To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Committee on Transportation and the Environment

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Committee on Transportation and the Environment

Version préliminaire

43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Thursday, September 14, 2023 - Vol. 47 N° 15

Special consultations and public hearings on Bill 22 an Act respecting expropriation


Aller directement au contenu du Journal des débats


 

Journal des débats

11 h 30 (version non révisée)

(Onze heures trente-six minutes)

La Présidente (Mme Maccarone) : Bonjour à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet...

La Présidente (Mme Maccarone) : ...loi numéro 22, loi concernant l'expropriation.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme McGraw, de Notre-Dame-de-Grâce, est remplacée par Mme Caron, de La Pinière.

La Présidente (Mme Maccarone) : Parfait. Nous débuterons ce matin par les remarques préliminaires, puis nous entendrons par la suite les organismes suivants : l'Union des municipalités du Québec et la Fédération québécoise des municipalités. Alors, j'invite maintenant la ministre des Transports et de la Mobilité durable à faire ses remarques préliminaires. Mme la ministre, vous disposerez de six minutes.

Mme Guilbault :Oui. Bien, merci beaucoup, Mme la Présidente. Je suis très heureuse d'être ici avec vous ce matin, ce midi, enfin. C'est mon premier projet de loi depuis que je suis ministre des Transports et de la Mobilité durable, donc c'est toujours un moment qui est excitant, bien qu'on en ait fait plusieurs dans le précédent mandat en Sécurité publique. Mais donc toujours un plaisir de se retrouver en commission. Je vais saluer évidemment d'abord la présidence, donc vous, Mme la Présidente, les gens qui vous accompagnent. On ne pourrait jamais faire de projets de loi si ce n'était de ces équipes importantes, les gens de la diffusion, les gens des whips, les gens du leader, toutes ces personnes qui nous permettent de faire avancer nos projets de loi. Salutations à mes collègues de la banquette gouvernementale, mes quatre, cinq... Quatre collègues qui sont présents ici aujourd'hui avec nos propres équipes, évidemment. Merci à vous tous d'être ici, dont mon adjoint gouvernemental, le député de René-Lévesque et d'autres députés très habitués avec les questions qui vont nous concerner aujourd'hui d'ailleurs. Alors, merci d'être ici. Mes collègues des oppositions, le député d'Acadie, le député de Taschereau, avec qui j'ai le plaisir de travailler depuis maintenant presque un an, qui sont mes vis-à-vis. Et je le disais justement au député de Taschereau cette semaine, qui travaille avec moi jusqu'à maintenant de manière très constructive, entre autres sur la sécurité routière, donc espérons que ça va se poursuivre dans le cadre de ce projet de loi sur l'expropriation.

Salutations évidemment aux gens qui sont avec nous, de l'UMQ, l'Union des municipalités, M. Damphousse, nouvellement élu... bien, de moins en moins nouvellement, mais quand même, c'est la première fois qu'on se croise en personne depuis votre nomination. Alors, félicitations encore et bienvenue ici aujourd'hui parmi nous. Je ne sais pas s'il y a déjà des représentants des prochains groupes dans la salle, mais bref, merci. Merci, tout le monde, d'être ici.

Mes équipes aussi qui sont derrière moi, bien sûr, les gens du ministère des Transports et de la Mobilité durable, qui ont participé à la confection du projet de loi et qui vont être avec nous pour, vraisemblablement, l'ensemble des travaux, non seulement consultation, mais pour les prochaines étapes.

C'est un projet de loi qui est important aujourd'hui, projet de loi sur l'expropriation. Instinctivement, bon, comme citoyen, moi, avant d'être aux Transports, ce n'est pas spontanément quelque chose auquel je pensais au quotidien, l'expropriation, dans la vie. Mais pour plusieurs groupes, pour les municipalités, pour notamment les groupes qui vont être présents aujourd'hui, mais pour, je dirais, les gens qui exproprient en général, donc, dont le ministère des Transports, c'est un projet de loi qui est majeur, la loi sur l'expropriation, qui n'a pas été réformée depuis 40 ans. La dernière fois, en 1983, la dernière fois qu'on l'a modifiée, elle avait été adoptée 10 ans auparavant, en 1973.

Donc, il y a beaucoup de choses dans ce projet de loi là. Vous l'avez sans doute regardé. Évidemment, les projets de loi sont toujours perfectibles par nature, d'où la raison pour laquelle on va entendre plusieurs groupes en consultations particulières, 24, si ma mémoire est bonne, alors sans doute de bonnes idées qui vont ressortir de ces discussions-là. Et je serai très ouverte, moi, à travailler avec les collègues, comme je le dis, là, pour rendre le projet de loi encore meilleur. Mais, de façon générale, on vient modifier des choses qui étaient des demandes de longue date. Même dans le dernier pacte fiscal qu'on avait fait, c'était un engagement qu'on avait pris, là, de réformer la loi sur l'expropriation. Il y avait un comité qui avait été formé. Donc, aujourd'hui, on donne suite à cet engagement-là avec le début officiel des travaux en vue de l'adoption d'une modification substantielle de la loi, entre autres, modifier... Introduire la valeur marchande, modifier, venir agir, finalement, sur la prévisibilité et sur les délais qui sont liés aux procédures d'expropriation, le tout pour faciliter, pour réduire les délais, les coûts des projets, faciliter la réalisation de nos projets, entre autres, nos projets d'infrastructure. C'est un sujet qui revient souvent, le délai et les coûts, dans nos projets d'infrastructure, et donc c'est... ce sont des responsabilités et des enjeux qui sont partagés par les municipalités et par les différents paliers de gouvernement. Donc, cette loi-là va être de nature à tous nous aider.

Donc, alors je... Mais on est déjà en retard, donc je ne m'étendrai pas davantage, simplement pour réitérer ma reconnaissance envers tous ceux qui ont rendu possible le début des travaux aujourd'hui, souhaiter de bons travaux à tout le monde et remercier encore une fois tous ceux qui viendront nous... Discuter avec nous aujourd'hui.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup, Mme la ministre. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle, le député de l'Acadie, pour ses remarques préliminaires. Vous disposez de trois minutes 36 secondes.

• (11 h 40) •

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi à mon tour de saluer Mme la ministre, son équipe, son équipe de fonctionnaires du ministère des Transports, les collègues députés et également notre premier groupe, qu'on va entendre dans quelques minutes.

Je vous dirais, dans mes remarques préliminaires, effectivement, c'est une réforme. J'ai lu avec attention le projet de loi...

M. Morin : ...c'est une réforme qui est ambitieuse et c'est vrai qu'habituellement, on ne parle pas beaucoup d'expropriations. Ce n'est pas un texte de loi qu'on va utiliser fréquemment jusqu'à tant qu'on soit exproprié, et là... là, la dimension prend une tout autre forme parce qu'elle devient très personnelle. Et il faut se rappeler que dans notre droit, l'expropriation, c'est une mesure extraordinaire. On comprend très bien que, pour le bien commun, des autorités, qu'elles soient gouvernementales ou municipales, puissent avoir le droit d'exproprier. Mais ça, c'est l'expropriant. Mais l'envers de la médaille, c'est ce qui se passe avec l'exproprié, et on sait que ça peut évidemment avoir des impacts négatifs sur les familles. Je pense entre autres à des petits propriétaires qui sont expropriés. On a évidemment beaucoup entendu parler des expropriés de Mirabel ou de Forillon. Donc, ça peut aussi engendrer des droits humains.

Donc, c'est un projet de loi qui, à première vue, semble être technique, très juridique, mais qui a aussi... qui touche aussi dans souvent ce qu'on a de plus précieux ou de précieux, un droit de propriété sur un objet, pour qu'une autorité publique puisse nous en déposséder. Donc je comprends l'importance d'une mise à jour, d'une modification de rendre le texte actuel, évidemment, le texte de loi présentement plus moderne. Mais je pense qu'il faut aussi toujours penser à l'ensemble des intérêts des différentes parties, que ce soit les expropriants ou les expropriés.

Et en tout cas, moi, j'ai hâte d'entendre les différents groupes parce que ce projet de loi apporte des modifications importantes sur les indemnités qui pourraient être accordées avec des délais quand même de rigueur. Donc, on va essayer de voir si tout ça fonctionne. Et je suis convaincu que les différents groupes qui vont venir témoigner vont nous aider à faire en sorte que ce projet de loi là évidemment soit non seulement actuel, mais qu'il soit le meilleur pour la société québécoise. Alors, je vous remercie.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup, M. le député. J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition, le député de Taschereau, pour ses remarques préliminaires. Vous disposez de 1 min 12 s.

M. Grandmont : Une?

La Présidente (Mme Maccarone) : 1 min 12 s.

M. Grandmont : 1 min 12 s, je vais faire ça rapidement. D'abord, merci beaucoup pour votre présence, Mme la Présidente. Content aussi... Bien, je salue tout le monde, évidemment, qui est ici présent, les collègues députés, les employés de soutien, les gens qui sont là aussi pour assurer la technique. Évidemment vous jouez un rôle important et essentiel qui nous permet de faire ce grand travail-là sur un p. l. qui est très important.

Moi, je suis très content qu'on aborde cette question-là, Mme la ministre, vraiment très heureux quand on l'aborde. Dans mon quotidien, c'est un sujet, moi, que je traitais souvent quand même ayant été impliqué beaucoup de près sur plusieurs projets de transport collectif. Je sais combien les expropriations peuvent être un enjeu de taille dans la réalisation de ces projets-là. Donc, j'étais vraiment content qu'on aborde cet enjeu-là. Il y a des enjeux de délais et de coûts qu'on veut pouvoir toucher. Même chose aussi dans le cadre de la révision de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. On en a beaucoup parlé, on a beaucoup entendu les groupes parler des expropriations déguisées. Donc, c'est un sujet qui est très important. Il va falloir trouver un équilibre. Bien entendu, il ne faut pas que ce soit du mur-à-mur. Les auditions nous permettront de mettre un peu de chair autour de l'os. Je pense que ça peut tourner autour de deux grandes questions : Qui est l'expropriation? Quelle est la raison de l'expropriation? En tout cas, les auditions seront très importantes pour bien balancer ce projet de loi là.

La Présidente (Mme Maccarone) : Vraiment à l'heure, à la seconde près. Merci.

Nous allons maintenant débuter les auditions,  et je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Union des municipalités du Québec, M. Martin Damphousse, président, M. Normand Diotte, président de la Commission de l'aménagement et des transports et maire de Candiac, et M. Philippe Biuzzi, conseiller aux politiques.

Alors, je vous rappelle, messieurs, que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi, nous procéderons à la période d'échanges avec les membres de la commission. Alors, je vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre exposé.

M. Damphousse (Martin) : Merci beaucoup. Martin Damphousse, maire de Varennes et président de l'Union des municipalités du Québec. Mme la ministre, Mme la Présidente de la commission, Mmes, MM. les membres de la Commission, nous sommes aussi très heureux d'être ici aujourd'hui. Je vous remercie de nous recevoir dans le cadre des consultations sur le projet de loi n° 22, loi concernant l'expropriation. Je suis accompagné aujourd'hui par M. Normand Diotte, président de la Commission de l'aménagement et des transports de l'UMQ et maire de Candiac, ainsi que par M. Philippe Biuzzi, conseiller politique de l'UMQ.

D'abord, j'aimerais rappeler que depuis maintenant plus de 100 ans, l'UMQ rassemble les gouvernements...

M. Damphousse (Martin) : ...de proximité de toutes les régions afin de mobiliser l'expertise municipale, accompagner ses membres dans l'exercice de leurs compétences et valoriser la démocratie municipale. Nos membres représentent plus de 85 % de la population et du territoire du Québec.

D'abord, l'UMQ salue le dépôt de cette importante pièce législative. Elle répond à une demande historique de l'UMQ et concrétise un engagement fort du premier ministre du Québec, pris lors des assises 2022 de l'UMQ. Dans sa forme actuelle, le projet de loi permettra d'accélérer la réalisation de projets structurants pour les municipalités, notamment en matière de transports collectifs, de protection de milieux naturels ou d'habitation. C'est une excellente nouvelle. C'est une avancée importante pour relever avec agilité les grands défis que nous avons devant en aménagement durable du territoire.

Dans notre présentation, nous mettrons l'emphase sur trois éléments importants de notre mémoire, soit le processus d'expropriation, tel que défini dans le projet de loi, la notion d'expropriation déguisée ainsi que l'entrée en vigueur de la loi. La pièce législative modifie le régime actuel en balisant l'indemnité à verser en contrepartie d'une expropriation. Il en résulte un régime beaucoup plus prévisible, tant pour les expropriants que pour les expropriés. L'UMQ estime que cette prévisibilité aura un effet de réduire considérablement les litiges entourant les procédures d'expropriation. Elle permettra ainsi de réduire les honoraires professionnels, de désengorger en partie le système de justice et d'assurer un processus d'expropriation rapide et efficace, tout cela en misant sur l'intérêt collectif de nos communautés. Le Code civil du Québec stipule que le propriétaire ne peut être contraint de céder sa propriété si ce n'est pas par voie d'expropriation faite suivant la loi pour une cause d'utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité. La Loi sur l'expropriation prescrit que l'indemnité est fixée d'après la valeur du bien exproprié et du préjudice directement causé par l'expropriation. L'Union ne remet pas en question le cadre établi par le Code civil du Québec et considère que la définition d'indemnité offerte par la Loi sur l'expropriation n'est pas problématique. C'est plutôt l'absence de balises législatives pour la détermination de la valeur du bien exproprié et du préjudice directement causé par l'expropriation qui constituent des lacunes importantes. Cette situation a laissé l'interprétation de ces notions aux tribunaux qui ont développé au fil des décennies les concepts de valeur aux propriétaires et d'usage le meilleur et le plus profitable. L'Union considère que la valeur aux propriétaires est imprévisible et mène à une indemnisation injuste puisqu'elle prend notamment en compte des éléments hautement spéculatifs qui varient en fonction du propriétaire.

C'est d'ailleurs pour ces raisons que de nombreuses juridictions ont plutôt décidé d'opter pour une valeur du bien exproprié reposant sur la valeur marchande, comme en Ontario, en Colombie-Britannique ainsi qu'au niveau fédéral. Il s'agit d'une modification souhaitable et attendue qui fera avancer le Québec dans la modernité en matière d'expropriation. C'est pourquoi l'UMQ recommande de maintenir la valeur marchande du droit exproprié comme base de l'indemnité immobilière.

Maintenant, je passe la parole à M. Normand Dyotte.

M. Dyotte (Normand) : Merci, M. le président, Mme la ministre, Mme la Présidente de la commission, Mesdames et Messieurs les membres de la commission. Alors, je souhaite vous parler maintenant de la notion d'expropriation déguisée. À cet effet, l'encadrement du recours à une expropriation déguisée constitue une avancée importante.

• (11 h 50) •

Toutefois, la notion même d'expropriation déguisée mérite d'être précisée par le projet de loi n° 22. Par sa nature, la réglementation d'urbanisme affecte nécessairement la valeur des immeubles. Il est établi qu'une baisse de valeur engendrée par la réglementation ne donne pas lieu à une indemnisation. En effet, une municipalité qui devrait indemniser un propriétaire à chaque fois qu'elle restreint le potentiel de développement d'un immeuble n'aurait dans les faits que des pouvoirs urbanistiques très limités. C'est pourquoi les poursuites pour expropriation déguisée constituent un risque important pour les finances municipales et les deniers publics. Les municipalités ont besoin de prévisibilité...

M. Dyotte (Normand) : ...Cadre juridique clair dans l'exercice de leurs compétences et des pouvoirs qui y sont associés.

Les récents jugements en matière d'expropriation déguisée soulignent le fait que la loi pourrait prévoir, au cas par cas, qu'il ne peut y avoir indemnité pour expropriation déguisée. Une telle solution va à l'encontre du principe de non-indemnisation en matière d'urbanisme. C'est pourquoi l'UMQ recommande d'enchâsser le principe selon lequel une atteinte au droit de propriété découlant de l'utilisation des pouvoirs prévus à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme ou à la Loi sur le patrimoine culturel ne donne pas lieu à une indemnisation.

Maintenant, je retourne la parole à M. le Président.

M. Damphousse (Martin) : Merci, M. le maire. Au Québec, l'interprétation de la notion d'expropriation déguisée a largement été laissée aux tribunaux. Les récents jugements en la matière sont inquiétants puisqu'il en découle qu'un règlement d'urbanisme conforme à l'habitation... à l'habilitation législative peut donner lieu à une expropriation déguisée sans même qu'il y ait appropriation d'un immeuble par la municipalité.

À ce titre, les jugements récents nous apprennent qu'un changement de zonage, qui a pour effet de maintenir un milieu naturel dans un état naturel, est à ce point restrictif pour un propriétaire qu'il donne lieu à une expropriation déguisée. La spéculation sur les milieux naturels ne devrait pas prévaloir sur l'intérêt collectif qui commande leur protection.

De plus, le projet de loi enchâsse le concept d'usage raisonnable sans toutefois le définir, ce qui pourrait avoir de fâcheuses conséquences. Ainsi, l'UMQ recommande de préciser les paramètres de ce qui constitue un usage raisonnable et de prévoir des présomptions d'usage raisonnables dans certains cas, notamment, en matière de protection et de conservation des milieux naturels.

Enfin, je termine sur l'entrée en vigueur de la loi concernant l'expropriation. Les dispositions transitoires et finales du projet de loi prévoient que la loi concernant l'expropriation, une fois adoptée et sanctionnée, entrerait en vigueur six mois après la date de la sanction du projet de loi. Ces dispositions prévoient également que toute instance d'expropriation commencée un jour avant l'entrée en vigueur de la loi demeurerait régie par l'ancienne loi. De plus, toutes réserves dont la procédure d'imposition a commencé un jour avant l'entrée en vigueur de la loi concernant l'expropriation demeureraient valides et régies par l'ancienne loi.

Une entrée en vigueur six mois après la date de la sanction du projet de loi aura nécessairement pour effet de retarder plusieurs projets d'importance pour les municipalités et la société québécoise.

Les municipalités attendront l'entrée en vigueur du nouveau régime pour entamer des procédures d'expropriation, puisque celle-ci est bien plus visible, rapide et équilibrée. Ainsi, l'UMQ recommande de modifier les dispositions transitoires et finales de manière que la loi concernant l'expropriation entre en vigueur dès sa sanction.

Aussi l'Union recommande de prévoir que la loi concernant l'expropriation est d'effet immédiat dès son entrée en vigueur, notamment, quant à la fixation des indemnités.

Enfin, l'UMQ recommande de continuer les instances commencées et les réserves dont la procédure d'imposition a commencé avant la sanction du projet de loi n° 22 sous le nouveau régime d'expropriation, avant les adaptations nécessaires.

Nous sommes maintenant disponibles pour répondre à vos questions. Merci de votre attention.

La Présidente (Mme Maccarone) : Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant procéder aux périodes d'échange. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Guilbault :Oui. Merci beaucoup. Très, très intéressant. Puis on avait pris connaissance des recommandations, évidemment, dans votre mémoire.

J'ai envie d'aborder d'emblée, parce que c'est une recommandation spécifique sur les articles 170 et 171, toute la question des expropriations déguisées, qui est une grande source de préoccupation. Et vous savez par ailleurs que ma collègue aux Affaires municipales, qui a son projet de loi, je ne sais pas si... il est-tu en son cheminement, son projet de loi, pour modifier la LAU?

Une voix : ...

Mme Guilbault :...En tout cas, il est terminé. Bref, parce que c'est des enjeux qui sont transversaux, qui touchent aussi les deux ministères, donc en quoi... Peut-être nous spécifier en quoi les modifications qui ont été faites à la LAU...

Mme Guilbault :...laisse une espèce de résiduel ou, tu sais, de quelle manière est-ce que ce serait absolument nécessaire qu'on modifie ce qu'on a mis, nous, dans le projet de loi pour vous simplifier la vie?

M. Damphousse (Martin) : Je vais inviter M. Philippe Biuzzi à commenter si nécessaire.

M. Biuzzi (Philippe) : En fait, c'est important de le mentionner, l'UMQ recommande de garder les articles 170 et 171 dans le projet de loi n° 22. L'encadrement du recours en expropriation déguisée et souhaitée. Il y a des éléments qui sont très importants ici. On parle notamment de la prescription après trois ans de l'adoption d'un acte municipal. Ceci étant, la notion d'expropriation déguisée, on considère qu'elle devrait également être abordée dans le projet de loi. En ce moment, on a des jugements des tribunaux qui mettent les municipalités dans des situations précaires parce qu'elles ont des poursuites avec des montants assez faramineux et qui mettent en cause leurs budgets municipaux. L'objectif, puis c'est pour ça que les deux premières recommandations portent spécifiquement sur la notion d'expropriation déguisée, on veut que le principe qui découle des tribunaux le principe de non-indemnisation, autant quand on fait un règlement pour modifier l'usage qui peut être permis sur un un lot que lorsqu'on permet par exemple plus d'étages. Bien, si on réduit le nombre d'étages, on n'indemnise pas le propriétaire puis, si on en permet plus, bien, la plus-value n'est pas prise par la municipalité. Ceci étant, ce qu'on veut, c'est vraiment que ce principe-là soit enchâssé à la base. Si à chaque fois, il faut indemniser pour l'utilisation des pouvoirs en urbanisme, bien, les municipalités n'auront pas de marge de manœuvre.

Ensuite, ce qu'on demande puis ce qui est important, c'est que dans l'article 170, le concept d'usage raisonnable, qui est un concept établi par les tribunaux, est intégré dans la loi, et ce qu'on demande en fait, c'est de prévoir des paramètres pour guider les tribunaux, pour ne pas se retrouver dans la même situation. On veut de la prévisibilité, c'est ça qu'on veut depuis le début, et également de prévoir des présomptions d'usage raisonnable, donc que le législateur vienne nous dire : Ah! vous faites un règlement pour vous conformer à, par exemple, ce qu'il y a dans le schéma d'aménagement et de développement qui est conforme aux orientations gouvernementales. Bien, dans ce cas là, si vous faites un règlement de concordance, il y a une présomption que c'est un usage raisonnable.

Mme Guilbault :Euh, oui, c'est ça. C'est que... puis là, on m'informe, c'est ça, il va avoir des choses dans le prochain projet de loi de ma collègue sur la fiscalité municipale. C'est sûr que moi, puis ça a été évoqué aussi par les collègues, il y a toujours la notion d'équilibre à trouver entre expropriant et l'exproprié, puis on a tous entendu des histoires. J'en ai même dans ma propre circonscription où on vient modifier le zonage, on vient faire des modifications une fois que, par exemple, un couple a acheté une maison. Des histoires comme ça, puis il y en a à beaucoup plus grande échelle, là, donc que vous vivez et qui impliquent beaucoup plus d'argent dans ces cas-là.

Donc, toujours dans l'optique de chercher l'équilibre, avez-vous des exemples? Tu sais, vous dites : On a plusieurs jugements de la Cour et tout ça. Pouvez-vous nous fournir des exemples de cas où, selon vous, un encadrement plus précis vous aurait permis soit de pouvoir aller plus rapidement ou soit de sauver de l'argent, ou pouvoir protéger des milieux, ou, tu sais, des exemples concrets? Puis il y a tout... puis peut-être aussi, puis après ça, vous pourrez répondre peut-être globalement.

On a beaucoup, beaucoup de cas de terrains de golf. Vous le savez, toutes les affaires de terrains de golf dans plusieurs circonscriptions, c'est des problèmes qui reviennent. La conversion des terrains de golf, le fait que les terrains de golf sont de moins en moins fréquentés puis qu'on essaie d'en trouver des usages plus modernes ou, tu sais, de les utiliser de d'autres façons, entre autres faire des parcs, des milieux de vie et tout ça. Donc, peut-être globalement nous dire, là, puis à quel point, de façon générale, ce projet de loi là pourra venir nous aider à faire un usage moderne, XXIᵉ siècle, puis en phase avec toutes les préoccupations qu'on peut avoir comme société, notamment pour les terrains de golf.

• (12 heures) •

M. Damphousse (Martin) : En fait, votre exemple est intéressant, puis je suis convaincu que mon collègue, M. Diotte, va vouloir commenter suite à mon intervention.

Ce qui est intéressant, c'est que je suis maire de Varennes, Normand est maire de Candiac. On est tous les deux dans la CMM. Donc, vous le savez, la CMM a mis en place un règlement de contrôle intérimaire dans un but très précis d'accélérer la protection de nos terrains et de viser l'objectif gouvernemental de 30 % de terrains protégés. Puis on le sait, que dans le sud du Québec, c'est beaucoup plus exigeant et plus difficile. Donc, que ça soit les milieux humides, que ça soit les secteurs avec des espèces à protéger, et l'exemple des golfs est extraordinaire...


 
 

12 h (version non révisée)

M. Damphousse (Martin) : ...parce que c'était un des objectifs, puis Normand vous donnera plus de détails, mais dans bien des cas où les golfs ont fermé, où les zonages sont parcs, récréatifs, golfs, des gens acquièrent ces terrains-là avec un objectif de spéculation en rêvant un jour que ce territoire-là sera développable. Et ils s'imaginent qu'un terrain qui a pu être acheté, puis là, j'invente des chiffres, 5, 8, 10 millions avec un potentiel de développement densifié qui peut valoir 200, 300, 400 millions. Mais le zonage aujourd'hui ne le permet pas, ça fait qu'on est dans un contexte, à la CMM, parce que je le connais bien, je siégeais à l'exécutif, c'est dans un objectif de protection et non de spéculation. Ça fait que, quand des villes veulent acquérir, soit par expropriation ou de gré à gré, ces terrains-là... Malgré de gré à gré, ça ne marchera jamais parce que la réalité, c'est que les valeurs explosent, donc ce n'est que par le principe d'expropriation. Ça fait que beaucoup de municipalités aujourd'hui attendent avec beaucoup d'intérêt votre... ce nouveau projet de loi là. Ça fait que c'est pour ça que le six mois de plus, quand on a attendu pendant 40 ans pour une réforme, bien, on aimerait être capable de l'éviter.

Mais, ceci étant dit, M. Dyotte a sûrement des éléments additionnels très intéressants en lien avec le RCI et les golfs.

M. Dyotte (Normand) :      Oui. Merci. Martin, alors, a quand même très bien expliqué la situation, c'est bien certain. Je pense qu'il faut faire le lien dans tout ça aussi avec les orientations gouvernementales, donc les OGAT qui sont actuellement en révision en cours actuellement. Alors, on veut suivre les orientations gouvernementales, Martin l'a bien spécifié, et aussi les orientations de la CMM, 30 % aussi d'atteinte au niveau de la biodiversité. Donc, on veut faire partie de l'équation, mais il faut se donner les moyens pour pouvoir le faire.

Alors, la question du zonage actuel est fort importante aussi. Quand un promoteur vient nous voir et il spécule puis il veut faire un projet pour lequel le zonage n'est pas celui qu'il désire, bien, il ne faudrait pas qu'il y ait une part d'indemnisation future par rapport à ça. Alors, il faut tenir compte donc du zonage actuel. C'est fort important. Et, quand il n'y a jamais eu de permis qui a été délivré ou des discussions sérieuses, ou d'ententes avec un promoteur, alors pourquoi une indemnisation devrait être sur la table pour un propriétaire? Alors, je pense que c'est là qu'il faut vraiment baliser les différentes étapes et s'assurer qu'à ce moment-là on en vient finalement à la valeur évidemment marchande. Mais encore là, au lieu de la valeur propriétaire, ce qui est bien, mais encore là, la valeur marchande, il faut tenir compte du zonage actuel. Alors, si c'est un zonage qui est récréatif, même si c'est un terrain blanc, reste que c'est un zonage qui est quand même récréatif. Alors, il ne faut pas penser en termes d'évaluation après ça parce que ça vaut 50 $, un terrain blanc dans la communauté métropolitaine de Montréal, ou peu importe où, qu'à ce moment-là cette valeur marchande-là, est supérieure à un zonage qui est récréatif. Alors, il y a une question aussi d'évaluation qu'il va falloir regarder par la suite par rapport à ce cadre-là de zonage qui est déjà existant sans qu'il y ait eu d'entente.

Mme Guilbault :Oui. Je passerais. Pouvez-vous nous dire combien de temps il nous reste, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Maccarone) : Il vous reste cinq minutes.

Mme Guilbault :Bien, je vais passer la parole à mon collègue de René-Lévesque, qui a été maire, comme, je pense, tout le monde le sait ici. Alors je vais lui passer la parole. Merci, messieurs. Puis s'il reste du temps, je reviendrai.

La Présidente (Mme Maccarone) : Parfait. M. le député de René-Lévesque, la parole est à vous.

M. Montigny : Merci beaucoup, Mme la Présidente. D'abord, salutations, vraiment content de vous retrouver. Vous savez, évidemment, on vient de le dire, j'ai été maire de Baie-Comeau pendant cinq ans, là, mais il y a un enjeu important, moi, où j'ai assisté au congrès... aux assises de l'Union des municipalités du Québec, où notre premier ministre est venu nous dire qu'il avançait dans cette direction. On était tous très heureux à ce moment-là, puis je voulais prendre le temps de le souligner, là, parce qu'on est vraiment en train d'étudier un projet de loi qui a une importance pour les municipalités, puis je suis content de voir là, puis de réfléchir avec nous sur certains enjeux.

Notre gouvernement l'a dit plusieurs fois, les municipalités sont importantes. C'est des importants partenaires pour notre gouvernement, puis c'est essentiel de travailler ensemble là-dedans, puis c'est le fun d'entendre... d'avoir lu votre mémoire puis d'entendre ce que vous avez à proposer.

Moi, je veux vous amener sur un enjeu important pour moi que j'ai vécu, que je vois encore comme problématique dans ma circonscription, toute la question de la spéculation, hein? Je vous donne juste un exemple, un maire qui décide de vouloir revitaliser un centre-ville qui se dévitalise, qui signifie son intérêt de le faire en toute franchise à ses citoyens, qu'il fait ça, qu'il y a des bâtiments qui sont désuets, des fois abandonnés, etc. Et là se lancent, question de spéculation, certains... certaines gens d'affaires qui achètent des bâtiments et là la discussion de gré à gré...

