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(Dix heures treize minutes)
Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il
vous plaît!
La commission élue permanente du travail se réunit afin
d'étudier les crédits pour 1983-1984 figurant au budget.
Les membres de la commission sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M.
Cusano (Viau), M. Dean (Prévost), M. Fréchette (Sherbrooke), Mme
Harel (Maisonneuve), M. Lafrenière (Ungava), M. Lavigne (Beauharnois),
Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Léger
(Lafontaine); M. Paradis (Brome-Missisquoi) sera remplacé par M.
Sirros (Laurier); M. Rivest (Jean-Talon) et M. Rochefort (Gouin).
Les intervenants sont: M. Bélanger (Mégantic-Compton), M.
Champagne (Mille-Îles), M. Fortier (Outremont), M. Leduc (Fabre), M.
Pagé (Portneuf), M. Payne (Vachon), M. Polak (Sainte-Anne), M. Proulx
(Saint-Jean) et M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Il y aurait lieu à ce moment-ci de la commission de
désigner un rapporteur. Je pourrais accepter des propositions dans ce
sens.
M. Fréchette: M. le Président, est-il
nécessaire que le rapporteur soit présent?
Le Président (M. Vallières): Si tel était le
cas, je pense qu'on peut admettre au départ que l'un des membres de la
commission pourrait agir à titre de rapporteur sur proposition et
acceptation des deux côtés.
M. Fréchette: Bon. Alors, je proposerais que Mme Harel,
députée de Maisonneuve, puisse agir comme rapporteur.
Le Président (M. Vallières): Cette proposition
est-elle adoptée?
Une voix: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Alors, Mme la
députée de Maisonneuve agira à titre de rapporteur. Il
serait peut-être aussi intéressant de se rappeler que notre
commission dispose de neuf heures afin d'étudier les crédits.
Nous travaillons aujourd'hui jusqu'à 12 h 30, pour ajourner sine die.
Après la période des questions, nous devrions nous retrouver
jusqu'à 18 heures. Demain, au cours de l'avant-midi, nous devrions
compléter l'étude des crédits. Je ne sais pas si cela
convient de part et d'autre de la table.
M. Fréchette: Cela nous convient fort bien, M. le
Président.
Le Président (M. Vallières): Nous pourrions
commencer immédiatement avec les déclarations d'ouverture. La
parole est au ministre du Travail.
Exposés préliminaires M. Fréchette: Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Le rapporteur
arrive.
M. Raynald Fréchette
M. Fréchette: Le rapporteur arrive. L'élue in
absentia est là maintenant.
M. le Président, il y a une coutume, à l'occasion de
l'étude des crédits d'un ministère, qui veut que le
ministre souligne la présence des collaborateurs de la direction du
ministère et présente aussi à la commission les personnes
qui l'accompagnent. Je vais procéder rapidement à ces
présentations. À ma droite immédiate, il y a M. Yvan
Blain, qui est le sous-ministre en titre au ministère du Travail - je
les nomme comme je les vois - M. Roland Léonard, qui est au bureau du
sous-ministre; M. Réjean Parent, qui est sous-ministre adjoint à
la recherche et à l'administration; M. Raymond Désilets, dont le
nom retient l'attention de tout le monde, qui est directeur des relations de
travail au ministère; M. Boily, qui est directeur des services
d'administration; M. Michel Sainte-Marie, directeur du service de conciliation;
M. Pierre-Paul Morissette, directeur du service des décrets; M. Robert
Levac, commissaire général du travail; M. Marius Dupuis,
directeur de la division de la construction au ministère; M. Bernard
Bastien, qui est là, aussi, qui est président du conseil des
services essentiels; M. Michel Gagnon, qui en est le directeur
général, et M. André Gagnon qui en est l'agent
d'information. Voilà, M. le Président.
Très brièvement, je voudrais, dans ces remarques
préliminaires, rappeler un certain nombre de choses qui m'apparaissent
utiles dans la perspective de l'étude des crédits du
ministère du Travail. Je rappellerai, en tout premier lieu, une chose
que les membres de
la commission se rappellent, c'est que, le 9 septembre dernier, lorsque
est arrivée cette décision du premier ministre de procéder
à un remaniement ministériel, le premier ministre avait alors
déclaré que le temps était venu de consacrer, de
dégager un intervenant ministériel unique et à temps plein
aux parties qui sont impliquées dans le monde des relations du travail.
Non seulement, M. le Président, cette décision a-t-elle
été commandée par une seule volonté politique, mais
il devenait de plus en plus évident, au fur et à mesure que le
temps passait, tant dans le monde syndical que dans le monde patronal, qu'il
fallait procéder à ce changement et donner aux priorités
importantes du travail, de la main-d'oeuvre et de la sécurité du
revenu des gens qui pourraient se consacrer en exclusivité à ces
trois secteurs précis.
Cependant, cette transition ou cette décision s'est faite, en
quelque sorte, sans aucun heurt, en assurant le suivi politique qui existait
déjà au ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu. C'est le Conseil consultatif du travail et de
la main-d'oeuvre qui a été l'intervenant privilégié
en vertu duquel les dialogues qui étaient déjà
amorcés avec l'autre direction administrative unique qui existait ont pu
se continuer sur les mêmes sujets.
Il est important aussi d'indiquer que la direction du ministère,
depuis la décision du 9 septembre, a consacré du temps, et
effectivement beaucoup de temps, pour assumer, prévoir et assurer le
transfert des effectifs à partir du ministère du Travail, de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, pour donner au
ministère du Travail qui était devenu une entité autonome
ces effectifs dont il avait besoin, en même temps que les ressources
matérielles absolument indispensables à son bon
fonctionnement.
On se rappelle, M. le Président - et le député de
Laurier était là - qu'au moment où la loi 95 a
été adoptée, cette loi qui consacrait effectivement dans
le droit et dans les faits la scission du ministère du Travail, de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, nous avions
indiqué que la création du ministère du Travail allait se
réaliser sans que l'on ait à assumer une augmentation
substantielle de coûts. Je pense pouvoir vous dire avec assez de justesse
- on pourra bien sûr y revenir au cours de la discussion - que cet
objectif qui préoccupait l'Opposition et qui nous préoccupait
aussi a pu se réaliser dans le sens souhaité.
Maintenant, au strict plan de l'étude des crédits du
ministère du Travail et pour la bonne compréhension de cette
étude, je me permets de vous soumettre la remarque suivante:
Peut-être, M. le Président, avez-vous remarqué des
augmentations importantes dans le livre des crédits par rapport à
l'année écoulée. Il y a plusieurs explications à
cela. Mais il en est une principale, fondamentale et fort simple à
comprendre, c'est que, lorsqu'on parle de l'année 1982-1983, il faut
retenir qu'il s'agit là d'une période de sept mois seulement. Et,
lorsqu'on parle de l'année 1983-1984, en termes strictement
budgétaires, évidemment, on couvre une période qui
s'étend sur douze mois. Alors, il peut y avoir des chiffres qui donnent
l'impression, à leur seule lecture, qu'il y a eu effectivement une
augmentation disproportionnée des budgets, mais tout cela est
causé essentiellement par le phénomène dont je viens de
vous parler, c'est-à-dire une année financière de sept
mois par rapport à une autre de douze mois.
M. le Président, concernant un autre chapitre, un autre secteur
de nos activités, je voudrais vous dire un mot, rapidement, des
différentes réalisations du ministère et essayer
brièvement, ensuite, de dégager nos principaux objectifs pour
l'année 1983-1984. Je n'apprends rien à personne en signalant que
depuis - et j'ose le dire comme je le pense, parce que c'est cela - un bon
nombre d'années maintenant, le projet de réforme du Code du
travail est dans l'air. On en parle, on fait beaucoup de considérations
autour de ce projet-là. Effectivement, des études formelles et
informelles ont été faites, des consultations formelles et
informelles ont également été faites.
Une décision politique, M. le Président, après
cheminement, a effectivement été prise à partir de ce dont
je viens de vous parler, ce qui me permet d'informer cette commission, de
l'informer officiellement que, d'ici deux semaines, j'aurai l'occasion de
procéder, à l'Assemblée nationale, au dépôt
d'un projet de loi dont l'objectif essentiel sera de proposer des amendements
au Code du travail, lesquels répondent essentiellement - et là,
je le dis, évidemment, en termes très généraux -
aux trois objectifs suivants. Nous allons viser, par l'étude et
l'adoption, si possible, de ces amendements, premièrement, à
améliorer le droit d'association et le processus d'association. Le
deuxième objectif qu'on retrouvera à l'intérieur du projet
qui sera déposé dans le délai dont je viens de vous parler
sera essentiellement d'arriver à permettre aux parties qui sont
impliquées dans le processus du Code du travail de fonctionner et de
travailler à l'intérieur de délais qui seront
considérablement réduits, nous semble-t-il, par la nature des
propositions que nous allons soumettre à l'Assemblée nationale
pour adoption. Réduction de délais dans deux activités
importantes du processus de notre Code du travail. D'une part, arriver à
faire en sorte que les délais d'arbitrage de griefs soient
considérablement réduits. D'autre part, arriver à
atteindre le même objectif dans le
cas d'arbitrage de différends, qu'il s'agisse de l'arbitrage
d'une première convention collective, qu'il s'agisse de l'arbitrage
d'une convention des policiers et pompiers ou qu'il s'agisse de l'arbitrage
d'une convention qui a été demandé par les deux
parties.
Finalement - vous allez facilement comprendre pourquoi - nous allons
également proposer, dans le projet de loi qui sera soumis à
l'Assemblée nationale, des dispositions qui auront comme objectif de
resserrer les dispositions antibriseurs de grève. C'est essentiellement
à cause d'au moins trois jugements de cour - il y en a peut-être
d'autres - qui sont connus de toutes les parties intéressées au
monde du travail, le dernier en liste et le plus percutant étant celui
de la Cour d'appel du Québec dans l'affaire de Shell Canada. À
l'unanimité, les trois juges de la Cour d'appel ont rendu le jugement
que l'on sait et en sont venus à la conclusion que, dans sa
rédaction actuelle, cet article, qu'on a convenu d'appeler depuis qu'il
est là l'"antiscab", n'était pas imperméable et que, dans
sa rédaction, encore une fois, il était possible, dans une
entreprise où il y avait conflit de la nature d'une grève, de
procéder à contracter avec une personne morale. Ce que le texte
dit essentiellement, actuellement, c'est qu'il interdit à un employeur
chez qui sévirait une grève d'embaucher une personne physique.
Par ailleurs, le mot "personne" n'est pas qualifié dans le code comme
tel, mais c'est l'interprétation que la Cour d'appel lui a
donnée, un employeur ne peut pas embaucher une personne physique, mais
pourrait contracter avec une personne morale. Ce serait donc essentiellement le
troisième volet de la refonte que nous allons proposer au Code du
travail.
Il nous est apparu évident que, même si nous l'avions
voulu, il n'était pas possible, dans l'état actuel des choses, de
procéder autrement et de pousser l'exercice plus loin. Malgré
cela, il m'apparaît maintenant évident qu'à un moment ou
à un autre, il faudra choisir la période dans le temps et qu'il
nous faudra bien - quand je dis nous, je parle de tous les intervenants du
monde du travail - pousser l'exercice plus loin et ouvrir un débat
très large sur l'ensemble de la philosophie qu'on retrouve actuellement
au Code du travail. Pour autant que je suis concerné, si les objectifs
que je vise peuvent se réaliser, je verrais bien qu'au cours de
l'automne prochain nous engagions cet exercice de discussion fondamentale sur
toute la philosophie qui sous-tend le Code du travail actuellement, exercice
qui nous permettrait de réévaluer globalement et fondamentalement
le processus qu'on retrouve à l'intérieur du code actuel. Je
suis, quant à moi, M. le Président - et je l'ai
déjà dit chaque fois que l'occasion s'est présentée
- tout à fait disposé à coordonner le déroulement
d'un semblable exercice qui ne pourrait qu'être très utile pour
toutes les parties intéressées. (10 h 30)
Il y a également un autre dossier qui nous préoccupe et
qui a été mis sur le métier quelque part en octobre ou
novembre 1982 et un mandat, d'ailleurs, très précis a
été donné à cet égard-là. La Loi sur
les décrets de convention collective est là depuis 1934
maintenant, sans avoir subi au cours des ans quelque transformation de fond que
ce soit. Il nous apparaît donc que le temps est maintenant venu de revoir
les différents mécanismes qui sont prévus dans cette loi
et d'arriver, si nos objectifs peuvent se réaliser, à
procéder au cours de l'automne, encore une fois, au dépôt
d'une loi dont l'objectif fondemental serait de revoir toute la philosophie
qu'on retrouve dans la Loi sur les décrets de convention collective. Je
vous le signalais il y a un instant, un mandat en ce sens a été
donné à un groupe de travail qui est déjà à
l'oeuvre depuis cinq ou six mois maintenant et qui a avancé d'une
façon intéressante depuis que le mandat lui a été
confié. Jusqu'à maintenant, les échéanciers que
nous nous étions fixés sont respectés, de sorte que nous
devrions pouvoir arriver à déposer un projet de loi, encore une
fois, au cours de l'automne prochain.
M. le Président, il est un autre aspect des activités du
ministère sur lequel je voudrais attirer l'attention des membres de la
commission. Nous pourrons, bien sûr, y revenir un peu plus tard si on le
souhaite. Ce sera la fin de mes remarques préliminaires. Je voudrais
attirer l'attention des membres de la commission sur l'objectif que je vise de
mieux faire connaître, d'une part, le Service de médiation
préventive qui existe au ministère du Travail et également
dire aux membres de cette commission que, quant à moi, je
privilégie de façon particulière - c'est un
euphémisme, je le sais bien, de parler comme cela - au premier chef,
l'expansion du Service de médiation préventive.
Très rapidement je vous soumettrai la philosophie qui sous-tend
le Service de médiation préventive. Il s'agit essentiellement
d'un organisme qui offre des services aux parties qui le désirent et qui
vivent une convention collective qui n'est pas arrivée à
échéance et à qui il reste une année, une
année et demie ou deux ans d'application. Je vous dirai, M. le
Président, qu'en 1979 le Service de médiation préventive a
été implanté strictement à titre
expérimental. Il s'agissait, d'abord, de voir si les parties
étaient intéressées à un genre de service comme
celui-là. Il s'agissait également de savoir quels services
pouvaient leur être offerts et, à partir des expériences,
il fallait décider si nous devions institutionnaliser le
Service de médiation préventive ou, alors, abandonner
l'expérience qui avait été tentée.
M. le Président, depuis 1979, donc, dans au moins 60 entreprises,
à la demande des parties, le Service de médiation
préventive a offert de l'expertise, tant humaine que de toute autre
nature, pour nous amener à la conclusion évidente, à la
conclusion très nette que ce service devait être
institutionnalisé. Ceux qui ont l'habitude des relations du travail, qui
ont l'habitude de l'exercice quotidien des mécanismes de relations du
travail savent fort bien que très souvent les relations
patronales-ouvrières se brisent, deviennent difficiles pendant
l'exercice même de la convention et, souvent, strictement à cause
de relations humaines difficiles entre un contremaître et un chef
syndical, un contremaître et un employé de tel ou tel service.
Alors, si les relations du travail se dégradent pendant la vie
même de la convention et que, pendant la vie de la convention, les
parties ne se parlent plus ou ne le font qu'avec amertume, ne le font qu'avec
une espèce de rancoeur, vous imaginez d'ici quelle atmosphère
peut prévaloir lorsque, à l'expiration de la convention, les
parties doivent s'asseoir autour d'une même table et amorcer la
négociation d'un nouveau contrat collectif. Si on a cessé de se
parler six mois avant l'expiration de la convention, si les conditions de vie,
dans tous les sens du terme, sont devenues difficiles six mois avant
l'expiration de la convention, il va de soi, M. le Président, que,
lorsqu'on arrivera au temps prévu pour la négociation, ce sera un
exercice ardu au travers duquel on ne pourra passer sans que cela
dégénère en conflit de la nature d'une grève ou
d'un lock-out.
Le Service de médiation préventive agit toujours avec le
consentement des parties. Le Service de médiation préventive ne
va pas s'imposer dans des entreprises ou des institutions où l'une ou
l'autre, ou les deux parties, ne veulent pas le voir. Les experts du Service de
médiation préventive vont y aller à la seule condition que
les parties acceptent de les recevoir de part et d'autre.
Je vous parlais de 59 ou de 60 expériences, M. le
Président. Je vais vous en donner une qui est assez
révélatrice du résultat que le travail des
médiateurs spéciaux, des médiateurs de la
prévention peut donner. C'est le cas des cols bleus de la ville de
Montréal. Il y a des gens ici qui savent mieux que moi combien, souvent,
ont été difficiles les relations du travail dans ce secteur
particulier des services de la ville de Montréal. Or, M. le
Président, quelque six mois, un peu plus ou un peu moins - j'essaie de
me situer dans la bonne moyenne - avant l'expiration de la dernière
convention collective chez les cols bleus de la ville de
Montréal, du consentement des deux parties, les experts de la
médiation préventive se sont rendus sur les lieux de travail et
ont rencontré les autorités de la ville ou, enfin, les patrons
pour essayer de savoir la nature des problèmes et de voir où se
situaient les difficultés. Le même exercice a été
fait avec la partie syndicale.
M. le Président, là où on était
habitué à une négociation serrée, pour ne pas dire
davantage, et difficile, qui plus souvent qu'autrement se terminait par un
conflit avec les conséquences que tout le monde connaît,
dès lors que les gens de la médiation préventive y sont
passés, on a réussi - quand je dis "on", je parle des parties
syndicale et patronale - à négocier une convention collective
dans des délais extraordinairement courts par rapport aux exercices
auxquels on était habitué. De plus, on a réussi cet
exercice sans qu'il y ait en bout de piste un conflit de la nature d'une
grève ou d'un lock-out. Il y a d'autres expériences à peu
près de la même nature, mais cet exercice m'apparaissait le plus
clair, le plus évident, quant au résultat qu'un service comme
celui-là peut donner.
Donc, sans être la panacée à tous les maux, je pense
que le Service de médiation préventive mérite qu'on le
fasse connaître davantage, et qu'on publicise également les
services qu'il peut rendre. En d'autres mots, je suis d'avis qu'il faut
institutionnaliser ce service.
Alors, M. le Président, c'étaient les remarques d'ordre
général que je voulais livrer aux membres de la commission pour
le moment. Nous pourrons, bien sûr, revenir sur l'un ou l'autre des
aspects dont je viens de vous parler.
Le Président (M. Vallières): Merci, M. le ministre.
La parole est maintenant au député de Laurier qui nous fera part
de ses remarques préliminaires.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci, M. le Président. Je ne sais pas s'il est
de coutume pour l'Opposition de présenter les personnes qui
l'accompagnent pour préparer l'étude des crédits, mais de
toute façon, c'est toujours quelque chose qui me frappe quand je viens
faire une étude des crédits. Cela me fait penser un peu à
la bataille entre David et Goliath, mais je me réjouis en me rappelant
le résultat de cette bataille.
M. le Président, si je peux résumer un peu les paroles du
ministre, il nous a parlé, finalement, de trois choses bien
concrètes: une réformette du Code du travail pour les prochaines
semaines, tel que cela a été annoncé lors du discours
inaugural; un changement concernant la loi des décrets,
éventuellement à l'automne. Je dois vous
avouer que j'attendrai de le voir avant de tenir pour acquis que c'est
effectivement quelque chose qui viendra à l'automne, étant
donné qu'on a souvent entendu par le passé des promesses de ce
genre où il y avait des projets de loi qui étaient
préparés. Je pense, par exemple, à un changement sur le
licenciement collectif qui a été annoncé à au moins
cinq ou six reprises avec des dates précises par rapport à leur
dépôt. Troisièmement, l'accentuation du Service de
médiation préventive. Même avec des exemples de bon
fonctionnement, il est à souhaiter qu'il prendra de l'ampleur pour faire
en sorte que le domaine des relations du travail devienne de moins en moins un
domaine d'affrontement et de confrontation.
Je voudrais revenir aux notes que j'avais préparées. Cela
fait depuis 1977, finalement, qu'on nous parle d'un projet de réforme du
Code du travail, afin de le rajeunir, afin qu'il soit mieux adapté
à la réalité d'aujourd'hui. On a beaucoup parlé, du
côté gouvernemental, mais on a très peu agi. Outre la loi
45, le très contesté règlement de placement dans
l'industrie de la construction et les lois spéciales
décrétant le retour au travail, peu d'engagements ont
été réalisés. À la limite, peut-être
est-ce mieux ainsi, finalement, M. le Président, car, de la façon
dont ce gouvernement a traité ses travailleurs, de la façon dont
on leur a démontré un préjugé favorable, la
situation pourrait être encore bien plus dramatique. Ainsi, s'est-on
contenté, au cours des dernières années, de changer les
titulaires du ministère et on a semblé beaucoup plus
intéressé à transformer les structures du ministère
qu'à se préoccuper de trouver de nouvelles avenues afin
d'améliorer le domaine des relations du travail.
Depuis moins de deux ans, de ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre qu'il était, il a dû assumer en plus la
responsabilité de la Sécurité du revenu, parce que, comme
le disait le leader du gouvernement à l'époque: "La
première façon d'avoir un revenu au Québec et d'avoir un
revenu en toute sécurité, c'est évidemment par le
travail". Il devait être, en décembre 1982, isolé de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu pour devenir le
ministère du Travail. Cela fait quand même, dans une
période assez courte, un revirement assez curieux. C'est un bien triste
bilan, finalement, que ce gouvernement affiche dans le domaine des relations du
travail en plus de ses piètres performances dans tous les autres
secteurs dont on parlera ailleurs.
Le gouvernement du Parti québécois a tenté, au nom
d'un idéal politique, d'un grand rêve nationaliste, finalement, de
camoufler les véritables problèmes, ceux qui affectent tous les
Québécois, afin de réaliser ses aspirations, sans
toutefois se soucier des maux qu'il provoquait. Ce gouvernement
péquiste, dont l'une des priorités, semble-t-il, était la
bonification du climat social, a amené le Québec à
l'impasse économique et sociale qu'il a lui-même engendrée.
Qu'en a-t-il fait, ce gouvernement, de cette préoccupation sans cesse
lancinante, de cet effort persistant et ininterrompu pour tâcher
d'améliorer le climat social, lui qui bafoue ses propres travailleurs,
qui outrepasse les droits fondamentaux garantis dans sa propre charte? Il a
créé un climat de morosité tel que la
quasi-totalité de la population se retrouve dans un état de
passivité qui ne ressemble en rien à l'effervescence d'un pays
jeune et dynamique. On compte, actuellement au Québec quelque 432 000
chômeurs et cela, sans compter plus de la moitié des
bénéficiaires d'aide sociale, qui sont aptes au travail et qui
n'entrent pas dans les statistiques du chômage. C'est un chiffre
effarant, mais, en y regardant de plus près, on se rend bien compte
qu'il est malheureusement réaliste. (10 h 45)
II faut être bien naïf pour croire ce gouvernement lorsqu'il
nous parle du droit au travail, de même que le premier ministre qui, dans
son message inaugural, affirme qu'il veut "faire de ce droit au travail une
réalité vécue le plus vite possible par tous nos
concitoyens". Au rythme où vont les choses, M. le Président, il
semble que c'est plutôt le chômage qui est une
réalité vécue par un plus grand nombre de
Québécois.
L'an passé, dans ses remarques préliminaires, le ministre
du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
rappelait les propos qu'il avait tenus l'année antérieure, sans y
ajouter de nouvelles intentions qui, sans doute, seraient aussi
demeurées lettre morte. Mais le ministre du Travail, version 1983, nous
a dit en quelques mots ce qu'il entendait faire. On se posait des questions,
parce que, si le gouvernement péquiste l'a oublié, nous estimons,
nous, qu'il y a beaucoup à faire en matière de relations du
travail, que les problèmes réclament des solutions urgentes et
que le milieu du travail attend impatiemment une réforme du Code du
travail. Qu'est-ce que le ministre choisira? On en a eu quelques bribes tout
à l'heure. Nous osons espérer que, pour une fois, le ministre du
Travail prendra au sérieux les malaises qui existent dans le secteur des
relations du travail et qu'il passera à l'action dans le domaine
législatif pour corriger la situation. .
Même le ministre des Finances souhaite une intervention rapide.
D'après ce que j'ai pu comprendre, je pense que, finalement, les actions
qui seront entreprises ne répondront pas à ce genre de
clarification de la situation. Le ministre des Finances disait, "Sur le plan
des relations du travail, il y a quelque chose d'indiscutable, il y a une sorte
de flottement chez les hommes d'affaires à
l'heure actuelle qu'il nous faut clarifier rapidement, cela presse.
Devant les syndicats qui nous demandent souvent l'accréditation
multipatronale, des milieux patronaux pour qui l'accréditation
multipatronale représente une sorte de danger perçu comme
étant mortel et toute une série de formules
intermédiaires, je pense qu'il est très important qu'assez
rapidement nous clarifiions la position gouvernementale à l'égard
de ces questions, et qu'on puisse dire aux milieux d'affaires: Voici la
politique que le gouvernement entend suivre. Nous avons là une
responsabilité de clarification et de précision de nos
positions."
Je n'ai rien entendu dans les propos du ministre tout à l'heure,
M. le Président, qui clarifierait la situation d'une façon
précise. Je pense qu'on a dit tout à l'heure que, plus tard, il y
aura une suite concernant la réforme du Code du travail sans donner des
précisions par rapport à cette inquiétude du ministre des
Finances.
Chaque année, on nous informe que des études sont en cours
sur des points particuliers qui aboutiraient à la révision du
Code du travail. Chaque année, on nous dit que le gouvernement
procédera à des consultations dans les milieux concernés
"de façon que le résultat final soit le fruit du consensus le
plus large possible." Cela, c'était dans le message inaugural. Depuis le
temps que des études sont élaborées au ministère du
Travail et que des discussions sont menées auprès des principaux
intéressés, le ministre ne serait-il pas en mesure de
procéder à une révision des lois qui régissent le
monde du travail? À moins qu'il n'y ait pas de la part du ministre et du
gouvernement une véritable volonté politique menant à
cette réforme réclamée impatiemment.
Lorsqu'il lisait son dernier message inaugural, le premier ministre
disait: "Le Code du travail, pour un, n'est plus adapté au contexte dans
lequel nous vivons et a besoin d'être amendé. Dans un premier
temps, c'est-à-dire avant l'été, en consultation avec les
parties concernées, le ministre du Travail présentera les
modifications les plus pressantes. Pour le reste, le gouvernement entend
procéder avec prudence et réalisme de façon que le
résultat final soit le fruit du consensus le plus large possible." Le
premier ministre nous promet, pour les prochaines semaines, quelques mesures
palliatives qui viendront corriger superficiellement certaines situations sans
résoudre vraiment les véritables problèmes. Je pense qu'on
fait référence à ce que le ministre a annoncé tout
à l'heure concernant l'amélioration du droit d'association, le
raccourcissement des délais et le resserrement de la loi antibriseurs de
grève.
Les annonces faites à l'égard de la première
série d'amendements à apporter au Code du travail indiquent que
le ministre envisage de faciliter l'accès à la syndicalisation,
de réduire les délais de différentes procédures
d'accréditation et d'arbitrage, ainsi que de rendre plus étanches
les dipositions antibriseurs de grève adoptées en 1978. Nous ne
pourrons que nous réjouir si le ministère légifère
pour lever certaines entraves afin de favoriser la syndicalisation des
travailleurs, qui oscille depuis quelques années entre 35% et 40%.
Depuis le temps qu'on nous répète cette intention qui a fait
beaucoup parler beaucoup de monde!
