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Point de presse de Mme Méganne Perry Mélançon, porte-parole du troisième groupe d’opposition en matière d’habitation, et M. Joël Arseneau, chef du troisième groupe d’opposition

Version finale

Le vendredi 8 avril 2022, 9 h

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Neuf heures cinquante et une minutes)

Mme Perry Mélançon : Donc, ce matin, on est... bien, je suis ici pour participer à l'interpellation du Parti libéral, en fait, sur l'inaction du gouvernement du Québec en matière d'habitation.

Alors, c'est un sujet qui nous préoccupe énormément au Parti québécois. D'ailleurs, on a proposé de multiples solutions à mettre en oeuvre, autant concernant l'accès au logement que l'accès à la propriété. Et malheureusement on est face à un ministre qui ne saisit pas encore l'ampleur de la crise du logement qui sévit partout au Québec.

Donc, moi, je suis allée à la rencontre de beaucoup de gens dans mon comté, justement, qui vivent cette crise du logement, qui cherchent, au quotidien, une place où se loger de manière abordable. Et ça touche vraiment toutes les catégories, soit les professionnels, les gens à plus faibles revenus. Et même, encore récemment, à Richelieu, une manifestation a eu lieu pour sauver un OBNL d'habitation qui, aujourd'hui, va passer aux mains d'intérêts privés, laissant les 60 locataires dans un avenir complètement incertain… qui va probablement mener à une hausse du loyer et possiblement même des départs de cette résidence-là.

Pendant ce temps-là, bien, le gouvernement du Québec croit encore que le marché immobilier va s'autoréguler, et on nous répond même que c'est moins pire qu'à Toronto et à Vancouver, donc on devrait s'en satisfaire. Alors, moi, je ne m'en satisfais pas. On va continuer de proposer des solutions. Et, bien, on ne peut pas être contents de l'annonce du gouvernement fédéral, hier, qui, encore une fois, vient s'ingérer dans le dossier du logement et finalement annonce seulement… Bien, il l'annonce vertueusement, mais c'est uniquement 100 000 unités de logements abordables, partout au Canada, alors qu'on a besoin de logements sociaux massivement. Donc, on aurait dû recevoir cet argent-là... que le Québec puisse le gérer selon ses propres besoins. Et malheureusement, bien, je pense que la ministre va être bien heureuse de pouvoir continuer de faire ses petites annonces, partout au Québec, aux côtés du fédéral, et puis de dire que la crise du logement, elle n'existe pas au Québec.

Donc, on s'attend à beaucoup plus du gouvernement du Québec. On aura des questions à poser aujourd'hui. Et j'espère, enfin, qu'on pourra entendre le cri du coeur de tous ces Québécois-là qui font face à la pire crise sociale que le Québec aura connu en matière de logement.

Je cède la parole à mon collègue et chef parlementaire, Joël Arseneau.

M. Arseneau : Merci beaucoup, Méganne. Écoutez, aujourd'hui, on ne peut pas ne pas réagir aux nouvelles révélations dans ce qu'il est convenu, maintenant, d'appeler le scandale monumental des CHSLD lors de la première vague de la pandémie, écoutez, ce mauvais théâtre qui a été mis en scène par le CISSS de l'Est de Montréal… de l'Ouest de Montréal, plutôt, avec la collaboration d'une agence de publicité pour dissimuler, essentiellement, là, l'inaction du gouvernement et du CIUSSS pendant 12 à 15 jours. Les appels à l'aide s'étaient multipliés pour le dépistage, pour avoir de la main-d'oeuvre, le gouvernement avait littéralement pris le contrôle du CHSLD Herron au moment... le 29 mars dernier, et on simule un appel au 9-1-1, donc un appel à la police, pour une enquête policière, alors qu'on n'a essentiellement rien fait pour corriger la situation, alors que des personnes aînées étaient mourantes, abandonnées, déshydratées, malnutris.

Je n'ai pas de mots pour utiliser... pour exprimer à quel point je suis choqué et dégoûté de voir à quel point on prend les Québécois pour des valises. Le gouvernement a préféré soigner son image plutôt que soigner les gens qui étaient abandonnés au CHSLD. Le gouvernement préfère soigner, donc, les apparences plutôt que de nous dire la vérité. C'est un peu le Watergate du Québec.

