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Point de presse de Mme Elisabeth Prass, porte-parole de l’opposition officielle en matière de santé mentale, et Mme Désirée McGraw, porte-parole de l’opposition officielle en matière de solidarité sociale et d’action communautaire

Version finale

Le mercredi 11 septembre 2024, 11 h 20

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Onze heures trente-sept minutes)

La Modératrice : ...en matière de santé mentale, Mme Elisabeth Prass, accompagnée de sa collègue, porte-parole en matière de solidarité sociale et d'action communautaire, Mme Désirée McGraw. Prendront aussi la parole cet avant-midi Mme Lili Plourde, directrice générale de la Fédération québécoise de l'autisme, ainsi que M. Steve Dubois, directeur de l'Alliance des groupes d'intervention pour le rétablissement en santé mentale de la région 03. Les députés sont accompagnés aussi de représentants du Réseau communautaire en santé mentale, de la Fédération des mouvements personne d'abord du Québec, du Regroupement des organismes de personnes handicapées de la région 03. La parole est à vous.

Mme Prass : Merci. Bonjour. Je voudrais d'abord remercier la présence de la Fédération québécoise de l'autisme, l'Alliance des groupes d'intervention pour le rétablissement en santé mentale, la Fédération des mouvements personne d'abord du Québec, le Regroupement des organismes de personnes handicapées de la région de la Capitale-Nationale, le Réseau communautaire en santé mentale, COSME, et ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce, Désirée McGraw.

Ce matin, j'ai déposé une pétition de 5 264 signatures pour demander au gouvernement et à la ministre responsable de la Solidarité sociale et l'Action communautaire de réintégrer les diagnostics d'autisme, de schizophrénie et de bipolarité parmi les diagnostics évidents pour avoir un accès accéléré à la solidarité sociale, ceux qui ont été retirés en juillet 2022. Je précise que les groupes des personnes avec un TSA ou avec des troubles de santé mentale graves représentent 43,1 % des prestataires de la solidarité sociale. Tandis que le nombre de personnes avec un diagnostic d'autisme augmente d'année en année, ce gouvernement fait marche arrière et de façon à diminuer leur accès à la solidarité sociale, même si de nombreuses personnes autistes ou ayant des troubles mentaux graves sont en situation de précarité, et l'aide sociale est souvent leur seule source de revenus. On voit de plus en plus de personnes en situation... dans ces situations se retrouver sans abri et on se demande pourquoi ce gouvernement veut leur rendre la vie encore plus difficile. La ministre n'a fait aucune consultation avant de prendre ses décisions avec le milieu et a mandaté un comité, tandis qu'il y a des... excusez-moi, des corps existants indépendants, comme l'INESSS et l'INSPQ, qui auraient dû faire cet exercice-là.

Pour vous montrer à quel point ce comité n'était pas en place de prendre ces décisions, parmi leurs justifications pour le retrait du diagnostic de l'autisme est la curabilité de l'autisme. En tant que maman d'un petit garçon autiste moi-même, je trouve ça vraiment... je suis outrée d'entendre ça de la part de quelqu'un qui prend des décisions à propos de la vie de ces personnes-là. De plus, lors des crédits, la ministre Rouleau a dit que l'autisme était... pouvait maintenant être contrôlé. Encore une fois, en tant que mère d'un petit garçon qui ne sera jamais apte au travail, je demanderais à la ministre de venir passer une heure dans ma vie et me dire par la suite ce qu'elle en pense. Parce que, vraiment, pour les familles et les personnes qui vivent ces situations-là, c'est ignoble d'entendre ces paroles-là.

Ce gouvernement pense-t-il vraiment que les personnes qui sont aptes au travail voudraient plutôt aller sur la solidarité sociale avec un revenu de 1 100 $ par mois plutôt que d'avoir un emploi où ils pourraient gagner davantage d'argent? Donc, clairement, il y a quelque chose qui ne marche pas dans la justification de la ministre, qui accuse quasiment les personnes dont le seuil de revenus serait la solidarité sociale d'essayer de frauder le gouvernement en recueillant la solidarité sociale quand ils sont aptes au travail. On parle de populations vulnérables qui n'ont pas d'autre recours pour un revenu.

