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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Wednesday, November 4, 2015 - Vol. 44 N° 123

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Féliciter l'entreprise Breuvages Bull's Head inc., lauréate du prix Breuvage non alcoolisé
de l'Association québécoise des dépanneurs en alimentation

Mme Karine Vallières

Rendre hommage à Mme Diane Duplin, récipiendaire de la Médaille de l'Assemblée nationale

M. Stéphane Bergeron

Féliciter Mme Allison Coon-Come pour son succès en tant que cinéaste

M. Jean Boucher

Souligner la tenue du mois de l'achat local dans la circonscription de Deux-Montagnes

M. Benoit Charette

Saluer le travail du Cercle de fermières de Montréal-Nord inc.

Mme Rita Lc de Santis

Souligner le 10e anniversaire du Challenger Banque Nationale de Saguenay

M. Sylvain Gaudreault

Souligner le 50e anniversaire du Club d'auto-neige Le Sapin d'or inc.

Mme Caroline Simard

Souligner la Semaine nationale de la sécurité des aînés

Mme Francine Charbonneau

Souligner le 25e anniversaire du Centre des aînés Côte-des-Neiges

M. Pierre Arcand

Souligner l'importance de la route verte comme moteur économique du Québec

M. Sylvain Pagé

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 497 Loi visant à responsabiliser les détenus quant aux coûts de leur détention

M. André Spénard

Mise aux voix

Dépôt de documents

Rapport annuel et états financiers du Bureau de décision et de révision

Dépôt de rapports de commissions

Élection à la présidence de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des
ressources naturelles


Dépôt de pétitions

Modifier le projet de loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours
haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives
pour renforcer la protection des personnes

Annuler les augmentations de loyer des baux de villégiature pour les propriétaires présents sur
les terres publiques

Revoir l'imputation des dépenses de l'agglomération de Québec à Saint-Augustin-de-Desmaures

Annuler les augmentations de loyer des baux de villégiature pour les propriétaires présents sur
les terres publiques


Questions et réponses orales

Impact de la restructuration du Directeur des poursuites criminelles et pénales sur la lutte
contre le crime organisé

Mme Véronique Hivon

Mme Stéphanie Vallée

Mme Véronique Hivon

Mme Stéphanie Vallée

Mme Véronique Hivon

Mme Stéphanie Vallée

Investissement du gouvernement dans Bombardier inc.

M. Alain Therrien

M. Jacques Daoust

M. Alain Therrien

M. Jacques Daoust

M. Alain Therrien

M. Jacques Daoust

Investissement gouvernemental dans le développement des CSeries

M. François Legault

M. Jacques Daoust

M. François Legault

M. Jacques Daoust

M. François Legault

M. Jacques Daoust

Frais médicaux accessoires

M. François Bonnardel

M. Gaétan Barrette

M. François Bonnardel

M. Gaétan Barrette

M. François Bonnardel

M. Gaétan Barrette

Coûts relatifs à la gestion de la surpopulation carcérale

M. André Spénard

M. Pierre Moreau

M. André Spénard

M. Pierre Moreau

M. André Spénard

M. Pierre Moreau

Hausse du prix des baux de villégiature sur les terres publiques

M. Sylvain Roy

M. Pierre Arcand

M. Sylvain Roy

M. Pierre Arcand

M. Sylvain Roy

M. Pierre Arcand

Développement du réseau des centres de la petite enfance

M. Sylvain Pagé

Mme Francine Charbonneau

M. Sylvain Pagé

Mme Francine Charbonneau

Allocations de transition des ex-premiers ministres

M. Benoit Charette

M. Jean-Marc Fournier

M. Benoit Charette

M. Jean-Marc Fournier

M. Benoit Charette

M. Jean-Marc Fournier

Encadrement des frais médicaux accessoires

Mme Diane Lamarre

M. Gaétan Barrette

Mme Diane Lamarre

M. Gaétan Barrette

Projet d'exportation de pétrole de Chaleur Terminals Inc.

Mme Martine Ouellet

M. David Heurtel

M. Mathieu Traversy

M. David Heurtel

Motions sans préavis

Presser le gouvernement de réviser les règles encadrant les avantages consentis aux
ex-premiers ministres

Mise aux voix

Souligner la Semaine nationale des proches aidants

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Affaires du jour

Projet de loi n° 57   Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite principalement
quant au financement des régimes de retraite à prestations déterminées

Adoption du principe

M. Sam Hamad

M. Alain Therrien

M. Marc Picard

M. Amir Khadir

M. Guy Leclair

M. André Drolet

Mise aux voix

Renvoi à la Commission de l'économie et du travail

Mise aux voix

Projet de loi n° 59   Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux
et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications
législatives pour renforcer la protection des personnes

Adoption du principe

Reprise du débat sur la motion de scission

Mme Agnès Maltais (suite)

Mme Nathalie Roy

M. Patrick Huot

Mme Françoise David

M. Jean-François Lisée

M. Nicolas Marceau

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement que la nomination du Commissaire
à la lutte contre la corruption soit approuvée par les deux tiers de ses membres

M. Pascal Bérubé

M. Pierre Moreau

Mme Nathalie Roy

M. Jean Rousselle

M. Benoit Charette

M. Marc Tanguay

M. Bernard Drainville

M. Amir Khadir

M. Pascal Bérubé (réplique)

Mise aux voix

Projet de loi n° 59   Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux
et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications
législatives pour renforcer la protection des personnes

Adoption du principe

Reprise du débat sur la motion de scission

Mme Stéphanie Vallée

Mme Carole Poirier

Vote reporté

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante minutes)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, bon mercredi matin. Vous pouvez prendre place.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Et nous débutons cette journée avec la rubrique des déclarations de députés, et, sans plus tarder, je cède la parole à Mme la députée de Richmond.

Féliciter l'entreprise Breuvages Bull's Head inc., lauréate
du prix Breuvage non alcoolisé de l'Association
québécoise des dépanneurs en alimentation

Mme Karine Vallières

Mme Vallières : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Vous savez à quel point j'aime vous faire découvrir des produits et des réussites du comté de Richmond. Alors, aujourd'hui, je vous invite tous, collègues de l'Assemblée nationale, à joindre votre voix à la mienne pour féliciter l'entreprise Bull's Head de Richmond qui vient de remporter le premier prix des boissons non alcoolisées au concours des produits de l'association des dépanneurs du Québec.

Bull's Head, c'est une entreprise qui a vu le jour en 1896 et qui a créé le fameux soda gingembre qui est dégusté et savouré depuis partout au Québec, et même servi ailleurs dans le monde, mais également au Château Frontenac à une certaine époque, avant la plus grande commercialisation.

Permettez-moi donc de féliciter et remercier l'homme d'affaires estrien, le Dr Peter O'Donnell, d'avoir sorti cette fameuse recette de son coffre-fort et de féliciter les frères Carl et Dominic Pearson qui, depuis 2009, eux, développent et diversifient la gamme de produits, ce qui leur permet aussi d'élargir le marché. Un très beau succès de chez nous que je vous invite tous à découvrir. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la députée de Richmond. Et, pour sa déclaration d'aujourd'hui, je cède la parole à M. le député de Verchères.

Rendre hommage à Mme Diane Duplin, récipiendaire
de la Médaille de l'Assemblée nationale

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron : Merci, Mme la Présidente. Le 13 octobre dernier, nous avons procédé à l'inauguration officielle du nouveau bureau de circonscription dans Verchères. C'était tout un changement puisqu'il avait auparavant eu pignon sur rue à la même adresse pendant plus de 20 ans, soit depuis que Bernard Landry y avait emménagé après son élection en 1994.

Il m'est donc apparu important de souligner le travail remarquable d'une femme qui incarne littéralement ces deux décennies de service à la population, Mme Diane Duplin, à qui j'ai alors remis la Médaille de l'Assemblée nationale. Ce faisant, les quelque 300 personnes présentes et moi-même avons rendu hommage au dévouement, au savoir-faire, à la rigueur, à l'efficacité et à la détermination dont elle a su faire preuve dans le traitement d'innombrables dossiers, permettant ainsi, dans la plupart des cas, leur dénouement heureux, et ce, au bénéfice des citoyennes et citoyens de même que des municipalités, organismes et entreprises concernés.

Nous savons, Mme la Présidente, à quel point nos collaboratrices et collaborateurs sont indispensables pour nous permettre de bien nous acquitter de notre travail. Diane Duplin en fut une des plus exemplaires. Bonne retraite, chère Diane, et merci de tout coeur, en mon nom et au nom de toute la population de Verchères! Profite bien du temps passé avec tes petits-enfants.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le député de Verchères. Et maintenant, pour la prochaine déclaration, je cède la parole à M. le député d'Ungava.

Féliciter Mme Allison Coon-Come pour
son succès en tant que cinéaste

M. Jean Boucher

M. Boucher : Bon matin, Mme la Présidente. «Ullaakkut.» «Wachya», chers collègues. «Good morning».

Ce matin, je vais vous parler de Mme Allison Coon-Come. C'est une jeune Crie originaire de la communauté de Mistissini dans mon comté.

Allison Coon-Come est une jeune cinéaste très douée réalisant des films avec le Wapikoni mobile. Eddie, her most recent film, was soon competing against eight other films and she may win the grand prize, un honneur qui ne sera pas son premier et certainement pas son dernier, Mme la Présidente. Entre autres, elle a déjà reçu, en 2012, une mention spéciale pour un court métrage au festival Présence autochtone, à Montréal.

Allison wishes to study cinema and become a filmmaker. Alors, ma chère Allison, j'ai une grande nouvelle à t'annoncer: Tu es déjà une grande réalisatrice, et je ne suis pas inquiet pour ton futur, avec déjà six films réalisés. «Meegwetch.» «Nakurmiik.» Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député d'Ungava. Et maintenant je cède la parole à M. le député de Deux-Montagnes.

Souligner la tenue du mois de l'achat local
dans la circonscription de Deux-Montagnes

M. Benoit Charette

M. Charette : Merci, Mme la Présidente. C'est avec une immense fierté que je souligne la tenue actuelle du mois de l'achat local dans la circonscription de Deux-Montagnes. Cette initiative de La Brigade jaune, de la Chambre de commerce et de l'industrie MRC de Deux-Montagnes vise à sensibiliser la population à la consommation locale en faisant la promotion des bienfaits de cette dernière notamment sur l'économie, l'environnement et le maintien d'une bonne santé.

Je suis heureux de constater qu'à ce jour plus d'une trentaine d'entreprises et de producteurs de ma région se sont mobilisés afin de faire de cette initiative un franc succès. À nous tous maintenant de sensibiliser les consommateurs à développer un réflexe de consommation responsable dans le but de faire prospérer la création d'emplois dans nos régions.

Ainsi, dans le cadre du mois de l'achat local, j'invite tous les consommateurs à joindre les citoyens de ma circonscription en posant un geste solidaire face aux producteurs de leurs communautés, tout en faisant prospérer l'économie de leurs régions. Mme la Présidente, achetons local!

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Deux-Montagnes. Et, pour sa déclaration d'aujourd'hui, je reconnais maintenant Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Saluer le travail du Cercle de fermières
de Montréal-Nord inc.

Mme Rita Lc de Santis

Mme de Santis : Merci, Mme la Présidente. Les Cercles des fermières du Québec constituent la plus grande association de femmes de notre province. Elles célèbrent cette année leur 100e anniversaire de fondation et sont toujours aussi actives dans leurs communautés pour promouvoir le patrimoine culturel et artisanal.

Nous avons la chance, à Montréal-Nord, d'avoir un cercle des fermières. Ces expertes aux mains agiles perpétuent les traditions de travail artisanal textile. Elles ont d'ailleurs récemment exposé et offert des démonstrations de tissage sur métier et de dentelle au fuseau et initié les visiteurs au tricot, à la broderie sur papier et la création d'accessoires à partir de matières recyclables.

Je félicite et remercie Mmes Pierrette Guérin, Louise Rheault, Louise Guay-Meunier et Micheline Arsenault pour cette heureuse initiative et souhaite encore beaucoup, beaucoup de succès et longue vie au Cercle des fermières de Montréal-Nord. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, Mme la députée de Bourassa-Sauvé. Et, toujours à la rubrique des déclarations de députés, je cède la parole à M. le député de Jonquière.

Souligner le 10e anniversaire du Challenger
Banque Nationale de Saguenay

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Oui. Mme la Présidente, c'est avec plaisir que je souligne aujourd'hui à l'Assemblée nationale le 10e anniversaire du Challenger Banque Nationale de Saguenay. Cet événement, qui réunit de jeunes talents sportifs féminins, peut se vanter de présenter aux Saguenéens et Saguenéennes, mais aussi à tous les amateurs de tennis au Québec, des joueuses de tennis de haut calibre qui représentent des espoirs de niveau international. Le challenger est donc un terreau fertile de jeunes talents qui fait la promotion du sport, bien sûr, chez les jeunes filles, mais elles peuvent, donc, s'illustrer chez nous et par la suite rivaliser au sommet de hautes compétitions. Nous connaissons d'ailleurs quelques vedettes, par exemple Eugenie Bouchard, qui sont passées par cette épreuve sportive à Jonquière.

Je tiens également à souligner l'excellent travaille des organisateurs, celui des généreux bénévoles, qui réussissent à faire du Challenger Banque Nationale un événement remarquable par sa qualité mais également une rencontre particulière entre les jeunes joueuses de tennis et la population. Je souhaite donc longue vie au Challenger Banque Nationale. Merci aux bénévoles, et encore au moins 10 ans! Merci.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Jonquière. Et maintenant je reconnais Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.

Souligner le 50e anniversaire du Club
d'auto-neige Le Sapin d'or inc.

Mme Caroline Simard

Mme Simard : Merci, Mme la Présidente. Le 7 novembre prochain, le Club auto-neige Le Sapin d'or soufflera ses 50 bougies dans le cadre d'une soirée au centre des loisirs de Saint-Hilarion. À travers les années, ce club a connu un succès continu. Il regroupe aujourd'hui près de 2 000 adeptes de décors majestueux présents sur 375 kilomètres de sentiers. Parmi les réalisations du club, soulignons que des bénévoles ont aménagé des sorties d'urgence pour permettre aux ambulanciers d'accéder aux sentiers lors d'accidents, une innovation qui leur a valu le prix Blizz'Or lors du congrès des motoneigistes du Québec en 2000.

Grâce à une signalisation claire et efficace, le réseau est devenu un attrait incontournable, recherché par les motoneigistes. Le Club d'auto-neige Le Sapin d'or est un acteur important du tourisme hivernal et participe activement à l'activité récréotouristique.

J'en profite pour féliciter tous les membres et bénévoles impliqués dans cette belle organisation et souligner l'accent particulier porté à la sécurité, qui demeure essentielle dans la pratique de ce sport. Bon 50e! Et merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Mille-Îles pour sa déclaration d'aujourd'hui.

Souligner la Semaine nationale
de la sécurité des aînés

Mme Francine Charbonneau

Mme Charbonneau : Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi, par cette déclaration, de souligner la Semaine nationale de la sécurité des aînés qui se déroule du 6 au 12 novembre 2015.

Cette semaine est organisée chaque année par le Conseil canadien de la sécurité. Ses objectifs visent à sensibiliser la population afin de réduire le nombre de décès, de blessures et de dégâts matériels qui peuvent être évités et élaborer et promouvoir des méthodes qui permettront une meilleure sécurité pour tous. Le thème, cette année, traite de la maladie d'Alzheimer et de ce qui peut être enfin fait pour rendre un domicile plus sécurisant envers les personnes qui ont cette maladie.

Depuis plus de 60 ans, grâce aux contributions des entreprises et des citoyens qui en sont membres, le conseil canadien répond aux demandes de la population dans le but d'assurer la sécurité des citoyennes et des citoyens de tous les âges. Je tiens à exprimer ma reconnaissance envers tous les organismes qui ont à coeur la prévention et la sécurité des aînés et qui font de cette semaine un grand succès. Merci, Mme la Présidente.

• (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, Mme la députée de Mille-Îles. Et maintenant je cède la parole à votre voisin, M. le député de Mont-Royal.

Souligner le 25e anniversaire du Centre
des aînés Côte-des-Neiges

M. Pierre Arcand

M. Arcand : Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir de souligner en cette Chambre le 25e anniversaire du Centre des aînés de Côte-des-Neiges.

Depuis plus de deux décennies, cet organisme communautaire a pour mission de maintenir les aînés actifs le plus longtemps possible dans la communauté, améliorant ainsi leur qualité de vie. La promotion de l'autonomie des personnes âgées, le développement des habiletés pour assurer leur mieux-être personnel, les activités de nature socioculturelle, récréative et éducative représentent l'essentiel de la vie associative que propose le centre des aînés.

En terminant, je tiens à remercier M. Roger Risasi, le directeur général, de même que les 14 personnes qui composent son équipe au Centre des aînés de Côte-des-Neiges, ainsi que les nombreux bénévoles qui par leur implication et leur dévouement font en sorte que le centre est rempli de succès. Alors que nous avons une forte croissance de nos aînés, je pense qu'un organisme comme le centre de Côte-des-Neiges, évidemment, a plus que jamais sa pertinence. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Mont-Royal. Et, pour la dernière déclaration d'aujourd'hui, je cède la parole à M. le député de Labelle.

Souligner l'importance de la route verte comme
moteur économique du Québec

M. Sylvain Pagé

M. Pagé : Merci, Mme la Présidente. Alors, à titre de porte-parole en matière de sports, loisirs et de saines habitudes de vie, je tiens à féliciter Équiterre, qui a su mobiliser des partenaires de partout au Québec afin de sauver la route verte.

L'idée de cette piste cyclable de 5 300 kilomètres a pris naissance à la fin des années 80 quand les principaux artisans de Vélo Québec imaginaient le Québec cyclable de demain. Inaugurée en 2007, la route traverse près de 400 municipalités dans 15 régions et 94 MRC. En 2008, Vélo Québec reçoit le prix mondial Innovation en loisirs de l'Organisation World Leisure. La même année, la route verte se classe première parmi les 10 plus belles véloroutes au monde, rien de moins!

Une pétition de 48 000 noms a été déposée la semaine dernière au ministre des Transports dans le but de sauver la route verte. Pour la région des Laurentides, il s'agit d'un moteur économique essentiel avec des retombées de 68 millions de dollars, imaginez donc pour l'ensemble du Québec!

Je félicite Équiterre, Vélo Québec, les élus et les 48 000 pétitionnaires qui souhaitent sauver la route verte, et je demande au ministre des Transports de donner suite à leur pétition. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Labelle.

Alors, ceci met fin à la rubrique des déclarations de députés, et je vais suspendre les travaux quelques instants.

(Suspension à 9 h 52)

(Reprise à 10 h 1)

Le Président : Bon matin. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez vous asseoir.

Mmes, MM. les députés, nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Bonnardel : Oui. Oui, M. le Président, bonjour. J'étais en grande discussion avec le chef de l'opposition officielle, c'est pour ça.

Le Président : Bonjour à vous aussi.

M. Bonnardel : Alors, je vous demande d'appeler l'article a, s'il vous plaît, M. le Président.

Projet de loi n° 497 

Le Président : Alors, à l'article a du feuilleton, M. le député de Beauce-Nord présente le projet de loi n° 497, Loi visant à responsabiliser les détenus quant aux coûts de leur détention. M. le député de Beauce-Nord.

M. André Spénard

M. Spénard : Merci, M. le Président. En premier lieu, permettez-moi de souhaiter prompt rétablissement à la vice-première ministre du Québec et à souhaiter la bienvenue au nouveau titulaire de ce ministère dont je suis le critique.

Alors, ça me fait plaisir de déposer à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 497, Loi visant à responsabiliser les détenus quant aux coûts de leur détention. Ce projet de loi a pour objet de responsabiliser davantage les détenus quant aux coûts de leur détention. À cette fin, le projet de loi prévoit diverses mesures de contribution de la part des personnes incarcérées.

D'une part, la personne incarcérée doit, pendant la durée de sa détention, verser une part de ses revenus au ministre des Finances à titre de remboursement des frais engagés pour son hébergement et sa nourriture.

D'autre part, tout fonds de soutien à la réinsertion sociale doit prélever de la rémunération due à une personne incarcérée qui exécute un travail dans le cadre d'un programme d'activités un montant qu'il verse au ministre des Finances à titre de remboursement des frais engagés pour l'hébergement et la nourriture de la personne incarcérée.

Enfin, la personne incarcérée sans personne à charge qui bénéficie d'une indemnité de remplacement du revenu versée par la Société de l'assurance automobile du Québec ou par la Commission de santé et sécurité du travail voit une partie de son indemnité retenue pour le remboursement des frais engagés pour son hébergement et sa nourriture. Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président : Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, M. le ministre des Finances.

Rapport annuel et états financiers du Bureau de décision et de révision

M. Leitão : M. le Président, je dépose le rapport d'activité et des états financiers 2014-2015 du Bureau de décision et de révision.

Le Président : Ce document est déposé.

Dépôt de rapports de commissions

À la rubrique Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles et député de Labelle.

Élection à la présidence de la Commission de l'agriculture,
des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles

M. Pagé : Oui, avant tout. Alors, merci, M. le Président. Je dépose le rapport de la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles, communément appelée la CAPERN, qui, le 29 octobre 2015, a procédé à l'élection à la présidence de la commission. Merci.

Le Président : C'est un bon choix.

M. Pagé : Je pense que oui.

Le Président : Alors, ça va...

M. Pagé : On laissera...

Le Président : Alors, ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, Mme la députée de Taschereau.

Modifier le projet de loi édictant la Loi concernant la prévention
et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à
la violence et apportant diverses modifications législatives
pour renforcer la protection des personnes

Mme Maltais : Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 964 pétitionnaires. Désignation : citoyennes et citoyens du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Attendu que les discours haineux et les discours incitant à la violence sont sanctionnés par la législation criminelle du Canada;

«Attendu que le Québec est une société laïque;

«Attendu que les religions font partie du monde des idées;

«Attendu que plusieurs acteurs de la société civile soulignent la menace à la liberté d'expression que constitue le projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes;

«Attendu que le projet de loi n° 59 risque d'entraîner de longues, inutiles et coûteuses procédures judiciaires;

«Attendu que le deuxième volet du projet de loi n° 59 prévoyant "diverses mesures pour renforcer la protection des personnes" constitue quant à lui une avancée sociale;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Pour ces raisons, nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec qu'il modifie le projet de loi n° 59 pour n'en conserver que le deuxième volet prévoyant "diverses mesures pour renforcer la protection des personnes".»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé. J'ai aussi M. le député de Bonaventure.

Annuler les augmentations de loyer des baux de villégiature
pour les propriétaires présents sur les terres publiques

M. Roy : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 5 087 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que les terres publiques du Québec appartiennent à l'ensemble des citoyens;

«Considérant que l'occupation dynamique et accessible du territoire public du Québec contribue à l'essor des régions;

«Considérant que l'accessibilité du territoire public permet la pratique d'activités économiques rentables pour les communautés, comme la chasse et la pêche;

«Considérant que les citoyens du Québec qui habitent le territoire public sont fiers de s'occuper du territoire, notamment en y aménageant des chemins depuis plusieurs décennies;

«Considérant que la hausse drastique des tarifs de location pour les propriétaires de chalets compromet l'accessibilité des terres publiques aux citoyens du Québec;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec d'annuler les augmentations importantes de loyer des baux de villégiature pour les propriétaires présents sur les terres publiques du Québec. Ces augmentations découlent de la nouvelle formule de calcul des valeurs de référence publiée dans la Gazette officielle du Québec, le 15 juillet 2015.

«Nous demandons également au gouvernement du Québec :

«Qu'il affirme son intention de maintenir les terres du domaine de l'État accessibles à l'ensemble des Québécois, peu importe le revenu;

«Qu'il tente, par tous les moyens, d'éviter un retour aux clubs privés qui ont été abolis dans les années 70, afin que l'ensemble des Québécois continuent à avoir accès au territoire qui leur appartient;

«Qu'il s'assure, par tous les moyens, de l'accessibilité des activités de villégiature comme la chasse, la pêche et autres activités de plein air sur les terres publiques.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé. J'ai reçu de la part de M. le député de La Peltrie une demande de dépôt d'une pétition qui est non conforme. Est-ce que j'ai un consentement? Consentement. M. le député, allez-y.

Revoir l'imputation des dépenses de l'agglomération
de Québec à Saint-Augustin-de-Desmaures

M. Caire : Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 3 700 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes de Saint-Augustin-de-Desmaures.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant le soutien de la population de Saint-Augustin-de-Desmaures contre l'imputation abusive des dépenses de l'agglomération de Québec à Saint-Augustin-de-Desmaures;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons conjointement et solidairement au ministre des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire :

«D'établir un moratoire sur la façon actuelle d'opérer de l'agglomération de Québec;

«Que toutes nouvelles dépenses ne soient adoptées qu'après approbation du ministre;

«D'accélérer la mise en place de la nécessaire vérification des dépenses de l'agglomération de Québec.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé. J'ai aussi reçu de la part de M. le député de Bonaventure une demande de présentation d'une pétition qui est non conforme. J'ai un consentement? Consentement. M. le député de Bonaventure.

Annuler les augmentations de loyer des baux de villégiature
pour les propriétaires présents sur les terres publiques

M. Roy : Merci, M. le Président. J'aimerais, d'entrée de jeu, souligner la présence de villégiateurs et de gens qui sont très actifs dans le domaine de l'occupation du territoire et de la forêt publique au Québec. Donc, mes salutations.

Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 528 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant que les terres publiques du Québec appartiennent à l'ensemble des citoyens;

«Considérant que l'occupation dynamique et accessible du territoire public du Québec contribue à l'essor des régions;

«Considérant que l'accessibilité du territoire public permet la pratique d'activités économiques rentables pour les communautés, comme la chasse et la pêche;

«Considérant que les citoyens du Québec qui habitent le territoire public sont fiers de s'occuper du territoire, notamment en y aménageant des chemins depuis plusieurs décennies;

«Considérant que la hausse drastique des tarifs de location pour les propriétaires de chalets compromet l'accessibilité des terres publiques aux citoyens du Québec;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec d'annuler les augmentations importantes de loyer des baux de villégiature pour les propriétaires présents sur les terres publiques du Québec. Ces augmentations découlent de la nouvelle formule de calcul des valeurs de référence publiée dans la Gazette officielle du Québec, le 15 juillet 2015.

«Nous demandons également au gouvernement du Québec :

«Qu'il affirme son intention de maintenir les terres du domaine de l'État accessibles à l'ensemble des Québécois, peu importe le revenu;

«Qu'il tente, par tous les moyens, d'éviter un retour aux clubs privés qui ont été abolis dans les années 70, afin que l'ensemble des Québécois continue à avoir accès au territoire qui leur appartient;

«Qu'il s'assure, par tous les moyens, de l'accessibilité des activités de villégiature comme la chasse, la pêche et autres activités de plein air sur les terres publiques.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

• (10 h 10) •

Le Président : Alors, l'extrait de cette pétition est déposé. Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une question de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes donc rendus à la période de questions et de réponses orales. Je cède la parole à Mme la députée de Joliette.

Impact de la restructuration du Directeur des poursuites
criminelles et pénales sur la lutte contre le crime organisé

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Depuis plusieurs semaines, nous questionnons la ministre de la Justice sur la baisse du nombre de procureurs qui découlera de la fusion des trois bureaux spécialisés du DPCP : bureaux de lutte à la corruption et à la malversation, de lutte au crime organisé, de lutte aux produits de la criminalité. Tel que ça a filtré, c'est une réduction de 40 % du nombre de procureurs affectés spécifiquement à ces bureaux qui est appréhendée.

La ministre s'est évertuée à répéter qu'il n'y aurait pas de baisse d'effectifs, en allant jusqu'à déclarer ici même : «...il n'y a pas de compression dans le nombre de procureurs chargés de s'attaquer au crime, chargés de s'attaquer à la grande criminalité, chargés de s'attaquer au crime organisé.» Or, le directeur de l'UPAC a déclaré lundi qu'il avait été informé que le nombre de procureurs dédiés à ces bureaux — actuellement, 110 — passeraient à 60 ou même à 50. Cette contradiction est pour le moins troublante, M. le Président.

La ministre va-t-elle nous dire que c'est le directeur de l'UPAC qui n'a pas transmis aux parlementaires la bonne information ou est-ce plutôt elle qui a induit la Chambre en erreur?

Le Président : Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : M. le Président, il me fait plaisir de répondre encore une fois à la question de la collègue, de faire de la pédagogie parce que ça semble manquer. Il y avait un certain nombre de procureurs répartis dans un certain nombre d'équipes qui travaillaient en silo pour s'attaquer au crime organisé. Ces 110 procureurs étaient répartis dans les différentes équipes. Maintenant, un bureau sera chargé de la haute criminalité et regroupera 60 procureurs. Les 40 autres procureurs, M. le Président, sont répartis dans les palais de justice, là où ils doivent travailler sur le territoire du Québec pour accompagner les équipes généralistes qui sont déjà en place dans ces palais de justice. Les 40 procureurs ont une expertise et vont partager cette expertise avec leurs collègues partout sur le territoire. Alors, M. le Président, on travaille de façon différente, mais on travaille afin de s'assurer que, partout au Québec, on puisse s'attaquer à une criminalité qui change, une criminalité qui nous fait mal.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : M. le Président, une chance qu'on a eu la comparution du directeur de l'UPAC pour qu'enfin on ait un début de réponse par rapport à ça. Donc, je comprends qu'enfin la ministre est en train de nous dire qu'effectivement ce ne sera plus 110 procureurs dédiés spécifiquement à la lutte contre la grande criminalité, mais bien 60. Donc, j'aimerais qu'elle nous explique d'abord comment elle a pu faire les déclarations qu'elle a faites ici même, en cette Chambre, niant ce fait-là. Et, deuxièmement, comment elle peut expliquer que ce n'est plus une priorité pour ce gouvernement, la lutte à la grande criminalité?

Le Président : Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : M. le Président, ce que je viens d'expliquer, je l'ai expliqué à maintes reprises. Si, de l'autre côté, on ne m'écoutait pas, ça, ce n'est pas mon problème. M. le Président, il y avait 599 procureurs en 2014... 597, pardon, en 2014, 599 en 2015. On a le même nombre — même bonifié — d'effectifs au Directeur des poursuites criminelles et pénales.

Si la Directrice des poursuites criminelles et pénales a choisi de revoir les choses, c'est parce que le travail en silo nuisait aux fonctions du DPCP et qu'elle souhaitait faire les choses différemment pour être plus efficace. Le directeur de l'UPAC a notamment mentionné que le travail en silo pouvait comporter des enjeux et qu'il ne pouvait...

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Joliette.

Mme Véronique Hivon

Mme Hivon : Alors, M. le Président, ce qu'on comprend, c'est qu'effectivement le chat sort enfin du sac. Il y en avait 110, il y en a maintenant 60 dédiés spécifiquement. Là, on nous dit : Oui, oui, mais on va réorganiser ça. Ils vont faire une partie du travail de spécialiste, mais ils vont faire surtout du généraliste. Bien, ce n'est pas ça, le but. Quand on fait une priorité de la lutte au crime organisé, on maintient des équipes spécialisées. On en fait une lutte de tous les instants, énergique.

Pourquoi ce gouvernement abandonne, ne fait plus d'une priorité la lutte au...

Le Président : Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : M. le Président, M. le Président, on veut, de l'autre côté, interpréter ce que j'ai expliqué et, surtout, interpréter les explications qui ont été données par Me Murphy, il y a de ça quelques semaines, et qui a fait état de cette restructuration. Il n'y a personne, personne qui a changé l'histoire. Au contraire, si quelqu'un tente de rejouer dans les faits, c'est de l'autre côté. On a maintenu le même nombre d'effectifs et on les répartit. Plutôt que d'être dans une tour à bureaux à Québec, on est dans les palais de justice. M. le Président, honnêtement, c'est du gros bon sens, cette restructuration...

Le Président : En terminant.

Mme Vallée : ...et ça vise à s'attaquer à la haute criminalité.

Le Président : Principale, M. le député de Sanguinet.

Investissement du gouvernement dans Bombardier inc.

M. Alain Therrien

M. Therrien : M. le Président, on le sait, le premier ministre a signé un mauvais deal avec Bombardier. Il a été celui qui a mis à risque 1,3 milliard de dollars de l'argent des Québécois. On apprend ce matin que le premier ministre a laissé négocier ce mauvais deal par le ministre de l'Économie, et ce dernier a fait ça tout seul sans s'adjoindre l'expertise d'Investissement Québec.

On a des experts négociateurs, des comptables, des gens chez Investissement dont c'est le métier de négocier ce genre d'entente, mais le ministre a préféré agir seul. On voit le résultat : un deal où ce sont les Québécois qui assument tous les risques. S'il y avait eu de vrais experts autour de la table, on n'en serait pas là aujourd'hui. Autrement dit, le ministre de l'Économie a été frappé par le principe de Peter.

M. le Président, pourquoi le ministre de l'Économie a-t-il refusé de se servir de l'expertise des gens chez Investissement Québec dans sa négociation avec Bombardier?

Le Président : M. le ministre de l'Économie.

M. Jacques Daoust

M. Daoust : Alors, M. le Président, comprenons d'abord qu'Investissement Québec gère ce qu'on appelle ses fonds propres, et le député de Rousseau, qui a été titulaire de la responsabilité de l'économie alors qu'il était ministre, se souvient très bien, ce qu'on appelle les fonds propres d'Investissement Québec, c'est ce qu'Investissement Québec gère. On lui demande aussi d'administrer le Fonds de développement économique. On ne lui demande pas de le négocier, on lui demande de le gérer. Ce sont des décisions qui sont prises par le gouvernement, mais qui font appel à l'équipe au ministère. Et il y a une équipe importante qui est dédiée à accomplir ce travail-là qui est une équipe aussi de spécialistes, mais qui vise un objectif nettement différent, qui est celui purement du développement économique, alors que, dans les fonds propres d'Investissement Québec, ce qu'on fait, c'est qu'on agit de façon complémentaire aux institutions financières.

Alors, la pratique que vous annoncez ce matin, elle existe depuis toujours, elle a existé sous tous les gouvernements, et, lorsqu'on a besoin de faire appel à Investissement Québec pour un dossier spécifique, on le fait. Et je vous ferai remarquer, M. le Président, que, dans ce dossier spécifique là, il y avait un membre de la haute direction d'Investissement Québec...

Le Président : En terminant.

M. Daoust : ...qui nous a apporté son expertise.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Sanguinet.

M. Alain Therrien

M. Therrien : M. le Président, l'expertise d'Investissement Québec aurait pu nous éviter ce genre de deal qui met en conflit les contribuables québécois. Les analystes économiques nous disent à l'unisson que c'est un mauvais deal. Les gens du milieu des affaires nous disent que c'est un mauvais deal. Investissement Québec, aujourd'hui, nous dit : C'est un mauvais deal. Il y a seulement deux négociateurs en culottes courtes qui nous disent que c'est un bon deal.

Pourquoi avoir refusé l'expertise d'Investissement Québec?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! M. le ministre de l'Économie.

M. Jacques Daoust

M. Daoust : Alors, je recommence. Je n'ai pas beaucoup de temps pour lui expliquer ça, mais je recommence. Dans un dossier de fonds de développement économique, c'est un dossier qui est traité par les équipes compétentes du ministère. Et, je répète, lorsque nous avons besoin de l'expertise d'Investissement Québec dans un dossier comme celui-là, nous faisons appel à Investissement Québec. Et, je le répète encore une fois, M. le Président, dans ce dossier spécifique là on a fait appel à certains experts d'Investissement Québec, dont un membre de la haute direction. Ce n'est pas le président, son expertise n'était pas requise, mais l'équipe que nous avons mise en place pour réaliser le mandat que nous lui avons confié a fait le bon travail selon la pratique normale.

Le Président : En terminant.

M. Daoust : J'invite, en fait, le député à parler un peu avec son collègue de Rousseau, qui va lui expliquer comment ça...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Sanguinet.

M. Alain Therrien

M. Therrien : Aujourd'hui, Investissement Québec nous dit : Ce n'est pas notre deal, on n'est pas d'accord avec ça, on se dissocie de ce deal-là. Alors, on se pose la question, M. le Président. Quand on est rendu qu'Investissement Québec, qui a une expertise évidente dans ce domaine-là, nous dit des choses comme ça, moi, je me pose la question encore une fois : Pourquoi le ministre de l'Économie n'a pas été chercher les ressources qui étaient à sa portée pour, justement, négocier un deal qui aurait eu du sens puis qui aurait été à l'avantage des Québécois?

• (10 h 20) •

Le Président : M. le ministre de l'Économie.

M. Jacques Daoust

M. Daoust : D'accord. Alors, je recommence. On a fait appel à l'expertise d'Investissement Québec. On a fait appel à un grand spécialiste qui fait partie de l'équipe de direction. Lui a eu à faire appel à ses équipes à lui, il l'a fait. On a négocié une bonne transaction, on l'a négociée avec l'expertise qui est en place à Investissement Québec. Et, selon le mandat que nous avons donné à cette équipe-là, ils ont accompli le travail que nous leur avons demandé.  

Alors, j'aimerais qu'on me trouve le document ou qu'on me montre la citation où Investissement Québec a dit que ce n'était pas une bonne transaction. Je serais très, très content que vous déposiez le document, M. le député.

Le Président : Principale, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

Investissement gouvernemental dans
le développement des CSeries

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le ministre de l'Économie a négocié une entente pour investir 1 milliard de dollars américains d'argent des Québécois, pour investir dans une société en commandite qui va gérer la série C de Bombardier. Cette entente a été mal négociée. M. le Président, pour que ça soit une bonne entente, il aurait fallu quatre choses. Premièrement, Bombardier a besoin de 2 milliards. Moi, je n'ai jamais vu ça, là, de faire une entente pour 1 milliard sans savoir qui va mettre l'autre milliard puis à quelle condition. Ça, c'est la première chose. Deuxième chose, il aurait dû demander des garanties sur les autres divisions de Bombardier. Troisième chose, le prix d'exercice des options. Moi, je n'ai jamais vu ça dans une transaction, là, un prix d'exercice qui est 40 % plus haut que le marché. Donc, pourquoi il n'a pas demandé un prix plus bas? Puis, quatrièmement, M. le Président, dans une entente aussi importante, je pense que le ministre aurait dû consulter l'opposition pour que le Québec parle d'une seule voix, d'une seule voix en face, entre autres, d'Ottawa.

Donc, moi, je voudrais savoir de la part du ministre de l'Économie, est-ce qu'il est trop tard pour renégocier cette entente?

Le Président : M. le ministre de l'Économie.

M. Jacques Daoust

M. Daoust : Alors, comprenons, M. le Président, que ce qu'on doit regarder dans ce dossier-là, c'est l'objectif qui était poursuivi. En fait, la proposition que nous fait le chef de la deuxième opposition est une proposition qui ne répond pas aux objectifs que nous poursuivions. Mais je le rassure tout de suite, quand on parle de dire : Je ne sais pas où est l'autre milliard, nous, quand nous débourserons — et nous le ferons en deux étapes — la société Bombardier mère devra nous garantir qu'elle a les liquidités suffisantes, à notre satisfaction, pour compléter le programme.

Alors, l'objectif que nous poursuivions... Et, j'y reviens, M. le Président, ce que nous voulons faire, ce que nous voulons accomplir avec ça, c'est d'abord de s'assurer que le marché est rassuré. Moi, si j'étais un propriétaire de compagnie aérienne et que j'avais besoin d'avions dans quatre ans — et vous l'avez été —je ne ferais pas affaire avec une entreprise qui me dirait : Bien, regarde, c'est intéressant que tu me fasses une commande, mais je ne le sais pas si je te les fabriquerai. On a besoin de rassurer le marché à l'effet que ces avions-là seront produits, et c'est ce que nous avons accompli avec cette entente-là qui a été faite avec le groupe Bombardier. Ce que nous voulons, ce n'est pas aider l'industrie du chemin de fer en Allemagne, ce que nous voulons...

Le Président : En terminant.

M. Daoust : ...c'est aider l'industrie aéronautique au Québec.

Le Président : Première complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le ministre de l'Économie vient de nous dire : Le milliard des Québécois ne sera pas déboursé tant que Bombardier ne nous assurera pas qu'il a trouvé le deuxième milliard. C'est ça que j'ai bien compris? S'il l'avait, il ne le demanderait pas, il ne demanderait rien à Ottawa. Et, s'il obtient de l'argent d'Ottawa avec des meilleures conditions, est-ce que le Québec va aussi avoir droit à ces meilleures conditions?

Le Président : M. le ministre de l'Économie.

M. Jacques Daoust

M. Daoust : Alors, sans vouloir rentrer trop profondément dans le détail, il est clair qu'on voudra avoir des conditions... on ne voudra pas que le fédéral, s'il vient dans le dossier, ait des conditions différentes ou supérieures aux nôtres. Ça, ça va de soi.

Mais la difficulté qu'on avait dans tout ça... Parce qu'il y a eu toutes sortes de propositions qui ont été faites, notamment de mettre de la dette subordonnée. Écoutez, regardez le bilan de la société. Je ne vous parle pas de sa valeur marchande, mais je vous parle de sa valeur aux livres. Vous êtes un CPA de formation, vous savez comme moi que, quand le passif dépasse l'actif, on ne rajoute pas de dette dans une entreprise. Ce qu'on a besoin, c'est de l'équité. C'est ce qu'on a fait.

Mais de m'inscrire dans la société mère, pour moi, je n'accomplissais pas ce que je veux accomplir dans la...

Le Président : En terminant.

M. Daoust : ...garder le CSeries au Québec, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, je veux être très clair, là. Habituellement, quand on signe une entente, il y a ensuite une vérification diligente, hein, avant d'avoir ce qu'on appelle le «closing».

Donc, je voudrais savoir, être bien clair, là, est-ce que la transaction aujourd'hui est «closée» ou elle n'est pas «closée»? Peut-on renégocier avec Bombardier, oui ou non?

Des voix : ...

Le Président : Chut, Chut! S'il vous plaît! M. le ministre de l'Économie.

M. Jacques Daoust

M. Daoust : Alors, M. le Président, le chef de la deuxième opposition a tout à fait raison, c'est qu'il y a une entente de principe. Par la suite, il y a une vérification diligente qui est en train de se faire, et la transaction se terminera le 31 décembre si le rapport de vérification diligente est à la satisfaction du gouvernement, et dans laquelle on a mis des clauses qui sont importantes.

