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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Wednesday, January 22, 2020 - Vol. 45 N° 41

Special consultations and public hearings on Bill 44, An Act mainly to ensure effective governance of the fight against climate change and to promote electrification


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Auditions (suite)

Vivre en ville

Association québécoise de la production d'énergie renouvelable (AQPER)

Vérificateur général

Documents déposés

Auditions (suite)

Ville de Montréal

Le Pacte pour la transition

E-Taxi inc.

Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec (RNCREQ)

Association du transport urbain du Québec (ATUQ)

Association des transports collectifs ruraux du Québec (ATCRQ)

Intervenants

M. Saul Polo, président suppléant

Mme Agnès Grondin, vice-présidente

M. Benoit Charette

M. Richard Campeau

Mme Marie Montpetit

M. Gregory Kelley

Mme Ruba Ghazal

M. Sylvain Gaudreault

Mme Joëlle Boutin

M. Denis Tardif

*          M. Christian Savard, Vivre en ville

*          Mme Jeanne Robin, idem

*          M. Jean-François Samray, AQPER

*          M. Paul Lanoie, bureau du Vérificateur général

*          M. Patrick Dubuc, idem

*          Mme Caroline Rivard, idem

*          Mme Valérie Plante, ville de Montréal

*          M. Sidney Ribaux, idem

*          M. Dominic Champagne, Le Pacte pour la transition

*          M. Nhan Dung Cuong, E-Taxi inc.

*          M. Pierre Lopez, idem

*          M. Gilles Brochu, RNCREQ

*          M. Martin Vaillancourt, idem

*          Mme Marie-Philippe Chouinard, idem

*          M. Marc-André Varin, ATUQ

*          M. André Lavoie, ATCRQ

*          Mme Andréanne Ladouceur, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente et une minutes)

Le Président (M. Polo) : S'il vous plaît! Ayant constaté le... À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare à séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 44, Loi visant principalement la gouvernance efficace de la lutte contre les changements climatiques et à favoriser l'électrification.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Lamothe (Ungava) sera remplacé par Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice); M. Reid (Beauharnois), par Mme Boutin (Jean-Talon); M. Barrette (La Pinière), par M. Kelley (Jacques-Cartier); M. Benjamin (Viau), par M. Polo (Laval-des-Rapides); et M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), par M. Gaudreault (Jonquière).

Auditions (suite)

Le Président (M. Polo) : Cet avant-midi, nous entendrons quatre groupes : Vivre en ville; ensuite l'Association québécoise de la production d'énergie renouvelable; le Vérificateur général du Québec, Commissaire au développement durable; et la ville de Montréal.

Je souhaite donc la bienvenue au groupe Vivre en ville, représenté par M. Christian Savard et Mme Jeanne Robin. C'est bien ça? Parfait. Je vous rappelle que vous disposez d'une période de 10 minutes pour votre exposé. Puis nous procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à procéder à votre exposé. La parole est à vous.

Vivre en ville

M. Savard (Christian) : Merci, M. le Président. Mmes, MM. les députés, merci de l'invitation à participer à cet important exercice pour l'avenir de la lutte contre les changements climatiques au Québec et la révision d'une partie de sa gouvernance. Je me sens un petit peu comme... Je commence à me sentir comme un vétéran, peut-être pas encore comme un sage parce qu'on a participé à des processus semblables, là, depuis madame, à l'époque, Line Beauchamp, avec les premières consultations sur la cible qui a eu... la cible 2020, justement. Donc, on commence à avoir une certaine profondeur sur, justement, les actions du Québec. On espère que notre contribution va pouvoir aiguiller les parlementaires et le gouvernement.

Donc, la présentation qu'on vous fait, notre mémoire, repose sur aussi une analyse des meilleures pratiques à travers le monde, les législations qui ont été les plus avant-gardistes en matière de gouvernance sur les changements climatiques, mais également, comme je le disais, sur notre expérience des dernières années. On a participé à plusieurs des comités consultatifs sur les changements climatiques dans les dernières années. Et je suis moi-même membre du conseil d'administration du Conseil de gestion du Fonds vert.

Donc, d'entrée de jeu, on considère... Notre première proposition dont je vais vous parler, elle est un peu audacieuse, mais probablement plus réaliste que certaines autres que j'ai pu entendre dernièrement, c'est d'effectivement de confier à un ministre l'imputabilité et la responsabilité de la lutte contre les changements climatiques. Mais, puisque les changements climatiques sont quelque chose de très transversal dans les différents secteurs de l'État et les différents secteurs de la société, on fait la proposition de nommer un ministre d'État aux changements climatiques qui aurait... On sait que, dans l'histoire du Québec, les ministres d'État avaient souvent un rôle transversal. C'étaient des superministres. Donc, on fait cette proposition-là afin de doter ce ministre-là des différents outils puis de l'influence auprès de ses collègues pour que l'État québécois ait une cohérence, parce qu'on sait que c'est ça qui est le plus difficile, les différents mouvements qui traversent... les différents intérêts qui traversent nos sociétés, notre société, sont difficiles à contenir. Donc, avoir un ministre d'État fort dédié uniquement aux changements climatiques nous semble la meilleure manière. C'est la suggestion qu'on vous fait qui n'est pas si loin de la suggestion du ministre de l'Environnement, mais, dans un monde idéal, il y aurait un ministre lié aux changements climatiques et un ministre de l'Environnement, mais ça serait notre proposition en ce qui concerne un ministre d'État.

Sinon, notre autre proposition va également dans le sens du projet de loi, et on fait des propositions même pour le renforcer. C'est effectivement d'avoir un comité aviseur consultatif sur les changements climatiques, indépendant, doté de ressources propres pour surveiller, justement, les actions du gouvernement et assurer cette cohérence-là. Ce comité-là viendrait jouer, justement, le rôle de chien de garde afin de maintenir le cap. C'est un peu la manière qu'on considère que ça peut... c'est une avenue intéressante, mais qu'il va falloir le renforcer afin, justement, d'éviter certains écueils du passé en ce qui concerne, là, la cohérence sur, par exemple, les investissements en matière de changements climatiques ou la cohérence des actions gouvernementales.

Donc, voilà pour nos deux premiers points. Je laisserais la parole à Jeanne.

Mme Robin (Jeanne) : Un autre point sur lequel on souhaitait attirer votre attention, c'est le réflexe climat qui s'appliquerait à l'ensemble de l'action gouvernementale et pas seulement au ministre responsable de la lutte contre les changements climatiques, parce qu'au-delà de ce ministère-là, c'est tous les ministères et organismes qui devraient être au service de l'enjeu climatique. Donc, on propose que chaque décision de l'État fasse l'objet d'une analyse rigoureuse de ses impacts climatiques, à la fois sous l'angle du bilan carbone, des émissions de gaz à effet de serre évitées, réduites ou séquestrées, et aussi sous l'angle de maintenir et renforcer la capacité d'adaptation des collectivités québécoises au climat futur.

Donc, la recommandation qu'on fait, c'est d'assujettir chacune des décisions stratégiques et budgétaires de l'État à une analyse rigoureuse de ses impacts climatiques via une grille d'analyse dont les résultats seront rendus publics. Une grille d'analyse, donc, qui serait la même pour l'ensemble des ministères et organismes qui seraient soumis, et cette analyse-là pourrait conduire à modifier les projets qui y sont soumis, à abandonner le projet, dans certains cas, si on juge que ses répercussions sont trop dommageables par rapport à l'enjeu climatique et, dans certains cas aussi, à compenser les effets non souhaités pour s'assurer de demeurer sur la trajectoire qu'on vise pour le Québec, à la fois en matière d'adaptation et de réduction des émissions.

Un autre point important sur lequel on souhaitait attirer votre attention concerne l'allocation des fonds dédiés à la lutte contre les changements climatiques, sur laquelle on comprend l'importance de gérer efficacement ces fonds et donc d'avoir des indicateurs de performance qui permettent de juger de la bonne allocation. On recommande de dépasser la question du coût à la tonne, qui est certes un élément important, mais qui conduit à sous-estimer parfois certains effets positifs de certaines mesures. En fait, le coût à la tonne ne tient pas compte ni du retour sur investissement d'un investissement ni de l'ensemble des bénéfices et, dans certains cas, il sous-estime même les réductions d'émissions. Donc, on propose de mettre en place des indicateurs de performance plus complets que le coût à la tonne pour mieux tenir compte des retombées globales des mesures financées, comme le coût net à la tonne.

• (9 h 40) •

M. Savard (Christian) : Pour également... il y a une recommandation plus spécifique sur la règle qui fait en sorte que l'argent de la bourse du carbone doit être dédié aux deux tiers au secteur des transports. On considère que, dans l'état actuel des choses, il n'y a pas lieu de toucher à cette règle-là, tout simplement parce que le secteur des transports demeure le plus grand émetteur de gaz à effet de serre au Québec, et le seul où est-ce qu'on ne réussit à peu près pas à réduire, donc il n'y a pas vraiment lieu d'y toucher pour l'instant, surtout que, si on commence à y toucher maintenant, mais qu'on ne connaît pas qu'elle va être, par exemple, le cadre financier qui va venir avec pour le transport collectif, on peut se retrouver, encore une fois, comme il y a eu dans le passé, où les gains qu'on fait actuellement au niveau des transports collectifs soient menacés pas une instabilité financière. Donc, à ce moment-ci, il n'y a pas lieu de toucher à cette règle-là, selon nous, et, lorsque le cadre financier pourrait être stabilisé, peut-être qu'on pourrait ouvrir la porte à regarder ça, mais je ne pense pas. Je pense que nos défis sont là, et, par principe, il faut maintenir cette règle-là. Et il ne faut pas oublier que le principal contributeur, justement, à la bourse du carbone, c'est le secteur des transports. Selon nos calculs, c'est, au minimum, à 60 %. Donc, il y a ça aussi qu'il faut prendre en considération et qui fait en sorte que, bien, on redonne aussi à ce secteur-là sa contribution. Et c'est souvent un argument qu'on entend pour le revoir, mais c'est le secteur des transports qui est le principal contributeur.

Donc, très important de continuer de mettre un certain focus, disait l'expression, sur ce secteur-là, et donc on considère qu'il n'est pas avenu de toucher au deux tiers. Et, d'ailleurs, on fait également la proposition que l'électrification des véhicules individuels ne fasse pas partie de ce deux tiers là, qu'il ait son fonds propre à travers un programme de redevances remises afin d'accélérer l'électrification et la diminution de la grosseur et du nombre du parc automobile, qui ne va pas assez vite. On l'a vu dans l'état de l'énergie dernièrement.

Sinon, une dernière recommandation, c'est, de manière générale, il va falloir... et ça concerne un petit peu moins directement le projet de loi, mais davantage l'ensemble de la stratégie du gouvernement. Vivre en ville, vous nous connaissez, on pense que c'est beaucoup à travers les collectivités, qui rejoignent les citoyens... qu'il faut faire des collectivités un de nos piliers de la lutte contre les changements climatiques. Ça touche autant l'adaptation que la réduction des gaz à effet de serre, mais ça touche également... Il ne faut pas oublier qu'au Québec on attend 400 000 nouveaux ménages. Il faudrait faire en sorte que les 400 000 nouveaux ménages qu'on attend soient les plus exemplaires possible. Il y a des choses qu'on a faites dans le passé qui alourdissent notre bilan, mais peut-être que qu'est-ce qu'on fait dans le futur ne le soit... ne l'alourdisse pas, répare finalement notre bilan. Donc, on considère important, là, de continuer à avoir nos collectivités au centre de la lutte contre les changements climatiques.

Donc, ça terminerait notre exposé. On est allés avec les lignes de force dans le 10 minutes qui nous est imparti. On a une vingtaine de recommandations plus précises, et ça va nous faire plaisir de répondre à vos questions. Merci.

Le Président (M. Polo) : Merci de respecter votre temps. Je vous remercie. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Charette : Merci, M. le Président. À vous deux, merci de vous joindre à nous ce matin. Je vous dirais que la partie frustrante de l'exercice commence maintenant, c'est-à-dire un temps très, très restreint par rapport aux questions qui pourraient être soulevées et, surtout, les réponses que vous pourriez nous apporter, donc, sans pouvoir avoir le temps de passer en revue tous les points, là. Mais j'ai quelques questions. Au niveau notamment de rapatrier les ressources, bon, vous avez évoqué un ministre d'État. Le gouvernement actuel, en toute franchise, n'a pas retenu la formule des ministres d'État. C'est une formule qui s'est vue par le passé, effectivement, mais qui n'est pas obligatoire pour arriver aux mêmes fins.

Mais je vois aussi, dans vos recommandations, de transférer la responsabilité de TEQ sous ce nouveau ministère, en quelque sorte. Certains groupes, hier, nous ont parlé d'une formule de TEQ plus, en quelque sorte. Est-ce qu'à l'égard d'une agence dédiée vous aviez aussi des préoccupations ou des souhaits particuliers?

M. Savard (Christian) : Il se dit beaucoup de choses sur la lutte contre les changements climatiques, l'utilisation du Fonds vert. Et je dirais que, personnellement, une de mes principales frustrations, ça a été de voir beaucoup de choses du plan d'action qui ne se sont pas mises en place, pour plein de raisons, dans les dernières années. Je pense à une action de 100 millions au ministère de l'Éducation pour travailler sur les écoles, que ce soit... On peut penser à plein de choses qu'on peut faire avec 100 millions pour nos écoles, et, pour l'instant, on n'a jamais vu le début de ce programme-là d'un plan d'action annoncé en 2012.

Donc, est-ce que l'idée d'avoir une agence qui serait dédiée pour certains programmes, avec une certaine indépendance... Personnellement, je ne vois pas le modèle d'une société d'État pure, de type Hydro-Québec. On s'entend, eux, ils produisent et ils vendent de l'électricité. Là, on parle de mesures qui touchent à la société. C'est normal qu'ils aient un certain rôle politique, selon nous. Mais avoir une agence de livraison d'un certain nombre des programmes peut probablement s'avérer intéressante d'un point de vue de l'agilité. Et force est de constater qu'on a eu des problèmes de livraison de programmes dans les dernières années. Il y a plein de raisons pour ça. Mais est-ce qu'une agence avec une certaine indépendance... Beaucoup d'acteurs pensent que c'est une bonne idée.

Et une chose est sûre, nous, on croit que... et on le voit, la division, parfois, entre le MREN, le ministère de l'Environnement, on peut même... fait parfois, selon moi, des choses qui pourraient être plus fortes et avec une plus forte imputabilité si c'était sous une même responsabilité.

M. Charette : Parfait. Et, sans poser une question par rapport à votre point quatre, juste réitérer que c'est l'objet même du projet de loi, c'est-à-dire une certaine imputabilité par rapport aux résultats.

Sans ressasser le passé indéfiniment et sans parler de la situation au Québec uniquement, il y a beaucoup de cibles qui ont été déterminées au fil des ans. Malheureusement, l'atteinte de ces cibles-là s'est rarement concrétisée. Et souvent c'est l'année avant l'échéance qu'on admettait bêtement : bien, c'est bien désolé, mais on va rater notre cible. C'est exactement le scénario que l'on souhaite éviter avec la proposition de gouvernance que l'on fait, surtout les deux chiens de garde, en quelque sorte, qu'on vient instituer.

Vous avez des recommandations intéressantes, ça fera l'objet de ma prochaine question, justement, au niveau du comité indépendant mais également du rôle que l'on souhaite confier au Commissaire au développement durable et, dans les deux cas, à travers des bulletins... c'est-à-dire, des rapports publics, ça va constituer notre bulletin, en quelque sorte, pour ne pas l'échapper sur quelques années.

Et, parce que je fais référence à ce comité de sélection, vous disiez : Fixer par la loi les critères de sélection. Le projet de loi ne va pas actuellement dans ce sens-là. Mais je serais tenté de vous poser la question : Quelle serait la constitution idéale de ce comité-là pour arriver aux mêmes fins?

M. Savard (Christian) : On fait des propositions plus précises, là, à la page 21, où est-ce qu'on y va avec différents critères.

M. Charette : Effectivement. Mais n'hésitez pas, étant donné que les auditions sont publiques, à les révéler, étant donné que tous n'auront pas le loisir, là, de lire votre mémoire.

M. Savard (Christian) : Oui. Donc, bien, à titre d'exemple, nous, on propose un président et huit membres indépendants. Dans d'autres juridictions, ça va jusqu'à 20. Ma petite expérience dit que parfois un trop grand comité finit par avoir beaucoup trop de types d'intérêts et devient plus difficile à avoir, par exemple, des consensus et une plus grande force.

Donc, il faudrait avoir un comité, aussi, diversifié. Oui, effectivement, des scientifiques, mais également des spécialistes des politiques publiques, des représentants de la société civile, avec des expertises, bien évidemment, lutte contre les changements climatiques, tant au niveau de l'atténuation, de l'adaptation, la science climatique, mais également l'économie, finance, mécanismes de tarification, en politiques publiques, sciences sociales également. Il y a des impacts, hein, nos choix au niveau des changements climatiques qui peuvent avoir des conséquences sociales. Donc, avoir des gens qui ont cette sensibilité-là serait important. Et puis une compréhension... Il peut y avoir également une compréhension des différents milieux du Québec, donc des gens qui viennent de différentes régions. Donc, essayer d'avoir quelque chose de représentatif des compétences nécessaires, là.

M. Charette : Comment nous aider à régler l'embouteillage à l'entrée de ce comité-là? Hier, à juste titre, et je comprends très bien leurs revendications, la FTQ a demandé à y être. Les autres centrales syndicales aimeraient y être. Je donnais l'exemple des universités, qui aimeraient toutes y être aussi. Cependant, on a cinq, six grandes universités. On a quatre, cinq grandes centrales syndicales. Comment faire la sélection?

Et l'idée que je vous propose : Est-ce que ce comité-là, plutôt que de vouloir réunir tous les ensembles possibles, ne pourrait pas créer des tables de travail ou de concertation pour pouvoir se référer, par exemple, au milieu syndical, pour pouvoir se référer au milieu universitaire? Est-ce que c'est une avenue qui pourrait être envisageable aussi?

M. Savard (Christian) : Question intéressante. Il faut éviter les lobbys qui sont obligés de dire certaines choses autour d'une table. Il faut des membres les plus indépendants possible. J'aurais dû le mentionner d'entrée de jeu, là, que le critère numéro un devrait être l'indépendance des membres. Donc, c'est pour ça qu'on parle souvent de scientifiques, on parle souvent d'universitaires, qui ont... souvent, justement, ils n'ont pas d'intérêt derrière qui sont, par exemple, lié à leurs membres. Par contre, est-ce que ça veut dire qu'il ne faut pas, justement, écouter ce type d'acteurs là? Bien sûr. Mais je crois... Et ça, c'est de tous les côtés, là, donc il va falloir être...

• (9 h 50) •

M. Charette : A priori, vous seriez d'accord avec l'esprit actuel du projet de loi qui vise un comité d'experts, naturellement, indépendants, majoritairement composé de scientifiques. Et, moi, l'idée que je trouve intéressante avec ce comité-là, c'est l'obligation d'une publication de ses rapports. Actuellement, on a cette même possibilité avec la loi telle qu'elle est vécue. Cependant, il y a une discrétion, à savoir : Est-ce qu'on rend public? Là, ça serait systématique. Donc, ça, c'est une idée, là, qui vous plaît, a priori.

M. Savard (Christian) : Oui, tout à fait, puis nos propositions vont pour renforcer cet aspect-là du projet de loi.

M. Charette : Vous avez aussi mentionné... Désolé, hein?

M. Savard (Christian) : Oui, allez-y.

M. Charette : Je semble bousculer le temps, mais c'est le temps qui est très, très limité. Vous avez fait référence aux deux tiers en transport, et notre collègue, et je le comprends tout à fait, de Jacques-Cartier a posé plusieurs questions très pertinentes à ce sujet-là hier. Je l'en remercie.

Nous, on ne dit pas qu'on va changer la règle des deux tiers, mais qu'on se laisse la possibilité de la revoir pour une raison bien simple, et ça a été très bien expliqué. Je pense, c'est M. Webster, hier, qui disait ça. Actuellement, c'est systématique, les deux tiers, mais sans qu'il y ait de programme ou de résultat acquis, ce qui fait que le transfert est fait de façon automatique, et les sommes finissent par se perdre, en quelque sorte, sans qu'on ait toujours les résultats escomptés.

Nous, clairement, les transports, c'est notre défi, 43 % de nos émissions, mais vous allez voir... et, je pense, le budget va pouvoir en rassurer plusieurs à ce niveau-là. Déjà, on mentionne une chose : tous les revenus du Fonds vert, qui est appelé à changer de nom, ne suffiront pas pour financer nos programmes et nos intentions pour les prochaines années. Donc, il faudra beaucoup recourir au PQI, et le transport collectif, étant donné qu'on parle d'infrastructures, est plus facilement finançable à travers le PQI qu'à travers des sommes provenant du Fonds vert.

Donc, on aura, au cours des prochaines semaines, la possibilité de rassurer certaines inquiétudes, mais je comprends tout à fait le questionnement de mon collègue de Jacques-Cartier. On ne veut pas minimiser l'importance du défi des transports, mais on veut le financer de la bonne façon pour ne pas accaparer l'ensemble des revenus du Fonds vert.

Une autre petite question. Vous avez fait référence, à juste titre, à votre rôle auprès des communautés, auprès de l'aménagement du territoire. Vous militez pour une politique. Je pense que notre collègue au niveau du MAMH, des Affaires municipales, travaille dans cette direction-là. On l'accompagne, d'ailleurs.

Mais, au niveau des communautés, comment le gouvernement pourrait mieux les appuyer? Je vous donne un exemple qui a été soulevé hier, qui mérite réflexion de notre côté. La FQM dit : Financez les MRC comme vous l'avez fait pour les milieux humides, pour que chaque MRC puisse se doter, en quelque sorte, d'un plan. Sans vous dire que c'est l'idée à retenir, mais c'est une des idées qui a été évoquée hier, quel pourrait être l'appui donné aux communautés pour qu'elles puissent, justement, jouer pleinement leur rôle au niveau de la lutte aux changements climatiques?

M. Savard (Christian) : Bien, en ce qui concerne les communautés, c'est une bonne... Il faut des incitatifs pour les diriger dans la bonne direction. J'ai juste un petit bémol sur l'idée de saupoudrer des plans partout au Québec. C'est sûr que, par exemple, la Fédération québécoise des municipalités va dire : Aïe! Donnez-en un petit peu à tout le monde. Je crois qu'on est rendus aussi à récompenser les meilleurs pour faire une émulation, pour que tout le monde veuille rattraper les meilleurs.

Et là je vais vous parler du programme ÉcoQuartier français, qui a fait ça. Ils étaient en retard sur les Allemands. Les Allemands arrivaient avec des beaux écoquartiers avec une empreinte écologique très faible. Et donc on a soutenu les meilleurs pour faire des projets types, et ça, au Québec, on n'en a pas beaucoup. Donc, oui, il faut aider un petit peu tout le monde, mais il faut aider aussi les meilleurs, les municipalités qui ont le goût de faire des projets innovants, avec un coup de pouce financier.

Comme je le dis souvent, il faut concentrer la machine municipale à faire des bons projets plutôt qu'à écrire des règlements de dézonage agricole. Si on leur donne de l'argent pour faire des bons projets, ils vont mettre leurs ressources là. Donc, il faut des incitatifs, de la même manière qu'on le fait pour la voiture électrique. Il faut des incitatifs aux villes pour faire autrement. Donc, un soutien financier va être essentiel parce qu'il y a une limite aussi à la réglementation, d'un point de vue politique.

M. Charette : Je ne prends pas parti à ce moment-ci, mais le contre-exemple ou le contre-argument qu'on nous donne au moment de consultations, notamment, c'est que les plus petites municipalités n'ont pas forcément les effectifs, au niveau de leur administration municipale, pour élaborer des plans ou des programmes, étant déjà très, très limitées au niveau de leurs moyens d'action. Je ne dis pas qu'il faut y aller dans une direction plutôt qu'une autre, mais, par rapport à l'argument que vous invoquez, certains nous répondent : Nous, comme petite municipalité, on n'a pas les ressources pour mettre de l'avant des initiatives de cette nature-là.

M. Savard (Christian) : Vous avez tout à fait raison, et pour... Il existe des programmes, à titre d'exemple, Climat municipalités. Vivre en ville, on appuie Saint-Camille. Vous savez comment que c'est gros, Saint-Camille, ce n'est pas très gros. Ils ont obtenu la subvention et on appuie Saint-Camille pour faire un petit développement résidentiel dans leur village. Effectivement, leur donner un appui de type climat-municipalité peut être intéressant aussi et, des fois, il faut des enveloppes dédiées à certains types de milieux.

J'ai écrit un texte la semaine dernière sur les banlieues, où est-ce qu'habite la moitié des Québécois. On les oublie souvent, qu'il faut, justement, peut-être la voir différemment, et des programmes spécifiques qui s'adresseraient à ce type de milieu là pourraient être intéressants. Pour éviter que les quartiers centraux, Montréal, Québec aillent chercher la part du lion, ils pourraient avoir des enveloppes dédiées.

Le Président (M. Polo) : M. le député de Bourget.

M. Campeau : Merci. Merci de votre présentation, c'est toujours aussi, je dirais, terre à terre et pertinent. Quand vous parlez d'évaluation des projets en dollars par tonne, je comprends qu'il peut y avoir d'autres façons différentes, regarder le retour sur investissement, et on peut même étirer ça, regarder l'effet marketing sur la population aussi. On peut regarder ça de bien façons. Ça me semble compliqué. Parce qu'à la fin est-ce qu'on n'est pas en train de se compliquer la vie? Parce que le dollar par tonne, c'est simple à expliquer. Je me pose la question.

M. Savard (Christian) : Bien, c'est intéressant, mais parfois c'est limité. Je vais vous donner l'exemple. On dit souvent : Le transport collectif, ça coûte cher par tonne. Ce qui est compliqué là-dedans, c'est qu'on n'est pas capable de mesurer l'effet indirect. Je vais vous donner un exemple qui est lié aux différentes stratégies qui a eu lieu au Québec au niveau des changements climatiques.

En 2006, il y a eu un... c'était 200 millions par année, il y avait 100 millions qui allait aux transports collectifs. Une des choses que ça a faite, c'est multiplier des plus petits projets à Québec. Pour ceux qui connaissent Montréal, la ligne orange est surchargée. Il y a une ligne qui s'appelle la 427, qui vise à désengorger la ligne orange. À l'époque, le gouvernement du Québec a mis de l'argent dans cette ligne-là à travers son programme pour, justement, aider la ville de Montréal. Là, on peut dire : On a mis la 427, il y a tel achalandage, ça fait tel dollar de la tonne, mais excepté qu'il y a eu effet d'entraînement et que, maintenant, ce bus-là qui était aux 15, 10 minutes au début est rendu aux trois minutes parce qu'il est très populaire. Mais l'argent supplémentaire qui a été mis par la ville de Montréal, il n'est pas calculé dans le coût à la tonne. Donc, il y a parfois des effets indirects, des effets d'entraînement. La densification qui se fait parfois autour du transport collectif qui fait que c'est des gens qui émettent moins de gaz à effet de serre, ce n'est pas calculé non plus. Donc, le coût à la tonne est souvent... peut être parfois limité sur certaines choses. Après ça, il existe des moyens de faire des grilles pondérées avec des évaluations sur l'écobénéfice.

On a fait venir récemment un expert de Californie, donc notre partenaire dans le marché du carbone... Oui?

Le Président (M. Polo) : C'est juste parce qu'il reste 30 secondes puis je sais que la députée d'Argenteuil voulait peut-être intervenir.

M. Savard (Christian) : Excusez. C'est correct, je vais arrêter sur mon exemple.

Le Président (M. Polo) : Non?

Une voix : ...mais en 30 secondes.

Le Président (M. Polo) : Ah! O.K. Bien, parfait. Terminez votre réponse, dans ce cas-là, puis...

M. Savard (Christian) : Puis qui disent : Il y a la crise climatique, il y a la crise des transports, il y a la crise de l'habitation. Pourquoi, quand on fait un investissement, on n'essaie pas de faire un investissement qui va s'attaquer à plus qu'un problème à la fois? Donc, évaluer la question d'écobénéfice est très important, surtout que, dans certains cas, c'est indirect. Merci.

Le Président (M. Polo) : Merci. La députée de Maurice-Richard, s'il vous plaît.

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Bonjour, tout le monde. Mme Robin, M. Savard, merci d'être là, avec nous, aujourd'hui. J'ai quelques questions sur la recommandation que vous nous faites, puis c'est plus des questions, je vous dirais, de... parce qu'on a eu des échanges hier, justement... Il y a beaucoup de recommandations qui sont faites puis je pense qu'il faut peut-être se concentrer sur les principes qui sont derrière ces recommandations-là aussi pour faciliter les discussions puis... Donc, vous recommandez, entre autres, que la transition énergétique soit au niveau du ministère de l'Environnement. Est-ce que, dans le fond, ce qui sous-tend cette recommandation-là, c'est de retrouver tout au même endroit? C'est pour des enjeux de coordination, d'efficience, d'efficacité?

M. Savard (Christian) : ...

Mme Montpetit : Tout à fait, c'est ça. O.K. Parce que ce que vous recherchez, dans le fond, c'est... puis peut-être, vous pouvez nous parler de votre expérience personnelle aussi, parce que ça a été mentionné à plusieurs... Hier, on a parlé beaucoup, justement, bon, de transparence, de reddition de comptes avec les groupes qui étaient présents, mais aussi d'agilité, d'efficacité, d'efficience, donc j'imagine que c'est de ce côté-là que vos recommandations se portent, là, particulièrement, là.

• (10 heures) •

M. Savard (Christian) : Effectivement, parce que, parfois, il peut y avoir... parfois, puis on va se le dire, là, parfois, c'est carrément des rivalités, là, pour les budgets, pour l'attention, pour la notoriété. On sait que, dans l'État, il y a des très grandes missions. Tu sais, très souvent, on va dire la santé, l'éducation puis, parfois, on va rajouter l'économie. Nous, nos objectifs, c'est que la lutte contre les changements climatiques atteigne la masse critique, parce que c'est le grand défi de notre siècle, atteigne la masse critique, pour devenir l'une de ces grandes priorités là. Et, pour atteindre cette masse critique là, il faut des moyens et il faut effectivement une masse critique d'expertise et de moyens d'intervention. Donc, c'est un des objectifs et c'est pour ça qu'on ose même aller plus loin avec l'idée d'un ministre d'État.

Mme Montpetit : Puis quelles seraient les conséquences? Parce que, justement, hier, les groupes qui sont venus, on a parlé particulièrement de Transition énergétique Québec, de TEQ, où on nous a dit, justement, que ça fonctionnait bien. C'est une jeune société d'État, mais qui fonctionne bien, qui fait ses preuves sur le terrain. Le fait de ramener son expertise au niveau du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles, ce que j'en comprends, justement, c'est que là la proposition qui est faite, qui est sur la table avec le projet de loi n° 44, c'est d'avoir deux ministères qui sont responsables comme si c'était deux choses, deux objectifs différents, alors que ça devrait être amalgamé, là. Est-ce que vous voyez que, vous, comme organisation, dans le fond, ça pourrait avoir un impact sur la rapidité à laquelle vous allez avoir des réponses, sur le choix des projets qui vont être faits? J'aimerais ça vous entendre sur vos préoccupations, sur votre vision de ce qui est proposé par...

M. Savard (Christian) : Bien, c'est effectivement ça et c'est pour ça qu'on fait souvent une société d'État pour certains programmes. Il y a une certaine agilité, une certaine simplicité dans la prise de décision. Mais je ramène mon argument premier, c'est afin d'avoir une cohérence globale. Lorsque c'est dans différents ministères, et malheureusement on le constate bien, des fois, on a beau avoir les meilleures intentions du monde, je connais c'est quoi, des partenariats entre organisations. Sinon, on va faire un partenariat. Tu as des cultures différentes, donc, d'avoir un ministre des changements... à la Lutte et l'Adaptation aux changements climatiques fort nous semble... avec qui il va avoir beaucoup de chaleur, parce qu'on sait, hein, qu'il y a beaucoup de chaleur sur cet enjeu-là, nous semble... et qui a tous les moyens aussi, qui n'est pas en train de devoir défendre, par exemple, sur le Fonds vert, défendre des décisions qui ont été prises, des fois, par d'autres ministères, qui est complètement imputable, nous semble la meilleure route.

Mme Montpetit : Je serais curieuse de vous entendre. J'imagine, vous avez suivi, justement, les travaux qui ont débuté hier, les consultations. Il y a des groupes qui nous ont proposé, justement, que ce soit chapeauté au niveau du Conseil exécutif, au niveau du premier ministre, dans le fond, pour s'assurer... Puis, j'imagine, ça va un petit peu dans l'idée que vous proposez, encore là je ne veux pas vous faire dire quelque chose, mais au niveau du principe de dire que ça devient un peu davantage par appui ou davantage transversal, où il y a une autorité qui est un petit peu plus forte par rapport aux différents ministères, aux différents projets qui sont déposés, projets d'infrastructures et autres, là, j'imagine, ça, vous êtes confortables avec l'idée au niveau du principe.

M. Savard (Christian) : J'ai fait science politique avant de faire aménagement du territoire, et je vous dirais que d'aller au premier ministre, c'est probablement trop gros. Il nous faut un ministre qui se consacre à ça, et dont c'est la mission. Le premier ministre, une de ces choses qu'il doit faire, c'est les différents... excusez-moi, oui, il tranche entre les différents... c'est ça. Donc, je ne pense pas que ça doit aller sur le premier ministre. Par contre, ça doit aller sur un ministre beaucoup plus fort que c'est actuellement, où surtout qu'actuellement c'est très dispersé. Donc, je pense qu'on pourrait arriver à cette cohérence-là et à cette force d'impact là à travers un ministre d'État. Premier ministre, je pense qu'on va un petit peu trop haut, là, dans la hiérarchie, à notre avis.

Mme Montpetit : D'accord. Et, encore là, au niveau de vos recommandations, vous suggérez, comme d'autres groupes l'ont fait, là, d'inscrire dans la loi les cibles adoptées pour 2030. Vous suggérez aussi qu'on en profite pour finaliser l'adoption de celles de 2050. Puis vous parlez de cibles quinquennales, ce qui est très intéressant, cibles de mi-parcours. Est-ce que, juste pour clarifier, est-ce que suggérez aussi que ces cibles quinquennales soient inscrites dans une loi ou juste qu'elles soient discutées, qu'elles soient adoptées pour donner, justement, des objectifs de mi-parcours?

M. Savard (Christian) : Une des choses que je retiens des dernières années, c'est que plus des choses qui sont inscrites dans la loi, plus qu'elles prennent de l'importance. Par exemple, parenthèse, c'est pour ça qu'on considère qu'on veut garder le deux tiers, malgré... le deux tiers en transport dans la loi, parce que c'est dur. Tu sais, on dit : C'est du «hard politics», là, c'est la loi. Donc, plus qu'il y a de choses qui est inscrit dans la loi, plus qu'on rend formelles nos cibles.

Les cibles intermédiaires, c'est pour éviter l'effet de : oui, on avance, on avance, on avance puis on espère que, par exemple, la technologie va nous sauver en 2029 donc... Et là on se retrouve en 2029, puis ah! on a raté notre coup, hein, finalement, l'auto électrique n'a pas été si vite qu'on pensait, puis il y a d'autres actions qu'on aurait dû prendre plus tôt qui auraient été structurantes.

À titre d'exemple, nous, on défend beaucoup les questions de comment on construit nos villes. C'était très fort, dans le PACC 2012... 2013‑2020, mais on n'a rien fait, finalement, pour vrai. Mais, si on avait fait des choses, à ce moment-là, quand on a commencé en 2012‑2013, bien, on aurait déjà des résultats. Donc, c'est pour éviter aussi l'espèce de tendance qu'on a, là, à dire : On va y arriver à la toute fin. Donc, en se mettant des cibles plus tôt, on s'assure d'y arriver.

Mme Montpetit : Parfait. Je vous entendais parler de l'enveloppe réservée de deux tiers pour le transport collectif, puis mon collègue de Jacques-Cartier, justement, souhaitait échanger avec vous là-dessus.

Le Président (M. Polo) : Allez-y, M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley : Oui. Alors, encore, je sais que le ministre a parlé un petit peu de ce sujet, mais juste une question pour vous autres. Je comprends que peut-être deux tiers, pour le gouvernement, c'est trop, il veut mettre l'argent dans les autres places comme l'innovation, et tout ça, mais, selon vous, autres, est-ce que... s'il n'y a pas un maximum, est-ce que c'est important de quand même avoir un minimum taux des fonds qui est réservé pour le transport collectif?

M. Savard (Christian) : D'abord, je tiens juste à mentionner que le deux tiers est réservé au secteur des transports et pas uniquement du transport collectif et je resouligne que — c'est une des raisons — c'est aussi parce que l'argent vient essentiellement du secteur des transports. Et, encore une fois, quand c'est inscrit dans la loi, tu t'assures de l'avoir, tu ne peux pas le changer à moins de passer à travers le processus législatif. Là, tu peux avoir des très bonnes intentions, mais là on ne les connaît pas encore, les intentions. Moi, j'ai toujours tendance à vouloir, lorsqu'il y a quelque chose d'attaché dans une loi, à ne pas le perdre. Et ce n'est pas comme si on avait réglé la question des transports, et ce n'est pas comme si ce n'était pas le plus grand défi encore plus grand que ce ne l'était. Donc, il y a suffisamment de besoins dans ce secteur-là, et les secteurs des transports paient déjà beaucoup, hein, c'est les camionneurs, c'est les automobilistes qui paient pour ça. Donc, je pense que c'est normal aussi d'y arriver. Il y a des bonnes raisons, là, de conserver cet élément-là.

M. Kelley : Et merci pour... vous avez corrigé sur le point du transport, et j'imagine, ça, c'est le lien avec la recommandation 18 sur un programme qui est autofinancé pour les véhicules électriques. C'est bien ça? Est-ce que vous pouvez juste expliquer un petit peu votre recommandation 18?

M. Savard (Christian) : Oui. Bien, on sait qu'il va y avoir toujours des voitures. On aurait beau diminuer de moitié les voitures, le nombre de voitures au Québec, il va toujours en rester, donc l'électrification est très importante. Et malgré le fait que le Québec, à l'échelle de l'Amérique du Nord, est un bon joueur, à l'échelle mondiale, on n'est pas là non plus. Ça ne va pas assez vite. Pour aller plus vite, il va falloir continuer les incitatifs et, pour continuer les incitatifs, il va falloir aller chercher de l'argent. Parce que, là, on va mettre 800 millions pour les 100 000 véhicules électriques, c'est vraiment beaucoup d'argent. Donc, si on continue à piger dans l'enveloppe pour les véhicules électriques, l'enveloppe va être prise. Donc, il faut un autre mécanisme de financement des incitatifs, et la redevance remise est, selon nous, la meilleure solution pour que les autres secteurs des transports continuent à bénéficier des sommes.

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup. Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Merci beaucoup. Désolée, je n'étais pas présente à votre présentation, mais j'ai quand même pris le temps de lire le mémoire et les recommandations.

Moi, j'aurais une question par rapport à ce que vous proposez sur redevance remise. Juste peut-être, là, vous venez d'en parler, mais juste de nous l'expliquer un peu plus, au-delà de la question financière aussi, parce que je comprends que vous voulez sortir l'argent de la lutte aux changements climatiques, que ça soit un système qui va s'autofinancer. Peut-être nous l'expliquer un peu mieux...

• (10 h 10) •

M. Savard (Christian) : Bien, puisque l'électrification des transports et les incitatifs sont encore nécessaires pour, justement, faire en sorte que les Québécois s'achètent davantage de véhicules électriques, il faut trouver un moyen de les financer. Et plus qu'il va y en avoir, plus ça va coûter cher, plus qu'on ne pourra plus se servir du Fonds vert.

Donc, nous, on propose qu'il y ait une légère redevance payée par les achats de véhicules à essence qui va servir de remise aux achats de véhicules électriques. Donc, on se retrouve avec un fonds autofinancé au niveau du parc des véhicules routiers et, de cette manière-là, bien, on peut garder le reste de l'argent pour faire autre chose, parce que les défis sont immenses. Donc, est-ce que j'ai répondu clairement?

Mme Ghazal : Donc, c'est un peu le bonus-malus, là? Vous, vous l'appelez...

M. Savard (Christian) : Si vous voulez, oui.

Mme Ghazal : Mais c'est la même chose. Vous l'avez juste changé parce que... O.K.

M. Savard (Christian) : Tu sais, oui, mais on veut que ça soit un fonds autofinancé puis que ça se balance, donc, en fonction... Tu sais, au début, le malus va être très limité, parce qu'il s'achète 400 000 véhicules par année, tu n'auras pas besoin d'un gros malus, donc d'une grosse redevance pour payer les incitatifs. Puis, à un moment donné, on va avoir... la roue va être bien partie, puis on n'aura plus besoin du programme.

Mme Ghazal : Puis ce seraient les redevances sur tous les véhicules, peu importe où on se trouve au Québec, et tout ça. Il n'y aurait pas comme une sorte de... Ça, ce n'est pas quelque chose que vous proposez, peu importe, sur 100 % des véhicules à essence, il faudrait qu'il soit... qu'il y ait une taxe.

M. Savard (Christian) : Tout à fait. Est-ce qu'il pourrait y avoir des exceptions x, y, z? Peut-être, là, mais...

Mme Ghazal : O.K., non, je voulais juste savoir. O.K. Puis, c'est ça, vous dites qu'il faut maintenir, là, le deux tiers pour le transport et que ce soit dans la loi. Dans la recommandation 15, vous dites qu'il faudrait assurer la traçabilité des sommes des fonds qui sont dédiés aux luttes aux changements climatiques, notamment les investissements en transport. Est-ce que vous pouvez l'expliquer un peu plus? Vous n'en avez pas parlé.

M. Savard (Christian) : Bien, c'est un enjeu auquel on a fait face. On suit évidemment la question du financement du transport collectif, et c'est un enjeu auquel on a fait face dans les dernières années. Les transports au Québec sont financés par quelque chose qu'on appelle le FORT, le fonds des transports routiers ou du transport des personnes, et ça vient de la taxe sur l'essence. Mais, depuis quelques années, ça vient également du Fonds vert, et on dit qu'on le met aux transports collectifs. Mais le FORT, c'est un pot. Donc, comment tracer l'argent? Ce n'est pas évident. Voilà.

Le Président (M. Polo) : M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui, merci. Merci beaucoup de votre présence. Recommandation 8 : «Inscrire dans la loi la cible de réduction déjà adoptée pour 2030.» Je veux juste être clair : Vous voulez qu'on maintienne le 37,5 % à ce stade-ci?

M. Savard (Christian) : Oui.

M. Gaudreault : O.K. Donc, vous êtes contre une hausse des cibles d'ici 2030?

M. Savard (Christian) : Je ne serais pas contre.

M. Gaudreault : Non, non...

M. Savard (Christian) : Mais, ayant fait partie du groupe de travail, justement, du comité consultatif qui avait adopté, je vais être solidaire de la décision qui avait été prise. Mais, si le gouvernement veut aller plus loin, je ne serai vraiment pas contre. Mais on est à l'aise avec le 37,5 %.

M. Gaudreault : O.K. Je veux juste vous entendre. Moi, je trouve ça génial, là, votre idée de ministre d'État aux Changements climatiques. Mais, admettons que ça ne marche pas, dans le contexte actuel tel que la loi est présentée, comment vous percevez le rôle du ministre, qui se donne un rôle d'avis-conseil avec comme un pouvoir qui, à mon point de vue, il n'a pas vraiment les moyens pour l'exécuter? Alors, est-ce que... Et vous avez un bagage en science politique que vous nous avez appris, alors comment vous voyez ça dans le fonctionnement, là, de l'application de la loi?

M. Savard (Christian) : Bien, d'abord, ce qui est l'aspect intéressant de la loi, c'est qu'on se retrouve avec un ministre qui va avoir toujours la... il va assumer la pression de la lutte contre les changements climatiques, notamment au niveau des dépenses des fonds. En tout cas, c'est ce qu'on comprend de l'intention. Effectivement, il va avoir un pouvoir de recommandation. Ça va être quelque chose qu'il va falloir voir évoluer. Ce n'est pas toujours évident que ça a un véritable impact ou pas, et c'est pour ça que nous, on va plus loin et on pense qu'il doit y avoir, de manière générale dans l'appareil gouvernemental, une clause de réflexe climatique, un peu comme il existe, lorsqu'on prend des décisions au Conseil des ministres, une clause pauvreté. Bien, il faut aussi une clause climatique qui va venir, justement, aider le ministre à travers les différentes décisions gouvernementales.

Je dois admettre que, pour moi, ce qui va aider encore plus, c'est l'idée qu'il va y avoir un chien de garde, qui sera un comité consultatif indépendant qui va devenir un peu un des contre-pouvoirs.

M. Gaudreault : Et le Commissaire au développement durable.

M. Savard (Christian) : Et le Commissaire au développement durable sur, souvent, un peu plus les processus. Donc, de ce mélange-là, on va venir, avec le Commissaire au développement durable et le comité consultatif, un peu combler le trou qu'il y a avec l'abolition du Conseil de gestion du Fonds vert. Donc... Le temps est terminé? Parfait.

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup. Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants pour permettre aux représentants de l'Association québécoise de la production d'énergie renouvelable de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 10 h 15)

(Reprise à 10 h 17)

Le Président (M. Polo) : Je souhaite la bienvenue au représentant de l'Association québécoise de la production d'énergie renouvelable, M. Jean-François Samray. C'est bien ça?

Association québécoise de la production d'énergie renouvelable (AQPER)

M. Samray (Jean-François) : Tout à fait, M. le Président. Bonjour.

Le Président (M. Polo) : Président-directeur général. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Puis nous procéderons, par la suite, à une période d'échange avec les membres de la commission. Donc, je vous invite à vous présenter et à débuter votre exposé.

M. Samray (Jean-François) : Parfait. Alors, mon nom est Jean-François Samray. Comme vous l'avez dit, je suis le P.D.G. de l'Association québécoise de la production d'énergie renouvelable, une association qui regroupe plus d'une centaine de membres, lesquels sont actifs dans la production des énergies renouvelables : l'hydraulique, l'éolien, la cogénération à la biomasse, le solaire photovoltaïque, les biocarburants et, depuis peu, l'hydrogène vert également. Donc, ça me fait plaisir en leur nom et au nom du conseil d'administration de présenter notre mémoire. Et donc, pour les auditeurs qui nous suivent par la voie des ondes, je vais lire une synthèse, puis ça me fera plaisir de discuter.

Alors, tandis que les coûts des énergies renouvelables ne cessent de diminuer, celui des changements climatiques ne cesse d'augmenter. Les travaux du consortium Ouranos démontrent que le Québec ne fait pas exception. L'inaction a donc un coût sur les finances publiques. L'enjeu est d'autant plus urgent que, selon le récent Inventaire québécois, les émissions de gaz à effet de serre n'ont été réduites que de 8,7 %, alors que l'objectif fixé pour 2020 est une réduction de 20 %. L'AQPER a donc accueilli avec satisfaction la détermination affichée par le ministre de l'Environnement et de la Lutte aux changements climatiques à redresser la barre afin d'atteindre la cible fixée pour 2030.

L'APQER est d'avis que les ancrages suivants devraient inspirer le gouvernement dans l'ensemble de ses actions : Un, une vision de long terme, laquelle permet aux citoyens et aux entreprises de prévoir ce qui est attendu de leur part et du cadre réglementaire, budgétaire et fiscal dans lequel ils évolueront; le deuxième principe, l'efficience économique, les besoins en société étant illimités alors que les ressources ne le sont pas nécessitent la meilleure utilisation des fonds publics; troisième point, l'imputabilité, des actions et des décisions doivent amener les élus, les gestionnaires et les décideurs économiques, peu importe leur niveau de responsabilité, à chercher la meilleure efficience des fonds qui leur sont confiés; et quatre, la justice sociale, en permettant l'accès à des programmes de formation et de conversion des compétences de la main-d'oeuvre vers des savoirs qui sont requis par les nouvelles technologies.

Venons-en au financement de la réduction des GES. L'AQPER salue la volonté du législateur d'affecter le nouveau Fonds d'électrification et des changements climatiques uniquement au financement de mesures visant la lutte contre les changements climatiques et de modifier la Loi sur le vérificateur général pour ajouter aux responsabilités du Commissaire au développement durable celle de faire part annuellement, dans la mesure qu'il juge appropriée, de ses constatations et de ses recommandations en lien avec ce fonds.

• (10 h 20) •

Le prochain plan d'action sur l'électrification et les changements climatiques précisera les mesures et les initiatives qui seront attendues. Les membres de l'AQPER se réjouissent de l'importance encore plus grande que prendra la production et la valorisation de l'électricité. Certains usages ne pourront cependant effectuer ce virage, notamment en ce qui a trait aux besoins thermiques. Le fait de pouvoir compter sur une électricité renouvelable accessible et compétitive permettra notamment aux biocarburants fabriqués ici d'avoir l'empreinte carbonique parmi les plus faibles de la planète. Cette particularité permettra d'apporter des réponses de court et de moyen terme aux millions de voitures et camions actuellement sur les routes, aux locomotives et véhicules hors route ou agricoles qui doivent impérativement réduire leur empreinte carbonique. Il en va de même de l'hydrogène vert, qui pourrait être fabriqué ici. C'est pourquoi l'AQPER invite fortement le ministre à prévoir un financement à la hauteur du défi qui est devant nous, non seulement pour les initiatives de conversion vers l'électricité, mais également pour les autres formes d'énergie renouvelable. La combinaison de ces forces facilitera non seulement la transition énergétique, mais également la transition économique du Québec vers un avenir durable.

En plus du financement, l'AQPER considère qu'il est de la plus haute importance d'identifier des cibles et des indicateurs de performance attendus, d'en mesurer la progression et d'en communiquer les résultats avec une base connue et périodique. Le fait d'avoir un portrait fidèle de la réalité et des éventuels écueils rencontrés permettra d'apporter, au moment venu, des correctifs afin de ramener le Québec vers l'atteinte des résultats attendus. Parmi tous ces indicateurs possibles, il reviendra au ministre de retenir les plus pertinents, le prix à la tonne de GES évités faisant nécessairement partie de cette courte liste.

L'AQPER invite, par ailleurs, le gouvernement à faire preuve de plus grande transparence en favorisant, entre autres, une valorisation maximale des statistiques en mode données ouvertes concernant l'énergie, l'efficacité énergétique et la réduction des émissions de GES. Ainsi, afin de faciliter la transition du parc immobilier et des parcs des véhicules appartenant au périmètre gouvernemental, l'AQPER recommande que leurs données de consommation énergétique soient rendues disponibles sur le portait gouvernemental Données Québec. Cette disponibilité permettra à de nombreux entrepreneurs de présenter des solutions novatrices permettant à l'État de réaliser sa transition de façon la plus efficace qui soit. L'AQPER est également d'avis que la mise en ligne de façon ordonnée et référencée des innombrables séries de données fournies par les distributeurs d'énergie à la Régie de l'énergie dans le cadre de leurs engagements ou déposés en preuve lors d'audiences serait un grand pas en avant.

