(Onze heures cinquante-neuf minutes)
Le Modérateur : Alors,
bonjour à tous. Et bienvenue à ce point de presse du ministre de l'Environnement,
M. Benoit Charette, qui est accompagné aujourd'hui de Mme Agnès
Grondin, adjointe parlementaire du ministre, concernant le dépôt du projet de
loi n° 20 instituant le Fonds bleu. Nos invités
prendront d'abord la parole, et nous procéderons ensuite à une période de
questions. À vous la parole.
M. Charette : Merci beaucoup.
Bonjour, tout le monde. Très heureux d'être à côté de ma collègue Agnès, avec
qui on travaille ce dossier-là depuis un bon moment. Et d'ailleurs, si on fait
un petit retour dans le temps, on se souviendra, pendant le discours inaugural
de la nouvelle législature, le premier ministre avait fait état de nos
intentions au niveau de l'institution, la création d'un fonds bleu. C'est un engagement
par la suite qui a été repris au moment de la COP15 sur le côté de Montréal. Et,
aujourd'hui, on donne suite à cet engagement-là.
Et j'étais à ses côtés, au moment de la
COP, puis je me souviens encore l'entendre dire à quel point la ressource d'eau
potable au Québec est une de nos principales richesses. On a ce grand, grand
privilège d'avoir essentiellement 3 % des réserves d'eau douce de la
planète. Donc, c'est quelque chose dont on doit être fiers, très certainement,
mais qu'on se doit de protéger. D'ailleurs, c'est une responsabilité qui est collective.
C'est la raison pour laquelle on vient instituer des balises importantes, avec
la création de ce fonds-là, qui confirment en même temps un principe qui est
nécessaire, celui d'utilisateur-payeur — parce que, dans quelques
instants, je vous parlerai également des redevances, qui seront, de façon
substantielle, rehaussées — là aussi, c'est un engagement qu'on avait
fait dès le printemps dernier, qui avait été réitéré par la suite à quelques reprises.
Donc, aujourd'hui, on vient déposer le
projet de loi qui vient créer le Fonds bleu, mais il y a aussi une
réglementation qui a été préparée en parallèle qui viendra confirmer les
hausses de tarifs. Je vous donne quelques indications qui sont précieuses.
Donc, dès le 1er janvier, le taux qui était actuellement à 2,50 $ le
litre, ça, ce sont pour les utilisateurs qui utilisent l'eau sans la capter, ce
taux-là va passer à 35 $ le million de litres. Et ceux qui captent en
partie cette eau-là, qui était à 70 $ le million de litres, passent
dorénavant à 150 $ le million de litres. Sans oublier non plus les
embouteilleurs : pour ce qui est de l'embouteillage d'eau, donc, on parle
d'un taux à 150 $, plus 350 $ de surcharge, donc, pour le million de
litres, pour l'embouteillage, c'est 500 $.
Je vois la circonspection dans les yeux de
quelques collègues. Oui, ce sont beaucoup de données, mais tout ça, le produit
final, c'est qu'on passe de 3 millions de dollars de redevances par
année à 30 millions. C'est une hausse qui est significative. On parle de
900 % d'augmentation. Et, pour éviter les erreurs du passé, parce que,
dans les faits, il n'y a pas eu de révision de ces tarifs-là depuis 2010, donc,
dorénavant, ce sont des tarifs, ce sont des taux qui seront indexés de 3 %
à chaque année. Et on se garde le droit aussi de revoir la tarification de base
à chaque cycle de cinq ans. Donc, minimalement 3 %, mais potentiellement
plus après cinq ans.
Autre élément très important, on vient
changer le taux d'assujettissement. Actuellement, ce sont les entreprises qui
captent 75 000 litres d'eau et plus par jour. On vient rabaisser ce niveau
d'assujettissement à 50 000 litres par jour, donc on aura encore davantage
d'entreprises qui seront touchées.
