(Quinze heures cinquante-neuf minutes)
La Modératrice : Bonjour à
tous et à toutes. Bienvenue à ce point de presse transpartisan suivant le dépôt
du rapport des consultations particulières et auditions publiques dans le cadre
du mandat d'initiative portant sur les révélations de violences lors des initiations
dans le milieu du hockey junior. Prendront la parole, lors de ce point
de presse, le porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière de sports
et de loisirs, M. Vincent Marissal, suivi de la députée de Hull, Mme Suzanne
Tremblay, ainsi que le porte-parole de l'opposition officielle en matière de
sports, de loisirs et de plein air, M. Enrico Ciccone. La parole est à
vous.
M. Marissal : Bien,
merci, Sandrine. Chers collègues, chers journalistes, merci d'être d'être là.
Vous noterez quand même que c'est un signe positif, en fin de session comme ça,
que tous les partis soient représentés, main dans la main, à présenter quelque
chose en commun. Ça arrive qu'on fait ça, ça arrive qu'on est capables de faire
ça et ça arrive même plus souvent qu'on pense, quand on est capable de prendre
un problème ici, de l'amener dans l'arène du peuple qu'est l'Assemblée
nationale, de considérer qu'on a notre mot à dire, qu'on a des actions à
prendre.
Puis, évidemment, bien, comme tout le
monde, moi, comme père de famille, mais je suis sûr que c'est vrai pour mes
collègues aussi, comme tout le monde au Québec, j'ai été renversé, dégoûté,
même, de lire certains rapports de presse sur des initiations qui ont eu lieu.
C'était, dans ce cas-là, au hockey en particulier quand ça s'est mis à éclater
de nouveau l'hiver dernier, en février. Évidemment, ça a probablement lieu
ailleurs, il y a eu des cas aussi dans d'autres sports. Peu importe, ce n'est
pas un concours. Ce que ça a fait, c'est que ça a créé chez moi une indignation
profonde qui était partagée par mes collègues.
Évidemment, la première question qu'on se
pose dans ce temps-là, c'est : Comme député, qu'est-ce que je peux faire?
Est-ce que je peux faire quelque chose? Est-ce que je peux aider d'une façon ou
d'une autre? Est-ce que je peux contribuer à ce débat? Donc, j'avais demandé à
ce moment-là, vers la fin février, un mandat d'initiative à la commission
culture et éducation, mandat d'initiative qui m'avait été accordé. À partir de
là, on s'est mis à travailler, on s'est mis à travailler rapidement, de façon
constructive, tous les partis ensemble. On a entendu des témoins. Vous avez
suivi, comme moi, certaines péripéties, parfois plus spectaculaires, notamment,
bon, la démission de l'ancien commissaire de la Ligue de hockey junior majeur.
Évidemment, ce n'était pas l'objet de nos travaux, ça s'est passé comme ça,
mais visiblement on a mis le doigt sur un bobo. Et je pense qu'on peut être
fiers d'avoir fait ça puis on va être encore plus fiers d'être arrivés avec un
rapport, un rapport unanime, consensuel, qui a 23 recommandations, qui, je
le souhaite, auront une suite politique, qui peuvent changer des choses. Parce
que le but à la fin, comme je l'ai dit, après l'indignation, c'est l'action, c'est
d'être capable de prendre des moyens pour protéger notamment les jeunes joueurs,
mais aussi leurs familles qui vivent des situations horribles avec lesquelles
ils vont vivre toute leur vie. Après, on le voit, il y a encore des cas qui
sortent récemment d'histoires qui se sont passées il y a 10, 15, 20 ans.
Puis, en même temps, ce qu'on voulait
faire, et je souhaite que c'est ça que nous fassions, c'est libérer la parole.
Et on le voit d'ailleurs, les gens qui reçoivent les plaintes dans le milieu
sportif nous disent : On en reçoit plus, il s'est passé quelque chose,
vous avez ouvert une brèche, la digue s'est ouverte. Et puis tant mieux si on a
réussi à faire ça. Maintenant, la suite, elle est beaucoup dans les mains du
gouvernement. Nous ferons les suivis, mais, dans l'immédiat, je veux juste
présenter le rapport avec mes collègues et les remercier aussi du travail qu'on
a fait. Suzanne.
