(Neuf heures quarante-quatre minutes)
M. Paradis : Alors, aujourd'hui,
à l'Assemblée nationale, interpellation sur le sujet du tramway. C'est le
moment de voir le vrai visage de la ministre Geneviève Guilbault. Est-ce qu'on
va voir aujourd'hui une CAQ qui veut bloquer le projet, traîner ses pieds
encore et peut-être même faire avorter le projet ou on va voir une ministre, un
gouvernement qui veut montrer sa bonne foi de manière concrète, arrêter de
retourner sa veste, d'invoquer des excuses et avancer dans ce projet-là?
La ville de Québec est prête, les parties
prenantes sont prêtes. Je rencontre des gens, moi, à Québec qui disent :
Là, on est prêts pour faire avancer ce projet-là. La CDPQ est venue témoigner
il y a quelques jours ici même, à l'Assemblée nationale, pour dire qu'elle est
prête. Et elle le dit dans son rapport qui a été déposé il y a déjà plusieurs
mois : Le projet peut commencer en 2024. Elle, elle est prête. Alors, qui
il manque? Le gouvernement du Québec. C'est important pour l'économie de toute
la Capitale-Nationale et même du Québec. Les intervenants économiques, encore
une fois, le mentionnent. 25 ans de croissance économique continue à
Québec. Et là un peu un flottement dans les derniers mois, et tout le monde le dit,
c'est en raison de l'absence d'un projet locomotive, d'une vision pour la ville
de Québec. On l'a, cette vision-là. La CDPQ nous l'a donnée.
Et c'est important aussi, enfin, que ce
gouvernement nous démontre s'il est capable d'avoir un réflexe Québec ou pas.
C'est le cas dans le projet du transport collectif structurant à Québec. Mais
on l'a vu encore hier, avec le président français Emmanuel Macron qui est reçu
à Montréal, encore une fois. Et là, le gouvernement qui tente d'interpréter à
la baisse la loi qui dit que ces rencontres-là doivent avoir lieu à Québec. On
l'a vu dans le dossier de la sécurité publique, où le chef de police de la
ville de Québec et la ville se sont fait dire non à répétition. Maintenant, il
y a une entente. Mais le réflexe Québec, c'est ce qu'on veut voir aujourd'hui à
l'interpellation. Je suis avec mon collègue Joël Arsenau, responsable des
transports. Évidemment qu'on a préparé l'interpellation d'aujourd'hui ensemble.
Journaliste : ...voyez-vous
un lien avec l'élection fédérale, le fait que le gouvernement Legault n'ait pas
encore signé l'entente avec la CDPQ?
M. Paradis : J'espère que
non. J'espère que le projet de tramway à Québec, qui est tellement important
pour la Capitale-Nationale, n'est pas encore instrumentalisé par ce parti et
par ce gouvernement à des fins purement politiques. Parce que, jusqu'à
maintenant, ce qu'on a vu dans la position du gouvernement sur le tramway, un
jour, c'est oui, un jour, c'est non, un jour, ça marche, un jour, ça ne marche
pas, c'était souvent ou presque toujours lié à des intérêts politiques. Et ce
qui a été dénoncé, d'ailleurs, dans un rapport de HEC Montréal qui étudie
qu'est-ce qui se passe avec les projets d'infrastructure au Québec, un des
problèmes, c'est l'interférence et l'ingérence à des fins politiques, et le
projet du tramway a été spécifiquement nommé comme un exemple de ça. Il faut
que ça arrête. C'est l'intérêt économique, l'avenir de la région de Québec qui
est en jeu. C'est ça qui doit primer, pas des intérêts politiques.
M. Arseneau : Si vous
permettez, j'ajouterais aussi que ça, c'est un test pour la CAQ, aujourd'hui,
sur la question du tramway, parce que je vous rappelle qu'on a déposé un projet
de loi, le projet de loi n° 61 qui veut accélérer les projets
d'infrastructure en transport collectif, qui fait que ça coûte moins cher et en
faire davantage. Mais, du même souffle, la ministre dit : C'est nous qui
allons déterminer quels sont les projets qu'on veut faire avancer. Et puis, à
ce moment-là, il y a une direction politique qui est clairement affirmée dans
le projet de loi. Aujourd'hui, le test de la ministre, c'est qu'elle se
compromette, qu'elle s'engage et que, pour une fois, là, ce ne soit pas le
gouvernement du Québec qui retarde les échéances. Il n'y a pas d'agence, là,
actuellement, en jeu. Parce que, là aussi, ça a été demandé pendant les
consultations publiques par CDPQ Infra, par ville de Québec également, par le
RTC, que le projet aille de l'avant maintenant, sans attendre une éventuelle agence.