Et je vous rappellerai une chose, c'est qu'on a gardé non seulement la série C au Québec, mais on a gardé la propriété intellectuelle, on en devient propriétaire. Là où il y a eu... On a effacé au bilan 4 milliards de dollars, c'est quand même considérable. On ne l'aurait pas fait s'il n'y avait pas eu cet effacement-là. On veut un bilan propre. On veut un avion d'avenir. On veut des emplois pour le Québec.

Le Président : En terminant.

M. Daoust : On veut sauver notre industrie de l'aéronautique parce que notre locomotive aéronautique, c'est Bombardier.

Le Président : Principale, M. le député de Granby.

Frais médicaux accessoires

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : M. le Président, le gouvernement s'apprête à normaliser les frais accessoires que les patients vont parfois devoir payer avec leur carte de crédit lorsqu'ils vont consulter un médecin en dehors des hôpitaux. Or, ces frais pourraient être aussi taxés par le gouvernement. En effet, en commission parlementaire, mon collègue de Lévis a demandé au ministre de la Santé si les frais accessoires seraient taxés. Voici sa réponse : «C'est un grand litige juridique avec Revenu Québec qui n'est pas encore résolu. Il y a des questionnements qui ont été soulevés dans la dernière année par Revenu Québec, alors je ne sais pas ce que Revenu Québec a pu conclure à cette date-ci.»

Bref, non seulement le ministre de la Santé va imposer des frais accessoires, mais, en plus, il ne sait pas si Revenu Québec va les taxer. La CAQ a proposé des solutions pour éviter aux patients de payer des frais accessoires, et c'est inacceptable aujourd'hui que le gouvernement songe à taxer aussi des services médicaux essentiels.

Ma question est fort claire pour le ministre des Finances : Est-ce qu'il s'engage à ce que les nouveaux frais accessoires ne soient pas taxés?

Le Président : M. le ministre de la Santé.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, c'est quasiment une question camouflage. On se croirait sur un champ de bataille. Le député mon collègue de Granby se lève avec une introduction qui me vise et il arrive avec une question très simple qui n'est pas en lien ou presque avec son introduction.

Alors, M. le Président, je vais quand même rectifier certains éléments et je vais même me référer à la position historique de la CAQ. La position historique de la CAQ est de gérer... Oui, je la connais. Je l'ai même intégrée, M. le Président, dans ma pensée puis je n'ai pas une distance qui est très longue, manifestement. Bon. Alors, M. le Président, la position traditionnelle de la CAQ est celle d'un gouvernement qui gère de façon responsable, et gérer de façon responsable... Et d'ailleurs je vais même prendre des propos que j'ai déjà entendus, peut-être privément, là, mais, privément, dans la CAQ, on considérait que les colonnes de revenus et de dépenses devraient faire en sorte qu'il y ait un équilibre. Et ça, M. le Président, ça fait en sorte que, quand on gère l'État, on doit prendre des décisions qui sont difficiles. Et, sur la question des frais accessoires, bien, cette question-là, elle a été débattue parce que ce sont des décisions qui nous amènent là...

Le Président : En terminant.

M. Barrette : ...pour faire en sorte que les soins nécessaires soient donnés à la population, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Granby.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : M. le Président, le Parti libéral a l'imagination fertile quand c'est le temps d'augmenter les tarifs et les taxes au-dessus de l'inflation. Maintenant, il y a peut-être un petit mélange entre le ministre des Finances et le ministre de la Santé.

Je pose une question fort claire au ministre des Finances : Est-ce qu'il s'engage à ne pas taxer les frais accessoires que le ministre de la Santé impose aux citoyens québécois? Je le demande au ministre des Finances.

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, au moment où on se parle, il y a une pratique qui existe, elle existe. Les frais accessoires, je vais me permettre de le rappeler, c'est quelque chose qui a été mis en place par le Parti québécois, qui a été mis en place par le Parti québécois, et c'est quelque chose que le Parti québécois avait prévu de baliser et d'encadrer, ce que nous faisons maintenant, contrairement à ce que le Parti québécois voudrait faire, parce que le Parti québécois change d'idée à tous les six mois. Alors, ils ont pris cette position-là. Maintenant, dans la pratique actuelle, M. le Président, il y a des frais qui sont facturés aux patients, il y a une pratique qui existe, et ce que nous faisons, c'est venir normaliser une situation, empêcher les abus et arrêter ce qui est illégal, M. le Président.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Granby.

M. François Bonnardel

M. Bonnardel : M. le Président, le ministre de la Santé a même déclaré que les frais accessoires seraient le prix coûtant plus une marge de profit minimalement de 10 % à 15 %. Alors, en plus, on imposerait une taxe.

Vous n'avez pas le courage de vous lever aujourd'hui et de dire aux Québécois — le ministre des Finances, qui ne me regarde pas, là — de dire aux Québécois qu'il n'y aura pas de taxe pour les frais accessoires? C'est une question fort simple. Je demande au ministre de répondre à la question.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, le traitement fiscal de ce qui existait sera le même ensuite, il n'y a pas de changement de ce côté-là.

Maintenant, compte tenu du propos que vient de tenir le député de Granby, je ne peux m'empêcher de le corriger. Il n'est pas question qu'il y ait... Et je n'ai jamais dit qu'il y ait un profit, ce n'est pas un mot que j'ai utilisé. J'ai dit qu'il devait y avoir d'autres éléments, j'ai parlé de certaines contingences, des choses qui étaient afférentes aux frais spécifiques. J'ai donné des exemples comme, par exemple, de l'entreposage, de la gestion et ce genre de choses là. Si j'achète une seringue...

Le Président : En terminant.

• (10 h 30) •

M. Barrette : ...la seringue a des frais qui sont afférents, et c'est ce à quoi je faisais référence.

Le Président : Principale, M. le député de Beauce-Nord.

Coûts relatifs à la gestion de la surpopulation carcérale

M. André Spénard

M. Spénard : Merci, M. le Président. La surpopulation est un problème chronique dans les prisons du Québec. Entre 2009 et 2014, le taux d'occupation moyen est passé de 97 % à 104 %, et à 116 % si on tient compte de la marge nécessaire pour assurer le respect de la capacité opérationnelle et sécuritaire des services. En conséquence, le coût moyen par détenu est passé de 173 $ en 2009 à 202 $ par jour en 2014. Les dépenses du système ont, quant à elles, augmenté de 36 % en passant de 288 millions à 392 millions. C'est 104 millions de plus par année. Avec un coût annuel de 76 000 $ en 2014, un détenu coûtait donc près de 13 000 $ de plus aux contribuables qu'en 2009. Le constat est clair et préoccupant.

Comment le gouvernement compte-t-il contrôler ces dépenses? Comment va-t-il trouver la place et les ressources nécessaires pour héberger les personnes que lui confieront les tribunaux?

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique, pour l'instant.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : Oui. Merci, M. le Président. À mon tour de saluer le député de Beauce-Sud comme porte-parole en matière de...

Des voix : ...

M. Moreau : Ah! Beauce-Nord, O.K., Beauce-Nord. Et ça va rester comme ça pour un bon moment, O.K.? Alors, je veux le saluer — son chef m'empêche de le faire, là, en m'interpellant. Alors, je veux saluer le député et porte-parole de l'opposition et l'assurer de toute ma collaboration.

La question qu'il soulève est une question importante effectivement, soit la question de la surpopulation dans les établissements. Le ministère de la Sécurité publique travaille à l'heure actuelle à compléter les ouvrages additionnels de détention, les centres additionnels de détention qui seront à la disposition du ministère de la Sécurité publique lorsque les vérifications sécuritaires auront été faites et qui vont contribuer à réduire le phénomène de la surpopulation, mais on doit agir et rapidement, notamment dans le cas du centre de détention Tanguay, qui est à ce point vétuste qu'il pourrait mettre en risque la sécurité des femmes qui y sont détenues, lesquelles seront transférées à l'institution Leclerc, qui est à moins de 50 kilomètres, et le travail se fait pour assurer le contrôle des coûts.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Beauce-Nord.

M. André Spénard

M. Spénard : Avec la fermeture de la prison Tanguay en février 2016, la fermeture des bâtiments modulaires temporaires en 2018 et les effets de la loi C-10 sur les peines minimales, la surpopulation va continuer à s'alourdir malgré l'ouverture de nouvelles prisons l'an prochain. Une mise à jour des projections de la Direction des services correctionnels du ministère porte le taux d'occupation à 114 % d'ici 2020, 128 % si on applique la marge opérationnelle et sécuritaire.

Comment le ministre entend-il contrôler les coûts liés à cette surcharge?

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : Encore une fois, M. le Président, ce qui est fait à l'heure actuelle, c'est de développer le plus rapidement possible des places additionnelles, parce qu'il y a des projets qui sont lancés depuis fort longtemps. Je me souviens, à une époque, j'étais directeur de cabinet à la Sécurité publique, puis on parlait de la prison de Roberval; bien, aujourd'hui, c'est passé d'un plan à une réalisation concrète. Et il y a plusieurs établissements comme ça, notamment Leclerc, qui vont bénéficier d'espaces additionnels.

Alors, ce que nous faisons, c'est : nous tentons de réduire le phénomène de la surpopulation. Et le contrôle des coûts est intimement lié à l'ouverture des nouveaux établissements. Alors, il y a un contrôle qui est fait. J'ai demandé au sous-ministre responsable des établissements carcéraux...

Le Président : En terminant.

M. Moreau : ...de me faire un rapport sur cette question-là, et c'est un dossier que nous suivons de près.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Beauce-Nord.

M. André Spénard

M. Spénard : Merci, M. le Président. Au rythme actuel, le coût journalier par détenu va atteindre environ 240 $ d'ici 2020, avec un coût total de 520 millions par année, soit 120 millions de plus qu'aujourd'hui. Parce que je suis inquiet que l'alourdissement des coûts du système devienne insoutenable pour les contribuables, j'ai déposé ce matin le projet de loi n° 497, qui contient des propositions visant à responsabiliser les détenus quant au coût de leur détention.

Le gouvernement est-il prêt à travailler avec nous pour trouver des solutions? Car nous, nous le sommes.

Le Président : M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : Oui, M. le Président. J'ai bien entendu le député déposer son projet de loi ce matin. C'est une formule qui revient de façon épisodique.

Il faut savoir qu'il y a moins de 10 % des détenus qui travaillent et qui reçoivent le tiers... Pour ceux qui travaillent — il y en a environ 480 dans l'ensemble du système — ils reçoivent le tiers du salaire minimum. Une partie du salaire retenu tombe dans le fonds d'intégration et de réintégration des détenus, et on maintient et on conserve 50 % et parfois 80 % de leurs revenus pour être en mesure de leur remettre au moment où ils vont être réinsérés dans la société, pour ne pas qu'ils aillent commettre des vols pour être capables de payer leur nourriture lorsqu'ils sont...

Le Président : En terminant.

M. Moreau : ...rendus dans la société. On est conscients de ça, on est prêts à travailler avec vous, mais je pense...

Le Président : Principale, M. le député de Bonaventure.

Hausse du prix des baux de villégiature
sur les terres publiques

M. Sylvain Roy

M. Roy : M. le Président, les propriétaires de chalet et de camp qui louent des terrains sur les terres publiques sont en train de se faire imposer des hausses draconiennes, pour ne pas dire prohibitives, de loyer par le gouvernement libéral.

Dans certaines régions, les tarifs passent de 480 $ à 3 000 $ par année pour un terrain en plein bois sans aucun service. Face à ces hausses, plusieurs chasseurs et pêcheurs vont abandonner leurs campements, car ils ne seront plus capables de payer. Le plan libéral, M. le Président, c'est une expropriation déguisée des Québécois moins riches. J'ai demandé ici même au ministre de reculer avec son projet inéquitable, il n'a rien voulu savoir. Nous avons, dans nos tribunes, plusieurs villégiateurs qui seront touchés par les hausses, et le ministre n'a même pas daigné les rencontrer. Depuis les années 70, le Parti québécois s'est battu pour que tout le monde, et pas juste les riches, puisse profiter de la forêt québécoise, et ce n'est pas aujourd'hui que nous allons arrêter.

Est-ce que le ministre va enfin comprendre le bon sens et, par respect pour les dizaines de milliers de gens lésés, annuler son projet, qui va nous ramener aux années 60?

Le Président : M. le ministre des Ressources naturelles.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : Merci, M. le Président. J'aimerais d'abord rappeler les faits au député.

Quand on regarde les faits comme tels, c'est 88 % des villégiateurs qui paient et qui vont payer en fait un loyer équivalent à moins de 2 $ par jour. Or, c'est ça, la réalité dont on parle actuellement. Quand on regarde des familles au Québec, par exemple, qui vont en camping pendant deux semaines, plusieurs paient à peu près, là, le prix qu'on va charger de... le loyer moyen pour les villégiateurs. Maintenant, je tiens à rappeler qu'on a utilisé, M. le Président, la même formule qu'en 2003, c'est-à-dire l'évaluation de la valeur marchande. Je tiens à rappeler également que le Commissaire au développement durable nous avait bien avisés, il nous avait rappelé dans un rapport de juin 2014 de réévaluer régulièrement la valeur marchande pour ne pas priver l'État, M. le Président, de retombées financières et créer, disait-il, des iniquités pour les autres locataires des terres de l'État.

Alors, c'est ça, la réalité, M. le Président, à laquelle nous avons à faire face. Il y a des endroits où il y a des augmentations plus importantes puis il y a des endroits où il n'y en a pas, d'augmentation...

Le Président : En terminant.

M. Arcand : ...parce que la valeur marchande n'est pas là, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de...

M. Roy : Bonaventure.

Le Président : ...Bonaventure.

M. Sylvain Roy

M. Roy : M. le Président, quand on fait référence à un terrain de camping, là, c'est parce qu'on ne comprend pas que tu as de l'eau, de l'électricité, tu as de l'égout, on ramasse les vidanges puis on entretient ton chemin. Donc, je dirais, la comparaison est très faible, hein? Les Québécois qui chassent, qui pêchent ou qui ne font que profiter de notre magnifique territoire, il y en a des centaines de milliers au Québec. Les forêts, les rivières et les lacs du Québec sont une richesse collective qui appartient à tous les Québécois. Avec le projet libéral, on va enlever l'accès à une grande partie d'entre eux.

Est-ce que le gouvernement veut vraiment qu'on revienne à l'époque des clubs privés où seuls les riches avaient accès aux forêts, aux lacs et aux rivières du Québec?

Le Président : M. le ministre des Ressources naturelles.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, je pense que les baux de villégiature, c'est une bonne entente pour l'ensemble des citoyens, de façon générale. D'ailleurs, les chiffres de notre ministère, M. le Président, démontrent qu'à chaque fois que nous avons, au cours des dernières années, mis au tirage au sort certains emplacements de villégiature, pour chaque emplacement, il y avait une moyenne de 41 demandes. Donc, je pense qu'il y a une demande extrêmement forte de ce côté-là.

Maintenant, je tiens à rappeler au député, sur cette question-là, parce que, pour moi, je pense que c'est important quand on parle d'équité, il faut rappeler que, si on compare, par exemple, avec la province de l'Ontario, eux, ils établissent un montant de 10 % de la valeur marchande pour établir...

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Bonaventure.

M. Sylvain Roy

M. Roy : Écoutez, M. le Président, les hausses sont drastiques, et pour les gens c'est une catastrophe, O.K.? Les conséquences de ces hausses de tarifs, les gens qui vont les subir peuvent vous les expliquer. Certains d'entre eux verront leurs baux passer de 480 $ à 3 000 $. 3 000 $, c'est une urbanisation de l'évaluation en plein bois. Aujourd'hui, ils sont ici avec nous, M. le ministre.

Est-ce que vous pouvez annuler les hausses et consentir à une rencontre avec eux? Ils sont prêts à vous recevoir après la période de questions.

• (10 h 40) •

Le Président : M. le ministre des Ressources naturelles.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, écoutez, encore une fois... je n'ai pas terminé tout à l'heure, mais je voulais simplement dire qu'en Ontario c'est 10 %, c'est 5 % ici de la valeur marchande au Québec, donc je pense que c'est encore une bonne entente.

Je dois vous dire également que notre gouvernement a pris en considération ces questions-là. Nous voulons réduire au maximum l'impact, M. le Président, en étalant la hausse sur cinq ans, M. le Président. Et, oui, je rencontrerai les gens après la période de questions. Il me ferait plaisir de le faire. Merci infiniment, M. le Président.

Le Président : Principale, M. le député de Labelle.

Développement du réseau des centres de la petite enfance

M. Sylvain Pagé

M. Pagé : Oui. Merci, M. le Président. En augmentant, dans certains cas, jusqu'à 270 % le tarif en CPE, en freinant le développement des places et en diminuant l'aide à la construction des installations, le gouvernement s'attaque directement à ce joyau québécois que sont les centres de la petite enfance. Bref, il est désormais plus attrayant pour certains parents d'envoyer leur enfant dans le système de garderies privées non subventionnées; des effets pervers qui contribuent à démanteler cette organisation, qui vise à donner une chance égale à tous les enfants. Selon Louis Senécal, P.D.G. de l'AQCPE, c'est du jamais-vu. Selon lui, c'est une crise qui n'a jamais été rencontrée depuis l'implantation de la politique familiale il y a 20 ans.

Est-ce que la ministre de la Famille en est consciente? Peut-elle nous dire quelles mesures elle va mettre en place afin de protéger nos CPE, ce service public reconnu partout dans le monde?

Le Président : Mme la ministre de la Famille.

Mme Francine Charbonneau

Mme Charbonneau : Merci, M. le Président. C'est un constat qui appartient à un regroupement, M. le Président, puis c'est important de rappeler aussi à mon collègue que je suis la ministre de la Famille et non la ministre des CPE.

Il faut faire en sorte que nos familles au Québec aient des services partout. D'ailleurs, je vous rappelle, M. le Président, qu'il y a à peine un an mon collègue se levait pour dénoncer... du moins, ce n'était pas lui, mais mon collègue de Terrebonne, mais maintenant on a changé. Par contre, il se levait pour dénoncer le fait que les parents manquaient de places, qu'il fallait faire des places. Eh bien, M. le Président, c'est 6 600 places, depuis l'arrivée du gouvernement libéral au pouvoir, qui ont été faites. Et, en ce moment, s'il y a des places partout au Québec, c'est parce que les parents ont un choix.

Donc, j'espère que mon collègue ne se lève pas en Chambre pour dénoncer le choix que font nos parents, le fait qu'ils en ont et le fait qu'ils peuvent choisir, proche de chez eux, proche de leur emploi, aux services et qu'ils peuvent magasiner leurs places. Ce n'est pas une faiblesse au Québec, c'est une force.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Labelle.

M. Sylvain Pagé

M. Pagé : Mme Josée Charette, directrice du CPE Rayons de soleil, nous dit : «...ce qui est aberrant, c'est qu'ils nous coupent l'herbe sous le pied avec [leur] nouvelle tarification. Ça crée un marché parallèle au privé.» M. le Président, avec les CPE, nous avions mis en place un système parmi les plus progressistes en Occident. Aujourd'hui, on assiste à un retour en arrière sans précédent.

Est-ce que la ministre va, oui ou non, corriger le tir afin de protéger comme il se doit le réseau public?

Le Président : Mme la ministre de la Famille.

Mme Francine Charbonneau

Mme Charbonneau : Merci, M. le Président. L'objectif que nous avons au Québec, c'est d'avoir des choix. D'ailleurs, mon collègue devrait le savoir, puisque 67 % des places qui sont subventionnées et privées ont été offertes par le Parti québécois. Donc, qu'aujourd'hui il se lève pour dénoncer qu'il y a des places partout... sachons qu'il faudrait peut-être qu'il parle à certains de ses collègues, puisque des places ont été offertes par son parti, au Québec, pour le privé subventionné, ce qui fait en sorte que nos parents ont des choix partout au Québec pour des services pour leurs enfants.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! La deuxième opposition a peut-être une question? M. le député de Deux-Montagnes.

Allocations de transition des ex-premiers ministres

M. Benoit Charette

M. Charette : En mai dernier, des révélations concernant les dépenses des anciens premiers ministres avaient grandement surpris et même choqué les Québécois.

Rappelons les faits révélés à l'époque : des dépenses de 370 000 $ pour Jean Charest en 22 mois, des dépenses de 130 000 $ pour Pauline Marois en à peine huit mois. Hier, nous avons vu un bel exemple du genre de dérive pouvant découler de règles qui ne sont pas suffisamment contraignantes : 16 000 $ ont été accordés à une ancienne candidate péquiste pour réaliser une étude bidon qui ne fait rien de moins que le procès des radios de la région de Québec. C'est exactement le genre de cas qu'il faut éviter. En mai, le premier ministre a dit qu'il était au courant de ce dossier depuis longtemps et qu'il avait même mandaté le secrétaire général pour proposer de nouvelles règles. Il avait par contre refusé de fixer une échéance.

Ma question est bien simple : Quand le gouvernement va-t-il présenter de nouvelles règles afin de mieux baliser les avantages consentis aux anciens premiers ministres?

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Oui. Merci, M. le Président. Effectivement, notre collègue rappelle des échanges qui ont eu lieu autour du 20 mai dernier, je crois, et le premier ministre, à l'époque, avait effectivement identifié des coupures de presse qu'il rappelle qu'il fallait revoir les privilèges, notamment l'étendue et même la durée des années de ces privilèges. Je tiens à noter par contre qu'il était assez précis sur l'importance de garder les mesures de sécurité pour les premiers ministres qui sortent de fonction. Je pense que là-dessus il n'y a personne qui va contester cet élément.

Au même moment, il y avait d'ailleurs eu une motion avec laquelle on était d'accord, il n'y a pas eu de débat, il n'y a pas eu de consentement pour d'autres raisons de la part du Parti québécois, mais on était d'accord. Je cite ou je lis la motion de l'époque, du 20 mai :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse la nécessité, en cette période de rigueur budgétaire, de revoir et de mieux encadrer l'utilisation et les montants de l'enveloppe annuellement dévolue aux anciens premiers ministres; et

«Qu'elle affirme qu'il est inacceptable d'utiliser une partie de cet argent à des fins purement partisanes.»

Tout à fait d'accord avec ça. D'ailleurs, dans la foulée de cela, j'ai eu des discussions avec le premier ministre, dans mes fonctions de responsable des institutions démocratiques, M. le Président. Nous travaillons à une loi sur l'Exécutif dans laquelle seraient intégrées des dimensions...

Le Président : En terminant.

M. Fournier : ...de cet ordre-là. La partie leader en moi souhaite que nous ayons un projet de loi plus global.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Deux-Montagnes.

M. Benoit Charette

M. Charette : Merci, M. le Président. Nous sommes tous d'accord pour respecter ceux qui ont occupé la fonction de premier ministre. Nous sommes également d'accord, naturellement, pour qu'il y ait une forme d'accompagnement pour d'anciens premiers ministres en transition. Par contre, nous devons faire un constat : il y a actuellement des abus, et le cas d'hier est aberrant. Financer une étude de piètre qualité, dans un esprit purement revanchard, n'a rien à voir avec la transition d'un ancien premier ministre.

Quel est l'échéancier du gouvernement pour revoir les règles en vigueur? Doit-on comprendre que, depuis mai dernier, aucune action n'a été déposée?

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Non, ne comprenez pas ça, parce que ce n'est pas ça que j'ai dit dans ma réponse. Évidemment, si vous l'écoutez, ça va aider à ce qu'on puisse avoir un débat satisfaisant et sérieux. Ce que je dis, c'est : Dans la foulée de ces échanges, il y a eu du travail qui est fait, mais, dans une loi sur l'Exécutif, il y aurait aussi d'autres matières. Alors, la question de l'échéancier, je sais que vous souhaitez que ce soit avant Noël, c'est possible; comme c'est possible que ce ne soit pas le cas. Je ne peux pas m'engager à ça.

Maintenant, la question est la suivante : À quel ancien premier ministre vont s'appliquer les nouvelles règles? Bien, ça serait au premier ministre actuel, et je ne crois pas qu'il y a urgence de le voir quitter sa fonction. D'abord, il a un mandat jusqu'en 2018, et on espère que ça puisse être renouvelé encore plus longtemps.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Deux-Montagnes.

M. Benoit Charette

M. Charette : Merci, M. le Président. Le ministre a fait état... ou a révélé la conversation qui a eu cours en mai dernier. Je vais citer le premier ministre directement : J'ai demandé au secrétaire général du gouvernement de nous fournir une recommandation des besoins normaux pour quelqu'un qui quitte cette fonction-là, incluant la sécurité, que ce soit prévisible et non pas ajusté à chaque fois qu'il y a une transition.

Encore une fois, financer une étude qui s'attaque aux radios de Québec n'a rien à voir avec les besoins normaux, encore moins avec des raisons de sécurité. On a déposé une motion qui sera présentée un petit peu plus...

Le Président : M. le leader du gouvernement.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier : Oui. J'ai déjà indiqué que la motion que vous avez faite nous indique qu'on doit procéder à cela avant Noël. Je ne suis pas en mesure de dire que je suis capable de le faire avant Noël, d'autant que je ne crois pas qu'il y a une obligation de le faire avant Noël. Et on a jusqu'en 2018 et, je crois, bien après. Si je vois la façon dont la CAQ se comporte, M. le Président, je ne suis pas sûr qu'il y a vraiment un défi à cet égard-là, d'autant qu'à chaque fois qu'ils se lèvent pour nous parler de ce genre d'investissement de fonds publics, M. le Président, ça me rappelle toujours que, pour cette législature-ci, ils ont insisté et fermaient le Parlement jusqu'à temps d'avoir 1,5 million de plus pour eux alors qu'ils avaient trois députés de plus. Et, depuis ce temps-là, il y en a deux qui ont quitté. Donc, un de plus.

Le Président : En terminant.

M. Fournier : Franchement, ils nous doivent 1 million, M. le Président.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Principale, Mme la députée de Taillon.

Encadrement des frais médicaux accessoires

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : M. le Président, le ministre s'apprête à faire adopter envers et contre tous son projet de loi n° 20, dans lequel il légalise sournoisement les frais accessoires. Ce n'est pas le statu quo, M. le Président, le ministre multiplie les actes facturables et le nombre de médecins qui va être autorisé dorénavant à facturer des frais accessoires. Ce qui était l'exception va devenir la règle. Les médecins sont déjà rémunérés pour ces soins et ces services. C'est donc un extra, une prime supplémentaire, de 50 millions que leur donne leur ministre en cadeau. Le ministre pousse l'affront en prétendant que les patients vont être contents de payer en double et en triple pour les soins de santé. Les citoyens ont le droit de savoir sur quoi porteront spécifiquement ces frais accessoires.

Le ministre va-t-il déposer en cette Chambre, avant l'adoption du projet de loi n° 20, la liste des frais accessoires que les patients devront dorénavant payer, à partir de la semaine prochaine?

• (10 h 50) •

Le Président : Mme la députée, permettez-moi de signaler que lorsque... Dans le vocabulaire que vous utilisez, évitez d'utiliser des mots qui peuvent mettre en lumière ou en matière... prêter des motifs à la personne à qui vous vous adressez. M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : M. le Président, c'est sûr que la députée de Taillon a régulièrement une approche extrêmement négative à mon endroit, on vient de le voir encore à l'instant.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! On perd le temps sur votre prochaine question, là. Moi, hein, je vous rappelle que, s'il y a une personne ici qui a le droit de parole, c'est M. le ministre de la Santé.

(Interruption)

M. Barrette : J'allais exprimer ma sensibilité, mais là je vais me préoccuper de la vôtre et, je pense, de celle de votre genou. Alors, M. le Président, est-ce que ça va?

Le Président : ...médecin.

M. Barrette : Alors, M. le Président, encore une fois, je n'ai pas le choix de réitérer le fait que les frais accessoires, mis en place par le Parti québécois et maintenus, que le Parti québécois voulait encadrer dans son programme électoral, voulait baliser — c'est ce qu'il voulait faire, M. le Président — ces frais accessoires là, étaient, au moment où on se parle, exercés dans le milieu médical. Les gens les payaient déjà.

Il y avait des abus... c'est-à-dire qu'il y a encore des abus. Le projet de loi n'est pas encore adopté. Il y avait des abus, il y en a encore. Il y a des choses illégales, il y en a encore. Et notre objectif, M. le Président, est de faire en sorte qu'abus et illégalités soient éliminés, M. le Président.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : La question qu'il faut se poser, M. le Président, c'est : Qui va profiter de la légalisation des frais accessoires? Ce n'est pas les patients, ce ne sont pas les Québécois. Ça va leur coûter de l'argent, à ces patients-là. On veut la liste des frais accessoires. Avant d'aller chez le médecin, les patients devront maintenant passer au guichet automatique. Est-ce qu'ils vont devoir retirer 100 $, 200 $? Et ceux qui ne l'ont pas dans leur compte, qu'est-ce qu'ils vont faire? Endurer leur mal à la maison, laisser leur enfant pleurer ou laisser la maladie s'aggraver?

C'est ça, les frais accessoires légalisés par le ministre de la Santé, M. le Président.

Le Président : M. le ministre de la Santé.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Bien non, M. le Président. Ce n'est évidemment pas ça, parce que la députée de Taillon laisse entendre qu'il va y avoir une multiplication des frais accessoires, alors que ça va être exactement le contraire, M. le Président. La situation actuelle, mise en place par le Parti québécois, qu'ils voulaient eux-mêmes baliser, va faire en sorte qu'après nos interventions les gens vont faire face à des situations qui vont être marginales. Actuellement, c'est marginal, et ça va l'être encore plus et ça sera encadré et contrôlé.

Les frais qui existent actuellement, il n'y en aura pas plus, et il n'y aura plus d'abus, et il n'y aura plus d'illégalité, malgré le fait que la députée de Taillon, M. le Président, essaie de nous faire croire le contraire.

Le Président : Principale, Mme la députée de Vachon.

Projet d'exportation de pétrole
de Chaleur Terminals Inc.

Mme Martine Ouellet

Mme Ouellet : Merci, M. le Président. Des municipalités représentant plus de 1,7 million de citoyens demandent au gouvernement du Québec qu'il se tienne de bout et qu'il assume ses responsabilités face au projet insensé de Belledune.

Belledune, c'est 86 000 wagons de pétrole bitumineux par année qui traverseraient le Québec d'un bout à l'autre pour exportation. Donc, aucune consommation, aucune transformation au Québec, une augmentation catastrophique du risque pour la sécurité civile des citoyens le long des rails du CN. Les municipalités qui bordent la voie du CN sont inquiètes, et avec raison. Le gouvernement libéral ne peut plus se défiler en invoquant une étude environnementale stratégique qui n'est même pas indépendante. La ville de Montréal, Rimouski, Saint-Hyacinthe, Amqui, Sainte-Florence et bien d'autres demandent un BAPE sur Belledune.

Est-ce que le gouvernement va répondre à leurs vives inquiétudes en déclenchant un BAPE?

Le Président : M. le ministre de l'Environnement.

M. David Heurtel

M. Heurtel : Merci, M. le Président. La question du transport des hydrocarbures est prise très sérieusement par notre gouvernement. On a déclenché une évaluation environnementale stratégique sur l'ensemble de la filière des hydrocarbures le 30 mai de l'année dernière, 2014, et cette EES, justement, vise plusieurs domaines, dont le domaine des transports. Et, sur ces questions-là, on a fait plusieurs études, il y a plusieurs études qui sont en cours, et également nous avons débuté un processus d'audiences publiques. La population, les groupes vont pouvoir s'exprimer sur ces questions-là, des questions très importantes. Et nous, de notre côté, au gouvernement, on s'assure justement de faire une étude complète, d'étudier l'ensemble des questions, d'aller chercher les avis scientifiques, d'aller chercher les avis de la population avant justement de porter un jugement sur l'ensemble de la filière des hydrocarbures.

Alors, on agit avec sérieux, on agit avec rigueur, on comprend les inquiétudes de la population, puis c'est pour ça qu'au cours des prochaines semaines on va aller partout au Québec pour entendre ces inquiétudes-là puis afin d'informer le jugement final que va prendre le gouvernement sur cette question très importante.

Le Président : Première complémentaire... Complémentaire ou principale?

Une voix : ...

Le Président : Complémentaire, M. le député de Terrebonne.

M. Mathieu Traversy

M. Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Le ministre sait très bien qu'il détient le pouvoir de déclencher un BAPE générique en vertu de l'article 6.3 de la loi québécoise sur l'environnement. Et, contrairement à une évaluation environnementale stratégique, un BAPE permet une évaluation indépendante, et surtout cibler davantage des enjeux précis, comme par exemple, dans ce cas-ci, le transport de pétrole par train.

Après une tragédie comme celle de Lac-Mégantic, la population québécoise ne prend plus ce genre de chose à la légère. Le ministre l'a-t-il compris? Et, si oui, déclenchera-t-il un BAPE dans le projet Chaleur Terminals à Belledune?

Le Président : M. le ministre de l'Environnement.

M. David Heurtel

M. Heurtel : Comme je l'ai dit, M. le Président, le gouvernement a enclenché une évaluation environnementale stratégique pour approfondir la question de transport des hydrocarbures. On ne peut pas être plus clairs que ça à quel point on prend la question au sérieux. Il va y avoir des audiences publiques, il y a des études scientifiques en cours. Mais, si on parle, justement, de BAPE et d'étudier la question des hydrocarbures en profondeur, il faut quand même rappeler, M. le Président, que le gouvernement du Parti québécois a déclenché un projet à Anticosti sans aucune étude environnementale, a autorisé le stockage du pétrole de l'Alberta à Sorel sans aucune forme d'étude environnementale...

Le Président : En terminant.

M. Heurtel : ...alors on reviendra sur les positions supposément bien fondées du Parti québécois sur la question du transport des hydrocarbures, M. le Président.

Le Président : Cela met fin à la période de questions et de réponses orales.

Motions sans préavis

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, puisqu'il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. Et, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation, je vais reconnaître un membre du groupe formant l'opposition officielle et je cède la parole à M. le député de Bonaventure.

M. Roy : Mme la Présidente, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le député de Nicolet-Bécancour et la députée de Gouin, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'annuler la hausse de loyer prévue pour les baux de villégiature.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Pas de consentement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Il n'y a malheureusement pas de consentement. Maintenant, un membre du deuxième groupe d'opposition. Et je cède la parole à M. le député de Deux-Montagnes.

Presser le gouvernement de réviser les règles encadrant les
avantages consentis aux ex-premiers ministres

M. Charette : Merci, Mme la Présidente. Je demande le consentement pour déposer la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale prenne acte de l'utilisation très discutable qui peut être faite des allocations et mesures de soutien accordées aux anciens premiers ministres;

«Qu'elle rappelle l'engagement pris par le premier ministre en mai dernier de présenter de nouvelles règles permettant de mieux encadrer l'ensemble des avantages consentis aux anciens premiers ministres; et

«Qu'elle presse le gouvernement de déposer le plus tôt possible un projet de révision de ces règles.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Sklavounos : Mme la Présidente, suite à la modification du libellé, suite à la réponse du ministre, il y aura consentement pour l'adoption sans débat, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, M. le leader du deuxième groupe de l'opposition.

M. Bonnardel : Mme la Présidente, avec le consentement de tous les partis, je demande le vote nominal sur cette motion.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est très bien. Alors, que l'on appelle les députés.

Je vais suspendre les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 59)

(Reprise à 11 heures)

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, nous allons reprendre les travaux et, suite à la demande d'un vote par appel nominal... Je n'ai pas le texte de la motion ici avec moi, peut-être que ça serait plus simple.

Mise aux voix

Merci. Alors, nous allons procéder au vote sur la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale prenne acte de l'utilisation très discutable qui peut être faite des allocations et mesures de soutien accordées aux anciens premiers ministres;

«Qu'elle rappelle l'engagement pris par le premier ministre en mai dernier de présenter de nouvelles règles permettant de mieux encadrer l'ensemble des avantages consentis aux anciens premiers ministres; [et]

«Qu'elle presse le gouvernement de déposer le plus tôt possible un projet de révision de ces règles.»

Et que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Roberge (Chambly), M. Laframboise (Blainville), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme D'Amours (Mirabel), M. Surprenant (Groulx), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Spénard (Beauce-Nord), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Jolin-Barrette (Borduas).

M. Fournier (Saint-Laurent), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Coiteux (Nelligan), M. Moreau (Châteauguay), Mme David (Outremont), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys), M. Huot (Vanier-Les Rivières), Mme Vallée (Gatineau), M. Barrette (La Pinière), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Heurtel (Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Daoust (Verdun), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vien (Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), M. Reid (Orford), Mme Vallières (Richmond), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Bernier (Montmorency), M. Ouellette (Chomedey), Mme Ménard (Laporte), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), M. Girard (Trois-Rivières), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière (Chapleau), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), M. Matte (Portneuf), M. Simard (Dubuc), M. Tanguay (LaFontaine), M. Bolduc (Mégantic), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Iracà (Papineau), M. Rousselle (Vimont), M. Fortin (Pontiac), M. Boucher (Ungava), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Auger (Champlain), M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy (Saint-François), M. Merlini (La Prairie), Mme Montpetit (Crémazie), Mme Nichols (Vaudreuil), M. Plante (Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. St-Denis (Argenteuil), Mme Tremblay (Chauveau).

M. Péladeau (Saint-Jérôme), M. Drainville (Marie-Victorin), M. Marceau (Rousseau), M. Therrien (Sanguinet), M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), Mme Lamarre (Taillon), M. Traversy (Terrebonne), M. Lelièvre (Gaspé), M. Bergeron (Verchères), M. Leclair (Beauharnois), M. Gaudreault (Jonquière), M. LeBel (Rimouski), Mme Hivon (Joliette), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Lisée (Rosemont), M. Pagé (Labelle), M. Cousineau (Bertrand), M. Rochon (Richelieu), M. Villeneuve (Berthier), Mme Ouellet (Vachon), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Kotto (Bourget), Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure).

Mme David (Gouin), M. Khadir (Mercier), Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Y a-t-il des députés contre cette motion? Des abstentions? Alors, M. le secrétaire général, pour le résultat du vote.

Le Secrétaire : Pour :  97

                     Contre :            0

                     Abstentions :    0

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, cette motion est adoptée.

Pour la prochaine motion, je reconnais maintenant un membre du groupe formant le gouvernement. Et je cède la parole à Mme la ministre des Aînés.

Souligner la Semaine nationale des proches aidants

Mme Charbonneau : Permettez-moi, avant de lire ma motion, de saluer les gens dans la tribune qui nous viennent du Regroupement des aidants naturels du Québec, Mme Johanne Audet, Mme Audet est présidente du regroupement; Mme Sonia Nadeau, de la Société Alzheimer Chaudière-Appalaches; Mme Édith Lachance, de l'organisme Nouvel Essor; et M. Jean-Claude Laporte et M. Mario Tardif, du regroupement. Bienvenue chez vous. Reconnaître les aidants naturels, ça commence par ici, Mme la Présidente. Merci.

Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec la ministre déléguée à la Réadaptation, à la Protection de la jeunesse et à la Santé publique, le député de Richelieu, le leader du deuxième groupe d'opposition et la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques :

«Que l'Assemblée nationale souligne la Semaine nationale des proches aidants au Québec, qui se déroule du 1er au 7 novembre, sous le thème de la solidarité;

«Qu'à cette occasion, elle reconnaisse à sa juste valeur le rôle inestimable que ces proches aidants jouent auprès de leur famille ou de leur entourage;

«Enfin, qu'elle salue les différentes activités réalisées au cours de cette semaine par les Appuis régionaux, en collaboration avec l'Appui national, afin de sensibiliser la population à l'importance du rôle des proches aidants et des groupes communautaires [de] notre société.» Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Sklavounos : Nous proposons l'adoption, sans débat, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Maintenant, pour la prochaine motion, je vais reconnaître Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Merci, Mme la Présidente.

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse la contribution essentielle des organismes en défense [de droits collectifs];

«Qu'elle demande au gouvernement de leur accorder un rehaussement [de 40 millions] de leur financement...»

Oh! pardon, Mme la Présidente, ce n'est pas la bonne version. Je recommence ça. Alors :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse la contribution essentielle des organismes en défense [...] de droits;

«Qu'elle demande au gouvernement de leur accorder un rehaussement de leur financement, de financer de nouveaux groupes et d'indexer annuellement les subventions;

«Qu'elle demande au gouvernement d'octroyer des sommes supplémentaires afin de couvrir l'ensemble des frais [...] à la pleine participation des personnes ayant des limitations fonctionnelles;

«Finalement, que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de signer des ententes de financement avec les groupes de défense [de droits collectifs] d'une durée minimale de 3 ans.»

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la députée. Maintenant, M. le leader de l'opposition officielle, vous souhaitez intervenir?

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, un instant.

M. Drainville : Je voulais juste souligner que nous étions conjoints... nous sommes conjoints dans la motion.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Très bien. Alors, M. le leader de l'opposition officielle souhaite que nous ajoutions que... C'était déjà entendu. Très bien. Alors, merci, Mme la députée. Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

M. Sklavounos : Pas de consentement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Il n'y a pas de consentement.

Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous en sommes maintenant à la rubrique des Avis touchant les travaux des commissions, et je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. J'avise cette Assemblée que la Commission de l'économie et du travail entreprendra les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 67, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement de l'hébergement touristique, dès maintenant, pour une durée d'une heure, et poursuivra de 15 heures à 16 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission des institutions, quant à elle, poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 51, Loi visant notamment à rendre l'administration de la justice plus efficace et les amendes aux mineurs plus dissuasives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 12 h 45, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

Finalement, la Commission de l'agriculture, des pêcheries, de l'énergie et des ressources naturelles poursuivra l'étude détaillée à l'égard du projet de loi n° 54, Loi visant l'amélioration de la situation juridique de l'animal, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, M. le leader adjoint du gouvernement. Et, pour ma part, je vous avise que la Commission des finances publiques se réunira aujourd'hui, après les affaires courantes, à la salle des Premiers-Ministres de l'édifice Pamphile-Le May, afin de procéder à l'élection à la vice-présidence de la commission.

Une voix : ...

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : M. le leader de l'opposition officielle.

