Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Vingt heures vingt minutes)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente du travail reprend ses travaux pour
l'étude du projet de loi 17, Loi modifiant le Code du travail et
diverses dispositions législatives.
Les membres de la commission sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), Dean (Prévost), Johnson (Anjou), Marquis
(Matapédia), Lafrenière (Ungava), Mme Juneau (Johnson), Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Blais (Terrebonne), Paradis (Brome-Missisquoi),
Rivest (Jean-Talon), Mme Lachapelle (Dorion).
Les intervenants à cette commission sont: MM. Bélanger
(Mégantic-Compton), Champagne (Mille-Îles), Fortier (Outremont),
Leduc (Fabre), Pagé (Portneuf), Payne (Vachon), Polak (Sainte-Anne),
Proulx (Saint-Jean), Vaugeois (Trois-Rivières).
Le rapporteur étant désigné, j'appelle
immédiatement les articles. Nous en étions à l'article
24.
M. le député de Mégantic-Compton.
M. Bélanger: Avant d'appeler l'article 24, M. le
Président, je voudrais vous dire qu'après entente de part et
d'autre il y aura sûrement certains de mes collègues qui viendront
se joindre à nous dans quelques minutes. Je demanderais la permission de
les ajouter à la liste des membres ou à celle des intervenants.
La raison est fort simple; c'est que nous discutons actuellement a
l'Assemblée nationale d'un autre projet de loi justement sur les
relations du travail. C'est la raison pour laquelle nous sommes peu
nombreux.
Le Président (M. Desbiens): S'il y a consentement, il n'y
a pas de problème. Pour deux, M. le ministre?
M. Johnson (Anjou): Pour deux.
Le Président (M. Desbiens): Consentement pour deux.
J'appelle l'article 24.
Modifications au Code du travail (suite)
M. Johnson (Anjou): II s'agit essentiellement, M. le
Président, d'accorder un délai de trente jours plutôt que
de quinze jours dans le cas des enquêtes en matière de devoir de
représentation syndicale.
M. Bélanger: Est-ce que c'est demandé par le
milieu? Est-ce qu'on peut savoir pourquoi on porte le délai de quinze
à trente jours? Cela semble un peu surprenant qu'on veuille faciliter
les relations du travail et accélérer les procédures et
que nous passions de quinze à trente jours. Si vous voulez faire un
"filibuster", je n'ai pas d'objection, mais je ne comprends pas.
M. Johnson (Anjou): Je m'excuse, je n'ai pas entendu.
M. Bélanger; M. le Président, c'est avec plaisir
que je vais recommencer pour le ministre. Il semblerait que le projet de loi 17
favorise l'accréditation syndicale et les relations du travail pour,
finalement, faire en sorte que le processus soit plus court et moins
pénible et là, on passe d'un délai de quinze jours
à trente jours.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, il faut lire les
articles 47.3 et 47.4 pour comprendre la portée de cela. On dit à
ces articles: "Si un salarié qui a subi un renvoi ou une sanction
disciplinaire croit que l'association accréditée -
c'est-à-dire son syndicat - viole à cette occasion l'article 47.2
- qui prévoit l'égalité de traitement entre les individus
par son syndicat - il doit, s'il veut se prévaloir de cet article,
porter plainte par écrit au ministre dans les six mois. Le ministre
nomme alors un enquêteur qui tente de régler la plainte à
la satisfaction de l'intéressé et de l'association
accréditée. "Si aucun règlement n'intervient dans les
quinze jours - c'est ce "quinze" qu'on change pour "trente" jours - de la
nomination de l'enquêteur ou si l'association ne donne pas suite à
l'entente, le salarié doit, s'il veut se prévaloir de l'article
47.2, faire une requête au tribunal dans les quinze jours suivants et
demander à ce dernier d'ordonner que sa réclamation soit
déférée à l'arbitrage".
M. le Président, c'est donc essentiellement un mécanisme
en vertu duquel on permet à un salarié de porter plainte contre
son syndicat s'il estime que son syndicat a eu une attitude - pour reprendre un
mot qu'on a utilisé
discriminatoire à son égard. Le ministre nomme un
enquêteur qui essaie de régler le problème. La plupart du
temps, cela se règle par la nomination de l'enquêteur; mais quinze
jours pour faire rapport et déclencher ensuite le délai qui
permet d'obtenir du tribunal que ça soit déféré
à l'arbitrage dans le cas d'un grief, c'est un peu serré. C'est
donc simplement pour faciliter l'exercice des droits de l'individu.
M. Bélanger: Si j'ai bien compris, c'est en faveur des
travailleurs. Donc, M. le Président, nous n'avons aucune objection
à adopter cet article.
Le Président (M. Desbiens): L'article 24 est
adopté. J'appelle l'article 25.
M. Johnson (Anjou): II s'agit simplement de dire, M. le
Président, que le commissaire du travail peut réviser ou
révoquer une décision ou un ordre rendu, pourvu que, dans le cas
où il peut y avoir appel, il n'y ait pas eu d'appel interjeté de
la décision au tribunal, ou que le tribunal n'ait pas encore
disposé de l'appel. Deuxièmement, on introduit le fait que le
commissaire peut corriger des erreurs de nature technique ou des erreurs
d'écriture.
M. Bélanger: Cela, M. le Président, c'est beaucoup
plus compliqué. Je comprends très bien que, lorsqu'on veut
corriger des erreurs d'écriture, c'est facile. Est-ce que cela n'ouvre
pas la porte à des changements de décision ou à des
renversements de décision? C'est là un danger, M. le
Président. À propos de l'article qui dit: "Un commissaire du
travail peut d'office ou à la demande d'une partie réviser ou
révoquer toute décision". C'est une décision de qui?
M. Johnson (Anjou): En fait, c'est que le Code du travail, avant
d'être amendé par la loi 17, était libellé de
façon telle que la jurisprudence, à toutes fins utiles,
interdisait au commissaire du travail de réviser une décision
qui, elle-même, était entachée d'erreurs provenant d'un
agent d'accréditation. Le nouveau libellé vise à permettre
au commissaire de réviser une décision elle-même
entachée d'irrégularités venant de l'agent
d'accréditation et, par ailleurs, de corriger les erreurs
d'écriture, ce qui est une notion qu'on retrouve dans le Code de
procédure civile.
M. Bélanger: C'est-à-dire que le commissaire du
travail peut renverser la décision d'un agent d'accréditation en
tout temps, quand bon lui semble. Et cela pourrait se répéter,
par exemple, à plusieurs reprises, sans qu'aucune sanction soit
prévue, sans aucune pénalité.
M. Johnson (Anjou): Oui, c'est un fait.
M. Bélanger: Et qu'existait-il auparavant? Il n'avait pas
le droit de le faire?
M. Johnson (Anjou): Non.
M. Bélanger: Selon les parrains du projet de loi 17,
c'était un besoin, c'était une nécessité?
M. Johnson (Anjou): On rétablit le droit qui existait
avant 1977. En 1977, on a changé le code; on a utilisé une
formule un peu plus restrictive et qui avait comme effet de paralyser la
possibilité pour le commissaire du travail de changer les
décisions de l'agent d'accréditation.
M. Bélanger: C'est agréable de constater, M. le
Président, qu'avant que le Parti québécois soit au pouvoir
on avait des lois, on avait un Code du travail qui, vraiment, était fait
à la mesure des besoins du Québec. Ce gouvernement, en arrivant
au pouvoir, a tout changé. Je suis heureux de voir qu'aujourd'hui on
revient en arrière et on corrige les erreurs qu'on a faites. Si cela va
comme cela, M. le Président, j'ai l'impression qu'on va être en
commission parlementaire souvent et longtemps parce que, sur beaucoup de
choses, il faudra revenir à avant 1977.
M. Johnson (Anjou): On va adopter le projet de loi avant minuit,
si je comprends?
M. Bélanger: Je pense que oui, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 25 est
adopté?
M. Bélanger: Je n'ai pas d'objection, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): Adopté. J'appelle
l'article 26. Est-ce que l'article 26 est adopté?
M. Bélanger: Vous allez trop vite. M. le Président,
le ministre pourrait peut-être nous donner des explications sur cet
article.
M. Johnson (Anjou): Oui. Essentiellement, il s'agit de dire qu'un
employeur ou le syndicat ne peuvent invoquer le fait qu'il y a une dispute
à savoir qui est couvert par l'unité, c'est-à-dire qui est
couvert par le certificat d'accréditation, pour ne pas
négocier.
M. Bélanger: M. le Président, je comprends mal. En
effet, si l'employeur et l'association ne veulent pas négocier de
bonne foi, cela va nous mener à quoi? On a vu cela ici au mois de
décembre dernier quand le gouvernement ne voulait pas négocier.
Les centrales syndicales voulaient négocier, mais le gouvernement ne
voulait pas négocier et préférait décréter.
Cela sert à quoi de les faire négocier de force? On a
tenté cela, nous, par des motions à l'Assemblée nationale.
On est venu à bout finalement d'avoir une commission parlementaire pour
tenter de faire négocier le gouvernement. Mais même s'il y avait
une loi pour les obliger à négocier, lorsqu'on n'est pas de bonne
foi, on peut facilement passer deux ou trois nuits au Hilton, dans une chambre
d'hôtel, et arriver au matin et dire... On pourrait faire la même
chose ici, M. le Président, en commission parlementaire. On pourrait
parler jusqu'à minuit et ne pas adopter un seul article. (20 h 30)
Alors, je ne vois pas la nécessité d'imposer une
négociation de force. La négociation, cela se fait de bonne foi.
Dieu sait si on n'a pas été servi dans les négociations
depuis quelques années. Cela n'a pas semblé aller très
bien. Là, on les force. On dit: Dorénavant, vous allez être
obligés de commencer les négociations. Cela va nous mener
où, servir à quoi d'autre que d'avoir plus de rencontres? Il n'y
a rien qui nous assure que ces rencontres seront fructueuses. Le but de
négocier - on ne parlera pas de ce qui s'est négocié dans
le bureau du premier ministre, c'est une autre affaire -pour les parties
patronale et syndicale, c'est de tenter d'en arriver à un terrain
d'entente. Il faut que les deux parties soient de bonne foi. C'est du "take and
give", si vous me permettez l'expression anglaise, c'est-à-dire:
Écoute, je ne peux pas t'accorder cela, mais peut-être qu'on
pourrait s'entendre sur cela, etc. Si vous les forcez lorsqu'ils ne veulent pas
le faire, vous avancez à quoi? Absolument rien. Je voudrais que le
ministre m'explique en quoi cet article 26 va améliorer notre Code du
travail.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, essentiellement,
c'est qu'il y a une unité: les employés de la production de
l'usine ABC Inc., et il y a un employeur qui est le propriétaire d'ABC.
À un moment donné, l'employeur ou le syndicat va en appel devant
le Tribunal du travail ou devant le commissaire après une
décision de l'agent pour dire: Écoutez, telle et telle personne
sur la ligne de production, on considère qu'elle ne devrait pas faire
partie de l'unité accréditée.
L'article dit: On ne peut pas invoquer le fait qu'il y a un litige
autour de l'inclusion ou de l'exclusion d'une personne dans l'unité pour
ne pas négocier la convention collective. Vous pouvez avoir un endroit
où il y a 25 personnes, il y en a 23 prévues dans l'unité
d'accréditation. On se chicane entre l'employeur et le syndicat à
savoir si la personnes qui est la 24 en vertu de l'ancienneté ou de je
ne sais pas quoi devrait être couverte ou pas compte tenu de ses
fonctions. On dit que cela n'est pas un motif pour ne pas négocier
l'ensemble. C'est tout.
M. Bélanger: C'est seulement cela.
M. Johnson (Anjou): Par ailleurs, l'obligation de négocier
de bonne foi existe déjà dans le code en vertu de l'article
53.
M. Bélanger: Vous faites quoi pour déterminer
qu'est-ce que c'est, la bonne foi?
M. Johnson (Anjou): Pardon?
M. Bélanger: Vous vous basez sur quels critères
pour déterminer qu'il n'y a pas de négociation de bonne foi?
M. Johnson (Anjou): C'est la jurisprudence qui donne des exemples
de cela.
M. Bélanger: C'est laissé au tribunal.
M. Johnson (Anjou): Des fois, c'est le gros bon sens. Des fois,
cela paraît.
M. Bélanger: M. le Président, on va l'adopter sur
division.
Le Président (M. Desbiens): Article 26, adopté sur
division. J'appelle l'article 27.
M. Johnson (Anjou): Amendement.
Le Président (M. Desbiens): Un amendement.
M. Bélanger: II y a un amendement. On va attendre.
Le Président (M. Desbiens): J'en avais une copie.
M. Johnson (Anjou): II y a un papillon, M. le Président,
et je peux en faire lecture. L'article 27 du projet de loi 17 est
remplacé par le suivant: "27. Ce code est modifié par
l'insertion, après l'article 57, de l'article suivant: "57.1 Un
conciliateur ne peut être contraint de divulguer ce qui lui a
été révélé et ce dont il a eu connaissance
dans l'exercice de ses fonctions ni de produire un document fait ou obtenu dans
cet exercice devant un tribunal, ou un arbitre ou devant un organisme ou une
personne exerçant des fonctions judiciaires ou quasi judiciaires."
L'objet des dispositions de la loi 17 c'est de rendre les conciliateurs
non contraignables devant les tribunaux. L'objet
de l'amendement que nous apportons au projet de loi est de rendre non
contraignable le conciliateur devant les arbitres, en plus des tribunaux comme
cela existe dans la majeure partie des provinces canadiennes, ainsi que dans le
code fédéral.
M. Bélanger: M. le Président, à l'article
27, 57.1, on dit: "Un conciliateur ne peut être contraint de divulguer".
Est-ce qu'auparavant il était contraint de divulguer?
M. Johnson (Anjou): II pouvait techniquement l'être. Le
tribunal pouvait assigner un conciliateur qui avait agi dans tel dossier, si
pour une raison ou pour une autre, il y avait quelque chose qui se retrouvait
devant le tribunal, à aller divulguer ce qui c'était passé
au moment de la conciliation.
M. Bélanger: Vous voulez qu'il soit couvert par le secret
professionnel.
M. Johnson (Anjou): Si on veut. C'est une façon de
s'exprimer.
M. Bélanger: C'est pratique.
M. Johnson (Anjou): II y a des conflits qui sont très
complexes dont les tribunaux se sont mêlés pour toutes sortes de
raisons, sûrement légitimes puisqu'ils s'en occupent. Dans la
mesure où l'on veut permettre à nos conciliateurs de faire leur
boulot en toute quiétude, leur rôle étant essentiellement
de rapprocher les parties pour trouver des solutions et les aider à en
trouver, on pense que ce type d'immunité devrait exister comme cela
existe dans toutes les Législatures canadiennes à l'égard
des conciliateurs. Le sous-ministre, M. Blain, qui est un homme de grande
expérience dans ce domaine, me rappelle un principe de base: quand les
parties ont signé une convention collective, c'est l'affaire des
parties. Je ne vois pas pourquoi on n'utiliserait pas une formule de
non-contraignabilité à l'égard des conciliateurs.
Ultimement, une convention collective, cela finit par se signer ou, me
dira-t-on, cela se décrète. Mais cela finit ultimement par se
signer. Celles qui se décrètent habituellement n'ont pas
donné lieu à de la conciliation. D'habitude, elles se sont
terminées par une signature, des fois après les
décrets.
M. Bélanger: Jusqu'à aujourd'hui, jusqu'à ce
que cette loi 17 soit adoptée, est-ce qu'à plusieurs reprises on
a forcé un conciliateur à témoigner en cour?
M. Johnson (Anjou): C'est arrivé à quelques
reprises au ministère.
M. Bélanger: Assez pour inclure l'article?
M. Johnson (Anjou): Oui. Assez pour que ce soit ennuyeux pour les
services de conciliation. Je pense que les services de conciliation au
Québec ont connu, depuis sept ou huit ans, une période où
s'est bâtie, s'est confirmée leur crédibilité et
qu'il faut donner cette protection aux conciliateurs.
M. Saintonge: Avec l'idée d'étendre cette
protection, cette espèce de confidentialité non seulement au
tribunal mais à un organisme ou à une personne exerçant
des fonctions judiciaires ou quasi judiciaires, ne trouvez-vous pas que vous
élargissez de beaucoup la question de la confidentialité que vous
pouvez accorder, à ce moment, aux conciliateurs?
M. Johnson (Anjou): II faut bien comprendre. Il s'agit de la
non-contraignabilité, ce qui ne veut pas dire que, proprio motu, le
conciliateur qui voudrait aller témoigner ne le pourrait pas. On dit
simplement qu'il ne pourrait pas être forcé de le faire. Si on
l'étend aux organismes et aux personnes exerçant des fonctions
judiciaires ou quasi judiciaires, c'est parce qu'on s'est posé la
question au moment de la formulation de l'article. Si, par exemple, une
commission royale d'enquête devait enquêter sur un conflit
particulier, on a dit: II faudrait appliquer la règle
générale dans la mesure où c'est judiciaire ou quasi
judiciaire. Si ce n'est pas judiciaire ou quasi judiciaire, mais purement
administratif, c'est autre chose.
M. Saintonge: Quand on mentionne, "ne peut être contraint",
en fait, je peux comprendre que c'est le conciliateur qui en son âme et
conscience décidera si, oui ou non, il veut se soumettre à cette
règle. C'est bien cela?
M. Johnson (Anjou): C'est cela.
M. Saintonge: Vous ne considérez pas qu'un conciliateur,
à ce moment, pourrait être placé dans un drôle
d'embarras ou subir des pressions de toutes sortes puisque c'est lui qui aura
dans une circonstance donnée le pouvoir ou non de se sentir lié
par les paroles ou les documents dont il a possession.
M. Johnson (Anjou): Je ne suis pas inquiet quant aux pressions.
Dans la mesure où il n'est pas contraignable, il n'y a personne qui va
essayer de faire des pressions sur lui pour qu'il choisisse d'y aller. Par
exemple, on dit qu'un ministre de la couronne n'est pas contraignable en vertu
des règles de la Loi sur l'Assemblée nationale, si je ne me
trompe pas. Comme un juge n'est
pas contraignable, sauf devant une commission parlementaire qui n'a pas
fait attention. Cela ne veut pas dire qu'il va y avoir des pressions pour que
les gens aillent témoigner, à l'exception des commissions
parlementaires.
M. Saintonge: Ce n'est pas un bout de bâton qu'on peut
donner au conciliateur dans ses mains, dans le fond.
M. Johnson (Anjou): C'est pour protéger sa
crédibilité. C'est parce qu'un conciliateur qui serait
appelé à témoigner, disons, devant un arbitre est aux
prises avec un risque de toucher sa propre crédibilité. Le
travail de conciliateur, par définition, c'est, sinon d'essayer de faire
se joindre des contraires -des fois, cela arrive sur les conflits difficiles -
de faire en sorte que les parties se rejoignent quelque part. Pour faire cela,
un conciliateur peut être appelé à pousser dans le dos
d'une partie, à tirer sur une autre, à se livrer à des
manoevres très difficiles, très délicates. Mais il y a une
chose qui garantit le succès de son travail, c'est sa
crédibilité. Je pense que le fait de pouvoir contraindre un
conciliateur devant un arbitre, par exemple, ferait que la
crédibilité des conciliateurs pourrait être mise en doute.
Les parties restent libres; si un syndicat et un employeur ne sont pas contents
d'un conciliateur, il peuvent écrire au ministre, ils peuvent dire
qu'ils ne sont pas heureux, ils peuvent se plaindre. Avec quinze ans d'histoire
dans le ministère, il y a eu quelques cas où des conciliateurs
ont eu des problèmes. Ce ne sont pas des surhommes ou des surfemmes,
mais, de façon générale, ce sont des personnes
crédibles et pour tout ce qui peut atteindre leur
crédibilité, on y va avec beaucoup de circonspection. Je pense
qu'il faut leur donner cette protection.
M. Saintonge: Qu'est-ce qui arriverait dans le cas où on
serait devant un tribunal, un organisme ou une personne exerçant des
fonctions judiciaires ou quasi judiciaires et que le tribunal était au
courant de ce qu'on a révélé au conciliateur ou de ce dont
il a eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions? N'y aurait-il pas lieu
alors de modifier l'article ou de prévoir une disposition par laquelle,
si ces éléments sont à la connaissance du tribunal par une
des parties le conciliateur ne pourrait pas invoquer un tel droit, non pas
à la confidentialité, mais à ne pas divulguer telle chose,
pour autant que le tribunal soit au courant par une des parties des faits en
question?
M. Johnson (Anjou): Encore une fois, je vais faire la
distinction. L'article ne dit pas que ce que le conciliateur fait ne peut pas
être divulgué; l'article dit qu'il ne peut pas être
contraint devant un tribunal. Il y a une distinction importante. Un
conciliateur, théoriquement, pourrait écrire ses mémoires
et dire tout ce qu'il sait de tous les représentants syndicaux et
patronaux et rien dans nos lois n'interdirait cela. Mais ce qu'on dit, c'est
qu'on ne peut pas, à toutes fins utiles, envoyer une sommation ou une
ordonnance de comparution à un conciliateur dans une cause, qu'il
s'agisse d'un arbitre ou d'un tribunal. En d'autres termes, on traite la
conciliation comme ce qu'elle est, c'est-à-dire une institution publique
à la disposition des parties, par opposition à l'intervention
d'un individu. On pense que l'institution qu'est la conciliation doit
être protégée par la non-contraignabilité comme
d'autres, dans notre société, bénéficient de la
non-contraignabilité. En vertu de la Loi sur la fonction publique, je
pense d'ailleurs qu'il y en a qui bénéficient de la
non-contraignabilité; c'est le cas des sous-chefs, des sous-ministres,
bien que je ne puisse pas l'affirmer avec certitude. Je vais demander à
quelqu'un de le vérifier et on confirmera cela plus tard.
M. Saintonge: Le point que je voulais soulever, M. le ministre,
c'est, que le conciliateur ne peut pas être contraint, selon l'article de
la loi, de divulguer ce qu'est à sa connaissance, mais si le tribunal,
dans un cas précis, était déjà au courant?
M. Johnson (Anjou): C'est que la preuve aurait été
faite autrement.
M. Saintonge: Oui, mais est-ce qu'il ne serait pas bon de le
délier ou de ne pas accorder ce pouvoir de ne pas être contraint
au conciliateur pour confirmer, par exemple, l'élément de preuve
présenté devant le tribunal? Cela pourrait être essentiel,
dans certains cas, que le conciliateur vienne confirmer un fait dont le
tribunal est au courant par un autre témoin. En vertu de cette
disposition de l'article 57.1, le conciliateur invoquant ce principe de ne pas
être contraint à divulguer cette chose, on ne pourrait pas
parfaire ou ajouter un complément à une preuve déjà
devant le tribunal.
