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Version finale

38th Legislature, 1st Session
(May 8, 2007 au November 5, 2008)

Thursday, October 18, 2007 - Vol. 40 N° 7

Consultations particulières sur le projet de stratégie gouvernementale de développement durable


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente-trois minutes)

Le Président (M. Bergman): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le secrétaire, est-ce qu'il y a un quorum?

Le Secrétaire: Oui.

Le Président (M. Bergman): Merci. Je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir fermer leurs téléphones cellulaires.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Damphousse (Maskinongé) est remplacé par M. Merlini (Chambly) et M. Gingras (Blainville) est remplacé par M. Roy (Montmagny-L'Islet).

Le Président (M. Bergman): Merci. Pour les membres de cette commission, chaque présentation sera d'une heure de durée: 15 minutes pour la présentation; après ça, les questions par le groupe parlementaire formant le gouvernement, 17 minutes; l'opposition officielle, de 15 minutes; et le deuxième groupe d'opposition, 13 minutes.

Auditions (suite)

Alors, on souhaite la bienvenue ce matin au premier groupe, le Conseil patronal de l'environnement du Québec, représenté par M. Michael Cloghesy. Bienvenue. Alors, vous avez 15 minutes pour faire votre présentation.

Conseil patronal de
l'environnement du Québec (CPEQ)

M. Cloghesy (Michael): Alors, merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais d'abord saluer Mme la ministre et les membres, mesdames et messieurs de la commission parlementaire, ainsi que M. Gaudreau et M. Millette.

Donc, le CPEQ, en passant, a été créé depuis 1993 par les membres du Conseil du patronat pour représenter le patronat québécois à l'égard des dossiers environnementaux. Mais, dans un contexte de développement durable, notre objectif, c'est de travailler d'une façon constructive avec tous les niveaux de gouvernement pour faire progresser les objectifs environnementaux et en même temps assurer une croissance économique saine au Québec. Nos 190 membres sont parmi les entreprises et les associations sectorielles les plus importantes au Québec.

D'abord, nous aimerions reconnaître l'important travail dont le résultat fut l'élaboration du document de la stratégie. Si ce n'était que pour le petit caractère qu'on a utilisé à l'imprimerie, nous croyons que le document aurait eu une centaine de pages au moins. Alors, c'est un travail important, et nous reconnaissons également que c'est un vrai défi de produire un tel document. Peu de gouvernements peuvent se comparer au Québec à cet égard. Je tiens également à vous signaler que, contrairement à notre pratique normale de commenter en profondeur sur tous les aspects d'un document tel que la stratégie, nous avons élaboré notre mémoire basé sur les commentaires limités reçus des membres, compte tenu des courts délais.

Le CPEQ s'est impliqué dans la démarche gouvernementale de développement durable dès ses débuts. En effet, il a participé aux consultations précédentes en soumettant un mémoire d'abord sur l'avant-projet de loi sur le développement durable, sur le Plan de développement durable et ensuite sur le projet de loi n° 118 sur le développement durable.

Le CPEQ accueille favorablement la démarche de développement durable initiée par le gouvernement du Québec et le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs. L'objectif de cette loi est d'instaurer des pratiques de développement durable au sein des ministères et organismes de l'administration publique, ce que le CPEQ considère normal et louable.

Tel que prévu à l'article 7 de la loi, l'objectif de la stratégie est de définir la vision, les enjeux, les orientations ou les axes d'intervention et les objectifs qui doivent être mis en oeuvre par l'État. Cet article se lit comme suit: «La stratégie de développement durable du gouvernement expose la vision retenue, les enjeux, les orientations ou les axes d'intervention, ainsi que les objectifs que doit poursuivre l'Administration en matière de développement durable.»

Toutefois, à la lecture de ce document, le CPEQ remarque que la stratégie semble s'écarter de son objectif de ne viser que l'Administration pour plutôt s'étendre à l'ensemble de la société. Cet écart se retrouve d'ailleurs dans la vision proposée par la stratégie où il est mentionné: «Une société où la qualité de vie du citoyen est et demeurera une réalité.» Le CPEQ considère que cette vision est possiblement trop large pour les fins de la loi. Le CPEQ croit que l'emploi du mot «société» porte à confusion et a pour effet de diluer l'objectif de la loi et de la stratégie qui en découle. Cet objectif est prévu à l'article 1 de la loi qui se lit comme suit: «La présente loi a pour [objectif] d'instaurer un nouveau cadre de gestion au sein de l'Administration afin que l'exercice de ses pouvoirs et de ses responsabilités s'inscrive dans la recherche d'un développement durable.»

Dans le contexte de la loi, c'est l'administration publique qui est visée et non la société, bien qu'il ne fasse aucun doute que celle-ci sera touchée par l'action de l'État. En vertu de la loi, l'administration publique a l'obligation d'instaurer un cadre de développement durable pour ses ministères et agences. Il semblerait donc que cette obligation s'impose à l'État et non à la société.

Le CPEQ s'interroge également sur la signification de la première phrase de la vision qui se lit: «Une société où la qualité de vie du citoyen est et demeurera une réalité.» Le CPEQ croit qu'il serait préférable de parler de la qualité de vie comme étant une priorité et non une réalité.

n(9 h 40)n

Afin de clarifier et de ramener la stratégie à ce qu'elle doit être en vertu de la loi, le CPEQ propose que la vision soit reformulée comme suit: «Un État où la qualité de vie du citoyen est et demeurera une priorité.» Cette confusion entre le rôle de l'État et celui de la société est présente à plusieurs reprises à travers la stratégie, ce qui rend sa lecture et sa compréhension complexes. En effet, plusieurs des objectifs proposés dans la stratégie dépassent le cadre de l'Administration pour s'étendre à d'autres intervenants de la société, tel le secteur privé. Le CPEQ considère que le gouvernement doit commencer d'abord par respecter le cadre législatif avant de prendre des mesures de nature réglementaire qui vont s'appliquer directement aux différents acteurs de la société, en particulier au secteur privé.

Dans ce même ordre d'idées, le CPEQ considère que les établissements et organismes visés à l'article 4 de la loi doivent être interpellés à jouer un rôle dans la démarche de développement durable gouvernementale avant tout autre intervenant de la société.

L'article 4 précise que, parmi les organismes gouvernementaux, on retrouve les organismes municipaux, les organismes scolaires et les établissements de santé et de services sociaux. Le CPEQ considère que ces établissements et organismes pourraient avoir une grande influence sur la mise en oeuvre de la démarche gouvernementale de développement durable. Par exemple, les institutions scolaires sont les mieux placées pour enseigner les principes de développement durable aux futures générations. Afin d'impliquer ces organismes, le CPEQ encourage fortement le gouvernement à fixer par décret les modalités d'application de la loi à ces entités, tel que prévu à l'article 4.

Le CPEQ est conscient que le secteur privé a un rôle à jouer dans la démarche de développement durable gouvernementale. Le secteur privé est prêt à faire sa part et à travailler en collaboration avec le gouvernement dans l'atteinte des objectifs qui seront fixés. D'ailleurs, le CPEQ tient à rappeler que plusieurs entreprises ont déjà adopté des politiques de développement durable dans leur cadre de gestion, conscientes des bienfaits dont elles-mêmes et l'ensemble de la société peuvent en tirer.

Pour assurer l'atteinte de l'objectif gouvernemental, le CPEQ recommande que la stratégie vise d'abord l'Administration et ensuite les organismes visés par l'article 4 de la loi. Dans un troisième temps et une fois que l'infrastructure gouvernementale sera en place, la démarche pourrait s'étendre à l'ensemble des intervenants de la société, incluant le secteur privé.

Quant aux indicateurs de développement durable, l'article 12 de la loi prévoit une obligation, pour le ministère du Développement durable, de soumettre une liste d'indicateurs au gouvernement pour adoption dans l'année suivant celle de l'adoption de la stratégie. Toutefois, aucun échéancier n'est fixé dans la loi pour l'adoption de ces indicateurs par le gouvernement. Les indicateurs de développement durable se veulent un mécanisme de suivi très important, puisqu'ils permettront de mesurer les progrès réalisés et d'identifier les points à améliorer. Pour cette raison, le CPEQ considère important que les indicateurs soient adoptés le plus tôt possible. Il est à noter qu'il existe déjà des indicateurs de développement durable qui ont été élaborés par la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie. Ceux-ci pourraient servir d'exemple sur lequel le Québec pourrait s'inspirer dans l'élaboration de ses propres indicateurs.

Au niveau des orientations, la première orientation, donc celle qui vise informer, sensibiliser, éduquer, innover, le CPEQ croit que les changements de comportement vers une approche plus axée vers le développement durable passent par l'information, la sensibilisation et l'éducation des différents acteurs de la société. D'ailleurs, le CPEQ, depuis ses débuts, fait la promotion du développement durable auprès de ses membres.

Tel que mentionné, l'implication des organismes mentionnés à l'article 4 de la loi, en particulier des institutions scolaires, contribuerait grandement à l'atteinte de ces objectifs. Bien que plusieurs institutions scolaires puissent avoir déjà établi des programmes de sensibilisation en matière d'environnement destinés aux élèves, il serait important d'y inclure les autres aspects du développement durable, en particulier l'importance d'avoir en place une économie saine.

Quant à l'orientation 3, Produire et consommer de façon responsable, le CPEQ est en faveur du fait que l'État se dote d'une politique d'acquisition écoresponsable qui intègre des mesures de gestion environnementale au sein des ministères et organismes. Toutefois, le CPEQ ne croit pas que l'administration publique doive s'ingérer dans les procédés de production, tel que le laisse entendre la stratégie aux pages 21 et 22 où il est prévu, et je cite: «En examinant les procédés de production, les ministères et les organismes publics, les organisations non gouvernementales et les entreprises peuvent découvrir leurs points faibles et déterminer quelles améliorations conviendront pour ? et je cite juste quelques exemples ? soutenir la conception et des designs innovateurs pour améliorer la qualité environnementale des produits et de l'environnement[...]; augmenter le contenu en matières secondaires et la "recyclabilité" des matériaux, des produits, des bâtiments et des infrastructures.» Un autre exemple: «Augmenter la durée de vie des produits; [ensuite,] augmenter la qualité des services; atteindre un plus haut niveau de satisfaction de la clientèle.

«De plus, pour assurer la viabilité et la performance des organisations et des entreprises, une gestion responsable des ressources [...] permet de réduire le taux de roulement du personnel...»

Donc, c'est des domaines où vraiment on ne croit pas que l'État devrait... dans lesquels l'État devrait s'impliquer.

Ensuite, à la page 23 de la stratégie, on parle de... «Si on connaît les méthodes de fabrication et les conséquences découlant de l'utilisation d'un produit ou d'un service, des choix plus éclairés en termes de capital social, culturel, économique et environnemental peuvent[-ils] être faits.»

Alors, l'utilisation du pronom «on» porte à confusion. Là où le CPEQ est d'accord, c'est lorsqu'on parle du fait que la grande consommatrice de biens et de services, l'administration publique, joue un rôle moteur dans l'économie du Québec. Oui, alors, une politique d'achat vert, c'est évidemment... ça fait partie du rôle de l'État, nous sommes tout à fait d'accord.

Le CPEQ considère que, dans le domaine des procédés de fabrication, ça doit demeurer la responsabilité du secteur privé, qui suit les lois du marché. L'État peut se doter d'une politique d'acquisition écoresponsable, mais elle ne devrait pas s'ingérer dans les procédés de fabrication utilisés par les entreprises. Il ne faut pas oublier que les entreprises québécoises ont peu de contrôle sur les produits ou matières offerts par leurs fournisseurs étrangers. Les entreprises québécoises opèrent au sein d'un marché mondial et ont peu d'influence sur les lois qui dictent ce marché. Toutefois, il ne fait aucun doute que l'État peut avoir une influence sur le marché québécois par ses politiques d'acquisition. De plus, j'aimerais noter que les forces du marché sont puissantes et peuvent orienter les consommateurs vers des produits et services écoresponsables. Le CPEQ est en faveur du principe d'écoresponsabilité...

Le Président (M. Bergman): Je m'excuse.

M. Cloghesy (Michael): Oui?

Le Président (M. Bergman): En conclusion.

M. Cloghesy (Michael): En conclusion, d'accord. Le CPEQ considère que le contenu du document vise trop large et donc apporte une vision trop diluée pour pouvoir offrir des pistes d'action concrètes. Il est également difficile de repérer la définition du développement durable Brundtland dans certaines orientations, car on ne retrouve pas les trois piliers, soit l'environnement, l'économie et les aspects sociaux. Quant aux trois enjeux fondamentaux, soit développer la connaissance, promouvoir l'action responsable et favoriser l'engagement, le CPEQ les considère très larges de portée et pas suffisamment spécifiques aux intérêts particuliers du Québec.

Enfin, il faudrait que le gouvernement consulte le secteur privé avant de mettre en place toute nouvelle réglementation afin de s'assurer que les objectifs visés et les échéanciers soient réalistes, car il ne faut pas oublier que l'économie demeure un des trois piliers du développement durable, et, sans un équilibre bien réfléchi, on peut rater l'objectif de la présente démarche. Je vous remercie.

n(9 h 50)n

Le Président (M. Bergman): Merci. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour à tous les membres de cette commission. Bienvenue, M. Cloghesy. M. Cloghesy, ma première question est d'ordre très général, mais il y a un point de divergence entre la lecture que vous faites, je crois, des intentions de la loi, là ? je parle bien de la Loi sur le développement durable ? et la lecture que vous faites de la loi qui doit donc se refléter dans la stratégie. En fait, vous nous dites que... la lecture que vous faites de la loi est qu'elle s'adresse à l'État québécois et vous dites donc: La stratégie devrait s'adresser uniquement à l'État québécois. Vous nous proposez même de biffer, là, de retirer les mots «société» pour les remplacer par le mot «État».

Je dois vous avouer, M. Cloghesy, que ma vision des choses n'est pas celle-là. Lorsque j'ai lu la Loi sur le développement durable... Et plus que cela, je vous avoue que je suis allée lire les comptes rendus de la consultation, la large consultation menée dans plusieurs régions du Québec. Il y a un compte rendu d'ailleurs qui est disponible, là, de cette consultation. Maintes et maintes fois, les citoyens qui se sont présentés puis les organismes qui se sont présentés nous ont plutôt demandé que cette démarche de développement durable, parce que c'est une démarche... que, comme responsable, comme leader également, que l'État québécois amène son influence sur l'ensemble de la société québécoise. Je résumerais ça en disant: Ce que les gens nous ont demandé, c'est que ce soit un projet de société et que cette stratégie de développement durable puis cette démarche, je dirais, percole et ait son influence auprès, bien sûr, ensuite des grands réseaux, puis, après ça, auprès des entreprises, puis de l'ensemble de la société. Je crois vraiment que c'était une volonté très clairement exprimée et, moi, je crois que la loi ? et on essaie de répondre à cette loi; que la loi ? prévoit que toute la démarche gouvernementale ne doit pas être juste une démarche de gouvernement, elle doit être une démarche de société.

Donc, je vous réinterpelle là-dessus. Moi, j'ai vraiment eu cette impression, je retiens cela des consultations qui ont été menées avant mon arrivée. Je pourrais même vous dire qu'il y a un article de la loi ? si je ne me trompe pas, je crois que c'est l'article 1 de la loi ? qui dit: «Les mesures prévues par la présente loi concourent plus particulièrement à réaliser le virage nécessaire au sein de la société...» Donc, je veux vous entendre, parce qu'il y a là vraiment un élément fondamental sur quelle est la vision, là, qu'on doit avoir de cette stratégie de développement durable. Et vous insistez beaucoup au nom de vos membres pour dire: Ça doit être une stratégie de l'État. Et je vous réponds: Il me semble vraiment que l'ensemble des intervenants entendus jusqu'à maintenant nous ont dit: Non, non, il faut viser à ce que ce soit un projet de société.

M. Cloghesy (Michael): D'accord, oui. Alors, c'était un point sur lequel, nous, on s'est penchés, et c'est que notre interprétation de la loi, on semble voir très clairement cité dans l'article 1 de la loi que ça vise vraiment l'Administration. Un peu plus loin, évidemment on comprend que cet exercice-là doit éventuellement avoir une portée sur la société en général et on le mentionne dans notre mémoire. Mais, dans un premier temps, on croit qu'il serait d'abord à l'État, à l'administration publique de mettre en place justement une infrastructure qui va inclure, peut-être dans un deuxième temps, les organismes gouvernementaux, c'est-à-dire les organismes municipaux, le domaine de l'éducation et services de santé et... Donc, d'abord à l'administration publique, les organismes gouvernementaux et ensuite à la société en général.

Mme Beauchamp: Mais peut-être, à ce moment-là, on peut s'entendre sur ceci: ce que vous venez de décrire est tout à fait la démarche prévue, c'est-à-dire que le gouvernement veut se positionner comme leader et, je dirais, un peu comme modèle, hein, avec toute l'humilité que ça commande, par ailleurs. Hier, des intervenants, le Conseil québécois du développement durable, nous le rappelaient. Mais c'est ce qui est prévu, un deuxième temps qui interpelle les grands réseaux, santé, éducation; dans la foulée, ensuite rejoindre le secteur privé. Le souhait que vous venez d'émettre, c'est vraiment ce qui est prévu. Cette stratégie interpelle, dans un premier temps, les 150 ministères et organismes d'État. Mais vous nous demandez carrément de remplacer le mot «société» dans la stratégie par le mot «État», et je vous avoue que j'hésiterais à le faire, parce qu'il reste que cette stratégie doit envoyer un message à la société. Mais, si votre message, si votre souhait, c'est pour dire: Bien, ça doit se procéder comme cela dans la démarche que vous venez de décliner, je crois sincèrement, c'est ce qui va se passer dans les faits.

Moi, j'ai une deuxième question, bien rapidement. Je trouve qu'à l'intérieur de votre mémoire ? et vous me pardonnerez si je vous ai mal compris ? deux choses... J'ai comme l'impression qu'à travers votre mémoire vous semblez voir la démarche de développement durable comme étant avant tout environnementale, un peu comme si vous considériez que les éléments plus sociaux, que vous mentionnez, là... La lutte à la pauvreté, contre les inéquités, par exemple, ou encore même la volonté qu'il y ait une plus grande participation citoyenne autour de ces enjeux, vous nous invitez presque à dire: Bien, ça, c'est trop large, et il faudrait réduire cela, alors que je crois qu'on a été très sensibilisés dans les consultations pour éviter le piège suivant: qu'une notion de gestion selon une vision de développement durable, ce n'est pas synonyme d'une stricte gestion environnementale. Une vision de développement durable doit toujours tenir compte des trois grands piliers que sont d'avoir une saine gestion environnementale, de s'assurer du développement économique, de la prospérité et de s'assurer aussi de l'équité sociale. Donc, je comprends mal pourquoi vous nous dites: C'est trop large, les objectifs qui sont devant nous, quand à mon sens ils reflètent les trois piliers qui doivent toujours... C'est le principe et le défi du développement durable que ces trois piliers soient toujours évalués de façon concomitante lorsqu'on prend une décision.

Et, très rapidement, je veux juste tout de suite vous dire, j'ai une dernière question, puis elle est importante à mes yeux, c'est vos commentaires carrément par rapport à l'orientation 3, que vous commentez assez longuement, qui est Produire et consommer de façon responsable. Donc, j'avais un commentaire sur... Est-ce que je vous comprends bien, que vous souhaitez presque qu'on mette un peu de côté les orientations plus sociales? Mais, sur cette orientation-là, c'est comme si vous voyiez ça comme étant une intrusion du gouvernement dans les modes de production des entreprises, alors que je ne le vois pas comme une intrusion, mais je le vois, oui, comme un gouvernement qui va influencer les modes de production, comme on invite d'ailleurs les consommateurs dans leurs choix, hein, d'achats à le faire.

Peut-être un exemple. Pour moi, quand on décrit, là, ce à quoi ça peut ressembler, c'est par exemple... Vous savez, comme moi, qu'il y a maintenant une norme, qui a été établie sous l'initiative de groupes environnementaux, qu'on appelle la «norme FSC». C'est, entre autres, sur le papier, où on est capable d'identifier le papier qui bien sûr va être recyclé, provient de fibre recyclée, mais qui provient aussi de forêts qui auront été exploitées en tenant compte des principes de développement durable. Pour moi, c'est un exemple de ce qu'on veut dire, dans les choix, d'en tenir compte, des modes de production. Ce n'est pas intrusif, mais c'est, oui, influencer les meilleurs modes de production possible dans notre société.

Donc, voilà, c'étaient mes commentaires. Je veux peut-être vous entendre.

n(10 heures)n

M. Cloghesy (Michael): Oui. Alors, merci pour ces commentaires et questions. D'abord, au niveau des aspects sociaux, où on parlait de salaires, de revenus, et tout ça, donc, pour nous, notre définition de développement durable, c'est vraiment qu'on porte sur des activités, ou des actions, ou des stratégies qui regroupent à la fois les trois piliers et non un pilier à la fois. Et c'est là où nous ne sommes pas nécessairement sur la même longueur d'onde avec le document, dans le sens que le développement durable, c'est vraiment, là, une instance où les trois piliers sont présents. Et donc, si on parle de pauvreté ou... ça, c'est vraiment un pilier à part sans nécessairement y avoir des considérations environnementales. Alors, c'est comme ça qu'on le considère. Nous avons notre définition du développement durable. On sait que c'est un concept tout de même assez abstrait, il y a peut-être plusieurs interprétations. Je sais, comme vous l'avez très bien mentionné, que vous avez fait une consultation à travers le Québec, une des plus poussées, je crois, parmi les consultations. C'est sûr qu'il y a des préoccupations de toutes sortes exprimées par les gens, ça, c'est certain, mais, pour nous, le développement durable, c'est lorsqu'on retrouve les trois piliers présents. Et donc on a trouvé certaines orientations en dehors de notre définition de développement durable, et c'est pour ça que vous avez retrouvé ces commentaires-là.

Quant à l'orientation 3 sur la consommation, sur la production, nous, nous avons toujours insisté que la façon de procéder, c'est que le gouvernement établisse des objectifs au niveau, je dirais, de l'environnement, les normes, et que le choix des moyens reste celui du secteur privé. Et on a trouvé que les propos dont on parle dans l'orientation 3 vraiment sont trop orientés vers une incursion gouvernementale dans la façon de produire, dans la façon de concevoir des produits ou des services. Et vraiment, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, et c'est dans notre mémoire, le gouvernement peut dicter des règlements, des normes, peut fixer des choses. Évidemment, il faut tenir compte qu'on opère dans un marché mondial, les entreprises du Québec vont sûrement tenter de s'ajuster mais, dans certains cas, n'auront pas le choix, c'est soit que le Québec empêche la vente de certains produits, parce que les normes du Québec seront telles qu'il n'y aura aucun producteur ou distributeur qui sera en mesure de mettre en marché un tel produit. Et c'est pour ça qu'on cherche à travailler avec vous dans ce domaine-là.

Il faudrait prendre énormément de consultations avant qu'on suggère au gouvernement d'établir des règlements ou des normes qui vont aller à l'encontre du marché actuel, compte tenu que c'est un marché global. Et donc nous avons évidemment notre point de vue là-dessus, on devait vous l'exprimer, et j'espère que c'est suffisamment clair pour que vous le compreniez bien, sinon je vais tenter de mieux expliquer.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci. M. Cloghesy, dans votre mémoire ou dans vos premières remarques, vous avez dit que c'était une démarche exigeante et que peu de gouvernements à travers le monde avaient choisi de faire une telle démarche. Je tiens à le redire pour qu'on réalise bien, oui, la complexité de la chose. Mais, moi, je trouve que c'est vraiment un défi emballant, je trouve vraiment que c'est ? je le disais hier; que c'est ? un concept et c'est un espoir qu'on donne aux Québécois, c'est un concept rassembleur. Et, oui, c'est exigeant, qu'on s'entende bien donc sur les mots. Il y a cinq gouvernements à travers le monde qui ont décidé de se donner une loi sur le développement durable. Puis je pense qu'on doit se dire ici que la loi que nous avons votée ensemble, à l'Assemblée nationale, est peut-être la plus exigeante en termes de démarche imposée, lorsqu'on dit qu'elle prévoit qu'il faut qu'il y ait une stratégie, des plans d'action ensuite, les indicateurs, le rôle du Commissaire au développement durable, disons qu'on a très, très bien identifié la démarche.

Je veux juste vous dire ceci dans l'échange que nous avons. Quand je vous interpellais sur... Quand vous nous dites que, par exemple, pour vous, une des orientations qui parlent, par exemple, d'iniquité sociale, de lutte contre la pauvreté... vous dites: Bien, ça, c'est uniquement social, et je n'y vois pas d'orientation de dimension environnementale, je retiens à refaire le point. Nous ne sommes pas devant un concept qui met en priorité la question de la gestion environnementale ou la dimension environnementale. Nous sommes vraiment devant un concept... Donc, il n'y a pas à se poser la question: Est-ce que, derrière chaque orientation, il y a une dimension environnementale? La question ne se pose pas ainsi, c'est plutôt qu'on se donne des orientations qui font en sorte que ce que j'appelais, moi, les trois grands piliers, là, largement reconnus à travers le monde quand on parle de développement durable, soit le fait que ça veut dire de conjuguer, puis au bénéfice des générations futures, les questions de gestion environnementale, de développement économique et d'équité sociale, ne nous amène pas à devoir nous poser à chaque fois la question: Est-ce qu'il y a une dimension environnementale ou est-ce qu'on parle de gestion environnementale?

D'ailleurs, quand j'ai pris le temps d'aller jaser avec des gens qui ont entrepris cette démarche-là au sein de leurs entreprises, parce qu'il faut mentionner qu'il y a des entreprises, au Québec, qui ont commencé une démarche de développement durable, ou encore au sein de l'appareil de l'État, on me racontait de façon très terre à terre que souvent le premier réflexe des gens, quand on les invite à être autour d'une table pour parler de développement durable dans leur entreprise, c'est de penser qu'on parle de gestion environnementale. Et là c'est de dire: On va revoir nos politiques d'achat. Il faut tout faire ça. Mais assez vite on s'aperçoit après ça que, oups, non, c'est plus global que ça.

Je dois vous dire, M. Cloghesy, avec tout le respect que j'ai pour vous, que, malgré vos arguments, je me dis: Non, les orientations qui sont là sont des orientations qui décrivent les trois piliers que doit comprendre une vision de développement durable.

Je termine sur le point sur lequel je vous ai amené, parce que bien sûr vos commentaires sont importants. Derrière l'orientation de produire et consommer de façon responsable, vous semblez y lire une volonté de réglementer et de normer, alors que, derrière cela, c'est plutôt le fait qu'on invite le gouvernement à réfléchir, à se poser les bonnes questions, comme moi en ce moment, puis, je pense, nous tous, on invite un citoyen québécois à le faire en se disant: Si j'achète tel produit, je devrais me poser la question: Est-ce qu'il vient de loin ou est-ce qu'il a été produit proche de moi? Comment il a été produit? Et on invite les Québécois à faire cela. Et là on a juste mis sur papier qu'on va inviter les ministères à se poser les mêmes questions dans leur politique d'achat. Et c'est non pas ici une annonce d'une réglementation puis de normes sur les modes de production nécessairement, là. Il y en a, là, mais ça ne veut pas dire une intensification de cela. Je voulais juste préciser cela.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre, en conclusion.

Mme Beauchamp: Bien, j'ai terminé. En conclusion, peut-être.

Le Président (M. Bergman): Le temps est écoulé pour ce bloc de temps. Alors, je vais demander au député de Marguerite-D'Youville de prendre la parole. Pour votre bloc de temps, il y a 15 minutes.

M. Diamond: Bien, merci, M. le Président. Tout d'abord, je tiens à vous saluer, M. Cloghesy, je vous remercie aussi pour votre mémoire. Mon intervention est sur deux axes: en premier lieu, la portée de la stratégie et parallèlement la Loi sur le développement durable, et l'autre volet, c'est toute la question de l'écofiscalité dont vous avez fait mention, puis j'aimerais en savoir plus à cet effet-là.

Mais d'entrée de jeu, sur la portée, je suis d'avis avec Mme la ministre de l'Environnement que la Loi sur le développement durable avait une portée excessivement générale qui s'adressait à toute la société. Je suis également d'avis que la stratégie avait une portée sur l'administration publique en premier lieu. Et, vous, dans votre mémoire, à la page 4, vous avez fait mention qu'effectivement, en dernier lieu, une fois que ce serait installé au sein de l'administration publique, vous seriez ouvert à l'esprit de l'étendre à l'ensemble des intervenants, ce qui évidemment inclut les intervenants privés.

Et là c'est là que mon interrogation commence: À quel moment on peut se rendre là? À quel moment on juge qu'on a assez appliqué? Parce que le développement durable, c'est quelque chose qui est continuellement en travail, et je pense qu'on ne pourra jamais voir la fin, il y a toujours des améliorations à amener. Donc, à quel moment, nous, on peut se dire en tant que société que notre administration publique est suffisamment adaptée au concept du développement durable et qu'on peut l'étendre à la société privée?

M. Cloghesy (Michael): Bonne question, réponse difficile. Ce serait évidemment au bon moment, mais ça, ce n'est pas une réponse que vous souhaitez. Je dirais... Comme vous savez, les changements, surtout au niveau du gouvernement, ça prend du temps, il faut que ce soit bien réfléchi, il faut considérer les impacts. Moi, je parle personnellement, sans vraiment avoir étudié la chose en profondeur, qu'on parle d'un échéancier peut-être de cinq à 10 ans. C'est d'après moi quelque chose de réalisable.

n(10 h 10)n

Évidemment, entre-temps, le secteur privé est impliqué au niveau de la démarche du développement durable. Il y a beaucoup d'entreprises qui sont déjà très impliquées là-dedans. Alors, comment dirais-je, on opère sur des voies parallèles en même temps, là. Donc, si je parle de cinq à 10 ans, ce serait peut-être pour des mesures concrètes, où il y aurait peut-être des normes, où il y aurait peut-être une réglementation, des modifications à la loi, je ne sais quoi, là, mais, entre-temps, ça se fait.

M. Diamond: O.K. Et puis, aujourd'hui, d'autant plus et de plus en plus, on va avoir un chevauchement entre le privé puis le public sous forme de toutes sortes de partenariats. Et est-ce qu'on devrait appliquer la stratégie du développement durable à ces partenariats-là qui sont des intervenants privés qui font affaire étroitement avec le public, donc il y a une certaine zone grise là-dedans? Est-ce que vous pensez qu'on devrait l'étendre à tous ces intervenants-là?

M. Cloghesy (Michael): Pourriez-vous me donner quelques exemples de ces intervenants-là?

M. Diamond: Oui, bien, écoutez, toutes formes de PPP, construction d'un pont, par exemple, ou d'autres fois ce serait pour être de la sous-traitance à l'intérieur de l'appareil étatique, mais ce sont les intervenants privés qui vont avoir une vocation étatique. Est-ce qu'on applique la stratégie à ces intervenants-là?

M. Cloghesy (Michael): Je le verrais pas mal partout. Je pense que Mme la ministre a parlé justement d'une vision très large gouvernementale qui est exprimée dans le document de la stratégie. Disons, nous, on le voit... Enfin, cette vision très large, je la vois comme Mme la ministre l'a indiqué tout à l'heure, comme un projet de société, donc ça va impliquer tout le monde. Nous, notre définition est plus étroite évidemment. Si vous parlez de projets privé-public, on est tout à fait d'accord pour aller dans cette voie-là et qu'on débute maintenant à aller dans cette voie-là, définitivement.

M. Diamond: O.K. Et puis, comme je vous l'avais annoncé, un troisième volet, puis, si vous me le permettez, après cette intervention-là, je vais céder la parole à mes collègues qui m'ont souligné qu'ils avaient des questions. C'était sur la page 9. Vous avez fait mention que... Bon, deux principes ici, l'internalisation des coûts, et puis, juste avant, un paragraphe qui commençait à la fin de la page 8, vous parlez de l'écofiscalité qui était une mesure efficace, où ça avait été utilisé, vous mentionnez, dans d'autres juridictions, et puis vous constatez qu'il n'y a pas beaucoup d'interventions, là, dans la stratégie, et puis c'est là-dessus que j'aimerais vous entendre. Est-ce que vous auriez des exemples précis d'écofiscalité qui pourraient être... Vous en donnez un sur les pneus. Est-ce qu'il y en aurait d'autres où ça pourrait être aisément appliqué? Et puis, lorsque vous faites mention de d'autres juridictions entourant le Québec, qui ont déjà appliqué des systèmes pareils, vous faites mention de quelles juridictions?

M. Cloghesy (Michael): Là, là-dessus, ça prend un peu de réflexion. Il y a des politiques qui existent au niveau de l'achat de voitures, soit des incitatifs pour acheter des voitures qui émettent moins de pollution, d'émissions atmosphériques, et ce genre de mesures là est appliqué un peu partout. À part ça, je peux peut-être citer un genre de normes qui ont eu beaucoup d'influence sur certains domaines. Les États-Unis ont établi une norme sur la quantité de papier recyclé que doit contenir le papier journal exporté ou importé aux États-Unis. Donc, ces genres de mesures là vont forcer le marché, et, comme je l'ai mentionné, les forces du marché sont très fortes et peuvent avoir le même effet ou même plus d'effet qu'une réglementation ou des normes. Donc, je ne peux pas vous citer plus d'exemples. Malheureusement, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, on n'a pas eu le temps d'aller en profondeur dans tous les domaines, donc j'aimerais peut-être vous revenir avec plus de réponses concrètes là-dessus à un autre moment donné.

M. Diamond: Ça va me faire plaisir de vous téléphoner, s'il y a lieu. Écoutez, c'est terminé pour moi, pour les séries de questions que j'avais, sinon de vous féliciter pour la démarche que vous avez entreprise. Je vais céder la parole à un des mes collègues. Je pense que Claude avait une question.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Bellechasse.

M. Roy: Montmagny-L'Islet.

Le Président (M. Bergman): Excusez. Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Montmagny-L'Islet. Merci, M. le Président. M. Cloghesy, bonjour. Merci beaucoup encore une fois pour votre présence. Moi, c'est au niveau de la manufacturation, donc tout ce qu'on fabrique présentement. Si on était ou si on devenait, et peut-être qu'on l'est déjà, un vrai leader mondial au niveau de la manufacturation, ou dans la construction, ou dans la fabrication de chacun de nos produits, nous avions une conscience environnementale un peu plus forte que la moyenne mondiale, disons-le... On l'a déjà dans les troisième et quatrième transformations en forêt, où on va jusqu'à la fin. Si un arbre est coupé, on sait qu'il ne restera plus rien dans l'environnement. Maintenant, on va s'en servir partout.