À propos de l'accès à la syndicalisation, en
novembre 1981, lors de son message inaugural, le premier ministre disait: "En
matière de relations du travail, il y aura d'abord d'importants
amendements au Code du travail. Sans chambarder l'économie
générale de la loi, ces amendements viseront principalement
à lever pour de bon ces obstacles, ces entraves et ces lenteurs que
rencontrent quotidiennement nombre de travailleurs et de travailleuses qui
tentent simplement d'exercer leur droit d'association." Alors, le temps est
venu pour que la lettre devienne réalité.
Mais ces amendements à la pièce, ces amendements qui ne
sont pas des amendements de fond ne pourront résoudre les
problèmes et améliorer le climat des relations du travail. Et ces
amendements à la pièce ne risquent-ils pas de retarder la
deuxième étape, celle d'une révision en profondeur du Code
du travail? Nous posons la question, M. le Président: Pourquoi le
gouvernement n'accepte-t-il pas d'y aller tout d'un bloc, afin d'analyser la
situation dans son ensemble et non seulement élément après
élément. Car il est essentiel d'avoir au Québec une
politique globale et cohérente en matière de relations du
travail. Il est tout à fait futile de prendre l'attitude du gouvernement
et d'adopter des mesures qui solutionneront temporairement quelques
problèmes, mais qui en causeront d'autres qui, eux, seront
résolus par une autre loi qui aura ses effets correcteurs et ses
lacunes. De cette façon, on s'enferme dans un cercle vicieux dont on ne
pourra sortir.
En adoptant cette stratégie en deux étapes, le
gouvernement se garde-t-il - on se pose la question - certains attraits pour
acheter la paix entre lui et les syndicats et, surtout, pour faire oublier les
gestes odieux qu'il a posés par l'adoption des lois 70, 105 et 111, en
vue de regagner la confiance des travailleurs lors des prochaines
élections? Cette attitude, si elle se révélait juste,
serait très dangereuse pour l'ensemble de la société
québécoise, car le gouvernement, pour se déculpabiliser en
quelque sorte, pourrait prendre des décisions contraires à
l'intérêt général du Québec. Et c'est
toujours ainsi, M. le Président, quand on met de
l'avant des préoccupations d'ordre électoral plutôt
que d'ordre social.
Tout au long de l'étude des crédits, nous demanderons au
ministre de nous donner des réponses sur des sujets qui
intéressent et qui, parfois même, inquiètent. L'un de ces
sujets est la négociation multipatronale ou sectorielle qui sourit
à certains, mais qui en inquiète beaucoup d'autres. Quelles sont
les intentions du gouvernement à ce sujet? Quand les
dévoilera-t-il afin de calmer les inquiétudes pour que chacun
sache, au moins, où il se situe dans cette démarche? Nous
aimerions connaître de quelle façon concrète se traduiront
les paroles du premier ministre qui annonçait, en mars dernier, la
formation d'un groupe d'enquête mandaté pour réviser le
régime des négociations dans les secteurs public et
parapublic.
Je ferai remarquer qu'il n'y a pas eu un seul mot dans les notes
d'ouverture du ministre concernant toute cette question qui, quand même,
je crois, est une question primordiale. On vient de vivre une période
bouleversante où un grand nombre de travailleurs ont dû subir les
gestes qu'a posés ce gouvernement. Cela fait déjà
plusieurs années, même depuis le tout début, qu'on nous dit
qu'il faut réviser la façon dont on négocie dans les
secteurs public et parapublic. On n'a même pas parlé de la
médiation préventive, par exemple, dans les secteurs public et
parapublic. On aimerait savoir ce que le gouvernement entend faire. Est-ce que
le fait que le ministre ne l'ait pas mentionné est une indication que le
ministère n'est pas impliqué dans cette révision, qu'il ne
fait pas partie de ce cheminement vers une nouvelle façon de
procéder?
Il sera sans doute intéressant d'entendre du ministre quelles
orientations il a données à son ministère depuis
décembre dernier, au moment de sa création ou plutôt du
changement qui a séparé le ministère de la Main-d'Oeuvre
et de la Sécurité du revenu du ministère du Travail. Nous
serions très intéressés à connaître le
cheminement du ministre. Nous aimerions savoir du ministre ce qu'il en est de
sa réflexion ou de celle de son ministère relativement au
principe de la cogestion et de la participation aux profits quant à la
productivité.
Le ministre nous révélera-t-il ses intentions concernant
le règlement de placement dans l'industrie de la construction qui brime
un trop grand nombre de travailleurs dans leur droit au travail, ce même
droit dont le premier ministre veut "faire une réalité
vécue le plus vite possible pour un plus grand nombre de citoyens"? Or,
dans l'industrie de la construction, c'est le contraire qui est mis en
application. Quand le ministre comprendra-t-il que ce règlement
contesté et décrié par plus d'un nuit aux travailleurs
québécois?
Quels sont les espoirs pour les travailleurs des métiers de la
construction alors que le nombre d'heures travaillées dans cette
industrie ne cesse de décroître? En 1981 et 1982, une diminution
de 26% du nombre d'heures a été enregistrée. Les
prévisions de l'Office de la construction pour 1983 et 1984 ne sont
guère plus encourageantes, car elles poursuivent leur tendance
décroissante. Le ministre pourra-t-il répondre, dans les plus
brefs délais, aux attentes et surtout aux inquiétudes des
milliers de travailleurs qualifiés de la construction? Ne
considère-t-il pas que ce règlement limitatif et inadapté
à la réalité n'a pas sa raison d'être dans une
société moderne où le droit au travail est un droit
sacré? Par ce règlement, le gouvernement encourage la
clandestinité et l'illégalité parce que les travailleurs
qualifiés, qui ont la capacité physique et la volonté de
travailler, les qualifications pour travailler, qui veulent participer à
construire le Québec, qui désirent faire leur part dans la
société sans être à la remorque de quiconque, mais
sur qui pèse une interdiction, doivent se cacher, finalement, pour
gagner leur vie. Ils doivent travailler au noir. Tout cela est illogique pour
une société qui prône le droit au travail.
Laissons de côté, pour quelques minutes, les intentions et
les non-intentions législatives du ministre pour regarder les
crédits affectés au ministère. De 40 000 000 $ qu'il
était pour l'exercice financier de 1982-1983, le budget passe à
quelque 20 000 000 $ pour la présente année. Vu cette diminution
de près de 50% dans le budget total du ministère, nous serions
presque tentés de féliciter le ministre pour les économies
qu'il réalise. Mais, lorsqu'on s'aperçoit que la
quasi-totalité de cette diminution se retrouve au programme 2,
c'est-à-dire au programme d'aide financière à la
Commission de la santé et de la sécurité du travail, nous
ne pouvons que nous étonner.
En 1982-1983, une somme de 20 776 000 $ était prévue pour
la CSST, alors que, cette année, les prévisions sont de l'ordre
de 1 920 000 $. Quelle est la signification de tout cela? J'espère que
le ministre pourra nous informer plus en détail sur cette baisse, car la
note à ce sujet dans le cahier des renseignements supplémentaires
n'est pas très éloquente. Elle nous informe tout simplement que
la baisse des crédits accordés à la CSST est due à
l'exclusion des activités d'inspection. Selon l'article 249 de la Loi
sur la santé et la sécurité du travail, toute somme
requise pour l'application de la présente loi et des règlements
relativement à l'inspection est prise à même les deniers
accordés annuellement à cette fin par voie
législative.
Concernant l'aide financière à la
Commission de la santé et de la sécurité du
travail, l'Opposition se pose de sérieuses questions tant du
côté de l'administration, c'est-à-dire la gestion des fonds
requis perçus chez les employeurs pour défrayer les coûts
qui découlent de l'application de la loi et des règlements, que
du côté de l'application elle-même de la loi, ainsi que des
résultats obtenus par la commission. À plusieurs reprises,
l'Opposition a demandé une commission parlementaire afin de faire toute
la lumière sur cette administration; même que, lors de
l'étude des crédits de 1982-1983, en mai 1982, le ministre nous
avait proposé qu'une équipe de parlementaires, issue de
l'Opposition et du gouvernement, rencontre la direction de la CSST pour
discuter à fond de la situation et des problèmes soulevés
par la commission. Depuis cette proposition du ministre, rien ne s'est
passé, sauf du côté de nos interrogations qui n'ont
cessé de se multiplier, passant du doute à la certitude d'une
mauvaise administration de cette commission.
Pour ce qui est de l'étude à fond de ce programme, M. le
Président, je demanderai aux porte-parole de l'Opposition, le
député de Viau et le député de Portneuf,
chargés du dossier de la CSST, d'interroger le ministre à ce
sujet.
En terminant - je le réitère une fois de plus - j'ose
espérer que le ministre du Travail saura, le plus tôt possible,
nous proposer des mesures attendues par des lois concrètes qu'il mettra
en application dans les plus brefs délais. Je voudrais également
rappeler au ministre que le domaine des relations du travail évolue et
que le gouvernement devra proposer aux différents intervenants une voie
plus harmonieuse, plus positive pour l'ensemble des travailleurs, afin que ce
secteur important ne soit plus synonyme d'affrontement et de confrontation.
Pour atteindre cet objectif, le gouvernement a un important rôle à
jouer. Ce n'est pas en adoptant des lois spéciales forçant le
retour au travail et édictant de nouvelles règles du jeu qu'il
éliminera la confrontation.
M. le Président, je terminerai là-dessus. Le ministre
pourra réagir à certaines des questions que l'on se pose, s'il le
veut bien.
Le Président (M. Vallières): M. le ministre du
Travail.
M. Raynald
Fréchette
M. Fréchette: M. le Président, je remercie le
député de Laurier de son intervention, de ses
préoccupations. Il ne sera, cependant, pas étonné - je
l'espère, en tout cas - que je lui dise que les questions qu'il m'a
posées, si on veut leur donner des réponses qui soient
complètes, peuvent retenir passablement de temps. Je prendrai le temps
qu'il faut - je pense que c'est ce qu'il veut - pour tenter de répondre
à ses questions. Je sais que le député de Viau est
là qui guette de très près, quand on abordera le chapitre
de la Commission de la santé et de la sécurité du travail,
et, connaissant sa perspicacité, je sais bien qu'il ne laissera pas
passer des choses qui ne lui conviennent pas. (11 heures)
Au tout début de ses remarques, le député de
Laurier, à toutes fins utiles, a essentiellement repris la nature du
débat que nous avions tenu lorsque la loi 95 a été
déposée pour adoption à l'Assemblée nationale. Il
me semble, et c'est l'évaluation que j'en fais - que le
député de Laurier et peut-être quelques-uns de ses
collègues, sinon tous, ont une certaine difficulté à faire
le cheminement qui doit être fait et qui s'impose dans la distinction
très nette qu'il faut faire entre un ministère dont la vocation
est de s'assurer essentiellement que les lois régissant les relations du
travail soient respectées et une autre entité administrative dont
la vocation est tout à fait différente, c'est-à-dire celle
de s'assurer d'une politique de main-d'oeuvre et de sécurité du
revenu. Ce débat a été fait à
satiété, encore une fois, quand la loi 95 a été
adoptée et il semble bien qu'on ne pourra pas s'accorder sur les
objectifs qui étaient visés au moment où la
décision qu'on connaît a été prise.
Le député de Laurier a parlé d'une
réformette du Code du travail. Evidemment, cela dépend à
quelle enseigne on se loge, cela dépend de la façon qu'on
évalue les situations. Cela peut bien être pour lui une
réformette, alors que d'autres y trouveront une matière
suffisamment abondante pour améliorer considérablement le
processus d'exercice des droits d'association et des autres droits
prévus dans la loi. Je vais lui donner un seul exemple de cela. Quand,
par exemple, dans l'état actuel des choses, il faut un délai
aussi long que 18, 24 et 36 mois pour disposer d'un grief de
congédiement d'un salarié, ce n'est pas une réformette que
de prendre des dispositions qui permettraient qu'à l'intérieur de
6 mois, ce problème soit réglé. Ce que nous souhaitons
voir introduire dans le code, ce sont des réformes de cette nature. Je
ne pense pas que cela soit de la nature d'une réformette.
Un autre exemple que plusieurs vivent régulièrement aussi:
Dans une situation de champ libre - je parle d'une entreprise où il n'y
a pas de syndicat - où des salariés prennent la décision,
les dispositions nécessaires pour se regrouper en association syndicale
et prennent également les dispositions nécessaires pour
enclencher le processus d'accréditation - je vous parle toujours de la
situation de champ libre, là où il n'y a pas déjà
des unités d'accréditation existantes - dans l'état actuel
des choses,
vous pouvez vous retrouver devant le commissaire du travail avec deux,
trois et, en poussant les choses au pire, quatre requêtes en
accréditation qui viennent de quatre associations différentes,
à qui le code permet actuellement qu'en tout temps avant la
décision du commissaire, une requête en accréditation
puisse être présentée. Si, par exemple, des dispositions
étaient prises pour que, dès qu'une première requête
en accréditation est déposée, le guichet se ferme et
qu'aucune autre requête ne soit reçue chez le commissaire
général du travail tant et aussi longtemps qu'il n'a pas
disposé de la première qui lui a été
présentée - je ne sais pas si le député de Laurier
évalue qu'il s'agit là d'une réformette - au lieu de
prendre 18 ou 24 mois avant qu'une décision finale soit prise en
matière d'accréditation, cela pourrait raccourcir
considérablement les délais. Est-ce qu'on est conscient du fait
que c'est une demande fondamentale qui revient continuellement de la part des
principaux intéressés?
Je vais peut-être vous étonner en vous disant que
même les parties patronales souhaitent que ce processus s'enclenche. Je
n'irai pas plus loin dans les exemples que je pourrais citer au
député de Laurier, mais on évaluera, quand le projet sera
déposé, le qualificatif qu'il faut lui donner. Est-ce une
réformette, une réforme, une grande réforme ou une petite
réforme? Chacun pourra y aller de son appréciation et de son
évaluation. C'est très subjectif, mais on verra en temps et lieu,
quand le document sera déposé.
M. le Président, le député de Laurier, comme
d'ailleurs beaucoup de ses collègues et autant à
l'Assemblée nationale qu'ailleurs, se préoccupe des intentions
gouvernementales quant à ce qu'on discute beaucoup depuis un certain
temps et particulièrement depuis le mois d'août dernier,
c'est-à-dire la philosophie de l'accréditation multipatronale ou
de ce qu'on pourrait convenir d'appeler une unité de négociation
élargie.
Je serais curieux que le Parti libéral nous donne sa philosophie
à cet égard, nous dise ce qu'il en pense. Est-ce que, pour lui,
ce serait une direction dans laquelle il faudrait s'engager? Est-ce qu'alors il
faut de toute évidence rejeter sans aucune forme de procès cette
philosophie de l'accréditation multipatronale? Quant à nous, ce
que nous disons, c'est qu'il s'agit d'un chapitre de nos relations du travail
qu'il va nous falloir vider par la voie d'une large discussion et d'une large
consultation. Qu'est-ce qui en résultera en bout de piste? Je ne suis
pas placé à ce moment-ci pour vous donner quelque réponse
que ce soit. Mais il m'apparaît évident maintenant, et plus
particulièrement depuis le mois d'août 1982, pour des motifs que
vous savez sans doute, qu'il nous faudra faire le débat sur cette
philosophie de l'accréditation multipatronale et, en même temps,
sur l'ensemble, je l'ai dit tout à l'heure, de notre philosophie des
relations du travail. Est-ce que, par exemple - la question peut se poser -
elle peut faire l'objet d'une discussion intéressante, ferme, mais
sereine? Est-ce que, par exemple, il nous faut pousser l'exercice de
réflexion jusqu'à nous poser la question suivante: Serait-il
utile, serait-il sage de songer à une commission des relations
ouvrières comme on en retrouve au palier fédéral, comme on
en retrouve en Colombie britannique, comme on en retrouve en Ontario? Il me
semble que c'est là aussi un sujet qui pourrait faire l'objet d'une
large discussion. Quand je parle de ce processus que je suis prêt
à coordonner, voici au moins deux sujets qui pourraient faire l'objet
d'une discussion qui permettrait de dégager les opinions de ceux et
celles qui doivent vivre les relations du travail.
Toujours en faisant référence au projet d'amendement, le
député de Laurier a également parlé du fait qu'il y
a eu ou qu'il n'y a pas eu de consultation auprès des intervenants,
auprès de ceux qui ont une argumentation à faire valoir.
Je lui dirai essentiellement qu'au mois d'octobre 1982, quelques
semaines seulement après qu'on m'a demandé d'aller au
ministère du Travail, je me suis présenté au Conseil
consultatif du travail et de la main-d'oeuvre. C'était à ce
moment une visite que j'appellerai une visite "de courtoisie" aux fins de
rencontrer les gens qui siègent au Conseil consultatif du travail et de
la main-d'oeuvre pour échanger avec eux et, dès lors, dès
cette première rencontre au mois d'octobre dernier, les intervenants au
Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre ont insisté pour
que leur soit présenté dans les meilleurs délais un projet
d'amendement au code, un document de travail sur lequel ils pourraient
effectivement amorcer une réflexion et soumettre au ministre des avis
sur les amendements proposés.
Je me suis engagé au mois d'octobre à remettre au Conseil
consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, avant le 15 décembre, le
projet qu'il souhaitait avoir entre les mains. C'est effectivement le 9
décembre que ce document lui a été déposé.
Le conseil a remis son avis le 13 mars, si mon souvenir est fidèle.
Depuis le 13 mars, nous avons cheminé dans les consultations, nous avons
préparé le projet. Aussi bien aller jusqu'à la limite,
quand on parle de consultation, je vous signale, et je crois que c'est bon
qu'on le sache, qu'autant le ministre du Travail que le député de
Prévost, adjoint parlementaire au ministre du Travail, nous avons fait
l'exercice de rencontrer les représentants des parties patronales en
séance informelle pour procéder avec toutes les parties à
une réévaluation des
amendements qu'on proposait de déposer bientôt. Cela a
été fait depuis le mois de mars dernier autant avec le Conseil du
patronat, la chambre de commerce, l'Association canadienne des manufacturiers
qu'avec toutes les instances syndicales et ce, M. le Président, en
prenant autant de temps qu'il était nécessaire pour le faire et
qu'il était nécessaire pour recueillir les avis et propos de ceux
qui étaient particulièrement touchés.
M. le Président, le député de Laurier, de
façon très habile, a aussi fait référence aux lois
70, 105 et 111. À moins que je ne l'aie mal compris - il me corrigera si
j'ai mal interprété ses propos - il a ajouté que ces lois
avaient été passées dans un strict but
électoraliste, aux fins de recueillir des faveurs électorales. Je
n'ai pas besoin de vous dire... Vous devez me corriger tout de suite?
Allez-y.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Laurier.
M. Sirros: Oui, M. le Président. Ce que j'ai dit, c'est
que, à la suite de l'adoption des lois 70, 105 et 111, on peut se poser
la question, à savoir si, du fait que vous semblez diviser la
réforme du Code du travail en deux étapes, dans le sens qu'il y
en a une première, que j'ai appelée "réformette", ou, si
vous voulez, une première réforme, concernant les trois points:
l'accréditation syndicale, le raccourcissement des délais et
rendre la loi antibriseurs de grève plus étanche, et que vous
avez vous-même dit qu'il faut pousser l'exercice plus loin, qu'il faut
regarder ensemble la philosophie du Code du travail -on fera cela plus tard -
j'ai dit qu'à la suite de l'adoption de ces lois, on peut se poser la
question, à savoir si le fait de diviser cela en deux étapes
n'est pas une démarche électoraliste dans le sens que, pour que
le gouvernement se déculpabilise en quelque sorte des gestes qu'il a
posés avec les lois 70, 105 et 111, il garde pour plus tard des cadeaux
pour acheter la paix et dans un but électoraliste, sans tenir compte des
besoins réels de la société tout entière, en tenant
compte seulement des besoins du parti.
M. Fréchette: M. le Président, je ne peux
absolument pas suivre le député de Laurier dans son
raisonnement...
M. Sirros: Je peux essayer encore.
M. Fréchette: ...parce que les événements
à partir desquels il tire sa conclusion ne sont pas ceux qui ont
déclenché ou qui ont amené le gouvernement à la
décision de revoir, autant dans le secteur privé que dans le
secteur public, l'ensemble des conditions qui prévalent en
matière de négociation et de relations du travail. Ce n'est pas
seulement à la suite des événements des derniers mois que
le gouvernement a réalisé - d'ailleurs, le Parti libéral
au pouvoir l'avait réalisé aussi avant - que le processus mis en
place en 1964 par le gouvernement Lesage, par rapport aux objectifs qu'on
s'était fixés à l'époque, autant du
côté gouvernemental que du côté syndical, ce n'est
pas à partir des derniers événements de l'automne et de
l'hiver dernier que cette décision a été prise de
procéder à la révision globale de tout le système
et de tout le processus. Il n'y a pas lieu, me semble-t-il, de faire de
relation directe entre ces événements et le processus
enclenché autant au niveau de la négociation dans les secteurs
public et parapublic que dans le secteur privé.
Parlant du public et du parapublic, M. le Président, je vous
dirai qu'au moment où l'on se parle, il y a déjà eu,
à ma connaissance, en tout cas - cela pourrait être plus, mais
à ma connaissance - trois réunions préliminaires qui ont
été tenues aux fins de procéder à
l'évaluation, dans un premier temps - et cela me semble la logique
même qui commande ce processus -aux fins de procéder au choix de
la tribune ou du forum qui sera habilité à revoir
l'évaluation de notre système de négociation dans les
secteurs public et parapublic.
Je vous signalerai également, puisque cela a fait l'objet d'une
de vos préoccupations ou de vos questions, M. le député de
Laurier, que le ministère du Travail est impliqué totalement et
entièrement dans ce processus dont je viens de vous parler et que, comme
lui, je suis d'opinion que le ministère du Travail doit s'impliquer non
seulement au niveau des processus préliminaires, non seulement au niveau
du déblaiement du terrain, mais le ministère du Travail doit
aussi être là de façon constante dans tout le processus qui
mènera à une conclusion de ce groupe de travail qui n'est pas
encore déterminé. (11 h 15)
Le député de Laurier me demande mon appréciation
sur une philosophie qui prend beaucoup d'envergure et d'ampleur depuis quelque
temps. C'est celle qui voudrait que des travailleurs soient appelés
à cogérer leur entreprise. À cet égard, je suis
l'un de ceux qui croient qu'effectivement il faille faire connaître cette
possibilité. Non seulement faudrait-il la faire connaître, mais il
faudrait mettre à la disposition des parties qui le souhaitent les
moyens nécessaires pour qu'elle puisse se réaliser.
Ce sur quoi j'aurais beaucoup de réserve, M. le Président,
pour ne pas dire des objections fondamentales, ce serait l'adoption de
politiques qui imposeraient une forme de cogestion. Il me semble qu'à
cet égard, les parties doivent agir dans un
contexte de consentement ou d'opération de gré à
gré, mais je suis l'un de ceux qui croient effectivement que la
cogestion pourrait, à bien des égards, éviter dans le
domaine des relations du travail des problèmes considérables
comme on en a connus. Je sais bien que si, par exemple, un travailleur ou deux
siégeaient au conseil d'administration de leur entreprise, s'il leur
était possible d'avoir accès aux livres, enfin, si le livre
pouvait être devant eux, il est évident que des attitudes
pourraient être modifiées, autant d'un côté comme de
l'autre. Or, à cet égard, sur le plan du principe, en tout cas,
et pour mettre à la disposition des parties les moyens
nécessaires pour y arriver, je suis l'un de ceux qui privilégient
cette philosophie. D'ailleurs, à certains endroits, cela a
déjà été mis en application, du consentement des
parties intéressées. Ne pensons qu'à Forano, par exemple,
où les parties d'un commun accord ont convenu que les travailleurs
pourraient s'asseoir à la table du conseil d'administration et
cogérer l'entreprise. Jusqu'à maintenant, il semble que
l'expérience qui a été tentée s'avère
heureuse.
M. le Président, il y a la philosophie du règlement de
placement. Je sais qu'on aura l'occasion d'y revenir tout au cours de
l'étude des crédits, mais je voudrais à ce stade-ci,
quitte à aller plus en profondeur en temps et lieu, que l'on
réalise une seule et simple chose: le règlement de placement
crée des inconvénients à des travailleurs de la
construction, c'est évident. Autant le règlement de placement que
n'importe quelle des lois qu'un gouvernement municipal, provincial ou
fédéral va adopter vont créer des inconvénients
à quelqu'un dans le champ quelque part. Personne ne mettra cela en
discussion. Ceux qui sont avocats savent quels problèmes cela a pu
créer quand l'aide juridique a été
institutionnalisée et combien les avocats ont eu des réserves;
c'est normal.
M. le Président, la philosophie essentielle du règlement
de placement, quant aux modalités de rappel au travail, va-t-on accepter
et admettre une fois pour toutes que c'est l'équivalent du principe de
l'ancienneté que l'on reconnaît dans n'importe quelle des
conventions collectives qui existent? Le principe de l'ancienneté dans
n'importe quelle des conventions collectives qui existent prévoit que,
lorsqu'un travailleur est mis à pied parce qu'il manque du travail ou
pour un autre motif qui n'est pas d'ordre disciplinaire, il peut être
rappelé au travail, mais il va l'être en fonction de
l'ancienneté qu'il détenait chez son employeur. Est-on prêt
à accepter que la philosophie qui sous-tend le règlement de
placement est essentiellement l'équivalent du principe de
l'ancienneté que l'on retrouve encore une fois, dans n'importe quelle
des conventions collectives qui existent entre des parties? Si on accepte ce
principe, je pense que l'on va convenir qu'on ne peut pas, sur le plan
fondamental de cette philosophie, trouver d'autres moyens de protéger
ceux qui ont accumulé effectivement, et dans ce cas-ci, c'est en termes
d'heures, cette ancienneté qui leur permet un rappel, par
préférence par rapport à d'autres qui ne l'ont pas
accumulée.
M. le Président, je vous dirai également que le
règlement de placement, sa source, son origine, ce n'est pas
précisément à partir de la prise du pouvoir par le Parti
québécois. Le gouvernement qui a précédé le
gouvernement du Parti québécois a été
préoccupé par ce problème; c'est le gouvernement qui a
précédé l'actuel gouvernement qui a commandé la
commission Cliche et c'est à partir des recommandations de la commission
Cliche que le gouvernement précédent a amorcé le processus
qui devait, indubitablement, conduire à l'adoption d'un règlement
de placement. Je comprends que le temps n'a pas permis au gouvernement qui a
précédé le nôtre d'adopter le règlement de
placement. Mais c'était très précisément la
philosophie vers laquelle se dirigeait le gouvernement précédent,
M. le Président. On pourra y revenir, bien sûr, mais il me semble
que ce sont là deux aspects de la situation qu'il faut retenir.
Est-ce que je peux, ne serait-ce qu'à titre d'information, M. le
Président, donner un renseignement aux membres de la commission? Vous
vous souvenez de ces événements un peu pénibles qui ont
marqué les problèmes qui ont été vécus
à la frontière du Nouveau-Brunswick et du Québec, à
Campbellton, plus particulièrement, depuis un mois ou six semaines.
Alors, il y a donc eu cette rencontre entre des représentants des
autorités du gouvernement du Nouveau-Brunswick et des gens du
gouvernement du Québec qui essayaient d'identifier les problèmes
qui pouvaient être à l'origine de cette violence à la
frontière des deux provinces. Le Procureur général du
Nouveau-Brunswick et le ministre du Travail nous faisaient remarquer que, selon
leur évaluation, il y avait trois causes de violence aux
frontières du Nouveau-Brunswick et du Québec. Une de ces causes
était, d'après eux, ils nous l'ont dit à l'occasion d'une
première rencontre, une réglementation dans le transport; la
deuxième était la mobilité de la main-d'oeuvre
forestière, les gens qui travaillent en forêt, et,
troisièmement, disait-on, il y avait le contenu ou la philosophie,
encore une fois, du règlement de placement du Québec. Ce qui a
été convenu, à l'occasion de cette première
rencontre, c'est que les hauts fonctionnaires des organismes concernés
des deux gouvernements
allaient se rencontrer pour effectivement procéder à
l'évaluation et à l'identification précise des causes qui
engendraient cette violence aux frontières du Québec et du
Nouveau-Brunswick.