Mme Tremblay : Alors,
bonjour, tout le monde. Je suis vraiment aussi heureuse, moi, d'être ici avec
mes deux collègues aujourd'hui, parce qu'on a fait un travail important
ensemble. Puis je pense, c'est important de le répéter, parce que ça nous
tenait à cœur de faire la lumière sur des situations — puis tu l'as
dit, hein? — totalement déplorables puis inacceptables.
On a rencontré de nombreux intervenants du
milieu du sport. Puis, pour en nommer quelques-uns : Sport'Aide, le RSEQ,
l'INSPQ, M. Dany Bertrand, qui est un docteur en psychologie, un avocat,
Me Michaud, ainsi que Michel Dorais, qui est un professeur titulaire à la
retraite qui a passé une grande partie de sa vie à prévenir les violences dans
le sport. Je les remercie, tous ceux qui sont venus nous parler, parce que ça a
enrichi grandement nos réflexions, puis ça, c'était important.
On a travaillé ensemble à proposer des
solutions qui sont concrètes puis qui sont réalisables. Tu l'as dit, Vincent,
c'est 23 recommandations qui sont axées notamment sur la prévention puis
le changement de culture et de valeurs. Notre objectif, c'est de protéger nos
jeunes. Il y a des milliers de jeunes au Québec qui pratiquent le sport. On
veut que ça soit une expérience qui est positive, que ça ait une... qu'ils
vivent ça pleinement puis dans des milieux qui sont stimulants, mais surtout
sécuritaires puis exempts de toutes formes de violences. Je suis moi-même une
maman de deux jeunes filles qui pratique le sport puis je veux que ça soit
positif dans leur vie. Donc, des histoires comme on en a entendu parler dans
les derniers mois, dans les dernières années, dans les dernières semaines, on
ne veut plus jamais que ça arrive au Québec. Donc, merci à mes collègues pour
le travail qu'on a fait dans les dernières semaines.
M. Ciccone :Merci. Alors, bonjour à tous. Bien, premièrement,
j'aimerais remercier l'initiateur de ce mandat d'initiative. Vincent, merci
beaucoup de l'avoir déposé. Également, merci au gouvernement d'avoir accepté
d'entendre ce mandat d'initiative. On sait, à l'Assemblée nationale, ça
n'arrive pas souvent, mais, en même temps, on l'a fait dans un but commun pour
aider notre jeunesse. Aussi, je ne voudrais pas oublier les rédacteurs de ce
rapport-là, qui a été écrit, qui reflète exactement, exactement, nos
discussions, nos propositions. Et je vous invite à le lire, il a été déposé il
y a quelques instants.
J'ai le sentiment... puis je suis persuadé
que mes collègues également avec moi ont le sentiment du devoir accompli. C'est
sûr et certain qu'on aurait souhaité ne pas se retrouver à être obligés de
faire des recommandations sur ce mandat d'initiative, mais que voulez-vous,
quand l'industrie... quand un milieu n'est pas capable de prendre soin à la
pleine mesure de ses membres — puis ici on parle de jeunes hommes
puis on parle de jeunes filles, parce que, comme ma collègue l'a dit, ce n'est
pas seulement au hockey, mais c'est dans d'autres sports également — alors
c'est le devoir du législateur de prendre les choses en main. On a 23 bonnes
recommandations et je pense sincèrement que ces recommandations vont aller de
l'avant. Je le souhaite. Maintenant, c'est dans les mains du gouvernement.
Et je suis persuadé qu'il va y avoir un
changement parce qu'une des recommandations qu'on a faites, on en a plusieurs,
puis on pourra discuter avec vous, là, mais une recommandation qui était archi importante,
c'est de s'assurer et de dire clairement au milieu sportif, que ce soit privé,
amateur et même scolaire, qu'on se réserve le droit de faire un suivi advenant
également... pour s'assurer que les mesures qui ont été demandées soient en
place. Alors, ça fait le tour. Alors, on est maintenant prêt à prendre vos
questions.
La Modératrice : Merci. On va
pouvoir prendre les questions d'abord en français. On va commencer avec Maxime
Denis, TVA.
M. Denis (Maxime) : Bonjour.
D'abord, concrètement, c'est quoi, le pouvoir de force face à la ligue pour
changer le C.A. ou la direction?