Le retrait de ces diagnostics sur la liste de ceux évidents complexifie l'accès aux solidarités sociales. Une personne doit maintenant passer par un processus qui peut prendre des mois, avoir un refus et devoir refaire une demande. Pendant ces mois-là, ces personnes n'ont pas de revenu et possiblement peuvent se retrouver en situation d'itinérance. Donc, ce gouvernement-là, encore une fois, attaque les personnes les plus vulnérables de notre société, et plutôt que de leur tendre la main, il leur enlève carrément le chèque de la main.

Plutôt que de dépenser 7 millions de dollars sur les Kings de Los Angeles, le gouvernement pourrait mieux dépenser son argent et le faire en ayant une approche avec dignité envers les personnes vulnérables. Donc, nous demandons la réintégration des diagnostics d'autisme, de bipolarité et de schizophrénie dans la liste des diagnostics évidents et de revoir le mode d'évaluation, plutôt que de façon biomédicale, que ce soit de façon psychosociale. Et je passe la parole à mes collègues. Merci.

Mme McGraw : Alors, bonjour, tout le monde. Je suis très fière et vraiment contente d'accompagner ma collègue, mon amie, ma voisine dans des comtés avoisinants, D'Arcy-McGee et Notre-Dame-de-Grâce, Elisabeth Prass, aussi non seulement comme collègue, mais aussi à cause de son expérience vécue, qui nous touche beaucoup au sein de notre caucus et la société québécoise dans son entier. Alors, merci, Elisabeth, pour tout ton travail acharné, et les collègues, les groupes sur le terrain qui militent à voix haute et forte pour les plus vulnérables et les plus démunis de notre société québécoise.

Et là je suis là en tant que porte-parole en matière de solidarité sociale. Et on sait que, depuis 2022, le gouvernement caquiste a modifié la liste des diagnostics évidents qui permettrait un accès accéléré et simplifié à la solidarité sociale pour des personnes avec des contraintes sévères à l'emploi. Plus de 50 diagnostics ont été alors retirés, y compris l'autisme, y compris la bipolarité, y compris la schizophrénie, y compris l'absence de vue aux deux yeux, et d'autres conditions permanentes et irréversibles. La CAQ ne simplifie pas la vie des plus vulnérables. La CAQ complique ainsi la vie des personnes ayant déjà des troubles de santé mentale ou d'autres conditions incapacitantes. La CAQ abandonne les Québécois, abandonne les plus démunis et les plus vulnérables de notre société. Est-ce qu'il s'agit d'un exercice financier de la CAQ qui cherche à les exclure de façon injuste au programme de solidarité sociale? Je vous confirme qu'on va dans la mauvaise direction.

D'ailleurs, ainsi que le nombre de personnes avec des incapacités augmente au Québec, les plus récentes statistiques sur le recours à l'aide sociale pour les personnes ayant des contraintes sévères à l'emploi révèle une diminution constante du nombre de prestataires au programme de solidarité sociale et au programme de revenu de base. Donc, on va dans le sens contraire.

Et là la ministre, ce matin, elle a déposé son projet de loi n° 70, qu'on va étudier très sérieusement. On prend notre rôle d'opposition... opposition... on va faire l'analyse, mais je vous dis juste le titre, la loi qui vise à améliorer l'accompagnement, c'est le contraire. Ce qu'on vit maintenant, c'est... on n'améliore pas l'accompagnement, c'est l'abandon, l'abandon et même la négligence vis-à-vis les plus vulnérables. Et le titre continue : des personnes à simplifier le régime d'assistance sociale. Et ça, ça démontre que ce n'est pas la simplification, ça rend la vie... le processus plus complexe et plus lourd pour les plus démunis. Donc, voici.