M. Montigny : ...et là, la discussion de gré à gré, comme vous avez parlé tout à l'heure, se place avec la municipalité, et, évidemment, un bâtiment qui avait une valeur peut-être marchande avant même les discussions de valorisation du centre-ville, bien, la valeur des bâtiments augmente, et puis finalement, bien, certains projets ne peuvent pas voir le jour pour toutes sortes de raisons.

Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus à nouveau, sur l'importance de ce projet de loi là pour éviter cet enjeu de spéculation que vous vivez constamment dans vos municipalités.

M. Damphousse (Martin) : Merci pour la question. En fait, ton préambule, si je peux me permettre, Yves, est tellement adéquat, là, parce qu'on le vit au quotidien, cette problématique-là. Ça fait que c'est pour... c'est une... un des motifs pour lesquels la modification de la loi est tellement importante.

Puis juste une petite anecdote, là, Varennes, je suis dans le processus du centre-ville, j'ai pu régler 80 % de mes acquisitions de gré à gré. Quand c'est ça, tout le monde est heureux. Mais il y en a un qui, malheureusement, là, bien, il est convaincu qu'on n'aura pas le choix de l'acheter, ça fait que son prix est démesuré. En fait, son prix est 300 fois la valeur qu'on estime, pas la valeur du rôle d'évaluation municipale, la valeur estimée par un évaluateur agréé. Mais lui est convaincu que, parce qu'il est au centre, il a le pouvoir de bloquer. Il s'assoit là-dessus.

Ça fait que tu comprends que ce projet de loi là définira des règles très précises de la valeur réelle, puis ça, c'est essentiel. Puis la valeur marchande spéculative, on en a parlé un peu avec les golfs. Bien, il y en a aussi qui s'imaginent qu'un terrain, bien, il a le pouvoir, lui, de changer le zonage pour venir donner une valeur explosive et exponentielle à son terrain. Mais ce n'est pas vrai. Ce pouvoir de modification là du territoire relève du milieu municipal. Ça fait que tant que ce n'est pas fait... puis n'oublions jamais qu'il y a des territoires qui peuvent être contestés comme modification du territoire. Ça fait que si des zones contiguës bloquent une modification de zonage, la valeur spéculative d'un propriétaire va se faire surprendre. Puis la réalité, si ça ne passe pas, ça n'a pas la valeur réelle. Donc, les nouveaux paramètres que vous mettez en place dans le projet de loi guideront et aideront la prévisibilité qui est essentielle d'une estimation des valeurs. Mais l'exemple est tout à fait valable, Yves.

M. Montigny : Peut-être un dernier élément avant de peut-être...

La Présidente (Mme Maccarone) : Il reste 45 secondes pour vos échanges.

M. Montigny : Oh! mon Dieu. O.K. J'allais simplement dire pourquoi il faut le faire, pourquoi il faut l'appliquer vite, vite, bien, on pensait qu'on pouvait laisser un délai pour que la machine s'adapte, là, disons ça de même, en quelques secondes.

M. Damphousse (Martin) : Bien, ça fait 40 ans qu'on attend, puis quand on a annoncé que ça s'en venait, on y croyait, on y est rendu, là. Ça fait qu'on a déjà attendu tellement longtemps, puis la réalité, c'est qu'il y a des projets qui sont en attente que ça arrive. Puis, dans la crise du logement qu'on connaît aujourd'hui, un délai additionnel va juste empirer l'effet de l'arrivée principalement de logements additionnels potentiels. Donc, essayons, si on est capable d'éviter ce délai additionnel. Merci.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à l'opposition officielle, M. le député de l'Acadie, la parole est à vous pour une période de 10 min 30 s.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, rebonjour, merci pour le dépôt de votre mémoire et merci pour le témoignage que vous avez rendu aujourd'hui.

Il y a quelques éléments que j'aimerais explorer avec vous parce, bien, vous savez, un des aspects importants du rôle en fait de l'opposition officielle, des députés, c'est de parfaire, d'aider à ce que les projets de loi soient meilleurs, bonifiés, puis évidemment, votre expertise est importante pour nous conseiller à ce sujet-là.

D'entrée de jeu, vous avez mentionné que ce projet de loi là allait aider à désengorger le système de justice. Hein, vous comprendrez que je suis aussi le porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice, donc cet élément-là pour moi est important. Quand j'ai lu le projet de loi, c'est curieux, j'avais l'impression qu'il allait engorger le système de justice. Alors, si vous pouviez me donner... ou en fait m'éclairer là-dessus, j'apprécierais grandement.

M. Damphousse (Martin) : En fait. Je pourrais regarder mes notes, là, mais j'ai juste dit en partie, là. On ne

règle pas l'engorgement du système juste par l'expropriation.

M. Morin : Non, mais je parle en termes de litiges en lien avec l'expropriation.

• (12 h 10) •

M. Damphousse (Martin) : Oui.

M. Morin : Oui.

M. Damphousse (Martin) : Mais à partir du moment où le projet de loi définit clairement les paramètres d'une valeur réelle au lieu d'une valeur marchande spéculative, mais là, ça devient beaucoup moins imaginable qu'un exproprié va se retrouver : O.K., mais non, non, non, je ne suis pas d'accord sur la valeur. Mais attendez, le projet de loi l'a clairement défini. Ses chances de gagner...

M. Damphousse (Martin) : ...ils vont tellement être faibles, parce qu'on a respecté la valeur prévisible, bien, ça ne l'empêche pas de l'essayer d'aller dans les tribunaux. Mais à partir du moment où on additionne des insuccès de poursuites, les éventuels poursuivants risquent d'être découragés.

À l'inverse, aujourd'hui, ce qu'on observe avec les tribunaux, c'est que dans bien de trop de cas, l'expropriation tout à fait conforme du milieu municipal est mise de l'avant, des poursuites arrivent bien longtemps après des modifications de zonage. Dans des cas, sans nommer de ville, huit ans après la modification de zonage. La contestation est perdue par le milieu municipal. Puis quand un territoire humide, sans réelle valeur de développement domicilié, se retrouve à être décuplé par un jugement au niveau de sa valeur, mais, honnêtement, c'est cette prévisibilité-là qu'on veut diminuer.

Mais, avec un projet de loi qui vient encadrer le plus précisément possible les valeurs de l'exproprié, honnêtement, on est convaincu qu'on risque de voir beaucoup moins de causes dans les tribunaux.

M. Morin : Je vous remercie. Maintenant, dans votre exposé, j'imagine que, dans l'état actuel, quand vous parlez de la valeur ou des poursuites qui sont déposées devant les tribunaux, le tribunal, qui est impartial, entend les deux parties. Les deux parties soumettent des preuves. Donc évidemment, quand le tribunal rend une décision, c'est après avoir écouté les preuves des deux parties. Donc si, dans certains cas, la valeur est augmentée, le juge ou la juge, il faut qu'il se base sur la preuve.

Donc, je comprends que dans certains cas, ça peut prendre du temps puis le montant peut être plus élevé. Mais il me semble qu'une fois que le tribunal a rendu sa décision, normalement il faut tenir compte de tous les paramètres, et donc ça devrait être une décision qui est juste. Non?

M. Damphousse (Martin) : Tout à fait, mais en fonction de paramètres de prévisibilité de la valeur et non dans le cadre du projet de loi et non de valeur spéculative. Le plus bel exemple que je peux vous donner, là... l'exemple que j'ai donné tantôt le RCI de la CMM, le nombre de poursuites qui ont découlé de ça, justement en fonction d'une valeur spéculative potentielle de terrain de golf. C'est le plus bel exemple. Puis Candiac est pris avec ça, puis Rosemère, puis combien d'autres villes. Des promoteurs immobiliers achètent des golfs dans un zonage parc, puis là, il y a un RCI qui bloque le développement. Mais le zonage ne le permet pas. Mais eux, ils ont la certitude que la ville aurait accepté une modification de zonage, puis tous les voisins seraient d'accord. Donc, ils perdent énormément de revenus de façon spéculative et donc déposent des poursuites parce que les paramètres ne sont pas clairs. Le jour où les paramètres deviennent clairs, les chances de se retrouver dans des tribunaux pour débattre de ce qu'on va débattre aujourd'hui, bien, sont beaucoup moindres.

M. Morin : D'accord. Merci. Vous avez également parlé... et vous souhaitez que la loi s'applique dès son entrée en vigueur. Donc, c'est quand même une mesure qui est assez extraordinaire. Habituellement, un projet de loi ou une loi entre en vigueur un montant de jours ou de mois après son entrée en vigueur. Ça permet aux gens, évidemment, de se conformer à la nouvelle législation.

Mon collègue a posé une question. Vous avez dit que ça faisait longtemps que les villes attendaient cette loi-là. Maintenant, n'y a-t-il pas un enjeu si la loi rentre directement et immédiatement en vigueur? Et justement, il y a des gens qui ne seront pas capables de se conformer à la loi de toute façon, puis que ça va entraîner un délai. Donc, le législateur, dans sa sagesse, prévoit un délai. Ne serait-il pas préférable de le laisser de cette façon-là?

M. Damphousse (Martin) : Bien honnêtement, si je peux me permettre un commentaire très personnel, si de raccourcir le délai, ça devient trop complexe ou infaisable. On va vivre avec le délai. Mais on est dans un contexte, aujourd'hui, tout le monde le reconnaît de crise du logement. À partir du moment où on retarde d'un six mois additionnel, un six mois, des fois, peut être un effet d'un an parce que si faire des fondations d'un logement ne peut pas se faire avant l'arrivée de l'hiver, bien, on perd un six mois, ça veut dire qu'on perd un an. Mais si c'est infaisable de réduire ce délai-là, c'est dans ce contexte-là.

Puis quand on vous dit que c'est une demande historique de l'Union des municipalités du Québec, ça fait des dizaines d'années qu'on souhaite améliorer ce projet de loi là. Donc on ne peut pas dire qu'il y a bien des gens qui vont être surpris d'apprendre ça et qui risquent d'être pris de court. Ça fait longtemps qu'on en parle. Donc, est-ce que le six mois peut être gagné et aider tout le monde? Si ce n'est pas possible, ce b'n'est pas possible. Mais ça n'aurait pas été honnête de notre part de ne pas le demander, de le revendiquer tout simplement.

M. Morin : D'accord...

M. Morin : ...merci. Dans votre mémoire, la recommandation 2, vous indiquez : «Préciser les paramètres de ce que constitue un usage raisonnable et prévoir des présomptions d'usage raisonnable.» Avez-vous des exemples particuliers, spécifiques? Parce que, bon, évidemment, c'est la même chose, les présomptions dans un texte législatif, c'est plutôt rare, ce n'est pas la norme. Donc, pour aider le législateur, avez-vous des exemples concrets de ce que ça pourrait être?

M. Damphousse (Martin) : Présomption de législation raisonnable, je vous dirais, je reviens souvent sur l'exemple de golf, parce que, dans bien des cas, on se retrouve dans des zonages parc, que ça soit golf ou secteur humide, mais, dans des cas comme ceux-là, on s'entend que de prévoir raisonnablement qu'il puisse y avoir du développement domicilié, pour nous, ça devient déraisonnable. Ça fait que, dans ce contexte-là, c'est assez clair. Ça fait que de la raisonnabilité, c'est en fonction de nos schémas d'aménagement aussi.

Mais M. Dyotte me fait un petit signe. Si vous me permettez, il a sûrement un complément de réponse qu'il souhaite apporter.

M. Morin : Bien sûr.

M. Dyotte (Normand) : Oui, merci. On peut penser, entre autres, à ce qui est en train d'être mis en place, le plan régional des milieux hydriques et humides. Alors, c'est quelque chose qui nous est demandé par le gouvernement, donc on est en plein déploiement de ces plans-là. Donc c'est en lien directement avec les orientations gouvernementales. Alors, quand on parle, là, d'exemple, là, donc, de présomption, c'en était un, exemple. Donc, ça devrait être enchâssé dans les règlements d'aménagement et de l'urbanisme. Alors, on suit directement les orientations, on suit les schémas d'aménagement, on réalise les plans. Donc, à ce moment-là, de quelle raison on pourrait être poursuivi pour, donc, des expropriations déguisées? Alors, ça ne tient pas la route. Alors, dans la mesure où cette chaîne-là est suivie, bien, on se dit : À ce moment-là, c'est une présomption qui fait en sorte que ce qu'on est en train de faire, bien, c'est en lien directement avec les orientations gouvernementales.

M. Morin : Oui, sauf que... je vous comprends, je vous entends, sauf que parfois, dans ce domaine-là comme dans d'autres domaines, il y a des citoyens qui peuvent contester les orientations gouvernementales, parce qu'ils trouvent qu'ils ne sont pas conformes aux lois, aux chartes, puis ils peuvent avoir raison. Donc, je comprends que c'est uniquement une présomption que vous demandez, mais je trouve ça un petit peu curieux, tu sais... Je comprends que vous, vous devez vous conformer aux orientations du gouvernement, vous n'avez pas le choix, mais le propriétaire, lui, normalement, devrait aussi avoir le droit de contester puis de faire valoir également ses droits, notamment son droit de propriété.

M. Biuzzi (Philippe) : Si je peux répondre à ça, en fait, ce pour quoi on propose des présomptions et pas, par exemple, une immunité, c'est pour s'assurer, justement, que ce droit-là de contester un acte municipal est encore présent. La seule chose qu'on souhaite, c'est qu'une présomption s'applique, c'est-à-dire, par exemple, si on fait un règlement de concordance parce que le schéma d'aménagement et de développement auquel la réglementation municipale doit se conformer, ce schéma-là, qui est accepté par le MAMH, la conformité est là, tu sais, ça devient un peu une obligation pour une municipalité. Puis ce qu'on souhaite avoir, c'est une présomption d'usage raisonnable, c'est-à-dire que ce qui se retrouve dans le schéma d'aménagement et de développement, ce qui doit se retrouver dans la réglementation municipale, bien, qu'il y ait une présomption d'usage raisonnable. Et ça n'enlève pas le droit de la personne qui se sent lésée de contester tout ça. Puis, si jamais, par exemple, elle réussit à démontrer que ce n'était pas un règlement de concordance, parce que ce n'est pas ça que le schéma d'aménagement et de développement dit, bien, la présomption sautera, puis le tribunal pourra trancher. Mais ce qu'on demande, c'est quand même d'avoir cette présomption-là qui va nous permettre de réduire le nombre de litiges sur, par exemple, des règlements de concordance, parce que la présomption va s'appliquer.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci. Ceci met fin à ces échanges. Nous allons poursuivre avec la deuxième opposition. M. le député de Taschereau, la parole est à vous pour une période de trois minutes 30 secondes.

M. Grandmont : Trois minutes 30 secondes. Bonjour. Je vais être bref, je vais essayer de passer deux questions, la première concernant le délai de six mois. De un, ça ne me paraît pas illogique, là, d'avoir une loi qui entre en vigueur dès la sanction, là. Est-ce que vous ne croyez pas qu'un délai de six mois aussi peut occasionner... Parce qu'il y en a qui suivent ça avec attention, là, qui nous écoutent peut-être même en ce moment, là, mais qui... Est-ce que ça pourrait provoquer un dépôt massif de contestations puis engorger, en quelque part? Est-ce que ça serait comme une espèce de dernier délai de grâce où les gens pourraient déposer, les promoteurs pourraient déposer des contestations dans le cas de litige?

• (12 h 20) •

M. Damphousse (Martin) : Bien, honnêtement, je ne pense pas, mais cet argument-là de dépôt massif, à mon avis, est autant valable après six mois. Ça fait qu'au fond je ne vois pas pourquoi il y aurait une accélération de dépôt massif aujourd'hui, mais ce qui est clair, puis je l'ai mentionné tantôt, il y a plusieurs municipalités qui ont des projets avec malheureusement pas de possibilité de s'entendre de gré à gré avec un voisin pour un développement de centre-ville, par exemple, bien là, on...

M. Damphousse (Martin) : ...en attente, ça fait que cette attente-là provoque un délai additionnel. Parce qu'entre le début des discussions d'un projet de loi à venir, bien, il y a bien... Le milieu municipal était très heureux. Ça fait que, le délai additionnel provoque donc un délai additionnel, mais, si ce n'est pas possible, c'est correct, on n'est pas à six mois près, après 40 ans, là.

M. Grandmont : Parfait. Merci. Merci. Concernant les expropriations déguisées, bon, tu sais, les changements de zonage, par exemple, qui sont faits pour protéger les milieux naturels, les milieux humides, il y a un plan que vous êtes supposés suivre. C'est fait tout le temps en concordance avec un schéma régional ou métropolitain puis, évidemment, avec les orientations gouvernementales elles-mêmes.

Une voix : Exact.

M. Grandmont : Vous êtes l'instance, en fait, qui régit, en fait, qui posez ces gestes-là, mais toujours en concordance. Est-ce que, selon vous, là, ce qu'on a en ce moment dans le projet de loi permet de... vous permet de faire votre boulot de régisseur et, en même temps, de le faire, parce que... je tiens à le souligner, vous le faites toujours dans l'intérêt collectif. C'est très, très rare qu'on voie des expropriations de mauvaise foi. Ça peut arriver, mais ça reste relativement rare. Donc, est-ce que vous pensez que, dans le projet de loi qu'on a actuellement, ça vous permet de faire votre job, de faire le travail en fonction du bien collectif protégé, toujours en concordance avec les orientations gouvernementales?

M. Damphousse (Martin) : Bien, selon moi, c'est très clair que la réponse est oui, beaucoup mieux que sans ce projet de loi là, mais est-ce qu'il y a des éléments additionnels qui méritent d'être soulignés?

M. Biuzzi (Philippe) : Bien, c'est ça. Il y a des éléments très pertinents au niveau de l'encadrement du recours en expropriation déguisée, par exemple, la prescription, mais, pour nous, il manque quand même, puis c'est pour ça qu'on propose des présomptions... Par exemple, quand on met en œuvre un plan régional des milieux humides et hydriques, bien, la personne qui se fait poursuivre, en bout de ligne, c'est la municipalité, même si c'est une obligation qui découle du gouvernement.

Et puis je rajouterais à ça, les milieux humides et hydriques, ce pour quoi on fait des plans pour les protéger, c'est qu'ils sont importants pour prévenir les inondations. Ça fait qu'on a quand même ici un problème d'application, quand même assez majeur, là, pour la mise en œuvre des plans régionaux de milieux humides et hydriques, puis c'est pour ça qu'on souhaite des présomptions.

M. Grandmont : Merci pour votre grande contribution.

La Présidente (Mme Maccarone) : M. Damphousse, M. Diotte et M. Biuzzi, merci beaucoup pour votre contribution à nos travaux.

Je vais suspendre nos travaux pour quelques instants, jusqu'à tant que nous pouvons accueillir le prochain groupe.

(Suspension de la séance à 12 h 23)

 (Reprise à 12 h 28)

La Présidente (Mme Maccarone) : Nous allons reprendre nos travaux, et je souhaite la bienvenue aux représentants de la Fédération québécoise des municipalités. M. Jacques Demers, président maire de Sainte-Catherine-de-Hatley et préfet de la MRC de Memphrémagog, et M. Sylvain Lepage, directeur général. Bienvenue, messieurs! Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à procéder avec votre exposé.

M. Demers (Jacques) :Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour, à tout le monde. Bonjour, Mme la vice-première ministre et ministre des Transports. Mmes, MM, membres de la commission, merci de nous recevoir aujourd'hui.

La Fédération québécoise des municipalités à titre de porte-parole des régions. On présente plus de 1 000 municipalités. Le chiffre présentement, c'est 1 040 sur les 1 108 qu'il y a au Québec. Ça fait que c'est l'ensemble du Québec, c'est l'ensemble du territoire. L'ensemble des MRC sont membres aussi chez nous.

L'opportunité de passer devant la commission dans un moment très intéressant pour nous parce qu'on parle d'un dossier qui se parle depuis des années. Comme vous le savez, la révision de la procédure d'expropriation était attendue par les municipalités. Le projet de loi donne d'ailleurs suite à l'engagement prévu du dernier pacte fiscal. On se souvient, il a déjà, le pacte fiscal, plus de trois ans. Entre autres, le gouvernement, représentants du monde municipal, dont la fédération, tout le monde étant en accord de dire qu'il fallait avancer dans ce dossier-là.

Pour la FQM, une telle modernisation est nécessaire pour s'adapter aux réalités d'aujourd'hui et ainsi tenir compte de l'évolution et des responsabilités des municipalités relatives à l'expropriation, mais également par rapport aux nouvelles responsabilités qui sont dévolues. Évidemment, on va parler du territoire, de la protection du territoire, de l'environnement. On passe à un autre niveau de ce côté-là, on a des responsabilités importantes à voir.

Vous l'aurez compris, nous sommes en faveur de la démarche. Certains éléments du projet de loi font d'ailleurs directement écho aux propositions soumises par la FQM. Toutefois, des modifications nous apparaissent nécessaires afin d'assurer l'atteinte des objectifs sous les ententes de la réforme de la loi. Enfin, je vais terminer avant de passer la parole à Mre Lepage.

Les recommandations de la FQM, ça consiste, au niveau du projet de loi n° 22, à apporter des solutions en matière de conservation aussi des milieux naturels et des autres obligations imposées aux municipalités par le gouvernement en matière de protection de l'environnement. Je pense que c'est quelque chose que, de façon collective, tout le monde est d'accord pour vouloir protéger l'environnement, mais il faut avoir le pouvoir de le faire. C'est, c'est vraiment là le but de notre démarche. Je vais laisser à Me Lepage.

M. Lepage (Sylvain) : Merci beaucoup. Alors, je vais faire... aller rapidement, là, à certaines questions techniques que vous trouvez à notre mémoire. Là, je vais tenter de faire mentir ma réputation de quelqu'un qui peut parler très longtemps.

• (12 h 30) •

Alors, d'abord, je pense que c'est important de le souligner, mon patron vient de le faire, là, la FQM est très satisfaite, là, que le gouvernement ait donné suite à l'engagement qu'il avait pris à l'occasion du pacte fiscal, et c'est véritablement ce que j'oserais dire...


 
 

12 h 30 (version non révisée)

M. Lepage (Sylvain) : ...et c'est véritablement ce que, j'oserais dire, l'ensemble du monde municipal attendait depuis plusieurs années.

Alors, rapidement, si on va aux principales recommandations, là, qui sont essentiellement... Je pense que vous avez tous noté les recommandations de nature quand même très technique, puisque c'est un projet de loi de nature très technique. D'abord, on l'a souligné dans notre mémoire, on pense que l'attribution d'intérêts devrait... et devrait demeurer à la discrétion du tribunal. Le tribunal, qui entend l'ensemble de la preuve, est en mesure de déterminer si... eu égard aux circonstances qui sont devant lui, quelles indemnités devraient obtenir des intérêts et dans quels cas. Parfois, vous savez qu'il arrive des situations où les tribunaux décident qu'il n'y en a pas, d'intérêts, eu égard à la preuve qui a été entendue. À des choses, par exemple, telles que la bonne foi des parties, où peu importent les critères, c'est généralement des circonstances ou des situations qui sont extrêmement bien balisées par la jurisprudence et qui habituellement relèvent de la discrétion d'un tribunal.

Deuxièmement, à notre recommandation numéro 5, on a souligné qu'il est extrêmement important qu'il n'y ait pas une adéquation entre réglementation municipale, interventions municipales et expropriations déguisées. Il ne faut pas que le projet de loi puisse être interprété qu'à chaque fois qu'une réglementation municipale porte atteinte, parce que toute réglementation porte nécessairement atteinte à certains droits, que nécessairement il y aura indemnité. Et, quant à nous, il y a une certaine ambiguïté, un peu comme mon patron l'a souligné, en matière environnementale.

Vous savez que, de plus en plus, des lois, O.K., obligent les municipalités à adopter des plans, puis c'est notamment le cas en matière hydrique, où on doit réglementer. Donc, il doit être clair, et le projet de loi doit être renforcé pour dire, que ce n'est pas parce qu'il y a possibilité de recours en expropriation déguisée que toute intervention réglementaire signifie la possibilité d'une expropriation déguisée. C'est un peu technique, je vous dirais, mais c'est quand même important que ce soit bien dit.

Par ailleurs, à notre recommandation 6, nous avons souligné que, tel que libellée, la loi laisse entendre de façon assez claire que désormais toute personne qui bénéficie d'un droit sur un terrain pourrait prétendre à une expropriation déguisée. Dans le cadre légal actuel, seul le... en vertu des règles du Code civil, seul le propriétaire, à notre connaissance ou à ma connaissance, et je ne suis pas un grand spécialiste, je dois le confesser, seul le propriétaire d'un immeuble peut prétendre à l'expropriation déguisée, alors que, tel que libellé, le projet de loi laisse entendre que, par... dans d'autres circonstances... Je le répète, vous savez qu'il y a tout un démembrement du droit de propriété. Bien, le titulaire de certains de ces démembrements-là pourrait prétendre à l'existence d'une expropriation déguisée. C'est la recommandation que vous retrouvez à la page... à la recommandation 10, pardon, de notre mémoire.

Par ailleurs, j'aborde maintenant un aspect qui est très important quant à nous, c'est les recommandations 7 et 8. La loi prévoit, telle que libellée, que la municipalité doit, dans un délai de 30 jours du jugement, prendre une décision. D'abord, la loi ne précise pas que c'est un jugement qui est final, et donc qui a l'autorité de la chose jugée. Or, vous savez qu'il y a possibilité d'appel. Ça peut être la personne qui prétend à l'expropriation déguisée qui est insatisfaite du fait qu'un tribunal a donné raison à la municipalité, mais ça pourrait... aussi que la municipalité qui est insatisfaite soit de la conclusion de l'expropriation déguisée, soit du montant de l'expropriation déguisée. Alors, la municipalité doit être placée... lorsqu'elle a à prendre sa décision, elle doit connaître la décision finale, hein? Donc, on vous suggère d'indiquer que le délai - et on reparlera dans quelques minutes du délai - court à partir du moment où il y a un jugement final.

Ça m'amène à vous parler du délai. La loi prévoit un délai de 30 jours. Vous savez que le délai pour porter en appel une décision est également de 30 jours. Évidemment, si vous précisez que c'est à partir du jugement final, le 30 jours, par exemple, sera à compter de la décision... si le jugement a été porté en appel, de la décision de la Cour d'appel. Donc, de préciser, comme je viens de vous le dire, que c'est à partir d'un jugement final devrait corriger en partie la lacune que je viens de vous souligner, O.K.

Il faut ajouter ceci. Un délai de 30... Un, il est important que... et c'est ce que laisse entendre le projet de loi, là, je dois l'admettre, mais il est important qu'un tribunal ne puisse pas scinder... Souvent, on voit... En matière d'indemnisation, les juges, de plus en plus, les tribunaux, de plus en plus, scindent l'instance d'abord sur la responsabilité, ensuite sur ce qu'on appelle le quantum. Il faut que dans notre cas, dans le cas d'expropriation, la cour règle dans un seul jugement...

M. Lepage (Sylvain) : ...la cour règle, dans un seul jugement, la question de savoir est-ce qu'il y a expropriation déguisée et si oui, voici le quantum. Si ça doit aller en appel, ça ira en appel.

Sur le délai, 30 jours, en toute honnêteté, n'importe qui qui est familier avec la mécanique municipale, même si, par exemple, on reçoit le jugement, on est... quand on le reçoit, on est au premier jour du 30 jours. Souvent, il y a des études à faire. Si on parle de montants considérables, on parle de financement. Il doit souvent avoir des discussions avec le MAMH. Il y aura un règlement d'emprunt. Donc on pense qu'il devrait y avoir un délai beaucoup plus long que le délai de 30 jours. Nous proposons 120 jours. Encore là, la Cour aura discrétion pour imposer des intérêts selon ce que nous proposons. Auquel cas, il n'y aura pas de perte d'argent de la part du promoteur, mais il faut que la municipalité ne soit pas placée dans une situation d'urgence. 30 jours, en toute honnêteté, ça nous apparaît clairement à peu près impossible.

Un mot, parce que vous en avez parlé avec les personnes qui ont parlé précédemment. L'entrée en vigueur, on partage l'opinion de l'UMQ à l'effet qu'il est extrêmement important que ce projet de loi, qui en fait est un projet de loi qui corrige une situation ou une forme d'abus, si je peux m'exprimer ainsi, entre en vigueur immédiatement le jour de sa sanction.

Contrairement à mon prédécesseur, je pense qu'il pourrait y avoir plusieurs promoteurs qui se dépêchent de prendre des procédures dans la mesure où on évalue que la situation sera beaucoup plus favorable ou à tout le moins beaucoup plus claire aujourd'hui qu'au lendemain, pardon, de l'adoption d'un projet de loi qu'aujourd'hui.

Est-ce que je respecte mon temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Maccarone) : Il vous reste même 25 secondes si vous souhaitez les prendre.

M. Lepage (Sylvain) : Alors, merci. Je vais vous laisser là-dessus, me poser des questions si ça vous va. J'ai fait rapidement, je pense, le tour de la question.

La Présidente (Mme Maccarone) : Parfait. Merci beaucoup, Me Lepage et M. Demers. Nous allons maintenant procéder aux périodes d'échange et je passe la parole à Mme la ministre.

Mme Guilbault :Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, messieurs, très intéressant. Évidemment, mais concernés au premier chef, avec l'ensemble des instances, des unions municipales puis des représentants des municipalités. C'est en fait... Comme vous l'avez dit, là, puis comme je l'ai dit en introduction, c'est un engagement qu'on avait pris dans le pacte fiscal. Ça a été réitéré aux dernières assises, par le P.M. donc, puis aujourd'hui c'est fait. Du moins, le projet de loi est déposé. Mais on est toujours en amélioration continue.

Je vais laisser l'essentiel de notre temps de parole à mon collègue, ici, de René-Lévesque qui, comme je l'ai dit tout à l'heure, a été maire d'une municipalité, a été tellement impliqué, et tout ça, et très concerné par le projet.