Maintenant, pour la gouvernance de la lutte aux changements climatiques, l'AQPER appuie la décision du gouvernement de confier un rôle accru au ministre de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques afin qu'il devienne le conseiller du gouvernement sur toute question touchant la lutte contre les changements climatiques et l'électrification de l'économie. Il est en effet primordial que le gouvernement assure une cohérence et une gouvernance intégrée à l'échelle gouvernementale de ses actions, et qu'à ce chapitre le ministre soit consulté sur l'élaboration de toute mesure susceptible d'avoir un impact en matière de lutte contre les changements climatiques et l'électrification de l'économie. Nous sommes heureux de constater que le projet de loi lui confère, à l'article 1, qui intègre l'article 10.1, le pouvoir de recommander des ajustements.

Afin de remplir toutes les attentes et les obligations liées à ce nouveau rôle ainsi qu'au nouveau processus mis de l'avant par les nouvelles dispositions de la LQE, l'AQPER est d'avis que la société québécoise tout entière gagnera à ce que le ministre de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques puisse compter sur des ressources humaines suffisantes, en nombre et en qualité, pour répondre à l'ensemble des obligations qui lui sont conférées.

L'AQPER se réjouit aussi de constater que le ministre a prévu la mise sur pied d'un comité consultatif dans la plus pure tradition du modèle québécois. Dans la continuité des groupes mis à contribution dans le cadre des travaux préparatoires du PECC, l'AQPER verrait d'un très bon oeil que les associations sectorielles soient mises à contribution au sein du comité. Celles-ci possèdent la connaissance terrain et l'accès à un large bassin d'experts. C'est pourquoi l'AQPER se place à la disposition du ministre et de ses équipes afin d'apporter des retours d'expériences vécues ici et de par le monde aux travaux dudit comité.

Quant à la gouvernance de la transition énergétique, en ce qui a trait à l'abolition et la réintégration de Transition énergétique au sein du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles, l'AQPER invite le législateur à reconsidérer son intention. Notre association soumet respectueusement qu'il serait possible d'accroître l'imputabilité de TEQ sans procéder au démantèlement complet de cette jeune société d'État, qui a su faire ses preuves, qui a su faire preuve d'efficience et a aussi été en mesure d'accompagner toutes les parties prenantes.

À l'instar d'Hydro-Québec, la Société des alcools, de la SEPAQ et d'autres sociétés d'État, TEQ a une mission et des pouvoirs balisés par sa loi constitutive et doit réaliser son plan stratégique. Elle ne peut faire ce que bon lui semble. L'AQPER est d'avis que la volonté gouvernementale d'accroître son contrôle sur TEQ, exprimée par le projet de loi n° 44, pourrait tout aussi bien se réaliser par la désignation de nouveaux administrateurs indépendants, d'une désignation accrue d'administrateurs non indépendants, voire même aller jusqu'à la désignation d'un nouveau président-directeur général sans pour autant abolir la société.

Le rapprochement des actions des responsabilités des ministères et organismes avec leur mission est un principe fondamental de saine gouvernance. L'abolition de TEQ et son intégration ou réintégration au sein d'un ministère va difficilement respecter ce principe, ce qui pourrait mettre le gouvernement en porte-à-faux dans certaines de ses missions et l'exposer à d'éventuels écueils. Réintégrer TEQ au sein du MERN tout en lui demandant de poursuivre la réalisation de son plan directeur, alors que le MERN a également pour mission d'accorder des licences d'exploration et d'exploitation d'hydrocarbures sur le territoire québécois, placerait le MERN en situation inconfortable, à savoir veiller à la mise en valeur des hydrocarbures tout en coordonnant la transition énergétique. Cet exercice de haute voltige pourrait exposer le ministre et son ministère à des contestations judiciaires de la part de parties prenantes se sentant lésées dans leurs droits ou dans la volonté réelle du ministère de développer les hydrocarbures.

C'est pourquoi l'AQPER insiste sur la nécessité de pouvoir compter sur une société d'État qui répond à un impératif d'État dédié uniquement et entièrement à la transition énergétique. Avec des programmes accessibles sur une base pluriannuelle, les projets de conversions énergétiques peuvent à présent se planifier sur plus d'un trimestre, se réaliser au moment le plus opportun et celui qui causera le moins de pertes de productivité ou le moins de désagréments. La prévisibilité tant appréciée des entrepreneurs leur permet de concevoir et de planifier des travaux selon les règles de financement connues, de choisir les meilleurs équipements disponibles ou de les faire fabriquer pour une date déterminée à un prix compétitif, d'ordonnancer la réalisation des travaux pendant une période qui optimise... en fait, qui minimise les pertes de revenus, pour ainsi réaliser une conversion à une optimisation au meilleur coût possible. Cette façon de faire a comme effet direct de raccourcir la période de retour sur les investissements, ce qui incite les gestionnaires et les consommateurs à passer en action.

La Présidente (Mme Grondin) : M. Samray, je vous invite à conclure, en 30 secondes, s'il vous plaît.

M. Samray (Jean-François) : Oui. Regardez, je pense que vous avez compris le message, et donc on va aller pour la discussion, on est ici pour ça.

La Présidente (Mme Grondin) : Merci. Donc, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Charette : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous pour votre présence ce matin. Plusieurs éléments intéressants, là, pour notre discussion, qui déjà, je vous le confirme, sera trop courte malheureusement ce matin.

Vous êtes à la tête, littéralement, d'un domaine d'avenir. Vous avez évoqué l'hydrogène, vous avez évoqué la gestion de la biomasse, l'énergie solaire, l'éolien également, bref, beaucoup, beaucoup de potentiel. Vous avez mentionné, à juste titre, qu'au fil des ans ces énergies renouvelables là, leur coût diminuait de façon sensible, donc elles deviennent encore plus intéressantes.

Petite question — vous avez sans doute vu, avant les fêtes, qu'Hydro-Québec a publié son plan de match, en quelque sorte, pour les 10 prochaines années, et la société d'État, qui a été longtemps dédiée à l'hydroélectricité, envisage de façon concrète de développer ses expertises dans ces domaines-là, notamment l'hydrogène : Pour vous, ce plan d'action là qui a été présenté en décembre, vous l'avez reçu de quelle façon?

M. Samray (Jean-François) : Bien, écoutez, pour l'industrie, le premier constat, et on fera le débat en long et en large devant la Régie de l'énergie, mais le premier constat qu'on a eu, ça a été de voir que le plan d'approvisionnement a été déposé avec une vision de «business as usual», et on ne voit pas dans le plan actuel, le plan d'approvisionnement du distributeur, on ne voit pas les efforts supplémentaires qui seront requis en électrification de la société, et on attend vraiment le plan d'électrification des changements climatiques qui va imposer une plus grande utilisation de l'électricité pour faire des biocarburants, pour faire de l'hydrogène vert, pour déplacer des combustibles fossiles. On ne le voit pas actuellement et on a hâte que le PECC soit déposé pour amener un plan amendé. Et, regardez, les membres chez nous sont tout à fait prêts et disposés à passer à l'action. Et, avec un plan amendé, sur la base la PECC, bien, je pense que ça donnera un signal clair.

M. Charette : Je ne suis pas tout à fait certain d'avoir lu le même document que vous, parce qu'au contraire Hydro-Québec, dans ce qu'elle publiait en décembre dernier notamment, ne serait-ce qu'à travers l'hydrogène, on parle d'une toute nouvelle approche, on parle de concepts nouveaux, on parle d'un potentiel immense pour le Québec. Fabriquer de l'hydrogène, c'est une chose, le faire à partir de l'hydroélectricité, ça confère un avantage encore plus important, là, à la société québécoise, mais c'est un potentiel que vous souhaiteriez, à tout le moins, voir développé. C'est une des énergies sur laquelle on doit miser, là, au cours des prochaines années.

M. Samray (Jean-François) : Oui, je vois le lien. Le lien, c'est que moi, je vous parlais du plan d'approvisionnement et vous, vous me parlez du plan stratégique.

M. Charette : Oui. Non, effectivement, on ne parle pas de la...

• (10 h 30) •

M. Samray (Jean-François) : Voilà. Alors, dans le plan stratégique, écoutez, on trouve ça très intéressant. On trouve... Hier, j'étais au forum de l'énergie du magazine les Affaires, et la présentation a été faite, et Hydro-Québec y expliquait, par son représentant David Vincent, qu'ils iraient vers l'hydrogène, la méthanation, c'est-à-dire l'utilisation de l'hydrogène vert avec du carbone vert pour faire du gaz naturel renouvelable, entre autres, l'utilisation dans les biocarburants aussi, qu'ils iraient par des prises de participation, et ça, on trouve que c'est une bonne nouvelle. Leur rôle, c'est de créer au Québec un écosystème où on va pouvoir maximiser la valorisation de l'électricité verte, puis on est heureux de voir qu'ils ne le feront pas eux-mêmes, basés sur l'expérience d'HydroSolution et des chauffe-eau. Faire de l'hydrogène, c'est un peu plus compliqué. Dans les chauffe-eau, ça n'a pas été nécessairement une bonne histoire. Mais d'avoir Hydro-Québec comme partenaire investisseur et de créer ici le meilleur environnement, c'est une très bonne nouvelle, d'ailleurs, parce que ça va donner des options à la valorisation de l'électricité du Québec. Si on n'est pas capable de passer une ligne électrique au New Hampshire, si on a de la difficulté à passer celle dans le Maine, si on est obligé de faire des ententes avec le Nouveau-Brunswick pour passer l'électricité en Nouvelle-Angleterre, bien là, l'hydrogène vert nous amène une nouvelle option qui va permettre d'exporter à l'international un produit à grande valeur ajoutée, qui est l'hydrogène vert, qui est unique et qui est recherché.

M. Charette : Je vous confirme qu'on parle maintenant du même document. J'en suis ravi.

M. Samray (Jean-François) : Ils en déposent beaucoup, de documents.

M. Charette : Effectivement. Mais, ceci dit, vous avez raison, le PECC, bref, ce qui s'en vient au cours des prochains mois va venir aider à la coordination. C'est certain qu'on est en communication avec Hydro-Québec. C'est clair que cette vision devra être conjointe pour la suite des choses, mais c'est le but du PECC de fédérer un petit peu le potentiel québécois. En même temps, ce que j'ai eu l'occasion de répéter à plusieurs reprises depuis hier, il faut distinguer le PECC du projet de loi lui-même. Le projet de loi, c'est davantage au niveau de la gouvernance, alors que le PECC sera beaucoup plus dans l'action.

Mais je comprends que, par rapport au projet de loi n° 44 lui-même... une appréciation somme toute positive, vous avez référé à plusieurs éléments positifs. Je comprends aussi, par contre, votre questionnement au niveau de TEQ, d'autres avant vous ont soulevé les mêmes questionnements.

Je comprends aussi que vous avez un intérêt particulier pour ce qui est de la composition du comité indépendant lui-même. Ça, je dois vous avouer, ce sera un défi, et je pose souvent la question. Vous étiez peut-être présent à la présentation tout juste avant, mais plusieurs groupes déjà se manifestent comme étant intéressés à être partie prenante de ce comité-là. Clairement, tous ne pourront pas y être. C'est la raison pour laquelle le projet de loi fait référence notamment à une prépondérance du milieu scientifique. Mais la composition idéale, pour vous, de ce comité-là, quelle serait-elle?

M. Samray (Jean-François) : Bien, je pense que, d'un certain côté, il y a nécessairement des universitaires, dont la compétence fine dans les technologies de pointe va être importante d'être présents. Mais, parfois, de la théorie à la pratique, il y a un grand pas, et donc, ce faisant... Et, sinon, la plupart des chercheurs seraient des entrepreneurs à grande fortune, mais ce n'est pas souvent le cas. Donc, de passer de la théorie à la pratique, il va nécessairement falloir qu'à l'intérieur du comité il y ait également des représentants de la société civile, mais également des gens dont c'est le métier dans le quotidien, qui ont essayé des choses, qui ont appris, qui ont eu des retours d'investissement et qui peuvent dire : Bien, c'est beau en théorie, mais on vit ici au Québec, et non pas en théorie, et donc, ce faisant, voici des écueils qu'il y a qu'il faut tenir en compte.

M. Charette : Je comprends tout à fait, mais la sélection elle-même, dans ce sens-là, elle est problématique. Hier, on avait Écotech, par exemple. Vous représentez plusieurs pans de l'industrie au niveau de l'énergie renouvelable. On a eu, hier, une association qui était davantage au niveau du domaine électrique lui-même. Donc, ce côté pratique là, comment le sélectionner? On évoquait... Une collègue lançait la suggestion hier... Oui, il y a un comité, mais la possibilité d'avoir une consultation avec les répondants de la société civile, aidez-nous à résoudre ce problème-là. Le comité consultatif ne pourra pas être composé d'une centaine de personnes, clairement, et, juste après deux jours, je pense qu'on se rendrait aisément à plus d'une centaine de personnes si on acceptait toutes les propositions qui nous sont faites à ce niveau-là.

M. Samray (Jean-François) : Bien, je veux dire... je pense, c'est une bonne nouvelle, ça démontre qu'il y a une volonté de changement, une volonté d'agir et de passer à l'action. Regardez, moi, je pense que d'avoir des représentants de sous-groupes qui sont liés par les décisions prises par les sous-groupes, ça amène une réflexion et que, derrière ça, ça va demander du temps de la part des gens d'y être présents. C'est une façon que vous avez utilisée pour la préparation du PECC, je pense que ça donne des bons résultats. Dans la mesure où les représentants qui siègent au comité sont redevables et tiennent la position qui a été collectivement adoptée, regardez, ça peut être une façon de faire.

M. Charette : Merci.

La Présidente (Mme Grondin) : M. le député de Bourget.

M. Campeau : Merci. Bien, pour le comité consultatif, je vois, moi aussi, l'intérêt des gens à en faire partie. C'est une bonne nouvelle, mais il va y avoir assez de monde, j'espère, qui vont venir en transport en commun, parce qu'il risque d'être pas mal gros.

Vous mentionnez l'évaluation des projets en coûts par tonne comme faisant partie d'une courte liste de critères. Pourriez-vous élaborer sur le reste de la liste?

M. Samray (Jean-François) : Oui. Bien, écoutez, moi, je vous invite, à titre... dans vos travaux, de regarder d'autres exemples de reddition de comptes et d'autres exemples d'agence de transition énergétique et aller voir Enova — E-n-o-v-a — .no, qui est l'agence de transition... en fait, qui n'est pas l'agence, qui est une société d'État norvégienne qui est responsable d'appliquer la transition énergétique, et, chez eux, tous les projets qui sont déposés sont analysés, tous les projets sont listés et accessibles par tout le monde, tous les projets qui sont acceptés... sont avec la grille d'évaluation, et il y a une reddition de comptes sur les GES ou l'efficacité énergétique générée. Donc, ça peut être également l'efficacité énergétique générée ou ça peut être aussi l'effet structurant sur l'économie globale du Québec. À titre d'exemple, Enova a financé un projet beaucoup plus large, qui était faire de l'aluminium vert pour Norsk Hydro. Ça a été quelque chose qui a été fait à l'effet de dire qu'il y a également un lien avec la structure économique, la conversion économique de ce pays.

Donc, ce faisant, il est évident que l'efficacité... le coût par tonne est un indicateur. Mais, si on prend l'exemple du véhicule électrique, à 204 $ par tonne, si on veut poursuivre, il va falloir avoir, dans le portefeuille de projets qui sont soutenus, d'autres mesures qui produisent des coûts par tonne nettement moindres, et, derrière ça, les biocarburants sont des façons de le faire qui sont autour de 30 $ à 60 $, selon la technologie utilisée, et donc... Hier, UC Berkeley était... présentait une analyse qui témoignait qu'à 40 $ la tonne, l'impact sur la croissance économique d'un pays est complètement non documentable, non traçable. Donc, ce faisant, je pense qu'il y a des indicateurs, comme vous le dites, et l'efficacité énergétique générée ou le coût par tonne en sont deux très bons.

M. Campeau : O.K. Une autre question, c'est que le Fondaction CSN est venu nous parler que, pour chaque dollar public, bon, il réussissait à aller chercher un 5 $ équivalent privé. Ça évolue dans le temps. Bien, est-ce que les gens de l'AQPER, vous vous voyez comme des investisseurs par rapport à ça? Est-ce que vous vous voyez travailler avec le Fondaction CSN ou d'autres fonds du même type?

M. Samray (Jean-François) : ...chez nous travaillent avec des gens qui sont là pour faire du financement dans... Ils travaillent également avec BlackRock, qui est un partenaire des sociétés du Québec très grand. Mais je pense que l'exemple que vous montrez là peut être également un indicateur à votre question précédente. Si je dis qu'une mesure, pour 1 $ de l'État, en fait lever 5 $ ou en fait lever 10 $ pour amener une réduction à la tonne, ça peut être également un très bon indicateur.

La Présidente (Mme Grondin) : Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Boutin : Dans votre mémoire, vous amenez une recommandation qui est nouvelle quand même par rapport à l'ouverture... à la nécessité d'ouvrir les données, les jeux de données ouvertes pour, entre autres, premièrement, stimuler la recherche, mais également le développement de solutions novatrices, puis vous mentionnez divers exemples, là, notamment en France puis au niveau d'Energy Information Administration. Est-ce que vous savez s'il y a eu des impacts concrets de ça? Parce que, personnellement, je trouve ça très intéressant, là.

• (10 h 40) •

M. Samray (Jean-François) : Bien, il y a des exemples très concrets qui se vivent au Québec. Il y a des jeunes pousses, comme on appelle en français, qui présentent devant certains financiers des projets avec... voici, basé sur des données américaines du Vermont, New York que je vais chercher dans le site de l'EIA, voici ce que ça pourrait être au Québec. Et là le financier regarde ça, il dit : Oui, mais as-tu des données pour le Québec? Bien non, je n'en ai pas. Bien, écoute, sais-tu, moi, le risque, si tu n'as pas de donnée, je le trouve pas mal grand. Puis le Vermont ou l'État de New York, l'Upper State New York, tu sais, c'est à 50 kilomètres d'ici. Ça fait que pourquoi tu ne vas pas faire ton projet là-bas? Parce que, là, je vois qu'il n'y a pas de risque, puis je vais où il y a vraiment un modèle d'affaires supportant. Donc, c'est la réalité des jeunes pousses, mais c'est également la réalité d'autres investisseurs qu'ils amènent et qui... face au manque de données, que le banquier va dire : Bien, regarde, moi, je vois un risque beaucoup trop grand. Voici le taux auquel je suis prêt à te financer. C'est nettement plus que si j'avais des données, mais moi, je le vois risqué.

La Présidente (Mme Grondin) : Il reste encore deux minutes.

M. Charette : Sinon, on a évoqué, tout à l'heure, plusieurs associations : Écotech en est une qu'on a reçue hier; il y avait l'association dont je vous parlais au niveau de l'industrie électrique; il y a la vôtre au niveau des énergies renouvelables. Est-ce qu'il y a un courant qui fait en sorte que vous êtes en communication ensemble? Est-ce qu'il y a une certaine fédération au niveau des énergies vertes, ou à chacune, des fois, ce sont des canaux de communication différents, en quelque sorte? Qu'est-ce qui vous lie ensemble? Est-ce que vous avez une association commune qui sert d'interlocutrice pour les «cleantech» en général?

M. Samray (Jean-François) : Bien, regardez, l'association, c'est, d'abord et avant tout, un regroupement d'entreprises et d'individus qui veulent faire avancer les choses dans leur domaine. Ayant été moi-même un P.D.G. de l'AIEQ, je suis bien placé pour parler que les membres de l'AIEQ sont davantage des manufacturiers d'équipement et des firmes de services qui veulent travailler avec Hydro-Québec. Les membres qui sont à l'AQPER sont dans toutes les énergies renouvelables, sont à l'oeuvre du Québec partout dans le monde, et, que ce soit Énergex, Boralex, Brookfield, Kruger, nommez-les, là, elles sont là, et leur intérêt est de développer, puis, du côté d'Écotech, c'est l'ensemble des technologies vertes. Donc, il va arriver qu'on va se parler sur des sujets communs, mais, nos champs d'intérêt étant divers, j'ai des interactions avec l'AIEQ sur des sujets, mais ils sont limités, parce qu'on n'a pas la même finalité. On se rejoint sur la notion d'électricité. Avec Écotech, on a beaucoup de discussions, et autres, mais il n'y a pas de grande fédération des associations en lien avec les énergies renouvelables, puisqu'on est cette association-là.

M. Charette : Dernière question... Parce que je veux résoudre le défi, là, du comité consultatif, mais je retiens ce que vous disiez un petit peu plus tôt, la possibilité d'une consultation à travers les membres officiels du comité, parce qu'autrement ce serait effectivement difficile de trouver un répondant pour l'ensemble de ces milieux-là.

Bien, écoutez, merci. Le temps, je sais qu'il court. Donc, un merci tout particulier, là, pour votre présence avec nous ce matin.

Le Président (M. Polo) : Merci. Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Je vous remercie. Bonjour, M. Samray, merci beaucoup pour votre éloquente présentation. Votre association, si je ne me trompe, existe depuis 30 ans maintenant. Pourriez-vous, juste pour qu'on cadre certains des échanges qu'on est en train de faire, nous lister... bien, pas nous lister, mais, je veux dire, nous donner une idée des membres qui font partie de votre association — je pense que vous avez une centaine de membres, je pense que vous êtes un acteur extrêmement important et significatif au Québec — juste pour nous donner une idée, pour les gens qui nous écoutent, là?

M. Samray (Jean-François) : Oui. Alors, on a des entreprises qui sont dans la production d'énergie renouvelable, que ce soit, comme j'ai dit tantôt, les Énergex, Boralex, Brookfield, Kruger, EDF, donc dans la production électrique, on a des gens qui sont également dans la production de cogénération, on a des entreprises qui sont actives dans la production d'hydrogène vert, on a des entreprises actives dans la production de gaz naturel renouvelable, de biométhane, on en a dans les biocarburants. Sont membres chez nous des municipalités, des Premières Nations, des universités, des centres de recherche, des entreprises de services. Donc, c'est l'ensemble du spectre, autant de la société civile que du côté du financement. Donc, l'ensemble du spectre se retrouve chez nous, et ce sont des gens qui sont actifs non seulement au Québec, mais également à l'international.

Mme Montpetit : Je vous remercie. Ça, c'est pour les fins de... Tu sais, vous êtes un acteur extrêmement important, au niveau de l'association, et vos membres, au niveau des énergies renouvelables, vous avez un lien, vous l'avez eu avec le gouvernement, vous devriez l'avoir encore au niveau de... Dans le fond, vous êtes un partenaire extrêmement important dans la lutte aux changements climatiques. Puis je lisais un petit peu, justement, ce que vous présentiez sur les objectifs que vous vous êtes donnés de doubler les énergies renouvelables, donc c'est un acteur majeur. Puis je trouvais important qu'on puisse camper ça, parce que, dans vos recommandations — et vous avez une crédibilité, pour moi, qui est extrêmement importante — vous suggérez de conserver TEQ dans sa forme actuelle ou de le bonifier, s'il le faut, avec les administrateurs, mais vous suggérez fortement que TEQ reste une société d'État indépendante comme elle est présentement.

M. Samray (Jean-François) : Tout à fait. Je pense que de regarder le... Écoutez, je pense qu'on a déjà vécu avec une agence de l'efficacité énergétique, on a déjà vécu avec un bureau, et là, le fait d'avoir une société d'État qui est une société d'État qui est liée par la loi sur les sociétés d'État du Québec, qui a son conseil d'administration, sa gouvernance, mais surtout et par-dessus tout une flexibilité puis une agilité, une approche business qui fait en sorte que d'avoir l'argent, c'est une chose, de le faire sortir sur des projets qui font de la transition énergétique... ça, c'est essentiel, et ils sont capables de se revirer très rapidement, ce que malheureusement le cadre de gestion normé du paramètre gouvernemental ne permet pas.

Aller chercher une subvention de 1 million, ou de 2, ou 3 au gouvernement nécessite d'aller chercher un avis à l'Exécutif, une analyse, retour sur des questions, et donc c'est long et ça allonge le coût et l'incertitude. Ce qu'on a vécu avec TEQ, et ce pour quoi l'industrie ne veut pas retourner faire un «back to the past», c'est vraiment le fait de cette agilité démontrée et d'être capable de prévoir les travaux. Parce que, souvent, quand on passe des énergies fossiles aux énergies renouvelables, il va y avoir le fait qu'on va analyser, et, dans l'ancien système, il y avait le budget, il y avait les discussions sur les crédits, qui est votre rôle, votre prérogative, c'est fondamental, et là, après ça, l'argent était disponible. L'argent est disponible à partir du mois de mai, juin, tout le monde se lance pour présenter des projets, en même temps, et on sait à la fin juin, début juillet si on a notre projet. Donc, il faut commander, et tout le monde commande en même temps, tout le monde fait livrer en même temps, donc les coûts sont gonflés par cette urgence, et, lorsque vient le temps de déposer, bien, finalement, on a fait le projet quand on a pu. Donc, on va avoir fait des fermetures de lignes de production ou autres, ce qui en augmente le coût du projet, et, quand vient le temps de faire cette analyse, cette reddition de comptes, on dit : Bien, écoute, la période de retour sur l'investissement, qui peut être un autre exemple d'indicateur de performance, la période de retour sur l'investissement est beaucoup trop longue. Ce projet-là ne fait pas de sens, on ne le fait pas. Ça, c'est quelque chose que l'État québécois doit se garder de reproduire, parce que ça n'a pas fonctionné, et l'exemple du projet sur la biomasse... ou Roulez vert, ou d'autres programmes du genre ont eu des sérieux ratés.

C'est pour ça que de conserver quelque chose qui fonctionne, comme TEQ, une approche business qui répond aux besoins, puis avec une prévisibilité sur du long terme puis une capacité pour les entrepreneurs et les citoyens de prévoir des projets puis de les faire au moment qui cause le moins de préjudices, c'est quelque chose de fondamental, et c'est pour ça qu'on demande de conserver TEQ dans sa forme actuelle.

Mme Montpetit : Parfait. Puis je comprends qu'au-delà du principe de ne pas vouloir revenir vers le passé — puis j'aimerais vous l'entendre dire, parce qu'il est bien écrit dans votre mémoire — vous êtes satisfaits de la mise en place de TEQ, vous êtes satisfait du travail que ça a fait. Je lisais que vous soulignez le fait que ça a contribué significativement à augmenter les aides financières qui ont été accordées, notamment. Donc, vous, vous êtes satisfait de la façon dont TEQ fonctionne à l'heure actuelle?

M. Samray (Jean-François) : Oui, tout à fait, et non seulement on est satisfait des aides accordées, mais je pense que l'État tout entier devrait voir les réductions de GES qui ont été obtenues et qui ne l'ont pas été par les autres structures précédentes. Et donc, ce faisant, là, je pense que «the proof of the pudding is in the eating», et donc, ce faisant, la démonstration se fait... qu'à regarder le bilan et le taux de satisfaction des gens avec qui ils font affaire. Donc, nous, pour nous... Écoutez, vous voulez réduire les émissions de GES, vous voulez faire de la transition énergétique un moteur de la prochaine économie du Québec? Bien, donnez un véhicule qui va le supporter, qui fonctionne, et la preuve est faite par elle-même.

Mme Montpetit : Puis, dans votre secteur, justement, particulièrement, vous faites référence aux diminutions de GES. Vous diriez que TEQ a contribué à quelle hauteur dans votre secteur?

• (10 h 50) •

M. Samray (Jean-François) : Bien, écoutez, je pense que, que ce soit sur différents projets en lien avec la conversion à l'électricité verte des réseaux autonomes... TEQ a été présent puis TEQ a été très ingénieux, positivement, pour faire en sorte qu'on puisse supporter le projet. Du côté des biocarburants, c'est la même chose; du côté de l'hydrogène vert, ils sont présents également. Donc, je pense que... Puis leurs liens avec d'autres organismes du même genre à l'international font en sorte que... je pense que ça démontre qu'ils sont un organisme dont on a besoin.

Mme Montpetit : Je vous remercie. J'ai une dernière question, parce que je voudrais laisser un petit peu de temps, puis le temps file, à mon collègue, mais je ne veux pas vous dire «rapidement», parce que c'est vraiment important, en même temps, mais vous soulignez, dans votre mémoire, des préoccupations vraiment importantes, sur le fait de réintégrer TEQ au niveau du ministère des Ressources naturelles, sur des possibles conflits au niveau des rôles. Entre autres, comme le ministère est responsable de donner des licences d'exploitation et d'exploration d'hydrocarbures, je comprends que ça, ça vous préoccupe particulièrement, là.

M. Samray (Jean-François) : Bien, ça me préoccupe, mais ça devrait préoccuper l'État également qu'il faut être cohérent, je ne peux pas vouloir une chose et son contraire en même temps. Donc, à un moment donné, soit qu'on change la mission du MERN, soit qu'on change la mission d'un autre ministère, ou soit qu'on maintient ce qui est là parce que ça fonctionne.

Mme Montpetit : Je vous remercie.

Le Président (M. Polo) : M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley : Oui, juste une question. Certains de vos membres viennent des communautés autochtones. Une question pour vous : C'est quoi, l'importance des projets comme les minicentrales, Apuiat, des autres projets des énergies renouvelables pour le développement économique, pour nos peuples autochtones ici au Québec?

M. Samray (Jean-François) : Bien, qui est fondamentale... J'ai d'ailleurs passé une partie de mon temps des fêtes avec certains de leurs représentants pour regarder la conversion dans le Nord-du-Québec, comment ça pourrait se faire de façon efficace avec d'autres énergies alternatives. Je pense, pour les Premières Nations, c'est discuté à la table du Plan Nord également, la table des partenaires.

L'énergie, elle est dans la communauté, elle est là par les combustibles fossiles. Mais l'énergie peut également être un moteur d'activité économique et doit être un moteur d'activité économique, pour la nouvelle génération qui arrive. Et ils ont un taux de naissances nettement plus fort qu'au sud du Québec, et donc, ce faisant, il faut offrir des emplois, et, si on n'occupe pas la population, bien, c'est là qu'il va arriver des enjeux sur des problèmes sociaux. Et je pense que, pour eux, les énergies renouvelables sont nettement en lien avec leur mode de vie, avec leur mode de culture, et, vous savez, entre gérer un déversement de granules de bois ou gérer un déversement de produits pétroliers, le premier est nettement plus facile à faire et peut même être fait par des élèves de maternelle, là, donc, puis, même maternelle quatre ans, là. On peut leur demander, offrir une petite pelle, puis : Ramassez-les. Donc, ce sont des choses, je pense, qui peuvent se faire, et c'est un moteur de développement économique pour eux, puis c'est fondamental.

M. Kelley : Parfait.

Le Président (M. Polo) : Merci. Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Alors, merci pour votre présentation. Moi aussi, ça m'a frappée, le fait que vous dites qu'il pourrait y avoir un conflit entre les différentes missions du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles, celle d'avoir des permis, là, d'exploration et exploitation du territoire... des hydrocarbures et, de l'autre côté, bien, de s'occuper de la transition. Donc, il y a un danger, un risque que vous voyez là qu'on partage.

Mais il y a, par exemple, TEQ. Vous, ce qui m'a étonnée, une des propositions que vous amenez, c'est que vous dites que TEQ, ça se passe bien, c'est important, il faut le maintenir, parce qu'il a toute cette qualité d'agilité, visibilité, approche business, comme vous dites. Mais ce qui m'étonne un peu, c'est que vous dites : Ils sont là, il faut que ce soit à l'extérieur du ministère pour conserver toute cette agilité, mais changeons la tête du conseil d'administration, changeons les têtes, que le ministre nomme ces gens-là. Donc, ce que TEQ... le fait... ça, ça veut dire qu'il ne sera pas indépendant. Et ça, ce n'est pas une préoccupation que vous avez, parce que l'objectif, c'est d'atteindre les objectifs de réduction de gaz à effet de serre. L'indépendance, il y a beaucoup de groupes qui l'ont amenée, c'est quelque chose d'important. Mais j'aimerais que vous me parliez plus de votre proposition de changer le conseil d'administration.

M. Samray (Jean-François) : Bien, écoutez, moi, si je comprends bien comment fonctionnent un parlement et un gouvernement, d'habitude, quand il y a un projet de loi qui est déposé, c'est que c'est le propre d'une volonté gouvernementale, amener des changements à quelque chose. Donc, si le gouvernement prend la peine, à un moment donné, de dire : Bien, voici une façon dont on a pensé qu'on pourrait changer parce que certains dans l'appareil, quelque part, ou certains élus peuvent avoir un inconfort avec certains éléments, bien, nous, on amène des suggestions. Puis une des premières suggestions... Puis ça s'est fait dans le passé : chez Hydro-Québec, combien de fois on a vu des membres du conseil d'administration, de la haute direction... une élection, wouf! on change. Ça s'est fait. Donc, là, pour nous, la question, c'est de dire : Est-ce qu'on abolit quelque chose qui fonctionne? Non. Si on trouve que, ma foi, il y a une reddition de comptes qui n'est peut-être pas celle qu'on souhaiterait ou il y a une orientation qui n'est peut-être pas celle qu'on souhaiterait à titre de parti gouvernemental, bien, la façon de l'exprimer, c'est... Comme toute société d'État, elle a un conseil d'administration, elle a un plan stratégique, sa loi est claire, les actions puis les programmes sont approuvés par le conseil d'administration. Pour le moment, il y a 10 sièges, il en reste cinq à pourvoir.

Mme Ghazal : Parce qu'on n'a plus... Le temps file. Pour atteindre les résultats de la transition, atteindre les objectifs, et tout ça... C'est ce que TEQ a réussi à faire avec le conseil d'administration actuel, peu importent les individus. Ma question, c'est : L'indépendance aussi est quelque chose d'important puis qui est important pour les intérêts mêmes de votre industrie, au lieu que ça soit... parce que l'objectif, c'est d'enlever, ce que les groupes nous ont dit hier aussi, c'est d'enlever les mains des politiques de la gestion de la transition, si on veut y arriver. Ça fait que je voulais juste voir si vous aviez cette... puis si c'est une préoccupation que vous voyez, que vous partagez.

M. Samray (Jean-François) : Bien, je pense que, pour nous, c'est très clair qu'on dit que la première des étapes, c'est de nommer des administrateurs non indépendants, il y a de la place pour ça, et je pense que la structure fonctionne, il n'y a pas de raison de la changer. Peut-être qu'on peut changer des administrateurs, mais il n'y a pas de raison de changer une structure qui fonctionne, qui est flexible puis qui livre les résultats.

Mme Ghazal : Est-ce que l'indépendance est importante, de cette organisation-là?

Le Président (M. Polo) : M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui, merci. Merci, M. le Président. Merci beaucoup d'être ici. Deux choses, moi, que je remarque de vos propos ou que je retiens, en tout cas qui me font réfléchir.

Moi, je trouve qu'on a perdu un nombre, hein, considérable d'années depuis... en tout cas, certainement l'abolition de l'Agence de l'efficacité énergétique : recréation d'un bureau à l'intérieur du ministère; création de TEQ; à travers ça, du côté du Fonds vert, bien là, création du Conseil de gestion du Fonds vert, on s'en va vers son abolition; retour entre les mains du ministre, et des ministres, en fait, Environnement et Énergie, pour soutenir les projets. Donc, beaucoup, beaucoup de structures, de structurite depuis 10 ans. Pendant ce temps-là, pas beaucoup de gains en réduction de gaz à effet de serre.

Et je trouve, deuxième chose, que vous mettez vraiment le doigt sur le bobo, là — j'aime bien votre page 26 : que la schizophrénie du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles, là, d'une part, «de veiller à la mise en valeur d'hydrocarbures, tout en coordonnant la transition énergétique». Donc, c'est difficile d'y voir clair.

Alors, ce que je comprends, c'est que vous nous dites : Prenons ce qu'on a, là, puis renforçons son indépendance, renforçons sa transparence, renforçons les données ouvertes, même, aussi à travers ça et allons de l'avant avec TEQ, mais un TEQ plus fort.

M. Samray (Jean-François) : Oui, puis je pense que la démonstration des autres formules de gouvernance a été essayée dans le passé, ça n'a pas fonctionné. On se rapproche de plus en plus de l'échéance, et, n'eût été de la crise économique de 2008, on n'aurait pas les résultats de réduction de GES qu'on a actuellement. On dépasse le 10 milliards de litres dans l'essence. On n'a pas besoin des données nécessairement de la compilation des GES, on n'a qu'à regarder les ventes de véhicules mensuelles, le rapport des ventes mensuelles pour savoir que les GES augmentent. C'est clair, plus il se vend de véhicules, plus il s'achète d'essence et de diesel et plus les émissions de GES sont présentes dans le transport. Donc, pour nous, ce que ça prend, c'est une structure qui fonctionne, et c'est d'être là, puis l'efficacité de la reddition de comptes.

M. Gaudreault : Comment intégrer Investissement Québec là-dedans? Est-ce que vous y avez réfléchi? Pour votre industrie, c'est important de pouvoir soutenir l'émergence d'énergies renouvelables, de nouveaux projets. Est-ce qu'Investissement Québec ne devrait pas avoir un rôle plus grand?

M. Samray (Jean-François) : Bien, on les a rencontrés il y a deux semaines, et on va mettre en place un comité de travail, un groupe de travail conjoint avec Investissement Québec pour faciliter le financement auprès de nos membres, et donc les membres ont des fonds qu'ils peuvent... des programmes qui sont disponibles à TEQ, il y a également de l'investissement qui est disponible auprès d'IQ, et donc je pense que tous ces gens-là se parlent. Et nous, on entretient le dialogue avec tout le monde pour s'assurer que, s'il y a des programmes qui sont mal ajustés, est-ce qu'on peut changer un mot ou, bref, focaliser sur l'objectif final.

Le Président (M. Polo) : Merci. Merci beaucoup, M. Samray. Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants pour permettre aux représentants... en fait, au Commissaire au développement durable de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 11 heures)

(Reprise à 11 h 03)

Le Président (M. Polo) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, je souhaite la bienvenue aux représentants du bureau du Vérificateur général, Commissaire au développement durable, représenté par M. Paul Lanoie, commissaire lui-même, Mme Caroline Rivard, directrice principale, M. Patrick Dubuc, directeur principal, et Mme Moïsette Fortin, directrice. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à procéder à votre exposé. Merci.

Vérificateur général

M. Lanoie (Paul) : Parfait, merci beaucoup. Donc, M. le Président, M. le ministre de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Mmes et MM. les membres de cette commission, c'est avec plaisir que je participe aux consultations particulières et auditions publiques concernant le projet de loi n° 44. Alors, permettez-moi d'abord de vous présenter les personnes qui m'accompagnent : donc, Mme Caroline Rivard, directrice principale d'audits, Mme Moïsette Fortin, directrice d'audits, et M. Patrick Dubuc, directeur principal d'audits.

Alors, d'entrée de jeu, il faut signaler que le Fonds vert peut constituer un outil puissant de développement durable s'il est géré adéquatement et si les sommes disponibles sont bien utilisées. Reconnaissons aussi que la tarification du carbone, qui permet d'alimenter ce fonds, est un principe pertinent, et que le Québec fait figure de leader dans ce domaine. Cela étant dit, je commencerai par un avis général sur le projet de loi.

Globalement, celui-ci semble nous ramener à une structure de gouvernance similaire à celle qui existait avant 2016, soit au moment où nous avons réalisé notre audit initial et notre suivi détaillé sur le Fonds vert.

En matière de lutte et d'adaptation aux changements climatiques, comme en toutes choses, la structure de gouvernance n'assure pas, à elle seule, l'atteinte des objectifs et la saine gestion des fonds publics. Pour y arriver, une gestion rigoureuse est essentielle. Il faut, par exemple, déterminer des objectifs clairs, réalistes, précis et mesurables à partir des orientations définies. Il faut sélectionner rigoureusement des mesures et des programmes d'attribution d'aide financière permettant d'atteindre les objectifs fixés. Il faut attribuer l'aide financière efficacement et équitablement à partir de règles précises. Il faut, bien sûr, évaluer l'atteinte des objectifs fixés. La nécessité de mettre en place une gestion rigoureuse axée sur les résultats était un des messages principaux de notre audit de 2014, et ce message demeure pertinent.

Passons maintenant à quelques commentaires plus spécifiques. D'abord, des éléments positifs du projet de loi méritent d'être soulignés. Le projet de loi réitère l'importance de gérer le fonds dans une perspective de développement durable, d'efficacité et de transparence. Il prévoit le comité... la création, dis-je, d'un comité consultatif permanent sur les changements climatiques dont les conseils seront rendus publics, ce qui n'était pas le cas précédemment. Ce comité pourra formuler des conseils à la demande du ministre mais également de sa propre initiative. Par ailleurs, il semble y avoir une volonté d'uniformiser le calcul des quantités de gaz à effet de serre émises, réduites ou évitées. Enfin, notons que, tout comme pour le Fonds vert, il est prévu que le Vérificateur général auditera les états financiers du nouveau Fonds d'électrification et de changements climatiques.

Toutefois, plusieurs éléments du projet de loi suscitent des préoccupations. Premièrement, il y a le partage des rôles et des responsabilités. Alors voici quelques-uns des questionnements que j'ai à cet égard. Les ministères et organismes devront consulter le ministre de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques lors de l'élaboration des mesures qui pourraient avoir un impact significatif. Et le ministre pourra leur recommander des ajustements ou donner tout avis qu'il estimera opportun. Toutefois, rien n'indique que les ministères et organismes devront tenir des avis ou des recommandations du ministre avant d'aller de l'avant. Rien ne précise ce qui est ou non significatif en termes d'impact. En fait, je serais étonné que le fonds finance des mesures qui n'ont pas un impact significatif en matière de lutte contre les changements climatiques. Cela implique donc que le ministre devra toujours être consulté, si je comprends bien.

De plus, le ministre doit assurer la cohérence d'ensemble des plans d'action des programmes et des autres mesures alors que chaque ministère ou organisme public concerné demeure responsable du choix et de la mise en oeuvre des moyens pour atteindre les résultats souhaités. Il y a donc un risque que chacun ne se sente pas imputable et se renvoie si ultimement les objectifs ne sont pas atteints. Cela est d'autant plus vrai que le projet de loi ne prévoit pas que l'évaluation de la performance doive être réalisée en continu par les acteurs du gouvernement imputables de l'utilisation des fonds, soit chaque ministère et organisme public de même que le ministre de l'Environnement à titre de responsable de la gestion du fonds.

Par ailleurs, en plus de conclure des ententes avec les ministères ou organismes publics, le ministre pourra leur confier des mandats. Dans ces deux situations, il devra établir des conditions suffisantes pour s'assurer que les différents acteurs respecteront leurs engagements et les objectifs au regard des changements climatiques.

Bref, même s'il est souhaité que le ministre assure une gouvernance intégrée à l'échelle gouvernementale en matière de lutte aux changements climatiques, force est de constater que plusieurs éléments pourraient l'empêcher d'exercer pleinement cette responsabilité.

En 2016, la Vérificatrice générale et moi avions mentionné, lors des auditions tenues par cette commission sur le projet de loi n° 102, que la définition des rôles et des responsabilités ainsi que leur partage entre le ministère de l'Environnement et le Conseil de gestion du Fonds vert seraient un enjeu. Nos préoccupations se sont matérialisées. En effet, dans un rapport publié en novembre 2018, le Conseil de gestion du Fonds vert indiquait qu'un différend persistait entre lui et le ministère de l'Environnement quant à l'interprétation de dispositions légales. Ce différend nuisait à l'exercice de la mission du conseil de gestion et à son indépendance. Le gouvernement du Québec a fait référence au même type de difficulté dans son plan budgétaire de mars 2019. Il faudrait donc éviter que pareille situation ne se reproduise avec l'adoption du projet de loi n° 44.

Deuxièmement, j'ai des questionnements concernant les comités qui sont créés par le projet de loi. Les ressources mises à la disposition du comité consultatif sur les changements climatiques sont celles que le ministre juge nécessaires. Étant donné que ses membres auront des responsabilités en dehors du comité et que ce comité aura un rôle stratégique, comment pourra-t-on s'assurer que ses ressources seront suffisantes pour qu'il joue adéquatement son rôle?

• (11 h 10) •

En ce qui concerne le comité consultatif prévu pour conseiller le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles, il ne sera actif que pendant l'élaboration des plans directeurs en transition, innovation et efficacité énergétiques. À son sujet, je me questionne sur les éléments suivants : N'y aurait-il pas lieu d'avoir en la matière un comité permanent, comme le comité consultatif sur les changements climatiques, de prévoir sa composition, de lui attribuer des ressources suffisantes et de rendre ses avis publics? Ce que le projet de loi ne prévoit pas.

Troisièmement, je suis préoccupé au regard d'un pouvoir introduit par le projet de loi. Le projet prévoit comme nouveauté que le ministre pourra déléguer à une municipalité ou même à toute personne morale la gestion d'un programme qu'il a élaboré.

À cet égard, nous interprétons qu'en vertu de la Loi sur le Vérificateur général nous aurons le pouvoir d'auditer la gestion et l'attribution de fonds publics effectuées par ces tiers lorsque nous le jugerons approprié. Toutefois, étant donné que certains de ces délégataires ou sous-délégataires pourraient ne pas être au fait du rôle du Vérificateur général et de celui du Commissaire au développement durable, nous souhaitons par prudence que ce pouvoir soit précisé dans le projet de loi. Ainsi, nous pourrons sans difficulté, grâce à nos audits, fournir aux parlementaires toute l'information nécessaire pour qu'ils puissent exercer leur contrôle sur les fonds publics. Sinon, il est possible qu'en tant que Commissaire au développement durable je ne puisse jouer convenablement le rôle que le projet de loi vise à me confier. Au besoin, à ce sujet-là, je peux fournir un libellé pour un amendement à apporter en ce sens au projet de loi.

Quatrièmement, j'ai des inquiétudes quant à l'audit des états financiers des fonds. Il faut s'assurer, le cas échéant, que les entités auront les ressources suffisantes et l'expertise nécessaire pour produire des états financiers de qualité pour les fonds en temps opportun et en respect des obligations législatives liées à leur publication.

Dans deux rapports de 2019, le Vérificateur général informait l'Assemblée nationale de ses préoccupations concernant l'audit des états financiers du Fonds vert et de Transition énergétique Québec. Entre autres choses, des arrêts ont été nécessaires pour donner le temps aux entités concernées de mieux s'organiser et d'être en mesure de préparer des états financiers appuyés par une documentation complète et fiable permettant à nos équipes d'audits financiers, donc, de réaliser un travail efficace et efficient.

À ce jour, le Vérificateur général n'a toujours pas pu finaliser l'audit des états financiers du Fonds vert pour l'exercice clos le 31 mars 2018. En raison des difficultés rencontrées, les travaux d'audit ont de nouveau été interrompus en décembre 2019.

D'autre part, en ce qui concerne les états financiers de Transition énergétique Québec pour l'exercice clos le 31 mars 2018, nos travaux d'audit complétés récemment démontrent des problématiques importantes.

Étant donné que le Fonds de transition, d'innovation et d'efficacité énergétiques servira à financer des activités auparavant dévolues à Transition énergétique Québec, je me demande pourquoi le projet de loi n° 44 ne prévoit pas que ce fonds ait à produire des états financiers et que ceux-ci soient audités par le Vérificateur général. Lorsque les fonds spéciaux ne sont pas audités, ils ne font pas l'objet d'un contrôle parlementaire aussi poussé.

Pour finir, il y a un élément de réflexion que j'aimerais vous apporter en ce qui concerne le nouveau rôle que le projet de loi me confierait. Mon analyse m'amène à constater que le Fonds d'électrification et de changements climatiques ne sera qu'un outil parmi d'autres pour atteindre les objectifs de la politique-cadre prévue sur les changements climatiques. Je me permets donc de soulever cette question concernant les modifications à la Loi sur le Vérificateur général : Est-ce que les parlementaires désirent vraiment que je concentre annuellement mes audits sur les activités financées par ce fonds ou est-ce qu'ils désirent plutôt que mes audits visent un niveau plus global, soit celui de la lutte et de l'adaptation aux changements climatiques?

Alors, je vous remercie, je suis maintenant disponible pour répondre à vos questions.

Le Président (M. Polo) : M. le ministre.

M. Charette : Merci, M. le Président. Merci à vous, comme représentants du commissaire et de la Vérificatrice générale. Exercice combien frustrant d'être aussi limité dans le temps, compte tenu des points très intéressants que vous avez soulevés.

Vous avez dit, d'entrée de jeu : La solution ne passe pas uniquement par la gouvernance. C'est bien vrai, il y a des questions de gouvernance dans le projet de loi, mais elle ne garantit pas, cette gouvernance, peu importe qu'elle, elle ait les résultats. C'est la raison pour laquelle on propose la mise en place de comités. Vous avez apporté des suggestions intéressantes à considérer à ce sujet-là.

Mais, derrière cette intention-là, il y a une volonté première, c'est qu'au fil des années les anciens gouvernements ont pris des engagements très, très fermes dans une durée déterminée. On est à la fin du PACC, du plan d'action sur les changements climatiques, qui s'est échelonné sur sept ans. On vit ses derniers mois. Et on apprend, quelques années sinon un an ou deux avant l'échéance de ce PACC là, qu'on n'atteindra pas nos objectifs. Donc, il n'y avait aucun moyen en cours de route pour redresser, soit que la volonté politique était inexistante à l'époque, mais, à tout le moins, il n'y avait pas ce contre-pouvoir-là qui, à chaque année, rappelait le gouvernement à ses responsabilités. C'est le cas pour le comité indépendant.

Je n'insisterai jamais assez, la structure actuelle avait une formule semblable, cependant les rapports n'étaient pas systématiquement rendus publics. Ça devient une obligation maintenant, donc, une forme de bulletin que le gouvernement va recevoir de façon périodique, en vous confiant également un rôle particulier. Je comprends la question que vous soulevez, mais ce rôle-là, pour nous, il est fondamental, parce qu'on veut éviter... nous, c'est une politique-cadre que l'on veut présenter dans les prochaines semaines, qui couvrirait l'actuelle décennie, mais on ne veut pas qu'en 2028 ou 2029 on se fasse faire le même coup que le gouvernement précédent, c'est-à-dire, à la dernière minute, dire : On n'y arrivera pas. Donc, ce rôle-là qu'on vous confère, à travers le projet de loi, il est fondamental.