Un élément important : tout ce qui
est transparence. Les groupes, au cours des derniers mois, des dernières
années, insistaient beaucoup sur la nécessité d'avoir ces données-là publiques.
Donc, autant le projet de loi que la réglementation font référence à cette
transparence-là, et, dès le 1er janvier 2024, les données seront publiées.
Et naturellement on crée un fonds bleu. Il
faut savoir pourquoi on le crée. Essentiellement, c'est pour s'assurer de la
qualité de notre eau, autant au niveau de nos rivières et de nos lacs, mais on
se donne aussi des orientations pour favoriser, naturellement, une utilisation
qui est durable, pour assurer une meilleure prévention des inondations,
améliorer la conservation des écosystèmes aquatiques et assurer une meilleure
gouvernance de l'eau. Pour ce qui est de l'utilisation du Fonds bleu, ma
collègue va pouvoir vous en dire encore davantage.
Mais, peut-être, en terminant, tout
simplement remercier les nombreux acteurs de l'eau. On va vous parler du Forum
d'action sur l'eau, mais il y a plusieurs organismes, il y a plusieurs
personnes qui, au quotidien, s'assurent de la préservation de notre eau. Je
pense que c'est une belle journée aujourd'hui pour les remercier pour leur
travail. Et un merci également tout particulier aux gens du ministère, qui ont
travaillé très fort sur cette question-là au cours des derniers mois, et
naturellement le cabinet, qui est un support indéfectible sur ces questions-là.
Donc, sans plus tarder, je céderais la
parole à ma collègue, Agnès.
Mme Grondin : Mesdames,
messieurs, bonjour. Donc, pour ceux qui le savez peut-être, la protection de
l'eau me tient particulièrement à cœur, et donc je considère que c'est une
journée très, très, très importante pour déposer ce projet de loi là, qui est
très ambitieux. Je crois sincèrement que nous avons, collectivement, à faire
beaucoup de choses pour protéger... on l'appelle, notre richesse naturelle
nationale. C'est par des mesures concrètes que nous serons en mesure de
protéger cette précieuse ressource, et la création du Fonds bleu en est une,
mesure concrète, tout comme la hausse de la redevance de l'eau.
Nous le savons, les défis qui sont liés à
la gestion intégrée de l'eau et les effets qu'ont les changements climatiques
sur cette ressource sont colossaux. Et donc la création du Fonds bleu devient
un outil très précieux dans ce sens. En profitant des sommes additionnelles
importantes, nous allons pouvoir agir davantage pour favoriser une utilisation
durable, équitable et efficace de nos ressources en eau et améliorer,
évidemment, la conservation de nos écosystèmes aquatiques. C'est fondamental
pour protéger cette grande richesse.
Et, à titre de présidente du Forum
d'action sur l'eau, je peux assurer le ministre que les membres du forum et
moi-même sommes pleinement investis à formuler des recommandations sur
l'utilisation judicieuse des sommes du Fonds bleu, mais aussi à identifier des
priorités et des mesures concrètes qui vont constituer le futur plan eau. Le
Fonds bleu va nous permettre d'aller beaucoup plus loin avec tous les... des
partenaires, pardon, qui veillent sur l'eau pour faire de l'eau au Québec, plus
que jamais, une ressource qui est à la fois une grande richesse, mais aussi une
fierté collective. Cette vision est à la base de la Stratégie québécoise de l'eau
et elle va nous guider pour les prochaines actions de la décennie. Les efforts
concertés de tous les partenaires de l'eau constituent notre base de succès.
On peut être fiers, on a une grande
expertise au Québec, partout dans les régions, et aujourd'hui on a les moyens
d'en faire plus. C'est donc un moment que je considère charnière. Je félicite
le ministre pour sa vision dans ce dossier. Il peut compter sur moi pour
continuer à veiller à la protection de l'eau et des écosystèmes aquatiques
ainsi qu'à la gestion intégrée, durable et responsable de l'eau. Moi, je suis
fière d'avoir contribué à l'élaboration de ce projet de loi là, et je serai là
pour le défendre et le mettre en œuvre. Merci à tous et à bientôt.
