences de l'application de ce projet de loi là, il est clair qu'il y a des gens, des catégories qui vont être beaucoup plus visés que d'autres, puis là, bien, on entend, évidemment, les femmes, les musulmans. Pourquoi? Simplement parce qu'il y en a plus qui portent des... et ils sont plus représentés dans le groupe des Québécoises et Québécois qui portent des signes religieux. Alors, c'est sûr que ça va viser plus certaines personnes que d'autres, et, le nier, bien, il y a quelque chose là-dedans qui est injuste.

Il y a une étude aussi qui a été faite par deux chercheuses de l'Université Stanford, aux États-Unis, qui a analysé les conséquences de la loi française interdisant le port du voile qui a été appliquée en 2004 en France. Parce qu'il y a beaucoup de gens qui disent : Ah! non, mais ce projet de loi là, il est modéré. Regardez dans d'autres pays, regardez ce qu'on fait, regardez la France. Mais, la France, là, ça ne va pas bien. Ça ne va pas bien en France. Si on disait : Regardez la France, c'est formidable, il n'y a plus de tensions sociales, je veux dire, il n'y a comme pas de tension interreligieuse, et puis ça, c'est à cause... je dirais : Bon. Mais ce n'est pas ça qui se passe. En France, après 15 ans d'application de ce règlement-là, qui, il faut le dire, n'est pas pareil comme le projet de loi n° 21 — mais il y a des analogies, on interdit des signes religieux — bien, ce qu'ils disent, c'est que les femmes qu'on voulait libérer et émanciper avec cette interdiction-là, en réalité, aujourd'hui, bien, elles sont, de façon générale, moins autonomes. Elles sont plus à la maison, elles travaillent moins, elles ont plus d'enfants, elles dépendent plus de leurs maris. Alors, est-ce que c'est ça qu'on veut? Bien, je pense que personne ici ne veut ça. Je ne suis pas capable de prêter ces intentions-là au ministre, puis ce n'est pas une question de règlement, c'est juste sincère. Je pense vraiment qu'il ne veut pas ça, puis personne ne veut ça. Mais alors pourquoi est-ce qu'on le fait? Bon, la question restera en suspens. J'aimerais bien qu'on y réponde un jour, mais j'aimerais surtout qu'on n'aille pas dans cette direction-là et qu'on regarde les faits, qu'on regarde ce que les études montrent par rapport à ces politiques publiques et à ce genre de politiques publiques là.

Par rapport au fait que ce projet de loi là touche particulièrement les femmes, d'ailleurs, on a demandé, nous... mais pas juste nous, même la ville de Montréal aussi, dont tous les élus se sont rassemblés contre ce projet de loi là... Ce n'est pas rien, hein? Tu sais, tu ne peux pas dire : Tous les élus de Montréal sont contre quelque chose, puis tu ne peux pas dire après ça : Ça fait consensus. C'est presque la moitié de la population du Québec qui est là, représentée par ces gens-là. C'est énorme. On ne peut pas dire que ça fait consensus. Et, quand on dit que ça ne touche pas particulièrement les femmes et puis, là, on dit : Ah! non, regardez le texte, il n'est pas mention de rien comme ça, bien, alors pourquoi est-ce qu'on ne fait pas une analyse différenciée selon les sexes qui soit sérieuse par rapport à ça? À moins qu'elle ait été faite puis qu'on ne soit pas au courant. Ça, c'est une autre affaire, il faudrait voir. Est-ce qu'une analyse a été faite pour affirmer que ça ne touche pas les femmes plus que les hommes? Est-ce qu'on a vérifié ça avant de «pondre», je n'ai pas de meilleur verbe, cette politique publique? Bien, ça serait intéressant qu'on le fasse. Et, je pense que, si on la faisait, ça ferait réfléchir beaucoup de monde, et je pense que ça dégonflerait beaucoup l'appui des gens qui appuient ce projet de loi là pour des raisons féministes.

On ne peut pas dire : Au nom de la liberté des femmes, on va appliquer des politiques publiques interdisant le port de signes religieux, qui vont réduire leur autonomie et qui vont les discriminer plus que les hommes. On ne peut pas dire ça, on ne peut pas faire ça avec comme motivation ou comme raison le féminisme.

Quand, en commission, on demandait aux gens, pour essayer de saisir le problème qui justifiait une telle solution, une solution si radicale, on demandait aux gens : Qu'est-ce qui va se passer, qu'est-ce qui se passe si on n'interdit pas les signes religieux, est-ce que vous avez des plaintes, est-ce qu'il y a des problèmes comme ça sur le terrain?, et ce qu'on nous a dit essentiellement, c'est qu'il n'y a pas vraiment de problème avec les signes religieux, spécialement dans le secteur de l'éducation, où pourtant il y a beaucoup de personnes qui portent des signes religieux. Donc, entre 2016 et 2019, là, les plaintes liées aux signes religieux déposées par des parents, des tuteurs, des étudiants et des enseignants, d'autres employés ou des cadres dans nos écoles, pour la commission scolaire de la Capitale c'est zéro plainte; pour la commission scolaire de Charlevoix, c'est zéro plainte; pour la commission scolaire des Premières-Seigneuries, c'est zéro plainte; pour la commission scolaire des Chênes, du Centre-du-Québec, zéro; pour la commission scolaire des Rives-du-Saguenay, c'est zéro, puis on pourrait continuer comme ça longtemps, parce que ce n'est pas quelque chose qui pose problème.

On a parlé aussi, dans ce projet de loi là, du danger du prosélytisme. On s'est dit : On fait ce projet de loi là pour la liberté des femmes, et, après ça, aussi pour éviter le prosélytisme, et au nom de la liberté de conscience des enfants. La liberté de conscience des enfants, tout le monde est d'accord avec ça, ça fait consensus, ça, c'est clair. Mais en quoi la liberté de conscience des enfants est-elle mise en cause parce qu'une de ces enseignantes ou un de ces enseignants porte un signe religieux? La définition de la liberté de conscience, là, la voici, juste pour qu'on se rappelle, là... Dans la charte québécoise des droits et libertés, là, on dit : Vous êtes libre de choisir... La liberté de conscience, c'est quoi? C'est : Vous êtes libres de choisir les valeurs, les convictions et les principes qui guident votre vie. Vous êtes libres de choisir les principes qui guident votre vie. En quoi le port d'un signe religieux soutire à quelqu'un sa liberté de choisir les principes qui guident sa vie? Ce qu'on a eu, les échos du terrain, des gens qui ont cette expérience-là parce que leurs enfants ont eu des enseignants excellents qu'ils adorent, qui portaient des signes religieux, bien, essentiellement, ce qu'ils disent, c'est : Ça les ouvre à la différence. Et ça veut dire quoi, les ouvrir à la différence? Ça ne veut pas dire qu'ils vont devenir... à chaque année, changer de religion comme ils changent de professeurs. Ça veut dire qu'ils réalisent que cette personne-là devant eux, qui est, avec elle, avec eux, généreuse, qui veut son bien, qui lui transmet un savoir, qui éveille sa conscience et sa curiosité à plein de phénomènes, bien, cette personne-là, elle porte un signe religieux, et puis, bien, c'est un humain comme elle. Elle porte des signes religieux, puis ça n'en fait pas quelqu'un de bizarre, de fermé, de dogmatique, qui fait du prosélytisme, qui méprise les valeurs occidentales, qui est contre la liberté, qui te dit quoi penser. Ça ne fait rien de tout ça, un signe religieux. Alors, il faut protéger la liberté de conscience de nos enfants, mais ce n'est pas en ne les exposant pas aux humains autour d'eux qui sont là dans la société, bien, qu'ils vont être plus libres de choisir les convictions, les valeurs et les principes qui guident leur vie.

Alors, le problème de prosélytisme supposé, bien, il n'y en a pas. Et par ailleurs, s'il y en avait un véritable, si vraiment des enseignantes ou des enseignants allaient dire aux enfants : Il faut que vous croyiez ça, sinon vous allez avoir des mauvaises notes, ou encore, s'ils leur faisaient des peurs en disant, je ne sais pas : Vous allez aller en enfer, ou quelque chose comme ça, bien, ce serait interdit. Il y a des lois qui empêchent ça déjà, des lois qui n'ont absolument aucun rapport avec l'interdiction des signes religieux. La liberté de conscience des enfants, là, en ce moment, là, sur ce sujet-là, elle est protégée au Québec. Et, s'il y avait une démonstration qu'elle ne l'était pas, évidemment qu'on voudrait faire des politiques publiques pour ça, mais en ce moment ce n'est pas le cas.

• (16 h 10) •

Ce qui est particulier aussi là-dedans, là, c'est toute la question du mélange qu'on fait avec nos relations avec le Canada. C'est comme si, je ne sais pas, certains commentateurs ont réussi à cadrer le débat, là, de façon à ce que ça nous donne l'illusion qu'en interdisant les signes religieux on faisait une affirmation nationale, comme si on allait dégager là, en niant des libertés, un espace de liberté, comme si on développait un modèle qui était, disons, plus fidèle à ce que nous sommes et différent de ce que propose le Canada. Bon, évidemment, c'est différent de ce que propose le Canada, mais c'est différent de ce que proposent bien des pays, de toute façon. Mais moi, j'aimerais amener l'idée que c'est différent de ce que nous sommes nous-mêmes. Parce que ceux qui utilisent cet argument-là disent : On va déroger à la Charte canadienne des droits et libertés, et c'est formidable, parce qu'elle nous a été imposée. Ça, je suis parfaitement d'accord avec ça, la Charte canadienne des droits et libertés, elle nous a été imposée, elle n'a pas la légitimité démocratique que devrait avoir une charte qui est dépositaire de nos droits, on ne l'a jamais accepté.

Mais on oublie de parler de la charte québécoise des droits et libertés, qui, elle, est un acte que nous avons posé nous-mêmes ici, dans cette Assemblée, à l'unanimité, tous les partis d'accord, en 1975, un rare geste d'unanimité transpartisane, un geste politique, un geste collectif qui marque notre identité, qui fait de nous ce que nous sommes vraiment, et, cette charte-là, on est en train d'y déroger et de faire comme si c'était exactement la même affaire que la Charte canadienne. Mais, en pilant sur la charte québécoise, bien, on pile sur ce qu'on a fait nous-mêmes, avec un bien moins grand appui politique ou populaire que ce qu'il y avait en 1975 pour mettre la charte sur pied. Alors, on n'est pas en train de se distinguer des autres en faisant ça et de s'affirmer nous-mêmes, on est en train de se nier nous-mêmes et on est en train de suivre une espèce de tendance qui n'est pas propre au Québec, une espèce de tendance à vouloir interdire les signes religieux, qui vient d'ailleurs, elle aussi, de toute façon. Alors, sur cette question-là, je trouve qu'on erre, si on pense faire un acte d'affirmation nationaliste.

Et, par rapport à la question du pays que nous voulons former... bon, je sais qu'ici ce n'est pas l'opinion de tout le monde encore, dans la salle — un jour, peut-être, ça viendra — mais, même si on est dans un Parlement provincial avec, juste au-dessus du président, oui, le crucifix... mais aussi c'est marqué Dieu est mon droit, puis là il y a comme la couronne britannique, qui est par ailleurs la chef de l'Église anglicane — ce n'est pas très laïque, ça, non plus — avec une licorne enchaînée, et tout ça, des symboles monarchiques, bon... bien, même si on est dans cet environnement-là, moi, je considère qu'on est ici pour préparer le pays et qu'à un moment donné on va le faire, le pays. Il faut réfléchir à quel genre de pays on veut. Est-ce qu'on veut un pays où on va avoir une charte des droits et libertés qu'on respecte, un pays où le peuple sera souverain, où le peuple sera libre et où les individus qui le composent le seront aussi ou est-ce qu'on veut un pays où il y a des gens qu'on va faire se sentir pas à leur place? Parce que c'est ça qui se passe.

Quand on parle aux personnes touchées par ce projet de loi là, les femmes qui portent le hidjab par exemple... c'est probablement les plus nombreuses, mais on ne peut pas le savoir, parce que le gouvernement ne veut pas faire une analyse différenciée selon les sexes, donc il faudrait avoir la certitude de ça, mais ce qu'on entend, c'est qu'elles sentent qu'elles ne sont pas les bienvenues, et elles se disent : Ça va être quoi, la prochaine étape? Là, moi, je ne pourrai pas être directrice d'école, par exemple, je ne pourrai pas aller en enseignement si je n'y suis pas toujours, je ne pourrai pas être procureure, je ne pourrai pas faire toutes ces choses-là. Et, en restant au Québec, bien, j'assume que mes filles, si elles décident de porter un signe religieux, un jour seront soumises à ces mêmes restrictions. Pourquoi est-ce que je voudrais limiter leur avenir à l'avance, d'une part? Puis aussi, le jour où ces enfants-là seront grandes, bien, quelle autre interdiction sera venue s'ajouter à ça? Y en aura-t-il d'autres? Et le sentiment qu'on leur fait vivre... et ce n'est pas notre intention, à personne, ce n'est pas l'intention du ministre, ce n'est pas l'intention d'aucun Québécois ou d'aucune Québécoise, mais ce qu'on leur fait vivre, c'est un sentiment de rejet et c'est le fait qu'elles se sentent sur un siège éjectable comme si, là, elles étaient en stand-by, excusez-moi l'expression latine, et qu'elles n'étaient pas les bienvenues. Est-ce que c'est un pays comme ça qu'on veut? Bien, non. On veut un pays où tout le monde se sent bien.

Le Québec, c'est un endroit au monde qui est extrêmement accueillant, c'est un endroit où on se sent bien, où on se sent accueillis, où on a des libertés extraordinaires et c'est un endroit qu'on est chanceux d'habiter et qui a été construit de manière formidable. Et moi, j'ai l'impression qu'avec ce projet de loi là on est en train de perdre du terrain là-dessus, on est en train de faire de notre pays en devenir un endroit qui est moins accueillant, un endroit où on va faire se sentir que les gens, ils ne sont pas à leur place, et ça, je suis vraiment très mal à l'aise avec ça, et ce n'est pas juste moi, c'est beaucoup de monde, beaucoup de Québécoises, beaucoup de Québécois.

Un autre problème aussi avec ce projet de loi là, c'est la question de l'applicabilité. Il y a des gros problèmes qui ont surgi, là, dans les audiences publiques, et on nous a fait bien comprendre que ça n'allait pas être applicable, entre autres, à cause de la définition absente de ce que c'est, un signe religieux. On se retrouve dans une situation complètement absurde où le projet de loi ne définit pas ce qu'est un signe religieux. Donc là, bien, comment est-ce qu'on va l'appliquer? Si quelqu'un arrive avec un signe religieux, bien, le directeur d'école va dire : Enlève ton signe religieux? Et, la personne, si elle dit : Bien, ce n'est pas un signe religieux, c'est une coutume, c'est une tradition, c'est une habitude, c'est un choix personnel, avec quel problème on laisse le directeur d'école, qui, lui, va être obligé de trancher un débat qui est essentiellement théologique? Tu sais, qui est le directeur ou la directrice d'école, là, pour dire : Ce que tu portes est une obligation religieuse, donc tu dois l'enlever? C'est complètement absurde. Et puis là on se dit : Et, si le gouvernement définit le signe religieux, je veux dire, bonne chance! Mais, si le gouvernement définit le signe religieux dans son projet de loi, il se méprend pour un théologien plutôt qu'un ministre. Il va devoir, quoi, étudier les différentes écoles d'interprétation coraniques et des hadiths de l'histoire, et puis, là, lire ce que dit l'école égyptienne, et puis, là, lire ce que dit telle autre école d'interprétation, et puis là dire : Il y en a qui disent que ce n'est pas un signe religieux, le hidjab, il y en a qui disent que c'en est un, et nous, gouvernement du Québec, là, nous, ministère, là, nous, on va dire : Bien, c'est telle école coranique qui a raison. Je veux dire, c'est complètement absurde.

