Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures seize minutes)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il
vous plaîtl
Un moment de recueillement, s'il vous plaît!
Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes.
Déclarations ministérielles.
M. le ministre du Revenu.
Prolongation du délai pour
bénéficier de deux régimes
M. Raynald Fréchette
M. Fréchette: M. le Président, en vertu des
pouvoirs qui me sont confiés par la loi du ministère, il me fait
plaisir d'annoncer la prolongation du délai de production des demandes
de prestations pour les régimes de supplément au revenu de
travail et du remboursement d'impôts fonciers.
Ainsi, les citoyens qui croient être admissibles à l'un ou
l'autre de ces deux programmes auront jusqu'au 30 juin 1981 pour produire leur
formulaire au ministère du Revenu. Certaines difficultés
techniques ont rendu inaccessible la demande pour nombre de requérants
et, parmi ces difficultés, l'impression des formulaires qui ne nous sont
pas parvenus à temps pour que le délai statutaire du 30 avril
soit respecté.
Nous espérons que ce délai exceptionnel permettra à
tous les citoyens, qui comptent sur ce revenu supplémentaire auquel ils
ont droit, de prendre avantage du supplément au revenu de travail et du
remboursement d'impôts fonciers.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Saint-Laurent.
M. Claude Forget
M. Forget: M. le Président, en faisant cette
déclaration ministérielle, le nouveau ministre du Revenu semble
vouloir faire la démonstration que le proverbe bien connu, à
savoir que le ridicule tue, ne s'applique pas.
On comprend, quand un gouvernement veut percevoir des impôts ou
veut imposer à des citoyens des obligations que ceux-ci n'ont aucune
incitation à poursuivre ou à rechercher de leur propre
côté, qu'il impose des délais. C'est ainsi qu'on
connaît très bien, malheureusement et douloureusement, le
délai qui s'applique à la production d'une déclaration
d'impôt le 30 avril.
On comprend moins que lorsqu'il s'agit d'attribuer des
bénéfices à la population, et particulièrement
d'aider des personnes qui sont près du seuil de la pauvreté ou
qui sont dans des situations économiques difficiles dans le cas des
personnes âgées, le gouvernement impose des délais. De ce
côté-ci, on n'a jamais compris cette question de délai,
sauf par un désir du gouvernement de limiter ses engagements.
Voilà que le ministre du Revenu nous annonce comme une grande
victoire que la mesquinerie avec laquelle le gouvernement a instauré ce
régime va être suspendue encore pendant quelques semaines. Cette
décision, même s'il s'en fait une grande gloire, n'est rien
d'autre que l'aveu que ce régime, mal annoncé et mal
conçu, semble-t-il, puisqu'il n'a jamais réussi à
dépenser la totalité des crédits que le ministre des
Finances, maintenant le président du Conseil du trésor mettra
à sa disposition, doit faire l'objet successivement de reports dans les
échéances pour produire des demandes de la part des citoyens. (10
h 20)
Je pense qu'on est en face d'un aveu, que la mesquinerie du gouvernement
a porté ses fruits, qu'elle a tellement porté ses fruits que
ça devient indécent et qu'il faut désormais, comme on l'a
fait dans le passé, suspendre un peu l'application de cette clause, de
cette guillotine pour la présentation des demandes.
Je pense que c'est une bonne occasion pour suggérer au
gouvernement de revoir ce programme de manière à rendre
accessibles à tous les citoyens gui se qualifient les
bénéfices du régime, indépendamment des dates et de
la bureaucratie gouvernementale qui est encore emmêlée dans toutes
ces procédures.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du
Revenu.
M. Fréchette: Je n'aurais qu'un très court
commentaire à ajouter. J'ai comme l'impression qu'il n'y a que le
député de Saint-Laurent qui n'est pas heureux de la
décision que je viens d'annoncer. Il s'agit de régimes qui sont
relativement nouveaux et pour lesquels la loi prévoit des délais,
mais justement à cause du fait qu'il s'agit de régimes nouveaux,
il nous paraît important de donner un délai de cette nature. Ce
n'est d'ailleurs pas la première fois qu'une semblable décision
est prise.
Le député de Saint-Laurent peut être malheureux s'il
le veut, mais les bénéficiaires du régime, eux, s'en
réjouiront,
j'en suis sûr.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Dépôt de
documents.
M. le ministre du Revenu.
Remises de droits, peines et
pénalités
M. Fréchette: Conformément aux dispositions de la
loi, j'ai l'honneur de déposer un état détaillé des
remises de droits, peines et pénalités accordées par le
lieutenant-gouverneur en conseil en vertu de l'article 94 de la Loi sur le
ministère du
Revenu depuis le 11 novembre 1980, date du rapport
précédent, jusqu'au 1er juin 1981.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Documents
déposés.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Dépôt de rapports du greffier en lois sur les projets de
loi privés.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Questions orales des députés.
M. le député de Nelligan.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
M. Lincoln: M. le Président, j'aurais une question pour le
ministre de l'Environnement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): II arrive. Vous pouvez y
aller, M. le député.
Projet Stablex à Bienville
M. Lincoln: Je préfère atttendre le ministre pour
qu'il entende bien la question. M. le ministre a dû aller faire une
petite inspection à l'île Rochon.
Cette fois-ci on va laisser les moutons de l'île Rochon dormir sur
les remblayages anciens, nouveaux et nouveaux nouveaux et on va aller visiter
un autre petit parc. Cela s'appelle le projet Stablex à Blainville. Le
projet Stablex à Blainville est un des deux projets qui avaient
été considérés pour une usine de déchets
industriels. Blainville et Mascouche. Mascouche a été
rejetée parce que la grande majorité des citoyens de Mascouche
s'opposait. Nous avons reçu une pétition dont j'avais une copie
de quelque 6500 citoyens adultes de Blainville, ce qui indique qu'une grande
majorité d'une population de seulement 13 000 âmes s'oppose
fondamentalement à ce projet. Les conclusions de bureau d'audiences
publiques de l'environnement sont aussi très contraires. J'aurais voulu
demander au ministre quels sont les critères dont il s'est servi,
quelles sont les raisons fondamentales qui ont appuyé sa recommandation
au Conseil des ministres pour décider que Blainville était le
site rêvé pour cette usine de déchets industriels.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Environnement.
M. Léger: M. le Président, je dois d'abord dire que
je suis surpris que le député, qui a passé cinq heures
avec moi en commission parlementaire, n'ait pas jugé bon de poser des
questions là-dessus. Il a préféré le faire en
Chambre. C'est son privilège. M. le Président, je dois quand
même lui faire remarquer...
Une voix: C'est pour les caméras.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît:
M. Léger: Ah, c'est peut-être pour les
caméras.
Une voix: ...le temps des caméras.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît:
M. Léger: M. le Président, je ferai remarquer que
dans les affirmations du député, il y a plusieurs erreurs. La
première, c'est que Mascouche n'a pas été
écartée parce que les citoyens ne le désiraient pas. C'est
tout simplement parce que le choix du terrain que la compagnie avait fait et le
choix du terrain que la municipalité avait fait au moment des audiences
publiques a été changé. Donc, il n'y avait plus de demande
précise sur le terrain pour lequel il y avait eu audiences publiques
à Mascouche.
Concernant Blainville, le député parle d'une
pétition de 6000 et quelques noms de citoyens. Je dois quand même
lui faire remarquer que cette pétition a circulé entre la
première audience publique et la deuxième, au moment de toutes
les peurs et de toutes les chinoiseries de gens plus ou moins au courant qui
pouvaient exprimer quelque crainte que ce soit. Donc, ce n'est pas une
pétition qui a été signée après l'audience
publique. La preuve, c'est que durant les audiences publiques, au début,
il y avait beaucoup de présences, beaucoup de personnes, beaucoup de
participation, et dans la deuxième série de séances, les
gens ayant eu la plupart des réponses à leurs
préoccupations, il n'y avait pratiquement plus de personnes qui
assistaient aux dernières séances. D'ailleurs, il n'y a eu que
onze mémoires de présentés.
Quels sont les critères sur lesquels le ministre de
l'Environnement s'est basé pour établir une recommandation au
Conseil des ministres pour le choix de Mascouche? Il y a plusieurs
critères, mais d'abord,
premièrement, il est important de comprendre que dans tout le
Québec, il y a environ 80 000 000 de tonnes de déchets
inorganiques qui doivent être traités, c'est-à-dire
transformés. Ces déchets n'ont pas d'issue, au moment où
on se parle, sauf le stockage. Il faut donc une usine de traitement. Cette
usine de traitement doit donner un procédé sécuritaire et
la compagnie Stablex nous a démontré qu'elle avait un
procédé sécuritaire qui transforme les déchets
inorganiques en un produit qui, maintenant, aux États-Unis, est
qualifié de matériau. Troisièmement, la
municipalité de Blainville a elle-même demandé que la
compagnie choisisse un site chez elle. Quatrièmement, le terrain sur
lequel elle va être située aura, en plus des études qui ont
déjà été faites, d'une étude telle que les
citoyens le demandaient, soit une étude plus poussée, une
étude hydrogéologique des sols pour s'assurer qu'il y aura une
imperméabilité et aussi pour apporter tous les correctifs
voulus.
Il faut donc conclure que, la municipalité le désirant, le
procédé étant expérimenté dans plusieurs
autres pays, le fait que nous ayons besoin d'un traitement de déchets
comme tel et que le Bureau d'audiences publiques ne conclue pas - son
rôle n'est pas de conclure, son rôle est d'être l'oreille du
ministre auprès des citoyens pour écouter leurs objections, leurs
amendements ou leurs demandes - nous avons donc donné à la
compagnie Stablex onze conditions qu'elle devra respecter, avec la
municipalité et le gouvernement, pour s'assurer que le permis soit
donné. La plupart de ces conditions étaient demandées par
les citoyens de Blainville, entre autres, la bretelle d'autoroute qui permet
aux camions de circuler en dehors de la municipalité. Pour
protéger l'environnement de tout le Québec en respectant
l'environnement des gens de Blainville, je pense que c'était la
meilleure décision qu'il fallait prendre.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Nelligan.
M. Lincoln: M. le Président, tout d'abord, pour rectifier,
je n'ai jamais posé la question sur le principe même d'une usine
de déchets industriels. J'ai posé la question: Pourquoi avez-vous
choisi le site de Blainville? Le Bureau d'audiences publiques n'émet pas
de conclusions, mais si on lit un commentaire après l'autre, en
commençant par le premier qui dit que la quasi-totalité des
intervenants était contre le site de Blainville, cela semble
négatif, et c'était très négatif. (10 h 30)
Le ministre pourrait-il me dire, puisque vous jugez maintenant que,
justement, une étude plus approfondie sur l'imperméabilité
du site deviendra nécessaire plus tard, pourquoi cette étude n'a
pas été faite avant que le Conseil des ministres adopte son
arrêté? En plus, n'est-il pas vrai que les experts du
ministère, et plusieurs chefs-experts du ministère, dans
plusieurs rapports, se sont prononcés catégoriquement contre le
site de Blainville qu'ils ont critiqué sous beaucoup de chefs, les chefs
les plus importants étant, justement l'imperméabilité des
sols, l'eau potable, etc., le rapport Stablex. Enfin, n'est-il pas vrai que sur
certains de ces rapports on indiquait de ne pas diffuser... citations vagues
seulement... secret, etc.?... Le sujet étant d'une telle importance,
j'aurais voulu savoir si le Conseil des ministres connaissait la conclusion du
rapport principal qui dit: II nous apparaît qu'après avoir
pesé tous les aspects environnementaux et les risques possibles
associés, nous pouvons dire avec suffisamment de certitude que nous
devons dès maintenant éliminer l'emplacement de Blainville et
orienter l'étude vers l'emplacement de Mascouche, et le cas
échéant, vers un nouvel emplacement. Ainsi, nous pourrons
répondre hors de tout doute raisonnable aux critères de
sécurité mis de l'avant par le ministère de
l'Environnement en vertu de son mandat de protection de l'environnement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député.
M. Lincoln: Je pense que la question est importante, on va placer
des citoyens dans la situation d'avoir une usine de déchets quand les
experts du ministère et plusieurs rapports sont contre. Je veux demander
au ministre...
M. Laplante: C'est assez, c'est assez.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît,
s'il vous plaît.
S'il vous plaît, en demandant au député de vouloir
bien...
M. Lincoln: Je veux demander au ministre: Est-ce que les
conclusions de ces nombreux rapports très négatifs sur Blainville
ont été considérés par le Conseil des ministres?
Et, ayant été considérés, pourquoi ont-ils
été ignorés?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Environnement.
M. Léger: M. le Président, je pense que le
député devrait avoir un peu plus de rigueur dans les affirmations
qu'il fait. Premièrement, quand il affirme que dans le texte du bureau
de audiences publiques on dit que la quasi-totalité des intervenants
se
sont prononcés contre c'est sûr, c'est normal, parce qu'une
audience publique est pour entendre ceux qui s'opposent à des projets.
C'est normal que les gens viennent donner leur point de vue d'opposants. Il ne
s'agit pas de les ignorer, comme le député semble vouloir le
dire. Au contraire, c'est en tenant compte de ce qu'ils disent et en prenant
une décision pour la majorité des citoyens qu'on doit
régler un problème de cette envergure.
Mais, nécessairement, ceux qui étaient pour n'ont pas
d'intérêt à aller à une audience publique. Ceux qui
sont indifférents n'ont pas d'intérêt non plus, c'est
normal. Il y a eu onze mémoires contre. Beaucoup de gens au début
sont allés et, ayant eu la réponse à leur question,
à la fin il n'y avait pratiquement plus personne.
Deuxième affirmation du député de Nelligan: II y a
eu des critiques dans le ministère, de hauts fonctionnaires du
ministère se sont opposés au projet. Je pense qu'il veut faire
allusion à un rapport interne d'un secteur du ministère de
l'Environnement dont la tâche précise est justement de faire le
travail dont le député vient de parler.
Quand une compagnie ou un promoteur a un projet de développement
et qu'on exige une étude d'impact, dès que l'étude
d'impact est entrée au ministère, le travail précis de ce
groupe, au ministère, est de poser toutes les questions, toutes les
objections, pour qu'on puisse y apporter des réponses à
l'intérieur du ministère. C'est pour ça que ce rapport est
un rapport interne qui nous amène à apporter les réponses
aux préoccupations de ce service, dont c'est la tâche. Nous avons
donc des rapports de l'ensemble du ministère qui recommandent le
site.
Je termine en relevant la dernière question du
député qui dit: Pour quelle raison n'accepte-t-on pas une
recommandation qui dit de s'installer à Mascouche plutôt
qu'à Blainville? Le député parle d'une usine de
déchets; ce n'est pas une usine de déchets, ça peut
prêter à confusion; c'est une usine de transformation de
déchets. C'est donc dire que ce qui arrive à l'usine, ce sont des
résidus beaucoup moins compacts que les produits qui sont
utilisés dans toutes les usines que nous avons au Québec, c'est
à peine 10% de densité de produits, soit chimiques ou
inorganiques. Ils sont traités et transformés. C'est donc dire
que le projet a toutes les mesures sécuritaires voulues pour le
bien-être de la population et on a tenu compte, dans les onze
recommandations, des demandes des citoyens, et c'est ce qui est important.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Nelligan.
M. Lincoln: M. le Président, le ministre parle d'un
rapport interne, moi, j'ai vu je ne sais combien de rapports, il ne s'agit pas
d'un seul rapport, mais de plusieurs rapports, de plusieurs personnes
différentes qui se prononcent dans le même sens.
Je comprends que ce soit une usine de transformation de déchets
je comprends que ce n'est pas une usine qui prend des déchets et qui les
resort de la même façon.
Ma dernière question est la suivante: Est-ce qu'un des facteurs
qui aurait motivé la décision du ministre est le fait qu'un des
gros contractuels du ministère de l'Environnement, très bien
payé, soit, par coïncidence - coïncidence heureuse pour lui,
très malheureuse pour les citoyens de la ville - en même temps un
conseiller municipal à Blainville, soit aussi - par heureuse
coïncidence pour lui, malheureuse pour les autres, un organisateur
politique du Parti québécois qui a été
impliqué dans la dernière campagne électorale. Est-ce que
cela a joué dans l'affaire?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Environnement.
M. Léger: M. le Président, au contraire, c'est un
avantage pour la municipalité d'avoir un spécialiste de
l'environnement comme conseiller municipal. C'est une garantie
supplémentaire que toutes les mesures de sécurité ont
été prises pour s'assurer que le projet soit un avantaqe
économique pour la municipalité qui verra 18 000 000 $
d'investissements chez elle...
Des voix: Bravo!
M. Léger: ...qui verra une possibilité
d'augmentation de paiement de taxes par une compagnie de cette envergure, donc
une baisse de taxes pour les citoyens, et qui verra une solution moderne
à un problème que nous vivons. Je tiens à dire ceci: c'est
qu'une personne qui est contractuelle, cela veut dire qu'elle travaille quand
elle a des tâches précises par contrat. Ce n'est pas un
fonctionnaire permanent. Donc, je dois assurer, avant que le
député voisin dont je remarque un regard assez foudroyant
réagisse, que ce conseiller municipal- qui est un contractuel,
n'était pas, durant la campaqne électorale, à l'emploi du
ministère de l'Environnement et qu'il n'a jamais été
payé par le gouvernement pour travailler pour les élections.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Groulx, question additionnelle.
M. Fallu: Nous avons eu l'occasion, hier soir, en commission
parlementaire, de parler un peu du dossier Stablex. Je suis tout à fait
étonné de voir l'un des intervenants à la commission se
réveiller ce matin subitement devant les caméras et faire un
débat
politique avec un dossier très technique.
Hier soir, j'ai posé une série de questions au ministre,
sauf qu'il y en a une que j'ai oubliée. Si vous me le permettez, c'est
l'occasion rêvée ce matin de la poser.
Vous avez posé onze conditions pour l'installation de l'usine
Stablex à Blainville. Il y en a une, je crois, qui, si elle est remplie
et vérifiée par la suite, est peut-être le sceau de
garantie. C'est le dépôt de la formule Sealosafe que vous avez
exigé pour que votre ministère connaisse bien le processus, le
procédé, de telle sorte qu'on puisse évaluer le
degré de sécurité du procédé lui-même.
Est-ce que la compagnie a accepté ce dépôt?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Environnement (10 h 40)
M. Léger: M. le Président, non seulement elle l'a
accepté, mais nous l'avons déjà au ministère, la
formule, en secret, nécessairement, puisque c'est un
procédé industriel qui doit être tenu secret. Nous l'avons
au ministère. Nous avons aussi, parmi les conditions
réclamées à la compagnie, un bon de 1 000 000 $ pour
garantir que la compagnie va respecter toutes les conditions de
sécurité émises dans son permis. Il ne faut pas oublier
non plus que ces investissements vont amener au Québec un siège
social qui aurait pu être sis en Ontario et c'est une autre raison pour
laquelle nous l'avons fait.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Brome-Missisquoi, question additionnelle.
M. Paradis: À la suite des révélations qui
nous ont été faites par le député de Nelligan, le
ministre de l'Environnement peut-il s'engager, devant cette Chambre, dans le
dossier de Stablex, de Blainville, à ne pas suivre les recommandations
du contractuel, payé plus de 25 000 $ par année par le
ministère de l'Environnement, ami personnel du ministre et maître
de cérémonie à l'ouverture des élections partielles
dans le comté de Brome-Missisquoi. Cela commence à être
loin de Blainville. Pour ne pas le nommer, il porte le nom de M. Claude
Vallée. Est-ce que le ministre peut s'engager à ne pas suivre les
recommandations de son ami, mais à suivre les recommandations du Bureau
d'audiences publiques dans ce dossier?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Environnement.
M. Léger: J'aurais de la difficulté à suivre
les recommandations du Bureau d'audiences publiques puisque ce n'est pas son
rôle. Il n'y a pas de recommandations, il y a tout simplement une
constatation de ce que les citoyens demandent. Concernant les amis...
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Léger: C'est ça, c'est le rôle du Bureau
d'audiences publiques. Je pense qu'il va falloir que vous vous consultiez
davantage dans votre parti parce que le nouveau député de
Nelligan a posé autant de questions en trois semaines que tout le Parti
libéral en quatre ans.
J'admets avec le député de Brome-Missisquoi que nous avons
beaucoup d'amis et celui-là, en particulier, en est un autre.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Laporte, question principale.
M. Bourbeau: Ma question s'adresse au ministre des
Transports.
Une voix: Lequel?
Remboursement du déficit de
fonctionnement de la CTRS
et de la CTCUM
M. Bourbeau: Le ministère des Transports doit à au
moins deux commissions de transport du Québec, soit la Commission de
transport de la rive sud de Montréal et la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Montréal, des sommes importantes au titre
de la contribution gouvernementale au déficit de fonctionnement de ces
deux commissions de transport pour l'année 1979. En ce qui concerne la
Commission de transport de la rive sud de Montréal, on sait qu'il s'agit
d'une somme d'environ 3 000 000 $ calculée au 1er mai 1981, somme que le
gouvernement s'est engagé à rembourser en quatre versements
annuels à compter de l'année 1982. Or, la Presse du 3 avril
dernier nous apprenait qu'en ce qui concerne la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Montréal il s'agirait d'une somme de 53 700
000 $ que le gouvernement se serait engagé à rembourser en sept
versements annuels, ce qui, en additionnant les intérêts au taux
courant, ferait une somme d'environ 120 000 000 $, soit approximativement deux
fois le coût du Palais des congrès.
J'ai une question à deux volets à poser au ministre. Le
ministre peut-il confirmer que la dette du gouvernement envers la Commission de
transport de la Communauté urbaine de Montréal, pour payer sa
part du déficit de fonctionnement de l'année 1979, est bien de 53
700 000 $, laquelle résultera en un déboursé d'environ 120
000 000 $ avec les intérêts et sera remboursable en sept ans
à compter du 1er mai 1982?
Deuxièmement, est-ce là une nouvelle
politique du gouvernement d'échelonner sur plusieurs
années le paiement de ces dettes sur les déficits de
fonctionnement des commissions de transport du Québec?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des
Transports.
M. Clair: Effectivement, il y a eu des engagements pris à
l'égard de la CTRSM et de la CTCUM relativement au déficit de
fonctionnement. Est-ce que c'est juste pour l'année 1979 ou pour un
certain nombre d'années? Je ne m'en souviens pas
précisément. Effectivement, il y a eu des engagements pris au
moment de la réforme de la fiscalité municipale en
particulier.
Quant à la première question du député de
Laporte, qui me demande de confirmer avec exactitude les montants, je ne suis
pas en mesure de le faire à brûle-pourpoint. Je dis qu'il s'agit
d'un ordre de grandeur semblable à celui auquel il réfère,
de mémoire. Maintenant, plutôt que de donner des chiffres
précis sans avoir avec moi les documents, je préférerais
lui répondre à la prochaine occasion. Si mon collègue le
ministre des Finances, qui a présidé à la réforme
de la fiscalité municipale, veut ajouter des choses là-dessus
pour l'information du député...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des
Finances.
M. Parizeau: M. le Président, effectivement,
l'année 1979 est une année charnière où on termine
un mode de financement autrefois basé sur un pa des déficits.
Cela s'est terminé avec l'année 1979. En même temps, on a
inauguré un nouveau mode de financement des commissions de transport,
basé cette fois sur le revenu et qui s'accompagne aussi d'une subvention
sur la carte mensuelle de transport. L'année 1979 étant à
la charnière, le montant résiduel qui restait à payer dans
ce déficit annuel sera effectivement remboursé sur une
période d'années. Cela ne s'applique qu'à l'année
1979 à cause d'un système de subventions qui disparaissait en
même temps qu'un autre était introduit. Il s'agit d'un
problème spécifique à l'année 1979. Effectivement
les montants dont on parle, encore une fois, je ne les ai pas
vérifiés récemment, mais ce sont de l'ordre de grandeur de
ceux qui sont mentionnés par le député de Laporte.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Laporte.