Et c'est aujourd'hui que je pense qu'on doit obtenir ces réponses-là, ces
engagements formels sur le plan politique. C'est incontournable. Parce que, si
le projet a retardé autant depuis six ans, c'est strictement la CAQ qui en est
la grande responsable.
Journaliste : ...M. Marchand
voulait que l'entente soit signée, l'entente provisoire, avant le
30 septembre, là. C'est lundi. Visiblement, ça n'arrivera pas, en tout
cas, à moins qu'il se passe quelque chose d'ici là. Qu'est-ce qu'on fait après?
Qu'elle demande vous allez formuler au gouvernement s'il n'y a pas... il n'y a
pas d'échéancier puis il n'y a pas d'ultimatum?
M. Paradis : Bien, d'abord,
cette idée qu'on signe rapidement, là, il ne faut pas l'abandonner. Pourquoi le
gouvernement continue à se traîner les pieds, alors que tous les intervenants
sont prêts? La CDPQ dit : C'est nous qui sommes à la table actuellement,
on est prêts. Ils ont mis dans le rapport qu'ils ont déposé que le projet
pouvait commencer en 2024. Il y a de l'argent aux crédits pour que le projet
commence en 2024. Alors, qu'est-ce qui manque? De la volonté politique.
Donc, nous, on n'abandonnera pas ça, là.
Il faut que ça signe rapidement et qu'on avance. Le projet... Le rapport de
CDPQ, c'est un résumé de 1 000 documents et études depuis les
années 70. Ils font un portrait puis disent : Voici la route. Le plan
cité, il est là. Puis c'est un résumé de ce qui est discuté depuis des
décennies à Québec. Alors, qu'on avance, que le gouvernement cesse de
procrastiner dans le dossier, de bloquer puis d'être les deux pieds sur les
freins, qu'il avance avec les autres acteurs qui sont prêts.
Journaliste : ...le premier
ministre semble vouloir une élection d'un gouvernement Poilievre à Ottawa, et
on sait que M. Poilievre a dit qu'il ne mettrait pas une cent dans le tramway
de Québec. Alors, comment vous interprétez les actions du premier ministre à
l'égard de ce qui se passe à Ottawa?
M. Paradis : Est-ce que le
premier ministre du Québec a parlé à son acolyte Pierre Poilievre de ce
projet-là? C'est une bonne question que vous devriez lui poser. Maintenant,
encore une fois, ce projet-là, il doit être sorti des intérêts politiques et
des jeux politiques, et c'est le problème du gouvernement de la CAQ que de
l'utiliser comme un levier politique. Ce n'est pas un levier politique, c'est
un projet structurant, le nom le dit, pour la région de Québec, pour la ville
de Québec, qui est discuté depuis longtemps. Tout le monde est prêt à avancer,
sauf le gouvernement. Et c'est là-dessus qu'on veut avoir des réponses
aujourd'hui de la part de la ministre.
Journaliste : ...risque?
Est-ce que ça peut compromettre le projet, l'élection d'un gouvernement Poilievre?
M. Paradis : Bien là, on ne
peut pas nier que le Parti conservateur du Canada a annoncé ses intentions dans
ce projet-là. Donc, on a plusieurs raisons additionnelles de vouloir faire
avancer le dossier maintenant pour le sortir du jeu politique, parce qu'il est
important pour la région de Québec. On a la CDPQ. C'est le gouvernement
caquiste lui-même qui a envoyé ça à la CDPQ, alors que tout le monde était
prêt, et là, aujourd'hui, la CDPQ a déposé son rapport, et le gouvernement ne
semble pas avoir pris acte des conclusions de la CDPQ, qui dit qu'on a tout ce
qu'il faut pour avancer et qu'on est prêts. Alors on est prêt.
Et d'ailleurs ça nous ramène à une
autre... une autre caractéristique de ce gouvernement, un gouvernement très
dépensier qui semble avoir peu de considération pour l'argent des Québécois
parce qu'il y a des centaines de millions de dollars qui ont déjà été investis
dans ce projet-là. Le projet a été mis sur la glace, et là les acteurs disent :
Capitalisons sur ces investissements pour aller de l'avant. Est-ce que le...
est-ce que le gouvernement du Québec va encore avoir dépensé des centaines de
millions en pure perte? Ça, c'est une autre question pour le gouvernement.
M. Arseneau : Juste pour
vous... pour ajouter, évidemment, ce serait un calcul absolument, totalement
cynique de la part du gouvernement de gagner du temps en espérant que le
gouvernement actuel tombe au fédéral pour être remplacé par un gouvernement qui
dirait : Je ne mets pas une cent dans le tramway, et le gouvernement du
Québec dirait : Bien, je ne peux pas aller de l'avant parce qu'il me
manque une partie de financement. Ça, si ce calcul-là s'avère, c'est d'un
cynisme absolument éhonté, et la CAQ devrait être sanctionnée, devra être
sanctionnée pour ça. Mais, aujourd'hui, ce matin, c'est la raison pour laquelle
mon collègue député de Jean-Talon, puis, je pense, toutes les autres
oppositions, vont demander au gouvernement du Québec un échéancier, un
échéancier ferme, et de faire preuve d'engagement et de conviction face à ce
projet-là. On ne peut pas continuer de l'appuyer du bout des lèvres tout en se
traînant les pieds sur le plan administratif et financier.
