To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Committee on Transportation and the Environment

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Committee on Transportation and the Environment

Version finale

36th Legislature, 1st Session
(March 2, 1999 au March 9, 2001)

Wednesday, June 9, 1999 - Vol. 36 N° 12

Étude détaillée du projet de loi n° 60 - Loi sur l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats


(Vingt heures huit minutes)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare ouverte la séance de la commission des transports et de l'environnement. Le mandat de la commission est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 60, Loi sur l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill.

Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bordeleau (Acadie) est remplacé par Mme Jérome-Forget (Marguerite-Bourgeoys); Mme Delisle (Jean-Talon) est remplacée par M. Kelley (Jacques-Cartier); et M. Middlemiss (Pontiac) est remplacé par M. Whissell (Argenteuil).


Remarques préliminaires

Le Président (M. Lachance): Merci. Avant de débuter l'étude du projet de loi article par article, j'invite M. le ministre à bien vouloir nous faire part de ses remarques préliminaires.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. MM. et Mme les membres de la commission, mes remarques sont très brèves. C'est un projet de loi qui envisage un projet considérable; mais, si on regarde le texte de loi, il est composé de cinq articles, donc, on peut cerner très rapidement ce dont il s'agit.

Alors, c'est un projet de loi qui vise à prévoir des modalités pour l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill. La rivière Churchill est principalement dans le territoire de Terre-Neuve. Il y a déjà des installations hydroélectriques qui ont été construites il y a plusieurs années. Il y a des ententes qui existent entre Québec et Terre-Neuve, et on envisage de faire un nouveau développement hydroélectrique.

Le développement hydroélectrique se ferait sur le territoire de Terre-Neuve. Mais il y aurait des effets sur le territoire québécois, puisqu'il y aurait détournement de deux rivières, la rivière Saint-Jean et la rivière Romaine, une partie de celle-ci vers la rivière Churchill. Et il y aurait création d'un réservoir d'eau de 1 000 km². Comme on peut voir, c'est un territoire assez considérable.

(20 h 10)

Il y aura, par la suite, aussi, construction de lignes hydroélectriques pour amener l'hydroélectricité produite dans cette nouvelle installation vers et à travers le Québec. Donc, ça implique des effets sur le territoire du Québec.

Comme il n'existe pas actuellement de loi qui autorise le Québec à faire des ententes avec soit une autre province, soit avec le gouvernement fédéral, ou les deux en même temps, comme il n'y en a pas, non plus, qui autorise à fonctionner en tenant compte particulièrement de communautés innu ou autochtones ou autres dans le milieu, il faut prévoir des dispositions qui vont autoriser la négociation d'ententes qui vont cerner de quelle façon les choses peuvent se faire en même temps pour éviter qu'on ne soit, par exemple, à faire trois types d'évaluation environnementale, toutes fragmentées les unes par rapport aux autres, et sans que chacune des parties qui les fasse ne puisse voir ce qui se passe ailleurs.

Donc, le projet vise à permettre justement au Québec de s'entendre avec Terre-Neuve et le fédéral, de même qu'avec les communautés autochtones, si elles le désirent, sur une façon de faire, cette façon devant cependant se rapprocher, le maximum possible, de notre procédure, dont nous sommes très fiers, d'évaluation environnementale dans ce type de projet. C'est-à-dire que le promoteur dépose son projet; deuxièmement, qu'il y a rédaction par le ministère de l'Environnement de ce qu'on appelle une directive sur comment le promoteur devra travailler pour répondre aux questions qui se posent à l'égard du projet. Par la suite, il y a, quand le tout est satisfaisant, des auditions faites par le Bureau d'audiences publiques – le BAPE – et, finalement, recommandation au gouvernement d'une décision par le Bureau d'audiences publiques. Après ça, le gouvernement prend une décision favorable, défavorable, partiellement favorable, avec modifications, selon les circonstances.

Donc, on va suivre ce grand cadre-là, mais il faut se donner le moyen de faire une entente appropriée pour qu'on puisse faire le travail en harmonie, le plus rapidement possible, mais en respectant les critères, les manières de faire que nous avons. Et le gouvernement du Québec sera ultimement capable de prendre une décision en ce qui concerne ce projet-là sur son territoire.

Alors, voilà, M. le Président, très schématiquement, de quoi il retourne. Il s'agit pour nous de voir si on est en mesure de se donner ce moyen qui est le prélude, le début, le commencement d'une démarche avec le gouvernement fédéral, le gouvernement de Terre-Neuve et les communautés innu sur la Côte-Nord.