M. Bourbeau: Question additionnelle, M. le Président.
Étant donné que le financement des commissions de transport au
Québec est assuré en partie par les usagers, en partie par les
municipalités et en partie par le gouvernement du Québec, le
gouvernement entend-il accorder aux usagers du transport en commun et aux
municipalités des facilités de crédit semblables et leur
permettre d'étaler leurs contributions sur une période
d'années?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des
Transports.
M. Clair: M. le Président, je pense que la réponse
à la question du député de Laporte se trouve dans sa
propre question finalement. Je pense qu'il veut faire un jeu de mots. Comme le
ministre des Finances l'a expliqué précédemment, dans la
mesure où il y avait, jusqu'à l'année 1979, un mode de
financement des systèmes de transport en commun et qu'on chanqe ce mode
de financement, c'est tout à fait normal - je pense que le citoyen moyen
comprend ça -qu'il y ait une année charnière où il
y a un résidu à absorber. On change de régime et le
nouveau système prévoit le financement, je pense, d'une
manière qui est très acceptable et qui est acceptée par
l'ensemble des intervenants et des usagers.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Beauce Sud.
M. Mathieu: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant. M. le ministre
délégué à l'Habitation.
Tardif: M. le Président, c'est peut-être important
de situer le problème parce que la question du député de
Laporte risque de laisser entendre que le financement du déficit du
transport en commun pour l'année 1979 n'est assumé dans le temps,
n'est étalé que par le seul gouvernement. Ce n'est pas exact. La
loi 57, d'accord, prévoit trois modalités de paiement. À
compter de l'an 1 de la réforme fiscale, le 1er janvier 1980, le
déficit d'exploitation d'une année donnée doit être
payé au cours de la même année. Ceci avait
été fait, entre autres, parce que les municipalités
trouvaient que les taux d'intérêt pour payer l'année
suivante le déficit de l'année antérieure étaient
extrêmement élevés. Exemple: dans le cas de la
Communauté urbaine de Montréal, les frais de financement
temporaires pour, les déficits d'exploitation s'élevaient
à plus de 15 000 000 $ seulement, de sorte qu'il a été
convenu qu'à compter de la première année de la
réforme de la fiscalité les dépenses d'exploitation ou le
déficit d'exploitation devraient être payés dans
l'année en cours, ce qui faisait, pour l'année 1980, deux
montants à payer, celui de l'année 1979 et celui de
l'année 1980.
Les municipalités ont eu - c'est dans la loi 57 - la
possibilité de faire trois choses: payer comptant ce déficit des
deux années ensemble, l'étaler sur une période
donnée ou y affecter leur surplus de l'année antérieure.
Par exemple, la ville de Montréal a décidé, en l'an 1 de
la réforme, de payer comptant sa part du déficit d'exploitation
de 1979, soit 42 000 000 $, à cause de la réforme fiscale. Dans
certaines municipalités, comme Laval -un instant, M. le
Président, on veut avoir des précisions, on va en avoir - la
municipalité payait avec deux années de retard son déficit
d'exploitation, ce qui entraînait des frais de financement beaucoup plus
considérables. La situation présente fait donc qu'il y a eu cette
période de chevauchement. Les municipalités peuvent étaler
dans le temps l'année 1979, le gouvernement également et,
à compter de 1980, tout le monde paie les dépenses courantes dans
l'année en cours. (10 h 50)
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Beauce-Sud.
L'aide aux producteurs de porc
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Vous aurez
deviné que ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
Des voix: Ah?
M. Mathieu: C'est malheureusement la troisième semaine que
je dois revenir à la charge, M. le Président, et j'espère
faire une pêche plus fructueuse ce matin qu'au cours des deux
dernières semaines. Devant la...
Une voix: Tu n'as pas...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Mathieu: ...détérioration rapide de la
situation, le ministre ne semble pas être sensibilisé aux
problèmes des producteurs de porc.
Des voix: Ah!
M. Mathieu: Je le déplore grandement. De plus, il semble
tout à fait imperméable aux avenues de solution. Il n'a encore
rien annoncé depuis trois semaines.
M. le Président, l'on sait au moins une chose, pour les naisseurs
qui ne sont pas assurés par l'assurance-stabilisation, il ne fera rien.
Il me disait l'autre jour que cela ne représentait presque personne. Le
gouvernement du Canada, l'office de stabilisation a donné des
chèques l'année dernière à 2983 naisseurs. Le
ministre disait qu'il y en avait environ 1560 qui étaient
assurés. Je comprends qu'il peut y avoir des naisseurs finisseurs dans
le groupe qui restent, mais, en tout cas, il y a au moins un large secteur pour
lequel le ministre ne fait rien.
Après trois semaines d'incurie, M. le Président, et devant
la situation qui devient de plus en plus corsée, devant des faillites
qui se multiplient, devant l'inquiétude du monde agricole, je demande au
ministre ce matin s'il est enfin en mesure d'annoncer un programme d'aide
d'urgence pour les finisseurs, ceci afin de compléter l'aide
fédérale.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Garon: M. le Président, je ne sais pas si, ayant le
numéro de téléphone de l'office canadien de stabilisation,
le député de Beauce-Sud a eu la curiosité de demander de
recevoir son programme. Moi, je l'ai reçu et je remarque que
l'état de ses questions...
Des voix: Ah! Ah!
M. Garon: J'ai vu, M. le Président, qu'une fois
renseigné le député de Beauce-Sud...
M. Mathieu: M. le Président, question de règlement!
Question de règlement!
Une voix: II n'y a pas de question de règlement!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant! Un instant! Un
instant! M. le député, j'aurai probablement l'occasion de vous
accorder une question additionnelle. Vous pourrez à ce moment-là,
si vous le voulez, faire votre remarque à la suite de la remarque du
ministre. M. le ministre.
M. Garon: J'ai compris aussi, M. le Président, que la
question du député de Beauce-Sud cette semaine était bien
différente des questions antérieures. Comme je l'avais
anticipé, voici ce que dit - et c'est pour cela qu'avec sagesse j'ai
attendu d'avoir ce document - le gouvernement fédéral, tel quel:
"Les paiements de stabilisation du prix du porc versés par les
gouvernements provinciaux seront déduits du montant qu'un producteur
peut obtenir du programme fédéral."
Des voix: Ah! Ce n'est pas possible!
M. Garon: Si vous allez dans les modalités, on entre
encore plus dans le détail. Ce matin, je reçois encore des
télégrammes, par exemple, du ministre de l'Agriculture de
l'Ontario qui se plaint parce qu'il n'a pas eu la même sagesse en
Ontario
qu'au Québec, l'Alberta également. Avec sagesse, nous
avons préféré agir différemment, dans l'ordre de
priorités pour les producteurs de porc qu'on entendait développer
pour les aider à traverser une période financière
difficile. Si on donne 2 $ ou 3 $ le porc immédiatement, le
fédéral va déduire ces 2 $ ou 3 $ de son paiement à
lui. Cela va avoir coûté de l'argent aux contribuables
québécois, sans donner un cent de plus aux producteurs de
porc.
Une voix: C'est ça.
M. Garon: Cela expligue les modalités sur lesquelles nous
nous sommes orientés avec l'expérience acquise quand nous avions
été coupés dans le boeuf en 1977, soit un régime
spécial de crédit que nous avons adopté l'an dernier et
que nous allons remettre en vigueur avec des modalités
particulières. C'est une question d'heures maintenant.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Beauce-Sud.
M. Mathieu: M. le Président, à la suite de la
remarque du ministre, je veux vous mentionner que j'ai le document en main
depuis samedi, c'est un document qui est daté du 21 mai. Le ministre
semblait faire un secret d'État, un secret très important de ce
fameux document. Je ne peux pas croire qu'il ne l'ait pas eu avant cela. Le
ministre nous dit: J'attendais, avant d'annoncer l'aide que j'étais pour
accorder, de connaître les modalités du fédéral,
pour ne pas que le fédéral diminue son aide en fonction de celle
que je vais accorder. Jusque-là, je suis d'accord, M. le
Président, mais ça fait trois semaines que le programme est
connu. Qu'attend-il, M. le Président? C'est ce que nous nous
demandons.
De plus, le ministre nous disait, l'autre jour: L'Alberta conteste le
programme fédéral de l'Ontario. Mais depuis quand
défend-il les intérêts de l'Ontario? Cela lui tient
tellement à coeur! Savez-vous pourquoi l'Alberta conteste? C'est parce
qu'elle a versé 9,50 $ à ses producteurs, et le gouvernement
fédéral dit: Ils en ont eu assez, on va en donner à ceux
qui n'en ont pas assez. C'est une mesure que j'approuve. Je veux
démystifier la réponse incomplète du ministre. Ce que je
veux lui demander avant tout, c'est de ne pas faire de la petite politique sur
le dos du fédéral. Devant la situation qui se
détériore de jour en jour, devant les faillites qui se
multiplient, quand, enfin, annoncera-t-il son aide? Est-ce qu'on doit
comprendre que son silence implique un refus d'aide supplémentaire?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Garon: M. le Président, je ne fais pas de politique
avec l'agriculture, mais nous faisons des politiques agricoles, c'est
différent. Je peux vous dire ceci. Pourquoi les gens
n'étaient-ils pas au courant du régime? C'est parce qu'ils ne
l'ont pas reçu avant nous. Je vous disais, la semaine dernière,
que je recevais des communiqués des autres provinces qui
s'enquéraient autant que nous des modalités. On a reçu
aussi, je pense que c'est vendredi, le communiqué du gouvernement
fédéral. Que voulez-vous? On ne l'a pas eu avant. C'est
évident...
M. Mathieu: Qu'allez-vous faire?
M. Garon: J'ai discuté avec la Fédération
des producteurs de porc pour leur dire que nous irions dans le sens d'une
extension du crédit spécial pour retarder la date de
l'assurance-stabilisation afin de donner une plus longue période
à ceux qui veulent s'assurer, pour également oublier un
remboursement d'intérêt sur une période difficile, par
exemple, la période qui va du 31 mars au 31 août, des mesures
comme celle-là.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. le député d'Orford, une question additionnelle.
M. Vaillancourt (Orford): Une question additionnelle. M. le
Président, le ministre de l'Agriculture semble trouver drôle de
voir tous les producteurs de porc sur le bord de la faillite. Je reçois
une demande de la Fédération de l'UPA de Sherbrooke qui dit
qu'environ 50% des producteurs de porc de la région vont faire faillite
si le gouvernement ne prend pas rapidement une décision pour leur venir
en aide. Si le ministre n'est pas capable de négocier avec le
gouvernement fédéral, je pense qu'il devrait donner sa place
à un autre. Le gouvernement fédéral est prêt
à aider les agriculteurs, mais je pense que le ministre n'est pas
capable de négocier avec lui. Qu'il démissionne, qu'il donne sa
place à un autre qui va certainement en être capable.
M. le Président, je demande au ministre quand il interviendra
auprès de ses collègues du Conseil des ministres pour aider les
producteurs de porc avant qu'ils fassent tous faillite.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre. (11
heures)
M. Garon: Je vois que le député d'Orford n'a rien
compris, parce qu'au fond ceux qui vont recevoir un paiement intégral du
gouvernement fédéral, actuellement, il y a Terre-Neuve où
il n'y a pas de production de porc, il y a l'Île-du-Prince-Édouard
où il
n'y en a à peu près pas, il y a le Québec et le
Manitoba et possiblement aussi la Colombie britannique qui a un régime
d'assurance-stabilisation qui ressemble à celui du Québec. Dans
les autres cas, tous les paiements faits par les provinces vont être
déduits du paiement fédéral. Je vais vous lire ce qu'il y
a pour l'Ontario: 5,33 $ par sujet jusqu'à concurrence de 1600 porcs
couverts par le programme provincial. Pourquoi? Parce que le programme
provincial paie 3,63 $. 3,63 $ plus 5,33 $, cela fait 8,96 $ exactement. Il y a
3,63 $ qu'ils ne recevront pas parce qu'il y a un paiement
d'assurance-stabilisation fait par la province sans tenir compte du paiement
fédéral.
Pourquoi le Québec s'est-il orienté ainsi? Regardez, tous
les commentateurs actuellement dans le domaine de l'agriculture vous disent: La
province qui passe le mieux à travers la crise, alors que c'est la
province qui a le plus haut pourcentage de production, 36% de la production
canadienne, c'est le Québec. Pourquoi? Parce que nous avons
adopté des mesures de crédit qui correspondent aux besoins
actuels des producteurs pour leur permettre de passer à travers la
crise. Mais, actuellement, si le gouvernement fédéral lorsqu'il y
a un paiement fait en vertu de l'assurance-stabilisation par une province, le
déduit de son paiement, cela ne donne rien pour une province de
s'orienter dans cette voie. Ce n'est pas une question de mésentente;
c'est une application de la politique du gouvernement fédéral
depuis un certain nombre d'années. Je suis obligé d'en tenir
compte dans les propositions.
Maintenant, que faut-il faire? Il faut y aller d'un crédit pour
permettre aux gens de passer a travers la période difficile qu'ils
auront à traverser. Qu'est-ce que j'ai dit éqalement? C'est que
la période qu'ils vont avoir à traverser, c'est dans les mois qui
viennent. C'est vrai que les producteurs sont serrés. Ceux qui sont
serrés financièrement, ce sont plutôt...
Des voix: Ah!
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, M.
le ministre.
M. Garon: Je n'ai jamais caché cela. J'ai même
donné le nombre de gens en vertu des études qu'on a faites au
crédit agricole. Je peux vous dire une chose, par exemple,
peut-être que vous ne savez pas. Il y a eu 1463 demandes formulées
à l'Office du crédit agricole l'an dernier sur 1136...
Une voix: Ce n'est pas le même chiffre que l'autre
fois.
M. Garon: J'ai dit un peu plus de 1100, vous allez comprendre,
attendez donc. 1463 producteurs ont pris la formule pour l'emporter chez eux,
vous comprenez cela; qui sont revenues à l'office, 1136. C'est ce que
j'ai dit. Je n'ai pas parlé des gens qui ont demandé des
formulaires; j'ai parlé de ceux qui les avaient remplis. Je pensais que
c'était plus important.
Alors, 1136 ont été retournés à l'Office du
crédit agricole. Là-dessus, il y en 892 qui ont été
acceptés. Sur les 892 qui ont été acceptés, 44 ne
se sont pas prévalus du prêt qui leur avait été
accordé et le reste s'en est prévalu pour un montant d'environ 21
800 000 $. Actuellement, on a parlé avec les producteurs de nouvelles
mesures; il s'agit de reporter des paiements dans la période difficile
qu'il y a actuellement pour ces producteurs qui ont été
identifiés.
Pour vous donner une idée à quel point le crédit
agricole n'a pas été aussi serré qu'on le dit, si on avait
été aussi serré qu'on le dit, les 892 producteurs qui se
sont prévalus de leur crédit spécial à un taux
d'intérêt de 5% la première année, au taux
d'intérêt actuel, se seraient tous prévalus de leur
crédit. Pourquoi 44 ne s'en sont pas prévalus? Parce qu'on a
appliqué cela d'une façon assez large - on ne peut pas accorder
un crédit seulement à ceux qui sont près de mourir - pour
permettre de passer à travers à ceux qui avaient des
difficultés.
Il y a 44 producteurs sur 892 qui ne s'en sont pas prévalus. On a
identifié les gens qui sont en difficulté. Actuellement, on va
proposer des mesures qui vont aller dans le sens d'aider ces qens à
continuer à passer à travers la période difficile qui est
un peu plus longue que prévu. Mais essentiellement, ces gens ont besoin
de liquidités à l'heure actuelle et c'est ce qu'on va leur
proposer.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. M. le
député de Roberval, question principal.
Conflit de travail à la CIP de La Tuque
M. Gauthier: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre du Travail, ou à son adjoint parlementaire. On vit dans notre
région un conflit particulièrement important dont on a eu
l'occasion de parler ici qui est celui de la CIP à La Tuque, qui
implique 1500 travailleurs dont 500 de mon comté, depuis plus de 11
mois.
Je voudrais savoir quelles sont les interventions... On sait, entre
autres, que dans la question du travail à forfait, le ministre du
Travail a déjà exprimé des points de vue positifs face
à ce problème et qu'il y a également à la Quebec
North Shore des avenues de règlement possibles. Je voudrais savoir ce
que le ministère entend faire à court terme pour favoriser un
règlement qui est extrêmement urgent dans ce cas, puisque
le conflit dure depuis onze mois.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. l'adjoint parlementaire
au ministre du
Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu.
M. Dean: M. le Président, à titre d'adjoint
parlementaire au ministre du Travail, de la Main - d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, il me fait plaisir de répondre
à la question.
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Dean: Nous avons reçu lundi une demande du syndicat de
nommer un médiateur dans ce conflit; c'était la première
demande pour un médiateur. Le médiateur a été
nommé hier. Il s'agit de M. Pierre-N. Dufresne, et nous lui demandons
d'intervenir le plus rapidement possible afin d'aider les parties à
apporter une solution à ce conflit qui dure depuis déjà
onze mois.
Il s'agit de souligner que le ministère et le ministre
lui-même, par une intervention vigoureuse dans le domaine des contrats
à forfait, ont apporté une solution au conflit à la Quebec
North Shore et une solution par étapes au problème des contrats
à forfait pour les travailleurs du bois.
Cette recommandation va aider à résoudre le présent
conflit. Il reste un point majeur et quelques points mineurs en litige. Le
point majeur, c'est la réduction de la semaine de travail avec
compensation.
Le médiateur a été nommé dans les 24 heures
suivant la demande et nous demandons avec insistance aux deux parties en
conflit de mobiliser toute leur bonne foi et leur bonne volonté dans le
but de régler ce conflit grâce à l'aide que peut apporter
le médiateur, M. Dufresne.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Une question principale,
tout en étant bref, puisqu'il reste très peu de temps à la
période de questions. M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
L'âge d'admission à
l'école
M. Lalonde: M. le Président, ma question porte sur
l'âge d'admission et s'adresse au ministre de l'Éducation;
l'âge d'admission à l'école primaire et, par voie de
conséquence à la maternelle.
Depuis plusieurs années, alors que la Loi sur l'instruction
publique crée une obligation de fréquentation scolaire à
tout enfant à compter de l'âge de six ans, les règlements
du gouvernement interdisent cette fréquentation pour l'année
courante à tout enfant qui n'aura six ans qu'à compter du 1er
octobre.
À une époque où on ferme des écoles,
où la dénatalité a réduit considérablement
la clientèle scolaire au niveau primaire, de nombreux parents
réclament le droit d'inscrire leurs enfants, même s'ils n'auront
six ans que plus tard au cours de l'année.
Le Parti libéral du Québec avait appuyé cette
demande et l'ancien ministre de l'Éducation, englouti qu'il était
dans le trou de 500 000 000 $, n'avait jamais pu trouver les fonds
nécessaires. Or, le nouveau ministre de l'Éducation, s'appuyant
sur un décret adopté par le Conseil des ministres le 25
février 1981, annonçait le lendemain, le 26 février, dans
le cadre d'un nouveau régime pédagogique, la modification de
l'âge d'admission du 1er octobre au 31 décembre, progressivement,
sur une période de trois ans.
Le document qu'il a distribué en conférence de presse et
intitulé "Version commentée du règlement" fait
état, à l'article 2, de la date du 31 décembre, comme si
c'était déjà fait. Toutefois, nous apprenions après
l'élection, par la Gazette officielle, que c'était toujours le
1er octobre.
Je veux demander au ministre comment il se fait qu'il ait
annoncé, quelque temps avant l'élection, aux quelques milliers de
parents concernés qui se sont sûrement réjouis de cette
décision, une modification qui n'était pas contenue au
décret adopté la veille de son annonce. Est-ce une erreur, assez
incroyable dans un document aussi officiel, ou est-ce simplement opportunisme
électoral?
Le Vice-Président (M. Jolivet):
Brièvement, M. le ministre de l'Éducation.
M. Laurin: Non, ce n'est pas une erreur, M. le Président.
Pour les raisons que le député évoque et pour d'autres qui
circulent depuis longtemps dans l'opinion publique, il est évident qu'il
y a de bonnes raisons de considérer le report de la date d'admission.
(11 h 10)
Dans le projet de règlement pédagogique que j'ai eu le
plaisir de présenter au Conseil des ministres, cette clause
n'était pas incluse, mais je l'ai présentée verbalement.
Nous en avons longuement discuté au Conseil des ministres, et le Conseil
des ministres a pris la décision, a annoncé l'intention, dans un
avenir prochain, de retarder la date d'entrée à l'école
d'une façon progressive étalée sur trois ans, un mois
à la fois. Mais il reste qu'il y a une différence entre
déclarer son intention, prendre des décisions de principe et les
concrétiser et les matérialiser dans des textes. Il faut
évidemment tenir compte, comme vous venez de le dire, de la loi, des
changements législatifs qui peuvent s'imposer. Tout en
annonçant notre intention très ferme, en prenant notre
décision de principe, nous nous sommes réservé une
période de temps pour matérialiser, selon toutes les
règles traditionnelles, cette décision dans les textes
législatifs et réglementaires. Nous le ferons au cours des mois
qui viennent et cette intention que nous avons manifestée sera
intégralement respectée. À partir de septembre 1982, la
date d'admission sera modifiée, tel que nous l'avons annoncé.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Fin de la période
des questions.
Motions non annoncées. M. le ministre de l'Éducation.
Décès de Mgr Jean-Marie
Lafontaine
M. Camille Laurin
M. Laurin: M. le Président, c'est avec une grande
tristesse que nous avons appris le décès prématuré
de Mgr Jean-Marie Lafontaine, évêque auxiliaire de
Montréal. Tous ceux qui ont eu le plaisir d'approcher ce pasteur et cet
homme en gardent un souvenir inoubliable.
Mgr Lafontaine était, bien sûr, comme chacun le sait, un
homme de travail qui s'est dévoué constamment pour toutes les
causes qui lui ont été soumises. Il y apportait la diligence en
même temps que le jugement et le sens critique que tout le monde s'est
employé à lui reconnaître.
Mais bien plus qu'un homme de travail, c'était un homme
d'écoute. Son coeur était ouvert à toutes les
difficultés dont on venait l'entretenir et particulièrement
lorsqu'elles venaient des plus démunis, des plus
défavorisés, des plus pénalisés par
l'existence.
C'était aussi un homme de paix. On ne compte plus les nombreux
conflits où on a eu recours à son expertise, que ce soit dans le
domaine du travail ou dans le domaine universitaire, conflits qu'il a
tenté de régler le plus souvent avec succès grâce
justement à ses qualités fraternelles, d'écoute, d'accueil
à l'endroit de tous ceux qui venaient lui parler de leur aspect du
problème, grâce à son jugement et aussi et surtout
grâce à l'esprit de paix qui lui faisait inventer les solutions
les plus appropriées.
En même temps, je pense qu'il s'est avéré un
pasteur, un homme de prière qui rayonnait dans tous les milieux qui ont
eu à le fréquenter.
C'est donc avec une grande tristesse que nous avons appris son
décès. Cette perte sera cruelle non seulement pour sa famille,
mais éqalement pour son évêque, pour son diocèse,
pour tous les groupes qui l'ont connu et aussi, je dirais, pour toute la
population et toute la collectivité.
C'est à ce titre que j'offre à la famille, au nom du
gouvernement, mes plus ardentes sympathies, que j'offre éqalement
personnellement mes prières et qu'au nom du gouvernement je transmets
à l'évêque de Montréal ainsi qu'à toute sa
famille spirituelle l'expression de notre peine et de notre sympathie.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le chef de
l'Opposition.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, ayant bien connu personnellement
Mgr Lafontaine, je m'associe a la douleur qu'exprime le ministre de
l'Éducation au nom du gouvernement ce matin à l'occasion du
décès de Mgr Lafontaine. Comme plusieurs le savent, il a
succombé à une longue et cruelle maladie qui l'avait affaibli
depuis de nombreux mois déjà.