M. Drainville : Sur la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, hein, j'aurais une question à poser à mon honorable collègue. Demain, nous allons entreprendre l'étude article par article de la loi... du projet de loi, en fait, n° 44, qui concerne la lutte au tabagisme. C'est arrivé à plusieurs reprises, Mme la Présidente, qu'on a signifié ouvertement et très publiquement en cette Chambre que nous souhaitions débuter le plus rapidement possible l'étude de ce projet de loi. Je vous rappelle, Mme la Présidente, qu'on a signifié qu'il était prioritaire pour nous. Et il est tellement prioritaire, Mme la Présidente, qu'on a fait connaître nos amendements, nous, déjà, à ce projet de loi. On les a déjà annoncés, nos amendements, mais nous ne connaissons pas les amendements qui seront apportés par la ministre responsable du projet de loi n° 44, Mme la Présidente.

 Alors, dans un esprit de collaboration dont nous avons déjà fait preuve en présentant nos propres amendements, Mme la Présidente, et dans une volonté aussi de procéder avec diligence à l'étude et à l'adoption éventuelle du projet de loi n° 44, j'aimerais, Mme la Présidente — je parle lentement parce que j'espère que mon honorable collègue aura, d'ici la fin de ma question, la réponse à ladite question — avoir des indications de la part du leader du gouvernement quant au dépôt des amendements émanant de la ministre responsable du projet de loi n° 44, dont on commencera l'étude demain. Et j'espère que le leader a eu le temps de finir de lire le papier qui vient de lui être acheminé pour qu'il nous donne une bonne réponse.

• (11 h 10) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le leader de l'opposition officielle. Je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Je remercie le collègue pour sa patience. L'étude détaillée débute demain, Mme la Présidente, et, comme d'habitude, nous allons montrer notre entière collaboration, et il aura la réponse à sa question demain en commission parlementaire. La ministre est prête et veut collaborer pour faciliter l'étude de ce projet de loi, qui est aussi important pour nous, et nous l'avons dit à plusieurs reprises. Donc, le collègue sera heureux demain de recevoir des renseignements là-dessus.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le leader adjoint. Vous voulez ajouter quelque chose, M. le leader de l'opposition officielle?

M. Drainville : Très, très brièvement. Je veux juste être sûr, Mme la Présidente, qu'on se comprend bien. Donc, si je comprends bien le leader du gouvernement, vous nous annoncez que demain la ministre, en commission parlementaire, va déposer les amendements en question, donc les amendements seront connus demain en commission parlementaire. C'est ce que je comprends?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : ...je ne peux pas dicter la conduite de la ministre. Cependant, il est de notre habitude, il est de notre tradition de collaborer avec l'opposition pour que l'étude puisse se faire bien. Donc, ce que je lui signifie, c'est que nous allons continuer à respecter cette tradition, et je pense que l'étude va bien se dérouler, avec une très bonne collaboration, la collaboration que nous montrons d'habitude pour un projet de loi aussi important pour lequel nous avons la collaboration de l'opposition.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le leader adjoint du gouvernement.

Affaires du jour

Nous en sommes maintenant... C'est-à-dire que, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour, et je vais céder la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Merci, Mme la Présidente. Je vous demande d'appeler l'article 5, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 57

Adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, à l'article 5 du feuilleton, M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale propose l'adoption du principe du projet de loi n° 57, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite principalement quant au financement des régimes de retraite à prestations déterminées. M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Sam Hamad

M. Hamad : Merci, Mme la Présidente. Et, le 11 juin dernier, on a présenté le projet de loi à l'Assemblée nationale, un projet de loi très important, Mme la Présidente, parce que — tantôt, je vais en parler — il touche beaucoup, beaucoup de monde au Québec, et presque 815 000 personnes touchées par ce projet de loi. Nous avons travaillé, Mme la Présidente...

D'abord, juste rappeler l'objectif principal de ce projet de loi : c'était de favoriser la stabilité financière et d'assurer la pérennité de ce type de régime de retraite. Et ça, c'est un élément important, Mme la Présidente. La façon qu'on a travaillé, c'est qu'on a invité les syndicats, les représentants des travailleurs, les représentants des patrons pour travailler ensemble puis arriver avec un consensus qui nous permet d'aller de l'avant avec un projet de loi aussi important pour les travailleurs, les retraités et les employeurs.

Mme la Présidente, nous avons cinq objectifs dans ce projet de loi là. Le premier, c'est stabiliser le financement des régimes de retraite à prestations déterminées pour les employeurs du secteur privé, premier objectif. Le deuxième, c'est freiner la conversion massive vers d'autres régimes. On se rappelle, Mme la Présidente, avec la crise économique, avec la baisse de taux de rendement des régimes, beaucoup d'employeurs et des travailleurs... évidemment, ça a menacé beaucoup de régimes par la suite, mais il y a eu une conversion à d'autres régimes. Donc là, on veut rendre ces régimes à prestations déterminées payants et... en fait, payants et plutôt stabilisés, et donc c'est un deuxième objectif. Le troisième objectif, c'est contrer le fait de la baisse des taux d'intérêt obligataires et va améliorer la gestion des risques des régimes. Parce que le taux d'intérêt obligataire, lorsqu'il baisse, Mme la Présidente, il a un impact immédiat sur les rendements des régimes, un impact négatif. Donc, cet impact-là, il faut vraiment contrer cet effet-là et en même temps aussi améliorer la gestion des risques de ces régimes-là. Et le dernier élément, c'est diminuer les répercussions qu'aura... à la fin des mesures d'allégement. En fait, celles-ci se termineront le 31 décembre. On se rappelle, on a mis des mesures d'allégement pour aider les régimes à passer à travers la crise économique, et les mesures d'allégement terminent le 31 décembre de cette année. Donc, après ça, on tombe dans un vide, donc il faut agir.

Mme la Présidente, un petit rappel. Il y a quelque 360 employeurs du secteur privé et près de 500 régimes actuellement de prestations déterminées au Québec, et on parle de 815 000 personnes qui sont touchées. Donc, pendant la consultation, il y a M. D'Amours, qui est venu présenter un mémoire, et il a constaté, M. D'Amours, il l'a dit, que la majorité de ces recommandations ont été réalisées.

Et, deuxième élément, Mme la Présidente, avec... très humblement, pour notre gouvernement, on a eu plusieurs présentations où les gens, ils disaient : On est les précurseurs, au Canada, en matière de régime de retraite. On est le modèle actuellement canadien pour tous les collègues canadiens en termes de régime de retraite, parce qu'on est en avant-garde dans l'innovation, dans les mesures qu'on va mettre en place.

Alors, vous comprendrez, Mme la Présidente, aussi, bien sûr, n'importe quelle loi, avec mon expérience — c'est mon 27e... 28e loi — il y a toujours des modifications, c'est normal. Le but, c'est bonifier les projets de loi, entendre les gens qui viennent nous faire des recommandations et trouver le meilleur de ces recommandations-là pour les inclure dans le projet de loi. Donc, on a l'intention d'amener des modifications, des amendements et on veut travailler avec l'opposition, les deux oppositions pour bonifier ce projet de loi. Et on a une très bonne idée où on s'en va, Mme la Présidente. Et je souhaite la collaboration de l'opposition officielle et la deuxième opposition, parce que c'est un projet de loi important.

Évidemment, l'adoption de ce projet de loi est importante aussi, parce que 815 000 personnes attendent après les députés de l'opposition pour voir qu'est-ce qu'ils vont dire, comment ils vont agir, quel comportement ils vont prendre face à leur retraite. Et donc ces gens-là, ils veulent que l'opposition, bien sûr, agisse d'une façon responsable pour qu'on bonifie ce projet de loi et on aille de l'avant le plus rapidement possible.

Alors donc, c'est un projet de loi très important dans l'économie du Québec, très important pour les 815 000 Québécois au Québec qui ont un régime comme ça, qui, eux autres, attendent de voir les réactions des députés de l'opposition, ils veulent voir qu'est-ce qu'ils vont faire, est-ce qu'ils vont travailler d'une façon très sérieuse pour qu'on adopte ce projet de loi. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Et maintenant, pour la prochaine intervention, je cède la parole à M. le député de Sanguinet, qui est aussi le porte-parole...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Non? Ah! excusez-moi. Alors, allez-y, la parole est à vous.

M. Alain Therrien

M. Therrien : Merci, Mme la Présidente. Alors donc, je suis heureux d'intervenir sur le projet de loi n° 57 aujourd'hui. Je tiens d'abord à saluer la ministre qui chapeaute ce projet de loi, saluer aussi les gens de la partie gouvernementale qui ont assisté aux consultations particulières, saluer mon collègue le nouveau porte-parole aux régimes de retraite, le député de Beauharnois, qui va faire un travail extraordinaire, j'en suis convaincu, et saluer aussi le député de Chutes-de-la-Chaudière, de la seconde opposition.

Alors donc, écoutez, des régimes de retraite, on le sait que c'est quelque chose d'extrêmement important dans notre société. C'est ce qui nous permet, nous, éventuellement, d'arriver et avoir une retraite en quiétude au niveau financier. C'est de faire en sorte qu'on puisse un jour se retirer avec les honneurs, comme on pourrait dire, et de s'assurer que, non, on ne manquera de rien, et que nos besoins les plus légitimes seront comblés.

Évidemment, pour ça, on considère toujours que les régimes à prestations déterminées, c'est le meilleur véhicule pour justement protéger les futurs retraités au niveau financier. Ça a commencé il y a un bout de temps, la réflexion au sujet des prestations déterminées, ça a commencé avec le rapport D'Amours. Le rapport D'Amours nous a suggéré plusieurs avenues pour justement assurer la pérennité de ce genre de régime là.

Pourquoi on a amené une réflexion dans ce sens-là? Bien, c'était à cause de la crise qu'on a vécue en 2008, qui a vraiment hypothéqué la rentabilité de ces régimes de retraite et qui a fait en sorte d'ébranler le socle sur lequel étaient assis ces régimes-là. Et donc cette réflexion-là, en partie, est causée par ça, mais aussi à cause qu'on s'aperçoit que la population vieillit, ce qui est une bonne nouvelle en soi, mais qui cause des problèmes quant à la solvabilité des régimes.

• (11 h 20) •

Alors donc, on a eu évidemment, là, un chapelet de mesures qui a suivi, pour justement s'assurer une pérennité de ce genre de régime là, pour s'assurer que les gens ne passent pas des régimes à prestations déterminées aux régimes à cotisation déterminée, qui sont une sécurité un peu moins grande au niveau financier.

Alors, évidemment, on a eu le projet de loi n° 3 de ce gouvernement-là, qui a été, d'après moi, une erreur fondamentale dans la façon de procéder. Pourquoi? Parce qu'on n'a pas laissé la place à la négociation, on n'a pas fait confiance aux gens qui étaient impliqués dans ce genre de dossier là pour justement s'assurer la pérennité de leurs régimes; je parle des employés municipaux.

On a eu ensuite d'autres régimes de retraite qui ont été, si on veut, assainis par les lois qui ont permis justement de s'assurer de la pérennité des régimes. On a parlé des régimes interentreprises avec le projet de loi n° 34. Et je vous ferai remarquer que, tout le long de ces péripéties législatives, nous avons, nous, du Parti québécois, toujours prêté et tendu la main au ministre qui était responsable de ces dossiers-là.

Et là on est rendus aujourd'hui avec le projet de loi n° 57, qui touche plus de 800 000 personnes, 500 régimes de retraite, dont à peu près 20 % était en difficulté financière. Donc, c'est important. On touche les régimes dans le secteur privé. Et il y a eu des problèmes... il y a jadis, avec ces régimes-là... Et l'idée, c'était de faire en sorte que ces régimes-là ne disparaissent tout simplement pas. Parce que c'est une tendance lourde qu'on s'aperçoit de plus en plus dans ce secteur de l'économie, c'est que les régimes à prestations déterminées, même s'ils sont un avantage pour les entreprises qui l'offrent... Parce que vous savez bien qu'un individu qui va aller dans une entreprise qui offre un régime à prestations déterminées, bien, c'est extrêmement attractif pour lui. Il va considérer que cet emploi-là est possiblement un emploi de qualité en partie à cause de cet avantage indéniable.

Alors donc, on s'aperçoit que les employeurs savent qu'il s'agit d'un avantage et ils veulent préserver cet avantage-là. Évidemment, les employés de l'autre côté sont d'accord avec ça. Où ce que je veux en venir, Mme la Présidente, c'est que la table est mise pour la négociation de bonne foi entre les gens qui avaient la responsabilité financière de ces régimes-là, je parle des employeurs, mais aussi ceux qui avaient des avantages indéniables à ce que ces régimes-là persistent, et là je parle des employés.

Évidemment, ce projet de loi là, c'est tout simplement un consensus social entre les différents intervenants et c'est une des raisons pourquoi je considère que le régime... le projet de loi est bien construit, parce qu'il a une assise sur la négociation et sur la volonté des partis d'améliorer les régimes de retraite.

Ce qui a fait cruellement défaut quand on a regardé le projet de loi n° 3, bien, ça fait la force du projet de loi n° 57 actuellement. Alors, voyez-vous, l'approche que nous voulions au Parti québécois pour le projet de loi n° 3, on l'a eu dans le projet de loi n° 57, et ça nous a permis d'arriver justement à un projet de loi qui est solide.

Il va faire en sorte de limiter justement le passage des régimes à prestations déterminées à des régimes de cotisation déterminée, ça, on va le voir de moins en moins, on l'espère, évidemment, mais aussi de faire en sorte que les régimes de retraite qui ont des difficultés financières fassent en sorte, à travers ces outils-là offerts par le projet de loi n° 57... nous permettent justement d'atteindre la capitalisation évaluée à 100 % pour... et même plus, parce qu'on va introduire, dans ce projet de loi là, des provisions qui vont être tout simplement là pour garantir que les régimes de retraite, à moins d'une catastrophe sur le marché financier comme on a vécu en 2008, bien, que les régimes de retraite ne soient pas partiellement capitalisés. Alors donc, très intéressant pour les gens qui seront impliqués dans ces régimes de retraite.

Chose importante : nous, où est-ce qu'on en avait au sujet d'améliorations, potentiellement, de ce régime de retraite là, c'est au niveau des lettres de crédit, de faire en sorte que les employeurs n'abusent pas de l'utilisation des lettres de crédit. Puis ça, du côté des employés, ça les inquiétait beaucoup. Mais je pense que là-dessus le ministre nous a offert une réflexion et une ouverture puis je pense que le consensus allait pas mal dans ce sens-là. Je ne peux pas dire les mots à sa place, évidemment, mais, quand même, je pense que, là-dessus, il n'y aura pas, je pense, de volonté d'aller accroître, là, l'utilisation des lettres de crédit. Aussi, faire en sorte que les lettres de crédit, qui ne donnent pas de rendement, évidemment, puissent faire en sorte qu'on calcule des rendements potentiels à partir du dépôt des lettres de crédit. Ça aussi, même les employeurs étaient d'accord avec ça.

Alors donc, pour nous, c'est une avancée intéressante pour justement s'assurer que les gens s'entendent et que les régimes de retraite soient pérennisés.

Dernier point sur lequel je voudrais insister, puis j'en ai parlé au ministre lorsqu'on était dans les consultations particulières, et je pense que le ministre, il faut avouer, avait une écoute attentive, il était positif dans son approche, et je suis convaincu qu'il va le demeurer, même si je ne suis plus le porte-parole dans le dossier... Et donc — espérons-le — l'idée... Oui, il pleure, peut-être qu'on pourrait le mentionner... Non, mais l'idée que, si on a une situation de faillite, il faut que les gens qui travaillent dans une entreprise qui fait faillite, on puisse s'assurer que ces gens-là soient protégés. Et là il y a différentes façons, il y a des gens qui nous avaient parlé d'un fonds de garantie qui était existant en Ontario, mais les différents intervenants, je pense, il y en a un qui nous en a parlé, puis les autres, en tout cas, je ne veux pas mettre les mots dans leur bouche, mais n'avaient pas l'air à être trop encouragés par ce genre de solution là. On a peut-être davantage... pour que ces gens-là se fassent chapeauter par la Régie des rentes, qui sera Retraite Québec éventuellement, pour qu'on puisse justement préserver une certaine santé financière à leur régime.

Pourquoi? Bien, parce que la pierre angulaire de ce projet de loi là, c'est dans le calcul de la capitalisation. Avant, on utilisait l'approche de solvabilité, qui est généralement, dans la plupart des cas, extrêmement sévère, qui va souvent sous-estimer la valeur réelle des régimes de retraite — ça, ce n'est pas moi qui le dis, mais c'est le rapport D'Amours, entre autres — et c'est pour cette raison-là que les intervenants à peu près à l'unanimité ont salué justement le projet de loi n° 57 qui nous disait qu'à partir de maintenant nous allons avoir une approche par capitalisation plus sévère un peu que ce qu'on retrouve ailleurs, mais quand même qui va jeter un peu de lest sur les exigences apportées pour pérenniser et assurer la santé financière des régimes de retraite.

Alors donc, il me reste à saluer les gens qui sont passés en commission parlementaire. On a eu une ambiance intéressante, les gens étaient généralement — je pense que je ne me trompe pas étant donné que c'est un consensus — d'accord. Il y avait des petits points où est-ce que, et c'est normal, on voulait avoir certaines améliorations, mais l'ensemble des intervenants disait : On a un consensus, gardons-le. Gardons-le. Alors donc, pour ces raisons-là, moi, je considère que nous devrions saluer les intentions du ministre dans le projet de loi n° 57 et faire en sorte qu'on se retrouve dans ce secteur précis à améliorer un bijou, un joyau, que je pourrais dire, de toute la façon de gérer les régimes de retraite, des régimes à prestations déterminées. Et évidemment je salue le nouveau porte-parole de mon parti, qui fera évidemment un travail extraordinaire. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Sanguinet. Et maintenant je vais céder la parole à M. le député de Chutes-de-la-Chaudière.

• (11 h 30) •

Une voix : ...

M. Marc Picard

M. Picard : Merci, M. le ministre. Je suis votre meilleur, si j'ai bien entendu. C'est ça? Excellent.

Mme la Présidente, je prends à mon tour une minute pour saluer mes collègues qui ont participé aux consultations du projet de loi n° 57, plus particulièrement le député de Sanguinet, et le député de Beauharnois, ainsi que le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité. Également, je salue tout le personnel de l'Assemblée nationale, dont le travail nous permet, nous, les parlementaires, d'avoir un bon déroulement lors de nos séances de travail. Je tiens à souligner une nouvelle fois l'esprit d'entente et de collaboration qui a régné lors de cette commission parlementaire, lors de nos travaux. Enfin, je ne saurais faire l'économie de salutations et de remerciements envers les nombreux intervenants qui ont pris la peine de venir nous rencontrer pour nous exposer leur point de vue et répondre à nos questions. Je crois qu'il est également à propos de souligner également le climat hautement consensuel, également, des différents acteurs oeuvrant autour des régimes de retraite à prestations déterminées au Québec.

En effet, comme cela a été mentionné par mes collègues avant moi, ce projet de loi est né d'une consultation entre syndicats et représentants du patronat. C'est au comité consultatif sur la main-d'oeuvre et le travail qu'ont eu lieu les échanges ayant mené au présent projet de loi. Le texte de loi est le résultat de compromis de part et d'autre. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que plusieurs groupes entendus en consultation nous disaient être d'accord avec l'essentiel du projet de loi n° 57. Chacun y allait ensuite de ses petits ajustements. Le texte à l'étude ici est, à notre avis, la démonstration de beaucoup d'efforts de la part du ministre afin de trouver l'équilibre, l'équilibre le plus adéquat possible, soit un projet de loi teinté d'une belle couleur. Certains voulaient une couleur légèrement plus foncée, d'autres, légèrement plus pâle. Nous considérons bien sûr que, d'ici à l'étude détaillée, ces nuances demandées par les groupes...

Le projet de loi accomplit un certain nombre de choses importantes pour la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées. Plusieurs avaient été recommandées par le rapport D'Amours déposé en juin 2013. Celles qui ne se retrouvaient pas... M. D'Amours lui-même est venu en commission parlementaire pour nous confirmer que, dans le contexte des changements proposés, les choix faits dans le texte qui nous occupe s'inscrivent dans une continuité logique. Nous en concluons donc que le projet de loi répond aux recommandations émises par le rapport D'Amours.

Le texte actuel ajoute une série de paramètres aux régimes de retraite à prestations déterminées afin d'en préserver la pérennité. Le financement se base maintenant sur la capitalisation plutôt que la solvabilité, ce qui contribuera à maintenir des cotisations d'exercice acceptables pour tous les employeurs. En échange, on leur demande de constituer une marge de stabilisation, on fait ensuite passer la fréquence des évaluations actuarielles aux trois ans, sauf lorsque la solvabilité sera inférieure à 85 %. Cette mesure, Mme la Présidente, permet aux employeurs de s'éviter d'avoir à retenir les services d'actuaires à chaque année tout en conservant un oeil sur la capacité du régime à s'acquitter de l'ensemble de ses obligations contractées à ce jour. Cela permet donc une certaine flexibilité sans devoir mettre en danger la sécurité des économies cumulées dans le régime. Enfin, des dispositions de lissage permettent de garder les cotisations d'exercice stables pour les employeurs, ce qui contribue à la stabilité des régimes.

De l'aveu de plusieurs groupes consultés, le projet de loi contribuera à ralentir sinon stopper la tendance selon laquelle les employeurs passaient de plus en plus souvent des régimes de retraite à prestations déterminées à des régimes à cotisation déterminée. Même si le ministre a exprimé le souhait que le texte de loi, une fois adopté, encourage les employeurs à revenir vers les régimes à prestations déterminées, nous demeurons sceptiques. Si ce transfert s'opère, ce sera probablement en raison d'autres causes plus conjoncturelles telles que la diminution de la main-d'oeuvre disponible sur le marché du travail.

Malgré cela, Mme la Présidente, le texte actuel traduit de bonnes intentions du ministre par rapport aux changements requis en matière de régime de retraite. Nous appuyons donc le principe du projet de loi n° 57. Nous tendons la main au ministre afin de travailler à la bonification du projet de loi dans un esprit de collaboration tel que ce fut le cas lors de nos récents travaux avec le ministre. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, merci beaucoup, M. le député de Chutes-de-la-Chaudière. Et maintenant je cède la parole à M. le député de Mercier.

M. Amir Khadir

M. Khadir : Merci, Mme la Présidente. Je prends quelques instants, moi aussi, pour saluer et féliciter le nouveau porte-parole de l'opposition officielle en matière de régimes de retraite.

Pour Québec solidaire, il est clair que, lorsqu'il y a un projet de loi qui part d'un consensus avec ceux qui sont concernés principalement — je pense aux travailleurs — et qu'il y a eu des discussions qui ont permis d'améliorer certaines dimensions du projet de loi, pour nous, c'est une qualité démocratique et qui nous emmène donc à nous joindre à l'ensemble des parlementaires ici et d'appuyer le principe du projet de loi, ce qui ne présuppose pas que tout est parfait dans ce projet de loi et qu'il n'y a pas place à amélioration. Alors, nous allons voter en faveur du principe.

L'intérêt de Québec solidaire pour la question des retraites ne date pas d'hier. C'est un des plus grands enjeux socioéconomiques pour toute social-démocratie qui se respecte. Pour tout gouvernement ou toute vision de la politique dans laquelle le gouvernement doit assurer un filet de sécurité sociale pour l'ensemble de sa population, les retraites viennent au-devant de la liste, et c'est le cas dans nombre de pays qui ont d'ailleurs un certain nombre de difficultés. Vous savez que la structure, l'architecture, des revenus de retraite assurés aux citoyens québécois et canadiens dans l'ensemble est quand même une architecture relativement enviable, qui est souvent citée en exemple dans plusieurs pays à travers le monde, notamment en Europe.

Cependant, il y a place à énormément d'améliorations, et surtout il faut éviter des reculs. Québec solidaire a fait donc des retraites une priorité dès 2012, où nous avons insisté sur un élément qui rejoint la vision aussi mise de l'avant par le comité D'Amours qu'il faut approcher la retraite dans une vision d'ensemble et commencer par le premier étage. N'importe qui ici qui s'est penché sur le dossier des régimes de retraite s'est fait souvent dire qu'au Québec le système de retraite repose sur trois piliers, mais le premier pilier, la base de la pyramide, est constitué par les régimes de retraite publics, donc, au Québec, par le Régime de rentes du Québec. Et, dès 2012, nous avons mis de l'avant que la priorité dans toute réforme de régime de retraite devrait être par l'amélioration du Régime de rentes du Québec. Et nous proposions même de permettre aux travailleurs qui le désirent et aux cotisants qui le désirent d'augmenter leurs cotisations de 9 % jusqu'à 13 %.

D'ailleurs, c'est un élément maintenant qui est reconnu depuis, je pense, maintenant deux ans par le gouvernement libéral d'Ontario. Je ne sais pas pourquoi les libéraux du Québec ne s'inspirent pas davantage de leurs correspondants dans d'autres provinces ou même de leur correspondant fédéral maintenant : le gouvernement, le nouveau gouvernement de M. Justin Trudeau, à Ottawa, s'apprête aussi à améliorer le régime de pension public.

Et c'est là le défaut des changements et des modifications à la pièce introduites par ce gouvernement qui tantôt a favorisé les régimes complémentaires de type REER avec le régime volontaire d'épargne-retraite, a voulu niveler par le bas, on le sait comment, par des modifications apportées aux régimes de retraite municipaux puis maintenant vient à la pièce... Oui, bien sûr, le projet de loi actuel n'est pas mauvais en soi, mais c'est quand même une vision et une approche à la pièce qui ne répond pas, je dirais, à l'esprit de ce qui avait été formulé comme recommandations par le comité D'Amours.

Un autre problème qui surgit du fait qu'on n'a pas une approche cohérente et globale et qu'on ne met pas assez l'accent sur la protection publique, la couverture universelle, le Régime de rentes du Québec, c'est que l'écart se creuse actuellement entre une majorité de la population qui n'a pas de régime complémentaire et les travailleurs et les travailleuses qui, par leur propre contribution, par les batailles qu'ils ont menées, ont réussi à obtenir des régimes complémentaires pour pallier les insuffisances du régime de retraite universel. Alors là, il y a une iniquité qui s'installe peu à peu, un écart qui se creuse, et un bris de solidarité sociale est visible dans ce glissement de nos politiques publiques.

Bien sûr, ce qui n'aide pas, c'est certains discours populistes, hein, qu'on a entendus de la part de certains ministres. Je n'en nommerai pas pour ne pas accabler mes collègues, mais, quand on insiste sur le fait qu'une grande partie de la population ne jouit pas de revenus de retraite suffisants pour demander qu'on baisse les revenus de retraite de ceux qui disposent, comme je le dis, en vertu des luttes qui ont été menées parfois sur des dizaines d'années, de régimes de retraite complémentaires ou de revenus de retraite adéquats, c'est un discours qui alimente le ressentiment et les envies des uns et des autres au lieu de dire : Bien, puisqu'on sait qu'on est capables d'offrir de meilleures retraites à notre population — voyez, il y en a une certaine partie qui ont obtenu, grâce à leurs luttes, des régimes de retraite dignes pour des revenus dignes et honorables à la fin de leur vie active, de leur vie, je veux dire, de travailleurs actifs — bien, il faudrait le faire également pour l'ensemble de la population et tabler sur la solidarité de l'ensemble donc pour augmenter le revenu de retraite assuré par le régime universel, d'où l'importance, je reviens encore, l'importance de reconnaître qu'il faut améliorer le Régime de rentes du Québec.

• (11 h 40) •

Souhaitons que le gouvernement libéral, les députés ici du gouvernement, de la formation du gouvernement, se reconnaissent dans la grande vision libérale, qui est supposée être la leur, d'appuyer la base de la social-démocratie qui est d'assurer des revenus de retraite adéquats pour l'ensemble de la population, exactement comme le font des gouvernements libéraux en Ontario et sur la scène fédérale. On attend de voir le gouvernement actuel aussi, disons, se rapprocher de cette vision, au minimum, je dirais, minimale dans la perspective d'un gouvernement libéral, que je suis même capable de reconnaître comme député d'une formation de gauche, c'est-à-dire Québec solidaire.

Donc, nous espérons que le ministre est ouvert à l'idée, dans cette vision-là d'aussi améliorer le projet de loi n° 57 pour protéger des régimes à prestations déterminées. D'ailleurs, le ministre actuel s'évertue à dire que ce qu'il fait avec ce projet de loi, c'est dans le but de protéger les régimes à prestations déterminées. Alors, si c'est le cas, j'aimerais qu'il m'explique pourquoi son collègue du Conseil du trésor... J'aimerais savoir comment il explique que son collègue du Conseil du trésor s'attaque, veut s'en prendre au principal régime de retraite à prestations déterminées, c'est-à-dire le RREGOP, qui est déjà capitalisé à 98,4 %, qui est donc parfaitement en santé. Suivant les discussions qu'on a eues déjà sur le dossier de retraite, là, à 98,4 %, il n'y a aucune raison de tripoter là-dedans. Alors que malheureusement il y a une incohérence dans l'approche du gouvernement qui fait que, bien que le ministre nous dise, puis on veut bien le croire, ce projet de loi n° 57, je dois avouer, est satisfaisant à cet égard-là... mais il devrait en parler à un de ses collègues qui est en train, donc, de s'en prendre au RREGOP.

Lors de l'étude détaillée, nous verrons donc dans quelle mesure le gouvernement est ouvert à bonifier le projet de loi n° 57. De nombreuses propositions ont été formulées par des associations de retraités. Ça serait bien que nous soyons ouverts comme parlementaires à les entendre, à écouter les craintes de voir les participants et les retraités perdre des acquis, hein? On a dit : L'essentiel, c'est d'améliorer ce qui est là, la base de la pyramide, le Régime de rentes du Québec, par exemple, mais aussi de s'assurer que les régimes à prestations déterminées, les modifications qu'on y apporte n'occasionnent pas des reculs, mais, disons, enregistrent la volonté de l'État d'assurer de meilleures retraites pour l'ensemble de la population et donc de tirer vers le haut, de niveler vers haut et non pas vers le bas la protection des revenus à la retraite.

Parmi les améliorations formulées, j'en cite une, pour le bénéfice de notre ministre, c'est la demande de rendre permanentes certaines mesures qui sont contenues dans la loi actuelle et qui donnent un rôle à la RRQ de prendre en charge le versement des rentes pour une période de 10 ans quand il y a un contexte d'insolvabilité ou de faillite, hein? C'est quelque chose qu'on a reconnu. On a besoin d'offrir des protections lorsqu'il y a des problèmes majeurs, en cas de faillite notamment. Une deuxième mesure concerne la valeur de transfert puisque le projet de loi n° 57 viendra réduire les rentes versées aux participants. Donc, ces propositions-là ont été formulées dans le but d'éviter toute forme de recul par rapport à ce que l'État s'est engagé à faire depuis des décennies. Merci beaucoup de votre écoute, Mme la Présidente, ainsi que de mes collègues.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Mercier. Et, pour la prochaine intervention, je vais reconnaître le nouveau porte-parole de l'opposition officielle en matière de régimes de retraite et député de Beauharnois. La parole est à vous.

M. Guy Leclair

M. Leclair : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, permettez-moi tout d'abord, Mme la Présidente, bien entendu, comme l'ont fait mes collègues, de remercier les collègues députés qui se prêtent à la commission parlementaire pour apporter leur savoir puis tenter de faire raisonner notre bon ministre qui, dans ce projet de loi, là a quand même devant lui un projet qui est très consensuel, et je pense que tout le monde le reconnaît, mais c'est avec le travail quand même de chaque député qu'on peut faire valoir un projet de loi. Puis parfois il y a des petits oublis, il n'y a rien de parfait dans ce monde, alors je remercie les collègues de participer.

Je remercie, bien entendu, Mme la Présidente, les gens qui prennent la peine d'écrire un mémoire. On sait que, dans ces projets de loi là, c'est beaucoup de chiffres comptables. Beaucoup d'actuaires mettent la main à la pâte pour s'assurer que tout balance lors des régimes de retraite. Donc, je remercie les gens pour, premièrement, leurs mémoires et, deuxièmement, s'être déplacés pour venir expliquer leurs mémoires qui étaient, un après l'autre, aussi clairs les uns que les autres.

Alors, sur ce aussi, je ferais un petit clin d'oeil, Mme la Présidente, bien entendu au secrétariat de la commission et aux gens de l'Assemblée nationale qui travaillent avec nous lors de ces commissions parlementaires pour nous apporter de l'aide, des services, que ce soit photocopies, et ainsi de suite. Alors, ces gens-là sont d'une valeur inestimable pour nous, les députés à l'Assemblée nationale. Donc, je leur fais un petit clin d'oeil en disant au Conseil du trésor : On remercie souvent les gens de l'Assemblée nationale, ils sont présentement en négociation, faisons-leur un petit clin d'oeil qu'ils pourront savourer aussi lors de leur négociation.

Alors, Mme la Présidente, j'aimerais revenir un peu en arrière. On parle d'une crise financière, en 2008, qui a déstabilisé le monde financier, pas seulement qu'au Québec, un peu partout sur la planète, surtout en Amérique du Nord. Mais on a commencé à voir des régimes de retraite... des compagnies qui n'étaient plus capables d'affronter, avec les pertes qu'ils ont eues dans leurs placements, d'affronter la solvabilité de leurs régimes de retraite.

Alors, face à ça, bien, il y a eu toutes sortes de choses dans le passé. On a donné la chance, en cinq ans, de s'assurer que le patronal adopte la solvabilité puis s'assure qu'il y ait une solvabilité pour les fonds de retraite. Mais, à tort ou à raison, tout ça avec la crise financière, mêlé ensemble, bien, on s'est aperçu que plusieurs compagnies ont dû fermer les portes pas seulement à cause des régimes de retraite, mais... Bien entendu, les travailleurs qui y travaillaient, bien, ont eu beaucoup de risques, et plusieurs ont perdu leur fond de retraite ou se sont trouvés avec un fond de retraite si peu capitalisé que... en ont ressorti avec quasiment rien. Alors, ça, c'est très choquant.

Je pense que toute la classe politique, on voit ce phénomène-là et cette problématique-là, puis, bien entendu, face à ça, bien, le Parti québécois, face au rapport D'Amours qui nous avait mis en garde sur le futur avec plusieurs bonnes recommandations... Puis il nous disait à nous, les législateurs : Faites quelque chose parce qu'on risque de mettre en danger les régimes de retraite tels qu'ils sont conçus en ce moment au Québec. Donc, suite à ça, bien, le Parti québécois, bien entendu, avec Mme Marois ainsi qu'avec ma collègue ex-ministre du Travail, avait décidé d'asseoir à une même table, pour les régimes de retraite, les retraités, les travailleurs et le patronal. On s'est dit : Bien, on a le choix de critiquer un ou l'autre, et la force d'un, la force de l'autre, mais une chose est certaine, Mme la Présidente, si on continue comme ça, excusez-moi l'expression, on va frapper un mur.

Donc, le Parti québécois a réussi à asseoir les gens ensemble puis se mettre dans un mode constructif pour la suite des choses. Malgré que l'image, parfois, était affreuse, parfois, dans d'autres cas, elle était quand même belle, mais, malgré tout ça, on devrait trouver un consensus. Donc, je félicite encore cette initiative-là de ma collègue, avec Mme Marois, qui a dit : Il faut s'asseoir ensemble. Puis on se disait : Ça va être impossible, ça va être impossible, mais on l'a réussi. On a assis les gens, ça a parti avec un embryon, on a continué, on a continué.

Malheureusement, malheureusement, quelques années plus tard, on arrive avec le premier projet de loi sur les régimes de retraite, Mme la Présidente, le projet de loi n° 3, qui touche les municipalités, et on n'utilise pas ce consensus-là qui est en train de se bâtir. Alors, le ministre le sait, les gens qui ont venu, qui ont participé au projet de loi n° 3 ont démontré leur mécontentement. On brisait des règles de l'art sur la négociation et des ententes prises légalement. Alors, tout le monde a critiqué en partie le projet de loi n° 3. Pourquoi? Parce qu'on n'a pas continué dans cette veine de consensus.

Heureusement, heureusement, Mme la Présidente, aujourd'hui, le projet de loi n° 57... le ministre nous a donné raison, est revenu sur ce consensus-là. Et vous devriez voir, Mme la Présidente, le ministre en commission, c'est de toute beauté. Vu qu'il y a consensus, les gens le félicitent, le saluent avec le gros sourire, autant patronal, autant syndical, et le ministre est très content de ça. Et je le comprends bien, parce qu'il était une fois, voilà juste quelques semaines, au projet de loi n° 3, ce n'était pas le cas du tout parce qu'il n'y avait pas eu de consensus.

• (11 h 50) •

Alors, cette manière de procéder là, je la salue et j'invite tous les parlementaires, lorsque c'est possible et même lorsqu'on prétend que ce sera impossible, de tenter de faire ce consensus-là avec toutes les parties. Une entente négociée, c'est sûr que ce ne sera jamais à 100 %, mais c'est toujours mieux qu'une entente qu'on oblige les gens. On doit s'asseoir et négocier. Le Québec est formé de gens intelligents. Je suis convaincu que, lorsqu'on prend le temps, on arrive à des résultats tels que celui-ci au projet de loi n° 57, que, bien entendu, l'opposition, on n'a pas le choix, on est fiers de cette démarche-là et on va appuyer. On va appuyer le projet de loi n° 57.

Bien entendu, Mme la Présidente, il reste toute l'étape article par article, rien n'est parfait dans ce beau monde là. Je ne suis pas inquiet que mes collègues de la deuxième opposition qui siègent studieusement avec nous vont apporter des nouveaux points, on va tenter d'agrémenter quelques lignes sur le projet de loi, mais toutefois une chose est certaine : sans défaire le consensus, sans défaire ce consensus-là qui... pour une fois dans un programme ou un projet de loi si complexe que les régimes de retraite, on a réussi à impliquer des retraités, des travailleurs ainsi que le patronal.

Alors, si vous n'avez pas compris mon message, Mme la Présidente, j'en suis très, très, fier parce que, lorsqu'on parle de consensus, bien entendu, ce qui est merveilleux de tout ça, Mme la Présidente, c'est que personne, personne dans tout ce beau monde là assis au coin de la table n'a perdu des droits, personne ne s'est vu oublié dans ce consensus-là. C'est ça qui fait la beauté, parce que le lendemain de ce projet de loi là, lorsqu'il sera adopté, bien les gens... puis ont déjà dit au ministre en commission parlementaire dans plusieurs mémoires : M. le ministre, il ne faut surtout pas que ça s'arrête là. On a ce bout de projet de loi là, puis je pense que le rapport D'Amours, les gens ont venu le dire en commission parlementaire, c'est un début, on est sur une bonne ligne, ça représente le futur, il faut suivre ça. Alors, M. le ministre, j'ose espérer... je vous le réitérerai en article par article tout au long de cette étude, bien il va falloir continuer, parce qu'on est loin, loin d'avoir atteint la perfection sur les régimes de retraite au Québec. C'est un pas vers l'avant, un pas consensuel, qu'on ne peut que dire qu'on doit continuer dans cette veine-là, mais, lorsqu'on parle, puis il y a plusieurs collègues qui le disaient un peu plus tôt, que plusieurs travailleurs au Québec n'ont pas droit à un régime de retraite décent à l'âge de leur retraite, soit à 60 ans, 62 ans ou 65 ans, tout dépendant des conventions collectives en ce moment, bien, il y aurait un minimum, un minimum, Mme la Présidente...

Vous savez tout comme moi, le coût de la vie étant... Bien, il y a beaucoup de gens qui ont travaillé tout de même depuis l'âge de 16 ans puis ils sont rendus à 60 ans aujourd'hui puis ils reçoivent les maigres régimes des rentes pour toutes sortes de raisons. Ils n'ont pas eu la chance d'être dans une association où est-ce qu'il y avait une entente pour avoir un régime de retraite. L'Ontario vient de mettre en branle un régime de retraite pour tous les Ontariens. Or, ça, ça l'a un prix à payer, bien entendu, Mme la Présidente, mais j'invite le ministre à aller de l'avant, au moins s'asseoir, vérifier la possibilité, le coût de ces régimes-là.

Est-ce que c'est possible au Québec? Il faut regarder de long et en large, mais moi, j'y crois. Moi, je crois qu'on peut trouver un système où est-ce que tous les Québécois seront dignes d'une retraite avec un minimum de fierté et pas une retraite où est-ce que les gens vont friser l'itinérance, parce qu'il y a des cas, Mme la Présidente, puis je ne commencerai pas à faire la nomenclature de ça ici ce matin, mais c'est épeurant de voir des gens qui ont travaillé puis ils se sont levés à tous les matins toute leur vie puis que, rendus à 60 ans, c'est un déclin total.

Alors, sur ce, Mme la Présidente, bien entendu, je vais rappeler quelques points que les gens nous ont spécifiés dans leurs mémoires, sans vouloir toutefois défaire ce consensus-là. Bien entendu, certaines gens tentent encore de faire entrer des lignes qui n'étaient pas consensuelles; de dire que c'est impossible, nous allons vérifier article par article, mais je voudrais quand même apporter quelques ouvertures que le ministre a laissé entendre lorsqu'on a écouté les groupes.

On parlait aussi que le régime... le projet de loi, il intégrait une grille qui avait fait consensus lors des négociations, que les gens aimeraient voir cette grille-là dans le projet de loi. Le ministre a bien écouté ces gens-là, leur a dit : Je ne vous dis pas oui, je ne vous dis pas non, il y a une possibilité. Alors, c'est sûr que, sur ces points-là, on va revenir durant l'article par article. Bien entendu, d'autres gens nous disaient aussi : Bien, l'utilisation des surplus futurs... Bien, en ce moment, les règles telles qu'elles sont écrites, bien c'est le côté patronal, seulement lui, qui peut utiliser les surplus futurs. Alors, certains groupes nous disent : Est-ce que ça pourrait être aussi l'employé? Nous allons discuter de ces points-là tout au long. Et, bien entendu, une recommandation qui avait été faite par les groupes... la Force Jeunesse, qui, eux, disent au ministre encore une fois : M. le ministre, il faut continuer dans cette veine-là. Lorsque le projet de loi n° 57 sera fermé et signé, continuons avec la table de travail, continuons à regarder. Ce n'est pas parfait parce qu'on a réussi à s'entendre sur le projet de loi n° 57, il reste beaucoup de régimes qui sont très variés. Alors, Force Jeunesse nous dit : Faites attention! On a encore beaucoup d'ouvrage à faire. Alors, j'ose espérer que le gouvernement, avec aussi M. le ministre, on va continuer dans cette veine-là pour tenter de trouver quelque chose d'équitable pour que tous les gens aient une bonne retraite un jour.