Maintenant, vous nous demandez : Est-ce que ça doit se limiter uniquement à une gestion, ou à des commentaires sur la gestion du fonds, ou de façon générale? Moi, je vous dirais les deux, en ce sens que la loi vous donne une obligation au niveau de la gestion du fonds, ce qui n'était pas le cas par le passé, mais vos mandats actuels vous confèrent toute la latitude nécessaire pour répondre à l'autre volet. Donc, on vient corriger une aberration, c'est-à-dire une gestion rigoureuse annuelle d'un fonds, mais la latitude que vous aviez avant, vous la conservez. Donc, je m'attendrais de votre organisation qu'elle réponde à ces deux volets-là. Mais le projet de loi vient corriger une aberration, malheureusement, qui a engendré les résultats que l'on connaît malheureusement aujourd'hui.

Je comprends tout à fait vos préoccupations, vos questionnements au niveau du partage des responsabilités. Je comprends également vos questionnements par rapport à tout ce qui est gestion financière du fonds. D'ailleurs, hier, on a eu le témoignage de l'actuel P.D.G. du conseil de gestion, et c'était préoccupant à bien, bien des égards, et vous y faites référence. On n'a toujours pas les états financiers vérifiés, audités de l'année financière 2017‑2018, c'est extrêmement préoccupant, et vous l'avez mentionné d'entrée de jeu.

Dès le départ, dès l'adoption de la loi, il y avait un conflit, non pas de personnalité, mais un conflit de compétences entre le ministère de l'Environnement et le conseil de gestion. Donc, lorsque la loi a été présentée, elle a engendré ce conflit-là. Ce que j'ai mentionné hier, et j'étais tout à fait abasourdi, en début de mandat, donc, en janvier 2019, je reçois, comme ministre, un avis juridique du conseil de gestion, qui dit : Vous n'avez pas à vous mêler de telle ou telle affaire, c'est ma prérogative. Et ce n'est pas parce que j'étais nouveau ministre, l'ancien gouvernement avait reçu ce même avis juridique là, comme quoi la compétence du ministère de l'Environnement était constituée. Donc, ce qui est malheureux, on a perdu du temps, on a perdu des années, parce qu'on avait une nouvelle loi, des nouvelles responsabilités qui ne déterminaient pas suffisamment les rôles et responsabilités de chacun. Et, oui, c'est venu certainement pourrir une relation ou empêcher l'atteinte de certains résultats. Ceci dit, une loi déficiente adoptée par l'administration précédente, une absence de volonté politique au niveau des résultats à atteindre, mais maintenant on l'a laissé pourrir, cette situation-là, pendant une certaine période de temps.

• (11 h 20) •

Nous, l'engagement qu'on a pu prendre l'automne dernier pour vous permettre de reprendre l'audition de ces états financiers, c'est de revoir la structure organisationnelle du ministère, confier les effectifs nécessaires, ce qui n'avait pas été fait non plus par l'administration précédente. En fait, c'était une restructuration, somme toute, majeure qui impliquait 15 ministères. On confiait au ministère de l'Environnement des responsabilités supplémentaires, mais on n'a jamais confié les effectifs nécessaires pour arriver à l'atteinte de ces résultats-là. Donc, l'engagement qu'on a pris dès l'automne dernier pour vous permettre de reprendre cet audit-là, c'est de confier les ressources nécessaires pour avoir les réponses que vous nous demandez. Parce que le laisser-faire des derrières années, moi, me rend absolument perplexe, et, mon collègue de Jonquière le disait à juste titre, ce cafouillage-là a engendré, dans la population, une absence ou un manque de confiance, un bris de confiance à l'égard de notre principal outil pour financer nos mesures de lutte aux changements climatiques.

Donc, cette négligence-là, on ne la répétera pas. On va vous donner les outils nécessaires pour vous acquitter de votre mandat. Et, vous l'avez mentionné, le projet de loi n° 44 maintient cette responsabilité-là que vous avez de voir auditer le futur fonds qui sera mis en place avec, souhaitons-le, l'adoption du projet de loi. Donc, oui, on a perdu de précieuses années, on a ébranlé la confiance de la population, mais on ne peut plus se permettre de répéter ces erreurs-là.

Et, pour ce qui est du rôle qu'on vous confie à travers le projet de loi, encore une fois, je me répète, mais il est fondamental. Il faut que vous conserviez la mission que vous avez déjà, mais il faut que vous nous donniez un bulletin, année après année, pour nous assurer que le fonds, il est bien administré pour nous assurer de l'atteinte de nos résultats. Moi, je regarde un petit peu ce qu'il se vit sur la scène internationale, la place que l'on accorde à l'environnement, une place croissante, ne serait-ce qu'au cours de la dernière année. Et les discours que l'on entend aussi, on ne doit pas les entendre, avec le projet de loi qui sera adopté, on ne peut pas se permettre de les entendre avec la politique-cadre qu'on va déposer. Il faut que les gens puissent se convaincre que la prochaine décennie va nous permettre d'atteindre les cibles que l'on s'est fixées, et on les a fixées ensemble, comme Assemblée nationale. Cette cible-là, la cible de 37,5 % de réduction d'ici 2030 par rapport à l'année de référence de 1990, elle a fait l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale.

Donc, on ne peut pas se permettre, comme Assemblée nationale, comme Parlement, de se donner des objectifs sans se donner les moyens de les atteindre. Donc, un rôle tout à fait fondamental qui est le vôtre.

Et, ce que j'ai eu l'occasion de réitérer hier à plusieurs reprises et à l'ouverture même des travaux du projet de loi, la consultation qui se vit maintenant, elle est très précieuse. Nous, on met sur la table ou on met au jeu un projet de loi, mais on prend des notes, et le projet de loi qui sera adopté, ultimement, j'espère, avec l'ensemble des formations politiques, sera le résultat des différentes propositions qui nous auront été faites au niveau de la présente commission parlementaire. Donc, merci déjà pour ces commentaires-là.

Maintenant, une question. Au niveau de l'audit, les défis que vous avez rencontrés, moi, ce qu'on m'indique, c'est qu'il y avait beaucoup de rotation au niveau du personnel du ministère, ce qui engendrait des problèmes de communication avec vos bureaux. Est-ce que vous pourriez me confirmer? On m'indique que, de votre côté aussi, il y avait une certaine rotation au niveau des personnes en charge qui a engendré des délais supplémentaires. Donc, nous, on prend l'engagement, avec la réorganisation qu'on vous proposait l'automne dernier, de mettre tout en oeuvre pour corriger la situation qui prévalait avec l'administration précédente. Mais, de votre côté, avez-vous le sentiment d'avoir les effectifs nécessaires pour pouvoir produire le plus rapidement possible les audits de l'année 2017‑2018?

M. Lanoie (Paul) : Bien, écoutez, la situation, donc, de l'audit financier ne relève pas de moi. Donc, j'ai un collègue qui pourra compléter ma réponse. Donc, nous, ce qu'on a constaté en faisant nos travaux à l'automne dernier, c'est qu'il y a eu quelquefois des erreurs assez nombreuses et importantes, et que les ressources en place avaient de la difficulté à préparer les documents, donc, qui nous étaient nécessaires, et c'est ce qui nous a amenés, donc, à interrompre nos travaux en décembre dernier, en décembre, donc, 2019.

Alors, je vais peut-être laisser mon collègue de l'audit financier, donc, compléter notre réponse à ce sujet-là.

M. Dubuc (Patrick) : Oui. Donc, oui, nous avons les ressources nécessaires, bien sûr, pour effectuer l'audit, donc, des états financiers. Au préalable, il faut toutefois que la documentation, donc, les corrections d'erreurs... Et, au fil du temps et dans les deux dernières... deux fois, donc, dans la dernière année, on a informé, donc, les parlementaires et, bien sûr, l'organisation du ministère aussi des anomalies, donc, constatées. Et le ministère voulait mettre en place les correctifs requis, donc c'est pour ça qu'il s'est passé des périodes de temps où on a décidé de sortir, nous, dans un souci de saine gestion publique, donc, des fonds... de laisser la chance à l'organisation, au ministère, donc, d'aller chercher les informations requises, d'apporter les correctifs, donc, aux états financiers.

Donc, récemment, en décembre, on a de nouveau rencontré, donc, le ministère et faire un état de situation. Et, compte tenu qu'il restait encore des anomalies, donc, importantes, des erreurs importantes donc... et c'est pour ça, donc, qu'on a pris un temps d'arrêt pour laisser le temps au ministère... Le ministère nous a exprimé sa volonté d'apporter les correctifs requis, donc, au fur et à mesure. Essentiellement, on parle de l'audit, donc, des états financiers du 31 mars 2018.

Donc, bien sûr, le défi, un des principaux enjeux est au niveau de la séparation des périodes, donc, la démarcation dans le bon exercice financier. Et, oui, il y a eu du roulement de personnel au niveau du ministère. Donc, de nouvelles personnes entrent en place pour essayer d'apporter les correctifs requis.

Et, nous, compte tenu de l'échelonnement dans le temps, bien sûr, nous, on réalise quand même plusieurs autres mandats d'audit, donc, pour le gouvernement du Québec, que ce soit dans les différentes sociétés d'État, tout. Donc, on doit amalgamer, je dirais, notre planification pour s'assurer de rendre compte et de rencontrer l'ensemble, dans le fond, des échéanciers, et donc on doit... on réajuste notre planification en fonction de l'évolution. Mais la première étape, il faut que la préparation des états financiers et la qualité soient présentes pour qu'on puisse par la suite auditer. Donc, nous, on est toujours en fin de parcours, donc.

M. Charette : Nous, naturellement... pas l'option, en fait, ce n'est pas une option, notre volonté est de s'améliorer avec les échanges que vous avez eus l'automne dernier avec la nouvelle structure organisationnelle qu'on vous propose pour corriger les erreurs passées. Est-ce que vous vous sentez davantage en confiance? Peut-être, le premier volet de la question.

Le deuxième : il y a un nouveau fonds qu'on propose de mettre en place avec le projet de loi n° 44. Quelle est ou quelles sont les mesures de précaution que l'on devrait prendre dès maintenant pour s'assurer que les prochaines vérifications se fassent dans des délais nettement plus raisonnables et qu'on ne vienne pas ébranler la confiance du public, comme ça s'est fait, malheureusement, là, pendant de trop longues années?

M. Lanoie (Paul) : Écoutez, comme je l'ai mentionné dans mon allocution, c'est évidemment important d'avoir des ressources suffisantes et l'expertise nécessaire. Donc, c'est vraiment, là, la qualité et la quantité qui doivent être là, essentiellement. Je vais laisser mon collègue compléter là-dessus, mais...

M. Dubuc (Patrick) : Oui. Donc, effectivement, donc, d'avoir une équipe, effectivement, là, dans le fond, là, suffisante pour permettre de traiter. Il faut comprendre qu'au ministère, bien sûr, vous préparez les états financiers du fonds du ministère. Il y a le fonds de protection du domaine de l'environnement également. Donc, il y a quand même plusieurs volets financiers que l'équipe au ministère doit traiter.

Et ce qui... Il y a quand même des joueurs. Donc, dans le dossier du Fonds vert, le ministère est tributaire de la qualité des informations qu'il reçoit de ses mandataires, donc, que ce soient les différents organismes, dont Transition énergétique Québec, ou autres, qui doivent... qui font des opérations, donc, qui eux doivent être inclus dans les états financiers du Fonds vert. Donc, cet élément-là, donc, ça prend une bonne coordination, une concertation entre les mandataires et le ministère pour assurer que les contrôles, dans le fond, là, soient efficaces pour recueillir l'information en temps opportun et pour rencontrer... Donc, c'est vraiment... Il y a plusieurs intervenants dans la chaîne, là.

M. Charette : Parce que le temps file, je réitère la question, tout simplement. Les rencontres, les discussions qui ont eu cours l'automne dernier vous mettent en confiance à ce niveau-là pour la suite des choses? Nous, déjà, la garantie qu'on vous donnait, c'est de mettre les effectifs nécessaires. Mais est-ce que vous êtes sortis rassurés, en quelque sorte, pour la suite des choses pour que l'on puisse produire ces documents-là, qui sont tout simplement fondamentaux, plus rapidement à l'avenir?

M. Dubuc (Patrick) : Mais, en fait, oui, on nous a exprimé, donc, une volonté, là, ferme d'apporter les correctifs requis et de prendre les mesures requises. Toutefois, c'est sûr que c'est lors de l'audit, donc, qu'on va pouvoir constater. Donc, dans la dernière année, on a dû arrêter quand même à deux occasions, donc, où on devait avoir l'information, donc, complète. Donc, à cet égard, oui, on a senti une volonté. Maintenant, on va voir, là... l'expérience, donc...

M. Charette : Tout à fait, c'est à l'usage qu'on pourra le démontrer. Mais déjà, vous mentionnez, puis c'est l'engagement qu'on a pris, on ne peut pas faire une réforme importante, comme le faisait l'ancien gouvernement, sans donner les effectifs nécessaires. On parle d'une quinzaine de ministères en place impliqués. On parle, dans certains cas, d'informations qui remontaient aussi loin que 2006 à transmettre. Donc, l'erreur du passé, ce n'est pas notre intention de la reproduire. Et vous aurez toute la collaboration nécessaire du ministère pour maintenir la confiance du public à ce niveau-là.

Le Président (M. Polo) : Merci.

M. Charette : Merci.

Le Président (M. Polo) : Mme la députée de Maurice-Richard.

• (11 h 30) •

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Merci à vous tous d'être présents aujourd'hui. Merci pour les commentaires très intéressants que vous nous faites et l'analyse du projet de loi qui est sur la table.

Moi, ce que j'entends de votre allocution de départ... puis j'aimerais ça qu'on profite du temps qu'on a, justement, pour que vous puissiez venir élaborer davantage, mais je vous ai sentis... J'ai senti que vous aviez quand même plusieurs réserves. Vous soulevez plusieurs questions. Vous avez mentionné qu'il y a plusieurs éléments dans le projet de loi, dans sa forme actuelle, qui empêcheront le ministre de jouer le rôle qu'il souhaite jouer.

Vous avez parlé d'enjeux d'imputabilité, puis vous êtes très au diapason avec les groupes qu'on a rencontrés jusqu'à maintenant, et très au diapason, je vous dirais, avec les préoccupations qui ont été soulevées du bord de cette table aussi. Le groupe qui était juste avant vous, aussi, a soulevé des préoccupations sur l'enjeu des ressources humaines qui sont présentes au ministère de l'Environnement présentement, tant en nombre mais également qu'en expertise. Vous l'avez souligné également.

Le fait qu'il n'y a rien de précis, dans le projet de loi, qui précise effectivement... C'est beau que le ministre émette des avis, mais, s'il n'y a pas force que ces avis soient respectés... Des avis, au Conseil des ministres, il y en a déjà. Le ministère de l'Environnement... Il y a quatre catégories, il y a quatre ministères, quatre, je vais dire, facteurs qui sont analysés à chaque fois qu'il y a un projet qui est déposé. C'est déjà le cas. Encore faut-il qu'il y ait force de recommandation.

Et donc, j'entends, vous avez encore plusieurs préoccupations par rapport à ces volets-là, et que le projet de loi ne vient pas répondre et, au contraire, peut-être crée d'autres problèmes, là.

M. Lanoie (Paul) : Et, nous, ce qu'on lit, à travers l'intention, là, du législateur, c'est que le ministre a été vraiment identifié comme le porteur de ballon, et donc c'est à lui de faire le travail, et, je pense, le projet de loi veut lui donner une légitimité. Il doit être capable d'assumer cette légitimité, il doit être capable d'exercer une influence forte auprès de ses collègues des autres ministères et des organismes et, bien sûr, pour être capable de mener tout ça de front, il faudra qu'il soit bien entouré, et il faudrait qu'il ait une équipe forte qui le soutienne. Donc, c'est ce qu'on décode, nous, du projet de loi. Alors, c'est à l'expérience qu'on va voir si ça va se réaliser.

Mme Montpetit : Mais vous soulignez quand même qu'il y a encore beaucoup d'éléments qu'il faudrait... qui devraient être précisés, dans le fond, dans ledit projet de loi, pour que ce rôle puisse se réaliser, là.

M. Lanoie (Paul) : Effectivement. Donc, si on pouvait avancer davantage dans les précisions, si c'est possible. Mais ce n'est pas tout non plus qui peut être édicté dans un projet de loi. Et c'est sûr qu'un projet de loi c'est une intention législative, et nous, on décode l'intention, comme je viens de le mentionner.

Mme Montpetit : Parfait. J'aimerais profiter de votre présence aujourd'hui pour vous entendre. Vous l'avez sûrement probablement écoutée hier, Mme Chagnon, donc, la présidente du Conseil de gestion du Fonds vert, qui est venue livrer, je dirais, un, j'allais dire vibrant mais, je pense, préoccupant témoignage, et qui a soulevé plusieurs enjeux, mais notamment celui des états financiers, justement. Donc, elle nous soulignait, puis c'était très, très clair, là, la loi sur le ministère du Développement durable et de la Lutte aux changements climatiques prévoit que le conseil de gestion doit remettre les états financiers, donc, chaque année, et donc elle nous expliquait qu'à l'automne 2018 et donc à l'automne 2019 également elle n'a pas reçu ces rapports, ces états financiers. Donc, de deux choses l'une, j'aimerais ça avoir votre... je ne sais pas si c'est appréciation ou lecture de cette situation, et, deux, est-ce que... puis là je sais que vous n'avez pas fait une vérification qui vous permet de pleinement répondre à la question, mais, a priori, est-ce que ça n'a pas empêché le conseil de gestion de jouer son rôle, de ne pas avoir ces états financiers, là?

M. Lanoie (Paul) : ...bien sûr, nous avons visionné la présentation de Mme Chagnon hier, et les enjeux reliés aux états financiers, on vient d'en parler de longues minutes, je les ai bien soulignés dans mon allocution.

Concernant peut-être le point un peu plus précis qui a été soulevé par Mme Chagnon hier, à savoir qu'on ne lui avait pas présenté le plan d'audit, alors, notre interprétation, donc, c'est que, selon l'article 15.2 de la loi sur le ministère, donc, c'est le ministère qui était responsable du Fonds vert et de préparer les états financiers, donc nous, on n'avait pas d'objection à ce que Mme Chagnon ait accès au plan d'audit, mais c'était au ministère, donc, de lui présenter ce plan-là. Alors, sur cet aspect-là plus précis, là, qui a été soulevé par Mme Chagnon, c'est, nous, la position qu'on avait à ce sujet. Je ne sais pas si Patrick...

Mme Montpetit : Mais juste pour qu'on se comprenne, là, dans la loi, il est bien écrit que le conseil de gestion doit remettre les états financiers. Là, on a des états financiers qui ne sont pas disponibles, là, présentement.

M. Dubuc (Patrick) : En fait, peut-être juste compléter. Donc, les états financiers qu'on vient de parler ne sont pas encore terminés, donc ne sont pas encore audités. Donc, à cet égard-là, lorsqu'ils seront terminés, selon l'évolution, donc, du projet de loi, le ministère aurait transmis, là, les états financiers comme tels au conseil. Nous, dans le fond, en termes de responsabilité, donc, de préparation, tel que la loi, donc, le met, donc, c'est le ministère. Donc, nous, on n'avait pas d'objection à ce que... rende disponible. Mais l'interlocuteur, pour la préparation de l'état financier, est le signataire de l'état financier et le sous-ministre, là, délégué, là, en vertu des règles, et ce n'est pas le conseil de gestion, donc le conseil de gestion n'avait pas la responsabilité des états financiers. Le conseil de gestion, dans la loi, avait la responsabilité, donc, de publier, donc, les états financiers et de remettre.

Donc, ça fait partie, là, de la confusion des rôles et responsabilités, un peu exprimés et mentionnés, là, dans les différentes...

M. Lanoie (Paul) : Comme le conseil de gestion l'a mentionné, comme il a été mentionné dans le document budgétaire du printemps 2019, il y avait un différend entre le conseil de gestion et le ministère quant à la définition des rôles et des responsabilités, et c'est ça, entre autres, qui nous empêchait, nous, d'aller faire ce qui a été demandé par la Commission de l'administration publique, donc une évaluation complète de la réforme du Fonds vert. Donc, c'est une demande qui nous a été faite depuis 2016. Et, en mai dernier, donc, j'ai expliqué pourquoi on n'était pas en mesure de le faire, parce que, dans le fond, nos rapports nous amènent à identifier des déficiences et à faire des recommandations, et, si on ne sait pas qui est responsable de quoi, c'est difficile pour nous de faire des recommandations.

Alors, on était, nous, témoins de cela. On n'a pas audité, on n'est pas entrés dans la boîte du point de vue de l'audit de performance. On travaille sur l'audit financier pour bien faire avancer les choses. Mais, du point de vue d'audit de performance, comme la CAP ou la Commission de l'administration publique nous l'avait demandé, on n'a pas été capable d'entrer faire notre travail, entre autres, à cause de ces différends qui ont été soulevés.

Mme Montpetit : J'aimerais ça vous entendre aussi sur le point... Puis là je sais que c'est un peu à froid, mais, comme vous avez une bonne connaissance des rôles de l'État et des ministères, le président de l'AQPER, qui était là juste avant vous, soulignait des préoccupations, justement, sur des conflits de missions qui pourraient être engendrés par ce qui est dans le projet de loi. Je vous le résume si...

M. Lanoie (Paul) : ...

Mme Montpetit : Vous étiez là? Parfait. Donc, le fait de ramener le rôle de TEQ au sein du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles, alors que c'est un ministère qui a la mission aussi d'octroyer des licences d'exploitation et d'exploration, il y voyait, bien, avec raison, un conflit potentiel au niveau de deux missions qui ne sont absolument pas concordantes, là, et donc des enjeux que ça pourrait amener assez rapidement, là.

M. Lanoie (Paul) : Alors, comme vous le dites, donc, vous me prenez un peu à froid là-dessus. Donc, je n'ai pas d'opinion, donc, tranchée sur ce sujet-là. Alors, concernant TEQ, donc, pour l'instant, moi, comme Commissaire au développement durable, donc, je n'ai pas fait d'audit à TEQ. C'était quelque chose qui était en réflexion chez nous. C'était probablement un sujet sur lequel on se serait penchés éventuellement, n'eut été, là, de la disparition de TEQ. Nous, présentement, au Vérificateur général, donc, les seuls travaux qu'on a réalisés à TEQ, ce sont des travaux d'audits d'états financiers. Alors donc, si vous voulez qu'on en dise plus là-dessus, je pourrai compléter, mais, pour l'instant, c'est les seuls travaux qui ont été réalisés à Transition énergétique Québec.

Mme Montpetit : Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Polo) : Oui, allez-y, M. le député de...

M. Kelley : Juste rapidement. Dans les mémoires ici, vous avez mentionné, concernant la délégation à une personne morale, à une municipalité, vous avez suggéré de déposer peut-être un amendement à ça, alors est-ce que vous avez un petit peu plus de détails là-dessus? Et, c'est sûr, oui, on veut avoir cet amendement, si possible, et vos suggestions.

M. Lanoie (Paul) : Oui, bien, écoutez, je ne vais pas nécessairement vous le lire à ce moment-ci, mais je pourrai le laisser à la secrétaire de la commission.

M. Kelley : ...laisser... nous... et déposer ça? Parfait.

M. Lanoie (Paul) : C'est tout simplement un amendement qui, par prudence, spécifie le rôle du Vérificateur général...

M. Kelley : Parfait.

M. Lanoie (Paul) : ...à l'égard des délégataires, là, dont on parle.

M. Kelley : Oui, si vous pouvez juste déposer ça à la commission, ça va être parfait.

M. Lanoie (Paul) : Oui, avec plaisir.

M. Kelley : Merci beaucoup.

Le Président (M. Polo) : Merci. Avant de poursuivre avec la députée de Mercier, je pense que le ministre a un dépôt de documents. O.K. Bon, bien, on va poursuivre avec la députée de Mercier.

• (11 h 40) •

Mme Ghazal : Merci. Merci beaucoup pour votre présentation. Vous savez, j'avais très, très hâte d'entendre votre témoignage, surtout après celui de Mme Chagnon, hier, où c'était vraiment alarmant. Tout le monde, ici, on était alarmés par ce qu'elle nous disait, parce que ce n'était rien que moins que de l'obstruction à son travail, elle avait les mains liées, même, je dirais, du sabotage pour qu'elle puisse faire bien son travail. D'ailleurs, une des choses qu'elle nous avait dites hier, c'est qu'il y a certains ministères qui avaient des mesures dans le PACC qui disaient : Bien, écoutez, on n'arrivera pas à atteindre les cibles, donc on va changer les objectifs. C'est ce qu'elle, elle a entendu, c'est ce que les gens lui disaient. Est-ce que vous avez été témoins de ça?

M. Lanoie (Paul) : Non, nous, on n'a pas été témoins de ça. Dans le fond, la seule fois où on s'est penchés sur le PACC, c'était le PACC 2006‑2012. Donc, on a livré un rapport en 2012, si je ne me trompe pas, donc, à ce sujet-là, et, ensuite de ça, notre audit principal concernait la gestion du Fonds vert, donc, un audit qui a été livré en 2014, avec un suivi, à la demande de la Commission de l'administration publique, en 2016. Donc, nous, c'est là où on en est. Et je n'étais pas là lors de ces audits-là, mais je ne sais pas si mes collègues peuvent compléter. Je n'ai pas l'impression qu'on a entendu ce genre de choses.

Mme Ghazal : O.K. Est-ce que vous voulez compléter?

Mme Rivard (Caroline) : Bien, dans le fond, effectivement, le premier...

Mme Ghazal : Il n'y en a pas?

Mme Rivard (Caroline) : On avait audité le plan d'action précédent. On avait fait des remarques, là, à l'égard du réaménagement et de la réallocation, de la façon dont c'était déterminé, à savoir est-ce que les décisions se prenaient sur la base de données fiables, et est-ce que, dans le fond, toutes les possibilités étaient mises sur la table et les meilleures possibilités étaient choisies. À ce moment-là, on en était arrivés à la conclusion que ce n'était pas le cas. Mais c'est ça, dans le fond, on n'a pas refait le nouveau plan d'action sur les changements climatiques, cette dernière, là...

Mme Ghazal : Parfait, merci. Puis, vous savez, le comité de gestion du Fonds vert a déposé un plan stratégique au début de l'année 2019, cafouillage après cafouillage dans ce dossier-là. Nous, on n'y a eu accès que... Le ministre ne l'a déposé qu'avant les fêtes. Est-ce que vous sentez, dans les orientations qui sont écrites dans ce plan stratégique du conseil de gestion... Est-ce que le p.l. n° 44 répond à ce qui est demandé, que ce soit de la transparence... Il y avait plein d'autres recommandations. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Lanoie (Paul) : Bien, écoutez, j'ai consulté le plan stratégique, là, il y a quelques semaines, donc, et ce que j'ai constaté, c'était un plan stratégique, donc, dans le fond, qui remplissait les rubriques standards, là, auxquelles on s'attend. Pour ce qui est du projet de loi n° 44, dans le fond, mon allocution fait valoir les inquiétudes qu'on peut avoir à son sujet, donc quatre grandes inquiétudes, à savoir les rôles et responsabilités, l'audit des états financiers, la reconnaissance de notre pouvoir auprès des délégataires puis le rôle des deux comités. Donc, ce sont les inquiétudes que l'on a, et on verra, avec l'expérience, donc, si ces inquiétudes sont fondées ou non.

Mme Ghazal : Merci. Dernière question. Vous dites que vos travaux qui ont été complétés, là, pour l'exercice financier du 31 décembre démontrent des problématiques. Est-ce que vous pouvez nous en nommer?

M. Lanoie (Paul) : On parle, donc, de l'exercice financier, donc, du 31 mars 2018, donc de TEQ.

Mme Ghazal : Pour TEQ. Exactement, c'est ça.

M. Lanoie (Paul) : C'est là le sujet de votre question?

Mme Ghazal : Tout à fait, oui.

M. Lanoie (Paul) : Alors, à cet égard-là, donc, dans le fond, j'aurais une permission spéciale à demander à votre président, ici, donc, de cette commission. Alors, il faut savoir, donc, que l'entité n'a pas complété son processus de reddition de comptes pour rendre publics ses états financiers et notre rapport de l'auditeur. Donc, est-ce que vous me donnez la permission d'en dire plus? Parce que c'est un rapport, dans le fond, qu'on va adresser à l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Polo) : Il manque de temps.

M. Lanoie (Paul) : Il manque de temps.

Le Président (M. Polo) : Mais avec le consentement de tous, on pourra...

Mme Ghazal : ...moi, je ne parlerai pas, là...

Le Président (M. Polo) : On pourra poursuivre, là, on ne coupera pas dans votre temps, M. le député de Jonquière, mais s'il y a consentement de...

M. Gaudreault : Oui, oui, oui. Bien, j'espère qu'on ne coupera pas dans mon temps.

Le Président (M. Polo) : Parfait. Bien, regardez, ce qu'on va faire, on va... Puisque le temps alloué pour la députée de Mercier est terminé, on va poursuivre avec le député de Jonquière. On reviendra. De toute façon, il y a un dépôt de document, puis, comme ça, bien, on essaiera de faire les choses dans l'ordre. Merci.

M. Gaudreault : O.K. Alors, merci beaucoup d'être là. D'abord, un premier mot sur votre dernière question, à la fin de votre mémoire, là, sur votre rôle en vertu du projet de loi n° 44. Moi, je pense, comme le ministre, que vos deux rôles sont importants. Mais là où je me distingue du ministre, c'est que la loi actuelle habilitante de votre mandat, à l'article 43.1 de la Loi sur le vérificateur général, ne vous donne pas le mandat pour faire ce que vous nous dites, là, un niveau plus global, la lutte à l'adaptation aux changements climatiques. Alors, ça, pour moi, ça m'apparaît très clair, parce que vous avez un mandat très concentré sur la Loi sur le développement durable. Alors, ça, c'est le premier élément.

Maintenant, sur l'enjeu avec le Conseil de gestion du Fonds vert, avec TEQ également, avec vos mandats d'audit, moi, je veux savoir, là, parce que, là, vos travaux sont comme suspendus, vous attendez des informations, etc., quand est-ce que vous allez être en mesure de nous déposer ça. Parce que vous savez que c'est un ordre de l'Assemblée nationale, puis ce n'est pas un reproche que je vous fais, là, mais c'est quand même une volonté de l'Assemblée nationale, plus les mandats confiés par la Commission de l'administration publique. Parce que, pour moi, il est hors de question qu'on entame l'étude détaillée du projet de loi n° 44 tant qu'on n'a pas l'audit.

M. Lanoie (Paul) : O.K. Alors donc, permettez-moi de faire quelques précisions, M. le Président. Donc, d'une part, le Vérificateur général et le Commissaire au développement durable, donc, peuvent aller auditer là où ils le veulent, au moment où ils le jugent opportun. Donc, si je veux aller auditer sur la question des changements climatiques de façon générale, j'ai toujours l'opportunité de le faire. Je comprends, de la volonté gouvernementale... c'est qu'à chaque année il y ait un rapport d'audit qui touche les activités financées par le fonds, le nouveau fonds qui va être créé. Et ma question était à l'effet : Est-ce que c'est vraiment ça, l'intention du gouvernement, ou c'est une intention plus large? Donc, c'était le sujet, donc, de ma question. Et la réponse du ministre, c'était de dire : Bien, si vous voulez aller plus large, votre loi vous le permet, et ce avec quoi je suis d'accord.

Donc, pour ce qui est de l'audit et de la motion de l'Assemblée nationale, donc, il faut faire attention, il y a l'audit financier et l'audit de performance. Donc, l'audit financier, on en a parlé, nos travaux vont reprendre en temps opportun, lorsqu'on sera en mesure, vraiment, de les réaliser dans un délai raisonnable, qu'on ne va pas perdre trop de temps, donc, là-dessus.

Pour ce qui est de la motion que j'ai évoquée tantôt, donc la motion où... Ce que la CAP nous a demandé de faire, c'est de faire une évaluation complète de la réforme du Fonds vert, de la réforme de la gestion du Fonds vert. Alors, nous, on l'a interprété... parce que ça a été une motion qui est venue au même moment que la création du conseil de gestion, donc, nous, on l'a interprété comme étant, bien, quand le conseil de gestion sera pleinement actif, vous irez voir s'il fonctionne bien. Alors, nous, donc — je vais terminer en deux phrases — on prévoyait y aller lorsque le conseil de gestion serait pleinement actif, donc on prévoyait commencer nos travaux à l'été 2019, mais, comme le conseil de gestion avait des difficultés avec le ministère, on a décidé de reporter. Et là le conseil de gestion a été aboli pour être remplacé par une autre structure de gouvernance, donc c'est difficile pour nous de répondre à cette demande d'une évaluation complète de la gestion du Fonds vert. On fait quand même des travaux sur la qualité de l'attribution des aides financières, on vous en rendra compte au moment où on le juge opportun. On est là-dessus présentement.

Le Président (M. Polo) : Parfait. Donc, avec le consentement de tous, vous vouliez peut-être répondre à la question de la députée de Mercier, c'est bien ça?

M. Lanoie (Paul) : Oui. Alors donc, je comprends qu'on a le consentement...

Le Président (M. Polo) : Oui, oui, on a le consentement.

M. Lanoie (Paul) : ...donc, d'aller de l'avant, même si l'organisme n'a pas présenté ses états financiers, et notre rapport...

Le Président (M. Polo) : Poursuivez, s'il vous plaît.

M. Lanoie (Paul) : Parfait. Alors donc, dans le fond, le rapport, là, qu'on a produit récemment, donc le rapport de l'auditeur, faisait état de notre impossibilité d'émettre une opinion sur la qualité des états financiers de TEQ. Donc, c'est un jugement, donc, assez sévère, c'est le jugement le plus sévère qu'un auditeur peut rendre dans pareille situation.

Documents déposés

Le Président (M. Polo) : Merci. Je comprends, avant de terminer, que M. le ministre a un dépôt de documents à faire, de deux documents, je pense.

M. Charette : En fait, on est rendus à trois documents, M. le Président.

Le Président (M. Polo) : À trois documents?

M. Charette : C'est pour faire suite à notre échange d'hier. On se souvient, avec le conseil de gestion, j'évoquais des avis juridiques, et ça reflète parfaitement l'échange qu'on vient de faire, c'est-à-dire un conflit de compétences, compte tenu d'une loi mal ficelée dès 2017. Je les mets en contexte. Dès novembre 2017, une première opinion juridique, que je dépose, parce que ce conflit de juridiction entre le conseil de gestion et le ministère était engendré par la loi adoptée par l'administration précédente. Ensuite, un avis juridique qui a été transmis au gouvernement précédent, donc, le 6 février 2018, que je qualifierais d'avis de complaisance, déposé par le conseil de gestion. Et, enfin, une autre opinion, cette fois-ci, du ministère. Donc, les trois documents sont déposés. Mais ça démontre que, dès l'adoption, en 2017, de ces nouvelles modalités, le gouvernement précédent ne s'était pas donné...

• (11 h 50) •

M. Gaudreault : Appel au règlement, M. le Président. C'est parce que moi, je suis très, très, très jaloux de notre temps de parole, O.K.? Là, moi, je suis bien d'accord pour avoir prolongé le temps accordé à M. Lanoie, c'est parfait. Je suis bien d'accord aussi, par consentement, pour que le ministre dépose les documents, mais, si on en profite pour faire une plaidoirie avec le dépôt du document, là, moi, je vais demander du temps. Parce que, moi aussi, j'aurais quelque chose à dire, là, de plus, après l'audition du Conseil de gestion du Fonds vert, hier, après l'audition du Commissaire au développement durable, le fait qu'il nous manque des documents. Moi, j'aimerais qu'on ait la garantie qu'on ne fera pas l'étude détaillée tant qu'on n'aura pas l'audit du Commissaire au développement durable. Alors, si on est, là, dans les plaidoiries, c'est ce que je vais faire.

M. Charette : Non, M. le Président, là, on... Moi, c'est un dépôt de...

Le Président (M. Polo) : Regardez, je comprends, ceci dit, je comprends. Terminez le dépôt de documents. Je prends note de vos commentaires, on va les transmettre correctement. S'il vous plaît, procédez, puis, par la suite, on va juste inviter les prochains...

M. Charette : Et, en guise de rappel à l'ordre, je n'ai que mis en contexte les trois documents qui sont...

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup, M. le ministre. Merci. Ça va être déposé au secrétariat, et ça va être transmis à toutes les parties prenantes.

Merci beaucoup. Merci aux représentants du Commissaire au développement durable.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux représentants de la ville de Montréal de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 51)

(Reprise à 12 h 01)

Le Président (M. Polo) : Bonjour. À l'ordre!

Auditions (suite)

Je souhaite la bienvenue aux représentants de la ville de Montréal, tout d'abord, Mme la mairesse, Valérie Plante, accompagnée de Sidney Ribaux, directeur du Bureau de...

Des voix : ...

Le Président (M. Polo) : À l'ordre! Mme la mairesse, Valérie Plante, accompagnée de M. Sidney Ribaux, directeur du Bureau de la transition écologique et de la résilience. Je vous rappelle que vous disposez d'un temps de parole de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à une période d'échanges avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à procéder à votre exposé. La parole est à vous.

Ville de Montréal

Mme Plante (Valérie) : Parfait. Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre, très heureuse d'être parmi vous, ainsi que Mmes et MM. les députés.

Alors, résolument engagée sur cette voie, la ville de Montréal se démarque par la proactivité de ses actions en matière de lutte aux changements climatiques. Dès 2005, en marge de la COP11, la ville s'était fixé un premier objectif de réduction et s'était dotée d'outils de planification climatique qui ont contribué à l'atteinte. Nous en sommes très fiers. La ville de Montréal, et je dirais les Montréalaises et les Montréalais eux-mêmes sont des champions du climat au Québec. Ils nous demandent quotidiennement d'accroître nos actions en ce sens.

D'ailleurs, lors mon passage au Sommet sur le climat du Secrétaire général des Nations unies, au mois de septembre dernier, j'ai pris l'engagement de réduire de 55 % les émissions de GES de la collectivité montréalaise d'ici 2030. Montréal se joint ainsi à Londres, Rome, Oslo, New York, Los Angeles, et des douzaines de grandes villes sur les cinq continents qui agissent pour atteindre les objectifs que nous dictent la science et l'Accord de Paris. C'est pourquoi je suis accompagnée de M. Sidney Ribaux, directeur du Bureau de la transition écologique et de la résilience. M. Ribaux et son équipe finalisent actuellement le Plan climat de la ville de Montréal, qui nous permettra d'atteindre notre cible ambitieuse, je le rappelle, une diminution de 55 % des GES d'ici 2030.

Le message que nous portons, c'est que l'atteinte de la cible québécoise de réduction de GES passe nécessairement par l'atteinte de la cible montréalaise. Ainsi, la ville de Montréal accueille positivement le dépôt du projet de loi n° 44. En créant le FECC, le nouveau projet de loi simplifie l'approche gouvernementale en matière de lutte contre les changements climatiques et axe sur l'atteinte de résultats concrets. Il vous confie, M. le ministre, le rôle très important de gardien des résultats. Toutefois, si une plus grande imputabilité du ministre quant aux résultats obtenus par les initiatives financées par le FECC constitue une avancée, il demeure que le nouveau modèle soulève quelques incertitudes. D'importants efforts devront être déployés afin de garantir l'objectivité et l'impartialité du processus de sélection des projets financés par le FECC. Le comité consultatif qui vous accompagnera à cet égard devra faire preuve d'une rigueur à toute épreuve. Considérant l'immense expertise municipale en matière de climat, que ce soit au plan de la résilience des infrastructures ou de la réponse d'urgence en cas d'épisode climatique extrême, nous considérons la présence d'un représentant du milieu municipal au sein de ce comité autant incontournable que nécessaire.

Maintenant, les impacts de la réforme proposée sur les municipalités sont multiples. La ville de Montréal s'interroge sur la portée de ces changements sur ses opérations courantes et futures. Nous sommes, par exemple, grandement interpelés par l'abolition de la contrainte légale de dédier les deux tiers des revenus issus de la bourse du carbone aux mesures applicables au transport. Les données démontrent que la meilleure façon de diminuer les gaz à effet de serre passe par le domaine du transport, qui représente à lui seul 43 % des émissions québécoises totales.

Par exemple, à l'échelle métropolitaine, les transports collectifs permettent d'éviter l'émission de 3,9 millions de tonnes annuellement. Les déplacements effectués par les usagers de la Société de transport de Montréal permettent, quant à eux, d'éviter annuellement la présence de 475 000 voitures sur le réseau routier. Pour le dire plus simplement, chaque tonne de GES émise par la STM permet d'en éviter 20. J'ajoute que la réduction de la congestion routière attribuable aux transports collectifs métropolitains permet, quant à elle, d'éviter des coûts de 1,85 milliard annuellement. Vous le voyez, ces investissements en transport collectif sont donc doublement rentables pour le gouvernement. D'ailleurs, le Programme d'aide au développement du transport collectif, qui est financé actuellement par le Fonds vert, par l'actuel Fonds vert, a, depuis 2006, permis à la STM d'augmenter son offre de service globale de 36 %. On voit donc que cet argent bien investi porte fruit. C'est pourquoi la ville demande que la disposition actuelle prévoyant que les deux tiers des revenus dédiés au financement de projets de transport soit reconduite.

Laissez-moi maintenant aborder la question de l'électrification des transports, puisque, comme vous tous et toutes, je crois que nous détenons collectivement au Québec une solution évidente pour réduire notre dépendance aux énergies fossiles. Si la ville appuie avec vigueur les efforts gouvernementaux en faveur de celle-ci, elle souhaite néanmoins insister sur l'importance d'investir en priorité dans les infrastructures collectives plutôt que dans les moyens individuels. Les investissements publics dans les infrastructures électriques collectives telles que le métro, le tramway ou encore l'autobus constituent des solutions qui sont pérennes, structurantes et surtout durables dans le temps. C'est, d'ailleurs, la voie qu'a choisie Montréal pour ses modes lourds, mais également pour sa flotte d'autobus. À partir de 2025, nous achèterons uniquement des autobus 100 % électriques. Je vous rappelle également que la transition vers l'électrification des transports n'est pas qu'une question de véhicules, mais elle doit également permettre la recharge efficace et performante. Enfin, la ville de Montréal accueille très favorablement les projets d'électrification du transport des marchandises, ça va de soi.

Évidemment, les changements climatiques ne se limitent pas au transport, et c'est pourquoi il sera également nécessaire d'agir sur l'empreinte carbone des bâtiments, qui compte pour plus de 27 % des émissions de GES de la collectivité montréalaise. Ces émissions sont principalement liées aux équipements de chauffage qui fonctionnent aux énergies fossiles : le mazout, le gaz naturel et le propane. La ville de Montréal souhaite l'implantation de mesures robustes et de soutien à l'efficacité énergétique des bâtiments, incluant les bâtiments municipaux.

En matière d'adaptation maintenant, le FECC doit prévoir des sommes significatives pour les projets municipaux d'adaptation de même que permettre le financement de mesures de verdissement telles que l'acquisition de terrains et la mise en valeur des infrastructures naturelles.

Permettez-moi maintenant de conclure sur une proposition à entreprendre ensemble, un virage encore plus affirmé en faveur d'une réelle transition vers une économie verte et une société carboneutre. Je l'ai dit, le projet de loi n° 44 jette les bases d'un renouveau qui est très intéressant, et force est toutefois d'admettre qu'il ne pourra à lui seul répondre à l'ampleur des réalités nouvelles opérées par les changements climatiques. Afin d'introduire des actions réellement transformatrices, le gouvernement du Québec devra s'appuyer sur des alliés solides et, au premier chef, sur la métropole. Je le rappelle, l'atteinte de la cible québécoise de réduction des GES passe inévitablement par une réduction de 55 % des émissions de GES émises dans l'île de Montréal, et la ville de Montréal entend mettre les bouchées doubles, au cours de la prochaine décennie, en mettant en oeuvre un ambitieux et courageux plan climat.

Devant l'ampleur de la crise climatique, le partenariat entre le gouvernement et la métropole constitue la clé de notre succès collectif, et je vous offre ainsi ma plus entière collaboration afin de convenir ensemble des modalités que pourrait prendre un tel partenariat pour le succès de la métropole, bien sûr, mais pour l'ensemble de la province du Québec.

Je vous remercie pour votre attention et je pense que vous m'aviez demandé de me présenter au début, ce que je n'ai pas fait, désolée : Valérie Plante, mairesse de Montréal.

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup, Mme la mairesse. Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

• (12 h 10) •

M. Charette : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Polo) : Je demanderai juste un consentement de la part de tous les collègues autour de la table, compte tenu que nous avons débuté autour de 12 h 2, là, de dépasser l'heure prévue de 12 h 30 afin de pouvoir respecter le temps de parole de tous les collègues autour.

M. Charette : Sans problème.

Le Président (M. Polo) : Merci.

M. Charette : Merci, M. le Président. Mme la mairesse, un plaisir de vous recevoir à l'Assemblée nationale ce matin. M. Ribaux, un plaisir de vous retrouver aussi. On le sent, à travers ce que la ville de Montréal souhaite mettre en place, à travers ce qu'elle a mis en place, un leadership qu'elle souhaite démontrer et transposer en actions concrètes, et le projet de loi vise à donner cette latitude-là et cette reconnaissance pour arriver à nos objectifs.

D'entrée de jeu, je veux faire référence à la préoccupation que vous avez soulevée au niveau des transports. Je l'ai fait un petit peu plus tôt ce matin, mais je pense que c'est important de le faire de nouveau. D'abord, une question. Vous, l'argent au niveau du transport collectif, sa provenance n'importe peu. Que l'argent vienne du Fonds d'électrification et des changements climatiques ou du budget global du gouvernement du Québec, ça importe peu, en autant que l'argent soit au rendez-vous pour réaliser ces projets-là. Est-ce que c'est ce que je décode de vos propos?

Mme Plante (Valérie) : Bien, écoutez, les projets de transport collectif à Montréal, bien, dans la région métropolitaine, donc je vais mettre mon chapeau de présidente de la CMM, les projets sont nombreux, et je pense que, pour arriver à financer à la hauteur de nos ambitions, et bientôt on va avoir les chiffres, mais on parle, dans la région métropolitaine, d'investissements d'à peu près 35 milliards de dollars sur plusieurs années, donc, nécessairement, les sources de financement doivent être nombreuses. Dans ce cas-ci, on parle du fonds qui était dédié à deux tiers pour le transport en général. On veut quand même garder cette enveloppe-là, qui est pertinente, mais je ne vous cacherai pas que la révision de la politique du financement du transport collectif et du transport tout court, mais qui implique, bien sûr, le transport collectif, est majeure et doit être complémentaire.

Donc, quand vous me posez la question : Est-ce que telle source ou telle source, ça n'a pas trop d'importance? Je vous dirais, dans l'absolu, vous avez raison, mais, dans ce fonds, il n'en demeure pas moins que ça a permis de mettre parfois certains programmes ou certains choix de financer, par exemple, le développement du transport collectif, alors qu'ici, ce que l'on souhaite aussi, c'est que ça puisse aider dans les opérations. Alors, dans l'absolu, oui, l'important et le nerf de la guerre, c'est l'argent, mais je ne voudrais pas non plus dire qu'on serait prêts à ce que, comment dire, bien, le fonds qui aura une nouvelle appellation, on abandonne notre transport collectif. Je pense que c'est important d'avoir des sources variées pour le transport collectif, l'électrification.

M. Charette : Et on se rejoint parfaitement, et vous avez répondu à la question que je me posais. Les sommes qui sont en jeu pour les projets en développement à venir sont colossales, donc le fait que lui-même ne suffira pas, même s'il devait dédier 100 % de son enveloppe aux transports collectifs, ce serait nettement insuffisant, et c'est la raison pour laquelle on a introduit cet article-là dans le projet de loi. On dit : On peut revoir la règle du deux tiers, mais ce n'est pas une obligation. Mais ce qu'on a convenu, par contre, et ce qu'on admet d'emblée, c'est que le fait qu'à lui seul il est nettement insuffisant pour répondre à la demande, donc il faut voir la multitude d'options, notamment le dépôt d'un budget, notamment le PQI. Donc, dans les prochaines semaines, sans doute qu'il y aura des réponses à ce niveau-là, mais c'est la raison pour laquelle, le deux tiers, on ne veut pas en faire un carcan, et, au contraire, l'application stricte actuelle, elle génère, par moments, des distorsions, c'est-à-dire, c'est un transfert automatique qui se fait sans qu'il n'y ait pour autant de mesures pour engendrer les décaissements requis. Et, dans certains cas, on se prive d'un potentiel monétaire pour mettre en place des nouvelles mesures.

Donc, je vous rassure d'emblée, le transport collectif, à travers le projet de loi qui est à l'étude actuellement, n'est nullement déconsidéré. Au contraire, vous l'avez dit à juste titre, notre gros, gros défi, au niveau de nos émissions, ça demeure le transport avec 43 % essentiellement de nos émissions, donc c'est énorme. Donc, soyez rassurés, on veut être le plus agile possible et le plus efficace possible pour faire en sorte que le transport collectif soit au rendez-vous. Et, vous le savez mieux que quiconque, le transport collectif devient attrayant, devient une option à l'égard de l'automobile lorsqu'il est efficace, et, pour ça, ça nécessite effectivement des sommes colossales.

Ceci dit, je serais curieux de vous entendre sur un autre élément du projet de loi. On confère et on permet, à travers le projet de loi qui est à l'étude, une certaine délégation de pouvoirs. Le milieu municipal sera, pour nous, un partenaire incontournable, compte tenu des services à sa disposition, compte tenu de ses obligations aussi, tout comme la société civile le sera. Ce n'est pas le gouvernement du Québec qui, à lui seul, permettra l'atteinte de ces objectifs-là, c'est une mobilisation de la société. Donc, par rapport à cette possibilité de délégation de pouvoirs, quelles sont vos attentes? Quels seraient vos souhaits? Quelle est la marge de manoeuvre que vous aimeriez obtenir du gouvernement du Québec que vous ne semblez pas avoir actuellement ou que vous ne semblez pas détenir pour le moment, à tout le moins?

M. Ribaux (Sidney) : Je peux peut-être répondre en partie. Je pense que l'esprit de cette recommandation-là va tout à fait dans l'esprit de la recommandation de créer un partenariat avec le gouvernement du Québec sur les plans climat respectifs de la ville et du gouvernement, donc, en fait, il y a plusieurs domaines. Évidemment, il y a différents éléments à Montréal qui font en sorte que la réalité des gestes à poser peut être différente que dans d'autres régions. Je donne un exemple concret, là. Le cadre bâti est très différent. Donc, il y a déjà une réglementation au niveau de la construction, par exemple, qui est différente à Montréal pour certains types de constructions et qui pourrait être bonifiée. Donc, c'est un exemple où la municipalité a déjà un pouvoir d'aller un petit peu plus loin que ce que prévoit la législation provinciale. Mais, lorsqu'on s'attaque à la question des changements climatiques, bien, cette législation-là ne concerne pas, par exemple, les émissions de gaz à effet de serre directement. Alors, il y a sans doute d'autres moyens d'y arriver, mais ce n'est pas simple. Alors donc, il y a définitivement une conversation à avoir entre les municipalités en général et vous sur quels types de pouvoirs pourraient être délégués pour s'assurer que, lorsque c'est possible, puis qu'une municipalité peut aller plus loin, comme elle le fait dans d'autres domaines, qu'elle puisse le faire. Et c'est la conversation qu'on veut avoir avec vous là-dessus, là.