C'était un homme remarquable. C'est assez rare que, dans un
Parlement, on souligne le décès d'un évêque
auxiliaire, si importantes que soient ses fonctions, mais je pense que
celui-là était plus qu'un évêque auxiliaire au sens
classique du terme. C'était un pivot, une cheville ouvrière non
seulement pour l'Église de Montréal, mais pour l'Église du
Québec. Il était associé pratiquement à toutes les
questions importantes qui ont été posées à
l'Église du Québec au cours des 2Q dernières
années. Comme l'a dit le ministre de l'Éducation, on aimait
recourir à lui parce que c'était un homme de grand jugement, un
homme doté de vertus de conciliation extraordinaires, capable de
pénétrer les deux points de vue dans une situation difficile avec
une sympathie presque éqale. C'est vrai qu'il avait une
préférence pour les faibles, mais il savait, même avec
cette préférence, rester juste envers tous. Cela est très
important aussi. Je pense que le député de Prévost se
souviendra d'une chose à laquelle nous avons été
associés: le conflit de Pratt et Whitney.
J'avais eu l'honneur de siéger, avec Mgr Lafontaine et quelques
autres citoyens, au sein d'un comité de conciliation qui avait
été formé de manière assez spontanée et qui
a joué un très qrand rôle, je pense, dans le
règlement du conflit qui avait pourri pendant si longtemps. Mgr
Lafontaine avait été nommé spontanément par les
membres du comité comme président de cette éguipe de
travail au sein de laquelle il devait déployer d'une manière
admirable ses vertus de patience, de compréhension et, je dirais, de
longanimité qui lui permettaient de suivre une situation aussi longtemps
qu'elle n'en était pas arrivée à un stade où elle
pouvait pratiquement se résoudre d'elle-même.
C'était un très grand homme d'Église
aussi, moderne, comprenant les grandes différences de points de
vue qui caractérisent la société d'aujourd'hui, mais en
même temps attaché à une doctrine sûre et stable, pas
du tout enclin à voler au gré de toutes les modes du moment, mais
capable de comprendre, cependant, les opinions nouvelles qui se faisaient jour.
Je pense que pour nous tous, c'est une perte très douloureuse. J'exprime
aussi à l'évêque de Montréal, aux collègues
de Mgr Lafontaine dans le sacerdoce et à tous les citoyens qui l'ont
connu, aux membres de sa famille en particulier, les condoléances de
l'Opposition.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est donc
adoptée.
Enregistrement des noms sur les votes en suspens.
Avis à la Chambre.
Le leader adjoint du gouvernement.
Avis à la Chambre
M. Bertrand: II n'y a pas d'avis particulier à la Chambre,
sauf que j'aimerais immédiatement, avant de faire les motions d'usage
pour que les commissions parlementaires puissent siéger et que nous
commencions nos travaux d'étude en deuxième lecture d'un projet
de loi, signaler immédiatement à la Chambre, avant que les
députés ne quittent pour les commissions parlementaires, que nous
nous retrouverons ici tous ensemble pour souligner un événement
fort important et qui, je pense, cadre bien avec ce qui vient de se
dérouler. Nous avons, à Québec, un nouvel
archevêque, Mgr Louis-Albert Vachon. Il sera ici à 12 h 30 avec
l'ex-archevêque pour le qrand diocèse de Québec, tout l'Est
du Québec, Mgr Maurice Roy, et l'Assemblée nationale
procédera à une cérémonie un peu
particulière. Tous les députés sont appelés
à suspendre les travaux, que ce soit en commission parlementaire ou
à l'Assemblée nationale, à 12 h 30.
Pour le reste, s'il n'y a pas d'autres questions posées en vertu
de l'article 34, nous pourrions procéder immédiatement.
Recours à l'article 34
Le Vice-Président (M. Jolivet): En vertu de l'article 34,
Mme la députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais demander au leader du gouvernement si
le gouvernement a toujours l'intention de faire adopter la loi 15 avant la fin
des travaux de cette session. C'est une loi à l'endroit de laquelle nous
avons exprimé notre sympathie, mais elle soulève quand même
des points d'interrogation dans la population et les dirigeants de la FTQ entre
autres, sans compter certains éditorialistes et d'autres commentaires
que nous avons entendus, ont suggéré qu'elle ne soit pas
adoptée trop rapidement, sans qu'on en ait considéré tous
les éléments extrêmement complexes. La FTQ,
particulièrement, a même suggéré la tenue d'une
commission parlementaire.
Est-ce que le leader pourrait nous indiquer les intentions du
gouvernement à l'endroit de la loi 15?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Bertrand: Nous souscrivons, Mme la députée, au
sentiment que vous exprimez. Bien que nous ayons toujours l'intention d'essayer
de faire adopter cette loi le plus rapidement possible. S'il s'avérait,
en cours de route, qu'il était plus prudent, pour toutes sortes de
considérations, dont celles que vous avez
énumérées, d'en retarder l'adoption finale jusqu'à
l'automne prochain, nous n'y verrions pas d'objection fondamentale. Nous sommes
donc, sur ce point, ouverts à des discussions qui pourront avoir lieu au
cours des prochaines jours.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Mont-Royal, en vertu de 34. (11 h 20)
M. Ciaccia: Hier, j'ai demandé au leader parlementaire
quand il déposerait les détails du programme de l'accès
à l'habitation. Dans sa réponse, le leader parlementaire avait
indiqué que toutes les modalités n'avaient pas encore
été déterminées et acceptées par le Conseil
des ministres et qu'aussitôt que le Conseil des ministres aurait
approuvé les détails, ils seraient déposés à
l'Assemblée nationale et le public pourrait en avoir connaissance. Je
comprends que mercredi, habituellement, il y a un Conseil des ministres. Est-ce
que le leader parlementaire adjoint peut nous dire aujourd'hui si les
détails du programme ont été acceptés? Si oui,
est-ce qu'on peut s'attendre que ces détails soient
déposés à l'Assemblée nationale
préférablement avant la deuxième lecture du projet de loi
qui doit avoir lieu demain, ici à l'Assemblée?
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Bertrand: Je comprends l'insistance du député de
Mont-Royal. Je n'aurai que quatre mots: "Même réponse
qu'hier".
M. Scowen: En vertu de l'article 34.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Hier, lors d'une question que j'ai posée au
ministre de l'Industrie et
du Commerce, j'ai essayé de souligner certaines contradictions
dans la politique économique. Ma façon de le faire était
très malhabile et je veux offrir mes excuses sincères à
ceux qui étaient affectés implicitement ou explicitement: M.
Biron, M. Samson, M. Ryan et même M. Duplessis.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint, sur
les motions.
M. Bertrand: M. le Président, ce n'était pas en
vertu de 34, mais je pense que toute l'Assemblée nationale
apprécie le geste hautement parlementaire que vient de poser le
député de Notre-Dame-de-Grâce. Pas d'autres questions en
vertu de 34?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cela va.
Avis à la Chambre
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais maintenant faire
motion pour que siègent à compter d'immédiatement les
commissions parlementaires suivantes. Au salon rouge, la commission
parlementaire des corporations professionnelles pour en étudier les
crédits. Cette commission devrait commencer ses travaux vers 11 h 30 et
j'indique qu'elle les suspendra à 12 h 30 pour recommencer normalement
demain matin. D'accord? Je fais aussi motion pour que la commission
parlementaire des finances et des comptes publics entreprenne ses travaux pour
l'étude de ses crédits à la salle 81-A, de 11 h 30
à 12 h 30 toujours, et qu'elle les poursuive cet après-midi,
toujours à la salle 81-A, de 15 heures à 18 heures. Maintenant,
j'indique, pour l'information des députés de l'Opposition et
aussi, bien sûr, du côté ministériel, que
jusqu'à 16 heures cet après-midi, c'est le président du
Conseil du trésor qui sera l'interlocuteur gouvernemental pour
l'Opposition et qu'à compter de 16 heures jusqu'à la fin, ce sera
le ministre des Finances.
Maintenant, j'indique aussi que cet après-midi, de 15 heures
à 18 heures, siégera la commission parlementaire permanente des
communications pour l'étude des crédits du ministère. Je
fais aussi motion pour que ce soir, de 20 heures à 24 heures, la
commission parlementaire des communications poursuive au salon rouge
l'étude de ces crédits qui prendra fin normalement autour de 24
heures ou un peu avant si on peut arriver à étudier cela en moins
de temps. La commission des finances et des comptes publics, toujours avec le
ministre des Finances, poursuivra l'étude de ses crédits à
la salle 81-A, et la commission des affaires sociales, à la salle 91-A,
entreprendre l'étude article par article du projet de loi no 10 sur la
protection de la jeunesse. Ce sont les motions, M. le Président, que je
fais à ce moment-ci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, ces motions
sont-elles adoptées?
M. Levesque (Bonaventure): Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Affaires du
jour. M. le leader adjoint.
M. Bertrand: Après entente avec le leader parlementaire de
l'Opposition, nous avons accepté de collaborer pour que nous puissions
modifier un peu notre travail aujourd'hui. Nous aurions environ une heure pour
disposer du projet de loi no 12, inscrit au nom de Mme la ministre de la
Fonction publique. Cet après-midi, lorsque nous reprendrons nos travaux
à 15 heures à l'Assemblée nationale, c'est le ministre de
l'Environnement qui procédera à son discours en deuxième
lecture sur le projet de loi no 8, Loi modifiant la Loi sur la qualité
de l'environnement. C'est un peu l'arrangement auquel on en est arrivé.
Si cela tient toujours, nous pourrions donc prendre l'heure qui nous resterait
pour étudier le projet de loi inscrit au nom de Mme la ministre de la
Fonction publique.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, c'est exact.
Une seule réserve, c'est que le gouvernement ne prenne pas plus de temps
que l'Opposition pour disposer du projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Bertrand: J'ai obtenu de Mme la ministre qu'au lieu de prendre
la demi-heure qu'elle s'était proposé de prendre dans le cadre de
ce débat, elle n'en prenne que la moitié, soit environ quinze
minutes, pour que d'autres parlementaires puissent aussi y participer.
J'espère qu'on obtiendra la même collaboration du
côté de l'Opposition pour que celui qui répliquera à
Mme la ministre ne prenne pas la demi-heure ou l'heure à laquelle il
aurait normalement droit.
Projet de loi no 12 Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture du
projet de loi no 12, Loi modifiant la Loi sur la Fonction publique. Mme la
ministre de la Fonction publique.
Mme Denise Leblanc-Bantey
Mme LeBlanc-Bantey: Merci, M. le
Président.
C'est avec beaucoup d'humilité, mais également avec
énormément de fierté que je viens proposer à cette
Chambre aujourd'hui... On va attendre quelques minutes, si je comprends
bien.
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît. Mme la ministre.
Mme LeBlanc-Bantey: Les promenades étant terminées,
on va se permettre de continuer, M. le Président.
Je disais donc que c'est avec beaucoup d'humilité, mais
également avec énormément de fierté que je viens
proposer à cette Chambre aujourd'hui l'adoption en deuxième
lecture du projet de loi no 12 apportant certaines modifications à notre
actuelle Loi sur la Fonction publique. Humilité parce que je suis
consciente que ma nomination à ce poste, que je me permets de qualifier
de névralgique, constitue un défi à la personne qui
l'occupe et encore plus, - il faut bien l'admettre - à quelqu'un qui est
une femme. Avoir la responsabilité générale de la gestion
de quelque 70 000 personnes ne peut être une sinécure pour qui que
ce soit. Je pense que l'on conviendra que cela devient encore plus difficile
lorsque, pour la première fois dans l'histoire de la fonction publique,
une femme est appelée à sa direction.
En me confiant la responsabilité de ce ministère, j'estime
que le premier ministre voulait donner un indice bien concret que les femmes
dans la société québécoise contemporaine pouvaient
accéder à n'importe quel poste, même ceux qui, par le
passé, pouvaient être considérés comme des chasses
gardées masculines. Pour que mes paroles ne puissent être
interprétées de façon partisane, il me faut sans doute
faire allusion à l'innovation qui date du gouvernement Lesage au moment
où on avait nommé Mme Claire Kirkland-Casgrain et dire que cela
s'était continué par la suite sous le gouvernement Bourassa avec
la députée actuelle, si ma mémoire est bonne, de Chomedey.
Nous espérons que, dans l'avenir, nous continuerons de plus en plus de
reconnaître l'efficacité incontestable des femmes.
Des voix: Bravo!
Mme LeBlanc-Bantey: Je parlais aussi de fierté et je
pensais surtout, vous me le permettrez, ce qui est tout à fait
compréhensible, aux sentiments qu'éprouvent mes commettants des
Îles-de-la-Madeleine du fait que, pour la première fois depuis la
Confédération, une des leurs est appelée au Conseil des
ministres.
Cela étant dit, avant qu'on me dise que je ne suis pas dans le
cadre de mon discours, je voudrais mettre en perspective le sens des
modifications que le projet de loi no 12 vise à apporter à la
législation que cette Chambre a adoptée en juin 1978. Pour ce
faire, j'aimerais rappeler brièvement les objectifs de la loi 50, telle
que parrainée par le député actuel de Charlesbourg. On se
souviendra que les objectifs majeurs de la loi 50, mise en vigueur en avril
1979, étaient de deux ordres. En premier lieu, nous voulions
créer une fonction publique plus efficace par une gestion davantage
décentralisée et mieux encadrée. En deuxième lieu,
il s'agissait de renforcer le principe du mérite en assujettissant les
nominations et les promotions à la règle du mérite et en
évitant ainsi tout soupçon de favoritisme politique. Le temps et
l'usage ont indiqué que cette règle de la sélection au
mérite avait en quelque sorte un caractère qui,
rétrospectivement, s'est avéré quelque peu
impératif et, en fait, absolu. Pour être plus précise, ce
sont certaines dispositions qui s'y rattachent indirectement et parfois
l'interprétation qui en a été faite qui ont eu pour effet
d'amoindrir l'efficacité visée. Je me dois ici de souligner que
c'est mon prédécesseur immédiat, le député
d'Abitibi-Ouest et ministre d'État à l'Aménaqement, qui a
été l'instigateur des modifications dont le projet de loi no 12
est le reflet. C'est lui gui, à la suite de commentaires, de critiques
et de suggestions des divers membres de ministères et d'organismes
centraux a su mettre en branle des mécanismes susceptibles
d'améliorer la gestion du personnel de la fonction publique.
Depuis mon arrivée au ministère, je me suis aussi
donné comme prioriété de consulter ces mêmes
personnes ainsi que certains dirigeants de syndicat et d'autres fonctionnaires
qui, tout en occupant des postes théoriquement de moindre importance,
constituent néanmoins la force véritable de ce vaste appareil qui
s'appelle la fonction publique. À partir de ces consultations s'est
dégagé un verdict presque unanime à savoir que certains
changements s'imposaient. On a l'impression, par exemple, que la loi actuelle
est parfois trop rigide et semble avoir un caractère que de nombreux
dirigeants et employés jugent tracassier.
Ces constatations ont incité le Conseil exécutif à
me confier le mandat d'effectuer un examen général de la loi
actuelle et d'en proposer, s'il y a lieu, une refonte plus
générale ayant pour but de corriger les carences qui sont
apparues depuis la mise en application de la loi 50. En quelques mots, les
amendements que nous proposons visent, d'une part, à corriger à
court terme un certain nombre de problèmes jugés plus aigus et,
d'autre part, à réaliser certains engagements pris par le
gouvernement lors de son premier mandat. Ces problèmes sont
reliés entre autres choses à l'impossibilité de
procéder aux ajustements rendus nécessaires à la suite de
la négociation de la convention
collective des professionnels, entre autres en ce qui a trait aux
changements de grade. À ce sujet, il faut rappeler que l'entente
intervenue avec le syndicat des professionnels n'avait pour objectif que
d'entériner une pratique de longue date. Les modifications qui sont
proposées maintenant n'ont pour objectif que de régulariser cette
pratique qui existe dans les faits.
Aussi, selon la loi, il est impossible à l'heure actuelle de
procéder à des concours réservés à des
finissants de niveau secondaire, collégial et universitaire. Dans la
même ligne de pensée, on constate également qu'il est
impossible de procéder à des concours par zone
géographique ou par entité administrative. La question qu'on se
pose est la suivante: La règle de sélection au mérite
doit-elle être à ce point rigide qu'il faille annoncer un concours
à l'ensemble du Québec pour combler un seul poste d'agent de
bureau pour la Basse-Côte-Nord, par exemple, ou pour le comté de
Bonaventure?
L'Office du recrutement et de la sélection du personnel, dans le
cadre de sa vocation même, est appelé à procéder
à des concours généraux, sectoriels et spécifiques
selon les besoins de l'administration. Il lui est impossible, dans les concours
sectoriels et spécifiques, actuellement, d'énoncer les conditions
de scolarité et d'expérience nécessaires pour combler le
ou les postes en concours. Il n'est donc pas nécessaire d'être
spécialiste dans la gestion des ressources humaines pour comprendre que
cette contrainte, entre autres, oblige l'Office de recrutement et de la
sélection du personnel à recevoir et à traiter de
nombreuses candidatures inadmissibles impliquant une perte de temps et
d'énergie intolérable. Ce qui est pire encore, c'est que cette
façon de procéder entraîne pour les candidats qui n'ont pas
réussi des frustrations bien compréhensibles.
Enfin - cela plaira sans doute à mes collègues des
Finances et du Trésor ainsi qu'aux contribuables québécois
en général -le processus actuel entraîne pour
l'administration des coûts dont on pourrait facilement faire
l'économie. Je vous ferai grâce d'autres aspects techniques - on
s'était entendus qu'on raccourcissait les discours -des problèmes
quotidiens qu'éprouve l'office dans l'exécution de son mandat
d'assurer une efficacité administrative et un régime de saine
gestion. Nous aurons d'ailleurs sans doute l'occasion d'en reparler en
commission parlementaire. Les solutions que nous désirons apporter aux
lacunes que je viens d'énumérer d'une façon
générale ont donc pour but unique d'accroître
l'efficacité de la fonction publique.
Nous allons maintenant passer aux problèmes reliés
à l'interprétation de la règle au mérite en ce qui
a trait aux mesures visant à mettre en oeuvre la politique et les
programmes d'égalité en emploi. Permettez-moi de faire le point
brièvement sur la situation actuelle en indiquant les
inégalités flagrantes qui existent et qui sont chiffrables pour
au moins deux des trois cas que les modifications proposées visent
à corriger. Je parle, d'une part, du cas des femmes et, d'autre part, du
cas des communautés culturelles.
Par ailleurs, il m'est difficile de faire toute la lumière que
j'estimerais désirable sur le cas des personnes handicapées car
nous ne possédons pas actuellement une définition de ce qu'est
une personne handicapée. Nous avons demandé un avis à
l'Office des personnes handicapées du Québec et nous
espérons que nous obtiendrons une telle définition dans les
meilleurs délais qui nous permettront, pour commencer, de faire
l'inventaire chez nous.
Le problème des femmes est plus facile à cerner; pas plus
facile à régler, mais plus facile à cerner. On sait que le
pourcentage des femmes au sein de la fonction publique se situe aux alentours
de 52%, chiffre qui semble tout à fait conforme au profil
démographique de la société québécoise.
M'est-il nécessaire de faire remarquer -il faut bien l'admettre -
qu'il ne s'agit que d'un leurre. Pour ne citer que quelques exemples,
mentionnons le cas des professionnels, des cadres et des sous-ministres. Au 31
mars 1981, les rangs des professionnels ne comptaient que 15,9% des femmes. On
est bien loin des 52%. Au même moment, le pourcentage des femmes chez les
cadres était de 2,2%, disparité que, sans être
féministe à l'extrême, tout le monde pourra qualifier de
frappante.
Quant aux sous-ministres, la dernière liste publiée il y a
quelque 48 heures m'indique un grand total de trois personnes de sexe
féminin. Le même écart existe au sein des
sociétés d'État où les femmes qui occupent des
postes de responsabilité, qui sont membres d'un conseil d'administration
ou qui ont des postes de directrices ou de cadres totalisent un peu plus de 7%.
Je pense que tout le monde conviendra avec nous que si on a l'air achalantes
quelquefois, c'est que nous ne sommes pas sorties du bois.
Les chiffres sont éloquents également dans le cas de la
représentation des membres des communautés culturelles. Un
inventaire systématique réalisé durant l'été
de 1979 indiquait que la représentation des personnes issues des
communautés ethniques minoritaires se situait autour de 2,7%. Notons
cependant que 40,4% des employés définis comme membres de groupes
ethniques minoritaires avaient le français comme langue maternelle. Ces
employés comptaient 1,09% du total des employés de la fonction
publique. Le reste, 1,61% des cas donnait
une langue autre que le français comme langue maternelle.
Selon différentes formules, il est possible de conclure de
façon assez rigoureuse qu'à peu près 9,5% de la population
sur les 20% communément considérés comme faisant partie
des communautés culturelles seraient aptes à postuler un emploi
au sein de la fonction publique. En quelques mots, la représentation
actuelle de ces groupes au sein de la fonction publique est moins de 3%, tandis
que le nombre de ceux qui seraient admissibles selon les proportions
démographiques serait de l'ordre de 10%. Cet état de choses
existe depuis longtemps. L'étude faite par la commission Gendron en 1972
indique que la situation n'a guère changé depuis ce moment. On ne
peut donc attribuer au gouvernement actuel la responsabilité de ce que
je ne peux que qualifier de situation, comme dans le cas des femmes, moralement
inacceptable.
Le livre blanc sur la politique québécoise de
développement culturel a établi, de façon non
équivoque, la volonté politique de notre gouvernement de corriger
cette situation. Et plus récemment, le plan d'action à
l'intention des communautés culturelles, mis sur pied par mon
collègue, l'actuel ministre de l'Éducation, et mené
à terme par l'actuel ministre d'État au Développement
culturel, a fixé un échéancier précis quant
à la réalisation des mesures visant à assurer une
représentation plus équilibrée.
L'actuel projet de loi donne donc à la ministre le mandat
d'élaborer et de proposer des mesures visant à assurer
l'égalité à l'emploi, notamment par des programmes de
redressement d'emplois. J'ai donc l'intention d'agir avec toute la
célérité nécessaire pour faire en sorte que cette
politique, dans le cas des femmes, des communautés culturelles et des
personnes handicapées se concrétise sans plus de tergiversation.
De cette façon, les belles affiches que nous voyons un peu partout et
qui chantent la vertu de l'égalité des chances pourront, dans un
avenir rapproché, refléter une situation de faits et non
l'expression de voeux fort louables, mais trop souvent, nous en avons fait
l'expérience, sans contenu réel.
Il me semble qu'il s'agit là - je crois que l'attitude de ce
matin le prouve - d'une démarche qui mérite l'appui des deux
côtés de la Chambre. J'allais faire appel aux
députés de l'Opposition. Je pense bien que, si je me fie aux
ententes qui ont été faites -je me fie déjà
à leur bonne foi - j'ai l'impression qu'ils vont aborder, si vous me
permettez l'expression, ce problème avec une largeur de vue tout
à fait libérale. Effectivement, que nous ayons des divergences
sur certaines questions idéologiques ne doit pas nous empêcher,
là où il y a convergence d'opinions, d'en arriver au même
objectif.
En terminant, je dirai que la modification que nous proposons ne
constitue que le début d'une longue réflexion que nous serons
appelés à faire ensemble dans les prochains mois. Je voudrais
rendre hommage aussi à l'énorme travail effectué par le
député de Charlesbourg lorsqu'il était titulaire du
ministère de la Fonction publique. Mais l'évolution de la
société, la conjoncture financière que nous connaissons et
certaines carences dont je vous ai fait part tout à l'heure nous
incitent à aller plus loin. À cet égard, j'aimerais
exprimer un avis que certains d'entre nous pourraient peut-être
considérer comme étant peu orthodoxe. À mon avis,
l'État n'est pas et ne peut pas être un patron comme les autres.
Si l'on exiqe l'excellence de la part des serviteurs de l'État, ce qui
va de soi, il est évident que nous devons faire en sorte qu'ils aient
les moyens de faire valoir cette excellence. (11 h 40)
II n'en reste pas moins que, par la force des choses, l'État
demeure quand même employeur. En effet, c'est par une
délégation de pouvoirs de la part de la population que le
législateur a !a responsabilité d'établir un
équilibre entre les désirs légitimes de nos fonctionnaires
pour un meilleur niveau de vie et la capacité des contribuables, dont il
font partie d'ailleurs, de supporter un fardeau qui devient de plus en plus
lourd.
