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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Wednesday, February 5, 2020 - Vol. 45 N° 44

Special consultations and public hearings on Bill 44, An Act mainly to ensure effective governance of the fight against climate change and to promote electrification


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Table des matières

Auditions (suite)

La Planète s'invite au Parlement

Nature Québec et Greenpeace

Mémoires déposés

Intervenants

Mme Christine St-Pierre, présidente

M. Benoit Charette

M. Sylvain Gaudreault

Mme Marie Montpetit

M. Gregory Kelley

Mme Ruba Ghazal

M. Richard Campeau

Mme Agnès Grondin

*          Mme Violaine Brisebois-Lavoie, La Planète s'invite au Parlement

*          M. François Geoffroy, idem

*          Mme Alice-Anne Simard, Nature Québec

*          M. Patrick Bonin, Greenpeace

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures vingt-cinq minutes)

La Présidente (Mme St-Pierre) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 44, Loi visant principalement la gouvernance efficace de la lutte contre les changements climatiques et à favoriser l'électrification.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Lamothe (Ungava) sera remplacé par Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice); M. Reid (Beauharnois), par M. Provençal (Beauce-Nord); M. Barrette (La Pinière), par M. Kelley (Jacques-Cartier); et M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), par M. Gaudreault (Jonquière).

Auditions (suite)

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, cet avant-midi, nous entendrons La Planète s'invite au Parlement — bienvenue au parlement — et Nature Québec. Donc, comme vous le savez, vous avez 10 minutes pour faire votre exposé. Puis nous procéderons par la suite à une période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à présenter votre rapport et à procéder à votre exposé. La parole est à vous.

La Planète s'invite au Parlement

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : Merci.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Oh! oui, vous devez décliner vos noms et titres, s'il vous plaît, avant de commencer.

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : Avec plaisir. Violaine Brisebois-Lavoie, co-porte-parole de La Planète s'invite au Parlement.

M. Geoffroy (François) : François Goeffroy, co-porte-parole de La Planète s'invite au Parlement.

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : MM., Mmes les élus, merci enfin d'avoir invité La Planète au parlement. Nous sommes un collectif citoyen qui se mobilise déjà depuis plus d'un an à travers l'organisation de manifestations et de mobilisations de grève, la dernière en date étant celle du 27 septembre organisée avec les étudiants, les centrales syndicales et d'autres groupes environnementaux. 550 000 Québécoises et Québécois ont participé en faisant la première grève climatique des travailleurs et la plus grosse manifestation de l'histoire du pays.

MM., Mmes les élus, vous l'avez vu le 27 septembre, les Québécois et les Québécoises ont peur. Et ils ont raison. Ces dernières années, nous avons vu nos premiers sinistrés climatiques. Les victimes des inondations de 2017, de 2019, de l'ouragan Dorian aux Îles-de-la-Madeleine. Mais des vies aussi ont été perdues, et nous n'en sommes qu'aux premiers impacts de la crise climatique. Comme nous l'explique la Dre Claudel Pétrin-Desrosiers, à l'été 2018, près de 100 personnes sont mortes à travers la province en raison de la chaleur extrême. Des événements de ce genre vont s'allonger, arriver plus fréquemment et être de plus en plus intenses. Nous le répétons, notre inaction politique tue.

Refuser de tout mettre en oeuvre pour respecter les cibles du GIEC, ça signifie quatre degrés de plus d'ici la fin du siècle. Et ça, c'est le scénario optimiste. L'été dernier, une étude australienne nous prédisait de fortes probabilités que la civilisation humaine s'effondre d'ici 2050. 2050, c'est dans 30 ans. Au printemps dernier, une étude parue dans Nature Geoscience parlait d'une augmentation possible de huit degrés d'ici 2100. À titre de comparaison, il y a 250 millions d'années, 96 % des espèces vivantes sont disparues, et ce, à cause d'une hausse de cinq degrés. Réalisez-vous que c'est à ça qu'on fait face?

Vous vous êtes fait élire à la CAQ en promettant du changement aux Québécois. Pourtant, votre loi climat n'a aucun mordant. On l'a lue, et ce qu'on a vu, c'est un gouvernement qui fait semblant de répondre à l'inquiétude des citoyens et qui ignore la gravité de la crise. C'est irresponsable. Une loi non contraignante nous condamne à l'échec avant même que vous déposiez votre plan. Et, des plans pour lutter contre les changements climatiques au Québec, on en a eu : 2000, 2006, 2012, trois plans, trois échecs. Et votre recette, c'est la même qu'avant : un beau plan, aucune contrainte, aucun courage, des promesses vides. Et on aura exactement le même résultat : l'échec. Est-ce que c'est vraiment ça que vous voulez proposer aux Québécois, l'échec?

Présentement, votre loi climat présente la structure suivante : un comité qui va donner son avis au ministre de l'Environnement qui, lui, va donner son avis aux autres ministres. Or, ici même, le 21 janvier, Mme Sylvie Chagnon, la P.D.G. du Conseil de gestion du Fonds vert, nous affirmait que tous les ministères lui disent que l'environnement, ce n'est pas leur priorité. Pourquoi ça changerait avec votre loi? Pourquoi des ministres se mettraient-ils subitement à écouter vos conseils, M. Charette, si rien ne les y oblige? On le sait, le gouvernement Legault a refusé toute loi qui l'obligerait à atteindre ses cibles.

La Présidente (Mme St-Pierre) : ...vous adresser au ministre en disant «M. le ministre» et non pas par son nom.

• (11 h 30) •

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : Je m'excuse. M. le ministre.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Oui, voilà.

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : Parfait. Merci. On le sait, le gouvernement Legault a refusé toute loi qui l'obligerait à atteindre ses cibles. En l'espace d'un an, deux projets de loi lui ont été proposés, un par Dominic Champagne, du pacte, et l'autre par Sylvain Gaudreault, du PQ...

La Présidente (Mme St-Pierre) : ...vous devez donner les noms des gens par leurs circonscriptions et non pas par leurs noms propres...

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : Pardon.

La Présidente (Mme St-Pierre) : ...et vous adresser à la présidente.

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : D'accord. Donc, l'autre a été proposé par Sylvain Gaudreault, député de Jonquière.

Des voix : ...

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : Ça va. Je m'excuse. Dans La Presse, Paul Journet rapportait que, d'après vous, la réduction des GES est une affaire de volonté. Vous nous dites donc : Faites-nous confiance, sans avoir vous-même de compte à rendre. Sur quelle base faire confiance à votre gouvernement quand il fait la promotion du troisième lien, quand vous vous entêtez à soutenir des projets comme GNL Québec, quand votre gouvernement parle de raser des forêts pour réduire les GES ou quand le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs va devoir évaluer son mandat en termes de rendement pour l'industrie du bois?

Il y a deux semaines, Christian Messier, chercheur en écologie forestière, nous disait que des feux de forêt comme ceux qu'on a vus en Australie pourraient bien arriver bientôt au Québec. Avec la crise climatique, il suffirait d'un été très sec pour que les Laurentides au complet s'enflamment. Est-ce que c'est ça que ça va vous prendre pour inscrire dans la loi des objectifs de réduction des GES? Est-ce qu'il va falloir que le Québec brûle avant de faire ce que la science réclame? Pour quelles raisons êtes-vous toujours incapables de faire face à cette crise de façon réaliste et pragmatique? Votre naïveté, et votre utopisme, nous inquiète et fait peur aux Québécois et aux Québécoises.

M. Geoffroy (François) : En somme, ce projet de loi laisse tous les pouvoirs entre des ministres qui, jusqu'à présent, se sont montrés incapables de comprendre la gravité de l'urgence climatique, des ministres qui se soucient de nos émissions de GES et de la protection de la biodiversité uniquement quand c'est compatible avec leurs objectifs de croissance économique, des ministres qui refusent de voir qu'il n'y aura pas d'emploi pour personne sur une planète morte.

Alors, pour réduire nos émissions à zéro, ce que toutes les études scientifiques nous demandent, il va falloir commencer par se poser une question très sérieuse : Entre la croissance du PIB et la protection des citoyens, M. le ministre, qu'est-ce que vous allez choisir? Faites attention à votre réponse. Je sais que vous avez envie de me dire qu'on peut faire les deux en même temps, qu'on n'a pas besoin de choisir. Or, c'est faux. Si on veut ramener nos émissions à zéro, ce que le GIEC nous demande de faire extrêmement rapidement, il va falloir accepter que la nature nous impose des limites. Ce n'est pas une question de croyance, ce n'est pas une question d'idéologie, c'est un fait scientifique et matériel. Notre surproduction et notre surconsommation se heurtent aux limites de la nature. Un enfant de cinq ans est capable de comprendre ça, c'est une évidence. Croire le contraire, c'est croire aux licornes.

Jusqu'ici, entre la croissance économique et le respect des ressources dont on a besoin pour vivre, à chaque fois, on a choisi la croissance. Si on veut que ça arrête, on doit commencer par inscrire dans la loi les limites devant lesquelles la nature nous place. Et ça, c'est un budget carbone, c'est la capacité de régénération des sols, des pêcheries, des forêts et de l'ensemble de nos écosystèmes. À l'intérieur de ces limites-là, on pourra commencer à discuter de la meilleure façon d'assurer le bien-être de tout le monde, mais il faut impérativement rester à l'intérieur de ces limites-là, et ça, aucun ministre, aucun ministère ne le fera jamais à moins d'y être obligé.

Soulignons au passage que la croissance économique, présentement, profite à une minorité. Au Québec, ces 30 dernières années, le salaire du 1 % a augmenté de 116 %, celui des autres, de 29 %. 29 %, c'est moins de 1 % par année. Et, pendant la même période, les témoignages d'épuisement se sont multipliés. La sacro-sainte croissance économique, celle pour laquelle on est en train de sacrifier l'avenir de nos enfants, concrètement c'est ça : la richesse pour le 1 % et le burn-out pour les autres. Ce serait le fun si on pouvait sortir d'une économie du burn-out qui nous presse le citron pour rentrer dans une économie qui régénère non seulement nos écosystèmes, mais aussi nos vies, nos familles et notre santé.

D'ailleurs, ce n'est pas comme si on avait le choix, je vous invite à aller parler aux gens d'affaires de l'Australie pour voir si les feux ont fait du bien à leurs projets de développement. En fait, pas besoin d'aller si loin, allez simplement voir les résidents de Sainte-Marthe ou de Gatineau, demandez-leur quel impact les inondations ont eu sur leur portefeuille. Allez aux Îles-de-la-Madeleine, parlez de l'ouragan Dorian aux résidents et expliquez-leur que c'est un résultat nécessaire de la croissance telle que vous la concevez.

Quand 7 500 travailleurs se sont mis en grève, le 27 septembre, avec 260 000 étudiants, ils avaient des attentes minimales. Les connaissez-vous, M. le ministre? Écoutez-les bien. Quand vous êtes venu marcher, le 27 septembre, c'est pour ça que vous marchiez. On vous demande d'arrêter de financer les hydrocarbures, de dire non aux nouveaux projets, contrairement à ce que vous vous entêtez à faire. On connaît votre engouement pour des projets comme GNL Québec. Une loi sur la gouvernance de la crise climatique, ça devrait minimalement inclure des dispositions claires pour empêcher d'annuler d'une main les gains qu'on essaie de faire de l'autre. On vous demande d'enchâsser dans la loi les limites que la nature nous impose. C'est vrai autant en termes de budget carbone que de protection de nos écosystèmes. Et on vous demande d'éduquer les Québécois et Québécoises par des programmes scolaires autant que par des campagnes de sensibilisation pour les aider à comprendre ce qui est en train de se passer et ce qu'on va devoir faire, tous ensemble, pour s'en sortir...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Je dois vous interrompre ici. Maintenant, nous devons procéder aux échanges avec les membres de la commission. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Charette : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous deux pour votre présence. Clairement, on ne s'entendra pas sur tout aujourd'hui, mais il y a quand même des éléments qui me semblent intéressants, dans ce que vous mentionnez.

Au niveau de vos recommandations, et c'est votre premier point, reconnaître que la crise climatique n'est pas qu'une question de réduction de gaz à effet de serre, là-dessus, on se rejoint entièrement. Et ça, c'est répété sur nombre de tribunes. On a focussé beaucoup sur la réduction des gaz à effet de serre. Nous y sommes. On n'a peut-être pas les mêmes objectifs que vous, par contre, mais, oui, on reconnaît cette importance-là, mais beaucoup, à travers le discours ambiant, oublient les impacts que ça peut avoir sur la biodiversité, la protection de nos milieux naturels, la protection de la qualité de notre air, la qualité de notre eau également. Donc, voir que c'est également un élément qui vous interpelle me rassure. Et c'est des éléments qu'on n'oublie pas au niveau du gouvernement. On a, par exemple, déposé un projet de loi n° 46 au niveau de la protection de notre territoire, de notre patrimoine naturel. Ce sont des gestes environnementaux.

