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Etude du projet de loi no 97
(Dix heures quatorze minutes)
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente des terres et forêts est réunie
pour étudier le projet de loi no 97, Loi modifiant la Loi de la
Société de récupération, d'exploitation et de
développement forestiers du Québec.
Les membres de la commission sont: MM. Bérubé (Matane),
Brassard (Lac-Saint-Jean), Desbiens (Dubuc), Giasson (Montmagny-L'Islet),
Jolivet (Laviolette), Picotte (Maskinongé) remplace Larivière
(Pontiac-Témiscamingue); Marquis (Matapédia), Perron (Duplessis),
Roy (Beauce-Sud), Bro-chu (Richmond) remplace Russell (Brome-Missisquoi).
Les intervenants sont: MM. Baril (Arthabaska), Lamontagne (Roberval),
Léger (Lafontaine), Lèves-que (Kamouraska-Témiscouata),
Marcoux (Rimouski), Mercier (Berthier), O'Gallagher (Robert Baldwin), Samson
(Rouyn-Noranda).
A l'ajournement de jeudi nous en étions à l'article 3. M.
le ministre.
Conseil d'administration (suite)
M. Bérubé: L'article 3, M. le Président,
porte sur la constitution d'un conseil d'administration suivant le mode
traditionnel qui a toujours existé pour REXFOR et pour la plupart des
sociétés d'Etat.
A la suite de l'article 11, nous insérons: "Lorsque les membres
du conseil d'administration sont élus pour deux ans ou moins, le
lieutenant-gouverneur en conseil fixe le traitement du président de
même que les indemnités et allocations auxquelles ont droit le
président et les autres membres."
Il s'agit donc d'un article qui permet de remettre en vigueur les
conditions antérieures des nominations, faites par le
lieutenant-gouverneur en conseil, puisque le lieutenant-gouverneur en conseil
fixe les indemnités, les allocations et le traitement. Cependant, ce que
nous inscrivons dans cet article c'est que le lieutenant-gouverneur ne peut
plus le faire que pour deux ans. En d'autres termes, si le gouvernement choisit
de nommer directement son conseil d'administration en définissant tous
les termes de l'engagement par arrêté en conseil, cette nomination
ne pourra excéder deux ans. Si le gouvernement veut excéder deux
ans, c'est l'article 2 de la présente loi qui s'appliquera,
c'est-à-dire que le ministre des Finances va choisir les
administrateurs, le conseil d'administration devra définir les
conditions d'exercice de ce mandat et le lieutenant-gouverneur en conseil devra
approuver le contrat définissant ces conditions.
Voilà le mode normalement en vigueur pour des nominations
excédant deux ans, mais ne dépassant pas, cependant, cinq ans.
Cependant, il peut très bien se produire particulièrement
dans des périodes de démarrage, lorsque le conseil
d'administration n'est pas formé ou lorsqu'un gouvernement voudrait
changer totalement le conseil d'administration à la fin du mandat des
administrateurs il est alors difficile de demander à l'actuel
conseil de prévoir la nomination des successeurs, et, par
conséquent, il faut que le gouvernement intervienne directement. Dans
ces conditions, évidemment, nous revenons au mode traditionnel de
nomination des membres du conseil. Cet article a comme but simplement de
permettre au gouvernement de choisir les administrateurs. Nous limitons,
cependant, le pouvoir des gouvernements, dans ce cas, à deux ans.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que l'article 3 est
adopté?
M. Brochu: Adopté.
M. Giasson: Je n'ai pas de questions.
Le Président (M. Boucher): Adopté, l'article 4.
M. Bérubé: L'article 12 de ladite loi, est
remplacé par le suivant je vous rappelle l'article 12: "Chacun
des membres du conseil d'administration demeure en fonction après
l'expiration de son mandat jusqu'à ce qu'il ait été
remplacé ou nommé de nouveau" L'article 12 est
remplacé par "En cas de vacance ou lorsqu'un membre est incapable
d'agir, l'intérim est assuré par une personne nommée par
le lieutenant-gouverneur en conseil, qui fixe ses indemnités et
allocations."
M. Giasson: Dans l'ancienne loi, il n'y avait pas de dispositions
ou de prévisions relatives au remplacement d'un administrateur de la
société?
M. Bérubé: Non, cependant, c'était le
lieutenant-gouverneur en conseil qui nommait automatiquement les membres du
conseil d'administration. Il n'était donc pas nécessaire
d'introduire dans la loi une clause identique à celle que nous
introduisons maintenant. En d'autres termes, advenant l'obligation d'agir
rapidement, le nouvel article 12 nous permet de nommer par intérim une
personne. Il s'agit ici d'un pouvoir d'urgence.
M. Giasson: La différence porte donc sur la
réalité que là c'est le ministre qui nomme les
administrateurs...
M. Bérubé: Par intérim.
M. Giasson: Oui mais le contrat qui va lier les administrateurs
avec la société, il faut qu'il soit ratifié quand
même par le lieutenant-gouverneur en conseil.
M. Bérubé: Oui.
M. Giasson: II va y avoir contrat entre la société
et ses administrateurs, mais il est encore nécessaire que le
lieutenant-gouverneur en conseil ratifie ces nominations?
M. Bérubé: Toujours. La seule
différence...
M. Giasson: En dernier ressort, c'est toujours le
lieutenant-gouverneur qui a la décision finale.
M. Bérubé: Qui approuve. La différence
fondamentale...
M. Giasson: S'il n'approuve pas, qu'est-ce qui se produit?
M. Bérubé: A ce moment-là, c'est le conseil
d'administration qui doit revoir sa décision. Je suis absolument
d'accord avec vous, cela oblige le Conseil des ministres à être
d'accord avec la nomination, ou du moins avec les termes du contrat, faite par
le conseil d'administration. Cependant, cela donne une autorité beaucoup
plus grande au conseil d'administration pour définir les conditions
d'exercice du mandat, ce que les conseils d'administration n'avaient pas dans
le passé. C'est cela la différence.
M. Giasson: Le contrat, s'il n'est pas ratifié par le
lieutenant-gouverneur, sa nomination...
M. Bérubé: II est caduc; l'administrateur ne peut
exercer son mandat.
M. Giasson: Donc, l'article 4 de la présente loi qui
modifie l'article 12, en définitive, donne à peu près les
mêmes pouvoirs au lieutenant-gouverneur en conseil lorsqu'il s'agit de
remplacer un commissaire qui ne peut plus siéger.
M. Bérubé: Exactement.
M. Giasson: C'est encore le Conseil des ministres qui a pleine
autorité.
M. Bérubé: Exactement.
M. Giasson; Je suis prêt à l'adopter, M. le
Président.
M. Brochu: D'accord.
Le Président (M. Boucher): Adopté. L'article 5.
M. Bérubé: L'article 13 de ladite loi est
remplacé par le suivant: ceci a fait l'objet, à
l'Assemblée nationale, d'un long débat. L'article 13 de ladite
loi se lisait ainsi: "Nul ne peut être membre du conseil d'administration
s'il n'est pas domicilié au Québec, mais la qualité
d'actionnaire n'est pas requise."
Dans le cas présent, l'article 13 serait modifié pour se
lire ainsi: "Les administrateurs, dans une proportion d'au moins les deux
tiers, doivent être domiciliés au Québec. La qualité
d'actionnaire n'est pas requise pour être administrateur de la
société."
En fait, M. le Président, je ne vous cacherai pas, pour autant
que je suis concerné, que j'aurais carrément
préféré abolir l'article 13. En d'autres termes, j'estime
que si un gouvernement élu par les Québécois devait
choisir de confier une société d'Etat entièrement à
des mains étrangères, cela indiquerait que les citoyens se sont
trompés au moment de l'élection; cependant, ils devront assumer
les conséquences de leur décision puisqu'ils ont choisi ce
gouvernement. Il ne m'apparaît pas approprié de limiter le pouvoir
d'un gouvernement dans le choix des administrateurs. Il m'apparaît bien
évident que c'est peu probable qu'un gouvernement décide de
choisir, à dessein, un grand nombre d'administrateurs étrangers
pour une société d'Etat.
Cependant, l'idée qui sous-tend le présent article est
simple. Dans l'hypothèse où, par suite de relations d'affaires,
par suite d'échanges entre le Québec et d'autres pays
pourquoi pas le Canada dans le cadre de ses accords d'association nous
devions choisir de nommer un Canadien au conseil d'administration, ou un
Américain, ou un Français, ou un autre, je pense que ce serait
tout à fait défendable. A titre d'exemple, tout récemment
on a assisté, dans le Nord-Ouest, à la création d'une
nouvelle entreprise, Forex-Leroy, et cela amène une entreprise bien
québécoise, le groupe Cossette, à travailler avec le
groupe Leroy en France. On peut très bien imaginer, un jour, que les
liens devenant assez serrés, on procède à un
échange d'administrateurs aux conseils d'administration. Cela
m'apparaît une pratique, d'une part, courante dans l'entreprise
privée et, d'autre part, cela permet d'élargir les horizons d'un
conseil d'administration.
Si un gouvernement devait un jour voir un avantage à une telle
opération, je vois mal pourquoi une loi devrait l'en empêcher.
Cependant, lors du débat sur la loi gérant la
Société nationale de l'amiante, l'Opposition s'était
opposée à la non-apparition pure et simple d'un tel article dans
la loi c'est ce que nous avions fait et nous avions finalement
consenti à un amendement, je pense, qui avait été
présenté par le député de Richmond, qui demandait
qu'au moins les deux tiers, sachant la faiblesse de son parti et les tentations
grandes qu'il pourrait avoir si jamais il arrivait au pouvoir, de ne nommer que
des étrangers, il a senti le besoin de se protéger
lui-même. Il a donc demandé que nous ne puissions nommer plus que
les deux tiers et nous avons consenti, sachant que nous n'étions pas
éternels et que, sans doute, peut-être un jour, en l'an 2000 ou
4000, l'Union Nationale pourrait reprendre le pouvoir et il serait important de
les protéger contre eux-mêmes, au moins pour la durée d'un
mandat, sachant qu'ils ne pourraient certainement pas résister plus
qu'un mandat. Mais, néanmoins, j'ai donc accepté d'introduire
directement dans le présent projet de loi, les deux tiers.
M. Giasson: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: En prenant connaissance du nouveau libellé de
l'article 13, il m'apparaît assez clair que l'on songe au gouvernement
à nommer un ou des administrateurs non domiciliés au
Québec. Cela m'apparaît assez évident en dépit de
tous les propos que le ministre a tenus au cours des derniers instants. Que le
ministre soit donc franc, ouvert, limpide et transparent et qu'il nous dise
immédiatement qu'il a l'intention de nommer des administrateurs à
la société REXFOR qui ne seraient pas des gens domiciliés
au Québec et qu'il nous dise les raisons pour lesquelles, au-delà
des motifs qu'il a invoqués, pourquoi on n'aurait pas suffisamment de
Québécois de chez nous, domiciliés au Québec, qui
pourraient répondre à toutes les attentes et tous les espoirs
qu'on met en REXFOR. Qu'il nous explique cela au-delà de sa
rhétorique.
Dans le secteur forestier au Québec, il y a certainement une
très grande quantité de gens qui ont une compétence
inattaquable. Le ministre pourra nous dire qu'ils sont présentement pour
une large part, dans l'industrie privée. C'est vrai...
M. Bérubé: Si on abolit l'article 14,
évidemment nous n'aurons aucun problème.
M. Giasson: C'est vrai, mais REXFOR est capable d'aller chercher
des compétences que nous avons au Québec, quelle que soit
l'entreprise qui les occupe présentement, pour les utiliser à
temps plein et je ne vois pas de nécessité qu'on doive garder de
la place ou des espaces pour des administrateurs de REXFOR qui ne seraient pas
domiciliés au Québec. Le ministre ne pourra jamais me faire
accepter cela, jamais.
S'il a besoin d'établir des contacts avec des
sociétés étrangères en vue d'utiliser la technique
qui peut exister à l'extérieur, les capacités de
marché, il y a certainement moyen d'atteindre les mêmes fins, sans
devoir procéder à l'administration d'administrateurs qui ne
seraient pas des Québécois. Le ministre le sait aussi bien que
moi.
Lorsque l'Union canadienne je vais lui donner des exemples, il en
a invoqué tout à l'heure a voulu profiter de la situation
d'un marché qui était en France, il n'a pas nommé de
Français sur le conseil d'administration de l'Union canadienne. Il a
conclu une entente avec une compagnie française, la compagnie Lenormand
et les échanges se font entre les deux entreprises. La capacité
de souscrire du marché en Europe, l'Union canadienne l'a par cette
compagnie française et il n'a pas besoin d'administrateurs
français sur la société. Il a cité l'exemple de
Forex tout à l'heure. Forex n'a pas nécessairement nommé
d'administrateurs non Québécois à sa direction. Elle a
passé un traité, elle a négocié une association
avec une autre entreprise de l'extérieur et va mener des
opérations en vertu d'ententes et de contrats signés entre les
deux entreprises. Il n'y a pas besoin d'échanger des administrateurs sur
l'un et l'autre des conseils d'administration d'entreprises qui ont
décidé de s'associer pour des objectifs communs.
M. le Président, je n'accepte pas qu'on modifie l'article 13 de
la loi pour donner une ouverture, de façon à permettre la
nomination d'étrangers sur le conseil d'administration de REXFOR.
Qu'on permette à REXFOR de négocier les ententes et de
participer à des sociétés sur lesquelles on retrouverait
des gens de l'extérieur du Québec qui peuvent apporter des
conseils et des connaissances à REXFOR et surtour ouvrir des
marchés, j'en suis, mais il est absolument non requis de devoir nommer
sur la direction de REXFOR des gens qui ne seraient pas des
Québécois.
M. Bérubé: II nous fait plaisir M.
l'ex-député de Matane, de vous accueillir parmi nous.
M. Picotte: Le futur... M. Bérubé: En l'an
4000.
M. Brochu: Le ministre était en air de faire des
projections tout à l'heure...
Une Voix: Lointaines.
M. Bérubé: Je suis bien d'accord pour que le
député de Kamouraska-Témiscouata s'y oppose. Je pense que
c'est son droit. (10 h 30)
Le Président (M. Boucher): Le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Bérubé: De Montmagny-L'Islet, excusez-moi. Je
pense que c'est son droit le plus strict. Néanmoins, son attitude
m'étonne, me surprend... Et je pense que...
M. Giasson: Cela vous étonne?
M. Bérubé: Oui, cela m'étonne et je vais
m'expliquer.
M. Giasson: Vous ne croyez pas en la capacité des
Québécois de diriger les...
M. Bérubé: Je vais m'expliquer, M. le
Président.
M. Giasson: ... destinés avec foi en l'avenir? Le
Président (M. Boucher): M. le député...
M. Bérubé: Si le député de Montmagny-
L'Islet veut bien me permettre de m'exprimer! Il fut un temps où on a
connu au Québec ce qu'on appelait "l'esprit de clocher",
c'est-à-dire que le nationalisme des citoyens se résumait
à leur paroisse, et parfois même à leur famille. On
n'acceptait pas facilement un "étrange", un "survenant"; cela a fait
l'objet d'un roman célèbre dans notre littérature. En
effet, chaque famille bien enroulée autour de son clocher, de son
curé, de son notaire, de son médecin, formait une entité
homogène et, évidemment, l'étranger était,
même souvent, le simple voisin du village d'à
côté.
M. Giasson: Cela n'a rien à voir... M.
Bérubé: Le Québec...
M. Giasson: Cela n'a rien à voir, M. le
Président.
M. Bérubé: Le Québec s'est ouvert. M.
Giasson: C'est du floklore.
M. Bérubé: Le Québec s'est ouvert, mais
malheureusement, le député de Montmagny-L'Islet est resté
avec cette mentalité et, d'ailleurs, cela explique pourquoi le
député de Montmagny-L'Islet, mais non moins l'ensemble de son
parti, je ne pense pas qu'il soit capable de comprendre le débat
politique profond qui agite le Québec présentement. On accuse le
parti québécois de tendance nationaliste; nous le reconnaissons.
Nous voulons contrôler notre développement. Cependant, nous
voulons un contrôle réel et non pas un contrôle fictif. Une
fois que nous avons obtenu un contrôle réel, sur notre
développement, nous estimons, en tant qu'adultes, être
responsables de notre développement. Il convient de prendre toutes les
décisions susceptibles d'accroître ce développement, et si
la décision à prendre devait être un jour, et je
rassure immédiatement le député de Montmagny-L'Islet: je
n'ai pas l'intention, en autant que je suis concerné, dans ce premier
conseil d'administration de nommer quelqu'un de l'extérieur, je
n'en vois aucune utilité, pour l'instant.
Mais je dis: Si le Québec devait, dans un an, dans cinq ans, dans
deux ans, décider qu'il serait important d'avoir quelqu'un de
l'extérieur au conseil d'administration, alors là, je ne partage
pas le point de vue du député de Montmagny-L'Islet, du tout.
M. Giasson: Bien, pour quel motif... M. Bérubé:
Lorsque...
M. Giasson: Cela serait important, M. le Président.
M. Bérubé: M. le député de
Montmagny-L'Islet, je vous ai laissé parler...
M. Giasson: Pour quel motif cela serait-il important d'avoir
quelqu'un de l'extérieur?
M. Bérubé: J'aimerais que vous manifestiez
la...
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît, M. le
député de Montmagny-L'Islet.
M. Bérubé: ... même décence dans vos
interventions et que vous attendiez la fin de mon intervention pour pouvoir
répliquer.
M. Giasson: Je ne réplique pas, je vous pose une question
tout simplement.
M. Bérubé: Donc, il est possible que, dans un
certain nombre d'années, un gouvernement décide qu'il est
important de faire venir au conseil quelqu'un de l'extérieur. A titre
d'exemple, si nos sociétés d'Etat avaient cherché
davantage à développer les marchés étrangers,
à mettre la main sur des réseaux de mise en marché
étrangers, leur situation serait, souvent, beaucoup plus forte qu'elle
ne l'est. Or, on constate que la plupart de ces sociétés d'Etat
l'ont envisagé, mais qu'elles se sont récusées, sachant
que lorsqu'elles arriveraient devant le Conseil des ministres, en disant: Nous
avons l'intention d'acheter une entreprise à l'étranger, on
aurait poussé de hauts cris, on aurait dit: Vous devez investir au
Québec et, par conséquent, ne mettez pas d'argent dans des
entreprises étrangères. Ce qui a très souvent
empêché nos sociétés d'Etat d'aller se
développer un réseau de mise en marché étranger qui
les aurait consolidées et les aurait véritablement rendues
économiques. Voilà ce que j'appelle du faux nationalisme,
c'est-à-dire que, au nom de la nécessité d'investir
l'argent des Québécois au Québec, on place une
société d'Etat québécoise dans une situation
où elle n'est pas concurrentielle, et on s'étonne,
subséquemment, des conséquences de cette décision
politique. Nous avons exactement là un exemple typique.
Dans l'hypothèse présentement, nous sommes à
négocier, je ne vous le cacherai pas... non pas pour REXFOR mais dans
une autre société d'Etat où des projets qui
impliquent carrément des investissements étrangers, des
investissements qui sont de nature à consolider une de nos
sociétés d'Etat, il est tout à fait possible que
prenons l'exemple de la Société nationale de l'amiante qui
posséderait, par exemple, Nordenham...
M. Giasson: Nous y voici.
M. Bérubé: ... où je devrais dire maintenant
que l'ex-directeur de la société à Nordenham était
un homme remarquable, un Allemand d'une remarquable compétence, reconnu
de tous, et si le gouvernement voulait inviter cet homme à siéger
au conseil d'administration de sa société, pourquoi pas?
Voilà exactement là où nous amène un article comme
celui-ci. Rejetant toute la compétence de cet ingénieur, la
réputation qu'il s'est acquise dans les milieux d'affaires allemands, on
s'interdirait de le nommer au conseil d'administratrion de la SNA, cela
m'apparaît totalement arbitraire.
De la même façon mais le problème ne se pose
pas dans le cas de REXFOR pour l'instant nous croyons que REXFOR doit
développer des marchés étrangers; nous croyons que la mise
en marché du bois québécois par REXFOR, sur les
marchés québécois, est susceptible d'amener des
engorgements en périodes de ralentissement qui nuisent à nos
propres scieries québécoises. Par conséquent l'un des
rôles importants de REXFOR pour l'avenir pourrait justement consister
à faire l'acquisition de réseaux de distribution à
l'étranger et de faire la mise en marché non seulement du bois de
REXFOR, mais également du bois de
plus petites scieries qui n'ont pas les moyens présentement de
faire de l'exportation mais qui, si REXFOR pouvait agir comme courtier,
pourraient certainement profiter des prix fort avantageux qu'offre
l'Europe.
