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(Onze heures de la matinée)
M. PAUL (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre,
messieurs!
Présentation de pétitions. Lecture et
réception de pétitions. Présentation de rapports de
comités élus.
Comité des régies
gouvernementales
M. GRENIER: M. le Président, le comité des régies
gouvernementales à caractère industriel et commercial a l'honneur
de soumettre à votre Chambre son premier rapport. Votre comité a
tenu deux séances et a entendu les représentants de l'Hydro-
Québec et votre comité s'est ajourné sine die.
M. LE PRESIDENT:
Présentation de motions non annoncées.
Présentation de bills privés. Présentation de bills
publics.
M. JOHNSON: B.
Bill no 81
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
première lecture d'une loi modifiant certaines dispositions
législatives concernant les placements de biens.
L'honorable ministre de la Justice.
M. BERTRAND: M. le Président, ce projet a tout simplement pour
but de modifier certaines dispositions législatives qui contiennent des
renvois à la totalité de l'article 981-0 du code civil que la
Chambre a déjà étudié et qu'elle a adopté le
7 juin, lequel bill est à l'heure actuelle au Conseil législatif.
On accroît aussi le nombre des cas où un émetteur de
valeurs mobilières devra s'enregistrer auprès de la Commission
des valeurs mobilières, surtout en ce qui a trait à certains
effets de commerce et billets échéant à moins d'un an de
leur date. Et nous retrouverons également dans le bill des dispositions
de concordance.
M. LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle
adoptée? Adopté.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture de ce bill à une
séance subséquente.
M. JOHNSON: C.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires culturelles propose
la première lecture...
M. JOHNSON: C, M. le Président. M. LE PRESIDENT: Pardon? M.
JOHNSON: C.
Bill no 83
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
première lecture d'une loi modifiant la loi de la Régie des
alcools.
L'honorable ministre de la Justice.
M. BERTRAND: Dans ce projet, M. le Président, il y a deux
parties. D'abord une qui a trait à la régie, je dirais dans son
rôle commercial, et l'autre quant à l'octroi de permis de vente de
boissons dans les salles à manger, restaurants et bars situés en
dehors des grands centres urbains où dorénavant on pourra vendre
des boissons les jours fériés. On sait qu'à l'heure
actuelle, cette permission est limitée aux villes de 50,000 de
population et dans un rayon de cinq milles. Dorénavant on pourra le
faire ailleurs avec le consentement du conseil de chaque
municipalité.
Il y a certains autres articles, par exemple, permission de vente ou de
faire vendre à l'aérogare de Dorval et également des
amendements qui permettent aussi aux détenteurs de permis qui seront
poursuivis pour avoir vendu des boissons alcooliques à des personnes
âgées de moins de 20 ans, pour avoir admis de telles personnes
dans une salle où on en vend, de se disculper s'ils prouvent qu'ils ont
usé de diligence raisonnable le tout conformément à une
jurisprudence établie en particulier à un jugement
déjà rendu par la cour d'Appel.
En ce qui a trait à la première partie du commerce, nous
donnons suite à certaines recommandations du rapport Smith et il y a
d'autres mesures quant au conseil d'administration qui sera créé
en vertu de ladite loi qui relèvera dorénavant quant à la
partie du commerce lui-même de l'honorable ministre des Finances. L'autre
partie de la loi, l'exercice du rôle quasi judiciaire de la Régie,
de même que les pénalités au sujet des infractions relevant
bien entendu du ministère de la Justice.
M. LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle
adoptée? Adopté.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture de ce bill à une
séance subséquente.
M. JOHNSON: D.
Bill no 91
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires culturelles propose
la première lecture de la Loi de la bibliothèque nationale du
Québec.
L'honorable ministre des Affaires culturelles.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, le but du projet de
loi est de faire de la bibliothèque Saint-Sulpice de Montréal la
bibliothèque nationale du Québec et de permettre au gouvernement
qui est responsable de cette bibliothèque nationale de prendre toute
disposition à cet effet, notamment en ce qui concerne l'obligation du
dépôt légal.
M. LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle
adoptée? Adopté.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Première lecture de ce bill. First
reading of this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture de ce bill à une
séance subséquente.
Affaires du jour.
M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.
M. LESAGE: M. le Président, est-ce que les projets de loi qui
viennent de subir leur première lecture sont imprimés et
prêts pour distribution?
M. BERTRAND: Oui, ils vont être distribués.
M. JOHNSON: Ils sont en train de les distribuer.
M. LESAGE: Est-ce que les bills 249 et 250 qui doivent faire l'objet
d'une étude demain matin au comité des bills privés, et
qui concernent la Corporation de prêt et de revenu sont imprimés
et prêts pour distribution?
M. JOHNSON: Je le crois, il y a peut-être des amendements
cependant, c'est un problème très complexe...
M. LESAGE: De nouveaux amendements? Parce que...
M. JOHNSON: Un instant, je vais vérifier. Ils sont
imprimés...
M. LESAGE: Oui.
M. JOHNSON: ... et il y a eu tellement de discussions autour de ces deux
bills-là.
M. LESAGE: Les amendements qui avaient été proposés
par les conseillers juridiques du gouvernement, d'après l'examen que f
ai fait...
M. JOHNSON: Lesquels? Quels amendements? Les derniers derniers,
derniers?
M. LESAGE: Oui, ceux qui m'ont été envoyés par M.
Normand ont été incorporés à la dernière
épreuve du bill que j'ai reçue.
M. JOHNSON: Je crois qu'ils ont été incorporés.
Maintenant, je ferai parvenir...
M. LESAGE: Oui, j'ai vérifié, mais je pourrai
vérifier beaucoup plus facilement avec le bill imprimé
définitivement.
M. JOHNSON: Je me demande s'il n'y a pas eu quelques corrections de
détail encore. Je ferai envoyer tout de suite un rapport au bureau du
chef de l'Opposition...
M. LESAGE: Très bien.
M. JOHNSON: ... afin que nous soyons prêts à étudier
ces bills-là.
M. LESAGE : Qu'on attire mon attention en même temps s'il y a de
nouvelles modifications.
M. JOHNSON: Très bien. Mais ils sont imprimés, je les al
ici, c'est 249 et 250.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. JOHNSON: Un instant
Oui, il y aura un amendement mineur. C'est une précision
seulement. Les autres amendements de base sont...
M. LESAGE: Sont incorporés.
M. JOHNSON: ... incorporés, amendements que connaît
déjà le chef de l'Opposition.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
Question de privilège M. Antonio Flamand
M. FLAMAND: Sur une question de privilège. Dimanche dernier,
à Rivière-du-Loup, le député de Matane a
déclaré que le député de Rouyn-Noranda
n'était plus apte à détenir un siège à
l'Assemblée législative. Voici comment la Presse du 7 août
rapporte les propos du député de Matane: « Le
député libéral de Matane à l'Assemblée
législative du Québec, Me Jean Bienvenue, a sommé hier
soir le député de l'Union Nationale de Rouyn, Me Antonio Flamand,
de donner sa démission en raison de sa participation dans l'affaire
1,000 Motels. Il a qualifié l'affaire de scandale. C'est le droit du
peuple d'avoir à l'Assemblée législative des
représentants qui ont les mains propres, a dit Me Bienvenue en
réclamant la démission du député Flamand. Selon des
articles publiés la semaine dernière par la Presse, c'est le
député de l'Union Nationale de Rouyn qui a loué le terrain
où devaient être érigés les bâtiments de
l'entreprise 1,000 Motels. Comme on le sait, des motels
préfabriqués furent fournis à cette entreprise par un
entrepreneur de New-Westminster en Colombie-Britannique, M. Peter Frazen, qui
s'est déclaré en faillite. En retour des démarches qu'il
fit pour louer le terrain de 1,000 Motels, M. Flamand devait obtenir certaines
actions dans cette entreprise. Me Bienvenue prenait la parole à une
assemblée du chef de l'Opposition, M. Jean Lesage, à
Rivière-du-Loup et il a déclaré que M. Flamand devrait
démissionner pour avoir agi ainsi. D'après Me Bienvenue, M.
Flamand aurait manqué à son rôle de député et
violé les dispositions de l'article 79 de la Loi de la
législature. Cet article concerne l'inhabilité d'un
député à siéger et se lit comme suit: « Nul
entreprenant, exécutant, voyant directement ou indirectement, seul ou
avec un autre, par lui-même ou par l'intermédiaire d'un
préposé ou d'un tiers, un contrat ou un marché avec Sa
Majesté ou avec un officier public ou un ministère du
gouvernement de cette province se rattachant au service public de cette
province ou en vertu duquel les deniers publics de la province doivent
être payés pour quelque service, ouvrage ou autres matières
ou choses ne peut être nommé conseiller législatif ou
être élu député ni siéger ou voter à
l'une ou l'autre qualité. » On sait que c'est à la demande
de son oncle, M. Gérard Flamand, que le député de Rouyn
loua le terrain destiné à 1,000 Motels. Me Flamand a d'ailleurs
admis ce fait la semaine dernière à un journaliste de la Presse.
»
Je déclare de mon siège que je n'ai posé au- cun
acte qui me rende inhabile à siéger en cette Chambre ou indigne
de ce faire. Le terrain dont j'ai été locataire pendant un
certain temps n'était pas un terrain de la Couronne.
Je demande donc au député de Matane de porter une
accusation formelle, suivant l'article 196 du règlement de cette
Chambre, ou bien, s'il ne veut pas le faire, de se rétracter
séance tenante.
DES VOIX: Dans le corridor!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. GRENIER: Cela ne regarde pas bien.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Matane.
M. BIENVENUE: M. le Président, j'ai parlé,
évidemment, à partir des propres déclarations ou aveux
faits par le député de Rouyn-Noranda et relatés dans les
journaux, déclarations ou aveux qu'il n'a d'ailleurs aucunement
répudiés ce matin. Je n'ai rien de plus à dire et je
continue d'étudier le dossier.
M. JOHNSON: M. le Président, l'accusation portée à
Rivière-du-Loup par le député de Matane, selon les
journaux...
M. LESAGE: C'est une question de privilège, M. le
Président?
M. JOHNSON: J'ai une motion à faire.
M. LESAGE: Il n'y a pas de motion, en vertu de l'article 196.
M. BELLEMARE: Certainement.
M. JOHNSON: M. le Président si on s'en tient aux journaux
l'accusation portée par le député de Matane, et qu'il n'a
pas rétractée ce matin, est grave. Il a déclaré
que, dans son opinion, le député était inapte à
siéger dans cette Chambre à cause d'un article de la loi.
M. LESAGE: C'était au conditionnel. DES VOIX: A l'ordre!
M. LESAGE: C'était au conditionnel, j'y étais. Je suis
témoin.
M. JOHNSON: Article 79... UNE VOIX: Qui ça?
M. LESAGE: Bien, ce n'est pas vous, certain.
M. JOHNSON: L'article 79 de la loi de la Législature. M. le
Président, en dehors de la Chambre, un membre de cette Assemblée
législative a pris sur lui, quelles que soient ses sources de
renseignement, de porter un jugement. Il a pris à son compte certains
faits vérifiés ou non, faux ou vrais, et il a tiré une
conséquence, formulé un jugement qui est clair,
catégorique et évidemment, dérogatoire à l'honneur
du député de Rouyn-Noranda. Il a attaqué non seulement la
dignité du député, mais il a attaqué même son
droit d'être ici, présent dans cette Chambre. Et si les journaux
rapportent exactement les propos du député de Matane, il a
demandé la démission du député de
Rouyn-Noranda.
Or, il y a une façon et c'est la seule façon
courageuse, digne d'un homme qui veut respecter son rôle de
député de porter une accusation, c'est d'utiliser
l'article 196 du règlement de l'Assemblée législative et
d'en subir les conséquences. Le député de Rouyn-Noranda a
évidemment des droits qui ne concernent pas cette Chambre, des droits
qui ne découlent pas du règlement de la Chambre, qui
ressortissent aux tribunaux civils ou criminels. C'est une autre affaire. Mais
il a des droits qui découlent du règlement de cette Chambre. Ou
bien le député de Matane se rétracte ce matin, ou bien il
porte une accusation.
M. LESAGE: Il n'est pas obligé de faire ça.
M. JOHNSON: M. le Président, le député de Matane
je le soumets respectueusement aurait dû se
rétracter ou porter l'accusation. Je ne veux pas profiter de
l'inexpérience du député de Matane. Je veux bien lui
donner l'occasion de se rétracter, s'il le juge à propos.
M. LESAGE: Il n'est pas obligé. Il n'y a rien qui le force
à faire ça.
M. BELLEMARE: Un instant. On va lire le règlement ensemble.
M. JOHNSON: Si le député ne se rétracte pas, nous
allons faire une motion pour demander qu'il se rétracte.
M. LESAGE: Il n'est pas obligé.
M. BELLEMARE: Certainement.
M. JOHNSON: La Chambre fera une motion. et s'il ne se rétracte
pas, nous ferons une motion pour qu'il subisse les peines que la Chambre juge
à propos de lui imposer.
Les articles du règlement nous permettent, si la Chambre le juge
à propos, de faire certaines motions et nous en ferons une pour une
raison très simple: il faut que les députés de cette
Chambre, de quelque côté qu'ils soient, ne se laissent pas aller
à des travers qu'ils auraient pu acquérir moyennant honoraires et
salissent...
M. LESAGE: Est-ce que nous sommes obligés d'encaisser les
insultes gratuites du premier ministre?
DES VOIX: Debout!
DES VOIX: A l'ordre!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. JOHNSON: Il serait infiniment regrettable...
M. LESAGE: Insulteur public.
M. JOHNSON: ... que nous soyons obligés... M. le
Président, vous avez entendu le chef de l'Opposition dire «
insulteur public », je lui demande de retirer...
M. LESAGE: Vous venez de le faire! M. JOHNSON: ... ses propos.
M. LESAGE: M. le Président, le premier ministre vient d'insulter
gratuitement le député de Matane...
UNE VOIX: Bien voyons donc!
M. LESAGE: ... en parlant des travers qu'il avait acquis a honoraires
payés par le gouvernement. M. le président, c'était une
insulte...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas ce qu'il a dit!
M. LESAGE: ... et le premier ministre a certainement insulté le
député de Matane.
M. LOUBIER: Ah, mon Dieu!
M. LESAGE: Si le premier ministre veut retirer son insulte, son
insinuation, je retirerai également...
M. BERGERON: Cela ne va pas bien dans votre parti!
M. LESAGE: ... le mot « insulteur ».
M. LOUBIER: C'est son bain de boue du lundi matin)
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LOUBIER: Il lui en faut un par semaine.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Une fois de plus nous pouvons voir avec quel
enthousiasme et quel intérêt les honorables députés
reprennent l'activité sessionnelle cette semaine, alors que pointe
à l'horizon, probablement, une prorogation des Chambres. Je crois que
nous devons, dans un commun accord, travailler pour abattre la besogne qu'il
nous reste a faire. Mais pour que nos travaux soient efficaces, il faut que
nous collaborions tous et chacun dans le respect intégral de nos
règlements, et ainsi nous pourrons passer à travers les
difficultés que les questions de privilège ou autres peuvent
soulever.
Je suis quelque peu surpris, ce matin, d'avoir été
moi-même distrait. J'ai écouté d'une oreille attentive les
remarques qui ont été échangées de part et d'autre
de cette Chambre, puisque mon attention est surtout attirée par les
points de règlement qu'on veut signaler à la présidence.
Je n'ai aucun doute cependant que, dans un bon esprit de coopération, si
d'une part on a pu prêter des motifs ou employer des termes offensants,
je suis sûr que d'autre part on voudra bien également retirer ces
expressions pour que nous puissions continuer à travailler dans le
respect de nos règlements et pour une efficacité de travail
marquée. Je dois admettre qu'a échappé à mon
attention l'emploi d'expressions qu'on semble attribuer à l'honorable
premier ministre, comme a échappé à mon attention l'emploi
d'expressions qu'on attribue à l'honorable chef de l'Opposition, et ce
par suite de la vérification que je faisais des articles du
règlement. Il ne m'arrive pas souvent d'être distrait durant les
propos échangés par les honorables députés mais
c'est avec beaucoup de franchise que je dois, ce matin, avouer cette faiblesse
et une fois de plus on doit se rendre compte qu'il est assez difficile de
tenter de faire deux choses en même temps.
Je m'en rapporte donc à chacun des intéressés,
à l'honorable premier ministre et à l'honorable chef de
l'Opposition, pour décider ce qu'ils doivent faire relativement à
certains propos qu'ils se sont peut-être échangés, parce
que je n'ai pu moi-même en saisir toute la portée pour les raisons
que je viens de donner.
M. JOHNSON: M. le Président, je n'ai pas l'intention de
prêter des motifs, et si le député de Matane
considère que mes paroles le visaient, je les retire.
M. LESAGE: Dans les circonstances, je retire les mots « insulteur
public ».
M. JOHNSON: M. le Président, le règlement est clair.
L'article 193 donne à tout député un droit et il se lit
comme suit: « Est réputée question de privilège
toute question qui concerne les droits de la Chambre prise comme corps, sa
sécurité, sa dignité ou la liberté de ses
délibérations, ou qui concerne les droits, la
sécurité, la conduite ou l'honneur des députés
considérés individuellement, mais en leur qualité de
membres de la Chambre. »
Je crois qu'il n'y a aucun doute que les propos tenus par le
député de Matane à Rivière-du-Loup, tels que
rapportés dans les journaux, attaquaient la conduite ou l'honneur du
député de Rouyn-Noranda, puisque ça n'a pas
été nié le député de Matane a
demandé la démission du député de Rouyn-Noranda en
alléguant et lisant devant l'assemblée l'article de la Loi de la
Législature, soit l'article 79 qui déclare indigne ou inhabile
à siéger quelqu'un qui aurait un intérêt
décrit dans l'article 79.
L'article 79, il faut le rappeler pour la bonne compréhension du
débat, dit ceci: « Nul entreprenant, exécutant ou ayant
directement ou indirectement, seul ou avec un autre, par lui-même ou par
1' intermédiaire d'un préposé ou d'un tiers, un contrat ou
marché avec Sa Majesté ou avec un officier public ou un
ministère du gouvernement de cette province se rattachant au service
public de cette province ou en vertu duquel des deniers publics de la province
doivent être payés pour quelque service, ouvrage, matière
ou chose, ne peut être nommé conseiller législatif ou
être élu député, ni siéger ou voter en l'une
ou l'autre qualité. Rien dans le présent article ne rend
cependant inéligible ou inhabile à siéger ou à
voter comme conseiller législatif ou député une personne
qui est actionnaire d'une compagnie constituée en corporation, ayant un
tel contrat ou marché, à l'exception d'une compagnie qui
entreprend l'exécution de travaux publics. »
M. le Président, prenons l'exception d'abord. Vous êtes
directeur de la Compagnie Crane ou d'une autre; le gouvernement achète
de la compagnie Crane et même si vous êtes député,
vous n'êtes pas disqualifié. Cela s'applique pour d'autres
compagnies. Vous êtes directeur ou admi-
nistrateur d'une société qui a un motel et vous êtes
député, ce motel loue des chambres à des gens qui viennent
à l'Expo...
M. LESAGE: Est-ce que c'est le fond de la question qu'on discute?
M. JOHNSON: M. le Président, vous n'êtes pas... Oui, oui,
j'explique tout simplement le problème...
M. LESAGE: Bien, si c'est le fond de la question que vous voulez
discuter, nous allons en discuter.
M. JOHNSON: ... en quoi, M. le Président, cette chose peut-elle
être sérieuse?
M. LESAGE: N'oubliez jamais le mot « indirectement ».
M. JOHNSON: M. le Président, vous êtes administrateur ou un
député est administrateur, actionnaire d'un motel qui loue des
chambres à l'Expo et il ne serait pas disqualifié pour
ça.
Dans le cas du député de Rouyn-Noranda, il l'a
déclaré ce matin, le terrain dont il est question et dont a fait
état, toujours selon les journaux, le député de Matane est
un terrain qui n'appartenait pas à la Couronne, qui a été
loué pendant un certain temps par le député de
Rouyn-Noranda et qui n'a jamais été reloué ou
sous-loué à la Couronne. Tel est l'état des faits devant
cette Chambre.
M. le Président, le député de Matane, rendu en
Chambre, doit prendre la parole du député de Rouyn-Noranda. S'il
y a d'autres aspects du problème qui ont été
traités à l'extérieur de cette Chambre, c'est le
député de Rouyn-Noranda qui décidera si, oui ou non, il
doit prendre des procédures, cela ne nous regarde pas.
M. LESAGE: C'est ça.
M. JOHNSON: Mais quand un député de l'Assemblée
législative, même en dehors de l'Assemblée
législative, demande la démission en alléguant qu'un
député est indigne ou inapte en vertu d'un article qu'il cite, M.
le Président, il prend à son compte tous les faits qui
l'amènent à cette conclusion, et le député de
Rouyn-Noranda a le droit ce matin de demander ou que le député de
Matane se rétracte ou qu'il utilise l'article 196 comme un homme, comme
un homme digne de se tenir debout.
Je l'avertis tout de suite, M. le Président, que nous
n'hésiterons pas...
M. LESAGE: Menace.
M. JOHNSON: Nous n'hésiterons pas...
M. BELLEMARE: C'est la procédure du règlement
M. JOHNSON: ... si on le demande à former le comité
prévu par le règlement, à entendre les accusations,
à entendre tous les témoins, à vider cette affaire afin
qu'on arrête de faire des insinuations.
M. le Président, il y a une façon de procéder,
c'est l'article 196, et je demande au député de Matane ou de se
rétracter ou de procéder. Autrement je ferai une motion comme
j'ai le droit de le faire.
M. LESAGE: Ah la menace!
M. JOHNSON: Et la première motion que je ferai, M. le
Président, ce sera de demander à l'Orateur d'exiger une
rétractation. Si le député ne la fait pas, nous ferons une
motion que nous avons le droit de faire...
M. LESAGE: Il n'en fera pas.
M. JOHNSON: ... évidemment, sujet à la décision de
l'Orateur. Si le député ne se rétracte pas, ne s'explique
pas à la satisfaction de la Chambre, et non pas de l'Orateur, nous
ferons les motions que le règlement nous permet de faire. Ce n'est pas
amusant, mais ce n'est pas drôle non plus de se faire demander sa
démission en partant de faits qu'on prend à son compte. Ce n'est
pas drôle non plus de perdre sa réputation...
M. LESAGE: Il ne les a pas pris à son compte. Vous n'y
étiez pas!
M. JOHNSON: ... à cause de certains rapports de journaux qui ne
seraient peut-être pas exacts, M. le Président, ni dans un cas ni
dans un autre, mais c'est au député de Matane à le
dire.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Matane.
M. Jean Bienvenue
M. BIENVENUE: M. le Président, précisément parce
que le premier ministre dit « si le député de Matane est un
homme », je suis debout. Je suis un homme, mais je ne suis pas un
« rétracteux », M. le Président. Le premier
ministre vient de parler d'insinuations. C'est un mot qu'il connaît bien,
qui sort naturellement de sa bouche.
DES VOIX: A l'ordre!
M. JOHNSON: M. le Président, j'invoque le règlement.
UNE VOIX: Tel père, tel fils! DES VOIX: A l'ordre!
M. JOHNSON: M. le Président, on ne parlait pas du vrai
père du député de Matane. Je pense que c'était du
père spirituel, comme il le sait. Je dois déclarer de mon
siège, M. le Président, que j'ai connu le père naturel du
député...
M. COURCY: A l'ordre!
M. JOHNSON: ... le vrai père légitime du
député de Matane...
M. COURCY: A l'ordre! M. JOHNSON: Vous ne me permettez pas... M. COURCY:
Suivez donc le règlement. M. JOHNSON: Vous ne me permettez pas...
M. COURCY: Vous vous êtes levé sur un point de
règlement. Quel est ce point de règlement? Et parlez donc sur la
question.
M. JOHNSON: ... que je dise... M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. COURCY:
Parlez donc sur la question.
M. BERTRAND: Levez-vous donc pour parler.
M. JOHNSON: Un député libéral ne voudrait pas que
je dise du bien d'un député libéral que j'ai connu dans
cette Chambre qui était un gentilhomme, c'était le père du
député...
M. COURCY: Ce n'est pas ce que le député de Bellechasse a
fait...
M. JOHNSON: ... le père du député de Matane...
M. COURCY: ... avec ses insinuations.
M. JOHNSON: ... qui jouait dur, mais qui jouait propre.
M. le Président, je demande au député de Matane de
retirer les propos qu'il a tenus à mon égard.
M. LE PRESIDENT: Qu'il me soit permis de rappeler à l'honorable
député de Matane que, justement, préalablement à
cette question qui est présentement débattue, j'ai demandé
et à l'honorable premier ministre et à l'honorable chef de
l'Opposition de retirer certaines expressions qui avaient pu être
employées dont l'une spécialement à l'endroit de
l'honorable député de Matane et, de bonne grâce et avec
empressement, l'honorable premier ministre et l'honorable chef de l'Opposition
ont retiré les expressions qui avaient été
employées. Alors je suis sûr que l'honorable député
n'a peut-être pas remarqué cette rétractation de la part de
l'honorable premier ministre et de celle de l'honorable chef de l'Opposition.
Il conviendra que les derniers reproches adressés à l'honorable
premier ministre devraient être retirés, comme les autres l'ont
été, et que sa déclaration, qu'il lui est parfaitement
permis de faire, sera dans les termes que je connais, qu'il a l'habitude
d'utiliser dans des moments critiques.
M. BIENVENUE: M. le Président, qu'il vous plaise, les
rétractations dont vous avez parlé ne m'avaient pas
échappé, ni celle du premier ministre et ni celle du chef de
l'Opposition. J'ai employé les mots que j'ai employés au sujet
d'insinuations dans la bouche du premier ministre tout d'abord parce qu'il
m'avait attribué quelques instants avant des insinuations en disant, et
je cite au mot, de mémoire: « Il est temps que les
députés de cette Chambre ne soient plus victimes d'insinuations.
» Si le premier ministre veut reconnaître qu'il ne m'adressait pas
ou ne m'imputait pas de telles insinuations, je suis bien prêt à
retirer de mon côté. Mais si j'ai parlé d'insinuations, et
vous ne pouvez le deviner, M. le Président, ni les membres de cette
Chambre ne peuvent le deviner, c'est qu'il en a faites des insinuations
à mon endroit, et lui sait de quoi je parle. Je vais le dire à
cette Chambre parce que j'aime les situations claires et franches. J'ai
été élevé à aimer à appeler les
choses par leur nom, et je n'aime pas les ambiguïtés. Le premier
ministre a donné sur un ton léger, apparemment innocent,
désintéressé, une comparaison tout à l'heure en
disant: C'est comme si un député de cette Chambre était
administrateur d'une compagnie, telle que la compagnie Crane. Le premier
ministre a continué. Or je suis...
DES VOIX: Ah!
M. BIENVENUE: Qu'on me laisse finir. M. LE PRESIDENT: A l'ordre! UNE
VOIX: Il n'y a pas d'insinuation.
M. BIENVENUE: Or je suis, M. le Président, administrateur de
cette compagnie et lorsque je suis devenu administrateur de cette
compagnie...
DES VOIX: Ah! Oui.
M. BIENVENUE: ... j'ai exigé, obtenu et composé
moi-même la lettre qu'elle a envoyée au Service des achats de
cette province, qui est dans les archives du Service des achats, par laquelle
elle demandait que son nom soit rayé comme fournisseur au gouvernement
de cette province. C'est ça l'insinuation.
Quand je parlais d'insinuation, M. le Président...
M. LOUBIER: Fabi & Fils?
M. BIENVENUE: ... c'est à ça que je faisais allusion.
M. LOUBIER: Avez-vous fait la même chose pour Fabi & Fils?
M. BIENVENUE: Je réponds... M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BIENVENUE: M. le Président, la question me va parfaitement et
je réponds au courageux député de Bellechasse qui a eu des
paroles aimables pour un être cher qui m'a
précédé...
M. LOUBIER: Non, non, pour le père spirituel. Ils se promenaient
dans Matane en disant: Voilà mon fils spirituel. Voilà mon
père spirituel.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'avance je remercie les honorables
députés pour la collaboration qu'ils voudront bien m'apporter
pour traverser cette question assez délicate et difficile.
M. BIENVENUE: Alors, répondant à cette question du
ministre du Tourisme de la Chasse et de la Pêche, il me plaît de
dire que, dans ce cas aussi, lorsque j'ai décidé de me porter
candidat dans le comté de Matane, avant que les électeurs, eux,
prennent une autre décision, j'ai envoyé, avant même de me
rendre à Matane, ma démission écrite à la compagnie
Fabi dont vient de parler le député. J'ai la copie. C'est comme
ça que je suis, moi, et c'est comme ça qu'on est de ce
côté-ci de la Chambre. Répondant maintenant...
M. GRENIER: Il fait dur.
M. BIENVENUE: Qui a dit ça?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAFONTAINE: Il était chez Fabi...
M. BIENVENUE: Je continue de m'adresser à vous, M. le
Président. Reprenant les propos que vient de tenir le premier ministre,
je sais ce que j'ai dit à Rivière-du-Loup parce que j'y
étais, moi. J'ai dit que j'avais lu dans les journaux les aveux ou les
propos qu'avait prononcés le député de Rouyn-Noranda. J'ai
dit que si ces propos étaient exacts, si ce qu'il avait dit était
bien ce que rapportaient les journaux, si ce qu'il avait confessé ou
avoué était bien ce que je lisais dans les journaux, il devait
démissionner. Voilà ce que j'ai dit.
Or, j'entends ce matin le député de Rouyn-Noranda qui se
lève sur une question de privilège. Il ne nie, ni ne contredit,
ni ne répudie rien de ce que les journaux lui attribuent. Le premier
ministre a tenté de le faire un peu pour lui, mais il ne l'a pas fait.
Alors, ma position est claire et nette. Que l'on me menace de motion de
sanction ou de tout ce que l'on voudra, je n'ai rien à rétracter,
je ne rétracterai rien, tant et aussi longtemps que je ne saurai pas et
que la population de cette province ne saura pas si oui ou non le
député de Rouyn-Noranda, le premier, affirme, confirme ou nie les
paroles qu'il aurait tenues à des représentants de la presse.
M. JOHNSON: Quelles paroles?
M. BIENVENUE: Je n'ai pas d'accusation à porter. J'ai fait ce que
j'avais à faire. Ce n'est pas le premier ministre qui va me dicter ce
que je dois faire, ni à moi ni à d'autres députés
de cette Chambre. Si le député de Rouyn-Noranda n'a pas dit ou
répudie ce que l'on lui attribue dans les journaux, c'est à lui
de le faire, ce n'est pas à moi. Quant à moi, je maintiens que je
continue d'étudier ce qui se passe et je n'ai rien de plus à
dire.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. FLAMAND: Il est vrai que j'ai loué un terrain, je ne le nie
pas, mais je voudrais savoir du député de Matane ce qu'il y a
d'incriminant dans ça et qui fait que je devrais démissionner
comme député, parce que c'est à partir de cette
affirmation, que, je le répète, j'accepte, qu'il me demande de
démissionner et qu'il me dit que je tombe sous le coup de l'article 79
des règlements de cette Chambre.
M. LESAGE: On ne peut poser de question à un député
en cette Chambre. Si le député de Rouyn-Noranda...
DES VOIX: A l'ordre!
M. LESAGE: ... a à se plaindre... C'est une question de
règlement.
M. JOHNSON: J'invoque le règlement. M. LESAGE: J'ai
invoqué le règlement avant.
M. LE PRESIDENT: Je dois signaler aux honorables députés
que l'honorable chef de l'Opposition a fait un rappel au règlement le
premier.
M. LESAGE: Le député de Rouyn-Noranda a posé une
question au député de Matane. Je dis qu'il n'est pas permis en
cette Chambre à un député ou à un ministre de poser
une question à un simple député. Si le
député de Rouyn-Noranda a à se plaindre de paroles
prononcées par un autre député, en dehors de cette Chambre
ou s'il prétend que sa réputation a été
attaquée, il peut avoir recours aux tribunaux. Il le sait,
d'ailleurs.
M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre.
M. JOHNSON: Je vous demande donc, M. le Président j'en
fais une motion que vous demandiez au député de se
rétracter, et nous verrons ensuite.
M. LAPORTE: M. le Président, nous nageons depuis le début
du débat dans l'illégalité la plus complète.
M. LAFONTAINE: Dans la pourriture libérale.
M. LAPORTE: Nous nageons dans l'illégalité la plus
complète. Le député de Rouyn-Noranda, comme c'était
parfaitement son droit, s'est levé pour soulever une question de
privilège. Et le règlement est formel: Tout député
qui soulève une question de privilège peut conclure par une
motion ou se borner à réclamer. Le député de
Rouyn-Noranda n'ayant pas fait de motion, il s'est évidemment
borné à réclamer. Et si vous lisez le même article
195, au paragraphe deux, on voit que s'il se borne à réclamer,
ses paroles ne doivent se référer à aucun sujet qui
prête à discussion et nul débat ne peut s'ensuivre.
Le premier ministre, intervenant illégalement, je le
prétends, à la suite de l'intervention du député de
Rouyn-Noranda, a sommé le député de Matane de se
rétracter ou de porter une accusation de son siège en vertu de
l'article 196. Je dirai d'abord, M. le Président, que le
député de Matane a certainement fait preuve d'une
détermination très grande puisqu'il a porté une accusation
publiquement sans se cacher derrière son immunité parlementaire.
Revenant au Règlement, il n'y a absolument rien qui force ou qui
forçait le député de Matane à proposer une motion
contre le député de Rouyn-Noranda puisque l'article 196 dit:
« Quand un député désire accuser un de ses
collègues de quelque acte rendant celui-ci indigne de siéger dans
la Chambre, il doit d'abord lire de son siège une déclaration
où l'accusation est énoncée en termes directs, explicites,
modérés où il prend la responsabilité de
l'accusation portée puis donner immédiatement avis qu'il
proposera à la Chambre de procéder à une enquête
pour constater si l'accusation est fondée. » Tel est le
règlement de cette Chambre. Rien n'obligeait le député de
Matane à recourir à l'article 196 et aucun membre de cette
Chambre ne peut ou l'inviter ou le défier de le faire. Il a choisi le
moyen de la déclaration publique d'une estrade politique. Le
député de Rouyn-Noranda a maintenant son recours, celui d'aller
ou de ne pas aller devant les tribunaux. Mais personne, n'a le droit et c'est
tellement clair, M. le Président, que si vous vous référez
à l'article 285, paragraphe 16, « il est interdit, dit le
règlement, d'interpeller un député, de le défier de
nier certains faits, de le mettre en demeure de répéter ou de
nier certains propos » c'est assez clair, je pense, M. le
Président « il est interdit de se prévaloir de son
silence pour tirer des conclusions ou des déductions et il est interdit
» ce que vient de faire le premier ministre « de le
menacer ou de menacer la Chambre. »
Et si vous vous référez à la note explicative au
bas de la page 93 de notre règlement, note explicative au paragraphe 16,
vous verrez que:
« intimer qu'on va proposer l'ajournement de la Chambre, à
moins que certaines explications ne soient données, a été
tenu pour une menace et déclaré en conséquence contraire
au règlement. »
La situation m'apparaît bien claire, M. le Président. Le
député de Matane a préparé son dossier d'une
certaine façon que, lui, avait choisie et qu'il a maintenant le devoir
de défendre sur le terrain que, lui, a choisi.
Ce terrain, c'est une déclaration au cours d'une assemblée
politique. C'est maintenant au député de Rouyn-Noranda de jouer
la prochaine carte. S'il décide que les propos qui ont été
tenus par le député de Matane ne sont pas fondés,
n'avaient pas à être dits publiquement ou sont contraires à
la vérité, il a maintenant le choix du moyen, mais ce n'est pas
à cette Chambre qu'il incombe d'ordonner au député de
Matane de procéder par tel moyen ou par un autre. Et tout
député qui tente de le faire, non seulement viole le
règlement, mais viole directement le droit qu'a le député
de Matane ou n'importe quel autre député en cette Chambre de
choisir le moyen qu'il entend prendre, lui.
Je conclus. Le dossier du litige entre le député de Matane
et le député de Rouyn-Noranda est précis. L'accusation
étant portée publiquement, sans la couverture de
l'immunité parlementaire, il a le choix. Interdiction à cette
Chambre d'ordonner au député de Matane de rétracter ses
paroles, interdiction à cette Chambre de lui ordonner de recourir
à l'article 196, s'il ne le désire pas et conclure que le
discours du premier ministre et la façon dont il a agi à
l'endroit du député de Matane comporte une intimidation
précise pour cette Chambre, chose que vous ne sauriez sanctionner, M. le
Président, comme président de nos
délibérations.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre du Travail, du Commerce et de
l'Industrie.
M. Maurice Bellemare
M. BELLEMARE: M. le Président, depuis que je siège en
cette Chambre, c'est un des matins qui me semblent le plus pénibles.
UNE VOIX: Il a la mémoire courte.
M. BELLEMARE: Si la thèse que vient de faire le
député de Chambly s'avère vraie...
M. LESAGE: Qu'est-ce que c'est, donc ça? M. LE PRESIDENT: A
l'ordre!
M. BELLEMARE: Le chef de l'Opposition a soulevé un point de
règlement.
M. LESAGE: Non, mais c'est réglé ça.
M. BELLEMARE: Non, monsieur, non. Nous allons...
M. LE PRESIDENT: J'ai été invité à trancher,
en quelque sorte, cette question soulevée par l'honorable
député de Rouyn-Noranda en premier lieu. Des propos ont
été tenus par l'honorable député de Matane et
l'honorable député de Rouyn-Noranda. Des remarques ont
été faites et des rappels au règlement ont
été faits par l'honorable premier ministre, par l'honorable
député de Chambly et je n'ai aucun doute que l'honorable ministre
du Commerce et de l'Industrie veut abonder dans le même sens de la
discussion ou du rappel de certains articles de notre règlement pour que
je sois en mesure de rendre la meilleure décision possible dans les
circonstances.
M. BELLEMARE: J'ai assisté en cette Chambre, depuis près
de vingt ans, à toutes sortes de prises de position et surtout à
ces questions de privilège qui concernent la Chambre des
députés, ou le député pris comme individu, comme
faisant partie intégrante, ayant qualité de membre de cette
Chambre. C'est la première fois, veuillez m'en croire, que je trouve
difficile et surtout presque indéfendable la position que prend
présentement un député en cette Chambre en l'occurrence
l'honorable député de Matane.