M. Charette : Donc, très, très intéressé à l'entretenir, cette conversation-là. J'ai un exemple en tête. Il y a quelques années, il y a un pouvoir qui a été reconnu à la ville de Montréal au niveau de la qualité de l'air notamment, donc la ville est maintenant responsable de ce dossier-là en grande partie, avec l'appui, naturellement, du gouvernement du Québec, du ministère de l'Environnement, mais c'est une compétence qui est reconnue à la ville de Montréal.

Là, on parle des bâtiments, j'en conviens. Il y a un beau défi à ce niveau-là. Mais, de façon générale, c'est quoi? Ce sont des enveloppes dédiées, c'est le développement de programmes conjointement, ce sont des pouvoirs? Même si la conversation sera alimentée davantage au cours des prochaines semaines, des prochains mois, je serais déjà curieux de voir un petit peu quelles sont vos attentes. Nous, on veut, comme gouvernement, appuyer les villes à faire, justement, leur effort, mais la métropole, avec le leadership qu'elle assume déjà, si on peut l'accompagner encore davantage, on en serait plus que ravis.

M. Ribaux (Sidney) : En fait, c'est tous les éléments que vous mentionnez. Donc, dans certains cas, il y a des pouvoirs additionnels qui vont être nécessaires, ou la clarification de certains pouvoirs, dans d'autres cas. Il y a évidemment de la collaboration sur des programmes. On pense, par exemple... je reviens au cadre bâti, simplement parce que c'est un énorme défi dans la réduction des gaz à effet de serre, là, des bâtiments qui utilisent actuellement une énergie fossile pour chauffer l'air ou l'eau. D'en arriver à diminuer cette consommation-là ou la retirer du bâtiment, c'est tout un défi, là, parce que c'est existant, ça nécessite des interventions importantes. Et, dans certains cas, prenons l'exemple des bâtiments de la ville qui a des centaines de bâtiments qui vont nécessiter des interventions, ce n'est pas viable pour nous de faire des demandes pour chaque bâtiment, ce qui est la façon que les programmes sont faits présentement.

Donc, une collaboration là-dessus pour dire : On peut-u avoir une discussion sur quels types d'investissements seraient nécessaires pour revoir, rénover l'ensemble des bâtiments de la ville de Montréal ou même de l'agglomération?, bien, c'est ce genre de choses là, je pense, qui pourrait faire partie d'une entente pour faire en sorte qu'on aille plus vite, parce que, dans le fond, plus ça va être simple, plus on va être en mesure d'amener des réductions rapides qui vont contribuer à l'atteinte de la cible du Québec.

M. Charette : Dans la perspective de mieux se comprendre et mieux s'accompagner, ce qui a été mis en place à travers le dernier budget, par exemple, au niveau de la décontamination des sols, ce sont des avenues qui sont bien reçues au niveau de la ville également?

• (12 h 20) •

Mme Plante (Valérie) : Oui, absolument, on en profite. On est sur le point de pouvoir mettre... En fait, le programme est effectif en tant que tel, mais effectivement c'est ce genre d'outils... ou du moins de flexibilité qui est très, très aidante, d'avoir à même... d'avoir la somme d'argent. Bien sûr, il y a une collaboration, on établit des critères ensemble. À partir de ce moment-ci, la somme, par exemple, de 100 millions, c'est la ville de Montréal qui la gère, qui rend des comptes évidemment, mais on a besoin de cette flexibilité-là, justement, parce que le territoire, avec toute sa complexité... Et puis je pense qu'on est les mieux placés pour pouvoir souvent agir directement et le plus efficacement possible. Donc, c'est un bon exemple.

M. Charette : Parfait. Donc, peut-être réitérer... je sais que j'ai des collègues qui veulent prendre la parole... mais, lorsqu'on parle de délégation, on reconnaît, naturellement, le leadership, on l'encourage, mais on veut l'accompagner davantage, donc c'est l'esprit du projet de loi que l'on étudie actuellement. Et là je sais que j'ai des collègues qui veulent prendre la parole également.

Le Président (M. Polo) : Mme la députée d'Argenteuil.

Mme Grondin : Merci, M. le Président. Il me reste combien de temps?

Le Président (M. Polo) : Ah! 5 min 30 s.

Mme Grondin : Parfait. Merci. Bonjour, Mme la mairesse, M. Ribaux. Merci pour votre leadership. Ma question s'adresse peut-être plus à M. Ribaux. M. Ribaux, ça fait plus de 20 ans qu'on se connaît, hein? Nous avons travaillé en environnement, vous, au niveau urbain, moi, plus en milieu rural, des enjeux qui sont notamment différents, surtout si on prend l'exemple, par exemple, la recommandation 11, où vous souhaitez le financement de projets municipaux d'adaptation, et vous parlez beaucoup de verdissement, création, mise en valeur de milieux naturels, création d'ouvrages naturalisés de rétention. Je comprends les enjeux, ça, c'est vraiment urbain. Quand on parle de milieux plus ruraux, au lieu de parler de verdissement, nous, on souhaite protéger des forêts d'intérieur. Au lieu de parler d'ouvrages naturalisés, on souhaite protéger des tourbières. Donc, on comprend qu'on a les mêmes objectifs, mais probablement pas les mêmes termes qui sont ici.

Votre recommandation 1 et 12, où on touche, justement, l'importance, au niveau des municipalités, de devenir un acteur fondamental, il y a certains acteurs qui ont passé hier et qui nous ont parlé, notamment la FQM, de l'importance d'avoir des plans régionaux, de déléguer l'exercice de plans régionaux, de changements climatiques, d'adaptation aux changements sociaux, écologiques, climatiques. Donc, comment vous voyez ça, le fait que, par exemple, il y aurait des plans régionaux qui seraient conçus au niveau... par des MRC ou ailleurs au Québec? Vous avez une réflexion au niveau de la ville, je comprends que 55 % des efforts... ce que la mairesse nous dit, donc, un impact majeur dans cette lutte-là, mais comment vous voyez la contribution des régions?

Mme Plante (Valérie) : Je vais me permettre une première réponse, plus un chapeau peut-être plus, comment dire, plus global. Bien, écoutez, je pense que les régions ont un rôle fondamental à jouer quand il est question de lutte aux changements climatiques, et, entre autres, par le territoire. Vous parliez de tourbières, on peut parler de milieux humides. On le sait, ce sont nos éponges. Que ce soit à Montréal, dans la grande région métropolitaine ou ailleurs, partout à travers le Québec, ce sont des zones que l'on souhaite préserver et qu'on souhaite protéger. On parle d'espaces verts, mais on pourrait parler aussi de terres agricoles, tous ces éléments qui, pour moi, vont dans une réflexion globale du rôle à jouer des municipalités, des MRC, dans nos efforts collectifs de réduction de gaz à effet de serre. Réduction de gaz à effet de serre, mais j'ai envie de vous amener aussi sur résilience du territoire, parce qu'on le voit on a de plus en plus d'épisodes, que ce soient des inondations ou on espère qu'on n'aura pas d'incendie, mais on a eu des fortes chaleurs. Donc, tout le monde a un rôle à jouer, et moi, je pense que les régions et la métropole, la région métropolitaine, sont très, très complémentaires.

On comprend très bien que, pour la région métropolitaine, la question de diminuer la voiture solo est majeure, parce que la densité est là, le réseau autoroutier est très présent, et on a une capacité, une opportunité de vraiment développer un système de transport collectif à grande échelle et structurant. Mais, après ça, quand on arrive dans de plus petites municipalités, diminuer nos gaz à effet de serre, ça se joue de d'autres manières également, si ce n'est pas nécessairement tout de suite par du transport collectif, bien que, je pense qu'il y a bien des municipalités qui aimeraient ça aussi en avoir, eux aussi, et à leur part du gâteau, et avec raison, puis on va les appuyer, mais la protection du territoire en tant que telle, pour moi, est fondamentale.

Le Président (M. Polo) : Mme la mairesse, compte tenu qu'il reste juste 80 secondes, je vais... La députée aurait une autre question pour vous.

Mme Grondin : De ce que je comprends, Mme la mairesse, c'est que, dans le fond, si les MRC ont des plans de lutte aux changements climatiques et d'adaptation aux changements environnementaux, sociaux et climatiques, vous appuieriez ça. Si c'est autre chose que du transport, ça peut être de la foresterie, ça peut être la conservation de milieux naturels, ça peut être, en fait, tout ce qui est important, de contribuer...

Mme Plante (Valérie) : Oui, absolument, mais le diable est dans les détails et dans la façon dont on perçoit la lutte aux changements climatiques, et je ne vous cacherai pas que, présentement — je mets encore mon chapeau de présidente de la CMM — dans toute la question de l'étalement urbain, ça aussi, ça doit être considéré dans la réflexion. Et l'étalement urbain ne se limite pas à la ville de Montréal, c'est également dans la région de l'Outaouais, c'est ici, à Québec, c'est ailleurs, alors il faut réfléchir, et ça touche directement à la protection du territoire et ainsi que les plus... forêts, milieux humides, tourbières, qui contribuent à faire... à protéger le territoire.

Mme Grondin : Merci.

Le Président (M. Polo) : Merci. C'est tout le temps. Donc, Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Mme Plante, M. Ribaux, vraiment ravie de vous avoir avec nous aujourd'hui. Je ferais juste un petit aparté, avant d'échanger avec vous, pour m'adresser au président sur le dernier intervenant qu'on a eu, le Vérificateur général, Commissaire au développement durable, simplement mentionner que je partage pleinement les commentaires qui ont été faits, à savoir qu'avant de débuter nos travaux, de toute évidence, il nous manque des informations, il nous manque des données, les états financiers, notamment du Conseil de gestion du Fonds vert, l'audit effectué auprès de TEQ par le Vérificateur général, et je souligne que nous devrions avoir ça en main, avant de commencer l'étude détaillée, pour avoir toutes les informations en main pour pouvoir s'orienter par la suite et s'assurer que le projet de loi déposé par le ministre ira dans la bonne direction.

Le Président (M. Polo) : Je comprends et je pense que vous faites suite aux propos du député de Jonquière à ce niveau-là. Donc, je pense qu'il y a... si c'est des discussions qui doivent se poursuivre entre les bureaux des leaders, notamment.

Mme Montpetit : Exactement. Merci. Ce sera fait au niveau du bureau des leaders, je veux juste vous en informer pour que vous soyez... que je fais miens les propos du député de Jonquière également.

Ceci dit, Mme Plante, M. Ribaux, je voudrais revenir sur un élément. On en a parlé avec quelques intervenants, mais je suis contente de vous avoir ici. D'abord, vous féliciter, avant toute chose, avant que je l'oublie, vous féliciter pour les choses qui ont été faites au niveau environnemental, au niveau de la lutte aux changements climatiques, ce qui a été annoncé, entre autres, gaspillage alimentaire, plastique, mais la liste est très, très longue, vous féliciter, ça prend beaucoup d'audace, et ce n'est pas... c'est toujours... c'est dans l'air du temps, mais ça vient bousculer aussi beaucoup de pratiques, d'habitudes de vie. Donc, non seulement comme parlementaire, mais comme élue de Montréal et comme citoyenne de Montréal, je vous dis vraiment bravo, je vous lève mon chapeau, je vous encourage à continuer dans cette direction. C'est certainement un legs important puis une impulsion, je l'espère, pour la suite également.

Donc, on en a parlé, c'est ça, avec différents intervenants, et vous l'avez mentionné, la question du transport... l'abolition, dans le fond, de la contrainte légale qui fait partie, présentement, là... donc de s'assurer qu'il y ait deux tiers des revenus du Fonds vert qui soient dédiés principalement au transport... C'est certainement, pour vous, une grande préoccupation. Je sais à quel point c'est un défi pour la ville de Montréal, justement, de venir répondre à cette réalité-là de l'utilisation de la voiture. Si vous pouviez peut-être nous mentionner... Je sais que c'est une partie importante, notamment, l'utilisation de la voiture, qui contribue, dans le cas de la ville de Montréal, aux gaz à effet de serre, et donc c'est une proportion importante pour le Québec. Donc, j'imagine, c'est un déterminant. Je sais, de toute façon, que vous en avez fait votre cheval de bataille, la question du transport collectif, la ligne rose, et je ne peux que vous donner mon appui encore à ce niveau-là. Mais je partage, moi, cette idée-là qu'il faut absolument préserver légalement, qu'il y ait une contrainte légale, et c'est le défi qu'on aura collectivement et c'est celui qui est... Je veux dire, on le sait, là, c'est 43 % des gaz à effet de serre qui viennent du transport. On ne réglera pas tout par la voiture électrique. Je pense que c'est une belle impulsion qui a été donnée au cours des dernières années, mais on demeure dans des mesures qui ne sont pas des mesures collectives mais des mesures individuelles. Et donc je pense qu'il faut revoir aussi... continuer, continuer de revoir, dans le fond, le paradigme complet, là, au niveau des transports. Donc, j'aurais aimé ça vous entendre spécifiquement sur cet élément-là.

• (12 h 30) •

Mme Plante (Valérie) : Je vais faire un premier élément de réponse. Je vais laisser mon collègue terminer. C'est sûr que, pour nous, l'électrification en tant que telle, là, on est pour, là. Ça, c'est sûr, mais on tenait quand même à faire... mentionner que l'électrification du transport collectif pour nous est même prioritaire ou, du moins, il faut le voir, là, comme étant un élément fondamental pour réussir à diminuer nos gaz à effet de serre. Mais parlons aussi de la congestion, congestion qui amène aussi... qui est liée à l'étalement urbain dont je parlais tout à l'heure.

Pour donner un ordre de grandeur, la congestion automobile dans la région métropolitaine, donc à même la CMM, la Communauté métropolitaine de Montréal, c'est à peu près 4 milliards de dollars en pertes annuelles. C'est énorme. Et donc, pour nous, l'électrification, on y croit, on pense que ça fait partie du plan, c'est un élément très, très important, mais, si on y allait rapidement puis on se disait : Toutes ces voitures deviennent d'un coup des voitures électriques, on ne règle pas le problème de la congestion, on ne le règle pas. Alors, il faut absolument... surtout que la population augmente et la population tend, si on regarde les chiffres au niveau mondial, à aller vers les grands centres.

Alors, nous, c'est un peu les deux éléments qu'on doit considérer. L'électrification, oui, mais pour le transport collectif d'abord et avant tout en ayant une stratégie forte pour encourager les ménages à utiliser... parce qu'il y aura, somme toute, probablement toujours des voitures, en tout cas, pour un très long moment. L'idée n'est pas de l'abolir mais de diminuer son impact sur le système autoroutier.

Et j'aimerais... Dernier élément pour l'électrification qu'on voulait quand même vous sensibiliser, mine de rien, l'électrification, ça vient avec... il faut recharger sa voiture. Mais, en parlant de cadre bâti, vous imaginez bien qu'à Montréal ce serait tout un défi, un défi pour les ménages. Où est-ce qu'on se branche? Et, même pour le mobilier urbain, imaginez un peu à quoi ressembleraient les villes, les rues si on devait mettre des bornes partout. Qui les financerait? Mais, même au niveau visuel quand on pense aux bancs, aux panneaux de stationnement, aux bornes-fontaines, enfin, alors c'est... Quand je parle de l'aspect Montréal, et ce n'est pas pour dire qu'on ne veut pas l'électrification des voitures solos, absolument pas, mais, à Montréal, on a des défis techniques et, je vous dirais, de cohésion urbaine dans la trame urbaine, qui sont importants. M. Ribaux.

M. Ribaux (Sidney) : Bien, peut-être juste ajouter sur la question du transport collectif en général. Puis on l'a bien expliqué dans un mémoire qu'on a déposé récemment, il y a un défi de repenser complètement le financement du transport en commun. Donc, c'est certain que la recommandation qu'on fait de ne pas abolir l'enjeu du deux tiers ici, c'est qu'on est encore sur des morceaux de financement qui viennent de plein d'endroits puis, pour l'instant, on ne veut pas laisser tomber, la ville de Montréal ne veut pas laisser tomber une source de financement qui est importante puis qui a fait ses preuves.

Donc, on a eu des gains importants d'amélioration du service puis d'achalandage grâce à ces investissements-là depuis 2006, alors on ne veut pas reculer sur cet élément-là jusqu'à tant qu'il y ait une nouvelle entente. Mais comme la mairesse le disait, il y a des besoins d'investissement de milliards de dollars, et ça, ça vient avec des besoins de financement des opérations. Évidemment, c'est une chose d'acheter des autobus, encore faut-il avoir des chauffeurs pour être là pour les conduire. Alors donc, il y a vraiment des grands enjeux. Et, si on veut répondre à l'ambition à la fois de la cible du Québec et celle dont Montréal s'est dotée qui, soit dit en passant, est la cible qu'on doit atteindre pour permettre à Québec d'atteindre sa cible, là, alors donc on est prêts à contribuer, mais ça va prendre un nouveau pacte au niveau du financement du transport collectif.

Mme Montpetit : Parfait. Le temps file à vive allure, mon collègue de Jacques-Cartier a une question à vous poser, mais je veux juste vous en... petite préoccupation par rapport à un élément que vous avez souligné. Vous soulignez que vous souhaitez être consultés de façon substantielle et significative en amont de la préparation du fameux plan et de la politique qui devraient être déposés, ce que je comprends, dans les quelques semaines. J'ai entendu le ministre à plusieurs reprises hier dire que les municipalités sont importantes. Vous êtes la métropole, vous n'avez pas été, à ce stade-ci encore, été consultés sur ce futur plan. Est-ce que c'est ce que je comprends?

M. Ribaux (Sidney) : C'est-à-dire que, oui, la ville a été consultée, mais ce qu'on souhaiterait... Ça revient un peu à la recommandation qu'on faisait sur le partenariat à la fin de l'allocution de la mairesse. Évidemment, pour qu'on conclue un partenariat, il va falloir avoir plus d'informations sur ce qui est dans ce cadre ou ce plan climatique du gouvernement, de la même façon que le gouvernement devra avoir plus de détails sur ce qui s'en vient au niveau de la ville de Montréal. Ça fait que c'est vraiment dans ce sens-là qu'on dit : On veut avoir une conversation plus dans les détails avec le gouvernement pour être en mesure d'élaborer ce partenariat.

Le Président (M. Polo) : M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley : Oui. Alors, ce n'est pas toujours que nous avons l'opportunité de parler avec la mairesse de Montréal. Alors, première chose, merci, merci pour l'annonce. Le Grand parc de l'Ouest, vous avez annoncé ça, là, quand vous avez mentionné la résilience du territoire. Ça, c'est un exemple que votre administration a fait. C'est important, pas juste pour les West Islanders, mais, avec le REM, le parc va être disponible pour toutes les personnes de Montréal. Alors, c'était une excellente annonce.

Mais, juste rapidement, je reviens sur la question, le deux tiers pour le transport. Moi, je pense que c'est très important qu'il y ait une cible qui est dans le projet de loi, parce que, oui, le PQI, c'est bien beau d'avoir des bonnes nouvelles dedans, mais un gouvernement peut toujours changer un PQI, toujours, alors, d'avoir une base d'argent qui est réservé juste pour le transport. Alors, question très simple : Si ce n'est pas deux tiers, le gouvernement veut utiliser une part de ces sommes-là pour des autres investissements, est-ce qu'il y a un minimal que vous recommandez présentement au gouvernement?

Mme Plante (Valérie) : Bien, écoutez, pour le moment, nous, on s'en tient aux deux tiers parce que le deux tiers a fait ses preuves. Le deux tiers a montré, dans la région montréalaise, à quel point il était efficace. Alors, je sais, encore une fois, on souhaite qu'il y ait des sources de financement et on s'attend à ce qu'il y ait du financement majeur en lien avec le transport collectif dans la région métropolitaine, mais il n'en demeure pas moins qu'aujourd'hui ce fonds-là a fait ses preuves, a donné des résultats très probants. Alors, pour moi, le minimum serait le deux tiers, idéalement.

Le Président (M. Polo) : Merci. Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation. Moi aussi, je voudrais prendre du peu de temps que j'ai, quelques secondes, pour dire à quel point c'est extrêmement important pour que les parlementaires aient accès à tous les documents, notamment le rapport de la Vérificatrice générale, du vérificateur... du Commissaire au développement durable sur le Conseil de gestion du Fonds vert. Vous savez, il a fallu qu'on bataille très fort pour avoir le plan stratégique neuf mois après que le Conseil de gestion du Fonds vert l'ait transmis au ministre. Là, ici, j'espère qu'on n'aura pas à batailler autant. C'est important, par respect pour notre travail, qu'on ait accès à tout ça avant de débuter l'étude détaillée.

Donc, bien, merci pour votre présentation. Juste un petit mot pour vous dire à quel point on appuie, à Québec solidaire, votre stratégie, là, pour les changements climatiques et aussi toute la question du transport en commun. Il y a aussi ce qui est important, qu'on nomme peu souvent, l'accessibilité, donc la tarification sociale, qui est extrêmement importante.

Vous n'avez pas abordé la question, le coeur, si on veut, du projet de loi n° 44, sur la structure et la gouvernance. J'aimerais vous entendre là-dessus, les changements qui sont faits, par exemple, par rapport à TEQ, le Fonds vert, etc.

Mme Plante (Valérie) : Bien, en fait, juste pour le TEQ, ce que je souhaite dire, c'est que nous, on travaille très, très bien avec Transition énergétique Québec. C'est un modèle qui donne l'agilité nécessaire, selon nous, pour être en mode action-réaction, parce que, quand il est question de transition écologique et de lutte aux changements climatiques, bien, ça le dit, là, on s'adapte, puis souvent il y a des choses qui arrivent et qu'on doit pouvoir, comment dire, donc, proposer et penser à l'extérieur de la boîte. Donc, pour nous, jusqu'à date, ça a été un très, très... comment dire, très efficace, et on pense que ça a... ça a bien... Ça vient démontrer la pertinence du TEQ en tant que tel aussi, pour répondre à votre question spécifiquement là-dessus.

Mme Ghazal : Parce que, dans le projet de loi, ce qu'on dit, c'est que TEQ va aller sous le ministère des Ressources naturelles, il n'existera plus. Est-ce que vous appuyez, dans le fond, ce que les gens qui sont venus en commission nous dire, il faudrait que ça soit un TEQ, un super TEQ, un TEQ 2.0, même une société d'État qui gère la transition pour enlever les mains du politique?

Mme Plante (Valérie) : Bien, pour nous, c'est sûr que, pour revenir sur le principe de l'agilité, on considère que ce serait dommage que ça devienne un, comment dire, département, là, en tant que tel, là. Cette indépendance-là non seulement permet de sortir de la partisanerie, d'une part, s'il y en a. Bien là, on est sûr qu'il n'y en a pas. Et aussi, et je le répète, là, le concept d'agilité, qui est pour moi absolument fondamental dans comment on avance dans ce dossier-là de la transition écologique... M. Ribaux.

M. Ribaux (Sidney) : Bien, peut-être un élément de complémentarité. Dans l'élaboration du plan climat qu'on fait, on a consulté les parties prenantes. Je reviens encore aux bâtiments, parce qu'on parle beaucoup de transport et, les bâtiments, c'est compliqué. On a parlé aux promoteurs, on a parlé aux promoteurs, on a parlé aux entrepreneurs, on a parlé aux architectes, aux ingénieurs, sur comment on fait ça, réduire les gaz à effets de serre dans les bâtiments existants, et ce n'est pas simple. On a besoin d'innovations, on a besoin d'agilité, donc d'où l'intérêt de maintenir une structure indépendante.

Mme Ghazal : Donc, vous appuyez. Très bien.

Le Président (M. Polo) : M. le député de Jonquière.

• (12 h 40) •

M. Gaudreault : Oui. Alors, merci, M. le Président. Je constate que les partis de l'opposition sont unis pour demander de ne pas entreprendre l'étude détaillée du projet de loi tant qu'on n'a pas les documents du VG. Parfait, on va continuer d'en reparler, sûrement.

Maintenant, merci d'être là, Mme la mairesse, M. Ribaux et l'équipe qui vous entoure. Moi, je suis entièrement d'accord avec un partenariat pour le climat avec le gouvernement du Québec et la ville de Montréal, c'est excellent, mais un partenariat implique une contrepartie des deux partenaires. Alors là, la question qui tue — et il manque juste les lumières, là : On fait quoi d'Ottawa? On fait quoi d'Ottawa? Qui est le partenaire privilégié de la ville de Montréal pour le climat? Parce que le lendemain — puis c'est correct, là, comme mairesse — le lendemain de l'élection fédérale, vous avez eu des rencontres avec Justin Trudeau, avec les ministres fédéraux pour parler de transport, de transport en commun, même d'habitation, et, de l'autre côté, on a l'autre partenaire que vous souhaitez avoir, qui est le gouvernement du Québec, qui réclame, même devant les tribunaux, que l'environnement soit de compétence exclusive du Québec. On l'a vu dans le dossier Trans Mountain, on le voit sur la question de la taxe carbone. Alors, qu'est-ce qu'on fait d'Ottawa dans un partenariat avec la ville de Montréal sur le climat?

Mme Plante (Valérie) : Peut-être juste pour rectifier. Donc, le gouvernement du Québec est le partenaire de Montréal. Donc, c'est important, c'est notre partenaire, on travaille avec le gouvernement en place, et ça, je tiens à le mentionner.

Vous savez, pour une ville, c'est toujours... Je peux difficilement vous répondre, parce que, moi, j'aurais envie... Si je vous parle comme mairesse de la métropole, je vous dirais qu'il y a bien des endroits, bien des domaines où, je vous dirais, je devrais avoir plus de pouvoirs parce qu'entre autres, quand il est question des lutte aux changements climatiques puis réduction des gaz à effet de serre, c'est dans les villes que ça se passe, et donc nécessairement, et le gouvernement du Québec, mais le gouvernement du Canada a besoin de travailler avec les villes, parce que c'est sur les territoires que ça se passe. Et je pense que, si vous parlez à plein de maires et mairesses, c'est ce qu'ils vont vous dire, oui, et de préfets et préfètes.

Donc, au final, pour moi, ce que je souhaite surtout, en respectant la compétence de Québec... Donc, la plupart des sommes descendent, on le sait, que ce soit en habitation, que ce soit en transport collectif, l'environnement également, vont descendre via Québec, et moi, je respecte cette façon de faire, mais, en même temps, s'il y a des sommes qui nous sont proposées par le fédéral, je pense, entre autres, au Grand parc de l'Ouest, on a réussi à avoir un partenariat rapide et efficace avec le gouvernement du Canada, qui nous a dit : Bravo! Ce parc de l'Ouest là est nécessaire, entre autres, pour protéger les milieux humides — nous sommes une île — alors, on a décidé d'aller de l'avant avec ce partenariat-là.

Donc, moi, je ne suis pas dans une posture pour dire oui à un et non à l'autre. Bien honnêtement, moi, j'ai une job à faire puis j'ai une cible à atteindre, c'est 55 % d'ici 2030, là, c'est énorme. Et il y a une chose que je veux répéter ici, c'est que, si on veut que ça marche, si on veut que Québec réussisse ses cibles, vous avez besoin de nous, mais comme nous on a besoin de vous, mais ça doit vraiment être entendu, puis qu'on veut travailler main dans la main. Mais je ne vais jamais rechigner sur des sommes d'argent qui viennent d'ailleurs, parce qu'on n'a pas le luxe d'attendre que ça se règle. Tu sais, il faut que je trouve des solutions maintenant.

M. Gaudreault : Mais n'y a-t-il pas...

Le Président (M. Polo) : M. le député de Jonquière. Mme la mairesse...

Mme Plante (Valérie) : Merci.

Le Président (M. Polo) : ...merci de nous avoir accompagnés.

Je suspends les travaux. Elle est suspendue, la commission est suspendue jusqu'à 14 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 44)

(Reprise à 14 h 02)

La Présidente (Mme Grondin) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des transports et de l'environnement reprend ses travaux. Je vous demande de bien vouloir éteindre la sonnerie de vos appareils électroniques.

Nous poursuivons les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 44, Loi visant principalement la gouvernance efficace de la lutte contre les changements climatiques et à favoriser l'électrification.

Cet après-midi, nous allons entendre Le Pacte, E-Taxi, le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec, l'Association du transport urbain du Québec et l'Association des transports collectifs ruraux du Québec.

Je souhaite donc la bienvenue à M. Champagne. M. Champagne, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter. La parole est à vous. Bienvenue à l'Assemblée nationale.

Le Pacte pour la transition

M. Champagne (Dominic) : Merci, merci, messieurs dames. J'ai tellement de choses à dire, 10 minutes, ce n'est pas beaucoup pour une grande gueule comme la mienne. Alors, après un bref préambule, je vais quand même commencer par vous livrer mes conclusions. Je veux d'abord dire, d'entrée de jeu, que je parle au nom des 285 000 signataires du Pacte pour la transition, et je tiens à souligner, c'est important, que je n'ai pas d'autre agenda, depuis un an, que celui de relayer le message de la science, les scientifiques du GIEC, qui ont sorti un rapport le 8 octobre 2018, une semaine après l'élection du présent gouvernement.

Un mois plus tard, après avoir lancé Le Pacte, deux jours après, je me suis présenté au bureau du premier ministre pour présenter à mon premier ministre, à notre premier ministre, une synthèse du rapport du GIEC, qui faisait état de la gravité de la situation et de l'importance de la mobilisation en cours au Québec pour répondre à cette crise-là. Les scientifiques du GIEC nous disent, au coeur du rapport, qu'il faut procéder à un changement radical et rapide de nos façons de faire. On pourrait interpréter de toutes sortes de manières... et j'ai été très heureux d'entendre le premier ministre déclarer, dans son premier discours à l'Assemblée nationale, et je le cite : «La survie de notre planète est en jeu, et je ne peux ignorer ce défi de l'urgence climatique et continuer de regarder mes deux fils dans les yeux.» Pour l'aider à regarder ses deux fils dans les yeux, un mois plus tard, je venais porter, au bureau du premier ministre, un projet de loi sur le climat, qui m'a été remis par des légistes, qui a été vérifié par des juristes et des scientifiques chevronnés, projet de loi qui avait pour but d'engager le gouvernement au respect de ses obligations climatiques, projet de loi que j'ai remis, trois semaines plus tard, au nouveau ministre responsable de la Lutte contre les changements climatiques puis à l'ensemble des députés du Parlement. Je suis venu à la rencontre des partis d'opposition dans l'espoir de susciter une véritable coalition pour l'avenir du Québec en réponse à l'urgence climatique.

Il y a plus de 20 juridictions à travers le monde qui ont adopté une loi climat contraignante pareille. Récemment, en décembre dernier, je pense que c'est important de le souligner, le Danemark a adopté une loi contraignante à l'atteinte des cibles de réduction de 70 % d'ici à 2030, une loi contraignante visant à la réduction de 70 % des émissions.

Ai-je besoin de rappeler toute l'importance que j'accorde aujourd'hui à ce premier projet de loi climat de notre gouvernement? En résumé, là, puis je vais y aller tout de suite aux conclusions, et je le dis avec toute ma bonne volonté, on se parle, dans le privé comme dans le public, on sait à quel point l'environnement est l'angle mort de la CAQ, du dire même de l'ex-ministre de l'Environnement, on s'en rappellera. Je pense vraiment que ce projet de loi là est l'occasion pour le gouvernement de rétablir la confiance dont on a besoin collectivement pour répondre à la crise climatique.

Il y a un ras-le-bol de plus en plus généralisé dans la population, et croissant, j'en sais quelque chose. Et il y a un déficit de crédibilité, il faut l'admettre. Il y a un train qui est en marche aussi, il y a des citoyens, par milliers, qui veulent que quelque chose se passe, et il ne faut pas que le gouvernement rate ce train-là. J'en appelle à ce que le gouvernement soit... assume le leadership dont le Québec a besoin. Et le grand problème qu'on doit régler, qui est celui qui a commencé le jour où la science a alerté le politique, quand on a identifié la crise climatique il y a une trentaine d'années : on n'arrive pas à ce que la science soit au coeur des décisions politiques, pour que, concrètement, on puisse atteindre les cibles nommées par la science. Alors, si le gouvernement est sérieux dans sa démarche, si le gouvernement veut être crédible, alors, d'entrée de jeu, dans la loi, il doit reconnaître l'urgence climatique, au début de la loi.

L'urgence de quoi? Une fois qu'on a dit ça, parce que ça fait quelques fois... Dans son premier discours, le premier ministre le reconnaît. On a adopté, à l'Assemblée nationale, une motion officielle reconnaissant l'urgence climatique. Quelle est cette urgence? L'urgence, ce n'est pas une opinion politique, là. L'urgence que la science nous invoque de poser comme geste, c'est de réduire de moitié nos émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030, et d'atteindre à la carboneutralité en 2050. Alors, le projet de loi doit formellement nommer, enchâsser, dans le texte, noir sur blanc, les vraies cibles nommées par la science. C'est la crédibilité du gouvernement qui est en jeu. C'est le seul moyen d'envoyer un signal clair à la population, au Conseil des ministres, à la jeunesse du Québec comme à l'ensemble des citoyens, qu'on reconnaît la gravité de la crise, et qu'on va prendre le taureau par les cornes. Le gouvernement doit avoir le courage de s'engager clairement.

Et on va nous dire — j'ai lu le journal comme vous ce matin — que les cibles et la loi, c'est une chose, mais que les vraies affaires vont se passer dans le plan qui s'en vient. Des plans, on en a eu au Québec, et aucun de ces plans n'a atteint ses cibles, depuis le temps qu'on se donne des plans. Et je ne dis pas qu'on n'a pas fait d'efforts. On a fait des efforts. Pourquoi? Parce que les plans n'ont pas force de loi. Alors, à l'instar de ce que les Danois ont fait, si on est sérieux, on va dire : Très bien, on reconnaît ce que la science nous dit, on reconnaît ce que la nature nous dit, on reconnaît l'inquiétude et l'appel de la jeunesse, et on va inscrire noir sur blanc qu'au Québec on est capable de faire aussi bien que les Danois, puis on va les atteindre, les cibles.

Pour atteindre les cibles, c'est sûr que le coeur de la réponse, c'est la transition énergétique. Je pense que ça, c'est reconnu par tout le monde. Mais cette transition énergétique là, si efficace soit-elle, ne suffira pas. Il faut engager l'ensemble de l'appareil d'État, l'ensemble des ministres, l'ensemble des institutions, la Caisse de dépôt, Hydro-Québec, Investissement Québec, et mobiliser l'ensemble de la société québécoise sur deux chantiers : la transition énergétique, bien sûr, mais aussi une transition écologique, juste et globale de notre économie. On a donc besoin d'une vraie loi, avec les vraies cibles, qui s'attaque aux premiers responsables de la crise, et ça, il faut les nommer. Tu sais, on ne veut pas jouer sur les mots et finasser. Les combustibles fossiles sont au coeur de la crise, et les premiers responsables, dans notre réalité — on peut mettre le charbon un peu de côté, là — c'est le pétrole et le gaz. Le pétrole et le gaz.

Donc, ce qu'il faut faire, si on veut qu'il y ait une crédibilité, là, c'est mettre la science au coeur des décisions, engager, reconnaître, dans la loi, l'importance d'un budget carbone, c'est-à-dire qu'il y a une quantité limite de carbone qu'on peut se permettre d'émettre dans l'atmosphère, et on va engager tout le monde, au gouvernement puis dans la société, de respecter ce budget-là, une loi qui va nommer un responsable à la lutte au réchauffement climatique, qui va nommer le ministre, et pas les deux, pas les trois, quelqu'un qui va assumer devant l'Assemblée nationale, devant le peuple, l'importance de la crise, l'urgence d'agir.

• (14 h 10) •

Stephen Jarislowsky, un milliardaire important qu'on ne peut pas traiter de militant de gauche, il y a deux semaines, sortait un article important, où il disait : «Je riais du réchauffement climatique il y a encore un an. Je suis un Juif né à Berlin qui a été chassé par le fascisme hitlérien à l'âge de 15 ans. Je suis venu au Canada, je me suis enrôlé dans l'armée canadienne, à l'âge de 18 ans, pour combattre le fascisme. Et aujourd'hui je reconnais que la crise climatique est aussi importante que la menace fasciste du temps où j'étais jeune.»

Qui était ministre de la Défense sous Churchill? Churchill. Ça prend un patron qui prend la situation au sérieux et qui a le pouvoir non pas de conseiller ses pairs, non pas de coordonner les activités, de décider, de prendre les bonnes décisions, sous l'impulsion de l'information de la science et de l'humanité, une consultation importante, mais ça prend une personne qui décide, qui dirige, pas qui conseille, qui dirige. On a besoin d'un leadership. Il y a une volonté populaire qui, je pense, qui s'exprime très clairement depuis un certain temps au Québec. Là, il est temps que la volonté politique prenne le relais.

Je pense que le ministre seul n'y arrivera pas. Il doit engager l'ensemble de l'appareil de l'État. Je l'ai déjà dit, le ministre, ça lui prend un orchestre, ça lui prend un orchestre. On a déjà Transition énergétique Québec, que le projet de loi, là, propose d'abolir, mais on conserve le plan directeur. Je pense que TEQ a fait ses preuves. TEQ n'est pas parfait, TEQ mérite d'être plus ambitieux, d'avoir des moyens plus importants pour embrasser les vraies cibles, pour atteindre les vraies cibles, avec des vraies cibles beaucoup plus ambitieuses que celles qui sont là présentement pour le pétrole et le gaz. Mais je pense qu'on doit reconnaître l'efficacité... On se pose en pragmatiques. Bien, TEQ, je pense qu'il est assez pragmatique, depuis le temps que son plan directeur est à l'oeuvre. Alors, on se doit de donner un outil. Je prône la création... Puis on appellera ça autrement, un TEQ plus... Je pense que ce qu'il faut qu'on se donne comme outil, c'est une société d'État, un Hydro-Québec de la lutte contre les réchauffements climatiques, dont le ministre responsable de la Lutte au réchauffement climatique sera responsable, imputable devant la population, devant l'Assemblée nationale. Mais qu'on ait un outil. Puis on l'a déjà, là. Ça fait que, s'il y a une urgence, agissons. On n'a plus le temps de se demander, si la maison brûle, quelle sorte d'extincteur on va utiliser. On y va.

Et on a besoin de lois. Tantôt, je parlais à des journalistes. On est d'accord : au Québec, c'est dans la conduite automobile que ça prend des stops au coin de la rue, ça prend des feux de circulation, ça prend des limites de vitesse, ça prend des ceintures dans nos chars. Pourquoi? Pour éviter qu'il y ait des accidents. Je pense que, oui, il y a eu des résistances à toutes ces lois-là, mais, à un moment donné, on va accepter, si on se fait dire la vérité, que c'est les meilleures mesures possibles, et je pense que la crédibilité du gouvernement, avec un bon outil de travail, on va y arriver.

Par ailleurs, et je vais terminer là-dessus, la transition énergétique ne suffira pas. Ça prend une transition globale. Il y a une fenêtre d'opportunité maintenant. On est plus sensibles que jamais, au Québec, à la nécessité de la lutte au réchauffement climatique, alors il faut mobiliser, il faut informer, parce qu'il y a une partie de la solution qui ne viendra pas de la transition strictement énergétique, mais qui doit venir d'une transition globale et juste de notre économie au Québec.

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup, M. Champagne, je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échange avec le ministre. La parole est à vous.

M. Charette : Merci, M. le Président. M. Champagne, un plaisir de vous retrouver cet après-midi. Merci pour votre présence. Merci pour le rôle de mobilisation que vous contribuez à jouer au Québec. C'est vrai que la donne a passablement changé au cours de la dernière année, sinon des deux dernières années. Vous avez dit, à juste titre, qu'on a eu plusieurs plans au cours des dernières années. On est malheureusement passés à côté de ces opportunités-là. Il faut comprendre le défi dans lequel on est, et l'urgence climatique, on y souscrit et on l'a réitéré à l'Assemblée nationale. Mais, au moment où on se parle, on est en 2020, on devrait être à moins 20 % par rapport à l'année de référence de 1990. Malheureusement, par manque d'ambition politique, par manque de moyens, les gouvernements précédents ont fait en sorte qu'aujourd'hui on est uniquement à moins 9 %, donc à 11 % du pourcentage convenu.

Tout à l'heure, vous faisiez la différence entre un projet de loi et un plan d'action. Je vous rappellerai que les cibles de 2020 ont été adoptées à l'Assemblée nationale. Donc, même si on adopte, dans une loi, une cible, s'il n'y a pas la volonté politique, par la suite, on n'ira pas plus loin. Et là je voudrais juste comprendre, pour 2030, est-ce que votre souhait serait qu'on soit à moins 50 % par rapport à 1990 ou on maintient la cible de 37,5 %, qui a fait l'objet, là, de discussions à l'Assemblée nationale?

M. Champagne (Dominic) : Vous savez déjà comme moi que la cible de 37,5 % qui a été convenue, là, suite à l'Accord de Paris, c'est une cible qui est périmée. Le premier ministre s'en va en Écosse en novembre prochain, il s'est commis à y aller. Moi, j'aimerais ça que notre premier ministre se présente en disant : Au Québec, on a entendu le message de la science, qui nous dit qu'il faut réduire les cibles à telle hauteur. Alors, ce que je revendique, puis je ne veux pas me lancer dans une guerre de chiffres aujourd'hui, c'est qu'on mette la science au coeur du projet collectif, et qu'on l'inscrive dans la loi. Alors, la cible du GIEC est entre 45 % et 55 % de réduction d'ici à 2030, et on vise la carboneutralité d'ici 2050.

J'aimerais ça que notre premier ministre, en Écosse, en novembre, dise : On a entendu le message de la science, le message de la nature, le message de la jeunesse. On s'est parlé au Québec, on s'est donné les outils, et là on débarque avec un plan qui dit : On va y arriver. Dans le concert des nations, là, les Danois disent qu'ils vont y arriver, les Costaricains disent qu'on va y arriver. Bien, nous, au Québec, on va y arriver, et c'est inscrit dans la loi, c'est un signal clair. Moi, je pense que c'est la première chose qu'on devrait dire pour qu'on puisse se rassembler fièrement derrière notre premier ministre, en disant : Le Québec est derrière vous, et on offre une coalition véritable, tous unis pour le climat, pour qu'on puisse y arriver.

Le Président (M. Polo) : M. Champagne, juste pour votre information, je n'ai pas l'habitude d'intervenir, je laisse les échanges, mais, normalement, on respecte à peu près le temps de parole qui est utilisé pour la question pour le temps de parole qui est utilisé pour la réponse. Donc, le ministre va poursuivre. Allez-y.

M. Champagne (Dominic) : Je fais de mon mieux. C'est vraiment... Je suis bavard de nature, vous allez m'excuser.

Le Président (M. Polo) : Je comprends.

M. Charette : Je suis d'accord pour les signaux clairs. C'est ce que l'on veut envoyer à la population avec le projet de loi n° 44. Mais le gros, gros défi, c'est le retard qui est déjà accumulé. De 1990 à 2020, on réussit, en 30 ans, essentiellement, à diminuer de moins 9 % et, d'ici 2030, donc en moins de 10 ans, on devrait parvenir à moins 50 %. Ce n'est pas que je manque d'ambition, c'est que je suis réaliste. Pour nous, la cible de 37,5 %, elle est déjà excessivement ambitieuse, ce sera déjà colossal que d'y parvenir. Et je comprends les exemples du Costa Rica, je comprends les exemples des autres États, mais on ne part pas tous du même endroit. Le Québec part d'une situation bien particulière, grâce à une décision très sage, qui a été prise dans les années 50, 60, c'est-à-dire de miser sur l'hydroélectricité. Notre principale source d'énergie, elle est déjà, pour ainsi dire, carboneutre.

Donc, pour nous, diminuer significativement au-delà de 37,5 %, je ne dis pas que c'est impensable, mais ça mettrait à mal l'environnement dans lequel le Québec évolue au niveau de sa démographie, au niveau de sa population, au niveau de sa santé économique, pour pouvoir offrir d'autres services, notamment au niveau de la santé. Donc, moi, je veux convenir de cibles ambitieuses, mais déjà, 37,5 %, ça me semble excessivement ambitieux. Si on considère qu'en 30 ans on a fait moins neuf, faire l'équivalent de 27 % en 10 ans, c'est colossal. Donc, il faudra des moyens financiers importants, ce qu'on veut déployer. Il faudra une gouvernance claire, ce qu'on veut confirmer à travers le projet de loi que l'on étudie présentement. Mais, aussi, il faut réaliser d'où on part, en quelque sorte.

Mais je prends bonne note de plusieurs des idées que vous nous avez communiquées, et, pour certaines, je me reconnais volontiers. Mais je vous invite à faire la nuance entre un simple vote... Même à travers une loi à l'Assemblée nationale, si la volonté politique n'y est pas, ça ne donne rien. On a eu l'illustration, au cours des 15 dernières années, que ce soit l'alternance libérale-péquiste, on avait tous voté ces cibles-là à l'époque, mais on n'est pas plus loin, malheureusement, aujourd'hui.

Mais c'est la première fois qu'on a un gouvernement, notamment à travers une mise à jour économique qu'on a faite en novembre dernier, qui précise, noir sur blanc : les surplus budgétaires, dorénavant, iront à la lutte contre les changements climatiques. C'est déjà un signal politique excessivement fort. C'est du jamais-vu. On est en mesure de répéter, sur différentes tribunes : les revenus du Fonds vert ne seront pas suffisants pour mettre en oeuvre la politique-cadre que l'on va présenter dans les prochaines semaines. Donc, on parle d'efforts colossaux, avec des milliards en cause, mais il faut juste admettre d'où on part.

Et c'est sans doute le message de mon propos cet après-midi...

M. Champagne (Dominic) : Si vous permettez, au début des années 60, John F. Kennedy dit : Dans 10 ans, on va se rendre sur la lune. Pas parce que c'est facile d'y aller, parce que c'est un grand défi, et qu'on est appelés à donner le meilleur de nous-mêmes. Et les Américains ont envoyé quelqu'un sur la lune. Quand on prend un voyage sur la lune, on n'arrête pas à moitié, on donne les moyens que ça prend, malgré tout le passé qu'on traîne, pour y arriver. Si on a été capable d'aller sur la lune, on devrait être capables, moralement, de revenir sur terre, par les temps qui courent, de regarder la réalité telle qu'elle est, de mettre la science au milieu de la réflexion politique et des décisions, et d'y aller. Convainquez-nous que vous allez avoir l'ambition, le courage d'être conséquents avec ce que la science nous exhorte de faire. Ce n'est pas ce qui est dans le projet de loi présentement.

• (14 h 20) •

M. Charette : Bien, en fait, la science, elle est à la base du projet de loi. Deux belles innovations pour éviter le piège des dernières années, c'est-à-dire mettre de l'avant des cibles sans se donner les moyens de les atteindre : un comité scientifique qui va évaluer l'action gouvernementale, dont les rapports seront systématiquement rendus publics — anciennement, il pouvait y avoir des rapports, mais le ministre décidait, selon sa bonne humeur du moment, s'il les rendait publics ou non; nous, ce sera systématiquement public, donc vous comprendrez qu'on n'a aucun intérêt à aller contre ces avis scientifiques là — avec un rôle, confirmé encore ce matin, au Commissaire du développement durable.

Ce matin, le Commissaire au développement durable me posait, à juste titre, la question : Qu'est-ce que vous attendez véritablement de nous, uniquement évaluer annuellement la performance du nouveau fonds qu'on met en place ou évaluer l'action gouvernementale en matière de changements climatiques en général? J'ai dit : Les deux. J'ai dit : Évaluer la performance générale du gouvernement, c'est déjà votre mandat, donc vous avez déjà la possibilité de le faire. Cependant, j'ai besoin de votre bulletin annuel aussi pour ajouter à cette obligation de résultat.

J'étais à Madrid il y a quelques semaines, d'ailleurs, avec mes collègues. On a entendu cette jeunesse-là, qui nous dit essentiellement la même chose au Québec : On est tannés de se faire donner ou entendre des objectifs qui, systématiquement, sont bafoués par la suite. Avec ces deux mesures-là, la science, en premier lieu, et une personnalité, à travers l'institution de la Vérificatrice générale, tout à fait indépendante, qui va accentuer... Moi, personnellement, j'appelle ça une pression tout à fait constructive. Il faut éviter les discours. C'est le danger à l'époque où on est. C'est-à-dire, je pourrais bien m'engager, 2030... pas 50 %, la carboneutralité. Je pourrais prendre cet engagement-là, mais il faut se donner les moyens d'y parvenir.

Peut-être un autre élément où je serais tenté de... ou intéressé de vous entendre...

Le Président (M. Polo) : M. le ministre, c'est aussi important de laisser intervenir M. Champagne.

M. Charette : Tout à fait, mais, en commission parlementaire, c'est la prérogative de la personne qui parle d'y aller sous forme d'interrogatoire, de questionnement.

Le Président (M. Polo) : Je comprends, mais...

M. Charette : C'est le principe même de la commission parlementaire. Mais, déjà, 16 minutes, c'est trop court, et j'en conviens d'emblée.

Sinon, un projet de loi, avec des objectifs réitérés, des moyens financiers supplémentaires, ce comité-là d'experts, comment le bonifier, selon vous, à travers des moyens précis? Les principes, puis je comprends les vôtres, et j'y souscris à bien des égards, mais concrètement... Vous avez parlé de TEQ. En termes d'amendement au projet de loi, est-ce qu'il y a d'autres avenues? Et ce que vous avez dit, vous n'avez pas besoin de le répéter, là, au niveau des cibles dans la loi, et autres. Concrètement, au niveau de l'action, comment faciliter le rôle du gouvernement à travers le projet de loi qui est proposé?

M. Champagne (Dominic) : Je vous communique ici, cet après-midi, 16 recommandations et un mémoire d'une trentaine de pages, dans lequel j'ai des recommandations extrêmement précises. Mais je veux quand même réagir à vos propos. Vous parlez du discours, qu'on ne peut pas s'en tenir, au discours. Ce matin, je lisais le discours du premier ministre, qui veut se poser en homme équilibré, quelque part entre Donald Trump et Greta Thunberg. Et moi, je vous dis, M. le ministre : Si on est sérieux, et si le premier ministre veut regarder ses deux fils dans les yeux en s'en allant en Écosse l'automne prochain, il faut qu'il aille plutôt d'un côté. Et on ne souhaite pas que ce discours d'équilibre là, en réalité, soit un double discours, qui annule les efforts réels du gouvernement.