Est-ce que la démarche peut se faire à long terme, bien sûr ? et je comprends votre questionnement là-dessus ? la démarche peut se faire sur des produits... Quand on va les construire, on peut toujours... il faut toujours avoir en mémoire qu'est-ce qui va arriver, demain, avec le produit qu'on va jeter. Parce qu'on va en disposer tôt ou tard, les gens sont de grands consommateurs, et on se ramasse avec... ou des grands marchés aux puces pleins de cochonneries que d'autres vont racheter, mais, tôt ou tard, on va les retrouver dans l'environnement.

Donc, est-ce que vous avez... est-ce que le Conseil du patronat a vraiment ? excusez-moi du... ? au niveau de la fabrication ? je m'excuse ? une conscience à long terme là-dessus, sur les produits qu'on fabrique, sur la qualité du produit qu'on va fabriquer pour qu'il puisse durer le plus longtemps possible, et, à la fin, que le produit utilisé ou les produits utilisés soient recyclables, et non pas juste disposables dans l'environnement?

M. Cloghesy (Michael): Alors, c'est un excellent point. Il y a une tendance, au niveau des pays développés, en ce moment d'envisager des normes ou même une réglementation, un encadrement réglementaire qui vise la responsabilité élargie des producteurs ? donc, à ce moment-là, on parle de cycles de vie, on parle de la responsabilité du producteur, même du distributeur du produit ? à s'assurer que le produit aurait une fin qui sera écoresponsable, c'est-à-dire soit pouvoir être recyclé, réutilisé ou que les matières secondaires, les rebuts de ces produits-là peuvent être utilisés, et non tout simplement enfouis ou incinérés, ou je ne sais quoi.

Donc, oui, c'est un volet très important, et la société, de plus en plus, s'en va dans cette direction-là, pas seulement ici, au Québec, au Canada, mais, dans tous les pays développés, l'Europe, les États-Unis, c'est déjà enclenché. Mais ça va demander peut-être un effort supplémentaire gouvernemental pour peut-être avancer l'échéancier là-dessus puisque ça devient un des problèmes les plus importants.

Et également il y a la Convention de Bâle, qui vise les déchets dangereux, où il faut vraiment cesser toute exportation de déchets dangereux vers les pays en voie de développement. Ça, c'est très important également puisqu'il s'agit qu'il y ait des déchets toxiques qui sont ? que ce soit des poussières, ou des vapeurs, ou des émissions ? ...qui puissent être transportés d'un pays à l'autre. Alors, on reçoit, de différents pays, des toxiques, des matières toxiques, alors ça devient un phénomène global, et donc il faut mettre les freins là-dessus, d'un point de vue global.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny.

M. Roy: Merci, M. le Président. Une dernière question sur ce dossier-là. Est-ce que justement, avec une politique enclenchée comme celle-ci, on ne pourrait pas justement se positionner, si on faisait un effort collectif, vraiment collectif, se positionner mondialement sur le fait que les produits qui viennent de chez nous sont d'une qualité environnementale qu'on ne peut pas retrouver? Donc, la mondialisation qui ferait qu'on est envahis par des produits de cochonneries, on est envahis par des produits qui sont très disposables rapidement, qu'on ne paie pas cher mais qu'on est obligés de jeter dans l'environnement parce que ça coûte 39,95 $ puis ça ne vaut pas ça... Est-ce que justement on n'aurait pas un grand avantage sur l'échelle mondiale, sur notre commercialisation, à l'effet que le Québec produit des produits d'une qualité tellement haute, comme le Japon l'a fait? On a connu les produits japonais, par le passé, qui étaient désastreux au niveau de la qualité, et, aujourd'hui, c'est les produits de plus grande qualité.

Donc, est-ce qu'on ne pourrait pas penser comme ça, aussi, à long terme? Parce que, moi, je suis d'accord qu'il faut qu'on fasse ça à long terme, mais il faut quand même commencer, là, il faut mettre des bases solides.

n(10 h 20)n

M. Cloghesy (Michael): Oui. Alors, je suis d'accord avec vous en principe que, oui, si le Québec pouvait sortir avec des produits, créer une niche au niveau du marché pour ces genres de produits là, oui, il y a une demande pour ces produits-là, mais évidemment ça prend une étude de marché pour savoir jusqu'à quel point que la demande serait forte. Il faut également créer la demande au niveau mondial. Mais, oui, définitivement, parce que les gens recherchent de plus en plus des produits de qualité, que ce soit au niveau des aliments, que ce soit au niveau des produits de consommateur ou des produits industriels. Il y a un marché pour ça, puis il y a une tendance de plus en plus vers ce genre de produit là. Alors, définitivement, oui.

Le Président (M. Bergman): D'autres questions? M. le député de Vachon.

M. Bouchard: Merci, M. le Président. Bonjour, monsieur, et bienvenue. Je vais poser mes questions rapidement et des questions courtes, parce qu'on en a plusieurs à poser puis on a très peu de temps.

La première remarque, c'est tout simplement, en début de discussion, de constater que vous nous ramenez aux débats extrêmement vifs qui ont eu cours lors de la discussion entourant la création de la Loi sur le développement durable et l'interprétation qu'on doit donner à la portée de la loi. Moi, je relis le deuxième alinéa de l'article 1, puis je vois bien que la portée est assez large, là, quand on parle des sphères d'intervention de l'administration, de ses politiques, et de ses programmes, et des actions de l'administration.

Par ailleurs, lorsqu'on va à l'article 5, on parle de la mise en oeuvre du développement durable au sein de l'administration, et là ça introduit une ambiguïté sur la portée. Mais à l'article 11, cependant ? puis je vous invite à le relire une fois cette séance terminée ? à l'alinéa 3°, on fait référence aussi aux «mécanismes mis en place pour susciter la participation des différents intervenants de la société». Alors, mon interprétation irait plutôt du côté de l'interprétation ministérielle, mais voilà un débat qu'on n'a pas fini de faire entre nous.

Votre position me fait poser la question suivante: Si vous allez en page 24, à gauche, en haut, sur toute la question de l'écoconditionnalité et de la responsabilité sociale, ce qu'on y lit, c'est qu'«une façon d'encourager les bonnes pratiques ? donc en termes de développement durable ? consiste à assujettir l'investissement public à des critères de protection de l'environnement et de responsabilité sociale». Est-ce que ce que vous nous dites, ce matin, c'est que vous considérez que cette disposition de la stratégie va trop loin, étant donné l'affirmation que vous faites à l'effet que ça devrait viser seulement les organismes gouvernementaux et paragouvernementaux?

M. Cloghesy (Michael): Encore une fois, ce serait dans une première étape qu'on verrait justement une... enfin, une implantation de cette politique au niveau de l'administration publique, ensuite, deuxième étape, les organismes gouvernementaux, toutes les municipalités, enfin, et, dans un troisième temps, à ce moment-là, aussitôt que l'infrastructure est en place, à ce moment-là, on implique les autres intervenants de la société. Donc...

M. Bouchard: Autrement dit...

M. Cloghesy (Michael): ...c'est par étapes qu'on le voit.

M. Bouchard: Je vais vous poser une question plus concrète. Si, demain matin ? et vous êtes parmi les animateurs très, très importants, là, du milieu patronal en termes d'environnement; si, demain matin ? une de vos entreprises avait l'occasion d'être subventionnée par le gouvernement et que cette entreprise ait un avantage lié au fait qu'elle a fait des efforts substantiels en matière de conciliation famille-travail, vous seriez contre?

M. Cloghesy (Michael): Non.

M. Bouchard: O.K. Et, si ça... Mais vous êtes contre le fait que ça arrive maintenant.

M. Cloghesy (Michael): Non, non, enfin...

M. Bouchard: Parce que l'écoconditionnalité, c'est ça, c'est l'idée de reconnaître des efforts dans le domaine... dans tous les domaines d'activité humaine qui font en sorte qu'éventuellement notre façon d'encourager ou d'offrir l'aide publique, l'aide... des argents publics à tout type d'entreprise, qu'elle soit d'entreprise d'économie sociale, du marché privé, etc., ou tout autre, que ces efforts-là puissent être reconnus comme un avantage dans l'accès aux fonds publics.

M. Cloghesy (Michael): Oui. Alors, c'est peut-être dans notre définition, dans notre compréhension de la terminologie «développement durable» où je mentionnais tout à l'heure que, pour nous, lorsqu'on parle de développement durable, il faut qu'il y ait présence des trois piliers, autrement c'est quelque chose à part, et c'est là où peut-être qu'on ne s'entend pas nécessairement.

M. Bouchard: Mais alors, si je reprends mon exemple, toute la question... mon exemple porte plus sur la responsabilité sociale que sur la protection de l'environnement. Et vous dites: S'il y avait seulement des efforts du côté de la responsabilité sociale, dans cette entreprise, mais pas d'effort sur la question de la protection de l'environnement, cette entreprise n'aurait pas d'avantages, ne se verrait pas donner d'avantages en termes de soutien public. C'est ça?

M. Cloghesy (Michael): Disons d'une interprétation stricte, oui. On le verrait comme ça. S'il y a un volet... Si l'action principale porte justement sur cet aspect social, mais il y a un volet tout de même environnemental, il y a des effets environnementaux, à ce moment-là, on est d'accord. Mais, s'il n'y a aucun effet environnemental, pour nous, ce n'est pas du développement durable dans le sens strict que, nous, on l'interprète.

M. Bouchard: Autre question. Hier, le Commissaire à l'environnement... au développement durable me répondait ceci à une question que je lui posais. Je lui dis: Ce que je comprends de vos propos, M. Mead, c'est que vous êtes... c'est que vous-même en tant que Commissaire, vous ne serez pas capable de juger de la portée de l'application de la stratégie. Parce que le Commissaire faisait le constat que, comme il n'y avait pas de cible, et comme on ne savait pas d'où on partait non plus, l'état de la question, enfin, le niveau opérant de base, comme on dit en sciences, et qu'il n'y avait pas non plus de cible à atteindre, que ça posait un problème important quant à l'évaluation. Et la réponse de M. Mead a dit: Ça, c'est vrai. Autrement dit, je ne serai pas capable de juger de la portée de l'application de la stratégie.

Est-ce que votre lecture de la stratégie vous porte à arriver aux mêmes conclusions?

M. Cloghesy (Michael): Oui, on serait peut-être d'accord avec M. Mead sur ce point-là dans le sens qu'on trouve que la stratégie a une portée peut-être trop large et pas suffisamment ciblée sur, comme je le mentionnais tout à l'heure, les enjeux importants du Québec, donc pas suffisamment ciblée sur des actions que, nous, on considère comme étant dans le domaine du développement durable.

M. Bouchard: Troisième question. Vous avez évoqué, dès le point de départ, votre intérêt pour l'éducation viable, l'éducation responsable. J'imagine que vous connaissez les établissements verts Brundtland dans nos écoles. Ce que vous avez amené cependant comme observation, c'est à l'effet que l'éducation devrait aussi porter sur l'éducation plus près de compétences reliées au développement économique. Est-ce que vous pourriez élaborer votre pensée un tout petit peu là-dessus?

M. Cloghesy (Michael): Oui, bien sûr. Alors, on sait qu'il y a une éducation qui se fait au niveau de nos écoles au Québec, qui porte sur l'environnement, alors ce qui est bien. Mais on aimerait que ce soit plus orienté justement vers le concept du développement durable où le volet économique serait également touché, donc l'importance d'avoir une économie saine pour pouvoir justement payer pour des programmes, des initiatives qui vont améliorer la qualité de l'environnement donc, et c'est ça qu'on trouve qui manque en ce moment.

M. Bouchard: Est-ce que vous avez déjà eu des interactions avec les responsables du réseau des établissements verts Brundtland à ce sujet-là?

M. Cloghesy (Michael): Très peu, donc je ne pourrai pas vous dire que oui. Non, ce n'est vraiment pas le cas.

Le Président (M. Bergman): M. le député d'Ungava.

M. Ferland: Merci, M. le Président. Bonjour. J'avais peut-être une question, mais deux volets puis qui vont un peu dans la lignée de mon collègue Camil, c'est... Vous avez parlé, dans votre mémoire, beaucoup... bon, la stratégie est orientée vers les... plus au niveau de l'appareil gouvernemental, les ministères, les sociétés d'État, et vous avez mentionné que... On parle aussi, plus loin, que, dans la logique, dans le temps, d'autres institutions comme les institutions d'enseignement, de santé devraient être impliquées, O.K. Je suis d'accord avec ça. Je pense qu'il faut, à tous les niveaux, sensibiliser les gens, que ce soit autant au niveau des jeunes, au niveau des... parce qu'il y a un volet pédagogique, de mise en oeuvre de cette stratégie-là, qui est lié à la loi qui a été adoptée, là, en 2006. Pour le volet pédagogique, je suis d'accord. J'aimerais peut-être... C'est une de mes questions ? je reviendrai au volet Production tantôt ? où vous avez parlé où l'État devrait un peu moins s'immiscer là-dessus. Mais, au niveau de nos... Sur le volet pédagogique, au niveau... Je prends l'exemple de nos institutions d'enseignement.

n(10 h 30)n

J'aimerais vous entendre peut-être de quelle façon ces institutions-là devraient sensibiliser? Est-ce que présentement, au moment où on se parle... ont les moyens, les outils nécessaires pour faire cette sensibilisation-là auprès des jeunes, auprès... Et on parle des consommateurs, parce qu'il y a un lien direct entre la production que... au niveau de ceux qui produisent des articles, des... peu importe, que ce soit du bois d'oeuvre, que ce soit n'importe quoi, et les consommateurs. Donc, est-ce que présentement nos institutions ont les outils?

Deuxième chose, au niveau de la productivité, vous dites: Bon, ça, on souhaite que... Vous, vous dites que l'État devrait laisser ça à l'entreprise, en tout cas en grande partie. J'aimerais vous entendre, parce qu'il arrive aussi... parce qu'il y a toujours des dommages collatéraux ou des effets. Puis on le voit dans un contexte de mondialisation des marchés, O.K., lorsqu'ici, au Québec, on produit des marchandises, des... peu importe quoi, et on vend, on exporte, on vend à l'étranger, on l'a vu dernièrement où certaines entreprises sont la cible de groupes environnementaux, et il n'y a pas de gagnant. Donc, moi, je pense qu'on devrait plutôt, dès le départ, au niveau de la production aussi... Mais j'aimerais vous entendre dessus, ces effets-là, parce qu'il y a des effets, là. L'État peut bien exiger de l'entreprise qu'elle respecte des normes... On sait qu'il se fait des choses, l'entreprise le fait au niveau de normes environnementales, de la certification, et ainsi de suite, mais on voit ce qui se passe présentement et les dommages que ça cause non seulement à l'entreprise en question, mais à nos travailleurs. On le voit dans des secteurs, puis là sans les nommer, là... J'aimerais vous entendre un peu là-dessus.

M. Cloghesy (Michael): D'accord. Alors, d'abord, sur votre premier point, je crois que vous me demandiez si, selon... enfin, si on croyait que notre système éducationnel avait suffisamment d'outils à leur disposition pour pouvoir enseigner le développement durable. Est-ce que ça revient à ça? Oui?

M. Ferland: ...la sensibilisation au niveau des jeunes liée à la consommation future, et ainsi de suite, c'est dans ce sens-là.

M. Cloghesy (Michael): Alors, je ne pourrai pas vous répondre définitivement là-dessus. Moi, j'ai cinq enfants qui ont tous fait l'école évidemment, mais ils sont maintenant tout de même assez... je ne dirais pas assez âgés, mais ils ont dépassés l'âge scolaire primaire. À mon sens, non, il n'y a pas suffisamment d'outils, il y a une... D'après moi, selon les informations que je reçois, les écoles sont bien dépourvues d'outils au niveau de l'enseignement de l'environnement comme tel. Au niveau du développement durable, j'ai beaucoup d'hésitation à vous signaler que, oui, on fait le lien entre les autres piliers. Et surtout je mets l'emphase sur le pilier économique, la nécessité justement d'avoir une économie saine.

Le Président (M. Bergman): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Cloghesy (Michael): Au niveau de votre deuxième point, ce que j'ai mentionné au niveau de la consommation, et de la production, et l'implication du gouvernement dans ces domaines-là, ce que j'ai mentionné, c'est qu'on devrait laisser les moyens d'atteindre des objectifs aux entreprises et pas nécessairement se faire dicter comment produire.

Maintenant, au niveau de la consommation, c'est sûr que l'État peut intervenir. On peut suggérer, comme ça a été mentionné tout à l'heure, acheter des produits qui sont produits localement plutôt que... Évidemment, il peut y avoir un élément de coût. Est-ce que les gens vont pouvoir se permettre ça? Mais, oui, tout le monde est en faveur d'une meilleure façon, plus écoresponsable, de consommation et de production, tout le monde vise cet objectif. Mais évidemment il y a le phénomène de la mondialisation, il y a le phénomène de la Chine et de l'Inde qui produisent... qui offrent des services. Est-ce qu'eux ont les mêmes règlements? On doit demeurer compétitifs. Ça pose des problèmes énormes vis-à-vis notre société, le secteur privé, mais c'est des défis, je crois, auxquels on doit faire face, et c'est peut-être, en dernier mot... Un dernier mot, c'est peut-être au niveau de l'Organisme mondial du commerce où l'on va devoir imposer des normes justement, puisque la pollution, c'est un phénomène global qui se transmet outre-frontières, et donc c'est peut-être par ces moyens-là.

Le Président (M. Bergman): Merci, M. Cloghesy. Merci pour votre présentation. Et on invite le prochain groupe à prendre place à la table. Je suspends pour quelques moments.

(Suspension de la séance à 10 h 35)

 

(Reprise à 10 h 36)

Le Président (M. Bergman): ...s'il vous plaît. Alors, je souhaite la bienvenue à l'Association québécoise pour l'évaluation d'impacts. Le temps alloué pour votre présentation sera 15 minutes, et la période d'échange sera 30 minutes. Alors, je vous invite pour s'identifier et pour présenter ceux qui vous accompagnent.

Association québécoise pour
l'évaluation d'impacts (AQEI)

Mme Lajoie (Ginette): M. le Président, Mme la ministre, membres de la commission, mesdames et messieurs, bonjour. Je me présente, Ginette Lajoie, présidente de l'AQEI, l'Association québécoise pour l'évaluation d'impacts. À ma gauche, M. Pierre Lundhal, membre de notre conseil d'administration, et, à ma droite, Mme Louise Fecteau, notre conseillère principale au dossier de l'évaluation environnementale stratégique.

Alors, je tiens à vous remercier de nous avoir invités pour nous permettre d'exprimer notre opinion sur le sujet du développement durable. L'Association québécoise pour l'évaluation d'impacts regroupe, depuis 16 ans, des professionnels du domaine de l'évaluation d'impacts. Elle regroupe quelque 200 décideurs, promoteurs, gestionnaires des secteurs public et privé, consultants, chercheurs ainsi que des organismes autochtones et des groupes de sensibilisation. Échanger sur des expériences et des problématiques reliées à l'évaluation d'impacts, améliorer la qualité professionnelle de l'évaluation d'impacts et généraliser l'utilisation de l'évaluation d'impacts, voilà autant d'objectifs de notre association.

Le message que nous venons livrer s'inscrit dans la ligne de ceux que nous avons présentés dans nos mémoires antérieurs, de février 2005 ainsi que de décembre 2006, que vous avez entre les mains. Il a reçu l'appui de nos membres lors de notre dernière assemblée générale, et notre dernier congrès portait sur le thème dont je vais vous entretenir.

Nous recommandons d'introduire l'évaluation environnementale stratégique comme outil dans la stratégie de développement durable afin de mieux anticiper et débattre des grands enjeux reliés aux politiques, plans et programmes gouvernementaux tôt dans le processus décisionnel de l'administration publique. Nous croyons que l'utilisation de l'évaluation environnementale stratégique facilitera l'atteinte du but évoqué à l'article 1 de la loi, à savoir s'assurer que les pouvoirs et responsabilités de l'Administration s'inscrivent dans la recherche du développement durable.

La stratégie de développement durable est déposée à un moment où les débats publics autour des grands projets d'investissement, notamment dans les domaines de l'énergie, des ressources naturelles et des transports, sont devenus de plus en plus difficiles. Les discussions sur les grands enjeux, les solutions de rechange ou les impacts cumulatifs surgissent à l'occasion de l'évaluation de chaque projet spécifique, paralysant souvent les démarches et provoquant des oppositions fortement cristallisées.

Pour que le Québec demeure compétitif, il doit se doter d'une procédure qui permet d'anticiper et de discuter des grands enjeux en amont du processus de décision sur les projets, soit au moment de l'élaboration des initiatives gouvernementales qui les encadrent. La procédure à adopter, selon nous, est l'évaluation environnementale stratégique des politiques, des plans et des programmes gouvernementaux.

n(10 h 40)n

Nous sommes d'avis que l'étude d'impact des projets, pratiquée depuis plus de 25 ans au Québec, a atteint ses objectifs propres. Elle reste un outil de gestion de grande valeur. Néanmoins, ici comme ailleurs, elle dévoile aussi ses limites, parmi lesquelles: la difficulté à évaluer correctement les incidences cumulatives et synergétiques liées aux multiples développements de projets d'infrastructures prévus sur un même territoire; le stade trop avancé du processus de planification qui ne peut garantir que toutes les solutions de substitution envisageables, tant technologiques que géographiques, ont été étudiées et prises en compte; de même, à ce stade avancé du processus, il n'est pas toujours possible de débattre de manière satisfaisante, en concertation avec le public, sur l'opportunité du projet et les grandes orientations qui ont présidé à sa préparation. Ces limites de l'évaluation environnementale de projets montrent que, dans une démarche de développement durable, l'évaluation de projets doit être complétée et précédée par l'évaluation environnementale stratégique.

Or, qu'entendons-nous par évaluation environnementale stratégique? Je vais vous donner certaines spécifications. L'évaluation environnementale stratégique se définit comme un processus systématique, formel et exhaustif qui consiste à prendre en compte les considérations environnementales lors de l'élaboration, de l'adoption ou de la révision des politiques, des plans et des programmes gouvernementaux. Le terme «environnement» se veut ici inclusif, incorporant, en plus des aspects naturels, l'analyse des aspects sociaux et économiques, ce qui cadre tout à fait avec la notion de développement durable.

L'évaluation environnementale stratégique vise, entre autres, à intégrer l'analyse d'options de rechange, y compris le statu quo, à faciliter la prise en compte des effets cumulatifs, à élargir l'évaluation à l'échelle d'une région plutôt que par projets individuels. Cette procédure favorise une participation plus effective du public dans les décisions stratégiques. Elle favorise une rationalisation des évaluations de projets pour les rendre plus cohérentes et acceptables socialement en s'assurant que les questions préalables relatives aux besoins, à la justification et aux solutions de rechange aient déjà fait l'objet d'examen environnemental approprié au moment où l'évaluation du projet est entreprise.

L'évaluation environnementale stratégique se distingue des audiences génériques du BAPE, notamment par son caractère systématique ainsi que par la responsabilité attribuée au ministère ou à l'organisme initiateur, lequel doit réaliser une évaluation avant la consultation publique. De plus, les audiences génériques se sont souvent tenues en situation de crise, après que les positions se soient fortement polarisées. Lors de l'élaboration des politiques, plans et programmes gouvernementaux, l'évaluation environnementale stratégique est un outil efficace pour faciliter la prise en considération des principes de la Loi sur le développement durable, notamment de ceux qui concernent la santé, la qualité de vie, la protection de l'environnement, la participation et l'engagement, la prévention, le principe de précaution, la protection du patrimoine culturel et la préservation de la biodiversité.

Selon nous, l'évaluation environnementale stratégique comporte plusieurs avantages. La démarche implique une continuité de la prise en compte de l'environnement au sens large depuis les politiques jusqu'au projet. Pour assurer cette continuité, il est important que les procédures d'évaluation de projets en vigueur au Québec puissent être harmonisées avec l'évaluation environnementale stratégique. D'une part, les différents paliers d'évaluation doivent être intégrés verticalement; et, d'autre part, l'évaluation environnementale stratégique doit être appliquée en priorité aux politiques, plans et programmes qui sont à l'origine des projets ou qui en fixent les conditions.

Un arrimage des paliers d'évaluation environnementale comporte des avantages significatifs, puisqu'il permet de gérer efficacement les différentes évaluations et la participation des publics pour s'assurer que les décisions prises au niveau supérieur ne seront pas remises en question aux niveaux subséquents. À moyen terme, un autre avantage serait de réduire efficacement les délais et les coûts relatifs aux évaluations environnementales des différents niveaux de planification. En somme, l'évaluation environnementale stratégique constitue une bonne politique publique, une bonne décision d'affaires, un outil pour intégrer les préoccupations publiques, une preuve de leadership, une source d'information pour les décideurs et une gestion saine des ressources naturelles et de l'environnement servant de fondement à une économie durable.

En conclusion, à l'article 11, la Loi sur le développement durable prévoit que la première stratégie sur le développement durable doit notamment inclure des outils ou grilles d'aide à la conception, à la décision et à l'analyse des projets en regard du développement durable. L'évaluation environnementale stratégique constitue un outil performant et éprouvé et qui répond à cette exigence de la loi. La version actuelle de la stratégie malheureusement n'en fait pas mention.

L'Association québécoise pour l'évaluation d'impacts est d'avis qu'en introduisant l'évaluation environnementale stratégique parmi les mesures prévues dans la stratégie pour faciliter sa mise en oeuvre le gouvernement du Québec se donnera un atout pour respecter son objectif d'intégrer les principes du développement durable au coeur de l'action gouvernementale tout en assurant la compétitivité du Québec comme lieu d'investissement.

Rappelons que le chemin est déjà tracé depuis longtemps d'ailleurs au niveau du gouvernement fédéral, en Europe et ailleurs. Même au Québec, certaines étapes ont été franchies, préparant la voie à l'insertion de l'évaluation environnementale. On vous rappelle par ailleurs que, pour faire suite à l'une des recommandations, l'Assemblée nationale a sanctionné, en décembre 1992, le projet de loi 61 modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement, visant notamment à y intégrer l'évaluation environnementale des politiques et des programmes. Cette modification de la loi n'est jamais entrée en vigueur. Le Comité interministériel du développement durable a, lui aussi, notamment proposé au gouvernement une politique sur l'évaluation environnementale stratégique en l'an 2000. Et finalement, dans son rapport portant sur l'année financière 2003-2004, l'équipe du Vérificateur général du Québec a fait un rappel au gouvernement des recommandations émises par ce même comité sur l'implantation de l'évaluation environnementale stratégique. Merci.

Le Président (M. Bergman): Merci, madame. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Merci beaucoup. Je vous remercie beaucoup de cette présentation qui, pour moi, a été très instructive. Hier, on avait devant nous le Conseil québécois de développement durable qui nous rappelait des mots clés dans la démarche qu'on entreprend, puis, parmi les mots clés, il y avait le mot «humilité». Ça fait que, là, je vais l'utiliser ce matin pour vous dire que vous m'avez apporté un éclairage honnêtement qu'après même pas six mois, là, au ministère de l'Environnement, que je n'avais pas encore, que je n'avais pas eu l'occasion de m'interroger sur un peu les principes devant guider l'État Québécois par rapport à l'évaluation des impacts environnementaux. Puis là vous nous invitez à ce qu'on se dise ensemble que, derrière le mot «environnement», un impact environnemental... Vous dites: Voyons-le dans son aspect global, avec les impacts économiques et sociaux.

Donc, avec humilité, je vais profiter de votre présence ici pour tenter d'en apprendre encore davantage. J'ai lu votre mémoire et je vous avoue que j'ai de la difficulté à bien voir la distinction entre la démarche, que vous proposez, d'évaluation et ce qu'on vit en ce moment, au quotidien, avec les instruments qu'on s'est donnés au Québec, et notamment en vertu, là, des principes de la loi sur l'environnement, la qualité de l'environnement, le fait que, lorsqu'on est devant certains types de projets, dont des projets majeurs, que nous avons le Bureau d'audiences publiques en environnement.

Je vous avoue que, quand je regarde votre proposition d'avoir des principes d'évaluation environnementale systématique, j'ai de la difficulté à voir où est-ce que ça s'inscrit exactement par rapport à ce qui se passe actuellement, qui est le fait que, que ce soit un promoteur privé ou un ministère du gouvernement, si on est devant un projet tel qu'identifié selon notre loi, il doit y avoir une étude d'impact. Ensuite, il y a la séance d'information au BAPE, il y a la tenue d'audiences du BAPE, il y a le travail de concertation interministérielle menée par le ministère avant qu'on en arrive à une décision.

n(10 h 50)n

Je veux juste savoir si je comprends bien: Est-ce que je dois comprendre que votre proposition... Il y a différentes possibilités. Est-ce que c'est qu'on ait une démarche d'évaluation systématique au niveau environnemental, à l'étape de la production de l'étude d'impact? Est-ce que c'est celle-là que vous dites: Elle n'est pas, en ce moment, assez globale, puis on doit revoir comment on fait nos études d'impact? Ou si ce que vous proposez, c'est même carrément de dire: Le Bureau d'audiences publiques en environnement, cet instrument que nous avons et qui, moi, à mes yeux, est précieux, parce que je trouve que... Et un des objectifs là-dedans, c'est la participation citoyenne, hein, qui est importante. Est-ce que c'est ça que ça vient remplacer? Est-ce que vous dites: Il faut revoir comment le BAPE fonctionne, parce qu'il faut que ce soit plus large, alors qu'à mon sens, dans sa façon de faire, je pense que le BAPE s'est pas mal inscrit dans une logique de développement durable en tenant compte d'impacts sociaux et économiques? Donc, je comprends ce que vous nous dites, avec des évaluations d'impact plus systématiques, mais j'ai de la difficulté à voir où est-ce qu'exactement vous voulez le voir s'inscrire dans nos façons de faire au quotidien, là.

Mme Lajoie (Ginette): Alors, je vais vous amener en fait en amont, je vais revenir sur un commentaire que nous avons fait à l'effet que je pense que les journaux ont été remplis, et sans doute que vos boîtes de courriels aussi, et autres, de questionnements concernant des grands projets de développement qui sont à l'étude justement... qui ont été à l'étude et qui ont fait l'objet d'audiences publiques, que ce soient des projets de développement éolien, des projets de port de gaz méthanier, et autres. Et ce qu'on vit actuellement, c'est qu'à l'échelle de l'analyse de projets individuels, il est impossible de questionner plus en amont vraiment les orientations au niveau des politiques, plans et programmes qui ont mené à favoriser ce genre de développement.

Et, parlant de hiérarchie de discussion, j'oserais même dire qu'il est temps de mettre de l'ordre dans les débats, c'est-à-dire de poser les questions et d'en débattre au bon niveau. Lorsqu'on... Comme on participe à la préparation d'une étude d'impact, qu'on passe à travers toute la procédure d'examen public, des projets de même catégorie auront à subir le même type d'examen, à remonter en amont jusqu'au questionnement sur la justification du projet, quand si, au niveau du programme gouvernemental, ou encore qui aurait favorisé ce genre de projet, ou encore de la politique énergétique, par exemple, on avait tenu une évaluation environnementale stratégique, nous aurions pu discuter au bon moment, au bon niveau des enjeux reliés à l'orientation politique en question au lieu de reprendre à chaque moment, à chaque projet et presque mettre les parties prenantes à la discussion, que ce soit le public local, le public québécois et même le public national, ainsi que les entreprises dans une situation où certains niveaux de discussion ne peuvent pas être débattus au niveau du projet individuellement.

Peut-être que ma collègue pourrait...

Mme Fecteau (Louise): Oui. En complément, il y a quelque chose qui est très important à se dire, c'est qu'il s'en fait déjà au Québec. On l'a dit dans la présentation, mais ça a passé un peu vite, on a dit: L'évaluation environnementale stratégique se distingue des audiences génériques du BAPE par le fait que ce soit plus systématique. Ça fait qu'en réponse à votre question c'est très clair que l'évaluation des projets a fait ses preuves. Ça aussi, c'est dit. Toutefois, quand vient le temps de discuter de l'évaluation des projets eux-mêmes, la première question, la première, avant même d'entreprendre les impacts, les questions sur les impacts et les mesures de mitigation éventuelles, c'est: Est-ce que le projet est justifié? Est-ce que le projet est pertinent? Et là on réfère: Est-ce qu'il est pertinent en regard de la politique? Est-ce que la politique ne mériterait pas qu'on la révise? Est-ce qu'on ne devrait pas mettre un moratoire sur la politique, le temps qu'on discute, les grands groupes nationaux, et le gouvernement, et les gens concernés, à un autre niveau que le projet lui-même, parce que le projet spécifique, il interpelle les riverains, les communautés autres, et là on se retrouve à discuter à deux paliers qui sont presque difficilement conciliables, c'est-à-dire on ramène les discussions sur... Les remises en question de grandes politiques, au niveau des projets, c'est là qu'il y a souvent une situation de blocage. Ça, c'est la première des choses.

On parle de grandes politiques, mais je vais vous donner des exemples très, très concrets d'exercices qui ont eu cours au Québec. Dans la dernière décennie, il y en a eu trois ou quatre. Celui sur la forêt, la commission Coulombe sur la forêt, c'en est un. Il est arrivé un peu trop tard dans le processus. C'est-à-dire qu'à un moment donné on se rend compte qu'il y a de quoi qui ne va pas, que le calcul de possibilité forestière n'est pas tout à fait adéquat. Il y a un film, il y a ci, il y a ça, il y a des groupes, il y a beaucoup de pression qui se crée, puis tout à coup on forme une commission ad hoc scientifique et technique qui fait des consultations très élargies, qui prend différents moyens pour arriver à faire des recommandations au gouvernement. Donc, une commission scientifique et technique ad hoc.

Dans le cas de la production porcine, on s'est retrouvé avec différents projets d'implantation un peu partout dans la province. À un moment donné, ça s'est mis à grincer, puis un peu plus, ça ne grinçait plus, ça bloquait complètement, c'étaient les manifestations, et tout ça. Et là on a créé une commission du BAPE, là c'est le BAPE qui est entré en jeu, qui a tenu des audiences génériques, qui a établi ses propres façons de faire aussi pour faire des recommandations au gouvernement à partir de mandats du ministre de l'Environnement.

Dans un autre contexte, en énergie, on a tenu une commission parlementaire. Après que des projets aient fait l'objet de remises en question, donc on a référé à la Régie de l'énergie, qui a relancé la balle aux parlementaires en disant: Faites une discussion au niveau... une commission parlementaire. Donc là, on a trois exercices qui s'inscrivent dans ce qu'on est en train de raconter aujourd'hui mais qui ne sont pas systématiques, dont la forme, chaque fois, est réévaluée, qui arrivent trop tard dans le processus, les positions sont déjà trop avancées, trop cristallisées, on est déjà presque en état de crise. Ce qu'on propose en fin de compte, c'est ce qui existe déjà au gouvernement canadien depuis 1990, ce qui existe en Union européenne. Il y a 25 pays de l'Union européenne qui se sont mis d'accord sur l'adoption d'une directive d'évaluation stratégique de leurs plans et programmes au niveau européen.