M. Johnson (Anjou): D'abord, il faut faire une distinction. En
matière de droit criminel, cette disposition ne verrait pas
d'application. S'il s'agit d'un acte criminel, cela n'a rien à voir avec
la réalisation des objets du Code du travail. Si, à l'occasion
d'une conciliation, un représentant patronal menace quelqu'un de mort ou
un représentant syndical menace de sévices graves une autre
personne et qu'il en résulte une poursuite criminelle, je pense que le
conciliateur serait contraignable comme témoin d'un acte criminel,
à savoir une tentative de voies de
fait ou autrement. Cela n'a rien à voir. Mais, pour les objets du
code, on pense qu'il ne faut pas faire comparaître devant le Tribunal du
travail ou même, dans le cadre d'une ordonnance d'évocation, de
certiorari ou autre, devant les tribunaux de droit commun ou devant un arbitre,
un conciliateur pour lui dire: Est-ce que l'employeur, à minuit et
quart, vous a dit telle chose au sujet de ses états de profits et
revenus, est-ce que le représentant syndical vous a dit qu'il
contrôlerait son assemblée syndicale sur telle proposition et pas
sur telle autre? (20 h 45)
On pense qu'il ne faut pas mettre le conciliateur dans une position
comme celle-là, parce que, par définition, il reçoit les
confidences des parties. D'ailleurs, un conciliateur qui n'est pas capable de
recevoir les confidences des parties a un problème en
général. Or, pour le protéger, comme pour protéger
les parties, comme pour protéger l'institution de la conciliation, il
nous apparaît important qu'il soit non contraignable, comme dans
l'ensemble des législations canadiennes et aussi comme dans d'autres
lois.
M. Bélanger: En attendant, M. le Président, je
voudrais vous faire un petit commercial. Notre candidat dans
Charlesbourg est en avance.
M. Johnson (Anjou): Vous êtes mieux de fermer vos
valises.
M. Bélanger: J'ai des nouvelles, malheureusement,
seulement pour le comté de Charlesbourg, mais il est très en
avance.
M. Johnson (Anjou): Cela va bien dans le comté de
Saint-Jacques, nous.
Une voix: Est-ce qu'il a fini?
M. Johnson (Anjou): Le Code canadien du travail, par exemple,
à son article 208, dit: Aucun membre du conseil - c'est le Conseil des
relations du travail du Canada -ou d'une commission de conciliation, ni aucun
conciliateur, commissaire-conciliateur, fonctionnaire ou employé au
service du conseil et de la fonction publique du Canada, ni aucune personne
nommée par le conseil ou le ministre en vertu de la présente
partie ne peut être requis de déposer dans quelque action,
instance ou autre procédure civile, au sujet des renseignements obtenus
dans l'exercice des fonctions que lui confère la présente
partie." C'est un peu le même genre de disposition qu'on retrouve en
Nouvelle-Écosse...
M. Saintonge: Est-ce que je peux comprendre, M. le ministre, que,
dans le cadre du Code canadien du travail, c'est de déposer des
documents seulement? M. Johnson (Anjou): Pardon?
M. Saintonge: Est-ce que j'ai compris que, dans le cadre du Code
canadien du travail, c'est simplement de déposer des documents?
M. Johnson (Anjou): Non. C'est de déposer, au sens de
notre droit.
M. Bélanger: De témoigner.
M. Johnson (Anjou): C'est faire une déposition, faire un
témoignage.
M. Saintonge: D'accord.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'amendement...
M. Johnson (Anjou): D'ailleurs, je pense que c'est une bien
mauvaise traduction de l'anglais.
M. Saintonge: Mais est-ce que dans la législation
canadienne, dans d'autres provinces, vous êtes au courant de dispositions
semblables qui existent?
M. Johnson (Anjou): Oui, dans les autres provinces canadiennes,
cela existe en Ontario, en Nouvelle-Écosse, à
l'Île-du-Prin-ce-Édouard, en Saskatchewan, en Alberta -on va
toutes les nommer - en Colombie britannique, au Manitoba - il doit y en avoir
dans le Yukon - au Nouveau-Brunswick.
Une voix: On n'a pas les Territoires du Nord-Ouest.
Terre-Neuve.
M. Johnson (Anjou): Même Terre-Neuve.
Le Président (M. Desbiens): L'article 27 est-il
adopté?
M. Bélanger: Adopté sur division.
M. Johnson (Anjou): L'article 27 est-il adopté, M. le
Président? Sur division?
M. Bélanger: Sur division.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 27 tel
qu'amendé est adopté?
M. Bélanger: Sur division, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Sur division dans les deux
cas. Article 28?
De l'arbitre unique M. Johnson (Anjou): Concordance, M. le
Président, avec le chapitre suivant où en remplace le mot
un peu partout. Dans le code, on va remplacer les mots "conseil d'arbitrage"
par le mot "arbitre". C'est un amendement de concordance à l'article
28.
Le Président (M. Desbiens): Adopté?
M. Bélanger: Un instant, M. le Président.
M. Paradis: Un instant, M. le Président. M.
Bélanger: J'ai mon spécialiste.
M. Paradis: M. le Président, je viens d'entendre le
ministre dire qu'à l'article 28 il s'agit d'un amendement de
concordance. On remplace les mots "conseil d'arbitrage" par le mot "arbitre".
C'est possible et j'en conviens. Mais parce que le leader du gouvernement a
choisi de faire siéger les parlementaires relativement au projet de loi
192, qui est une loi relative au monde du travail, en même temps qu'il
fait siéger la commission qui modifie le Code du travail comme tel, je
voudrais être certain qu'à l'article 58 - on me donnera sans doute
cinq minutes pour le vérifier; je viens d'arriver; ce n'est
peut-être pas noté comme tel au journal des Débats, mais je
tiens à le dire -ce n'est pas un changement, même s'il est de
concordance, qui affecte de façon fondamentale le fonctionnement de nos
relations du travail.
Si on change les mots "conseil d'arbitrage" par le mot "arbitre" dans
certaines situations, cela pourrait être - vous en conviendrez, M. le
Président - anodin, mais si on change les mots "conseil d'arbitrage" par
le mot "arbitre" dans d'autres circonstances, cela pourrait être crucial.
Je me rappelle avoir entendu, en commission parlementaire, à peu
près tous les intervenants qui ont touché à cette
modification nous dire que, dans le cas d'une première convention
collective, s'il fallait changer les mots "conseil d'arbitrage" par le mot
"arbitre", on courrait au désastre. Je voudrais m'assurer -
j'espère en avoir le temps - que ce n'est pas cela, parce qu'on sait
comme c'est important une première convention collective. Une
première convention collective, c'est ce qui établit les acquis
du patron et les acquis du syndicat. C'est à partir de cette
première convention collective que l'on structure dans une usine
quelconque l'ensemble de nos relations du travail. Qu'on me dise que c'est par
concordance, on va sans doute prétendre que ce n'est pas cela. J'ai
également entendu beaucoup d'intervenants venir nous dire que la
sécurité qu'apporte un conseil d'arbitrage dans tous les cas est
une sécurité que l'on ne retrouve pas dans le cas où un
arbitre unique est appelé à se prononcer.
M. le Président, on connaît l'homme; on connaît
l'humain. La députée de Dorion m'indique que l'on connaît
la femme. Si peu, hélas! On la découvre de plus en plus, mais
l'on connaît du mieux que l'on peut, la femme. La députée
de Dorion pourrait nous dire: On connaît l'homme du mieux que l'on peut
également, mais on n'est pas là pour discuter de ces choses ce
soir. Mais on connaît l'hommerie, finalement. On sait qu'un arbitre peut
juger selon ses antécédents, sa culture, le milieu où il a
vécu, sa formation - A-t-il oeuvré du côté patronal?
A-t-il oeuvré du côté syndical -également, vous en
conviendrez, M. le Président, selon ses préjugés. Tout
arbitre arrive avec un certain nombre de préjugés.
Si on se retrouve dans un conseil d'arbitrage, ces
préjugés sont d'autant plus amenuisés, sont d'autant plus
détectés, sont d'autant plus pesés dans la décision
finale qui sera rendue. Mais si on se retrouve face à un arbitre unique,
l'homme étant l'homme et la femme étant incluse dans la
définition, non pas parce qu'elle est inférieure, mais parce
qu'elle est bien égale, l'erreur étant humaine, la simple
modification de concordance que nous annonce le ministre par intérim du
Travail, soulignons-le, d'un ton détaché de la
réalité, peut avoir des conséquences pénibles et
durables sur la vie de l'entrepreneur, du travailleur ou de la travailleuse
syndiqués dans cette usine et sur la vie de l'entreprise.
S'il fallait que cette première convention collective
décidée par un seul homme ou une seule femme ne tienne pas
compte, par une simple erreur humaine, de la réalité
économique, du champ d'activité dans lequel fonctionne cette
entreprise, on condamnerait à la faillite, par cette seule modification,
une entreprise. On aurait un employeur de moins au Québec et on aurait
combien de travailleurs et de travailleuses mis à pied, Le ministre nous
invite-t-il à dire: Oui, c'est de la concordance, et à oublier
toutes les incidences qui peuvent découler de la mise en vigueur d'un
tel article?
Je vous dis respecteusement que j'ai eu l'occasion d'en discuter avec
mon collègue, le député de Mégantic-Compton, qui a
été un employeur exemplaire au cours de... C'est conforme au
règlement de dire qu'il a été un employeur exemplaire. Ce
n'est pas lui prêter de mauvaises intentions. Il a été un
employeur exemplaire et a une expérience du vécu quotidien,
autant comme travailleur syndiqué à une époque de sa vie,
que comme employeur qui a eu à faire face à des syndicats, qui,
des fois, les a eus à côté de lui, car des fois cela a
très bien été avec des syndicats, ou comme
législateur qui reçoit dans son comté et qui est
responsable d'une multitude de PME et qui est responsable du fait qu'encore
dans Mégantic-
Compton, malgré le gouvernement en place, il y a des
travailleurs, des syndicats et des employés qui ont réussi
à survivre au désastre économique que représente un
tel gouvernement pour la province.
Mais s'ils ont survécu au désastre, dans quel état
les retrouve-t-on aujourd'hui? On les retrouve dans un état de
fragilité, non pas au niveau du syndicat, non pas au au niveau du
patronat, mais au niveau de l'entreprise. Est-ce qu'on va confier à un
seul homme - que dis-je? - à une seule femme, des décisions
cruciales pour l'avenir de cette entreprise? M. le Président, le conseil
des arbitres souhaite que les décisions tripartites soient maintenues
pour éviter, justement, les erreurs grossières qu'un seul homme
ou qu'une seule femme peut commettre. Est-ce qu'on a le droit, comme
législateurs, d'enlever à nos travailleurs et à nos
travailleuses, d'enlever à nos patrons et patronnes cette garantie de
stabilité décisionnelle que représente un conseil
d'arbitrage et de leur dire tout simplement: On vous livre à un ou une
arbitre; sa décision sera finale et sans appel et si l'entreprise
périt, eh bien, tant pis?
M. le Président, c'est grave de conséquences, grave de
conséquences. Lorsqu'on est en fin de session, M. le Président,
des fois, on a affaire à certains ministres qui, compte tenu que le
temps presse, qu'il ne faut pas en abuser, sont prêts à
considérer des suggestions positives, des suggestions constructives.
Cela existait jadis, avant l'arrivée du PQ, parce que eux ont le
monopole de la vérité. En tenant pour acquis que ce monopole de
la vérité s'estomperait légèrement, est-ce qu'on
pourrait proposer au ministre que sa modification changeant "conseil
d'arbitrage" par un seul arbitre serait acceptable, mais pas dans le cadre
où il nous la propose, mais dans un cadre où les décisions
de cet arbitre pourraient être sujettes à appel sur des questions
de droit, sur des questions de fait devant les tribunaux de droit commun?
M. le Président, le ministre n'a pas retenu les suggestions des
centrales syndicales, du monde patronal et surtout de la CSD, par la voix de
son président, de déjudiciariser les relations du travail au
Québec; il a décidé de les judiciariser davantage. Est-ce
que cela serait pensable, que, si on confie le sort de milliers et de milliers
de travailleurs et de travailleuses, si on confie le sort de combien
d'entreprises, de combien d'entrepreneurs aux mains d'un seul arbitre, la
partie qui, dans son for intérieur, dans ses tripes, dans son coeur,
dans sa tête, se sentira lésée par l'hommerie ou la
"féminerie" - s'il s'agit d'une arbitre de l'autre sexe - pourra avoir
recours au tribunal de droit commun pour faire soit confirmer la
décision rendue par l'arbitre unique, soit la faire casser? Est-ce qu'on
a le droit de refuser cela aux travailleurs, aux travailleuses, aux employeurs,
est-ce qu'on a le droit de le refuser à l'ensemble des intervenants
socio-économiques au Québec? Je vous le soumets avec tout le
respect que je vous dois: Est- ce qu'on a le droit de leur soumettre qu'un seul
arbitre peut faire la "job" de façon infaillible?
Est-ce qu'il y a un député ou une députée
autour de la table, est-ce qu'il y a un fonctionnaire en arrière, est-ce
qu'il y a quelqu'un, dans la salle, qui croit qu'un seul arbitre peut rendre
des décisions totalement justes, correctes, et qu'on n'aura pas le droit
d'aller en appel? Il y en a un qui a levé la main. On voit donc que ceux
qui ne l'ont pas levée ne sont pas d'accord: les fonctionnaires, les
députés...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît, M. le député de Brome-Missisquoi!
M. Paradis: J'avais donc une main levée, mais ce n'est pas
pour la raison pour laquelle je l'avais interprété.
M. Johnson (Anjou): Vous incitez au désordre. (21
heures)
M. Paradis: M. le Président, avec un seul arbitre, c'est
justement à quoi on incite les travailleurs, les travailleuses, les
employeurs, au désordre! Si les décisions sont entachées
d'une erreur humaine et que ces décisions sont finales et sans appel,
c'est au désordre que le gouvernement va inciter l'ensemble de la
population du Québec.
Lorsque vous recevez une décision, vous, M. le Président,
et qu'elle est signée par trois personnes, cela ne vous donne-t-il pas,
au moins, le sentiment qu'il y a eu plus d'une mentalité derrière
elle, qu'il y a plus d'un homme ou d'une femme avec tel "background", si vous
me passez l'expression, avec tel préjugé qui l'a rendue? Si vous
en avez trois, vous dites: II y a moins d'hommerie dans la décision qui
m'est rendue et cela vous incite à la respecter. Cela incite à
l'ordre. Mais s'il faut par concordance, comme le dit bien humblement le
ministre, adopter cet article, on dit à ceux qui nous ont
précédés dans cette enceinte à l'Assemblée
nationale, dans ces salles de commissions parlementaires, à ces sages
gens qui ont pensé que ça prenait un conseil d'arbitrage
plutôt qu'un arbitre unique: Vous avez tous eu tort.
M. le Président, nous avons le droit, comme législateurs,
de changer des choses -et des choses importantes - mais, en fin de session,
avec une motion de clôture sur la tête, avec la guillotine qui est
supposée tomber dans les heures qui viennent, avons-nous le droit de
renier tous ceux qui nous ont précédés, de quelque
formation politique
qu'ils aient été, et qui, depuis 1964, ont pensé
que c'était mieux, que c'était plus prudent, que c'était
plus sage, que cela inciterait plus au respect de l'ordre établi d'avoir
un conseil d'arbitrage plutôt que d'avoir un seul arbitre? Est-ce
qu'à 21 h 02 ou à 21 h 03, quelques minutes avant une guillotine,
on peut dire à tous ceux qui nous ont précédés:
Vous étiez de parfaits cons, vous vous êtes trompés? M. le
Président, c'est ce qu'on dit.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, puis-je rappeler le
député à l'ordre? Il utilise un langage de ruelle qui ne
devrait pas être admissible ici.
M. Paradis: M. le Président, sur la question de
règlement, s'il fallait que vous me rappeliez à l'ordre sur le
mot que j'ai utilisé, le premier ministre n'aurait pas le droit de
parole en Chambre.
Le Président (M. Desbiens): Vous avez le droit de parole
sur l'article 28, monsieur.
M. Paradis: Merci, M. le Président. Je comprends le
dauphin de venir au secours de son "boss" une fois de temps en temps; ça
fait bien et ça assure la relève.
Oui, M. le Président, l'article 28 remplace les mots "conseil
d'arbitrage" par le mot "arbitre". Vous venez de voir jusqu'à quel point
un seul homme peut faire une erreur. Si le député, ministre du
Travail par intérim, avait eu l'occasion de consulter ses deux
collègues de Dorion et de l'Ungava, bien qu'ils soient de la même
idéologie politique... Il ne les connaît même pas. Comment
voulez-vous qu'il les consulte? Moi, je les connnais bien parce qu'on
fraternise, on est les "back-benchers" de l'Assemblée nationale. On
comprend que les ministres n'ont pas toujours le temps, étant
donné leurs importantes fonctions, de parler à des
"back-benchers" comme nous, mais nous représentons quand même, les
députés d'Ungava, de Dorion, de Mégantic-Compton, de
Laprairie tout comme celui qui vous parle, autant d'électeurs. Nous
avons été élus selon un processus aussi
démocratique.
Mais je reviens à mon sujet, à mon propos. Est-ce que le
ministre, s'il avait eu le temps - s'il les avait connus - de consulter ses
deux collègues, aurait dit ce qu'il a dit? Parce que faire une telle
déclaration, c'est rendre une décision sur le règlement:
on ne peut pas utiliser le mot "con" en commission parlementaire. Mais, s'il
avait consulté ses deux collègues, Mme la députée
de Dorion, assise directement à l'arrière du premier ministre,
lui aurait dit: J'entends pire que ça à longueur de jour. Et
là, le député d'Anjou, ministre du Travail par
intérim, aurait dit: Ah! Il ne faut donc pas que je me prononce dans ce
sens-là.
Mais, c'est cela, la différence fondamentale entre trois arbitres
auxquels je fais appel et un seul. Toutefois, pour que le gouvernement accepte
la recommandation de tous les intervenants syndicaux qui en ont traité,
pour que le gouvernement accepte la recommandation de tous les intervenants
patronaux, pour que le gouvernement accepte les interventions de l'Opposition,
il faudrait que les trois arbitres soient sur un pied d'égalité,
et que les députés de Dorion et d'Ungava aient le droit de se
prononcer en toute liberté, sans avoir à subir ce qu'on appelle
la ligne de parti.
S'ils étaient entièrement libres, ils recommanderaient
sans doute - parce que je connais bien les députés de Dorion et
d'Ungava - au gouvernement de maintenir les conseils d'arbitrage. Mais que
voulez-vous, notre système parlementaire étant ce qu'il est,
l'autorité du ministre du Travail par intérim étant ce
qu'elle est, l'éthique au sein d'une formation politique exigeant ce
qu'elle exige, ces gens-là vont, même si c'est contre leurs
convictions - si ce n'est pas contre, je leur demanderais d'intervenir
tantôt - voter avec le ministre. J'ai une expression, - je m'en excuse,
c'est assez difficile à visualiser pour les jeunes filles du journal des
Débats -le ministre va tirer la chaîne et les bras vont se lever,
M. le Président. Si ces bras-là, si ces coeurs et si ces
têtes étaient libres, s'ils agissaient librement, ils nous
diraient qu'un conseil d'arbitrage représente beaucoup plus de
sécurité, beaucoup plus de stabilité et beaucoup plus
d'incitation à l'ordre et à l'autorité qu'une
décision rendue par un seul arbitre. C'est clair et net, tout le monde
sait cela.
Je me demande pourquoi le ministre du Travail par intérim nous
présente cet amendement-là. Je n'ose pas dire que ce n'est pas
son amendement à lui. Il se fait le procureur devant cette commission -
un peu comme le ministre de l'Énergie et des Ressources a
été le procureur du premier ministre au cours de la commission
portant sur LG 2 - de ce qu'a peut-être pensé, avant d'être
obligé d'aller en congé de maladie, notre collègue de
Sherbrooke, de ce qu'ont certainement pensé les hauts fonctionnaires du
ministère du Travail. Il est un peu, bon gré mal gré,
placé dans une situation corsée et c'est son devoir, on le
comprend, de tenter de défendre un tel projet de loi.
Le ministre du Travail par intérim me dit: C'est une bonne
"gang". Je suis d'accord avec lui, c'est une bonne "gang", mais qui est
responsable devant la population? Si ce projet de loi-là crée du
chaos, crée de l'anarchie, est-ce que ce sont les gens de la
rangée d'en arrière - nos bien-aimés fonctionnaires - qui
vont en subir les conséquences politiques? Est-ce que ce sont, comme on
le verra ce soir, les candidats d'un parti? Qui subit le jugement de la
population? Qui est responsable? J'aime bien que le ministre se fie aux
gens d'en arrière mais pas aveuglément. Il faudrait que le
ministre puisse m'assurer qu'il en a parlé avec son collègue
présentement en congé de maladie et que son collègue lui a
donné des arguments valables pour changer les mots "conseil d'arbitrage"
par le mot "arbitre", qu'il puisse me dire que son collègue, le
député de Sherbrooke et ministre du Travail, y tient et qu'il a
des raisons fondamentales pour y tenir, que ces raisons ne sont pas des raisons
comme: on pense que cela va raccourcir les délais, parce que, là,
on va répondre: Avec la terminologie que vous avez changée dans
le projet de loi, vous allez à l'encontre de vos objectifs et vous allez
rallonger les délais; ça ne peut pas être cela. Si ce n'est
pas cela, c'est peut-être le président du Conseil du trésor
qui a dit qu'un conseil d'arbitrage coûtait plus cher qu'un arbitre et
qu'on est donc mieux de couper là encore. C'est peut-être cela,
mais est-ce que, par rapport à une décision stable, à une
décision partagée, à une décision
arrêtée, ces coûts-là s'équilibrent avec le
coût des coupures aveugles?
Il me reste simplement une minute. Je pense que j'en ai convaincu deux.
Ce n'est pas si pire. Si je ne les ai pas convaincus, ils vont me le dire, ils
vont m'expliquer pourquoi. Mais, je ne pense pas avoir convaincu encore celui
qui dicte les ordres, les diktats de l'autre côté. Je ne pense pas
avoir convaincu le ministre au Travail par intérim. Mais je ne sais pas
- ce seront mes propos en terminant - si on peut le convaincre, si on peut
l'atteindre, parce que j'ai l'impression que ce n'est pas son
bébé à lui. C'est un bébé - je n'aime pas
l'expression - par adoption. Généralement, quand on les adopte,
on les aime aussi bien que les nôtres. Mais on dirait que le ministre ne
vibre pas pour ce bébé-là. On dirait qu'il lui vient
d'ailleurs, d'une autre planète ou je ne sais trop et que c'est un peu
mécaniquement, sans amour, sans logique même, qu'il nous le
défend. Je fais un vibrant appel au ministre du Travail pour que, s'il
ne veut pas se rendre à mes arguments, il prenne au moins le temps
d'écouter les arguments des gens de son côté, qu'il prenne
le temps d'écouter la députée de Dorion qui va lui
expliquer, après l'avoir bien comprise, la portée de cette
modification. Qu'il prenne le temps d'écouter - c'est vrai qu'il a l'air
"tough" quelquefois, mais il livre des messages - le député
d'Ungava, qui, à la suite de son expérience dans le monde
patronal et dans le monde syndical - il a été de tous les
côtés de la clôture, le député d'Ungava - est
capable de convaincre le ministre. Je ne doute pas qu'il y a plus de
stabilité dans une décision rendue à trois que dans une
décision rendue à un. Je les vois améliorer leurs
arguments ensemble présentement pendant que je parle.
Le Président (M. Desbiens): II faudrait que vous
terminiez.