Voilà donc la possibilité pour REXFOR de s'étendre,
de sortir. Evidemment, il n'est pas question pour l'instant d'aller choisir
quelqu'un de l'étranger pour le nommer, mais qui sait, dans deux ans,
dans trois ans, dans cinq ans, si nous ne serions pas amenés à le
faire. Or, je pense qu'il faut établir un principe, une loi qui ne
devrait pas être amendée à tout bout de champ. Parce qu'on
doit maintenant nommer un étranger, on se dépêche d'amender
la loi. On sait d'ailleurs les lenteurs du processus démocratique qui
amène à la passation de ces lois, dans la mesure où les
travaux de l'Assemblée nationale sont déjà
surchargés. D'ailleurs l'Opposition l'a souligné à
plusieurs reprises; on ne peut pas ramener une loi régulièrement.
Par conséquent, cette modification que nous proposons ici, c'est une
modification à long terme; elle ne vise pas l'immédiat, mais si,
à l'avenir, il devait s'avérer intéressant de nommer un
étranger à un conseil d'administration, hé bien! M. le
Président, les Québécois ont cessé d'être des
nationalistes à vue courte, avec des oeillères, ils sont devenus
des souverainistes-associationnistes.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. le Président, les arguments que vient
d'invoquer le ministre ne me convainquent aucunement. D'ailleurs les motifs
qu'il a invoqués ne tiennent pas par eux-mêmes. Quand il voit la
possibilité pour la Société REXFOR d'acquérir des
moyens de distribution à l'extérieur, il sait fort bien, tout
autant que moi, qu'il n'est pas nécessaire de laisser une place à
des administrateurs qui ne seraient pas des Québécois. Il
connaît beaucoup d'entreprises au Québec qui vendent en large
mesure leurs produits à l'extérieur du Québec, qui n'ont
jamais eu à faire appel à des administrateurs étrangers.
Il y a des compagnies québécoises qui ont acquis des entreprises
en dehors du Québec, dans d'autres provinces et même aux
Etats-Unis; elles n'ont pas dû pour ça faire place à des
administrateurs venant de l'extérieur du Québec. Nous avons des
entreprises de sciage de grande envergure au Québec qui vendent, dans
une très grande proportion, leur production à l'étranger
et pour ce faire elles ont développé des marchés
étrangers par elles-mêmes, avec des administrateurs
québécois. Le ministre en connaît, j'en connaîs
moi-même dans ma région. Encore tout récemment un citoyen
de La Pocatière a acquis une entreprise américaine M.
Amyot de mon comté représentée par leur
président. Notre citoyen de La Pocatière n'a pas besoin de faire
place, dans son conseil d'administration, à des Américains, parce
qu'il a acquis une compagnie de New York et que tout le produit, toute la
matière première étant au Québec, tout le produit
transformé est vendu sur le marché américain. Il ne fera
pas de place à un administrateur américain, il n'a pas besoin de
ça. C'est un Québécois qui a fait ses preuves, qui a le
potentiel, qui a les capacités de mener son entreprise et il va la
conduire même si tout son produit s'en va sur des marchés
extérieurs. C'est une argumentation qui ne tient pas.
Lorsque la Société REXFOR a décidé de mettre
en exploitation la scierie des Outardes et qu'elle s'est associée
à une entreprise, Quebec North Shore, nous avons là la preuve
qu'il est possible pour REXFOR de développer des projets, dans des coins
du Québec, avec des partenaires qui ne sont pas nécessairement
des partenaires québécois, qui ne sont pas dirigés
automatiquement par des Québécois, mais ça nous prouve
qu'il y a des capacités, des possibilités de s'associer pour
lancer des entreprises et les développer sans devoir
nécessairement faire place à des administrateurs qui ne soient
pas des Québécois.
L'expérience vécue à la scierie des Outardes ne
serait pas meilleure, même si on avait eu un ou deux administrateurs qui
n'avaient pas été québécois. Cela ne change
rien.
M. Bérubé: Mais il y en a qui ne sont pas
québécois dans le cas de la scierie des Outardes. Je regrette
infiniment.
M. Giasson: Mais est-ce que Rexfor serait plus productive? Est-ce
que Rexfor serait beaucoup plus forte dans cette association s'il y avait des
administrateurs qui n'étaient pas québécois? Elle s'est
associée à une autre entreprise, elle a formé, suite
à des ententes, une nouvelle administration, mais ce ne sont pas les
administrateurs de Rexfor comme tels qui prennent toutes les décisions.
La société a été créée pour exploiter
la scierie des Outardes qui administre le projet avec la participation de
Rexfor, tout simplement. Mais je ne sache pas qu'on doive nommer chez Rexfor
des gens qui ne sont pas québécois pour mieux faire cette
expérience et développer la scierie des Outardes. C'est simple,
c'est la simplicité dans son état le plus...
M. Bérubé: Vous n'aurez qu'à ne pas en
nommer, M. le député de Montmagny-L'Islet. Cette loi ne vous
force pas à les nommer, elle dit tout simplement que, si un gouvernement
du Québec élu légitimement se penchait sur les
problèmes de cette société d'Etat à un moment
donné dans le temps et qu'il devait juger qu'il a besoin de telles ou
telles personnes réputées dans tel secteur, qui peuvent donner
une expertise à son conseil d'administration qu'il n'est pas en mesure
de lui donner pour diverses raisons, je ne vois absolument pas de raison pour
laquelle on devrait limiter le pouvoir de ce gouvernement à ce
moment.
M. Giasson: Mais si la société avait besoin
d'expertise qu'elle ne peut pas trouver au Québec, est-ce qu'il est
absolument requis de faire un administrateur de cet expert? Est-ce qu'il ne
pourrait pas conseiller la société comme expert,
sans devoir nécessairement siéger au conseil
d'administration? C'est là une réalité qu'on retrouve dans
beaucoup d'entreprises: elles font affaires avec des experts sans les nommer
administrateurs. On fait appel à leurs services, on les indemnise pour
les services qu'ils rendent à l'entreprise, mais on ne les nomme pas
automatiquement au conseil d'administration de l'entreprise. C'est pratique
courante, non seulement au Québec, mais dans tous les pays
industrialisés.
M. Bérubé: Je dois souligner une incorrection dans
une déclaration que le député de Montmagny-L'Islet a faite
il y a quelques minutes. En effet, il soulignait tantôt que la
société pouvait engager à temps plein tout le personnel
nécessaire à la conduite...
M. Giasson: A temps plein ou partiel. Je n'ai pas parlé de
temps plein.
M. Bérubé: ... à temps partiel, à la
poursuite de ses... je suis absolument d'accord avec cette opinion du
député de Montmagny-L'Islet, mais il confond la direction de la
société avec le conseil d'administration. Pour la prise de
décision quotidienne, la direction de la société peut
faire appel à toute l'expertise dont elle juge avoir besoin, et c'est
normal.
Le conseil d'administration, cependant, lui, est là comme jury,
comme arbitre. Il doit juger quotidiennement, ou au moins mensuellement, des
décisions prises par la direction. Il est donc difficile de mettre en
conflit d'intérêts quelqu'un du conseil d'administration qui doit
en même temps juger de la qualité des décisions qui ont
été prises. Vous mêlez la direction et le conseil
d'administration. La direction...
M. Giasson: Je ne mêle pas cela.
M. Bérubé: Dans votre esprit, de toute
évidence, c'est la confusion la plus totale qui règne. La
direction doit prendre des décisions et les soumettre à son
conseil d'administration pour jugement.
M. Giasson: La direction, dans votre esprit...
M. Bérubé: II ne faut donc pas qu'au conseil
d'administration siègent...
M. Giasson: M. le Président...
M. Bérubé: ... des gens qui ont participé
à la prise de décisions, si ce n'est suivant la tradition
qui est connue de faire siéger le président de la
société, c'est-à-dire le directeur, le chef des
opérations, au conseil d'administration. C'est là une tradition,
et d'ailleurs nous l'imposons dans la loi. Au conseil d'administration ne
siégera qu'une personne que j'appellerais en véritable conflit
d'intérêts, soit le président et directeur des
opérations. Appelons-le directeur général...
M. Giasson: La gérance des opérations. (10 h
45)
M. Bérubé: ... la gérance, il y a
différentes façons de le nommer. Souvent on dit
"président-directeur des opérations" et vous avez le
président-directeur en charge de l'exécutif. Ce sont les deux
façons générales de les décrire pour distinguer les
deux présidents. Par conséquent, on confond quand on dit: "La
société peut engager à temps plein tout le personnel
technique nécessaire pour la conseiller"; là-dessus, je suis
absolument d'accord et c'est évident que la direction devra le faire.
Mais au conseil d'administration, on va demander à des administrateurs
de porter un jugement une fois ces recommandations faites. A ce
moment-là, il peut s'avérer, si le genre de décisions est
récurrent et se produit fréquemment, que le conseil
d'administration sente le besoin d'avoir un expert dans un domaine particulier
au conseil d'administration.
Personnellement, je pense que les éclats de voix du
député de Montmagny-L'Islet sont un peu bizarres dans la mesure
où la loi ne dit pas qu'on va nommer des étrangers; elle dit tout
simplement qu'un gouvernement légitimement élu qui, au moment de
l'évaluation de la situation, estimerait nécessaire de choisir
une personne qui n'est pas résidente du Québec. Ce que nous
disons, c'est que nous ne voyons pas pourquoi la loi devrait interdire à
ce gouvernement de le faire. Au nom de quel principe, au nom de quel
sacro-saint principe devrait-on se fermer sur nous-mêmes, s'isoler, se
séparer, alors qu'au contraire le rôle du Québec, c'est
d'être présent dans le monde à l'avenir. Evidemment, cela
suppose un changement dans l'idée qu'on se fait du nationalisme et, de
toute évidence, étant donné l'orientation qu'a prise le
Parti libéral, la maturité politique nécessaire n'a pas
encore pénétré au sein du Parti libéral et c'est
pourquoi ils ne peuvent comprendre la nature de cet amendement.
M. Giasson: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: Le ministre des Terres et Forêts
interprète les choses à sa manière.
M. Bérubé: Forcément, nous faisons de la
politique.
M. Giasson: Je soutiens qu'au Québec, nous avons
suffisamment de gens qui possèdent les connaissances, la technique,
l'expérience pour administrer notre société d'Etat et le
ministre le sait très bien. C'est parce qu'il a des projets
derrière la tête. Quand il nous dit qu'il met cela "en tous cas",
il place cette disposition dans la loi de la société
forestière au cas où un jour, un gouvernement légitimement
élu déciderait de procéder à la nomination d'un
administrateur qui ne serait pas Québécois. C'est de la foutaise.
C'est parce que le ministre a déjà quelque chose de très
précis à l'esprit et il ne veut pas le dire, il n'a pas assez de
transparence pour nous dire ce qu'il a derrière la tête lorsqu'il
veut ouvrir à des non-
Québécois le conseil d'administration de la
société d'Etat; qu'il le dise donc très ouvertement.
M. Bérubé: C'est l'esprit de la loi, M. le
Président. En vertu de l'article 2, nous avons volontairement
cherché à étendre le pouvoir du conseil d'administration
qui doit définir lui-même les termes du contrat liant
l'administrateur à la société. Nous avons volontairement
voulu donner un rôle à ce conseil, qu'il ait à
négocier avec l'administrateur, qu'il ait à établir les
termes de l'engagement, qu'il ait même, éventuellement, à
faire des recommandations au gouvernement sur la composition du futur conseil
d'administration pour étoffer. A titre d'exemple, un président
d'un conseil exécutif, très fréquemment, va indiquer
à l'actionnaire le type de personnes qu'il aimerait voir sur son conseil
d'administration, de manière à pouvoir avoir les avis,
tantôt d'un financier, d'un forestier, tantôt d'un industriel des
pâtes et papiers, d'un industriel du sciage, tantôt du milieu du
travail, tantôt de la population locale. En fait, nous voudrons nous
entourer d'un certain nombre de conseillers qui vont nous permettre d'avoir
différentes opinions et de trancher avec une certaine garantie
d'infaillibilité.
A partir du moment où, justement, on donne plus d'autonomie au
conseil d'administration, où on va tendre à respecter les
décisions de ce conseil, il m'apparaît normal de donner plus de
pouvoirs à ce conseil. Si le conseil devait, à un moment
donné, par suite de ces opérations, aviser le ministre des
Finances que la nature même des opérations de la
société l'amène à travailler quotidiennement
à l'extérieur et, au cours d'échanges d'affaires, ils ont
fait la connaissance d'un homme remarquable qui serait un atout précieux
sur le conseil d'administration, en vertu de quel principe devrait-on refuser
de nommer, pour le salaire minime de quelques milliers de dollars par
année, cet homme qui pourrait être d'un conseil judicieux lors de
l'examen des décisions de la direction? Cela m'apparaît tellement
aberrant que je suis incapable de comprendre l'opinion du député
de Montmagny-L'Islet, si ce n'est en me disant que la vision que se font les
libéraux du nationalisme est une vision idylliquée, totalement
refermés sur eux-mêmes avec une crainte morbide de
l'étranger, ce qui explique d'ailleurs que face au nationalisme nouveau
au Québec, ils n'ont pas encore compris qu'on pouvait, à la fois,
être fiers d'être Québécois, vouloir contrôler
son développement, mais, en même temps, être ouverts aux
autres. Ils n'ont pas encore compris cela.
M. Giasson: M. le Président, ce sont encore des
affirmations gratuites de la part du ministre. D'ailleurs, c'est son habitude,
c'est son style. C'est à peu près dans ce domaine qu'il excelle
le plus. Il ne faut pas s'en surprendre, on connaît le ministre.
Lorsque nous avons, chez les Québécois, le potentiel aussi
grand et aussi riche que ce qu'on peut aller chercher à
l'extérieur, pourquoi doit-on aller chercher à
l'extérieur? Il n'est pas question de nationalisme. Quand on a chez nous
les sommités qui nous permettent d'administrer nos affaires, en vertu de
quel principe et en vertu de quelle règle de bon sens doit-on laisser de
côté des nôtres, des Québécois, pour aller en
chercher à l'extérieur du Québec?
M. Bérubé: M. le Président...
M. Giasson: Oubliez la carte nationaliste derrière,
revenez donc au sens pratique des choses.
M. Bérubé: Allez-vous me faire croire qu'il
n'existe pas, par exemple, en Amérique, de personnes suffisamment
compétentes pour gérer une entreprise d'aluminium?
Néanmoins, l'Alcan est allée chercher M. Reach, un alsacien. Je
pourrais prendre le président d'IBM, qui est un Français.
Allez-vous me faire croire qu'il n'existe pas aux Etats-Unis
d'Américains compétents, connaissants, susceptibles de diriger
IBM? Cela m'apparaît aberrant, puisque les Etats-Unis sont le berceau de
l'électronique contemporaine. Ils sont les inventeurs des ordinateurs,
ils sont à la fine pointe de tout ce qui se fait dans le domaine
électronique. Néanmoins, si la société IBM estime
qu'elle doit aller chercher un Français à sa direction, ce n'est
pas qu'elle pense qu'il n'y a pas d'Américains compétents, c'est
qu'elle connaît ce Français et qu'elle a estimé que ce
Français pouvait leur être utile...
M. Giasson: Vous êtes rendu dans les multinationales.
M. Bérubé:... de la même façon...
M. Giasson: Alcan, IBM, vous êtes dans les multinationales.
Ce n'est pas plus américain, c'est transcontinental, c'est
transplanétaire.
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît!
M. Bérubé: De la même façon, M. le
Président, si...
M. Giasson: ... à la dimension de la planète, pas
d'un pays. Quand vous êtes dans les multinationales comme dans ces
exemples...
M. Bérubé:... il apparaît au moment du choix
des administrateurs d'une société d'Etat que l'on est aux prises
avec l'embarras du choix, que nous avons un grand nombre de
Québécois qui pourraient très bien remplir les postes en
question, nous ne nommerons pas d'étrangers, c'est évident. Cela
m'apparaît évident.
C'est pour cela que la problématique, telle que posée par
le député de Montmagny-L'Islet, n'a pas de sens. Il dit: "Si nous
avons tous les gens compétents, pourquoi nommer des étrangers"?
Eh bien, si nous avons tous les gens compétents et que nous devons
prendre la décision de nommer un conseil d'administration et que nous
approchons un certain nombre de personnes qui
toutes acceptent, évidemment nous n'avons sans doute pas besoin
de nommer un étranger.
Mais je pose la question différemment et je dis: Si, à un
moment donné, un gouvernement devait trouver avantageux de nommer un
étranger je dis bien avantageux pourquoi le lui interdire?
Il ne répond pas à ma question non plus.
Je réponds à la sienne dans le mesure où je dis: Si
au moment de former un conseil d'administration et vous aurez l'occasion de le
voir dans les prochaines semaines, le gouvernement ne choisit que des
Québécois, c'est qu'il estime qu'il avait tous les talents
nécessaires au Québec pour satisfaire les besoins. Mais, nous ne
discutons pas d'une décision actuelle, nous discutons d'un principe. Je
pose la question différemment: Si, à un moment donné, nous
estimons, comme gouvernement, avoir besoin d'un étranger, pourquoi nous
refuser de le nommer? C'est tout ce qu'il y a dans cet article. Cet article ne
dit pas qu'on doit nommer des étrangers, mais il dit: Nous devons cesser
d'avoir peur des étrangers. C'est tout. Personnellement, je ne vous
cacherai pas que je préférerais purement et simplement abolir le
présent article. Dire tout simplement: Le gouvernement choisit des
administrateurs et si le gouvernement est suffisamment niaiseux pour ne nommer
que des étrangers, eh bien, les Québécois ont
été suffisamment niaiseux pour l'élire. Ils n'ont pas
besoin de se protéger par une loi.
Enfin, je sais que l'élimination pure et simple de cet article a
soulevé des remous; par conséquent, nous avons consenti que la
majorité absolue des deux tiers soit toujours formée de
Québécois.
M. Giasson: Je crois, M. le Président, que nous avons au
Québec suffisamment de Québécois qui ont acquis une
expérience pratique, qui ont les connaissances voulues pour diriger
notre société d'Etat et administrer la société
REXFOR. On ne doit même pas songer pour l'instant à faire
siéger des étrangers au conseil d'administration. Si le ministre
ne croit pas que le Québec compte suffisamment d'experts dans les
questions forestières, pour réserver la composition du conseil
d'administration de REXFOR, je n'y comprends plus rien. S'il met en doute la
capacité de la province de Québec de posséder les hommes
qui ont tout ce qu'on doit attendre d'administrateurs de sociétés
d'Etat, si lui croit qu'on n'a pas cela au Québec, je ne sais plus
où on va. Je ne m'explique pas cette attitude du ministre.
M. Bérubé: Le député de
Montmagny-L'Islet pourrait-il me nommer un seul Québécois qui
connaisse quoi que ce soit au thermo-mécanique? Le député
de Montmagny-L'Islet pourrait-il me nommer une seule compagnie
québécoise, en foresterie, qui fait de l'aménagement
intensif de nos forêts? Non. Dans ce cas...
M. Giasson: II y a des gens au Québec...
M. Bérubé: ... qu'il ravale donc ce qu'il vient de
déclarer.
M. Giasson: Au Québec, M. le Président, nous avons
des Québécois qui sont capables de faire de l'aménagement
intensif de forêts.
M. Bérubé: Je ne vous demande pas de placoter.
M. Giasson: II s'agit de leur donner les moyens...
M. Bérubé: Je vous demande: Donnez-moi donc une
entreprise du Québec qui gère sa forêt sur la base d'un
rendement soutenu en pratiquant les aménagements intensifs, comme Irving
le fait au Nouveau-Brunswick, comme CIP l'a fait dans le sud des Etats-Unis,
comme les Suédois le font depuis 75 ans. Qu'il m'en donne une qui a
cette expérience quotidienne de la gestion des forêts sur la base
d'un rendement soutenu.
M. Giasson: Les compagnies forestières du Québec
n'ont jamais eu comme priorité de faire de l'aménagement
intensif.