Là où on ne se rejoindra vraisemblablement pas, c'est au niveau de la nécessité d'une décroissance. On ne retient pas du tout ce discours-là. Au contraire, on a une situation qui est sérieuse, qui est grave, mais on ne retient pas le discours de peur, mais on voit plutôt une très, très belle opportunité de réorienter notre économie vers des approches plus vertes. Et là il y a une possibilité de croissance économique excessivement importante. Ce sont des milliards, à travers la planète, qui devront être investis année après année. Donc, pour nos entreprises qui ont développé une expertise dans ce domaine-là, je ne parle pas de décroissance pour eux, au contraire, je parle d'une croissance sans doute exceptionnelle si le gouvernement du Québec est en mesure de bien les accompagner.

Au niveau des cibles, maintenant... Ou peut-être même, avant de parler des cibles, vous parlez d'une loi climat et de la déception du projet de loi n° 44. Le projet de loi n° 44 n'est pas une...

M. Geoffroy (François) : M. le ministre, je croyais qu'on était pour échanger. Votre question?

M. Charette : Vous me laissez terminer, s'il vous plaît. Il y a des règles qui...

M. Geoffroy (François) : D'accord, avec plaisir.

M. Charette : Et je pourrais prendre les 16 minutes en entier, c'est comme ça que ça fonctionne. Donc, ce que j'allais vous mentionner, ce n'est pas une loi climat, c'est une loi sur la gouvernance. La façon d'y parvenir va être détaillée à travers un plan d'action qui sera présenté sous peu, le sera ensuite par un plan de mise en oeuvre, ensuite. Mais ce n'est pas une loi climat. Donc, si vos attentes sont à l'égard d'une loi climat, je comprends votre déception.

En même temps, je vous dis : Vous ne vous adressez pas à la bonne tribune, ce n'est pas le projet de loi n° 44 qui va régler ces enjeux-là. Nous, ce que l'on veut régler comme problématique, c'est réellement la confusion qui règne actuellement entre les différents ministères, pour éviter ce qui vous a mobilisés. Puis, votre mobilisation, je la comprends, je la respecte en entier. On a pris des engagements, au fil des années, à répétition, à l'égard de cibles de réduction de gaz à effet de serre et on n'y est jamais parvenus par absence de plan adéquat, mais surtout par absence de volonté politique. Et, cette absence de volonté politique, vous ne la retrouvez pas du côté du gouvernement, quoi que vous puissiez en penser. Et je respecte tout à fait votre opinion, mais on met en place, actuellement, des moyens, des protections qui vont nous éviter de reproduire les erreurs du passé.

On a fait référence, à plusieurs reprises, au comité scientifique, qui est une façon de reddition de comptes importante. On a fait une avancée importante au niveau du Commissaire au développement durable, qui, à chaque année, va nous indiquer si on est sur le bon chemin pour éviter qu'en 2029, à la fin de notre plan, on réalise que, non, on n'a pas retenu la bonne approche. Donc, à chaque année, on va avoir notre bulletin, en quelque sorte. Ceci dit, je comprends les divergences de points de vue, puis on est là pour s'écouter, l'un et l'autre.

Je vous rejoins aussi entièrement sur la nécessité de sensibilisation, mais, au niveau des cibles, c'est difficile, honnêtement, de prêter quelque... Il n'y a pas d'uniformité. Vous parlez de 65 %, d'autres groupes parlent de 45 %, l'Assemblée nationale s'est entendue sur 37,5 %. Donc, votre 65 % par rapport au 45 % ou par rapport au 50 %... Même hier, une nouvelle coalition a vu le jour, et eux s'attendent à 100 % pour 2030. Donc, il y a des attentes, honnêtement, qui ne sont pas réconciliables. Votre 65 %, vous, vous le justifiez de quelle façon?

• (11 h 40) •

M. Geoffroy (François) : On est arrivés à la question. Merci pour votre échange et votre capacité d'écoute, M. le ministre. Ils sont visiblement légendaires.

Donc, si j'ai bien compris la question, c'est : Comment est-ce qu'on justifie la demande de réduction de GES? On la justifie tout simplement par les cibles mises de l'avant par le GIEC. Le GIEC nous dit très, très, très explicitement... et ça, M. le ministre, j'espère que vous en êtes conscient, c'est quand même votre travail, c'est quand même votre responsabilité d'être au courant de ces rapports-là, et je suis inquiet si vous n'êtes pas conscient que le GIEC nous exige globalement d'en arriver à zéro émission pour 2050 au plus tard. On parle, règle générale, de plus rapidement que ça, même, si on veut pouvoir prendre nos responsabilités en tant que pays développé où on a la possibilité de faire des efforts supplémentaires.

Maintenant, j'aimerais revenir sur l'idée de décroissance que vous avez mise de l'avant.

M. Charette : ...l'échange, je veux vous entendre sur les cibles...

M. Geoffroy (François) : Je n'ai pas le droit au même temps de réponse que vous avez utilisé?

M. Charette : Bien, c'est-à-dire, la question...

Une voix : ...

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le député.

M. Gaudreault : C'est parce que, tout à l'heure, le ministre a dit à nos invités... bon, il a rappelé les règles, mais lui-même, dans nos échanges la semaine passée, rappelait la règle de la proportionnalité.

M. Charette : Tout à fait, en autant que ça porte sur la question.

M. Gaudreault : Alors, la règle de la proportionnalité, si le ministre a pris 10 minutes pour répondre, ils ont un 10 minutes pour répondre aussi.

M. Charette : Mme la Présidente, appel au règlement, également.

M. Gaudreault : Alors, moi, je veux juste que ça soit équitable pour tout le monde, la règle de la proportionnalité. Alors, 10 minutes d'intervention, 10 minutes de réponse.

M. Charette : Non, absolument pas, Mme la Présidente. Il y a un principe qui est clair au niveau de la consultation. La personne qui pose les questions dirige l'échange. La réponse doit être sur la question. Moi, je ne parle pas de décroissance à ce moment-ci...

Des voix : ...

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le ministre, c'est moi qui préside.

M. Charette : Oui, mais il y a un règlement à appliquer.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, M. le ministre, par respect pour nos invités, laissez les invités faire leur réponse.

M. Charette : Oui, je veux bien...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Ensuite, vous prenez tout le temps que vous pouvez, M. le ministre.

M. Charette : Mme la Présidente, je veux bien. Cependant, c'est moi qui pose les questions. Je peux...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Oui, mais c'est moi qui préside.

M. Charette : Effectivement. Mme la Présidente...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, monsieur a la parole.

M. Charette : Non, un appel au règlement. Je suis très ferme à ce niveau-là...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Bien, moi, je suis très ferme, je préside.

M. Charette : Regardez notre règlement.

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le ministre, je préside.

M. Charette : Mme la Présidente, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Vous allez laisser monsieur finir sa réponse. Monsieur, terminez votre réponse.

M. Charette : Tout à fait. Mais c'est-à-dire, là, il embarquait sur un autre sujet. Mme la Présidente, question de règlement.

Des voix : ...

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le ministre, je préside cette commission.

M. Charette : Question de règlement, Mme la Présidente. Vous allez quand même me laisser parler, c'est un point de règlement. La question porte sur les cibles. Et j'ai d'autres questions sur la question des cibles. Je veux voir comment qu'on fait pour établir une cible à 65 %, tantôt, sinon à 45 %, sinon à 100 %. C'est l'objet de ma question. Je veux bien, on parlera de décroissance par la suite...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Et à quel numéro de règlement vous vous référez?

M. Charette : Bien, on est en consultation, donc il y a des questions, et la réponse doit porter sur la question. Je veux bien qu'on parle de décroissance par la suite, mais là je veux qu'on puisse s'entendre sur la notion de cible.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Le compteur est arrêté, là. Moi, ça ne me fait rien, là.

Mme Montpetit : ...un appel au règlement. Il y a un article qui est très, très clair, très clair, qui est : le président préside. On a une présidente qui préside ici. Les échanges allaient bien jusqu'à maintenant. Je demanderais au ministre de respecter la présidente. Elle préside notre commission, elle l'a bien fait jusqu'à maintenant. Donc, je pense qu'on pourrait lui laisser...

Une voix : ...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, M. le ministre...

Mme Montpetit : On pourrait me laisser terminer ma phrase et la laisser aussi terminer.

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le ministre...

M. Charette : Parfait. Donc, je vais vous demander de parler des cibles, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Charette : C'est l'objet de la question, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Merci de me respecter.

M. Charette : C'est l'objet de la question, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, respectez-moi. Monsieur, vous avez la parole.

M. Geoffroy (François) : Merci. Merci, encore une fois, pour votre écoute, M. Charette. Donc, ce sur quoi on insiste depuis le début, c'est l'importance de placer des limites contraignantes pour respecter les cibles. Justement, je reviens sur votre question, donc, à partir de ce moment-là, toute la question de la décroissance, on n'a même pas besoin d'en parler. Est-ce que vous comptez, oui ou non, placer des cibles contraignantes à l'intérieur de cette loi-là? C'est une question de respecter la sécurité de l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Si on n'est pas prêts à aller là, on se donne toute la marge de manoeuvre nécessaire pour échouer, bien entendu. Si on n'est pas prêts à aller là, ça veut dire, avant même qu'on ait commencé à mettre en oeuvre quelque mesure que ce soit, qu'on n'a pas vraiment l'intention de respecter les cibles qu'on s'est données, comme les gouvernements ont eu tendance à le faire par le passé.

Et ça veut dire qu'au premier projet gazier qui va être mis sur la table, ce qu'on voit déjà, vos belles paroles, vos belles promesses, vos beaux engagements, vos belles cibles vont prendre le bord et qu'on va continuer à faire... oui, qu'on va investir dans le transport en commun, oui, qu'on va investir dans des projets pour développer une alternative aux transports, par exemple. Mais, si, en même temps qu'on fait ça, on vend notre territoire aux entreprises pétrolières et aux entreprises gazières, on se dirige vers l'échec, vers un échec annoncé et vers un échec évident. Présentement...

Une voix : ...

M. Geoffroy (François) : Merci.

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le ministre a d'autres questions.

M. Charette : Je comprends tout ça et je ne voulais pas être impoli en vous parlant des cibles, il faut se donner des cibles qu'on est en mesure d'atteindre. Vous parlez de 65 %, d'autres parlent de 45 %, d'autres parlent de 100 % en 2030. L'équilibre, il est où? Actuellement, à l'Assemblée nationale, il y a un vote qui a été tenu sur une cible à 37,5 %, et déjà elle constitue un défi immense, on est à moins 9 %. 2030, c'est demain, c'est dans à peine 10 ans. Nous, notre plan d'action va entrer en vigueur au début de l'année 2021, donc ça va nous laisser neuf ans. Donc, faire en neuf ans ce qu'on n'a pas pu faire, comme société, en 30 ans, le défi est là. On a une notion de transition juste qui est, à juste titre, évoquée à plusieurs reprises. On a ces inquiétudes-là de maintenir l'équilibre.

Vous avez la lunette de l'environnement, je la comprends, je l'ai aussi au nom du gouvernement, mais le gouvernement a une vision d'ensemble aussi. Il faut être en mesure d'alimenter un système de santé, il faut être en mesure d'alimenter un système d'éducation. Il faut aussi composer avec une économie qui est largement intégrée en Amérique du Nord. On est un leader en Amérique du Nord. On veut en faire plus, on va en faire plus, mais vous allez être franchement déçus si vous attendez à ce qu'on ait des cibles qui soient irréalistes. Moi, j'aime mieux me baser sur le consensus qui a été voté à l'Assemblée nationale, à 37,5 %, mettre tout en oeuvre pour y parvenir. Je pourrais, d'un coup de crayon, là, ajouter un article : On va être à 50 % en 2030, mais sans aucune valeur et surtout sans aucune façon réaliste d'y parvenir.

Les gens de la FTQ ont un discours semblable à ceux du Conseil du patronat sur cette question-là. Il y a entre 400 000 et 700 000 emplois, au Québec, qui seraient en jeu, au dire même de la FTQ, si jamais on y allait d'une façon qui est trop radicale. Le terme «transition» laisse entendre que, pendant un certain temps, oui, on va avoir besoin d'énergie fossile. Le but, c'est d'arriver à ne plus en avoir besoin, mais, dans l'intervalle... Je suis à peu près certain que vous avez un téléphone cellulaire avec vous, je pourrais vous parler de toutes les composantes qui ont des produits fossiles à l'intérieur. Vous en avez besoin, la technologie, actuellement, requiert ces produits-là. Éventuellement, il va se développer, cette technologie-là, et ultimement on n'aura plus besoin de ces produits pétroliers.

• (11 h 50) •

Dans votre quotidien, on se connaît peu, mais convaincu que je pourrais vous rappeler tout ce qui nécessite du pétrole pas dans sa forme brute, pas dans sa forme de combustible, mais dans votre quotidien.