A l'article 193 de nos règlements, d'abord, si vous lisez les
notes qui le suivent vous verrez de nombreux cas où l'on recherche
l'intégrité, où l'on essaie de protéger le
député dans sa personne et dans sa responsabilité, dans
son honneur et où, surtout, on apporte énormément de soin
à dire que si dans telle occasion, tel écrit, tel homme, telle
chose se produit, il y aura question de privilège pour que le
député en cause puisse rétablir son honneur. Parce que en
cette Chambre, tout est à base d'honneur, d'intégrité.
Cela ne peut pas être autrement.
Cet article 193, maintes fois invoqué dans le passé par
tous ceux qui se sont sentis lésés dans leur réputation,
dans leur honnêteté, a été utilisé et les
décisions nombreuses qui ont été rendues prouvent la
véracité et l'utilité de cet article.
Une accusation grave a été portée, et je me
sers du terme de l'honorable député de Chambly
publiquement. Donc il y a eu accusation, il ne peut pas être dit
maintenant qu'il n'y a pas eu une accusation formelle, il y en a eu une. Une
faite par qui? Par le député de Matane. C'est quoi l'accusation?
Scandale, mains qui ne sont pas propres, qu'il n'est pas digne de siéger
en Chambre, doit donner sa démis-
sion. Est-ce que ce n'est pas l'intégrité même,
l'honnêteté même, du député de Rouyn-Noranda
qui est mise en cause? Et c'est le député de Chambly qui
l'affirme, accusation publique. Il n'a pas dit « Je me suis servi de
telle déclaration » le député de Chambly a
affirmé: « Déclaration publique, accusation
formelle».Donc, M. le Président, il y a eu là...
M. LAPORTE: M. le Président, j'invoque le règlement. Je
pense que le député de Champlain, ministre du Travail, a assez
à dire sans essayer de forcer mes déclarations, en prenant
à la lettre les mots d'une improvisation. J'ai simplement
déclaré qu'il y a deux façons: il y en a une qui est
publique, qui peut conduire devant les tribunaux...
M. BELLEMARE: Un instant.
M. LAPORTE: ... et il y en a une qui peut conduire...
M. BELLEMARE: On a compris ça. Je vais faire mon discours...
M. LAPORTE: Je comprends mais...
M. BELLEMARE: ... et puis s'il y a quelque chose qui ne plaît pas
au député de Chambly...
M. LAPORTE: Je sais que le député de Champlain est
peut-être porté à faire ça mais pas étirer
mon discours...
M. BELLEMARE: Non, non, je vais vous prouver que je ne
l'étiré pas.
M. LAFONTAINE: On a compris la tactique libérale qui est toujours
la même!
M. BELLEMARE: Même avec les règlements que vous avez
cités, je vais vous prouver que vous êtes dans l'erreur.
M. LAPORTE: J'ai hâte de voir ça!
M. BELLEMARE: L'honorable député de Chambly, donc, admet
qu'il y a accusation formelle et il a choisi son terrain, dit-il. Il l'a
portée l'accusation. Qu'est-ce qu'il y a de plus clair pour le
député, ce matin, de se servir de l'article 193 et de dire:
L'honneur de la Chambre, les droits de la Chambre, ce qui concerne son corps,
sa sécurité, sa dignité, sa liberté de
délibération et même l'honneur des députés
considéré comme tel est en jeu? C'est la pres- se, c'est la
radio, c'est la télévision, partout on a rapporté les
propos de l'honorable député de Matane qui incriminent
publiquement l'honorable député de Rouyn-Noranda. Est-ce que ce
n'est pas une question de privilège? Est-ce que nous n'avons pas le
droit, ce matin, d'invoquer la question de privilège, de le dire
à la face de la province et de demander à l'honorable
député de se rétracter? Je le dis, M. le Président.
L'honorable député de Chambly dit: Le député doit
se conformer à l'article 195. Oui, tout député qui
soulève une question de privilège peut conclure par une motion ou
se borner à réclamer. Mais il a oublié l'article 198,
troisièmement, où il est dit ceci: « Toute question de
privilège peut être soulevée par un autre
député que celui que la violation de privilège concerne
».
M. LESAGE: Oui, mais il l'a invoqué lui-même !
M. BELLEMARE: M. le Président, il n'avait pas le droit de le
faire en vertu de la thèse émise par l'honorable
député de Chambly. Il a cité l'article 285. L'article 285
aussi, vingtièmement, vous le lirez: « Quand un
député... » et ça se borne simplement dans les
corridors du parlement. Mais qu'est-ce donc à dire quand on a à
redire des paroles, un député peut se plaindre des injures qu'un
autre député a proférées à son adresse dans
les couloirs de la Chambre? Mais c'est à la Chambre et non pas au
président à se prononcer en ce cas. Mais c'est bien pire que dans
les corridors du gouvernement, c'est, selon le député de Chambly,
une accusation formelle faite publiquement contre un honorable
député de cette Chambre et nous n'aurions pas le droit, ce
matin,...
M. LIZOTTE: C'est répandu à la grandeur de la
province!
M. BELLEMARE: ... de vous demander de prier l'honorable
député de Matane de s'excuser, de se rétracter quand on a
l'article 194 qui est formel,- article 194 qui dit que tout
député ou autre personne qui ne veut pas se rendre à la
demande de la Chambre et là ça va être ça, il
va y avoir une demande de la Chambre de se rétracter et à
l'article 194, puisqu'il y a violation de privilège qui est absolument
une question fondamentale vous aurez à appliquer l'article 77 de
notre règlement qui est clair.
L'article 77 dit formellement: « Si un député refuse
de se conformer à un ordre légitime de la Chambre, celle-ci
» et ce sera un ordre légitime de respecter la question de
privilège,
de respecter l'honneur et l'honnêteté de toute la Chambre
et d'un député en particulier.
M. PINARD: C'est prématuré.
M. BELLEMARE: La, M. le Président, je crois que vous aurez le
devoir d'appliquer notre règlement, bien péniblement, je le sais,
mais vous aurez le devoir d'appliquer la discipline. Autrement, où
allons-nous dans cette Chambre? Demain matin, n'importe quel
député pourra monter sur une estrade, accuser formellement un
député en Chambre, lui demander sa démission...
M. LESAGE: Bien oui, mais ça s'est fait bien des fois.
M. BELLEMARE: ... et, dans notre Législature, nous allons
permettre que l'article 193 ne soit pas respecté? Non, M. le
Président! Le règlement a été fait par des hommes
qui ont déjà vécu le parlementarisme
québécois, qui savaient pourquoi cet article spécifique
était mis la, dans un chapitre bien spécifique des questions de
privilège et des motions qui s'ensuivent. Alors je crois que l'honorable
député de Matane, que je connais bien et que j'estime, voudra
bien ce matin faire un geste de gentilhomme, un geste de parlementaire et dire:
M. le Président, ou messieurs de la Chambre, ç'a
dépassé ma pensée. Il devra, je le crois, faire un geste
qui serait à son honneur et àl'honneur de la Chambre, à
l'honneur de tous les parlementaires, afin que ne se répètent pas
dans la province ces accusations qui attaquent l'intégrité d'un
membre et qui mettent en doute l'honnêteté d'un homme comme le
député de Rouyn-Noranda ou des autres qui siègent dans
cette Chambre.
Non, M. le Président! Intimidation par une question de motion? il
n'y a pas de question d'intimidation. Nous ne voulons pas sûrement ce
matin faire de chantage; il n'est pas question d'autre chose que les
règlements tels qu'ils sont faits et sur lesquels vous devez, vous
particulièrement, vous appuyer afin de rendre une décision qui
soit à l'honneur de notre Législature, à l'honneur de
notre parlementarisme, pour protéger les droits acquis de ces
députés qui, dans cette Chambre, ont droit au respect de leurs
commettants, ont droit au respect de leur famille et surtout au respect et
à la conservation de leur réputation.
M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.
M. LESAGE: M. le Président, le...
UNE VOIX: C'est un point d'ordre ça? M. JOHNSON: M. le
Président...
M. LESAGE : C'est justement, M. le Président, je voulais
dire...
M. JOHNSON: ... j'invoque le règlement.
M. LESAGE: Je voulais d'abord dire qu'il n'y a absolument rien devant la
Chambre.
M. JOHNSON: J'invoque le règlement, M. le Président.
M. LESAGE: Comment le règlement?
M. JOHNSON: Le chef de l'Opposition a invoqué le règlement
à l'encontre de l'intention que j'avais annoncée...
M. LESAGE: Non, non! D'une demande du député de
Rouyn-Noranda disant qu'il n'avait pas le droit...
M. JOHNSON: M. le Président, le député de
Louis-Hébert...
M. LESAGE: ...de poser des questions au député de
Matane.
M. JOHNSON: ... a invoqué le règlement, ç'a
été ça son intervention. Il a invoqué le
règlement, j'ai tenté de me lever en même temps que lui,
vous avez accordé la parole à juste titre au chef de l'Opposition
en disant: « Le chef de l'Opposition a invoqué le
règlement, c'est donc à lui la parole ». Alors s'il a
parlé sur ce point du règlement, je ne vois pas comment il
pourrait parler de nouveau. __ M. LESAGE: M. le Président, j'ai
invoqué le règlement lorsque le député de
Rouyn-Noranda a repris son siège après avoir sommé le
député de Matane de se prononcer, et j'ai attiré votre
attention sur le fait que le député de Rouyn-Noranda, pas plus
qu'un autre député ou un ministre en cette Chambre, n'avait le
droit de poser des questions et d'exiger une réponse d'un
député, et j'ai repris mon siège. Le premier ministre
s'est levé, et là j'ai invoqué le règlement, j'ai
soutenu qu'il n'y avait rien devant la Chambre.
Mais, vous vous en souvenez, M. le Président, c'est
vous-même qui avez dit: Je désire entendre les
députés et les ministres sur les divers points de
règlement. Or, je ne touche plus à l'affirmation, je ne
désire plus toucher
à l'affirmation du député de Rouyn-Noranda, non
plus qu'aux questions qu'il a posées au député de Matane,
mais bien m'en tenir à ce que tous nous avez dit vous-même que
nous devions faire: parler des divers articles du règlement concernant
le sujet dont il est question, mais qui en réalité n'est pas
devant la Chambre officiellement. C'était ma première remarque.
C'était pour attirer votre attention, M. le Président, sur le
fait qu'il n'y a absolument rien devant la Chambre, que je ne vois pas, on ne
vous a pas demandé de vous prononcer...
Le premier ministre a suggéré certaines choses, mais il
n'y a pas de motion formelle devant la Chambre. Il n'y a rien, à moins
que ce soit votre avis que l'on recherche. Si c'est votre avis, M. le
Président, vous me permettrez de vous dire bien respectueusement que, en
ce qui concerne les déclarations du député de Matane
dimanche soir à Rivière-du-Loup, le député de
Matane est juridiquement dans la situation de n'importe quel autre citoyen de
la province de Québec Celui qui dans une assemblée publique fait
une déclaration, ne la fait pas devant la Chambre. Il la fait dans une
assemblée publique et le code civil ainsi que le code criminel, dans
certains cas extrêmes, prévoient les recours que les personnes
offensées ou la personne qui se croit offensée peut avoir. Ce
recours, c'est un recours devant les tribunaux, dans un cas comme dans l'autre.
Si le député de Rouyn-Noranda croit avoir été
offensé, blessé dans sa réputation par les
déclarations du député de Matane à
Rivière-du-Loup dimanche, il devra d'abord avoir recours aux tribunaux
et il lui faudra prouver exactement ce qu'a dit le député de
Matane. J'y étais moi, à Rivière-du-Loup, M. le
Président.
M. LAFONTAINE: ... qu'est-ce qu'il a dit? M. LESAGE: Et le
député de Matane...
M. LAFONTAINE: Vous y étiez à titre de citoyen.
M. LESAGE: ... a dit...
M. LAFONTAINE: Vous y étiez seulement à titre de
citoyen.
M. LESAGE: Oui. Le député de Matane a
déclaré que si...
M. LAFONTAINE: C'est de la « politicaillerie »
libérale.
M. LESAGE: ... les faits rapportés par les journaux, d'ailleurs
le député de Matane vient de le dire.
M. JOHNSON: M. le Président, j'invoque le règlement...
M. LAFONTAINE: Vieille traditionlibérale!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable premier ministre sur un rappel
au règlement.
M. LOUBIER: Vous étiez témoin, mais Joe Smallwood ne vous
accepterait pas comme témoin.
M. JOHNSON: M. le Président, en invoquant le règlement, je
dis que ce n'est pas au chef de l'Opposition à parler au nom de...
M. LESAGE: Je ne parle pas au nom de... je répète ce que
le député de Matane a dit tantôt.
M. JOHNSON: M. le Président, le chef de l'Opposition ira
témoigner devant les tribunaux en temps et lieu.
M. LESAGE: C'est ça. Merci, M. le Président. Le premier
ministre vient d'admettre mon point de vue, je n'ai plus rien à ajouter.
C'est clair que ni vous ni les députés de cette Chambre ne sont
en mesure de porter un jugement, parce qu'il n'y a pas de preuve devant
nous.
M. JOHNSON: M. le Président, sur le point de règlement,
voici...
M. LESAGE: Ah, mais c'est la deuxième fois.
M. JOHNSON: Non, non, j'interviens sur l'intervention faite par...
M. LESAGE: Bien oui, mais nous n'allons pas nous répondre comme
ça...
M. JOHNSON: M. le Président, très brièvement et
sans, évidemment, soulever des passions, je voudrais répondre au
chef de l'Opposition qui vient de dire qu'il n'y a rien devant la Chambre. Il y
a d'une part une affirmation par le député de
Rouyn-Noranda...
M. HYDE: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. LOUBIER: Il parle sur un point du règlement, là.
M. LESAGE: C'est une question de privilège M. le
Président, mais ce n'est pas sujet à un débat. On ne peut
pas prétendre qu'il y a quelque chose devant la Chambre.
M. LOUBIER: Il parle sur un point de règlement.
M. JOHNSON: M. le Président, je n'ai pas...
M. LAPORTE: Il soulève un point du règlement.
M. JOHNSON: ... d'objection, quant à moi, à ce que le
règlement soit appliqué...
M. HYDE: M. le Président, j'ai invoqué le
règlement: le premier ministre est obligé de reprendre son
siège.
M. JOHNSON: ... mais je suis à invoquer le règlement et je
ne dois pas être interrompu.
M. BELLEMARE: On ne peut faire un point d'ordre dans un autre point
d'ordre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je saisis très bien l'intervention de
l'honorable député de Westmount, qui, sans doute, veut faire un
rappel au règlement au sujet de ce rappel nouveau au règlement
que fait l'honorable premier ministre. Mais, tout en réservant pour une
période très très courte la demande de l'honorable
député de Westmount, nous pourrions peut-être attendre de
voir quel point l'honorable premier ministre a l'intention de soulever et
ensuite, je céderai immédiatement la parole à l'honorable
député de Westmount.
M. JOHNSON: M. le Président, le chef de l'Opposition
prétend qu'il n'y a rien devant la Chambre. Or, la déclaration du
député de Rouyn...
M. HYDE: M. le Président, j'invoque le règlement
précisément sur la déclaration que vient de faire le
premier ministre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. HYDE: On prétend, M. le Président, qu'il y a une
question de règlement devant vous; il semble qu'on prétend qu'on
a le droit...
M. JOHNSON: M. le Président, il me semblait que vous m'aviez
donné la parole.
M. LOUBIER: Qu'il attende!
UNE VOIX: Vous passez en deuxième.
M. HYDE: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Alors, disons que, pour procéder avec
intelligence le plus possible, nous allons voir quels sont les faits
soulevés par l'honorable premier ministre. Je répète, une
fois de plus, que je saisis très bien le sens du rappel au
règlement de l'honorable député de Westmount, car il est
toujours possible de faire un rappel au règlement sur une question de
règlement. Alors, encore une fois, je ferais appel à la
collaboration de tous. Quant à moi, je suis très bien
orienté sur ce que je me propose de faire. Alors, j'espère que la
collaboration des honorables députés me sera acquise pour que
nous puissions passer aux affaires du jour, si possible.
M. JOHNSON: M. le Président, la prétention du chef de
l'Opposition, comme d'ailleurs celle du député de Chambly, c'est
qu'il n'y a rien devant la Chambre. Or, il y a eu une déclaration faite
par le député de Rouyn-Noranda, qui dit, entre autres, ceci:
« Je déclare de mon siège que je n'ai posé aucun
acte qui me rende inhabile à siéger en cette Chambre ou indigne
de ce fait. » Et il y a la conclusion demandant au député
de Matane de se prévaloir de l'article 196.
M. le Président, la Chambre ne peut pas forcer le
député à porter une accusation. Le député de
Matane a été clair; il a dit qu'il ne la porterait pas cette
accusation en vertu de 196. Mais il y a aussi une autre partie qui se lit comme
suit: « Je demande au député de Matane de se
rétracter séance tenante, » évidemment en prenant la
parole du député de Rouyn-Noranda. On sait, que tous les
députés dans cette Chambre doivent prendre la parole d'un
collègue, mais le député de Matane ne l'a pas prise. Nous
prétendons, M. le Président, que le député de
Matane doit prendre la parole du député de Rouyn-Noranda.
Quant au reste, ce qui s'est passé à l'extérieur,
la façon d'organiser ça à l'extérieur, on a raison
de part et d'autre. On s'entend, ça regarde les tribunaux mais, une fois
le problème posé devant la Chambre, quand un député
a déclaré de son siège qu'il n'avait rien fait qui pouvait
le rendre inhabile, c'est le député qui doit prendre sa parole et
qui doit, M. le Président...
M. LESAGE: Quel article?
M. LAPORTE: Est-ce que je peux me permettre...
M. JOHNSON: ... se rétracter. Oui.
M. LAPORTE: En vertu de quoi le député de Matane serait-il
obligé de dire: « Je prends la parole du député de
Rouyn-Noranda? C'est le règlement qui dit qu'il doit prendre la parole
du député? Il n'y a personne ni aucun règlement qui peut
l'y obliger.
M. JOHNSON: M. le Président, il refuse, ç'a
été clajr dans les propos du député de
Matane...
M. LESAGE: Non.
M. JOHNSON: ... il refuse de prendre la parole du
député...
M. LESAGE: Non, non, non.
M. JOHNSON: Deuxièmement, le président peut le faire, le
demander. La Chambre, troisièmement, peut, sur une motion, juger si oui
ou non les propos tenus par un député sont indignes; si oui ou
non il doit prendre la parole d'un autre député et si oui ou non
il doit, ne se rétractant pas, subir des peines prévues aux
articles 76, 77 et 78. Alors, c'est ça qui est devant la Chambre et on
pourrait éviter beaucoup de problèmes tout simplement en
observant le règlement: autrement, nous serons obligés ce
n'est pas une menace, c'est notre devoir de maintenir la dignité dans
cette Chambre et la réputation des députés ce sera
notre pénible devoir d'avoir à faire des motions. Nous avons le
droit de le faire; la Chambre est souveraine dans ce domaine.
M. FLAMAND: M. le Président... M. LAPORTE: Sur quoi? M. LE
PRESIDENT: A l'ordre! M. LESAGE: Il a pris la parole.
M. LE PRESIDENT: Qu'il me soit permis de rappeler aux honorables
députés qu'une question de privilège ne doit pas en soi
soulever de débats ni de répliques de part et d'autre. Je
conviendrai, cependant, que l'honorable député de Rouyn-Noranda,
étant celui qui a soulevé cette question qui a été
débattue d'une façon fort intéressante, il conviendrait,
peut-être, que nous l'entendions sur un point que j'ignore pour le
moment. Peut-être qu'ensuite, je pourrais suggérer quelque chose
à la Chambre.
M. FLAMAND: Il me semble avoir été assez clair dans ma
déclaration de ce matin, ce qui a été mis en doute par le
député de Chambly. A la fin de ma déclaration, il est bien
dit: Je demande donc au député de Matane de porter une accusation
formelle, ou bien, s'il ne veut pas le faire, de se rétracter
séance tenante.
M. LESAGE: Il n'est pas obligé.
M. FLAMAND: Si cela ne suffit pas et si l'on veut quelque chose de plus
formel, j'ai l'honneur de faire motion afin de vous demander que le
député de Matane soit obligé de se rétracter
séance tenante.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chambly.
M. LAPORTE: Il est clair que cette motion est irrêgulière,
irrecevable et contrevient clairement et directement aux prescriptions du
paragraphe 16 de l'article 285 que j'ai cité in extenso tout à
l'heure.
M. HYDE: Annoncé à part ça.
M. LE PRESIDENT: Sans porter préjudice à qui que ce soit
dans cette Chambre et encore moins à l'honorable député de
Rouyn-Noranda, je vais, pour le moment, mettre de côté cette
dernière partie de ses remarques, soit le mot «
immédiatement » et en vertu des pouvoirs qui sont accordés
au président à l'article 70, disons que, comme en matière
civile, je vais prendre toute cette question en
délibéré.
Et, comme en droit pénal, disons que le
délibéré ne se prolongera pas plus tard qu'à
l'ouverture de la séance de jeudi et très probablement,
dès l'ouverture de la séance de demain.
Question de privilège
M. Gabriel Loubier
M. LOUBIER: M. le Président, sur une question de
privilège. Les journaux de lundi rapportent les propos tenus à
une assemblée partisane à Rivière-du-Loup, propos tenus
par Me Jean Bienvenue, député de Matane. Or, sous le même
titre que celui qu'a Invoqué tout à l'heure le
député de Rouyn-Noranda, dans le Soleil, lundi 7 août:
« L'Affaire Logexpo, le député Flamand est pris à
partie. Rivière-du-Loup Le député de Matane
à Québec, Me Jean Bienvenue, a som-
mé le député unioniste de Rouyn-Noranda, M. Antonio
Flamand, de démissionner pour céder son siège à un
vrai serviteur du peuple. Me Bienvenue, qui parlait à
Rivière-du-Loup, hier soir, en compagnie du chef du parti libéral
du Québec, M. Jean Lesage, a expliqué que le député
Flamand n'était plus apte à détenir un siège
à l'Assemblée législative 1 cause de la part qu'il a prise
dans le scandale de Logexpo. » Et voici l'endroit où le
député de Matane attaque directement le député de
Bellechasse :« Le député de Matane a rappelé...
» et je passe un paragraphe...
M. LESAGE: Bien oui!
M. LOUBIER: « Commentant tout d'abord le congédiement de M.
Foucard, Me Bienvenue a affirmé que le fonctionnaire avait
été remercié à la demande du ministre Gabriel
Loubier, du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, qui s'était
empressé de recueillir ensuite M. Foucard parmi les hauts fonctionnaires
de son ministère. Me Bienvenue a demandé: « Pourquoi
demande-t-on déchéance d'un fonctionnaire pour le repêcher
ensuite? Que voulait-on l'empêcher de faire ou de dire? » Et ceci
est dans la même source où il attaquait le député de
Rouyn-Noranda.
Or, M. le Président, premièrement, M. Foucard n'est pas au
service du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pèche de
la province de Québec Deuxièmement, jamais, ni directement ni
indirectement, je n'ai demandé ou je ne suis Intervenu pour demander que
l'on congédie M. Foucard. Loin de là, M. Foucard déclarait
lui-même dans le Soleil du samedi, le 5 août: « M. Foucard
nous a précisé que la question de sa collaboration avec le
gouvernement après l'Expo était sur le tapis depuis plusieurs
mois. Il s'agit là, nous a-t-il dit, de la suite logique du travail que
j'accomplissais à Logexpo. Il était presque sûr que
j'entrerais au service du gouvernement en octobre, et mes patrons de Logexpo le
savaient. » Or, le député de Matane, connaissant son
courage, son souci de la franchise, de l'intégrité, a fait une
affirmation...
M. JOHNSON: Deux affirmations fausses.
M. LOUBIER: ... deux affirmations complètement fausses et des
insinuations sous forme d'interrogations malveillantes, mesquines et contraires
aux faits. La population du Québec sait maintenant de quel bois se
chauffe le député de Matane et à quel enseigne il se loge.
Je demanderais au député de Matane d'avoir le même souci de
la vérité qu'il a eu la semaine dernière lorsqu'il
invoquait une question de privilège pour faire corriger trois lignes
d'un journaliste parce qu'on lui avait semble-t-il
prêté des motifs, des mobiles. Eh bien, je demanderais au
député de Matane, devant les faussetées qu'il a
répandues mesquinement et dans le seul but...
M. LESAGE: « Mesquinement », M. le Président est-ce
parlementaire?
M. LOUBIER: ... passionnément de soulever la foule de ses
partisans. Il devrait avoir l'honnêteté, au moins cette fois, de
se rétracter.
M. LE PRESIDENT: Je ne voudrais pas que l'on utilise d'expressions
pointues dans des questions de privilège, dans les débats. Et je
suis sûr que tous collaboreront afin que nous puissions garder le
décorum tout à fait nécessaire à la bonne marche de
nos travaux.
M. LESAGE: M. le Président, pourrais-je demander au ministre du
Travail s'il pourrait faire rapport...
DES VOIX: A l'ordre!
M. JOHNSON: M. le Président.
M. LESAGE: C'est correct, ça. Qu'y a-t-il?
M. JOHNSON: Il y a une motion de faite.
Il y a une demande présentée devant cette Chambre...
M. LESAGE: Il n'y a pas de motion devant la Chambre.
M. LAPORTE: Elle est prise en délibéré.
M. JOHNSON: Le député de Matane a accusé le
ministre du Tourisme d'avoir fait mettre à la porte M. Foucard.
Deuxièmement, il a affirmé qu'il l'avait engagé, et
troisièmement, il a donné à l'appui une série de
questions et de motifs: Pourquoi a-t-on engagé un homme qu'on a fait
mettre dehors? Qui voulait-on protéger? S'il est un homme, qu'il se
lève et retire ces propos-là.
M. LESAGE: Il n'y a pas de motion devant la Chambre.
Le député de Matane avait le droit de dire, en dehors de
la Chambre, ce qu'il a dit. Et nous verrons où est présentement
M. Foucard et ce qu'il fait pour le gouvernement de la province
de Québec. Nous savons que toute l'affaire du ministre est cousue
de fils blancs.
DES VOIX: Ah! Ah!
M. LESAGE: Le député de Matane n'a pas à se
rétracter. L'incident est clos, et je demande au ministre du
Travail...
M. BELLEMARE: M. le Président... M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M.BELLEMARE: En vertu de l'article 194...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je crois qu'il serait logique que la
deuxième question soulevée par l'honorable ministre du Tourisme,
de la Chasse et de la Pêche, soit réservée comme la
première pour que la décision soit communiquée à la
Chambre au plus tard jeudi.
M., LOUBIER: Le chef de l'Opposition a insinué que ma
thèse était cousue de fils blancs. M. Foucard est-il
engagé, oui ou non? Or il ne l'est pas, sous aucune forme. Il n'est pas
engagé, employé par le ministère du Tourisme, de la Chasse
et de la Pêche de laprovince de Québec, et ça fait suite
à l'affirmation...
M. LESAGE: Quel ministère alors?
M. LOUBIER: Aucun ministère.
M. LESAGE: Le Secrétariat de la province?
M. LOUBIER: Aucun ministère.
M. LESAGE: Est-ce qu'il est en voie d'être engagé?
M. LOUBIER: M. le Président, est-ce que le chef de l'Opposition
va pousser l'ignorance...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LOUBIER: ... jusqu'à affirmer que Logexpo relève du
Secrétariat de la province?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LOUBIER: Cela relève de laCompagnie, les employés
étant nommés par la Compagnie universelle de l'Expo.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LOUBIER: Il ne savait pas ça, lui!
M. LAFONTAINE: Il savait comment mentir, cependant!
M. COURCY: Voyons, les loups!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Qu'il me soit permis de rappeler bien
doucement, aimablement, aux honorables députés les dispositions
de l'article 679, et spécialement la note 2.
L'honorable premier ministre.
M. JOHNSON: J'aurais une déclaration à faire comme premier
ministre pour mettre fin à beaucoup de confusion dans l'opinion
publique. Logexpo est un organisme incorporé en vertu de la partie 3 de
la Loi des compagnies du Québec, par les soins c'est une autre
affaire de la Compagnie de l'Exposition universelle et
internationale...
M. GERIN-LAJOIE: C'est une façon détournée de
parler sur le même sujet.
M. BERTRAND: Bien voyons! DES VOIX: A l'ordre!
M. JOHNSON: ... à laquelle compagnie il y a trois
représentants de la province de Québec.
M. LESAGE: C'est ça!
M. JOHNSON: ... M. Claude Pratte, M. Maurice Riel et M. André
Rousseau, ancien ministre de l'Industrie et du Commerce, les mêmes qui
ont été nommés du temps des libéraux et qui ont
été maintenus en position.
M. LEVESQUE (Bonaventure): M. le Président...
M. JOHNSON: Logexpo n'est pas un organisme qui relève...
DES VOIX: A l'ordre!
M. JOHNSON: ... ni directement ni indirectement...
M. LEVESQUE (Bonaventure): Je soulève un point d'ordre.
M. JOHNSON: ... du gouvernement de laprovince de Québec.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Bonaventure sur une question de rappel au règlement.
M. LEVESQUE (Bonaventure): M. le Président, simplement pour
rendre justice à la vérité, je dois rappeler à
l'honorable premier ministre qu'il y a sept directeurs qui sont nommés
par le gouvernement fédéral à la suggestion du
gouvernement de la province de Québec.
M. JOHNSON: D'accord.
M. LEVESQUE (Bonaventure): Or, le premier ministre aurait dû
ajouter le nom du maire Jean Drapeau, le nom de M. Lucien Saulnier,
président du comité exécutif de la ville de
Montréal...
M. LOUBIER: C'est une correction!
M. LEVESQUE (Bonaventure): ... le nom de M. Lucien Piché,
vice-recteur de l'université de Montréal et le nom de M. Herb
Lank, président de la compagnie DuPont.
M. JOHNSON: Merci, M. le Président.Il y a là une nuance,
c'est le fédéral qui les a nommés à la suggestion
du provincial, les trois en question, et...
M. LESAGE: Les sept!
M. JOHNSON: ... les autres ont été nommés à
la suggestion de la cité, M. Saulnier, M. Drapeau et...
M. LEVESQUE (Bonaventure): Tous à la suggestion du
provincial.
M. JOHNSON: Ah bon, d'accord.
M. LEVESQUE (Bonaventure): Et il y en a sept autres nommés
directement par le gouvernement fédéral.
M. JOHNSON: M. le Président, Logexpo ne dépend ni du
Secrétariat de la province, ni du ministère du Tourisme, de la
Chasse et de la Pêche ni d'aucun ministère du gouvernement, c'est
une compagnie subsidiaire, filiale, fille, comme on voudra, de la compagnie de
l'Exposition universelle. Il y a un service de logement provincial
établi par une loi de cette Législature dont l'unique fonction
consiste à fixer un prix pour chacun des logis que Pon veut mettre
à la disposition des visiteurs et de poursuivre ceux qui commettent des
infractions à l'encontre de telle prescription faite selon cette loi,
selon le bill 19, passé en décembre 1966.
M. CHOQUETTE: J'invoque le règlement, M. le Président.
M. JOHNSON: Ce sont donc deux différents organismes et je
crois...
M. CHOQUETTE: J'invoque le règlement. Selon le premier ministre,
le rôle du service du logement du Québec n'est que de fixer les
prix des chambres. Or, l'article 5 du bill 19 nous dit que le service du
logement du Québec doit assurer que le plus grand nombre de logements
possible soient à la disposition des voyageurs à un prix
convenable.
M.JOHNSON: Donc, deux organismes différents, et chaque fois que
nous avons une plainte relativement à des gens qui seraient
employés par le service provincial, il y a enquête de faite et,
s'il y a lieu, il y a poursuite et quand il y a une plainte contre des
employés de Logexpo et bien là, c'est la mécanique
habituelle du ministère de la Justice qui entre en jeu.
M. le Président, je voulais faire une mise au point, car il y a
beaucoup de confusion quant à Logexpo que l'on croit être un
organisme du gouvernement provincial, alors que ce n'en est pas un. Que ce soit
clair une fois pour toutes, je pense que nous avons tous intérêt
les députés de cette Chambre qui avons voté le bill 19
à ce que le public sache que la responsabilité doit tomber
là où elle doit tomber et on ne doit pas nous faire porter
inutilement un fardeau quand nous n'avons pas juridiction dans ce domaine.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Outremont.
M. CHOQUETTE: M. le Président, j'aurais une question à
poser au premier ministre. Le gouvernement trouve-t-il normal que l'entreprise
privée, c'est-à-dire l'hôtel Reine Elizabeth ou la
chaîne d'hôtels Hilton...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A l'ordre!
M. CHOQUETTE: ... soit obligée de suppléer aux carences
évidentes et à l'inefficacité du service du logement du
Québec et d'autres organismes officiels devant s'occuper du
logement...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CHOQUETTE: ... des touristes àl'Expo?
M. LE PRESIDENT: Alors, je crois que l'honorable député a
fait précéder sa question de l'expression: « est-il normal?
» C'est donc dire qu'à ce moment-là, l'honorable
député inviterait le premier ministre à émettre une
opinion. S'il se réfère je crois, je ne voudrais pas
induire la Chambre en erreur à l'article 668, il verra
qu'il ne peut demander une opinion. D'autant plus qu'il pose sa question
à propos d'un organisme ou d'une question qui n'est pas de la
compétence de la province, puisque l'hôtel Reine-Elizabeth n'a
rien à voir avec les pouvoirs que peut avoir la Législature du
Québec. En second lieu, je crois que cette question, quoique très
intéressante, n'offre peut-être pas la caractère d'urgence
et d'intérêt public auquel j'ai invité les honorables
députés à se conformer, plus tôt durant cette
session, afin que notre période de questions ne couvre que des questions
urgentes et d'intérêt public.
M. CHOQUE TTE: Je m'incline devant votre décision, M. le
Président, bien que je sois pas entièrement d'accord avec les
raisons que vous donnez.
DES VOIX: A l'ordre! A l'ordre!
M. CHOQUETTE: Mais je poserais la question suivante...
DES VOIX: A l'ordre!
M. CHOQUETTE: ... à l'honorable premier ministre: Quelle mesure
le gouvernement entend-il prendre je cite un article de ce matin dans
les journaux pour que la ville de Montréal et son industrie
hôtelière ne voient pas leur réputation compromise par les
carences et l'inefficacité évidentes du service provincial de
logement...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CHOQUETTE: ... organisme provincial, ainsi que par Logexpo?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Alors, je suis sur que cette question fort
intéressante ne pré- sente pas un intérêt ou une
urgence qui puissent justifier une réponse immédiate de la part
de l'honorable premier ministre ou de tout autre ministre
intéressé. L'honorable député d'Outremont
conviendra sûrement que l'inscription de sa question au feuilleton serait
une manière plus conforme à notre règlement d'obtenir la
réponse désirée.
M. CHOQUETTE: M. le Président, puisque vous me demandez de...
UNE VOIX: Assis.
M. CHOQUETTE: Le président m'a posé une question, j'ai le
droit de répondre. Puisque vous me demandez de convenir, je ne conviens
pas. Et j'aimerais ça que le premier ministre nous dise si la question
est urgente ou non.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!Comme l'honorable député
d'Outremont ne convient pas, je déclare sa question hors d'ordre.
M. BELLEMARE: Très bien. Lui aussi il est hors d'ordre.
M. JOHNSON: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.
M. JOHNSON: M. le Président, j'ai à vous demander...
DES VOIX: Une heure.
M. JOHNSON: ... d'ajourner la Chambre à trois heures.
M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à trois
heures cet après-midi.
Reprise de la séance à 3 h 9 p.m.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BELLEMARE: Je voudrais déposer aujourd'hui, pour le
bénéfice de tous les membres de cette Chambre ainsi que de la
population tout entière la nouvelle liste d'intégration qui
commencera à s'appliquer le 1er octobre 1967 des nouvelles personnes
assujetties à la Loi des accidents du travail.
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour. L'honorable chef de l'Opposition.
Questions et réponses
Négociations à
l'Hydro-Québec
M. LESAGE: Puis-je demander au ministre du Travail de nous dire
où en sont les négociations entre la Société
Cordner Hubert et Bond, sous-traitants de l'Hydro-Québec au complexe
Manlcouagan-Outardes, et le syndicat de leurs employés?
M. BELLEMARE: Je remercie le chef de l'Opposition de m'avoir
prévenu de sa question ce matin. Des rencontres ont eu lieu, en effet,
au bureau du ministère du Travail depuis hier après-midi à
deux heures. Elles se sont continuées une partie de la nuit
jusqu'à quatre heures ce matin et je dois dire, pour l'information du
public, que ce n'est pas seulement la compagnie Cordner Hubert et Bond qui est
en cause, mais aussi celle des employés des Comptoirs forestiers qui
sont partie contractante avec l'autre syndicat. Je dois dire que les
négociations sont normales pour le moment, que le négociateur du
gouvernement, M. Lafleur, est déjà bien au courant du
problème et que le sous-ministre, M. Mireault, est là comme
spectateur.
M. LESAGE: Spectateur seulement?
M. BELLEMARE: Non, comme observateur.
M. LESAGE: Et aviseur?
M. BELLEMARE: Aviseur, j'en suis bien assuré. Je dois dire que
bien que ce soit très lent, très difficile, les
négociations vont bon train. Pour le moment, c'est la seule
déclaration que je doive faire pour ne pas...
M. LESAGE: D'accord. Je n'insiste pas.
M. BELLEMARE: Merci.
M. LESAGE: A cause de la situation, justement, je n'insiste pas et je
souhaite que la chose se règle.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Taillon.
M. LEDUC (Taillon): Etant donné que plusieurs centaines de
pères de famille sont en grève, depuis une heure moins quart ce
matin, aux usines de la United Aircraft à Longueuil, Jacques-Cartier et
Saint-Hubert, est-ce que le ministre du Travail pourrait nous dire ce qu'il
entend faire à ce sujet?
M. BELLEMARE: Je ne sais pas si le député aurait
été mieux de m'en prévenir un peu. J'aurais pu lui dire
qu'il y a une juridiction fédérale en cause.