Mais je veux d'abord peut être revenir sur deux petites choses qui ont été mentionnées, d'abord... En fait, non, une essentiellement toute la question du délai de 30 jours versus 120 jours que vous proposez, que vous contre-proposez, et que le délai courre à partir du jugement final. Donc simplement vous dire que moi j'ai de l'ouverture sur la question de faire courir le 30 jours à partir du jugement final. Ça va de soi, surtout s'il y a des procédures d'appel et tout ça. Alors je trouve que c'est intelligent puis constructif.

Sur le 120 jours, est-ce que... puis surtout si, par exemple, vous décidez d'aller en appel ou, en tout cas, du moins il y a une de période réflexion que vous allez en appel ou non? Il y a déjà, j'imagine, des réflexions qui se font aussi sur ce que vous avez à décider en 30 jours. Donc, est-ce que 120 jours, parce si on se met du point de vue de l'exproprié, c'est sûr que c'est quatre mois au lieu d'un mois. Est-ce que vous avez de la flexibilité ou...

M. Demers (Jacques) :Je suis prêt à faire un petit bout pareil là-dessus. Dans le fond, une municipalité, surtout une petite municipalité, n'a pas les professionnels autour de lui. Ça fait quand qu'on doit rendre une réponse en 30 jours, c'est carrément impossible. On tient un conseil municipal par mois. Ça fait que si on le reçoit, ne serait-ce que peu importe la journée qu'on va la revoir, le temps de communiquer, d'avoir un professionnel qui est prêt à nous accompagner, qui est disponible à ce moment-là pour le faire, puis de rendre... Une municipalité, ça parle par résolution. Sinon, on oblige les municipalités à faire des conseils spéciaux pour tenir ces instances- là, ont donc des coûts reliés supplémentaires à ça. On se dit : Voyons, le rythme ne convient pas. Le 30 jours, on ne rentre pas là-dedans.

• (12 h 40) •

Est-ce qu'il y a de quoi jouer entre le 30 et 120 jours? J'aurais tendance à dire ça va dépendre du dossier. De là peut être que le juge pourrait considérer, dans un dossier plus léger, qu'un 60 ou qu'un 90 jours suffit. Mais si on gèle maintenant une période trop courte, on n'aura peut-être pas la chance même que le juge puisse laisser une période plus longue. C'est là où est-ce qu'on dit : Bon, bien, 120 jours au moins, on se donne un espace-temps, puis comme qu'on disait, ce n'est pas pour d'un point de vue pécunier, sinon on nous impose des intérêts sur la somme qu'on a à payer ou quoi que ce soit, on le comprendrait. C'est vraiment pour rendre la bonne réponse, là...

M. Lepage (Sylvain) : ...si je peux me permettre d'ajouter.

Mme Guilbault :Oui, allez-y.

M. Lepage (Sylvain) : Oui, on est toujours flexible, vous le savez, là, puis on est ouvert à des propositions constructives, mais, essentiellement, je vous dirais, un peu comme mon patron, que c'est dossier par dossier, tu sais. S'il faut financer 3 millions, puis qu'on parle d'une petite municipalité, puis que, dans la vraie vie, tout le monde convient que le projet doit se faire, mais qu'il faut que ça passe par le MAMH... puis vous connaissez le processus mieux que moi, d'autorisation budgétaire, il faut que les autorités gouvernementales aient aussi la chance de s'adapter à la réalité qu'elle va accueillir. Ça fait que, oui, je pense qu'on peut, mais la suggestion de mon patron est excellente, ça pourrait être 90 jours, à moins que la cour prévoie un délai plus long, ou un 60 jours, à moins que la cour prévoie un délai plus long. Mais c'est vraiment important, quand on parle de quelques centaines de milliers de dollars, il n'y en a pas, de problème, mais personne ne va se rendre à la Cour d'appel pour quelques centaines de milliers de dollars. Donc, c'est des dossiers, souvent, où les sommes en jeu sont extrêmement importantes, puis le financement de ces indemnités-là, dans la mesure où on pense que ça doit être acheté, peut être considérable, effectivement, là. Donc, il faut tenir compte de l'ensemble de la mécanique, là.

Mme Guilbault :Et, bien, vous m'amenez... vous dites, sur... Non, en fait, peut-être un dernier point... Vous parliez tout à l'heure... bien, c'est parce que vous dites... Non, attends, c'est parce que j'ai deux idées même temps, je vais commencer par la première parce que c'est vous qui me l'avez amenée. Vous dites : On sait comment ça marche, la machine, l'adaptation. Et tout ça, les processus, et tout ça, ça fait que j'ai envie peut-être de vous demander, puis ça fait suite à l'UMQ, qui vous a précédé : Vous, le six mois d'entrée en vigueur, êtes-vous confortable avec ça, justement, pour des questions d'adaptation?

M. Lepage (Sylvain) : Non. On pense que la loi devrait entrer en vigueur immédiatement.

Mme Guilbault :Parce que ça va amener beaucoup de changements, tu sais, ne serait-ce que les modèles de lettres, les ci, les ça, tout est long et tout est lourd.

M. Demers (Jacques) :Si vous...

M. Lepage (Sylvain) : Oui, allez-y.

M. Demers (Jacques) :Pourtant, on est habitué, dans le monde municipal. On parlerait des schémas d'aménagement qu'on fait au niveau des MRC, puis qu'on met des RCI pour obliger l'application immédiate, particulièrement quand on parle d'environnement, différents dossiers, pour éviter justement ces prolongations-là. Puis un changement, évidemment, ça va avoir un impact, puis, si ça se passe dans six mois, qu'est-ce qui se passe dans ce délai-là? Ce n'est pas... Pour nous, on ne voit pas le besoin. Si on est à faire le changement, il faut l'appliquer. Pourquoi qu'il faudrait qu'il y ait un six mois? Il va servir à qui, ce six mois-là? Nous, on ne le voit pas, là, tu sais, c'est...

M. Lepage (Sylvain) : Moi, si je peux me permettre, la loi pourrait parfaitement prévoir que ce qui s'applique immédiatement, c'est les critères d'indemnisation puis les critères pour déterminer si, oui ou non, il y a expropriation déguisée. Puis on pourrait... vous avez raison, le volet administratif, là, puis toute une série de dispositions du projet de loi pourraient entrer en vigueur plus tard. Vous avez raison, on ne changera pas le papier à lettres du jour au lendemain. Puis je dis papier à lettres, puis c'est très réducteur, on le sait, là, mais, dans la mesure où il y a un juge, mettons, qui va commencer un procès la semaine après l'entrée en vigueur de la loi, qu'ils doivent suivre les nouveaux critères de la loi plutôt que de se baser sur l'ancienne jurisprudence, il n'y a rien qui empêche ce bout-là d'entrer en vigueur immédiatement, là.

Mme Guilbault :Puis, dernier point, vous me disiez tout à l'heure... l'exemple, par exemple, des règlements sur... hydriques puis, donc, finalement, les orientations, puis les besoins, puis tout ce qui est apparu avec les changements climatiques, et tout ça, tout ce qu'on se donne comme cible, comme société. Puis on a eu la COP15, en décembre dernier, avec la signature de l'accord du 30 %, terres et océans, puis tout ça, alors on est tous dans ce mouvement-là.

Avez-vous des exemples concrets de situations où la loi actuelle vous a mis dans des situations... pour vos membres, là, des municipalités, dans des situations intenables, tu sais, un exemple concret, avec un jugement, puis, vraiment, la vraie vie, là?

M. Demers (Jacques) :Non, je n'aurais pas... Bien, il faut s'entendre. La dernière COP, elle n'est pas de si loin. Quand le ministre nous a annoncé qu'on allait protéger 30 % de la biodiversité du territoire... ce n'est pas appliqué encore, cet élément-là. C'est là qu'on voit... Je dis : Bien, il faut le prévoir quelque part s'ils veulent vraiment que le monde municipal embarque là-dedans puis on puisse le faire. Le risque, c'est qu'on parle toujours d'expropriation déguisée, mais ce n'est pas déguisé quand c'est le gouvernement qui dit aux municipalités, là : Il y a 30% de votre territoire qu'on doit protéger. Il n'y a pas de costume pour personne, là. Je pense qu'on est capable de comprendre que cet élément-là, il faut avoir les outils pour l'appliquer.

Mme Guilbault :Pour l'opérationnaliser, exactement. Je vais laisser... merci beaucoup, je vais laisser la parole à mon collègue de René-Lévesque.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci. M. le député de René-Lévesque, vous disposez de 6min 20 s.

M. Montigny : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je vous amène... suite aux questions de Mme la ministre, je vous ramène juste un petit peu, à savoir, sur toute la question environnementale, vous ne jugez pas qu'on devrait, comme c'est...

M. Montigny : ...procédural, là, puis on discute beaucoup d'enjeux, là, les gens qui nous écoutent peuvent voir qu'on est dans le fond du dossier puis on regarde les détails, tout ça, puis il faut faire ça. Et j'ai envie de vous amener sur la question environnementale en disant : Est-ce qu'il n'y a pas d'autres véhicules dans d'autres ministères, notamment l'Environnement, notamment aux Affaires municipales, qui seraient plus appropriés pour faire ça, ou si vous jugez que celui-là est vraiment essentiel pour le faire, puis, si c'est le cas, pourquoi?

M. Demers (Jacques) :Quand on parle d'expropriation, je pensais que c'est avec vous qu'on devait parler de ça. Parce que, quand on parle de protéger 30 % du territoire puis qu'on veut payer ça un juste prix, bien, je pense qu'il faut en parler ensemble. Si on repousse ça à un autre ministère qui va... qui eux nous disent que c'est avec vous qu'on travaille l'expropriation, je ne sais pas de quelle façon, vous allez donner à un autre ministère le droit de faire... Ce que je comprends, du moins, avec les limites, je laisserai maître en parler peut-être mieux que moi, mais, pour moi, on s'est toujours dit que c'était ici que ça se passait. On s'est dit : Bon, bien, il faudrait probablement trouver la façon de l'inclure ou de voir à quel moment vous avez l'intention de l'inclure, parce que c'est une demande officielle qu'on avance vers ça. J'arrête là.

M. Montigny : Si je comprends bien, vous dites : Donnez-nous les moyens pour être capable de le faire, notamment par ce que vous allez mettre en place dans le projet 22, qui va nous donner les moyens d'atteindre ce que vous parlez par rapport aux 30 % d'aires protégées dans vos territoires municipaux.

M. Demers (Jacques) :Ça va prendre ça. Il y a des endroits que ça va être plus facile que d'autres, il y a des grands territoires. Mais là on parle de l'ensemble, là, puis là on va parler de plein d'endroits, là. On est sur un territoire habité. On parle d'un 30 %, là, au sud du Québec, où est-ce qu'il y a des habitations un peu partout. C'est beaucoup, là, quand on dessine un 30 % sur la carte, là, puis vous trouverez la façon de le dessiner, même en étant très imaginatif, sans toucher où est-ce qu'il y a des propriétés privées, mais c'est que ça qu'on va trouver partout sur le territoire. Est-ce qu'on va avoir les moyens, de toute façon, de façon collective, d'arriver à ça? Puis, en même temps, je pense qu'on a un besoin, collectivement, d'y arriver. Le but est là, bien, il faut l'atteindre, il va falloir se donner les outils. C'est pour ça qu'on voulait l'amener dès aujourd'hui.

M. Montigny : Je veux vous amener sur un autre terrain avant la fin, il ne reste presque plus de temps, trois minutes. Le monde municipal demande qu'une réforme de la loi soit faite depuis vraiment plusieurs années. J'en étais témoin d'ailleurs de l'interne, là. Quel effet, vraiment... Parce qu'on a parlé beaucoup de procédures, puis tout ça, puis plus techniques, là, ça fait que je vous l'amène plus large, là.  Quel effet aura, vraiment, cette réforme-là sur vos projets municipaux, mais aussi sur vos finances municipales comme municipalité?

M. Demers (Jacques) :C'est toujours dur dire... Là, on pourrait croire que ça va régler plein d'affaires. On va le voir à l'usure : Est-ce que ça va être contesté? Qu'est-ce qui va se passer? Aujourd'hui, je ne le sais pas, mais je peux vous dire que la problématique qu'on a aujourd'hui, c'est souvent des surévaluations de terrain. On voit bien que les gens considèrent que la valeur de ce terrain-là, il faut qu'ils considèrent leurs revenus qu'ils auraient, d'avoir bâti, d'avoir fait des routes, d'avoir mis des infrastructures. Il n'y a rien présentement sur le terrain. Mais, dans les évaluations, quand on regarde tout ce qui est inclus à l'intérieur de ça, on se dit : Voyons, ça n'a pas d'allure. Il n'y a personne qui a dépensé tout cet argent-là. Mais si on veut l'acquérir, les juges vont considérer qu'il faut payer tous ces éléments-là. C'est beaucoup trop.

Puis je pense que le citoyen a besoin de voir le côté déraisonnable de ce qui se paie présentement là-dessus, c'est ce qu'on essaie de protéger. Mais des choses déraisonnables, il ne faut pas le devenir non plus l'autre bord.  Moi, de l'expropriation, je suis de ceux qui disent : Faisons attention, là, parce que c'est quand même un mot fort. Il ne faut pas se retrouver puis dire : C'est des bulldozers. Puis, maintenant, on a décidé qu'on fait quelque chose, on donne des droits d'exproprier. Je pense qu'il va avoir une façon puis un rôle important au monde municipal de dire qu'est-ce qu'on exproprie, de quelle façon, puis, de façon collective, il faut protéger. Mais je pense qu'on n'a pas le choix d'avancer de ce côté-là, puis d'aller plus loin parce qu'il y a vraiment de l'exagération. De l'autre côté, on a payé des sommes, juste du fait qu'on n'avait, on ose dire, on n'avait pas le choix. Puis moi de donner cette réponse-là, je pense qu'on a toujours des choix, mais, des fois, il y a des conséquences.

• (12 h 50) •

M. Montigny : Il me reste-tu encore un peu de temps?

La Présidente (Mme Maccarone) : Une minute 20.

M. Montigny : Une question bien, bien simple. Sur la question du mot «probable», je veux vous entendre là-dessus, je n'ai pas  beaucoup de temps, le mot «probable», c'est dans votre mémoire.

M. Lepage (Sylvain) : Quel article, monsieur?

M. Montigny : Vite, vite là...

M. Montigny : ...l'usage probable. Toute la question de l'usage probable que vous avez mis dans votre mémoire. Je voulais sauver du temps. Je suis désolé.

M. Lepage (Sylvain) : Oui, oui. Non, non, mais je m'excuse, je ne maîtrise pas non plus par cœur, mais... Oui, quelle est votre question sur l'usage du mot probable, là?

M. Montigny : Bien, en fait, vous proposez quoi d'autre comme autre mot si vous voulez qu'on remplace le mot d'usage probable?

M. Lepage (Sylvain) : Bien, je dirais... Je vous répondrais «usage envisagé». Tu sais, si vous avez acheté un terrain avec un usage clairement envisagé, puis je vous empêche de le faire, mais vous êtes capable de démontrer que cet usage-là que vous aviez envisagé, bien, vous l'aviez prévu, votre projet. Un usage probable, ça nous semble beaucoup trop large parce que vous... on peut... avec le même terrain, on peut tous avoir une idée quelconque de ce qu'on veut faire. Bon, c'est probable. Je pense que c'est ce qui... qu'est-ce que le promoteur ou qu'est ce que le propriétaire avait envisagé. Je donne un exemple, je l'ai déjà d'ailleurs donné à certains sous-ministres, j'ai une terre à bois, je m'en sers pour bûcher. C'est un... c'est un usage envisagé. Je peux vous inviter sur ma terre la fin de semaine, j'y vais régulièrement. Je l'ai pas prévu faire un développement... Ah! puis...

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci.

M. Lepage (Sylvain) : ...probable qu'il serait trop large, là.

La Présidente (Mme Maccarone) : C'est parfait. Nous allons maintenant procéder avec l'opposition officielle. M. le député de l'Acadie, la parole est à vous.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup pour votre témoignage et votre... et votre mémoire. J'ai quelques questions pour vous. Je veux vous dire d'emblée, désolé, je ne resterai peut-être pas jusqu'à la fin. J'ai un débat de fin de séance au salon bleu. Donc, je vais devoir quitter. Ce n'est pas par manque d'intérêt ou par manque de respect, bien au contraire, mais je tenais à vous le souligner.

J'ai une question qui est qui est plus large parce que je comprends que la Fédération québécoise des municipalités, au fond, vous représentez un ensemble important de municipalités au Québec, dans toutes les régions. Je ne me trompe pas. Et le projet de loi actuel, bon, modernise le droit en matière d'expropriation, établit des critères qui sont beaucoup plus stricts. Puis le fait que, quand on parle, entre autres à l'article 10, de l'indemnité, puis qu'on fait référence à la valeur marchande du droit, il est très probable que ça va coûter moins cher aux municipalités. Est-ce qu'on peut faire ce constat-là?

M. Demers (Jacques) :Le mot «moins cher», pour moi, n'est pas adéquat dans ce cas là, parce que ce qu'on veut payer, c'est le juste prix, qu'on pense que présentement ce n'est pas ça qu'on paie. Puis, je pense, j'espère que la loi va rester assez juste pour que le propriétaire ait un juste prix pour son terrain. Tu sais, ce n'est pas de payer moins cher, c'est que ça n'a pas de bon sens ce qu'on paie présentement. En supposant qu'il va se passer tellement de choses lucratives sur ce terrain-là, à toutes les fois, là, c'est une manne. Si tous les terrains seraient aussi payants que ce qu'ils proposent à l'intérieur de tout ça, ça serait incroyable, la valeur de nos terres au Québec, là.

M. Morin : O.K. Maintenant, ma question est la suivante. Compte tenu des paramètres de la loi, compte tenu de la valeur marchande, est ce que vous ne craignez pas... Parce que, bon, évidemment, il y a des promoteurs qui vont lire ça, là, évidemment, là, et puis des promoteurs au Québec, puis il y en a à l'extérieur du Québec. Est-ce que vous ne croyez pas que ça pourrait diminuer l'attractivité du Québec pour certains promoteurs qui vont préférer aller ailleurs parce qu'ils vont aussi dire : Bien, écoutez, si les municipalités ont ce pouvoir-là, puis qu'on a juste ça comme montant, puis que, nous, on va faire du développement, bien, on risque de perdre trop?

M. Demers (Jacques) :D'abord ces promoteurs là, s'ils se promènent au Québec, ils vont voit qu'on a des schémas d'aménagement. Chacun des territoires a des schémas. On sait déjà où est-ce qu'on va se promener, dans quel territoire, s'il y a des terrains en réserve. Ces choses-là, c'est tout inclus à l'intérieur du schéma. Ça fait que je ne pense pas que c'est une grande surprise, là, qu'on va retrouver à l'intérieur de ça. C'est juste quand on veut l'appliquer, le schéma, puis on veut avancer, c'est là qu'on trouve des problématiques la plupart du temps. C'est rare que c'est toujours du jour au lendemain, on va dire : Woups! finalement, un promoteur ou quelqu'un de l'extérieur venait acheter un terrain puis c'est celui-là qu'on veut. Si cette personne-là s'est informée, il sait déjà qu'est-ce qui est le but de ce terrain-là, qu'est ce qu'il a comme zonage, qu'est ce qu'il a comme permission. Puis il sait que s'il décide de changer le zonage, il y a tout un processus. Puis ce qui est bien au Québec, c'est que la population peut se prononcer quand on change ces zonages-là. Ça fait qu'on ne laisse pas à un groupe, on ne laisse pas même à quelques élus changer ces choses-là. Ça fait que de là à dire, bien là, quand la population... quand, de façon collective, on a besoin d'un terrain ou d'un espace, bien, c'est de pouvoir avancer et de le payer à un juste prix, c'est vraiment le but.

M. Morin : Parfait. Je vous remercie. Vous avez fait référence tout à l'heure au pourcentage du territoire québécois qui va devoir être protégé...

M. Morin : ...donc, évidemment, pour les villes, vous n'avez pas le choix, vous devez évidemment suivre ces décisions-là. Forcément, ça va toucher des endroits où il y a des bâtiments qui sont construits déjà, où il y a des propriétaires, est-ce qu'on s'entend là-dessus? Ça risque d'entraîner pour vous un exercice qui va vous amener éventuellement à faire des expropriations.

M. Demers (Jacques) :Aujourd'hui, on pourrait le penser. J'ai hâte de voir quand on va parler de biodiversité, puis on va... on peut voir ce qui se passe sur la planète, on peut voir dans d'autres pays qui considèrent avoir protégé des endroits où est-ce que l'humain peut se retrouver quand même. De protéger la biodiversité ne veut pas nécessairement parler de la cloche de verre. Ça fait que moi, c'est ça que j'ai hâte de voir, les paramètres dans ce 30 %-là. Parce qu'un endroit qui... une municipalité qui a un périmètre urbain avec des constructions, on devrait être d'accord avec vous puis dire : Bien, si déjà c'est construit, il faut enlever 30 % de ce qui est construit parce que là on ne fait plus rien. Je ne pense pas que c'est ça le but. On va regarder ce qui est l'objectif du 30 % de la biodiversité, de quelle façon on peut l'adapter, comment on peut faire que ces endroits-là font partie aussi de l'effort collectif pour éviter les changements climatiques qui sont énormes présentement, là.

M. Morin : Absolument. On est tout à fait d'accord là-dessus, puis il faut effectivement s'en occuper. Je vous remercie.

Si on regarde votre mémoire comme tel, à la page quatre, vous dites que la loi 22 ou le projet de loi n° 22 n'apporte pas de solution en matière de conservation des milieux naturels. «La FQM tient à réitérer au gouvernement l'urgence de proposer une solution législative claire en regard des enjeux liés à l'exercice des pouvoirs réglementaires municipaux visant la protection et la conservation des milieux naturels.» Mais vous n'élaborez pas davantage. Donc, dans le but, évidemment, de bonifier n'importe quel type de législation, avez-vous des recommandations là-dessus?

M. Lepage (Sylvain) : Ce qu'on souhaite éviter, puis ça rejoint un peu la question précédente de M. le député, là, c'est qu'il y ait un écart entre le moment où des nouvelles normes, par exemple en matière d'inondation, entrent en vigueur, et ces dispositions-là.

Nous, ce qu'on souhaite, c'est que, clairement, puis on a laissé entendre ça pouvait être un autre ministère qui le fasse, mais on pense que le bon projet de loi, c'est celui-là, clairement, lorsqu'une MRC ou une municipalité adopte une réglementation en réponse à une exigence gouvernementale, on ne puisse pas prétendre à une expropriation déguisée. Le meilleur exemple, c'est les inondations. Il y a plein de fermes au Québec qui font de l'agriculture sur des territoires qui vont... sont inondables, peuvent être inondées, puis on va souhaiter que certaines choses ne se passent plus là, on ne veut pas se retrouver avec des poursuites judiciaires en disant : Bien là, vous m'avez empêché de faire un, deux, trois, quatre, donc je suis dans ma zone inondable, donc c'est une expropriation déguisée. Alors, on pense qu'on devrait profiter de l'occasion pour dire : Ne peut notamment pas être une expropriation déguisée. On vous a dit c'est quoi, on va vous dire ce que ce n'est pas, c'est quand une MRC ou une municipalité applique de bonne foi une exigence gouvernementale.

M. Morin : Parfait. Je vous remercie. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Maccarone) : On poursuit nos échanges avec la deuxième opposition. M. le député de Taschereau, vous disposez de 3 min 30 s.

M. Grandmont : Oui, Mme la Présidente. Il y a du temps résiduel, je ne sais pas si, avec le consentement, on ne pourrait pas m'accorder ces minutes.

La Présidente (Mme Maccarone) : Vous avez tout à fait raison. Et vous vous disposez de 6 min 30 s à peu près.

M. Grandmont : Excusez-moi. Voilà, Merci beaucoup. M. Lepage, M. Demers, merci pour votre présence et votre mémoire. On a un peu plus de temps. Donc, je vais y aller d'abord avec votre recommandation numéro 5 qui est un peu en lien avec ce que je disais tantôt, là, puis je pense que vous l'avez bien souligné vous-même, là, vous êtes à quelque part au premier... au front, en fait, puis pénalisés par des poursuites alors que vous ne faites qu'appliquer des dispositions qui sont en concordance avec les orientations gouvernementales. Donc, il y a quelque chose là-dedans qui est un petit peu... vous êtes pénalisés, finalement, pour faire votre travail, qu'on vous demande en haut lieu d'effectuer, tu sais. Vous dites, bon : «Le législateur s'assure de pouvoir attribuer aux municipalités par la loi de régir, de prohiber tous les usages n'ayant pas un effet expropriant automatique lorsque l'objectif n'est pas... est la protection de l'environnement. Vous dites : «N'a pas nécessairement un effet expropriant automatique». Donc, est-ce qu'il y a des usages pour lesquels, dans le fond, cette disposition-là finalement ne serait pas applicable, est-ce qu'il y a déjà des... est-ce qu'il y a des dispositions, finalement, des cas dans lesquels cette recommandation-là ne s'appliquerait pas?

• (13 heures) •

M. Lepage (Sylvain) : À proprement parler, je ne vois pas dans quels cas elle pourrait ne pas s'appliquer, là, dans ce sens...


 
 

13 h (version non révisée)

M. Lepage (Sylvain) : ...ce que ce que l'on souhaite, je le répète, c'est qu'il soit clair que... lorsque l'on adopte des normes et des règlements dans le but de répondre à une exigence gouvernementale, il doit être clair que ce n'est pas de l'expropriation déguisée. Alors, évidemment, dans la mesure où on restreint, là, l'application de cette norme-là à ce que je viens de vous décrire, bien, ça s'applique à toutes les normes où on oblige une municipalité à adopter certaines normes, là, tu sais.

M. Grandmont : Je voulais juste être sûr parce que, de la façon que c'est écrit, «un effet expropriant automatique» dans ma tête, a laissé entendre qu'il y a peut-être des moments ou des cas dans lesquels, finalement, ça continue de s'appliquer quand même. Par exemple, peut-être une expropriation de mauvaise foi, par exemple. J'imagine qu'il y a des cas très exceptionnels dans lesquels ça pourrait arriver.

M. Lepage (Sylvain) : On peut toujours imaginer... Vous savez que les tribunaux font, de façon générale, là, un contrôle de la mauvaise foi, ça fait qu'on peut toujours imaginer un scénario un peu cauchemardesque où, moi, je veux prendre votre terrain et je prends prétexte, entre guillemets, de la norme gouvernementale pour faire un certain nombre de choses. Mais, habituellement, à ma connaissance, les tribunaux ont toujours compétence pour dire : Écoutez, on prétend que c'est ça, mais on m'a fait la preuve que ce n'est pas une situation comme celle-là. Alors, évidemment, nous, ce qu'on soulève, c'est lorsque... Mais comprenez-vous que, dans le cas d'une MRC, il y a un conseil des maires avec, par exemple, 12 ou 14 maires qui décident d'adopter un règlement. C'est difficile de penser que les 14 se sont mis d'accord pour vous exproprier de façon déguisée dans le but de partager le butin un peu plus tard. Vous comprenez ce que je veux dire, là? C'est à peu près... Rien n'est impossible, mais ça me semble pas mal peu peu probable.

M. Grandmont : Parfait. Excellent. C'est une recommandation que je trouve très intéressante. Peut-être revenir sur l'intervention de mon collègue... le mot en «p», là, le mot «probable», là... Est-ce qu'on pourrait utiliser un autre mot en «p» puis utiliser... vous avez utilisé «envisagé». Peut-être «prévu»? Un usage prévu, est-ce que ça serait peut-être un petit peu plus fort puis... c'est un petit peu plus engagé?

M. Lepage (Sylvain) : «Pourrait être prévu». Nous, ce qu'on souhaite, là, c'est que qu'on tienne compte du fait que vous avez acheté un terrain pour vous bâtir une maison, pour construire un centre d'achat, puis que vous l'avez acheté pour ça, puis la preuve établit que c'est pour ça. C'est parfait. Si vous dites : Ah! Mais il aurait aussi pu construire une tour de 35 étages que... dont personne n'a jamais entendu parler ou peu importe, bien, ça nous... le mot... «probable», pardon, nous semble trop large. C'est essentiellement ce que l'on dit.

M. Grandmont : Parfait. Mais vous seriez à l'aise avec un mot plus fort?

M. Lepage (Sylvain) : Puis, c'est encore plus vrai lorsqu'on parle d'un terrain qui a été acheté il y a 15 ans ou il y a 20 ans par rapport à un terrain qui a été acheté aujourd'hui, là, tu sais.

M. Grandmont : parfait. Peut-être une dernière question, là. Qu'est-ce que vous diriez si on introduisait l'idée qu'à partir d'un Moment où un propriétaire affirme que son terrain vaut... Je donne des chiffres au hasard, là, mais affirme 400 millions de dollars, alors que le rôle municipal, lui, dit que c'est 40 millions de dollars, mais que vous, vous puissiez déjà taxer sur la valeur appréhendée par le propriétaire? Vous comprenez ce que je veux dire?

M. Lepage (Sylvain) : On est toujours heureux, je pense. Je pense que mes patrons seraient heureux d'avoir la possibilité de taxer là-dessus. Il faut faire attention aussi quand même de ne pas entrer dans l'hyperbole, là. J'ai un de mes anciens patrons qui a pris sa retraite, qui me contait toujours l'histoire des érablières, là, qui, quand on les taxe, ne valent pas grand-chose. Puis, quand lui-même offrait aux propriétaires d'acheter à la valeur de l'évaluation, la terre en question, le propriétaire ne voulait jamais. Alors, oui, ça pourrait être une mesure, mais ça me semble être une mesure, en toute honnêteté, un peu extrême, là.

M. Grandmont : Extrême, mais qui pourrait avoir quand même peut-être un effet dissuasif?

M. Lepage (Sylvain) : Ah! un effet très dissuasif. En fait, je pense qu'on arrêterait immédiatement l'expropriation puis on dirait : parfait, on va collecter sur 400 millions pendant les 20 prochaines années, à ce prix-là, on va acheter un autre terrain avec votre argent, tu sais.

