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Point de presse de M. Paul St-Pierre Plamondon, chef du troisième groupe d’opposition, et M. Joël Arseneau, porte-parole du troisième groupe d’opposition en matière de santé, de services sociaux et de soins à domicile

Version finale

Le mardi 23 mai 2023, 10 h 30

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Dix heures trente minutes)

M. St-Pierre Plamondon : Bonjour à tous. Donc, ce matin, d'entrée de jeu, je veux revenir sur notre demande d'hier au gouvernement de la CAQ de rendre publics, de déclassifier tous les documents d'archives, donc, témoignages comme documents remis, relatifs à la commission Grenier, qui enquêtait sur le financement illégal du camp du Non lors du référendum de 1995. On a profité de la Journée des patriotes pour le faire parce que c'est une journée qui commémore plusieurs générations de Québécoises et de Québécois qui se sont tenus debout pour que la vérité et la justice émergent dans un régime d'origine coloniale.

Ce n'est pas la première fois que la remise en question du narratif officiel du Canada est nécessaire. Rappelons que la Constitution canadienne de 1867 émane de plusieurs fraudes ou manoeuvres douteuses sur le plan électoral. Rappelons le rapatriement de la Constitution de 1982, qui s'est fait sans le Québec, avec, à nouveau, des manoeuvres douteuses. Donc, un moment historique de l'importance de 1995 mérite qu'il y ait tout simplement de la transparence, qu'on dise la vérité et donc qu'on rende publics des documents qui, pour l'instant, de manière inexplicable — on parle de 4 500 documents, 90 témoignages — seraient sous pli confidentiel et ordonnance de non-divulgation pour l'éternité. Mais ça, dans le contexte québécois, comme Canadiens, c'est du jamais vu, ça ne s'explique pas non plus à la lumière des critères jurisprudentiels, et même quand on regarde aux États-Unis, même l'assassinat de John F. Kennedy ne justifiait pas de retenir les documents pour l'éternité. Donc, il y a une question de recherche de la vérité, qui est le fondement de notre système de justice et du fonctionnement de nos institutions.

Donc, je vous annonce que nous allons déposer demain, mercredi, notre motion pour demander au gouvernement et à tous les partis de soutenir une simple loi qui viendra dire : Rendez publics tous ces documents-là. C'est une motion, demain, du mercredi, ce qui veut dire qu'il n'y a pas de question de consentement, chaque parti devra voter, il y aura bel et bien débat sur la question. Et je pense que, que l'on soit fédéraliste, ou indépendantiste, ou qu'on soit entre les deux, il y a un principe plus fondamental de transparence envers la population et de respect de notre démocratie. Si un des moments démocratiques les plus importants de notre histoire a été le théâtre de plusieurs fraudes électorales, il faut absolument que l'information soit divulguée de manière transparente. Et on espère donc que les autres partis appuieront tout simplement cette démarche-là, dans quel cas la loi peut s'adopter très rapidement, elle tiendra à une page environ. Donc, voilà.

M. Lacroix (Louis) : Qu'est-ce que vous espérez trouver dans ces documents-là?

M. St-Pierre Plamondon : On espère comprendre la portée des manoeuvres frauduleuses sur le plan des dépenses électorales. Parce qu'en date d'aujourd'hui ce qu'on sait, c'est qu'il y a eu le «love-in» qui a été financé on ne sait pas comment, on sait que plusieurs personnes aussi ont été appelées à voter, même leurs billets d'avion auraient été payés, dans le cas de militaires, pour venir voter. On a une idée qu'il y a au moins des dizaines de milliers de personnes qui ont voté alors qu'ils n'avaient pas le droit de vote au Québec. On sait également que Chuck Guité puis les origines du scandale des commandites, ça commence par du placement publicitaire de millions de dollars, pas longtemps avant le vote de 1995, mais, encore là, on n'a pas tous les détails. On sait que Patrimoine Canada, le comité pour l'unité canadienne, plusieurs entités étaient actives dans du financement électoral à ce moment-là, mais le fait est qu'en date d'aujourd'hui on ne sait pas toute la vérité. Et même une commission aussi limitée que celle de la commission Grenier, qui découle du Directeur général des élections, avec un mandat très, très limité à Option Canada, on a pris la décision d'entendre ça à huis clos, derrière les portes closes, pour ensuite enterrer tous les documents et tous les témoignages pour toujours. Ça suggère qu'on va apprendre des choses très pertinentes lorsqu'on rendra public.