Ici, on le fait mais de manière informelle... en tout cas, dans certaines situations, puis ça mérite d'avoir un squelette, un «frame», là ? excusez l'expression ? un peu plus organisé, tout simplement pour que les groupes, les parlementaires, les décideurs puissent anticiper, se préparer comme il faut, donc sachent qu'à chaque révision de politique, à chaque élaboration de plan ou de programme, l'exercice va se réaliser. Puis des exemples précis... Les grandes politiques, on les voit facilement, mais, par exemple, dans les années quatre-vingt, il y a eu un programme... Je donne un exemple. Au ministère de l'Agriculture, à un moment donné, il y a un programme pour redresser les cours d'eau. Là, on y va, les pelles, les ci, les ça, on met de l'argent là-dedans, on fait une belle job, là, les beaux cours d'eau, là, droits. Ça a pris plusieurs années avant de se rendre compte que ça a créé des problèmes multiples, là. Je veux dire, à un moment donné, l'eau, elle partait, puis pas sur un moyen temps, au printemps, puis les difficultés ont commencé à se multiplier. Donc, le programme en question aurait mérité...

Le Président (M. Bergman): Madame, en conclusion.

Mme Beauchamp: C'est parce qu'on a peu de temps, puis j'avais une autre question.

Mme Fecteau (Louise): Allez-y.

Mme Beauchamp: Je suis désolée parce que votre... Je le disais, je considère votre présentation extrêmement intéressante, et c'est sûr que ça va entraîner des discussions avec notre équipe, là, par rapport à la vision des choses, par rapport à la stratégie. Je veux vous entendre plus spécifiquement sur... Parce que les exemples que vous me donnez, que ça se fait comme ça en Europe, à l'échelle du Canada, je reviens à une considération qui est: Comment je fais pour que le citoyen s'y retrouve et soit proche de ça? C'est-à-dire que ma réaction, c'est un peu de dire: C'est vrai, je pense que vous avez raison, mais en même temps c'est des endroits où on ne connaît pas ? à moins que je me trompe; mais ? un processus équivalent au BAPE, qui, pour moi, est un processus citoyen, hein, d'engagement citoyen.

J'ai compris que vous me disiez: Un n'empêche pas l'autre, mais, néanmoins, je veux vous entendre, parce que, derrière ce que vous me racontez puis les exemples que vous me donnez, je me dis... Bon, bien, les exemples que vous dites: Ah! ça a trop été ad hoc ou en situation de crise, mais, néanmoins, derrière ça, il y avait une commission parlementaire, il y avait des élus, des représentants démocratiques qui se sont intéressés à une question puis qui ont écouté des citoyens. Derrière le processus que vous nous invitez à adopter, je veux vous entendre sur, dans la vraie vie, ça va ressembler à quoi, mettons, une grande vision des choses, de dire: On fait un processus d'évaluation d'impact environnemental systématique, et tout ça. Il est où, le citoyen, là-dedans?

n(11 heures)n

Je me repose la question, et j'ai un peu... Je m'interroge encore sur qu'est-ce qui arrive au BAPE ensuite. Parce que je vais vous reprendre, même s'il existe une politique énergétique au Québec où... Reprenons les exemples que vous nous avez amenés, la forêt ou les porcheries, si jamais il y a un BAPE, là, les citoyens vont vouloir... peu importe qu'il y ait eu une grande évaluation environnementale systématique à quelque part, ils vont reposer les questions sur la justification du projet, ils vont la reposer. On ne pourra pas simplement dire aux citoyens: Vous ne pouvez plus poser de questions sur ça parce qu'on l'a décidé dans un grand plan d'évaluation environnementale. Honnêtement, je me mets à la place du citoyen, je pense que ce que vous proposez, c'est sûrement intéressant, vertueux, et je ne veux pas que vous pensiez que je suis en train de dire que, dans mes propos, je le rejette, je vous pose ma vraie interrogation, c'est: Comment, à la fin, je réintègre le citoyen pour qu'il se l'approprie, cette démarche-là, puis que, lui, là, quand, à la fin, il arrive un projet dans sa cour, il puisse, devant une instance, reposer les questions sur la justification du projet, sur pourquoi, ou non, on a besoin de ce projet-là? Vous comprenez? Je m'interroge vraiment sur il est où, le citoyen, dans le processus que vous nous proposez.

Le Président (M. Bergman): ...dans ce bloc de temps.

Mme Fecteau (Louise): Oui, je vais être rapide cette fois-là. Si on prend l'exemple de la directive canadienne sur l'évaluation environnementale stratégique, chacun des ministères doit se poser la question, à chaque révision ou élaboration d'une politique, d'un plan ou d'un programme: Est-ce qu'on doit faire une évaluation environnementale stratégique? Est-ce que le programme ou le plan en question mérite qu'on le fasse? Puis, si oui, de quelle façon on va procéder? Puis là il peut y avoir une consultation d'experts, il peut y avoir une consultation publique, il peut y avoir... Et l'instance qui va la tenir, cette consultation-là, ça peut être le BAPE. Le Bureau d'audiences publiques, au long de son histoire, s'est souvent posé la question justement: Est-ce qu'il n'y a pas lieu de faire une procédure plus formelle en ce qui a trait aux audiences génériques pour couvrir ce genre d'exercice là de manière plus systématique? Ça fait que, oui, ça peut se faire à ce niveau-là.

Mais ce qui est assuré dans ça, c'est que les politiques, les plans et programmes souvent sont élaborés dans les ministères un peu à huis clos. Oui, il y a des consultations plus ou moins formelles, mais à la limite on ne sait même pas qu'il y a une politique qui est en train d'être élaborée. Quand on arrive au niveau des projets, les détails entourant les justifications de la politique émergent, mais là on est déjà rendu au projet. Ce que ça fait, ça fait des décisions mieux éclairées à l'avance. C'est-à-dire qu'on prend le pari que la politique, au moment de son élaboration, va déjà tenir compte de l'opinion des grands groupes, des groupes environnementaux, des groupes de citoyens. S'il y a une consultation publique élargie, ils vont avoir l'occasion de s'exprimer. Dans le cas des politiques, par exemple, qui sont à portée plus large, le public peut être invité à commenter. Mais ça fait que le gouvernement, à partir du moment où il a fait cet exercice-là... Disons, sur un horizon quinquennal, quand des projets viennent s'insérer spécifiquement dans le cadre de cette même politique là, c'est plus facile, c'est plus reconnu. Ça n'empêche pas les questions, ça n'empêche pas les remises en question...

Le Président (M. Bergman): En conclusion.

Mme Fecteau (Louise): ...mais la politique a plus de chances d'être mieux organisée au départ. C'est surtout ça.

Le Président (M. Bergman): Merci. M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Bien, merci, M. le Président. Première des choses, je voudrais remercier le député d'Orford d'avoir offert du café aux parlementaires, c'est très courtois. Puis merci aux intervenants qui sont ici. Mme Fecteau, ça fait plusieurs fois qu'on se rencontre. Vous êtes de tous les combats, comme je peux me rendre compte. Dans mon introduction, là, sur la commission parlementaire, j'avais fait référence au fait que c'était la première fois que j'avais la chance d'assister à une consultation puis que ça allait m'apprendre beaucoup de choses. Et puis, dans ce cas-là, j'ai appris beaucoup, et ça m'a permis d'appeler beaucoup de personnes pour comprendre la différence entre une étude d'impact et une évaluation stratégique et essayer de chercher aussi des exemples concrets de ça.

Alors, d'entrée de jeu, là, j'aimerais clarifier ce point-là, si vous pourriez élaborer. Là, vous avez donné des exemples tout à l'heure concrets, donc Mme la ministre de l'Environnement m'a éclairé sur ces points-là. Mais, si on revient à la stratégie en tant que telle avec les nombreux objectifs qui y sont présents, est-ce que vous pourriez me fournir des éléments concrets d'une stratégie en environnement qui pourraient, dans ce cas précis là, être appliqués très rapidement?

Mme Fecteau (Louise): Une chose est sûre, dans la stratégie qui est déposée aujourd'hui ? c'est un peu pour ça qu'on appelle la proposition d'aujourd'hui un complément ? c'est qu'il y a une zone d'ombre. Quand on revient à la citation de Mme la ministre tout à l'heure, l'article 1 de la Loi sur le développement durable, ce qu'il dit, exactement le même paragraphe, mais je vais aller un petit peu plus loin.... Quand on dit qu'il faut «réaliser le virage nécessaire au sein de la société face aux modes de développement non viable, en intégrant davantage la recherche d'un développement durable, à tous les niveaux et dans toutes les sphères d'intervention ? et là ? dans les politiques, les programmes et les actions de l'Administration», je dirais de manière spontanée, là, on a le réflexe de se porter sur l'action du gouvernement, des sociétés, des ministères. Donc, elles doivent élaborer... chacun doit élaborer son plan d'action, chacun doit se doter d'indicateurs, chacun doit intégrer, comme organisation spécifique, là, à l'interne, différentes mesures, consommer de façon responsable, et tout ça.

Mais, dans sa portée, le ministère, lui, a une mission, là, je veux dire, il a des relations avec les citoyens, avec les groupes, avec les entreprises. Donc, dans ses politiques, ses plans, ses programmes, ça vient s'introduire comment, le développement durable? Comment on s'assure que les principes qu'on adopte, qu'on a adoptés, qu'on a retenus, qui sont non négociables, disons, viennent s'introduire graduellement dans nos politiques publiques, dans nos plans, dans nos programmes? Ce n'est pas nécessairement...

C'est difficile de rattacher de ce dont on parle aujourd'hui à la stratégie déposée parce que ce n'est pas nécessairement couvert, cet aspect-là des... Il y a deux endroits, là, quand on parle justement d'écoconditionnalité, ça a été mentionné ce matin. Mais ici on parle plus d'une subvention qui serait peut-être conditionnelle ? le mot le dit ? au respect d'une norme, ou d'un critère, ou d'un... Bon, ça peut être une entreprise qui a besoin de démontrer qu'elle respecte la norme de rejet en... ses objectifs environnementaux de rejet de façon à pouvoir obtenir un crédit fiscal ou qu'importe. Donc ça, c'est très, très spécifique, ce n'est pas au niveau de la politique ou du programme comme tel. Puis, au niveau de l'aménagement du territoire, on fait une référence au besoin d'intégrer, d'avoir une cohérence dans les interventions. Là, c'est un peu visé sur l'aménagement du territoire, mais les autres domaines d'activité méritent de l'être aussi.

M. Bergman: M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Oui. Bien, je vais essayer de poursuivre ma compréhension, là. Fin 1990, le BAPE a fait une étude sur l'eau, toute la gestion de l'eau au Québec qui a finalement poursuivi son cheminement au sein de l'Assemblée. Est-ce que cette... Parce que, là, il y a une distinction importante entre l'étude systématique, bon, puis les études d'impact, puis les études en environnement... Bon, je ne me souviens pas du nom exact, là, mais est-ce que le BAPE a dérogé dans le fond de son rôle de simplement faire des études d'impact de projets spécifiques ou le BAPE peut en quelque sorte pallier plusieurs domaines, dont celui-là que vous nous présentez actuellement?

Mme Lajoie (Ginette): J'espère bien répondre à votre question. Dans le cas dont vous faites mention, sur la politique de gestion de l'eau, ce n'était pas automatique que le BAPE allait tenir une consultation publique sur la question; il en a reçu un mandat spécifique du ministre de l'époque. Alors, ce que nous prônons davantage, nous, c'est que systématiquement, lorsqu'on est en mesure d'élaborer une politique, un programme ou encore un plan au niveau du gouvernement, et quel que soit le ministère, parce que ça responsabilise tous les ministères, que ce soient les ministères des Ressources naturelles ou de l'Industrie et Commerce et autres... à se questionner au départ est-ce que la politique que je suis en train de promouvoir et d'élaborer, j'ai suffisamment bien intégré dans cette politique les considérations environnementales qui y sont associées. Et, très tôt, donc on peut détecter si, dans cette politique, on risque d'avoir une incidence assez négative sur certains éléments environnementaux.

Mais on se tient à un niveau quand même... On comprend que, quand vous développez une politique, on est à un niveau très générique. Alors, nous, ce qu'on prône, c'est que cette approche-là... Dans le cas du BAPE, sur la politique de la gestion de l'eau, en sont sorties des discussions intéressantes, c'est que justement on... systématiquement, à chaque ministère, les responsables des ministères se posent la question et suivent une méthode qui est systématique, qui a fait ses preuves, qui, au cours des derniers 15 ans, à travers le monde, a développé plusieurs méthodes. Toute méthode a besoin d'être adaptée, on en convient, selon les besoins de chaque organisme gouvernemental, mais il y a actuellement devant nous tellement d'exemples qu'il est relativement simple de penser qu'on pourrait implanter, dans chacun des ministères, cet exercice.

Mme Fecteau (Louise): Juste en complément, je viens de réaliser quelque chose. Ça peut avoir l'air vraiment gigantesque, l'affaire, là, quand on dit: À chaque révision de politique, plan ou programme, arriver avec une procédure qui a l'air assez imposante. Dans les faits, ce qui est systématique, c'est de se poser la question. La mécanique est automatique, est systématique. Au gouvernement fédéral, sur quelque chose comme plusieurs centaines d'initiatives gouvernementales, il y a quelques dizaines d'évaluations qui se sont tenues dans les faits. La question doit nécessairement se poser: Est-ce que le programme que je m'apprête à mettre en place... Supposons, le ministère de la Santé a une nouvelle politique ou un nouveau programme pour les personnes âgées en milieu... je ne sais pas quoi, la question va se poser: Est-ce que ça peut avoir... est-ce que les principes de développement durable rentrent là-dedans, oui ou non? Si la réponse est non, on documente la réponse, on passe à...

n(11 h 10)n

Autrement dit, l'évaluation ne se fait pas nécessairement de manière détaillée. Mais, s'il met en place un programme de récupération des médicaments périmés, là il va peut-être falloir se poser la question: On les récupère? On en fait quoi? Les pharmaciens, comment on s'assure... Tu sais, donc là c'est une série de questions à se poser. On descend dans un tamis. Oui, des fois, il peut y avoir une évaluation assez élaborée, comme dans le cas de l'eau, parce que, là, ça touche les citoyens dans leur... chacun personnellement, mais, dans d'autres types de programmes, il n'y aura pas d'évaluation détaillée. Ça reste, les évaluations en bonne et due forme, plutôt marginal, mais il y a une mécanique qui s'est installée.

M. Diamond: O.K. Parce qu'effectivement, à la page 6, vous en parlez, de ça, et puis, moi, ça m'est venu en tête, là, effectivement, la question de l'eau puis la question de l'énergie, est-ce qu'on a des directions là-dedans. Puis je suis sûr qu'on va avoir la chance de revenir sur la question de l'énergie, mais ça m'apparaît des consultations assez importantes, des remises en question assez importantes.

Vous faites référence... Vous m'avez donné des exemples fictifs, là, mais, à votre page 6, vous citez qu'il y a des exemples concrets qui, au contraire, ça ne coûtait rien puis que même au contraire ça accélérait les processus à la place de les ralentir, et puis est-ce que ce serait possible pour vous d'élaborer sur ces exemples concrets là où au contraire ça a eu l'effet bénéfique sur les résultats? C'est à la page 6, dans le milieu de la page.

Mme Fecteau (Louise): ...où ça se présente, les évaluations environnementales stratégiques. Premièrement, on ne dit pas que ça coûte rien, là. C'est-à-dire que, toutes proportions gardées, de faire un exercice au niveau... quand on est au niveau vraiment de l'élaboration de la politique, ça a un coût, ça a un coût, là. Si on se réfère aux audiences génériques du BAPE, on parle de quelque chose comme 1 million à 2, là, on a fait... Moi, dans un autre exercice, j'ai fait une évaluation de vraiment plusieurs cas, les audiences génériques, ça a un coût. Ce qu'il faut se dire, c'est qu'on en tient de toute façon. Comme on disait tout à l'heure, on en tient souvent un peu tard, un peu de manière désorganisée, puis tout ça. Donc, le coût est déjà là. Le faire un peu plus systématique, ça a définitivement un coût.

Là où ça peut permettre des économies, c'est qu'à un moment donné il y a des projets, des politiques ou des programmes qui sont longtemps dans la machine, qui sont longtemps discutés, qui font l'objet de discussions ou d'évaluations plus spécifiques, puis, à un moment donné, ils ne verront jamais le jour. Je veux dire, ils vont bloquer dans le processus quelque part, ils vont avorter, ils ne se rendront pas à terme parce que la discussion, je dirais, ouverte, en bonne et due forme au niveau de l'élaboration elle-même ne se sera pas tenue. Donc, c'est le coût de l'alternative qui rentre en ligne de compte. Des projets qui ne voient jamais le jour, ça coûte combien? C'est ça, la question qui est importante de se poser. À un moment donné, c'est qu'il faut que tous et chacun, tant le gouvernement que les promoteurs, puissent présenter des projets qui ont des bonnes chances de réussir parce qu'ils s'inscrivent dans une mécanique qui a fait l'objet des consultations en bonne et due forme à chaque occasion qui s'est présentée.

M. Diamond: Combien de temps il me reste, M. le Président?

Le Président (M. Bergman): Trois minutes.

M. Diamond: Trois minutes?

Le Président (M. Bergman): 2 min 30 s.

M. Diamond: O.K. Écoutez, j'avais une autre question, mais je vais céder la parole à... je vais demander au président de céder la parole au député de Montmagny-L'Islet si...

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Diamond: ...puis je reviendrai peut-être vous en parler prochainement.

M. Roy: Merci bien.

Le Président (M. Bergman): Oui. Pour à peu près deux minutes, M. le député.

M. Roy: Merci beaucoup. J'ai deux questions, mais rapidement, tout simplement... très, très rapidement. Moi, j'ai toujours une inquiétude... Je m'excuse, entre parenthèses, bonjour. Et bienvenue pour la commission.

Les questions que je me pose, c'est... Les personnes qui composent votre organisme, j'espère et je suppose qu'il n'y a pas personne de biaisé dans ça. Donc, je m'explique. Dans la région que j'habite, Montmagny-L'Islet, on est dans un territoire où les agronomes disent: Vous avez besoin de fertilisants. Le meilleur fertilisant, c'est le purin de porc. Vous êtes en présence d'un territoire qui peut supporter beaucoup. Donc, on pourrait, à ce moment-là, faire affaire avec un organisme comme le vôtre pour dire: Nous, on aurait ce projet-là, qui est un projet de comté, mais on sait que personne n'en veut, du porc, personne ne veut avoir de porcheries. Est-ce que vous êtes en mesure, vous autres, de dire: Bien, écoutez, nous, on va faire l'évaluation environnementale stratégique pour voir l'impact de ce que ça peut avoir chez vous? Est-ce que vous allez jusque-là?

Mme Lajoie (Ginette): L'association, avant tout, a comme rôle de regrouper, hein, tous les intervenants en matière d'évaluation environnementale, spécialistes, consultants, personnes de l'administration publique, décideurs du secteur privé comme du secteur public, et comme tel nous n'entreprenons pas d'exercices. Mais, parmi notre membership, il y a des gens qui ont les compétences pour faire ce genre d'exercice. Nous avons déjà parmi nos membres par ailleurs des consultants qui travaillent à l'international où, là, systématiquement, par exemple, pour les programmes de l'ACDI, que ce soit l'OCDE, doivent... Tous les grands prêteurs, la Banque mondiale, la Banque interaméricaine sont tous tenus d'appliquer, pour chaque programme de développement, l'évaluation environnementale stratégique. Et déjà, parmi notre membership, nous avons des gens qui ont les compétences de mettre en oeuvre ce genre de méthode pour l'appliquer à des problématiques comme la vôtre, par exemple.

Le Président (M. Bergman): Merci, madame. M. le député de Vachon.

M. Bouchard: Oui. Alors, Mme Lajoie, Mme Fecteau, M. Lundahl, bienvenue. Deux questions. La première, je la demanderai souvent, parce que je trouve que c'est un pavé dans la mare assez important que le Commissaire au développement durable a lancé hier, à l'effet qu'il se disait, étant donné la nature même de la stratégie qui était présentée devant lui, incapable de remplir son rôle et de donner à la fin de l'année... de juger de la portée de l'application de la stratégie. Qu'est-ce que vous pensez de... Est-ce que vous êtes d'avis du Commissaire qu'il sera placé dans une situation d'impossibilité d'une évaluation rigoureuse de la stratégie ou de la portée de la stratégie?

Mme Lajoie (Ginette): Grosse question.

M. Bouchard: Vous êtes la mieux placée pour répondre.

Mme Lajoie (Ginette): Écoutez, lorsqu'on a lu le projet de stratégie du gouvernement, on a peut-être eu comme première réaction qu'effectivement, je pense, comme l'intervenant qui nous a précédés, que ça ratissait extrêmement large. J'ai même utilisé, à un moment donné... ? peut-être que j'étais fatiguée au moment de la lecture ? que ça me semblait un peu comme un patchwork. Il y a plein, plein de bonnes choses dans le document qu'on a repiquées d'exemples ici et là soit d'une petite action, soit d'un petit programme qui converge vers les orientations de la stratégie, mais je partagerais, moi, l'avis de M. le Commissaire à l'effet que ce sera tout un défi d'arriver, au bout d'un an ou autre, d'avoir une mesure ou une évaluation de la progression.

Mme Fecteau (Louise): Une chose est sûre, c'est que la stratégie ne peut pas aller à ce niveau de détail près, mais ça dit qu'il doit y avoir un plan d'action dans chacun des ministères, organismes... Bon. Le plan d'action, là, il doit comporter dès le départ un état des lieux. Je veux dire, quand on travaille... La question a été posée tout à l'heure, oui, on intervient au sein de certains projets ou... avec les municipalités beaucoup, et tout ça. Première question, photo. On prend une photo de la situation de départ. C'est la seule façon de mesurer l'évolution finalement. Quel est le chemin à parcourir pour atteindre les objectifs qu'on se fixe? Il faut d'abord savoir d'où on part. Donc, M. Mead posait la question, mais ça revient... Autrement dit, il faut s'assurer que, dans le squelette qui va être fourni, parce que c'est un peu ça que j'ai compris, moi, à la lecture de la stratégie, les ministères vont être assistés, on va les accompagner, le ministère du Développement durable va les accompagner pour construire un premier plan d'action, puis les étapes qui vont assurer la possibilité de les vérifier vont rentrer là-dedans, là. Donc, c'est là que vont venir se greffer, en fin de compte ? comment je dirais ca? ? les différents mécanismes pouvant lui permettre de faire son travail.

M. Bouchard: O.K. Deuxième question. Je pense que vous soulevez une dimension de l'acceptabilité dans le fond sociale des projets ou des grands projets... à propos de l'acceptabilité sociale des grands projets au Québec. Je fais référence notamment au projet de développement du bassin Peel à Montréal, où il n'y a pas eu cette espèce d'approche d'évaluation systématique, à partir de 16 principes du développement durable, des caractéristiques du projet qui était présenté avant même que ce ne soit présenté au public. Ce que je comprends, là, ce que vous dites, c'est qu'il doit y avoir une phase préalable durant laquelle les promoteurs, ou les entrepreneurs, ou les ministères se posent la question: Comment, nous, on se positionne vis-à-vis, étant donné le projet qu'on veut développer, de ces principes-là? Bon, c'est un exemple.

n(11 h 20)n

L'autre exemple qui me vient à l'esprit, c'est l'exemple de Rabaska. Ce que vous avez dit tantôt m'a frappé beaucoup. Vous avez dit: Une des questions qu'il faut se poser avant d'aller devant la consultation avec le BAPE, où finalement le BAPE consulte une population relativement restreinte, locale à propos de l'implantation d'un projet qui va la toucher directement et pour laquelle la population peut avoir toutes sortes de réticences, etc., la question qui se pose, c'est la question de la pertinence du projet. Et ce que vous avez avancé, c'est qu'il fallait s'interroger d'abord sur la pertinence du projet vue du point de vue de l'Administration avec un grand A. Ça, ça m'apparaît extrêmement important pas pour arriver à ce que le projet soit absolument accepté, mais pour qu'il n'y ait pas de doute au point de départ, étant donné ce que ça demande comme adaptation à la population, que le projet est vraiment indispensable. C'est comme ça que j'ai compris votre intervention. Est-ce que j'ai bien compris?

Mme Lajoie (Ginette): Je vais faire une nuance. Notre intervention au niveau de l'évaluation environnementale stratégique, c'est même plus en amont que le projet. O.K.?

M. Bouchard: C'est ce que je comprends.

Mme Lajoie (Ginette): Et ce que je veux dire, pour l'administration publique, la question qui se poserait dans un cas de ce genre de type de développement, c'est davantage non pas... est-ce que, cadrant avec ma politique de développement énergétique, est-ce qu'il y a une place pour ce genre... ce bloc de genre de développement? Et quelle place... ou quelle dimension ce développement-là doit avoir? C'est à ce niveau-là que la discussion et l'analyse doivent se tenir, et on ne présume pas par la suite des projets individuellement.

M. Bouchard: Non, non. Alors ça, moi, je suis tout à fait... Écoutez, moi, je ne pensais pas pouvoir entendre ça de la bouche d'une association aussi rigoureuse et systématique que la vôtre, mais ça conforte l'idée que nous avons de faite qu'avant que de proposer un projet précis on ait accès à une appréciation de l'ensemble de l'oeuvre, autrement dit, par exemple, dans ce cas-là, qu'un organisme qui vient naturellement à l'esprit, là ? c'est la Régie de l'énergie du Québec ? puisse être mandaté pour réfléchir quant à la stratégie de développement de chacune de nos filières énergétiques en regard des besoins du Québec, par exemple, et quelle pourrait être la position ou le rôle du gaz naturel dans l'ensemble de ces filières-là.

Et, moi, je suis tout à fait conforté par votre opinion là-dessus, parce qu'il me semble... Moi, si j'étais à la place des gens qui sont concernés par un projet d'implantation, par exemple, d'un port méthanier ou d'un casino à portée de chez nous, j'aurais cette réaction-là de dire: Aïe! Aïe! Aïe! un instant, là, vous me demandez toutes sortes d'adaptations, mais est-ce que c'est vraiment nécessaire? Et ce que vous dites, vous, c'est qu'on dégoupillerait cette réaction spontanée de dire: Je rejette parce que je ne suis pas sûr que ce soit absolument nécessaire en faisant la démonstration quelque part de la nécessité du projet.

Mme Fecteau (Louise): Très, très, rapidement, là. L'exemple que vous apportez, de référer à la Régie de l'énergie, ce n'est pas nécessairement le bon parce que c'est un organisme qui a une mission spécifique, qui a un cadre très précis de fonctionnement et qui ne peut même pas aller au-delà, à la limite, des autres considérations que celle pour laquelle il est strictement dédié. Donc...

M. Bouchard: Je suis d'accord avec vous parce que le BAPE va au-delà de ça par la suite.

Mme Fecteau (Louise): Oui. Donc, on ne peut pas revenir en arrière sur des choses qui sont déjà très avancées. Mais je vais reprendre des rampes d'épandage en milieu agricole. Très rapidement, si, demain matin, parce qu'il y a un paquet de problèmes de cohabitation dans le milieu agricole puis qu'on recherche une meilleure harmonisation entre les projets des agriculteurs et de leurs communautés respectives, on dit que le gouvernement veut élaborer un programme, mettons, de financement des rampes d'épandage ? comment qu'on dit, donc? ? qu'ils vont planter dans le sol les fumiers plutôt que de les «splasher» dans l'air, là, ça, c'est un programme donc qui serait nouveau, une initiative gouvernementale qui serait à mettre en place. Ce qu'on est en train de dire, c'est que, plutôt que le ministère de l'Agriculture se mette à développer ça, fasse un programme, le lance avec le milieu agricole, etc., il va faire comme feraient les promoteurs, il va se demander: Quels ministères ça touche? Il va faire une consultation interministérielle: Est-ce que ça a d'autres impacts que ceux que je pense? Est-ce que le ministère des Affaires municipales a de quoi à dire sur le sujet? Est-ce que le ministère des Transports, je ne sais pas, ces rampes-là, est-ce qu'ils peuvent créer... est-ce qu'ils peuvent être hors norme sur le chemin? Est-ce que...

Donc, déjà au moment de l'élaboration de son programme, avant même de le lancer, il va se poser des questions comme on s'en poserait dans un projet spécifique, puis on va arriver donc à l'issue de tout ça avec un programme mieux élaboré, qui tient compte d'un ensemble de facteurs plutôt que traditionnellement s'en aller avec les fonctionnaires du ministère de l'Agriculture qui travaillent fort, qui font tout ce qu'ils peuvent, mais que finalement ça ne contente personne, puis là ils disent: Mais mosus! ils ne sont jamais contents, tu sais. Ça fait que c'est un peu ça, la... On a parlé beaucoup des grandes politiques, mais ça peut aller même à ce niveau-là.

M. Bouchard: Ce que je comprends de votre réponse, Mme Fecteau, c'est que la systématisation de l'approche que vous proposez devrait nous encourager, en tant que gestionnaires des affaires de l'État, à nous poser la question de la pertinence au point de départ puis qu'à un moment donné, dans le processus, une fois que la pertinence est démontrée, on puisse, à ce moment-là, consulter sur des aspects plus particuliers d'implantation d'un projet ou d'un autre dans des territoires donnés. Et ce que vous nous dites dans le fond, c'est que, lorsque j'évoque la Régie de l'énergie du Québec, par exemple, c'est qu'on ne peut pas demander que le projet soit présenté devant la régie une fois que le projet est à ce point cristallisé ou les opinions sont à ce point cristallisées dans l'opinion publique que finalement l'opinion de la régie n'aurait plus de portée. C'est ça que vous dites?

Mme Fecteau (Louise): Non, mais c'est que son mandat...

Mme Lajoie (Ginette): Son mandat est déjà très cerné. Elle ne serait pas en mesure, la régie, selon nous, d'aborder, à ce niveau-là, les questions.

M. Bouchard: Bien, écoutez, est-ce que la régie peut donner un avis de pertinence, ou non, sur le développement des filières énergétiques au Québec?

Mme Fecteau (Louise): Nous ne sommes pas là pour faire un propos sur un projet très spécifique.

M. Bouchard: Moi, je suis là pour le faire. Moi, ce que je vous pose comme question, c'est: Est-ce que la régie n'a pas comme mandat d'évaluer l'ensemble de la stratégie énergétique du Québec et de la position de chacune de ses filières? Autrement dit, moi, ce que j'entends de votre discours, là, c'est qu'il y a une nécessité de démontrer la pertinence d'un projet. C'est ce que vous avez affirmé au point de départ.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Vachon.

M. Bouchard: Oui.

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, le temps est écoulé, et je vous remercie pour votre contribution. Et je demande au Réseau québécois des groupes écologistes de prendre place à la table, et je suspends pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 27)

 

(Reprise à 11 h 34)

Le Président (M. Bergman): À l'ordre! Alors, je souhaite la bienvenue au Réseau québécois des groupes écologistes. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, et, après, il y aura une période d'échange. Alors, s'il vous plaît, s'identifier et procéder avec votre présentation. Merci.

Réseau québécois des
groupes écologistes (RQGE)

Mme Pelletier (Gabrielle): D'accord. Merci, M. le Président. Gabrielle Pelletier. Je suis la présidente du Réseau québécois des groupes écologistes. Mme la ministre, MM. et Mmes les députés, on est très contents d'être ici, aujourd'hui, en fait parce qu'on n'avait pas été invités au départ. Alors, peut-être un oubli, mais on est contents de pouvoir participer parce qu'on a quand même suivi de très près toutes les consultations et la commission parlementaire sur le projet de loi n° 118, là, sur la Loi sur le développement durable. Donc, c'est clair que, pour le Réseau québécois, ça nous tient à coeur, toute la question de la protection de l'environnement mais aussi les décisions que prend le gouvernement en termes de protection de l'environnement.

Peut-être rapidement, le Réseau québécois est actif depuis maintenant plus de 25 ans. On regroupe des groupes à la base qui ont un mandat local, régional et national. Ce sont des groupes qui existent depuis pas mal d'années, qui oeuvrent sur le terrain et qui voient justement à faire de la sensibilisation, de l'éducation, mais aussi à être présents; si quelque chose se passe, à dénoncer, dans le cas échéant, mais surtout aussi à proposer des solutions évidemment en lien avec leur communauté.

Le Réseau québécois est aussi très, très impliqué avec les autres secteurs de... les autres secteurs sociaux ? excusez-moi ? les autres groupes communautaires. On siège au Réseau québécois de l'action communautaire autonome depuis le tout début. Donc, ça nous permet d'être en lien aussi avec les autres aspects de la société et de travailler avec nos collègues du milieu communautaire. Je vais laisser la parole à Priscilla Gareau et, après, je reviendrai. Merci.

Mme Gareau (Priscilla): Donc, en ce qui concerne le document du projet de stratégie de développement durable, je vais y aller par ordre donc de sections du document. Au niveau de la section Introduction, bien, premièrement, on tient à souligner positivement la volonté du gouvernement d'appliquer puis d'intégrer le concept de développement durable au sein de l'administration publique. Mais à notre avis la stratégie de développement durable est quand même insuffisante parce que, premièrement, elle ne s'adresse qu'à l'appareil gouvernemental et non au secteur privé institutionnel et à la collectivité; donc, c'est un seul secteur. Donc, au niveau d'une espèce de plan vert, ça devrait être collectif.

Donc, je vais aller aux recommandations pour faire le plus rapidement possible donc, étant donné qu'on a seulement 15 minutes. Donc, une de nos premières recommandations, c'est que la stratégie et les actions de développement durable qui vont découler de la stratégie ne se limitent pas qu'à l'administration publique et qu'un véritable plan vert s'adresse à l'ensemble de la société et qu'il soit adopté pour responsabiliser tous les acteurs dont les générateurs de pollution.

Par la suite, on en vient aux principes de développement durable qui sont cités dans la stratégie. Donc, c'est bien, les ministères vont suivre ces principes-là. Cependant, les organismes publics, ils ne seront pas... il n'y a pas de sanction prévue s'ils ne respectent pas ces principes-là.

Et, de plus, donc... et, par exemple, c'est le 15 octobre, le ministère des Ressources naturelles annonçait qu'il abolissait le conseil de mise en oeuvre des recommandations du rapport Coulombe sur la gestion de la forêt québécoise. Donc, étant donné que, même s'il y a une loi et une stratégie, on doute que cette stratégie soit assez musclée pour faire en sorte que les acteurs gouvernementaux respectent ces principes-là.

De plus, il n'y a pas de hiérarchisation des principes, contrairement à ce qui était préconisé dans le rapport Brundtland qui fait du respect, par exemple, de la capacité de support des écosystèmes le principe prioritaire avant les autres principes. Et aussi il n'y a aucun principe qui a été retenu quant aux populations autochtones, aux femmes et aux jeunes.