Donc, cette transition-là, on veut la faire, on va la faire, mais elle ne se fait pas du jour au lendemain. 37,5 %, c'est excessivement ambitieux, c'est même des efforts colossaux en termes d'investissement économique, en termes de changements d'habitude, mais moi, je ne veux pas 1 million de chômeurs de plus au Québec, sinon c'est l'ensemble de l'économie qui s'effondrerait. On n'aurait plus le réseau de l'éducation pour lequel les pressions sont fortes. On n'aurait plus le réseau de la santé pour lequel les pressions sont fortes. Mais, oui, agissons de façon concrète, de façon musclée pour faire en sorte que les travailleurs ne soient pas les premiers pénalisés. Dans votre discours, 65 % pour 2030, clairement, on parle de plus de 1 million de chômeurs, et ce n'est pas le type de société que l'on souhaite avoir au Québec, du moins, pas une majorité de Québécois.

Vous m'avez dit de leur parler. J'étais à la marche du 27. Vous savez de quoi ils m'ont parlé, la plupart des gens qui me voisinaient dans cette marche-là? Gestion des matières résiduelles, recyclage, beaucoup m'ont parlé de consignes, on en a parlé la semaine dernière. Les Québécois veulent des gestes concrets pour lesquels ils peuvent être assurés de faire une différence.

Donc, je respecte votre point de vue, mais déjà je vous indique que le projet de loi n° 44 ne répond pas à vos attentes et ne répondra pas à vos attentes, parce que ce n'est pas une loi climat. C'est une loi qui va permettre une gouvernance claire pour arriver à des objectifs. Je vois l'opposition officielle, je la vois hocher de la tête, ma collègue, que j'estime, au demeurant. C'est facile pour eux, ils ont été au pouvoir pendant 15 ans, avec un plan d'action, sans se donner aucun moyen d'atteindre les résultats. Et aujourd'hui on nous demande d'en faire plus. Si on était à moins 20 % comme on devait l'être en 2020, s'ils s'étaient bien acquittés de leur mandat, là je pourrais peut-être parler de 40 % à 45 % pour 2030, mais on est à moins 11 % de l'objectif par manque d'action au cours des dernières années. Donc, défi colossal, oui, mais il faut y aller de façon juste et équitable.

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le ministre...

Une voix : ...

M. Charette : Tout à fait. J'ai terminé.

M. Geoffroy (François) : Je ne suis pas sûr d'avoir saisi la question, donc je vais essayer de répondre à une question qui n'était pas vraiment là. J'espère respecter les règlements, donc, de la commission en faisant ça.

Écoutez, je suis plutôt triste, M. le ministre, de vous entendre vous déresponsabiliser sur vos prédécesseurs. Je n'ai rien pour vous contredire, effectivement, mais je m'attendais de la part du gouvernement actuel qu'il ait le courage de faire preuve de leader. Je suis surtout profondément troublé quand vous nous parlez de radicalité, alors que tout ce qu'on est en train de vous demander de faire, c'est de respecter ce que la science met de l'avant. Je suis encore plus troublé quand vous tenez un discours de peur en me disant, essentiellement : Bien, si on respecte ce que tous les scientifiques de la planète nous disent qu'il faut faire, tout le monde va perdre sa job. Donc, c'est un peu ça que vous êtes en train de me dire.

En fait, j'ai deux questions. La première, c'est : Est-ce que vous croyez à la science du climat, oui ou non? Est-ce que vous croyez au rapport du GIEC et aux chiffres qui y sont présents? Et la deuxième, c'est : Si vous y croyez, de quelle façon est-ce qu'en tant qu'élu, en tant que ministre, en tant que gouvernement... Pourquoi est-ce que vous abdiquez déjà votre responsabilité, votre capacité à prendre le «lead» pour développer véritablement, au Québec, le type d'économie qui va nous permettre de ne pas se retrouver à 1 million de chômeurs tout en restant à l'intérieur des limites que la nature nous impose?

Parce que, sinon, ce qu'on est en train de dire aux Québécois et aux Québécoises, c'est que ça ne nous dérange pas que les inondations continuent, c'est que ça ne nous dérange pas que les cyclones continuent à ravager nos demeures et que les sécheresses se multiplient, c'est que ça ne nous dérange pas si nous, en tant que pays développé, au Québec, on n'est pas capables de servir de modèle et de tendre vers le zéro émission alors qu'on a toutes les conditions pour y arriver...

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. Geoffroy...

M. Geoffroy (François) : On est dans une dynamique d'abdication. Est-ce que c'est ça que vous êtes en train de faire, M. le ministre, abdiquer?

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, M. le ministre, vous avez la parole. Il reste 1 min 40 s, et j'ai trois demandes de questions, alors il faudrait que ce soit court.

M. Charette : Voilà. Je vais me gouverner en conséquence. Vous me demandez de reconnaître les rapports du GIEC. On les reconnaît. C'est la raison pour laquelle un plan d'action costaud sera mis en place. Attendez de voir le budget pour voir la place qu'on y fera, à l'Environnement, des efforts jamais vus. Donc, lorsque vous parlez d'abdication, ça peut être une perception qui est la vôtre, mais ce ne sera pas celle des Québécois, et déjà ce n'est pas celle des Québécois actuellement. On pense avoir un appui assez fort dans la population.

Ceci dit, lorsque vous parlez du GIEC, on a comme objectif de viser la carboneutralité pour 2050. On est en 2020. Vous me parlez de transférer ou de migrer vers une économie verte. Nous sommes là. Cependant, ça ne se fait pas du jour au lendemain. Migrer vers une économie verte, d'une part, ça ne se fait pas du jour au lendemain. On parle de convertir... Pensez uniquement à votre propre quotidien, tout ce qui requiert du pétrole dans votre quotidien, pas comme énergie fossile... pas comme énergie combustible ou pour vos déplacements, ne serait-ce que dans votre environnement immédiat, le plastique, et autres, qui est autour de vous. Pour se transférer, pour se déplacer vers une économie verte, ça ne se fait pas du jour au lendemain. C'est la raison pour laquelle...

Une voix : ...

M. Charette : Vous m'avez posé des questions, j'y réponds, actuellement.

M. Geoffroy (François) : ...est de votre côté, pas du mien.

M. Charette : Je réponds à vos questions, actuellement. Donc, ça ne se fait pas du jour au lendemain, d'une part, pour éviter qu'il y ait justement ce million de chômeurs. C'est le patronat, c'est le milieu syndical qui nous dit ça. Et honnêtement je les sens aussi excessivement mobilisés pour arriver à nos fins.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, je dois vous interrompre, M. le ministre. Mme la députée de Maurice-Richard... Ah! M. le député de Jacques-Cartier, vous avez la parole.

M. Kelley : Bienvenue. Je veux juste commencer rapidement, une question de certains de mes citoyens de Baie-d'Urfé. Il y a un conseil des jeunes qui participe, chaque mois, à une rencontre avec des élus de la municipalité de Baie-d'Urfé. C'est des jeunes élèves entre des âges de 12 à 16 ans, qui sont tellement fiers qu'ils ont participé à la marche l'année passée, mais on a eu une discussion ensemble, puis ils ont dit : On était fiers qu'on était là, mais qu'est-ce que je peux faire, comme un citoyen, pour faire plus pour l'environnement?

Alors, je pose la question parce que je vais partager ça avec eux autres, parce que je pense que vous êtes ici, c'est vous autres qui organisez la manifestation, et tout ça. Alors, c'est une question pour vous, pour ces jeunes-là : Comment les jeunes, si on peut faire plus... pas juste le gouvernement, mais des jeunes peuvent faire plus pour lutter contre les changements climatiques?

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : Merci. Ça va me faire plaisir de répondre, étant moi-même une étudiante du primaire de Baie-d'Urfé. Qu'est-ce qu'il faut faire à ce point-ci? La solution, elle est politique. Alors, de participer à la marche du 27 septembre, c'est génial. On encourage les jeunes, absolument, à continuer, à s'impliquer, à participer à des débats avec leurs élus, à continuer à mettre de la pression sur vous pour que tout le monde, ici, agisse vraiment avec beaucoup plus de courage que ce qui nous est démontré aujourd'hui. Ça va en prendre, du courage. Ça va en prendre, des moyens qui vont nous demander, vraiment, de transformer la société.

Et, si c'est vrai qu'en effet tous les produits qui nous entourent utilisent le pétrole, et compagnie, bien, justement, il va falloir toute la créativité, toute l'ingéniosité, tout le savoir-faire des Québécois et des Québécoises pour faire la transition. Mais ce n'est pas à coups de dire : Ce n'est pas de notre faute, c'est de la faute de mes prédécesseurs, et on est très ambitieux, bien longtemps après qu'on ne sera plus au pouvoir, on vise d'atteindre des cibles de zéro émission. Ça manque vraiment de pragmatisme et ça manque de sérieux. Donc, je dirais à ces jeunes-là de continuer à lutter au niveau politique pour s'assurer que nos politiciens ne nous laissent pas tomber.

M. Kelley : Parfait. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Oui, je vous remercie. Bonjour, Mme Brisebois-Lavoie, M. Geoffroy. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Puis félicitations, surtout, pour tout ce que vous faites, la mobilisation. Je sais que vous n'êtes pas seuls derrière ça, mais vous avez quand même créé quelque chose d'assez exceptionnel, surtout par... ce n'est pas la première fois qu'il y a des marches pour l'environnement, au Québec, mais le fait qu'elles soient répétitives, qu'il y ait vraiment un mouvement qui se crée derrière ça et surtout qu'elles se fassent de façon, je pense, très positive, c'est ce qui est très, très intéressant derrière ça.

Puis je m'explique mal, d'ailleurs, l'échange qu'on vient d'avoir, qui est empreint d'animosité, beaucoup de défense. On parle de radicalité, de discours de la peur. Je ne sais pas, moi, ce n'est pas ce que j'ai entendu dans vos discours puis dans ceux des jeunes qui sont sur le terrain. Moi, je ne suis pas non plus dans une démarche d'à qui la faute, mais je n'embarque pas non plus dans le discours : Il n'y a rien qui a été fait par le passé. Tu sais, c'est de dire : On buvait des piña coladas pendant les 50 dernières années, au Québec, puis on avait les deux pieds sur le pouf, tous les gouvernements confondus qui ont été là pour... Tu sais, il y a plein de choses qui ont été faites au niveau du transport collectif, encore dans les dernières années, d'annoncer la ligne bleue, d'annoncer le REM. Ce n'est pas pour rien qu'on est la société, en Amérique du Nord... Je pense qu'il faut être quand même contents de dire qu'on est la société, en Amérique du Nord, qui produit le moins de GES. Tu sais, c'est quand même extraordinaire.

Une fois qu'on a dit ça, est-ce qu'on doit s'asseoir sur ce bilan-là? Absolument pas. Est-ce qu'on doit faire mieux? Absolument. Mais je trouve ça dommage, puis ce n'est pas à vous que je fais référence en disant ça, que, dans les échanges où on devrait tous travailler dans la même direction, ça occupe beaucoup de place, ce genre d'attaque, malheureusement.

Et, tu sais, je regarde, vous, vous avez été mis... Tu sais, puis je l'ai déjà mentionné, moi, j'ai fait une maîtrise en environnement il y a 10 ans déjà. Ce n'est pas nouveau, là, le dossier de la lutte aux changements climatiques, mais il y a quand même quelque chose qui s'est cristallisé il n'y a pas très longtemps. Puis à voir... Votre organisme date de 2018, il ne date pas non plus d'il y a 10 ans, ou il y a 20 ans, ou il y a 30 ans. Donc, il y a quelque chose qui est quand même assez récent aussi. Le rapport du GIEC date de 2018. Il y a des choses qu'on savait, mais il faut prendre acte du fait qu'il y a quelque chose qui se passe là présentement et auquel toutes les sociétés sont confrontées.

• (12 heures) •

Et c'est pour ça que je trouve ça un peu dommage de se retrouver dans des discours de qui a fait quoi. On peut-u juste tous travailler dans la même direction, ensemble, pas être dans des attaques comme ça? Puis je vais vous laisser du temps, là, mon objectif n'est pas de prendre tout le temps. Mais je voulais revenir sur des choses qui ont été dites, sur ce qui vous est prêté comme intentions, sur tout ce qu'il y a en lien avec la transition. Puis c'est des échanges qu'on a eus beaucoup, entre autres, avec la FTQ sur la transition juste. Je pense, il faut être un peu obtus pour penser que le fait de s'attaquer ou de s'investir dans la lutte aux changements climatiques égale nécessairement millions ou milliers de chômeurs. L'idée, c'est de faire un plan de transition — ça sert à ça, la transition — puis de ne laisser personne de côté, de s'assurer justement que des gens qui travaillent dans des secteurs qui vont être touchés dans cette transition ne soient pas laissés de côté.