Mais une réforme plus globale de notre loi actuelle doit faire
l'objet d'un consensus. C'est pour cette raison qu'il est dans mes intentions
de mettre sur pied, d'ici peu, un comité de députés qui,
j'ose l'espérer - de la même façon que cette semaine
l'Opposition officielle le suggérait - puisse être bipartisan ou
non partisan, selon l'expression que vous préférez, dans le but
d'analyser les grandes lignes d'une refonte globale, si c'est
nécessaire.
J'ai l'intention également d'entreprendre une vaste consultation
auprès des divers syndicats et associations des employés pour
faire en sorte que certaines tracasseries mineures, qui, prises dans
l'ensemble, deviennent souvent des montagnes, puissent être
analysées calmement et, en autant que possible, réglées
à la fois dans l'intérêt des serviteurs de l'État et
dans l'intérêt public. Quant à moi - et au risque
d'être taxée de naïve - je pense que ces deux
intérêts sont complémentaires. Avec l'appui de cette
Chambre, je suis persuadée que cet objectif pourra se réaliser
dans les faits. Merci, M. le Président. J'espère que je n'ai pas
été trop longue.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Papineau.
M. Mark Assad
M. Assad: M. le Président, j'ai simplement quelques
commentaires à faire sur les propos qu'a tenus Mme la ministre.
Évidemment, la politique du gouvernement, en tant qu'employeur, consiste
à mettre en place une série de mesures ayant pour but
d'éliminer des politiques, réglementations, pratiques et
directives en matière de gestion du personnel les éléments
qui pourraient, d'une façon quelconque, être de nature
discriminatoire envers les femmes et aussi les hommes, M. le Président,
notamment et non exclusivement, au niveau de l'embauche, de la formation
professionnelle, de l'évaluation de l'expérience, y compris de
celle obtenue sans rémunération, de la promotion, des conditions
de travail, ainsi que dans l'établissement des catégories pour la
classification des emplois.
J'ai pris connaissance des études récentes ayant
démontré un problème de représentation des femmes
à tous les niveaux de l'emploi dans la fonction publique. Le
gouvernement devrait proposer également de développer des mesures
additionnelles pour assurer un juste équilibre dans la
représentation des femmes et des hommes à tous les niveaux et
dans tous les secteurs d'emploi de la fonction publique reconnaissant,
j'espère, la nécessité de rendre l'ensemble de la fonction
publique sensible à la présence des femmes et de mettre en
oeuvre, dans les plus brefs délais, des mécanismes
opérationnels susceptibles d'atteindre des résultats tangibles
à court terme, si c'est possible. Et c'est dans toutes les
régions administratives sous sa compétence que le gouvernement
devrait s'assurer de la participation de tous ses ministères et
organismes sous forme de plan d'action conforme aux objectifs qu'on voudrait
atteindre comme collectivité. C'est effectivement au ministère de
la Fonction publique que revient la responsabilité d'émettre des
directives relatives à l'implantation du plan d'action auquel vous avez
fait allusion.
Concernant votre projet de loi, Mme la ministre, il y a quelques points
qui ont été portés à mon attention et j'en ai
discuté avec d'autres. Sous forme de questions en commission
parlementaire, je crois qu'on pourra étudier en profondeur les articles
de ce projet de loi.
Concernant le redressement d'emploi, je voudrais savoir si Mme la
ministre pourrait détailler cet élément. Qu'est-ce qu'on
veut dire exactement quand on parle de redressement d'emploi? En matière
de recrutement et de promotion dans la fonction publique, est-ce que les
concours pourraient se limiter uniquement aux femmes? Concernant le
redressement d'emploi, est-ce que cela pourrait être strictement
limité aux femmes? Cela pourrait être le cas, mais on voudrait
savoir, si possible, si cela pourrait être limité.
On a parlé effectivement dans le projet de loi de limiter
l'admissibilité aux concours, c'est-à-dire qu'on va limiter
l'admissibilité à des concours. Je me demande, Mme la ministre,
si cela ne pourra pas entrer en conflit avec l'article 20 en particulier de la
convention collective.
Concernant le changement de grade, qu'est-ce que cela implique? Est-ce
que cela implique un changement dans la même classification? Vous exigez
des examens lors d'un changement de grade - je ne crois pas que ce soit une
interprétation de ma part -mais est-ce que vous avez eu des
consultations avec les sous-ministres de votre ministère? N'y aurait-il
pas ce danger d'aller à l'encontre au moins de l'esprit de l'article 19
de la convention collective? C'est seulement deux points que je voudrais
soulever.
Dans vos nouveaux pouvoirs au ministère de la Fonction publique,
n'y aurait-il pas le danger d'interprétation des conditions
d'admissibilité, à savoir qu'il pourrait y avoir une manipulation
des admissibilités?
Je voudrais, en particulier, avoir une explication au sujet du
changement de l'article 60 de la loi no 50.
Donc, sans entrer dans plus de détails pour le moment, il y a
simplement ces remarques brèves que j'ai faites. Je voudrais savoir si
on pourrait, en commission parlementaire, aller dans les détails. Pour
le moment, je voudrais simplement noter les deux éléments qui
pourraient aller à l'encontre de la convention collective que le
gouvernement a signée avec le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du
Québec.
M. le Président, pour le moment, ce sont les seules remarques que
je présente au chapitre du projet de loi no 12, Loi modifiant la Loi sur
la fonction publique.
Le Président: Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi! Pardon!
Le Président: Mme la ministre d'État à la
Condition féminine. Excusez-moi!
Mme Marois: Merci.
Mme Lavoie-Roux: C'est parce que je ne voyais personne se lever
et je ne voulais pas...
Mme Pauline Marois
Mme Marois: ... mon inexpérience. Merci, M. le
Président. C'est avec plaisir que je prends la parole ce matin pour
intervenir en faveur du projet de loi no 12 qui vient modifier la Loi sur la
fonction publique.
Je me permets de souligner que je souscris tout à fait à
la première partie de l'intervention du député de
Papineau. Si c'est ce genre de collaboration qu'on nous offre, j'en serai
très heureuse.
Je pense que le projet de loi qui nous est soumis va effectivement
permettre à des femmes, à des handicapés, à des
Québécois et à des Québécoises de nouvelle
souche de prendre leur place dans la fonction publique, et je pense qu'il
était temps. (11 h 50)
La véritable question qu'on a à se poser dans cette
Chambre et également, finalement, comme citoyen et citoyenne, c'est:
Pourquoi, en 1981, le gouvernement se voit-il dans l'obligation de
légiférer et de proposer des programmes de redressement et, qui
plus est, dans sa propre administration? Un sondage Gallup, publié dans
les grands quotidiens cette semaine, mercredi, nous apprenait que plus de
Canadiens croient que les femmes ne disposent pas de conditions objectives pour
être égales aux hommes. Nous partons de loin, mais c'est un pas de
franchi.
Mme Lavoie-Roux: Mais pas au Québec.
Mme Marois: Au Québec, c'était un peu
différent.
Mme Lavoie-Roux: Très différent.
Mme Marois: Ce qui nous prouve qu'effectivement nos
mentalités doivent aussi évoluer. Si on part de si loin, il reste
que ce qui nous est proposé aujourd'hui est un pas important de franchi.
En effet, si on est en mesure de réaliser qu'il y a bel et bien
discrimination envers les femmes, comme envers les handicapés et les
membres des communautés culturelles d'ailleurs, c'est probablement que
nous sommes également prêts à envisager des solutions pour
mettre fin à cette discrimination. Le constat nous amène donc
à agir, à intervenir.
Si, aujourd'hui, le gouvernement s'apprête à adopter une
loi pour tenter de mettre fin à cette discrimination, ce n'est pas parce
que quelques femmes ou quelques personnes handicapées se sont vu refuser
des emplois et des promotions à l'intérieur de la fonction
publique. Dans la cause qui nous occupe, la discrimination ne vise pas un
individu, elle atteint un membre d'un groupe social discriminé. La
discrimination, n'est-ce pas, au fond, l'ensemble de tous nos
préjugés relatifs à un ou des groupes d'individus? Les
femmes sont trop émotives, les femmes ne peuvent pas diriger des hommes,
une femme qui a des responsabilités importantes au travail
néglige son foyer, la femme est moins motivée que l'homme, la
femme est instable. Tous des clichés! Et des meilleurs encore, vous en
avez sûrement déjà entendu.
Un handicapé est trop lent au travail, un handicapé est
trop dépendant de ses collègues de travail, un handicapé
sera absent du travail fréquemment et d'autres encore, quand ce n'est
pas un Québécois ou une Québécoise de nouvelle
souche qui se fait reprocher de ne pas avoir notre mentalité. Quelle
belle mentalité, parfois!
La discrimination, c'est donc le résultat d'un ensemble
d'attitudes, mais aussi de pratiques. En ce sens, sur le marché du
travail - la fonction publique n'en est pas exempte - les systèmes de
gestion des ressources humaines sont porteurs de pratiques, de traditions aussi
et, par conséquent, de règles de discrimination. Cette
discrimination se vit cependant de façons diverses d'un secteur de
travail à un autre, mais qu'il me soit permis de rappeler à cette
Assemblée quelques chiffres décrits dans le rapport
Égalité et indépendance publié par le Conseil du
statut de la femme et que notre gouvernement a entériné comme
politique d'ensemble.
En effet, ce qu'on soulignait dans cette étude, c'est que dans
les conseils d'administration des compagnies manufacturières au Canada
on retrouve 3 femmes pour 1369 hommes; je répète, ça en
vaut la peine: 3 femmes sur 1372 postes. Plus près de nous, 46 femmes et
256 hommes étaient membres, en 1978, des conseils d'administration des
conseils régionaux de la santé et des services sociaux;
déjà, on parle de proportions un peu plus intéressantes.
En 1977, 11 femmes juges au Québec sur un total de 372; on fait de
petits pas. En 1976, moins de 1% des cadres de direction d'Hydro-Québec
étaient des femmes. Tel que l'a déjà mentionné ma
collègue de la fonction publique, une étude de la situation de la
femme au sein de la fonction publique montre que le gouvernement employeur ne
fait guère plus de place aux femmes que l'employeur privé et cela
me désole tout autant que vous.
Actuellement, on compte cependant au gouvernement 3 femmes et 17 hommes
qui occupent des postes de sous-ministre en titre. Il faut rappeler qu'en 1976
il n'y avait aucune femme à ce poste. En 1975, 1,5% des cadres de la
fonction publique étaient des femmes, mais 90% des femmes
employées par la fonction publique travaillaient dans les secteurs du
personnel de bureau, techniciens et assimilés. Et même si cette
situation a évolué au cours des cinq dernières
années, le rattrapage à faire est tellement grand qu'il
faudra davantage qu'une simple évolution des choses.
Pourquoi tenons-nous tant à ce que des femmes occupent les postes
de direction et de responsabilités? Pourquoi on y tient? D'abord, parce
qu'elles représentent 52% de la population, on le sait maintenant, et
que les hommes n'ont pas à usurper les privilèges d'être
les seuls à des postes de commande, à prendre des
décisions. Les femmes ont le droit d'occuper leur place là aussi.
Ensuite, parce que les femmes sont compétentes et que la
société gagnerait à faire vivre et à
reconnaître ces compétences. Davantage encore, parce que les
femmes confinées à ces niveaux sont moins bien
rémunérées, elles sont évidemment, donc, plus
pauvres que les hommes. Peu de responsabilités, peu
rémunérées, c'est aussi dire, malheureusement, peu
reconnues. Pour toutes celles-là qui, pour des raisons
d'éducation, d'instruction, de confiance - je le mentionnais dans une
intervention précédente - et très souvent et
malheureusement de discrimination, n'ont pu occuper leur place, je
réclame: à compétence égale, statut
égal.
Déjà, en mars 1980, le gouvernement a rendu publique son
intention de donner suite aux recommandations que le rapport pour les
Québécoises, Égalité et indépendance, lui
adressait en tant qu'employeur. Le ministre de la Fonction publique de
l'époque présentait en effet, l'an dernier, un
énoncé de politique d'égalité d'emploi de
même que son cadre d'exécution. Mars 1981 marquait donc la fin de
la première année d'implantation de la politique gouvernementale
en matière d'égalité en emploi. On couvrait ainsi
l'ensemble de la fonction publique.
Ce dossier de la condition féminine se caractérise,
à mon point de vue, par un grand nombre d'intervenants qu'il met en
cause, qu'il mobilise et qu'il motive dans ce même objectif commun. Qui y
retrouve-t-on? Non seulement des organismes centraux tels que le
ministère de la Fonction publique, l'Office de recrutement et de la
sélection du personnel et le Conseil du trésor, mais
également tous les ministères et, à peu d'exceptions
près, tous les organismes gouvernementaux. Il était donc normal
que ce soit le ministère de la Fonction publique qui donne l'exemple et
qui propose dans un projet de loi des programmes de redressement visant
l'égalité dans l'emploi. Toutefois, il ne s'agit là - on
se l'est dit et la ministre l'a dit - que de mesures préliminaires et
nous n'avons nullement l'intention, même avec l'adoption de ce projet de
loi, de faire en sorte que le travail de redressement s'arrête là,
le cheminement ne fait que commencer. Avec le dépôt de ce projet
de loi, le gouvernement s'engage, et je m'y engage personnellement, M. le
Président, à réfléchir sur toutes les dispositions,
que ce soit d'ordre législatif ou fonction d'une nouvelle gestion, qui
feraient en sorte de rétablir l'équilibre pour les trois groupes
visés dans ce projet de loi.
Ma collègue, ministre de la Fonction publique, Mme
LeBlanc-Bantey, affirmait, le 28 mai dernier: "Les modifications
apportées par le projet de loi no 12 ne représentent qu'un
début. Nous sommes convaincus que cette démarche portera fruits.
Par contre, si ces premiers gestes ne produisaient pas les résultats
escomptés, il faudrait alors envisager de prendre des mesures plus
fermes." Nous lui accorderons donc tout notre appui en ce sens, et ce premier
jalon amorce pour nous un processus de réflexion qui est loin
d'être terminé. Cette réflexion, de même que la mise
en vigueur des programmes de redressement, nous permettra également
d'évaluer jusqu'à quel point notre prise de conscience sur la
condition de travail des femmes, des handicapés, des
Québécois et des Québécoises de nouvelle souche
nous permet maintenant de la transposer dans la réalité. Il est
temps de passer à l'action, M. le Président, car toutes les
constatations ont été faites. Je le répète, ce que
nous recherchons par ce projet de loi, c'est de permettre à ceux et
à celles qui sont actuellement discriminés d'occuper leur place,
toute leur place, car ils et elles y ont droit. Merci, M. le
Président.
Le Président: Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Il me fait
plaisir d'intervenir sur le projet de loi no 12 présenté par la
ministre - je ne voudrais vraiment pas commettre d'erreur dès la
présentation de son premier projet de loi - de la Fonction publique.
Évidemment, j'écoute les membres du côté
ministériel et c'est avec beaucoup d'enthousiasme qu'on présente
ce projet de loi en Chambre. Je peux le comprendre, dans un certain sens. Mais
on semble oublier que c'est depuis - à ma connaissance, puisque je ne
suis dans cette Assemblée que depuis 1976 - maintenant près de
cinq ans que, continuellement, du côté de l'Opposition officielle,
à toutes les occasions qui nous ont été données,
soit à l'occasion de l'adoption d'un projet de loi, de réponses
au message inaugural, de débats du vendredi, l'étude des
crédits de la Condition féminine, ce sujet est revenu à
l'ordre du jour d'une façon ou d'une autre. (12 heures)
Certains se souviendront, que, par exemple, à l'occasion du 8
mars, la journée de la femme, on a droit de la part du gouvernement
à de bons voeux à l'endroit des femmes. Déjà, en
1979, on se souviendra
des grandes affiches où on disait aux femmes: II y a une place
pour toi ici. En 1980, on a eu droit, à l'occasion de la fête de
la femme, à une nouvelle affiche où on disait:
L'égalité pour tous ou, enfin, ce à quoi la ministre
d'État à la Condition féminine faisait allusion tout
à l'heure. Aujourd'hui, quand on regarde la réalité, on se
dit: C'est loin d'être les progrès qu'on aurait
espéré obtenir.
Dans ma réponse au message inaugural du mois de décembre
1980, je faisais la remarque suivante. Je disais: Le gouvernement, qui a voulu
cultiver une image de marque auprès des femmes a attendu une
dernière session parlementaire pour mettre en marche un processus
susceptible d'engendrer enfin de véritables changements touchant
l'emploi des femmes dans la fonction publique. Ainsi, de 1977 à 1979, la
fonction publique a enregistré un taux de croissance qui ne
s'élève qu'à 0,4% pour ses cadres supérieurs
féminins et à 3% pour les professionnels. On ne retrouve aucune
femme chez les cadres supérieurs dans plusieurs ministères dont
le Travail. Je pense qu'il y en a eu une de nommée il y a quelques mois,
récemment, aux Affaires municipales. Les femmes sont pourtant
impliquées depuis longtemps dans la politique municipale. Au
ministère des Travaux publics qui, au moment où j'ai parlé
en décembre 1980, était pourtant dirigé par une femme, la
députée de Hull du temps, on ne retrouvait aucune femme dans les
cadres supérieurs.
Je vous mentionnerai simplement l'incident auquel j'ai assisté
hier soir. Pour la première fois, j'assistais à l'étude
des crédits du ministère de l'Environnement. Si
l'événement avait été filmé, je pense que
cela aurait été extrêmement intéressant comme outil
de travail pour les ministres qui s'intéressent à la condition
féminine. Le ministre avait pris soin d'amener ses gens avec lui. Je ne
les ai pas comptés, mais on rapporte qu'il y en avait au moins 42 et je
dois vous dire que ce ne devait pas être loin de 42, même si je ne
les ai pas comptés. Inutile de vous dire que la gent masculine
était fortement représentée. Je leur ai demandé:
Quel est le nombre de cadres supérieurs au ministère de
l'Environnement? Sur 60, on compte deux femmes. Évidemment, le ministre
m'a immédiatement dit: Ce sont des postes très
spécialisés. Toujours les rationalisations qu'on entend.
Évidemment, c'est peut-être plus difficile de penser qu'à
l'intérieur d'un ministère comme l'Environnement on puisse
s'attendre à voir davantage de femmes parmi les cadres
supérieurs. Je me suis rappelé que, lors d'un débat du
vendredi avec l'ex-ministre d'État à la Condition
féminine, auquel étaient présents à ce
moment-là le ministre d'État au Développement culturel, le
député de Bourget et le ministre d'État au
Développement social, le député de Marie-Victorin,
je pense qu'il était député de Laporte à ce
moment-là, on m'avait assuré -et c'est en 1979 - qu'à
l'intérieur de chacun des ministères il y avait une personne dont
la fonction particulière était, justement, de promouvoir
l'accès des femmes aux postes supérieurs, le recrutement des
femmes, enfin tout ce qui touche à l'égalité de la femme
dans la fonction publique. Hier soir, j'ai été assez
étonnée d'apprendre qu'au ministère de l'Environnement
cela n'existe pas.
Évidemment, je n'aurai pas le temps de faire le tour de tous les
ministères, d'aller à l'étude des crédits de tous
les ministères pour savoir ce qui se passe ailleurs. Celui-là, je
ne l'ai pas choisi; c'est à cause des responsabilités que j'ai
que je m'y trouvais. Elle n'y est pas, cette personne. On m'a rassurée,
il y a un comité formé de quatre personnes où il y a les
deux femmes auxquelles j'ai fait allusion tout à l'heure. Il y en a une
qui est ingénieur et l'autre a une responsabilité importante dans
la trésorerie, aux finances ou dans la comptabilité du
ministère de l'Environnement. Comment peut-on croire qu'une femme qui a
un poste important comme ingénieur - je m'en réjouis - dans le
domaine de l'assainissement des eaux et une autre dont on vantait les grandes
capacités dans l'administration financière vont aussi avoir le
temps de faire la promotion de l'égalité de la femme à
l'intérieur de la fonction publique au ministère de
l'Environnement? Je me demande pourquoi on m'avait affirmé avec tant de
force, au moment de ce débat, que je ne n'avais pas à
m'inquiéter parce que le gouvernement prenait bien soin de toute
chose.
Je voudrais également rappeler qu'à l'occasion de ce
débat, la ministre d'État à la Condition féminine
de l'époque - je ne lui en fais pas reproche parce que je pense qu'elle
aussi il fallait qu'elle rame à contre-courant, comme on dit - alors
qu'on l'interrogeait à savoir dans quelle mesure les recommandations du
rapport du Conseil du statut de la femme sur l'égalité et
l'indépendance étaient implantées, a dit: J'ai bon espoir
que d'ici deux ou trois ans tout soit à peu près fini.
Écoutez, on approche des trois ans, ça fait au moins deux ans et
demi et les chiffres - je pense que Mme la ministre de la Fonction publique
nous en a donnés - sont extrêmement bas. Je voudrais simplement en
ajouter quelques autres qui viennent des rapports du ministère de la
Fonction publique pour mars 1979. Dans les emplois supérieurs, il y a eu
une légère amélioration, je l'ai dit tout à
l'heure, de quelques dixièmes de points. Nous sommes toujours quand
même à 2,2% ou 2,4% de tous les cadres supérieurs. Il y
avait 2615 hommes dans les emplois supérieurs, on n'y retrouvait que 59
femmes.
Évidemment, quand on arrive aux professionnels et aux
enseignants, où le plan de carrière est quelque peu
différent et où, généralement, on n'accède
pas de façon aussi automatique à un poste d'emploi
supérieur, il y a un peu plus de femmes: 9172 hommes contre 1649 femmes.
Plus vous descendez, plus les femmes augmentent, ainsi de suite.
Quand vous regardez les traitements et les salaires... Il y a la
question de la promotion dans l'emploi, mais il y a aussi la question des
salaires. Si vous examinez les chiffres au 31 mars 1980, chiffres qui viennent
des livres de la fonction publique, vous constatez que la plus forte proportion
des femmes, soit 39,1%, se retrouve dans la catégorie de salaires de 20
000 $ à 40 000 $, alors que la plus forte proportion des hommes... je
m'excuse, je n'ai pas les chiffres exacts, je ne voudrais pas induire la
Chambre en erreur... Je voudrais mentionner un point particulier qui m'a
frappée. Par exemple, il y a encore 1% des femmes qui gagnent moins de
8000 $ dans la fonction publique alors qu'aucun homme ne se retrouve dans cette
catégorie. Il y a 1% des hommes qui se retrouve dans la catégorie
de 34 000 $ à 38 000 $, alors qu'il n'y a aucune femme. Mais ce sont
dans les deux catégories inférieures de salaire de la fonction
publique que l'on retrouve les femmes en grande majorité.
M. le Président, le gouvernement nous présente ce projet
de loi auquel nous allons souscrire d'emblée et que nous allons tenter
d'améliorer. Je pense que si on veut procéder à un
redressement progressif dans l'égalité des chances dans la
fonction publique, non seulement pour les femmes, mais pour les personnes
handicapées et pour les minorités culturelles, il faudrait aussi
que le gouvernement fasse son propre examen de conscience. Dans la fonction
publique, on sait qu'à une époque où on connaît un
chômage important, où on doit procéder à une
diminution du personnel, on met en place une loi probablement au moment le plus
difficile, sans oublier toutes les contingences qui entourent le recrutement
dans la fonction publique dues aux conventions collectives et autres. (12 h
10)
II y a un domaine où le gouvernement a toute la latitude pour
lui-même nommer des femmes à des postes et des organismes, des
conseils, le Conseil supérieur de l'éducation, la Commission des
affaires sociales, etc. Cela dépend des décisions
gouvernementales, cela n'a rien à faire avec la fonction publique. Quand
on examine la présence des femmes à l'intérieur de ces
organismes, on réalise qu'elles n'y sont présentes que dans une
proportion de 14,6%. Je redis ce que j'ai dit au mois de décembre:
à moins qu'il n'y ait eu un correctif d'apporté, on ne retrouve
aucune femme à la Commission de la santé et de la
sécurité au travail, une femme à la Commission des normes
minimales, aucune femme à l'Office de la langue française, et je
pourrais allonger la liste.