M. Paradis: En terminant, parce qu'il faut que j'aille au salon
bleu, car il y a un autre projet en cours au salon bleu, je les remercie
à l'avance du travail qu'ils vont faire, au nom des électeurs de
leur comté, pour convaincre le ministre du Travail par intérim
qu'un conseil d'arbitrage, c'est beaucoup plus sécuritaire...
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Ungava.
M. Paradis: ...comme décision rendue qu'un seul arbitre.
Je vous remercie beaucoup, M. le Président, de la patience que vous avez
eue.
M. Lafrenière: M. le Président, après avoir
écouté le député de...
Une voix: Brome-Missisquoi.
M. Lafrenière: ...j'avais même oublié
-Brome-Missisquoi pendant 20 minutes, il ne m'a pas convaincu que trois
était mieux qu'un. D'abord, il sait que j'ai oeuvré du
côté syndical pendant assez longtemps. Il y avait trois arbitres
et cela ne m'a pas convaincu que c'est ce que cela prenait. Un arbitre, je suis
pour cela. J'ai été, comme il le dit, du côté
patronal. Ce n'était pas moi qui engageais ou qui congédiais,
mais là, ils l'avaient, l'arbitre unique et je pense que les
résultats ont été meilleurs avec l'arbitre unique qu'avec
un tribunal d'arbitrage et les délais beaucoup moins longs. Le
député de Brome-Missisquoi, même s'il a été
20 minutes à nous parler - je ne sais pas ce qu'il nous disait
exactement parce que c'était mêlé - ne m'a pas convaincu.
En ce qui a trait à la consultation, je pense qu'on a été
consultés avant. Même s'il nous dit que le ministre ne nous
connaît pas, on vient à bout de se parler et on peut se
téléphoner. Ah, il s'en va? D'une manière ou d'une autre,
on a été consultés et on est d'accord avec le ministre sur
cet article-là.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 28 est
adopté?
M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous le
permettez...
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): ...pas tellement pour le député
de Brome-Missisquoi qui est parti sous d'autres cieux, je vais simplement lire
un extrait d'un rapport qui a été préparé
sur l'arbitrage des premières conventions collectives par le
Centre d'étude et de recherche du ministère du Travail et qui
dit, à la page 126 - c'est un rapport qui a été
publié le 12 juillet 1982, à la suite d'une très longue
analyse et des sondages auprès des arbitres -: "Le second
problème majeur pour les présidents - on parle des
présidents de conseils d'arbitrage - c'est celui des arbitres patronaux
et syndicaux. Conscients de la pratique actuelle, ils souhaiteraient soit
changer le statut des arbitres pour en faire des assesseurs ou permettre aux
parties de choisir entre un conseil avec un arbitre unique ou un conseil avec
un arbitre et deux assesseurs." M. le Président, c'est la solution que
nous avons retenue. C'est exactement ce que nous avons retenu. J'ai eu
l'occasion d'annoncer en deuxième lecture que nous recommandons
effectivement que, dans le cas des différends, la règle soit un
président du tribunal d'arbitrage avec un assesseur syndical et un
assesseur patronal, à moins que les parties ne conviennent qu'il n'y
aura qu'un arbitre unique. (21 h 15)
Je continue la citation, M. le Président: "Lorsqu'on se
réfère à la notion d'assesseur, on veut dire - une
citation de Gérard Dion dans le Dictionnaire canadien des relations de
travail, 1976, Presses de l'Université Laval, page 24 - une personne
choisie par chacune des parties en cause dans un litige, dont la fonction est
d'assister un arbitre ou un tribunal pour s'assurer qu'il sera tenu compte de
son mandat lors de l'étude du dossier et parfois aussi au moment de la
décision sans toutefois qu'elle y participe."
C'est exactement ce que nous avons choisi, M. le Président. Il
nous apparaît non seulement adéquat, mais souhaitable après
quinze années de rodage de procéder à la formation, dans
le cas des différends, d'un tribunal d'arbitrage à arbitre
unique, mais flanqué de deux assesseurs à moins que les parties
n'en conviennent autrement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Bélanger: Je pense que l'article 28 du projet de loi
17, c'est la base même du projet de loi. C'est l'article qui change
à peu près le plus les relations du travail au Québec. Moi
aussi, je m'inquiète qu'une seule personne puisse décider du sort
d'une entreprise. Si c'était si efficace, pourquoi dans un conseil
municipal, par exemple, on n'éliminerait pas les conseillers pour
laisser seulement le maire? C'est évident que les décisions se
prendraient plus vite. Si on a dans la loi la formation d'un conseil municipal
avec un maire et des conseillers, c'est justement pour s'assurer que les
citoyens sont protégés davantage, que les citoyens ont plusieurs
personnes sur qui compter. Cela revient à la même chose, M. le
Président, d'abolir le conseil d'arbitrage pour arriver avec un arbitre
unique.
C'est également la crainte de l'entreprise privée. Elle
est venue nous le dire en commission parlementaire. Cela se comprend. C'est la
crainte du chef d'entreprise, surtout pour la première convention
collective. Imaginez-vous le patron qui a investi à peu près tout
son avoir dans son entreprise, qui doit même -et cela, M. le
Président, je le dis en connaissance de cause - fréquemment
dîner avec son gérant de banque pour tenter de le convaincre que
son entreprise va fonctionner, que cela va très bien, qu'il a besoin de
crédit additionnel. Il rencontre son banquier en lui disant:
Écoute...
M. Johnson (Anjou): En plus des intérêts.
M. Bélanger: ...mes employés sont à se
syndiquer. J'ai un peu retardé à négocier. Le gouvernement
vient de me nommer un arbitre. C'est lui qui va décider si, oui ou non,
je demeure encore en affaires. C'est lui qui va décider si ma vingtaine,
ma cinquantaine, ma trentaine et peut-être même seulement ma
dizaine d'employés et même moins vont être encore à
mon emploi à compter de tel jour.
M. le Président, il faut y penser et on n'a pas le choix. Je suis
en faveur de garder le statu quo. Trois, ce n'est pas trop pour prendre des
décisions, pour analyser, pour voir des choses que peut-être un
seul n'aura pas vues. C'est évident et c'est à peu près
pareil dans tout. Lorsqu'on arrive devant une cour, par exemple, si on va en
appel, il n'y a pas seulement un juge. Pourquoi? Pour s'assurer que toutes les
facettes du problème ont été regardées. C'est pour
l'entreprise privée une crainte énorme qu'on arrive avec cet
arbitre unique, surtout - je reviens sur cela, M. le Président - lors de
la première convention collective. Déjà, le patron est
anxieux à l'idée que ses employés se syndicalisent.
Parfois, cela va très bien aller, nous en sommes conscients. D'autres
fois, cela va moins bien aller, le syndicat, les travailleurs n'étant
peut-être pas conscients de la situation financière de
l'entreprise. Un seul arbitre, qui n'a peut-être aucune expérience
en gestion, va décider: Oui, il est capable d'accorder tant de jours de
congé, tant de jours de congé de maternité, tel taux
horaire. Vous avez un homme, une personne - cela peut être une femme,
comme le dit mon collègue de Brome-Missisquoi; j'espère que ce
sera une femme, car souvent elles sont un peu plus attentives - qui va
décider de l'avenir de l'entreprise, sans appel. C'est fini, c'est
réglé, c'est classé.
On assistera encore une fois, M. le
Président, à l'exode des entreprises vers d'autres
provinces où c'est moins... Pourquoi vous riez, M. le Président?
Je ne comprends pas pourquoi le député rit. C'est cela qui nous
arrive depuis des années et des années, des départs vers
d'autres provinces. On semble très peu soucieux de cela. Pourtant, c'est
la réalité même. On se le fait dire partout.
M. Johnson (Anjou): Si le député me le permet, M.
le Président, je peux lui garantir qu'elles n'iront pas en Ontario, ni
en Colombie britannique, parce que ce sont des dispositions comme les
nôtres.
M. Bélanger: Elles vont aller au Nouveau-Brunswick.
M. Johnson (Anjou): Pas au Nouveau-Brunswick, non plus.
M. Bélanger: C'est ce que vous avez trouvé? Il n'y
en a pas d'autres, la Saskatchewan?
M. Johnson (Anjou): II n'y a rien à faire là, de
toute façon.
M. Bélanger: M. le Président, comme je l'ai
mentionné, c'est le fer de lance du projet de loi, l'article 28. C'est
évident que, si nous changeons "conseil d'arbitrage" par le mot
"arbitre", cela semble très simple, mais, comme signification, c'est
totalement différent. Ce sera une crainte pour l'entreprise
privée d'investir.
J'ai de la difficulté à comprendre que, de l'autre
côté, on semble traiter cela à la légère. Il
n'y a personne qui peut forcer un investisseur à investir. À
moins que vous ne nationalisiez les épargnes, dans le moment, il n'y a
pas encore de loi qui force un entrepreneur à investir. Il faut
absolument que l'entrepreneur soit conscient qu'il y a possibilité
d'avoir une certaine rentabilité. Il faut qu'il soit assuré que
ce sera lui le patron et qu'il n'ira pas investir pour qu'un arbitre vienne
décider combien il va payer ses employés, quelle "job" va faire
tel et tel employé. Il veut s'assurer que ce sera lui qui sera encore le
patron. Sinon, cela donne quoi de travailler le samedi, le dimanche? Cela ne
lui donne absolument rien.
M. le Président, le ministre me dit: Pas de syndicat. Ce n'est
absolument pas cela qu'on veut. Je n'ai jamais dit cela une seule fois de ma
vie. Comme le disait mon collègue de Brome-Missisquoi, j'ai
travaillé avec des centrales syndicales, j'ai toujours eu des relations
assez cordiales.
Une voix: Assez.
M. Bélanger: Oui, c'est évident. Je ne sais pas,
mais, lorsque je suis chef d'une entreprise, j'aime bien que ce soit moi le
patron. Je présume que les autres ne sont pas plus fous que moi et
qu'ils veulent absolument la même chose. C'est normal. L'employé
qui n'est pas content de son patron, il n'y a rien qui l'empêche d'aller
voir ailleurs. Il n'y a également rien qui l'empêche de tenter de
s'ouvrir une entreprise. C'est cela, le bon côté de notre
système actuel. C'est qu'il peut prendre la place du patron dans
quelques années. D'ailleurs, il semblerait que c'est le rêve de
chaque chauffeur de ministre de partir d'en avant et de passer au siège
arrière. C'est normal et il n'y a rien de grave dans cela. Faisons en
sorte que ces gens-là aient de l'ambition. Faisons en sorte que ces
travailleurs-là disent: Nous sommes capables de faire comme notre
patron. Je suis capable, moi aussi, d'avoir mon entreprise. C'est de cette
confiance que nous avons besoin au Québec.
Vous avez déjà l'incertitude du séparatisme. Encore
une fois, je comprends que vous n'aimez pas cela, de l'autre côté.
C'est encore un point qui fait en sorte que nous avons moins d'investissements
au Québec et qu'ils s'en vont ailleurs. C'est aussi simple que cela.
L'option séparatiste fait peur à énormément
d'investisseurs.
Le Président (M. Desbiens): II n'en est pas question dans
l'article 28.
M. Bélanger: Oui, c'est indiqué là. S'il y a
trois arbitres, ils vont se séparer beaucoup plus difficilement que s'il
y en a seulement un. Imaginez-vous qu'il y a seulement un arbitre et qu'il se
sépare, il arrive quoi dans les négociations? C'est là
où je voulais en venir. De toute façon, je vais céder la
parole à mon collègue qui, lui aussi, je présume, a des
choses à dire sur cet article. C'est l'article le plus important du
projet de loi 17. C'est l'article, comme je l'ai mentionné, qui est le
fer de lance de tout le projet. C'est évident que, si cette loi est
adoptée dans sa forme actuelle, ce seront les Québécois
qui devront en assumer la note.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie.
M. Saintonge: Merci, M. le Président. En fait, je ne sais
pas si l'article 28 est le plus important du projet de loi, mais c'est
sûrement un des articles importants du projet de loi. On se retrouve
devant une situation où on change "conseil d'arbitrage" par le mot
"arbitre". Donc, on va confirmer que le différend sera examiné
par simplement un arbitre au lieu de la procédure usuelle qui est en
cours depuis nombre d'annés. Un conseil d'arbitrage formé de
trois arbitres garantissait une certaine diversité d'opinions,
une certaine façon que pouvaient avoir les différents
individus nommés à ce conseil d'arbitrage d'examiner le
problème et d'apporter une solution, et donnait un éclairage
passablement différent de ce qu'on peut avoir si une seule personne est
chargée de rendre la décision.
Le ministre nous disait tantôt au niveau du ministère qu'un
conseil de recherche favorisait la possibilité de remplacer le conseil
d'arbitrage par un seul arbitre. Je m'interroge, car c'est peut-être une
façon d'éliminer certaines difficultés en confiant cela
à un seul arbitre au lieu de trois. En effet, si on veut nommer un
arbitre patronal, un arbitre syndical, plus le président du conseil
d'arbitrage, les deux premiers arbitres étant nommés par une des
parties, on présuppose qu'ils auront une certaine propension à
favoriser davantage la partie qui les a nommés.
Au lieu d'arriver à un tel consensus, on pourrait simplement
avoir, par exemple, des arbitres permanents qui seraient nommés, qui
pourraient être choisis dans un "pool" d'arbitres et qui seraient
à la disposition de toutes les parties sans qu'ils soient
entachés d'un certain favoritisme patronal ou d'un certain favoritisme
syndical. Cela peut être une façon de bonifier la question du
conseil d'arbitrage et, également, une certaine façon, si on
veut, de créer un système d'arbitrage beaucoup plus
homogène, plus impartial ou beaucoup moins partial envers une des
parties.
Dans le journal Les affaires, on notait que 30 entreprises ont
péri après avoir signé une première convention
collective. Dans cet article, M. Roger Bédard, conseiller en relations
industrielles de Montréal, notait que, dans certains cas, si un seul
arbitre arrive à décider de la question, il peut être
influencé par certains arguments. Il peut être influencé,
dans certains cas, négativement par certains arguments et par manque de
connaissances du genre d'entreprise sur laquelle il aura à se prononcer
et pour laquelle il aura été assigné comme arbitre pour
régler le différend en question ou prononcer la décision
sur le différend en question. Dans un tel cas, il m'apparaîtrait
bien sage - c'est un peu le sens de ce que M. Bédard disait - qu'on
puisse assurer aux parties impliquées, surtout aux entreprises que le
problème aura pu être visualisé et compris par plus d'une
personne. On a plus de chances, à ce moment, que trois personnes au lieu
d'une puissent saisir des points importants pour une des parties en cause. Dans
le cas présent, cela peut être l'employeur. D'autres fois, cela
pourra être le syndicat. Cela pourra permettre une décision plus
éclairée et plus équitable. Il y a, quand même,
plusieurs commissions permanentes qui fonctionnent dans d'autres domaines que
dans le travail et, que je sache, ces commissions sont souvent fonctionnelles
avec un système - on ne parle pas d'arbitres - de commissaires. Je
pense, par exemple, à la Commission des transports, je pense à la
Commission des loyers où on entend la cause. Je suis d'accord qu'on
pourra me répondre que, dans certains cas, sur une première
décision rendue, on a affaire à un seul commissaire. Il reste
important de noter que, lorsqu'une décision dans une commission
administrative de ce genre est rendue par un seul commissaire, elle demeure
toujours sujette à un appel devant une commission où on retrouve,
non pas un commissaire, mais souvent trois commissaires qui vont rendre leur
décision. Donc, on a une pluralité d'esprit qui permet
d'envisager et d'étudier le problème, de regarder les solutions
que chacune des parties apporte. Cette solution présentée en
appel nous est toujours donnée par une espèce de conseil
composé de trois commissaires.
Il est bon de noter que, dans le processus judiciaire, on retrouve cette
pluralité d'esprit à l'audition d'une cause. Qu'on sache que,
lorsqu'il y a appel d'une décision rendue, soit en Cour provinciale ou
en Cour supérieure, on se retrouve en Cour d'appel et parfois même
en Cour suprême, et, dans ces cas, c'est toujours un tribunal
composé de trois, cinq, sept et cela peut aller même
jusqu'à neuf juges qui prendra la décision. Est-ce qu'on doit
dire que la Cour d'appel est un tribunal supérieur et que la Cour
suprême, étant le plus haut tribunal, que nous pouvons
posséder, une seule tête pourrait rendre la décision, soit
en Cour d'appel ou en Cour suprême? La réponse pourrait être
facilement oui, tout autant qu'un juge le fait en première instance.
Dans un tel cas, pourquoi, justement, s'assure-t-on qu'une pluralité de
personnes participent à la décision en appel? C'est, justement,
parce qu'on veut s'assurer que plusieurs esprits se penchent sur le
problème, que plusieurs personnes puissent examiner attentivement les
éléments que chacune des parties peut soumettre dans un litige.
(21 h 30)
Cela permet alors aux individus qui ont soumis un tel cas à un
tribunal, lorsqu'ils vont en appel où il y a plus qu'une personne qui
prononce un jugement, d'être assurés d'une certaine façon
que, plus qu'une personne s'étant prononcée, ils ont eu la chance
de faire valoir des points qui ont pu sensibiliser davantage une, deux ou trois
personnes justement au point qu'on pouvait défendre.
Nonobstant le fait que dans d'autres provinces on puisse nous mentionner
que le système d'arbitre unique a remplacé le conseil d'arbitrage
et que le conseil d'arbitrage a bien pu ne pas exister dans certaines autres
provinces canadiennes, il
m'apparaît, quand même, important de ne rien changer au
Québec face à l'expérience antérieure que nous
avons pu avoir, face même au témoignage, dans certains cas,
d'experts, comme M. Bédard, conseiller en relations industrielles, qui
nous font valoir certains points où effectivement il est
préférable que plusieurs personnes participent à
l'élaboration de la décision. Dans un tel cas, si on assure,
comme mon confrère de Brome-Missisquoi l'avait noté
précédemment, aux personnes d'être entendues par un conseil
d'arbitrage formé de trois arbitres, si on permet à ces gens de
pouvoir sensibiliser plus qu'une personne à leurs propres arguments, ces
gens ont sûrement dans leur esprit l'idée qu'ils n'ont pas
été soumis à l'arbitraire d'une seule personne. Ils
peuvent avoir également l'idée et même la ferme conviction
que les prétentions qu'ils ont pu étaler devant un conseil de
trois arbitres feront en sorte que leur point de vue a été
examiné avec plus d'attention par des personnes qui peuvent être
plus au courant -dans certains cas, ce sera une des personnes ou deux des
personnes concernées - des diverses modalités de leur
différend.
Cet amendement à l'article 28, où on modifie l'article 74
et on parle de concordance, est un amendement qui, en fait, est
extrêmement important. Cela mérite, en tout cas, que le ministre
du Travail par intérim puisse à son tour examiner la situation et
peut-être même infléchir son confrère du Travail ou
même le gouvernement, dans le cadre présent, afin qu'une telle
modification ne puisse pas être adoptée à un moment
où on peut considérer qu'on pousse un peu les parties à se
prononcer sur un amendement possible à la loi, dans le sens qu'on limite
le temps de discussion, qu'on limite la possibilité d'avoir certaines
représentations du milieu pour voir le cheminement qu'un tel amendement
peut apporter à notre Code du travail.
Si on avait plus de temps pour examiner un tel amendement, si on avait
plus de temps pour permettre aux employeurs, aux conseillers en relations
industrielles et même parfois à certains syndicalistes de
réfléchir aux conséquences en ce qui a trait à
l'assurance pour tout le monde d'une décision pleinement
éclairée, pleinement satisfaisante pour les parties qui auront
à faire valoir des arguments, je suis convaincu que ces
différentes personnes pourraient arriver à faire comprendre au
ministre du Travail par intérim et même au ministre du Travail,
quand il sera revenu de son congé de maladie, à l'automne, de se
pencher de façon beaucoup plus arrêtée sur cet article en
particulier.
Si nous regardons différentes décisions que chacun d'entre
nous peut avoir à prendre, dans quelque domaine que ce soit, nous avons
tous eu des expériences où nous avons eu affaire à nous
soumettre à une décision qui pouvait être rendue par une
personne unique. Dans un tel cas, parfois, lorsqu'on est du côté
de la médaille où la décision ne nous a pas
favorisé, où certains arguments que chaque personne a pu
soumettre à l'arbitre en question ou à la personne chargée
de prendre la décision, certains arguments fondamentaux que la personne
a pu faire valoir ont été rejetés par une personne, on a
le sentiment qu'on n'a pas été compris, que l'arbitre en question
a pu être influencé par sa formation antérieure, a pu
être influencé par ses expériences antérieures dans
certains domaines. À ce moment-là, on se dit: Si cela avait
été un autre arbitre qui m'avait entendu ou une autre personne
qui avait pu juger du problème qui était soumis à son
jugement, effectivement, j'aurais pu avoir une décision
différente qui m'aurait favorisé.
Mais - je parlais de cela tantôt - si on se retrouve pour une
décision devant un commissaire seul, qu'on va en appel devant trois
personnes qui examinent notre cas et que les trois personnes peuvent arriver
unanimement à une décision, ou majoritairement à une
décision deux contre un, on se dit: Au moins, si l'argumentation que
j'ai fait valoir n'a pas été retenue par l'ensemble du conseil
d'arbitrage ou par l'ensemble des commissaires ou même par un tribunal
dans certains cas, c'est que les gens se sont penchés sur d'autres
arguments et, majoritairement, ils ont pu conclure que mes arguments
étaient moins valables ou ils n'ont pas accroché comme ceux de
l'autre partie.
Dans le cas présent, il m'apparaît très clair que,
pour éviter un certain préjudice qui pourrait être
causé aux parties, justement dans le cas d'arbitrage de
différends, il est souhaitable que la règle actuelle soit
maintenue, qu'on maintienne l'arbitrage par le conseil d'arbitrage et non par
un seul arbitre. L'arbitrage de différends par le conseil assurera
valablement que trois personnes pourront être saisies du cas et pourront
rendre une décision plus éclairée, comme je l'ai dit, qui
pourra éventuellement, en tout cas, permettre une paix sociale plus
grande, comme mon collègue de Brome-Missisquoi l'a mentionné,
parce que les gens accepteront sûrement plus facilement une telle
décision.
Ce qui milite davantage, à mon point de vue, pour que le
système du conseil d'arbitrage soit maintenu, c'est surtout le fait que,
la décision rendue par le conseil d'arbitrage étant finale et
sans appel, elle ne sera pas modifiée. Si c'est un arbitre unique, sa
décision sera également, je pense, finale et sans appel. Donc,
dans un tel cas, il faut s'assurer que trois personnes entendent de prime abord
cette cause-là, trois personnes de formation différente, trois
personnes d'expérience différente dans le domaine du
travail. Aussi, on pourra s'assurer que, chez ces trois personnes, il y
a déjà un élément important. Peut-être qu'une
des trois personnes qui seront choisies sur un conseil d'arbitrage, au lieu
d'un seul arbitre, aura une expérience particulière
adaptée au cas précis qui sera soumis devant le conseil
d'arbitrage. S'il n'y a un seul arbitre, il n'y a aucune garantie que le
problème particulier puisse être compris dans son entité,
dans tous ses fondements principaux par l'arbitre en question. Ce n'est pas que
je veux ici alléguer une mauvaise foi ou un escamotage de certains
éléments de la décision par l'arbitre qui pourrait
être unique, mais il reste que trois personnes, trois têtes valent
toujours mieux qu'une.