Puis, chose certaine, la transition va amener des nouvelles opportunités. Puis c'est la grande force du Québec, tout ce qui est technologies vertes, tout ce qui est... Moi, je pense qu'on a... au contraire, on devrait tellement, tellement investir là-dedans, tellement capitaliser là-dedans, parce qu'on va... On est une société, veux veux pas, dans son histoire, qui a toujours eu une sensibilité, je vais dire, tu sais, le fait qu'on ait choisi l'hydroélectricité à une certaine époque plutôt que... démontre qu'on a une sensibilité à ça. On a des entrepreneurs hyperinvestis là-dedans, puis je pense qu'on peut être une solution très internationale sur toutes ces questions-là.

Mais j'aurais envie de vous laisser le reste du temps que j'ai peut-être pour recadrer justement le message qui a été fait de... Puis je ne sais pas pourquoi on vous a mis dans cette posture-là de radicalité, de discours de peur. Je pense qu'on a des milliers... puis ce n'est même pas juste des jeunes, hein, c'est des dizaines de milliers de gens de toutes générations qui... Moi, je regarde des aînés, dans ma circonscription, qui m'en parlent tous les jours, de dire à quel point ils sont inquiets pour leurs enfants et leurs petits-enfants. Et c'est pour ça que cette mobilisation-là, elle fonctionne, parce que les gens sont en mode solution, justement. Mais, en mode solution, il faut qu'on travaille tous dans la même direction puis qu'on évite de s'antagoniser aussi de part et d'autre, là.

Donc, il n'y a pas de question, c'est vraiment... prenez le temps, parce que vous avez des propositions, aussi, que vous vouliez... que vous avez mises dans le mémoire, peut-être si vous voulez les présenter un peu davantage, parce qu'il y a d'excellentes recommandations aussi qui ont été faites, là.

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : Je vais céder la parole à François dans quelques instants, mais, pour faire écho à ce que vous mentionniez et répondre un peu en même temps au ministre de l'Environnement et des Changements climatiques, il y a des sondages qui ont été faits dans les derniers mois, dont un intéressant, qui dit à l'affirmation suivante : «Il est plus important que le gouvernement s'occupe des changements climatiques même si cela veut dire que l'économie va en souffrir», 78 % des Québécois sont d'accord avec cette affirmation-là.

Donc, c'est absolument vrai de dire qu'il s'est passé quelque chose dans les dernières années, que les Québécois sont prêts et qu'ils veulent des changements. Et la science nous dit que ces changements-là doivent être radicaux parce qu'on fait face à quelque chose d'extrêmement dangereux qui menace notre survie. Donc, ce ne sont pas les groupes qui sont radicaux, c'est les changements qui doivent l'être. Mais, si on les fait ensemble, qu'il y a une concertation, que les pouvoirs ne sont pas juste dans les mains d'un ministre ou deux mais bien que la population se sent investie, moi, je suis certaine... C'est sûr qu'il y en a, des travailleurs qui vont devoir quitter leurs emplois parce qu'ils sont employés d'une industrie qui est menée à disparaître, nécessairement, si on fait la transition. Mais il faut s'en occuper, de ces gens-là, on ne peut pas les laisser tomber, on ne laisse personne derrière nous. Les travailleurs seront avec nous, il va falloir absolument que le gouvernement investisse massivement pour pouvoir leur donner l'opportunité. Parce qu'il n'y a personne qui veut travailler dans une job polluante. Tout le monde en est conscient. Ces travailleurs-là, ils seraient bien plus contents d'aller puncher puis de créer quelque chose de positif pour le Québec.

M. Geoffroy (François) : Et j'ajouterais qu'effectivement, dans nos recommandations, ça va dans ce sens-là, on parle de créer massivement des emplois carboneutres, des emplois décents et d'offrir une protection aux Québécois et Québécoises qui vont être touchés par la transition parce que ça, bien sûr, on ne s'en sortira pas.

On parle aussi de favoriser le dialogue avec tous les Québécois et les Québécoises. La science nous place devant une position, devant un constat auquel on ne peut pas échapper, peu importe ce qu'on va faire. On ne peut pas échapper à ce qui s'en vient. Alors, à partir de ce moment-là, la façon dont on va procéder, il faut que ça se fasse ensemble et il faut que ça se fasse en se parlant. Une des positions, une des propositions qu'on met de l'avant, à La Planète s'invite au Parlement, depuis presque le tout début, c'est la nécessité de créer, dans toutes les régions du Québec, des mécanismes de démocratie participative, ouverte, des mécanismes ouverts à tous les citoyens pour leur permettre de participer en continu aux dialogues et aux prises de décision, qui vont parfois être difficiles, mais aux prises de décision nécessaires si on veut arriver à sortir de la situation historique, à la fois au sens positif et négatif du terme.

On est dans une position de jamais vu, l'humanité fait face à une crise sans précédent. Il faut réussir à se mobiliser, tout le monde ensemble et, pour ça, il faut réussir à se parler. Parce qu'effectivement, comme le disait Violaine, il n'y a absolument personne qui se lève le matin en étant heureux d'aller travailler dans un emploi qui scrape la planète. On peut offrir aux Québécois et Québécoises des alternatives.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Il reste 30 secondes. Est-ce que vous avez quelque chose à ajouter?

Mme Montpetit : ...très, très brièvement, le sondage auquel vous faites référence, justement, démontre à quel point, je vais dire, l'acceptabilité sociale ou les changements de moeurs ont changé énormément, énormément dans les deux dernières années, là — je vais le scinder — ou les trois dernières années, mais c'est quand même assez récent. Les gens sont prêts à faire des sacrifices.

Ceci dit, moi, je demeure encore dans une posture où je pense que c'est une opportunité économique extraordinaire, c'est une opportunité de rayonner à travers le monde, justement, si on arrive à faire...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Je dois vous interrompre ici.

Mme Montpetit : ...une transition dans le bon sens.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Merci. Merci beaucoup pour votre présentation, pour votre présence aussi. C'est une voix extrêmement importante, dans le cadre du projet de loi qu'on est en train d'étudier, qu'il faut entendre.

Et, vous savez, vous n'êtes pas les premiers à demander à ce que les cibles soient dans le projet de loi n° 44. À chaque fois, le ministre, ce n'était pas clair s'il répond. Cette fois, il a été extrêmement clair : Ce projet de loi n'est pas une loi sur le climat. Donc, question réglée maintenant pour nous. Si on avait le moindre espoir que ce soit une loi sur le climat, le ministre vient de le dire, il l'a répété à deux fois, elle ne l'est pas, donc nos espoirs sont malheureusement anéantis.

Mais ça, ça veut dire que la mobilisation est extrêmement, extrêmement, extrêmement importante. Il faut qu'elle soit la plus forte possible. Et je sais que c'est ce à quoi vous êtes en train de travailler, toute la jeunesse, et on va vous soutenir là-dessus.

Je veux vous poser une question par rapport... bien, suite à ce qu'on vient d'entendre du ministre, mais aussi du premier ministre, qui a lu le dernier livre de Laure Waridel, La transition, c'est maintenant : Choisir aujourd'hui ce que sera demain. Le premier ministre a dit : Je suis d'accord avec les conclusions, avec qu'est-ce qui est écrit dans le livre de Laure Waridel, ce qu'elle propose, mais ce avec quoi je ne suis pas d'accord, c'est la rapidité à laquelle elle veut nous mener à ce changement-là.

J'aimerais vous entendre là-dessus, quand vous constatez qu'il n'y a pas d'urgence du ministre ni de la part du premier ministre sur cette question-là, précisément.

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : J'y vais? Par où commencer?

Une voix : ...

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : Dire qu'on a lu le livre de Laure Waridel puis qu'on est d'accord avec tout ce qu'elle dit sauf sur l'urgence d'agir, c'est un peu comme dire qu'on a lu la théorie de l'évolution de Darwin, qu'on est d'accord avec tout ce qu'il dit, sauf sur le fait que l'homme et le singe partagent des ancêtres communs. C'est à peu près ça. Je ne sais pas, est-ce qu'il a lu le livre? Si oui, est-ce qu'il l'a compris? Et, sinon, pourquoi est-ce qu'il est entêté comme ça à ne pas reconnaître qu'il faut agir maintenant? En fait, il aurait fallu agir il y a 20, 30 ans. Là, on est face au mur, il faut absolument agir tout de suite. Cet entêtement-là est dangereux pour le Québec.

Mme Ghazal : Et il est à l'encontre de la science...

Mme Brisebois-Lavoie (Violaine) : Absolument.

Mme Ghazal : ...c'est ça, dans le fond, votre message. Ce que vous dites, ce n'est pas une opinion personnelle que vous amenez par rapport aux cibles, c'est ce que la science nous dit et c'est ce que vous demandez au gouvernement d'entendre.

M. Geoffroy (François) : Si seulement on était dans une affaire d'idéologie, qu'on était juste des dangereux idéologues qui essayaient de faire valoir nos opinions, malheureusement ce n'est pas ça. Présentement, on a deux choix...

La Présidente (Mme St-Pierre) : ...la parole, maintenant, est au député de Jonquière.

M. Geoffroy (François) : Merci.

Mme Ghazal : Merci.

M. Gaudreault : Merci. Merci beaucoup de votre présence. Ce que j'aime dans votre présentation, entre autres, c'est le renversement de paradigme que vous amenez, puis je pense qu'il faut continuer de le dire. Par exemple, les radicaux sont ceux qui refusent d'agir... de voir et d'agir sur l'urgence. Le pays des licornes, il est chez ceux qui pensent que l'avenir passe par GNL Québec, avec soi-disant des milliers d'emplois à court terme pour une industrie, et une énergie fossile, qui est, de toute façon, prévue pour disparaître. Alors, il faut renverser ce paradigme-là, vous y contribuez de façon puissante.

L'autre élément aussi sur lequel votre présence ici a été très, très pertinente, c'est que vous avez amené le ministre à admettre que son projet de loi n'est pas une loi climat. On le savait puis on essayait de le faire dire, mais vous, vous l'avez obtenu, cet aveu-là, rapidement. Parce qu'on ne parle pas de la même chose, puis, moi, c'est ce que je sens depuis le début de ces consultations-là. Il y a beaucoup de groupes qui viennent nous voir, qui parlent d'une loi climat, mais le ministre, il est comme complètement sur une autre track.

Alors, la question que je veux savoir de votre part, dont je veux avoir une réponse : Qu'est-ce qu'on est mieux de faire, nous, comme pauvres parlementaires, là? Est-ce qu'on est mieux d'essayer quand même de travailler pour rafistoler l'espèce de bidule proposé par le ministre ou on est mieux de statu quo puis de recommencer à zéro avec une feuille neuve ou avec le projet de loi n° 194 que j'ai déposé? Évidemment, ça, ça serait l'idéal. Alors, qu'est-ce qu'on fait, là?

• (12 h 10) •

M. Geoffroy (François) : C'est clair que la loi telle qu'elle est présentée, de notre point de vue, elle est parfaitement insuffisante.

Maintenant, j'ai envie de rebondir aussi sur l'entêtement du gouvernement actuel à mettre de l'avant un projet comme GNL Québec. De notre point de vue, on ne comprend pas ce qui est en train de se passer. On se rappelle d'ailleurs que, dans ce fameux gazoduc, ce qui va transiter, c'est majoritairement du gaz de schiste. Présenter un projet comme celui-là comme un projet de transition écologique, ou bien il y a quelqu'un qui n'a pas fait ses devoirs ou bien le gouvernement est carrément en train de mentir.

On a rencontré l'été dernier M. Benjamin Bélair, un conseiller politique du gouvernement, qui nous a dit...

M. Charette : ...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Monsieur...

M. Geoffroy (François) : ...quand on lui a présenté ces arguments-là, justement...

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le ministre.

M. Charette : ...pas parler de mensonges, et autres, là, c'est à vous de respecter...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, monsieur...

M. Geoffroy (François) : D'accord, je ne prêterai pas d'intentions. Mais donc on a rencontré M. Benjamin Bélair, un conseiller politique de la CAQ, et, quand on lui a dit que... selon la plupart des études, quand on prenait le gaz naturel liquéfié, surtout le gaz de schiste, et qu'on le considérait sur l'ensemble de son cycle de vie, de la production jusqu'à la consommation, c'était une énergie qui était à peu près aussi polluante que le charbon.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Je dois vous interrompre ici. Cette période est terminée.

M. Geoffroy (François) : Merci.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, merci beaucoup d'avoir participé à notre commission parlementaire.

Et nous allons suspendre quelques instants, pour entendre par la suite Nature Québec. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 12)

(Reprise à 12 h 14)

La Présidente (Mme St-Pierre) : Je vous inviterais à prendre place, s'il vous plaît, les représentants de Nature Québec. S'il vous plaît, nous allons reprendre nos travaux. Veuillez prendre place, s'il vous plaît.

Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de Nature Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je dis bien «période d'échange», donc ça peut être des questions, ça peut être aussi des commentaires. Je vous invite donc à vous présenter, décliner vos noms et vos titres et à procéder à votre exposé. La parole est à vous, vous avez 10 minutes.