Le gouvernement veut bien - je pensais que c'était le
député qui voulait intervenir -faire beaucoup de publicité
à l'endroit de ce projet de loi, je pense que c'est bon, cela contribue
à faire évoluer les mentalités. Mais je voudrais que le
gouvernement fasse son propre examen de conscience. Je dirais la même
chose à l'endroit de ses bonnes intentions au sujet des personnes
handicapées. Je voudrais là-dessus assurer Mme la ministre, qui
mettait de l'avant l'idée de travailler dans un comité non
partisan -j'aime mieux non partisan que bipartisan, Mme la ministre - pour
essayer d'établir ou d'élaborer les règles, j'imagine, et
les règlements et toutes les dispositions qui devront être mis en
place pour s'assurer qu'au-delà d'un énoncé de principe
dans une loi on passe vraiment à l'action. Je peux l'assurer de notre
collaboration.
Il se passe peu de semaines qu'il ne m'arrive à mon bureau le cas
de personnes handicapées qui ont subi des concours et qui sont
refusées. Je ne veux pas dire que les résultats sont injustes,
mais je pense qu'il sera particulièrement important dans le cas des
personnes handicapées, d'abord, comme vous le mentionniez
vous-même, de trouver une définition peut-être plus large au
terme "handicapé", pour pouvoir y inclure aussi des personnes qui
souffrent d'un handicap mental, ne pas les limiter uniquement peut-être
à des handicaps physiques très précis que l'on peut
identifier d'une façon bien particulière.
De ce côté, je pense qu'il y a énormément de
travail et je me propose de renvoyer à la ministre quelques cas qui sont
sur mon bureau et dont le postulants, dernièrement, ont subi des
concours. Je me demande même si, dans les modalités que le
gouvernement adoptera, on ne devrait pas prévoir un droit d'appel. Je
sais qu'on prévoit un droit d'appel dans le cas de la promotion à
l'intérieur de la fonction publique. Peut-être qu'au plan
technique ce n'est pas possible, cela alourdirait peut-être les choses.
Mais si on veut vraiment s'assurer que les choses soient efficaces... Quand on
tombe dans des domaines aussi délicats qui, finalement, font une
discrimination positive, si on veut, je pense qu'il faut bien s'assurer que les
outils qui soient là soient les plus objectifs et les plus rigoureux
possible, non seulement à l'endroit de ceux que l'on veut engager ou que
ceux que l'on veut recruter, mais également à l'endroit de ceux
que le concours de recrutement rejette par les circonstances.
Je voudrais ajouter un mot, M. le Président, parce que je pense
qu'il y a d'autres invités qui doivent venir dans cette
Chambre dans quelques instants et qui sont certainement plus importants
que les propos que je peux tenir; c'est la question des minorités
culturelles. Encore une fois, le gouvernement est intervenu a la toute
dernière minute avant les élections, pour présenter son
projet sur les minorités culturelles. Je m'en réjouis, parce que
depuis la loi 101 - j'ai déjà eu l'occasion de le dire dans cette
Chambre - au moment où on faisait une condition stricte de la
connaissance du français pour obtenir un emploi à
l'intérieur de la fonction publique, on éliminait automatiquement
un grand nombre de citoyens. Tout le monde s'accorde à dire que ce sont
des citoyens à part entière, mais on leur refuse une
entrée ou une intégration progressive dans la fonction publique.
Également cette remarque vaut pour la volonté gouvernementale que
la représentation de ces minorités culturelles soit beaucoup plus
grande, comme je le disais tout à l'heure, à l'égard des
femmes, dans les organismes gouvernementaux ou les organismes dont les
nominations relèvent directement du Conseil exécutif.
Je voudrais simplement vous faire remarquer, dans un autre rapport qui a
été publié, la présence des communautés
culturelles dans les organismes exécutifs de l'administration publique.
Dans les 154 régies, à l'intérieur de 23 ministères
- ceci est extrait du répertoire administratif du Québec pour
1979 - où il y a 1155 administrateurs, on ne retrouve que 3,6%, soit 41
personnes, qui probablement n'avaient pas déclaré le
français comme langue maternelle. Inutile de vous dire que les 3,6% sont
bien loin des 18% ou 19% dont on parle quand on parle des groupes
minoritaires.
M. le Président, en terminant, je veux strictement souligner -
puisque j'ai devant moi les deux ministres, la ministre de la Fonction publique
et la ministre d'État à la Condition féminine - d'autres
problèmes à l'endroit de ce qu'on appelle des groupes
minoritaires dans la fonction publique, et je veux parler ici du
harcèlement sexuel. Je pense qu'on en a eu des exemples, et l'exemple
qui nous revient le plus facilement à l'esprit c'est quand on refait la
distribution ou la répartition des secrétaires de
députés; ça, ça nous touche personnellement. Mais
on a eu un exemple au ministère de l'Éducation, un cas. Et
ça prend joliment de courage, de la part d'une employée modeste
ou occupant un poste intermédiaire, pour se rendre jusqu'à la
Commission des droits de la personne et faire valoir ses droits. La Commission
des droits de la personne s'est prononcée en faveur de cette femme
contre laquelle on avait fait de la discrimination à l'intérieur
de la fonction publique. C'est évidemment un cas dont tout le monde peut
parler parce que c'est un cas récent et il a fait l'objet de manchettes
ou de "petites" manchettes dans les journaux, mais je suis sûre qu'on
pourrait les multiplier - j'espère pas à l'infini - beaucoup. Je
pense que cette même discrimination à l'intérieur peut
s'exercer à l'endroit des autres groupes, soit pour des
difficultés de langue, soit à cause de certains handicaps.
Je pense que toute cette dimension de la protection, non seulement de la
non-discrimination au moment de l'emploi, au moment de la promotion, mais au
moment de l'exercice des fonctions de ces groupes dits minoritaires - on ne
devrait pas dire ça des femmes - mais de ces groupes pour qui on
recherche l'égalité des chances, il faut la rechercher à
tous les niveaux de l'emploi et aussi dans le vécu quotidien de ces
personnes. J'insiste particulièrement là-dessus, parce que
ça, c'est plus difficile à calculer, à quantifier. J'en
appelle à mes deux collègues, à l'ensemble du gouvernement
pour qu'on se penche également, au moment de ce comité non
partisan qui sera peut-être mis sur pied, sur cette dimension du
problème de non-discrimination et qu'une égalité vraiment
réelle dans tous les domaines soit assurée à ceux envers
qui, aujourd'hui ou très prochainement, on posera ce geste de justice,
je devrais dire, et ce geste d'équité. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Vachon.
M. David Payne
M. Payne: M. le Président. I will be brief and very quick,
because we just have a couple of minutes to recommend the adoption of this bill
no 12 which gives the government an excellent opportunity to continue
vigorously, very vigorously, its attempt to recruit non-Francophones in the
Civil Service.
I would particularly recommend also that the government continues its
push towards the acceptance of more non-Francophones by dropping the
prerequisite with respect to French as a necessary language for acceptance to
the Civil Service.
The way in which this will work, if I understand correctly, will be
first of all that a candidate can pass his examination in English if he wishes
later to pass the test in French to show quality and expertise in French. This
is an excellent initiative and I would like to very warmly recommend it because
it is a first for any Québec government in the history of Québec.
Thank you, Mr President. (12 h 20)
Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la ministre.
Mme Denise Leblanc-Bantey (réplique)
Mme LeBlanc-Bantey: Merci, M. le Président. Je voudrais
d'abord remercier mes deux collègues de l'Opposition, le
député de Papineau et Mme la députée de L'Acadie,
pour la collaboration que j'avais anticipée et qui a été,
de leur côté, me semble-t-il, toute naturelle compte tenu du fait
qu'ils sont d'accord avec les objectifs visés dans ce projet de loi en
ce qui a trait aux politiques de redressement d'emploi pour les femmes, pour
les communautés culturelles et pour les personnes
handicapées.
Quand j'écoutais Mme la députée de L'Acadie, je
pensais à ce proverbe: péché avoué est à
moitié pardonné. Je me disais que même du côté
du gouvernement, à la suite de la volonté politique
gouvernementale d'améliorer les chances d'emploi pour les femmes dans la
fonction publique, les résultats n'avaient pas été
à la mesure de nos espoirs et de nos ambitions. J'étais d'accord
avec la façon dont Mme la députée de L'Acadie a
traité le problème parce que je me suis dit: Le jour où
les femmes seront heureuses du progrès accompli, c'est qu'elles auront
cessé de lutter. Dans cette mesure, je crois que" nous sommes
condamnées, non seulement aujourd'hui, mais dans des années
à venir et encore pour longtemps, à protester et protester
toujours contre la lenteur de l'évolution des mentalités quant
à l'égalité que nous sommes prêts à donner,
que ce soit dans le cas des femmes, des communautés culturelles et des
personnes handicapées.
Mais il reste qu'il faut quand même admettre qu'il y a des
volontés gouvernementales qui ont été clairement
exprimées à l'égard des clientèles visées.
Il faut admettre aussi qu'entre une volonté politique et une
volonté administrative, il y a souvent une mentalité qui
n'évolue pas toujours aussi rapidement qu'on le voudrait.
Pour rassurer notre collègue de L'Acadie, j'aimerais lui
souligner que Mme la ministre d'État à la Condition
féminine a l'intention, dans les prochains mois, de suivre de
près les nominations qui se feront par le Conseil des ministres à
des postes dont on ne pourrait mettre le blâme sur le cadre rigide d'une
loi pour en empêcher l'accès aux femmes.
Ceci étant dit, je voudrais aussi rappeler que le projet de loi
que nous discutons aujourd'hui - dans le même état d'esprit qui
indique que le gouvernement avait quand même l'intention de passer
à l'action - avait été préparé par mon
prédécesseur, le ministre d'État à
l'Aménagement, et qu'il y a tout lieu de croire que si nous n'avions
été perturbés de part et d'autre par les dernières
élections, nous n'aurions pas à en discuter aujourd'hui, parce
que ce serait déjà fait. C'est important de le souligner, parce
que ce n'est pas tous les jours qu'on a l'occasion de vanter nos
collègues et de louanger leurs mérites; mais il faut quand
même reconnaître ce qu'ils ont fait. J'espère, non seulement
du côté gouvernemental, que, dans les prochaines années, on
accordera de plus en plus d'importance aux clientèles mutées,
mais que ce sera aussi du côté des partis, tant de votre
côté que du nôtre, et vous aurez certainement vous aussi,
dans les prochaines années, l'occasion de faire vos preuves à ce
sujet.
Pour répondre à certaines questions posées par le
député de Papineau, en ce qui a trait à
l'admissibilité aux concours et à la question des
surnuméraires, le député de Papineau s'inquiétait
quant à la largeur des conditions possibles d'admissibilité par
rapport à un concours donné, je pourrais peut-être vous
expliquer, pour commencer, dans quel contexte l'Office de recrutement a senti
le besoin de suggérer qu'on puisse limiter l'admissibilité
à certains concours. Par exemple, dans l'état actuel des choses,
avec la loi actuelle, si nous avons besoin d'un ingénieur en
énergie nucléaire, nous sommes obligés, en vertu de la
loi, d'ouvrir ce concours à tous les ingénieurs de l'Ordre des
ingénieurs, ce qui fait que nous pouvons nous retrouver avec des
ingénieurs en construction de routes ou oeuvrant dans d'autres domaines
qui n'ont rien à voir avec l'énergie nucléaire. Nous
devons donc refuser beaucoup de candidats, ce qui, comme je le disais, est
frustrant pour les personnes concernées et ce qui entraîne aussi
des coûts inutiles.
Il reste que les règlements qui pourront limiter
l'admissibilité des concours sont soumis au Conseil du trésor qui
les retourne à la Commission de la fonction publique pour avis et,
ensuite, ils sont transmis à l'Assemblée nationale, si mes
connaissances sont exactes, en vertu de la loi. Il me semble que toutes les
précautions ont été prises pour éviter qu'un
ministre ou une ministre puisse, par un hasard, par distraction, faire des
règlements qui, à cet égard, soient tout à fait
farfelus.
J'avais promis que ce serait très court. Je termine en remerciant
encore une fois l'Opposition de sa collaboration et en assurant mes
collègues de l'Opposition qui ont discuté sur le sujet que nous
allons suivre de très près l'évolution des
mentalités dans la machine administrative quant au programme
d'égalité des chances et que - il me faut bien l'avouer - si
l'évolution des mentalités n'est pas aussi rapide que nous le
souhaitons, nous devrons en arriver, malheureusement, à des mesures
peut-être un peu plus coercitives que celles qui sont visées dans
le moment. Je vous remercie beaucoup.
Le Président: Est-ce que la motion de deuxième
lecture du projet de loi no 12 sera adoptée?
Des voix: Adopté.
M. Bertrand: M. le Président, sur cette question, je pense
qu'il plairait beaucoup, probablement à cause de l'enjeu même de
la loi, et comme il s'agit de condition féminine en très grande
partie et des minorités culturelles, de l'avenir aussi des
handicapés dans la fonction publique, et aussi pour permettre à
tous nos collèques de nous rejoindre, pour que nous procédions
aux cérémonies, d'appeler un vote sur ce projet de loi. Pour
répondre à ce que Mme la ministre, en parlant de Mme la
députée de L'Acadie, a dit: Un péché avoué
est à demi pardonné, je pense qu'avec la présence de tous
les ecclésiastiques ici aujourd'hui, c'est complètement
pardonné, s'il est avoué, M. le Président.
Mme Leblanc-Bantey: Cela dépend... Le Président:
Qu'on appelle les députés. (Suspension de la séance
à 12 h 25)
Reprise de la séance à 12 h 34
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
J'appelle aux voix la motion de deuxième lecture du projet de loi no 12,
Loi modifiant la Loi sur la fonction publique.
Que celles et ceux qui sont en faveur de ce projet de loi veuillent bien
se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Mme
Marois, MM. Bédard, Parizeau, Laurin, Landry, Lazure, Gendron, Mme
LeBlanc-Bantey...
Des voix: Bravo!
Le Secrétaire adjoint: ...MM. Marcoux, Biron, Godin,
Rancourt, Johnson (Anjou), Chevrette, Bertrand, Marois, Duhaime,
Léonard, Fréchette, Martel, Ouellette, Dussault, Mmes Harel,
Lachapelle, MM. Vaugeois, Paquette, Proulx, Guay, Baril (Arthabaska), Dean,
Fallu, Mme Juneau, MM. Leduc, Marquis, Boucher, Lavigne, Beauséjour,
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Gauthier, Desbiens, Perron,
Gravel, Brassard, Laplante, Charbonneau, Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Blouin, Rochefort, Brouillet, Champagne,
Rodrigue, Payne, Tremblay, Beaumier, Leblanc, Lafrenière, Lachance,
Paré, Ryan, Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Ciaccia, Mme
Lavoie-Roux, MM. Forget, Vaillancourt (Orford), Mme Bacon, MM. Bélanger,
Bourbeau, Blank, Garon, Mathieu, Assad, Lincoln, Paradis, Scowen, Picotte,
Pagé, Rivest, Bissonnet, Polak, Maciocia, Dauphin, Cusano, Hains,
Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kehoe,
Houde, Middlemiss.
Le Président: Que celles et ceux qui sont contre veuillent
bien se lever s'il vous plaît.
Abstentions.
M. Lessard: M. le Président, si j'étais
arrivé quelques minutes plus tôt, j'aurais voté pour.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour
enregistrer le vote du ministre?
M. Levesque (Bonaventure): D'accord.
Le Président: Consentement unanime.
M. Clair: M. le Président, je requiers le même
privilège.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour le
ministre des Transports?
M. Clair: Je suis arrivé avec le député de
Laporte.
Le Secrétaire: Pour: 94
Contre: 0
Abstentions: 0
Le Président: Deuxième lecture, adopté. M.
le leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de la fonction
publique
M. Bertrand: M. le Président, je fais maintenant motion
pour que ce projet de loi soit déféré à la
commission parlementaire permanente de la fonction publique.
Le Président: Est-ce que cette motion de
déférence sera adoptée?
Des voix: Adopté.
M. Bertrand: J'ajoute, M. le Président, qu'il y a - je ne
sais pas si c'est la journée qui nous y aide et qui nous y porte - une
collaboration extraordinaire qui règne à l'Assemblée
nationale. Il semblerait que cet après-midi, quand on aura
terminé l'étude du projet de loi inscrit au nom du ministre de
l'Environnement, soit vers 16 h 30, la Chambre ne siégera plus, puisque
nous n'aurons pas d'autre projet de loi à l'étude, mais nous
pourrions aller en commission parlementaire pour l'étude du projet de
loi
inscrit au nom de Mme la ministre de la Fonction publique. J'ai obtenu
l'accord de l'Opposition sur cette question. Je l'en remercie.
Je voudrais faire une modification à la motion qui a
été faite plus tôt dans la journée, M. le
Président, pour que cette commission parlementaire puisse siéger
pour étudier ce projet de loi article par article à compter
d'environ 16 h 30, après que nous aurons étudié en
deuxième lecture le projet de loi inscrit au nom du ministre de
l'Environnement.
Le Président: Est-ce que cette motion telle
qu'amendée sera adoptée?
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je suis
pleinement d'accord sur cette motion, je l'ai déjà indiqué
au leader parlementaire adjoint. Cependant, j'ai toujours la même
réserve, il faudrait que les ministériels se retiennent un peu
dans leur désir, évidemment, de parler d'abondance, surtout
devant les caméras. Deuxièmement, c'est un désir que nous
exprimons à ce moment-ci que cela se termine vers 16 h 30, mais
connaissant la vie parlementaire on pourrait dépasser, bien
sûr.
Le Président: M. le leader adjoint.
M. Bertrand: M. le Président, tout le monde sait que le
ministre de l'Environnement n'aime pas faire de longs discours, surtout en
présence des caméras, alors on pourra procéder très
rapidement. (12 h 40)
Hommage au cardinal Maurice Roy et à Mgr
Louis-Albert Vachon
Le Président, M. Claude Vaillancourt
Le Président: Chers collègues de l'Assemblée
nationale, il est très rare que l'Assemblée interrompe ses
travaux pour souligner un événement. Celui qui se présente
aujourd'hui est vraiment exceptionnel non seulement pour nous, les
députés, mais pour toute la population du Québec. En
soulignant la présence dans nos galeries d'illustres visiteurs, je sais
que tous mes collègues de l'Assemblée se joindront à moi
pour saluer d'une façon toute particulière Son Éminence le
cardinal Maurice Roy et Mgr Louis-Albert Vachon, nouvel archevêque primat
de Québec et de nombreux représentants du clergé
québécois et du corps consulaire.
Au nom de tous mes collègues de cette Assemblée, membres
de l'Assemblée des représentants du peuple
québécois, permettez-moi de remercier chaleureusement nos
visiteurs d'avoir accepté l'invitation que je leur ai faite en votre nom
et de leur dire jusqu'à quel point leur visite nous honore.
II y a quelques années, dans l'enceinte de ce parlement, au
Conseil législatif, pour être plus précis, paraphrasant
saint Paul, le cardinal Roy disait ceci: "Civis sum, je suis citoyen du
Québec. Mon travail ne s'accomplit pas dans une sphère
éloignée et sans contact avec cette province. Bien au contraire,
c'est au sein de la cité où nous vivons tous ensemble qu'il doit
être réalisé."
Aujourd'hui, ceux et celles qui constituent l'autorité civile
s'unissent pour lui présenter leurs hommages et le remercier
sincèrement d'avoir toujours été attentif à son
milieu, d'avoir été un guide spirituel dont le leadership et la
sagesse ont constamment inspiré confiance aux fidèles
québécois. Nous avons la conviction que, malgré ce repos
bien mérité, il demeurera actif et disponible pour sa
communauté.
Nous nous réjouissons également de l'intronisation de Mgr
Vachon comme archevêque primat du Québec, ce grand
éducateur qui devient ainsi le vingt-deuxième évêque
de Québec depuis que Jean-François de Laval a
accédé au siège épiscopal en 1674. Cette lourde
responsabilité continuera de mettre en valeur toutes les qualités
d'une personnalité dont le sens de la diplomatie et la sollicitude
à l'égard de son milieu nous sont connus.
Encore une fois, au nom de tous mes collègues de
l'Assemblée nationale, merci de l'honneur que vous nous faites et
bienvenue chez nous chez vous. Merci beaucoup.
M. le premier ministre.
M. René Levesque
M. Levesque (Taillon): M. le Président et - on me
permettra, comme vous, de m'adresser directement à nos visiteurs
Éminence Mgr l'archevêque, alors que l'Église du
Québec - la vie est ainsi faite souvent de contrastres brutaux; le
ministre de l'Éducation nous le rappelait tout à l'heure
-déplore aujourd'hui à Montréal et partout au
Québec, je crois bien, la perte d'un grand serviteur, Mgr Lafontaine,
ici à Québec, à l'Assemblée nationale, nous sommes
à la fois heureux et honorés d'accueillir deux de ses chefs les
plus éminents qui incarnent bien à la fois toute la
vitalité et aussi l'appartenance étroite, l'appartenance intime
de cette Église à la société
québécoise.
C'est l'occasion pour l'Assemblée nationale - et je pense bien
que tous nos concitoyens se joignent à nous en ce moment - de dire
d'abord au nom du gouvernement -et je suis sûr que le chef de
l'Opposition se joindra à nous dans ses propres termes - le respect et
l'affection que nous avons tous pour celui qui, pendant plus de 30 ans, a
assumé la charge primatiale de Québec et aussi pour son
successeur, Mgr Vachon, qui a notamment dirigé l'Université Laval
avec un
brio et, nous dit-on aussi, une poigne remarquables. Aussi, en
même temps, je veux saluer très cordialement tous ceux et toutes
celles, en particulier du clergé, des autres confessions religieuses et
du corps consulaire, qui les accompagnent en ce moment.
Cet hommage à ces deux personnalités qui vivent, qui ont
vécu toute leur carrière intensément au sein de la
cité, comme vous le disiez, M. le Président, en citant le
cardinal Roy, c'est aussi un témoignage rendu par nous tous, les
élus du peuple, au rôle historique qu'a joué, que joue
encore l'Église catholique au Québec. Lorsque, en 1659, vous le
rappeliez, le vicaire apostolique qui était alors Mgr de Laval a pris
les rênes de ce qui allait devenir, quelques années plus tard, le
diocèse de Québec, on pouvait difficilement prévoir,
à l'époque, le rôle qu'allait être appelé
à jouer ce siège épiscopal.
C'est à partir de Québec - c'est une chose dont on se
souvient aussi bien au point de vue national qu'au point de vue religieux - que
l'Église a essaimé dans toutes les parties de ce continent et que
les femmes et les hommes appartenant à nos nombreuses communautés
religieuses ont répandu, dans tous les coins de l'Amérique du
Nord et, ensuite, dans toutes les parties du monde, notamment en Afrique, en
Asie et en Amérique latine, d'abord, bien sûr, la parole
évangélique, mais aussi quelques-uns des plus beaux traits de
notre civilisation et de notre culture.
L'histoire a déjà porté son juqement sur ce
rôle missionnaire remarquable de l'Église du Québec. Tous
nous pouvons en être fiers, parce que c'est là que pendant
longtemps se sont peut-être surtout manifestés l'élan et la
générosité de notre peuple.
Plus près de nous, au cours de cette période qu'il est
convenu d'appeler la révolution tranquille, et depuis lors,
l'Église du Québec a su aussi accepter, avec un esprit
d'ouverture remarquable, et parfois même inspiré, avec autant de
sérénité que de lucidité, les changements
considérables qu'a connus notre société depuis les
années soixante.
D'une Église qu'on qualifiait souvent naguère de
triomphaliste, elle est devenue une Église au diapason de Vatican II.
Elle le doit en particulier - comme nous le devons tous d'ailleurs - à
des hommes de la trempe de Son Excellence le cardinal Roy et du nouvel
archevêque primat, Mgr Vachon. Cette Église du Québec,
dirigée de telle façon, continue de faire montre - comme nous le
savons tous, nous le vivons constamment -d'une vitalité, d'une
sérénité et d'un dynamisme qui, à bien des
égards, sont exemplaires.