Est-ce qu'un État laïque tranche des débats théologiques? C'est justement ce qu'on veut éviter en faisant quelque chose au sujet de la laïcité. Et, si on contourne la difficulté en faisant une liste, parce que c'est ce qui s'est passé en France, bien là, on a un autre problème. Récemment... bien là, pas si récemment que ça, mais dans les années dernières — je ne me souviens pas de la date exacte — un cas se révélait en France, où il y avait une jeune femme à l'école qui se voyait interdire de porter une certaine jupe considérée comme étant une jupe religieuse parce qu'elle était noire et longue. Bien là, c'est problématique. Je veux dire, là, est-ce qu'on va interdire... Jusqu'où ça va aller? Alors, il y a un problème avec la question des listes, il y a un problème avec la question de la définition d'un signe religieux, et c'est pour ça que non seulement l'interdiction des signes religieux n'est pas pertinente pour l'application de la laïcité, mais en plus elle est à peu près impossible à faire. Bien, impossible... c'est possible, mais, dans un État de droit, ça va susciter des contestations devant les tribunaux. Alors, j'allais dire «bonne chance», mais, en fait, je ne souhaiterai pas bonne chance pour l'application de cette affaire-là inapplicable, on ne veut pas que ça s'applique, mais il va y avoir des problèmes qui vont nous rattraper. Une autre raison pour dire que ce débat-là, il n'est pas fini, il va juste s'enfoncer, puis il va s'enfoncer dans des absurdités sans fond qu'on ne pourra pas trancher ici et qu'il n'est pas dans notre rôle de trancher, c'est-à-dire la définition du signe religieux.

• (16 h 20) •

Une autre chose aussi que soulignait, cette fois-ci, des experts de l'ONU qui analysent ce qui se passe au sujet des droits et libertés dans tous les pays du monde, et tout ça... donc, ce n'est pas l'Arabie saoudite ou la Chine qui a envoyé une lettre, là, au Québec et au Canada pour faire un avis de ça, ce sont des experts désignés qui ont fait ça, puis eux, ils ont dit : Le fait que le signe religieux ne soit pas vraiment défini, bien, ça laisse la porte ouverte à une application discrétionnaire de la loi qui pourrait être abusive, parce que, là, on pourrait avoir des gens qui vont dire, d'une part : Ah! bien, ça, porte ton signe religieux parce que ce n'en est pas un, et puis ça, bien, tant mieux, mais il pourrait y avoir des gens qui diraient : Ah! mais là, toi, ce que tu portes là, qui n'est pas sur la liste ou je ne sais pas trop quoi... ou, ça, je considère que c'est un signe religieux, alors que ce n'en est pas. Alors, ça va poser des problèmes extrêmement importants.

On a peu abordé la question du p.l. n° 21 du point de vue du droit du travail, mais ça pose aussi des problèmes concernant le droit au travail. Les syndicats l'ont souligné, là, que l'application de ça, ça va poser problème. Comment les syndicats vont pouvoir défendre un employé, alors que la loi permet son congédiement, rend impossible le recours aux chartes pour plaider le caractère discriminatoire de ce geste et que les autres outils juridiques se heurteront, là, inévitablement aux clauses dérogatoires? Comment est-ce qu'on va pouvoir défendre ces personnes-là? La tâche sera pour le moins titanesque et risque de déplacer le débat vers une application individuelle d'une mesure qui se voulait collective et même sociétale. La CSQ recommande même au gouvernement que l'article 29 du projet de loi, la dérogation à la charte québécoise, soit retiré. Alors, c'est quelque chose qui est une préoccupation, disons, très répandue.

Concernant la clause dérogatoire; ce projet de loi déroge à la Charte canadienne ainsi qu'à la charte québécoise des droits et libertés de la personne. La clause dérogatoire a été utilisée à plusieurs reprises dans l'histoire du Québec. On n'est pas de l'école du tout de ceux qui disent qu'il ne faut jamais utiliser la clause dérogatoire contre la charte des droits et libertés canadienne, par exemple, évidemment, dont nous ne reconnaissons pas la légitimité, mais ce qu'on trouve questionnable, c'est de déroger à notre propre charte, la charte québécoise, qui défend nos valeurs à nous, pas celles qu'on nous a imposées, celles qu'on a choisies, qu'on a choisies nous-mêmes. Et le grand constitutionnaliste québécois Henri Brun, là, il explique que la dérogation peut être justifiée lorsqu'il s'agit, pour une collectivité fragile comme le Québec, d'exercer sa liberté collective, lorsqu'il s'agit de défendre sa langue et sa culture, son identité, par exemple. Et on est tout à fait d'accord avec ça. Mais aujourd'hui, là, devant le projet de loi n° 21, on ne comprend pas cette justification-là. Contre qui nous nous défendons? De quoi exactement, là, avons-nous peur? Est-ce que nous sommes réellement en train de défendre notre identité et notre culture? Bien, pas du tout. Notre identité et notre culture, là, les menaces qui planent sur elles sont autres. Ce n'est pas le port des signes religieux. Et il faut qu'on s'attaque à ça absolument. En interdisant de porter des signes religieux principalement à des femmes, quel pan de notre identité est-ce que nous défendons? Est-ce que ça vaut le coup? Est-ce que ça vaut la peine de faire ça?

Je pense que l'enjeu névralgique ici, c'est justement, là, l'identité et l'unité. L'enjeu, c'est de défendre notre identité et de défendre l'unité nationale, et pour ça il faut donner les mêmes droits à tout le monde et donner une liberté plus grande à tout le monde. Qu'est-ce qu'on est, exactement? Est-ce qu'on va se définir comme un peuple qui craint les signes religieux ou comme un peuple qui voit dans la diversité une forme de richesse, et qui est confiant de son identité, et qui sait que, pour avoir une identité, ça prend des projets collectifs et que, pour avoir des projets collectifs, ça prend l'unité? Et, pour avoir de l'unité nationale et un sentiment d'appartenance au Québec, bien, il faut que tout le monde se sente à sa place, il faut que personne ne se sente comme une espèce d'indésirable qui est sur un siège éjectable, qu'on ne sait jamais quand est-ce qu'on va restreindre ses droits encore plus.

Pour résumer, là, on pourrait dire que ce projet de loi là, là, il aurait pu porter davantage sur la laïcité, il aurait pu laisser de côté complètement les signes religieux, qu'il n'est pas pertinent d'interdire dans l'enjeu de la laïcité de l'État, mais il est allé complètement dans le sens contraire.

On va faire notre travail, nous, de parlementaire et on va faire valoir nos convictions. On va minimiser les dégâts. On va proposer des amendements qui vont retirer, là, le plus de personnes possible des effets dévastateurs que va avoir dans leur vie ce projet de loi là. Évidemment, si le gouvernement reculait là-dessus, ce serait extraordinaire, mais il semble assez déterminé à faire ce qu'on estime être une erreur, une erreur collective qu'il va falloir, un jour, réparer. Ce projet de loi aurait très bien pu être écrit autrement. Il aurait pu être rassembleur, il aurait pu être modéré, il aurait pu ne pas viser en particulier les femmes, il aurait pu ne pas viser en particulier certaines religions, mais ce n'est pas ce qu'il fait. Et là le gouvernement fonce tête baissée là-dedans, et ça laisse un goût amer et une certaine tristesse.

Quoi qu'on souhaite par rapport à l'avenir de ce débat-là, il est clair qu'il n'est pas fini. Alors, on peut émettre des souhaits par rapport à la façon dont ce débat-là va évoluer et à la façon dont nous, on va prendre conscience des conséquences de ce qu'on est en train de faire. Et j'espère qu'on va réaliser à un moment donné que c'est une erreur et j'espère qu'on va revenir en arrière. Et j'espère qu'on va redonner à la charte québécoise des droits et libertés, qui fait partie de notre identité, ses lettres de noblesse et qu'on va lui faire honneur, faire honneur à ce que nous sommes, faire honneur à ce pays qu'on veut construire et qu'on va vraiment faire en sorte que tout le monde se sente bien ici parce que c'est ça, la clé de l'unité nationale. C'est ça, la clé de l'appartenance, c'est ça, la clé d'une culture et de valeurs communes, c'est quand tout le monde se sent bien, c'est quand les gens ont envie de faire des choses ensemble et qu'ils sentent qu'ils sont reconnus pour leur apport qu'ils donnent à notre collectivité. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Robert-Baldwin.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour de prendre quelques minutes pour parler du projet de loi n° 21. Je n'ai pas assisté aux commissions parlementaires, je ne faisais pas partie de cette commission, mais j'ai suivi quand même les travaux de la commission. J'en ai lu quelques mémoires qui ont été soumis à cette commission parlementaire, et bien sûr j'ai suivi ce débat d'assez près, et un débat qui m'interpelle beaucoup.

Bon. On va y aller dans l'ordre, M. le Président. Et je commencerais en disant que, ce projet de loi, moi, je ne pense pas que ce soit un projet de loi sur la laïcité de l'État, mais c'est un projet de loi sur les signes religieux, sur les vêtements, sur ce qu'on porte sur la tête. C'est ça qu'on est en train de légiférer au Québec au XXIe siècle. Bravo! Et pourquoi on fait ça? Pourquoi on fait ça? Quelle est l'urgence? Pourquoi ce projet de loi qui nous est présenté? Quelle est l'urgence? Quel est le problème qu'on essaie de régler? Je n'ai pas vu de réponses à ces questions-là. On le dit souvent, le ministre nous a dit qu'il a l'appui de la population et que probablement... enfin, je ne sais pas, les sondages le disent, qu'il s'agit d'un projet de loi qui est populaire. Mais être populaire, ce n'est pas nécessairement la même chose qu'être bon, qu'être bien, qu'être dans l'intérêt public. Je pense, dans une société développée comme la nôtre, le rôle de l'État, le rôle du gouvernement, c'est de gouverner pour tous et particulièrement, justement, de mettre les minorités à l'abri des désirs de la majorité. C'est ça, le rôle d'un État moderne du XXIe siècle. Alors, de dire qu'on va faire ça et la population est derrière nous, c'est populaire, bon, très bien, alors oups! on y va, je trouve que c'est vraiment très, très réducteur, Mme la Présidente.

• (16 h 30) •

Donc, le rôle du gouvernement, c'est de gouverner pour tous et particulièrement de tenir toujours en considération l'intérêt des minorités. Ce projet de loi, à mon avis, c'est un projet de loi qui constitue un recul historique pour le Québec, un pas rétrograde et vraiment un recul historique pour le Québec.

Permettez-moi maintenant de faire un petit retour, beaucoup de choses que nos collègues, tant de Québec solidaire que notre formation politique, ont mentionnées, et que je suis d'accord, mais permettez-moi de faire un petit recul historique. Savez-vous, Mme la Présidente, le député de Robert-Baldwin, dans le West Island de Montréal, a connu, et a parlé, et a discuté avec des gens tels que Jacques Couture ou Gérald Godin, des nationalistes québécois, et qui étaient au pouvoir, d'ailleurs, dans les années 70. Et on a discuté bien avec ces personnes-là pour qui j'ai une très grande estime. On n'était pas de la même famille politique, mais on pouvait discuter de ces enjeux-là. Et vraiment, sous l'impulsion de cette génération-là de nationalistes québécois, le Québec a fait de grands pas, a fait de grands pas dans cette nouvelle conception de c'est quoi, une nation, c'est quoi, la nation québécoise. Et, dans l'esprit de Godin, la nation québécoise, c'était une nation inclusive et que... comme d'ailleurs il le disait très bien, autant de façons d'être québécois. Et la vie culturelle québécoise montréalaise des années 70 et des années 80 était extrêmement riche et, justement, elle gagnait à avoir l'apport de toutes ces différentes communautés.

Comme l'a dit récemment M. Louis Balthazar, un politologue très reconnu au Québec, dans un article dans Le Devoir du 29 mai, il ne parlait pas du projet de loi, mais il parlait de la nation québécoise, l'évolution de la nation québécoise, et il dit que, bon, que la collectivité s'enrichissait oui, sous l'effet de la diversité, et, disait-il, le boulevard Saint-Laurent à Montréal, autrefois frontière entre les anglophones et les francophones, devenait un lieu de convergence et de vitalité culturelle par excellence. C'est ça, le Québec que j'ai connu. C'est ça, le Québec qui m'a accueilli. C'est ça, le Québec où j'ai grandi. C'est ça, le Québec que j'apprécie, Mme la Présidente.

Et ce Québec accueillant et divers, on a continué à faire tout un grand progrès tout le long du deuxième... de la dernière partie du XXe siècle, les années 80, les années 90, où, donc, le Québec divers et multiethnique faisait de très grands progrès, Mme la Présidente. Mais, au tournant du siècle, malheureusement, à mon avis, on a commencé à aller un peu de l'autre côté, malheureusement, et nous voilà maintenant avec le projet de loi n° 21, qui est, en fin de compte, le point culminant de toute une série de développements sociopolitiques de cette première partie du XXIe siècle, et donc qui constitue, à mon avis, un pas en arrière, un énorme pas en arrière, et donc un tort incroyable pour le Québec, pour le Québec de Gérald Godin que j'ai connu puis apprécié.

Alors, parlons donc de laïcité, très bien. Soyons clairs, en commençant, que la laïcité n'exige absolument rien de l'interdiction des signes religieux. Ce n'est pas ça, là. Je pense qu'il y a un énorme flou, une énorme confusion entre laïcité et signes religieux. Ça, c'est le choix du gouvernement, c'est le choix du ministre de l'Immigration de nous imposer ce choix-là et ce n'est pas un bon choix, donc, de faire l'équation entre laïcité et interdiction de signes religieux. Et ce n'est pas bon, ce n'est pas un bon choix parce que c'est profondément injuste et profondément discriminatoire.

Maintenant, le ministre aussi nous dit à plusieurs reprises que son projet de loi c'est un projet de loi modéré, un projet de loi pragmatique. Non, Mme la Présidente, ce projet de loi n'est ni modéré, ni cohérent, ni applicable. Donc, on a beaucoup parlé de laïcité. Comme j'ai dit tantôt, la laïcité, on fait l'équation avec l'interdiction de signes religieux. Et le ministre dit s'inspirer beaucoup, s'inspirer beaucoup, de l'expérience et de la tradition française, donc la France. Et ça, par opposition au méchant multiculturalisme canadien. Ça, ça pose plusieurs problèmes, Mme la Présidente.