Nature Québec et Greenpeace

Mme Simard (Alice-Anne) : Alors, bonjour. Merci, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés. Mon nom est Alice-Anne Simard, je suis la directrice générale de Nature Québec. Je suis accompagnée aujourd'hui de M. Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie de Greenpeace. Donc, j'ai décidé de partager mon temps aujourd'hui avec M. Bonin parce qu'il n'avait pas été invité. Il faut croire que son invitation s'est perdue dans la malle. Je vais donc commencer, et il va s'exprimer par la suite.

Donc, pour Nature Québec et Greenpeace, il est clair que le projet de loi n° 44 n'est pas assez ambitieux et n'est pas à la hauteur des transformations structurelles, dans l'ensemble de la société, qu'il est nécessaire de réaliser, là, pour relever les défis qui nous attendent. Le Québec accuse un retard important dans l'atteinte de ses cibles de réduction de GES, et les propositions faites dans p.l. n° 44 ne nous garantissent en rien que le Québec sera en mesure de faire mieux et plus vite dans les années à venir pour rattraper son retard et atteindre ses cibles.

L'Assemblée nationale a adopté en décembre... en septembre, excusez-moi, une déclaration sur l'urgence climatique deux jours avant le 27 septembre, là, qui était une journée de mobilisation pour le climat, où des centaines de milliers de personnes se sont retrouvées dans les rues, au Québec. Si le gouvernement a réellement l'intention d'agir pour lutter contre la crise climatique, il doit proposer une véritable loi climat et non seulement quelques modifications à la gouvernance, comme le propose p.l. n° 44.

Alors, les recommandations dans notre mémoire visent à vous inciter à hausser votre niveau d'ambition et faire preuve d'audace dans votre vision de la lutte contre la crise climatique en basant vos décisions sur la science.

Alors, Nature Québec et Greenpeace recommandent au gouvernement de profiter de l'étude du projet de loi n° 44 pour réviser ses cibles de réduction des émissions. Nous sommes d'avis que, pour respecter les exigences de la science et faire sa juste part dans l'effort mondial, le Québec doit avoir une cible de réduction de 65 % d'ici 2030 et atteindre la neutralité carbone en 2040.

On recommande que ces cibles de réduction ainsi qu'un mécanisme de révision quinquennal de ces cibles soient enchâssés dans la loi. On recommande d'enchâsser, aussi, dans la loi un budget carbone. On recommande d'inclure des mécanismes de reddition de comptes, aussi, qui assureront le suivi et l'atteinte des objectifs. On recommande aussi que la loi inclue des notions de justice sociale et d'équité intergénérationnelle.

On recommande finalement que la loi, aussi, inclue des notions de justice sociale et d'équité... intergénérationnelle, oui. Et on recommande un test climat, c'est-à-dire que l'impact sur les émissions de GES et sur l'atténuation de l'adaptation aux changements climatiques soit évalué par le gouvernement, donc toutes les décisions gouvernementales soumises à un test climat.

On recommande aussi d'inclure une référence aux solutions nature comme moyens efficaces et efficients de lutter contre la crise climatique. Et on recommande aussi que le Fonds d'électrification et de changements climatiques ne soit pas utilisé pour financer des coupes forestières, là, dans les forêts éloignées ou des coupes de bois, finalement, qui ne respectent pas l'approche écosystémique.

Et je vais maintenant vous laisser mon collègue présenter d'autres recommandations. Mais avant je veux quand même prendre un peu de mon temps pour vous dire que je vous demande de mettre la partisanerie de côté et je vous demande de relever aussi vos manches, là, pour répondre au défi titanesque qui se présente devant nous. Vous pouvez passer quatre ans, là, à accuser l'ancien gouvernement pour notre retard collectif ou vous pouvez utiliser le pouvoir, que vous avez enfin, pour faire mieux.

Oui, il y a un grand retard à rattraper. Oui, c'est un défi, parce que vous êtes au pouvoir durant ce tournant de l'histoire, durant ces années cruciales et que ça aurait été probablement plus facile si vous aviez été plus prêts et prêtes au début de votre mandat, donc les défis auraient peut-être été moins grands. Mais maintenant il faut quand même que vous preniez des bouchées triples pour que les exigences scientifiques soient reconnues.

Que voulez-vous, le hasard a fait les choses ainsi, c'est vous qui êtes au pouvoir pendant que se joue l'avenir de l'humanité. Et je vous invite à voir ça comme une chance incroyable, là, d'être du bon côté de l'histoire. Soyez donc de ceux et celles dont les livres parleront comme une poignée de leaders qui ont contribué à sauver le monde et les générations futures. Merci.

M. Bonin (Patrick) : Merci. Mme la Présidente, M. le ministre, MM., Mmes les députés, merci de nous accueillir aujourd'hui. Merci surtout à Alice-Anne et à Nature Québec de nous avoir acceptés aujourd'hui, parce que, comme vous le savez, malgré notre demande, Greenpeace n'a pas été invitée. Je ne peux m'empêcher de déplorer cela.

Je vous ferai remarquer que Greenpeace existe depuis près de 50 ans. On est sur cinq continents. On a 27 000 membres, au Québec, donateurs. En comparaison, je crois que la CAQ en a peut-être 11 500, plus ou moins, à l'époque, lorsque c'étaient des donateurs. On est quand même 3 millions de personnes qui soutiennent cette organisation-là. Et, si on veut avoir un véritable débat de société, M. le ministre... — M. le ministre, je vous parle, merci — si on veut avoir un véritable débat de société, je pense qu'il faut accepter tout le monde autour de la table et non pas...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Un instant. Vous devez vous adresser à la présidence.

• (12 h 20) •

M. Bonin (Patrick) : Mme la Présidente, je m'adresse à vous et j'apprécierais que M. le ministre nous écoute lorsqu'on parle. Merci.

Ceci étant dit, nous sommes ici pour parler de la loi climat ou la fameuse loi qui n'est pas une loi climat. Vous savez très bien que le gouvernement du Québec a adopté une loi antidéficit budgétaire. Ce dont on a besoin, ce à quoi la CAQ s'est affairée dès son début de mandat, c'est de dire qu'elle ne savait pas où on s'en allait dans la lutte contre les changements climatiques. Et, pour savoir où on s'en va dans la lutte contre les changements climatiques, il faut insérer dans la loi, au-delà des gouvernements, de la partisanerie, l'obligation d'atteindre des cibles de réduction de gaz à effet de serre, l'obligation de respecter la science du climat, l'obligation d'avoir une reddition de comptes permanente, transparente, annuelle, et on n'a absolument rien de ça dans ce projet de loi là.

Le gouvernement s'est plaint, il l'a dit clairement, il ne sait pas où on s'en va. Actuellement, on n'a rien, dans ce projet de loi, qui permet d'espérer qu'on va voir plus clair. Au contraire, les nombreuses incohérences proposées par le gouvernement nous laissent craindre qu'on s'en va encore une fois dans la mauvaise direction.

Au-delà de ça, si on n'a pas un exercice du type test climat, qui permet de s'assurer que l'ensemble des politiques, l'ensemble des règlements, l'ensemble des projets du gouvernement nous amènent dans la bonne direction, on n'y arrivera pas. Et c'est certain qu'on est en train... le gouvernement est en train de manquer l'occasion idéale de mettre en place justement ce qu'il exigeait du gouvernement précédent, que ce soit au niveau de la gestion du Fonds vert, la transparence, la reddition de comptes. Il n'y a rien là-dedans qui nous rassure.

Pire encore, on craint que le gouvernement repolitise, entre autres, Transition énergétique Québec, qui est une société d'État qui permet justement d'avoir davantage de transparence, d'agilité, de rapidité, d'efficacité au moment où on est en urgence climatique. Lorsque le gouvernement et l'Assemblée nationale déclarent que nous sommes en urgence climatique, il faut se donner les moyens de régler cette urgence-là.

Nous avons une panoplie de recommandations dans le mémoire. Il nous fera un plaisir d'aller plus en profondeur dans ces recommandations-là, mais je vais vous donner quelques exemples. On a actuellement un gouvernement qui conteste au niveau fédéral, qui veut aller en Cour suprême pour refuser que le système de plafonnement et d'échange d'émissions du gouvernement du Québec soit étudié et comparé à ce que le gouvernement fédéral veut mettre en place. Ce dont on a besoin, ce sont des gouvernements qui relèvent la barre. Donc, si le gouvernement est si fier de sa bourse, de son marché du carbone, s'il est si convaincu qu'il est si efficace, je ne vois pas pourquoi on n'aurait pas davantage de transparence et qu'on n'évaluerait pas ça en regard de ce qui se passe au niveau fédéral.

Au-delà de ça, vous êtes très conscients, plusieurs l'ont mentionné, des projets comme GNL, des projets comme le troisième lien, l'idée de couper des arbres pour lutter contre les changements climatiques, pour nous, c'est l'ensemble des activités proposées par le gouvernement qui doivent être vues en regard de la lutte contre les changements climatiques, et actuellement, M. le ministre... ou Mme la Présidente, ce n'est pas ce qu'on a actuellement. On n'a absolument rien, c'est déplorable. Le gouvernement, actuellement, est irresponsable, littéralement.

Parce qu'il y a une urgence climatique, on a la population la plus mobilisée dans le monde, 500 000 personnes au mois de septembre dans la rue. Tout le monde, la société civile est prête à aider, à mettre l'épaule à la roue, mais on doit avoir des assurances que le gouvernement actuellement ne nous propose pas... pire encore, il propose des projets et de l'incohérence qui nous inquiètent au plus haut point. Et le fait qu'il veuille exclure, par exemple, Greenpeace d'une consultation parlementaire sur la gouvernance climatique...

Une voix : ...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Monsieur...

M. Bonin (Patrick) : Bien, ça, c'est un fait. C'est un fait.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Vous avez encore une minute pour conclure. Vous avez une minute pour conclure.

M. Bonin (Patrick) : Donc, le fait qu'il exclut Greenpeace est, pour nous, un signe très inquiétant au niveau de son ouverture à travailler avec tout le monde et à faire en sorte que l'ensemble de la société québécoise et de l'appareil gouvernemental se met au service de la lutte contre les changements climatiques et qu'on capitalise sur les occasions — parce qu'il y en a, au Québec — et les opportunités dans cette transition-là, qu'on doit identifier, tout comme on doit identifier les écueils et les emplois qui devront... et qui risquent de se perdre, et de ne pas condamner les travailleurs et les communautés dans cette transition qu'on doit faire rapidement.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Vous avez encore 40 secondes. Est-ce que vous avez quelque chose à ajouter pour conclure?

Mme Simard (Alice-Anne) : Écoutez, je vous dirais que cette loi-là n'est pas suffisante, et c'est le message qu'on veut transmettre aujourd'hui. Ce n'est pas une loi suffisamment ambitieuse. D'accord si le ministre dit que ce n'est pas une loi climat, mais nous avons besoin d'une loi climat. Nous en avons grandement besoin si nous voulons respecter nos cibles. Et nous devons même réviser ces cibles-là, c'est essentiel pour s'assurer que nous sommes justes envers le reste du monde. Nous avons besoin de plus de cohérence, de plus de transparence et surtout de plus d'efficacité pour s'assurer qu'on respecte nos cibles.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Merci. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Charette : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous deux. J'aime l'expression «on est d'accord pour ne pas être tout le temps d'accord». Il y a des éléments tout à fait intéressants, mais il y a des éléments sur lesquels on ne se rejoindra pas, vraisemblablement.

Bien, peut-être juste une petite précision, en tout respect : On ne vous a pas exclus de la commission parlementaire. Je vous explique un petit peu comment ça fonctionne. Chaque groupe soumet une liste. Lorsqu'on additionne le total de tous ces groupes proposés là, on était, dans le cas présent, je pense, à plus de 100 groupes, il fallait ensuite s'entendre sur un nombre et s'assurer que l'ensemble des points de vue soient retenus. Il y a des groupes qu'on a proposés qui ne sont pas... qui n'ont pas pu se présenter devant nous. Vous avez trouvé la bonne façon de vous faire entendre, et je respecte ça. Mais on ne vous a pas sciemment exclus de la liste qui a été adoptée, elle a été adoptée par l'ensemble des groupes parlementaires. Donc, pour la précision.

Au niveau du recours contre le fédéral, merci d'ouvrir la question parce que, là aussi, il y a un consensus à l'Assemblée nationale. Par le passé, ma prédécesseure, qui était dans mes fonctions avant, qui...

M. Gaudreault : ...appel au règlement, là.

La Présidente (Mme St-Pierre) : ...

M. Gaudreault : Bien, parce que le ministre vient de décrire une façon de faire pour choisir les groupes, mais chacun soumet des groupes puis... Je veux dire, les trois oppositions ont soumis Greenpeace, là, puis il y a un groupe parlementaire qui l'a refusée, puis c'est le gouvernement. Alors, je peux bien comprendre, là, mais on est revenus à la charge... À chaque fois qu'il y avait des...