M. Bérubé: Alors, puisqu'il vient d'avouer...
M. Giasson: Mais cela ne veut pas dire qu'on a...
M. Bérubé: ... qu'il n'y a pas de
Québécois qui sont compétents dans le domaine, il vient
justement de me dire que, au contraire, nous avons des compétences dans
tous les domaines. Si vous persistez à croire que nous avons au
Québec des compétences dans tous les domaines, je lâche, je
ne comprends plus rien.
M. Giasson: Nous avons au Québec des compétences en
aménagement forestier qui travaillent présentement à
l'extérieur du Québec, parce que nous n'avons pas d'entreprise
qui ait décidé de procéder dans le sens de
l'aménagement intensif de la forêt.
M. Bérubé: Dans ce cas, ils sont
non-résidents québécois, et vous m'interdisez, en vertu de
la loi, de les nommer au conseil d'administration.
M. Giasson: Ils habitent toujours le Québec, leur famille
est au Québec et ils vont travailler au Nouveau-Brunswick. Ils sont
encore québécois, ils reviennent dans leur famille
régulièrement, mais ils travaillent pour des entreprises qui ont
décidé de pratiquer l'aménagement.
M. Bérubé: Ah!
M. Giasson: Au Québec, nous ne les avons pas.
M. Bérubé: Voilà, maintenant vous... M.
Giasson: Cela ne veut pas dire...
M. Bérubé: ... reconnaissez, en fait, qu'il y a des
secteurs forestiers où nous n'avons pas les
compétences. C'est exactement ce que je voulais vous faire
dire.
M. Giasson: Nous avons des compétences, mais elles sont
employées par des entreprises hors du Québec. Vous le savez,
d'ailleurs, M. le ministre.
M. Bérubé: Oui, oui.
M. Giasson: Ce n'est pas qu'on n'a pas de Québécois
qui sont en mesure de faire de l'aménagement, nous les avons, mais ces
Québécois travaillent pour des entreprises qui ne sont pas
nécessairement au Québec. Mais ce sont eux qui dirigent
l'aménagement forestier.
M. Bérubé: D'ailleurs, vous auriez pu me
répondre à cela: Oui, il y a une société
québécoise qui effectivement fait de l'aménagement
intensif. C'est dans votre comté, c'est la Société
REXFOR.
M. Giasson: Non, mais vous avez parlé d'entreprises
privées, des entreprises forestières privées. Cela
n'inclut pas REXFOR.
M. Bérubé: Vous voyez bien que votre argumentation
ne tient pas.
M. Giasson: Elle tient. Je vous donne la preuve, et vous l'avez
confirmé vous-même, que REXFOR possède une équipe
qui fait de l'aménagement forestier et je vous ai indiqué que je
connais des Québécois qui font de l'aménagement forestier
au Nouveau-Brunswick présentement et leur famille vit encore au
Québec.
M. Bérubé: Et susceptibles de siéger au
conseil d'administration de REXFOR?
M. Giasson: Si on va les chercher, oui, mais qu'on les paie.
M. Bérubé: Mais que font-ils comme travail?
M. Giasson: Ils dirigent des opérations de reboisement et
de pratiques syvicoles, mais ils sont payés pour le faire, par exemple.
REXFOR ne les aura pas pour des "peanuts".
M. Bérubé: Vous mentionnez son nom, cela va
être intéressant à avoir.
M. Giasson: En tout cas, M. le Président, j'aurais un
amendement à proposer. Je le dépose.
Le Président (M. Boucher): Alors, M. le
député de Montmagny-L'Islet propose l'amendement suivant à
l'article 5: Ajouter, dans la première phrase, avant le mot "les", le
mot "tous", et faire disparaître, "dans une proportion d'au moins les
deux tiers". L'article se lirait comme suit: "Tous les administrateurs doivent
être domiciliés au Québec. La qualité d'actionnaire
n'est pas requise pour être administrateur de la société".
(11 heures)
M. Bérubé: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): Oui, M. le ministre.
M. Bérubé: Un amendement ne doit pas être de
nature à dénaturer entièrement l'article principal.
Dois-je vous souligner que l'article de la présente loi amende un
article d'une ancienne loi et si nous devions accepter l'amendement à
l'amendement, nous retrouverions l'ancien article. Par conséquent, il
n'a qu'à battre l'amendement proposé par le gouvernement. Je
pense qu'il est donc irrecevable.
M. Giasson: C'est recevable, très bien recevable. C'est un
amendement recevable.
Le Président (M. Boucher): Un instant. Je vais
délibérer avec moi-même avant. Si vous voulez parler sur la
recevabilité, allez-y.
M. Jolivet: C'est justement, comme M. le ministre le disait, le
but de la proposition dans le projet de loi gouvernemental est dans le but de
changer l'article de loi actuel. Par l'amendement proposé par le
député, on revient, en fait, à l'article
déjà contenu dans la loi. Je pense qu'on sauverait
énormément de temps et de discussion puisqu'on vient d'en faire
un bon bout actuellement. On pourrait permettre au député de
l'Union Nationale de faire valoir son point. Mais le député
n'aurait qu'à battre la proposition faite par le gouvernement à
l'effet de changer l'article déjà existant dans la loi actuelle
et il n'a même pas besoin, pour ce faire, de passer par un autre
amendement qui remettrait en force l'article de loi existant. On
économiserait énormément de temps.
M. Brochu: M. le Président, si vous me le permettez, le
raisonnement que suit le député de Laviolette est exact sur la
question de règlement, puisqu'à toutes fins utiles, si on prend
l'esprit du règlement, également, cela reviendra à faire,
par un chemin détourné, ce qu'on peut faire directement, en
battant la proposition de l'amendement qui est contenu dans l'article 5 du
présent projet de loi. Alors, cela voudrait dire, à ce moment,
que si on accepte ce principe, si vous deviez, M. le Président, rendre
une décision favorable à la recevabilité de l'amendement,
à tout bout de champ, on pourrait proposer des amendements qui
reviennent au texte qu'on veut changer, justement, et on allongerait, on
alourdirait les débats indéfiniment, alors qu'on pourrait
directement discuter de la question, la battre, si elle ne fait pas notre
affaire, en fournissant nos arguments, ce qui revient au même. Alors,
cela voudrait dire que, désormais, on peut prendre le chemin le plus
long en termes de règlements pour arriver aux mêmes
conclusions.
M. Giasson: M. le Président, sur la recevabilité,
je considère que l'amendement que j'ai déposé est
parfaitement recevable, selon les règles qui régissent notre
commission. Peut-être que les
députés autour de cette table ne voudraient pas voter sur
l'amendement que j'ai proposé. S'ils veulent le battre, il le batteront
et nous reviendrons à l'article principal. Mais la rédaction de
l'amendement que je viens de déposer est parfaitement recevable. On peut
faire le débat et s'il faut y mettre du temps, nous allons mettre le
temps; il n'y a rien qui nous presse aussi. Nous allons faire le débat.
C'est un article irrecevable, nous allons prendre le vote et après le
vote, nous pourrons revenir à l'article principal, tel que
déposé. Ce sont là, les coutumes et la pratique
parlementaire que nous avons toujours vécues en commission
parlementaire.
Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur la recevabilité? Alors, je suspens pour cinq minutes,
étant donné que je dois rendre la décision suivant un
article du règlement que je cherche présentement.
Suspension de la séance à 11 h 5
Reprise de la séance à 11 h 13
Le Président (M. Boucher): ... l'amendement est
irrecevable étant donné qu'il y a un principe en deuxième
lecture lorsque la deuxième lecture a été
adoptée qui disait que l'on pouvait nommer des administrateurs en
dehors du Québec, alors que dans l'amendement proposé par le
député de Montmagny-L'Islet, on ignore le principe tout
simplement en mettant ".tous les administrateurs au Québec". S'il y
avait une question de deux tiers, quatre cinquièmes ou de changer la
possibilité du principe de nommer des administrateurs en dehors du
Québec, à ce moment, cela aurait pu être recevable. Mais au
moment où on change complètement le principe et on dit: "tous les
administrateurs devront être au Québec", c'est irrecevable.
M. Giasson: M. le Président, si j'ai bien compris, vous
avez déclaré qu'on change le principe de la loi par le
dépôt de tels amendements.
Le Président (M. Boucher): II y avait un principe à
l'article 4 qui était inscrit dans les notes explicatives au
début: de fixer au moins à deux tiers le nombre des
administrateurs qui doivent être domiciliés au Québec.
M. Giasson: Oui, mais les notes explicatives ne sont pas
nécessairement le principe d'une loi.
Le Président (M. Boucher): Oui, mais c'est un principe qui
est quand même établi au départ.
M. Giasson: Alors tous les articles sont des principes?
Le Président (M. Boucher): D'accord, il y a un principe
sur cet article.
M. Giasson: Pourquoi serait-il à cet article et pas
à d'autres?
Le Président (M. Boucher): Vous en avez discuté
pendant au-delà de 20 minutes chacun, tout à l'heure, à
l'effet qu'il y avait une question de principe en cause, alors j'ai retenu
qu'il y avait un principe à ce moment.
M. Giasson: On n'a pas encore discuté sur le
principe...
Le Président (M. Boucher): Vous l'avez
mentionné.
M. Giasson: ... on n'a pas parlé de principe, on a
discuté sur le bien-fondé de nommer des Québécois
au conseil d'administration de REXFOR.
Le Président (M. Boucher): Vous avez mentionné
vous-même qu'il y avait une question de principe, à savoir si on
pouvait nommer ou pas ces administrateurs en dehors du Québec.
M. Jolivet: ... une décision, M. le Président.
M. Giasson: M. le Président, au moins est-ce que je
peux...
Le Président (M. Boucher): L'amendement est
déclaré irrecevable.
M. Giasson: ... rectifier ce que vous venez de déclarer?
Je n'ai jamais fait allusion qu'il y avait un principe; on pourrait relever la
transcription des débats, je n'ai jamais mentionné qu'il y avait
un principe derrière ça. Je peux au moins corriger ça, M.
le Président?
Le Président (M. Boucher): Vous, vous ne l'avez pas
mentionné, mais il reste quand même qu'il y en a un. (11 h 15)
M. Giasson: C'est que vous m'avez prêté des paroles
que je n'ai pas prononcées. Vous avez dit que moi-même, dans mon
intervention, j'avais déclaré qu'il y avait un principe.
Le Président (M. Boucher): Excusez si je vous ai
prêté des paroles, mais il a été question d'un
principe au moment de la discussion qui a précédé.
Je déclare l'amendement irrecevable. Est-ce que l'article 5 sera
adopté?
M. Giasson: Vote enregistré, M. le Président.
M. Brochu: M. le Président, seulement une remarque avant
de passer au...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Richmond.
M. Brochu: ... vote enregistré là-dessus. C'est que
je me rappelle la discussion qu'on avait eue
justement sur la Société nationale de l'amiante, lors de
l'étude de la loi 70; le ministre y a fait allusion tout à
l'heure. Lorsqu'on était arrivé à un article similaire
à celui qui est devant nous actuellement, où le gouvernement
voulait réduire et ouvrir la porte complètement à une
nomination d'un certain nombre ce n'était pas mentionné
à ce moment dans l'article de la loi telle quelle
d'administrateurs pouvant venir de l'extérieur du Québec.
A ce moment-là, je me rappelle qu'on s'était
élevé contre cela du côté de l'Opposition. Ce qui
était curieux, et qui l'est encore aujourd'hui, c'est que c'est
l'Opposition qui défend le contenu québécois du conseil
d'administration de nos entreprises d'Etat, alors qu'on a devant nous un
gouvernement soi-disant nationaliste, ayant des visées
indépendantistes. Puisque le ministre s'est levé sur ce
pied-là ce matin et qu'il a commencé des discussions dans ce
sens-là...
M. Jolivet: Ouvert sur le monde.
M. Brochu: Lorsqu'on en arrive à un article de loi comme
celui-là, c'est l'Opposition qui doit se faire le défenseur du
contenu québécois des conseils d'administration.
M. Jolivet: Ouvert sur le monde.
M. Brochu: Je pense qu'on ne peut pas laisser passer cela sans le
souligner. Si on inversait la situation un tant soit peu, j'ai l'impression que
les réactions de ce côté-ci de la table... Si on
était le gouvernement de l'autre côté qui propose un
article tel que celui qui est devant nous actuellement, on aurait des gens, non
seulement qui s'élèveraient contre ça, mais qui seraient
debout sur la table, qui déchireraient leurs vêtements, leurs
toges sur la place publique et qui lanceraient de hauts cris pour dire que
c'est une atteinte aux Québécois...
M. Jolivet: Pas notre toge, on n'en a pas.
M. Brochu: ... de la part d'un gouvernement, ce serait même
une trahison. J'entends déjà les ténors du Parti
québécois entonner tous le refrain les uns à la suite des
autres. Je pense que le ministre, même s'il écoute d'une oreille
distraite tout en finissant la lecture de son journal, en est conscient et peut
s'imaginer un tant soit peu la scène, s'il devait être de ce
côté-ci. Je pense qu'il n'aurait même pas le temps de suivre
tous les grands titres du journal qu'il a dans les mains actuellement, tant il
serait occupé à fournir tous les efforts pour convaincre le
gouvernement de ne pas commettre cet outrage ultime envers les
Québécois que celui d'ouvrir la porte à des
"étrangers" au conseil d'administration de ces entreprises.
Je pense qu'il convenait de le souligner. C'est quand même
drôle de voir que, selon le côté de la table où on se
trouve, la vision des choses semble changer passablement.
M. Giasson: Même les principes changent...
M. Brochu: Même au niveau des programmes politiques
et je le dis de façon bien générale pour l'ensemble des
partis politiques je ne sais pas ce qui se passe, M. le
Président, je n'ai jamais traversé de l'autre côté
de la table, je suis un spécialiste de l'Opposition, mais j'aimerais
faire l'expérience à un moment donné pour voir si vraiment
on change au point de brûler ce qu'on a chéri et de chérir
ce qu'on a brûlé.
J'aimerais bien comprendre toute la dynamique qui sous-tend ce
changement d'attitude qui nous apparaît souvent radical et
diamétralement opposé à ce qu'on a défendu dans le
passé. C'est devant ça exactement qu'on se trouve aujourd'hui. Je
regardais les échanges vigoureux tout à l'heure entre...
M. Giasson: Les pirouettes.
M. Brochu: ... le député de Montmangy-L'Islet et le
ministre et je voyais un peu ce phénomène-là. Si on
inversait les rôles, si le ministre était député de
Matane dans l'Opposition et que le député de Montmagny-L'Islet
soit ministre, on assisterait peut-être à la même
conversation, avec les mêmes arguments, sauf que les interlocuteurs
seraient changés. Les arguments que le député de
Montmagny-L'Islet nous sert maintenant seraient peut-être dans la bouche
du ministre et les réponses du ministre dans la bouche du
député de Montmagny-L'Islet.
Une Voix: ...
M. Brochu: Je pense qu'on peut se l'imaginer assez facilement. Je
voulais le souligner, M. le Président, parce que c'est tout le contexte
de la discussion qu'on a déjà eue. Au départ, on voulait
que tout le conseil d'administration demeure québécois,
c'était la volonté de l'Opposition. A la rigueur, pour
protéger les Québécois, l'Union Nationale avait à
ce moment-là proposé un amendement pour qu'au moins on sauve les
meubles et que les deux tiers du conseil d'administration soient
québécois. Le ministre avait accepté finalement qu'au
moins les deux tiers... Mais l'optique de la proposition que j'avais faite
moi-même au nom de l'Union Nationale, c'était justement de
protéger ce contenu québécois, et on s'était rendu
à cette décision.
Autres temps, autres moeurs. Selon le côté de la table
où on est, les choses semblent changer passablement. Je comprends les
avenues que s'aménage le ministre, actuellement. Sur la question de la
logique du principe lui-même, c'est une autre discussion; lorsqu'on parle
sur le plan strictement administratif, on peut élaborer les grands
principes administratifs et les ouvertures qu'on doit avoir de ce
côté. Je comprends, en même temps, toute la philosophie
qu'il y a derrière l'amendement qui était dans la loi
créant la Société nationale de l'amiante et celui qui est
là actuellement. On commence à se ménager des
avenues et lorsque le ministre a parlé tantôt des
installations de Nordenham en Allemagne, ce qui était rigide à ce
moment-là et le ministre s'en rappellera j'en avais fait
état en commission parlementaire que le gouvernement, après avoir
acquis Asbestos Corporation, serait aux prises avec la concurrence des moulins
de Nordenham. Ace moment-là, c'était bien drôle,
maintenant, cela l'est moins puisqu'on s'aménage une sortie pour que le
gouvernement puisse accaparer des marchés et prévenir la
concurrence qu'il pourrait y avoir de ce côté. J'aimerais aussi
que le ministre, s'il est capable de me répondre puisqu'il est au
courant, qu'il a fouillé ces choses passablement... juste une question
en terminant. Est-ce que vous avez fait l'expérience, ou êtes-vous
au courant que dans d'autres pays, une loi semblable a été
adoptée à l'inverse, c'est-à-dire en permettant que des
gens siègent au conseil d'administration, soit d'une compagnie
américaine ou d'une compagnie française, d'une compagnie belge ou
autre c'est une information technique au moment où on se
parle, savez-vous si l'inverse a déjà été fait, si
d'autres pays se sont prévalus de cette soi-disant ouverture à
d'autres pays pour amener un contenu "étranger", entre
parenthèses toujours, à leur conseil d'administration?
M. Bérubé: J'ignore si on peut retrouver le
même genre de réglementation que cellequ'on retrouve dans beaucoup
de lois de nos sociétés d'Etat. Je crois que, dans le cas de
services publics, il me paraît assez évident qu'on puisse vouloir
maintenir un contenu proprement national à un conseil d'administration,
dans la mesure où il s'agit de services donnés aux citoyens. Par
conséquent, dans la mesure où les citoyens doivent être
représentés lors des décisions importantes comme des
tarifs ou des décisions importantes de capitalisation, dans le cas de
services publics, effectivement, j'accepterais volontiers qu'il y ait un
article de loi qui interdise la nomination d'étrangers.
Cependant, je n'ai pas fait d'études comparatives. Vous
n'êtes pas sans savoir que des sociétés d'Etat à
caractère purement commercial, on en retrouve peu aux Etats-Unis; on en
retrouve surtout au Canada et dans les pays européens. Je n'ai pas fait
une étude exhaustive, je n'ai pas fait l'exégèse de tous
les projets de loi créant des sociétés d'Etat dans le
monde pour en arriver à décider que, sur le plan logique, je ne
voyais pas de raisons pour lesquelles l'Etat s'interdirait de nommer à
un conseil d'administration toute personne susceptible de jouer un rôle
bénéfique; finalement, le principe qui est en cause c'est
celui-là. Ce n'est pas la question de savoir si nous avons ou non les
compétences; on peut différer d'opinion là-dessus. Le
point qui est en cause est de savoir si un gouvernement du Québec
devait, pour les fins d'une bonne gestion d'une société d'Etat,
estimer qu'il serait avantageux de nommer une personne qui, pour diverses
raisons, n'est pas résidente du Québec, je pense qu'elle pourrait
choisir de le faire.
On pourrait imaginer, par exemple, un Québé- cois
travaillant dans le sud des Etats-Unis ayant acquis une très grande
expérience dans la foresterie intensive qu'on pourrait inviter ce
Québécois à assister à des réunions
mensuelles du Conseil d'administration pour donner son avis sur les programmes
que proposerait REXFOR dans ce secteur, par exemple, au Canada et au
Québec.
Cela me paraît tout à fait possible. Récemment, la
société Reed avait manifesté son intention de se
départir de ses actifs. Elle a donc approché un grand nombre
d'entreprises dont quelques-unes de nos sociétés d'Etat pour voir
dans quelle mesure ces sociétés ne pourraient pas être
intéressées à l'achat des actifs de Reed. Il aurait donc
été théoriquement possible de se retrouver
propriétaire de Reed à Dryden en Ontario.
C'est donc un cas évident qui aurait très bien pu se
passer il y a quelques semaines, et qui nous aurait amenés à
donner une dimension très internationale aux activités de REXFOR
puisqu'elles auraient débordé sur les autres provinces
canadiennes. Donc, le raisonnement que nous avons fait vis-à-vis de la
SNA et vis-à-vis de REXFOR n'est pas tellement un raisonnement portant
sur le fait que l'on doive se nommer des étrangers, que l'on doive
chercher à nommer des étrangers; là n'est pas la question.