Alors, sur ce, Mme la Présidente, bien, je réitère mon engagement à cette commission parlementaire, et ce projet de loi, nous allons le travailler, bien entendu, toujours avec professionnalisme, je n'ai aucun doute. Nous allons poser des questions adéquates. Même si nous appuyons le projet de loi, bien entendu, il y aura des questionnements, des questionnements de compréhension. Et je tiens d'abord aussi à spécifier, Mme la Présidente, que je remercie le ministre et le ministère. Lorsque nous demandons ce qu'on appelle dans notre jargon les débriefings techniques, bien, le ministre est toujours ouvert à nos suggestions puis il nous apporte l'information nécessaire. Alors, je tiens à remercier ce travail-là en collatéral avec les autres collègues. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Beauharnois. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Jean-Lesage.

M. André Drolet

M. Drolet : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Salutations particulières à tous les collègues qui ont travaillé au projet de loi. C'est un plaisir pour moi aujourd'hui de pouvoir prendre la parole sur un important projet de loi, qui est le projet de loi n° 57, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite principalement quant au financement des régimes de retraite à prestations déterminées.

Mme la Présidente, depuis la crise financière de 2008, on observe une détérioration de la situation financière de différents régimes de retraite à prestations déterminées. Le degré de solvabilité des régimes du secteur privé est passé d'un taux de capitalisation de 92 % à un taux de 87 % en seulement 12 mois, soit l'année 2013‑2014. De plus, les taux d'intérêt extrêmement bas des dernières années ont amené des rendements nettement inférieurs à ceux attendus, ce qui a entraîné d'importantes variations dans le financement de différents régimes.

Le nombre de régimes de retraite à prestations déterminées dans le secteur ne cesse de décroître. En 2000, 11 % de ces régimes comportaient un volet à cotisation déterminée. En 2013, nous en étions à 39 %. Les régimes à prestations déterminées se transforment en régimes à cotisation déterminée pour les nouveaux employés parce que les promoteurs estiment que leurs coûts devenaient insoutenables. D'ailleurs, la méthode de financement actuelle, basée sur la solvabilité, est coûteuse et imprévisible pour les quelque 380 employeurs du secteur privé qui offrent à leur personnel ces régimes de retraite. Enfin, il faut mentionner que l'ensemble de ces régimes est sous la gouverne de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. C'est pourquoi, heureusement, notre gouvernement amène le projet de loi n° 57, qui propose plusieurs mesures pour corriger la situation, dont la plupart s'inspirent des recommandations du rapport D'Amours déposé en 2013 dans le but de pérenniser le système de retraite actuel.

Mme la Présidente, quelques-unes de ces mesures présentées dans le projet de loi et qui sont essentielles au maintien des régimes à prestations déterminées.

D'abord, la modification de la méthode de financement applicable aux régimes de retraite à prestations déterminées. Le projet de loi n° 57 propose d'écarter le financement sur la base de la solvabilité au profit d'un financement axé sur la capitalisation pour amener plus de stabilité aux différents régimes. Par ailleurs, le projet de loi n° 57 propose une mesure intéressante : la cotisation d'une provision de stabilisation pour pallier à différentes fluctuations économiques et les impacts dus à l'allongement de l'espérance de vie. Cette provision proviendra des gains actuariels et des cotisations.

• (12 heures) •

Une autre mesure importante et proposée par le projet de loi vient encadrer avec des règles claires l'utilisation des surplus. En fait, aucune utilisation des surplus ne sera permise, à moins que la provision de stabilisation ne soit capitalisée au moins à 5 % au-dessus de l'objectif de capitalisation du régime et qu'un test de solvabilité soit respecté. Le test de solvabilité d'un régime doit être égal à 105 % ou plus. Lorsque ces conditions seront remplies, la création d'une clause banquier pour les entreprises, incluse dans le projet de loi, permettra aux employeurs de récupérer une partie des sommes versées pour capitaliser le régime, Mme la Présidente. Cette mesure innovatrice contribuera à soutenir le développement de nos entreprises.

Le projet de loi permettra également un meilleur suivi des régimes en difficulté. En fait, chacun de ces régimes avec un degré de solvabilité inférieur à 85 % devra transmettre à la Régie des rentes du Québec une évaluation actuarielle tous les trois ans.

Enfin, le projet de loi prévoit des règles modifiant le concept de la cotisation patronale minimale. Un test assurera que le participant qui n'aurait pas financé avec ses cotisations et ses intérêts plus de 50 % de la valeur de ses prestations... En effet, des cotisations d'équilibre sont versées pour rembourser un déficit, et la période d'amortissement des déficits passera de 10 à 15 ans.

Lors des consultations, plusieurs intervenants sont venus nous dire que les mesures proposées dans le projet de loi correspondent aux besoins, tant du côté des employeurs que du côté des employés. Je constate qu'il se dégage un consensus clair sur le fait que les régimes de retraite à prestations déterminées sont le véhicule le plus soutenable à la fois au niveau de la planification de la retraite pour un participant et pour l'économie en général.

Enfin, ces régimes permettent de garantir, à la retraite, des revenus prédéterminés à l'embauche. Il importe donc de s'attaquer à des règles... les faiblesses du système actuel pour assurer aux travailleurs d'aujourd'hui et aux générations futures des retraites décentes. Il est de loin préférable d'en assurer la pérennité.

En fait, pour les employeurs, ce genre de régime a un pouvoir d'attraction pour la main-d'oeuvre de qualité, qui sera plus fidèle et intéressée pour le genre de conditions qu'elle offre. D'ailleurs, Mme la Présidente, justement, le projet de loi était très attendu. Et, comme le ministre le disait tout à l'heure, c'est un modèle canadien, et on se fait envier.

Alors, c'est très intéressant pour moi de vanter le travail du ministre et de faire en sorte aussi que tous les gens qui ont été entendus avec leurs mémoires, que ça soit les syndicats, que ça soit les employeurs, ont tous... et j'ai rarement entendu autant de consensus que cela lors d'une étude des mémoires. Alors, je félicite toute l'équipe du ministre, le ministre particulièrement, aussi, pour le travail de consensus comme ça qui a fait en sorte que ça a été, naturellement, d'un plaisir d'écouter ces gens-là.

Alors, Mme la Présidente, pour les employeurs, c'est une valeur ajoutée, comme je l'ai déjà mentionné, pour attirer et fidéliser la main-d'oeuvre de qualité et assurer une retraite de qualité à nos jeunes. Et d'ailleurs, comme le collègue l'a dit, oui, Force Jeunesse ont aussi été, je pense, impressionnés et très articulés lors de leur prise de parole.

Mme la Présidente, d'ailleurs, certaines études affirment que les régimes à prestations déterminées parviennent à verser des rentes de 20 % à 30 % plus élevées qu'un régime de type REER. Et il en est ainsi car un régime à prestations déterminées se distingue par un horizon de placement plus long, une tolérance au risque, aussi, supérieure, une mutualisation du risque de placement et des frais moindres pour l'employé, sans oublier l'avantage marqué découlant de la répartition des risques entre les membres qui participent au régime.

En conclusion, Mme la Présidente, avec le projet de loi n° 57, loi modifiant... sur les régimes complémentaires de retraite principalement quant au financement des régimes de retraite à prestations déterminées, notre gouvernement comprend toute l'importance que revêt la santé financière des régimes de retraite à prestations déterminées pour notre économie et pour notre avenir. Les conséquences sont trop grandes pour qu'on laisse lentement agoniser ceux-ci.

Employés, employeurs, retraités, jeunes, syndicats, conseillers professionnels et gouvernement doivent travailler de concert pour rétablir la santé des régimes à prestations déterminées. C'est pourquoi je recommande à mes collègues d'accepter le principe de ce projet de loi et d'en permettre l'étude article par article en commission parlementaire, il y va de l'intérêt du système de pension du Québec, de la sécurité financière de plusieurs Québécois et Québécoises et la bonne volonté de la santé économique en général. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Jean-Lesage. Alors, y a-t-il d'autres interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 57? Il n'y en a pas.

Mise aux voix

Alors, est-ce que le principe du projet de loi n° 57, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite principalement quant au financement des régimes de retraite à prestations déterminées... est-il adopté?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Maintenant, M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la Commission de l'économie et du travail

M. Sklavounos : Oui, Mme la Présidente. Conformément à l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que ce projet de loi soit déféré à la Commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, très bien. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Adopté. Maintenant, pour la suite des choses, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Oui. Article 6, s'il vous plaît, Mme la Présidente.

Projet de loi n° 59

Adoption du principe

Reprise du débat sur la motion de scission

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, très bien. À l'article 6 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 3 novembre 2015 sur la motion de scission présentée par M. le député de Jonquière dans le cadre du débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.

Lors de l'ajournement des travaux, Mme la députée de Taschereau n'avait pas terminé son intervention, et, avant de lui céder la parole, je vous indique qu'il reste 41 min 43 s au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 min 12 s au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 23 min 30 s au deuxième groupe d'opposition et sept minutes aux députés indépendants.

Alors, sans plus tarder, je vais céder la parole à Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais (suite)

Mme Maltais : Merci, Mme la Présidente. Effectivement, je n'avais pas eu le temps de terminer, la dernière fois, d'expliquer pourquoi je crois que nous devrions voter collectivement pour cette motion de scission. Quelques minutes simplement pour compléter, puisque j'en étais rendue à terminer mon allocution.

J'en étais à un passage où j'expliquais aux membres de l'Assemblée nationale qu'il y a des moments où il faut entendre l'opposition, il faut l'écouter. Il y a des moments où il y a des mains tendues, d'un côté à l'autre de l'Assemblée nationale, qui ne doivent pas se perdre ou, en tout cas, qui ne doivent pas être vues, examinées et soupesées. C'est une main tendue, une main tendue que je montre au gouvernement. Je tends la main au gouvernement.

Le projet de loi, c'est clair maintenant, contient deux principes — l'Assemblée nationale a statué comme ça, la présidence a statué — deux principes, et chacun de ces deux principes peut vivre indépendamment. Un des deux principes, le deuxième, la deuxième partie, contient bien sûr quelques difficultés, mais contient des... va rapidement, à notre avis, faire consensus, et il y a là-dedans des notions importantes qui permettraient à la ministre de la Justice, d'ici à avant Noël probablement, d'avoir un legs à la société. Je pense, entre autres, à la lutte aux mariages forcés, je pense aux ajouts sur le crime d'honneur. Je pense que ce sont des choses qui sont intéressantes.

Maintenant, le problème, c'est que la première partie, ce qu'on veut... sur quoi on veut scinder, il y a énormément de problèmes. Ça a été décrié en commission parlementaire, ça a été ratiboisé. Alors, est-ce qu'on va étudier tout ça en même temps? Mais, si on étudie tout ça en même temps, ces deux principes différents, bien... j'ai eu tout à coup à l'oreille une réplique de l'époque qui disait : On s'engrange pour un deux belles grosses semaines. On s'engrange pour une belle grosse session.

Je n'ai pas peur de la difficulté. Nous n'avons pas peur de la difficulté, au contraire, mais nous voulons avancer rapidement sur certains éléments, sur ce qui devrait être une loi en soi, la deuxième partie, les modifications qui s'intitulent «les modifications législatives pour renforcer la protection des personnes», pour protéger les personnes. Mais il nous faut revoir véritablement ensemble, sérieusement, la première partie, qui a été décriée, qui crée une nouvelle définition dans la Charte des droits, une modification à la Charte des droits et des libertés — je rappelle que le premier ministre plaidait pour qu'on ne touche pas à la Charte des droits et des libertés pour des offenses qui sont déjà balisées par le Code criminel, sanctionnées par le Code criminel — et crée une nouvelle offense, crée un tribunal, crée des amendes, crée une liste noire, enfin... et on touche à la liberté d'expression.

Donc, la proposition, la main tendue que nous faisons, c'est : Acceptez cette motion de scission. Nous pourrons ainsi entreprendre le travail de façon harmonieuse et, je crois, d'une façon plus logique qui nous permettra d'avancer les travaux d'une façon intéressante pour l'Assemblée nationale. Voici notre main tendue, cette motion de scission est une main tendue, Mme la Présidente. Merci.

• (12 h 10) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, Mme la députée de Taschereau. Et, pour la prochaine intervention, je vais céder la parole à Mme la députée de Montarville, qui est aussi la porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de laïcité.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Eh bien, à ce moment-ci des discussions, je vais réitérer, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, que nous sommes contre l'idée de scinder en deux le projet de loi n° 59 et nous voterons contre cette idée. Et je vous explique pourquoi, il y a une logique derrière ça.

Le projet de loi n° 59 s'inscrit dans un vaste plan de lutte à la radicalisation qui a été présenté par le gouvernement. Dans sa deuxième partie, comme le souhaitait l'opposition officielle, on parle de mariage forcé, on parle de crime d'honneur, et c'est effectivement très important, et ce qui est dit là est extrêmement intéressant, pertinent. C'est ce qu'on appelle les vraies affaires ou ce qu'appelleraient les collègues d'en face les vraies affaires. «Mariage forcé», on n'a pas entendu ça souvent dans les lois au Québec. «Crime d'honneur» non plus, on n'a pas entendu ça souvent dans nos lois au Québec, on sait que c'est toute la tristement célèbre affaire Shafia qui nous a ouvert les yeux sur ce qu'étaient les crimes d'honneur, et ça se trouve, ça, dans le projet de loi n° 59.

Mais, pour nous, ce projet de loi est un tout et doit être un tout. Je vous ramène à ce vaste plan pour contrer la radicalisation. Aussi forts soient les mots qui sont identifiés dans cette deuxième partie, «mariage forcé», «crime d'honneur», et j'en passe — ce qui est excellent, là, c'est le temps que le gouvernement s'attaque à ça — aussi forts soient ces mots, aussi déçus sommes-nous du fait qu'on ne retrouve pas les corollaires dans la première partie. Et ce que nous disons, c'est qu'il faut qu'ils s'y trouvent, ces corollaires, dans cette première partie. Là, je m'explique.

Dans la première partie, on parle de lutter contre les discours haineux et les discours incitant à la violence. Soit. Personne n'est pour ça. Cependant, nous spécifions que c'est très, très large et pas assez précis, et ce que nous souhaitons et ce que nous voulons du côté du gouvernement, c'est qu'on soit aussi précis dans la première portion que dans la deuxième et que, les préceptes qui entraînent les mariages forcés, les préceptes qui entraînent les crimes d'honneur, il faut dire les vraies affaires. Ça ne vient pas, là... Ça ne vient pas d'une création de l'esprit, là, ça vient, entre autres, de dérives religieuses, d'intégrisme religieux, de pratiques radicales religieuses, et ces termes-là devraient également se retrouver dans la première partie, parce qu'ils le sont dans la deuxième. Dans la deuxième partie, comprenez-moi bien, Mme la Présidente, on nomme les vraies affaires, mais, dans la deuxième, on ne les nomme pas, et nous disons au contraire : Nommons-les. Ne soyons pas aussi larges que la ministre le fait, mais soyons plus précis. Parce que c'est bien à ça que l'on s'attaque.

Je vous rappelle que le p.l. n° 59 a été déposé pour s'attaquer à la radicalisation de nos jeunes, au fait que des jeunes sont endoctrinés, qu'on leur lave le cerveau, que ces jeunes se convertissent mais qu'ils sont convertis dans un but précis, c'est de les amener jusqu'à l'étape finale qui est, ô horreur! d'aller combattre à l'étranger contre les propres valeurs québécoises et canadiennes, en passant. Et, avant d'en arriver là, bien, il faut lutter contre les propos qui mènent ces jeunes, de un, à se convertir puis, de deux, surtout à se radicaliser, parce que c'est la radicalisation, le problème. Et il faut donc s'attaquer aux propos qui sont livrés par ceux qui lavent le cerveau de ces jeunes, qui peut-être sont plus vulnérables, qui peut-être, oui, sont sans emploi, qui peut-être, oui, sont moins bien intégrés, mais, ces agents de radicalisation qui sont là puis qui profitent de ces circonstances pour radicaliser les jeunes, c'est à ces propos-là qu'il faut s'attaquer, les propos que ces personnes, que ces agents disent, disent, prêchent, répètent, en fait l'endoctrinement. Donc, c'est un tout, et nous aimerions, nous souhaiterions que, du côté du gouvernement, on ait le courage autant dans la première partie, d'en avoir eu autant que pour la deuxième partie, parce que ça va ensemble.

On est ici pour se prononcer sur cette motion de scission. Le président a rendu sa décision. Soit. De son avis, elle est recevable, cette motion. Soit. Cependant, pour ce qui est de la recevabilité de la motion, c'est aux législateurs de travailler ensemble pour voir quels sont ou les amendements, ou les arrangements, ou les modalités qui seront pris en considération pour faire avancer le projet de loi. Alors, à cet égard, nous, ce que nous disons, c'est : De grâce, gouvernement, soyez aussi courageux que vous l'avez été dans la deuxième portion puis nommez les vraies affaires dans la première également. Et attaquons-nous au bon discours, ce discours de radicalisation, dans la première également et on va éviter les dérapages, on va répondre aussi... et dérapages, comprenez-moi bien, dans la mesure où tous les intervenants qui sont venus nous rencontrer nous ont dit que c'est trop large, que l'interdiction, telle qu'écrite dans le p.l. n° 59, porte trop grandement atteinte à la liberté d'expression. Et ça, il ne faut pas le faire. Il ne faut pas le faire, et c'est la raison pour laquelle nous devons être précis.

Donc, pour ces raisons, pour ce souci de cohérence, parce qu'il y a ce souci de cohérence, nous sommes contre cette motion et nous voterons contre. Cependant, nous souhaitons et nous attendons ardemment de voir quelles seront les modifications qui seront apportées, les amendements qui seront apportés, puisqu'on sait que le premier ministre a lui-même demandé à la ministre de la Justice d'apporter des modifications. Il a même laissé entendre que toute la notion des discours haineux pourrait être évacuée. Alors là, je ne sais pas où on s'en va. Donc, j'ai hâte de voir avec quoi on pourra travailler, mais il faut effectivement apporter d'importantes modifications à ce projet de loi. N'oublions pas que, l'objectif visé, nous le partageons tous, la lutte à la radicalisation des jeunes, c'est extrêmement important. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, Mme la députée de Montarville. Et, pour la suite de ce débat, je vais céder la parole à M. le député de Vanier-Les Rivières.

M. Patrick Huot

M. Huot : Merci beaucoup, Mme la Présidente. C'est à mon tour de m'adresser à vous sur cette question-là dans le cadre de l'adoption de principe du projet de loi n° 59, la Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.

Et là on est devant une proposition de l'opposition officielle de scinder... d'une motion de scission pour scinder le projet de loi en deux principes. Donc, il y a eu des plaidoyers qui ont été faits. Ça a été retenu, ça a été valide, ça ne veut pas dire qu'on est tous d'accord avec ça. Nous, nous serons contre cette proposition du Parti québécois.

Et je veux tenter d'expliquer un petit peu, même si je n'ai pas participé... Vous savez, avec mes fonctions de whip adjoint, je suis un petit peu moins souvent en commission parlementaire, mon rôle est essentiellement ici. Je fais quelques remplacements, mais ça ne veut pas dire qu'on ne suit pas les travaux qui ont lieu en commission parlementaire, et celui-là particulièrement, qui nous a interpellés, tous. Donc, on a suivi ça. Et j'ai malheureusement manqué le plaidoyer de la députée de Taschereau hier pour expliquer sa motion de scission, mais j'ai bien entendu son plaidoyer au moment de l'adoption de principe. Elle a fait une présentation, elle a fait son heure complète, et je suis même allé la voir après pour lui dire qu'elle avait fait un bon travail et qu'on n'est pas obligés d'être d'accord. Mais elle avait fait un bon travail, un bon plaidoyer, beaucoup... c'était très préparé, très argumenté. Et je le dis publiquement, je ne suis pas gêné, mais ça ne veut pas dire que je suis d'accord nécessairement avec elle.

Donc, nous, ce qu'on veut dire dans ce projet de loi là, à l'image de ce qui vient d'être dit par la députée de Montarville, c'est un tout. Il a été présenté, en juin dernier, un plan d'action : plan d'action gouvernemental 2015-2018 La radicalisation au Québec : agir, prévenir, détecter et vivre ensemble. Ça a été présenté à la suite, donc, des événements qu'on connaît, Mme la Présidente. Ce qu'on voulait faire un peu... C'est ensemble qu'on doit faire face à ceux et celles qui menacent notre sécurité, nos droits et libertés et la démocratie au Québec. Et donc, on l'a dit dans le titre, on voit quatre axes principaux : agir, prévenir, détecter et vivre ensemble. Et le défi dans tout ça, c'est de savoir conjuguer notre identité d'accueil forte au Québec et une diversité croissante qui nous arrive au Québec, qui est nécessaire et qui est bénéfique. Donc, le plan d'action, ça vise la sécurité de la population et le mieux-vivre ensemble, Mme la Présidente.

Donc, ce qu'on veut faire, c'est renforcer nos interventions pour qu'on puisse se doter de nouveaux moyens pour assurer la protection des personnes, c'est sanctionner la diffusion de propos haineux ou incitant à la violence. On veut élever au rang de droits fondamentaux la protection individuelle contre les discours haineux ou incitant à la violence en l'incluant dans la Charte des droits et libertés de la personne. Donc, il y a une série de mesures qui sont proposées afin de prévenir et de faire cesser la diffusion de discours haineux et de sanctionner les auteurs. Ça, c'est en termes de discours haineux.

Il y a plusieurs choses qui sont dans le projet de loi aussi. Il y a des choses en matière de protection de la personne, donc lutter contre le mariage forcé, prévenir les crimes basés sur une conception de l'honneur, les crimes d'honneur, implanter un outil de protection immédiate pour les personnes dont la sécurité pourrait être menacée, mieux protéger les élèves dans les établissements d'enseignement, etc.

• (12 h 20) •

Il y a des choses qui ont été dites beaucoup sur la liberté d'expression. Là, on le démontre. Tout le monde peut s'exprimer là-dessus. Il y a eu des consultations. Évidemment, il y a eu des consultations qui ont été faites sur le projet de loi, plusieurs groupes qui se sont fait entendre. Et là ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'on n'est pas... Pour ceux qui nous écoutent, entre autres, là, ce qu'il faut bien comprendre : on n'est pas en train d'adopter le projet de loi, là, on n'est pas à l'adoption finale du projet de loi. Pour bien comprendre le processus démocratique... le processus législatif plutôt, pour adopter un projet de loi, là on est à l'adoption de principe. Il y a eu des consultations, comme j'ai mentionné, on propose... Voici un projet de loi qui est proposé, on entend... il y a plusieurs personnes qui ont des choses à dire, plusieurs groupes, plusieurs individus, plusieurs regroupements qui ont des choses à dire, ils sont venus le dire. Il y a des notes qui sont prises. Je serais curieux... il y a peut-être des statistiques là-dessus, là, mais je serais curieux de savoir... Un projet de loi qui a été présenté comme ça, qui a eu des consultations, qu'on a fait une étude détaillée et qui est arrivé adopté tel quel qu'il avait été proposé au départ, il ne doit pas y en avoir des tonnes, Mme la Présidente.

Donc là, ce qui a été fait, une proposition... Il y a eu des commentaires, et la députée de Taschereau en avait même parlé, avait fait un lien beaucoup entre radicalisation et utilisation de la violence, elle disait : On n'est pas d'accord avec la solution. Là, je résume très rapidement, elle avait fait une intervention assez longue là-dessus. Et la réponse de la ministre à ça avait été qu'elle avait dit : J'entends donc proposer des améliorations au projet de loi au moment de la reprise de l'étude, donc en étude détaillée.

Et, je répète, aujourd'hui on n'est pas à l'adoption finale ni à l'étude détaillée du projet de loi, mais bien à l'adoption de principe. Et, dans le cadre de l'adoption de principe, il y a une motion de l'opposition, donc un débat restreint à l'intérieur de l'adoption de principe, pour séparer, hein... — ce qu'ils veulent faire, on n'est pas d'accord pour le faire — mais après ça on revient même à l'adoption de principe, ils auront encore l'occasion, toutes les... tout le monde a l'occasion de parler au moment de l'adoption de principe, pour ensuite l'envoyer en commission parlementaire en étude détaillée, ce qu'on appelle étude article par article. Et là, encore une fois, on peut proposer toutes sortes d'amendements et de modifications. Et la ministre a dit qu'elle arriverait avec des amendements au moment de la reprise de l'étude des travaux. Et, au moment que les oppositions verront ces amendements-là, ils pourront les commenter, ils pourront en débattre et ils pourront en proposer d'autres, améliorer, bonifier. C'est ça, le principe, c'est ça que... c'est comme ça qu'on fonctionne dans notre Parlement, et ça fonctionne bien. On arrive régulièrement avec des consensus dans l'adoption de nos lois.

Donc, c'est ce qu'on dit qui va être fait, Mme la Présidente. Donc, je pense que c'est essentiel de le rapporter, de dire qu'on n'est pas... ce n'est pas parce qu'on adopte le principe aujourd'hui que la loi s'adopte de même, là, il va y avoir d'autres modifications, d'autres propositions qui vont être faites.

Je sais que ce qui a accroché beaucoup — et, dans le discours de la députée de Taschereau aussi, on l'a entendu — c'est la question de discours haineux, entre autres. Et ça, le premier ministre avait été assez clair, il avait dit... je pense que ça avait été rapporté beaucoup dans le cadre de notre caucus présessionnnel qu'on avait eu un petit peu avant que la session commence, qui disait que «le but, ce n'est pas de réduire la liberté d'expression au Québec, mais d'en indiquer la limite, qui, à [son] avis — c'est le premier ministre qui disait ça — requiert le consensus et va recueillir [les] consensus des citoyens». Il dit : «On peut dire des bêtises. On peut dire toutes sortes de choses, mais on ne peut pas appeler à la violence.» Il y a une nuance qui est là, donc, le projet de loi, on a une limite, il faut préciser la démarcation entre l'acceptable et l'inacceptable. Ce qu'on dit : On doit être assez explicites et définis.

Donc, il y a trois conditions, et la ministre en a parlé en commission parlementaire. On parle de trois conditions qui permettent de définir ce qu'on entend par discours haineux, des conditions établies par la Cour suprême, Mme la Présidente. Donc, on a le critère de la personne raisonnable qui estimerait que des propos exposent un groupe ciblé à la haine ou à des gestes violents. Deuxièmement, on a des propos qui sont tenus ou qui sont diffusés publiquement. Le projet de loi ne vise pas les conversations privées — c'est important de le préciser — ne vise pas les conversations privées. Il ne touche pas non plus aux médias qui rapportent des faits dans leur devoir d'information. Donc, si on rapporte des propos violents, on ne touche pas les médias qui ont rapporté ce qui peut être dit par d'autres personnes. Et, troisièmement, par «le groupe de personnes visées», on entend celles ayant une caractéristique qui est commune, qui est identifiée à la charte québécoise des droits et libertés de la personne, soit la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil, l'âge, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la condition sociale ou le handicap.

Donc, ce qu'on veut faire, Mme la Présidente, c'est d'agir sans porter atteinte, bien sûr, à la liberté d'expression. Mais le respect de ce droit fondamental, il ne doit pas servir à cautionner la libre circulation de propos haineux ou incitant à la violence dans l'espace public. C'est donc de la responsabilité de l'État de se porter garant du respect d'un juste équilibre entre la liberté d'expression des uns et la limite à ne pas franchir pour que des propos soient qualifiés par les autres de haineux ou incitant à la violence. Donc, c'est ce qu'on veut faire, c'est ce qui va continuer à être débattre... on va continuer à débattre de cette question-là au moment de l'étude détaillée, avec des nouvelles propositions, des bonifications, des propositions d'amendement, et ce que le Parti québécois comme la Coalition avenir Québec, les députés indépendants pourront faire aussi.

Donc, je répète qu'on est contre la motion de scission parce que le projet de loi n° 59, c'est un tout qui découle du plan d'action dont tout le monde parle. Donc, de scinder le projet ou de retarder son adoption, on retarde les travaux. Et on a besoin de ça, c'est les suites du plan d'action, comme je vous mentionnais. Donc, nous, ce qu'on veut, c'est de faire avancer le dossier. On veut que ça continue à aller rondement. Ça ne se réglera pas en deux heures de commission parlementaire. On a plusieurs heures de travaux, on en est conscients, à faire, mais on veut avancer.

Puis je veux rappeler aussi que, le PQ, récemment encore, sur la question de discours haineux et de liberté d'expression, c'étaient eux qui... Il y a eu question des blogueurs, des rappeurs qui voulaient venir aussi... qui voulaient venir au Québec. Dans leurs discours... On voulait les empêcher de venir diffuser leurs discours haineux ou incitant à la violence. Entre autres, il y avait de la violence envers les femmes qui était dans ces discours-là. Donc, on nous avait demandé d'agir là-dessus. Donc, nous, ce qu'on dit, c'est qu'on veut adopter des moyens pour empêcher ces personnes de diffuser leurs discours. Mais il y a un certain manque de cohérence, parce qu'on nous empêche de vouloir... d'aller de l'avant avec cette adoption-là.

Puis, je rappelle la députée d'Hochelaga qui avait déclaré... entre autres, un blogueur qui était venu, qui... et, à la suite des propos d'un blogueur qui voulait venir ici, elle a dit : «[C'est] le devoir du gouvernement de lancer un message pour indiquer que les propos haineux faisant la promotion de la violence envers les femmes étaient inacceptables...» Donc, nous, ce qu'on veut, c'est aller de l'avant avec ça. Donc, on est d'accord que c'est inacceptable. Donc, on veut protéger les personnes et les groupes de personnes les plus vulnérables notamment contre les discours haineux, les discours incitant à la violence, et, pour ça, bien, il faut faire certaines modifications législatives.

Donc, avec le plan d'action qu'on a proposé, on a agi pour tous les Québécois. Ça fait partie d'un plan d'ensemble. Nous voulons dire non aux discours haineux et ceux incitant à la violence. On veut protéger les mineurs contre les mariages forcés. On veut protéger les personnes vulnérables en leur donnant la possibilité d'obtenir des ordonnances de protection. Et nous voulons nous assurer, en terminant, Mme la Présidente, que, sur le territoire du Québec, nous continuions de vivre dans un monde où le respect des différences fait notre marque de commerce et qu'il se fasse sans violence et sans haine. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le député de Vanier-Les Rivières. Et maintenant je vais céder la parole à Mme la députée de Gouin et je vous indique que vous disposez d'un temps de parole de sept minutes.

Mme Françoise David

Mme David (Gouin) : Merci, Mme la Présidente. Alors, étant donné que nous discutons, pour l'instant, essentiellement de la motion de scission, je veux annoncer, au nom de ma formation politique, que nous allons voter en faveur de cette motion et je veux expliquer pourquoi. Je vais aussi apporter, évidemment, chacun et chacune ici l'a fait, un certain nombre de considérations sur l'ensemble de l'oeuvre, c'est-à-dire du projet de loi n° 59.

Très rapidement, je pense que c'est une bonne idée de scinder ce projet de loi. Le lien entre les deux parties du projet de loi, dès le point de départ, m'est apparu extrêmement ténu, vraiment ténu. En fait, on ne le voit pas très bien. Et, pour cette raison, ne serait-ce que pour cette raison, je pense qu'il vaut mieux discuter des deux questions indépendamment l'une de l'autre, la première question étant : Nous faut-il au Québec un outil législatif supplémentaire pour contrer les discours haineux?, la deuxième question étant : Avons-nous besoin d'outils supplémentaires au Québec pour aider particulièrement, je dirais, des jeunes, jeunes femmes, jeunes hommes, soit à contrer des tentatives de radicalisation ou soit, dans le cas de jeunes filles, à échapper à ce que dans le projet de loi on appelle la contrainte excessive, échapper à la perspective d'un mariage forcé, etc.? Et, sur cette deuxième partie, il y aura toutes sortes d'amendements à apporter, toutes sortes de commentaires à faire, mais je sens qu'il y a une espèce de consensus pour dire : Il faut avoir les moyens d'agir dans des situations où des jeunes — et je pense particulièrement aux jeunes filles — sont susceptibles de vivre des problèmes d'inégalité profonde portant atteinte à leur santé, à leur intégrité et même parfois à leur vie. Donc, je pense que c'est difficile, vraiment, intellectuellement, là — j'ai bien cherché — de comprendre le lien qui existe entre les deux parties. Je pense que, vraiment, on aurait des discussions plus intéressantes et plus efficaces si on prenait chacune des parties comme un tout en elles-mêmes.

• (12 h 30) •

Pour ce qui est de la première partie, c'est-à-dire celle portant sur les discours haineux, je pense qu'il va être impossible d'entreprendre cette discussion sans qu'on ait une indication beaucoup plus claire que ce que nous avons en ce moment de la part de la ministre des amendements qu'elle compte apporter à cette partie. Il y a eu beaucoup de critiques qui ont été faites à cette première partie, un certain nombre de critiques que je partage — pas toutes, mais un certain nombre — et j'ai été assez surprise de constater, au début de nos discussions sur le principe du projet de loi n° 59, que la seule indication nouvelle que nous avions de la part de la ministre était à l'effet qu'il y aurait des clarifications de la notion même de discours haineux, ce qui est une chose excellente, mais j'aurais souhaité que ça aille beaucoup plus loin, et je pense que, si on veut entreprendre des débats sur la première partie de 59, il va vraiment falloir qu'on sache où s'en va la ministre.

Premièrement, les objectifs de la première partie devront être clarifiés. Ce projet de loi a été déposé le même jour qu'un plan de lutte à la radicalisation, le même jour que le projet de loi n° 62 sur la neutralité religieuse de l'État, et c'est comme si tout ça s'inscrivait, doit-on comprendre, dans une sorte de plan, mais en fait on est dans des sujets complètement différents. Dans certains États parmi les plus laïques au monde, il peut y avoir montée de discours haineux comme il peut y avoir montée de radicalisation des jeunes. Le lien n'est pas toujours si évident que ça entre la laïcité de l'État, essentielle à mes yeux, et comment contrer la radicalisation de certains jeunes.

De la même façon, on peut avoir un projet de loi fort intéressant, bien documenté, bien expliqué sur la montée des discours haineux, ça n'a pas un grand rapport avec la question de la laïcité, ou, en tout cas, il faut chercher, là. Autrement dit, ce qui a un peu, je pense, confondu bien des gens, c'est qu'on présente tout ça le même jour, avec un plan de lutte à la radicalisation aussi, qui, lui, est présenté à Montréal, pendant que le reste se passe à Québec. Ça n'est pas clair, Mme la Présidente, quels sont les objectifs véritablement poursuivis par le projet de loi n° 59. Moi, je pense que ça, on a besoin de le savoir.

Après, on entre dans : si l'objectif; si l'objectif, et la ministre l'a quand même exprimé l'autre jour, c'est de contrer des manifestations de haine, d'intolérance, des manifestations graves, là, qui portent atteinte à la sécurité des personnes, qui portent... à leur sécurité, je ne veux pas juste dire des questions de vie ou de mort... Quand on parle de sécurité, c'est de se sentir bien, de se sentir en paix, dans un Québec paisible, démocratique, où les opinions s'expriment, mais paisible. S'il y a des gens et si c'est démontré qu'à l'heure actuelle il y a des formes de montée d'intolérance, de xénophobie, de discours haineux — à définir, «discours haineux» — un projet de loi peut être intéressant s'il nous donne des outils efficaces, des outils supplémentaires à ce qu'on a déjà dans le Code criminel. Là où je pense qu'on a besoin d'une démonstration additionnelle, c'est... beaucoup de gens demandent : Mais pourquoi une loi civile au Québec et pourquoi tout ce processus mis en branle avec la Commission des droits de la personne alors qu'on a déjà le Code criminel? La ministre devra répondre à cette question.

De plus, et je termine là-dessus, il y a beaucoup d'irritants dans la première partie du projet de loi n° 59, et des irritants sérieux. La fameuse liste : alors, j'espère un amendement qui va la faire disparaître. Comment on travaille avec les jeunes, dans les écoles, qui ne sont pas majeurs puis qui peuvent déraper à certains moments? Des établissements viennent nous dire : Laissez-nous travailler, on est capables. Est-ce qu'on est capables d'entendre ça? Qu'est-ce que ça veut dire, la sécurité morale des jeunes? Ça n'est pas clair. La contrainte excessive. Est-ce qu'on donnera à la Commission des droits de la personne des moyens d'agir?

Bref, beaucoup de questions actuellement sans réponse et, pour l'instant, comme la question, c'est la motion sur la scission, j'annonce que nous allons voter pour, réservant tout le reste des débats pour l'ensemble de l'oeuvre.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci beaucoup, Mme la députée de Gouin. Et, toujours dans le cadre du débat restreint sur cette motion de scission du député de Jonquière, je vais céder la parole à M. le député de Rosemont.

M. Jean-François Lisée

M. Lisée : Merci, Mme la Présidente. D'abord, j'aurais une question pour vous. Est-ce qu'à votre avis il y a d'autres intervenants d'autres partis?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je pense qu'à ce point-ci je vais vous demander d'intervenir, puis on verra après la répartition du temps s'il reste du temps des autres formations politiques. Alors, la parole est à vous, M. le député.

M. Lisée : Très bien. Merci, Mme la Présidente.

Donc, la présidence a jugé recevable la demande de la députée de Taschereau, leader adjointe du gouvernement de l'opposition officielle, de scinder. Alors, pourquoi c'est important de scinder? Parce qu'il y a deux parties qui sont très distinctes, donc, la présidence l'a reconnu : une partie qui va directement sur les questions des discours haineux et de la liberté d'expression et qui a suscité une controverse considérable depuis le dépôt du projet de loi et une autre partie sur les mariages forcés, sur les crimes dits d'honneur et sur la sécurité morale des étudiants, qui soulève des questions, mais, enfin, qui est moins... moins mise à mal et dont la pertinence est davantage reconnue par la plupart des intervenants. Et donc de scinder ce projet, évidemment, c'est que nous, de l'opposition officielle, nous aimerions que le projet qui porte sur les mariages forcés et les autres aspects soit suffisamment amélioré pour qu'on puisse y consentir, mais, sur la première partie, on ne voit vraiment pas, à l'heure actuelle, comment on pourrait y consentir.

Alors, sur des questions comme celles-là, Mme la Présidente, c'est important que l'Assemblée nationale parle de la façon la plus forte possible. Alors, c'est dans le but d'avoir une législation qui aurait l'appui de la majorité et de l'opposition officielle que nous offrons au gouvernement de scinder en deux son projet, de façon à ce qu'une partie du projet puisse avoir un assentiment plus large. Je pense que c'est dans un esprit constructif. Sinon, dans les dispositions que nous avons en ce moment, nous serons contraints de voter contre le projet qui serait non scindé.

Alors, pourquoi est-ce que la première partie sur les discours haineux est si difficile? Pourquoi est-ce que... Ça part d'une bonne intention, bien sûr. Et le collègue, tout à l'heure, disait : Bon, bien, on n'aime pas ça que des gens viennent faire des prêches, des discours qui sont discriminatoires, qui sont dérangeants, qui remettent en cause plusieurs de nos valeurs, hein, c'est d'ailleurs une partie de l'argumentation de la CAQ, mais en même temps il y a la question de la liberté d'expression. Alors, où tracer la ligne?

Moi, je n'ai pas vu de texte plus éclairant là-dessus que celui que nous a déposé Me Julius Grey, bien connu au Québec comme étant le défenseur des libertés d'expression, le défenseur des accommodements raisonnables, le défenseur d'énormément de causes qui parfois sont sujettes à controverse et qui était quelqu'un qui était contre notre proposition de charte des valeurs, et Me Julie Latour, ancienne bâtonnière de Montréal, qui, elle, était favorable à la charte des valeurs. Ils se sont mis ensemble. Ils disent : Bien, nous, là, qui étions des deux côtés d'un débat important sur l'identité et les valeurs québécoises, on est ensemble pour dire que ce projet de loi ne devrait pas exister.

Et pourquoi disent-ils cela? Je vais les citer longuement, parce que je ne pense pas qu'on puisse faire mieux que ce qu'ils ont indiqué. Alors, je les cite : «Nous estimons que le projet de loi n° 59 générerait des entraves majeures et injustifiées à la liberté d'expression de tous les citoyens du Québec et à la liberté académique. Loin de favoriser le vivre-ensemble et la cohésion sociale, nous croyons que les dispositions proposées risqueraient de créer un climat social de suspicion, aux effets délétères.

«En cette époque d'austérité économique étatique, où d'importants programmes sociaux sont supprimés ou significativement réduits, l'idée que des deniers publics soient investis pour que la commission des droits de la personne et de la jeunesse se dote d'une brigade d'effectifs pour recevoir des dénonciations anonymes, avant même la supposée diffusion d'un discours, pour créer un "comité des dénonciations" et tenir une liste à jour sur son site Internet des coupables qui auraient fait l'objet d'une décision à leur encontre, nous apparaît totalement inconciliable avec les assises d'une société libre et démocratique et nous heurte profondément.» Alors, les mots sont forts, les mots sont forts, mais ils s'appuient sur la proposition.

Ils continuent : «Nous sommes également très inquiets de constater les atteintes potentielles à la liberté académique qui y sont instaurées avec l'avènement d'un pouvoir unilatéral et non balisé pour le ministre de l'Éducation d'"enquêter — c'est ce que dit la loi, hein, le projet — sur tout comportement pouvant raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique ou morale des élèves".» Fin de citation. «Alors que nous célébrons avec une fierté légitime les 50 ans de la Révolution tranquille, verrons-nous ressurgir l'index et la censure dans nos établissements scolaires afin de protéger une notion aussi floue et tendancieuse que celle de la "sécurité morale" des élèves?