M. Grandmont : Ça fait que, pas fermés, finalement?

M. Lepage (Sylvain) : On est ouverts à toute bonne suggestion.

M. Grandmont : Parfait. Excellent. Est-ce qu'il me reste un petit peu de temps, je pense, hein?

La Présidente (Mme Maccarone) : Oui, 1 min 30 s

M. Grandmont : Vous êtes très efficace. Merci beaucoup. Les délais de jugement, je veux juste revenir là-dessus, là. Je comprends bien, là, passer de 30 jours à 120 jours, je comprends que vous défendez vos membres. Puis je l'entends très, très bien, l'idée, là, que les petites... les plus petites municipalités ont... tu sais, c'est plus compliqué, puis on a besoin de délais un peu plus grands. Est-ce que vous trouvez que c'est balancé par rapport avec ce que d'autres acteurs pourraient venir... Ici, on a entendu l'UMQ tantôt, les grandes municipalités, ce n'est pas la même réalité?

M. Lepage (Sylvain) : Oui. Je me permettrais de vous dire que ce n'est pas tant de défendre nos membres que de défendre une mécanique qui doit pouvoir fonctionner. Si on met en place un système qui devient... la vraie vie ne correspond pas à ça, personne n'est gagnant là-dedans, ni les municipalités, ni le gouvernement, ni même les promoteurs. Donc, il faut que ce soit à partir d'un jugement final. Puis il faut que, raisonnablement, tant du côté municipal que du côté gouvernemental, les gens soient confortables de dire : on peut s'organiser dans ce délai-là.

Vous savez, un jugement qui est rendu le 31 juillet, pas mal plus compliqué de se revirer de bord, même quand tout le monde veut travailler très fort. Je peux appeler le sous-ministre au MAMH, généralement...

M. Lepage (Sylvain) : ...il y en a un dans les trois qui remplace l'autre, parce qu'il y en a un qui prend des vacances. Même chose au niveau... vous le savez, là, même chose de l'Assemblée nationale. Donc, nous, on va être confortables avec un délai raisonnable qui permet à tous les acteurs de se revirer de bord puis de régler le problème, puis de prendre une décision éclairée.

M. Grandmont : ...pour votre intervention.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup, M. Demers, merci beaucoup, Me Lepage, pour la contribution à nos travaux.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 14 h.

(Suspension de la séance à 13 h 07)


 
 

14 h (version non révisée)

(Reprise à 14 h 02)

La Présidente (Mme Maccarone) : Alors, bonjour à tous. La Commission des transports et de l'environnement reprend ses travaux. Avant de poursuivre les travaux, je dois vous demander le consentement que le collègue de Notre-Dame-de-Grâce reprend sa place comme membre de la commission. Est-ce qu'il ya le consentement? Merci.

Alors nous poursuivons les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 22, loi concernant l'expropriation. Cet après-midi, nous entendons les organismes suivants : la Ville de Montréal, la Communauté métropolitaine de Montréal et la Communauté métropolitaine métropolitaine de Québec.

Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de la Ville de Montréal, Mme Dominique Ollivier, présidente du comité exécutif, et M. Robert Beaudry, membre du comité exécutif, responsable de l'urbanisme, de la participation citoyenne et de la démocratie. Bienvenue chez vous. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Après quoi, nous procéderons à la période d'échanges avec les membres de la commission. Alors, je vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre exposé.

Mme Ollivier (Dominique) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, Mme la ministre, Messieurs, Mesdames les députés. Alors, ça nous fait grand plaisir d'être ici, et on vous remercie d'avoir convié la métropole aux présentes consultations et aux auditions publiques. Je suis accompagnée de mon collègue, M. Robert Beaudry, comme vous l'avez dit, qui est responsable notamment de l'urbanisme.

Et on est vraiment très heureux de prendre part aux présentes consultations entourant le dépôt du projet de loi n° 22, Loi concernant l'expropriation. Comme chacun d'entre vous le savez très bien, les enjeux qui sont liés aux expropriations influencent directement la réalisation de projets d'utilité publique d'envergure tels que le développement de transports... de réseau de transport collectif, le logement social ou communautaire, l'amélioration d'infrastructures stratégiques, nos milieux de vie, nos parcs, et ainsi de suite. Ceux-ci revêtent une importance vraiment capitale pour la métropole québécoise. Et ce très bon projet de loi vient codifier et préciser une mécanique centrale au processus d'expropriation, donc on en est très satisfaits. Et notre propos d'aujourd'hui a pour objectif de rappeler la portée éminemment concrète pour nous et les bienfaits collectifs qui sont générés par cette importante réforme.

Si la Ville de Montréal demande, depuis des années, que la présente loi soit modifiée afin d'apporter des changements significatifs, c'est d'abord et avant tout en ayant le souci d'améliorer les espaces publics et le bien-être de la collectivité. Je crois que le gouvernement du Québec a bien entendu le message de la métropole et manifestement, si on se fie au projet de loi qui est devant nous, y souscrit lui aussi. Les aménagements qui sont apportés par le projet de loi n° 22 vont contribuer à rendre plus accessibles plus rapidement les projets d'aménagement du territoire portés par la ville et viendront appuyer la mise en œuvre des orientations gouvernementales en la matière.

Je vous le rappelle rapidement, la loi actuelle qui avait été adoptée en 73 avait sérieusement besoin d'une mise à jour puisque son application posait d'importants problèmes. D'abord, ça entretenait un système où l'acquisition d'un immeuble par expropriation coûtait plus cher que l'acquisition de gré à gré, et ce, dans un contexte où les pouvoirs publics expropriants étaient dans l'impossibilité d'en prévoir le coût final. C'était en grande partie dû au fait que les délais étaient démesurément longs au point de vue... au point parfois de remettre en question le développement même de certains projets. Et ça, c'était vraiment une situation insoutenable.

Pour une municipalité, l'encadrement des mécanismes d'indemnisation a des conséquences bien concrètes. Ça signifie que les budgets reliés à l'expropriation deviennent prévisibles et moins susceptibles d'être augmentés en cours de processus. Et vous en conviendrez, à l'heure où les finances publiques subissent des pressions de toutes parts, que le taux d'endettement des municipalités est important et où la capacité de payer des citoyens atteint largement sa limite, bien, c'est une mesure qui arrive à point nommé.

C'est un projet de loi qui répond aux attentes de la Ville de Montréal en permettant une meilleure prévisibilité des coûts, en générant des économies significatives pour les contribuables, en raccourcissant les délais de prise de position et en accélérant la mise en œuvre de grands projets structurants qui vont être aussi conformes aux orientations gouvernementales en aménagement du territoire et en phase avec nos outils de planification qu'on adopte démocratiquement, tel le PMAD, par exemple, de la...

Mme Ollivier (Dominique) : ...Métropolitaine de Montréal et les schémas et les plans d'urbanisme montréalais.

C'est un projet qui s'avère plus complet, plus précis, mieux structuré que le cadre législatif qui est actuellement en vigueur et qui définit des concepts clés en plus de détailler la marche à suivre pour les recours de mise en réserve et d'expropriation. Et ceci, comme je le disais tout à l'heure, va nous permettre de mieux anticiper et de mieux planifier.

Je pense qu'il est important de souligner que l'esprit du projet de loi n° 22 reste sensible au fait qu'aucune administration publique responsable n'apprécie de devoir entamer une procédure d'expropriation auprès d'un citoyen. Et ces démarches-là sont toujours, à Montréal du moins... Toujours réalisées dans le respect, avec sensibilité et avec la plus grande circonspection, en gardant en tête l'ampleur du choc et parfois le désarroi que ça peut représenter pour une famille ou une entreprise qui est affectée.

Alors, nous saluons la volonté du gouvernement d'encadrer les modalités associées à ce type de procédure dans la perspective de la rendre plus juste et plus équitable pour tous.

Nous avons deux recommandations et je cède la parole à mon collègue, M. Beaudry, pour vous en expliquer la teneur.

M. Beaudry (Robert) : Merci beaucoup, Mme Ollivier. Donc, effectivement, la Ville de Montréal accueille avec grand intérêt la révision proposée à l'égard des mécanismes de calcul de... L'indemnité, pardon, définitive. En balisant l'indemnité définitive dans le texte de loi plutôt que d'en faire un droit jurisprudentiel comme c'est le cas actuellement, chaque citoyen exproprié, représenté ou non par un avocat, aura droit à une indemnité établie en vertu des mêmes principes.

La situation sera donc désormais plus équitable pour tous. Un tel système favorisera la conclusion des règlements plus justes, idéalement hors cour, et évitera d'enrichir à outrance un individu qui souhaite tirer profit de la réalisation d'un projet à vocation collective. C'est ce que nous souhaitons tous, évidemment.

Fonder l'indemnité sur la valeur marchande de l'immeuble exproprié plutôt que sur la valeur au propriétaire, comme c'est le cas actuellement, permettra une meilleure uniformité des indemnités pour dommages ainsi qu'une plus grande équité pour les expropriés. Pour la Ville de Montréal, il s'agit là de mesures de gestion responsables. Elles constituent des avancées importantes.

Autre élément important, le projet de loi permet désormais à l'expropriant d'effectuer certains travaux préparatoires sans intervention des tribunaux. Pour la Ville, qui doit composer avec un passé industriel lourd et une densité élevée, une telle mesure permettra de mieux connaître en amont les composantes physiques du lot visé et, par exemple, anticiper le degré de contamination du sol et sa capacité portante. Il s'agit d'une excellente avancée.

La métropole salue également la volonté du gouvernement de corriger certaines aberrations en venant notamment exclure l'indemnisation de la valeur résultant d'une activité illégale ou encore l'augmentation de la valeur occasionnée par l'annonce publique d'un projet de l'expropriant.

Le projet de loi maintient la possibilité pour un citoyen de contester un avis d'expropriation. La Ville de Montréal est satisfaite de constater qu'un tel recours ne suspend plus automatiquement la procédure d'expropriation. Il s'agit là d'un pas dans la bonne direction, bien que nous ayons hâte de connaître les circonstances où la cour autoriserait une telle suspension.

La Ville de Montréal accueille avec ouverture les nouvelles exigences et procédures légales prévues au présent projet de loi. Il va de soi que nous devons, nous aussi, faire notre part et mieux anticiper les besoins d'acquisition afin de mieux préparer les dossiers avant d'entreprendre une procédure d'expropriation. Cela requiert davantage de rigueur, de transparence, d'arrimage avec les différentes parties prenantes. Une meilleure préparation et une meilleure compréhension des projets sont au cœur des pratiques de saine gestion, et nous sommes disposés à améliorer nos pratiques, si cela s'avère nécessaire.

En revanche, la Ville de Montréal s'interroge sur la pertinence de la disposition prévue à l'article 35, laquelle prévoit que tout désistement de la part d'une municipalité requiert qu'une décision du Tribunal administratif du Québec soit homologuée par une décision de la Cour supérieure. Dans le contexte montréalais, une telle mesure occasionnera assurément des délais inutiles.

En conclusion, je nuancerais notre propos puisque deux modifications apparaissent également nécessaires afin de rendre la présente réforme plus complète et mieux adaptée aux besoins de la collectivité.

D'abord, la Ville reconnaît la nécessité que l'expropriation déguisée soit encadrée par des dispositions législatives. Par ailleurs, des clarifications importantes doivent impérativement être apportées aux éléments relatifs aux expropriations déguisées dans la perspective de reconnaître la volonté des pouvoirs publics de développer ou de protéger des territoires pour le bien commun.

• (14 h 10) •

Il demeure pour nous incompréhensible qu'un acte municipal, adopté conformément au pouvoir habilitant prévu dans la loi et sans mauvaise foi de la part de l'administration, puisse être considéré comme étant une expropriation déguisée. Par sa nature même, un acte ou un règlement municipal valide ne devrait pas donner ouverture à un tel recours, et ce, même s'il y a un effet de dépossession d'un droit sur un immeuble ou qu'il supprime un usage. Le zonage légalement adopté constitue une limite inhérente au droit de propriété.

Par conséquent, la Ville de Montréal recommande au gouvernement de retirer la disposition relative aux articles 170 et 161 du projet de loi n° 22, tout en entamant rapidement la réflexion au sujet de la codification de l'expropriation déguisée afin qu'elle soit approfondie et que...

M. Beaudry (Robert) : ...nouvelles dispositions soient incluses dans les lois municipales à cet égard. Il serait également judicieux de prévoir qu'aucune indemnité ne puisse être accordée si l'acte municipal est adopté conformément à la loi et qu'il est réalisé dans l'intérêt du public, conformément aux outils d'urbanisme en vigueur ou en réponse à des circonstances qui le justifient, telle la sécurité publique. De telles mesures visent notamment à rendre opérantes les actions municipales visant la protection des milieux humides et hydriques, la mise en valeur des milieux naturels ou encore afin de limiter l'étalement urbain.

Enfin, la ville de Montréal est à ce point satisfaite de ce projet de loi et elle croit suffisamment à ses effets positifs pour demander que sa date d'entrée en fonction soit celle de sa sanction, particulièrement en ce qui a trait aux indemnités. Nous souhaitons nous en servir le plus rapidement possible et ainsi la rendre applicable à tous les dossiers actifs. Évidemment, puisqu'il s'agit d'une réforme d'envergure, nos experts ont d'autres commentaires d'ordre technique qu'ils vous formuleront par la suite. Et je vous propose, Mme la ministre, que ces questions soient échangées entre nos équipes respectives.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup, M. Beaudry, Mme Ollivier, nous allons procéder aux périodes des échanges. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Guilbault :Oui, merci beaucoup. Bienvenue à Québec dans notre capitale. Je ne sais pas si vous restez aussi pour le Sommet sur l'itinérance. Le hasard fait que je rencontre Mme Plante demain ici, à Québec, d'ailleurs, qui va être chez nous aussi. Alors donc, bienvenue, un plaisir de vous retrouver. On se croise souvent dans toutes sortes de circonstances. Et merci pour votre exposé. Merci pour le mémoire, merci pour les réflexions, de nous partager des choses éclairantes.

Je pense que je vais commencer par les articles 170, 171. Vous êtes le troisième groupe. On a débuté les consultations ce matin et on a eu l'UMQ et la FQM qui tous les deux non seulement étaient heureux de trouver quelque chose, même si ce n'est pas aussi explicite et aussi affirmé, peut-être, que ce qu'ils souhaiteraient sur les expropriations déguisées, mais au moins l'introduction des articles 170 et 171. Et vous, à l'inverse, vous proposez de les retirer et de régler ça d'autre part, ou autrement peut-être par d'autres lois, peut-être la LAU, peut-être à l'Environnement.

Est-ce que vous pourriez nous préciser, par exemple les véhicules? Parce que... Puis, tu sais, ici, puis je ne l'ai peut-être pas dit, là, il n'y a personne qui a prétendu que ce projet de loi là allait être un miracle ou une panacée et régler tous les problèmes que les municipalités peuvent rencontrer dans l'atteinte des objectifs du 30 %, dans le développement des projets d'infrastructure, etc. Mais donc, avez-vous une réflexion achevée là-dessus? Avez-vous des idées concrètes, dans quelle loi, de quelle façon est-ce que vous pourriez atteindre les mêmes objectifs qui sont souhaités par d'autres?

M. Beaudry (Robert) : Oui, absolument, Mme la ministre. En fait, déjà, pour nous, c'est important et c'est vraiment fondamental que ce soit dans tous les cas, peu importe que ce soit gardé, modifié ou retiré et retravaillé, de un, arriver rapidement, qu'on puisse traiter cette question-là pour s'assurer que, quand c'est fait selon les pouvoirs habilitants d'une municipalité, il n'y ait pas de contestation possible, qu'on ne puisse pas ouvrir la porte.

Dans la LAU, bien évidemment, il faut que ça se trouve, mais aussi pour Montréal, sur la Loi sur les cités et villes. Après, on pourrait vivre avec le fait que ça se retrouve à l'intérieur de ce projet de loi ci, mais il faudrait très clairement indiquer que les pouvoirs habilitants des municipalités ne peuvent pas être contestés à ce moment-ci. Nous, l'enjeu, c'est vraiment un enjeu de temps parce qu'entre le moment où il y aura sanction de la loi puis le moment où on va retravailler ça, il y a des dossiers en cours. Donc, il faut éviter toute possibilité de poursuite par des éléments qui sont de bonne foi et qui sont dans la loi du Québec, dans tous les cas, la limite du droit de propriété étant celle des pouvoirs habilitants des différents gouvernements, dont ceux des municipalités.

Mme Guilbault :Puis néanmoins le fait, quand même, qu'on ait introduit les articles 170, 171 puis qu'on limite au moins à trois ans, est-ce que, déjà, ce n'est pas, selon vous, une belle avancée par rapport en ce moment où tu peux décider d'invoquer l'expropriation déguisée 15 ans, 20 ans après?

M. Beaudry (Robert) : C'est qu'on garde la possibilité d'avoir des méthodes dilatoires qui permettraient de faire durer des processus, ce qui est contre la nature même du projet de loi qui veut justement nous éviter des délais beaucoup trop longs pour finalement faire sauver de l'argent au public. Et encore une fois, on est de bonne foi. Des fois, même, ce sont des mesures qui sont demandées par le gouvernement du Québec. Je prends par exemple le plan de protection pour les milieux hydriques et humides. On ne voudrait pas, dans un délai qui est très, très court, qu'on doit actuellement... D'ailleurs, il y a eu un report. On vous en remercie, mais qu'on doit appliquer ces mesures-là sur le territoire, de se trouver avec une épée de Damoclès où on pourrait prétendre que c'est de l'expropriation déguisée. On pense que, quand c'est fait de bonne foi dans les pouvoirs habilitants, ça peut être très clair. Ça peut être indiqué dans le projet de loi, puis on peut venir ensuite le définir dans la LAU, puis dans la Loi sur les cités et villes.

Mme Guilbault :Puis je vous amène, vous avez mentionné, à juste titre, je crois, c'est pour ça qu'on l'a prévu dans le projet de loi, sur la suspension. Actuellement, quand il y a une procédure de contestation, tout est suspendu, et là on donne la possibilité au moins de continuer d'avancer sur des travaux préparatoires. Vous donniez l'exemple, au moins pour aller voir la capacité portante, le niveau de contamination, des choses qui, après ça, peuvent nous aider...

Mme Guilbault :...peuvent nous aider de continuer d'avancer même si on respecte, par ailleurs, la procédure qui est en cours. Est-ce que vous avez des exemples en ce moment... Puis Dieu sait qu'à Montréal c'est probablement là qu'il a le plus de projets, entre autres, de transports collectifs mais beaucoup de projets d'infrastructure. Avez-vous des exemples concrets, en ce moment, de projets soit qui ont déjà été complétés et qui auraient été complétés plus vite ou qui sont en réalisation ou en cours de tentative de réalisation et qui pourraient avancer plus vite? Ça peut déborder le transport, ça peut être du logement, et tout ça. Parce que cette loi-là est aux Transports, mais on comprend bien qu'elle sert à exproprier de manière générale pour des infras en général. Avez-vous des exemples concrets, dans la métropole, de projets qui seraient livrés plus vite pour nos citoyens si on avait la loi actuelle?

Mme Ollivier (Dominique) : ...plusieurs, en fait. Je vais laisser Robert vous en donner quelques-uns.

M. Beaudry (Robert) : Oui, en fait, par exemple, ça peut être tout simplement pour de l'élargissement de certaines rues où il faut exproprier des parties de terrains. Ça nous est arrivé. Des fois, c'est des entreprises, deux propriétaires distincts, où pour établir, là, les compensations préliminaires, là, qu'on doit établir, on ne peut pas mobiliser le chantier à ce moment-ci. Donc, ça a fait en sorte, des fois, qu'on a été obligé de démobiliser certains chantiers publics, pour le bénéfice public, dans des cas très précis, et que, dans le fond, au final, c'est le public qui finit par perdre de l'argent et que, le temps qu'on s'entende sur un montant à établir pour vraiment commencer l'exécution, la compensation préliminaire, bien là, on perd ce temps-là. Et après même les coûts de construction deviennent beaucoup plus importants. Donc, c'est un exemple concret, là, que je peux vous donner. Je ne sais pas, Mme Ollivier, si...

Mme Ollivier (Dominique) : Oui, puis il y a toutes sortes d'autres exemples, effectivement, dans les coûts, dans la prévisibilité des coûts, où on se retrouve, en fait, retardés par cette possibilité qu'offrait, à l'heure actuelle, la loi et qui fait qu'on finit souvent par payer beaucoup plus cher des choses simplement dans l'idée d'aller vite, beaucoup plus cher des projets dont la... En tout cas, pour nous, aller à la juste valeur marchande et la prévisibilité que ça amène, c'est vraiment intéressant. C'est bien aussi que soit préservé le droit pour les gens de contester, mais au moins ça nous permet... vous le savez comme moi, quand on est en prévision, en planification, en réalisation, ça nous permet au moins de continuer plusieurs étapes et sauver de l'argent en bout de ligne, là, parce que c'est l'argent des payeurs de taxes.

Mme Guilbault :Oui, bien, absolument, c'est toujours le même argent au final, mais c'est vrai que ça a une existence sur les citoyens. Puis vous disiez, c'est ça, par rapport aux objectifs, entre autres des objectifs gouvernementaux qui sont fixés sur... que ce soit le 30 % ou les zones hydriques, les zones inondables, et tout ça. Puis ça a été évoqué, ce matin, par l'UMQ et la FQM, le... bien, plus par l'UMQ, mais donc par rapport... puis la CMM va vous suivre si ma mémoire est bonne, le règlement de contrôle intérimaire. Et évidemment, à Montréal, il n'y a pas tant d'espace disponible, disons que c'est très densément peuplé. Donc, si on regarde par rapport au RCI ce qui a été convenu de réserver, si on veut, comme territoire pour l'atteinte des objectifs, dans la métropole comme telle, je ne sais pas à quel point vous avez pu réfléchir et chiffrer l'incidence que pourrait avoir ce projet de loi là dans la manière dont vous allez pouvoir acquérir puis gérer tous ces terrains-là. Est-ce que vous avez déjà une idée du montant des économies, puis des délais, des procédures, et tout ça, que vous pourriez épargner avec la nouvelle formule de la loi?

M. Beaudry (Robert) : Pas à ce stade-ci. Toutefois, c'est clair, parce qu'on voit certains dossiers où on tombe sur une valeur au propriétaire où c'est le double de ce qui a été évalué au niveau de la valeur marchande, même si on ajoute certains dédommagements, qui sont tout à fait normaux, là, parce qu'il y a certains... il peut y avoir certains impacts sur le propriétaire, mais on se retrouve du simple au double. Et il y a encore de grands et de vastes terrains, on a des terrains de golf, par exemple, sur l'île de Montréal, on a des milieux naturels, on l'a vu dans le cadre du dernier mandat, où on a fait l'acquisition de terrains pour l'agrandissement du grand parc de l'Ouest, par exemple, des terrains dans l'Est aussi, des friches vertes qui sont très présentes, des opportunités, justement, pour la collectivité de faire face aux diverses crises qui sont devant nous, là, les crises environnementales, plus de résilience face aux changements climatiques. Donc, bien évidemment, la flexibilité et le temps va nous faire sauver de l'argent. Parce que, quand on peut arriver rapidement en évaluation, en exécution, qu'il n'y a pas le temps des tribunaux de s'entendre, ça... et que les paramètres sont plus clairs dès le départ, c'est de l'inflation de moins sur nos projets aussi quand il y a de l'aménagement, par exemple, à faire.

• (14 h 20) •

Mme Ollivier (Dominique) : Absolument. Puis on le sait, sur certains des projets qui sont en cours, maintenant, on regarde ce qu'on a payé, par exemple, ou ce qu'on est en train de payer versus ce qui serait en place avec la loi et on se rend compte que, pour certaines infrastructures...

Mme Ollivier (Dominique) : ...de transports, par exemple, on parle du simple au triple, hein, donc du... c'est vraiment... ça fait vraiment exploser les coûts. Donc, la prévisibilité, je pense, c'est la plus grande qualité qu'on retrouve dans ce projet de loi.

Mme Guilbault :Tout à fait, puis c'est un des objectifs, d'ailleurs, du projet de loi. Il me reste combien de temps? Sept minutes. Parfait. J'aimerais ça aussi vous entendre parce qu'il y a des... certains intervenants, puis probablement qui vont venir éventuellement aussi nous en entretenir, mais qui invoquent que ça pourrait avoir une incidence négative sur le développement de l'habitation. Parce que le logement, c'est un des grands combats ou, en tout cas, un des grands enjeux auxquels on fait face actuellement, là, pour ne pas dire une crise, la crise du logement. Donc, on est partenaires là-dedans aussi. Et un des objectifs du projet de loi, c'est de mettre fin à la spéculation, donc de limiter les argents qu'on est obligés de dépenser aux municipalités, aux gouvernements. Mais, en même temps, certains disent que ça peut freiner des projets de développement, donc nuire à d'autres objectifs, notamment en habitation. Qu'est-ce que vous pensez, vous, de ça?

Mme Ollivier (Dominique) : On pourra compléter, mais moi, je vois difficilement comment ça pourrait freiner certains projets en habitation, particulièrement quand on sait que les besoins réels qu'on a à l'heure actuelle sont beaucoup dans le logement social et dans le logement abordable. Donc, pour nous, cette capacité-là de plus vient en plus permettre qu'on soit à la juste valeur. Vraiment, la notion de juste valeur marchande est vraiment importante là-dessus. Donc, ça va nous permettre aussi d'accélérer certains projets qui vont vers des populations qui sont plus vulnérables. J'ai de la difficulté à comprendre la logique derrière le fait de dire que ça va retarder des projets d'habitation, alors qu'au fond ça devrait simplement leur permettre de se développer plus rapidement.

M. Beaudry (Robert) : Et même, je dirais l'inverse, parce qu'au final c'est la société et tous les paliers de gouvernement, donc la même poche, comme on dit, Mme la ministre, qui va finir par payer moins cher pour l'essor du développement de logements sociaux, communautaires ou abordables par l'acquisition moins cher de certains terrains à juste valeur marchande, à tout le moins, de certains terrains. Et on le sait à travers l'histoire, le logement social a été souvent un levier important de développement immobilier, même privé. Donc, ça devient complémentaire comme type d'approche.

Mme Guilbault :Oui, je vais laisser du temps à mon collègue de Masson, mais peut-être une dernière question sur le six mois, qui a été abordée par vos deux prédécesseurs aussi. Nous, le six mois, il vise à ce que les administrations, donc toute la mécanique autour d'un SAD... administrative autour... pour faire atterrir la nouvelle formule de la loi, les gens, ils aient le temps de se préparer, vont dire ce matin... Tu sais, le papier à lettres, et tout ça, ça semble simpliste, là, mais donc... tu sais, vous savez comment c'est, les grosses administrations. Donc, pour nous, on était confortables avec le six mois. Vous, vous demandez à ce que ce soit immédiat. Est-ce que, pour vous, il y aurait une forme de compromis? Quelqu'un avait proposé ce matin : Est-ce qu'au moins certains concepts ou certains éléments du projet de loi pourraient peut-être entrer en vigueur tout de suite, et on attend le reste plus tard? Je ne sais pas à quel point c'est opérationnalisable. Il faudra que je le voie avec mes équipes. Donc, quel genre de position intermédiaire pourriez-vous avoir là-dessus?

Mme Ollivier (Dominique) : Je ne suis pas sûre qu'on a une position intermédiaire. Pour nous, c'est assez clair que le plus rapidement ça rentre en vigueur, que la sanction, tout au moins des dispositions principales, soit là, le plus rapidement on est capables de procéder et de, justement, échapper à des choses comme l'inflation, comme le retard de planification et répondre tout de suite aux besoins. Ceci dit, Robert, qu'il l'a plus étudié que moi.

M. Beaudry (Robert) : Non, non, non, mais je pense qu'on peut répondre présent très rapidement comme municipalité. Ça évitera tout, tout élément de flottement aussi entre les six mois, hein? Je veux dire est-ce qu'il n'y aura pas un ralentissement d'attente que les nouvelles dispositions vont arriver ou un empressement peut-être de la part de certains? Donc, nous, ce qu'on se dit, c'est que, dès que... Comme c'est public, c'est un projet de loi qui est très bien ficelé. La municipalité est prête à utiliser ces leviers-là de façon intelligente. Je pense qu'on a toutes les conditions gagnantes pour la mettre rapidement en œuvre.

Mme Ollivier (Dominique) : Parce que, dépendant du délai aussi d'adoption du projet, ça pourrait prendre... si on ajoute les six mois, ça pourrait nous amener à des choses qui seraient en planification maintenant à être retardées jusqu'à ce qu'on utilise les effets de la nouvelle loi. Donc, le temps de l'adopter, plus le temps de la mettre en vigueur, ça peut nous amener au plus tôt à l'été prochain ou, sinon, à l'automne prochain. Et ça, ça pourrait être catastrophique pour certains projets.

Mme Guilbault :Tout à fait, en prenant en compte, effectivement, les délais parlementaires normaux des différentes étapes du projet de loi, c'est vrai qu'il faut l'additionner au six mois. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup, je vais mettant céder la parole...

La Présidente (Mme Maccarone) : ...au député de Masson. Vous disposez de deux minutes 30 secondes.

M. Lemay : ...Mme la Présidente. Merci, Mme Ollivier, M. Beaudry, d'être avec nous. Vous savez, je veux juste revenir sur une question de précision sur votre recommandation 1, que vous mentionnez au mémoire, d'abolir les articles 170 et 171. Les groupes de ce matin nous disaient, bon, de ne pas nécessairement les abolir ou de réviser. Vous, quand vous mentionnez ça, vous venez dire, en même temps, puis je vais vous citer, là, dans votre recommandation, vous dites qu'«afin qu'aucune indemnité ne puisse être accordée si l'acte municipal est adopté conformément à la loi et qu'il est dans l'intérêt public». Et là, bien entendu, vous parlez des projets à des fins environnementales, on veut les conserver, corridors de biodiversité, peu importe.