M. Marissal : Bien, le
rapport, il est d'abord et avant tout politique, hein? Je vous l'ai dit, moi,
quand j'ai lancé cette idée-là et que les collègues ont embarqué avec enthousiasme,
l'idée n'était pas de faire rouler des têtes, ce n'était pas ça, ce n'était pas
ça du tout. La pression populaire nous a suivis, nous a même poussés à faire
plus. Les dirigeants, après ça, de la ligue de hockey junior, pour ne parler
que d'eux-mêmes, ont pris leur décision. Alors, la preuve est faite de façon
peut-être un peu brutale, j'en conviens, mais c'était allé très, très, très
loin. La preuve a été faite en mettant la pression politique et populaire,
parfois les deux en même temps, l'une avant l'autre. Peu importe, ça met une
pression sur ces gens-là qui, je vais employer un anglicisme, là, qui vivent
dans l'œil du public, hein?
La Ligue de hockey junior majeur, on l'a
vu d'ailleurs, là... Puis je pense qu'on aurait dû commencer peut-être par
féliciter les Remparts, puis on ne l'a pas fait encore, parce qu'ils sont en
train, en plus, de faire un beau parcours à Kamloops, je pense, mais prenons
les Remparts, par exemple. Ils remplissent des arénas, là, de
17 000 personnes à Québec, là. C'est un produit de consommation, ça,
le hockey, on le sait au Québec, là. Puis il se vend des chandails, il se vend
toutes sortes de produits dérivés. La ligue aussi fait de l'argent. Puis c'est
donc une activité commerciale qui n'est pas soumise à beaucoup de règlements
parce que ces gens-là, la plupart, les joueurs sont mineurs, ils ne sont pas
syndiqués, ils n'ont pas d'association de joueurs. D'ailleurs, nous suggérons
qu'ils soient représentés comme joueurs au sein de l'administration de la
ligue. C'est important qu'ils le soient parce que c'est d'abord et avant tout
eux qui sont concernés.
Alors, la ligue doit montrer patte
blanche. Les autres sports aussi doivent montrer patte blanche. Puis je pense
qu'on a fait la démonstration que, quand on s'y intéresse politiquement et que
la pression populaire suit ou que la pression populaire nous demande de faire
quelque chose... Vous savez, moi, je ne suis pas un spécialiste du hockey, là,
plutôt la course à pied, mon truc, là. Puis les gens m'arrêtaient dans la rue.
Je suis allé voir un match de hockey à un moment donné, à Laval. Les gens
venaient me voir en faisant des blagues, puis savoir si ça allait se battre ou
quoi. Puis les gens sont hyper intéressés par ce travail-là. Puis je pense que,
nous, on a fait le boulot de relais, puis d'envoyer le message, de dire :
On sait ce qui s'est passé, on veut qu'il y ait des changements puis on va
faire un suivi.
M. Denis (Maxime) : Sur
les sanctions possibles pour les différents gestes qu'on pourrait donc limiter,
ça pourrait ressembler à quoi comme sanctions?
M. Marissal : Veux-tu y
aller, Enrico?
M. Ciccone :Bien, oui. Oui. Bien, écoutez...
M. Denis (Maxime) :
Enrico, le connaisseur.
M. Ciccone :Oui, oui. Non, mais écoutez, c'est sûr et certain que les
recommandations, ici, n'ont pas force de loi, là. Je veux dire, s'il y a des
abus sexuels, s'il y a de la violence, ça va toujours passer par des enquêtes,
des accusations, là, je veux dire, on ne protège pas personne ici, là. Nous, c'est
pour éviter justement qu'on arrive à avoir des débordements comme on a vu, là,
dans les dernières années, ou même dans les 40 dernières années, je vais
dire. Alors, c'est pour ça que nos recommandations, c'est pour éviter que ce
genre de chose là arrive. Puis ça, c'est notre mandat.
Puis je veux juste venir avec ce que vous
aviez dit tantôt, il n'y a pas une ligue, il n'y a pas un dirigeant qui veut se
retrouver en commission parlementaire, là. Il n'y a personne qui veut faire ça
parce qu'ils savent sincèrement que ça fait mal au produit quand ils se
retrouvent là. On a demandé à des gens de venir nous voir, de venir nous
expliquer, de venir répondre à nos questions parce que c'était notre devoir de
le faire. Maintenant, ils doivent se gouverner. Ils doivent se gouverner, mais
le message qu'on envoie aujourd'hui, c'est : Gouvernez-vous parce que si
vous ne vous gouvernez pas, bien, on va passer à une autre étape, là.
