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(Douze heures deux minutes)
Le Président (M. Blouin): La commission élue
permanente du travail reprend ses travaux. Je vous rappelle le mandat de cette
commission qui est d'examiner l'administration et le fonctionnement de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail.
Aujourd'hui, nous allons entendre les membres du conseil d'administration de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail ainsi
que l'Association des entrepreneurs en construction du Québec et
l'Association des mines de métaux du Québec Inc.
Ce matin, c'est le conseil d'administration de la commission qui est
devant nous et je demanderais aux représentants et membres du conseil
d'administration de bien vouloir s'identifier pour les fins du journal des
Débats et, par la suite, de procéder à la
présentation qu'ils ont à nous livrer.
Conseil d'administration de la CSST
M. Sauvé (Robert): M. le Président, M. le ministre,
MM. les députés, permettez-moi de vous présenter les
membres du conseil d'administration. À l'extrême gauche, il y a la
partie patronale au complet: M. Gaston Pellan, M. Gilles Lavallée, Mme
Grimard, M. René Bédard, M. Claude Drouin, M. Sarto Paquin et M.
Ghislain Dufour. À l'extrême droite, le Dr Michel Vézina,
observateur pour le ministre des Affaires sociales au conseil, M.
Étienne Giasson, de la Fédération des pâtes et
papiers affiliée à la CSN, M. Claude Gingras,
vice-président de la CSD, M. Jean Lavallée, MM. Claude Morrisseau
et Louis Laberge, de la FTQ. Il y a deux absents: MM. Clément Godbout et
Pierre Dupont, de la Fédération de la métallurgie (CSN)
qui sont malheureusement pris sur la route entre Montréal et
Québec.
Le Président (M. Blouin): M. Sauvé, avant que vous
ne débutiez votre présentation, je vais identifier les membres de
cette commission qui sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Cusano (Viau), Dean
(Prévost), Fréchette (Sherbrooke), Mme Harel (Maisonneuve), MM.
Lafrenière (Ungava), Lavigne (Beauharnois), Pagé (Portneuf),
Baril (Arthabaska), Maltais (Saguenay), Champagne (Saint-Jacques) et Rochefort
(Gouin). Les intervenants étant MM. Sirros (Laurier), Champagne
(Mille-Îles), Côté (Charlesbourg), Leduc (Fabre), LeMay
(Gaspé), Mme LeBlanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine) et M. Vaugeois
(Trois-Rivières).
M. Fréchette: M. Champagne (Mille-Îles) serait
membre en lieu et place de M. Rochefort.
Le Président (M. Blouin): M. Champagne (Mille-Îles)
remplace M. Rochefort et il devient donc membre. Cela va. D'accord?
Allez-y.
M. Sauvé: M. le Président, permettez-moi quelques
minutes de présentation du fonctionnement du conseil d'administration de
la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Je
vais procéder par trois exemples en me servant du règlement de
régie interne et de la loi. Je serai suivi de deux de mes
collègues, M. Dufour et M. Laberge; ils voudraient également
prendre quelques minutes du temps de la commission pour donner leur point de
vue.
Le premier exemple dont je voudrais me servir, c'est pour vous
expliquer... Vous avez devant vous le règlement de régie interne
et, à l'article 2, vous avez les pouvoirs du conseil d'administration.
Je n'ai pas l'intention de tout lire les différents pouvoirs du conseil
d'administration, mais uniquement de vous souligner les quatre plus importants
auxquels s'attache le conseil à chacune de ses réunions. Le
conseil d'administration a le pouvoir d'étudier les règlements
qu'il soumet au gouvernement pour approbation, les politiques, les programmes
et le budget. Il est bien évident que nous ne sommes pas des experts
dans toutes les matières et, dès le départ, le conseil
d'administration a décidé des formules qu'il pouvait prendre. Je
vous rappelle que le conseil a été nommé en mars 1980,
qu'il a siégé le 30 mars 1980 pour la première fois et
qu'il a établi un certain nombre de règles du jeu.
Par exemple, quand il s'agit d'étudier une question qui peut
être assez complexe, le conseil détermine le nombre de membres de
comités ad hoc. Un comité ad hoc est un comité qui
siège, par exemple, sur la surdité professionnelle, qui
siège sur la détermination des priorités, etc. Depuis le
début du conseil, il y a eu 25 ou 26 comités ad hoc. À
chaque
comité ad hoc, il y a un représentant du conseil de
chacune des parties. À ce comité s'adjoignent des experts
nommés par les parties. Ces comités sont composés de trois
à cinq membres déterminés par le conseil d'administration
dans chaque cas.
Le premier cas que je voudrais utiliser est celui des priorités
de la loi. Vous savez qu'en vertu de l'article 167, premier paragraphe, la
commission exerce notamment les fonctions suivantes: établir les
priorités d'intervention en matière de santé et de
sécurité des travailleurs. Dès le mois de mai 1980, la
commission - la permanence, comme on l'appelle - a déposé au
conseil d'administration des documents qui portaient sur la fréquence
des accidents, la gravité des accidents, les études de NIOSH sur
le sujet, NIOSH étant l'institut national américain en
santé et sécurité du travail, et quelques connaissances
que nous avions sur les problèmes de santé et de
sécurité du travail.
Le conseil a immédiatement nommé un comité ad hoc
qui était composé d'un représentant de la partie
patronale, M. Paquin, et de deux experts, M. Duguay et M. Trépanier, du
côté syndical. Le représentant du conseil d'administration
dans le temps était M. Étienne Giasson. Depuis, c'est encore
Étienne Giasson, Claude Gingras et Robert Bouchard. Ce comité a
siégé à quelque 18 reprises. Ce comité a,
après de longues réunions, de longues études,
déterminé les six groupes. Vous savez que -ce n'est pas la
commission qui l'a inventé, ce n'est pas le conseil d'administration -
il y a 30 secteurs au Québec reconnus par le BSQ, le Bureau de la
statistique du Québec. Avec les données en main, le
comité, qui est toujours présidé par un
vice-président selon la compétence du sujet, a
déterminé les six groupes et par ordre alphabétique dans
chacun des groupes, pour ne pas dire qui est le pire ou le moins pire.
Le premier groupe, je pense que vous l'avez. J'ai ici des tableaux et je
me demande si quelqu'un de la commission parlementaire peut prendre ce tableau.
Vous l'avez déjà sur une feuille de format 8 1/2x11, je pense.
Madame, est-ce que quelqu'un pourrait le remettre parce que je pense que
personne ne l'a?
Vous voyez que, dans le groupe 1, ce sont: Bâtiment et travaux
publics, produits chimiques, forêts et scieries, mines et
carrières, produits en métal. Les quatre sujets, bâtiments,
forêts, mines et carrières et produits en métal sont
là suivant les données de fréquence et de gravité;
celui des produits chimiques est là pour des raisons de
possibilité de maladie professionnelle, et ainsi de suite pour les
groupes 2, 3, 4, 5 et 6.
Après un an et demi, le comité s'est réuni pour
savoir s'il devait changer l'ordre dans les groupes. Le comité, en
faisant rapport au conseil - le rapport avait été accepté
par le conseil - avait gardé une porte ouverte en disant: On pourra
regarder à l'avenir s'il y a des groupes qui pourraient changer.
Effectivement, au cours des six mois qui ont suivi, il y a le secteur des
affaires sociales qui a demandé à être devancé et le
secteur des fonderies qui voulait aller dans le groupe 1 plutôt que dans
le groupe 2. Le conseil a décidé de ne pas faire ces changements
dans le cas des fonderies principalement parce que les groupes 1 et 2 sont
suivis d'assez près pour leur proclamation. C'est ainsi que cela a
été déterminé par les parties, après
étude de toutes les données possibles. Les groupes 1 et 2 sont
déjà des groupes proclamés. Ceci veut dire qu'ils ont un
an pour soumettre les programmes de prévention entre autres choses et
avoir des comités de santé et de sécurité, etc.
C'est là que l'application de la loi entre en jeu. Pour le groupe 1, la
date de la fin de la remise des programmes de prévention était le
3 juillet 1983. Pour le groupe 2, ce sera en mai 1984. Au cours de
l'année prochaine, nous proclamerons, je pense - le conseil le
décidera - le groupe 3. Vous comprendrez que les six groupes ne peuvent
entrer en même temps en activité.
Voilà pour le premier exemple, la façon de fonctionner du
conseil. C'est par voie d'un comité ad hoc. Cependant, nous avons
utilisé d'autres méthodes également. Au cours du mois de
mai de cette année, nous avons siégé en comité
plénier pour étudier le mode de financement de la commission.
C'est le cahier bleu que vous avez tous dans vos dossiers.
Ce mode de financement a été soumis aux membres du conseil
d'administration et la partie patronale entre autres a demandé que trois
experts actuaires puissent siéger en comité plénier pour
étudier, poser des questions sur ce document et demander l'avis des
actuaires de la commission et des actuaires-conseils. Toutes les discussions
ont eu lieu. Je reviendrai demain sur le contenu de ce projet de financement.
Quand même, cela vous indique qu'à la séance de juin le
conseil a accepté ce mode de financement après avoir
étudié le tout en comité plénier. L'autre exemple
qui a été encore plus poussé, si vous me permettez, M. le
Président, c'est celui de la physiothérapie. Il était bien
connu que nous avions un problème avec la physiothérapie à
la commission, qu'il s'agisse du traitement des accidentés pour avoir
les meilleurs soins possible, et également une question de coût.
(12 h 15)
Le comité a siégé en comité plénier.
Là encore, la partie patronale était accompagnée de trois
médecins, si mon souvenir est bon; mon collègue me corrigera. Il
y avait le Dr Michel Lesage, le Dr Guillemette et le Dr Paquet qui
étaient là. Il y avait évidemment le directeur des
services médicaux de la commission qui a siégé avec
trois de ses collègues, trois orthopédistes et un physiatre.
Là nous avons entendu d'abord le rapport du groupe Duranceau qui
était composé de physiatres, orthopédistes, rhumatologues,
épidémiologistes et physiothérapeutes qui avaient
étudié la question et soumis un rapport.
Ils ont pu défendre leur point de vue, être
interrogés par les médecins de toutes les parties et
répondre aux questions. Ils ont été suivis dans
l'après-midi par les représentants de l'Association des
physiatres qui est venue donner son point de vue, a critiqué le rapport,
fait des suggestions et, par la suite, nous avons eu le groupe des
physiothérapeutes qui a sensiblement expliqué ce que vous avez
reçu dans le document qui a été déposé
devant la commission parlementaire. Les orthopédistes, eux, ont fait
parvenir un document écrit. Ils ne se sont pas
présentés.
C'était au mois de juin. Au mois d'août, la commission a
entendu - en comité plénier toujours, avec les médecins de
l'extérieur - les représentations des docteurs Lemieux, Guimont,
Martineau et Brouillet, de la commission, sur la nouvelle politique, qui
n'était pas incidemment basée sur le rapport Duranceau. Cette
nouvelle politique se veut également souple; si vous la lisez
attentivement on va dire "généralement, telle chose" et "il y a
possibilité d'améliorer la situation". Quant aux problèmes
qui sont soulevés en physiothérapie, je pense que demain, M. le
Président, on aura l'occasion d'y revenir. Il s'agit de l'administration
et des activités courantes. C'est dans les pouvoirs du P.-D.G. et du
comité de direction.
Voilà trois exemples pour expliquer comment le conseil
fonctionne, en plus d'avoir ses réunions mensuelles. Je pense que les
gens ne s'imaginent pas à quel point les administrateurs externes de la
commission ont beaucoup de travail à faire. Ils ne font pas que
siéger au conseil; ils siègent à des comités ad hoc
ou des comités pléniers. Cela a un excellent rôle
d'informateur auprès des différentes associations. De cette
façon, ces comités permettent à plusieurs personnes de
faire valoir leur point de vue.
Je vous ai donné trois exemples. Si vous en voulez d'autres, j'y
reviendrai. Je pense que mon collègue, Ghislain Dufour, voudrait d'abord
faire une présentation et, par la suite, M. Laberge.
Le Président (M. Blouin): M. Dufour.
M. Dufour (Ghislain): Merci, M. le Président. Je pense que
vous avez reçu ce matin, par le Secrétariat des commissions
parlementaires, ce bref document de huit ou neuf pages. Je vais en faire la
lecture. C'est douze ou quinze minutes au maximum.
La partie patronale au conseil d'administration de la CSST est, bien
sûr, prête à répondre, selon les règles
juridiques et d'éthique habituelles, à toutes lesquestions que les députés voudront bien lui poser
relativement à sa participation à la gestion de cet organisme. Il
s'agira de réponses relatives à la gestion générale
de l'organisme selon le rôle qui nous est dévolu et sur lequel
nous reviendrons longuement plus loin. Nous laisserons notamment au
président-directeur général le soin de répondre aux
questions qui concernent la gestion courante, selon d'ailleurs les articles 28
et 43 du règlement de régie interne de la commission dont on vous
parlait tantôt et qui est un règlement qui a été
accepté par le gouvernement.
Il nous semble cependant profitable de faire précéder ces
discussions d'un bref rappel d'un certain nombre de paramètres qui
pourront être utiles à la compréhension que vous pourriez
avoir de certaines réactions à certaines préoccupations
qui sont souvent exprimées à l'endroit de la CSST, peu importent
les groupes. Ces paramètres sont d'ailleurs l'expression de nos
principales préoccupations à l'égard de la CSST. Ils vous
sont livrés, bien sûr, en vrac, sans ordre précis dans le
but simplement d'encadrer, si vous nous le permettez, davantage la discussion.
En effet, l'expérience de plusieurs d'entre nous dans des exercices du
genre, exercices qui revêtent nécessairement un caractère
politique, nous amène à penser qu'on est ainsi moins susceptibles
de se perdre inutilement dans des détails, sinon de s'aventurer dans des
interprétations qui sont souvent erronées.
Il n'est pas inutile au départ de préciser qu'au moment de
la discussion du livre blanc sur la santé et la sécurité
du travail et, subséquemment, au moment du débat sur la loi 17,
le patronat souhaitait également atteindre les principaux objectifs du
projet de loi, à savoir prévenir et réduire les accidents
et les maladies professionnelles. Il signalait cependant que la loi
était plus ou moins bien faite et qu'elle coûterait cher. Il
exprimait son désaccord avec bon nombre de moyens suggérés
pour y parvenir, notamment parce qu'ils étaient souvent tout à
fait inédits en Amérique du Nord. Ce que suggérait alors
le patronat, au lieu du régime de réglementation proposé,
c'était de procéder en fixant des objectifs, ce qui, de son avis,
aurait permis de mieux atteindre les buts poursuivis.
Le législateur de l'époque ne s'est pas engagé dans
cette voie: à la gestion par objectif, il a préféré
l'approche réglementaire, ce qui fait qu'aujourd'hui, il n'est pas
surprenant que le patronat soit parfois ou opposé ou réticent aux
règlements que la loi engendre et, bien sûr, aux coûts
qu'ils comportent. Déjà, rappelons-le, cette
loi a suscité une vingtaine de nouveaux règlements. Avec
les anciens règlements découlant de la Loi sur les accidents du
travail, c'est plus de 50 règlements que la commission doit administrer.
Et plusieurs autres sont encore à venir.
Il est utile également de rappeler que la loi 17 a innové
au Québec, sinon en Amérique du Nord, en créant une
commission dont le conseil d'administration est composé de
représentants patronaux et syndicaux, sur une base paritaire de 7-7 et
d'un P.-D.G. nommé, quant à lui, non pas par les parties, tout
comme les vice-présidents d'ailleurs, mais par le gouvernement
lui-même. C'était là une orientation tout à fait
nouvelle dont on a beaucoup fait état au nom du paritarisme
patronal-syndical.
Des précisions s'imposent cependant quand on parle de ce type de
conseil d'administration. Il faudrait dire que, généralement, un
conseil d'administration possède des pouvoirs qui sont bien connus. Il
nomme son président-directeur général, il nomme ses
principaux officiers exécutifs; il approuve l'organigramme interne; il
est, sous réserve de l'assemblée générale des
actionnaires, souverain dans la totalité de ses décisions, il
regroupe finalement - et c'est important - des personnes qui partagent à
peu près exclusivement non seulement les mêmes objectifs, mais les
mêmes vues sur les moyens de les réaliser.
Contrairement à ce schéma, le législateur a
prévu des modalités différentes dans la loi 17, dont je
vais vous entretenir rapidement. Je voudrais dire qu'il ne s'agit nullement ici
de passer un quelconque jugement sur les hommes en place actuellement ou ceux
qui ont été là dans le passé, mais ce que nous
voulons passer, c'est un jugement sur les structures.
Première modalité: le conseil d'administration ne nomme
pas son président-directeur général, ni ses
vice-présidents.
Deuxièmement, le président-directeur général
possède, de par l'article 154 de la loi, des pouvoirs que l'entreprise
privée en tout cas ne consent pas à son P.-D.G.
Troisièmement, sans tenir compte du conseil d'administration, le
ministre responsable de la loi et le gouvernement peuvent faire ce qu'ils
veulent en vertu de l'article 225 et ils ont déjà pris au moins
deux décisions dont le conseil d'administration n'a pris connaissance
qu'après coup, et on peut les identifier: le certificat de retrait de la
travailleuse enceinte et le non-financement de l'inspection. Dans ce dernier
cas, le gouvernement est revenu sur sa décision, notamment, à la
suite des pressions du ministre du Travail et des pressions exercées, ce
qui fait que le gouvernement a changé sa décision.
Contrairement au conseil d'admi- nistration de l'entreprise
privée, celui de la CSST n'est pas neutre. Au-delà des objectifs
communs, bien sûr, parce que les objectifs de santé et de
sécurité sont communs, mais il représente des
intérêts souvent convergents et parfois tout à fait
opposés.
M. le Président, il faut vivre ce genre de situation pour la
comprendre vraiment et comprendre également pourquoi il est toujours
essentiel, et déjà certains l'ont fait, de faire la distinction
entre la direction de la CSST et le conseil d'administration. Ce dernier, en
effet, ne siège qu'un jour ou deux par mois, en dehors des nombreux
comités auxquels le président s'est référé
tout à l'heure, doit se taper des dossiers très complexes,
techniques et volumineux dans des périodes qui ne peuvent, par
définition, qu'être relativement courtes. Selon les
paramètres établis par le ministre sur lesquels je vais revenir,
il incombe donc à l'administration, à la permanence de voir
à la gestion régulière des choses de la CSST.
Finalement, le ministre responsable, selon la loi, peut prendre des
décisions politiques. Exemple: décider de proclamer tel ou tel
article, lorsque tel est son désir, indépendamment du conseil
d'administration. J'ai un exemple dans le texte ici. Je vais vous en donner
plutôt un autre parce que vous l'avez vécu en commission
parlementaire. Vous avez eu le groupe de l'AIFQ, l'Association des industries
forestières, qui s'est présenté hier pour exposer le
problème concret de trois associations patronales qui existent dans le
champ au niveau de la prévention. Elles disparaissent tout simplement
par proclamation d'un article de la loi 17. Le conseil d'administration, dans
son ensemble, doit vivre les retombées qui vous ont été
exposées hier, mais il n'a rien à voir avec la proclamation de
l'article en question.
On est donc loin ici, je me résume sur cela, du conseil
d'administration tradionnel et on ne saurait trop insister sur ces aspects
particuliers du conseil d'administration de la CSST. Et là, il n'y a pas
de possibilité de désaccord. Tout ce que je viens de vous dire
est vérifiable à la lecture même de la loi.
Le Conseil du patronat, pour sa part, appréhendait du moins de
façon théorique ces difficultés lorsqu'il a accepté
de siéger au conseil d'administration de la CSST. Cependant, il n'a pas
pour autant accepté de perdre sa marge de critique politique et publique
en acceptant d'y siéger. En recommandant, en 1980 et en 1982, des
représentants du CPQ pour siéger au conseil d'administration,
Pierre Côté, qui était alors le président du CPQ,
indiquait clairement au ministre qui, à ce moment, était M.
Marois, que "cette collaboration ne devra en aucune façon nous
empêcher, en tant qu'organisme, de continuer nos représentations,
le cas
échéant, auprès du législateur ou de
l'opinion publique."
C'est ce que nous venons d'ailleurs de faire en contestant en Cour
supérieure le bureau de révision-inspection de la CSST pour la
seule et unique raison qu'il ne permet pas de droit d'appel à
l'extérieur de la CSST. C'est ce que nous ferons aussi bientôt en
contestant également en Cour supérieure, non pas le
règlement de santé et de sécurité de façon
générale, mais un aspect précis de ce règlement qui
nous apparaît discriminatoire à l'endroit des travailleurs non
syndiqués.
Ces deux seuls exemples illustrent bien à quel point les
administrateurs de la CSST doivent souvent porter plusieurs chapeaux, soit
comme administrateurs, soit comme représentants de leur groupe, soit
comme représentants du ministre, soit comme représentants des
bénéficiaires. La loi est ainsi faite. Je le répète
pour qu'il n'y ait pas de méprise. Rappelons que nous ne sommes pas ici
comme représentants de nos organismes, mais bien comme membres du
conseil d'administration. Il serait bien naïf de croire que les
préoccupations de nos organismes ne sont pas aussi un peu les
nôtres.
Au plan du travail réalisé, au cours des trois
dernières années, par les administrateurs, il fut, à sa
face même, énorme, compte tenu des contraintes du mandat. À
cet égard, il suffirait simplement de prendre connaissance, et on en a,
d'un seul ordre du jour d'une assemblée et de constater l'importance des
questions qui sont en cause pour s'en convaincre. (12 h 30)
Dans ce contexte, il n'est pas inutile de rappeler ce que nous disions
il y a un instant: Les administrateurs doivent s'en tenir aux grands
problèmes, aux grandes orientations. C'est le sens, d'ailleurs, du
mandat que nous avait donné, le 31 mars 1980, le ministre Pierre Marois
lorsqu'il était venu rencontrer les membres du conseil et qu'il nous
avait livré le texte suivant, et cela m'apparaît important
à la poursuite des débats de lire un extrait de ce texte: "Une
lecture attentive de la loi vous permettra de constater que les mots
"commission" et "conseil d'administration" ne sont pas équivalents et ne
sont pas employés à l'aveuglette. "La commission, c'est
l'ensemble des structures et des personnes qui voient à l'application de
la loi. Elle comprend des organes décisionnels comme des services
opérationnels. En matière de décisions, on distingue deux
niveaux: ceux du conseil d'administration et du P.-D.G. L'esprit de la loi veut
que le conseil d'administration agisse comme tout conseil d'administration
d'une grande corporation. Il est le plus haut niveau de décision parce
qu'il fixe les grandes orientations et approuve les grandes politiques; mais il
n'a pas d'action directe dans les opérations quoditiennes. Il joue un
rôle de contrôleur général plutôt que celui de
direction générale. C'est pourquoi la loi dit
précisément, à l'article 154 - auquel je faisais
référence tantôt - que le directeur général
est responsable de l'administration et de la direction de la commission. Le
législateur - et il termine là-dessus - a voulu que l'application
des programmes aux clientèles et la conduite des opérations
courantes relèvent d'abord du P.-D.G. et de ses assistants."