Alors, commençons avec le fait qu'on s'inspire de l'expérience française. Comme l'a dit notre collègue tantôt, est-ce que ça va tellement bien en France? Donc, c'est ça, le modèle qu'on va adopter au Québec? Vraiment? C'est ça vraiment qu'on veut adopter au Québec? Et puis d'où ça vient? D'où ça vient, ce modèle français de laïcité? Bon, on ne va pas faire un très grand cours d'histoire, je n'ai quand même pas beaucoup de temps, le temps est quand même limité, mais rappelons-nous quand même, Mme la Présidente, que toute cette question de laïcité française, à la française, bien, vient de la Révolution française, vient de cette période des années 1789 à 1799, la période qui a mis fin à l'ancien régime et a donc mené à la création de la République. Et donc un de ses objectifs était, bien sûr, de mettre fin au pouvoir et à l'abus de l'Église. Donc, c'était ça, la grande cassure, c'était la Révolution française. Littéralement, des têtes ont roulé à cause de ça, et donc une fin tragique et brutale à l'ancien régime.

150 ans plus tard, à peu près, ce concept de laïcité a été embourbé dans tout l'historique, l'histoire coloniale française et le processus de décolonisation, particulièrement en Afrique du Nord. Ça n'a rien à voir avec le Québec, ça n'a rien à voir avec l'expérience québécoise. La Révolution tranquille au Québec, c'était tranquille. Ce n'est pas du tout la même chose que la Révolution française. Donc, notre contexte est très différent. En fin de compte, notre contexte est beaucoup plus proche du contexte canadien.

Encore une fois, je reviens à Gérald Godin et au nationalisme québécois. La définition de la nation québécoise, qui était inclusive et multiculturelle, ce n'est pas tellement aux antipodes du multiculturalisme canadien, ça n'a absolument rien à voir avec la laïcité à la française. Et pourtant, maintenant, on se dirige vers un modèle de laïcité complètement fermé, profondément antireligieux, qui est la laïcité à la française. Encore une fois, est-ce que ça va tellement bien en France? Est-ce que c'est le modèle qu'on veut adopter ici? Je ne pense pas.

Deuxième problème avec le projet de loi, c'est qu'évidemment on mélange beaucoup la laïcité de l'État avec la laïcité de l'individu. Oui, l'État doit être laïque, et je pense que l'État du Québec est laïque, mais ce n'est pas nécessaire que les individus, eux, qu'on les force à être laïque aussi. Donc, ça, c'est un problème, à mon avis, qui est extrêmement... qui est tellement important et qu'il faudrait adresser à un moment donné.

• (16 h 40) •

Évidemment, dans cet ordre d'idées, il y a un troisième très grand problème, à mon avis, c'est l'inclusion des enseignants, donc de l'éducation, dans le projet de loi. On nous parle beaucoup du rapport Bouchard-Taylor, on nous parle beaucoup qu'on s'inspire du rapport Bouchard-Taylor puis ce qu'on veut faire, c'est Bouchard-Taylor. Ah! mais ils n'ont jamais parlé d'enseignants, du secteur de l'éducation.

Et d'ailleurs permettez-moi de quand même citer un peu ce que le rapport Bouchard-Taylor disait. Il disait ceci : «Les agents de l'État doivent [être à notre avis] évalués à la lumière de leurs actes. Font-ils preuve d'impartialité dans l'exercice de leurs fonctions? Leurs croyances religieuses interfèrent-elles, dans les faits, avec l'exercice de leur jugement professionnel? La restriction de la liberté de conscience et de religion de certains citoyens constitue une solution de dernier recours. Dans le cas qui nous occupe, il est possible d'évaluer la neutralité des actes des agents de l'État sans restreindre leur liberté de conscience et de religion.»

Ce qu'on s'apprête à faire avec le projet de loi n° 21 est très loin de ce que Bouchard-Taylor proposait à l'époque. Donc, ça, c'est un problème très important dans ce projet de loi, et donc l'inclusion des enseignants, surtout les enseignantes, toute la discussion qu'on a déjà eue ici sur le port du hidjab, parce qu'en fin de compte c'est de ça qu'il s'agit, là. On peut très bien prétendre que ça s'applique à tout le monde, mais, dans les faits, en réalité, on vise les femmes musulmanes qui portent un hidjab. Mais c'est quoi, le problème? Est-ce que porter un hidjab va perturber nos enfants ou porter un turban sikh, ça va perturber nos enfants? Est-ce que nos enfants sont si fragiles que ça, franchement? Je trouve ça extrêmement, extrêmement problématique, Mme la Présidente.

Mais le grand problème, quatrièmement, vraiment, là, le coeur de l'objection que j'ai à ce projet de loi, c'est le fait qu'on va invoquer la clause dérogatoire tout de suite, «up front», comme diraient les Chinois. Et donc on va suspendre les droits fondamentaux de nos citoyens. Et ce qui est encore plus incroyable, à mon avis, c'est qu'on fait ça au nom — c'est ce qui nous est dit — de la défense des valeurs québécoises.

Alors, on suspend les droits individuels, on suspend les droits des minorités, les droits fondamentaux au nom de la protection des valeurs québécoises. Alors, ça veut dire, si c'est ça, vraiment, ce qu'on s'apprête à faire, ça veut dire que les valeurs québécoises sont incompatibles avec les droits fondamentaux. Ça, c'est absurde de penser... Non, ce n'est pas ça. Les valeurs québécoises ne sont pas incompatibles avec les droits fondamentaux. Mais, dans l'esprit du gouvernement, ça semble être ça, le cas, puisqu'on va suspendre les droits fondamentaux pour protéger les valeurs québécoises. Quelle soupe, Mme la Présidente!

Donc, de court-circuiter le processus de recours juridique qui existe dans un État de droit comme c'est le cas de l'État du Québec, c'est grave, c'est très grave. On ne doit pas faire ça à la légère. Ça a été fait dans le passé dans des circonstances très particulières. Ma collègue, notre porte-parole, a bien indiqué, bien résumé cela... pourquoi cela a été fait dans le passé. Et ce qu'on s'apprête à faire ici, ça n'a rien à voir avec ce qui a été fait dans le passé, et donc ça démontre, à mon avis, que c'est un projet de loi qui n'est pas modéré du tout. C'est un projet de loi qui est très, très radical. Encore une fois, on semble vouloir plaire à une majorité sans nécessairement se rendre compte du tort que cela fait aux minorités et surtout du tort que cela fait à notre société, à notre société de droit, à notre réputation et à notre identité. C'est une identité, encore une fois, je nous ramène tous à Gérald Godin, une identité plurielle.

Alors, avant de passer, Mme la Présidente, à certaines incohérences dans ce projet de loi, il y a quand même certaines autres instances que je trouve que c'est intéressant de constater, de citer plusieurs juristes. Moi, je ne suis pas juriste, donc je me remets aux travaux de certains juristes éminents, comme le Pr Pierre Bosset, qui nous disait d'ailleurs très sagement que recourir à la clause dérogatoire, c'est une forme de monologue, que le gouvernement, donc, refusait ainsi tout dialogue entre les pouvoirs politique et judiciaire. Dans une société de droit comme la nôtre, ce dialogue-là entre le politique et le judiciaire, entre le législatif et le judiciaire, ce dialogue-là doit avoir lieu en tout temps. Et ici on va court-circuiter ça, et donc ce n'est pas pertinent dans le point de vue du gouvernement. Aussi, le Pr Lampron nous a dit plusieurs fois que de mettre de l'avant, donc, la simple majorité de la population pour justifier une telle action, c'est tout à fait inapproprié, et donc ça ne devrait pas être fait.

Et donc je vois que le temps passe, le temps passe vite, Mme la Présidente, mais je vais quand même vous parler un petit peu, avant de passer à la conclusion, je vais quand même vous parler un petit peu des énormes incohérences qu'on trouve dans ce projet de loi. Par exemple, même si c'est un projet de loi sur les signes religieux, on ne définit pas c'est quoi, un signe religieux. On ne parle pas de... on ne prouve pas que le prosélytisme existe. L'État est neutre, oui, mais les individus ne sont pas neutres. Donc, Mme la Présidente, beaucoup d'incohérences.

Mais, en conclusion, Mme la Présidente, le gouvernement est majoritaire, donc il pourra décider ce qu'il veut. Nous allons faire notre travail, notre travail de parlementaires, pour essayer de bonifier ce projet de loi. Et juste pour la petite histoire, Mme la Présidente, je vous rappelle, je nous rappelle à nous tous que le projet de loi n° 62 de l'ancienne législature a pris à peu près 40 heures de travail en commission parlementaire lors de l'étude détaillée. Donc, c'est un travail qui doit être fait, c'est un travail qu'on va faire et un travail qu'on va le faire rigoureusement, et on ne va pas se laisser bousculer par le gouvernement. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Taschereau, la parole est à vous.

Mme Catherine Dorion

Mme Dorion : Merci. Il y a quelques jours, le professeur et politologue québécois bien connu Louis Balthazar écrivait dans Le Devoir une chose dont j'avais commencé à me rendre compte depuis un petit bout. Il nous expliquait qu'entre la «grande noirceur» et la Révolution tranquille, les Canadiens français ont pris leur nationalisme, qui en était un de repli et de survivance, et l'ont transformé en nationalisme québécois d'émancipation qui était construit non pas autour d'une origine ethnique ou religieuse, mais autour du territoire québécois, un nationalisme d'émancipation qui voulait inclure tous ceux qui vivaient sur le territoire québécois, un nationalisme d'émancipation qui est devenu extrêmement porteur et fertile.

Et j'ajouterais, pour avoir étudié les mouvements sociaux d'alors, qu'il y avait sur le terrain une explosion d'identités individuelles diverses, un encouragement à être soi-même à fond la caisse pour chaque personne. Et, par cette libération individuelle, le peuple entrait en relation intime avec lui-même. Il prenait de la force à s'ouvrir à lui-même dans une grande acceptation de ce qu'il était devenu dans la réalité et non selon ce que les élites cléricales disaient qu'il devrait être. Il gagnait une confiance nouvelle et, par là, comme chaque fois qu'on a plus confiance en nous, il gagnait aussi le goût d'entreprendre de grands projets. Et c'est ce qui a donné naissance au puissant mouvement indépendantiste de l'époque, qui est, par essence, un mouvement révolutionnaire. Je vous rappelle qu'il s'agit quand même d'aller chercher toute notre liberté politique des mains d'un État du G7, ce n'est quand même pas rien, et il y a encore une importante frange de Québécois qui portent en eux ce désir révolutionnaire assez peu orthodoxe. Et moi, juste de penser à ça, je nous trouve un peu punks, ça me fait un peu plaisir. Et donc ce projet indépendantiste là n'était pas un projet qui pouvait être basé sur la peur du changement, ou sur la peur de l'autre, ou sur la peur tout simplement.

• (16 h 50) •

Mais ce qu'écrit Louis Balthazar de vraiment intéressant, c'est qu'il dit : On est en train en ce moment de reculer sérieusement du point de vue de notre nationalisme. Dans sa lettre au Devoir, il nous rappelle qu'à la suite de sa cuisante défaite de 2007, le Parti québécois a décidé de jouer, à l'instar de l'ADQ, qui l'avait doublé aux élections, la carte identitaire, lui aussi. Cela nous a valu la charte des valeurs de 2013 et toutes les tensions que ça a créées et le projet de loi n° 21 contre les signes religieux s'inscrit aujourd'hui clairement dans cette tendance-là.

Il faut dire aussi que, depuis le 11 septembre, plusieurs médias, plusieurs faiseurs d'opinion ont décidé de faire de cette carte leur principale marque de commerce et avaient déjà, pas juste ici, ailleurs dans le monde aussi, fortement participé à transformer le climat social en quelque chose de plus aigri, en quelque chose de plus négatif, en quelque chose qui n'avait plus rien à voir avec une quelconque idée d'émancipation individuelle et collective ni avec la foi ou le positivisme nécessaire à la réalisation des grands projets, d'un grand projet ambitieux comme faire naître un État sur la carte du monde.

Et ce que ça a fait, tout ça, c'est que la conception du nous québécois, après s'être explosée en ouverture, atteint énormément de gens, crée un nationalisme civique sur le territoire québécois, cette conception-là du nous québécois a commencé à régresser, à opérer, en fait, le mouvement inverse de celui qu'elle avait opéré entre la «grande noirceur» et la Révolution tranquille. La conception du nous dans les dernières années a rétréci, et on s'y sent aujourd'hui de plus en plus à l'étroit.

Et je cite encore Louis Balthazar une dernière fois. Il écrit : «La Coalition avenir Québec représente la forme la plus pure de ce recul vers l'appartenance canadienne française — en opposition à "québécoise", qui est arrivé pendant la Révolution tranquille, donc. Rarement a-t-on vu un gouvernement aussi peu représentatif des minorités. Le présent gouvernement est pratiquement absent de la métropole et d'autres centres urbains du Québec. Il s'en remet exclusivement à la majorité francophone pour faire des lois qui déplaisent aux minorités. Aucun véritable dialogue avec ces minorités. On oublie qu'une démocratie libérale ne repose pas que sur la loi de la majorité, mais aussi sur les droits des minorités.»

C'est la base de toute la pensée derrière la démocratie occidentale depuis les débuts. C'est la base. Moi, j'aime mieux dire ça comme ça : La démocratie, c'est plus que deux loups et un agneau qui votent ensemble sur ce qu'ils vont manger pour souper. Et sur ce principe-là que les démocraties, jusqu'à présent, ont fonctionné. Et donc, ce que je veux amener ici, c'est que le projet de loi n° 21, en opposant nationalisme québécois à communauté religieuse, nuit, va nuire, va continuer de nuire profondément au projet indépendantiste québécois. Le chemin enthousiasmant d'ouverture à nous-mêmes, tous autant que nous sommes, sur le territoire qui a mené vers les luttes pour l'indépendance du Québec, nous sommes en train de le prendre, ce même chemin, mais à rebours.

Et ça me fait personnellement quelque chose, ça ne touche pas tout le monde ici de façon égale, et je le comprends, mais je me sens personnellement héritière de ces luttes indépendantistes des femmes et des hommes qui ont été là avant moi, ma mère, ma grand-mère, mes oncles. Ma circonscription du centre-ville de Québec, qui a voté à 60 % pour l'indépendance en 1995, des politiciens d'envergure qui ont marqué notre histoire, dont on a des statues autour de cet édifice-là, qui ont milité ici même pendant des heures, pendant des semaines, pendant des années pour que ce rêve puisse prendre forme dans la réalité, ce n'est quand même pas n'importe quoi. C'est quelque chose qui a une importance fondamentale dans l'histoire québécoise.

Et il est clair et évident qu'en empruntant ce chemin-là à rebours, ce même chemin vers un nationalisme de repli et de protection plutôt que vers un projet enthousiasmant, ouvert, qui a confiance en lui et qui crée de l'identité plutôt que de se replier sur un truc qui est perdu dans le passé, il est clair qu'en empruntant ce chemin-là le projet de loi contre les signes religieux va continuer d'entacher ce merveilleux projet d'indépendance politique du Québec, qui est à la fois un projet historique et un projet d'avenir, tout comme la charte des valeurs, en 2013, l'a entaché. Ça nous ramène à un nationalisme qui sonne comme survivance, ne pas changer rien, avoir peur du nouveau, alors qu'on devrait aller, comme on a déjà été à de meilleurs moments de notre histoire, vers un nationalisme qui sonne comme libération collective, comme se remettre à créer notre histoire, notre identité, nos projets à nous.