Moi, j'ai une question, parce que, tu sais, on fait quoi si vous dites «aucune indemnité»? Mais il y avait la notion tout à l'heure, avec le groupe précédent, de l'usage probable, tu sais, on parlerait peut-être de l'usage envisagé. Si quelqu'un avait déjà... par exemple, voudrait faire du logement social et abordable, tu sais, puis là on vient de dire : Bien là, en vertu... il n'y a aucune expropriation possible, bref, aucune indemnité. Et là ma question, c'est : Mais on fait quoi, tu sais, quand il y avait déjà un usage envisagé pour ce terrain-là? Est ce qu'il y a... Comment on fait, pour que cette personne-là... tu sais, il y a une perte de jouissance sur son terrain, est-ce que vous dites, par exemple, sans vous mettre les mots dans la bouche, est-ce que vous diriez : Bien, garde, au moins... on va enlever la taxe, tu sais, il n'y aura pas de taxe municipale sur le terrain, parce que... l'usage, il ne peut pas s'en servir, puis on ne peut pas l'exproprier? Allez-y. 

La Présidente (Mme Maccarone) : En une minute.

M. Beaudry (Robert) : Oui, en une minute. Aïe, aïe, aïe! En fait, en fait, l'enjeu, ce n'est pas dans un processus d'expropriation, c'est l'expropriation déguisée où on dit que, quand c'est réclamé suite, par exemple, à un pouvoir d'une municipalité qui a changé un zonage ou pas, hein, parce que ça peut être quelqu'un, par exemple, qui a décidé de spéculer sur un terrain dans un milieu boisé, parce qu'il y avait une annonce, à un moment donné, qu'il allait avoir une connexion d'une route tout près. Donc, nous, ce qu'on dit, c'est : Si, finalement, la municipalité décide de ne pas faire cette planification-là... et on ne peut pas crier à l'expropriation déguisée, à ce moment-là, parce que c'est un pouvoir habilitant. Le pouvoir de zonage, ce n'est pas une stratégie pour exproprier, de façon déguisée, une propriété qui appartient à un particulier.

Donc, nous, c'est vraiment sur cet élément-là qu'on veut venir clarifier non pas un processus en bonne et due forme d'expropriation, mais bien un pouvoir, qui est en vertu de la Loi du Québec, pour les municipalités qui pourraient être... qui pourraient nous accuser d'expropriation déguisée. J'espère avoir bien répondu à votre question.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup. Nous allons passer maintenant à l'opposition officielle. M. le député de l'Acadie, vous disposez de 12 minutes 23 secondes. La parole est à vous.

M. Morin : Merci, merci, Mme la Présidente. Alors, merci beaucoup pour être là, cet après-midi, discuter avec nous. Merci pour votre mémoire également. J'aimerais, j'aimerais continuer, en fait, un peu la discussion qui était en cours sur l'expropriation déguisée. Parce que, dans votre première recommandation, vous ne parlez... En fait, vous, ce que vous souhaitez, là, c'est que ces deux articles-là soient retirés du projet de loi et qu'il n'y ait aucune indemnité possible. Donc... Puis je comprends ce que vous dites, c'est dans le contexte d'une expropriation déguisée, ça, c'est clair.

Maintenant, si je vous comprends bien, ce que vous aviez commencé à dire... Vous avez quelqu'un qui achète un terrain, admettons, bon, parce qu'il y aura, je ne sais pas, moi, un développement d'une route quelconque. Il voudrait faire un développement domiciliaire avec accès à la route, évidemment, ça peut être très pratique, et que, par la même occasion, la ville adopte un règlement qui ferait en sorte qu'on voudrait protéger, je ne sais pas, un boisé ou un milieu quelconque. Donc, la ville veut exproprier le terrain. Non, oui...

• (14 h 30) •

M. Beaudry (Robert) : En fait, en fait, ce qu'on dit justement, c'est, quand on parle de pouvoirs des municipalités liés au zonage pour une planification, qui sont faits de bonne foi, on ne souhaite pas ouvrir la possibilité pour un particulier de venir demander des indemnités sous prétexte que ce serait une expropriation déguisée, d'avoir fait ce changement de zonage là. On comprend qu'il y a des indemnités à une expropriation en bonne et due forme. Puis ce qu'on aime beaucoup du projet de loi, c'est qu'il vient vraiment les définir clairement à la juste valeur marchande. La société va payer le bon montant pour ce qu'elle achète en fonction de ce que ça vaut sur le marché, plus quelques indemnités. Nous, ce qu'on se dit, c'est, quand on parle de zonage, quand on parle de lois du Québec, où on nous demande aux municipalités de venir protéger des milieux humides, on ne devrait pas...


 
 

14 h 30 (version non révisée)

M. Beaudry (Robert) : ...à aucun moment parce que, dans la loi du Québec, la limite du droit de propriété, c'est les pouvoirs... c'est les pouvoirs des gouvernements de planification. Donc, on ne devrait à aucun moment venir nous demander ou prétendre à une expropriation déguisée... nous demander une compensation.

M. Morin : Sur ce bout là, quand vous parlez d'une obligation pour une municipalité de vous conformer, par exemple, à une loi ou règlement, ça, je l'ai bien compris. Le bout qui me manque, c'est... je reprends mon exemple, de tantôt, là, donc vous avez un promoteur qui a acheté un terrain. Il veut faire du développement. Il y a une infrastructure autour, donc qui pourrait être bénéfique pour le développement qu'il veut faire. Mais le zonage de la Ville fait en sorte qu'à un moment donné, il ne pourra plus développer. On se comprend? Donc, son terrain, là, il voulait développer, c'était clair, là, c'est un développeur. Donc, il ne voulait pas faire autre chose que ça. Alors, est-ce que vous dites qu'à ce moment-là, il n'aura pas droit à aucune indemnité?

M. Beaudry (Robert) :  C'est un pouvoir de la municipalité de planifier son zonage ou son territoire pour la protection, par exemple, de milieux naturels. On ne peut pas présumer que, du jour au lendemain, ce zonage-là va être résidentiel. Les changements de zonage sont régis de façon très, très claire, ils doivent suivre un processus très, très clair. Donc quelqu'un qui est justement à acheter un terrain, souvent, c'est même l'inverse, on achète un terrain vert, qui n'est même pas zoné résidentiel, puis on attend, en se disant, là, tu sais, on a des intentions de connectivité, puis que ça va venir, puis que, là, on dit : Ah! bien, comme ce n'est pas venu... ou comme on est venu rajouter une couche de protection supplémentaire, c'est une expropriation déguisée. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'à partir de ce moment-là, c'est fait de bonne foi, c'est fait selon les statuts... les lois, c'est fait selon les règlements de la Ville de Montréal. Bien, on ne devrait pas laisser une ouverture à des accusations ou des poursuites pour expropriation déguisée.

M. Morin : Ce serait plus des poursuites que des accusations, on s'entend, là.

M. Beaudry (Robert) : Oui, oui. Exact. Exact.

M. Morin : Mais je reprends encore mon exemple. Vous changez le règlement de zonage. Là, je ne parle pas de quelqu'un... parce qu'évidemment un règlement de zonage, c'est public, là, dans une ville. Normalement, quelqu'un qui veut acheter un terrain dans une ville... regarder aussi s'il y a des règlements, s'il y a du zonage, bon. Moi, je parle de la situation où la Ville, par exemple, après, pour se conformer à une loi du gouvernement, va changer le règlement de zonage. La personne, elle a déjà acheté son terrain, avait déjà... elle voulait le développer, mais là, elle ne pourra plus, là. Est-ce que vous dites que cette personne-là n'aura droit à aucune indemnité?

M. Beaudry (Robert) : On dit qu'on ne laisse pas à la personne la possibilité de poursuivre pour expropriation déguisée. On dit qu'on ne veut pas laisser de marge à la poursuite contre la ville. Après, il y a plein de processus où il y a des lois qui combinent, d'ailleurs, des indemnités, quand elles sont appliquées sur le territoire. Donc, ce que je viens dire ici, c'est vraiment pour nous, ce qui est important, c'est qu'on ne laisse pas place à une possibilité de poursuite pour expropriation déguisée dans un cadre où c'est une planification faite de bonne foi en vertu de lois du gouvernement du Québec, du gouvernement fédéral ou de règlements de la municipalité.

M. Morin : Ça, je le comprends bien.

M. Beaudry (Robert) : C'est ça.

M. Morin : Mais l'acheteur de bonne foi, lui, qui a payé pour le terrain puis qui veut développer, il reste...

Mme Ollivier (Dominique) : Je pense, M. le député, ça dépend. Nous, on parle vraiment de cas de spéculation. C'est ce qu'on a le plus souvent. C'est-à-dire... et on a eu le cas dans l'ouest de Montréal, par exemple, où des gens avaient acheté des anciennes... des terres qui étaient zonées agricoles dans le temps. Puis on attend assez longtemps que ce soit dézoné pour pouvoir faire du développement, par exemple, domiciliaire. Et, en cours de route, le projet n'est pas fait, il n'est pas déposé à la Ville. En cours de route, on décide qu'on va agrandir un parc ou on décide qu'on va protéger des milieux humides. À ce moment-là, ce qu'on dit, c'est que ce qu'il avait acheté, c'était un type de propriété. Il ne peut pas nous dire, parce qu'il avait l'intention de le développer dans un autre type qui n'était pas prévu dans le zonage, qu'il est... qu'il puisse crier à l'expropriation déguisée parce qu'on a décidé de développer une partie du territoire d'une certaine façon, qui entame son projet. Et c'est dans ce sens-là qu'on dit : Quand tout est fait de bonne foi, selon les lois. Sinon, c'est sûr que, si on décide d'exproprier quelqu'un parce qu'on veut prendre son terrain pour en faire un parc, c'est sûr qu'il a droit à ses propres... à son propre... en tout cas, à son dédommagement. Surtout si on reprend, mettons, quelque chose qui était résidentiel à tant de logements à l'hectare, puis là, on dit : Désormais c'est un parc, on peut comprendre qu'il y a un problème. Mais, s'il avait acheté quelque chose qui était déjà soit un parc, soit un terrain vert, puis là on dit : Oui, on conserve l'usage de terrain vert, ce n'est pas une expropriation déguisée, c'est juste ça qu'on dit, mais on ne veut pas que ça puisse ouvrir...

Mme Ollivier (Dominique) : ...la porte à ce genre de choses là.

M. Morin : D'accord dans votre mémoire, évidemment, vous... vous êtes tout à fait en faveur de l'indemnité au coût de la valeur marchande et non pas sur la valeur au propriétaire. C'est ce que j'ai bien compris de votre mémoire. C'est à la page 4. Il y a une foule de façons d'évaluer la valeur d'une propriété maintenant. Les évaluateurs sont souvent des gens qui vont jouer un rôle fondamental là-dedans. Ils vont vous aider. Vous n'avez pas peur qu'en utilisant uniquement la valeur marchande, ça enlève une attractivité à Montréal pour des investisseurs éventuels ou potentiels, en disant, écoutez, si jamais nous on fait face à une expropriation, on va perdre, on va avoir moins. Donc on va aller investir ailleurs.

M. Beaudry (Robert) : Personnellement, je pense qu'on pense plus que ça va décourager des spéculateurs que des investisseurs parce que les règles du jeu vont être claires et on ne pourra plus dire : On joue avec les valeurs de terrain. Si on est sérieux, si on veut développer, on va être accueillant à Montréal, puis on le fait. Notre objectif, c'est de densifier notre ville. Mais pour les spéculateurs, par exemple, ce projet-là vient mettre des règles du jeu en mettant un holà sur des pratiques qui actuellement enrichissaient des particuliers au détriment des communautés.

M. Morin : D'accord. Je vous remercie. On a parlé beaucoup évidemment du fameux délai de six mois, là, pour l'entrée en vigueur de la loi. Bon, c'est souvent... Il y a souvent un délai entre la sanction d'une loi puis son entrée en vigueur. On nous a dit ce matin qu'il fallait que ça soit d'application immédiate parce que certaines municipalités avaient... auraient peur qu'il y ait un déluge d'actions contre les municipalités en attendant l'entrée en vigueur de la loi. Est-ce que c'est quelque chose qui vous concerne? Est-ce que c'est une tendance que vous voyez à Montréal ou que vous appréhendez?

M. Beaudry (Robert) : Bien évidemment, quand il n'y a pas de clarté ou quand on est entre deux, c'est la pire des situations. Je veux dire, actuellement, on est dans une situation qui est très incertaine. Mais là, quand on est dans une situation où on sait que les choses vont venir se reclarifier, on se retrouve dans une dans un moment de flottement où c'est autant inconfortable pour les municipalités que pour les propriétaires parce qu'on ne sait pas quand ou comment ça va arriver. Donc, tous les cas de figure sont possibles, mais je ne jouerai pas les devins aujourd'hui pour vous dire : On s'attend à tant. Toutefois, on peut penser, avec le comportement de personnes qui seraient malveillantes ou qui seraient vraiment dans des stratégies de spéculation, qu'il y aurait probablement des mesures qui seraient entreprises. Ça, je pense que cette inquiétude-là n'est pas à négliger.

M. Morin : Et là, évidemment, le projet de loi a été déposé à l'Assemblée nationale, donc il est public. Donc tout le monde sait évidemment que ça s'en vient. Puis on peut penser qu'avec un gouvernement qui a présentement 89 députés, ça risque d'être adopté. Ça, je pense que je ne suis pas un devin en disant ça, là. Avez-vous vu, au niveau de votre contentieux, plus d'actions, plus de mises en demeure compte tenu de ce qui s'en vient?

Mme Ollivier (Dominique) : On n'est pas allé chercher les chiffres pour vous répondre, mais on sait qu'effectivement plus ce serait... plus ça va être un fait établi, que ça va être... ça va être décidé que ça va être ainsi, plus on augmente le risque de voir les choses, en fait les poursuites et tout, s'intensifier pendant le temps où le règlement n'est pas en vigueur. Donc, c'est pour ça que, pour nous, ça devenait vraiment important. La question de la sanction et de la mise en vigueur devenait vraiment, vraiment importante et cruciale.

M. Morin : Parfait. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant passer au deuxième opposition. M. le député de Taschereau, vous disposez de quatre minutes 10 secondes. Excusez-moi cinq minutes 13 secondes. Je suis très généreuse aujourd'hui.

• (14 h 40) •

M. Grandmont : C'est parfait, j'adore ça. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mme Olivier et M. Beaudry, merci d'être là. Merci pour votre mémoire. J'ai peut-être quelques questions pour commencer. Bien, peut-être en fait un petit commentaire, en fait, là, sur le délai de six mois. Ce n'est pas tout le monde qui est familier avec les calendriers des travaux, le temps de travaux. Puis vous pourriez me corriger, mais le temps de travaux, des chantiers, en fait, là, c'est du huit... six, huit mois à peu près, là, la période de chantier au Québec. Donc, un délai de six mois peut facilement se transformer en une année supplémentaire, finalement, là. Non? Donc vous êtes d'accord. O.K. J'ai bien compris. Donc, d'où l'importance finalement de faire en sorte que le projet, ou en tout cas dans ses plus grands morceaux, là, dans ses plus grandes composantes, il vient en application dès la sanction, là, vient en vigueur dès la...

M. Grandmont : ...la sanction du projet de loi.

J'aimerais revenir sur les articles 170 et 171, oui. J'ai de la misère à m'expliquer... Puis vous allez pouvoir m'éclairer, là. Vous invoquez le fait que... Bon, d'une part, je comprends que vous avez certaines réticences par rapport à ces articles-là, je l'entends bien, mais, en même temps, puis on vient de parler du délai de six mois, à de multiples occasions, dans votre plaidoyer, dans votre mémoire, vous invoquez le fait qu'il faut avoir... il faut que ça entre en vigueur le plus rapidement possible. Donc, dans 170 et 171, vous dites : Il y a des morceaux là-dedans qui nous intéressent mais devraient être mieux codifiés, devraient... Est-ce qu'il n'y a pas un risque de les voir se repousser aux calendes grecques si on n'essaie pas d'amender ou d'avoir des meilleurs amendements dans le projet de loi n° 22? Et auquel cas, si c'est le cas, bien, je vous demanderais : est-ce qu'on peut trouver une façon d'avoir des amendements qui feraient que 170, 171 répondraient réellement à vos besoins?

Mme Ollivier (Dominique) : En fait, c'est ça, pour nous, l'idée, quand on demande de les retirer, c'est justement pour ça. Pour nous, il y a comme une codification supplémentaire à faire, on ne voudrait pas créer des délais supplémentaires face à un projet de loi qui, par ailleurs, est largement satisfaisant. Donc, c'est pour ça qu'on suggérait de les retirer et de les traiter soit dans la LAU soit dans la Loi sur les cités et villes le temps de se donner le temps de les rédiger correctement. Maintenant, est-ce qu'on peut vivre avec le fait qu'ils restent là? Oui, dans la mesure où on s'entend qu'ils vont être également traités dans les autres lois habilitantes.

M. Beaudry (Robert) : Et qu'on ne laisse pas la possibilité... et qu'on vienne préciser que ce n'est pas possible de poursuivre les municipalités pour expropriation déguisée dans un cas que c'est en mesure... en lien avec les pouvoirs habilitants de ces municipalités-là.

M. Grandmont : Évidemment, on en a parlé beaucoup, là, dans le cadre des discussions qu'on a eues avec vos... des groupes qui vous ont précédé. On trouve ça quand même assez logique que, dans le fond, les municipalités ne soient pas poursuivies pour des... une réglementation qu'ils doivent mettre en place qui est en concordance avec des orientations, des stratégies gouvernementales, bien entendu. D'accord, ça m'éclaire, c'est bien.

La Ville de Montréal, ce n'est pas que des projets d'infrastructure, ce n'est pas que des projets de logements sociaux, ce n'est pas que des projets de transports collectifs, des routes, c'est aussi des personnes qui y vivent, vous les représentez. Moi, je me posais la question puis je vais le vous dire de façon très transparente : est-ce que vous trouvez que, dans les outils qu'il y a là, dans le projet de loi n° 22, on a suffisamment de mécanismes pour protéger les petits propriétaires, les locataires? Par exemple, un locataire qui est dans un logement depuis 20 ans, qui paie un 700 $ pour un trois et demie, ce qui est quelque chose de très raisonnable, disons, là, aujourd'hui, tu sais, si jamais il se fait... tu sais, il se fait exproprier pour un projet d'infrastructure qui est tout à fait utile, là, pour la communauté, bien, comment s'assurer que cette personne-là puisse faire valoir ses droits, ait une indemnisation suffisante pour être capable de se reloger dans le quartier dans lequel il habite et pour lequel, malheureusement, probablement, surtout si vous êtes à faire des projets d'infrastructures de transport collectif, par exemple, bien, les prix vont avoir augmenté beaucoup? Donc, comment on fait pour s'assurer, comme ville, à travers le p.l. n° 22, ou peut-être y manque-t-il des choses dans le p.l. n° 22, pour protéger ce monde-là qui est peut-être plus vulnérable puis qu'on ne veut pas déraciner de leur quartier?

Mme Ollivier (Dominique) : ...je l'avais dit d'entrée de jeu lorsque j'ai fait ma présentation, tout à l'heure, à Montréal, on est très conscient de ça et on n'entreprend pas des procédures d'expropriation sans avoir un certain respect, une certaine sensibilité, puis en gardant en tête l'ampleur de ce que ça peut représenter comme choc pour certaines personnes. Par ailleurs, on dispose aussi d'autres outils qui nous permettent d'accompagner les gens notamment dans la recherche de logement, notamment en les reclassifiant. Ça nous est arrivé, hein, on a fait différentes mesures, dans le dossier de l'habitation notamment, qui nous ont amenés à protéger, à essayer toujours de protéger le logement qui est abordable et les gens qui y sont, donc de trouver d'autres types de mesures ou d'autres endroits pour les reloger de façon équivalente.

Donc, je pense que c'est des exercices... Je ne suis pas sûre que ça peut être encadré, ce dont vous parlez là, peut être encadré dans le projet de loi, puisque l'indemnité ne va pas à la personne qui est expropriée, elle va au propriétaire de l'immeuble. Donc, ce n'est pas sûr qu'il va la partager de façon juste et équitable avec les autres personnes. Donc, je pense qu'il faut qu'il y ait à la fois de la sensibilité...

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci.

Mme Ollivier (Dominique) : ...quand on entend ce genre de choses là, et qu'il y ait d'autres mécanismes à côté, soit mis en place par les villes soit mis en place par le gouvernement, pour pouvoir s'assurer qu'on est capable de reloger...

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup. Merci, Mme Ollivier, merci, M. Beaudry, pour votre contribution à nos travaux.

Je suspends la commission quelques instants qu'on puisse accueillir le prochain groupe. Merci.

(Suspension de la séance à 14 h 46)

 (Reprise à 14 h 51)

La Présidente (Mme Maccarone) : Alors, nous allons reprendre nos travaux. Et je souhaite la bienvenue aux représentants de la Communauté métropolitaine de Montréal, M. Alexandre Warnet, président de la Commission de l'environnement et de la transition écologique et conseiller municipal de la Ville de Laval, qui est avec nous en visio; M. Marc-André Guertin, vice-président de la Commission de l'environnement et de la transition écologique et maire de la Ville de Mont-Saint-Hilaire; M. Mathieu Traversy, membre de la Commission de l'environnement et de la transition écologique et maire de la Ville de Terrebonne; et Me Marc-André LeChasseur, associé et membre du comité exécutif, Bélanger Sauvé avocats.

Messieurs, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période des échanges avec les membres de la commission. Alors, je vous invite donc à commencer votre présentation. Merci.

On n'entend pas. Excusez-moi. Juste un instant, M. Warnet, on a un problème d'audition. Votre micro est fermé. Pourriez-vous... Voilà.

M. Warnet (Alexandre) : Est-ce que vous m'entendez maintenant?

La Présidente (Mme Maccarone) : Oui. Très bien. Merci. La parole est à vous.

(Visioconférence)

M. Warnet (Alexandre) : Parfait. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mme la vice-première ministre et ministre des Transports et de la Mobilité durable, Geneviève Guilbault, Messieurs dames, les députés membres de la commission, salutations. Je m'appelle donc, comme il a été dit, Alexandra Warnet, je suis conseiller municipal et membre associé du comité exécutif de la Ville de Laval. Et c'est aujourd'hui comme président de la Commission de l'environnement et de la transition écologique de la Communauté métropolitaine de Montréal, la CMM que je viens voir. La CMM, elle regroupe les 82 municipalités du Grand Montréal et la moitié de la population du Québec.

Je suis accompagné, vous l'avez mentionné, de M. Marc-André Guertin, maire de Mont-Saint-Hilaire, qui est le vice-président de cette commission, M. Mathieu Traversy, maire de Terrebonne, membre de la commission et Me LeChasseur qui est le conseiller juridique de la CMM.

Et d'entrée de jeu, j'ai envie de vous dire que la CMM, elle accueille très positivement le projet de loi n° 22 concernant l'expropriation que votre commission étudie actuellement. C'est un projet de loi qui répond à plusieurs demandes que la CMM adresse au gouvernement depuis plusieurs années et qui sont partagées par le monde municipal, et va nous permettre, en particulier, de mieux accomplir notre mission en matière de protection des milieux naturels. Et je céderais la parole à M. Traversy.

M. Traversy (Mathieu) : Merci beaucoup, M. le Président. Mme la Présidente, Mme la vice-première ministre, Messieurs, Mesdames les députés qui sont autour de la table, merci de nous accueillir aujourd'hui au niveau de la Commission métropolitaine de Montréal, donc au niveau de la communauté. Je tiens à vous rappeler à quel point on est enthousiaste d'être avec vous pour le projet de loi n° 22 et vous dire à quel point les 82 municipalités que représente cette communauté sont interpellées par les travaux des députés qui sont actuellement à l'Assemblée nationale sur cette question.

La CMM a adhéré au cours des dernières années aux objectifs des Nations unies visant à protéger la nature et à contrer la perte de biodiversité, et s'est engagée, à l'instar du gouvernement du Québec, à atteindre l'objectif de 30 % de milieux naturels protégés dans le Grand Montréal d'ici 2030. Pour atteindre cet objectif, elle s'est donné donc plusieurs recours, différentes stratégies pour y parvenir, notamment par la voie réglementaire, par l'acquisition de terrains qui lui permettent de protéger et de mettre en valeur les milieux naturels qui composent la trame verte et bleue du Grand Montréal.

En ce qui concerne cette approche réglementaire, le Plan métropolitain d'aménagement et de développement, qu'on appelle communément dans le jargon le PMAD, accorde déjà depuis 2012 un minimal de protection. Pour renforcer celle-ci dans une perspective de développement durable, la CMM a adopté récemment deux règlements de contrôle intérimaire qui visent la préservation des milieux naturels et donc... et qui concernent les secteurs présentant un potentiel de reconversion en espaces verts ou en milieux naturels. Ces RCI visent spécifiquement neuf terrains de golf, donc, dans la grande région de Montréal, tous localisés dans un périmètre urbain. Un est situé à Laval notamment, et une autre à Terrebonne, donc je déclare déjà mes intérêts. Ces RCI sont temporairement... et visent à permettre aux parties prenantes de définir dans le prochain PMAD les objectifs de protection en fonction des orientations du gouvernement en matière d'aménagement du territoire qu'on appelle les OGAT, donc dans un jargon plus politique.

À la suite de l'adoption de ces deux règlements de contrôle intérimaire, plus d'une vingtaine de poursuites judiciaires ont été intentées contre la Communauté métropolitaine de Montréal. Le gouvernement du Québec a pourtant reconnu que ces RCI étaient conformes, donc, aux orientations du gouvernement. Cette situation illustre un peu les difficultés auxquelles la CMM, les municipalités locales, les MRC sont confrontées pour mettre en oeuvre leurs politiques et les règlements qui sont demandés par les OGAT.

En ce qui concerne...

M. Traversy (Mathieu) : ... En ce qui concerne l'acquisition, plus spécifiquement par voie d'expropriation, la Loi sur l'expropriation actuelle cause un préjudice important à la CMM et aux municipalités qui en sont membres, parce que les règles en vigueur ont pour effet d'augmenter substantiellement l'indemnité visée à cet égard. En effet, le calcul des indemnités est actuellement fait sur une base qui est plutôt imprécise, qui est laissée... qui laisse une grande place à l'interprétation des tribunaux, et au fil des ans les indemnités financières ont souvent été accordées en faisant fi de la loi, des réglementations en vigueur et en fonction également des considérations qu'on souhaite avoir lorsqu'on souhaite une expropriation.

Donc, par exemple, pour quatre terrains de golf visés par des RCI qui sont en poursuites actuellement, la valeur marchande estimée du côté des villes est de 68,4 millions, et le montant réclamé par les propriétaires tourne autour des 508 millions. Alors, vous pouvez voir qu'il y a un écart de 440 millions entre la vision des villes et la vision des propriétaires qui sont concernés par ces RCI. La Loi sur l'expropriation actuelle, parce qu'elle n'établit pas des critères fixes ou plus précis pour le calcul de l'indemnisation, fait en sorte que dans le cas d'une expropriation le tribunal peut parfois inclure dans le calcul des indemnités un éventuel développement immobilier, bien que le zonage interdise cet usage, ce qui pourrait rendre ces acquisitions pour les municipalités, pour la CMM et pour la collectivité extrêmement coûteuses.

Les paramètres prévus actuellement dans la Loi sur l'expropriation nuisent donc aux efforts des municipalités qui souhaitent contribuer à la protection des milieux naturels et qui veulent répondre aux orientations qui nous sont demandées par le gouvernement. À toutes fins pratiques, si le cadre juridique actuel perdure, plusieurs espaces pourraient éventuellement être convertis en projets immobiliers malgré la volonté d'une majorité de la population, qui souhaite voir en effet la vocation passer à un autre niveau. Les pouvoirs publics sont donc incapables d'adopter une réglementation conforme aux OGAT pour protéger sans se voir menacer de poursuites et ne peuvent plus, donc, acquérir à juste prix, en vue de conserver ou de renaturaliser, certains terrains. La prolifération, donc, de ces poursuites démontre clairement l'existence d'un enjeu social.

Je suis accompagné, donc, d'un conseiller de la ville de Terrebonne, M. Robert Auger. Je tiens à saluer aussi l'équipe de la CMM, M. Massimo, qui est avec nous aujourd'hui, et je passe la parole au maire de Saint-Hilaire, M. Guertin, pour la suite de l'intervention.

M. Guertin (Marc-André) : Alors, bonjour. Salutations, Mme la Présidente, Mme la ministre, distingués membres de la commission. Donc, l'adoption du projet de loi n° 22 fera en sorte que le Québec adoptera des règles d'indemnisation claires et appliquera des principes similaires à ceux qui sont en pratique dans les autres provinces canadiennes et aux États-Unis ainsi que dans la majorité des pays européens.

Le droit de propriété est évidemment un droit fondamental protégé par la Charte des droits et libertés de la personne du Québec et par le Code civil du Québec. Cette protection n'est toutefois pas absolue, puisque l'une et l'autre de ces lois subordonnent le droit de propriété au respect des lois en vigueur, ce qui établit d'emblée une hiérarchie favorable à l'intérêt public ancrée dans les valeurs du droit civil québécois et européen.

Ainsi, même si l'acquisition par expropriation de milieux naturels à protéger n'est jamais le premier choix, elle peut, dans certains rares cas, s'avérer nécessaire pour le bien de la population, qui demande aux instances publiques de protéger les milieux naturels et d'y avoir un accès à proximité de leur lieu de résidence. Les modifications à la Loi sur l'expropriation qui sont proposées par le gouvernement dans le projet de loi n° 22 créeront, si elles sont adoptées telles que... par l'Assemblée nationale du Québec, un meilleur équilibre entre les droits individuels et les droits collectifs, lequel reflétera l'évolution des dernières années dans le rapport de la société avec le territoire. En effet, la protection des milieux naturels et du territoire agricole est désormais une priorité pour la vaste majorité de la population que nous représentons, et, croyez-moi, à Mont-Saint-Hilaire, c'est bien souhaité également.