On ne peut pas, d'une main, se prétendre vert et, de l'autre main, considérer des projets comme celui de GNL. Et que le premier ministre, à deux jours de la loi historique sur le climat, parle de ce projet-là comme d'un beau projet, et relaie la propagande de l'industrie, qui nous laisse croire qu'on va aller fermer des centrales de charbon avec la liquéfaction de ce gaz de fracturation avec notre électricité propre, et que ça, c'est un beau projet pour la suite du monde, qui nous permettrait de financer la prospérité et la lutte au réchauffement climatique...

Le temps des doubles discours et de votre crédibilité doit être révolu. C'est important que vous soyez crédibles. Et il faut aider notre premier ministre à avoir le courage d'être conséquent avec l'engagement. Et il n'y a rien comme une loi pour obliger les bonnes balises, pour empêcher ce genre de double discours là de nourrir l'illusion, à la population, qu'on fait une bonne chose en augmentant la production et la combustion des énergies fossiles, alors que la sagesse et la science nous disent : Il faut garder dans le sol 80 % des ressources connues en pétrole et en gaz et diminuer la combustion, non pas l'augmenter.

M. Charette : Vous parlez d'une loi. J'en conviens, elle est nécessaire. C'est l'objet de la présente consultation. Selon vous, qu'est-ce qui est préférable, le statu quo actuel ou une loi n° 44 que l'on débat, qu'on s'est engagés à bonifier au gré des consultations? Donc, statu quo ou l'occasion de travailler à l'étude du projet de loi?

M. Champagne (Dominic) : Le statu quo n'est pas une option. Je suis très heureux que vous ayez répondu à mon appel de venir contribuer ici positivement. Je prends le dossier très au sérieux. Depuis un an, j'ai fait mes devoirs. Et je pense que la... si on est là vraiment pour inspirer notre gouvernement et souffler dans la voile de cette volonté-là qui s'affirme... Et je salue les efforts que vous avez faits, mais ce que je vous dis, c'est que c'est bien, mais c'est loin d'être suffisant. Et soyez à la hauteur.

Et pourquoi j'insiste? C'est qu'il y a urgence. On n'a pas une génération pour en parler. Il y a urgence d'agir. Ça doit être la priorité numéro un de ce gouvernement-là. Et, bien sûr, il y a de la richesse, espérons-le, à retirer de tout ça. Il y a un paquet de gens qui sont à l'oeuvre. On n'est pas en train de creuser notre tombe en améliorant ce projet de loi là. Le statu quo ou un projet de loi qui n'est pas à la hauteur, lui, serait mortifère. Alors, assurons-nous qu'on va livrer. Vous voulez être pragmatiques? Vous voulez livrer? Bien, moi, je vous dis : Si vous prenez l'engagement de livrer, on va tous être derrière vous. On va dire : Oui, on y va, on va faire nos efforts et on va faire en sorte qu'on y arrive, en 2030, fièrement.

M. Charette : Je comprends l'urgence de procéder à l'étude de ce projet de loi là, parce que le statu quo n'est pas suffisant... je ne sais pas... ou n'est pas acceptable. Je ne sais pas si vous avez suivi nos débats ce matin, mais nous avons les trois oppositions qui se sont liguées et qui menacent littéralement de faire de l'obstruction au cours des prochaines années. Et je vous explique le contexte...

Une voix : ...

M. Charette : Vous interviendrez quand ce sera votre temps.

Le Président (M. Polo) : M. le ministre, vous avez le droit de dire ce que vous voulez. Vous dialoguez avec M. Champagne. Vous n'avez juste pas le droit de susciter un débat par vos propos. Voilà.

M. Charette : Parfait, j'en prends bonne note. Mais je vous explique le contexte. Les trois oppositions, ce matin, ont mentionné qu'elles n'avaient pas l'intention de débuter l'étude article par article du présent projet de loi avant que ne soient déposés les états financiers audités du Fonds vert, en fait, 2017‑2018, un cafouillage qui est à l'origine de la mauvaise gouvernance libérale, et là...

Le Président (M. Polo) : M. le ministre...

M. Charette : ...le Vérificateur général a mentionné lui-même que cet audit-là pourrait être rendu disponible en 2020, 2021, possiblement 2022. Avons-nous le luxe d'attendre un an, deux ans, sinon trois ans avant d'adopter un projet de loi bonifié qui nous permette de répondre à l'urgence climatique?

M. Champagne (Dominic) : Alors, adoptez un projet de loi qui va faire de nous des alliés, et qui va faire de l'ensemble des partis politiques et de la population au Québec une véritable coalition derrière vous, responsable de la lutte contre les changements climatiques, derrière notre premier ministre. Le Québec réclame ça. Tout le monde va être fier de la CAQ si vous accomplissez ça. Sinon, vous allez continuer à contribuer au climat de suspicion, de polarisation, qui ne nous mène nulle part et qui contribue au statu quo. Et le statu quo, c'est quoi? C'est poursuivre la dégradation du monde dans lequel on vit.

Est-ce que j'ai besoin de vous rappeler ici... Est-ce qu'on croit dans la science? Est-ce qu'on lit les chiffres de ce que la science nous rapporte comme dégradation du monde dans lequel on vit? L'Organisation météorologique mondiale nous dit que, depuis cinq ans, la température s'est réchauffée de 0,2 degré par année. Ça, ça veut dire qu'en 10 ans c'est 0,4 degré. Ça veut dire que le pari est immense d'atteindre les cibles du GIEC. Pas 37,5 %. Les cibles du GIEC pour 2030, le pari est déjà colossal. Alors, disons-le, la Banque mondiale, qu'on ne peut pas traiter d'organisme de gauche, dit : On s'enligne vers un réchauffement de 4 degrés. Une des sommités climatiques au monde, John Schellnhuber, nous dit que la différence entre 2 degrés et 4 degrés de réchauffement, savez-vous c'est quoi? Puis ce n'est pas une joke, c'est la fin de la civilisation humaine. C'est ça qui est en jeu.

Le Président (M. Polo) : M. Champagne...

M. Champagne (Dominic) : Alors, ne finassons pas, ne politicaillons pas, prenons des gestes courageux, rassemblons les gens, et allons-y. Et, pour ça, il faut se donner les vrais objectifs avec les vrais moyens.

Le Président (M. Polo) : M. Champagne...

M. Charette : Je comprends l'urgence...

Le Président (M. Polo) : M. le ministre, votre temps est terminé. Si la députée de Maurice-Richard souhaite que M. Champagne poursuive sur sa lancée, c'est sur son temps.

M. Champagne (Dominic) : ...vous êtes maître du jeu. Donnez-moi pas trop d'espace.

Le Président (M. Polo) : C'est bon, parfait. Allez-y, Mme la députée de Maurice-Richard.

• (14 h 30) •

Mme Montpetit : Bonjour, M. Champagne. Merci d'être là avec nous, puis je vais vous donner tout l'espace que j'ai pour vous exprimer. Je pense que vous avez, malheureusement, peut-être mis... je ne veux pas prêter d'intention, mais mis le ministre, peut-être, un peu de mauvaise humeur. Mais moi, je suis contente de venir vous entendre, je suis contente de vous entendre, aujourd'hui, sur ce que vous avez à dire. C'est une belle occasion de le faire.

Je veux aussi commencer en vous remerciant de votre apport à la mobilisation. Je pense que c'est tout à votre honneur de le faire. On a eu beaucoup d'échanges ensemble dans la dernière année. J'apprécie beaucoup le travail que vous faites, puis c'est important, et toutes les occasions que vous avez de répéter le message que vous faites, qui est celui effectivement du rapport du GIEC de l'automne 2018, qui est celui que le secrétaire de l'ONU a refait au début de la COP25, où j'étais présente avec mes collègues, où il a dit qu'il était... il n'est plus minuit moins cinq, il est minuit moins une.

Et je veux bien le redire, parce que le ministre pourra répéter tant, et autant, et autant qu'il le souhaite que c'est de la faute des gouvernements précédents, le Québec n'est pas une société qui est isolée, qui est dans une situation qui est différente de celle du reste du monde, c'est un défi qui est international. C'est un enjeu qui a évolué. Il y a une réalité qui est en train de nous fouetter. Je ne dis pas qu'elle est nouvelle, mais elle est en train de nous fouetter de plein fouet et elle touche toutes les sociétés et tous les gouvernements du monde entier. Tout le monde doit y faire face.

Et là, c'est une question... Je ne sais pas dans quel état d'esprit l'échange vient de vous mettre, mais je trouve que ça manque... Je serais... J'espère que ça ne ralentit pas vos ardeurs, puis, vous connaissant, je suis certaine que ça ne ralentit pas vos ardeurs, parce que je trouve ça extrêmement déprimant, l'échange que je suis en train d'entendre, parce que vous avez un ministre qui vous répond : Je n'ai pas les moyens, on n'y arrivera pas, c'est de la faute au passé. Encore faut-il qu'il ait de l'ambition et qu'il ait la volonté de le faire et de vouloir y parvenir.

M. Charette : M. le Président, question de règlement. La collègue, pour maintenir un climat sain, un environnement sain, sans jeu de mots, me prête des...

Mme Montpetit : C'est quel article, là?

M. Charette : En fait, on ne prête pas d'intention. Je n'ai jamais dit qu'on n'avait pas les moyens. Je n'ai jamais dit qu'on n'avait pas d'ambition. Donc, ne me prêtez pas d'intention, encore moins des propos, comme vous le faites généralement si bien.

Mme Montpetit : Je peux continuer?

Le Président (M. Polo) : Mme la députée de Maurice-Richard, je vous demande de poursuivre, et restez sur votre message, sans provoquer un débat.

Mme Montpetit : O.K. Il faut avoir l'ambition, la volonté et l'enthousiasme d'y parvenir. Au-delà des structures, au-delà des plans que l'on se donne, encore faut-il vouloir le faire, et vouloir le faire, bien là, à l'heure actuelle, c'est de mettre les bouchées doubles.

Puis, oui, on attend toujours le plan. On est comme vous, on attend toujours d'en voir la lumière, à défaut que le projet de loi, l'excellent projet de loi, d'ailleurs, que vous avez déposé, des deux juristes, en décembre, n'ait pas été appelé, malheureusement.

Et je pense que, dans l'ensemble des propos que vous avez faits, ce que vous recherchez... Puis moi, je veux savoir précisément, sur le projet de loi... Vous avez dit que TEQ, justement, a bien joué son rôle. Il y a plusieurs intervenants qui sont venus, depuis hier, pour nous dire, justement, que TEQ avait contribué à la diminution des GES, qu'il y avait des améliorations, des bonifications, que son rôle pouvait être bonifié davantage, qu'on pouvait lui donner des ressources supplémentaires. Mais ce que je comprends, c'est que ce que vous cherchez, à travers... peu importe le projet de loi, c'est de la transparence au niveau des actions climatiques, c'est, de toute évidence, un respect des obligations climatiques du Québec mais aussi une imputabilité. Est-ce que le projet qu'on a devant les yeux, à l'heure actuelle, répond à vos attentes à ce niveau-là?

M. Champagne (Dominic) : Le projet est un bon pas dans la bonne direction, O.K.? Je pense qu'il est important de le souligner, là. Je ne veux pas être ici pour démoniser ou critiquer à outrance tout ce qu'il se fait. C'est juste qu'on est... On a une crise grave, et c'est la première fois que le gouvernement dépose un projet de loi sur le climat. Alors, le projet de loi, il doit être à la hauteur de la crise, à la hauteur de ce que la science dit et des attentes des citoyens.

Hier... Je vais vous donner un exemple, O.K., de ce qu'il se passe. Moi, là, j'ai rencontré des dizaines de milliers de personnes, là. Je mange à tous les râteliers, je parle à tout le monde, O.K., je suis «full on». Hier, je m'en vais au cégep André-Grasset, collège André-Grasset, à Montréal, où le directeur de l'école et ceux qui s'occupent d'améliorer les choses au collège André-Grasset, là, sont fiers d'annoncer des mesures qu'ils vont prendre. On vient de changer les chaudières de chauffage. Les étudiants sont en train de sortir le plastique de la cafétéria. On est en train d'inaugurer un jardin. Il y a des mesures, là-dedans, qui ont à voir avec la transition énergétique, et il faut souffler dans la voile de cette volonté populaire, qui n'émane pas du gouvernement, qui émane de la société civile.

Et tout le monde, au Québec, a sa job à faire, des directeurs d'école comme ceux des hôpitaux, comme les dirigeants d'entreprise, comme les travailleurs, comme les citoyens, à gauche, à droite, à Montréal, à Québec, dans les grands centres comme dans les régions, tout le monde a sa job à faire.

Il faut que le gouvernement envoie un signe fort, à la hauteur de la crise et de l'urgence, et que ça soit clair, pour encourager les bonnes pratiques et faire taire tout ce qui nous tire par le bas.

Moi, là, j'ai eu du succès dans ma vie, O.K.? Je suis multimillionnaire parce que j'ai fait des shows puis que le monde m'ont applaudi. Je ne me suis jamais autant fait critiquer que depuis un an parce que j'essaie de mettre le message de la science au centre du débat public. Et je le sais, qu'il y a du monde qui nous tire par le bas. Il faut se mettre au-dessus de cette mêlée-là, et le leadership politique, la volonté politique... C'est votre première responsabilité que d'envoyer des signaux clairs. Pas des opinions politiques, ce que la science nous demande de faire, ce que la nature nous prie de faire, ce que la jeunesse de plus en plus nombreuse, au Québec comme au monde entier, nous demande de faire.

Et on est mûrs. On est prêts à vous suivre. J'ai pris ma carte de membre de la CAQ. C'est-u assez fort? On est prêts à y aller. On veut y aller. C'est urgent. Alors, faisons-le. Moi, je vous dis : Il n'y a pas une journée où il n'y a pas un citoyen, un homme d'affaires, quelqu'un du communautaire qui vient me dire, me vanter les mesures qu'ils sont en train de prendre. Les gens ont soif d'agir. Identifions les bonnes pratiques, mettons les scientifiques au coeur d'analyser qu'est-ce qui est de mieux comme comportement à adopter, et faisons-le. Mettons les bons stops au coin des bonnes rues, les bons feux de circulation, les bonnes limites, les bonnes mesures qui vont créer des jobs.

Je vais donner un exemple, O.K.? Au Danemark, aujourd'hui, les écoles, les hôpitaux sont obligés de servir à manger aux élèves et aux patients de la nourriture bio produite localement. C'est dans la loi. Ce n'est pas une mesure de transition énergétique, ça amène du mieux-être, ça crée des jobs, ça améliore plutôt que de dévaster les sols, on est en train de régénérer les sols, et ça va contribuer à tel pourcentage à atteindre les cibles. Ces meilleures pratiques-là, là, au Québec, on en a. Mon deuxième gars bâtit des maisons, il n'était pas compétitif il y a cinq ans dans la façon de bâtir traditionnelle. Là, ils font de l'écoconstruction, ils sont compétitifs. Pourquoi? Parce qu'il y a du monde qui veulent vivre dans ces maisons-là, les acheter, ces maisons-là.

Ça remonte de partout au Québec, et vous avez une manne extraordinaire à récolter. Assumez le leadership à la hauteur de la gravité de la crise, je vous en implore. Oui, par moment, je suis désespéré. Tu sais, tantôt, je jasais, je dis : Coudon, il va-tu falloir que je fasse une grève de la faim? Peut-être que ça serait bon pour moi. Mais c'est à désespérer de se demander : Mais sur quel ton? Moi, j'ai travaillé comme un fou pour rassembler du monde. J'ai contribué à mettre un demi-million de personnes dans la rue. J'ai hébergé Greta Thunberg puis, quand elle revenait de New York outrée de l'inaction des gouvernements du monde, j'avais envie de la prendre dans mes bras. Je lui ai dit : Demain, on va marcher, après ça, je vais t'amener à Tadoussac voir les baleines pour que tu puisses souffler un peu. Cette femme admirable qui a fait plus que tous nous autres depuis un an, plus que la science depuis 30 ans pour mettre le message : On est là, on est les contemporains de cette inquiétude, mais de cette opportunité. De Greta Thunberg à Manon Massé jusqu'à Stephen Jarislowsky, le Québec est prêt à vous suivre, soyez à la hauteur.

Puis c'est maintenant, la loi, ce n'est pas dans six mois. Puis le plan, il ne sera pas parfait. Mais, si la volonté est très clairement indiquée dans la loi, on va venir le bonifier, votre plan. Parce que, là, vous vous êtes cantonnés à un plan d'affaires pour électrifier les affaires. Puis je ne doute pas qu'il va y avoir des bonnes mesures, mais vous savez comme moi, après tout cet effort intellectuel, ces consultations, qu'on peut faire beaucoup plus. On a fait une consultation, nous autres, qui a touché des milliers de citoyens. Il y a le Front commun pour la transition énergétique qui rallie, je pense, près de 2 millions de citoyens au Québec. Il y a un paquet d'entrepreneurs puis de gens qui sont prêts à bouger, à souffler dans votre voile.

Dites-vous, dites-nous qu'on va y arriver et que c'est par là qu'il faut aller, pas des demi-mesures, pas des doubles discours qui vont miner votre crédibilité et qui vont nous désespérer.

Mme Montpetit : J'aimerais ça également vous... Quand vous parlez de pas dans la bonne direction puis de message, vous avez sûrement noté que, dans le projet de loi qui est déposé, on enlève l'obligation légale que le deux tiers du budget du Fonds vert soit dédié au transport. Ça a été décrié ce matin par différents groupes, dont la mairesse de Montréal, qui soulève des préoccupations également par rapport à ça. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Champagne (Dominic) : O.K. Moi, je n'ai pas l'expertise là-dessus, O.K.? Je n'entrerai pas dans cette plomberie-là, ce n'est pas mon département. J'ai consulté des gens, j'en fais part, là, il y a quelques lignes là-dessus dans le mémoire. Ma question n'est pas là, O.K.

Si j'ai un message à livrer... Et, par moment, parce que je rencontre... J'ai passé deux heures avec le ministre de l'Environnement et son chef de cabinet la semaine dernière. J'ai parlé avec des gens du bureau du premier ministre. Je rencontre un paquet de monde dans la diplomatie climatique au Québec et je vois à quel point vous êtes embourbés dans l'appareil d'État. Et je ne dis pas que ce n'est pas important de le faire, bien sûr, que c'est important de le faire. Mais Churchill n'a pas laissé gommer la capacité industrielle britannique, ou américaine, ou alliée dans des consultations à n'en plus finir alors qu'il y a... les V2 bombardent Londres. Il y a une urgence d'agir.

Et je m'excuse, mais, des fois, c'est à désespérer. Je me dis : Mais qu'est-ce qu'ils ne comprennent pas dans la gravité de la situation? Combien de feux en Australie ça va prendre? Il va-tu falloir que ce feu-là pogne ici ou qu'on ait des inondations cataclysmiques pour se dire : Ah oui! Mon Dieu!

J'étais tellement fier... C'est triste à dire, mais, le 22 avril dernier, on est venus encercler le Parlement. Ce jour-là, il y avait des inondations, et notre premier ministre avait ses bottes de boeufs dans l'eau à Gatineau ou à Deux-Montagnes en disant : Bien, il va falloir se rendre à l'évidence, il y a un réchauffement climatique. Tu dis : «Hey, you bet!» Là, de là, là, on constate la réalité, bien là, on agit en conséquence.

Et le projet de loi, je vous félicite pour vos efforts, mais ce que je viens vous dire, c'est que les efforts ne sont pas assez. Combien ça coûte la tonne de réduction d'investir dans des infrastructures en transport plutôt que de faire... d'investir dans des chars électriques si on a la décence de voir que de l'extraction du lithium au recyclage du lithium, il y a aussi des enjeux? Ce n'est pas moi qui vais vous donner la réponse à ça.

Ce que je vous demande, c'est : Mettez la science au milieu. Prenons le temps le temps de bien agir, mais urgemment. Et là il faut, c'est maintenant, O.K.? Hier, quelqu'un me dit : Les plaques paires, les jours pairs, c'est dans la loi, là, puis que le monde soit obligé de faire du covoiturage. Si l'éveil de nos consciences ne suffit pas, ça prend des règles, ça prend des stops aux coins des rues. Et ça, c'est les gouvernements qui écrivent les lois, c'est un trait de plume pour nous obliger. Si on est encore en train d'avoir des débats, je fais une chronique avec Bernard Drainville tous les mardis puis je fais son éducation, un journaliste de haut calibre, un homme intelligent, qui a toute son éducation à faire en matière climatique. Le gouvernement a la responsabilité d'être bien conseillé, d'être bien informé et de décider et de diriger, d'être le chef d'orchestre.

• (14 h 40) •

Le Président (M. Polo) : Merci.

M. Champagne (Dominic) : Je vous en prie.

Le Président (M. Polo) : Mme la députée.

Mme Ghazal : Merci beaucoup. J'ai 2 min 40 s seulement. Écoutez, je n'ai jamais vu le ministre réagir autant. C'est bon aussi d'avoir des discours comme ça qui nous fouettent, tout le monde, pas seulement le gouvernement. Donc, moi, ce que j'entends dans l'échange que vous aviez eu, c'est que le message du ministre, on a du retard à cause du passé, donc ce n'est pas possible d'être ambitieux aujourd'hui, donc réduisons notre ambition. Pourquoi? Parce qu'on est réalistes et pragmatiques.

Vous, ce que vous dites, c'est : soyons réalistes, écoutons la science, n'en rajoutons pas, des gaz à effet de serre, déjà avec GNL, troisième lien. Au contraire, il faut augmenter nos ambitions, et ça, ça veut dire, 37,5 %, ce n'est pas suffisant d'ici 2030. Ce que vous dites, c'est... la cible, c'est 45 %, 55 % en 2030, carboneutralité, et il faut que ça soit écrit dans la loi, il faut qu'on ait aussi un budget carbone, etc., toutes les mesures pour y arriver. Il faut que ça soit écrit, et c'est ça que ça veut dire, l'ambition.

La question que je voulais vous poser, vous avez dit qu'il ne suffit pas juste d'avoir une transition énergétique, mais il faut aussi une transition globale juste. J'aimerais vous entendre un peu plus là-dessus, c'est quoi cette transition globale?

M. Champagne (Dominic) : O.K. Ce que la science nous dit, c'est qu'il faut réduire les émissions de carbone. Donc, essentiellement, le taureau qu'on doit prendre par les cornes, il est lié à l'usage du pétrole...

Mme Ghazal : ...ce n'est pas grave...

M. Champagne (Dominic) : Ça, c'est-u dans mon temps, ça, quand le ministre n'écoute pas, est-ce que c'est sur mon temps?

Des voix : ...

M. Champagne (Dominic) : Très bien. Juste qu'on est là pour ça.

Une voix : ...question de règlement. Parce qu'on aimerait mieux vous suivre. Parce que votre mémoire, on ne l'a pas reçu. C'est la raison pour laquelle on se questionnait.

Le Président (M. Polo) : Poursuivez puis on adressera la question à la fin des...

M. Champagne (Dominic) : Très bien. Je l'ai ici. Je vais me faire un plaisir d'aller vous en porter une copie à l'instant.

Mme Ghazal : ...

M. Champagne (Dominic) : Oui. Très bien. Alors, pour répondre à votre question : Au coeur du projet, bien sûr, il faut prendre le taureau par les cornes, c'est-à-dire la réduction du pétrole et du gaz. Transition énergétique Québec est responsable de 60 %, 65 %, 70 % de la réduction pour le gouvernement du Québec. C'est déjà ça. On est d'accord. La part du lion pour le projet qui nous occupe, c'est celui de la transition énergétique, mais tout ne viendra pas... et ce serait une erreur de penser que tout va venir d'un transfert strictement du pétrole et du gaz vers l'électricité, parce qu'il y a un nouvel art de vivre à développer, des nouveaux comportements. Quand les scientifiques du GIEC disent : On doit procéder à un changement radical de nos façons de faire, on pointe l'énergie, mais on pointe... et tantôt, quand je donnais l'exemple de la pratique danoise en matière d'alimentation dans les hôpitaux et les écoles, c'est une mesure très claire. Et, au Québec, là, ça regorge d'initiatives à cet égard-là. Il y a des gens qui, depuis un certain nombre d'années, adoptent des mesures pour qu'on puisse investir autrement, se transporter autrement, consommer autrement, produire autrement, s'alimenter autrement, qui vont tous dans le sens d'une transition de notre économie qui ne soit pas mortifère, c'est-à-dire qu'elle n'alimente pas la dégradation du monde dans lequel on vit, mais qui soit une source de mieux-être, une source de richesse, une source de prospérité, une source de mieux-être.

Et je pense que le gouvernement a commencé à identifier, dans ses consultations, les forces vives des meilleures pratiques, alors encourageons ça. Taxons le pétrole et le gaz, là, ou refusons, et, avec le profit ou l'argent qu'on fera de ces taxes-là, soutenons les entreprises qui nous en éloignent. Il y a tout un travail important de mobilisation de la société civile, et des gens d'affaires, et des travailleurs en marge de la transition strictement énergétique.

Mme Ghazal : Merci.

Le Président (M. Polo) : M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Merci. Alors, évidemment, j'adhère à votre cri du coeur, j'adhère à votre constat. Vous savez, d'ailleurs, que j'ai eu l'occasion de déposer le projet de loi n° 194 sur le respect des obligations climatiques, j'ai tout fait, en tout cas, je suis un gars optimiste, là, je veux continuer de tout faire pour que le gouvernement appelle ce projet de loi, au moins, pour des consultations comme celles que nous sommes en train de faire. Le gouvernement, jusqu'à maintenant, a refusé.

Moi, je pense, globalement, là, il y a deux façons d'arriver à nos objectifs, soit par la confrontation et la polarisation ou soit par l'adhésion. Moi, la confrontation et la polarisation, ce n'est pas ma tasse de thé, je pense que ça conduit à des excès, ça conduit à des crises sociales, comme on le voit dans d'autres pays à l'heure actuelle sur différents enjeux. Je ne veux pas faire de comparaison boiteuse. Moi, je choisis l'adhésion. Je choisis l'adhésion.

Ce n'est pas tout le monde qui est multimillionnaire comme vous, donc il y a des gens qui travaillent, qui gagnent leur vie, qui se lèvent à tous les matins pour aller travailler dans une usine qui produit, entre autres, des circulaires qui vont dans le Publi-Sac mais qui fait gagner la vie à bien des gens. Alors, c'est là qu'on embarque, dans l'idée de la transition juste.

Alors, moi, je voudrais vous entendre un peu plus sur ce passage-là, là, entre le multimillionnaire, là, qui est en colère puis qui l'exprime, là, puis M., Mme Tout-le-monde, puis je ne veux pas être condescendant ou, tu sais, regarder les gens de haut, au contraire, mais je veux juste dire : Comment on fait pour arriver à cette adhésion populaire vers une cause aussi importante que celle-ci sans tomber dans les exemples un peu ultimes, là? Alors, comment on fait ça?

M. Champagne (Dominic) : Très bien. Il y a plusieurs choses dans ce que vous dites.

Le Président (M. Polo) : ...secondes.

M. Champagne (Dominic) : D'abord, je peux vous dire, O.K., que je pense que c'est extrêmement important de ne pas culpabiliser ou pointer les individus comme étant les responsables de la crise. Nicolas Hulot, en France, l'ancien ministre de la transition écologique, disait : Les citoyens, on est peut-être responsables de 20 %, en poussant, là, du problème. Donc, dans nos comportements individuels, bien, on a une responsabilité à 20 %. Et, parmi ces citoyens-là, ce n'est pas les pauvres, les plus vulnérables ou ceux qui ont des revenus moyens qui sont les principaux agents. Moi, un jour, j'ai pris le téléphone, j'ai appelé Guy Laliberté, en lui disant : Guy, je pense que tu as une bonne empreinte carbone, je lance un pacte puis j'aimerais ça ne pas parler juste aux militants écologistes de gauche convaincus, mais que ça serait le fun qu'on envoie un signal clair que ceux qui sont riches, parce que ce n'est pas tout le monde qui peut se promener en fusée, en jet privé à travers le monde, ceux qui ont des plus grandes empreintes écologiques, bien sûr, qu'ils peuvent faire plus. Il y a un esprit de justice là-dedans. À l'échelle du monde, nous sommes une société riche.

Le Président (M. Polo) : M. Champagne.

M. Champagne (Dominic) : On ne peut pas demander aux pays africains ou à Haïti présentement de faire le même effort que le Québec peut faire.

Le Président (M. Polo) : M. Champagne.

M. Champagne (Dominic) : On se dit qu'on est bons, au Québec... excusez-moi, mais je pense que c'est important de le dire, de le rappeler, on se dit qu'on est bons au Québec, O.K., puis, si on se compare aux Américains, aux Canadiens, bien sûr, mais à l'échelle du monde nous sommes encore des émetteurs de gaz à effet de serre, des pollueurs...

Le Président (M. Polo) : M. Champagne, c'est beau.

M. Champagne (Dominic) : ...deux fois plus grands que les pays comparables en Europe. Donc, dans...

Le Président (M. Polo) : Merci. Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux représentants de E-Taxi de prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 14 h 48)

(Reprise à 14 h 51)

Le Président (M. Polo) : Je souhaite la bienvenue aux représentants de E-Taxi, M. Dung Cuong, président, et M. Pierre Lopez, administrateur chez Paxi Technologies. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à procéder à votre exposé. La parole est à vous.

E-Taxi inc.

M. Cuong (Nhan Dung) : Oui. Bonjour, merci. Merci, M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les membres de la commission.

Mon nom est Dung Cuong, je suis président de E-Taxi. Je suis accompagné de Pierre Lopez, administrateur de Paxi Technologies inc.

Fondé en 2017, E-Taxi est une entreprise québécoise dont la mission est de prendre part à l'électrification des transports du Québec. L'entreprise se concentre actuellement sur la réalisation de projets d'électrification des taxis à Montréal, avec comme partenaire le plus grand fabricant d'automobiles électriques, BYD.

Dans les prochaines années, E-Taxi entend diversifier ses opérations. Le projet progresse rapidement et a acquis plusieurs appuis. En ce moment, la première vingtaine de véhicules BYD e6 est déjà sur les routes du Québec. À terme, nous visons l'électrification complète de la flotte de taxis québécoise.

Nous sommes très heureux de pouvoir jouer un rôle de premier plan dans l'atteinte de l'électrification complète des transports au Québec. En somme, nous importons, distribuons et aidons à financer les chauffeurs de taxi qui désirent prendre part de cet important changement.

Je veux vous remercier de l'invitation à participer aux consultations sur cet important projet de loi. Nous sommes convaincus que nos idées amélioreront l'efficacité du Fonds d'électrification et de changements climatiques, tout en étant bénéfiques pour la transition énergétique.

En commençant, nous tenons à dire que E-Taxi appuie le principe du projet de loi n° 44, qui vise à accroître l'efficacité du Fonds d'électrification et de changements climatiques et à électrifier l'économie québécoise. En effet, le Québec a la chance de détenir une énergie verte renouvelable, l'hydroélectricité.

Pour nous, l'électricité doit être la solution, surtout en ce qui concerne les changements à faire en matière de transport. Vous le savez déjà, le secteur des transports est responsable de 43 % de toutes les émissions de gaz à effet de serre au Québec. Il y a un travail important à faire, et nous faisons partie de la solution, mais nous ne pouvons pas y arriver seuls. Ce projet de loi est un pas dans la bonne direction afin que le gouvernement se dote d'outils lui permettant de mettre de l'avant des politiques ambitieuses.

Lors du dépôt de ce projet de loi, le ministre a indiqué qu'il voulait avoir des objectifs clairs et quantifiables. En ce sens, laissez-moi vous présenter quelques chiffres qui démontrent hors de tout doute l'impact positif que peut avoir l'électrification de la flotte de taxi québécoise.

La voiture typique de taxi est la Toyota Camry, qui consomme en moyenne neuf litres sur 100 kilomètres pour environ 70 000 kilomètres parcourus par année. Ceci représente une consommation approximative de 53 millions de litres d'essence par année pour l'ensemble de l'industrie du taxi québécois. L'électrification d'un taxi équivaut à une économie de 6 300 litres d'essence par année. Je vous laisse faire le calcul des économies si l'essence reste à 1,25 $ par litre.

En termes d'émission de GES, l'industrie du taxi est responsable de l'émission d'environ 215 000 tonnes équivalentes de CO2 par année. Ceci représente environ 25 tonnes équivalentes de CO2 par véhicule de taxi. Au moment où on se parle, la valeur minimale pour un crédit carbone est d'environ de 16 $ par tonne équivalente de CO2. Ceci peut représenter une valeur minimale approximative de 408 $ par année par chauffeur sur le marché du carbone. De ce fait, une électrification complète de 8 000 véhicules de taxi québécois représente un nombre important de crédits carbone. Nous évaluons la valeur minimale de l'industrie du taxi à environ 3,4 millions sur le marché de carbone.

De plus, rouler électrique représente des économies de plus de 7 000 $ par année pour un chauffeur. Non seulement le chauffeur économise à la pompe, mais une voiture électrique demande beaucoup moins d'entretien et est plus durable dans le temps qu'une voiture à essence.

Les chiffres que je viens de donner sont une partie de l'impact positif que peut avoir l'électrification de la flotte de taxis. Nous croyons que les chauffeurs ont la volonté de prendre part à ce changement, mais le gouvernement doit mettre de l'avant des incitatifs afin de les aider à prendre action.

Une autre priorité du gouvernement avec le projet de loi n° 44 est l'électrification de l'économie québécoise. Pour y arriver, le projet de loi prévoit la mise en place d'un comité consultatif sur les changements climatiques afin de conseiller le gouvernement en matière de lutte contre ce phénomène grandissant. Nous saluons le fait que ce comité doit composer en majorité de scientifiques, cependant, nous croyons que la solution doit émaner de plusieurs acteurs afin que l'ensemble des réalités soient prises en compte dans l'élaboration de mesures efficaces. En ce sens, nous croyons qu'il sera pertinent que le comité consultatif comprenne les membres provenant de différentes industries, notamment celle du transport. La lutte contre les changements climatiques est un enjeu qui touche l'ensemble des Québécois et je suis certain que beaucoup de gens ont des solutions intéressantes à proposer.

Par ailleurs, nous croyons que le virage vert en matière de transport doit être mis de l'avant par les différents paliers gouvernementaux. À notre avis, le gouvernement a le devoir de montrer l'exemple et d'inciter la société civile à emprunter le pas. Au surplus, nous savons tous qu'un gouvernement qui se déplace à zéro émission constitue un attrait non négligeable au plan international.

Dernièrement, nous avons eu les discussions avec l'aéroport de Montréal afin qu'un pourcentage de véhicules de taxi pouvant opérer à l'aéroport soient électriques. À notre plus grand désarroi, les autorités se sont montrées réfractaires à cette idée. Cependant, les mêmes personnes nous ont également indiqué que, si une partie des véhicules pouvant desservir l'aéroport sont électriques, l'ensemble des compagnies de taxi de Montréal convertiraient leur flotte à l'électricité.

Dans un même ordre d'idées, la Société de transport de Montréal, la STM, s'est aussi montrée réfractaire à l'idée de favoriser l'utilisation de véhicules électriques. Pourtant, c'est plus de 650 véhicules de taxi qui travaillent en permanence avec la STM. Il y a 950 véhicules qui travaillent par jour, il y a 650 en permanence. Ce circuit de taxi, offert par la STM, coûte environ 100 millions de dollars annuellement aux utilisateurs, qui est financé par le MTQ. À notre avis, le refus de favoriser l'utilisation de taxis électriques est un manque flagrant de volonté de la STM et les institutions gouvernementales d'aller de l'avant avec l'électrification des transports.

Pour l'instant, de nombreux intervenants publics nous offrent une résistance face aux possibilités que nous leur offrons afin de favoriser l'électrification des transports. Pour que l'électrification des transports soit réussie au Québec, les acteurs de l'industrie tels que le ministère de l'Économie et de l'Innovation, la Société de transport de Montréal à l'aéroport de Montréal n'ont d'autre choix que de prendre des mesures pour inciter les acteurs de leurs industries à participer au changement, tout ceci afin d'amener des acteurs publics au Québec à prendre des engagements sérieux en faveur de l'électrification.

De son côté, le gouvernement du Québec se doit de prendre les mesures pour que les acteurs de l'économie verte soient intéressés à venir s'installer au Québec. Des cibles claires et des politiques musclées montreront aux investisseurs étrangers que le Québec croit et investit dans des différents projets visant l'électrification des transports.

Les doubles discours que nous observons présentement, pour nous, prouvent que le gouvernement doit agir. Si l'ensemble des paliers gouvernementaux favorisent et utilisent les moyens de transport électrique rapidement, le Québec roulera à zéro émission.

Je conclus en vous assurant de notre entière collaboration dans l'analyse du projet de loi n° 44. E-Taxi se veut un joueur clé en matière d'électrification des transports, et nous avons plusieurs propositions en ce sens.

Voici les principales recommandations d'E-Taxi vis-à-vis le projet de loi n° 44. Que le principe du projet de loi soit adopté. Qu'un programme de garantie de prêt soit instauré pour les propriétaires de taxi qui souhaitent faire l'achat de véhicules 100 % électriques, parce que la valeur du permis est tombée à zéro en ce moment à cause de la loi n° 17, aucun prêteur, aucune institution financière n'est prête de prêter aux chauffeurs pour un véhicule. Pourtant, toute l'industrie réclame haut et fort tous les avantages qu'ils peuvent obtenir pour aller vers l'électrification des transports.

Qu'une partie spécifique du Fonds d'électrification et de changements climatiques soit réservée aux initiatives en lien avec l'électrification des transports. L'industrie du transport émet 43 %, mais pourquoi ne pas utiliser 43 % du fonds pour... le pourcentage de 43 % pour l'électrification des transports? C'est égal. Je pense que c'est tout à fait raisonnable. Que les projets d'électrification des transports qui impliquent une utilisation quantifiable et directe de l'électricité soient mis de l'avant. Exemple, recharge des véhicules. Autrement dit, on va favoriser les «end users».

• (15 heures) •

Le Président (M. Polo) : 20 secondes.

M. Cuong (Nhan Dung) : O.K. Que le gouvernement impose les cibles d'électrification des transports visant la participation obligatoire des organismes publics, parapublics et municipaux pour leurs flottes de véhicules, celles de leurs sous-traitants, exemple, l'ADM, STM.

Merci de votre attention. On est là pour répondre à vos questions.

Le Président (M. Polo) : Merci. Merci d'avoir respecté le temps, M. Cuong, je vous remercie. Alors, nous allons débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Charette : Merci, M. le Président. Messieurs... un réel plaisir de vous recevoir cet après-midi...

M. Cuong (Nhan Dung) : Merci.

M. Charette : ...parce que, pour moi, vous représentez, en quelque sorte, la somme de ce qui a été mentionné à plusieurs reprises au cours des deux dernières journées, c'est-à-dire : il faut mobiliser du capital privé. La formule de subvention telle qu'on la connaît a ses limites, en quelque sorte. Et, lorsque je vous entends et lorsque je lis, par exemple, la formule de garantie de prêt, c'est là où je retrouve un peu ce que plusieurs ont dit avant vous : Un dollar public peut générer, en investissements, plusieurs dollars privés.

Donc, ce que je comprends, pour électrifier une flotte ou pour électrifier un mode de transport qui est très, très répandu, ce n'est pas tant des subventions qui sont souhaitées, mais tout simplement accompagner le chauffeur ou le propriétaire de taxi avec une garantie de prêt pour qu'il puisse ensuite financer l'achat de son véhicule. Et, selon vous, économiquement parlant, et pour le chauffeur, et pour l'entreprise prêteuse, c'est un mode économiquement viable, c'est quelque chose qui est démontré?

M. Cuong (Nhan Dung) : Oui. Vous avez sans doute vu, dans les journaux : j'ai pris l'initiative de faire entrer les 25 premiers, je les ai endossés moi-même. Les 25 premiers véhicules électriques taxis roulent déjà à Montréal. Et puis les prêteurs ne voulaient pas prêter, ça, c'est sûr, mais il fallait avoir mon intervention comme endosseur avec les paiements garantis. Mais moi, j'ai une limite financière pour garantir ça. Je l'ai fait, je voulais juste montrer que le Québec doit aller de l'avant. C'est pour ça que je crois à ce projet de loi, je les ai fait entrer ici.

Actuellement, FinTaxi et Desjardins, c'est les deux institutions qui financent les permis avec les véhicules, mais la porte est fermée. Et puis FinTaxi va fermer la porte cet été et puis... parce qu'il n'y a plus de valeur, et, deuxièmement, ils sont en train de chercher quelqu'un pour acheter la créance des véhicules. Ils ont quand même 3 millions de créances sur les véhicules. Il n'y en a plus, de prêteurs, pour l'industrie du taxi, parce que le permis, il tombe à zéro. Mais ça ne veut pas dire qu'il y a un gros risque, ça, je peux vous le garantir, mais ça prend comme un genre de bourse d'étudiant. Il y a toujours un risque, mais le risque est quand même calculable, et très, très peu... c'est très minime. Mais, s'il n'y a pas de garantie, il n'y a aucune institution... Ça, je peux vous le garantir.

Moi, personnellement, je n'ai pas de capacité pour aller endosser des 1 000, 2 000 véhicules. Je l'ai faite, ma part, pour montrer que le véhicule existe. Les chauffeurs sont intéressés. On a passé deux mois de temps pour les éduquer... le changement. Là, maintenant, l'électrification des taxis sur l'île de Montréal, ça devient à la mode, parce que tout le monde voit. On sait, on a un élan pour aller de l'avant. C'est pour ça que je suis là, je suis content devant vous pour vous dire que c'est réglé, le côté des taxis, c'est réglé. Profitons-en, ça ne coûte pas grand-chose, ça prend juste quelques incitatifs pour aller de l'avant pour tout le monde.

Il n'y a pas un chauffeur qui travaille qui ne paie pas son véhicule, parce que c'est son gagne-pain. Mais ça nous prend quelque chose pour permettre aux prêteurs d'ouvrir la porte. Oubliez ça aujourd'hui. J'ai contacté Desjardins. C'était mon principal partenaire au début, il a fermé la porte; FinTaxi est fini; et puis Nationale, non; Scotia, non; CIBC, non — il n'y a aucune banque; Montréal, non, ils disent : Non, on ne prête pas. Mais là ça veut dire que vous mettez toutes les possibilités de la loi pour électrifier le transport, mais, de l'autre côté, c'est impossible.

M. Charette : Non. Je comprends tout à fait. Malheureusement, le temps est très, très limité, donc je souhaitais aussi...

M. Cuong (Nhan Dung) : Oui. Désolé.

M. Charette : Bien non, c'est bien, bien, bien compréhensible. Mais ce que j'aime, à travers l'électrification des taxis... Oui, il faut continuer nos efforts au niveau de l'électrification des véhicules personnels. Un véhicule personnel, sur 24 heures, essentiellement, c'est stationné quoi? C'est stationné 23 heures, 22 heures...

M. Cuong (Nhan Dung) : 90 %, 95 %.

M. Charette : ...effectivement, alors qu'un véhicule de flotte — je parle des taxis, mais je pourrais parler des autres véhicules de flotte, que ce soit transport urbain — ce sont des véhicules qui, sur leurs 24 heures, roulent une bonne partie du temps et roulent aussi plusieurs kilomètres. Donc, oui à l'électrification des véhicules personnels, c'est un effort qu'on poursuit. D'ailleurs, le gouvernement, lors du dernier budget, a reconduit la mesure. Mais je pense, il faut porter une attention toute particulière aux véhicules de flotte si, au niveau de l'électrification des transports, effectivement, on veut atteindre des diminutions significatives de gaz à effet de serre.

Et vous avez fait quelques calculs tout à l'heure, vous donniez l'exemple de la Toyota Camry versus un véhicule électrique. C'est à travers des calculs de cette nature-là que vous êtes en mesure d'évaluer que la flotte de taxis montréalaise, par exemple, génère... Vous avez mentionné quoi, 3 et quelques millions de tonnes. Ce sont des chiffres qui sont...

M. Cuong (Nhan Dung) : Non, c'est... Par véhicule de taxi par année, c'est cinq fois un véhicule de promenade, c'est 25,5 tonnes de GES. Ça veut dire qu'un taxi qui roule de cette manière-là, qu'il émet cinq fois plus de GES qu'une voiture ordinaire. C'est la raison pour laquelle que le... E-Taxi, nous, on a appuyé ce projet il y a trois ans, parce que je ne crois pas que c'est les véhicules de promenade qui émettent plus d'émissions, il faut travailler sur le commercial. C'est la raison pour laquelle on est allés en Chine, on a choisi un modèle qui... fait pour le taxi. C'est là que... C'est mon métier de toute façon, je suis dans le taxi depuis 26 ans, c'est mon métier. En connaissant la mentalité, ça nous a permis d'amener le projet à terme. Donc, jusqu'à maintenant, il n'y a pas personne qui dit que ce n'est pas vrai, les véhicules commerciaux taxis roulent... c'est un modèle qui roule depuis 10 ans, c'est même la police qui utilisait ça. La police utilisait le même véhicule, c'est une batterie de 90 kilowatts. Le modèle qu'on a reçu, c'est 450 kilomètres d'autonomie. C'est 6 000 livres, le véhicule, c'est fait pour commercial. On a tout ce qu'il faut.

Donc, on a tout ce qu'il faut. On s'en va vers le FECC, le nouveau. Je me suis dit que, si on n'avait pas ces incitatifs à côté pour aider, un coup de pouce... Si jamais il n'y avait pas le projet de loi n° 17, je croyais que... je ne crois pas qu'on aurait besoin d'un endossement. Mais, à cause du projet de loi n° 17... de la loi n° 17, pardon...

M. Charette : Non, je comprends. Malheureusement, le temps file, et c'est très, très malheureux. Mais je serais intéressé à vous entendre aussi... Vous dites : La STM a des contrats avec les taxis pour x millions de dollars, donc la STM est un partenaire précieux. C'est quoi? Comment vous voyez ça, qu'il y ait des... pas des contraintes, mais, à tout le moins, des incitatifs pour la STM de développer davantage de partenariats avec les voitures... les taxis électriques, versus la voiture conventionnelle?

• (15 h 10) •

M. Cuong (Nhan Dung) : Oui, puis vous avez entendu M. Champagne, du pacte, l'expliquer, ça prend une implication de tout le monde. Moi, ça fait deux ans que je discute avec la STM. Moi, entre autres, j'ai deux compagnies de transport adapté. Avec la STM, j'ai eu la chance de discuter, j'ai été tellement déçu. Actuellement, juste pour vous expliquer vite, vite, vite, chaque véhicule de berline — je ne parle pas des vans adaptées — ils ont une feuille de route de deux heures. La clientèle est là, la STM garantit deux heures. Puis j'ai demandé à la direction de la STM de la division de transport adapté : Pour favoriser l'utilisation de voitures électriques, faites une feuille de route de trois heures. Parce que trois heures, ça attire beaucoup plus les gens vers l'électrification des véhicules, ça ne coûte rien. Malheureusement, on m'a refusé, on m'a répondu comme quoi qu'ils n'ont pas de ressource. Pourtant, la clientèle est là, c'est le gouvernement qui paie 100 millions. Je ne vois pas quelles sont les raisons qu'on ne peut pas y arriver. En faisant ça, l'ADM puis la STM... 1 000 véhicules, comme ça. Partir en électrification des véhicules, ça ne coûte rien à personne.

Donc, j'avais raison de dire : Il n'y a pas juste vous. Vous ne pouvez pas faire grand-chose s'il n'y a personne qui embarque dans le même bateau que vous. Nous, les privés, on a fait notre part : on a investi, on a pris le risque, on investit. Vous, vous déposez la nouvelle loi n° 44. Mais, si jamais il n'y a personne à l'extérieur, le public, parapublic ou privé... participent, on n'ira nulle part. On parle beaucoup... Actuellement, une voiture électrique est six à huit mois d'attente. Bon, on va aller où? Mais moi, je suis capable d'importer 100 par mois. Je vous dis, 100 par mois, c'est fait, la chaîne d'approvisionnement est faite, puis, avec ça, je suis capable d'amener même un petit mot pour vous... un manufacturier ici, je peux vous le garantir.

Ça prend une imposition, ça prend une obligation. M. le ministre, si vous n'allez pas par une imposition, vous ne réussirez pas. Ça, je peux vous le garantir. Je suis un gars de terrain. Je ne suis pas un gars scientifique, je ne parle pas... les chiffres. Je rencontre les chauffeurs tous les jours, je rencontre les clients tous les jours, je vois ce qu'ils pensent. Tout le monde est concerné pour le changement climatique. Mais je vais attendre mon tour, ce n'est pas ça.

Je viens de finir le meeting avec l'ADM. J'étais tellement déçu. L'année dernière, on était d'accord; cette année, on n'est pas d'accord. Mais, pourtant, il y a une loi fédérale : zéro émission dans les aéroports. Ça ne coûte rien si, mettons, on dit que, cette année, 100 véhicules électriques, sans avoir passé par le tirage... Fini! 100 véhicules. Mais pourquoi qu'on ne fait pas ça? Y a-tu une raison qu'on ne fait pas ça?

C'est exactement ce que M. Champagne vous avait dit : Il faut mettre quelque chose là... on est obligé d'atteindre, tout le monde va y arriver. Nous, on n'a pas besoin... Je crois beaucoup sur le travail collectif. Ensemble, on est capables d'y arriver. On a besoin juste d'un accompagnement, vous savez ce que je veux dire. On a réussi avec la SAAQ... poser les plaques sur le véhicule homologué. On a homologué... véhicules, importé par bateau, préparé, mis sur la route. On est en train d'ouvrir un garage, un concessionnaire pour les autobus, pour camions et pour les voitures taxis. C'est ça que je veux amener, une économie verte ici, mais on dirait qu'en arrière il y a toujours quelqu'un qui me retient.

La même chose, on me demande une garantie de prêt. S'il n'y a pas de garantie de prêt, oubliez ça, là. Demain matin... un taxi, il n'y a pas de voitures qui vont rentrer ici. Mais je ne vois pas pourquoi le ministère de l'Économie attend aussi longtemps que ça, il n'y a pas de perte là-dessus. Le gouvernement garantit le prêt? Il n'y a pas personne qui ose ne pas payer, je peux vous le garantir.

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup. M. le député de Bourget.

M. Campeau : J'aimerais revenir sur ce que vous avez dit par rapport à la STM. Je ne mets pas en doute ce que vous avez dit. Mais, en même temps, on avait la mairesse de Montréal qui était là ce matin, puis ses objectifs sont non seulement en ligne avec ceux du gouvernement du Québec, mais encore plus élevés.

M. Cuong (Nhan Dung) : 55.

M. Campeau : C'est ça. Alors, je suis surpris. C'est comme si vous n'aviez pas parlé au bon moment à la bonne personne, je ne sais pas. Je suis étonné. Je n'ai pas de doute, mais, en même temps, j'ai l'impression qu'on relancerait ce sujet-là dans x semaines, et l'atmosphère va changer.