Or, c'est justement sur les grands problèmes, les grandes
orientations que s'expriment les plus profonds désaccords. Le
paritarisme, c'est beau, c'est noble, mais c'est une tâche
extrêmement difficile, d'autant plus qu'on taille dans du neuf et que,
dans le contexte économique difficile dans lequel fonctionnent nos
entreprises québécoises, nous devons, comme représentants
patronaux, incluant le gouvernement comme employeur responsable, freiner
certaines demandes et exiger également des comptes de nos
administrateurs internes.
Dans les circonstances et dans ce contexte difficile du paritarisme, il
n'est pas étonnant que ce soit la loi 17, Loi sur la santé et la
sécurité du travail, et non la Loi sur les accidents du travail,
qui ait retenu davantage l'attention des administrateurs au cours des trois
dernières années. Ceci s'explique pour deux raisons.
La première, c'est que le dossier de la réparation a
toujours été, depuis qu'on est là, un peu mis en veilleuse
à cause du fameux débat concernant l'article 38.4 et du recours
collectif qu'il a suscité. Nous espérons que tous et chacun des
membres sont bien au fait de ce dossier. C'est également parce que tout
débat concernant des dossiers sur la réparation nous amenait
presque invariablement au contenu de l'avant-projet de loi du gouvernement sur
les accidents du travail et les maladies professionnelles qui est maintenant
dans le décor depuis trois ans. Qu'il s'agisse des dossiers relatifs,
par exemple, aux artisans, aux maladies professionnelles, au calcul du revenu
net et combien d'autres, le problème que nous soulevions était
invariablement dans la future réforme de la Loi sur les accidents du
travail.
Ici, vous me permettrez un aparté, qui n'a rien à voir tel
comme membre du conseil pour vous dire que les grands dossiers auxquels s'est
opposée la délégation patronale au conseil
d'administration de la CSST sont traités dans l'actuel projet de loi 42.
Je voudrais dire qu'on n'y retrouve pas nécessairement les
préoccupations et les recommandations patronales que nous avons
débattues au conseil d'administration de la
CSST. Je veux simplement parler du problème des artisans, du
problème des "miraculés" de l'amiantose et de la silicose sur
lesquels, semble-t-il, on avait fait un certain consensus. Les objections
patronales à l'égard du calcul du revenu net et d'un certain
nombre de problèmes comme cela semblent trouver une réponse dans
la loi 42, mais pas nécessairement la réponse à laquelle
on se serait attendu quant à nous.
La deuxième raison, c'est que nous sommes arrivés au
conseil d'administration de la CSST au moment de l'entrée en vigueur de
la loi 17, et celle-ci a exigé que les administrateurs y consacrent
à peu près toutes leurs énergies. On a débattu des
dossiers extrêmement complexes, comme, par exemple, le nouveau
système de tarification, la physiothérapie,
l'éventualité de la construction d'un siège social, les
placements à la Caisse de dépôt et combien d'autres. Mais
une analyse du temps qui a été consacré à tous nos
débats démontrerait que la priorité a été
donnée au contenu de la loi 17: les priorités d'action dont on
vous parlait tantôt, les représentants à la
prévention, les associations sectorielles, les services de santé,
les programmes de prévention, les comités de santé et de
sécurité, etc., et, par le fait même, le budget annuel
d'administration de la CSST. En somme, nous avons été
impliqués, tel que vu par nous, dans la réglementation beaucoup
plus que dans l'administration.
Inutile de dire que, pour la partie patronale, ces dossiers
revêtaient et revêtent toujours une extrême importance
puisqu'ils comportent les véritables coûts qu'auront à
absorber les entreprises, les effets éventuels de la
réglementation dans l'entreprise; c'est là que vraiment les
coûts seront connus. C'est ainsi que nous avons passé de
nombreuses heures pour convaincre une fraction de la représentation
syndicale qu'il était impensable d'implanter, dans les six
groupes prioritaires retenus par la CSST, des comités de santé et
de sécurité et ce, dès la promulgation du
règlement.
Quelques questions diverses en conclusion, M. le Président. Il
faut constater que l'appareil de la CSST est gros - on peut différer de
point de vue sur la grosseur, mais c'est gros - et qu'il devra se donner des
politiques administratives plus rigides. Au même titre que nous nous
sommes donné comme conseil, il y a trois ans, des politiques plus
strictes d'achat, des politiques plus strictes de services professionnels, nous
croyons qu'il faut absolument - et c'est un dossier que nous pilotons depuis
plusieurs mois maintenant - créer un comité de
vérification interne redevable au conseil d'administration. On a des
problèmes là-dessus et j'espère qu'on y reviendra avec le
Vérificateur général. Ce n'est pas son rôle qui est
ici en cause, mais il nous paraît essentiel de se doter d'outils
additionnels d'information des membres du conseil d'administration.
Deuxièmement, les coûts actuels de la CSST, ceux à
venir et surtout ceux - je me répète - de la réforme dans
les entreprises préoccupent énormément les entreprises qui
nous en font part constamment, qui vous en font part également comme
hommes politiques. On ne parle pas ici, bien sûr, de la loi 42. En tant
qu'administrateurs, parce que c'est ce que nous sommes d'abord et, ensuite,
comme membres de la délégation patronale, il s'agit, pour nous,
d'une préoccupation constante et nous espérons que c'est
également celle du législateur.
Troisièmement, nous faisons régulièrement, comme
partie patronale, d'importantes remises en cause. C'est actuellement le cas du
fameux système de mérite et de démérite de
l'association paritaire de prévention de la santé et de la
sécurité du travail. C'est le cas du dossier de l'inspection qui,
soit dit en passant, a retenu beaucoup d'énergies du conseil
d'administration il y a quelques mois, lorsque le gouvernement avait
décidé d'en faire payer le coût par les employeurs. Il est
revenu sur sa décision; on peut s'interroger à savoir pour
combien de temps.
En conclusion, M. le Président, nous répétons que
les représentants patronaux se présentent ici en tant que membres
du conseil d'administration et non à titre de représentants du
CPQ ou de leurs organismes respectifs. Le patronat aura, d'ailleurs,
l'occasion, lors du débat sur le projet de loi 42, de s'exprimer sur
toutes ces questions. La loi 42 - le ministre du Travail sera d'accord - est
tellement vaste qu'elle permettra de reprendre bon nombre de débats et
de discuter de certaines allégations qui ont pu être faites au
cours des derniers jours et qui peuvent être vues de façon tout
à fait différente par les entreprises.
Nous souhaitons, en terminant, que ce débat se déroule en
toute objectivité. Pour notre part, nous sommes conscients de la
multitude de problèmes qui peuvent être soulevés.
Cela ne nous surprend absolument pas, tous ces problèmes qui sont
soulevés autour de la CSST. Nous répondrons aux questions
relatives à notre mandat. Nous signalons que nous sommes tout à
fait favorables à cette réflexion, car nous la faisons
constamment nous-mêmes au CPQ; l'analyse se poursuit
régulièrement et même celle qui concerne notre propre
présence au sein de l'organisme. Des amendements nous apparaissent
essentiels à certains modes de fonctionnement actuels de la CSST. Nous
avons hérité de certaines structures, de certains modes de
fonctionnement qui provoquent de justes récriminations chez les
entreprises. On ne saurait les ignorer et de nécessaires remises en
cause s'imposent. Je
vous remercie.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Dufour. Je
présume que nous pourrons suspendre nos travaux vers 13 heures et qu'en
20 ou 25 minutes...
M. Cusano: À 13 heures.
Le Président (M. Blouin): Nous suspendrons à 13
heures. Donc, en 20 ou 25 minutes, M. Laberge devrait pouvoir présenter
son exposé.
M. Laberge (Louis): Merci, M. le Président. Madame,
messieurs les membres de la commission, lors de l'adoption de la loi 17, lors
des discussions en commission parlementaire et, enfin, un peu partout, la FTQ
n'a jamais caché qu'elle était en faveur de la loi 17. Les trois
centrales syndicales représentées au conseil d'administration, la
CSD, la CSN et la FTQ, étaient d'accord avec la formation et la
création de cette Commission de la santé et de la
sécurité du travail. On était pour une
représentation paritaire pour administrer la loi 17. Il était
bien évident que nous appréhendions que ceci voudrait dire
beaucoup de temps. Il est bien évident que sept représentants
venant de la partie patronale et sept représentants venant de la partie
syndicale ne sont pas toujours d'accord. Évidemment, la commission est
poignée un peu entre les deux. Nous, par exemple, de la partie
syndicale, nous trouvons que les inspecteurs ne vont pas assez souvent faire de
l'inspection, qu'ils sont trop mous, qu'ils sont bienveillants.
Évidemment, la patrie patronale trouve que les inspecteurs y vont trop
souvent, qu'ils sont "achalants" et qu'ils sont trop "tough". En fait, quand
vient le temps d'adopter un règlement, c'est un peu comme ce qui se
passe à l'Assemblée nationale. Cela irait beaucoup plus vite s'il
n'y avait ici qu'une formation politique et si on avait un conseil
d'administration avec du monde tout du même bord. Bien sûr! Sauf
que je pense qu'on n'obtiendrait pas toujours les mêmes résultats.
C'est bon qu'il y ait des choses, des problèmes de fond qui se
discutent. Il est évident qu'on ne discute pas, au conseil
d'administration, de cas individuels. Sauf, bien sûr, quand on entend
dire que dans certains domaines les mêmes plaintes se
répètent; là, nous amenons cela au conseil
d'administration pour en discuter.
Nous étions d'accord avec cette formation-là. On dirait
qu'il y a des gens qui ont la mémoire courte, qui oublient le fouillis
indescriptible qui existait dans le cas des accidentés du travail il y a
quelques années à peine, alors qu'il y avait cinq, six ou sept
différents ministères qui avaient juridiction sur l'inspection.
Parfois, on s'enfargeait dans les inspecteurs et parfois on n'en voyait pas
durant une "mautadite secousse". On se disait: Cela prend un organisme pour
diriger tout cela, pour coordonner ces efforts, et cela, dans le meilleur
intérêt des travailleuses et des travailleurs.
Bien sûr que tout n'est pas encore fait. Il y a d'autres pays
où de telles commissions existent. Par exemple, en Suède, en
Allemagne, il y a un organisme, comme cela, paritaire et, d'après les
informations que nous avons, cela a pris un minimum de cinq ans avant que tout
soit vraiment mis en place, avant que cela soit rodé et que cela
fonctionne. Bien, ici au Québec, nous aussi, on trouve cela long. Il y a
des règlements, entre autres le règlement sur les comités
de santé et de sécurité je ne pense pas dévoiler
beaucoup de secrets - où il n'y avait pas accord parfait entre les
représentants de la partie patronale et les représentants de la
partie syndicale. On l'a négocié. Cela a pris du temps, trop de
temps à notre avis, mais on est finalement arrivé à un
projet de règlement pour les comités de santé et de
sécurité. Vous voyez qu'il n'y a pas encore d'accord parfait, car
dans la présentation de M. Dufour, le Conseil du patronat ou la partie
patronale, nous informe-t-on, est prêt à le contester.
Il est évident que ce processus est plus long. Mais, nous sommes
toujours du même avis. Nous sortons à peine d'un congrès,
la semaine dernière: près de 1100 délégués,
392 observateurs, et pas un seul n'a remis en question la Commission de la
santé et de la sécurité du travail; pas un seul n'a remis
en question notre présence à la Commission de la santé et
de la sécurité du travail. Mais nous avons, évidemment,
beaucoup de militants et de militantes qui critiquent certains aspects et qui
critiquent des cas. Grâce à notre système de formation
syndicale - c'est vrai à la CSN et c'est vrai à la CSD - nous
avons réussi à former des douzaines et des centaines de militants
et de militantes qui, aujourd'hui, connaissent beaucoup mieux la Loi sur la
santé et la sécurité du travail, connaissent beaucoup
mieux les cas de réclamation, peuvent prendre un dossier et le mener
à bonne fin. Mais il est bien évident que, lorsqu'on perd un cas,
on n'est jamais content. Je n'ose pas dire que, lorsqu'on en gagne un, il y en
a d'autres qui ne sont pas contents. II est bien évident qu'il est, pour
nous, d'une extrême importance que la commission puisse agir vite, que
les travailleurs et les travailleuses accidentés aient l'occasion de
faire valoir leur point de vue en quelque part. (12 h 45)
Nous aurons l'occasion, nous aussi, M. le ministre, lors de la
commission parlementaire sur la loi 42, de faire connaître nos points de
vue. Là non plus il n'y aura pas entente parfaite entre la partie
patronale et la partie syndicale. On croit que
le projet de loi 42 ne va pas assez loin. On ne soutiendra pas l'autre
thèse, c'est évident.
Pour s'en tenir aux travaux de la commission parlementaire, le conseil
d'administration de la CSST n'est pas là pour décider de cas
particuliers. Cela se fait, bien sûr, par la permanence de la commission.
Nous avons été là, dans bien des cas - et nous avons
été heureux de l'être - pour corriger certaines mauvaises
habitudes. Nous sommes toujours en faveur de la décentralisation de la
commission. Auparavant, il n'y avait que les travailleurs et les travailleuses
accidentés de Montréal et de Québec qui avaient vraiment
l'occasion de se faire entendre. Dans les autres régions, il fallait que
cela se fasse par écrit et par téléphone. Pour une
travailleuse ou un travailleur, essayer de débattre un cas par
écrit, c'est quelque chose qui commence à leur compliquer
l'existence.
Alors, nous sommes toujours en faveur de la décentralisation.
Nous sommes toujours en faveur qu'il y ait une commission pour coordonner les
efforts de tout le monde. Nous sommes toujours d'accord que les travailleuses
et les travailleurs, pour être protégés, doivent avoir un
syndicat fort, militant, qui peut les représenter continuellement,
s'occuper de leur cas, s'occuper de leurs dossiers et, bien sûr, faire
les grandes réclamations avec des représentants de la commission,
quand vient le temps de les faire.
M. Dufour l'a dit, c'est plus long, c'est difficile. Évidemment,
sans être méchant, nous sommes plus habitués que la partie
patronale à des débats de temps en temps virils. On a des
assemblées constituantes depuis toujours. C'est un peu plus
récent ailleurs. C'est évident que cela prend plus de temps.
Encore une fois, on vient de passer ce congrès, la semaine
dernière, et pas une seule seconde tout cela n'a été remis
en question. Nous avons des centaines de cas que nous contestons et que nous
continuerons de contester. Encore une fois, la permanence de la commission est
poignée avec cela. Nous trouvons qu'elle ne va pas assez loin et
d'autres trouvent qu'elle va trop loin, les inspecteurs et tout le reste. Nous
continuerons à jouer notre rôle comme représentants de nos
syndicats d'abord, ensuite, évidemment, comme administrateurs de la
commission, bien sûr.
On sait qu'il y a des limites à ce qu'on peut faire en même
temps. Le budget n'est pas illimité et, là non plus, on ne
s'entend pas toujours. À un moment donné, il faut bien donner
notre accord quelque part parce qu'il n'y aurait pas de budget. Mais il est
bien évident que, pour nous, le budget est toujours trop petit et que,
pour les employeurs, je ne dis pas cela pour critiquer - le budget est toujours
trop gros.
Quand M. Dufour parle de mettre sur pied un comité pour s'assurer
que tout est fait le mieux possible, on ne peut être en désaccord
avec cela. Nous sommes aussi d'accord. Nous sommes d'accord avec les bureaux de
révision, nous sommes d'accord avec l'inspection centrée et
coordonnée, nous somme d'accord avec un tas de choses, ce qui ne nous
empêchera jamais de critiquer des choses qui, croyons-nous, doivent
être critiquées.
Le Président (M. Blouin): Est-ce qu'il y a d'autres
membres du conseil d'administration qui désirent s'exprimer ou les
porte-parole ont-ils bien rendu les questions que vous vouliez soulever? Cela
va? Très bien. M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, bien sûr que
mes premières remarques vont être pour remercier les membres du
conseil d'administration qui se sont tous déplacés ce matin pour
venir faire part de leur appréciation, sauf deux qui, me dit-on, sont
pris dans des conditions de température absolument inévitables
qui font en sorte qu'ils ne peuvent être ici.
Ce matin, aujourd'hui, et nous le ferons demain aussi, nous sommes en
train de compléter le mandat que l'Assemblée nationale du
Québec nous a donné récemment, c'est-à-dire de
procéder à la tenue d'une commission parlementaire ayant
essentiellement comme objectif et comme mandat d'examiner - et j'utilise les
termes mêmes de la motion de l'Assemblée nationale -
"l'administration et le fonctionnement de la Commission de la santé et
de la sécurité du travail." Je suis d'avis qu'il s'agit là
d'un exercice tout à fait normal dans les circonstances - M. Dufour l'a
souligné, me semble-t-il, à juste titre - qui s'inscrit dans le
cadre d'un double objectif: permettre, d'une part, aux élus ou aux
membres de l'Assemblée nationale d'entendre des groupes, des organismes
et des individus qui doivent traiter quotidiennement ou sur une période
un peu plus longue avec cet organisme qu'est la Commission de la santé
et de la sécurité du travail. Il me semble également que
l'exercice s'inscrit nettement dans l'esprit de ce qu'on est convenu d'appeler
maintenant -et on en parle de plus en plus depuis quelque temps -
l'imputabilité de personnes à qui des mandats sont donnés
pour diriger ou pour administrer des organismes ou des sociétés
publiques.
L'exercice que nous tenons ce matin avait été
annoncé depuis un bon nombre de mois maintenant, plus d'une
année, par mon prédécesseur, M. Marois. Il avait
effectivement indiqué que, lorsque la Commission de la santé
et de la sécurité du travail allait être mise sur
pied, qu'elle aurait commencé à fonctionner, il allait
sans doute s'imposer qu'après une certaine période
l'on doive procéder au genre d'évaluation qu'on est en
train de faire. Il y a un peu plus de trois ans qu'elle est là
maintenant et ces trois années nous ont permis de faire certains
constats, de faire l'appréciation d'un certain nombre de choses. Il me
semble évident - l'exercice que nous avons commencé depuis deux
jours le démontre très clairement - qu'il y avait effectivement
pertinence à la tenue de ces travaux.
Je signalerai également, en toute objectivité - je pense
qu'il faut le dire - que l'Opposition à l'Assemblée nationale a
réclamé depuis un bon moment que l'on fasse l'exercice qu'on est
en train de faire. Non seulement les membres de l'Opposition l'ont-ils
réclamé, mais également des députés
ministériels, depuis un bon moment, souhaitent effectivement que
l'occasion nous soit donnée de pouvoir faire le genre de travail qu'on
est en train de faire.
Je le signalais il y a un instant, M. le Président, au fur et
à mesure que nos travaux avancent, au fur et à mesure que nous
avons l'occasion d'entendre des témoins, cette pertinence dont je
parlais il y a un instant nous apparaît de plus en plus avoir
été celle sur laquelle il fallait s'arrêter. Nous avons
donc entendu des organismes et des individus, comme je le disais il y a un
instant, qui doivent régulièrement, dans l'exercice de leur
mandat et de leurs fonctions, faire affaires avec la Commission de la
santé et de la sécurité du travail qui se posent et qui se
posaient des questions quant à son administration. Nous sommes en train
d'atteindre l'objectif que cette commission parlementaire s'est
fixé.
M. Laberge l'a souligné, me semble-t-il, avec beaucoup
d'à-propos: Au conseil d'administration, à cause de la nature des
choses, à cause des opinions qu'on défend et qu'on plaide de part
et d'autre, il arrive que certaines décisions peuvent prendre un peu de
temps à être acheminées et, très souvent, il y a des
positions qui sont inconciliables. Cela m'apparaît être la
normalité des choses en fonction de la vocation qu'on trouve à
l'intérieur de cette loi. C'était essentiellement l'objectif que
visait le législateur lorsqu'il a présenté et fait adopter
cette loi.
M. Laberge a insisté sur cela, mais vous allez comprendre que
déjà nous imaginions que ce devait être comme cela, d'une
part. Deuxièmement, ces auditions auxquelles nous procédons
depuis deux jours nous démontrent que non seulement au conseil
d'administration il y a des divergences d'opinions profondes, des divergences
d'opinions de base, mais on retrouve ce même phénomène chez
ceux qui ont à faire affaires avec la commission en
général. Là non plus - je pense que tout le monde va
convenir de ce que je suis en train de dire - il n'y a pas à se
surprendre.
Cependant - je le dis tout de suite, je dis ce que je pense comme je le
pense sans, pour le moment, tirer les conclusions de la commission - il est
peut-être utile de signaler dès maintenant qu'au-delà des
divergences d'opinions, qu'au-delà des préoccupations
différentes qui peuvent nous avoir été soumises par des
groupes il y a quand même un certain nombre de choses sur lesquelles bon
nombre de personnes et d'organismes s'entendent et qui,
régulièrement dans la plupart des argumentations qui nous ont
été soumises, nous sont revenues, nous ont été
présentées comme préoccupations. Il me semble - je vous
donne là une réflexion tout à fait spontanée qui
est préliminaire, qui n'est à ce stade-ci ni une décision,
ni une recommandation - clair que, lorsque des groupes qui souvent - et c'est
leur vocation, d'ailleurs - ont des philosophies différentes, des
façons différentes de voir les choses se rencontrent sur
certaines choses, il y a lieu pour le législateur de
réfléchir sérieusement sur ces points de rencontre qui
nous sont soumis par les personnes que nous avons entendues jusqu'à
maintenant.
C'était des remarques très générales et
très préliminaires, M. le Président. Je sais que demain
nous aurons l'occasion d'entrer dans des questions plus particulières,
des questions plus spécifiques qui ont été
soulevées par les différents témoins qui se sont
présentés à la commission, mais je voudrais, très
rapidement, poser une ou deux questions.
Le Président (M. Blouin): M. le ministre, je vous
suggère de retenir vos questions et de les poser à 15 heures
lorsque nous reprendrons nos travaux. Je précise tout de suite que nous
reprendrons effectivement à 15 heures, mais dans la salle 91-A qui est
située à l'étage inférieur.
M. Fréchette: À la salle 81, je pense.
Le Président (M. Blouin): À la salle 81, oui, la
salle 91 est en réfection. On aura peut-être un petit
problème d'espace, mais il s'agit de raisons hors de notre
contrôle et nous devrons donc tenir nos débats à
l'étage inférieur.
Sur ce, je suspends les travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise de la séance à 15 h 5)
Le Président (M. Blouin): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission permanente du travail reprend ses travaux. Au moment
où nous nous sommes quittés, à 13 heures, la parole
était au ministre et nous allions
commencer l'échange avec les membres du conseil d'administration
de la Commission de la santé et de la sécurité du travail.
M. le ministre.
M. Sauvé: II y a des membres du conseil, M. le
Président, qui ont de la difficulté à entrer. Est-ce qu'on
peut attendre quelques minutes?