M. LESAGE: Est-ce que ce ne sont pas des négociateurs
provinciaux?
M. LEDUC (Taillon): Est-ce que le ministre du Travail pourrait nous dire
s'il n'y a pas eu un conciliateur du ministère du Travail qui a fait des
démarches auprès des deux groupes concernés pour essayer
d'en venir à une conciliation?
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Vaudreuil
-Soulanges.
M. GERENT-LA JOIE: M. le Président, le ministre de l'Education a
eu l'amabilité de remettre au chef de l'Opposition, pour son information
et celle de ses collègues, les amendements que le gouvernement se
propose de suggérer au bill 67 tel qu'il a été lu en
première lecture. Est-ce que le ministre est en mesure, à ce
moment-ci, de nous dire quand et comment il se propose de rendre ces
amendements publics? Parce que nous ne voulons évidemment pas commettre
d'indiscrétion, et nous dire peut-être en mime temps comment il
proposerait à la Chambre de procéder à ce
sujet-là.
M. BERTRAND: M. le Président, comme nous l'avons
déjà déclaré, d'abord nous avons fait parvenir au
chef de l'Opposition, comme le député de Vaudreuil-Soulanges
vient de le dire, une copie ou quelques copies des amendements pour qu'il
puisse en informer ses collègues. Le chef de l'Opposition m'a
lui-même déclaré qu'il en avait fait préparer
plusieurs copies pour les
remettre à ceux qui s'Intéressent d'une manière
toute particulière à ce problème. Deuxièmement,
pour répondre a la question qui m'est posée par le
député de Vaudreuil-Soulanges, dès l'instant où
j'amorcerai ma réplique, je ferai connaître exactement le pourquoi
des amendements. Et par la suite, lorsque nous serons rendus en comité
plénier, on pourra à loisir, sur tous et chacun des articles,
autant les articles du bill que ceux qui apportent des amendements, me poser
les questions que l'on voudra.
M. GERIN-LAJOIE : Evidemment. M. le Président, je me permets de
signaler que le problème est le suivant. Nous sommes en train
d'étudier le bill 67. Nous étudions actuellement une motion de
remise à trois mois. C'est le député de
Vaudreuil-Soulanges qui a la parole lors de la reprise du débat sur le
bill 67. Alors, je ne sais pas, on peut peut-être suggérer que
nous nous rencontrions privément pour voir s'il y a lieu de discuter
d'une procédure sur laquelle nous pourrions être d'accord pour
éviter des débats inutiles, soit sur la motion de remise a trois
mois, soit sur tout autre incident de la procédure, alors que les
amendements ne sont pas encore rendus publics. Est-ce que nous serions
appelés à discuter sur le bill tel qu'il a été lu
en première lecture ou sur le bill tel qu'il sera vraisemblablement
amendé? Peut-être que le ministre de l'Education accepterait d'en
discuter privément et que nous pourrions faire rapport à la
Chambre s'il y a entente?
M. BERTRAND: Je n'ai aucune objection premièrement à avoir
une rencontre avec le député de Vaudreuil-Soulanges. Et
deuxièmement, je n'ai aucune objection à rendre les amendements
publics.
M. LESAGE: Bon! Eh bien, alors.
M. BERTRAND: Maintenant, pour accélérer les travaux de la
Chambre, si tout cela demande une rencontre avec le député de
Vaudreuil-Soulanges et quelques-uns de ses collègues, étant
donné la procédure qu'il y a à l'heure actuelle à
l'article 24, je suis prêt à coopérer en vue
d'accélérer les travaux de la Chambre pour éviter toute
procédure tracassière inutile qui n'irait pas au fond du
débat.
M. GERIN-LAJOIE: Au fond des choses.
M. BERTRAND: Au fond des choses. C'est devenu un mot à la mode au
Québec et je suis prêt, étant donné le stade
où nous sommes rendus, le 8 août, comme tous les
députés de la
Chambre, à contribuer par tous les moyens possibles à la
rapide adoption des lois, compte tenu des droits fondamentaux des
députés.
M. GERIN-LAJOIE: Etant donné ce que le ministre vient de nous
dire et que j'apprécie, quant à moi, est-ce que le ministre
serait disposer cet après-midi pour que cela apparaisse aux
procès-verbaux de la Chambre?
M. BERTRAND: Je n'ai pas d'objection. Je vais en faire préparer
des copies qui seront déposées et remises à tous les
députés, de même qu'aux membres de la galerie de la
presse.
M. GERIN-LAJOIE: Et cela sera déposé entre les mains du
greffier?
M. BERTRAND: Déposé entre les mains du greffier. On
connaît la procédure. De pareils amendements doivent être
faits en comité plénier. Il ne faut pas l'oublier. Alors qu'ils
soient déposés tout simplement comme avis d'amendements ou comme
amendements qui seront proposés lors de l'étude du bill, article
par article, en comité plénier.
Message du Conseil législatif
M. LE PRESIDENT: Qu'il me soit permis d'informer cette honorable Chambre
d'un message reçu du Conseil législatif. « Conseil
législatif, le 4 août 1967.
Le Conseil législatif informe l'Assemblée
législative qu'il a voté, sans amendements, les bills
suivants:
Bill numéro 70, intitulé Loi de l'Office du crédit
industriel du Québec;
Bill numéro 79, intitulé Loi modifiant la Loi des
accidents du travail.
Attesté Léonard Parent greffier associé du Conseil
législatif. »
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education.
Résultats d'examens
M. BERTRAND: Je voudrais répondre à la question qui
m'avait été posée par les députés de
Robert-Baldwin et de D'Arcy-McGee au sujet du délai apporté
à faire connaître les résultats des examens du cours
secondaire pour les candidats anglo-catholiques de même que pour les
candidats anglo-protestants. Je dois informer
la Chambre que, dans le cas des candidats anglo-catholiques, l'envoi des
bulletins aux étudiants s'est effectué le 31 juillet et, dans le
cas des candidats anglo-protestants, toujours du cours secondaire, le 7
août.
Il y aura examen de reprise du 17 au 29 août et l'on m'informe que
le retard peut être attribué à des conditions
mécaniques, de la mécanographie. Voilà les informations
que j'ai obtenues du chef de la division des examens, informations qui ont
été contrôlées par le sous-ministre associé
au ministère de l'Education représentant auprès du
comité protestant, M. Dickson.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauharnois.
M. GERIN-LAJOIE: M. le Président, si le député de
Beauharnois me permettait et vous-même pour simplement enchaîner
avec ce que nous avons dit sur le bill 67, je proposerais que les amendements
proposés par le ministre de l'Education soient inscrits au
procès-verbal de la Chambre pour que nous ayons le mot n'est pas
bien français un record quelconque des projets d'amendement sur
lesquels nous allons discuter. Alors soit que ça apparaisse au
procès-verbal comme étant les amendements que le ministre de
PEducation a déposés avec l'intention, je pense, que le
procès-verbal pourrait dire que le ministre de l'Education a
déposé entre les mains du greffier les amendements qu'il se
propose de soumettre lors de l'étude en comité. L'autre
façon serait de les mettre en annexe au journal des Débats.
M. BERTRAND: Le but principal, premièrement je pense que
nous sommes tous du même avis d'abord de les rendre publics.
Deuxièmement, quant au point de vue de la procédure, le
député de Vaudreuil-Soulanges conviendra avec moi que pour
l'étude des amendements qui peuvent être, à un moment
donné, suggérés par l'Opposition ou proposés par le
gouvernement, que la procédure normale c'est en comité
plénier. Je n'ai pas d'objection, par exemple, pour leur assurer un
caractère public premièrement de les faire distribuer, et
deuxièmement qu'ils soient déposés sur la table et
insérés aux procès-verbaux, mais l'étude, j'entends
particulière de chacun des articles étant faite en comité
plénier.
M. GERIN-LAJOIE: C'est simplement pour qu'ils apparaissent dans un
document officiel. Effectivement, sur le bill 21 le ministre de l'Education a
soumis, avec le consentement de la Chambre, un bill amendé à un
moment donné, après la première lecture, comprenant les
amendements proposés par le gouvernement. Alors, cette fois-ci je ne
suggère pas qu'on fasse faire une réimpression mais qu'on ait
quelque part dans les documents officiels de la Chambre le texte imprimé
pour que le public puisse suivre les débats avec quelque intelligence
des choses.
M. BERTRAND: J'ai bien l'impression, si vous me permettez, M. le
Président, que dès que les journalistes auront reçu les
amendements ils s'empresseront de renseigner le public et que le public sera
très bien informé des amendements que le gouvernement apporte au
bill 67. Il y aura d'ailleurs une copie pour chaque député.
M. LE PRESIDENT: Il y a certaines difficultés qui se
présentent parce que le procès-verbal ne contient jamais les
amendements avant que le bill ne soit adopté. Alors il s'agirait de
créer un précédent. Alors je me demande si ça ne
pourrait pas convenir aux honorables députés que ces amendements
soient imprimés en appendice au journal des Débats.
M. BERTRAND: Au journal des Débats, oui.
M. LE PRESIDENT: Alors je crois que ça serait...
M. GERIN-LAJOIE: Parfait!
M. LE PRESIDENT: ... la procédure conforme à notre
règlement.
M. GERIN-LAJOIE: Très bien, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Alors le consentement unanime est donné.
Adopté? Adopté.
(Voir annexe)
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauharnois.
Rapport Rameau
M. CADIEUX: M. le Président, l'honorable ministre de l'Industrie
et du Commerce se souviendra qu'à plusieurs reprises je me suis
adressé à lui pour savoir si le comité de l'Industrie et
du Commerce siégerait pour étudier le rapport Rameau sur
l'uniformisation des heures d'ouverture et de fermeture des commerces au
détail. Et j'ai eu comme réponse : Très bientôt,
incessamment, pendant cette session, et cette année. Alors est-ce
que le ministre de l'Industrie et du Commerce est prêt à faire
siéger le comité de l'Industrie et du Commerce pour
étudier le rapport Rameau?
M. BELLEMARE: M. le Président, conscients de nos lourdes
responsabilités, c'est notre intention d'apporter beaucoup de diligence
pour rendre service à tous les intéressés et
protéger sûrement l'intérêt public en cause.
M. GERIN-LAJOIE: L'intérêt public en
général.
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour. M. CADIEUX: Comme réponse...
M. JOHNSON: Article 20, M. le Président. M. BELLEMARE: Il y a de
tout.
M. JOHNSON: Article 28, pardon, M. le Président.
M. CADIEUX: Cela me fait penser aux diligences du 18e siècle.
Bill no 82
M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre propose la deuxième
lecture du bill 82, Loi modifiant la charte de la Société
générale de financement du Québec.
L'honorable premier ministre.
M. Daniel Johnson
M. JOHNSON: M. le Président, Son Excellence le
lieutenant-gouverneur informé de la teneur de ce bill...
M. LESAGE: Est-ce que nous ne devions pas...
M. JOHNSON: ... a bien voulu accepter que nous en étudiions ses
clauses cet après-midi.
M. LESAGE: Si le premier ministre me permet?
M. JOHNSON: Oui.
M. LESAGE: L'autre jour, je crois que c'est vendredi, le premier
ministre avait appelé d'abord le bill créant le nouveau
ministère des Institutions financières, concernant les
institutions financières, les compagnies et les coopératives. Le
député de Mercier, qui doit répondre au nom de
l'Opposition sur le bill de la Société générale de
financement, m'avait exprimé l'espoir que... C'est-à-dire que lui
et moi étions convaincus que le même ordre serait suivi
aujourd'hui.
M. JOHNSON: D'ailleurs, M. le Président, il est vrai que j'avais
donné...
M. LESAGE: C'est simplement question d'accommoder.
M. JOHNSON: ... mais je pense que ce n'est pas tellement grave...
M. LESAGE: Non, ce n'est pas très grave.
M. JOHNSON: La vraie raison, c'est que nous devons tenter dans toute la
mesure du possible d'accommoder certains de nos hauts fonctionnaires qui
retardent leurs vacances précisément pour nous assister dans
l'adoption de ces lois.
M. LESAGE: Cela ne les retardera pas parce que nous avons bien
l'intention de passer les deux bills cet après-midi.
M. JOHNSON: Alors voici, M. le Président, il s'agit d'une loi
modifiant la charte de la Société générale de
financement du Québec. Vous le savez déjà, il y a une loi
qui est maintenant dans les statuts refondus et qui porte le numéro 54
des chapitres contenus dans le premier volume, Loi constituant la
Société générale de financement du Québec.
La Société générale de financement a demandé
au gouvernement de souscrire une somme additionnelle de $5 millions au fonds
social de la société pour 500,000 actions à dividendes
différés.
On se rappelera qu'en vertu de la Loi constituant la
Société générale de financement, le gouvernement
s'était engagé à souscrire $5 millions pour 500,000
actions à dividendes différés.
Lorsque le pouvoir nous a été dévolu, nous avons
fait confiance à la direction de la Société
générale de financement et nous avons même renouvelé
le mandat des représentants du gouvernement. Aujourd'hui, cette
Société générale de financement nous demande de
souscrire un montant additionnel de $5 millions dans une période
maximale de deux ans. Il s'agit pour cette société de se
développer, de prendre des intérêts dans diverses
entreprises et particulièrement si on me permet d'être
indiscret mais d'une façon limitée dans une papeterie,
con-
jointement avec les propriétaires actuels et une
société filiale de Saint-Gobain, La cellulose Dupin.
La Société nous a aussi représenté, par son
directeur général, M. Jean Deschamps, qu'elle espérait
pouvoir faire souscrire un autre montant de $5 millions par le public sous une
forme ou sous une autre. Je devrais dire, pour être plus exact, que le
directeur général est convaincu qu'il réussira à
obtenir ce montant additionnel de $5 millions. Si ses désirs se
réalisent et si la présente loi est votée, il aura donc
à sa disposition un montant de $10 millions de capital, ce qui lui
permettra de donner à la Société générale de
financement l'expansion que son bureau d'administration désire lui
donner.
La Société nous a aussi demandé certains
amendements qui apparaissent aux articles appropriés et je crois, M. le
Président, qu'il n'est pas nécessaire, comme il ne serait pas du
tout opportun non plus, d'entrer dans le détail. A l'occasion de
l'étude en comité plénier, nous pourrons répondre
volontiers à toutes les questions que voudraient poser les
députés. Nous répondrons dans toute la mesure où
nous sommes libres de le faire, c'est-â-dire en n'oubliant pas qu'il
s'agit non pas d'une société de la Couronne, mais d'une
société privée, même si le gouvernement y a un
intérêt substantiel, mais quand même minoritaire.
Donc, nous faisons confiance à la SGF. Nous sommes
disposés à répondre à ses désirs et nous
verrons, à l'occasion de l'étude en comité plénier,
que la plupart des demandes qui nous avaient été faites quant aux
amendements soient accordées à la SGF. J'ai donc l'honneur de
proposer, M. le Président, la deuxième lecture du bill.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Mercier.
M. Robert Bourassa
M. BOURASSA: M. le Président, je serai peut-être un petit
peu plus long que le premier ministre, parce que je considère que la
Société générale de financement est
extrêmement importante actuellement pour le développement
économique de la province, de même que pour l'affirmation du fait
national québécois, et je voudrais essayer de dire quelques mots
à cet égard tout en me tenant dans le cadre du principe du
bill.
Lorsque nous avons écouté le ministre des Finances au
cours de son discours du budget, et lorsque nous avons discuté des
crédits du ministère des Finances, il nous a été
répondu que la Société générale de
financement aurait tous les moyens nécessaires pour non seulement
consolider son action, mais aussi pour maintenir son élan vers l'avenir.
La même réponse nous avait été faite à
l'occasion de l'Office du crédit industriel qui a été
déjà adopté par cette Chambre comme quoi la façon
ou l'utilisation des fonds contribuerait énormément au
progrès économique de la province. Or, comme dans le cas de
l'Office du crédit industriel, nous avons ici une somme qui de toute
évidence est très modeste et ne pourra pas permettre à la
Société générale de financement de remplir ses
objectifs. J'espère qu'il n'en sera pas de même pour le Conseil de
la recherche ou l'Office du plan qui ne sont pas encore déposés
dans cette Chambre et qui comportent avec la Société
générale de financement et l'Office de crédit industriel,
les mesures de nature économique du présent gouvernement.
Je me permettrai de signaler en premier lieu, M. le Président,
que je ne vois pas pourquoi on n'aurait pas suivi dans le cas de la
Société générale de financement, la formule qu'on a
choisie pour l'Office du crédit industriel ou encore la formule qui a
été choisie pour Soquem, c'est-à-dire qu'on aurait fourni
sur un certain nombre d'années, cinq ou dix ans, des ressources
régulières et annuelles à cette société lui
permettant de planifier l'avenir. Actuellement, contrairement à ce qu'on
a fait pour Soquem, contrairement à ce qu'on a fait pour l'Office du
crédit industriel, tout ce qu'on donne à la Société
générale de financement, c'est une somme de $5 millions payable
d'ici deux ans.
On doit donc en conclure que cette société est plus ou
moins dans un sens à la merci du gouvernement parce qu'on ne peut pas
croire qu'avec une somme aussi minime, si elle veut développer et si
elle veut remplir ses objectifs, elle sera capable de le faire.
M. le Président, je n'ai pas à signaler ici l'existence
des besoins de la Société générale de financement.
En effet, la vente de l'industrie Sicard à des intérêts
étrangers il y a plusieurs mois est un exemple parmi plusieurs autres
qui révèle de façon certaine et patente comment il serait
possible à la Société générale de
financement, si elle avait les fonds nécessaires de se développer
et d'accroître son importance dans l'économie du
Québec.
Précisément, M. le Président, je voudrais dire
quelques mots sur l'importance de cette société par rapport
à deux objectifs qui nous semblent prioritaires, c'est-à-dire la
croissance économique au Québec, la promotion de notre
économie, la création d'effets d'entraînement et
deuxièmement le pouvoir ou l'importance écono-
mique accrue des Canadiens français.
M. le Président, je n'ai pas à vous signaler aujourd'hui
la pertinence de toute mesure qui nous permettrait de développer notre
économie. Le chômage augmente, l'inflation augmente 4%
depuis la dernière année la productivité diminue,
les investissements ralentissent. Si nous considérons ces quatre
facteurs ensemble, qui sont des indices importants et qui nous permettent de
tester si la situation économique est saine ou ne l'est pas, nous voyons
que ces quatre indices réunis ensemble se combinent pour décrire
le caractère sérieux de notre situation économique. On
peut donc s'étonner que pour améliorer cette situation
économique avec la SGF, on ne donne qu'une somme aussi peu importante
que $5 millions alors qu'elle est un instrument qui, utilisé à
plein, pourrait faire sa part pour corriger ou prévenir cette menace de
récession qui se trouve à découler de cette hausse du
chômage et de l'inflation, de cette baisse de la productivité et
de cette baisse de nos investissements.
Un autre objectif prioritaire qui pourrait être aidé par
une société générale de financement qui aurait les
moyens suffisants, c'est cette affirmation nationale de l'importance
économique des Canadiens français. Nous avons connu, ces
jours-ci, des discussions fort intenses, sur la question nationale au
Québec. Mais qu'est-ce qui se fait concrètement dans le secteur
où nous sommes le plus faible, c'est-à-dire le secteur
économique? Qu'est-ce qui se fait concrètement dans ce secteur
qui, de plus en plus, va devenir dominant dans toute l'activité
humaine?
Je pense qu'il faut éviter que cette éclatante
dramatisation du fait national que nous avons connue ces jours-ci ne devienne
stérile parce qu'on accorderait toute l'importance non pas aux mesures
positives et concrètes, mais à des effets de rhétorique,
si excellents soient-ils. On doit certainement se réjouir du
réveil qui est causé actuellement pour nous faire
reconnaître et constater la croissance et le progrès de la
communauté canadienne-française. Mais ce qui compte surtout,
même si c'est plus difficile, même si c'est moins visible, c'est
d'arriver avec des mesures concrètes dont l'effet, peut-être, est
à long terme, mais qui définitivement, à mon sens, sont la
solution à nos problèmes.
Si nous sommes à peu près exclus de ce qui compte dans la
vie économique, si le fait français ne se trouve pas à
jouer un rôle dans la vie économique du Québec, il y a un
sérieux danger que tous les efforts qui sont faits ailleurs soient
compromis.
Je ne vois pas pourquoi nous serions craintifs, je ne vois pas pourquoi
nous hésiterions à nous servir de l'Etat au Québec pour
affirmer le fait français en matière économique. Plusieurs
pays n'ont jamais hésité à utiliser l'Etat. Pour donner
quelques exemples, l'Angleterre, l'Italie, le Mexique, le Chili; tous ces pays
possèdent des sociétés puissantes qui, grâce
à l'aide de l'Etat, interviennent dans la vie économique et
participent à sa croissance. Même si nous regardons beaucoup plus
près, si nous regardons par exemple en Ontario, nous voyons qu'il y a
plusieurs mois, l'Ontario donnait $7 millions à une
société appelée l'Ontario Development Corporation. Et
pourtant, l'Ontario a un chômage moins élevé que le
nôtre, une plus grande productivité, des investissements plus
nombreux et il donne une somme de 40% supérieure à celle que
nous, au Québec, avec une industrie secondaire beaucoup plus faible,
décidons de donner.
Je pense, comme le parti libéral, que l'Etat est un instrument
principal, même on peut dire que c'est le levier principal de
l'économie pour permettre aux Canadiens français de jouer leur
rôle. Le gouvernement précédent n'a pas
hésité à constituer ce qu'on peut peut-être appeler
un « coffre d'outils » avec Soquem, avec la Caisse de
dépôts, avec la Société générale de
financement, qui s'ils sont bien utilisés, permettent à l'Etat de
favoriser et d'accroître la force économique des nôtres.
Si nous examinons plus précisément la structure de la
Société générale de financement, nous voyons
qu'actuellement la Société générale de financement
est habilitée à faire des prêts comme elle est
habilitée à faire des investissements. Je pense, pour ma part,
que la Société générale de financement devrait
s'orienter de plus en plus vers le secteur des investissements, puisque, dans
le secteur des prêts, nous possédons déjà plusieurs
entreprises qui peuvent agir, comme la Banque d'expansion industrielle, la
Société RoyNat, la Canadian Enterprises Limited et, plus
récemment, ce que nous avons adopté ici, en cette Chambre,
l'Office du crédit industriel.
C'est donc vers les investissements productifs que doit s'orienter la
Société générale de financement. Par exemple, elle
doit encourager les fusions de manière à ce que nos entreprises
aient une dimension et une taille qui soient plus propices à augmenter
leur force concurrentielle et à accroître leur rentabilité.
Nous sommes dans une ère de concentration industrielle où ce sont
les plus forts qui triomphent. Il nous faut donc, au Québec, si nous ne
voulons pas être absents éventuelle-
ment de tout ce qui compte dans le secteur économique, il nous
faut donc prendre les moyens pour bâtir des entreprises qui puissent
rivaliser avec des entreprises des autres provinces ou des autres pays. Et je
pense que la Société générale de financement peut
jouer un rôle fort actif en fonction de cet objectif. Elle peut aussi
fournir de l'aide technique aux entreprises pour accroître leur
productivité. Elle peut s'orienter vers la concentration dans un secteur
donné, par exemple, la construction métallique. D'ailleurs, elle
a déjà fait quelques pas dans cette direction.
Bref, ce qu'il faut au Québec, c'est développer notre
industrie secondaire. Parce que c'est elle qui procure des revenus
élevés aux employés, aux travailleurs, de même
qu'aux propriétaires et de même qu'au gouvernement ou à
l'Etat sous forme de taxation. Et lorsque nous aurons une industrie secondaire
plus développée que celle que nous avons présentement, une
partie de nos problèmes pourra être plus facilement
réglée parce que tout tournant plus ou moins autour de la
question fiscale, si nous pouvons réussir par nous-mêmes à
augmenter les sources de revenu, nous pourrons évidemment
accroître notre développement économique et social beaucoup
plus facilement.
Je n'ai pas à répéter ce que j'ai
déjà dit en comparant l'industrie secondaire de l'Ontario et
celle du Québec. Nous avons une industrie axée sur la
main-d'oeuvre alors qu'en Ontario, elle est axée sur le capital. Tant
que nous ne pourrons pas changer cette situation, nous serons toujours dans un
état d'infériorité économique et c'est par des
moyens comme la Société générale de financement que
nous pourrons le réaliser. Je pense bien que l'expérience a
démontré, à la Société
générale de financement, que ce dont nos entreprises ont besoin,
c'est du capital-actions plutôt que des prêts, puisque plusieurs
autres sociétés existent pour faire des prêts.
Il y a lieu aussi de créer un marché public pour nos
entreprises par des inscriptions en bourse. Il est essentiel que les Canadiens
français aient un plus grand nombre d'entreprises inscrites en bourse.
Dans le cas de la SGF, ceci permettrait de récupérer une partie
des capitaux et ainsi de pouvoir investir ailleurs. De plus, elle pourrait, par
ce moyen, faire des profits de capital importants qui lui permettraient
d'accroître ses ressources à investir. Il est donc, à mon
sens, très opportun, dans la mesure du possible, d'encourager la
Société générale de financement à ce que les
entreprises s'inscrivent en bourse.
Deuxièmement, ceci aurait l'avantage d'offrir à
l'épargne canadienne-française un choix plus attrayant que celui
qui existe actuellement. C'est évident qu'aujourd'hui, ce choix est
très mince. L'épargne canadienne-française, même
celle qui a des objectifs tout à fait nationalistes, est forcée
de s'orienter vers l'achat de valeurs étrangères, parce que le
choix qui s'offre à elle est extrêmement limité. La
Société générale de financement, si elle
possédait les moyens suffisants, pourrait encourager nos entreprises
à inscrire leurs valeurs en bourse et ainsi, à offrir à
toute la communauté du Québec des occasions de pouvoir encourager
les nôtres, lesquelles n'existent pratiquement pas aujourd'hui.
M. le Président, je voudrais signaler très
brièvement, puisque ce sera discuté en comité, je voudrais
simplement mentionner la question des terrains de Bécancour. Il n'y a
rien dans le projet de loi qui dise ce qu'il surviendra aux terrains de
Bécancour. Nous restons absolument dans le vague là-dessus. Je ne
sais pas si le premier ministre a informé la Société
générale de financement de ses intentions mais de toute
manière, l'Assemblée elle-même n'est pas prévenue et
elle a le droit de se demander ce qui arrivera à un investissement fort
important de la Société générale de
financement.
Deuxièmement, la loi, telle qu'elle est proposée
présentement, réduit la souplesse de la Société
générale de financement dans les prêts qu'elle peut faire
à ses filiales. En permettant seulement des prêts sur
hypothèques, la Société générale de
financement se trouve à exclure la machinerie et réduit ainsi la
facilité, pour la Société générale de
financement, de venir en aide à ses filiales. Cet article, à mon
sens, loin d'améliorer la situation, la détériore.
En conclusion, je voudrais signaler que ce que l'on offre
présentement pour aider la Société générale
de financement ne répond aucunement au souci ou à la vocation
véritable qu'à notre sens cette société doit avoir,
c'est-à-dire un moyen-clef pour les Québécois, non
seulement de promouvoir et de relancer leur économie, mais essayer de la
reprendre en main. Des centaines de millions ont été
accordés, octroyés à la colonisation durant dix, quinze ou
vingt ans, avec les résultats que l'on sait. Alors, aujourd'hui, on
offre, pour un secteur vital non seulement pour notre économie mais pour
le progrès de la communauté canadienne-française, pour un
secteur vital, on offre quelques millions seulement. C'est pourquoi nous
pouvons conclure que le nationalisme dont fait preuve le présent
gouvernement, est un nationalisme verbal, puisque dans les faits, dans les
secteurs essentiels pour notre économie et pour notre progrès,
son action est pratiquement absente; et clairement l'on ne peut prévoir
aucun résultat concret avec
les moyens qui sont offerts présentement parle gouvernement.
M. LE PRESIDENT: La motion en deuxième...
M. JOHNSON: S'il n'y a pas d'autres députés qui veulent
parler sur la deuxième lecture, je voudrais bien exercer
très brièvement d'ailleurs mon droit de
réplique.
On voit que cette loi n'est pas du tout litigieuse. Il semble que tous
les députés sont d'accord pour permettre au lieutenant-gouverneur
en conseil d'investir un montant additionnel de $5 millions. Le
député fait un reproche en disant que c'est très peu et,
deuxièmement, il nous blâme de ne pas procéder comme dans
le cas de Soquem et de l'Office du crédit, c'est-à-dire annoncer
d'avance un montant substantiel réparti sur une période
donnée.
D'abord, je lui ferai remarquer que le gouvernement, en 1962, a souscrit
$5 millions sur un capital nominal de $150 millions. C'est donc que le
gouvernement du temps considérait qu'il fallait démarrer
doucement peut-être, prudemment certainement, et en arriver à un
point où la Société générale de fiancement
serait en position d'émettre des actions dans le public et de se
débrouiller seule si possible.
Le député feint d'oublier que Soquem et l'Office du
crédit industriel sont deux organismes du gouvernement. Alors que la
Société générale de financement est une compagnie
mixte, une compagnie où le gouvernement est minoritaire de toute
façon. Le gouvernement, évidemment, ne doit pas être seul
à souscrire du capital.
Il y en a de la place pour une souscription de capital par le public,
soit canadien-français ou canadien-anglais ou de quelque
nationalité que ce soit. Il y a une capitalisation autorisée de
$150 millions.
M. BOURASSA: Est-ce que le premier ministre me permettrait une
question?
M. JOHNSON: Oui, pourquoi pas?
M. BOURASSA: Je ne vois pas quelle objection il y aurait à ce que
le gouvernement souscrive aux actions ordinaires. Le public peut toujours
souscrire à des actions privilégiées. Alors je ne vois pas
quelle objection le gouvernement aurait à dire à la SGF qu'en
raison d'un capital autorisé de $150 millions, durant un certain nombre
d'années, pour lui permettre de planifier les achats éventuels ou
d'envisager des réformes, on octroiera durant les cinq prochaines
années, un montant donné; ça pourrait être
très utile.
M. JOHNSON: M. le Président, la SGF est administrée par un
certain nombre de directeurs dont les noms sont publiés dans les
rapports rendus publics et je ne voudrais pas, pour ma part, substituer mon
jugement aux leurs. On nous a demandé $5 millions et nous accordons $5
millions. Deuxièmement, il est question de soulager la SGF d'une somme
de $2,800,000, j'arrondis les chiffres, investie dans des terrains pour
l'implantation d'un complexe sidérurgique à Bécancour.
Exemple parfait, on a mis la charrue avant les boeufs. On a immobilisé
$2 millions des fonds, au-delà de $2 millions. Maintenant,
évidemment, il y a des intérêts depuis ce temps-là,
dans l'achat de terrains à Bécancour. Si ma mémoire est
fidèle c'est en 1963, je cite de mémoire.
Alors il y a quatre ou cinq ans que la SGF a $2 millions de ses fonds et
l'intérêt sur ses fonds immobilisés dans quoi? Des terrains
pour implanter une sidérurgie dont on a dit dans un rapport officiel que
nous avons demandé après les élections au mois de juin
1966, qu'après $5 millions de dépenses et d'engagements et cinq
ans d'étude on ne pouvait pas encore déclarer si oui ou non une
sidérurgie devait être établie et à plus forte
raison on ne pouvait pas déclarer quel genre de sidérurgie devait
être établie.
M. LESAGE: Le premier ministre résume les faits un peu fort.
M. JOHNSON: Bien non.
M. LESAGE: Oui, il passe des épisodes importants.
M. LAFRANCE: Il ne va pas au fond des choses!
M. LESAGE: Non, pas cette fois-ci.
M. JOHNSON: Oui, je vais y aller au fond des choses. Cela a
été un autre gros « bluff » libéral.
M. LESAGE: Le premier ministre est injuste. Il sait fort bien ce qui
s'est passé.
M. JOHNSON: Cela c'est le fond des choses.
M. LESAGE: Il sait fort bien ce qui s'est passé alors que le
président n'était pas M. Gignac.
M. JOHNSON: Acheter des terrains $ 2 millions...
M. LESAGE: Il sait fort bien ce qui s'est passé.
M. JOHNSON: ... faire croire aux gens que ça s'en vient, la
sidérurgie: on a des terrains, passer une loi pour prévoir des
conditions spéciales d'urbanisme dans cette ville. J'entends encore le
ministre des Affaires municipales dans cette Chambre, le député
de Chambly, nous faire la grande démonstration de la
nécessité de cette loi pour l'urbanisme dans Bécancour.
C'était urgent, il fallait passer ça tout de suite, la
sidérurgie s'en venait, en chemin de fer ou en bateau, et ça
devait accoster...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. JOHNSON: ... pour être déchargé d'un jour
à l'autre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. JOHNSON: Alors il fallait tout de suite y voir.
M. LESAGE: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable chef de l'Opposition.
M. LESAGE: Nous sommes loin de la Société
générale de financement. J'attire votre attention, M. le
Président, mais je pense que le premier ministre, s'il veut parler de la
sidérurgie, devrait au moins dire que le président et les
administrateurs de Sidbec avaient fortement recommandé l'achat des
terrains en question comme étant une condition sine qua non de
l'établissement d'une sidérurgie que, à ce
moment-là, nous était garantie par les administrateurs de
Sidbec
M. JOHNSON: Alors en temps et lieu, M. le Président, nous
parlerons des structures modèles...
M. LESAGE: Oui, mais au cours de la campagne électorale le
premier ministre d'aujourd'hui l'a promise, la sidérurgie.
M. JOHNSON: ... données à Sidbec et deuxièmement de
la façon...
M. PINARD: Là je pense qu'il s'empresse de faire autre
chose...
M. JOHNSON: ...très orthodoxe selon laquelle on a
procédé. Je me retiens aujourd'hui M. le Président.
M. LESAGE: Cela paraît.
M. LAFRANCE: Qu'est-ce que cela serait?
M. JOHNSON: Si on me laissait la permission de sortir un peu du
débat...
M. LESAGE: Ah, vous êtes déjà trop « sorteux.
»
M. JOHNSON: ... Ils seraient joliment moins souriants, les
députés de l'autre côté. On aura d'autres
occasions.
M. LAFRANCE: Non, non, ne le faites pas.
M. JOHNSON: En attendant, je réponds au discours
prétendument sérieux du député de Mercier et je lui
répète que la SGF a dû immobiliser des fonds ou des
possibilités d'emprunts pour des terrains qui n'ont pas encore servi.
Nous avons sur le métier un projet de loi...
M. LESAGE: Vous aviez promis qu'ils serviraient tout de suite, au
lendemain de l'élection.
M. JOHNSON: Nous avons un projet de loi qui permettrait à une
régie d'acquérir ces terrains en vue d'une acierie, s'il doit y
en avoir une là, et en vue du développement industriel de la
région de Trois-Rivières et de la rive sud. Mais nous devons,
avant de présenter un tel projet de loi, prendre le temps de consulter
les autorités municipales de toute la région. Nous ne voudrions
pas leur imposer un parc industriel sans avoir eu l'occasion de discuter avec
elles. Mais, à l'occasion de la présentation de cette loi, on se
rendra compte que l'ancien gouvernement, contentons-nous de cette expression, a
procédé de façon non orthodoxe.
Vous savez, M. le Président, il est bien beau de parler
d'investissements, canadiens-français, de solliciter les gens à
investir dans des entreprises de chez nous, mais c'est le devoir du
gouvernement de veiller à ce que le patriotisme des gens ne soit pas
exploité. C'est-à-dire de voir à ce que...
M. LESAGE: M. le Président, est-ce bien la voix du
député de Bagot que j'entends?
M. JOHNSON: ... l'on ne répète pas dans
cette province certaines expériences malheureuses...
UNE VOIX: Oui.
M. JOHNSON: ... de gens qui ont vu leurs économies englouties par
des gens qui les sollicitaient au nom du patriotisme ou de la religion. Il y a
en économie une série de lois qu'on ne peut ignorer.
M. LESAGE: C'est l'autre bill ça. M. JOHNSON: Il y a...
M. LESAGE: C'est le discours pour l'autre bill.
M. JOHNSON: ... même pour la SGF, une série de lois qui
régissent cette société, des lois économiques dont
on ne peut pas, sans risquer de faire perdre de l'argent, dévier avec
trop de liberté. Il faut s'assurer d'un développement graduel,
d'une gérance solide qui prend de l'expérience. La SGF ne doit
pas être uniquement une façon pour certaines familles de
régler leur succession. Il y a...
UNE VOIX: Des arguments...
M. JOHNSON: Non, M. le Président, je ne parle pas de Marine
Industries; je parle des premières qu'on a achetées, 99% à
90%. Je ne dis pas que c'est un bon ou un mauvais achat, mais il faut prendre
garde...
M. LESAGE: Bon! C'est l'autre bill.
M. JOHNSON: ... que ce ne soit pas un instrument seulement de «
nomme-moi directeur ici, j'achète ton affaire et je te nomme directeur
là. » Le gouvernement actuel prenant ses responsabilités y
va prudemment; ça serait beau de dire: Nous mettons $50 millions
à la disposition de la SGF sur une période de cinq ans, mais ce
ne serait pas prudent.
M. BOURASSA: Sicard.
M. JOHNSON: M. le Président, on veut parler de Sicard. Ce que
j'en connais, c'est que Sicard demandait un prix prohibitif selon le jugement
des gens de la SGF, c'est à eux de le juger.
Une compagnie canadienne de Colombie, filiale d'une compagnie
américaine, s'est portée acquéreur de Sicard, mais, M. le
Président, il faut tout en encourageant le développement
éco- nomique dans la province de Québec, se garder d'un
irréalisme qui trop longtemps a servi quelques individus, mais a
tourné au détriment du petit épargnant. Quand il s'agit
des fonds de la province, nous considérons que nous devons y apporter la
même prudence que si nous administrions des fonds des petits
épargnants, car en réalité, ce sont les fonds de toute la
population et ce sont des fonds qui viennent en grande partie de
salariés, de gens qui n'ont pas un revenu extraordinaire. Nous devons
donc, avec beaucoup de prudence, administrer les fonds et à plus forte
raison lorsqu'il s'agit d'investir.
Or, M. le Président, le directeur général, M.