• (15 heures) •

La CMM estime donc que la nouvelle Loi sur les expropriations réglera plusieurs problèmes : premièrement, le processus d'expropriation sera simplifié et le calcul des indemnités, mieux balisé sur la base de la juste valeur marchande, et non plus de la valeur aux propriétaires; deuxièmement, les lois et la réglementation en vigueur devront être prises en compte dans le calcul des indemnités afin d'estimer les préjudices réellement causés par l'expropriation; troisièmement, les coûts d'acquisition immobilière par expropriation seront plus facilement prévisibles; quatrièmement, le délai pour la prise en possession des immeubles sera réduit; cinquièmement, la durée initiale de la réserve pour fins publiques est portée à quatre ans d'emblée, ce qui évitera de devoir le renouveler, comme actuellement; et, sixièmement, le recours contre les municipalités qui font l'objet d'une poursuite pour l'appropriation déguisée d'un immeuble sera mieux balisé. Globalement, une plus grande équité sera garantie entre les expropriants et les expropriés et entre le droit des individus et le droit de la collectivité. ...


 
 

15 h (version non révisée)

M. Guertin (Marc-André) : ...entre le droit des individus et le droit de la collectivité. Alors, je cède la parole à M. Warnet pour lever les dernières recommandations.

M. Warnet (Alexandre) : Avec quelques amendements que la CMM considère que le projet de loi pourrait bénéficier... Le premier vise la possibilité d'exproprier les terres agricoles non exploitées depuis au moins trois ans. Donc, la CMM et les municipalités demandent le pouvoir d'exproprier des terres agricoles non exploitées depuis trois ans pour qu'elles puissent être louées ou vendues à des producteurs agricoles qui vont pouvoir les remettre en culture. Et, dans ce cas, bien, qu'une indemnisation payable au propriétaire soit établie en fonction d'un zonage agricole et que l'usage agricole soit réputé pour être l'usage le meilleur et le plus profitable, et que le propriétaire ne puisse pas réclamer de pertes de profits de promoteurs ou de pertes des profits de constructeurs.

Le deuxième amendement que la CMM propose est que, dès la sanction de la loi, les litiges en cours puissent être jugés en calculant les indemnités selon dles nouvelles dispositions de la loi et que, dès que la sanction de la loi, les municipalités devraient avoir le pouvoir de bénéficier du droit de faire cesser l'effet de dépossession ou la suppression d'un usage raisonnable d'un droit sur un immeuble résultant d'un acte municipal.

Et, par ailleurs, troisième proposition parce que le droit de retrait des municipalités qui est prévu aux articles 170, 171 n'est parfois pas possible légalement puisque les dispositions en jeu découlent directement de la concordance obligatoire qui est prévue par la loi au schéma au plan métropolitain ou aux OGAT, bien, la CMM invite le gouvernement du Québec à modifier également la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Le gouvernement devrait introduire à la LAU un mécanisme suivant lequel chaque municipalité locale qui adopte un règlement en vertu des articles 113, alinéa 2.16 ou 16.1 ou article 115, alinéa 2.4 ou 4.1, qui applique le document complémentaire au schéma, qui est lui-même approuvé par le gouvernement dans le cadre de l'analyse de conformité aux OGAT, que ces municipalités bénéficient d'une immunité dans LAU et que cette immunité, bien sûr, s'applique également aux MRC et aux communautés métropolitaines, avec les adaptations nécessaires.

Et je conclus là-dessus en vous disant que l'expropriation n'est pas banale, que le législateur doit s'assurer qu'elle soit accompagnée d'une indemnité et d'un dédommagement équitable pour le propriétaire et responsable pour le bien commun, maintenant et pour les générations futures, que les principaux problèmes de la Loi sur l'expropriation actuelle vont être réglés par la nouvelle loi et que la CMM salue le projet de loi no 22, en estimant que la question d'immeubles par expropriation aux fins de projets de logements sociaux ou abordables, de projets d'infrastructures publiques, dont la construction d'écoles, de protection et de mise en valeur des milieux naturels ou de remise en terres agricoles en friche, va pouvoir se réaliser à moindre coût pour la collectivité, et donc faciliter et accélérer l'atteinte de notre vision collective. On aura donc ces outils nécessaires pour y arriver. Bien, je vous remercie pour votre attention, puis ça nous fera plaisir d'échanger avec vous.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup. Je dois remercier le gouvernement, qui vous a cédé 1min 30 s, à peu près, de leur temps. Alors je cède maintenant la parole pour les échanges à Mme la ministre. La parole est à vous.

Mme Guilbault :Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Ça m'a fait plaisir de vous céder cette minute 30, évidemment, parce que vous êtes les plus... je dirais, les plus importants ou les plus intéressants dans la salle, actuellement, parce qu'on est là pour vous entendre, entendre vos impressions, vos suggestions sur le projet de loi.

Je note, globalement, que vous l'accueillez très favorablement. Donc, merci beaucoup. Salutations, évidemment, je ne vous ai pas salués, mais donc considérez-vous tous chaleureusement salués. Très bel exposé. J'ai entendu des choses très intéressantes. C'est le cas avec chacun des groupes qui viennent depuis ce matin, mais je n'ai pas pu m'empêcher de prendre en note, entre autres, puis je vais revenir sur l'UPA, parce que je trouve ça intéressant, vous êtes les premiers à amener cet angle-là, mais je n'ai pas pu m'empêcher de noter les... Parce qu'avant vous il y avait la ville de Montréal, et je leur avais demandé : Avez-vous été en mesure, déjà, dans la réflexion, de chiffrer une évaluation du genre de gains que ça pourrait vous apporter si on modifiait la loi, des exemples de projets, combien ça vous coûterait versus... Et on n'avait pas nécessairement de chiffre.

Et là le maire de Terrebonne nous dit que... par rapport au RCI, l'évaluation que vous en faites, à la CMM, l'évaluation des villes pour les terrains, de 68,4 millions et de 508 millions, pour ce qui est des propriétaires, bien, d'abord, c'est frappant, là, mathématiquement, on voit bien qu'il y a un delta qui est énorme puis qui vient, je pense, si quelqu'un en doutait encore, confirmer la nécessité de venir encadrer les notions comme la valeur, comme les usages les plus profitables et toutes ces notions-là sur lesquelles se base les tribunaux, actuellement, entre autres, l'UMPP, qui va venir être... qui va être précisé par le projet de loi. Donc, quand on pense à une différence aussi grande...

Mme Guilbault :...millions versus 508 millions, peut-être, c'est... À brûle-pourpoint, comme ça, refaire le calcul très précis de à combien vont finir les ventes et les expropriations, avec le projet de loi, ce serait peut-être un peu hasardeux.

Mais avez-vous des exemples en ce moment de projets dans la CMM, que ce soit avec le 30 % d'aires protégées, que ce soit avec des projets de développement que vous avez, qui, en ce moment, sont soit en suspens, soit retardés, voire impossibles à cause de considérations financières, comme ça, soit de l'impossibilité ou du manque... Ou du fait que ce n'est pas réaliste pour le budget des diverses municipalités? Vous êtes 82, donc en dehors de la Ville de Montréal, il y a des villes qui ont des plus petits budgets. Avez-vous des exemples de projets précis qui sont soit compromis, retardés ou inexistants à cause de cette disparité-là puis, disons, cette... ce défi financier là, qui est majeur et qui pourrait être bon pour nos citoyens, bien sûr, puisqu'on travaille tous pour les mêmes personnes?

M. Guertin (Marc-André) : Bien, en fait, malheureusement, même dans nos villes. On remarque, en fait, une spéculation, dans notre cas, même récemment, un jugement de quérulence, dans la mesure où on multiplie les recours dans le cadre d'un projet d'expropriation. Puis, dans notre cas, à Mont-Saint-Hilaire, on parle d'un processus qui, maintenant, s'est étalé sur plus de 13 ans. Donc, si vous voulez parler d'exemples, malheureusement, on a des exemples extrêmes qui ont même été... qui ont fait l'objet de jugements de quérulence pour ma municipalité.

Alors, la réponse, c'est oui, tout... En fait, la... Une loi qui viendra baliser le processus d'expropriation est nécessairement bienvenue. Et dans le cas qui nous intéresse, ça a eu une incidence non pas juste pour la ville, mais pour tous... des promoteurs environnants qui, eux aussi, voulaient jouir de leurs biens, mais qui ne peuvent pas puisqu'ils sont pris dans une espèce de jeu d'échecs.

Je n'ai pas les valeurs financières, mais je peux vous dire que pour une municipalité de la taille de Mont-Saint-Hilaire, qui représente 0,3 % de la population de la CMM, d'avoir à encourir des processus légaux qui maintenant se chiffrent, juste les honoraires professionnels, dans les millions de dollars pour une valeur à l'expropriation qui, elle, était évaluée à à peu près 200 000 $ il y a 13 ans, ce genre d'histoires d'horreur, si vous me permettez, ça fait malheureusement partie de notre quotidien. Et c'est l'exemple que j'avais à vous offrir aujourd'hui.

M. Traversy (Mathieu) : Si je peux vous donner d'autres exemples?

Mme Guilbault :Oui, peut-être, oui.

M. Traversy (Mathieu) : Pour profiter un peu de la situation. Mais je vais être quand même prudent parce qu'on est toutes quand même devant les tribunaux sur certaines causes.

Donc, La Ville de Terrebonne, la CMM, donc, sur une question de RCI, comme on a été présentés lors de l'introduction, a une poursuite de près de 98 millions de par un promoteur à l'heure actuelle. Je pense que vous avez bien saisi, Mme la ministre, là, la volonté de vouloir raffermir l'esprit de la loi des parlementaires ou du moins des législateurs qui font partie de votre commission sur... pour bien ramener, dans le fond, les différents interlocuteurs sur le même canal de communication.

Visiblement, cette disparité entre ce que certains propriétaires pensent avoir comme valeur de terrain versus ce que les villes ou les municipalités ou les collectivités semblent voir, donc, il y a un grand canyon. On parle de 440 millions dans le cas des quatre exemples de RCI que je vous ai donnés. Le but est donc d'essayer de trouver un point de convergence où on parle tous le même langage et donc aider les municipalités à accomplir ce... les objectifs que le gouvernement leur demande de faire, donc d'améliorer la conservation, par exemple, des milieux naturels, d'essayer de répondre, donc, aux...

Et là-dessus, bien, on a besoin d'outils. C'est pour cette raison qu'on reçoit avec beaucoup d'enthousiasme la venue de ce projet de loi. Je sais que c'est compliqué. Le diable est dans les détails, mais je pense qu'avec le potentiel d'expertise qu'on a autour de cette table, vous allez être capables de nous amener à un résultat qui risque d'être assez précis et objectif pour atteindre ce qu'on souhaite, c'est-à-dire l'objectif de préserver des milieux, notamment, ou de donner les outils aux villes de pouvoir aménager et développer leur territoire selon les orientations que le gouvernement et que celles-ci se sont donné.

• (15 h 10) •

Mme Guilbault :Oui. Merci beaucoup. Effectivement, j'y crois aussi et j'espère que ça se fera de manière diligente, quoique consciencieuse, évidemment. Parce que le diable est dans les détails. C'est quand même un projet de loi très technique aussi, il faut le dire.

Sur l'angle de l'UPA, je trouvais ça intéressant. En fait, peut-être deux questions. D'abord, est-ce que vous en avez discuté avec l'UPA ou avec peut-être même notre propre ministère de l'Agriculture, la CPTAQ, ou autres partenaires qui sont concernés par les terres agricoles? Et aussi qu'est-ce qui vous a amenés à faire cette recommandation-là? Est-ce que c'est le fait que ces terres-là, justement... Parce que vous mettez un usage...

Mme Guilbault :...de trois ans, une terre qui n'aurait pas été utilisée pour un usage agricole de trois ans, si ma mémoire est bonne. Donc, est-ce que c'est pour, finalement, un peu occuper notre territoire, revitaliser ou raviver l'usage agricole de ces terres-là dans une optique de souveraineté alimentaire, et tout ça? J'aimerais peut-être avoir des... vous entendre là-dessus.

M. Warnet (Alexandre) : Dois-tu? Je pense que le l'élément de la souveraineté alimentaire, elle est très, très importante. Puis il y a énormément de spéculation sur les terres agricoles, des propriétaires qui attendent des années et des années, voire des décennies au cas où un jour il y aurait un dézonage puis là ils puissent construire des tours à condos, et ce n'est vraiment pas ça qu'on veut. Et le trois ans, c'est qu'à partir d'un certain moment, entre trois et cinq ans, il y a une arborescence qui se développe sur les territoires. Ça commence à pousser, les arbres. Et là, il y a des coûts supplémentaires énormes pour retransformer la terre agricole pour qu'elle soit cultivable. Donc, il y a plusieurs éléments là-dedans. Donc, contrer la spéculation pour s'assurer que la remise en culture, elle soit efficace et rapide.

Mme Guilbault :Parfait. Sur... Combien de temps il me reste, Mme...

La Présidente (Mme Maccarone) : Sept minutes.

Mme Guilbault :Sept minutes. Un dernier petit élément, et ensuite, ma collègue de Châteauguay va avoir, je pense, aussi une intervention à faire. Sur les articles 170, 171, l'expropriation déguisée, il y a eu différents points de vue à date là-dessus. Est-ce que je comprends que vous souhaitez les maintenir ou est-ce que vous souhaitez plutôt que ce soit traité autrement? Parce que je voyais un extrait où on parlait peut-être de... dans le projet de loi du ministère des Affaires municipales. Donc, quelle est votre préférence? Comment vous voyez ça? Et ce qu'on a mis dans les deux articles, est-ce que vous trouvez au moins trois ans? Puis est-ce que... tu sais, est-ce que, déjà, vous trouvez que c'est une avancée? Quel est votre point de vue là-dessus? Parce que c'est un gros enjeu aussi pour les municipalités.

M. Traversy (Mathieu) : C'est un très gros enjeu. Moi, je vais vous dire, pour ce qui concerne Terrebonne, la CMM, moi, j'aimerais qu'on puisse aller de l'avant avec la proposition qui est dans votre projet de loi. Je pense que c'est un pas dans la bonne direction. Est-ce qu'on peut aller plus loin puis être perfectible dans l'avenir? Tout à fait. Là-dessus aussi, on est ouverts à des modifications et à des améliorations. Mais je pense que c'est déjà une bonne première étape qui est franchie. Donc, ce qui est proposé actuellement nous fait déjà avancer. Je suis partisan de ceux qui aiment ça bouger, donc j'aime mieux avancer peut-être un petit peu plus tranquillement mais tendre dans la bonne direction que de retarder peut-être certaines dispositions qui pourraient nous aider rapidement, donc, à régler certains problèmes ou, du moins, à éclaircir certaines situations. Donc, dans ce cas-ci, pour les articles mentionnés par Mme la vice-première ministre, moi, je serais d'avis d'y aller de l'avant en se gardant l'ouverture de l'amélioration pour l'avenir. Mais je vais laisser M. Guertin aussi compléter.

M. Guertin (Marc-André) : ...on va jouer un peu... Alors, oui, un «tu l'as» vaut mieux que deux «tu l'auras», donc je pense que notre intérêt est réellement une sanction rapide pour qu'on puisse utiliser la loi promptement. Je pense que c'est le message qu'on souhaite divulguer aujourd'hui. Mais, puisque Me LeChasseur nous a accompagnés aujourd'hui, je pense que son opinion, à l'égard des articles 70 et 71, mérite peut-être d'être aussi entendue.

M. LeChasseur (Marc-André) : Brièvement, lorsque les discussions ont été entamées sur le projet de loi n° 22, il y a quand même un petit bout de temps de ça, la rumeur avait circulé, hein, dans les cercles fermés, je dirais, ou à peu près fermés, là, et les promoteurs immobiliers se sont passés le mot, et ça concordait à peu près avec l'adoption des RCI de la CMM. Vous savez, il y a cinq ans, il y a quatre ans, il n'y avait pas de poursuite à l'expropriation déguisée, là, c'est un concept, là, quand même assez peu connu. Les deux RCI, le PL 22 ont semé beaucoup d'émotions en cours de route dans les cœurs de promoteurs, et ils se sont empressés de déposer des poursuites pour être certains que, s'il y avait un jugement qui allait être rendu, c'est en fonction de la loi actuelle, qui est beaucoup plus généreuse.

Alors, quand on parle de spéculation, c'en est, et on spécule, en fait, sur le temps que le gouvernement prend à mettre en place le projet de loi n° 22. Et, plus on retarde l'échéance, plus les gens qui ont des intérêts privés, et je ne suis pas en train de les condamner, là, s'installent, si on veut, en fonction de ce qui fait la promotion de leurs intérêts. Alors, on est aux prises avec plus de 1 milliard de poursuites au bureau qui n'existaient pas il y a quelques années, qui sont le fruit en fait de propriétaires privés qui ont établi leur propre carré de sable en se disant : Bon, bien, on va le mettre en place tout de suite, là. Si le PL 22 n'arrive pas, tant mieux. S'il arrive, bien, on aura pris de court le gouvernement. Alors, on est aux prises avec ça présentement.

Dans cette optique-là d'avoir deux articles, comme 170 et 171... sont absolument indispensables, perfectibles, je pense que... peut-être que le MAMH pourrait faire un bout de travail au niveau des OGAT, là, notamment, mais absolument indispensables. Et j'irai plus loin que ça, et...

M. LeChasseur (Marc-André) : ...doivent être d'effet immédiat aussitôt que la loi est sanctionnée, c'est-à-dire que... deux aspects qui peuvent être d'effet immédiat, c'est-à-dire qu'on peut les appliquer, en termes de calcul d'indemnités, à tous les dossiers en cours présentement, et on peut choisir aussi de donner aux municipalités poursuivies, j'inclus la CMM dans ça, le droit de retrait immédiat. Le droit de retrait, ça ne change rien pour personne, hein, on s'entend, là. Le dossier suit son cours, sauf que le gouvernement... la municipalité a l'option, à terme, de décider : Est-ce que je fais un chèque ou est-ce que je recule sur ma réglementation? Dans les deux cas, la personne qui poursuit n'est pas désavantagée par la résultante. Alors, c'est la direction, je pense, qu'il serait approprié de prendre.

Mme Guilbault :Merci beaucoup. Je vais passer la parole à ma collègue. Merci.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci. Je cède la collègue... Je cède la parole à la collègue de Châteauguay. Vous disposez de deux minutes.

Mme Gendron : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, messieurs. Contente de vous recevoir ici aujourd'hui. En fait, moi, j'ai été charmée par votre première étude de cas, qui parle du Corridor vert Châteauguay-Léry. J'aimerais... Je comprends que, pour soutenir les efforts municipaux et métropolitains pour préserver les milieux naturels, vous avez besoin d'une loi telle que celle-ci, la loi de... sur l'expropriation. J'aimerais que vous preniez le temps de partager avec mes collègues ici aujourd'hui des exemples concrets de quelle façon cette loi-là peut avoir un bénéfice pour certains projets tels que des écoles, mais également des milieux naturels. Donc, concrètement, peut-être d'un niveau plus école, je ne sais pas si vous êtes en mesure de me dire certains exemples aujourd'hui.

La Présidente (Mme Maccarone) : Vous avez à peu près une minute.

M. Guertin (Marc-André) : ...pas d'exemple d'école, mais j'ai un exemple de sentier d'intérêt métropolitain, où, pendant deux décennies de temps, des citoyens de Mont-Saint-Hilaire ont gracieusement offert de leurs propriétés, et j'ai été partie prenante de 15 de ces transactions-là qui ont fait l'objet de donation, croyez-le ou non. Donc, les gens ont voulu léguer à leur municipalité, pour le mieux-être des générations futures, une partie de leurs propriétés. Et, avec l'aide de la Communauté métropolitaine de Montréal, on voulait aménager un sentier au pied... du mont Saint-Hilaire. À cet égard, je vous invite au mont Saint-Hilaire pour le voir. Il manquait une propriété, et cette propriété-là, finalement, le propriétaire a décidé que lui court-circuitait cette initiative-là et... qui est le fruit, là, de dons de plusieurs propriétaires. Il a fallu exproprier cette personne-là, et ça... en fait, on s'en est tiré à trois fois la valeur marchande pour une toute petite propriété puis un projet d'intérêt métropolitain qui a été stoppé au mont Saint-Hilaire à cause de ça. C'est l'exemple que j'ai à vous offrir aujourd'hui.

Mme Gendron : Je vous remercie.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup. Nous allons poursuivre l'échange avec l'opposition officielle. M. le député de l'Acadie, la parole est à vous.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, merci. Bon après-midi. Merci d'être là. Merci pour votre mémoire et puis le témoignage que vous rendez cet après-midi. C'est très... C'est très éclairant.

On a parlé avec d'autres groupes, il y a d'autres groupes qui ont passé avant vous aujourd'hui, et on a parlé, puis on a commencé à en parler tout à l'heure, des fameux articles 170 et 171, qui traitent des expropriations déguisées. Or, il y a des... il y a un groupe, entre autres, qui nous a dit qu'il fallait absolument enlever ces dispositions-là du projet de loi, peut-être les inclure dans d'autres lois. Vous semblez dire qu'il faudrait qu'on les laisse. Alors, ça devient un peu difficile, en tout cas, à tout le moins pour moi, de dire... écoutez, on va avoir... on va entendre d'autres groupes, là, mais on le laisse, on l'enlève? Qu'est-ce qui est le mieux? Parce qu'en bout de piste, quand la loi va être adoptée, on veut que ça soit le plus utile pour l'ensemble des citoyens puis des citoyennes du Québec, là.

M. LeChasseur (Marc-André) : Le plus utile, c'est de les laisser. Ça, c'est indubitable. Maintenant, ce régime-là peut être... doit être complété. Alors, c'est pour ça qu'il y a eu beaucoup de commentaires qui ont été faits. Il y a eu beaucoup de discussions, là, entre les parties prenantes, je dirais, dans ces... à l'égard de ces deux articles-là. Les gens qui sont devant vous, là, avant puis après nous, là, on s'est tous parlé. Bon. Alors, il y a... Bien, vous le devinez d'ailleurs, là, que ce n'est pas...

• (15 h 20) •

Alors, il y a deux régimes qu'on doit mettre en place. Il y a celui-là, qui est indispensable et qu'on vous invite à mettre en place aussitôt que la loi est sanctionnée. Il y en a un deuxième, qui est l'immunité des municipalités, qui obéissent aux OGAT, en fait. Ça, c'est autre chose, c'est de l'urbanisme, en fait. La Loi sur l'aménagement et l'urbanisme devrait être modifiée pour intégrer une immunité à cet égard-là parce qu'elle est...

M. LeChasseur (Marc-André) : ...le bras exécutif du gouvernement lorsqu'on fait de la protection pour le gouvernement, pour les OGAT, alors il faut protéger les municipalités qui sont poursuivies, comme on le voit présentement, avec beaucoup de passion, là, par les propriétaires privés. Alors donc, il y a deux aspects. Il y a le volet expropriation déguisée, qui est un règlement de zonage qui est réputé aller trop loin, par exemple. Bon, parfait. Maintenant, il y a le calcul de l'indemnité à ce moment-là, l'ancienne loi ou la nouvelle loi? Nous, on dit : La nouvelle loi, ce serait plus approprié. Et en troisième lieu, on dit : Le droit de retrait, bien, immédiat. On veut laisser au public... aux municipalités le choix de leur décision ultimement.

Ce qu'on dit, en parallèle à ça, c'est que la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme à l'automne, pourrait être modifiée pour compléter ce régime-là, qui est incomplet présentement, très bon, mais qui peut être bonifié par une immunité comme on retrouve dans plusieurs lois à l'extérieur du Québec ou dans la Loi sur la protection du territoire agricole. Il y a une immunité dans cette loi-là, l'article 98, je pense, qui dit : Dorénavant, quand tu es zoné à des fins agricoles par le gouvernement, tu n'as pas le droit à une indemnité. Donc, ce qu'on dit, c'est qu'on devrait répliquer ce système-là, propre aux terres agricoles, dans la loi sur l'aménagement et l'urbanisme pour les zonages de type conservation faits par des municipalités, mais en application des OGAT du gouvernement.

M. Morin : Jusqu'à maintenant, vous êtes les seuls qui demandez une immunité. Je comprends que, pour vous, ça n'a pas une valeur de précédent puisque vous référez à d'autres lois où ce type, évidemment, d'action là existe, mais vous demandez carrément une immunité. Mais dans cette loi-là, laisser les articles 170, 171.

M. LeChasseur (Marc-André) : En fait, l'immunité pour le l'urbanisme, en fait, là, serait visée par un projet de loi autre que celui-là, là, qui modifierait la loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Mais c'est indispensable si on veut que les OGAT fonctionnent, qu'on donne aux municipalités... et j'inclus dans tout ça, là, les CMM, CMQ, MRC et municipalités locales qu'on donne à ces corps-là publics l'outil nécessaire pour mettre en œuvre les OGAT et le 30 %, là.

Sans ça, le gouvernement a le choix, là, faire un chèque ou donner l'immunité, essentiellement, mais pas l'immunité at large, l'immunité pour ce qui découle des OGAT. C'est ça, l'idée qui est derrière l'immunité, là.

M. Morin : D'accord, je vous remercie. Maintenant, vous avez mentionné également que vous voulez que la loi, si elle est votée après la sanction, s'appliquerait automatiquement en termes d'indemnités, même pour les litiges qui sont en cours. Est-ce que je vous ai bien compris?

M. LeChasseur (Marc-André) : ...raisons à ça que je peux vous expliquer d'emblée.

M. Morin : Oui.

M. LeChasseur (Marc-André) : 95 % des dossiers d'expropriation déguisée, là, je fais une phrase courte, là, se retrouvent sur mon bureau... tous scindés. Donc il y a la cause de : Est-ce qu'il y a expropriation déguisée? Bon, ça, le premier procès a commencé hier. C'est le seul qui a commencé hier. Maintenant, il y a un deuxième procès qui doit se tenir. S'il y a expropriation déguisée, quelle est l'indemnité payable? Ça, ça prend des experts évaluateurs, et tout, là, hein? Alors, ça, ça va venir dans six mois, un an, deux ans ou trois ans. C'est pour ça qu'on dit : Tous les dossiers ou à peu près, d'expropriation déguisée, étant suspendus pour la question de l'indemnité, il n'y a aucun péril à mettre d'emblée en vigueur le nouveau calcul. Parce que, quand on va arriver au procès dans trois ans, disons qu'on fait de l'expropriation déguisée, là, à la CMM puis à la municipalité, quand on va aller pour fixer l'indemnité dans deux, trois ans, bien, cette loi-ci, elle va être en vigueur depuis deux, trois ans. Alors, pourquoi retarder son... Pourquoi... sa mise en effet ou son application aux dossiers qui sont présentement devant les tribunaux? Parce que la question qui est débattue, ce n'est pas celle-là présentement, c'est la première : Est-ce qu'il y a expropriation déguisée?

M. Morin : Et ça, je vous comprends, dans ce cas de figure là, mais c'est parce que, tout à l'heure, vous avez parlé, évidemment, d'appliquer les nouvelles indemnités directement au litige. Or, dans votre cas de figure, la question de l'indemnité va arriver. Mais il doit y avoir des dossiers devant les tribunaux présentement, où on est en train de parler de l'indemnité, maintenant.

M. LeChasseur (Marc-André) : Il n'y en a aucun.

M. Morin : Il n'y en a aucun. Aucun, aucune cause au Québec?

M. LeChasseur (Marc-André) : Je ne crois pas, mais, écoutez, je ne suis pas dans tous les souliers, mais je crois qu'il n'y en a aucun.

M. Morin : O.K. Évidemment, on nous a dit aussi que... puis en fait, j'aimerais vous entendre là-dessus, que la loi devrait rendre...

M. Morin : ...en vigueur immédiatement. Donc, il n'y aurait pas un 60 jours de délai. Votre position là-dessus, c'est...

Une voix : ...

M. Morin : Bien, en fait, à un moment donné, on a parlé de 60 jours pour sa mise en vigueur.

M. LeChasseur (Marc-André) : Ah! je comprends. Oui, je ne crois pas que ça soit nécessaire qu'il y ait un délai pour la mise en vigueur de la loi. Aussitôt adoptée, aussitôt sanctionnée. Effet immédiat. À mon avis, ce serait la... À mon avis, c'est faux de prétendre qu'il y a de la complexité qui va en découler pour les corps publics et les municipalités et autres, là. Ça m'apparaît une vue de l'esprit plus parce que la plus grande difficulté, à mon avis, va résider dans la capacité du Tribunal administratif du Québec à se mettre à jour et à appliquer les nouveaux concepts qu'il connaît déjà, soit dit en passant, là, mais à les mettre en œuvre dans le contexte des dossiers qui vont se présenter devant lui, là.

Mais tous les concepts du PL 22 sont des concepts connus du TAQ parce que c'est lui-même qui les applique et qui les a développés à travers les âges, là. Alors, ce n'est pas rien de nouveau. Ce que le PL 22 vient faire, c'est dire au Tribunal administratif du Québec : À travers les 427 formules que tu as mises de l'avant pour calculer l'indemnité, là, voici les 14 que tu dois retenir, là. Parce que le tribunal faisait preuve de beaucoup d'imagination à bien des égards. Alors là, on est venu encadrer cette imagination-là, ce qui est, dans ce cas-ci, une très bonne idée, soit dit en passant.

M. Morin : D'accord, merci. Maintenant, évidemment, vous êtes en faveur d'utiliser la valeur marchande pour l'évaluation d'un bien qui va être... qui va être exproprié. On a parlé beaucoup de terrains de golf, on a parlé beaucoup de grands spéculateurs, etc., mais il arrive aussi dans la vie où c'est des petits propriétaires qui sont... qui sont expropriés, des gens qui ont une maison depuis une ou deux générations, sans que ça soit un bien patrimonial dans différentes villes. Évidemment, on connaît l'inflation présentement. Comment s'assurer que ces propriétaires-là ne seront pas défavorisés avec la nouvelle loi s'ils sont expropriés?