M. Marissal : Et par
ailleurs, il y a une dimension politique, je l'ai dit, là. Aujourd'hui, vous
comprendrez que je n'ai pas de... à part les recommandations que nous appuyons
tous et toutes, ici, là, je n'ai pas de commande particulière à faire à la
ministre. Ce serait mal venu de le faire ici avec les collègues. Je ne veux pas
mettre personne mal à l'aise, mais tout le monde sait qu'il y a une suite
politique à ça. Je sais que la ministre travaille sur des choses. Je ne suis
pas dans le secret de tous les Dieux ou tous les secrets de Dieu, mais je sais
qu'elle travaille sur des choses. Je le souhaite, qu'elle le fasse. Le fédéral
a bougé. Quant à moi, ça ne va même pas assez loin au fédéral. Alors, il y a
une suite politique à ça. À partir du moment où le rapport est dans... il est
sur la place publique, on le débat, vous le commenterez, il sera commenté. Nous,
on fera nos suivis aussi, puis si on a des demandes plus politiques à faire, on
le fera. Mais je pense qu'il y a une base de travail intéressante.
M. Denis (Maxime) : Merci.
M. Marissal : Merci.
La Modératrice : Gabriel
Côté, QMI.
M. Côté (Gabriel) : Bonjour.
M. Marissal : Bonjour.
M. Côté (Gabriel) : Pourquoi
est-ce qu'un C.A. indépendant pour la Ligue de hockey junior majeur du Québec
c'est important? Puis comment est-ce qu'un C.A. indépendant, ça va faire en
sorte qu'il va y avoir moins d'initiations dégradantes dans le sport?
M. Ciccone :Un C.A. de la façon que ça fonctionne, avec la ligue junior
majeur du Québec, là, c'est que le C.A. est composé de membres qui sont des
partenaires de la ligue junior majeur du Québec. Nous, ce qu'on veut, notre
demande, c'est d'avoir quelqu'un d'indépendant parce que vous savez que... puis
ce n'est pas juste la Ligue junior majeur du Québec, là, c'est partout, puis on
l'a vu dans d'autres sphères, on l'a vu avec Hockey Canada. On l'a vu dans des
grosses compagnies aussi, qui est à l'extérieur du sport, c'est qu'on veut
protéger notre marque. On va tenter toujours de vouloir peut-être même cacher
des choses. On va toujours essayer de s'assurer que la marque, notre image
n'est pas entachée. Alors, qu'est-ce qu'on va faire? On l'a vu avec Hockey
Canada, on a payé une jeune femme pour garder le silence. Avec un C.A.
indépendant, bien, c'est comme un chien de garde dans le fond. Le C.A. n'a rien
à gagner, là. Le C.A., c'est de s'assurer justement que les jeunes en premier
lieu... puis la chose la plus importante, c'est nos enfants, de bien protéger
les enfants. Je ne dis pas qu'il y a... il n'y aura plus jamais de gestes
déplacés. Nous, on le souhaite, là, mais je veux dire l'être humain fait en
sorte qu'il va toujours y avoir, à un moment donné, des débordements, mais il
faut absolument, absolument, que ce soit le bureau des plaintes de la Ligue
junior majeur du Québec ou le C.A. qui soit complètement indépendant des
propriétaires de la Ligue junior majeur du Québec, là.
M. Côté (Gabriel) : La
recommandation stipule aussi que le C.A. devrait comporter plus de membres
issus de la diversité culturelle, puis qu'il soit composé aussi de plus de
femmes. Comment est-ce que ça, ça va aider à ce qu'il y ait moins de violence,
là, justement?
M. Ciccone :Je vais laisser Suzanne...
Mme Tremblay : Écoutez,
je pense qu'aujourd'hui, là, puis c'est ce qu'on souhaite... c'est important
dans la société dans laquelle on est que, justement, ça représente le sport,
qu'il y ait des femmes. Ça amène une autre dimension, une autre perspective,
une autre sensibilité, puis tout ça, ce que je répète, c'est important, c'est
que ça reste le plus... que ce soit indépendant. Donc, moi, je pense que...
puis, dans le sport, il y a une diversité culturelle, il y a des femmes qui
jouent au hockey, ça fait que moi, je pense que c'est important que ça se
reflète dans la Ligue junior majeure de hockey puis partout dans le sport. Non
seulement, là... puis nos recommandations, il faut le dire ici, aujourd'hui,
là, ils touchent l'ensemble des sports fédérés, scolaires, privés parce que la
violence dans les sports, on souhaite qu'il n'y en ait pas. Et on a été très
clair dans les recommandations là-dessus aujourd'hui.
M. Côté (Gabriel) : Merci
beaucoup.