Deschamps connaît ces principes et reconnaît quelle est la
véritable situation. Il ne nous a pas demandé $50 millions
à investir dans une période de cinq ans ou dix ans, il nous a
demandé si le gouvernement voulait bien investir une autre somme de $5
millions, s'ajoutant à l'investissement initial au départ de la
compagnie dans la même catégorie d'actions, c'est-à-dire
des actions à dividendes différés. Et, nous avons
accédé à sa demande.
M. le Président, je l'ai déjà dit dans cette
Chambre et je pense que c'est l'occasion de le répéter. Nous
avons connu dans la province des gens qui ont fait fortune en disant: Il faut
acheter chez nous parce que nous sommes des gens comme vous de langue
française, et quand ils se furent enrichis en nous chargeant 5% et 10%
plus cher très souvent, ont vendu aux Américains ou à des
Européens et ne nous ont pas remis les 5% qu'ils nous ont chargés
en trop pendant vingt ans. Alors il y a, M. le Président, un sain
réalisme à observer et nous voulons quant à nous que la
SGF se place dans une position telle, qu'elle puisse marcher d'elle-même,
qu'elle puisse inspirer confiance par une excellente gérance et qu'elle
puisse montrer des bénéfices, afin que le public investisseur,
ait, comme l'a dit avec raison, le député de Mercier, une autre
occasion d'investir dans quelque chose qui contribue à notre
accroissement économique, mais un accroissement économique
basé sur une bonne administration et sur d'autres choses qu'un appel aux
sentiments.
M. le Président, je n'ai aucune raison de mettre en doute la
valeur de la gérance de la SGF. M. Deschamps nous a demandé $5
millions de plus. Il nous a expliqué que c'était urgent pour une
partie de ce montant, et nous lui avons dit devant les associés
éventuels, dans l'expansion d'une entreprise actuelle, que le
gouvernement contribuerait à temps. On aura constaté que
l'article est permissif, le délai est un délai maximum, ce qui ne
nous empêchera pas d'accommoder la SGF dès le mois prochain ou
la
semaine prochaine même, avec le montant requis pour lui permettre
un point final à ce projet qui se négocie entre elle et les
intérêts français.
M. le Président, je pense bien que tous les députés
de cette Chambre seront heureux d'apprendre que le gouvernement fait confiance
à la SGF et espère qu'elle continuera à améliorer
sa gérance, à faire d'excellents placements, surtout à
aider les industries à se grouper et atteindre le plus tôt
possible ce stade compétitif qui est évidemment l'un des
impératifs dans notre économie Nord-américaine.
M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture est-elle
adoptée? Adopté.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
Comité plénier
M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre propose que je quitte
maintenant le fauteuil pour que la Chambre se forme en comité pour
l'étude du bill 82, Loi modifiant la charte de la Société
générale de financement du Québec. Cette motion est-elle
adoptée? Adopté.
M. LEBEL (président du comité plénier): Bill 82,
article 1.
M. BOURASSA: M. le Président, j'ai un amendement. Je crois que
l'article réduit la souplesse de la Société
générale de financement par rapport à...
M. JOHNSON: J'ai un amendement plus radical que ça, je propose
qu'on l'enlève.
M. BOURASSA: Vous le retirez.
M. JOHNSON: La Société générale de
financement à qui nous avons soumis le projet de loi nous a dit: Bien,
nous préférons que vous retiriez l'article 1.
M. LESAGE: M. le Président, je crois bien que c'est une
décision sage de retirer l'article 1, parce que c'était changer
complètement la vocation de la Société
générale de financement. Je comprends que la garantie de
prêt et les prêts soient la raison d'être et le but de la Loi
du crédit industriel, mais la Société
générale de financement a été fondée pour
les fins qui sont bien décrites dans sa loi de fondation. Pour atteindre
ces fins, bien évidemment, il s'agissait d'investir dans le stock commun
ou privi- légié ou dans les obligations de sociétés
industrielles. Alors je crois que le gouvernement est bien avisé de
retrancher l'article 1.
M. BOURASSA: M. le Président, si vous me permettez sur ce
même article. Je suis d'accord avec le chef de l'Opposition
c'était un recul par rapport au présent. Mais je me demande s'il
ne serait pas bon de s'informer auprès de la Société
générale de financement si, au lieu de dire des prêts sur
hypothèque, on pouvait faire des prêts garantis sur titres.
D'après la situation présente, je pense qu'ils sont
obligés d'attendre l'approbation de la Commission des valeurs
mobilières. La Société générale de
financement, lorsqu'elle veut prêter, est obligée d'attendre
l'approbation de la Commission des valeurs mobilières. Est-ce qu'il n'y
aurait pas lieu, peut-être pas évidemment immédiatement,
mais que le Conseil législatif propose un amendement pour accorder plus
de flexibilité au lieu de la réduire comme on voulait le faire,
mais maintenant on revient au statu quo. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu au
contraire d'accorder plus de flexibilité en abolissant cette
nécessité d'attendre l'approbation de la Commission des valeurs
mobilières.
M. JOHNSON: Le statu quo est défini dans l'article 5.
M. BOURASSA: Oui, oui.
M. JOHNSON: a) La Société a en particulier le pouvoir
d'acquérir, par souscriptions ou autrement des actions, des obligations
ou autres valeurs de toutes entreprises; b) de créer et de louer des
services techniques d'administration et de recherches pour elle-même ou
pour d'autres; c) d'acheter des obligations ou des bons du Trésor
émis ou garantis par le gouvernement fédéral ou une
province et des obligations de municipalités ou commissions scolaires de
la province de Québec; d) revendre des actions, obligations, bons du
Trésor ou autres valeurs acquises par la Société, mais non
d'en faire commerce.
M. le Président, il y a là des pouvoirs assez
considérables. D'ailleurs nous discutons dans le vide, l'article est
retiré a leur propre demande.
M. BOURASSA: Oui, je suis d'accord, mais il aurait lieu
d'améliorer la situation de la SGF, nous sommes ici pour cela.
Et 5 a), tel que je l'interprète oblige la Société
générale de financement, avant de pouvoir prêter, à
recevoir l'assentiment de la Commission des valeurs mobilières et ceci
impli-
que des délais considérables et parfois les besoins sont
urgents. Alors, je me demande si...
M. JOHNSON: Non, la Société générale de
financement n'est pas obligée d'avoir un permis de la Commission des
valeurs mobilières pour investir dans des valeurs mais elle doit
investir dans des valeurs qui sont autorisées par exemple.
M. BOURASSA: Oui mais...
M. JOHNSON: Et ça c'est bon. C'est excellent.
M. BOURASSA: D'accord mais ça retarde, ça peut retarder
l'emploi, je suggère au premier ministre...
M. JOHNSON: Ce retard peut être corrigé autrement qu'en
donnant la permission d'acheter ou des titres qui n'ont pas été
approuvés par une décision favorable de la Commission des valeurs
mobilières. Alors, nous allons... d'ailleurs, la SGF n'est pas
intéressée à changer la situation, elle nous a
demandé de retirer l'article, tout le reste c'est un débat
hypothétique.
M. BOURASSA: Ils seraient peut-être intéressés, si
vous leur offriez l'opportunité.
M. JOHNSON: Seulement, nous ne pouvons pas, quant à nous, imposer
à la SGF des pouvoirs. Nous sommes bien prêts à
étudier ses demandes et nous sommes prêts à lui accorder
les pouvoirs qu'elle demande, c'est une société dans laquelle
nous sommes représentés mais nous n'irons pas jusqu'à
sacrifier nos intérêts. On verra un peu plus loin que nous n'avons
pas tout à fait accordé ce qu'on a demandé. Mais nous
avions une raison qui était précisément celle de
l'intérêt des gens que nous représentons,
c'est-â-dire le contribuable, le Québécois.
M. LE PRESIDENT: La motion d'amendement est-elle adoptée?
Adopté, Article 2 qui deviendra 1. Adopté. Article 3 qui
deviendra 2.
M. BOURASSA: Etant donné qu'il est question des $5 millions, je
peux peut-être répliquer au premier ministre brièvement. Il
a dit que M. Deschamps avait demandé $5 millions, j'ai traité,
moi, de cette injection de capital nouveau à l'égard de la
situation économique globale au Québec. J'en ai conclu que le
développement économique était le parent pauvre de
l'administration actuelle à cause des mesures économiques
présentées jusqu'ici par le gouvernement et même si M.
Deschamps s'est dit satisfait de $5 millions, je pense qu'il demandait cette
somme en fonction d'objectifs précis et limités. Mais je ne vois
pas comment le directeur général de la Société
générale de financement pourrait s'objecter à certaines
garanties ou à certaines possibilités financières
éventuelles qui permettraient à la SGF de remplir un rôle
plus important et plus positif en fonction des objectifs de croissance
économique et de l'affirmation du Québec en matière
économique.
M. JOHNSON: Le député de Mercier semble oublier que les $5
millions que nous avons l'intention d'investir est l'équivalent de ce
qu'on a investi au départ. C'est comme si on la fondait de nouveau.
M. LESAGE: Pas tout à fait. C'est une injection nécessaire
mais pas tout à fait dans les mêmes conditions.
M. JOHNSON: Alors $5 millions au départ...
M. BOURASSA: On a perdu des occasions après en 1965.
M. JOHNSON: ... cela a été l'investissement du
gouvernement. Or, d'après les chiffres officiels, les ventes en 1966 se
sont élevées à $95 millions, les ventes prévues en
1967 sont estimées à $112 millions et il y a 7,000
employés qui travaillent pour des compagnies dans laquelle la SGF a des
intérêts majoritaires ou des intérêts minoritaires,
pas seulement majoritaires, des sociétés dans lesquelles la SGF
est le plus gros actionnaire ou à 50% ou plus. Avec $5 millions, on a pu
au départ, en 1961 ou 1962, on a pu faire tourner des chiffres d'une
telle valeur, imaginons qu'avec une autre somme de $5 millions maintenant
lorsque l'entreprise est lancée, ce que l'on peut générer
d'activités économiques. On estime à 2,000 le nombre
d'emplois créés par la SGF, ce sont là des
évaluations que tout le monde n'admettra peut-être pas, que des
économistes pourraient discuter entre eux, mais il reste que avec $5
millions on a généré l'activité économique
et une autre somme de $5 millions au moment où le véhicule est en
marche.
Je pense que c'est une bonne injection, à la condition que la SGF
aille puiser à ces autres sources comme elle l'a fait au départ.
Cela n'a jamais été V intention du gouvernement du temps
d'être seul à souscrire les fonds, même à souscrire
des actions communes. Le gouvernement s'est placé dans une
position...
M. LESAGE: L'Intention du gouvernement du temps était de fournir
25%.
M. JOHNSON: ... qui était, disons, très confortable pour
la SGF. Le gouvernement s'est placé dans des actions à dividendes
différés qui ne créaient pas un fardeau pour la SGF et qui
lui donnaient toute liberté de mouvement, toute liberté
d'accorder à d'autres souscripteurs des positions plus confortables.
Alors, je pense qu'on ne peut pas nous blâmer de continuer la même
politique; au contraire,nous croyons qu'elle mérite d'être
expérimentée davantage. A quoi en viendra-t-on? Quel genre
d'actions émettra-t-on dans le public? Ceci est la responsabilité
de la SGF.
M. LESAGE: Les cinq millions qu'on injecte sont évidemment
nécessaires à la Société générale de
financement. Ces nouveaux cinq millions, qu'ils soient injectés de la
même façon que les premiers cinq millions, c'est-à-dire en
souscrivant des actions à dividendes différés, je crois
qu'il était impossible de faire autrement, dans les circonstances
actuelles. Maintenant, je ne crois pas qu'il y ait lieu
d'espérer,à ce moment-ci, que ces cinq millions additionnels
constituent 25% d'un montant additionnel global de $20 millions qui serait
souscrit actuellement. Je comprends que l'on peut s'attendre à des
souscriptions des caisses populaires suivant les moyens qui sont prévus
un peu plus loin dans le bill, mais je ne crois pas que, dans le moment du
moins, on puisse aller chercher dans le public et chez les
sociétés une dizaine de millions de dollars additionnels. Si nous
ne pouvons maintenir le même équilibre, il est essentiel d'agir
quand même. Quant à moi, je suis d'accord qu'il faut, à ce
moment-ci, injecter cinq millions aux mêmes conditions que le premier
cinq millions.
M. LE PRESIDENT: L'article 3 devenu 2, est-il adopté?
M. JOHNSON: Oui.
M. LE PRESIDENT: L'article 4 qui deviendra 3, adopté?
Adopté. L'article 5 qui deviendra 4est-il adopté? Adopté.
L'article 6 qui deviendra 5 est-il adopté?
M. BOURASSA: Non. Pourquoi le premier ministre augmente-t-il ceci?
Est-ce que douze n'est pas suffisant, ne serait-ce que pour raisons
d'efficacité pour un conseil d'administration?
M. JOHNSON: Voici. On peut discuter longtemps sur l'opportunité
de douze et de seize, mais il y a un exécutif. Je crois qu'il y a
intérêt à avoir un éventail le plus large possible.
Le rajeunissement des cadres, ce n'est pas mauvais. Des injections de sang
nouveau dans des bureaux d'administration, ce n'est pas mauvais. La SGF est
intéressée à ce que soit maintenue la proportion entre les
divers groupes,l'équilibre actuel, si on veut, et c'est ce que nous
respectons, évidemment, en prévoyant..
M. LESAGE: L'équilibre est brisé. M. JOHNSON: Non, ce
n'est pas brisé.
M. LESAGE: L'équilibre dans la souscription de capital.
M. JOHNSON: Oui^oui. Quant à l'équilibre, oui. Sauf qu'on
a peut-être oublié, de l'autre côté de la
Chambre...
M. LESAGE: J'ai dit que c'était inévitable. Ce n'est pas
une critique, c'est une constatation.
M. JOHNSON: Non, non, mais j'ai rapporté à cette Chambre
que M. Deschamps, le directeur général, était moralement
certain qu'il obtiendrait des souscriptions de capital sous une forme ou sous
une autre pour un montant équivalent à celui que nous allons
placer.
M. LESAGE: Oui, mais c'est cinq millions; ce n'est pas quinze.
M. JOHNSON: Même au-delà. Et on sait que si la
gérance est bonne, si on monte les profits, on attirera l'attention des
investisseurs et on acquerra leur confiance. Ce n'est pas à nous
d'attendre. Nous aurions pu attendre que la cote en bourse soit meilleure, mais
nous croyons que c'est notre devoir de mettre le montant de base pour qu'on
puisse remonter la côte, même s'il s'agit d'une cote à la
bourse.
D'ailleurs, on me fait remarquer avec raison, j'oubliais de le
dire que la cote à la bourse est remontée, je crois bien,
à 8.
M. LESAGE: Ce sont des frais, cela.
M. JOHNSON: Je crois que la mesure annoncée par le gouvernement
était de nature à Inspirer confiance à d'autres
investisseurs. Et nous avons déjà...
M. LESAGE: C'est-à-dire que c'était denature à
bonifier les actions, $5 millions de plus.
M. JOHNSON: Et à inspirer confiance aussi.
On a vu par d'autres articles que le gouvernement permettait maintenant
à la SGF, à sa demande, d'avoir un petit peu plus de souplesse
dans la vente de ses actions. Il y a la possibilité pour les caisses
populaires d'acheter d'autres titres que des actions ordinaires, comme il y a
possibilité pour un détenteur individuel de dépasser le
montant de $10,000 qu'on avait, au début, prévu comme limite.
M. BOURASSA: Je veux signaler ce dernier point, je pense bien, c'est que
tantôt le premier ministre a parlé des droits de succession et a
exclu Marine Industries, forcément parce que...
M. JOHNSON: Non!
M. BOURASSA: Pardon?
M. JOHNSON: Je ne parlais pas de Marine Industries.
M. LESAGE: C'est ça. Vous l'avez exclu.
M. BOURASSA: Forcément, parce que les actions appartenaient aux
enfants déjà avant la vente.
M. JOHNSON: Je regrette, mais je connais le problème de Marine
Industries. Je sais que cela n'a pas été fait pour régler
une succession. Au contraire...
M. BOURASSA: Même les autres...
M. JOHNSON: ... c'était réglé depuis 1925.
M. BOURASSA: Même les autres, le montant en question ne pouvait
pas influer sur les droits de succession. C'est un argument que beaucoup
d'industriels apportent pour faire réduire les droits de succession,
mais c'est très rare, surtout lorsque l'entreprise est minime, qu'on
puisse dire que les droits de succession sont suffisamment importants, parce
que le capital...
M. JOHNSON: Je regrette, mais je n'ai pas parlé des droits de
succession. J'ai dit: Régler la succession. Cela ne veut pas dire les
droits. La transmission, en somme...
M. BELLEMARE: Ce sont les députés qui veulent
ça.
M. JOHNSON: ... des biens, la pérennité d'une institution.
C'est excellent, d'ailleurs, cela remue.
M. BOURASSA: Cela revient au même. Parce que la SGF n'était
pas le seul acheteur sur le marché.
M. LE PRESIDENT: Article 6, devenu 5, adopté? Adopté.
Article 7 adopté? Adopté. Article 8, adopté? Adopte.
M. LESAGE: Restez là, M. Parizeau: on ne vous retardera pas pour
vos vacances. Laissez vos dossiers là: vous allez revenir.
M. JOHNSON: C'est une autre série de papiers qu'il va
apporter.
M. LAPORTE: Dans sa boite de...
M. LEBEL (Président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité a
adopté le bill 82 avec un amendement qu'il vous prie
d'agréer.
M. PAUL (président): L'honorable premier ministre propose que
l'amendement adopté par le comité soit maintenant lu, reçu
et agréé. Cette motion est-elle adoptée?
UNE VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT: De consentement unanime, l'honorable premier ministre
propose la deuxième lecture du...
M. BELLEMARE: Troisième.
M. LE PRESIDENT: ... la troisième lecture du bill 82, Loi
modifiant la charte de la Société générale de
financement du Québec. Cette motion est-elle adoptée?
M. JOHNSON: Adopté. Bill 80, M. le Président.
Bill no 80
M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre propose la deuxième
lecture du bill 80, Loi du ministère des Institutions
financières, compagnies et coopératives.
L'honorable premier ministre.
M. Daniel Johnson
M. JOHNSON: Le lieutenant-gouverneur, informé de la teneur de ce
projet de loi, en a autorisé l'étude par cette Chambre, Le
lieutenant-gouverneur aura l'occasion, avant le 1er novem-
bre ou au plus tard le 1er novembre 1967, d'as-sermenter un nouveau
ministre qui portera le titre de ministre des Institutions financières,
compagnies et coopératives.
M. LESAGE: Est-ce que le premier ministre me permet une question
indiscrète?
M. JOHNSON: Oui, monsieur.
M. LESAGE: Est-ce qu'il s'agira d'un nouveau ministre, d'un nouvel
homme?
M. JOHNSON: Il n'y a jamais de questions indiscrètes: Il n'y a
que des réponses indiscrètes. En temps et lieu...
M. LESAGE: Très bien.
M. JOHNSON: ... tenant compte des intérêts de la
province...
M. LESAGE: Je voulais que l'affirmation du premier ministre soit aussi
claire...
M. JOHNSON: ... et ayant délibéré sagement pour en
arriver à une décision, nous espérons pouvoir nommer
à ce poste un ministre qui aura toutes les qualités requises pour
bien administrer un service aussi important.
M. LESAGE: Bien répondu, élève Johnson!
M. JOHNSON: D'ailleurs, on comprendra les difficultés dans
lesquelles je me trouve actuellement d'avoir à choisir...
M. LESAGE: Oui, nous comprenons!
M. JOHNSON: ... entre un aussi grand nombre de gens de talent.
M. LESAGE: Oui?
M. JOHNSON: Donc, il s'agit d'un nouveau ministère. Il y a une
vieille loi de la nature qui est ainsi formulée: le besoin crée
l'organe. M. le Président, il y a longtemps que nous aurions eu besoin
d'une plus grande surveillance des institutions financières et des
compagnies en général. Quant aux coopératives, nous
n'avons pas eu de plaintes, sauf que récemment les journaux ont fait
grand état d'une fraude de près de $1 million dans une
coopérative de crédit. Le cas est tellement connu.
Je voudrais ici tout de suite annoncer qu'en comité
plénier j'apporterai un amendement pour prévoir la nomination
d'un sous-ministre asso- cié qui aura la responsabilité de
l'application des lois concernant la constitution, le fonctionnement,
l'inspection et la liquidation des coopératives faisant affaires dans la
province.
M. le Président, voici un domaine, les coopératives,
extrêmement important. Voici un domaine qui est différent de
l'entreprise privée ordinaire. On connaît, évidemment, le
slogan, on connaît le principe de base: tous pour un, un pour tous, qui
anime tout ce secteur de la coopération. On sait aussi que c'est
grâce à la coopération que divers secteurs de
l'activité industrielle ont connu, surtout depuis une dizaine
d'années, une activité extraordinaire. On sait que c'est
grâce aux coopératives, au système coopératif, si
les petits épargnants ont pu monter une institution aussi respectable
par son importance et par sa gérance que les caisses populaires. On sait
que c'est par le moyen de la coopération que certaines initiatives dans
cette province sont nées et ont inspiré des législations.
Je songe entre autres à la coopérative d'habitation de
Trois-Rivières, la coopérative de la paroisse Sainte-Marguerite
qui a inspiré cette loi d'aide à l'habitation familiale.
Il n'a jamais été reconnu dans aucune législation
que ce secteur était en soi un secteur qualifié qui devait
être organisé avec des services appropriés auprès du
gouvernement. Je ne fais pas de reproches au Secrétaire provincial ni
à ceux qui l'ont précédé, ni au ministre de
l'Agriculture, ni à aucun des ministres présents ou
passés. La responsabilité du domaine de la coopération, la
responsabilité des institutions coopératives était
éparpillée à travers tout le gouvernement, mais il n'y
avait personne qui en faisait sa chose, son bébé comme on dit en
langage populaire. Personne ne s'attelait à la tâche, d'abord de
devenir l'interlocuteur du mouvement coopératif et, deuxièmement,
le protecteur ou le promoteur de ce genre d'activité économique
par des amendements constants aux législations et par,
évidemment, une coordination avec les autres services gouvernementaux et
les autres activités économiques et financières de la
province. Donc, le domaine des coopératives, pour la première
fois, est reconnu comme tel et je crois que cette reconnaissance arrive
à temps et à point.
Je disais donc que le besoin crée l'organe. On n'a pas à
insister, il y a eu à travers le Canada depuis quelques années
des scandales; évidemment, si j'étais libéral j'appelerais
ça un scandale, mais je dirai des situations déplorables, des
situations qui ont fait perdre beaucoup d'argent aux épargnants. Les
gouvernements, tant le gouvernement fédéral que les gouvernements
provinciaux, se sont rendu compte qu'ils
n'avaient pas tous les instruments ni tous les pouvoirs
nécessaires à la surveillance de certaines institutions. L'on a
découvert, à la grande surprise du public et même des
initiés, que ni le gouvernement fédéral ni le gouvernement
provincial n'avaient de juridiction sur certaines institutions. Il y a une zone
grise.
Nous avons, pour remédier à cette situation, pris
l'initiative de demander à Ottawa une conférence
fédérale-provinciale qui nous a été accordée
sans délai, qui a été tenue et qui a mis en branle des
mécanismes qui feront en sorte qu'à travers tout le Canada, dans
une coopération où on respecte, évidemment, les
juridictions des provinces et du fédéral, nous aurons à
l'un ou l'autre palier de gouvernement la juridiction et les instruments
nécessaires pour que tout le secteur privé, par opposition,
évidemment, au secteur gouvernemental, soit policé,
surveillé et nettoyé au besoin.
Ce ministère des Institutions financières, des compagnies
et des coopératives est destiné, comme on le voit à la
lecture de la loi, à appliquer les lois qui concernent la constitution,
le fonctionnement, l'inspection et la liquidation des compagnies et des
coopératives. Certains services de surveillance existent
déjà au gouvernement, mais ils sont éparpillés et
il arrive que, dans certains secteurs, il n'y a aucune surveillance; par
exemple, les compagnies de finance, les billets à 364 jours, pas de
juridiction pour la commission des valeurs mobilières, pas de
juridiction d'Ottawa et le champ libre aux escrocs, le champ libre aux
imprudents, le champ libre à des gens qui seraient même de bonne
foi, mais qui n'ont pas la compétence nécessaire pour administrer
les fonds des épargnants.
Il s'agit donc d'abord de faire en sorte qu'un seul organisme soit
chargé de suivre les compagnies, de leur création jusqu'à
leur disparition éventuelle. Comme aurait dit le premier ministre
d'Angleterre, M. Churchill: From cradle to grave ou from moon to tune. Que les
compagnies soient surveillées par un même organisme dès
leur naissance et jusqu'à leur liquidation ou disparition
éventuelle. En pratique, cela veut dire que le nouveau ministère
surveillera l'incorporation des sociétés, les opérations
de celles-ci, de façon à s'assurer qu'elles sont conformes aux
lois qui régissent chaque catégorie d'institutions. Le nouveau
ministère verra à faire corriger les situations
irréguliêres lorsqu'elles se présenteront, accordera ou
retirera les permis le cas échéant et, finalement, surveillera
les liquidations si cela est nécessaire.
Chaque société ou coopérative n'aura plus à
relever de plusieurs ministères et à présenter ou
préparer autant de rapports qu'il y a d'agen- ces. A l'exception des
déclarations d'impôts, les sociétés devraient
pouvoir, d'ici quelque temps, ne traiter qu'avec un seul organisme, le nouveau
ministère et à fournir à lui seul les renseignements
utiles, quitte à ce que celui-ci transmette aux autres ministères
ou autres agences gouvernementales les renseignements qui intéressent
les autres agences et ministères et qui puissent leur être
transmis.
Je l'ai déclaré dans cette Chambre, j'en ai fait l'objet
d'une causerie devant des hommes d'affaires, nos industriels,
particulièrement les petits industriels, les moyens et petits
commerçants en ont plein le dos de remplir des formules
gouvernementales. Cela ne finit plus. Il faut remplir une formule très
longue et très compliquée pour les statistiques, pour le
ministère de l'Industrie et du Commerce, fédérales et
provinciales. Ensuite, il faut remplir les formules prévues par la loi
des compagnies. Ensuite le Secrétariat provincial pour certaines
catégories de compagnies envoie une série de formules aussi. Nous
allons demander au nouveau ministre de bien vouloir en venir le plus rapidement
possible à une seule et unique formule qui, pour chaque personne morale
qui s'appelle une compagnie, une seule et unique formule qui contiendrait tous
les renseignements dont ont besoin toutes les agences gouvernementales et
tousles ministères, quitte, comme je l'ai dit, toujours au moyen de la
cybernétique de distribuer ces renseignements là où on en
a besoin.
M. le Président, il y a quatre, cinq, six ministères ou
agences qui demandent des rapports. Je ne suis pas du tout certain qu'ils sont
lus, ces rapports-là, dans bien des ministères. Mais là
où je suis bien certain, c'est qu'ils ne se rencontrent jamais nulle
part.
M. LESAGE: Cela est vrai.
M. JOHNSON: Qu'ils ne sont pas amenés dans un faisceau pour que
l'on puisse à la base des renseignements extrêmement utiles,
planifier un peu mieux notre politique, notre développement et prendre
les mesures nécessaires pour tenir les dates, les lois à
date.
M. le Président, les gouvernements, je l'ai dit, sont
appelés à grossir dans tous les pays du monde. Le gouvernement
est présent, omniprésent maintenant, et il ne sert à rien
de s'imaginer qu'on va retourner au bon vieux temps du libéralisme,
où les gouvernements avaient comme principe premier d'être le
moins présents possible, « the least conspicuous possible
».
M. LESAGE: Le mot « Libéralisme » va
paraître dans le journal des Débats. Je suis sûr que
le premier ministre voudra le qualifier de libéralisme
économique.
M. JOHNSON: M. le Président, c'était même la
théorie des libéraux non-économiques, des
libéraux.
M. LESAGE: Au 19ème siècle, c'était aussi celle des
conservateurs.
M. JOHNSON: A moins qu'on fasse comme...
M. LESAGE: C'était aussi celle des conservateurs.
M. JOHNSON: Je parlais évidemment du libéralisme
économique et je ne voudrais pas être accusé d'avoir
prêté aux libéraux l'intention d'avoir des principes, car
leur premier principe, c'est de n'en pas avoir.
Cela remonte à la Confédération. C'est une blague
d'Antoine-Aimé Dorion.
M. LESAGE: Le premier ministre se contente de l'ambivalence.
M. JOHNSON: L'enfant terrible. M. LESAGE: C'est de
l'ambiguïté.
M. JOHNSON: M. le Président, donc les gouvernements étant
présents, le gouvernement devant être présent pour le bien
public, doit nécessairement, cependant comme conséquence, voir
à ce qu'il soit présent mais avec efficacité, qu'il soit
présent non pas pour nuire, mais pour aider. Et on a l'impression que le
ou les gouvernements dans trop de pays, y inclus dans notre province, dans
certains secteurs, est là comme une nuisance au lieu d'être
là comme un soutien, comme un stimulant, comme surveillant dans certains
domaines. Donc c'est un devoir pour le gouvernement de devenir efficace et
c'est dans cet esprit que nous voulons, nous, imprimer à
l'administration provinciale, un peu plus de dynamisme, nettoyer ce qui
traîne dans les coins et faire du Québec l'Etat le plus moderne et
gouverné de la façon la plus moderne en respectant le plus
évidemment possible l'initiative privée et la liberté
personnelle.
La meilleure façon de respecter la liberté personnelle et
l'initiative privée c'est de ne pas embarrasser les gens ni les
compagnies avec de la paperasse, comme nous l'avons fait. Evidemment on aura
retenu qu'il ne s'agit pas de mêler l'impôt sur le revenu des
corporations à ce système d'inspection puisqu'il s'agit là
d'un domaine tout à fait spécial.
Plusieurs des lois qui régissent les sociétés se
sont révélées à l'usage tout à fait
insuffisantes. M. le Président, veut-on un exemple du modernisme de nos
lois, dans un domaine tout à fait autre que celui que je traite mais
tout simplement à titre d'exemple? Que l'on lise le chapitre 301 des
Statuts refondus 1964, et on verra que l'on peut s'exposer à une
pénalité qui ne doit pas excéder $2 si son cheval trotte
dans une distance de quelques arpents de l'église. On verra que les
marguilliers peuvent nous arrêter n'importe quand. Je n'ai jamais vu un
exemple de dispositions aussi drolatiques dans les Statuts refondus de
1964...
M. LESAGE: Il y en a encore des chevaux. M. JOHNSON: ... chapitre
301.
M. LESAGE: Il y en a encore des chevaux qui trottent.
M. JOHNSON: Oh qu'il y en a!
M. BELLE MAKE: A la porte des églises, il n'y en a pas
beaucoup...
M. JOHNSON: Il y a encore, M. le Président, surtout...
M. BELLEMARE: ... dans Champlain. M. LESAGE: Oui.
M. JOHNSON: Oui, il y a les chevaux de Drummondville qui
s'entraînent chez nous, à Saint-Hugues.
M. LESAGE : Il y a encore des chevaux à la porte des
églises le dimanche dans certains coins de la province.
M. BELLEMARE: Bien rare!
M. JOHNSON: M. le Président, qu'on lise le chapitre 301, on verra
qu'il y a, comme disaient nos mères, de l'époussettage a
faire...
M. LESAGE: C'est une des perles que l'on trouve.
UNE VOIX: Le bill, le bill.
M. JOHNSON: Plusieurs des lois donc qui régissent le domaine des
sociétés sont tout à fait insuffisantes. D'autre part,
plusieurs types de sociétés, d'institutions financières en
par-
ticulier, ne sont pas actuellement régis par des lois
spécifiques. Le nouveau ministère devra donc voir à
refondre les lois existantes et à préparer de nouvelles lois
permettant d'assurer un contrôle et une surveillance satisfaisante sur
chacun des types d'institutions.
Le nouveau ministère exercera les pouvoirs d'enquêtes et
d'inspections qui sont déjà prévus dans les lois dont il
aura la responsabilité. Le nouveau ministère sera cependant
doté de pouvoirs d'enquêtes et d'inspections plus étendus,
de façon non seulement à assurer une surveillance
régulière et efficace, mais de façon aussi à
pouvoir agir, dans des cas exceptionnels, avec toute la
célérité nécessaire à la protection des
déposants, des épargnants ou des actionnaires.
Cette loi cependant, M. le Président, n'est pas une
panacée. Il ne faudrait pas s'attendre à des miracles. Il ne
faudrait pas s'attendre que le gouvernement va se rendre responsable de toutes
les pertes d'argent qui surviennent par fraude ou par suite de mauvaise
gérance. Il y aura un appareil de surveillance très
adéquat que nous devrons monter pièce par pièce, et cela
prendra quelque temps; mais il y aura quand même des accidents sur les
marchés financiers. Il ne faudrait pas s'illusionner, nous n'apportons
pas une garantie contre toutes les pertes d'argent. On se rappellera que ce
parlement a voté une loi d'assurance-dépôts qui
protège le déposant pour un maximum de $20,000. Mais quant au
placement dans des actions ordinaires, privilégiées, à
dividendes différés, privilégiées B ou C, M. le
Président, obligations ou débentures qui ne sont pas des
dépôts, l'épargnant aura toujours la responsabilité
première de surveiller ses placements. Mais le gouvernement par ce
ministère verra à ce qu'il y ait plus de surveillance, plus de
célérité, entre autres dans le domaine des valeurs
mobilières et plus de sévérité aussi lorsqu'il
s'agira de barrer la route aux escrocs.
En somme, le gouvernement ne peut pas, comme on le sait bien,
protéger le public contre tous les risques d'une mauvaise
administration, mais il peut et doit établir un cadre de prudence, y
astreindre les entreprises, de même qu'il doit chercher à limiter
les possibilités de fraude ou de malversation.
Ce n'est pas le genre de ministère, lorsqu'on en présente
la création en cette Chambre, qui se prête à des
développements éloquents. Ce n'est pas un genre de
ministère comme les Affaires culturelles qui entraîne le proposeur
et ceux qui parlent sur le sujet à se lancer dans des
considérations poétiques qui vous transportent dans une autre
sphère. C'est une loi qui n'a pas en soi ce « glamour»,
comme dirait Bos-suet, ce « glamour » qui entourait certains autres
ministères quand ils ont été créés.
Je me souviens, lorsque les Affaires culturelles ont été
mises au monde comme ministère, de l'euphorie verbale dans laquelle nous
sommes tous tombés car nous étions d'accord en bonne partie, dans
l'Opposition, sur ce ministère. Non, je pense qu'il n'y a que le
député de Saint-Jacques et quelques spécialistes du genre
qui pourraient réellement jouir en faisant un discours, jouir de faire
un discours sur un sujet semblable. Il y a le député de Mercier,
peut-être, il y a le député...
M. LESAGE: Le député d'Outremont va jouir
tantôt.
M. JOHNSON: Oui? J'espère que... C'est peut-être l'une des
initiatives les plus fructueuses, les plus prometteuses, à tout
événement, qu'ait prises le gouvernement actuel. Il y a un
secteur public qui est constitué, évidemment, par les finances du
gouvernement, les finances de l'Hydro-Québec, les finances des autres
agences gouvernementales. Mais il y a un secteur privé: assurances,
compagnies ordinaires, compagnies de finance, coopératives, qui sont
nécessaires au progrès de notre société. Ce secteur
privé, pour ceux qui croient à l'initiative privée et nous
y croyons, nous, doit nettoyer ses écuries. Le secteur privé
doit, avec l'aide du gouvernement, se débarrasser de ceux qui lui
donnent mauvaise conscience et mauvaise réputation. Et nous avons
été très heureux d'entendre certains témoignages.
Des compagnies sérieuses sont heureuses de constater que le gouvernement
prend ses responsabilités. Les avocats qui s'occupent de compagnies, des
avocats sérieux, sont heureux, je n'en doute pas, et le
député d'Outremont en profitera pour le dire publiquement, de
voir qu'il y aura un service efficace d'inspection. Il y aura une distinction
dorénavant entre des commerçants de chartes, de lettres patentes
et des avocats sérieux, entre des avocats qui s'y connaissent et
s'occupent de leur affaire en ce domaine et des gens qui laissent traîner
pendant douze ans des livres de minutes sans jamais les mettre 3 jour et qui
ensuite courent après la secrétaire qui a signé le premier
procès-verbal, douze ans auparavant. Elle est peut-être
décédée, mariée, domiciliée dans un autre
pays.
M. LESAGE: Cela revient au même, mariée,
décédée?
M. JOHNSON: Cela devient compliqué car là
il y a le mari qui entre en scène et qui dit: Oui, mais tu avais
des actions dans cette compagnie-là.
M. BELLEMARE: Qui entre enceinte.
M. JOHNSON: C'est un domaine où nous avançons
évidemment avec, je ne dis pas appréhension, mais avec beaucoup
de prudence.
La province d'Ontario a créé un ministère, mais il
n'a pas toute cette juridiction. Je ne sache pas que, dans aucune autre
province, on ait fait un pareil effort de synthèse, un pareil effort de
regroupement quant aux responsabilités d'un ministre vis-à-vis
tout un secteur, le secteur des institutions financières, des compagnies
et des coopératives.
M. le Président, j'ai l'honneur de proposer la deuxième
lecture du bill 80 qui contribuera à assainir notre climat
économique et évidemment, de ce fait même, à
permettre un progrès plus rapide dans notre province.
M. LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition.
M. Jean Lesage
M. LESAGE: M. le Président, qu'une législation concernant
les institutions financières et les compagnies, de même que les
coopératives, soit devenue nécessaire, je n'en ai aucun doute. Le
premier ministre a dit que le besoin crée Porgane. Il est clair qu'en ce
qui concerne les institutions financières et mêmes les compagnies
privées en général, les exemples que nous avons eus depuis
quelque temps, surtout depuis quelques mois, les faillites qui sont survenues
dans le domaine financier de même que les accidents financiers, si on
veut les appeler ainsi, nous prouvent qu'une surveillance plus adéquate
du gouvernement est nécessaire. Cependant, je me demande
réellement si les coopératives vont se sentir bien à
l'aise, lorsqu'elles constateront qu'elles sont mises dans le même sac
que les institutions financières et les compagnies privées. On
sait que les coopératives, y compris les caisses populaires,
particulièrement la Fédération des caisses populaires,
sont très jalouses de leur statut particulier, c'est le cas de
l'invoquer, je crois, et ces institutions y tiennent absolument. Etre incluses
dans le même sac, dans le même moule que les institutions
financières en général et les compagnies privées
n'est certainement pas de nature à leur plaire. Le premier ministre a
bien senti l'objection qui pouvait venir de ce coté, puisqu'il s'est
empressé, dès le début de ses remarques, de nous assurer
qu'il y aurait un sous-ministre associé qui serait spécialement
chargé de s'occuper des institutions coopératives. Je ne sais pas
si une conversation privée que j'ai eue avec lui la semaine
dernière a pu avoir quelque effet, mais au moins, c'est de nature
à corriger quelque peu ce défaut du projet de loi.
M. JOHNSON: Si le chef de POpposition me le permet, je ne voudrais pas
du tout qu'il ait l'impression que ces conversations privées avec lui
aient pu nous décider de faire ça, quoique ce ne serait pas si
mauvais; mais il m'avait mentionné qu'il aurait des objections ou des
observations à faire quant à l'inspection, par exemple. C'est du
domaine des coopératives. Je dois dire en toute franchise que ce sont
des représentations du conseil de la coopérative.
M. LESAGE: Je constate cependant que le premier ministre a voulu, en
annonçant la nomination d'un sous-ministre associé
particulièrement chargé de s'occuper du domaine des
coopératives, y compris les caisses populaires, je constate, dis-je, que
le premier ministre veut faire un effort pour qu'on distingue bien entre les
deux catégories d'institutions. Il y a une différence
considérable entre l'entreprise privée et l'entreprise
coopérative. Le premier ministre a raison de dire que la juridiction
gouvernementale sur les coopératives était
éparpillée dans divers ministères. C'est une bonne chose
que toutes les activités des coopératives, y compris les
coopératives de crédit, se retrouvent sous la juridiction d'un
même ministère.
Mais il nous semble et là-dessus, le député
d'Outremont ira dans beaucoup plus de détails que le ministre des
Institutions financières, compagnies et coopératives aura, en
vertu de ce bill, des pouvoirs plus qu'extraordinaires. Des pouvoirs- massues.
Il aura, à toutes fins pratiques, les pouvoirs d'un dictateur pour
s'ingérer dans les affaires des particuliers et dans les affaires
privées des compagnies.
Est-il bien nécessaire que le ministre ait tous les pouvoirs
prévus par un ou deux articles du bill? Je crois sincèrement que
ces pouvoirs sont trop étendus. Tellement étendus en fait que, si
ce n'était de l'importance de la création du ministère, eh
bien, cela pourrait affecter notre jugement au point de nous amener à
voter contre le principe du bill. Le gouvernement va tellement loin dans sa
demande de pouvoirs pour ce ministre, que nous nous demandons jusqu'à
quel point l'attribution de tels pouvoirs ne vicie pas le principe même
du bill
dont l'application est pourtant devenue nécessaire.
Lorsque l'on examine ces pouvoirs extraordinaires, ces pouvoirs
dictatoriaux, au regard par exemple de la Fédération des caisses
populaires, eh bien, on peut tout au moins se poser des questions
sérieuses. La Fédération des caisses populaires je
ne parle pas des caisses populaires indépendantes, mais je donne
l'exemple de la Fédération des caisses populaires cette
Fédération a et a toujours eu des services d'inspection
excellents. A venir jusqu'à cette année, le gouvernement, ou la
Législature, devrais-je dire, apportait par un poste budgétaire
une contribution de $90,000 par année aux services d'Inspection des
caisses populaires. Ces services d'inspection sont excellents et je ne vois pas
pourquoi le nouveau ministre deviendrait l'inspecteur des caisses populaires
faisant partie de la Fédération. Je vous avoue qu'à mon
sens ceci est un peu inconcevable.
Est-ce que le ministre pourrait déléguer ses pouvoirs
d'inspection à la Fédération des caisses? Eh bien, je
serais très heureux, en comité, que le premier ministre attire
mon attention sur le ou les articles qui permettraient au ministre de
déléguer ses pouvoirs d'inspection dans le cas des caisses
populaires membres de la Fédération des caisses.
J'avoue que plusieurs lectures du bill ne m'ont pas permis de
déceler de processus précis de délégation par le
ministre de sonpouvoir d'inspection sur les caisses populaires faisant partie
de la Fédération des caisses. Il me semble que l'autonomie des
caisses populaires membres de la Fédération est en jeu. Cette
Fédération a toujours très bien fait son travail. Ses
inspections ont toujours été de première classe et je ne
vois pas pourquoi le gouvernement se substituerait à la
Fédération des caisses populaires dans le cas des caisses membres
de cette Fédération.
M. le Président, comme je l'ai dit, les pouvoirs accordés
par certains articles débordent la mesure et j'ose espérer qu'en
comité, le gouvernement sera disposé à atténuer la
rigueur des pouvoirs qu'il nous demande d'accorder au nouveau ministre.
Un dernier mot, M. le Président, pour dire qu'il sera essentiel
que les fonctionnaires de ce nouveau ministère soient des hommes de
première valeur, des hommes ou des femmes, mais de première
valeur. Les experts dans la matière qui nous préoccupe
aujourd'hui ne sont pas foison mais le rôle qu'ils auront à
remplir sous l'égide du nouveau ministre sera un rôle
délicat, difficile et qui demande une connais- sance approfondie de tout
le domaine financier. J'espère donc que le ministre et ses
fonctionnaires pourront remplir le rôle de sauvegarde des biens, surtout
des petits épargnants et qu'ils pourront le faire sans avoir recours aux
pouvoirs absolument injustifiables que l'on demande d'accorder au ministre. Et
là-dessus je suis sûr que le député d'Outremont fera
une analyse détaillée de ces pouvoirs et qu'il demandera qu'ils
soient réduits. Vous avez remarqué que nous voulons autant que
possible procéder avec célérité à
l'étude des projets de loi et nous évitons la
répétition. Je sais que le député d'Outremont fera
très bien valoir notre point de vue sur ces pouvoirs abusifs que l'on
demande et, quant à moi, je lui cède la parole.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Outremont.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE! S'il ne s'agissait que d'un bill formant un nouveau
ministère et simplifiant la procédure pour les corporations quant
aux rapports qu'ils doivent donner au gouvernement, s'il ne s'agissait que
d'une loi centralisant d'une façon légitime l'administration des
affaires corporatives, les affaires de compagnies dans la province de
Québec et l'administration des caisses populaires, des
coopératives, il est évident que ce bill ne représenterait
aucune difficulté. Mais là où est la pierre d'achoppement
de la législation qui nous est présentée, c'est que sous
le prétexte de protéger l'intérêt public, sur quoi
nous sommes d'accord sous ce prétexte on nous présente une loi
où le futur ministre et ses fonctionnaires sont dotés de pouvoirs
extraordinaires d'enquête auprès de tous les organismes qui sont
régis par la série des lois énumérées
à l'article 23 du bill et cette série de lois-là, M. le
Président, si vous l'examinez vous constaterez que ce sont tous les
organismes corporatifs, que ce soient des compagnies purement privées
appartenant à des individus qui détiennent un garage, un
restaurant, enfin de ces entreprises purement civiles ordinaires jusqu'aux plus
grandes corporations en passant par les coopératives et par les caisses
populaires, les compagnies d'assurance et enfin tous ces organismes
corporatifs.
Maintenant, quand nous examinons l'ensemble des pouvoirs qui sont
donnés au ministre en vertu des articles 3, 4 et 5 nous nous
aperçevons que le ministre, en vertu des pouvoirs qui lui sont
accordés, a le droit de demander à n'importe qui dans n'importe
lequel de ces orga-
nismes régis par la loi, n'importe quelle question sur n'importe
quel sujet et que l'individu est obligé de donner une réponse au
ministre, sans qu'il y ait aucun moyen de contrôle de prévu sur la
personne du ministre.
Je m'explique. Le ministre peut, en vertu des articles tels qu'ils nous
sont proposés, poser des questions sur n'importe quel sujet, puisque
l'article 3 nous dit que les pouvoirs de questionner, tant verbalement que par
écrit, sont en outre des pouvoirs qui lui sont conférés en
vertu de chaque loi qu'il est chargé d'appliquer, c'est-à-dire de
chaque loi énumérée à l'article 23.
On comprendra que conférer à un individu quel qu'il soit
le droit de questionner pratiquement n'importe qui dans la province de
Québec sur n'importe quel sujet, sans aucun contrôle judiciaire ou
administratif eh bien, M. le Président, je ne m'exprimerai pas
pour vous mais disons que pour moi qui ai entraîné dans la
discipline du droit, ceci paraît au premier abord assez extraordinaire,
au point de nous demander si les auteurs de ces bills-là comprenaient
réellement les pouvoirs formidables qu'ils étaient en train de
confier au futur ministre et au futur ministère et jusqu'à quel
point on pouvait abuser, sans contrôle d'aucune nature, puisque, comme
vous le savez, M. le Président, les actes d'un ministre ne peuvent pas
être attaqués devant les tribunaux et ceci en vertu de notre code
de procédure civile.
Ceci n'est que le premier pouvoir qu'on accorde au ministre, le pouvoir
de l'inquisition, le pouvoir de questionner, mais si nous allons plus loin,
nous nous apercevons qu'il a le droit de perquisitionner. Il peut aller dans
n'importe quelle corporation, dans n'importe quel de ces organismes
prévus à l'article 23 et, là, sans mandat de la cour, sans
aucune autre forme d'autorisation judiciaire, il peut perquisitionner, examiner
tous les livres, tous les documents, sans aucune limite quant à la
nature des documents, livres ou choses qui seront soumis à son
examen.
Alors que, dans notre tradition, dans notre droit, il est reconnu comme
un principe fondamental qu'on ne permet pas à un organisme administratif
ou à un fonctionnaire d'exercer une perquisition sans une autorisation
de la cour je veux bien croire que les conditions économiques ont
changé, qu'aujourd'hui il est peut-être devenu nécessaire
de confier des pouvoirs administratifs beaucoup plus considérables,
étant donné qu'il faut protéger l'intérêt
public mais je le souligne, il ne faudrait pas qu'en voulant
protéger l'intérêt public dans son ensemble, on sacrifie
les droits de l'individu. Or, c'est ce que le projet de loi fait par les
pouvoirs abusifs et discrétionnaires qu'il confère au
ministre.
Maintenant, autre pouvoir formidable que je n'ai jamais vu dans aucune
loi: quand le ministre fait faire une perquisition, il a le droit de
contraindre toute personne qui est sur les lieux à lui prêter
l'assistance nécessaire, c'est-à-dire qu'il peut se rendre chez
n'importe qui et, là non seulement il peut perquisitionner mais il peut
obliger toute personne sur les lieux, quelle qu'elle soit, à se
conformer aux ordres soit du ministre, soit de son fonctionnaire
délégué. Eh bien, est-ce que l'Etat policier, c'est autre
chose que les pouvoirs qui sont donnés au futur ministre par cette
loi-là? Je dis que c'est ça, M. le Président, l'Etat
policier. L'Etat policier, ce n'est pas seulement dans les cas où on bat
des accusés, dans les cas où on leur extorque des aveux; c'est
dans le cas où l'individu est à la merci du pouvoir administratif
et où il n'a aucun recours judiciaire pour combattre les exigences d'une
administration qui peut abuser de ses pouvoirs.
M. le Président, je n'énumérerai pas tout ce qu'il
y a de fantastique dans cette loi-là, parce que ça dépasse
réellement Pentendement,mais, à un moment donné, on fait
une offense de contrevenir à la loi en ne conservant pas les registres
qui peuvent être nécessaires, et dans la loi on ne mentionne
même pas quels peuvent être les registres qui peuvent être
jugés nécessaires.
C'est-à-dire qu'on oblige quelqu'un à se conformer
à une obligation qui n'est même pas déterminée dans
la loi ni par le ministre, qui devient une question purement
discrétionnaire. Eh bien, je ne suis pas de l'école
libérale dont parlait tout à l'heure le premier ministre qui
croit que nécessairement, dans les conditions modernes, l'entreprise
privée peut continuer à fonctionner sans entrave aucune, sans
aucune réglementation.
Aujourd'hui l'intérêt public, la protection du public, que
ce soit des créanciers, que ce soit des actionnaires, commande qu'il y
ait un certain contrôle, commande cela, et il faut l'admettre. Mais en ce
faisant, il faut faire attention de créer les mécanismes qui
empêchent les fonctionnaires et les hommes politiques à qui l'on
confère tant de pouvoirs, créer, dis-je, les mécanismes de
contrôle pour empêcher qu'il y ait des abus de pouvoir.
C'est justement le défaut de la législation qui nous est
présentée. C'est qu'après avoir donné tous ces
pouvoirs que j'ai énumérés tout à l'heure, que j'ai
résumé assez largement, on n'a créé aucun
mécanisme de contrôle.
Mais voici l'autre défaut de cette législa-
tion. Je reviens ici à ce que disait le premier ministre en
présentant le projet de loi. Le premier ministre nous disait: Il faut
qu'il y ait un organisme de surveillance des corporations, de ces
établissements visés à l'article 23. Or, il nous laissait
entendre que, par ce mécanisme de surveillance, le futur
ministère pourrait prévenir des fraudes, pourrait en quelque
sorte protéger l'intérêt public. Or, le fond du
problème, c'est que le futur ministère n'a aucun pouvoir,
excepté celui d'inquisiteur. Il n'a pas d'autres pouvoirs que celui de
faire de l'inquisition. Il peut obliger les gens à répondre, il
peut perquisitionner sans mandat. Il peut forcer des gens à donner leur
assistance contre leur gré. Il peut faire toutes ces choses-là,
mais une fois qu'il a les renseignements, il n'y a rien dans la loi qui nous
dit ce qu'il peut faire.
Je dis donc, M. le Président, qu'il y a un élément
trompe-l'oeil dans cette législation qui nous est
présentée. Elle est beaucoup trop étendue sous le rapport
de l'inquisition, sous le rapport des pouvoirs excessifs qui sont
confiés au futur ministre. Elle est beaucoup trop étendue sous ce
rapport-là alors qu'en réalité le futur ministre, une fois
qu'il a les renseignements évidemment, il y a les tribunaux
ordinaires mais d'un autre côté,iln'ya pas d'autre chose
que cette inquisition.
M. le Président, nous vivons, et je pense que tout le monde dans
cette Chambre en est heureux, nous vivons dans une société
démocratique. Nous vivons dans une société où on
admet par exemple le droit pour une personne de ne pas s'incriminer
elle-même. C'est un droit qui est reconnu fondamentalement. J'admets que
ce droit est battu en brèche, parce qu'aujourd'hui, les individus sont
obligés de répondre à des questionnaires du gouvernement.
S'ils jouissent de privilèges corporatifs, il faut qu'ils rencontrent
des exigences imposées à ceux qui ont ces privilèges
corporatifs et, par conséquent, répondent à certains
questionnaires.
Mais, d'un autre côté, cette obligation de répondre,
cette obligation de donner des renseignements, elle doit être
contrôlée légalement, juridiquement. Elle doit être
fixée dans la loi. Elle ne doit pas être laissée à
l'arbitraire d'un seul homme qui peut déterminer quelles sont les
obligations d'un individu, quant à répondre à des
questions précises.
M. le Président, comme je le disais tout à l'heure, il est
exact que l'intérêt public commande des contrôles plus
considérables, mais ces contrôles doivent être fixés
dans la loi et non pas laissés à l'arbitraire d'un individu,
comme le futur ministre des Institutions financières.
Si je m'écoutais, M. le Président, je voterais contre le
principe de cette loi, mais j'ai confiance qu'en deuxième lecture le
gouvernement jugera sage de restreindre les pouvoirs qui sont accordés
au futur ministère et que, comme le disait le premier ministre tout
à l'heure, il se ravisera devant le fait que la province d'Ontario a
voté une loi semblable et qu'on n'a jamais confié aux futurs
ministres des pouvoirs aussi étendus que ceux-là.
M. JOHNSON: Ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. CHOQUETTE: C'est ce que j'ai compris.
M. JOHNSON: On a mal compris. Non, qu'on n'avait pas fait le même
effort de coordination quant à la surveillance des compagnies. Est-ce
qu'on a laissé...
M. CHOQUETTE: Est-ce que le premier ministre peut nous dire si les
mêmes pouvoirs sont accordés au ministre en Ontario?
M. JOHNSON: Ah! je vais lui donner une foule d'exemples. L'Ontario, le
fédéral et le provincial, en 1965.
M. CHOQUETTE: Le provincial... M. JOHNSON: Oui.
M. CHOQUETTE: Dans certaines corporations. C'est évident que
lorsque nous parlons par exemple de corporations qui sont soumises à la
Loi des valeurs mobilières, de corporations par exemple qui sont sur le
marché public, les critères de contrôle sont
complètement différents des critères qui s'appliquent
à une compagnie purement privée. Or, cette loi, la loi qui nous
est présentée actuellement ne fait aucune distinction entre ces
deux formes de corporation. Tout le monde est traité sur un pied
d'égalité, tout le monde peut se faire enquêter, tout le
monde peut se faire questionner, tout le monde peut se faire perquisitionner
sans aucun contrôle. Si je m'écoutais je voterais contre le
principe de cette loi-là, mais j'ai confiance qu'en deuxième
lecture le gouvernement jugera sage de faire machine arrière sur l'abus
de pouvoir qu'il est en train de commettre par les articles, 3, 4 et 5 de cette
loi-là.
Et, M. le Président, je termine en disant ceci, c'est que si les
correctifs ne sont pas apportés, je voterai contre le projet en
troisième lecture.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Finances.
M. Paul Dozols
M. DOZOIS: M. le Président, le premier ministre en
présentant cette loi avait raison de dire que c'est une des
pièces de législation des plus importantes à être
présentées non seulement au cours de cette session, mais depuis
longtemps en cette Chambre. Je ne reviendrai pas sur les raisons qui motivent
la présentation de cette loi créant un nouveau ministère.
Je pense que sur le principe tout le monde s'entend, mais je veux tout
simplement dire que cette loi est absolument essentielle et permettra de
concentrer dans le même ministère les contrôles
nécessaires de façon à protéger le public et, en
particulier les épargnants qui, à l'occasion, vont investir leurs
économies dans toutes sortes d'entreprises publiques qui sont
régies par les différentes lois que l'on retrouve à la fin
du bill et qui relèveront à l'avenir de ce nouveau
ministère.
Je ne retiendrai pas cette Chambre trop longtemps, je veux tout
simplement dire que les caisses populaires de même que les
coopératives pourront être, du moins les caisses populaires quant
à l'inspection,le ministère pourra accepter le service
d'inspection qui existe dans les caisses populaires, parce qu'en vertu de ce
bill, puisque la Loi d'assurance-dépôts relève de ce
ministère, l'on constate que dans le bill 51 qui a été
adopté, à l'article 40, il est dit que la Régie «
doit au moins une fois l'an procéder ou faire procéder... »
Cela a été mis dans cette loi précisément pour que
la Régie de l'assurance-dépots puisse accepter le service
d'inspection des caisses populaires. Au lieu que ce soit les officiers de la
Régie de l'assurance-dépôts qui procèdent à
l'inspection, la Régie pourra faire procéder et mandater le
service d'inspection des caisses populaires et accepter leur rapport.
M. LESAGE: Oui, mais les pouvoirs.
M. DOZOIS: Je le répète, cette loi
d'assurance-dépôts va relever du ministère et les
méthodes d'inspection sont déjà contenues dans le bill 51
qui a été voté il y a quelques semaines par cette
Chambre.
M. LESAGE: Est-ce que le ministre me permet une question? Il n'y a
absolument rien dans le bill je m'excuse, mais étant donné
que le ministre des Finances a choisi d'en parler qui permette au
ministre de déléguer les pouvoirs d'inspection qui lui sont
accordés par le bill même à la Fédération des
caisses.
M. DOZOIS: Le ministère étant chargé de
l'application de la Loi de l'assurance-dépôts doit se conformer
à cette loi et la loi d'assurance-dépôts, à
l'article 40, précise que la régie pourra procéder .ou
faire procéder à des inspections. La rédaction de cet
article visait précisément le cas des caisses populaires; nous
sommes assurés qu'il existe dans cet organisme un excellent
système d'inspection. Il y en a peut-être dans d'autres
institutions, et c'est pourquoi l'article 40 de cette loi a été
rédigé de cette façon. Il y a un autre point
également que je voudrais soulever pour répondre au
député d'Outremont, qui se plaint des pouvoirs exorbitants
contenus aux articles 3, 4 et 5. J'ai remarqué qu'il a affirmé
que jamais il n'avait vu dans aucune loi des pouvoirs semblables, des pouvoirs
aussi exorbitants. Je dois lui rappeler que, tout simplement au cours de cette
session, nous avons voté des lois, entre autres pour la taxe de vente,
où nous avons mis exactement les pouvoirs qui sont inclus à
l'article 3, et ces pouvoirs étaient copiés sur des pouvoirs qui
existaient déjà dans la Loi de l'impôt sur le revenu.
M. LESAGE: Ce n'est pas la même chose.
M. DOZOIS: C'était de la taxation, mais il est évident que
le nouveau ministère, voulant protéger les citoyens de cette
province, va utiliser un tel pouvoir à bon escient. Aura-t-on l'occasion
de s'en servir une fois, deux fois ou dix fois par année? Je ne le sais
pas, mais je pense quand même, devant certains exemples que nous avons
eus, au cours des dernières années, de la façon de
procéder de certaines per-sommes qui ont affaire au public, qu'il est
préférable d'avoir de tels pouvoirs, car si on ne les avait pas,
on ne pourrait vraiment pas mettre à la raison ou corriger des
situations qui entraînent des pertes considérables pour nos
concitoyens.
Il est évident qu'en matière de taxation, d'impôt
sur le revenu ou de taxe de vente, ce sont également des pouvoirs
exorbitants, mais ils sont là. Le ministère du Revenu s'en sert
très rarement, mais il faut qu'ils soient là, parce que l'on sait
que, malheureusement, une infime minorité, peut-être, de nos
concitoyens, adopte souvent des ruses pour arriver à ses fins ou pour
bâtir certaines entreprises commerciales financières. Même
si ces pouvoirs n'existaient que pour mettre à la raison un seul de ces
citoyens, je pense que c'est nécessaire. Il vaut mieux les avoir. Il est
évident qu'un ministère n'abusera pas de tels pouvoirs, mais il
faut qu'un ministère possède de tels pouvoirs de façon que
si les es-
crocs et les gens malhonnêtes veulent profiter du manque de
pouvoir que pourrait avoir un tel ministère pour monter des choses
malhonnêtes, le ministère puisse vraiment intervenir. Je ne crois
pas que jusqu'à préseni, bien que de telles dispositions existent
dans la Loi de l'impôt sur le revenu depuis de nombreuses années,
l'on ait eu à se plaindre des agissements du ministère du
Revenu.
Nous avons d'excellents employés, qui, lorsqu'ils entrent en
fonction, s'engagent à faire leur devoir et le font. Cela ne serait pas
long, si des employés ou le sous-ministre qui sera nommé à
ce nouveau ministère ou même le ministre utilisaient les pouvoirs
qui sont contenus dans ce bill à mauvais escient, que l'on ne pourrait
résister et qu'avec raison, les gens, les journaux, l'opinion publique
se plaindraient d'un pouvoir qui serait exercé d'une façon
abusive.
Mais, je le répète, même si ce sont des pouvoirs
exorbitants, ils existent dans d'autres lois et ce serait rendre la loi
absolument inopérante que de ne pas lui donner des dents. Il faut que
ceux qui seront chargés de faire respecter les différentes lois
qui seront administrées par ce nouveau ministère puissent, quand
même ce ne serait qu'une fois en dix ans, avoir les moyens de
sévir contre ceux qui voudraient mettre sur pied des organisations dans
le but de frauder la population.
M. le Président, j'estime qu'il serait malsain d'amender ces
dispositions. Ce serait enlever de l'efficacité au nouveau
ministère et permettre peut-être que des entreprises qui ne
doivent pas exister prolifèrent dans la province de Québec et
j'estime que nous devons donner ces pouvoirs, même s'ils sont
exorbitants, à ce nouvel organisme du gouvernement.
M. HYDE: M. le Président, seulement quelques mots.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Westmount.
M. J. Richard Hyde
M. HYDE: Je n'ai certainement pas l'intention de répéter
tous les arguments qui ont déjà été avancés
par le chef de l'Opposition, surtout sur la question qu'a traitée le
député d'Outremont. Mais le député d'Outremont a
terminé en espérant qu'avec le magnifique plaidoyer qu'il avait
fait concernant certains pouvoirs qu'on demande dans cette loi, le gouvernement
serait peut-être consentant à amender ou retirer certaines parties
du bill qui font obstacle au consentement unanime. Comme le disait le
député de Saint-Jacques, je ne crois pas qu'il y ait d'objection;
tout le monde est d'accord sur le principe fondamental du bill, la
création du ministère. C'est simplement sur cette partie
où on demande des pouvoirs extraordinaires que nous ne sommes pas
d'accord et là-dessus, la suggestion que je ferais au gouvernement
serait de commencer au commencement, de créer, par étapes, le
ministère avec tous les pouvoirs nécessaires mais en omettant
pour le moment les pouvoirs spéciaux pour le ministère
lui-même. Parce que le ministère va avoir charge de
différentes lois et dans toutes et chacune de ces lois, a dans la Loi
des compagnies, dans le Companies Information Act, dans la Loi des valeurs
mobilières, il existe déjà des sanctions, des pouvoirs
d'inspection, des pouvoirs pour faire à peu près tout ce qu'on
prévoit dans une partie des pouvoirs qu'on demande dans le texte de la
loi actuelle. Alors, je me demande si cela ne devrait pas être,
peut-être, l'un des premiers devoirs du nouveau ministère de
prendre toutes et chacune de ces lois qu'il va avoir à administrer pour
faire une étude dans chaque cas, à savoir s'il a besoin d'autres
pouvoirs, plus étendus dans certains cas peut-être. Mais je vois
mal l'idée de mettre dans la loi du ministère lui-même des
pouvoirs aussi stricts, aussi draconiens que ceux que l'on trouve dans le
projet qui est devant la Chambre actuellement. Le ministre des Finances a
donné l'exemple des lois de taxation. On retrouve certains pouvoirs dans
la Loi du ministère du Revenu, dans la Loi de l'impôt sur le
revenu. Je ne peux pas évidemment parler pour le ministre actuel du
Revenu, mais durant les quelques mois que j'ai été à ce
ministère, je dois admettre que j'avais toujours peur de ces pouvoirs
tellement étendus qu'on voit dans les lois de taxation.
Mais cela est entré dans nos moeurs, la nécessité,
surtout dans les lois de taxation, non pas seulement ici au Québec ou au
Canada, c'est accepté partout dans le monde, des pouvoirs
extraordinaires pour celui qui ira percevoir de l'argent, qui est obligé
d'avoir tous les pouvoirs nécessaires pour l'inspection.
Alors, la suggestion que je fais c'est qu'on commence par le
commencement, qu'on crée le ministère. La première chose
que le ministre avec les nouveaux officiers, avec l'équipe qu'il va
former, devra faire sera de prendre chacune des lois qu'il aura à
administrer il y a une liste assez longue et s'il trouve qu'il y
a besoin d'amendement dans quelques-unes de ces lois, qu'on les amende, mais
qu'on ne donne pas un chèque en blanc avec des pouvoirs tellement
étendus et avec les résultats dont le député
d'Outremont a donné l'explication à la Chambre.
M. LE PRESIDENT: La réplique de l'honorable premier ministre
devra nécessairement mettre fin au débat de deuxième
lecture tel que le prévoit l'article 269 de notre règlement.
L'honorable premier ministre.
M. Daniel Johnson
M. JOHNSON: M. le Président, le chef de l'Opposition a
soulevé un point, celui qui concerne la Fédération des
caisses populaires. Le député de Saint-Jacques, je crois bien,
lui a donné la réponse complète, sinon satisfaisante, et
je ne voudrais pas insister sauf pour rappeler à cette Chambre que si la
Fédération des caisses populaires a un excellent service
d'inspection, il y a d'autres groupes de caisses et en particulier un groupe
dont on a entendu parler, qui n'ont pas un service d'aussi bonne
qualité. Le pouvoir de déléguer est clair dans le bill 51,
article 40, et nous avons bien l'intention de nous en servir.
Mais là où le chef de l'Opposition et le
député d'Outremont dérivent un peu, c'est lorsqu'ils ne
lisent pas attentivement l'article 3, auquel on a
référé...
M. LESAGE: En comité, on s'est bien gardé de le...
M. JOHNSON: Je comprends. On a tiré un argument de l'article 3,
les pouvoirs d'inspection. Mais je crois qu'on n'aurait pas tiré le
même argument si on avait remarqué qu'il s'agit, chaque fois qu'on
parle des pouvoirs d'inspection, que ce sont des pouvoirs qui sont
donnés pour l'application de chacune des lois.
M. CHOQUETTE: Oui, mais c'est littéraire ça, cela ne veut
rien dire.
M. JOHNSON: Cela veut dire que le pouvoir d'inspection ne s'applique
qu'en fonction des objets de la loi.
M. LESÂGE: Pas toutes.
M. CHOQUETTE: Mais qui le détermine exclusive ment?
M. JOHNSON: C'est la loi.
M. CHOQUETTE: Non. C'est le ministre.
M. LESAGE: C'est le ministre.
M. JOHNSON: J'irai plus loin. Si un inspecteur mandaté par le
ministre outrepassait ses droits, il pourrait y avoir un recours aux
tribunaux.
M. CHOQUETTE: Qu'il juge utile.
M. LESAGE: Le ministre peut, en outre des pouvoirs qui lui seront
conférés...
M. CHOQUETTE: Qu'il juge utile.
M. JOHNSON: Qu'il juge utile ou opportun pour l'application de chacune
des lois.
M. CHOQUETTE: Bien oui, mais c'est une question d'opinion.
M. LESAGE: En comité, M. le Président, en comité
pour vrai là.
M. JOHNSON: Quand on écoutait tantôt, M. le
Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je suis sûr que l'honorable premier
ministre peut discuter du principe des articles 3, 4 et 5, comme d'ailleurs les
préopinants l'ont fait, mais je voudrais mettre en garde tous les
honorables députés de me faire goûter les avantages d'un
débat en comité.
M. JOHNSON: M. le Président, à écouter le
député d'Outremont, on venait subitement d'être
transporté dans un Etat policier.
M. CHOQUETTE: C'est vrai.
M. JOHNSON: Si je croyais qu'il y a l'ombre d'un soupçon d'un
doute que c'est possible en vertu de cette loi, je l'amenderais beaucoup plus
rapidement que ne le pourrait formuler en amendement le député
d'Outremont.
M. LESAGE: Il nommerait son ombudsman! M. JOHNSON: Oui, on m'y fait
songer. M. LESAGE: Bien oui.
M. JOHNSON: L'ombudsman sera là pour protéger le citoyen,
ça viendra ça. Il ne faut quand même pas dramatiser.
Partons d'un exemple concret très d'actualité. On m'informe que
le gouvernement des Etats-Unis, par son département des Postes, a
annoncé que tout courrier des Etats-Unis à destination de tel
motel, que je ne veux pas nommer, « will be stamped fraudulent and
returned to the sender on the grounds that the motel's advertising is
fraudulent and
misleading ». M. le Président, c'est le gouvernement
américain qui prend l'initiative d'arrêter, de mettre fin à
une situation que nous soupçonnons être pourrie, mais au sujet de
laquelle nous ne pouvons rien faire. Mais avec cette loi, si elle était
votée, il y aurait, depuis au-delà d'un mois, un inspecteur qui
serait allé voir ce qui se passe là, mais nous n'avons pas le
droit de le faire en vertu d'aucune loi. Il faut attendre d'avoir les preuves,
il faut attendre qu'il y ait des victimes, il faut attendre que les victimes se
plaignent, il faut faire enquête, ensuite porter des plaintes. Et pendant
ce temps-là, qu'est-ce qu'on fait aux Etats-Unis? « All mail from
the Il.S. to such motel will be stamped fraudulent and returned to the sender
». Cela c'est une façon efficace de protéger les citoyens
américains, une vraie.
M. le Président, juste un exemple pour vous montrer la situation
dans laquelle nous sommes placés actuellement. Nous savons depuis des
semaines et des mois à Québec qu'il y a une situation
extraordinaire ment explosive, dommageable, nuisible qui va faire perdre des
millions de dollars à des épargnants et nous n'avons aucun
pouvoir. Quand la faillite surviendra dans cette affaire, on dira: le
gouvernement aurait dû agir. Nous avons tenté de trouver des
pouvoirs, nous avons demandé des opinions; il n'y a pas moyen de bouger.
Nous n'avons pas juridiction, nous ne pouvons pas entrer là. Nous
pourrions le faire par des moyens détournés, nous pourrions
utiliser des trucs peut-être, mais nous n'aimons pas ce genre de
législation ou de manière de gouverner qui consiste à
utiliser des trucs. Nous apportons un texte de loi qui nous donne des
pouvoirs.
Je ne vous cacherai pas que j'y al songé très
sérieusement avant d'initialer ce texte, mais nous recherchons
l'efficacité. Or, qu'ont fait les gouvernements ailleurs ou même
dans la province de Québec avant nous, lorsqu'on voulait avoir de
l'efficacité? On est allé plus loin, aussi loin ou plus loin
même quand, il s'agit, par exemple, de l'article 10 de la loi
fédérale sur les coalitions. Là il s'agit tout simplement
d'une affaire de commerce, de concurrence, des prix.
M. CHOQUETTE: C'est parce qu'il y a lieu, à ce moment-là,
de croire qu'il y a eu un complot pour restreindre le commerce...
M. JOHNSON: Oui, mais...
M. CHOQUETTE: ... s'il y a une plainte.
M. JOHNSON: ... baisser les prix pour faire disparaiîre un
concurrent...
M. CHOQUETTE: C'est un crime!
M. JOHNSON: C'est un crime prévu par la loll
M. CHOQUETTE: Bien oui.
M. JOHNSON: Imaginez le grand crime: Mais faire perdre des millions de
dollars à des gens, exploiter des touristes tous les soirs, avec la
connivence de qui? Je ne le sais pas.
M. CHOQUETTE: Oui, mais ici...
M. JOHNSON: Cela, c'est un crime aussi; on n'a pas les moyens de
sévir contre ça, d'empêcher que ça se continue.
M. CHOQUETTE: Mais on le voit très bien; ici, tous les pouvoirs
sont donnés à un seul homme, c'est différent d'une
commission.
M. JOHNSON: Est-ce que ce n'est pas en comité qu'on pourrait
discuter? On le fera debout, cependant. M. le Président, la Loi des
assurances fédérale accorde des pouvoirs beaucoup plus radicaux
nous en discuterons tantôt, si on veut que ceux que nous
demandons dans la présente loi. Quand il s'est agi, comme l'a dit le
député de Saint-Jacques, de l'impôt sur le revenu, de
l'Impôt sur les corporations, de l'impôt sur les droits miniers, on
a utilisé cette formulation et même on est allé plus loin
dans certains cas. Les articles 72, 73 du chapitre 24, statuts 1965, concernant
le régime de retraite... C'est grave ça, le régime de
retraite, M. le Président, des pouvoirs très graves, très
stricts, très durs. '
Régime de rentes, M. le Président, loi passée en
1965: « Le ministre peut, par un ordre transmis par poste
recommandée ou signifié personnellement, exiger d'une personne,
dans le délai raisonnable qu'il fixe, tout renseignement
supplémentaire, y compris une déclaration supplémentaire
ou la production de livres, lettres, comptes, factures, états financiers
ou autres documents qu'il juge utiles à l'application de la
présente loi. » Article 73: « Toute personne qui est
autorisée par le ministre peut, pendant les heures ordinaires de
travail, pénétrer dans un établissement, y faire des
recherches, exiger la production des livres, registres et documents relatifs
à l'application du présent titre et requérir tout autre
renseignement jugé utile ou nécessaire. Si, au cours d'une
enquête, il apparaît à cette personne qu'une infraction
à la présente loi a été commise, elle peut saisir
et emporter tout livre, registre, écrit ou autre document et
les garder jusqu'à leur production dans les procédures
judiciaires. Le ministre peut autoriser une personne qu'il désigne,
qu'elle soit ou non un fonctionnaire ou un employé du ministère
du Revenu de la province, à faire toute enquête qu'il juge
nécessaire sur une question relevant de l'application et de
l'exécution du présent titre, lequel est censé être
une loi de revenu, au sens de la loi du ministère du Revenu. » Et
article 74: « Copie des documents lorsqu'ils sont saisis, etc. etc.
».
M. le Président, ce sont des pouvoirs qu'on a souvent
accordés. On les a aussi accordés contre notre gré au
ministre de l'Agriculture et de la Colonisation lorsqu'on a créé
son ministère groupant les deux anciens ministères, soit celui de
l'Agriculture et de la Colonisation. On lui a accordé les mêmes
pouvoirs que ceux conférés à un commissaire ou à
une commission en vertu du chapitre 11.
Et, plus que ça, on a donné le pouvoir au ministre de
l'Agriculture et de la Colonisation de déléguer toute personne
qui aurait tous ces pouvoirs du chapitre 11, y inclus le pouvoir d'interroger
toute et chacune des personnes, sans aucune limitation quant à la
catégorie de questions, quant à la couverture, quant à
tout le terrain qui pourrait être couvert ou découvert par
l'enquêteur délégué par le ministre de l'Agriculture
et de la Colonisation.
Je suis d'accord avec le député d'Outremont. Je n'en veux
pas d'Etat-police, et cela voisinait à mon sens l'Etat-police.
J'espère, M. le Président, que nous n'aurons pas à nous
servir de cette loi, et j'espère que s'il y a le moindre abus, on
attirera l'attention du gouvernement et lorsque l'ombudsman, le protecteur
public sera nommé, on le fera, M. le Président, entrer en
scène et régler le problème. Et nous amenderons la loi,
s'il le faut. Nous n'avons pas le goût ni l'intention de permettre que
l'on instaure dans cette province un système qui, M. le
Président, limiterait la liberté de commerce, la liberté
d'opérer sous le nom de compagnie. Mais le secteur d'entreprise
privée est entrain de prendre, d'obtenir une réputation de sans
conscience, de gens sans conscience, parce qu'il y a des tenants qui
échappent aux gouvernements, et je voudrais que ce soit bien
mentionné que c'est au pluriel, même si les gouvernements savent
qu'il y a tout un système, tout un réseau.