M. LeChasseur (Marc-André) : Bien, c'est une bonne question. En fait, vous savez, il y a deux... il y a deux, deux postures qu'on peut adopter pour ça. Le Québec, avec la Saskatchewan et l'île du Prince Édouard, sont les seules provinces à avoir la juste... la valeur au propriétaire. Donc, la population de la Saskatchewan et du Prince-Édouard, ça rentre à peu près dans la salle, ici et là. Alors, ce n'est pas des problématiques importantes là-bas. Au Québec, c'est un peu plus... c'est un peu plus criant, je vous dirais. Alors, toutes les provinces qui ont des populations fortes ont adopté depuis fort longtemps la valeur... la juste valeur marchande, donc la valeur Remax, là, essentiellement, là, lorsqu'une propriété est expropriée. Alors ça, puis ces... C'est indispensable parce que la valeur au propriétaire qu'on connaît actuellement contient la juste valeur marchande et plus. Le plus, c'est le bout insaisissable, là, à bien des égards, là, lié à la valeur émotive, à la valeur de convenance, aux dommages et intérêts. C'est le bout où un tribunal, le TAQ, fait preuve d'imagination à beaucoup d'égards en écoutant les avocats qui sont des créatures imaginatives, là.

M. Morin : ...la preuve.

M. LeChasseur (Marc-André) : La preuve? Oui, bien évidemment, on n'a rien contre, mais ce n'est pas abrogé dans la nouvelle loi, cela étant dit, hein? C'est-à-dire que la juste valeur marchande, elle est là. Donc, la valeur qu'on a comme vendeur libre et acheteur libre, elle est parfaitement respectée. Donc, lorsque quelqu'un est exproprié, vous ou moi, hein, ça peut être moi qui se fait exproprier, je vais avoir la valeur Remax pour ma maison. Bon. Maintenant, si j'ai un peu de troubles, ennuis et inconvénients, je vais avoir un montant maximum de 5 000 $. Et si j'ai une valeur de convenance perdue parce que mon père était Picasso et qu'il peignait dans le grenier de la maison, et que ça avait une valeur sentimentale importante pour moi, je vais avoir 20 000 $. Alors ça, c'est limité matériellement, je vous dirais, mais ça ne me défavorise pas. Ça vient effectivement baliser, je dirais, le carré de sable, mais c'est faux de prétendre, puis je ne vous accuse pas, vous le devinez, là, mais ça... c'est faux de prétendre que les gens vont être défavorisés. Ils vont être traités équitablement, sans le bonus qui vient avec la valeur au propriétaire où il y a un préjugé favorable à la partie expropriée, je dirais.

M. Morin : Parce qu'évidemment le droit de propriété est quand même un droit fondamental dans notre société, là. Le droit est très clair là-dessus.

M. LeChasseur (Marc-André) : Absolument.

• (15 h 30) •

M. Morin : Maintenant, je continue, puis je termine avec ça, moi, je suis un propriétaire, j'ai un triplex, et on m'exproprie. Ça faisait longtemps que mes locataires vivaient dans le triplex. Donc, ils avaient un loyer, un tel montant. On connaît la flambée des loyers. Alors, comment, eux, on va s'assurer qu'ils vont être capables de se retrouver un logement et qu'ils vont pouvoir payer?

M. LeChasseur (Marc-André) : C'est une bonne question. Je pense que la loi prévoit des mécanismes. En fait, je peux te dire ça en deux volets. Un, ça fait quand même 27 ans que je fais ça. Je n'ai jamais vu un duplex ou un triplex être exproprié puis qu'on mette les gens dehors. Donc, ça a...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

M. LeChasseur (Marc-André) : ...Certainement, là, mais c'est d'une rareté absolue. On est plus souvent dans le terrain vacant, je vais vous dire, pour mettre des rues, par exemple, ou une bibliothèque municipale, rarement pour mettre des gens dehors. Mais bon, ça peut arriver.

À ma connaissance de la loi, puis c'est une question très sophistiquée, là, ce que vous posez là, c'est très technique, je pense que la mécanique législative est très précise eu égard aux indemnités payables au locataire. Je ne pense pas qu'il y ait de changement par rapport à la situation actuelle pour les locataires résidentiels. Il y en a pour les locataires commerciaux qui voient leurs indemnités mieux encadrées.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci. Ceci... mettre fin à cette partie des échanges. Nous allons continuer avec le député de Taschereau. Vous disposez de quatre minutes huit secondes. La parole est à vous.

M. Grandmont : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Voulez-vous terminer votre explication? Ça m'intéresse.

M. LeChasseur (Marc-André) : J'étais presque au bout de mon idée.

M. Grandmont : Allez-y, terminez-la, s'il vous plaît.

M. LeChasseur (Marc-André) : Alors, je pense que pour le locataire résidentiel, je ne pense pas que la loi vient modifier substantiellement le régime actuel. C'est-à-dire que le locataire, sans bénéficier d'une protection accrue, doit être remis dans la même... Dans le même état où il était dans son logement. Donc, ça, ce n'est pas modifié, à ma connaissance. Mais là je vous dis ça sous réserve parce que c'est une question très technique.

Pour le locataire commercial, là, là, l'encadrement est plus important. On a copié, je pense... On n'a pas copié, on s'est inspirés des lois ontariennes et de la Colombie-Britannique, je pense, sur cet aspect-là, ce qui vient encadrer beaucoup mieux l'indemnité payable aux commerces, locataires commerciaux. Parce que, présentement, lorsqu'on exproprie un locataire commercial, cher ami, c'est très compliqué, c'est très long, et on en a pour des années à débattre des indemnités puis des pertes de profits pour l'avenir, et tout ce qu'on veut, là. Alors, il fallait absolument encadrer ça.

M. Grandmont : Parfait. Merci beaucoup. Bon, bonjour, messieurs, merci pour votre présence. Merci pour votre mémoire. On demande souvent des exemples, hein?, puis votre mémoire en est rempli, donc c'est déjà très instructif, très éclairant. Merci pour ça.

J'ai beaucoup aimé quand vous avez pris le temps de préciser quand même un principe fondamental, oui, le droit de propriété existe, il est fondamental, mais il doit respecter les lois en vigueur. C'est un rappel important. J'espère que tout le monde l'a bien entendu ici.

J'aurais une question toute simple, là, qui concerne principalement, là, les terres agricoles non utilisées depuis trois ans, j'apprécie cette proposition-là, franchement, c'est quelque chose qui me préoccupe énormément, principalement pour les redonner aux agriculteurs ou leur donner ou les revendre à des agriculteurs mal pris... Puis, j'imagine, raisonnable aussi, parce que c'est quand même assez difficile, on connaît la flambée des prix dans le milieu de l'agriculture. Je me posais la question suivante : il y a des gens qui achètent des terres, qui attendent un changement de zonage, mais qui ne les laissent pas en friche, qui vont les louer à des agriculteurs, est-ce que votre... Pourquoi votre proposition ne va pas jusque-là? Est -ce que c'est parce qu'elles sont utilisées? Mais, je veux dire, le principe derrière est quand même le même, on est en train de spéculer en attendant un possible changement de zonage. C'est juste qu'il n'est pas en friche, il est juste loué. Mais la personne a la même façon de penser derrière. Donc, votre proposition, pourquoi elle ne va pas toucher ça aussi? Y avez-vous réfléchi?

M. LeChasseur (Marc-André) : En fait, la proposition pourrait viser tous ces aspects-là, effectivement. Bon. Ce qui est l'idée derrière la proposition, c'est que lorsqu'un spéculateur n'a pas la candeur, si on veut, ou la générosité de cultiver sa terre ou de la louer pour qu'elle soit cultivée, peut-être qu'une fiducie alimentaire ou, tu sais, à des fins sociales, ou peut-être qu'un organisme public qui veut la mettre en valeur pour les maraîchers puis les métayers voudrait l'acquérir pour que l'autonomie alimentaire soit, vous savez, mise de l'avant.

Alors l'idée, c'est de dire : Bon, bien, pour les gens qui n'ont pas d'intérêt, dans le fond, dans la culture et qui ne le font pas depuis trois ans, ce sont probablement des spéculateurs à ce moment-là, on devrait être en mesure d'acheter la terre agricole pour la mettre en valeur à une valeur économique. Bon.

Maintenant, la loi prévoit peut-être déjà, hein? Parce qu'on parle beaucoup de l'usage actuel du terrain pour évaluer la valeur, mais la valeur marchande, ce n'est peut-être pas nécessairement en lien avec l'utilisation en friche, là. C'est-à-dire qu'on peut peut-peut tenir compte aussi de la valeur sur le marché qu'aurait, pour un... qui ne correspond pas à l'agriculture. Là, ce qu'on dit, c'est : considérons que... pour ce terrain-là est l'agriculture et que c'est une valeur économique qui s'applique. N'ayons pas de débat sur un usage alternatif qui pourrait être mis en place par un propriétaire qui voudrait le faire. Donc, on s'en tient à la valeur agronomique d'un terrain qui pourrait être utilisé à des fins agronomiques.

C'est une précision dans la loi, en fait, qui est demandée. Alors, ce n'est pas un changement de régime drastique. La jurisprudence a reconnu, notamment pour la CMM, pour les terrains qui sont près du dix30, que la valeur agricole d'une propriété, la valeur à l'expropriation, à l'achat d'une propriété vouée... la valeur agricole, c'est la valeur agronomique.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci.

M. LeChasseur (Marc-André) : Maintenant, ce qu'on dit dans la loi, on pourrait le préciser pour éviter tout débat.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci. Merci beaucoup. Ceci... mettre fin à nos échanges. Merci à M....

La Présidente (Mme Maccarone) : ...Merci, M. Guertin, M. Traversy et Me LeChasseur pour votre contribution à nos travaux. Je vais suspendre les travaux de la commission pour quelques instants. Très courte pause, collègues, afin de laisser installer le nouveau groupe. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 36)

(Reprise à 15 h 40)

La Présidente (Mme Maccarone) : Alors, nous reprenons nos travaux. Et je souhaite la bienvenue à la Communauté métropolitaine de Québec. Bienvenue chez vous. Alors, je vous rappelle... Excusez-moi, je recommence. J'invite maintenant Mme Marie-Josée Asselin, membre du conseil, vice-présidente du comité exécutif de la Ville de Québec et conseillère municipale de la Ville de Québec; M. Antoine Verville, directeur de l'aménagement du territoire, du transport et de la mobilité durable; Mme Isabelle Pelletier, conseillère en environnement et aménagement du territoire; et Mme Caroline Brodeur, directrice générale et trésorière, de faire votre présentation, un exposé de 10 minutes. Après que nous allons procéder avec la période d'échanges avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et commencer votre exposé. Merci.

Mme Asselin (Marie-Josée) : Bonjour, Mme la Présidente. Mme la ministre, Mesdames, Messieurs les membres de la Commission, nous vous remercions de nous recevoir à cette consultation particulière portant sur le projet de loi n° 22 concernant l'expropriation, ainsi que pour cette magnifique opportunité que nous avons de vous déposer un mémoire et de vous présenter nos recommandations...

Mme Asselin (Marie-Josée) : ...mon nom est Marie-Josée Asselin, je suis vice-présidente du comité exécutif et conseillère municipale à la ville de Québec. Je m'exprime aujourd'hui à titre de représentante de la Communauté métropolitaine de Québec, pour laquelle je siège comme membre du conseil métropolitain et du comité exécutif. Je suis accompagnée d'Antoine Verville, directeur de l'aménagement du territoire, du transport et de la mobilité durable, et d'Isabelle Pelletier, conseillère en environnement et en aménagement du territoire. Je souligne aussi la présence de notre directrice générale dans la salle, Mme Caroline Brodeur.

Avant tout, quelques mots sur la Communauté métropolitaine de Québec. La CM Québec regroupe regroupe 28 municipalités. Elle rassemble plus de 830 000 habitants, soit plus de 10 % de la population du Québec. Je m'exprime aujourd'hui en considérant les réalités de l'ensemble des instances municipales qui composent notre territoire, soit l'agglomération de Québec, la ville de Lévis, ainsi que les municipalités régionales de comté de la Jacques-Cartier, de la Côte-de-Beaupré et de l'île d'Orléans.

L'objectif de notre intervention est de soutenir nos composantes qui pourraient avoir recours à l'expropriation, soit pour réaliser des projets publics, soit pour mettre en œuvre des actions afin de se conformer aux obligations gouvernementales, mais aussi au Plan métropolitain d'aménagement et de développement, notre fameux PMAD, de la CM Québec. Je vous rappelle que la CM Québec a amorcé la révision de son PMAD, qu'elle va adopter très prochainement un premier projet qui abordera les grandes priorités métropolitaines en aménagement du territoire.

Parmi ces grandes priorités, deux sont en lien direct avec le projet de loi no 22, l'augmentation de mesures qui visent à conserver des milieux naturels du territoire, mais également la valorisation et le développement d'espaces stratégiques pour accueillir dans le futur la croissance démographique et économique. Les modifications apportées aux procédures d'expropriation par le p.l. 22 auront un impact direct sur la capacité d'agir des organismes municipaux en ces matières et sur l'atteinte des cibles et des objectifs de notre futur PMAD.

En premier lieu, la CM Québec salue, comme les autres partenaires, la démarche gouvernementale de révision de la Loi sur l'expropriation, réclamée par différentes instances municipales depuis de nombreuses années. En 2022, la CM Québec avait d'ailleurs suggéré au gouvernement de moderniser la Loi sur l'expropriation, afin notamment de faciliter les initiatives de ces municipalités locales en matière de conservation de milieux naturels, d'utilité publique et de requalification urbaine. Nous partageons également l'ensemble des objectifs évoqués par le gouvernement lors du dépôt de ce projet de loi, qui consistent à préciser les processus d'expropriation, à réduire les délais quant à la prise de possession des immeubles et à contrecarrer les manœuvres spéculatives.

La Communauté métropolitaine de Québec souhaite tout de même aujourd'hui faire part par la commission de ses préoccupations concernant certaines dispositions du p.l. 22 qui pourraient porter atteinte aux objectifs de protection de l'environnement et nuire au respect des orientations en aménagement du territoire. Nous vous exprimons donc de façon plus spécifique... sur les sujets suivants : les indemnités d'expropriation, les pouvoirs habilitants en matière de planification territoriale et l'entrée en vigueur des différentes dispositions.

Tout d'abord, la CM Québec considère que le p.l. 22 apporte de nombreux bénéfices, notamment en clarifiant et en encadrant les paramètres utilisés pour fixer le montant d'une indemnité d'expropriation. Nous sommes d'avis que le p.l. 22 permettra aux municipalités d'être plus prévisibles dans l'élaboration de leurs budgets, ce qui favorisera une meilleure gestion des fonds publics. Cette nouvelle façon de faire facilitera également le développement de grands projets d'infrastructure et améliorera significativement l'acceptabilité sociale en permettant une planification plus réelle des coûts des projets.

En deuxième lieu, nous pensons que le nouvel encadrement apporté par le p.l. 22 pourrait permettre de réguler les effets de la spéculation immobilière, qui immobilise actuellement de grandes superficies foncières vouées au développement urbain sur notre territoire.

Au-delà des constats généraux, la CM Québec souhaite s'exprimer de façon plus particulière sur trois éléments ayant un lien avec l'indemnité d'expropriation, soit : la valeur marchande du droit exproprié, la notion d'usage probable, et sur la détermination de la valeur des milieux naturels. La CM Québec salue et appuie la modification apportée par le p.l. 22 qui prévoit les indemnités à la valeur marchande du droit exproprié plutôt qu'à la valeur au propriétaire. La CM Québec recommande ainsi de maintenir le paramètre de fixation du montant de l'indemnité immobilière qui tient compte de la valeur marchande afin de permettre l'appropriation d'immeubles par les organismes municipaux à des coûts plus justes. La CM Québec est également en faveur de l'introduction dans la loi de la notion d'usage le meilleur et le plus profitable, qui est maintenant balisée par un ensemble de critères. Il nous apparaît d'ailleurs essentiel que la valeur marchande soit établie en tenant compte d'une l'utilisation probable de l'immeuble à court terme, selon le zonage en vigueur à la date de l'expropriation, plutôt que sur une simple possibilité ou intention.

La CM Québec recommande, dans sa recommandation deux...

Mme Asselin (Marie-Josée) : ...de maintenir l'introduction de la notion d'usage le meilleur et le plus profitable afin d'assurer la détermination d'une indemnité équitable, tant pour l'exproprié, que pour la collectivité. Toutefois, la CMQuébec constate que des éléments de preuve qu'une personne expropriée doit fournir pour démontrer la probabilité de concrétisation de cet usage ne sont pas assez précis ou sont encore trop sujet à interprétation. Nous encourageons donc le gouvernement à apporter davantage de balises quant à la notion d'usage probable, notamment quant aux éléments permettant de démontrer la probabilité de concrétisation d'un usage par une personne expropriée, dans les trois ans suivant la date d'expropriation, pour en faciliter l'application.

Pour poursuivre sur le sujet des indemnités, nous croyons que le PL 22 répond bien à des situations d'expropriation pour des projets d'infrastructures ou de transports publics... ou de services publics. Toutefois, on est inquiet quant à la hausse possible et significative de la valeur marchande des milieux naturels qu'on aura identifiés comme étant d'intérêt pour la conservation par les municipalités. L'acquisition de milieux naturels, c'est quelque chose dont les citoyens se préoccupent et que les citoyens ont à cœur. Régulièrement, les citoyens vont nous dire : Bien, vous avez seulement à l'acheter, le terrain, si vous voulez le préserver.

Dans le contexte actuel, c'est extrêmement difficile. L'acquisition des milieux naturels doit demeurer à la portée des organismes municipaux afin qu'ils puissent contribuer aux efforts de conservation. Un encadrement spécifique déterminerait la valeur des milieux naturels, rassurerait les organisations municipales qui appréhendent une augmentation indue de leur valeur foncière après la diffusion de leur planification liée à la protection de l'environnement et de la biodiversité et qui permettrait d'assurer une meilleure prévisibilité budgétaire.

Nous souhaitons mettre l'emphase aujourd'hui sur l'importance, dans le PL 22, du respect des pouvoirs habilitants et de planification territoriale appropriée attribuée aux municipalités en vertu de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Les organismes municipaux sont les premiers responsables de l'aménagement du territoire et ont des obligations de plus en plus grandes en matière de protection de l'environnement, de sécurité publique ou de lutte et d'adaptation aux changements climatiques. Selon les dispositions de la Loi sur l'aménagement et de l'urbanisme, une municipalité peut restreindre, régir et prohiber des usages, notamment dans un objectif de protection de l'environnement. Ses pouvoirs habilitants sont notamment conférés par certains paragraphes de l'article 113 de la LAU.

De plus, les dernières réformes du gouvernement visant à moderniser les pratiques en aménagement du territoire obligent les municipalités à prendre des actions fortes pour améliorer la planification de leur développement et pour répondre aux défis indéniables auxquels elles font et feront face dans les prochaines années. Pensons, par exemple, à l'adoption de la Politique nationale d'architecture et d'aménagement du territoire et son plan de mise en œuvre, mais encore l'obligation faite aux MRC d'identifier des milieux naturels, des milieux humides, hydriques à conserver dans leurs plans régionaux, dans leurs...

Dans ce contexte, nous soulevons le très haut risque que certaines dispositions du PL 22, et notamment les articles 170 et 171, pourraient avoir comme graves conséquences de reconnaître automatiquement l'application du concept d'expropriation déguisée lors de toute utilisation d'un pouvoir prévu dans la LAU. Ainsi, un règlement, même validement adopté en vertu du cadre applicable de la LAU, qui restreint, régit ou prohibe des usages sur un terrain, constituerait un risque pour les municipalités d'être poursuivies en justice et donnerait droit à une indemnité aux propriétaires. Cette situation est susceptible d'avoir un impact important sur l'état des finances publiques municipales et pourrait compromettre l'intérêt des municipalités à adopter des résolutions et des mesures réglementaires pour protéger les milieux naturels, maintenir la biodiversité et lutter contre les changements climatiques.

À ce titre, la CMQuébec demande au gouvernement de s'assurer que le PL 22 reconnaisse que le pouvoir particulier attribué aux municipalités de restreindre, régir ou prohiber tous les usages du sol par la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, principalement en vertu de l'article 113, ne sera pas assimilé à de l'expropriation déguisée, et qu'il permette aux organismes municipaux de répondre aux objectifs et obligations légales qui leur incombent, en matière d'aménagement du territoire, de sécurité publique et de protection de l'environnement, sans indemnisation.

• (15 h 50) •

L'entrée en vigueur des dispositions... Pour terminer notre représentation au sein de cette commission, la communauté souhaite partager sa préoccupation quant à l'entrée en vigueur des dispositions. En effet, il est notamment prévu, à l'article 244, que la loi entrera en vigueur six mois après sa sanction. La CMQuébec est préoccupée de ce délai, car il pourrait entraîner plusieurs impacts et incertitudes au sein des municipalités du territoire métropolitain. Dans un premier temps, les municipalités pourraient subir une pression administrative importante de la part de certains propriétaires qui chercheraient à faire valoir l'usage le meilleur et le plus profitable. Ceci pourrait se concrétiser par le dépôt de demandes de permis de construction auprès de services d'urbanisme et des demandes de changement de zonage pour faire valoir de nouveaux usages sur un immeuble.

Ensuite, le délai de prescription de trois ans, pour effectuer un recours en expropriation déguisée, n'étant pas en vigueur avant six mois après... pardon, n'étant pas en vigueur avant six mois de la sanction, les municipalités pourraient...

Mme Asselin (Marie-Josée) : ...pendant sa période de six mois, faire face à une hausse des recours judiciaires à l'égard d'un acte municipal pris en vertu de la... il y a de nombreuses années. Le délai de six mois avant l'entrée en vigueur des dispositions pourrait avoir comme conséquence de ralentir les projets des municipalités qui attendront les délais prescrits pour mettre en application les actions de protection de l'environnement ou de sécurité publique qu'elles souhaitent mettre en place via leur planification. Par exemple, dans un contexte d'incertitude quant au recours judiciaire pour expropriation déguisée, les MRC pourraient vouloir attendre de mettre en vigueur leur nouveau cadre légal avant d'adopter les plans régionaux des milieux humides hydriques prévus pour 2023. Nous proposons ainsi au gouvernement de modifier l'entrée en vigueur des dispositions du p.l. n° 22 à la date de sanction de la loi afin d'éviter les incertitudes financières et administratives aux municipalités.

En guise de conclusion, nous soulignons que le projet de loi établit la procédure et les règles applicables dans une démarche d'appropriation. Dans l'ensemble, elle nous semble adéquate pour des expropriations réalisées dans le cadre de projets d'infrastructure, comme pour la construction de routes ou de réseaux d'égouts et d'aqueducs. Nous croyons toutefois que certaines dispositions de ce projet de loi compromettent sérieusement certains pouvoirs habilitants des municipalités en matière de protection de l'environnement et de sécurité publique et que l'adoption du PL 22, dans sa forme actuelle, aura comme conséquence de freiner les municipalités dans leurs initiatives de conservation et de protection des milieux naturels, le tout dans un contexte où les municipalités doivent s'adapter aux différents changements environnementaux et climatiques. La C.M. Québec souhaite donc des modifications au présent p.l. n° 22 en fonction des recommandations qu'elle formule dans son mémoire. Bien entendu, nous restons à la disposition pour échanger sur l'ensemble de nos interventions avec l'ensemble des membres de la Commission. Nous vous remercions infiniment pour votre écoute.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup pour votre exposé. Merci encore une fois au gouvernement qui a imputé deux minutes de leur temps pour vous permettre de terminer votre présentation. Alors, je cède la parole à Mme la ministre.

Mme Guilbault :Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous d'être présent au nom de la Communauté métropolitaine de Québec, à Mme Brodeur aussi qui vous accompagne. C'est un plaisir de vous recevoir. Évidemment, la CMM vous précédait, donc d'avoir nos deux communautés métropolitaines une à la suite de l'autre, je trouve ça encore plus intéressant parce qu'on est en mesure de voir beaucoup de points communs, d'ailleurs, puis on a eu avant ça la Ville de Montréal, la FQM et l'UMQ.

On sent, chez vous aussi d'ailleurs, si j'ai bien compris, là, un appui puis une grande ouverture, voire une certaine reconnaissance, je dirais, dans le dépôt de ce projet de loi là, parce que, premièrement, c'est un engagement que nous, on avait pris. Et aussi, ça fait 40 ans qu'il n'y a pas eu de modifications et, depuis 40 ans, sont apparus toutes sortes de phénomènes de société, toutes sortes de phénomènes environnementaux dont découlent de plus en plus d'obligations, à la fois pour le gouvernement, pour les municipalités. Et les outils pour être capable de donner suite à ces obligations-là et à cette mouvance là, entre autres de protection des milieux naturels, puis aussi de multiplication des chantiers d'infrastructures logements, transports font en sorte qu'on a besoin de moderniser les outils qui sont à notre disposition, et c'est ce que propose de faire ce projet de loi là, entre autres projets de loi. Évidemment, il y a des choses qui se font aussi aux Affaires municipales. Mais je pense qu'avec la Loi concernant l'expropriation, déjà, on va donner un bon coup de pouce à nos municipalités.

Vous ne l'avez pas... Bien, je vais commencer par ce que vous avez abordé, puis, peut-être, après je viendrai sur un point que vous n'avez pas abordé, mais que les autres ont abordé, sur l'usage probable. Puis vous l'avez déjà abordé aussi quand même, là, mais, tu sais, on passe d'un usage possible à un usage probable. Donc, déjà, on vient resserrer, puis on vient mettre une durée finie aussi sur le trois ans. Tu sais, on essaie d'amener une notion beaucoup plus réaliste et beaucoup moins... un peu, tu sais, dans des temps infinis, avec peu de balises qui nous attachent à des considérations réelles. Puis, quand vous dites avoir peut être plus de précisions sur les preuves que les instances devraient fournir, tout ça, peut être nous donner des exemples, des exemples plus concrets.

Parce que nous, dans notre proposition de venir dire... puis c'est listé, là, tu sais d'avoir quelque chose qui respecte évidemment les règlements, notamment les règlements municipaux, qui est réalisable en raison des dimensions de la forme de la superficie, de la topographie, de la composition de l'immeuble. Tu sais, il y a un certain nombre de critères, mais qui se concrétisent dans les trois ans qui suivent la date de l'expropriation. Pour nous, c'est un peu le nerf de la guerre, là, puis de changer le possible ou probable. Puis on trouvait que ça resserrait suffisamment. Mais je serais intéressée à vous entendre peut-être là-dessus.

M. Verville (Antoine) : Oui, c'est moi qui vais répondre. Bien, merci pour la question. C'est une très bonne question. Effectivement, aussi, on est d'accord que c'est préférable d'aller sur l'usage probable que sur l'usage possible. Quand on parle de mettre davantage de balises ou préciser davantage les balises, en fait, on cherche à savoir quand est-ce qu'on va juger que c'est un usage probable qui se réalise dans les trois prochaines années. Est-ce que c'est, par exemple, où on serait favorable à ce que ce soit dans le zonage en vigueur, par exemple? Donc, si le projet nécessite un changement de zonage par le propriétaire, puis il n'y a pas de changement de zonage qui est débuté, qui est...

M. Verville (Antoine) : ...approuvé par la municipalité, mais est-ce qu'il y a réellement probabilité que ça se produise dans trois ans? On est plutôt... plutôt d'avis que non. Mais ce type de précisions là, en fait, on pense qu'elles doivent être apportées, puis, tu sais, c'est... en fait, le diable est dans les détails, hein? Ça fait qu'on saura comment on juge de l'usage probable dans les trois prochaines années mais on pourra voir aussi à quel point c'est une avancée intéressante par rapport à la situation actuelle. Donc, on n'avait pas une proposition particulière à vous formuler aujourd'hui. On pense qu'il faut faire cette réflexion-là puis convenir collectivement, là, pour le Québec, de qu'est-ce qu'un usage probable et comment on va juger, là, de la probabilité sur les trois prochaines années.

Mme Guilbault :Puis est-ce que vous avez des exemples concrets? On l'a demandé pas mal à tout le monde parce que c'est intéressant, parce que vous êtes aux premières loges puis vous le vivez vraiment dans les projets, nous aussi, d'ailleurs, à notre niveau. Mais des exemples concrets de projets, soit la ville de Québec ou dans la communauté métropolitaine, qui, en ce moment, à cause de litiges, à cause d'incapacités financières, parce que les plus petites municipalités ont des plus petits budgets évidemment, à cause de procédures judiciaires, à cause de tout ce qui est apparu avec, entre autres, le 30 % d'objectif, là, de protection qu'on s'est donné, et tout ça, des exemples de projets, soit d'infrastructures ou autre, qui sont soit mis sur la glace, qui sont soit en suspend, qui sont soit compromis... tu sais, des exemples vraiment concrets ou... Ma collègue, tout à l'heure, parlait des écoles, elle a demandé à la CMM : Avez-vous des exemples de projets d'école, de CPE? Tu sais, des projets vraiment tangibles, concrets dans la CMQ qui, en ce moment, pourraient aller plus vite ou pourraient carrément aller de l'avant versus sans être mis sur la glace à cause... grâce aux nouvelles modalités puis au fait que ça coûterait moins cher puis que ça serait moins long.

Mme Asselin (Marie-Josée) : Je prendrais l'exemple, tu sais, des PRMHH que les municipalités ont ou s'apprêtent à déposer. À partir du moment où on annonce des contraintes ou des souhaits de préserver ou de protéger certains milieux, bien, on, dans le contexte du projet de loi n° 22... Mais il y a une crainte des municipalités de s'exposer à un litige, en disant : Bien, vous aviez déjà annoncé une contrainte sur ce terrain-là. Donc, il y a comme une espèce de frilosité à aller de l'avant, notamment pour déposer les PRMHH dans une espèce de concept d'«on va mettre de la valeur ou on va mettre le spotlight sur certains milieux» en disant : Ce sont des milieux qu'on souhaite conserver, et ouvrir la porte, pour le promoteur, à une volonté de dire : Bien, on va m'empêcher de développer sur ce terrain-là.