M. Marissal : On veut
casser le moule du boy's club, là, le fameux boy's club. C'est vrai, en
politique aussi, hein, il n'y avait pas tant de femmes que ça, moi, quand j'ai
commencé à couvrir la politique, il y a 30 ans, là, puis les mœurs ont
changé en politique et pour le mieux. Tant mieux si on amène de l'air frais,
là, je l'ai souvent dit, là, il faut ouvrir les fenêtres, laisser rentrer, là,
des idées fraîches, du monde qui ont aussi des intérêts ailleurs, qui sont
capables aussi de voir plus loin que la rentabilité de l'équipe. Ce pour quoi
il faut ouvrir les C.A. aussi à des gens qui ne sont pas intimement liés à
l'opération commerciale qui est, dans ce cas-ci, la Ligue de hockey junior
majeure du Québec.
Mme Tremblay : Puis que
les athlètes soient au cœur des décisions qui sont prises à l'intérieur de ces
conseils d'administration là.
La Modératrice : Merci.
Sébastien Desrosiers, Radio-Canada.
M. Desrosiers (Sébastien) : Bien,
justement, sur le conseil d'administration, peut-être une précision sur la
composition du conseil d'administration que vous envisagez, parce que,
présentement, le C.A. de la LHJMQ, si je ne m'abuse, c'est
18 propriétaires des 18 équipes de la LHJMQ.
M. Ciccone :C'est ce que j'ai dit, oui.
M. Desrosiers (Sébastien) :
Alors, vous, votre conseil d'administration indépendant, ça ressemblerait à
quoi?
M. Ciccone :Bien, un peu ce qui est écrit dans le rapport, là, tu sais,
je veux dire avec une diversité, avec d'autres personnes qui vont justement
être impliquées au niveau de la Ligue junior majeur du Québec.
M. Desrosiers (Sébastien) : Mais
vous ne voulez pas que les propriétaires soient majoritaires, c'est ça que je
comprends?
M. Ciccone :Bien, c'est sûr qu'il faut avoir une participation des
propriétaires, c'est sûr et certain. Je vais vous donner mon exemple à moi qui
a fait partie d'un conseil d'administration, mais tu avais plusieurs sphères de
la société qui étaient représentées pour bien représenter tout le monde, là.
Quand... tu sais, Vincent a utilisé le terme boy's club, mais quand tu
rencontres le conseil exécutif de la Ligue junior majeur du Québec, c'est comme
dans la Ligue nationale, là... je fais un parallèle avec la ligue nationale, le
Conseil exécutif de la ligue nationale, c'est huit ou neuf ou
10 propriétaires qui, eux, vont prendre les décisions finales pour le
bien-être de la Ligue nationale. Oui, mais c'est toujours les mêmes gars qui
sont propriétaires qui prennent les décisions. Mais là on parle de jeunes puis
de jeunes mineures, là, tu sais, je veux dire, c'est une... c'est comme un
chien de garde, dans le fond.
M. Desrosiers (Sébastien) : Je
comprends, mais j'imagine que ces propriétaires-là ne voudront pas céder leur
place au sein du C.A. Est-ce que, par exemple, on pourrait nommer
19 nouveaux membres, comme ça, ils seraient minoritaires? Est-ce que c'est
une formule? J'hypothétise, là.
M. Ciccone :Bien là, nous...
M. Desrosiers (Sébastien) : Est-ce
que c'est une formule qui vous conviendrait?
M. Ciccone :Bien, je veux dire, on a fait des propositions, on fait des
propositions, puis on parle... On a utilisé le terme C.A., justement pour avoir
quelqu'un d'indépendant, mais appelez-le comme vous voulez, là, puis la façon
que vous voulez, mais ce n'est pas vrai qu'il faut que ce soient les mêmes
personnes qui veulent protéger leur image de marque, qui veulent protéger leurs
poches, mais en même temps qui prennent les décisions aussi pour nos jeunes
hommes, là.
M. Desrosiers (Sébastien) : O.K.
je comprends mieux. Je voulais juste comprendre la mécanique, mais une autre
question sur l'officier aux plaintes. Vous proposez aussi... vous recommandez
que cette personne-là, ce soit un poste puis que ce soit une personne, pas
juste un bureau. Pourquoi cette recommandation-là? Puis qu'est-ce que ça
changerait?