Quant au règlement de placement, il y a eu deux rencontres qui
ont été tenues. La première s'est tenue entre les
fonctionnaires du gouvernement du Nouveau-Brunswick et les fonctionnaires du
gouvernement du Québec, des gens de l'OCQ, qui, ensemble, ont
échangé sur la philosophie, encore une fois, du règlement
de placement.
M. le Président, vous allez sans doute être
étonné que je vous dise que le gouvernement du Nouveau-Brunswick
a manifesté un intérêt tout à fait évident
pour notre réglementation dans le placement. Il n'en connaissait pas les
tenants et les aboutissants - pour employer une expression chère
à l'un de vos collègues - et ils se sont intéressés
au premier chef au contenu du règlement de placement. Non seulement le
gouvernement du Nouveau-Brunswick s'y est-il intéressé, mais les
parties patronale et syndicale de la construction au Nouveau-Brunswick nous ont
également demandé d'aller rencontrer les principaux intervenants
du monde de la construction au Nouveau-Brunswick, travailleurs et patrons, pour
obtenir des renseignements sur le règlement de placement et pour nous
dire, finalement: "Seriez-vous disponibles pour nous donner un coup de main
dans le cas où on souhaiterait avoir au Nouveau-Brunswick un
règlement de placement qui ressemblerait au vôtre?"
Je ne pense pas que ce soit là la révolution. Si,
effectivement, un autre gouvernement s'intéresse à la philosophie
de notre règlement de placement, je ne pense pas non plus que ce soit la
fin du monde, en quelque sorte.
M. le Président, le député de Laurier
s'étonne que les crédits soient passés de 40 000 000 $
à 20 000 000 $. Je le comprends de s'étonner. Je le comprends
parce qu'au moment où les documents ont été
imprimés, il y avait effectivement cette décision qui avait
été prise, en vertu de l'article 249 de la Loi sur la
santé et la sécurité du travail, de ne plus financer le
service d'inspection de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail.
Cette décision a été réévaluée
autant par le Comité des priorités que par le gouvernement
lui-même. Après cette réévaluation, après
cette analyse de l'ensemble de la situation, il a été convenu de
revenir au statu quo ante, de respecter l'article 249 de la loi et de financer,
comme par les années passées, l'inspection à la Commission
de la santé et de la sécurité du travail.
Je ne fais aucun reproche au député de Laurier d'avoir
soulevé la question parce qu'effectivement, la décision est toute
récente et ne correspond pas - je suis tout à fait d'accord avec
lui - à l'ensemble des chiffres que l'on retrouve dans le livre des
crédits.
Le Président (M. Vallières): M. le
député.
M. Sirros: Si je comprends bien, cela veut dire qu'il y aura des
modifications dans les chiffres ultérieurs.
M. Fréchette: Voilà.
M. Sirros: Est-ce que le ministre pourrait expliquer en quelque
sorte ce qui a amené la première prise de décision?
Qu'est-ce qui a amené la révision?
M. Fréchette: Ce qui a amené la première
prise de décision - je l'ai dit à l'Assemblée nationale la
semaine dernière -c'est qu'à partir du principe ou de la
volonté de rationaliser les finances publiques et à partir de la
constatation que le fonds actuariel de la CSST est capitalisé à
72%... Il est capitalisé à 72%, mais entendons-nous bien, cela
comprend à la fois la réparation et l'indexation.
L'évaluation qui en avait alors été faite, c'est que,
compte tenu de cette capitalisation, il était sans doute possible que la
Commission de la santé et de la sécurité du travail puisse
elle-même assumer les coûts ou enfin le financement de
l'inspection.
Après réévaluation, comme je viens de vous le dire,
la décision de revenir au statu quo ante a été prise pour
deux motifs bien précis. D'abord, il y a une loi qui fait obligation au
gouvernement - c'est l'article 249 de la loi 17 - de financer l'inspection,
d'une part. Deuxièmement, il a été décidé
que le gouvernement devait continuer de contribuer purement et simplement
à assumer les coûts nécessités par l'inspection. Ce
ne sont pas d'autres motifs que ceux-là qui ont amené la
réévaluation de la situation du dossier et qui ont amené
la décision, comme je viens de vous le signaler, de respecter
intégralement l'article 249 de la loi.
Toujours au chapitre de la CSST, je sais que les députés
de Viau et de Portneuf brûlent du désir d'aborder le sujet. Mais,
comme vous y avez touché, vous me permettrez quelques commentaires.
Depuis quelque temps - je ne dirai pas qu'on s'acharne - on revient constamment
avec des préoccupations qui touchent la Commission de la santé et
de la sécurité du travail. On a l'impression que l'objectif
fondamental est d'arriver carrément à discréditer
l'organisme sur la place publique, en s'attaquant plus
précisément à une personne, non seulement en s'y
attaquant, mais en demandant purement et simplement sa tête. (11 h
30)
M. le Président, est-ce que je peux,
comme première remarque, vous indiquer qu'il est le
président d'un conseil d'administration paritaire composé de
quatorze personnes plus un observateur? Je ne sache pas que la politique
administrative d'un organisme soit le lot ou la juridiction exclusive d'une
seule personne, fût-elle président-directeur général
de l'organisme en question. Si l'on veut demander des comptes, qu'on les
demande à l'ensemble de l'organisme et donc aux quatorze autres
administrateurs du même organisme. On s'est plu, depuis une quinzaine,
à lancer dans le paysage toute espèce de chiffres aussi effarants
et gros les uns que les autres quant au déficit de la CSST. Le
député de Viau a même annoncé - ou enfin, il a
avancé dans une intervention à l'Assemblée nationale,
qu'il y avait là un déficit de 230 000 000 $. M. le
Président, c'est absolument et strictement faux. Le député
de Viau a parlé de sources d'information. Je sais qu'il peut avoir des
sources d'information à la CSST, mais ce ne sont pas les bonnes. Ce ne
sont pas les bonnes. Ou alors, les informations qu'on vous donne ne sont pas
les bonnes. M. le Président, il n'y a pas et il n'y a pas eu de
déficit de 200 000 000 $ ou plus à la Commission de la
santé et de la sécurité du travail. Il y a eu, en 1982, un
déficit de 57 000 000 $. Retranchez le surplus de 18 000 000 $ de 1981 -
pour vous, il y a un déficit de 40 000 000 $ ou 50 000 000 $ aussi en
1981, mais les livres vérifiés démontrent un surplus de 18
000 000 $ - retranchez donc des 57 000 000 $ de 1982 les 18 000 000 $ de
surplus de 1981 et vous arrivez avec un déficit d'à peu
près 39 000 000 $. L'Opposition, M. le Président, évalue
que le déficit de la CSST pour 1983 dépassera les 80 000 000 $.
Ce n'est pas, non plus, l'évaluation qui est faite par le conseil
d'administration. Il est évalué par le conseil d'administration
que le déficit tournerait autour d'une quarantaine de millions. Alors,
pour 1982 et 1983, cela pourrait faire, globalement, à peu près
80 000 000 $ de déficit. Enfin, j'arrondis.
Et qu'y a-t-il de dramatique dans une situation comme celle-là,
quand on parle d'un fonds capitalisé à 72%, d'une somme d'argent
de 1 600 000 000 $ placée à la Caisse de dépôt et
placement, qui rapporte des intérêts et qui peut profiter à
d'autres initiatives du gouvernement du Québec? Et, quand on a le
goût souvent de se comparer avec l'Ontario, retenons donc qu'en Ontario,
le fonds de capitalisation, le fonds acturiel capitalisé de la
même commission est à 56%, sans tenir compte de l'indexation. On
ne tient compte que de la réparation et on est capitalisé
à 56%. Si on tenait compte de l'indexation, comme on le fait ici, ce
serait capitalisé à 37% en Ontario. Je pense que c'est un certain
nombre de choses qu'on a le droit d'éclaircir, M. le Président.
Et, quand on nous parle d'une politique de recouvrement... Je trouve
étrange qu'il y a trois ou six mois, le Parti libéral ait
mené une guerre de tous les instants pour dire que le gouvernement
s'acharnait sur des gens qui devaient une certaine somme d'argent à
l'impôt, qu'on prenait tous les moyens pour recouvrer même des
sommes qui n'étaient pas dues, qu'on n'était pas humanisé,
disait-on, dans le recouvrement des sommes d'impôt qui seraient dues au
gouvernement. Et là, assez curieusement - ou bien j'évalue mal,
ou bien je ne comprends pas la signification des termes - ce qu'on voudrait,
c'est qu'on implante à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail un système comme celui qu'on reproche
au ministère du Revenu. Je ne sais pas si c'est l'objectif. Mais le
recouvrement à la CSST, il se fait, et il est basé sur les
principes du droit civil. Je vous en donne les paramètres
rapidement.
Quand il y a constatation et évidence de fraude ou de fausse
représentation, M. le Président, ou de déclaration qui ne
serait pas conforme à la réalité des faits,
indépendamment des montants qui sont en cause, le processus de
recouvrement va s'enclencher par la voie du processus reconnu en matière
civile et cela peut aller jusqu'à la saisie des biens de celui qui
aurait fait une fausse déclaration.
Par ailleurs, M. le Président, quand on est devant un
surpayé de 50 $, 75 $, 100 $, et c'est la majorité...
M. Cusano: 5000 $?
M. Fréchette: Je vais y arriver à vos 5000 $. Je
vais aussi arriver à vos 15 000 $ que vous avez soulevés à
l'Assemblée nationale, ce ne sera pas long, vous allez voir. Mais, quand
on est devant un montant surpayé de 50 $, 75 $ ou 100 $ et que
l'évaluation est faite que cela en coûterait 300 $, 400 $ ou 500 $
pour le recouvrer, sans être sûr de pouvoir le
récupérer ou le recouvrer, est-ce que le député de
Portneuf serait prêt à agir comme procureur de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail pour aller saisir des
gens qui ont reçu un montant surpayé de 50 $, 75 $, 100 $ et
qu'il en coûtera 250 $ à 300 $ en frais? C'est cela l'objectif?
C'est cela que vous nous demandez de faire?
Je vais parler d'une autre situation et vous me direz également
si votre objectif serait de récupérer quelque argent. Je vous
donne le cas de gens que vous connaissez fort bien, celui des gens qui ont
été, en 1979, déclarés "amiantosiques". Un examen
médical pose un diagnostic clair: Voici une personne qui est
amiantosée à 10% et plus. Les dispositions de la loi 52 sont
telles que ce travailleur se retire du marché du travail. Son permis lui
est enlevé. Il a 50 ans, 55
ans. Il reçoit donc 90% de son salaire net pour le restant de ses
jours, comme on dit communément. Or, il arrive que, sans que lui,
d'aucune espèce de façon, ait eu quelque rôle à
jouer dans le processus que je suis en train de vous expliquer, deux ans plus
tard, un comité de trois médecins spécialistes en
matière de maladies pulmonnaires en vient à la conclusion qu'il
n'a pas d'amiantose. Miracle! On les appelle les "miraculés de
l'amiante", M. le Président. Ils ont 45, 50 et 55 ans. Ils ont
reçu en moyenne 74 000 $ chacun, sans que, d'aucune espèce de
façon, ils soient responsables de la situation qui leur arrive. C'est
une évaluation médicale qui a été faite au
départ. C'est une évaluation médicale qui est faite, en
fin de compte. Est-ce que quelqu'un est disposé à accepter le
mandat que la commission pourrait lui donner de prendre les procédures
judiciaires pour récupérer les 74 000 $ du travailleur qui n'a
plus de permis de travail, qui a 55 ou 60 ans et qui, à toutes fins
utiles, ne vit qu'avec 90% du revenu net que la loi lui permettait d'avoir
lorsqu'il était amiantosé? Mais il ne l'est plus, parce qu'il
s'est produit un miracle. Est-ce ce genre de récupération que
vous souhaitez que la commission fasse? Y a-t-il un avocat chez vous qui serait
disponible, bénévole, pour entamer ces procédures? Si oui,
on peut lui confier le mandat rapidement.
Un autre exemple, M. le Président. C'est beau de le lancer sur la
place publique, de le lancer en pâture à tout le monde sans y
donner d'explication. Le député de Portneuf va être ici,
cet après-midi, on pourra reprendre le débat, s'il le
souhaite.
Mais, la semaine dernière, à l'Assemblée nationale,
ce député me pose la question suivante: Comment, M. le ministre,
pouvez-vous expliquer qu'un travailleur accidenté, qu'un accident a
rendu inapte à travailler, reçoive, après s'être
retiré du marché du travail, 35 000 $, alors qu'il retirait un
salaire de 23 500 $? Lancée comme cela, M. le Président, il est
clair que cette question jette le discrédit sur l'organisme
lui-même, sur les gens qui y travaillent à l'intérieur.
Mais, quand on y regarde de près, cela s'explique très
facilement.
Ce travailleur du CN - pour reprendre l'exemple du député
de Portneuf - est au travail et gagne, pendant qu'il y est, 23 500 $ de
salaire. Il subit un accident de travail qui lui occasionne une
incapacité partielle permanente de 12%. Mais son accident fait en sorte
que sa situation se dégrade et l'amène au point où il doit
se retirer complètement du travail, il n'est plus capable de travailler.
Il est déclaré "inapte" au travail ou en incapacité
totale. Qu'arrive-t-il, M. le Président? Il arrive qu'il a droit,
étant devenu totalement invalide et incapable de travailler, è
90% de son salaire net. C'est l'indemnisation qu'il va recevoir de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail. Cela
fait à peu près 20 000 $.
Mais, ce même travailleur, qui est au CN depuis 20 ans, 25 ans, 30
ans, et qui a pris la précaution, qui a eu la prudence de cotiser
à un fonds de retraite privé, va aussi recevoir, quand il va se
retirer du marché du travail soit pour un motif d'incapacité,
soit pour un motif d'âge, sa prestation de retraite de 15 000 $, ce qui
va faire qu'il va recevoir effectivement 35 000 $ après avoir
été retiré du marché du travail. Est-ce que vous
êtes en train de nous dire qu'on devrait soustraire de la prestation de
ce travailleur le montant équivalant au montant qu'il reçoit du
régime de retraite qu'il s'est lui-même payé pendant 20 ou
25 ans? Il est vrai qu'un travailleur qui se retire du marché du travail
peut retirer plus que le montant qu'il gagnait, mais il l'a fait de sa propre
initiative, avec ses deniers, en se payant un fonds de retraite privé.
Il serait peut-être utile d'aller jusqu'au bout du dossier. Ce
n'est pas 35 000 $ qui viennent de la CSST, entendons-nous bien. La CSST
paie 20 000 $, soit le maximum prévu, les 15 000 $ proviennent de la
compagnie d'assurances ou d'un autre organisme.
M. Cusano: Question de privilège.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Viau, je vous rappelle qu'en commission parlementaire,
il n'y a pas de question de privilège, cela ne peut être qu'une
question de règlement.
M. Cusano: Question de règlement ou de directive ou
simplement une demande au ministre à ce moment-ci. Est-ce qu'on veut
aborder l'étude des crédits de la CSST immédiatement ou si
cela fait partie des remarques préliminaires?
Le Président (M. Vallières): Je puis
répondre à cette question. À ce stade-ci de nos travaux,
le ministre vient de mettre fin à ce qu'on appelle la réplique
à la suite des notes préliminaires des deux formations
politiques. J'avais une demande d'intervention du député de
Prévost. Je lui demanderais si cela concerne un programme en particulier
parce que, pour la bonne marche de nos travaux, il serait intéressant
qu'on convienne de la façon qu'on va aborder les divers programmes.
M. Cusano: Je vous avais demandé la parole pour demander
quelques précisions au ministre. On vient de me les donner. Cela
élimine toute question de règlement.
Le Président (M. Vallières): Je donnerai d'abord la
parole au député de Prévost et je reviendrai à
votre question par la suite.
M. Sirros: Je m'interroge simplement sur la façon de
procéder. Est-ce que je peux proposer au ministre de procéder -
c'est ce que nous aimerions faire - d'une façon générale
et, avant la fin des crédits, de passer les programmes en détail?
Concernant la CSST, comme le ministre a fait référence
lui-même à plusieurs reprises au député de Portneuf,
il y aurait peut-être une seule question que j'aurais à poser
lorsque le député de Prévost aura terminé sur
quelque chose que le ministre a dit dans sa réplique. On pourrait
peut-être aborder la CSST quand le député de Portneuf sera
ici.
M. Fréchette: C'est l'entendement que j'en avais. Je me
suis référé à ces choses-là parce qu'il
s'agissait d'une réplique et effectivement le député... Il
me semblait avoir compris - on pourra me corriger - que, ce matin, on faisait
une discussion d'ordre général sur la question des relations du
travail comme telle, qu'on revenait cet après-midi à la CSST et
enfin aux autres programmes, pour le temps qu'il restera.
M. Cusano: M. le Président...
Le Président (M. Vallières): Juste avant, M. le
député de Viau, j'avais reconnu le député de
Prévost. J'aimerais qu'il nous indique le but de son intervention.
M. Dean: Je suis en train de me faire avoir par la
procédure. Mes remarques étaient en partie de nature
générale et aussi en réplique au député de
Laurier sur la question des relations du travail en général.
Le Président (M. Vallières): Si vous le permettez,
nous pourrions procéder, compte tenu que nous procédons par
alternance et le ministre venant de donner la réplique, avec le
député de Viau et ensuite avec le député de
Prévost.
M. le député de Viau.
M. William Cusano
M. Cusano: Merci, M. le Président. J'aimerais
préciser que je n'embarquerai pas dans les crédits de la CSST
tout de suite. Mes remarques seront plutôt d'ordre général,
à propos de la volée de réformes que vous avez
proposées. Je m'excuse, je n'ai rien entendu sur des changements de
structures ou une loi sur la CSST. Je peux assurer le ministre qu'il ne s'agit
pas d'un problème de langue, mais c'est parce que je suis arrivé
en retard à la commission. J'aimerais lui poser la question suivante:
Dans la volée de réformes qu'il a présentées,
a-t-il mentionné des modifications minimales de structures, internes
à la CSST? Ou a-t-il mentionné des modifications globales de
structures à la CSST? Je voudrais savoir s'il s'agit d'un oubli de sa
part, s'il y en a, premièrement, et, s'il y en a, va-t-il les
présenter cet après-midi lorsqu'on en arrivera aux crédits
de la CSST?
M. Fréchette: Je ne l'ai pas fait ce matin et cela
était volontaire, parce que j'envisageais de le faire lorsqu'on
arriverait au programme consacré strictement à la Commission de
la santé et de la sécurité du travail. (11 h 45)
M. Cusano: L'autre commentaire, encore d'ordre
général, suivant vos déclarations de tout à
l'heure, est sur le fait que le président de la CSST n'est
peut-être pas le seul responsable de ce qui se passe à la CSST et
cela justifie notre demande depuis un an d'avoir une commission parlementaire
sur la CSST, suggestion que vous semblez mettre de côté
complètement.
M. Fréchette: Je n'ai jamais dit que quelqu'un
était responsable de quoi que ce soit. Si vous voulez faire des
responsables et des coupables sur la place publique, il n'y a peut-être
pas juste une personne à qui il faut s'adresser.
M. Cusano: Comment peut-on s'adresser au conseil d'administration
en totalité sans une commission parlementaire?
M. Fréchette: Est-ce qu'on ne doit pas y revenir cet
après-midi, M. le Président?
M. Cusano: Ah bon!
Le Président (M. Vallières): On pourrait
peut-être réserver ces questions pour l'étude du programme
2, où on retrouve les crédits de la CSST. On pourrait maintenant
donner la parole au député de Prévost.
M. Robert Dean
M. Dean: Merci, M. le Président.
Quand le député de Laurier, au nom de sa formation
politique, dit qu'il y a des problèmes de relations du travail au
Québec et il les déplore, je dois être d'accord avec lui.
Quand il dit que peut-être notre gouvernement a été
relativement lent à apporter des projets de solution à certains
de ces problèmes de relations du travail, je suis encore porté,
à cause de mon passé, à être d'accord avec lui.
M. Sirros: C'est sûr.
M. Dean: J'ai très hâte de participer à un
débat public, en profondeur, sur la question des relations du travail au
Québec. Je suis impatient de participer à un débat qui
chercherait à trouver de nouvelles orientations pour les relations
patronales-
syndicales au Québec pour le bien économique et social du
Québec. J'ai hâte aussi que ce débat, cette remise en
question, s'exerce non seulement à l'égard du secteur public,
mais à l'égard des 85% des travailleurs, et de connaître
quel est le pourcentage des entreprises au Québec qui oeuvrent dans le
domaine de l'extraction, de la transformation, de la distribution de la
richesse, ce qu'on appelle, pour une bonne part, le secteur privé. J'ai
hâte à la première phase, qu'on entamera d'ici quelques
jours ou quelques semaines, et j'ai hâte aussi à la
deuxième phase qui s'annonce pour l'automne. J'ai hâte de
participer à ce débat, parce que je suis impatient de voir
quelles positions seront prises par l'Opposition à ces débats. Il
est beaucoup plus facile de poser des questions, de déplorer des
situations que de prendre position. Ce parti dit: On est contre cela. Mais on
est pour quoi? On est pour qui? Cela est beaucoup plus difficile et j'ai
hâte de voir les représentants de l'Opposition montrer leurs
couleurs. Espérons qu'il y aura d'autres couleurs que du rouge,
espérons qu'il y aura des nuances.
Espérons qu'après avoir voulu ce débat et
déploré sa lenteur à se tenir, l'Opposition ne finira pas
par faire ce qu'elle a fait quand il s'est agi de la Loi sur la santé et
la sécurité du travail où, après un débat
public, où elle a dénoncé à toute la population le
fouillis épouvantable, le coût économique, social et humain
effarant des questions de la santé et de la sécurité du
travail en face d'un projet de loi qui cherchait à apporter des
solutions à certains de ces problèmes, le Parti libéral a
voté contre. Tout en déplorant que le débat n'ait pas
lieu, le député de Laurier trouve déjà une
réponse à l'avance, s'il fallait que ce débat ait lieu. Si
on aborde ces deux projets de loi ou ce projet de loi prochain et ce
débat public qui suivra, sur des questions plus profondes,
déjà il se bâtit un mécanisme de défense en
disant: Bon, est-ce que cela sera pour acheter la paix? Est-ce que cela veut
dire que si, après ces débats publics, on en arrivait à
des solutions qui devaient reconnaître qu'il y a un problème
sérieux d'accès à la syndicalisation pour les
travailleurs, le parti de l'Opposition dirait que c'est pour acheter la paix,
pour des raisons électoralistes, comme ces gens ont dit?
Je souhaiterais plutôt, M. le Président, que le
député de Laurier, avec son calme et son intégrité,
son mérite habituel, participe à ce débat en vue de
préparer un consensus non seulement des partis politiques, mais des
partenaires sociaux, un consensus qui finisse par établir une fois pour
toutes au Québec le droit à l'entreprise d'exister, de faire des
profits, d'être productive, d'être concurrentielle, de fabriquer
des produits de qualité au meilleur prix, mais aussi le rôle
essentiel dans une société démocratique d'un syndicalisme
librement choisi, démocratique et efficace comme élément
essentiel de la participation des travailleurs dans l'entreprise et dans la
société.
Le député de Laurier a fait rapidement allusion à
l'accréditation multipatronale. Une des choses que je déplore
dans ce débat qui n'en est pas encore un, c'est cette hystérie
qu'on retrouve dans les journaux - et je ne parle pas du parti de l'Opposition
actuellement - visant à protester contre un principe dont on peut
déplorer le fait - et je ne suis pas le seul à le déplorer
- que même les balises... Qu'est-ce que cela veut dire au fond ou
qu'est-ce que cela peut vouloir dire? Hypothèses A, B, C, D. Avant
même qu'on balise la question, qu'on définisse la question,
déjà les positions sont braquées sur le concept
d'accréditation multipatronale: c'est la catastrophe, c'est
l'apocalypse, c'est la fermeture de tout ce qui existe au monde et on ne sait
même pas de quoi on parle encore.
On aura sans doute l'occasion dans ce débat d'explorer en
détail ce que l'accréditation multipatronale mange en hiver. Mais
je veux surtout m'attarder aujourd'hui sur le problème encore plus
fondamental - parce que s'il y a des problèmes de relations du travail -
de l'état pitoyable de l'exercice du droit d'association ici au
Québec en vertu de nos législations existantes, le droit
d'association qui est reconnu dans la Charte universelle des droits de l'homme,
celle des Nations Unies, le droit des travailleurs partout dans le monde de se
former en syndicat pour la défense de leurs droits.
La première loi au Québec qui a régi les relations
du travail, c'est la loi instituant une commission de relations
ouvrières du 3 février 1944, une belle petite loi de six pages,
M. le Président, qui, à son article 3, disait: "Tout employeur et
tout salarié ont droit d'être membre d'une association et de
participer à ses activités légitimes." Ce droit est
reconduit dans notre Code du travail d'aujourd'hui et, malgré son nombre
de pages terriblement supérieur à six, avec toute la
sophistication qu'on a apportée à notre code, pour une grande
partie des travailleurs et travailleuses du Québec, est
systématiquement et complètement bafoué.
Ce n'est pas vrai que l'homme ou la femme au travail, le groupe d'hommes
ou de femmes au travail qui veulent se syndiquer sont capables de le faire.
J'oserais dire qu'un employeur, s'il y a des accréditations aujourd'hui,
en vertu des lois et procédures qui existent, malgré ce droit
fondamental... Et je voulais vous le dire tantôt, non seulement la
première loi au Québec en 1944, mais la Charte des droits et
libertés de la personne et même le Canada Bill de
1981 parlent du droit fondamental des travailleurs de se grouper en
association; tout le monde peut se grouper en association. Mais ce droit est
bafoué.
Ce qui me fait dire, M. le Président, qu'actuellement, pour une
bonne partie du secteur privé du Québec, le taux de
syndicalisation est excessivement bas - il y en a qui disent 25%, il y en a qui
disent 20%; d'autres, plus pessimistes, disent 17% -le taux de syndicalisation
n'est pas fort. Je peux vous dire que... Je pourrais vous donner des preuves
détaillées pendant les neuf heures de notre débat, mais ce
n'est pas mon intention, M. le Président, il y aura d'autres occasions.
J'oserais dire qu'est accrédité aujourd'hui un syndicat dont
l'employeur, face à une demande d'accréditation, décide
qu'il respecte la loi, qu'il respecte le droit d'association et décide
de ne pas mettre les bâtons dans les roues et de consentir, même
s'il conteste certains éléments de la requête et de
l'unité de négociation, etc., que ses employés soient
syndiqués. Parce que je vais vous dire avec autant de conviction que
l'employeur qui décide qu'il n'y aura pas de syndicat dans sa boutique,
quel que soit le désir des travailleurs et des travailleuses chez lui
d'avoir un syndicat, va gagner à coup sûr. C'est selon la
décision de l'employeur si, oui ou non, il y aura un syndicat dans cette
botte, même si les travailleurs à 100% désirent se donner
un syndicat.
Il y un pattern très bien connu et très classique:
requête en accréditation par un syndicat, par le patron,
contestation de l'unité de négociations qui provoque des
délais, congédiement au besoin, soit de tous les employés
ou de la moitié de certaines personnes identifiées comme
personnes clés dans l'effort de recrutement syndical, menace de
fermeture ou fermeture pure et simple, formation de syndicats de boutique.