Alors, on peut regarder dans notre passé ce à quoi peut ressembler ce type de nationalisme là puisqu'on l'a déjà vécu. C'était quoi, la «grande noirceur»? C'était quoi, le nationalisme conservateur fédéraliste de Duplessis? Évidemment, l'époque a bien changé. Énormément de choses sont incomparables, mais il y a des similitudes avec aujourd'hui.

Sous Duplessis, on parlait beaucoup de patronage. C'était quoi, ça? C'est qu'on avait une espèce de sorte de ministère de l'expansion économique pour les comtés qui votaient du bon bord. Moi, ça me fait penser à l'histoire du troisième lien qui va nuire à Québec et qui va permettre d'augmenter les taxes foncières au sud dans les comtés qui ont voté pour CAQ. Ça me fait penser à l'histoire du transport en commun où on fait jouer les centres-villes de Québec et de Montréal l'un contre l'autre comme s'il s'agissait de les punir de ne pas avoir voté comme il faut.

Duplessis concédait aussi de grands avantages aux compagnies étrangères. Aujourd'hui, le nationalisme de la CAQ se plie en quatre pour faire plaisir à Uber, à Amazon et à bien d'autres. Et sur l'identité, maintenant, comme aujourd'hui on travaillait alors à une définition plutôt rétrécie du peuple québécois, qui était alors canadien-français. Il y avait ceux qui sont avec nous, il y a ceux qui sont contre nous. Il y a ceux qui protègent notre identité, qui sont nous, puis il y a ceux qui ne sont pas nous, ceux qui détruisent notre identité. On décourageait la diversité. On tapait sur la diversité. On considérait comme dangereux d'être différent les uns les autres. On considérait que mieux valait forcer les différents à rentrer dans la norme à coup de lois discriminatoires.

Oui, il y a des similitudes avec aujourd'hui. Ça ne se fait pas de la même manière, évidemment, mais il y a quelque chose dans l'essence qui vient de là. Notre histoire, ce n'est pas juste la Révolution tranquille, c'est aussi d'autres moments moins roses. Et tout ça, je trouve, ce vers où on s'en va avec ce projet de loi là, ça montre qu'on est en train de quitter cette belle conception de notre identité où on se disait qu'un peuple, ce n'est pas nécessairement du monde qui sont tous pareils, mais que c'est du monde qui sont tous ensemble dans un même projet collectif. C'est comme un couple. Tu n'as pas besoin d'être pareil pour que ça aille bien. Ce qui est important, c'est que tu aies des projets ensemble puis que tu sois capable de te respecter l'un l'autre dans tes différences. Être pareil, ça ne nous donne pas de force. Ça donne de la force à ceux qui veulent qu'on soit prévisibles, utilisables, des petites unités fabriquées en série qui vont pouvoir servir les besoins d'une quelconque industrie et ne pas se mettre à avoir des idées qui remettent le pouvoir en cause.

Être ensemble, par contre, ça libère la force collective, ça libère la création, l'inventivité, la fierté. Être ensemble, ça libère le courage, l'énergie de faire des projets de société qui nous donnent envie au lieu de nous écoeurer chaque fois qu'on ouvre la télé. Puis tant mieux si nos talents, si nos personnalités, si nos façons d'être, si nos façons de paraître diffèrent. C'est comme ça que fonctionnent les musiciens d'un orchestre, c'est comme ça que fonctionnent les joueurs d'une équipe de hockey. On a besoin de s'accepter les uns les autres pour être capables de créer des liens forts. Puis c'est dans notre différence qu'on trouve notre force. Puis ces liens forts là, c'est précisément ça, la culture, puis c'est précisément ça, la force d'un peuple. Alors, quand on s'attaque aux liens entre nous, on attaque notre culture puis on attaque notre identité. L'identité, ce n'est pas un truc inscrit dans les airs qu'on peut mettre dans un projet de loi. C'est quelque chose qui se vit entre nous, jour après jour, et qu'on adapte continuellement. Les êtres humains changent. Ce qui est important, c'est qu'on fasse ça ensemble. C'est ça, une culture. Une culture, c'est vivant. Ça évolue à travers les époques. Pourquoi faire comme si le Québec était autre chose que ce qu'il est dans la réalité avec toutes ces composantes différentes?

Lorsque je vois les dommages que la charte des valeurs du PQ a fait subir à l'adhésion des membres des communautés ethnoculturelles à l'idée d'indépendance, je ne demande pourquoi on tient à continuer ça avec le projet de loi n° 21, pourquoi on tient à stigmatiser des minorités. Alors qu'on doit rassembler, on divise. Évidemment, moi, je cherche à travailler au renouveau du mouvement indépendantiste. Alors, pour moi, c'est clair que ça veut dire se battre contre le projet de loi n° 21. Ça veut dire accueillir des gens de partout. Puis ça veut dire leur dire : Le jour où on va faire l'indépendance, nous serons tous les cofondateurs d'un pays. Il n'y a personne qui va être moins qu'un autre un représentant de la nation québécoise et de ses valeurs.

Mon espoir aujourd'hui vient du fait que je vois bouillonner, sous le couvercle de la marmite conservatrice qui marque notre époque, toute une panoplie de mouvements. On voit les luttes pour le climat, on voit les luttes des infirmières, on voit toutes sortes de luttes qui, en ce moment, sont en train de se renforcer. Et ça me fait penser à ce qu'il y avait dans les années 40, dans les années 50, juste avant, finalement, cette révolution tranquille là où on avait... il y avait le Refus global, la grève d'Asbestos, Madeleine Parent, les grèves, le textile. Il y avait un couvercle conservateur, mais ça bouillonnait déjà. Puis, même si le couvercle conservateur disait : On n'a pas besoin de vous écouter. De toute façon, les médias sont avec nous, bien, peu après, finalement, ces gens-là, sous le couvercle, ont créé une nouvelle culture qui a pris de la force et qui est devenue la culture québécoise de la Révolution tranquille.

Et c'est là qu'au lieu d'exclure les différents pour protéger une identité figée par le clergé à l'époque on a levé à bout de bras, avec tous ceux qui voulaient nous suivre, un projet enthousiasmant, un projet positif qui acceptait tout le monde, un projet qui n'avait pas peur de l'avenir, qui n'avait pas peur des autres, en fait, un projet qui n'avait pas peur. Pour moi, le Québec, dans ce que ça a de plus beau, c'est un peuple qui n'a pas peur. Et, quand je le vois avoir peur et se replier, vouloir mettre des barrières partout, je suis triste. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. M. le député de Robert-Baldwin, la parole est à vous.

Une voix : ...

• (17 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : D'Arcy-McGee, excusez-moi. Allez-y.

M. David Birnbaum

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. J'ai eu, il y a peut-être trois semaines, dans ma circonscription, mon bureau de circonscription, une visite, une visite d'un enseignant de ma communauté, un enseignant, père de famille, un enseignant qui porte la kippa, un enseignant qui est dans une école publique française à l'est de l'île de Montréal, et on a eu une belle conversation très révélatrice. J'ai tiré au moins trois messages de notre conversation : un d'espoir, un qui m'inquiète et un troisième qui me met en colère.

Le message d'espoir... Il porte, comme je dis, la kippa, en plus le taleth, que portent des hommes juifs croyants, avec des franges, alors clairement identifiable, identifié avec sa foi. Il me parle de ses jeunes élèves, beaucoup Québécois, Québécoises de souche, d'autres de toutes origines, qu'il adore, qui lui posent des questions : Ah! monsieur, c'est quoi que vous portez sur la tête, là? Est-ce que vous portez ça toute la journée? Est-ce que vous dormez avec ça? Comment ça fonctionne? Puis ils avaient d'autres questions en parlant avec leur prof, comme n'importe quel prof, parce qu'ils l'aimaient, parce qu'il leur inculquait de bonnes valeurs qui n'avaient rien à faire avec ce qui était sa tête, qui leur enseignait en maths et sciences parce qu'il était bon... il est bon prof. Message d'espoir, n'est-ce pas, M. le premier ministre, M. le ministre? Ces enfants-là n'ont appris de lui que des choses qu'on souhaiterait qu'ils apprennent.

Deuxième message, plus inquiétant, qu'il m'a transmis, il m'a dit qu'il hésite de s'identifier, même pas donner son nom. Et moi, j'avais des discours à faire, je cherchais des opportunités pour parler publiquement de ce projet de loi que je n'aime pas et j'aurais aimé l'invoquer et parler de lui avec son nom. Il m'a dit : Écoutez, je suis père de famille, j'ai trois enfants, je me sens mal à l'aise.

Troisième message qui me met en colère... Moi, j'ai eu le privilège de travailler dans l'école publique pour 16 ans. Je connais du talent quand je le vois et je sais que la pierre angulaire, évidemment, vous le savez comme parents, de l'enseignement de nos enfants, c'est la qualité de l'enseignant et l'enseignante. J'avais devant moi un prof d'évidente grande qualité qui va être interpelé ou qui aurait été interpelé par les cadres, les hauts cadres de sa commission scolaire sur l'île de Montréal pour devenir directeur d'école. Cet individu m'a fait comprendre qu'il souhaiterait continuer sa carrière ainsi. «Sorry», le projet de loi du gouvernement de la CAQ mettra ce Québécois juif croyant devant un choix inutile et, qu'on le dise, illégal — si on oublie, on va en parler, de la cause dérogatoire — illégal. Enlevez votre kippa ou oubliez ce poste de directeur. À la jeune femme qui porte le hidjab et ne rêve, elle aussi, que de partager son expérience, sa passion, son talent avec les jeunes élèves du Québec, elle qui voudrait faire apprendre à ces jeunes des principes de liberté, de l'ouverture, de l'égalité, qui font, oui, des pierres angulaires de notre société québécoise, la porte se ferme jusqu'à tant qu'elle décide de se plier aux exigences de ce mauvais projet de loi et de cacher ses croyances les plus profondes.

M. le premier ministre, M. le ministre, ça, ce n'est pas mon Québec. Ce n'est pas le Québec que j'ai la fierté de défendre au nom de mes concitoyens de D'Arcy-McGee à Assemblée nationale. It's not the modern, confident, distinct Québec that I am proud to represent and defend every time I'm in this Chamber, I'm in the rest of Canada or traveling anywhere in the world. L'Association de droit Lord Reading est la voix collective des juristes juifs au Québec, fondée en 1948. Sa mission, et je les cite : «Nous sommes dédiés à la promotion des droits de la personne et des libertés fondamentales et nous visons à desservir la communauté juridique, la communauté juive et la communauté en général.» L'association se donne la mission primordiale de défendre les droits de la personne dans le contexte distinct du Québec. Elle a soumis un mémoire. Elle aurait aimé avoir l'opportunité de le défendre devant les quelques jours d'audiences parlementaires accordés par ce gouvernement, mais ils n'étaient pas invités.

Une citation : «Et il est par le présent déclaré et statué par ladite autorité que toutes personnes professant le judaïsme, et qui sont nées sujets britanniques, et qui habitent et résident en cette province ont droit, et seront censées, considérées et regardées comme ayant droit à tous les droits et privilèges des autres sujets de Sa Majesté, ses héritiers et successeurs, à toutes intentions, interprétations et fins quelconques, et sont habiles à pouvoir posséder, avoir ou jouir d'aucun office ou charge de confiance quelconque en cette province.» L'extrait que je viens de lire n'est pas, évidemment, du projet de loi n° 21, mais d'une loi adoptée ici, au Québec, en 1831, quand nous, nous sommes devenus la première juridiction de l'Empire britannique à accorder la pleine émancipation des Juifs, laquelle garantissait leur droit d'obtenir et d'exercer toutes les fonctions au sein de la société, dont celle de député élu à l'Assemblée législative du Bas-Canada, maintenant notre Québec.

Là, je cite Lord Reading : «La description de "toutes les personnes professant la religion juive" est délibérée — je vous rappelle, en 1832. Elle reconnaît que les droits de "posséder, avoir ou jouir d'aucun office ou charge de confiance en cette province" sont fondamentaux, et ce, nonobstant leur — son — affirmation ouverte et démonstrative de la conviction religieuse. En adoptant cette législation, le Québec a érigé le pluralisme à titre de valeur fondamentale.» Fin de la citation de Lord Reading. Mais, il continue, en conclusion, donc : «Le projet de loi n° 21 propose aux Québécois un retour à l'ère pré-1832; il propose d'abroger et de retirer à des minorités des droits acquis depuis maintenant plus de 187 ans.»

Bon, si j'écoute les arguments, que je ne caractériserai pas comme arguments de grande rigueur du côté ministériel, ils se résument en trois ou quatre principes : neutralité, identité, le fait qu'il y ait supposément un consensus au sein de notre Québec sur le projet.

Neutralité, bon, laïcité, c'est le mot préféré. Pour moi, il n'y a pas grande distinction là-dedans, peu importe. Quelle distorsion de dire que la laïcité exige qu'on efface nos différences. Quelle absurdité que la laïcité fait en sorte que chaque prof soit pareil. Le programme même de formation de l'école québécoise dit le contraire. I've had the pleasure of defending cette formation lors des conférences dans les autres coins de notre pays, aux États-Unis et en Afrique à deux reprises en tant qu'adjoint parlementaire à l'ancien ministre de l'Éducation, maintenant député de Jean-Talon, à défendre notre programme de formation des jeunes qui se distingue par sa reconnaissance de la diversité, de l'égalité hommes-femmes, l'interpellation à nos enfants, justement, de questionner, développer leur esprit critique, d'apprendre à faire la part des choses. La laïcité n'est pas... on n'arrive pas là par le déni, l'aveuglement, la fermeture volontaire.

• (17 h 10) •

Identité, oui, notre identité. Allow me to spend a minute on what I find a deplorable and absolutely false dichotomy that the Premier, the Minister and many others continue to propagate : if you're in favor of this law, it's because you share and defend our Québec identity; if you oppose it, you ignore collective rights and are somehow stuck in some multicultural time warp. Quel constat banal et insultant! Et je prends ça très personnel, comme Québécois d'expression anglaise, membre de la communauté juive, et fier de l'être, mais fier d'être Québécois à part entière en même temps, fier de défendre, oui, notre langue commune, le français, nationaliste de ma façon. Alors, de suggérer que moi, que des gens de la CSDM, voyons donc, que plein de membres de notre société civile, Québécois francophones de souche font un choix de mettre à côté notre identité pour défendre une autre approche ouverte d'esprit, légale, réaliste de notre dite laïcité... ça se fait autrement.

Consensus. Dans un premier temps, René Lévesque lui-même a dit qu'on ne juge pas les gouvernements que par leur traitement des minorités. Il ne se levait pas le matin pour regarder qu'est-ce qui fait le consensus du monde. La démocratie serait beaucoup plus simple ainsi, mais ce n'est pas comme ça.

J'ajouterais qu'on va continuer à juger sévèrement le gouvernement, qui remplace leur devoir de leadership par une adhérence simpliste et, j'ose dire, une myopie volontaire des sondages. Ce projet de loi n'est pas correct, pas digne de nos traditions démocratiques, pas respectueux de l'égalité des femmes, pas fidèle à notre, oui, identité québécoise. Et qu'on arrête de suggérer que ceux qui opposent à ce projet de loi sont surtout et uniquement issus de ces mêmes minorités. Qu'on n'oublie pas non plus que ce gouvernement impose, et même avant l'adoption de la loi, la clause dérogatoire, la clause «nonobstant» pour éviter, éviter l'analyse légale et essentielle.