Dans un tel cas où les relations sont souventefois tendues, si on
arrive, justement, à devoir régler un différend, c'est
parce qu'antérieurement, lors de la conciliation, on n'est pas
arrivé à s'entendre, les deux parties ne sont pas arrivées
à être d'accord sur un certain principe, même avec l'aide
d'un conciliateur. Donc, si, déjà, un conciliateur n'a pu aider
des parties à arriver à une entente, il m'apparaît d'autant
plus important de soumettre le tout à la considération de plus
d'une personne, puisque ce n'est pas une personne qui prendra une
décision qui, fondamentalement, aura une influence grandiose sur
l'entreprise qui sera éventuellement gérée par une
convention collective qu'on pourra imposer à cette nouvelle entreprise
ou à une entreprise existante. S'il y a trois personnes qui le font, on
assurera, à ce moment-là, à l'entreprise, dans ses
fondements mêmes, une décision qui pourra apparaître, en
tout cas, à tout le moins, beaucoup plus juste.
On dit souvent que l'important, c'est que justice paraisse avoir
été rendue. Justement, dans un tel cas, il sera beaucoup plus
évident que justice aura été rendue si on est
confronté à un tribunal d'arbitrage ou à un conseil
d'arbitrage formé de trois arbitres plutôt que d'un seul arbitre,
puisqu'il n'y a pas d'appel. Nos règles actuelles de droit nous
apprennent que, quand la décision finale est rendue, dans les cas d'un
appel, c'est toujours un tribunal qui comprend plusieurs personnes, qui a
plusieurs voix à exprimer. Quant aux différends, puisque la
décision qui sera rendue sera finale et sans appel, je maintiens que,
tout comme pour les décisions finales rendues en appel d'une
décision pour clore un dossier, il est toujours
préférable, pour assurer que justice puisse paraître avoir
été rendue, qu'on soit devant un tribunal d'arbitrage à
trois arbitres.
S'il faut éventuellement critiquer d'une certaine façon,
comme on semblait le faire tantôt, toute la question des arbitres au
niveau de leur compétence ou à certains autres niveaux, il
m'apparaît important que l'on puisse plutôt s'attaquer à
établir un système de "pool" d'arbitres permanents qui seront des
arbitres impartiaux que chacune des parties pourra, en fin de compte faire,
choisir et non pas des arbitres qui sont plutôt identifiés
à une partie ou à une autre. M. le Président, c'est pour
cela qu'il m'apparaît important, finalement, que cette modification
apportée par l'article 30 puisse être reconsidérée
et que l'on maintienne plutôt le conseil d'arbitrage qui a quand
même fait ses preuves jusqu'à maintenant au lieu d'un arbitre
seulement.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, si vous me le
permettez, je remercie le député de...
Le Président (M. Desbiens): Je n'ai pas saisi la
dernière partie de votre intervention, M. le député de
Laprairie. M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): ...Laprairie de son intéressant
exposé sur l'article 30. L'article 28 est-il adopté?
M. Paradis: M. le Président, vote nominal.
M. Saintonge: M. le Président, j'ai fait une petite erreur
de concordance, c'est l'article 28.
Le Président (M. Desbiens): Alors, le vote est
appelé.
Une voix: Adopté.
M. Johnson (Anjou): Adopté sur division.
Le Président (M. Desbiens): Non, le vote nominal.
M. Johnson (Anjou): Ah! Le vote nominal.
Le Président (M. Desbiens): Alors, à l'article 28,
M. le ministre?
M. Johnson (Anjou): Pour.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Ungava?
M. Lafrenière: Pour.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie?
M. Saintonge: Contre.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Brome-Missisquoi?
M. Paradis: Contre, M. le Président. Le
Président (M. Desbiens): Mme la
députée de Dorion?
Mme Lachapelle: Pour.
Le Président (M. Desbiens): Alors, trois pour et deux
contre. L'article 28 est adopté sur division.
M. Paradis: Cela a passé proche.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, c'est peut-être
un peu le fait anesthésiant des propos en face de nous.
Le Président (M. Desbiens): L'article 28 est
adopté. J'appelle l'article 29. M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, il s'agit de changer
le titre Du conseil d'arbitrage de différend par De l'arbitre de
différend. L'article est-il adopté, M. le Président?
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Sur cet article, qui peut sembler anodin à
première vue, il faut rappeler le principe de base qui fait en sorte que
plusieurs articles vont être affectés. Qu'il suffise, sous ce
chapitre, de penser à l'article 74, à l'article 75 et à
l'article 77. Le ministre est pressé, il a sauté l'article 78.
Qu'il suffise de penser aux modifications à l'article 78, de penser aux
modifications à l'article 79, de penser aux modifications à
l'article 80 - c'est toujours dans le même chapitre sur la pertinence -
de penser aux modifications à l'article 81, de penser aux modifications
à l'article 82, de penser aux modifications importantes à
l'article 83. Qu'il suffise de penser, toujours dans ce même chapitre,
aux modifications importantes à l'article 84. (21 h 45)
Pour éviter que cela prenne trop de temps, c'est la même
chose pour les articles 85 - l'article 86 n'a pas de modifications -et 87.
C'est dans le même sens, mais pas la même chose, M. le
Président, pour l'article 88. Ce n'est pas la même chose, mais
également dans le même sens pour l'article 89. C'est
également important, vous en conviendrez, au niveau de l'article 90.
C'est la même chose au niveau de l'article 91. Ce n'est pas la même
chose, mais c'est essentiellement dans le même sens au niveau de
l'article 92. C'est identiquement, essentiellement la même chose au
niveau des articles 93.1 et 93.3.
L'article 93.4, c'est plus substantiel, c'est la même chose, de
façon identique. Au niveau de l'article 93.4, c'est plus substantiel.
C'est la même chose, de façon identique au niveau de l'article
93.5. Au niveau de l'article 93.6, c'est plus grave parce qu'il y a abrogation;
il n'existera plus. Je suis certain que j'apprends des choses à certains
collègues de l'autre côté. Dans le cas de l'article 93.8,
c'est substantiel. Dans le cas de l'article 93.9, c'est aussi important que
l'article substantiel qui précédait. Dans le cas de l'article 94,
c'est nouveau. Dans le cas de l'article 95, on n'en parlera plus, c'est la
dernière fois qu'on va en parler, il est abrogé. C'est aussi
grave que cela comme amendement, M. le Président.
Dans le cas de l'article 96, ce n'est pas aussi grave que le
précédent, mais c'est quand même important. Dans le cas de
l'article 97, on ajoute après le mot "municipale", les mots "ou
régie intermunicipale". On en reparlera tantôt lorsqu'on sera
rendu à cet article-là pour voir vraiment les implications. C'est
au niveau du titre que cela a une incidence. À l'article 98, c'est dans
le sens indiqué par la plupart des arbitres; c'est la modification
identifiée comme telle de façon très transparente,
très claire au niveau du titre. Quant à l'article 99, on n'en
parlera plus, car il est abrogé, on ne le reverra plus.
M. le Président, de l'autre côté, on fait sauter, un
peu en riant, des articles qui ont été longuement
discutés, réfléchis et pensés par nos
prédécesseurs en cette Chambre. La sagesse qui a animé ces
grands hommes, ces grandes dames m'inspire et me fait hésiter lorsque je
vois le mot abrogation. Cela me fait réfléchir
profondément, m'incite à tenter de retrouver par les
écrits auxquels on a accès - le journal des Débats de
l'époque, par exemple - pourquoi ces hommes et ces femmes politiques qui
ont nous précédés dans cette enceinte avaient choisi
d'inscrire cet article-là. Quelles sont les conséquences du geste
draconien que l'on pose lorsqu'on parle d'abrogation?
Ayant, lors de ma dernière intervention - j'en conviens -
réussi à convaincre de façon très temporaire - je
l'avoue - la députée de Dorion, je vais à cette
intervention-ci, tenter de la convaincre dans le même sens, mais de
façon plus permanente. Elle m'a parlé avec son coeur contre
l'article proposé par le ministre; elle a parlé avec sa
tête lorsqu'elle a voté en faveur. Un juste mélange des
deux devrait amener la députée de Dorion à
réfléchir sur la conséquence...
M. le Président, le leader de l'Opposition vient de m'annoncer
que nous avons acquis une victoire comme formation politique dans le
comté de Saguenay. Je sais que ce n'est pas pertinent, M. le
Président, mais vous allez me permettre une minute et on vous permettra
la même chose si jamais vous en gagnez une.
M. Johnson (Anjou): Non, M. le Président, non.
M. Paradis: C'est chaud dans Saint-Jacques?
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Il n'y a pas de consentement. Alors, M. le député de
Brome-Missisquoi, vous avez la parole sur l'article 29.
M. Paradis: Il n'y a pas de consentement, M. le Président?
Je tiens, quand même, à féliciter Ghislain Maltais, le
candidat libéral, qui pourra relire ça dans la transcription.
Le Président (M. Desbiens): L'article 29, s'il vous
plaît!
M. Paradis: M. le Président, je reviens à l'article
29, c'est-à-dire à ce que nous disait la Centrale de
l'enseignement du Québec (CEQ), à la page 20 de son
mémoire où l'on retrouve, sous le chapitre IV, le titre suivant:
L'arbitrage de différends et l'arbitrage de la première
convention collective. Voyons, non pas ce qu'en dit un député
libéral, un député de l'Opposition, mais plutôt ce
qu'en disent les gens impliqués dans la Centrale de l'enseignement du
Québec. On retrouve cela, comme je l'ai indiqué, dès le
premier paragraphe, immédiatement en dessous du titre, à la page
20: "L'ensemble des amendements aux articles 74 à 99..." C'est pourquoi
j'ai voulu vous indiquer dans ma nomenclature du début que le titre
incluait l'ensemble des ces articles. Je reprends donc ce que disait la
Centrale de l'enseignement du Québec: "L'ensemble des amendements aux
articles 74 à 99 du code vise principalement à remplacer le
conseil d'arbitrage par un arbitre unique, assisté, si les parties y
consentent, de deux assesseurs nommés respectivement par la partie
syndicale et la partie patronale". La CEQ continue: "Nous sommes opposés
à cette modification importante du régime". C'est clair, ils y
sont "opposés".
Est-ce qu'on va changer le titre s'ils sont opposés aux articles
ou faut-il s'assurer que le titre correspondra aux articles de façon
à ne pas faire en sorte qu'on adopte un titre qui ne correspondra pas
plus tard au contenu des articles qu'on va adopter? Si les libéraux ne
vous convainquent pas, j'ai beaucoup de représentants de travailleurs et
de représentants d'employeurs qui vont vous parler par ma bouche ce soir
et qui vont tenter de vous convaincre. S'il fallait qu'on adopte le titre,
comment pensez-vous qu'on va pouvoir revenir en arrière sur les articles
74 à 100 et y mettre quelque chose qui ne soit pas conforme au titre? Et
nos règlements nous interdisent de revenir sur un article
déjà adopté. Vous comprenez l'impasse dans laquelle on se
retrouve. C'est incroyable!
La CEQ, je le répète, dit au ministre du Travail par
intérim, elle dit à Mme la députée de Dorion, elle
dit au député d'Ungava: Lorsque vous allez voter sur ce titre,
pensez à ce que nous vous disons, c'est clair, ce n'est pas
mi-souveraineté, mi-association, ce n'est pas en veilleuse, c'est
limpide. Cela se lit: "Nous sommes opposés à cette modification
importante au régime". Cela vous laisse-t-il des doutes? C'est clair? Et
ils continuent à la CEQ à vous expliquer pourquoi ils sont
opposés à cette modification importante au régime: "La
nature du processus de décision au sein d'un conseil d'arbitrage en fait
un forum qui conserve un lien de parenté avec la négociation. Le
président cherchera à rapprocher les parties par
l'intermédiaire des arbitres syndicaux et patronaux. "L'arbitre unique
écoute les représentants des parties lors de l'audition et il
consulte les assesseurs - si assesseurs il y a, naturellement - puisqu'il
suffit qu'une partie s'y oppose pour qu'il n'y ait pas d'assesseurs",
naturellement. "Et il tranche les questions complexes qui sont en débat.
Il s'agit d'une formule qui a un caractère autoritaire - autoritaire, M.
le ministre - et, si elle était retenue, elle aurait pour effet de
dissuader les parties, en certains cas, d'avoir recours à
l'arbitrage."
La CEQ continue: "Nous pensons, par contre, que les parties, si elles le
désirent, doivent pouvoir choisir un arbitre unique d'un commun accord
et adjoindre des assesseurs si elles le désirent. Nous demandons donc de
conserver le régime du conseil d'arbitrage des différends - il
faut garder le titre, car autrement on ne sera pas conséquent avec le
reste - mais de prévoir que les parties peuvent d'un commun accord
choisir un arbitre unique et y adjoindre des assesseurs."
M. le Président, il me paraissait important à ce stade-ci
de notre discussion de rappeler, pour l'information des parlementaires
péquistes, le point de vue de la Centrale de l'enseignement du
Québec. On peut se poser la question: N'y a-t-il que les
représentants syndicaux qui endossent ce point de vue? La réponse
est négative. Nous retrouvons cette réponse à la page 8 du
mémoire du Conseil du patronat du Québec. Quand on aura
terminé, il n'y aura que les gens d'en face qui ont...
M. le Président, j'étais pour annoncer au ministre les
derniers résultats dans Saint-Jacques. Il y a une voix de
différence entre le Parti québécois et le Parti
libéral du Québec dans 100 bureaux de scrutin sur 159. On me dit
de l'autre côté qu'on a encore des résultats plus
décevants.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît! Article 29.
M. Paradis: C'est cela, M. le Président. Je parlais des
résultats qu'on retrouve dans la modification au Code du travail qu'on
nous propose; ils sont aussi décevants que les résultats des
élections complémentaires ce soir le seront pour le Parti
québécois.
À la page 8 du mémoire du Conseil du patronat du
Québec, sous la grande rubrique L'arbitrage de la première
convention collective et des différends, nous retrouvons le texte
suivant que je vous citerai en extraits pour raccourcir les débats et
pour avoir le temps de vous convaincre avec d'autres arguments. Il ne me reste
pas seulement une minute? Ce ne sera que des extraits. "Le contenu d'une
première convention collective est trop important pour la vie de
l'entreprise pour être laissé au jugement d'une seule
personne."
D'un côté, nous retrouvons les syndicats qui s'opposent au
PQ; de l'autre côté, nous retrouvons le patronat qui s'oppose aux
modifications du PQ. De ce côté-ci de la table, nous retrouvons,
bien appuyée par l'ensemble des travailleurs et des employeurs de la
province de Québec, l'Opposition libérale qui s'oppose aux
modifications proposées par le Parti québécois. Que
faudra-t-il pour convaincre ces gens-là? Je fais appel à vous,
Mme la députée de Dorion. Cette fois-ci, que votre vote qui vient
du coeur soit plus permanent que le dernier vote que vous avez donné et
qui venait des tripes. Je vous dis que, si on embarque dans tout ce
chapitre-là sans avoir modifié le titre et si à cause des
arguments on vous convainc...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!
M. Paradis: Je termine là-dessus, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): Je crains que vous n'ayez pas
le temps de la convaincre.
M. Paradis: Elle n'est pas facile à convaincre. Si on vous
convainc à l'article 58, de quoi aurons-nous l'air avec un titre
semblable lorsqu'on va changer tout ce qui suit? Mme la députée
de Dorion, en toute logique, en toute bonne foi et pour la protection de vos
travailleurs...
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 29 est
adopté?
M. Paradis: M. le Président, j'ai terminé mon
exposé sur l'article 29. Ce sera maintenant au député de
Laprairie...
Le Président (M. Desbiens): Merci. M. le
député de Laprairie.
M. Paradis: ...parce que chez nous tout le monde a le droit de
parole.
M. Saintonge: Merci, M. le Président. Tantôt,
j'étais rendu à l'article 30 par interférence.
Étant donné que les articles 28 et 30 se confondaient dans mon
esprit, c'est la même chose. On parlait de l'article 58. À
l'article 29, on parle du titre De l'arbitre de différend. On confirme
dans le titre la modification qu'on veut entreprendre au niveau du conseil
d'arbitrage. (22 heures)
Mon confrère de Brome-Missisquoi vous a cité certains
mémoires qui vous démontraient la position de plusieurs parties
intéressées à cette question d'arbitrage de
différends. Ces personnes faisaient valoir des arguments dans le sens
qu'il était préférable de conserver un conseil d'arbitrage
formé de trois arbitres plutôt que de s'en remettre à un
seul arbitre. Là-dessus, sans reprendre l'argumentation donnée
tantôt à l'article 28, nous pouvons continuer à vous citer
certains extraits d'un mémoire du Conseil du patronat du Québec,
où, relativement à l'arbitrage de conventions collectives et de
différends, ils vont discuter de cette question d'un seul arbitre par
rapport au conseil d'arbitrage conventionnel. On mentionne ceci: "Les
dispositions actuelles, très récentes d'ailleurs, confient
à un conseil d'arbitrage la tâche de fixer les modalités
d'une première convention collective. Les deux seules autres
juridictions, la Colombie britannique et le fédéral, qui ont
édicté l'arbitrage obligatoire du contenu d'une première
convention à défaut d'entente entre les parties, confient cette
délicate tâche au Conseil des relations du travail. C'est à
bon escient que le législateur québécois a voulu confier
la responsabilité à un conseil d'arbitrage plutôt
qu'à un arbitre unique. En effet, les dispositions d'une première
convention collective revêtent une importance capitale et influenceront
pendant longtemps la santé financière de l'entreprise. Une
première convention collective imposée par une personne
connaissant peu ou pas les caractéristiques propres au milieu où
évolue l'entreprise risque de contenir certaines dispositions qui
pourraient mettre en péril la survie de cette entreprise. "Le contenu
d'une première convention collective est trop important pour la vie de
l'entreprise pour être laissé au jugement d'une seule
personne."
Cela rejoint la citation que je faisais d'un article du journal Les
affaires où on faisait référence au conseiller en
relations industrielles, M. Bédard, qui nous informait que trente
entreprises avaient déjà connu, à la suite de l'imposition
d'une convention collective, une survie menacée. Cela confirme le fait
qu'il est important de laisser le contenu de la première convention
collective non pas à la discrétion d'une seule
personne, mais à un conseil d'arbitrage, puisque le jugement de
trois personnes vaut toujours mieux que le jugement d'une seule personne,
surtout que cette décision est finale et sans appel.
Je maintiendrai toujours l'argument de tantôt. Ce n'est pas que,
dans un tel cas, on met en doute l'honnêteté, la capacité
de décider d'une personne sur un sujet donné. Il s'agit de
permettre l'éclairage d'une situation par le jugement non pas d'une
personne, mais de trois personnes et de s'en remettre à la
complémentarité que trois personnes peuvent apporter à une
décision en lieu et place d'une seule personne. Il m'apparaît tout
à fait indiqué, il m'apparaît tout à fait loisible
à l'esprit humain de comprendre que trois personnes ayant à se
prononcer sur un point précis, l'éclairage qu'elles peuvent
apporter sur un problème donné, l'expérience que ces
personnes peuvent apporter à l'étude, par exemple, dans le cas
d'une première convention collective, des conditions qui doivent
régir les parties, est beaucoup plus pertinente et garante d'une
décision équitable que si une personne devait rendre une telle
décision.
Je vous rappellerai aussi un commentaire de la FTQ sur cette question
d'arbitrage de différends: "Nous nous opposons à la modification
de fond de ce chapitre pour établir une convention collective. Nous
croyons important de maintenir un conseil constitué de trois arbitres."
C'était la FTQ qui donnait son opinion sur le sujet. La FTQ avait comme
optique d'assurer la compréhension des difficultés au niveau de
l'établissement d'une convention collective, la compréhension par
plus d'une personne des éléments qui sont importants à
décider.
On se retrouve, ici, non seulement avec le Conseil du patronat, qui
représente l'un des côtés intéressés, mais
avec le côté syndical, la FTQ, qui est une centrale très
importante. Ces gens maintiennent l'idée que trois arbitres permettront
de rendre une décision plus éclairée. On peut en conclure,
un peu comme je le disais plus tôt, qu'à tout le moins justice
semblera plus facilement avoir été rendue dans un tel cas.
On pourrait citer la Fédération des pompiers
professionnels qui, justement, sur cette question du remplacement du Conseil
d'arbitrage par un arbitre unique, avait à dire ce qui suit: "La
Fédération des pompiers professionnels du Québec
considère que le changement proposé est tout à fait
inopportun." Elle demande qu'on maintienne l'existence du conseil d'arbitrage
dans sa forme actuelle. "Malgré l'existence de certains
problèmes, le régime s'est, en effet, avéré
satisfaisant dans les résultats obtenus et, dans l'ensemble, nous
estimons qu'il a fait preuve d'efficacité. Ce sont, quant à nous,
des raisons suffisantes pour maintenir la formule actuelle. Mais il y a plus.
En effet, les résultats satisfaisants obtenus sont, dans une très
large mesure, attribuables au caractère tripartite du conseil
d'arbitrage. Son remplacement par un arbitre unique risque donc de compromettre
sérieusement l'efficacité du régime".
Je suis ici depuis deux ans et on essaie de prôner, d'après
ce que je peux comprendre en Chambre quand je réussis à saisir
les idées que le gouvernement veut essayer d'implanter dans ses
différents projets de loi ou dans sa gestion publique, le principe de
l'efficacité. Je puis vous assurer, M. le Président, que,
souvent, à bien des égards, on recherche cette efficacité
et on se demande si les décisions sont réellement empreintes d'un
désir d'efficacité.
La Fédération des pompiers professionnels du
Québec, sur ce point particulier, au niveau du remplacement du conseil
d'arbitrage par un arbitre unique, nous dit, dans son mémoire, que
"c'est tout à fait inopportun d'agir de cette façon-là" de
remplacer le conseil d'arbitrage par un seul arbitre pour des raisons
primordiales d'efficacité. Dans un tel cas, je pense qu'on devrait
être extrêmement sensible à cette position-là. Cette
position de la FTQ rejoint, en fin de compte, la position du Conseil du
patronat que j'ai mentionnée plus tôt. Si les parties
concernées, tant au niveau patronal qu'au niveau syndical, viennent
témoigner et nous disent que, jusqu'à maintenant, les
résultats leur paraissent satisfaisants ou leur garantissent une
certaine efficacité, je verrais difficilement qu'on puisse, proprio
motu, simplement par désir de changement, adopter cette
façon-là de procéder et s'en remettre à un arbitre
unique.
En fait, M. le Président, j'aurais bien aimé
connaître les raisons fondamentales et particulières qui
pousseraient le gouvernement actuel à proposer un tel changement,
contrairement à la volonté et aux résultats qui sont
apparus à la face même des diverses parties confrontées aux
dispositions du code relativement à l'arbitrage. Il m'apparaît
presque farfelu de dire qu'on va modifier un tel système, alors que tout
le monde s'en déclare satisfait.