C'est la formule classique. Cela se déroule tous les jours comme un
vieux film qu'on a vu à maintes reprises. Il y a un manuel du parfait
casseur de syndicat qui existe, qui est disponible à tout le monde et
qui fonctionne à merveille, qui provoque de longs processus. Je vous
dirai même, devant des décisions favorables des enquêteurs,
des commissaires de travail, du Tribunal du travail, des évocations, des
requêtes de toutes sortes devant les tribunaux supérieurs, que,
finalement, il y a un refus de se conformer aux ordonnances, aux
décisions et même aux injonctions, qui sont difficiles à
obtenir pour un syndicat, carrément.
Je peux vous citer, dans mon propre comté, des cas où le
syndicat a tout gagné pendant trois ans: des congédiements ont
été gagnés, le syndicat de boutique a été
rejeté, le syndicat a été accrédité et il
n'y eut aucune décision patronale pour respecter toutes ces
décisions. Le syndicat va devant les tribunaux pour chercher des
injonctions; il les obtient, ce qui est quasiment un miracle. L'employeur ne
respecte pas les injonctions; il y a une condamnation, trois fois, pour outrage
au tribunal et des amendes pitoyables, dérisoires, malheureusement.
Encore aujourd'hui, il n'y a pas de syndicat, pas de convention collective, pas
de réintégration; le syndicat a déjà
dépensé 50 000 $ en frais juridiques et les travailleurs sont
complètement écoeurés. Ceux qui restent sont
complètement écoeurés de l'idée de ce syndicat. Ce
ne sont pas eux qui recevront avec sympathie un recruteur syndical qui se
présentera chez eux un jour.
Une personne de la centrale syndicale m'a dit hier soir que, dans mon
comté, depuis deux ans, il n'y a pas une accréditation syndicale
dans la région, au nord de Montréal, dans le secteur
privé. Zéro sur dix-sept requêtes d'une centrale et l'autre
centrale viendra me voir la semaine prochaine pour déplorer la
même chose dans son secteur. Donc, problème fondamental de respect
du droit d'association. Si on a un premier projet qui s'en vient très
bientôt, c'est pour aller au plus pressé, pour essayer de colmater
certains des problèmes du respect du droit d'association, du droit
fondamental d'association dans nos lois. Mais, c'est nécessaire aussi
d'aller plus loin, parce, dans les années soixante, au Québec, on
a choisi une voie unique de traitement de requêtes en
accréditation syndicale. On a choisi le système commissaires de
travail, Tribunal du travail. On se pensait bien fin et bien beau au
Québec dans les années soixante et on se pense encore ainsi, avec
raison, mais, dans ce domaine, on a pris un chemin tout seul. Ce chemin,
après treize ans, avec l'évolution du monde du travail, comme
toutes les autres, l'évolution sociale, économique, structurelle,
les industries et tout le reste, cette évolution fait en sorte que notre
système est joliment figé pendant que, dans d'autres provinces,
en Colombie britannique, en Nouvelle-Écosse, en Ontario et même
aux commissions fédérales, on a adopté une nouvelle
approche pour la reconnaissance du droit fondamental d'association qui est ce
qu'on appelle un "board" moderne, pour le distinguer des anciennes commissions
de relations du travail, avec un nouveau fonctionnement basé sur les
relations du travail, une fonction de médiation et une fonction
d'ordonnance, une fonction de médiation avec pouvoir d'ordonnance, ce
qui fait en sorte que, en Colombie britannique et en Ontario, les
accréditations sortent beaucoup plus rapidement. (12 heures)
II y a aussi beaucoup moins de congédiements pour
activités syndicales qu'au Québec. Pourquoi? Parce que, avec un
"board" moderne, avec un fonctionnement
rapide et ce type d'institution qui a été soumis avec
succès à l'épreuve de la Cour suprême et des
tribunaux supérieurs, on trouve le moyen d'ordonner des
réintégrations très rapidement, quand il y a des
congédiements, de donner des accréditations beaucoup plus
rapidement qu'au Québec, avec le résultat aussi que ce n'est pas
payant pour les employeurs qui veulent casser le syndicat dans ces autres
provinces, dans ces autres juridictions. Ce n'est pas payant de le faire. Au
Québec, c'est payant. On sait que, même si le travailleur
congédié gagne sa cause deux ans après, cela en valait la
peine, car, entre temps, même s'il a gagné, dans bien des cas, le
syndicat n'existe plus, parce que les employés qui ont fondé ce
syndicat n'existent plus.
Donc, j'ai bien hâte, M. le Président, que les deux partis
dans cette Chambre s'assoient pour étudier ce prochain projet de loi et
qu'il y ait le plus tôt possible un débat majeur et global sur
l'orientation de notre législation du travail. J'ai hâte qu'on
trouve de nouvelles solutions à la mode des années quatre-vingt
pour assurer que les travailleuses et les travailleurs du Québec qui
veulent se syndiquer puissent le faire rapidement et en toute justice. Comme je
l'ai dit au début, M. le Président, j'ai hâte de voir
quelle sorte de consensus on pourra bâtir entre les deux partis à
l'Assemblée nationale du Québec sur ces questions.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Laurier.
Discussion générale
M. Sirros: Merci, M. le Président. Je suis heureux de
constater, d'abord, qu'on est d'accord sur la lenteur du processus et aussi sur
le besoin d'avoir un débat public. C'est pour cette raison
précise que je disais tout à l'heure que cela aurait
été bien mieux de procéder en bloc, si vous voulez,
à cette réforme. En effet, même à travers les
exemples que donnait le député de Prévost, je pense qu'il
a fourni, en quelque sorte, les éléments de preuve du besoin de
faire ce débat avant de procéder à des changements dans un
secteur, les relations du travail, du Code du travail. Finalement, dans ce
domaine M. le Président, il s'agit beaucoup des mentalités qu'ont
les gens. On ne légifère pas sur des mentalités. On peut
légiférer pour clarifier des choses, préciser des choses,
mais le problème de fond, dans le domaine des relations du travail,
c'est un problème de mentalités et d'approche. C'est dans ce sens
que je disais qu'il vaut mieux faire le débat d'abord, de scruter
à fond ce qu'on veut et ce qu'on souhaite voir, ce que pensent les
différents intervenants de tout le domaine des relations du travail et
de procéder après aux révisions et aux correctifs qui
s'imposent, que ce soit au niveau de l'accès à la
syndicalisation, que ce soit au niveau du raccourcissement des délais,
etc. Mais il me semble qu'on fait l'inverse. On procède d'abord à
corriger quelque chose et on jugera le projet de loi à sa valeur
même. Quant au principe, je pense qu'il y a un consensus sur le principe
de la syndicalisation. Après, on va continuer, comme le disait le
ministre, à examiner la philosophie qui sous-tend les relations du
travail. Il me semble, M. le Président, qu'on aurait dû
normalement examiner, d'abord, la philosophie qui sous-tend ces relations et
apporter des corrections par la suite.
Quant à l'inquiétude ou à la hâte du
député de Prévost de voir l'Opposition s'afficher par
rapport à des questions bien précises sur ce débat, je lui
rappellerai simplement que, à moins qu'il n'y ait quelque chose qui ait
changé tout récemment et dont je ne me suis pas aperçu,
c'est toujours le gouvernement qui est là pour établir ces choix
que nous aurons à vivre comme société. C'est sûr
qu'on va donner nos réactions, nos positions et ce que l'on croit sur
cette question, mais il ne faudrait pas que le gouvernement essaie d'escamoter
le fait que lui-même n'a pas fait cette déclaration de foi ou de
principe simplement parce que l'Opposition ne l'a pas faite encore.
Financement des activités d'inspection de la
CSST
On va ajourner à 12 h 30. Il y a une question que j'ai
posée tout à l'heure au ministre dont, vraiment, la
réponse m'a laissé complètement insatisfait. J'aimerais
juste y revenir un peu, même si cela touche la CSST. C'était par
rapport aux crédits. Vous avez dit tout à l'heure qu'il y avait
eu une décision antérieure à la parution du livre des
crédits qui était de supprimer le financement des
activités d'inspection et que - je pense qu'on a reçu le livre
des crédits jeudi dernier - jusqu'à aujourd'hui cette
décision avait été révisée. J'avais
posé la question: Qu'est-ce qui a amené le gouvernement, d'une
part, à le supprimer et, deuxièmement, qu'est-ce qui l'a
amené à changer? La réponse était, pour ce qui est
de la révision, que, d'abord, il y a la loi qui dit qu'il faut les
financer et, deuxièmement, parce qu'on voulait les financer. Je pense
que je résume assez fidèlement les paroles du ministre. Je ferais
remarquer simplement que la loi était là même au moment
où vous avez pris la décision de supprimer le financement.
Finalement, la question exacte était: Qu'est-ce qui vous a amenés
à refinancer? Répondre "parce qu'on le voulait" n'est vraiment
pas une réponse.
M. Fréchette: M. le Président, il y a
peut-être lieu d'être un peu plus explicite sur ce qu'on
appelle la suppression du financement. Là-dessus, c'est peut-être
moi qui n'ai pas été assez clair; non seulement je n'ai pas
été assez clair, mais je ne l'ai pas signalé à
cette commission. La suppression dont on parle devait se faire de façon
graduelle, c'est-à-dire qu'à partir du montant global qui
était financé par le gouvernement, qui se situe à 18 000
000 $, la première décision qui avait été prise,
à la suite d'une consultation avec les autorités de la CSST,
c'était de procéder pour une première année
à diminuer le montant du financement d'une première tranche de 6
000 000 $, d'une deuxième tranche de 6 000 000 $ la deuxième
année et, la troisième année, d'une autre et
dernière tranche de 6 000 000 $, pour faire la somme globale de 18 000
000 $.
Le raisonnement qu'il y avait derrière tout cela, c'est que, le
fonds actuariel étant capitalisé de la façon qu'on le
sait, l'évaluation politique nous a amenés à ce
moment-là à la conclusion que l'inspection pouvait
peut-être se financer à partir du fonds actuariel
capitalisé. Par ailleurs, partant surtout du principe même qu'il y
a dans la loi, en vertu duquel ce sont les employeurs qui financent la
réparation, l'indexation, la prévention, l'administration en
général, la réévaluation nous a amenés
à la conclusion qu'il ne fallait pas, parce que le fonds actuariel
était au stade où il est et intéressant, pénaliser
l'organisme comme tel et l'obliger à prendre de l'argent provenant des
cotisations des employeurs pour financer l'inspection, le gouvernement ayant
décidé, au moment où il a fait adopter la loi 17, de
prendre sur lui et d'assumer lui-même les sommes nécessaires pour
l'inspection. C'est le motif ou un des motifs pour lesquels on est revenu au
statu quo ante, enfin, on est revenu à la situation qui existait avant
cette première décision dont on vient de parler.
M. Sirros: Vous vous êtes trompé, finalement. C'est
ce que je comprends.
M. Fréchette: Écoutez, on ne s'est pas
trompé. Une discussion davantage poussée...
M. Sirros: Vous avez pris une mauvaise décision.
M. Fréchette: ...nous a menés à la
conclusion qu'il ne fallait pas pénaliser les employeurs, quand il y a
deux ans le gouvernement avait très carrément et explicitement
pris la décision de financer lui-même l'inspection. Je ne vois pas
ce qu'il y a de mal à réévaluer une situation de cette
nature. Vous savez, si l'on s'encadrait continuellement et
régulièrement dans des décisions, sans les
réévaluer de temps en temps, on se retrouverait dans des
situations pénibles souvent.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Viau.
M. Cusano: M. le Président, cette révision dont
vous parlez, cela veut dire un chiffre de 18 000 000 $ dans les crédits
pour la CSST.
M. Fréchette: C'est le même montant que celui qui a
toujours été donné.
M. Cusano: Est-ce que vous avez révisé d'autres
programmes depuis l'impression du livre de crédits?
M. Fréchette: Non, M. le Président. M. Cusano:
Merci.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Laurier.
M. Sirros: Je voudrais seulement revenir un peu en
arrière, parce que cela me laisse un peu...
M. Fréchette: Écoutez...
M. Sirros: Si je comprends bien, auparavant, c'est le
gouvernement qui finançait les activités d'inspection, tel que
prévu par la loi. Il y a, à un moment donné, une
décision du gouvernement de ne plus financer, pour les raisons du fonds
actuariel qui est capitalisé, etc., les activités
d'inspection.
M. Fréchette: De la façon que je vous l'ai dit.
M. Sirros: Oui, sur une période de trois ans, de
réduire, même si, dans le livre qui est présenté, je
pense qu'il y a seulement 1 900 000 $ prévus pour la commission
proprement dite. Donc, c'est ce qui nous a amenés à dire que
c'était complètement coupé. Vous prenez cette
décision, vous préparez le livre des crédits, etc. Vous
arrivez ici et vous dites finalement: Non, on revient à ce qu'on avait
au tout début, c'est-à-dire qu'on va maintenir le financement.
C'est de là que je tire la conclusion: soit qu'il y ait eu une mauvaise
décision prise la première fois qui était de couper, soit
que vous vous êtes trompé à ce sujet. J'aimerais avoir un
peu de précisions sur cette question. Il y a quelque chose qui s'est
passé, en tout cas, qui...
M. Fréchette: Oui, je vais vous le dire et avec assez de
satisfaction, par ailleurs. Au cours de l'été 1982, vous vous
souvenez que le gouvernement a demandé à tous les
ministères de prendre les dispositions
nécessaires pour rationaliser l'état des finances
publiques. Un moyen pour y arriver, c'était de demander, effectivement,
à chacun des ministères de procéder à des coupures
-enfin, appelons cela comme on voudra - dans une proportion de 15%.
C'était au cours de l'été 1982, alors qu'existait
juridiquement et administrativement le ministère du Travail, de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Donc, au
ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, on a procédé à l'analyse
de l'ensemble de la situation financière. Comme on voulait
répondre au mandat qui était demandé, on a
procédé, effectivement, à la ventilation, au choix,
à l'intérieur des programmes, des différents chapitres ou
des différents endroits où il faudrait, effectivement, supprimer,
enfin, amoindrir des modes de financement ou diminuer des sommes d'argent.
Alors, toujours au ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et
de la Sécurité du revenu, après que le tour eut
été fait au chapitre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, il fallait voir si de moyens financiers
pouvaient être soustraits au ministère du Travail, division des
relations du travail. Et tout le monde est arrivé à la conclusion
qu'il n'y avait pas, au ministère du Travail, division des relations du
travail, d'endroit ou de direction où l'on pouvait couper quoi que ce
soit.
Comme la CSST, à l'époque, devait répondre de son
administration au ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, l'exercice a été poussé
plus loin. C'est un des endroits qu'on a identifiés comme étant
un de ceux à qui on pourrait demander le sacrifice, en quelque sorte, de
ne pas retirer totalement le montant prévu par l'inspection et de
procéder graduellement. Je vous signale que celui qui vous parle en
particulier n'a, en aucune espèce de façon, été
impliqué dans ce processus, non plus d'ailleurs que les gens du
ministère.
Quand, au mois de décembre dernier, plus
précisément le 17 décembre, j'ai été
assermenté comme ministre du Travail et qu'on m'a soumis cette
situation, j'ai fait effectivement des représentations pour qu'on essaie
de réévaluer la situation et que l'on renonce à la
possibilité de cheminer cette décision jusqu'à son
exécution. C'est à partir de cette demande, de cette
requête que j'ai formulée au Conseil des ministres et à la
suite de conversations et de discussions avec mon collègue de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, qui avait
été un de ceux qui avaient fait progresser la décision,
qu'on l'a effectivement réévaluée et qu'on en est venu
à la conclusion de revenir au statu quo ante. (12 h 15)
Évidemment, cela dépend de notre façon de percevoir
les choses, mais je ne vois rien de répréhensible ni, non plus,
de condamnable dans le fait de réévaluer une situation et de
reconsidérer une décision. Je pense que, si l'on s'imbriquait
dans une philosophie de cette nature, il y a plein de choses qu'on regretterait
à un moment donné. Ce n'est pas, me semble-t-il, un aveu ou une
admission de quelque faiblesse ou de quelque manque de prévision que ce
soit que de dire: Bon, peut-être bien qu'il faudrait envisager la
possibilité de rétablir le statu quo. C'est ainsi que le
processus s'est fait. Je ne me sens pas du tout mal à l'aise devant
cette décision. Bien au contraire, je suis relativement satisfait que la
situation ait été réévaluée et qu'on
revienne à ce qui existait auparavant comme contribution gouvernementale
à la CSST, particulièrement au chapitre de l'inspection.
Si le député de Laurier est en train de développer
une thèse pour me placer dans l'embarras en me disant que je me suis
trompé et que j'ai procédé à
réévaluer une situation, je lui dirai que, si quelqu'un
considère et admet qu'il s'est trompé et que la décision
qu'il a prise n'était peut-être pas la bonne, il me semble qu'il a
plus de mérite à la reconsidérer et à revenir au
statu quo ante que d'essayer littéralement de le crucifier sur la place
publique parce qu'il aura pris une telle décision.
M. Sirros: Au contraire! C'est pour cela que j'ai posé la
question tout à l'heure, M. le Président: Vous vous êtes
trompé? Le ministre m'a dit non et, maintenant, il est en train de me
dire: Oui, on le reconnaît. J'ai pu convaincre mes collègues,
finalement, que le statu quo était mieux que la décision qu'ils
avaient prise. On est donc revenu à cela parce que mes collègues
se sont trompés. Je voulais avoir des explications.
M. Fréchette: La Parti libéral s'est aussi
trompé dans le choix de son chef à un moment donné et
là, il reconsidère le statu quo.
M. Sirros: On peut commencer ce genre de débat. Ne vous
offusquez pas. Je suis tout à fait d'accord. Ce que je demandais,
c'étaient des explications et je les ai eues.
M. Fréchette: Je ne sais pas si elles sont satisfaisantes,
mais cela résume en gros.
M. Sirros: II faudra peut-être que je trouve que votre
réponse couvre le cheminement. Si j'ai des questions à poser sur
les raisons pour lesquelles on a décidé une première fois
de supprimer cela, il faudra que je les pose ailleurs, j'imagine. Dans ce
sens-là, la réponse me satisfait.
Travail partagé et travail à temps
partiel
Je voudrais, dans les dix minutes qui restent, couvrir quelques autres
questions d'ordre général et revenir cet après-midi sur la
CSST. Le premier ministre a parlé, lors de son message inaugural, du
travail partagé, du travail à temps partiel, pour permettre plus
d'emplois. J'avais du mal à saisir les éléments qui
étaient là-dedans et qui feraient en sorte que quelque chose de
positif résulterait de ces changements. Est-ce que le ministre pourrait
expliciter davantage les orientations que son ministère entend donner
à ce choix?
M. Fréchette: Je voudrais bien être agréable
au député de Laurier et répondre expressément
à sa question. J'espère qu'il ne me dira pas que je veux utiliser
des faux-fuyants en lui indiquant en première réaction qu'il
s'agit beaucoup plus d'un principe de main-d'oeuvre que d'un strict principe
qui rejoint les concepts de relations du travail. Par ailleurs, je n'ai pas
d'objection, quant à moi, à lui dire ma perception de cet
objectif. Il n'y a pas que le gouvernement qui est préoccupé par
ce genre d'exercice possible. Je pense que la Fédération des
travailleurs du Québec, au cours du dernier week-end, a tenu un colloque
important à l'intérieur duquel on a discuté, de la
possibilité d'introduire le travail partagé. On a
débordé au-delà de la philosophie du travail
partagé. On a même dit: Est-ce qu'il n'y aurait pas, dans
l'état actuel des choses, dans la conjoncture actuelle, la
possibilité de considérer, par exemple, la possibilité de
restreindre, sinon de supprimer totalement, le quantum des heures
supplémentaires que certains travailleurs peuvent faire à
l'intérieur de leur usine ou de leur entreprise?
Je ne voudrais pas poser en connaisseur parce que je n'ai pas
été impliqué dans le processus des négociations
comme tel mais, si mon souvenir est exact au cours de la dernière ronde
de négociations - je réfère, évidemment, aux
secteurs public et parapublic - à une des tables de négociations
- il me semble que c'était à la table de négociations de
la CEQ, M. Désilets pourrait très bien nous en parler - il me
semble que le principe du travail partagé a été
évoqué pour des fins de discussion et, deuxièmement, avec
l'objectif évident, de la part du gouvernement, d'essayer de faire
accepter le principe par les travailleurs de l'enseignement. Vous allez me dire
que c'est du ouï-dire, mais il semble que la discussion n'a pas
été très longue sur le sujet et qu'on ne s'est pas
aventuré beaucoup dans les échanges parce que la partie syndicale
y aurait, à toutes fins utiles, opposé une fin de non-recevoir
formelle. Il n'était pas question d'accepter le principe ni même
la discussion.
Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, comme le signale le
député de Laurier, de pousser plus avant l'exercice et de voir si
dans le concret une telle réalisation est possible? Je suis l'un de ceux
qui croient que oui. La FTQ, au cours du week-end, encore une fois, a
exploré cette possibilité en même temps que certaines
autres possibilités. Là, comme dans le cas de la cogestion dont
on parlait tout à l'heure, il me semble que dans beaucoup d'entreprises
privées, jusqu'à maintenant, travailleurs et patrons se sont
entendus pour accepter qu'il y ait effectivement du travail partagé.
Si le député de Laurier me demande quelle action le
gouvernement peut prendre à cet égard, je ne serais pas
disposé, du moins pour le moment, à répondre
spontanément et sans faire de distinction qu'il faille intervenir par
voie de législation, par exemple, pour imposer le travail
partagé. Encore là, il me semble y avoir un élément
fondamental de volontariat de la part des deux parties pour qu'on puisse
arriver à le concrétiser dans les faits. Mais, si on s'en tient
toujours au plan du principe strict et qu'on ajoute au principe les
expériences déjà vécues, il me semble que cela
pourrait nous conduire à des résultats intéressants qui
feraient en sorte qu'on pourrait gagner un peu moins dans certains milieux,
dans certains secteurs d'activités, mais au moins on pourrait donner du
travail à plus de travailleurs et de travailleuses qui souhaitent
travailler. Je réitère au député de Laurier que je
ne crois pas du tout avoir l'expertise nécessaire pour m'étendre
davantage compte tenu du fait, encore une fois, que cela me paraît
référer beaucoup plus, comme, d'ailleurs, la question du
licenciement collectif dont on a parlé aussi, à une politique
générale de main-d'oeuvre et de plein emploi qu'au cadre strict
d'une politique de relations du travail comme telle.
M. Sirros: Une dernière question. On a parlé de la
cogestion. Vous avez dit qu'on ne souhaitait pas ou qu'on n'envisageait pas
intervenir par voie de législation. Est-ce que le ministère a
fait des recherches, des études un peu plus approfondies sur la
question?
M. Fréchette: Alors, M. le Président, dans cette
revue qui s'appelle Le marché du travail au Québec, il y a un an,
me dit-on, il y a eu une publication effectivement qui a été
faite et qui relève le contenu ou le cadre d'une dizaine
d'expériences de cogestion qui ont été faites au
Québec; cette étude répondrait probablement à bon
nombre de questions que, légitimement, le député de
Laurier se pose. Je pourrais essayer de savoir quel est le numéro
précis. On peut l'avoir cet après-midi; on pourra, à ce
moment, vous en remettre copie et cela vous
permettra de voir ce qu'a réalisé le ministère du
Travail à cet égard.
M. Sirros: Si je comprends bien, à l'heure actuelle, des
investigations dans ce sens ne sont pas en cours.
M. Fréchette: Alors, M. le Président, on m'informe
que c'est effectivement l'objectif du service de la recherche au
ministère que de continuer à pousser l'expertise à cet
égard. On me signale aussi une distinction importante et je veux la
transmettre au député de Laurier. C'est que les
expériences dont on parle, qui ont été menées et
que le ministère a effectivement expertisées en termes de
recherche, l'ont été dans des entreprises qui se retrouvaient en
difficultés, difficultés de toute espèce, autant
financières que peut-être bien de relations du travail. L'objectif
est de continuer à voir les situations qui prévalent dans des
entreprises en difficultés, mais aussi de pousser la recherche dans des
entreprises qui sont en bonne santé pour voir ce que, en bout de piste,
cela peut donner comme résultat. On me dit que la recherche
là-dessus est à se faire et à se compléter.
M. Sirros: Lorsqu'on parle de recherche ou de choses comme cela,
M. le Président -juste avant de terminer - est-ce que le
ministère, depuis le mois de décembre, a suivi l'exemple du
ministère de la Main-d'Oeuvre et a mis sur pied un mode
d'évaluation des programmes?
M. Fréchette: On verra.
Le Président (M. Vallières): II est 12 h 30. La
commission ajourne ses travaux sine die.
(Suspension de la séance à 12 h 30)
(Reprise de la séance à 15 h 41)
Le Président (M. Vailières): La commission
élue permanente du travail reprend ses travaux. Nous avions convenu,
lorsque nous nous sommes séparés cet avant-midi, de commencer
l'étude du programme 2 où il est particulièrement question
de la Commission de la santé et de la sécurité du
travail.
M. le ministre.
M. Fréchette: Est-ce que je pourrais simplement vous
demander - c'est une demande de directive, d'ordre très pratique -compte
tenu de la discussion de ce matin, si on peut considérer que le
programme 1 est adopté? Ceci nous permettrait de libérer certains
fonctionnaires qui étaient ici ce matin. Si on me dit qu'on
préfère attendre à la fin de l'exercice, je n'ai pas
d'objection non plus.
Le Président (M. Vailières): Les
députés de Laurier et de Portneuf ont à s'exprimer
là-dessus.
M. Sirros: M. le Président, on avait convenu ce matin
qu'on avait fait un genre de discussion générale, mais on a
assuré le ministre qu'on reviendrait à la fin pour adopter les
éléments. On y reviendra.
Le Président (M. Vailières): M. le
député de Portneuf.
Ordre des travaux
M. Pagé: J'apprécie que le ministre soulève
ce point cet après-midi. Je comprends que la commission a abordé,
dans un premier temps, une déclaration du ministre, une
déclaration du porte-parole de l'Opposition et que des questions et
commentaires ont été formulés de part et d'autre, de
façon très générale. Dois-je comprendre que nous
pourrons adopter le programme 1 lorsque le programme 2 aura été
étudié? J'ai cru comprendre que le ministre - je m'excuse d'avoir
été absent ce matin, c'était hors de mon contrôle -
s'était montré disposé à ce qu'on puisse lui poser
des questions et en poser aux représentants de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail, cet
après-midi.
Dans ce cadre-là, M. le Président, pourriez-vous indiquer,
vous ou encore le ministre, aux membres de la commission, le nombre d'heures
que vous entendez mettre à notre disposition, en sus, évidemment,
des deux heures qu'il reste cet après-midi et des trois heures
prévues pour demain? Quel est le calendrier des travaux que vous seriez
disposé à nous suggérer et à nous proposer pour que
nous puissions avoir l'assurance que les députés qui ont des
questions importantes à poser au programme 1 et aux suivants, mais
particulièrement au programme 2, puissent avoir le temps qu'il faut pour
pouvoir les poser?
Le Président (M. Vailières): M. le ministre.
M. Fréchette: J'avais compris qu'une entente était
intervenue quant à l'enveloppe globale du temps consacré à
l'étude des crédits du ministère. Par ailleurs, sous
réserve de la véracité des informations que j'ai obtenues,
il n'y avait pas eu d'entente spécifique quant au temps consacré
à tel programme par rapport à l'autre, sauf que ce matin, le
député de Laurier, enfin les membres de la commission, avec votre
assentiment, M. le Président, ont convenu de consacrer l'avant-midi au
programme 1 dans
le cadre d'une discussion très générale, convenant
aussi - et là-dessus, on me corrigera si je ne suis pas exact dans mon
appréciation - qu'on consacrerait le temps de cet après-midi au
programme 2 touchant la Commission de la santé et de la
sécurité du travail. Je pense avoir compris que c'est comme cela
qu'on s'était entendu. Si ce n'est pas cela, je suis tout à fait
disposé à réévaluer la situation.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Laurier.