M. Ciccone :Bien, Vincent...
M. Marissal : Parce que,
vous savez que ça partait d'une bonne idée, là. Puis c'est assez nouveau, on
peut encore changer, là, ce n'est pas trop, trop enraciné, on peut encore le
changer. C'est qu'en fait on dit l'officier aux plaintes, mais l'officier aux
plaintes, ce n'est personne en ce moment, c'est un bureau. Puis là je le dis en
tout respect pour les gens qui travaillent là, qui font du bon travail puis qui
reçoivent les plaintes, mais il n'y a pas une personne physique, là, qui est
l'entité de... Quand vous rencontrez la Vérificatrice générale, vous savez que
c'est Mme Leclerc, ainsi de suite. Et ce sont des postes d'officier, des
postes d'ombudsman, en quelque sorte, qui doivent être représentés, qui ont une
autorité, puis ça permet aussi de convoquer cette personne au moins une fois
par année aux crédits ou dans d'autres forums parlementaires, ici, pour faire
le suivi, justement, puisqu'il y aura de l'argent public là-dedans. Alors, moi,
je pense que ça enverrait un bon message que ce n'est pas juste un bureau,
c'est quelqu'un, vraiment, qui peut aussi faire des conférences, qui peut
s'impliquer, qui va participer à la rédaction des projets de loi, si d'aventure
il y a des projets de loi qui suivent, quelqu'un qui a vraiment... qui est
vraiment le porteur de ce dossier-là et le visage de ça.
M. Desrosiers (Sébastien) : Ça
fait que, quand vous parlez de suite politique, est-ce que c'est ça que vous
envisagez?
M. Marissal : Bien, moi,
j'aimerais bien, effectivement, que cette recommandation prenne forme sous
forme de loi, une personne, donc, qui est nommée aux deux tiers de l'Assemblée
nationale, une personne qui a une constituante, une constitution,
effectivement, des pouvoirs, un bureau, un budget. Ce n'est pas la seule
recommandation qui va demander des suites politiques. Puis là, encore là, je vais
me garder une petite gêne pour aujourd'hui, j'aurai probablement l'occasion,
là, de poser des questions à la ministre là-dessus, mais je pense qu'il faut
qu'on bouge, il y a des choses qu'on peut faire qui ne passeront pas toujours
par une loi mais parfois par une loi.
M. Laberge (Thomas) : Bonjour
à tous. Bien, je vais faire un peu du pouce, là, sur ce que mon collègue a dit.
Est-ce que vous demandez, là, aujourd'hui à la ministre de se saisir de ces
recommandations-là et qu'elles se traduisent, finalement, en loi ou qu'il y ait
quelque chose, finalement, de contraignant pour la ligue?
M. Marissal : Bien, je
pense que je parle au nom de mes collègues, que nous souhaitons... Bien,
personne n'écrit un rapport pour qu'il soit tabletté puis qu'il prenne la
poussière, là, on n'a pas fait ça pour ça. Je pense qu'on a fait la
démonstration qu'il y a urgence et nécessité d'agir. Maintenant, je le redis,
je ne veux pas, aujourd'hui, mettre toute la pression sur la ministre et les
membres du gouvernement qui sont ici, là, on l'a fait ensemble, le rapport. Je
pense que, de bonne foi, tout le monde peut lire le rapport puis décider qu'il
y a des suites à donner à ça. Est-ce que c'est ce que je souhaite, moi? Oui,
absolument.
M. Ciccone :Je peux-tu juste ajouter? Je veux juste ajouter une chose.
Je veux qu'on comprenne bien, là, que le rapport, ce n'est pas une punition, là,
ce n'est pas des punitions. Je veux dire, non, ce n'est pas des punitions, ce
qu'on fait, c'est qu'on vient protéger, des suggestions pour protéger... selon
nous, là, on n'a pas la science infuse, mais on a rencontré des gens
exceptionnels qui sont venus nous voir.
Puis je vais vous donner un exemple. Le Pr
Labeau, de McGill, j'avais insisté, j'avais proposé, j'ai dit : Il faut
absolument entendre McGill. Ils ont été réticents au début parce qu'ils
pensaient qu'on était pour faire leur procès, ce n'était pas du tout le cas.