Le Président (M. Blouin): M. Sauvé, j'avais
demandé qu'il y ait un nombre de chaises suffisant autour de la table
pour que vous puissiez vous y installer.
M. Sauvé: Tout est là, mais c'est...
Le Président (M. Blouin): C'est l'engorgement. Compte tenu
de l'exiguïté des locaux, j'ai permis que certains invités
puissent venir s'asseoir dans les fauteuils qui longent le mur ici. S'il y en a
qui n'ont pas de place, je les inviterais à venir s'asseoir ici. Si on
manque encore un peu de place, on pourrait prendre quelques chaises
derrière les députés, mais je demanderais qu'on en laisse
dégagées car les députés ont souvent des
recherchistes ou des membres de leurs services qui viennent s'asseoir
derrière eux. S'il y a des gens qui n'ont pas de place, vous pouvez
venir prendre place à l'avant. On va faire cela en famille. Puisque nous
devons siéger jusqu'à 18 heures ce soir, nous allons tenter de
compléter cet échange le plus rigoureusement possible dans les
meilleurs délais et, ensuite, d'entendre les organismes qui
étaient prévus, si possible, quoique j'en doute, mais enfin. M.
le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je terminais
effectivement, lors de la suspension de nos travaux, mes remarques
préliminaires. Je voudrais y ajouter un seul commentaire puisque, autant
M. Dufour que M. Laberge ont fait référence au projet de loi 42
qui a été déposé en première lecture. Je
suis bien conscient que ce n'est pas le mandat de l'actuelle commission
d'étudier cette loi, mais ce que je voulais simplement signaler, pour
l'information de toutes les personnes intéressées, c'est
qu'effectivement, au mois de février prochain, à des dates qui ne
sont pas encore fixées, nous allons convoquer une commission
parlementaire avant la deuxième lecture - d'ailleurs, les
procédures sont déjà engagées comme cela devant
l'Assemblée nationale - pour procéder à l'étude du
projet de loi 42.
J'ai deux questions d'ordre très général, une
s'adressant, d'abord, à M. Dufour, à la suite de l'audition de
votre mémoire, en regardant de près les commentaires que vous y
faites et, plus particulièrement, les conclusions auxquelles vous
arrivez. Je fais particulièrement référence à
l'avant-dernier paragraphe de la page 9 du mémoire. Là, vous
parlez du Conseil du patronat du Québec, en disant: "Nous sommes,
d'ailleurs, tout à fait favorables à cette réflexion, car
nous la faisons nous-mêmes et, au CPQ, l'analyse se poursuit
régulièrement, même en ce qui concerne notre
présence au sein de cet organisme." Ma question, M. Dufour, est la
suivante: Est-ce que, à partir du contenu global de votre mémoire
et de cette conclusion particulière à laquelle je viens de faire
référence, c'est, finalement, la philosophie globale de la loi,
c'est-à-dire cette orientation vers le paritarisme, que vous remettez en
question, sur laquelle vous vous interrogez et réfléchissez au
Conseil du patronat du Québec?
Le Président (M. Blouin): M. Dufour.
M. Dufour: M. le ministre, cet avant-dernier paragraphe du texte
se veut une espèce de relation avec la commission parlementaire comme
telle. C'est une façon pour nous de dire que nous sommes d'accord avec
la tenue de cette commission parlementaire, comme vous l'avez, d'ailleurs,
souligné avant le déjeuner. C'est une loi qui existe depuis trois
ans. C'est la première fois, je pense, que les gens ont l'occasion de
faire une réflexion plus en profondeur en dehors des dossiers courants.
Dès le mois de juin, lorsque avait été débattue
cette possibilité de commission parlementaire, nous nous étions
prononcés pour qu'elle se tienne. Nous sommes donc favorables à
la commission parlementaire et nous ajoutons que ce genre de réflexion,
à l'intérieur de nos propres structures, nous la faisons
régulièrement avec nos membres. Je peux vous dire qu'à
l'ordre du jour de nos réunions mensuelles avec les membres il y a
toujours la loi 17 qui est présente. Il y a régulièrement
aussi au conseil d'administration une réflexion qui se poursuit
concernant la loi 17.
Cela n'a rien à voir comme tel avec le paritarisme. Quand on
s'est embarqué dans le schéma de la loi 17, nous avons
contesté certains des moyens mis sur pied, mais nous n'avons jamais
contesté le paritarisme. Nous sommes d'accord avec le paritarisme
exprimé notamment par les comités paritaires de santé et
de sécurité sous réserve d'un aspect, celui qu'on a
mentionné ce matin, à savoir les travailleurs non
syndiqués qui ne seraient pas toujours, selon nous, bien
représentés dans les comités de santé et de
sécurité. Nous sommes d'accord, en principe, avec les
associations sectorielles lorsqu'elles sont libres, négociées par
les parties. Nous avons toujours été contre l'association
sectorielle qui a été imposée au secteur de la
construction, mais c'est la loi. Tout cela pour dire que ce n'est pas le
paritarisme; c'est beaucoup plus ce que nous avons essayé
de véhiculer comme conception ce matin, une participation
à l'intérieur d'une structure qui devrait être davantage
décisionnelle que consultative.
M. le ministre, si cela peut vous aider à comprendre le sens de
la réflexion qu'on poursuit - on aura l'occasion de vous le dire lors de
l'étude du projet de loi 42, parce qu'il est beaucoup question de la
Commission de la santé et de la sécurité dans le projet de
loi 42, quand on prend les pouvoirs qui sont donnés au ministre, au
Vérificateur général, au ministère des Affaires
sociales ou à d'autres; il y a 22 articles du projet de loi qui font
référence à des pouvoirs qui n'ont rien à voir avec
le conseil d'administration -est beaucoup plus autour de cela que du
paritarisme.
M. Fréchette: Merci. Une dernière question quant
à moi, M. le Président, que je poserai à M. Laberge. M.
Laberge, nous avons tous entendu ce matin votre message, enfin vos remarques.
Le député de Portneuf, depuis qu'on est autour de la table de la
commission, non pas viva voce comme cela, mais à la suite de ses
questions, m'en suggère une. Est-ce que vous êtes d'opinion que,
depuis que cette loi 17 a été adoptée, proclamée,
mise en vigueur, les objectifs qui y étaient prévus ont
été atteints, partiellement ou en tout? Enfin, comment
évaluez-vous l'état actuel de la situation par rapport à
ce qui était inscrit comme objectifs dans la loi? (15 h 15)
Le Président (M. Blouin): M. Laberge.
M. Laberge: II est bien évident que les objectifs n'ont
pas encore été atteints, mais je pense que, laborieusement, nous
y arrivons. Ce qui s'est fait jusqu'à maintenant, d'après moi, ce
n'est pas encore le plus important. De la réparation, il s'en faisait
avant la loi 17. Il ne se faisait pas beaucoup de réadaptation. Il y a
d'ailleurs un honorable tribunal qui l'a dit à l'ancienne CAT, mais il
se faisait très peu de prévention et on s'occupait encore moins
d'associer tous ceux qui sont directement responsables de la santé et de
la sécurité dans les usines, les chantiers, les bureaux, enfin
dans tous les endroits de travail, c'est-à-dire les travailleuses et les
travailleurs et les employeurs. Il fallait commencer quelque part. On s'est
rendu compte au cours des années que, dans certains endroits, des
comités de santé et de sécurité fonctionnaient
assez bien; là où il y avait un syndicat militant, bien en place,
assez fort, un employeur un peu plus clairvoyant, ils réussissaient
à s'entendre et il se faisait des choses, pour un certain nombre
très limités de travailleuses et de travailleurs.
Ce qui s'en vient, d'après moi, c'est à peu près le
plus important: la mise en place des comités de santé et de
sécurité, le travail en commun pour essayer de mieux
prévenir les accidents. C'est vrai qu'à ce jour la loi 17 et la
Commission de la santé et de la sécurité du travail et cet
organisme paritaire n'ont pas fait diminuer les accidents de façon
mirobolante. C'est vrai, mais c'est parce que tout n'est pas en place. Le plus
important est à venir. M. Dufour l'a dit ce matin. Je suis bien heureux
que vous lui ayez posé la question, puisque, de la manière dont
c'est écrit là - il ne faut pas toujours se fier aux
écrits - cela pouvait vouloir dire qu'on remettait cela en cause, ce
n'est pas cela. Tous les trois, le P.-D.G., M. Dufour et moi, avons dit: On
trouve cela laborieux. Mais quelle est la formule pour remplacer ce travail
laborieux où la démocratie s'exerce et où les gens
représentent des gens ayant des intérêts différents,
parfois opposés? Comment fait-on pour remplacer cela? C'est
évidemment plus efficace avec une dictature. C'est un peu plus long et
un peu plus laborieux, mais je pense que c'est la mise en place; de là
l'importance de la loi 17. Ce n'est pas juste la réparation, c'est la
prévention, c'est la santé.
M. Fréchette: J'ai terminé, quant à moi, M.
le Président.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le ministre.
M. le député de Viau.
M. Cusano: Merci, M. le Président. Quelques remarques
préliminaires avant de passer à des questions. J'ai
été étonné des remarques préliminaires du
ministre ce matin, où il dit que c'était très normal de se
retrouver aujourd'hui à cette commission parlementaire. Il a même
dit que, du côté ministériel, on souhaitait une telle
chose. J'aimerais bien lui rappeler qu'il ne faut pas confondre la
réforme parlementaire à laquelle je souscris et à laquelle
mes collègues souscrivent et la demande de l'Opposition, faite depuis
au-delà d'un an, de convoquer la commission du travail pour examiner
l'administration et le fonctionnement de la CSST. Nous l'avons fait par
l'entremise de l'étude des crédits; ceci n'étant pas
suffisant, nous nous sommes servis de la période des questions pour
essayer de savoir ce qui se passait à l'intérieur de la CSST.
Ceci ne nous donnant pas des réponses suffisantes, nous avons même
fait une question avec débat et ce n'est qu'à la reprise de cette
session, après les vacances supplémentaires qu'on nous a
accordées, qu'on se retrouve finalement ici.
Avant de passer à des questions, j'aimerais faire un court
commentaire sur les quelques paroles prononcées par M. Laberge cet
avant-midi, alors qu'il comparait la CSST
à l'Assemblée nationale et qu'il laissait entendre que
cela irait peut-être plus vite ici, à l'Assemblée
nationale, s'il y avait seulement un parti politique. Cela ne serait pas
nécessairement mieux, mais peut-être plus vite. Ce qui me vient
à l'esprit, M. le Président, c'est que nous vivons ici, à
l'Assemblée nationale, ce qu'on appelle le "bulldozer". C'est le leader
du gouvernement qui, à la fin de la session, impose des motions. J'y
arrive, M. le Président, je veux faire une remarque avant.
Le Président (M. Blouin): Oui, je comprends, mais je vous
demanderais de vous en tenir au mandat de la commission et de vous entretenir
des sujets pertinents avec nos invités.
M. Cusano: Oui, M. le Président, c'est très
pertinent, je parlais du "bulldozer" de l'Assemblée nationale. Je me
demande si la CSST elle-même, son conseil d'administration, ne fait pas
face à un "bulldozer" au sein de ses réunions. Il est sûr -
je pense que tout le monde le comprend - que lorsque vous avez à une
table le côté patronal et le côté syndical on est
d'accord sur certaines choses, mais il y a certaines choses sur lesquelles on
est en désaccord.
J'aimerais poser une question à M. Dufour concernant une lettre
qu'il adressait, le 31 mars 1983, au président de la CSST, M.
Sauvé. Cette lettre présente des inquiétudes. C'est une
lettre de trois pages et je ne la lirai pas en entier, mais je vais en citer
quelques paragraphes. Cette lettre a pour objet le budget de la CSST, pour
1983. "M. le Président, nonobstant les résolutions du conseil
d'administration de février et de mars 1983 acceptant le budget de la
CSST pour l'exercice financier 1983, je vous saurais gré, ainsi que je
vous l'ai demandé verbalement le 17 mars, de remettre le budget 1983
à l'ordre du jour de la réunion d'avril pour révision et
discussion".
Je saute un paragraphe. Vous continuez: "Résumons les faits.
Après de multiples discussions concernant le budget 1983 lors des
réunions relatives à la tarification et plus
particulièrement en décembre 1982 et en janvier et février
1983, nous avons convenu, les 17 février et 17 mars, d'un budget de 827
000 000 $, représentant une hausse de 6% sur ce que la direction de la
CSST nous disait devoir être les dépenses réelles de la
CSST pour 1982. Il s'agissait alors des seuls chiffres disponibles que pouvait
nous donner la direction et dont nous pouvions nous servir pour les fins de
l'élaboration du budget 1983, les états financiers 1982
n'étant pas disponibles. Le budget 1983 prévoyait ainsi un
excédent de 14 000 000 $ - c'est selon les chiffres que vous aviez - des
revenus sur les dépenses même si, à maintes reprises, les
administrateurs ont interrogé l'estimation de ces chiffres."
M. le Président, j'en saute un peu. "Cependant, à peine ce
budget était-il approuvé définitivement qu'on nous
remettait, toujours ce 17 mars, les états financiers pour 1982 non
disponibles jusqu'à cette date. Et voilà où rien ne va
plus. Les administrateurs sont, cette fois, informés qu'à cause
d'une mauvaise estimation de la masse salariale" -j'en laisse passer quelque
peu - le déficit pour cette année même sera de plus de 57
000 000 $."
M. Dufour, si je comprends bien le contenu de la lettre, on vous a
présenté certains chiffres et on vous a demandé d'adopter
un budget. En toute bonne foi, je présume, les membres du conseil
d'administration ont regardé ces chiffres et vous avez adopté un
budget. Vous dites qu'un peu plus tard - vous me corrigerez si j'ai tort, mais
j'ai l'impression que c'était la même journée - on vous a
donné des chiffres qui démontraient un déficit.
Pouvez-vous donner des détails sur cette question?
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M.
Dufour.
M. Dufour: M. Cusano, M. le Président, nous allons
peut-être procéder en deux temps pour ce dossier. Au niveau du
conseil d'administration, compte tenu des dossiers, on est obligé de se
les diviser un peu. Le dossier finance, c'est M. René Bédard.
René pourra ajouter à ce que je vais dire.
Le budget de la direction pour l'année 1983 a été
déposé en décembre. Un budget des dépenses de
l'ordre d'à peu près 834 000 000 $, si je me souviens bien. Nous
avons pris en délibéré les propositions. Nous les avons
regardées au conseil d'administration du mois de janvier et nous avons
voulu en rester à des règles strictes d'augmentation. Nous avons
été sur la base des 6%, c'étaient les 6% et 5% qui
étaient dans le dossier à ce moment, ce qui a ramené le
budget à 827 000 000 $. Cela veut dire pour l'exercice 1983, une
possibilité d'un excédent de 14 000 000 $, les 14 000 000 $
auxquels vous faites référence.
Quand nous avons donné notre aval à ce budget,
c'était en comparant, comme administrateurs, avec ce qui s'était
passé en 1982. Or, en 1982, on prévoyait un déficit
d'à peu près 4 000 000 $ à 5 000 000 $. Nous avions, quand
même, la puce à l'oreille parce que, tout au cours de
l'année 1982, nous avions - parce qu'il faudrait revenir en
arrière et dire qu'on fait aussi un budget préliminaire au moment
de la tarification, qui est six mois avant, donc au mois de juillet 1982 -
toujours, mais vraiment, prévenu la direction de la CSST que son
évaluation de la masse salariale était mal faite, qu'elle avait
beaucoup trop estimé les
salaires pour l'année à venir. Comme les dépenses
sont ajustées en fonction des revenus, on disait: Vous allez vous
ramasser quelque part, cela n'a pas d'allure. On le sent dans le secteur
privé, la construction ne fonctionne pas, les mines ferment. Il y a un
problème. Mais il reste que nous n'avions pas d'autres données
que celles qui nous avaient été fournies, qui étaient d'un
budget 1982 déficitaire de 4 000 000 $, par rapport à un budget
1983, qui serait excédentaire de 14 000 000 $.
En bons administrateurs, nous avons accepté ce budget. Là,
il y a une dimension qu'il faut ajouter. C'est qu'on fonctionne dans une
entreprise paragouvernementale, où intervient ce à quoi nous ne
sommes pas habitués et qui s'appelle le Vérificateur
général. Dans l'entreprise privée, après que le
budget est accepté, l'assemblée générale des
actionnaires ratifie les états financiers, qui sont acceptés
généralement par des firmes de comptables agréés.
Ce n'est pas le cheminement à la CSST, parce que le Vérificateur
général doit, de par la loi, être le seul
vérificateur, même si nous ne sommes pas d'accord. Le
Vérificateur doit être le seul qui examine les chiffres de la
CSST.
Nous avons accepté le budget en début d'année parce
que nous ne voulions pas, non plus, que la CSST fonctionne sans budget. Il
faut, quand même, lui donner un budget. C'est ce cheminement qu'on a
suivi jusqu'au moment où, en acceptant la résolution du 17 mars
à laquelle vous faites référence, d'un budget
excédentaire de 14 000 000 $ à partir d'un déficit
escompté pour 1982 de 4 000 000 $, on nous a présenté le
rapport du Vérificateur général qui, lui, estimait le
déficit à 57 000 000 $. (15 h 30)
C'est bien évident qu'on a écrit au P.-D.G. en lui disant:
Compte tenu de cela, nous ne voulons plus rien savoir du budget qu'on a
approuvé, parce qu'on ne l'aurait pas approuvé si on avait su
qu'on avait un déficit de 57 000 000 $ et non pas un déficit de 4
000 000 $. Cela a donné lieu à tout ce que vous connaissez
sûrement, soit la création d'un comité du budget à
la CSST, le fait aussi qu'à la réunion suivante, cette fois, la
direction nous a présenté un budget déficitaire de 48 000
000 $. On a aussi un peu fait cela avec l'autre budget. C'est donc ce qui s'est
passé, en quelques mots, pour ne pas aller vraiment plus loin dans les
détails. C'est une acceptation de budget en l'absence de données,
ces données nous ayant été fournies trop tard après
l'acceptation du budget.
M. René Bédard, qui s'occupe du budget, pourrait ajouter
quelque chose à cela.
M. Bédard (René): Oui. Vous avez déjà
dit à peu près tout ce que j'aurais voulu dire, mais j'aimerais
parler d'une autre facette de ce qui s'est passé exactement. D'abord,
j'aimerais préciser que ce n'est pas le fait que la CSST ait
terminé son année avec un déficit d'environ 57 000 000 $
plutôt qu'un déficit de 4 000 000 $ ou 5 000 000 $ ou 6 000 000 $.
Il était difficile, pour presque tous les organismes de la province de
Québec, du Canada et du monde entier, d'essayer de budgétiser de
façon précise avec les difficultés financières que
tout le monde a connues.
Ce que j'ai mis en cause personnellement quant au budget de 1983 -je ne
veux pas mettre en cause l'avis des autres membres du conseil d'administration
-est que ce budget n'a pas été accepté. Il n'a pas
été adopté, du moins pas par moi. J'ai adopté un
budget qui était basé sur des chiffres que l'on nous fournissait,
soit les états financiers de 1982, dont on nous rappelait à
plusieurs reprises qu'ils étaient les plus précis possible et les
plus près de la vérité. À partir de cela, on a
accepté un budget d'augmentation d'environ 6% pour l'année 1983.
Mais, ce même jour où on nous disait que les états
financiers réels n'étaient pas disponibles, on nous
présente, après avoir adopté le budget, les états
financiers réels. C'est donc là qu'on a réalisé
qu'il ne s'agissait plus d'un déficit de 4 000 000 $ ou 5 000 000 $,
mais plutôt d'un déficit de 57 000 000 $ pour l'année
financière 1982.
Ce que je mets donc en cause, ce n'est pas le déficit, mais bien
la procédure. Je ne dis pas que cela a été cuisiné,
mais je pense qu'il s'est produit des événements ou des
façons de faire les choses que je n'ai jamais compris. Si on m'avait
présenté les vrais chiffres, les chiffres réels, je
n'aurais certainement pas réagi de la façon dont j'ai
réagi en adoptant le budget pour l'année 1983.
M. Cusano: Seulement une petite question. Lorsque vous vous
rencontrez, vous avez un ordre du jour déjà établi. On
présume que des deux côtés, soit du côté
syndical et du côté patronal - je devrais plutôt dire des
trois côtés - on doit soumettre des sujets à inclure dans
l'ordre du jour. Je présume que c'est la procédure. Qui
établit l'ordre du jour de la CSST et de son conseil
d'administration?
M. Dufour: C'est peut-être une question qui s'adresse au
président parce que c'est lui qui fait l'ordre du jour. Quand on arrive
en assemblée, avec le consentement des parties, on peut modifier l'ordre
du jour et faire une priorité des dossiers qu'on décide de
débattre.
Le Président (M. Champagne, Mille-Îles): M.
Sauvé.
M. Sauvé: Je pense que M. Dufour a bien explicité
ce qui se passe. Comme permanence, nous préparons l'ordre du jour et
nous l'envoyons aux parties. Normalement, les réunions ont lieu le
troisième jeudi du mois. Selon ce qui est convenu, les gens doivent
recevoir leurs dossiers au plus tard le vendredi de la semaine
précédente. Si, au comité administratif, on a voulu
ajouter des sujets, on le fait pour la réunion du conseil. Au conseil,
les gens peuvent aussi ajouter des sujets et dire qu'ils veulent avoir tel
sujet en priorité. C'est ainsi que cela fonctionne.
Maintenant je pense que j'aurais quelques mots à dire sur ce
qu'on vient d'expliquer au sujet du déficit. Ce qui est arrivé
est très clair et très simple. Je l'ai déjà
expliqué lors de l'étude des crédits. Nous avions
surestimé la masse salariale. Je pense que tout le monde peut faire
cette erreur, si erreur il y avait. Je pense que personne n'avait prévu
que la crise serait aussi sévère. Les états financiers
sont faits par le Vérificateur général et je dirais qu'il
n'y a aucune entreprise privée qui a une vérification comme cela.
Il y a dix vérificateurs qui passent six mois à la commission et
ces gens remettent leur rapport, parce qu'il faut que l'année soit
terminée. Vous savez que nous marchons sur l'année civile et non
sur l'année fiscale. Ces gens-là exigent de nous que nous
donnions tous les états financiers du 31 décembre
précédent le 15 janvier au plus tard et là, ils
complètent leur rapport qu'ils nous remettent vers le 15 ou le 20
février parce que nous avons une exigence très forte dans la loi
qui veut que le rapport annuel soit déposé avant le 31 mars. Ceci
nous paraît une chose à corriger pour l'avenir parce que c'est
trop serré et nous sommes probablement un des rares organismes qui
essaient de le produire dans les délais. Ces états financiers,
vers la fin, sont discutés avec les gens des finances chez nous. Par
exemple, le Vérificateur général disait cette
année-là: Les provisions pour mauvaises créances avec
toute la situation économique, etc., qui se produit, nous voudrions que
ce soit - si mon souvenir est bon 14 000 000 $. Nous disions que c'était
trop et c'est ce qui fait qu'on n'a pu avoir le résultat des
états financiers que pour la séance. C'était tout
simplement cela. Je ne voudrais pas que quelqu'un ait l'impression qu'il y a eu
du tripotage là-dedans. C'était très clair et la
surestimation de la masse salariale n'était que la cause. Les
dépenses étaient moindres que les années
précédentes.