• (12 h 40) •

«Nous sommes d'avis qu'il n'est pas souhaitable ni autrement requis, aux plans politique et juridique, d'introduire la prohibition de tenir ou diffuser un discours haineux ou incitant à la violence, pour l'un des motifs visés à l'article 10 de la charte, en tant que principe juridique fondamental au sein de la constitution matérielle du Québec. Cet enchâssement proposé ne répond à aucune nécessité juridique et n'est aucunement étayé au plan factuel.»

Et là ils introduisent une notion très importante — c'est comme si on était dans une autre zone temporelle que le reste du Canada — sur le débat sur les discours haineux. Alors, ils signalent : «Alors que le législateur fédéral a abrogé en juin 2013 l'article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, relié aux discours haineux, [...]nous estimons que le projet de loi n° 59 est présenté à contretemps, dans un contexte où de telles dispositions, et la façon dont les institutions canadiennes des droits de la personne traitent les plaintes anti-haine, sont fortement remises en question à travers le pays.»

Alors, ce qu'il nous dit, c'est que l'État actuel de la législation fédérale et la façon dont les commissions des droits de la personne, dans chacune des provinces, traitent la question du discours haineux par rapport à la liberté d'expression, est en redéfinition. Il y a des problèmes avec la façon dont on détaille les discours haineux par rapport à... il n'y a pas de problème sur les discours qui incitent à la violence ou qui appellent à la violence où, là, le consensus est total. Ils disent : Bon, on est en train de se reposer la question : Est-ce qu'on est allés trop loin? Alors, ils disent : En ce moment, on est en train d'aller dans le sens inverse de la discussion canadienne.

Vous voulez intervenir, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Je vous remercie, M. le député. Je vais demander aux membres de cette Assemblée, si vous avez des discussions à avoir, peut-être de les avoir à l'extérieur, puisque la seule personne qui a la parole en ce moment, c'est M. le député de Rosemont, puis on aimerait l'entendre. Alors, merci. Merci.

D'ailleurs, je voudrais indiquer, pendant que je suis debout, qu'il vous reste un temps de parole d'à peu près 10 minutes.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui. Merci.

M. Lisée : Merci, Mme la Présidente. Je sais que certains de mes commentaires suscitent le débat, et c'est sain, le débat. J'admets la liberté d'expression, mais chacun son tour, chacun son tour.

Alors donc, je citais ce document très éclairant de Me Grey et Me Latour, d'abord sur la liberté d'expression : «La liberté d'expression est une source essentielle pour irriguer la démocratie. Chèrement acquise à travers l'histoire, elle peut être définie comme la "liberté mère", car elle incarne la faculté pour chacun de formuler une idée et de s'exprimer librement, ce qui distingue l'être humain.»

Citation : «La liberté d'expression, qui inclut la liberté de s'exprimer, de publier, d'informer, de manifester, de débattre, est absolument fondamentale dans toute société prétendant protéger les droits de l'homme. Sans liberté d'expression, il ne peut y avoir de liberté d'opinion. L'une et l'autre font partie des libertés de la pensée.

«Paradoxalement, la liberté d'expression est à la fois la plus célébrée et la plus honnie des libertés fondamentales. Alors qu'on ne lui connaît aucun opposant au plan conceptuel, voilà qu'elle doit constamment essuyer le feu nourri des critiques et des tentatives de l'éradiquer au quotidien. La situation semble toujours différente dans les cas qui soulèvent les passions.

«Dans l'affaire R. c. Guignard — en 2002 — [...] le juge Louis LeBel écrivait ce qui suit : "Notre cour attache une importance particulière à la liberté d'expression. Depuis l'entrée en vigueur de la charte — canadienne des droits — elle a souligné à maintes reprises l'importance sociétale de la liberté d'expression et sa position privilégiée dans le droit constitutionnel canadien. [Cette liberté] protège non seulement les opinions acceptées, mais aussi celles qui contestent et parfois dérangent"». C'est ça, l'idée. Les banalités n'ont pas besoin d'être défendues. C'est lorsqu'on dérange que la liberté d'expression prend tout son sens.

«Dans l'affaire Montréal[...] c. Cabaret Sex Appeal...» Hein, toutes ces questions de pornographie et d'érotisme qui nous ont occupés pendant les années 70, 80, ça a été des questions liées à la liberté d'expression. Vous me direz : Expression corporelle, mais expression quand même. Alors, dans cette affaire, «le juge Jean-Louis Baudouin s'inscrivait en faux contre la rectitude politique — déjà, en 1994 — et exprimait le fait, à l'instar de la juge [...] McLachlin dans l'affaire [...] précitée, que ce ne sont pas les déclarations consensuelles ou doucereuses qui nécessitent la protection de la charte, mais bien celles qui sont impopulaires et controversées — alors, je cite le juge Baudouin :

«"Une société libre et démocratique comme la nôtre doit nécessairement faire preuve d'un haut degré de tolérance pour l'expression de pensées, d'opinions, d'attitudes ou d'actions qui, non seulement ne font pas l'unanimité ou ne rallient pas les vues de la majorité des citoyens, mais encore peuvent être dérangeantes, choquantes ou même blessantes pour certaines personnes ou pour certains groupes — certains groupes. La liberté d'expression ne doit pas être couchée dans le lit de Procuste du ΄political correctness΄. Ce n'est que dans l'hypothèse d'abus clairs et donc de dangers pour le caractère libre et démocratique de la société, qu'au nom de la protection de certaines valeurs fondamentales, alors non négociables, on peut imposer l'intervention légitime de la loi."»

Et c'est là toute la question : Quel est ce danger? À partir de quel moment on dit : Le danger est tellement grand que nous allons faire une limite raisonnable à la liberté d'expression? Et c'est là où est le débat en ce moment, parce qu'il y a eu tout ce débat sur des discours haineux.

Par exemple, au Canada, on a décidé, pendant un certain temps, qu'il était illégal de dire que l'Holocauste n'a jamais eu lieu. C'était illégal. On ne pouvait pas le dire publiquement. Bien, évidemment, l'Holocauste a déjà eu lieu. Évidemment, c'est une bêtise de dire qu'il n'a pas eu lieu. Mais pourquoi est-ce que ça devrait être illégal de le dire? Pourquoi? Parce que c'est une grande question. Dans certains pays comme la France, c'est illégal de le dire. Bien, il y a des gens qui disent : Bien non! La meilleure façon de faire front contre des idées absurdes, c'est de leur opposer des idées non absurdes dans le débat public. Et qu'il y a un genre de contresens à l'interdiction de propos choquants, c'est qu'on en fait le fruit défendu. Et le fruit défendu est toujours plus tentant que le fruit qui est en distribution libre. Mais là on peut dire : Ce fruit est pourri. Il y en a d'autres qui sont meilleurs.

Alors, c'est un peu la discussion, donc, qui est en cours en ce moment parmi des juristes canadiens, de dire : Bien, écoutez, il faut bien tracer la ligne entre ce qui devrait être interdit et permis, et cette ligne-là... Justement, dans le rapport du juriste Richard Moon de 2013, qui a conduit à ce que la législation fédérale soit relaxée sur certaines de ces dispositions, il disait très clairement qu'il faut laisser au Code criminel la responsabilité de s'attaquer à des propos qui — et c'est en anglais — «advocates, justifies or threatens violence», c'est-à-dire qui fait la promotion, qui justifie ou qui menace la violence. Alors, dès qu'on s'approche de la violence, donc, il y a un danger qui est réel, et là on peut intervenir pour interdire ou sanctionner le propos qui non seulement est désagréable, discriminatoire et haineux, mais qui est à l'orée, à l'aube de la violence elle-même.

Alors, les juristes, sachant que ce débat a cours et sachant que la Commission des droits de la personne et de la jeunesse du Québec est bien au courant de l'état de ce débat, sont très surpris que la commission recommande au gouvernement et que le gouvernement reprenne à son compte un déploiement législatif qui excède largement ce qui existe en ce moment ailleurs au Canada sur l'encadrement du discours haineux et qui va à contresens du débat canadien sur le discours haineux. Alors, ce sont des raisons qui motivent... nous, de l'opposition officielle, notre volonté de scinder les deux pour faire en sorte, nous l'espérons, que cette initiative mal avisée ne se traduise pas par une législation.

Mais ce qui est intéressant, c'est que les juristes se disent : Mais d'où vient la nécessité? Comment l'idée est venue à la Commission des droits de la personne, et à la ministre de la Justice, et au gouvernement de proposer ça? Alors, la commission répond en disant que... en décembre 2014, donc, proposait d'ajouter cette disposition en affirmant — et là on cite la commission : «...la disposition proposée ne vise aucunement à limiter la liberté d'expression, ni à empêcher l'expression de quelques critiques que ce soit.» Alors, pourquoi nier l'évidence?

Plus loin, au sein de cette même lettre, la commission ne cite qu'un seul exemple passé où elle n'a pas pu agir avec ses droits actuels et qui pourrait justifier de lui en donner de nouveaux. La commission dit : «Par exemple, au milieu des années 90, elle n'a pas eu la capacité de traiter la plainte d'une personne dénonçant les gestes haineux de membres de groupes néonazis.» Une fois. Pour le reste, elle ne s'appuie que sur des exemples hypothétiques.

Où est donc l'objectif urgent et réel requérant de légiférer? S'il y avait, dans le cas de cette plainte dont on ne connaît pas les détails, un danger pour la personne, c'est le 9-1-1 qu'il fallait appeler, le 9-1-1. Ce n'est pas la Commission des droits de la personne. Si la personne se sentait intimidée par un groupe néonazi, il faut agir immédiatement.

Alors, les juristes Grey et Latour disent : «En définitive, on ne sait pas contre quel soi-disant péril les dispositions du projet de loi n° 59 veulent nous protéger, ce qui est en soi inquiétant quant aux assises de la législation qui risque de faire boomerang.»

• (12 h 50) •

Alors, on le sait, à quoi ça voulait s'attaquer. Ça voulait s'attaquer au processus de radicalisation en cours dans la société québécoise comme dans toutes les autres sociétés mondiales en ce moment qui fait en sorte que de jeunes Québécois, de jeunes Montréalais, en l'espace de quelques mois, deviennent des djihadistes. C'est ça, le problème. Alors, ce n'est pas un problème de discours haineux, c'est un problème de continuum, d'embrigadement, d'aliénation, de radicalisation et ensuite de passage à l'acte. Alors, de toute évidence, ces propositions-là ne satisfont pas l'objectif que nous avons de traiter correctement cette radicalisation-là, elles créent plus de problèmes. Et en fait un autre de leurs arguments, c'est de dire : Combien de plaintes anonymes aurons-nous sur le discours haineux, sur le blasphème? Et nous avons eu des imams qui sont venus nous dire : Bien, nous, on est d'accord, parce qu'il y a des gens qui blasphèment, et donc on va se mettre à déposer des plaintes contre le blasphème. Mais ce n'est pas ça, l'idée, là. L'idée, c'est de dire justement aux jeunes Québécois : La liberté d'expression, elle est plus importante que ce que des leaders religieux peuvent vous en dire, alors que là on ouvre en fait le champ pour que des leaders religieux se mettent à se plaindre qu'il y a des gens qui font des blasphèmes.

Alors, c'est pourquoi je plaide pour la scission, pour faire en sorte d'éviter au gouvernement de devoir avoir l'opposition de l'opposition officielle sur l'ensemble du projet de loi. Il y a une partie du projet de loi qu'on peut sauver. Celui-là, il n'est pas sauvable, il devrait être retiré. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Merci, M. le député de Rosemont. Alors, y a-t-il d'autres interventions sur ce débat restreint? M. le député de Rousseau, il n'y a plus de temps imparti.

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : C'est-à-dire qu'on n'a pas encore...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Oui. Juste pour éclairer un petit peu, je peux vous dire, Mme la Présidente, que nous allons avoir une intervenante, mais elle ne pourra pas être disponible pour tout de suite. Alors, nous réservons le droit d'appeler l'intervenante cet après-midi, quand le débat va continuer.

Cependant, vous savez bien, Mme la Présidente, la CAQ n'aura pas d'autre intervenant. Alors, je vous invite, si nécessaire, à répartir le temps de la Coalition avenir Québec, qui nous a annoncé qu'ils n'auront pas d'autre intervenant.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci, M. le leader adjoint. Alors, est-ce que c'est le cas? Oui, c'est le cas.

Alors, il reste quelques minutes avant la suspension de ce débat restreint, je ne sais pas si vous voulez débuter votre intervention immédiatement ou peut-être attendre... Écoutez, il reste six minutes, c'est comme vous voulez. Oui? Alors, je vous cède la parole, M. le député de Rousseau.

Mme Maltais : ...vous poser une question?

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui, allez-y.

Mme Maltais : On voudrait connaître quel est le temps disponible puisqu'il n'y a pas d'intervenant.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Oui. Il reste 8 min 40 s.

Mme Maltais : Avec le temps de la...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Du temps de la CAQ qui a été réparti. Alors, M. le député de Rousseau dispose en ce moment...

Mme Maltais : Huit minutes. Et de l'autre côté?

M. Sklavounos : ...un autre intervenant, comme j'ai indiqué à Mme la présidente, mais cet après-midi, pour la continuation.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, pour ce matin, on peut poursuivre avec l'intervention de M. le député de Rousseau.

M. Nicolas Marceau

M. Marceau : Bien, écoutez, Mme la Présidente, ça me fait plaisir d'intervenir sur cette motion de scission qui a été déposée par le député de Jonquière, si je ne m'abuse, motion tout à fait appropriée dans le contexte puisque le projet de loi n° 59, tel que présentement rédigé, comporte deux parties bien distinctes, ce qui a été d'ailleurs reconnu par la présidence. Et, tel que l'a été dit par mes collègues, les deux parties ne sont pas d'égale qualité. La première partie portant sur le discours haineux et les discours incitant à la violence est une partie qui, à notre avis, pose problème, avec laquelle nous sommes profondément inconfortables, alors que la deuxième partie, elle, du projet de loi, qui, elle, porte sur différentes mesures, différentes modifications de manière à protéger les personnes, cette deuxième partie, bien qu'elle ne soit pas, à ce jour, parfaite, nous la croyons améliorable, en tout cas suffisamment améliorable pour qu'un jour nous puissions envisager de voter en faveur, alors ce qui fait, Mme la Présidente, dans ce contexte, que nous croyons qu'il est tout à fait judicieux... qu'il serait judicieux de scinder le projet de loi.

Dans sa décision de recevoir la motion de scission du député de Jonquière, la présidence nous rappelait qu'un certain nombre de critères ou de principes guide la présidence dans l'établissement de la recevabilité d'une motion de cette nature. Et, tout d'abord, il fallait qu'il y ait plus que deux principes... plus qu'un principe, pardon, et il fallait que les projets de loi résultant de la scission soient à la fois cohérents, complets et qu'ils puissent vivre indépendamment l'un de l'autre.

Et la présidence, dans sa décision, a été extrêmement claire à ce sujet. Après avoir passé en revue chacun de ces critères-là, la présidence nous dit : Effectivement, la motion du député de Jonquière est recevable parce qu'effectivement les deux projets de loi qui résulteraient de la scission seraient des projets de loi cohérents, autosuffisants, complets, pouvant vivre indépendamment l'un de l'autre.

Or, Mme la Présidente, à partir du moment où tel est le cas, à partir du moment où tel est le cas et dans la perspective où on doit avoir ici des débats les plus intelligents possible, les plus sereins possible, des débats le plus ordonnés possible, moi, j'invite le gouvernement, j'invite les députés des banquettes gouvernementales à appuyer la motion de scission. De cela résultera un débat plus éclairé, un débat plus intelligent et surtout, comme le mentionnait, juste avant moi, mon collègue de Rosemont, ça permettra aux députés de l'opposition officielle, peut-être à d'autres députés de d'autres formations politiques... ça nous permettra d'appuyer la partie du projet de loi qui porte sur la protection des personnes et sur laquelle, moi, je pense, effectivement, nous devons parler d'une voix forte, d'une voix unanime si c'est possible. Alors, j'invite le gouvernement à y réfléchir sérieusement. Je sais que ce n'est pas la pratique habituelle que de scinder des projets de loi pour un gouvernement, mais, en même temps, l'importance du sujet fait en sorte qu'on doit faire exception.

J'aimerais aussi rappeler, Mme la Présidente — puis j'ouvre une légère parenthèse, mais je pense que c'est important — j'aimerais rappeler qu'on a assisté à une certaine dérive ces dernières années. Il y a eu, évidemment, le projet de loi petit mammouth, dont vous vous rappellerez, le projet de loi n° 28, qui était en fait une dérive importante, inspiré des pratiques législatives du gouvernement conservateur de M. Harper. De telles pratiques législatives ne sont pas désirables, je pense que vous en conviendrez avec moi. On a intérêt à avoir des débats éclairés sur chacun des aspects des projets de loi. Et de regrouper, à l'intérieur d'un même projet de loi, des principes différents, des dispositions qui portent sur des principes différents, ça n'est pas souhaitable.

Alors, on a eu la dérive ici avec le projet de loi n° 28. Bien sûr, ici, l'ampleur du projet de loi n'est pas la même, je suis prêt à en convenir. Bien sûr, dans le cas du projet de loi n° 59, on parle d'un projet de loi de taille raisonnable; il n'en demeure pas moins qu'on mélange, qu'on combine, qu'on joint des principes qui sont différents. Et surtout il n'y a pas, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, de confort, de notre côté, quant à la première partie, dont on croit qu'il n'est pas possible de l'améliorer, on pense que ça doit être mis au rebut et puis que le gouvernement doit refaire ses devoirs sur cette première partie.

Je peux aller sur le fond, si vous le voulez, parce que je vois que le temps passe et je... enfin, je n'aurai pas beaucoup de temps pour aller sur le fond, mais je reviendrais peut-être plus tard. Tout simplement vous annoncer puis vous redire les inconforts qu'on a quant à la première partie du projet de loi qui porte sur les discours haineux. Mon collègue de Rosemont rappelait la difficulté qu'il y a à tracer la ligne, à établir ce qu'est un discours haineux puis ce qui n'en est pas. C'est un concept, évidemment, qui a évolué à travers le temps et puis, Mme la Présidente, je ne vous apprendrai rien en vous disant qu'il va continuer à évoluer. Les normes sociales, le caractère acceptable de certains propos, ça change à travers le temps, et, d'une certaine façon, c'est tout à fait normal. Mais on ne peut pas créer un tribunal des idées, un tribunal du bon goût sans avoir établi au préalable, au moins pour aujourd'hui, sans avoir établi au préalable ce qui est un discours haineux, ce qui est de bon goût, ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas. Présentement, le projet de loi est tout à fait inadéquat à cet égard.

Il y a aussi la question de l'opportunité d'aller de l'avant avec cette partie I du projet de loi n° 59, qui pose problème puisqu'on se demande encore à quoi ça va servir que de créer une nouvelle infraction pénale alors qu'il y a déjà...

Excusez-moi, Mme la Présidente.

• (13 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, M. le député, compte tenu de l'heure, je dois interrompre le présent débat. Alors, j'imagine que vous n'avez pas terminé votre intervention.

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Un instant, là. C'est que M. le député de Rousseau disposait d'un temps de parole de 8 min 40 s, nous en sommes à 6 min 24 s. On nous demande de poursuivre le débat encore deux minutes. Alors, oui, c'est accepté? Vous pouvez poursuivre, M. le député.

M. Marceau : Merci aux collègues. Écoutez, de toute façon, ce ne sera pas... Écoutez, je vais simplement rappeler les raisons pour lesquelles nous sommes inconfortables quant à la première partie du projet de loi n° 59. Et, sur le fond des choses, c'est la raison pour laquelle on veut scinder.

Je rappelais aussi, donc, qu'on a encore... enfin, quant à moi, en tout cas, je n'ai pas bien compris les raisons pour lesquelles on veut créer une infraction pénale alors qu'il existe déjà une infraction criminelle qui est interprétée par la cour, enfin, qui est du ressort de la Cour supérieure. La Cour supérieure, à ce jour, a été capable de faire le travail, alors on se demande, encore une fois, les raisons pour lesquelles de l'autre côté on a envisagé la création de cette infraction pénale, qui est essentiellement calquée sur une infraction criminelle existante.

Il y a aussi la question de la liste, là. J'entendais tout à l'heure... J'ai entendu mes collègues. Je crois que certainement, du côté des oppositions, ça pose certainement un problème. Mme la Présidente, pour empêcher les gens de tenir des discours haineux, on voudrait que la population puisse haïr des personnes dont les noms apparaîtraient sur une liste, c'est un peu ça, là, qui est l'objet de cette liste. Je veux dire, quant à moi, j'ai l'impression qu'on retourne à la loi du Far West. Je suis très, très inconfortable avec une telle initiative et je m'explique très, très mal qu'on ait pu envisager ça de l'autre côté. Cela étant, je ne comprends pas les motivations, peut-être qu'on arriverait à me l'expliquer, mais à ce jour je suis très, très inconfortable.

Alors, Mme la Présidente, pour moi, ce serait impensable de pouvoir voter pour un projet de loi contenant ces dispositions-là, et donc je pense que, du côté du gouvernement, encore une fois, de manière à faire en sorte que l'opposition officielle puisse certainement appuyer, dans la mesure où on apportera les changements adéquats, la deuxième partie du projet de loi, j'invite le gouvernement à accepter la scission du projet de loi, je crois que c'est à l'avantage de tous. Quant à la première partie, de toute évidence, ni dans la société civile ni ici, au Parlement, où c'est important d'avoir un appui important des parlementaires, il n'y a d'appui pour cette partie I du projet de loi, alors je crois que le gouvernement a intérêt à revoir cette partie.

Alors, Mme la Présidente, merci pour votre écoute.

La Vice-Présidente (Mme Gaudreault) : Alors, merci beaucoup, M. le député de Rousseau.

Alors, compte tenu de l'heure et afin de permettre, cet après-midi, le débat sur une affaire inscrite par les députés de l'opposition, le présent débat sur la motion de scission présentée dans le cadre de l'adoption du principe du projet de loi n° 59 est ajourné, et je vais maintenant... suspendu puisqu'on va probablement pouvoir poursuivre cet après-midi après le vote.

Alors, je vais suspendre les travaux, pour le moment, jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 3)

(Reprise à 15 h 5)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, bon après-midi. Venez prendre place, chers collègues.

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement
que la nomination du Commissaire à la lutte contre la
corruption soit approuvée par les deux tiers de ses membres

Et, comme c'est prévu à l'article 43 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, M. le député de Matane-Matapédia présente la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement que la nomination du Commissaire à la lutte contre la corruption soit approuvée par les deux tiers de ses membres.»

Je vous informe que, comme d'habitude, là, il faut répartir le temps, parce que c'est une motion limitée dans le temps. Donc, 10 minutes sont réservées comme d'habitude, 51 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 30 min 30 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 21 minutes au deuxième groupe d'opposition, puis sept minutes sont allouées aux députés indépendants, sous réserve de deux, max, par personne et la députée d'Arthabaska. Dans le cadre du temps non utilisé, vous savez ce qui se passe, on verra ça tantôt.

Alors, je cède immédiatement la parole à M. le député de Matane pour la présentation de sa motion. M. le député de Matane, à vous.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Non, je viens de la lire. Oui.

M. Sklavounos : Avec votre permission, comme je ne voudrais pas interrompre mon collègue qui prendra la parole, est-ce que vous pourriez vérifier le quorum? Il me semble qu'on n'est pas en situation.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Vous avez raison. Je savais en commençant qu'on ne l'a pas...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Juste une minute. Et on a toujours quorum s'il n'est pas soulevé, sérieusement, parce que... Mais là vous venez de vérifier le quorum, et je sais... Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, 10, 11. Il en manque un, à ma connaissance, parce que c'est 12 ou 13, là...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, c'est ça, il en manque un, on est 12. Alors, qu'on appelle les députés, parce qu'on n'a pas quorum.

 ( 15 h 6   15 h 7)

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, oui, un instant, on commence, mais on a quorum. Effectivement, si j'avais eu... Je n'ai pas eu le temps de prendre connaissance, là, depuis qu'on a perdu un collègue... Le quorum est 12. Alors, on avait quorum, mais ce n'est pas grave, je ne le savais pas. Ça fait que le quorum est 12, j'en informe cette Assemblée.

Alors, M. le député de Matane-Matapédia, à vous la parole pour votre intervention. À vous.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Merci, M. le Président. Cet après-midi, un débat important pour la démocratie, pour nos institutions, pour leur indépendance.

Lundi dernier, on a eu l'occasion d'accueillir, à la Commission des institutions, le commissaire de la lutte à la criminalité, l'Unité permanente anticorruption, l'UPAC, et on doit ça, entre autres, au député de Chomedey qui a un vif intérêt sur ces questions, qui nous a permis d'accueillir Robert Lafrenière. Ce n'était pas prématuré comme rencontre. C'est la première fois qu'on le rencontre depuis 2011 pour lui poser des questions, et on en a plusieurs.

D'abord, il faut savoir que la lutte à la corruption, ça a toujours été un cheval de bataille important pour nous. On a demandé la commission d'enquête sur le crime organisé, sur la construction. On l'a demandée plusieurs fois en cette Chambre. Une des réponses du gouvernement, ça a été la création de l'UPAC. Alors, on a nommé un policier de carrière, M. Robert Lafrenière, ex-sous-ministre de Robert Dutil, qui a été nommé pour un mandat de cinq ans, et ce mandat, M. le Président, qui a commencé en 2011 se termine en 2016.

Alors, il est toujours bon de pouvoir faire un bilan puis pouvoir se questionner sur les meilleures pratiques possible dans une démocratie, et c'est pour ça qu'on arrive aujourd'hui avec une proposition à l'effet que, cette importante institution, soit celle, là, de l'Unité permanente anticorruption, son commissaire puisse être nommé dorénavant par les deux tiers de l'Assemblée nationale, deux tiers des députés, comme c'est le cas pour d'autres institutions, comme le Directeur général des élections, comme le Vérificateur général. Ça nous apparaît important de faire cette proposition, d'autant plus qu'on a du temps d'ici le mois de mars pour pouvoir l'appliquer. Alors, c'est la proposition qu'on fait à nos collègues parlementaires et notamment au gouvernement du Québec.

• (15 h 10) •

Présentement, c'est le ou la titulaire du ministère de la Sécurité publique qui décide, suite à des discussions avec un comité, de choisir le commissaire ou de le renouveler, parce qu'on a appris lundi que le commissaire souhaitait poursuivre son travail. Et on a appris également qu'il n'est pas en faveur de notre proposition. Lui, il préfère être nommé par le titulaire du poste de ministre de la Sécurité publique. Et ce qui est d'autant plus particulier, c'est qu'il demande des pouvoirs additionnels, M. le Président. Il demande à ce que l'UPAC devienne la police des polices, qu'elle soit distincte de la Sûreté du Québec, qu'elle puisse faire des enquêtes, être la seule organisation pour faire des enquêtes en matière de corruption, entre autres, de malversations, en haut de la Sûreté du Québec, en haut du SPVM. Jamais, si d'aventure le gouvernement décide de lui accorder ce qu'il demande, jamais une personnalité n'aura obtenu autant de pouvoirs dans le domaine de la police dans l'histoire du Québec. Moi, j'avais évoqué hier que, dans le domaine de la santé, jamais un ministre n'avait eu autant de pouvoirs, c'est maintenant acquis avec le projet de loi n° 20 qui semble se destiner vers une adoption de la part du gouvernement, mais, avec la police, ça serait incroyable. On a appris que ce n'était pas tellement avancé mais que l'intention demeurait.

Alors, pourquoi qu'on demande ça? Parce qu'on considère que l'enquêteur des enquêteurs devrait être totalement indépendant, puis devrait avoir les coudées franches, et ne devrait pas avoir quelconque influence ou apparence d'influence. Or, la situation actuelle, c'est : comme il relève de la ou du ministre de la Sécurité publique, il y a un peu un malaise. Il peut arriver qu'il ait à enquêter sur le gouvernement en place. M. le Président, c'est le cas. C'est le cas et c'est connu. Il y a des enquêtes qui visent des personnes reliées au gouvernement libéral. C'est connu. L'opération Lierre, l'opération Joug — j'imagine que je n'apprends peut-être pas grand-chose aux gens du gouvernement — bien, c'est l'UPAC qui a enquêté là-dessus, le financement des partis politiques, entre autres. Parce qu'on sait que la commission Charbonneau ne peut pas tout faire. L'UPAC a un rôle aussi.

Alors, il est assez particulier que le commissaire Lafrenière, qui veut être renouvelé en mars, il nous l'a dit, doive obtenir cette autorisation de la part des membres du Conseil des ministres, qui appartiennent au gouvernement libéral, qui appartiennent au Parti libéral et où il y a des enquêtes. Vous ne trouvez pas que c'est une situation assez particulière? Cette indépendance, elle doit être totale. Et, même si le commissaire nous dit qu'avec une indépendance face à la SQ il serait davantage indépendant, ça ne change pas le processus de nomination.

M. le Président, il est vrai que nous avons des inquiétudes, des inquiétudes quant à la proximité qui peut survenir entre le travail de l'UPAC et entre le gouvernement libéral. Je vais prendre deux exemples. J'ai vu, moi, il y a quelques semaines, le commissaire de l'UPAC, M. Lafrenière, côte à côte avec le président du Conseil du trésor pour une conférence portant sur les enquêtes dans le domaine informatique. Donc, le commissaire de l'UPAC se retrouve avec un membre du gouvernement qui aura à décider de son renouvellement ou pas. Mais ce n'était pas la première fois, il l'a fait également avec le ministère des Transports.

Puis, il nous dit : Bien, j'étais heureux parce qu'il venait appuyer mes efforts. Bien, je lui dis : Vous auriez pu faire votre conférence de presse, et après les ministres auraient pu faire un communiqué ou un point de presse pour dire : Bien, ça va dans le bon sens, on est heureux. Alors, j'ai posé la question : Pourquoi, c'est arrivé, ça? Ah! bien, ils me l'ont demandé. Donc, le président du Conseil du trésor a demandé au commissaire de l'UPAC de venir s'asseoir avec lui, d'établir, là, que sa crédibilité était associée à celle du gouvernement puis qu'on allait de l'avant. Bien, moi, j'ai dit au commissaire de l'UPAC que c'était une erreur, que ça ne se faisait pas.

Moi, je n'ai pas souvenir que le député de Verchères, alors ministre, ait fait un point de presse en compagnie du commissaire de l'UPAC. Et, comme le commissaire était nommé pour cinq ans, donc de 2011 à 2016, on a travaillé avec lui, ce qui ne nous empêche pas de faire un certain nombre d'observations pour s'assurer que cette institution est parfaitement indépendante.

Ce n'est pas la première fois qu'on demande ça. On l'a demandé pour la Direction de la Sûreté du Québec pour les mêmes raisons. Et, même si la ministre s'était engagée à avoir un processus plus transparent qui faisait en sorte de faire appel aux parlementaires, moi, je n'ai jamais été questionné là-dessus. Finalement, ça a été un comité et ça a été M. Martin Prud'homme qui a été choisi. L'enjeu dans le cas de M. Prud'homme, ce n'est pas sa personnalité. On a travaillé avec lui puis on a été satisfaits de son travail. Moi, je me souviens, comme ministre responsable de la région, de m'être rendu avec le ministre à L'Isle-Verte, puis on a travaillé avec lui, puis on l'a félicité. Ça a été quelqu'un d'exceptionnel à la Sûreté du Québec. Même chose pour Lac-Mégantic. Ces crises-là, on a réussi à bien les gérer de notre côté notamment grâce à une belle collaboration. Et je pense que Martin Prud'homme est une de ces raisons-là pour laquelle on a bien fait. Alors, Martin Prud'homme, on a travaillé avec lui.

Le commissaire de l'UPAC, il a un travail vraiment essentiel dans une démocratie. On l'a toujours dit, du côté du gouvernement, qu'il n'y avait pas d'impunité, que toute personne qui aurait commis des gestes qu'elle ne devrait pas commettre n'est pas au-dessus des lois et pourrait être accusée, voire condamnée. Bien, alors, c'est arrivé dans bien des cas. C'est arrivé dans le cas de fonctionnaires. Il y a même un fonctionnaire, dans le domaine informatique, qui a été arrêté trois fois, M. le Président. C'est arrivé dans le domaine municipal, dans plusieurs municipalités du Québec, où il y a eu des réussites. Il y a eu un échec : Saint-Constant. Mais, la plupart des cas, il y a eu des accusations qui ont été portées, et puis il y a eu des condamnations, et puis il y a un travail qui a été fait partout sur le territoire du Québec, on a tous entendu parler de municipalités qui ont été visitées.

Mais le public a des attentes importantes. Il y a des révélations sous serment qui ont été faites à la commission Charbonneau concernant le financement des partis politiques. Et il est permis de croire que ça touche des membres de la classe politique provinciale, l'Assemblée nationale, les formations politiques représentées à l'Assemblée nationale. Vous voyez bien que, comme dans le cas de la commission d'enquête sur la construction, on n'a rien à se reprocher, on est prêts à faire l'exercice pour tout le monde, on est prêts à aller de l'avant.

Alors, les gens qui ne sont pas... qui n'ont pas comparu devant la commission Charbonneau — puis on aura le rapport bientôt, après les élections partielles — bien, on se dit : Peut-être que l'UPAC les a rencontrés puis peut-être que ça aurait pu nuire à des enquêtes, donc ils vont peut-être les pogner. Puis Dieu sait que les médias nous ont fait part d'allégations extrêmement graves! Puis les noms sont connus. Il y a des noms de personnes clairement, clairement associés au financement du Parti libéral de par leurs fonctions : directeur général, entre autres, collecteurs de fonds, des gens qui sont très près... Puis ça a été reconnu, y compris par le gouvernement, que, si ces personnes ont mal fait, bien, ils vont être arrêtés.

Bien là, il y a deux ans, jour pour jour, donc lundi, à partir du moment où on a rencontré M. Lafrenière... Je me suis rappelé d'un texte de Brian Myles, qui n'est pas n'importe qui, qui a été président de la fédération des journalistes du Québec et qui a indiqué que les accusations, les recherches, les enquêtes sur le Parti libéral, il semble, ça n'avance pas. Il y a eu des choses quand même importantes. Je vais être factuel — je vais utiliser l'expression du député de Chomedey — il y a eu, à tout le moins, au moins une perquisition au siège social du Parti libéral, sinon deux. Alors, il y a des enquêtes qui se poursuivent.

Dans toute la chaîne, il y a aussi le DPCP. Ça, c'est une autre question, on va l'aborder le 12 novembre, quand ils vont venir nous voir. Parce que l'UPAC pourrait indiquer aussi qu'elle, elle fait son travail, mais, si le bras, disons, juridique ne le fait pas, ce n'est pas de sa faute. Ça, c'est un autre enjeu, que je n'aborderai pas aujourd'hui. Mais, chose certaine, il y a là une belle occasion d'améliorer nos institutions. On le fait régulièrement, on se questionne sur les meilleures pratiques possible comme législateurs, puis là on a une opportunité.

En mars, le commissaire à la lutte à la criminalité, M. Lafrenière, bien, son mandat viendrait à échéance, puis on sait déjà qu'il veut renouveler son mandat. Donc, entre lundi, où il nous annonçait ça, et puis le mois de mars, bien là, le gouvernement va évaluer son travail. Sur quelles bases? Je ne sais pas quels sont les critères, mais il va décider si c'est lui qui devrait être l'enquêteur des enquêteurs.

J'ai confiance que le ministre, le gouvernement vont analyser sérieusement notre proposition. Je suis assez convaincu, pour avoir entendu les collègues de la CAQ, qu'ils vont nous appuyer pour les mêmes raisons. Quant à Québec solidaire, comme le débat de lundi, je ne le sais pas, je ne les vois pas. Mais je suis assez convaincu que c'est susceptible d'améliorer la perception du public quant au fait qu'il n'y aura pas d'impunité. L'avantage d'avoir une proposition qui relève de l'appui des deux tiers de l'Assemblée nationale, comme c'est le cas d'autres institutions — je les rappelle à nouveau, Directeur général des élections, Vérificateur général — c'est que ce n'est pas seulement le gouvernement qui décide de qui enquêtera ou pas sur son gouvernement.

Alors, moi, j'ai proposé ça à M. Lafrenière : Vous n'aimeriez pas, vous, avoir vraiment l'assurance que non seulement votre candidature va plaire au gouvernement en place, qui, lorsqu'il sera réuni à huis clos en Conseil des ministres, décidera sur des critères qui ne sont pas connus... mais qu'également il a la confiance de l'opposition du Parti québécois, de l'opposition de la CAQ, de Québec solidaire? Il m'apparaît que c'est plein de sens, ça a bien du sens.

Je rappelle que les deux points de presse que M. Lafrenière a faits avec le ministre des Transports et le président du Conseil du trésor, bien, ça leur a fait plaisir. Ils ont demandé à M. Lafrenière d'y aller, puis ça a fait une belle clip à la télévision puis des beaux articles dans les journaux. Sauf que ces deux personnes-là vont être autour de la table quand elles vont décider ou non de le renouveler. Je trouve que c'était une imprudence à la fois de l'avoir invité, de la part des ministres ou de leur entourage, mais à la fois, aussi, pour M. Lafrenière, de l'avoir accepté. Ça, c'est particulier. Ça, c'est quelque chose que, dès que c'est arrivé, j'en ai parlé avec des collègues. Alors, c'est suite à l'audition de M. Lafrenière qu'on a réfléchi là-dessus.

• (15 h 20) •

Je veux vous citer Brian Myles à nouveau, qui a réécrit là-dessus dans L'Actualité le 3 novembre dernier. Et je pense que son propos rejoint celui non seulement des analystes judiciaires, de la presse parlementaire, qui est drôlement intéressée à savoir ce que le gouvernement va décider sur la motion. Il dit, Myles : «La situation n'est pas banale. L'UPAC ne traque pas les voleurs de dépanneurs. Elle a le quasi-monopole des enquêtes sur la corruption des titulaires de charges publiques au Québec. Depuis plus de deux ans, l'unité enquête d'ailleurs, sans succès apparent, sur le financement illégal du PLQ.» Brian Myles, 3 novembre. «Il ne suffit pas d'affirmer que l'UPAC est à l'abri des pressions politiques et que ses enquêtes ne souffrent d'aucune ingérence. Les apparences de proximité, auxquelles le public est si sensible, exigent la plus grande prudence.»

Qu'est-ce que ça change pour la suite? À partir du moment où M. Lafrenière, fort de son mandat, est capable de le présenter devant les parlementaires, je suis convaincu qu'on saura faire les choix. Si c'est seulement le gouvernement qui décide, lui qui se retrouve dans une situation — puis il n'y a personne qui va le nier — où il y a des vérifications, des enquêtes qui touchent le financement du Parti libéral, il se place dans une position où il choisit son enquêteur. Moi, je pense qu'il a à gagner à faire appel à la sagesse des parlementaires, qui sont là comme législateurs aussi pour porter des jugements sur l'évaluation, qui vont... des personnes qui sont nommées non pas pour n'importe quoi, là, pour être l'enquêteur en chef de la corruption au Québec. Alors, on compte sur l'appui du gouvernement là-dessus.

Et la question pourrait se poser sur d'autres institutions aussi. C'était une occasion manquée dans le cas de la SQ. On serait peut-être arrivé au même résultat, mais je pense qu'il était imprudent de seulement confier ça au gouvernement. Là, on a une autre occasion puis on a du temps pour le regarder, c'est en mars.

M. Lafrenière nous a dit lundi qu'il était prêt à faire l'exercice chaque année, à venir nous voir. Je trouve que c'est un gain, je trouve ça intéressant. Il nous a appris ça, mais en même temps il dit : C'est une décision du politique. Alors, le politique, c'est notamment le gouvernement, puis, je le rappelle à chaque fois, vous en êtes témoins, le gouvernement est majoritaire, c'est lui qui va décider. Alors, pour les gens qui nous écoutent, la décision qu'ils auront à prendre, le Parti libéral, aujourd'hui, c'est : Est-ce qu'ils sont les seuls à choisir celui qui enquête au Québec sur la corruption et la malversation, y compris sur des allégations sur leur parti, ou ils vont décider d'avoir assez de confiance pour permettre à l'Assemblée nationale de choisir ou de renouveler la personne qui est une des personnes les plus clés au Québec pour s'assurer de l'intégrité de nos institutions et de notre démocratie? C'est ça, le défi qu'on a aujourd'hui, et c'est pour ça qu'on fait une proposition constructive, qui, je l'espère, recevra l'assentiment des parlementaires. Et je suis convaincu que le ministre, qui est sensible à ces enjeux, aura au moins la sagesse de l'étudier comme il faut et de nous faire part des arguments qui, selon lui, militent en faveur ou contre, qui ne reposent pas sur, je dirais, une négation idéologique mais sur une volonté d'améliorer, d'améliorer nos institutions. Alors, on a une chance unique aujourd'hui, elle est offerte au gouvernement, et on compte sur ce dernier pour faire en sorte qu'on ressorte de ce débat, à 17 heures, grandis d'avoir amélioré une institution importante, c'est-à-dire la lutte à la corruption. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de Matane-Matapédia, de votre intervention sur cette motion du mercredi. Je cède maintenant la parole à M. le ministre de la Sécurité publique ainsi que des Affaires municipales et de l'Habitation. M. le ministre, à vous la parole.

M. Pierre Moreau

M. Moreau : Merci, M. le Président. Je suis heureux de prendre la parole sur la motion du mercredi, qui touche un enjeu lié au ministère de la Sécurité publique.

Vous me permettrez sans aucun doute de commencer cette intervention en ayant une pensée pour ma collègue qui présentement est en convalescence et à qui je tiens à souhaiter de façon publique, au nom du gouvernement, et je suis convaincu que sur cette question... au nom de l'ensemble de tous les parlementaires, un prompt et rapide rétablissement. Nous lui souhaitons de pouvoir revenir parmi nous rapidement.

Je commencerai également en remerciant le premier ministre de la confiance qu'il me manifeste en me demandant de prendre la charge et la responsabilité de la sécurité publique, à un moment où curieusement la question est brûlante d'actualité, notamment en raison des événements malheureux que nous avons vécus au cours des derniers jours. Mais il semble que ce soit une caractéristique. Je me souviens d'avoir été assermenté à 4 heures ministre des Transports, et, à 6 heures le lendemain matin, il y avait un camion qui avait eu la mauvaise idée de frapper un viaduc pour fermer l'autoroute 20.