Nous avons tenu, grâce à vous, M. le Président, et
à l'invitation de l'Assemblée nationale, à en
témoigner publiquement. En terminant, je voudrais très simplement
proposer, en dérogation de notre règlement, si vous le permettez,
la motion suivante: "Au nom de tous les Québécois, les membres de
l'Assemblée nationale du Québec félicitent et remercient
Son Eminence le cardinal Maurice Roy de son action constante en tant
qu'archevêque primat de Québec et présentent en même
temps leurs voeux les plus chaleureux à son successeur, Mgr Louis-Albert
Vachon." Merci, M. le Président.
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, c'est avec une joie sans
mélange que l'Opposition se joint aujourd'hui au gouvernement afin de
souhaiter la plus chaleureuse bienvenue dans cette Assemblée nationale
aux deux éminentes personnalités religieuses qui nous visitent et
à ceux qui les accompagnent.
Envers le cardinal Maurice Roy, nous nourrissons tous, je pense, des
sentiments de gratitude et d'affection inspirés par l'exemple
infatigable de dévouement désintéressé et serein
qu'il a donné au service de notre peuple depuis plus d'un
demi-siècle. Je me souviens encore, Éminence, de ce jour
maintenant lointain où j'eus l'honneur de vous croiser dans les
corridors du vieux séminaire de Québec, quelques heures à
peine après votre accession au siège épiscopal de
Trois-Rivières. C'était il y a 35 ans. Dès lors, en
réponse à une démarche qui souhaitait vous arracher un
consentement immédiat, vous aviez répondu, avec cette modestie et
cette réserve tranquille dont vous ne vous êtes jamais
départi, que vous devriez d'abord étudier la question et qu'en
temps utile une décision opportune serait prise.
Ce calme, cette simplicité, ce souci de laisser mûrir les
choses, cette volonté d'être utile, mais de servir sans jamais
rien brusquer et sans écraser quiconque auront caractérisé
vos 35 années d'épiscopat et plus particulièrement les 34
années que vous avez passées à la tête de
l'Église diocésaine de Québec. Sous votre direction,
l'Éqlise diocésaine de Québec est demeurée celle
vers laquelle tout le Québec, voire tout le Canada, continue de se
tourner comme vers une source unique de sagesse spirituelle et morale. À
une époque où tout changeait à un rythme vertigineux et
où les valeurs les plus sûres étaient souvent
emportées par le courant, la Providence a voulu que vous demeuriez
très longtemps dans un poste où vous fûtes universellement
aimé et respecté. (12 h 50)
Par-delà le pluralisme des options qui caractérisent
désormais notre société, vous avez montré à
tous que la voie du véritable
progrès se situe à la fois dans la fidélité
à soi-même et dans l'acceptation de la liberté
d'autrui.
Vous avez été parmi nous un pasteur ferme sur la doctrine
et les principes, mais doux et compréhensif envers les hommes et ouvert
aux changements nécessaires. Vous avez été d'abord homme
d'Église, mais vous avez également assumé en
plénitude, comme on nous le rappelait tantôt, votre beau titre de
citoyen. Vous avez toujours eu avec l'autorité civile des rapports
courtois et sincères, empreints d'esprit de collaboration et de respect
réciproque.
Le service de la paix, la paix religieuse, la paix entre les peuples, la
paix entre les familles culturelles, la paix sociale, la paix intellectuelle et
surtout la recherche de la paix qui ne peut guère venir que de la
justice, ainsi qu'en témoigne le nom même de l'organisme Justice
et paix que vous fûtes appelé à présider pendant
plusieurs années, ont toujours été la marque dominante de
votre action parce qu'il n'est pas de valeur plus haute que celle de la paix et
que, dans le service de la paix, se retrouvent tous les hommes de bonne
volonté, quel que soit leur statut, leur rang social ou leur
fonction.
Vous avez été au coeur de l'évolution de notre
société au cours des années qui ont suivi le
deuxième conflit mondial, et vous l'aurez profondément
influencée avec cette sagesse qui vous caractérise. Nous vous en
disons aujourd'hui merci à l'occasion de votre retraite bien
méritée. Nous vous souhaitons de jouir en abondance de cette paix
paisible et sereine que vous n'avez cessé de nous communiquer pendant
votre long et fructueux épiscopat.
Au nouvel archevêque de Québec, Mgr Vachon, j'adresse, au
nom de l'Opposition, des félicitations cordiales à l'occasion de
son accession au poste d'archevêque de Québec. Cette nomination
qui vous échoit nous apparaît, Excellence, comme le couronnement
logique d'une longue et fructueuse carrière tout entière
consacrée au service des valeurs de l'esprit. Votre visite à
l'Assemblée nationale nous rappelle cette période des origines de
la colonie où votre illustre prédécesseur, le premier
évêque de Québec, Mgr de Laval, en plus d'être
pasteur, siégeait au Conseil supérieur de la Nouvelle-France en
compagnie des notables du pays et partageait, à toutes fins utiles, avec
le gouverneur la direction des affaires humaines de la colonie naissante.
Cette symbiose entre l'autorité ecclésiatique et
l'autorité civile n'est plus possible aujourd'hui et cela paraît
très bien accepté de part et d'autre. Mais ces faits nouveaux ne
nous empêchent pas de nous souvenir avec gratitude, à l'occasion
de votre passage parmi nous, du rôle clé qu'a joué
l'Église catholique dans la formation du type humain
québécois et canadien et dans la création ici d'une
société originale qui porte la marque de l'influence
chrétienne non seulement dans ses institutions, mais parfois même
jusque dans ses attitudes les plus radicales.
Cela ne nous empêche pas non plus d'espérer que sous des
formes nouvelles, dont l'Église garde l'entière
responsabilité, elle sera toujours appelée à jouer un
rôle très important dans notre évolution collective. Parce
qu'ils s'adressent, en définitive, aux mêmes hommes et aux
mêmes femmes, parce qu'ils sont tous issus de ce peuple auquel nous
appartenons tous à titre égal, pasteurs et hommes politiques ne
sauraient s'ignorer les uns les autres, ils ne sauraient se considérer
comme des étrangers. Dans le respect des fonctions propres à
chacun et des contraintes nouvelles qui pèsent aujourd'hui sur nous, ils
sont appelés, au contraire, à collaborer pour le bien de
tous.
Dans cette perspective, veuillez être assuré, Excellence,
de l'ouverture d'esprit et de la bonne volonté foncière de
l'Opposition et du parti que je représente. Votre haute mission morale
et spirituelle est plus nécessaire que jamais. Au moment où vous
échoient les lourdes responsabilités inhérentes à
votre charge de pasteur de l'Église de Québec qui est pour nous
tous l'Église mère et le symbole par excellence de la
continuité morale de notre peuple, nous vous adressons des voeux
chaleureux en vue d'un épiscopat long, paisible et fructueux.
Le Président: La présidence présume qu'il y
a consentement unanime à la présentation de la motion du premier
ministre et, en conséquence, je demande si cette motion sera
adoptée.
Des voix: Adopté.
Le Président: Motion adoptée. M. le leader adjoint
du gouvernement.
M. Bertrand: Sur ce, M. le Président, je demande que nous
suspendions nos travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi.
Le Président: Les travaux de l'Assemblée sont
suspendus jusqu'à 15 heures, cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 55)
(Reprise de la séance à 15 h 10)
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît.
Veuillez vous asseoir.
M. Vaugeois: M. le Président, je crois qu'il faut appeler
l'article 7.
Projet de loi no 8 Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Deuxième lecture du projet de loi no 8, Loi modifiant la Loi sur
la qualité de l'environnement. M. le ministre de l'Environnement.
M. Marcel Léger
M. Léger: M. le Président, il me fait plaisir
aujourd'hui, au nom du gouvernement, de déposer ce projet de loi en
deuxième lecture concernant une modification à la Loi de la
qualité de l'environnement. Je suis d'autant plus heureux de
déposer ce projet de loi qu'il a été réclamé
par l'Union de municipalités du Québec afin d'accroître les
garanties que peuvent représenter les programmes de financement du
gouvernement dans le domaine de l'assainissement de l'environnement.
De façon précise, ce projet de loi a pour objet de
permettre à une municipalité de demander au ministre de
l'Environnement de déposer en fidéicommis, entre les mains du
ministre des Finances, les subventions que j'accorde aux municipalités
dans le cadre de notre programme d'assainissement des eaux, afin que le
ministre des Finances acquitte, à même ces sommes, aux
échéances indiquées par les municipalités, le
capital et les intérêts des obligations émises par une
municipalité pour financer les travaux visés par ces
subventions.
D'ailleurs, cette mesure est semblable à celle qui avait
été adoptée par l'Assemblée nationale en 1968 dans
le cadre de la Loi des subventions aux commissions scolaires afin de faciliter,
justement, le financement des travaux de construction d'écoles. Or, on
sait que les commissions scolaires du Québec ont réussi à
doter le Québec d'un excellent réseau d'écoles dont nous
pouvons être fiers à juste titre.
M. le Président, j'aimerais faire un bref survol de la situation.
Depuis vingt ans, l'état de la qualité des eaux, à travers
le Québec, se détériore. Au cours des dernières
années, de plus en plus, toute la plaine du Saint-Laurent, comprenant
les bassins qui s'y jettent, a vu ses eaux devenir de plus en plus
polluées et les citoyens privés de la qualité des cours
d'eau pour les usages auxquels ils avaient droit. La même chose se
produit, M. le Président, dans la plupart des pays industralisés.
Nous avons donc remarqué que dans toutes les régions où il
y a des cours d'eau, une population dense et une industrialisation
poussée, nous voyons apparaître sur le bord des cours d'eau des
sources de pollution provenant de quatre types de pollueurs traditionnels. Ces
pollueurs sont nécessairement les municipalités avec une
population dense, les industries qui déversent trop souvent leurs
déchets dans les cours d'eau sans traitement. Le domaine de
l'élevage agricole a aussi sa part de responsabilités dans la
pollution de nos cours d'eau. Finalement, le quatrième type de pollueur,
ce sont souvent les individus qui, n'ayant pas une fosse septique suffisante
dans des résidences isolées des réseaux municipaux,
déversent directement ou indirectement les déchets dans les cours
d'eau, spécialement dans les rivières.
Depuis les vingt dernières années, la densité de la
population, la concentration de l'élevage dans le domaine agricole et
aussi la densité d'installation des industries ont amené la perte
régulière de plus en plus poussée d'usages importants pour
les citoyens. De plus en plus, on voit des plages qui sont fermées; de
plus en plus, on voit des municipalités qui ne peuvent pas
aménager le bord des cours d'eau parce qu'ils ne sont pas accessibles.
De plus en plus, on voit des baignades qui sont refusées, et même
des prises d'eau potable qui doivent être fermées. La
récréation, qui devrait être une source intéressante
de qualité de vie pour les citoyens, est complètement
coupée à une quantité importante de citoyens.
C'est donc important de regarder les causes de cette situation. Je
verrais quatre causes importantes parmi les quatre types de pollution que nous
avons vus. D'abord, depuis peut-être 20 ans, les pollueurs se renvoient
la balle chacun leur tour en se trouvant une excuse pour ne pas contrecarrer
l'émanation de leur propre pollution en disant: II y en a d'autres qui
polluent aussi, et on essaie de trouver qui pollue le plus au lieu d'essayer de
trouver qui pourrait polluer le moins. La deuxième raison de cet
état de choses, c'est que l'État, jusqu'à
dernièrement, n'a jamais pris ses responsabilités en ce qui
concerne son rôle de gestionnaire de l'eau dans le Québec. La
troisième raison, c'est qu'on a aussi trop souvent, dans les
mentalités, privilégié le profit immédiat et
négligé la qualité de vie des citoyens. Trop souvent on
disait: Telle usine ne peut pas se permettre de se doter d'équipement
parce que ça va coûter trop cher et on sortait la menace possible
de fermeture d'usines tout simplement en disant que la qualité de vie
des citoyens était peut-être moins importante que le travail.
C'est un faux problème, M. le Président. Il ne faut jamais
choisir entre un chômeur en santé et un travailleur malade. Il
faut réellement choisir une solution qui tienne compte de
l'équilibre du milieu, qui permette le développement de nos
industries, mais en même temps le respect de la qualité de vie des
citoyens qui vivent autour.
La quatrième raison, M. le Président, c'est qu'on a
tenté, dans une philosophie de plus en plus moderne, de faire croire
à la population qu'il fallait accepter cet état de
fait, qu'à cause de l'industrialisation il fallait accepter que
les cours d'eau soient pollués, qu'il n'y avait pas grand-chose à
faire de ce côté, que c'est une situation qu'il fallait
accepter.
Je dois dire que ce sont peut-être les quatre grandes causes de
cette situation qui s'est aggravée depuis les 20 dernières
années. Les choses ont changé depuis ce temps. D'abord,
aujourd'hui, en 1981, la population du Québec n'accepte plus
d'être privée de ses ressources au profit de certains qui
l'accaparent. Deuxièmement, la population du Québec voit, dans le
programme d'assainissement des eaux, une façon d'améliorer
concrètement sa qualité de vie et d'améliorer aussi la
qualité de l'environnement, aussi bien l'environnement de son domicile
que du paysage, pour une meilleure utilisation de ses ressources pour le bien
des citoyens. On n'accepte plus que les rivières deviennent des
dépotoirs pour les déchets de ceux qui veulent un profit
immédiat et ne pas penser à l'avenir.
On a décidé, au niveau du gouvernement, de remplacer cette
ancienne vision du laisser-faire par une responsabilité qui doit
être prise par le gouvernement du Québec, soit de devenir le
gestionnaire de la qualité de l'eau. La politique que le gouvernement du
Parti québécois a décidé de mettre de l'avant est
que tous les utilisateurs ont le droit d'utiliser l'eau, que tous les citoyens
du Québec ont droit à l'eau et non pas uniquement les
producteurs.
Le programme d'assainissement des eaux que nous avons mis de l'avant est
un programme qui vise à rétablir et à garantir toutes les
utilisations des cours d'eau au profit de tous les Québécois. En
d'autres termes, il est important que tous les Québécois aient
une eau saine pour boire, une eau de qualité pour se baigner, des eaux
acceptables pour la pêche, la récréation, le canotage.
L'accessibilité à tous les cours d'eau pour les citoyens est une
mesure qui fait partie de la qualité de vie que les
Québécois doivent se donner. Il faut donc retrouver la notion
d'équilibre d'un développement qui ne se fait pas au
détriment de la qualité de la vie et, comme je l'ai toujours dit
à ceux qui veulent protéger l'environnement: II ne faut pas
s'opposer aveuglement au progrès, mais s'opposer au progrès
aveugle.
M. le Président, l'intervention que nous avons
décidé de faire, c'est celle de choisir des bassins cibles au
Québec, des bassins où tous les pollueurs, en même temps,
devront s'attaquer à trouver une solution et se doter
d'équipements qui permettront de corriger leur part de
responsabilité dans la pollution d'une rivière, et tout cela dans
une même bassin, en même temps. Le pollueur municipal doit faire sa
part; il ne doit pas attendre que les industries la fassent. Les industries
doivent faire leur part; elles ne doivent pas attendre que les aqriculteurs
fassent leur part. Les éleveurs ne doivent pas, non plus, attendre que
les industries et les municipalités fassent leur part. Les individus
doivent aussi savoir qu'ils sont responsables de la qualité de leurs
rivières et de leurs lacs. Ils doivent avoir des fosses septiques
étanches, assurant le contrôle des rejets dont chacun est
responsable. (15 h 20)
M. le Président, nous avons donc choisi de commencer, dans des
bassins cibles, par l'amont, de façon, quand on arrivera à
prendre des mesures en aval d'une rivière, qu'on ne puisse pas nous
dire: Les eaux qui nous arrivent d'en haut sont polluées, pourquoi
dépenserait-on de l'argent alors qu'on ne récupérerait pas
les usages? Nous commençons donc par l'amont et nous nous dirigeons
graduellement vers l'aval jusqu'à ce que la rivière
complète soit dépolluée.
C'est une stratégie que nous avons mise de l'avant, une
stratégie que j'appellerais de contractuels. Nous voulons
négocier avec chacun des pollueurs un échéancier
raisonnable à l'intérieur du plan global, permettant de s'assurer
que chacun commence à poser les gestes de dépollution dans la
mesure de ses possibilités, à l'endroit où il est
situé, dépendant de la qualité du cours d'eau qui recevra
le rejet qui aura été traité.
Ces mesures de négociation ont permis, jusqu'à maintenant,
d'atteindre des objectifs très importants, parce que cette
stratégie de négociation a déjà porté ses
fruits. À l'heure actuelle, à travers les bassins cibles qui ont
été choisis, nous avons mis de l'avant un programme à
l'intérieur duquel nous avons inclus des municipalités, des
industries et aussi d'autres types de pollueurs qui doivent faire leur part.
Dans ce programme, juste au niveau municipal, nous avons inclus des programmes
de dépollution pour un montant de 1 800 000 000 $.
Actuellement, M. le Président, il y a pour 1 400 000 000 $ de
projets signés avec les municipalités, c'est-à-dire que 66
programmes ont été signés, touchant environ 120
municipalités, incluant des régions aussi densément
peuplées que celles de la Communauté urbaine de Montréal,
de la Communauté urbaine de Québec et de la Communauté
régionale de l'Outaouais. C'est donc dire qu'au niveau des territoires,
déjà près de la moitié de la population du
Québec est touchée par des protocoles d'entente signés
avec les municipalités et que les travaux sont déjà
commencés. La plupart des travaux sont déjà
commencés au niveau des études EPIC, c'est-à-dire
l'analyse des réseaux existants à l'intérieur des
municipalités pour connaître les débits, au niveau des
plans et devis dans les bureaux d'ingénieurs partout au Québec
pour établir
les types de tuyaux intercepteurs qui devront être construits et
aussi au niveau des stations ou des usines de traitement qui devront être
construites pour traiter les rejets des municipalités selon les besoins
de la qualité du cours d'eau récepteur.
Ces 66 programmes se chiffrent à 1 400 000 000 $ sur un programme
de 1 800 000 000 $. Donc, près de 80% du programme mis de l'avant lors
de son lancement il y a un an et demi, sont déjà engagés.
Il y a quelques municipalités qui ont terminé leur projet et, au
cours de cette année, il y en aura au moins sept ou huit autres qui
auront terminé le leur.
Dans le grand projet de la Communauté urbaine de Montréal,
il y a pour 433 000 000 $ d'intercepteurs qui sont déjà
installés de l'ouest à l'est, au nord de l'île de
Montréal, ce qui couvre toute l'île de Montréal du
côté nord, versant de la rivière des Prairies, et arrive
à la rivière des Prairies où, déjà, le
creusage a été fait pour la station de pompage et l'usine
d'épuration qui va coûter 333 000 000 $. C'est donc dire que,
déjà, dans la grande région de Montréal, il y a eu
des investissements de 733 000 000 $ qui sont actuellement producteurs
d'emplois et aussi de mesures correctives pour la qualité de l'eau de la
rivière des Prairies.
Bientôt, nous commencerons la rive sud, c'est-à-dire le
côté sud de l'île de Montréal, permettant de faire
tout le tour de l'île et de s'assurer du contrôle des eaux
polluées dans cette région.
M. le Président, les mesures que nous avons appliquées ont
été négociées avec les municipalités. Nous
savons que l'assainissement des eaux est une responsabilité municipale,
mais nous voulons aider les municipalités. C'est la raison pour laquelle
il y a un programme de subventions défrayé à près
de 100% par le gouvernement du Québec. Il n'y a pratiquement plus aucun
programme qui vient du fédéral puisque ce dernier a coupé,
d'une façon unilatérale, tous les nouveaux programmes
d'équipement communautaire. Donc, le gouvernement du Québec a
dû, là encore comme dans d'autres dossiers, prendre toute la
responsabilité en sachant fort bien que, bien que les
Québécois paient une partie de leurs impôts à
Ottawa, il n'y a pas d'argent du fédéral là-dedans, sauf
dans les premiers projets que nous avions sur l'île de
Montréal.
Donc, nous finançons ces projets à raison d'une portion
payée par le gouvernement du Québec aux municipalités.
Ainsi, pour les intercepteurs d'égouts, le gouvernement du Québec
défraie 66%, au minimum, du coût des intercepteurs, capital et
intérêts. Nous finançons aussi jusqu'à 90%,
dépendant de la capacité financière de la
municipalité et aussi de la relation entre le coût des ouvrages et
l'évaluation de la municipalité pour être juste envers les
municipalités moins bien nanties.
L'usine de traitement doit transformer les déchets pour retourner
au cours d'eau une qualité d'eau acceptable; nous la finançons
à 90% - le gouvernement du Québec - capital et
intérêts. J'insiste beaucoup sur les mots "capital et
intérêts" parce que les premiers projets commencés par
l'ancien gouvernement libéral, avant 1976, ne finançaient que le
capital. On a donc vu, à un moment donné, des projets qui se sont
soldés par une réussite aussi loufoque que celle de Val-David
alors que le projet des intercepteurs était de 1 500 000 $. Le
gouvernement libéral du temps avait décidé de donner 150
000 $ par année pendant dix ans pour rembourser à la
municipalité le 1 500 000 $. C'est bien vrai que dix ans ou dix fois 150
000 $, ça fait 1 500 000 $, sauf que le taux d'intérêt
n'étant pas inclus, après dix ans de paiement, la
municipalité avait reçu 1 500 000 $, mais il lui restait encore
la dette de 1 500 000 $ du capital. Cela n'avait à peine payé que
les intérêts. À ce moment-là, c'était une
situation loufoque. Nous payons donc capital et intérêts.
Du côté des industries, nous avons aussi lancé, dans
les bassins cibles, un programme d'épuration des industries. Il y a une
centaine de programmes qui ont déjà été
signés et je peux vous dire qu'à l'intérieur de ces 100
programmes il y a déjà 38 usines de pâtes et papiers sur 57
qui se sont embarquées dans le programme de modernisation des
entreprises et aussi de contrôle des équipements antipollution.
Ceci permet justement de penser en termes de l'amont vers l'aval. Quand on
pense à Montréal, les eaux de la rivière Outaouais doivent
être dépolluées. C'est pour cela qu'il y a le programme
d'épuration des eaux de la Communauté régionale de
l'Outaouais en amont, il y a les usines de pâtes et papiers qui ont, pour
la plupart, signé des protocoles pour se doter elles-mêmes d'un
équipement contrôlant la pollution. Nous allons, dans les mois qui
viennent, continuer à négocier avec les municipalités, le
long de la rivière Outaouais, pour nous assurer que les eaux du
Saint-Laurent seront complètement dépolluées à
mesure que nous avançons dans le Saint-Laurent.
Pourtant, qui paie quoi? L'industrie qui n'a pas besoin de subvention
comme telle parce que dans le principe de la dépollution, nous croyons
que le pollueur doit être le payeur. C'est le principe du pollueur
payeur.
II faut donc que le coût de dépollution soit inclus dans le
coût de production. Cela doit être intégré
nécessairement aux coûts de production d'une compagnie comme les
autres coûts qu'on doit inclure pour un produit. Dans un produit, on
introduit le coût des salaires, le coût de la matière
première, le coût de la publicité et le coût du
service
social. Le coût de la qualité de l'environnement doit
être inclus dans le coût de production. C'est pour cela que,
jusqu'à maintenant, les 100 programmes que nous avons signés avec
l'industrie se sont soldés par un succès
phénoménal. Ainsi, nous espérons atteindre nos objectifs
plus tôt que les dix années que nous avions prévues pour
l'ensemble du Québec puisque, juste au niveau municipal, nous avons
presque atteint la moitié des sommes d'argent prévues sur le
programme de 6 000 000 000 $. Il y avait 4 000 000 000 $ pour les
municipalités et nous sommes rendus à 1 800 000 000 $. Donc, le
programme de dix ans devrait être nécessairement
respecté.
On me dit aussi que 80% des projets sont en voie de réalisation.