Un autre principe qu'on aimerait qu'il y ait une précision, c'est le principe de pollueur-payeur. Donc, on aimerait que la définition soit plus précise et qu'elle intègre toutes les personnes, du simple citoyen aux personnes morales, donc aux entreprises, pas seulement aux personnes morales, pour que la responsabilité ne soit pas uniquement mise sur les épaules du citoyen.

Après ça, la section sur l'orientation 1, d'informer, de sensibiliser, d'éduquer et d'innover: on s'inquiète un peu au niveau notamment des indicateurs de développement durable parce que, souvent, quand on utilise seulement ce mécanisme-là, ça ne tient compte que des données quantitatives et ça ne tient pas compte des données qualitatives. Donc, on se demandait comment ces indicateurs-là allaient être choisis: Est-ce que ça va être des données à long terme aussi?

Donc, pour nous, le processus d'identification, de sélection et d'adoption des indicateurs est crucial. Donc, on recommande que les groupes environnementaux soient invités à participer à un groupe de travail qui aurait comme mandat de définir les indicateurs de développement durable avec le support d'un comité d'experts universitaires ou indépendants, et qu'une évaluation systématique des politiques, programmes, plans soit réalisée au regard des impacts sur l'environnement, et que tout projet soit soumis à l'évaluation environnementale et aux audiences publiques.

n(11 h 40)n

Au niveau de l'orientation 2 qui s'intitule Réduire et gérer les risques pour améliorer la santé, la sécurité et l'environnement, c'est qu'il semble y avoir, dans les principes mêmes qui sont définis, une contradiction entre le principe de prévention et de précaution parce que le principe de prévention réfère à la notion de gestion de risques qui est... Dans la gestion de risques, déjà ce ne sont pas seulement des critères de santé, mais c'est aussi évalué selon des critères économiques, sociaux et politiques. Donc, ce ne sont pas que des critères de santé publique ou environnementaux. Donc, c'est très différent du principe de précaution.

Donc, on recommande que, dans la hiérarchie des principes, le principe de précaution, tel que défini par la majorité des auteurs sur le sujet et non tel que défini par la stratégie gouvernementale, soit prioritaire comparativement au principe de prévention. Parce que, dans la définition du principe, c'est indiqué que, s'il y a un risque grave, et je n'ai pas... je n'ai pas le temps... je ne l'ai pas noté à côté de moi, là, je peux l'avoir dans le mémoire, c'est marqué «grave», alors que, dans le principe de précaution, par la majorité des auteurs, ce n'est jamais indiqué ça.

Et finalement ce n'est jamais non plus... il n'est jamais mentionné la santé environnementale, alors que c'est la base d'application du principe de précaution, donc que ce soit inclus dans la stratégie. Donc, je laisse la parole à Gabrielle Pelletier. Merci.

Mme Pelletier (Gabrielle): C'est clair que, pour mettre en place une stratégie comme ça de développement durable au sein de l'appareil de l'État, le ministère a quand même des alliés dits naturels. Donc, on parle, entre autres, des groupes environnementaux. Alors, pour nous, c'est clair qu'il faut aussi que ces groupes-là évidemment travaillent de concert avec le ministère, mais, pour ce faire, on veut évidemment avoir les moyens de le faire, donc que ce soit au niveau du financement des groupes, mais de leur soutien et de leur reconnaissance comme tels. Il y a eu des bons pas dans la bonne direction, dernièrement, de la part de la ministre, et ça, c'est apprécié, mais il y a encore beaucoup de groupes qui malheureusement ne sont pas reconnus pour leur apport dans leur communauté, particulièrement les groupes locaux en région qui font énormément de travail sur le terrain mais qui ne sont pas reconnus présentement.

C'est clair aussi pour nous, une stratégie de développement durable comme ça, il faut que le ministère de l'Environnement ait les moyens de le faire, et ça, ça veut dire d'avoir beaucoup plus de crédits qu'il a actuellement. Malheureusement, c'est un ministère qui, au cours des années, a vu son budget nettement diminuer, et ça, on le déplore fortement. Il faut aussi qu'il ait les moyens aussi législatifs et réglementaires de pouvoir faire appliquer ce qu'il met en place. On sait qu'une stratégie, ce n'est pas une loi, ça n'a pas la même force, mais quand même, d'avoir les moyens de pouvoir faire respecter cette stratégie, pour nous, c'est essentiel que le ministère puisse le faire. On sait qu'il s'est fait couper pas mal de choses au cours des ans, que ce soit son contentieux, sa police verte et plein de choses. Il faut vraiment que le ministère redevienne un ministère important au sein de l'appareil de l'État et qu'il puisse, lui, coordonner, d'une façon cohérente, l'ensemble des décisions et l'ensemble du développement qui se fait au sein du gouvernement, et ça, ça veut dire aussi d'avoir à travailler avec le ministère des Ressources naturelles qui a effectivement peut-être une vocation plus économique, mais de pouvoir avoir peut-être préséance sur certains dossiers qu'on peut nommer. Simplement la question des aires protégées et la question des mines, je pense qu'il va falloir que le ministère ait ce pouvoir de faire appliquer ce qu'il veut mettre en place.

Donc, pour nous, la stratégie, oui, c'est un bon pas. On verra par la suite si cette stratégie-là va pouvoir être mise en oeuvre correctement, être appliquée aussi et voir comment le gouvernement va faire respecter ce qu'il veut faire. C'est clair que d'avoir des plans d'action dans chacun des ministères, c'est une chose, les évaluer à chaque année, c'en est une autre, encore faut-il voir quelles vont être vraiment les actions concrètes.

Le RQGE aussi préconise, et là je ne sais pas comment le gouvernement en place voit ça, mais peut-être que l'application de l'ensemble de tout ce qui est développement durable soit peut-être mis dans une instance beaucoup plus... une instance peut-être située à un plus haut niveau de l'État, peut-être même que le premier ministre devrait en être responsable et que l'application se fasse adéquatement.

Donc, pour nous, le gouvernement doit aller vraiment dans le sens de protéger l'environnement, ce qui n'empêche pas de développer le Québec, mais de le développer d'une façon beaucoup plus viable que c'est fait actuellement et de le faire dans une ? comment je pourrais dire? ? perspective où tout le monde sait qu'est-ce que son voisin ministériel fait ou qu'il y ait une cohérence dans l'aménagement du territoire ou dans le développement de projets en termes des besoins aussi. On sait que la question énergétique actuellement ? et on peut ne nommer que le projet Rabaska ? semble créer certains remous, si ce n'est des gros remous. Il va falloir aussi qu'il y ait une cohérence aussi à ce niveau-là. Donc, pour nous, il faut vraiment que l'efficacité de ce plan-là... En tout cas, l'avenir nous dira s'il y a vraiment une efficacité par rapport à ce plan mis en place, parce que, bon, c'est clair qu'au fil des ans beaucoup de gouvernements ont dit qu'ils voulaient respecter la notion de développement durable depuis le rapport Brundtland, mais, malheureusement, souvent, les gestes n'ont pas suivi les voeux de mettre ça en place.

Pour terminer, j'aimerais quand même vous rappeler l'importance du rôle des groupes écologistes dans notre société. Ce sont des groupes qui, en amont, vont sensibiliser la population sur l'importance de notre qualité de vie, sur l'importance de notre environnement, mais qui sont aussi les premiers à voir un problème surgir sur le terrain. Donc, c'est important de les considérer. Ils ont aussi, au cours des ans, développé une expertise et une crédibilité dans la plupart de leurs dossiers, même proposent des solutions. Que ce soit dans la gestion des déchets, on a vu énormément d'organismes proposer des choses très positives de ce côté-là. Donc, je pense qu'il va falloir les considérer, les mettre à contribution et qu'il serait grand temps qu'on les reconnaisse adéquatement.

Alors, le RQGE souhaite effectivement que le gouvernement aille peut-être une coche plus loin et ne pas avoir seulement une stratégie comme telle, mais d'avoir une réelle volonté politique, d'avoir un plan vert cohérent et qui va faire en sorte que tous les ministères puissent se concerter dans le choix des développements qui restent à faire. On sait qu'il y a des gros projets qui s'en viennent en termes d'infrastructures, en termes de partenariat public-privé, en termes énergétiques. Il va falloir vraiment que le gouvernement soit concerté et que le ministère de l'Environnement joue son rôle, et son rôle est crucial, et j'espère qu'on va lui donner les moyens de le jouer aussi, ce rôle-là. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bergman): Merci pour votre présentation. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Merci beaucoup. Merci beaucoup et bienvenue. Ça me fait plaisir de vous revoir. Vous faites des commentaires, dans votre mémoire, sur la notion d'écoute des groupes, et je tiens ici à dire que... sûrement que les choses n'ont pas été parfaites, mais je veux juste quand même qu'on resitue l'exercice dans lequel nous sommes. Il faut quand même mentionner que... et je pense que vous l'aviez fait lors de la consultation publique qui a eu lieu en 2005, mais on est quand même devant une démarche qui, entre autres, je pense sincèrement, a impliqué de nombreux groupes environnementaux et a été une démarche citoyenne avec une consultation... avec plus de 3 000 participants à travers les régions du Québec. Je voulais juste mettre en perspective le fait que vous avez sûrement connu des irritants avec le gouvernement, mais je ne voudrais pas que, dans vos propos puis dans la lecture de votre mémoire, ça donne l'impression qu'il y a eu un manque d'écoute, alors que je suis là puis je me dis: Mon Dieu! on est devant, entre autres, une démarche au niveau du développement durable, qui, je pense, en termes d'écoute de la population, a été assez exemplaire.

Vous parlez aussi donc... Derrière, je pense, cette critique que vous faites, il y a un appel à du respect puis de la reconnaissance des groupes environnementaux, et je veux juste vous réitérer... Je pense que vous le savez, vous l'avez mentionné qu'on a posé des gestes récents d'un rétablissement de financement, mais peut-être pour illustrer la chose, là, que je n'ai aucune difficulté à dire ici haut et fort que, pour moi, vous êtes des partenaires, des alliés, que je vous respecte et que je vous reconnais, puis c'est vrai pour l'ensemble du gouvernement. C'est le fait qu'après six mois, moi, à la tête du ministère de l'Environnement, ce sera tout près de 1,5 million de dollars récurrents qui auront été injectés directement vers le fonctionnement d'organismes environnementaux. Je pense aux organismes nationaux et je pense aux organismes de bassin versant et aux conseils régionaux en environnement. C'est qu'après six mois je me dis: Je pense que les gestes ont été posés pour reconnaître le respect qu'on a pour vous, et, comme vous le savez, il y a un plan sur la table pour être capable, de façon vraiment pérenne, d'assurer le financement du groupe via le Fonds vert, je l'espère, dès la prochaine année financière. En fait, je ne fais pas juste l'espérer, j'y travaille activement, comme vous le savez.

Votre mémoire est un appel à ce que l'approche soit plus large, hein, vraiment, en disant elle ne s'adresse, dans un premier temps, qu'à l'administration publique, et vous déplorez qu'elle n'interpelle pas suffisamment l'ensemble de la société, dont le secteur privé. Je sais, j'ai fait des commentaires précédemment avec d'autres invités qu'on a reçus depuis hier, pour dire justement que je sais que, lorsque, vous, vous vous êtes présentées en consultation publique en 2005, puis de nombreux autres groupes, il y avait cet appel à ce que ce soit un projet de société, et c'est un peu ça que vous réitérez aujourd'hui en disant: Ça doit devenir un projet de société puis ça doit ratisser large, si je peux dire. Et je veux juste par contre vous dire que, depuis le début de notre consultation, hier, il y a certains organismes... je pense au Centre québécois de développement durable qui s'est présenté devant nous, hier, en nous proposant plutôt, puis je ne voudrais pas dénaturer ce qu'ils nous ont dit, là, il y en a d'autres qui étaient là, mais en nous faisant pratiquement la suggestion de réduire le nombre d'objectifs visés en disant: Vous devriez en prioriser trois plutôt que d'essayer d'atteindre les neuf. Ou encore, le Commissaire au développement durable, qui a aussi dit: Ça ratisse large, à un point tel que je pense aussi qu'on manque de cibles. Puis ce sera...

n(11 h 50)n

Le député de Vachon le rappelle souvent. Le Commissaire au développement durable hier nous a dit: Je vais peut-être avoir de la difficulté à faire mon boulot parce que ça ratisse tellement large et avec un manque de cibles que je ne serai peut-être pas capable de faire l'évaluation de l'avancement de l'application de la stratégie. Ça fait que je suis en train de vous dire que, depuis qu'on est assis ici, depuis quelques heures, on entend plutôt des gens... Je ne veux pas réduire ce qu'ils nous ont dit, là, je ne voudrais pas simplifier à outrance, mais on est quand même plutôt devant certaines invitations à réduire un peu en se disant: Ayez plutôt une stratégie des petits pas.

Même, ce matin aussi, le Conseil patronal de l'environnement est aussi venu nous dire: Il faudrait peut-être qu'il y ait certains éléments qui soient enlevés. Et, vous, vous nous dites: Non, il faut l'élargir. Donc, je comprends votre message au niveau de dire: Il faut l'appliquer au secteur privé, et je pense que vous savez que, même dans la loi, cette démarche-là, elle était prévue en disant: On va commencer par l'appareil gouvernemental, et ça va... Je disais tantôt, entre guillemets, ça va percoler. Mais ensuite c'est les grands réseaux, santé, éducation, et c'est le secteur privé et l'ensemble de la société.

Je veux vous entendre sur concrètement, là, est-ce qu'on doit viser une approche très large et tout de suite interpeller l'ensemble des acteurs au prix de se faire dire, comme le Commissaire au développement durable nous l'a dit hier: Une chatte va y perdre ses petits, là? C'est tellement large que ce n'est pas vrai, ça ne se passera pas, vous ne serez pas capables de suivre ce qui se passe, et on ne sera pas capables de se donner les bons indicateurs pour suivre ce qui se passe? Ou si vous dites: Non, la situation est à ce point, je ne sais pas, moi, urgente qu'il faut tout de suite impliquer le plus largement possible l'ensemble de la société?

Mais je vous dirais que je suis... on est un peu dans une confrontation de deux visions. Et je me répète, là, mais je veux juste vous dire: Il y a du monde, y compris, par exemple, le Centre québécois de développement durable, qui hier est pratiquement venu nous dire: Visez... Ayez plutôt une ? j'ai compris ça comme ça; ayez plutôt une ? démarche qui sera vouée au succès et ce sera la meilleure façon de s'assurer qu'ensuite ça s'implante dans l'ensemble de la société. Ça fait que je veux vous entendre parce que, vous, vous avez une vision vraiment, vraiment différente, et je veux vous entendre peut-être la défendre, là, par rapport à ce qu'on a entendu jusqu'à maintenant, entre autres aussi, du Commissaire au développement durable.

Mme Pelletier (Gabrielle): Bien, vous avez dit le mot «urgence». Je pense qu'en 2007 on ne peut plus non plus ne faire que l'approche petits pas. On l'a faite depuis déjà un bon moment. On a commencé avec des bacs verts, certaines actions, certaines choses. Mais je pense qu'il y a une situation aussi qui fait qu'il faut peut-être ne plus prendre cette approche-là.

Mais, nous, ce qu'on dit particulièrement, c'est la cohérence des décisions gouvernementales. Vous ne pouvez pas dire qu'on va faire quelque chose en développement et dire qu'après ça, d'un autre côté, on va faire aussi du développement durable. Il y a des choses, des décisions qui doivent être cohérentes aussi avec ce que vous allez mettre en place.

Pourquoi on dit que ça regarde l'ensemble? C'est que, si vous demandez et à la collectivité... Ou, mettons, le gouvernement dit: Oh, oh! On va faire très attention à ce qu'on fait puis, d'un même côté, l'entreprise privée n'a aucune contrainte et continue, elle, à faire peut-être des projets, mettons, moins viables, il y a comme aussi une incohérence du message qu'on lance à l'ensemble de la population.

Vous savez, on demande souvent la contribution citoyenne. Oui, c'est important, la contribution citoyenne, mais il y a aussi une contribution collective qu'il faut faire et il y a une contribution corporative aussi qui doit être mise de l'avant. Et ça, malheureusement, ça a peut-être trop tardé à le faire, où on n'est même pas encore à faire une politique sur les emballages, on n'est pas encore en train de réduire même la quantité de déchets produits. Écoutez, moi, je participe à des projets innovateurs où on va chercher chez les industries des matériaux qui vont aux sites d'enfouissement, qu'on récupère et qu'on fait des créations pour les écoles au niveau des réalisations artistiques.

D'ailleurs, je pense que vous avez lancé la Semaine québécoise de réduction des déchets. À Québec, vous savez, à la Tohu, il y a la clôture de cette semaine-là avec l'artiste de renom Armand Vaillancourt, où il va nous démontrer qu'à partir de matériaux on peut effectivement créer de l'art. Mais, nous, durant toute la semaine, on a prouvé que des enfants ont besoin de ces matériaux-là aussi pour réaliser des choses.

C'est des exemples qui ont l'air peut-être insignifiants, mais on est encore à une étape où il y a tellement de choses qui vont dans les sites d'enfouissement ? ça, c'est une chose ? mais dans toutes les... La stratégie, on a favorisé beaucoup la question de, bon, réparer les routes, et tout ça, mais le transport en commun n'est encore pas assez avancé. C'est de comment on fait, que, si on met une stratégie, oui, le gouvernement veut bien se donner des principes, mais, à un moment donné, il va être aussi confronté dans ce qu'il va accepter et ce qu'il va émettre comme autorisations auprès de développeurs, auprès d'entreprises privées.

Comment on fait cette cohérence-là? Ce n'est pas de dire ce qu'on va atteindre avec des indicateurs précis. Oui, ça peut en être, mais en même temps il faut que tout le monde s'implique parce qu'on ne pourra pas développer une société de la façon dont on la développe comme ça en surutilisant nos ressources naturelles et en continuant à remplir des mégasites d'enfouissement, là, pour donner cet exemple-là, mais il y en aurait tellement d'autres. Alors, je pense qu'il y a une cohérence là-dedans aussi.

Et comment voulez-vous que tous les citoyens, dont les citoyens corporatifs, soient mis à contribution si le gouvernement ne leur demande... en tout cas, je ne sais pas si on peut dire le mot «demander» ou «exiger», mais il n'y a pas des choses à respecter de ce côté-là? Vous savez, s'il n'y a pas une législation, qu'est-ce qu'on fait? C'est comme... je ne sais pas comment vous expliquer, hein, c'est le boeuf et la charrue ou la charrue et le boeuf, mais il faut que ça se fasse de concert. On ne peut pas demander de faire une partie de la job, mettons dépolluer nos lacs ou demander aux agriculteurs d'être partie prenante, de faire attention et de demander aux citoyens de faire leur effort, puis d'un autre côté vous avez des compagnies qui ne font rien. Il y a comme une cohérence aussi à avoir dans tout ça. Donc, ce n'est pas vraiment l'approche de... mais c'est l'approche que le tout est cohérent avec les décisions qu'on prend.

Et ça, ça va peut-être demander effectivement beaucoup plus de travail en termes de consultations et d'avoir peut-être une Régie de l'énergie plus efficace ou de regarder en amont les besoins et comment on implante dorénavant nos projets ou comment on veut développer avec l'ensemble des acteurs de la société, comment on veut développer le Québec. Ça va peut-être demander ça, et de ne plus y aller peut-être à la pièce comme on a eu tendance à faire par le passé.

Je ne sais pas si je suis assez claire, Mme la ministre, mais en tout cas l'approche petits pas, je pense qu'on n'est plus à cette étape-là, il faut exiger beaucoup plus. Et ça, c'est exiger aussi des corporations, des grandes corporations d'aller dans le même sens que nous.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. En fait, j'ai repris ? je veux juste vous le préciser ? exactement le vocabulaire proposé par le Conseil québécois de développement durable, hier, qui, dans son texte, parlait de cette approche de petits pas. En fait, ce que j'essaie de voir avec vous, deux choses: la première, c'est que je pense, vous me pardonnerez, là, des fois on essaie de résumer les choses et je sais que c'est trop court, tu sais, c'est trop résumé, mais j'ai l'impression que, derrière votre vision des choses, il y a beaucoup une volonté que je respecte, là, mais que ce soit un ministère de l'Environnement, vous savez, plus fort, mieux outillé, mieux financé, et donc aussi plus coercitif, plus exigeant, plus de règlements, plus de normes; je comprends toute cette vision-là, je la respecte, je la partage en grande partie. J'ai envie de vous dire: Pour moi, la démarche de développement durable, ce n'est pas strictement cela.

C'est-à-dire que je comprends, et je pense que, depuis 30 ans, le ministère est un ministère assez jeune dans l'histoire du Québec, c'est un peu ça qui s'est passé, peut-être pas à la bonne vitesse, et tout ça, mais je ne crois pas que l'aboutissement de la démarche de développement durable, ça veuille dire qu'à la fin ça veut dire un État avec plus de réglementations, plus de normes, plus... Pour moi, le mot clé, c'est plus le mot «démarche». Ce qu'on propose, c'est une démarche où les joueurs, les acteurs de notre société adoptent une vision des choses sur... L'intervenante précédemment, Mme Fecteau, nous disait: Dans le fond, c'est d'inciter les gens à se poser le bon ordre de questions, hein, qu'on doit se poser avant d'aller de l'avant avec une politique, un projet, une action, etc.

Ça fait que, moi, je veux juste vous dire: Je comprends ce que vous nous demandez, mais je me dis: Dans le cadre d'une stratégie de développement durable, moi, je trouve que la question qu'on doit se poser, comme parlementaires, puis moi, au premier rang, comme ministre du Développement durable, c'est: Comment je réussis la mobilisation de la société? Comment je réussis de faire en sorte que mes organismes, mon gouvernement mais aussi les entreprises, les citoyens, comment je les mobilise? Et c'est là que, je dirais, il y a une vision, en termes quasiment de la démarche organisationnelle, sur est-ce qu'il n'y a pas un danger à dire: Bien, ça concerne tout le monde, et j'impose ça à tout le monde? Est-ce qu'à la fin on n'est pas en train de rater son coup sur le fait qu'il y a un vrai changement de culture par rapport à une démarche qui dit: Bien, on va commencer à ce que le gouvernement soit exemplaire? Et je disais tantôt, avoir une démarche avec des histoires à succès pour que ce soit vraiment un changement de culture plutôt que quelque chose d'imposé qui à la fin va... on aurait un peu raté notre coup?

Mme Pelletier (Gabrielle): Si je peux me permettre...

n(12 heures)n

Le Président (M. Bergman): Il vous reste seulement une minute pour une réponse.

Mme Pelletier (Gabrielle): ...une petite réponse. Bon, vous savez, la démarche volontaire, là, a aussi ses limites. Je pense qu'il y a eu quand même beaucoup d'initiatives au cours des ans. Je pense que la sensibilisation et l'appropriation du fait que la planète a ses limites... la notion environnementale, je pense qu'elle a été... elle est très présente dans nos sociétés et partout mondialement. Je pense que ce bout-là a été réussi, disons-le comme ça, là, qu'il y a même peut-être une appropriation des fois peut-être à l'exagération du mot «développement durable» mais aussi du mot «environnement» par toutes sortes de gens dans la société.

Mais, dans le concret des actions, peut-être que, oui, les pas malheureusement n'ont pas suivi la chose. C'est que qu'est-ce qu'on fait si on ne fait pas d'une façon peut-être beaucoup plus exigeante et cohérente maintenant parce qu'il y a des enjeux qui sont aussi dans un délai de temps beaucoup plus limité? On a peut-être ? comment je pourrais dire? ? mis beaucoup trop de pression sur certains écosystèmes et beaucoup peut-être mis même des ressources et la biodiversité à risque, à trop grand risque, même à de la disparition. Est-ce qu'on peut se permettre encore d'en arriver à une démarche qui reste encore une démarche de sensibiliser? Je pense que ce bout-là a été fait, et on doit toujours le continuer ? ça, je suis d'accord avec vous ? mais en même temps on ne peut pas aller vers moins d'étapes, moins de réglementations, une déresponsabilisation de l'État mais aussi un État moins fort, et de laisser le marché aussi interagir. Malheureusement, dans les dernières années...

Mme Beauchamp: Je veux qu'on se comprenne bien...

Mme Pelletier (Gabrielle): ...sous les libéraux particulièrement, il y a eu peut-être un... peut-être trop grand... de notre point de vue, au niveau du réseau, et il va falloir peut-être aller vers peut-être plus... Je ne dis pas de jouer tout le temps à la police, mais de mettre des normes et des cadres. Il y a même des entreprises qui demandent à avoir des normes plus sévères, à avoir des cadres plus stricts pour pouvoir répondre adéquatement...

Mme Beauchamp: Mais, si vous permettez...

Mme Pelletier (Gabrielle): ...et répondre aussi à ce que les gens demandent à la société.

Mme Beauchamp: Mais, si vous permettez...

Mme Pelletier (Gabrielle): Et c'est dans ce sens-là qu'on aimerait aller.

Mme Beauchamp: Non, mais, juste très rapidement.

Mme Pelletier (Gabrielle): Oui.

Mme Beauchamp: C'est parce que, moi, j'essaie de faire attention, je sais que c'est imparfait d'essayer de bien résumer ce que vous nous amenez ou d'autres groupes. Je veux juste vous dire: J'espère que vous n'avez pas compris que, moi, je suis en train de plaider pour moins de règlements puis moins de normes. Je dis juste que, ça, ça appartient...

Mme Pelletier (Gabrielle): Oui.

Mme Beauchamp: Bien non, c'est ça, je vais le préciser parce que, dans vos propos, c'est comme si vous aviez compris ça, puis, si c'est ça, vous m'avez mal comprise. Je dis juste que, ça, pour moi, ça appartient à des débats, par exemple, dans la révision de la loi sur la protection de l'environnement puis qu'ici on est dans une démarche de développement durable. C'était plus ça, mon questionnement, que d'affirmer qu'on n'a plus besoin de normes puis de règlements. Puis je voulais juste dire: S'il y a quelqu'un qui a compris ça, je vais tout de suite rectifier l'affaire, ce n'est pas ça que j'ai voulu dire.

Le Président (M. Bergman): Merci, Mme la ministre. On va procéder. M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Merci, M. le Président. Premièrement, bonjour. J'ai certaines questions par rapport à ce que vous avez mentionné. Évidemment, là, je n'ai pas lu... On vient tout juste d'avoir votre mémoire, donc peut-être j'aurai la chance de vous retéléphoner pour d'autres questions supplémentaires. Mais, sur la base des discussions qu'on vient d'avoir, je pense qu'aujourd'hui c'est intéressant, parce qu'on a eu dans le fond l'interprétation des... le sommaire ou du moins la synthèse des groupes qu'on a reçus. Puis je diverge... j'ai une opinion un peu divergente sur l'interprétation qu'on doit donner des interlocuteurs qu'on a eus précédemment. Je ne pense pas, moi, que le problème actuellement, ce soit le nombre d'objectifs, j'ai plutôt l'impression que c'est l'absence de moyens précis et identifiés et l'absence de balises, d'étapes concrètes qui porte problème. Le Commissaire au développement durable, hier, M. Mead, disait qu'effectivement, en l'absence de balises précises puis en l'absence de moyens spécifiques vérifiables, il va être difficile pour lui de faire son travail. Ce n'était pas nécessairement l'abondance des objectifs, parce qu'au contraire je pense que tous les objectifs qui sont présents sont louables. C'est dans la précision que, là, on a des difficultés.

L'autre élément que M. Mead avait souligné, et avec raison, c'était la cohérence. Et là c'est là que je veux en venir, parce que vous avez fait mention à plusieurs reprises de la cohérence. Il soulignait qu'on va laisser libre cours aux entités ? donc là on en avait identifié à peu près 150, entités gouvernementales et parapubliques ? le soin de faire des plans d'action qui vont correspondre à la stratégie. Et puis, là, c'est là qu'il y voyait un problème de cohérence et des difficultés de vérification de sa part, là, parce qu'il allait y avoir 150 peut-être interprétations différentes, 150 directions différentes. Et puis, là, vous, vous avez fait mention de cohérence à plusieurs reprises, et lui aussi. J'aimerais savoir si sa vision de la cohérence est en fait la même que la vôtre. Est-ce que vous pourriez élaborer ce sujet-là?

Mme Gareau (Priscilla): Bien, je pense que oui, je pense que... je n'ai pas eu le temps de répliquer tantôt à la ministre. Mais c'est vrai que ça ratisse large, la stratégie, et que ce n'est pas une question... ce n'est pas parce qu'on dit qu'on voudrait intégrer, par exemple, au niveau de la stratégie, les autres acteurs que les acteurs gouvernementaux, ça ne veut pas dire de ratisser large. Effectivement, la stratégie est large, puis il n'y a pas assez de moyens d'action précis. Comme ceux qui sont mentionnés à la fin du document, c'est toutes des actions qui existent depuis très longtemps dans les différents partis qui sont passés au pouvoir. Donc, il n'y a pas nécessairement rien de nouveau qui est amené... ou en tout cas on ne l'a pas vu encore, qu'est-ce qui a été amené au niveau de la précision. Donc, effectivement, ce serait bien de préciser.

Et, par exemple, c'est comme... comme Gabrielle le disait au niveau, par exemple, du manque de cohérence au niveau des projets entre les différents ministères, on peut parler du ministère de l'Agriculture, il est question à la fin qu'au niveau de la protection, pour assurer une gestion intégrée du territoire, que la Commission sur la protection du territoire agricole, bien, c'était suffisant pour protéger ces terres-là, alors que je ne crois pas que... avec les dernières nouvelles, c'est comme... les terres agricoles sont de plus en plus... il y a de plus en plus de dézonage pour différents autres usages du territoire. Donc, c'est un aspect où il y a, par exemple, eu plusieurs commissions du BAPE, et finalement ça a été renversé, le gouvernement a décidé de finalement... ou décide de réaliser le projet, même si la majorité des citoyens qui ont participé étaient contre le projet.

Donc ça, quand on parle de démocratie participative, je ne crois pas que ça va dans le même sens, et c'est une espèce d'incohérence au niveau du développement durable, qui veut justement... c'est comme, il faut avoir, oui, il faut avoir un plan général mais aussi il faut avoir une législation pour ne pas abuser des ressources pour qu'il y en ait encore pour les générations futures.

M. Diamond: Dans les remarques préliminaires que j'ai adressées à la commission, j'avais souligné le fait que le gouvernement faisait en fait une synthèse de ce qui est déjà... puis vous avez, dans votre intervention, souligné qu'effectivement c'est toutes des mesures qui existent déjà, des objectifs, et une mesure concrète qui est déjà existante. On ne donne pas de balises supplémentaires puis on n'essaie pas de pousser plus loin. Puis, moi, ça m'a fait penser que peut-être il y avait un manque de volonté, de vouloir amener la stratégie plus loin, de vouloir pousser le développement durable d'une manière plus importante au Québec. Et puis vous avez fait mention qu'effectivement c'est toutes des choses qui existent déjà. Est-ce que vous avez ce même sentiment-là, que la stratégie aurait pu aller beaucoup plus loin, être beaucoup plus précise?

Mme Gareau (Priscilla): C'est sûr.

M. Diamond: C'est sûr. Est-ce que vous auriez des exemples concrets de moyens, comme les objectifs qui sont amenés, sans nécessairement amener des moyens plus concrets? Je pense que vous pourriez nous fournir une aide indispensable à ce niveau-là.

Mme Gareau (Priscilla): Par rapport aux moyens apportés, bien, premièrement, au niveau du BAPE, c'est quand même... Ici, le Québec, c'est comme... était à l'avant-garde dans les années soixante-dix, quatre-vingt, quand c'est sorti, mais on est très en retard au niveau des pays européens par rapport à la démocratie participative parce que le BAPE n'a pas de pouvoir décisionnel. Donc, c'est un type de consultations publiques où, après ça, le gouvernement évidemment fait ce qu'il veut avec les recommandations, alors qu'il existe beaucoup d'autres types de démocratie participative où les citoyens ont beaucoup plus de place, par exemple.

Le BAPE, c'est comme... il y a des projets où le gouvernement, c'est comme, il ne les passe pas en consultations publiques, c'est comme, il va passer par un autre type de commission qui est beaucoup moins... c'est comme une démocratie participative où il va sélectionner certains acteurs pour les consulter, ça va plus vite effectivement. Mais, au niveau de la démocratie participative, c'est réducteur quand même, par exemple.

n(12 h 10)n

Mme Pelletier (Gabrielle): Bien, peut-être au niveau... on parlait, tout à l'heure, de cohérence, peut-être des fois de voir en amont parce que, oui, il y a des évaluations, oui, il y a des consultations sur des projets, des projets précis comme avec un promoteur privé, mais souvent ce n'est pas mis dans le cadre de l'ensemble soit des besoins ou de ce que ça peut répondre au niveau de la société, au niveau collectif. Les ports méthaniers en sont peut-être un exemple, la question éolienne aussi en est un autre, il y a des exemples comme ça. Ce n'est pas parce qu'il ne faut pas aller évaluer ces projets-là, mais en même temps on ne comprend pas dans quel cadre ils s'inscrivent. Et c'est là aussi qu'il y a toute cette contradiction, et ce qu'on voit actuellement, que, oui, il doit y avoir une acceptation locale, une acceptation sociale localement d'un projet, et souvent c'est là où ça achoppe, parce qu'effectivement je ne pense pas que grand monde veulent avoir un port méthanier ou un site d'enfouissement dans leur cour, et ça, c'est compréhensible. Mais on n'arrive pas à élargir le débat souvent plus loin, parce que le projet va être décidé comme ça. La notion des autoroutes, c'est la même chose. Bon, il pourrait y avoir plusieurs exemples, mais ça, c'est au cours des ans. Dans les dernières décennies, ça a été un peu ce type d'approche là qu'on a faite. Pourtant, on avait revendiqué des choses, on a eu la Régie de l'énergie, mais on ne comprend plus pourquoi, à un moment donné, on n'est plus capable d'évaluer beaucoup plus largement ce qui se passe au Québec: la notion de droit de produire, ce qui s'est passé avec les porcheries, avec l'agriculture. Il y a comme une étape en amont qui n'est pas là. Et là on se dit: Tiens, il y a une stratégie gouvernementale de développement durable. Oui! Bon. Là, on peut applaudir. Au moins, il y a un gouvernement qui dit: On va la mettre en place. Ça, on ne peut que saluer ça, mais après ça il faut effectivement la mettre en place et la faire, et la faire avec des moyens, et la faire appliquer pour que justement cette réflexion-là en amont se fasse.