Alors, je pense que c'est pour ça qu'on
répète que c'est le moment de vérité. Le gouvernement, actuellement, a la
responsabilité de faire avancer et accomplir le projet pour lequel on est tous
réunis aujourd'hui puis que... des milliers de Québécois souhaitent qu'enfin ça
avance et ça se réalise.
Journaliste : On apprend, ce
matin, que le gouvernement, M. Legault et quelques-uns de ses ministres,
qui devaient hier participer au souper avec M. Macron et M. Trudeau,
ne se sont pas présentés au repas. Qu'est-ce que vous pensez de cette
absence-là? Est-ce qu'ils auraient dû être aux côtés de M. Trudeau?
M. Paradis : Des ministres du
gouvernement du Québec?
Journaliste : Ils avaient
quelques invitations. Mme Guilbault était invitée, M. Roberge...
M. Paradis : Bien... Bon.
Vous me l'apprenez, là, au moment où je vous parle, mais c'est un signal aussi
de l'intérêt ou du non-intérêt que ce gouvernement place dans les relations
diplomatiques.
En ce qui concerne les relations
internationales du Québec, ce gouvernement a mis tous ses oeufs dans le même
panier : c'est le commerce international, et le reste, ça nous intéresse
moins. Si, de fait, ce que vous me dites est vrai, qu'il y a des ministres qui
devaient être là, qui ne se sont pas présentés, je pense que c'est une
illustration qui se passe d'explication. C'est un gouvernement qui laisse
Ottawa occuper le terrain en matière de diplomatie. Et on voit ce que ça donne,
là, quand on laisse Justin Trudeau et le gouvernement du... et le gouvernement
du Canada s'occuper de notre diplomatie. On l'a vu hier, là, avec le genre de
conférence de presse qu'on a eue de Justin Trudeau, et avec Emmanuel Macron, le
gouvernement du Québec doit s'occuper de ses relations internationales et, en
fait, de l'ensemble de sa diplomatie. Une autre des raisons pour lesquelles
nous, on pense que le Québec doit être un pays indépendant, pour s'occuper de
sa propre diplomatie. Alors, on voit ce que ça veut dire. Des ministres ne se
présentent même pas à un souper important avec le président de la République
française, qui est le pays avec lequel on entretient les relations les plus
fortes, historiquement. Ça me sidère un peu, ce que vous me dites ce matin.
Journaliste : On voyait aussi
cette semaine, je ne sais pas si vous en avez pris connaissance, mais il y a
une étude de la SAAQ sur le 0,05 qui a été... qui est complètement caviardée finalement.
On a fait une demande, mais en fait c'est le Parti libéral qui a fait une
demande d'accès, a reçu ce document-là. Pourquoi vous pensez que cette
étude-là, cette analyse là de la SAAQ sur la faisabilité du 0,05 est gardée
secrète?
M. Arseneau : Mais, écoutez,
il y a eu tout un débat autour de la question du 0,05 l'automne dernier. C'est
un débat d'intérêt public et c'est absolument inconcevable que le gouvernement
garde secrètes des études qui nous permettraient d'avancer dans ce dossier-là,
de faire avancer la réflexion, la discussion et le débat public. Alors, moi, je
ne vois pas, dans ce cas-là, comment le gouvernement peut affirmer que cette
information-là est sensible ou est confidentielle parce qu'il ne parle pas...
on ne parle pas d'intérêts, là, financiers, de corporations, d'entreprises en
concurrence, et ainsi de suite, là, on ne parle pas non plus de secret d'État,
on parle de la sécurité des gens, on parle d'un débat public ouvert où les gens
et des familles de victimes on fait un plaidoyer pour réduire le taux
d'alcoolémie. Et là il y a un élément essentiel du puzzle que le gouvernement
garde pour lui. Qu'est ce qu'il a à cacher, le gouvernement, là-dedans? Moi, je
pense qu'encore une fois c'est un geste de manque de transparence, d'opacité du
gouvernement qui nuit au débat public, qui nuit justement à ce que les citoyens
aient l'heure juste.
Journaliste : Il fait ça
pourquoi vous penser?