Autrement dit, ce gouvernement, de façon explicite, reconnaît le fait que ce projet de loi abroge les lois les plus fondamentales. Et qu'on n'oublie pas qu'il y a d'autres marges de manoeuvre qui auraient été disponibles à ce gouvernement avant de se prévaloir de la clause «nonobstant». Des limites dites raisonnables sur les droits fondamentaux sont permises. Donc, la CAQ constate elle-même que ce projet dépasse ses limites, impose des limites déraisonnables parce qu'ils décident qu'ils ont besoin d'avoir recours à cette clause «nonobstant». Alors, c'est des limites déraisonnables que constate implicitement ce propre gouvernement. Là, pour une rare fois, je suis d'accord avec eux.

This Government plans to adopt this law by impending, by imposing closure. And furthermore, it will impose by simple-majority vote of this National Assembly a major modification to our most fundamental of laws, la charte québécoise des droits et libertés de la personne. History will solemnly record this arbitrary and unprecedented gesture.

Laïcité dans notre charte? Bon, peut-être bien, mais pas rédigée sur le coin de la table et pas aux dépens des autres droits fondamentaux. Ces droits ne sont pas classés en hiérarchie, c'est un principe très clair en droit, ils sont un ensemble, un n'est pas supérieur à l'autre.

As a true champion of this Legislature, Clifford Lincoln once said here : Rights are rights are rights.

Bon, nonobstant, si je peux utiliser ce mot triste, nonobstant tout ça, même si, en quelque part, il y avait un encadrement d'arguments idéologiques défensibles, et je soumets qu'on ne voit aucun tel encadrement, même proposé par le côté ministériel, comment faire une fois adopter une telle loi? Comme je l'ai dit, j'ai oeuvré en éducation. J'imagine nos directrices, nos directeurs d'école, qui font d'ailleurs un travail formidable, Mme la Présidente, qui auraient devant eux, comme j'ai suggéré va être le cas, un prof formidable qui devrait être sur la voie de devenir directrice d'école, soudainement, sous peine, en quelque part, j'imagine — on parle d'une loi, ce n'est pas un petit discours, un voeu pieux — va être obligé de dire à ce prof : Je m'excuse, vous restez dans la salle de classe.

D'autres exemples, même plus banals et moins évidents : Ah mon Dieu! Il y a un prof dans l'autre classe de quatrième année qui doit aller en congé maternel, elle est enceinte. Ce petit transfert, ce prof avec le hidjab, qui enseigne aussi en quatrième année, peut-être ce serait à propos qu'elle prenne la relève. On utilise le mot «fonction» dans la loi. Évidemment, comme souvent l'autre côté, le tout va se régler par règlement. Mais ça veut dire quoi? Est-ce que ça, c'est un changement latéral? Est-ce que c'est une promotion? Bon, le directeur d'école, qui est leader pédagogique de son école, intermédiaire avec les parents, motivateur de son équipe, va devenir agent policier, agente policière et va passer une moitié de son temps en évaluant comment déployer son équipe.

Et, je m'excuse, le ministre, quand notre porte-parole a posé quelques questions de cet ordre pratique, a eu l'effronterie de suggérer que, bon, mais, voyons donc, ça va être le gros bon sens qui va s'imposer. Bon, j'aimerais bien trouver ce principe-là dans la jurisprudence. Une loi est à implanter, à implémenter, donc qu'on soit cohérents. Ce même directeur, cette même directrice d'école dont je parle aurait à agir si elle ou il découvre qu'il y a un prof qui porte le crucifix de façon très discrète. Il ou elle n'aurait pas à se questionner s'il y a un prof musulman très, très, croyant avec une longue barbe — évidemment, je défends son droit de l'avoir — mais non, rien à faire là, mais la femme, oui. J'imagine qu'il va, ce directeur, se gratter la tête quand il y a un prof avec des tatouages partout sur le corps. Est-ce qu'il ou elle va demander de regarder de plus près pour voir si peut-être il y a un crucifix sur un tatouage qui est moyennement caché? L'absurdité totale, mais pas juste absurde, quand on pense... quand on parle de la vie des personnes qui cherchent à faire leur avenir ici, au Québec.

Donc, M. le Président, c'est avec fierté mais tristesse pour le Québec que j'adore que je vais voter contre ce projet de loi que je déplore.

• (17 h 20) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Maintenant, je suis prête à reconnaître M. le député de Laurier-Dorion.

M. Andrés Fontecilla

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. Donc, le projet de loi que nous avons devant nous d'emblée est un projet qui va trop loin et qui, sous sa forme actuelle, est inacceptable pour notre formation politique. C'est un projet de loi qui sort de la logique d'un compromis acceptable, un compromis qui a été avancé après mûre réflexion par le rapport Bouchard-Taylor, qui a consulté des centaines, voire des milliers de personnes et aussi beaucoup d'experts. Sous prétexte de vouloir clore un débat qui dure depuis plus d'une décennie, ce projet de loi fait déjà la preuve, par les interventions qu'il soulève dans l'espace public, qu'il va au contraire alimenter les tensions déjà exacerbées auxquelles on assiste parce que, oui, c'est un débat qui se fait, en ce moment, sur le dos des minorités culturelles, religieuses, des minorités issues de l'immigration, dans la très grande majorité. Mais ne nous racontons pas d'histoires, Mme la Présidente, ces communautés sont pointées du doigt et stigmatisées dans les médias et dans l'espace public par les débats suscités par le projet de loi présenté par le gouvernement.

À Québec solidaire, nous avions toujours adopté une posture de compromis acceptable sur l'enjeu des signes religieux en reprenant la philosophie du rapport Bouchard-Taylor, qui incarnait ce compromis, un certain consensus québécois sur la question. Notre ancienne députée Françoise David avait même déposé, il y a cinq ans, un projet de loi directement inspiré du compromis Bouchard-Taylor pour régler cette question-là en plein milieu de la crise, on va s'en rappeler, de la charte des valeurs qui a profondément divisé le Québec. C'était une main tendue pour faire preuve de raison autour d'un consensus établi par des experts reconnus sur la base des consultations partout au Québec. On aurait pu s'entendre sur un projet de loi consensuel. Or, le ministre a décidé d'aller aux extrêmes, d'aller beaucoup, beaucoup plus loin que le rapport Bouchard-Taylor. En effet, les autres partis, y compris la Coalition avenir Québec, qui forme l'actuel gouvernement, ont successivement décidé de se retirer de ce compromis et de laisser traîner ce débat qui s'est, bien sûr, envenimé en faisant prendre à un non-problème une ampleur complètement démesurée et injustifiée.

Oui, Mme la Présidente, on s'attaque à un faux problème, à un problème inexistant. On légifère sur quelque chose qui n'est pas problématique dans la société dans laquelle nous vivons. Constat de la Confédération des syndicats nationaux, de la CSQ, de l'association des policiers et policières du Québec, des avocats, de notaires, etc., la liste est longue : il n'y a pas de plaintes, il n'y a pas de cas répertoriés de prosélytisme, pas tant, il y a seulement des perceptions, des préjugés et, il faut se le dire, il y a de la peur. On ne peut pas retirer des droits à des gens sur la base des perceptions sans un préjudice démontré.

Parlons-en un peu plus, des symboles religieux portés par les enseignants qui seraient interdits sous peine de congédiement par la loi actuelle. Encore une fois, ce projet de loi va trop loin. Il est fondé sur des préjugés en interdisant les symboles religieux pour les enseignants. Il n'y a toujours aucune preuve démontrée que les signes religieux affectent les enfants, les perturbent, qu'ils constituent du prosélytisme patent auprès des enfants. Il ne faut pas donner raison à la peur injustifiée que les enfants soient contaminés par les enseignants et enseignantes issus des communautés culturelles et qui portent des signes religieux visibles. Parce qu'il se peut très bien, Mme la Présidente, qu'il y ait des enseignants, des enseignantes qui portent des signes religieux qui ne sont pas visibles mais qui font du prosélytisme. Il n'y a pas de plaintes dans les écoles en ce moment. Le seul cas répertorié est celui d'une enseignante qui s'est fait demander par un enfant... ce qu'était son voile par ses élèves, ce qui est tout à fait acceptable. Nous vivons dans une société, de plus en plus, qui accepte la diversité, et nos enfants doivent côtoyer cette diversité-là et ils ont le droit de se poser des questions sur cette diversité.

L'école a pour mission, on le sait, dans la Loi sur l'instruction publique, de socialiser les élèves, ce qui inclut l'exposition à la différence pour qu'ils apprennent à vivre avec cette différence, avec cette diversité. On ne peut pas faire de l'école un endroit où la diversité — la diversité religieuse, dans le cas qui nous concerne — est de facto interdite. Le message envoyé par le projet de loi, c'est que la présence de la différence dans les écoles est une mauvaise chose, que les profs différents sont une menace pour les élèves. La multiplication des bagages culturels et des regards sur le monde que côtoient les élèves à l'école ne peut qu'ouvrir leurs esprits et leur permettre une compréhension et de grandir de façon harmonieuse avec le monde qui les entoure. On doit encourager la curiosité des élèves et un rapport sain et respectueux par rapport à la différence. La différence enrichit l'éducation, l'homogénéité appauvrit l'éducation.

Aujourd'hui, on se pose la question sur le port de signes religieux par les professeurs dans les écoles, mais demain, inévitablement, on va se poser la question aussi sur d'autres métiers qui sont présents dans les écoles, qui peuvent... qui portent des signes religieux qui sont permis par la loi en ce moment, on parle des orthopédagogues, des éducatrices spécialisées, des concierges. Pour vous donner un exemple, Mme la Présidente, le personnel de service de garde. Mon enfant, qui vient d'avoir sept ans, il fréquente un service de garde, et évidemment, en tout cas, dans ma circonscription et dans la grande région de Montréal, on voit énormément de personnes, des femmes en particulier, qui portent des signes religieux, le hidjab, pour être plus précis. Et moi, je n'ai pas peur que mon enfant côtoie ces femmes-là. Est-ce qu'on va un jour légiférer... puisqu'on a commencé avec les profs dans les écoles, bien, demain ça peut être les orthopédagogues, les éducatrices spécialisées, les femmes qui travaillent dans les services de garde. Jusqu'où va-t-on aller, là? Une fois qu'on a mis le pied dans ce processus-là, on peut aller beaucoup plus loin.

Le port de signes religieux n'est pas du prosélytisme. Il n'y a pas d'intention de prosélytisme chez l'écrasante majorité des gens qui en portent. Ils les portent tout simplement parce que, à tort ou à raison, ce n'est pas à nous de le dire, ils croient qu'ils doivent les porter, c'est une prescription religieuse. Le fait d'afficher son identité, sa culture, sa religion ne veut pas dire adopter les mêmes que moi. On impute des motifs aux personnes qui en portent. On fait des procès d'intention. Le problème, ce n'est pas le signe religieux en tant que tel, c'est la stigmatisation et les préjugés envers les personnes qui en portent.

Si on veut s'attaquer réellement au prosélytisme, on devrait tout simplement appliquer les outils légaux dont on dispose actuellement. On n'a pas besoin d'interdire les signes religieux. Je vous rappelle, Mme la Présidente, que, déjà, la Loi sur l'instruction publique interdit expressément le prosélytisme au personnel enseignant, et les mêmes dispositions doivent se trouver sur la Loi sur la fonction publique, etc. Le prosélytisme est interdit. On a déjà les outils juridiques pour régler cette fameuse question du prosélytisme.

Face à la position extrême et à l'entêtement du gouvernement à légiférer à coups de massue sur cette question en utilisant d'emblée la disposition de dérogation de notre propre charte québécoise pour retirer des droits à des personnes, en grande partie issues de l'immigration ou des minorités culturelles, je n'ai pas d'autre choix que de m'opposer fermement au principe de ce projet de loi.

Pour nous, dans notre formation politique, à Québec solidaire, notre position a toujours été et demeure la même, à savoir que c'est l'État qui est neutre et non pas les individus. Notre position en est une d'ouverture et de tolérance inspirée par la longue tradition humaniste qui traverse notre histoire au Québec pour garantir un sain vivre-ensemble. Et nous avons un certain niveau d'expérience historique dans ce savoir-vivre-ensemble. Nous avons cohabité avec les Premières Nations. Nous avons longuement cohabité avec nos compatriotes de langue anglaise. Plus tard, nous avons cohabité avec des gens issus de la communauté juive ou, aujourd'hui, des gens qui portent des turbans. Notre position en est une de laïcité, la vraie, celle qui consiste à garantir la neutralité religieuse de l'État envers toutes les religions pour garantir la liberté de conscience et le même accès pour tous et toutes à la vie citoyenne et publique dans le respect des convictions de chacun et chacune.

Et dire ça, ce n'est pas adhérer au multiculturalisme canadien. Pour nous qui sommes fiers de notre identité québécoise et pour le mouvement progressiste et indépendantiste que nous incarnons, notre modèle, c'est le modèle de l'interculturalisme qui doit être mis de l'avant pour s'opposer au «free-for-all» culturel canadien qui relègue la nation canadienne et aussi les nations autochtones à un rang de minorités parmi tant d'autres. Le multiculturalisme canadien engendre, on le constate, la ghettoïsation des communautés culturelles, tout comme le sentiment d'exclusion qui sera assurément le résultat de ce projet de loi. L'interculturalisme québécois est le seul modèle qui permet réellement l'intégration.

• (17 h 30) •

Dans le modèle interculturaliste... et il vaut la peine de dire que c'est le «made in»... il est fait maison, c'est un modèle que nous avons développé ici, à Québec, oui, il y a eu des intellectuels, des philosophes qui ont contribué, comment dire, à le schématiser, à le définir, etc., mais il s'est construit sur la base du quotidien, en quelque sorte. C'est un projet qui est issu de la coexistence, du vivre-ensemble de toutes les communautés au quotidien. Il s'est construit à chaque jour. C'est un modèle, en quelque sorte, empirique, ce n'est pas un modèle... on a créé une théorie et on l'a appliquée. Au contraire, on s'est inspirés de la réalité et on l'a formalisée dans une théorie, dans une approche qui s'appelle l'interculturalisme.

Dans ce modèle-là, l'interculturalisme, tout le monde, peu importe d'où on vient, apporte sa propre contribution à une même identité commune, à un tronc commun en français, dans le cas du Québec. Il y a dans ce modèle-là un métissage culturel enrichissant. Nous sommes forts de notre différence et nous sommes plus que nos différences. Affirmer une identité québécoise plurielle, inclusive, fondée sur un nationalisme civique.

Vous savez, la culture, notre identité, il faut la protéger, oui, mais elle n'est surtout pas figée. Ce n'est pas une statue qui demeure telle quelle à travers le temps, c'est quelque chose d'éminemment en mouvement, dynamique. À tous les jours elle se transforme, elle devient autre chose. Et la culture québécoise, oui, elle existe, elle est réelle et elle est appelée à se transformer comme elle s'est transformée tout au long de son histoire. Et les communautés qui viennent d'ailleurs, qui ont une autre confession religieuse contribuent à forger cette culture commune qu'est l'interculturalisme, à fonder la culture de demain.