M. Sirros: Dans la matinée, on a fait un genre de
discussion générale et j'ai dit au ministre: Cet
après-midi, on pourrait prendre la CSST, étant donné qu'il
y a deux collègues qui veulent intervenir spécifiquement sur cela
et, après, probablement demain, si le temps le permet - demain
probablement, de toute façon - on pourrait reprendre en détail
les crédits de chacun des programmes pour que ce soit adopté.
Mais ce n'était pas mon intention d'adopter dès aujourd'hui ou
dès ce matin le programme 1 ou un autre programme.
M. Fréchette: Cela me va très bien, il n'y a pas
d'embêtement à cet égard. Il y a une seule autre chose
d'ordre pratique dont je voudrais m'assurer, tout en étant bien
conscient du fait qu'il n'y a rien de péremptoire, là non plus.
Est-ce que je dois comprendre que les fonctionnaires du ministère du
Travail, de la Direction générale du travail, pourraient cet
après-midi être libérés jusqu'à la reprise
des travaux demain? Est-ce que là-dessus on peut s'entendre?
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: II n'y a aucune objection, aucun problème,
quant à nous, sachant pertinemment le caractère utile de leur
présence au ministère cet après-midi, et probablement
demain.
J'ai une autre question. M. le ministre, deux heures treize minutes pour
pouvoir, de façon appréciable, poser toutes les questions qu'on a
à poser à l'honorable juge Sauvé, vous allez comprendre
que c'est très peu de temps. Je comprends, par contre, que les deux
leaders se sont rencontrés, ont établi un plan de travail qui
fixe le nombre d'heures allouées pour chacun des ministères.
C'est, d'ailleurs, dans cette perspective, avec ces éléments
à l'esprit, que je vous ai demandé la semaine dernière
à quel moment vous entendiez convoquer une commission parlementaire pour
qu'on puisse avoir le plaisir de recevoir les gens de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail pendant deux, trois,
quatre, cinq ou six jours s'il le faut. Comment allez-vous régler cette
équivoque? Est-ce que vous nous proposez seulement deux heures douze
minutes pour poser des questions? Nous croyons sincèrement que nos
questions vont largement dépasser les deux heures douze minutes.
M. Fréchette: M. le Président, j'ai constaté
depuis une couple de semaines l'intérêt fort particulier que
portent le député de Portneuf et le député de Viau
à la Commission de la santé et de la sécurité du
travail.
M. Pagé: Pas depuis quelques semaines. Avant même
que vous soyez député, on s'en occupait.
M. Fréchette: Particulièrement depuis quelques
semaines. Tout cela pour arriver à vous dire que je n'ai pas
d'objection, quant à moi, que, jusqu'à 18 heures, nous
consacrions tout le temps à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail. Si, comme le dit le député de
Portneuf, l'exercice n'a pas été suffisamment long, suffisamment
complet pour lui permettre, dit-il, de poser toutes ses questions aux
représentants de la CSST, plus particulièrement au
président-directeur général, je n'ai pas d'objection
à ce que nous débordions sur le temps de demain, à une
condition, cependant, qui va de soi: c'est qu'on ne déborde certainement
pas des neuf heures - je ne sais pas comment dire cela pour éviter des
velours - globales qui nous sont consacrées. Dans ce sens, si, demain,
nous devions faire encore une couple d'heures sur la Commission de la
santé et de la sécurité du travail, il resterait
très peu de temps pour procéder à l'adoption du reste des
programmes.
Je n'ai pas d'objection à ce que l'exercice soit aussi complet
que possible, qu'on prenne tout le temps que l'on voudra, à la
condition, encore une fois, que l'on convienne tout le monde qu'on doit entrer
à l'intérieur des neuf heures pour compléter le mandat qui
nous a été confié.
M. Pagé: C'est donc dire que vous nous laissez le choix
entre avancer dans les questions que nous avons à poser aux
représentants de la CSST et négliger ainsi les questions que moi
et d'autres de mes collègues aurions à poser sur les autres
programmes, sur les autres éléments de votre ministère.
C'est le choix que vous nous offrez. C'est, d'ailleurs, dans cet esprit que
nous vous avons demandé à vous, la semaine dernière, en
quelque sorte, en vous donnant un préavis, une commission. On voulait
vous indiquer par là que les neuf heures qui sont normalement
allouées aux crédits, ne suffiraient pas. On sait que les
parlementaires profitent de cette période pour faire une revue
générale des activités
du ministère pour savoir où il en est dans ses objectifs,
etc. On savait pertinemment que le moyen le plus efficace de pouvoir à
la fois poser des questions justes et recevoir les réponses
adéquates, appropriées, ce n'était pas le forum où
nous sommes actuellement; c'étaient des commissions parlementaires
spéciales. C'est ce qu'on vous réitère.
On est prêt à faire le "deal" suivant avec vous, si "deal"
il y a. On peut passer deux heures à questionner le ministre du Travail,
le président de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, mais n'allez pas croire qu'on va se
satisfaire d'être ainsi bousculés et de recevoir des
énoncés comme ceux-là: C'est à prendre ou à
laisser: vous prenez le temps que vous voulez et, après, c'est fini. Je
ne crois pas, M. le ministre, que ce soit efficace comme attitude d'un membre
du gouvernement de nous soumettre cela ainsi.
M. Fréchette: S'il y a des reproches qui doivent
être adressés à quelqu'un, je pense que le
député de Portneuf et celui qui vous parle devront prendre les
dispositions nécessaires pour adresser ces reproches à leurs
leaders respectifs. Ce sont eux qui, par la voie normale de la
négociation et en vertu des us et coutumes qui existent en semblable
matière, ont négocié une période de neuf heures
pour l'ensemble des crédits du ministère. Cela veut donc dire que
tous les deux en sont venus à la conclusion que cette période
était suffisamment longue pour qu'on puisse faire le tour des cinq
programmes soumis à notre appréciation pour étude et
adoption.
Le député de Portneuf - et ce n'est pas la première
fois qu'il formule la demande, dans un forum ou dans l'autre -fait
référence à une commission parlementaire élargie.
Quant à moi, si les motifs pour lesquels une semblable commission
pourrait être convoquée sont ceux qu'il a évoqués
depuis quelques semaines, je lui dirai purement et simplement qu'à aucun
égard et pour aucune espèce de considération je ne vois,
jusqu'à maintenant, en tout cas, dans les questions qui ont
été soulevées, dans les commentaires qui ont
été faits et dans les appréciations qui ont
été faites par différents intervenants de motif qui ferait
qu'on doive convoquer ou mettre sur pied cette commission parlementaire
élargie.
D'ailleurs, si l'on se fie, par exemple, à l'évaluation
qu'en a faite un observateur neutre, qui n'est impliqué ni d'un
côté, ni de l'autre, ni membre du Parlement, ni membre de la
Commission de la santé et de la sécurité elle-même,
qui est M. Francoeur, du Devoir - je pense qu'on va convenir que non seulement
il est un observateur neutre, mais qu'il est, en même temps, un
spécialiste de ce genre de questions - vendredi dernier, M. Francoeur a
très bien circonscrit l'ensemble de la discussion pour dire que
jusqu'à maintenant, dans son évaluation à lui, il ne
voyait pas pourquoi il y aurait, à ce stade-ci, en tout cas, de
commission parlementaire élargie pour discuter de l'ensemble de
l'administration de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail.
À moins que l'exercice qu'on s'apprête à entamer ne
démontre très clairement qu'il y a effectivement lieu
d'élargir le processus, d'élargir la discussion sur une
période plus longue, plus approfondie, à moins que cet exercice,
qu'on s'apprête à entamer, n'en démontre la
nécessité, je ne vois pas pourquoi nous pourrions agréer
cette demande de l'Opposition.
Quand je parlais des observations de quelqu'un qui, de
l'extérieur, analyse ce qui se passe actuellement, je ne voulais que
retenir un passage de l'éditorial principal du Devoir du 2 mai dernier,
sous la plume de M. Jean Francoeur qui disait: "II est plus vraisemblable de
penser que la Commission de santé et de sécurité au
travail, comme tout gros appareil de protection sociale
(assurance-chômage, aide sociale, soins de santé) affronte des
problèmes de contrôle d'abus toujours possibles. Que la commission
s'inquiète des certificats de complaisance, des traitements inutiles ou
indûment prolongés, il n'y a pas à jeter les hauts cris.
C'est le contraire qui devrait indigner puisque le premier perdant serait alors
le bénéficiaire de bonne foi".
Quand on est membre du Parlement, que l'on soit de l'Opposition ou du
parti ministériel, il est clair qu'on ne peut pas avoir la même
objectivité qu'un observateur de l'extérieur. M. Francoeur a fait
son analyse à partir des différentes questions qui ont
été soumises jusqu'à maintenant à
l'Assemblée nationale et sans doute aussi sur l'évaluation qui a
été autrement faite par d'autres personnes. Je
réitère à mon collègue de Portneuf que,
jusqu'à maintenant, je ne vois pas qu'il y ait de motifs suffisamment
étoffés ou graves, si on me permet l'expression, pour
répondre affirmativement à la requête qui nous est
présentée.
M. Pagé: Et ce malgré que votre
prédécesseur, M. Marois, ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre, se soit engagé, en juin 1982, à ce qu'une
commission se tienne. Je vous réfère aux questions qui ont
été posées en mai et en juin. Le ministre du Travail
avait, dans un premier temps, proposé une rencontre avec la Commission
de la santé et de la sécurité du travail. Je cite le
ministre du Travail de l'époque, M. Marois: "Je serais prêt
à proposer ceci: qu'une équipe de parlementaires choisis par
l'Opposition, avec une équipe de parlementaires de chez nous - en
indiquant
le gouvernement - organise une rencontre avec le
président-directeur général et les vice-présidents
et qu'on puisse, ensemble - et qu'on prenne une journée s'il le faut -
lors d'une rencontre, examiner tous les dossiers et toutes les questions,
s'informer mutuellement et obtenir des réponses pertinentes."
Par la suite, des questions étaient posées en Chambre
demandant au ministre non pas ce genre de rencontres à la commission ou
ailleurs, mais dans un cadre autre que notre système parlementaire. Le
ministre répondait, à une question posée le 1er juin 1982
- vous verrez, par le vocabulaire employé, que c'est bien de M. Marois -
"Si tant est que c'est ce que l'Opposition veut, elle aura l'occasion d'avoir
cette commission parlementaire". Comme cela, vous ne voulez pas donner suite
à cela? Merci!
M. Fréchette: Mon prédécesseur a pu prendre
des positions, c'était son droit strict. Je vous signale simplement que
si, par exemple, cette réunion d'information à laquelle M. Marois
lui-même faisait référence est le genre d'exercice auquel
l'Opposition souhaiterait pouvoir participer, nous pourrions dès
maintenant, si c'était votre choix, convenir d'une date qui permettrait
effectivement la rencontre entre les parlementaires intéressés et
le président-directeur général de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail.
Quant au reste, surtout quand on voit ce qui se passe depuis cinq ou six
semaines au salon rouge de ce Parlement, je vous réitère que je
ne vois pas, au moment où on se parle, de motifs suffisamment
étoffés pour que nous engagions le processus d'une commission
parlementaire. Le député de Portneuf a même parlé
d'une commission d'enquête. À moins qu'il n'ait été
mal cité par les journalistes qui ont écrit les propos qu'il leur
avait communiqués, il a même parlé d'une commission
d'enquête. Du moins, c'est ce qu'un journal a titré, à un
moment donné. Si vous voulez une commission d'enquête qui
prendrait l'allure d'un tribunal d'inquisition pour essayer d'identifier des
coupables de quelque geste ou acte que ce soit, à partir des
expériences qu'on est en train de vivre, je vous réitère
qu'il n'y a aucun motif valable, actuellement, en tout cas, pour qu'on
accède è une demande de cette nature.
M. Pagé: Dernière question très technique,
M. le Président. Nous allons recevoir cet après-midi M. le juge
Sauvé, ses adjoints et ses adjointes. Lorsque celui-ci parlera - je
présume qu'il aura lui-même à répondre aux questions
- est-ce qu'il le fera en son nom ou si on fera l'inscription de ses propos au
journal des Débats comme étant ceux du ministre, M.
Fréchette? (16 heures)
La commission, entre autres, la semaine dernière, mardi, si ma
mémoire est fidèle, a contribué de façon assez
utile et assez importante à la rédaction du texte que le ministre
du Travail a déposé ici à l'Assemblée. Il
apparaissait clairement que ce texte, à sa face même, avait
été préparé par la commission. Ce que je veux
demander cet après-midi, c'est si M. le juge Sauvé va
répondre lui-même et si ses paroles lui seront imputées ou
si elles seront imputées au ministre.
Le Président (M. Vallières): M. le ministre, avant
que vous interveniez...
M. Fréchette: Je comprends que la question vous est
posée.
Le Président (M. Vallières):
Effectivement, compte tenu que notre commission ne reçoit pas
d'invités comme tels à témoigner, les propos qui sont
tenus en commission par des personnes qui assistent le ministre le sont par
délégation et, au journal des Débats, ce qui
apparaît, effectivement, c'est le nom du ministre et les citations qui
suivent deviennent les siennes. Là-dessus, M. le ministre m'avait
demandé la parole; ensuite, le député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: C'est parce qu'il y a un précédent,
M. le Président, qui va à l'encontre de ce que vous venez de
dire. Il vient à peine d'arriver. Lors de la commission parlementaire
sur l'éducation qui a siégé pendant le conflit, deux
sous-ministres sont venus témoigner en leur nom devant une commission
parlementaire, télévisée de surcroît. Alors, on a
déjà un précédent et ce précédent a
été expliqué aux parlementaires et à l'ensemble de
la population comme étant une suite logique d'un certain nombre de
réformes qui s'en viennent ou qui sont commencées. Je dois vous
dire que je trouve un peu absurde cette procédure qui fait que, quand on
lit quelque chose dans le journal des Débats sous le nom du ministre, on
peut retrouver la phrase qui dit: J'en ai parlé au ministre. Or, c'est
le ministre qui parle. Pour quelqu'un qui lit le journal des Débats,
c'est un peu ridicule quand on sait que ce n'est pas cela qui se passe en
réalité. Je me demande pourquoi on n'entre pas de plain-pied dans
le précédent qui a déjà été
créé, de sorte que, lorsqu'il parle, ce soit M. Sauvé qui
parle. Tout le monde ici, tous ceux qui sont présents le savent.
Pourquoi les gens qui lisent le journal des Débats ne le sauraient-ils
pas?
Le Président (M. Vallières): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, le
député de Sainte-Marie fait référence au
précédent qui a été créé à la
commission parlementaire qui a été formée dans le plus
fort du conflit des relations de travail dans les secteurs public et
parapublic. Il faut bien tenir compte du mandat très précis,
très explicite qui avait été confié à cette
commission parlementaire. L'un des mandats était
précisément d'entendre les négociateurs principaux de
toutes les parties. Les négociateurs du gouvernement, dans les
circonstances que l'on sait, étant les deux sous-ministres qui ont
témoigné pour et en leur propre nom, la nature même de la
commission imposait qu'il en soit ainsi.
Maintenant, M. le Président, vous avez déjà, me
semble-t-il, rendu une décision à partir de ce qui a toujours
existé à l'occasion de l'étude des crédits de
chacun des ministères et je m'en tiens à votre décision.
Je tiens pour acquis que ce que le président de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail déclarera ici,
les réponses qu'il donnera aux questions, de même que les autres
officiers de la commission, comme cela a toujours été le cas,
seront inscrites au nom du ministre qui est responsable de l'organisme dont on
étudie les crédits.
Le Président (M. Vallières): Est-ce qu'il y aurait
d'autres interventions sur la question de règlement? À moins
qu'on n'ait des éléments nouveaux, je me limiterai à
l'application du règlement qui prévoit que, lors de
l'étude des crédits, effectivement, les gens qui ont
été appelés, jusqu'à ce jour du moins, parlaient au
nom du ministre. Je pense que la commission à laquelle se reportait le
député de Sainte-Marie tantôt n'était pas une
commission qui étudiait les crédits du ministère de
l'Éducation. C'est quand même intéressant de voir les
points de vue qui sont partagés là-dessus, et je pense que, dans
la réforme qui pointe, il y aura peut-être des choses à
améliorer prochainement de ce côté.
M. le député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, je vais me permettre, si
vous le voulez bien, un dernier commentaire qui est beaucoup plus sur
l'intervention des représentants de la Commission de la santé et
de la sécurité du travail au moment de l'étude des
crédits, pour essayer, encore une fois, de démontrer
jusqu'à quel point c'est un exercice qui est un peu ridicule au niveau
parlementaire et qui limite les parlementaires dans l'analyse qu'ils font.
L'étude des crédits d'un ministère, c'est non seulement
l'étude de son budget, de ses prévisions budgétaires, mais
c'est aussi l'étude de ses orientations. Or, il n'y a pas que le
ministère. Il y a aussi des organismes gouvernementaux. Et on sait que
nos lois, de plus en plus, ont créé ce type d'organismes.
Aujourd'hui, il y a la Commission de la santé et de la
sécurité du travail; il y a le Conseil des services essentiels et
il y a d'autres organismes autonomes, créés par une loi, qui ont
un budget et qui ont aussi une autonomie par rapport au ministère du
Travail comme tel.
Je dis que, de plus en plus, les parlementaires sont enferrés
dans une procédure qui ne répond plus aux exigences
d'aujourd'hui. Si je conteste le budget du ministère du Travail, je
conteste par le fait même et en même temps ses politiques. Comment
puis-je faire de même - avec le temps qui m'est imparti - pour la
Commission de la santé et de la sécurité du travail?
Comment puis-je poser des questions non seulement sur le budget, mais sur la
façon d'administrer cette commission, sur les grandes orientations de
l'avenir? Comment puis-je savoir aussi les problèmes particuliers qu'a
rencontrés la Commission de la santé et de la
sécurité du travail dans l'application de sa loi? Comment puis-je
demander au président de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail les amendements qu'il verrait dans la Loi sur
la santé et la sécurité du travail? Ce sont toutes des
questions qu'il faudrait poser. Or, à l'étude des crédits,
ce n'est pas nécessairement le moment de les poser. Je pense que nous
permettre, à nous, parlementaires, de ne poser des questions qu'à
la période de l'étude des crédits, c'est nous limiter non
seulement par rapport à l'organisme, mais aussi par rapport aux lois que
cet organisme est appelé à mettre en application. Cela nous
empêche, par le fait même, de bonifier ces lois et de les
améliorer avec les années. C'était un commentaire
général, M. le Président.
Le Président (M. Vallières): Merci.
M. Bisaillon: Mais j'espère que le ministre en a tenu
compte et qu'il sera un peu plus large. Chaque fois qu'on parle de commission
parlementaire pour rencontrer des organismes, les ministres se sentent
attaqués. C'est comme si, chaque fois qu'il y aura une commission
parlementaire avec un organisme, c'est parce qu'il y a un scandale à
l'horizon ou quelque chose de louche qu'il faut creuser. Je pense que c'est une
mauvaise perception, M. le ministre, que vous continuez à laisser aux
gens. Ce n'est pas nécessairement parce qu'il y a des scandales qu'il
faut qu'on jase avec des organismes. C'est peut-être, tout simplement,
parce qu'on veut améliorer le fonctionnement et améliorer la loi
que doivent administrer ces organismes. Continuer à prétendre que
cela prend absolument un scandale fera que, chaque fois qu'un organisme se
présentera devant une commission, on dira qu'il y avait
anguille sous roche. On encourage, par notre attitude, ce genre de
commentaires de la part de la population.
Le Président (M. Vallières): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je ne sais pas si
vous me permettez de réagir très rapidement à ce que le
député de Sainte-Marie a appelé lui-même une
observation ou un commentaire. S'il est en train d'essayer de me convaincre que
notre procédure parlementaire est ainsi faite qu'on n'atteint pas les
objectifs qu'on souhaiterait atteindre dans bien des domaines, il n'a pas
besoin de plaider longtemps pour me convaincre de cela. Il me semble que,
effectivement, la nouvelle orientation que semble vouloir prendre l'ensemble de
la réglementation va précisément dans le sens qu'il le
souhaite. Quand on parle de ce grand terme qui s'appelle l'imputabilité,
c'est précisément vers l'orientation dont parle le
député de Sainte-Marie qu'on est en train de se diriger. Et,
encore une fois, sur le plan de la philosophie de l'argumentation qu'il vient
de développer, je suis tout à fait d'accord avec lui, sauf que
là on a des règles qui actuellement sont ce qu'elles sont et qui
ne permettent pas d'engager le processus dans le sens qu'il le souhaite. Je
prends acte de ses observations.
M. Bisaillon: La théorie des petits pas. Vous pourriez
faire un petit pas.
Le Président (M. Vallières): Nous passons
maintenant à l'étude du programme 2 traitant de l'aide
financière à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail.
La parole est au député de Portneuf.
Aide financière à la
Commission de la santé et
de la sécurité du travail
M. Pagé: M. le ministre pourrait profiter de la visite du
juge Sauvé et de ses adjoints pour nous les présenter.
M. Fréchette: M. le Président, le
député de Portneuf est d'une perspicacité qui
déborde toutes les limites de ce qu'on peut prévoir.
M. Bisaillon: Constamment?
M. Fréchette: Je ne sais pas s'il allait s'imaginer que,
effectivement, j'allais aborder le processus de l'étude du programme 2
sans procéder à la présentation des gens de la CSST qui
sont ici pour répondre à ses nombreuses questions.
La personne qui est immédiatement à ma droite n'a sans
doute pas besoin de présentation: M. le juge Robert Sauvé...
M. Polak: Au moins cette année, il est venu.
M. Fréchette: ...qui est le président-directeur
général de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail. Immédiatement à la droite du
président, il y a M. Lionel Bernier, vice-président à la
réparation à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail et M. Paul-Émile Boucher, le directeur
des services financiers à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail. Voilà les deux personnes qui
accompagnent le président-directeur général et qui
pourront très certainement, l'une ou l'autre des trois, répondre
aux questions que le député de Portneuf ou les autres membres de
la commission pourraient vouloir leur poser.
M. le Président, je ferai des remarques préliminaires,
mais très courtes, parce que je sais que l'on veut surtout consacrer le
temps qui nous est alloué à un échange par voie de
questions et de réponses. Je rappellerai simplement et strictement les
objectifs fondamentaux qui ont été visés par le
législateur lorsqu'il a adopté cette loi 17.
Essentiellement, l'objectif de la loi 17 et l'objectif de l'organisme
qui est né de cette loi 17 est de s'assurer, par la voie d'un organisme
paritaire, de maintenir à la fois la santé, la
sécurité et l'intégrité physique du travailleur et
de la travailleuse. On va facilement comprendre que, lorsque le processus a
été mis en branle, lorsque le processus s'est engagé, la
priorité - c'était normal, me semble-t-il - a été
accordée à la réparation des lésions
professionnelles. Cela allait de soi, compte tenu du processus qu'avait
élaboré, qu'avait utilisé la Commission des accidents du
travail depuis son existence. Là-dessus, encore une fois, toutes les
possibilités sont là pour connaître les politiques qui
seront élaborées. Maintenant, la Commission de la santé et
de la sécurité du travail, en ne négligeant pas, bien
sûr, la réparation, va mettre l'accent sur la prévention
des accidents de toute espèce qui ont comme origine des accidents de
travail ou des maladies industrielles.
Je rappellerai également essentiellement ce que tout le monde
sait. Le financement de cet organisme, à part le chapitre de
l'inspection, s'opère à partir des cotisations que les employeurs
paient sur leur masse salariale. Ce taux de cotisations, qui est imposé
aux employeurs en vertu de la loi, tient compte, dans chaque secteur, des
dangers ou des expériences passées dans ce même secteur de
travail. Il m'apparaît important de rappeler - ce que j'ai fait ce matin,
d'ailleurs, mais je pense qu'il faut y revenir - que la Commission de la
santé et de la sécurité du travail est dirigée par
un
conseil d'administration composé de quinze membres de plein
droit, dont, bien sûr, un président-directeur
général, sept membres provenant du milieu syndical, sept membres
provenant du milieu patronal et un observateur du ministère des Affaires
sociales. (16 h 15)
Donc, quand l'on réfère à la Commission de la
santé et de la sécurité du travail, il
m'apparaîtrait tout à fait opportun que l'on réfère
à l'organisme dans son entité et que l'on retienne très
nettement qu'il est dirigé par ce conseil d'administration
composé paritairement et dirigé par un président-directeur
général. Les membres du conseil d'administration, à part
le président-directeur général, sont nommés
à partir de suggestions faites autant par les milieux patronaux que par
les milieux syndicaux. Encore une fois, cela m'apparaissait important de faire
cette mise au point parce qu'il semble que dans certains milieux,
jusqu'à maintenant, on a une espèce de tendance à oublier
cette réalité juridique et factuelle que l'on retrouve à
la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Il
ne faudrait pas non plus oublier que ce conseil d'administration est
responsable de la gestion des affaires de la commission, le législateur
a voulu qu'il en soit ainsi. Il a accordé à la Commission de la
santé et de la sécurité du travail, donc, à son
conseil d'administration, toute la juridiction, toute l'autonomie
nécessaire pour gérer l'organisme en question. D'ailleurs, quand
on fait référence aux dispositions de la loi, on y retrouve
très clairement que le ministre du Travail, dans ce cas-ci, est
responsable de l'application de la loi. Le ministre doit s'assurer que la loi
est appliquée.
Le ministre, me semble-t-il, toujours à partir des prescriptions
de la loi, n'a aucune espèce de juridiction pour s'ingérer dans
l'administration de l'organisme tant et aussi longtemps que la loi sera ce
qu'elle est actuellement. Il faut aussi retenir, je l'ai souligné il y a
un instant, que le budget global de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, à part le budget prévu pour
l'inspection, se bâtit autour des cotisations que fournissent les
employeurs. Ce ne sont donc pas, à proprement parler, au sens normal du
terme, au sens où on l'entend habituellement, ce qu'on est convenu
d'appeler des fonds publics comme tels, c'est-à-dire des fonds qui
proviennent de la perception de taxes et qui ensuite sont
transférés à un organisme. Cela n'est pas une raison,
évidemment, pour ne pas voir de près ce qui s'y passe. Ce n'est
pas une raison non plus pour obtenir des renseignements sur ce qui s'y passe.
Je signale, en insistant, que c'est là la situation, encore une fois,
juridique et de fait qui existe et devant laquelle on est.
Je suis l'un de ceux qui espèrent que l'étude des
crédits nous permettra, permettra à tous les membres de la
commission de poser les questions qu'ils veulent poser au
président-directeur général, à ceux qui
l'accompagnent pour éclaircir un certain nombre de situations, si tant
est qu'elles doivent être éclaircies. Mais, quant à la
tenue de cette commission d'enquête, disait le député de
Portneuf, à moins qu'à la fin de notre exercice, il ne se fasse
des révélations absolument extraordinaires et qu'on ne
soupçonne pas au moment où on se parle, je réitère
que je ne vois pas de véritable motif pour lequel un semblable exercice
devrait être tenu. Je réitère aussi, par ailleurs, que, si
c'était le voeu des membres de cette commission, et cela pourrait
rejoindre un peu ce que suggérait, ce que souhaitait le
député de Sainte-Marie tout à l'heure, si les membres de
cette commission ou si d'autres parlementaires siégeant à
l'Assemblée nationale avaient le goût de prendre une
journée complète pour rencontrer ou bien le
président-directeur général ou alors d'autres officiers de
la Commission de la santé et de la sécurité du travail
pour faire le tour de l'ensemble de ce qui s'y passe, à cet
égard, nous pourrions dès maintenant, à la convenance de
tout le monde, fixer une date pour que nous puissions ensemble participer
à un semblable exercice. Ce sont les remarques très
générales et préliminaires que je voulais vous soumettre.