M. Arseneau : Bien,
exactement, il faut leur demander. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement
a ce réflexe à répétition de garder l'information pour lui-même, comme si tout
était d'une sensibilité politique extraordinaire. Et puis évidemment on peut
faire toutes sortes de conjectures sur l'idée qu'il a défendu une posture très ferme
du maintien du statu quo. Qu'est-ce que dit le rapport? Est-ce que le rapport
contredit la position du gouvernement? C'est la question qu'on peut se poser.
Auquel cas, bien, il y a un manque de responsabilité de la part du
gouvernement. Il peut maintenir sa position, mais il ne peut pas, comment dire,
oblitérer la science, par exemple, ce qu'il a tendance à faire dans maints
dossiers.
Le Modérateur : On va prendre
une dernière question.
Journaliste : Oui, sur
Trudeau, je voulais revenir là-dessus. Est-ce que vous partagez sa vision des
choses quand il dit que M. Legault fait des fausses déclarations en
matière d'immigration?
M. Paradis : Ce que Justin
Trudeau dit en matière d'immigration, là, je pense qu'il pourrait se retourner
le commentaire à lui-même. Ce qui s'est passé dans les dernières années, c'est
qu'on a vu l'immigration être décidée par une idéologie plus que par des
véritables données et par des faits. Alors, je pense que Justin Trudeau n'a pas
de leçon à donner à personne en matière de commentaires sur l'immigration. Bon,
là, il s'adressait au premier ministre du Québec, le Québec, qui lui aussi, a
malheureusement très mal géré l'immigration dans les dernières années. Donc,
c'est un dialogue entre deux personnes qui, malheureusement, ne semblent pas
avoir un portrait adéquat de la situation en matière d'immigration.
Journaliste : Mais, sur le
fond, est-ce qu'il a raison, est-ce que M. Legault propage des faussetés
sur l'immigration?
M. Paradis : Bien, une chose
est sûre, c'est qu'actuellement il y a un nombre vraiment important d'études,
d'intervenants indépendants qui sont venus dire que les politiques publiques en
matière d'immigration actuellement sont mal gérées et nous mènent à une
situation impossible pour les services publics, pour l'accueil, pour la
réussite du parcours de l'immigration et pour la capacité du système
d'accueillir et d'intégrer les nouvelles personnes qui arrivent au Canada. Les
banques le disent maintenant, la Société canadienne d'hypothèques et de
logement, les organisations à la base, c'est ce qu'elles disent. Alors, quand
M. Trudeau vient nous dire que non, sa politique était la bonne, il semble
être à peu près le seul maintenant à penser ça.
Journaliste : Ce n'est pas
ça, ma question. Est-ce qu'il a raison de dire que M. Legault propage des
faussetés en matière d'immigration?
M. Paradis : Ce sont deux
chefs, Trudeau et Legault, qui, malheureusement, représentent, illustrent la
perte de contrôle des politiques publiques en matière d'immigration, l'un et
l'autre.
Le Modérateur : On va
devoir...
Journaliste : ...sur la
santé, là.
M. Arseneau : Oui. Merci de
poser la question, parce que je voulais quand même faire une petite
intervention.
Le Modérateur : ...
M. Arseneau : Oui, mais c'est
quoi, votre question là-dessus?
Journaliste : Bien, en fait,
on apprend que le gouvernement demande aux administrations de santé de faire
des... bien, de trouver de l'argent un peu, là, de réduire les dépenses sans
toucher les services. Est-ce que vous pensez que les services seront touchés?
M. Arseneau : C'est un
refrain connu. C'est un refrain connu, là, l'optimisation sans austérité, là.
On a déjà entendu la chanson, puis ça a résulté dans des coupures de services
et de soins aux personnes un peu partout à travers le Québec dans le réseau de
la santé. Et là on sait que le réseau est déjà sous pression, on sait qu'il y a
une crise en santé dans les régions de l'Abitibi-Témiscamingue, dans la région
de la Côte-Nord, de l'Outaouais et ailleurs. Et ce que le gouvernement nous
annonce, c'est... après avoir dilapidé ses surplus, après avoir donné des
chèques préélectoraux, après avoir donné des congés d'impôt, aujourd'hui, il
veut serrer la ceinture tout en disant qu'il ne va pas réduire la taille de la
fonction publique.
Alors, le gouvernement actuellement nous
doit des explications sur les commandes qui passent à travers le réseau de la
santé et... nous garantisse que l'équation est possible, moins de financement
puis le maintien des services. Moi, je suis très inquiet. C'est... Ce sont des
mesures d'austérité déguisées. On va être extrêmement vigilants là-dessus parce
qu'on est déjà dans un système qui s'effondre. On ne peut pas imaginer qu'on
aille plus loin dans la réduction des services. Et si le gouvernement doit
réduire les dépenses administratives, bien, il doit nous dire comment c'est
possible de le faire sans affecter les services aux citoyens. Merci.
(Fin à 10 h 01)