Et on parlait de cohérence tout à l'heure, et peut-être que le meilleur exemple, c'est ce qui se passe aussi entre deux ministères: les aires protégées. C'est un dossier quand même qui est là depuis plusieurs années et sur lequel beaucoup de groupes travaillent. C'est que, d'un côté, vous avez le ministère de l'Environnement et, de l'autre côté, vous avez les Ressources naturelles. Mais, là où on veut faire des aires protégées, malheureusement, le territoire est déjà alloué pour l'exploitation forestière. Donc, il y a ça aussi. C'est peut-être de planifier peut-être un peu avant, parce que, si on n'avait pas tout alloué le territoire, on aurait peut-être pu avoir des territoires qu'on aurait pu donner en aires protégées. Mais ça, c'est des exemples, mais il y en aurait beaucoup. Pas parce que chaque chose est mauvaise, mais la chose, elle n'est pas traitée, elle n'est pas mise de l'avant pour qu'on sente qu'il y a quelque chose de cohérent. Pourquoi on donne des décrets pour des mégasites d'enfouissement, alors qu'on demande qu'on doive atteindre la réduction des déchets qu'on n'a pas atteinte? Regardez les chiffres depuis les dernières années, per capita, on a augmenté la production de déchets. Il y a une incohérence là-dedans. Et là je ne sais personne de fautif, mais il y a quelque chose qui ne fonctionne pas. Et nous, s'il y a bien une stratégie qu'on doit mettre de l'avant, c'est pour renverser cette situation-là, parce qu'on ne peut plus continuer de cette façon-là, c'est l'avenir de nos enfants qu'on met en jeu, là.

M. Diamond: Vous n'avez pas l'impression qu'actuellement, là, l'idée d'amener des plans dans tous les ministères et organismes parapublics en fonction d'une stratégie qui est excessivement vague sur les objectifs puis les moyens précis pour atteindre les objectifs, vous n'avez pas l'impression qu'on va accentuer ce problème de coordination là entre les ministères qui n'ont pas nécessairement des discussions? Est-ce que ça va... demain matin, après l'adoption de cette stratégie-là, on va être dans le fond plus dans le pétrin qu'on l'est actuellement?

Mme Pelletier (Gabrielle): Non, je nuancerais, ce n'est pas ce qu'on a dit. Je pense que les objectifs ? comment je pourrais dire? ? sont louables ? je ne sais pas comment dire le terme ? sont corrects, là. Les objectifs, on ne peut pas être contre les objectifs qui sont développés là.

M. Diamond: ...

Mme Pelletier (Gabrielle): Bon. Sur la mise en oeuvre, écoutez, tout n'est pas, dans la stratégie, sur le document de consultation, parce qu'effectivement on n'a pas vu les plans d'action ministère par ministère, on n'a pas vu quels seront les indicateurs, on n'a pas vu ce que le comité interministériel va proposer. Donc, oui, il nous manque des éléments pour pouvoir le mettre en place. Nous, ce qu'on vient dire ici, c'est que, qu'il y ait des objectifs et que tout le monde participe, on ne peut pas être contre ça. Effectivement, il faut donner les moyens et il faut que quelqu'un le fasse pour que ça se fasse effectivement et que ce soit mis en oeuvre. Est-ce que c'est la ministre de l'Environnement qui va être la coordonnatrice ? est-ce que c'est le terme? ? en chef, là? On dit «forestier en chef», mais on dit la «ministre responsable», plutôt, comme il y avait un ministre responsable de la politique. Comment tout ça va s'imbriquer? Oui, là, on a des questionnements, et, nous, ce qu'on veut, c'est que ça fonctionne, et que ça fonctionne dans l'appareil de l'État, c'est une chose, qu'ils soient plus cohérents entre eux dans leurs décisions. Est-ce que ça doit se décider à un autre niveau, à l'Exécutif? Je ne sais pas. Mais il faut au moins que quelque chose se fasse. Et, par la suite, ce qu'on disait tout à l'heure, c'est qu'on ne peut pas n'avoir que l'appareil gouvernemental qui fait ses plans d'action, puis, à chaque année, ils révisent leurs indicateurs, puis ils voient si ça a marché ou pas, il faut que ça aille peut-être plus loin que ça, qu'il y ait plus de mordant...

M. Diamond: Puis, si vous me le permettez, là ? il reste très peu de temps à mon intervention ? j'aimerais vous amener sur un autre sujet sur lequel vous avez parlé: vous avez fait mention brièvement du financement des groupes verts. On a eu un éclaircissement de la part de la ministre de l'Environnement à l'instant. Si je voudrais, là, projeter dans l'avenir actuellement, là, demain matin, c'est quoi, les enjeux importants, les demandes, les requêtes que vous avez à faire pour vos commettants?

Le Président (M. Bergman): Il reste seulement une minute, madame.

Mme Pelletier (Gabrielle): Mais en fait ? clarification ? vous demandez quoi? Un montant? Qu'est-ce que vous me demandez, là?

M. Diamond: Un montant sur les formes de paiement à ces... Est-ce qu'il y a... La gestion par projets, est-ce que c'est quelque chose qui est efficace? Est-ce que... Bien, c'est assez large, là. Ça fait que, là-dessus, j'aimerais vous entendre.

Mme Pelletier (Gabrielle): Bien, c'est clair que le financement à la mission de l'organisme, c'est un enjeu important, la politique de l'action communautaire le reconnaît. Donc ça, effectivement, il faut continuer d'avoir le programme. D'ailleurs, bon, le programme des groupes nationaux a été rétabli, mais il faut aussi que les locaux et les régionaux aient le même type de financement. Évidemment, on avait un programme qui a existé pendant plus de 15 ans, le programme Action-environnement, qui est un programme par projets, qui a permis justement à beaucoup de groupes en région de développer des projets très, très intéressants. Donc, oui, là, si on pouvait avoir aussi du financement pour développer ce type de projet, on ne pourrait que saluer ça. On verra ce que le Fonds vert nous réservera, mais il va falloir, dans l'enveloppe du Fonds vert ou en tout cas dans la priorité du Fonds vert, que ça, ce soit mis de l'avant, tous les projets qui vont dans le sens de protéger l'environnement. Et, nous, ça fait des années qu'on revendique, les groupes environnementaux, un fonds dédié, entre autres pour financer des groupes, et non pas un fonds malheureusement où un peu tout le monde pige dedans ou un peu ce qu'est devenu le FAQDD, qu'on déplorait un peu que, bon, les municipalités ont une grosse part là-dedans.

Donc, il faudrait vraiment un fonds peut-être beaucoup plus dédié et ciblé, oui, mais il faut continuer à financer des projets à tous les niveaux, je pense, avec des partenariats qui sont autant du secteur privé que du gouvernement. Il y a eu des initiatives sur le terrain très, très intéressantes qui se font avec la collectivité, et, ça, je pense que l'État peut donner un coup de main là-dessus.

Le Président (M. Bergman): Merci, madame. M. le député de Vachon.

M. Bouchard: Merci, M. le Président. Bonjour. J'aimerais, s'il vous plaît, vous référer à votre page 11 pour continuer dans... pour poursuivre la conversation en ce qui concerne le financement de vos organismes. Deuxième paragraphe, deuxième phrase: «Malgré l'annonce récente d'un programme de financement pour les groupes nationaux de la ministre de l'Environnement, la majorité du financement est toujours accordée à des organismes de concertation qui ne sont pas considérés comme des groupes de base en environnement, tels que les conseils régionaux de l'environnement et les comités de bassin versant.»

Ce que je vois là-dedans, c'est une petite pointe d'envie vis-à-vis ces organismes-là, et ce que j'entends de ces organismes-là, notamment les comités de bassin versant, c'est qu'ils sont sous-financés à raison de 65 000 $ par année par organisme de bassin versant. Alors, je m'inquiète pour votre propre situation parce que, si j'interprète bien votre intervention, c'est que les ressources dont vous disposez sont loin d'être à égalité avec ce 65 000 $ là. Est-ce que vous avez des chiffres de l'évolution des subventions, de la moyenne par organisme, etc., que vous pourriez livrer à la commission?

Mme Pelletier (Gabrielle): Effectivement...

M. Bouchard: Parce que vous prétendez notamment donc... en plus, c'est que... et remarquez que les organismes familiaux disent la même chose, mais que le secteur environnemental se retrouve parmi les plus démunis des secteurs communautaires.

Mme Pelletier (Gabrielle): Effectivement, on peut honnêtement dire que c'est un secteur qui a été sous-financé d'une façon chronique au cours des ans, pas financé du tout, là, si on remonte dans le temps, mais là on ne fera pas l'histoire ici. Mais, oui, on a les données parce que, comme je l'avais mentionné en introduction, on travaille avec le Réseau québécois de l'action communautaire autonome depuis ? avant, ça s'appelait Comité aviseur; depuis ? 1996, et il y a des données qui ont été étudiées là-dessus en termes des sommes octroyées, et je peux vous dire que les groupes environnementaux... Actuellement, la plupart des groupes locaux et régionaux n'ont rien. Mettez zéro, là, à part les propres levées de fonds qu'ils peuvent faire eux-mêmes dans leur communauté, donc. Mais on a ces données effectivement de financement au cours des ans ou quand il y avait des programmes au sein du ministère. Ça, c'est des données aussi que le ministère a, ce qui est facile à colliger, à voir, mais, ça, il y a un document qui a été fait spécifiquement là-dessus, depuis surtout la mise en oeuvre de la politique, où évidemment tous les ministères devaient faire en sorte d'avoir des programmes de soutien à la mission. Ce que le ministère de l'Environnement a fait à l'époque, a développé ces programmes qui... après ça, bon, un autre ministre a décidé de tout abolir. Donc, c'est devenu un peu le ministère délinquant, comme ça, qui... Maintenant, les programmes reviennent, mais c'est clair que, pour l'importance... et puis on prêche toujours un peu pour notre paroisse, mais pour l'importance du rôle des groupes écologistes parce que, selon nous, évidemment, on a un rôle essentiel mais important aussi pour l'avenir, et c'est clair qu'on est sous-financés. On ne se le cachera pas.

n(12 h 20)n

Ce n'est pas une question d'envie pour ça. C'est une question où ce sont des organismes qui ont été reconnus et qui, eux, n'ont jamais été définancés, ou refinancés, ou définancés au cours des ans depuis qu'ils existent, et reconnus officiellement en 1995 par le gouvernement péquiste de l'époque. Donc, c'est clair qu'eux n'ont jamais eu cette diminution ou carrément zéro sou, là, pour fonctionner. Donc, ce n'est pas une question d'envie. C'est qu'il y a eu des priorités, il y a eu une reconnaissance faite au cours des ans par différents ministres et gouvernements, qui a fait qu'eux ont continué à être financés, mais pas les autres.

M. Bouchard: Puisque vous êtes un réseau, j'imagine que vous faites le monitoring de ça. Est-ce que vous seriez en mesure de produire ces données-là devant la commission, les faire parvenir au président pour qu'on puisse en prendre connaissance?

Mme Pelletier (Gabrielle): Faire parvenir le document effectivement, oui.

M. Bouchard: Merci.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Vachon... d'Ungava.

M. Ferland: Ungava. M. le Président, merci. Mme Pelletier, Mme Gareau, j'aurais aimé ça poursuivre sur la lancée du financement parce que, dans une ancienne vie, j'ai eu la chance d'oeuvrer dans un organisme et de travailler de très près avec un organisme voué à la protection, au développement de l'environnement. Mais, étant donné que j'ai aussi les responsabilités en matière d'affaires autochtones, vous êtes les premiers qui soulevez, dans votre mémoire... Je sais que, dans les prochains jours, dans les prochaines semaines, on va rencontrer beaucoup de groupes représentant les communautés autochtones, notamment les Cris, les premières nations, et ainsi de suite, mais j'aimerais vous entendre parce qu'à la page 6, le deuxième paragraphe, je vous amène à cet endroit où on lit, à la deuxième phrase: «Nous tenons aussi à souligner qu'aucun principe n'est retenu quant aux populations autochtones, aux femmes et aux jeunes. Pourtant, dans les principes de la Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement, les principes 20, 21 et 22 ont un rôle vital à jouer dans la gestion de l'environnement et le développement des collectivités.» Je termine avec l'autre phrase qui est très importante: «L'histoire du Québec est indéniablement liée aux peuples autochtones.» J'aimerais vous entendre peut-être élaborer un peu plus sur... Vous, vu de votre organisme, de quelle façon vous voyez soit l'écoute ou l'implication des peuples autochtones, toujours, bien entendu, lié avec la stratégie gouvernementale ou la politique? J'aimerais vous entendre un peu là-dessus.

Mme Pelletier (Gabrielle): En combien de secondes, là? C'est une grosse question.

M. Ferland: Bien... ou, si ce n'est pas vous autres qui avez fait ce bout-là...

Mme Pelletier (Gabrielle): C'est clair qu'au cours des ans il y a beaucoup d'organismes environnementaux qui ont développé des liens, des projets sur le terrain avec des communautés autochtones, que ce soit pour la question du dossier forêt où on a des groupes, nous, en Abitibi, qui travaillent de très près avec les communautés autochtones, et je pense qu'on ne peut pas faire fi qu'effectivement ils sont là et ils sont partie prenante évidemment du développement de ce qui se passe ici. Alors, si on parle de stratégie, je pense qu'il va falloir peut-être ? évidemment, bon, je suis contente qu'ils vont être entendus ? les considérer dans ça, mais ça va plus loin, c'est peut-être de les considérer comme... je ne pourrais pas vous le dire, mais c'est à eux à vous dire qu'est-ce qu'eux voient dans leur propre situation, leur propre histoire, comment ils voient ce développement-là où ils sont quand même, pour certaines communautés, beaucoup plus près des écosystèmes que, nous, on pourrait l'être quand on travaille, mettons, à partir de Montréal, et tout ça. Donc ça, je pense qu'il y a une perspective plus sensible dont il faudrait tenir compte, et malheureusement on l'oublie souvent, comme la question de l'implication et du rôle des femmes dans le milieu communautaire, mais dans la société aussi en général où on n'a pas l'impression qu'elles sont toujours partie prenante de tout et qu'elles sont reconnues à leur juste titre, et les jeunes évidemment aussi parce que c'est l'avenir aussi de ça.

Donc, quand on parle de développement durable, pour nous, c'est des notions qui sont toutes interreliées, et évidemment notre base vient du rapport Brundtland mais aussi de ce qui avait été déclaré à Rio, et ce sont peut-être des... comment... c'est toujours des termes délicats. Je pourrais dire, c'est des personnes qui sont peut-être moins entendues, peut-être moins partie prenante des décisions, parce que notre société est faite, au cours de l'histoire, beaucoup plus sur un modèle patriarcal, disons-le comme ça, mais aussi, dans la communauté, peut-être que ce sont des personnes qui sont moins partie prenante de ce qu'ils font. Et ce n'est pas parce que ces gens-là ne sont pas impliqués au niveau de leur communauté à un niveau particulièrement local... que même les jeunes, tout ce qui se fait avec les jeunes dans des projets au niveau des écoles, mais dans leurs propres communautés... Et les femmes sont beaucoup là dans le rôle d'éducation, le rôle de sensibilisation dans le milieu communautaire et social, elles sont extrêmement dynamiques et très présentes, et c'est elles aussi qui sont des moteurs de changement du comportement, d'attitudes, beaucoup à la maison aussi. Bon, je peux parler pour mon cas, mais c'est clair qu'on est beaucoup là aussi pour créer ces attitudes et ces changements-là pour l'avenir parce qu'on est, dans notre rôle, peut-être plus présentes auprès des jeunes et auprès de ce qu'on veut faire comme promotion.

Les communautés autochtones, je leur laisserai le soin d'expliquer eux-mêmes. Mais, nous, le travail qu'on a eu à faire avec eux et les liens qu'on a développés avec eux, évidemment il y a une sensibilité très présente en termes de l'avenir des écosystèmes et de ce qui se passe en forêt boréale mais parce qu'ils le vivent d'une façon complètement différente que, nous, on peut percevoir la forêt, et là ça leur appartient évidemment. Donc, on ne peut pas imposer aussi certaines choses comme on aurait trop tendance à le faire par le passé.

M. Ferland: O.K. C'est pour ça que c'était surtout sur les populations autochtones. Mais le lien que votre organisation entretient, vous avez ouvert un peu là-dessus. C'est parce que c'est important souvent, parce qu'il y a des ententes. Je représente un comté, un grand comté, le comté d'Ungava où il y a la présence autochtone de façon significative, qu'on parle des Cris ou du peuple des Inuits. Il y a des ententes de signées, je pense à la «Paix des Braves», je pense aussi aux autres ententes qui sont sur la table, qui sont en discussion, qui n'ont pas encore été... qui n'ont pas fait l'objet de signature formelle. Je pense à tout le dossier de l'Approche commune et ces choses-là. J'entends par là... parce qu'on est dans le contexte de développement durable, O.K.

Moi, j'aimerais voir un peu, vu que vous entretenez des liens avec ces gens-là... On va les questionner, je les connais bien, je suis heureux qu'ils déposent des mémoires bientôt. Mais, dans le cadre, dans un contexte de développement harmonieux ? parce que, si on parle d'environnement, on parle de développement durable, mais; dans le contexte d'un développement harmonieux ? où l'on tient compte...

Le Président (M. Bergman): Une minute, une minute.

M. Ferland: Une minute, O.K. Je voudrais vous entendre là-dessus. Vous allez être sauvée par la cloche, madame.

Mme Pelletier (Gabrielle): Bien là, oui. C'est sûr qu'on souhaite tous que tout soit harmonieux, ça, c'est clair, mais je pense qu'on habite le même territoire et il faut le tenir en compte. Et je pense que chacun a peut-être sa perspective de développement, mais le gouvernement est encore responsable des projets de développement qu'il met en place. Alors, nous, on souhaite que ces développements se fassent de la façon peut-être la plus viable possible, mais peut-être aussi considérer les gens qui vont subir peut-être les impacts de ces développements. Et ça, c'est important que ce soit dans le Grand Nord, effectivement, on pense qu'on peut développer à tous crins des grands barrages ou plein de choses parce qu'il n'y a personne qui habite là. Il faut peut-être nuancer évidemment, là. Mais il faut peut-être respecter beaucoup plus les gens qui sont directement touchés, que ce soient aussi les travailleurs de la forêt, que ce soient des gens qui vont habiter près des éoliennes. Même si on dit que c'est une énergie verte, on ne peut pas être contre ça, mais je pense que, quand vous parlez d'harmonie, c'est aussi les usages et les gens qui directement vont être touchés par les impacts et peut-être en tenir compte.

Alors, on ne peut que souhaiter de revoir peut-être les choses d'une façon à ce que les développements se fassent évidemment d'une façon écologique, ça, on ne sera pas contre ça, au contraire. Alors, peut-être avant de penser à importer du gaz lourd, on pourrait peut-être penser à d'autres solutions, mais de le faire d'une façon effectivement avec l'ensemble des acteurs concernés, et le Grand Nord est concerné en premier ? je pourrais même aller un peu plus loin ? est concerné aussi en termes de territoire témoin, de protection de la biodiversité qu'il y a là aussi. Parce qu'on oublie souvent... Là, on n'a pas le temps d'en discuter, mais, dans nos écosystèmes, chaque maillon a une importance. Si vous en enlever un, ça a un impact sur le reste, et, malheureusement, notre biodiversité est affectée par un type de développement qu'on a tendance à faire parce que... On le fait parce qu'il y a moins de gens, mais il y a aussi d'autres aspects dans un écosystème qu'il faut tenir compte, pour notre propre avenir d'ailleurs.

Le Président (M. Bergman): Merci pour votre présentation.

Mme Pelletier (Gabrielle): Merci.

Le Président (M. Bergman): Je suspends les travaux à cet après-midi, à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 29)

 

(Reprise à 15 h 20)

Le Président (M. Bergman): Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a un quorum?

La Secrétaire: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Bergman): Merci. Je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir fermer leurs téléphones cellulaires. Je souhaite la bienvenue au groupe ENvironnement JEUnesse, représenté par M. Dominique Boudreau. Vous allez avoir 15 minutes pour votre présentation et, après, une période d'échange de 45 minutes avec les députés. C'est à vous, monsieur.

ENvironnement JEUnesse inc. (ENJEU)

M. Boudreau (Dominique): Merci. Bonjour, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés et membres de la commission...

Le Président (M. Bergman): Excusez-moi.

M. Boudreau (Dominique): Oui.

Le Président (M. Bergman): Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Non, M. le Président.

Le Président (M. Bergman): Merci.

La Secrétaire: Bien, pas depuis ce matin. C'est les mêmes que ce matin.

Le Président (M. Bergman): Merci.

La Secrétaire: Merci.

Le Président (M. Bergman): Ça va.

M. Boudreau (Dominique): Le gouvernement du Québec s'apprête à adopter une stratégie de développement durable et souhaite un engagement et une responsabilité des entreprises, des organisations, de la société civile et des citoyens et citoyennes du Québec. Afin de réussir ce tour de force, il devra faire preuve de leadership et de vision à long terme. Les consultations que mène le gouvernement sont primordiales et nécessaires à cette vision, mais celles-ci doivent tendre vers des actions concrètes. De plus, nous faisons le pari de soutenir le gouvernement du Québec en soulignant que l'exercice proposé ne consiste pas en une campagne d'image visant à redorer le blason du gouvernement actuel, mais bien à entreprendre des changements fondamentaux afin d'améliorer les conditions de vie de notre société.

Les jeunes ont leur mot à dire face à ce projet de société, puisque c'est pour nous que le développement durable doit exister. La citation d'Antoine de Saint-Exupéry: «Nous n'héritons pas de la terre de nos ancêtres, mais nous l'empruntons à nos enfants» est souvent utilisée lorsque nous parlons de développement durable. Il est donc de mise d'écouter ce que nous avons à dire.

À ce titre, je suis venu vous parler au nom d'ENvironnement JEUnesse et des jeunes qu'il représente. ENvironnement JEUnesse, c'est un organisme qui oeuvre depuis maintenant 28 ans dans le domaine de l'éducation relative à l'environnement et qui vise à stimuler le développement d'une conscience environnementale et d'une pensée critique auprès des jeunes afin qu'ils exercent des actions citoyennes pour un avenir viable. L'organisme souhaite développer chez les citoyens et citoyennes une vision critique des décisions prises sur le plan économique, social, culturel et environnemental. ENvironnement JEUnesse, c'est le porte-voix des jeunes pour faire connaître leurs positions, leurs espoirs, leurs préoccupations et leurs solutions concernant les enjeux environnementaux actuels. Plusieurs thématiques sont couvertes par nos activités. Parmi celles-ci, nous abordons les enjeux alimentaires, les déchets-ressources, les changements climatiques, le transport, et bien d'autres.

Tout d'abord, partir du bon pied. Dans le cadre de sa stratégie de développement durable, le gouvernement du Québec se dote d'orientations afin d'améliorer la qualité de vie des Québécois. La loi mentionne par ailleurs que les ministères et organismes devront se doter de plans d'action suivant l'adoption de la stratégie et rendre compte de l'avancement de leurs travaux annuellement. Nous reconnaissons l'importance d'un tel mécanisme de suivi, mais permet-il réellement de valider s'il y a eu amélioration ou détérioration de la qualité de vie des citoyens? Nous en doutons fortement, car aucun diagnostic initial de développement durable n'a été réalisé.

Le gouvernement du Québec, dans sa démarche d'implantation du développement durable, se doit de réaliser un diagnostic de développement durable du Québec, et ce, dès les tout débuts de sa démarche. Le diagnostic constitue l'élément de base sur lequel devraient s'appuyer la stratégie et les différentes actions du gouvernement. Sans connaissance de sa situation de départ, il est très difficile pour le gouvernement de savoir si les orientations choisies et les actions qui suivront lui permettront d'améliorer la qualité de vie de la collectivité. L'état des lieux, au début d'une démarche, est donc essentiel pour cibler les orientations à prioriser et prendre connaissance des progrès réalisés par la suite. Imaginez un médecin qui reçoit un patient et qui décide immédiatement de l'opérer au coeur sans avoir au préalable demandé à ce patient ce qui n'allait pas, hein? Il serait malvenu, pour ce médecin, d'affirmer par la suite que la situation de son patient s'est améliorée.

Par conséquent, nous recommandons au gouvernement du Québec d'effectuer un diagnostic de développement durable immédiatement. Avec une base comparative, il sera possible d'évaluer les progrès réguliers et de réajuster le tir si nécessaire. De plus, dans le cadre de l'application de la Loi sur le développement durable, le diagnostic de développement durable constitue un outil indispensable à l'accomplissement du travail du Commissaire au développement durable. À cet effet, ce dernier se doit d'avoir des données de base pour évaluer dans quelle mesure les actions des différents ministères auront permis d'améliorer les conditions de vie au Québec. Ainsi, nous aurons un portrait juste de l'avancement du développement durable au Québec.

Le développement durable, ça mange quoi en hiver? Eh bien, l'éducation est une condition essentielle à l'action. Personne n'agit s'il n'est pas conscient et convaincu bien sûr qu'il doit le faire. À ENvironnement JEUnesse, cela fait 28 ans que nous sensibilisons nos pairs et changeons cette éducation en action. Nous croyons qu'il en va de même dans le cas de la présente démarche de développement durable. L'accès au savoir est la pierre d'assise de tout changement de comportement. La connaissance permet de susciter l'adhésion au principe de développement durable et de stimuler l'engouement dans la démarche.

À ce titre, nous affirmons que l'éducation et la sensibilisation au développement durable constituent une orientation qui devrait être priorisée au sein des ministères et organismes. Le succès de la démarche repose sur une stratégie de communication qui permet la diffusion des concepts de développement durable à tous les paliers et la rétroaction efficace de tous les acteurs concernés. Nous préconisons l'éducation par l'action, qui se traduit par la mise en place de projets vitrines au sein du gouvernement en vue d'améliorer la compréhension et l'intégration du concept de développement durable. De plus, considérant que la stratégie se veut d'avoir des orientations à long terme, il est impératif que l'éducation et la sensibilisation débordent du cadre administratif des ministères et viennent rapidement en contact avec la population. À cet effet, il importe de poursuivre et d'accentuer les efforts en matière d'éducation relative à l'environnement et au développement durable auprès des jeunes.

Comme vous le savez, les jeunes représentent un vecteur de changement majeur au sein de la société. Par conséquent, nous croyons qu'il est capital de développer les connaissances, les attitudes et les habiletés des jeunes pour qu'ils puissent agir en tant qu'agents multiplicateurs dans leur milieu. On se doit de rassembler et motiver ces derniers afin de les informer sur les enjeux actuels de notre société et de promouvoir chez eux l'intégration des comportements responsables. Chez ENvironnement JEUnesse, nous sommes conscients que l'avenir de notre société repose entre les mains des jeunes d'aujourd'hui. Il est grand temps de miser sur le puissant levier de changement qu'ils constituent.

Finalement, nous comprenons que la stratégie s'adresse à l'ensemble des ministères et organismes et vise à leur donner des orientations portant sur le long terme. Toutefois, pour ne pas perdre de sa crédibilité auprès des jeunes du Québec, il est primordial que cette stratégie se transpose rapidement en actions concrètes. Au courant de la prochaine année, les ministères auront à élaborer leurs plans d'action respectifs et à mettre en branle le changement fondamental qu'implique le développement durable dans leur organisation.

À cet effet, ENvironnement JEUnesse croit qu'il n'est pas trop tôt pour commencer à réfléchir aux différentes pistes d'action et propose au ministère quelques suggestions en lien avec les 16 principes de la loi. Par exemple, si nous prenons le principe de la santé et qualité de vie, ENvironnement JEUnesse considère que l'enjeu écologique est intimement lié à la santé et à la qualité de vie des citoyens du Québec. En ce sens, notre organisme propose des mesures concrètes pour améliorer la santé et la qualité de vie de la population québécoise: par exemple, appuyer, d'ici un an, des projets pilotes à travers le Québec de cafétérias intégrant des produits issus de l'agriculture soutenue par la communauté et biologiques dans les écoles primaires et secondaires; un autre exemple pourrait être favoriser la mise en place de nouvelles infrastructures auprès des municipalités et des industries pour favoriser le transport actif.

Sous le principe de l'équité et solidarité sociales, le gouvernement du Québec se doit d'assurer que le développement durable s'effectue dans un cadre de solidarité sociale où chaque partenaire doit contribuer, à sa mesure et selon son impact sur l'environnement, au développement durable. En ce sens, nous croyons que le gouvernement doit, dans un court avenir, joindre à sa démarche de développement durable les entreprises québécoises qui jouent un rôle majeur sur le plan économique, social et environnemental afin de leur permettre d'atteindre les objectifs conjoints de la société avec qui elles cohabitent; favoriser la présence des jeunes au sein des débats sur le développement durable et s'assurer de la présence et de la voix des jeunes au sein de l'élaboration des politiques et plans d'action touchant le développement durable.

Sous l'aspect de la protection de l'environnement, la protection de l'environnement est un incontournable à la qualité de vie. À ce chapitre, nous insistons sur le fait que le gouvernement doit s'assurer que le développement social et économique du Québec se fasse à l'intérieur des limites fixées par l'environnement et qu'en ce sens il se dote de moyens nécessaires pour voir au respect de l'ensemble des législations environnementales de la province, donc de se donner les moyens de les faire appliquer.

n(15 h 30)n

Sous l'aspect de l'efficacité économique, on dit: Pour avoir un impact positif global, il est nécessaire que la prospérité économique favorise le progrès social et le respect de l'environnement. Pour ce faire, le gouvernement devrait s'assurer, par exemple, que la Société générale de financement et la Caisse de dépôt et placement du Québec investissent en conformité avec le développement durable. Il serait essentiel que ces institutions se dotent, d'ici deux ans, d'un fonds pilote ayant des critères d'investissement basés sur le développement durable.

Un autre point, au niveau du principe de l'accès au savoir. On sait que l'accès au savoir constitue le pilier fondamental de l'évolution d'une société. À ce titre, il est primordial que le gouvernement place l'éducation au coeur de sa stratégie de développement durable et ainsi encourage et soutienne, notamment par un financement récurrent, les organismes faisant de l'éducation relative à l'environnement et au développement durable auprès de la population, et plus particulièrement auprès des jeunes, qu'il travaille aussi à l'intégration des valeurs environnementales et du développement durable au sein de la formation générale du système éducatif québécois de l'école primaire à l'université et qu'il encourage fortement les institutions d'enseignement à se doter d'une politique de développement durable d'ici deux ans. Cette politique environnementale devrait être inspirée des exigences de la certification Cégep vert du Québec. Il est urgent que toute institution scolaire ait une politique environnementale et un plan d'action qui l'accompagne.

Sous l'aspect du principe de pollueur-payeur, la responsabilité élargie des producteurs demande à quiconque qui met en marché un produit de prendre en charge la gestion de son produit jusqu'à la fin de son cycle de vie. À ce sujet, nous recommandons au gouvernement d'adopter, d'ici deux ans, sa législation portant sur la responsabilité élargie des producteurs des technologies de l'information et des communications. Ceci dit, le principe de pollueur-payeur ne doit pas servir à rendre légitime la pollution. En effet, bien des acteurs économiques pourraient se sentir en droit de polluer à partir du moment où ils en paient les coûts. Ce principe doit être vu comme une mesure transitoire visant à créer un incitatif à éliminer la pollution à la source.

Sous le principe de l'internalisation des coûts, les produits à usage unique constituent un fléau et représentent une part importante des coûts de gestion de matières résiduelles, en plus d'exercer une forte pression sur les ressources naturelles. Les coûts de traitement environnementaux de ces produits incombent à la société et ne sont pas pris en charge par le producteur ou l'utilisateur du produit. Par conséquent, nous invitons le gouvernement à appliquer une taxe aux produits prêts à jeter, comme la vaisselle jetable et les milliers de tasses de styromousse utilisées chaque jour, afin de refléter le prix réel de ces externalités sur le marché et favoriser l'émergence de produits à moindres impacts environnementaux.

En conclusion, les jeunes ont fait le choix de soutenir le gouvernement du Québec dans son initiative de mettre en place une stratégie de développement durable. Voilà 28 ans qu'ENvironnement JEUnesse attend cela. Cependant, nous ne sommes plus en 1979, et l'urgence d'agir se fait encore sentir davantage. Nous avons donc le choix: continuer de parler, de faire semblant que nous avons le temps d'hypothéquer la survie des générations futures ou bien de passer à l'action, et ce, immédiatement. Nous parions que le gouvernement aura le courage de choisir la deuxième alternative et de faire du Québec un modèle de développement durable en Amérique du Nord. Merci à tous de votre attention.

Le Président (M. Bergman): Merci pour votre présentation. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Vraiment, M. Boudreau ? c'est bien ça? ? M. Boudreau, je veux vous saluer, je veux vous remercier d'être des nôtres. Et le mémoire d'ENvironnement JEUnesse est un excellent mémoire. Je prends le temps de vous en féliciter, je pense que vos membres puis les jeunes que vous représentez peuvent être fiers.

On m'a parlé de votre contribution lors de la première étape, lorsqu'il y a eu cette consultation pour donner vie à la Loi sur le développement durable et, premièrement, peut-être vous souligner que je pense que, parmi vos préoccupations à l'époque, à juste titre il y avait la préoccupation d'éviter que la notion d'avoir une démarche de développement durable au sein du gouvernement puis de l'ensemble de la société... qu'on ne succombe pas à un effet de mode. Et vous insistiez pour dire: Il faut qu'il y ait des mécanismes mis en place pour qu'on soit sûr de la pérennité, hein, de la démarche justement au-delà des générations. Et je prends le temps de vous dire que je pense qu'à ce moment-là vos commentaires ont été très bien entendus, parce que je pense qu'il faut reconnaître ensemble...

Je vais vous donner, pour moi, un exemple qui est important, le fait que comme gouvernement... Premièrement, ça a été une loi adoptée à l'unanimité, mais ensuite, comme gouvernement, que dans cette loi... pas juste le gouvernement, que les parlementaires souhaitent mettre en place, par exemple, le poste de Commissaire au développement durable sous le Vérificateur général, il y a là, je pense, un mécanisme mis en place où on s'assure qu'on ne pourra pas succomber à un effet de mode, parce qu'il y a une vraie logique de reddition de comptes et même, je dirais, de surveillance, hein, du gouvernement.

Je vous dis cela en disant: Vos propos de l'époque donc ont été, je pense, entendus. En tout cas, chose certaine, si ça ne l'est pas parfaitement ? sûrement pas; chose certaine ? vous avez eu votre pouvoir d'influence à l'époque. Je peux vous le confirmer, on m'en a parlé, et je pense que ce sera encore la même chose aujourd'hui. On m'a aussi raconté, à l'époque, que déjà vous aviez beaucoup, beaucoup, beaucoup de recommandations sur qu'est-ce qu'on devrait retrouver dans une stratégie, et aujourd'hui ? et je le salue; dans le fond, c'est sûrement le signe de la jeunesse, hein ? vous devancez les choses avec le fait qu'aujourd'hui, quand on parle de la stratégie, vous nous forcez ? et c'est très bien ? à déjà se questionner sur ce que devront comprendre les plans d'action à venir dans la prochaine année, puis je peux vous dire que les suggestions que vous faites seront transmises aux bons ministères et... à l'ensemble des ministères, en fait. Et je trouve que l'exercice que vous avez fait est un exercice créatif mais très solide et surtout très inspirant.