Le Modérateur : Merci beaucoup.
Nous allons maintenant passer à la période des questions. Et nous débutons
aujourd'hui avec Véronique Prince, Radio-Canada.
Mme Prince (Véronique) : Bonjour.
J'aimerais avoir des comparatifs quand même, si c'est possible, avec d'autres
pays ou d'autres provinces. Tu sais, à quel point on est capables de dire qu'on
se rapproche de ce que les leaders peuvent faire en la matière, là, tu sais?
M. Charette : C'est une belle
question qu'on a évaluée, là, au cours des derniers mois. Clairement, en Amérique
du Nord, on devient de loin les leaders en la matière. Il ne faut pas
uniquement considérer les taux sur certains prélèvements, parce qu'il y a
certaines législations qui ont des taux qui peuvent sembler plus élevés par
rapport à ce qu'on avait avant mais qui ont de nombreuses exemptions. Je me
souviens, l'année dernière, lorsqu'on a présenté le projet de loi qu'on n'a pas
eu le temps d'adopter, c'était en mai ou en juin dernier, on parlait de
certains taux du côté ontarien qui étaient plus élevés. Mais, en même temps,
nous, actuellement, avec les 800 milliards de litres d'eau qui sont
perçus, on va chercher 3 millions de dollars, ce qui est trop peu, et
l'Ontario, malgré des taux qui pouvaient sembler plus élevés, ne va chercher
que 1 million de dollars parce qu'ils ont énormément d'exemptions. Donc, à
partir du moment où on parle de 30 millions, avec tous ces paramètres-là
qui ont été évoqués, on est de loin, là, celles et ceux qui mettons un prix le
plus élevé en Amérique du Nord, là, sur les questions de redevances sur l'eau.
Mme Prince (Véronique) : Bien,
justement, ça faisait partie de ma prochaine question. Donc, est-ce que nous,
on en a plein, des exemptions qu'on va finir par découvrir, ou vous les avez
limités? Puis, parallèlement à ça, c'est sûr que vous allez vous faire
dire : Bon, bien, les gros consommateurs, comme les alumineries, les
minières, on leur donne une chance parce qu'ils paient moins cher quand même.
M. Charette : En fait, on n'a
pas soustrait aucun groupe ou aucune industrie par rapport à ce qui était déjà
perçu. Il y a essentiellement deux types de perception — je
l'expliquais avec des chiffres qui peuvent effectivement porter à confusion. On
a un groupe qui utilise de l'eau sans la garder, sans la capter. On peut penser
aux groupes qui, par exemple, vont avoir besoin de l'eau pour... comme agent de
refroidissement. Donc, ils utilisent l'eau et ensuite la relâche. Donc, eux
passent de 2,50 à 35. C'est exactement ce qui était le cas par le passé, on
n'ajoute aucune nouvelle exemption. Et ceux qui captent l'eau, c'est eux qui
passent dorénavant à 150 $, et, encore une fois, on n'a pas aucune
exemption qui s'est ajoutée. Il y a des secteurs qui étaient déjà exclus et qui
le demeurent. Au niveau, par exemple, de la production de l'hydroélectricité, naturellement,
Hydro-Québec produit son électricité avec de l'eau, au fil de l'eau, on ne
comptabilise pas ça. Le secteur agricole, par exemple, est aussi exempté. Et je
fais la distinction entre secteur agricole et transformation alimentaire. Donc,
les groupes qui étaient exemptés par le passé le demeurent, donc il n'y a pas
eu de nouvelle exclusion, en quelque sorte. Et, au contraire, on vient ajouter
non pas des types d'industries mais des percepteurs potentiels, parce qu'on a changé
le taux d'assujettissement. Actuellement, le déclencheur est à
75 000 litres d'eau par jour, et on le rabaisse à
50 000 litres d'eau par jour.