M. Bergeron (Patrice) : Donc, vous pensez déjà qu'il y a... déjà, vous estimez ...vous êtes déjà certain qu'il y a eu fraude, si je comprends bien? Vous parlez de manœuvres frauduleuses, vous êtes déjà...

M. St-Pierre Plamondon :Oui, parce que le rapport Grenier, même s'il est très succinct, parle de dépenses électorales non autorisées, et c'est le mandat, à l'époque, du Directeur général des élections, qui se disait : Bien là, si on a mis... on a placé des règles du jeu, 5 point quelques millions pour le camp du Oui, même chose pour le camp du Non, et que le camp du Non a contourné ces règles-là de toutes sortes de manières, on va s'intéresser au cas d'Option Canada. Mais ce qui est très particulier, c'est qu'on a décidé de s'y intéresser à huis clos et on s'est organisé pour que jamais ces documents-là ne soient rendus publics, ce qui fait un peu penser à la fameuse patente à gosses qui avait été suggérée avant la commission Charbonneau, où, à l'origine, le gouvernement Charest espérait une commission à huis clos, derrière les portes closes, en disant aux gens : Tout ce que vous pourrez dire serait peut-être retenu contre vous. Vous comprenez que c'est contre tous les principes de justice.

Mme Lajoie (Geneviève) : ...dévoilement de ces informations-là au grand public, est-ce que vous pensez que ça pourrait donner de l'aide ou, en tout cas, aider la cause souverainiste au Québec?

M. St-Pierre Plamondon :On est plus dans une logique de recherche de la vérité, c'est-à-dire que la justice en général, notre système de justice, est fondée sur la recherche de la vérité, et, quand il y a des moments déterminants de notre histoire, on ne peut pas bâtir une société sur le mensonge. Et, vraisemblablement, si on cache toute l'information pour l'éternité, c'est que là-dedans se trouvent des éléments de vérité qui sont importants.

M. Lacroix (Louis) : Mais est-ce que, 30 ans plus tard, vous croyez que si on devait, par exemple, découvrir des manoeuvres et démontrer des manœuvres frauduleuses... est-ce qu'il y aurait une possibilité, à votre avis, d'intenter un recours juridique pour faire reconnaître les résultats du référendum?

M. St-Pierre Plamondon :On est, disons, à la première étape, de simplement demander au gouvernement de passer une loi pour rendre les choses publiques, mais, immédiatement...

M. Lacroix (Louis) : Mais est-ce que vous rejetez ça d'emblée... en train de dire : Bien, il est trop tard, ça fait 30 ans?

M. St-Pierre Plamondon :Non, on ne rejette rien, mais on est dans une logique de tout simplement laisser les journalistes faire leur travail. Parce qu'il faut comprendre que, lorsqu'on met tout sous ordonnance de non-divulgation, ensuite, bonne chance pour les journalistes qui posent des questions, tentent d'avoir des documents, parce qu'ils se font répondre constamment : On ne peut plus parler de ce sujet-là au Québec parce qu'il y a une ordonnance de confidentialité et de non-divulgation qui couvre tout ce sujet-là. Donc, en rendant publics les documents, on laisse aux journalistes la chance de s'intéresser et d'enquêter sur plusieurs des aspects de ce qui est vraisemblablement de la fraude électorale.

Mme Lajoie (Geneviève) : ...changer l'avenir. Est-ce que ça pourrait, le dévoilement de ça...

M. St-Pierre Plamondon :La vérité peut toujours changer l'avenir. Si on choisit de ne pas vivre dans un mensonge institutionnalisé et on choisit la vérité, ça change le cours des choses, notamment le simple argument qu'on m'a déjà souvent servi à titre de chef du Parti québécois, à savoir : Les Québécois se sont déjà décidés, ont déjà parlé, en 1995, donc vous n'avez plus le droit de ramener l'hypothèse d'un Québec indépendant. Vous comprendrez que, si, comme la Constitution de 1867, si, comme le rapatriement de 1982, le référendum de 1995 a bel et bien eu lieu sous le signe de la fraude et des manoeuvres malhonnêtes, évidemment que ça change certains des arguments qui sont servis aux indépendantistes comme quoi on n'aurait pas le droit de faire la promotion d'une option qui est parfaitement légitime. La vérité a toujours un impact sur l'avenir.