Si une amélioration peut être apportée, suivant
certains rapports du Conseil de la recherche du ministère du Travail,
à cause du fait qu'on a eu certains problèmes au niveau de la
création d'un tribunal d'arbitrage, au niveau du choix d'arbitres, du
choix du président du conseil d'arbitrage, il m'apparaît beaucoup
plus important de le maintenir pour assurer le respect des droits et de la
volonté des parties et pour garantir et maintenir une efficacité
qui n'est pas mise en doute par le niveau patronal, ni par certains
intervenants importants du niveau syndical. Comment peut-on vouloir modifier
cela si ces gens-là, dans la presque-totalité,
affirment en fin de compte, que le système actuel, au niveau de
l'arbitrage, devrait être maintenu?
Point n'est besoin ici d'insister quant à l'efficacité. Je
pense qu'à ce moment-ci, puisque ces décisions du conseil
d'arbitrage sont finales et sans appel, la décision qui sera rendue non
pas par le conseil, mais par un arbitre unique sera également finale et
sans appel. Il apparaît d'autant plus important d'assurer le maintien
d'un tel régime qui a prouvé son efficacité, qui a
prouvé sa façon de satisfaire les parties dans leur ensemble. En
fait, même si l'article actuellement en discussion, l'article 29, nous
parle uniquement du titre, il est essentiel de souligner ces positions des
parties.
Si on revient au mémoire soumis par la Conférence des
arbitres du Québec en date du 3 juin 1983 à la commission
parlementaire sur le projet de loi 17 modifiant le Code du travail et diverses
dispositions législatives, on peut référer à la
page 3 du mémoire: "Surtout, il faut insister sur le fait qu'une
décision à laquelle les parties ont collaboré de
très près a beaucoup plus de chance de représenter la
réalité vécue dans une entreprise quelconque." Cela, en
aparté, on peut dire que c'est une question d'efficacité. Je
continue la citation: "Aussi, il en ressort normalement une bien plus grande
facilité d'application que si, au contraire, elle est revêtue d'un
caractère juridique. En effet, un conseil ou tribunal d'arbitrage
comprend certes un président, mais aussi deux arbitres que chacune des
parties a désignés. Ces arbitres désignés par les
parties jouent un rôle important dans le façonnement et
l'élaboration d'une décision qui tiendra lieu d'une convention
collective. À ce sujet, nous désirons attirer l'attention des
honorables membres de la commission parlementaire aux articles 76, 77, 78 et 79
du Code du travail actuel. Nous devons souligner que nous croyons qu'une
convention collective imposée par un arbitre unique aura un
caractère beaucoup plus judiciaire que si celle-ci est le fruit d'une
démarche tripartite. Avant de terminer nos propos quant à ce
premier aspect de l'arbitrage de différends, nous osons soulever des
doutes que l'utilisation du procédé d'un arbitre unique puisse
réellement accélérer l'arbitrage de différends. De
plus, nous nous permettons de soulever que, même s'il y avait un certain
gain de procéder ainsi, il ne faut pas mettre de côté
l'objet principal d'une convention collective qui est de régir et
d'assurer les conditions de travail qui s'appliquent réellement à
un ensemble de personnes qui correspondent à la réalité
d'un établissement ou d'une entreprise. À ce sujet, nous nous
permettons de croire que le conseil ou le tribunal d'arbitrage peut remplir
beaucoup plus adéquatement cette tâche que l'arbitre unique."
M. le Président, il m'apparaît fortement confirmé
par le mémoire soumis par la Conférence des arbitres du
Québec que la question d'efficacité, qui intéressait
grandement la Fédération des pompiers professionnels du
Québec et qu'on pouvait retrouver dans les mémoires soumis par le
Conseil du patronat du Québec, de même que par la FTQ, veut le
maintien de la formule actuelle du conseil d'arbitrage en lieu et place d'une
modification que le gouvernement actuel voudrait apporter au régime de
notre droit du travail concernant l'arbitrage des différends en
soumettant le cas non pas au conseil d'arbitrage tripartite, mais à un
seul arbitre.
Également, au niveau de la Conférence des arbitres du
Québec, un élément important dans ce sujet en discussion
est le fait qu'on mentionne qu'une décision rendue par un arbitre unique
aura un caractère beaucoup plus judiciaire qu'une décision rendue
à la suite d'une démarche tripartite. Dans toute la question du
droit du travail depuis de nombreuses années, on mentionne souvent qu'il
faudrait déjudiciariser le monde du travail. À plusieurs moments,
tant du côté patronal que du côté syndical, on a fait
valoir de tels arguments. C'est un élément qu'on retrouve
constamment dans toute discussion relative à quelque sujet que ce soit
dans le droit du travail. (22 h 15)
Mais nous avons ici un cas où des parties fortement
intéressées par la question, soit le Conseil du patronat, soit
les syndicats, soit même la Conférence des arbitres, disent qu'on
devrait maintenir le système actuel pour éviter d'amener un
élément davantage judiciaire dans la décision à
être rendue au niveau de l'arbitrage des différends. Une telle
constatation, une telle formulation, une telle vue sur les modifications
proposées par le ministre du Travail m'apparaissent effectivement
militer, contrairement à ce qu'on veut faire ici, pour le maintien du
régime actuel, je le répète, pour une question
d'efficacité qui est également reconnue par la Conférence
des arbitres.
On aurait pu penser qu'un système tripartite aurait
peut-être été une garantie de moins d'efficacité,
d'une prise de décision plus longue. Mais non, la Conférence des
arbitres, eux qui sont des gens qui ont l'expertise du milieu, qui sont les
gens mêmes qui sont appelés à se prononcer sur ces sujets,
nous dit que la décision tripartite n'est pas une décision qui
pourra nous amener une perte de temps ou un manque d'efficacité. Au
contraire, cela garantit même l'efficacité. Ces arbitres sont
nommés par la partie syndicale, par la partie patronale et le
troisième, du consentement des deux, par le ministère. Ces
arbitres pourront permettre aux parties de faire valoir des points en ayant en
tête que ces
points seront à tout le moins entendus par l'arbitre même
que le syndicat aura nommé. On aura plus de chance, en tout cas,
d'attirer l'attention d'un arbitre qui sera nommé du côté
patronal, dans un certain cas, et, pour l'autre partie, c'est aussi valable au
niveau syndical. On aura beaucoup plus de chance de sensibiliser, d'attirer
l'attention de cet arbitre sur les arguments que la partie concernée
fera valoir.
Évidemment, ces arbitres, il faut se rendre compte d'une chose,
soit l'arbitre patronal ou l'arbitre syndical, au niveau de la discussion aux
fins d'arriver à une décision finale, pourront amener le
président du tribunal à s'arrêter sur certains points
particuliers qui auront pu être soulevés par le côté
syndical ou le côté patronal. Comme je le mentionnais
tantôt, à tout le moins la justice paraîtra avoir
été rendue dans le sens que les individus d'un côté
ou de l'autre auront à tout le moins le sentiment d'avoir pu faire
valoir avec force leurs prétentions et d'avoir été
écoutés avant que la décision finale ait pu être
rendue. Un conseil d'arbitres tripartite garantissant l'efficacité
actuelle qu'on retrouve au sein du régime permettra aux parties de
garder confiance dans un système qui a fait ses preuves depuis de
nombreuses années au Québec. On devrait retrouver cela dans tout
système proposé au niveau du Code du travail où on veut
déjudiciariser le processus. On en a la preuve ici suivant le conseil
d'arbitrage, au moins sur le fondement essentiel qui est le leur. Un conseil
tripartite va accélérer le processus, cela va maintenir ce
processus au lieu d'amener une fonction davantage judiciaire par un seul
arbitre. Le conseil d'arbitrage tripartite garantissant l'efficacité,
quelle serait la raison valable aujourd'hui de vouloir modifier un tel chapitre
du Code du travail, si les parties concernées, patronale et syndicale,
et la Conférence des arbitres nous disent, en fin de compte, que le
système actuel est efficace dans son ensemble? La question posée
amène la réponse; je pense qu'il serait inconséquent de
modifier un tel système puisque le fondement de toute loi devrait viser
à l'efficacité des dispositions administratives qu'on y adopte.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'article 29 sera
adopté?
M. Paradis: Vote nominal, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. Dean (Prévost)?
C'est un vote nominal sur l'article 29.
M. Dean: Pour.
Le Président (M. Bordeleau): M. Dean
(Prévost), pour. M. Lafrenière (Ungava)? M.
Lafrenière: Pour.
Le Président (M. Bordeleau): Pour. M. Saintonge
(Laprairie)?
M. Saintonge: Contre.
Le Président (M. Bordeleau): M. Paradis
(Brome-Missisquoi)?
M. Paradis: Contre.
Le Président (M. Bordeleau): Mme
Lachapelle (Dorion)?
Mme Lachapelle: Pour.
Le Président (M. Bordeleau): Si j'ai bien compté,
M. le greffier, cela fait trois pour et deux contre. L'article 29 est donc
adopté. J'appelle l'article 30. L'article 30, adopté sur
division?
M. Dean: C'est un article de concordance.
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Bordeleau): L'article 30 est
adopté sur division. Article 31?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Bordeleau): Article 31, adopté sur
division. Article 32?
M. Paradis: Sur division.
Le Président (M. Bordeleau): Article 32, adopté sur
division. Article 33? M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Sur l'article 33, qui modifie l'article 77, il est
important de se rappeler que l'article 77, dans son état original, avant
qu'on tente de le modifier, se lisait comme suit: "Le ministre nomme membres du
conseil d'arbitrage les personnes désignées par chaque partie
dans la demande ou, à défaut, les désigne d'office. Il
nomme également le greffier."
C'est le ministre du Travail par intérim ou le ministre du
Travail de façon régulière.
L'article 77 est remplacé par le suivant: "Dans les dix jours de
la réception de l'avis prévu par l'article 75, les parties
doivent se consulter sur le choix de l'arbitre; si elles s'entendent, le
ministre nomme à ce poste la personne de leur choix. À
défaut d'entente, le ministre le nomme d'office. "Un arbitre
nommé d'office est choisi sur une liste dressée annuellement par
le ministre, après consultation du Conseil consultatif du travail et de
la main-d'oeuvre.
"Le ministre nomme également le greffier."
On voit donc que l'arbitre est choisi après entente entre les
parties; sinon, c'est le ministre qui le nomme. C'est assez clair. Est-ce qu'il
n'est pas à craindre - c'est une question que je pose aux gens de
l'autre côté - que les consensus ne s'établiront que
très rarement avec la nouvelle formule et que c'est le ministre qui
statuera? Est-ce qu'il n'est pas à craindre que le ministre ait à
intervenir, lui qui est occupé par ses travaux en Chambre, qui est
occupé comme député, qui est occupé par toutes
sortes de fonctions? Est-ce qu'il n'est pas à craindre, dis-je, que la
nouvelle modification fasse en sorte qu'on ait recours aux talents - il faut le
reconnaître - du ministre du Travail de façon très
fréquente et que sa charge administrative sera alors très lourde?
Est-ce que le calendrier du ministre lui permet de s'accabler d'une
autre...
M. Bélanger: Pas saccager.
M. Paradis: Non, pas saccager. Merci, M. le député
de Mégantic-Compton. ...responsabilité aussi importante? Tout
porte à croire que le consensus va s'établir plus rarement.
Est-ce ce qu'on vise par le projet de loi? Avant d'adopter cet article,
j'aimerais le savoir. Le ministre est parti, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): II ne doit pas être
loin.
M. Paradis: Est-ce qu'on peut siéger en l'absence du
ministre?
Le Président (M. Bordeleau): Vous avez quand même
l'adjoint parlementaire au Travail.
M. Paradis: Je sais, mais en vertu de la nouvelle Loi sur la
Législature, je ne suis pas certain, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Non, il n'y a pas de
problème.
M. Paradis: C'est un problème qui s'est posé, M. le
Président - je vous le soumets et j'en fais une demande de directive -
entre les deux leaders lorsqu'on a appris que le ministre du Travail et
député de Sherbrooke était en congé de maladie.
Sans étayer mon argumentation plus à fond sur le sujet, je sais
qu'une des raisons qui ont motivé le gouvernement à nommer un
ministre du Travail par interim, c'était le fait que
l'interprétation de la nouvelle Loi sur l'Assemblée nationale
portait à croire - cela n'a pas été tranché; je
vous le dis, M. le Président - qu'il faut la présence du ministre
pour poursuivre nos travaux. D'ailleurs, le ministre a toujours
été ici. C'est un cas exceptionnel que je soulève.
Toutefois, par consentement, je vous l'accorde, on peut faire de
merveilleuses choses à l'Assemblée nationale du Québec.
Maintenant, s'il n'y a pas consentement, je vous demanderais de vérifier
auprès de la présidence qui a déjà
été sensibilisée à cette question, bien qu'elle
n'ait pas encore rendu de décision, lorsqu'on nous a demandé,
comme Opposition, si on acceptait que l'adjoint parlementaire remplace le
ministre. Je sais que des discussions ont cours entre les leaders. Je sais que
la présidence a été sensibilisée et je sais que la
décision prise, finalement, fut de nommer un ministre du Travail par
intérim pour éviter de prendre la décision importante qui
s'imposait dans les circonstances. Je vous soumets ce que je connais du
dossier, M. le Président. Je vous préviens, étant
donné, que la guillotine pèse sur nos épaules, qu'il n'est
pas question, à ce stade-ci de l'adoption du projet de loi, de donner un
consentement dans ce sens-là. En temps normal - on l'a fait dans le
passé -nous sommes très accommodants et nous aurions donné
un consentement. Mais, avec la guillotine, si vous pouvez prendre le temps de
vérifier auprès de la présidence, parce que c'est une
décision importante en vertu de la nouvelle Loi sur l'Assemblée
nationale, cela nous donnerait également le temps, si vous le
désirez - après vérification auprès de mon leader;
la même chose de l'autre côté -de vérifier si, sans
consentement, nous siégeons présentement de façon
légale. Je vous demanderais, là-dessus, sous réserve de
mon droit de parole, de vérifier si on peut siéger ainsi.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député,
pour répondre à votre demande de directive, comme vous l'avez
vous-même mentionné, la présidence n'ayant pas
tranché le débat, je serais malvenu de le trancher
moi-même, sauf que je comprends qu'on a eu la sagesse de nommer un
ministre du Travail par intérim pour l'étude du projet de loi.
À mon sens, étant, depuis quelques années,
président de commissions parlementaires, il n'est pas indiqué,
dans notre règlement, que le ministre doit siéger absolument
à la commission même. Je comprends que c'est de mise dans le cadre
de l'explication du projet de loi. De toute façon, comme vous l'avez
vous-même mentionné, le ministre a suivi, je pense, assez
assidûment la commission et il semble qu'il se soit absenté pour
quelques minutes. Il devrait être là très bientôt. Je
ne pense pas que cela remette en question l'étude de l'article 33, pour
le moment.
M. Paradis: Non, c'est le principe, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Sur le principe, M. le
député, vous aurez éventuellement une décision de
la présidence.
M. Paradis: Vous avez dit que vous siégez depuis
longtemps. Les représentations que j'avais eues provenaient de la
formulation de la nouvelle Loi sur l'Assemblée nationale. J'ai
demandé au député de Laprairie d'aller vérifier
immédiatement auprès du leader de l'Opposition parce que, lorsque
l'on crée un précédent dans ce sens-là avec une
nouvelle loi - c'est l'un des principes d'interprétation de notre
règlement - votre décision pourrait faire jurisprudence.
Considérant que c'est la première, il est important de partir pas
simplement de pied ferme, mais en se basant sur l'argumentation de chacune des
parties. Je vous ai strictement fait part des commentaires que j'avais entendus
en coulisse sans effectuer moi-même de recherche relativement à
l'application de cet article. Mais je ne l'aurais pas fait, M. le
Président, si je n'avais pas eu vent des pourparlers qui ont eu lieu
entre les deux formations politiques et qui ont amené la nomination d'un
ministre du Travail par intérim. (22 h 30)
Cela étant dit et dans le but de ne pas retarder nos
débats jusqu'à ce que j'aie des nouvelles de la position du
leader de l'Opposition, je vais continuer en donnant un consentement qui sera
d'une durée équivalente au rapport des nouvelles. Comme cela,
nous ne perdrons pas de temps et les travaux pourront continuer. Cela ne
créera pas une jurisprudence. Il n'y aura pas de décision rendue.
Si le leader de l'Opposition en venait à la conclusion que nous vous
demandons une directive formelle, que nous avons une argumentation sur le plan
juridique à vous étayer, nous la ferons et, à ce
moment-là, vous serez en mesure de trancher avec toutes les
lumières qui s'imposent dans de telles circonstances.
Le Président (M. Bordeleau): Comme vous n'avez pas
demandé une directive formelle, mais que vous avez simplement
porté à l'attention de la présidence vos craintes, cela ne
pourrait pas, pour le moment, créer de jurisprudence, étant
donné que je n'ai pas répondu formellement à votre demande
de directive non formelle. Entre-temps, on va s'informer si le ministre peut
être là bientôt.
Une voix: II est parti en Chambre.
Le Président (M. Bordeleau): Pour longtemps? De toute
façon, on va s'informer. M. le député de Brome-Missisquoi,
si vous voulez continuer, vous avez toujours le droit de parole. On a suspendu
le temps pour votre intervention.
M. Paradis: M. le Président, j'aimerais seulement que le
député de Prévost, qui est adjoint parlementaire,
réponde en l'absence du ministre aux inquiétudes que j'ai
soulevées face à l'article 33 qui modifie l'article 77. Si ses
réponses font toute la lumière sur le sujet, nous pourrons
à ce moment-là passer à l'article suivant.
M. Dean: M. le Président, pour comprendre le sens de
l'amendement, il faut lire les anciens articles 77 et 78 ensemble pour
comprendre le sens des nouveaux articles 77 et 78 qui sont les articles 33 et
34 du projet de loi. Selon le système du tribunal à trois,
d'abord, les deux arbitres, patronal et syndical, étaient nommés
en vertu de l'article 77 et, en vertu de l'article 78, les deux arbitres
essaient de s'entendre sur le choix d'un président. S'ils ne s'entendent
pas, le ministre le nomme d'office. Là, on dit que tout président
nommé d'office est choisi sur la liste dressée annuellement par
le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre.
Dans le projet de loi que nous avons devant nous, on fait la
différence. C'est que maintenant on propose un système d'arbitre
où on peut avoir ou non des assesseurs. Donc, le nouvel article 77 dit
que les parties se consultent sur le choix du président d'arbitrage et,
si elles s'entendent, le ministre nomme la personne de leur choix. À
défaut d'entente, il le nomme d'office.
M. Paradis: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Brome-Missisquoi, sur une question de règlement.
M. Paradis: M. le Président, celui qui est allé
vérifier auprès du leader de l'Opposition, le
député de Laprairie, me rapporte que la loi oblige le ministre
à être présent pour répondre aux questions et pour
apporter les modifications, etc. J'en fais une question de règlement. On
a voulu ce soir faire siéger la commission du travail ici en même
temps que l'on faisait siéger, les députés qui sont
assignés au dossier du travail au salon bleu. Le ministre n'est pas
présent. Je vous demande donc de rendre une décision formelle sur
l'obligation de la présence du ministre responsable...
Une voix: Par intérim.
M. Paradis: ...à la commission parlementaire pendant que
la commission parlementaire poursuit ses travaux... Les nouvelles sont
bonnes.
Le Président (M. Desbiens): Alors, M. le
député de Prévost, vous pouvez continuer, d'après
ce que je comprends.
M. Paradis: Le ministre est arrivé. Il faut que ce soit
inscrit au journal des Débats, M. le Président.
M. Dean: J'étais en train de dire qu'il faut lire les
anciens articles 77 et 78 et les nouveaux articles comme un ensemble qui tient
compte du nouveau système d'arbitrage de différends avec
assesseurs. Alors, il n'y a pas plus de contenu dans les anciens articles 77 et
78 qu'il n'y en a dans les articles 77 et 78 proposés dans le
présent projet dé loi. C'est la même procédure.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 33 est
adopté?
M. Bélanger: On nous apporte des notes pour des
amendements probables.
M. Johnson (Anjou): Adopté, M. le Président.
M. Bélanger: Sur division.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.
J'appelle l'article 34.
M. Johnson (Anjou): Adopté.
M. Bélanger: Une minute, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur
division.
Une voix: Un amendement, M. le Président.
M. Bélanger: Le ministre est un peu vite.
Le Président (M. Desbiens): L'article 34 du projet de loi
est remplacé par le suivant: L'article 78 de ce code est remplacé
par le suivant: "78. L'arbitre procède à l'arbitrage avec
assesseurs à moins que, dans les quinze jours de sa nomination, il n'y
ait entente à l'effet contraire entre les parties. "Chaque partie
désigne, dans les quinze jours de la nomination de l'arbitre, un
assesseur pour assister ce dernier et la représenter au cours de
l'audition du différend et du délibéré. Si une
partie ne désigne pas un assesseur dans ce délai, l'arbitre peut
procéder en l'absence de l'assesseur de cette partie. "Il peut
procéder en l'absence d'un assesseur lorsque celui-ci ne se
présente pas après avoir été
régulièrement convoqué."
Est-ce que l'amendement est adopté?
M. Johnson (Anjou): Est-ce que l'article 34 est adopté?
Adopté?
M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: L'article contenu au projet de loi que nous
étudions présentement se lisait comme suit: "L'arbitre
procède à l'arbitrage avec assesseurs si, dans les quinze jours
de sa nomination, il y a entente à cet effet entre les parties." Vous
renversez, M. le ministre, finalement, la mécanique. Quant à
renverser la mécanique d'avoir deux assesseurs sauf si les parties n'en
veulent pas - vous vous rapprochez de la situation du conseil d'arbitrage, bien
que vous me disiez que l'assesseur ne rend pas de décision, qu'il n'a
pas le droit de rendre une décision dissidente - quant à avoir
les trois personnes présentes, pourquoi ne pas maintenir le conseil
d'arbitrage comme tel? C'est un pas dans la bonne direction, mais pourquoi,
quant à faire un pas, n'entrez vous pas dans la marche?
M. Johnson (Anjou): L'objet de l'article 34 du projet de loi est
d'introduire la notion d'un arbitrage à arbitre unique avec, cependant,
la règle, dans le cas des arbitrages, qu'il soit flanqué de deux
assesseurs à moins que les parties n'en conviennent autrement.
L'avantage d'avoir des assesseurs plutôt que des arbitres se retrouve
dans une étude que j'ai citée antérieurement, mais que le
député de Brome-Missisquoi n'a pas voulu nous faire l'honneur
d'écouter...
M. Paradis: M. le Président, question de
règlement.
M. Johnson (Anjou): ...puisqu'il était occupé, M.
le Président. Qu'il ne prenne pas cela personnellement, c'est un
fait.
Le second problème majeur des présidents, nous dit une
étude publiée par le ministère en 1982 à la suite
d'une analyse très exhaustive de l'arbitrage de différends de
première convention collective, c'est celui des arbitres. "Conscients de
la pratique actuelle, ils souhaiteraient soit changer le statut des arbitres et
en faire des assesseurs ou permettre aux parties de choisir entre un conseil
à arbitre unique ou un conseil avec un arbitre et deux assesseurs."