Si on parle de projets qu'on a payés beaucoup plus cher, on va prendre, par exemple, un terrain qu'on a acheté en guise de compensation pour le garage du tramway de Québec, bien, qui était évalué à 260 000 $ qu'on a payé 2 600 000 $ parce qu'on s'était engagé à acheter un terrain pour compenser la perte de milieux humides dans la construction du garage. Donc, si on avait payé la juste valeur marchande de ce terrain-là, puis il n'y avait pas de probabilité à court terme de développement, bien, on a payé quand même passablement cher un terrain pour lequel il n'y avait pas de probabilité de développement à court terme. Donc, c'est peut-être des exemples, là, de projets pour lesquels la spéculation a fait en sorte que les coûts ont augmenté considérablement et qu'on retarde peut-être certaines acquisitions, certaines annonces en termes de protection de milieux naturels pour éviter justement d'exposer la ville.

Mme Guilbault :C'est un excellent exemple que vous venez de donner. 260 000, 2,6 millions, c'est comme vraiment 10 fois plus, là. Je veux juste qu'on se dise ça au micro. Puis, quand on parle du projet du tramway, le gouvernement est un partenaire financier majeur. Donc, c'est dire à quel point ça coûte cher à la ville, ça coûte cher au gouvernement. Et tout cet argent-là sort des mêmes poches. Tu sais, parce qu'après ça nous autres, il faut qu'on... ça passe dans le dossier d'affaires, et je veux dire tout ça, c'est majeur. Alors... Bien, parfait. Merci. Peut-être enchaîner avec le point sur lequel je voulais en venir avec vous, les articles 170 et 171. Je ne crois pas que vous l'ayez abordé, du moins pas aujourd'hui. Puis je ne veux pas vous mettre sur la sellette. Si vous n'avez rien de particulier à dire, c'est correct aussi. Mais tout le monde l'a abordé. Ce sont les articles qui touchent directement, indirectement ou, en tout cas, plus ou moins explicitement l'expropriation déguisée, qui est un enjeu pour beaucoup de municipalités. Alors, certains disaient : On veut... La plupart disaient : On veut les maintenir. D'autres disaient : Peut-être ça devrait être traité... d'autre part, dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, par exemple, ça devrait être traité autrement. Est-ce que vous, vous avez une opinion là-dessus? Est-ce que vous considérez que c'est une... déjà, c'est une avancée par rapport à ce qui se fait en ce moment dans les paramètres qu'on introduit? Est-ce que...

• (16 heures) •

Mme Asselin (Marie-Josée) : Effectivement, c'est effectivement une avancée, les articles 170, 171, mais on souhaite toutefois que ces articles-là nous permettent de maintenir les pouvoirs habilitants de la LAU, donc qu'on puisse... qu'on ne puisse pas être...


 
 

16 h (version non révisée)

Mme Asselin (Marie-Josée) : ...accuser la municipalité d'expropriation déguisée pour des actes qui auraient été posés conformément, là, à la LAU antérieurement à l'adoption du projet. Donc, si on veut réaliser nos OGAT, bon, on a vraiment besoin que ces articles-là nous permettent de maintenir nos décisions antérieures, nos pouvoirs habilitants. Je ne sais pas, M. Verville, si vous voulez continuer.

M. Verville (Antoine) : Oui. Tout à fait, c'est à notre recommandation 3 dans le projet de mémoire. En fait, on souhaite que le projet de loi reconnaisse le pouvoir particulier qui est attribué aux municipalités de restreindre, régir, prohiber les usages en vertu de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Puis ce qu'on souhaite, ce n'est pas nécessairement le retrait, là, des articles 170, 171, mais vraiment d'aller clarifier que lorsqu'on agit en vertu de la LAU, dans nos champs de pouvoirs municipaux, là, de restreindre, prohiber, et régir les usages, mais qu'il n'y ait pas d'expropriation déguisée possible, de recours au concept d'expropriation déguisée puis qu'on puisse, dans le fond, utiliser nos pouvoirs sans indemnisation.

Par ailleurs, les autres éléments des articles 170, 171, qui sont introduits, eux, sont intéressants, là. Donc, c'est pour ça que nous, on ne propose pas le retrait, mais vraiment d'aller préciser, là, cette nuance-là en lien avec nos pouvoirs habilitants à la LAU.

Mme Guilbault :Parfait. Puis peut-être dernière petite question avant de céder la parole à mon collègue de René-Lévesque sur l'application. Je pense, vous l'avez dit... d'ailleurs, j'ai dit que vous n'aviez pas abordé, mais c'est vrai, vous l'avez abordé finalement, je l'ai ici. Sur le six mois, je pense que vous, vous êtes probablement favorable à ce que ça entre en application au moment de la sanction de la loi.

Mme Asselin (Marie-Josée) : Absolument, pour les mêmes raisons que celles qui ont été évoquées par ceux qui nous ont précédés, que je ne répéterai pas, mais exactement pour les mêmes raisons, pour des notions d'incertitude, de délai d'application. Donc, on est plutôt en faveur à une application directement au moment de la sanction.

Mme Guilbault :Parfait. Merci. Je vais céder... au député René-Lévesque.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci. M. le député de René-Lévesque, vous disposez de 4 min 30 s.

M. Montigny : Merci, Mme la Présidente. Je veux juste revenir sur ce que vous venez de discuter avec Mme la ministre, sur la question de précisions au niveau des articles, là, que vous avez nommés tout à l'heure... la CMM nous parlait, là. Peut-être de se donner dans un autre véhicule ou... toute la notion d'immunité. J'aimerais ça peut-être vous entendre comme... avec ce que les gens de la Communauté métropolitaine de Montréal amenaient, voir s'il n'y a peut-être pas des éléments de convergence, là, que vous pourriez voir là-dedans. Est-ce que c'est le bon véhicule, le projet de loi n° 22, ou est-ce qu'on ne pourrait pas utiliser aussi un autre véhicule, peut-être avec les Affaires municipales, pour venir préciser certaines choses qui vous permettraient d'avoir quelque chose qui a un peu... je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, mais ce que la CMM parlait tout à l'heure par rapport à la notion d'immunité? Je ne sais pas. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Verville (Antoine) : Mais effectivement, c'est une présentation puis un propos qui était fort pertinent de la CMM. On pense aussi que ça peut être traité par ailleurs, par exemple dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Notre crainte, par contre, la façon dont les articles sont rédigés actuellement, 170 et 171, dans le projet de loi n° 22, s'ils ne sont pas ajustés, mais on vient confirmer finalement qu'à toutes les fois qu'on fait un acte municipal, on peut être poursuivi en expropriation déguisée. Donc, nous, on craint, là, une porte ouverte, un message clair, finalement, à l'ensemble des propriétaires que lorsqu'une municipalité utilise ses pouvoirs de restreindre, régir ou prohiber les usages, mais elle est admissible à faire un recours en expropriation déguisée, puis c'est cette porte ouverte là qui nous inquiète. Elle pourrait être encadrée, refermée par une autre loi, mais si on va vers l'adoption des articles tels qu'ils sont actuellement sans avoir attaché cet autre bout-là du casse-tête, là, on a une préoccupation sur la situation, là, que ça peut entraîner.

Mme Asselin (Marie-Josée) : Parce que n'importe quelle contrainte qu'on aurait émise, en forte pente ou dans d'autres RCI ou... ouvrirait la porte, dans le libellé actuel, à des poursuites pour expropriation déguisée. Donc, c'est vraiment... c'est ce qu'on souhaite voir, se refermer cette porte-là, quand les décisions ont été prises en fonction des pouvoirs, là, habilitants des villes.

M. Montigny : Parfait. Je vous entends bien là-dessus sans problème. Un autre élément sur lequel j'aimerais arriver, si j'ai du temps, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Maccarone) : Deux minutes.

M. Montigny : Deux minutes. O.K. Je vais y aller avec celle-là. Il pourrait arriver, puis on ne sait pas ce que... les décisions qu'on va prendre, là, que finalement, tu sais, toute la question des délais qu'on a des discussions pour l'application, là, de cette loi-là, le fameux six mois qu'on parlait, aviez-vous... je suis en réflexion, moi, personnellement, là-dedans, s'il y avait des éléments à prioriser, là, qu'on devrait appliquer rapidement, mettons qu'on n'appliquerait pas tout, là, est-ce que vous vous risqueriez à dire : Ça, il faut que ça s'applique vite, là? Mettons, là, qu'on décidait de ne pas tout appliquer... prioriser certaines affaires qui doivent être appliquées vite, vite, là.

Mme Asselin (Marie-Josée) : Vous avez des bonnes questions. Puis je vais me lancer, tu sais, je pense que la juste valeur marchande est un élément extrêmement important...

Mme Asselin (Marie-Josée) : ...pour nous permettre d'aller de l'avant dans les acquisitions qu'on souhaite faire pour différents projets structurants et pour la protection des milieux naturels. Puis établir la valeur marchande d'un milieu boisé ou d'un milieu humide, ce n'est pas si évident que ça. C'est plus facile avec un immeuble, avec un terrain construisible que d'évaluer la valeur d'un milieu écologique. Mais, à mes yeux à moi, puis je parle en termes d'élue municipale qui entend ce que les citoyens lui disent, ce qui presse le plus, c'est de nous permettre de faire des acquisitions à des fins notamment environnementales à un juste coût pour les municipalités et se sortir de la spéculation immobilière.

Donc, actuellement, il y a des gens qui ont des vastes propriétés, qui n'attendent qu'un geste de la ville souhaitant les acheter pour nous offrir... effectivement, nous les vendre, mais à des prix qui sont complètement démesurés compte tenu du pouvoir de payer des citoyens.

Donc, s'il y a un élément là-dedans qui, pour nous, est essentiel, c'est vraiment la notion de juste valeur marchande plutôt que la valeur au propriétaire. Je pense que c'est le cœur, de... le cœur des problèmes qu'on vit dans les municipalités notamment, mais peut-être que...

M. Verville (Antoine) : Tout à fait. C'est la priorité, là, pour le projet de loi, très certainement. On amène une nuance, toutefois, dans notre mémoire, là, dans notre position sur le fait que la juste valeur marchande peut bien se prêter à des projets d'infrastructures routières, par exemple...

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci.

M. Verville (Antoine) : ...transport collectif...

La Présidente (Mme Maccarone) : Fort intéressant, mais nous allons poursuivre les échanges avec l'opposition officielle. M. le député de l'Acadie, la parole est à vous.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, bon après-midi. Merci. Merci d'être avec nous. Merci pour votre mémoire.

Il y a des éléments que j'aimerais clarifier avec vous. Dans votre document, à la recommandation 2, vous dites... Bon, d'abord, recommandation 1, vous parlez, bien sûr, de la valeur marchande. Ça, vous en avez parlé, c'est très clair. Mais, à la recommandation 2, vous dites : «Maintenir l'introduction de la notion d'usage le meilleur et le plus profitable afin d'assurer la détermination d'une indemnité équitable tant pour l'exproprié que pour la collectivité». Est-ce que vous pouvez être plus explicites? C'est un ajout à la juste valeur marchande? Comment... Pouvez-vous être plus clairs là-dessus, s'il vous plaît?

M. Verville (Antoine) : Oui, tout à fait. La notion d'usage le meilleur et le plus profitable a été introduite dans le projet de loi n° 22. Donc, on soutient cette introduction-là. On pense que c'est la bonne voie à suivre, c'est la bonne piste.

La deuxième partie de notre recommandation, par contre, est d'aller baliser, là, qu'est-ce qu'on veut dire par «probable dans un délai de trois ans». C'est ce qu'on discutait un peu tout à l'heure. Bon, nous, on est d'avis que, si c'est un projet pour lequel on est dans le zonage en vigueur, et cetera, bien, c'est clair que c'est un usage qui est probable, mais le spectre, là, des possibles est très, très grand. Un propriétaire qui serait, par exemple, dans un périmètre urbain mais pas dans un zonage résidentiel, est-ce qu'il est en mesure d'affirmer qu'il y a un usage probable résidentiel dans les trois prochaines années? Donc, où est-ce qu'on trace la ligne? Elle va avoir un impact, là, assez majeur, finalement, sur la valeur de l'indemnisation qui sera donnée.

Donc, on est en faveur, on appuie le principe qui est introduit dans le projet de loi. On se questionne sur son application, où est-ce qu'on va tracer la ligne.

M. Morin : D'accord. Je vous remercie. D'ailleurs, parlant d'usage probable plutôt que d'usage possible... évidemment, bon, «probable», c'est quelque chose qui normalement devrait se matérialiser davantage, mais vous disiez tout à l'heure : Qu'est-ce qui arriverait... On veut que ce soit probable. Par exemple, quelqu'un qui aurait fait une demande de changement de zonage, est-ce que c'est probable qu'il pourrait obtenir la demande ou éventuellement un permis dans les trois ans? Si mon souvenir est bon, là, vous avez parlé un peu de cet exemple-là, mais quelqu'un qui fait une demande de changement de zonage, il va la faire à la ville. Donc, la ville, dans les trois ans, ne sera pas capable de lui répondre?

Mme Asselin (Marie-Josée) : Bien, ça dépend toujours de l'ampleur du projet de changement de zonage, du secteur qui est visé, de la sensibilité des citoyens, aussi, qui habitent autour. Parce que, dans les processus de changement de zonage, il y a nécessairement un processus de consultation citoyenne qui doit s'enclencher. La ville peut utiliser, je vais parler pour la ville de Québec, l'article 74.4 pour des projets d'école, de CPE, de logement social où l'usage collectif... où le gain collectif est supérieur et qu'on ne veut pas nécessairement aller en consultation avec l'ensemble des citoyens qui habitent autour pour éviter le «pas dans ma cour» et qu'on a besoin de ces espaces-là pour des besoins sociaux.

• (16 h 10) •

Quand on demande un changement de zonage pour faire une rue, une rue résidentielle, développer un projet, bien, on passe nécessairement par des étapes de consultation citoyenne qui peuvent aller jusqu'à un processus référendaire demandé par les citoyens. Ça fait qu'il y a tout un processus de consultation publique qui peut s'enclencher. Donc, c'est possible, dans certains cas, que la demande de changement de zonage soit beaucoup plus longue...

Mme Asselin (Marie-Josée) : ...notamment en raison, là, des consultations et des processus référendaires que les citoyens peuvent enclencher dans des demandes de changement de zonage.

M. Morin : Sauf... Oui.

M. Verville (Antoine) : Et d'ailleurs, ce n'est pas parce qu'un propriétaire ou un promoteur fait une demande de changement de zonage qu'il obtiendra un résultat favorable à la fin, hein? Ce n'est pas toujours oui, la réponse à un changement de zonage, même chose un peu si on va demander un certificat d'autorisation ou une autorisation gouvernementale au ministère de l'Environnement. Donc, nous, on a une crainte que si le... Par exemple, de dire, bien, j'ai entamé un processus, j'ai fait une demande de zonage. Donc, maintenant, c'est un usage probable. Mais que ça puisse devenir une voie, finalement, pour que le propriétaire, là, place une demande pour démontrer qu'il est en processus puis que son projet est probable. Donc, c'est pour ça qu'on dit : Il faut venir bien le baliser. L'idée est bonne. Si les balises sont bonnes, ça fonctionnera bien, mais il faut bien le baliser.

M. Morin : La balise, ça serait de trois ans, notamment.

M. Verville (Antoine) : La balise de trois ans, nous, on est assez favorable aussi d'utiliser la notion du zonage en vigueur actuellement, là. Donc...

M. Morin : Puis je vous suis complètement. Puis vous avez tout à fait raison. Ce c'est pas parce que quelqu'un demande une modification du zonage qu'il va l'obtenir. Ça, c'est sûr, je veux dire. La Ville va faire une évaluation, va suivre la loi et puis, après ça, va prendre une décision. Mais où... Ma question est la suivante. C'est que pour la personne qui, en fait, vise ou peut vivre une expropriation, si lui fait une demande de changement de zonage éventuellement, bien, il n'est pas responsable ou il n'a pas les leviers pour travailler, faire avancer le dossier pendant la période de trois ans, parce que la Ville en a aussi une possibilité. Donc, ça m'apparaissait, tu sais, quand vous avez dit que vous... Vous avez donné votre exemple tout à l'heure. Trois ans, c'est peut-être des fois un peu court, mais ce n'est pas nécessairement à cause de la personne qui a fait la demande, tu sais ce que je veux dire. Le processus peut faire en sorte que ça va plus loin que trois ans. Puis, à ce moment-là, est-ce que la personne va être défavorisée?

M. Verville (Antoine) : Nous, on est d'avis que le projet... Le probable sur trois ans, ça veut dire qu'il est déjà bien amorcé au moment où on ferait l'acte d'expropriation par exemple. Donc, pas dans les idées, les cartons d'un promoteur, mais le projet est déjà vraiment bien amorcé. Donc, normalement, le zonage est déjà confirmé comme étant le bon, ou il faudrait vraiment démontrer que c'est un projet qui est en cours, que ce n'est pas un projet qui était à l'état d'idée puis qu'on pense qu'en trois ans on aurait le temps de le réaliser si tout va bien, et que la ville accepte mon changement de zonage, et que le certificat d'autorisation de l'environnement arrive, là. Donc, ce qu'on souhaiterait, c'est que les balises soient très, très claires pour s'en tenir aux projets qui sont vraiment amorcés ou en tout cas vraiment sur la table de façon très, très claire, puis que les autres projets qui sont à l'état d'idée, bien, ils ne rentrent pas dans cette catégorie d'usage probable, là, là, de se réaliser dans les trois prochaines années.

M. Morin : Et ça, et ça, je vous suis absolument, là. Évidemment, on ne veut pas que quelqu'un se lève un matin et puis qu'il dise : Ah! bien, peut être que je pourrais faire quelque chose. Dans le fond, ça, c'est d'accord. Mais trouvez-vous que la loi... Pour illustrer ce que vous venez de dire, trouvez-vous que la loi est assez précise?

M. Verville (Antoine) : Bien, nous, on demande d'apporter davantage de balises.

M. Morin : Puis avez-vous...

M. Verville (Antoine) : Maintenant, est-ce les balises doivent être dans la loi, ou doivent être dans un guide d'interprétation, ou dans autre chose? Là, on va laisser dans le fond le travail à faire, là, au gouvernement, mais on pense que ces balises-là doivent être apportées. Dans l'état actuel, on peut l'interpréter de différentes façons, là, l'usage le plus probable. Si on l'interprète, là, avec un peu de mauvaise foi, j'ai placé mon certificat d'autorisation, etc., bien, on n'est pas en train de changer vraiment la situation actuelle qui est sur l'usage la plus profitable. Donc, nous, on veut vraiment, là, que la situation change, aille vers un réel usage probable sur une période de trois ans, donc, reconnaître les projets qui sont en cours, qui sont amorcés, puis laisser les projets, là, qui étaient à l'état de projet dans un petit tiroir, là, de côté.

Mme Asselin (Marie-Josée) : Bien, éviter notamment que quelqu'un qui a un terrain puis qui prend conscience de cette opportunité-là, de dire : Bien, je vais le... J'ai un terrain forestier. Je vais demander un changement de zonage et je serai indemnisé pour expropriation déguisée parce que je signale une potentielle... un potentiel développement auquel je n'avais pas vraiment pensé avant. Mais là, je vois l'opportunité de profiter de cette... de cette expropriation-là ou de ces sommes-là d'indemnités. Il y a aussi toute la capacité financière d'un promoteur, quelqu'un qui possède une terre, un terrain boisé puis qui décide de dire : Bien, moi, j'avais un projet de construire je ne sais pas combien d'unités d'habitation sur ce terrain-là. Bien, il devrait y avoir une certaine capacité d'analyse qui permet de sortir de ce lot-là les projets qui sont plutôt des projets que je vais dire opportunistes dans le contexte, là, de l'arrivée du PL 22 puis d'indemnités potentielles pour expropriation.

M. Morin : Non, ça, c'est... Ça, c'est bien clair, mais en fait, si vous avez des suggestions ou des recommandations, parce qu'évidemment, dans le cadre du processus législatif, le gouvernement fait des choses, mais l'opposition, quand on travaille en commission, à un moment donné, on va avoir une analyse article par article. Donc, on peut aussi proposer des amendements. Alors, c'était dans ce sens-là. Donc, on peut également vous aider à faire avancer vos dossiers...

M. Morin : ...donc, l'autre chose. Vous avez parlé parfois de difficultés pour l'acquisition de milieux naturels. Et avez-vous des exemples d'enjeux que vous rencontrez spécifiquement?

Mme Asselin (Marie-Josée) : Bien, par exemple, aux alentours du bassin versant de la prise d'eau potable de la ville de Québec, si on voulait acquérir l'ensemble des terrains qu'on jugerait intéressant de posséder pour éviter, justement, du développement autour du lac pour protéger notre source d'eau, bien, c'est plusieurs millions de dollars de terrains qu'on devrait acquérir pour, justement, assurer la protection de notre prise d'eau. Donc, c'est dans des contextes comme ceux-là où, même si on identifie des terrains qui seraient profitables pour la conservation de milieux humides, de milieux hydriques ou de boisés ou d'espaces verts, bien, quand on vient pour en faire l'inventaire, bien, les sommes requises, là, pour acquérir ces terrains-là sont vraiment astronomiques actuellement. Donc, ça ne nous permet pas de faire les acquisitions, il faut s'associer avec des groupes d'acquisition, il faut essayer de travailler avec des partenaires privés. Mais ce n'est pas à la portée des municipalités de faire l'acquisition de l'ensemble des terrains dont ils auraient besoin pour protéger des espaces verts, dont les citoyens... ou que les citoyens sont attachés puis les citoyens nous demandent de jouer notre rôle dans la lutte aux changements climatiques, notamment.

M. Morin : Bien, je vous remercie. Quand on parle d'expropriation, souvent on parle... On a entendu beaucoup parler de promoteurs, de spéculateurs, etc. Mais il y a aussi des dossiers où c'est des gens... tu sais, en fait, ça peut être des petits propriétaires qui ont des petites maisons, ça peut être des locataires également. D'après vous, un propriétaire d'une résidence dans la grande région de Québec qui serait exproprié serait en mesure, avec la loi, avec le projet de loi, de se retrouver une maison semblable puis il ne perdrait pas d'argent? Puis, idem pour les locataires?

Mme Asselin (Marie-Josée) : Bien, en fait, il y a différents... je pense à la Communauté métropolitaine de Montréal qui a répondu un peu à la même... On accompagne les gens qui sont visés par des expropriations à se relocaliser, à se trouver d'autres loyers quand on pense à des locataires. Pour les expropriations de propriétés, les gens négocient la juste valeur marchande avec les indemnités requises. C'est du cas par cas. Mais là on est vraiment dans d'autres leviers municipaux d'accompagnement, là, pour la relocalisation de ces gens-là. Je ne sais pas, Antoine, si tu...

M. Verville (Antoine) : Bien, c'est un peu la même réponse qui a été donnée par nos collègues précédemment. On pense qu'en ramenant la juste valeur marchande, en fait, on vient rétablir un équilibre qui était peut-être en ce moment à la faveur du propriétaire dans plusieurs cas. Donc, juste valeur marchande, la notion le dit, c'est supposé être la valeur juste autant, là, pour la société que pour le propriétaire. C'est ce qu'on souhaite rétablir, évidemment ne pas établir non plus, là, de préjudices aux propriétaires ou aux locataires, très certainement.

M. Morin : Et puis, pour le locataire qui est dans un logement depuis longtemps, on connaît le problème des loyers présentement, il serait en mesure d'être indemnisé pour se retrouver un logement ailleurs?

Mme Asselin (Marie-Josée) : Il y a des mesures d'accompagnement, là, dans les municipalités pour la relocalisation des gens qui doivent malheureusement quitter leur loyer. Mais c'est encadré aussi par d'autres mécanismes, là, au sein des municipalités.

M. Morin : Très bien. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Maccarone) : Merci. On poursuit les échanges avec la deuxième opposition. Le député de Taschereau, la parole est à vous.

M. Grandmont : Combien de temps.

La Présidente (Mme Maccarone) : Vous disposez de 4 min 30 s.

M. Grandmont : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci pour votre mémoire. Content de vous retrouver. J'aimerais d'abord aller sur la question, là, des usages probables. Je trouve ça très intéressant que vous apportiez des nuances par rapport à ça. Déjà de donner des balises pour que ça soit plus clair. Je comprends l'importance que ça revêt pour vous. Tout à l'heure, précédemment avec un autre groupe, on a fait la suggestion, là, d'aller pour un usage prévu. Je veux juste vous entendre là-dessus. Est-ce que ça va un peu dans le sens de ce que vous aviez en tête? Je comprends qu'il faut qu'un promoteur ait déjà des idées très achevées. Quand vous décriviez un peu le processus, on comprenait qu'il avait vraiment un projet qui était en train de se faire. Est-ce que cette notion-là pourrait peut-être vous rejoindre?

• (16 h 20) •

Mme Asselin (Marie-Josée) : Bien, le «prévu», ça dépend prévu pour qui. Ça peut être prévu par le promoteur, pas nécessairement dans les visées souhaitées par la Ville ou par les citoyens. Donc, la notion de «prévu»... Je pense que j'aime bien la notion de «probable», parce qu'entre l'espoir et le rêve d'un promoteur et la réalisation concrète d'un projet en fonction des visées ou des objectifs qui sont poursuivis par les municipalités, notamment en raison de la lutte aux changements climatiques, on est ailleurs. Tu sais, il y a des choses qui étaient peut-être probables il y a quelques années, mais qui le deviennent de moins en moins si on veut jouer notre rôle en matière environnementale et aider à lutter contre les changements climatiques et faire les acquisitions pour atteindre notre 30 % d'aires protégées...

Mme Asselin (Marie-Josée) : ...bien, entre ce qui était prévu, peut-être, il y a 10 ans, ou ce qui était probable il y a 10 ans, ça se peut que les choses aient changé depuis. Donc, j'aime bien l'idée du «probable» à l'intérieur de trois ans, c'est-à-dire, est-ce que ça répond à des objectifs qui sont communs entre le promoteur qui souhaite développer quelque chose et les visées de la ville, qui représente des citoyens, et qui a des besoins d'acquisition ou de protection, là, donc.

M. Grandmont : Et ce que j'entends, c'est qu'on a besoin de davantage de balises, de définitions, qu'on doit être plus concrets, en fait, là, dans le projet lui-même. Parfait, excellent. Sur les questions d'acquisition, vous l'avez nommé tantôt, là, ce n'est pas évident, là, je pense, pour une municipalité, de penser à... envisager dépenser des millions de dollars pour acquérir des terrains qui sont d'intérêt. Notamment pour protéger la ressource d'eau potable de la ville de Québec, je comprends que c'est très important. Je me demandais : Comment on arrive à fixer la valeur d'un milieu, d'un milieu humide, par exemple?

Mme Asselin (Marie-Josée) : Bien, ce n'est pas évident, puis c'est ce qu'on dit, là. Pour ce qui est les acquisitions de propriétés, de terrains plus réguliers, c'est plus facile. Quand on parle d'acquérir des milieux humides, c'est plus difficile, puis c'est ce qu'on pense aussi, c'est qu'il doit y avoir des balises plus claires pour la juste valeur marchande, là, de milieux naturels. Mais, vous avez raison, actuellement, quand on parle d'acquisition, si on n'est pas sur la juste valeur marchande, ce qui n'est pas le cas actuellement, par ailleurs, on paie ces terrains-là ou on nous fait des offres d'achat beaucoup trop... des offres de vente, plutôt, beaucoup trop... à des prix beaucoup trop élevés, pour ce qui est de la juste valeur marchande. Donc, on va avoir besoin, on a absolument besoin de pouvoir appliquer la juste valeur marchande. Pour ce qui est de comment on la détermine, c'est à partir des éléments qu'on a nommés dans notre mémoire, que ce n'est pas nécessairement si simple que ça, là, pour quantifier.

M. Verville (Antoine) : C'est une excellente question. Puis une grande préoccupation qu'on a, en fait, c'est : on est en accord avec la valeur marchande, mais, quand on l'applique aux milieux naturels, qu'est-ce que ça veut dire, la valeur marchande? Par exemple, dans la région, nous, on a fait des études sur la valeur écologique des milieux naturels. On est en train de faire un plan métropolitain d'aménagement, qui veut cibler des milieux naturels d'intérêt métropolitain, même chose dans les PRMHH. Donc, on commence à avoir des milieux, là, on les cible, on dit : C'est ceux qui ont la plus grande valeur écologique. Donc, pour le propriétaire, c'est ce que ça fait, augmenter sa valeur marchande. Ou la valeur marchande, est-ce que c'est la valeur de l'évaluation foncière, simplement, dans un boisé, en dehors d'un périmètre urbain, donc qui n'est pas très élevée?

Il y a aussi, par ailleurs, le ministère de l'Environnement, avec le Règlement sur la valeur de la compensation pour l'atteinte aux milieux humides, qui fixe une valeur, dans un règlement, qui est la valeur de destruction, dans ce cas-ci, si on détruit un milieu humide, combien on paie. Donc là, nous, on voudrait, minimalement, s'assurer que ça ne coûte pas moins cher, détruire le milieu humide, que ça coûte pour l'acquérir, de l'autre côté, pour le protéger. Donc, il y a une forme de réflexion à faire sur quelle est la valeur marchande des milieux naturels qu'on souhaite associer, en lien avec le p.l. n° 22, là, pour s'assurer que ce soit équitable des deux côtés, puis que ça ne devienne pas plus difficile de protéger que de détruire.

M. Grandmont : Merci. Non, ça va être beau, c'est correct, merci.

La Présidente (Mme Maccarone) : Excellent. Merci beaucoup, Mme Asselin et M. Verville, Mme Peltier et Mme Brodeur, qui est assise en arrière, pour votre contribution à nos travaux.

Compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux au mardi le 19 septembre 2023, à 9 h 45, où elle poursuivra son mandat. Merci.

(Fin de la séance à 16 h 25)


 
 

Document(s) related to the sitting