Parce qu'eux avaient mis une politique en place qui était superintéressante,
puis on l'a mise, on l'a mise dans nos recommandations. Et la proposition,
c'était que... Justement, quand il est venu devant nous, Dr Labeau, il a dit
une chose très intéressante, mais en même temps inquiétante, parce qu'il nous a
dit : Ce n'est pas tout le monde qui a la même définition de l'abus puis
du bizutage. Ça fait qu'imaginez-vous, là, tout le monde va faire leur
politique, mais n'ont pas la même définition de l'abus. Alors, qu'est-ce que
McGill a fait? McGill a mis noir sur blanc qu'est-ce qui détermine le bizutage
et qu'est-ce qu'on n'a pas le droit de faire? On l'a repris, et c'est un peu...
Bien, encore là, est-ce que c'est une punition, ça? Pas du tout. On dit :
Les jeunes n'ont pas le droit de faire ça parce que vous n'avez pas été
capables d'empêcher vos jeunes de le faire, tout simplement.
M. Laberge (Thomas) : M. Ciccone,
vous avez lancé un avertissement à la ligue, vous avez dit :
Gouvernez-vous, il va y avoir une prochaine étape. Ça serait quoi, la prochaine
étape?
M. Ciccone :Non, ce que je dis, c'est qu'on va faire des suivis.
Tantôt, j'ai dit... Ce que j'ai dit, tantôt, là, il n'y a personne qui aime ça
se retrouver devant une commission, puis je vous le dis, là, puis c'est écrit
dans le rapport qu'on se réserve le droit, là, si on trouve nécessaire, de les
faire venir devant nous. Moi, si c'était juste de moi, personnellement, je les
ferais revenir pendant les trois prochaines années, le temps qu'on est là,
mais, je veux dire, de la façon qu'on l'a écrit, là, on va donner un peu...
Moi, je suis un peu plus raide, là, mes collègues peuvent en témoigner, là, je
suis un peu plus direct, mais, en même temps, on a donné une latitude, on va
vous laisser travailler. Parce qu'à un moment donné on va être obligés de vous
ramener, là, puis c'est plate, là. Puis il faut passer quoi? Vous avez dit une
autre étape, mais là, quoi? On va-tu être obligé de légiférer pour protéger nos
enfants encore plus? Ça n'a pas de bon sens, là.
Mme Tremblay : Puis ils ont
des rôles puis des responsabilités, les fédérations.
M. Ciccone :Exactement, exactement.
M. Marissal : Et la
bonne foi se présume, la bonne foi se présume, là. M. Cecchini vient
d'arriver en poste, il a donné des entrevues. Il est venu d'ailleurs, deux fois
plutôt qu'une, nous voir. On a apprécié. Il s'est engagé à des changements. Bien,
la balle est dans son camp, là, ou la puck est dans son camp, là. Alors, qu'il
fasse les changements qu'il souhaite, et qui sont nécessaires, et qui
conviennent aussi aux recommandations du rapport. Vous savez, à la fin, s'il
faut sévir pour protéger des mineurs qui subissent des abus, je n'aurai aucune
gêne à le recommander. Ce n'est pas moi qui est ministre, là, mais si vous
dites... s'il faut aller plus loin, bien, je souhaite qu'on aille plus loin.
Puis, là-dessus, je vais vous dire, la bonne foi se présume aussi pour la
ministre, là, elle connaît le milieu du sport, là. Je ne pense pas qu'elle non
plus souhaite qu'on revive des affaires comme ça puis qu'on se retrouve dans un
an ou deux avec des nouveaux cas d'abus épouvantables pour lesquels on va
encore devoir faire des commissions.
M. Laberge (Thomas) : Peut-être
que c'est une question un peu plus philosophique, là. Dans le rapport, vous
dites au fond que le hockey est plus propice à ce genre de situation là,
notamment à cause qu'il y a une forme de hiérarchie ou si on survalorise la
victoire, mais, en même temps, c'est un sport, il y a des coachs. Vous ne vous
attaquez pas un peu à l'essence du hockey avec ce genre d'affirmation là dans
le rapport?
M. Marissal : Bien,
est-ce que, pour gagner, il faut absolument violer les lois et ses coéquipiers?
Je ne crois pas. Je ne pense pas que ça fait partie de la philosophie d'un
sport. Puis gagner, tout le monde veut gagner quand on fait des sports, là, je
veux dire, normalement, quand on se lance dans une équipe ou dans un marathon,
ce n'est pas pour finir dernier, on... Cela dit, est-ce qu'on a des règles à
respecter? Oui. On dit par ailleurs que les rites d'initiation peuvent être
positifs et peuvent apporter quelque chose.