M. le Président, tout le monde sait dans la province qu'il y a un
réseau de faillites frauduleuses par exemple, on en a parlé. Les
gouvernements se sont accusés l'un l'autre de ne pas agir. Je ne veux
pas entrer là-dedans. Il y a toute une foule de complications, une foule
de raisons sur lesquelles je ne veux pas revenir.
M. CHOQUETTE: Constitutionnelles entre autres.
M. JOHNSON: Entre autres. Mais, pour l'avenir, nous voulons être
en position de ne pas permettre à des gens d'opérer sous le
couvert de compagnies. Il va falloir que, dans ce domaine en particulier, nous
soyons plus sévères. Il va falloir, pour la protection de tous
ceux qui opèrent honnêtement, nettoyer le secteur de l'entreprise
privée de certains entrepreneurs, au sens péjoratif du mot.
M. le Président, comment le faire? Par des poursuites judiciaires
après coup, quand on pourra les attraper ou en voyant à ce que la
loi soit suivie, la loi telle qu'elle est, la loi telle qu'elle sera
amendée graduellement? C'est là, comme l'a souligné le
député de Westmount, l'un des devoirs du ministre, mais nous
voulons prévenir. J'espère que nous n'aurons pas à
employer ces pouvoirs trop souvent, mais nous n'hésiterons pas à
les employer.
Le ministre aura à répondre en Chambre, devant tout le
monde, devant la presse et autres moyens de communications, il devra
répondre devant tout le monde de sa conduite dans tel ou tel cas.
M. le Président, c'est loin du libéralisme
économique, c'est un pas extrêmement important que nous
franchissons là, mais nous avons pris cette décision après
avoir mûrement réfléchi et parce que nous sommes
déterminés...
M. LESAGE: C'est loin du libéralisme économique, mais
c'est loin de la liberté des individus.
M. JOHNSON: Ce ne sont pas les individus qui sont en jeu.
M. LESAGE: Ah oui!
M. JOHNSON: Il s'agit des compagnies, M. le Président. Il ne
s'agit pas des allées et venues d'un individu en particulier...
M. LESAGE: De la liberté des personnes.
M. JOHNSON: Je voudrais bien voir l'inspecteur du ministre des
compagnies, des institutions financières et des coopératives qui
commencerait à me suivre, qui commencerait à se mettre le nez
dans mes affaires personnelles.
M. LESAGE : Non, pas vous, mais un autre peut opérer ses affaires
personnelles sous le nom d'une compagnie.
M. JOHNSON: Mais que je veuille sous le nom d'une compagnie faire
certaines opérations, c'est l'Etat qui m'a donné la personne
morale par l'incorporation..
M. LESAGE: Oui, mais si c'est simplement... M. JOHNSON: La
responsabilité limitée...
M. LESAGE: Est-ce que le premier ministre me permet une question?
M. JOHNSON: Non, mais...
M. LESAGE: Est-ce qu'il me permet une question? Quel besoin le ministre
des Institutions financières aura-t-il de pouvoirs dictatoriaux sur la
compagnie propriété presque unique d'un homme qui opère un
commerce de meubles? Pourquoi demander la permission de mettre le nez dans ses
affaires avec les pouvoirs dictatoriaux qu'on demande? Je dis que ce n'est pas
nécessaire. Dans le cas des institutions financières, très
bien, mais des compagnies opérant des commerces ordinaires, je ne crois
pas.
M. JOHNSON: M. le Président, des pouvoirs dictatoriaux, d'abord
disons que ce sont des pouvoirs qui ressemblent énormément
à tous ceux que j'ai mentionnés tantôt. Alors ils sont
dictatoriaux ou non, mais ils sont exactement comme ceux que l'on a
accordés à la demande du gouvernement antérieur,
même au ministre de l'Agriculture et de la Colonisation, qui peut, lui,
aller demander: Qu'est-ce que vous avez fait, vous, mademoiselle, hier soir, de
telle heure à telle heure? On ne va pas si loin que ça
là-dedans. C'était la liberté...
M. CHOQUETTE: C'est le ministre du Travail qui pose ce genre de
question-là.
M. BELLEMARE: Parlez-vous de l'Aquarium?
M. JOHNSON: Non, mais j'espère qu'on ne viendra pas ici
diffamer...
M. LESAGE: C'est le ministre du Travail qui...
M. BELLEMARE: Parlez-vous de l'Aquarium?
M. JOHNSON: J'espère qu'on ne viendra pas, ici, diffamer l'ancien
député de Saint-Hyacinthe, ministre des Travaux publics, sous
l'administration libérale. M. le Président, qui donne la
personnalité morale d'une compagnie? C'est l'Etat.
M. LESAGE: Cela ne donne pas tous les droits.
M. JOHNSON: Et sous le couvert de la personne morale à
responsabilité limitée, prenons l'exemple de ce marchand de
meubles, grand Dieu qu'on tombe dans un domaine où c'est clair ce que je
veux expliquer. Il s'en est trouvé qui, transigeant sur des «
chesterfields, » gratuitement ou contre rémunération, ont
été l'objet de publicité très peu recherchée
dans le temps.
Marchands de meubles incorporés recevant ce droit de personnes
morales à responsabilité limitée à la mise de fonds
ou à ses endossements, marchands de meubles qui ont abusé, qui
ont fait perdre des milliers et des milliers de dollars à des
créanciers de bonne foi. Que la Loi des compagnies serve de couverture
à des escrocs pour monter, comme on l'a vu, comme on le sait tous, les
avocats qui ont pratiqué le moindrement, pour monter ces pyramides de
compagnies qui s'écroulent à un moment donné, laissant
tous les fournisseurs avec du papier, avec une créance qui ne vaut
même pas ce papier! Il y en a trop eu de ça dans la province. Il
va falloir prendre les mesures nécessaires pour attaquer le mal à
sa racine. Et comment le faire, sinon par une législation semblable?
Les lois que le ministre sera chargé d'administrer contiennent
certains pouvoirs. Il devra évidemment les exercer conformément
à cette loi. Mais plusieurs de ces lois, on le verra en comité,
ne contiennent pas des pouvoirs suffisants. Il fallait au début accorder
un pouvoir, disons supplétif, pour prévoir
précisément le cas de certaines lois qui ne prévoient pas
des pouvoirs suffisants au ministre.
Donc, pour l'application de ces lois, comme le dit l'article 3 et les
articles qui suivent, le ministre aura ces pouvoirs
énumérés à l'article 3 et suivants, pouvoirs
déjà accordés en moultes occasions par l'Assemblée
législative où nous sommes aujourd'hui, pouvoirs qui ont des
parallèles dans d'autres provinces et qui sont beaucoup moins
sévères beaucoup moins radicaux que les pouvoirs accordés
par certaines lois fédérales. Il me semble que c'est là
une nécessité. La suggestion du député de Westmount
était assez intéressante, dans le sens: Allez-y donc à
petits pas. D'abord, prenez les pouvoirs qui sont prévus dans les lois
dont l'administration sera dévolue au nouveau ministre et ensuite, si
vous en avez besoin, ajoutez-y.
Ce serait peut-être très bien, mais une année de
perdue peut être assez dommageable pour l'économie en
général et pour le secteur privé en particulier. Je songe
surtout au secteur privé par opposition, à ce moment-ci, aux
coopératives. Nous avons cru que ce serait la façon de
procéder, mais on nous a convaincus, que ce pouvoir était
nécessaire au départ. Nous allons y voir et, s'il y a le moindre
abus, je compte bien que l'Opposition nous avertira, nous critiquera, et nous
amenderons la loi en conséquence. J'aurais aimé pouvoir dire au
député que nous allons enlever ces pouvoirs, mais, en toute
honnêteté, je dois l'affirmer ici, nous n'avons pas l'intention de
recommander qu'on les enlève de cette loi. Cependant, si on a des
amendements à nous suggérer qui rendent moins radicaux ces
pouvoirs, mais qui nous en laissent quand même assez pour les fins que
nous recherchons, nous serons très heureux d'accueillir ces
amendements.
M. LE PRESIDENT: La deuxième lecture est-elle adoptée?
Adopté.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
Comité plénier
M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre propose que je quitte
maintenant le fauteuil pour que la Chambre se forme en comité
plénier pour l'étude du bill 80, Loi du ministère des
Institutions financières, compagnies et coopératives. Cette
motion est-elle adoptée?
M. LESAGE: Avant que vous ne quittiez le fauteuil, M. le
Président, je voudrais demander au premier ministre si nous allons
siéger ce soir. Si nous siégeons ce soir, évidemment, la
séance du comité sera suspendue et non pas la séance de la
Chambre. Je voudrais profiter du fait que le président est au fauteuil
pour demander au premier ministre quels seront, après que nous aurons
terminé l'étude du bill 80, les bills dont l'étude devra
nous préoccuper ce soir, pour que j'aie le temps de revoir mes
dossiers.
M. JOHNSON: M. le Président, premièrement, disons que nous
avions l'intention de faire siéger la Chambre ce soir. Le dîner a
lieu dans le salon des membres du cabinet Je me suis fait représenter.
J'irai accueillir le visiteur, causer avec lui un peu, mais je m'excuserai,
c'est déjà entendu, et je reviendrai en Chambre à huit
heures trente pour continuer l'étude de ce projet de loi.
M. LESAGE: Oui. Alors, à huit heures, nous pourrions
peut-être commencer un autre bill?
M. JOHNSON: Je n'aurais pas d'objection, si l'on veut ajourner à
huit heures, que l'on entreprenne le Régime de retraite des
enseignants.
M. LESAGE: Il y a aussi le bill du ministère de la Voirie. Le
bill du ministère de la Voirie, c'est de la mécanique
législative.
M. JOHNSON: Alors, je serai de retour à huit heures trente ou
huit heures quarante, de toute façon.
M. LESAGE: Est-ce qu'on étudiera d'autres bills ce soir que le
bill des enseignants et celui de la voirie, en outre du bill 80?
M. JOHNSON: Disons que nous ajournerons à une heure convenable,
je l'espère.
M. LESAGE: Oui, mais je voudrais bien savoir... Après tout, il
est normal que je veuille réexaminer les dossiers des projets de lois
qui seront étudiés ce soir. J'ai de six heures à huit
heures pour le faire, alors j'aimerais bien savoir quel est exactement le
nombre de bills que nous aurons à étudier ce soir.
M. JOHNSON: Il vient de m'en arriver un autre.
M. LESAGE: Oui, eh bien alors?
M. JOHNSON: A la demande de 1'UCC, un petit amendement.
M. LESAGE: Nous sommes disposés à coopérer, nous
pouvons demander au moins un peu de collaboration de la part du
gouvernement.
M.JOHNSON: Oui, mais qu'on ne me demande pas le nombre exact.
M. LESAGE: Pardon?
M. JOHNSON: Il m'est arrivé un autre projet aujourd'hui.
M. LESAGE: Je ne demande pas le nombre exact, je demande quels sont les
bills que nous étudierons ce soir.
M. JOHNSON: Ce soir, Régime de retraite, je l'ai dit. Ensuite,
nous pourrons continuer l'étude du bill 80 et ensuite nous pourrons
passer à la loi...
M. LESAGE: De la voirie.
M. JOHNSON: ... de la voirie et ensuite nous pourrons passer a la Place
Royale, si l'on veut, et nous ajournerons à une heure convenable, je
l'espère, pour continuer demain.
M. GERIN-LAJOIE: La Voie royale?
UNE VOIX: Entre les deux.
M. BERTRAND: Le Chemin du roi.
M. LE PRESIDENT: La Chambre conviendra-t-elle que le greffier fasse les
entrées de procédure pour que la Chambre puisse siéger ce
soir à huit heures?
M. GERIN-LAJOIE: Iluit heures ou huit heures et demie?
UNE VOIX: Huit heures.
M. LESAGE : Oui, oui, en Chambre.
M. JOHNSON: D'accord.
Reprise de la séance à 8 h 5
p.m.
M. BERTRAND: Bill 77, Loi modifiant le régime de retraite des
enseignants.
Bill no 77
M. PAUL (Président): A l'ordre! L'honorable ministre des
Finances, pour et au nom de l'honorable premier ministre, propose la
deuxième lecture du bill 77, Loi modifiant le régime de retraite
des enseignants.
L'honorable ministre des Finances.
M. DOZOIS: M. le Président, après entente avec le chef de
l'Opposition, comme c'est une loi qui amende différents articles de ce
régime de retraite, nous suggérons de faire la discussion en
comité plénier. Alors, le lieutenant-gouverneur, ayant pris
connaissance de la teneur de ce bill, en recommande la prise en
considération.
M. LAPORTE: Bravo!
M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture du bill 77
est-elle adoptée?
UNE VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. L'honorable ministre des Finances, pour
et au nom de l'honorable premier ministre, propose que je quitte maintenant le
fauteuil pour que la Chambre se forme en comité plénier pour
l'étude du bill 77, Loi modifiant le régime de retraite des
enseignants. Cette motion est-elle adoptée? Adopté.
M. FRECHETTE (Président du comité plénier): Bill
77, article 1.
M. LESAGE: Le ministre a-t-il reçu des représentations des
enseignants quant à ce bill?
M. DOZOIS: Si nous avons reçu des commentaires?
M. LESAGE: Oui. M. DOZOIS: Oui.
M. LESAGE: Est-ce que le ministre pourrait faire part au comité
des commentaires qu'il a reçus des enseignants et de la façon
dont le gouvernement a décidé de disposer de ces
commentaires?
M. DOZOIS: Voici, M. le Président, le pre-
mier ministre a reçu de M. André Therrien,
vice-président de la Corporation des instituteurs et institutrices
catholiques du Québec, un mémoire daté du 20 juillet, dont
copie a été envoyée au ministre de l'Education, au
ministre d'Etat à l'Education, au chef de l'Opposition ainsi qu'à
celui qui vous parle. Alors, je pense que le chef de l'Opposition a pris
connaissance de ces remarques. Ce mémoire qui a quatre pages, cinq pages
même, je crois, fait les commentaires, dit qu'ils sont d'accord. Enfin,
tout ce que contient la loi « satisfait les officiers, sauf l'article 4
amendant l'article 5 de la loi actuelle en vigueur ainsi que l'article
concernant les enseignants des collèges d'enseignement
général et professionnel (CEGEP) qui, à notre avis, sont
insuffisants ».
Et on ajoute des remarques à propos des amendements que les
professeurs réclamaient quant au minimum de la pension, quant au moment
de la mise à la retraite, quant aux pouvoirs du conseil consultatif et
aux droits des anciens religieux de payer pour certaines années
d'enseignement.
Or, on constatera que le bill 77 répète en très
grande partie le bill 32 qui avait été présenté par
l'ancien gouvernement avant la dissolution des Chambres l'an dernier et qui
n'avait pas été adopté. Nous reprenons ce que contenait ce
bill et nous avons ajouté certaines autres modifications, soit à
la demande du service des pensions du ministère des Finances ou encore
à la suite des suggestions qui avaient été faites
antérieurement au conseil consultatif. Comme le dit si bien le rapport,
la CIC approuve le contenu de ce bill, sauf l'article 4, parce qu'on trouve
qu'on ne va pas assez loin, et l'article 1 avec quelques modifications. Mais je
dois informer cette Chambre que ce que réclame la CIC, c'est que tous
les professeurs qui seront engagés dans les CEGEP puissent
bénéficier du fonds de pension pour toutes les années
antérieures où ils auraient enseigné, même dans des
institutions où il n'y avait pas de fonds de pension.
Or, les actuaires au service du gouvernement, la maison Castonguay,
Lemay, Graveline, Pouliot, Guérard & Associés Inc., ont fait
une étude assez sommaire, j'en conviens, de cette question et on fait un
rapport à l'effet qu'à première vue cela pourrait
peut-être représenter un engagement de l'ordre de $30,000 par
professeur. Est-ce qu'il y en aura 100,1,000 ou 10,000 de ces professeurs? On
ne le sait pas. Et la même chose pour la demande de la CIC à
propos de la pension aux anciens religieux. Les actuaires prétendent
qu'on peut, peut-être, envisager des engagements de l'ordre de $300
millions et recommandent de faire une étude actuarielle plus
poussée de toute cette question.
Alors, nous ne refuserons pas cette demande, mais nous disons que, avant
de modifier cette loi comme on nous le demande, il faut nécessairement
faire cette étude et, à cet effet, un comité a
été formé au ministère de l'Education, sous la
direction de M. Gérard Martin où les enseignants sont
également représentés. Ce comité est formé
de M. Gérard Martin, du ministère de l'Education, ainsi que des
représentants des associations d'enseignants intéressées,
et M. Grondin fera également partie de ce comité. Lorsque le
comité aura fait son étude, lorsque les actuaires auront fait
rapport, nous jugerons, à la lumière de ce rapport, s'il y a lieu
et dans quelle mesure on pourra accorder le rachat des années
d'enseignement pour ceux qui deviendront professeurs des CEGEP et qui ne
bénéficient d'aucun fonds de pension, de même que les
anciens religieux.
M. LESAGE: Pour ce qui est des enseignants des CEGEP qui avaient
déjà contribué à un fonds de pension, que se
passe-t-il?
M. DOZOIS: Bien, il y en a un grand nombre, n'est-ce pas, qui font
partie du fonds de pension des fonctionnaires...
M. LESAGE: Oui, mais d'autres?
M. DOZOIS: ... enseignant dans le moment dans les instituts de
technologie. Pour ceux-là, il n'y a aucune difficulté, mais
même pour ceux qui souscrivaient à des plans de pension
privés, il faudrait quand même faire une étude, parce que
tous ces fonds de pension n'ont pas la même valeur. Alors, de l'avis de
nos actuaires, il faudrait faire une étude complète des
différents fonds de pension des institutions d'enseignement susceptibles
de fournir des professeurs aux CEGEP. On nous demande quelques mois du moins,
un an peut-être, pour compléter cette étude et il est fort
probable que l'an prochain, nous serons en mesure de prendre une
décision.
Evidemment, pour tous ceux qui sont actuellement à l'emploi de la
province, il n'y a aucune difficulté, soit dans les instituts de
technologie, les écoles normales, etc.
M. LESAGE: C'est entendu.
M. DOZOIS: C'est un problème...
M. LESAGE: Non, je pensais au cas de ceux justement qui pouvaient
participer à des plans de pension privés, mais le ministre me
donne
une réponse satisfaisante. Du moment que le sujet est à
l'étude.
M. DOZOIS: Absolument.
M. LESAGE: Je comprends parfaitement qu'il soit impossible d'adopter une
règle générale.
M. DOZOIS: Oui.
M. LESAGE: C'est la même chose que lorsqu'il s'est agi de signer
des ententes avec le gouvernement fédéral, avec des
universités. Pour ce qui est de la contribution au fonds de pension,
soit du gouvernement fédéral, soit des universités, en ce
qui concerne les fonctionnaires qui entrent au service de la province...
M. DOZOIS: C'est ça.
M. LESAGE: ... il est clair que tout dépend des conditions du
fonds de pension auquel ces personnes ont contribué, et la même
règle...
M. DOZOIS: Exactement.
M. LESAGE: ... qui est une règle de l'étude de chaque
catégorie particulière...
M. DOZOIS: C'est ça.
M. LESAGE: ... se doit d'être suivie dans le cas
présent
M. DOZOIS: Oui. Alors, cette étude est en cours. Peut-être
que l'an prochain, je l'espère, on sera en mesure de prendre une
décision.
M. LE PRESIDENT: Article 1 adopté dans son ensemble? Tout
l'article? Article 2.
M. LESAGE: Evidemment, la différence avec le bill 32, c'est
l'amendement au sous-paragraphe 3 pour couvrir les collèges
d'enseignement général et professionnel.
M. LE PRESIDENT: Article 2. M. BELLEMARE: Adopté.
M. DOZOIS: Cela, c'est pour empêcher que la pension soit
supérieure. Il y avait un doute...
M. LESAGE: Evidemment. La loi concernant les collèges
d'enseignement général et professionnel a été
adoptée à la présente session. C'est clair que ça
ne pouvait pas être prévu dans le bill 32 de l'année
dernière.
M. DOZOIS: C'est ça.
M. LE PRESIDENT: Article 3.
M. DOZOIS: L'article 3, c'est un article de concordance. On parle de
rente universelle dans le moment et on nous recommande de remplacer ça
par rente du régime général.
M. LESAGE: C'était dans le bill 32. M. DOZOIS: C'est ça.
M. LE PRESIDENT: Article 4. M. DOZOIS: L'article 4...
M. LESAGE: L'explication que vient de donner le ministre des Finances
avait trait à l'article 3.
M. DOZOIS: ... ne faisait pas partie... L'article 3, on vient de
l'adopter...
M. LESAGE: Oui.
M. DOZOIS: ... c'était de la concordance également. Trois
est adopté?
M. LESAGE: Oui, oui, c'est très bien.
M. DOZOIS: Alors, l'article 4, n'était pas contenu dans le bill
32. La modification que nous apportons, c'est pour corriger une situation qui a
découlé des grèves qui obligeraient un enseignant, parce
qu'il a manqué 10 jours, 15 jours dans une année, à
reprendre une autre année d'enseignement. L'on sait qu'on ne peut pas
engager les professeurs pour 15 jours ni un mois, ni deux mois; lorsqu'ils
commencent une année d'enseignement, eh bien, il faut qu'il se rendent
au bout, autrement ça pourrait créer des problèmes
considérables pour l'enseignement des élèves. Or,
après avoir étudié la question, au service des fonds de
pension, l'on nous a recommandé d'accorder cette faveur, si l'on veut,
aux enseignants de façon que l'on puisse ajouter deux mois à leur
35 ans.
Si ça fait 34 ans et dix mois pour que l'on puisse compter les 35
ans de façon à ce qu'ils puissent prendre leur pension, on ne les
obligera pas à travailler tout le mois de septembre et causer
peut-être beaucoup d'ennui à la commission scolaire qui, le mois
suivant, sera obligé de confier une classe à un nouveau
professeur après le début de l'année.
M. LESAGE: La demande des enseignants à ce sujet était
différente, n'est-ce pas, dans le mémoire que les
enseignants...
M. DOZOIS: Oui.
M. LESAGE: ... ont fait parvenir conjointement au premier ministre et au
ministre de l'Education et au ministre des Finances.
M. DOZOIS: Ils auraient voulu...
M. LESAGE: Ils voulaient qu'on considère une année de 120
jours, qu'on considère comme une année d'enseignement, 120 jours
d'enseignement. Si je comprends bien, le gouvernement en est venu à la
décision d'ajouter 60 jours seulement, c'est-à-dire de
prévoir une période additionnelle de 60 jours.
M. DOZOIS: Avant, elle était de 120 jours mais maintenant, en
vertu des changements de 1965, c'est l'année complète qui compte.
Or, en raison des grèves qui ont eu lieu au mois de décembre
dernier, il y en a qui doivent prendre leur pension mais ils leur manqueraient
deux mois au maximum.
M. LESAGE: C'est ça.
M. DOZOIS: Alors, avec cette disposition, ça va régler le
cas de tous ces gens-là. La CIC n'aurait pas voulu qu'on marque cette
limite de temps avant le 1er juillet 1967.
M. LESAGE: Je comprends...
M. DOZOIS: Cela existe pour toujours, nous réglons le
passé.
M. LESAGE: S'il y avait une grève de 90 jours au cours de
l'année scolaire 1967-68, les enseignants ne pourraient plus compter
l'année scolaire comme une année pour fin de pension.
C'était sous forme de question. Je dis: Est-ce que je dois conclure que
si au cours de l'année scolaire 1967-68, il y avait dans un secteur de
l'enseignement une grève de 90 jours.
M. DOZOIS: On ferait un autre amendement éventuellement.
M. LESAGE: Le ministre admet que les grévistes ne pourraient pas
compter l'année scolaire 1967-68 comme une année à leur
crédit pour fin de pension.
M. DOZOIS: Non.
M. LESAGE: Alors pourquoi ne pas se rendre à la demande des
enseignants et parler de 120 jours?
M. DOZOIS: C'est un règlement temporaire, ou pour régler
une situation qui est passée, et nous allons étudier s'il n'y a
pas moyen de compter les années de pension de façon
différente, alors.
M. LESAGE: Est-ce que le ministre ne croit pas que ce délai de 60
jours, et 60 jours seulement, constitue une entrave au droit de
grève.
M. DOZOIS: Non.
M. LESAGE: Bien voici. C'est certainement une Incitation très
forte à ne pas faire la grève. C'est une limitation à un
droit absolu.
M. BELLEMARE: A ne pas dépasser 60 jours.
M. DOZOIS: L'ancien gouvernement avait déterminé en 1965
ce que serait une année d'enseignement pour un enseignant. En appliquant
la loi qui a été votée en 1965 et en tenant compte des
grèves qui ont eu lieu au cours de l'année qui vient de
s'écouler, on constate que quelques professeurs seraient obligés
de recommencer un mois ou un mois et demi d'enseignement. Alors, après
avoir étudié la question au service des pensions, ils en sont
venus à la conclusion que les deux mois régleraient le cas de
tous les professeurs qui ont été impliqués dans des
grèves depuis 1965. Il n'y a pas de difficulté. Pour l'avenir, le
service des pensions veut étudier s'il n'y a pas lieu de compu ter les
années pour fin de pension d'une façon différente. Nous
réglons le passé et, si la même chose se représente
à l'avenir, nous allons tenter de la régler de façon
différente, parce qu'on ne peut tout de même pas penser à
faire des amendements chaque année. S'il y a une grève de 90
jours, l'année prochaine, ce sera 90 jours; l'année suivante, ce
sera 120 jours et, l'autre année, ce sera peut-être 150 jours.
Alors, il y a une étude à faire sur ce problème. On
ne veut pas que ce soit un empêchement à la grève, pas plus
que l'ancien gouvernement avait décidé que cela empêcherait
l'exercice libre du droit de grève en mettant dans sa loi les
dispositions qui déterminaient que pour prendre sa pension, il fallait
une année d'enseignement et non plus 120 jours, comme ce l'était
autrefois.
M. LESAGE: Oui, mais il faut bien comprendre que le bill 32 avait
été déposé avant les vacances de Pâques, en
1966, justement, pour donner une chance aux enseignants de faire des
représentations sur le bill.
M. DOZOIS: Je ne parle pas du bill 32, M. le Président, je parle
de la loi de 1965.
M. LESAGE: Oui, très bien, mais...
M. DOZOIS: A ce moment-là, les professeurs avaient le droit de
grève.
M. LESAGE: Oui, je sais, mais quand, en 1966, nous avons
présenté le bill 32, c'était pour recevoir... Evidemment,
nous l'avons déposé et nous n'en avons pas proposé
l'adoption pour que le gouvernement reçoive des représentations
des enseignants. Or, ces représentations sont à l'effet que la
période devrait être de plus de 60 jours. Alors, je crois de mon
devoir d'attirer l'attention du ministre sur le fait qu'à mon sens, cela
constitue virtuellement une limitation au droit de grève.
M. BELLEMARE: Très bien.
M. LE PRESIDENT: Article 4, adopté. Cinq. Article 5,
adopté. Article 6...
M. LESAGE: Un instant, là.
M. DOZOIS: C'est pour le veuf invalide, ça. Pour lui donner une
pension au même titre que la veuve.
M. LESAGE: Oui, cinq, c'est correct.
M. DOZOIS: C'est la même chose qu'il y avait dans le bill 32.
M. LESAGE: Oui. Six...
M. DOZOIS: La CIC a réclamé cet amendement.
M. LE PRESIDENT: Six, adopté? Adopté. Article 7,
adopté? Adopté. Article 8, adopté?
M. LESAGE: Un instant, là.
M. DOZOIS: C'est la même chose que le bill 32.
M. LESAGE: Oui, c'est la même chose que le bill 32. C'est pour les
enseignants...
M. DOZOIS: On a changé la date.
M. LESAGE: ... qui peuvent prendre leur retraite à l'âge de
50 ans.
M. DOZOIS: On a mis juillet 1968 au lieu de 1967.
M. LESAGE: Neuf, c'est la même chose que le bill 32.
M. DOZOIS: C'est ça. M. LE PRESIDENT: Article 9, adopté.
M. LESAGE: Dix, c'est la concordance. M. LE PRESIDENT: Dix, adopté.
M. LESAGE: Onze, c'est la même chose. C'est la base annuelle au
lieu de la base mensuelle.
M. LE PRESIDENT: Article 11, adopté. Article 12.
M. DOZOIS: L'article 12, c'est la même chose qui était
à l'article 10 dans le bill 32.
M. LE PRESIDENT: L'article 13.
M. LESAGE: L'article 13, un instant...
M. DOZOIS: Voici! C'est une disposition qui permettrait à des
professeurs d'aller enseigner en dehors du Canada, dans des pays
étrangers, et de ne pas perdre leur droit à la pension. Faire
compter ces années-là pour fin de pension en autant qu'ils
acquittent la contribution.
M. LESAGE: Même s'il n'y a pas d'entente avec le pays
étranger.
M. DOZOIS: C'est ça.
M. LE PRESIDENT: L'article 13 est-il adopté?
Adopté. Article 14.
M. LESAGE: Concordance.
M. GOLDBLOOM: A l'article 14, il me semble qu'au moins dans le texte
anglais il y a quelque chose qui n'est pas clair. Si je comprends bien le texte
français, il y a deux choses que le ministre doit prescrire: Primo, les
documents requis pour établir le droit à la pension et, secondo,
la forme que prendrait le contrôle périodique. Est-ce que j'ai
raison?
M. DOZOIS: A quel sous-paragraphe?
M. GOLDBLOOM: Sous paragraphe d, qui paraît à l'article
14.
M. BERTRAND: What do you suggest?
M. GOLDBLOOM: Si on disait en anglais: « Prescribe the documents
required to establish the right to the pension, half pension or deferred
pension, as well as the periodic verification ». Ce n'est pas clair comme
c'est écrit en ce moment.
M. BERTRAND: Très bien.
M. LESAGE: D'ailleurs, même en français, cela serait
beaucoup plus clair si on remplaçait « et le » par «
de même que » ou...
M. DOZOIS: Ainsi que le contrôle périodique?
M. LESAGE: Oui, je pense que cela serait plus clair.
M. BELLEMARE: « Ainsi que ». Très bon amendement,
UNE VOIX: Adopté?
M. BELLEMARE: Article 15.
M. LESAGE: Un instant.
M. LE PRESIDENT: Article 15, adopté. Article 16.
Adopté?
M. LESAGE: Un instant là. C'est la même chose.
M. LE PRESIDENT: Article 16 adopté. Article 17. Adopté?
Article 18 adopté?
M. LESAGE: Oui, ça va.
M. SEGUIN: M. le Président, à titre d'information, sur
l'article 5 qui est déjà adopté, le ministre pourrait-il
me dire par exemple, dans le cas d'une institutrice qui serait le support de
son mari invalide ou infirme.
M. BELLEMARE: Est-ce que le député pourrait parler devant
son micro?
M. SEGUIN: Je parle devant. Il est tourné de ce
côté-ci. C'est ma gorge qui fait défaut, M. le
député de Champlain.
M. BELLEMARE: Ah bon!
M. SEGUIN: Alors, on prétend ici, dans l'article 5, M. le
ministre: « Le paiement de la pension ou du traitement d'un enseignant du
sexe féminin qui était le seul soutien de son mari in- valide ou
de ses enfants, la moitié de la pension, etc., etc. Le seul soutien de
son mari. Advenant le cas où le mari serait, par exemple, un grand
blessé de guerre et qu'il retirerait une pension de
vétéran, est-ce que l'on considérerait l'enseignante comme
étant le seul soutien de son mari dans ce cas-là? Et est-ce
qu'elle aura droit ou est-ce que le mari aura encore droit à la
demi-pension?
M.DOZOIS: L'information que l'on me donne, c'est que, dans le cas d'un
vétéran qui aurait une pension d'ancien combattant, il aurait
droit également à cette pension de veuf invalide puisqu'il est
invalide. Il n'aurait pas le droit de recevoir deux pensions du même
gouvernement, mais comme ce n'est pas le même gouvernement, il aurait
droit de recevoir celle-ci.
M. SEGUIN: Je craignais tout simplement qu'on prétende que
l'enseignante n'était pas le seul soutien de son mari, dans ce
cas-là à cause de sa pension.
M. DOZOIS: Adopté.
M. LEBEL (Président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité a
adopté le bill 77 avec un amendement qu'il vous prie
d'agréer.
M. PAUL (Président): L'honorable ministre des Finances, pour et
au nom de l'honorable premier ministre, propose que l'amendement adopté
par le comité plénier soit maintenant lu, reçu et
agréé. Cette motion est-elle adoptée? Adopté.
M. DOZOIS: Troisième lecture.
Troisième lecture
M. LE PRESIDENT: De consentement unanime, l'honorable ministre des
Finances, pour et au nom de l'honorable premier ministre, propose la
troisième lecture du bill 77, Loi modifiant le régime de retraite
des enseignants. Cette motion est-elle adoptée? Adopté.
M. LESAGE: Je croyais que ce serait le bill de la voirie. Nous sommes
prêts, comité. C'est un bill purement et simplement de
mécanique législative.
M. BELLEMARE: Bill 85.
M. DOZOIS: On peut passer à un autre bill en attendant que le
ministre de la Voirie...
M. LESAGE: Lequel?
M. BERTRAND: La Place Royale.
M. LESAGE: Je ne sais pas si le député de Chambly est
prêt.
M. LAPORTE: Toujours! D'autant plus que c'est mon bill. Il n'y a
qu'à changer le nom en bas, et c'est mon bill.
M. BELLEMARE: L'article 30.
Bill no 84
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires culturelles propose
la deuxième lecture du bill 84, Loi concernant la Place Royale à
Québec. Cette motion est-elle adoptée? Adopté. L'honorable
ministre des Affaires culturelles propose que je quitte maintenant le fauteuil
pour que la Chambre se forme en comité plénier pour
l'étude du bill 84, Loi concernant la Place Royale à
Québec. Cette motion est-elle adoptée? Adopté. Avant
l'adoption de cette motion il y aurait peut-être lieu d'entendre une
déclaration pertinente de l'honorable ministre des Affaires
culturelles.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, l'honorable
lieutenant-gouverneur de la province...
M. LAPORTE: M. le Président, j'invoque le règlement et je
demande au ministre s'il se prend pour le premier ministre! Il n'est pas
à son fauteuil et nous sommes en Chambre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah! Pardon! UNE VOIX: Conseiller
spécial!
M. LAPORTE: Cela a beau être la Place Royale, ce n'est pas la voie
royale, M. le Président.
UNE VOIX: C'est le chemin du roi!
M. LAPORTE: Ce n'est pas le chemin du roi!
M. PINARD: Il a eu une place importante à
Frédéricton!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pour une fois il a eu raison!
M. LAPORTE: C'est-à-dire que c'est la première fois que
vous l'admettez.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. le Président, l'honorable
lieutenant-gouverneur de la province a pris connaissance de ce bill et en
recommande l'étude à la Chambre.
M. LE PRESIDENT: A la suite de cette déclaration très
intéressante, l'honorable ministre des Affaires culturelles... La motion
pour que je quitte le fauteuil est-elle adoptée? Adopté.
M. LAPORTE: M. le Président, étant donné
l'intervention très importante du ministre des Affaires culturelles, je
crois qu'il est de mon devoir, comme député en cette Chambre, de
faire quelques remarques. Je voudrais que cette Chambre se souvienne que la
restauration de l'un des endroits les plus historiques de la province de
Québec, la Place Royale, a faitpendant bon nombre d'années
l'objet de la sollicitude d'un certain nombre de citoyens de la ville de
Québec. Je sais, en particulier, que la Chambre de Commerce de
Québec avait, par un comité, préparé un programme
qui était des plus intéressant et qui impliquait la participation
de l'entreprise privée.
L'un des objectifs essentiels que l'on voulait atteindre, c'était
de redonner à cette place l'aspect qu'elle avait il y a plusieurs
décennies, mais en même temps ne pas en faire un vaste
musée, ce qui aurait affecté sans l'ombre d'un doute toute cette
partie de la vieille ville de Québec.
La Chambre de Commerce était venue au ministère des
Affaires culturelles, alors que j'avais l'honneur d'en assumer la direction, et
nous en étions venus à la conclusion que puisque de toute
façon c'était l'Etat du Québec qui allait assumer la
presque totalité des frais de restauration, il n'était que normal
que toute la place, tous les immeubles, soient la propriété des
citoyens du Québec. Nous avons à l'époque adopté un
budget qui a permis au ministère des Affaires culturelles ou au
ministère des Travaux publics, je ne me souviens plus exactement, de se
porter acquéreur des 15, 17 ou 18 immeubles qui entourent
l'église Notre-Dame-des-Victoires sur la Place Royale. Et comme la
Chambre de Commerce de Québec avait dans ce domaine des états de
service importants, nous avions convenu avec elle de créer un
comité consultatif où serait évidemment
représenté le ministère des Affaires culturelles qui
représenterait en fait le gouvernement québécois,
où serait représentée la ville de Québec qui
avait certainement son mot à dire puisque cette place très
historique était située dans ses murs, et où serait
également représentée la Chambre de Commerce, l'organisme
qui dans le domaine de la restauration de la Place Royale avait en quelque
sorte attaché le grelot. Tout ceci était convenu,
décidé. Il arrive que c'est le gouvernement qui a suivi le
nôtre qui réalise ce que nous avions entrepris, qui
complète. Je ne puis que me réjouir et j'aurai tout à
l'heure quelques questions à poser au ministre sur l'état du
projet de restauration de la Place Royale. Mais nous sommes, sur le principe et
sur les modalités du projet de loi qu'il nous propose, tout à
fait d'accord, puisqu'il ne fait en somme que compléter les choses que
nous avions entreprises.
M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture est-elle
adoptée?
M. BELLEMARE: Adopté. M. LAPORTE: Adopté.
M. LE GREFFIER ADJOINT: Deuxième lecture de ce bill. Second
reading of this bill.