Et il semble que, lorsque j'arrive dans des fonctions, il y a quelque chose qui se passe rapidement. Là, on a cette espèce d'alerte qui a été faite et, je tiens à le dire, pour laquelle la Sûreté du Québec et l'ensemble des corps policiers ont fait un travail... font un travail remarquable pour poursuivre l'enquête et essayer de découvrir qui serait à la base de ces menaces, qui, heureusement, heureusement pour l'instant, ne semblent pas fondées, mais il faut rassurer la population et leur dire à quel point les forces policières sont à pied d'oeuvre pour assurer la sécurité de tous au Québec.

Ce qui nous ramène donc à la question que soulève la motion du mercredi, à savoir la nomination du commissaire de l'UPAC. D'abord, il faut replacer les choses dans leur contexte. Le commissaire de l'UPAC est nommé en vertu d'une loi qui a été adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, qui, à l'époque, était le projet de loi n° 15, la Loi concernant la lutte contre la corruption, qui a été présentée par notre collègue Robert Dutil, qui, à l'époque, était ministre de la Sécurité publique.

Dans sa version de présentation, le projet de loi n° 15 prévoyait, à l'article 5, la nomination du commissaire à l'UPAC. Alors, l'article 5, au dépôt du projet de loi, se lisait ainsi : «Le commissaire est nommé par le gouvernement, qui fixe sa rémunération, ses avantages sociaux et ses autres conditions de travail.

«Le mandat du commissaire est d'une durée fixe, qui ne peut excéder cinq ans. À l'expiration de son mandat, il demeure en fonction jusqu'à ce qu'il ait été nommé de nouveau ou remplacé.»

Et évidemment, bien, comme tous les projets de loi, ce projet de loi là a fait l'objet d'une commission parlementaire, de consultations, d'étude article par article, et, lorsque les parlementaires en sont venus à l'examen de l'article 5 sur la nomination du commissaire, je pense que le député de Verchères, qui était à ce moment-là porte-parole de l'opposition en matière de sécurité publique, celui-ci a proposé... a entamé une discussion avec le ministre Dutil et a fait un certain nombre de propositions qui se sont avérées, lors des remarques finales qui ont été faites lors de l'adoption du projet de loi, comme un compromis qui avait été fait par l'ensemble des parlementaires ayant participé à la commission parlementaire dont il est question.

Alors, le texte final, par rapport au texte déposé, est bien différent. Le texte final de l'article 5 indique : «Le gouvernement nomme un commissaire qui est choisi parmi une liste d'au moins trois personnes qui ont été déclarées aptes à exercer la charge par un comité de sélection formé pour la circonstance. Le commissaire doit notamment satisfaire aux conditions prévues aux paragraphes 1° et 2° du deuxième alinéa de l'article 12.

«Le gouvernement fixe la rémunération du commissaire, ses avantages sociaux et ses autres conditions de travail.

«Le mandat du commissaire est d'une durée fixe, qui ne peut excéder cinq ans — et c'est un point sur lequel je reviendrai. À l'expiration de son mandat, il demeure en fonction jusqu'à ce qu'il ait été nommé de nouveau ou remplacé.»

Et, pour ceux qui suivent nos débats, quelles sont donc les conditions auxquelles on parle et qu'un candidat doit respecter, c'est-à-dire les conditions prévues aux paragraphes 1o et 2o du deuxième alinéa de l'article 12? Bien, on dit : «Les conditions minimales pour être embauché comme membre du personnel du commissaire — donc s'appliquent également à lui — [doivent demeurer] les suivantes:

«1° être de bonnes moeurs;

«2° ne pas avoir été reconnu coupable, en quelque lieu que ce soit, d'une infraction pour un acte ou une omission qui constitue une infraction au Code criminel ou une infraction visée à l'article 183 de ce code créée par l'une des lois qui y sont énumérées, ayant un lien avec l'emploi.

«Les exigences prévues aux paragraphes 1° et 2° du deuxième alinéa s'appliquent également aux membres des équipes de vérification ou d'enquête désignées par le gouvernement.»

Et, en préparation du dossier, je me souviens d'ailleurs d'avoir lu un des commentaires du député de Verchères à l'époque, qui suggérait cette modification dans la procédure de nomination du commissaire à l'UPAC, en disant s'être inspiré de dispositions analogues que l'on retrouve dans d'autres lois du Québec pour la nomination d'autres personnes qui occupent des fonctions non pas similaires, mais des fonctions qui peuvent être associées à celles exercées par le commissaire à l'UPAC.

• (15 h 30) •

Je rappelle aussi que la loi finale, la Loi concernant la lutte contre la corruption, a été présentée, donc, le 11 mai 2011 et qu'elle a été adoptée à l'unanimité des membres de l'Assemblée le 8 juin de la même année, donc le 8 juin 2011, ce qui en fait une loi qui est relativement récente et qui a fait l'objet d'un consensus par l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale.

Qui d'autre a un processus de nomination semblable? Bien, le directeur du Service de police de la ville de Montréal, qui est nommé par le gouvernement après recommandation du conseil municipal, qui, lui, a une procédure interne; le directeur de la Sûreté du Québec, qui est nommé exactement de la même façon.

Alors, qu'est-ce qui explique cette demande — qui n'est pas la première — faite par le député de Matane sur cette question-là? Qu'est-ce qui explique la différence entre les nominations faites au deux tiers des membres de l'Assemblée nationale et les nominations qui sont faites sur la base d'une procédure différente pour des gens qui occupent des fonctions aussi extrêmement importantes? Et qu'est-ce qui assure, je dirais, l'impartialité, la marge de manoeuvre, la sérénité nécessaire, l'indépendance, bref, requise pour exécuter la fonction?

Lorsqu'on regarde les nominations faites par l'Assemblée nationale, on se rend compte qu'on a la Protectrice du citoyen, le Vérificateur général, le Commissaire au lobbyisme, etc., qui sont des fonctions qui ne sont pas des fonctions policières mais qui sont des fonctions d'un contrôle gouvernemental, contrôle de l'activité gouvernementale soit dans l'adjudication des contrats, soit dans les relations des membres du gouvernement avec les tiers, soit encore dans la vérification et le contrôle financier, qui est un des trois rôles joués par les législateurs en cette Chambre, c'est-à-dire contrôler les finances du gouvernement, être des législateurs et assurer une reddition de comptes de la part du gouvernement.

Ici, ce dont on parle, ce n'est pas ça. On ne parle pas d'individus qui ont un lien unique et spécifique ou direct avec l'activité gouvernementale, mais on parle de gens et de fonctions qui s'appliquent à l'ensemble des citoyens du Québec, selon le vocable habituel voulant que personne ne soit au-dessus des lois, les élus en font partie, évidemment, et l'ensemble des activités non seulement du gouvernement, mais des activités de la société sont mesurées selon la conformité par rapport à nos lois. Et les gens dont on parle aujourd'hui... Et notamment le commissaire à l'UPAC a une marge de manoeuvre absolue, totale et nécessaire, d'ailleurs, en fonction de sa loi, pour s'assurer du respect des lois et aussi pour assurer le respect de cette institution et l'apparence d'indépendance de cette institution.

L'Assemblée nationale, en adoptant le projet de loi de façon unanime et en y insérant le processus de nomination que l'on connaît aujourd'hui, a donc posé un jugement sur l'indépendance que l'on veut donner à la fonction. On peut toujours se reposer la question sur ces questions-là. Et l'objet de mon intervention n'est pas de faire grief au député de Matane de soulever le débat. Cependant, l'objet de mon intervention est de dire : Dans sa forme actuelle, sur la base du principe et de la procédure de nomination qui est prévue à la Loi concernant la lutte contre la corruption, on retrouve là les éléments essentiels pour donner au commissaire l'ensemble des qualificatifs nécessaires pour qu'il ait cette indépendance, ce recul, cette sérénité et cette capacité d'interagir et d'exécuter correctement son mandat.

Un des éléments — et je vous ai fait lecture de l'article 5 tel qu'il a été adopté — un de ces éléments-là, c'est : «Le mandat du commissaire est d'une durée fixe, qui ne peut excéder cinq ans.» L'existence d'un mandat à durée fixe fait en sorte qu'il ne peut y avoir à l'égard du commissaire une influence indue d'un tiers — et c'est ce que le principe de la loi sous-tend — d'influence indue qui empêcherait le commissaire, à l'intérieur de son mandat, d'avoir toute la marge de manoeuvre requise pour exécuter les fonctions qu'il a. Et donc on retrouve, dans les éléments de la loi, au-delà de la stricte procédure de nomination, tous les éléments d'indépendance et d'impartialité et toute la latitude que l'on souhaite qu'il ait et qu'il doit avoir pour être capable de rencontrer les obligations et le mandat que lui confère la loi.

Maintenant, j'entendais le député de Matane, au début de son intervention, dire : Oui, mais on a vu le commissaire avec un ministre — je pense, c'était mon collègue le ministre des Transports — puis après ça on l'a vu avec un autre ministre, le président du Conseil du trésor. Écoutez, le fait d'être vu avec le commissaire à l'UPAC et un ministre du gouvernement, assermenté, moi, je pense qu'il faudrait être bien mesquin pour voir dans une rencontre semblable le fait que l'on veuille influencer ou que l'on tente d'influencer le commissaire. Les ministres, d'abord, dans... Mon collègue indique que ces rencontres-là ont été faites en public. Les ministres rencontrent — du gouvernement, quel que soit le gouvernement, quel que soit le parti au pouvoir — régulièrement les gens qui oeuvrent dans l'appareil de l'État.

D'ailleurs, en préparant le dossier, je réalisais que le député de Verchères, alors qu'il était ministre de la Sécurité publique, ne s'est pas gêné pour aller rencontrer le commissaire à l'UPAC. Et je vais vous faire une lecture de l'article du Devoir, un extrait, c'était la journaliste Kathleen Lévesque qui, à ce moment-là, était au Devoir, 18 octobre 2012. Et vous allez voir que le ton de l'article, là, c'est : Le ministre de la Sécurité publique, là, il va brasser le pommier.

Alors : «Le ministre de la Sécurité publique [...] — dont le nom est cité ici et que nous connaissons bien, de l'époque évidemment, qui est le député de Verchères — exige un redressement de l'Unité permanente anticorruption dont le manque de cohésion freine l'action. En entrevue au Devoir, le ministre a servi un avertissement non équivoque, précisant qu'il n'exclut pas d'apporter des changements "jusqu'aux plus hautes sphères" de l'organisme.»

La plus haute sphère de l'organisme, je peux me tromper, mais je pense que c'est le commissaire, dans le cas de l'UPAC. Alors, il dit, là, et c'est entre guillemets, qu'il apporterait des changements, entre guillemets, «jusqu'aux plus hautes sphères de l'organisme». Ça puis une rencontre avec le président du Conseil du trésor ou le ministre des Transports, je pense qu'il y a une différence, à tout le moins, ici, dans le ton, parce que je n'ai pas entendu que la rencontre avec le président du Conseil du trésor avait été assortie de menaces, non plus que la rencontre avec le ministre des Transports.

«"À l'heure où le patronage, le trafic d'influence, la collusion et les magouilles de toutes sortes préoccupent le Québec tout entier — je vais continuer la lecture — l'UPAC ne peut se permettre d'être handicapée par un dysfonctionnement interne", croit le ministre.» Et la citation, ouvrez les guillemets : «"Aucun changement n'est exclu d'emblée — on va peut-être tous les faire sauter. On évalue la situation et nous verrons s'il y a lieu d'apporter des ajustements jusqu'aux plus hautes sphères. Le message est passé" — fin de la citation — a déclaré [le député de Verchères].»

Ça fait que je veux bien, moi, qu'on ait des photographies de monde qui rencontrent du monde qui font partie de l'appareil de l'État, mais je trouve que ça donne un drôle de double standard au discours du député de Matane qui, lui, s'émeut d'une photographie, alors qu'on voit que, lorsqu'ils étaient aux affaires de l'État, ce n'était pas juste une photographie, là, ils descendaient dans le coin puis ils brassaient le pommier jusqu'à la plus haute sphère. Évidemment, sans le nommer, il s'agit bien de M. Lafrenière, qui est le commissaire à l'UPAC.

Alors, si la motion du mercredi sert à protéger l'opposition de sa propre turpitude ou des actions qu'eux-mêmes ont posées alors qu'ils étaient aux affaires de l'État...

Une voix : ...

M. Moreau : J'ai bien écouté le député de Matane, M. le Président, je l'entends encore. Il n'y a pas de difficulté, ça ne me déconcentrera pas, j'ai cette capacité d'entendre le bruit et de continuer dans les actions.

Alors, si l'objectif poursuivi par le député de Matane, c'est de faire en sorte de se protéger de lui-même ou de son propre groupe, bien, moi, je veux le rassurer, le député de Matane : Les lois du Québec sont faites pour résister même au moment où, malheureusement, vous êtes aux affaires de l'État. Et ces éléments-là, c'est quoi? C'est l'indépendance qu'on a voulu donner au commissaire en le nommant pour un mandat fixe à l'intérieur duquel personne ne peut, même quand il y a une menace qui est faite, venir lui brasser le pommier.

Et qu'est-ce qui fait que l'UPAC a continué son travail et qu'est-ce qui fait que l'UPAC fait un bon travail? C'est précisément parce que, quand le commissaire voit rentrer le ministre de la Sécurité publique qui lui dit qu'il va lui brasser le pommier, il est capable de dire au ministre : Merci beaucoup. J'ai entendu ce que vous aviez à dire. Maintenant, la porte est là. Nous, on a du travail à faire. Et c'est ce que...

Une voix : ...

M. Moreau : Là, le député de Verchères... Si le député de Verchères...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Oui. C'est ça. Ça aide...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Non. Mais là, écoutez, c'est toujours la même règle. Il n'y a pas de commentaire lorsque quelqu'un a la parole, parce que ça donne ce qu'on voit, là.

Une voix : ...

• (15 h 40) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Non, là, les... Oui, bien, c'est très rare que, dans une intervention, il n'y a pas d'intentions qui sont prêtées. J'ai rarement vu ça, mais il y a une manière de le faire.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Gendron) : Ah! justement, mais là j'aime ce commentaire-là, «dans la manière de le faire». C'est pour ça que c'est télévisé. Il y a du monde qui entendent ça — parce qu'il y a du monde qui suivent ça — qui porteront un jugement.

Mais on ne peut pas constamment, à chaque phrase, dire : Il y a là une intention. Autant que possible, on demande aux parlementaires qui ont la parole de faire attention aux propos qu'ils tiennent pour éviter ce qui arrive. Ah! il avait une intention, il avait une intention! Il n'y a plus de discours ici, là.

Alors, faites attention, s'il y avait un prêt d'intention. Mais ce n'est pas ça qui a commencé, c'est le commentaire quand on n'a pas la parole. Alors là, vous l'avez, veuillez continuer en faisant attention aux propos que vous tenez pour éviter les intentions.

M. Moreau : Bien sûr. Alors, la longue mise en garde que vous avez faite ici, M. le Président, pourrait se résumer par nos cousins anglophones en disant : «If they can't stand the heat, get out of the kitchen», hein? S'il trouve que c'est trop chaud, ce qu'on dit là, bien, qu'il n'apporte pas ces sujets-là et surtout qu'il ne prétexte pas une motion du mercredi basée sur des photographies qui semblent bien intéressantes, dans l'opinion du député de Matane, à exhiber. Mais, quand on va dans tout l'album photos et qu'on en a une, nous, qui nous dit que Le Devoir... Et il y a eu, là, des entrevues de données, là, par le député de Verchères alors qu'il était responsable du portefeuille de la Sécurité publique. Bien, ça, je trouve drôlement plus parlant, drôlement plus parlant que toutes les photos que le député de Matane pourrait nous sortir de son album.

Ce disant, je l'entendais dire : Tous les observateurs experts estiment que ça doit être changé. Ce n'est pas vrai, ça. Je regrette, ce n'est pas vrai. Et les nominations qui sont faites, lorsqu'elles ont le caractère d'indépendance en raison des circonstances de l'exécution du mandat et de la protection, dans le cas de l'exécution du mandat, valent tout à fait la procédure de nomination, quelle qu'elle puisse être. À partir du moment où, ici, il y a... Et, si M. Lafrenière voulait d'emblée poursuivre son mandat, il devrait se soumettre à la procédure du comité de sélection qui doit être mise en place en vertu des dispositions de l'article 5 tel qu'il a été adopté.

D'ailleurs, dans les observateurs en question, le député de Matane a fait grand état de M. Myles qui serait un expert tout crin en cette matière. Moi, je vais lui en citer un autre, commentateur, qui est Rémy Trudel, hein? Il a été ministre dans un gouvernement péquiste. J'imagine qu'à certaines époques ses conseils étaient pris en haute considération, puisqu'il faisait partie du cabinet. Voici ce qu'il dit sur la nomination du prochain commissaire par l'Assemblée nationale. Lorsqu'on dit : Vous devriez le nommer par l'Assemblée nationale, il dit : «Je suis contre.» Mais il explique aussi pourquoi : «Ça ne doit être soumis à aucun compromis politique.» Puis ça, c'est une phrase intéressante, et on va voir ce que c'est que le compromis politique. «Je préconise qu'en matière délicate il y a un ministre responsable qui doit répondre à toutes les questions et par ailleurs que les commissions parlementaires puissent examiner le mandat.» Commissions parlementaires, on en a, elles examinent le mandat. Le fait est : elles l'ont fait cette semaine. Et le président de la commission s'est assuré que toutes les questions qui étaient correctes pouvaient être posées par tous les partis qui ont participé aux travaux de la commission parlementaire.

Qu'est-ce qu'il entend, Rémy Trudel, lorsqu'il dit : «Ça ne doit être soumis à aucun compromis politique»? C'est parce que les nominations aux deux tiers... Et là je vous le dis à vous, sachant très bien, M. le Président, que vous savez mieux que quiconque ici comment ça fonctionne, puisque vous êtes le doyen de notre Assemblée. Lorsqu'il y a des nominations aux deux tiers, il y a une proposition qui est faite par le premier ministre, et tout ce qu'il y a à faire, c'est que l'opposition dit : Non, moi, je ne suis pas d'accord avec cette proposition-là, selon la répartition des sièges, puis on est dans une paralysie partielle, totale ou absolue, selon l'évolution du dossier.

Dans le cas qui nous occupe, les gens qui doivent occuper ces fonctions-là, qui sont des fonctions hautement spécialisées, doivent répondre à un certain nombre de critères, on l'a vu, en vertu de la loi. Et la raison pour laquelle on soumet ces candidatures à un comité, c'est que le comité est formé d'experts dans les domaines précis dans lesquels le candidat, s'il a la fonction ou s'il réussit à se rendre sur ce qu'on appelle la courte liste... donc, des attributions qui auront fait l'objet de vérifications par des experts.

Alors, dans un contexte comme celui-là, M. le Président, et je sais que j'ai d'autres collègues qui veulent intervenir sur la question et qui ont une connaissance de ces situations-là, je vais conclure ici en disant simplement qu'il n'y a pas, selon le gouvernement, lieu de modifier l'article 5 que nous avons adopté à l'unanimité, l'article 5 de la Loi concernant la lutte contre la corruption, et qu'en conséquence nous allons voter contre la motion présentée par le député de Matane. Je vous remercie de votre attention, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Je vous remercie, M. le ministre de la Sécurité publique. Et, pour la poursuite du débat, je cède maintenant la parole à Mme la députée de Marieville... pas Marieville, voyons! Montarville, oui, oui, de Montarville. À vous la parole, Mme la députée.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy (Montarville) : Merci, M. le Président. Écoutez, effectivement, lundi dernier, nous avons eu le plaisir, pour la première fois depuis sa création, de recevoir M. Lafrenière, le Commissaire à la lutte contre la corruption — ça s'est passé en commission parlementaire — pour examiner ses orientations, ses activités, également sa gestion administrative. Et c'était la première fois qu'il rencontrait les parlementaires, et on a discuté. Il y a eu plusieurs échanges, et le commissaire nous a dit qu'il estime qu'il est à l'abri de l'ingérence politique dans l'exercice de ses fonctions.

Cependant, j'aimerais souligner ici qu'il y a plusieurs personnes, dont les ministres des Transports et de la Sécurité publique, qui avaient déjà émis quelques bémols, et j'aimerais vous ramener dans le temps sur les bémols, à une époque où M. Lafrenière était en poste. Mais, à cette époque-ci, on a eu d'autres sons de cloche.

En septembre 2013, on remonte un petit peu dans le temps, le ministre des Transports, le député de Marguerite-Bourgeoys, alors dans l'opposition, avait réagi à la rencontre impromptue de l'UPAC au domicile de son chef, l'actuel premier ministre. Il avait évoqué le manque d'indépendance de l'UPAC quant aux enquêtes actuelles qui touchent le Parti libéral. Selon lui, il n'y aurait aucun hasard dans le fait que la visite de l'UPAC ait eu lieu la veille du début de la session parlementaire. Et là je vais le citer, les paroles que je dis ici se retrouvent dans les revues de presse auxquelles vous avez accès, nous avons tous accès, donc je cite : «...la cloison qui doit s'ériger entre la police et le pouvoir politique n'est plus étanche», disait-il. Je vous rappelle qu'il s'agissait du député de Marguerite-Bourgeoys de l'époque, en 2013. Et le chef du Parti libéral avait également fait un lapsus révélateur à cette occasion en utilisant l'expression «escouade politique» pour qualifier l'UPAC. On avait bien ri, mais c'était un lapsus.

Autre remarque, remontons dans le temps, en novembre 2014, la ministre de la Sécurité publique soutenait, à juste titre, que «l'étanchéité entre l'UPAC et la SQ est essentielle pour éviter la "contamination" des dossiers. À l'heure actuelle, l'escouade Marteau constitue le bras policier de l'UPAC, mais chacun des enquêteurs est un policier de la SQ. "Il faut que les enquêteurs aient les coudées franches et qu'ils ne soient soumis à aucune influence", [disait] la ministre.»

Cet impératif explique les demandes actuelles du commissaire de doter l'UPAC de son propre corps de police, comme il l'avait proposé, d'ailleurs on s'en souvient tous, lors du dépôt de son mémoire auprès de la commission Charbonneau. En effet, le grand patron de l'UPAC souhaite que l'UPAC puisse constituer un corps policier totalement autonome et indépendant de tout autre service policier. Cette UPAC renforcée, si je peux m'exprimer ainsi, aurait la responsabilité exclusive des enquêtes qu'elle mène, lui permettrait aussi, à M. Lafrenière, d'avoir un accès direct aux banques de renseignements et faciliterait ses échanges avec les corps policiers nationaux et internationaux. C'est ce qu'il nous a dit, d'ailleurs, lundi.

• (15 h 50) •

L'accroissement de l'indépendance de l'UPAC passe peut-être par cette voie, peut-être, peut-être. Mais, selon nous, c'est important de le souligner, cette voie, si on va là, si le gouvernement décide d'aller là et d'en faire un corps policier, eh bien, il faut impérativement que cette voie soit accompagnée d'un rehaussement de son imputabilité et de la reddition de comptes auprès des élus. En d'autres mots, ça prendra un comité pour surveiller ce qui s'y passe, si d'aventure le gouvernement décide d'aller dans cette voie, mais la demande a été faite par M. Lafrenière. Alors, c'est très important que, si ce corps policier est créé, il y ait un organisme de surveillance au-dessus de lui. Ça se passe d'ailleurs au SCRS, ça existe.

Revenons à l'indépendance de l'UPAC. Cette indépendance de l'UPAC, elle doit également et surtout, selon nous, être garantie par la personne, la personne qui prend les décisions et qui choisit quels dossiers feront ou ne feront pas l'objet d'une enquête. Comprenez-moi bien, l'UPAC a fait ses preuves, on le voit. M. Lafrenière a fait un excellent travail depuis sa création, on le voit également. Je ne remets pas du tout son intégrité en cause, bien au contraire, mais il demeure que seul le commissaire de l'UPAC prend la décision d'envoyer un dossier en enquête ou non. Je l'ai questionné là-dessus. Qui, ultimement, décide des cibles des enquêtes? C'est lui. Parfait, c'est clair.

Maintenant, je vous reviens à cette surveillance qu'il faut impérativement. Actuellement, personne ne surveille le surveillant. Vous me suivez? C'est pourquoi il nous apparaît nécessaire que la nomination à ce poste si stratégique se fasse par un vote aux deux tiers des membres de l'Assemblée nationale pour s'assurer de la plus grande probité, la plus grande indépendance et compétence possible de la personne nommée à ce poste. C'est un poste de très, très grands pouvoirs. Le recours à ce processus est d'autant plus important que le gouvernement s'apprête à remettre davantage de pouvoirs entre les mains du commissaire de l'UPAC en dotant son organisme d'un corps de police autonome, comme je vous disais, si d'aventure il le fait, mais la demande a été faite, et on attend de voir où va le gouvernement avec cette demande. Alors, pour nous, c'est une question de transparence, de perception et d'indépendance.

Mais, pour l'instant, c'est le gouvernement qui procède à la nomination du grand patron de l'UPAC, un mécanisme qui n'est clairement pas à l'épreuve, malheureusement pas à l'épreuve des failles ou peut-être de partisanerie et qui mine surtout la confiance de la population envers le processus de nomination. L'échéance du mandat de M. Lafrenière arrive en mars prochain, nous disait-il. Eh bien, cette échéance du renouvellement de son mandat, puisqu'il en demande un nouveau, ça nous donne l'occasion de saisir la balle au bond et de revoir nos façons de faire pour s'assurer que la personne la plus compétente et la plus indépendante soit nommée pour occuper ce poste. Cette personne, ça pourrait bien être M. Lafrenière. Comprenez-moi bien, le présent débat ne porte aucunement sur ses capacités à poursuivre son mandat. Ce n'est pas de ça dont il est question, ni de son bilan à titre de commissaire des dernières années. Mais un gouvernement responsable doit, doit et se doit de nommer ses décideurs publics de façon responsable et transparente, surtout dans le cadre d'une unité permanente qui doit faire la lutte à la corruption et à la collusion.

Rappelons à quel point le poste de commissaire à l'UPAC est névralgique pour la lutte à la corruption. On le sait, c'est un fléau qui gangrène le Québec, là, ça a duré depuis des années. Il a finalement fallu avoir cette commission d'enquête, qui est tout à fait autre chose, mais également un corps particulier dédié pour y faire face. La Loi concernant la lutte contre la corruption prévoit que le commissaire «a compétence pour prévenir et réprimer le crime et les infractions aux lois et d'en rechercher les auteurs». Il assure «la coordination des actions de prévention et de lutte contre la corruption en matière contractuelle dans le secteur public».

«9. Le commissaire a pour fonctions — d'abord, premièrement :

«1° de recevoir, de consigner et d'examiner les dénonciations d'actes répréhensibles, afin de leur donner les suites appropriées;

«2° de diriger ou de coordonner les activités de toute équipe d'enquête formée de membres de son personnel ou désignée par le gouvernement, selon le cas;

«3° de requérir, de sa propre initiative, des enquêtes afin de détecter la commission d'actes répréhensibles;

«4° de formuler des recommandations au président du Conseil du trésor et au ministre des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire sur toute mesure concernant l'adjudication des contrats dont les conditions sont déterminées par une loi dont [il est chargé] de l'application;

«5° [finalement] de formuler des recommandations au ministre ainsi qu'à tout organisme ou toute personne du secteur public sur toute mesure visant à favoriser la prévention et la lutte contre la corruption.»

Alors, ces responsabilités sont trop importantes pour que la personne titulaire de ce poste puisse être nommée par le gouvernement sur une base potentiellement — il y a un risque, il y a un risque — partisane, ce que nous ne souhaitons pas. Le processus de nomination que nous demandons au gouvernement d'adopter vise à assurer que les choix d'enquête ne soient teintés d'aucune partisanerie, notamment lorsqu'il s'agit des partis politiques, et que les enquêtes soient menées sans entraves. L'intérêt public et l'intégrité sont au coeur de cet enjeu.

Cela dit, selon nous, un processus de nomination plus démocratique et transparent ne doit pas seulement s'appliquer au commissaire de l'UPAC mais à tous les emplois supérieurs au sein de l'administration gouvernementale. D'ailleurs, mon collègue le député de Deux-Montagnes a présenté un projet de loi, le projet de loi n° 393, encadrant la nomination de certains titulaires d'emplois supérieurs et uniformisant certains aspects de nomination des juges et décideurs administratifs. Ça se passait en décembre 2014 et ça visait justement à instaurer un tel processus plus transparent, un processus qui, nous en sommes convaincus, rassurerait la population. Il y aurait vraiment transparence et apparence de transparence si nous changions la nomination.

Et je parlais justement de mon collègue de Deux-Montagnes. Malheureusement, le gouvernement n'a pas encore appelé notre projet de loi. Mais j'aimerais céder la parole à mon collègue pour le temps qu'il nous reste pour qu'il puisse parler et élaborer davantage des avantages d'un vote aux deux tiers de l'Assemblée nationale pour nommer ces très, très hauts fonctionnaires qui sont dans des positions d'autorité et d'importance ultime pour le Québec, pour ce Parlement et pour toute la société québécoise qui nous regarde aller. Alors, j'aimerais céder la parole à mon collègue de Deux-Montagnes.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, merci, mais après la rotation, parce qu'il faut faire l'alternance, on ne peut pas céder la... Alors, tout le monde a compris que, oui, votre collègue pourra parler, parce qu'il reste du temps dans votre banque. Alors, je cède maintenant la parole à M. le député de Vimont pour son intervention, en lui indiquant que vous n'êtes pas obligé de le prendre, mais il vous reste 24 minutes.

M. Jean Rousselle

M. Rousselle : Merci, M. le Président. Quand je regarde cette motion-là du mercredi qui parle de processus de nomination par le deux tiers, quelque part, c'est comme... ce n'est pas égal sur le côté de l'opposition officielle, parce qu'effectivement, comme le ministre le mentionnait, en 2011, quand qu'on a bâti, donc, cette unité-là qu'est l'UPAC, c'est même le député de Verchères qui a même proposé un amendement, justement, pour arriver à la manière qu'on fonctionne actuellement, donc qu'on choisisse de la manière qu'on fonctionne, donc le processus de nomination, qu'il soit comme celui-là.

Je ne comprends pas aujourd'hui le pourquoi de le changer. L'objectif de ça... En tout cas, je ne veux pas envoyer des allusions ou des choses qui... bien souvent, ils vont faire de l'autre côté, mais moi, je ne le ferai pas, mais je trouve ça malheureux d'en arriver avec des motions de cette manière-là puis d'amener auprès du public juste une allusion comme quoi que ce n'est pas... que l'UPAC n'est pas transparente, que, l'UPAC, il y a quelque chose qui ne va pas bien là-dedans. Parce que, veux veux pas, les gens qui sont dans le salon, ils vont nous écouter, eux autres, ils vont accrocher sur : Oups! O.K., si l'opposition a amené quelque chose, il y a quelque chose qui ne va pas bien. Puis moi, je ne suis vraiment pas d'accord là-dessus.

Vous savez, c'est un nouveau... L'UPAC, c'est une nouvelle unité, hein? Ça fait juste cinq ans qu'elle existe. Ça fait cinq ans d'existence. Et c'est le gouvernement du Québec qui l'a mise en place, donc le Parti libéral. La mission comme telle, c'est de lutter contre la corruption pour un système public intègre. Tout le monde ici veut avoir ça. Tout le monde, et peu importe le côté, je pense que tout le monde veut avoir ça. C'est un organisme qui est sous la responsabilité d'un commissaire. Oui, M. Lafrenière, c'est le commissaire qui est en charge de ça. C'est lui qui est en charge justement pour... qui s'occupe justement à ramener tous les autres... les professionnels dans le domaine pour qu'ils travaillent ensemble. Parce que l'unité, c'est une combinaison de plusieurs institutions, de plusieurs regroupements. On parle de différents organismes et ministères, mais on parle de la Sûreté du Québec, on parle aussi des corps policiers municipaux, parce que les corps policiers municipaux, ils sont aussi à l'intérieur de ça, là, Revenu Québec, la Régie du bâtiment, Service de police de la ville de Montréal, la Commission de la construction du Québec, et le ministère des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire. Donc, ça touche tout le monde. Tout le monde est responsable là-dedans.

• (16 heures) •

Même, on demande au public, justement, quand qu'il voit quelque chose de pas correct, d'aviser, de dénoncer, parce que ce n'est pas juste l'affaire justement du gouvernement, mais c'est l'affaire de tout le monde.

Et, là-dedans, bien, je pense qu'avec notre responsabilité là-dedans, bien, ça touche tous les gens qui sont, de près ou de loin, dans le système public. Et ça, que ça soit les donneurs de travail, que ça soit les fournisseurs de toutes sortes, ça comprend les employés municipaux, provinciaux, les ministres, les députés, les maires, les conseillers, les commissaires d'école et toutes les compagnies privées. Donc, quand on parle d'une nomination de cette manière-là, nommé par le deux tiers, bien, est-ce qu'on va demander, à ce moment-là, de nommer aux deux tiers les directeurs de police? Est-ce qu'on va demander de nommer aux deux tiers... Vous savez, à un moment donné, on arrête où?

Je pense qu'ici, de la manière qu'ils fonctionnent, les gens qui sont nommés aux deux tiers, c'est des gens désignés et nommés par l'Assemblée nationale, donc des gens qui exercent une charge publique, et puis qui ont une indépendance, et qui sont désignés par... impartialité dans l'exercice de leurs fonctions. Et ça, il y a cinq personnes qui sont désignées. On parle du Commissaire au lobbyisme, le Directeur général des élections, le Protecteur du citoyen, le Vérificateur général ainsi que le Commissaire à l'éthique et la déontologie. Donc, ces gens-là, c'est eux autres qui sont là pour vérifier, voir si, ici, tous les parlementaires, on fait notre travail correctement et dans l'ordre, et les ministères aussi. Mais là on ne parle pas de la même chose, là, là on parle des choses qui, bien souvent, qui sont criminelles.

Donc là, tout à l'heure, on parle de M. Lafrenière, mais DPCP, c'est la même chose. Qui qui le nomme, le DPCP? Je pense, c'est le même système, un peu comme M. Lafrenière. Donc, si on commence à vouloir nommer des gens... Comme M. Lafrenière dit : O.K. Ça va être aux deux tiers. Bien, comme je le mentionnais tantôt, on va arrêter où?

Et cette motion-là, encore une fois, je reviens toujours avec parce que l'objectif des discussions aujourd'hui, c'est sur cette motion-là. Comme je le mentionnais, c'est quelqu'un de l'opposition qui a amené cette proposition-là de la manière qu'on fonctionne, et c'est ça, le... Encore une fois, je reviens toujours avec l'objectif, pourquoi qu'on veut changer ça aujourd'hui? Parce que je pense que, quand on regarde les rendements, la manière de fonctionner du commissaire actuellement, il y a des bons rendements. Oui, la population voudrait toujours avoir, je pense, des arrestations à chaque jour. Et, quand il y a une période donnée qu'il n'y a pas d'arrestations, les gens : Bon, il est arrivé quelque chose. Pas nécessairement évident de faire des enquêtes. Vous savez, des enquêtes, c'est compliqué, puis... Et, comme l'expliquait d'ailleurs M. le commissaire quand on l'a rencontré dernièrement, il mentionnait que, des fois, c'est compliqué, mais ils veulent tellement avoir une bonne preuve à toute épreuve quand ils vont l'amener à la cour, bien, justement, ça prend plus de temps.

Et, si eux ne prennent pas le temps pour le faire correctement, vous pensez... quoi la population va penser? Bon, ils l'ont fait rapidement ou ils ont tourné les coins ronds, puis c'est pour ça, d'ailleurs, qu'ils ont perdu. Bien, moi, je pense qu'ils sont bien mieux de prendre leur temps, de le faire correctement, et les fautifs, bien, qu'on les prenne puis qu'on les condamne à ce moment-là. Parce qu'effectivement les gens veulent avoir, justement, les fautifs... ils veulent que les fautifs paient. Et, je pense, c'est comme je vous mentionnais tantôt, tous les gens ici veulent que ces fautifs-là paient parce que, malheureusement, c'est eux qui mettent un ombrage sur notre travail ici, mais qui mettent aussi un ombrage sur tous les maires et tous les conseillers municipaux dans les municipalités, et puis... Et personne n'est à l'abri de ça, mais vraiment personne à l'abri. Parce que les gens qui pensent qu'eux sont à l'abri, bien souvent, on peut aller creuser, puis, des fois, on peut trouver des choses, hein? Et, bien souvent, comme disait ma grand-mère, il ne faut pas que tu craches en l'air parce que ça peut te retomber dessus, hein? Donc, bien beau que les gens... Comme je leur disais tantôt, les gens, ils pensent toujours que les enquêtes se font rapidement, mais elles ne se font pas si rapidement que ça.

Je reviens encore sur la manière de nomination des directeurs de police dans chaque municipalité. Imaginez-vous s'il faudrait que ça soit nommé aux deux tiers de l'Assemblée dans les municipalités, on n'en finirait plus. Je pense que de la manière qu'on fonctionne, il y a un comité qui se penche, qui prend les trois meilleurs candidats et puis... trois, quatre, mais, en tout cas, ils prennent les meilleurs candidats, et, à ce moment-là, c'est là que c'est choisi. Moi, je pense qu'il ne faut pas en venir à un système qu'à un moment donné la politique embarque là-dedans, puis qu'on commence à faire de la politique ici, là-dedans, par la nomination. Je pense qu'on est mieux de laisser ça à des gens qui connaissent ça, qui vont faire les vérifications, qui vont faire des suggestions, et, de là, bien, le ministre concerné prendra la personne qu'il pense être bonne. Là-dessus, je vais laisser mon collègue, moi aussi... Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, M. le député de Vimont, de votre intervention. Et je suis prêt à entendre le prochain intervenant, et, M. le député de Deux-Montagnes, à vous la parole pour le temps qu'il vous reste, 8 min 50 s pour le deuxième groupe parlementaire. À vous la parole.

M. Benoit Charette

M. Charette : Merci, M. le Président. C'est un plaisir de me retrouver parmi vous cet après-midi. En fait, ma collègue de Montarville a fait une éloquente démonstration un petit peu plus tôt de la nécessité de revoir notre processus de nomination quant aux nominations dites partisanes. Qu'est-ce qu'une nomination partisane, M. le Président? C'est tout simplement une nomination qui est faite par la seule intervention de l'Exécutif sans que le législatif ne soit consulté ou interpellé. Et, à ce niveau, je veux être bien précis, on n'est pas contre cette prérogative qui relève de l'Exécutif, mais, en même temps, il ne faut pas se leurrer, il est grand temps que le législatif aussi puisse avoir un mot à dire parce que, dans les faits — et on n'est pas les seuls à le déplorer — la question des nominations partisanes a fait beaucoup jaser au cours des dernières années, hein, ce n'est pas un sujet qui est nouveau.

Et, la semaine dernière, on avait un débat, à la même heure d'ailleurs, sur la question des primes de départ des députés démissionnaires. Selon moi, c'est sans doute les deux sujets qui ont suscité le plus de réactions dans la population au cours des dernières années, soit, effectivement, les primes de départ et, ultimement, les nominations partisanes. Ce sont deux sujets qui, malheureusement, alimentent un cynisme déjà très ambiant dans la population. Donc, oui, au rôle qui revient à l'Exécutif, mais oui, il serait grandement temps que le législatif ait à intervenir. Et, pour cette raison, on l'a dit, ma collègue l'a mentionné, je le répète d'emblée, on appuiera la motion qui est déposée par l'opposition officielle aujourd'hui.

Cela dit, on a tout de même une base sur la table. Il y a quelque temps, j'ai déposé le projet de loi n° 393, qui visait, justement, à rendre plus transparent le processus de nomination des nominations partisanes. Et notre projet de loi n'est pas sorti de nulle part, en ce sens qu'on s'est basé beaucoup sur la réflexion qui avait été conduite par deux spécialistes des questions qui ont amené le dépôt de deux projets de loi, et je fais référence au rapport Noreau sur les juges administratifs et le rapport Perreault sur les nominations partisanes dans les emplois supérieurs. Donc, le projet de loi que nous avons présenté il y a quelque temps maintenant est déjà largement appuyé par une réflexion qui a été conduite par des experts. Ce qu'il dit essentiellement, c'est que c'est un processus qui se doit, dorénavant, d'être plus transparent.

Tout à l'heure, je faisais référence du cynisme, mais ce cynisme-là n'est pas provoqué uniquement dans la population. Je m'explique. Au sein même de notre fonction publique, de voir constamment de nouvelles nominations qui viennent, en quelque sorte, bouleverser la hiérarchie de nos institutions, ça crée un profond sentiment de démotivation et ça alimente aussi le cynisme dans notre fonction publique, sur laquelle on doit compter, naturellement. Et le projet de loi qu'on déposait, il avait différents volets, on parlait, dans certains cas, de nominations qui devaient être adoptées aux deux tiers, un petit peu comme la motion de l'opposition officielle le propose. Et aussi, pour certaines autres catégories d'emploi, on proposait, ni plus ni moins, de se référer à la CAP, à la Commission de l'administration publique, appuyée par la Commission de la fonction publique, pour la nomination des emplois supérieurs.

• (16 h 10) •

Et, encore là, ce n'est pas un processus qui est né de nulle part ou qui est inventé de notre part, c'est ce qui se produit dans bon nombre de législatures, dans bon nombre de Parlements, que ce soit, dans certains cas, au niveau du Parlement fédéral, mais sinon on le voit régulièrement du côté du Congrès américain. Lorsqu'il y a des nominations qui sont importantes, lorsqu'elles sont proposées par l'Exécutif, le législatif a la possibilité de mesurer un petit peu les motivations du candidat ou de la candidate. Bref, il y a différentes avenues qui sont proposées par le projet de loi.