Il y a une dimension sur laquelle je veux vous entendre, parce que peut-être avez-vous su, là, qu'hier nous avons reçu le Commissaire du développement durable justement, M. Harvey Mead, et M. Mead, dans ses commentaires à des questions posées par les parlementaires, a dit qu'il jugeait son travail difficile, en fait qu'il jugeait qu'il ne serait pas capable de bien évaluer l'avancée, l'impact de la stratégie de développement durable, entre autres parce qu'il... un peu comme vous aujourd'hui, il disait: Bien, est-ce qu'on sait vraiment d'où on part, la notion de diagnostic? Hier ? et je pense que c'était mon rôle ? je lui ai dit: Bon, bien, est-ce qu'on doit donc arrêter un peu ça pour plutôt faire les diagnostics, et, après ça, les transmettre aux différents ministères, et que, là, ils se mettent en marche vers leurs plans d'action ou si je vais quand même de l'avant dans quelque chose qui est peut-être imparfait mais qu'on doit aller de l'avant avec un peu l'appel que vous nous faisiez en conclusion?

Depuis hier, j'ai eu l'occasion d'échanger avec les collègues du ministère, et tout, et on me rappelle que, dans la loi, dans le fond, là, il y avait le mécanisme prévu ? c'est une loi qu'on a votée ensemble; il y avait le mécanisme prévu ? c'est à l'article 12 où on dit: Au plus tard dans l'année suivant l'adoption de la stratégie ? que, moi, j'espère bien que ça va se faire au mois de décembre ? le gouvernement doit travailler une série d'indicateurs, et, plus que ça, on s'oblige à ce que ces indicateurs, donc dans les prochains mois ? ça, ça veut dire au cours de l'année 2008 ? aussi soient discutés avec beaucoup de transparence, là, à l'aide d'une consultation pour que ce soit avec la population puis avec vous en fait, j'allais dire, qu'on puisse établir les indicateurs.

Puis je suis là, puis je me dis: Bien, la loi prévoyait cette démarche. Donc, on se dit: Voici effectivement le cadre de gestion qu'on propose à l'ensemble des ministères et organismes. Au cours de l'année 2008, avec un processus de consultation publique puis, on me disait, avec le soutien aussi de l'Institut de la statistique du Québec, on va pouvoir discuter de quels sont les bons indicateurs maintenant qu'on doit se donner pour justement être capables d'évaluer, avec l'aide du Commissaire au développement durable, est-ce que je vais réussir ou pas... est-ce que je réussis ou pas l'atteinte des objectifs.

Ma question donc, c'est que je me dis... J'essaie de voir si, moi, je comprends bien la loi, j'essaie de vous demander: Est-ce que, pour vous, là, vous voyez une énorme différence entre la notion de diagnostic et la notion que prévoit la loi qui dit: Dans les prochains mois, on va se donner des indicateurs? Puis bien sûr, là, ça doit être des indicateurs mesurables, choisis et déterminés avec la population, qui vont, eux, nous permettre, lorsqu'on sera rendus à faire le bilan des premiers plans d'action déposés par les ministères, de voir l'avancement des choses. Autrement dit, je suis en train de vous dire: Quand vous me dites: On doit se mettre à faire un diagnostic dès maintenant, est-ce que ce n'est pas plutôt l'appel de dire: Très rapidement ? puis la loi le prévoit ? on doit travailler sur ces indicateurs qui vont nous permettre de voir l'avancement des choses?

M. Boudreau (Dominique): Bien, pour répondre à votre question, Mme Beauchamp, je dirais, en fait il ne faut pas... on ne demande pas là vraiment d'arrêter le processus et dire: Il faut faire un diagnostic. Je ne pense pas que c'est ça du tout. Normalement, dans un processus, je dirais, d'implantation, de démarche de développement durable, au préalable on fait un diagnostic: À quel endroit est-ce qu'on se situe? Quels sont nos points forts, points faibles? Et ça nous permet de déterminer c'est quoi, nos orientations, sur quel axe qu'on doit travailler. Et c'est un peu d'où normalement découle une stratégie, ça fait suite à un diagnostic, et, après ça, on décide de s'orienter et de foncer. Je vous dirais, en tout franchise, vous avez tous les outils et à mon avis toutes les données aussi que ce diagnostic-là pourrait comporter à travers les différents ministères. Chaque ministère a ses objectifs qui à mon avis lui sont très clairs dans la façon qui lui est présentée. La seule chose, c'est qu'il n'y a peut-être pas eu, je dirais, de présentation globale ou on n'a pas vraiment présenté que ce diagnostic-là avait été fait au préalable et que les orientations étaient issues de ce diagnostic, de cet état des lieux au préalable. Donc, par la suite, suite à la stratégie, les indicateurs s'ensuivent. C'est certain que les indicateurs vont être consistants, je crois, avec les différents objectifs des ministères, et normalement ils découleraient un peu de l'état des lieux, là, oui.

n(15 h 40)n

Mme Beauchamp: Peut-être vous dire: Je pense que la stratégie qui est devant nous... Quand, moi, je me suis assise avec les gens du ministère, on a pu me démontrer que le choix des orientations puis des objectifs vraiment ? puis c'est pour ça que je soulignais votre rôle d'influence dans la première partie, là ? découle beaucoup, beaucoup, beaucoup ce qui a été entendu lors de la consultation pour l'adoption de la loi. J'ai envie de vous dire... Est-ce que c'est un défaut ou une qualité? J'ai envie de vous dire: Peut-être que ce que vous avez devant vous ne procède pas d'un diagnostic formel, bien que le gouvernement du Québec ait déjà déposé des bilans du développement durable, on me disait, en 1997, en 2002, mais découle beaucoup de ce qui a été entendu de la part de la population, là, des milliers, comme je disais, de personnes qui ont été entendues lors de la tournée.

Je vais tout de suite... Malheureusement, ce serait intéressant de pouvoir continuer à jaser là-dessus, mais j'ai d'autres questions pour vous puis je vais passer tout de suite à l'autre question, c'est sur la dimension de l'éducation, c'est vraiment au coeur, vous, de votre mission. Et, parmi beaucoup d'intervenants que nous rencontrons depuis le début, je vous avoue que, moi, je trouve que, parmi mes responsabilités comme ministre du Développement durable, qui ne sont peut-être pas toujours explicites, je pense que j'ai une responsabilité avec mes collègues parlementaires, c'est la notion, vous savez, de mobilisation, de vraiment... Et je pense qu'on a créé ça, là. Quand je regarde ce qui s'est passé au niveau de plusieurs municipalités, de plusieurs organismes ou même d'entreprises, déjà des ministères puis des sociétés d'État du gouvernement, il y a eu un effet de mobilisation, et je veux vous entendre sur, concrètement, là, avec les notions d'éducation, d'information, comment vous voyez le rôle du gouvernement puis peut-être, au premier titre, du titulaire du ministère sur ces notions de mobilisation, comment on doit s'y prendre ? puis j'ai envie de dire ? pour garder la flamme autour du développement durable.

Puis peut-être pour vous... quelque chose... Et je pense que, moi, je suis une fille... j'ai besoin d'être bien concrète, je suis faite comme ça. Vous, vous avez l'expérience du programme dans les cégeps, puis je me dis, vous êtes en train de travailler, c'est plus une notion, là aussi, de gestion environnementale, mais, tout de même, vous êtes en train de travailler avec des instances où il y a un conseil d'administration, où il y a une population, hein, que je pourrais comparer aux citoyens, vous avez des départements, vous avez des employés. Je me dis, à partir de votre expérience, même si ce n'est pas complètement une démarche de développement durable... Je pense que c'est plus une démarche de gestion environnementale dans les cégeps, mais je pense qu'avec ce que vous vivez au quotidien vous pouvez sûrement m'être de très bon conseil sur comment on doit procéder pour instaurer puis garder une mobilisation de tous les acteurs dans un milieu donné.

M. Boudreau (Dominique): Oui. Pour répondre à votre question, je commencerais peut-être... je pense que ça se situe surtout au niveau du gouvernement, un peu, la question que vous me posez. L'importance de la sensibilisation, l'éducation, ce qu'on se rend compte, je crois qu'à prime abord, lorsqu'on parle de développement durable, c'est d'arriver... commencer par la compréhension du concept. Parce que j'imagine, si on faisait simplement un tour de table des gens ici, tous et chacun auraient une perception différente du développement durable, et ce, pour faire avancer un processus, il faut que les gens, du moins, comprennent un peu de quoi qu'on parle, hein, dans le fond, donc de commencer à transmettre... à savoir qu'est-ce que le développement durable, à quoi ça rime aussi dans les différents ministères. Parce que c'est certain que, si on prend, on va dire, le ministère de l'Environnement, au MDDEP, ça peut être quand même assez clair, mais, quand on rentre, je ne sais pas, au ministère des Finances, des choses comme ça, les gens ont peut-être une perception différente ou il ne voient pas comment rattacher leurs objectifs ministériels avec le développement durable. Donc, vraiment de parler un langage, je crois, qui est adapté aux personnes, aux différentes préoccupations, tu sais, c'est quelque chose qui peut aider les gens.

Un autre point qui est très clair, c'est celui de l'engagement de la direction, d'avoir un responsable, un champion, un porteur de flambeau dans chaque ministère. Et ce, je ne vous en ai pas parlé tout à l'heure, mais on parlait du sous-ministre, par exemple, pour assurer aussi une pérennité puis qu'il y ait une reddition de comptes à l'interne même des différents ministères. C'est un bon moyen de dire: Bien oui, la direction s'engage, il y a une vraie volonté. Et les gens, je dirais, sous les différents paliers ensuite, sont attirés et participent, là, à la démarche. Donc, c'est un autre moyen. Ça, c'est pour ce qui est du gouvernement, mais je pense qu'à l'extérieur de ça, bien, il y a différents organismes et des gens qui font la promotion de ces valeurs-là, puis, à ce moment-là, c'est de soutenir ces différentes formules là, ces organisations-là.

Mme Beauchamp: Je ne sais pas... O.K. Je vais laisser du temps à mon collègue.

Le Président (M. Bergman): Il y a du temps pour une courte question, une courte réponse, il y a deux minutes.

M. Reid: Bon. Je vais aller très, très vite à ce moment-là. Si on essaie de regarder, au-delà du cégep, le monde scolaire, vous faites une recommandation quelque part, là ? je vais essayer rapidement de trouver ? où vous dites: «[Encourager] fortement les institutions d'enseignement à se doter ? donc, moi, je pense, quand vous dites ça, primaire et secondaire aussi ? d'une politique de développement durable d'ici deux ans.» Effectivement, beaucoup de gens de mon âge qui ont eu des enfants à une période où on était moins sensible à l'environnement sont devenus sensibles à l'environnement parce que les enfants nous ont obligés à l'être, entre autres toute la question du recyclage, et ça a donc été assez efficace.

Maintenant, est-ce que le fait d'y aller par l'action, comme vous recommandez, avec un plan qui serait dans une école donnée ? on sait que ça existe dans certaines écoles, Brundtland, etc.; mais ? est-ce que ça, ça va suffire, disons, pour... ou est-ce que l'effet de ça qu'on a connu dans les années peut-être quatre-vingt ou quatre-vingt-dix, est-ce que ça, ça va être encore un effet de levier puissant pour mobiliser l'ensemble de la population? Parce qu'on n'arrivera pas à implanter une stratégie comme celle-là évidemment juste par décret gouvernemental, par des lois qui vont obliger tout le monde, qui vont surveiller tout un chacun, ça va fonctionner par une mobilisation de la population, et est-ce que c'est dans ce sens-là que vous allez en disant que chaque école se fasse un plan mais que ce plan-là... Quand vous parlez d'un plan, d'une politique de développement durable, c'est quelque chose qui va dans le sens de l'éducation, oui, des jeunes, mais aussi de leur effet multiplicateur à leur âge, au primaire, au secondaire et pas uniquement au cégep, parce qu'au cégep souvent ils sont moins d'impact sur leurs parents, et réciproquement d'ailleurs. Mais, à ce niveau-là, est-ce que c'est quelque chose que vous considérez comme un élément important?

Le Président (M. Bergman): ...pour une très courte réponse, le temps est presque écoulé.

M. Boudreau (Dominique): D'accord. Je pense, vous avez bien donné l'exemple, là. Je crois que les jeunes, des enfants ou... jusqu'au cégep, sont vraiment des motivateurs et ils ont amené des changements de comportement auprès de leurs parents. Parce que vous l'avez dit, là, quand ton jeune te dit: Bien, il ne faut pas jeter ça à la poubelle, il faut mettre ça au recyclage, souvent les parents se sentent un peu mal, coupables puis ils changent leurs habitudes. Je crois que c'est une bonne façon de le faire, puis à travers des politiques de développement durable. C'est parce que, dans les modèles qu'on propose, les jeunes participent, mais aussi le conseil d'administration est là, les gens de la direction, les gens de l'approvisionnement, etc., donc tout le monde met la main à la pâte. Ça permet aussi de comprendre la dynamique de chacun. Les jeunes sont très revendicateurs. Quand ils comprennent un peu c'est quoi, la dynamique du conseil d'administration, je dirais, ils en laissent tomber un peu, et vice versa. Donc, je crois que c'est une belle formule pour éduquer tout le monde et faire des changements fondamentaux, là, oui.

Le Président (M. Bergman): Merci. M. le député de Marguerite-D'Youville.

M. Diamond: Bien, merci beaucoup. Premièrement, bonjour. C'est la première des choses. Puis je tiens à dire qu'ENvironnement JEUnesse, c'est un organisme sur lequel... L'environnement, c'est assez large, hein, il y a toutes sortes de dossiers, il y a toutes sortes d'enjeux. Mais l'éducation chez les jeunes, c'est quelque chose que je crois beaucoup, parce que, moi, personnellement, c'est grâce au réseau des écoles vertes Bruntland que j'ai commencé à être sensibilisé à l'environnement, parce qu'avant ça il n'y a pas eu d'éléments marquants dans ma vie qui m'ont rapproché des causes environnementales, je n'ai pas eu personne non plus, je veux dire, qui m'a sensibilisé à ça quand j'étais jeune. La première fois que j'ai été sensibilisé à la pollution, ça a été quand on a commencé avec le recyclage, avec la pollution des cours d'eau, des petites choses comme ça, puis éventuellement on est allé sur des sujets de plus en plus complexes.

Mais c'est grâce à ces petites capsules là, tu sais, du réseau vert Bruntland, puis des journées qu'on dédiait, puis des semaines de l'environnement qu'on dédiait lorsque j'étais au secondaire qui m'ont ouvert l'esprit à cette cause-là, puis aujourd'hui je ne suis toujours pas décroché. Donc, c'est quelque chose à lequel je crois beaucoup, beaucoup, beaucoup. Puis, moi, j'ai été quelqu'un qui a pu en sensibiliser d'autres de par mes actions, puis par mes paroles, puis parce que je croyais, là, alors... Mais ça, ça a commencé grâce au système d'éducation, qui avait intégré dans le fond l'éducation chez les jeunes. Donc là, aujourd'hui, ENvironnement JEUnesse, vous venez me parler de quelque chose sur lequel je suis un cobaye, puis, aujourd'hui, bien je me retrouve à être un acteur dans le domaine. Donc, c'est la preuve que le réseau fonctionne bien puis que ça peut changer la mentalité de beaucoup, beaucoup de personnes. Ça fait que, de ce côté-là, félicitations.

n(15 h 50)n

J'ai trouvé votre mémoire excessivement intéressant dans la mesure où c'est très précis, où il amène... On a souvent reproché jusqu'à maintenant à la stratégie de manquer de précision. On comprend évidemment que tous les indicateurs plus précis vont venir dans l'année suivant l'adoption de la stratégie, mais je continue à croire qu'on pourrait préciser les moyens. Et puis, comme je suis quelqu'un qui souvent prêche pour des exemples concrets, je vais en donner un. Vous parlez, exemple, d'augmenter la taxe sur l'enfouissement. Donc ça, c'est une mesure précise qui est ici. On n'est pas obligé, à ce stade-ci, de préciser de combien, dans quelles modalités, mais, par exemple, on peut souligner que c'est un moyen dans le but de réduire la production inutile ou de jeter des produits qui pourraient être autrement réutilisés. Donc ça, c'est un moyen à mon sens qui pourrait être mis de l'avant, et je pense que la stratégie se doit d'avoir des moyens précis comme celui-là sans être obligé d'imposer aux organismes des objectifs très, très précis en termes de pourcentage ou de tonnes. Mais un moyen comme ça, je trouve que c'est fantastique de voir que vous avez eu le courage d'en amener. Et je pense que ça pourrait être un bon modèle sur lequel la stratégie pourrait préciser en quelque sorte les objectifs qu'elle entend atteindre.

Je trouve votre mémoire très concis, là. Autrement dit, vous avez amené beaucoup d'éclaircissements. Cependant, j'ai encore des petites questions. Puis ça ne devrait pas être tellement long, j'ai deux, trois questions. Après ça, je céderai la parole au député de Montmagny-L'Islet pour ses questions, à lui aussi.

Une des questions que j'ai, ça se trouve à la page 12 de votre mémoire où vous parlez de l'internisation des coûts. Et puis, moi-même, j'ai déjà eu plusieurs réflexions sur ce sujet-là, à savoir est-ce qu'on devrait taxer, par exemple, le styromousse, les gobelets de styromousse dans les machines à café puis des trucs comme ça, puis la conclusion à laquelle j'en suis arrivé, c'est que, quand on achète en gros, là, des dizaines de milliers de tasses puis de... Exemple, Hydro-Québec qui dernièrement a décidé qu'il n'y avait plus de styromousse dans ses établissements, eux, ça fait des conséquences immédiates, c'est rentable. Mais, chez l'individu, tu sais, lorsqu'on va aller acheter un paquet de 25, là, la taxe, c'est rendu, là, même si on dit que c'est un pourcentage élevé du produit qui est taxé, c'est rendu un montant insignifiant pour le consommateur, puis, à ce moment-là, j'ai l'impression qu'au contraire, tu sais, ça ne sert à rien puis ce n'est pas assez persuasif.

Ça fait que là-dessus j'aimerais savoir si vous avez la même vision que moi ou au contraire on devrait taxer les produits, même quand c'est acheté en petite quantité puis que l'impact est dérisoire chez le consommateur.

M. Boudreau (Dominique): Bien, je pense que, si on parle, pour ce qui est des sacs de plastique en tant que tels, là, je pense que le principe... c'est surtout d'amener le principe là-dedans. Le problème, c'est que souvent le producteur ne prend pas en charge le cycle de vie de son produit, puis, à ce moment-là, c'est la société qui se retrouve à payer ces frais-là mais de façon, je dirais, détournée, à travers des taxes municipales, à travers des impôts, etc., pour corriger la situation, et malheureusement, à ce moment-là, l'individu n'est pas capable de se rendre compte finalement que c'est son acte ou, je dirais, la vraie valeur du produit, en fait. Donc, lorsqu'il achète un sac de plastique... Ou souvent on lui donne, mais, dans les faits, ce sac de plastique là, il coûte quelque chose, il coûte quelque chose en termes de gestion de matières résiduelles, etc. Donc, vraiment d'avoir un moyen, un mécanisme qui permet de refléter les externalités. Dans le fond, c'est un peu ce que ca reprend, l'internalisation des coûts. Bien, c'est un peu ça qu'on veut amener. Je pense que l'exemple là était un exemple un peu frappant. De dire: On paie pour, bon, quelque chose qu'on n'est pas habitués de payer nécessairement, là... On s'attend que des verres de styromousse, ça ne coûte rien, mais en fait il y a un prix rattaché à ça. Ce qu'on dit, c'est: Il faudrait peut-être payer le juste prix que ça coûte. Donc, c'est un peu cet aspect-là. Puis juste pour reprendre un peu...

M. Diamond: O.K. Donc, vous, l'exemple du styromousse ? peut-être que je l'ai mal compris ? c'est à la consommation, quand j'achète un café, puis là il y a un 20 cents de plus. O.K. Ça fait que ce n'est pas nécessairement quand je m'en vais dans un commerce au détail puis là j'achète un paquet de 25. Parce qu'effectivement je trouve qu'il y a une nuance importante là-dessus puis je ne l'avais pas vu comme ça, mais... O.K. Autrement dit, dans le commerce au détail, est-ce que vous êtes sur la même longueur d'onde, que ça ne sert à rien, mais que, là, dans ce cas-là, si on y va avec... dans un café ou des trucs comme ça, là ça vaudrait la peine? C'est ça que vous nous dites?

M. Boudreau (Dominique): Bien, j'ai de la misère à voir un peu la différence. Parce qu'en fait on va dire: Si le surcoût est refilé en quelque part au consommateur ou au producteur, bien ça revient bien souvent, je dirais, dans les mains du consommateur en quelque sorte, là. Si on dit: Les producteurs de produits jetables soient... à se conformer à une taxe pour prendre en charge leurs produits, bien, en fait, ce que ça va arriver, c'est que les produits qu'ils vont produire vont augmenter de prix, et les consommateurs vont voir la différence. Et ça va ouvrir aussi vers, je dirais, la rentabilité d'autres solutions qui ont moins d'impact dans un coût total au niveau du produit.

M. Diamond: O.K. Je vais poursuivre ma réflexion sur ce dossier-là. L'autre question que j'avais ? puis là c'est question d'ordre très général ? vous avez fait mention à quelques reprises ? je pense, deux ou trois ? des cégeps verts. Et puis je sais que ça existe, là, mais, à part ça, je n'en sais pas beaucoup plus. Est-ce qu'il serait possible de me faire le topo rapide de c'est quoi, un cégep vert, puis les différences que ça a aussi avec les écoles Brundtland, que je connais beaucoup mieux? Brièvement, puis, après ça, ce sera tout pour mes questions. Dans l'ensemble, j'ai trouvé le mémoire très clair, très convaincant, ça fait que je n'ai pas trop de questions à vous poser.

M. Boudreau (Dominique): Oui. Pour l'explication des cégeps verts, c'est certain qu'elle ne sera pas aussi bonne que si c'était mon directeur qui la faisait, mais je dirais, dans la...

M. Diamond: Vous parlez de M. Normand, c'est ça? Jérôme Normand?

M. Boudreau (Dominique): Oui, oui, oui.

M. Diamond: C'est un ancien directeur de cégep vert ou...

M. Boudreau (Dominique): C'est toujours le directeur d'ENvironnement JEUnesse; moi, je suis le président. Mais tout simplement, je dirais, le fonctionnement, c'est que, dans un cégep, il y a ce qu'on appelle un comité d'action et de concertation pour l'environnement qui est formé, qui rejoint autant des élèves, des étudiants que des gens aussi de l'administration, puis, à travers leur cheminement au niveau des certifications, bien il y a quatre niveaux de certification. Là, je ne les ai pas en mémoire clairement, mais il me semble que, dans la première certification du premier degré, bien les gens s'engagent à avoir une politique, par exemple. Ils s'engagent aussi à faire quatre activités de sensibilisation au cours de l'année, puis ça, ça leur donne droit à une certification de niveau 1. Pour avoir un niveau 2, à ce moment-là il faut, par exemple, que l'institution se dote d'un fonds pour mettre en place des actions. Donc, c'est un peu ce genre de fonctionnement là.

Et présentement, au Québec, là, il y a 25 institutions collégiales qui sont certifiées cégeps verts de certains niveaux. Le collège de Rosemont, il est niveau 4, c'est des gens qui sont assez précurseurs dans le secteur, là. Mais vraiment il y a un engouement, là, pour cette certification-là.

M. Diamond: O.K. Bien, merci.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci, M. le Président. Simplement en préambule à ma question, quand on parle de garder la flamme, que Mme la ministre posait tout à l'heure, quand on commence à travailler en environnement, quand on commence à s'impliquer en environnement et qu'on voit les conséquences de non-actions en environnement, il est très facile de garder la flamme, il est très facile de la cultiver, et de la partager avec les autres, et même d'insister sur les faits environnementaux. Donc, quand on se met dans... Peu importe l'âge qu'on a, quand on commence à travailler en environnement et que, chaque geste qu'on pose, on pense à demain ou on pense aux jeunes... Parce que vous arrivez au niveau des jeunes, moi, je dis toujours ça en farce, mais ça va arriver: Je peux partir, je laisse quelque chose en arrière. J'ai essayé de travailler pour que les jeunes puissent finir par avoir un milieu de vie beaucoup plus sain, beaucoup plus serein, et j'aurai fait ma part.

Mais, ceci étant dit, quand je regarde... Vous avez... On a posé la question tantôt, et je vous pose la question à vous: Quand vous parlez de personnes responsables, je regarde au niveau de chez Hydro-Québec où ils ont mis, à l'intérieur de leur développement... à l'intérieur de leur branche en environnement, des personnes responsables du développement durable et qui ont décidé d'un commun accord: Aujourd'hui, on apporte nos tasses, et qu'il n'y aura plus jamais un verre de styromousse chez Hydro-Québec... Parce qu'on fait, à tous les ans, la distance Montréal?Baie-Comeau avec des verres de styromousse alignés sur l'asphalte. À tous les ans, c'est ce qu'on jetait dans environnement. Et c'est ça, les gestes qu'on parle. Donc, est-ce que, dans chacun des ministères, vous ne pourriez pas préconiser... D'ailleurs, est-ce que ce n'est pas à l'intérieur de votre mémoire où, dans chacun des ministères, il y a quelqu'un, il y a un employé, quelqu'un qui prend en charge le rôle environnemental et qui garde la flamme justement pour l'ensemble des consoeurs, confrères?

n(16 heures)n

M. Boudreau (Dominique): Oui. Je pense, c'est un bon point que vous amenez. Regardez, vous avez parlé d'Hydro-Québec, moi, j'ai en tête aussi ce qui a été fait chez Loto-Québec. Loto-Québec, le développement durable, ça a été repris un peu par les gens en communications justement parce qu'ils croyaient que c'était un peu les porteurs du flambeau à l'intérieur, là, de cette institution-là. Puis, moi, je vois deux choses. Je vois une structure de sensibilisation, d'information pour... Oui, on passe le message, mais passer le message, quand ça reste seulement théorique, sur papier, souvent ça rentre par une oreille puis ça sort par l'autre. C'est important de faire des projets vitrines, c'est important de faire des... Des fois, c'est une petite action, hein? On va dire: Un verre de styromousse, ce n'est pas grand-chose, mais ça amène un changement de comportement, ça amène aussi, je dirais, à rendre concrète cette information-là, que ça s'imbrique dans nous. Et, par la suite, lorsqu'on voit d'autres opportunités, bien les gens, ils ont l'engouement. D'autant plus, c'est un moyen qui est réalisé, à plusieurs sauces, dans différentes situations. On fait un petit projet dont on s'assure qu'il est très bien diffusé puis aussi qui est une belle réussite, et, à ce moment-là, les gens voient: Ah, wow, c'est super! Voilà un beau projet, c'est le fun, je veux y participer. Il y a l'engouement, puis les gens sont plus à même de vouloir embarquer dans des démarches des fois qui sont plus longues, plus ardues, où on ne voit pas les résultats à court terme. Donc, c'est important de faire des petits projets à court terme qui ont un bon impact, une belle visibilité pour qu'il y ait l'engouement dans les différents ministères et dans la population aussi. Je pense que, si on veut que ça se développe, bien, c'est la façon de faire, oui.

Le Président (M. Bergman): Il vous reste...

M. Roy: J'ai un petit peu de temps?

Le Président (M. Bergman): Une minute.

M. Roy: Merci beaucoup, monsieur. J'ai vu dans des écoles... Est-ce que... Je vais plutôt rephraser. J'ai vu dans des écoles où on a fait des pièces annuelles, c'est-à-dire une grande fresque ou une grande pièce annuelle faite avec tout des produits de recyclage, donc on a créé des concours à l'intérieur des écoles, en tout cas chez moi où on a créé ces monuments-là qu'on garde pendant l'année, en plein hôtel de ville ou dehors de l'hôtel de ville.

Vous parlez de quel âge qu'on doit... Moi, je pense que c'est en bas âge, mais, vous, vous insistez à partir de quel âge où on parle environnement mais vraiment sérieusement, là, non pas en bébé, mais sérieusement?

M. Boudreau (Dominique): Je vous dirais: Il n'y a pas d'âge.

M. Roy: C'est ça.

M. Boudreau (Dominique): On doit commencer à parler en bébé aux bébés puis, par la suite, on parle au niveau de langage à l'âge à qui on s'adresse.

M. Roy: On a parlé de cégeps verts, donc je me disais... C'est sûr que, moi, j'aimerais ça que ça commence au primaire pour qu'on puisse, déjà au primaire, inculquer ces notions-là aux jeunes.

M. Boudreau (Dominique): Oui, tout à fait. Bien, on fait des actions au primaire, au secondaire, au collégial. Je pense qu'on préconise l'éducation à tous âges. ENvironnement JEUnesse, des fois on a des gens, je vous dirais, au-delà de... le seuil de jeunesse du gouvernement du Québec. Donc, ça s'adresse à tous. Merci.

M. Roy: Merci beaucoup. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bergman): Merci. M. le député de Vachon.

M. Bouchard: Oui. Merci, M. le Président. Bonjour, M. Boudreau. Il y a plusieurs éléments que j'ai relevés dans votre mémoire, qui m'apparaissent particulièrement intéressants. J'aimerais revenir très brièvement sur la question d'un diagnostic, du diagnostic que vous évoquez en page 6, là, au bas de la page 6.

La ministre disait tout à l'heure: Bien, peut-être qu'on y arrivera parce qu'on développera, dans l'année subséquente, des indicateurs. Développer un indicateur, à mon point de vue, M. Boudreau, c'est identifier la nature de l'indicateur: un volume, un poids, enfin. Mais faire le diagnostic, c'est de savoir à quel niveau on est à propos de cet indicateur. Éventuellement, définir une cible, c'est voir où est-ce qu'on veut s'en aller à propos de cet indicateur. Alors, il m'apparaît à moi que ça ne répond pas tout à fait à la préoccupation qui a été véhiculée par... amenée par le commissaire ni par ce que vous soulevez dans votre rapport, à savoir qu'une fois que l'indicateur est connu il faut savoir où est-ce qu'on se situe par rapport au thermomètre qu'on vient de désigner.

Ceci étant dit, je m'interroge sur une des dispositions que vous évoquez, en bas de la page 10, en ce qui concerne le partenariat et la coopération intergouvernementale. Vous êtes, je pense, si ma mémoire n'est pas fautive ni celle de ma conseillère politique, le premier organisme à faire référence au Protocole de Kyoto. J'en ai fait référence, moi, dans mon introduction, dans les remarques préliminaires, à l'effet que la stratégie ne fait pas référence à ce partenaire qu'est supposé être le gouvernement fédéral dans notre capacité de construire une culture et de renforcer une culture du développement durable, notamment par le respect du Protocole de Kyoto. Et je ne vois pas comment vous pouvez arriver à espérer ce partenariat à Ottawa d'investir 0,7 % du PIB du Québec, en partenariat avec Ottawa, dans le cadre du Protocole de Kyoto, alors que c'est assez clair qu'Ottawa ne veut rien savoir du protocole, là.

M. Boudreau (Dominique): Oui, mais je pense que ça vaut la peine de continuer à taper sur le clou. Je pense, à ce niveau-là d'ailleurs, le Québec le fait depuis des années, là, pour faire avancer, cheminer ce dossier-là avec Ottawa. Donc, la conjoncture fait en sorte, comme vous dites, que ça n'avance peut-être pas beaucoup avec Kyoto à Ottawa, mais, au niveau du Québec, il y a des actions qui commencent à être entreprises, et on voit qu'il y a des choses qui se font en ce sens-là. Donc, je crois que c'est important de continuer, d'aller et travailler sur des problématiques tel Kyoto, et c'est une problématique qui est un enjeu au niveau du Canada.

L'autre point, pourquoi qu'on amenait ça, ce point-là? En fait, ce qu'on disait au niveau de la coopération intergouvernementale, on le voyait plus ou moins dans la stratégie. On parlait beaucoup de coopération entre les ministères, peu de coopération en dehors des ministères. C'était juste qu'on voulait faire un rappel. Je pense que c'est quelque chose qui se fait déjà, mais c'était juste de le mentionner et de l'asseoir, là, donc.

M. Bouchard: Bien, moi, je reconnais tout à fait la pertinence d'évoquer le fait que normalement on devrait avoir un allié dans le respect du protocole et dans notre démarche d'atteindre la cible de Kyoto, mais que, si j'avais écrit le texte, j'aurais écrit «malgré Ottawa» plutôt «qu'en partenariat avec Ottawa».

Par ailleurs, à l'élément sur la protection du patrimoine culturel, en page 11, vous recommandez au gouvernement de s'assurer du respect des décisions d'instance comme la Commission sur la protection du territoire agricole qui, par son action, permet la protection du patrimoine paysager des zones agricoles du Québec. Est-ce qu'il y a des éléments spéciaux qui vous font insister davantage sur cette recommandation-là maintenant? Pourquoi l'amener maintenant?

M. Boudreau (Dominique): Je vous dirais, il n'y a pas nécessairement d'éléments spéciaux à ce niveau-là, je pense qu'on voulait parler de la protection du patrimoine culturel mais à travers un point de vue un peu plus en lien avec l'environnement, donc au niveau du paysage. Puis je pense que la CPTAQ est une institution qui permet justement, là, de veiller à la préservation de ce patrimoine paysager du Québec à travers les lois qu'elle dirige, là.

M. Bouchard: Et si ce respect des décisions de la CPTAQ n'était pas assuré, quelles inquiétudes ou quelles préoccupations avez-vous à cet égard-là?

M. Boudreau (Dominique): Bien, je pense qu'on le voit en termes, on va dire, de pression sur le milieu agricole. Tout ce qui est l'étalement urbain, par exemple, est une problématique qui joue, là, en la défaveur, là, du monde agricole et du patrimoine paysager, là, donc culturel du Québec. Donc, c'est vraiment de voir à ce qu'on préserve bien le patrimoine agricole du Québec à travers justement les décisions de la CPTAQ. Beaucoup de gens vont en contestation, certains ont plus d'arguments que d'autres, donc c'est de voir à ce que ça se fasse bien, c'est tout, oui.

M. Bouchard: Est-ce que vous avez quelque part des indications à l'effet que, dans la population, il puisse y avoir un doute à l'effet que la commission puisse ne pas avoir tout l'impact qu'elle devrait avoir?

M. Boudreau (Dominique): Je ne voudrais peut-être pas rentrer dans les détails de fonctionnement, étant donné que je ne suis pas un expert, là, au niveau des décisions de la commission et du fonctionnement particulier. Je reprends un peu ce que j'avais entendu, là, par les branches, là, dans le milieu, mais je pense qu'en général la commission a un poids assez décisif. Je pense, c'est d'appuyer et continuer son bon travail, là, c'est un peu ça, oui.