Comité plénier
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires culturelles propose
que je quitte maintenant le fauteuil pour que la Chambre se forme en
comité plénier pour l'étude du bill 84, Loi concernant la
Place Royale à Québec. Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: Adopté.
M. LEBEL (président du comité plénier): Article
1.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Adopté.
M. LAPORTE: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 2.
M. LAPORTE: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 3.
M. LAPORTE: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 4.
M. LAPORTE: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 5.
M. LAPORTE: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 6.
M. LAPORTE: M. le Président, à l'article 6, je sais que le
ministre aura l'occasion de publier ou d'adopter une réglementation
quant à la Place Royale. Je voudrais lui demander à cet article,
puisque je ne veux intervenir à aucun autre, s'il pourrait très
brièvement nous dire quel est l'état de réalisation du
projet de la Place Royale à Québec. Je l'autorise à
être bref.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je voudrais d'abord en
passant, puisque les remerciements d'usage ont été faits par le
député de Chambly, qui s'est approprié beaucoup de
mérite, remercier la Chambre de Commerce de Québec...
M. LAPORTE: Ce qui lui revenait.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et pour dire où nous en sommes
rendus à l'heure actuelle. Voici l'état de la question. Nous
avons acheté à l'heure actuelle les maisons Bourget, Lemieux,
Martel, O'Donnell, Paquin, Paradis, Proulx, Roberge, Talbot. Il reste à
acheter les maisons Berrouard où il y a refus de vente, Brochu où
il y a refus de vente, Deslauriers où un acompte a été
donné de $6,000, Lachance...
M. LEDUC (Taillon): M. le Président, est-ce qu'on pourrait
comprendre quelque chose, parce que le ministre semble s'adresser au
député plutôt qu'à la Chambre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... pour laquelle il y a eu aussi acompte,
Asselin, également une maison que nous achèterons et pour
laquelle nous avons donné un acompte. La maison Moore, même cas,
l'hôtel Louis-XIV à négocier, la maison Thibault pour
laquelle nous avons versé aussi un acompte et la maison Gélinas.
Quant à la question précise que m'a posée le
député de Chambly, je dois lui dire qu'une équipe de
travail qui a à sa tête M. Mayrand, historien, spécialiste
de la restauration, s'occupe de préparer le plan d'aménagement.
Il nous a fallu faire des études assez poussées et M. Mayrand est
assisté de M. Roy, M. Robert Giroux, M. Ulric Breton, M. Pierre Cantin
et de M. Denis Samson.
Les travaux préparatoires à la restauration comportent
d'abord un plan d'aménagement
et ils comportent ensuite des données d'ordre technique sur le
plan architectural et évidemment, il n'est pas nécessaire
d'entrer dans le détail de ces questions, puisque le formel de la loi
est de créer un organisme destiné à restaurer la Place
Royale.
M. BELLEMARE: Adopté.
M. BEAUPRE: M. le Président, tout à l'heure, on a
passé très vite sur l'article 4.
M. BELLEMARE: Ah! Ah!
M. BEAUPRE: Je m'excuse, on a passé ça à la
vapeur.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Adopté. M. BEAUPRE: N'ayant pas voulu
être...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, M. le Président, je regrette, mais
nous avons passé l'article 4.
M. BEAUPRE: Ce que je voulais savoir...
M. LESAGE: C'est la première fois que f entends une chose comme
ça.
M. LEDUC (Taillon): Magnifique collaboration.
M. LESAGE: Bien vous allez siéger, mon petit garçon. On va
cultiver son bill.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Voici, si nous n'avons pas le consentement
unanime de la Chambre, je serai toutefois dans l'obligation de demander
à l'honorable député de Jean-Talon de...
M. LAPORTE: M. le Président, je pense bien que F étude de
ce projet de loi s'est faite de la façon la plus rapide qui soit,
tellement rapide qu'à Particle 4, je n'ai pas pensé de consulter
mon collègue de Québec qui avait une ou deux questions à
poser quant à l'article 4. Je suis certain que le ministre n'aura pas
d'objection, quand même cela retarderait l'adoption de son projet de loi
de deux minutes, je pense bien...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord. Excusez-moi. D'accord.
M. BEAUPRE: Voici, il s'agit de mon comté, ces immeubles sont
situés dans le comté de
Jean-Talon que j'ai l'honneur de représenter, et l'article 4
concerne la charte de la cité de Québec. C'est à ce
sujet-là que je voulais questionner le ministre. Je voulais demander
s'il savait en ce moment quelle disposition pouvait devenir de la loi en vertu
de laquelle le ministre exerce les pouvoirs des articles 18 et 19. En quoi
pouvait-il croire que la charte de la cité de Québec pourrait
avoir des exigences inconciliables avec ladite loi? Parce que voici qu'on
demande un pouvoir assez exceptionnel. On demande de passer outre, non
seulement aux dispositions de la charte de la cité de Québec,
mais encore aux dispositions de la charte de la Commission d'aménagement
ou de ce qui lui tient lieu de charte. Alors, est-ce qu'il y a des cas
où le ministre sait à l'avance qu'il lui faut aller à Y
encontre de ladite charte de la cité de Québec?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne dirai pas qu'il y a des cas, mais c'est
pour prévoir les cas où cela pourrait se produire, et c'est dans
un but de coordination pour accélérer les travaux que nous avons
inclus cette disposition dans la loi.
M. BEAUPRE: Est-ce que cette disposition existe dans d'autres lois
similaires?
Est-ce que le ministre pourrait nous donner des exemples de ce
précédent? Est-ce que le ministre pourrait nous donner des
précédents pour...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Relativement à quoi?
M. BEAUPRE: ... pour un genre de législation comme ça qui
passe à l'encontre d'une charte comme celle de la ville de
Québec.
M. BELLEMARE: C'est justement parce que c'est une loi spéciale
que vous...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est une loi spéciale que nous
présentons pour prévenir toute difficulté et comme nous
avons d'ailleurs d'excellentes relations avec la ville de Québec et que
la ville de Québec sera représentée, nous ne voyons pas
là de difficulté. C'est simplement, comme je l'ai dit tout
à l'heure, dans un but de coordination et pour accélérer
le travail de restauration.
M. BELLEMARE: C'est ça.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Et je n'ai quand même pas, M. le
Président... le député de Québec, pardon, de...
M. BEAUPRE: Jean-Talon.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... de Jean-Taillon comprendra que je ne puis
pas relever tous les précédents...
M. LESAGE: Jean-Talon. C'est un intendant de la Nouvelle-France.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... de Jean-Talon... relever tous les
précédents qui peuvent exister dans quelque loi que ce soit.
M. BELLEMARE: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Article 6, adopté? Adopté. Article 7.
M. LAPORTE: M. le Président, le comité consultatif devra
remettre au ministre un rapport semestriel c'est évidemment
normal qu'il en soit ainsi est-ce qu'on pourrait demander au ministre
s'il ne serait pas normal que ce rapport ou ces rapports soient
déposés à l'Assemblée législative selon la
tradition dans les quinze jours ou dans les dix jours qui suivent l'ouverture
de la session?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous verrons, M. le Président, à
donner à la Chambre tous les renseignements utiles et il est toujours
possible de demander la production de documents. Alors j'imagine que le
député de Chambly pourra à l'occasion nous demander
où en est l'état des travaux et si les rapports dont il parle
sont nécessaires, la production de ces rapports est
nécessaire.
M. LAPORTE: Etant donné, M. le Président, que le ministre
est d'accord et qu'il pourrait oublier ou que nous-mêmes nous pourrions
retarder à demander la production de rapports aussi intéressants,
je crois que nous devrions amender cet article 7 pour dire que le ministre
dépose, il y a une formule classique, dépose... alors je vois que
le ministre est d'accord, je le remercie et j'inviterais M. le
vice-président, président des comités, à modifier
l'article 7 qui pourrait se lire: « Le comité consultatif est tenu
de faire au ministre un rapport semestriel de ses activités ».
M. BELLEMARE: De déposer un rapport annuel dans les dix premiers
jours après l'ouverture de la session.
M. LESAGE : Dans les quinze jours qui suivent l'ouverture de la session
suivante.
M. BELLEMARE: Trente jours.
M. LESAGE: On peut régler pour vingt.
M. BELLEMARE: Non, mais parfois il y a des lenteurs administratives.
Dans les 30 jours.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quel amendement, M. le Président?
M. LAPORTE : M. le Président, étant donné qu'il y
en aura deux par année, parce que semestriels, est-ce qu'on pourrait
dire que tels rapports sont déposés à l'Assemblée
législative dans les 30 jours de l'ouverture de la session?
M. BELLEMARE: Un rapport annuel.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un rapport annuel.
M. BELLEMARE: Un rapport annuel.
M. LAPORTE: Ah, il présenterait seulement un rapport.
M. BELLEMARE: Un rapport annuel.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est-à-dire que voici...
M. LAPORTE : Mais vous changez ces textes.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... on dit que le comité consultatif,
à l'article 7, est tenu de faire au ministre un rapport semestriel de
ses activités. Or, il peut arriver que, le premier rapport semestriel
comporte des renseignements qui ne soient pas complets, qui ne donnent pas
suffisamment d'informations à la Chambre. Je préférerais
que l'honorable député de Chambly propose plutôt la
présentation d'un rapport annuel sur l'état des travaux du
comité.
M. LAPORTE: Bon. Le ministre... Si vous le voulez, M. le
Président, nous allons suspendre l'article 7 pour quelques minutes parce
que, honnêtement, la rédaction faite au fil de la plume comme
ça... On va adopter l'article... J'aurais une question à poser
sur l'article 8. Lorsqu'on dit évidemment...
M. LE PRESIDENT: Est-ce que l'article 7 est suspendu?
M. LAPORTE : Suspendu pour quelques minutes. Lorsqu'on dit que l'article
8 est déclaratoire, c'est évident que ceci doit couvrir les
actes qui ont été posés par le comité
consultatif ou ceux qui ont entrepris le travail de restauration depuis le
début.
Est-ce que le ministre a en vue certaines décisions ou certains
actes spécifiques par l'adoption de cet article?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): L'article 8 est déclaratoire en ce sens
qu'il valide les actes qui ont été posés jusqu'à
présent,
M. BELLEMARE : Ce qui apparaît dans le bill du crédit
industriel, bill 70, à la page 3, un rapport annuel est
déposé devant l'Assemblée législative si elle est
en session, si elle ne l'est pas, dans les trente jours de l'ouverture de la
session suivante.
M. LAPORTE: C'est bien.
M. BELLEMARE: Cela existe déjà. Il faudrait garder un peu
la même formule.
M. LAPORTE: C'est bien.
M. LE PRESIDENT: Article 8 adopté. Article 9 adopté.
Quant à l'article 7 qui a été suspendu,
l'amendement se lirait comme suit: Le rapport est déposé devant
l'Assemblée législative, si elle est en session, ou si elle ne
l'est pas dans les trente jours de l'ouverture de la session suivante. Cette
motion pour amendement est-elle adoptée?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un rapport annuel. Est-ce que le
député de Chambly est d'accord là-dessus? Annuel?
M. LAPORTE: Je n'ai pas d'objection. M. TREMBLAY (Chicoutimi):
D'accord.
M. LE PRESIDENT: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport
que le comité a adopté le bill 84 avec un amendement qu'il vous
prie d'agréer.
M. PAUL (Président): L'honorable ministre des Affaires
culturelles propose que l'amendement adopté par le comité
plénier soit maintenant lu, reçu et agréé. Cette
motion est-elle adoptée? Adopté.
M. BELLEMARE: Troisième lecture.
Troisième lecture
M. LE PRESIDENT: De consentement, l'honorable ministre des Affaires
culturelles propose la troisième lecture du bill 84, Loi concernant la
Place Royale à Québec Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
M. BELLEMARE: Article 27. M. JOHNSON: De nouveau en comité
plénier.
Bill no 80
M. LE PRESIDENT: L'honorable premier ministre propose que la Chambre se
forme de nouveau en comité plénier pour étude du bill 80,
Loi du ministère des institutions financières, compagnies et
coopératives.
M. BELLEMARE: Adopté.
M. FRECHETTE (Président du comité plénier): Bill
80. Article premier.
M. JOHNSON: Article 1 adopté. Article 2. M. LE PRESIDENT: Article
2.
M. CHOQUETTE: Pour l'article 2, je n'ai pas d'objection
fondamentale.
M. JOHNSON: Article 3.
M. CHOQUETTE: Sur l'article 3, cet après-midi, j'ai
écouté avec intérêt les interventions du ministre
des Finances ainsi que celles du premier ministre au sujet des pouvoirs qui
sont réclamés quant à l'article 3, l'article 4 et
l'article 5. Je pense que d'abord le ministre des Finances nous a dit que les
pouvoirs qui étaient requis pourraient être utilisés une
fois par dix ans ou peut-être dans un seul cas et que ces cas
isolés où l'on ferait usage de ces pouvoirs considérables
pouvaient justifier, suivant lui, des pouvoirs aussi étendus. Et je
soumets que ce raisonnement est faux. Ce n'est pas parce que des pouvoirs
peuvent être requis à une occasion ou dans une occasion
isolée qu'on puisse confier des pouvoirs aussi considérables et
créer l'occasion d'abus de pouvoir, comme je l'ai signalé.
Quant à l'argumentation dupremier ministre, je soumets qu'elle
était flottante. Premièrement, il nous a dit que le ministre
était limité par l'article 3 à des renseignements qui
seraient utiles pour l'application des lois énu-
mérées à l'article 23. Or, les renseignements qui,
d'après les lois déterminées à l'article 23,
peuvent être utiles pour les corporations créées en vertu
de ces lois-là, évidemment sont prescrits dans les lois
déjà existantes. La Législature s'est déjà
prononcée et a déjà déterminé quels
renseignements ces diverses corporations seraient obligées de donner au
gouvernement.
Donc, je dis qu'en réclamant des pouvoirs aussi étendus,
qui s'ajoutent à ceux qui sont prescrits dans les lois
déjà existantes, on ouvre la porte à une série de
questions qui ne sont pas prévues par la loi et c'est pour cette raison
que, cet après-midi, je disais qu'il me semblait abusif qu'on laisse au
pouvoir discrétionnaire du ministre, tel que le fait l'article 3, le
droit de déterminer quelles questions pourront être posées
à une corporation, questions que, lui, juge utiles, alors que ce n'est
pas prévu dans les lois déterminées à l'article
23.
Je dis que si on veut que le futur ministre ou le futur ministère
soient habilités à poser des questions à ces corporations,
qu'on étende la portée des questions ou des questionnaires
auxquels ces corporations seront obligées de répondre dans leur
loi particulière. Non en bloc. Non, comme le disait le
député de Westmount, par une espèce de mandat en
blanc.
Le premier ministre, après ça, est tombé dans le
domaine de la fraude, et de la malversation. Il nous a dit que des individus se
servaient des corporations pour commettre des fraudes. Or, à ce
moment-là, nous ne sommes plus du tout dans le domaine de
l'administration des corporations énumérées à
l'article 23. Nous sommes dans le domaine du droit criminel qui n'est pas de
juridiction provinciale. Nous sommes, à ce moment-là, dans le
domaine d'actes criminels qui ne sont pas réellement du ressort de la
province quant à leur nature.
Maintenant, j'admets que la province avant d'instituer des
procédures en droit criminel devant les tribunaux ordinaires a le droit
de procéder par enquête. Mais on a toujours entendu une
enquête, dans notre droit dans la province de Québec, comme une
enquête impartiale. Je cite le cas de la Loi des commissions
d'enquête, par exemple, où le gouvernement peut demander une
enquête sur n'importe quel sujet et si la conclusion du juge ou du
commissaire qui fait enquête est à l'effet qu'il y a des
accusations à porter, il fait les recommandations nécessaires au
gouvernement. Mais ce n'est pas le gouvernement qui va chercher dans la bouche
des témoins et même dans la bouche des accusés des aveux,
avant même qu'ils soient accusés.
Un autre cas d'enquête, c'est, par exemple, le cas d'enquête
en matière de corruption municipale et scolaire. On sait que les
citoyens peuvent s'adresser à un juge de la cour Supérieure et
obtenir une enquête sur la corruption en matière municipale et
scolaire. A ce moment-là, il y a une enquête devant un juge qui
détermine quels sont les faits révélés par la
preuve. Or, dans le cas de ces enquêtes, il est particulièrement
important de noter qu'en toute circonstance ces tribunaux d'enquête
respectent les règles fondamentales de la loi de la preuve au Canada.
Premièrement, toute personne a le droit de se faire représenter
par un avocat. Deuxièmement, la partie qui témoigne a le droit de
demander la protection du tribunal, c'est-à-dire de demander que son
témoignage ne serve pas contre elle dans des procédures
judiciaires ultérieures.
La personne qui a des témoins à faire entendre a le droit
de produire ses témoins. En un mot, l'enquête qui a lieu est une
enquête judiciaire. Or, l'enquête telle qu'elle nous est
proposée, dans le système des articles 3, 4 et 5, n'est pas une
enquête judiciaire. C'est un système en vertu duquel on va
extorquer n'importe quel renseignement utile à faire condamner un
accusé éventuel devant la cour. Je dis que par conséquent
nous nageons avec les propositions du gouvernement actuel dans ce
domaine -là en pleine illégalité constitutionnelle,
et je serais surpris que des pouvoirs aussi étendus que ceux-ci soient
maintenus par une cour de justice alors qu'ils violent les droits fondamentaux
des individus tels que reconnus par le bill des droits de l'homme et tels que
reconnus par la loi de la preuve au Canada et alors que le provincial est en
train de se mêler d'une juridiction qui concerne en réalité
le gouvernement fédéral, puisqu'il s'agit de droit criminel.
Mais comme je le disais tout à l'heure, cela n'empêcherait
pas le gouvernement provincial d'instituer un système d'enquête.
L'enquêteur, après avoir entendu les faits de part et d'autre,
après qu'il a examiné les documents qui ont été
produits ou qui ont été saisis, il peut faire des recommandations
et là, le ministère de la Justice fera ce qu'il y a a faire pour
traduire les individus devant les tribunaux. C'est la raison pour laquelle je
pense qu'en définitive, la seule façon de réhabiliter la
législation qui est actuellement présentée par le
gouvernement, plus particulièrement les articles 3 à 5, c'est
d'éliminer carrément ces articles-là pour remplacer par un
système permettant au gouvernement provincial, par arrêté
en conseil, d'instituer une enquête chaque fois qu'il soupçonne
qu'il y a fraude ou malversation ou que l'intérêt public com-
mande qu'il y ait une enquête dans les affaires d'une des
corporations énumérées à l'article 23.
Ce système donnerait toutes les garanties de l'observance des
règles fondamentales de la justice qui, je suis sûr, tiennent
autant à coeur aux membres du gouvernement qu'aux membres de
l'Opposition.
Ce n'est pas par souci d'efficacité qu'il faut s'efforcer de
passer une réglementation qui ne puisse servir en définitive
qu'à violer, au fond, le secret et l'intégrité de la
personne. C'est ce que le gouvernement est entrain de faire à l'heure
actuelle.
Le premier ministre a invité les membres de l'Opposition à
faire des suggestions quant à l'amendement de ces articles. Je ne suis
pas pour faire le travail du gouvernement. Mais je dis que la seule
façon...
M. JOHNSON: Contentez-vous de faire celui de l'Opposition.
M. CHOQUETTE: Oui, c'est exact, c'est suffisant. Je ne suis pas pour
faire le travail du gouvernement, mais je dis que la seule façon
d'arriver à un résultat qui soit convenable, qui soit juste et
qui soit efficace en même temps, c'est de créer un moyen pour le
lieutenant-gouverneur en conseil d'instituer, à un moment donné,
une enquête sur telle corporation ou tel groupe de corporations, et
là, il y aura un commissaire de nommé en vertu de la Loi des
commissions d'enquête ou en vertu de cette loi-là, qui fera
enquête sur les circonstances frauduleuses de cette affaire. Si on veut
avoir le pouvoir de perquisitionner, on l'aura avec la permission de la cour
Supérieure ou la permission d'une autre cour.
Ce sont les observations que j'avais à faire quant à
l'article 3. Evidemment, si on me permet de passer en revue tout ce que je
trouve abusif dans cet article extraordinaire... Je m'étonne que des
juristes et surtout de la part du premier ministre qui est un avocat de
formation je m'étonne qu'il puisse venir présenter un
projet de loi comme celui-ci devant la Chambre. J'admets que, de la part d'un
individu qui n'a pas de formation juridique, qui ne sait pas calculer
jusqu'à un certain point la portée des textes, on peut excuser
beaucoup de choses.
Mais de la part du premier ministre, qui a une grande expérience
en matière juridique, qui était autrefois un avocat de
réputation lorsqu'il était dans la pratique, qui aune
expérience comme législateur, je m'étonne qu'il ne se
rende pas compte jusqu'à quel point les pouvoirs qu'il est en train de
réclamer pour son futur minis- tère s'éloignent de la
conception normale que quelqu'un qui a une formation juridique se fait. Et
c'est pour cette raison que la réputation du premier ministre, à
mes yeux, tombera beaucoup s'il ne se rend pas aux arguments que je lui
soumets.
M. BELLEMARE: Oui, c'est ça! On a fait ça souvent!
M. GOSSELIN: Faites enregistrer votre sourire!
M. CHOQUETTE: M. le Président, je voulais simplement faire une
preuve de ce que je trouvais assez extraordinaire dans l'article 3, puisque
nous sommes à l'article 3. Les renseignements que le ministre peut
demander sont tout renseignement ou tout document qu'il juge utiles. C'est
entièrement discrétionnaire: c'est lui qui détermine ce
qu'il juge utile et ce qu'il ne juge pas utile. C'est lui qui dit: Vous allez
me donner tel renseignement et, comme je le signalais plus tôt dans mon
argumentation cet après-midi, ce pouvoir d'inquisition ne s'adresse pas
seulement à des corporations qui sont sur le marché public, qui
ont emprunté dans le public, où il s'agit de
l'intérêt public: ça s'adresse à n'importe quelle
« binerie », n'importe quel « hot dog stand » de la
province de Québec. Une fois que c'est marqué incorporé
après, l'individu qui en est propriétaire peut se faire
questionner. Je ne veux pas imputer de motifs aux membres du gouvernement, loin
de là ma pensée, mais quand je parlais de l'abus de pouvoir, je
voulais dire, évidemment, qu'il était dans le pouvoir du ministre
d'abuser du pouvoir aussi considérable qui lui est
conféré.
Deuxième chose qui est assez formidable, c'est le pouvoir de
pénétrer, à tout moment raisonnable, dans tout lieu ou
endroit dans lequel des affaires sont exercées et des biens sont
gardés, dans lequel sont ou devraient être tenus des livres ou
registres. D'abord, on ne définit pas quels livres ou registres
devraient être tenus; c'est pour ça que les auteurs de cette
loi-là, réellement, ne conçoivent pas la portée de
ce qu'ils disent. « Dans lequel devraient être tenus des livres
», mais quels livres? On ne le dit pas. Mais c'est surtout au pouvoir de
pénétrer sans mandat, que je m'oppose. Alors qu'il est reconnu,
que des gens sont morts pour le principe de l'inviolabilité du domicile,
alors que, disons donc, tous les principes juridiques qui se sont
développés depuis le 10e siècle en Angleterre et dont nous
avons hérité sont à l'effet qu'on n'a
pas le droit de pénétrer dans la maison d'une personne,
sans avoir la permission de la cour et sans que celui qui demande d'y
pénétrer ait montré qu'il a une raison valable ou
raisonnable d'y pénétrer.
Ce n'est pas la conception de ceux qui proposent cette loi-là
qui, évidemment, vise l'efficacité. « Une fois qu'il a
pénétré dans les lieux, il peut saisir toute pièce,
lettre, télégramme et prendre copie de tout document ». Eh
bien, évidemment, je n'ai pas besoin d'insister sur ça. Il est
évident me semble-t-il, que ce n'est pas simplement par un geste ou une
décision administrative que l'on peut s'emparer de la
propriété d'autrui, mais que ça doit être
autorisé par une cour. Au moins, on doit avoir créé les
mécanismes de contrôle pour éviter l'arbitraire, pour
éviter l'usage abusif de ce pouvoir-là. Je n'insiste pas plus
qu'il ne faut sur ce point-là, M. le Président.
Et là, une fois qu'on est dans les lieux, à l'article 3,
« obliger le propriétaire ou le gérant des biens, etc,
à répondre à toute question appropriée se
rapportant à la vérification et à l'examen, soit
oralement, soit, s'il l'exige, par écrit, sous serment ou par
déclaration solennelle ». Ici, on arrive dans le domaine de
l'Inquisition la plus parfaite que j'aie jamais vue. On pénètre
sans mandat, on avise le gérant ou le propriétaire, alors qu'une
corporation, évidemment, n'a pas de propriétaire, me semble-t-il.
Elle a des actionnaires, mais elle n'a pas de propriétaire, ça
c'est clair. Il n'y a pas de propriétaire d'une corporation; la
corporation est propriétaire de ses biens, mais je passe sur ce petit
accroc juridique. Alors qu'on a pénétré dans les lieux
sans mandat, on avise le gérant ou le propriétaire ou celui qu'on
appelle le propriétaire et là on l'oblige, verbalement ou par
écrit, sous serment ou autrement, à répondre à
n'importe quelle question que le ministre peut juger opportune, alors qu'il a
entière discrétion pour dire ce que lui juge opportun.
M. le Président, c'est extraordinaire. Je n'aurais jamais
pensé que dans la Législature de la province de Québec on
aurait pu présenter un tel projet de loi. Je n'aurais jamais
pensé que dans le parlement de l'Etat du Québec, que dans un
parlement si respectueux des valeurs démocratiques...
M. JOHNSON: Attention!
M. CHOQUETTE: Attention à quoi?
M. JOHNSON: Si vous utilisez le mot « Etat », vous allez
être mis en dehors du corridor.
M. CHOQUETTE: Je ne suis pas menacé. Mais de toute façon,
M. le Président, je n'aurais jamais pensé que dans cette
Législature démocratique on puisse présenter un principe
qui viole tous les principes reconnus.
Finalement, il y a un autre pouvoir, celui où on force n'importe
quel individu sur les lieux à prêter l'assistance
nécessaire. Non seulement on va chez lui, mais on lui dit: C'est vous
qui allez transporter les caisses de documents, sortez-les de la cave,
donnez-les-nous puis apportez-les dans le camion. Or, si c'est de
l'esclavage...
M. LESAGE: On en fait un complice.
M. CHOQUETTE: On en fait un complice. S'il y a une forme d'esclavage
administratif organisé, c'est bien celle-là. Je plaisante parce
que vaut mieux en rire qu'en pleurer. Je plaisante parce que c'est ça la
situation. Et si les membres de la Législature ne sont pas capables de
se rendre compte de l'extraordinaire aspect de cette législation, eh
bien je me demande où notre province s'en va.
Je suggère donc que pour la protection du public, notion avec
laquelle je suis 100%, pour éviter et réprimer la fraude... Le
premier ministre, cet après-midi, a attiré notre attention sur
des cas où il y avait des rackets organisés, des faillites
frauduleuses, où l'Etat à l'heure actuelle n'avait pas les moyens
d'enquête nécessaires. J'admets que ces situations-là
existent et j'admets, comme tous les membres de l'Opposition, qu'il est
impératif que l'Etat se munisse des moyens de faire face à ces
éléments de la pègre. Mais je dis que ce n'est pas en
combattant la pègre par des moyens qui violent les principes
démocratiques qu'on va assurer l'ordre dans la société. Je
dis qu'il faut créer les commissions d'enquête nécessaires
et là, les membres de la pègre, les organisateurs de ces rackets,
les organisateurs de ces faillites frauduleuses seront obligés de venir
s'expliquer et on pourra saisir, avec la permission de la cour, les documents
qui seront nécessaires pour établir la preuve. Mais on aura
respecté les principes qui font qu'il fait bon vivre dans notre
société et non pas dans la société que nous laisse
entrevoir le bill 80.
M. JOHNSON: M. le Président, vous avez dû esquisser vous
aussi un sourire lorsque vous avez entendu le député d'Outremont
se lancer dans un art auquel il n'est pas tellement habitué, celui de
faire des compliments, de lancer des fleurs.
M. CHOQUETTE: Avec vous, ça vient tout naturellement.
M. JOHNSON: Il l'a fait avec un telle habileté envers celui qui
vous parle que ma modestie en est sortie toute déchiquetée et je
m'excuse si... j'ai dû être frappé parle pot alors que
certainement le député d'Outremont ne voulait lancer que les
fleurs. Je n'ai pas son expérience devant les tribunaux, je l'admets
volontiers, mais disons que je connais la jurisprudence administrative un peu
mieux et que je me scandalise un peu moins que lui de certaines dispositions
que nous voyons dans cette loi, dispositions que nous trouvons dans d'autres
lois.
D'abord le principe. Est-ce qu'on juge un gouvernement par les pouvoirs
qu'il a ou qu'il n'a pas ou si ce n'est pas plutôt par la façon
dont il exerce tous les pouvoirs qu'il devrait avoir et qu'il a? Je m'explique.
Ce n'est pas parce qu'un gouvernement ne se donne pas des pouvoirs qu'il est
bon ou qu'il est mauvais, qu'il est démocratique ou qu'il ne l'est pas.
J'ai appris, à force de l'entendre répéter pendant cinq
ans par des gens que j'avais en face de moi, qui occupaient ces banquettes, que
l'Etat avait une responsabilité envers ses citoyens.
Et la responsabilité, c'est de protéger ses citoyens
contre ceux qui abusent de la confiance qu'on a mise en eux ou des
privilèges que l'Etat leur a accordés. La confiance, disons que
cela s'applique à ce groupe de compagnies qui reçoivent des
dépôts, qui reçoivent des primes d'assurance et qui doivent
les gérer afin de payer des rentes ou d'effectuer des remboursements.
Disons que ce domaine des compagnies qui reçoivent des sommes pour les
faire fructifier ou pour éventuellement les remettre, ces compagnies
sont déjà, par des lois existantes, sujettes à certaines
inspections, et nous avons vu, particulièrement à Poccasion du
bill 51, un gouvernement se donner les instruments nécessaires pour
protéger les citoyens.
Il y a une autre catégorie de compagnies, de corporations. Ce
sont ces corporations qui, par un acte de l'Etat représentant tous les
citoyens, obtiennent le privilège lorsqu'ils font affaire de limiter
leur responsabilité et leur mise de fonds. Ce sont les compagnies
ordinaires. Ce privilège leur est accordé en vertu de lois. Ce
privilège leur est accordé à la condition qu'elles
respectent certaines lois édictées par le parlement et certains
règlements, s'il y a lieu, si la chose s'applique, édictés
en vertu de pouvoirs découlant desdites lois. Or, dans la loi des
compagnies, aux articles 107 et suivants, certains pouvoirs d'inspection sont
prévus.
Ils sont prévus entre autres à l'article 107, et ensuite
on voit comment le mécanisme se met en branle. Il est joliment
compliqué. Il est long, et encore là, il est laissé
à la discrétion du ministre dans une certaine mesure, puisque
c'est lui qui doit décider si à son avis les
pétitionnaires, actionnaires de la compagnie, possèdent une
partie suffisante des actions émises par la compagnie, partie qui serait
suffisante pour justifier une demande.
M. le Président, ce sont des pouvoirs, nous a-t-on
représenté, qui ne sont pas assez...
M. LESAGE: Qui ne permettent pas une action assez directe.
M. JOHNSON: Qui ne permettent pas une action assez directe, assez
rapide, qui ne permettent pas de protéger même les actionnaires
absents ou distraits, et qui...
M. LESAGE: Est-ce que le premier ministre pourrait nous...
M. JOHNSON: ... donnent tout le temps aux gens de s'en aller aux
Bermudes quand ils ont le goût de s'en aller...
M. LESAGE: Bien oui, mais est-ce que le premier ministre pourrait se
servir par exemple de l'exemple qu'il donne en rapport avec 3d du bill? Le
droit de saisir, s'il y a un soupçon, et de conserver jusqu'à ce
que des procédures judiciaires soient intentées?
M. JOHNSON: Ce sont des pouvoirs, M. le Président, qu'on a
accordés ici...
M. LESAGE: Dans la loi de l'impôt.
M. JOHNSON: ... à la demande du gouvernement qui nous a
précédés dans la loi de l'impôt.
M. LESAGE: Oui, ils existaient.
M. JOHNSON: Quand il s'agit d'impôt.
M. LESAGE: Cela existait déjà.
M. JOHNSON: Quand il s»agitpour l'Etat d'aller chercher, comme on
dit dans le comté de Baldwin: « His pound of flesh », l'Etat
lui a tous les pouvoirs au monde, tous, y inclus celui contre lequel
s'élève le député d'Outremont, celui de conscrire
en quelque sorte les personnes sur les lieux pour lui venir en aide, venir en
aide aux délégués de l'Etat.
Je ne crois pas, M. le Président, que le député
d'Outremont ne se soit jamais scandalisé
de cette situation au point de vue impôt, dans le domaine des
droits miniers.
Il suggère dans son intervention que nous utilisions la loi des
enquêtes. On sait ce que ça veut dire.
M. CHOQUETTE: C'est quelque chose de similaire. Ou un mécanisme
similaire.
M. JOHNSON: Bien le rôle de l'Opposition c'est
précisément de nous suggérer les mécanismes
similaires, les mécanismes qu'il croirait moins radicaux, des
mécanismes qui feraient moins mal, et quant à moi, M. le
Président, je les accepterais volontiers. Le député
d'Outremont n'a pas jugé à propos de faire de suggestions
pratiques, il dit que c'est au gouvernement de faire ce travail. Je crois que
l'Opposition pourrait nous aider, si réellement sa lutte est
basée sur des fondations sérieuses. Le député
d'Outremont n'a donc pas fait de suggestion.
M. CHOQUETTE: Un instant, M. le Président, j'invoque le
règlement. J'ai fait une suggestion...
M. JOHNSON: Laquelle?
M. CHOQUETTE: J'ai suggéré de biffer les trois articles et
de les remplacer par un mécanisme similaire. Il ne faut pas oublier que
cette loi-là est venue en première lecture cet après-midi,
je n'ai pas le temps de rédiger toute une loi. Je suis bien prêt
à le faire d'ici à demain, mais...
M. JOHNSON: Cette loi a été distribuée avant le
congé que nous avons connu.
M. LESAGE: Non, non.
M. CHOQUETTE: Mais je suis comme tout le monde, ma pensée ne
s'était pas réellement précisée jusqu'à
temps que j'entende le premier ministre et le ministre des Finances. Une fois
que j'ai entendu leur argumentation je suis devenu encore plus convaincu de ce
que j'avais dit.
M. JOHNSON: Ah bon!
M. CHOQUETTE: Alors, à ce moment-là, j'ai cherché
une solution et j'ai trouvé la solution que j'ai suggérée
au premier ministre et qui me semble juste, qui me semble, disons donc, tenir
compte des nécessités de faire enquête dans des situations
frauduleuses comme l'a indiqué le premier ministre cet
après-midi, mais aussi des droits des personnes. Si le premier ministre
veut le remettre...
M. JOHNSON: D'abord si on veut être de bon compte, on n'apportera
pas la loi, on n'invoquera pas, dis-je, les droits de l'homme quand il s'agit
des compagnies. On va faire une certaine distinction entre l'individu et la
personne morale qu'est une compagnie. Evidemment, M. le Président.,.
M. LESAGE: Il y a des compagnies wholly owned par des gens de bonne foi
et...
M. JOHNSON: Oui.
M. CHOQUETTE: Le premier ministre ne légifère pas comme
ça.
M. LESAGE: Oui, il y en a beaucoup plus, il y en a 999 sur 1,000.
M. JOHNSON: Bien, je veux bien être obligé d'admettre ces
chiffres-là, mais je crois qu'ils sont joliment trop enthousiastes.
M. LESAGE: De bonne foi, certainement.
M. JOHNSON: Les corporations qui appartiennent en somme à un seul
individu sauf pour deux actions qualificatrices...
M. LESAGE: Il y en a beaucoup.
M. JOHNSON: ... généralement une à son
épouse, l'autre à sa fille ou à son fils ne sont pas aussi
nombreuses que les propos du chef de l'Opposition pourraient le faire croire.
Si on avait une façon d'atténuer ce paragraphe en disant que
« peut sur plainte de l'un des actionnaires ou de l'un des
créanciers », ou quelque chose de ce genre, j'accepterais cette
suggestion avec...
M. LESAGE: Bien...
M. JOHNSON: ... plaisir, je pense bien, parce que ce n'est pas notre
intention même de donner l'impression de vouloir exercer de tels
pouvoirs. Que l'on restreigne les pouvoirs du paragraphe 1 à des
occasions où il y a une dénonciation par un actionnaire ou...
M. LESAGE: Bien. Peut-être que le premier ministre...
M. JOHNSON: ... un créancier, M. le Prési-
dent, à ce moment-là on aurait un commencement de
suggestion et on pourrait en discuter, mais ce n'est pas la suggestion qu'on
nous fait là. Il reste que...
M. CHOQUETTE: Faire enquête...
M. JOHNSON: ... nous sommes devant des cas concrets actuellement...
M. LESAGE: Oui, mais... Il me semble toujours quand on peut
légiférer...
M. JOHNSON: ... et le gouvernement d'après les conseillers
juridiques, des gens qui ont la formation juridique et l'expérience, le
gouvernement ne peut pas bouger, et ce n'est pas intéressant.
M. LESAGE: Mais quand on peut légiférer pour des cas
d'exception, il me semble que l'on ne doit pas adopter une loi qui peut
être utilisée comme une tracasserie pour l'ensemble, alors que
l'on sait que c'est seulement l'exception que l'on vise.
M. JOHNSON: Ce sont des pouvoirs qui sont tracassiers dans la mesure
où ils sont utilisés.
M. LESAGE : Je parle des pouvoirs.
M. JOHNSON: On dit: Cela va peut-être arriver une fois sur mille
et il ne faut pas légiférer pour ces cas-là.
M. LESAGE: Non, non.
M. JOHNSON: Cela me frappe, chaque fois que je monte à bord d'un
avion...
M. LESAGE : Je dis qu'au contraire il faut légiférer pour
ces cas-là, mais pas pour tous les cas.