Alors, encore une fois, je suis très contente et très fière d'être ici avec ma collègue, Elisabeth Prass, et les groupes et les représentants que vous allez maintenant... qui vont maintenant prendre la parole. Merci.

Mme Plourde (Lili) : Bonjour. Je tiens à remercier mes collègues qui sont présents aujourd'hui pour nous soutenir dans cette cause importante. Merci à Mme Prass et Mme McGraw pour leur soutien dans le dépôt de cette pétition.

Je m'appelle Lili Plourde. Je suis directrice générale de la Fédération québécoise de l'autisme. Nous sommes réunis aujourd'hui pour demander à la ministre de la Solidarité sociale et de l'Action communautaire, Chantal Rouleau, de renverser la décision de son ministère et de réintégrer les diagnostics d'autisme, de schizophrénie et de bipolarité dans la liste des diagnostics évidents donnant droit à un accès direct au programme de solidarité sociale. Nous sommes soutenus moralement dans cette démarche par plus de 5 000 signataires de la pétition.

Depuis presque deux ans maintenant qu'avec le COSME nous multiplions les démarches afin de convaincre le gouvernement des impacts de leurs décisions sur les conditions de vie des personnes : Incompréhension du processus et des demandes gouvernementales, manque de soutien pour compléter les formulaires, absence d'un médecin de famille, difficulté d'accès à des services spécialisés à l'âge adulte. Les embûches sont nombreuses et pénalisent les personnes que nous représentons. Plusieurs d'entre elles cessent les démarches à la suite d'un premier refus, car elles ne comprennent pas les démarches à compléter pour le... pour recevoir la solidarité sociale. Même les parents qui complètent le formulaire pour leur enfant ayant un besoin important se butent à des défis de taille pour faire reconnaître la contrainte sévère à l'emploi de leur adulte.

Les personnes autistes ont de la difficulté à obtenir leur diplôme, perdent leur emploi à répétition, vivent dans la précarité financière et finissent même par perdre leur logement. Elles sont aussi victimes de préjugés... de préjugés dans la population et dans plusieurs ministères. À titre d'exemple, un membre du comité d'évaluation médicale du ministère de la Solidarité sociale... du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, comité qui évalue les contraintes sévères à l'emploi, croit que l'autisme est une maladie traitable et curable. On peut donc se questionner sur la capacité de ce comité à analyser les demandes déterminant l'accès au programme de solidarité sociale.

Le ministère ne semble d'ailleurs pas avoir les... monitoré les impacts de cette décision sur l'accès au programme de solidarité sociale. Dans son dernier plan de lutte à la pauvreté et à l'exclusion sociale, le ministère vient de se donner cinq ans pour trouver une nouvelle façon de déterminer les contraintes sévères à l'emploi. Si on ajoute deux ans, puisque la nouvelle liste date de juillet 2022, les personnes auront donc à se battre pendant sept ans pour faire reconnaître leurs besoins et leurs contraintes sévères à l'emploi, sept ans à acculer les gens dans une pauvreté extrême et à causer du stress et de l'anxiété à des personnes vulnérables. C'est la preuve d'un grand manque de compassion et de compréhension.

Dans les dernières années, la montée de l'itinérance est fulgurante chez les personnes autistes. Le maintien dans cette pauvreté extrême en est-elle la cause? La pauvreté et l'itinérance sont des facteurs de risque pour la judiciarisation des personnes en situation de handicap, et elles sont déjà représentées de façon beaucoup trop importante dans les prisons québécoises.

Si nous ne voulons pas que la situation dégénère et que des drames surviennent, c'est maintenant qu'il faut prendre les moyens nécessaires pour soutenir les personnes vulnérables, c'est maintenant qu'il faut réintégrer l'autisme, la bipolarité et la schizophrénie dans la liste des diagnostics évidents afin de permettre un accès plus rapide au programme de solidarité sociale. Merci.