M. Desrosiers (Sébastien) : S'il suffit d'un projet de loi pour déclassifier ces documents-là, pourquoi le PQ ne l'a pas présenté quand il était au pouvoir?

M. St-Pierre Plamondon :Bien là, de me demander pourquoi, en 2012 ou en 2002, on n'a pas fait ce geste-là... La commission Grenier, je pense, s'est déclenchée en 2006, le rapport est en 2007. Dans le contexte d'un gouvernement minoritaire, il y avait probablement également, là, d'autres enjeux, simultanément. Donc, une fois en 2023... Moi, comme chef, j'avais déjà fait, durant la pandémie, une intervention auprès d'un ancien président de Telus qui se vantait, au nom du patriotisme canadien, d'avoir contourné les règles et je l'avais épinglé dans une lettre ouverte en disant : Vous devriez avoir honte de saboter la démocratie québécoise, mais vous comprendrez que la pandémie n'était pas nécessairement un moment pour demander une chose comme celle-là. Le jour des Patriotes me semble... la journée dédiée aux Patriotes me semble une journée dédiée à la quête de justice des Québécoises et Québécois, donc ça me semblait approprié de faire une demande qui est toute simple aussi, là, qui ne demande pas mer et monde.

M. Desrosiers (Sébastien) : ...compréhension, le gouvernement Marois aurait pu le faire...

M. St-Pierre Plamondon :Je ne sais pas si ça a été évalué. Je n'ai pas d'information. Je n'ai pas demandé.

M. Bergeron (Patrice) : Si je vous comprends bien, bien, vous dites que ces manœuvres frauduleuses là ont pu coûter, donc — on suit votre logique, là — des milliers de votes, ou ça a pu faire changer le résultat du référendum?

M. St-Pierre Plamondon : Est-ce que la tricherie et la fraude électorale est acceptable en fonction du résultat qui aurait changé ou non? Moi, je vous répondrais : La tricherie et la fraude électorale dans des moments de vérité aussi importants dans l'histoire du Québec que ce référendum de 1995, elle est inacceptable dans tous les cas.

Maintenant, est-ce qu'il y a des chances que des dizaines de milliers de personnes qui votent alors qu'ils n'ont pas le droit de vote, des millions de dollars en placements publicitaires, quelques jours avant le vote, qui n'étaient pas autorisés, qui n'étaient pas permis... est-ce que tout ça a pu, comme le «love-in», également, changer certains votes? Bien, évidemment, évidemment.

M. Desrosiers (Sébastien) : Sur la ligne de parti, il semble que M. Legault a donné la consigne à ses députés de ne pas s'exprimer publiquement sur le troisième lien. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Est-ce que vous pensez que la ligne de parti est dommageable pour la démocratie?

M. St-Pierre Plamondon : Quelques nuances. Bon. Là, évidemment, ça tombe quelques jours après qu'une ancienne députée de la CAQ se soit exprimée en disant : On n'a pas notre mot à dire, le rôle de député est dévalorisé. Et là on a entendu les ténors de la CAQ dire : Non, non, à la CAQ, tout le monde peut s'exprimer, on a une saine démocratie, et là arrive cette révélation qui ne surprend personne, là, à savoir que les députés de la région de Québec se sont fait dire de ne pas s'exprimer sur cette question-là.

Je pense qu'on ne peut pas non plus imaginer un système politique où les membres d'un même parti disent une chose et son contraire à tous les jours. Il y a une obligation envers la population d'être cohérent une fois qu'on a délibéré à l'interne, parce que, des fois, les décisions sont difficiles, génèrent des débats. J'ai l'impression qu'à la CAQ ce qui se produit, c'est qu'il n'y a même pas de débat à l'interne. Donc, vous comprenez que vous êtes député de la région de Québec, on vous annonce que ce sur quoi vous avez fait campagne, ce pour quoi vous avez prêté la main sur le cœur au moment de promettre, là, finalement, ce n'est plus ça du tout. Vous n'avez pas été consulté, votre mot à dire est minime, sinon nul, et ensuite on vous dit : Non seulement, à l'interne, ton opinion ne changera pas la décision de la personne... François Legault ou les quelques personnes qui décident, mais en plus, par après, quand la population va, à juste titre, se sentir flouée, là non plus, comme députés, vous n'aurez pas la chance de vous exprimer.