Mme Prince (Véronique) : Je
voulais juste avoir une petite précision ici. Pourquoi c'est 500 millions
et non pas 650, comme la promesse électorale qui avait été faite?
M. Charette : Ah! parce que
c'est bien, bien simple, on est à une première année d'un nouveau mandat. Moi,
j'étais déjà très heureux d'avoir 500 millions de dollars de confirmés,
mais vous allez voir, au gré des budgets, c'est des sommes qui vont être
majorées. Et on est fermes sur l'engagement qui a été pris de
650 millions, mais c'est déjà un très, très beau signal. Dès le premier
budget, on a 500 millions des 650 millions qui avaient été promis qui
figurent en bonne et due forme au budget.
Le Modérateur : François
Carabin,Le Devoir.
M. Carabin (François) : Bonjour
à vous deux. M. Charette, j'aimerais revenir sur les exemptions, parce que
M. Fitzgibbon a évoqué, dans un échange avec des collègues des médias, des
mesures d'atténuation. Est-ce que c'est prévu qu'il y en ait?
M. Charette : Ce qu'il faut
savoir, l'objectif premier du projet de loi, c'est de donner de la valeur à
notre eau, c'est de faire en sorte que son... le recours à l'eau soit le plus
limité possible. Là, actuellement, on est à 800 milliards de litres d'eau.
Donc, le but, ce n'est pas de faire de l'argent avec les redevances, c'est de
changer un comportement.
Ce qu'on est prêts à considérer, et c'est
un programme qui n'existe pas à l'heure actuelle, c'est de dire : Si une
entreprise qui utilise beaucoup d'eau change sa façon de faire... Et le seul
exemple qu'on est en mesure et... qu'on serait prêts à considérer, c'est le
suivant. Si on est une entreprise qui est... qui avons un circuit ouvert,
c'est-à-dire qui prend continuellement de la nouvelle eau, donc qui finit par
en prendre beaucoup, et qui nous dit : Nous, on veut transformer ce
circuit ouvert là en circuit fermé, ce qu'on pourrait lui permettre de faire,
c'est que le prix qu'elle a payé en redevances lui permette de financer la
transformation de son procédé industriel.
Donc, on ne pige pas dans le Fonds bleu.
Le Fonds bleu ne devient pas une occasion de transformer les procédés industriels
des entreprises. Donc, ça ne servirait qu'à celui ou à celle qui a payé une
redevance, point. C'est une des possibilités qui est évaluée actuellement. Et,
pour nous, ça remplit l'objectif qu'on s'est donné de diminuer le recours à
l'eau, faire en sorte que la perception d'eau diminue, mais, en même temps, il
y a des évaluations qui ont été faites, on est très transparents, il y a très
peu d'entreprises qui pourront dire : On passe d'un circuit ouvert à
fermé. Donc, ce n'est pas des sommes, là, qui risquent d'être très, très
conséquentes.
M. Carabin (François) : O.K.
Parce que vous dites que l'objectif, c'est de réduire le prélèvement d'eau, là,
essentiellement. Avez-vous un objectif? Et, si la consommation d'eau est
réduite, est-ce que ça ne veut pas dire également que l'argent qui va pouvoir
aller au Fonds bleu va baisser avec le temps?
M. Charette : Ce serait
presque une bonne nouvelle qu'on fasse moins d'argent avec les redevances que
les 30 millions qui sont escomptés parce que ça voudra dire qu'il y a un
changement de comportement important qui a été fait. Comme je le mentionnais,
nous, on ne veut pas faire de l'argent pour faire de l'argent, on veut qu'il y
ait un changement de comportement, qu'on puisse donner de la valeur. Donc, à
terme, si c'est le résultat, je vous dirais tant mieux, mais je vous ferai
remarquer, sur les 500 millions de dollars, c'est beaucoup des crédits
budgétaires. Donc, la part du Fonds bleu n'est pas la principale source de
financement de ce fonds-là. Donc, éventuellement, si les redevances devaient
rapporter moins, ça voudra dire d'autres sources de financement pour pouvoir
atteindre notamment le 650 millions de dollars à terme.