Les gens qui viennent ici, au Québec, nous choisissent et veulent participer à ce mouvement, à la construction d'une nouvelle société, d'une culture qui va être plus forte et qui va être l'addition et beaucoup plus que l'addition de toutes nos différences. Dans ce sens-là, Mme la Présidente, il faut cesser d'avoir peur de l'autre. Il ne faut pas céder aux craintes de ce que les autres représentent. Plus les gens sont en contact avec des gens qui portent des signes religieux, qui portent la différence, moins ils sont en faveur du bannissement des symboles religieux. Moins on est en contact avec la différence, plus on la craint. L'ignorance engendre la peur, qui attise la haine à son tour, et on le voit malheureusement trop souvent dans notre société et ailleurs aussi. Apprendre à connaître les minorités culturelles et religieuses est un atout essentiel pour briser les préjugés. Les communautés culturelles ou les minorités religieuses ne sont pas une menace, elles sont un enrichissement pour la culture québécoise.

Le projet de loi n° 21 contribue à envoyer un message de fermeture et d'exclusion qui ne fait pas honneur à la tradition, à l'histoire, à la culture québécoise telle que nous la vivons aujourd'hui. Le message envoyé par le gouvernement, c'est le suivant : Au Québec, nos droits et libertés ne s'appliquent pas quand on légifère pour viser les minorités religieuses. Au Québec, on n'accommode pas les minorités, on n'est pas prêts à respecter les compromis proposés par tant de gens et parmi les plus éminents de notre propre société.

C'est malheureux parce que le projet de loi n° 21 n'est pas tout seul dans l'oeuvre du nouveau gouvernement. Il y a d'autres éléments qui s'ajoutent, qui, une fois mis ensemble, commencent à former une sorte de tableau, un tableau qui n'est pas très réjouissant, reluisant et qui ne parle pas en bien de la majorité gouvernementale, selon moi. Le projet de loi n° 21 s'ajoute aux dossiers d'immigration jetés à la poubelle par le projet de loi n° 9. Ça s'ajoute à la baisse des seuils d'immigration qui a été annoncée il y a quelques mois, comme si, encore une fois, il y avait trop d'immigrants au Québec. Ça s'ajoute au scandale de l'abolition des permis de taxi, qui touche beaucoup, de nombreux... des minorités issues de l'immigration, qui, dans le cas du taxi, est une industrie refuge pour les gens issus de l'immigration qui n'ont pas réussi à se faire reconnaître leurs diplômes, leurs compétences pour qu'ils puissent travailler selon ce qu'ils ont appris dans leur vie, c'est un secteur refuge. Et, encore une fois, le gouvernement s'attaque à un secteur composé en grande majorité, à tout le moins dans la grande région de Montréal... composé par des immigrants.

À Québec solidaire, nous ne voulons pas d'un Québec qui envoie un message de fermeture et d'exclusion, qui finit par sacrifier le concept d'identité commune, un concept d'identité ouvert et inclusif, en le noyant dans la multiplication des identités comme le fait le multiculturalisme. Mais il y a un juste milieu. Il y a une approche qui nous est propre, qui est faite ici, chez nous, c'est l'interculturalisme. Et le projet de loi n° 21 vient justement s'attaquer à ce modèle-là qui fait notre fierté.

Nous, à Québec solidaire, nous voulons d'un Québec où tout le monde apprend à se connaître, où on s'inspire les uns des autres, où on se transforme, on s'influence mutuellement. Nous voulons d'un Québec où on apprend à dire à tous nos concitoyens, à toutes nos concitoyennes, comme Saint-Exupéry : «Si tu diffères de moi, mon frère — ma soeur — loin de me léser, tu m'enrichis.» Le hidjab, la kippa, le turban, ce n'est pas une menace, c'est quelque chose qui nous enrichit. C'est une question d'humanisme de base, d'ouverture minimale à ce qu'est la différence. Et cette différence-là, elle ne s'effacera pas, elle va continuer à exister ici, au Québec, et elle va s'accentuer, parce que, oui, le flux migratoire devient la norme dans toutes les sociétés comme la nôtre, et aussi au Québec, donc nous devons apprendre à vivre avec cette diversité-là. Et nous devons faire un effort majeur pour tendre vers l'inclusion. Malheureusement, c'est tout le contraire du projet de loi que nous avons devant nous. Et, pour ça, c'est notre devoir de nous y opposer. Merci beaucoup.

• (17 h 40) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député des Îles-de-la-Madeleine, la parole est à vous.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Merci. Monsieur mon collègue, est-ce que je pourrais avoir votre... Merci beaucoup, Mme la Présidente.

Alors, d'entrée de jeu, j'aimerais faire un petit retour sur les éléments du projet de loi, sur ce qu'il représente pour nous, en fait, ce que l'on en comprend, pour commencer mon allocution.

Donc, le projet de loi, dans certains de ses éléments, de ses articles, va modifier la Charte des droits et libertés de la personne afin d'y inscrire que les libertés et droits fondamentaux doivent s'exercer dans le respect de la laïcité de l'État. Et nous croyons que c'est une bonne chose que l'on puisse inscrire le principe de la laïcité de l'État dans la Charte des droits et libertés de la personne, et nous l'appuierons tout au cours de l'étude qui se poursuivra sur le projet de loi n° 21.

Nous savons aussi, et on en a parlé depuis le début des travaux, qu'il, aussi, prévoit d'inscrire l'interdiction du port de signes religieux pour plusieurs catégories de personnes représentant l'État du Québec. Ce débat-là a cours depuis longtemps, et il est temps, aujourd'hui, de faire un pas décisif dans le sens de ce que les Québécois veulent, c'est-à-dire de poursuivre et de compléter la séparation de l'Église et de l'État, qui a été amorcée, comme on le sait tous, durant les années 60 et malheureusement n'a pas atteint la finalité que les Québécois souhaitaient la voir atteindre au cours des dernières années. Donc, le port des signes religieux, pour certains, peut paraître anodin, mais, pour nous, nous souscrivons à l'idée, en fait, de façon totalement égalitaire, que les gens puissent avoir, même dans leur apparence physique ou vestimentaire, la neutralité totale dans les services qui sont offerts à la population et aux citoyens du Québec.

Alors, comme vous le savez, le président et les vice-présidents de l'Assemblée nationale devront ne pas afficher de signes religieux; les juges de paix, les greffiers, les shérifs, registraires des faillites; également tous ceux qui doivent prendre des décisions de façon neutre et objective, comme les juges administratifs, les commissaires régisseurs de la Régie du logement; lorsqu'il est question, également, de commission d'enquête, un commissaire qui serait nommé ne devrait pas avoir de signes religieux qui soient visibles de la part des gens avec qui il est en interaction; un arbitre nommé par le ministre du Travail, le ministre de la Justice — on comprend bien pourquoi — le Procureur général, le Directeur des poursuites criminelles et pénales ainsi qu'une personne qui exerce la fonction d'avocat, de notaire ou de procureur aux poursuites criminelles et pénales et qui relève d'un gouvernement; un avocat, un notaire de pratique privée pour des mandats qu'il a reçus du gouvernement ou d'un organisme public; un agent de paix exerçant des fonctions principalement au Québec; un directeur, une directrice, un directeur adjoint, directrice... ainsi qu'un enseignant d'un établissement d'enseignement public, on y reviendra tout à l'heure, mais il s'agit d'un établissement d'enseignement public...

Bien, en fait, je vais le mentionner tout de suite. Il est quand même à noter que les établissements privés et le personnel non enseignant des écoles publiques ne sont pas visés par la loi à l'heure actuelle. Nous aurons des questions à poser sur cet aspect. Par contre, tout le personnel scolaire, tant privé que public, est assujetti à l'obligation de services publics à visage découvert. Les CPE et garderies subventionnées ne sont pas assujettis à l'interdiction des signes religieux, ce que l'on a déploré, mais le sont pour les services à visage découvert, ainsi que les bureaux coordonnateurs de garde en milieu familial.

Le projet de loi, enfin, introduit une clause de droits acquis relativement restreinte, qui ne vise que les personnes qui conservent les mêmes fonctions dans le même organisme public. Tout changement de poste, d'organisme, de commission scolaire ou promotion fera perdre le droit acquis. Nous saluons d'ailleurs le fait que cette idée du droit acquis ait été retenue par le législateur, par le gouvernement, pour les fins de son projet de loi, pour éviter la mise à pied de gens qui sont déjà à l'emploi du gouvernement et qui verraient ainsi leurs conditions de travail modifiées de façon, disons, discutable.

Le projet de loi introduit une clause dérogatoire aux deux chartes des droits et libertés, celles du Québec et du Canada, en précisant que le projet de loi est fait indépendamment de certaines dispositions de la Charte des droits et libertés de la personne, de la Loi constitutionnelle de 1982.

Alors, pour ce qui est de l'opinion et du point de vue de notre formation politique, eh bien, il est clair que la séparation de l'État et des religions est non seulement nécessaire, mais absolument fondamentale. Nous croyons que c'est la base même de la société, d'une société qui se veut libre et neutre, où tous les citoyens et les citoyennes sont égaux et où la liberté de conscience et la liberté de religion sont de mise.

Et ça, on ne le discute pas. Il y a beaucoup de discours qui portent sur cet élément-là, nous le reconnaissons. La liberté de conscience et de religion demeurera. Elle a été inscrite dans les chartes de droits et libertés et elle est là pour durer, cette liberté qu'on accorde à tout un chacun de choisir sa religion, de croire en son Dieu et d'y adhérer sur une base personnelle, dans son intimité, ou en public, dans l'espace public. Mais évidemment, et c'est une condition stricte pour le projet de loi, lorsqu'il est question de fournir des services au nom de l'État du Québec, eh bien, évidemment, là, la perspective est totalement différente.

Je reviens donc sur le fait qu'il existe des principes et des concepts de la laïcité de l'État qui sont mis de l'avant dans le projet de loi, et il nous apparaît essentiel que les institutions parlementaires, gouvernementales et judiciaires respectent ces principes de neutralité et de laïcité, de liberté de conscience, oui, et de liberté de religion. Nous reconnaissons donc les efforts du gouvernement pour légiférer enfin sur cette question sensible et tenter de mettre fin à ce débat de société qui dure, comme on le sait tous, depuis nombre d'années.

Nous saluons également l'interdiction du port de signes religieux pour les enseignants et les enseignantes. Il y a eu une réflexion là-dessus au gouvernement qui a été, j'imagine, aussi influencée ou alimentée par le point de vue que nous avions exprimé dans le débat public, et qui finalement a été retenu pour, donc, que ce soit appliqué dans le système scolaire public au Québec. Et évidemment, on le sait, cet élément-là va plus loin que la recommandation du rapport Bouchard-Taylor, qui est utilisé comme référence par à peu près tous les intervenants au dossier.

Cependant, on doit quand même mentionner — et on pourra évidemment argumenter et questionner le gouvernement sur ses intentions — certains éléments qui nous semblent révéler des incohérences, dans le projet de loi.

D'abord, il est entendu que le projet de loi est affaibli par le fait que l'on ne prenne pas la peine de définir les signes religieux dont il est question dans le projet de loi. Il s'agit, de notre point de vue, d'une lacune majeure au projet de loi, qui le fragilise, qui le rend plus vulnérable à la contestation ou à l'interprétation.

On omet également d'en dire davantage ou de préciser quelles sont les sanctions ou les conséquences dans le cas où les personnes ne se soumettraient pas à la loi. Évidemment, lorsque l'on met de l'avant un projet de loi et qu'il a force de loi, les gens qui y sont soumis se poseront la question à savoir s'ils doivent en tout temps respecter les éléments de la loi et quelles sont les conséquences si on ne le fait pas, et, à ce stade-ci, il n'est pas clair à savoir qui sera responsable de faire appliquer la loi et quelles seront les conséquences ou les sanctions si on ne respecte pas les éléments de la loi par rapport, par exemple, aux signes religieux. C'est un élément qui est important et qui est d'autant plus inquiétant que plusieurs personnes, morales ou physiques, déjà, dans le dossier, dans l'espace public, à travers les médias, ont signifié leur intention de ne pas respecter ces éléments de la loi, donc d'organiser de façon plus ou moins concertée une désobéissance civile en ce qui concerne l'application de ce qui deviendra loi, on le suppose bien, au cours des prochaines semaines. Même après avoir questionné le ministre lors des audiences ou des auditions publiques et des consultations particulières, ces questions ne sont toujours pas résolues, elles sont toujours en suspens. Il faudra bien que l'on puisse avoir des précisions, des clarifications pour l'ensemble des parlementaires, bien entendu, mais également et de façon beaucoup plus importante pour la population et les citoyens du Québec.

• (17 h 50) •

La plus grande incohérence, parce que c'est de ça dont il s'agit, et nous l'avons déjà mentionné, l'incohérence, donc, du projet de loi n° 21 est celle d'interdire le port de signes religieux pour les enseignantes et les enseignants du secteur public, des écoles qui sont financées à 100 % par le gouvernement du Québec, mais ne pas l'appliquer aux écoles privées, les écoles privées qui, comme on le sait, bénéficient du soutien de l'État et d'un soutien important, à hauteur de 60 %, ce qui, pour nous, est à ce point significatif que la différence ne doit pas, finalement, avoir pour conséquence de les considérer de façon distincte dans le cadre d'un projet de loi comme celui-là. Si l'on veut véritablement que la laïcité de l'État soit affichée, soit présente dans le milieu scolaire, évidemment, le milieu scolaire privé, largement financé par l'État, devrait également en faire partie. C'est, pour nous, un non-sens, qu'un État qui se veut laïque subventionne des écoles religieuses. Il y a près de 140 écoles religieuses subventionnées au Québec, à l'heure actuelle, et on devra un jour se pencher sur cet élément-là. Et j'en profite quand même pour mentionner que, si l'État s'affirme laïque, il devra considérer la possibilité de cesser le financement d'écoles qui ne seraient pas laïques, qui ne se conformeraient pas, donc, à la loi que l'on adoptera.

Plusieurs groupes sont venus témoigner pour l'abolition de tout financement public aux écoles privées conventionnelles... confessionnelles, je devrais dire : Pour les droits des femmes du Québec, le Mouvement laïque québécois, Rassemblement pour la laïcité, Ligue d'action nationale, Centrale des syndicats du Québec. Même le sociologue Gérard Bouchard, malgré son récent, comment dire, changement de position, s'étonnait de l'exclusion des écoles privées, pourtant largement financées par l'État. Il a affirmé que ces milieux-là devraient être visés également. De son côté, la Fédération autonome de l'enseignement, en faveur de la neutralité religieuse, a relevé également l'incohérence, voire même l'injustice selon laquelle seules les écoles publiques doivent assumer cette responsabilité. La Fédération des commissions scolaires du Québec était aussi du même avis.

Alors, en plus de ce qu'on pourrait appeler le double standard entre le privé et le public, le projet de loi interdit également le port de signes religieux pour les enseignantes et les enseignants ainsi que pour les directeurs d'école, mais pas pour le reste du personnel scolaire, qui pourtant est tout aussi important dans le fonctionnement de l'école, du système scolaire. Et ces gens-là, les dévoués membres du personnel scolaire, sont des gens tout aussi significatifs pour les jeunes du Québec en milieu scolaire que peuvent l'être des enseignants, les enseignantes et les directeurs. Ce personnel a un impact, fort heureusement, un impact important dans le cheminement scolaire des élèves, dans la vie de nos enfants. Et c'est là où le projet de loi crée une certaine inégalité dans le traitement des membres du personnel des écoles, à savoir une enseignante, un enseignant se verra dans l'obligation de retirer les signes religieux qu'il pourrait ou qu'elle pourrait porter, par exemple une enseignante qui porterait le voile devrait le retirer lorsqu'elle est en fonction, alors que son collègue qui pourrait être éducateur spécialisé pourra, lui, porter sa kippa sans aucune autre préoccupation.