Voilà!

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. M. le député d'Orford et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'environnement, pour vos remarques préliminaires.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Très bien, M. le Président. D'abord, saluer le ministre. Tel qu'on l'a dit au moment du dépôt du projet de loi, on a indiqué au ministre que l'opposition serait en faveur du projet de loi, et ce n'est pas parce qu'on est en faveur du projet de loi qu'on n'a pas un bon nombre de questions à poser et qu'on ne fera pas notre ouvrage comme opposition officielle.

On a ici un député qui va, entre autres, regarder tout l'aspect des communautés autochtones et inuit. Il me semble que c'est un des aspects... Et, depuis que nous avons regardé le dossier, plein d'informations nous sont parvenues. Les gens, soudainement, réalisent que ce dossier-là est à l'Assemblée nationale. Alors, nous allons regarder cet aspect-là.

Je veux rappeler au ministre que le projet de loi, il est pour unifier effectivement une démarche environnementale entre Terre-Neuve, le Canada et la province de Québec; nous en sommes et nous nous en réjouissons. D'autre part, il faut bien comprendre que, si nous passons à travers ce projet de loi là ici, ce soir, c'est parce qu'en 1998 la province n'a pas cru bon de faire comme les autres provinces canadiennes, de signer une entente où ces choses-là auraient été prévues. Il faut bien comprendre que nous ne sommes pas la première province et nous ne sommes certainement pas dans la première situation environnementale où nous avons à négocier avec une autre province.

En 1998 – le 29 janvier exactement – il y a eu ce qu'on a appelé l'accord sur l'harmonisation environnementale qui prévenait ce genre de situation et qui facilitait – et c'est la beauté d'un fédéralisme – finalement, que les provinces, quand elles avaient des problèmes, ou anticipaient des problèmes, ou voulaient faire des audiences en environnement, pouvaient très rapidement s'entendre.

Bien sûr, société distincte oblige, le PQ, aimant bien faire les petites guéguerres avec Ottawa, n'a pas signé cette entente-là et nous sommes obligés, ce soir, de nous faire un beau petit projet de loi pour le cas de la rivière Churchill. Et, s'il y en avait un autre avec le Nouveau-Brunswick, petite guéguerre aidant, on serait obligé de se faire un autre petit projet de loi avec le Nouveau-Brunswick. Et, s'il y en a un autre avec l'Ontario, probablement qu'on sera obligé de se faire un troisième projet de loi pour faire une étude conjointe avec une autre province alors que cette entente nous aurait évité cette démarche qui finalement revient et n'a pas vraiment sa raison d'être si nous avions... étant donné qu'on est dans un pays, nous aurions pu et dû, je pense, faire ce que les autres provinces canadiennes ont fait.

D'autre part, le ministre – et j'y reviendrai tantôt – nous dit dans ses écrits, et Hydro-Québec en tête, qu'eux... je lis le journal Les Affaires du mois de décembre, où on dit: «Si tout se passe comme prévu, la construction de deux centrales hydroélectriques débutera dès 2002.»

M. le Président, pour les groupes d'environnement, 2002, c'est très rapidement. C'est dans deux ans. On parle ici d'un territoire immense; on parle d'un bassin qui aura 1 000 km². Mais là, les chiffres que je donne, c'était avant la lecture du premier projet de loi il y a trois jours.

Depuis, au même moment où le ministre déposait ça – je ne sais pas s'il était au courant ou il nous l'a caché – au même moment où il déposait, il y a deux jours, ce projet de loi là, sur les postes de télévision du Québec, nous apprenions que tout était changé dans la rivière Churchill. Ou bien le ministre ne nous l'a pas indiqué à ce moment-là, voulant nous le cacher, ou bien il ne le savait pas. Il pourra peut-être nous dire tantôt s'il le savait.

Moi, je me suis senti un peu frustré ce soir-là et je pense que les citoyens du Québec qui nous écoutaient, à l'Assemblée nationale, parler de deux rivières, parler de 1 000 km²... Au même moment, Radio-Canada nous annonçait que c'était une rivière et que c'était finalement 700 km², que c'était une turbine de moins, que ce n'était plus 13 000 000 000 $, que c'était 10 000 000 000 $, et le ministre, lui, se faisait aller ici en nous déposant un projet de loi. Ou bien il n'est pas au courant – sérieux problème s'il n'est pas au courant – ou bien il est au courant puis il ne nous l'a pas dit, et là c'est un autre problème.