M. Bouchard: Si à répétition un gouvernement, quel qu'il soit ? ou l'État ? mettait en cause les décisions ou les recommandations vis-à-vis de la commission, est-ce que cela vous inquiéterait?

M. Boudreau (Dominique): Bien, c'est certain que le statu quo ou de se fixer... Comment dire? Si on gèle nos positions à travers le temps, je pense que ce n'est pas une bonne façon de faire. C'est certain, à travers le temps, on peut changer des orientations, la dynamique. En tout cas, le contexte dans lequel on vit se modifie, il y a des changements à faire, ça, c'est certain, mais, à ce moment-là, il faut voir dans quel contexte, sur quoi qu'on s'appuie pour prendre ces décisions-là. Je pense que, dans le global, c'est surtout ce qui est important, oui.

M. Bouchard: Est-ce que vous avez l'impression qu'outre le fait de la vocation agricole des zones agricoles il y a, dans la population et dans ses représentants, une préoccupation pour la beauté des paysages? Est-ce que vous pensez que c'est un argument de poids dans une politique de développement durable?

n(16 h 10)n

M. Boudreau (Dominique): Sûrement. Il faut le voir, c'est très contextuel, hein? On va reprendre un exemple: les groupes environnementaux sont très pour les énergies renouvelables, par exemple. Et, si on prend les dossiers des éoliennes présentement, on sait que la Gaspésie, c'est un territoire qui vit beaucoup du tourisme. À ce moment-là, est-ce qu'une intervention désordonnée de projets à travers la Gaspésie, c'est une bonne façon de faire? Peut-être pas nécessairement. Donc, c'est certain qu'il y a des préoccupations au niveau du paysage un peu partout, mais ça dépend du contexte, comme je vous le dis, là, oui.

M. Bouchard: Dans un autre ordre d'idées, vous faites une recommandation qui m'apparaissait extrêmement intéressante, au point d, concernant l'efficacité économique. Et vous demandez au gouvernement de s'assurer que la Société générale de financement et la Caisse de dépôt et placement du Québec investissent en conformité avec le développement durable. «Il serait essentiel ? dites-vous ? que ces institutions se dotent d'ici deux ans d'un fonds pilote ayant des critères d'investissement basés sur le développement durable.»

Est-ce que cette recommandation-là suit une étude ou une analyse que vous auriez faite des politiques qui sont mises de l'avant maintenant à la Caisse de dépôt et placement du Québec et vous auriez constaté qu'il n'y a pas ce genre de préoccupation-là, ou...

M. Boudreau (Dominique): Je vais vous dire, à ma connaissance, je ne crois pas que ça existe, présentement, là, au niveau des politiques d'investissement de la Caisse de dépôt et placement. Ça a peut-être changé, je n'en suis pas au courant. Je sais, par exemple, qu'il existe des fonds, par exemple le Fonds d'investissement en développement durable qui investit sur les critères de développement durable. Je pense que la FTQ a peut-être aussi... ou Fondaction, excusez-moi, avec CSN, ont peut-être des critères un peu semblables ou qui tendent vers un développement durable. Et on amène ce point-là, je pense aussi, d'y aller avec un projet pilote, comme on disait tout à l'heure, des petites actions pour voir ça fonctionne-tu bien. C'est important, c'est un premier pas. Et on voit que la tendance aussi, puis on verra si ça se confirme pour le long terme, mais, bon, bien, les rendements, dans les fonds verts de ces dernières années, étaient très, très bons, là, je veux dire, très concurrentiels par rapport aux autres fonds. Donc, pourquoi pas, quand on investit, investir de façon responsable?

M. Bouchard: Ça nous fait regretter de ne pas avoir invité la caisse, parce qu'il y a là, il y a là un patrimoine, un patrimoine financier extrêmement important, c'est notre bas de laine collectif, et le fait d'interpeller cette grande institution de développement économique du Québec m'apparaît tout à fait intéressant. Je serais curieux d'entendre les gens de la Caisse de dépôt et placement...

Le Président (M. Bergman): M. le député, il vous reste une minute pour la question et réponse.

M. Bouchard: ...sur le sujet et éventuellement peut-être aurons-nous l'occasion d'en parler avec les dirigeants de la caisse.

Une dernière question sur les OGM. J'ai aussi évoqué cela, dans mes remarques préliminaires, demandant à la ministre de nous faire savoir ses intentions à ce sujet-là, éventuellement. Mais il y a certainement quelque chose quelque part qui ne fonctionne pas, du côté du Québec ou de l'Amérique du Nord, à ce sujet-là. L'Union européenne a adopté, depuis un certain temps, un certain nombre de règles à cet égard-là. Est-ce que vous avez une explication à nous proposer sur notre incapacité à y arriver?

M. Boudreau (Dominique): Je dirais, selon mes connaissances toujours, là, le Canada est un pays qui est très impliqué au niveau du développement des OGM. Donc, l'industrie des biotechnologies est une industrie importante, donc on en fait la promotion.

Une voix: Et le lobby.

M. Boudreau (Dominique): Oui, et le lobby, bien sûr, alors que, du côté de l'Union européenne, les gens ont eu une approche beaucoup plus préventive, c'est-à-dire de voir justement, en termes de précaution, si on ne connaît pas les impacts à long terme de ces OGM, on doit peut-être mettre un «hold», là, y aller tranquillement puis voir où est-ce que ça nous mène. Donc, c'est un peu ça.

Nous, ce qu'on dit, c'est: Étant donné que les structures peut-être de vérification, de réglementation sont des façons coûteuses des fois que Santé Canada peut, par exemple, dire: Bien, on ne peut pas se permettre de faire ça, bien, à ce moment-là, ce serait important de donner le choix aux consommateurs au moins de pouvoir faire la différence: Est-ce qu'on choisit de faire ça et de s'informer? À ce moment-là, au moins, les gens vont avoir un certain pouvoir.

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, le temps est écoulé.

M. Boudreau (Dominique): Merci.

Le Président (M. Bergman): Alors, je vous remercie pour votre contribution, et je demande aux gens de la Coalition québécoise contre les ateliers de misère pour prendre la table, et on suspend entre-temps.

(Suspension de la séance à 16 h 14)

 

(Reprise à 16 h 16)

Le Président (M. Bergman): Alors, le temps alloué pour votre présentation est de 15 minutes, et, après, on va avoir un peu d'échanges avec les députés de la commission. Est-ce que vous pouvez vous identifier et procéder avec votre présentation?

Coalition québécoise contre
les ateliers de misère (CQCAM)

Mme Roy (Marie-Noëlle): Parfait, merci. Merci, M. le Président, Mme la ministre, mesdames, messieurs. Alors, je me nomme Marie-Noëlle Roy. Je suis coordonnatrice de la Coalition québécoise contre les ateliers de misère et chargée de projet au Centre international de solidarité ouvrière. Je suis accompagnée de Mme Priscilla Bittar, qui est conseillère syndicale au Conseil central de Montréal de la CSN, qui est une organisation membre de la Coalition québécoise contre les ateliers de misère.

Donc, peut-être juste un petit mot sur la Coalition québécoise contre les ateliers de misère, qui est un regroupement de plus de 35 organisations provenant essentiellement du secteur syndical, des ONG et des associations étudiantes. Une coalition qui existe depuis 2003 et qui a comme mission principalement d'informer la population sur la question des ateliers de misère et de développer des alternatives pour contrer la prolifération des ateliers de misère. Une des alternatives qui a été mise de l'avant au cours des dernières années, en fait, ce sont les politiques d'achat responsable, politiques qu'on tente de faire mettre en application dans toutes les organisations québécoises, autant du secteur public que du secteur privé.

La coalition est coordonnée depuis son existence, depuis 2003, par le Centre international de solidarité ouvrière, qui est une organisation de solidarité internationale dont le membership est essentiellement syndical et où on oeuvre essentiellement dans le domaine des droits des travailleurs à l'international. Alors, voilà pour la brève présentation.

Je commencerais en disant, bon, que, dès le départ, dès le début de la stratégie gouvernementale de développement durable, dans l'introduction, on fait mention que, traditionnellement, au Québec, on a généralement parlé du développement durable précisément par rapport aux questions environnementales et qu'on a souvent laissé de côté les questions économiques et sociales. Nous ne sommes que trop d'accord avec cette affirmation, et notre mémoire veut être un peu un apport à cette réflexion-là et redonner à la dimension sociale, particulièrement à la dimension sociale pour notre cas, la place qui lui revient lorsqu'on aborde la question du développement durable.

D'une part, je voudrais préciser que, lorsque la Loi sur le développement durable a été... quand il y a eu les audiences publiques et une discussion au Québec, en 2005, bon, la coalition avait voulu présenter un mémoire. Il y avait un changement de personnel à l'époque, et ça n'a pas été possible. À l'époque, on voulait réagir parce qu'on trouvait que, bien que, dans les principes de la loi, on aborde les trois dimensions du développement durable, il semblait que, dans le reste de la Loi de développement durable, on parlait principalement presque uniquement d'environnement. Mais, bon, on n'avait pas pu présenter de mémoire à cet effet.

Nous avons été très contents de voir que la stratégie de développement durable incorpore beaucoup plus les dimensions sociales et économiques, et, pour ça, enfin, on vous félicite. Bon, d'une part, on le voit dans les enjeux principaux transversaux, notamment l'enjeu 2 qui est un enjeu qui nous intéressait particulièrement, donc, où on parle de la promotion de l'action responsable, où on parle de pratiques économiques viables, de responsabilités aux niveaux social et environnemental et où on parle de rendre les modes de production et de consommation plus responsables.

n(16 h 20)n

D'autre part, lorsqu'on aborde, dans la stratégie, les orientations, nous avons noté que six des neuf orientations font mention de la volonté du gouvernement de résoudre les problématiques sociales. Bien entendu, l'orientation qui nous a intéressés particulièrement pour la coalition, c'est l'orientation 3, où on parle de produire et consommer de façon responsable, et où le gouvernement mentionne sa volonté d'intégrer des critères de responsabilités environnementales et sociales dans ses processus d'achat ou d'attribution de contrats.

Donc, en bref, lorsqu'on a fait la lecture de la stratégie, nous étions quand même contents de retrouver ces dimensions-là, et on s'attendait... Bon, d'une part, on s'attendait, dans les objectifs de chacune des orientations, particulièrement les orientations où on aborde les dimensions sociales, que, dans les objectifs proposés à la fin de chacune des orientations, il y ait des points dans les objectifs qui font spécifiquement référence aux dimensions sociales qu'on aborde, ce qu'on retrouve très peu. Même dans l'orientation 3, qui est celle où on aborde de manière plus complète la dimension sociale, on regarde les objectifs à l'orientation 3 et on parle encore principalement de gestion environnementale et d'écoresponsabilité.

Deuxièmement, lorsqu'on regarde le plan d'action qui, en somme, s'adresse... c'est un plan d'action du ministère du Développement durable et de l'Environnement, mais qui est quand même et, je crois, qui doit être un exemple pour tous les autres plans d'action qui devront être mis en place pour les autres ministères, on regarde... le plan d'action et la dimension sociale et économique est presque inexistante.

En fait, les gestes 1 à 18 dans le plan d'action parlent du développement durable au sens large. Et on regarde les gestes 19 à 73 et on aborde presque exclusivement les dimensions environnementales. Donc, c'est comme si on vit une espèce de décalage entre la stratégie, le discours général dans la stratégie, ce qui apparaît dans les objectifs à l'intérieur de chacune des orientations et ce qui apparaît par la suite dans le plan d'action qui est proposé pour un ministère mais qui en somme devrait être un exemple pour les autres ministères.

Donc, le gouvernement, au départ de la stratégie, parle de rompre avec l'habitude populaire de lier le développement durable seulement à l'environnement, mais on se retrouve en conclusion avec quelque chose... on se retrouve encore dans ce biais-là. Donc, c'est un peu pour ça qu'on a fait des recommandations au gouvernement, parce qu'on est bien conscients qu'il y a plus d'alternatives environnementales qui existent et que parfois, de vouloir aborder et trouver des solutions aux problématiques sociales, ce n'est pas toujours facile.

On va vous citer en fait les recommandations principales. Vous avez toutes les autres recommandations dans notre mémoire. D'une part, il serait important que, dans les plans d'action de tous les ministères, incluant le plan d'action du ministère du Développement durable, il y ait la question de mettre en place une politique d'achat responsable pour chaque ministère et organisme gouvernemental, et ce, afin de répondre à l'orientation 3. Et, lorsqu'on parle de politique d'achat responsable, on parle d'une politique qui va spécifier les normes fondamentales et minimales autant au niveau environnemental que social. Et nécessairement ces normes-là devraient se retrouver dans les indicateurs qui vont être développés par le gouvernement, par la suite.

D'autre part, lorsqu'on parle de politique d'achat responsable, on parle d'un processus de mise en place et de suivi et un processus de vérification par un organisme externe multipartite. Soit dit en passant, les politiques d'achat responsable, ce n'est pas quelque chose de nouveau. Si le gouvernement dit qu'il innove dans ce domaine avec cette orientation-là, on retrouve, dans le Canada anglais, aux États-Unis et en Europe, des initiatives qui existent depuis maintenant 10 ans. On a plusieurs villes dans le Canada anglais, on a la province du Manitoba, depuis 2006, qui a adopté une politique d'achat responsable. En France, je pense qu'on peut s'en inspirer, depuis 2005, la France s'est dotée d'une structure nationale Achats publics éthiques. Donc, on a plusieurs initiatives un peu partout qui sont mises en place et qui incluent à la fois des aspects environnementaux et sociaux.

Comme deuxième recommandation qu'on juge très importante et qui devrait apparaître dans un plan d'action et encore là au niveau de chacun des ministères et même à l'intérieur de la stratégie du gouvernement, c'est de développer un format de rapport de responsabilités sociales et environnementales qui devrait être rempli annuellement par toutes les entreprises québécoises qui reçoivent des subventions de l'État et récompenser les entreprises québécoises qui se dotent d'une politique d'achat responsable et qui la respectent.

Et, dans l'orientation 3 de la stratégie, on parle brièvement de la responsabilité sociale des entreprises, mais, encore là, ce serait de veiller à ce que, dans les plans d'action, ça apparaisse réellement. Et, encore là, je pense qu'on peut prendre exemple dans plusieurs pays, par exemple en France où la loi relative aux nouvelles régulations économiques a été adoptée en 2005. En Angleterre, on a des politiques similaires. Donc, voilà une deuxième recommandation qu'on juge importante.

Troisièmement, c'est... en fait, c'est globalement, au niveau... À chaque fois qu'on parle du développement durable et à chaque fois qu'on développe des alternatives en ce sens-là, c'est de toujours aborder la dimension sociale, et on considère que ce n'est pas le cas. Donc, je donne, par exemple, la politique interne des acquisitions écoresponsables du gouvernement qui est donnée comme exemple. Bien, on le voit dans la définition: «écoresponsables». Et, quand on regarde cette politique-là, elle ne parle que d'environnement. Pourquoi? Pourquoi est-ce qu'on parle écoresponsables? Pourquoi on n'utilise pas le terme «responsables» et qu'on n'inclut pas la dimension sociale? Point d'interrogation.

Deuxièmement, le principe d'écoconditionnalité dans les programmes d'aide publique. Dans la stratégie générale, on parle également de responsabilité sociale, mais, quand on la reprend dans le plan d'action, au niveau du plan d'action du ministère du Développement durable, on a éliminé la responsabilité sociale et on a gardé seulement l'écoconditionnalité. Pourquoi? On ne sait pas.

Quatrième point. Ce serait important, si on veut produire et consommer de manière responsable, comme ça apparaît dans la stratégie 3... l'orientation 3, pardon, de modifier les lois québécoises qui complexifient la mise en place de politique d'achat responsable et le développement d'appels d'offres qui vont incorporer justement des indicateurs sociaux, environnementaux et économiques, et je donne comme exemple la Loi sur les cités et les villes et la Politique sur les marchés publics. La coalition, depuis plusieurs années, on travaille avec des acteurs au Québec. Au Québec, en ce moment, on a recensé plus de 60 organisations, la moitié qui vient du secteur public, la moitié qui vient du secteur privé, qui sont en processus d'adopter... certains ont mis en place des politiques, d'autres sont en train de faire le suivi de. Donc, ils sont à différents niveaux de la démarche, et il y en a plusieurs qui ont des difficultés de le mettre en application à cause de ces lois-là. Pourquoi? Parce que plusieurs de ces lois et même plusieurs accords économiques vont privilégier la question du coût moindre, donc ils ne pourront pas mettre des critères sociaux ou environnementaux. Donc, il faudrait finalement modifier ces lois et ces accords-là.

Et finalement: mettre en place un comité consultatif multipartite, donc, qui va être composé de représentants de la société civile, du milieu associatif et syndical, du secteur des entreprises et du domaine public afin de superviser les étapes de mise en oeuvre de la stratégie de développement durable. Et, sur ça, je pense qu'on pourrait prendre exemple, par exemple, sur l'Ethical Trading Initiative, en Angleterre, qui fait ça depuis maintenant plus de 10 ans.

Mme Bittar (Priscilla): Et là restera-t-il de conclure. Alors, je vous rappelle les grands objectifs de notre mémoire. La première des préoccupations que l'on a, c'est d'incorporer toute la dimension sociale à l'intérieur de votre stratégie, et ce serait bien important que ça aille dans la pratique, donc dans l'action; ensuite, d'exiger des PAR, des politiques d'achat responsable pour toutes les entreprises qui sont subventionnées par le gouvernement et par tous les organismes et les ministères du gouvernement. Donc, à chacun des niveaux, à chacune des étapes, que les gouvernements, les organismes gouvernementaux aient des PAR, qu'ils en mettent sur pied et qu'ils fassent le suivi et la vérification qui s'ensuit.

Enfin, la plus grande préoccupation également, ce serait d'avoir des rapports annuels de responsabilité civile pour les entreprises. Ce serait bien important qu'à chaque année on puisse suivre, comme il se passe en France ou en Angleterre, la responsabilité civile, les rapports de ces entreprises-là.

Pourquoi est-ce que le gouvernement devrait aller dans ce sens, pour commencer? D'abord, je pense qu'au niveau de la société québécoise, c'est une société qui est éprise de justice sociale. On en fait d'ailleurs rapport dans votre démarche. C'est important, cette justice, cette équité, on répond à des ambitions de la société et des citoyens si jamais on embarque dans ce sens-là.

Je vais faire un petit parallèle ? j'espère qu'il n'est pas trop boiteux ? par rapport à l'équité salariale. Au Québec, nous avons mis sur pied... Ça a pris du temps, ça a été dur, ça a été une démarche, ça n'a pas toujours été facile, et on a encore des séquelles parfois de la démarche d'équité salariale, mais ça a été pour répondre à un besoin et une demande d'équité sociale... d'une injustice... pour la réparer.

On peut faire à peu près la même chose avec les politiques d'achat responsable, les PAR. L'argent des contribuables, croit-on, ne devrait certainement pas servir à exploiter des travailleurs. Que ce soit ici, au Québec, au Canada, en Amérique du Nord ou ailleurs dans le monde, nous devons faire en sorte d'être propres, entre guillemets, et de respecter les travailleurs. C'est une question d'économie générale du travail, si l'on peut dire, de santé de société et du monde entier. Ça, c'est important aussi que ce soit dans toute la chaîne de production.

Marie-Noëlle vous parlait de ces PAR. Ce n'est pas juste au niveau des organismes ou des ministères ou des entreprises que ça devrait être, mais ça devrait être dans toute la chaîne de production, c'est-à-dire que l'on devrait avoir des façons de faire pour vérifier au niveau des sous-traitants et des fournisseurs de chacune des compagnies et des chaînes de production.

L'image du Québec. Que ce soit auprès de sa propre société, que ce soit au Canada et dans le monde, il faut être soucieux de la qualité que l'on offre pour les travailleurs ici. Il faut, je crois, et c'est présent dans votre démarche également, il y a un souci d'éliminer la pauvreté et de faire en sorte que la qualité de vie des citoyens en général soit plus élevée.

n(16 h 30)n

Ce sera très court. Je voudrais vous faire... Au niveau de l'image, je vous rappelle aussi les grandes entreprises qui se sont démarquées, je parle de Nike, de GAP, de IKEA, par exemple, qui ont dû rajuster leur tir, suite à toutes les pertes au niveau du marché qu'ils ont subies, étant donné qu'ils avaient des pratiques de travail qui étaient très déplorables et qui ont été dénoncées. Alors, on a rajusté le tir par rapport à ça, leur image a été renflouée de façon beaucoup... elle a été meilleure.

Enfin, au niveau de la cohérence du discours gouvernemental, ce serait important. Puisque vous parlez que la dimension sociale fait partie du développement durable, il faudrait que, dans l'action, effectivement, bien, ça puisse se ressentir et puis qu'on puisse voir qu'effectivement il y a une cohérence entre le discours et l'action. Merci, c'est terminé.

Le Président (M. Bergman): Merci pour votre présentation. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci beaucoup. Je veux vous saluer, Mme Roy, Mme Bittar, et vous remercier. Votre présence est très importante parce que je suis en train de me dire que, peut-être même avec les gens qu'on a entendus depuis le début, un biais s'est installé parce que c'étaient beaucoup des gens qui venaient nous parler avec une vision de meilleure gestion environnementale, et votre présence à ce moment-ci, assez tôt dans notre consultation, est un rappel à nous tous et avec raison de dire que les notions de développement durable, ce n'est pas synonyme de gestion environnementale, c'est bel et bien trois piliers, y compris donc la dimension sociale, et, moi, je pense que vos propos arrivent juste au bon moment. On termine une semaine de consultation pour nous rappeler cela.

Peut-être aussi un élément de précision. J'apprécie vos commentaires sur le projet de plan d'action que, moi, j'ai demandé qu'on dépose en même temps à des fins de faciliter la discussion ici, autour de la consultation, parce que, juste vous dire en deux mots, je devinais qu'au moment où on allait... au moment où on a discuté de la loi, beaucoup de gens disaient leurs espoirs pour la stratégie, et je devinais qu'au moment où on allait parler de la stratégie les gens... Je pense, par exemple, au député de Marguerite-D'Youville. Il est pressé, je comprends, de dire: Oui, mais il faudrait parler des plans d'action puis qu'est-ce qu'on va retrouver de concret dans les plans d'action. Et c'était pour cela que, moi, j'ai demandé, pour les fins de la discussion, qu'on dépose, vraiment à titre d'exemple, mais à quoi pourrait ressembler le plan d'action du ministère de l'Environnement. Et donc là vous l'avez commenté en disant: Bien, quand on regarde ce projet de plan d'action donné à titre indicatif... Vous nous dites ? et je vais vraiment enregistrer votre commentaire: Bien, on n'y retrouve pas assez la dimension sociale, là, dans l'ensemble des objectifs et des actions que souhaite entreprendre le ministère.

M. Gaudreau, qui m'accompagne, qui est là depuis le tout début de ce processus, qui est le sous-ministre responsable de la démarche de développement durable, me donnait par contre un exemple, lui me disait: Voyez-vous comment c'est formulé autrement en tenant compte des principes de développement durable? C'est, par exemple, l'action 19 de notre plan, là, qu'on propose à fins d'exemple, qui parle au niveau des aires protégées. Elle se formule ainsi dans un plan d'action du ministère, qui peut vraiment changer, mais c'est intégrer les communautés locales, régionales et autochtones dans le processus d'établissement des aires protégées. Je vous dirais que, pour un ministère de l'Environnement, c'est quand même un certain virage que de dire que l'accent et même la cible, c'est sur la participation citoyenne. On vous le donnait à titre d'exemple en disant: Bien, moi, je suis prête à dire que tout n'est pas parfait, là, mais juste pour vous dire qu'il y a quand même une influence des dimensions sociales à travers un plan d'action proposé à titre de projet d'un ministère qui s'appelle quand même le ministère aussi de l'Environnement, hein? C'est vrai que c'est teinté, nous, l'environnement, mais c'est le coeur de notre mission.

J'ai deux questions assez précises pour vous. Dans votre mémoire... parce que je ne veux pas prendre le temps de vous le résumer, j'aimerais bien vous montrer que j'ai bien compris, mais je vous le dis, là, j'ai compris votre message, mais les deux questions, c'est vraiment de façon très, très concrète pour la suite de notre réflexion. Deux choses. La première, dans votre mémoire, en page 10, vous avez cette phrase-là qui, moi, m'a étonnée, puis je veux vraiment vous entendre plus, vous commentez la question des certifications. Nous, on fait référence au fait, là... dans le fond, dans notre document, on fait référence au fait qu'on doit s'inspirer, si je peux dire, de certaines certifications qui existent à travers le monde, et, vous, vous nous allumez une lumière rouge, vous dites carrément: «...il [n'est] pas pertinent de présenter la certification comme une avenue viable pour assurer la production et la consommation responsables.» Et là je veux vous entendre plus, pourquoi vous nous dites... vous lancez un message au gouvernement en disant: Ce n'est pas par la certification, qui est la bonne voie de se donner dans le fond justement un peu des cibles puis des critères pour dire comment je peux reconnaître une consommation responsable ou comment je peux me guider, quels sont les guides. Je vais vous dire bien honnêtement: Même dans ma vie de tous les jours, j'ai tendance à penser que la certification aide, là, quand on voit les certifications que les consommateurs ont commencé à voir d'un point de vue en tout cas environnemental, là. Ça fait que, là, je veux vous entendre un peu plus. Est-ce que ça, c'est pour toujours? Est-ce que c'est parce que les certifications actuelles ne vous satisfont pas, parce qu'elles ne tiennent pas assez en compte la dimension des conditions de travail? En tout cas, je veux vous entendre, parce qu'honnêtement, ça, je pense, ça me surprend, puis je pense qu'en ce moment le consommateur, et donc le gouvernement, dans son acte de consommer aussi, là, a sûrement des réflexes de se fier à des certifications. Et, moi, hier, j'en donnais une comme exemple, il y a une certification développée par des groupes environnementaux sur le type de papier à consommer, et ça va jusqu'à aller voir comment la forêt est exploitée par l'entreprise qui produit les papiers. Et, moi, honnêtement, jusqu'à maintenant, je me disais: Bien, c'est intéressant, cette vague-là de certification qui va au-delà de ce que contient le produit, mais qui va voir comment il a été produit, comment il a été produit. Donc, moi, ça m'a beaucoup étonnée, cette phrase-là, puis je veux vous entendre plus sur pourquoi, pour vous, la certification, ce n'est pas la bonne voie.

Puis mon autre question porte au niveau des politiques d'achat responsable. Vous commentez la loi qui notamment encadre les municipalités et qui dit aux municipalités... en fait, là, pour résumer ça, là, on va le dire dans un langage courant, qui dit: Dans le fond, vous choisissez le plus bas soumissionnaire. Je me souviens, c'était sous l'actuelle députée d'Hochelaga-Maisonneuve qu'il y avait eu des débats là-dessus, que ça a été réaffirmé, qu'il fallait prendre le plus bas soumissionnaire.

Je veux vous entendre un petit peu plus là-dessus parce que je vous dirais que je pense que, pour un grand nombre de citoyens, il a l'impression que, derrière ça, il y a comme même un processus d'intégrité, hein, que c'est une saine compétition pour que les gens se forcent à faire les choses au meilleur prix, et je veux vous entendre. Si ce n'est pas le plus bas soumissionnaire... Et j'ai souvent entendu cet argument-là, je veux juste vous dire qu'il y a vous puis il y a des firmes d'ingénieurs qui ne veulent pas que ce soit le plus bas soumissionnaire. Je dis ça à la blague, là, mais je veux vous entendre sur... Vous, vous voyez ça comment? Si ce n'est pas le principe du plus bas soumissionnaire, quel est le modèle que vous proposez? Je le dis à la blague, mais il y a des firmes d'ingénieurs qui nous en proposent, des modèles, hein, pour quasiment nous obliger à retirer le plus bas, retirer le plus haut, etc. En tout cas, je veux vous entendre un peu plus sur comment ça pourrait fonctionner puis que le citoyen s'y retrouve avec la notion, lui, même si ce n'est pas le plus bas soumissionnaire, qu'il n'y aura pas un jeu de contrôle politique sur l'attribution des contrats, et tout ça, comment on fait pour préserver la notion d'intégrité dans les processus puis de ne pas y aller avec le plus bas soumissionnaire.

Mme Roy (Marie-Noëlle): Merci pour vos questions. Bon, d'une part, au niveau de la certification ? je le savais, que ça allait revenir aujourd'hui ? c'est une position au niveau de la coalition. Ce qu'on dit en fait ? là, il faudrait que je vérifie comment est-ce que ça a été dit exactement, là, parce que c'est sûr que, nous, on a appris hier qu'on venait aujourd'hui, donc tout a été fait assez rapidement: La certification, ce n'est pas une voie viable au niveau de seulement s'en remettre à la certification parce que, si on s'en remet seulement à la certification quand on parle de consommation responsable, le système, on ne pourra le modifier que de manière très petite, là, parce que la certification...

Si on prend, par exemple, l'exemple des produits équitables ? ne prenons pas les produits biologiques parce que les produits biologiques, ça ne veut pas dire qu'il y a des bonnes conditions des travailleurs; prenons les produits équitables où on respecte l'environnement, les conditions des travailleurs ? le commerce équitable ne pourra jamais incorporer tous les secteurs, ça va toujours rester une niche comme on l'appelle, et c'est bien, le commerce équitable, il faut l'encourager. Mais, par exemple, tout le domaine des vêtements, des outils promotionnels qui sont à l'intérieur d'une chaîne de production énorme, jamais on ne pourra avoir un vêtement 100 % certifié responsable au niveau environnement et conditions de travail, jamais. C'est un secteur qui bouge beaucoup trop, les usines de sous-traitance, ça change d'une fois à l'autre, c'est des contrats à court terme, en tout cas c'est pratiquement inimaginable. Donc, nous, ce qu'on dit, c'est: Si on s'en remet seulement, au niveau de la consommation responsable, à dire à un ministère: Achetez ce qui est certifié, eh bien ça veut dire qu'on va toujours seulement encourager une niche et que de toute façon, la niche, comme elle est assez limitée dans son développement, elle ne pourra jamais fournir à tous les organismes, ministères, villes, institutions des produits de cette sorte. Et ce qu'on dit, c'est qu'avec le pouvoir d'achat énorme du gouvernement, des institutions, il faut qu'ils utilisent ce pouvoir-là pour faire changer les pratiques des acteurs dans la chaîne. Et c'est pour ça que, par exemple, un ministère qui se dote d'une politique d'achat responsable, qui oblige ses fournisseurs, par une lettre d'engagement, à respecter cette politique-là et qui oblige le fournisseur à faire respecter cette politique-là par ses sous-traitants, on fait un travail... en fait, on crée des acteurs en société qui travaillent dans le même sens que nous. Donc, le fournisseur, lui, il commence à être conscient de ça, il communique avec ses sous-traitants, il vérifie à ce que les conditions de travail et à ce que l'environnement soient respectés. Et de la manière qu'on... En fait, en faisant de la vérification dans toute la chaîne de production au niveau des fournisseurs et des sous-traitants, on s'assure qu'effectivement les normes qui sont dans la politique sont respectées d'un bout à l'autre de la chaîne.

n(16 h 40)n

Donc, ça veut dire que, petit à petit, on élargit le champ d'action parce que, par exemple, il y a des domaines où... je ne sais pas, le domaine de la plomberie, où on sait qu'il y a énormément d'ateliers de misère. Le domaine de la plomberie, on ne pourra jamais avoir un tuyau équitable. C'est pratiquement impossible à imaginer. Donc, le commerce équitable puis les certifications en ce sens-là, ça va rester dans des secteurs limités, mais qu'est-ce qu'on fait pour tous les autres secteurs? Donc, c'est en ce sens-là que les politiques d'achat responsable et la mise en application des politiques depuis les 15 dernières années, particulièrement dans le Canada anglais, ont démontré que, bien, finalement les institutions, les villes qui se dotent de politiques vont devenir des acteurs et qui vont amener tous les acteurs dans la chaîne à se responsabiliser à cet effet. Donc, c'est pour ça qu'on dit que ce n'est pas la seule voie viable.

D'une même part, au niveau des certifications, là où, nous, parfois ça nous crée un certain malaise, c'est, par exemple, au niveau environnemental. Il y a énormément de certifications environnementales qui se sont développées depuis les dernières années. Et c'est très ambigu parce qu'il n'y a pas de certifications qui... Bien, c'est-à-dire, il y a une panoplie de certifications. Certaines sont développées par des entreprises du secteur privé; d'autres, par des organisations de la société civile, et les gens sont tout à fait mélangés. Pas parce qu'il y a une certification que ça veut dire qu'elle est nécessairement bonne. Et, au niveau des certifications environnementales, tous les spécialistes qui s'intéressent à ces questions vont dire: Premièrement, regardez toujours qui fait la certification. Donc, il y a des certifications environnementales que... Si c'est plusieurs entreprises qui décident de développer une certification, qu'est-ce qui nous prouve que c'est vraiment respecté? Donc, il faut qu'il y ait un certain barème autour des certifications. Donc, certification ne veut pas nécessairement dire respect des normes qui sont énoncées. Donc, c'est pour ça qu'il y a un certain malaise. Mais c'est sûr qu'on ne dit pas: N'achetez pas si ce n'est pas certifié. Mais ce n'est pas tout, c'est vraiment une petite partie.

D'autre part, pour votre autre question au niveau des politiques d'achat responsable et les lois qui nous mettent finalement des bâtons dans les roues des institutions, des villes avec lesquelles on travaille depuis quelques années, c'est vraiment... C'est ça. C'est la politique du plus bas soumissionnaire. Concrètement, là où il y a un problème... Et je donne l'exemple de la ville de Québec qui a adopté une politique... qui a modifié sa politique d'approvisionnement l'année dernière, qui a incorporé des normes minimales à respecter, la ville de Montréal qui a des normes en ce sens-là avec sa politique de développement durable. Lorsque ça se ramasse au niveau des approvisionnements et que, là, on veut modifier les appels d'offres en fonction de ça, donc concrètement ça veut dire quoi? Ça veut dire, dans les appels d'offres, sur les points, qu'on décide de réaménager le pointage et d'accorder, par exemple, 10 % pour des normes environnementales et 10 % pour le respect de normes fondamentales. Donc, on enlève un petit peu de points ailleurs. C'est sûr qu'il va toujours rester majoritairement plus de points au niveau du plus bas soumissionnaire. Donc, concrètement, c'est comme ça que ça peut s'actualiser.

Mais, en ce moment, au niveau des villes, en tout cas particulièrement, c'est très complexe parce qu'ils ne peuvent pas... parce qu'ils sont... à cause de la Loi sur les cités et villes, ils ne peuvent pas incorporer ces critères-là dans les appels d'offres. La commission scolaire de Montréal, qui a une politique d'approvisionnement responsable, a modifié dernièrement justement ses appels d'offres et sa lettre d'engagement pour les fournisseurs et a incorporé 10 % pour l'environnement, 10 % pour le social. Et ils peuvent le faire parce qu'il n'y a pas de loi qui les encadre à ce point-là.