Selon nous, l'interdiction devrait être étendue à toute personne qui, dans le cadre scolaire, interagit avec les enfants. L'enseignant n'est pas le seul à agir auprès des élèves, on en conviendra. Il faut donc que l'école soit un domaine complètement neutre pour les enfants, pour l'ensemble des élèves dans leurs relations, donc, avec le personnel de soutien comme avec le personnel enseignant. Les professionnels qui complètent le travail de l'enseignant ne devraient donc pas être soumis à une norme différente. Les adultes qui exercent une autorité morale sur les enfants, qui représentent des modèles pour eux ont, selon nous, le devoir de mettre en place les conditions favorables à la construction de leur jugement, de leur identité, de leurs convictions et permettre à chaque enfant de se forger sa propre vision du monde. Les enseignants doivent être neutres dans une école, qui doit l'être aussi.

Alors, je pourrais mentionner que, de plus, on s'interroge, à savoir : Pourquoi interdire le port de signes religieux pour les enseignantes et les enseignants mais pas pour les éducatrices ou les éducateurs en centre de la petite enfance, en garderie privée ainsi qu'en service de garde? C'est, encore une fois, une incohérence du projet de loi, on en conviendra. La nécessité d'assurer une neutralité réelle et apparente des enseignantes et des enseignants est cruciale, considérant que l'école a un rôle fondamental dans la formation de l'esprit citoyen et du développement de l'autonomie de la pensée des élèves. Mais alors comment ne pas s'étonner qu'il n'y a rien dans le projet de loi sur les éducatrices ou éducateurs en milieu de la petite enfance?

Je voudrais également manifester un autre élément qui nous a étonnés, à savoir qu'il n'y a rien dans le projet de loi sur l'abolition ou minimalement la réforme des cours d'éthique et culture religieuse. Nous l'avons déjà mentionné ici, au salon bleu, que ce cours devait être aboli. Nous ne sommes pas les seuls, d'ailleurs, à nous questionner sur la partie culture religieuse de ce cours. En commission parlementaire, c'était également le cas de Nadia El-Mabrouk, Pour les droits des femmes, Ligue d'action nationale, le Mouvement laïque québécois, le Rassemblement pour la laïcité.

Alors, je pense, en terminant, qu'il faut enfin franchir une étape déterminante dans ce débat, qui dure depuis nombre d'années. Je crois qu'il faut se mettre au diapason de la majorité de la population du Québec, qui est en faveur de la laïcité de l'État. Et nous travaillerons à bonifier ce projet de loi au cours des prochaines semaines, des prochains jours et des prochaines semaines.

Je vais terminer là-dessus, Mme la Présidente. Je vous remercie de votre attention.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Compte tenu de l'heure, je vais suspendre les travaux pour procéder aux deux débats de fin de séance.

Alors, je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 18 h 4)

Débats de fin de séance

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder aux deux débats de fin de séance.

Le premier débat, qui se fera entre M. le député de Pontiac et Mme la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation, concerne l'absence d'entente entre le gouvernement et l'armée pour enlever les sacs de sable des terrains des gens sinistrés en Outaouais.

Je vous rappelle que, conformément à l'article 310 du règlement, le député qui a soulevé le débat et le ministre qui lui répond ont chacun un temps de parole de cinq minutes, et le député a ensuite un droit de réplique de deux minutes.

M. le député de Pontiac, je vous cède la parole pour une durée de cinq minutes.

Aide aux victimes outaouaises des inondations printanières de 2019

M. André Fortin

M. Fortin : Merci. Merci, Mme la Présidente. Effectivement, c'est un peu un suivi, là, de la discussion qu'on a eu ce matin entre, bien, moi-même et le leader parlementaire du gouvernement ainsi que la ministre des Affaires municipales, et je sais que la ministre des Affaires municipales sait exactement de quoi je parle.

Je le sais qu'elle le sait parce que la mairesse de Pontiac lui en a parlé quand elle est allée dans la région. La mairesse de Pontiac lui a dit : Ce serait important pour nos citoyens, pour notre communauté, pour notre municipalité, ce serait primordial que les Forces armées soient disponibles pour enlever les sacs de sable. Pourtant, ce matin, la réponse qu'on a eue de la ministre... et c'est pour ça qu'on est ici, Mme la Présidente, la ministre a parlé d'hébergement, a parlé d'hébergement des sinistrés, et ce n'était pas ça, la question du tout. On parlait de sacs de sable. Vous l'avez noté d'entrée de jeu, là, dans votre introduction.

Et pour ceux qui ont déjà fait un sac de sable, pour ceux qui ont déjà installé un sac de sable... savent exactement de quoi je parle. Les sinistrés savent exactement de quoi on parle. C'est du travail... c'est un dur labeur, disons, c'est pesant, ce n'est pas évident à manoeuvrer, c'est... il y en a, on n'en fait pas un, sac de sable, on en fait des centaines, des fois des milliers. J'ai vu un reportage récemment sur une résidence dans la municipalité de Pontiac où il y avait 30 000 sacs de sable d'installés, Mme la Présidente. 30 000 sacs de sable, c'est une chose de les faire avec des bénévoles, c'est une chose de le faire quand on a de l'adrénaline, on essaie de protéger notre maison. Les inondations commencent, l'eau monte, il faut absolument faire ce qu'il faut faire pour protéger nos avoirs, pour protéger notre résidence, pour protéger là où on élève notre famille, pour protéger un lieu qui est cher dans notre coeur pour nous, pour notre famille, pour nos enfants. Puis, quand il y a des gens autour... Il y en a eu des centaines, il y en a eu des milliers, de bénévoles, en Outaouais, au cours des dernières semaines.

Alors, c'est une chose de faire des sacs de sable, d'installer les sacs de sable quand on a de l'aide, quand on a de l'énergie, quand on commence une aventure malheureuse comme celle-là. Mais, au stade où on est rendus aujourd'hui, Mme la Présidente, après six semaines... on est dans la sixième ou la septième semaine, là, si je ne me trompe pas, Mme la Présidente, d'inondations... Il y a des gens qui ont de l'eau dans leur cuisine depuis six semaines, puis ça commence à baisser. Il y a des endroits où ça a diminué beaucoup. Il y a des endroits où ça n'a pas diminué tant que ça encore. Il y a des gens qui habitent chez leur beau-frère, chez leur belle-soeur, chez leur cousin, chez leurs amis, chez leurs parents. Je ne sais pas pour vous, Mme la Présidente, mais, moi, passer quelques semaines chez ma belle-mère dans un petit appartement avec les enfants, avec les animaux, avec tous nos avoirs, disons que ce n'est pas facile pour la personne qui nous héberge, puis ce n'est pas facile pour nous autres non plus. Ce n'est pas toujours évident à vivre, une situation... ce n'est jamais évident à vivre, une situation comme celle-là.

Puis, dans les petites municipalités — la ministre nous parlait d'hébergement, là — dans les toutes petites municipalités, il n'y en a pas, d'hôtel. Des gens habitent avec leur famille. Et là ils sont épuisés. Là, ils sont tannés. Ça fait des semaines qu'ils essaient de pomper l'eau de leur sous-sol. Ils ont tout fait pour protéger leur maison. Ils se rendent compte que peut-être qu'ils y sont arrivés, peut-être qu'ils n'y sont pas arrivés, peut-être que leur maison, c'est une perte totale, mais il faut quand même, quand ils arrivent chez eux, là... L'eau s'en va un peu, ils arrivent chez eux, ils regardent ça puis ils se disent : Ouf! J'ai de la job à faire, hein, ça ne sera pas facile. J'ai de la job à faire. Là, ils retournent dans la maison, ils voient ce qui est dehors, là, les centaines de sacs de sable qui n'ont pas fonctionné. Ça n'a pas protégé la résidence, l'eau est passée par-dessus. Ils sont rendus contaminés, hein, le sable est contaminé. Ça ne sent pas bon, Mme la Présidente, parce qu'il y a toutes sortes de contaminants qui ont affecté ces sacs-là. Ils sont mouillés, ils sont pesants.

Puis pesant, on parlait de pesant, là... Quand on commençait les sacs de sable qui étaient secs, des sacs de 50 livres, Mme la Présidente, j'en ai vu dans mon comté, des sacs de 50 livres secs, ça va, imaginez mouillés, ces sacs-là. Il y en a qui sont déchirés. Il y en a qui... Les citoyens ne sont simplement pas capables. Imaginez, enlever 30 000 sacs de sable de votre terrain, Mme la Présidente. Ça ne se fait pas, et c'est pour ça que l'armée a été appréciée en 2017. C'était une immense partie de ce qu'ils ont fait pour les citoyens de notre région, mais des citoyens de beaucoup d'endroits au Québec, des citoyens, là, qui se retrouvaient au dépourvu.

Et le gouvernement n'a pas d'entente avec les Forces armées. Pourquoi? On ne le sait pas, c'est ce qu'on demande à la ministre, aujourd'hui, c'est : Entendez-vous, s'il vous plaît, avec les Forces armées canadiennes, parce que nos citoyens, là, nos citoyens, ils n'ont pas l'énergie, ils sont épuisés, ils sont fatigués, ils n'ont pas le temps. Ils ne veulent pas que leurs enfants jouent autour de ce sable contaminé là quand l'eau va rebaisser puis ils n'auront pas eu le temps de les enlever. Ils ne veulent pas, Mme la Présidente, mettre à risque leurs familles. Ils veulent retrouver une quiétude, éventuellement, et ça, ça passe par avoir l'aide de l'armée. Les gens n'ont pas les ressources, que ce soit... les petites municipalités n'ont pas les ressources pour le faire, il va y avoir moins de bénévoles, ça va être une situation, on le sait, qui va être difficile, pour des semaines et des semaines. Pourquoi le gouvernement n'a pas exigé de l'armée d'avoir de l'aide pour les sacs de sable?

• (18 h 10) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à Mme la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation.

Mme Andrée Laforest

Mme Laforest : Merci, Mme la Présidente. Alors, ce matin, oui, j'ai pris la réponse pour ma collègue à la Sécurité publique et puis je peux vous dire qu'on a travaillé ensemble, toutes les deux, depuis le début. Elle, depuis le 10 avril, avec son programme d'indemnisation qui était très, très, très bien apprécié. Oui, je suis allée à Pontiac rencontrer votre mairesse, je suis allée à Gatineau aussi, et vous comprendrez que les Affaires municipales et l'Habitation, avec la Sécurité publique, on a vraiment été proactifs, si je peux dire.

L'armée est arrivée très, très rapidement. Oui, vous parlez maintenant de sacs de sable. Moi, j'ai tout de suite discuté, parce que, oui, on a discuté ensemble, Sécurité publique, Affaires municipales et Habitation, on a discuté ensemble, puis on a un programme, aux Affaires municipales, un programme qu'on peut mettre en commun les services d'une autre municipalité qui est tout près. Moi, j'ai communiqué avec toutes les municipalités qui étaient problématiques, si je peux dire, ou qui avaient besoin d'aide, et... Merveilleux, parce que nos directions régionales sont en place, communiquent ensemble et elles se sont partagé des services, des services au niveau des besoins matériels, des services au niveau des ressources humaines. La communication a très bien été.

Ce matin, d'ailleurs, je suis arrivée à mon travail et j'ai posé la question, j'ai appelé dans certaines directions régionales. Le travail se fait vraiment en collaboration. Qu'est-ce qui s'est passé, peut-être, dans le passé? Écoutez, moi, ce qu'on m'a dit, c'est que toutes les demandes arrivaient et toutes les demandes étaient acceptées. Nous, ce qu'on fait, vous avez raison, on fonctionne... on y va, par exemple, aux deux semaines, on demande à l'armée. Ne soyez pas inquiet, nos demandes sont là, notre travail est vraiment important, on fait des pressions. Mais, ceci étant dit, il faut que les directions régionales travaillent avec les municipalités qui sont ensemble, là, on appelle ça de la mise en commun, et, quand les directions régionales nous disent que ça va bien, par exemple, avec les cols bleus, le travail se fait bien, bien, à ce moment-là, on est plus que satisfaits.

Ce matin, je voulais amener le point d'hébergement, parce que l'habitation, quand je suis allée en Outaouais, l'habitation, vraiment... je sais que cette région-là a des besoins en habitation. J'ai rencontré, comme je le disais encore ce matin, le maire de Gatineau. Et ce qu'on m'a dit, c'est qu'on avait la chance d'avoir les PSL d'urgence, les programmes au soutien au loyer d'urgence. On en a encore. On est toujours en communication. Même, ce que je peux dire, c'est qu'on a libéré 70 unités AccèsLogis pour la région de Gatineau. Vous allez me dire : Ça ne se construit pas tout de suite. Sauf qu'on a des possibilités avec des logements privés, avec les PSL, d'offrir de l'aide.

Alors, si je peux dire, ce matin, j'étais très heureuse de prendre la question, parce qu'on est toujours en communication, ma collègue et moi, par rapport aux inondations. Et également ce que je pourrais vous... comment je pourrais vous rassurer, c'est que, même aujourd'hui, ma collègue était à Vaudreuil-Soulanges. Parce qu'on l'a entendu hier, les demandes. Sainte-Marthe-sur-le-Lac, j'ai été là, je suis allée quatre fois. Alors, ne soyez pas inquiet, la mairesse de Sainte-Marthe, la mairesse de Pontiac, le maire de Gatineau, on discute ensemble. Les demandes se font parfois par texte. Alors, si on dit que ce n'est pas rapide, ça... je pense qu'on ne peut pas aller plus rapidement que ça. On a un gouvernement qui a demandé l'aide de l'armée beaucoup plus rapidement que par les années passées.

Ceci étant dit, Il ne faudrait pas vivre ça, 2017, 2019, 2020. Alors, mon rôle, moi, qui est l'aménagement du territoire... on a notre comité d'action, qui est essentiel. On est huit ministres. On va s'associer d'experts. On va, par exemple, se concentrer sur les futurs événements pour ne plus que ça revienne. Et, si ça revient... L'aménagement du territoire, on n'en parle pas beaucoup, parce que la loi sur l'aménagement du territoire a 40 ans. Alors, vous allez comprendre que nos actions vont être centrées sur l'aménagement du territoire. On va regarder les zones qui sont inondables, les zones qui sont zéro-20 ans, les zones de 2017 qui ont été inondées, les zones de 2019. Alors, on va se concentrer sur ce travail-là. Puis, ceci étant dit, ne soyez pas inquiet, ce n'est pas parce que vous ne voyez pas toutes les demandes, et tous les événements, et toutes les démarches qui se font pour aider les municipalités... Mais je peux vous dire que la différence entre 2017 et 2019, c'est que la communication a été tout à fait franche, transparente, honnête, et on n'a eu que des remerciements — de votre mairesse, du maire de Gatineau. Puis je peux vous rassurer, ça va me faire plaisir demain, avec plaisir, de recommuniquer avec votre mairesse parce que, quand je suis passée, elle m'a dit : Je suis vraiment impressionnée de la vitesse dont votre gouvernement a agi pour les inondations. La sécurité du public, c'est essentiel. Oui, l'armée est arrivée tout de suite. Les directions régionales des affaires municipales ont avancé. Et ne soyez pas...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Pontiac, la parole est à vous pour votre droit de réplique de deux minutes.