M. JOHNSON: ... là on a l'exercice de la mise en place du veston
de sauvetage. Cela n'arrive pas une fois sur 2,000 qu'on coule, mais on emporte
tout le temps le veston de sauvetage. Les règlements de l'aviation
internationale prévoient qu'on doit en avoir et si une compagnie disait:
Mon Dieu, on n'a jamais eu d'accident, ce n'est pas nécessaire, elle
serait mise à l'amende.
M. LESAGE: C'est comme l'assurance.
M. JOHNSON: Alors, même si on ne doit pas utiliser souvent cette
procédure...
M. LESAGE : Ce n'est pas la même chose.
M. JOHNSON: ... il semble qu'il soit nécessaire d'avoir ce
pouvoir ou un pouvoir similaire.
M. LESAGE: Mais lorsqu'il s'agit de crime l'on sait qu'il peut y
en avoir des crimes, que le crime heureusement c'est l'exception dans la
procédure de répression des crimes, on entoure la
dénonciation et le processus de la poursuite de précautions qui
garantissent à l'accusé, même s'il s'agit d'une compagnie
limitée, tous les moyens de se défendre en toute circonstance.
J'en suis surtout au procédé de l'enquête et il me semble
qu'il faudrait prévoir qu'à un moment donné un juge peut
intervenir. Il faudrait, il me semble, se faire donner par une cour de justice
à qui l'on aura prouvé, au moins prima facie, qu'il y a cause
raisonnable et probable. Il me semble que ce serait normal.
Avant d'aller saisir les livres, de les retenir jusqu'à ce qu'il
y ait une poursuite qui peut ne pas venir, n'y aurait-il pas moyen de
prévoir que, pour exercer les pouvoirs prévus à l'article
3, le ministre devra d'abord obtenir la permission d'un juge d'une cour de
justice? Il me semble que ce serait une garantie à donner à
l'immense majorité des gens de bonne foi. Est-ce que le premier ministre
voudrait y penser? On peut bien suspendre l'étude de ces articles; il
pourra en discuter avec ses conseillers juridiques. Ce sont les articles sur
lesquels nous avons des objections, je crois; quant au reste, ça ira
très rapidement et nous pourrions, ce soir, adopter le bill de la
voirie.
M. CHOQUETTE: Ce qui est aggravant, c'est l'article 12 qui permet au
ministre de déléguer tous ses pouvoirs à n'importe quel
fonctionnaire. C'est aggravant.
M. JOHNSON: Vous ne voyez pas le ministre se promener, faire des
inspections?
M. CHOQUETTE: Je suis d'accord, mais je dis que c'est aggravant, dans ce
sens que les abus de pouvoirs possibles que j'imputais au ministre peuvent
être commis par des fonctionnaires, des subalternes.
M. JOHNSON: Cela va de soi. Des pouvoirs de ce genre-là, il faut
avoir la possibilité de les déléguer, mais le ministre
doit répondre en Chambre de ça.
M. LESAGE : Très bien, entendu. Protégeons le
ministre.
M. JOHNSON: Voici. A l'heure actuelle, pour prévenir certaines
fraudes, pour nettoyer certaines situations qu'on a lieu de croire plus ou
moins propres, on pourrait toujours demander aux inspecteurs de l'impôt
sur le revenu d'aller faire un tour et de surveiller tel ou tel aspect du
problème. Mais je n'aime pas ce système et je ne l'appliquerai
pas. Je pense que c'est de gauchir toute administration que d'utiliser ces
stratagèmes, ces détours.
M. LESAGE: On le fait aux Etats-Unis, et Dieu sait que le gouvernement
américain est joliment critiqué pour cette façon
d'agir.
M. JOHNSON: Mais que l'on soit franc, que l'on apporte en Chambre une
loi, que l'on demande des pouvoirs, que l'on rende le ministre responsable
à la Chambre de ses actes, je pense que c'est la façon
démocratique.
Mais quant à moi, je n'aurais pas d'objection à ce qu'on
limite, qu'on circonscrive ce pouvoir-là pour n'atteindre que les fins
qu'on veut atteindre. Je n'ai pas d'objection à ça. Maintenant
qu'on ne se place pas des entraves qui empêcheront une administration
efficace. Qu'on fasse une distinction entre les compagnies qui ont de l'argent
d'autrui, comme les compagnies d'assurance, compagnies de fidéi-commis
et ces autres du genre et des compagnies qui ne concernent en somme qu'une
seule personne, je ne vois pas d'objection. Cepen-dans, je pense qu'il faut
aller beaucoup plus loin que le mécanisme prévu par l'article 107
de la Loi des compagnies. On sait l'état dans lequel se trouve
l'actionnaire minoritaire, l'actionnaire isolé. Par ailleurs, on sait
comme ce peut être malcommode pour le détenteur d'une seule action
qui veut créer des problèmes.
M. LESAGE: Si l'exercice des pouvoirs prévus aux articles 3 et
suivants était sujet à l'obtention d'un bref d'un juge, d'un
mandat ou d'une permission, d'un licet d'un juge.
M. JOHNSON: Même ex parte?
M. LESAGE: Certainement, il faudrait que ce soit ex parte.
M. CHOQUETTE: On ne paut pas donner un avertissement à
ceux...
M. LESAGE: Il ne faut pas aviser celui qu'on veut surprendre. Je pense
sérieusement... Dans le fond, ce que nous discutons là, c'est de
la protection législative. Le premier ministre a raison quand il dit
qu'un gouvernement peut toujours abuser. Mais quand même, si, dans la
population, on sait qu'il faut un mandat ou un licet d'un juge, il me semble
qu'on obtiendra ex parte, mais il faudra montrer au juge qu'il y a cause
raisonnable.
M. JOHNSON: Le ministre des Finances me suggère un amendement
tout de suite à l'article 12 que nous serions prêts à
accepter. Disons qu'on va réfléchir en même temps sur les
autres. Ce serait de la délégation spécifique plutôt
que de la délégation générale.
M. LESAGE: Délégation nominative. M. JOHNSON:
Nominative.
M. CHOQUETTE: D'accord, c'est un peu mieux. Ce n'est pas riche, mais
c'est un peu mieux. Si on me permet, je pense que le dilemme dans lequel le
gouvernement se trouve à l'heure actuelle, le dilemme de
l'efficacité de l'enquête, mais en même temps du respect des
droits du citoyen, que ce dilemme peut se régler par la nomination d'un
commissaire enquêteur. C'est la seule solution possible.
M. JOHNSON: El commissar, ah non!
M. CHOQUETTE: Non, pas d'un commissaire.
M. JOHNSON: Non, je préférerais l'autorisation judiciaire.
C'est beaucoup plus... Alors, disons qu'on suspend trois et quatre pour le
moment.
M. LE PRESIDENT: L'étude des articles 3 et 4 est suspendue.
M. JOHNSON: Cinq.
M. BELLEMARE: Trois et quatre, suspendus.
M. LE PRESIDENT: Article 5.
M. CHOQUETTE: A l'article 5, M. le Président, f ai des
représentations à faire. Voici. L'article b, là, je parle
d'un élément qui n'est pas venu plus tôt dans la
discussion. Personnellement, je trouve que l'article 5, dans son ensemble, est
abusif, mais l'article b l'est plus particulièrement que d'autres.
« Pour éluder les dispositions de la présente loi,
détruit, altéré, mutilé ou caché des
registres ou livres, comptes ou en a disposé autrement ». On ne
dit même pas quels sont les livres, registres
ou comptes. Quels registres, livres ou comptes sont prescrits par la
présente loi, alors que tout est discrétionnaire et tout est dans
les pouvoirs du ministre?
M. JOHNSON: J'aurais dû répondre au député
tantôt. Ce sont évidemment les livres qu'on est obligé de
garder en vertu de la loi qui régit telle compagnie
déterminée. On le voit clairement au paragraphe a, de l'article 3
par exemple. On y dit: « Verifier ou examiner les livres, registres ou
tout compte, pièce justificative, lettre, télégramme ou
autre document qui se rapporte ou qui peut se rapporter aux renseignements qui
se trouvent ou devraient se trouver dans les livres ou registres, et prendre
copie de tout document qu'il juge nécessaire ». Ce sont
évidemment les livres qu'on doit garder en vertu de la loi ou des
règlements prévus par la loi.
M. CHOQUETTE: Mais de quelle loi?
M. JOHNSON: Toutes et chacune des lois...
Il y a dans chacune des lois dont le ministre aura...
M. CHOQUETTE: C'est la présente loi qui est marquée.
M. BELLEMARE: Oui, oui, mais...
M. JOHNSON: Dans chacune des lois prévues.
M. CHOQUETTE: Mais il y a des pénalités prévues
dans ces lois-là pour quelqu'un qui ne garde pas les livres requis. Il
n'est pas besoin d'imposer une double pénalité, si c'est le
cas.
M. JOHNSON: Non, il n'y en a pas dans toutes les lois. C'est un domaine
joliment épars d'abord et c'est là un euphémisme
c'est un domaine qui était en friche. Il y a longtemps qu'on l'a
inspecté, labouré ou hersé. Il y a longtemps plus de
broussailles là que de beaux parterres, dans toute cette série de
lois énumérées à l'article 23. On verra, si on se
donne la peine de les étudier, qu'il y a longtemps qu'on aurait dû
amender certaines de ces lois-là.
M. CHOQUETTE: Oui, mais c'est ce que je trouve formidable dans l'aveu du
premier ministre. Il nous dit que ces lois-là requièrent des
amendements impératifs. Pourtant, ce ne sont pas ces amendements
impératifs qu'il nous apporte à la Chambre; c'est une loi qui
donne des pouvoirs arbitraires à un ministre de faire n'importe quoi.
C'est la solution que le gouverne- ment propose. C'est la solution à
laquelle l'Opposition s'objecte. Nous refusons de conférer des pouvoirs
aussi étendus à un gouvernement ou à un ministre.
M. BELLEMARE: Est-ce que le député...
M. CHOQUETTE: Nous refusons de donner notre consentement à des
abus de pouvoirs.
M. JOHNSON: Des abus de pouvoirs qui n'ont pas eu lieu.
M. CHOQUETTE: Qui auront lieu sans aucun doute par l'étendue des
pouvoirs qui sont accordés ici sans aucun contrôle.
M. BELLEMARE: J'ai eu l'occasion en cette Chambre de défendre un
bill particulier pendant plusieurs semaines, celui des mines, lorsque nous
avons refait toute la loi des mines. J'ai fait à ce moment-là une
étude assez poussée de tous les articles. Et si l'honorable
député veut s'y référer, il va s'apercevoir
à l'article 37 que « le ministre peut déléguer une
personne et l'autoriser à vérifier et à examiner les
livres et les registres, à examiner toutes les procédures et
toutes les méthodes, à obliger le propriétaire, le
gérant des biens de l'entreprise ou toute autre personne présente
sur les lieux à lui prêter toute l'aide nécessaire. Si au
cours d'une vérification ou d'un examen par cette personne
autorisée par le ministre, il lui paraît qu'une Infraction
à la présente loi et aux règlements a été
commise, ladite personne est autorisée à prendre tous les
échantillons, à saisir et à emporter tous les registres,
les livres, les comptes, les pièces justificatives, les lettres, les
télégrammes et autres documents, à les garder
jusqu'à ce qu'ils aient été produits lors des
procédures judiciaires. Et cette loi a été
sanctionnée le 8 avril 1965. A ce moment-là, le gouvernement qui
nous a précédés prouvait la nécessité
absolue qu'il y a d'intervenir dans certains cas spécifiques. Et c'est
dans la législation qu'on a présentement dans la province de
Québec. Elle existe, là, en toutes lettres.
M. JOHNSON: C'est à cause de ça que l'avocat Choquette
s'est porté candidat dans Outremont, à cause de cette loi
qu'avait passée le gouvernement antérieur, ou s'il l'ignorait
à ce moment là?
M. DOZOIS: Il n'en a pas demandé le rappel pourtant!
M. CHOQUETTE: Non, ce n'est certainement pas à cause de
ça.
M. BELLEMARE: Non, mais regardez l'article, vous allez voir, c'est
fantastique.
M. CHOQUETTE: Non, écoutez, je ne suis pas en mesure de discuter
sur un article qui est complètement différent de celui qui est
proposé par l'actuelle législation.
M. BELLEMARE: Non, non, non.
M. CHOQUETTE: Deuxièmement, l'article que l'honorable ministre du
Travail cite est un article qui s'applique en droit minier, là où
il y a des concessions minières. Par conséquent, il s'agit du sol
de la Couronne, il s'agit d'échantillonnage, il s'agit de « claims
» et de questions...
M. JOHNSON: Non, non, non.
M. CHOQUETTE: Tandis que, dans l'actuelle législation...
M. BELLEMARE: Ce n'est pas ça du tout. Le député,
M. le Président...
M. CHOQUETTE: Est-ce que je pourrais finir mon intervention, M. le
Président?
M. BELLEMARE: Le député me dit que ça ne s'applique
pas, parce que ce sont des concessions. Ce n'est pas ça du tout.
M. CHOQUETTE: Laissez-moi finir mon intervention.
M. BELLEMARE: Lisez l'article 36.
M. CHOQUETTE: M. le Président, je m'objecte à ce que le
ministre du Travail m'interrompe...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CHOQUETTE: M. le Président, tandis que, dans la
présente législation, ce sont toutes les corporations de la
province de Québec, à tel point qu'on pourrait se demander
pourquoi le gouvernement dans l'esprit qui l'anime lorsqu'il nous
propose cette législation-là, vu qu'il veut tellement
réprimer la fraude et qu'il veut être d'une telle
efficacité ne veut pas appliquer cette
législation-là non seulement aux corporations de la province de
Québec, mais à tous les individus. Je me demande ce qui
arrête le gouvernement dans la voie où il est engagé.
M. BELLEMARE: Ah!
M. CHOQUETTE: Je ne le sais pas, parce que la pensée qui anime le
gouvernement m'a l'air tellement floue et incertaine quant aux buts exacts qui
vont être remplis par ces enquêtes que je suis moi-même
réellement dans le doute sur les intentions profondes du
gouvernement.
Mais l'aspect incertain, c'est que le gouvernement ne sait pas quel sera
le résultat de cette enquête-là. Est-ce que ça sera
le retrait de la charte? Est-ce qu'on fait enquête pour savoir si on va
retirer la charte à des gens qui en abusent? Si c'est le cas, accordons
des pouvoirs en fonction de ça. On demande ces pouvoirs d'enquête
pour enquêter sur des faillites frauduleuses. A ce moment-là, je
dis qu'on entre dans le domaine du droit criminel. Si on est dans le domaine du
droit criminel, respectons les règles qui s'imposent en droit criminel
et que j'ai énumérées tout à l'heure dans mon
intervention.
Je pense que la pensée du gouvernement n'est pas
réellement précisée. Le premier ministre l'a presque
avoué tout à l'heure. Il dit: Il y a des renseignements à
obtenir: on ne sait pas trop lesquels obtenir et puis là on veut tous
les obtenir par cette loi-là. D'un autre côté, en plus de
ça, il nous laisse entendre: « On veut enquêter au point de
vue administratif pour que toutes les chartes soient en ordre », ce qui
est normal pour empêcher que les lettres patentes se perdent dans les
nuages, comme ça s'est toujours produit en matière de compagnie.
C'est peut-être normal aussi, mais il dit : « Par
contre, on veut enquêter sur la fraude et puis prévenir la fraude,
protéger le public ». Mais là, on arrive dans un domaine
qui est bien plus grave qu'une simple enquête administrative par un
fonctionnaire nommé par un ministre qui a le droit d'aller chez
n'importe qui, de saisir n'importe quel document et de demander n'importe quel
renseignement.
Il faut quand même calculer les pouvoirs qu'on réclame par
rapport aux effets qu'on recherche. C'est ça que le gouvernement ne fait
pas. Le gouvernement réclame des pouvoirs formidables, peut-être,
pour faire face à des situations insignifiantes. Si ce sont des
situations insignifiantes, que les pouvoirs soient insignifiants. Si les
situations sont graves, elles méritent d'être traitées
gravement et quand je parle de grave je veux dire s'il s'agit de fraude et,
à ce moment-la, si c'est grave, qu'on institue une enquête en
bonne et due forme et là les droits des personnes et des individus
seront respectés suivant les normes actuelles.
M. le Président, le gouvernement cherche à régler
trop de problèmes par une loi. En définitive, c'est ça et
puis il en voit beaucoup.
J'admets qu'il a beaucoup de problèmes à régler;
réellement, à ce point de vue-là, je suis bien prêt
à reconnaître la position difficile du gouvernement, d'accord,
mais je ne suis pas prêt à approuver un genre de
législation comme ça.
M. JOHNSON: Alors, l'article 3 et l'article 4 sont suspendus. Il reste
l'article 5. Est-ce qu'on a des remarques à faire quant à
l'article 5 ou si on veut le suspendre pour étudier les articles 3 et
4?
M. CHOQUE TTE: Si vous voulez suspendre, je pense qu'il devrait
être suspendu...
M. JOHNSON: Article 6.
M. CHOQUETTE: ...aussi avec les autres.
M. LE PRESIDENT: Adopté?
M. JOHNSON: Non, un instant, s'il vous plaît, j'ai un amendement
à présenter. J'aimerais le formuler de la façon suivante:
«Le ministre peut, avec l'autorisation du lieutenant-gouverneur en
conseil, conclure des accords avec tout gouvernement ou organisme
gouvernemental dans le but de favoriser l'application de la présente
loi. » Je n'ai pas besoin de faire un dessin; il pourrait arriver que
nous ayons à faire des ententes avec certains organismes gouvernementaux
d'autres pays quant aux valeurs mobilières. Et ce texte, si je ne
m'abuse, suit de très près le texte adopté dans le bill 60
au sujet des accords entre gouvernements et organismes gouvernementaux.
M. BELLEMARE: Adopté.
M. LE PRESIDENT: La motion pour amendement est-elle adoptée?
Adopté. Article 6, adopté? Adopté. Article 7,
adopté?
M. JOHNSON: Un instant, non, il y a un amendement. Il faudrait enlever
« détaillé » pour la raison très simple qu'on
ne peut pas à la fois garder le secret et faire un rapport
détaillé. On aura remarqué qu'il y a des dispositions
prévoyant le secret ou liant au secret tout fonctionnaire ou tout chef,
même le ministre je pense, qui aurait obtenu des renseignements au cours
de ses inspections. Alors on modifie l'article 7 en enlevant le mot «
détaillé ». Cela va, M. le Président, vous avez
rayé « détaillé »?
M. LE PRESIDENT: L'amendement est adopté? Adopté. Article
7, adopté? Adopté. Article 8.
M. JOHNSON: Alors c'est là, à l'article 8, que nous
introduisons ce que j'avais annoncé cet après-midi, un amendement
concernant les sous-ministres adjoints. « Le lieutenant-gouverneur en
conseil nomme un sous-ministre des Institutions financières, compagnies
et coopératives, » et j'ajoute, je vous envoie le texte, M. le
Président, j'ajoute « ci-après désigné sous
le nom du sous-ministre et au moins un sous-ministre associé.
»
M. LE PRESIDENT: La motion pour amendement est-elle adoptée?
Adopté. Article 8, adopté? Adopté. Article 9.
M. JOHNSON: Evidemment, en conséquence, on doit ajouter à
la fin de l'article 9 les alinéas suivants: « Sous
l'autorité du ministre et du sous-ministre et en tenant compte de la
coordination établie dans le ministère, l'un des sous-ministre
associés a la responsabilité de l'application des lois concernant
la constitution, le fonctionnement, l'inspection et la liquidation des
coopératives faisant affaires dans la province. » Alinéa
suivant: « Les sous-ministres associés exercent en outre les
pouvoirs du sous-ministre dans les sphères que détermine le
ministre. »
M. LESAGE: Les sphères ou les domaines ou...
M. JOHNSON: Je pense que c'est mieux les sphères, parce qu'on en
est toujours dans le même domaine qui est divisé en...
M. LESAGE: Est-ce qu'il y a des domaines dans une sphère ou des
sphères dans un domaine? C'est une question de sémantique que je
laisse au premier ministre.
M. JOHNSON: Je référerai à la question,
après la passation de la loi, au ministre des Affaires
culturelles...
M. LESAGE: Référez donc ça au député
de Chicoutimi.
M. JOHNSON: ... à ses experts. Donc 9, on a ajouté deux
alinéas.
M. LE PRESIDENT: L'amendement est-il adopté? Adopté.
Article 9, adopté. Article 10?
M. JOHNSON: Article 10, je pense, M. le Président, qu'il n'est
pas là une difficulté. C'est le texte habituellement...
M. LESAGE: Oui, c'est le texte courant dans toutes les lois des
ministères.
M. JOHNSON: ... adopté pour des lois de ce genre. Article 11, le
lieutenant-gouverneur en conseil...
M. LESAGE: Même chose.
M. LE PRESIDENT: Article 10, adopté. Article 11?
M. JOHNSON: Oui.
M. LE PRESIDENT: Article 11, adopté.
M. JOHNSON: Article 12, ici nous allons présenter...
M. LESAGE: Oui.
M. JOHNSON: ... un petit texte d'amendement...
M. LESAGE: Ne vaudrait-il pas mieux suspendre l'article 12...
M. JOHNSON: On va le suspendre en même temps que les autres, oui
d'accord. Article 13...
M. LE PRESIDENT: Article 12, suspendu. Article 13?
M. JOHNSON: On aura remarqué que les personnes employées
au service du gouvernement ne doivent communiqer ou permettre que soit
communiqué à qui que ce soit, autre qu'une personne
autorisée généralement et spécifiquement par le
ministre lui-même, une information obtenue en vertu des dispositions de
la présente loi. Alors, je crois bien que c'est calqué sur une
disposition similaire dans la loi de l'impôt.
M. BELLEMARE: Adopté. M. JOHNSON: Article 14...
M. LE PRESIDENT: Article 13, adopté. Article 14?
M. JOHNSON: Article 15?
M. LE PRESIDENT: Article 14, adopté. Article 15?
M. LESAGE: Ce sont les articles coutumiers. M. JOHNSON: Article 16?
M. LE PRESIDENT: Article 15, adopté. Article 16, adopté.
Article 17, adopté.
M. LESAGE: Une minute. Oui.
M. LE PRESIDENT: Article 18, adopté.
M. LESAGE: Même chose.
M. LE PRESIDENT: Article 19, adopté. Article 20? Adopté.
Article 21?
M. JOHNSON: Article 21, un amendement, M. le Président. Il
faudrait remplacer l'article tel qu'il se lit par le suivant: Article 21:
L'article 3 de la Loi du ministère des Finances (Statuts refondus 1964,
chapitre 64) est modifié en retranchant le paragraphe 4. »
M. LESAGE: Non, on retranche. Qu'est-ce qu'il dit à l'heure
actuelle pour éviter le...
M. JOHNSON: Les sociétés charitables sont
déjà sujettes à l'inspection du surintendant des
assurances. Dans le paragraphe 4 dans cette même loi, les assurances et
les sociétés charitables sont mentionnées dans le
paragraphe 4, alors on veut par la nouvelle rédaction de 21, donner
suite... C'est-à-dire qu'il n'est pas nécessaire d'y
insérer le paragraphe qu'on avait la.
Il s'agit tout simplement de l'enlever puisque la Loi des assurances
prévoit déjà que ces sociétés qu'on appelle
charitables sont sujettes à l'inspection du surintendant.
M. LESAGE: Ce n'est pas ce qu'il y a de mieux comme coordination.
M. LE PRESIDENT: Article 20. Est-ce que l'amendement est adopté?
Adopté. Article 21, adopté. Article 22. Article 22,
adopté. Article 23.
M. LESAGE: Oh ça, c'est la liste. UNE VOIX: La liste. M. LE
PRESIDENT: Article 23, adopté. M. LESAGE: Oui.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 24,adopté.
M. LESAGE: Oui, ça va.
M. LE PRESIDENT: Article 25,adopté...
M. LESAGE: Bien non.
M. JOHNSON: On suspend. On verra demain avec l'étude des
autres.
M. LESAGE: Il reste les articles 3, 4, 12 et 25.
M. CHOQUETTE: Les articles 3, 4, 5...
M. JOHNSON: Les articles 3, 4, 5, 12 et 25, puisqu'on suspend les
articles...
M. LESAGE: Les articles, 3, 4,5,12 et 25.
M. JOHNSON: Merci. Si vous voulez faire rapport, M. le Président,
et demander la permission de siéger à nouveau.
M. LEBEL (président du comité plénier): M. le
Président, f ai l'honneur de faire rapport que le comité n'a pas
fini de délibérer et demande la permission de siéger
à nouveau,
M. PAUL (président): Quand le comité pour-ra-t-il
siéger à nouveau? Prochaine séance.
Bill no 85
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Voirie propose la
deuxième lecture du bill 85, Loi modifiant la Loi de la voirie et
d'autres dispositions législatives. Cette motion est-elle
adoptée?
M. LESAGE: Deuxième lecture, oui. M. LE PRESIDENT:
Adopté.
M. LESAGE: Adopté. C'est de la mécanique
législative, ça va se faire en comité.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Voirie propose que je quitte
maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité
plénier pour l'étude du bill 85, Loi modifiant la Loi de la
Voirie et d'autres dispositions législatives. Cette motion est-elle
adoptée? Adopté.
M. LAFONTAINE: Le lieutenant-gouverneur ayant pris connaissance des
dispositions de ce bill en recommande la prise en considération.
M. LEBEL (président du comité plénier): Article
premier.
UNE VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 2.
UNE VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 3.
M. GOSSELIN: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 4, adopté. Article 5.
M. GOSSELIN: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 6.
M. GOSSELIN: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 7.
M. GOSSELIN: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 8, adopté. Article 9,
adopté. Article 10.
M. GOSSELIN: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 11.
M. GOSSELIN: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 12, adopté. Article
13?
M. GOSSELIN: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 14?
M. GOSSELIN: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 15? Adopté. Article 16?
Adopté.
M. GOSSELIN: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Article 17, adopté?
M. LESAGE: Je comprends que je pourrais faire les remarques que j'ai
l'intention de faire et qui d'ailleurs seront très brèves lorsque
nous en viendrons à l'étude du titre de la loi. La seule
suggestion que j'ai à faire c'est que l'on dise: « Loi modifiant
la Loi de la Voirie, la Loi
des Travaux publics et d'autres dispositions législatives
», puisque les deux modifications les plus importantes ont trait à
ces deux lois. C'est toute la section concernant les ponts dans la Loi des
Travaux publics que l'on enlève de la Loi des Travaux publics pour
l'inclure à la Loi du ministère de la Voirie. Alors, les autres
amendements à d'autres lois sont mineurs, tandis que celui que je viens
de mentionner est important. Il s'agirait simplement de dire: « Le
ministère de la Voirie, la Loi des Travaux publics et d'autres
dispositions législatives ». C'est pour la facilité de ceux
qui font des recherches juridiques.
M. LE PRESIDENT: L'amendement est-il adopté? Adopté.
L'amendement du titre est adopté? Adopté.
M. LESAGE: Evidemment, cela aurait été bien
intéressant d'appeler ça la Loi du ministère des ponts et
chaussées.
M. BELLEMARE: Des ponts et chaussées! M. LESAGE: Mais oui, cela
devient ça.
M. PINARD: M. le Président, est-ce que le ministre peut me dire
si des recherches ont été faites de façon approfondie pour
en arriver possiblement à donner un nouveau titre au ministère et
à appeler désormais le ministère de la Voirie, le
ministère des ponts et chaussées ou quelque chose comme
ça? Parce que je sais que cela avait été envisagé
au ministère de la Voirie à l'époque. Je ne sais pas si
ces recherches-là ont été poursuivies, mais je pense que
le ministre actuel avait fait une déclaration dans ce sens-là au
cours d'une conférence prononcée devant un club social ou devant
l'Association des constructeurs de routes du Québec.
M. LAFONTAINE: M. le Président, évidemment, la loi que
nous présentons aujourd'hui est la suite logique d'un paragraphe du
discours du Trône dans lequel le gouvernement disait: Une étape
importante sera franchie vers la création d'un ministère de
l'Equipement, grâce à un projet de loi qui donnera au
ministère de la Voirie la responsabilité de la construction et de
l'entretien des ponts.
M. LESAGE: Il aurait dû faire son discours en deuxième
lecture.
M. LAFONTAINE : M. le Président, je ne fais que répondre
au député de Drummond.
M. LESAGE: Non, non. D'abord, le ministre ne répond pas à
l'ancien ministre de la Voirie et, deuxièmement, il fait son discours de
deuxième lecture. Il est trop tard. Il le fera en troisième
lecture.
M. LAFONTAINE: Le député m'a demandé si on doit
changer le titre et s'il y a d'autres dispositions législatives qui s'en
viennent. Disons que pour avoir réellement une planification dans la
province au point de vue de la voirie, il fallait commencer parle
commencement.
Il fallait prendre les ponts qui appartenaient aux Travaux publics et
les emporter au ministère de la Voirie. Cette Chambre sera certainement
intéressée à savoir que depuis 1920 dans la
province...
M. LESAGE: On en a assez des discours du ministre. Il est parti en
orbite!
M. LAFONTAINE: ... tous les gouvernements ont essayé d'emmener
les ponts au ministère de la Voirie.
UNE VOIX: Adopté. Article 21.
M. LE PRESIDENT: Article 18, adopté. Article 19, adopté.
Article 20...
M. PINARD: Laissez ça comme ça.
M. LESAGE: Je dirai au premier ministre ce que j'avais à dire;
c'est trop dangereux que le ministre tue son bill lui-même.
M. LE PRESIDENT: Article 21, adopté? Adopté. Article 22,
adopté? Adopté. Article 23, adopté? Adopté.
M. LEBEL (Président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité a
adopté le bill 85 avec un amendement au titre.
M. PAUL (Président): L'honorable ministre de la Voirie propose
que l'amendement adopté par le comité soit maintenant
reçu, lu et agréé. Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
M. DOZOIS: Troisième lecture.
Troisième lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Voirie propose la
troisième lecture du bill tel qu'amendé dans son titre. Cette
motion est-elle adoptée?
DES VOIX: Adopté.
M. JOHNSON: M. le Président, on pourrait peut-être, ce
n'est pas litigieux du tout, adopter immédiatement l'amendement
apporté par le Conseil législatif au bill 52.
M. LESAGE : Demain. Il est trop tard.
M. JOHNSON: On pourrait peut-être se payer un petit dessert, un
autre petit bout du discours du député de Huntingdon.
M. FRASER: Envoyez.
M. LESAGE: Pas ce soir. Demain.
M. JOHNSON: Alors on pourrait demander l'ajournement de la Chambre
à...
M. LESAGE : Deux heures et demie.
M. JOHNSON: Il y a du comité demain.
M. LESAGE: Deux heures et demie. Il n'y a pas de visite qui arrive
demain? Il y a du comité demain matin. Comité des bills
privés à dix heures et demie.
M. DOZOIS: Est-ce que ce sera long?
M. LESAGE: Eh bien, on en a pour une heure ou une heure et demie, je
pense bien.
M. JOHNSON: Alors, disons deux heures et demie.
M. LESAGE : Deux heures et demie. Maintenant quel sera l'ordre?
M. JOHNSON: Le bill... M. LESAGE: Bill 22?
M. JOHNSON: Les amendements à 52, bill 67, pas
nécessairement dans cet ordre.
M. LESAGE: Le bill 22 avant 67?
M. JOHNSON: Non, non. Bill 52.
M. LESAGE: Bill 52, oui. Bill 22 après?
M. JOHNSON: L'amendement de ces messieurs du Conseil.
M. LESAGE: Oui, j'ai compris.
M. JOHNSON: Ensuite, nous pourrions peut-être passer demain, si
l'Opposition a eu le temps d'étudier les projets, à ces lois qui
ont été présentées et lues en première
lecture aujourd'hui. La loi concernant la Régie des alcools, la
loi...
M. LESAGE : Non, la Régie des Alcools, cela ne serait pas
prêt. Les autres, oui. Il y a les biens d'autrui aussi.
M. JOHNSON: Ah I Encore là, on est en train de
négocier...
M. LESAGE: Les biens d'autrui?
M. JOHNSON: Le leader parlementaire de l'Opposition au Conseil et le
leader de la majorité sont en colloque...
M. LESAGE: Actuellement?
M. JOHNSON: Les demandes ne sont pas...
M. LESAGE: Le colloque a eu lieu vendredi. M. JOHNSON: Bien, il y en a
d'autres.
M. BERTRAND: Non, mais il y en a un autre à venir.
M. LESAGE: Parce que, d'après les informations que j'avais eues
et que j'ai transmises au ministre de la Justice, il semblait que nous pouvions
procéder, quitte à ne pas procéder en troisième
lecture.
M. BERTRAND: J'en ai eu d'autres et puis, apparemment, il va y avoir
d'autres colloques.
M. LESAGE: Très bien.
M. JOHNSON: La loi de la bibliothèque nationale du Québec,
on devrait...
M. LESAGE: Oui.
M. JOHNSON: ... être prêt demain.
M. LESAGE: Cela, c'est l'article 91.
M. JOHNSON: La Régie des alcools, on ne sera pas prêt.
M. LESAGE: Article 91.
M. JOHNSON: A tout événement, si on manque de loi on
passera à celle...
M. LESAGE: La Régie des alcools, est-ce que vous l'avez
examinée?
M. JOHNSON: Deux heures et demie, M. le Président.
M. LESAGE: Est-ce que le bill 67 viendra demain?
M. JOHNSON: Probablement.
M. LESAGE: Après tout ça? Articles 52, 91, Régie
des alcools et 67?
M. JOHNSON: En tout cas, ce n'est pas nécessairement dans cet
ordre-là. Tout dépend... On a des rencontres à aller faire
à l'avion et puis un autre...
M. LESAGE: Non, pas demain.
M. JOHNSON: ... oui, un autre doit aller à
l'université.
M. LESAGE: Pas demain, c'est jeudi.
M. BELLEMARE: Le Maroc.
M. LESAGE: C'est.jeudi, le Maroc.
M. JOHNSON: Il y en a un demain.
M. LESAGE: Non, vendredi.
M. JOHNSON: Un demain.
M. BELLEMARE: Un demain.
M. JOHNSON: A tout événement, M. le Président, deux
heures trente demain.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! La Chambre ajourne ses travaux à
demain après-midi, deux heures trente.
ANNEXE
Bill 67 MODIFICATIONS
A Le titre du bill est modifié en ajoutant les mots
suivants: « et prévoyant l'institution d'un Conseil de la
restructuration scolaire sur l'île de Montréal ».
B L'article 1 du bill est modifié en remplaçant le
paragraphe a par le suivant: a) en remplaçant les deuxième et
troisième alinéas par les suivants: « Cette commission est
formée de neuf membres, dont un de langue anglaise, nommés par le
lieutenant-gouverneur en conseil. « La charge de membre de la commission
devient vacante par décès, démission, absence de la
province ou incapacité d'agir pendant six mois. »
C Aucun changement à Particle 2 du bill.
D L'article 3 du bill est modifié en remplaçant les
deux premiers alinéas de l'article 4 par le suivant: « 4. Le
lieutenant-gouverneur en conseil choisit, parmi les membres de la commission,
une personne pour agir comme président général, une autre
pour agir comme premier vice-président et une autre pour agir comme
deuxième vice-président; le président
général doit s'occuper exclusivement du travail de la commission
et des devoirs de son office. Le traitement du président
général, des vice-présidents et des autres membres de la
commission est fixé par le lieutenant-gouverneur en conseil. »
E L'article 4 du bill est modifié en remplaçant le
premier alinéa de l'article 5 par le suivant: « 5. Le mandat des
membres de la commission en fonctions le (insérer ici la date de
l'entrée en vigueur du bill 67) et des membres nommés à
partir de cette date expire le 1er juillet 1970. »
F L'article 5 du bill est remplacé par le suivant: «
5. L'article 2 de la loi 5-6 Elizabeth II, chapitre 128 est remplacé par
le suivant: « 2. Les vice-présidents ont pour fonctions d'assister
le président général. Au cas d'absence ou
d'incapacité d'agir du président général, le
premier vice-président ou, s'il est lui-même absent ou incapable
d'agir, le deuxième vice-président le remplace d'office. Il est
alors assujetti aux mêmes obligations que le président
général et possède tous les pouvoirs qu'accordent à
ce dernier les règlements et les résolutions de la commission,
ainsi que les lois, générales et spéciales, qui lui sont
applicables.
L'article 192 de la Loi de l'instruction publique (Statuts refondus,
1964, chapitre 235) ne s'applique pas à la commission. »
G L'article 6 du bill est remplacé par le suivant: «
6. Le ministre de l'éducation institue, dans les trente jours qui
suivent l'entrée en vigueur de la présente loi, un Conseil de la
restructuration scolaire sur l'île de
Montréal.
Le Conseil est composé de onze membres désignés de
la façon suivante: a) quatre membres, par la Commission des
écoles catholiques de Montréal; b) deux membres, par les autres
commissions scolaires catholiques de l'île de Montréal; c) deux
membres, par le Bureau métropolitain des écoles protestantes de
Montréal; d) un membre, par les autres commissions scolaires
protestantes ou dissidentes de l'île de Montréal; e) deux membres,
par le ministre de l'éducation.
Pour les fins de l'alinéa précédent, l'expression
« commission scolaire » a le même sens que dans la Loi de
l'instruction publique.
A défaut par Pun des organismes ou des groupes visés aux
paragraphes a à d de désigner dans les vingt jours de
l'entrée en vigueur de la présente loi, les membres du Conseil
qu'ils sont tenus de choisir, le ministre les désigne d'office. A sa
première séance, le Conseil choisit son président parmi
ses membres. Le Conseil a pour mandat de faire au ministre de
l'éducation des recommandations relativement aux modes d'organisation et
de mise en place des organismes habilités à assumer, dans
l'île de Montréal, les responsabilités attribuées
aux commissions scolaires par la Loi de l'instruction publique (Statuts
refondus, 1964, chapitre 235), aux fonctions et à la juridiction
territoriale de ces organismes et aux modalités de nomination et
d'élection de leurs membres.
Le Conseil doit faire rapport du progrès de ses travaux tous les
six mois à compter de la date de son institution et soumettre le rapport
final de ses recommandations avant le 31 décembre 1968. »
H Aucun changement à l'article 7 du bill.