Mme Lajoie (Geneviève) : Est-ce que c'est le parti d'un seul homme?

M. St-Pierre Plamondon : Bien, c'est ça, c'est que c'est une mentalité, la CAQ, une conception de la démocratie où, en fait, c'est géré davantage comme une compagnie détenue par quelques personnes qui ont le pouvoir de prendre ces décisions-là, plutôt que comme une démocratie. Et il y a là des questions à se poser sur comment un parti politique doit fonctionner. Est-ce que ça doit tenir seulement à des employés rémunérés ou est-ce que de vrais militants qui débattent librement... On l'a vu, au congrès du Bloc, d'ailleurs, il y avait certaines propositions qui généraient de véritables questions, mais une vie démocratique dans un...

M. Lacroix (Louis) : ...soit dit en passant, pour ne pas qu'il y ait de débat, il y a eu du débat sur une proposition au congrès du Bloc.

M. St-Pierre Plamondon : Bien non, il y a eu certains débats importants, dont sur le Parti québécois et son rôle, et la présence de plusieurs propositions démontre qu'il y a une transparence sur la volonté des militants, donc...

Journaliste : ...pas publiquement, vous trouvez ça normal? Il y a une ligne de parti à suivre dans tous les partis.

M. St-Pierre Plamondon : On ne peut pas dire une chose et son contraire au nom d'un gouvernement. On doit, par contre, avant de prendre la décision du gouvernement, surtout lorsque des députés se sont engagés personnellement, solennellement sur quelque chose il y a quelques mois, en élections... J'ai l'impression que le problème réside dans le fait qu'il n'y a pas de délibération de groupe, mais une ou quelques...

Journaliste : ...

M. St-Pierre Plamondon : Bien, on suppose. Allez poser la question aux députés de Québec, à quel point ils ont été consultés, à quel point leurs voix ont pesé dans la décision de se raviser complètement sur la promesse du troisième lien. Vous allez trouver votre réponse assez rapidement, je crois.

M. Lecavalier (Charles) : Mais juste pour comprendre, sur la ligne de parti, pour vous, ça ne serait pas possible qu'un député, sur un sujet qui concerne sa circonscription, puisse dire : Écoutez, je fais partie de x parti politique, mais, sur cet enjeu-là, je ne suis pas d'accord...

M. St-Pierre Plamondon : Bien, on peut dire : Je ne suis pas d'accord et je me rallie, mais, quand on est à ce point en désaccord avec le parti politique, qu'on n'est pas capable de se rallier à une délibération à l'interne, bien là, il y a la possibilité de devenir indépendant, de se réaligner, mais il faut être conscient quand même, de manière réaliste... Puis mon travail, c'est de critiquer la CAQ, mais je n'irai pas au point de dire que la CAQ devrait dire à chacun de ses députés : Exprimez-vous librement, de sorte qu'on dise une chose et son contraire à tous les jours sur chaque enjeu. Pour la population, ça devient absolument incompréhensible.

M. Lecavalier (Charles) : Mais Mme Foster, elle, disait, bien, il y a d'autres... aux États-Unis, en France, les partis politiques acceptent une diversité d'opinions beaucoup plus grande qu'ici, c'est-à-dire que... Évidemment, je comprends ce que vous voulez dire sur... un député péquiste ne pourrait pas dire : Bien, moi, je ne crois pas à l'indépendance du Québec, donc.

M. St-Pierre Plamondon : Par exemple.

M. Lecavalier (Charles) : Mais ça, évidemment, on comprend ça, mais, sur des enjeux, disons, qui sont moins névralgiques, que certains élus aient une opinion différente, là, du parti, ça ne marcherait pas?