M. Cuong (Nhan Dung) : On n'a pas de temps d'attendre, il y a la rencontre le 4 février, ça passe ou ça casse. C'est que moi, je respecte toujours la hiérarchie. J'ai un département, qui est la division de transport adapté, qui était géré par M. Mario Gagnon. Il a quitté le poste il y a une semaine. Je me suis engagé à la conversion avec lui depuis à peu près un an et demi, deux ans. Il m'a référé avec Marie Hotte, de l'approvisionnement de la STM, on a échangé les conversations. Je lui ai expliqué comment qu'on peut faire pour favoriser l'utilisation des voitures électriques, taxis électriques qui ne coûtent rien. On a parlé... La dernière discussion qu'on a eue, c'était au mois de juillet, au début juillet. Après ça, on m'a répondu... J'ai demandé, ils m'ont dit que ce n'est pas possible de... faire. J'ai demandé un retour par écrit. On m'a demandé... on a retourné une lettre par écrit comme quoi ils sont pour le changement climatique, mais on n'a pas les moyens pour le faire. J'ai dit : Pardon? Là, j'ai reçu la lettre. Ce que j'ai fait... On a envoyé une demande de rencontre avec Valérie Plante, envoyée le mois de novembre. On a envoyé... on a toutes les dates. Après ça, je lui ai écrit un courriel, que j'ai besoin de vous rencontrer, c'est très urgent, en fonction de ce que vous avez déclaré à l'ONU. Hein, je pense que c'est clair comme ça : Il n'y a rien qui ne coûte pas une cent à personne. On nous a répondu : Elle est très occupée. C'est son conseiller qui va nous rencontrer le 4 février.

C'est pour ça que moi, je me suis dit : En toute sincérité, vous, les élus, vous devrez imposer. S'il n'y a pas l'imposition, il n'y a pas personne qui va participer avec vous.

M. Campeau : L'autre côté, vous parlez aussi que l'aéroport de Montréal était réfractaire. Je me demande encore pourquoi, parce que, dans le fond, pour un aéroport, c'est le nombre de voitures qui compte, puis que les gens sortent le plus rapidement possible. Est-ce qu'il y a un contexte particulier qui explique ça? Avez-vous une explication?

M. Cuong (Nhan Dung) : Moi, j'ai déjà eu un support de l'aéroport l'année dernière avant d'avoir les véhicules. On m'a déjà dit qu'il y a 50 véhicules qui vont rentrer à l'aéroport lorsque tu vas recevoir les véhicules. J'ai la lettre, là, je peux vous la donner.

Mais, malheureusement, et avec l'affaire de Huawei, au mois de novembre, décembre 2018, après... il y a le projet de loi n° 17, j'ai été obligé d'arrêter la livraison. Je ne sais pas ce qu'il va arriver. Et puis les prêteurs, ils disent : Non, non, non, moi, je ne te prête plus. Là, j'ai arrêté... livraison. Après, suite à consultations de la loi n° 17, là, j'ai compris c'est quoi, la loi n° 17. Il faut aller de l'avant. C'est à cause de ça que la loi n° 17... Lorsque la loi n° 17 a passé, j'ai donné la commande tout de suite, parce que je crois, je crois que la loi n° 17 a été nécessaire pour moderniser l'industrie. À partir de là, j'ai donné la commande, les véhicules sont rentrés le 22 novembre.

Là, j'ai recontacté la STM, je l'ai rencontrée vendredi dernier. On m'a dit catégoriquement : Il n'y a rien à faire pour le moment, et puis nous, on ne sait pas où on s'en va, on ne sait pas où la loi va nous amener, qui va stationner là. On va te donner des nouvelles au mois de mai, de juin. Mais, écoutez, là, l'année dernière, vous avez dit oui, puis, cette année, vous avez dit non. J'ai dit : Avez-vous une raison particulière que vous dites non? Ça ne vous coûte rien. Si vous dites que moi, j'ai besoin... 100, 200 véhicules électriques sans tirage, ça nous permet de faire... planning. Si vous me dites, au mois de juin : J'ai besoin... 100 véhicules, où est-ce que vous voulez que j'aille chercher les 100 véhicules? Il faut que je planifie pour faire entrer 50, 50, 50 pour mettre sur la route d'ici jusqu'au mois de septembre, ça va être prêt au mois d'octobre, novembre. Le contrat de commande, les véhicules électriques rentrent dedans. C'est tout ce que je demande, qu'ils me confirment au plus tard février, mais on m'a refusé, qu'il n'y a rien à faire pour cette année. J'étais tellement surpris!

C'est la raison principale que je suis là pour vous dire : Ça ne peut pas fonctionner. Avec les organismes gouvernementaux qui ne participent pas, je me demande comment vous allez faire participer les privés. Impossible, impossible. Avec les privés, là, on est capable de faire...

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup, M. Cuong. Je cède la parole à Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : ...en fait, ça va être mon collègue le député de Jacques-Cartier.

Le Président (M. Polo) : Ah! le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley : Merci. Merci beaucoup pour votre présentation. Et je me souviens, quand vous avez présenté...

M. Cuong (Nhan Dung) : En transports?

M. Kelley : ...exactement, en transports, concernant le projet de loi n° 17, nous avons eu des discussions avec vous autres puis aussi avec M. Péladeau, concernant le Fonds vert puis la stratégie de la mobilité durable.

Juste une question : Est-ce que le projet de loi n° 17 a répondu à tous vos besoins? Parce que c'est... on a un petit peu dit : Bien, on va discuter ça dans d'autres étapes aussi, mais après, avec le produit final, est-ce que vous êtes présentement satisfait avec ça, et aussi sur les éléments qui touchent plus l'accessibilité au financement pour vous?

M. Cuong (Nhan Dung) : Mais ce que va amener la loi n° 17, à mon avis, c'était nécessaire, c'est parce que c'était tellement d'illégal avec le fameux Uber. Moi, je n'ai jamais... peur d'Uber, quoi que ce soit, je vous l'ai dit déjà, j'ai déjà une application pour les véhicules électriques. La minute que j'ai une flotte électrique, je lance l'application, c'est seulement les voitures électriques. Je n'ai aucune peur de ça.

Ça prend une modernisation, hein? On s'est parlé déjà, il faut aller de l'avant. Mais, maintenant, c'est la forme comment qu'on est arrivé. De toute façon, la loi a été votée. J'aurais souhaité qu'ils payaient la valeur marchande de tout le monde en engageant 1,3 milliard, puis, en échange, l'industrie s'engage à électrifier 2 000 véhicules en deux ans, trois ans. Tout le monde est gagnant. Malheureusement, ça n'a pas tourné de cette manière-là, et puis le gouvernement a décidé de rembourser la valeur comptable. Mais il y en a qui sont gagnants, d'autres qui sont perdants, on ne peut pas dire... mais il y a sûrement les anciens qui y ont mis leurs corps, leurs âmes qui travaillent dans l'industrie, ces gens-là sont foutus, ça, je peux vous le dire. Mais ceux... qui ils ont payé les 240 000 $, ils sont sauvés. Ils sont sauvés dans un sens, parce que ces gens-là vont éviter la faillite.

• (15 h 20) •

C'est pour ça qu'il ne faut pas dire que... la loi n° 17 est-u bénéfique ou non? Mais c'était nécessaire pour aller de l'avant. Mais, malheureusement, dans toutes les lois, dans tous les changements dans la société, il y a toujours les gagnants puis les perdants. C'est dans ce sens-là. Puis moi, je me suis dit qu'il y a... Par contre, il y a une chose très négative pour l'industrie avec cette loi-là, c'est que la valeur... Ce n'est pas nécessairement que... Je ne peux pas dire que c'est négatif, 100 %, c'est juste le contexte qui était comme ça. Vu que le permis n'a aucune valeur, ça empêche les prêteurs de prêter l'argent pour acheter les véhicules. C'est aussi simple que ça. FinTaxi va fermer la porte au mois de juin — c'est un des joueurs pour l'industrie du taxi — puis Desjardins a fermé la porte. Bien, ça veut dire que... on change quelque chose. On tire une balle dans nos pieds. On n'est pas capable de moderniser, puis les chauffeurs vont être obligés d'acheter des minounes. Ça veut dire, dans l'autre côté, on va accélérer l'électrification.

Je vous donne tellement un exemple concret, là, M. le ministre, c'est très important avant que j'oublie. Desjardins a installé quatre postes de recharge rapide à l'intérieur du complexe Desjardins... à côté. C'était excellent. Puis ils se plaignaient qu'il n'y avait pas assez d'utilisateurs, à Hydro-Québec. C'est vrai, il est installé, puis il n'y a pas de monde qui l'utilise. Depuis que j'ai mis les 21 véhicules sur la route, ça a envahi toutes les bornes, puis ça surcharge, il n'y a plus de place. C'est bon pour l'économie québécoise, c'est l'hydroélectricité. Malheureusement, il y a beaucoup de gens comme la STM, l'aéroport... ne voient pas ça, ne voient pas que c'est important pour le Québec d'aller de l'avant... l'électrification, parce que je commence à préparer pour faire entrer les camions de vidanges électriques. On ne compétitionne pas avec nos compétiteurs ici. Lorsqu'on a un produit ici, je ne vais pas faire entrer, je vais faire entrer les produits qui n'existent pas. On va s'associer avec ces compagnies-là pour implanter quelque chose ici, mais à condition qu'on ait du volume. Lorsqu'on a du volume, on n'a pas à investir. Je n'ai pas à investir avec les compagnies pour s'installer ici, parce que j'ai du volume.

Pour avoir du volume, travaillons ensemble, collectivement ensemble. Combien d'autobus électriques? Regarde, la STM puis le RTM... commencer avec les voitures électriques, les autobus électriques. Les camions, camions vidanges, les camions de travail, les taxis, les véhicules... Ensemble, mettons, on a 5 000 véhicules en cinq ans, six ans... installe une usine...

M. Kelley : Merci beaucoup. Juste une autre question, rapidement. Pour vous autres, recharger une auto, c'est un coût, c'est comme... Comme moi, j'ai un char électrique. Alors, chaque fois... je mets ça dans la borne, il y a un prix, et tout ça. Mais, maintenant, on va payer plus pour notre électricité, ça va être fixé... le taux d'inflation. Ça va être 6 % sur plusieurs années, si on fait le calcul. Est-ce que ce 6 % là, c'est un défi vraiment pour vous autres? Parce que vous avez déjà expliqué que vous avez plusieurs, plusieurs problématiques devant vous de vous assurer que votre entreprise est rentable. Alors, l'augmentation du prix de l'hydroélectricité chaque année, est-ce que ça, c'est une problématique pour vous autres, ou est-ce que vous êtes contents avec le fait qu'il y a un taux qui est fixé à l'inflation?

M. Cuong (Nhan Dung) : Je vais vous répondre tout de suite. Les véhicules ne m'appartiennent pas, je suis un concessionnaire, je vends les véhicules aux chauffeurs. C'est les «end users» qui sont frappés s'il y a une augmentation ou non. Actuellement, avec le prix de l'électricité au Québec, je peux vous dire tout de suite, là, je meurs de rire avec ça. Ça ne coûte pas cher : 0,07 $ le kilowatt, 0,07 $, 0,08 $ le kilowatt. Le véhicule, c'est 90 kilowatts. La batterie, c'est une batterie commerciale que je vends, c'est une batterie comme les autobus. Les Tesla, c'est 65; les Bolt, c'est 56; ça, c'est 90, qui tire 6 000 livres. Et puis, pour... C'est une batterie de phosphate, fer, lithium. Ça prend plus de charge pour tirer, c'est normal. Pour charger 450 kilos par jour, c'est entre 6,50 $ et 7 $. Ça vous donne une idée. C'est quand même très raisonnable.

Par contre, tous les jours, je fais les... J'ai recueilli les données depuis qu'on a mis les voitures-taxis sur la route. À tous les jours, en hiver, ils doivent charger, minimum, en moyenne, à l'année longue, si on calcule, entre 30... et une heure de charge par jour pour pouvoir continuer, parce qu'il y a du chauffage, il faut qu'ils allument le chauffage. Donc, c'est pour ça que, moi, dans mon mémoire, je me suis dit que, si on veut aller de l'avant, on propose que le FECC va donner à ceux qui sont capables de quantifier la réduction du nombre de tonnes. Bon.

Selon mes calculs... On a installé un module de contrôle «fleet management» dans le véhicule électrique. J'ai accès... le rapport, combien de kilomètres parcourus. À partir... le kilomètre, on donne... On ne donne pas n'importe quoi, on donne 0,06 $, taxes incluses, par kilomètre parcouru. Ça, c'est le plus juste. Tant et aussi longtemps que tu roules sans émissions, je te paie. Bien, cet argent-là, ça va redonner aux chauffeurs... ça va les aider de faire beaucoup de choses. Ça va les encourager encore plus d'aller vers l'avant... l'électrification, parce qu'ils paient la recharge, parce qu'ils utilisent la recharge rapide tous les jours. Ils ne peuvent pas charger tous à la maison pour retourner quatre heures, c'est impossible, il faut qu'ils aillent dans les postes de recharge quelque part. Avant-hier, il faisait tellement froid... on courait partout pour trouver les bornes, tout est full. Il y a les bornes qui sont brisées lorsqu'il fait froid.

Ça vous donne une idée que c'est excellent pour Hydro-Québec, qui va installer les 1 600 bornes. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à l'aéroport de me laisser deux, trois places pour faire le projet pilote afin de recueillir les données : lorsque les gens travaillent à l'aéroport, combien de charges qu'ils ont besoin par jour, qui me permettent de faire une suggestion à Hydro-Québec : si c'est 100 véhicules électriques de taxi... travaillaient à l'aéroport, on a besoin... tant de bornes pour installer dans les endroits stratégiques. On m'a refusé. Croyez-vous ça? On m'a refusé : Bien, ça ne donne rien qu'on vous laisse la place pour recueillir les données. Mes deux bras sont tombés! Là, je suis en train d'appeler M. Marc Garneau, j'ai besoin de lui parler. C'est incroyable, là! Je veux avoir les données pour pouvoir installer les bornes, c'est bon pour Hydro-Québec, c'est bon pour nous, pour la province au complet c'est bon, l'électrification, on me refuse.

Vous me demandez la raison. Bien, il faut demander le P.D.G. de l'aéroport : Quelle est la raison... tu refuses? C'est ça qu'on a commencé à demander, qu'il nous réponde pour quelle raison, pour que je puisse cogner la porte à Justin Trudeau.

Le Président (M. Polo) : Mme la députée, non? Oui.

Mme Montpetit : Merci, monsieur, d'être avec nous. Éloquente présentation, je vous remercie. C'est très...

M. Cuong (Nhan Dung) : Ce soir, je vais rester, hein?

Mme Montpetit : C'est très, très clair. J'aurais juste une question, parce que vos points étaient, justement, très bien définis. Je vous en remercie.

Vous avez mentionné, dans le fond, que 43 % des sommes devraient être dédiées à l'électrification des transports, parce que ça reflète, justement, le poids que le transport représente au niveau des émissions de GES, donc de faire une adéquation entre le financement et la proportion que ça occupe. Mais je présume que la suite de votre réflexion, ce n'est peut-être pas que cette adéquation-là aille à la baisse, j'imagine que c'est un plancher, le 43 %, ou est-ce que vous suggérez qu'au fur et à mesure que le transport prendrait... baisserait, vous suggérez également de baisser la proportion qui serait donnée à l'électrification?

M. Cuong (Nhan Dung) : Exactement.

Mme Montpetit : O.K., d'accord.

M. Cuong (Nhan Dung) : Il faut aller en proportion. Si on baisse, on baisse. Mais, faites attention, je ne suis pas là pour vous dire d'utiliser le FECC pour aller aider les entreprises à démarrer le modèle d'affaires, ce n'est pas pour le développement d'affaires. Je n'ai jamais demandé ça, j'ai dit simplement que le FECC doit être utilisé directement aux «end users». Ceux qui ont les flottes, tu réduis tant de tonnes de gaz à effet de serre, tu as droit... tant, ça incite tout le monde à changer; si c'est les chauffeurs, on fait la même chose; si c'est les livreurs, on fait la même chose. Je ne demande pas qu'on donne... des compagnies pour développer leur plan d'affaires, le démarrage du plan d'affaires, là, pas du tout.

Mme Montpetit : Parfait. Bien... Alors, merci beaucoup.

Le Président (M. Polo) : Merci. Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Merci. Merci pour votre présentation. On s'était aussi rencontrés lors de l'étude du projet de loi n° 17.

C'est ça, vous dites que le projet de loi, il peut faire des gagnants, des perdants. Mais, malheureusement, c'est entre les mains aussi du gouvernement, trouver des solutions pour que les chauffeurs les plus vieux, que je continue à rencontrer, qui, eux, sont dans la dèche, là, comme vous avez dit, puis qui doivent continuer à travailler...

Justement, une des inquiétudes qu'on avait, c'était que tous les efforts qui avaient été faits par l'industrie d'avoir beaucoup de voitures hybrides — je pense que c'était 50 % des voitures hybrides, là, on n'est même pas dans les voitures électriques — on avait peur qu'il y ait un recul, puisque n'importe qui avec sa voiture à essence pouvait conduire. Vous, ce que vous dites, c'est qu'il faut instaurer le fameux programme de prêt... de garantie pour les propriétaires de taxi. Vous parlez des fameux 8 000 propriétaires de permis qui ne valent plus rien aujourd'hui, ou vous dites : tous ceux qui doivent faire du transport de... qui veulent faire du transport de personnes avec Uber ou autres?

M. Cuong (Nhan Dung) : Je ne parle pas d'Uber, je parle des taxis, je parle des taxis professionnels avec le dôme...

Mme Ghazal : O.K., ceux qui ont un dôme puis qui vont rester.

M. Cuong (Nhan Dung) : ...bien, parce qu'Uber... 80 % des Uber, ils travaillent... c'est des temps partiels avec leur véhicule...

Mme Ghazal : Exact.

M. Cuong (Nhan Dung) : ...ils ne stationnent pas sur le stand. Il ne faut pas créer un programme pour ça, là...

Mme Ghazal : Exactement.

M. Cuong (Nhan Dung) : ...sinon ça ne finit plus, tout le monde déclare, comme Uber, d'avoir un prêt.

Mme Ghazal : Non, mais je voulais être sûre. Moi, ce n'est pas quelque chose auquel je... Mais, en fait...

M. Cuong (Nhan Dung) : Non, non, c'est seulement pour les taxis.

Mme Ghazal : En fait, pas la garantie de prêt, mais que les véhicules... soit exigé qu'ils soient électriques, oui, ça, c'est quelque chose qu'on demande, on a obtenu des pourcentages extrêmement minimes, mais pas les garanties de prêt.

Puis vous avez... Pour, justement, les garanties de prêt, vous êtes en discussion avec le ministre de l'Économie et de l'Innovation.

M. Cuong (Nhan Dung) : Ça fait depuis...

Mme Ghazal : Sur ça, vous êtes rendus où? Parce qu'on a son collègue le ministre de l'Environnement...

• (15 h 30) •

M. Cuong (Nhan Dung) : Depuis le mois de juillet, là, puis on attend toujours. Puis j'ai pris l'initiative de faire entrer les 25 puis j'ai dit : Écoutez, je montre notre savoir-faire. On fait quelque chose pour le Québec ici, ça ne coûte rien. O.K., ce n'est pas nécessairement rentable de faire rentrer 25, hein? Vous savez très bien. Ça prend beaucoup de volume avec des véhicules pour que ce soit rentable, mais on a pris nos risques. Ça, ça fait partie de nos gènes en affaires. On a pris notre risque, on l'assume. Mais on ne peut plus aller plus loin. Si on n'a pas ce programme-là, je peux vous garantir, il n'y en a plus, de taxis, qui vont rentrer ici sans programme de garantie de prêt.

Mme Ghazal : Puis donc vous dites que vous n'avez pas encore de réponse depuis le mois de juillet ou est-ce qu'il y a quand même une ouverture dans le bureau?

M. Cuong (Nhan Dung) : Très réticent. C'est très réticent, très résistant, une grosse résistance de ça. C'est pour ça que je demande, M. le ministre, de votre intervention. C'est très résistant.

Mme Ghazal : Parce que, déjà, c'est ça, d'avoir ces 8 000-là, c'est déjà 8 000 voitures...

M. Cuong (Nhan Dung) : Tout de suite.

Mme Ghazal : ...hybrides ou à essence qui vont devenir électriques, donc.

M. Cuong (Nhan Dung) : En passant, juste pour vous dire que la Prius, ils ont rappelé la fabrication.

Le Président (M. Polo) : Très rapidement. Merci.

M. Cuong (Nhan Dung) : Il n'en a plus arrivé.

Le Président (M. Polo) : Merci. M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Merci, merci beaucoup pour votre présentation. Êtes-vous en région?

M. Cuong (Nhan Dung) : Non, je suis à Montréal pour le moment.

M. Gaudreault : Mais... C'est ça, donc. Mais je voudrais savoir un peu, parce qu'effectivement c'est important de réduire les GES à Montréal et de changer la flotte automobile à Montréal... Mais il y a des taxis partout sur le territoire québécois.

M. Cuong (Nhan Dung) : Actuellement, c'est que ma capacité, on a déjà parlé, Québec, ma capacité, c'est les 25 premiers pour Montréal. C'est comme un genre de projet test, et puis combien de fois qu'on charge. Là, ça roule. On n'a pas dormi pendant trois semaines pour éduquer nos chauffeurs. Puis ça, c'est l'expérience qu'on reçoit pour pouvoir mieux préparer dans les régions, parce que les régions, le kilométrage parcouru est différent. Donc, avant de faire quoi que ce soit, il faut s'assurer d'avoir une borne. Sinon, là, on va tomber dans les mêmes problèmes.

À Montréal, au début, j'ai déjà eu le problème. Ce n'est pas le problème véhicule qu'on a eu, c'est le problème de la panique des chauffeurs. Entre autres, ils sont habitués de mettre des 140 $, 150 $ par jour. Là, ce qui arrive : Hé! ça chute, le chauffage. C'est sûr, on a donné le véhicule le 15-16; le 17, 18, 19 décembre, il faisait moins 30 °C la nuit, le jour. On n'a pas dormi, le téléphone sonne à tous les jours, tout le monde panique.

M. Gaudreault : Mais c'est la meilleure façon d'apprendre, hein, quand on est plongés... C'est mieux en décembre qu'en juillet pour vraiment apprendre la réalité de la conduite électrique au Québec, là. C'est ça.

M. Cuong (Nhan Dung) : Bien, vous avez 100 % raison, parce qu'on m'a demandé : Pourquoi tu fais rentrer en hiver? Regarde, j'ai dit, si je fais rentrer en été, vous allez dire que je vais voir l'hiver...

M. Gaudreault : Ça, c'est comme quand on veut apprendre à nager, là : on est mieux dans une piscine que dans un bain.

M. Cuong (Nhan Dung) : Exact.

M. Lopez (Pierre) : Excusez, si je peux me permettre, là-dessus, un petit commentaire, on sait aussi qu'il y a de l'intérêt, là, pour travailler avec des compagnies de taxi à travers le Québec au complet, il y a des compagnies qui nous ont appelés pour dire : Quand est-ce que vous allez venir vous présenter chez nous avec un modèle qu'on puisse l'observer? Je pense, entre autres, à Trois-Rivières, je pense à Drummondville. C'est sûr que plus loin on va en région, plus les distances sont grandes, plus le froid, il est présent, plus il va y avoir une réticence, probablement, à faire ce type de changement là, là. Et Sept-Îles, ça va peut-être être un petit peu plus long.

M. Gaudreault : Oui, pas tant, pas tant. On vous attend au Saguenay. Vous allez voir, ce n'est pas si froid que ça, puis on est... il y a de l'asphalte.

M. Lopez (Pierre) : Mais Saguenay... Non, non. Effectivement, on connaît très bien les compagnies au Saguenay puis on est certains qu'il y en a certaines là-dedans qui seraient intéressées à aller de l'avant.

Le Président (M. Polo) : 30 secondes.

M. Gaudreault : La modification que vous demandez à la loi sur les véhicules zéro émission, pouvez-vous nous en parler un petit peu plus? Parce que, là, tant qu'à ouvrir la loi, on peut en profiter pour passer des messages ou faire des amendements, là.

M. Cuong (Nhan Dung) : Quelle est votre question?

M. Gaudreault : Votre recommandation 9 : «Que soient alloués des crédits d'impôt aux fournisseurs et distributeurs de véhicules électriques, par le biais de la loi visant [...] les véhicules automobiles zéro émission...» Donc, ça, c'est...

M. Cuong (Nhan Dung) : O.K., mais c'est très simple.

Le Président (M. Polo) : Très rapidement.

M. Cuong (Nhan Dung) : Un exemple, comme je vous ai dit, nous, on a pris le risque pour partir en affaires. On ne demande pas de subvention, on ne demande rien. Mais, si le Fonds vert est là pour aider les entreprises, je pense que ceux qui ont les initiatives pour électrifier leur flotte de véhicules peuvent obtenir aussi un crédit d'impôt sur forme, là. Ce n'est pas moi qui vais décider c'est quoi. C'est juste une proposition.

Le Président (M. Polo) : Merci. Merci beaucoup, M. Cuong. Merci aux représentants de E-taxi.

On va prendre une pause. On va inviter les gens du Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec à poursuivre.

(Suspension de la séance à 15 h 34)

(Reprise à 15 h 37)

La Présidente (Mme Grondin) : Donc, nous reprenons les travaux. À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du regroupement des CRE du Québec. Je vous rappelle... Je vous invite d'abord à vous présenter, mais je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons, par la suite, aux échanges avec différents groupes parlementaires. Donc, la parole est à vous, et bienvenue à nouveau à l'Assemblée nationale.

Regroupement national des conseils régionaux
de l'environnement du Québec (RNCREQ)

M. Brochu (Gilles) : Merci, donc, Mme la Présidente, M. le ministre et les membres de la commission, merci de nous accueillir et de nous écouter aujourd'hui. Je suis accompagné par Marie-Philippe Chouinard, qui est ici, notre analyste au Regroupement national des conseils régionaux en environnement, ainsi que de M. Martin Vaillancourt, qui est directeur général du Conseil régional de l'environnement de Chaudière-Appalaches. Personnellement, je suis président du Conseil régional de l'environnement du Centre-du-Québec.

Donc, en ce qui concerne les conseils régionaux, depuis près de 35 ans, nous existons. Ça a commencé un peu partout, dont au Lac-Saint-Jean, et maintenant nous sommes 16, un par région administrative, sauf pour le Grand Nord du Québec. En ce qui concerne ces conseils régionaux là, nous nous sommes regroupés en 1991 pour devenir le Regroupement national des conseils régionaux en environnement... pour mission de contribuer au développement et à la promotion d'une vision nationale de développement durable du Québec et de représenter l'ensemble des CRE et d'émettre des opinions publiques en leur nom.

Aujourd'hui, le projet de loi nous propose des mesures qui vont dans le sens d'une amélioration de la gouvernance dans son ensemble, ce qui est très bien. Toutefois, à la lecture du projet de loi, on s'interroge sur certains volets. Donc si vous permettez, on va en discuter. Il y en a six grands.

Le premier, c'est le pouvoir au ministre de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. Le projet de loi modifie l'article 10 du ministère du Développement durable et de l'Environnement. Et il est écrit que le ministre est d'office conseiller du gouvernement sur toute question qui concerne la lutte contre les changements climatiques — bravo — et il en assure la gouvernance intégrée à l'échelle gouvernementale, ce qui est excellent. Le ministère assure la cohérence et la coordination des politiques, des plans d'action, des programmes, des processus de concertation et autres mesures du gouvernement, des ministères et des organismes publics.

• (15 h 40) •

Toutefois, si le gouvernement accorde au ministre de l'Environnement cette gouvernance-là intégrée des différentes mesures ainsi que la cohérence, la coordination notamment des politiques, des plans d'action et des programmes, il va de soi que les avis qu'il peut émettre pour favoriser la lutte contre les changements climatiques et les directives qu'il peut donner aux ministères et aux organismes publics sont limités et sont nettement insuffisants, car ils ne sont pas exécutoires, ce sont des avis. Pour s'assurer que le ministre participe activement aux intérêts supérieurs de la lutte contre les changements climatiques, tel que déclaré par le gouvernement à l'Assemblée nationale sur l'urgence climatique au mois de septembre 2019, le rôle de gouvernance intégrée à l'échelle gouvernementale attribué au ministre devrait être appuyé par le Conseil exécutif pour confirmer l'importance et la priorité accordées à la lutte contre les changements climatiques. En effet, le Conseil exécutif doit, entre autres, établir une coordination interministérielle et assurer une cohérence entre les différentes actions du gouvernement. Il serait donc logique que la lutte contre les changements climatiques ait son propre secrétariat pour appuyer le ministre. D'ailleurs, le Conseil exécutif a déjà pris sous son aile certains dossiers prioritaires, nommons celui-là de la jeunesse et les affaires autochtones, en créant des secrétariats de mission pour chacun d'eux afin d'assurer une coordination interministérielle.

Dans un objectif d'imputabilité, les cibles de réduction devraient être inscrites dans la loi. Le ministre aura alors un objectif concret à respecter et assurera une cohérence entre les différents plans d'action. Des cibles intermédiaires devraient également être déterminées. Celles-ci permettront un suivi rigoureux et d'évaluer les impacts et les décisions de l'atteinte de ces objectifs.

En ce qui concerne le deuxième point, le comité consultatif, l'expérience a démontré que les administrateurs d'un organisme, peu importe l'organisme, soit un organisme commercial, un organisme sans but lucratif, etc., ou gouvernemental, peu importe sa structure, doivent avoir les compétences requises pour assurer leurs mandats respectifs, sinon l'organisme ne pourra atteindre ses objectifs. On dit souvent que, dans une organisation, la ressource la plus importante, ce n'est pas l'argent, mais ce sont les ressources humaines. Effectivement, c'est capital. À l'article 15.0.2, il est dit que... on précise que «les membres doivent avoir collectivement une compétence et une expérience significatives et pluridisciplinaires en matière de lutte contre les changements climatiques et la majorité doit être issue du milieu scientifique».

Effectivement, comme on l'a mentionné, il ne faut pas se baser sur des rumeurs, sur des ouï-dire, mais vraiment sur des notions scientifiques reconnues mondialement pour viser juste, parce qu'on n'a pas une deuxième chance, tellement où est-ce qu'on en est rendus. Donc, des critères de sélection des membres du comité consultatif permanent devraient être mentionnés dans le projet de loi dans le but d'assurer un choix judicieux dans la composition des membres. De plus, afin d'assurer une indépendance et une transparence, il serait préférable que les membres du comité soient nommés par un comité de sélection qui pourrait être présidé par le Scientifique en chef du Québec. Le RN suggère que ce comité de sélection soit composé des membres du comité de pilotage qui a été mis en place lors de la tournée pour l'élaboration du plan d'électrification et des changements climatiques. Ce sont des acteurs provenant de différents milieux, connaissant bien la réalité des objectifs et que le gouvernement doit atteindre. Donc, on est en pays connu.

Il est dit également à l'article 15.0.3 : «Le comité a pour mission de conseiller le ministre...» Cet article aurait avantage à être bonifié en apportant quelques précisions sur la mission du comité consultatif. En effet, il serait pertinent de mentionner que le comité consultatif doit également veiller... l'atteinte des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Et, enfin, le comité consultatif permanent doit impérativement posséder les moyens d'accomplir sa mission. Ce dernier est le meilleur juge pour déterminer les ressources nécessaires afin de réaliser sa mission. Pour ce faire, un budget pourrait être alloué au comité, qui sera en mesure de gérer la répartition des ressources en fonction des travaux à accomplir.

Ce qui nous amène au troisième volet, le fonds d'électrification et de changements climatiques. Le projet de loi modifie plusieurs règlements qui régissent le fonds afin d'assurer une gouvernance adéquate du Fonds d'électrification des changements climatiques. Cependant, le RNCREQ se questionne sur le retrait ou le silence des deux tiers des sommes qui étaient déjà consacrés dans l'ancien article pour des mesures applicables au transport. Le RN aimerait réitérer, comme mentionné dans le mémoire sur le chantier du financement de la politique en mobilité durable et lors des consultations pour le Plan d'électrification et des changements climatiques, que l'électrification des transports devrait, avant tout, s'appliquer au réseau de transport collectif. Le changement du nom du Fonds vert indique évidemment que l'électrification est une priorité pour le gouvernement, mais il est essentiel que l'argent du fonds serve les intérêts collectifs avant, que ce soit en milieu urbain ou rural.

Comme on l'a mentionné à plusieurs reprises, il y a tellement de choses à faire, ça demande une somme d'argent phénoménale, donc il faudra prioriser les priorités prioritaires, un exercice très exigeant. Donc, c'est pour ça qu'on dit : Au moins qu'on cible le transport collectif qui va répondre à plusieurs besoins, aussi bien dans les villes, avec tout ce qu'on regarde comme pollution, qu'en région également. Quand on parle en région, vous avez dit, bien, transport collectif, on n'a pas besoin. J'ai demeuré à Sept-Îles, à Rimouski, à Rivière-du-Loup, et, lorsqu'il fallait se déplacer d'une municipalité à une autre, à l'époque Voyageur puis Orléans, tout ça, ça pouvait aller, mais c'était minimal, là, ça a tellement, tellement disparu que ce n'est pus efficace du tout, la même chose pour le train. Donc, ces différentes mesures là sont capitales, aussi bien en milieu urbain que rural.

Quatrième point : modification des responsabilités du Vérificateur général...

La Présidente (Mme Grondin) : M. Brochu, il vous reste une minute.

M. Brochu (Gilles) : Une minute?

La Présidente (Mme Grondin) : Oui.

M. Brochu (Gilles) : Bon, bien, en ce qui concerne le Vérificateur général, commissaire au développement, on trouve qu'effectivement c'est capital. Il faut donc que ça soit retenu. Puis une des choses qui a été mentionnée, c'est que les critères de gestion du fonds, par différentes études qui ont été faites, montrent qu'il y a quatre grandes catégories. Il faut établir des objectifs visant l'atteinte des résultats, établir un processus de sélection de projets, mettre en oeuvre un mécanisme de surveillance ou de suivi et diffuser des informations sur le fonds. Donc, j'aurais pu élaborer sur chacun, mais c'est capital, il ne faut pas en manquer un seul.

Ça nous amène au cinquième point : une gouvernance intégrée en matière de transition, d'innovation et d'efficacité énergétique confiée au ministère de l'Énergie et Ressources. Le regroupement est préoccupé par l'orientation proposée par le gouvernement quant à l'abolition du TEQ et à l'intégration de son équipe au ministère de l'Environnement... au ministère de l'Énergie et Ressources. Par contre, ça avait l'avantage qu'ils étaient dédiés à sa mise en oeuvre à temps plein, alors que, maintenant, si on l'intègre au ministère de l'Environnement, oui, il peut y avoir une influence importante auprès des autres ministères, ils vont parler comme d'égal à égal, mais la fonction publique, comme on le sait, ils veulent tellement bien gérer les sous que ça amène une lourdeur administrative. Donc, on doute, là, que ça pourrait être efficace.

Et, en fin de compte, au niveau du Fonds de la transition, de l'innovation et de l'efficacité énergétique, pour conclure, on recommande... les avis que le gouvernement lie à sa transition, innovation, etc., doivent inclure des activités visant à accompagner les collectivités et à soutenir l'innovation sociale ainsi que la mise en oeuvre de programmes d'accompagnement par des clientèles susceptibles d'être défavorisées par la transition énergétique. Le RN recommande donc le maintien des programmes qui visent à favoriser la concertation, l'éducation, la formation et la sensibilisation à la transition énergétique et la lutte contre les changements climatiques, car ceux-ci sont essentiels pour... et contribuent aux changements des comportements souhaités. On a beau avoir tous les programmes, si on n'a pas les ressources humaines qui suivent, ça nous cause des problèmes, et, à cet effet-là, le conseil régional de l'environnement, partout dans les 16 régions du Québec, travaille déjà dans ce sens, et il nous fera plaisir, bien sûr, de contribuer par la suite.

La Présidente (Mme Grondin) : Merci, M. Brochu. Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. M. le ministre, puisque vous avez accepté de donner du temps, vous avez donc 14 minutes.

M. Charette : Merci, Mme la Présidente. C'est la partie frustrante. Vous m'avez entendu le dire à quelques reprises depuis ce matin, les échanges sont malheureusement trop courts compte tenu de l'ampleur des discussions que nous pourrions avoir.

• (15 h 50) •

 Je tiens à vous remercier d'emblée, dans un premier temps, pour le rôle que vous avez joué au cours des derniers mois dans l'organisation de cette vaste consultation. C'est un petit peu... En fait, c'est peu habituel comme formule de consultation, ce qu'on a réussi à tenir. L'association, le ministère de l'Environnement, les chambres de commerce, votre regroupement, vous avez permis de vivre une très belle consultation, et c'est très, très précieux, les informations qu'on a recueillies pour la suite des choses pour l'élaboration de notre politique-cadre. Donc, déjà, merci beaucoup pour ce rôle-là.

Sinon, à travers ce que vous avez mentionné, plusieurs petites questions. Vous avez parlé notamment d'un secrétariat. Est-ce que ce secrétariat-là, c'est la continuité de TEQ tel que TEQ se vit actuellement? Est-ce que c'est indépendant? Parce que plusieurs des groupes nous ont apporté des suggestions par rapport aux modifications que nous proposons dans le libellé actuel du projet de loi. Est-ce qu'on voit un parallèle ou c'est deux choses complètement différentes?

M. Brochu (Gilles) : Bien, on n'aura peut-être pas le temps de rentrer dans la technicalité, mais je dois dire que le Conseil exécutif est là pour faire exécuter des décisions gouvernementales. Et, pour ce faire, si on pense au niveau de la jeunesse ou les milieux autochtones, tout le monde, tous les ministères ont des responsabilités partagées, mais personne ne met peut-être toute l'énergie nécessaire. Donc, le premier ministre avait décidé de créer ce secrétariat-là pour s'assurer que tous les ministères s'intègrent puis que la coordination existe bien.

Ça serait le même phénomène. Il ne faut pas non plus gonfler le Conseil exécutif. Mais ça pourrait être un secrétariat qui assure une coordination avec les ministères. Donc, exemple, vous envoyez un avis, comme c'est marqué dans la loi, à un autre ministère, automatiquement, le Conseil exécutif pourrait obtenir ça, s'il y avait un secrétariat, pour prendre connaissance de ça puis s'assurer que ça soit fait puis que les livrables avec les échéanciers soient respectés.

Il faut vraiment qu'on crée une force de frappe parce que tout ministre est égal aux autres ministères, chacun a sa responsabilité. Si on veut que notre ministre de l'Environnement puisse avoir tous les pouvoirs nécessaires pour que ça devienne vraiment une priorité, bien, à ce moment-là, il faut monter d'un cran au niveau du Conseil exécutif. Ça aurait pu être, comme on a parlé ce matin, là, d'un ministre d'État ou des choses du genre. Mais, pour ne pas créer trop de structure, je pense bien que le Conseil exécutif, c'est dans son rôle de faire ça.

M. Charette : Parfait. En fait, je posais la question, je voulais tout simplement comprendre s'il y avait un lien avec la transformation proposée à TEQ, mais je comprends que c'est deux mandats différents.

Sinon, au niveau des cibles, c'est un défi. Moi, je trouve qu'une cible de 37,5 % d'ici 2030, contrairement à ce qu'a affirmé ma collègue de Maurice-Richard un petit peu plus tôt, c'est excessivement ambitieux, donc on ne manque pas d'ambition. Mais, au niveau du regroupement, est-ce que vous avez une position sur l'état des cibles? Parce que, dans les faits, ce que beaucoup oublient, malheureusement, c'est que ces cibles-là ont été adoptées à l'Assemblée nationale, c'est un pacte, sans jeu de mots, avec l'organisation qu'on a reçue juste avant vous, c'est un pacte qu'on s'est donné, comme assemblée, on doit travailler à atteindre des cibles qu'on a tous reconnues. Donc, quelle est votre perception par rapport à l'ambition de la cible de 37,5 %?

M. Brochu (Gilles) : Bien, je pense que c'est une cible, mais minimale. Donc, il ne faudrait pas que ce soit en bas de ça et même plus. Donc, l'idéal, c'est de forcer un peu plus. Mais il faut que ce soient des cibles réalistes aussi. On connaît tout ce que ça demande comme orchestration pour la mise en oeuvre. Mais l'avantage qu'il y a, c'est que, si on a des cibles intermédiaires aussi, bien, si on l'atteint plus vite, à l'intérieur des 10 prochaines années, on peut augmenter, à ce moment-là, cette cible-là à 40 %, 42 %, 45 %.

M. Charette : Donc, on s'entend pour dire que c'est déjà très ambitieux, 37,5 %. Si on peut faire mieux, tant mieux, mais déjà c'est un défi important que d'atteindre cette cible-là. Et la façon d'y parvenir, c'est d'avoir un... je dis tout le temps un bulletin annuel en cours de route. Parce que les habitudes passées, c'était de se doter d'un plan d'action sur le long terme et laisser courir le risque que, 24 mois avant l'échéance, 12 mois avant l'échéance, on se rende compte que c'est impossible, d'où les deux mandats que l'on confie : un au Commissaire au développement durable, l'autre au comité.

Vous avez fait largement mention du comité, et je comprends les questionnements que vous avez soulevés. Maintenant, le défi, vous m'avez entendu un petit peu plus tôt poser la question, le défi, c'est de trouver la composition de ce comité-là. Tout le monde veut y être, hein? On comprend que c'est là où beaucoup de recommandations et d'évaluations vont se faire. Mais on ne peut pas non plus faire un comité composé de 20, 30 sinon 40 personnes ou même davantage. Quels sont les critères, selon vous... Vous étiez sur le point d'aborder la question tout à l'heure, la composition idéale serait laquelle, selon vous?

M. Brochu (Gilles) : Donc là, on parle de deux comités. Il y a le comité de sélection pour choisir, pour ne pas que vous soyez pris tout seul à identifier les meilleures personnes. Donc, on pensait que le Scientifique en chef puisse vraiment vous conseiller et vous assister pour trouver les meilleurs candidats et candidates là-dessus.

Maintenant, la composition en tant que telle, c'est sûr que ça peut varier. Il ne faut pas que ce soit un nombre trop nombreux, mais peut-être une dizaine de personnes, ça serait correct, du moment qu'il y en a la moitié qui viennent du monde scientifique et l'autre moitié viennent du monde... comment qu'on appelle ça, donc... la société civile, excusez.

M. Charette : En fait, on parle, depuis le début, de l'importance de la science pour qu'on soit guidés sur des avis qui aient toute la crédibilité nécessaire sur ces enjeux-là. Nous, c'est ce qu'on veut confirmer, une prépondérance de scientifiques. Ça n'exclut pas, naturellement, une représentation de la société civile. Cependant, elle est très large, la société civile. Hier, on avait un syndicat, notamment, qui veut y être, mais les autres syndicats souhaitent y être. Je vous donne les exemples des universités, qu'elles souhaiteraient toutes y être aussi. Donc, comment rallier un peu ou composer avec les attentes? On évoquait le comité scientifique lui-même, mais qui serait, lui, en lien avec la société civile, un petit peu à l'image de la consultation qu'on a tenue ensemble au cours des derniers mois.

M. Brochu (Gilles) : Je vais peut-être laisser Martin, puis je pourrai compléter.

M. Vaillancourt (Martin) : Effectivement, c'est toujours une question intéressante, de savoir qui de la société civile on peut convier à ce type de comité là. Mais je dirais que, dans ce cas-là, au-delà des connaissances scientifiques qui sont nécessaires, c'est aussi d'avoir une excellente connaissance de l'appareil de l'État. Donc, il y a des représentants de la société civile qui ont fait leur carrière parfois comme sous-ministre, parfois comme juge ou comme... en fait, d'anciens députés ou commissaires sur différentes commissions qui ont une très bonne connaissance de la capacité de l'État à mettre en oeuvre des programmes, à mettre en oeuvre des changements de société. Et c'est ces gens-là qui devront aussi conseiller le gouvernement sur la faisabilité de la mise en oeuvre des recommandations des scientifiques.

Donc, je ne cherche pas à placer, là, des représentants de l'industrie ou des groupes d'intérêt en particulier, là. Je cherche davantage quelqu'un qui a à coeur la mise en oeuvre de ces programmes-là et avec une approche pragmatique et réaliste, là.

M. Charette : Qui a une connaissance, en quelque sorte, de l'application du développement de politiques publiques. Il faut avoir les idées, mais il faut pouvoir les implanter par la suite.

M. Vaillancourt (Martin) : Par exemple.

M. Charette : Il me reste un dernier petit point, parce que je sais que j'ai des collègues aussi qui souhaiteraient intervenir. Vous avez abordé la question de l'importance des transports. Nous en sommes. C'est effectivement, et de loin, le plus grand défi au Québec, compte tenu du pourcentage d'émissions reliées à ce secteur-là. Ce que j'ai eu l'occasion de mentionner à plusieurs reprises : On n'enlève pas le deux tiers. On se garde la possibilité de modifier ce pourcentage-là dans le libellé proposé dans l'actuel projet de loi, mais ce qu'on a déjà mentionné à plusieurs reprises, peu importe l'ampleur du FECC en termes de montants ou de sommes d'argent, ce ne sera pas suffisant à répondre uniquement aux besoins de transport que nous avons identifiés.

Donc, clairement, les deux tiers, ce n'est pas assez, mais la marge de manoeuvre que l'on se donne, c'est que ça ne doit pas être financé excessivement à travers le FECC pour se garder aussi une capacité d'action dans d'autres domaines, que ce soit énergie renouvelable, que ce soit développement de nouvelles approches technologiques. Donc, je tenais à vous rassurer à ce niveau-là. Le FECC en entier ne serait pas suffisant pour, justement, répondre à tous les besoins en matière de transport collectif. Mais il faut se garder une marge de manoeuvre. Là, on le transfère automatiquement. On y perd un peu au niveau des suivis, au niveau des résultats, et c'est ce qu'on souhaite changer pour avoir des résultats probants pour chaque dollar investi.

Là, j'ai mon collègue, je sais, de Bourget qui souhaiterait prendre la parole.

M. Campeau : Bien, premièrement, je salue l'idée de, quand vous parlez, d'un comité de sélection. Parce que j'imagine que la seule idée en arrière, c'est la transparence.

M. Brochu (Gilles) : Exact.

M. Campeau : Est-ce que ça devrait être par le Scientifique en chef? Peut-être, mais je pense que l'idée en arrière de vouloir être transparent par à ça, dans ce sujet-là et qu'on vise vraiment les bonnes personnes venant des bons milieux est intéressante. Quand vous mentionnez 10, je ne sais pas si c'est le bon nombre. C'est le chiffre que moi aussi j'avais en tête...

M. Brochu (Gilles) : C'est un ordre de grandeur.

M. Campeau : ...pour ne pas que ça soit trop gros.

L'autre, c'est un commentaire, mais j'aimerais vous entendre sur le commentaire. Vous avez parlé que les avis ministériels étaient non exécutoires.

M. Brochu (Gilles) : Oui.

• (16 heures) •

M. Campeau : Ce serait le fun si c'était exécutoire, s'il y avait un secrétariat qui s'occupait de l'aspect transversal, etc. Je trouve ça intéressant, c'est une approche intéressante. En même temps, je me dis, un avis ministériel exécutoire, ça veut dire qu'on donne un poids énorme à une seule personne. Moi, je me dis : on n'est pas dans... on est encore avec la carotte et le bâton, là. On est encore avec la carotte, à ce moment-là, pour convaincre. Et je me demande si ce n'est pas, justement, une bonne idée que cet avis ministériel ne soit pas exécutoire, mais que le pouvoir du ministre, c'est de convaincre. Alors, commentaires par rapport à ça?

M. Brochu (Gilles) : Je vous comprends, sauf qu'on a dit, puis l'Assemblée nationale l'a reconnu, il y a urgence au niveau de la lutte contre les changements climatiques. Donc, il faut rapidement que les directions qu'on veut prendre, les implications des ministres et ministères soient efficaces et rapides. Donc, je comprends très bien que chaque ministre a sa responsabilité, puis il n'a pas d'ordre à recevoir d'autres ministres, tu sais. Il fait son affaire puis il en a déjà plein son portefeuille. Sauf que là, là, on n'a pas le temps bien, bien de convaincre plus longtemps qu'il faut, parce qu'il y aura toujours du monde qui vont trouver des bonnes raisons pour retarder. Mais je pense qu'on ne peut plus retarder à ce niveau-là.

Donc, la notion d'avis est correcte, en général, mais là, dans la situation où nous sommes... C'est pour ça que moi, je me dis, bien, si l'avis reste là, au moins, que le Conseil exécutif soit là pour dire : Aïe! C'est sérieux, là. Il a dit un avis, mais, en réalité, tu le fais. Donc, c'est dans cet esprit-là qu'on voulait que le Conseil exécutif puisse intervenir pour rajouter une coche. Donc, le ministre pourrait regarder son avis, mais, comme il n'est pas exécutoire, si on veut qu'il s'exécute puis qu'il sente... que ça ne va pas tellement bien avec certains ministères, pour toutes sortes de bonnes ou de mauvaises raisons, peu importe... mais là le Conseil exécutif s'assure de la livraison du message.

M. Campeau : O.K. je vous entends. Vous avez parlé de l'importance du capital et de l'importance des ressources humaines. J'ai bien aimé le jeu de mots que vous avez fait et je pense qu'il n'était pas volontaire, mais il était quand même très bien, quand vous avez dit : Les ressources humaines, c'est capital. J'ai bien aimé.

M. Brochu (Gilles) : Oui, c'est la fusion de deux notions, hein?

M. Campeau : Dernièrement, vous parlez de la mission du comité par rapport qu'ils doivent veiller à l'atteinte des objectifs. Je suis surpris que vous ayez mentionné ça, parce que, dans ma tête, dans ma lecture du projet de loi n° 44, il ne fait pas que regarder un plan, mais c'est son but de valider, ils ont le droit, ils ont pleine latitude, ils vont même le rendre public, qu'ils veulent aller, justement, valider, si on est en direction pour atteindre nos objectifs. En tout cas, c'était ma compréhension.

M. Brochu (Gilles) : Bon, je vais laisser Marie-Philippe développer un peu plus, mais il ne faut pas oublier qu'on parle d'un comité consultatif. Permanent, ça, c'est merveilleux, mais consultatif. Donc, il a juste un pouvoir d'avis auprès du ministre. Ce n'est pas lui qui décide, ce n'est pas lui, l'élu. C'est le ministre. Donc, à ce moment-là, c'est bien important qu'au moins, dans son mandat il dit : Écoutez, M. le ministre, on a tel objectif à atteindre, puis je trouve que tel et tel programme serait mieux, donc, si vous vouliez bien procéder là-dessus pour atteindre lesdits objectifs. Sans ça, on parle pour parler, amicalement, puis on dit : Ce serait le fun qu'il y ait ci ou qu'il y ait ça. Donc, c'est pour ça qu'on veut que ce soit plus coercitif, d'une certaine façon, dans le sens positif du mot, que ça puisse toucher vraiment des cibles qui ont été fixées. Donc, mes commentaires porteraient là-dessus.