M. André Fortin (réplique)

M. Fortin : Mme la Présidente, je pose une question à la ministre sur des sacs de sable, elle me répond avec des logements subventionnés puis elle me répond avec la réponse globale du gouvernement sur les inondations. J'ai l'impression, quand elle va au restaurant, là, elle s'assoit, on lui demande ce qu'elle veut manger, elle dit : Bien, j'aimerais commander une paire de souliers. Ça ne marche pas, son affaire.

Je lui demande une question simple et elle me répond sur autre chose complètement. Elle nous dit, Mme la Présidente, elle nous dit : Inquiétez-vous pas, nos demandes sont là. Bien, la grande corvée à Gatineau, là, c'est en fin de semaine. À ce que je sache, il va y avoir des citoyens, des bénévoles qui vont être là, qui vont aider, qui vont aider à nettoyer, mais il n'y en aura pas autant qu'il y avait des bénévoles il y a quelques semaines pour installer ces sacs de sable là. Ce serait, sans mauvais jeu de mots, se mettre la tête dans le sable de penser ça, Mme la Présidente. Il va y en avoir, des bénévoles, mais jamais ils ne vont être capables de ramasser tout ce qu'il y a à ramasser. C'est en fin de semaine, c'est maintenant, c'est là qu'on a besoin des Forces armées. Ce n'est pas plus tard, c'est maintenant.

Alors, nos demandes sont là. Elle est où, la réponse? Est-ce qu'ils vont voir les Forces armées, les citoyens, bientôt? Je ne pense pas, Mme la Présidente, parce que, quand la ministre me dit : Bien, peut-être que vous ne voyez pas, M. le député, tout ce qui se fait au gouvernement, bien, elle a peut-être raison, mais les citoyens, en fin de semaine, là, ils ne verront pas les Forces armées les aider. Ils vont regarder le gros tas de sacs de sable puis ils vont se dire : Comment je fais ça? Comment je vais faire pour nettoyer ça? Ils vont être découragés encore plus qu'ils sont présentement découragés.

Mais savez-vous quoi? Mme la ministre me dit : Bien, je ne voudrais pas qu'on revive ça en 2020. Mais, au rythme où on est partis, là, les sacs de sable, ils vont encore être là en 2020 pour les citoyens. Ils ne les auront jamais bougés, ils n'ont jamais pu les déplacer, Mme la Présidente.

Alors, réellement, là, je m'attendais à une réponse toute simple, et ça ne demande rien au gouvernement du Québec, ça demande un appel, ça demande un appel au gouvernement fédéral de dire : Pouvez-vous, s'il vous plaît, aider les citoyens qui sont sinistrés, qui sont évacués, qui sont fatigués, qui sont inondés puis qui n'ont pas les moyens, qui n'ont pas les ressources, qui n'ont pas la force pour ramasser ces sacs de sable là? Pouvez-vous envoyer l'armée? C'est tout ce qu'ils avaient besoin de faire. Ça ne leur aurait rien coûté, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, nous allons procéder au second débat entre M. le député de Nelligan et Mme la ministre déléguée au Développement économique régional concernant l'abolition insensée et antiéconomique du réseau national des pôles d'innovation. M. le député de Nelligan, je vous cède la parole pour une durée de cinq minutes.

Financement de l'innovation en région

M. Monsef Derraji

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, je ne pense pas devoir rappeler le nombre de fois que j'ai pu me lever dans cette Chambre pour poser la question à Mme la ministre responsable du Développement économique régional sur l'avenir des pôles. J'ai eu toute une panoplie de réponses : Je vais faire la tournée, je vais consulter les acteurs du milieu...

Tout a commencé, Mme la Présidente, le jour de l'annulation du lac-à-l'épaule. À l'époque, on disait que la facture dépassait les 100 000 $, 80 000 $ ou 100 000 $. J'ai eu l'occasion de questionner Mme la ministre pendant l'étude de crédits. J'ai demandé à ce qu'on nous dévoile cette facture, qu'on nous met au courant de cette facture, et il n'y avait pas de facture. Il y avait une réponse verbale que les coûts... et le coût était faramineux. C'est pour cela, on annulait le lac-à-l'épaule.

Pourtant, Mme la Présidente, les acteurs du milieu voulaient un organisme de coordination nationale. Les acteurs du milieu et les pôles travaillaient déjà ensemble, et vous savez pourquoi? Ce qui m'attriste aujourd'hui, ce qui m'attriste énormément aujourd'hui, c'est que... le vote de non-confiance que la ministre a envoyé à toute la région de la Mauricie, toute la région de la Mauricie... parce que ce que le Digihub a réussi, ce que la région a réussi depuis les dernières années est un exemple de succès pour l'ensemble des régions du Québec. Et ce n'est pas en tant que de donneurs de leçons que ces gens voulaient aider le Québec; au contraire, ces gens voulaient accompagner. C'est comme ça qu'on travaille, au Québec. Ensemble, on tisse des liens, surtout au niveau de l'innovation. C'est pour cela que notre gouvernement a mis en place les pôles.

Et la ministre avait l'opportunité de signer et de lâcher le financement depuis le début de son mandat. Ça n'a pas été fait, Mme la Présidente. Ça n'a pas été fait. Encore sur la table de son ministère, il y a des projets, et, encore, on traîne ça.

• (18 h 20) •

Et qu'est-ce qu'on fait, Mme la Présidente? Mme la Présidente, la ministre a décidé finalement de fermer la porte d'un réseau national. Vous savez quoi? C'est comme si on coupe la tête et on sépare le corps de la tête. C'est exactement ce qui a été fait.

L'organisme accompagnait les pôles, les aidait. Et vous savez quoi? Le réseau était en France, maintenant, Mme la Présidente. Et je vais vous lire un texte. Le jour même que Mme la ministre a annulé le réseau, le D.G., l'ex-D.G. du RNPRI participait, en France, à une mission, et il voulait faire profiter l'ensemble des régions, par visioconférence, et il partageait : «"Nous avons un outil de cartographie qui permet d'afficher les besoins particuliers d'entreprises", explique-t-il. "En temps réel, nous pourrons prévoir, par exemple, ce que sera l'industrie du drone dans trois ou six mois, avec des chiffres pour tous les métiers reliés à cette industrie."

«M. Nadeau précise que cet outil sera déployé gratuitement aux régions intéressées. Il est complété par un cryptoposte, un genre de contrat intelligent qui facilite la recherche selon les besoins. "Avec l'intelligence artificielle et la ‘blockchain', ça permet de positionner des gens qui veulent aller en région, de les envoyer au bon endroit, au bon moment, avec les bons interlocuteurs..."»

Ces innovations, Mme la Présidente, n'ont finalement pas été présentées en visioconférence. Vous savez pourquoi? Parce que Mme la ministre a décidé un jeudi soir d'envoyer un communiqué de presse pour fermer le réseau national.

Et donc notre cheval de bataille, notre expert en innovation qu'ont vanté depuis plusieurs années l'exemple parfait d'une région et non pas de Québec et de Montréal, d'une région qui s'est levée pour changer l'économie régionale ont dit : On ferme le réseau et on laisse les pôles à leur plein essor. Ça veut dire : on ne va pas les accompagner. Et, à date, au lieu d'avoir 18 pôles, on a quatre ou cinq pôles.

Mme la Présidente, le maire, le maire de Shawinigan a, à plusieurs dit que le but du réseau national n'était pas d'imposer une méthode mais d'aider au développement, et, peut-être, si la ministre a pris le temps d'écouter ces gens réellement, pas une seule fois, probablement, le réseau va continuer d'exister et va jouer son rôle d'accompagner les pôles et, en parallèle, encourager l'innovation dans nos régions.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à Mme la ministre déléguée au Développement économique régional. La parole est à vous pour une durée de cinq minutes.

Mme Marie-Eve Proulx

Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Merci, Mme la Présidente. J'apprécie énormément la question du collègue de Nelligan puisque ça fait plusieurs fois que je lui rappelle et je lui répète les éléments par rapport au réseau national des pôles d'innovation. Mais, en même temps, je sais que ça peut prendre 17 fois avant qu'un message, en moyenne, soit intégré. Donc, je dois être rendue à cinq. Donc, on va continuer dans ce sens.

Je veux juste rappeler à mon collègue de Nelligan qu'en janvier dernier j'ai reçu une lettre, le gouvernement a reçu une lettre de la Fédération québécoise des municipalités qui nous indiquait se questionner sur le rôle que pouvait jouer le réseau national des pôles régionaux d'innovation, ce qui nous a amenés à valider certains éléments directement avec le pôle. On a d'ailleurs des preuves écrites du réseau national, qui nous indique qu'ils organisaient, à ce moment-là, un événement rassemblant les pôles régionaux d'innovation pour des coûts, un budget total de 70 000 $.

Ça m'a préoccupée, comme ministre responsable du Développement économique régional, puisque j'ai constaté qui avait seulement cinq pôles de légitimés par une entente gouvernementale. Donc, cinq pôles, 70 000 $. Utiliser des fonds publics sans avoir d'acteurs à mobiliser, ça m'a préoccupée, comme ministre, comme responsable des fonds publics.

C'est donc à partir de ce moment-là qu'on a agi avec leadership puis qu'on a mis fin à cet événement qui n'avait pas de légitimité à ce moment-là. Toutefois, j'ai donné une chance au coureur. J'ai dit : Je vais aller faire une tournée, rencontrer l'ensemble des acteurs des régions. J'ai aussi décidé d'aller rencontrer ce fameux réseau national, parce qu'il y avait quand même sûrement quelque chose d'intéressant. L'intérêt était de voir qu'est-ce qu'il y avait d'intéressant là-dedans. Donc, à partir de là, ça nous a amenés à faire une tournée dans les régions. Ce que j'ai pu constater, puis ça, même mon collègue de Nelligan l'a reconnu le 3 mai dernier lors de l'interpellation, l'ancien gouvernement a saccagé et abandonné les régions. Il n'y avait plus d'infrastructure, il n'y avait plus d'organisme qui accompagnait. On cherchait un sens au développement. Toutefois, j'ai rencontré, dans cette fameuse tournée, des gens motivés, une volonté d'agir, un dynamisme pour faire vivre les régions, pour propulser les régions. Puis c'est ça qui m'a stimulée à pouvoir dire qu'on travaille en développant par le bas. C'est ça, la base du développement, Mme la Présidente, c'est qu'on ne commence pas par en haut pour imposer à la base, mais on commence à la base, puis c'est la base qui décide de se rassembler ou non.

Donc, ce qu'on a constaté par rapport au réseau, il y a eu trois constats. D'abord, qu'on a commencé par en haut. Donc, que le sens du réseau n'avait pas de sens parce que, d'abord, les pôles n'étaient pas constitués officiellement. Donc, en n'ayant pas de légitimité, comment le réseau pouvait agir? Deuxièmement, on a eu beaucoup de difficultés à obtenir des états financiers. On a eu beaucoup de difficultés à obtenir cette reddition de comptes. L'utilisation des fonds était douteuse. Puis ça, ça me préoccupe. Encore une fois, avec l'utilisation de fonds publics, c'est questionnable. L'autre élément, c'est que c'était assez désorganisé dans les actions, puisque la légitimité... les pôles n'étaient pas constitués. Donc, comment pouvaient-ils être structurés, organisés? Il y avait plusieurs objectifs, puis on ne savait pas trop où est-ce que ça s'en allait.

Notre philosophie, comme gouvernement, au niveau du développement économique régional, est claire. On veut s'assurer que chaque région puisse se développer en fonction de ses spécificités régionales. On veut également s'assurer qu'on ne fasse pas de mur-à-mur. Ce n'est pas vrai qu'on va avoir un seul modèle, qu'on prenne le modèle, par exemple, de la Mauricie puis qu'on le reproduise partout au Québec. Il est temps au Québec que chaque région puisse se développer en fonction de ses spécificités, de ses couleurs, de ses façons de faire, de sa culture. Puis c'est ce qu'on veut faire au niveau du développement économique régional. Pour nous, c'est clair, puis c'est à partir de là aussi qu'on va pousser la créativité, l'innovation puis assurer que le développement du Québec soit prospère.

Donc, notre objectif est d'abord : l'argent va s'en aller en région. Ça, je peux le garantir comme ministre. On l'a déjà garanti d'ailleurs par le budget, ces fonds-là vont aller en région pour les pôles. Cet argent-là aussi qui devait être prévu au réseau national va s'en aller en région. Si les régions sont intéressées, une fois que ces fameux organismes seront créés, s'ils sont intéressés à se regrouper au niveau national, nous les supporterons. Mais nous n'agirons plus à l'inverse comme l'a faite la stratégie électoraliste du dernier gouvernement de créer, à la dernière minute, un réseau et des pôles sans trop savoir pourquoi et comment. Donc, nous, on part des besoins des régions, on part des besoins du milieu pour assurer un développement économique prospère et cohérent, et ce, partout au Québec. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Nelligan, vous avez un droit de réplique de deux minutes. On vous écoute.

M. Monsef Derraji (réplique)

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Je pense que, finalement, j'ai ma réponse à la question : À qui la ministre est-elle redevable? À qui la ministre est-elle redevable? La ministre, pour la première fois, déclare en Chambre, au salon bleu, qu'elle a reçu une lettre de la FQM. Donc, si j'ai bien compris, la ministre a écouté la FQM en fermant le réseau national et non pas écouté les régions pour voir si elles ont besoin d'un pôle national.

Donc, la ministre répond à une commande, Mme la Présidente. La commande venait de la FQM, qui pensait que le réseau national, il n'est pas bon, et donc la ministre exécute le voeu de la FQM en fermant le réseau national.

Bien, vous savez pourquoi, Mme la Présidente, j'évoque cette question? Parce que, depuis le début, je questionnais Mme la ministre sur son leadership réel pour promouvoir l'innovation. Aujourd'hui, j'ai la confirmation que, si on veut promouvoir quelque chose, on n'écoute pas un groupe ou un lobby, on écoute nous-mêmes, nos fonctionnaires, nos agents avec qui on travaille, et les régions, c'est comme ça qu'on bâtit des stratégies économiques. Je tiens à rappeler à Mme la ministre, Mme la Présidente, que le maire de Shawi, qui est le président de C.A., que Mme la ministre connaît très bien, a dit que le but du réseau national des pôles régionaux d'innovation n'était pas d'imposer une méthode, mais d'aider au développement. Ce que Mme la ministre nous explique aujourd'hui, c'est qu'elle refuse de l'accompagnement d'un incubateur qui a démontré sa plus-value. Aujourd'hui, Mme la ministre refuse, et on voit un vote de non-confiance à l'ensemble de la région de la Mauricie. C'est triste, ce qui se passe, Mme la Présidente, parce que, finalement, Mme la ministre a écouté un groupe, Mme la ministre a écouté la FQM et n'a pas écouté les régions. Et c'est pour cela que, depuis le début je dis... et je me questionne sur son réel leadership. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député.

Ajournement

Compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont ajournés au lundi 3 juin 2019 à 13 h 40.

(Fin de la séance à 18 h 30)