M. Charette : Ce n'est pas une question de règlement, ça. Madame, ce n'est pas une question de règlement.

M. Gaudreault : ...chaque fois qu'il y avait des groupes qui sortaient de la liste, nous, on revenait avec Greenpeace. Alors, il faut bien faire attention, on n'a pas consenti à ne pas avoir Greenpeace ici, là. Il ne faut pas que le ministre... lui-même dit que le témoin a prêté des intentions. Moi, je reviens avec la même chose, il ne faut pas qu'il nous prête des intentions, à nous aussi. Alors, il y a une façon d'interpréter l'histoire, là...

La Présidente (Mme St-Pierre) : O.K., alors vous avez fait votre point.

M. Charette : Ce que je mentionne, c'est qu'au final on s'est entendus sur cette liste-là, vous l'avez approuvée. Parce que nous aussi, on a eu à faire des concessions. La responsabilité d'une commission parlementaire, lorsqu'il est temps de faire des consultations, c'est que l'ensemble des points de vue soient entendus. Et l'espace de dialogue... On parle avec les gens de Greenpeace à toutes les semaines, d'une façon ou d'une autre, donc l'espace de dialogue, il est présent.

Concernant le recours avec le fédéral, ma prédécesseure, la ministre Melançon, a écrit une lettre à son vis-à-vis au fédéral...

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le ministre, vous devez appeler les parlementaires par leur titre de parlementaire et non pas par leur nom personnel.

M. Charette : Oui, mais c'est parce que j'ai oublié le nom de sa circonscription... Verdun. Anciennement, la ministre de l'Environnement, députée, aujourd'hui, de Verdun — je l'ai dit en tout respect, c'est le nom de la circonscription qui m'échappait — avait écrit au fédéral pour reprendre essentiellement la position qui est la nôtre. Le Parti québécois défend la même position pour une question de prévisibilité. Notre marché du carbone a besoin de prévisibilité, et le cadre actuel, et c'est ce qu'on est allés revendiquer à Ottawa à quelques reprises, n'offre pas cette prévisibilité-là. On est déjà en train de regarder avec les industries concernées qu'est-ce qui va s'appliquer à eux de 2024 à 2030. Donc, cette prévisibilité-là, elle est nécessaire. Or, la prétention du gouvernement fédéral, c'est de pouvoir remettre en question, année après année, notre système. Donc, on ne peut pas se permettre d'avoir cette épée de Damoclès sur la tête.

Donc, c'est la raison pour laquelle ce recours-là, il est fondamental. Et on estime que la procédure d'évaluation environnementale du Québec, elle est nettement plus sérieuse qu'est-ce qui se vit au fédéral et qu'est-ce qui pourrait aussi arriver au fédéral advenant un changement de gouvernement. Donc, c'était la précision que je voulais vous apporter.

Une autre petite question. On a parlé des cibles. Vous m'avez entendu peut-être avec le groupe précédent. Vous aussi, vous avez une cible différente de l'ensemble des groupes qui se présentent... pas l'ensemble, quelques groupes qui se présentent devant nous. Je veux juste la comprendre. On parle du GIEC à plus ou moins 45 %. Vous, vous êtes à 65 % parce qu'il faudrait compenser pour les États plus défavorisés. C'est difficile... Entendez-nous, là, ce n'est pas un aveu d'échec, ce n'est pas de l'abdication, mais c'est difficile de s'entendre sur une cible, lorsque plusieurs groupes nous arrivent avec des chiffres différents, qu'ils justifient de façon différente. Donc, peut-être juste nous éclairer à ce niveau-là, s'il vous plaît.

Mme Simard (Alice-Anne) : Donc, au niveau des cibles, écoutez, vous avez dans la Loi sur la qualité de l'environnement, à l'article 46.4, un mécanisme qui permet de réviser les cibles de réduction des GES. Je vous invite à aller voir ça.

Donc, qu'est-ce qu'on vous demande, nous, en fait, c'est de profiter de l'étude du projet de loi n° 44 — là, je suis à la page 12 de notre mémoire — pour annoncer une cible de révision des émissions de GES selon les modalités, finalement, qui sont présentées à l'article 46.4 de la Loi sur la qualité de l'environnement. Et il y a même, dans l'Accord de Paris, aussi, un mécanisme semblable là, aussi, là, pour réviser à tous les cinq ans cette loi-là. Donc, il y a plusieurs...

Évidemment, nous, on se base sur des cibles qui sont demandées par d'autres groupes, entre autres le Réseau Action Climat Canada, et aussi des recommandations du Front commun pour la transition énergétique, qui regroupe maintenant plus de 1 million de Québécois et Québécoises, plusieurs... les centrales syndicales, des groupes sociaux, des groupes en logement, des groupes de femmes, des groupes environnementaux, donc une large part de la société civile qui demande des révisions de ces cibles-là.

Alors, nous, ce qu'on vous dit : Ne prenez pas nécessairement nos cibles, prenez plutôt le mécanisme et enclenchez ce mécanisme-là de révision. Et ça nous fera plaisir d'aller vous présenter notre point de vue sur les cibles, d'aller présenter aussi les recommandations de la science, les recommandations aussi de ce que les cibles devraient être pour que le Québec fasse sa juste part dans l'effort mondial. Mais, premièrement, enclenchez ce mécanisme-là, et on pourra faire cette révision-là tout le monde ensemble.

• (12 h 30) •

M. Bonin (Patrick) : Et, pour renchérir et compléter, c'est extrêmement important, cette année 2020. Le Québec a adhéré à l'Accord de Paris, c'est prévu, 2020, en vue de la COP26, à laquelle assistera M. Legault, et on le félicite, c'est extrêmement important que, d'ici septembre, l'ensemble des nations au niveau international arrivent avec des cibles plus ambitieuses. On se dirige vers 3,2 °C au niveau planétaire actuellement. L'Accord de Paris vise 1,5 °C. Si l'Assemblée nationale déclare qu'il y a une urgence climatique sur la base de la science, elle doit regarder ce que la science exige pour régler cette urgence climatique là. Vous avez fait référence au GIEC, le GIEC demande une réduction planétaire du CO2 d'au moins 50 % d'ici 2030, donc 45 % par rapport à 2010, ce qui est l'équivalent de 50 %, environ.

Vous savez très bien que l'Accord de Paris réclame aussi que les pays développés assument le leadership, plafonnent leurs émissions et les réduisent avant les pays en développement. Donc, inévitablement, l'ensemble de la communauté internationale, qui fait partie des nations développées, doit en faire plus, plus rapidement que les pays en développement. C'est ce pour quoi la cible proposée actuellement est légèrement plus ambitieuse que celle que le GIEC demande.

Ceci étant dit, il est certain que cette dynamique-là... le Québec doit lancer immédiatement cette révision de cette cible. Et ayons-la, la discussion, ayons-la. Si la science demande ça, comment on peut y arriver au Québec? Quelles sont les opportunités? Quels sont les défis? Mais actuellement le gouvernement repousse même en septembre, ce qu'on entend, le plan de mise en oeuvre avec les mesures pour atteindre une cible qui n'est pas adéquate.

Donc, c'est une chose, on félicite l'intention d'atteindre la cible actuelle du gouvernement du Québec, mais ne nous cachons pas la vérité, cette cible n'est pas assez ambitieuse. Et c'est crucial qu'en 2020 l'ensemble des nations démontrent leur volonté de respecter l'Accord de Paris, écoutent les gens, les 500 000 personnes qui étaient dans la rue. Et le Québec doit embarquer, doit être un vrai leader, et, pour l'instant, la cible est inadéquate, et on n'a pas de plan, et on n'a pas de mécanisme. Et c'est ce pour quoi la loi est essentielle. Au-delà de la cible, ça nous prend une assurance, un suivi qui nous permettra d'être certains que le gouvernement est sur la bonne voie, ce qui n'est pas le cas actuellement.

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le député de Bourget.

M. Charette : Juste une petite précision, et mes excuses au collègue, juste pour démontrer la bonne foi au niveau des groupes, on vient de relire les courriels qui se sont échangés pour convenir des groupes. Québec solidaire nous envoie, le 21 novembre dernier : «Dans un esprit de collaboration, nous limiterons nos demandes à ce stade-ci à un seul groupe, soit La Planète s'invite au Parlement.»

Des voix : ...

La Présidente (Mme St-Pierre) : J'ai arrêté le...

M. Charette : Bref, on ne mentionnait pas...

La Présidente (Mme St-Pierre) : J'ai arrêté le compteur parce que, M. le ministre, vous avez fait votre point tout à l'heure. M. le député a fait son point.

M. Charette : Oui, non, mais c'était juste une précision pour démontrer la bonne volonté.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Allez-y.

M. Bonin (Patrick) : Bien, M. le ministre, si vous invitez E-Taxi en commission...

Mme Ghazal : ...extrêmement longtemps, pas juste un courriel. Je pourrais soumettre tous les courriels qu'on a discutés ensemble.

M. Charette : Rendez-les disponibles.

Mme Ghazal : Si le ministre veut aller là, moi...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Bon. Un instant, là. Un instant! Un instant! On continue. S'il vous plaît! M. le député de Bourget, vous avez la parole. M. le ministre, vous... M. le député de Bourget, vous avez la parole.

M. Charette : ...

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le ministre, c'est moi qui mène ici. M. le député de Bourget.

Des voix : ...

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le député de Bourget, vous avez la parole.

M. Charette : Il me la laisse, la parole. C'est le temps du gouvernement, Mme la Présidente, juste vous démontrer... Et si vous voulez partager les courriels, partagez surtout, là, tout, tout...

Mme Ghazal : ...

M. Charette : Laissez-moi parler, s'il vous plaît. Partagez surtout le dernier, dernier courriel, où on est tous d'accord pour la liste qui a été convenue. Partagez ce courriel-là, s'il vous plaît.

Des voix : ...

La Présidente (Mme St-Pierre) : M. le député de Bourget.

Une voix : C'est de l'information confidentielle...

M. Charette : Ah! voilà, c'est confidentiel, maintenant ça ne fait pas votre affaire.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Bon, M. le ministre, vous venez de prêter des intentions, je vous demande de retirer vos paroles. Vous avez dit : C'est parce que ça ne faisait pas votre affaire. Je vous demande de retirer vos paroles.

M. Charette : Désolé si ça a offensé la collègue.

M. Bonin (Patrick) : Il est certain que, si le ministre a l'intention d'entendre un groupe en commission parlementaire, il prend les moyens de ses intentions. Et, nous, le message qu'on reçoit, c'est que le gouvernement ne veut pas entendre parler les organisations qui ne partagent pas exactement sa vision. Vous avez invité les organisations qui sont favorables à votre vision, qui pensent comme vous, dans un premier temps, et...

Une voix : ...

M. Bonin (Patrick) : Bien, si on regarde la conclusion, c'est cela, M. le ministre.

La Présidente (Mme St-Pierre) : S'il vous plaît! M. le député de Bourget, vous avez la parole.

M. Campeau : Je ferais juste remarquer qu'on a eu, juste avant, un groupe qui s'appelle La Planète s'invite au Parlement, et on ne peut pas dire qu'ils ont été très tendres et qu'on partage tout ce qui était là-dedans, et pourtant ils ont été invités.

J'étais dans la rue au mois de septembre, je partage l'inquiétude climatique depuis Kyoto en 1997. Alors, ce n'est pas nouveau, je suis... J'aime votre commentaire sur la partisanerie. Je suis d'accord que travailler tous en collégialité va sûrement aider, je suis... c'est évident, par rapport à ça, ce n'est pas toujours facile à faire.

Vous avez parlé, Mme Simard, de solutions nature. Je voudrais juste comprendre, je n'ai pas compris ce que ça voulait dire.

Mme Simard (Alice-Anne) : Bien sûr, donc, c'est dans notre mémoire, écoutez, c'est vers la fin, c'est à la page 27. Donc, les solutions climatiques basées sur la nature, ce sont des solutions, finalement, qui visent à conserver et restaurer des espaces naturels pour... et que ça nous permet, finalement, de lutter contre la crise climatique, à la fois dans des mesures d'atténuation, donc, par exemple, avec de la séquestration du carbone par ces espaces naturels là, que ce soient des arbres, des tourbières, mais aussi par, finalement, l'adaptation aussi, par exemple les milieux humides qui permettent de retenir l'eau lors des inondations.

Donc, c'est de dire... plutôt que de miser uniquement sur des solutions technologiques à la crise climatique, dont, des fois, l'électrification, qui est quand même une solution technologique à la crise climatique, on dit : Miser sur la nature puisque, présentement, il n'y a pas seulement une crise climatique dans le monde, il y a une grave crise de la biodiversité, et il faut trouver des solutions qui vont résoudre ces deux crises-là à la fois. Et les études montrent que les solutions nature sont plus efficaces et plus efficientes, donc il y a des économies financières, là, qui sont réalisées quand on investit dans les solutions nature, comparativement à seulement la technologie, là.

M. Bonin (Patrick) : Et, en complément, sur la dimension... et là-dessus on reconnaît l'effort gouvernemental en vue de l'atteinte des cibles de protection de la biodiversité pour 2020, on sait que, cette année, c'est une autre grande année au niveau des cibles internationales qu'il faut viser, et on attend une entente internationale d'ici la fin de l'année, au moins 30 % d'aires protégées d'ici 2030.