Donc, en ce sens-là, nous, ça nous cause un problème parce qu'on travaille avec des acteurs qui sont prêts à aller en ce sens-là, mais les lois qui les encadrent les empêchent finalement de les développer.

Le Président (M. Bergman): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Oui, très rapidement. Il reste peu de temps.

Le Président (M. Bergman): Vous avez deux minutes pour la question.

Mme Beauchamp: O.K. Mais je sais que vous menez une action, parce que vous avez le soutien financier du Fonds d'action québécois en développement durable, puis vous avez entrepris déjà donc une étude, là, sur ? vous y avez fait allusion dans votre présentation; sur ? les entreprises qui se sont dotées de politiques d'achat responsable.

Très rapidement, vous en avez identifié, si je ne me trompe pas, une soixantaine, à ce que vous avez dit. Pouvez-vous très rapidement me dire, selon vous, c'est quoi, les caractéristiques des organisations qui ont franchi ce pas, au moment où on se parle, puis peut-être un petit peu des conditions de succès? Je ne sais pas si vous avez pu vous pencher là-dessus, mais, maintenant que vous interpellez le gouvernement pour qu'il adopte une telle approche, là, peut-être vous entendre sur quelles semblent avoir été un peu des conditions de succès. Qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui certains ont franchi cette étape-là puis ? c'est ça; puis ? quelles sont les conditions de succès de l'adoption des politiques d'achat responsable?

Mme Roy (Marie-Noëlle): Bien, je dirais que, bon, d'une part, la caractéristique des ces organisations-là, comme je disais, il y en a la moitié qui proviennent du secteur public, la moitié du secteur privé, et la majorité qui proviennent du secteur public, ce sont des institutions d'enseignement, des commissions scolaires, beaucoup du secteur de l'enseignement. D'autre part, du secteur privé, ce sont des entreprises, très peu de PME, ce sont de grosses entreprises.

Peut-être juste un petit mot sur cette caractéristique-là. Au niveau des entreprises, on le comprend, parce que des entreprises, les grosses entreprises, pas des petites PME qui sont souvent moins connues, mais elles ont une identité de marque, donc c'est bon pour le marketing. Concrètement, c'est ça. Au niveau des institutions d'enseignement, bien, on le sait, les jeunes, les étudiants sont très sensibilisés à ces causes-là, et, concrètement, c'est la pression sociale souvent qui va amener ces acteurs-là, la pression sociale et le leadership au niveau des gestionnaires en place dans ces institutions-là. Donc, par exemple, l'Université de Sherbrooke, il y a vraiment... ils ont un leader responsable, à l'Université de Sherbrooke, qui est très visionnaire en ce sens-là, et c'est pour ça qu'ils sont rendus si loin, mais également la population étudiante.

Donc, les conditions de succès, je dirais, c'est ça, des leaders à l'intérieur de l'organisation, une coalition de gens qui tournent autour, soit des étudiants, par exemple, dans le cas d'une institution d'enseignement, mais aussi des employés, c'est vraiment... qui va faire que ça va se développer. Par la suite, au niveau de tout ce qui est la mise en place, le suivi et finalement les résultats concrets, bien, c'est sûr que ça dépend beaucoup des secteurs, et on n'a pas encore toutes les données, la recherche est encore en cours, ce n'est pas final, mais, je dirais, c'est ça, ça dépend des secteurs. Mais on va avoir le rapport qui va sortir d'ici décembre, et il va y avoir plus de détails à ce niveau-là.

Le Président (M. Bergman): Merci, madame. M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames. J'ai une couple d'interrogations. Ici, on a parlé de ministères, on a parlé de grandes entreprises qui ont les moyens de se doter de ce type de politiques là et qui auront bien sûr les moyens de les mettre en place. De l'autre côté, on parle bien sûr de travailleurs aussi et on veut garder une certaine éthique à nos travailleurs, on veut garder un certain niveau de vie aussi, là, je le comprends bien, quand on parle des conditions de travail des travailleurs et des travailleuses qui puissent être vérifiées en tout temps. Ça, ça représente quand même une tarification, ça représente un prix. Les gens qui sont déjà dans la classe moyenne, en bas de la classe moyenne, comment ils vont faire pour payer les produits dits équitables? Et je vous pose une question toute simple. On achète un café bon marché parce qu'on le voit dans les circulaires imprimées les fins de semaine, qu'on devrait bannir pour enlever le papier, on devrait bannir les produits. Et comment on va faire pour acheter du café qui vaut trois fois le prix, mais qui aurait une notion équitable, qu'on sait qu'il est équitable? Comment ces gens-là peuvent faire pour entrer dans la grande chaîne d'achats équitables et répondre à l'ensemble d'un paquet de critères, là?

Mme Roy (Marie-Noëlle): Bon. Bien, je peux répondre à ça. Juste un petit commentaire pour dire que nous... C'est sûr que le travail au niveau de la coalition, comparativement à d'autres groupes comme Équiterre, nous, on ne propose pas d'alternatives en tant que telles pour les individus, nous, on est vraiment plus au niveau d'alternatives organisationnelles, donc la consommation de masse. Quoi qu'il en soit, pour répondre à votre question, je dirais: Bon, d'une part, nous, il y a des recherches qui ont été faites avec les initiatives des municipalités dans le Canada anglais et depuis les dernières années où ont été adoptées des politiques d'achat responsable. Alors que toutes les municipalités croyaient que les prix allaient augmenter, la moyenne démontre que c'est généralement resté similaire. Pour certaines municipalités, les prix ont été augmentés un petit peu et pour d'autres les prix ont diminué. Pour quelle raison? C'est qu'en commençant à regarder tous les maillons de la chaîne dans la chaîne de production, ils se sont rendu compte qu'il y avait certains fournisseurs où les relations n'étaient pas très claires et il y avait certains fournisseurs qui abusaient et qui prenaient une grosse part de profit. Et c'est ça qui a fait que, pour certaines municipalités comme la ville de Vancouver, en ayant des achats responsables, les coûts ont diminué de 14 000 $, bon, dans l'année. Ce n'est pas beaucoup, mais les coûts n'ont pas augmenté parce qu'ils ont adopté une politique d'achat responsable. Donc ça, c'est pour la question des coûts. Donc, ça ne veut pas dire que les coûts vont augmenter, et ça, les organisations environnementales aussi pourraient vous en dire beaucoup, ça ne veut pas nécessairement dire... Et on sait que c'est la question de l'offre ou de la demande: plus il va y avoir d'acteurs qui vont acheter, plus il va y avoir d'offre, plus que les coûts vont diminuer.

n(16 h 50)n

Au niveau individuel, c'est un peu la même chose, et je le sais pour avoir travaillé longtemps dans le milieu du commerce équitable. Il y a des acteurs qui vont commencer à offrir des produits biologiques et équitables et qui vont les rendre parfois trois fois plus cher, parce qu'ils désirent avoir la même marge de profit. Heureusement, il y a des acteurs là-dedans qui vont décider de, bien, peut-être diminuer un peu la part de profit qu'ils se font pour le rendre plus largement disponible. Donc, parfois, on retrouve du café qui est biologique et équitable et qui n'est pas plus cher que du café... Bon, on ne le retrouvera pas à 4 $ comme vous allez le retrouver chez Wal-Mart, on s'entend, là, parce que c'est sûr qu'eux autres, ils ont des pratiques vraiment inacceptables, mais un café à un prix abordable. Donc, c'est une question aussi de démystifier à l'intérieur de ça, et c'est possible de trouver des produits qui respectent l'environnement et la société, qui ne sont pas si dispendieux. Mais ça reste qu'il y a toujours la question d'éducation là-dedans qui est importante, et il faut conscientiser les gens, et on n'a pas le choix de passer à travers ça pour dire: En ce moment, le système actuel dans les prix, on ne considère pas les coûts sociaux et environnementaux, et ça, il faut que tout le monde l'accepte. Les coûts ne sont pas là, on les paie par la suite, on paie pour dépolluer une rivière. À tous les niveaux, on va les payer par la suite. Donc, on doit les internaliser et on doit être conscient que, bien, pour l'individu, parfois ça veut dire de payer un peu plus cher.

Le Président (M. Bergman): M. le député.

M. Roy: Je reviens bien sûr à votre titre: Coalition québécoise contre les ateliers de misère, et je voyais, dans un reportage télé, la semaine dernière, des immigrantes qui travaillaient dans une industrie de Montréal et qui faisaient nos fameux sacs de coton que nous utilisons maintenant pour remplacer les sacs de plastique et bien sûr pour éliminer encore une fois, au niveau de l'environnement, tous ces sacs potentiellement dommageables. Ces personnes-là, bien sûr, c'étaient des immigrants, et ils travaillaient. Donc, c'était une pharmacienne qui travaillait là en attendant bien sûr d'être capable d'avoir son accréditation. Mais, ces sacs-là, on le sait qu'ils se vendent 1 $. Elle avait au moins le coeur de travailler dans une entreprise qui donnait, qui semblait donner du travail... J'ai peut-être vu 30 personnes, à la caméra, qui faisaient des sacs, qui faisaient de la couture. Et est-ce que, ça, vous considérez que c'est des ateliers de misère?

Mme Roy (Marie-Noëlle): Bien là, c'est-à-dire, là, il faudrait que je... Je n'ai pas vu le documentaire dont vous parlez. Un atelier de misère, concrètement, qu'est-ce que c'est? C'est où les conditions de travail minimales ne sont pas respectées. Nous, au niveau de la Coalition québécoise contre les ateliers de misère, on se fie aux conventions de l'Organisation internationale du travail, et, les conventions, vous les avez dans le mémoire, les conventions de base. En fait, tout pays signataire membre de l'OIT doit obligatoirement respecter les quatre premières normes qui font référence... vous les avez, là, je ne les relirai pas, mais qui font référence aux conditions de travail, le droit à se syndiquer, pas de travail d'enfants, etc. Donc, quand on parle d'ateliers de misère, c'est là où les conditions de travail ne sont pas respectées. Si les travailleurs veulent se regrouper pour mettre en place une organisation syndicale, ils vont avoir le droit, etc. Là, je ne sais pas si celle-là, c'était un atelier de misère en soi.

Comme vous avez dû le voir dans le mémoire ? tout à l'heure, monsieur me faisait un commentaire à ce sujet ? nous savons qu'au Québec il y a des ateliers de misère, et ça, on le sait parce qu'on travaille avec des comités de travail. Notamment avec un comité intersyndical Bombardier, on essaie de faire pression pour que l'entreprise se responsabilise, et tous les syndicats de Bombardier nous ont dit connaître par dizaines des sous-traitants de Bombardier ? mais c'est des sous-traitants, ce n'est pas à l'entreprise, mais qui travaille avec des sous-traitants ? où ce sont de réels ateliers de misère, et, nous, ça fait des années qu'on essaie d'avoir des contacts avec ces ateliers-là, mais c'est excessivement difficile. On travaille en lien avec des organisations des communautés culturelles, par exemple les travailleuses chinoises, et tout ça, pour essayer d'avoir accès, parce qu'on sait que souvent, justement, c'est des travailleuses immigrantes, mais c'est excessivement difficile, et souvent ces sous-traitants-là québécois ferment, rouvrent ailleurs justement pour ne pas se faire attraper.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Roy: J'ai une dernière question. Vous traitez d'un autre sujet que, moi, je vis dans mon comté de Montmagny-L'Islet, les travailleurs immigrants. On n'a pas de main-d'oeuvre au Québec en ce qui concerne l'agriculture, il n'y en a pas. Cherchons-en pas, il n'y a pas de relève et il n'y a pas de main-d'oeuvre. On fait venir énormément d'immigrants mexicains, et il y en a beaucoup. Je les ai rencontrés. Ils sont hyperheureux, ils sont conscients que déjà ce qu'ils ont ici, c'est de loin supérieur. Et est-ce que, dans le même ordre d'idées, ces gens-là sont considérés comme des travailleurs dans des ateliers de misère parce qu'ils viennent ici chercher quelque chose qu'ils n'ont pas chez eux? On ne les exploite pas, on les paie largement pour faire le travail qu'ils font.

Mme Bittar (Priscilla): Je vais répondre à cette question-ci, si c'est possible. Je ne connais pas tous les endroits où les travailleurs mexicains principalement, effectivement, viennent travailler au niveau de l'agriculture. Je n'ai pas les mêmes informations que vous à l'effet qu'ils sont payés largement. Je trouve au contraire que les conditions de travail de ces travailleurs agriculteurs sont plutôt modestes. Et, si nous n'avons pas de travailleurs québécois qui prennent la place, ce n'est pas pour rien.

Alors, les conditions de travail de ces agriculteurs sont moindres. Ils ont parfois des conditions qui entourent le travail ? je parle du logement, par exemple ? qui sont abominables. Je crois qu'il y a environ quatre ans il y a eu une dénonciation. C'était presque de l'apartheid qui se produisait dans un milieu québécois, ici, où les Noirs qui travaillaient dans les champs avaient des conditions de travail absolument abominables, tandis que les Québécois, parce qu'il y en avait là, avaient des conditions, à deux pas, exactement correctes et selon les normes que l'on a ici établies au Québec.

Alors, à mon avis, je trouve... En tout cas, l'information que j'en ai, c'est: Non, les conditions de travail ne sont pas bonnes. Il faudrait légiférer à ce niveau-là, au niveau de l'agriculture, parce que c'est inadmissible, à mon sens à moi et au sens des organisations syndicales, bien évidemment, et je crois qu'il va falloir fouiller.

Alors, si effectivement il y a des agriculteurs, des producteurs qui offrent des conditions de travail viables, acceptables, soutenables à ces agriculteurs, tout est beau. Mais, si jamais ça devient proche des conditions d'ateliers de misère, mal payés, des heures insupportables, le temps supplémentaire non payé, les conditions de logement déplorables, c'est évident qu'il faut les dénoncer et qu'il faut mettre fin à ces pratiques-là.

M. Roy: ...d'un agriculteur québécois normal, là.

Mme Bittar (Priscilla): Ça, c'est un... Je ne pourrais pas... Je n'ai pas fait une étude exhaustive et fouillée de la question, je dois vous dire. Mais, si ça arrivait, on devrait agir là-dessus effectivement.

M. Roy: Merci beaucoup.

Le Président (M. Bergman): Il vous reste... M. le député de Bellechasse.

M. Domingue: Bonjour. J'ai vu que vous aviez bien épluché, là, la stratégie gouvernementale en ce qui a trait au développement durable. Je vois que la dimension sociale est importante pour vous. Et j'ai été surpris. Je vais vous amener dans votre mémoire, à la page 9, à la fin du paragraphe, où vous dites que... dans le document, il est inscrit: «Ainsi, le document parle-t-il "d'encourager la [responsabilité] des entreprises".» Et vous souhaitez que le terme apparaisse plutôt d'«obliger». Pensez-vous qu'on est rendu à obliger plutôt que d'inciter?

Mme Roy (Marie-Noëlle): Bien, la question de la responsabilité sociale des entreprises, qui se développe depuis plusieurs dizaines d'années, nous a démontré que les entreprises ? et je le disais un peu tout à l'heure; les entreprises ? qui sont embarquées dans le bain et qui ont décidé de se responsabiliser l'ont fait d'abord et avant tout pour une question de marketing.

La première multinationale qui a embarqué dans le bain, ça a été Gap, et suite au fait qu'il y a plusieurs consommateurs dans le monde qui se sont mis à le boycotter dans les années quatre-vingt. Et Gap est embarquée dans un processus. Et, aujourd'hui, c'est une des multinationales qui est le plus loin en termes de responsabilité sociale des entreprises.

Une petite PME... Et on le sait parce qu'on a essayé de travailler avec des PME au Québec qui sont fournisseurs d'institutions pour essayer de les faire embarquer dans ce bain-là. Un petit fournisseur, son identité n'est pas connue. Il n'embarquera jamais là-dedans. C'est très difficile de lui donner... Il n'a pas son identité de marque, il ne pourra pas faire du marketing avec ça ou très difficilement, comme va le faire une grande compagnie.

Donc, laisser la question de cette décision-là aux entreprises, du volontariat, nous, on trouve que c'est très dangereux. On le voit. Actuellement, il y a certaines entreprises qui se disent vertes. Puis, là, tout à coup, tu creuses l'entreprise puis tu regardes. Bon. Une de ces entreprises au Québec, effectivement, ils ont certaines initiatives vertes. Mais là tu regardes les 15 autres à l'étranger, puis là tu apprends qu'ils produisent dans des conditions abominables ou ils polluent les rivières autour, etc. Mais c'est une entreprise verte, et tout le monde en parle comme une entreprise québécoise responsable.

Donc, c'est très difficile parce qu'ils utilisent cette terminologie-là, ils vont imprimer sur du papier recyclé puis ils vont faire du recyclage, puis là ça va être une entreprise verte et responsable. Donc, il faut que ce soit plus légiféré. Il faut légiférer à un certain niveau. Au niveau des entreprises, nous, on a parlé, entre autres, peut-être d'incitatifs fiscaux plus que de punir, d'encourager ou... Il y aurait en tout cas une réflexion à faire à ce niveau-là et ne pas laisser la seule responsabilité aux entreprises parce que ça peut être trop dangereux, et ils peuvent se servir de ça uniquement pour le marketing.

n(17 heures)n

Mme Bittar (Priscilla): Je vais faire le même parallèle que j'ai fait tantôt avec l'équité salariale, si vous voulez. Ça a été difficile. Il y a eu une période d'éducation populaire qui a été faite, et on pourrait peut-être prendre la même démarche et les mêmes façons de faire. Donc, on va informer la population, on va dénoncer ce qu'on a à dénoncer, une injustice comme l'équité salariale où les femmes, à travail équivalent, étaient moins bien payées, et peu à peu, de façon transitoire ? ça peut aller de façon transitoire ? on a à mettre sur pied une législation et à la faire appliquer. Donc, ça pourrait être le même principe, mais, oui, je crois qu'il va falloir arriver à une législation obligée.

M. Domingue: Une dernière intervention, parce que j'ai appris assez rapidement que, quand on se met à obliger les gens ou qu'on réglemente, on est toujours un peu réfractaire. Quand on incite ou qu'on devient des modèles ? vous parliez tantôt au niveau des ministères, d'encourager les ministères ? il me semble que, par l'encouragement, il y a une prise en charge, une responsabilité, tandis que, quand on impose, on dicte, je me pose toujours la question si c'est la méthode efficace à employer.

Mme Bittar (Priscilla): Pas tout à fait, puis vous avez...

Le Président (M. Bergman): Pour une courte réponse.

Mme Bittar (Priscilla): Excusez-moi. Pardon?

Le Président (M. Bergman): Juste pour une courte réponse.

Mme Bittar (Priscilla): Oui, d'accord. C'est tout à fait louable. J'avais pensé à certaines organisations gouvernementales, que ce soit au niveau municipal ou provincial, que j'ai connues où, par exemple, il y avait des programmes d'incitation à l'octroi de postes de façon positive... de discrimination positive. Alors, c'étaient des politiques qui existaient mais qui n'avaient aucune mise en application, aucune vérification, et donc, en termes de théorie, en termes de philosophie, l'organisme, l'entreprise y adhère, mais, en termes de pratique, ça ne se fait pas. Alors, oui, si on trouve des incitatifs autres que la simple théorie, bien, oui, je serais d'accord avec vous. Mais, jusqu'à maintenant, l'humain étant ce qu'il est puis les entreprises ce qu'ils sont, je crois que peut-être on devrait trouver un moyen mitoyen entre les deux, je ne le sais pas.

Le Président (M. Bergman): M. le député de Vachon.

M. Bouchard: Bonjour. Et merci de votre contribution aux travaux de la commission, c'est fichument intéressant. J'ai abordé avec vous, avant que les travaux ne commencent, là, cette question des ateliers de misère. J'ai été d'abord surpris de voir dans votre texte une référence des ateliers de misère en sol québécois, je me suis dit: Mais diable! ça fait longtemps que je ne suis pas sorti de la maison, là, je m'imaginais que, les ateliers de misère, on faisait toujours référence à des ateliers de misère ailleurs dans le monde, qu'on exploitait de jeunes enfants dans des ateliers, etc., dans certaines sociétés, certains pays. Quelle est l'importance de ce phénomène-là en sol québécois?

Mme Roy (Marie-Noëlle): C'est très difficile. Je vous dirais qu'à peu près une fois aux deux semaines on a un journaliste qui est sur une piste, qui essaie de faire un article là-dessus. Et c'est très difficile, il y en a qui évaluent à autour de 100 000... Tu sais, ça varie, là, selon les données qui nous viennent, et je vous dirais qu'il y a quelques années on était plus près du but qu'on l'est maintenant, comme quoi avec aussi le phénomène... Bien, on l'a vu, le secteur manufacturier qui est tombé, le fait qu'antérieurement, souvent, au Québec, on avait des travailleuses qui travaillaient dans des petites usines, maintenant c'est des travailleuses à domicile, donc, souvent, c'est ça, les ateliers de misère, c'est des travailleuses à domicile qui se retrouvent chez elles dans des conditions où elles doivent rendre... Elles ne sont pas payées de l'heure, elles sont payées selon la production. C'est très difficile d'avoir accès à ces femmes-là. Antérieurement, parce qu'on était réseauté avec des organisations, justement des travailleuses chinoises, et tout ça, on pouvait avoir un certain contact, mais, même aujourd'hui, ces organisations-là disent qu'elles n'ont pas plus contact avec ces femmes-là qui sont souvent des immigrantes, parfois des immigrantes illégales, et donc elles ont peur, elles ont peur de perdre leur emploi, elles ont peur de se faire chasser. Et donc, aujourd'hui, je vous dirais, on n'a presque plus aucun contact. On essaie, là, on essaie avec notre réseau, mais très difficile. Ça fait qu'on ne sait pas le chiffre exact.

M. Bouchard: Est-ce que l'action de votre coalition porte en priorité sur le territoire ou sur le sol québécois ou vous êtes davantage impliqués ou préoccupés ailleurs dans le monde?

Mme Roy (Marie-Noëlle): Bien, je vous dirais qu'on travaille au Québec avec les organisations québécoises. Ça, c'est vraiment ce qu'on fait, on fait de l'accompagnement, on veut vraiment aider tous les acteurs de la société à mettre en place des politiques d'achat responsable. On commence dans nos propres organisations puis on le fait avec tous les acteurs, mais c'est sûr que, comme on l'a exprimé plusieurs fois, c'est dans toute la chaîne de production. Donc, c'est sûr que ça implique à la fois au Québec et à la fois à l'international. Donc, des fois, un acteur, une entreprise, par exemple, va avoir deux, trois fournisseurs québécois. L'exemple de Wal-Mart est le meilleur, hein, fait et produit au Québec, mais Wal-Mart travaille avec des fournisseurs qui... a des sous-traitants partout dans le monde. Donc, en fait, les produits sont faits ailleurs. Donc, c'est comme ça souvent que ça se passe, donc on n'a pas le choix de travailler avec l'étranger aussi.

Et en fait, de la même manière, on travaille dans un réseau international de coalitions du genre où on est rapidement mis au courant si, dans une usine X, il y a des mauvaises conditions de travail ou les travailleurs ont essayé de se syndiquer, et il y a une grosse répression. Et là, souvent, on va commencer à mettre en place des actions urgentes pour essayer de faire pression. Donc, souvent, de la manière que ça fonctionne, c'est qu'on fait pression auprès de l'acheteur final.

Donc, par exemple, Nike a un sous-traitant en Chine où il y a une grosse répression des travailleurs. Bien là, toute la coalition au niveau international, on apprend ça, on fait une pression sur Nike, et Nike va faire une pression sur le sous-traitant en disant: Il faut que tu respectes les droits des travailleurs, sinon, moi, je ne t'achète plus. Et c'est comme ça que finalement le respect dans toute la chaîne de production s'est fait depuis les 15 dernières années pour les entreprises qui ont décidé de s'embarquer dans la responsabilité sociale des entreprises.

Mme Bittar (Priscilla): Ce qui est intéressant au Québec, pour compléter, M. Bouchard, c'est qu'actuellement les entreprises font appel à la coalition pour que, un, on puisse les former sur la responsabilité sociale et, de deux, qu'on puisse certifier. Donc, on parlait de certification tantôt, on n'en est pas là à la coalition, loin de là, mais il y a une volonté de la part des entreprises de devenir de plus en plus responsables au niveau social et environnemental. Et, dans ce sens-là, c'est très intéressant, je crois qu'il y a un terreau fertile à l'instauration de cette responsabilité-là. Alors, la coalition, actuellement elle travaille avec les entreprises qui font appel à elle. Ce n'est pas qu'on va les chercher nécessairement toujours, elles font appel à la coalition pour la formation. Et l'instauration d'une certification, c'est possible, mais on n'en est pas là du tout.

M. Bouchard: Tout à l'heure, vous faisiez référence au fait que les entreprises avaient un intérêt mercantile à s'afficher comme adoptant un PAR chez elles. Est-ce que vous voyez une évolution dans les motivations? Parce que vous faites référence au fait que désormais les organisations vous approchent, est-ce qu'elles le font toujours d'un point de vue strictement mercantile ou est-ce qu'il y a une culture ambiante de style corporatif qui fait que les corporations deviennent de plus en plus sensibles à cela sans que, pour autant, il y ait une motivation d'ordre commercial?

Mme Roy (Marie-Noëlle): Bien, je vous dirais que, pour les données qu'on a actuellement sur les organisations, les entreprises québécoises qu'on a sondées avec notre recherche, on a deux critères qui ressortent, les raisons qui les ont amenées à mettre en place des politiques. De un, c'est la question de justement l'image, donc l'image vis-à-vis des consommateurs. Donc, c'est toute la question finalement du marketing. Et, de l'autre part, c'est la pression sociale donc de la part des consommateurs, des groupes de pression. Donc, ce sont les deux raisons qui ressortent principalement. Ce qui est clair, c'est que la responsabilité sociale, la consommation responsable, on le sait, c'est de vogue tout comme le développement durable, et donc, vraiment, il y a de plus en plus d'entreprises qui embarquent dans ce bain-là. C'est sûr qu'aussi, au niveau international, la responsabilité sociale des entreprises, ça fait à peine 15 ans que ça a commencé, donc... Mais là on est vraiment dans un processus où ça s'accélère, il y a de plus en plus d'acteurs qui embarquent dans le bain, là, et on est bien contents de ça.

M. Bouchard: Dans votre quatrième recommandation, vous dites qu'il faudrait «modifier le principe d'écoconditionnalité dans les programmes d'aide publique pour que celle-ci s'applique au respect tant de critères sociaux qu'environnementaux». Est-ce que vous faites référence à des politiques existantes dont j'ignorerais l'application maintenant ou est-ce que vous faites référence au principe même?

Mme Roy (Marie-Noëlle): Bien, en fait, au principe même. C'est parce qu'en fait c'est que, dans la stratégie, on parle de principes d'écoconditionnalité et de responsabilité sociale dans les programmes d'aide publique, alors que, dans l'exemple de plan d'action qui est donné pour le ministère de Développement durable, on a biffé finalement la responsabilité sociale et on a gardé seulement l'écoconditionnalité. Alors, en fait, moi, j'ai de la difficulté d'une part, à chaque fois qu'on parle de conditionnalité, de responsabilité, qu'on met toujours le terme «éco» avant quand on parle de développement durable, parce que la responsabilité, ce n'est pas juste écologique. Ce point-là, en fait c'est spécifiquement pour dire: La dimension sociale, elle a été mise de côté, et on ne comprend pas pourquoi.

M. Bouchard: Oui. Oui. Enfin, je ne sais pas si on fait... Je ne sais pas jusqu'à quel point c'est une dimension sémantique. Moi, j'ai été très longuement impliqué dans ce qu'on appelle l'écologie sociale et, quand je vois «éco», je vois «sociale» en même temps, et toute la dimension sociale des préoccupations de type écologique ou environnemental m'apparaît liée au terme «écoconditionnalité». Je ne voyais pas qu'il y avait une exclusion à partir de ce thème-là, mais, bon, puisque vous l'affirmez, sans doute qu'il y a une restriction de définition que vous y voyez, hein?

n(17 h 10)n

Mme Roy (Marie-Noëlle): Oui. Bien, c'est surtout spécifiquement que, lorsqu'on regarde les gestes concrets qui sont proposés dans le plan d'action, bien là on regarde les gestes, puis ce sont des gestes purement environnementaux, là. Donc, moi, je n'ai retrouvé là aucun geste en relation avec la dimension sociale.

Le Président (M. Bergman): M. le député d'Ungava.

M. Ferland: Merci, M. le Président. Félicitations pour votre mémoire, très intéressant. Je constate aussi que l'accent est mis surtout sur les institutions et les organisations. Parce qu'on a eu des points de soulevés tantôt au niveau de l'individu, au niveau de la pédagogie, au niveau de la formation, au niveau des... mais vous vous attardez beaucoup plus... Moi, je vais vous amener sur la page 12, au niveau des... Vous demandez dans vos recommandations, point 5, de «modifier les lois québécoises qui complexifient la mise en place de politiques d'achat responsable et de développement durable». Ça, c'est pour permettre aux municipalités... Parce que vous avez donné comme exemple tantôt que les grands centres urbains, les grandes villes comme Montréal ou peut-être Québec, eux peuvent le faire, mais la Loi sur les cités et villes ne permet pas à l'ensemble des municipalités au Québec d'avoir une politique d'achat responsable. C'est-u ça que vous avez dit ou... Non?

Mme Roy (Marie-Noëlle): Non. En fait, c'est que ces villes-là ? l'exemple de Québec et de Montréal ? ont modifié leur politique d'approvisionnement où ils ont incorporé des critères. Mais on pourrait dire: C'est comme si on adopte une loi ou une stratégie puis qu'on n'a pas de plan d'action. Si on ne la met pas en application, ça ne veut rien dire. Donc, en ce moment, les villes étaient en train, chacune de son côté, d'essayer de mettre en application ce qu'il y avait dans la politique d'approvisionnement. Donc, qu'est-ce que ça veut dire? La première étape, c'est de mettre en concordance les appels d'offres. Et c'est là qu'arrivait le problème, et c'est à partir de ce moment-là, quand ils essayaient... Pour eux, c'était impossible d'incorporer dans les appels d'offres un pourcentage de points pour critères environnementaux ou sociaux à cause de la Loi sur les cités et villes.

M. Ferland: ...ce que je veux savoir: Est-ce que l'Union des municipalités au Québec ou les villes comme Montréal, Québec ou... ont demandé au ministère des modifications pour leur permettre, dans leurs appels d'offres... Parce qu'il y a des coûts aussi, là. Des fois, on se cache derrière une loi, ça fait notre affaire quand on n'a pas le droit.

Ou, vous, vous le demandez, mais est-ce qu'eux... Puis je prends l'ensemble, il y a les grandes villes, mais il y a des très petites municipalités au Québec qui, pour eux, ajouter des... peut-être qu'ils seraient d'accord, mais il y a des coûts supplémentaires. Est-ce qu'eux l'ont fait?

Mme Roy (Marie-Noëlle): Non. Ils l'ont...

M. Ferland: Ils le demandent, ou vous le demandez en leur nom, ou vous le demandez à...

Mme Roy (Marie-Noëlle): Bien, c'est-à-dire c'est très nouveau, hein, parce que la ville de Québec et la ville de Montréal, ce sont des politiques qu'ils ont adoptées en 2006, donc... Et il faut savoir qu'une ville qui veut adopter une politique, souvent c'est un processus qui est très long.

M. Ferland: Oui. Je connais, oui.

Mme Roy (Marie-Noëlle): En fait, il y a toujours un processus en plusieurs étapes. Ça fait qu'on n'est pas rendu là. On est en communication constante avec les villes, probablement que ça va être une demande qu'on va faire, là. Moi, j'ai essayé d'avoir une rencontre avec le regroupement des municipalités. On va voir de quelle manière on s'y prend, mais c'est sûr qu'à moyen terme c'est une demande qu'on aurait à faire probablement avec les villes, parce qu'elles le voient comme un problème, elles aussi, là.

Le Président (M. Bergman): Il vous reste une minute pour question et réponse.

M. Ferland: Une minute? Ah, juste rapidement parce que c'est... Comme mon collègue Camille, j'ai sursauté en apprenant qu'au Québec, ici, quand on parlait qu'il y avait des entreprises ou des employeurs, là, considérés comme ateliers de misère, vous avez cité tantôt Bombardier ou les grands... mais pas ici, au Québec, parce qu'ils... Je veux juste un éclaircissement là-dessus où on... Est-ce que c'est des sous-traitants qui viennent de l'extérieur du Québec ou... C'est ça que vous vouliez dire?

Mme Bittar (Priscilla): Non, pas nécessairement. Ça peut être des sous-traitants qui ont leur bureau à l'extérieur du Québec effectivement, mais il y en a au Québec aussi. L'information est difficile à aller chercher. Dès qu'on a une petite parcelle d'information, tous les chemins commencent à se bloquer. Mais, oui, au Québec aussi. Et là je ne veux pas parler seulement de Bombardier, ou bien principalement de Bombardier, ou de Bombardier même, ce n'est pas le cas.

Une voix: ...

Mme Bittar (Priscilla): Oui, oui.

M. Ferland: ...d'autres aussi, mais...

Mme Bittar (Priscilla): C'est des grosses compagnies qui ont des sous-traitants, que ce soit Bombardier ou d'autres, et sur le territoire du Québec avec des... Et ce n'est pas juste des employés femmes immigrantes qui travaillent à la maison, ce sont des bâtisses bien établies avec des vrais moyens de production et qui sont au Québec, et qui ont des conditions qui sont loin d'être avantageuses, qui se rapprochent de beaucoup à celles qui sont dénoncées dans les ateliers de misère.

M. Ferland:J.E. ne peut pas percer ce mystère-là...

Mme Bittar (Priscilla): Je ne le sais pas, je n'ai pas fait appel à J.E.

M. Ferland: Bien, je suis surpris.

Le Président (M. Bergman): Malheureusement, le temps s'est écoulé. Alors, Mme Roy, Mme Bittar, merci pour votre contribution.

Document déposé

Avant d'ajourner nos travaux, j'avise les membres de cette commission que l'article 10 de la Loi concernant les partenariats en matière d'infrastructures de transport prévoit que toute entente de partenariat conclue par le ministère des Transports est déposée à cette commission. Je vous informe que j'ai reçu, à titre de président de la commission, copie de l'entente avec le ministère concernant l'autoroute 25. Je dépose donc ce document. Étant donné que ce document comporte un grand nombre de pages, je présume qu'à moins d'avis contraire de votre part vous dispensez le secrétaire de vous faire parvenir ces copies. Ces documents seront toutefois placés sur le site Greffier ou vous pourrez consulter ces documents au bureau du secrétaire.

Chers collègues, j'ajourne les travaux au mardi le 23 octobre, après les affaires courantes. Merci. Bonne fin de semaine.

(Fin de la séance à 17 h 16)


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