Nous avons aussi ajouté une autre source de réponses à des
préoccupations des municipalités. En créant la
Société québécoise d'assainissement des eaux, nous
avons permis, justement, aux municipalités qui préféraient
confier ce mandat à une société qui aurait une
expérience supérieure à la capacité
financière ou à la capacité technique des
municipalités, de confier à cette société le soin
d'être le maître d'oeuvre de ce projet. (15 h 30)
Je peux vous dire que les résultats, au moment où on se
parle, sont au-delà de nos espérances parce que
déjà, la société d'État, la
Société québécoise d'assainissement des eaux a un
carnet de commandes signées par des municipalités pour 95 000 000
$. Dernièrement, hier soir justement, la ville de Chibougamau, pour un
besoin de 10 000 000 $, a confié à la société
d'État le soin de faire le travail d'assainissement des eaux;
Cowansville, pour un projet de 5 050 000 $; Granby, pour un projet de 19 500
000 $; Lac-Etchemin, pour 1 039 000 $; Lac-Mégantic, pour 3 640 000 $;
Mont-Laurier, pour 6 000 000 $; Sainte-Angèle-de-Monnoir, pour 290 000
$; Sainte-Aurélie et Saint-Zacharie, pour 2 920 000 $;
Saint-Gédéon, 1 090 000 $; Saint-Hyacinthe, pour 21 000 000 $;
Saint-Louis-de-France, pour 2 000 000 $; Saint-Pie, pour 1 041 000 $;
Valleyfield, pour 12 550 000 $; Vaudreuil, pour 2800 000 $; Waterloo, pour 4
600 000 $.
Près de huit autres municipalités sont en train de
négocier avec la société d'État pour utiliser les
avantages de cette société. Vous avez Châteauguay pour 13
000 000 $, Farnham pour 4 600 000 $, Fossambault pour 600 000 $,
Jonquière pour 20 000 000 $, Marieville pour 4 500 000 $, Sainte-Julie
pour 4 500 000 $, Saint-Placide pour 100 000 $, Saint-Timothée pour 3
430 000 $, Valcourt pour 1 770 000 $. Ce sont donc toutes des
municipalités qui ont signé avec la société
d'État pour réaliser ce programme.
Si le temps me le permettait, M. le Président, je pourrais donner
toutes les autres municipalités qui ont déjà
décidé de faire le projet avec le ministère, mais en ne
faisant pas la demande à la société d'État. M. le
Président, je pense que nous devons réaliser que le programme
d'assainissement des eaux est lancé. Je convie chacun des
Québécois à faire partie de ce programme aussi bien au
niveau municipal, industriel, dans le domaine l'élevage, de
l'agriculture que dans le domaine individuel. Il faut se sentir chacun
responsable de sa portion de qualité de vie en assainissant nos cours
d'eau. C'est un projet collectif, je pense, que tous les
Québécois espèrent, parce que tous les
Québécois vont en bénéficier. Je suis très
fier aujourd'hui de dire que la collaboration des municipalités a
été extraordinaire et que la loi que nous présentons
aujourd'hui va ajouter les derniers éléments que l'Union des
municipalités nous demandait pour que ça devienne
réellement un projet collectif dont tous les gens vont
bénéficier.
Une voix: Bravo, Marcel! Très bien!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Nelligan.
Une voix: Remets-lui cela. Il y a plus de millions; c'est un bon
gars.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: M. le Président, je vais être beaucoup
plus bref. C'est tout à fait normal puisque dans le West Island, nous
n'avons pas de millions avec quoi jongler.
En tout cas, je voudrais confirmer notre position comme Opposition ici.
Nous sommes tout à fait d'accord en principe et dans toute la mesure du
possible de notre côté pour justement la plus grande protection de
l'environnement, qui inclut certainement l'assainissement des eaux comme un de
ses objectifs principaux. Tous ceux d'entre nous qui considèrent que la
qualité de vie du citoyen passe, en fait, avant toutes les autres
considérations mécaniques ou matérielles ne peuvent pas
s'opposer à toute loi qui voudrait que notre environnement soit plus
sain et plus pur. Donc, de ce côté, nous nous associons
complètement aux paroles du ministre du point de vue de toute politique
d'assainissement du milieu, d'assainissement des eaux qui fait l'objet du
présent projet de loi.
Je suis naturellement tout à fait d'accord pour l'assainissement
de toutes les nappes d'eau, des fleuves, des cours d'eau, de tous les lacs. Et
je suis, encore une fois, d'accord avec le ministre quand il dit que la
qualité de vie du citoyen passe avant les industries, passe avant les
manufacturiers, passe avant ceux qui polluent, et que le pollueur devrait
être responsable de ses actes. Nous sommes aussi tout à fait
d'accord sur le principe du pollueur payant qui devrait justement
être responsable de ses actes à tout moment. Je voudrais parler
aussi des zones inondables, qu'on devrait protéger avec peut-être
un peu plus de vigueur, et de la protection de toutes nos îles. Il y a
des cas qui se présentent tous les jours; il y en a gui vont se
présenter bientôt dans certaines régions où les
îles, maintenant, servent de site pour les promoteurs de construction.
Celle que j'ai mentionnée déjà il y a quelques jours,
c'est seulement un exemple; il y en a trois qui seront en cause bientôt.
Il faudrait revoir toute cette question.
Je suis très content de voir que le ministre a mis l'accent sur
l'action des municipalités au sein du programme d'assainissement des
eaux. Je suis particulièrement content de cela parce que lorsque la
Société québécoise d'assainissement des eaux a
été incorporée et que le projet de loi a été
présenté, je rappellerai que l'Union des municipalités du
Québec avait justement mis l'accent sur cette question en disant: II
faudrait surtout que la société reste un élément
planificateur et gestionnaire, non pas opérationnel, laissant toute la
marge de manoeuvre, tout le fonctionnement, toute la décentralisation
entre les mains des municipalités.
Malheureusement, le ministre a parlé du gouvernement
libéral précédent en critiquant sa façon d'agir.
Pourtant, il faudrait admettre aussi que sans le gouvernement libéral
des années passées, toute la guestion de la protection de
l'environnement ne serait jamais arrivée sur le tapis. C'est lui,
justement, qui a commencé le travail, c'est le début gui a
compté; comme on dit, c'est le premier pas qui compte toujours. C'est
lui qui a fait le premier pas. Naturellement, il n'avait pas des millions
à ce moment; il n'y avait pas non plus un déficit de 3 000 000
000 $ et 4 000 000 000 $. Il a commencé le travail, il a commencé
à sensibiliser la population à la protection de l'environnement.
C'est surtout cela gui a compté, ce grand premier pas qui a
été fait à une époque où les gens
étaient très peu conscients de la chose.
On a parlé de beaucoup de millions, de millions ici, de millions
là. Hier soir, si je me souviens bien, au sujet des crédits, on a
dit qu'on dépensait, je pense, 1 000 000 $ pour la dépollution de
tous les lacs du Québec. C'est une question qu'il faudrait
peut-être revoir. Il faudrait mettre l'accent sur cela aussi.
Pour revenir au projet de loi, pour nous, en principe, le projet de loi
semble très simple, il se résume en un paragraphe. On ne peut pas
s'opposer au principe, mais, en même temps, on voudrait poser une ou deux
questions de base que je laisserai mes collègues qui sont plus
près des municipalités développer plus en profondeur.
Concernant l'argent mis en fidéicommis entre les mains du
ministre des Finances, s'il obtient des intérêts supérieurs
à ceux des obligations des municipalités et, en contrepartie,
s'il obtient des intérêts inférieurs - ce gui pourrait
arriver dans les années qui viennent - à ceux des obligations des
municipalités, que se passera-t-il pour la différence des
intérêts? Est-ce que les municipalités vont recevoir le
crédit pour l'excédent de ces intérêts? Est-ce
qu'elles vont recevoir le débit pour la part inférieure de ces
intérêts? C'est une question qui doit être posée et
à laquelle on doit répondre.
Oe plus, si les municipalités confient de l'argent au ministre
des Finances, ont-elles des frais quelconques pour l'administration de ces
fonds de la part du ministre des Finances ou si c'est un service qui sera rendu
sans tenir compte des intérêts et sans frais pour l'administration
de ces finances? (15 h 40)
Je vais laisser mes collègues qui sont beaucoup plus près
des municipalités relever toute cette question de finances
municipales-provinciales qui, je pense, est d'importance cruciale dans ce
projet de loi, parce que c'est cela vraiment que cela vise.
Pour la question fondamentale de la qualité de l'environnement et
de l'assainissement des eaux, comme nous le disons ici, naturellement nous ne
pouvons qu'appuyer le principe dans toute sa totalité. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Vimont.
M. Jean-Guy Rodrigue
M. Rodrigue: M. le Président, étant donné
que c'est la première occasion que j'ai de m'adresser à cette
Assemblée, vous me permettrez en premier lieu de remercier les
électrices et les électeurs du comté de Vimont pour le
témoignage de confiance dont ils m'ont gratifié en
m'élisant député de cette nouvelle circonscription
électorale, le 13 avril dernier.
Vimont est l'un des cinq comtés que compte maintenant la ville de
Laval. C'est un comté urbain qui regroupe une population relativement
jeune. En fait, 50% des électeurs, le 13 avril, avaient 35 ans et moins.
C'est donc une population dont le dynamisme se manifeste dans tous les secteurs
d'activité de notre collectivité et plus particulièrement
dans les organismes où le travail bénévole est à
l'honneur. Mes remerciements, M. le Président, s'adressent
également aux quelgue 500 militantes et militants du Parti
québécois de mon comté, dont l'enthousiasme et le
dynamisme ne se sont jamais démentis au cours de cette campagne
électorale et gui ont eu la
satisfaction de pouvoir se joindre à l'ensemble de la population
du Québec pour célébrer la réélection du
Parti québécois en cette date mémorable que nous avons
connue récemment.
Je veux réitérer à toutes ces personnes un
engagement que j'ai pris envers elles au cours de la campagne électorale
qui est de les représenter avec dignité et efficacité en
cette Assemblée et auprès du gouvernement et les assurer...
Une voix: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant, M. le
député, je m'excuse, j'ai de la part du député
d'Outremont une question de règlement.
M. Fortier: Une question de règlement, s'il vous
plaît.
Est-ce que vous pourriez rappeler le député de Vimont
à l'ordre, s'il vous plaît? Je crois que dans le moment nous
traitons d'un projet de loi et ce n'est pas le temps de faire un discours
faisant suite à la dernière élection.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, M.
le whip du parti.
M. Chevrette: M. le Président, le député
d'Outremont devrait comprendre qu'on a laissé les députés
de l'Opposition faire exactement la même chose lorsque c'était la
première intervention. Je pense qu'un minimum de décence s'impose
et qu'il devrait l'accepter.
M. Bédard: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de la
Justice, sur la même question de règlement.
M. Bédard: M. le Président, il me semble que c'est
toujours dans l'ordre pour un député de réitérer le
fait qu'il est à la disposition de ses électeurs. Qu'on le laisse
faire et qu'on arrête de l'interrompre.
M. Gratton: Sur la question de règlement, très
brièvement, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Gatineau.
M. Gratton: Merci, M. le Président.
Très brièvement. Nous n'avons sûrement pas
d'objection à ce que le député de Vimont fasse
l'entrée en matière qui s'impose au moment où il prononce
son premier discours à cette Assemblée nationale. Mais il me
semble que l'intervention du député d'Outremont est tout à
fait dans l'ordre. Le député ayant fait sa mise au point, il
devrait maintenant nous entretenir du projet de loi dont nous discutons le
principe.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Vimont, vous connaissez le règlement, j'en suis assuré. Je
sais très bien qu'en cette Assemblée il est coutume que, lors de
la première possibilité qu'une personne a de parler après
une élection, il puisse toucher le sujet le plus rapidement possible,
mais qu'ensuite il parle sur le sujet du jour.
M. le député.
M. Rodrigue: Je vous remercie, M. le Président. De toute
façon je vais vous dire que le député d'Outremont s'est
énervé un peu rapidement, parce que j'avais effectivement
terminé mon introduction en remerciant les électeurs de mon
comté.
M. le Président, le projet de loi no 8 que nous étudions
aujourd'hui, intitulé Loi modifiant la Loi sur la qualité de
l'environnement, est un projet d'une envergure plutôt modeste, puisqu'il
ne comprend qu'un seul article véritable. Il n'en est pas moins
important pour autant, puisqu'il accorde aux municipalités qui se sont
déjà engagées dans le Programme d'assainissement des eaux
du Québec et à celles qui comptent profiter de ce programme dans
l'avenir des garanties supplémentaires quant aux sommes d'argent que le
gouvernement s'engage à leur verser pour la réalisation de
travaux d'assainissement sur leur territoire.
Il faut rappeler, M. le Président, que le Programme
d'assainissement des eaux du Québec, qui a démarré vers la
fin de 1978, vise deux objectifs principaux, soit, d'une part,
d'améliorer et de conserver la qualité des eaux pour satisfaire
aux besoins d'approvisionnement et de récréation de la population
et, d'autre part, d'obtenir et de maintenir des milieux aquatiques
équilibrés permettant aux ressources biologiques d'évoluer
normalement.
Ce programme, quoique relativement récent, connaît
déjà un succès remarquable puisque, en vertu de ses
dispositions, 79 ententes déjà, portant sur des travaux dont le
coût total est évalué à 1 600 000 000 $, ont
déjà été conclues avec des municipalités du
Québec, comme l'a signalé tout à l'heure le ministre de
l'Environnement.
Ces chiffres démontrent à la fois l'intérêt
qu'a soulevé ce programme et la nécessité dans laquelle
nous sommes d'en asseoir le financement sur des bases solides. D'autant plus
que le gouvernement du Québec assume une part très importante du
coût des travaux réalisés en vertu de ce programme; part
qui varie, comme on l'a signalé tout à l'heure, entre 66 2/3% et
90% selon la nature des travaux subventionnés.
À titre d'illustration, M. le Président,
pour la ville de Laval, qui englobe le comté de Vimont, ce
programme a permis d'amorcer la réalisation de travaux d'assainissement
indispensables à la poursuite du développement de notre ville,
travaux dont le coût est évalué à 116 000 000 % et
pour lesquels une subvention de 71 000 000 $ a été
accordée par le gouvernement du Québec. Ces travaux sont d'autant
plus indispensables que la ville de Laval est entourée de deux
rivières - c'est une île - la rivière des Mille îles,
au nord, qui est contiguë aux comtés des basses Laurentides, et la
rivière des Prairies, au sud. Ces deux rivières sont
alimentées par le lac des Deux Montagnes qui, à son tour, est
alimenté par la rivière des Outaouais et la rivière du
Nord.
Sans faire de jeu de mots, M. le Président, je voudrais quand
même relever ce que le ministre de l'Environnement a
déclaré tout à l'heure, on part en amont et on s'en vient
vers "Laval".
Ces travaux sont d'autant plus importants qu'il y a une vingtaine
d'années, à Sainte-Rose et à Auteuil en particulier, dans
mon comté, nous avions des plages très importantes, qui servaient
de bases de plein air non seulement aux citoyens de Laval, mais
également aux citoyens de plusieurs des municipalités
environnantes. Et la réalisation des travaux qui est en cours -
même si ces travaux doivent prendre un certain temps, même s'il
s'agit là de projets à moyen terme qui peuvent durer cinq, six ou
sept ans - va nous permettre enfin de redonner l'accès à leurs
rives et à leurs rivières aux Lavallois et aux riverains de la
rivière des Mille Îles et de la rivière des Prairies.
De fait, M. le Président, les ententes intervenues en vertu de ce
programme ont permis a plusieurs municipalités d'entreprendre des
travaux d'assainissement essentiels et parfois urgents. Ces ententes auront
aussi des effets secondaires importants sur l'industrialisation et la
création d'emplois au Québec puisque, si l'on fait des
projections sur les dix prochaines années, ce programme devrait
engendrer des investissements globaux d'environ 6 000 000 000 $, ce qui ouvre
des perspectives assez extraordinaires pour les consultants, les entrepreneurs,
les industriels et les travailleurs québécois qui choisiront
d'oeuvrer dans le secteur de la dépollution et de l'assainissement des
eaux et de l'atmosphère. (15 h 50)
En conclusion, M. le Président, cette loi va permettre d'arrimer
solidement le Programme d'assainissement des eaux du Québec qui a
été lancé par le gouvernement du Québec actuel et
qui est l'un des programmes les plus importants que nous ayons mis en branle.
Ce projet de loi va, d'autre part, faciliter la tâche de nos élus
municipaux, ce qui est l'objectif visé par le projet de loi no 8.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Hull.
M. Gilles Rocheleau
M. Rocheleau: M. le Président, j'aurais souhaité
qu'un de mes ministres préférés soit en cette Chambre
alors que j'ai certains commentaires à faire concernant le projet de
loi.
M. Chevrette: M. le Président, question de
règlement ou de privilège.
Des voix: Ah!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip, s'il vous
plaît!
M. Chevrette: M. le Président, c'est parce que le ministre
avait été demandé d'urgence au téléphone. Je
pense que c'est mesquin d'agir de la sorte et cela ressemble à
Oswald.
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M.
le député de Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je dois vous
informer qu'après le ticket modérateur du ministre des Finances,
c'est maintenant le ticket aux municipalités. Lors du congrès de
1980 de l'Union des municipalités, le ministre des Finances, M.
Parizeau, annonçait justement, tenant compte des programmes
d'assainissement des eaux, un projet d'au-delà de 4 000 000 000 $ pour
les dix prochaines années. Il est bien évident, M. le
Président, qu'avec le déficit du gouvernement actuel, de l'ordre
de près de 15 000 000 000 $ dans ses états financiers de mars
prochain, il doit passer la balle à quelqu'un d'autre.
Une voix: C'est le déficit du fédéral.
Une voix:Non, c'est le vôtre.
M. Rocheleau: M. le Président, lorsque le ministre de
l'Environnement mentionnait, il y a quelques instants, qu'il avait
négocié avec les municipalités du Québec, il a
même failli prendre au jeu mon collègue, le député
de Nelligan, qui semblait croire à sa bonne foi, alors qu'on a
pratiquement utilisé une dictature pernicieuse face aux
municipalités du Québec. On les a prises à la gorge pour
les obliger à emprunter pour et au nom du gouvernement, parce que les
coffres du gouvernement du Québec étaient à sec, pour
financer les programmes d'assainissement des eaux.
Je me permettrai de lire à cette
Assemblée un communiqué que faisait parvenir l'Union des
municipalités du Québec concernant l'assainissement des eaux, le
2 mars 1981. "L'Union des municipalités du Québec ne s'est jamais
opposée et ne s'oppose pas encore aujourd'hui au programme
d'assainissement des eaux du Québec et jamais l'Union des
municipalités n'a usé de mesures dilatoires pour en retarder la
réalisation. Les modifications aux modalités du programme et aux
échéanciers proposés qu'a réclamées l'Union
des municipalités l'ont été pour correspondre davantage a
la réalité avec laquelle doivent vivre les villes,
réalité que d'aucuns ont tendance à oublier facilement.
Depuis maintenant un an, l'Union des municipalités fait des
représentations auprès du ministère de l'Environnement en
soulignant sa préoccupation en regard du processus suivi. Les
municipalités considèrent qu'en cette matière elles sont
les partenaires du gouvernement supérieur puisque, pour atteindre les
objectifs du programme, elles doivent consentir à prêter leurs
crédits et à en financer directement une part importante. Or,
dans l'élaboration de ce gros oeuvre, les représentants des
municipalités avaient été très peu
consultés." Autrement dit, sans qu'elles n'aient été
partie aux prises de décision, le législateur avait engagé
leur responsabilité. Les autorités municipales qui sont
élues localement et qui, dès lors, sont de véritables
gouvernements se retrouvent donc engagées dans un processus auquel elles
n'ont point participé, et on s'étonne qu'elles
réagissent.
Les municipalités ne sont pas des extensions
déconcentrées de ministères constituées pour
répondre à des objectifs fixés par le gouvernement
central. Les conseils de ville doivent faire face au dilemme suivant: voir
à l'intérêt commun avec des moyens locaux. II n'est donc
pas question d'avoir pour objectif de retarder le programme, et les appels
à la prudence que l'Union des municipalités a lancés
à ses membres à l'automne 1980 visaient uniquement à
suggérer beaucoup de viqilance au moment des négociations des
protocoles d'entente jusqu'au moment où les porte-parole des élus
locaux en arriveraient, avec les ministres concernés, à trouver
des formules acceptables pour tous.
À cette fin, l'Union des municipalités a proposé la
formation d'un comité conjoint interministériel. Cette
suggestion, très bien reçue par les ministres Parizeau,
Léonard et Léger, tarde par ailleurs à se
concrétiser, aucune réunion n'ayant encore été
convoquée.
Il est bien évident qu'au fond les programmes d'assainissement
des eaux ne sont pas contestés; au contraire, ils sont souhaités
et ils sont souhaités aussi par l'Opposition. Ce que nous contestons,
c'est le fait que le gouvernement utilise les fonds, c'est-à-dire les
crédits des municipalités, crédits qui coûtent plus
cher que si le gouvernement empruntait lui-même les sommes d'argent
nécessaires pour faire les travaux. À la suite de données
de la firme Wood Gundy, il est déterminé que les coûts
d'emprunt aux municipalités sont de l'ordre de 0,5% supérieurs en
intérêts sur le marché des obligations que les emprunts
effectués par le gouvernement du Québec.
Quand on parle d'un projet de 4 000 000 000 $, on parle de plusieurs
centaines de millions à l'échéance. Je considère
que le gouvernement actuel ne semble pas évaluer le coût des
intérêts d'aujourd'hui et semble se fouter de ce que cela pourra
représenter à plus ou moins longue échéance. On est
en train d'hypothéquer notre jeunesse pour le restant de ses jours et
pour des générations à venir. Cela place les
municipalités dans des situations importantes dans le sens qu'elles
doivent renouveler aussi les obligations à l'échéance:
elles doivent renouveler constamment des obligations qui arrivent à
échéance.
Elles doivent aussi financer des programmes locaux en tenant compte des
orientations, des plans directeurs locaux, des besoins de la population face
à d'autres programmes. Je considère que même si le projet
de loi no 8 semble satisfaire une partie, une infime partie des gens, d'autre
part, nous mettons en danger nos municipalités pour l'avenir. Je ne sais
pas si le gouvernement ou les différents ministères viendront
apporter de l'aide aux municipalités gui seront en difficulté,
qui connaîtront sûrement certaines difficultés. (16
heures)
J'aimerais aussi, avant l'acceptation en troisième lecture et en
commission parlementaire, que le ministre puisse nous informer... Je voudrais
ici simplement vous lire un paraqraphe d'une lettre que je recevais du maire de
Québec, M. Jean Pelletier, alors qu'il avait rencontré les
ministres des Finances, des Affaires municipales et de l'Environnement. Dans un
paragraphe que je lis, M. Pelletier mentionne: J'ai personnellement de
sérieuses réserves sur cette façon de procéder,
mais le gouvernement du Québec, par la voix de son ministre des
Finances, a formellement indiqué qu'il ne changera pas sa façon
de procéder. Je comprends aujourd'hui que le ministre de l'Environnement
ne semble pas avoir d'autre choix que d'imposer aux municipalités le
fardeau de financer pour et au nom du gouvernement les programmes
d'assainissement des eaux. Mais je voudrais que le ministre de l'Environnement
puisse m'informer, lors de l'étude en commission parlementaire, des
raisons qui motivent le ministre des Finances à refuser de subventionner
directement le coût des
équipements et des conduites maîtresses et à obliger
plus particulièrement les municipalités à en faire les
frais.
En terminant, M. le Président, je tiens quand même à
souligner qu'il est important pour l'ensemble du Québec de
procéder le plus rapidement possible a l'assainissement des eaux. On a
déjà retardé pendant trop d'années et j'ose
souhaiter, qu'en même temps le ministre de l'Environnement pourra
discuter avec ses collègues, le ministre de l'Éducation et le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, afin d'établir
des programmes d'éducation. On parle d'assainissement des eaux, on parle
des lacs, on parle de la forêt, mais il est malheureux de constater en
forêt combien il y a de dépotoirs à ciel ouvert qui sont
créés, malheureusement, par des gens qui ne respectent pas les
normes les plus normales, c'est-à-dire qu'ils utilisent l'ensemble de
nos forêts ou les abords des lacs comme dépotoirs publics. Je
pense que les différents ministères devraient mettre l'accent sur
une certaine forme d'éducation dans ce domaine.