Le Président (M. Champagne, Mille-
Îles): Une question sur le même sujet, M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Une question additionnelle, sans enlever le droit
de parole de mon collègue de Viau et de mes autres collègues, en
assurant à tous les intervenants qu'on prendra, évidemment, tout
le temps qui sera nécessaire pour les questions. Une question à
M. Dufour: Le budget de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, ce sont plusieurs centaines de millions de
dollars. Je dois vous exprimer ma surprise de la réponse que vous avez
donnée tout à l'heure, ainsi que votre collègue à
la question formulée par mon collègue. Le budget de la commission
doit être approuvé par le conseil d'administration après,
je présume, une prise de connaissance du dossier, une explication du
prochain budget ou le pourquoi des modifications à tel ou tel poste -
des augmentations ou des diminutions - un échange qui, j'en suis
persuadé, doit convier toutes les parties et tous les membres du conseil
sur le bien-fondé de telle ou telle autre modification. C'est, je
présume, une discussion normale qui entoure l'adoption d'un budget.
Devons-nous comprendre de vos propos que le budget pour l'année en cours
aurait été adopté en s'appuyant sur l'énoncé
budgétaire et le budget de 1982 avec un énoncé du
président-directeur général dans le sens que le budget
serait augmenté d'un pourcentage de X%, que ce serait globalement cela
et que le budget de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail qui est de plusieurs centaines de millions -
je le répète - aurait été adopté,
premièrement, sans qu'un véritable débat soit tenu sur les
véritables chiffres et propositions budgétaires?
Deuxièmement, devons-nous comprendre, de la réponse de votre
collègue qui représente la partie patronale au conseil, qu'une
fois que le budget aurait été adopté dans un délai
assez bref, que j'aimerais voir préciser, les chiffres qui vous
manquaient vous auraient été fournis?
M. Dufour: Quand vous parlez de débat de budget, comptez
sur nous.
M. Laberge: J'en suis témoin.
M. Dufour: Non. Ce que j'ai exprimé, je pense, en termes
de séquences, c'est qu'on se retrouve au mois de mars où,
à ce moment-là, il y a sur la table le budget qu'on accepte, qui
est de 827 000 000 $. On vient d'accepter la résolution, parce que
l'acceptation du budget comme telle avait été faite en
février; on ferme le dossier. L'ordre du jour amendé, dont M.
Cusano parlait tout à l'heure, fait en sorte qu'ils ont les chiffres sur
les états financiers. Là on fait entrer les gens de la
comptabilité pour parler des chiffres nouveaux quant à nous, mais
on vient d'adopter l'autre résolution. Il est bien évident qu'on
a reçu ces documents purement et simplement disant que, à la
lumière de ces nouvelles données, on referait le
débat. Il a tellement été fait, M. Pagé, que, s'il
n'avait pas été fait, vous n'auriez pas en main cette lettre,
dont parlait M. Cusano tout à l'heure, qui demande - si vous regardez
les conclusions - qu'un nouveau budget qui tienne compte de la situation
réelle, données connues etc., soit déposé lors de
la réunion d'avril et que les nouveaux engagements, consécutifs
à notre décision, soient suspendus. On avait accepté des
choses, mais, avec un déficit de 47 000 000 $, on ne fait pas les
mêmes dépenses qu'avec un surplus de 14 000 000 $. Alors, on a
bloqué cela, ce qui a amené la permanence à nous
présenter un budget révisé qui, cette fois, est de l'ordre
de 48 000 000 $. Le débat s'est vraiment fait. Cela nous a amenés
à toute une série de choses qui, tout en étant une
expérience négative qu'on a vécue, ont eu les effets
positifs suivants: création d'un comité du budget, justement pour
regarder cela programme par programme, plus en profondeur qu'on ne peut le
faire à l'occasion de la discussion d'un budget.
On a même été aussi loin, M. le député
de Portneuf, que de refuser maintenant de signer les états financiers du
Vérificateur général, alors que la loi nous impose
l'inverse; on ne veut rien savoir. On ne se fera pas embarquer deux fois dans
une procédure gouvernementale. On a l'habitude de fonctionner selon des
schémas d'entreprise privée; on va essayer de fonctionner
là-dedans et d'amener la commission à fonctionner
là-dedans.
Au fur et à mesure la CSST s'était engagée à
nous déposer des budgets amendés de façon à
réduire toujours son déficit. Comme on était parti de 14
000 000 $ de surplus et qu'on s'était ramassé à 48 000 000
$ de déficit, alors on a drôlement surveillé les
dépenses. Ceci a amené, par exemple, les fameuses sessions sur la
physiothérapie dont on parlait ce matin. Dans notre comité, nous
avions trouvé qu'on pouvait épargner probablement 50 000 000 $
sur la physiothérapie. C'est le cheminement global de la discussion d'un
budget, si vous me permettez d'ajouter, dans le paritarisme.
M. Sauvé: J'ajouterais, M. le Président, une chose
fort importante. On fait deux fois la discussion du budget. Je vais donner
l'exemple: jeudi prochain, le 22 décembre, le conseil siège par
exception le quatrième jeudi puisque nous sommes ici demain. Le budget a
déjà été discuté une première fois
à la séance du mois de juin parce que la commission, depuis 1979,
annonce le 1er juillet à tous les employeurs leur taux pour
l'année suivante. Pour pouvoir faire le taux, il faut donc faire les
coûts des accidents, il faut estimer la masse salariale, il faut avoir un
budget d'administration, etc. À la séance du mois de juin, on
fait une discussion du budget. La discussion se finalise au mois de
décembre. Nous avons encore plus de temps pour voir si les estimations
sont justes. Nous avons énormément de contrôles sur nos
budgets d'administration. Quant aux budgets des coûts d'accidents, il y a
assez d'expérience actuarielle pour pouvoir faire des pourcentages
valables. Le gros point de suspension, c'est toujours la masse salariale. Nous
avons fait un budget pour les taux de 1984 en juin 1983. Nous allons
déposer un budget en décembre et notre expérience des
années passées nous dit qu'il sera probablement adopté en
janvier ou en février. Mais tout le monde verra - parce que personne ne
l'a reçu encore, nous avons terminé notre budget la semaine
dernière -que les cotisations prévues pour 1984 seront moindres
que celles qu'on avait prévues en juin 1983. Le budget est
équilibré en conséquence et c'est tout à fait
normal. Vous voyez qu'il y a deux grosses discussions sur le budget. Ce n'est
pas fait à l'improviste et je pense que la partie patronale y voit
très bien et sans problème. (15 h 45)
Le Président (M. Blouin): M. Dufour.
M. Dufour: Oui, M. le Président, pour répondre
encore de façon plus précise à M. Pagé, tout ce
cheminement dont M. Cusano parle, ma lettre, l'éventualité
même d'un déficit de 80 000 000 $, tout cela était devenu
sérieux pour nous, parce que, si on avait continué avec la
même estimation de la masse salariale, on aurait été
drôlement en déficit. Or, j'ai le document révisé
ici des 48 000 000 $ de déficit qui a été
déposé dès le mois de mars avec les précisions.
M. Paquin et M. Bédard veulent ajouter quelques mots à
cela.
M. Paquin (Sarto): C'est peut-être une réponse
à la deuxième partie de la question de M. Pagé, qui nous
demande de nous situer un peu dans le temps. En résumé, cela se
passe de la façon suivante: cela nous prend une résolution pour
adopter le budget de 1983. On dit: D'accord, on accepte le budget de 1983,
mais, en bons administrateurs, on dit: Ne pourrait-on pas avoir les chiffres
réels de 1982? À cela, on nous dit: On ne les a pas maintenant.
On va les avoir bientôt. Voici la question que l'on pose: Peut-on vous
demander si ce que l'on prévoyait pour 1982, à savoir un
déficit d'à peu près 4 000 000 $ ou 5 000 000 $, va se
réaliser? On nous dit: Oui. On dit: D'accord, on accepte la
résolution du budget de 1983. Le temps pris pour vous répondre,
c'est le temps que cela a pris pour que quelqu'un entre pour nous dire: Non, ce
n'est plus 4 000 000 $, c'est environ
50 000 000 $ de déficit qu'on a. C'est là qu'on a dit: La
résolution qu'on vient d'adopter pour accepter le budget de 1983, vous
allez comprendre qu'en fonction des chiffres réels, maintenant, on va en
discuter à nouveau un peu. Dans le temps, c'est à peu près
ce qui s'est passé.
M. Bédard (René): Je voudrais simplement ajouter
qu'on va vivre exactement la même situation en 1984. M. Sauvé
vient de nous dire qu'il va présenter au conseil d'administration les
prévisions budgétaires de l'année 1984, mais les
états financiers de l'année 1983 ne seront pas disponibles avant
la fin de février ou le début de mars. On est pris dans une
espèce de carcan où on doit adopter un budget pour une
année en se basant sur des chiffres qui ne sont pas des chiffres
réels.
M. Pagé: Non seulement je présume, mais je suis
assuré que les représentants des travailleurs étaient dans
la même position que vous. C'est donc dire que, si vous n'aviez pas
été vigilants en exigeant les données exactes des
résultats de l'exercice 1982, la direction aurait vu son budget
adopté tel quel. Je dois à ce moment-ci exprimer ma surprise que,
dans un laps de temps aussi bref...
M. Dufour: Non, M. Pagé, on l'aurait vu le mois
suivant.
M. Pagé: Oui, mais, quand même, il faut se
surprendre que les données de 1982 soient arrivées aussi
rapidement. On aura l'occasion d'y revenir probablement demain, mais
j'apprécie la réponse à nos questions, M, Dufour.
Le Président (M. Blouin): Oui, monsieur.
M. Laberge: Vous n'avez pas une copie de la lettre que j'ai
envoyée au président là-dessus, M. Pagé?
M. Pagé: Non, vous ne me l'avez pas fait parvenir, M.
Laberge.
M. Laberge: C'est probablement parce que je l'ai envoyée
seulement au président.
M. Pagé: Vous auriez dû me la faire parvenir. Nos
relations pourraient peut-être être plus étroites. Il n'en
tient qu'à vous.
M. Laberge: Nous sommes là lors de la discussion des
budgets. Bien sûr, on n'a pas exactement le même souci que le
côté patronal, mais nous ne sommes pas des irresponsables, non
plus. Je sais que vous n'avez pas voulu dire cela.
M. Pagé: Non, loin de nous de telles pensées, M.
Laberge.
M. Laberge: Je suis heureux de vous l'entendre dire.
M. Pagé: On l'apprécie.
M. Laberge: Nous avons cru, nous aussi, que, dans l'estimation de
la masse salariale, on avait été peut-être un peu
généreux, mais l'erreur n'est pas pire que celles qui se font
dans les finances du Québec, celles d'Ottawa et celles de partout
ailleurs, à ce que j'ai pu voir. Sauf qu'il fallait regarder cela de
plus près. Je pense que vous n'avez peut-être pas tout à
fait bien saisi le problème. C'est que, par le truchement du
Vérificateur de la province, les chiffres réels de l'année
précédente nous arrivent deux ou trois mois après qu'on
est obligé de voter le budget qui, lui, est basé sur un autre
budget, mais qui n'est pas encore une réalisation. Quand le P.-D.G. vous
disait tantôt qu'il faudrait peut-être regarder cela, la soumission
du rapport de la CSST, c'est quelque chose qui pourrait possiblement nous
éviter des situations un peu embarrassantes. Basée sur le budget
1982, la CSST, la permanence nous arrive avec un budget 1983, une augmentation
de 6% à laquelle nous n'avons pas souscrit découlant du
fédéral et tout. Nous avons protesté
véhémentement contre les 6%, mais il reste que c'était
basé sur les chiffres de 1982 tels que nous les connaissions dans le
temps.
Après que tout est fait, on arrive avec des chiffres
différents pour 1982 et, comme M. Bédard vient de le dire, la
même chose va probablement se reproduire en 1984. C'est peut-être
quelque chose que vous pourriez regarder de plus près pour nous
permettre de nous baser sur quelque chose de plus réel qu'un budget
basé sur un budget.
M. Sauvé: À titre d'exemple, le rapport des
états financiers du Vérificateur général pour
l'exercice terminé le 31 décembre 1982 est signé par M.
Châtelain, le Vérificateur général, le 18 mars
1983.
M. Pagé: L'ensemble de cette question fait
référence à tout l'aspect de la vérification
interne de la commission et des services de vérification. À cet
égard, mon collègue a des questions.
M. Cusano: Je m'étonne de deux choses. Je reviens sur la
question. Si je comprends bien, on vous a fait adopter un budget et, tout de
suite après, vous avez pris connaissance des chiffres réels.
C'est bien cela? Bon. Est-ce que ces chiffres réels sont arrivés
du ciel ou est-ce que le président-directeur général a eu
l'occasion, avant qu'il les dépose, d'en prendre connaissance?
M. Dufour: Je vais répéter ce que j'ai dit
tantôt. Le budget a été approuvé en février.
D'accord? Sauf qu'il y a une espèce de règle d'or, c'est que,
tant et aussi longtemps qu'on n'a pas vu le procès-verbal et le contenu
d'une résolution, nous ne sanctionnons pas. Le procès-verbal, la
résolution sont arrivés en mars. Pour nous, ce qui fait foi d'une
décision, c'est la résolution, quand tu acceptes ton
procès-verbal. Cela se situe en mars. C'est le même jour que nous
arrivent les états financiers.
M. Sauvé: L'an prochain, ce sera pareil.
M. Laberge: Je dois vous dire que la partie syndicale a
suggéré à la partie patronale qu'on grève. À
notre grande surprise, ils n'ont pas accepté.
M. Dufour: Je ne sais pas si cela termine ou à peu
près sur cette question, mais, pour nous, la partie patronale, il y a un
problème majeur qui est soulevé: toute la question de la
vérification interne et de l'information du conseil d'administration. Je
dois dire à cette commission que nous avons soumis le problème
à une firme de conseillers en gestion auprès de la CSST à
deux occasions cette année pour se donner ces outils sans lesquels on ne
peut pas fonctionner, en tout cas, à l'intérieur desquels on se
sent très mal à l'aise pour fonctionner. On a demandé un
comité de vérification interne auprès d'un conseil
d'administration comme vous en retrouvez dans l'entreprise privée.
Même dans certains organismes publics comme Hydro-Québec, il y a
un comité de vérification interne auprès du conseil
d'administration.
Le Vérificateur général, à ce jour, nous a
toujours répondu quasiment de nous mêler de nos affaires. Cela
nous fatigue un peu et c'est un débat qu'on va vraiment continuer
à faire comme partie patronale. Qu'on le veuille ou qu'on le veuille
pas, on pense que souvent ce ne sont que des cotisations patronales. On
voudrait avoir plus d'information pour éviter le genre de
problème que vous soulevez. Si les ministériels et les autres
députés peuvent nous aider en proposant un petit amendement
nécessaire à la loi, on aura fait oeuvre très utile.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Dufour. M. le
député de Viau.
M. Cusano: Sur cette question de vérification interne, il
doit certainement y avoir, dans tous les départements, une espèce
de compte rendu soumis régulièrement. Est-ce que cela a
été fait, M. le président?
M. Sauvé: Ce que nous faisons, nous avons un service de
vérification interne qui voit tous les services et toutes les directions
à intervalles réguliers, c'est-à-dire que notre service de
vérification interne, sur la base de quatre ans, voit tous les services.
Nous recevons aux deux mois un rapport des états financiers selon
l'estimation faite deux mois avant. Vous savez comment la comptabilité
fonctionne; nous avons des indications, mais jamais de certitude. Cette
année-là, il y avait beaucoup de problèmes. Vous savez,
d'ailleurs, que la cotisation ne se termine qu'à la toute fin de
l'année. Les employeurs ont jusqu'au 31 octobre pour réviser leur
masse salariale de l'année en cours. Vous savez que l'expérience
passée démontre qu'ils sous-estiment leur masse salariale
d'environ 8%. Les chiffres arrivent à la toute dernière minute et
c'est comme cela qu'on a parfois des surprises.
M. Cusano: M. le président, est-ce que vous avez, en
termes de procédure, des rapports trimestriels? Si oui, sont-ils soumis
au conseil d'administration?
M. Sauvé: Sauf erreur - mes collègues me
corrigeront - quand on a des rapports -on nous l'a, d'ailleurs, demandé
à la suite du dernier budget 1983 - nous soumettons les états
financiers. Au mois de juin, nous avons soumis les prévisions. Il y en a
eu en mars; il y en a eu en juin. Nous essayons au conseil d'administration -
il s'agit de livres ouverts, puisque nous sommes une entreprise publique - que
tout soit donné pour que les gens puissent prendre les décisions
en toute connaissance de cause. Vous savez que, dans la Loi sur la santé
et la sécurité du travail, il y a deux grands principes: il y a
l'élimination à la source, mais il y en a un autre qui est fort
important, la prise en charge par les parties.
Pour qu'il y est une prise en charge par les parties, je pense qu'il
faut qu'elles soient totalement informées. Nous essayons de donner tout
ce que nous pouvons à tout notre monde au conseil d'administration.
D'ailleurs, je les comprends, pendant un certain temps, on nous a
reproché de les inonder de documents.
M. Laberge: Je ne vois pas pourquoi vous dites "pendant un
certain temps".
M. Sauvé: II y a beaucoup de documents. Je pense qu'il
faut qu'ils aient tout en main pour pouvoir en discuter et c'est comme cela
qu'on forme des comités ad hoc, un comité spécial sur le
budget. On voudrait former un comité de vérification interne avec
des membres du conseil. Le Vérificateur général semble
nous dire qu'on joue dans ses plates-bandes. Une des solutions est probablement
de changer la date du rapport annuel ou de demander que
nous soyons comme 18 des 58 organismes existants. Je vous le cite de
mémoire, je pourrais vous donner le chiffre exact demain. Je pense qu'il
y a une cinquantaine d'organismes où le Vérificateur
général, selon la loi, doit faire la vérification
générale et nous sommes de ceux-là. Il y a 18 organismes
où on peut faire faire cette vérification par des comptables
privés. L'autre solution, c'est de changer pour que ce soit comme cela.
C'est dans ce sens qu'on cherche des solutions. Je pense qu'on va y arriver.
(16 heures)
M. Dufour: M. le Président, juste un bref commentaire.
J'aimerais dire que c'est insuffisant, l'information que nous avons. La partie
patronale en réclame. C'est vrai qu'il y a beaucoup de papiers, mais
nous commençons à nous habituer. Ceux qui regardent les
états financiers, nous allons les accepter en tout temps.
Lorsqu'on parle de la CCST, il faut aussi un peu parler de l'IRSST
(l'Institut de recherche en santé et sécurité au travail),
parce que nous sommes aussi le conseil d'administration de cet organisme. C'est
nous qui acceptons les budgets de cet organisme. Je dois vous dire que
là nous avons tout structuré sur la base de l'entreprise
privée. Ce sont des vérificateurs externes; on peut même
nommer la firme. L'institut est enregistré en vertu de la
troisième partie de la Loi sur les compagnies. On vit de façon
très différente des choses à l'IRSST et des choses
à la CSST et on voudrait se donner le modèle IRSST quand on parle
de la Commission de la santé et de la sécurité du travail.
M. le président Sauvé, je pense que jamais vous ne nous inonderez
assez de documents financiers.
Le Président (M. Blouin): Très bien. Cela va, M. le
député de Viau? M. le député de Prévost.
M. Dean: M. le Président, la Loi sur la santé et la
sécurité du travail a été adoptée en 1978,
si je ne me trompe pas, à la suite d'une quinzaine d'années de
revendications...
Une voix: Le 20 décembre 1979.
M. Dean: En 1979... de la part des centrales syndicales au nom
des travailleurs et des travailleuses du Québec et à la suite de
quelques années de débats, d'abord, autour d'un livre blanc et,
finalement, autour du projet de loi 17 issu de ce livre blanc. Cette loi a
créé la CSST dans le but de créer un organisme au
Québec pour chapeauter tout ce qui regarde la santé et la
sécurité des travailleurs quels que soient leurs secteurs
industriels, quelles que soient leurs situations. Deuxièmement,
fondée sur le principe de l'implication, à tous les paliers de la
loi, des parties patronale et syndicale dans l'élimination des dangers,
cette commission avait comme fonction, d'abord, de continuer à appliquer
la Loi sur les accidents du travail, de regrouper en son sein des services
d'inspection éparpillés à cette époque dans au
moins cinq ministères qui se pilaient souvent sur les pieds, ce qui
créait une confusion assez épouvantable dans le respect des
conditions de travail concernant la santé et la sécurité
des travailleurs et des travailleuses.
Ce qui semblait être la ligne de force de ce projet de loi
c'était la prévention des accidents, le tout groupé autour
d'un objectif principal qui se trouve à l'article 2 de la loi: "La
présente loi a pour objet l'élimination à la source
même des dangers pour la santé, la sécurité et
l'intégrité physique des travailleurs. Elle établit les
mécanismes de participation des travailleurs et de leurs associations,
ainsi que des employeurs et de leurs associations à la
réalisation de cet objet".
Mes questions vont surtout porter sur la réussite ou non ou la
réussite partielle de cet objectif de l'article 2 de la loi. C'est
sûr que cet objectif de fusion de services d'inspection, de regroupement
de services déjà impressionnants du côté de
l'ancienne Commission des accidents de travail, c'était tout un
défi sur le plan administratif. Cela a donné qu'au moins on peut
aujourd'hui avec une certaine justification dire que l'impression qu'on a,
c'est que, depuis deux ans et demi ou trois ans que la loi est en vigueur et
que la CSST existe, on a peut-être difficilement résisté
aux dangers de "fonctionnarisation" de tout ce processus. On parle souvent de
grilles, de politiques à outrance et on donne l'impression qu'on a
très bien fait le côté fonctionnaire, mais on se pose des
questions sur les réalisations dans les faits quant à
l'implication des parties et à l'atteinte de l'objectif de l'article 2
de la loi.
Mes questions sont à quatre volets. Je les pose sans
discrimination aucune tant à l'égard de M. Dufour, de M. Paquin
et de leurs collègues qu'à l'égard de M. Laberge, M.
Giasson et M. Gingras, du côté des travailleurs.
D'abord, comment se fait-il que les règlements relatifs aux
comités de santé et de sécurité, et aux
représentants à la prévention aient pris tant de temps
à venir en rapport à des innovations technocratiques et
"fonctionnariques", si vous me permettez d'inventer un mot?
Deuxièmement, malgré que ces comités, comme tels,
viennent tout juste d'entrer dans nos moeurs par l'adoption du
règlement, est-ce que cet objectif de la loi a pu influencer les
employeurs et les syndicats dans le sens de créer, par
négociation collective, des comités conjoints de santé en
plus grand
nombre qu'auparavant et peut-être avec plus de pouvoirs
qu'auparavant dans le but, justement d'éliminer à la source les
dangers pour la santé, la sécurité et
l'intégrité physique des travailleurs? Donc, quel est
l'état de cette réforme dans les usines, dans les mines, dans les
ateliers, dans les entrepôts et dans les bureaux du Québec? Ces
deux questions concernent cet objectif de la loi.