Nous verrons maintenant comment les choses vont s'orienter.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je remercie le
ministre. Je dois, dans un premier temps, au nom de mes collègues, M.
Sirros de Laurier, qui est notre porte-parole pour tout le secteur de la
main-d'oeuvre au sein de l'Opposition, secteur qui touche directement la
Commission de la santé et de la sécurité du travail et le
mandat qui lui est conféré par la loi, accompagné de mon
collègue de Viau, M. Cusano, qui est le député qui doit
suivre les activités, le respect du mandat et la façon dont ce
mandat est administré par la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, et par mon collègue de Sainte-Anne,
M. Polak, qui était, jusqu'à tout récemment, plus
particulièrement concerné et mandaté pour ce travail
au sein de notre équipe parlementaire...
Si j'interviens aujourd'hui, c'est que j'ai eu l'occasion d'agir pour et
au nom de ma formation politique lorsque nous avons étudié, en
commission parlementaire, pendant de longs jours, le projet de loi no 17,
commission qui a entendu autant de groupes que lors des audiences sur la loi
101 en
1977, on se le rappellera. Je dois vous indiquer que nous sommes bien
satisfaits de recevoir l'honorable juge Sauvé aujourd'hui,
particulièrement, compte tenu du fait que nous n'avions pas eu cette
possibilité en 1982 et pour un motif bien particulier qui, je pense, se
réfère au mandat que nous avons ici, M. le Président.
Vous conviendrez avec moi que le mandat des parlementaires est, d'une
part, de s'assurer, et ce de quelque côté de la Chambre que nous
soyons, que l'exécutif remplit bien les responsabilités
auxquelles il se convie lui-même soit par son programme politique, soit
par les engagements qu'il a formulés, soit par l'orientation qu'il donne
à l'action gouvernementale. C'est la base de notre
responsabilité. Il ne faudrait pas que le ministre du Travail, qui
semble, à certains égards, avoir parfois l'épiderme un peu
chatouilleux, chaque fois qu'un collègue de l'Assemblée, du
côté de la majorité ou de l'Opposition, lui pose une
question, voie là matière à sursauter ou matière
à s'offusquer. Ce qu'on a fait, ce qu'on fait et ce qu'on continuera
à faire, c'est respecter intégralement le mandat qui nous a
été confié par les électeurs que nous
représentons.
À l'égard de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, nous avons un mandat véritablement
à deux volets, qui se réfère à deux
démarches, à deux moyens pour nous de nous poser des questions et
d'en poser, par conséquent, à la commission. D'une part, on sait
que la Commission de la santé et de la sécurité du travail
est un organisme qui peut être qualifié d'"autonome" dans une
certaine mesure, un organisme qui a à assumer la gestion de fonds
publics importants en vertu d'une loi qui a été adoptée
ici. C'est là l'essentiel de notre rôle, de poser des questions
sur ce type de gestion, par exemple.
Comme députés, nous sommes aussi appelés
régulièrement, et ce, de quelque côté de la Chambre
que nous soyons, à réagir à des cas qui nous sont soumis,
à des problèmes qui, plus souvent qu'à leur tour, sont
légitimes et justifiés de la part de contribuables, de la part de
citoyens qui, malheureusement, se retrouvent bénéficiaires de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail. Ce
n'est certainement pas de gaieté de coeur qu'un travailleur ou qu'une
travailleuse du Québec va cogner à votre porte. Nous avons,
depuis quelques semaines, posé des questions qui se
référaient à des cas particuliers, j'en conviens. De ces
cas particuliers, seulement quelques-uns ont été portés
à l'attention du ministre et probablement que d'autres seront
portés à son attention la semaine prochaine et la semaine
suivante, et probablement jusqu'au 18 juin. Je vous en donne un préavis
tout de suite.
M. Fréchette: J'en attendais cet après-midi et je
n'en ai pas eu. Vous m'avez induit en erreur.
M. Pagé: À moins que nous n'ayons l'occasion, en
termes de fonctionnement parlementaire, de vider l'ensemble des nombreuses
questions que nous voulons soulever. Il y a quelques années, le
Parlement adoptait majoritairement la loi 17 sur la santé et la
sécurité du travail. Le mandat de la commission est explicite,
c'est de voir à l'intégrité de la sécurité
physique des travailleurs du Québec. Lorsque nous avons
étudié cette loi, c'est de bonne foi que les gens qui ont investi
du capital humain dans l'étude de cette loi y ont participé. Nous
avons abordé des points essentiels, qui sont au coeur même de
l'action, qui doivent être au coeur même de l'action de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail. Les
questions que nous avons posées jusqu'à maintenant s'inscrivaient
et continuent à s'inscrire dans la démarche suivante. Il devient
nécessaire et nous devons prendre le temps qu'il faut, à ce
moment-ci, d'évaluer et de juger de l'action de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail, du bilan de cette
action par rapport aux objectifs qui lui étaient impartis par la loi, et
je ne crois pas, bien franchement, M. le Président, que, dans une heure
et demie, nous puissions avoir l'occasion de le faire.
Nous voulons, par cette commission, aborder toute la question de la
prévention. Des dizaines et des dizaines d'heures ont été
consacrées à des discussions lors de la loi 17. Mon
collègue, M. Lavigne, y était, si je me souviens bien. Plusieurs
groupes sont venus ici. Des engagements ont été pris par le
gouvernement, par le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre de
l'époque, sur ce qui se ferait, sur les échéanciers, sur
les moyens utiles dont la commission se doterait pour atteindre une meilleure
prévention des accidents du travail au Québec: plus d'information
et toute la structure qui devait accompagner cela. Il a été
longuement question du contrôle de la sécurité comme telle.
Qu'on se rappelle les témoignages éloquents des travailleurs, des
travailleuses et de leurs représentants syndicaux, notamment sur la
question des comités de la santé et de la sécurité
du travail. Il y a quelques années que tout cela est en marche, et le
moment le plus utile devait être, pour nous, une commission
parlementaire, pour voir, avant d'aborder un projet de loi... J'y reviendrai
à la fin.
Cela aurait été un moyen utile d'entendre la Commission de
la santé et de la sécurité du travail et son expertise;
d'entendre, au besoin, des administrateurs de la commission. On sait - le
ministre l'a dit tout à l'heure - qu'il y a un type d'administration
paritaire. Il aurait été utile,
je crois, qu'on puisse discuter dans ce projet de loi de toute la notion
du droit de refus, qui est un domaine de droit nouveau et qui a fait l'objet de
beaucoup de commentaires et d'écritures. Dans certains cas,
c'étaient des appréhensions. Dans d'autres cas, c'étaient
des souhaits disant que ce n'était pas assez. Une commission
parlementaire comme celle-là nous aurait permis de tracer une ligne et
de voir ce qu'il en était et, au besoin, de profiter de l'arrivée
d'un projet de loi qui sera déposé éventuellement pour
pouvoir nous rajuster.
On se rappellera toute l'importance que le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre de l'époque avait donnée aux associations qui ont
le mandat de voir à la sécurité, à la formation et
à l'information. On se rappellera que, à l'époque, on a
parlé longuement des accidentés et de ceux qui, malheureusement,
ont à vivre une situation... Une commission comme celle-là nous
aurait permis de toucher des aspects intéressants au chapitre des
indemnités, de ce qui est formulé par certains groupes, entre
autres le mouvement d'aide aux accidentés du travail, de discuter de
tout ce contentieux à la suite d'un recours collectif qui a
été présenté par des travailleurs qui soutiennent
avoir un droit légitime à des prestations.
Il aurait été intéressant, je crois, d'entendre non
pas le ministre du Travail, mais le président et, au besoin, d'autres
intervenants qui ont, dans leur vécu quotidien, à contribuer
à cette responsabilité. Il aurait été certainement
très intéressant de voir avec M. le juge Sauvé
l'application des programmes, des règlements, l'application de ce qu'on
qualifie, à l'intérieur de la boîte, de politiques
concernant la réadaptation, concernant la réinsertion sociale des
travailleurs accidentés. Finalement, ce n'est pas de la redistribution
de richesse par la Commission de la santé et de la
sécurité du travail. Ce sont des transferts de fonds à
partir, jusqu'à un certain égard, d'un "no fault", d'une
responsabilité qui est mise en commun et c'est un financement qui est
très appréciable. Ce sont des sommes importantes qui sont en jeu,
pour des choses importantes, j'en conviens, mais des sommes importantes. Il
aurait été intéressant de voir toute la notion du
financement de la Commision de la santé et de la sécurité
du travail et les structures, en termes de tarif, sur lesquelles la commission
s'appuie pour se financer parce que, comme on le sait, en 1980, c'était
536 000 000 $, si ma mémoire est fidèle ou si le rapport annuel
était fidèle, et c'est 664 000 000 $ que vous êtes
allés chercher en 1981, avec l'effet que des sommes aussi importantes
peut avoir sur des entreprises qui oeuvrent au Québec. (16 h 30)
Je suis persuadé que les commentaires que je formule à ce
moment-ci vont dans le sens des préoccupations d'autres collègues
du ministre du Travail, que ce soit le ministre d'État au
Développement économique, que ce soit le président du
Comité de développement économique, qui présentera
le budget ce soir, que ce soit le ministre de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme qui s'évertue à soutenir que le Québec doit
être plus compétitif, que les coûts de production doivent
être comparables. Cela aurait été intéressant de
voir le financement et surtout une projection à moyen terme, parce que
je présume, M. le juge Sauvé, que vous serez en mesure,
malgré l'heure et demie que nous avons, de nous indiquer vos projections
en termes de coûts et en termes de besoins en financement pour les
prochaines années.
Il aurait été non seulement intéressant, mais il
serait impérieux qu'on puisse interroger M. le juge sur l'administration
de la Commission de la santé et de la sécurité du travail.
Comment la gestion est-elle assumée, à partir même du
conseil d'administration? Là, on se retrouve dans une belle
ambiguïté qu'on avait d'ailleurs évoquée et que les
parlementaires des deux côtés de la Chambre avaient
évoquée lors de l'étude de la loi 17. Le ministre nous
dit: C'est une administration paritaire. Bon, bravo! Donc, il y a des
représentants des patrons et des représentants des syndicats. Le
ministre a presque voulu laisser entendre ou laisser croire, tout au moins, la
semaine dernière, que, finalement, le gouvernement n'avait pas affaire
là-dedans, que c'étaient les parties qui s'arrangeaient entre
elles. On parle aux parties et les parties nous disent à l'oreille: Vous
savez, on parle de parité, mais, finalement, celui qui a le gros bout du
bâton et celui qui décide, c'est le représentant du
gouvernement. Allez donc savoir qui décide quoi! On présume que
des décisions se prennent, on le constate, mais l'important est de
pouvoir juger, après quelques années, en fonction d'un
régime comme celui-ci, un régime juridique d'administration, qui
est tributaire devant qui.
Je comprends le caractère délicat dans lequel se retrouve
le ministre du Travail qui, comme je le disais, sans vouloir lui lancer de
flèche, lui qui n'est là que depuis quelques mois seulement - on
sait que le ministère du Travail, c'est un gros ministère - a de
nombreux problèmes à étudier dans les 18 heures de travail
par jour qu'il effectue, comme les autres ministres et comme les autres
députés, bien souvent. Il a bien d'autres questions à voir
que celles qui touchent la Commission de la santé et de la
sécurité du travail. Je dois vous dire qu'il est
inquiétant pour nous de constater que, compte tenu de ce système,
de cette méthode, je ne suis pas convaincu que le ministre soit
suffisamment au fait, soit toujours au fait d'un dossier aussi important
que celui de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail pour être tributaire et répondre
devant les élus des actions de la commission.
Décentralisation. Combien de temps pourrions-nous passer sur
toute la question de la décentralisation? On se rapproche de vous, du
chapeau. Rappelons-nous cela. La décentralisation, cela n'a pas
été fait pour le plaisir de dire qu'on fait de la
décentralisation. À ma connaissance - le ministre pourra me
corriger - cela a été fait dans le but de donner un meilleur
service aux accidentés du travail, comme les mécanismes d'appel.
Lorsque le législateur a inséré dans la loi un
mécanisme d'appel, un bureau de révision, de
références à la Commission des affaires sociales, le
législateur ne l'a pas fait pour se gargariser de termes et bien
paraître devant des associations de droit; c'était dans le but de
donner, encore une fois, plus de droits et une meilleure qualité de
services, une meilleure garantie d'un jugement impartial de la part de ceux qui
ont à décider d'un cas.
Or, je dois vous avouer qu'on a de grandes et de graves
inquiétudes à cet égard: d'une part, sur la
réussite de la décentralisation et, d'autre part, on
s'inquiète quand on voit non seulement un, mais plusieurs
accidentés du travail qui vont attendre, qui sont en "stand by" pendant
des mois et des années avant de recevoir une décision finale. On
aurait bien aimé entendre non seulement le président, de la
commission de la santé mais d'autres personnes qui y sont, sur la
réaction de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail lorsqu'elle a constaté que le
travailleur avait maintenant ses droits et ses prérogatives. On
soupçonne qu'il y a eu des réactions. Et, ce n'est pas en une
heure et quelque vingt minutes qu'on pourra aborder ces questions-là.
Nous aurions voulu passer beaucoup de temps sur la façon de traiter
l'accidenté.
Le ministre - je n'ai pas eu le temps de lire tout ce qu'il a dit ce
matin, mais j'ai vu quelques passages - a peut-être voulu laisser croire
- il pourra me corriger - que la démarche enclenchée par les
questions posées la semaine dernière, tentait de démontrer
qu'on s'inquiétait strictement des coûts. Nous indiquons
clairement que, quant à nous, les travailleurs accidentés du
Québec, les travailleurs qui ont une maladie industrielle, les
travailleuses doivent bénéficier, dans les plus brefs
délais, des indemnités auxquelles ils ou elles ont droit ainsi
que des mécanismes de réadaptation, de
réintégration sur le marché du travail et de
réinsertion sociale. Aucune objection à cet égard, sauf
que nous croyons qu'une gestion plus rigoureuse de la commission permettrait
des résultats budgétaires moins coûteux et, par
conséquent, probablement beaucoup plus d'argent disponible pour les
travailleurs accidentés. D'ailleurs, au sujet des cas particuliers, que
ce soient les surpayés, que ce soient les politiques
expérimentales, on aura l'occasion d'y revenir, soit ici ou, si on n'a
pas le temps, à l'Assemblée nationale.
Et enfin, il aurait été certainement très utile de
voir, avec M. le juge Sauvé, de se référer à la
déclaration du premier ministre du 23 mars dernier qui disait: "En
matière de réparations et de lésions professionnelles,
nous proposerons, en accord avec les partenaires dans ce domaine, de mettre
à jour les modes d'indemnisation de manière à les rendre
compatibles avec les autres régimes publics en vigueur." M. René
Lévesque, premier ministre du Québec, message inaugural. Il
aurait été intéressant de voir de quels
éléments particuliers le législateur sera saisi lorsque le
projet de loi sera déposé, adopté, et les effets de tout
cela. On ne lui demanderait évidemment pas de nous lire la loi, mais
cela serait certainement utile de pouvoir échanger dans le cadre d'une
commission parlementaire, quitte à ce que cela se fasse après le
dépôt de la loi, parce que je présume que la loi doit
être prête. Si elle n'est pas prête, qu'on me corrige.
Alors, c'était l'essentiel, M. le Président, des questions
que nous voulions aborder en plus des questions, peut-être
sévères, mais qui doivent être posées sur
l'administration de la commission. D'ailleurs, on en a déjà
posé l'année dernière et on n'a pas eu de réponse.
Et on en a beaucoup d'autres à poser. Encore une fois, ce n'est pas que
- comme un journaliste le titrait -l'Opposition veuille la tête de M.
Sauvé, non. Nous n'avons pas d'intérêt particulier à
l'égard de la tête de M. le juge. Ce qu'on veut, c'est que nos
commissions autonomes qui bénéficient d'un degré important
d'autonomie puissent être vraiment tributaires des actes, des gestes
qu'elles posent et de l'administration.
M. le Président, mon collègue, le député de
Viau, aura plusieurs questions à poser. Moi aussi. Je vais lui
céder la parole sur les questions d'orientation et on en aura pour
plusieurs heures.
M. Fréchette: M. le Président, est-ce que je peux
poser une question de règlement? Comme ce matin, est-ce que je n'aurai
pas le droit d'exercer un court droit de réplique sur les observations
générales que vient de formuler le député de
Portneuf?
Le Président (M. Vallières): Je pense
qu'effectivement, dans la pratique, quand il y a énoncé de notes
préliminaires, comme nous abordons ici un progamme, normalement, le
ministre fait part de ses notes, il y a réaction de l'Opposition et
ensuite réplique de la part du ministre. Je crois qu'on pourrait revenir
à notre collègue, le député
de Laurier et, par la suite, le député de... M.
Fréchette: De Viau?
Le Président (M. Vallières): ...de Viau,
immédiatement après les paroles du ministre. M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, j'irai très
brièvement. Je suis heureux d'entendre le député de
Portneuf nous dire que l'on va continuer jusqu'au mois de juin de soumettre des
questions à l'Assemblée nationale. J'en suis, quant à moi,
fort heureux. Je lui dirai tout simplement que, plus les questions viennent,
plus cela nous permet de connaître davantage le rouage de l'organisme en
question.
M. Pagé: On vous aide.
M. Fréchette: Je vais être obligé,
malheureusement, de réitérer des choses que j'ai dites ce matin,
le député de Portneuf n'ayant pas été ici ce matin,
pour des motifs qui sont valables, il nous l'a dit lui-même. Je ne mets
pas en doute ces motifs. Deuxièmement, parce qu'il a lui-même
touché à un sujet particulier qui est revenu souvent dans les
préoccupations des membres de l'Opposition et qui revient là sur
la table cet après-midi, c'est celui de ce qu'on est maintenant convenu
d'appeler les surpayés. C'est fort curieux d'essayer de comprendre le
raisonnement, la théorie ou l'argumentation que le député
de Portneuf vient de développer.
Il nous dit, d'une part, que les travailleurs, les travailleuses
accidentés se plaignent des délais considérables qui leur
sont imposés pour obtenir l'indemnité à laquelle ils ont
droit en vertu de la loi. Assez curieusement, par ailleurs, quand on se
réfère au chapitre des surpayés et qu'on lui explique que
ces gens ont reçu une indemnité peut-être trop rapidement,
il nous fait également un reproche parce que le paiement a
été fait trop rapidement. J'essaie, entre ces deux
extrêmes, de savoir où se situe précisément le
député de Portneuf. Je vous signale que j'ai passablement de
difficulté à saisir l'astuce de sa réflexion. Je veux bien
que l'on pose toute espèce de questions sur la gestion,
l'administration, le fonctionnement général de la Commission de
la santé et de la sécurité du travail et qu'on pose les
questions sans, par ailleurs, en donner, suivant l'expression fort chère
du député de Portneuf, les tenants et aboutissants; il y a
derrière cela un processus avec lequel je ne peux pas être
d'accord.
Je vous en donne un seul exemple tout en étant bien conscient que
je fais de la redondance ou de la répétition. Le
député de Portneuf, appuyé en cela par son collègue
de Viau, fait grand état, ces derniers temps, du dossier qu'on est
convenu d'appeler les surpayés. Il plaide avec beaucoup d'énergie
qu'il n'y aurait pas à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail de politique de recouvrement pour les
surpayés. Il y a effectivement une politique de recouvrement et qui est
strictement basée sur les principes que l'on retrouve en matière
de droit civil. Quand une créance nous est due, le droit civil
prévoit des modalités, prévoit des moyens pour percevoir
cette créance. La politique de recouvrement de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail qui, donc, est
basée sur les principes de droit civil, va tenir compte de certains
facteurs de la nature suivante: quand, par exemple, la commission ou le service
de recouvrement est convaincu du fait que, dans un dossier, il peut y avoir des
déclarations qui sont contraires à la réalité, qui
sont contraires à la véracité des
événements, qui peuvent - hélas, ce sont des choses qui
arrivent - s'approcher de la fraude ou de la fausse déclaration, quel
que soit le montant en litige, la commission va entamer les procédures
nécessaires pour procéder à récupérer les
sommes qui ont été payées en trop à la suite de
fausses déclarations. (16 h 45)
Cependant, là comme ailleurs, il peut arriver qu'il y ait des
surpayés, mais pour des montants minimes, qu'il y ait des paiements en
trop qui sont faits et qui se situent dans des quanta variant de 50 $, 75 $
à 100 $. Est-ce qu'il faut comprendre, de l'évaluation que fait
le député de Portneuf, qu'il faudrait, peu importe le montant en
litige, entamer tout le processus judiciaire, peu importe le coût que
cela peut représenter, peu importe l'assurance qu'on a de pouvoir
réaliser ou pas le jugement qu'on pourrait obtenir d'une cour? Est-ce
que le député de Portneuf est en train de nous dire, est-ce qu'il
est en train de plaider, depuis deux semaines, qu'il faudrait enclencher le
processus judiciaire? Cela coûtera 200 $, 300 $ ou 400 $, ce n'est pas
important pour aller réclamer un surpayé de 50 $, de 75 $, de 100
$. Est-ce que c'est cela que le député de Portneuf plaide depuis
deux semaines? Si c'est cela, M. le Président, il y a un autre de ses
raisonnements que je n'arrive pas à comprendre. Il va sans doute nous
l'expliquer. C'est lui qui a provoqué, également à
l'Assemblée nationale, toute une série de questions pour essayer
de démontrer que le ministère du Revenu, par exemple, avait un
système de recouvrement "sauvage". C'est lui qui, l'automne dernier, a
posé questions par-dessus questions pour blâmer, en quelque sorte,
le ministre du Revenu du fait qu'il procédait à du recouvrement
d'argent dû par des contribuables. Là, il fait reproche à
la Commission de la santé et de la sécurité du travail de
ne pas procéder à
la récupération, dans certains cas, de sommes d'argent qui
ont été payées en trop.
M. Pagé: Question de règlement, M. le
Président, très brièvement. Je vais répondre tout
de suite à cela.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Portneuf, sur une question de règlement.
M. Pagé: Premièrement, le ministre aurait dû
comprendre que, parmi les questions qui seront posées - on va les
aborder d'une façon générale, les questions
préliminaires - on en a plusieurs sur l'orientation de la
commission.
Deuxièmement, notre intention était de passer quelques
heures strictement sur des points aussi particuliers que ceux que vous venez
d'évoquer. Particulièrement en réponse aux deux
commentaires que vient de faire le ministre, il me permettra de dire, quand il
parle de montants de 50 $, 75 $ et 100 $, qu'il erre dans les faits. Si je fais
référence strictement aux documents auxquels je me suis
référé à la commission, pour le mois, par exemple,
de janvier 1982, c'était 1 092 727 $ pour 1775 cas. La moyenne, par
personne, est de 615 $ pour le mois de janvier; par nombre de cas: 573 $, 559
$, 706 $, etc. Ce ne sont pas des montants de 25 $ et de 50 $.
Deuxièmement, le ministre s'inquiète de la conciliation
à faire entre les arguments invoqués ici et ceux invoqués
dans le cadre d'une démarche parlementaire portant sur le
ministère du Revenu. Vous auriez dû comprendre, vous l'avez
été, ministre du Revenu, un bout de temps. Nous avons toujours
soutenu et démontré dans plusieurs cas que les montants
réclamés par le ministère du Revenu, dans une
démarche spéciale commandée par le ministre des Finances
où le montant était de 270 000 000 $, nous avons soutenu que dans
la majorité de ces cas, les montants n'étaient pas dus et que les
gens se voyaient placés dans l'obligation, pour acheter leur paix, de
payer purement et simplement, ce qui est bien différent. Vous pouvez
continuer.
Le Président (M. Vallières): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, si le
député de Portneuf m'avait laissé compléter mon
argumentation à l'aide d'exemples, il aurait sans doute compris que les
cas dont il parle allaient être rejoints par les exemples que je veux
donner. L'exemple que j'ai soulevé ce matin, il est important. C'est
celui des travailleurs qui, à un moment donné, ont
été déclarés, par un diagnostic médical,
"amiantosiques", en 1979. Le résultat de ce diagnostic médical,
c'est que ces travailleurs se voient, d'une part, retirer leur permis de
travail et qu'ils se voient, d'autre part, accorder une indemnité pour
le restant de leur vie équivalant à 90% de leur salaire net.
C'est un diagnostic médical posé en 1979 par des médecins
dont personne ne peut mettre en doute la compétence. Quelque deux ans
plus tard, un "panel" de médecins, composé de trois
médecins spécialisés en maladies pulmonaires,
déclare et décrète qu'il y a eu erreur sur le diagnostic
en 1979.
M. Pagé: ...médical.
M. Fréchette: Alors, ces gens ont reçu des
indemnités qui atteignent, dans bien des cas, plus de 70 000 $. C'est du
surpayé, M. le Président. La Commission des affaires sociales a
décrété dans un jugement que c'étaient des
surpayés, des gens qui n'avaient pas droit à ces montants, des
gens de 45, 50 ans, 55 ans, qui n'ont plus de permis de travail, mais qui ont
été payés alors qu'ils n'y avaient pas droit. Je posais la
question ce matin, mais le député de Portneuf n'était pas
là. Je lui relance la même question: Est-ce que, comme procureur,
le député de Portneuf accepterait d'enclencher le processus
judiciaire pour aller percevoir chez ces gens les montants qu'ils ont
reçus en trop sans que, d'aucune espèce de façon, ils
n'aient eu, quant à eux, quelque rôle à jouer dans une
situation comme celle-là? Le député de Portneuf a fait
grand état, la semaine dernière, de la situation d'un travailleur
qui recevait plus - imaginez le scandale - après avoir été
déclaré inapte au travail, que le salaire qu'il retirait
lorsqu'il était à l'emploi du CN. C'était scandaleux comme
situation!
Un travailleur, que ce soit au CN ou ailleurs, peut gagner 24 000 $ de
salaire. Il peut être victime d'un accident de travail qui lui occasionne
une incapacité partielle permanente, qui peut
dégénérer en incapacité totale permanente qui
l'oblige à se retirer du marché du travail. Si c'est cela la
situation, M. le Président, un travailleur qui gagne 24 000 $, 25 000 $
et qui, à un moment donné, à cause d'un accident de
travail, doit se retirer complètement du marché du travail, va
recevoir le maximum prévu par la loi, 90% de son salaire net; dans ce
cas-ci, cela pourrait être 20 000 $, l'indemnité de la commission.
Ce travailleur qui a été pendant 20 ans, 25 ans au service du
même employeur, qui a pris la précaution, qui a eu la prudence,
à même ses deniers, avec la participation de son employeur, de se
payer un fonds de retraite privé qui lui permet de retirer une
indemnité de 15 000 $ par année, à même des sommes
qu'il a lui-même versées avec son employeur, va effectivement
recevoir, après s'être retiré du marché du travail,
une somme de 35 000 $
alors que, lorsqu'il était au travail, il retirait 23 000 $ ou 24
000 $. Est-ce qu'il y a là un scandale? Est-ce que le
député de Portneuf souhaiterait que l'on soustraie de la
compensation à laquelle ce travailleur a droit le montant de
l'indemnité que son fonds de retraite lui permet de retirer? Est-ce que
c'est cela que le député de Portneuf est en train de plaider
depuis deux semaines?
Si c'est cela, M. le Président, je vous réitère que
je n'accepterai certainement pas ce genre d'argumentation, ce genre de
philosophie. Quand je vous disais au début de mes remarques que le genre
de questions que l'on pose, que le processus que l'on est en train de
développer en ne donnant pas tous les faits qui sont pertinents à
des cas particuliers, ont justement comme effet de discréditer un
organisme...