M. Carabin (François) : Juste
pour préciser, avez-vous un objectif de réduction du prélèvement d'eau?
M. Charette : C'est difficile
à évaluer à ce moment-ci. Cependant, la hausse, elle est importante au niveau
des produits de ces redevances-là, 900 %. Donc, on va penser... on veut
penser qu'il y a des entreprises qui voudront diminuer leurs coûts, donc qui
feront le nécessaire, là, pour changer certaines façons de faire ou certains
procédés de leur côté.
Le Modérateur : Thomas
Laberge, LaPresse canadienne.
M. Laberge (Thomas) : Oui,
bonjour. Je voulais savoir quels critères ont été utilisés pour fixer le
montant des redevances?
M. Charette : Il y a eu
différentes analyses d'impact réglementaire de faites. En même temps, on
voulait que ça soit substantiel et équitable. On a gardé exactement les deux
mêmes taux. Cependant, on les a majorés. Donc, il n'y a pas une hausse qui est
plus inéquitable par rapport à une autre. Les deux ont une augmentation qui est
substantielle, et, au final, c'est 30 millions de dollars, là, qui
sera escompté.
Peut-être juste... ça me permet de faire
un petit complément à ce que je mentionnais tout à l'heure : c'est
rehaussé de 3 % par année. Il y a quelques chiffres qui peuvent être
intéressants. La redevance qui passe de 2,50 $ à 35 $ au
1er janvier 2024, ce 35 $ là sera déjà 42 $, en janvier 2030,
donc sur quelques années, et le 150 $ sera déjà 179 $ en 2030. Donc,
l'indexation de 3 %, elle va avoir un impact significatif sur les sommes
relevées. Mais, je vous dirais, il y a eu une analyse d'impact, et on voulait,
là, que les deux taux soient augmentés de façon équivalente, sinon
substantielle, dans les deux cas, là. C'était à la base de la réflexion.
M. Laberge (Thomas) : Vous
l'avez dit, justement, là, c'est des montants... c'est des augmentations qui
sont substantielles. Est-ce que vous avez entendu parler d'entreprises...
est-ce qu'il y en a qui sont venues vous voir parce qu'elles avaient des préoccupations?
Est-ce que vous craignez qu'il y ait des entreprises qui ne soient pas capables
de payer ces redevances-là?
M. Charette : Je ne connais
pas d'entreprise contente de se voir imposer des tarifs plus élevés. C'est dans
la nature même de tout être humain ou de toute entreprise, donc je ne devine
pas qu'elles soient contentes.
Cependant, ce que je rappellerai, c'est
que le 3 millions de dollars actuel, il était tout simplement
injustifiable. 800 milliards de litres d'eau pour 3 millions de dollars,
donc, on la donnait, notre eau, essentiellement. Et là on contribue à ce que le
taux soit plus conséquent, pour, justement, donner l'importance à cette
ressource-là.
M. Laberge (Thomas) : Mais
les entreprises ont les moyens de payer ce montant-là? Ça a été évalué?
M. Charette : Bien, en fait,
ça devient une obligation à partir du moment où le règlement... Puis vous avez
vu, hein, ces taux-là ne sont pas dans le projet de loi, ils sont dans le
règlement, là, qui va être présenté avant même la commission parlementaire,
donc les entreprises pourront toujours nous faire valoir leur point de vue,
mais on sait que c'est le minimum qu'on s'est imposé, dans un premier temps,
avec la possibilité de le revoir dans cinq ans. Donc, il se pourrait que ce
soit encore rehaussé dans cinq ans, mais, sinon, dans l'intervalle, une
indexation minimale, là, de 3 % par année.
Le Modérateur : Charles
Lecavalier, LaPresse.