Mes troisième et quatrième questions sont plutôt
dans le sens du paritarisme, un autre beau mot qu'on a inventé. Quel est
l'état du paritarisme? Quelle est l'évaluation, même
préliminaire, de cette approche de l'implication des partenaires
patronaux et syndicaux dans la protection de la santé, de la
sécurité et de l'intégrité physique des
travailleurs?
Finalement, autour de cette commission qui a un objectif assez
précis, on constate qu'il y a au moins deux ou trois associations
patronales autres que les représentants patronaux au conseil
d'administration de la CSST et au moins deux personnes identifées au
syndicalisme qui sont venues, avec d'autres chapeaux, mettre en doute ou en
valeur, par leurs interventions, la validité du paritarisme et de
l'efficacité des syndicats dans le processus de la Loi sur la
santé et de la sécurité du travail. Est-ce que les deux
parties au conseil d'administration sont, après deux ans
d'expérience, satisfaites des canaux de communication qui existent dans
leurs propres milieux, patronaux et syndicaux, pour véhiculer au conseil
d'administration de la CSST les problèmes vécus, les
difficultés et les critiques à l'égard de la loi?
Le Président (M. Blouin): Succinctement.
M. Laberge: Vous avez remarqué, jusqu'à maintenant,
que c'était toujours M. Dufour qui prenait le micro et, par habitude, je
le lui laissais.
M. Dufour: On va le laisser au président.
M. Laberge: Bon, très bien.
M. Sauvé: Vous posez la question, relativement au
règlement sur la santé et la sécurité du travail:
Comment se fait-il que cela ait pris tant de temps? Prenons les étapes
suivantes: la loi a été adoptée le 20 décembre
1979. La commission a été nommée autour du 13 ou du 14
mars 1980; elle a tenu sa première séance le 31 mars 1980,
c'était assez rapide. Il fallait, évidemment, préparer un
certain nombre de projets, comme un règlement de régie interne,
les choix de priorités et des documents de base pour pouvoir
fonctionner. Tous les règlements de base, les gros règlements
comme ceux des comités de santé et de sécurité, des
services de santé, des représentants à la
prévention et quelques autres, ont été
déposés au conseil d'administration avant décembre 1980.
Celui qui touche les comités de santé et de
sécurité a été déposé le 25 septembre
1980.
On a, alors, formé un comité qui était
composé, du côté patronal, de Sarto Paquin, Thomas Lavoie
et Pierre Duguay; du côté syndical, de Louis Larberge,
Clément Godbout, Étienne Giasson et Claude Morisseau. Dans ce
temps-là, c'était probablement M. Émile Boudreau puisque
M. Clément Godbout est venu remplacer... Je ne pourrais pas dire pour la
FTQ, mais c'est un des nouveaux membres, parce qu'à la FTQ il y a deux
personnes qui ont été remplacées, Émile Boudreau et
Roger Laramée, les deux nouveaux membres étant Claude Morisseau
et Clément Godbout.
Ces gens ont travaillé sur un projet de règlement qui a
été, si mon souvenir est bon, adopté pour
prépublication le 18 décembre 1980. Il a été
publié à la Gazette officielle. Pour vous faire une longue
histoire courte et vous empêcher d'avoir toutes les dates, après
publication à la Gazette officielle à l'automne 1981, les gens
disent: II faudrait qu'on annule la prépublication; on a
réétudié toute la question et on s'aperçoit que ce
n'est pas un bon projet de règlement.
Finalement, en février 1982, j'ai été obligé
de voter pour qu'un nouveau règlement puisse être
prépublié parce que la discussion avait été faite
longuement, même à des conseils spéciaux de deux jours en
novembre et en janvier. Finalement, je pense qu'il a été
prépublié au cours du mois de mars - je voudrais vérifier
les dates - 1982. Il est revenu au conseil et, finalement, nous l'avons
adopté en décembre 1982 sur division, encore une fois. J'ai
voté pour l'adoption du règlement qui avait changé de
façon assez importante, je pense, entre la première version et la
version finale qui garantissait toujours la majorité des membres d'un
comité de santé et sécurité aux gens
syndiqués. C'est là qu'il fait la division entre la partie
patronale et la partie syndicale. Il est venu au gouvernement pour adoption. Il
a, finalement, été publié le 12 octobre 1983 et, comme la
coutume le veut, il entrait en vigueur dix jours après sa publication.
Il est donc en vigueur depuis le 22 octobre.
C'est un règlement d'importance qui a été
négocié, renégocié, comme vous pouvez le voir,
repris par les parties. C'est la seule fois, si mon souvenir est bon,
où, pour un règlement qui avait été
prépublié, c'est le conseil qui a demandé qu'on annule la
prépublication et qu'on recommence. C'est notre cas d'exception. C'est
là l'histoire des comités de santé et de
sécurité. Je ne sais pas si mes collègues veulent ajouter
sur
celui-là?
Le Président (M. Blouin): Est-ce qu'il y a des
commentaires. Cela va, la version?
M. Laberge: Oui, probablement, M. le Président.
Le Président (M. Blouin): Oui, M. Laberge.
M. Laberge: Quand nous avons été nommés au
conseil d'administration, première réunion en mars 1980 - je suis
bien placé pour m'en souvenir - nous avons été
inondés de paperasse. Il faut vous dire que la CAT, la Commission des
accidents du travail, était quand même là depuis de
nombreuses années et la CSST, toute nouvelle, nous arrivait tout de
même avec un tas de règlements que la Commission des accidents du
travail s'était déjà donnés et là il fallait
soit réviser ces règlements, soit les renouveler, les adopter,
etc. Nous avons été inondés par des tas de paperasse et je
n'exagère absolument pas. (16 h 15)
Arrive ce règlement ou ce projet de règlement sur les
comités de santé et de sécurité. Il est vrai qu'il
y avait eu un premier projet d'adopté, soumis au gouvernement pour
approbation. On voulait faire tellement vite, en tout cas de notre
côté -je ne parlerai pas pour la partie patronale -que les
consultations étaient loin d'être terminées. Alors, les
consultations continuant, nous avons adopté une position et nous avons
prévenu la CSST, la partie patronale, que nous ne nous voulions plus que
le règlement, tel qu'il avait été proposé au
gouvernement, soit adopté. Nous avons fait des démarches, M.
Dufour vous l'a dit ce matin. Même si nous siégeons au conseil
d'administration, en tant qu'organisme, nous nous gardons l'entière
liberté de faire les représentations que nous jugeons
nécessaires après en avoir informé le conseil
d'administration. C'est ce que nous avons fait. Nous avons fait des
démarches auprès du gouvernement et, finalement, le projet de
règlement a été laissé sur les tablettes durant
plusieurs mois. Pendant ce temps-là, les discussions ont repris à
la Commission de la santé et de la sécurité. Nous avons
vraiment fait tous les efforts pour essayer de négocier - et le mot est
juste, je crois - un nouveau règlement.
Nous sommes venus à un cheveu près, je pense, de nous
entendre, mais, finalement, et cela revient un peu à la question du
leader de l'Opposition sur ce comité: Est-ce qu'il y a un bulldozer
à la CSST? Oui, de temps à autre, le P.-D.G. agit un peu comme
bulldozer, bulldozer dans le bon sens du terme. On peut se servir d'un
bulldozer pour détruire, mais on se sert plus souvent d'un bulldozer
pour construire. Je suis bien à l'aise pour en parler. Il fut un temps
où les opérateurs de bulldozers étaient dans le conseil;
maintenant, la majorité étant chez nous, nous sommes heureux d'en
parler. Il reste que le P.-D.G. a été obligé de prendre
position pour trancher ce projet de règlement qui est à la base
même de l'application de la loi 17.
Quant à la question que me posait le député de
Prévost sur les deux personnes qui sont venues hier et qui ont fait des
interventions, je vais me limiter à l'une des deux personnes qui est
membre d'un syndicat affilié à la FTQ. Il n'était
même pas délégué au congrès; sa section
locale 1123 l'était. Encore une fois, je le répète que pas
un seul délégué n'a remis en question...
M. Chartrand (Michel): Parce qu'il n'y avait aucune
résolution...
Le Président (M. Blouin): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre!
M. Laberge: Je ne parlais pas de la grande gueule qui n'est pas
membre chez nous.
Le Président (M. Blouin): S'il vous plaît, s'il vous
plaît!
M. Chartrand: Dis toute la vérité, Laberge...
Le Président (M. Blouin): S'il vous plaît, s'il vous
plaît!
M. Laberge: Je ne parlais pas de la grande gueule, M. le
Président.
Le Président (M. Blouin): Je vais suspendre les travaux
pour quelques minutes.
M. Chartrand: Unanimité sur une question que vous n'avez
pas soulevée! Dis toute la vérité, Laberge, ne conte pas
de mensonges et ne dénigre pas Pétel, qui est le meilleur gars de
la FTQ pour les accidentés du travail, à part Émile
Boudreau, que tu as traité avec un coup de pied de l'âne.
M. Laberge: Alors, M. le Président, avant que la grande
gueule se fasse entendre...
M. Chartrand: Qu'il ne me fasse pas chier, lui. Menteur!
Le Président (M. Blouin): Nos travaux sont suspendus.
M. Chartrand: Tu es un maudit menteur, Louis Laberge...
M. Laberge: Tu as toujours été fou... M.
Chartrand: Cela n'a pas été discuté
au congrès, parce que vous n'avez pas amené les
commissions, parce que tu n'as pas pris les résolutions. Tu as juste
parlé de la loi 42; tu n'as même pas parlé de la commission
présente. C'est une honte pour un mouvement syndical.
M. Laberge: Heureusement...
M. Chartrand: À part ça, tu accuses les gars qui
s'occupent des accidentés.
M. Laberge: Heureusement...
M. Chartrand: Maintenant que tu es membre, tu dis: Je vais
corriger mes affaires et, après cela...
M. Laberge: Heureusement que tu n'es pas chez nous...
M. Chartrand: Bon, très bien. Je vais me taire et je vais
m'asseoir.
Une voix: Monsieur, c'est le président de la
commission...
M. Laberge: Alors, M. le Président, si vous le
permettez...
M. Chartrand: Je me rassois et je ne parle pas, M. le
Président.
M. Laberge: ...je ne crois pas avoir dénigré qui
que ce soit...
Une voix: Suspension.
M. Chartrand: ...Laberge, il est déjà venu avec des
"bouncers" ici pour sortir toute la commission. Laberge a déjà
fait cela avec des hommes de main, lui. Il a déjà sorti toute la
commission, Laberge, et les députés n'ont rien dit.
(Suspension de la séance à 16 h 19).
(Reprise de la séance à 16 h 23).
Le Président (M. Blouin): Le mandat de cette commission
est d'examiner l'administration et le fonctionnement de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail. Jusqu'à
maintenant, nous avons permis à tous les organismes invités de
s'exprimer librement et, dans beaucoup de cas, aussi longtemps qu'ils le
désiraient sur tous les sujets pertinents. Vous comprendrez que c'est
dans cette perspective que nous allons poursuivre nos travaux.
M. Laberge: M. le Président, si vous me le permettez, non
seulement je ne dénigrais pas la personne membre d'un syndicat
affilié à la FTQ, Claude Pétel, pour ne pas le nommer,
maintenant que tout le monde sait de qui je parlais, mais il n'était pas
délégué au congrès de la FTQ, tenu la semaine
dernière. Ce n'est pas dénigrer quelqu'un; il n'y était
pas, c'est un fait.
Le Président (M. Blouin): Est-ce que vous pourriez revenir
au sujet plus directement?
M. Laberge: Oui, oui, mais je pense que c'est important, M. le
Président.
Le Président (M. Blouin): Non, non.
M. Laberge: Si vous me le permettez, avec l'intervention
intempestive...
Le Président (M. Blouin): M. Laberge...
M. Laberge: ...les journaux vont rapporter tout cela de
travers.
Le Président (M. Blouin): M. Laberge, vous avez toujours
le loisir de donner une conférence de presse après la tenue de
cette commission. Je vous signale que, lorsque nous avons suspendu les travaux,
ces interventions n'ont pas été enregistrées et
consignées au journal des Débats. Nous sommes en commission
parlementaire, nous avons reçu un mandat de l'Assemblée nationale
et c'est sur ce mandat, et non sur autre chose, que nous allons poursuivre nos
travaux.
M. Laberge: C'est de cela que je veux parler, M. le
Président.
Le Président (M. Blouin): Alors, revenons au sujet
très directement.
M. Laberge: Bien, je pense que c'est important de savoir comment
la CSST a été perçue par les 1100
délégués qu'il y avait au congrès de la FTQ la
semaine dernière. Je disais qu'au local 1123 des Travailleurs unis de
l'automobile où M. Pétel représente les travailleurs
syndiqués accidentés - il fait une bonne "job", je le reconnais
tout de suite sans aucune hésitation - personne n'a remis en cause ni la
CSST, ni notre participation à la CSST. Il y a des griefs, bien
sûr, surtout en réparation, surtout vis-à-vis les
médecins, enfin, un tas de choses dont on aura l'occasion de parler.
Mais je pensais qu'il était important de prendre quelques secondes du
temps de la commission pour exprimer cela très clairement.
Le Président (M. Blouin): Très bien. Poursuivons,
cela va. Oui, M. le député de Prévost.
M. Dean: Je ne veux pas empêcher, parce que j'ai
évoqué la possibilité que d'autres personnes...
Le Président (M. Blouin): Je m'excuse,
M. le député de Prévost, M. Dufour avait une
réponse à apporter sur cette même question.
M. Dufour: À moins que M. le député de
Prévost ne veuille revenir sur les comités de santé et de
sécurité. C'est parce que vous avez posé cinq
questions.
M. Laberge: On a répondu à une.
M. Dean: D'accord. Il y a seulement cet élément, un
peu l'état de la réforme. Même si le règlement sur
les comités de santé et de sécurité a
retardé, est-ce que la loi 17 a quand même eu une influence
bénéfique sur les entreprises et les syndicats de façon
qu'ils puissent plus rapidement négocier des meilleures clauses ou des
meilleurs comités conjoints de santé et de
sécurité, indépendamment de la loi? Finalement, est-ce
que, même s'il n'y a que deux ans et demi d'expérience
vécue, le côté élimination à la source de
danger pour la santé, la sécurité et
l'intégrité physique des travailleurs a commencé à
démontrer des effets positifs?
Une voix: D'accord, vas-y.
M. Laberge: Très brièvement, M. le
Président, cela a eu des effets différents selon les compagnies.
À certains endroits, les employeurs ont dit: On attend que le
règlement soit adopté. Dans d'autres endroits, ils ont dit: On a
une indication très claire où cela se dirige et cela a
aidé. Ce n'est pas une application universelle.
M. Dufour: M. le Président, je pense qu'on pourrait parler
du comité de santé et de sécurité longtemps. Je
sais que nos collègues de l'AECQ et des mines de métaux attendent
et que vous désirez terminer à 19 heures. Je voudrais donner un
"feed-back" rapide sur les cinq questions du député de
Prévost.
D'abord, sur la réglementation, c'est tout à fait normal
que cela soit long. On taille carrément dans du neuf. Des comités
de santé et de sécurité avec des pouvoirs
décisionnels comme ceux qu'on a dans la loi, cela n'existe pas en
Amérique du Nord. C'est tout à fait normal que cela prenne du
temps. Le représentant à la prévention, cela s'applique de
façon différente, par exemple, dans le secteur de la construction
et dans l'industrie manufacturière. On est obligé de
négocier le nombre d'heures qu'on va consentir pour ces
représentants à la prévention. Alors, ce sont des choses
où il y a des coûts énormes qui sont impliqués et
c'est normal que ce soit long. De toute façon, Claude Drouin va parler
un peu plus sur les règlements.
Sur l'influence sur les conventions collectives, je voudrais juste vous
rappeler un colloque qu'on a eu conjointement avec la CSST, il y a à
peine trois semaines ou un mois, où on a établi - qu'on n'a pas
innové avec la loi 17 dans les comités de santé et de
sécurité; cela existe déjà dans bon nombre de
secteurs. Pour l'instant, c'est vrai qu'il y a une attitude d'attentisme. Les
gens se disent: Qu'est-ce qui va se passer? Finalement, les groupes patronaux,
vous en avez mentionné deux, sont en attente, bien sûr, parce que
ce sont des problèmes très particuliers; la construction a une
partie de la loi qui lui est particulière et, il y a aussi les mines qui
sont souvent citées dans le problème de la prévention
comme étant un secteur prioritaire. Alors, il n'est que normal, quant
à nous, sans que cela ait quelque lien que ce soit avec les
communications internes, que ces organismes-là puissent se faire
entendre à l'occasion d'une telle commission, M. Dean.
Claude Drouin va enchaîner sur les règlements,
rapidement.
Le Président (M. Blouin): M. Drouin.
M. Drouin (Claude): M. le Président, je n'en ai pas
très long à dire, mais je crois tout de même que c'est
important. J'ai siégé à je ne sais combien de
comités de règlements - peut-être une dizaine - et je dois
vous dire qu'une des barrières qui fait que nous discutons
extrêmement longtemps sur les différents règlements, c'est
que le style des règlements qui nous sont proposés fait appel
à des mots choisis et à un contexte extrêmement
précis. C'est la minutie, c'est la recherche du détail objectif.
On veut toujours donner dans ces règlements des éléments
précis et, semble-t-il, quand on parle avec les gens de la direction, on
s'aperçoit que l'élément qu'on recherche, c'est la
facilité de contrôler et d'appliquer le règlement,
c'est-à-dire qu'on pense toujours à l'inspection quand on fait un
règlement, et de quelle façon on va pouvoir appliquer cela avec
une certaine rigueur.
La question de la rigueur des règlements exige de nous un temps
considérable parce qu'on ne discute pas en fonction des principes; on
discute en fonction de certains éléments qui sont difficilement
pondérables. Prenons le règlement des premiers soins par exemple.
Combien de temps avons-nous pris pour en décider? Une proposition avait
été faite pour dire que la trousse de premiers soins devait
être à trois minutes du travailleur. Bien, c'est quoi, trois
minutes? C'est quoi, quatre minutes? C'est quoi, cinq minutes? Il n'y a pas de
principe en arrière de ces choses-là et on est mal pris. Du
côté pratique, c'est très difficile d'arriver à des
solutions.
Je pense que, malheureusement,
souvent, on a l'impression - personnellement, j'ai cette impression -
que le but des règlements, c'est beaucoup plus de faciliter l'acte
d'inspection ou de faciliter le contrôle, c'est-à-dire que la
clientèle elle-même vient parfois un peu trop en arrière du
mécanisme qui va appliquer cela. Ce problème, on l'a vécu
avec le règlement des premiers soins, on l'a vécu chez les
représentants à la prévention. Combien de temps avons-nous
passé à discuter d'instruments qu'on donnerait aux
représentants? Par exemple, on avait là-dedans une "flashlight"
pour mesurer la poussière. Quand on y pense un peu, il a fallu se battre
je ne sais combien de temps, combien d'heures pour essayer de sortir un
élément comme cela dans un règlement. C'est qu'il n'y a
pas de logique là-dedans. À un moment donné, on est pris
là-dedans. On a vécu cela avec une quantité de
règlements, entre autres celui pour fixer les heures d'affectation du
représentant. Tout cela, ce sont des détails, finalement. Une des
choses qui nous bloquent, c'est que, malheureusement, souvent les
règlements qu'on nous présente sont truffés de
procédurite et de détails, et cela fait mal.
Je me mets dans les bottines de la direction. J'admets que, pour la
direction, plus les règlements sont précis et
détaillés, plus l'application devient facile pour elle. Mais,
quand on se met du côté de la clientèle, ce n'est pas la
même chose. Souvent, une des réponses que la direction nous fait,
c'est: Oui, il y a beaucoup de détails, mais il y a une espèce de
bureau de législation déléguée ou quelque bureau de
législation ici qui exige tous ces détails. Mais tous ces
détails nous font perdre un temps énorme et cela explique
pourquoi les règlements sont souvent très lents à
évoluer.
Le Président (M. Blouin): Merci.
M. Laberge: M. le Président, me permettriez-vous trente
secondes sur ce point?
Le Président (M. Blouin): II y a trois autres intervenants
à la table sur le même point. M. Giasson?
M. Giasson (Étienne): Je voudrais donner mon opinion,
parce que mon nom revient souvent comme étant membre des comités
ad hoc qui ont siégé sur les règlements. Étant
représentant de la Fédération des travailleurs du papier,
il est sûr que je croyais - et on le croit encore -qu'à
l'intérieur de cette loi il y avait possibilité
d'améliorer et de changer des choses à l'intérieur du
secteur qui, évidemment, dans les secteurs prioritaires, était le
premier, la forêt; par la suite, il y avait les scieries, les papeteries
venant seulement en troisième lieu.
Nous sommes convaincus que les articles lus par le ministre en ce qui
regarde l'élimination à la source même des dangers pour la
santé, la sécurité et l'intégrité physique
comprennent tout ce qu'il faut pour permettre d'améliorer bien des
choses. Cependant, dans mon secteur, je ne peux pas dire qu'il y ait eu
d'énormes améliorations. Ce qu'il faut, je pense - et c'est
là une opinion bien personnelle - c'est que les parties qui sont
là changent leur opinion en ce qui regarde la santé et la
sécurité dans les années à venir.
J'ai sursauté hier et je suis bien aise d'en parler, puisque il y
a une association dont les travailleurs sont de chez nous qui a
présenté son document hier soir. Elle ne m'a rien
démontré, elle m'a plutôt amené à prendre la
position que les accidents de travail, en gravité et en nombre, n'ont
pas diminué dans le secteur de la forêt, si ce n'est pendant une
courte période durant laquelle il y a eu un énorme conflit au
niveau de la façon de travailler à l'intérieur de ce
secteur et aussi au sujet de la diminution des heures de travail et de la
longueur des saisons de coupe qui existent actuellement dans la
forêt.
Il ne faut pas penser que, parce qu'on va arriver avec du paritarisme et
avec des comités, on va tout régler. Je pense qu'à la base
il faut un changement au niveau de l'idée, de la mentalité qu'on
a à propos de tout ce qui touche la santé et la
sécurité. Nous, à l'intérieur de la
Fédération des travailleurs du papier, nous avons passé
par un long conflit pour essayer de faire comprendre aux employeurs qu'ils
avaient tout intérêt à s'asseoir et à
négocier une nouvelle méthode de travail. Cela a
été en partie gagné. Vous allez me dire, à ce
moment-là, que les travailleurs sont peut-être "flyés",
qu'ils pensent peut-être à une solution irréaliste. Je vous
ferai remarquer cependant que, dans un autre secteur où il y a eu une
commission spéciale au niveau de la mine Belmoral, l'un des points
importants était justement le travail au boni qu'il fallait changer ou
modifier pour être capable d'améliorer la santé et de
réduire les accidents de ce groupe.