Je ne sais pas, Marie, si tu veux rajouter?

Mme Chouinard (Marie-Philippe) : Je dirais juste que, dans le fond, il faut vraiment que, dans le projet de loi, la mission du comité soit davantage définie et que ça soit vraiment plus précis qu'actuellement.

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup. Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Je vous remercie. Bonjour à vous trois, merci d'être là. Je vais continuer, dans le fond, sur cet élément-là. Je ne pensais pas commencer par ça, mais... sur la question du comité, comme on était sur cet échange-là. Vous parlez, justement, de préciser la mission. Vous parliez de préciser aussi... d'avoir des critères de sélection bien définis pour choisir les membres qui vont constituer le comité. Est-ce que vous aviez des éléments... Puis je pense que c'est vraiment de... une très bonne recommandation que ce soit... que tous ces aspects-là soient précisés, entre autres, c'est la moindre des choses, là, sur la mission et sur le rôle qu'il serait porté à jouer. Mais, sur la sélection des membres du comité, qu'est-ce que vous aviez en tête au niveau des critères?

M. Brochu (Gilles) : Bien, à titre d'exemple, ce comité-là, s'il veut bien jouer son rôle de façon transversale, il faudrait qu'il y ait un représentant qui... un scientifique ou du milieu société civile pour l'air, un autre pour l'eau, un autre pour le sol. Donc, que ce soient des critères... Et non pas un scientifique où... tous axés vers un volet seulement, mais vraiment sur les axes d'intervention. Donc, l'environnement, c'est l'air, l'eau et le sol, principalement, et on a des problématiques dans les trois cas. Donc, minimalement partant, il faudrait que les critères touchent ces notions-là. Je ne sais pas, toi, Marie, bien, tu as travaillé sur le dossier également...

Mme Chouinard (Marie-Philippe) : En fait, je dirais qu'il faut vraiment définir c'est quoi, les domaines d'expertise en fonction des politiques publiques qu'on met en place. Et, en même temps, bien, il faudrait vraiment les écrire dans la loi pour éviter... bien, justement, pour qu'il y ait plus de transparence puis éviter qu'on se tire dans toutes les directions, parce que l'environnement, c'est très vaste.

M. Brochu (Gilles) : C'est ça, il faut le recentrer, donc des critères sur les grandes préoccupations.

Mme Montpetit : Parfait. Non, mais vous avez... Je pense que, de toute façon, ce que vous proposez va dans la bonne... En partant, si tous ces aspects-là... si la mission n'est pas précisée encore, si on ne sait pas exactement ce qu'il va faire encore... est-il difficile... ou ça amène un certain flou sur la sélection des gens. Vous le dites bien, c'est un domaine, oui, qui est transversal, l'environnement, mais ce n'est pas l'environnement, effectivement, il y a des expertises très particulières que des chercheurs, que des scientifiques, notamment, ont développées. Je pense que c'est ces gens-là, mais encore faut-il définir ce qu'on veut à la fin. Je prends bonne note de cette recommandation, qui est fort pertinente.

Dans votre mémoire, puis je vous réfère à la page... bon, ce n'est pas très important, là, mais à la page 10, vous le connaissez de toute façon par coeur, là, mais je... Par rapport à l'abolition de TEQ, vous soulevez des préoccupations par rapport à l'orientation qui est prise par le gouvernement d'abolir TEQ et de l'intégrer à l'équipe du MERN. Puis je vais insister, parce qu'il y a quand même... Il y a plusieurs gens qui suivent les travaux de la commission qui n'ont pas nécessairement accès en temps réel. Vous savez, hein, les mémoires deviennent disponibles par la suite, là. Et donc vous dites, bon, que c'est... que «TEQ est un organisme relativement récent mais qui a été rapidement en mesure de proposer le Plan directeur en transition, en innovation, en efficacité énergétique du Québec 2018‑2023, qui a été préparé dans un large processus consultatif auprès de nombreuses parties. Puis le plan a le mérite de proposer 225 mesures qui seront mises en oeuvre au cours des cinq prochaines années du plan, ainsi qu'une quinzaine de feuilles de route pour atteindre les objectifs à l'horizon de 2030.» Vous mentionnez que «TEQ a su jusqu'à maintenant faire preuve d'efficacité dans la mise en oeuvre du plan».

Et ce que vous soulignez, dans le fond, fait écho et est très au diapason de ce que la plupart des groupes ont mentionné aussi, à savoir que c'est une société d'État, à l'heure actuelle, qui a fait ses preuves, qui a fait son travail. Donc, je me questionnais pourquoi vous n'aviez pas précisément recommandé que TEQ soit maintenu, à la limite, bonifié, avec des ressources supplémentaires ou avec une mission élargie, ce qui pourrait être le cas, hein, je pense que c'est évolutif. Mais vous n'avez pas spécifiquement recommandé son maintien, alors que vous en faites l'apologie assez ouvertement, là, dans votre mémoire, là.

M. Brochu (Gilles) : Je peux répondre... Ou veux-tu répondre, Martin?

M. Vaillancourt (Martin) : Je peux... En fait, on s'est questionnés. On est dans une situation où on cherche à obtenir un résultat. Donc, après, le choix des moyens peut être discutable.

Nous, ce qu'on a constaté, c'est que, depuis le peu de temps que TEQ existe, en effet, il a su démontrer une très grande efficacité. Les raisons pourquoi le MERN désire l'intégrer ne sont pas, en fait, complètement transcendantes à travers le projet de loi. Donc, la question demeure ouverte.

Notre principale préoccupation, c'est que cette intégration-là ne devrait pas ralentir la mise en oeuvre du plan d'action, parce que c'est le plan d'action du gouvernement du Québec, là, pas le... Oui, il a été élaboré et mis en oeuvre par TEQ, là, mais c'est bien celui du gouvernement. Donc, il faut que l'ensemble des actions et des programmes qui sont prévus se poursuivent. Et on n'a pas le luxe d'attendre. Et, si, effectivement, il y avait des délais qui étaient impartis parce qu'on change de structure administrative, ce serait, selon nous... En fait, il faudrait y réfléchir.

L'autre élément, TEQ et le plan directeur est en quelque sorte le bras agissant d'une partie de l'action environnementale en termes de changements climatiques du gouvernement. En l'intégrant au ministère des Ressources naturelles et de l'Énergie, c'est un autre ministre qui devient responsable de l'atteinte des cibles gouvernementales, donc associées au plan directeur. Pour nous, ça peut aussi amener une certaine confusion sur l'imputabilité de l'action gouvernementale en général.

Donc, là aussi, on croit, là, que le gouvernement aurait avantage à préciser comment il rend son action gouvernementale la plus cohérente possible, compte tenu qu'on a peu de temps collectivement, là, pour se mettre dans la bonne direction.

• (16 h 10) •

Mme Montpetit : Parfait. Bien, c'est ce qui rejoint, je pense, c'est ça, plusieurs propos qui ont été portés par d'autres groupes aussi, à savoir qu'on se... Je veux dire, il y a quelques mois à peine, puis je pourrais le mettre en semaines avec plusieurs s, mais, au début de la session de l'automne, l'Assemblée nationale a quand même déclaré l'urgence climatique, hein? Ce n'est pas... Je trouve qu'on n'en a pas parlé beaucoup. Je pense qu'on n'a pas saisi encore collectivement ce que ça veut dire. Mais l'Assemblée nationale du Québec, ses 125 parlementaires ont voté pour une motion et ont déclaré l'urgence climatique. Et je pense que le... On n'a pas pris la pleine mesure de ça encore à l'heure actuelle, puis je pense, dans les commentaires que vous faites, de dire... ce n'est pas idéologique sur la structure, mais c'est bien : Ne prenons pas de retard, assurons-nous que la proposition qui est faite... et vous soulevez des préoccupations par rapport à ça, comme d'autres l'ont fait sur les confusions de rôle, les confusions de missions, sur la perte d'agilité qu'on pourrait retrouver.

Et je réitère que la démonstration est faite, puis vous le soulignez, que TEQ fonctionne à l'heure actuelle, donc pourquoi changer des structures qui vont bien? Bonifions-les, si nécessaire, mais ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain.

Je note aussi avec intérêt que vous avez souligné... vous avez fait comme recommandation d'ajouter les cibles dans la présente loi. J'entends cette recommandation-là, je peux vous assurer que je la porterai aussi. Et, sur la question de... Je comprends que vous avez des préoccupations aussi sur le fait d'enlever l'obligation légale d'avoir le deux tiers du budget qui est dédié au transport. Vous avez entendu les différents groupes, dont la mairesse de Montréal, aujourd'hui, qui est venue parler de ça. Et je trouve que c'est fort à-propos de le souligner, particulièrement avec... médiatiquement, on parle beaucoup de transport collectif, en plus de ça, durant les derniers jours, et il faut donner encore plus un coup d'accélérateur. Le jeu de mots n'est vraiment pas très bon, là, mais ce n'était pas l'intention. Mais ce que je veux dire, c'est qu'il faut accélérer encore davantage les investissements qu'on fait en transport collectif, et donc il faut s'assurer que ce soit un plancher et que ce soit une obligation légale.

M. Brochu (Gilles) : C'est collectif, hein? Donc, le même dollar sert à plusieurs personnes au lieu de servir seulement qu'à une entreprise ou juste une voiture électrique, des choses du genre.

Mme Montpetit : Je vous remercie. Moi, ça va être tout, merci.

Le Président (M. Polo) : Mme la députée de Mercier. Mme la députée...

Mme Ghazal : Ah oui! Pardon. Bien, merci, merci beaucoup pour votre présentation. Je veux revenir rapidement, en fait, par rapport au... à ce que le fait... sur TEQ, parce que c'est quand même assez fort, ce qui est écrit dans votre mémoire. Vous dites que «l'intégration de TEQ au ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles est un facteur qui pourrait, à court terme, affecter la mise en oeuvre du plan et retarder l'atteinte des cibles fixées par le gouvernement et des résultats anticipés par le plan». C'est quand même fort. J'ai compris de votre réponse que vous dites : Bien, on ne comprend pas pourquoi est-ce que ça s'en va là. Nous, on trouve ça très risqué, mais c'est ce que le gouvernement fait. Sonnette d'alarme, faites attention, il ne faut pas que ça l'affecte.

On se pose la même question. Nous, on est d'avis de faire la même chose que ce que les gens ont proposé, d'avoir une société d'État indépendante, de sortir le politique. Mais, si on suit la logique du ministre, je me dis : Pourquoi c'est sous un autre ministre? Pourquoi ça ne serait pas comme le Fonds vert sous les mains du même ministre, qui serait le ministre de l'Environnement? Mais bon, on va avoir la possibilité de poser des questions là-dessus... Est-ce que vous vouliez dire quelque chose là-dessus?

M. Brochu (Gilles) : Oui, si vous me permettez...

Mme Ghazal : Oui, oui, allez-y.

M. Brochu (Gilles) : Deux choses à dire là-dessus. C'est que, si on est mitigés dans notre position entre le TEQ ou qu'il soit intégré au ministère des Ressources naturelles et Énergie, c'est que... c'est comme dans d'autres choses, je l'ai dit tantôt, dans toute organisation, peu importe sa structure intra ou extragouvernementale, ce sont les individus qui sont le capital le plus important dans nos ressources humaines. Donc, si on met des gens compétents dans un domaine puis qu'ils font une job, la structure, ils réussissent à s'adapter puis à faire qu'est-ce qu'il faut pour compenser.

À l'inverse, au ministère des Transports, par exemple, il y a eu le fameux programme sur la route verte. Donc, ce n'était pas une société d'État, c'est à l'intérieur de la structure puis, même, c'était régionalisé dans chacun des ministères en région. Donc, ce n'était pas une société d'État, mais, comme le programme était bien fait puis qu'il répondait à des attentes, tout le monde a embarqué là-dessus. Donc, ça dépend beaucoup, en fin de compte, là, c'est circonstanciel.

Mme Ghazal : Mais il y a quand même un risque qui existe puis que vous nommez bien. Rapidement, vous nommez les quatre critères pour que le Fonds vert soit géré de la bonne façon. Vous les nommez puis vous nous en donnez connaissance : Voici ce qu'il faut. Est-ce que le projet de loi n° 44, la façon que le Fonds vert va être géré, est-ce qu'il répond à ces critères-là, à ces quatre critères, selon vous?

M. Brochu (Gilles) : Bien, c'est-à-dire, il dit : une meilleure gouvernance, mais sans la préciser. Puis je trouve qu'en ce qui concerne le Vérificateur général, quand il a fait ses démarches, il a pu identifier ces critères-là. Et, dans nos recherches, on s'est rendu compte que plusieurs fonds répondent aux mêmes critères des fonds qui réussissent bien, qui fonctionnent bien. Donc, on s'est dit : Il faudrait que ces quatre critères-là soient reconnus. On a beau avoir des objectifs clairs, si on n'a pas d'argent, ça ne donne rien. Si on fait des choses, mais qu'on ne diffuse pas l'information, ça ne va pas bien non plus. C'est quatre piliers importants d'une saine gestion. Vous allez dire : C'est élémentaire. Oui, mais, même à ça, on a réussi à glisser à côté de certains cas.

Le Président (M. Polo) : Je vous...

Mme Ghazal : ...on n'a pas réussi.

Le Président (M. Polo) : Malheureusement, on a dépassé le temps.

Mme Ghazal : Très bien, merci.

Le Président (M. Polo) : Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons prendre une pause et...

Des voix : ...

Le Président (M. Polo) : Ah! excusez-moi. Je le sais, que ça allait arriver au moins une fois. La parole est au député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Alors, merci, M. le Président. M. Brochu, vous avez dit quelque chose de très important tantôt, vous avez dit : Tous les ministres sont égaux. Et là vous avez mis le doigt... vous avez formulé quelque chose qu'on... qui est comme un peu dans l'air, mais qui n'a jamais été nommé et qui incarne bien le problème de ce projet de loi.

Il y en a un ministre qui est plus égaux que les autres, c'est le premier ministre. Et là, quand on lit le projet de loi n° 44, dans le fond, les nouveaux pouvoirs qui seraient donnés au ministre sont diffus, parce qu'à l'article 10.1, par exemple, on dit : «Chaque ministre ou organisme public concerné demeure responsable du choix...» Après ça : «Le ministre doit être consulté...» Bon. Puis là il émet des avis. Après ça, à 12.1, on dit : «...le ministre peut donner des directives aux ministères...» Mais ça reste, bon, des directives.

Alors que ce dont on parle, en tout cas, certainement une partie de ce côté-ci de l'Assemblée, puis ce qu'on a entendu beaucoup dans les audiences, c'est qu'il faut que ça soit une loi plus, plus. Mais, de l'autre côté, ils ne sont pas dans le plus, plus. Ce n'est pas une loi ordinaire. Il faut que ça soit une loi extraordinaire, quasiment du statut d'une charte, ou quasi constitutionnelle pour obliger le respect et développer le réflexe climatique en fonction des projets qui sont déposés devant le gouvernement. Il y a un autre groupe qui parlait de réflexe climatique. Me trompe-je?

M. Brochu (Gilles) : Vous avez entièrement raison. C'est pour ça qu'on a dit que le Conseil exécutif, dont le premier ministre, devrait être impliqué pour être sûr que les livrables, les responsabilités demandées à chaque ministère soient exécutoires. Et non pas : Si on a le temps, si on a le budget, quand j'aurai la ressource, on n'a pas le temps. C'est des problèmes de temps, malheureusement.

M. Gaudreault : Parce que là, dans le fond, le ministre se donne beaucoup de pouvoir. C'est bien «cute» de donner beaucoup de pouvoir à l'environnement, mais il n'a pas plus de ressource pour convaincre les autres. À la limite, s'il y en a un autre qui est petit peu plus ministre que les autres, ou plus égaux, c'est le Conseil du trésor. Tant qu'à ça, j'aimerais autant que cette loi-là soit confiée au ministre du Conseil du trésor. Vous comprenez ce que je veux dire?

M. Brochu (Gilles) : Ah! très bien.

M. Gaudreault : Bon.

M. Brochu (Gilles) : Donc, d'où l'importance du Conseil exécutif, qu'il puisse intervenir pour s'assurer que ça soit la plus, plus, la loi la plus reconnue. Parce que, je ne sais pas, le ministère de la Santé est très important, puis il y a une somme phénoménale d'argent là-dedans, tout ça, sauf que, tant qu'on n'aura pas réglé certains majeurs en environnement, la santé va toujours continuer à se détériorer, puis il va falloir toujours investir de plus en plus. Donc, tant qu'on n'a pas réglé les prémisses de l'environnement, les autres ministères deviennent... sans être accessoires, là, sont dépendants de l'environnement.

M. Gaudreault : Exactement.

Le Président (M. Polo) : Donc, merci beaucoup, cette fois-ci pour de vrai.

Donc, nous allons prendre une pause de quelques instants afin de permettre à la l'Association du transport urbain du Québec de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 19)

(Reprise à 16 h 21)

Le Président (M. Polo) : Je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association du transport urbain du Québec. M. Marc-André Varin, directeur général, vous êtes accompagné de?

Association du transport urbain du Québec (ATUQ)

M. Varin (Marc-André) : Valérie Leclerc, qui est directrice aux relations gouvernementales et institutionnelles à l'association.

Le Président (M. Polo) : Bien, bienvenue. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à débuter votre allocution. La parole est à vous.

M. Varin (Marc-André) : ...un petit peu de transport collectif. M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, merci beaucoup de cette invitation à venir partager nos opinions, nos recommandations sur le projet de loi n° 44, qui concerne une source de financement qui est un outil essentiel à la mise en oeuvre des différents projets et mesures en transport collectif.

L'ATUQ, vous la connaissez, pour la plupart. Très rapidement, l'ATUQ, c'est les neuf sociétés de transport au Québec, mais ce que vous ne savez peut-être pas, c'est que, depuis octobre ou fin octobre début novembre maintenant, Exo, dans la grande région de Montréal, fait partie de l'association également. Alors, vous connaissez bien nos mandats et le rôle de l'association. Avec Exo, ça représente 99 % de l'achalandage du transport collectif, qui dessert à peu près 60 % de la population.

En fait, vous allez probablement reconnaître plusieurs des messages de notre mémoire et de mon intervention, car ils sont aussi ceux de plusieurs organismes qui collaborent depuis quelques années maintenant dans le cadre du comité de suivi de la Politique de mobilité durable, duquel je fais partie. Cet élément-là, cette politique-là, elle est clé pour nous, naturellement.

Pour les organismes de transport collectif, les projets sont nombreux et l'appui financier du gouvernement du Québec est essentiel pour les réaliser et ainsi atteindre les cibles que nous nous sommes données via la politique de mobilité durable. Ce soutien est déjà important mais, malheureusement, insuffisant si l'on veut atteindre les objectifs de la PMD. J'y reviendrai dans quelques minutes.

Le produit du marché du carbone, comme les autres sources de financement qui se retrouvent dans divers fonds et ensuite dans divers programmes — c'est la mécanique qui est en place — qui sont accessibles aux organismes de transport collectif leur permet plusieurs choses, entre autres, de réaliser des grands projets de transport collectif, comme ceux dans la région de Montréal, de Québec ou de Gatineau, de maintenir les actifs et, en fait, dans certains cas, de rattraper des déficits de maintien également, de développer les offres de services pour accélérer le transfert modal, ce qui aurait un effet direct sur les GES émis dans le secteur des transports, principal émetteur, comme vous le savez, d'électrifier les réseaux — on va en parler un petit plus tout à l'heure — de remplacer les autobus en fin de vie et d'en acheter plus pour augmenter les flottes. Les besoins financiers sont donc énormes.

Un estimé conservateur des besoins en immobilisation sur un horizon 2020‑2029, à peu près, chiffre à plus de 27 milliards de dollars, les coûts en immobilisation des projets qui sont liés aux activités que je viens tout juste de vous mentionner. À lui seul, le dossier de l'électrification, un dossier fort du gouvernement, naturellement, est à évaluer à un minimum de 1,5 milliard de dollars d'investissements requis pour les installations de recharge et les différents projets de garage, coûts qui doivent maintenant inclure les installations d'Hydro-Québec qui, aux dernières indications, dans nos dernières discussions, ne financera pas les équipements requis pour alimenter les garages des sociétés de transport.

Pour le parc de véhicules, l'estimation, sur la même période de temps, 2020‑2029, se chiffre à plus de 3 milliards de dollars. Ces chiffrent ne comprennent pas les augmentations des frais d'exploitation requis pour bonifier les offres de service, comme le requiert la politique de mobilité durable, l'offre de service, donc, augmentation de 5 % annuellement d'ici 2023, c'est ce qui est prévu.

Il ne fait aucun doute que le Fonds d'électrification et des changements climatiques est un outil essentiel à la réalisation de ses projets et sa gouvernance proposée, dans le cadre du projet de loi, pose des jalons importants pour les choix de financement, disons, plutôt des choix d'investissement qui seront faits dans le futur. Je ne crois pas nécessaire de faire un plaidoyer sur l'importance du transport en commun, du transport collectif pour améliorer notre bilan carbone et permettre l'atteinte des cibles de réduction de GES. Je pense qu'avec les indications qu'on reçoit du gouvernement et des différentes politiques... je pense que ce message-là est déjà bien clair, et on l'apprécie beaucoup.

Le transport est donc, vous le savez, un domaine prioritaire sur lequel intervenir pour, au moins, les 10 prochaines années, et les opportunités sont prometteuses. Le financement, c'est la clé de voûte définitivement. Selon les membres de l'ATUQ, l'enjeu principal est la disponibilité des fonds nécessaires et la réforme de la gouvernance proposée au projet de loi pose des interrogations. D'emblée, nous notons que le requis du Fonds vert d'avoir les deux tiers des voies affectées au transport est retiré, ça a été mentionné tout à l'heure, et j'ai bien entendu les commentaires de M. le ministre. Et on a entendu également que le ministre des Transports ne serait plus à la table décisionnelle, ces modifications sont pour nous préoccupantes. Une part minimale des fonds, comme le mentionne le projet de loi, doit être prévue pour les transports puisque c'est principalement dans ce domaine qu'il faut agir, il faut agir rapidement. Vu l'importance du secteur, nous recommandons, donc, le maintien de cette règle au minimum. Pour la même raison, le ministre des Transports devrait également continuer de participer aux décisions qui sont liées aux différents investissements, l'utilisation des fonds qui seront disponibles.

En fait, le projet de loi n'est pas explicite sur comment les projets d'investissement seront évalués, choisis et suivis à travers le temps. Nous comprenons, à la lecture du projet de loi, que ce sera la politique-cadre qui précisera les orientations, voire la stratégie d'investissement — on peut peut‑être l'appeler comme ça — et la méthode de priorisation. La notion de meilleurs résultats — on en fait référence à l'article 6 du projet de loi — est plutôt subjective. Nos recommandations proposent de mettre en place une façon de faire basée sur des évaluations complètes, donc globales — et je vais expliquer un petit peu tout à l'heure — objectives, équitables et rigoureuses, avec des méthodes éprouvées qui vont au-delà de la réduction des GES d'une technologie, par exemple, et examine également les cobénéfices des projets comme ceux liés à la santé et à l'inclusion sociale.

Une priorité doit être donnée au mode partagé afin de favoriser le transfert modal à des modes collectifs et actifs et s'attaquer à l'auto solo. Il faut, de plus, mettre en oeuvre un processus de gestion et de reddition à la fois rigoureux, mais aussi agile, mené par des experts, incluant des gens des industries concernées. Je pense que c'est important. Il ne doit pas y avoir de place pour l'arbitraire afin de faire les bons choix et de se protéger de la critique des choix qui seront faits.

Le marché du carbone ne sera pas suffisant à la réflexion, et la réflexion en cours sur les autres sources de financement est tout à fait pertinente. Toutes les sources de financement doivent se retrouver dans des fonds puis des programmes cohérents et agiles — le mot «agile» revient souvent par différentes organisations — et, présentement, c'est un enjeu afin de permettre que les sommes soient mises à l'oeuvre rapidement. La revue des programmes disponibles au transport collectif doit être accélérée, et les processus, simplifiés, tout en gardant leur rigueur et la robustesse de ces processus-là afin de réaliser rapidement les projets et actions qui permettent la bonification des offres de services et à l'électrification.

Il est démontré que l'augmentation de l'offre de services en transport collectif, particulièrement par des modes structurants, se traduit en augmentation de l'achalandage et donc en transfert modal. Le dossier de l'électrification, pour sa part, n'est pas simple, puisque les projets de transformation des installations pour accueillir les autobus électriques sont des projets majeurs qui vont au-delà de l'installation de simples bornes de recharge.

Globalement, les projets de transport collectif et d'électrification des flottes devraient pouvoir bénéficier de processus de planification et de réalisation accélérés si on veut arriver à nos objectifs. Dans le cas d'Exo, les programmes de subvention devraient être accessibles à cet organisme, ce qui n'est pas le cas présentement de par leur modèle d'affaires, qui implique la sous-traitance.

Finalement, il faut alléger la reddition de comptes. Oui, j'ai bien dit : Alléger la reddition de comptes. Ça ne veut pas dire l'éliminer, ça ne veut pas dire tourner les coins ronds non plus, mais c'est d'éviter que quatre organismes de vérification revoient les mêmes projets, parfois dans un décalage de huit à 10 ans après le fait, pour utiliser un exemple extrême. Est-ce qu'il y a moyen de trouver un juste milieu, une balance, de ce côté-là? Beaucoup de ressources sont requises pour l'administration des projets, ressources qu'il serait peut-être mieux d'investir dans l'offre de service. De plus, l'arrimage avec la PMD doit être fait grâce à des indicateurs simples permettant une gestion optimale des fonds.

En conclusion, le financement du transport collectif est un enjeu clé, il n'en fait aucun doute. Les organismes de transport doivent pouvoir compter sur un financement dédié, pérenne, prévisible, cohérent et suffisant. Vous allez lire probablement ça à quelques reprises dans le mémoire, et on le mentionne aussi dans nos interventions, l'accès aux fonds disponibles... En fait l'objet principal du projet de loi n° 44 est un aspect sur lequel il faut porter une attention particulière, et les organismes de transport collectif veulent contribuer à mettre en place des façons de faire qui nous permettront collectivement d'atteindre les objectifs recherchés. Merci beaucoup.

• (16 h 30) •

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup, M. Varin. Pile sur le poil. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Charette : Merci, M. le Président. Bon après-midi à vous deux, un plaisir de vous retrouver en commission parlementaire. Je suis un témoin du bon travail que fait l'ATUQ depuis plusieurs années. Donc, vous êtes un joueur, là, incontournable dans notre volonté d'augmenter l'offre en matière de transport collectif, de l'électrifier aussi lorsque c'est possible.

Alors, vous avez compris les nuances, hein, le projet de loi, c'est réellement la gouvernance. Pour ce qui est des moyens, pour ce qui est de ce qui sera déployé, c'est davantage dans la politique-cadre, notamment. Mais, au niveau de la gouvernance, justement, donc dans le cadre du projet de loi ou dans l'esprit qui l'habite, où est-ce qu'on peut vous aider? Si je vous pose la question simplement, c'est que les sommes dédiées au transport collectif, elles sont importantes, mais, souvent, ce que l'on entend, c'est le décaissement, c'est les garanties non pas de financement, mais les garanties d'obtenir les sommes rapidement.

Vous parliez de prévisibilité, donc on est davantage non pas dans la nécessité d'avoir les sommes importantes, mais comment faire en sorte qu'elles soient disponibles et en mesure d'atteindre les résultats les plus probants possible. Est-ce que c'est à travers une relation différente, ministère de l'Environnement, ministère des Transports? Où est-ce que ça accroche actuellement?

M. Varin (Marc-André) : À sa plus simple expression, le dossier, il n'est pas simple. À sa plus simple expression, ce qui concerne les sociétés de transport, c'est les différents programmes dans lesquels les fonds sont disponibles pour pouvoir accéder et financer les projets de garages, les acquisitions de véhicules ou autres choses. Alors, il y a un niveau de complexité, il y a des processus qui sont associés avec ça qui remontent, dans certains cas, aux fonds et aux sources de financement. Le gouvernement fédéral est également à la table sur certaines sources de financement. Alors, il y a toutes sortes de modalités qui sont attachées à travers les différents programmes qui font qu'aujourd'hui financer un projet en question devient extrêmement complexe, particulièrement au moment d'en faire la demande puis, après ça, de le suivre à travers le temps, à travers les différents processus de planification et de reddition de comptes.

Je pense qu'on a une réingénierie de processus à faire et je sais qu'il y a du travail, du côté du ministère des Transports, qui est en cours présentement pour revoir un peu la façon dont cette mécanique fonctionne à travers le temps, à travers les différents programmes et les différents processus gouvernementaux pour qu'on soit plus efficaces à accélérer, quand on peut accélérer sous certaines conditions, mais également appliquer, suivre, obtenir les fonds disponibles.

J'ai plusieurs sociétés de transport qui me répètent que, dans des grands projets maintenant, on est obligé de financer, à partir de dettes, certains projets, parce que c'est dans la machine et ça prend du temps pour recevoir le décaissement. Donc, les sociétés de transport aujourd'hui doivent dépenser de l'argent pour les services de dette, à travers les processus qui existent, qui sont complexes également, alors que ces sommes-là pourraient être utilisées à meilleur escient dans l'offre de services. Je prends seulement cet élément-là comme exemple.

M. Charette : Juste pour bien vous comprendre, donc, il y a une garantie de financement qui est donnée à la société de transport, mais, avant que l'argent soit décaissé, c'est là où il peut y avoir des délais assez longs. Est-ce que vous pouvez nous aider à les évaluer? On parle de semaines, de mois? Comment...

M. Varin (Marc-André) : On parle d'années dans certains cas.

M. Charette : Littéralement.

M. Varin (Marc-André) : On parle d'années, là, littéralement, dans certains cas. C'était juste avant Noël, je pense que j'ai une société de transport qui m'a parlé d'un projet, c'était un peu vague à savoir lequel était exactement, où on parlait de paiements qui étaient liés à des projets en 2018, là, quand même.

M. Charette : Paiements associés à l'achat du véhicule?

M. Varin (Marc-André) : À des programmes. Je ne me souviens pas spécifiquement dans quel cas c'était, si c'était spécifiquement pour l'acquisition de véhicules, d'autobus.

M. Charette : Naturellement, il y a la possibilité de faire de l'acquisition, mais il y a aussi du financement possible pour l'opération de ces véhicules-là. Vous ne savez pas s'il y a un modèle qui est plus laborieux que... Est-ce que c'est davantage pour l'acquisition? Est-ce que c'est davantage pour les frais d'opération?

M. Varin (Marc-André) : Alors, le financement pour l'exploitation des réseaux, il y a un programme qui existe pour ça, mais la plupart du financement qui est disponible du gouvernement du Québec, c'est pour les projets d'immobilisations, d'acquisition de véhicules.

Alors, spécifiquement sur le processus qui est suivi, je dois admettre que je le connais un petit peu moins sur les frais d'exploitation, c'est le Programme d'aide au développement du transport collectif, le PADTC, si je me souviens bien, qui a différents volets, dont le maintien de l'offre de services, le développement de l'offre de services, et il y a un troisième volet également qui est lié à des indicateurs de performance.

Les enjeux sont plutôt alentour, de ce que j'entends, plutôt alentour des grands projets d'acquisition et d'infrastructures. La grande situation, présentement, qui est liée beaucoup à l'électrification, c'est que l'acquisition des véhicules, le système est assez bien rodé, mais là, maintenant, on est dans des processus pour faire de l'agrandissement et de l'électrification de garages, alors on est dans des sommes assez importantes. On n'y pense pas tellement, mais ça va au-delà de simplement installer une borne de recharge comme on le fait pour des véhicules de particuliers, alors on est maintenant dans des situations de grands projets, entre autres, qui sont beaucoup plus complexes à réaliser, alors que, dans la Politique de mobilité durable, pour mentionner cet exemple-là, il est explicite qu'à partir de 2025 seulement les véhicules 100 % électriques seront subventionnés. Il y a un enjeu de temps présentement sur le dossier de l'électrification.

M. Charette : Vous comprendrez que, notre volonté, c'est d'avoir les meilleurs résultats possible le plus rapidement possible. Donc, lorsque vous me parlez de délais de cette nature-là, moi, ce n'est pas ce que je souhaite entendre. Donc, c'est surtout notre volonté de vouloir corriger la situation. Reste à savoir si c'est le projet de loi n° 44 qui peut nous aider à améliorer les façons de faire ou sinon à travers la dynamique au sein des différents programmes, des différents ministères. Mais, dans tous les cas, ce n'est pas des délais qui nous réconfortent et avec lesquels on veut composer, là. Donc, c'est clairement un enjeu à considérer.

Au niveau de l'achat des véhicules, on l'a dit à maintes reprises, pour nous, c'est un plan, oui, de réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais on y voit une très, très belle opportunité de développement économique pour les entreprises québécoises. On sait que certaines entreprises ont la possibilité de fournir des véhicules électriques. Peut-être nous parler, à ce niveau-là, quel est soit l'avantage que l'on pourrait donner à l'achat local ou, sinon, au niveau technologique, où se situent nos fabricants par rapport à la demande de produits des sociétés de transport. Est-ce qu'il y a une adéquation ou, au contraire, ce n'est pas le bon modèle pour le type de besoins ou... Je serais curieux de vous entendre à ce niveau-là.

• (16 h 40) •

M. Varin (Marc-André) : C'est un dossier passionnant également. Tout ce qui est lié à l'électrification, on pourrait en parler longuement. On a un fournisseur, au Québec, qui est Nova Bus, que vous connaissez bien. Il n'est pas le seul fournisseur en Amérique du Nord. Le dossier de l'électrification des autobus, c'est des nouvelles technologies, c'est en évolution, alors tous les fournisseurs sont dans des situations de développer des nouveaux produits.

Présentement, Nova Bus n'est pas prêt à fournir... Il y a des modifications qu'ils sont en train de faire sur les choix technologiques qu'ils ont faits, alors ils sont en train de s'adapter à ça. Présentement, il y a des équipements que les sociétés de transport vont avoir besoin à court terme qui ne seront pas disponibles par Nova Bus, alors il faut regarder d'autres fournisseurs également. Et là on embarque, dans tout le domaine des contractuels, des appels d'offres, des critères qui existent, qui est un autre domaine également, dans un contexte, encore une fois, où la technologie évolue rapidement. Ça fait partie de la problématique de l'électrification également. Alors, il y a du travail à faire de ce côté-là. Il y a des appels d'offres qui sont en cours et qui sont en planification, et les sociétés de transport sont très, très au fait et très consciencieuses, si on peut le dire comme ça, des solutions technologiques, des solutions d'équipement qui existent au Québec par rapport à celles qui existent ailleurs par d'autres fournisseurs.

Le Président (M. Polo) : Mme la députée Jean-Talon.

Mme Boutin : Oui. À deux endroits, dans votre mémoire, vous mentionnez la nécessité d'avoir des mécanismes de reddition de comptes, mais vous avez également dit, dans votre présentation, de ne pas avoir des mécanismes trop lourds non plus, les mécanismes de reddition de comptes notamment sur la gestion du fonds, mais également le choix de projets. Est-ce que vous croyez que, dans le projet de loi, le rôle renforcé du Commissaire au développement durable, ça va être suffisant, mettons, par rapport aux audits qui vont être mis en place, ou vous suggéreriez autre chose?

M. Varin (Marc-André) : Ma réaction est la suivante, puis on n'est pas contre la reddition de comptes, là, mais on rajoute un autre niveau. Est-ce qu'on peut, encore une fois, revoir un peu les processus de vérification et d'audit pour essayer de les simplifier? Parce que, là, on a, au sein d'une société de transport, un projet en particulier qui va être vérifié par l'auditeur interne de la société de transport, probablement par le vérificateur de la ville, probablement par le Vérificateur général du Québec, et, à travers tout ça, on va rajouter un commissaire, qui va venir également faire des vérifications.

Les vérifications, présentement, sur les grands projets, ça ne se fait pas par échantillonnage, ça se fait sur 100 % des projets et des factures qui sont associées. Beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps est passé là-dessus et, dans certains cas, on retourne 10 ans en arrière, huit ans en arrière, comme je l'ai mentionné, pour faire des vérifications. Je n'ai pas la solution miracle, mais il faut trouver, à travers ça, un juste milieu d'une formule qui va garantir la transparence et la solidité, et la rigueur de l'exercice, mais sans tomber dans l'excès non plus.

Mme Boutin : Est-ce qu'il y a assez de collaboration puis de cohérence entre toutes ces parties prenantes là qui font des...

M. Varin (Marc-André) : Présentement, pas vraiment, non.

Le Président (M. Polo) : ...de Laviolette—Saint-Maurice.

Mme Tardif : Je souhaiterais que vous développiez un peu plus votre recommandation n° 5 par rapport aux modalités ou à la lourdeur des modalités des programmes, parce que, bien, j'en ai entendu parler par des petits entrepreneurs, disant qu'ils voulaient déposer des demandes de projet. On déborde un petit peu de la loi comme telle, mais je pense que ça fait partie des actions, là, qu'on doit regarder afin d'améliorer ce qui existe déjà.

M. Varin (Marc-André) : Alors, il y a toutes sortes de sources de financement qui existent. Le marché du carbone en est un, les taxes sur l'essence... Ces sources de financement là se retrouvent, pour la plupart, dans des fonds, des fonds avec lesquels il y a certaines modalités qui sont attachées. Mais, particulièrement, comme je le mentionnais tout à l'heure, ce qui est pertinent pour les sociétés de transport, ces fonds-là sont versés dans des programmes, et c'est surtout des programmes normés avec toutes sortes de modalités sur les frais éligibles, dans certains cas, dans un programme mais pas dans l'autre, les frais qui sont admissibles ou pas admissibles, le service de dette, les frais administratifs. On se retrouve parfois dans des situations où un projet en particulier d'une société de transport n'est pas financé à partir d'un programme, mais on le divise en morceaux à partir de deux ou trois programmes, parce que certains types de dépenses sont remboursables sous un programme mais ils ne le sont pas sous un autre, alors, la gestion de ça... et à travers le temps également, parce qu'on s'entend que c'est des programmes et c'est des applications continuelles pour avoir les sommes disponibles, elles doivent être suivies à travers le temps sur la durée de vie d'un projet pour sa réalisation. Et on est dans des projets structurants d'ampleur. Alors, ça prend des ressources assez importantes pour suivre ces différents projets là.

Mme Tardif : M. le Président... Alors, est-ce que j'entends que les programmes vont devoir être revus aussi?

M. Varin (Marc-André) : Il y a un exercice, présentement, avec le ministère, le ministère des Transports, pour revoir, harmoniser, simplifier. Et ce qui serait bien, c'est d'essayer de trouver un processus. À la limite, mon rêve serait d'avoir un formulaire Excel qu'on pourrait utiliser et on coche le fonds... pas le fonds, mais le programme duquel la dépense serait couverte plutôt que de recommencer à chaque fois pour chaque projet pour faire des applications dans différents programmes.

Le Président (M. Polo) : M. le député de Bourget.

M. Campeau : Un commentaire que j'aurais pu faire... Bien, vous savez, M. Varin, je suis plutôt sympathique à ce que vous avez présenté. De toute façon, on s'est rencontré très récemment, c'est juste un commentaire que j'aurais pu faire bien avant aussi. On entend que l'ordre de grandeur, c'est 27 milliards, qu'il y aurait à dépenser sur les neuf, 10 prochaines années; j'ai entendu 35. En tout cas, l'ordre de grandeur est là. Quand on parle de deux tiers venant du FECC, ce n'est pas de là que va venir le «bulk», le montant principal, alors que, quand on me dit qu'on doit maintenir absolument le deux tiers, peut-être, mais je me dis, qu'on mette deux tiers, 90 % ou 43 %, comme on nous l'a mentionné aujourd'hui, ce n'est pas là que va venir l'argent. Alors, j'ai l'impression qu'on met une importance un petit peu démesurée sur ce deux tiers, alors que, dans le fond, l'argent principal va peut-être venir d'ailleurs.

M. Varin (Marc-André) : Complément d'information, rapidement, là, le 27 milliards est une évaluation, un estimé qui est fait. Le 27 milliards est un coût estimé des immobilisations d'ici à 2029, et il n'y a pas tout là-dedans. La ligne rose n'est pas là-dedans, par exemple, mais il y a un bureau de projet qui est déjà là-dedans. Alors, comme vous le savez, le financement vient en partie du gouvernement du Québec, il vient également des municipalités, il vient un petit peu des usagers également, alors le 27 milliards, il n'est peut-être pas tout pour le gouvernement provincial. Il y a une partie qui vient du gouvernement fédéral également, alors, à travers le FITC qui existait, ou l'entente EBI, pour laquelle on attend le programme. Alors, il y a du financement fédéral qui vient à travers tout ça aussi. Alors, l'estimé qu'on a fait, je veux juste mettre un bémol ou plutôt le quantifier un peu plus, c'est qu'il s'agit de coûts d'immobilisations pour lesquels il va y avoir une partie de financement qui va être requise. Alors, en effet, c'est une somme importante.

Est-ce que le marché du carbone, le Fonds vert, le FECC seront suffisants? Probablement pas, et je n'ai pas la répartition exacte, je voulais simplement vous dresser un portrait et vous donner des ordres de grandeur, mais surtout mettre l'emphase sur le fait que les jalons qui sont mis en place sur la gouvernance de ce fonds-là sont importants. On a une réflexion, comme vous le savez, sur d'autres sources de financement, alors, si on commence à faire, naturellement, certaines orientations sur la gouvernance des différents fonds, gardons ça en tête également pour les autres sources de financement qui seront éventuellement disponibles, nous l'espérons.

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup. Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Bonjour à vous deux. Merci bien. Petite question... Bien, il y a beaucoup de recommandations que vous nous faites, et on commence à dégager un certain consensus aussi après deux journées de commission, donc ça va être facilitateur pour le travail qui va être fait au niveau des amendements qui devront être apportés au projet de loi.

J'avais une petite question concernant votre deuxième recommandation que vous faites. Vous parlez de l'importance... Puis, encore là, on est sur des questions de principe, je pense, plus que de technicalité, mais vous parlez de l'importance de s'assurer d'avoir un processus de gestion qui est simple et qui est agile, puis l'agilité, c'est un mot qui est revenu à plusieurs reprises, hein, dans les échanges qu'on a eus avec les différents groupes, et plusieurs ont exprimé des préoccupations, justement, sur le fait de ramener le travail, qui est effectué à l'heure actuelle de façon assez agile et très habile par TEQ, de ramener ça au sein d'un ministère.

Vous avez entendu les différents groupes qui sont venus partager leurs préoccupations sur, justement, une perte d'agilité, perte d'efficacité, d'efficience, est-ce que les ressources humaines sont au rendez-vous en termes de nombre, notamment, mais surtout, justement, sur le fait de se retrouver entre deux volets, entre deux ministères séparés aussi qui peut amener une certaine complicité. Je comprends que vous partagez aussi ces préoccupations de lenteur supplémentaire qui pourrait être apportée, de complexité aussi au niveau des différents organismes, alors qu'on devrait être dans une situation où on devrait rechercher le contraire, de pouvoir, justement, encore améliorer davantage l'agilité, hein?

• (16 h 50) •

M. Varin (Marc-André) : Oui, tout à fait. On peut présumer qu'il y aura des choix d'investissement qui seront faits. Ces choix d'investissement seront faits à partir de dossiers, d'objectifs, d'indicateurs de performance, d'échéances, de plans de travail qui seront établis. Alors, dans un premier temps, comme vous le mentionnez, il serait désirable de faire affaire avec un organisme de suivi auquel on est redevable sur les projets, avec suivi et indicateurs performance, plutôt que d'éparpiller ça dans plusieurs organismes, ministères, vérificateurs, et différents organismes qui veulent suivre les projets en question. Alors, essayons de penser à des façons de faire, justement, qui vont nous permettre d'être efficaces mais agiles également, parce qu'on le sait, à travers le temps, des grands projets, ils peuvent évoluer à travers le temps. Il y a des grands projets... même l'acquisition de véhicules peut... dans lequel on est impliqué, l'association est impliquée, peut évoluer à travers le temps. Alors, donnons-nous une structure qui va permettre de suivre les investissements à travers le temps, puis, s'il y a des mesures correctives à prendre, si quelque chose marche et quelque chose ne marche pas, qu'on puisse agir rapidement, justement, pour faire les meilleurs choix et être optimal dans cette gestion.

Mme Montpetit : ...la structure qui est proposée présentement dans le cadre du projet de loi n° 44 justement, est-ce qu'elle répond à ces objectifs-là que vous mettez de l'avant?

M. Varin (Marc-André) : Difficile à répondre, parce qu'à la fois du côté du... en amont, au moment où on va... la façon dont laquelle on va faire les choix d'investissement, que de la façon dont ces investissements-là seront gérés à travers le temps, on a des grands paramètres, mais on n'a rien de vraiment très explicite, très concret sur lequel on pourrait commenter. Alors, on réplique en vous disant : Bien, voici, pas exactement la structure qu'on voyait, mais avec des grandes orientations également de ce qu'on aimerait voir. Alors, difficile de répondre à votre question.

Mme Montpetit : ...je pense peut-être au niveau du... puis ça a été souligné encore là par d'autres groupes, là, qu'il manque de beaucoup de précisions pour pouvoir se faire une tête avec les... C'est ce que je comprends?

M. Varin (Marc-André) : Exactement. Outre les responsabilités du ministre, le comité consultatif, la politique-cadre, et comment tout ça, ça va s'articuler, il y a des précisions manquantes dans le projet de loi, selon nous, pour pouvoir réagir.

Mme Montpetit : Je pense que vous partagez, justement, les commentaires qui ont été faits à cet effet-là aussi, que c'est difficile, si on ne connaît pas la mission du comité — notamment, là, vous y faites référence, le groupe avant vous y faisait référence aussi — quand on ne connaît pas sa mission, ses objectifs, ce sera difficile de l'évaluer, de toute façon, sur ses résultats, si ce n'est pas précis, au départ, ce qu'on attend de ce comité-là, et je pense que, dans le projet de loi, de toute évidence, ça doit être très clair et très précis également.

Je voudrais aussi revenir sur la question... puis on a échangé avec chacun des groupes sur la question du deux tiers des revenus consacrés aux transports. C'est une inquiétude qui est revenue, une préoccupation qui a été soulignée par plusieurs, de préoccupations que l'obligation légale, et je pense que c'est important de le mentionner, que l'obligation légale de consacrer le deux tiers des revenus du Fonds vert aux transports ne figure plus dans le projet de loi actuel qui est déposé.

Après ça, c'est sûr qu'on peut faire, hein... on peut l'argumenter de toutes les façons possibles en disant : Ça ne veut pas dire que, parce qu'on enlève l'obligation légale, ça veut dire qu'il n'y a plus rien. Mais il n'y a plus d'obligation légale, et que ce soit un PQI, que ce soit un budget, bien, après ça, ça peut évoluer, ça devient plus sensible aux cycles politiques, ça devient plus sensible aux différentes orientations. Le fait qu'il y ait une obligation légale, justement, ce que ça protège, c'est : ça protège un seuil à tout le moins minimal. Et j'aimerais vous entendre davantage là-dessus, parce que, pour nous, de toute évidence, je pense que ça va être un des objets qui va faire l'objet des discussions, un des éléments qui va faire l'objet des discussions qu'on va avoir en étude détaillée, et je pense que c'est important d'avoir l'opinion bien précise de chacun des groupes là-dessus.

M. Varin (Marc-André) : Il n'y a rien de magique dans deux tiers. Il n'y a rien de magique dans le chiffre ou dans le pourcentage ou dans le ratio. En fait, quant à moi, ça devrait... avec ce qu'on sait aujourd'hui, 43 % des émissions de GES, les priorités, ce qui a été fait à date... Jusqu'à tout récemment, je siégeais sur le comité consultatif du Fonds vert, donc je savais un petit peu où les sommes étaient investies, puis les enjeux et le bilan mi-parcours, quant à moi, 100 % devraient être dans le transport, je ne voudrais peut-être même pas dire 100 % sur le transport collectif, mais ça me tenterait de le dire. Alors, tout ça pour dire qu'il n'y a pas rien de magique en disant deux tiers, mais, en effet, ça donne, au moins, un plancher, ça donne une certaine garantie, comme vous le mentionnez, d'où simplement l'argument qui est fait dans le mémoire et qui sera probablement fait par d'autres organismes également dans le domaine du transport.

Mme Montpetit : Mais on partage évidemment votre opinion là-dessus, puis je pense que c'est ce qui a été relaté par la plupart des groupes aussi, de dire que, le deux tiers, c'est un plancher, c'est un minimum, et le principe derrière ça, c'est que ce soit enchâssé, dans le fond, dans une... qu'il y ait une obligation légale qui demeure, là.

J'ai mon collègue de Jacques-Cartier qui souhaiterait échanger avec vous également.

M. Kelley : Oui. On a eu plusieurs groupes qui ont parlé de l'idée de peut-être créer un secrétariat, donner plus de pouvoir directement au premier ministre, de mettre le dossier dans les mains du premier ministre. Selon vous, est-ce que c'est nécessaire peut-être d'ajouter un autre palier de gouvernance, d'ajouter un secrétariat pour gérer si c'est le Fonds vert ou, quand même, de créer comme un ministère qui est vraiment un ministère de l'État comme on a un petit peu en France? Selon vous, est-ce que vous pensez que c'est une bonne idée, ça peut aider le gouvernement de plus rapidement traiter certains dossiers?

M. Varin (Marc-André) : J'hésite à vous donner une réponse claire là-dessus, simplement parce que je représente une association, puis on ne s'est pas prononcé, dans nos discussions, sur l'existence d'un tel secrétariat. Je peux spéculer un peu que d'avoir quelqu'un à un niveau, comme on le mentionnait, exécutif près du premier ministre, qui pilote un peu les interventions environnementales pour atteindre nos objectifs, moi, Marc-André Varin, je pense que ce n'est pas une méchante idée.

Ceci dit, dans la mécanique de l'attribution des fonds, de la gestion des projets d'investissement, d'application et de suivi, c'est peut-être aller un petit peu trop loin. Encore une fois, si j'en viens aux arguments principaux de notre mémoire, c'est : Essayons de trouver des formules, des façons de faire, pas nécessairement allégées, mais simplifiées et plus agiles.

M. Kelley : Parfait. Merci beaucoup.

Le Président (M. Polo) : Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Merci pour votre présentation. Je comprends que vous ne puissiez pas vous prononcer très clairement, est-ce que ça prendrait, par exemple, soit un super-ministre ou un TEQ 2.0, une société d'État, etc., pour gérer le Fonds vert, et tout ça, mais vous avez quand même dit quelque chose d'important, c'est que le ministre des Transports n'est plus à la table de décision, et là, en ce moment, on voit que TEQ, bien, il va être mis sous le ministère de... le MERN. Qu'est-ce que vous pensez de ça?