Ce que nous introduisons, M. le Président, c'est l'arbitre avec
deux assesseurs, conformément à une étude assez exhaustive
auprès des arbitres, nonobstant les commentaires qu'a pu nous faire la
Conférence des arbitres. L'objectif visé, c'est de raccourcir les
délais. Deuxièmement, l'avantage de la formule à
l'égard de cet objectif, c'est que nous obtenons que le président
puisse siéger en l'absence des assesseurs s'ils ne veulent pas se
présenter, en plus de ne pas être aux prises avec de
longs délibérés des arbitres des parties pour les
fins de rédaction d'une dissidence. Je pense que tout cela, M. le
Président, serait de nature à favoriser une dynamique beaucoup
plus efficace au niveau de l'arbitrage de différends, que ce soit la
première convention collective des policiers ou des pompiers ou
l'arbitrage volontaire.
Est-ce que l'article 34 est adopté, M. le Président?
Le Président (M. Desbiens): L'amendement est-il
adopté?
M. Paradis: Sur division, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Sur division. L'article 34 est
adopté tel qu'amendé.
M. Paradis: Tel qu'amendé, sur division.
Le Président (M. Desbiens): Sur division. Article 35?
M. Johnson (Anjou): M. le Président, avant de passer
à l'article suivant, je voudrais simplement signaler - je pense que mon
collègue l'a soulevé, mais je croyais qu'entre les leaders il y
avait eu des échanges à cet égard, il y a
déjà quinze jours - que mon collègue, le
député de Prévost, qui est l'adjoint parlementaire au
ministre du Travail, participera jusqu'à la fin aux travaux de cette
commission. Je devrai m'absenter pour une période d'environ 45 minutes.
Je pense qu'il est normal et adéquat que l'on permette à mon
collègue, comme cela s'est fait dans d'autres commissions, de se
responsabiliser face à l'étude article par article. Je pense que
le député de Brome-Missisquoi ne pourrait pas invoquer le fait
que j'ai été absent très longtemps. J'ai
été, d'ailleurs, moi-même un peu moins absent que lui lors
de cette commission pour des raisons qu'il avait et qui étaient sans
doute justifiables.
M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article
suivant.
Le Président (M. Desbiens): Article 35. M. le
député de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: Sur la question de règlement, le ministre nous
avertit immédiatement qu'il va s'absenter. On est dans une situation de
guillotine - c'est le choix du gouvernement d'annexer au feuilleton un projet
de guillotine; il l'a fait dès vendredi dernier - et le projet de loi
revêt une importance capitale. Je vous dirais que, dans des circonstances
normales, nous consentirions à ce que l'adjoint parlementaire remplace
le ministre. Mais, étant donné la situation de guillotine, nous
insistons pour que le ministre soit présent. S'il quitte, nous devrons
insister pour l'application intégrale de la Loi sur l'Assemblée
nationale et de notre règlement, ce qui va vous appeler, M. le
Président, à trancher la question. Après
vérification, comme je l'ai indiqué tantôt, auprès
du bureau de notre leader, on nous informe qu'il y a une question de droit qui
se soulève et qu'en vertu de la nouvelle loi il n'y a pas de
jurisprudence sur le sujet. Nous invitons le ministre à demeurer avec
nous, s'il veut le faire. On est déjà rendu à l'article
35.
M. Johnson (Anjou): On est déjà rendu!
M. Paradis: On est déjà rendu à l'article 35
et il y en a 110. Après combien, M. le Président? Après
peut-être une quinzaine d'heures de session? Cela fait, quand même,
un bon rythme. Je suis conscient que le ministre peut avoir - il est au Travail
par intérim, mais il est également ministre des Affaires sociales
- d'autres occupations. On est conscient de cela, mais on n'a pas choisi, nous
de l'Opposition, d'amener le projet en fin de session, on n'a pas choisi de
placer ce projet de loi dans une situation de guillotine; c'est le gouvernement
qui l'a choisi. On ne souhaiterait rien de mieux, dans des circonstances
normales, que de donner notre consentement, mais pas dans une situation de
guillotine.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, sur la
question de règlement.
M. Johnson (Anjou): Oui, sur la question de règlement qui
est soulevée. Je n'ai pas le texte à la portée de la main,
je l'aurai d'ici quelques secondes, mais je sais que les nouvelles dispositions
de la Loi sur l'Assemblée nationale sont rédigées d'une
façon un peu plus restrictive qu'auparavant. Je pense cependant, pour
avoir suivi avec un certain intérêt les travaux de la commission
qui a modifié la Loi sur l'Assemblée nationale, qu'il n'a jamais
été de l'intention de l'Assemblée nationale d'interdire
qu'à l'occasion l'adjoint parlementaire d'un ministre puisse
défendre une certaine partie d'un projet de loi. (22 h 45)
Je comprends, M. le Président, qu'il n'est pas question, en vertu
de la nouvelle loi, qu'un adjoint parlementaire pilote, à lui seul, un
projet de loi lors de l'étude article par article. Je pense, cependant,
qu'il n'est pas interdit, à l'occasion, sur quelques articles ou sur un
article précis, que cette responsabilité revienne à
l'adjoint parlementaire.
Je me permets de dire, M. le Président, que je ne peux pas
présumer du comportement et du rythme avec lequel l'Opposition fera
avancer ce projet, bien que
j'aie des opinions assez sérieuses sur les probabilités me
basant sur l'expérience des quinze dernières heures ou un peu
plus en commission.
Je suis sûr, M. le Président, que si je m'absente pendant
environ une heure, me basant sur ce qui s'est passé depuis quelques
heures, on devrait adopter au maximum deux articles. Comme tout cela est
à l'intérieur du chapitre de l'arbitrage, M. le Président,
je suis sûr que mon collègue le député de
Prévost - qui a participé beaucoup plus longtemps que moi aux
travaux préparatoires du projet de loi 17 - peut assumer plus
qu'adéquatement les responsabilités de cette partie de notre
étude, d'autant plus, M. le Président, qu'on ne peut pas
reprocher à votre serviteur d'avoir été absent des travaux
de cette commission. Au contraire, pour l'ensemble des travaux, je pense y
avoir été présent plus souvent que le député
de Brome-Missisquoi ou que la plupart des autres membres de cette
commission.
M. Paradis: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Brome-Missisquoi, sur la question de règlement.
M. Paradis: M. le Président, j'ai suivi attentivement, et
j'ai participé à la commission qui a adopté la nouvelle
Loi sur l'Assemblée nationale. Une des questions fondamentales
débattues à l'occasion de cette commission sur la Loi sur
l'Assemblée nationale portait sur la nomination de nouveaux adjoints
parlementaires et sur les responsabilités des nouveaux comme des
anciens. Il a été clairement établi par l'ensemble des
intervenants - c'est pourquoi le texte que j'ai envoyé chercher va
être aussi clair, M. le Président - qu'il s'agissait d'une demande
de certaines personnes du côté gouvernemental que les adjoints
parlementaires puissent exercer le rôle et la fonction de
défendre, en commission parlementaire, au nom de leur ministre, les
positions du parti ministériel.
À ce moment-là, on s'est heurté à une vive
opposition, M. le Président, de l'Opposition qui a demandé,
exigé et gagné son point sur cet article. C'était
peut-être grâce à l'ex-président, M. Vaillancourt,
député de Jonquière, qu'on a gagné. Il
n'était pas question, pour quelqu'un qui n'avait pas accès au
Conseil des ministres, d'entendre les revendications autant de la population
qui nous rend visite, à l'occasion de certaines commissions
parlementaires, que des autres parlementaires de l'autre côté de
la Chambre, de même que des collègues.
On a justement clarifié cette ambiguïté dans la
nouvelle Loi sur l'Assemblée nationale pour s'assurer qu'un membre
du
Conseil des ministres, qui peut, par sa présence au Conseil des
ministres, influer sur les modifications à apporter à un projet
de loi, ait l'obligation absolue d'assister aux travaux et d'être en
mesure, par ce fait, de véhiculer, auprès de ses collègues
du Conseil des ministres, l'essentiel des représentations faites en
commission parlementaire.
M. le Président, je me souviens très clairement de cette
discussion. Malheureusement, je ne peux pas réciter l'article de la loi
par coeur; je vais l'avoir d'ici quelques minutes. Vous aussi, à la
lecture, vous allez vous rendre compte que l'Assemblée nationale du
Québec a créé une obligation pour le ministre responsable
d'un projet de loi d'être présent et de répondre aux
parlementaires, ainsi qu'aux invités, du contenu du projet de loi.
Jamais nous n'avons accepté, M. le Président, qu'un adjoint
parlementaire ait cette fonction, cette responsabilité. Vous le
comprendrez, M. le Président, l'adjoint parlementaire n'a pas
accès au Conseil des ministres. L'adjoint parlementaire n'a pas
l'autorité voulue pour accepter, proprio motu, les amendements.
M. le Président, je vous soumets que la décision que vous
allez rendre est lourde de conséquences. C'est la première qui
suit l'adoption de la nouvelle Loi sur l'Assemblée nationale du
Québec. Si vous permettez à l'adjoint parlementaire au ministre
du Travail de remplacer le ministre du Travail par intérim, à
cette commission parlementaire, dans les commissions parlementaires qui vont
suivre, se basant sur la jurisprudence que votre décision va
établir, les ministres vont tout simplement nous déléguer
leurs adjoints parlementaires pour répondre des projets de loi du
gouvernement et ils seront conformes à votre décision, à
la loi et aux règlements.
C'est ce que nous avons voulu éviter à l'occasion de la
réforme de la Loi sur l'Assemblée nationale et, pour donner
raison au ministre des Affaires sociales ministre du Travail par
intérim, il vous faudrait rendre une décision qui serait
contraire à la lettre et à l'esprit de la nouvelle Loi sur
l'Assemblée nationale du Québec. M. le Président, vous
avez voté vous-même comme l'ensemble des parlementaires - cette
loi a été votée unanimement - pour l'adoption de ladite
loi. Lorsque nous avons voté cette loi, nous étions conscients
que la présence d'un ministre et non d'un adjoint parlementaire lors du
débat en commission parlementaire d'un projet de loi était
essentielle et je n'aimerais pas que votre décision nous prive de la
présence si agréable du ministre du Travail par
intérim.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur la question de règlement? M. le député
de Brome-Missisquoi.
M. Paradis: J'attends.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Brome-Missisquoi, je suis d'accord avec vous qu'il s'agit d'une décision
extrêmement importante pour l'avenir des travaux en commission. Je ne
suis pas en mesure, de toute façon, immédiatement, de rendre ma
décision. Même si j'étais en mesure de rendre ma
décision, le ministre étant là, cela devient une question
hypothétique pour l'instant.
M. Johnson (Anjou): Voilà! M. Paradis: Merci.
M. Johnson (Anjou): L'article 33. Ou plutôt 35. Pardon! Mon
Dieu, cela va vite!
Le Président (M. Desbiens): Article 35.
M. Paradis: Nous allons trop vite pour le ministre.
M. Johnson (Anjou): L'objet de l'article 35 se retrouve
essentiellement dans le deuxième paragraphe; c'est la notion, si on
veut, d'équité et de bonne conscience.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Brome-Missisquoi, sur l'article 35.
M. Paradis: L'article original, c'est-à-dire l'article tel
qu'il existe actuellement avant qu'on le modifie, se lit comme suit: "Tout
membre d'un conseil doit avant d'agir prêter serment de rendre sentence
selon l'équité et la bonne conscience." Traditionnellement, ces
deux critères guidaient les arbitres dans leurs prises de
décision. On se souvient, pour l'avoir entendu au salon bleu, pour
l'avoir entendu en commission parlementaire, de la bouche du président
de l'Union des municipalités du Québec, de la bouche du
président de l'Union...
M. Johnson (Anjou): ...des municipalités régionales
de comté.
M. Paradis: ...des municipalités régionales de
comté - il faut vivre à l'heure du Québec - des MRC, M. le
Président, pour l'avoir entendu de la bouche des représentants
des policiers et des pompiers que la modification apportée par le
gouvernement réussit à faire l'unanimité - il faut se le
rappeler, c'est important - mais l'unanimité n'est pas en faveur. C'est
une unanimité contre cet article.
Ledit article ajoute les critères suivants: "Pour rendre sa
sentence, l'arbitre peut tenir compte, entre autres, des conditions de travail
qui prévalent dans des entreprises semblables ou dans des circonstances
similaires, ainsi que des conditions de travail applicables aux autres
salariés de l'entreprise." Une telle disposition, mi-chair, mi-poisson,
aurait pu se lire: L'arbitre doit tenir compte, entre autres... Si on avait
tenu compte des représentations de l'Union des municipalités du
Québec et l'Union des municipalités régionales de
comté, c'est ce qu'on lirait.
Maintenant, parce qu'elle dit "peut" et qu'elle ajoute des
critères à ce qui existait avant, ce sont les associations de
pompiers et les associations de policiers qui sont contre. Est-ce que c'est
trop demander à ce gouvernement, est-ce que c'est trop demander au
ministre du Travail par intérim de trouver une solution, de trouver une
rédaction de l'article qui, au moins, aurait pour effet non pas
d'aliéner toutes les parties, mais au moins de créer un certain
consensus dans un groupe donné et, si possible, de créer un
consensus chez l'ensemble des intervenants? Il faut le faire, être
capable de rédiger un article qui nous aliène à la fois le
support des patrons et des syndicats. Il faut le faire, c'est un tour de force,
je reconnais cela au ministre.
M. Johnson (Anjou): Le support des deux.
M. Paradis: Le support de l'un et de l'autre ou des deux si
possible. Mais n'avoir l'endossement de personne et se faire critiquer
vertement par tous les intervenants dans ce dossier, M. le ministre, est-ce
qu'on peut imaginer un gouvernement, un ministre aussi déconnecté
de la réalité? Est-ce possible? Peut-on inviter le ministre
à nous dire, après analyse de la position des autorités
municipales ou des représentants syndicaux, laquelle il
privilégie? Peut-on demander au ministre s'il a tenté, avec tout
le génie qu'on lui connaît - parce qu'il faut être
génial pour s'aliéner tout le monde - de l'appliquer en sens
contraire et d'avoir l'appui de tout le monde?
Avec l'ancien article, le ministre avait réussi à s'allier
les fédérations, les syndicats de pompiers et de policiers; ils
étaient d'accord avec la rédaction de l'article tel qu'il
existait alors que le membre du conseil, avant de prêter serment, disait
qu'il le ferait selon l'équité et la bonne conscience. La
fédération des pompiers était d'accord, la
fédération des policiers était d'accord. L'Union des
municipalités du Québec était contre, l'Union des
municipalités régionales de comté était contre. On
n'améliore pas un projet de loi lorsqu'on crée un consensus
contre le projet de loi.
Est-ce que le génie ministériel qu'on a en face de nous
peut, au moins, nous garantir qu'il a des appuis quelque part sur ce projet de
loi? Il ne les trouvera pas du côté de l'Opposition. S'il ne les
trouve pas
du côté des syndicats et s'il ne les trouve pas du
côté du patronat, est-ce que ses seuls appuis viennent de ceux qui
sont assis en arrière de lui? Est-ce que ce sont les seuls appuis qu'il
peut recueillir pour ce projet de loi? Est-ce que ses seuls appuis viennent des
députés ministériels qui, au fur et à mesure qu'on
adopte des articles, prennent connaissance du projet de loi? Est-ce que ce sont
les seuls appuis qu'on a pour adopter un tel article? C'est décourageant
pour le monde municipal, décourageant pour le monde syndical de voir
à quel point le gouvernement s'ingénie à s'aliéner
tout le monde dans la société.
Les résultats des élections partielles ce soir - trois sur
trois au Parti libéral - nous indiquent, pendant que nous discutons ce
projet de loi, comment l'ensemble de la population réalise qu'en
adoptant des articles comme l'article 35 du projet de loi on s'aliène
tout le monde. Est-ce qu'on peut gouverner longtemps en s'aliénant tout
le monde?
Je vous soumets bien respectueusement qu'en disant à l'arbitre
qu'il peut peut-être tenir compte, entre autres choses, "des conditions
de travail qui prévalent dans des entreprises semblables ou dans des
circonstances similaires, ainsi que des conditions de travail applicables aux
autres salariés de l'entreprise", tout ce que le ministre fait, c'est
donner, en partie simplement et de façon décevante pour les
autorités municipales, suite aux engagements formels du premier ministre
du Québec, engagements qu'il a pris en Chambre, au salon bleu,
engagements qu'il a pris à l'occasion du dernier congrès de
l'Union des municipalités du Québec. M. le Président, on
nous a dit qu'il avait été chaudement applaudi, notre bon premier
ministre, au congrès de l'Union des municipalités du
Québec. (23 heures)
Une voix: À Baie-Comeau aussi.
M. Paradis: À Baie-Comeau aussi? Bon! II est applaudi
partout. M. le Président, lorsqu'il a parlé d'imposer
l'obligation aux arbitres de tenir compte des critères
énumérés à l'article 79, est-ce que ce Parti
québécois est capable de remplir un engagement? Est-ce qu'il est
capable de ne pas tromper les gens, au salon bleu comme à
l'extérieur? Est-ce qu'il est capable d'avoir une parole? Je vous dis
respectueusement que les gens des municipalités se sont sentis
trompés. Les gens des syndicats se sont sentis trompés. Je vous
soumets respectueusement qu'à la suite de questions sur le sujet que
j'ai adressées au premier ministre en Chambre, personnellement, je me
suis senti trompé.
Il y a des gens, ce soir, qui ne se sont pas trompés. C'est quand
ils sont allés voter dans les trois comtés qu'on a gagnés.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Sur les dispositions du nouvel article 79 du
Code du travail, il est exact de dire que l'article 35 du projet de loi 17
s'est attiré des critiques de la part des syndicats de policiers et de
pompiers, comme il s'est attiré des critiques des représentants
des municipalités. Or, c'est assez caractéristique de ce qu'on
retrouve dans les relations du travail très organisées, comme
c'est le cas des policiers et pompiers ou comme c'est le cas des ouvriers de la
construction. La partie syndicale est contre parce qu'elle trouve que cela va
trop loin et la partie patronale est contre parce qu'elle trouve que cela ne va
pas assez loin, ou le contraire.
Dans les circonstances, M. le Président, je trouve que la formule
choisie par mon collègue, le député de Sherbrooke et
ministre responsable de la présentation de ce projet de loi à
l'Assemblée, est extrêmement sage, extrêmement
équilibrée. Elle permet d'introduire ces notions de
référence à la réalité environnante, sans
pour autant tomber dans le travers qui aurait impliqué, si on avait
écouté l'Union des municipalités du Québec,
l'alignement total des arbitrages de différends sur les conditions de
travail de l'ensemble des autres salariés. Je pense que c'est là
une formule mitoyenne. Par définition, il n'y a pas de consensus
possible autour d'une formulation comme celle-là. Je
répète qu'elle m'apparaît sage.
Est-ce que l'article est adopté, M. le Président?
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Bélanger: Quand je vois l'article 35 où on dit
"peut tenir compte", je trouve que c'est un non-sens. Ce n'est qu'un voeu pieux
et pas exercé de la façon dont le premier ministre est capable de
l'exercer. Lorsqu'il fait des voeux pieux, au moins il évoque des choses
qui touchent directement à la religion. C'est vraiment pieux. Ici, c'est
un voeu pieux: "L'arbitre peut tenir compte".
Pourquoi cela m'inquiète-t-il? Je représente un
comté qui comptent 50 municipalités. Là, on donne le
pouvoir à une seule personne de décider quel salaire auront les
policiers. Les élus municipaux n'ont donc aucun contrôle sur les
dépenses de la municipalité. C'est pourtant eux qui ont
été élus pour gouverner. Il y a pourtant un conseil
municipal composé d'un maire et de conseillers municipaux. Ils sont de
bonne foi. La plupart d'entre eux font du travail bénévole. Mais
ils se sont plaints, à juste
titre d'ailleurs, qu'ils n'ont plus le contrôle des
dépenses publiques. Le premier ministre, à l'Assemblée
nationale, en réponse à une question qu'on lui adressait - Mon
Dieu, est-ce qu'on va pouvoir le croire encore, ce premier ministre? - nous a
dit: Cela a trop duré, c'est fini; il va falloir faire quelque chose; ce
n'est plus possible que ce soient des gens qui ne sont pas élus qui
décident pour l'ensemble des citoyens. Ce que nous retrouvons à
cet article, c'est exactement cela: "L'arbitre peut tenir compte, entre autres,
des conditions de travail qui prévalent dans des entreprises
semblables", mais on ne l'oblige pas.
Je reviens toujours à mes municipalités, parce que c'est
le gros problème. Je représente de petites municipalités.
Je ne suis pas le seul, d'ailleurs. Vous savez qu'au Québec il y a 1600
municipalités. On a beau les regrouper en municipalités
régionales de comté, la capacité de payer demeure la
même. Ce n'est pas parce qu'on a un conseil supplémentaire que,
finalement, les gens ont de l'argent. Ce n'est pas parce qu'on a un conseil
supplémentaire que les évaluations ont augmenté dans les
municipalités et qu'il y a des sources de taxation. On sait que le
gouvernement a retiré la taxe de vente aux municipalités et
là elles sont rendues avec quelles sources de revenus? En plus, on leur
impose, avec le Code du travail, qu'un arbitre va décider à
Lac-Mégantic, à East-Angus, à Victoriaville combien un
policier va gagner sans que le maire, et le conseil municipal n'aient un mot
à dire. Cela n'a aucun sens. C'est incroyable et cela n'a même pas
de logique.
Je rencontrais tout récemment un maire, un ancien membre
très actif du Parti québécois qui est devenu maire et qui
s'est même excusé parce qu'on a déjà eu des prises
de bec. Il a dit: Tu avais raison. C'est vrai que cela n'a pas de bon sens.
Parce que là il était dedans, il s'apercevait de quelle
façon le Code du travail fait en sorte que, tout en étant maire
de la municipalité, tout en ayant le fardeau de cette
municipalité, ce n'était pas lui qui décidait;
c'était une tierce personne.
Le ministre me dit: Nommez-les. J'ai beaucoup trop de respect pour ces
anciens péquistes qui sont devenus libéraux, surtout ce soir; ce
n'est pas moi qui vais commencer cela. Il y en a tellement de péquistes
qui sont devenus libéraux aujourd'hui. Ce n'est pas croyable. Je ne suis
pas pour commencer à les nommer. D'ailleurs, je n'aurais pas le temps,
on retarderait les travaux inutilement. On veut plutôt passer à
l'article 35. Mon collègue m'apprend qu'il a des choses à
dire.
Cela devrait être au moins: "doit tenir compte des
possibilités de payer". À ce moment-là, l'arbitre pourrait
dire: Je n'ai pas accordé d'augmentation de salaire, au contraire, c'est
une diminution de salaire de 20% parce que la municipalité n'est pas
capable de payer. Mais il ne le peut pas. Il peut en tenir compte, mais c'est
un voeu pieux. Ce n'est pas un projet de loi qui est préparé
adéquatement, c'est un projet de loi qui demande encore une certaine
réflexion. Je suis persuadé qu'avec un peu de bonne
volonté nous pourrons arriver à l'automne à reprendre ce
projet de loi avec la refonte globale du Code du travail pour faire en sorte
qu'on améliore au Québec nos conditions de travail. C'est ce que
nous visons, nous du Parti libéral.
