(Neuf heures deux minutes)
M. Arseneau : Bonjour,
tout le monde. Alors, aujourd'hui, c'est un jour d'interpellation, une
interpellation qui a été appelée par le Parti libéral du Québec sur le thème
suivant : Manque d'anticipation, incohérence et volte-face : les
Québécois font les frais de la gestion de la pandémie de la COVID-19 par le
gouvernement caquiste. Évidemment, on va se prêter au jeu, participer à la
discussion. Les exemples d'incohérence ou de volte-face sont nombreux, sont
très nombreux, sont peut-être beaucoup trop nombreux lorsqu'on les regarde, là,
d'un point de vue rétrospectif sur les 20 derniers mois.
On pourrait donner quelques exemples. Les
deux périodes de Noël où, avec un certain jovialisme, on avait promis, là, des
jours heureux avant de refermer complètement et de confiner les Québécois. On a
eu le premier couvre-feu où on avait complètement oublié les itinérants. Il a
fallu aller en cour pour pouvoir défendre leurs droits. On pourrait penser au
défi de 28 jours, à la lumière au bout du tunnel, à la vaccination qui
allait nous permettre de sortir de cette pandémie à l'automne dernier, avant qu'Omicron
fasse des siennes. Évidemment, il y a toute la question de la vaccination
obligatoire en santé sur laquelle le gouvernement a d'abord imposé un report
puis, ensuite, a reculé. La fermeture des commerces le dimanche, plus
récemment, qui n'avait pas nécessairement de fondement sur le plan
épidémiologique. Toute la saga de la ventilation qui n'est d'ailleurs pas
terminée, la ventilation dans les écoles mais également dans les autres
édifices publics. Même la reconnaissance de la transmission de la COVID-19 par
les aérosols qui vient tout juste d'être reconnue, là, au Québec, alors que
cela faisait consensus dans le monde scientifique à travers la planète depuis
déjà plusieurs semaines, sinon plusieurs mois. Toute la question de la
stratégie de dépistage, les tests PCR sans lesquels on ne pouvait absolument
pas valider quelque test que ce soit, quelque cas que ce soit, avant que,
finalement, on finisse par manquer de réactifs et de promouvoir les autotests. Les
tests rapides qu'on avait toujours rejetés au point où on avait des millions de
tests qui dormaient dans des entrepôts pendant des mois et des mois. Toute la
saga des équipements de protection individuelle dès le départ. Les masques qu'on
disait qu'ils n'étaient pas nécessairement utiles, mais on peut penser que c'était
parce qu'on n'en avait pas suffisamment. La saga des N95, où le personnel, les
hôpitaux, les syndicats ont dû aller jusqu'en cour pour défendre leur droit de
se protéger dans un milieu hautement à risque. Encore aujourd'hui, plusieurs
demandent de pouvoir porter le N95, que ce soit dans les écoles ou dans les
services de garde. Le sport civil ou parascolaire, même catégorie d'âge : dans
un cas, on impose un masque; dans l'autre, on ne l'impose plus. Finalement, on
laisse tomber.
C'est des mesures comme ça qui ont été
décidées sans qu'on sache véritablement quels étaient les fondements
scientifiques de ces mesures. Évidemment, on pourrait parler aussi des ballons
d'essai. Évidemment, le plus célèbre, le plus récent, c'est celui de la
vaccitaxe sur lequel on promettait de déposer un projet de loi pour en faire un
débat avant de l'abandonner.
Et, en conclusion, ce qu'on peut retirer,
c'est que, pendant toute la durée de la pandémie, il y a toujours eu une
confusion qui a été maintenue entre le politique, et la Santé publique, et la
science. Parce qu'on n'a jamais publié de façon rigoureuse et régulière les
avis de santé publique, ses recommandations, qu'on a aussi suspendu les règles
de l'Assemblée nationale, ce qui a empêché tout débat démocratique sur la
pandémie, sur les mesures à prendre et sur leurs justifications. On l'a fait de
façon très, très aléatoire. Évidemment, il y a toujours, depuis le début et
encore aujourd'hui, ce questionnement sur ce que l'on sait sur le plan
scientifique, ce qu'on ne sait pas vraiment puis qu'on voudrait savoir. Et ça
crée évidemment une certaine incertitude aussi dans la population.