M. St-Pierre Plamondon : Ce qu'on a proposé en campagne électorale et ce sur quoi on va revenir aujourd'hui et dans les prochains jours, c'est sur la valorisation du rôle des députés lorsqu'ils ne sont pas ministres, donc avoir plus de liberté pour une réelle délibération interne, avoir une liberté d'expression sur les dossiers de sa région, indépendamment de l'intérêt du gouvernement, au moins de pouvoir nommer les enjeux, ce qui est une problématique. Donc, on va proposer un certain nombre d'améliorations pour que le rôle de député ne soit pas celui, là, de l'expression «plante verte», là, qu'on a entendue souvent. On va travailler là-dessus.

M. Lacroix (Louis) : Mais, tu sais, on dit souvent que la liberté d'expression, dans un parti, sur des questions morales, par exemple, tu sais, on l'a vu à l'Assemblée nationale, sur l'aide médicale à mourir...

M. St-Pierre Plamondon : Exact.

M. Lacroix (Louis) : On se souvient qu'il y avait des députés du Parti libéral qui avaient voté contre, puis ils n'ont pas été exclus du caucus. Est-ce que, sur des éléments moraux comme ça, les députés doivent avoir la liberté d'expression? Je vous donne un exemple : si quelqu'un dans votre formation politique disait : Bien, moi, là, le droit à l'avortement, je ne suis pas d'accord avec ça, est-ce qu'il serait exclu? Question morale.

M. St-Pierre Plamondon : Sur les questions morales, c'est vrai qu'on a réussi à quelques reprises à se donner un peu plus d'espace pour des questions qui ne touchent pas... qui touchent la politique dans l'absolu et non pas, par exemple, sur des questions de promesses électorales non tenues, mais ça demeure qu'on doit être en accord suffisamment avec son parti, si on y milite, pour pouvoir se rallier après une vraie délibération à l'interne. À la CAQ, moi, je pense que le problème, c'est que cette délibération interne, le débat réel...

M. Lacroix (Louis) : Vous ne répondez pas à ma question. Sur une question comme l'avortement, par exemple, qui est une question hautement morale, est-ce qu'un député au Parti québécois aurait le droit de ne pas être d'accord avec la position du parti là-dessus?

M. St-Pierre Plamondon : Je ne répondrai pas sur des questions hypothétiques, mais, en effet, sur des questions plus larges, on l'a vu, sur l'aide médicale à mourir, il y a peut-être plus d'espace pour donner de la liberté. Mais, encore là, se pose la question légitime de la cohérence de la position d'un parti. Je ne pense pas qu'un parti politique peut dire une chose et son contraire à la population dans la place publique.

L'important, puis c'est ça, ma réponse, c'est qu'il faut qu'il y ait une démocratie à l'interne qui est saine, qui permette de soulever toutes les prises de position, mais, une fois que la délibération est faite... Si, dans le cas de la CAQ, 90 députés s'expriment sur l'actualité en disant une chose et son contraire à tous les jours, pour la population, c'est complètement inintelligible, et, au niveau de la cohérence, c'est-à-dire comprendre quelles sont les orientations pour l'avenir du gouvernement, également, ça pose problème. Donc, moi, je pense que la clé, c'est la délibération à l'interne, laisser tout le monde s'exprimer, qu'il y ait un vrai débat sain. Et c'est ce qui manque, à mon avis, du côté, de la CAQ, c'est ce qui explique qu'autant de députés soient insatisfaits de comment ça procède.

M. Bergeron (Patrice) : ...déjà vu ça ici, c'est-à-dire qu'avant, les caucus... dans le bon vieux temps, là, tous les députés pouvaient parler avant le caucus, sur tous les sujets, le registre des armes à feu... puis ils disaient une chose et son contraire parce que, dans leurs circonscriptions, ils disaient une chose. Une fois qu'ils sortaient du caucus, ils avaient une opinion cohérente. Mais vous, est-ce que, dans votre rêve le plus fou, vous aviez 63 députés, par exemple, vous laisseriez vos députés parler avant d'arriver au caucus, puis librement parler?