Et ce projet de loi, on l'a dit d'emblée, il est perfectible. Et je l'admets d'emblée, lorsqu'on l'a rédigé et lorsqu'on l'a présenté il y a quelques mois maintenant, on n'incluait pas dans la liste des emplois ou des nominations celui du directeur de l'UPAC pour un poste nécessitant l'approbation des deux tiers de la Chambre, ça ne faisait pas partie du projet de loi initial. Mais, dès le moment du dépôt, on a eu l'occasion de réitérer notre volonté de collaborer avec les autres formations politiques présentes à l'Assemblée nationale pour, justement, le parfaire.

Et il y a un engagement tout de même important qui a été pris auprès du leader du gouvernement et devant cette Assemblée, lors d'une prochaine motion du mercredi on va appeler ce projet de loi, c'est-à-dire on va demander le vote. Et le gouvernement s'est engagé à appuyer la démarche, et j'espère qu'on ne se limitera pas uniquement à la période que nous garantit la motion du mercredi pour étudier le projet de loi, qui est perfectible. On pourrait ajouter une fonction supplémentaire très certainement, mais il grand temps qu'on ait l'occasion de se pencher sur ces questions. Et, naturellement, j'écoutais les échanges un petit peu plus tôt, j'ai écouté l'intervention du député de Matane, celle de mon collègue de Vimont également qui s'interrogeaient un petit peu sur le pourquoi, aujourd'hui, de l'étude de cette motion.

Naturellement, il y a eu la comparution la semaine dernière du responsable de l'UPAC, on comprend le contexte. Mais ce que j'aime interroger de mon côté, c'est que les deux rapports dont je vous faisais mention tout à l'heure, les rapports Noreau et Perreault, ont été déposés lors de la précédente législature, sous la gouverne, donc, du gouvernement précédent. Donc, il y avait possibilité aussi d'agir plus tôt. Ce ne sont pas des rapports qui viennent d'être déposés, ce n'est pas une situation qui est nouvelle. Donc, sans prêter d'intentions — parce que j'ai bien entendu votre remarque tout à l'heure, M. le Président — je me questionne sur l'intérêt aujourd'hui avoué de l'opposition officielle sur ces questions parce qu'il y avait possibilité d'agir.

        Mais peu importe — et je ne veux pas non plus attribuer de torts à qui que ce soit — l'important, c'est de se saisir d'une situation. On a un commissaire à l'UPAC dont la fonction arrive à échéance dans les prochains mois, donc on a une très belle occasion, à travers cette fin de mandat, de revoir un petit peu le processus de nomination. Et autant ce que disait ma collègue que tous les autres collègues, on ne remet pas en question la compétence de M. Lafrenière, mais, au moment où son contrat sera renouvellé, on aimerait, effectivement, au niveau de l'Assemblée nationale, se prononcer pour qu'ultimement il ait non seulement l'appui du Parti libéral, donc du parti au pouvoir, mais ultimement, si tel est le cas, l'appui de l'ensemble des formations politiques pour qu'on ait un poste qui soit légitimé par un appui réel de l'Assemblée nationale.

Donc, on est à quelques semaines de la fin d'un mandat, je nous invite tous, naturellement, à appuyer — et je le dis sans réserve — la motion qui est aujourd'hui présentée par l'opposition officielle, donc par le Parti québécois. Et, oui, j'ai entendu quelques propos de collègues du gouvernement, mais j'ai en souvenir également... mémoire, plutôt, ce qu'a dit le leader du gouvernement il n'y a pas si longtemps, lorsqu'on a réitéré notre intention de présenter notre projet de loi. Ça semble être une question qui préoccupe le gouvernement. On va le souhaiter, naturellement. Donc, non seulement on pourra le démontrer ou le vérifier lorsque notre projet de loi sera appelé lors d'une motion du mercredi, mais on a tout de même une belle occasion aujourd'hui de démontrer à la population notre intention de mettre fin à un cycle qui, malheureusement, nous affecte tous ou affecte directement notre image comme parlementaires. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron) : Merci, M. le député de Deux-Montagnes. Et le temps attribué à votre formation politique est terminé. Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de LaFontaine pour son intervention, en vous indiquant qu'il vous reste 15 min 30 s. Si vous le prenez, vous le prenez. Il reste 15 min 30 s à votre formation politique.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Merci beaucoup, M. le Président. Soyez assuré que je prendrai toutes les minutes et secondes que vous allez me permettre d'utiliser. Et, d'entrée de jeu, vous savez, il est important, évidemment, de préciser que nous allons voter contre cette motion. Pourquoi? Parce que le processus actuel, mis en place en 2011, de nomination du Commissaire à la lutte contre la corruption est un processus qui assure l'indépendance et la compétence du commissaire. Et ça, ça avait été confirmé, ce processus-là qui est en place, par l'actuel député de Verchères à l'époque, qui était, à l'époque, critique de l'opposition officielle, porte-parole de l'opposition officielle en matière de sécurité publique et qui avait proposé lui-même ce processus en disant : Écoutez, M. le ministre de la Sécurité publique, qui, à l'époque, était Robert Dutil, du Parti libéral du Québec... Il avait dit : M. le ministre, ce processus-là, ce que vous proposez, moi, je propose autre chose, ayez donc un processus où il y aura un comité indépendant qui va identifier trois candidatures, puis vous choisirez, le gouvernement, à travers ces trois excellentes candidatures là. Puis, M. le ministre... C'est toujours le collègue actuel de Verchères qui disait ça en 2011 : Et ça, M. le ministre, ça va assurer un processus tout à fait rigoureux, va assurer l'indépendance de la personne nommée et, évidemment, sa compétence.

J'entends aujourd'hui et je constate que ce n'est plus le collègue de Verchères qui est porte-parole de l'opposition officielle en matière de sécurité publique, c'est le collègue de Matane, mais il doit y avoir un minimum de cohérence, je pense, dans les propositions du Parti québécois, dans les propositions de l'opposition officielle. Puis ce qu'on dit en 2011 sur un sujet aussi fondamental, là — pas un crédit d'impôt, là, un sujet aussi fondamental — on ne doit pas, M. le Président, je vous le soumets bien respectueusement, aller aux aléas et faire un 180 degrés là-dessus.

J'ai écouté — vous me permettez d'ouvrir une parenthèse — avec beaucoup d'attention d'abord la collègue de Montarville, qui a dit : Ah! changer le processus et nommer aux deux tiers de l'Assemblée nationale non seulement pour le Commissaire à la lutte contre la corruption, mais pour tous les hauts fonctionnaires, ça serait important. Alors, première des choses, je pense qu'on ferait ça à la journée longue parce qu'il y en a des centaines et des centaines.

Deuxième élément, le collègue de Deux-Montagnes a dit : Il y a beaucoup de cynisme, et il associe une nomination par le gouvernement... Même si ça fait l'objet de trois rigoureuses recommandations d'un comité indépendant, il associe, le collègue de Deux-Montagnes, toute nomination du gouvernement à des nominations partisanes. Et, en ce sens-là, j'ai de la misère à me réconcilier avec ces propos-là quand je constate que le 24 août 2012, dans La Presse, le chef de la Coalition avenir Québec précisait, et je cite : «Si on veut faire un changement au Québec, il faut remplacer les personnes qui font de la politique, mais aussi les sous-ministres et les présidents de sociétés d'État qui ne pensent pas comme nous, qui ne sont pas d'accord pour faire ces virages.» Alors, en août 2012, le chef de la Coalition avenir Québec voulait remplacer tous les présidents et présidentes de sociétés d'État, les sous-ministres, tous les hauts fonctionnaires qui ne pensent pas comme eux, mais il ne précisait pas qu'il voulait le faire aux deux tiers. Et il ne l'aurait pas fait aux deux tiers parce qu'évidemment ce ne serait pas des personnes autres qu'indépendantes puis qui ne pensent pas comme eux, M. le Président, et là j'entends la collègue de Montarville qui dit : Il faudrait, aux deux tiers, remplacer tout le monde.

Alors, je ferme la parenthèse, M. le Président. Je pense que ce qui contribue bien davantage au cynisme, c'est quand les élus exagèrent. Et, quand on dit, M. le Président, qu'on va nommer aux deux tiers tous les hauts fonctionnaires, je pense qu'on exagère. Et, quand le chef de la Coalition avenir Québec précise en 2012 que lui, il va changer — pas aux deux tiers — tous les hauts fonctionnaires, je pense qu'il exagérait également. Alors, M. le Président, le cynisme, on l'alimente quand on exagère. Et, à cet effet-là, je pense que c'était important de le souligner aux collègues.

Le député de Matane-Matapédia, bon, aujourd'hui, c'est lui, là, qui est critique, qui est le porte-parole de l'opposition officielle en matière de sécurité publique, ce n'est plus le collègue de Verchères. Bien, évidemment, j'aimerais bien l'entendre sur le 180 degrés qu'il nous propose aujourd'hui. Quand son collègue, en 2011, nous proposait, proposait à cette Assemblée nationale lors du débat sur la Loi concernant la lutte contre la corruption, proposait, donc, en mai 2011 que le processus... Et je le cite : Le processus, quel est-il, M. le Président? Article 5 de la loi qui a été adopté à l'unanimité.

Alors, sur un amendement du collègue de Verchères, du Parti québécois, critique à l'époque en matière de sécurité publique... 2011, le projet de loi est adopté. Il est parfaitement conscient et heureux que l'on prenne, évidemment... que l'Assemblée nationale prenne à son compte son amendement, qui fait en sorte que la nomination, puis c'est le processus actuel... «...choisi parmi une liste d'au moins trois personnes déclarées aptes à exercer la charge par un comité de sélection formé par[les circonstances]...» Le collègue de Verchères le soumet. Il dit que c'est un processus qui est extrêmement rigoureux, assure la compétence et l'indépendance. L'Assemblée nationale... Pas juste lui, là, que je pointe, tous les députés votent unanimement ce processus de sélection.

• (16 h 20) •

Bien, M. le Président, j'aimerais entendre mon collègue de Matane. Je veux bien croire qu'on change de critique, mais il ne faut pas qu'on change, sur un projet aussi fondamental, qu'on change notre fusil d'épaule. Ce n'est pas un crédit d'impôt, là, c'est quelque chose de fondamental. Et ce que disait le collègue de Verchères, je prends pour acquis, M. le Président, qu'il le tient toujours pour vrai. Puis je vais être curieux de voir comment il va voter là-dessus tout à l'heure, M. le Président, parce qu'on ne l'a pas entendu sur cette motion. Je suis persuadé qu'il sera présent puis qu'il va voter contre parce qu'il ne peut pas se dédire sur un sujet aussi fondamental.

Et il disait, M. le Président, à l'époque — et je vais le citer — le 25 mai 2011 : «Mais je pense qu'il conviendrait, à l'instar de ce qui est fait pour d'autres officiers de l'État, de prévoir un mécanisme peut-être un peu plus rigoureux de nomination du commissaire. Il faut que le processus — toujours le collègue de Verchères — de nomination soit, hors de tout doute raisonnable, crédible dans l'esprit des observateurs extérieurs.» C'était le processus proposé à l'époque, c'est le processus actuel.

Je poursuis. Le collègue de Verchères, du Parti québécois, disait... et qui est en porte-à-faux avec son collègue de Matane-Matapédia, il disait — et je le cite — en mai 2011 : «L'idée est simplement de faire en sorte que de nous assurer, pour les parlementaires — ah! tiens donc — pour le public en général, mais pour le ministre lui-même, au fond, d'avoir un processus qui va permettre que la personne qui va occuper cette fonction soit au-dessus de tout soupçon de nomination complaisante.»

Alors, aujourd'hui, il se dédit, force est de constater. Et, en ce sens-là, il précisait même que sa proposition, qui a été acceptée par le ministre de l'époque, qui a été adoptée unanimement et qui fait en sorte que c'est le processus en place aujourd'hui... il disait, le collègue de Verchères du Parti québécois, qui est en porte-à-faux avec son collègue de Matane-Matapédia : «On n'a pas tiré ça, là, de notre chapeau. C'est le processus qui est employé pour la nomination du Directeur des poursuites criminelles et pénales.» Et il y allait même de d'autres exemples : «Je ne vois pas — poursuivait-il — en quoi cette proposition d'amendement ne nous assurerait pas d'avoir à la tête de l'UPAC une personne présentant l'ensemble des compétences et l'expérience requise, bien au contraire, bien au contraire, M. le Président.» Fin de la citation.

Alors, aujourd'hui, on change de porte-parole, on change de position, et je pense que c'est un dur coup pour notre collègue de Matane-Matapédia, d'être en porte-à-faux, en contradiction flagrante avec, encore une fois, je le répète, M. le Président, un élément fondamental. Qu'on ne vienne pas nous dire : Oui, bien, ça fait quatre ans, il a changé d'idée, il a évolué, c'est un processus qui est perfectible, qui est bonifiable. Bien non, M. le Président, en 2011, on avait une même réalité québécoise qui est la même en 2015, aujourd'hui, qui était de s'assurer que le commissaire à la lutte à la corruption soit compétent, indépendant et soit nommé suite à un processus rigoureux. C'était le cas en 2011, c'est encore le cas en 2015.

Qu'est-ce qui a changé dans l'eau ou dans l'oxygène, M. le Président, pour que cette position-là défendue de façon très forte, très raisonnable et très justifiée, qui a permis d'amender le projet de loi, qui est la loi aujourd'hui... Et je n'irai pas jusqu'à dire, M. le Président, ou à laisser entendre qu'il s'agit des aléas politiques de courte échelle, de courte vue qui font en sorte qu'aujourd'hui nous avons une proposition pour modifier tout cela. Et d'entendre mon collègue de Matane-Matapédia dire à hauts cris : On n'a pas un processus qui permet d'assurer l'indépendance et la compétence, bien, je veux dire, à chaque fois je trouve ça dur, je trouve ça dur pour mon collègue de Verchères puis je trouve ça dur sur la crédibilité de son parti en cette matière, qui, encore une fois, est fondamentale.

En passant, vous me permettrez, M. le Président, de souligner — et là, bon, j'imagine que c'est une erreur de rédaction — les mots ont leur sens, et, en la matière, surtout sur une motion, une proposition de motion qui en contient peu, il est important de bien choisir les mots. Vous savez, M. le Président, mieux que moi qu'il y a déjà cinq personnes, cinq officiers qui sont nommés par l'Assemblée nationale. Évidemment, il s'agit, M. le Président, du Vérificateur général, du Protecteur du citoyen, du Directeur général des élections, du Commissaire au lobbyisme et du Commissaire à l'éthique et à la déontologie. On dit : «Une personne désignée est une personne nommée par l'Assemblée nationale pour exercer cette charge. Ces personnes sont directement responsables devant elle.»

Alors, M. le Président, quand on lit la motion, on ne dit pas qu'ils sont nommés, mais on dit... On me dira : Ah! c'est une erreur de rédaction. Mais, quand même, ça me surprend, connaissant la rigueur de mon collègue, que l'Assemblée nationale approuve par les deux tiers de ses membres. Est-ce que ça veut donc dire que le gouvernement... Parce qu'«approuve» a un sens. L'Assemblée nationale ne nomme pas. L'Assemblée nationale, dans ce contexte-là, l'Assemblée nationale, avec les cinq autres, elle prend la candidature et elle nomme. Fin de la discussion. Ici, il dit «approuve». Vous allez me dire : C'est anodin, c'est une erreur de rédaction. «Approuve», ça veut dire que le gouvernement propose. Et, s'il n'y a pas d'approbation, le gouvernement en propose un autre, le gouvernement en propose un autre, en propose un autre. Parce qu'il ne nomme pas, il approuve.

Pourquoi le mot est important? De un, pour ce que je viens de dire. Mais, de deux, les cinq officiers, les cinq institutions, les cinq personnes qui sont nommées par l'Assemblée nationale relèvent de l'Assemblée nationale, relèvent de la responsabilité des 125 députés. Ici, Rémy Trudel, qui a été cité par le ministre de la Sécurité publique, a dit... qui est un ancien ministre du Parti québécois et, encore une fois, qui a eu l'occasion d'émettre son opinion au sein du parti, qui était, j'imagine, considéré à l'époque, comme l'a bien dit le ministre de la Sécurité publique... il a dit : Il y a un ministre responsable qui répond de toutes ces questions. Il y a en place un processus, un comité qui choisit trois excellentes candidatures, et le gouvernement nomme la personne.

Et il s'agit d'un processus qui avait même, M. le Président, été confirmé par l'opposition officielle pas il y a 10 ans, 15 ans, le 1er octobre 2014 le même collègue député de Matane-Matapédia avait déposé pour la nomination du directeur de la Sûreté du Québec... avait proposé un processus où il y avait un comité qui recommandait trois candidatures. Et là, évidemment, il ne voulait que ce soit le gouvernement, mais il voulait que ce soit le comité parlementaire, la majorité des groupes parlementaires qui le décide. Mais, s'il concevait qu'à l'époque les comités, la commission parlementaire et l'Assemblée nationale pouvaient décider à travers ces trois candidatures-là qui émanaient d'un comité indépendant, force est de constater qu'il avait avalisé, il avait confirmé qu'il s'agissait, là, d'un processus qui, au départ, nous permettait d'aboutir avec trois excellentes candidatures.

C'est exactement le même processus ici, M. le Président, qui est en place que celui qu'il proposait en octobre 2014, autrement dit un comité indépendant dont personne ne questionne, M. le Président, la compétence. Les membres qui le forment sont compétents, connaissent le domaine, sont indépendants. Personne ne conteste ça, M. le Président, puis j'aimerais entendre le collègue de Matane. S'il conteste ça, qu'il le dise clairement. Donc, trois excellentes candidatures à travers lesquelles le gouvernement utilise et le gouvernement met en application et est responsable devant cette Assemblée nationale. Trois excellentes candidatures. Le gouvernement choisit, et, en vertu de l'article 73 de la loi adoptée en 2011, le ministre responsable, qui se fait questionner, M. le Président, à tous les jours qu'on siège, est responsable, a la responsabilité ministérielle de s'assurer, évidemment, que cette entité, qui demeure tout à fait indépendante, fasse sont travail, ait les ressources nécessaires, ait toute l'indépendance. Et c'est là, M. le Président, que se fait le véritable travail qui fait en sorte, évidemment, de s'assurer que nous avons une unité permanente anticorruption à l'oeuvre.

On a fait grief à l'actuel commissaire d'avoir participé à une conférence de presse, et le collègue de Matane a dit qu'il avait un malaise, c'était une erreur, ça ne se fait pas. Il n'avait pas souvenir que le collègue de Verchères, l'époque, quand il était ministre du Parti québécois de la Sécurité publique fait une conférence de presse avec le commissaire... Bien, M. le Président, mon collègue ministre de la Sécurité publique a eu l'occasion de soulever que, pire que de faire une conférence de presse, publique par définition, a fait état d'un article du Devoir du 11 octobre 2012 où le ministre du Parti québécois de la Sécurité publique avait visité les locaux de l'UPAC et avait dit qu'il devait y avoir des changements et qu'il envisageait même des changements jusqu'à la plus haute sphère.

Donc, ce qu'il disait, si vous me permettez de paraphraser, qu'il allait se permettre, le cas échéant, s'il le jugeait bon, de se débarrasser de l'actuel commissaire puis de le changer si ça ne faisait pas. Il n'avait pas précisé qu'il allait revenir à l'Assemblée nationale puis demander un vote des deux tiers à ce moment-là, M. le Président. Bien non, parce qu'il le savait qu'il y avait un processus, il y avait un processus qui était mis en place. Mais non seulement on vient faire grief aujourd'hui, on vient dire : Il y a eu conférence de presse avec le commissaire, conférence de presse publique, le collègue de Matane a un malaise énorme à ça, il dit : On attaque son indépendance. Et, de l'autre main, d'un autre côté, lorsqu'ils étaient au pouvoir, le Parti québécois, le ministre de la Sécurité publique avait été faire une visite privée — pas publique, il n'y avait pas de caméras, là, il n'y a eu de photos qui ont été prises — où il a dit : Ça a besoin de changer, sinon, là, jusqu'aux plus hautes sphères, vous risquez d'être dégommés. Et, en ce sens-là, M. le Président, on ne peut pas avoir deux poids, deux mesures, on ne peut pas, à défaut... Sinon, on n'a pas la crédibilité nécessaire pour venir attaquer un processus qui, en 2011, M. le Président, était un processus extraordinaire, un processus qui nous assurait d'avoir une personne à la tête de l'UPAC, le commissaire actuel, totalement indépendant, compétent, et, en ce sens-là, nous allons voter contre la motion. Et j'ai bien hâte de voir si mon collègue de Verchères... Je suis certain, M. le Président, connaissant son honnêteté intellectuelle, que lui aussi, il va voter contre cette motion. Merci, M. le Président.

• (16 h 30) •

Le Vice-Président (M. Gendron) : Alors, je vous remercie, M. le député de LaFontaine, de votre intervention. Le temps étant écoulé au gouvernement, il reste du temps à l'opposition officielle, 11 min 40 s. Alors, je cède la parole à M. le leader de l'opposition officielle pour son intervention. À vous, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Bernard Drainville

M. Drainville : Merci, M. le Président. Alors, 11 minutes, ce n'est pas beaucoup, je vais aller à l'essentiel. M. le Président, le mandat du Commissaire à la lutte contre la corruption, le commissaire à l'UPAC, c'est, et je cite : «...assurer, pour l'État, la coordination des actions de prévention et de lutte contre la corruption en matière contractuelle dans le secteur public.» Ça, c'est tiré de la loi qui crée l'UPAC. «Le gouvernement nomme [le] commissaire», dit la loi, M. le Président. Bien, nous, ce qu'on soutient, à travers la motion du député de Matane-Matapédia, c'est que ça ne doit plus être le gouvernement qui doit nommer le commissaire, M. le Président, ça doit être l'Assemblée nationale aux deux tiers, et pas juste, M. le Président, parce que c'est une bonne idée sur le fond des choses, c'est une bonne idée parce qu'on nomme déjà aux deux tiers un certain nombre d'officiers : le Vérificateur général, le Directeur général des élections, le Commissaire au lobbyisme, le Commissaire à l'éthique, la Protectrice du citoyen... Donc, sur le fond des choses, on pense déjà que c'est une bonne idée, mais aussi, M. le Président, parce que, dans le contexte actuel, dans celui dans lequel nous nous trouvons, c'est une bonne idée que le Parti libéral accepte cette idée que la Chambre choisisse le prochain commissaire à l'UPAC aux deux tiers parce que ça va envoyer un message clair sur sa volonté d'assurer l'indépendance du commissaire. Pourquoi? Parce que le Parti libéral, M. le Président, il est sous enquête de l'UPAC. Le Parti libéral qui est actuellement au gouvernement est sous enquête de l'UPAC, M. le Président. Alors, on leur donne dans le fond une belle occasion de démontrer leur volonté de faire le ménage et de nommer quelqu'un qui pourra, en toute indépendance, faire la lumière sur toutes les allégations et les enquêtes qui touchent directement le Parti libéral, M. le Président.

Alors, j'ai quelques exemples à vous citer. C'est des découpures de presse, M. le Président, c'est du domaine public : Le Parti libéral du Québec et son ex-argentier, Marc Bibeau, ciblés par l'UPAC. L'UPAC vise l'argentier du Parti libéral sous Jean Charest. «Marc Bibeau est au coeur d'une enquête sur un système de financement illégal du parti sur fond de collusion.» L'UPAC : de la permanence du Parti libéral du Québec à Schokbéton.Un lien avec les perquisitions au Parti libéral du Québec, ça, c'est les perquisitions chez Schokbéton toujours. Un député libéral réélu visé par une enquête de l'UPAC, ça, c'est Alain Gravel qui a sorti cette nouvelle-là, M. le Président, le 16 avril 2014, je cite : «Exclusif. Radio-Canada a appris qu'un député libéral, réélu au sein de l'équipe de Philippe [...] — de l'actuel premier ministre — fait l'objet d'une enquête de l'UPAC. Outre ce député, trois ex-parlementaires sous le gouvernement de Jean Charest sont visés par les enquêteurs.» Alors, on parle des projets Lierre et Joug, «il y a aussi le projet Justesse, dont les enquêtes portent essentiellement sur des soupçons — et je cite : d'abus de confidence, de corruption, de fraude, de transactions illégales et de financement illégal du Parti libéral du Québec», dit toujours Alain Gravel de Radio-Canada. «Dans le projet Joug — je cite toujours — on retrouve entre autres le nom d'un député qui vient tout juste d'être réélu.»

Alors, M. le Président, ce n'est pas bien, bien compliqué, c'est une bonne idée que le commissaire à l'UPAC soit nommé aux deux tiers par l'Assemblée nationale parce que ça donne l'occasion au gouvernement libéral et donc au Parti libéral de dire : Nous, on n'a pas peur des enquêtes de l'UPAC, on est animés d'une volonté de vraiment faire la lumière sur toutes ces enquêtes, on veut que ça aboutisse. S'il y a des gens qui ont des choses à se reprocher, on veut qu'ils soient arrêtés et accusés devant la justice. On veut tourner la page par rapport au passé du parti, on veut montrer qu'on regarde en avant et que, s'il y a eu des comportements délinquants ou même criminels par le passé sous des administrations précédentes, nous, ce n'est pas ce qu'on est maintenant, nous, au Parti libéral, on veut donc montrer qu'on est sérieux. On veut que le commissaire à l'UPAC aille au bout des choses, et c'est pour ça qu'on est prêts à le choisir aux deux tiers. On n'a rien à cacher. On n'a peur de rien. On n'a pas peur de la vérité. Puis, s'il y a des bandits qui ont fait du travail de bandit, bien, qu'on les arrête puis qu'ils soient traduits devant les tribunaux.

Quelle belle occasion, M. le Président, que le député de Matane-Matapédia offre aux députés du Parti libéral de dire : On marque vraiment une rupture avec le passé, avec toutes ces nouvelles que je viens de citer, M. le Président.

Dans le fond, M. le Président, actuellement, là, dans la loi actuelle, le gouvernement nomme lui-même un commissaire qui peut enquêter sur le gouvernement qui le nomme. On s'entend-u que ça n'a pas de bon sens? Peu importe le gouvernement, M. le Président. Aujourd'hui, c'est un gouvernement libéral. Que demain ce soit un gouvernement péquiste, ou que ce soit un gouvernement caquiste, ou que ça soit un gouvernement solidaire, peu importe le gouvernement, M. le Président, ça n'a pas de bon sens que le gouvernement qui est enquêté nomme le commissaire à l'UPAC qui va l'enquêter. Voyons donc!

Pourquoi est-ce qu'on nomme aux deux tiers le commissaire à l'éthique? Pourquoi est-ce qu'on nomme aux deux tiers le Directeur général des élections? Pourquoi est-ce qu'on nomme aux deux tiers le Commissaire au lobbyisme? Bien, c'est justement pour envoyer un message de crédibilité, d'indépendance. On veut que la personne soit au-dessus de tout soupçon. Parce que sincèrement, là, au minimum, M. le Président, quand vous avez un gouvernement qui nomme quelqu'un qui pourrait enquêter sur le gouvernement, quand vous avez un gouvernement libéral qui dit : Moi, je veux nommer le prochain commissaire à l'UPAC, même si le commissaire à l'UPAC va poursuivre des enquêtes sur moi, comme Parti libéral, on s'entend-u qu'au minimum ça a un petit peu l'apparence de conflit d'intérêts? Au minimum.

Quel message ça envoie, M. le Président, si le parti qui est sous enquête nomme le responsable des enquêtes? Ça peut-u être plus clair, comme question, ça? Quel message de crédibilité on envoie si le parti qui est sous enquête nomme le responsable des enquêtes? Bien, c'est une maudite bonne question.

Et là on entend le commissaire Lafrenière, pour lequel j'ai beaucoup de respect, M. le Président. Je l'ai interviewé plusieurs fois, à La part des choses, avant qu'il devienne le personnage public serviteur de l'État qu'il a été. Je l'ai interviewé plusieurs fois, je dirais probablement une dizaine de fois sur toutes sortes d'affaires. D'ailleurs, il n'était pas connu du public avant de devenir un invité régulier de La part des choses, M. le Président. Donc, je vous le dis : J'ai beaucoup de respect pour M. Lafrenière.

M. Lafrenière dit : Moi, je veux être le plus indépendant possible, hein? C'est ça qu'il déclare. Il veut que l'UPAC soit la plus indépendante possible. Mais là, M. le Président, ce qu'on lui répond : Si tu veux être indépendant, accepte d'être nommé aux deux tiers. Puis, si tu ne le veux pas — parce qu'il a fait des déclarations à l'effet qu'il ne le veuille pas — bien là... C'est à nous, députés de l'Assemblée nationale, M. le Président, de décider si le prochain commissaire à l'UPAC doit être nommé aux deux tiers des députés de l'Assemblée. C'est à nous de décider ça. On prend tous les avis, on entend, bien entendu, les déclarations de M. Lafrenière et on le respecte, encore une fois, mais on n'est pas obligés d'être d'accord avec lui. Ultimement, on est ici pour représenter les citoyens, M. le Président. C'est à ça qu'on sert.

• (16 h 40) •

Alors, nous, ce qu'on dit, c'est : Qu'est-ce qu'on a à perdre, comme institution démocratique, M. le Président, à nommer le commissaire à l'UPAC aux deux tiers? Qu'est-ce qu'on a à perdre, comme institution, comme Assemblée nationale? Qu'est-ce qu'on a à perdre, comme population, comme société, de décider, tout le monde ensemble, que le prochain, on va le nommer aux deux tiers? On a rien à perdre et on a tout à gagner, on a tout à gagner.

C'est foncièrement une bonne idée, puis franchement, M. le Président, il n'y en a pas, de bonne raison pour être contre ça. Il n'y en a pas, de bonne raison pour être contre ça. Je veux dire, on ne peut quand même pas faire valoir que l'Assemblée nationale aux deux tiers aurait un moins bon jugement que si c'était fait seulement par le gouvernement. On ne va pas soutenir ça, M. le Président, parce que, si c'est ça, la logique, à ce moment-là, le gouvernement va proposer quoi, que les autres qu'on nomme aux deux tiers ne le soient plus parce qu'on prétend que le seul jugement du gouvernement est suffisant pour nommer des personnes de cette élévation, qui représentent ces institutions? Bien non, M. le Président, ça a du sens que ce soit l'Assemblée nationale qui nomme le prochain aux deux tiers parce qu'il s'en trouvera rehaussé dans sa crédibilité, dans sa légitimité. Il n'y a pas personne qui pourra dire : Cet homme-là ou cette femme-là n'incarne pas une espèce de consensus.

Puis moi, je vous le dis, M. le Président, puis il me reste une minute, j'en suis conscient : Le parti libéral et les élus libéraux qui siègent actuellement en cette Chambre ont tout à gagner. C'est les premiers qui devraient se réjouir d'une proposition comme celle-là parce qu'ils vont être capables de dire : Aïe! Aïe! Aïe! Il a été nommé aux deux tiers. N'allez pas dire, là, que l'UPAC, là, est influencée par la politique, que l'UPAC est une police politique, qui a eu une ingérence politique, qui a eu une influence politique. Bien non, il a été nommé aux deux tiers par les députés de l'Assemblée, pas juste par des libéraux, mais aussi par des péquistes, puis, espérons-le, par des caquistes, puis par des solidaires. La crédibilité des enquêtes, le résultat des enquêtes, le travail de ces policiers-là s'en trouvera grandi, rehaussé. L'institution de l'UPAC sera renforcée par une décision comme celle-là, M. le Président.

Moi, je vous le dis : C'est une excellente bataille qu'on a l'intention de continuer à mener. Si on ne la gagne pas aujourd'hui avec le vote d'aujourd'hui, on va continuer à la mener. Je félicite le député de Matane-Matapédia pour son excellente initiative. Le Parti québécois ne lâchera pas là-dessus, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le leader de l'opposition officielle, pour cette intervention. Je cède maintenant la parole à M. le député de Mercier en vous indiquant que vous avez un droit de parole de sept minutes. À vous la parole.

M. Amir Khadir

M. Khadir : Merci, M. le Président. Pour Québec solidaire, il est clair qu'il y a quelque chose de tout simplement logique dans la proposition qui est faite par la motion inscrite par l'opposition officielle aujourd'hui, c'est-à-dire que le Commissaire à la lutte contre la corruption soit nommé et approuvé aux deux tiers des voix des membres de l'Assemblée nationale.

D'abord, ceux qui ont suivi tout le dossier de la lutte à la corruption, qui a été mené par l'opinion publique d'abord, par les journalistes d'enquête ensuite et les relais politiques à l'Assemblée nationale depuis 2009... Le rôle qu'a joué Québec solidaire dans cette bataille est non négligeable. Mon collègue de l'opposition officielle vient de mentionner de tout le dossier de Schokbéton et les enquêtes menées par l'UPAC dans l'appareil du Parti libéral alentour des relations entre le Parti libéral et Schokbéton.

Vous vous rappellerez, M. le Président, que le premier à avoir jeté une lumière crue sur le financement sectoriel et le rôle central joué par Marc Bibeau à la tête de Schokbéton a été la tâche de Québec solidaire. J'ai posé plusieurs fois la question, j'ai révélé notamment la participation tout à fait inattendue d'un entrepreneur du béton aux côtés du premier ministre d'alors, du Québec, M. Jean Charest à une réception donnée en l'honneur de George W. Bush à Ottawa en 2005, et comment, alentour de cette table, Jean Charest et M. Marc Bibeau, en fait, alimentaient des discussions sur des contrats gouvernementaux à donner et les orientations prises par le gouvernement de l'époque.

Maintenant, on ne rentrera pas dans ce débat, mais ce que je voulais dire par là, c'est que j'ai quand même été, à cause de ce qui s'imposait à nous à ce moment-là, au coeur de cette réflexion depuis au moins cinq ans, et il m'apparaît évident que, pour le ministre de l'époque qui a institué l'UPAC — nous nous rappellerons, c'était M. Robert Dutil qui assumait les fonctions du ministère de la Sécurité publique — la création de l'UPAC était en réponse à une lutte plus large dans tout le dossier de la corruption qui pouvait être liée dans l'octroi des contrats publics. Et, comme cet enjeu était particulièrement critique et a entraîné un débat houleux dans la société avec, si vous vous rappelez, toute la campagne menée par des initiatives populaires, les 250 000, 300 000 signatures qui ont été réunies au bas d'une pétition à l'Assemblée nationale alentour de ça, ensuite l'initiative des foulards blancs... On peut en penser ce qu'on peut en penser, mais c'était une situation particulièrement critique, une crise de confiance au sein de l'opinion publique et une situation qui exigeait une réponse urgente. Et, face aux demandes d'une commission d'enquête publique, qui est venue plus tard à la suite de ces pressions, le gouvernement, de manière urgente, a institué cette unité permanente anticorruption comme réponse intérimaire, comme palliatif, en ne pouvant pas immédiatement rencontrer la demande de l'opposition et de l'opinion publique pour une commission d'enquête publique, et donc, dans cette urgence-là, on n'avait pas les conditions politiques réunies pour que le gouvernement puisse obtenir l'assentiment des deux tiers de l'Assemblée nationale.

Cependant, ceux qui étaient là s'en rappelleront, le gouvernement d'alors s'était bien employé à nommer à la tête de l'UPAC une personne, en la personne de M. Lafrenière, qui apparaissait aux yeux de tout le monde, y compris de l'opposition de l'époque, comme tout à fait indépendante de toute filière politique. La raison était simple : c'est que le ministre d'alors, M. Dutil, était particulièrement soucieux, en plein milieu de ce débat-là, de ne pas donner prise à aucune possibilité, à aucun, je dirais, doute sur l'impartialité de la personne retenue, pour que les perceptions soient au rendez-vous, c'est-à-dire que la personne nommée jouisse de la plus grande crédibilité possible. Suivant cette logique-là aujourd'hui, les députés du Parti libéral devraient accueillir avec ouverture et, je dirais, satisfaction une proposition qui vient compléter l'oeuvre de leur collègue d'alors, M. Dutil, qui était donc animé de cette volonté de placer l'UPAC au-dessus de tout soupçon.

Quant aux propos tenus par M. Lafrenière lui-même, je crois que ça émane d'une personne qui lui-même est consciente de son indépendance. C'est une personne que je respecte également, et je suis persuadé de son indépendance. Là n'est pas la question. Comme M. Lafrenière lui-même est confiant de cette indépendance, il ne juge pas nécessaire d'avoir l'assentiment des deux tiers de l'Assemblée nationale. Peut-être, de son point de vue, mais, du point de vue de l'opinion publique et pour la pérennité de cette institution qu'on voudrait voir permanente, justement, et qui va exiger éventuellement d'autres nominations, il m'apparaît tout à fait logique que l'ensemble des députés de l'Assemblée nationale se rangent derrière cette proposition. Et, à date, les arguments que j'ai écoutés qui ont été employés, déployés par les députés de la partie ministérielle sont loin d'avoir apporté, au minimum, une réponse intellectuellement satisfaisante. Pourquoi ils se refuseraient à quelque chose qui va de soi? On le fait pour tant d'autres institutions qui nécessitent une neutralité au-dessus de toute attaque, de tout soupçon, de toute critique.

Donc, c'est en vertu de cet, je dirais, appel du bon sens et de l'esprit qui a guidé le ministre Dutil, un ministre libéral, un de vos collègues, à l'époque pour la création de l'UPAC que j'interpelle mes collègues de la partie ministérielle de revenir sur leur décision, contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure, et de voter en faveur de la motion qui est devant nous. Merci, M. le Président.

• (16 h 50) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, M. le député de Mercier, pour cette intervention. Nous en arrivons maintenant au droit de réplique de M. le député de Matane-Matapédia, à qui je cède la parole.

M. Pascal Bérubé (réplique)

M. Bérubé : Merci, M. le Président. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les arguments du gouvernement quant à notre proposition qui vise à protéger une institution importante, celle de la lutte à la corruption.

Depuis 2011, le contexte a changé, et je vais le dire de la façon la plus directe possible : Le Parti libéral qui forme le gouvernement du Québec est sous enquête. Sur la rue Waverly à Montréal, il y a eu perquisition de l'UPAC. Des personnalités importantes font face à différentes allégations. Violette Trépanier...

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Une seule personne a la parole, et c'est le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : Oui, merci — ça fait mal — Violette Trépanier, Joël Gauthier, Marc Bibeau, des libéraux notoires bien connus font face à des allégations importantes. Depuis plus de deux ans, de nombreux observateurs, dont Brian Myles, que le ministre de la Sécurité publique s'est amusé à discréditer tout à l'heure, ont remarqué ça : ça tarde à venir. Des opérations importantes qui visent des élus libéraux, passés et actuels, l'opération Joug et Lierre...

Une voix : ...

M. Bérubé : Tu es qui, toi?

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Un instant, M. le député. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Sklavounos : Simplement parce qu'il me semble... on a une certaine tolérance, je démontre une certaine tolérance. Le collègue leader du gouvernement a fait cette mention plus tôt, je ne me suis pas levé. Là, c'est la deuxième fois. C'est clair dans notre règlement, M. le Président, que, si on veut attaquer la conduite d'un député, il y a une procédure qui est prévue dans notre règlement, il faut la prendre.

Là, on laisse entendre... on ne nomme pas, mais on laisse entendre... Et c'est encore plus dommage lorsqu'on laisse entendre sans nommer, parce qu'on ne peut pas réfuter des allégations qui n'ont pas de détail. Alors, je vais inviter... surtout, surtout lorsqu'on nomme des personnes qui ne siègent pas, il y a une certaine tolérance à avoir. Là, on est en train de dire qu'il y a quelqu'un qui siège ici, des allégations, pas particulières, pas de particularité, pas de personne. On ne peut pas réfuter des allégations qui n'ont pas de détail. Je vais l'inviter à la prudence et je vais lui demander de retirer ses propos concernant ce député, qui est à quelque part ici, qui serait corrompu, mais on ne sait pas c'est qui, puis on ne sait pas comment, puis on ne sait pas où, puis on n'a pas de détail. Parce qu'à un moment donné, l'énumération qu'il fait, de personnes... Je vous rappelle, M. le Président, qu'il y a un parti politique qui a été condamné pour du financement politique illégal, c'est le rapport Moisan, c'est le Parti québécois. Un détail plus, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, je vais vous demander votre collaboration, M. le député de Matane-Matapédia. Le débat se déroulait relativement bien. Il ne faut pas imputer des motifs à des personnes. Alors, je vous demande votre collaboration, connaissant votre fair-play, M. le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : Bien, on pourrait peut-être nommer son nom, M. le Président, à ce moment-là, s'il le souhaite, parce que lui, il connaît son identité, puis l'ensemble du caucus aussi, M. le Président.

Continuons, parce qu'il est protégé présentement.

Des voix : ...

M. Bérubé : Je peux-tu parler?

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Juste un instant, juste un instant. J'ai bien compris les arguments, là. Je vous cède la parole, M. le député de Matane-Matapédia. Je vous rappelle les propos du leader adjoint du gouvernement par rapport à l'attaque de la conduite d'un député. Il y a des mécanismes prévus dans notre règlement. Alors, je vous demande de faire attention et je vous demande votre collaboration.

M. Bérubé : M. le Président, nous sommes en recherche de la vérité, et on doit avoir confiance dans l'ensemble de la justice et des mécanismes qui mènent à des accusations et à des condamnations. Que ça soit l'UPAQ, que ça soit la direction des poursuites criminelles et pénales, personne ne doit être au-dessus des lois.

Le problème qu'on a présentement... Puis tout à l'heure le leader ne s'est pas levé quand mon collègue a indiqué qu'il y avait des enquêtes qui visaient le Parti libéral, parce que c'est reconnu. Il ne m'apparaît pas normal que le gouvernement soit le seul à choisir l'enquêteur en chef au Québec. Il m'apparaît que le gouvernement a à gagner à ce qu'il n'y ait aucun doute quant à l'indépendance nécessaire du commissaire de l'Unité permanente anticorruption.

J'ai dénoté tout à l'heure que le commissaire qui doit être renouvellé en mars prochain par le gouvernement, soit qu'il est renouvellé, soit qu'on nomme une autre personne. Bien là, il sera évalué sur quelle base? Pas dans un débat public, dans une séance du Conseil des ministres où moi, je n'aurai pas accès puis le député de LaFontaine non plus, à ma connaissance, puis le député de Laurier-Dorion non plus, en tout cas, pas dans un avenir prévisible, quant à moi.