Chez nous, il y a une méthode de travail au boni, à la
pièce, qui pousse continuellement les travailleurs à travailler
à une vitesse exagérée. Je pense que tant qu'on ne
changera pas nos opinions sur ce point, qu'on ne changera pas notre
façon de voir cela, on va avoir des difficultés.
Je vais vous donner des exemples pratiques parce que je pense
qu'à cette commission, on doit échanger. Je suis quand même
heureux qu'on soit ici pour exprimer -en tout cas, personnellement - nos
idées sur cela. À l'intérieur de la
fédération, même à l'extérieur de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail - cela
n'avait rien
à voir avec ce qui se passe comme fonctionnement au niveau de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail -
à la suite d'une étude faite par un comité très
technique dans les usines et dans les forêts pour savoir quel
était le point no 1, majeur à l'unanimité, les gens ont
découvert que c'était le bruit. Nous avons, toujours dans
l'idée de l'article 2, l'élimination à la source,
présenté une opinion dans quatre unités où nous
sommes représentés comme fédération du papier pour
discussion localement avec l'employeur pour établir et travailler
activement et sérieusement à l'élimination à la
source du bruit, dont l'intensité dans les usines est très
exagérée. À notre grande surprise, les quatre
unités locales ont refusé notre idée et nous ont
renvoyés au plan provincial. Je pense que c'était là un
des moyens de pouvoir, à l'intérieur d'un secteur, appliquer
l'article 2 où l'on pouvait, au départ, éliminer un
problème énorme que nous avons à l'intérieur des
papeteries et à l'intérieur de la forêt.
Le Président (M. Blouin): Cela va. Il y avait aussi MM.
Lavallée, Paquin et Laberge qui désiraient intervenir. Le plus
succinctement possible, s'il vous plaît! M. Lavallée.
M. Lavallée (Jean): Mon nom est Jean Lavallée.
À la question posée par le député de Prévost
concernant notre évaluation après trois années d'existence
de la Commission de la santé et de la sécurité du travail
- je siège au conseil depuis le début de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail - nous sommes
entièrement d'accord avec les objectifs de la loi 17. C'est vrai, comme
le disait mon confrère, qu'il y a des mentalités qu'il va falloir
changer. Moi, je constate, après trois ans, que le bulldozer dont M.
Cusano parlait tout à l'heure, j'ai eu à y faire face, mais ce
n'est pas le même bulldozer. C'est l'AECQ. Je n'ai pas pris connaissance
du mémoire qu'elle va présenter. Nous avons eu plusieurs
rencontres pour essayer de régler l'association sectorielle de la
construction. C'est la seule obligatoire dans la loi. Il n'y a pas eu moyen de
s'entendre. Même dans le cadre du pluralisme syndical où il est
assez difficile de se comprendre, nous avons quand même réussi
à nous comprendre concernant l'association sectorielle, mais l'AECQ n'a
jamais voulu prendre entente avec nous, puis démarrer cette association
sectorielle. La même chose au niveau du représentant à la
prévention. Plusieurs rencontres ont eu lieu auxquelles les
différentes centrales syndicales étaient présentes. Nous
n'avons absolument pas pu régler la question du représentant
à la prévention.
Il y a un chapitre dans la loi 17 qui traite de la construction. Je
pense que cette partie-là, il va falloir que l'AECQ essaie de composer
avec nous pour la mettre en application. Si, de part et d'autre, on ne
réussit pas à se comprendre, c'est quasi impossible d'avoir une
association sectorielle qui soit fonctionnelle.
Je peux vous assurer qu'on a eu pleine collaboration de la permanence de
la commission. J'espère que l'AECQ, dans son mémoire, va prendre
une position différente et nous dire si elle a réellement
l'intention de fonctionner selon la loi 17 et faire en sorte que l'association
sectorielle dans l'industrie de la construction démarre une fois pour
toutes afin qu'on puisse, par la suite, mettre en application les autres
règlements qui vont en découler.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Lavallée. M.
Paquin.
M. Paquin: Merci, M. le Président. M. le
député de Prévost, dans votre deuxième question -
j'essaie de la formuler du mieux que je l'ai prise en note - vous dites: Les
comités viennent juste d'entrer dans nos moeurs. Est-ce que cela a
influencé les employeurs à négocier ou à
créer des comités de santé et de sécurité?
Il y a deux aspects dans cette question et brièvement, M. le
Président, j'aimerais me prononcer là-dessus.
Sur la question d'influencer des employeurs à créer ou
à négocier des comités de santé et de
sécurité, je présume que vous faites
référence à ce qui existait avant et à ce qui
existe maintenant. Du fait, M. le député, qu'on a subi et que
l'on continue à subir ce que j'appelle la théorie du
"maroisisme", qui est, d'une part, de ne pas reconnaître ce que les
employeurs ont fait auparavant et de conclure que ce qu'ils ont fait
n'était pas bon et de le remplacer par quelque chose qui pourrait
peut-être fonctionner, mais qui coûtera plus cher, vous allez
comprendre que nous n'avons pas de statistiques sur ce qui existait avant et
sur ce qu'il y a maintenant. Je sais, par contre, qu'auparavant il y avait des
comités de santé et de sécurité qui fonctionnaient
très bien. Mais, avec les nouveaux règlements et les nouveaux
pouvoirs de décision, je dois vous dire, personnellement, que je ne suis
pas très sûr que cela va aller mieux. Je l'espère, mais je
n'en suis pas sûr.
Lorsque vous dites que les comités viennent juste d'entrer dans
nos moeurs, la façon - je vais me permettre de le mentionner dès
maintenant - dont on essaie de les faire entrer dans nos moeurs est
inconcevable. Je m'explique. L'article 68 dit qu'un comité peut
être formé et l'article 69 dit qu'un comité se forme quand
une des deux parties le demande. On veut tellement faire entrer cela dans nos
moeurs que, dernièrement - je vous parle de quelques
jours à peine et je n'en croyais pas mes oreilles quand on me l'a
dit au téléphone, j'en ai demandé une copie - il y a une
lettre qui a été envoyée aux chefs d'établissements
dans l'île de Montréal. Je ne vous lirai que le deuxième
paragraphe: "Or, depuis le 22 octobre 1983 - date où les comités
sont maintenant légalement en vigueur - un comité devra
être formé dans les établissements comme le vôtre de
21 travailleurs et plus et appartenant à une catégorie
désignée par la CSST." Enfin, c'est le moins qu'on puisse dire,
l'information que l'on donne n'est pas exacte. Ce n'est pas "devra", mais
plutôt "une des deux parties qui le demande". J'aimerais vous dire que
c'est une lettre signée par un "sous-sous-sous-sous adjoint" quelque
part, mais tel n'est pas le cas.
Bien sûr que ce problème dont je viens de vous faire
prendre connaissance va faire l'objet d'un débat lors de notre
réunion au conseil la semaine prochaine, mais, ce que je veux dire,
c'est qu'à titre de membre du conseil et, comme le disaient si bien M.
Dufour et M. Laberge et le P.-D.G., on parle de grandes orientations, mais on
nous arrive avec des cas semblables où on essaie de nous forcer
indirectement, si vous voulez, à appliquer la loi d'une façon qui
n'est pas tout à fait celle négociée ou proclamée
soit par la loi ou par les règlements. Cela, c'est d'entrer dans les
moeurs un peu raide. Merci.
Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci. M. Laberge.
M. Laberge: Trente secondes, M. le Président. Je pense
qu'il faut que les membres de la commission soient conscients que - M. Dufour
l'a dit, plusieurs l'ont dit et je l'ai dit aussi - cette commission paritaire
prend un peu de temps, que c'est un peu lourd. C'est vrai, mais cela prendrait
autant de temps, sinon plus, si cela n'existait pas, parce que les discussions
qui se font avant d'adopter un projet de règlement se feraient
après. Le ministre est fort conscient de cela. Lorsque le projet de
règlement serait publié, les organismes tels la CSN, la CSD, la
FTQ, le Conseil du patronat et tous les autres, demanderaient d'être
entendus pour discuter du projet de règlement. Les discussions qui se
font avant se font, quand même, d'une façon un peu plus rapide
qu'elles peuvent se faire en commission parlementaire. Je pense que vous en
êtes témoins.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Laberge. Rapidement,
M. le député de Prévost, s'il vous plaît.
M. Dean: Oui, M. le Président. Seulement une petite
clarification, car mes propos ont pu prêter à confusion surtout
auprès de M. Paquin. Quand j'ai posé ma question, j'étais
pleinement conscient qu'il existait des comités conjoints de
santé et de sécurité négociés dans un
certain nombre d'entreprises et même dans un nombre certain
d'entreprises, et depuis longtemps. Je savais également que le fait que
la loi soit adoptée a amené des syndicats et des employeurs
à la table de négociations pour améliorer leurs
conventions collectives quant à l'existence et aux pouvoirs de leurs
comités conjoints de santé et de sécurité en
fonction de ce que prévoyait la loi. (16 h 45)
Mon but était de savoir si, dans l'opinion des parties
représentées au conseil d'administration, même si la
commission fonctionne depuis seulement deux ans ou deux ans et demi, la loi a
pu déjà commencer à amener des améliorations quant
à cet objectif principal qui est l'élimination, à la
source même, des dangers à la santé, à la
sécurité et à l'intégrité physique des
travailleurs. Je ne voulais pas faire le procès de qui que ce soit.
J'étais très conscient de ce qui se passait dans le milieu. Mon
opinion, c'est une chose. L'opinion de ceux qui vivent les problèmes,
c'est une autre chose, mais, pour moi, c'est important. Merci.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. J'aurais un bref
commentaire et quelques questions à poser à nos distingués
visiteurs qu'on apprécie de rencontrer aujourd'hui. Le conseil
d'administration de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, formé à la suite de l'adoption
de la loi 17, a des particularités très intéressantes en
ce qu'il est composé de sept représentants du monde patronal et
de sept représentants du monde syndical, des employés ou des
travailleurs. Cela implique, évidemment, tout un défi à
relever. Cela implique une adaptation qui n'a certainement pas
été facile au début - on en convient et on le comprend -
parce que vous avez à agir, jusqu'à une certaine limite, dans une
solidarité par les décisions que vous prenez, tout au moins
celles qui sont unanimes. Vous avez à représenter des secteurs
particuliers qui vous sont propres sans être pour autant des
délégués. Somme toute, comme M. Dufour l'indiquait ce
matin dans le mémoire, vous avez, finalement, à porter plusieurs
chapeaux, parce que vous êtes assis dans le fauteuil que vous occupez. La
loi est adoptée. Vous avez peut-être, comme nous, des
réserves à l'égard de cette loi, mais comme elle est
adoptée majoritairement, elle doit être respectée et tout
le monde doit vivre avec elle. Ses mécanismes doivent être
fonctionnels. On a longuement abordé, depuis quelques jours, toute la
trame de fond de cette loi qui est
le paritarisme.
Ma première question est une suite de la question posée
par le député de Prévost. On comprend que, depuis 1980 -
déjà trois ans - vous avez eu à consacrer vos efforts,
très probablement dans les premiers mois, à la régie
interne, au budget et à l'organisation. Vous avez déblayé
le terrain pour commencer à travailler. Vous vous réunissez une
fois par mois, sauf quelques exceptions. Vous avez le mandat de
délibérer et de décider ce que je qualifierais de "grandes
questions", les politiques de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, son budget, les services de
sécurité, les services d'inspection, les règlements qui
entourent tout cela, les budgets à consentir aux associations
sectorielles qui en font la demande pour être reconnues et fonctionner,
parce que c'est sur une base volontaire, sauf dans le monde de la construction.
Vous êtes, somme toute, très près de la forêt. Vous
avez la grande forêt devant vous et on dit souvent que, lorsqu'on est
trop près de la forêt, on perd les arbres de vue. On a entendu
depuis quelques jours des questions, des remarques, des interrogations et des
inquiétudes très pertinentes et bien fondées. Ne
craignez-vous pas ou ne croyez-vous pas plutôt - et là, j'adresse
ma question plus particulièrement à M. Laberge et à M.
Dufour - que votre conseil, étant convié à débattre
et à discuter de grandes questions comme celles-là,
s'éloigne peut-être de l'objectif? C'est, d'ailleurs, ce qui a
été soulevé par quelques organismes qui ont comparu hier
en disant que, pendant que le conseil s'occupe d'élaborer des programmes
de prévention, des accidents malheureux se produisent chez les
travailleurs et les travailleuses. J'aimerais connaître votre
appréciation à cet égard. Je comprends que vous avez,
d'une part, les grandes politiques. Vous avez tout ce que vous deviez faire, ce
qui est en train de se faire encore tout récemment. Il y a des
règlements qui ont été adoptés il y a seulement
quelques mois. Quelle place prend, dans vos délibérations,
l'aspect objectif d'éliminer à la source les risques d'accident
de travail en regard des statistiques malheureuses qu'on retrouve encore
aujourd'hui?
Le Président (M. Blouin): M. Dufour.
M. Dufour: C'est très vaste comme question, M.
Pagé, parce que vous faites référence, d'abord, à
tout le problème du paritarisme et c'est un problème majeur. Il
ne se présente pas de la même façon selon que vous le
viviez au conseil d'administration ou à l'intérieur des
associations sectorielles dont certaines fonctionnent très bien. C'est
le cas, par exemple, du textile. D'autres éléments ont
été imposés par la loi. Le collègue Jean
Lavallée peut attendre la réaction de l'AECQ, mais j'ai
l'impression qu'il la connaît. Je ne pense pas qu'on puisse fonctionner
dans un schéma d'obligation quand on parle de prévention et cela
présente un problème tout à fait particulier quant au
paritarisme.
Il y a, ensuite, les comités de santé et de
sécurité au niveau de l'entreprise. Certains vont très
bien parce que, dans certains cas, il y a des relations du travail qui sont
bonnes et déjà cela fonctionne. C'est le comité qui
fonctionne déjà paritairement qui va devenir celui de la loi 17.
Je pense que, selon qu'on se situe à une strate ou à l'autre, on
va avoir des réponses un peu différentes.
Mais à l'intérieur de tout cela, je pense que vous voulez
parler du paritarisme conseil d'administration en fonction de la
réparation. Je l'ai dit un peu ce matin. Cela n'a peut-être pas
été assez clair. Le dossier de la réparation et même
le budget de la réparation, à toutes fins utiles, le conseil
d'administration y touche très peu parce que tout ce qui constitue le
budget de réparation, les 600 000 000 $, c'est déjà ce qui
est contenu à la Loi sur les accidents du travail. Ce sont
déjà les indemnités prévues. C'est
déjà tout ce que la Loi sur les accidents du travail
prévoit. C'est ce que j'ai dit ce matin. Invariablement, quand on veut
parler de la réparation, surtout des dossiers qui ont été
soulevés devant vous, il y a toujours dans le tableau les deux grands
dossiers, celui du 38.4 dont on a beaucoup parlé hier - ce dossier est
majeur - et le dossier de la loi 42 de M. Fréchette, qui nous
ramène invariablement à la solution possible de problèmes
qu'on soulève dans le domaine de la réparation.
Par ailleurs, on a l'impression, comme employeurs, que si tous les
efforts qu'on met actuellement dans la loi 17 pour les fins de la
prévention ne devaient pas avoir un jour un effet sur les coûts de
la réparation, on s'en irait demain matin. Quand on dit qu'on va
investir 40 000 000 $, 50 000 000 $, par exemple, dans les DSC, il faut y
croire. Je pense que l'évaluation sera à faire dans deux ou trois
ans. Je dirais que, du côté patronal, la loi est là. Il y a
des mécanismes. Il faut essayer de notre mieux, et ce n'est pas facile,
de les faire fonctionner, mais je pense que, dans le fin fond de tout cela,
c'est toujours le tableau réparation parce qu'il n'y a pas un homme
d'affaires qui va investir de l'argent dans la prévention si, un jour,
il n'y a pas de résultat. C'est ce qui inspire nos travaux.
Je ne sais pas ce que tu veux ajouter, Claude.
M. Drouin: Regarder la loi et dire que c'est l'outil qui
réellement va nous donner les avantages qu'on attend en
prévention, il y a peut-être un peu de rêverie dans tout
cela. Quand on regarde comment arrive l'accident de travail, à
quelle place arrive un accident de travail, il arrive au travail.
J'espère qu'il arrive là, parce qu'on serait censé payer
seulement ceux-là. On en paie peut-être d'autres, mais on va
parler de ceux-là pour le moment. L'accident de travail arrive avec deux
intervenants. Les deux derniers intervenants avant l'accident, c'est le
travailleur lui-même et son contremaître. C'est lui qui a
été le dernier intervenant là-dedans. Tous les gens qui
font partie du mécanisme que la loi a mis en place, par exemple, les
comités de sécurité, le représentant à la
prévention, l'association sectorielle, l'association patronale, les
associations syndicales et tout ce que vous voulez, moi, j'appelle cela la
grande congrégation de Notre-Dame-du-Bon-Conseil. Ce sont des gens qui
ne sont pas capables d'intervenir immédiatement, spontanément et
ponctuellement avec chaque travailleur au moment du travail. Le loi ne peut pas
remplacer cette intervention. Le loi ne peut pas faire cela. La loi crée
des structures et, ensuite, on peut fonctionner. La loi est un apport au point
de vue de la prévention, mais je crois que la loi a ignoré un
aspect important: le rôle que l'employeur doit jouer en tant
qu'employeur. La loi ne prévoit pas d'organisme pour faire en sorte que
l'employeur se prenne en charge. Elle a fixé le paritarisme plutôt
qu'un aspect important. C'est un oubli, mais je ne m'attends pas à des
miracles avec la loi.
En France, après trente ans d'efforts, la fréquence des
accidents est une courbe horizontale. Aux États-Unis, après douze
ans de police, ils ne sont pas heureux, non plus. C'est la même chose
partout. Si on installe un système de police, un système
parallèle plutôt qu'un système prévoyant
l'intégration de l'action production et de l'action prévention en
même temps, nous n'irons pas loin. Cela améliorera certaines
choses à petite dose et non pas à grosse dose.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Drouin. M.
Laberge.
M. Laberge: M. le Président, je vais me servir de la
même image dont M. Pagé s'est servi, s'il me le permet. Il est
vrai qu'à force de regarder toute la forêt on peut oublier un
arbre, mais le contraire est aussi vrai. Si vous accordez toute votre attention
à cet arbre, vous ignorez ce qui se passe dans la forêt. C'est un
peu le dilemme dans lequel nous nous débattons: la réparation, la
prévention.
Je pense que tous les efforts qu'on peut faire pour la
prévention, même s'il ne faut pas s'attendre à des
miracles, comme on aura sauvé le bras d'un travailleur, l'oeil d'une
travailleuse, qu'on aura sauvé une vie, cela en vaut la peine. Cela peut
se faire par la prévention. Il y a des organismes de prévention
qui se targuent d'avoir fait beaucoup de prévention au cours des
dernières années et, pourtant ce sont presque les pires dossiers.
Je pourrais donner des noms, mais je serai plus délicat, je n'en
nommerai pas.
Il y a une différence entre parler de prévention et faire
de la prévention. La seule façon de faire de la véritable
prévention, c'est de changer la mentalité des employeurs et des
travailleurs, c'est de rendre tout le monde conscient que c'est ensemble qu'on
va pouvoir faire de la véritable prévention.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Laberge. M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: J'ai une deuxième question,
celle-là est plus précise. Je veux aborder l'aspect du conseil
d'administration, les quatorze représentants que vous êtes par
rapport à la direction, en la personne du président-directeur
général et de ses adjoints. Nous n'avons pas le privilège
d'assister à vos délibérations quoique, parfois, on
aimerait être un petit oiseau et y être, sur certains sujets en
particulier. On n'est pas observateur, non plus. Je présume que vous
établissez une programmation; je présume que vous procédez
en fonction de documents, de rapports produits, d'ordres du jour.
On a parlé souvent autour de cette table, comme autour de la
table qui a étudié le projet de loi 17, de l'obligation que tout
le monde avait de se convier à une action particulière dans les
secteurs prioritaires. À cet égard, l'action qui débouche
sur les décisions du conseil d'administration, les politiques, les
propositions, ce qui est décidé, est-ce que cela peut facilement
être amorcé par les membres ou si c'est entrepris par la
direction, par le président-directeur général?
Je pourrais, évidemment, aujourd'hui, poser plusieurs questions
au représentant de la FIPOE, M. Lavallée, qui représente
les employés. Je pourrais lui poser des questions bien
spécifiques sur des cas qui ont été portés à
notre attention. Je pourrais lui poser des questions sur la possibilité
réelle ou non d'utiliser le droit de refus dans le secteur de la
construction, quand on sait comment cela peut être délicat pour un
travailleur de l'exercer. On en est conscient. Je ne crois pas que le mandat de
votre conseil d'administration soit d'être formé de quatorze
personnes déléguées; j'ai bien dit, au début, que
nous n'étiez pas des délégués. Je ne crois pas que
cette réunion soit pour convier quatorze personnes qui viennent faire
des propositions au jour le jour. Quand même, vous êtes un conseil
d'administration qui a à décider sur de grandes orientations. (17
heures)
Est-ce que vous pouvez proposer des
choses, des programmes, amorcer des questions particulières ou si
vous êtes là pour attendre ce qui vous est proposé par la
commission par l'entremise de son directeur général et, par la
suite, le ratifier après modification ou non? Le plus bel exemple de
cela, c'est peut-être ce qu'on évoquait tout à l'heure,
tout ce qui a trait au. monde de la construction. M. Lavallée indiquait
qu'il était peiné de constater que, malgré que
l'association soit obligatoire, elle ne fonctionne pas avec les
problèmes qu'il y a. C'est un aspect important. Est-ce que vous pouvez
proposer quelque chose ou si vous êtes là pour ratifier?
M. Laberge: Est-ce qu'on peut proposer?
M. Pagé: Oui.
M. Laberge: Jamais personne n'a empêché qui que ce
soit d'ajouter des articles à l'ordre du jour, que cela vienne
d'Étienne Giasson pour le groupe des pâtes et papiers, des mines
et de la métallurgie...
M. Pagé: M. Laberge, si vous me le permettez, je m'excuse,
je veux bien qu'on se comprenne. Je ne parle pas d'inscrire des sujets
à l'ordre du jour et d'en discuter.
M. Laberge: D'accord.
M. Pagé: Je parle de programmes, de méthodes, de
moyens et d'objectifs, des choses comme cela.
M. Laberge: En fait, je peux vous dire que, personnellement, je
suis en rapport avec la commission sur des cas précis au moins 20 fois
plus souvent qu'avant parce que, siégeant à la commission, cela
m'a donné l'occasion de connaître le responsable de tel aspect
d'un dossier, etc. Je peux y aller directement. Des fois, cela fait gagner
énormément de temps et, des fois, cela se règle plus
rapidement, mais je l'ai dit ce matin, quand on perd un cas, on n'est jamais
content.