M. St-Pierre Plamondon : Oui. Ça prend une sphère de débat. Il faut se donner rendez-vous à un endroit et dire : Il y a un désaccord sur cette question-là. Par exemple, le troisième lien c'est un excellent exemple, là, parce que, dans le cas des députés de la région de Québec, ils ont mené campagne en promettant et en repromettant ça. Donc, le premier ministre a une obligation morale envers ces députés-là si eux-mêmes se font flouer dans le processus. Parce que, mettez-vous à leur place, eux, la main sur le cœur, en jurant sur la Bible, disent aux électeurs : Ça aura lieu, et là ils sont pris pour défendre l'indéfendable par après. S'il n'y a pas de vraie délibération, puis de vrai débat à l'interne, puis que c'est géré comme une compagnie où est-ce que le P.D.G. dit : Ça va marcher de même, puis arrangez-vous, évidemment que ça ne tient pas, là.

Mme Lajoie (Geneviève) : Il me semble, au Parti Québécois, quand même, qu'il y a déjà eu des désaccords au sein des caucus, là.

M. St-Pierre Plamondon : Bien sûr.

Mme Lajoie (Geneviève) : Je pense, vite, vite, là, Véronique Hivon, il me semble, sur le racisme systémique, là, elle n'avait pas nécessairement la même partie que le chef. Comment vous gérez ça?

M. St-Pierre Plamondon :Il y a vraiment un espace, au Parti québécois, pour du débat puis de l'argumentation sains. Ça a duré pendant un certain nombre de semaines, mais, ultimement, les gens se rallient à une position commune. C'est un bon exemple où, si on tient une position et son contraire constamment, bien, c'est intenable, parce que la population a le droit de savoir, si je vote pour le Parti québécois ou si je vote pour la CAQ, je vote pour quoi sur ce sujet-là.

Mme Lajoie (Geneviève) : ...là, on fait une question hypothétique, mais Mme Hivon, par exemple, donc, après ça, une fois que la position du PQ est prise, elle ne peut plus s'exprimer publiquement sur sa position à elle?

M. St-Pierre Plamondon :Bien, c'est-à-dire qu'on peut toujours s'exprimer, mais on doit également assurer la cohérence de la position du parti si on veut que les gens comprennent c'est quoi, la position du parti, sinon... C'est là que la délibération interne me semble très importante. Puis, à l'externe, il faut quand même communiquer quelque chose de compréhensible pour la population. Sinon, il n'y a rien à comprendre.

M. Desrosiers (Sébastien) : Je reviens à l'exemple du troisième lien. Est-ce que vous ne pensez pas que les électeurs de la région de Québec aimeraient ça, savoir que leur député, par exemple, est contre la position du gouvernement sur cet enjeu-là? Parce qu'ils ont voté, entre autres, sur cette question-là à la dernière élection. Est-ce que vous ne pensez pas que les électeurs méritent d'entendre leurs députés quand ils ne sont pas d'accord?

M. St-Pierre Plamondon :Bien, on peut concevoir un système où le député dit : J'ai exprimé mon désaccord. Maintenant, après délibération et compte tenu des arguments, je me rallie à la position du parti, et c'est ce que je vais mettre de l'avant dorénavant. On peut consigner un désaccord, mais je pense qu'au final il faut être capable, également, vis-à-vis la population, de dire quelque chose de compréhensible et de cohérent. Si on dit une chose et son contraire, simultanément et constamment, ça devient complètement ingérable, puis les gens ne savent pas à quoi s'en tenir quant à la position du parti. C'est fondamental, en démocratie, de savoir pour qui on vote puis pour quoi on vote.

M. Lecavalier (Charles) : ...quand un parti dit, par exemple : Nous, on va être le parti des régions, bien, un gouvernement doit toujours faire de l'arbitrage, et parfois c'est de prendre une décision pour une région au détriment d'une autre, par exemple, en appuyant un projet d'entreprise qui hésite entre deux régions. Il donne une subvention, il va aller dans une région plutôt qu'une autre. Donc, le député, lui, qui représente la région, disons, qui est perdante, là, bien, dans l'opposition, il pourrait pousser des hauts cris, dénoncer ça, puis, au gouvernement, il ne peut pas. Mais est-ce qu'on ne pourrait pas concevoir une situation où, même au gouvernement, un député qui veut bien défendre sa région puisse dire : Bien, écoutez, là...