C'est plutôt un raisonnement en ce sens que l'on ne doive pas interdire
la nomination d'un étranger, si cette nomination apparaît,
à un moment donné, désirable. C'est uniquement le point
que nous défendions.
M. Brochu: Si je comprends bien, il n'y a pas d'exemple qui
vienne de choses...
M. Bérubé: Non, je n'ai pas...
M. Brochu: ... qui ont été faites dans le
même sens dans d'autres pays.
M. Bérubé: ... fait l'étude exhaustive, par
exemple, pour savoir si à la régie Renaud, par exemple, il existe
des étrangers siégeant à la direction; si, par exemple,
à la Canadian Development Corporation il existe également des
étrangers; je l'ignore. Cela n'est peut-être pas facile à
vérifier, mais je pense que cela peut se vérifier.
M. Brochu: Mais, une simple remarque, M. le Président.
Vous admettrez que la situation est quand même caricaturale, parce qu'au
point de départ, si on fait une comparaison, par exemple entre REXFOR et
ce qu'on demande maintenant et la Société nationale de l'amiante,
d'un côté au nom du nationalisme, dans l'expropriation ou
l'acquisition d'Asbestos Corporation, économiquement non rentable pour
le gouvernement avant X années, si jamais cela devait être, c'est
au nom du drapeau, du nationalisme et de l'entité
québécoise qu'on veut absolument se lancer dans un projet comme
celui-là, quel que soit le coût et quels que soient les
résultats à l'autre bout et les risques en cours de route, et de
l'autre côté, on est prêt à peindre le nationalisme
pour le transformer, en
disant: On va s'ouvrir sur le monde et avoir un contenu, d'ailleurs,
d'autre sorte. Il semble y avoir, quand même, une situation paradoxale
dans ce sens.
M. Bérubé: C'est ce qui caractérise ce
nouveau nationalisme.
M. Brochu: On est prêt à se lancer dans... M.
Bérubé: C'est un nationalisme différent. M.
Brochu:... à se lancer dans... je m'excuse...
M. Bérubé: Voyez-vous, vous parlez du
nationalisme...
M. Brochu: Je n'ai pas interrompu le ministre...
M. Bérubé: ... de M. Duplessis.
M. Brochu:... tout à l'heure, le ministre pourra revenir
s'il veut sur cette question, mais on est prêt à se lancer dans
une aventure économique, au niveau de la Société nationale
de l'amiante, avec l'acquisition de l'Asbestos Corporation, simplement sur une
hypothèse de travail non fondée, qui est davantage axée
sur le nationalisme dans le sens du Parti québécois, où on
doit être maître de nos richesses naturelles si la chose
peut se faire dans ce contexte, on sait que cela ne se peut pas on
accepte cela d'un côté, et on s'en fait fort du côté
du Parti québécois, quel que soit le coût. Au bout de la
ligne, vous allez avoir 400 ou 500 emplois, au maximum, vous allez avoir
dépensé $300 millions à $400 millions.
De l'autre côté, on dit, presque dans un même
souffle: Pour une autre société d'Etat, si cela n'est pas grave,
on va aller à l'extérieur, on va avoir un contenu de
l'extérieur à notre conseil d'administration même qui est
appelé à prendre des décisions importantes concernant les
investissements des Québécois, qui sont à
l'intérieur de cela. C'est ce qui semble un peu un paradoxe. Le ministre
pourra l'éclaircir, s'il veut, dans ce sens, mais au moment où on
dit qu'on veut se défaire, encore entre parenthèses, de nos
attaches traditionnelles, des carcans traditionnels dans lesquels on pouvait
être à ce moment, en même temps, on va donner à des
étrangers une partie des décisions qui nous appartiennent, c'est
aussi simple que cela.
C'est comme l'adolescent... Le ministre me fait penser, avec l'attitude
du gouvernement, à un adolescent qui vient à bout, après
des années, d'avoir une voiture à lui et qui irait voir son
père pour la conduire ou un voisin pour lui offrir le volant, et lui
dire: Conduis-la avec moi, maintenant.
M. Bérubé: Des leçons de conduite, cela
n'est pas si fou.
M. Brochu: Dans ce sens, on dirait qu'il y a un pas qui manque
dans ce sens. Je comprends d'un côté, lorsque je regarde
l'argument logique, administratif, d'ouvrir et aller chercher des
compétences, c'est une chose. Mais quand vous tombez et cela
arrive dans plusieurs de nos discussions sur le plan émotif,
nationaliste, lorsque vous teintez de cet élément émotif
nationaliste, des discussions comme celles concernant la Société
nationale de l'amiante on retrouve, de l'autre côté, où on
veut être strictement logique, à un moment donné; qu'il y a
d'apparentes contradictions. C'est dans ce sens. C'est pour cela, M. le
Président, que sur cet article, je vais être conséquent
avec moi-même, avec ce qu'on a fait à ce moment, ce qu'on avait
demandé pour la Société nationale de l'amiante c'est que
tout le conseil d'administration soit composé de
Québécois. A la rigueur, on a fait accepter au gouvernement que
ce soit au moins deux tiers, pour sauver les meubles. Dans ce sens je vais
appuyer l'article 5, tel que présenté, qui est dans le même
sens, qui au moins nous assure un contenu même si cela n'est pas
idéal.
Le Président (M. Boucher): Alors vous êtes... les
membres sont prêts pour le vote demandé par le
député de Montmagny-L'Islet. M. Bérubé
(Matane).
M. Bérubé: Faites attention, il nous a
mêlés avec ses contre-propositions.
Le Président (M. Boucher): C'est sur l'article 5.
M. Bérubé: On vote sur la loi.
Le Président (M. Boucher): Ceux qui sont en faveur de
l'article tel que rédigé. (11 h 30)
M. Bérubé: Pour, M. le Président.
M. Brochu: II aurait fallu mettre le président Callaghan.
A un moment donné, le gouvernement n'a pas trouvé...
Le Président (M. Boucher): Pour. M. Desbiens (Dubuc).
M. Bérubé: Ceux qui sont pour, sont contre et ceux
qui sont contre sont pour.
Le Président (M. Boucher): M. Giasson
(Montmagny-L'Islet).
M. Giasson: Je suis contre l'article 5, tel que
libellé.
Le Président (M. Boucher): M. Jolivet (Laviolette).
M. Jolivet: Pour.
Le Président (M. Boucher): M. Picotte
(Maskinongé).
M. Picotte: Contre.
Le Président (M. Boucher): M. Brochu (Richmond).
M. Brochu: Pour.
Le Président (M. Boucher): M. Marquis
(Matapédia).
M. Marquis: Pour.
Le Président (M. Boucher): L'article est adopté.
L'article 6.
Conflit d'intérêt
M. Bérubé: M. le Président, je
prévois un débat intéressant à ce niveau-ci.
Cependant, je prévois avoir l'appui complet de l'Union Nationale,
à la lumière du discours de son chef.
M. Brochu: Ne présumez pas.
M. Bérubé: A la lumière du discours
enfin, j'interprète évidemment les directives de son chef
mais j'ignore s'il a véritablement l'autorité nécessaire
sur les membres de son parti, pour les amener à se rallier...
M. Brochu: Je les inviterais même à méditer
toutes les directives de mon chef.
M. Giasson: Surtout ses positions sur la société
d'Etat...
M. Brochu: Voilà.
M. Bérubé: Alors, l'article 6 dit tout simplement:
"L'article 14 de ladite loi est abrogé". Nous avons eu un long
débat à l'Assemblée nationale, en deuxième lecture,
un débat que je ne voudrais pas reprendre. J'essaierai plutôt de
répondre, en fait, aux questions et essayer peut-être de bonifier,
si c'est possible de bonifier.
L'article 14 stipulait que les membres d'un conseil d'administration et
ses fonctionnaires ou employés ne peuvent, sous peine de
déchéance de leurs charges, avoir un intérêt direct
ou indirect dans une entreprise, mettant en conflit leur intérêt
personnel et celui de la société, évidemment, à
l'exclusion des cas de succession, puisque l'administrateur n'en était
pas responsable.
Le député de Lotbinière, dans son intervention, en
deuxième lecture, a souligné à quel point, dans les
sociétés d'Etat, on devrait avoir des administrateurs. Il a
demandé: Pourquoi n'avez-vous pas un article dans la loi, un article qui
dirait qu'il faut être administrateur pour être administrateur,
puisqu'effectivement, siéger à un conseil d'administration par
définition, c'est être un administrateur. Or, ce que le
député de Lotbinière nous disait, c'est qu'il faudrait
avoir la qualité d'administrateur pour siéger à un conseil
d'administration. Là-dessus, je ne peux qu'être en entier accord
avec lui. Effectivement, pour être administrateur, il faut être
administrateur. C'est une pétition de principe.
Cependant, ce n'est pas le sens que le député de
Lotbinière voulait donner à ses paroles. Ce que le
député de Lotbinière voulait dire, c'est qu'on devrait
aller chercher pour siéger au conseil d'administration, des gens qui ont
une expérience dans le secteur et qui pourraient apporter une
contribution positive au contrôle de la direction d'une
société d'Etat. En ce sens, je suis en entier accord avec le
député de Lotbinière. Si c'est vraiment le sens qu'il
voulait donner, je suis d'accord avec lui.
Effectivement, il est important que sur nos sociétés
d'Etat, on puisse nommer des administrateurs qui ont une connaissance actuelle
du domaine et qui, par conséquent, auront l'esprit averti lorsque la
direction apportera une proposition de développement ou soumettra une
décision au conseil d'administration. Le conseil d'administration devra,
à un moment donné, juger.
Il fait peu de doute que si nous avions eu un homme
spécialisé dans le sciage, connaissant bien cette industrie, au
conseil d'administration de REXFOR, il est possible que l'on ait pu
régler le problème de Samoco il y a peut-être trois ans.
Cependant, un des problèmes auquel la société a dû
faire face, c'est qu'elle se trouvait aux prises avec Béarn, Taschereau.
Ils ont eu la scierie des Outardes en pleine construction. En d'autres termes,
tout le capital humain que REXFOR pouvait assigner à des dossiers de
scieries, était utilisé. Au conseil d'administration, on n'a
peut-être pas été autant en mesure de se rendre compte
qu'effectivement, on avait besoin d'un scieur, à ce point qu'à un
moment donné, le gouvernement a dû former une commission
d'experts. Nous sommes allés chercher le gérant de la scierie du
Séminaire de Québec, également, un gérant d'usine
du groupe Cossette, pour aller visiter les installations et nous faire des
suggestions quant aux problèmes qui se développaient à
Samoco. Donc, on a senti le besoin, nous, comme gouvernement, d'engager des
scieurs pour juger de la situation.
Il paraît donc important de pouvoir nommer, à un conseil
d'administration, des administrateurs qui aient une véritable
connaissance du domaine. Or, malheureusement, pour avoir une véritable
connaissance du domaine, il faut soit y travailler, soit y avoir
travaillé, soit être en contact avec des gens qui y travaillent;
je pense que c'est assez logique.
Toute personne qui y travaille, cependant, peut-être dite en
conflit d'intérêts au moins indirectement; elle est donc exclue.
Toute personne qui y a travaillé, évidemment, ça
réduit automatiquement le nombre, puisque forcément ce n'est pas
tous les jours qu'on peut trouver une personne de 65 ans ayant pris sa retraite
et ayant géré une entreprise de sciage; ce n'est pas tous les
jours qu'on rencontre ça, sans qu'elle soit actionnaire ou
propriétaire d'une entreprise.
Il s'agit donc là d'un bassin beaucoup plus restreint, qui limite
notre possibilité de choix. D'autant plus qu'une personne qui a
oeuvré dans un secteur il y a un certain nombre d'années,
souvent, a perdu contact, parce que la technologie évolue très
rapidement; on ne scie pas le bois
comme on le faisait il y a dix ans. Or, quelqu'un qui aurait une
expérience du sciage il y a dix ans n'aurait pas nécessairement
une expérience quotidienne de la mise en marché du bois, de la
technologie du sciage; elle n'aurait probablement pas non plus une
compréhension des nouvelles relations de travail.
En d'autres termes, même cette personne qui aurait une
expérience du sciage, mais qui ne serait plus dans le domaine depuis un
certain nombre d'années, ne serait peut-être pas non plus la
personne idéale pour gérer cette entreprise. Néanmoins,
c'est déjà un atout; ce qui a amené le gouvernement, d'une
façon générale, à nommer aux conseils
d'administration de ses sociétés d'Etat des gens qui avaient une
connaissance indirecte du domaine. On pourrait prendre le conseil
d'administration de SOQUEM, par exemple, où nous avons un maire, un
administrateur de l'Hydro-Québec, nous avons un certain nombre
d'administrateurs qui connaissent bien l'industrie minière. Le maire est
le maire de Chibougamau; donc il connaît bien l'industrie minière
parce qu'il y vit quotidiennement, mais lui-même n'est pas administrateur
au sens où le définissait le député de
Lotbinière.
Donc, un des obstacles est là. Cela ne veut pas dire pour autant
là, je veux bien être clair qu'il ne faille pas
nommer, par exemple, à un conseil d'administration quelqu'un qui aurait
une expérience politique. On pourrait, par exemple, nommer un ancien
ministre des Terres et Forêts. Ce serait peut-être la solution
idéale. D'ailleurs, je suggérerais au prochain gouvernement
d'envisager de nommer le ministre antérieur, qui a une très
grande connaissance de ce dossier. Mais je pense qu'un ancien politicien, le
ministre de l'Agriculture, par exemple, a certainement une connaissance de la
forêt, une connaissance qui lui est propre, qui peut être d'un
apport appréciable aux décisions que doit prendre la
société. Là où ça devient dangereux, c'est
lorsqu'on ne peut pas, à côté d'un représentant du
monde politique ou un membre de l'âge d'or, qui aurait déjà
eu une connaissance de l'industrie du sciage, qu'on ne puisse, à
côté de ces participants, nommer d'autres citoyens qui, eux,
connaissent bien le domaine.
Je pense qu'à cet égard on peut améliorer les
choses et c'est notre intention; je ne cacherai pas que c'est mon intention
très ferme, je n'ai pas l'intention de nommer d'étrangers, mais
j'ai certainement l'intention de nommer des Québécois qui
jouissent d'une grande réputation dans le monde forestier au
Québec, qui sont liés encore au domaine forestier et qui seraient
prêts à faire partager leur expérience à la
société d'Etat.
C'est donc une intention très ferme. J'ai l'intention d'aller
puiser dans ce secteur de l'industrie du sciage qui est contrôlée
à 72% par des Québécois. Nous avons des industriels d'un
rare dynamisme. Evidemment, il ne s'agit pas de nommer un industriel qui est en
concurrence directe avec REXFOR dans les mêmes marchés, c'est une
question de prudence élémentaire. Mais nous avons des industriels
qui n'ont pas de contacts réguliers avec REXFOR, qui en fait ne sont
même pas en concurrence pour les mêmes marchés et qui, par
conséquent, pourraient être disponibles pour porter jugement sur
les activités de sciage de la société. On pourrait penser,
étant donné que REXFOR est appelée à aller du
côté de l'industrie forestière, les pâtes et papiers,
par exemple, qu'il pourrait être avantageux d'avoir un homme d'une grande
expérience qui parfois est en fin de carrière. Souvent, c'est le
cas qui se produit, quelqu'un qui est déjà impliqué dans
une entreprise, étant à la fin de sa carrière, à
qui il reste un an ou deux, qui doit donc envisager une deuxième
carrière. A ce moment-là, c'est un élément
extrêmement positif pour un conseil d'administration d'aller chercher une
telle personne.
M. Giasson: Comme qui, par exemple? Léopold Dion?
M. Bérubé: Non, je n'ai pas l'intention... je ne
connais pas M. Dion. C'est un partisan du Parti libéral qui
finançait la caisse? Non?
M. Giasson: Je ne connais pas ses options politiques.
M. Bérubé: Ah bon! C'est correct.
M. Giasson: C'est un ancien confrère de collège qui
occupe un haut poste dans une compagnie papetière. Je ne connais pas du
tout son option politique; je l'ai perdu de vue depuis des années.
M. Bérubé: De toute façon, cela n'a aucune
espèce d'importance. Je ne vous cacherai pas que je serais bien en peine
de pouvoir donner l'opinion politique des gens que j'ai l'intention de
choisir.
En d'autres termes, l'objectif est d'aller piger peut-être un
représentant de l'industrie papetière, un représentant de
l'industrie du sciage...
M. Giasson: Le ministre va...
M. Bérubé: ... un représentant des
forestiers, par exemple, au Québec, de la foresterie plus
conventionnelle, industrielle ou la foresterie telle que la pratiquent
certaines de nos excellentes firmes d'ingénieurs-conseils dans le
domaine. On ne réalise pas assez que, par exemple, au Québec,
nous possédons trois des dix plus grandes firmes d'ingénieurs au
monde et on a tendance à l'ignorer. Dans le domaine du génie, les
Québécois ont atteint un niveau d'excellence qui est rarement
égalé ailleurs dans le monde. Nous avons des...
M. Brochu: Est-ce que le ministre me permettrait de poser une
question sur ce qu'il vient de dire? Est-ce que cela veut dire que l'intention
du gouvernement, à ce moment-là, en oeuvrant cette porte, c'est
de l'employer sur une assez vaste échelle, d'utiliser cette disposition
sur une vaste échelle, d'aller chercher toutes les
compétences
disponibles et de les mettre à profit au niveau de l'Etat?
M. Bérubé: Exactement. D'aller chercher tant dans
le domaine du génie-conseil, tant dans le domaine de l'industrie
papetière, tant dans le domaine du sciage, tant dans le domaine,
également, de la fonction publique, tant dans le domaine de la chose
publique, des hommes publics, d'aller chercher un éventail
d'expériences humaines qui nous permettraient, je pense, de pouvoir
porter un jugement plus conséquent, où plus de facettes pourront
être examinées au conseil d'administration. C'est l'intention.
Je dois dire c'est peut-être important, aussi que
nous sommes également conscients de ces problèmes de conflits
d'intérêts. Aussi, dans le contrat qui lie l'administrateur
à la société, nous avons l'intention d'introduire des
clauses de conflits d'intérêts tels que la divulgation,
l'impossibilité pour un administrateur de voter lorsque des
intérêts de sa firme sont en cause. Nous allons le définir
dans un contrat. Comme, à ce moment-là, l'origine des membres du
conseil d'administration est assez vaste, il est difficile de prévoir
dans une loi un article qui prévoirait à l'avance toutes les
possibilités de clauses de conflits d'intérêts et qui les
prévoirait nommément. Par conséquent, nous avons
pensé que ce serait dans le contrat d'engagement liant l'administrateur
à la société qui doit être approuvé par le
gouvernement, que le gouvernement doit faire preuve de sagesse et introduire
les clauses nommément de conflits d'intérêts.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: M. le Président, je n'admets pas, pour autant
que je suis concerné, qu'on abroge complètement l'article 14. Je
ne comprends pas, par le fait même, où sont passées la
pureté et la transparence du Parti québécois. Sans doute
que le gouvernement a l'intention de nommer au conseil d'administration les
personnes qui puissent siéger à d'autres entreprises
forestières au Québec, qu'elles soient papetières, de
sciage ou autre et qui pourraient, par le fait même, créer des
possibilités de conflits d'intérêts. Au-delà de
cela, pourquoi ne pas avoir modifié l'article 14 pour, tout au moins,
interdire le conflit d'intérêts pour le personnel de direction,
les fonctionnaires et le personnel de REXFOR? (11 h 45)
Je crois, M. le Président, que les buts recherchés
auraient été atteints en modifiant quelque peu l'article 14 dans
sa rédaction actuelle. Cet article se lit comme suit: "Les membres du
conseil d'administration de la société et ses fonctionnaires ou
employés, ne peuvent, sous peine de déchéance de leur
charge, avoir un intérêt direct ou indirect, etc".
Il aurait été plus valable à mon sens, de modifier
l'article en retranchant les membres du conseil d'administration de la
société et de dire: "Le personnel de direction, les
fonctionnaires ou employés de la société ne peuvent". Nous
aurions au moins conservé une interdiction de conflit
d'intérêts pour une partie de personnes qui sont directement
impliquées dans les opérations de REXFOR, sans
nécessairement toucher au conflit d'intérêts possible chez
les membres du conseil d'administration qui vont se trouver sans doute un jour
ou l'autre, de par leur appartenance à d'autres entreprises, dans une
forme de conflit d'intérêts, qu'il soit direct ou indirect.