Mon Dieu qu'on l'a dit souvent! On dit qu'en politique, lorsqu'on est
tanné de dire quelque chose, il faut le dire quatre fois plus. Alors, on
va le dire quatre fois plus. Ce que nous voulons, c'est revoir le Code du
travail au complet pour améliorer nos conditions de travail,
améliorer, en fait, l'économie du Québec et pour donner
des "jobs" aux 400 000 chômeurs.
M. Johnson (Anjou): L'article 35 est-il adopté, M. le
Président?
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie.
M. Bélanger: Mon collègue a un mot à
dire.
M. Saintonge: Merci, M. le Président. Je voudrais faire
quelques remarques sur cet article 35. En fin de compte, je me souviens d'une
chose, c'est qu'au mois de décembre le ministre Parizeau lors d'une
entrevue - je ne me souviens pas exactement où - qui fut
rapportée dans les journaux, mentionnait qu'au niveau des policiers
municipaux, on était en train d'amener les municipalités à
une faillite complète. C'est ce que le ministre Parizeau disait à
l'époque et il disait qu'il est important qu'à brève
échéance on en vienne à modifier le fameux système
d'arbitrage pour les policiers et les pompiers municipaux.
Le premier ministre a repris cela en Chambre. Répondant à
une question du député de Brome-Missisquoi, il a dit que la
situation avait assez duré et qu'il verrait à ce que des mesures
soient prises incessamment et même que des instructions étaient
données dans ce sens-là. En tout cas, c'était un peu
farfelu et un peu compliqué comme attitude et comme possibilité
d'amendements au Code du travail concernant les policiers municipaux.
Je dois vous dire que j'ai rencontré la Fédération
des policiers du Québec. J'ai également rencontré l'Union
des municipalités du Québec, l'Union des municipalités
régionales de comté puisque je suis le porte-parole des affaires
municipales. J'ai rencontré également le conseiller en relations
industrielles auprès de l'UMQ et nous avons
discuté longuement du fameux problème en question.
Il est sûr que les sentences arbitrales qui affectent le monde
municipal, les sentences arbitrales qui évoluent avec des augmentations
de salaires de l'ordre de 25% à 37% et davantage dans certains cas
-récemment, à la ville de Repentigny, je crois, on a vu une
augmentation d'environ 53%; c'est de mémoire, mais c'était plus
que 50% - cela n'avait pas de bon sens, M. le ministre. Le premier ministre a
même reconnu cela et le ministre Parizeau, qui est le
député du comté de L'Assomption -c'était au mois de
décembre, avant une décision qui a été rendue
à la fin d'avril ou au début de mai - disait que cela n'avait pas
de bon sens que ce régime-là continue. Mais rendu au mois de mai,
on lui donnait pleinement raison. Dans son propre comté, une des
municipalités est prise avec une augmentation de 53% pour une
année. Je comprends qu'il y a peut-être du rattrapage à
effectuer d'une certaine façon, mais le problème global, c'est
que, quant à la réforme actuelle, une réforme qui a
été poussée, on a vu antérieurement que le milieu
rejette d'une façon assez globale plusieurs amendements proposés.
Il n'y a personne de satisfait.
Dans ce cas-ci, on a l'exemple patent d'une situation où on
modifie d'une façon abracadabrante un article de loi dans lequel on
insère un critère quelconque où on vient dire simplement:
"Pour rendre sa sentence, l'arbitre peut tenir compte, entre autres, des
conditions de travail qui prévalent dans des entreprises semblables ou
dans des circonstances similaires, ainsi que des conditions de travail
applicables aux autres salariés de l'entreprise." Cela ne satisfait pas
l'UMQ. Peut-être qu'à l'UMA ils ont des revendications qui
apparaissent fondamentalement trop poussées, trop prononcées, au
ministre du Travail par intérim comme au ministre du Travail actuel ou
même au premier ministre ou au ministre des Finances. Mais si ces
revendications de l'UMQ sont vraiment trop poussées, il faut dire
qu'elles sont aux prises actuellement, depuis deux ans, avec des sentences
arbitrales qui n'ont pas de commune mesure avec les réalités qui
affectent le monde municipal.
Pour quelle raison? C'est que ces sentences arbitrales viennent, en fin
de compte, mettre une espèce de frein, au niveau municipal, à
l'autonomie des municipalités, dans le sens que ce sont des arbitres ou
un conseil d'arbitrage qui viennent purement et simplement fixer les conditions
de salaire des policiers ou des pompiers municipaux, mais qui viennent en
même temps grever les budgets municipaux. Et ce conseil d'arbitrage qui
rend une telle décision n'est pas celui qui a l'odieux de supporter
vis-à-vis des contribuables une telle augmentation de salaire. La
question n'est pas de savoir si les policiers méritent ou ne
méritent pas la chose, mais c'est de voir si l'autonomie des
municipalités est affectée ou non, les élus municipaux,
qui ont à composer avec un électorat et qui ont à
justifier un budget de municipalité, faire valoir pleinement leurs
objectifs et leurs réalisations.
Dans les circonstances présentes, les officiers municipaux,
maires et conseillers, et les conseillers des maires, soit les avocats ou les
conseillers en relations industrielles, n'étaient nullement satisfaits
des conditions suivant lesquelles les présentes décisions
devaient être rendues, c'est-à-dire suivant l'équité
et la bonne conscience. On demandait une modification importante afin de
permettre aux officiers municipaux de pouvoir conserver leur autonomie, tout en
donnant satisfaction, en fin de compte, aux catégories d'employés
que sont les policiers et les pompiers. Actuellement, suivant
l'équité et la bonne conscience, il s'est
révélé, dans les décisions rendues, qu'on
créait au niveau des municipalités deux ordres de travailleurs,
les policiers et les pompiers, d'une part, et les autres travailleurs
municipaux, d'autre part, les cols blancs et les cols bleus.
Même à ce niveau-là, cela allait plus loin que les
cols blancs et les cols bleus; cela affectait d'une certaine façon, dans
plusieurs cas, l'administration même des municipalités,
c'est-à-dire ce qui touche les gérants, les trésoriers,
les évaluateurs, les greffiers. Il y avait des situations absolument
impossibles où les policiers, dans certains cas, pouvaient gagner plus
que d'autres travailleurs municipaux qui ont des fonctions administratives
très importantes, qui assurent la bonne marche des municipalités
mêmes. Ces gens-là ne pouvaient pas rattraper, ne pouvaient
même pas avoir, dans certains cas, un salaire équivalent à
celui payé aux policiers et aux pompiers. Cela allait même plus
loin: dans certaines municipalités, on s'est rendu compte que le chef de
police avait pratiquement un salaire équivalent, à celui que des
policiers de première classe recevaient au bout de quelques
années. À ce moment-là, on arrive à quoi? C'est
beau de dire que cela prend des chefs et des Indiens, mais si les Indiens
gagnent plus que le chef, à un moment donné, le chef va se
demander ce qu'il fait dans la baraque. C'est exactement le cas qui occupait
ces municipalités.
Il y a une révision importante à considérer
concernant la détermination des salaires dans les municipalités.
On doit tenir compte non seulement du potentiel fiscal, mais de la situation
économique de la municipalité. Même si cela fait dormir le
ministre, je crois qu'il devrait prêter une
oreille attentive non pas simplement à mes propos, car mes
propos, ce n'est pas important... Ce qui me surprend, c'est que le ministre me
dit qu'il a tout entendu. S'il a tout entendu, d'où vient le fait que
l'UMQ ne soit pas contente, d'où vient le fait que l'ensemble des
municipalités du Québec qui sont affectées par une telle
disposition ne soient nullement satisfaites, après des mois et des mois
où on a promis aux élus municipaux qu'on se pencherait sur cela
d'une façon complète, d'une façon - je ne dirais pas
intelligente, parce qu'il me semble que cela va de soi - absolument exhaustive,
même plus que cela, d'une façon globale, d'une façon aussi
qui va permettre de rendre justice non seulement aux administrateurs
municipaux, mais également aux citoyens de chacune des villes du
Québec qui se voient confrontés à des augmentations de
salaire envers une catégorie d'employés municipaux? (23 h 15)
Je comprends, d'autre part, que, vis-à-vis de cela, on n'ait pas
pu respecter un tant soit peu le désir de l'Union des
municipalités. Je comprends qu'il y a peut-être des contraintes
à d'autres niveaux. Par exemple, au niveau de la
Fédération des policiers du Québec, on est satisfait. D'un
côté, on se dit: L'Union des municipalités n'est pas
contente et les municipalités, non plus. D'autre part, au niveau de la
Fédération des policiers, on dit: Qu'on garde le régime
actuel, qu'on maintienne le statu quo. C'est bien évident, quand on est
directement favorisé par les éléments que contient un
système, on ne veut pas changer un tel système. Dans les
circonstances actuelles, le ministre Parizeau, M. Lévesque et même
des ministres Jacques Léonard et Marc-André Bédard, lors
des rencontres avec les dirigeants municipaux que le système ne pouvait
pas durer ainsi, qu'il y avait des modifications importantes à y
apporter, lorsqu'on se retrouve avec la montagne qui accouche d'une souris, au
niveau municipal, cela ne satisfait nullement.
Il n'y a aucune garantie quant aux décisions éventuelles.
Si on ne peut pas avoir raison avec trois arbitres et qu'on a de la
difficulté à obtenir justice, avec un arbitre
éventuellement, comment va-t-on pouvoir l'obliger, dans les
circonstances actuelles, à tenir compte de la situation
économique prévalant dans la municipalité où il
aura à se prononcer sur des facteurs salariaux et sur des conditions de
travail qui touchent les autres employés municipaux? Il n'y a aucune
garantie qui permette aux municipalités de s'assurer, avec la
rédaction actuelle de cet article, qu'au moins, dans chacune des
municipalités du Québec, on ne se retrouvera pas, encore une
fois, avec des conventions collectives accordées lors d'arbitrage qui
vont permettre aux policiers municipaux de s'en tirer avec un gain important
par rapport à d'autres catégories de citoyens travaillant dans
ces municipalités.
Je maintiendrai, M. le Président, dans ces circonstances, que les
policiers municipaux, de toute façon, qui sont dans une région
donnée, font un travail qu'ils ont accepté librement de faire.
C'est peut-être une question de fond. Il reste que ces policiers ont
accepté d'aller travailler dans une municipalité donnée,
dans des circonstances données au point de vue économique et du
régime fiscal des municipalités. Le potentiel fiscal des
municipalités n'est pas le même partout au Québec.
Un autre élément important à noter porte sur
l'indice de criminalité et sur l'indice de participation des citoyens
à la prévention du crime qui n'est pas le même partout. Ce
sont des facteurs dont il aurait fallu tenir compte dans l'établissement
éventuel des conditions sur lesquelles les arbitres, ou l'arbitre,
auront à se prononcer pour fixer une telle sentence arbitrale. Je
maintiendrai que l'article actuel, tel qu'il est écrit, ne porte aucune
garantie quant à cela. C'est ce qui explique la réaction de
l'Union des municipalités du Québec, qui représente
l'ensemble des municipalités du Québec et non pas des
municipalités locales. Même l'Union des municipalités du
Québec, représentant aujourd'hui certaines municipalités
régionales de comté et certaines municipalités locales qui
se joignent à l'UMQ, démontre son insatisfaction vis-à-vis
du problème tel qu'il existe actuellement. L'UMRCQ est également
touchée, dans certains cas, par ces dispositions puisque les sentences
arbitrales, éventuellement, pourront affecter les municipalités
qui sont obligées de créer éventuellement des corps de
police dans les municipalités de plus de 5000 habitants.
C'est un problème qui touche l'ensemble des municipalités
du Québec à qui le gouvernement actuel avait promis une
réforme en profondeur de ce système d'arbitrage. L'ensemble des
municipalités osait espérer, en tout cas, des amendements qui
auraient pu, d'une façon certaine, régler ce problème
réel qui se renouvellera à la prochaine convention collective. On
pouvait d'autant plus s'en attendre que le ministre des Finances lui-même
reconnaissait qu'on était en train de mener certaines
municipalités du Québec à la faillite directe. Si c'est le
cas, je comprends difficilement comment, entre le discours, et la
réalité, ces amendements qu'on veut apporter par le projet de loi
se retrouvent là-dedans. On ne se retrouve plus d'aucune
façon.
Est-ce qu'on ne peut pas conclure que le gouvernement, dans
l'état actuel, a fait preuve d'une certaine frivolité
vis-à-vis de l'Union des municipalités du Québec et de ses
composantes, c'est-à-dire de l'ensemble
des municipalités? Il s'est foutu de la gueule des
administrateurs municipaux en ne réglant pas les problèmes.
Pourtant, c'est ce même gouvernement qui, dans le cas de ses
fonctionnaires, peut légiférer, puis revenir sur sa parole au
niveau de certaines conventions collectives signées
antérieurement. Dans le cas des municipalités, on ne les laisse
pas libres de décider au niveau de l'impact financier qui va toucher
l'ensemble des citoyens, l'ensemble des contribuables. On ne laisse pas le
conseil municipal participer activement, d'une certaine façon, à
la préparation d'une politique salariale. C'est impossible.
On s'attendait que les modifications au niveau du Code du travail
concernant l'arbitrage des policiers et des pompiers municipaux auraient pu,
tout au moins, amener le gouvernement à tenir compte de
représentations qui m'apparaissent très fondées de l'Union
des municipalités du Québec sans, pour autant, dire qu'on accepte
entièrement et intégralement ses demande. Sans dire que toute
revendication de la Fédération des policiers du Québec
n'est pas valable, il reste que cela démontre une chose; si au niveau de
la Fédération des policiers du Québec on est d'accord pour
garder le système antérieur, équité et bonne
conscience - manifestement, on a regimbé un peu contre les nouvelles
modifications à l'article - cela démontrait que le régime
antérieur satisfaisait une des parties pleinement. D'autre part, cela
démontre le décalage qui pouvait exister dans la
réalité, puisque l'autre partie qui était
complètement défavorisée, les municipalités du
Québec, n'a même pas pu avoir la garantie minimale qu'on avait
promise, et qu'une réforme éventuelle rapide du Code du travail
pouvait apporter.
Le ministre me fait signe que cela fait trois minutes. Je pense qu'il
veut faire toutes les "jobs" en même temps. Je ne sais pas si c'est cela.
Il s'est légèrement trompé tantôt; il me disait
quatre minutes et cela faisait trois minutes que je parlais. Je pensais qu'il
tenait le compte à rebours et non pas de l'autre côté.
En fin de compte, c'est simplement pour noter que, de ce
côté, les critères antérieurs,
l'équité et la bonne conscience, qu'on modifie par des
possibilités au niveau de l'article 79 où on dit que l'arbitre
peut en tenir compte, ce n'est pas tellement engageant. L'arbitre n'a pas
tellement de responsabilité directe, n'a pas d'obligation directe. Il
"peut tenir compte, entre autres, des conditions de travail qui
prévalent dans des entreprises semblables ou dans des circonstances
similaires, ainsi que des conditions de travail applicables aux autres
salariés de l'entreprise." Si on laisse à l'arbitre le choix
à un moment donné, de suivre un critère, on aura
peut-être des disparités de sentences encore plus grandes, parce
qu'on aura qu'un seul arbitre et non pas, comme antérieurement, un
conseil d'arbitrage. Un seul arbitre va décider. Cet arbitre pourra
carrément ignorer la possibilité de tenir compte d'autres
conditions de travail qui prévalent, de tenir compte aussi au niveau des
diverses municipalités du potentiel fiscal de la municipalité, du
fardeau fiscal qui affecte chacun des contribuables. C'est à sa
discrétion d'en tenir compte. C'est l'équité et la bonne
conscience. C'est beaucoup trop large comme critère. La preuve en a
été faite.
Je ne comprends absolument pas, dans un tel cas, qu'on puisse venir
modifier de cette façon le Code du travail qui va simplement
perpétuer, à mon humble avis, les problèmes qu'on a connus
jusqu'à maintenant. Non seulement il va les perpétuer, mais je
maintiendrai qu'il va augmenter les problèmes de disparités entre
les régions, puisque nous aurons affaire, dans certains cas, à un
arbitre qui pourra en tenir compte dans une municipalité et un autre
arbitre, dans une autre municipalité voisine pourra ne pas en tenir
compte, puisqu'il ne se sentira pas lié par le texte même de
l'article 79 qui n'apporte aucune obligation fondamentale.
Je pense que, pour un gouvernement qui a toujours prôné son
haut niveau de consultation, sa grande ouverture pour la consultation, surtout
au niveau municipal où le ministre actuel des Affaires municipales parle
toujours de grande consultation... Il dit toujours aux municipalités: On
va vous écouter, on va prendre une décision suivant la
volonté de l'ensemble des municipalités concernées. On l'a
vu au niveau des MRC. On l'a vu à plusieurs autres niveaux. On l'a
entendu, encore une fois, dans les discussions que le ministre pouvait avoir
avec l'Union des municipalités relativement à cela, avec certains
maires de municipalités qui se plaignaient, justement, des
difficultés énormes que leur apportait la disparité des
sentences arbitrales affectant les policiers par rapport aux autres
travailleurs municipaux. La consultation a donné quoi? On devait
proposer un système même qui pourrait faire l'affaire de l'Union
des municipalités.
On apporte un projet de loi, dans les dernières heures de session
où il n'y a pas possibilité de discuter, aussi de voir
l'interaction dans le milieu municipal par rapport au milieu des travailleurs.
Dans le cas présent, soit celui de la Fédération des
policiers ou des pompiers municipaux, on n'a pas pu voir l'interaction des
amendements proposés par rapport à ces différents corps
qui sont concernés dans l'établissement éventuel du
régime dans lequel ils auront à
vivre. Ce n'est pas possible à cause du très minime laps
de temps qu'on a pu concéder à ces gens pour se prononcer
là-dessus, pour suggérer tout amendement et aussi pour avoir
toute discussion possible sur l'établissement de certains
critères. On parle de consultation, on a parlé
énormément de concertation également, c'est un mot qui est
à la mode. Au niveau du Code du travail, on maintient toujours que la
concertation, c'est la clé de plusieurs problèmes, que les gens
doivent se concerter pour arriver à des décisions, pour arriver
à des éléments de solution qu'ils pourront accepter,
qu'ils pourront eux-mêmes faire intégrer, d'un commun accord, au
Code du travail dans le but de résoudre les problèmes qui se
posent peut-être pas quotidiennement, mais annuellement ou tous les deux
ans, quand ils ont a renégocier ces conventions collectives.
Mais, dans le cas présent, cette fameuse concertation sur les
possibilités de modifications du Code du travail, quand va-t-elle se
faire? Quand le Code du travail aura été adopté à
la vapeur, sans qu'on ait pu en discuter et sans qu'on ait pu prendre en
considération des amendements que l'UMQ aurait sûrement pu
proposer et aussi sans avoir tenu la promesse antérieure qui avait
été faite non seulement par le ministre des Affaires municipales,
mais également par le ministre de la Justice, ainsi que par le ministre
du Travail, de l'élaboration de critères éventuels devant
permettre aux municipalités de se retrouver dans un régime qui
pourrait être acceptable pour les élus municipaux.
Le ministre des Affaires municipales va prôner pendant longtemps
que le gouvernement respecte les élus municipaux, que le gouvernement
respecte l'autonomie des municipalités, que le gouvernement est
prêt à donner aux municipalités la possibilité
d'avoir une voix directe dans leur potentiel fiscal à distribuer dans la
municipalité, à donner aux municipalités, en fin de
compte, la possibilité d'être des administrateurs municipaux qui
soient vraiment, pour l'ensemble des contribuables, les garants d'une bonne
administration, les garants de l'utilisation d'une façon décente
et conformément à la réalité de chacune des
municipalités, de tous les deniers municipaux.
Mais ces choses ne pourraient être possibles que par un amendement
à cet article 79, entre autres, qui pourra, d'une façon
réaliste, permettre aux municipalités de s'impliquer davantage ou
d'avoir la possibilité, d'une certaine façon, de faire valoir des
arguments qui pourront modifier une décision... En tout cas, elles
pourront inciter les arbitres ou l'arbitre qui sera appelé à
rendre la décision malheureusement, l'arbitre unique au lieu d'un
conseil d'arbitrage - à la rendre dans la plus grande
équité, mais aussi dans la plus grande justice non seulement pour
elles, mais pour l'ensemble des travailleurs affectés à ces
municipalités et également pour tous les contribuables de chacune
des municipalités. Je vous remercie, M. le Président, de votre
patience.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Oui, brièvement, parce que je ne peux
pas passer sous silence certaines choses provenant de l'Opposition. Je pense
que l'attitude qui voudrait qu'on mette le mot "doit" plutôt que "peut
tenir compte" n'est pas très sage venant de l'Opposition, pour les trois
motifs suivants. Le premier, c'est qu'elle postule, à toutes fins
utiles, que l'ensemble des sentences arbitales ne sont pas réalistes, ce
qui est faux. Je pense que les études le démontrent. S'il y a des
cas comme Repentigny et quelques autres à l'occasion, ce n'est pas une
règle générale. Deuxièmement, elle postule
également que, si on y mettait le mot "doit" au lieu de "peut", cela
jouerait toujours en faveur des municipalités. Or, depuis la
réforme fiscale municipale, de nombreuses municipalités au
Québec se sont retrouvées avec des surplus considérables
et, techniquement, cela amènerait - je pourrais en nommer une bonne
demi-douzaine dans la grande région montréalaise - effectivement
des arbitres à prendre des décisions qui tiendraient compte de ce
qu'on a appelé la capacité de payer, en face, et à rendre
de drôle de jugements. Troisièmement, une approche comme
celle-là aurait comme effet de transformer des arbitres - à qui
on essaye de dessiner un couloir le mieux possible pour baliser leurs
décisions de façon adéquate -en juges de la pertinence de
l'implication des municipalités dans certaines affaires. (23 h 30)
Or, on voudrait qu'un arbitre, qui n'est élu par personne, qui
n'aura à rendre des comptes qu'à lui-même et aux tribunaux,
dans la mesure où il excède sa juridiction, vienne dans une
municipalité et décide que cette municipalité n'aurait pas
dû avoir un service de loisir et qu'elle ne devrait pas mettre ses
priorités ailleurs que sur les pompiers. Je pense que ce n'est pas
l'objet d'un arbitrage. En ce sens, je répète que la formule
retenue m'apparaît très sage parce qu'elle introduit la notion
selon laquelle on ne peut pas se séparer totalement de l'existence de
conditions locales dans une décision de la nature d'une sentence
arbitrale pour des policiers-pompiers ou encore dans l'arbitrage d'une
première convention collective, puisque l'article 79 s'y applique.
En ce sens, cet article m'apparaît, encore une fois, sage dans la
mesure où toute expression différente entraînerait le type
de conséquences que j'ai évoquées tout
à l'heure, qui ne joueraient pas nécessairement en faveur
des municipalités et qui, surtout, transformeraient les arbitres en
juges de l'opportunité de décisions administratives ou de
politiques municipales. Ceci n'est souhaité ni par nos amis d'en face,
ni par nous et surtout pas par les maires.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 35 est
adopté?
M. Bélanger: Sur division.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.
J'appelle l'article 36.