Et ce que je veux dire, c'est qu'on ne
connaît jamais véritablement quels sont les indicateurs, quels sont les
critères précis sur lesquels le gouvernement peut s'appuyer pour mettre en
place des mesures ou pour les enlever. Le plus récent exemple est celui,
évidemment, du calendrier de déconfinement. Il n'était pas question de déposer
un calendrier jusqu'à cette semaine parce qu'on disait que la situation était,
évidemment, trop imprévisible. Et, tout d'un coup, sans qu'on sache
véritablement pourquoi, un calendrier précis, avec des dates précises, sur des
mesures à lever jusqu'au 14 mars, sans qu'on sache véritablement quels
sont les indicateurs qui permettent de dire qu'aujourd'hui puis au 14 mars,
bien, on aura atteint un certain taux de confort avec les mesures pour pouvoir
essentiellement les lever.
Donc, nous, aujourd'hui, on va présenter
deux demandes au gouvernement à travers cette interpellation-là. Réitérer notre
demande d'une enquête publique et indépendante sur la gestion de la pandémie. Parce
qu'on devra absolument, au Québec, tirer des leçons de ces deux années de
pandémie pour pouvoir véritablement démontrer ce qui a pu fonctionner et ce qui
a moins bien fonctionné, mais surtout en tirer des conclusions et des leçons
sur la façon de se préparer pour une prochaine pandémie ou pour d'éventuelles
prochaines vagues de la pandémie de la COVID-19 si elle devait se poursuivre.
On ne peut plus, après deux ans, continuer de construire un avion en plein vol.
Il y a des leçons à tirer des deux dernières années, et je pense que le
gouvernement devrait avoir l'humilité de faire un examen de conscience avec
nous, avec les experts, pour pouvoir, justement, préparer la suite de façon à
ce qu'on gère de façon plus adéquate et qu'on anticipe de meilleure façon ce
qui s'en vient pour le Québec en matière de santé. Qu'on puisse enfin pouvoir dire
qu'on a fait tous les efforts puis qu'on a déployé tous les moyens adéquats
pour y faire face, tout en continuant d'avoir une certaine normalité dans la
société.
Deuxième élément, c'est un débat immédiat
qu'on demande sur la levée éventuelle de l'état d'urgence sanitaire. Un débat
sur les mesures qui devront... qui pourraient demeurer en place, notamment la
question du passeport vaccinal et d'autres mesures.
Merci. Je suis prêt à prendre vos
questions là-dessus.
M. Lacroix (Louis) : Les
manifestants se déplacent vers Montréal ce week-end. Cette semaine, on nous a
annoncé que toutes les mesures ou à peu près, là, à part le masque et le
passeport vaccinal, allaient être levées le 14 mars. Ce sera presque le
retour à la vie normale. Mais les manifestants se dirigent vers Montréal. Et là,
d'abord, est-ce qu'ils ont toujours une légitimité à manifester après ce qui a
été annoncé cette semaine, selon vous?
M. Arseneau : Bien, en
fait, il faudrait savoir quelles sont leurs revendications exactement. Vous
avez raison de dire qu'une fois que le gouvernement a déposé un calendrier la
cause est entendue sur les mesures qui apparaissaient aux yeux de plusieurs
comme étant restrictives, et peut-être trop restrictives, et inexplicables.
Alors, je pense que ce calendrier-là, il était nécessaire, il devrait rassurer
les gens sur la suite des choses si on veut revenir à une certaine normalité avec,
notamment, la réouverture des salles de spectacle, des bars, et ainsi de suite.
Je pense que ça devrait donner un signal positif à ceux qui, dans la population
en général, se demandent quand on va pouvoir recommencer, là, à vivre
normalement. Maintenant, il y a encore quelques détails à régler. J'en parlais,
la question du passeport vaccinal...
M. Lacroix (Louis) : Mais
ma question, M. Arseneau, c'est plus simple que ça, là, est-ce que c'est
justifié, une manifestation comme celle-là, dans l'état actuel des choses?