M. Pagé: Voyons donc! Ne me faites pas pleurer ici!
M. Fréchette: ...de discréditer ceux qui sont
à l'intérieur de cet organisme, quand on fait toute espèce
de références sans qu'elles soient complètes pour laisser
planer toutes sortes de gestes de mauvaise admnistration. Si, dans les cas dont
je viens de parler, le député de Portneuf est disponible pour
aller devant les tribunaux pour procéder à la
récupération, je serai un de ceux qui plaideront pour qu'on lui
confie le mandat pour aller auprès de ces surpayés
procéder à la récupération.
M. Pagé: M. le Président, sur ces deux
questions.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Très brièvement. Nous aurons
l'occasion de vider l'ensemble de ces deux questions, je l'espère, dans
les plus brefs délais. On a des questions qui embrassent plus
généralement l'orientation de la commission. Vous avez cru
comprendre, je présume, qu'on en avait plusieurs. On va commencer par
les questions d'orientation, les questions de politique générale
avant d'aborder des sujets spécifiques comme ceux-là. Les deux
questions que vous avez abordées, on est prêt en tout temps
à les vider et à prendre le temps qu'il faut pour le faire.
Le Président (M. Vallières): J'ai maintenant deux
demandes d'intervention, d'abord du député de Viau, qui sera
suivi par la députée de Maisonneuve.
M. Cusano: Merci, M. le Président. Le ministre vient de
nous dire qu'il ne voulait pas être redondant, mais il l'a
été en répétant ce qu'il a dit ce matin. Je suis
obligé d'être redondant parce que je lui ai posé une
question ce matin. Il m'avait promis une réponse cet après-midi.
C'était pour lui dire que, dans sa volée de modifications ou de
réformes des lois, il n'a fait aucune mention de réforme possible
de la loi ou de l'organisation de la CSST. Je voudrais, en premier lieu, faire
référence au discours inaugural. Je pense qu'il connaît
très bien le discours inaugural de l'honorable premier ministre
où il y avait une référence, où, du moins, on
pouvait croire qu'il y aurait certainement des changements. Et je veux aussi
faire référence à un télégramme qui a
été envoyé à M. Robert Sauvé, signé
par Roger Lecours, président du SPGQ. Ce télégramme se lit
comme suit: "Nous avons eu vent que la CSST serait bientôt
transformée en société non régie par la Loi sur la
fonction publique. Nous aimerions savoir si cette affirmation est
fondée. L'intérêt de nos membres est en jeu, vous le
comprendrez aisément." La réponse de M. Sauvé à ce
télégramme est la suivante: "II est certain que cette question
est à l'étude -cette question, je présume que c'est la
question des transformations à la CSST - et les intérêts
des travailleurs seront certainement considérés." Alors, je dois
répéter ma question de ce matin, sans être redondant, et
demander au ministre quels sont les changements qu'il envisage d'apporter
à la CSST.
Le Président (M. Vallières): M. le ministre du
Travail.
M. Fréchette: M. le Président, je ne sais pas si le
député de Viau est en train de me demander quel sera de
façon précise le contenu du projet de loi qui sera
déposé à l'Assemblée nationale. Si c'est en termes
aussi précis, explicites et exprès qu'il me pose cette question,
il va très facilement comprendre que je ne peux pas entreprendre,
à ce stade-ci, de lui faire la lecture des articles que pourrait
contenir ce projet de loi. Maintenant, il fait référence à
une situation très précise sur laquelle je puis lui formuler des
commentaires en termes très généraux. Est-ce qu'il est
exact que la CSST, la Commission de la santé et de la
sécurité du travail pourrait devenir une société
d'État? Je vous dirai essentiellement, M. le Président, que,
effectivement, il y a eu jusqu'à maintenant des discussions à cet
égard. Il y a des spécialistes en la matière qui se sont
penchés sur le problème, qui ont pris le temps nécessaire
à l'étudier. Il y a des conclusions de ces études qui ont
été soumises au niveau politique pour décision, et il
restera à l'autorité politique de prendre la décision
finale qui s'impose en semblable circonstance. (17 heures)
Mais, M. le Président, en rapport avec
ce télégramme de M. Lecours, qui fait part
d'appréhensions qui me semblent justifiées, compte tenu de
l'ensemble de la discussion qui se fait, je voudrais dire ceci au
député de Viau: Pour les strictes fins de la discussion, tenons
pour acquis que, effectivement, dans un an, dans deux ans ou dans cinq ans, la
Commission de la santé et de la sécurité du travail
devienne une société d'État, donc soustraite aux
règles de la fonction publique. Si les travailleurs craignent pour leurs
droits, les droits qui leur sont consentis dans l'état actuel des
choses, il y a un certain nombre de choses dont il faut tenir compte. D'abord,
si ça devait être cela, comme je vous le dis, dans un délai
que personne ne peut, pour le moment, carrément spécifier, il
faudra que les gens qui, au premier chef, sont intéressés par les
préoccupations qu'a soumises M. Lecours, soient informés au moins
sept mois à l'avance d'une semblable décision. Voilà une
première préoccupation ou, enfin, une première garantie,
me semble-t-il, vis-à-vis de ceux qui se préoccupent de la
situation.
Deuxièmement, toujours en tenant pour acquis, pour les fins de la
discussion, que c'est l'orientation que devra prendre l'organisme, ceux qui
sont visés, donc les gens, les hommes et les femmes qui travaillent
à l'intérieur de la commission, ont à leur disposition un
délai variant de 30 à 60 jours pour faire le choix de continuer
de travailler à l'intérieur de ce que serait
éventuellement cette nouvelle société d'État ou,
alors, décider de réorienter leur carrière. Ils ont une
période de 30 à 60 jours, dans l'état actuel des
choses.
Troisièmement, le député de Viau prenait plaisir la
semaine dernière à me référer à certains
articles de certaines lois, je vais le référer à l'article
45 du Code du travail. Il sait ce que c'est, l'article 45 du Code du travail.
L'article 45 du Code du travail, il sait ce que c'est, le député
de Viau. Il sait très bien que c'est une disposition dont les objectifs
sont précisément de protéger les droits des travailleurs
et des travailleuses dont la gérance de l'organisme à
l'intérieur duquel ils oeuvrent peut changer de vocation. Le
député de Viau sait très bien que cet article 45 existe.
Alors, que les travailleurs à l'intérieur de la commission se
préoccupent de sa vocation future, je suis tout à fait conscient
que c'est une préoccupation légitime. Mais je dis qu'il y a, dans
l'état actuel des choses, des paramètres suffisamment
circonscrits, un cadre suffisamment clair pour que tous leurs droits leur
soient préservés dans le cas où il y aurait ce changement
de vocation dont on vient de parler.
M. Cusano: M. le ministre, vous êtes sans doute une
personne qui doit lire assez souvent Jonathan Swift, qui a écrit A Tale
of a Tub, qui a tendance à changer certains propos. Je ne veux pas
aborder l'article 45, on le connaît. Ce n'est pas le but de ma question.
Le but de ma question, c'est que vous avez mentionné qu'il y a une
possibilité de transformation de la CSST en société
d'État. Je présume qu'il se fait des études. Cela ne vient
pas du ciel. Vous dites que ces études, ces consultations ont lieu, mais
avec qui sont-elles faites présentement? Cela est très
précis. J'aurai d'autres questions à vous poser.
M. Fréchette: Les études et les consultations dont
je vous parle ont été menées par des personnes qui, au
premier chef, possèdent l'expertise de l'administration d'un organisme
comme celui-là. Elles ont été élaborées sur
une longue période et elles ont été approfondies comme il
fallait le faire dans des circonstances comme celles-là. Cette
opération étant terminée, le tout a été
remis entre les mains des autorités politiques qui devront, à
partir des considérations qui ont été faites par ces
spécialistes, prendre une décision qui n'est pas prise et sur
laquelle, au moment où on se parle, en tout cas, je n'ai pas de
commentaire précis à faire au député de Viau.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Viau.
M. Cusano: M. le Président, je répète ma
question. Lorsque le ministre parle de consultations, quelles sont les
personnes que vous avez consultées, quels spécialistes avez-vous
consultés?
Une voix: Vous n'avez pas confiance?
M. Pagé: Le président de la CSST peut
répondre.
M. Fréchette: Oui. Bien sûr.
Je vais répondre tantôt, si vous me le permettez, parce que
j'ai pris note de vos questions. Je vais faire une déclaration
générale, moi aussi, si vous me le permettez. Vous avez dit bien
des choses. J'aimerais avoir l'occasion de dire moi aussi quelque chose.
Le Président (M. Vallières): À l'ordre, s'il
vous plaît! Pour les besoins du journal des Débats, je voudrais
indiquer que le président de la CSST vient de s'exprimer et
c'était donc au nom du ministre qu'il le faisait.
La parole est maintenant au ministre.
M. Fréchette: Je réitère ce que je viens de
dire. Je ne sais pas en quels termes il faudrait le dire pour que ce soit
suffisamment clair. Je vous ai dit que ces consultations ont
été menées à l'intérieur d'organismes, de
groupes et chez des individus qui ont l'expertise.
M. Cusano: Oui, mais qui sont-ils, ces individus qui ont
l'expertise?
M. Fréchette: Des spécialistes.
M. Cusano: C'est qui, ces spécialistes? Est-ce que ce sont
des personnes ou est-ce que ce sont des groupes?
M. Fréchette: Ce sont des personnes qui oeuvrent à
l'intérieur de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail.
M. Cusano: Est-ce que ce sont des ordinateurs qu'on consulte? Je
veux savoir qui est la personne physique que vous avez consultée.
Une voix: Des spécialistes.
M. Fréchette: Le président et des gens de
l'intérieur ont, effectivement, réfléchi sur cette
question. Ils en ont discuté, également, avec d'autres personnes
au gouvernement. Ils en ont discuté avec celui qui vous parle. Il reste
à faire cheminer cette décision politique qui n'est pas prise
encore.
M. Cusano: Alors, si je suis bien la dernière partie de
votre réponse, vous n'avez aucune conclusion d'arrêtée
jusqu'à maintenant?
Une voix: De quelle nature?
M. Fréchette? Non, M. le Président. En aurais-je
que je ne le dirais pas immédiatement parce que - je vous livrerais le
contenu d'un projet de loi. Je vous ai signalé, au tout début de
nos travaux, que ce n'était pas mon intention de vous donner verbalement
ce qu'il y aura dans le projet de loi.
M. Cusano: Quand pensez-vous que vous allez pouvoir finir toute
votre consultation et déposer ce projet de loi?
M. Fréchette: M. le Président, le projet de loi,
dans son ensemble, m'a été remis il y a quatre semaines ou
à peu près. Nous sommes actuellement à procéder
à l'évaluation finale de son contenu avec des experts qui
proviennent de toutes les sources qui peuvent être
intéressés d'une façon ou d'une autre à ce projet
de loi. Si le calendrier est respecté - jusqu'à maintenant, je
n'ai aucune raison de croire qu'il ne le sera pas - le projet de loi devrait
être déposé avant l'ajournement pour la période
d'été afin de permettre, durant la période
d'été et jusqu'à la reprise des travaux, à tous les
organismes, à toutes les associations, à tous les individus qui
voudront prendre connaissance du contenu du projet, de pouvoir le faire durant
la période d'ajournement pour l'été jusqu'à la
reprise des travaux, quelque part l'automne prochain.
M. Cusano: À ce temps-là, on va certainement nous
présenter l'impact financier d'une telle réforme. Est-ce qu'il y
a des études qui ont été effectuées sur cela?
M. Fréchette: M. le Président, il en est de cette
loi comme de toute autre loi qui touche, d'une façon ou d'une autre, les
relations de travail ou de la main-d'oeuvre ou de l'emploi. Le
député de Viau est très certainement au fait que, dans de
semblables circonstances, il faut soumettre tous ces projets à
l'appréciation du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre
pour recueillir son avis sur l'opportunité de maintenir ou de rejeter
telle ou telle proposition. Je vous dirai que cet exercice a été
complété au Conseil consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre, que les parties ont effectivement remis leur avis et leur
appréciation quant au contenu du projet de loi. Je peux vous dire - mais
c'est le plus loin que je peux aller - qu'à bien des égards et
sur à peu près l'ensemble du projet beaucoup d'avis convergent
entre les différents intervenants qu'on retrouve au Conseil consultatif
du travail et de la main-d'oeuvre. Il est clair aussi que cette instance, qui
s'appelle le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, a
procédé à une évaluation en termes strictement
pécuniaires ou financiers de ce que pourrait vouloir dire le projet de
loi tel qu'il lui a été soumis. Vous allez comprendre
également que le conseil d'administration de la commission a aussi fait
sa propre évaluation. Quand le député de Viau me pose la
question et me demande: Est-ce que des évaluations ont été
faites de l'impact financier par rapport à l'état actuel des
choses et à ce que cela pourrait donner avec une nouvelle loi de cette
nature, je lui réponds: Oui, cela a été fait à
travers les instances formelles, c'est-à-dire la commission
elle-même et le Conseil consultatif du travail, et aussi à travers
d'autres instances qui n'ont pas le même statut juridique que les deux
instances dont je viens de vous parler.
Le Président (M. Vallières): Alors, oui.
M. Pagé: M. le Président, si vous le permettez, mon
collègue de Maisonneuve me permettrait très brièvement,
sur le même sujet, une question à quelques volets adressée
à M. le ministre. Devons-nous prendre acte que le ministre nous indique
aujourd'hui que des consultations ont été faites et qu'il ne
veut pas nous dire avec qui, que des spécialistes ont aussi
été consultés et qu'il ne veut pas nous dire lesquels?
S'ils en sont arrivés à certaines conclusions, j'aimerais qu'il
nous indique de quelle nature sont ces conclusions parce qu'il y a
probablement, très certainement, plusieurs hypothèses qui sont
retenues. Ce n'est pas faire défaut à son engagement
ministériel de nous indiquer les hypothèses et la nature des
différentes conclusions auxquelles ils en viennent pour que le pouvoir
politique décide.
Enfin, il a référé au Conseil consultatif du
travail et de la main-d'oeuvre. Si on se réfère au rapport annuel
de 1981 du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, il y
était fait mention d'un projet de loi éventuel sur la
réparation des lésions professionnelles: II y était dit
ceci - je cite le rapport du Conseil consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre - "Avant de procéder à l'étude de cet
avant-projet, le conseil a demandé de procéder à une
évaluation de ses implications financières." Il a donc obtenu
qu'on lui transmette, entre autres, les informations suivantes: les coûts
de l'application de la Loi sur les accidents du travail, coût global et
coût de certaines dispositions, une analyse et une évaluation du
coût de différentes hypothèses contenues dans
l'avant-projet de loi sur la réparation des lésions
professionnelles, l'analyse et l'évaluation devant être faites,
d'une part, pour les accidents du travail et, d'autre part, pour les maladies
professionnelles, enfin une étude comparative entre les coûts
réels de certaines mesures contenues dans la Loi sur les accidents du
travail: incapacité totale temporaire, incapacité partielle
permanente, programme d'assistance financière, prestations de
décès, etc., et une évaluation des coûts de
certaines mesures contenues à l'avant-projet de loi sur la
réparation des lésions professionnelles: rentes,
indemnités temporaires, indemnités spéciales au
décès, indemnité de remariage, etc..
Donc, est-ce que le président pourrait nous indiquer si le
comité consultatif s'est déclaré satisfait des documents
qu'il a reçus? Est-ce que le ministre peut s'engager, au moment du
dépôt de la loi, à déposer à
l'Assemblée nationale les documents qu'il a déposés au
Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre: entre autres,
l'étude du rapport coûts-bénéfices du projet de loi
qui s'en vient, en plus des autres volets comme la nature des conclusions? Tout
cela est peut-être bien hypothétique.
Le Président (M. Vallières): M. le ministre.
M. Fréchette: Est-ce que j'ai bien compris que le
député de Portneuf me demandait si j'étais disposé,
au moment où l'étude du projet de loi arrivera, à
déposer en même temps les documents que j'aurais
déposés au conseil consultatif? Est-ce que c'est cela, la
question? Est-ce que le député de Portneuf me demande si je serai
disposé, au moment où on entamera l'étude du projet de
loi, à procéder au dépôt des documents ou des
études que j'aurais déposés au Conseil consultatif du
travail et de la main-d'oeuvre? Si c'est cela la question, je veux simplement
lui signaler que, pour autant que je suis concerné, je n'ai fait le
dépôt d'aucun document. (17 h 15)
M. Pagé: Non, mais le comité consultatif du travail
et de la main-d'oeuvre a requis des documents, des données, des
chiffres, des quanta à prévoir. Est-ce que le ministre peut
s'engager, au moment du dépôt du projet de loi, pour que les
parlementaires puissent en être saisis lors de l'étude en
commission parlementaire probablement, entre la première et la
deuxième lecture, pour que les groupes ou les intervenants du milieu,
tant syndicaux que patronaux, qui seraient désireux de se faire entendre
sur cet aspect du projet de loi puissent avoir toutes les données et en
bénéficier? On a cru comprendre que, même si le
comité consultatif est formé de gens qui représentent les
parties patronales, syndicales, etc., ces données, ce n'est pas ce qu'il
y a de plus public. Vous le savez, M. le ministre.
M. Fréchette: Oui, je suis très conscient de cela.
Je voudrais d'abord signaler au député de Portneuf
qu'effectivement, le Conseil consultatif du travail a reçu toute la
documentation qu'il a requise, toutes les expertises qu'il a sollicitées
de la Commissision de la santé et de la sécurité du
travail. Tout le matériel lui a été remis et tout ce qu'il
a demandé, effectivement, comme matériel. C'est à partir
de l'analyse de cette documentation que le Conseil consultatif du travail a
élaboré ses avis quant à l'opportunité, encore une
fois, du contenu du projet de loi. Le député de Portneuf me
demande également et me donne avis d'une période de je ne sais
combien de mois, quand on en arrivera à l'étude en commission
parlementaire ou en deuxième lecture, si je serai disposé
à ce moment-là à procéder au dépôt de
ces mêmes documents qui ont servi au Conseil consultatif du travail pour
émettre ses avis sur le contenu du projet de loi. M. le
Président, je peux difficilement m'engager, dans l'état actuel
des choses et aujourd'hui, à procéder au dépôt de
cette documentation. En principe, cela ne répugne pas que l'on puisse le
faire, mais le député de Portneuf va comprendre qu'avant de
m'engager formellement, il y a un certain nombre de considérations dont
je devrai tenir compte. Mais, sur le plan du principe, je ne vois pas
qu'il y ait là de grands secrets d'État qui feraient ou
qui empêcheraient qu'effectivement ces mêmes documents puissent
être mis à la disposition des parlementaires qui auront à
procéder à la discussion de la loi.
M. Pagé: Les documents qui ont été
déposés au Conseil consultatif du travail étaient selon
une ou plusieurs hypothèses.
M. Fréchette: Je voudrais bien qu'on s'entende. Tout
è l'heure, le député de Viau a soulevé un aspect
particulier, un aspect éventuel très particulier du projet de
loi, c'est-à-dire le changement de vocation. Le député de
Portneuf entreprend la discussion sur un autre chapitre, celui...
M. Pagé: Des réparations.
M. Fréchette: ...du mode de financement. Je voudrais qu'on
s'entende. Me demandez-vous de procéder au dépôt de la
documentation qui aurait servi à la fois au cheminement de la vocation
de la société et à l'établissement des coûts
comparatifs par rapport à ce qui existe actuellement et à ce qui
pourrait exister? Je vous réitère ce que je viens de vous dire,
M. le Président. Je ne prendrai très certainement pas aujourd'hui
l'engagement de procéder au dépôt de ces documents. Je ne
vous dis pas que cela ne peut pas se faire. Je ne vous dis pas non plus qu'en
principe, cela devrait être accepté, mais je ne prendrai pas
l'engagement aujourd'hui d'y procéder, sans tenir compte d'un certain
nombre d'autres considérations.
M. Pagé: Ce n'était pas cela, la question. Je
m'excuse, M. le Président. Très brièvement, je la
réitère, parce que madame a une question qui attend. Dans le
rapport du Conseil consultatif du travail, on fait allusion à des
documents, à des renseignements, à des données et à
des chiffres qui ont été demandés à la commission
dans le cadre du projet de loi sur les réparations professionnelles. On
m'a indiqué tout à l'heure que ces données avaient
été fournies au Conseil consultatif du travail, lequel avait eu
à délibérer sur le sujet. Je vous demande, dans les
documents ou dans les données qui ont été fournis en vertu
du projet de loi sur la réparation professionnelle, si ces chiffres ont
été donnés en fonction d'une ou de plusieurs
hypothèses. Ce n'est pas compliqué.
M. Fréchette: Par rapport à la vocation?
M. Pagé: Par rapport à la loi sur les
réparations professionnelles, M. le ministre. Je m'excuse.
M. Fréchette: II y a eu des évaluations qui ont
été faites par rapport à plusieurs hypothèses,
effectivement: une hypothèse qui ferait que cela coûte plus cher,
considérablement plus cher, moyennement moins cher, que cela reste dans
le statu quo et des hypothèses qui feraient que cela coûte moins
cher. Vous savez, je commence à connaître un peu le
député de Portneuf, M. le Président. Il est probablement
au courant de toutes ces études de coûts, quand il nous parle de
ses sources de renseignements et que le député de Viau revient
là-dessus. Il sait très probablement de quoi il parle. La
documentation à laquelle il se réfère, il l'a sans doute
sous les yeux au moment où on se parle. Dans ces conditions, au chapitre
strict de l'étude des coûts, je peux aujourd'hui prendre
l'engagement de procéder au dépôt de la documentation qui
est strictement en relation avec l'étude des coûts.
M. Pagé: Pour toutes les hypothèses.
M. Fréchette: Oui, vous les avez déjà, de
toute façon.
M. Pagé: Merci, M. le Président. On va continuer
tantôt.
Le Président (M. Vallières): La parole est
maintenant à Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, je ne vous cacherai pas que ce
n'est pas tant ceux qui seraient surpayés qui me préoccupent que
ceux qui sont sous-payés. Les représentations que j'ai à
faire font suite à des représentations qui m'ont
été faites par une association d'accidentés très
active dans Maisonneuve, comme il en existe ailleurs dans plusieurs autres
régions du Québec. J'en profite pour dire que ces associations
ont parfois un comportement un peu frondeur, mais il n'en reste pas moins
qu'elles rendent des services absolument inestimables à leurs
concitoyens et certainement au bureau de comté du député
qui peut souvent leur référer des cas problèmes. Ces
personnes sont soutenues, tout au long des réclamations qu'elles ont
à faire, par ces associations. Il est évident que j'appelle de
tous mes voeux cette loi sur les lésions corporelles. On parle des
coûts financiers de la prochaine loi, mais encore faut-il parler du
coût social du maintien de la loi actuelle, un coût social
certainement très élevé quand on pense que cette loi,
malgré ses réformes, est vieille de cinquante ans et de plus en
plus difficile d'application.
Il y a certainement un coût économique à la loi
actuelle. Je retrouvais, dans une entrevue donnée par le
président, M. Sauvé, dans le Journal du travail, l'an
dernier,
certains renseignements concernant l'administration
générale de la commission: notamment ce chiffre assez
éloquent qui indiquait qu'au-delà de 85% des réclamations
admissibles concernaient des cas requérant au plus vingt jours de
travail. C'est donc dire que, dans la pratique courante, sur l'ensemble des
dossiers traités, l'administration des petites réclamations
occupait à peu près 85% du temps de l'administration, tandis que
15% du temps était utilisé pour les cas graves et complexes.
C'est donc dire que, dans l'administration même de la commission, il y a
certainement un coût économique, il y a certainement un coût
au maintien de la loi actuelle.
M. le Président, selon les représentations qui m'ont
été faites - je ne voudrais pas plaider parce que cela a
été fait éloquemment par d'autres - il n'y a pas
présentement de protection dans la loi pour une victime qui est
congédiée ou mise à pied en raison de son
incapacité ou de sa lésion. Il n'y a pas de protection non plus
pour les travailleurs ou les travailleuses domestiques qui ne sont pas
couverts.
Il y a également - je pense que c'est une injustice assez grave
qui, semble-t-il, serait réparée dans le cas de la Régie
des rentes avec la réforme qui est annoncée et attendue - dans le
cadre de la CSST, le cas du conjoint survivant qui perd toujours son droit
à une indemnité lors de son remariage. Je peux vous dire que
fréquemment on me dit combien les mariages augmenteraient dans mon
comté si tant est que les gens pouvaient légaliser leur
situation. Il y a toujours une indemnité de 35 $, c'est ce que m'ont dit
les travailleurs de mon comté, pour incapacité temporaire
minimale. Toutes choses qui, évidemment, appellent de façon
urgente une loi qui permettrait de remédier à ces cas-là,
tout en n'oubliant pas - parce que cette entrevue avec le président de
la CSST, d'ailleurs, le démontre très clairement - qu'il y a une
injustice du fait de ne pas être indemnisé au Québec
présentement, selon la même philosophie de base: selon que c'est
un accident d'automobile, selon qu'on est victime d'un acte criminel ou selon
qu'on est victime d'un accident de travail. Je pense que c'est certainement le
motif fondamental pour appeler une loi de réparation.
Les questions que je voudrais adresser au président de la CSST
portent sur l'administration courante. Il y a beaucoup de colère, d'une
certaine façon, chez des travailleurs accidentés, à la
suite de la décision, qui aurait été prise
l'été dernier, de ne plus indexer les allocations pour une
incapacité totale temporaire et pour la réadaptation. Vu qu'il y
a déjà 90% du salaire net qui est compensé, comme ils
voient le montant de la compensation gelé, sans indexation, semble-t-il
que cela crée un déséquilibre. Est-ce que c'est toujours
en vigueur? Qu'est-ce qui a bien pu présider à une telle
décision? N'y a-t-il pas lieu d'en revoir l'application?
Les travailleurs parlent très souvent d'un contingentement des
programmes de réadaptation sociale. Est-ce que c'est le cas pour
Montréal et serait-ce différent pour les autres régions du
Québec? Y a-t-il contingentement ou non dans les programmes de
réadaptation actuellement à la CSST?
Il y a un problème qui revient très souvent, celui du
non-dédoublement. En d'autres termes, il s'agit des prestations
d'invalidité de la Régie des rentes. Actuellement, on soustrait
des prestations de la CSST les prestations de la Régie des rentes.
Lorsqu'il y aura la réforme de la Régie des rentes et qu'il y
aura accès, admissibilité beaucoup plus grande à la
Régie des rentes à partir de 60 ans, sans autre preuve qu'un
certificat médical, semble-t-il, indiquant qu'on ne peut plus continuer
à maintenir l'emploi qu'on a toujours exercé, quelle sera alors
l'harmonisation avec la CSST? Est-ce qu'il y a eu des études
d'harmonisation qui ont été faites relativement à la
réforme de la Régie des rentes qui doit être
déposée très prochainement et qui, comme je le disais
tantôt, prévoit le maintien de l'allocation pour le conjoint
survivant?
Il y a deux autres aspects. Je crois que c'est possible, et j'ai
tenté d'explorer plus à fond cette question. Il semblerait
qu'à Montréal, il soit possible qu'un médecin puisse
à la fois être contractant avec la CSST et pratiquer en clinique
privée, donc recevoir un travailleur qui s'adresse à lui sans que
ce dernier sache que ce médecin peut être appelé à
travailler pour la CSST. Il y a des cas qui ont été portés
à ma connaissance, selon lesquels le mode de fonctionnement à
Montréal pourrait amener cette injustice. Je considère qu'au
minimum, il faudrait que la liste des médecins qui ont des contrats avec
la CSST soit connue, si tant est qu'il peut y avoir, à un moment
donné, un même médecin qui soit consulté et qui ait,
à la fois pour le travailleur et pour la CSST, à émettre
un certificat. (17 h 30)
Qu'en est-il des programmes à coûts partagés avec
l'assurance-chômage? Il y a des plaintes qui sont formulées, selon
lesquelles, pendant les périodes de recherche d'emploi, les travailleurs
se retrouvent transférés à l'assurance-chômage et ne
sont plus admissibles à la CSST.