M. Dubois (Steve) : Bonjour. Merci à tous ceux qui ont pris la parole. Je suis Steve Dubois, directeur de l'AGIR, Regroupement des organismes communautaires en santé mentale de la région de la Capitale-Nationale.

À l'AGIR, dans nos organismes, tous les jours nous rencontrons de ces personnes avec des diagnostics de schizophrénie ou de trouble bipolaire, ces personnes qui, justement, sont exclues, hein, aujourd'hui de cette liste de diagnostics qui autrefois donnait un accès facilité au programme de solidarité sociale. Ce sont pour ces personnes et pour leurs proches surtout, aussi, n'oublions pas, que nous joignons notre voix aux 5 000 signataires de la pétition déposée aujourd'hui. Dans nos organismes, nous sommes à même de constater les souffrances vécues par ces personnes. Nous constatons les combats qu'elles mènent quotidiennement pour composer avec leur vulnérabilité. Nous voyons aussi les nombreux défis auxquels plusieurs sont confrontés. Parmi ces défis, il y a bien sûr l'emploi. Plusieurs n'arrivent pas à travailler, ou alors ils arrivent plus difficilement à maintenir leur lien d'emploi. D'autres arrivent difficilement à payer leur loyer ou à se maintenir en logement et risquent de se retrouver à la rue. Avons-nous vraiment besoin de dire que l'accès au logement est un besoin de base, et qu'en ce moment, dans notre contexte socioéconomique qui ne cesse de se détériorer... Est-ce qu'on a besoin de dire que, dans ce contexte-là, on a besoin de faire quelque chose pour aider les gens qui en ont le plus besoin, qui sont les plus vulnérables et qui chutent avec la situation actuelle de la société?

Dans nos organismes communautaires oeuvrant en santé mentale, nous sommes aussi témoins que plusieurs personnes souhaitent accéder à des services d'aide pour mieux avancer dans leur processus de rétablissement. Cependant, pour un grand nombre d'entre eux, malheureusement, après avoir payé l'épicerie, le loyer, bien, il ne reste plus vraiment de sous pour même se rendre dans les organismes. Les services ont beau être gratuits, si les gens n'ont pas le moyen de prendre l'autobus pour se rendre vers nos services, ils n'ont simplement pas accès aux services. On aimerait faire plus, malheureusement on n'a pas le moyen toujours de le faire.

Dans ce contexte, pensons aux membres de l'entourage, les parents, les frères, les sœurs, les conjoints, conjointes, les enfants des personnes qui ont des diagnostics en santé mentale. On en rencontre aussi dans nos organismes. Pour plusieurs, en plus de jouer un rôle de proche aidant, ils utiliseront leurs propres ressources pour pallier aux difficultés financières de leurs proches vivant avec une schizophrénie ou un trouble bipolaire. Ce sont des proches qui sont affectés qui viennent dans nos services, ce sont des proches qui sont épuisés, souvent découragés, à bout de ressources et qui, en plus, s'appauvrissent pour compenser le fait que l'accès à des revenus viables s'avère de plus en plus complexe.

Pour toutes ces personnes en souffrance et en besoin, il faut poursuivre les travaux. C'est pourquoi nous demandons à la ministre de la Solidarité sociale et de l'Action communautaire, Mme Chantal Rouleau, de réintégrer des diagnostics évidents d'autisme, de trouble de la schizophrénie ou de la bipolarité dans la liste des diagnostics donnant un accès facilité vers le programme de solidarité sociale. Aussi, nous appuyons les autres demandes de la pétition, soit que l'évaluation des contraintes à l'emploi puisse passer par une approche psychosociale plus adaptée aux réalités liées à la santé mentale, plutôt que de passer par une approche plus biomédicale et enfin que les prestations des programmes de solidarité sociale et de revenus de base soient revues à la hausse pour permettre d'atteindre le seuil de revenu viable. Je vous remercie.

La Modératrice : C'est ce qui met fin à ce point de presse. Bonne journée.

(Fin à 11 h 52)

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