M. Dufour: M. Pagé, la réponse est oui, on peut
proposer quelque chose. Pour ne pas commencer un débat, je vais prendre,
tout simplement, l'exemple de tout à l'heure. Nous avons, je pense,
repris à chaque réunion du conseil, depuis six mois, cette
demande d'avoir un comité de vérification interne auprès
du conseil d'administration. C'est une initiative vraiment entreprise par les
parties. Ne me demandez pas le résultat. Vous me demandez si on peut le
faire. Dans certains cas, on a des résultats; dans d'autres cas, on
attend. C'est peut-être le processus.
Il y a l'inverse aussi. J'ai mentionné, ce matin, qu'en vertu de
l'article 154 le P.-
D.G. a des pouvoirs qui lui permettent d'entreprendre des choses. Cela
peut être important. C'est l'autre volet. Cela nous amène souvent
dans des champs d'action qui créent, au niveau du conseil
d'administration, un certain nombre de débats. Votre question aussi pose
tout l'autre problème de toujours distinguer entre les deux niveaux, le
conseil d'administration et le comité de direction de la CSST. Je prends
simplement un exemple donné dans un journal d'hier: Expro fait face
à la poursuite de la CSST. Expro, qui est un de mes membres, me dit: Tu
me poursuis. On ne poursuit pas, mais ce genre de problème est constant
dans le champ; on se poursuit soi-même. On vient de prendre une poursuite
en Cour supérieure et les métallos viennent de faire la
même chose contre la CSST et contre nous. C'est la faiblesse de la loi
à laquelle on faisait référence ce matin, ces pouvoirs
diffus entre nous, le P.-D.G., ce qu'il a comme pouvoirs en vertu de l'article
154, ce que le ministre a comme pouvoirs. Je pense que vous campez, finalement,
tout le fonctionnement du conseil d'administration. Je propose des choses, mais
où est-ce que je me ramasse? Je ne le sais pas. Si le P.-D.G. propose
quelque chose, il a peut-être plus de chances que moi de se rendre au
bout.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Dufour.
M. Sauvé: Les comités ad hoc sont formés des
parties.
Le Président (M. Blouin): M. Giasson.
M. Giasson: Concernant ce que le président vient de dire,
on a expliqué avant le fonctionnement: afin que les gens du conseil
d'administration ne soient pas pris avec des dossiers à étudier
très rapidement, on doit former des comités qui se penchent sur
les dossiers. Depuis un certain temps, on peut dire qu'il y a peut-être
plus de comités qu'il ne devrait y en avoir normalement, mais je pense
qu'il est normal aussi que, quand il y a deux parties, on soit capable
d'écouter, d'échanger et de se faire comprendre par l'autre
partie.
Ces sous-comités sont présidés par les
vice-présidents. J'en ai soutenu plusieurs. On a toute la liberté
de lancer des projets et de faire des propositions, parce qu'en travaillant
à l'intérieur de ces sous-comités il est évident
que l'on se retire et on n'est pas spécialiste dans toutes les
discussions. Je siège actuellement à un comité où
on parle de produits toxiques. Je ne suis pas le spécialiste des
produits toxiques, mais il y a des personnes au Québec qui peuvent nous
conseiller entre les réunions de sous-comités, ce qui fait qu'on
entreprend des propositions ou de la véritable négociation
même à l'intérieur des sous-comités. De là,
on
revient, évidemment, au conseil d'administration.
Le Président (M. Blouin): Cela va?
M. Pagé: Une dernière question, M. le
Président, plus spécifiquement à M. Dufour. Dans votre
mémoire, à la page 3 du document, vous dites - on doit constater
que vous n'êtes pas les seuls à pouvoir proposer des choses, le
ministre aussi - "Sans tenir compte du conseil d'administration, le ministre
responsable de la loi et le gouvernement peuvent faire ce qu'ils veulent. Ils
ont déjà pris au moins deux décisions dont le conseil
d'administration n'a pris connaissance qu'après coup." C'est grave.
M. Dufour: Oui, c'est à l'article 2.25.
M. Pagé: Financement de l'inspection et certificat de
retrait. Quels sont vos commentaires sur l'article 2.25? Je m'excuse si la
question vous a été posée ce matin.
M. Dufour: Non, non.
M. Pagé: Je n'étais pas ici. Comment
réagissez-vous face à ce pouvoir du ministre? J'aimerais aussi
entendre M. Laberge sur cette question.
M. Dufour: C'est peut-être cela, le paritarisme. Il faut
que quelqu'un décide quelque part. On le vit à l'intérieur
de la loi 17. On a mis sur pied un certain nombre d'associations sectorielles;
je pense à l'association paritaire sur la santé et la
sécurité du travail notamment où on ne s'est pas
donné une procédure de règlement des griefs. Il n'y a
personne qui règle; alors, on ne règle jamais les
problèmes.
Dans le schéma actuel, le législateur a prévu un
certain nombre d'interventions: ou une solution par le P.-D.G. ou des solutions
par le ministre responsable. Et l'article 225 est très clair: "À
défaut par la commission d'adopter un règlement dans un
délai que le gouvernement juge raisonnable, ce dernier peut
lui-même adopter le règlement." Finalement, c'est se donner les
pleins pouvoirs vis-à-vis de ceux d'un conseil d'administration. Je me
répète peut-être, mais on peut noter 25
références dans la loi 17 à des pouvoirs ou du ministre ou
du Vérificateur général ou du ministre des Affaires
sociales etc. On est un peu cerné de tous bords et de tous
côtés. Hier soir, on a eu l'exemple d'une proclamation d'un
article qui crée des problèmes énormes au niveau du
conseil d'administration, entre les parties syndicale et patronale et entre les
parties dans le champ; c'est une petite proclamation, un arrêté en
conseil quelque part un mercredi soir ou un mercredi midi, je ne sais plus,
mais l'effet, dans le champ, est énorme.
M. Pagé: Sur les associations forestières...
M. Dufour: La proclamation d'un article de la loi 17 qui abroge
l'article 115 de la Loi sur les accidents du travail et qui ne permet plus
à notre commission de financer dans le champ des associations patronales
de prévention qui existent depuis 50 ans. Imaginez-vous! Trois
associations qui existent depuis 50 ans et qui, du jour au lendemain, par la
proclamation d'un article n'existent plus. Comme conseil d'administration, on a
un problème là-dessus. Il n'y a peut-être pas d'autre
façon de s'en sortir - le ministre doit peut-être le proclamer -
sauf qu'on se demande si c'était le bon moment. Pourquoi est-ce qu'on
fait cela au mois d'octobre? On est à la merci de ce genre de
situation.
Le Président (M. Blouin): Cela va. M. Laberge?
M. Laberge: Non.
Le Président (M. Blouin): Non. M. Giasson.
M. Giasson: Je voudrais dire que c'est une initiative qu'on a
prise au niveau du conseil d'administration pour demander au ministre d'abroger
cet article. J'en suis personnellement heureux, même s'il y a eu hier une
intervention par un groupe qui parlait de montants d'argent qui leur
étaient coupés. Il ne faut pas prendre les travailleurs qui sont
dans ce secteur...
M. Dufour: Je m'excuse...
Le Président (M. Blouin): Après, M. Dufour.
M. Giasson: Cela existe depuis 50 ans. Je l'ai dit tout à
l'heure, dans ma première intervention, il y a des mentalités
à changer. Au même moment où on a dit: II faut abroger cet
article, il n'y a rien qui empêche les parties - nous sommes prêts
syndicalement - de se rencontrer rapidement et de mettre les trois associations
sectorielles en vigueur. Il s'agirait simplement de pouvoir se parler un peu et
d'avancer encore un peu. On ne peut pas continuer, et ne nous demandez pas de
continuer - cela fait quand même cinq ans qu'on parle de cela - à
subventionner une partie qui devrait normalement former une association
sectorielle. Il n'y en aura jamais.
M. Dufour: Je ne veux pas qu'on fasse un débat sur le
fond.
Le Président (M. Blouin): M. Dufour, je
crains bien qu'on ne se retrouve en plein conseil d'administration.
M. Dufour: Non, non.
M. Sauvé: II y a un comité ad hoc le 19 sur le
sujet.
M. Giasson: Vous vouliez voir comment cela fonctionnait au
CA.
M. Dufour: Au CA, le président me donnerait la parole.
Le Président (M. Blouin): Rapidement, M. Dufour.
M. Dufour: C'est bien sûr que M. Giasson peut faire
auprès du ministre toutes les représentations qu'il veut. C'est
entendu comme cela. Mais il ne peut quand même pas se prévaloir du
fait que c'est le conseil d'administration qui a recommandé au ministre
de mettre en vigueur l'article.
M. Giasson: Sur division.
M. Dufour: II faut être précis. On ne reproche pas
au ministre de le faire. La loi est là, il est obligé de le
faire. Sauf qu'on voudrait être consultés dans le temps et que
ça arrive au bon moment. Si c'est en pleine période où on
a, justement, les gants de boxe sur ces dossiers, ce n'est pas le temps.
Merci.
Le Président (M. Blouin): Cela va, merci.
Je ne voudrais pas qu'on s'étende trop sur cette discussion qui
est plutôt interne. Est-ce que cela va, M. le député de
Portneuf?
M. Pagé: Pour moi, oui. Sauf, que monsieur veut
répondre et veut ajouter quelque chose, je crois.
M. Drouin: M. Pagé, vous avez dit tout à l'heure
que vous étiez tout de même surpris de voir l'article 225 et sa
portée.
J'aimerais vous inviter à regarder la loi 42 aux articles 335 et
337; elle va encore plus loin que cela. Vous en tiendrez compte,
j'espère.
Le Président (M. Blouin): On n'est pas tout à fait
dans le sujet, mais enfin! Cela va?
Très bien.
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Messieurs du conseil
d'administration et madame, j'ai trois questions relatives à des
politiques générales. J'ai fait bien attention -parce que je sais
que demain on rencontre les permanents de la commission - pour appliquer la
distinction que faisait M. Dufour dans son mémoire, à savoir de
dissocier la gestion courante de la gestion dite générale. Il y a
trois volets. Le premier concerne la politique générale à
l'égard du retrait préventif. Particulièrement, je veux
connaître l'interprétation que l'on fait à la commission de
l'expression "conditions de travail" que l'on retrouve à l'article 40.
Je pense que c'est là le coeur du litige. D'une part, la commission a
décidé - je ne sais pas si cela fait partie de la gestion
courante ou des politiques générales, on me le dira; si c'est de
la gestion courante, j'y reviendrai demain - de confier l'ensemble de la
gestion du dossier "retrait préventif" à la
vice-présidence à la réparation. Antérieurement
c'était à la fois à la prévention et à la
réparation. On retrouve cela uniquement à la réparation
maintenant. D'autre part, l'interprétation qui est faite de ce qu'on
appelle les conditions...
M. Sauvé: Je m'excuse de vous interrompre. Il y a une
question d'indemnisation importante.
Mme Harel: Une question d'indemnisation certainement, mais il y a
aussi tous les autres aspects et on va y revenir. Le Protecteur du citoyen
donne une interprétation large à la notion de conditions de
travail. À la commission, vous avez décidé d'aller en
appel devant la Commission des affaires sociales sur cette
interprétation des conditions de travail. L'appel a eu lieu, la
décision a été rendue. Je veux savoir quelle est
l'interprétation que vous allez en faire actuellement, quelle est la
réaction que vous allez avoir compte tenu de cette décision de la
Commission des affaires sociales.
M. Laberge: Je tiens à vous dire, tout de suite au
début, que ce n'est pas une décision du conseil d'administration.
Nous n'avons jamais voté pour une chose comme celle-là.
M. Sauvé: Madame, je dois vous dire que je serais bien
heureux que vous posiez la question demain. Je dois vous dire que ce n'est pas
la commission qui va en appel, c'est la travailleuse. La commission n'est
jamais allée en appel devant la Commission des affaires sociales depuis
le 1er septembre 1977; elle n'a jamais comparu devant la Commission des
affaires sociales. Et j'expliquerai demain également pourquoi.
Mme Harel: Très bien, M. Sauvé. Je vais reposer la
question. La travailleuse est allée en appel. Dites-nous quelle est la
position de la commission? La commission a-t-elle fait connaître ses
positions?
Certainement, puisque la travailleuse est allée en appel d'une
décision de la commission, laquelle décision se restreignait, je
pense, seulement aux conditions de travail, et non pas à la situation
personnelle. À ce moment, compte tenu de la décision de la
Commission des affaires sociales... Est-ce de la gestion courante ou si cela
concerne le conseil d'administration?
M. Sauvé: C'est cela, c'est de la gestion courante.
Demain, nous allons pouvoir vous expliquer tout cela avec
énormément de plaisir. (17 h 15)
Mme Harel: Et le conseil d'administration? La partie syndicale,
par exemple, n'est pas concernée dans cela?
M. Laberge: II pourrait peut-être vous donner un bout de
réponse, vu qu'on est ici.
Mme Harel: Oui. Cela va.
M. Sauvé: On va être ici demain aussi; alors, vous
verrez. C'est parce que je pense à l'autre groupe.
Mme Harel: On y reviendra certainement parce qu'on ne peut pas,
je pense - vous allez me comprendre, M. Sauvé - écarter cette
question en disant: Nous ne sommes pas allés nous-mêmes en appel.
Vous n'y êtes pas allés vous-mêmes, mais vous avez maintenu
là une interprétation très restrictive. On y
reviendra.
M. Sauvé: Nous sommes très
intéressés.
Mme Harel: Sur la question de la transmission de l'information,
si j'ai bien compris, il y a une évaluation des primes exigées
des employeurs qui est faite à partir de bien des facteurs, mais parmi
ceux qui me semblent être retenus, il y a la fréquence et la
gravité des accidents. Donc, il y a des statistiques sur la
gravité et sur la fréquence des accidents qui vous permettent
d'évaluer les taux à exiger des employeurs, qui,
évidemment, peuvent aussi être utilisées, j'imagine, pour
le système de mérite et de démérite, pour
évaluer si une entreprise dépasse ou non la gravité des
accidents du groupe auquel elle appartient. C'est bien le cas? Donc, vous avez
des statistiques, pour chacune des entreprises, sur la fréquence et la
gravité des accidents. C'est bien cela? Qu'est-ce qui justifie que ces
informations, ces statistiques ne soient pas transmises à la partie
syndicale?
M. Sauvé: Je pense, madame, que c'est un vieux
débat qui a été soulevé dans les premières
réunions du conseil d'administration où l'une des parties avait,
je pense, sans blaguer, demandé tout ce qui était dans
l'ordinateur.
En vertu de l'article 174 de la Loi sur la santé et la
sécurité du travail, le conseil a essayé de trouver une
solution à la confidentialité des données. Je dois vous
dire que, malheureusement, jusqu'à maintenant, tout le monde s'est
renvoyé la balle et personne n'a trouvé la solution. Les parties
sont partagées là-dessus. Nous sommes bien conscients, d'un
côté, que toutes les données d'une entreprise ne doivent
pas être données à tout le monde. Cependant, d'une
façon pratique, vous savez que, s'il y une association sectorielle,
forcément, les gens auront les données. Je pense qu'on se cache
présentement un peu la tête dans le sable, mais on en viendra
à aboutir sur cette question de l'échange des données. Il
y a eu d'autres questions qui ont été jugées plus
prioritaires. Quand je dis qu'on s'est renvoyé chacun la balle, c'est
qu'au début on avait confié à un membre du conseil
d'administration la tâche de trouver la solution à cela et,
après un certain temps, il nous a dit: Je pense que c'est
extrêmement difficile de trouver la solution, je retournerais la balle
à la permanence. La permanence a regardé cela avec les textes de
loi, etc., et elle n'a pas trouvé de solution pratique. Cela semble
facile de dire cela, mais comment trouver la solution? On pense que cela
prendra encore un certain temps avant de la trouver.
Mme Harel: Mais ces donnnées étaient disponibles
antérieurement.
Le Président (M. Blouin): M. Dufour.
M. Dufour: Oui, mais j'aimerais quand même, parce que j'ai
l'impression que le président oublie un élément
d'information, vous référer en fait à l'article 174: "La
commission assure le caractère confidentiel des renseignements et
informations qu'elle obtient". La gravité et la fréquence
auxquelles vous vous référez sont des documents confidentiels.
Ils étaient antérieurement donnés à un certain
nombre d'associations patronales, notamment dans le domaine dont on parlait
plus tôt pour fins de prévention. C'est cela qui a
été contesté. Mais les données, au lieu
d'être transmises aux syndicats, ont été transmises aux
membres du conseil d'administration. Alors, si les gars du conseil l'ont, il me
semble que cela devrait se transmettre assez facilement.
Mme Harel: Les données par entreprise sont actuellement,
en fait...
M. Dufour: Non, non, ce qui se donnait avant à la partie
patronale se donne maintenant à la partie syndicale sauf que, au lieu
d'être transmis directement, parce que la loi ne le permet pas, aux
syndicats, c'est
donné aux administrateurs qui, eux, ont la possibilité de
l'avoir.
M. Sauvé: On les donnait par secteur et on continue
à les donner par secteur, mais pas par entreprise.
Mme Harel: Alors, il n'y a pas de profil d'une entreprise. Dans
une entreprise plus mécréante qu'une autre, on a le cas par cas,
mais on n'a pas le profil. D'autre part, peut-être qu'on reviendra sur la
gestion, cela doit être de la gestion courante, la transmission aussi des
décisions des inspecteurs puisque, dans les cas de refus, un inspecteur
qui est appelé émet une décision et, que je sache,
l'ensemble des décisions sont, cas par cas, remises aux travailleurs
concernés, mais, là encore, il n'y a pas de possibilité de
faire un profil dans une année d'une entreprise sur ces
questions-là. Est-ce bien de la gestion courante, M. Sauvé?
Très bien, on y reviendra demain.
La dernière question: En physiothérapie, j'ai vu sur la
liste qu'il y a un médecin qui siège...
M. Laberge: Le Dr Vézina.
Mme Harel: Oui, le Dr Michel Vézina. Compte tenu du
mémoire qui a été présenté en fin
d'après-midi hier par l'Association des physiothérapeutes, je me
posais des questions, puisqu'il y a eu un comité ad hoc qui a
été mis sur pied. Le vice-président du Conseil du patronat
a fait état d'une économie, qu'il chiffrait à 50 000 000
$, sur les soins, les traitements, les indemnisations. C'est bien le cas?
M. Sauvé: M. Dufour a été
généreux dans ses économies, mais il y avait des
économies substantielles, selon la thèse patronale.
Mme Harel: Je reviens donc à vous, Dr Vézina. Hier,
cela nous a semblé, à certains de mes collègues et
à moi-même, une espèce de mécanique implacable.
Indépendamment du diagnostic du médecin traitant,
indépendamment du diagnostic du médecin spécialiste, il
est décidé, comme une espèce de mécanique un peu
abusive, que tout cela ne commence pas avant le 21e jour. Je voulais vous
demander si c'est courant en pratique médicale ou si c'est une pratique
exclusive à la CSST. Est-ce que cela veut dire qu'on pourrait croire
qu'il y a des traitements de second ordre qui sont donnés à des
travailleurs qui n'ont pas accès à des services médicaux
auxquels n'importe quel autre citoyen victime de la même blessure aurait
accès dans les traitements qu'il recevrait des services de santé
au Québec?
M. Vézina (Michel): Je ne veux pas faire la critique de la
gestion de la CSST et de ses politiques de réparation. Tout ce que je
peux dire, c'est qu'au niveau des services de santé offerts à la
population chaque travailleur ou chaque personne, chaque citoyen du
Québec a le choix de son médecin. Ce choix du médecin
traitant pour réparer une blessure ou un accident du travail est
respecté dans le cadre de la Loi sur la santé et la
sécurité du travail, dans le cas de la Loi sur les accidents du
travail. Comme toute personne qui se présente chez un médecin, il
est l'objet d'un questionnaire et d'un examen. À la suite de cette
analyse, de ce processus du diagnostic, le médecin détermine un
traitement. Habituellement, il établit le traitement en fonction de son
expérience, de sa connaissance du cas, de sa spécialité,
et c'est son jugement qui prévaut dans la relation de deux parties: le
client qui demande un service et le médecin qui le donne.
Quand on mêle à cela des problèmes de financement,
d'indemnisation, de durée d'incapacité, on entre dans le cadre
d'une autre loi, dans le cadre de la gestion courante de la réparation,
et c'est un autre organisme qui fixe des politiques administratives. Quand on
regarde des situations très faciles, où il n'y a pas beaucoup de
divergences d'opinions entre le diagnostic de deux médecins, il n'y a
pas de problème. Mais, en médecine, surtout en
physiothérapie, ou pour les pathologies locomotrices, il y a plusieurs
divergences d'opinions tant au niveau du diagnostic que du traitement, de sorte
qu'une même personne, se présentant avec la même histoire,
le même cas, le même problème chez deux médecins,
peut sortir de là avec deux prescriptions différentes, parce que
la science médicale est limitée pour certaines pathologies.
Quelle est l'opinion qui doit prévaloir? Est-ce celle du médecin
que le travailleur a choisi ou celle de l'expert consultant? On entre là
dans la gestion de la réparation.
Mais on ne peut en même temps faire le procès de la gestion
de la réparation et aussi celui de la pratique médicale. Les
médecins prennent des décisions en fonction des limites de leur
science et, actuellement, plusieurs pathologies ne sont pas suffisamment
connues, même que plusieurs conduites thérapeutiques ne s'appuient
pas sur suffisamment de connaissances scientifiques valables pour
entraîner l'unanimité de tout le monde.
Mme Harel: M. le Président, si vous me permettez, en fait,
vous nous référez à des diagnostics qui peuvent être
différents, selon le médecin que le client a choisi ou selon
l'expert consultant. Je pense que c'est là certainement un aspect de la
question. Par ailleurs, je pense que, dans le cadre de la
question que je vous ai posée, il ne s'agit pas de ce type de
problème. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'un traitement
différent à la suite d'un diagnostic différent, puisqu'il
s'agit, si j'ai bien compris d'une décision administrative qui est prise
d'une façon mécanique de ne pas accorder de traitement avant 21
jours indépendamment du fait qu'il y ait concordance ou non dans le
traitement de l'expert consultant ou du médecin choisi par le client.
Est-ce que je me trompe?
M. Vézina: Non. Si on entre dans la situation
concrète d'une politique administrative de la CSST...
Mme Harel: On y revient demain.
M. Sauvé: Généralement. Il faut faire
attention. Ce n'est pas absolu.
M. Vézina: Mais non! Je ne veux pas revenir, non plus, sur
le rapport Duranceau. C'est un comité d'experts qui s'est réuni,
qui a émis une opinion qui est actuellement contestée, comme vous
l'avez vu hier. Mais quand on n'a pas de recherche ou de connaissance
scientifique de ces cliniques, comme on dit dans le jargon randomisées
pour appuyer une conduite thérapeutique, la stratégie qu'on
utilise en échographie pour la surveillance de la femme enceinte, qu'on
utilise pour les écrans cathodiques et qu'on utilise pour les risques
ergonomiques, c'est l'approche de consensus d'experts. On réunit des
experts et on leur demande quelle est la meilleure des attitudes face à
l'absence de données scientifiques sérieuses. C'est ce qui a
été fait avec le rapport Duranceau.