M. Lecavalier (Charles) : Oui.
Bonjour, M. Charette. Pourquoi vous voulez vous donner le pouvoir
d'interdire les contenants à usage unique?
M. Charette : C'est un bon
élément. Je n'ai pas insisté là-dessus tout à l'heure parce que c'est un
pouvoir habilitant qu'on se donne. Autant le règlement sur la hausse de taux
est prêt, autant celui-ci sera présenté plus tard. Ce qui est visé, à travers
ce pouvoir habilitant là, et c'est majeur, quant à moi... On a énormément... et
ça se calcule en centaines de millions de bouteilles, les petites bouteilles
d'eau qui sont vendues au Québec et qui ne contiennent que de l'eau provenant
des réseaux d'aqueduc. Pour moi, c'est un non-sens. Si on veut absolument se
procurer une eau de source ou quelque chose de cette nature-là, il y a une
plus-value, il y a une valeur ajoutée, mais qu'on embouteille, avec un
plastique à usage unique, de l'eau qui est de l'eau d'aqueduc, pour nous, ça ne
fait pas de sens.
Donc, ne vous surprenez pas, dans la
prochaine année, on va espérer pouvoir déposer un projet de loi qui vise à
interdire ce type de vente là ou à l'encadrer de façon importante. Donc là,
aujourd'hui, on fait juste se donner le pouvoir.
M. Lecavalier (Charles) : Vous
avez dit «un projet de loi».
M. Charette : En fait, c'est
dans le projet de loi actuel, le pouvoir habilitant, mais le règlement lui-même
va suivre dans la prochaine année pour pouvoir utiliser ce pouvoir habilitant
là. Et ça, c'est majeur.
M. Lecavalier (Charles) : Oui.
Cette interdiction-là, vous l'imaginez... tu sais, c'est-u comme les autos,
genre, en 2030, ou vous voulez que ça soit rapide, là?
M. Charette : Naturellement,
la raison pour laquelle on ne le dépose pas aujourd'hui, c'est qu'il y a une
analyse d'impact réglementaire qui doit être complétée d'ici là, mais, à partir
du moment où c'est interdit, on va s'assurer que l'interdiction entre en
vigueur le plus rapidement possible. Et je veux rassurer celles et ceux qui
disent : Je tiens ma bouteille d'eau de source. Ce n'est pas ce qui est
visé, c'est réellement les bouteilles d'eau avec de l'eau, tout simplement,
d'aqueduc.
Mme Prince (Véronique) : ...les
Dasani, je pense, de ce monde, là, tu sais, qui embouteillent à partir du
robinet, finalement, ça ne pourrait plus exister?
M. Charette : Vous me
permettrez, je ne nommerai pas de compagnies, à ce moment-ci, mais il y a
beaucoup de compagnies, effectivement, qui ne font qu'embouteiller l'eau du
robinet ou du système d'aqueduc. On a par contre des compagnies d'eau de source
de qualité au Québec aussi, et ces compagnies-là ne seraient pas visées, là,
par le type de restriction dont il est question.
M. Carabin (François) : Est-ce
que vous pouvez les nommer, ces compagnies-là?
M. Charette : Non, je ne
commencerai pas à nommer des compagnies. Un, je ne connais pas tous leurs noms.
Mais on sait, sans les nommer, il y a de grandes compagnies, souvent
multinationales, qui en ont fait une de leurs spécialités, là.
Le Modérateur : Charles
Lecavalier...
M. Lecavalier (Charles) : Oui,
bien, juste une question. Vous dites des centaines... Est-ce que vous pouvez
nous dire aujourd'hui à peu près combien de déchets ça produit? J'imagine que
ça vient... Parce que vous savez que ça produit beaucoup de plastique.