Il faut aller beaucoup plus loin pour essayer maintenant de comprendre ce qui s'est véritablement passé. Et aujourd'hui, quand on... et évidemment je parle ici d'une commission d'enquête indépendante, mais aussi de pouvoir remonter la chaîne de commandement. Il est impensable qu'un sous-ministre à la Santé ait encouragé une P.D.G. de CIUSSS de mettre en scène, avec la collaboration d'une agence de communication, un appel au 9-1-1, et que la ministre n'ait pas été au courant, et que les décideurs de la cellule de crise n'aient pas été au courant non plus, alors que c'était la fonction même de la cellule de crise d'agir pour éviter les morts, un peu partout au Québec, en lien avec la propagation du virus.

Ce qu'on présente, en terminant, aujourd'hui, comme étant... le fait que les deux ministres en cause, donc la ministre des Aînés, Mme Blais, la ministre de la Santé de l'époque, Mme McCann, ne se représenteront pas aux prochaines élections, pour moi, c'est un indice, évidemment, qu'on tente de faire du «damage control», qu'on essaie de limiter les dégâts. Mais c'est un indice, en fait, qu'on reconnaît, essentiellement, la responsabilité ministérielle qui n'a pas été assumée correctement. Mais, si on veut aller au bout de l'exercice, c'est maintenant qu'elles doivent partir.

Journaliste : Donc, si je comprends bien, vous dites que le fait qu'elles décident de ne pas se représenter, c'est comme un aveu, dans le fond, qu'elles ont échoué, pendant la première vague?

M. Arseneau : Je ne sais pas avec quelles autres agences de publicité on a organisé cette astuce, aujourd'hui, à la une du Journal de Montréal, en annonçant, pour faire baisser la pression, que ces deux ministres, qui sont ciblées, là, par toutes les attaques parce qu'elles n'ont pas assumé leurs responsabilités ministérielles, bien, elles vont quitter. On veut faire baisser la pression, mais on reconnaît, de facto, qu'elles n'ont pas joué leur rôle, qu'elles n'ont pas assumé leurs responsabilités ministérielles, et on en reconnaît les conséquences. Alors, moi, je pense que c'est un premier pas, on reconnaît la responsabilité. Mais le pas définitif, c'est qu'elles quittent maintenant si elles reconnaissent, effectivement, qu'elles n'ont pas été à la hauteur de leurs responsabilités.

Journaliste : Pensez-vous que le cabinet du premier ministre les a poussées vers la porte ou que c'est leur propre décision?

M. Arseneau : Écoutez, c'est au premier ministre de le dire, mais on peut certainement imaginer, là, qu'avec toute la manipulation des faits et de la vérité à laquelle on fait face depuis des mois et des mois, et plus particulièrement au cours des derniers jours, que le bureau du premier ministre était certainement au courant de l'annonce qui allait être faite à travers des sources gouvernementales, par l'intermédiaire du Journal de Montréal, aujourd'hui. Ça n'a pas été une surprise, je crois, là, en voyant le Journal de Montréal aujourd'hui, pour le premier ministre, d'apprendre que ses deux ministres ne se représenteraient pas aux prochaines élections, si vous voulez mon avis.

Journaliste : Autrement, c'est comme les deux... vous êtes d'avis, dans le fond, que les deux têtes roulent à l'approche des élections parce que ça permet d'identifier...

M. Arseneau : Bien, on essaie, essentiellement, là, de faire baisser la pression en disant : Bien, finalement, on a trouvé une solution facile, un tour de passe-passe pour régler le problème. Les deux ministres sont mises en cause. Ne vous inquiétez pas, elles ne seront pas aux prochaines élections, elles ne seront pas en lice pour se faire réélire, donc ne posez plus de questions, détournez le regard, la cause est entendue. Ce n'est pas si simple que ça.