M. Laberge: Si vous me le permettez, M. le Président,
justement après avoir rencontré toutes ces associations et
discuté assez longuement, nous nous sommes assurés que le projet
d'énoncé de politique de la permanence là-dessus parlait,
par exemple, non seulement des 21 jours, mais il disait ensuite qu'après
20 traitements cela cessait. On y a vu et la politique, maintenant, c'est que
cela ne cesse pas au bout de 21 traitements, mais on revoit le dossier, ce qui
est très différent.
Mme Harel: Dois-je comprendre, donc, que les 21 jours sont
maintenus?
M. Laberge: Les 21 jours... Tous les experts disent que, s'il y a
brisure quelque part, pendant les 21 premiers jours, ce sont les tissus qui se
réparent et il serait dangereux, même pour le patient, de lui
donner des traitements. Évidemment, je ne suis pas un expert
là-dedans.
M. Sauvé: Mais, sur ordonnance médicale, cela peut
être différent.
M. Laberge: Oui.
M. Sauvé: C'est pour cela que je dis que ce n'est pas
absolu. Les gens qui parlent de l'absolutisme n'ont pas bien lu, je pense, la
politique.
Mme Harel: La question on y reviendra demain au niveau de la
gestion courante - est peut-être de savoir la différence entre la
politique et la procédure, parce qu'on en a traité au niveau du
retrait préventif. Il y a des procédures. On ne peut pas le nier,
puisqu'il y a des personnes en chair et en os qui sont victimes de
décisions, de procédures, malgré des politiques qui,
elles, sont beaucoup plus générales et beaucoup plus
ouvertes.
Le Président (M. Blouin): Cela va? Y a-t-il d'autres
députés qui désirent intervenir? M. le
député de Beauharnois.
M. Lavigne: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais
remercier les membres de la commission d'être ici pour qu'on puisse
discuter, finalement, de l'administration de la CSST. On sait que, comme
députés, dans nos bureaux de comté, on est appelé
à se mêler, veux, veux pas, à toute la gestion et à
l'administration de la CSST, surtout dans un comté comme Beauharnois
où il y a énormément d'entreprises. Dieu merci, il y a
quand même chez nous un fort taux de personnes syndiquées
comparativement au reste du Québec. Ce sont, en général,
de grandes entreprises, mais, malheureusement, il y a encore un taux trop
élevé de travailleurs non syndiqués. C'est sûr qu'au
départ la personne syndiquée a certains avantages par rapport
à la personne non syndiquée. Elle a, bien sûr, le bureau de
député où elle peut s'adresser pour avoir de
l'information, mais elle a aussi son représentant syndical qui peut lui
donner un fier coup de main occasionnellement. Donc, si je dis cela, c'est
parce que le conseil d'administration de la CSST doit voir à ce qu'au
niveau de la gestion courante on puisse accorder le même traitement
à la personne syndiquée qu'à la personne non
syndiquée. Il faudrait peut-être même, sans être
paternaliste, faciliter l'approche ou la paperasse pour la personne non
syndiquée, qui en général, est plus dépourvue. Elle
n'a que ses propres moyens et on sait que, dans toute cette administration,
même si tout le monde est de bonne foi, il y a encore beaucoup de
formules et beaucoup de choses à comprendre. Même nous, qui sommes
mêlés de près à toute cette question, par moments,
on y perd un peu notre latin. Imaginez-vous que la personne qui travaille dans
une petite boutique, un atelier de couture ou comme serveur ou serveuse dans un
restaurant, qui est victime d'un accident de travail et qui
veut vérifier quels sont ses droits auprès de la CSST,
quelles chinoiseries il y a pour elle ou pour lui à apprendre la
réglementation et à connaître ses droits. C'est à ce
niveau, je pense, qu'il faudrait que le conseil d'administration... (17 h
30)
C'est difficile de séparer ou de tirer une ligne entre les
questions qu'on doit poser aujourd'hui aux membres du conseil d'administration
et les questions qu'on aura à poser demain sur la question de la gestion
courante. Cela est tellement relié de près. Il y a des zones
grises où parfois on se pose à soi-même la question de
savoir si c'est aujourd'hui ou demain. Cela a été le cas de ma
collègue, la députée de Maisonneuve.
Je voudrais quand même, à la suite des mémoires que
j'ai entendus hier, vous poser quelques questions, entre autres sur la
publicité. Est-ce que vous avez une politique au conseil
d'administration sur la publicité que vous devez faire sur la CSST, soit
la publicité ou l'information qui sort dans le grand public? Est-ce que
vous avez un budget sur cette question? Semble-t-il que la publicité -
je le dis à partir d'un mémoire présenté hier, et
vous me direz si les personnes qui ont soulevé cette question avaient
tort ou raison - qui a été mise à la portée de
l'ensemble des citoyens ne représentait pas tout à fait
exactement les services auxquels les personnes pouvaient s'attendre
après avoir lu cette publicité? Je dis qu'il est important de ne
pas annoncer, de ne pas dire ou de ne pas publier des choses pour susciter des
attentes quand, en fin de compte, on ne peut pas bénéficier des
attentes contenues dans la publicité qui circule dans la population.
C'est ma première question.
M. Sauvé: Oui, il y a un budget important pour la
publicité, M. le député.
M. Laberge: Trop petit, comme nous le disons.
M. Sauvé: Oui. Mais il n'y a publication que dans les deux
langues, en français et en anglais, pour le moment. Cela
répond-il à votre première question? Je pense que les
documents qui sont imprimés ne donnent pas de faux espoirs. Ils sont
assez vérifiés pour ne pas faire des promesses qui ne peuvent pas
être tenues. Il n'y a pas de promesses dans les documents. Vous avez vu,
même hier soir, les gens au bas de l'échelle dire que les
documents qui étaient faits sur la femme enceinte étaient
simples, très clairs, très précis, non légalistes
et très agréables. Je pense que c'est une politique interne
à la commission de s'assurer de ne jamais promettre des choses que nous
ne pouvons pas livrer et on a toujours fait cela depuis que la loi existe.
M. Lavigne: Seulement pour terminer, si vous permettez...
Le Président (M. Blouin): Oui.
M. Lavigne: Ils regrettaient par ailleurs qu'on ait retiré
cette publicité.
M. Sauvé: Ce n'est pas retiré, c'est
épuisé. C'est en réimpression. C'est ce qui arrive.
M. Lavigne: Cela n'a pas été volontaire, dans le
sens de dire qu'on arrête cette publicité.
M. Sauvé: Non, non. Quand c'est trop populaire...
M. Lavigne: Oui, c'est cela.
Mme Harel: Si vous me permettez, M. Sauvé, sur ce sujet,
j'aurais une question additionnelle. Cette publicité porte maintenant
beaucoup plus sur la réaffectation que sur le retrait. Est-ce exact?
M. Sauvé: On va expliquer tout cela demain, madame.
Mme Harel: Bien.
M. Laberge: Vous allez avoir une grosse journée
demain.
Mme Harel: C'est un rendez-vous. Le Président (M.
Blouin): M. Bédard.
M. Bédard (René): Je ne vois pas le
président, mais c'est mon tour. M. Lavigne, vous semblez insinuer que
les seuls en position de faire de l'information auprès des travailleurs
sont les syndicats.
M. Lavigne: Je n'ai pas dit cela.
M. Bédard (René): Vous dites cela. Vous dites qu'il
y en a qui sont plus heureux parce qu'ils sont syndiqués.
M. Lavigne: Non, je n'ai pas dit qu'ils étaient les seuls.
J'ai dit qu'ils étaient privilégiés par rapport à
d'autres.
M. Bédard (René): Il y a des employeurs qui font de
l'information et qui
font de l'excellente information aussi. Je voulais tout
simplement vous dire cela.
M. Lavigne: Merci.
Le Président (M. Blouin): M. Dufour.
M. Dufour: Vous parlez d'un type d'information, d'un type de
communication
comme les dépliants pour femmes enceintes. Il va en sortir aussi
sur les comités de santé et de sécurité, puisque je
viens d'en voir un. C'est un aspect des communications de la CSST. C'est
l'aspect qui vous préoccupe et, avec raison. Il nous préoccupe
aussi, mais il y a aussi tout l'aspect de l'information auprès des
employeurs. Là, je ne suis pas sûr qu'on ait la plus belle des
politiques de communication qu'on devrait se donner. Souvent, dans le champ, il
y a des politiques qui sont émises, au niveau régional notamment,
et qui n'ont pas nécessairement reçu l'autorisation du conseil
d'administration. On a eu à vivre ce genre de problème, notamment
avec le calcul du revenu net, dans la région de Montréal, dans le
domaine de la réparation. Cela a créé d'énormes
problèmes dans les entreprises. D'ailleurs, cela se pratique dans le
champ d'après une décision régionale sans que le conseil
d'administration ait de quelque façon accepté cette politique de
communication.
Quant à moi, M. le député, je pense que vous
soulevez un problème qui devra être débattu de nouveau au
conseil d'administration et non pas purement sous l'angle de l'information aux
travailleurs.
M. Lavigne: Merci, M. le Président. Je pourrais poser une
autre question, si vous le permettez. Je voudrais soulever cette question: les
directives émises, les grandes orientations prises par votre conseil
d'administration par rapport à la gestion courante à partir de la
loi. C'est quand même vous autres qui allez dire à la gestion, par
exemple... On a parlé du retrait préventif tout à l'heure.
Il semblerait que, dans un premier temps - c'est la même loi -on a
semblé interpréter la loi d'une façon un peu plus large;
dans un deuxième temps, il semblerait qu'on aurait resserré
l'interprétation de la loi. Je pense que c'est une directive qui doit
venir du conseil d'administration. Ou est-ce que l'administration courante
prend à son compte de resserrer ou de desserrer l'administration de la
loi?
M. Sauvé: II faut faire attention dans "resserrer". C'est
cela qu'on dit qu'on va expliquer demain matin.
M. Laberge: C'est une très bonne question quand
même. Cela n'a rien à voir avec le conseil d'administration. C'est
la permanence.
M. Sauvé: C'est cela.
M. Dufour: Je pense quand même que vous avez en partie
raison. Je vais donner un exemple que soulevait comme dossier Au bas de
l'échelle hier, en faisant référence notamment au Conseil
du patronat: il y a une lettre qu'on a envoyée sur le retrait
préventif de la femme enceinte. Peut-être que c'est à cela
aussi que faisait référence Mme Harel. C'est sûr que nous,
quand on a su que certains DSC appliquaient ce que le Protecteur du citoyen a
donné comme définition de ce que devaient être les
conditions ambiantes pour un retrait préventif, ce n'était pas
notre compréhension de la loi. Cela ne l'est toujours pas. À ce
moment, au niveau des membres du conseil, qu'on apporte cela au conseil et
qu'on dise: Cela n'a pas d'allure. Quelle que soit la condition - qui n'a rien
à voir avec le travail - on va permettre un retrait préventif
payé par le fonds de la CSST: Oui, dans cette situation, en tout cas,
nous, on va attirer l'attention de la direction comme membres du conseil
d'administration. Dans ce sens, vous avez raison.
M. Sauvé: Et on va vous dire demain, avec chiffres
à l'appui, qu'il y a plus de demandes acceptées que dans le
passé. Vous allez avoir des surprises, je pense. On va tout vous dire
cela demain.
M. Lavigne: D'accord. Je voudrais, en terminant, vous poser une
question que je pense très pertinente. M. Laberge a dit, je pense, sans
ambiguïté, très clairement, qu'il valait mieux vivre avec la
loi 17, à la CSST, que de ne pas l'avoir. J'aimerais savoir si, du
côté patronal, M. Dufour, vous êtes d'accord avec cela.
Est-ce que la loi 17, en d'autres mots, est un bon outil de travail? Il s'agit
de roder le conseil d'administration, la gestion courante de s'habituer
à vivre avec le plus harmonieusement possible et aussi d'apprendre, je
pense, non pas seulement aux membres de l'exécutif ou de la gestion
courante, mais au commun des mortels, à la population en
général, qu'elle a des droits et que, pour être
indemnisée ou pour avoir accès à cette loi, elle peut le
faire avec le moins de paperasse possible et dans la plus grande
simplicité. J'aimerais savoir si c'est un bon outil, la loi 17 et si la
CSST est aussi un bon outil. Est-ce qu'on devrait mettre la hache
là-dedans et penser à une autre formule ou si on n'est pas mieux
de garder tout cela et d'essayer de polir un peu l'outil qu'on a entre les
mains?
Le Président (M. Blouin): M. Dufour.
M. Dufour! Je voudrais d'abord demander à M. Laberge si
vous l'avez bien cité.
M. Laberge: Répondez.
M. Lavigne: Je m'excuse, M. Dufour, si j'ai mal
interprété M. Laberge, mais je l'avais interprété
comme cela.
M. Laberge: Si je l'avais cru, je serais intervenu. Si je ne suis
pas intervenu, c'est parce que je suis d'accord avec ce que vous dites.
Le Président (M. Blouin): Cependant, je note, M. le
député de Beauharnois, que votre question à l'égard
de la loi 17 peut amener une réaction de la part des membres du conseil
d'administration. Redemander aux membres du conseil d'administration
d'évaluer la CSST, c'est reprendre tout le débat à
zéro.
M. Dufour: C'est refaire le mémoire de ce matin.
Le Président (M. Blouin): Largement.
M. Dufour: Je pense qu'on a encore été très
clair, et je vais le dire en deux phrases. On a été très
clair au niveau des objectifs, le monde patronal veut réduire les
accidents de travail, les maladies professionnelles, sauf que, sur un bon
nombre de moyens, on s'interroge. D'ailleurs, la partie syndicale s'interroge
sur bon nombre de moyens et on ne s'en cachera pas. Mais ce n'est pas facile
à vivre et il y a des secteurs qui ont plus de difficultés que
d'autres pour des raisons que vous connaissez et que vous allez apprendre
à connaître si vous vous impliquez dans le dossier. Nous, ce qu'on
dit souvent, c'est que, dans des comtés comme le vôtre, justement,
se véhiculent peut-être plus des préoccupations de
travailleurs que des préoccupations d'entreprises. Nous aussi, on a une
espèce d'attente de votre part de faire une jonction de ces deux
préoccupations, et cela aiderait à faire bien vivre davantage la
loi 17.
M. Lavigne: C'est une préoccupation que j'ai à
coeur, M. Dufour, de faire en sorte que, d'abord, tout cela soit basé
sur le bipartisme. Il y a la partie syndicale et la partie patronale, et je
pense que je serais très malvenu. C'est une loi qui est quand même
issue de mon parti, de mon gouvernement. J'ai été témoin
du débat sur la loi 17 et de la mise en place de la CSST, et je me
sentirais très malvenu, comme député, dans mon
comté, de ne pas jouer le jeu qu'il faut que je joue, soit de prendre
tous les moyens qu'il faut pour rassembler les deux parties et de faire en
sorte qu'elles puissent travailler le plus harmonieusement possible. Je pense
que cela est mon devoir de le faire.
M. Laberge: Et d'essayer, s'il y a moyen, de bonifier tout
cela.
M. Lavigne: Bien sûr!
M. Laberge: Évidemment, bien sûr.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le
député de Beauharnois. M. le député de
Mille-Îles.
M. Champagne (Mille-Îles): Merci, M. le Président.
Deux courtes questions au sujet du fonctionnement de la commission.
Dans votre déclaration d'ouverture, M. Dufour, vous avez dit,
à la page 7, que le conseil d'administration de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail déplorait le
fait que les membres du conseil d'administration étaient
impliqués dans la réglementation beaucoup plus que dans
l'administration. Est-ce inévitable, compte tenu du mandat de la
commission, ou s'il faut le déplorer?
M. Dufour: Je ne l'ai pas déploré. J'ai juste dit,
en somme, que nous avons été -c'est une constatation -
impliqués dans la réglementation beaucoup plus que dans
l'administration. Je n'ai pas porté de jugement; j'ai décrit des
faits. Et c'est vrai.
M. Champagne (Mille-Îles): C'est vrai, mais vous aimeriez
peut-être une amélioration dans le fonctionnement, administrer
davantage et moins réglementer.
M. Dufour: Dans la question de l'administration, je pense aussi
qu'on a lancé un certain nombre d'éléments-solutions
à certains des problèmes tout au cours de la journée.
Être impliqué davantage dans l'administration, non. S'il s'agit
d'aller décider des cas du bureau de Longueuil, non. Il y a des grandes
politiques générales dans lesquelles on veut être
impliqué. Je vais vous donner un beau cas: on n'en a pas parlé et
ce serait quasiment épouvantable qu'on n'en parle pas. Il vient de se
faire, dans le champ, une fusion de l'inspection et de la prévention. Ce
n'est pas encore décidé au conseil d'administration, il n'y a pas
encore de chose officielle de terminée quant à ce dossier. Pour
le P.-D.G., c'est une question d'administration. Sa vision de l'artile 154,
c'est de l'administration courante, de la gestion. Pour la partie patronale,
qui n'a jamais accepté que l'inspection soit transférée
à la CSST, c'est bien évident qu'on ne peut pas être
d'accord avec une telle fusion. Cela vous donne un élément de
réponse. Être impliqué dans l'administration directe de
l'inspection, bien non! Mais dans la structure, dans l'organigramme qui va
décider cela, oui! Et cela, c'est de l'administration.
M. Champagne (Mille-Îles): Une dernière question.
Dans votre conclusion, vous dites, à la pge 9: "Des amendements nous
apparaissent essentiels à certains modes de fonctionnement actuels de la
CSST. Nous avons hérité de certaines structures, de
certains modes de fonctionnement qui provoquent de justes
récriminations chez les entreprises." Enfin, est-ce que vous pourriez
dire quels sont les amendements que vous souhaitez voir se réaliser au
comité?
M. Dufour: On les fera surtout à l'occasion de la loi 42,
encore là pour donner une chance à l'association des mines et
à l'AECQ. Quand on dit qu'on a hérité de strutures, on a
hérité de la régionalisation, on ne s'est jamais
posé la question à savoir si on était même d'accord
avec cela. On a hérité d'un organigramme, d'un certain nombre de
vice-présidences. On a hérité de systèmes. Ce sont
des choses qu'on devrait, à tout le moins, remettre en cause; mais plus
fondamentalement que cela, le rôle du Vérificateur
général, les pouvoirs du ministre, l'article 154 en question. Les
décisions dans le champ, dont on parlait tantôt: la
réparation, la fusion, l'inspection, la prévention, ce sont des
modes de fonctionnement que, actuellement, on voudrait débattre de
nouveau et remettre en cause.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le
député. Sur ce, au nom de tous les membres de la commission, je
remercie les membres du conseil d'administration de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail de leur très
importante collaboration et de leurs témoignages. (17 h 45)
Nous avons maintenant, vous le réaliserez, un problème
technique important. Il est 17 h 45, il y a deux autres organismes dont nous
avions prévu l'audition aujourd'hui. Alors, la suggestion qui m'a
été faite - s'il y a consentement de tous les membres de cette
commission - ce serait que nous poursuivions au-delà de 18 heures, que
nous entendions un des deux organismes invités et que nous reportions
l'audition du deuxième organisme à demain. Est-ce que cette
proposition est agréée par les membres de la commission?
M. Cusano: Seulement une clarification, M. le Président.
Oui, on serait d'accord pour entendre un organisme ce soir et l'autre demain,
mais on retient l'entente voulant que le conseil de direction de la CSST ait
toute une journée devant cette commission.
M. Fréchette: M. le Président, il est bien
évident qu'on est dans un cul-de-sac, devant un imbroglio. Par ailleurs,
j'ai aussi l'impression très nette qu'on n'a pas perdu notre temps, on a
assisté à ciel ouvert à une réunion du conseil
d'administration. Je pense que cela a été fort utile pour tout le
monde.
Je voudrais, comme première information, suggérer que les
membres du conseil d'administration qui le désirent puissent être
libérés dès ce soir, c'est-à-dire que la
présence de personne ne sera requise à compter de maintenant,
dès que les témoignages sont terminés. Par ailleurs, il
est également important de souligner que, si des membres du conseil
d'administration étaient intéressés à suivre la fin
de nos travaux et voulaient, en dernière instance, revenir
témoigner, il y a une entente dans ce sens-là pour que cela
puisse être fait. Je ne sais pas si c'est suffisamment clair.
M. Laberge: Très clair. Nous y serons.
M. Fréchette: C'était la première annonce du
prône.
Quant à l'autre problème devant lequel nous sommes, M. le
Président, évidemment, on ne peut pas composer avec le temps, on
est rendu dans cette situation. La suggestion que le député de
Viau vient de faire m'agréerait quant à moi, c'est-à-dire
que, si l'une ou l'autre des deux associations qui étaient sur le
rôle pour aujourd'hui voulait se faire entendre ce soir et si elle nous
disait que, d'ici à 19 heures, elle a suffisamment de temps pour
soumettre son mémoire, nous procéderions à cette audition
et remettrions l'autre à demain.
Quant à l'audition de la permanence de la commission, il faudra -
je ne sais pas comment on va procéder - nous entendre pour une autre
journée d'ici à la fin de la session. On n'a pas beaucoup
d'options, sauf qu'on a vécu hier - et je le mets sur la table pour ce
que cela vaut, vous en ferez ce que vous voudrez - une expérience
concluante, intéressante, alors que deux organismes qui soumettaient des
mémoires ont accepté de s'asseoir à la même table et
de partager le temps. Cela nous a permis d'entendre deux mémoires
à la fois.
Je vous réitère que cela n'est qu'une suggestion, on en
fera ce qu'on voudra. Si elle est refusée, bien sûr, il va nous
falloir encore une fois, comme je le disais il y a quelques instants, composer
avec le temps. Si, par ailleurs, elle était acceptée, nous
pourrions ce soir compléter l'agenda qui était prévu et
libérer tout le monde demain soir. Cela, M. le Président, je le
mets sur la table à titre de suggestion.
Le Président (M. Blouin): Est-ce que cette suggestion, si
elle était acceptée, pourrait convenir aux membres de la
commission?
M. Cusano: Oui.
Le Président (M. Blouin): Alors, nous allons suspendre une
minute ou deux, en demandant aux représentants de l'Association des
entrepreneurs en construction et de l'Association des mines de métaux du
Québec de venir en avant pour que nous puissions
discuter de ces possibilités, s'il vous plaît. (Suspension
de la séance à 17 h 49)
(Reprise de la séance à 17 h 56)
Le Président (M. Blouin): S'il vous plaît! S'il vous
plaît! Après avoir discuté avec les organismes
concernés, il a été entendu que nous allions
écouter et ensuite procéder aux échanges avec ces deux
organismes au cours de la journée de demain. Au cours d'une date
ultérieure, d'ici à la fin de la session, l'administration de la
CSST pourra être entendue. Sur ce, nous ajournons nos travaux sine die.
Mais, comprenez que cela veut dire, demain, vers 11 h 30.
(Fin de la séance à 17 h 57)