M. Charette : Au Québec, il
se vend quelque 2 milliards de petites bouteilles d'eau par année en
plastique. C'est énorme. Naturellement, il y a différentes catégories. Donc, ce
ne sont pas ces 2 milliards-là qui seraient retirées du jour au lendemain,
parce que, dans certains cas, c'est de l'eau de source, mais c'est des
quantités qui sont non négligeables. À partir des prochains mois, avec la
consigne élargie, ce sont toutes des bouteilles qui seront consignées, mais, si
on peut réduire à la source même le nombre de bouteilles qui est mis en marché,
bien, on fait un gain supplémentaire.
Le Modérateur : Philip
Rodrigue-Comeau, Cogeco.
M. Rodrigue-Comeau (Philip) : Bonjour
à vous deux. Pour faire du pouce encore sur la question de mon collègue, ça
représente quoi, la proportion de bouteilles en plastique comme ça qui sont
vendues et qui ne sont pas de l'eau de source? Est-ce que c'est la moitié des
2 milliards?
M. Charette : C'est là où,
malheureusement, l'analyse d'impact réglementaire n'est pas complétée, je ne
serais pas en mesure de vous donner cette information-là, mais on sait qu'il y
en a beaucoup qui sont... Et c'est écrit, littéralement, sur l'étiquette de ces
bouteilles-là. Mais je ne serais pas en mesure de vous dire le prorata ou le
ratio, là, versus le nombre total de bouteilles d'eau qui est vendu.
M. Rodrigue-Comeau (Philip) : Sur
les redevances, vous avez parlé tout à l'heure d'un plafond d'assujettissement
qui a été abaissé à 50 000. Est-ce que ça vient chercher beaucoup...
est-ce que vous avez un chiffre du nombre d'entreprises qui vont... qui ne
payaient pas de redevances, qui, maintenant, vont devoir payer? Ça représente
quoi sur la proportion de 27 millions supplémentaires?
M. Charette : On est en train
de compléter cette évaluation-là. On estime que c'est en bas de
100 nouvelles entreprises qui seraient assujetties, mais je ne pourrais
pas vous dire le nombre exact aujourd'hui, là, c'est une évaluation qui se
poursuit.
M. Rodrigue-Comeau (Philip) : Mais
c'est mineur sur les 27 millions, on comprend que ce n'est pas eux qui
vont...
M. Charette : Bien, il n'y a
pas 27 millions d'entreprises qui sont...
M. Rodrigue-Comeau (Philip) : Non,
non, sur les 27 millions de redevances qui vont s'ajouter, là, vous parlez
de 30 millions...
M. Charette : C'est-à-dire,
si elles sont entre 50 000 et 75 000 litres d'eau par jour,
c'est sûr que ce n'est pas la plus grande proportion, mais, quand même, on
vient ajouter des compagnies assujetties, là, à cette redevance-là.
M. Rodrigue-Comeau (Philip) : Et,
en terminant, qu'est-ce que vous comptez faire avec les 27 millions
supplémentaires de redevances?
M. Charette : C'est peut-être
là où ma collègue pourrait parler des travaux du Forum d'action sur l'eau.
Mme Grondin : Oui, merci, M.
le ministre. En fait, on a mis en place un forum d'action sur l'eau en 2020. Il
y a une quinzaine d'associations, d'organisations à travers le Québec, là, des
experts qui sont à évaluer. C'est le mandat que le ministre nous a donné. Donc,
moi, j'en suis la présidente. Donc là, on va établir des priorités dans un
futur plan eau et on va aussi établir des critères, une proposition au ministre
de ce qu'on va faire, comment on va ventiler ces investissements-là.
M. Rodrigue-Comeau (Philip) : Donc,
vous ne savez pas encore exactement comment vous allez dépenser cet argent-là?