M. St-Pierre Plamondon :Oui, la réponse, c'est oui, parce que, là, on est vraiment dans la défense de sa circonscription. Le député a le rôle fondamental de la défense de sa circonscription, et c'est ce sur quoi on est en train de travailler. On en a parlé en campagne électorale, mais, dans notre réflexion sur comment on peut relancer ou revaloriser le rôle de député lorsqu'il n'est pas ministre, il y a, minimalement, la capacité de s'exprimer sur les enjeux dans sa circonscription. Si on n'est même pas capable de nommer un problème en santé, et en éducation, ou en services sociaux dans la circonscription qu'on défend, bien là, on est dans une omerta qui est malsaine. Donc, on travaille là-dessus, on va présenter quelque chose prochainement.

M. Bergeron (Patrice) : ...député, le parlementaire caquiste comprend bien son rôle? Est-ce qu'il a bien compris son rôle de parlementaire? Il reçoit quand même un mandat de la population, il n'est pas juste là pour le parti. Est-ce que les 90 ont bien compris leur rôle de parlementaire, là, leur droit de parole que...

M. St-Pierre Plamondon :L'intervention de Mme Foster, qui était députée il n'y a pas si longtemps, de la CAQ, suggère qu'on leur a peut-être donné une version de leur rôle qui est partiellement erronée.

M. Lacroix (Louis) : Juste une précision sur la commission Grenier parce que ma question tout à l'heure n'était pas tout à fait claire, puis là j'aimerais ça... est-ce que, selon ce que vous allez trouver, éventuellement... Si on vous donnait accès, justement, aux témoignages ou aux documents, est-ce que vous pourriez utiliser ce que vous allez trouver pour remettre en question la légitimité du référendum de 1995 et nous relancer dans une démarche référendaire, par exemple, pour dire : Bien, il faut reprendre, compte tenu qu'il y a eu une fraude électorale, il faudrait reprendre le référendum? Est-ce que ça, c'est dans vos intentions?

M. St-Pierre Plamondon :Je ne prends pas d'engagement en ce sens-là ce matin. Mon engagement, ce matin...

M. Lacroix (Louis) : Mais vous ne l'écartez pas.

M. St-Pierre Plamondon :Il n'est pas écarté, mais, en même temps, mon engagement, ce matin, c'est tout simplement de rendre les faits et la vérité sur les fraudes électorales de 1995 disponibles, transparents pour la population, mon engagement s'arrête là, parce que c'est fondamental pour une démocratie.

Ensuite, je ne veux pas faire de prédiction, parce que, dépendamment de ce qu'on y trouvera et des conséquences que ça peut ou ne pas avoir, bien, je ne veux pas m'engager dans une direction. Je pense qu'on est vraiment dans les fondamentaux, ce matin, là. Est-ce que, dans une démocratie, c'est normal de cacher la vérité aux gens alors que ce sont des informations sur de la fraude électorale à un des moments les plus importants de notre histoire?

M. Lacroix (Louis) : Je comprends, mais sauf que, si on prend la décision, par exemple, de passer un petit projet de loi puis de permettre justement...

M. St-Pierre Plamondon :La divulgation.

M. Lacroix (Louis) : ...l'accès, il faut savoir qu'est-ce qu'il y a derrière, qu'est-ce qui peut arriver éventuellement, non?

M. St-Pierre Plamondon :En fait, on ne sait pas ce qu'il y a dedans. On se doute que c'est important, parce qu'on ne met pas sous scellé de l'information pour l'éternité.

M. Lacroix (Louis) : Mais vous n'écartez pas la possibilité de dire... si c'est évident, par exemple, de dire : Ce référendum-là a été volé, reprenons-le?

M. St-Pierre Plamondon :Je n'ai pas de position là-dessus ce matin. On va prendre cette première étape là.

M. Bossé (Olivier) : ...M. St-Pierre Plamondon, si vous le rencontriez aujourd'hui, qu'est-ce que vous voudriez lui dire?

M. St-Pierre Plamondon :Je n'ai pas eu d'invitation, ça fait que...

M. Bossé (Olivier) : ...à discuter avec lui?

M. St-Pierre Plamondon :Ah! probablement qu'il y aurait... en fait, il y aurait des tonnes de choses : l'environnement, le français, le statut du Québec dans le monde. Il y a plein de choses à discuter. Le fait est que je n'ai pas eu d'invitation et que je n'ai pas non plus relancé quoi que ce soit en ce sens.