J'aimerais que le ministre nous explique les raisons pour lesquelles on
a libéré de toute possibilité de conflit
d'intérêts le personnel de direction, la gestion ou le personnel
de gérance de la société, comme les autres fonctionnaires
ou les autres employés de la société.
J'apprécierais, M. le Président, que le ministre nous explique
les raisons fondamentales pour lesquelles on a décidé de
soustraire toutes les personnes ayant un emploi à la
société REXFOR lorsque la possibilité de conflit
d'intérêts va se situer au niveau du conseil d'administration par
les choix que le ministre entend faire et qu'il nous a expliqués dans
ses propos il y a quelques moments.
Pour les membres du conseil d'administration, il nous a indiqué
qu'il était de l'intention du gouvernement d'aborder la question de
conflit d'intérêts en ce qui a trait aux contrats qui devraient
être signés entre la société et les administrateurs.
Je prends la parole du ministre qu'il a l'intention de prévoir des
mécanismes de conflit d'intérêts chez les administrateurs,
mais pour ce qui est de tout le personnel qui représente la direction,
les gestionnaires ou la gérance, comme on dit couramment, ainsi que les
autres fonctionnaires, le bon sens, il me semble, aurait commandé qu'on
maintienne ces dispositions dans l'article 14, en le modifiant dans sa teneur
présente.
J'aimerais connaître l'attitude du ministre à cet
égard.
M. Bérubé: Ecoutez, mon attitude était la
suivante: On vous a présenté récemment au tout
début des travaux de cette commission le témoignage de
l'avocat de REXFOR qui répondait, je pense, à une de vos
questions, M. le député de Montmagny-L'Islet, qui portait plus
spécifiquement sur la poursuite pour fraude entreprise par REXFOR contre
un de ses employés. Ce que l'avocat expliquait, c'est que
l'employé en question avait émis des chèques à une
société dont lui-même était actionnaire ou encore
à laquelle siégeaient ou qui était possédée
par des membres de sa famille.
Dans un cas comme celui-là, les lois existent, la notion de
conflit d'intérêts a déjà fait l'objet d'une longue
jurisprudence et les poursuites judiciaires peuvent toujours être
entreprises contre une personne qui agit illégalement ou qui va à
l'encontre de l'intérêt de son employeur, par suite d'un conflit
d'intérêts.
Donc, on peut dire que dans la mesure où les lois
prévoient ces situations, est-il nécessaire de refaire de
nouvelles lois pour retraiter du même sujet? C'est la question qu'on peut
se poser.
Evidemment, la rédaction originale de l'article résultait
d'une préoccupation du législateur de ne pas laisser l'ombre d'un
doute quant à l'intégrité absolue des administrateurs de
ces sociétés d'Etat, sans doute pour éviter le scandale
politique. C'était là un geste du prudence, geste de prudence qui
a peut-être entraîné une mauvaise administration de
certaines de nos sociétés d'Etat et des conséquences
économiques telles qu'aujourd'hui, lorsqu'on écoute le
député de Lotbinière, on se demande si son parti aurait
dû être aussi prudent qu'il l'a été en
préparant la loi de REXFOR, par exemple, puisque beaucoup de
problèmes résultent parfois, justement, de la difficulté
de trouver des administrateurs ayant une connaissance ad hoc des
problèmes de la société.
Cependant, personnellement, je n'ai pas d'objection en principe, et je
serai d'accord avec l'Opposition si celle-ci voit là une question
majeure... Pour autant que je suis concerné, il me semblait que, dans le
cadre du contrat d'engagement, on prévoirait les clauses de conflit
d'intérêts. Dans les règlements de la
société, par exemple, qui doivent être approuvés par
le lieutenant-gouverneur en conseil, il y a une clause de conflit
d'intérêts qui interdit aux employés de...
M. Giasson: Si vous me le permettez, c'est toujours
vis-à-vis des administrateurs.
M. Bérubé: Non, vis-à-vis des
employés.
M. Giasson: Des fonctionnaires de REXFOR, employés...
M. Bérubé: Oui, parce que la société
a un règlement interne et elle peut, dans son règlement de
régie interne, avoir un règlement interdisant les conflits
d'intérêts.
M. Giasson: Mais vous ne pensez pas qu'il est mieux de le
prévoir dans la loi même, la loi constituante?
M. Bérubé: Trop fort ne casse pas; je pense qu'en
soi ce n'est pas plus grave et c'est pour cela que récemment, toujours
dans cette même orientation, il y a eu le projet de |oi 105 qui a
été déposé, Loi constituant la
société québécoise de développement des
industries culturelles. A cet égard il y a une formulation
intéressante que les légistes auraient peut-être dû
envisager lorsqu'il a été question d'amender l'article 14 de la
loi 105. Je vous lis l'article: "Aucun membre du conseil d'administration
exerçant ses fonctions à plein temps ne peut, sous peine de
déchéance de sa charge, avoir un conflit direct ou indirect dans
une entreprise mettant en conflit son intérêt personnel et celui
de la société."
En d'autres termes, le président de la société ne
peut pas en même temps être actionnaire de Consolidated Bathurst;
cela m'apparaît assez logique. "Toutefois, cette déchéance
n'a pas lieu si un tel intérêt...". C'est l'article
essentiellement con- ventionnel. "Tout autre membre du conseil d'administration
ayant un intérêt dans une entreprise doit, sous peine de
déchéance de sa charge, le révéler par écrit
au président et s'abstenir de participer à toute
délibération et à toute décision portant sur
l'entreprise dans laquelle il y a un intérêt."
Je pense que là on retrouve essentiellement l'article de la Loi
des compagnies fédérales qui inclut un tel article.
Cela m'apparaît possible de chercher à amender l'article 14
dans ce sens. Si l'opposition estimait que, rédigé de cette
façon, cela répondrait à ses attentes, pour autant que je
suis concerné, cela répondrait à mes attentes. Je suis
tout à fait d'accord pour dire qu'un membre du conseil d'administration
qui exerce une fonction à temps plein on peut penser au
président de la société qui est véritablement un
membre de la direction et qui exerce ses fonctions à temps plein pour la
société normalement, ne devrait pas être en conflit
d'intérêts. Par conséquent, on pourrait le prévoir
dans la loi, je n'y ai aucune objection.
Le président du conseil, s'il n'est là qu'à temps
partiel, s'il ne vient que pour présider les réunions du conseil,
à nouveau, je serais d'accord pour dire qu'il ne doit pas être en
conflit d'intérêts. Il peut arriver parfois, dans le cas de
sociétés plus importantes, qu'on veuille nommer le
président du conseil d'administration à temps plein, de
manière qu'il suive de beaucoup plus près les décisions
prises par la direction et qu'il soit, en pratique, quotidiennement dans la
boîte. Dans un cas comme celui-là, à nouveau, puisqu'il
s'agit d'un salaire respectable, on pourrait exiger de la part de cet
administrateur qu'il ne soit pas en conflit d'intérêts.
Lors d'une nomination avec une rémunération
correspondante, on pourrait avoir comme condition qu'il n'y ait pas de conflit
d'intérêts. Je suis absolument d'accord si cela répond
à...
M. Brochu: Vous seriez prêt à l'inclure en amendant
l'article 60
M. Bérubé: Je dois dire que suite au débat
de deuxième lecture...
M. Giasson: On pourrait proposer un amendement à l'article
14. Je n'ai pas de texte écrit, mais ça pourrait se lire comme
ceci: L'article 14 de ladite loi est remplacé ou est modifié par
le suivant: Les membres du conseil de direction, les fonctionnaires et les
employés de la société ne peuvent, sous peine de
déchéance de leur charge, avoir un intérêt direct ou
indirect dans une entreprise mettant en conflit leur intérêt
personnel et celui de la société. Toutefois cette
déchéance n'a pas lieu si un tel intérêt
échoit à l'un d'eux par succession ou par donation, pourvu qu'il
y renonce ou en dispose avec toute la diligence possible.
Cela ne touche pas du tout les membres du conseil d'administration en ce
qui concerne les conflits d'intérêts et le contrat qui les liera
avec la société pourra prévoir des conditions ou des
stipulations touchant les conflits d'intérêts.
D'un autre côté, il n'aurait peut-être pas
été mauvais, M. le Président, de garder dans la loi une
disposition qui dirait que les administrateurs devraient s'abstenir de
participer ou de voter lorsqu'une décision à prendre les touche
directement ou indirectement. Cela pourrait très bien être inscrit
dans la loi, même si le contrat qui les liera contiendra également
des prévisions ou des précisions relatives aux conflits
d'intérêts.
M. Bérubé: II s'agit en fait, ce que vous venez de
dire, essentiellement de l'article 14 de la loi 105 qui dit: "Aucun membre du
conseil d'administration". Quand vous dites: la direction, je suis
hésitant parce que...
M. Giasson: Dans mon esprit, la direction c'est la
gérance.
M. Bérubé: Oui, mais...
M. Giasson: Le conseil d'administration, si je comprends bien ce
qu'on recherche, ce sont les administrateurs de la société. Sous
cela, vous avez une équipe qui est la direction de l'entreprise qui
exécute les projets et les plans qui ont été
décidés par les administrateurs. Les administrateurs continuent
de surveiller l'exécution des projets et des plans afin de constater si
la direction ou le personnel de gestion de l'entreprise va vraiment dans le
sens des objectifs qui ont été prévus par les
administrateurs. C'est ainsi que je perçois cela. Le ministre voudra
bien me dire si c'est là sa vision...
M. Bérubé: Oui.
M. Giasson: ... ou s'il a une autre perception des choses.
M. Bérubé: Je ne voudrais pas utiliser un...
Le Président (M. Boucher): Un instant, s'il vous
plaît! M. le député de Montmagny-L'Islet, est-ce que vous
présentez votre amendement ou faites-vous simplement une suggestion?
M. Giasson: Je n'ai pas rédigé de texte. Je viens
de proposer une formulation nouvelle de l'article 14.
Le Président (M. Boucher): Si on veut discuter sur
l'amendement, j'aimerais avoir le texte.
M. Giasson: II faudrait le rédiger.
M. Bérubé: De toute façon, M. le
Président, si je ne m'abuse, il n'est pas possible d'amender l'article
6. Il faut que d'un commun accord nous votions contre l'article 6 et que nous
proposions un nouvel article à insérer entre 5 et 7. Donc, il
s'agit là d'un consensus à établir à cette
commission. Sinon on ne peut pas amender...
M. Giasson: Oui.
M. Brochu: C'est ça. D'accord. J'aimerais juste poser une
question au député de Montmagny-L'Islet, si le ministre le
permet. Est-ce qu'il ne s'agit pas simplement de revenir à la loi
actuelle en ajoutant au début que c'est la direction et les
fonctionnaires?
M. Giasson: C'est ça.
M. Brochu: C'est exactement ça?
M. Giasson: C'est ça. C'est soustraire les membres du
conseil d'administration à l'article 14. L'article 14 actuel les
inclut...
M. Brochu: Tel que libellé...
M. Giasson: ... dans les interdictions de conflits
d'intérêts. On enlève les membres du conseil
d'administration du libellé de l'article 14.
M. Bérubé: ... tirer une copie de l'article 14 de
la loi 105 qui, je pense, dit exactement ce que vous avez à l'esprit et
qui, effectivement, reviendrait à dire prenons l'article 14 de la
loi originale, c'est-à-dire la loi 5... enfin, c'est l'ancien...
M. Giasson: M. le ministre, l'article 14 auquel vous faites
référence ne fait pas mention du personnel, des fonctionnaires ou
des personnes qui siègent à la direction, il traite uniquement du
cas des administrateurs.
M. Bérubé: Oui... L'article 14 de la loi 105, vous
voulez dire?
M. Giasson: C'est ça.
M. Bérubé: Vous avez raison. C'est pour cette
raison qu'on pourrait, dans l'esprit de ce que vous dites, partir de l'article
14 de l'ancienne loi de REXFOR et l'amender ou la réécrire d'une
façon qui le rapproche de l'article 105. Essentiellement, ce que vous
semblez désirer, c'est que les membres du conseil d'administration de la
société exerçant leur fonction à temps plein et les
fonctionnaires ou employés de la société ne puissent, sous
peine de déchéance de leur charge, avoir un intérêt
direct ou indirect.
M. Giasson: D'accord, cela m'irait.
M. Bérubé: Je pense que c'est en ce
sens-là.
M. Giasson: Cette formulation-là, oui.
M. Brochu: Cela rejoint l'esprit de ce qui a été
discuté.
M. Bérubé: Oui.
M. Giasson: Oui. (12 heures)
M. Bérubé: Si nous sommes d'accord, M. le
Président, on pourrait peut-être demander aux
juristes du gouvernement, à la lumière de ce qu'on vient
de dire, de nous formuler un article qui répondrait essentiellement
à notre objectif, c'est-à-dire que les membres du conseil
d'administration employés à temps plein et tout autre
fonctionnaire de la société ne peuvent pas avoir de conflit
d'intérêts; on ajouterait c'est à ce moment
l'article 14 de la loi 105 un deuxième alinéa: "Tout autre
membre du conseil d'administration ayant un intérêt dans une
entreprise, doit, sous peine de déchéance de sa charge, le
révéler par écrit au président et s'abstenir de
participer à toute délibération", c'est le deuxième
point qu'a soulevé le député de Montmagny-L'Islet.
M. Giasson: C'est ça.
M. Bérubé: Si on avait un article structuré
de cette façon, on répondrait à votre préoccupation
et moi ça réglerait mes problèmes de nomination au
concours.
M. Giasson: Oui et je préférerais de beaucoup cette
modification, plutôt que d'abroger en totalité l'article 14 qui
traitait des conflits d'intérêts.
M. Bérubé: Je serais, personnellement,
entièrement d'accord, je ne sais pas si les membres...
M. Giasson: Parce que le problème, au fond, que vous
voulez prévoir, ce serait le cas d'administrateurs qui ne seraient pas
à temps plein ou permanents, qui viennent d'autres entreprises, qui
n'ont pas coupé totalement, de façon complète, avec ces
entreprises quelles qu'elles soient et qui viennent apporter leur connaissance
à l'administration.
M. Bérubé: Qui sont prêtés.
M. Giasson: C'est là qu'il y aurait un danger de conflit
d'intérêts qui pourrait empêcher parfois de faire appel
à ces personnes.
M. Bérubé: Oui, exactement.
Le Président (M. Boucher): Si j'ai bien compris, M. le
ministre, vous suggérez de retirer l'article 6 tel que
rédigé actuellement...
M. Bérubé: Ou de le garder en... Est-il possible,
M. le Président de...
M. Giasson: On pourrait le suspendre.
M. Bérubé: ... le garder en suspens, ce qui nous
permettrait de soumettre aux légistes du gouvernement...
Le Président (M. Boucher): Un nouvel article 6.
M. Giasson: C'est ça, oui.
M. Bérubé: Au moins les réflexions que nous
avons tous émises lors de cette discussion, de manière à
ce qu'eux nous rédigent un article qui tienne compte du consensus.
Le Président (M. Doucher): Nous suspendons l'article 6.
Article 7. M. le ministre.
Responsabilité du président
M. Bérubé: L'article 15 de la loi: "Le
président et le vice-président doivent s'occuper exclusivement du
travail de la société et des devoirs de leur fonction."
Il m'apparaît que c'est d'abord exiger de la part du conseil
d'administration l'évidence même. Un conseil d'administration qui
engagerait un président de société à temps partiel
si cette société a beaucoup de travail ça
m'apparaît un peu aberrant. Par conséquent, il faut
reconnaître au conseil d'administration le pouvoir de décider des
termes du contrat, d'autant plus qu'on soulignait pourquoi le
vice-président, s'il y avait plusieurs vice-présidents
parce que très souvent on peut avoir le vice-président aux
ventes, le vice-président aux opérations par
conséquent on se rend compte à nouveau que le
vice-président n'était pas inclus.
Il m'apparaît plus simple de laisser au conseil d'administration
le soin de définir c'est dans l'esprit même les
termes du contrat. Lorsqu'on engage quelqu'un et qu'on lui paie un salaire
suffisamment élevé, à ce moment je pense qu'on exige qu'il
consacre tout son temps à la société en question.
Evidemment, dans le cas d'une très petite société,
on aurait peut-être pu imaginer quelqu'un qui aurait fait ce travail
à temps partiel, mais je ne vois vraiment pas pourquoi on a mis
l'article 15 au départ. C'est pour cette raison, étant
donné que l'article 15 lui-même n'a pas tellement de sens, que
nous avons pensé ajouter un article qui, lui, est quand même plein
de sens et qui dit: "Le président de la société, qui peut
être aussi président du conseil d'administration, est responsable
de l'administration et de la direction de la société dans le
cadre de ses règlements." En d'autres termes, nous définissons
par cet article, un président de la société qui doit
diriger l'entreprise. Il faut donc qu'il y ait un président-directeur
général, mais en même temps, nous soulignons qu'il est
possible d'avoir un président du conseil d'administration distinct.
Personnellement, j'ai l'intention de faire en sorte que nous ayons un
président du conseil d'administration distinct. Je ne veux pas,
cependant, imposer, à un gouvernement ultérieur, l'obligation de
suivre et, par conséquent, il s'agit là d'un article qui rend
possible la distinction des deux rôles, mais qui ne les rend pas
obligatoires.
Je n'aime pas les carcans trop serrés qui font qu'à un
moment donné, un gouvernement pense qu'on aurait dû modifier...
à titre d'exemple: l'entreprise va très mal, on décide de
mettre le conseil d'administration à la porte, on se choisit un homme
fort et à ce moment, on lui donne le
mandat, avec trois ou quatre conseillers, de vraiment secouer la
boîte et par conséquent, il ne s'agit pas, à ce moment,
d'augmenter les contrôles sur cet individu, mais au contraire, de lui
donner les coudées franches.
Dans une opération comme celle-là, évidemment, cela
serait peut-être utile pour le gouvernement d'avoir un président
de société qui est en même temps président du
conseil, qui, en fait, mène la boîte. C'est une opération
de salut public.
Donc, pour garder la liberté, il s'agit ici de dire simplement
peu, mais en même temps, il est important de souligner qu'on peut avoir
un président du conseil distinct de la présidence de
société.
M. Giasson: M. le Président, je souscris à
l'objectif que vient d'énoncer le ministre. C'est une question de plus
grande souplesse que de ne pas lier automatiquement, dans sa fonction et son
rôle le président de la société avec la
présidence du conseil de l'administration. Mais éventuellement,
dans le réaménagement qui va se faire dans l'équipe
d'administrateurs, est-ce que le ministre est en mesure de nous indiquer qui va
être cet homme qui va accéder à la présidence,
puisque la rumeur veut que M. Côté laisse sa fonction pour occuper
d'autres responsabilités?
M. Bérubé: Laissons courir les rumeurs.
M. Giasson: Ah bon! Je n'ai pas d'autres commentaires à
faire, M. le Président. Je n'ai pas d'objection à la
formulation.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Richmond. Est-ce que l'article 7 est adopté?
M. Bérubé: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté, l'article 8.
Rémunération
M. Bérubé: L'article 16 est abrogé. Le
secrétaire et les employés de la société qui ne
sont pas régis par une convention collective de travail sont
rémunérés suivant les normes et les barèmes
établis par règlement de la société approuvé
par le lieutenant-gouverneur en conseil. "Pourquoi? Tout simplement, que nous
estimons qu'il appartient à la société de décider
de ses politiques de rémunération. Plus on augmente les
contrôles gouvernementaux, plus on doit assumer une responsabilité
directe dans les échecs d'une société d'Etat. Il convient
de dire que la société qui est sur le marché du travail
concurrence d'autres sociétés dans le même secteur pour
aller se chercher les cadres les plus compétents, les plus experts dans
leur domaine et cela peut les amener à payer des salaires qui sont
très élevés par rapport aux salaires de la fonction
publique.