Mme Grondin : Le travail est
en train de se faire, mais il y a des mots-clés, des mots-clés qui vont nous
guider, là, évidemment, j'en ai parlé un peu. Mais, vous savez, la protection
et la gestion intégrée de l'eau, on a une grande expertise au Québec. On sait
qu'est-ce qu'on a à faire. Notre grand défi est la gestion intégrée. Donc,
autour de la table, il y a de grands experts, j'en suis très fière, j'ai le
privilège d'être la présidente, mais le défi va être de susciter l'intelligence
collective, qu'est-ce qui est le mieux pour les cinq prochaines années,
notamment où on doit investir. C'est une responsabilité collective. Je vais
revenir souvent avec ce terme-là. Donc, mobilisation et engagement, ça va être
des mots-clés.
Le Modérateur : Une dernière
question en français avant de passer à l'anglais. M. Carabin.
M. Carabin (François) : Oui.
M. Charette, juste pour revenir sur la transparence, la Cour du Québec
avait statué l'année dernière pour dire que le secret professionnel interdisait
au gouvernement du Québec de lever le secret sur les quantités d'eau pompées.
Qu'est-ce qui, dans votre projet de loi, va faire en sorte que ça va changer?
Parce que les termes utilisés, c'est «favoriser une meilleure transparence», mais
qu'est-ce qui vous fait dire que, le 1er janvier 2024, vous allez pouvoir
dire... vous allez pouvoir publier ces données-là?
M. Charette : Deux choses.
Dans le projet de loi, il y a une référence à cette nécessaire transparence là.
Et le projet de règlement va aussi, de façon très claire, le mentionner. Donc,
la cour a statué en vertu des règlements et de la loi actuelle. Donc, c'est des
modifications qui vont nous permettre de le faire, et ce, dès le 1er janvier,
là, donc, dans quelques mois, là, tout juste.
M. Carabin (François) :
Merci.
Le Modérateur
: En
anglais, maintenant, avec Franca Mignacca, CBC.
Mme Mignacca (Franca G.) :
Good... (Interruption) ...sorry. Good
afternoon. Can you start by explaining why it was so important for you to
change these fees for the companies? And do you feel concerned that you might
get pushed back from them?
M. Charette : Well, I think it was a mandatory step. We've been talking about
that for several months, if it's not years at this moment. And we have to
realize one thing, every year more than 800... I will practice my numbers in
English, 800 milliards...
Mme Mignacca (Franca
G.) : 800 billion.
M. Charette : ...800 billion of liters of water, and that provides only
$3 million. So, we can say that we used to give our water, but we have to
give some value to this natural resource. We are very fortunate, we have 3% of
the whole fresh water in the world. So, it's a very precious tool that we have,
but we have to give it... to give to it some value.
So, that's why it's a
mandatory step. And for some companies who might be not that happy with this
bill and this new rule, I would say that they had it for almost free, and now
they will have to contribute to make sure that we preserve that resource. So,
it's a mandatory step that we are making today.
Mme Mignacca (Franca
G.) : And when it comes to this new blue fund,
how exactly will that be used... What will you be using it for?
M. Charette : We've been working with an action group since almost two years.
They will be able to present some recommendations in the coming months, but we already know the main principle, it's
to make sure that we preserve that resource. We want to preserve our lakes and
our rivers. So, it's the main goal but with formal recommendations in the coming months.
Mme Mignacca (Franca
G.) : I just want to come back to something
you said earlier about changing the laws on bottled water. What exactly are you
hoping to change? How would that work?
M. Charette : It's a major aspect of the bill. It's a power that... it's a new
power that we want to receive by this bill. It's not for tomorrow, because we
will have to change the regulation also, but the goal is... The companies that
only put water from the municipal system in plastic bottles, they won't have
the right to do it when the regulation will be in place. Why? We have a good
quality of water in Québec, we
can use the other form than this «usage unique»...
Mme Mignacca
(Franca G.) : Single use.
M. Charette : C'est ce que je
voulais mentionner. So, we have other possibilities than that,
so that's what we want to promote by this future regulation.
Le
Modérateur : Merci beaucoup. C'est ce qui met fin au point de presse.
M. Charette : Merci beaucoup,
tout le monde. Bonne fin de journée.
(Fin à 12 h 30)