Et tous les scénarios climatiques qui permettent de limiter le réchauffement à près de 1,5 °C exigent qu'on soit en émissions négatives après 2050. Et le seul moyen, c'est d'augmenter le couvert forestier, de protéger les vieilles forêts anciennes, d'augmenter les aires protégées, et c'est central à l'atteinte des cibles et de la contribution du Québec dans la lutte contre les changements climatiques. Il n'y a aucun plan qui nous garde sous 2 °C si on n'augmente pas le couvert forestier et la captation naturelle de CO2. Et ça, c'est central, et tout plan gouvernemental doit avoir une partie importante... parce qu'en plus de lutter contre les changements climatiques, c'est également la protection de la biodiversité qui en dépend.

>17843 M. Campeau : Bien, je pense qu'on aura des bonnes nouvelles à annoncer par rapport aux aires protégées, je partage votre avis. J'imagine que ça peut aussi faire partie... si je fais la suite de ce que vous venez de dire, que construire des maisons en bois, par exemple, on peut penser que ça fait une partie de la séquestration, au lieu de les faire en ciment ou en béton. C'est un peu ça, dans ce sens-là aussi.

Mme Simard (Alice-Anne) : Bien, c'est sûr que construire des choses en bois, c'est bien, mais ce qui est mieux, c'est de protéger des espaces naturels, de ne pas couper ces arbres-là, de revitaliser les berges pour permettre de limiter les inondations. Là, le printemps s'en vient encore, puis je ne sais pas pour vous, mais, moi, ça m'inquiète encore de voir plusieurs maisons inondées, des gens tout perdre à cause de ça. Et pourtant on peut revitaliser les berges, on peut les remettre sous un aspect plus naturel, parce qu'on va limiter les inondations. Il faut restaurer des milieux humides, il faut restaurer des habitats qui ont été détruits, aussi, à cause des industries, entre autres des industries minières. Il y a beaucoup de travail. Ce n'est pas seulement de construire des bâtiments en bois. Ça fait partie de la solution, mais c'est beaucoup plus que ça, c'est de ramener la nature dans tous, tous, tous les aspects de la société aussi et ramener la nature aussi en ville, faire du verdissement urbain, entre autres. Donc, c'est plusieurs aspects.

Présentement, d'ailleurs, à Ottawa, il y a un congrès, un vaste congrès pancanadien sur les solutions nature. Je ne sais pas si vous avez envoyé quelqu'un de votre gouvernement là, mais ça aurait été intéressant pour vous éduquer, en fait, sur ces mesures-là qui sont efficaces et efficientes aussi pour lutter contre la crise climatique.

• (12 h 40) •

M. Bonin (Patrick) : Et, au-delà des mesures comme ça, précises... et vous faites bien de le mentionner, l'importance, justement, de construire davantage en bois au Québec, à partir du moment où les coupes sont bien faites également, par contre, mais là on parle d'une mesure précise. Et, si on parle d'une gouvernance climatique au Québec, ça nous prend un plan complet et global qui nous permettra de nous assurer qu'on va atteindre la cible. Parce que, oui, il y en a 1 million, de mesures, qu'il va falloir mettre en place, mais la vision globale et l'assurance d'atteindre ça, si on n'a pas ça dans une loi, une révision des plans proposés en regard des objectifs de réduction et de la science, on n'y arrivera pas, parce que c'est le total qu'il faut regarder.

Et ça, bien, actuellement, ce qu'on entend, c'est malheureusement qu'on... On attendait un plan, là, début 2020, de la part du gouvernement. Ce qu'on entend, c'est qu'il y aura un plan et peut-être plus tard, en septembre, un plan plus complet de mise en oeuvre pour atteindre la cible, qui n'est pas adéquate au niveau scientifique. Et ça, ça nous préoccupe parce qu'on est encore en train de perdre du temps alors qu'on sait que les années actuelles sont charnières, qu'on a 10 ans pour couper les émissions mondiales de CO2 de moitié, et on ne peut plus se permettre de repousser, de retarder. Donc, nous, on est très inquiets des mauvais signes, de l'incohérence proposée par le gouvernement.

Quand un premier ministre s'assoit avec une entreprise qui propose l'exportation du gaz naturel fracturé qui viendrait de l'Ouest pour lutter contre les changements climatiques alors que l'évaluation environnementale n'a pas été faite, c'est très préoccupant. Et il y a plusieurs exemples comme ça qu'on pourrait prendre. Et le seul moyen de rassurer la population, c'est de le mettre dans une loi pour que, peu importe le gouvernement, on soit capable de suivre l'évolution du Québec et qu'il y ait de la constance dans la lutte contre les changements climatiques, chose qu'on n'a pas eue dans le passé.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Mme la députée d'Argenteuil, vous avez 30 secondes.

Mme Grondin : Très rapidement. Miser sur la nature pour lutter contre la crise climatique, c'est de la musique à mes oreilles. Dans un plan d'action, vous considérez cette orientation-là... combien de pourcentage, 50 %, 20 %, 10 %, 90 %?

Mme Simard (Alice-Anne) : Il est reconnu qu'à l'échelle planétaire 30 % des réductions des émissions de gaz à effet de serre pourraient venir des solutions nature.

Mme Grondin : Merci.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, maintenant, vous avez la parole, Mme la députée de Mercier... Mme la députée... pardon, excusez-moi, Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Je vous remercie, Mme la Présidente. Bonjour à vous deux. Très apprécié que vous veniez ensemble nous présenter d'une même voix, dans le fond, votre analyse de la situation. Ce que j'entends de... non seulement de ce que j'ai lu dans votre mémoire, mais ce que vous venez présenter, dans le fond, c'est que le projet de loi qui est devant nous, bien, ça fait écho à ce que beaucoup de groupes nous ont dit, dans le fond, lors des consultations, à savoir que les structures qui sont présentes... Dans le fond, le projet de loi, si on le résume, là, c'est un projet de loi qui fait de la structurite, qui fait simplement enlever des structures, des jeunes structures qui étaient en train de faire la démonstration qu'elles fonctionnaient, qui ont fait la démonstration qu'elles fonctionnent, là, que ce soit au niveau du Conseil de gestion du Fonds vert, que ce soit au niveau de TEQ.

Vous avez soulevé certaines inquiétudes par rapport, justement, à la politisation, par rapport à la reddition de comptes, par rapport à la transparence. Je pense que c'est des inquiétudes qui sont fort louables. On en a parlé à plusieurs reprises. Je sais que vous avez dû suivre étroitement les travaux de la commission. C'est des préoccupations qui sont plus que louables, elles sont légitimes puis elles sont prévisibles.

Vous avez vu, il y a un de nos intervenants qui nous a dit que, le projet de loi n° 44, la façon dont il est présenté, c'est l'échec d'un... c'est l'assurance d'un... c'est faire le choix d'un échec parce que, dans le fond, on retourne à un endroit qu'on sait très bien qu'il n'a pas fonctionné, et c'est les raisons pour lesquelles ces deux structures-là, entre autres, avaient été mises sur pied.

Ce qu'on a appris avec le groupe précédent, c'est que le ministre convient — au moins il convient, il est lucide à ce niveau-là — que la loi, le projet de loi n° 44 n'est pas une loi climat. Ça, on avait tous compris ça, mais on est bien... je veux dire, lui, au moins, il vient le circonscrire. Et ce que je comprends de votre mémoire puis de votre intervention, c'est justement qu'il devait être... Parce que vous ne faites pas des propositions sur les deux organismes qui sont abolis, mais ce que je comprends, c'est que vous souhaiteriez que le projet, au minimum, soit extrêmement, beaucoup bonifié, parce que vous faites beaucoup, beaucoup de recommandations pour que ça se rapproche justement d'une loi climat et qu'on l'utilise pour en faire une loi climat.

Il y a certains éléments sur lesquels j'aimerais vous entendre, mais, si je ne me trompe pas, c'est la première ou la deuxième recommandation, vous parlez de réviser les cibles, puis je veux vous donner l'opportunité d'en parler davantage, si ce n'est que pour l'avoir sur les scripts de l'Assemblée. Vous parlez de réviser les cibles et de venir les enchâsser dans le projet de loi. Vous êtes le ixième groupe qui venez souligner ça. Ça semble être assez unanime, cette volonté-là et cette nécessité. Puis j'aimerais que vous puissiez nous expliquer pourquoi, selon vous, c'est absolument nécessaire.

M. Bonin (Patrick) : Juste, peut-être, sur la question de Transition énergétique Québec, que vous avez adressée directement, je pense qu'on est très clairs, comme la plupart des intervenants qui sont venus ici, qu'on a une nouvelle institution qui fonctionne, qui a davantage d'agilité, de flexibilité, d'efficacité et qui... moins de politisation également, et, dans l'urgence climatique, on ne voit pas... et le ministre, et le gouvernement, n'a pas fait la démonstration en quoi intégrer TEQ et... abolir cette société d'État et l'intégrer, pire encore, au ministère des Ressources naturelles aiderait. Pour nous, on croit que ça devrait être une société d'État probablement rattachée au premier ministre directement, surtout pas au ministère des Ressources naturelles. Dans le passé, il y a eu l'Agence de l'efficacité énergétique, le bureau de l'efficacité énergétique, également, qui ont démontré que ce ministère-là ne possède pas l'expertise complète et la volonté de lutter contre les changements climatiques. Et sa mission même est problématique.

Donc, pour nous, ça, c'est extrêmement inquiétant. Minimalement, le garder, cette société d'État, sous la responsabilité du ministre de l'Environnement, mais clairement pas d'envoyer ça au niveau des Ressources naturelles. Le passé est garant de l'avenir dans ce cas-ci. Et je pense qu'on n'est pas les seuls... Et les expériences internationales ont démontré que les agences indépendantes ont cette flexibilité, cette capacité d'agir, qui est beaucoup plus complexe et compliquée au niveau gouvernemental et qui est soumise davantage à la politisation dans une idée où on veut avoir de la continuité au-delà des cycles gouvernementaux et des différents partis.

Sur les cibles, vas-y.

Mme Simard (Alice-Anne) : Peut-être juste rapidement, c'est ça, c'est clair dans notre mémoire, à la page 19, on dit : On veut une société d'État qui englobe TEQ et le Conseil de gestion du Fonds vert, de regrouper ça ensemble pour que finalement on puisse avoir à la fois tous les moyens pour lutter contre la crise climatique, mais à la fois pour mettre en place la transition énergétique juste, donc de regrouper ça tout ensemble, et c'est très important.

Et mon collègue l'a mentionné, mais je tiens à le souligner encore une fois, la grande majorité, sinon pas la totalité des intervenants et intervenantes qui sont venus ici, de ce que j'ai vu, ont questionné l'abolition de TEQ. Donc, j'espère, M. le ministre, que vous allez prendre ça en considération. C'est essentiel. Quand, en commission parlementaire, il y a une quasi-unanimité pour dire que d'abolir un organisme comme TEQ, ce n'est pas bon, quand même le Conseil du patronat du Québec le dit, puis je dois vous dire que moi, je ne suis pas souvent d'accord avec le Conseil du patronat du Québec, et quand, là, on est d'accord sur quelque chose, s'il vous plaît, agissez à ce niveau-là.

Pour les cibles, maintenant.

M. Bonin (Patrick) : Pour l'établissement des cibles, comme on l'a mentionné, la cible du gouvernement du Québec a été adoptée avant l'Accord de Paris, la cible a été adoptée avant le rapport spécial du GIEC sur le réchauffement de 1,5 °C, qui est paru en 2018, et qui avait été commandé lors de la conférence de Paris, en 2015, et qui visait justement à faire l'état sur la science climatique : qu'est-ce que ça veut dire, 2 °C, qu'est-ce que ça veut dire, 1,5 °C. Et la science est très claire qu'il y a des différences majeures, ne serait-ce... On a subi une canicule meurtrière à Montréal, près de 80 personnes, en 2018. Le GIEC nous dit : Si on passe de 1,5 °C à 2 °C, c'est 400 millions de personnes de plus dans le monde qui vont subir des canicules extrêmes. Ça, c'est un exemple. Donc, la différence, elle est énorme. Et le GIEC nous dit aussi qu'est-ce qu'il faut faire en termes de réduction pour atteindre le 1,5 °C. Et c'est ce pour quoi l'Accord de Paris prévoit la révision quinquennale des cibles, et c'est cette année qu'elle a lieu. Parce qu'actuellement on s'en va vers 3,2 °C. Et ce n'est pas les catastrophistes qui disent que, 3,2 °C, on ne veut pas vivre dans ce monde-là, c'est la science.