M. Arseneau : Bien, en
fait, on ne va jamais s'inscrire en faux contre une manifestation pacifique qui
a pour objectif de promouvoir ou de demander quelque chose. Actuellement, on
comprend mal quelles sont les revendications des manifestants. Une fois qu'on a
obtenu, justement, un plan de déconfinement du gouvernement, qu'est ce qu'on
peut espérer de plus? Pourquoi manifeste-t-on? Moi, c'est la première question
qu'on devrait poser avant de justifier ou non la légitimité de la
manifestation.
M. Lacroix (Louis) : Je
vais vous lire ce qu'a dit un manifestant, puis c'est assez éloquent de ce qu'une
certaine partie de la population pense des politiciens. Il dit, c'est un
article de LaPresse, il dit : «Vous allez tous payer. Puis
on va le faire pacifiquement. On va aller dans les rues parce que nous autres,
on a nos enfants à coeur, pas vous autres. Vous avez juste votre hostie de portefeuille
à coeur. Vous allez voir ce que ça fait, un peuple, quand c'est tout uni.»
Comment vous réagissez quand vous entendez des choses comme celle-là, comme
politicien, là? Parce que...
M. Arseneau : Exactement.
Mais il y a véritablement, dans ce discours-là, je dirais, une déconnexion avec
la volonté de tous les élus, évidemment ceux du gouvernement, mais ceux de l'opposition,
les experts, tous les intervenants du domaine de la santé qui sont au front au
jour le jour. On ne peut pas cautionner un discours qui dit que, contrairement
à toute la société civile et tous les pouvoirs publics, on serait pour la
protection des familles et des enfants. Pour en faire quoi? Est-ce que ces
mesures-là, les mesures auxquelles on a été confrontés au cours des deux
dernières années, ont servi à autre chose que la protection du public? Moi, je
ne le pense pas. Est-ce que ça a été fait de façon parfaite? Bon, évidemment,
il y a toujours place à l'amélioration. Mais je pense qu'à un moment donné il
faut faire preuve de bonne foi. Puis, visiblement, un commentaire comme
celui-là, là, on s'éloigne un peu d'une vision, je dirais, réaliste et
rationnelle de ce qui se passe au Québec et ailleurs.
Mme Côté (Claudie) : Mais qu'est-ce
que ça va prendre pour arriver à une désescalade? Parce que, malgré le
calendrier de déconfinement, malgré les mesures qui sont annoncées, au
contraire, ces manifestants-là semblent confortés dans leur message. Alors, qu'est-ce
que le gouvernement devrait faire? Qu'est-ce que les élus devraient faire pour
éviter que ça escalade...
M. Arseneau : Bien, nous,
on le mentionne et on l'a mentionné à plusieurs reprises, je pense qu'il faut
surtout éviter de mettre de l'huile sur le feu, de stigmatiser certaines
couches de la population. Je pense qu'il faut ouvrir le dialogue. Je pense qu'il
faut continuer de sensibiliser, continuer d'expliquer les mesures, donner
davantage d'information sur les raisons pour lesquelles on impose toujours des mesures,
pour lesquelles on les lève. Je pense qu'il y a des efforts de communication à
faire, parce que ce message-là, il est un peu nihiliste, c'est comme... il fait
abstraction de tous les efforts qui ont été consentis par un peu tout le monde,
durant les derniers mois, et les efforts qu'on fait, justement, pour arriver à
un rétablissement, un retour à la normale. Donc, le rejet d'à peu près tout ce
que c'est qu'on peut faire, et dans les hôpitaux, et au gouvernement, et dans l'opposition,
pour essayer de faire des propositions pour améliorer les choses, on sait, ce n'est
pas une voie de sortie de la pandémie, absolument pas.
M. Lavallée (Hugo) : Il
y a une nouvelle interpellation, ce matin, là. Vous avez mis de l'avant vos
revendications : une enquête publique, levée de l'état d'urgence.
Avez-vous le sentiment que ça tourne un peu en rond, tout ce débat-là? Parce
que, l'enquête publique, même la Commissaire à la santé a dit que ce n'est pas
nécessaire. Le gouvernement, clairement, ne veut pas. L'état d'urgence, il dit :
Bien, on va avoir un projet de loi en mars. Le fait de toujours faire ce
débat-là, est-ce que c'est, d'un, toujours utile? Puis, de deux, est-ce que ça
ne contribue pas, justement, à alourdir un peu ce climat sanitaire sur lequel
les gens veulent tourner la page aussi?