En terminant, M. le Président, je vous remercie et nous pourrons
sûrement poser certaines questions au ministre lors de la commission
parlementaire.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Groulx.
M. Elie Fallu
M. Fallu: M. le Président, vous me permettrez, et
ça assez brièvement, avant d'aborder le problème du
fidéicommis, de dire, par votre intermédiaire, deux choses
relativement simples, il me semblait du moins, au député de Hull.
De lui rappeler, en premier lieu, que dans une société il y a des
responsabilités qui sont partagées. On sait que l'un des plus
gros pollueurs dans notre société, ce sont nos communautés
urbaines. La pollution est la responsabilité de l'individu, elle est
celle de la municipalité. C'est historiquement les individus, lorsqu'ils
sont isolés, et les municipalités, lorsque les citoyens sont
regroupés, à qui appartient et à qui a toujours appartenu
le soin de régler les problèmes de pollution. Si l'État
intervient aujourd'hui, c'est qu'historiquement, et notamment depuis les
années cinquante-cinq, les municipalités avaient, à toutes
fins utiles, abandonné leur rôle. Les dernières usines
qu'on avait vues pousser datent des années cinquante-quatre et
cinquante-cinq.
Donc, qu'on ne se surprenne pas aujourd'hui de voir un mouvement. Les
municipalités avaient cette responsabilité. Elles l'ont toujours.
D'autre part, on nous dit que le gouvernement impose un fardeau fiscal aux
municipalités. Ce fardeau, elles l'avaient de toute façon. Ce que
le gouvernement fait, c'est de les aider au moment où elles insistent.
Quelle aide, Dieu! 100% pour les études. 90% pour les usines. 66 1/3%
pour les intercepteurs. C'est là charger le dos, le fardeau des
municipalités? De surcroît - et j'arrive à mon propos - et
notamment depuis le 6 juin dernier dans cette Chambre, l'Assemblée
nationale... Il semble que le député de Hull l'ait
complètement ignoré, pourtant il était maire, il y a
encore peu de temps. Comment se fait-il qu'il ne sache pas que, le 6 juin 1980,
ici dans cette Chambre, nous avons adopté un projet de loi créant
la Société québécoise d'assainissement des eaux qui
a atteint exactement les buts qu'il cherche, à savoir que l'État,
par le biais de sa société nationale, assume la
responsabilité du crédit municipal, va sur les marchés
à meilleur compte, tel que l'ex-maire le propose, remplit
précisément les buts que, normalement, les municipalités
doivent atteindre elles-mêmes. L'Assemblée nationale a
chargé le ministère de l'Environnement de se mettre au service
des municipalités. C'est d'ailleurs ce geste encore que nous posons
aujourd'hui. Les municipalités ont demandé, l'Union des
municipalités, notamment, a demandé au gouvernement de donner une
facilité supplémentaire, je dirai une garantie
supplémentaire dans le paiement des subventions, et l'Assemblée
nationale, un an moins deux jours après le projet de loi sur la
Société québécoise d'assainissement des eaux,
revient, obtempère à la demande des municipalités pour le
faire. La responsabilité première appartient toujours aux
municipalités et pourtant, l'Assemblée nationale siège
pour venir leur donner un coup de main.
J'arrive à la loi, M. le Président. Comment se paient les
subventions? Il y a deux pratiques possibles. Les crédits sont inscrits
annuellement, programme par programme, élément par
élément, et sont votés par l'Assemblée nationale.
J'ai bien dit "annuellement", notamment lorsqu'il s'agit de paiements de
subventions qui s'échelonnent sur un certain nombre d'années. On
sait qu'il est coutume, dans les municipalités, de financer des
équipements de telle ampleur sur au moins 20 ans. La première
règle consiste, selon les règles budgétaires connues de
tous, à verser, quinze jours avant l'échéance, par
l'intermédiaire d'un chèque qui est émis sur le compte
d'un ministère, directement la subvention à la
municipalité, sans passer par le ministère des Finances. Vous
avez reçu, comme maire, M. le député de Hull, de tels
chèques, venant du ministère des Affaires municipales ou de
l'Environnement, signés et présentés par une lettre du
ministre de l'Environnement ou des Affaires municipales.
Il existe - et c'est le seul cas que nous ayons - dans la Loi sur les
subventions aux
commissions scolaires, depuis 1968, une autre façon d'agir. C'est
ce qu'on appelle le dépôt en fidéicommis et là, je
dois m'étendre quelque peu sur le sujet pour expliquer la
mécanique car il est évident que le député de
Nelligan n'a pas saisi la règle administrative, mais enfin, comme il est
nouveau en cette Chambre, je le comprends très facilement. Il est
important, je crois, que nous précisions la mécanique aujourd'hui
et tout de suite en première lecture car, sans cela, on risquerait
d'induire en erreur les municipalités. Le dépôt en
fidéicommis se fait à partir des crédits votés
à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire sur des tranches
annuelles. Cela se passe, M. le Président, de la façon suivante:
Quinze jours avant l'échéance, le ministre, donc, le ministre de
l'Environnement en l'occurrence, comme le ministre de l'Éducation en ce
qui a trait aux subventions aux commissions scolaires, dépose en
fidéicommis, à partir des crédits de son ministère,
entre les mains du ministre des Finances, pour que celui-ci acquitte, à
même ces sommes, partie du capital ou de l'intérêt
arrivée à échéance dans la municipalité. Le
versement se fait alors à la municipalité. Voilà ce qu'est
le fidéicommis. Donc, il n'y a pas de fonds, de réserve quelque
part qui porterait intérêt, il n'y a pas de spéculation
possible de la part du ministre des Finances. La différence
fondamentale, essentielle entre les deux règles de fonctionnement, c'est
que par les méthodes habituelles de versement, les fonds sont
versés par le ministre de l'Environnement et dans le second cas, c'est
versé par le ministre des Finances. (16 h 10)
Ce matin, j'ai interrogé l'administration des finances au
ministère de l'Éducation pour savoir, puisque cette disposition
existait à l'article 10, section VIII de la Loi des subventions aux
commissions scolaires, comment, après quand même 13 ans
maintenant, cette loi avait été administrée. J'ai
demandé qu'on me donne la liste des commissions scolaires qui avaient
utilisé la méthode de fidéicommis plutôt que les
règles de pratique. La réponse, M. le Président: aucune.
Nous le savions néanmoins lorsque nous avons inscrit ce projet de loi,
et il faut s'expliquer. C'était une demande formelle de l'Union des
municipalités et nous l'avons acceptée car il y avait, dans
l'esprit des gens qui nous l'ont demandé, une sorte de garantie
supplémentaire - et elle existe, de fait - par le biais du
fidéicommis plutôt que par le biais des règles
budgétaires habituelles. Il s'agit donc uniquement de garantie
supplémentaire. Mais en pratique, l'État étant
l'État, l'Assemblée nationale étant l'Assemblée
nationale, les budgets étant votés annuellement, à toutes
choses égales, l'argent vient du même fonds. La demande
était là, nous avons obtempéré.
Un dernier mot. Je voudrais remercier mon collègue de la
rivière des Mille Îles, le député de Vimont, d'avoir
encore une fois en cette Chambre souligné auprès du ministre en
cette occasion l'importance des travaux à faire dans le paysage urbain
que nous habitons. Enfin, M. le Président, j'espère que les
quelques réflexions d'approche philosophique, devrais-je dire, que j'ai
faites au début de mon exposé auront convaincu le
député de Hull que, si quelquefois l'Union des
municipalités s'est faite si critique auprès du gouvernement dans
les années passées, lors de notre premier mandat, c'est
peut-être que ces gens, comme mon adversaire à la dernière
campagne électorale, membre de l'exécutif de l'Union des
municipalités, Me Nolan Filiatrault, ont fait des représentations
qui étaient plus partisanes qu'utiles pour les municipalités.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de
l'Environnement, pour votre droit de réplique.
M. Marcel Léger (réplique)
M. Léger: M. le Président, je voudrais d'abord,
dans ce droit de réplique de deuxième lecture, remercier les
intervenants qui ont exprimé leur appui au projet, spécialement
le député de Nelligan, qui a manifesté un
intérêt particulier pour la protection de l'environnement. Aux
questions qu'il m'a posées, il a probablement eu la réponse qu'il
désirait de la part du député de Groulx. S'il
désirait des détails supplémentaires, on pourrait le faire
au moment de l'article qu'on doit adopter.
Cependant, je ne peux pas terminer sans parler du contenu de
l'intervention du député de Hull. En regardant le style du
député de Hull, j'ai pensé: Ne me dis pas que cela va
être la croix qu'on devra endurer pendant quatre ans! M. le
Président, j'ai l'impression que le député de Hull est en
retard de quelques mois. Avant les élections provinciales c'était
devenu le ballon politique du Parti libéral d'essayer de trouver une
façon de minimiser une des grandes réussites du gouvernement du
Québec actuel, le programme d'assainissement des eaux. C'est un ballon
qui a failli se retourner contre le député de Hull qui, par sa
patisanerie aveugle libérale a fait perdre beaucoup aux citoyens de la
municipalité de Hull qui ont justement vu des projets retardés
uniquement par son intention de vouloir faire battre la ministre du coin sur un
projet qui intéressait d'ailleurs les gens de Hull.
M. le Président, il y a une chose qu'il faut expliquer au
député de Hull - je ne sais pas s'il va vouloir la comprendre
à travers sa partisanerie libérale - c'est que la
responsabilité des aqueducs et des égouts, donc, entre autres,
des rejets d'une municipalité, c'est une responsabilité
municipale. Je ne sais pas combien de fois il faut le dire, c'est
d'abord une responsabilité municipale. Ce n'est pas parce que le
gouvernement du Québec a décidé d'aider par des
subventions l'ensemble des municipalités du Québec qu'il faut
qu'on se décharge d'une responsabilité. C'est un peu comme si
quelqu'un disait: Comment, vous ne voulez payer que 90% de ma dette, je vous
accuse de ne pas payer 100% de ma dette.
M. le Président, on est prêt à payer jusqu'à
90% des usines d'épuration qui sont sur une responsabilité
municipale, et juste par intérêt politique on va dire: II ne paie
pas les 10%, donc, il n'est pas correct et on veut nous obliger à
assumer une responsabilité et, ajoutant démagogiquement, à
cumuler une diminution de capacité d'emprunt d'une municipalité.
C'est complètement faux, c'est démagogue. Je dirais plus que
cela, c'est induire la population en erreur. Une responsabilité
municipale doit être prise par les responsables et les élus d'une
municipalité et c'est elle qui doit être le maître-d'oeuvre
et avoir la responsabilité financière, ou bien elle ne veut pas
prendre la responsabilité financière, comme c'est le cas quand
certains nous ont dit: On veut laisser à la société
d'État le soin de faire les emprunts, mais on veut garder le "candy", la
maîtrise d'oeuvre.
M. le Président, tout est là. Ou bien on prend les droits
et aussi les responsabilités. On ne peut pas prendre uniquement les
avantages et laisser de côté les inconvénients. C'est bien
simple, quand on est maître-d'oeuvre, on est aussi responsable
financièrement. Si le gouvernement apporte une aide financière,
c'est une façon de permettre à beaucoup de municipalités
d'embarquer, c'est une façon de négocier. La preuve que le
député de Hull est en arrière de son temps, c'est
qu'aujourd'hui il nous présente des lettres, entre autres du maire
Pelletier, mais il ne nous a pas dit la date de la lettre du maire Pelletier.
Ce n'est pas nécessaire de me le dire, c'était avant que la ville
de Québec signe elle-même son protocole d'entente! Ce qu'il n'a
pas dit non plus, M. le Président, c'est que la demande de l'Union des
municipalités a été faite par les représentants et
les dirigeants de l'Union des municipalités et que parmi ces dirigeants
il y a le maire de Sherbrooke, il y a le maire de Valleyfield, il y a le maire
de Québec qui, je tiens à le dire pour l'information du
député, ont dû trouver que les négociations avec le
gouvernement du Québec étaient épouvantables, mais les
trois ont signé des protocoles d'entente avec le gouvernement du
Québec. Le maire de Boisbriand a même signé. D'où
vient ce désir d'essayer de mêler les cartes, M. le
Président? C'est parce qu'avant nous étions en période
préélectorale et il fallait essayer d'aller chercher des votes en
trompant un peu la population, en étant démagogue ici et
là.
(16 h 20)
M. le Président, ce temps est passé, les
Québécois ont jugé le Parti libéral, c'est pour
ça que nous allons continuer le programme d'assainissement des eaux.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, un
instant. M. le député de Hull, j'ai cru comprendre que vous
vouliez intervenir sur le discours que vous aviez prononcé; en vertu de
l'article 96, à la fin du discours du ministre, je vous le
permettrai.
M. Léger: M. le Président, je voudrais terminer en
donnant certains renseignements pour la bonne compréhension des citoyens
qui nous écoutent.
Les municipalités, dans ce programme d'assainissement des eaux,
ont négocié de bonne foi avec le gouvernement du Québec et
elles ont accepté les subventions que nous leur avons proposées,
elles ont accepté les projets que nous avons proposés.
Près de la moitié de la population du Québec, par la voix
des élus de ces municipalités, a déjà
accepté le programme d'assainissement des eaux. Qu'est-ce que le
député de Hull veut de plus comme preuve de l'acceptation de ce
projet?
Deuxièmement, M. le Président, nous avons voulu assurer,
comme je l'ai dit tantôt, que les municipalités recevraient le
remboursement intégral, capital et intérêts, de la portion
que le gouvernement du Québec prend à sa charge sur une
responsabilité municipale. Les municipalités ont dit: Si les
sommes d'argent que nous empruntons faisaient augmenter la dette que la
municipalité a, est-ce qu'elles pourraient être
pénalisées sur les marchés d'emprunt? Nous avons inclus
une lettre de la Commission municipale du Québec, qui a accepté
de répondre à cette préoccupation en disant qu'on ne
tiendra pas compte de la somme d'argent garantie par le gouvernement du
Québec dans la capacité financière d'une
municipalité pour faire des emprunts sur le marché. M. le
Président, qu'est-ce qu'on veut de plus?
C'est alors que l'Union des municipalités nous a demandé
d'apporter un projet de loi garantissant les sommes d'arqent - autrement dit la
paire de bretelles et la ceinture en même temps, pour être
sûr que personne ne perde ses culottes; on nous a demandé une
double sécurité - dans un contrat signé par le
gouvernement du Québec; non seulement par le ministre de
l'Environnement, mais aussi par un décret du Conseil des ministres. Eh
bien, en plus de cela, pour être certain que l'argent ne se perde pas
quelque part, on va prendre
l'argent garanti par décret du Conseil des ministres, l'argent
qui reviendrait à une municipalité, si elle le demande, et on va
le déposer en fidéocommis au ministère des Finances, pour
avoir une autre double sécurité.
C'est ce que nous faisons aujourd'hui, M. le Président. Les
membres de cette Chambre, ainsi que les citoyens ou les maires qui peuvent
écouter l'étude de ce projet de loi actuellement à la
télévision doivent savoir que nous avons donné toutes les
garanties voulues pour assurer qu'un des programmes les plus populaires,
accepté par toutes les régions du Québec se réalise
par la négociation avec une aide gouvernementale, pour qu'on retrouve au
plus tôt, sans plus tarder, l'usage des cours d'eau. Ainsi, partout au
Québec, dans quelques années, on pourra avoir de l'eau potable,
se baigner, avoir la possibilité de la pêche, de la
récréation et les cours d'eau du Québec pourront retourner
aux citoyens du Québec.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant de vous accorder la
parole, M. le député de Hull, j'aimerais simplement rappeler
à plusieurs des nouveaux membres de cette Chambre trois articles du
règlement.
Le premier, qui est le no 100 indique que tout député qui
a la parole ne doit être interrompu en aucun moment, à moins que
la personne qui l'interrompt ne lui en demande la permission.
J'ai, lors de la dernière session avant la nouvelle
Législature, souvent fait mention de cet article 100. J'ai aussi fait
mention de l'article 48 qui dit qu'une violation des droits de
l'Assemblée ou d'un de ses membres constitue une question de
privilège. J'ai souvent aussi fait mention de l'article 49.2 gui dit
qu'un député peut toujours soulever une question de
privilège à l'Assemblée nationale immédiatement
après qu'ont été prononcées les paroles ou que se
sont déroulés les événements qui y donnent
lieu.
Cependant, j'ai insisté, de façon qu'on sache très
bien que le premier des privilèges que possède un
député en cette Chambre, c'est de se prononcer sans être
interrompu. En conséguence, un député qui a
déjà prononcé un discours et qui croit que celui qui est
en train d'en prononcer un a mal interprété ses paroles, j'ai
demandé, pour lui permettre, en vertu de l'article 100 de n'être
interrompu d'aucune façon, que la personne qui veut l'interrompre
utilise plutôt l'article 96 qui se lit comme suit: "Le
député qui prend la parole pour donner des explications sur un
discours qu'il a déjà prononcé ne peut le faire que
lorsque le discours qui les provoque est terminé, à moins que
celui qui le prononce ne consente à être interrompu. Les
explications doivent être brèves et ne doivent apporter aucun
élément nouveau dans la discussion et elles ne peuvent engendrer
un débat."
Donc, en vertu de l'article 96, je vous permets, M. le
député de Hull, et en même temps pour permettre aux
nouveaux députés en cette Chambre de bien connaître le
règlement, de faire votre intervention en ne vous limitant qu'à
ce que vous vouliez vraiment apporter comme correction. M. le
député de Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je dois dire au
ministre de l'Environnement que son préambule, qui semblait lui rappeler
un ex-député de cette Chambre, M. Lacroix...
M. Chevrette: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député. Question de règlement de la part du whip du
gouvernement.
M. Chevrette: M. le Président, vous avez bien dit qu'en
vertu de l'article 96, l'intervenant devait se lever et dire: Les propos qui
étaient les suivants sont faux pour telle raison, et ne pas commencer
à paraphraser.
M. Rocheleau: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant, M. le
député. Je répète l'article 96 qui dit bien que les
explications doivent être brèves, ne doivent apporter aucun
élément nouveau dans la discussion et ne peuvent engendrer un
débat. Au moment où vous vous êtes levé tout
à l'heure, cela avait trait à une demande du ministre au sujet
d'une lettre adressée par le maire de Québec. Je pense que c'est
à ce moment précis que vous avez demandé la parole et que
je vous ai demandé d'attendre la fin du discours. Je pense que
c'était le but de votre intervention de tout à l'heure. M. le
député.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Justement, le
ministre de l'Environnement a demandé la date de cette lettre,
étant donné qu'il prétendait que le maire avait
signé après. Je dois vous informer que cette lettre est
datée du 13 février et que si le projet de loi est
présentement à l'étude en Chambre, c'est grâce aux
objections que la ville de Hull a soutenues à la Communauté
régionale de l'Outaouais et toute la Communauté régionale
de l'Outaouais, face à la politique que le ministre de l'Environnement
apportait dans le temps.
Une voix: Très bien.
Une voix: II n'y a pas de débat.
Le Vice-Président (M. Jolivet): II n'y a pas de
débat, mais le ministre a quand même droit à sa question.
M. le ministre.
M. Léger: M. le Président, en vertu de l'article 96
qui permet de donner des explications sur un discours qu'un
député a déjà prononcé, je dois dire que la
question que j'ai soulevée était pour demander si la lettre du
maire de Québec avait été postée ou reçue
avant la signature du protocole par la ville de Québec. Il vient de nous
donner raison puisqu'il a dit que la lettre était datée du 13
février et que la signature a eu lieu au mois de mars.
Une voix: C'est cela.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que la motion de
deuxième lecture du projet de loi no 8, Loi modifiant la Loi sur la
qualité de l'environnement, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
Renvoi à la commission de la protection de
l'environnement
M. Chevrette: M. le Président, je propose qu'on
défère ce projet de loi à la commission de la protection
de l'environnement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de
déférence est-elle adoptée?
M. Picotte: Adopté. Le Vice-Président (M.
Jolivet): Adopté.
Travaux de la Chambre
M. Chevrette: M. le Président, qu'il me soit permis, au
nom du leader, de rappeler les commissions qui doivent siéger
aujourd'hui.
Tout d'abord, la commission des communications siège
présentement jusqu'à 18 heures et devra siéger
également de 20 heures à minuit, au salon rouge. À la
salle 81-A, la commission des finances et des comptes publics siège
toute la journée. Cet après-midi, jusqu'à 18 heures, la
commission de la fonction publique pour l'étude du projet de loi no 12
siégera. Ce soir, en remplacement de la commission de la fonction
publique, ce sera la commission des affaires sociales pour l'étude,
article par article, du projet de loi no 10 sur la protection de la
jeunesse.
Demain, vendredi, en Chambre, ce sera la première lecture du
projet de loi no 1 et du projet de loi no 7 concernant l'amendement au statut
de la SHQ pour permettre l'accessibilité à la
propriété. (16 h 30)
II y aura des commissions parlementaires qui seront annoncées
demain, mais vous pouvez tout de suite prévoir qu'il y aura les
institutions financières, de même que la commission des
communautés culturelles et l'immigration en après-midi. Celle des
transports siégera toute la journée demain pour l'étude
des crédits. Également, demain matin, si l'Opposition y consent,
nous pourrions, après la période des questions, étudier le
projet de loi que nous venons d'adopter en deuxième lecture sur la
protection de l'environnement, de 11 h 30 à 13 heures, sous
réserve du consentement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip adjoint de
l'Opposition.
M. Picotte: Sous toute réserve, demain, nos
collègues semblent prêts à discuter du seul article,
d'ailleurs, du projet de loi sur l'environnement que nous venons d'adopter en
deuxième lecture. Il devrait y avoir possibilité de le faire...
Je dis cela sous toute réserve. Le leader de l'Opposition pourra
confirmer cela probablement ce soir avec le leader du gouvernement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Avez-vous quelque chose
à ajouter, M. le leader de l'Opposition?
M. Levesque (Bonaventure): Pardon?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Avez-vous quelque chose
d'autre à ajouter?
M. Levesque (Bonaventure): Non.
M. Chevrette: De toute façon, je m'entendrai avec lui et
cela pourra faire l'objet, demain, d'un avis en Chambre après la
période des questions. S'il n'y a aucune intervention de la part de
l'Opposition, je vais proposer l'ajournement des travaux à 10
heures...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): J'arrive de fonctions un peu
différentes. Est-ce que le leader parlementaire adjoint pourrait nous
dire avec lequel des projets de loi, le no 1 ou le no 7, on commencera
demain?
M. Chevrette: Demain matin, on commencerait par le projet de loi
no 1 et ensuite, le projet de loi no 7.
M. Levesque (Bonaventure): D'accord.
M. Chevrette: On peut étudier le no 7 en premier, me
dit-on.
M. Levesque (Bonaventure): Pardon?
M. Chevrette: On peut commencer par le projet de loi no 7 et
finir par le projet de loi no 1. D'ailleurs, le projet de loi no 7 ne compte
qu'un seul petit amendement.
M. Levesque (Bonaventure): Je pense qu'il serait
préférable que nous commencions - c'est un bon conseil que je
veux donner à nos amis - par le projet de loi no 1; on pourrait en
disposer probablement plus rapidement et on suivrait l'ordre, d'ailleurs.
M. Chevrette: Si c'est pour prédisposer nos ad... amis
d'en face à accepter le projet de loi...
Une voix: Nos adversaires.
M. Chevrette: C'est ce que j'ai failli dire. Ç'eut
été un lapsus. On peut commencer par le projet no 1, il n'y a pas
d'objection, en tenant pour acquis que, pour le deuxième vous saurez
montrer une très grande collaboration. Cela nous permettra de finir
à une heure raisonnable.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Nous pouvons donc avoir
une motion d'ajournement.
M. Chevrette: Je propose l'ajournement à 10 heures demain
matin.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté? Des
voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Donc,
ajournement à demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 16 h 33)