Il est toujours difficile pour un gouvernement d'approuver de telles
dérogations, dans la mesure où, pour des raisons politiques, il
peut défendre une certaine thèse valable au niveau de la fonction
publique et des salaires qu'on doive payer dans ce domaine, mais qu'à ce
moment, entérinant une décision d'un conseil d'administration qui
paie des salaires qui dépassent de beaucoup ce que lui-même est
prêt à payer comme gouvernement à ses propres cadres, qu'il
se place dans une situation un peu délicate, et l'on constate que les
décisions sont alors très longues, très lentes, que le
gouvernement tarde à prendre une décision, demande des
réexamens et finalement, nous compliquons inutilement le rôle de
nos sociétés d'Etat.
Nos sociétés d'Etat doivent-elles être rentables?
Nos sociétés d'Etat doivent-elles accomplir avec succès le
mandat que nous leur avons donné? En ce cas, jugeons-les sur les
résultats obtenus et n'essayons pas continuellement de vouloir avoir le
nez au-dessus de leur épaule, à surveiller chacune de leurs
décisions. C'est donc dans cet esprit qui veut que, d'une part, on donne
le plus d'autonomie possible de gestion à nos sociétés
d'Etat, mais que d'autre part et nous le verrons plus loin nous
exercions un contrôle beaucoup plus suivi sur les développements
qui ont cours dans la société et sur les projets de
développement.
M. Giasson: M. le Président, est-ce que le ministre
pourrait nous dire si REXFOR a beaucoup d'employés qui ne sont pas
couverts par les dispositions d'une convention de travail?
M. Bérubé: Je ne pourrais pas vous dire s'il y en a
beaucoup, mais tous les cadres ne sont pas...
M. Giasson: Et présentement, la rémunération
des cadres était toujours approuvée par le lieutenant-gouverneur
en conseil?
M. Bérubé: Le lieutenant-gouverneur en conseil,
oui... est-ce qu'il appartient par...
M. Giasson: Cette rémunération a été
établie sur quelle base? Il doit, tout de même, avoir des points
de référence pour déterminer la rémunération
des cadres dans cette décision du Conseil des ministres?
M. Bérubé: II n'y a pas de critères. On peut
avoir des...
M. Giasson: C'est tiré au pif, comme on dit?
M. Bérubé: Presque, oui. Il n'y a pas tellement de
critères.
M. Giasson: Est-ce qu'il n'existerait pas une politique interne
de rémunération des cadres qui permettrait, par exemple, au
Conseil des ministres, lorsqu'il s'agit de cadres d'une société
d'Etat, de déterminer les conditions de rémunération
à partir de situations existantes à l'intérieur de la
fonction publique elle-même?
M. Bérubé: C'est très relatif. Dans certains
cas, les gouvernements antérieurs et actuels ont
dû être amenés à payer au président un
très fort salaire pour tenter d'attirer une personne de grande
compétence. A partir du moment où le président est bien
payé, il est évidemment plus facile d'approuver des
rémunérations de cadres qui se présentent sous forme de
rapport ou de ratio par rapport au salaire du président. Donc, cela
devient plus facile; c'est généralement la façon de le
faire. Il n'y a pas vraiment de...
M. Giasson: En pratique, c'était la direction de REXFOR
qui proposait au lieutenant-gouverneur les barèmes de
rémunération qui étaient revisés...
M. Bérubé: Cela se retrouvait au Conseil du
trésor qui se mettait à comparer les salaires payés
à tel ingénieur forestier, un cadre avec tel ingénieur
forestier payé au ministère des Terres et Forêts et pouvait
trouver que c'était trop payé, par exemple. On écrivait
à nouveau à la société en lui disant: Cela ne se
compare peut-être pas vraiment avec les salaires payés à la
fonction publique. Néanmoins, cela crée des problèmes de
relations personnelles souvent assez désagréables au sein de la
société, mais il était tout à fait possible que cet
ingénieur forestier soit une personne de très grande
qualité et que la société REXFOR désire se
l'attacher d'une façon solide pour ne pas le perdre au profit d'un
concurrent qui a peut-être les yeux dessus.
Par conséquent, appartient-il vraiment au Conseil du
trésor de décider si oui ou non on le paie trop cher? Il
appartient au Conseil du trésor de décider si oui ou non la
société fait des profits justifiés compte tenu des
investissements. Il n'appartient pas au Conseil du trésor de
décider si les cadres sont trop payés ou pas assez payés
ou si telle dépense est justifiée ou ne l'est pas. On doit juger
des résultats, on ne doit pas juger des décisions qui
amènent nos résultats. Cela m'apparaît important de
défendre cette autonomie.
M. Giasson: Tout de même, on constate que par l'abrogation
complète de l'article 16, la rémunération des cadres
à la société sera la décision et le choix de la
direction et du conseil d'administration.
M. Bérubé: Oui.
M. Giasson: C'est-à-dire que la direction va sans doute
proposer à l'administration qui, elle, va trancher, comme le disait le
Conseil du trésor, sur des propositions venant de la
société traditionnellement.
M. Bérubé: Exactement. Le conseil d'administration
va jouer le rôle du Conseil du trésor.
M. Giasson: Ce sera sans doute fait en fonction des
résultats d'exploitation et du rendement de l'équipe des cadres;
cela ne veut pas dire que ça pourra se comparer avec une autre
échelle de rémunération pour des fonctions semblables
à d'autres postes, soit aux Terres et Forêts ou dans d'autres
sociétés.
M. Bérubé: On pourra avoir une clause de
participation aux profits chez les cadres, ce qui est une approche, en
général, extrêmement intéressante, une participation
aux profits en fonction de la réalisation des objectifs que chaque cadre
s'assigne ou se voit assigné par la société. C'est une
approche qui est courante dans beaucoup d'entreprises et qui amène des
performances souvent étonnantes de la part des cadres administrateurs.
Je laisse évidemment au conseil d'administration le soin de
décider de la formule, mais je suis convaincu que si nous devions amener
au Conseil du trésor une proposition à l'effet que les cadres
soient payés en fonction des profits, je ne suis pas convaincu que
ça cadrerait tellement avec les préoccupations du Conseil du
trésor.
Le Président (M. Boucher): L'article 8 est-il
adopté?
M. Giasson: Adopté. Le Président (M. Boucher):
L'article 9. Accords
M. Bérubé: L'article 9 de ladite loi est
modifié par l'addition, après le paragraphe c), du suivant:
Conclure des accords avec toute personne ainsi qu'avec tout organisme
privé ou public, en vue de stimuler l'implantation et le
développement de l'industrie forestière ainsi que la
création d'emplois nouveaux. (12 h 15)
En fait, lorsqu'on lit les objectifs consignés originairement
dans la loi, on constate que la société pouvait, avec
l'approbation du ministre des Terres et Forêts, conclure des accords avec
toute personne ainsi qu'avec tout organisme public ou privé en vue de
contribuer à l'approvisi-sionnement des industries forestières en
matières premières et à la stabilisation de ces
industries; conclure des accords avec toute personne ou tout organisme public
ou privé pour la coupe, l'écorça-ge et le sciage,
l'usinage et la vente du bois et du produit; conclure des accords avec toute
personne ou tout organisme public ou privé en vue de valoriser et de
protéger les forêts et terrains visés au paragraphe b) de
l'article 3."
Or, il s'est avéré que, graduellement, REXFOR a pris des
orientations carrément industrielles. Le pur aspect de foresterie s'est
vu complété par une implication de REXFOR au niveau de plusieurs
projets industriels. On peut penser à Cabano, on peut penser au projet
de la vallée de la Matapédia, on peut penser au projet de la
scierie des Outardes, Béarn, Taschereau et, éventuellement, on en
vient à se demander si c'était véritablement l'intention
du législateur puisque nulle part le législateur n'avait pris la
peine d'indiquer que REXFOR pouvait s'engager dans des projets carrément
industriels.
Par conséquent, nous ajoutons cet article qui indique que
c'était l'intention du législateur qu'il ne puisse s'engager dans
ces domaines.
M. Giasson: Est-ce à dire que certaines décisions
et certains gestes posés par REXFOR, dans le passé, à la
demande du gouvernement du temps, dans la plupart des cas, dépassaient,
outrepassaient les pouvoirs que la loi constituante de la société
lui avait accordés?
M. Bérubé: Pas vraiment.
M. Giasson: Non, parce que si on prend l'article 19,
alinéa a), cela donne une marge de manoeuvre qui n'est pas
précisée de façon aussi complète que l'addition de
l'alinéa d) qu'on apporte à l'article 9.
M. Bérubé: A titre d'exemple, "conclure des accords
avec toute personne en vue de contribuer à la stabilisation de ces
industries". Si on prenait l'alinéa a), strictement, cela voudrait dire
que REXFOR ne pourrait pas s'engager dans un nouveau projet dans le secteur
forestier. On pourrait stabiliser les usines existantes et on pourrait invoquer
que ce fut le cas de Béarn, Taschereau, Richardson, mais cela
n'était certainement pas le cas avec la scierie des Outardes: on ne
stabilisait pas une industrie existante.
Cependant, vous pourriez dire, à ce moment, que l'article
b)...
M. Giasson: b) vient toucher un petit peu.
M. Bérubé: Effectivement, en jouant sur les mots,
il y avait peut-être toujours moyen de justifier l'action de REXFOR.
M. Giasson: Oui, les Outardes s'est fait en vertu des pouvoirs
accordés par b). "Conclure des accords avec toute personne ou avec tout
organisme public ou privé..." ce qui s'est produit pour la coupe,
l'écorçage, le sciage, l'outillage, l'usinage ou la vente du bois
et des produits du bois. Ce sont là les pouvoirs qui permettaient
l'opération des Outardes.
M. Bérubé: Sauf qu'il indiquait peut-être
moins clairement que REXFOR pouvait, effectivement, avoir un mandat. On a
parfois remis en cause ce mandat industriel de REXFOR et suggéré
que REXFOR se cantonne purement et simplement à la foresterie. Le
présent article permet, tout simplement, d'indiquer clairement que
REXFOR a également un mandat, une vocation dans le secteur du
développement industriel.
M. Giasson: Mais à la connaissance du ministre, est-ce
qu'il est possible que, dans le passé, se soient présentés
des cas où REXFOR n'aurait pu intervenir à cause des dispositions
de l'article 19, qui était assez limitatif, même s'il attribue des
pouvoirs ou des objectifs que peut atteindre REXFOR, est-ce qu'il s'est
produit, à la connaissance du ministre, des situations où on
aurait souhaité l'intervention de REXFOR et que la société
n'ait pu intervenir, à cause d'un champ d'action qui est trop
limité?
M. Bérubé: Je ne pense pas, parce que tel que
rédigé, en termes suffisamment vagues, je pense que l'on pouvait,
à peu près toujours, jouer sur les mots. Ce que nous faisons
maintenant, c'est que à la suggestion, d'ailleurs, du conseil
d'administration de REXFOR nous précisons clairement un mandat qu'il se
sente appelé à remplir et qu'il estime n'avoir pas
été défini de façon suffisamment explicite dans la
loi pour se sentir continuellement protégé par la loi. C'est
tout. Cela ne fait aucun doute qu'ils avaient déjà le droit de
conclure des accords, en vue de l'usinage du bois. Evidemment, c'est tellement
vague que ça...
M. Giasson: M. le Président, je suis prêt à
adopter l'article 9.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 10.
M. Bérubé: "Ladite loi est modifiée par
l'insertion, après l'article 19, du suivant: "Le ministre des Terres et
Forêts peut, dans le cadre des responsabilités et pouvoirs qui lui
sont confiés, émettre des...
M. Giasson: M. le Président. Excusez, M. le ministre. Dans
les objets de la société, à l'article 3c, on
prévoyait à peu près les mêmes objectifs que ceux
qu'on vient d'adopter à l'article 9d. Les objectifs étaient de
stimuler l'implantation et le développement de l'industrie
forestière, ainsi que la création d'emplois nouveaux.
M. Bérubé: Oui, on...
M. Giasson: II y a un peu de similitude.
M. Bérubé: ... lui donnait un objectif, mais on ne
lui permettait pas strictement de signer des accords en vue de réaliser
cet objectif.
M. Giasson: II y avait la partie des accords.
M. Bérubé: Le problème était
qu'effectivement le législateur lui avait donné un objectif, mais
lorsqu'on a défini les domaines dans lesquels il pouvait signer des
accords de développement, on avait spécifié clairement la
foresterie, le soutien de l'industrie existante, mais on n'avait pas
indiqué qu'il pouvait signer des accords en vue de développement
de nouvelles industries dans le secteur forestier. La société l'a
néanmoins fait en jouant...
M. Giasson: D'accord, M. le ministre.
Le Président (M. Boucher): D'accord? Alors, on revient
à l'article 10.
Objectifs et orientation
M. Bérubé: "Le ministre des Terres et Forêts
peut, dans le cadre des responsabilités et pouvoirs
qui lui sont confiés, émettre des directives portant sur
les objectifs et l'orientation de la société dans
l'exécution des fonctions qui lui sont confiées par la loi. "Ces
directives doivent être soumises au lieutenant-gouverneur en conseil pour
approbation. Si elles sont ainsi approuvées, elles lient la
société qui est tenue de s'y conformer. "Toute directive
émise en vertu du présent article doit être
déposée devant l'Assemblée nationale, si elle est en
session, dans les quinze jours de son approbation par le lieutenant-gouverneur
en conseil. Si la directive est émise alors que l'Assemblée
nationale ne siège pas, la directive doit être
déposée devant elle dans les quinze jours de l'ouverture de la
session suivante ou, suivant le cas, dans les quinze jours de la reprise de ses
travaux".
Il s'agit là d'un article qui, je pense, a été
inscrit pour la première fois pour la Loi de SOQUIA, à la toute
fin du régime antérieur. A la suite d'une longue discussion
portant sur les sociétés d'Etat et après une analyse en
compagnie des divers présidents des sociétés d'Etat, nous
avons dû constater qu'un des principaux problèmes
rencontrés par nos sociétés d'Etat demeurait cette absence
de volonté politique. On ignorait, en fait, ce que l'actionnaire
voulait. Par conséquent, les sociétés d'Etat, à
leur origine, étaient souvent bien encadrées mais, quelques
années plus tard, pouvaient prendre à peu près n'importe
quelle direction. Une caractéristique m'avait frappé, lors de la
nomination d'un nouveau président de la société d'Etat que
nous avions été chercher dans l'entreprise privée. Le
président de la société d'Etat m'avait demandé
quelle était la fréquence de la présentation des rapports
à l'actionnaire. Je devais lui dire qu'il y avait un rapport annuel qui
devait être présenté à l'actionnaire. Il en
était tout surpris parce que, dans l'entreprise privée,
très fréquemment, l'actionnaire majoritaire exige un rapport au
moins trimestriel de l'état d'avancement et demande de suivre de
très près le déroulement des activités de la
société. En fait, on devait constater que nos
sociétés d'Etat sont suivies de beaucoup moins près que
l'entreprise privée.
Donc, cet article vise à essayer de corriger ça en
obligeant le gouvernement à définir ce qu'il veut pour sa
société d'Etat et finalement à suivre le fonctionnement de
nos sociétés d'Etat.
M. Giasson: M. le Président, il est assez évident
que le libellé de l'article 19a met les pouvoirs de gérance entre
les mains du ministre d'une certaine manière. Le ministre peut
intervenir et donner la directive à la société publique
d'entreprendre telle activité dans tel champ ou tel secteur
d'activité forestière, même si ce n'était pas dans
les prévisions du conseil d'administration pour une année
donnée.
M. Bérubé: Sur les objectifs et orientations.
M. Giasson: Oui, les objectifs et les orientations, mais les
objectifs, à un moment donné, si la volonté politique du
gouvernement est dans le sens qu'un objectif nouveau, voulu et vu par le
conseil d'administration... si cette volonté politique se traduit par
une décision du ministre d'indiquer au conseil d'administration que tel
objectif qui n'était pas un sujet de préoccupation pour les
administrateurs est une volonté politique devant être atteinte,
à ce moment-là, le conseil d'administration n'aurait pas le
choix; il serait obligé d'aller dans le sens de l'objectif poursuivi par
la volonté politique.
M. Bérubé: C'est parfaitement exact.
M. Giasson: Vous croyez que c'était vraiment
nécessaire d'ajouter cet article à la loi constituante de la
société forestière?
M. Bérubé: Je pense qu'on a récemment
assisté à un débat sur la performance des
sociétés d'Etat. Si le gouvernement n'inscrit pas dans une loi
son pouvoir de directives, le seul pouvoir qu'il lui reste, c'est l'expulsion
d'un conseil d'administration et son remplacement, généralement
en payant les compensations aux administrateurs déplacés. Par
conséquent, le pouvoir de l'Etat est relativement limité. Avec le
présent article, d'une part on a donné beaucoup plus d'autonomie
à la société d'Etat, mais, d'autre part, plus cette
société est libre de prendre des décisions sans
interférence, plus il faut s'assurer qu'en tant que mandataire de
l'Etat, la société remplisse les objectifs que l'Etat se
fixe.
Il est donc possible que l'Etat puisse vouloir augmenter le nombre
d'industries papetières au Québec et qu'on fixe comme objectif
à la société d'implanter au Québec des industries,
des usines de fabrication de papier journal, par exemple... soyons plus
générai, disons des industries de la transformation de la
forêt. Voici un objectif qu'on pourrait, à un moment donné,
définir et imposer à la société. La
société doit, à ce moment-là, examiner les
possibilités qui s'offrent à elle et faire rapport au
gouvernement, par son plan de développement, de l'analyse qu'elle a
faite de l'objectif que lui a fourni le gouvernement et lui dire si oui ou non
c'est économiquement rentable, si c'est faisable et dans quelles
conditions, qu'est-ce que le gouvernement devra réaliser comme
conditions pour atteindre son objectif.
Il ne fait pas de doute, cependant, que, normalement, les relations sont
suffisamment étroites entre un gouvernement et une société
d'Etat pour qu'un gouvernement qui voudrait imposer une directive puisse le
faire puisque, finalement, on s'appelle... Cependant, ce n'est pas public.
Très fréquemment, le lieutenant-gouverneur en conseil est mis
devant un état de fait puisque presque toutes les tractations ont
été faites entre le ministre et la société d'Etat.
Il nous apparaissait donc important que beaucoup de ces décisions qui,
normalement, ne passent peut-être pas devant le Conseil des ministres,
maintenant y passent. C'est-à-dire que toute directive émise par
le ministre doit, à ce moment-là, être approuvée par
le Conseil des ministres et doit être déposée à
l'Assemblée nationale et peut donc faire l'objet d'un
débat. Cela va peut-être éliminer les pressions politiques
camouflées auxquelles des présidents de sociétés
d'Etat ont peut-être été soumis dans le passé et
qu'ils n'ont pas voulu révéler au public par
intégrité intellectuelle et par dévouement à la
cause de leur société et de l'Etat. Je pense que nous allons, de
cette façon, rendre publiques de telles directives d'une part et d'autre
part, je pense que nous allons puisque c'est maintenant inscrit dans la
loi obliger le ministère à définir quels sont les
objectifs et les orientations qu'il attend pour la société, ce
qui ne se faisait pas dans le passé.
Il faut quand même dire que la société d'Etat,
généralement, est l'instrument un peu privilégié
que se donne un gouvernement pour réaliser ses politiques. Les
politiques de l'Etat peuvent porter tant sur la réglementation, tant sur
la fiscalité, tant sur des incitations à l'entreprise
privée de réaliser certaines choses, mais, parfois, il peut
s'avérer nécessaire d'intervenir directement. Il ne fait aucun
doute présentement que, dans le cas de l'amiante, l'intervention directe
apporte des changements à la situation de la transformation de l'amiante
au Québec qui, sans cette intervention directe, ne se seraient pas
produits. (12 h 30)
M. Giasson: M. le Président, je n'ai pas eu l'occasion
d'assister à la commission parlementaire qui a travaillé sur le
projet de loi touchant Marine Industrie, mais il n'avait pas été
question de pouvoirs à peu près similaires au... c'était
la loi touchant à Marine Industrie ou SGF; je ne me souviens pas.
M. Bérubé: C'est la SGF, mais évidemment,
c'était pour couvrir le déficit de Marine.
M. Giasson: C'était pour couvrir le déficit de
Marine sur la construction des bateaux invendus. Mais on demandait
également du capital-action additionnel, au besoin, de couvrir le
déficit de la construction de ces navires. C'est à ce moment,
qu'il avait été accepté qu'avant que la SGF plonge ou
prenne des décisions, s'oriente dans des investissements fort
importants, qu'il fallait que le ministre de l'Industrie et du Commerce en
fasse part à l'Assemblée nationale avant d'appliquer les
crédits qui étaient votés par la loi, c'est-à-dire
l'augmentation du capital-action, je pense, par cette loi. Est-ce que
c'étaient des dispositions similaires à celles qu'on ajoute
à la loi de REXFOR par diverses formes?