Le Président (M. Vallières): M. le ministre.
M. Fréchette: Mme la députée de Maisonneuve
soumet plusieurs questions. Elle
a commencé son intervention en se référant à
ce groupe qui s'appelle l'Association des travailleurs accidentés du
Québec; quand on utilise le sigle, on retrouve ATAQ, si mon souvenir est
fidèle. J'ai eu l'occasion, il y a peut-être trois ou quatre mois
maintenant, un peu plus ou un peu moins, de rencontrer ce groupe de
travailleurs et de travailleuses accidentés qui m'ont fait part de
représentations qui, à bien des égards, sont
fondées. Une des principales préoccupations que soumet Mme la
députée de Maisonneuve est en relation directe, me semble-t-il,
avec la nécessité de procéder à l'harmonisation de
toutes nos lois qui prévoient des indemnités, qu'il s'agisse
d'assurance automobile ou de tout autre programme qui, effectivement,
prévoit des indemnisations.
Je voudrais simplement signaler, en réponse à cette
préoccupation, que l'un des objectifs fondamentaux, sinon le principal
objectif de la loi, est précisément d'arriver à
réaliser cette harmonisation. C'est, encore une fois, peut-être
l'élément le plus important de l'ensemble de la loi parce que,
effectivement, on se retrouve dans des situations qui, à bien des
égards et dans l'état actuel des choses, ne peuvent s'expliquer
ni par la logique, ni par l'équité, ni par la justice, ni par
aucune autre espèce de processus de raisonnement ou processus
mental.
Mme la députée de Maisonneuve a également
soulevé le problème de l'indexation. Dans le cas de
l'incapacité permanente, je pense que cela ne pose pas de
problème: l'indexation est là et elle est totale,
c'est-à-dire qu'elle est en conformité avec ce qui existe. Il est
par ailleurs exact que, depuis le 1er juin de l'année dernière,
me semble-t-il, les travailleurs ou travailleuses accidentés qui sont
affectés d'une incapacité totale mais temporaire ne
reçoivent plus, depuis ce moment-là, cette indexation. La seule
et unique raison pour laquelle cette décision a été prise,
c'est que, selon les avis juridiques du contentieux, il semble que, dans
l'état actuel de la loi, il ne soit pas possible, juridiquement,
d'indemniser dans les cas d'incapacité totale temporaire. Sans doute,
aurait-il été un autre chapitre pour le député de
Portneuf de nous parler de surpayés, si on avait accordé
l'indexation dans le cas des indemnités totales temporaires.
C'est un fait que, depuis le 1er juin dernier, ces paiements ont
cessé et cela crée effectivement, au niveau de ce qu'on pourrait
convenir d'appeler un droit acquis, cela provoque effectivement des
réactions vives. Je me place dans la situation dans laquelle se
retrouvent ces gens et j'aurais sans doute la même réaction. Il
est également évident que c'est une situation qu'il faudra
contribuer à régulariser.
Mme la députée de Maisonneuve a soulevé un autre
aspect de la pratique que j'appellerai quotidienne, concernant les intervenants
médicaux. Je me suis laissé dire, moi aussi, que certains
travailleurs s'étaient retrouvés dans la presque impossible
situation d'avoir reçu des traitements d'un médecin, d'avoir
été suivis en consultation pendant le temps que devait durer la
convalescence, d'avoir vu ce médecin poser un diagnostic et, à un
moment donné, de retrouver le même spécialiste ou le
même professionnel de la santé qui ferait - je dis bien qui ferait
- une évaluation pour le compte de la CSST.
Évidemment, si de semblables situations existent, il
m'apparaît clairement, M. le Président, qu'il y a pour le
professionnel qui est impliqué dans une telle situation une question
d'éthique importante. Je ne pense pas que la commission puisse suivre de
si près l'évolution de ce genre de situation pour pouvoir
identifier très clairement qui a été le médecin
traitant d'un accidenté immédiatement après que l'accident
s'est produit, lequel médecin deviendrait ensuite contractuel avec la
Commission de la santé et de la sécurité du travail, si
jamais il en était fait référence. Je
réitère que c'est là, à mon sens, selon mon
évaluation et avec tout le respect que je dois à la profession,
une question d'éthique fondamentale que de ne pas accepter de se
retrouver, à un moment donné, dans une situation de
contradiction, dans une situation qui pourrait ressembler étrangement
à un net conflit d'intérêts. C'est aux professionnels
mêmes qu'il faut lancer l'appel bien que la commission puisse
peut-être y voir de façon expresse pour tenter de
régulariser, de corriger au plus tôt, d'éviter que des
situations de cette nature se reproduisent.
M. Pagé: Comme pour les avocats.
M. Fréchette: Pardon?
M. Pagé: Comme pour les avocats.
M. Fréchette: On pourra y revenir. S'il y a des situations
semblables chez les avocats, le même principe devrait s'appliquer.
M. Pagé: On en parle en haut.
M. Fréchette: C'est pour cela que vous ne voulez pas
accepter le mandat de la commission d'aller chercher les surpayés.
M. Pagé: On en parle en haut.
M. Fréchette: Maintenant, je pense qu'il est important de
signaler également que, dans 80% des cas, les avis médicaux du
médecin traitant, le diagnostic final posé par le médecin
traitant est celui qui est retenu
par la commission, le médecin traitant qui a reçu le
travailleur ou la travailleuse en consultation immédiatement
après son accident, qui a suivi l'évolution de l'état de
santé de ce travailleur accidenté ou de cette travailleuse
accidentée et qui, à la toute fin du traitement, va porter un
jugement sur l'état d'incapacité du travailleur. Dans 80% des
cas, c'est ce diagnostic-là et cette évaluation-là qui
sont acceptés par la commission pour les fins de l'indemnisation qui lui
sera versée, qui peut lui être due.
Mme la députée de Maisonneuve a également soumis le
cas qu'elle a identifié comme celui des coûts partagés avec
l'assurance-chômage. À ce chapitre-là, M. le
député de Portneuf, vous allez me permettre de demander au
président de la commission de préciser quelle est la politique de
la commission.
Le Président (M. Vallières): Alors, au nom du
ministre du Travail, le président de la Commission de la santé et
de la sécurité du travail.
M. Fréchette: C'est M. Bernier qui l'expliquera parce que
c'est sa spécialité.
Le Président (M. Vallières): M. Bernier.
M. Fréchette: II y a effectivement une entente qui a
été signée avec la Commission de
l'assurance-chômage, Emploi et Immigration Canada, au sujet des
indemnités qui étaient versées en réadaptation. On
s'était rendu compte que, lorsque les accidentés étaient
inscrits à un programme de recherche d'emploi au Québec et qu'on
leur versait des indemnités de réadaptation pouvant aller
jusqu'à 90% du revenu, la Commission de l'assurance-chômage
refusait de faire bénéficier ces accidentés de ses
services de recherche d'emploi et refusait également de leur verser les
prestations d'assurance-chômage auxquelles ils avaient droit. On a
vérifié dans les autres provinces et, dans les autres provinces,
les accidentés avaient droit aux services de l'Emploi et de
l'Immigration ils recevaient la différence entre ce que versait la
Commission de l'assurance-chômage - puisque l'accidenté, à
ce moment-là, était considéré apte à
retourner au travail - et ce que versait la commission en cause.
On a donc fait une entente et le travailleur ne reçoit pas moins
à titre d'indemnité. Il reçoit toujours 90% du montant de
son salaire net, sauf que le premier payeur est la Commission de l'emploi et de
l'immigration et la différence lui est versée par la Commission
de la santé et de la sécurité du travail. À ce
moment, le travailleur bénéficie à la fois des services de
réadaptation de la commission et des services qui sont dispensés
pour la recherche d'emplois par la Commission de l'emploi et de
l'immigration.
Le Président (M. Vallières): Mme la
députée de Maisonneuve, vous avez terminé. J'ai plusieurs
demandes d'intervention.
Mme Harel: Je n'ai pas terminé, M. le Président. Je
ne demanderai pas à M. Bernier quels sont les services dispensés
par les bureaux d'assurance-chômage auxquels il fait
référence. Concernant la réadaptation, y a-t-il un
contingentement des services de réadaptation présentement, compte
tenu des demandes qui sont formulées?
M. Fréchette: Non, il n'y a aucun contingentement. Tout ce
que la commission a fait, c'est de s'être rendu compte que, dans les
petits cas d'incapacité, la procédure administrative qu'elle
avait adoptée faisait que toute personne qui avait un déficit
physique quel qu'il soit, qu'il soit de 1% ou de 2% ou de 0,5%, passait dans le
mécanisme de réadaptation qui était prévu,
même si elle était retournée au travail. On avait
institué ce qu'on appelait un mécanisme de détection
précoce des accidentés qui avaient besoin de réadaptation
et ce mécanisme était élargi à tous les
accidentés. Ce qu'on a fait, c'est qu'on a dit: on va conserver cette
procédure pour les accidentés qui ont 10% et plus
d'incapacité et, dans les autres cas, ce sera sur demande que les
programmes de réadaptation pourront leur être appliqués. Il
n'est pas question de contingenter. Il est tout simplement question
d'éliminer un fardeau administratif inutile, puisque à peu
près 5% de ces cas ayant une incapacité de 10% et moins, avaient
besoin de réadaptation.
C'est ce qui fait qu'il y a moins de gens qui passent dans le
mécanisme de réadaptation ou rencontrent les gens de la
réadaptation, mais, si ces personnes en ont besoin, si elles sont
détectées chez nous ou si le travailleur ne retourne pas à
son emploi, cette personne ou ce travailleur a droit systématiquement au
même programme de réadaptation, quel que soit son taux
d'incapacité. C'est tout simplement une procédure administrative
pour ne pas surcharger nos gens, ne pas rendre le processus bureaucratique trop
lourd et s'assurer que nos gens aient le temps de faire de la
réadaptation également.
Le Président (M. Vallières): Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: Vous allez me permettre une autre question, concernant
les mesures instaurées par la CSST. Il est maintenant notoirement
souhaité que la réglementation, la législation
déléguée, puisse en fait permettre à des parties
concernées de se
faire entendre. Je fais référence, par exemple, à
la Loi sur le cinéma qui est en discussion présentement devant
l'Assemblée où, lors de la commission parlementaire, le ministre
des Affaires culturelles s'est engagé à ce que la
réglementation qui va découler de la loi puisse même faire
l'objet d'une commission parlementaire. En tout cas, dans la loi, il est
prévu qu'elle doit être publiée 30 jours à l'avance
dans la Gazette officielle et les parties concernées pourront faire
valoir leur point de vue.
J'aimerais savoir pour l'avenir, pour que cet avenir, il faut le
souhaiter, soit le plus immédiat possible, compte tenu de la nouvelle
loi sur les lésions corporelles: est-ce qu'on peut s'attendre que la
réglementation, c'est-à-dire les mesures qui ont une incidence
sur les parties concernées, et je pense, en particulier, aux
travailleurs, puissent faire justement l'objet d'une réglementation sur
laquelle les parties pourront se faire entendre avant qu'elle soit en
vigueur?
Le Président (M. Vallières): M. le ministre. (17 h
45)
M. Fréchette: Je vais donner une réponse et, si
elle n'était pas complète, je suis sûr qu'on pourra la
compléter. Dans l'état actuel des choses, quand il s'agit d'une
réglementation qui découle de la Loi sur les accidents du
travail, il y a effectivement une prépublication dans la Gazette
officielle et une prépublication de 30 jours permettant aux personnes
intéressées ou aux organismes intéressés de faire
valoir leur argumentation quant au contenu de cette réglementation et,
dans le cas de la Commission de la santé et de la sécurité
du travail, c'est le même mécanisme qui existe, avec un
délai de 60 jours au lieu de 30 jours. Si je comprends bien le souhait
qu'émet Mme la députée de Maisonneuve, c'est que non
seulement on puisse se prévaloir du droit de faire valoir une
argumentation, mais qu'en même temps, ce soit soumis à
l'approbation d'une commission parlementaire ou d'un processus parlementaire
qui ferait que les élus pourraient discuter du contenu d'une semblable
réglementation. M. le Président, sur le plan du principe, surtout
quand il s'agit de cas qui touchent très précisément le
processus d'indemnisation lui-même ou le processus qui vise directement
le salarié accidenté, je suis tout à fait disposé
à regarder de très près la possibilité qu'on puisse
inclure dans l'éventuelle loi une disposition qui permettrait d'arriver
à réaliser cet objectif, surtout si, déjà, il y a
un précédent de créé dans une autre loi à
laquelle vous nous référez.
Le Président (M. Vallières): J'ai maintenant trois
demandes d'intervention qui ont été faites dans l'ordre par les
députés de Viau, Sainte-Anne et Sainte-Marie. Le
député de Sainte-Marie aurait, je pense, une question de
règlement. Peut-être que, demain, il ne pourra pas être
ici.
M. Bisaillon: Non, pas nécessairement, M. le
Président. Si vous me donnez la parole, il n'y aura pas de question de
règlement.
Le Président (M. Vallières): J'avais prévu
donner la parole au début au député de Viau, que j'avais
reconnu.
M. Bisaillon: Alors, question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, je pense que vous savez ce
que je veux vous dire. Si je suis de leur côté, je ne suis pas
nécessairement de leur bord. Je conçois que la période des
crédits est effectivement une partie qui doit revenir fort
majoritairement à l'Opposition. Par ailleurs, on a toujours
respecté le principe de l'alternance à cette commission. Comme
c'est un débat fermé et que j'ai compris que, lorsqu'on finirait
la période avant le souper, il en serait terminé de la Commission
de la santé et de la sécurité du travail, j'avais quelques
questions que je n'ai pas encore posées et il me semble que j'aurais la
possibilité de le faire en cinq minutes.
Le Président (M. Vallières): M. le ministre.
M. Fréchette: Ce n'est pas l'entendement que j'en ai eu au
début, lorsqu'on a essayé d'établir nos règles de
fonctionnement. J'ai cru comprendre que c'était le désir de
l'Opposition que, demain, l'on puisse continuer sur le même programme, ce
à quoi nous n'avons aucune espèce d'objection, étant par
ailleurs bien entendu que nous ne devrions pas déborder les neuf heures
prévues pour l'ensemble.
M. Pagé: Question de règlement, très
brièvement.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Portneuf, sur une question de règlement.
M. Pagé: M. le ministre du Travail a évoqué
que les gens de la commission seraient disponibles demain, que l'horaire
initial prévoyait que les crédits devaient être
étudiés jusqu'à 13 heures demain et qu'après cela,
le temps serait écoulé, sous réserve, toutefois, d'une
entente à survenir ou à
intervenir entre les deux leaders. Vous êtes soumis à votre
leader, M. le ministre, moi aussi.
M. Fréchette: Je m'excuse, mais pourriez-vous reprendre
votre énoncé?
M. Pagé: Sous réserve toutefois... La banque
d'heures, la quantité d'heures qui a été établie
pour vos crédits...
M. Fréchette: Oui.
M. Pagé: ...c'est toujours sous réserve de
l'acceptation par votre leader et le nôtre de revenir à une
séance un mercredi soir, un vendredi matin, un vendredi
après-midi ou à toute autre date que les leaders jugeront
opportun d'établir pour continuer les travaux de la commission
parlementaire et entendre les honorables représentants de la Commission
de la santé et de la sécurité du travail.
M. Fréchette: M. le Président, ce n'est pas
l'entendement que j'en ai. Cela peut sans doute être
vérifié, mais j'ai compris que la règle imposait de
façon préalable que les deux leaders, effectivement, s'entendent
sur une enveloppe globale, ce qui a été fait. Les deux ont
convenu qu'une période de neuf heures était sans doute suffisante
pour compléter l'étude des différents programmes. Quand le
député de Portneuf me parle de la possibilité de revenir
un mercredi soir, un samedi matin ou un dimanche, à Pâques ou
à Noël, je n'ai pas d'objection à cela. Le
député de Portneuf sait très bien qu'il existe une
procédure simple dans notre règlement, qui s'appelle la question
avec débat. Il me semble que ce serait une belle question qui pourrait
être inscrite au feuilleton et on pourrait...
M. Pagé: Une motion de blâme et tout cela.
M. Fréchette: Oui, absolument. M. Pagé: Le
règlement est là. M. Fréchette: C'est cela.
Le Président (M. Vallières): Je veux vous indiquer
immédiatement que j'aurai l'occasion de consulter d'autres personnes qui
occupent le poste de président aux commissions parlementaires afin de
savoir, au niveau du principe de l'alternance, si, effectivement, la venue d'un
député indépendant nous permet d'appliquer le principe de
l'alternance...
M. Bisaillon: On n'y peut rien, M. le Président.
Le Président (M. Vallières):
...ministérielle, de passer à l'Opposition et ensuite au
député indépendant.
M. Bisaillon: Je vais même vous signaler, M. le
Président, que le whip du parti ministériel s'est essayé
à plusieurs reprises à soulever cette question, qu'il y a eu des
jugements de rendus là-dessus et qu'à l'intérieur d'un
débat fermé, normalement, c'est l'Opposition, moi et un
député ministériel, et que, par la suite, on revient
à l'Opposition. Or, dans les circonstances, je vous signale qu'il y a eu
deux interventions de l'Opposition et une intervention ministérielle que
j'ai laissée aller. Il me semble que je devrais profiter des
dernières cinq ou dix minutes.
Le Président (M. Vallières): M. le
député de Sainte-Marie, vous avez la parole.
M. Bisaillon: Merci, M. le Président. J'ai quelques
questions rapides à poser au président de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail ou au ministre du
Travail. Je les pose en vrac, on me répondra globalement à la
fin, en vrac aussi, je connais le ministre du Travail.
D'abord, j'aimerais avoir une réponse à une question qui a
été soulevée par la ministre - c'est un lapsus - par la
députée de Maisonneuve, qui n'a pas reçu de
réponse, c'est-à-dire qu'elle porte sur un trou qu'on avait
souligné au moment où on a voté la loi 17, soit
l'impossibilité souvent pour le travailleur d'être
réintégré dans ses fonctions après avoir subi un
accident de travail. La députée de Maisonneuve a soulevé
cette question. Je voudrais savoir si, à la Commission de la
santé et de la sécurité du travail, on a des
données là-dessus maintenant. A-t-on tenu compte de ce qui
arrivait aux travailleurs qui avaient subi des accidents de travail? Peut-on
nous donner des statistiques à cet égard? Combien ont
été réintégrés dans leur ancien emploi?
Combien ont été réintégrés dans l'entreprise
à laquelle ils appartenaient sans nécessairement être au
même emploi? Combien ont tout simplement été
congédiés par la suite? C'est ma première question.
Deuxième question: La Commission de la santé et de la
sécurité du travail dépense des sommes d'argent pour
préserver les travailleurs des accidents de travail. Il y a cependant
des coûts sociaux qui ne dépendent pas nécessairement de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail. Je me
réfère, par exemple, aux traitements hospitaliers, aux
traitements des professionnels. Y a-t-il possibilité de savoir, pour les
cas qui ont été traités par la Commission de la
santé et de la sécurité du travail, ce que
représentent ces coûts sociaux au moment où on se parle?
Est-ce
qu'une partie de ces coûts sociaux sont imputés au budget
de la Commission de la santé et de la sécurité du travail
ou si c'est réparti dans les différents ministères qui en
sont responsables? C'est ma deuxième question.
Troisième question. On a parlé - je crois que c'est le
whip de l'Opposition qui en a parlé - de cet élément de la
loi qui permet à un travailleur de cesser son travail s'il sent sa
sécurité en danger. Combien y a-t-il eu, à la connaissance
de la commission, d'arrêts de travail nécessitant l'intervention
de la Commission de la santé et de la sécurité du travail
depuis l'application de la loi?
Quatrième question. Quels sont actuellement les délais
minimaux et maximaux pour le règlement des dossiers à la
Commission de la santé et de la sécurité du travail?
Évidemment, je comprends que les cas ne sont pas tous identiques. Il y a
des cas plus litigieux. Quels sont les délais minimaux et maximaux et,
à l'intérieur de ces délais minimaux et maximaux, peut-on
nous situer le pourcentage des travailleurs concernés? Est-ce que 80% se
règlent en trois semaines et 20% en trois ans? Est-ce le contraire?
Où est-ce que cela se situe à l'intérieur du délai
minimal et maximal?
Cinquième question. Les médecins. J'ai eu l'occasion de
toucher à plusieurs dossiers où il y avait des conflits entre le
médecin traitant et les médecins de la commission, entre autres
un dossier qui s'est répété à plusieurs reprises,
où les médecins de la commission exigeaient des radiographies, ce
que les médecins traitants se refusaient à prescrire,
prétextant, par exemple, que l'abus de la radiographie pouvait
représenter un danger. Donc, le médecin traitant se refusait
à prescrire une radiographie. Quelle est la position de la CSST
là-dessus? Quelle est l'attitude de la Commission de la santé et
de la sécurité du travail lorsqu'il y a un conflit entre deux
professionnels?
Ma dernière question va concerner le personnel de la Commission
de la santé et de la sécurité du travail. Quel est
actuellement le personnel permanent de la commission? Combien y a-t-il
d'employés occasionnels ou à contrat? Est-ce que tous ces
employés dépendent de la Loi sur la fonction publique? Combien y
en avait-il au moment de l'intégration de l'ancienne Commission des
accidents de travail? Combien y a-t-il d'employés qui ont
été intégrés à la CSST? Donc, quelle a
été l'évolution du personnel? Comment se situe ce
personnel en région par rapport au centre de Montréal?
Finalement, quels sont les efforts pour intégrer dans le personnel
nouveau de la CSST du personnel actuellement à l'emploi de la fonction
publique? Autrement dit, est-ce qu'à la direction du personnel, il y a
des efforts qui sont tentés pour prêter du personnel à
d'autres ministères de la fonction publique ou si, lorsqu'il y a des
postes vacants, on s'adresse d'abord et avant tout au personnel en
disponibilité dans la fonction publique?
Le Président (M. Vallières): M. le président
de la CSST, au nom du ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je commence par la
dernière question concernant le personnel. Nous avions 2800 postes
autorisés, effectivement. Au moment où je vous parle, nous avons
soumis un dernier document au Conseil du trésor où nous avons
2742 postes autorisés, donc une diminution de 58 postes par rapport
à l'an dernier et par rapport au mandat du début. Nous avons
actuellement 2219 postes réguliers occupés à la
commission, avec les 355 de l'inspection, puisque nous tenons une
comptabilité à part, étant donné que cette section
est payée par le gouvernement. Tout le financement de l'inspection est
payé par le gouvernement en vertu de l'article 249 de la Loi sur la
santé et la sécurité du travail; si on additionne les
deux, cela fait 2574. Tout ce monde est régi par la Loi sur la fonction
publique et la répartition est la suivante. Au moment où je vous
parle, il y a 1305 personnes en région, 1269 au siège social
à Québec et à la Direction de la prévention et de
l'inspection située au 1199, rue Bleury, à Montréal...
M. Bisaillon: Le siège social est à
Québec.
M. Fréchette: Le siège social est à
Québec. À ma connaissance, cela prend un décret du
gouvernement pour changer le siège social. Si vous en trouvez un, on
serait très heureux de le voir.
C'est 2574 personnes. Nous avons, avec le Conseil du trésor, une
entente pour 175 occasionnels permis et voici pourquoi: 75 occasionnels nous
ont été autorisés pour les systèmes d'informatique
sur une période de deux ans, étant donné qu'à la
fin de décembre 1983, nous aurons terminé la partie majeure de
l'implantation de nos systèmes. Je peux vous dire que, parmi ces 75
occasionnels, au moment où je vous parle, il y en a 50 en place. Donc,
on diminue graduellement. Nous maintenons, à longueur d'année,
à la commission, environ 40 personnes en congé de
maternité et 10 en congé de maladie prolongé, ce qui nous
permet donc un petit écart de 50 personnes pour des périodes de
pointe, par exemple, la cotisation ou, à certaines périodes de
l'année, la réparation dans les régions.
J'espère avoir répondu...
M. Bisaillon: Ces 2500 personnes dépendent du budget de la
CSST, alors que
300...
M. Fréchette: Moins les 355.
M. Bisaillon: Moins les 300. Donc, quelque 2200.
M. Fréchette: Si vous voulez. Il y en a 2219 qui
dépendent du budget de la CSST et 355 de celui de l'inspection.
M. Bisaillon: Maintenant, parmi ces 2219 personnes qui
dépendent du budget de la CSST, combien y en avait-il qui étaient
déjà là sous l'ancienne loi? Autrement dit, combien en
avez-vous intégré au départ et combien y a-t-il de
personnel nouveau? Finalement, c'est ce que j'essaie de savoir, ce personnel
nouveau vient-il de la fonction publique?
M. Fréchette: Oui.
M. Bisaillon: Était-il déjà ailleurs dans la
fonction publique ou si c'est du personnel neuf, engagé selon la Loi sur
la fonction publique?
M. Fréchette: Au mois de mars 1980, lorsque la Commission
de la santé et de la sécurité du travail est née,
nous avions comme effectif autorisé 1900 personnes et nous avions
effectivement 1900 personnes. Donc, on a ajouté, à ce
moment-là, 132 personnes qui venaient du ministère du Travail, de
l'inspection, environ 20 personnes du ministère de l'Énergie et
des Ressources, 25 ou 26 personnes du ministère de l'Environnement et 46
personnes de l'OCQ. Elles ne faisaient pas partie de la fonction publique. Si
vous vous le rappelez, par le biais de l'intégration, il y a eu un
amendement à la loi - je pense que c'était la loi 10 sur la
fonction publique, à l'époque - qui les a
intégrées...
M. Bisaillon: En juin.
M. Fréchette: ...parce que ces gens-là, c'est un
peu une garantie en vertu de la loi sur la qualification professionnelle: quand
vous coupez un emploi, vous le garantissez. Par voie de conséquence,
presque tout ce monde venait de la fonction publique. Il y a eu de nouveaux
postes, à l'époque, chez les professionnels. Par exemple, du
côté de la prévention, il y a 232 employés
autorisés. Ces gens-là sont surtout des spécialistes de
toutes sortes: en hygiène industrielle, en toxicologie, en
médecine du travail, etc. Ces spécialistes étaient
plutôt rares à l'intérieur de la fonction publique; on a
donc fait des concours selon la Loi sur la fonction publique. (18 heures)
Le Président (M. Vallières): S'il vous
plaît!
Je constate qu'il est 18 heures et, à moins que nous n'ayons un
consentement unanime pour prolonger nos travaux, nous devrons les ajourner
à demain, 10 heures.
M. Bisaillon: Dois-je comprendre, M. le Président, que
demain matin, lors de la reprise, on continuera à me fournir des
réponses?
Le Président (M. Vallières): Exactement. M.
Bisaillon: II n'y a pas de problème.
Le Président (M. Vallières): Nous pourrions
commencer la journée de demain avec le programme 2 qui, semble-t-il, ne
sera pas adopté aujourd'hui.
M. le ministre.
M. Fréchette: J'avais cru comprendre que le
député de Sainte-Marie ne serait peut-être pas là
demain.
M. Bisaillon: Non, je serai là demain matin.
M. Fréchette: Bon. Je m'apprêtais à
solliciter le consentement pour que vous ayez vos réponses.
Le Président (M. Vallières): Très bien. La
commission ajourne ses travaux à demain, 10 heures, même
salle.
(Fin de la séance à 18 h 01)