Mme François (Mélissa) : We're learning François Legault asked his MNAs not to express their disagreement on that tunnel project. I would like to know if you would allow your MNAs to have their own opinions on some matters.

M. St-Pierre Plamondon : Of course, MNAs are alllowed to have their own opinion, and I think what's problematic in the third link of Québec file is that they were, not so long ago, in an election where they promised something very clearly, and then I don't think they were ever genuinely consulted, in terms of the new decision to just give up on that promise. And so, if there's no deliberation, if there's no freedom to express a disagreement within the CAQ because it's run by one or a very few number of people, a bit like a company, well, of course, it's difficult afterwards to accept that on top of that you're not even allowed to express your disagreement publicly. So, I think where it's very important for a political party... is to allow genuine debates on decisions to be made, expecially if it's about to break an electoral promise. And what I understand is that that was not done.

And so, at the same time, I need to mention that a Government or any political party needs to be coherent and clear as to what they stand for. So, you can't have a system where a party or a Government says one thing and the exact contrary on a daily basis, simultaneously, because then the population will not understand what's the stance, what's the position. But to express a disagreement, it is fundamental in a political party, and in the decision making of the Government, is it the case? Is there a space for people who promised the third link to express their disagreement within the CAQ? Did their opinion count before they took the decision to give up on that promise? That needs to be asked to those MNAs, because it seems that they were not really consulted, that their opinion never really counted in the decision of the Premier.

Mme François (Mélissa) : Thanks. Maybe a last one about MNA Pierre Dufour. There's a lot of indigenous groups that are asking for him to resign after what he said about indigenous women. What is your take on that? How do you view things, see things on that?

M. St-Pierre Plamondon : Well, I think he did apologize this morning.

Mme François (Mélissa) : On his Facebook page.

M. St-Pierre Plamondon : I think the CAQ should get a grip and stop doing things that make apologies necessary on a weekly or daily basis. They need to get on public policies that are urgently needed. So, there's been, in the past weeks, several cases of statements that are unacceptable. I think that it was clearly unacceptable. Now, he apologized, but, at some point, apologies are not normal on a daily basis by a Government. So, they shoud... «se ressaisir». How do we say that?

Mme François (Mélissa) : I'll look for it.

Des voix : ...

M. St-Pierre Plamondon :Thank you.

M. Arseneau : Get your act together.

(Panne de son)

M. Arseneau : ...on n'a pas entendu tous les groupes. Il y a des groupes qui devront manifester leur point de vue par la voie de mémoires. C'est regrettable. Les trois partis d'opposition avaient demandé qu'on puisse ouvrir des plages horaires supplémentaires. Néanmoins, ce qui semble être nécessaire de se donner, c'est tout le temps nécessaire pour étudier ce projet de loi mammouth. Donc, on pense qu'encore évoquer la possibilité d'une adoption d'ici la fin des travaux, c'est absolument impossible, c'était... ce serait aberrant. Il y a une précipitation de la part du gouvernement avec laquelle on est franchement en désaccord.

Et la question, par exemple, aujourd'hui, qui sera soulevée, sur la place des services sociaux dans la réforme sur la santé, est fort pertinente, également, toute la question, également, là, de la centralisation-décentralisation, gestion de proximité. Bref, suivez ça, ça continue toute la journée et pour les jours à venir. Merci.

M. Denis (Maxime) : ...quand même urgence de réformer ce... là aussi. À un moment donné, on passe-tu deux ans là-dessus? Ça serait quoi le...

M. Arseneau : Bien, en fait, le cadre ne peut pas être 11 jours. Est-ce qu'il peut être une session, comme la session d'automne, avec des travaux intensifs? Je pense que c'est possible, mais, à mon sens, là, c'est le minimum. On a vu des projets de loi d'une importance bien moindre qui ont pris deux ou trois mois. Celui-là, là, c'est... Je pense que plusieurs s'entendent sur l'idée d'avoir une réforme qui fonctionne, donc il faut se donner un temps de qualité pour y arriver. Merci beaucoup. Merci.

(Fin à 11 heures)

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