M. Bérubé: Je ne vous cacherai pas que nous
appliquons ces dispositions présentement à toutes les
sociétés d'Etat, chaque fois que nous rouvrons les lois. J'ai
l'intention de rouvrir la Loi de SOQUEM, mais nous appliquerons
également cette disposition, de manière qu'éventuellement,
toutes les sociétés d'Etat soient régies essentiellement
par les mêmes dispositions, réglementations et pouvoirs.
M. Giasson: Mais la reprise du...
Le Président (M. Boucher): Messieurs, nous sommes à
l'heure de l'ajournement. Nous reviendrons cet après-midi probablement,
mais pour le moment, je dois ajourner sine die.
Fin de la séance à 12 h 32
Reprise de la séance à 15 h 46
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente des terres et forêts est réunie
pour étudier le projet de loi 97, Loi modifiant la Loi de la
société de récupération, d'exploitation et de
développement forestiers du Québec.
Les membres de la commission sont M. Bérubé (Matane); M.
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata) qui remplace M. Brassard
(Lac-Saint-Jean), M. Desbiens (Dubuc), M. Giasson (Montmagny-L'Islet), M.
Jolivet (Laviolette); M. O'Gallagher (Robert Baldwin) qui remplace M.
Larivière (Pontiac-Témiscamingue), M. Marquis (Matapédia),
M. Perron (Duplessis), M. Roy (Beauce-Sud); M. Brochu (Richmond) remplace M.
Russel (Brome-Missisquoi).
Les intervenants sont M. Baril (Arthabaska), M. Lamontagne (Roberval),
M. Léger (Lafontaine), M. Marcoux (Rimouski), M. Mercier (Berthier), M.
Samson (Rouyn-Noranda).
Nous en étions à l'étude de l'article 10. M. le
député de Montmagny-L'Islet, vous aviez demandé la
parole.
M. Giasson: Merci, M. le Président. Par l'article 10, on
continue d'introduire petit à petit des clauses de directives dans les
lois touchant les sociétés de la Couronne, les
sociétés d'Etat; le ministre l'a signalé. J'accepte assez
bien le principe qu'au moment où des directives sont données
à une société d'Etat, REXFOR en l'occurrence, le ministre
doive les déposer devant l'Assemblée nationale. Mais il
m'apparaît qu'il serait également utile d'y ajouter une dimension.
L'article tel que rédigé parle de dépôt devant
l'Assemblée nationale, mais je soutiendrais fort bien que cela puisse
être, soit devant l'Assemblée nationale ou devant la commission
parlementaire des terres et forêts et des richesses naturelles afin qu'il
soit possible aux élus du peuple, à ceux qui ont le mandat de
participer à l'application et à la surveillance de l'application
des lois, de discuter et de faire connaître leur opinion lorsque de
telles directives pourront être émises par les ministres
responsables de certaines sociétés.
Dans ce contexte, je voudrais formuler un amendement à l'article
19a tel que rédigé, en ajoutant au quatrième paragraphe,
à la deuxième ligne, après le mot "déposer", les
mots "et dis-
cuter". Ajouter également au quatrième paragraphe,
à la deuxième ligne, après "Assemblée nationale",
les mots "ou sa commission permanente des richesses naturelles et des terres et
forêts", afin qu'il soit possible, au-delà du dépôt
devant l'Assemblée nationale, d'avoir un dépôt devant la
commission concernée des richesses naturelles et des terres et
forêts. Que ce ne soit pas uniquement limité à un
dépôt, mais que l'ensemble des députés membres de
cette commission aient l'occasion de discuter du bien-fondé des
directives et d'obtenir des informations additionnelles. Cela ne modifie pas en
profondeur, cela ne change pas le principe; c'est de permettre aux
députés membres de la commission parlementaire...
M. Bérubé: Mais est-ce que la commission peut
siéger sans un ordre de la Chambre? Ce qui m'apparaît dans votre
proposition, c'est que, par cet article de loi, on pourrait forcer la
commission à siéger, sans qu'elle ait eu un ordre de la
Chambre.
M. Giasson: Si l'Assemblée nationale siège, il est
fort loisible à l'Assemblée nationale de permettre que la
commission siège. Si la directive était donnée au moment
où l'Assemblée nationale ne siège pas, il faudrait
attendre un ordre de la Chambre, lorsqu'elle reprendrait ses travaux, à
savoir faire siéger la commission parlementaire permanente. C'est le
même phénomène qui va jouer vis-à-vis de
l'Assemblée nationale. Si elle siège, le ministre dépose
des directives; si elle ne siège pas, il attend la reprise des travaux
à l'Assemblée, avant de déposer ses directives. Cela ne
pose pas un problème majeur, par rapport au texte que nous fournit le
ministre, à l'article 19a.
Le Président (M. Boucher): L'article 10 du
député de Montmagny-L'Islet est à l'effet d'ajouter au
quatrième paragraphe, à la ligne 2, après le mot
"déposée", "et discutée", ajouter au quatrième
paragraphe, à la ligne 2, après "nationale", les mots "ou sa
commission permanente des richesses naturelles et terres et forêts". M.
le député de Montmagny-L'Islet, il y aurait peut-être lieu
de corriger "la commission permanente des richesses naturelles et terres et
forêts" qui sont deux commissions distinctes.
M. Giasson: On pourrait limiter cela à la commission
permanente des terres et forêts, puisqu'il s'agit d'une
société d'Etat, à caractère hautement forestier, ou
sa commission permanente, rayons "des richesses naturelles"...
Le Président (M. Boucher): On raie "des richesses
naturelles"...
M. Giasson: ... commission permanente des terres et
forêts.
Le Président (M. Boucher): L'article se lirait ainsi:
"Ladite loi est modifiée par l'insertion, après l'article 19, du
suivant: "19a. Le ministre des Terres et Forêts peut, dans le cadre des
responsabilités ou pouvoirs qui lui sont confiés, émettre
des directives portant sur les objectifs et l'orientation de la
société dans l'exécution des fonctions qui lui sont
confiées par la loi. "Ces directives doivent être soumises au
lieutenant-gouverneur en conseil, pour approbation. Si elles sont ainsi
approuvées, elles lient la société qui est tenue de s'y
conformer. "Toute directive émise en vertu du présent article
doit être déposée et discutée devant
l'Assemblée nationale ou sa commission permanente des richesses
naturelles... "
M. Giasson: Pas des richesses naturelles, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): Alors l'expression "les
richesses naturelles" disparaît. "... ou sa commission permanente des
terres et forêts, si elle est en session, dans les quinze jours de son
approbation, par le lieutenant-gouverneur en conseil. "Si la directive est
émise alors que l'Assemblée nationale ne siège pas, la
directive doit être déposée devant elle dans les quinze
jours de l'ouverture de la session suivante ou, suivant le cas, dans les quinze
jours de la reprise de ses travaux".
M. Jolivet: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: ... sur l'amendement proposé, d'abord si on le
retenait, il faudrait qu'il y ait concordance avec le deuxième membre du
paragraphe, parce qu'en session, elle est déposée et
discutée devant l'Assemblée nationale ou la commission
parlementaire et si elle est émise alors que l'Assemblée
nationale ne siège pas, la directive doit être
déposée et discutée dans les quinze jours, en fait, je
pense que si on retenait... Mais comme, quant à moi, je ne vois pas
l'utilité d'insérer dans une loi comme celle-là cette
obligation qui, normalement, revient au leader de la Chambre, à
déterminer sur quoi siègent les commissions parlementaires ou sur
des motions faites à l'Assemblée nationale, acceptées par
l'ensemble de l'Assemblée nationale, des avis qui sont donnés
pour discuter de tel et tel sujet, soit à l'Assemblée nationale,
soit à la commission parlementaire.
Au niveau des règlements prévus, si le leader n'accepte
pas une telle décision, des motions non annoncées ou des motions
de la part des membres de l'Assemblée. Dans ce contexte-là, je ne
vois pas comment une loi si on acceptait cela pour une loi telle qu'elle
est actuellement il faudrait l'accepter pour l'ensemble de toute autre
loi puisque c'est un principe de fond que vous voulez en fait insérer.
Oui, vous faites signe que non, M. le...
M. Giasson: Pas toutes les lois. Les lois qui régissent
des sociétés d'Etat, constituant des sociétés
d'Etat.
M. Jolivet: Je sais, mais actuellement c'est ce sur quoi
je m'en venais au niveau de la façon dont vous le
présentez, à mon avis, pour le moment, on est en train, au niveau
du ministre d'Etat au développement économique, de regarder ce
qu'on va faire avec l'ensemble des sociétés d'Etat. Si, dans le
futur, il faut en arriver parce qu'à ce niveau-là, je
pense que c'est la motion de l'Union Nationale qui a amené la discussion
devant le ministre d'Etat et la commission permanente de l'Assemblée
nationale je ne vois pas comment on pourrait, par la loi actuelle, faire
des choses que nous sommes en train de discuter, comment on va regarder les
directives et on parle même de règlements ou encore
même les sociétés d'Etat comment on va regarder tout
cela dans le futur, à la suite de l'étude faite par la commission
de l'Assemblée nationale sur la question.
Je ne vois pas pourquoi on l'insérerait ici, alors que, d'abord,
toutes choses qui sont discutées en commission parlementaire il y
en a qui sont statutaires, elles sont données par le leader, mais
d'autres sont facultatives, décidées par le ministre et
annoncées par le leader en Chambre je ne vois pas comment une loi
pourrait actuellement obliger le leader à poser tel et tel geste sans
qu'il en connaisse toute la portée. Quant à moi, je m'opposerai
à une telle insertion.
M. Giasson: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): Je pense qu'on est en train de
discuter sur le fond. On a déjà commencé à en
discuter. Je reçois cette motion jusqu'à ce que je sois certain
que ce que le député de Montmagny-L'Islet veut dire dans sa
motion ne va pas à l'encontre des règlements existant pour les
commissions parlementaires.
M. Brochu: D'accord. Si vous me permettez d'enchaîner
immédiatement sur les propos qui viennent d'être tenus, la
question m'intéresse d'une façon particulière puisque je
siège à cette sous-commission qui fait actuellement un travail
d'évaluation des moyens à fournir à l'Assemblée
nationale pour contrôler d'une certaine façon les
sociétés d'Etat. Je pense qu'il convient de faire une distinction
à la suite des propos qui viennent d'être tenus par le
député. Il faut bien se dire que la proposition qui est faite ici
est directement reliée aux directives qui portent sur les objectifs et
l'orientation de la société qui sont émises par le
ministre dans le contexte bien particulier de cette société
d'Etat.
Donc, ce que le ministre voit en termes de plans d'action de la
société d'Etat en question... Si j'ai bien compris l'esprit de la
motion qui nous est présentée, on demande qu'immédiatement
cela soit réglé à la commission parlementaire qui a la
responsabilité de discuter de l'orientation que le ministre veut donner
à sa société d'Etat. C'est une chose, mais l'autre
commission parlementaire couvre les cas plus particuliers si, par exemple, il y
a un problème qui se pose au niveau du comportement ou de la performance
d'une société d'Etat. A ce moment c'est dans ce sens
d'ailleurs que la sous-commission oriente ses travaux on pourra avoir
une commission permanente qui sera celle des sociétés d'Etat et
non pas d'une société d'Etat ou d'un ministère en
particulier. Cette commission permanente des sociétés d'Etat,
elle, pourra convoquer devant sa table la société d'Etat en
question qui est impliquée, qui a une performance douteuse ou sur
laquelle on se pose des questions. A ce moment, ces gens seront obligés
d'ouvrir leurs livres et on pourra discuter avec l'aide technique, le support
et le matériel dont les députés autour de la table auront
besoin.
Ce sont donc deux choses complètement différentes. L'une
ne va pas à l'encontre de l'autre, même si on arrivait aux
résultats qu'on souhaite, d'ailleurs, soit la création de cette
commission permanente des sociétés d'Etat qui aurait le mandat
large de convoquer au besoin devant elle ou selon des termes fixes les
sociétés d'Etat. C'est une chose. A l'intérieur du
fonctionnement de chacune des sociétés d'Etat, lorsque le
ministre donne des directives, il serait bon que cela passe devant la table de
la commission parlementaire attitrée. Ce n'est donc pas un
problème qui toucherait à la surveillance des
sociétés d'Etat comme telles, mais, à l'orientation que
lui donnera le ministre dans un contexte bien donné. Alors, ce serait un
tout autre genre de discussion que celle qui voit à la surveillance et
aux performances des sociétés d'Etat.
Je voulais établir cette nuance, parce qu'il semblait y avoir une
contradiction; le député semblait mettre cela dans le même
sac. Mais ce sont deux choses complètement distinctes de ce qu'on a
discuté jusqu'à maintenant.
M. Jolivet: Oui, sauf, monsieur...
M. Giasson: Comme je l'ai indiqué tout à l'heure,
M. le Président, nous commençons à introduire
graduellement dans les lois constituant nos sociétés d'Etat ou
les lois constitutives de nos sociétés d'Etat le principe des
directives décrétées par le Conseil des ministres ou par
le lieutenant-gouverneur en conseil. Le député de Laviolette a
invoqué le fait qu'on ne pouvait pas se permettre de traduire dans les
lois de telles volontés à cause du droit qu'a le leader
parlementaire de convoquer... Selon le principe ou les déclarations que
vient de formuler le député de Richmond, même avec la
constitution d'une commission permanente qui ait comme mandat de surveiller
toutes les sociétés d'Etat du Québec, il faudra bien qu'un
jour ou l'autre le leader du gouvernement accepte, au-delà de son
autorité normale ou habituelle, le principe que de temps à autre
il devra convoquer la commission permanente qui aura le mandat très
large de surveiller toutes les actions de toutes les sociétés
d'Etat. Il faudra bien que le leader du
gouvernement l'accepte. A partir du fait qu'on introduit le principe des
directives venant d'un ministre, de qui relève les
sociétés qui sont en cause, qu'il accepte de convoquer les
commissions permanentes.
Si on n'avait pas introduit cette dimension nouvelle des directives
venant des ministres, à la rigueur, on aurait pu ne pas oublier les
ministres à aviser l'Assemblée nationale des décisions
prises par la société. (16 heures)
Mais lorsqu'il s'agit de décisions qui sont, à toutes fins
utiles, imposées ou voulues par le ministre lui-même, je crois que
ça prend une autre dimension que les simples règles
administratives d'une société et que les élus du peuple
auraient droit, non seulement de recevoir un rapport, mais de le discuter et de
voir les objectifs et les orientations qui sont voulus par un ministre à
l'endroit d'une société donnée.
Je ne crois pas que ça brime fondamentalement les droits d'un
leader du gouvernement, quel qu'il soit, quel que soit le parti politique qui
forme le gouvernement, de permettre à ceux qui ont reçu un mandat
de la population d'aller examiner en profondeur, discuter et obtenir des
commentaires ou informations additionnelles que pourrait contenir un document
tout simplement déposé à l'Assemblée nationale.
Si les sociétés d'Etat doivent continuer à
connaître un champ de développement agrandi et recevoir des
mandats du gouvernement, il m'apparaît sain pour la démocratie que
les députés puissent, en plus de recevoir un rapport ou un
dépôt de documents qu'ils ne peuvent même pas commenter,
avoir la possibilité de discuter les orientations ou le contenu des
directives, si ça va au-delà des orientations ou encore de
discuter des objectifs nouveaux qu'un ministre veut bien indiquer à une
des sociétés d'Etat.
M. Jolivet: M. le Président.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: J'ai fait allusion à deux choses; je reviens
pour bien expliquer ce que j'ai voulu dire. J'ai parlé des
règlements aussi, parce que la discussion est amorcée sur la
question de savoir si tous les règlements qui sont
présentés dans des projets de loi parce qu'on dit: A tel
article, il y aura tel règlement et que la régie interne sera
à ce moment la discussion à l'Assemblée nationale
n'est pas terminée sur la question de savoir s'il y aura, oui ou non,
des commissions parlementaires pour étudier les règlements ou si
l'Assemblée nationale ne pourrait... Souvent on le demande quand on dit:
Déposez votre projet de loi, mais allez-vous avoir les règlements
en conséquence pour qu'on puisse discuter en sachant où on va?
Pour moi, directives et règlements, au niveau de la discussion par
l'Assemblée nationale, c'est la même chose.
Le deuxième point, c'est quand j'ai parlé des
sociétés d'Etat. Il est bien d'avoir du député de
Richmond qui est au sous-comité, l'orientation qu'on y prend
actuellement, mais il n'y a rien qui garantisse que, au bout de la course,
c'est ce qui va sortir de la discussion. Il est fort possible qu'au niveau du
sous-comité de l'Assemblée nationale formé sur la question
des sociétés d'Etat, on en arrive à dire qu'on regardera
aussi, non seulement la performance de la société d'Etat, mais
aussi autre chose. Donc, je ne présume en rien de ça.
J'aime bien avoir des réunions pour avoir des réunions,
mais quitte à bien lire le texte tel quel. On dit: "Toute directive
émise en vertu du présent article doit être
déposée devant l'Assemblée nationale", mais regardez bien,
la directive est déjà acceptée par le
lieutenant-gouverneur en conseil. La logique, si vous voulez la discuter, ce
serait de la discuter avant qu'elle ne soit adoptée, tandis que
là vous en discutez après. Je me dis: Cela sert à quoi?
C'est dans ce contexte que je me dis: La question des sociétés
d'Etat, indépendamment de ce que dit le député de
Richmond, ne pouvant présumer de ce qui sera décidé
à la fin, moi j'aime mieux ne pas inscrire dans une telle loi, qui est
une loi particulière, des choses qui peuvent être d'ordre
général.
C'est dans ce contexte que je me refuse à l'insérer.
M. Brochu: M. le Président, si vous me le permettez.
Lorsqu'on discute un projet de loi comme celui-ci on doit quand même,
même si on fait référence aux discussions qu'il y a
à côté, concernant l'attitude que va prendre le
gouvernement sur le contrôle et la gestion des sociétés
d'Etat, on doit adopter le projet de loi en ayant, d'accord, à l'esprit
les discussions qui sont en cours, mais en ne tenant pas pour acquis que c'est
accepté non plus. On ne peut pas légiférer, accepter ou
rejeter un amendement sur une hypothèse de travail parallèle qui
n'est pas encore acceptée, parce qu'on n'est pas sûr que le
gouvernement va faire les derniers pas.
Il a donné l'impression, jusqu'à maintenant, qu'il
était intéressé à souscrire à la motion de
l'Union Nationale et à établir un certain contrôle, mais
si, en fin de course il n'établit pas ce contrôle, ça veut
dire que si on rejette, ici, l'amendement qui est proposé, qui permet en
quelque sorte un contrôle supplémentaire, simplement sur le fait
que peut-être va-t-on accepter une commission permanente qui va avoir
droit de regard sur l'ensemble des sociétés d'Etat, je pense
qu'on manque le bateau actuellement; on ne peut pas rejeter ou accepter un
amendement en se basant sur une hypothèse de travail à
côté.
Si je prends le raisonnement à l'inverse, c'est qu'advenant le
cas où une telle commission serait créée, où on
s'entendrait pour créer une commission permanente de surveillance des
sociétés d'Etat et de leur performance, il y aura
automatiquement, comme tout cadre législatif, à l'adapter,
c'est-à-dire à faire les corrections dans tous les autres projets
de loi qui s'y rapportent.
Si jamais on acceptait cette proposition-là et qu'une semblable
était contenue dans la définition même d'une loi ou d'un
règlement créant cette commission de surveillance, à ce
moment-là, celle-ci pourrait devenir caduque suite à l'autre loi
qui concerne l'ensemble. Si jamais c'était inclus dans le mandat auquel
donnerait lieu la création de cette commission parlementaire permanente,
si jamais dans son mandat c'était aussi de discuter de ce qu'il y a ici
dans le projet de loi... Je m'excuse...
M. Jolivet: II y a une chose que vous oubliez, une loi ne peut
pas rendre caduque une autre partie d'une autre loi. Il faut faire à
l'Assemblée nationale un amendement de la loi existante. Ce n'est pas
possible qu'une loi rende caduc un autre article de loi.