M. Johnson (Anjou): Adopté, M. le Président?
M. Bélanger: J'aurais un mot, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Bélanger: Je vais tenter de procéder le plus
rapidement possible. Si je regarde l'article 36, il se lit comme suit: "En cas
d'incapacité d'agir de l'arbitre par démission, refus d'agir ou
autrement..." J'aimerais que le ministre m'explique ce qui peut arriver d'autre
que d'être incapable d'agir ou d'avoir démissionné.
M. Johnson (Anjou): Bonne question! Je peux vous dire que c'est
la formule consacrée qu'on retrouve ailleurs. Je présume que cela
peut couvrir autre chose, si jamais les tribunaux donnaient au mot
"incapacité" une définition restrictive. Par exemple, est-ce que
le fait d'avoir raté son autobus, un matin, constitue une
incapacité d'agir? Est-ce que ce n'est pas cela, "autrement"? J'ai
l'impression que le mot "autrement" vise simplement à s'assurer qu'on ne
se restreint pas dans l'interprétation des raisons pour lesquelles un
assesseur ne peut pas siéger.
Est-ce que l'article est adopté, M. le Président?
M. Bélanger: Sur division.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.
J'appelle l'article 37.
M. Johnson (Anjou): Concordance.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 37 est
adopté?
M. Bélanger: C'est toujours le même problème,
M. le Président. On aurait préféré garder le mot
"conseil" au lieu du mot "arbitre", mais on a décidé, de l'autre
côté, que l'arbitre était plus efficace et plus rapide.
Encore une fois, ce sera sur division.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.
J'appelle l'article 38. Il y a un amendement.
M. Johnson (Anjou): À l'article 38, il y a un papillon. Je
ne sais pas si vous préférez qu'on utilise l'expression
"papillon" plutôt qu"'amendement" dans la mesure où les papillons
font partie intégrante du projet de loi. Il se lit comme suit: L'article
38 du projet de loi est remplacé par le suivant: "38. L'article 82 de ce
code est remplacé par le suivant: 82. Les séances d'arbitrage
sont publiques; l'arbitre peut toutefois, de son chef ou à la demande de
l'une ou l'autre des parties, ordonner le huis clos."
Il s'agit essentiellement, dans le cas de ce papillon, de supprimer le
deuxième paragraphe de l'article 82, de sorte qu'on ne tient plus les
assesseurs au secret du délibéré.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'amendement est
adopté? M. le député de Laprairie.
M. Saintonge: M. le ministre, j'aurais peut-être une
question. On dit: "Les séances d'arbitrage sont publiques; l'arbitre
peut, toutefois, de son chef ou à la demande de l'une des parties,
ordonner le huis clos." De quelle façon et suivant quelles règles
ou suivant quels critères l'arbitre, de son propre chef, peut-il
ordonner le huis clos? Est-ce qu'on a des cas particuliers? Qu'est-ce qu'on
visait comme distinction? Est-ce une possibilité d'ordonner le huis
clos, purement et simplement, arbitrairement par l'arbitre?
M. Johnson (Anjou): M. le Président, cela peut être
dans deux circonstances, j'ai l'impression. D'abord, on retrouve là
essentiellement les dispositions de l'article du Code du travail tel qu'il
existait antérieurement, la seule chose qu'on change, c'est l'arbitre
plutôt que le conseil d'arbitrage. Deuxièmement, cela a dû
arriver certainement une couple de fois, à la quantité
d'arbitrages qu'il y a depuis quinze ans, que l'arbitre décide du huis
clos. Dans la mesure où c'est public et que vous arrivez dans une
municipalité relativement restreinte où les gens se connaissent,
etc., et que les gens décident de venir manifester pendant les
séances du conseil d'arbitrage, peut-être que cela peut arriver
ainsi. Je présume que c'est la raison pour laquelle c'est dans le code
depuis un certain nombre d'années. Cela a dû servir une couple de
fois, mais je ne pourrais pas vous étayer cela. Ce qu'on fait, c'est
qu'on reconduit les dispositions actuelles du code.
M. Saintonge: On dit: "à la demande de
l'une des parties", mais il n'y a pas de critères. D'après
ce que je peux comprendre, le ministre parle d'une municipalité, si on
prend le cas des municipalités, où il y aurait eu un peu de
polémique, les gens venant manifester au conseil.
M. Johnson (Anjou): II se pourrait que l'arbitre soit dans une
position où il a l'impression qu'en ayant des séances publiques
on essaie d'exercer des pressions sur lui et qu'à l'occasion des
séances publiques l'attitude ou les manifestations venant des gens dans
la salle soient perçues comme des pressions pour l'empêcher de
faire son travail adéquatement. Cela se pourrait.
M. Saintonge: Mais si l'arbitre - je maintiendrai mon point de
vue là-dessus dans un cas semblable - pense qu'on peut faire des
pressions sur lui d'une certaine façon, il reste que dans un cas, par
exemple, où on parlera bien clairement d'un arbitrage municipal... On
parlait des policiers tantôt. Je comprends que les arbitres ne sont pas
simplement des gens qui vont décider suivant des critères
préétablis et à la manière d'un ordinateur, mais,
à ce niveau, si dans une circonstance semblable ou parce qu'on craint un
peu que les gens puissent manifester, si on veut rendre les séances
d'arbitrage publiques, il reste que, dans le cas des policiers municipaux, les
décisions que les conseils d'arbitrage ont à prendre - cela
revient presque à ce que je disais tantôt -influencent directement
les municipalités.
Cela influence également les conseils municipaux qui seront pris
éventuellement avec la décision rendue et qui ont à faire
face à la musique devant leurs concitoyens. Les citoyens peuvent
exercer, à ce moment-là, une pression sur le conseil municipal.
Le conseil municipal devrait-il, lui aussi, siéger à huis clos
dans un tel cas pour éviter d'avoir des pressions des citoyens, par
exemple, sur l'arbitrage d'une convention collective ou éventuellement
sur la responsabilité que les élus municipaux assument quant
à la fiscalité municipale dans un tel cas? Cela m'apparaît
un peu aberrant. Je trouve que, de toute façon, dans un tel cas, il
devrait, au moins, y avoir certaines règles qui pourraient, en tout cas,
permettre à une partie de demander le huis clos dans des cas
particuliers. II serait peut-être important de pouvoir préciser
ces cas pour établir une certaine façon de procéder qui
apporterait, je pense, une unanimité, en tout cas, dans la façon
d'administrer le Code du travail quant à l'arbitrage des
différends.
Si on parle de pressions qui peuvent être exercées,
à un moment donné, sur un arbitre, selon que l'arbitre va sentir
une pression plus ou moins forte ou va être plus ou moins susceptible de
ressentir une pression, il pourra plus facilement ordonner le huis clos qu'un
autre arbitre qui pourrait être appelé à juger du
même cas ou d'un cas tout à fait analogue à celui
concerné. Si on veut vraiment rendre les séances d'arbitrage
publiques, il me semble qu'on devrait prévoir les conditions ou,
à tout le moins, certains critères en vertu desquels le huis clos
pourrait être décrété. Autrement, on laisse le soin,
encore une fois, à un individu ou à un arbitre donné, dans
une circonstance donnée, à cause de sa fatigue ou à cause
de son désir plus ou moins apparent de ne pas se faire ennuyer par
quelqu'un d'autre, de décréter le huis clos. Cela
m'apparaît beaucoup trop facile pour quelqu'un qui est arbitre dans un
différend qui est public dans certains cas, qui va concerner l'ensemble
des citoyens, qui influencera peut-être les administrations municipales,
qui va apporter des contraintes aux administrations municipales qui ont
à répondre publiquement de leurs gestes. À ce
moment-là, il m'apparaît un peu dérisoire de permettre cela
à une personne qui n'aura pas à subir éventuellement les
conséquences de la décision qui sera rendue qui pourra être
au détriment des contribuables d'une municipalité.
Dans ce cas, j'ose espérer que le gouvernement, par
l'intermédiaire du ministre du Travail par intérim, puisse, au
moins, nous spécifier dans quelles conditions pourrait s'exercer le huis
clos ou la possibilité d'ordonner le huis clos pour que vraiment...
M. Johnson (Anjou): Avez-vous une proposition d'amendement?
M. Saintonge: ...les séances soient publiques.
M. Johnson (Anjou): Est-ce que le député me permet
une question, M. le Président?
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): Est-ce que le député a une
proposition d'amendement?
M. Saintonge: Non, je n'ai pas de proposition d'amendement.
M. Johnson (Anjou): Ah bon!
M. Saintonge: Mais je dis simplement au ministre qu'on
décrète, dans un tel cas - je viens de voir l'article en
question, ce soir que les séances d'arbitrage soient publiques.
M. Johnson (Anjou): Le projet de loi a été
déposé il y a quinze jours. Plus que cela.
M. Saintonge: Oui, mais il y a eu d'autres projets de loi.
M. Johnson (Anjou): Un mois.
M. Saintonge: Je vous ferai remarquer, M. le ministre, qu'on est
en fin de session et que le gouvernement ne se gêne pas pour nous en
donner à la planche.
M. Johnson (Anjou): II faut que vous vous organisiez.
M. Saintonge: Oui, justement, on s'organise.
M. Johnson (Anjou): C'est du travail. Il faut que vous
travailliez.
M. Saintonge: II y a des ministres du Travail qui ne sont pas
capables de supporter la pression; ils tombent malades et ils s'en vont chez
eux. Il faut les remplacer.
M. Johnson (Anjou): Je suis sûr que le député
de Laprairie va s'excuser de ses propos qui ont sûrement
dépassé un peu sa pensée.
M. Saintonge: Je peux peut-être m'en excuser, M. le
ministre...
M. Johnson (Anjou): Parfait.
M. Saintonge: ...mais à la condition que vous vous
excusiez également de vos propos. Il est peut-être bon que vous
disiez qu'il y a beaucoup de travail à faire, mais il y a des
députés qui ont des dossiers particuliers dont ils doivent
s'occuper et qui ne s'occupent pas nécessairement des dossiers du
travail. C'est dans ce sens-là que vous nous faites le reproche de ne
pas avoir pris connaissance, avant ce soir, du fameux article en question. Vous
me demandez si j'ai des amendements à vous donner là-dessus.
Simplement, ma remarque va dans le sens qu'on veut, par le projet de loi, dire
que les séances sont publiques. Si, vraiment, les séances sont
publiques, il me semble que pour garantir qu'elles seront publiques et pour ne
pas laisser à un seul arbitre le choix de décider, de son propre
chef, on aurait dû prévoir, justement, dans ce cas, les
critères suivant lesquels le huis clos peut être ordonné.
C'était le but de mon intervention, purement et simplement. Je n'ai pas
d'amendement à vous suggérer, mais si on veut garantir
l'accessibilité publique à ces séances, qu'on le prouve
par des faits précis et qu'on démontre la transparence qu'on
voulait noter, purement et simplement.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, juste une remarque.
Je pense que c'est bien légitime de la part du député de
soulever des choses comme celle-là. Je fais simplement remarquer une
chose. Comme législateur, de temps en temps, on a recours aux
précédents ou à l'historique de la législation.
Premièrement, il s'agit d'une formule plus ou moins consacrée.
Deuxièmement, elle existe depuis 1964 dans le Code du travail. Donc,
elle a presque 20 ans et je pense qu'elle n'a pas causé de
difficultés en termes de protection des libertés
démocratiques.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'amendement est
adopté?
M. Saintonge: Sur division, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.
L'article 38, tel qu'amendé, est adopté sur division.
M. Johnson (Anjou): À l'article 39, il n'y a pas
d'amendement. Concordance, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que cela va?
Adopté sur division?
M. Saintonge: L'article 39?
Le Président (M. Desbiens): L'article 38, tel
qu'amendé, adopté sur division?
M. Saintonge: Sur division.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.
Article 39?
M. Johnson (Anjou): Concordance. M. Saintonge: Sur
division.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.
Article 40?
M. Johnson (Anjou): Concordance.
M. Saintonge: Concordance. Sur division, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.
Article 41?
M. Johnson (Anjou): Concordance. M. Saintonge: Sur
division.
Le Président (M. Desbiens): L'article 41 est adopté
sur division. Article 42?
M. Johnson (Anjou): Concordance.
M. Saintonge: Sur division.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur
division. J'appelle l'article 43.
M. Johnson (Anjou): Concordance. L'article 43 est adopté,
M. le Président.
M. Saintonge: Sur division.
Le Président (M. Desbiens): L'article 43 est adopté
sur division. Article 44?
M. Johnson (Anjou): Concordance. M. Saintonge: Sur
division.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.
Article 45?
M. Johnson (Anjou): Concordance.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 45 est
adopté?
M. Saintonge: Sur division.
Le Président (M. Desbiens): Sur division. Article 46? (23
h 45)
M. Johnson (Anjou): Concordance.
M. Saintonge: Sur division.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.
Article 47?
M. Johnson (Anjou): Concordance. J'aimerais cependant, M. le
Président, que l'on spécifie un minimum d'un an et un maximum de
deux ans et non pas simplement un maximum de deux ans, pour lequel nous avons,
d'ailleurs, à l'article 47 et à l'article 52, un amendement que
je vous laisse. C'est un article qui fait suite aux représentations des
parties.
L'article 47 du projet de loi est remplacé par le suivant: "47.
L'article 92 de ce code est remplacé par le suivant: "92. La sentence de
l'arbitre lie les parties pour une durée d'au moins un an et d'au plus
deux ans. Les parties peuvent cependant convenir d'en modifier le contenu en
partie ou en tout."
Le Président (M. Desbiens): L'amendement est-il
adopté?
M. Saintonge: J'ai une question, M. le ministre.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laprairie.
M. Saintonge: "Les parties peuvent cependant convenir d'en
modifier le contenu en partie ou en tout". Qu'est-ce qui vous a justifié
d'apporter ce papillon pour une modification en ce sens?
M. Johnson (Anjou): II s'agit tout simplement de s'assurer, M. le
Président, que la notion du code qui permet aux parties de modifier en
tout temps le contenu d'une sentence à condition cependant que ces
modifications n'aient pas d'influence sur les articles qui touchent la
période d'ouverture pour les fins d'accréditation ou de demande
de vérification de la représentativité s'applique à
l'ensemble des dispositions de l'arbitrage des différends.
Le Président (M. Desbiens): L'amendement est-il
adopté?
M. Saintonge: Adopté sur division.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.
L'article 47, tel qu'amendé, est-il adopté?
M. Saintonge: Sur division.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division.
Article 48?
M. Johnson (Anjou): Concordance. M. Saintonge: Sur
division.
Le Président (M. Desbiens): L'article 48 est adopté
sur division. Article 49?
M. Johnson (Anjou): II s'agit d'éliminer ici, M. le
Président, le procès de la bonne foi des parties que devait faire
l'arbitre avant de décider d'aller au fond dans une décision
touchant une première convention collective et de remplacer cette notion
par une notion d'improbabilité que les parties puissent en arriver
à la conclusion d'une convention collective dans un délai
raisonnable.
Le Président (M. Desbiens): L'article 49 est-il
adopté?
M. Saintonge: Non. M. le ministre, le terme "improbable"
m'apparaît relativement vaste. On dit qu'un arbitre peut dire qu'il est
d'avis qu'il est improbable que les parties puissent s'entendre. Ne
trouvez-vous pas qu'une telle connotation aussi vague ouvre la porte à
peu près à n'importe quoi au niveau d'un arbitre?
M. Johnson (Anjou): M. le Président, le
député de Laprairie a raison de souligner cette notion.
Cependant, nous nous sommes inspirés d'un jugement de la Cour d'appel
dans CAE Electronics, cas de relations du travail célèbre, dans
lequel il appert, en vertu de cette décision, qu'il faut
interpréter la notion de bonne foi dans le sens de
l'improbabilité d'en arriver à un résultat.
M. Saintonge: M. le ministre, il m'apparaît, en tout cas,
que cela peut permettre certains abus dans le sens que cela peut favoriser une
attitude d'une des parties à négocier de façon à
démontrer qu'il ne puisse pas y avoir entente ou à tenter
d'empêcher toute entente possible pour en arriver à la conclusion
qu'il serait improbable que les parties puissent s'entendre. Il
m'apparaît que, dans une telle circonstance, on vient fausser le principe
même que le Code du travail devrait tenter de faire établir,
c'est-à-dire d'amener une certaine négociation ou, au moins,
d'amener les parties à démontrer leur bonne foi dans la
négociation. Cette disposition entre, justement, aussi dans le cadre
actuel des modifications qui ont pu être apportées
antérieurement au Code du travail où on arrive simplement
à un cas où on a éliminé le conseil d'arbitrage
pour avoir simplement un seul arbitre qui va venir décider. En tout cas,
cela accentue les possibilités qu'on faisait valoir
antérieurement non seulement au niveau de l'efficacité, mais
aussi pour assurer les parties que, pour elles, justice aura été
rendue et les assurer d'un minimum de compréhension par rapport au
conseil d'arbitrage sur leur argumentation.
Dans le cas présent, on laisse plutôt un seul arbitre
être maître de tout ce qui se passe au lieu d'arriver avec un
conseil d'arbitrage composé de trois arbitres qui pourront faire preuve
de jugement ou qui pourront analyser, chacun suivant sa conception ou sa
perception de ce qui l'entoure, si vraiment, oui ou non, il est improbable que
les parties puissent s'entendre. C'était une certaine garantie, alors
qu'on avait un conseil d'arbitrage composé de trois arbitres, qu'on
pouvait éliminer certains abus ou éliminer, dans certains cas, la
propension pour un arbitre particulier à se laisser convaincre plus
facilement ou à interpréter, suivant ce qui se passe dans les
négociations entre les deux parties ou dans les attitudes que les deux
parties peuvent adopter au moment de la négociation,
l'improbabilité que les deux parties puissent arriver à
s'entendre.
En tout cas, je trouve, d'une certaine façon, assez malheureux
qu'on laisse ici à une seule personne le soin de décider sans
fixer, encore une fois, certains paramètres suivant lesquels l'arbitre
devra se décider ou juger de la situation, sans mettre certains
paramètres pour orienter la décision de l'arbitre sur cette
possibilité que les parties puissent s'entendre ou pas et de
décider que c'est, en fait, improbable.
Dans certaines circonstances, cela permet également, à mon
point de vue, à une des parties voulant volontairement imposer une
première convention collective de négocier de façon
à démontrer, dès le départ, qu'il ne peut y avoir
entente, ce qui ne favoriserait pas le processus législatif que le Code
du travail a l'obligation d'instaurer, pour que les parties puissent vraiment
arriver à une certaine concertation. Il m'apparaîtrait que, dans
un tel cas, dans certaines circonstances, au lieu de favoriser une certaine
concertation, on favorise plutôt une espèce d'affrontement entre
les parties ou qu'on peut, d'une certaine façon, orienter plutôt
les parties vers une possibilité d'affrontement ou encourager même
une des parties à l'affrontement pour amener, justement, l'arbitre
à dire: II est improbable que les parties puissent s'entendre,
allons-y.
Ce sont ces interrogations que l'article 93.4, tel que libellé,
amènent à mon esprit, ce soir. La jurisprudence a peut-être
fixé un certain cadre particulier, mais qui était, quand
même, d'une façon, tout à fait général, tel
que le ministre l'a reconnu. Comment se fait-il qu'on ne vienne pas, à
tout le moins dans un tel cas, en droit statutaire, spécifier, encore
une fois, certains paramètres pour amener l'arbitre à prendre sa
décision?
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, seulement une
question. Le député de Laprairie a-t-il une suggestion
d'amendement?
M. Saintonge: Non, je n'ai pas de suggestion d'amendement. C'est
une question que je me pose à la lumière de ces faits. Je pense
que le ministre a reconnu tantôt que, suivant la cause qu'il a
citée, c'était effectivement une interprétation
extrêmement large qu'on donnait aux pouvoirs de l'arbitre. Cela
m'étonne, en tout cas, qu'on puisse, dans un tel cas, favoriser une
interprétation aussi large et donner autant de discrétion
à l'arbitre dans un tel cas, surtout parce qu'on s'en tient au jugement
d'une seule personne et non plus au jugement de trois personnes tel qu'on avait
l'habitude antérieurement d'agir dans ces cas-là.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 49 est
adopté?
M. Saintonge: Est-ce que le ministre n'a pas d'autres
éléments à donner quant à la raison pour laquelle
on laisse une aussi grande latitude à l'arbitre pour manifester sa
décison dans un tel cas?
M. Johnson (Anjou): Dans un premier temps, c'est l'utilisation
qui a été faite de l'appréciation de la notion de la bonne
foi des parties par l'arbitre en vertu de l'article original qui posait de
sérieux problèmes aux parties et aussi aux arbitres. Nous
avons
tenté de répondre à ces préoccupations des
arbitres, encore une fois, en nous inspirant d'une décision de la Cour
d'appel, dont je vais lire un extrait. Il s'agit des juges: Owen, L'Heureux,
Dubé et Malouf, dans la cause de CAE Electronics contre l'Association
des ingénieurs et scientifiques de CAE. À la page 8 du jugement,
les savants juges de la Cour d'appel disent ceci: "L'expression, "en raison du
comportement des parties eu égard à l'article 53" vise
vraisemblablement à empêcher que ne soient faussées les
règles du jeu de la négociation libre entre les parties et que ne
soit imposée une convention collective alors que les négociations
pourraient normalement aboutir à la conclusion d'une telle convention.
Toutefois, pousuit le tribunal, si à cause du comportement de l'une ou
l'autre des parties, une telle convention s'avérait pratiquement
impossible à conclure, ce qu'il appartient au conseil de soupeser, le
conseil d'arbitrage a discrétion pour décider d'intervenir pour
déterminer le contenu de cette convention."
On voit bien, ici, le genre de dilemme dans lequel sont mises les
parties. Je répète le dernier paragraphe: "Toutefois, si à
cause du comportement de l'une ou l'autre des parties, une telle convention
s'avérait pratiquement impossible à conclure". Je vous
réfère ici à une notion: "improbable que les parties
puissent en arriver à la conclusion d'une convention collective dans un
délai raisonnable". C'est le texte que nous proposons. "Ce qu'il
appartient au conseil de souspeser - donc à l'arbitre en vertu de la loi
17 - le conseil d'arbitrage a discrétion pour décider
d'intervenir pour déterminer le contenu de cette convention". En
d'autres termes, il s'agit là d'une disposition déclaratoire pour
clarifier les pouvoirs, à toutes fins utiles, de l'arbitre, en vertu de
l'article 93.4 du code et en s'inspirant essentiellement du jugement de la Cour
d'appel dans la cause de CAE Electronics, rendu au mois de mai 1982.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 49 est
adopté?
M. Saintonge: Adopté sur division.
Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division. Il
est minuit. Est-ce qu'il y a un consentement pour poursuivre les travaux?
M. Saintonge: II n'y a pas de consentement, M. le
Président.
Une voix: II n'y a pas de consentement, vous mettez fin à
vos travaux.
M. Saintonge: De toute façon, M. le Président,
c'est déjà décidé de l'autre côté.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le projet de loi 17
est adopté?
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je crois remarquer
que l'Opposition veut mettre fin à nos travaux. On va lui faciliter
cela.
Le Président (M. Desbiens): La commission élue
permanente du travail ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 23 h 59)