M. Arseneau : Bien,
nous, on pense que si on se penchait de façon sérieuse et rigoureuse sur la
gestion de la pandémie, on pourrait, justement, avoir une idée plus claire de
ce qui a bien fonctionné, ce qui a moins bien fonctionné et se préparer pour l'avenir.
Et moi, je ne vois pas pourquoi le gouvernement ne contribuerait pas à cette
volonté qu'ont plusieurs, évidemment, partis politiques, mais aussi des experts
de la santé publique et des scientifiques qui disent : Est-ce qu'on sera
mieux préparés, après avoir vécu les deux dernières années de pandémie, à une
prochaine pandémie? Quelles conclusions peut-on tirer? Est-ce qu'il est normal,
dans une opération d'aussi grande envergure, de ne pas faire un post-mortem sur
ce qui s'est passé? On le fait dans toutes sortes d'entreprises, on le fait
pour des événements qu'on crée, que ce soient des événements culturels, des
congrès, ainsi de suite. Il me semble que toute organisation sérieuse, une fois
passé un événement important, va se pencher en disant : Qu'est-ce qui a
bien fonctionné? Comment on peut s'améliorer pour la suite? Je pense que le
gouvernement doit le faire avec nous et avec les Québécois.
Mme Porter (Isabelle) : Concernant
l'état d'urgence, justement, le Parti conservateur accuse le gouvernement de
reporter la levée parce qu'ils ne veulent pas rendre publiques des informations
sur les contrats de gré à gré qui ont été faits pendant la pandémie. Est-ce que
c'est un soupçon que vous partagez?
M. Arseneau : En fait, nous,
on ne veut pas imputer... comment dire, on ne veut pas, justement, là, créer ce
soupçon-là, là, dans la population, dans l'espace public. Mais on va
certainement s'attendre à ce que le gouvernement débatte de la levée de l'urgence
sanitaire et dépose son rapport avant la fin de la session parlementaire
actuelle. Sinon, évidemment, il nous manquerait une bonne partie de l'information
sur ce qui s'est passé au cours de plus de la moitié de son mandat avant d'aller
en période électorale. Nous, on pense que le gouvernement, malgré le fait qu'il
peut y avoir des dates qui lui permettraient de déposer son rapport au-delà de
l'élection, on pense qu'il va avoir la bonne idée d'être transparent avec les
Québécois. C'est ce qu'on souhaite. Merci beaucoup.
M. Pouliot
(Samuel) : ...in English.
M. Arseneau : Ah! sorry.
M. Pouliot
(Samuel) : ...summarize your demands and
explain what your expectations are for today?
M. Arseneau : For today? OK. Well, today, of course we can demonstrate how many,
you know, decisions were or appeared incoherent and how many times people saw
the Government back down on certain measures or how many measures that were
announced that were never implemented. It's rather easy to demonstrate.
What we'd like, today, to
put forward is the idea that we have to make a complete examination on what
really happened during the passed two years, to try and, you know, learn
lessons on how to better prepare for a next wave or the next pandemic, because
most people say that it's not the last one. So, are we going to be better
prepared or are we going to improvise if we have to be faced with such a
pandemic? And, you know, it doesn't have to be partisan. I don't think it
should be. I think it should be rigorous, scientific, and really go through the
processes that the Government has, you know, observed or gone through. I think
it would be better because we do that for all sorts of events in society. To
have, you know, the humility to just say : OK, what did I do right and
what are the improvements that another government could put forward to better
cope with it? I think that's one of the key proposals that we're going to put
forward.
Another one is, for the
time being, we have a calendar, but the calendar doesn't include lifting the
emergency measures. I think we have to discuss this in the next two weeks,
before the pause that we have at the end of the month, and to see what kind of
measures we could keep passed the period of the deconfinement, which, right
now, in the calendar, is identified as mid-March. Thank you very much.
Merci.
La Modératrice
: Merci.
Bonne journée.
(Fin à 9 h 18)