Alors, ce que je veux indiquer, c'est qu'on a tout à gagner à avoir un débat qui fait en sorte que, lorsqu'il y aura des résultats d'enquête, par exemple, ou des accusations qui seront portées, bien là, on pourra dire : L'Assemblée, au même titre que d'autres institutions importantes comme le Directeur général des élections, comme le Vérificateur général, sont à l'aise avec le choix qui a été fait. Qu'est-ce que le gouvernement a à perdre d'accepter cette proposition qui est très susceptible de faire en sorte qu'il n'y ait aucun doute? Sinon, l'alternative est la suivante : le gouvernement libéral choisit celui qui enquête sur l'ensemble des enjeux de corruption, mais y compris sur l'action gouvernementale. C'est ça qui va demeurer, là, de cette motion si vous ne l'acceptez pas.

Et j'ai écouté le ministre de la Sécurité publique tout à l'heure indiquer qu'il était contre ça, puis ce n'est pas tellement clair. Quand j'ai indiqué qu'il y a deux ministres qui ont participé à des conférences de presse avec le commissaire de l'UPAC, ce n'est pas pour rien. D'abord, ce n'est pas lui qui a choisi, on lui a demandé de venir participer à une conférence de presse. Je trouve ça plutôt imprudent. Pourquoi? Bien, est-ce que le commissaire à l'UPAC aurait été mal à l'aise de refuser? C'est l'impression qu'il nous a donnée lundi dernier. Il dit : Ils étaient là pour m'appuyer. Il aurait pu faire une présentation dans un point de presse, dans une démonstration publique, puis ensuite le gouvernement aurait pu dire : Bien, on va suivre ses recommandations puis on va travailler ensemble. Ça a été fait deux fois : le ministre des Transports, le président du Conseil du trésor. Deux personnes qui auront le privilège, eux, d'être autour de la table à huis clos quand le choix sera fait de renouveler ou non M. Lafrenière. C'est ça, le problème. Quand M. Lafrenière nous dit lundi dernier que le plus grand gage d'indépendance, puis il rajoute une couche, c'est d'avoir encore plus de pouvoir pour être le seul à faire des enquêtes de corruption au Québec, en haut de la Sûreté du Québec, de qui il serait indépendant, puis du SPVM et des autres corps de police, c'est des pouvoirs exceptionnels, extrêmement importants, puis ça milite encore plus pour que l'Assemblée nationale puisse être saisie d'une proposition visant à lui assurer une totale indépendance.

Alors là, le gouvernement libéral, ce qu'il nous envoie comme message, c'est : Nous autres, là, le patron de la SQ, là, on avait fait une proposition, c'est nous autres qui le nomment, puis le patron de l'UPAC, c'est nous autres aussi, pas vous autres. C'est nous autres qui va faire le choix. Mais là on dit : Oui, mais il me semble que ce qu'on ne savait pas en 2011, qu'on sait maintenant, c'est qu'il y a des enquêtes en cours, des enquêtes en cours sérieuses sur le financement, et la porte-parole du Parti libéral, Mme Ringuette, ça, ce n'est pas une rumeur, elle l'a dit, elle l'a confirmé qu'il y a eu une perquisition à l'édifice, le siège social du Parti libéral sur la rue Waverly. À l'époque, à tout le moins, il était là. Ça, elle l'a dit.

Alors, moi, ce que je ferais si j'étais le gouvernement, je dirais : Parfait, vous nous mettez au défi, on n'a rien à cacher — j'ai entendu ça souvent ici — on va soumettre le bilan de M. Lafrenière à l'appréciation des groupes parlementaires, on va faire ce débat puis on va voter. Soit que les gens vont être en accord, soit que les gens vont être en désaccord puis ils vont expliquer pourquoi puis ça va être public. Le problème qu'on a, c'est que le débat, il va se faire seulement entre quelques membres du caucus libéral, ceux qui ont le privilège d'être au Conseil des ministres. Ça ne sera pas rediffusé. On n'aura pas la transcription; bien que, des fois, en lisant le journal, on a des transcriptions du Conseil des ministres, c'est arrivé samedi. C'est susceptible d'améliorer.

Pourquoi qu'on en parle maintenant? Quelqu'un a posé la question. Parce que le mandat arrive à échéance au printemps 2016, puis on n'est pas à la dernière minute, on a du temps pour regarder ça ensemble, cette proposition. Et M. Lafrenière, s'il passe le test du choix de l'Assemblée nationale, sa légitimité va s'en retrouver renforcée. D'ailleurs, il l'a dit lui-même dans Le Devoir du 17 septembre 2014. Il s'est dit ouvert à toutes les suggestions, y compris de confier à l'Assemblée nationale le processus de nomination du commissaire.

J'ai parlé de Brian Myles tantôt. Moi, je trouve très téméraire de s'attaquer à son jugement là-dessus. C'est un spécialiste. On a évoqué un ancien ministre. Je pourrais évoquer un ancien ministre aussi, M. Marc Bellemare, qui nous a parlé amplement des risques d'associer des institutions importantes au politique. Quand j'entends un député tantôt dire : Il ne faut pas que ça soit politique, de soumettre ça à l'Assemblée nationale, c'est quoi quand c'est seulement le ou la ministre qui décide de la nomination?

Alors, ce que je dis au Parti libéral : Ne soyez pas les seuls à choisir qui va enquêter, notamment sur vous, posez le seul geste susceptible d'améliorer l'institution...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, merci, M. le député de Matane-Matapédia.

Mise aux voix

Je vais maintenant mettre aux voix la motion de M. le député de Matane-Matapédia, qui se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement que la nomination du Commissaire à la lutte contre la corruption soit approuvée par les deux tiers de ses membres.»

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, la motion...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Le vote par appel nominal?

Qu'on appelle les députés.

• (17 heures — 17 h 12) •

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la motion de M. le député de Matane-Matapédia, qui se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement que la nomination du Commissaire à la lutte contre la corruption soit approuvée par les deux tiers de ses membres.»

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Péladeau (Saint-Jérôme), M. Drainville (Marie-Victorin), M. Marceau (Rousseau), M. Therrien (Sanguinet), M. Bérubé (Matane-Matapédia), Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), Mme Lamarre (Taillon), M. Traversy (Terrebonne), M. Lelièvre (Gaspé), M. Therrien (Sanguinet)... pardon, M. Leclair (Beauharnois), M. Gaudreault (Jonquière), Mme Maltais (Taschereau), M. LeBel (Rimouski), Mme Hivon (Joliette), M. Cloutier (Lac-Saint-Jean), M. Lisée (Rosemont), M. Pagé (Labelle), M. Cousineau (Bertrand), M. Rochon (Richelieu), M. Villeneuve (Berthier), Mme Ouellet (Vachon), M. Turcotte (Saint-Jean), M. Kotto (Bourget), Mme Richard (Duplessis), M. Roy (Bonaventure).

M. Legault (L'Assomption), M. Bonnardel (Granby), M. Caire (La Peltrie), M. Charette (Deux-Montagnes), M. Martel (Nicolet-Bécancour), Mme Roy (Montarville), Mme Samson (Iberville), M. Roberge (Chambly), M. Laframboise (Blainville), M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs), Mme D'Amours (Mirabel), M. Lemay (Masson), M. Surprenant (Groulx), Mme Soucy (Saint-Hyacinthe), M. Jolin-Barrette (Borduas).

Mme David (Gouin), M. Khadir (Mercier).

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint : M. Fournier (Saint-Laurent), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Leitão (Robert-Baldwin), M. Moreau (Châteauguay), Mme David (Outremont), M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys), M. Huot (Vanier-Les Rivières), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vallée (Gatineau), M. Barrette (La Pinière), M. Blanchette (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), M. Heurtel (Viau), M. Arcand (Mont-Royal), Mme Charbonneau (Mille-Îles), M. Daoust (Verdun), Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Vien (Bellechasse), M. Billette (Huntingdon), M. Reid (Orford), Mme Vallières (Richmond), M. Morin (Côte-du-Sud), M. Bernier (Montmorency), M. Ouellette (Chomedey), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Ménard (Laporte), M. Sklavounos (Laurier-Dorion), M. Girard (Trois-Rivières), Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger), M. Carrière (Chapleau), M. Drolet (Jean-Lesage), M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine), M. Matte (Portneuf), M. Simard (Dubuc), M. Tanguay (LaFontaine), M. Bolduc (Mégantic), Mme de Santis (Bourassa-Sauvé), M. Iracà (Papineau), M. Rousselle (Vimont), M. Giguère (Saint-Maurice), M. Fortin (Pontiac), M. Bourgeois (Abitibi-Est), M. Boucher (Ungava), M. Birnbaum (D'Arcy-McGee), M. Auger (Champlain), M. Habel (Sainte-Rose), M. Hardy (Saint-François), M. Merlini (La Prairie), M. Plante (Maskinongé), M. Polo (Laval-des-Rapides), Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré), M. St-Denis (Argenteuil), Mme Tremblay (Chauveau).

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Y a-t-il des abstentions? M. le leader du gouvernement

M. Fournier : ...avec le consentement de la Chambre, avant de faire le calcul des voix, M. le Président. Il y a le député de Nelligan qui s'est joint à nous et qui aimerait aussi pouvoir s'exprimer, avec le consentement de nos collègues.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, y a-t-il consentement pour permettre au député de Nelligan d'exercer son droit de vote?

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : M. le leader de l'opposition officielle, y a-t-il consentement pour permettre au député de Nelligan... Alors, consentement.

Le Secrétaire adjoint : M. Coiteux (Nelligan).

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Très bien. Alors, pour le résultat du vote. Merci.

La Secrétaire : Pour :         43

                     Contre :           54

                     Abstentions :     0

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, la motion est donc rejetée. Je cède la parole à nouveau à M. le leader adjoint du gouvernement pour la suite des choses.

M. Sklavounos : Je suggère la suite du débat qui avait suspendu à 13 heures, M. le Président, l'article 6.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, l'article 6 du feuilleton. Je vais suspendre quelques instants pour permettre aux députés de quitter l'enceinte de l'Assemblée.

(Suspension de la séance à 17 h 17)

(Reprise à 17  h 18)

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, l'Assemblée reprend le débat, ajourné plus tôt aujourd'hui, sur la motion de scission présentée par M. le député de Jonquière dans le cadre du débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.

Projet de loi n° 59

Adoption du principe

Reprise du débat sur la motion de scission

Je vous avise qu'il reste 39 min 23 s au groupe parlementaire formant le gouvernement, dans le cadre de ce débat. Et je cède maintenant la parole à Mme la ministre de la Justice.

Mme Stéphanie Vallée

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, pour moi c'est important d'intervenir sur la motion de scission, bien que je sois intervenue lors du début de nos échanges.

Le projet de loi n° 59, c'est un projet de loi qui s'inscrit dans un contexte particulier, qui s'inscrit dans le contexte du plan d'action qui a été déposé par notre gouvernement, du plan d'action qui vise à s'attaquer à une problématique qui s'exprime dans différents horizons, dans différentes façons et qui est la radicalisation. Et ce projet de loi vise à lutter contre les discours haineux, contre les discours qui incitent à la violence, des discours qui s'attaquent à des clientèles vulnérables, des clientèles qui sont déjà protégées par la Charte des droits et libertés de la personne et des clientèles qui sont trop souvent ostracisées par des discours d'une portée telle qu'elles en sont marginalisées, elles en sont mises à l'écart, et cette marginalisation à l'extrême apporte des conséquences importantes. Le projet de loi vise aussi, dans le cadre de cette lutte à la radicalisation, à apporter un certain nombre de modifications qui vont renforcer la protection des personnes.

• (17 h 20) •

Alors, M. le Président, c'est un tout. Les personnes les plus vulnérables sont protégées, d'une part, contre les discours haineux et incitant à la violence et, d'autre part, par une série de mesures bien identifiées qui permettent une meilleure intervention de l'État, une série de mesures bien identifiées qui ont fait l'objet bien souvent de recommandations au fil des années, suivant l'actualité, notamment qui a fait l'objet de recommandations de la part du Conseil du statut de la femme, de la commission des droits de la personne et de la jeunesse. Et donc il s'agit d'un tout, et il faut prendre les modifications, les dispositions législatives dans leur ensemble. Et dissocier le projet de loi, M. le Président — ce n'est pas compliqué — ça retarde les travaux, ça retarde l'entrée en vigueur de dispositions importantes pour la protection des plus vulnérables, protection à l'encontre d'une forme ou d'une autre de radicalisation.

M. le Président, on veut éviter des situations, notamment des situations telles que celles que nous avons vécues cet été. Rappelons-nous, M. le Président, cet été, la venue du rapper Roosh V, qui tenait des propos incitant à la violence notamment à l'égard des femmes, des propos qui ont été dénoncés sur toutes les tribunes, toutes les tribunes : Que va faire la ministre pour empêcher l'intervention ou la venue de Roosh V au Québec? La collègue d'Hochelaga-Maisonneuve demandait à notre gouvernement d'adopter des mesures pour sévir contre de tels propos, contre de tels personnages. Elle nous l'a demandé par communiqué, d'ailleurs. Elle nous a demandé d'agir rapidement. Le projet de loi n° 59 permet justement la mise en place de mesures pour venir intervenir directement et pour permettre de contrer ce type de discours, ce type de discours qui porte atteinte à l'égalité hommes-femmes, ce type de discours qui peut s'inscrire dans une certaine forme de radicalisation, parce que la radicalisation, M. le Président, elle n'est pas que religieuse; elle peut aussi être sociale, elle peut être culturelle.

Alors, on nous a demandé d'agir. Bien, agissons. Ne scindons pas un projet de loi pour retarder l'entrée en vigueur de dispositions qui vont nous permettre d'agir contre des situations comme celle que nous avons vécue cet été. Je vous parle de celle-là, M. le Président, de cette situation, de ces propos, parce que, lorsque j'ai lu le communiqué de ma collègue, je me suis dit : Bravo! c'est exactement ce qui est prévu dans 59, c'est là que nous allons, nous allons pouvoir obtenir une collaboration des collègues de l'opposition. Je vous avoue, ma collègue n'a pas participé à nos échanges, mais la collègue de Taschereau, elle ne semble pas du tout d'avis qu'on doive donner des outils pour contrer ce type de discours. Ce n'est pas nouveau, M. le Président. On le sait, qu'on ne se parle pas toujours, de l'autre côté de la Chambre.

Mais, vous savez, c'est quand même assez impressionnant de constater que l'ancienne ministre responsable de la Condition féminine ne soit pas sensible à l'importance d'intervenir dans de tels cas. Parce que la députée de Taschereau, avant la dernière élection, occupait les fonctions de ministre de la Condition féminine. Elle est très consciente des menaces du discours haineux, du discours incitant à la violence dont les femmes sont victimes. Pourquoi n'est-elle pas solidaire, M. le Président? Pourquoi ne travaille-t-elle pas à améliorer le projet de loi, mais travaille-t-elle pour le retarder? C'est ça qui m'interpelle, c'est ce qui me travaille, M. le Président, parce que, bien honnêtement, est-ce qu'un projet de loi peut être bonifié? Oui. C'est le travail que nous faisons en cette Chambre, que nous avons fait dans bon nombre de projets de loi. Je dois vous avouer, M. le Président, en huit ans et demi de vie parlementaire, très peu, très peu et même très rares ou exceptionnels sont les projets de loi qui ne font l'objectif d'aucune modification entre le moment de leur présentation et le moment de l'adoption. Prenons, par exemple, le projet de notre collègue la députée de Joliette sur les soins de fin de vie, projet de loi qui a reçu plus de 80 amendements, et c'est un projet de loi qui a été salué.

Alors, le travail parlementaire nous amène à échanger, nous amène à écouter, nous amène à bonifier. C'est la beauté de la chose. Ce que je souhaite, M. le Président, c'est que ce travail puisse se faire, puisse se continuer, parce que le projet de loi s'inscrit dans cette volonté commune de protéger les personnes vulnérables. Et de proposer une motion de scission tel que l'a fait notre collègue de Jonquière nous empêche justement de pouvoir nous pencher sur ces mesures, nous empêche de protéger davantage les personnes vulnérables. C'est une réponse législative, le projet n° 59, à une problématique, à un certain nombre de problématiques, je dirais, qui ont surgi, et c'est une réponse qui est claire. Est-ce qu'on peut collaborer? Est-ce qu'on peut travailler ensemble pour le bien de ceux et celles qui ont besoin de cette attention, qui auront besoin de ces outils?

M. le Président, lorsque j'ai pris parole, d'entrée de jeu, j'ai mentionné que des amendements seraient déposés, parce que j'ai été à l'écoute des citoyens. J'ai été, aussi, sensible aux questions et aux interventions de nos collègues de l'opposition. La députée de Montarville a soulevé des enjeux importants dans ses questionnements, et je pense qu'il est important d'apporter des réponses à certains questionnements soulevés par notre collègue. Nous le ferons, M. le Président. Je serai à l'écoute des demandes aussi qui seront formulées par les collègues parlementaires, des propositions d'amendement. Ce travail-là, il doit se faire ensemble pour contrer cette radicalisation, qui est montante et qui, malheureusement, s'attaque, d'abord et avant tout, aux personnes vulnérables. Briser, séparer, nous savons que c'est le motto de la première opposition, mais je nous invite à aller au-delà de l'idéologie, je nous invite à nous pencher sérieusement sur cet enjeu.

Comme je le mentionnais, M. le Président, le projet de loi n° 59 fait partie d'un tout, fait partie d'un plan de lutte global pour contrer la radicalisation. On souhaite dire non aux discours haineux, non aux discours qui incitent à la violence, on veut protéger les mineurs contre les mariages forcés, on veut permettre... et protéger, plutôt, les personnes vulnérables en leur donnant la possibilité d'obtenir des ordonnances de protection.

C'est un tout, M. le Président. Il y a un lien entre les dispositions prévues en première partie du projet de loi et les dispositions qui s'ensuivent. On veut protéger les enfants en introduisant la notion de contrôle excessif et assurer que, sur le territoire du Québec, nous puissions continuer de vivre dans un monde où le respect de la différence fait notre marque de commerce, que ce respect se fasse sans haine et sans violence. M. le Président, il est important de travailler sur ce projet de loi là de façon globale. Le scinder n'apportera aucun élément positif, ne permettra d'aucune façon d'aborder les questions de façon globale, ne permettra pas d'apporter rapidement une réponse aux préoccupations que la collègue d'Hochelaga-Maisonneuve a soulevées le 4 août dernier. C'est malheureusement ce qu'entraînera la scission de ce projet de loi là.

• (17 h 30) •

Alors, M. le Président, je sais que, du côté du Parti québécois, on veut opérer dans la division, on le propose en faisant la motion de scission, mais, au lieu de diviser, est-ce qu'on peut travailler ensemble, travailler collectivement pour nous permettre de faire avancer le Québec, pour nous permettre de lutter ensemble contre la radicalisation et de le faire d'une façon ouverte? Les éléments soulevés par notre collègue de Taschereau sont inexacts, M. le Président. Mais la députée — je relisais l'allocution de la députée de Taschereau — la semaine dernière, lorsqu'elle nous disait : On va créer un nouveau tribunal... Le projet de loi ne crée pas de nouveau tribunal, là. Le Tribunal des droits de la personne, il existe. D'ailleurs, il y a deux semaines, nous avons souligné son 25e anniversaire. Il existe. La Commission des droits de la personne, là, elle n'est pas nouvelle, elle existe depuis fort longtemps. D'ailleurs, nous allons fêter, en décembre prochain, les 40 ans, le 40e anniversaire, de la charte. Rien de nouveau dans tout ça, là, M. le Président.

On prétend qu'il y a une nouvelle définition du discours haineux. Il n'y a pas de nouvelle définition du discours haineux. Oui, est-ce que le projet de loi nécessite peut-être qu'une définition conforme aux dispositions, aux enseignements de la Cour suprême y soit inscrite à des fins notamment pédagogiques? Possiblement, M. le Président. Puis là-dessus j'ai entendu les interventions en commission parlementaire. Puis je pense qu'en effet, pour les fins d'acceptabilité sociale, pour bien comprendre ce qu'est le discours haineux, pour éviter qu'on dise et qu'on associe le discours haineux à ce qu'il n'est pas, nous avons le devoir de le définir. Nous allons le faire, M. le Président, c'est important. Parce que c'est important de mentionner, M. le Président, que le discours haineux, là, ce n'est pas le discours qui critique la religion, là. De l'autre côté, on tente de nous dire qu'on va empêcher la critique d'une religion. Pas du tout. La critique d'une religion, c'est sain dans une société démocratique. La critique d'une idée politique, c'est sain dans une démocratie, M. le Président. On doit pouvoir continuer. Et notre liberté d'expression, elle est essentielle. Il ne s'agit pas d'un projet de loi qui vient porter atteinte à cette liberté d'expression. Ce n'est pas ça. C'est un projet de loi qui reprend les enseignements de la Cour suprême, M. le Président, pas plus. La Cour suprême, dès 1990, a eu à se prononcer sur la notion de discours haineux. Ses décisions, au fil des ans, entre l'affaire Taylor et l'affaire Whatcott ont permis de définir, de dégager une définition de ce qu'est le discours haineux. Cette définition, ce concept est celui du projet de loi. Donc, ce n'est pas une nouvelle définition, ce n'est pas un nouveau concept complètement, c'est un concept qui est tiré de la jurisprudence, c'est un concept qui a été peaufiné et qui a fait l'objet de plusieurs, plusieurs décisions.

On nous rappelle, M. le Président, l'intervention de Me Grey, un juriste que je respecte infiniment, qui est venu en commission parlementaire et qui a manifesté certaines réserves à l'égard du projet de loi. Mais je vous dirais que, quelques semaines plus tard, dans un autre dossier qui a été fortement médiatisé, un dossier qui concernait le jeune Jérémy, Me Grey disait en entrevue dans La Presse que la liberté d'expression avait ses limites. Lui-même, le même Me Grey qui, quelques semaines plus tôt était devant notre commission.

Je pense que c'est important qu'on en parle. C'est important qu'on dise les choses telles qu'elles sont, qu'on ne fasse pas de raccourcis parce que ce projet de loi là, il est important pour notre société, M. le Président. C'est important qu'on comprenne sa vraie nature. C'est important qu'on explique ce qui en découle. C'est important que l'on mentionne que le pourquoi de ce projet-là est vraiment de protéger ceux qui celles qui sont les plus vulnérables de notre société à l'encontre, notamment, d'une radicalisation qui est montante.

Et, vous savez, on pourrait continuer et débattre pendant des heures de cette question parce que l'allocution de ma collègue, qui a été d'une durée de près d'une heure, comporte un certain nombre d'inexactitudes qu'il est important de corriger. Nous avons la responsabilité comme parlementaires de prendre le temps de bien lire les projets de loi, de les comprendre, et d'échanger de façon... avec une ouverture d'esprit, et de voir à ce que les projets de loi qui sont déposés ici puissent cheminer d'autant que ces projets de loi là visent à protéger les personnes les plus vulnérables et visent à donner des outils pour protéger également les femmes.

Alors, j'invite ma collègue ex-ministre de la Condition féminine à se rallier à notre cause, à travailler en collaboration avec les collègues et j'invite surtout, surtout les parlementaires de cette Assemblée à ne pas adopter cette motion de scission et à la mettre de côté pour permettre une étude complète d'un projet de loi qui est un tout et qui vise à contrer une problématique complexe, mais une problématique qui nous interpelle tous et qui nous interpelle toutes. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la ministre de la Justice pour cette intervention. Y a-t-il d'autres interventions du côté gouvernemental? S'il n'y a pas d'autre intervention, je vais répartir le temps et je vais offrir le temps à l'opposition officielle et à la deuxième opposition... Juste l'opposition officielle. M. le leader adjoint... M. le leader de l'opposition officielle, il reste du temps au débat. Je ne sais pas si vous voulez vous en prévaloir. Sinon, je vais...

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, le prochain intervenant. Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, désolé, vous n'étiez pas dans mon champ de vision. Je vous vois maintenant. Alors, je vous cède la parole.

Mme Carole Poirier

Mme Poirier : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour d'intervenir en lien avec votre décision, M. le Président, concernant la recevabilité de la motion de scission du projet de Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes.

Alors, M. le Président, je reprends votre décision en tant que telle où vous reconnaissez qu'il y a là deux parties dans ce projet de loi, où vous venez justement identifier qu'il y a une première partie où on vient créer finalement une loi en tant que telle et qui vient englober une partie de ce que la ministre vient de nous tenir comme discours, toute la partie sur les discours haineux et les discours incitant à la violence. Ça, effectivement, c'est un champ d'action en tant que tel que la ministre a tenté de couvrir avec son projet de loi qui est très différent, très, très, très différent, M. le Président de la deuxième partie.

Parce que la deuxième partie, M. le Président, est à mon avis une partie qui n'a pas besoin des mêmes... qui n'a pas les mêmes besoins que la première partie, je vais le dire comme ça. Que l'on parle de mariage forcé, que l'on parle d'ordonnance de protection, que l'on parle de la protection de la jeunesse, de sécurité physique ou morale des élèves et des étudiants, c'est à mon avis un sujet tout à fait différent que celui des discours haineux. Il ne s'agit pas du tout des mêmes objets. Il ne s'agit pas non plus des mêmes volontés pour les deux objets qui sont en cause. Je ne vois pas ce que viennent faire les discours haineux dans les mariages forcés. Je ne vois pas ce que viennent faire les discours haineux dans la protection de la jeunesse en tant que telle. Je ne vois pas le lien et je pense que vous ne l'avez pas vu, vous non plus, d'où votre décision d'accueillir cette motion de scission.

• (17 h 40) •

Alors, M. le Président, il y a là, dans ce projet de loi là, des consultations qui ont été tenues et je vais vous dire que j'ai rarement vu un projet qui réussit à faire autant de personnes qui pourraient... on pourrait penser qu'elles auraient été vers le même sens de décision ou la même lecture du projet de loi, mais qui n'en sont pas du tout. Quand je vois des personnes complètement contradictoires entre elles, mais rejeter, tout le monde, le projet, il y a là quelque chose qui m'interpelle. Quand je vois l'ex-collègue de la ministre, la députée Fatima Houda-Pepin, qui est venue en commission et qui nous dit que le projet de loi aidera à stigmatiser les critiques de... Excusez, je recommence. Elle dit que le gouvernement Couillard favorise... le gouvernement du premier ministre, le gouvernement libéral — je vais interpréter ce qui est écrit — favorise les intégristes avec le projet de loi n° 59 qui les aidera à stigmatiser les critiques de leurs pratiques rigoristes. Elle continue en disant : «"Je suis estomaquée. ", [Mme Fatima Houda-Pepin dit] à l'issue de sa comparution en commission parlementaire au sujet du projet de loi n° 59...» Et elle nous dit : «"C'est une revendication des intégristes depuis longtemps", estime l'ancienne députée[...]. Grâce au projet de loi n° 59, un groupe religieux, et non plus seulement une personne croyante, pourrait se dire la cible d'un discours haineux...»

Il y a là, à mon avis, M. le Président, une dérive importante que produit le projet de loi. Et, à cet effet, je reprendrais les propos de la ministre qui, semble-t-il, m'a citée à plusieurs reprises. Alors, je vais tout simplement relire le propos de la ministre qui s'est tenu en cette Chambre, qui dit : «...j'aimerais rappeler aux collègues ce que disait la députée d'Hochelaga-Maisonneuve le 4 août dernier [à] la venue du blogueur Roosh V, reconnu pour ses propos haineux envers les femmes.» Alors, déjà, là, il y a quelque chose de fondamental dans ce que dit la ministre, c'est qu'elle dit qu'il est reconnu pour ses propos haineux, donc, elle reconnaît qu'il avait des propos haineux.

«Elle a dit que c'était — elle parle de moi — le devoir du gouvernement de lancer un message pour indiquer que les propos haineux faisant la promotion de la violence envers les femmes étaient inacceptables.» Je pense que juste de lire ça et de le dire, c'est assez clair. Penser qu'un gouvernement accepte que des propos haineux soient tenus envers les femmes... et un gouvernement qui ne le ferait pas est, à mon avis, un gouvernement qui ne fait pas son travail de protection envers 50 % de la population qu'il gouverne.

Et elle continue en disant : «Je suis d'accord avec ma collègue[...]. C'est exactement ce que nous entendons faire avec le projet de loi n° 59.» Moi, je n'ai pas la même lecture, M. le Président. Et elle continue en disant : «Mais, pour lancer ce message fort que les propos haineux sont inacceptables, il faudrait que la députée de Taschereau écoute sa collègue et qu'elle collabore avec nous afin de faire cheminer nos travaux. J'espère [...] pouvoir compter sur son appui, pouvoir compter sur l'appui de la députée de Montarville [aussi]i, pouvoir compter sur l'appui des collègues de l'Assemblée pour permettre de faire cheminer rapidement cet important projet de loi.»

Alors, M. le Président, je trouve ça assez particulier, les propos de la ministre, m'utilisant pour justifier ce qu'elle veut faire. Parce que, quand je dénonce Roosh V je dénonce exactement ce que j'ai fait le 19 octobre 2011. Le 19 octobre 2011 — ça, la ministre ne l'a pas repris — en période de questions, j'ai interpellé la ministre de l'Immigration et je lui ai... Je vous lis au texte, M. le Président, la question que j'ai posée à la ministre de l'Immigration :

«Cette semaine doit se tenir à Montréal une conférence de l'Islamic Education and Research Academy avec pour conférenciers deux personnages aux opinions inacceptables. Comme d'autres avant eux, Hamza Tzortzis et Abdur Raheem Green viennent au Québec pour déverser leur flot de haine homophobe, antiféministe, antisémite et contre la liberté d'expression et tenter de présenter une image inacceptable de l'islam... une image acceptable de l'islam politique radical. Il n'y a pas de compromis possible avec de tels personnages. Pourtant, depuis plusieurs jours, ces deux individus sont entrés impunément au Canada, alors que l'Allemagne et les États-Unis leur ont signifié qu'ils n'étaient pas les bienvenus sur leur sol.

«Le ministre de la Sécurité publique peut-il nous dire pourquoi le gouvernement du Québec n'a rien fait pour exiger que le gouvernement fédéral interdise l'entrée au pays de ces deux personnages? Va-t-il exiger...»

Alors, la ministre de l'Immigration de l'époque, qui est toujours la ministre de l'Immigration maintenant, était intervenue, M. le Président, et nous avions adopté une motion, une motion unanime ici, pour dire que des personnages comme ça, on n'en veut pas. Pas eu besoin d'un projet de loi pour ça, là. Et, en plus, la ministre était intervenue parce qu'ils devaient faire leur conférence à Concordia. Et la ministre avait lancé un message fort en disant : J'invite l'institution de l'Université Concordia à ne pas accueillir ces personnages-là. C'est un message fort, ça. Moi, je n'ai pas entendu la ministre, cet été, faire la même chose pour Roosh V. Je ne l'ai pas entendue dire qu'elle était intervenue pour demander à l'institution qui accueillait Roosh V... Je ne l'ai pas entendue.

Alors, quand elle m'utilise, quand elle utilise mes propos, il faudrait qu'elle les utilise jusqu'au bout en disant ce qu'elle n'a pas fait. Et elle n'a pas besoin de la loi pour faire une intervention, elle n'a pas besoin d'une loi, comme ministre de la Condition féminine, pour se lever debout et dire : Je vais intervenir, je vais intervenir parce que je trouve ça inacceptable. Elle l'a dit, que c'était inacceptable, je dois le lui reconnaître. Je suis honnête là-dedans, elle l'a dit : C'est inacceptable, cet été, Roosh V. Je pense qu'il n'y a pas personne sur la Terre qui n'a pas dit que ce n'était pas inacceptable, et ça, elle l'a dit. Mais elle n'est pas intervenue et elle s'abrite en arrière d'une loi dont on n'a pas besoin pour faire ce que sa collègue a fait, qui est d'intervenir.

Alors, M. le Président, moi, quand je vois la ministre qui me cite, me disant que c'est inacceptable, les propos de Roosh V... Oui, c'est inacceptable, oui, c'est inacceptable, et il faut justement se lever debout à ce moment-là et intervenir. Il faut faire en sorte qu'il n'y ait pas de lieu pour recevoir ces gens-là, il n'y ait pas de possibilité pour ces gens-là de se faire entendre, puisqu'ils traitent...

Et moi, je me rappelle très bien, M. le Président, suite à cette motion que nous avons adoptée unanimement, moi, j'ai vu des gens de la communauté gaie juive, des gens de la communauté gaie juive venir ici, à l'Assemblée nationale, me remercier d'avoir fait adopter cette motion-là. Pourquoi? Parce que ces deux islamistes radicaux venaient porter un message homophobe radical. Je ne sais pas si ça existe, même, «homophobe radical». Je me pose même la question si ça se dit, ces deux mots-là, un à côté de l'autre. Mais c'était ça. Alors, ces gens-là, ces deux personnages qui étaient connus, bien le Canada les a laissés rentrer, M. le Président. Le Canada les a laissés rentrer sans se poser de questions malgré que les États-Unis, l'Allemagne, eux, étaient intervenus. Alors, M. le Président, le projet de loi de la ministre n'empêchera pas de laisser entrer ces gens-là. Le projet de loi de la ministre ne nous permettra pas, à part que de faire des motions ici, à l'Assemblée nationale, d'interpeller la commission, parce que son projet de loi, ce qu'il dit, c'est d'interpeller la Commission des droits de la personne. Ça n'empêchera pas ces gens-là de rentrer au Canada.

Ce qu'il faut faire, c'est d'avoir justement... Ma collègue avait proposé un observatoire précédemment. Bien, justement, cet observatoire-là nous aurait permis d'être en alerte à la venue de ce genre de personnages qui viennent tenir des propos absolument inadmissibles chez nous, des propos que l'on ne peut accepter et que même d'autres pays ont empêché justement d'entrer chez eux.

Bon, là, c'est sûr que je peux avoir la note facile de mon côté parce que, chez nous, nous, on y croit. Si nous étions un pays, on aurait pu intervenir sur nos frontières, mais on n'en est pas là. Mais on peut au moins dire au Canada, encore aujourd'hui, on peut leur dire, au Canada, qu'on n'en veut pas, de ces gens-là chez nous. Et c'est ce qu'on avait fait par une motion unanime, on avait dit que ces gens-là, on n'en veut pas chez nous, et on peut encore et encore le faire. Mais est-ce que le projet de la ministre va fermer les frontières du Canada, et particulièrement celles du Québec, parce que c'est celles-là qui nous intéressent, à des personnages qui vont vouloir venir tenir des discours haineux chez nous? Non, non, pas du tout.

Alors, M. le Président, avant de citer des collègues, comme l'a fait la ministre, bien, il faut faire l'histoire au complet. Mais, encore là, M. le Président, je suis toujours surprise de voir des personnes qui ne sont pas du tout de la même... des mêmes axes de pensée, je vais le dire comme ça, se prononcer tous contre ce projet de loi là.

• (17 h 50) •

Je vous ai parlé de votre ex-collègue la députée Fatima Houda-Pepin, la députée de La Prairie, qui rejette le projet de loi, mais, quand je vois Adil Charkaoui... Alors, on peut penser que ce sont des personnes qui ne sont pas du tout dans la même ligne de pensée... Adil Charkaoui ne veut pas du projet de loi n° 59. Bien, ce n'est pas pour les mêmes motifs, là. Alors, on voit bien que l'objectif du projet de loi n'atteint pas sa cible puisque les gens qui pensent totalement un contraire à l'autre rejettent tous les deux le projet de loi.

Alors, je vous cite ce qui est paru dans Le Devoir le 16 septembre dernier, M. le Président, sous la plume de Marco Bélair-Cirino, alors :

«Le prédicateur Adil Charkaoui accuse des élus de l'Assemblée nationale de l'avoir muselé dans la foulée de son passage mardi soir devant la Commission des institutions.

«Le porte-parole du Collectif québécois contre l'islamophobie a appelé la ministre de la Justice [...] à "abandonner" le projet de loi antidiscours de haine. À ses yeux, celui-ci ne contribuerait pas à "résorber" ou à "réduire" l'islamophobie, au contraire. Le projet de loi n° 59 — et je le cite — "cible implicitement toute une communauté" en établissant une "corrélation problématique entre l'islamophobie et la radicalisation".» C'est assez incroyable, M. le Président, que M. Charkaoui et Mme Fatima Pepin rejettent tous les deux le même projet de loi mais pour des motifs totalement contraires. C'est assez parlant, à mon avis.

Mais ce qui est le plus intéressant à cela, c'est le propos de Gérard Bouchard. Alors, Gérard Bouchard, qui, on le sait, est le père de toute la consultation importante qu'on a eue en 2007‑2008, pour lequel on a tabletté son rapport, eh bien, Gérard Bouchard nous dit dans La Presse du 16 septembre, même jour : «S'il est permis de ridiculiser les convictions d'un agnostique, pourquoi celles d'un croyant devraient-elles être exemptées?» Alors, il nous dit : «Récemment, Salam Elmenyawi est intervenu, à Québec, devant la commission parlementaire sur le projet de loi n° 59 visant à combattre les propos haineux. À cette occasion, le leader musulman — et, entre parenthèses, il est dit : "Il est président du Conseil musulman de Montréal" — a réclamé un amendement au projet de loi pour que, à l'avenir il soit formellement interdit de se moquer de l'islam.»

Est-ce que ça nous rappelle Charlie Hebdo? M. le Président, c'est assez incroyable qu'un citoyen vienne en nos murs après les événements de Charlie Hebdo et vienne tenir un tel propos. Notre liberté d'expression, elle est extraordinaire. Mais M. Salam Elmenyawi est venu dire ici qu'il demandait qu'il soit formellement interdit de se moquer de l'islam. Est-ce qu'il a mentionné «de toutes les religions»? Est-ce qu'il a mentionné «de la religion catholique»? Non, l'islam. Alors, pour M. Bouchard, que je continue à citer, «l'affaire mérite attention pour deux raisons. D'abord, [...]il parlait au nom de son association, [alors,] on suppose qu'il relayait une volonté exprimée par une majorité de ses membres. En deuxième lieu, cette demande est sans précédent; elle donne à penser qu'un mouvement d'idées pour le moins troublant serait en cours parmi certains milieux musulmans.» Et, un peu plus loin dans son texte, il nous dit : «Il fut un temps au Québec où il en était ainsi.» Et ça, il faut se rappeler notre histoire. «La religion catholique était intouchable. C'était avant que notre société n'accède pleinement au respect des différences, au respect des droits de chacun.»

On se rappellera, M. le Président, qu'avant les années 60, qui aurait osé s'attaquer à la religion catholique? Qui aurait osé faire une caricature? Certains journaux plus libertariens l'ont fait. Et on a vu comment l'Église catholique avait une mainmise sur la société québécoise. Notre société est passée à autre chose, notre société a évolué. La société québécoise n'est plus dans ce dogme-là des religions. Et là, ici, en cette enceinte, quelqu'un vient nous dire : Je ne vous permets... Je demande qu'il soit formellement interdit de se moquer de l'islam. Est-ce que quelqu'un au Québec viendrait dire aujourd'hui : Il est formellement interdit de se moquer de la religion catholique? Est-ce que quelqu'un viendrait dire ça? C'est un discours d'un autre siècle, ce n'est pas un discours actuel.

Alors, M. le Président, je vais vous dire que votre décision d'accepter cette demande de scission du projet de loi n° 59 nous apparaît fort judicieuse. Nous sommes tout à fait volontaires à discuter de la partie II du projet de loi, de parler des mariages forcés — oui, il faut en parler — de parler de l'ordonnance de protection — oui, puis j'ai bien des choses à dire là-dessus — de la protection de la jeunesse, de la sécurité physique ou morale des élèves et des étudiants. Oui. Et on peut démarrer des travaux très rapidement. Je pense que la ministre, au cours des auditions, a pris le pouls que la partie I de son projet de loi n'est pas adéquate, n'est pas... Ce n'est pas prêt, ce n'est pas mûr. Ce qu'elle nous a présenté n'est pas mûr. Alors, pour faire avancer le Québec, M. le Président, pour protéger des enfants, parce que, dans les mariages forcés, on parle des enfants, pour protéger des gens ici, débutons donc des travaux dans la deuxième partie. Et laissons la ministre continuer à travailler sur la première partie.

Je pense que le Québec, M. le Président, va en bénéficier, va bénéficier de faire avancer la deuxième partie, parce qu'on en a besoin. Mais, M. le Président, ce qu'on besoin actuellement, c'est de s'assurer que la ministre retourne faire ses devoirs, que la ministre continue son travail. Elle peut agir sur les discours haineux comme l'a fait sa collègue ministre de l'Immigration précédemment, comme l'ont fait d'autres collègues lorsqu'ils étaient titulaires de charges publiques, pour s'assurer qu'il n'y a pas, dans nos institutions qui relèvent de l'État ou subventionnées à majorité par l'État... on ne peut avoir de radicalisme, de propos radicaux qui s'y tiennent.

Alors, M. le Président, j'invite plutôt la partie gouvernementale aujourd'hui à soutenir cette demande de scission du projet de loi, et à faire en sorte que l'on puisse régler les mariages forcés et la deuxième partie de ce projet de loi dans les meilleurs délais, et de faire en sorte que le débat sur la première partie, qui est les discours haineux, soit retravaillé afin que l'on puisse justement avoir une loi qui réponde vraiment aux besoins de notre société. Alors, merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, merci à vous, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Je vais maintenant mettre aux voix la motion qui se lit comme suit :

«Qu'en vertu de l'article 241 du Règlement de l'Assemblée nationale, le projet de loi n° 59, Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence et apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes soit scindé en deux projets de loi :

«Un premier intitulé Loi édictant la Loi concernant la prévention et la lutte contre les discours haineux et les discours incitant à la violence, comprenant l'article 1 et l'article 43; et

«Un second intitulé Loi apportant diverses modifications législatives pour renforcer la protection des personnes, comprenant les articles 2 à 43.»

Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Vote par appel nominal, M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Sklavounos : Je vous demanderais, en vertu de l'article 223, M. le Président, de reporter le vote à demain, aux affaires courantes.

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Ouimet) : Alors, conformément à la demande du leader adjoint du gouvernement, le vote sera reporté à demain, après la période des affaires courantes.

Ajournement

Compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux à demain, 9 h 40. Merci. Bonne fin de soirée.

(Fin de la séance à 18 heures)