Donc, soit qu'on écoute la science, et on dit qu'il y a une urgence climatique, et on regarde qu'est-ce qu'il faut faire, et on le met en oeuvre, ou sinon on ne l'écoute pas. Mais on ne déclare pas une urgence climatique en Assemblée nationale pour ne pas, par la suite, donner suite. Et, pour le faire, il y a des mécanismes prévus dans la LQE pour y arriver, pour établir cette cible-là, pour avoir cette discussion-là, sociétale, pour que les gens comprennent c'est quoi, le niveau de défi auquel on fait face, que tout le monde mette l'épaule à la roue, que nos ingénieurs embarquent, que les sociétés d'État, que l'ensemble du gouvernement, que l'argent soit mis à la bonne place, que les comportements soient changés. Mais, si on n'a pas cette discussion-là, bien, on n'y arrivera pas, ça, c'est certain.

Et, encore une fois, je reviens sur l'importance de 2020, on est dans la même dynamique où le gouvernement Trudeau, lui aussi, s'engage à réviser ses cibles, arriver en septembre avec une nouvelle cible, se fie sur la contribution des provinces. Et on sait qu'il y a des enjeux de compétence. L'environnement, c'est une compétence partagée. On ne partage pas, à Greenpeace, la position gouvernementale qu'on ne devrait pas comparer le marché du carbone au Québec avec ce qui est proposé comme tarification fédérale. S'il est si bon que ça, le marché du carbone, eh bien, que le gouvernement du Québec s'assoie avec le gouvernement fédéral, qu'on établisse des critères d'évaluation de la performance, de l'efficacité en regard des cibles et qu'on voie que le marché est si bon que ça.

Nous, actuellement, regardez dans le mémoire, on a regardé, pour 2013 à 2018, il y a eu plus d'allocations gratuites, de droits de polluer gratuits pour les grands émetteurs qu'ils ont eu d'émissions. Ils ont été payés, essentiellement, quand on regarde au total, alors que normalement le principe de pollueur-payeur dit qu'ils doivent payer pour leur pollution. Si ce système-là est optimal dans cette situation-là, qu'on donne plus de droits de polluer aux grands pollueurs qu'ils ont d'émissions, nous, on ne croit pas, Nature Québec, non plus... On a présenté des mémoires là-dessus disant que le système n'est pas optimal. Travaillons à l'optimaliser. Regardons aussi ce qui se passe au niveau pancanadien. On n'est plus dans la même game. Mais là le Québec a choisi de s'allier essentiellement avec Doug Ford et Jason Kenney pour confronter le gouvernement fédéral au lieu d'élever la barre vers le haut. Il est là, le problème. 2020, c'est une année charnière. Ce n'est pas vrai qu'on a cinq ans à perdre. C'est là qu'il faut revoir les cibles, c'est là qu'on s'en va à... Si on s'en va à Glasgow, et le premier ministre va à Glasgow, il ne peut pas arriver les mains vides encore une fois cette année, c'est certain.

• (12 h 50) •

La Présidente (Mme St-Pierre) : Il reste 1 min 40 s.

Mme Montpetit : Merci. Rapidement, parce que vous l'avez effleuré, j'aimerais ça vous entendre sur les conflits de mission du ministère des Ressources naturelles, parce qu'on va leur confier la transition énergétique, c'est ce qui est proposé par le ministre, par le gouvernement, en même temps qu'ils sont, entre autres, responsables des hydrocarbures, de l'émission des licences. J'aimerais ça vous... Je comprends que c'était peut-être ça que vous souligniez comme problématique, là.

Mme Simard (Alice-Anne) : Oui. Donc, évidemment, tu sais, dans... la mission, finalement, du ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles, c'est, entre autres, de favoriser, tu sais, le développement de l'industrie des hydrocarbures et ça va tout à fait à l'encontre de ce qui devrait être fait en matière de transition énergétique juste.

Et c'est surtout, en fait, qu'il faut s'assurer que, comme la transition doit s'opérer dans l'ensemble de la société... Ce n'est pas seulement une question d'énergie, ce n'est pas seulement une question d'électrification, il faut opérer des changements au niveau de l'aménagement du territoire, des infrastructures, il faut... Ça doit englober tout, tout, tout. Et c'est pour ça que nous, on demande que ça soit rattaché au plus haut niveau de pouvoir, au premier ministre, que ça soit transversal avec tous les ministères, cette transition juste là.

Et je veux juste profiter du dernier temps qui reste au niveau de... pour enchâsser les cibles de réduction dans la loi, pourquoi c'est important. Présentement, on va manquer notre cible de réduction pour 2020, et je crois que le gouvernement, présentement, de la CAQ aurait été peut-être content qu'il y ait ce mécanisme-là qui oblige le gouvernement à respecter ses cibles, parce que vous auriez beaucoup moins de retard à rattraper de cette façon-là, on aurait atteint nos cibles de cette façon-là. Donc, de se retrouver comme ça, dans une situation où vous avez des grands défis devant vous, c'est, entre autres, parce que les cibles n'ont pas été enchâssées dans la loi. Et c'est pour ça qu'on vous demande de le faire maintenant, comme d'autres juridictions l'ont fait, entre autres la Colombie-Britannique, le Royaume-Uni, l'Écosse, le Danemark...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Je dois vous interrompre ici.

Mme Simard (Alice-Anne) : Il n'y a pas de problème.

La Présidente (Mme St-Pierre) : La parole est maintenant à la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Merci. Merci beaucoup. Merci pour votre présentation. Je veux aussi remercier... Toute la question des cibles, vous en parlez beaucoup, et le ministre qui nous dit, puis ça fait quelques fois qu'il répète comme quoi les cibles, bien... On entend toutes sortes de cibles ici pour le Québec, et la majorité de ces gens-là, évidemment, contestent le 37,5 %. Puis vous l'avez très, très bien expliqué puis décrit, pourquoi est-ce qu'il faudrait que la cible que vous présentez... pour écouter le GIEC mais aussi parce que le Québec a, si on veut, une responsabilité, en tant que pays industrialisé, de hausser ça. Puis vous l'avez très, très bien expliqué et décrit. Puis on va avoir l'occasion aussi de le renchérir puis d'expliquer un peu plus pourquoi est-ce que cette cible devrait être rehaussée et à combien.

Je voudrais vous amener sur la question de la foresterie. Vous en avez parlé un peu... bien, pas mal, puis aussi dans votre mémoire. On avait reçu la Fédération québécoise des municipalités, qui nous a dit que le nouveau Fonds vert, là, le FECC, devrait financer des opérations forestières dans le but... parce que c'est bon pour l'environnement, un peu comme ce que le ministre nous disait, le ministre de la Forêt. Étant donné que ça va être le ministre de l'Environnement qui, maintenant, va gérer le Fonds vert, ça va être important de vous entendre lui expliquer pourquoi est-ce que ce fonds-là ne devrait pas financer des opérations de foresterie.

Mme Simard (Alice-Anne) : Écoutez, les déclarations, là, du ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs, là, qui a affirmé vouloir faire davantage de coupes de bois puis, bien, justement cette demande-là, là, d'aider l'industrie forestière à même le fonds, le FECC, c'est vraiment une simplification, là, d'une réalité qui est très complexe.

Oui, c'est vrai que la forêt peut capter, séquestrer du carbone, mais ce n'est pas aussi clair que ça. Il y a beaucoup d'éléments qu'il faut regarder. Une forêt qui pousse, c'est vrai que c'est un bon puits de carbone, mais une forêt qui est mature, c'est un meilleur réservoir de carbone, qui va contenir plus de carbone qu'une jeune forêt en croissance.

Il ne faut pas oublier aussi que la majorité des activités reliées à la foresterie émettent des GES de par leur nature qui est motorisée. Donc, par exemple, parce qu'on utilise des combustibles fossiles dans la machinerie, il faut aller faire des tracés de coupe, il faut aller ouvrir des chemins, des choses comme ça, donc ça va émettre quand même beaucoup de GES, et c'est encore pire quand les coupes sont réalisées en région éloignée.

Donc, il y a aussi... il faut penser à tout le carbone qui est séquestré dans les racines, qui est séquestré dans le sol également.

Donc, c'est un problème qui est très, très complexe, on ne peut pas juste dire : On peut couper plus d'arbres, ça va lutter contre les changements climatiques. Ce n'est pas vrai. Nous, à Nature Québec, on a des experts, expertes qui se penchent présentement sur la question pour colliger toutes les informations disponibles, pour voir réellement quel est l'impact de la foresterie sur les changements climatiques. Et j'invite le gouvernement même à faire ce genre d'étude là également...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Je dois vous interrompre ici.

Mme Simard (Alice-Anne) : ...et surtout de publier des études qui sont indépendantes de l'industrie forestière.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Maintenant, la parole est au député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Le ministre semble reprocher aux oppositions de ne pas avoir voulu entendre Greenpeace. Alors, moi, je demande le consentement pour qu'on étire de trois quarts d'heure puis qu'on puisse entendre Greenpeace, soit aujourd'hui ou plus tard, la semaine prochaine. Alors, je ne sais pas s'il y a consentement des oppositions.

Une voix : Pas pour aujourd'hui...

M. Gaudreault : Bien, peut-être pas pour aujourd'hui, mais on trouvera le moment. Est-ce qu'il y a consentement du gouvernement?

M. Charette : ...

M. Gaudreault : Bien, par consentement, en commission.

Des voix : ...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Alors, la démonstration est faite auprès de nos invités. Merci. Merci, Mme la Présidente.

Là, visiblement, puis le ministre l'a dit à plusieurs reprises, on n'a pas devant nous une loi climat. On a une loi ordinaire, une loi de gestion courante des choses. Puis, pour nous, comme députés de l'opposition, ça nous pose un méchant problème parce que, là, on doit dire : On est-u mieux de déchirer tout ça puis de ne rien faire ou d'essayer d'améliorer et de bonifier?

Si vous aviez une chose, là, à nous dire, qu'on devrait se battre, là, auprès du gouvernement pour l'amender, cette loi-là, ça serait sur quoi?

M. Bonin (Patrick) : Bien, pour nous, il est très clair qu'elle n'est pas à la hauteur. Et un moyen de l'améliorer, c'est définitivement d'inscrire dans la loi les cibles en lien avec la science, un budget carbone rattaché à ces cibles-là, mécanisme de reddition de comptes qui va nous assurer de manière périodique qu'on va suivre les inventaires à date fixe, qu'on va avoir également des évaluations des plans d'action proposés, des évaluations des projections des émissions. On n'a pas ça au Québec encore aujourd'hui, un an et demi après l'arrivée du gouvernement, qui dit qu'il ne savait pas où on s'en va, on n'a pas de projection de la trajectoire des émissions au Québec.

Donc, c'est un package : les cibles, un budget carbone, mécanisme complet de reddition de comptes, parce que, sinon, on n'a aucune certitude, on va répéter la même histoire à chaque fois, il va y avoir de la politisation, on n'aura pas de débat de fond sur des chiffres indépendants qui permettraient justement d'élever le débat.

M. Gaudreault : O.K. Moi, je suis d'accord avec ça. Je pense que, si on a un morceau à aller chercher de ce gouvernement, c'est le budget carbone, qui, pour moi, fait d'une pierre deux coups parce que le budget carbone en soi est un mécanisme de reddition de comptes. Vous êtes d'accord avec ça?

M. Bonin (Patrick) : Bien, tout comme on a une loi antidéficit budgétaire.

M. Gaudreault : Exact.

M. Bonin (Patrick) : Ça nous prend l'équivalent avec un budget carbone équivalent.

M. Gaudreault : Comme dans les années 90, c'était important d'avoir l'équilibre zéro dans les... c'est-à-dire le déficit zéro dans l'équilibre budgétaire, bien là, aujourd'hui, c'est certainement déficit zéro climatique. Il nous reste peu de secondes...

La Présidente (Mme St-Pierre) : Sept secondes.

M. Gaudreault : Ah! sept secondes. Bien, sept secondes pour vous dire merci. Puis on va continuer de travailler au moins pour bonifier la loi.

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, merci beaucoup. Merci pour votre participation à notre commission. Donc, nous allons terminer nos travaux. Il faut que je fasse la conclusion de la commission.

Je peux suspendre quelques instants pour vous permettre de remercier nos invités.

(Suspension de la séance à 12 h 58)

(Reprise à 12 h 59)

La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Je dois conclure les travaux de la commission.

Mémoires déposés

Donc, avant de terminer, je dépose les mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus. Nous avons eu 14 mémoires, soit de l'Association médicale canadienne, de M. Réjean Benoit, M. Alain Bonnier, M. Reynald Du Berger et M. Marc A. Vallée, et autres — c'est un groupe — Centre d'excellence en efficacité énergétique, Citoyens au Courant, Conseil québécois de l'environnement, Constructeurs mondiaux d'automobiles du Canada, Éco Entreprises Québec, Énergir, Front commun pour la transition énergétique, Producteurs de grains du Québec, Union des municipalités du Québec, Vélo Québec et ville de Laval.

Je remercie encore une fois tous les participants pour leur contribution à nos travaux.

La commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux au jeudi le 6 février, à 14 h 30. Merci beaucoup, mesdames et messieurs, et je vous souhaite une très belle fin de journée. Merci.

(Fin de la séance à 13 heures)

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