M. Brochu: C'est-à-dire que vous l'amendez... M. Jolivet:
Sauf si une loi...
M. Giasson: Sauf si une loi avait comme fin d'abroger tel article
dans d'autres lois.
M. Brochu: C'est cela.
M. Bérubé: En fait, M. le Président, j'ai
l'impression qu'on confond un objectif avec une stratégie. L'objectif du
présent article est de s'assurer que les directives transmises à
une société d'Etat sont de caractère public et que les
élus du peuple ont l'occasion d'en prendre connaissance et, s'ils le
jugent à propos, de soumettre le gouvernement à un ensemble de
questions. C'est l'objectif.
Une stratégie parlementaire porte sur l'utilisation que l'on fait
de cette information et le type de débat que l'on entend avoir sur la
question. On pourrait tantôt vouloir convoquer l'Assemblée
nationale un vendredi matin, pour approfondir; on pourrait y aller d'un
mini-débat en fin de soirée, on pourrait y aller d'une discussion
lors du débat portant sur les crédits du ministère, on
pourrait y aller lors d'un débat entourant un projet de loi du type de
celui que nous avons présentement, amendant la loi d'une
société d'Etat; donc, il existe plusieurs façons
finalement pour l'Assemblée nationale, de décider de la
façon dont elle juge bon d'analyser les dossiers.
Imaginons, par exemple, que toutes les sociétés d'Etat
soient soumises à la même directive et que nous nous retrouvions
en plein budget ou en plein discours inaugural, avec 25 directives arrivant en
même temps. Nous serions tenus de convoquer toutes ces commissions
parlementaires pour en faire la discussion, ce qui pourrait totalement bloquer
le processus parlementaire. On se rend bien compte que la loi ne peut pas venir
nous dicter notre façon de travailler à l'Assemblée
nationale. L'Assemblée nationale reste maître de l'organisation de
ses travaux.
Or, je pense que ce que le député de Montmagny-L'Islet
veut faire en introduisant l'amendement qu'il nous propose ici, c'est
finalement d'organiser à l'avance en vertu d'une loi, les travaux de
l'Assemblée nationale. Personnellement, je pense que ce n'est pas la
place.
M. Giasson: M. le Président, je ne recherche aucunement
les objectifs que vient de signaler le ministre. Je veux tout simplement
je l'ai indiqué dans mes commentaires du début permettre
à l'ensemble des députés qui sont intéressés
à la commission permanente d'un ministère auquel relève
une société d'Etat, de pouvoir examiner plus en profondeur la
directive et le bien-fondé ou la logique ou les objectifs qui ne
seraient pas suivis par le ministre qui pose de telles directives. Dans mon
esprit, il n'a jamais été question de vouloir organiser ou
diriger les travaux de l'Assemblée par l'inclusion, dans ce texte de
loi, d'une capacité qu'aurait la commission parlementaire de pouvoir
entendre et discuter sur le contenu ou là-propos de directives qui
seraient données par le ministre.
M. Bérubé: Le résultat en serait là
néanmoins. Si vous avez un amendement...
M. Giasson: Oui, dans l'hypothèse la plus poussée
qu'on puisse concevoir que tous les ministres de qui relèvent des
sociétés d'Etat arriveraient au même moment avec un
dépôt de directives pendant l'étude des crédits.
C'est de prendre cela...
M. Bérubé: Et dans l'hypothèse où
l'Opposition n'est jamais de mauvaise foi, ne chercherait pas à bloquer
le fonctionnement de l'Assemblée nationale à des fins
partisanes...
M. Giasson: Ce n'est pas l'Opposition qui va rendre les
directives, c'est le ministre responsable d'une société.
M. Bérubé: L'obligation d'en faire la discussion en
commission parlementaire peut totalement bloquer le fonctionnement de
l'Assemblée nationale.
M. Desbiens: M. le Président, est-ce qu'il ne faudrait pas
ajouter aussi que l'article se lirait: "doit être déposée
et doit être discutée"; un dépôt de document à
l'Assemblée nationale, selon mes connaissances du règlement,
n'entraîne pas une discussion. Un dépôt de document à
l'Assemblée nationale, c'est simplement un dépôt, il n'y a
pas de discussion sur le sujet.
Le Président (M. Boucher): C'est justement ce sur quoi
j'attendais que le député de Montmagny-L'Islet éclaire sa
pensée, à savoir si la discussion se faisait au moment du
dépôt ou après. Si la discussion devait se faire au moment
du dépôt, je n'aurais pas reçu la motion.
M. Brochu: Justement, j'aimerais avoir une précision.
L'amendement tel que proposé n'est peut-être pas libellé de
façon exacte. Si on respec-
te le sens de l'article comme tel, ne devrait-on pas dire: "Toute
directive émise en vertu du présent article doit être
déposée devant l'Assemblée nationale et discutée en
commission parlementaire", dans une autre étape. De la façon que
c'est écrit, je pense que...
M. Giasson: ... rédaction dans le sens...
Le Président (M. Boucher): C'est ce que j'avais compris
quand il l'a formulé tout à l'heure.
M. Brochu: II faudrait d'abord corriger l'amendement.
Le Président (M. Boucher): Oui.
M. Giasson: Déposée à l'Assemblée
nationale et discutée en commission parlementaire, à la
commission permanente des terres et forêts.
Le Président (M. Boucher): Déposée devant
l'Assemblée nationale et discutée devant la commission
parlementaire des terres et forêts.
M. Giasson: On pourrait plutôt dire: Déposée
devant l'Assemblée nationale, si elle est en session... cela va encore
compliquer les choses; cela va être moins lourd.
M. Jolivet: M. le Président, on ne l'acceptera pas. Alors
cela ne compliquera pas les choses et pour la raison suivante: au niveau de ce
qu'il vient de nous dire, cela veut dire que l'Assemblée nationale aura
l'obligation ce sera le leader qui en aura l'obligation de
convoquer une commission parlementaire pour discuter de la directive. Il me
semble que ce n'est pas à une loi de venir dire à
l'Assemblée nationale comment faire l'ensemble de ses travaux. Ce que le
député de Montmagny-L'Islet et je ne suis pas...
M. Giasson: II y a des lois qui obligent à cela: la Loi de
l'administration financière oblige le leader parlementaire à
convoquer des commissions pour l'étude des crédits.
M. Jolivet: Oui, mais...
M. Giasson: Ce n'est pas du droit parlementaire nouveau.
M. Jolivet: Ce n'est pas une loi au niveau de l'ensemble des
crédits gouvernementaux; c'est une loi sur la société
REXFOR. A partir de cela, je ne vois pas comment on pourrait, par une loi sur
une société, en arriver à donner des obligations de
travail à l'Assemblée nationale. Dans la discussion qui est
amorcée j'y suis sensible au niveau des règlements
à certains égards, on considère qu'on devrait, comme
députés, être plus au courant des règlements pour
pouvoir en discuter davantage. Cette discussion est amorcée à
l'Assemblée nationale. C'est dans ce sens que je disais, tout à
l'heure, que ce n'est pas par la loi actuelle qu'on va régler la
question des règlements, ou des directives.
Pour revenir à la deuxième partie de l'argumentation du
député de Richmond à savoir que le sous-comité sur
les sociétés d'Etat, la réglementation qui pourrait y
être adoptée pourrait changer la loi actuelle, je dis que par
cette loi, on ne devrait pas dire à ce sous-comité de quelle
façon il doit procéder; il va le déterminer et si jamais
il faut changer la loi à nouveau, on la changera. Ce n'est pas par la
loi actuelle qu'on va donner des modes de travail à l'Assemblée
nationale. On est prêt pour le vote, M. le ministre.
M. Desbiens: Ce serait en quelque sorte forcer la main au
sous-comité de travail, justement, que d'agir dans ce sens.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que les membres sont
prêts à voter sur l'amendement proposé par le
député de Montmagny-L'Islet?
M. Giasson: ... l'amendement.
Le Président (M. Boucher): M. Bérubé
(Matane)?
M. Bérubé: Contre.
Le Président (M. Boucher): M. Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata)?
M. Lévesque: Contre.
Le Président (M. Boucher): M. Desbiens (Dubuc)?
M. Desbiens: Contre.
Le Président (M. Boucher): M. Giasson
(Montmagny-L'Islet)?
M. Giasson: Pour.
Le Président (M. Boucher): M. Jolivet (Laviolette)?
M. Jolivet: Contre.
Le Président (M. Boucher): M. O'Gallagher (Robert
Baldwin)?
M. O'Gallagher: Pour.
Le Président (M. Boucher): M. Marquis (Matapédia)?
M. Perron (Duplessis)? M. Roy (Beauce-Sud)? M. Brochu (Richmond)?
M. Brochu: Pour.
Le Président (M. Boucher): L'amenderne~it est
rejeté à 4 contre 3.
L'article 10 est-il adopté?
M. Bérubé: Adopté, M. le Président.
(16 h 45)
Le Président (M. Boucher): Article 11. Sommes
requises
M. Bérubé: M. le Président, l'article 11
complète l'article 22. Je vais lire l'article 22. L'article 22 porte
essentiellement sur les conditions de paiement en capital de la
société et permet au ministre des Finances d'avancer les sommes
nécessaires aux opérations de la société.
L'amendement ici présenté nous a été soumis par la
société elle-même qui a dû constater que, par
exemple, dans le cas de ses filiales souvent même à 100%,
donc de véritables sociétés filles le ministre des
Finances n'avait pas les mêmes privilèges vis-à-vis des
filiales qu'il avait vis-à-vis de la société mère.
Par exemple, l'article 22 permettrait désormais de garantir le paiement
en capital et intérêts de tout emprunt de la société
ou d'une filiale dont elle détient plus de 50% des actions, ainsi que
l'exécution de toute obligation de la société ou de toute
telle filiale. En d'autres termes, le paragraphe a) qui permettait de garantir
les emprunts de la société est remplacé maintenant par un
paragraphe qui permet de garantir les emprunts non seulement de la
société mais de ses filiales.
Le paragraphe c) se lisait dans l'ancienne loi: "Autoriser le ministre
des Finances à avancer à la société tout montant
jugé nécessaire pour l'exécution des autres dispositions
de la présente loi à un taux d'intérêt pour un laps
de temps et aux autres conditions que détermine le lieutenant-gouverneur
en conseil." Dans le cas présent, cela se lirait maintenant: "autoriser
le ministre des Finances à avancer à la société ou
une filiale visée au paragraphe a) tout montant jugé
nécessaire pour l'exercice... etc.". En d'autres termes, le ministre des
Finances peut avancer des sommes aussi bien à la société
mère qu'aux filiales contrôlées par la
société.
On remplace également le dernier alinéa: "Les sommes que
le gouvernement peut être appelé à payer en vertu de ses
garanties... sont prises à même le fonds consolidé du
revenu". Je ne vous cacherai pas que je ne me souviens plus pourquoi on l'avait
changé. "Les sommes que le gouvernement peut être appelé
à payer en vertu de ces garanties ou que le ministre des Finances avance
à la société ou à une filiale..." c'est un
amendement de concordance, c'est produire la notion de filiale.
En d'autres termes, M. le Président, on a vu des cas
Samoco est un bel exemple, puisque Samoco est à l'honneur aujourd'hui
où le gouvernement était pris pour avancer des sommes
à Samoco et la loi ne le lui permettait pas. Nous avons donc dû
faire appel à un certain subterfuge qui consiste à avancer les
sommes à REXFOR qui, elle, les avance à Samoco, doublant ainsi
l'administration et nous amenant à des manoeuvres que l'on pourrait,
à tout le moins, qualifier de non-transparentes. Par conséquent,
avec un tel amendement, toute filiale contrôlée entièrement
par REXFOR pourrait se voir garantir des prêts par le ministre des
Finances de la même façon que
REXFOR se les voit garantir présentement par le ministre des
Finances.
Une Voix: ...
M. Bérubé: Toutes celles contrôlées
à plus de 50% par REXFOR.
M. Giasson: Est-ce que le ministre est absolument certain de
cela?
M. Bérubé: Que?
M. Giasson: Toutes celles contrôlées à 50% et
plus par REXFOR.
M. Bérubé: Le texte de loi, tel qu'on l'avait
prévu...
M. Giasson: La scierie des Outardes, 60% REXFOR, êtes-vous
sûr qu'il sera possible au ministre des Finances...
M. Bérubé: Dans le cas de la scierie des Outardes,
excusez-moi l'expression anglaise, il s'agit d'un "joint venture".
M. Giasson: II ne s'agit pas d'une société par
actions.
M. Bérubé: Non, il s'agit d'un "joint venture". En
d'autres termes, les partenaires sont responsables de la part de l'entreprise
qu'ils possèdent. Cela permettrait donc au ministre des Finances
d'avancer les sommes ou de garantir les emprunts qu'encourt REXFOR sur sa part
de propriété.
M. Giasson: Si je comprends bien, la scierie des Outardes n'est
pas une société à capital-actions, elle a
été créée en vertu du Code civil?
M. Bérubé: Exactement, c'est l'équivalent
d'une société au sens de la première partie du code. Ce
n'est pas la Loi des compagnies, c'est donc...
M. Giasson: Continuez.
M. Bérubé: Vous avez parfaitement raison, ce n'est
pas une compagnie, c'est une société.
M. Giasson: Je suis prêt à l'adopter, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): Article 11, adopté.
Article 12.
M. Bérubé: M. le Président, c'est en
continuité avec ce contrôle que doit exercer le gouvernement sur
les sociétés d'Etat et, je pense, non seulement contrôle,
mais c'est également dans l'esprit des directives que nous
émettons à nos sociétés, qui veulent que ces
sociétés sachent où elles vont. Par conséquent,
qu'elles soient en mesure en tout temps de dire au gouvernement
essentiellement
quelle sera l'expansion prévue au cours des trois prochaines
années et quels sont les projets à l'intérieur desquels la
société veut s'engager. Evidemment, il n'est pas question, dans
un plan de développement, d'indiquer en détail les projets
spécifiques, cequi pourra amener éventuellement la concurrence
à connaître entièrement les intentions cachées de la
société et, par conséquent, se prévaloir de cette
information pour contrer les objectifs de la société. Comme il
s'agit d'une société à caractère commercial, le
plan de développement devrait donner les grandes orientations, mais non
les projets spécifiques, à moins que de tels projets
spécifiques puissent être dévoilés sans qu'il y ait
préjudice aux intérêts de la société. A titre
d'exemple, si REXFOR, ayant su qu'un volume de bois devient disponible dans une
région donnée du Québec, devait annoncer, quelque trois
années à l'avance, qu'elle est en train de faire
l'évaluation du potentiel forestier et qu'elle va prendre sa
décision dans un an, il serait possible à un concurrent de jouer
plus rapidement et, finalement, de tenter de mettre la main sur ce volume de
bois disponible avant que REXFOR puisse être prête à faire
sa proposition. Par conséquent, dans un monde de concurrence, il
apparaît normal qu'un plan de développement n'inclue pas le
détail des activités, ce qui serait susceptible de nuire à
notre entreprise.
Cependant, il est important que cette société sache
où elle va, dans quel secteur elle entend prendre de l'expansion, elle
entend favoriser le secteur de l'industrie papetière, la conservation de
l'énergie, les panneaux d'aggloméré ou le sciage plus
classique, la mise en marché plutôt que la centralisation d'achat;
en d'autres termes, on peut demander à notre société
d'Etat d'avoir une idée assez précise des secteurs à
l'intérieur desquels elle entend oeuvrer et où elle entend donner
une expansion à ses activités présentes. C'est le sens que
nous donnons à ce plan de développement, aussi bien pour la
compagnie que pour ses filiales. On dit bien que le lieutenant-gouverneur en
conseil en détermine la forme et la teneur ainsi que l'époque
à laquelle il doit être présenté, l'objectif
étant évidemment de rassurer la société d'Etat
quant au contenu de ce plan de développement pour ne pas imposer
à une société d'Etat de dévoiler absolument tous
les secrets de compagnie.
M. Giasson: J'ai moins d'objections, M. le Président, aux
dispositions nouvelles qu'on ajoute à l'article 24a. Il m'apparaît
sain et valable que le gouvernement puisse savoir un peu à l'avance
quels seront les besoins financiers de la société, non seulement
de la société, mais, puisque nous avons parlé
récemment des filiales, on donne une marge de manoeuvre additionnelle
à la situation pour les besoins financiers de REXFOR et de ses filiales,
ça m'apparaît logique qu'on prévoie les besoins financiers
et qu'on ne le fasse pas sur une base simplement annuelle, mais qu'on le
prévoie deux ou trois ans à l'avance de manière qu'on ne
revive pas dans le futur les problèmes que la société a pu
connaître dans le passé, lorsque le gouvernement a jugé bon
de faire appel à ses services pour corriger des situations fort
délicates ou difficiles qu'on connaissait dans des régions
données, au Québec.
Je pense qu'avec cette disposition, le gouvernement aura le pouvoir,
dans un laps de temps plus long, de prévoir ses besoins financiers, les
besoins financiers de notre société comme ceux de ses
filiales.
Je n'ai pas d'objection, M. le Président, à adopter
l'article 12.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que l'article 12 est
adopté.
Une Voix: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. L'article
13.
M. Giasson: L'article 13.
M. Jolivet:... entrée en vigueur...
M. Giasson: Je crois que le gouvernement garde des
réserves pour l'entrée en vigueur du contenu des articles 1, 2, 3
de la loi.
M. Bérubé: Je vais expliquer rapidement, M. le
Président. La raison en est très simple. Il nous faut être
certains, lorsque la présente loi entrera en vigueur, que nous ne nous
retrouverons pas avec un conseil d'administration, la patte en l'air. C'est
pour cette raison que nous pouvons proclamer la loi dans son entier. Mais,
cependant, la proclamation des trois articles qui portent plus
spécifiquement sur la constitution du conseil d'administration, ne sera
pas faite tant et aussi longtemps que tous les documents nécessaires
à la nomination des membres du conseil d'administration, renouvellements
de mandats et autres, tant que ces papiers ne seront pas prêts, en bonne
et due forme, et c'est la raison pour laquelle nous avons dû pour
éviter ces problèmes de transition permettre de proclamer
que les articles 1, 2, 3, ne se soient sanctionnés
éventuellement, que lorsque nous serons prêts à le
faire.
M. Giasson: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): L'article 13, adopté.
Nous avions suspendu l'article 6. M. le ministre, est-ce que vous êtes
prêt à présenter votre nouvel article 6?
M. Bérubé: Non, malheureusement. Nous avons soumis
le problème de l'article 6 au comité de législation.
Est-ce qu'il serait possible, M. le Président, au moment de la
troisième lecture, de nous entendre avec l'Opposition sur la teneur d'un
amendement que nous pourrions à ce moment, présenter? Je pense
que le député de Robert Baldwin nous avait présenté
un amendement à une loi, concernant le régime des eaux, et nous
avions
convenu de chercher à l'amender dans le sens de ses
recommandations et nous avions tout simplement, en troisième lecture,
présenté un amendement qui donnait raison... Je pense que nous
nous sommes entendus sur le contenu.
M. Giasson: Est-ce que le rapport de la commission...
Le Président (M. Boucher): Est-ce que cela ne pourrait pas
se faire au niveau du rapport... dans les douze heures qui suivent le
dépôt du rapport?
M. Bérubé: Oui.
M. Giasson: D'accord. C'est cela, si on a fait mention au rapport
de la commission, c'est la façon dont on avait procédé
dans le cas auquel le ministre réfère.
Le Président (M. Boucher): Alors, on l'adopte?
M. Bérubé: Oui.
Le Président (M. Boucher): On l'adopterait sous
réserve de modifications.
M. Giasson: De la modification d'un changement apporté
à l'article 6.
M. Jolivet: Le ministre va les...
M. Bérubé: Oui, je n'ai aucune objection,
d'ailleurs, à m'assurer avant, que la rédaction de l'article en
question corresponde à ce que vous vouliez, parce que je pense que nous
nous sommes mis d'accord.
Le Président (M. Boucher): L'article 6 est adopté
sous réserve d'une modification à l'étape du rapport.
Le projet de loi 97, Loi modifiant la Loi de la Société de
récupération, d'exploitation et de développement forestier
du Québec est donc adoptée et je prierais le rapporteur de la
commission, en l'occurrence, le député de Duplessis, de faire
rapport à l'Assemblée nationale au nom des membres de la
commission. Merci, messieurs.
Fin de la séance à 16 h 30