M. Varin (Marc-André) : Alors, sur TEQ spécifiquement, j'ai collaboré dans les ateliers qui ont mené à la production de leur plan, ce n'est cependant pas pour les sociétés de transport. On les a rencontrés à plusieurs reprises. Pour les sociétés de transport, TEQ n'était pas un intervenant de première ligne. Les domaines dans lesquels on oeuvre, ce n'est pas via des programmes. À quelques exceptions près, là, les flottes commerciales de véhicules... C'est sûr que les sociétés de transport ont des véhicules, des berlines, mais les grands programmes dans lesquels, nous autres, on est plus interpelés, les sociétés de transport, ce ne sont pas ceux qui se retrouvent sous l'organisme TEQ. Alors...

Mme Ghazal : Mais le rôle du ministre du Transport, quand vous dites : Il n'est plus à la table...

M. Varin (Marc-André) : Oui, effectivement.

Mme Ghazal : Et là, dans le projet de loi n° 44, ce n'est pas là. Qu'est-ce que... comment est-ce qu'on pourrait faire en sorte qu'il soit présent?

M. Varin (Marc-André) : C'est une inquiétude. Définitivement, ça fait partie d'une de nos recommandations dans le mémoire, en effet, que le ministre des Transports siège à la table comme c'était le cas présentement. Puisqu'une bonne partie des fonds, des objectifs, des priorités, des opportunités sont dans le domaine du transport, il serait tout à fait pertinent qu'il soit...

Mme Ghazal : Et, quand vous dites : La table... Parce que vous dites : Il n'y sera plus. C'est de quel endroit vous parlez?

M. Varin (Marc-André) : Ah! il était avant dans le processus décisionnel, pas nécessairement à une table, là, mais dans le processus décisionnel.

Mme Ghazal : O.K. je comprends.

M. Varin (Marc-André) : C'est au sens figuré.

Mme Ghazal : Et là on ne le voit plus, c'est ça l'inquiétude.

M. Varin (Marc-André) : Exactement. D'après ce qu'on peut voir dans le projet de loi, en effet, il n'est plus à cette table décisionnelle.

Mme Ghazal : D'où l'idée qui a été amenée par certains groupes d'avoir, par exemple, une société d'État, et là tous les ministères qui seraient — c'est transversal, la transition — qui seraient touchés auraient aussi des comptes à rendre.

Vous avez dit aussi, dans votre présentation : S'attaquer à l'auto solo. On a vu le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles, hier, dire qu'il souhaiterait ou il trouve que c'est important que les gens changent leur comportement, par exemple, par rapport à l'achat de VUS, et tout ça.

• (17 heures) •

M. Varin (Marc-André) : Oui, tout à fait.

Mme Ghazal : Encore faut-il qu'ils aient les moyens de le faire, d'avoir accès à du transport collectif. De quels moyens vous parlez pour s'attaquer à l'auto solo? Des moyens incitatifs, des moyens peut-être plus contraignants, autres que dire : Bien, il faut plus de transport en commun?

M. Varin (Marc-André) : Alors, dans un premier temps, c'est l'augmentation de l'offre de services, d'abord et avant tout, une offre attrayante, qui va rencontrer les besoins des usagers. Je pense que le rôle des sociétés de transport, c'est de mettre en place, justement, ces offres de services là, et d'assurer une qualité de services qui va être suffisante pour les utilisateurs, en reconnaissant très bien quels sont leurs besoins, où sont les déplacements, et sachant très bien — et je pense que c'est un commentaire que j'ai fait — que des modes structurants sont, d'abord, plus attrayants que de l'autobus, et c'est d'abord et avant tout sur cet aspect-là sur lequel on voudrait se concentrer.

Mme Ghazal : Là où faut aller.

Le Président (M. Polo) : M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui. Merci beaucoup. Vous ne trouvez pas qu'il y a un double standard dans l'autorisation des projets en transport collectif versus transport routier? Moi, j'ai été ministre des Transports, là, c'était déjà le bordel avec le SRB Pie IX, à Montréal. Pourtant, c'est un projet de 400 millions, 11 kilomètres, ça fait 10 ans qu'on l'attend. Si on est chanceux, on va l'avoir en 2022. Et, pourtant, c'est pour 70 000 passages par jour. De l'autre côté, le ministre de l'Environnement lui-même a applaudi le troisième lien, première pelletée de terre qui est prévue dans ce mandat gouvernemental, pour peut-être 10 milliards de dollars et, au mieux, 20 000 chars par jour. Il me semble qu'il y a un double standard dans l'autorisation des projets.

M. Varin (Marc-André) : C'est long, c'est long. Les grands projets, on le sait, c'est sur des horizons d'au moins 10 ans, si on parle de SRB Pie IX et les autres grands projets, et c'est un peu un de mes messages principaux : Est-ce qu'on peut aller plus vite pour atteindre les objectifs? Parce que, sinon, on va manquer le bateau.

M. Gaudreault : Bien, ce qui compte, c'est... On va manquer le bateau, oui, surtout si vous prenez Matane-Godbout, là, mais, je veux dire, c'est complètement disproportionné. C'est comme si on ne tenait pas compte du nombre de personnes, au final, qu'on doit déplacer, au lieu de tenir compte juste du nombre de voitures. Et je veux dire, ce n'est pas mieux si, dans la loi, quand on dit «le ministre doit être consulté», il doit donner des avis, si son avis puis sa consultation disent oui au troisième lien. Alors, comment on peut s'assurer, je dirais, d'un avis sur, par exemple, la réduction de GES qui est entraînée par un projet ou par un éventuel projet... Si, admettons, là, le Conseil des ministres a sur la table le projet d'un troisième lien, bien, il faut que le ministre de l'Environnement soit capable de dire : Ça n'a pas de bon sens, puis que ce soit écouté. Alors que, si son avis puis sa consultation disent que ça de l'allure, on n'est pas plus avancés.

M. Varin (Marc-André) : Alors, il faut, selon moi, ramener l'évaluation des différents projets d'investissement, je vais les appeler encore comme ça, sur des bases objectives, quantifiables, équitables, cohérentes également avec les différentes politiques. Essayons de se donner un cadre d'analyse qui va permettre à des experts, avec des méthodes qui sont éprouvées... Dans le domaine du transport collectif, les réductions de GES, il y a une méthodologie qui existe, qui a été mise en place par l'American Public Transit Association. Alors, il y a des méthodes scientifiques qui permettent d'évaluer et d'identifier certains indicateurs qui devraient nous permettre à faire les bons choix collectivement.

Le Président (M. Polo) : Bien, je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux représentants de l'Association des transports collectifs ruraux du Québec de prendre place.

(Suspension de la séance à 17 h 04)

(Reprise à 17 h 06)

Le Président (M. Polo) : Je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association des transports collectifs ruraux du Québec, M. André Lavoie, président, Mme Andréanne Ladouceur, secrétaire. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à débuter votre présentation. La parole est à vous.

Association des transports collectifs ruraux du Québec (ATCRQ)

M. Lavoie (André) : Parfait. Merci, M. le Président, M. le ministre, messieurs dames les députés. En fait, merci de nous recevoir à titre de représentants de l'Association des transports collectifs ruraux du Québec. Les présentations ont été faites.

Pour vous faire un topo un peu sur notre mission, nous autres, notre mission est de représenter et d'accompagner nos membres, et de contribuer au développement des politiques et règlements régissant le transport collectif de personnes. Ça fait que notre présence ici est tout à propos. Et comment on fait ça? C'est en mettant toujours le citoyen au coeur des décisions. Dans le fond, mon collègue de l'ATUQ, tout à l'heure, qui s'est présenté, représente les sociétés de transport; nous, on représente les autres corporations de transport qui offrent du transport collectif un peu partout sur le territoire.

L'ATCRQ, on travaille avec plusieurs associations nationales, entre autres, beaucoup avec celles du milieu municipal, étant donné que c'est une compétence municipale. Pour votre information, on a participé au comité de rédaction de la Politique de mobilité durable, on fait partie du comité de suivi, on fait partie du chantier sur... les comités techniques sur le chantier du financement. Bref, on est bien impliqués au niveau national aussi, ça fait qu'on comprend bien les enjeux qui sont soulevés ici, entre autres, pour la réforme proposée dans le projet de loi n° 44.

Rapidement, il faut se rappeler que les régions du Québec, en fait, représentent une personne sur trois. Une personne sur trois reste en dehors des régions métropolitaines, et qu'il y a eu quand même une augmentation marquante de l'utilisation du transport collectif rural et régional. En fait, il y a six fois plus de monde qui prennent le transport collectif, entre 2007 et 2016, dans les régions.

Pour donner une idée de grandeur de ce que représente le Fonds vert pour nous, en fait, le Fonds vert, présentement, finance 66 % du PADTC, le PADTC, qui est le Programme d'aide au développement du transport collectif, qui est le programme d'aide qui finance pratiquement l'ensemble des opérations de nos corporations sur le terrain. Ça fait qu'on comprendra que, si les enveloppes disponibles diminuent, pour nous, il y a un impact direct pour la population.

De façon générale, on tient à saluer l'initiative, là, de reconnaître l'importance d'une gouvernance efficace dans la lutte, mais aussi, dans l'adaptation aux changements climatiques. Pour nous autres, la réforme qui est proposée, c'est une opportunité pour régler les problèmes d'efficience qui perdurent depuis quelques années. Il y a quand même plusieurs enjeux autour de tout ça, entre autres, il y a un enjeu de cohésion, hein? Lorsqu'on modifie une loi, ça entraîne d'autres modifications, et puis là il faut s'assurer d'être en concordance avec les politiques, les stratégies, les plans, les fonds, etc., puis je ne nommerai pas comment ce qu'il y en a qui entourent le transport, mais il y en a quand même pas mal. Ça fait qu'il faudrait faire attention pour ne pas arriver en contradiction, notamment, avec la Politique de mobilité durable, qui émane quand même du milieu.

Ce n'est pas la première fois qu'on est ici, et ce n'est pas la première qu'on dépose des mémoires. On a déposé plusieurs mémoires, entre autres, sur l'optimisation, justement, du PADTC puis on fait aussi un mémoire par rapport au chantier du financement du transport collectif. Et il y a des enjeux qui se rapportent ici, et on pourrait profiter du projet de loi n° 44 pour peut-être en adresser quelques-uns, entre autres, de réduire la lourdeur administrative et la gestion des programmes, de rendre les programmes plus agiles, d'optimiser les programmes existants pour répondre aux spécificités locales et régionales, de permettre le versement des subventions et autres aides financières dans un temps raisonnable, d'investir en région l'argent qui a été récupéré en région, d'investir les revenus supplémentaires dans les alternatives à l'auto solo, et de maintenir un lien de confiance par la transparence, autant dans les actions que dans les communications.

• (17 h 10) •

Par rapport au projet de loi n° 44 lui-même, on a certaines inquiétudes auxquelles on veut vous faire part, qui sont toutes mentionnées et détaillées dans le mémoire qu'on a déposé. La première qu'on veut souligner, c'est la règle du deux tiers en transport. Quand je suis arrivé, on en parlait déjà. En réalité, on trouve que ça va à l'encontre, un, des objectifs de pérennisation par rapport au financement de la mobilité durable. Que ce soit en milieu urbain, rural ou régional, intermunicipal, tout ça repose sur des bases... En fait, il faut s'assurer que l'argent revienne année après année, et, présentement, on a une insécurité par rapport... à savoir : L'enveloppe va-tu diminuer? Deuxièmement, on trouve que ça va à l'encontre aussi des engagements du gouvernement, où il avait été annoncé précédemment qu'on voulait tendre vers un 50-50 entre le financement du réseau routier et le transport collectif, et d'enlever de l'argent dans le transport collectif ne favorise absolument pas à arriver à 50-50. Présentement, on le sait, d'ailleurs, le FORT, là... il y a beaucoup d'argent qui provient du FORT, f-o-r-t, le Fonds des réseaux de transport terrestre, puis on sait que, depuis plusieurs années, ce fonds-là est déficitaire, ça fait que, donc, il faut le compenser. Ça fait que ce n'est pas nécessairement en baissant les fonds qu'on va y arriver.

Deuxième inquiétude, c'est le financement à la performance, qui semble souvent lié aux GES. Une des choses qui est importante à savoir, c'est que tout n'est pas quantifiable en GES. Les corporations de transport ne font pas seulement déplacer des gens. Ils vont aussi faire de la sensibilisation, ils vont faire des campagnes de promotion, ils vont accompagner les milieux pour développer comme il faut la mobilité durable sur leur terrain, et ça, ce ne sera jamais quantifiable en GES, mais les impacts directs sur la mobilité des gens sont indiscutables. Il y a aussi une distinction importante à faire entre réduction et évitement, puis on comprendra que, pour le transport collectif, l'évitement est plus facile à calculer que la réduction.

Autre chose, c'est qu'un financement à la performance peut entraîner des effets contraires aux attentes voulues, dans le sens que, si on a un projet qui est non performant, et qu'on diminue son financement, assurément on le condamne à perdurer dans la médiocrité. Par contre, ce qu'il faudrait plutôt faire, si on dit qu'on veut favoriser la performance, c'est de donner plus d'argent aux projets qui fonctionnent bien.

Et finalement, le financement de performance pourrait aussi nuire à la mise en place et à la pérennisation des nouveaux services, parce que, par exemple, si on met une nouvelle desserte en place, la maturité d'une ligne d'autobus, c'est environ trois à cinq ans que ça prend. Si on prend une mesure après une seule année, les résultats risquent d'être modestes, et donc, si le financement diminue à cause que les résultats sont modestes, assurément, on ne sera pas capable de développer le réseau.

Autre inquiétude, c'est le comité consultatif. La nécessité de s'entourer de scientifiques puis d'experts pour prendre des décisions éclairées, pour nous autres, c'est absolument nécessaire, surtout que les changements climatiques, c'est très large. Mais il faut concéder que les experts en mobilité sont rares, et les experts en mobilité qui comprennent les réalités régionales sont très rares. En réalité, je ne serais pas capable de vous en nommer présentement, un expert en mobilité régionale, encore moins les études scientifiques, parce que ça se fait surtout dans les zones métropolitaines. C'est qu'il faut s'assurer de la présence de ces experts-là, puis — c'est ce que j'entendais tout à l'heure aussi — le MTQ semble occulté de toute cette colonne décisionnelle là. Je pense que c'est impératif qu'ils aient leur mot à dire là-dedans.

Une autre des points et des inquiétudes, c'est la structure décisionnelle et l'imputabilité. En réalité, pour nous autres, donner plus de pouvoir au ministre de l'Environnement, on trouve que c'est une excellente idée. Que les intervenants soient imputables de leurs actions, mais une vraie imputabilité, et non pas rien que de faire semblant qu'ils sont imputables, c'est quelque chose qui est primordial, mais il faut faire attention pour ne pas que les décisions pour répartir l'enveloppe ou les sommes nécessaires soient uniquement basées sur des choix politiques. Au-delà même de la personne qui autorise la dépense — et ça, le mécanisme, pour nous, n'est pas important, là — ce qui est important, c'est qu'à la fin il y ait un cadre, qu'il y ait des normes qui soient respectées, et que ça réponde aux besoins des milieux, et que ça réponde aussi à mettre l'usager au centre des décisions, et non pas à certains autres intérêts.

Deux derniers points, rapidement, l'électrification et le milieu rural. En fait, on parle beaucoup d'électrification, c'est une chose intéressante, mais on entend très peu parler de transport collectif électrique. On en parle pour ce qui est de la partie urbaine. Mais, en réalité, pour donner un exemple hyperconcret, on subventionne les véhicules électriques personnels, mais les corporations... bien, pas les corporations, mais ceux qui offrent le service dans le privé, en fait, ceux qui possèdent les flottes d'autobus, les fournisseurs de services, n'ont pas de subventions pour acheter des autobus électriques, alors que l'électrification devrait commencer, selon nous, par le transport collectif. Il faut se rappeler que nos corporations n'ont pas le droit de posséder leurs propres flottes, ça fait qu'on dépend des flottes qui sont possédées par les fournisseurs de services.

Bien, rapidement, la dernière inquiétude qu'on a c'est sur les indicateurs de performance. C'est important d'en avoir. C'est juste important aussi de les mentionner avant le début des mises en oeuvre des projets, et non pas à la fin, pour qu'on ne soit pas capable de prendre les mesures. Je dis ça avec un sourire, parce que c'est déjà arrivé.

En conclusion, le projet de loi n° 44, c'est une opportunité pour améliorer l'efficience de gestion, pour atteindre les cibles, qui sont quand même audacieuses, du gouvernement. Il faut toutefois s'assurer que les résultats de la réforme soient en adéquation avec les besoins des régions. Et qui dit réforme dit transition. Une des choses qui serait importante, c'est que, pendant la période de transition, il ne faudrait pas que ça cause des retards supplémentaires pour la versation des montants pour soutenir les opérations sur le terrain, et, pire que maintenant, ce serait désastreux. Merci. On est prêts pour vos questions.

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Charette : Merci, M. le Président. Merci à vous deux, un plaisir de vous entendre cet après-midi. Le hasard fait bien les choses, vous êtes, avec l'ATUQ, les deux associations qui recouvrez le... qui couvrez, c'est-à-dire, le territoire québécois, et le hasard fait qu'on vous entend une à la suite de l'autre. Donc, sans faire de comparaisons, on peut, à tout le moins, dire : On parle de sommes colossales. Si on veut développer notre réseau de transport collectif, on est dans les dizaines de milliards, en termes d'évaluation, là, sur les prochaines années. Votre perception... Je vous pose la question candidement : Est-ce que vous avez l'impression qu'on favorise... on ne favorisera jamais trop, mais est-ce qu'on favorise les milieux plus densifiés, au détriment des régions, pour ce qui est de l'accessibilité au transport collectif?

M. Lavoie (André) : Bien, en ce moment, la réponse serait facilement oui. Et, présentement, il y a 0,6 % du budget de transport collectif qui va dans les régions, 0,6 %. Il faut dire, par contre, que le transport urbain, parce qu'on aime ça, comparer nos statistiques, représente 99 % des déplacements. Mais là, dans ce temps-là, je leur dis qu'ils ne sont pas nécessairement... Bon, c'est à cause qu'ils ont l'argent qui va avec, mais c'est correct. Mais c'est 0,6 %. Il y aurait beaucoup d'argent à mettre, mais c'est certain qu'on ne sera jamais capable d'arriver avec une fréquence puis une habitude qui vont être semblables à ce qui peut se faire dans l'urbain. Par contre, les besoins sont là. La crise de main-d'oeuvre est importante en région, et il y a des entreprises qui, présentement, ne sont pas capables de recruter, alors que le transport collectif, bien, serait une solution. Puis, d'ailleurs, on les met en place, ces solutions-là, de plus en plus.

Ça fait que, oui, il y a des millions à mettre, peut-être pas des... Bien, vous pouvez nous donner des milliards, on va trouver un moyen de les investir, faites-vous-en pas. Mais il y a déjà à s'assurer que ce qu'il se fait arrive en bas, et qu'on puisse développer selon les besoins des citoyens.

M. Charette : Et loin de moi, à travers la question que j'ai posée, l'idée de vouloir créer un débat entre les deux associations. Sinon, il y a toujours la possibilité d'aller prendre un verre ensemble par la suite. Mais c'était juste de voir un petit peu quelle était, justement, votre réalité versus le financement qui est offert aux grands centres.

Vous avez évoqué la Politique de mobilité durable. Si j'ai à vous rassurer, je vous mentionnerai qu'on la travaille en étroite collaboration avec nos collègues au niveau des Transports, donc il n'y a aucune menace et il n'y a aucune contradiction. Je vous disais que... Vous disiez, c'est-à-dire, qu'il y avait peut-être une contradiction entre notre volonté de tendre vers le 50 % des investissements, transport collectif versus transport routier, peut-être une contradiction, à votre sens, par rapport à la diminution des seuils obligatoires, là, des deux tiers pour les transports. En fait, je vous rassure, il n'y en a pas, de contradiction. On a encore cet objectif de tendre vers le 50 % au niveau des transports collectifs.

Et je vous dirais, pourquoi cet article-là dans le projet de loi, c'est que c'est beaucoup plus facile de financer des infrastructures à travers d'autres modes que le FECC lui-même, en ce sens que, lorsqu'on parle d'infrastructures, on parle de sommes colossales. On a le PQI qui peut être une garantie de financement à ce niveau-là, alors que le FECC, lui, nous offre une autre opportunité de financer des plus petits projets, moins dispendieux, mais qui nous permettent aussi de réduire significativement nos émissions de gaz à effet de serre. Mais, je vous rassure, là, le président du Conseil du trésor, régulièrement, réitère son intention de tendre vers le 50 %. Je l'ai mentionné à quelques reprises, le deux tiers, c'est juste pour nous donner de l'habileté, de l'agilité. C'est un concept qui est souvent entendu au moment de cette présente commission. Donc, nullement et loin de nous l'intention de diminuer notre apport au niveau du transport collectif, parce que tout ce qui est transport est notre principal défi au niveau, là, de nos émissions de gaz à effet de serre.

Vous avez fait référence au comité consultatif également. Je ne sais pas si vous avez pu suivre nos travaux depuis hier, mais tout le monde souhaite y être, donc c'est un défi aussi, de notre côté, à trouver la composition juste. Je comprends que le scientifique n'est pas spécialiste dans l'opération du transport collectif, encore moins en région, mais c'est de trouver le bon équilibre, donner la majorité à la science, aux scientifiques, mais nul n'empêche que ce comité scientifique soit en communication avec, justement, des associations comme la vôtre, pour voir comment transposer des concepts en opérations directes. Et, à ce niveau-là, oui, possibilité de consultation, mais, sinon, le comité lui-même, à partir du moment où on a dit : Une majorité de membres sont des scientifiques, quelle devrait être sa composition, et comment l'arrêter? Tout à l'heure, on avait une proposition, tout à fait originale, de confier le mandat, par exemple, au Scientifique en chef. C'est une idée que l'on a entendue, qui n'est pas mauvaise. Mais, selon votre expertise, comment arrêter la composition de ce comité?

• (17 h 20) •

M. Lavoie (André) : La question est pertinente. Si j'avais la réponse, j'aimerais ça vous la donner. En réalité, ça va être extrêmement complexe de prendre un parti qui... en fait, de former un comité consultatif qui serait complètement neutre et assez connaissant pour... Peut-être que la solution ne serait pas un seul comité, mais qu'il pourrait y avoir des comités thématiques, et là peut-être qu'il y aurait une possibilité de chercher des experts un peu plus facilement, parce que les questions de transport ne sont pas adressées de la même façon que pour la gestion de l'eau, puis etc., puis vous le savez. Ça fait qu'il y a peut-être d'autres mécanismes qui pourraient être observés.

Ce n'était pas l'objectif, de vous dire quoi faire, en fait, en venant ici, mais on pense que ça va être nécessaire d'avoir les experts... de gens qui vont connaître ce qu'il se passe en région, ne serait-ce que... Parce qu'en fait la mobilité, en région, la problématique est transversale, comme je disais. Parce qu'en réalité, ici, en fait, la mobilité n'est pas la problématique, c'est la solution pour les problèmes d'études, pour le décrochage, pour la revitalisation des milieux, etc. Ça fait que peut-être qu'un expert en économie pourrait être une bonne référence. Mais la gestion du transport nécessite certaines connaissances, puis malheureusement, au Québec, il n'y en a pas, de cursus scolaire, hein, en transport. Il y a des cours, mais il n'y a pas...

M. Charette : Effectivement. Une dernière intervention, et ce n'est même pas une question, ce qui va permettre à mes collègues de prendre la relève. Vous avez formulé une inquiétude, qu'on a entendue aussi, tout à l'heure, par rapport à nos amis de l'ATUQ, quant à la procédure de décision au niveau de la détermination, est-ce que c'est deux tiers, est-ce que c'est plus, est-ce que c'est moins. C'est vrai que c'était une décision qui, par le passé, jusqu'à maintenant, et, à tout le moins, tant que la loi ne sera pas modifiée, était prise à trois, c'est-à-dire Transport, Environnement, Finances. Là, on parle, dans le projet de loi, de ramener ça à Finances, Environnement, mais Finances gère les budgets de Transports, et c'est le Transports qui fait ses revendications pour ses propres budgets. Donc, il n'y a pas une perte d'influence de Transports à ce niveau-là, bien au contraire. Donc, c'est peut-être l'élément que je peux vous donner, en guise de conclusion, pour ce qui est de ma propre intervention.

Mais là je sais que j'ai des collègues qui veulent prendre la parole. Donc, encore une fois, merci pour votre présence cet après-midi.

M. Lavoie (André) : Ça fait plaisir, M. le ministre.

Le Président (M. Polo) : C'est M. le député de Rimouski-Témiscouata, c'est bien ça? Rivière-du-Loup—Témiscouata.

M. Tardif : On s'en vient.

Le Président (M. Polo) : C'est bon.

M. Tardif : Merci, M. le Président. Alors, merci pour votre mémoire. Écoutez, j'apprécie. Puis, évidemment, vous avez raison, à mes yeux, transport collectif au niveau... versus région, versus les grands centres, tous les deux sont en mode de solutions, mais les solutions ne sont pas nécessairement les mêmes pour l'un comme l'autre.

M. Lavoie (André) : Tout à fait.

M. Tardif : Je retiens, puis je vais être rapide là-dessus, je retiens, si j'ai bien compris, que le projet de loi, ça semble une opportunité de gestion, à condition que ça corresponde aux besoins des régions. Mon interrogation, qui m'a un petit peu écorché les oreilles, puis vous allez me comprendre : Les versements de subventions, c'est quoi, encore, cette histoire de retard là? Qu'est-ce qu'il faut faire? Si ça existe, il est où, le problème, puis comment qu'on peut aller chercher notre stabilité? Parce que, là, on parle de beaucoup de choses et on est sur le mode solutions.

M. Lavoie (André) : Je vais laisser ma collègue répondre, étant donné qu'elle est directrice, justement, d'un service de transport, transport collectif, transport adapté dans la région de l'Estrie.

Mme Ladouceur (Andréanne) : En fait, dans le fond, moi, je suis pour le service de transport collectif de la MRC des Sources, donc la région Asbestos, et puis, nous, ce qu'il arrive présentement, on gère le transport adapté, également, le transport collectif régulier. Du côté du transport adapté, ce qu'on constate, c'est que les versements entrent à temps dans l'année financière due. Quand on arrive présentement avec le PADTC, en fait, qui provient du Fonds vert, je ne peux pas expliquer, là, pourquoi, le transport adapté, les financements arrivent dans l'année, puis pourquoi est-ce que le transport collectif, à cette date-ci, pour 2019, j'ai reçu, en décembre, 50 % de mon versement. Ce qui fait que, majoritairement, dans ces situations-là, ce sont soit les MRC qui avancent l'argent, soit les organismes prennent une marge de crédit, avec des taux d'intérêt. Donc, on s'entend qu'il y a une partie du financement, présentement, causé par des retards, qui s'en va dans le remboursement des intérêts. Donc, on pourrait essayer de mettre ces fonds-là ailleurs que dans le remboursement d'intérêt, clairement.

Donc, je ne peux pas expliquer, là, pourquoi, d'un côté, on a un retard, pourquoi, de l'autre côté, on est à temps. Ça, c'est, pour nous, incompréhensible. Ce qu'on souhaite, en fait, c'est que le projet de loi puisse... On parle de souplesse, d'agilité, on parle aussi de faciliter, d'enlever de la lourdeur administrative. De cette façon-là, je n'ai pas de connaissances, en termes d'organigrammes administratifs, exactement de comment les processus se passent. On sait que, bon, il y a des hiérarchies, on sait qu'il y a des choses à approuver, mais pourquoi est-ce que le PADTC n'arrive pas à temps, c'est très, très difficile de répondre à ça, même si on essaie d'avoir des réponses. On essaie de faire avancer les choses de notre côté, mais c'est difficile. Je vous dirais que c'est un enjeu qui est assez important, et qui est comme ça depuis des années, et qu'on souhaite évidemment qu'avec le projet de loi on puisse avoir, si ce n'est pas 100 %, au moins, 90 % de notre subvention, dans l'année financière, accordée...

M. Tardif : Merci. Merci, pour moi.

Le Président (M. Polo) : Merci. M. le député de Bourget.

M. Campeau : Moi, je voudrais revenir sur le financement à la performance. Bien, en principe, je trouve ça le fun, comme idée, moi. Mais vous semblez nous dire qu'il y a des choses qui accrochent. Auriez-vous un exemple, s'il vous plaît, pour montrer qu'est-ce que vous voulez illustrer par ça?

Mme Ladouceur (Andréanne) : Par le financement... Bien, si je peux me permettre, là... Par performance, en fait, ce qui est important, c'est de développer des réseaux structurants. Ça, c'est important. Si on compte la performance, dans cette optique-là, de financer des réseaux performants, c'est bien. Par contre, c'est aussi... Comment je peux dire? On gère des entreprises, en quelque part aussi, donc on avait des mentions de projets également. On n'est pas des projets, on est quand même des entreprises, avec des bases, aussi, administratives. C'était juste de ne pas prendre une tendance de dire «on y va par projet», mais dire : C'est une globalité, c'est une pérennité aussi. Comme André le mentionnait, un service de transport, avant qu'il devienne structurant puis qu'on puisse constater les effets, c'est sur des années. C'est dans...

M. Campeau : Je comprends. Si je comprends bien, le mot «performance», ce n'est pas là, le problème, c'est la performance à trop court terme.

Mme Ladouceur (Andréanne) : Non...

M. Lavoie (André) : Bien, il y a ça mais il y a autre chose aussi. Dans le sens que, si on y va sur l'achalandage, par exemple, bon, si on dit... À 50 000 déplacements, en fait, sur la couronne nord de Montréal, ça va coûter pas mal moins cher que 50 000 déplacements sur la Haute-Côte-Nord. Si on dit que c'est l'achalandage par rapport les coûts par déplacement, la Haute-Côte-Nord ne sera jamais capable de développer un réseau qui va avoir un sens. Ça fait que c'est pour ça que je dis que le côté performance peut avoir un côté pernicieux, parce que les réalités ne sont pas partout pareilles, la densité de population change. C'est d'ailleurs des recommandations qu'on a mises, par rapport au PADTC, pour qu'on aille plus loin que seulement l'achalandage. Ça fait qu'il y a probablement des pistes de solution là-dedans aussi.

M. Campeau : O.K. Vous avez aussi parlé d'électrification, et je pense que c'est normal. Mais, en même temps, en région, est-ce que vous ne verriez pas plus, au lieu de l'électrification ou en plus de l'électrification, d'aller vers l'hydrogène? Parce que ce serait une façon, vu qu'on est capable d'avoir de l'hydrogène vert au Québec... c'est quasiment comme électrifier. Est-ce que vous ne verriez pas ça comme une simplification du travail à faire?

M. Lavoie (André) : Tout est possible. En fait, on parle d'électrification, mais, effectivement, ça pourrait être autre chose. En réalité, ce serait l'approvisionnement, je pense, qui serait le problème, et les coûts de cet approvisionnement-là. Ça fait qu'il y a un coût à tout ça. On parle d'électrification, mais vous avez raison que ça pourrait aller plus vers de quoi qui est...

Mme Ladouceur (Andréanne) : Il y a différentes options aussi. Dans notre région, ce qu'on fait avec notre transporteur, c'est qu'on a une biénergie propane, présentement, essence qui est déjà une diminution. Par contre, présentement, électrification, si je prends l'exemple de notre organisme versus l'achat d'un véhicule électrique, ce qu'on a regardé présentement, ce n'est pas assez abordable pour nous, pour ce qu'on a comme réseau, ce qu'on a comme financement, et tout, surtout aussi pour notre transporteur. Puis on aurait des coûts de contrats de transport, pour couvrir les frais fixes de ça, qui sont déraisonnables.

Donc, il faut essayer de trouver un équilibre. Nous, on essaie présentement le propane, là, pour les prochaines cinq années avec le contrat, là. Donc, déjà ça, on va voir ce que ça va apporter. Il va y avoir des technologies qui vont avancer, mais, comme on mentionnait aussi, au niveau des subventions pour nos transporteurs, nos fournisseurs, ça serait important, si on veut tendre vers... parce que, des fois, la technologie n'est pas toujours accessible, d'être aidés par une subvention ou autre pour pouvoir faire avancer les processus de choix de véhicules vers des véhicules plus verts. Ça, c'est quelque chose qui pourrait être très important, là.

• (17 h 30) •

M. Campeau : Il reste combien de temps, s'il vous plaît? Pardon?

Le Président (M. Polo) : 45 secondes.

M. Campeau : O.K. Rapidement, vous avez parlé d'un lien de confiance action et communication. Pourriez-vous expliquer un petit peu plus? Vous avez 38 secondes.

M. Lavoie (André) : On va y arriver. Ceci dit, en fait, dans le sens... c'est dans les décisions, les actions qu'on va supporter avec le FECC, le prochain FECC, et aussi dans la transparence, dans la communication, de comment sont dépensés les argents et quels résultats réels ils ont. Je pense que c'est tout simplement de... c'est une question de transparence.

M. Campeau : ...transparent de façon générale.

M. Lavoie (André) : Oui, mais pas suffisamment transparent pour qu'on ne voie pas le chiffre.

M. Campeau : ...vous remercier de votre présentation.

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley : Merci, M. le Président. Juste une question sur la règle de deux tiers pour le transport. Nous avons eu plusieurs discussions aujourd'hui, plusieurs groupes qui ont présenté puis parlé le sujet. C'est sûr que je comprends, l'objectif du gouvernement, c'est peut-être de rendre ça un petit peu flexible — j'ai utilisé ce mot souvent aujourd'hui aussi — mais peut-être c'est mieux pour nous de garder les deux tiers mais peut-être proposer des amendements d'être plus précis avec l'objectif.

Alors, on parle de transport, un petit peu, là, transport collectif, et etc., mais peut-être que c'est mieux d'ajouter quelque chose spécifiquement pour le transport en région. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Peut-être, ce n'est pas la question... juste le deux tiers, mais c'est le fait que, quand même, dans la présente loi, s'il y a un petit peu un manque de clarté, qu'est-ce que vous pensez de ça?

M. Lavoie (André) : Il y a toujours un danger à... c'est ça, il y a un côté flexibilité qui est important puis il y a un danger à — je vais prendre un terme anglais, désolé — mais à taguer l'argent à quelque chose parce que c'est... bien, en fait, si on fait ça, il faut juste s'assurer que s'il n'est pas complètement dépensé, qu'il puisse aller ailleurs. On se comprend? Je pense que, oui, c'est important de prévoir dans le temps, parce que nos organismes... il y a des organismes qui sont très prêts à développer, il y a des places qu'il n'y a pas encore de transport collectif au Québec, qui sont prêtes à développer. Ça fait que, oui, là, je pense qu'on peut prévoir ces augmentations-là, on peut taguer une partie de cet argent-là, mais la mobilité, c'est large. Puis présentement, pour le transport collectif rural, c'est les opérations qui sont subventionnées. On commence à peine, là, on devrait avoir un programme ou on va avoir accès au programme du SOFIL pour pouvoir acheter des infrastructures, mais ce n'était pas possible avant ça. Est-ce qu'il y a moyen de rendre ça aussi plus large?

Ça fait qu'au-delà, même, de dire qu'il y a plus d'argent, est-ce qu'on peut faire plus de choses avec cet argent-là? Ça serait aussi de quoi qui serait plus qu'intéressant.

M. Kelley : Parfait, merci.

Le Président (M. Polo) : Mme la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Merci, bonjour à vous deux. J'aurais envie de vous poser une question qui va être quand même assez large. Puis je vous explique, en fait, je... déjà, merci pour vos recommandations, votre analyse, elle est très claire, puis je l'ai dit au groupe qui vous précédait aussi, mais il y a une pensée qui se recoupe et des recommandations qui se recoupent d'un groupe à l'autre depuis deux jours, donc il y a une vision qui semble assez claire et assez commune. C'est fort intéressant et elles sont très claires, vos recommandations, donc je ne vous questionnerai pas sur chacune d'entre elles, mais j'aurais envie de vous donner du temps pour, justement, nous parler de transport collectif rural, parce que c'est un sujet dont on n'a pas l'occasion de parler souvent.

Je suis... j'ai le plaisir d'être une députée de Montréal, mais j'ai surtout le grand bonheur de venir d'une toute petite région, d'un tout petit village, avec lequel... où j'ai l'occasion de retourner régulièrement. Donc, ça fait partie des enjeux qui sont là et j'aimerais ça vous donner du temps pour nous parler des différents défis qui sont devant nous, parce que le transport, j'ose espérer, va être un des dossiers dont on va devoir parler très, très, très régulièrement. Et je pense que, si on a tous ça en tête, justement, ça nous aidera, que ce soit dans ce projet de loi là, mais les autres qui viendront et les différents plans et politiques également, là.

M. Lavoie (André) : On vous l'a dit, on a fait plusieurs travaux là-dessus. Entre autres, une des choses qu'on a constatées dans le développement du transport collectif rural, on vous l'a dit, il n'y a pas d'études qui se font là-dessus, hein, au Québec. On ne peut pas avoir d'experts, il faut qu'ils se forment un peu sur le tas, là, les gens. Et une des choses qui seraient importantes, probablement, à investir pour avoir un développement plus important du transport collectif, ce serait la formation, autant des élus que des fonctionnaires municipaux, que des gestionnaires de transport collectif. Ça semble banal, mais, pour certains élus municipaux, le transport collectif, il est souvent... des fois, même, un mal nécessaire, ça fait qu'ils donnent de l'argent, mais à peine. En transport adapté, des fois, c'est l'obligation de le faire qui... Il y a une réforme à faire, mais il y a aussi une conscientisation à faire, parce que ce palier de gouvernement là, c'est quand même... la compétence appartient aux municipalités et aux MRC, ce qui fait qu'un des constats qu'on faisait avec la FQM, entre autres, c'était, justement, là, qu'il faudrait accompagner les milieux pour mieux développer la mobilité.

Puis là on parle de transport collectif, mais le transport collectif, on parle du «last mile», là, en... dans les villes, nous autres, c'est plus les «last 10 miles», là, en région, là. Ça fait qu'il faut développer tout le reste pour le rabattement aussi, ça fait que, présentement, nos organismes ont une tâche en transport collectif. Mais est-ce qu'on ne pourrait pas donner un mandat plus large, où ce serait aussi le covoiturage, les flottes de vélos, l'autopartage, etc.? Ça ne se fait pas partout, mais... Puis, avec l'ouverture qu'il y a avec le projet de loi n° 17 qui a été adopté puis dans le cadre réglementaire, il y a peut-être des opportunités pour les MRC à développer le transport collectif.

Ça fait que, oui, le transport collectif — oui, je vais te laisser la parole après, je te vois, là, que tu es sur le bord — mais ce que je veux dire par là, c'est que, oui, l'autobus est une partie de la solution, puis une solution importante, puis c'est la partie structurante de la chose, mais il y a tout le reste, parce qu'on ne pourra pas prendre un autobus puis signaler toutes, toutes, toutes les rues du Québec. On pourrait, mais on va mettre tout notre argent là-dedans, ça ne serait pas efficient. Ça fait que...

Mme Ladouceur (Andréanne) : C'est ça, dans le fond, c'est pour renchérir un petit peu. C'est que, présentement, on est beaucoup vus dans le transport collectif, et il y a des minibus, mais on a des enjeux de densité, on a des enjeux de superficie. Donc, si je prends ma région, par exemple, la MRC des Sources, sept municipalités, on est un petit territoire comparé à bien d'autres. Par contre, si je vais chercher, par exemple, là, très concrètement, une personne à Ham-Sud, qui est à environ 40 kilomètres de mon centre urbain, parce que l'urbain est assez... moi, j'ai l'urbain, mais pour vous, mon urbain, c'est très rural, là, donc, il y a quand même 40 kilomètres. D'avoir un autobus pour aller chercher peut-être deux personnes, parce que c'est une municipalité de plus ou moins 200 à 300 habitants... Bien, le taxi, le projet de loi n° 17, va aller chercher des plus petits véhicules, aller chercher des contrats avec des taxis. Pour nous, là, ça devient plus intéressant que d'amener un gros minibus de 18 ou 24 places. Donc, d'aller... ça serait le fun qu'on nous voie comme des organismes de mobilité durable, parce qu'on a besoin d'aller chercher différents moyens de transport pour desservir les gens, pas que les autobus. Donc, la reconnaissance d'utiliser le covoiturage, l'autopartage dans les régions, utiliser les taxis, les ressources qui sont présentes, c'est ça qu'il faut, parce qu'on n'a... c'est la densité qui est faible. Il a des régions, comme il disait, la Côte-Nord, qui n'ont même pas un habitant par kilomètre carré tellement le territoire est grand. Donc, à couvrir, ça ne nous prend pas des gros véhicules. Des fois, c'est un petit véhicule qui peut amener deux personnes, puis ça fait ce qui est le transport collectif en région aussi.

Donc, c'est un peu ça, les défis, la densité, l'éloignement. Aller chercher une personne va nous coûter peut-être plus cher que d'aller chercher une personne à Montréal, et puis la densité est là. Nous, la part usagère est... bien, je parle pour mon organisme, puis ce qui peut être... est à peu près d'environ 10 % à 15 % la part usagère de notre financement, ce n'est pas ça qui est majoritaire. Par contre, on fait quand même de l'économie sociale, on est quand même une entreprise de services aussi, en même temps. Puis on est là pour les gens, on est là pour l'environnement. Puis il ne faut pas se cacher non plus que la mentalité en région, d'avoir des véhicules, c'est facile. Donc, nous, on a un gros travail de changement de mentalité à faire en région. C'est un autre défi qui va... qui peut prendre encore du long terme, qu'on n'aura pas des résultats performants immédiatement, mais que, sur le long terme, on le travaille, puis on essaie d'offrir des options aux gens.

M. Lavoie (André) : Je ne sais pas s'il reste un peu de secondes, M. le Président.

Le Président (M. Polo) : Oui, il reste encore 2 min 45 s.

• (17 h 40) •

M. Lavoie (André) : «Alright». Je voudrais juste renchérir, parce qu'une des choses... En fait, présentement, la compétence appartient surtout aux MRC, et puis, avec la centralisation des services publics, en fait, ce n'est pas toutes les MRC qui ont une université, qui ont un hôpital ou... Ça fait que, veux, veux pas, ça peut... rien que ce découpage-là entraîne des problématiques dans l'interurbain. Ça fait qu'il y a certaines MRC qui disent : Moi, je ne veux pas payer pour que mes citoyens aillent à l'autre MRC parce que je ne veux pas de fuite commerciale, hein? Ça fait que c'est des discours qu'on entend aussi. Alors, il y a... quand on parle d'interurbain, ça va bien quand toutes les MRC s'entendent bien, mais, en réalité, ce n'est pas toujours le cas, malheureusement. Ça fait qu'il y a un travail là-dessus. Ça fait que vous voulez qu'on en parle... Je pense que, là, c'est très général, mais il y a... on a quoi, 80 quelques MRC au Québec? C'est 80 quelques milieux complètement différents. Voilà.

Mme Montpetit : Je vous remercie. Puis vous dites : Oui, c'est très général, mais je pense que, juste dans ce que vous avez souligné, vous venez mettre le doigt sur un des enjeux qui est encore présent puis sur lequel on a du millage à faire, c'est la perception que le transport collectif, ça passe nécessairement par... Combien de fois j'ai entendu ça : Oui, mais on n'ira pas mettre des trains ou des autobus ou des lignes de métro dans les petits villages du Québec ou dans les régions du Québec, alors qu'il faut, justement, revoir ce paradigme-là de pensée. Donc, il y a encore du travail d'éducation, comme vous dites, à le faire. Mais je vous remercie d'avoir pris la peine. Je pense, c'est certainement le début d'une discussion pour la suite. Merci beaucoup.

Le Président (M. Polo) : Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Merci. Merci énormément pour votre présentation. Parce que vous avez parlé de former les élus, mais vous nous sensibilisez aussi à une réalité à laquelle on n'est pas conscients. Combien de fois j'ai eu des interventions à faire, notamment sur le transport collectif, et mes collègues qui viennent des régions disent : Bien non, ça ne se peut pas, ça ne marche pas chez nous, parce qu'on pense toujours grosse structure, gros autobus, alors qu'il faut être créatifs puis il y a toutes sortes de moyens. Et, moi, personnellement, qui viens de Montréal, j'ai été sensibilisée par nos élus, à Québec solidaire, d'Abitibi-Témiscamingue et de Sherbrooke. Donc, j'ai été sensibilisée aussi à cette question-là.

Et c'est d'autant pertinent, ce que vous présentez, parce que la transition, elle ne pourra pas juste se faire dans les centres urbains. La transition, il faut qu'elle se fasse partout au Québec. Et, quand on parle de transition juste, on parle des travailleurs, mais on parle aussi de la transition dans les régions. Et c'est extrêmement important. Et il y a une demande, parce que vous dites que les déplacements ont augmenté, donc il y a des gens qui ont des besoins.

Je voulais vous parler aussi du transport collectif interurbain. On sait que c'est très manquant. On peut se déplacer dans les grandes régions, par exemple, ou aller vers Montréal ou au centre, mais, quand on veut aller entre interurbains, c'est très difficile. Est-ce que vous avez chiffré les montants qui sont nécessaires pour investir pour... si on veut, les montants, là, que ça prendrait d'investissement pour le transport interurbain?

M. Lavoie (André) : Ça n'a pas été calculé. Mais, effectivement, tu sais, si on essaie de partir de Matane pour aller à Montréal, là, c'est une quête. Vous êtes mieux de partir avec un pacsac bien rempli de vivres, parce que vous n'y arriverez pas à court terme. Il y a toute la... c'est une problématique importante, puis c'est d'autant plus important que les lignes qui sont les plus rentables, ce n'est pas celles qu'on peut développer, nous, étant donné qu'elles appartiennent déjà à du privé, puis c'est correct, qui les opère bien, mais de plus en plus de compétition pour le transport interurbain présentement. Comment ça coûterait de faire de l'interurbain efficace?

Mme Ladouceur (Andréanne) : Ça dépend.

M. Lavoie (André) : Oui, c'est ça.

Mme Ladouceur (Andréanne) : Ça dépend d'où on a à aller. Si je le prends pour ma région, parce que... en tout cas, il y a quand même une image assez importante, comme il disait, les lignes qui sont rentables, mettons que c'est la colonne vertébrale du Québec. Bien, nous, on pourrait faire... on peut faire de l'interurbain pour relier la colonne au reste, puis ça peut passer par nos organismes. Tu sais, pour ma région, moi, mettons, les services, on regarde le médical, c'est beaucoup lié à Sherbrooke. Je suis à 45 minutes. Mais, si on part du Lac-Mégantic, qui est beaucoup plus loin, la distance va être différente. Les coûts vont être reliés en fonction de chacun des projets. Moi, je peux évaluer ma ligne pour me rendre à Sherbrooke admettons à 200 000 $, puis ça, ça dépend, est-ce que j'y vais cinq jours semaine, est-ce que j'y vais trois jours semaine, c'est quoi mes priorités. Donc, c'est assez variable sur chaque territoire.

Le Président (M. Polo) : Merci...

Mme Ladouceur (Andréanne) : Tu sais, l'Abitibi-Témiscamingue, c'est différent que...

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup.

Mme Ladouceur (Andréanne) : Je m'excuse.

Le Président (M. Polo) : Merci. C'est ça que ça veut dire. Voilà. M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Oui, merci. Merci beaucoup. Moi aussi, j'aurais plein, plein, plein de questions. Quand vous dites, à la page six, que c'est important que la réforme permette d'investir en région l'argent récupéré dans les régions, moi, ça, là, ça vient me chercher directement. Qu'est-ce que vous constatez qui fait que ce n'est pas ça? Il y a-tu de l'argent qui vient des régions qui est investi ailleurs?

M. Lavoie (André) : Bien, assurément. En fait, on a un tiers de la population qui est en région, et le budget des transports collectifs ruraux, c'est 0,6 %. Pas besoin d'être un docteur en mathématiques, je pense, pour arriver à dire... C'est normal, par contre, que les régions paient aussi pour les grosses infrastructures. On est une société, c'est correct, ça. Mais il faudrait quand même arriver... en fait, pour le Québécois moyen, lorsqu'il paie ses taxes ou qu'il paie son impôt, il aime revoir un peu le pour quoi il a payé. Je pense qu'il y aurait peut-être lieu de réinvestir un peu plus en région. Je le dirais comme ça. Puis un peu plus, ce n'est pas très dur, hein?

M. Gaudreault : O.K. Parlez-moi du transport adapté, la réalité du transport adapté.

Mme Ladouceur (Andréanne) : Le transport adapté que... Vous parlez...

M. Gaudreault : Bien, je veux dire, au sens large, parce que je n'ai pas beaucoup de temps, là, mais je sais que c'est un problème encore plus particulier. Là, on parle même d'appartenance au territoire pour des personnes qui sont à mobilité réduite, par exemple, qui sont dans un village. Mais là, pour avoir des soins de santé à l'hôpital qui est dans la petite ville-centre, il ne faut pas non plus que c'est... forcer les gens à déménager, là. Mais, moi, par exemple, au Saguenay, on a eu un enjeu pour le transport adapté parce qu'on manquait de chauffeurs. Bon. Alors, comment on peut s'assurer, là, qu'il va avoir les services pour les transports adaptés?

Mme Ladouceur (Andréanne) : Bien, ça, déjà, nous, avec le transporteur, ça va bien. C'est sûr que l'enjeu de main-d'oeuvre, si on veut ouvrir le soir, faire du 24 heures, c'est là. On essaie, on fait ce qu'on peut, on peut pousser nos fournisseurs, mais, à un moment donné aussi, tout le monde, je pense qu'on veut une qualité de vie, même pour les chauffeurs, là. Donc, tu sais, d'avoir du 24 heures sur 24, pour nous, c'est des choses qui peuvent parfois être plus difficiles. La main-d'oeuvre, c'est une réalité. C'est un enjeu. C'est un défi. C'est là. On essaie d'évoluer. Tout dépend d'où on est rendus. Chaque service est différent aussi. Dans notre région, ce qu'on voit, bien, pour le service de transport adapté, nos gens semblent bien desservis, selon ce qu'on a demandé. Puis la perception est très bonne, les services sont bons. Ce qu'on constate, c'est en aménagement du territoire...

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup.

Mme Ladouceur (Andréanne) : ...l'aménagement, accessibilité.

Le Président (M. Polo) : Merci beaucoup. Alors, je vous remercie pour la contribution aux travaux de la commission. Nous reprenons... Bien, en fait, nous allons...

La commission ajourne ses travaux. Et nous reprendrons les travaux jeudi 23 janvier à 9 h 30.

(Fin de la séance à 17 h 47)

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