Si, effectivement, on avoue qu'elles n'ont pas été à la hauteur de leurs responsabilités ministérielles, c'est maintenant qu'il faut agir. Et la question qui se pose maintenant, c'est : Qu'est ce qu'on savait, en haut? Qui savait quoi, à quel moment, et qu'est ce qu'on a fait, et qu'est ce qu'on n'a pas fait pour sauver des vies? C'est, encore là, la grande question qui se pose. Il y a une question ici d'avoir accès à la vérité. Il y a une question de transparence. Il y a une question, en fait, d'opacité. Et on réclame la transparence la plus totale du gouvernement. Et là ce qu'on voit, c'est que, sans une enquête publique et indépendante, on n'aura jamais le fin mot de l'histoire. Et les Québécois sont en droit de s'attendre à connaître la vérité. Et je crois que le gouvernement n'a plus d'autre issue que de, justement, instituer une commission d'enquête pour faire la lumière. S'il n'a rien à cacher, qu'il le fasse.

Journaliste : Bien, moi, j'aurais une question en logement pour Mme Perry Mélançon. Vous dénoncez, là, l'empiétement du fédéral dans les compétences du Québec. Mais, au-delà de la question des juridictions, vous ne pensez pas que ce qui a été annoncé, hier, ça va quand même aider les locataires du Québec?

Mme Perry Mélançon : Ça dépend quels locataires. On a annoncé uniquement 100 000 logements abordables, là, pour tout le Canada, donc. Et, de ce 10 milliards là, il y a seulement 1,5 milliard qui est réservé pour du logement social. Sachant qu'au Québec on a nettement besoin d'augmenter le nombre d'unités construites en logement social... Là, on est présentement en train de régler des unités prises, là, dans le système d'AccèsLogis, et il faudrait, à ça, ajouter 5 000 unités par année sur cinq ans. Et ce n'est pas du tout les chiffres qu'on a actuellement. Donc, nous, on... Déjà, le fédéral nous dit comment, sous quelles conditions, s'occuper de l'habitation au Québec, ce qui est, pour moi, inacceptable.

Journaliste : Puis en termes d'actions, là, si la ministre Laforest devait agir davantage, à votre avis, est-ce qu'elle doit concentrer ses efforts davantage sur des investissements ou plus sur des mesures, disons, visant à peut-être légiférer ou mieux encadrer le marché?

Mme Perry Mélançon : Il faut agir sur les deux fronts. La ministre, présentement, ne fait rien sur ces deux fronts-là. Donc, on voit des bâtiments qu'on avait construits, il y a 30, 40 ans, pour du logement social… on voit ça passer à des mains de promoteurs privés qui vont augmenter le coût des loyers. Donc, tout ce qu'on a fait n'est pas protégé, présentement, par la loi.  Donc, on demandait un moratoire, ça tient toujours, le temps qu'on se dote d'outils législatifs qui protégeront notre parc immobilier actuel. Et là-dessus il faut aussi avoir des mesures d'accélération du chantier en logement social, d'abord et avant tout et, bon, avoir des mesures pour l'accès à la propriété.

Mais ce qui est vraiment le plus urgent, c'est de s'assurer d'avoir une plus grande offre pour baisser, justement, le prix des logements, mais également des propriétés, qui n'ont absolument pas d'allure présentement. Et ce que ça fait, bien, c'est seulement les spéculateurs immobiliers qui sont en mesure d'aller chercher ces maisons-là sur le marché. Et, encore une fois, c'est ma génération qui est sacrifiée, là-dedans, et qui n'est pas en mesure de s'acheter une première maison.

Donc, il y a beaucoup à faire, là, dans le dossier de l'habitation, et c'est sur plusieurs fronts. Et présentement, de laisser le marché s'autoréguler, pour moi, ce n'est pas la solution à envisager. Quand j'entends le ministre Girard, là, rire de nous avec les propositions qu'on a, autant sur l'offre que la demande, je me dis : Dans quel monde il vit? Dans son monde, je pense, où est-ce que l'argent n'est peut-être pas un problème. Mais, réellement, on est beaucoup dans cette situation-là, là, surtout les jeunes, surtout les personnes à faibles revenus qui écopent de cette crise du logement.

Donc, je m'attends, aujourd'hui, à ce que la ministre, là, sorte de ce discours où tout va bien, où est-ce qu'il n'y a pas de crise, là, puis commence vraiment à accélérer sur les projets de construction puis d'investissement. Merci.

(Fin à 10 h 4)

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