M. Ciccone :On les encourage.
M. Marissal : Ce qu'on
dit, essentiellement, c'est qu'il y a des lignes à ne pas traverser, que tu
sois au hockey ou dans un autre sport, mais essentiellement, c'est ce que ça
dit. Tu sais, gouvernez-vous en conséquence. Les abus dont on a lu les détails
ces dernières années ne participent en rien à la réussite et à
l'accomplissement sportif, au contraire, parce que les gens qui ont subi ça,
là, ils en subissent encore les conséquences, des fois, 20, 30, 40 ans
plus tard. Bien, ils ont peut-être gagné un trophée, mais ils ont perdu leur
vie.
M. Laberge (Thomas) :
Merci.
La Modératrice : Merci, on va
pouvoir passer en anglais.
Mme Greig
(Kelly) : Just to pick up on a similar theme
from the question from earlier, for parents, for young athletes who are
listening today, why are you confident that things will change this time?
M. Marissal : Well, I'm confident that things could change, because what we have
done over the last month is basically raising a bell and saying : Wo! Wo!
Wo! Stop that, there's something wrong with this, we should act, and we should
do something about it. And that's what we did, that was the first step, that
was the step that belongs to us. Now, the puck is in the zone of the political
leaders, the Minister, and the Ligue de hockey junior majeur as well, for that
matter, and other… in sports in Québec. So, I'm quite confident that sport is
not only a business, sports concern everybody in Québec, and we love sports in
Québec, so I'm quite confident that we can pull together to reach something
constructive, to make sure that we protect our kids, and that's basically what
we did, that's the first brick of this new house.
Mme Greig
(Kelly) : How can you make sure…
M. Marissal : Enrico, veux-tu y aller?
M. Ciccone : Oui.
Mme Greig
(Kelly) : Sorry, do you want to comment?
M. Ciccone : Ah! Sure, sure, sure.
Mme Greig
(Kelly) : Do you want to keep going on that…
M. Ciccone : No, no.
Mme Greig
(Kelly) :OK. You mentioned McGill and that they were one of the actors that had
a policy. How important is it to actually have it written down what hazing is
or intimidation or bullying, whatever you would like to call it? And, you know, this came out during the hearings
that you were surprised that not everybody had that. So, to have it, what do
you think that's going to add to stop it?
M. Ciccone : Well, it's to make it uniform, it's to make it uniform because, as
we've seen, Mr. Labeau that came representing McGill, what he has told us is
that the abuse, the definition of abuse is different for everybody, a different
level, initiation, also, is different for everybody. For some leagues, some
sports, some teams, you know,
doing something might be OK, might be OK, like we've seen in the last 40 years.
Because, you know, me, I went
through this process, and, you know, for me, when I was there, it was normal, because why? Because they
did it before me, they did it after me, and it was a part of the culture,
that's the way it is. So, you know… So, it's important to put it in black and white what you're not
aloud to do. And why McGill did that? Because in 2005, something happened in
the football program, you know,
about this story, but… And I think they did something well, but you know what? It happened again with the
girls in basketball and the boys in the basketball program also, again. So,
they said: Where can we go? Because McGill did that work before, before us, and
we used their experience to put it across sports in Québec. Thank you.
Journaliste
: How can you make sure those recommendations
are implemented?
M. Ciccone :
Well, you know, like my colleague, Vincent, said, you know, now, what we've
done with the report, we transferred this now to the Government. Now, the
minister has the full power, the Government has the full power to apply them.
You know… And for me, there's 23 recommendations, and I can talk for all my
colleagues, we hope that they will apply them. You know, they will help, they
will help the federations, they will help the sports in schools to… because they
will need some help from the Government also.
Journaliste
:
There was a lot of alleged cases of abuse in the last… you know, in the last
few months, in the last few years. What is your message today to the victims?
M. Ciccone :
Well, you know, we tell the victims : Don't be afraid. You know, don't be
afraid. You've been heard. Don't be afraid. You've been heard. I'm talking, I
have chills, because for me, you know, going back to see all the sports and all
the players that I've been with, you know, and to tell them that you're not
alone anymore, you can speak freely and please do so. Still, please do so. If something
happened 20, 25, 30 years ago, you know, there is no limitation, please speak,
you know, and somebody will help you. We have organizations like Sport'Aide
that can help you. They will listen to you, you know. So, they will accompany
you to whatever you need to do to put a band aid on what happened in your life.
Journaliste
:
Thank you.
M. Ciccone :
Thank you very much.
La Modératrice
:
Merci beaucoup. Bonne fin de journée.
(Fin à 16 h 28)