Enfin, ceci dit, on ne partira pas la chicane ici, à soir. On veut passer à travers le projet de loi. Mais j'aimerais ça qu'il réponde à cette question-là, si ce n'était que pour ma culture personnelle.

Alors, l'an 2002, c'est très proche; c'est très proche pour un projet comme celui-là et, bien sûr, si on veut stampeder tout le monde comme on a fait dans le comté de Johnson, ça ne sera pas long, deux ans. Ils l'ont fait dans un mois et demi dans le comté de Johnson. On voit les répercussions de tout ça, et il n'y a personne de satisfait. Même le député de Johnson, j'ai cru comprendre, n'était pas très satisfait.

Alors, on peut peut-être éviter ça puis peut-être se donner le temps et pas se mettre des objectifs, là... Puis Hydro-Québec, dans leur communiqué de presse d'aujourd'hui: Il faut absolument que les premiers kilowatts sortent de là en l'an 2008, sinon on va perdre 500 000 000 $ par année, là. Aïe! Aïe! Aïe!

Moi, je me souviens, là, quand mes filles, je les éduquais puis elles m'arrivaient avec des affaires comme ça, les délais incroyables, j'avais une tendance à dire: On recommence, là. Alors, j'invite le ministre à ne pas se laisser trop poussailler dans le dos, et prenons le temps que ça prend pour bien faire les ouvrages. Dans le cas de la Baie James, M. Bourassa a pris le temps que ça a pris, et le net-net de tout ça, c'est qu'on ne requestionne pas ces ententes-là; la communauté autochtone est heureuse. Et n'allons pas trop vite. D'ailleurs, je vais revenir tantôt, il y a des gens qui se proposent de questionner.

L'autre point – je l'ai souligné, je veux revenir avec ça – c'est un projet environnemental. On a dépensé 1 100 000 $ pour envoyer le premier ministre là quelques jours avant une élection, pour aller, ce qu'on appelle, en termes de métier, «faire du film pour l'élection». Luc Lavoie en tête, ex-chef de cabinet du premier ministre, s'est amené à la rivière Churchill, les satellites; il n'y avait rien de trop beau, ça a coûté 1 100 000 $, cette histoire-là, et organisé par l'ancien chef de cabinet, par une firme de communications.

Moi, je demande au ministre ce soir, là... Et je rencontrerai les CRE dimanche, je vais être le conférencier invité au Regroupement des conseils régionaux d'environnement du Québec. J'aimerais ça, pouvoir leur dire: Écoutez, là, dans le cas de la rivière Churchill, on ne va pas renvoyer le premier ministre à un coût de 1 100 000 $ là-bas. Vous, les groupes environnementaux, on va prendre le 1 100 000 $ puis on va vous permettre de vous bâtir des documents, on va vous permettre de vous bâtir des photographies, des cartes puis de pouvoir venir à ces audiences-là et de pouvoir bien défendre le point de vue environnemental.

Si on a été capable de défendre 1 100 000 $, au Conseil des ministres, pour faire de la publicité... C'est une conférence de presse qui n'aura jamais lieu. On se comprend bien, là, les gens qui nous écoutent? La conférence de presse n'a jamais eu lieu. Elle a été bloquée, elle n'a jamais eu lieu. Le 1 100 000 $, ça a été de la pure perte; tu ne peux pas perdre de l'argent plus vite et d'une façon plus épouvantable que ça.

Moi, je dis au ministre: Si on a été capable, au Conseil des ministres, de faire approuver 1 100 000 $ pour aider M. Luc Lavoie, la compagnie National puis ce qu'on était après faire, là, toute la balloune électorale, est-ce qu'on pourrait faire la même chose pour les groupes d'environnement? Il y a des provinces, il y a des pays qui le font, c'est-à-dire que, quand les groupes d'environnement veulent aller devant des audiences publiques, on les aide.

(20 h 20)

Dans le comté de Johnson, l'euphorie, c'est que non seulement on n'a pas aidé les groupes d'environnement, pire que ça, on les a amenés en cour. Il a fallu que les groupes d'environnement s'en aillent en cour, et l'euphorie, en bout de ligne, c'est que non seulement on n'a pas payé les groupes d'environnement, non seulement ils ont payé leurs frais d'avocat, mais la juge, dans sa sagesse, elle a dit: Vous allez maintenant payer les frais d'avocat, messieurs du gouvernement, parce que ça n'a pas de bon sens, ce que vous avez fait.

Ce que je dis au ministre, là: Essayons donc de regarder ça froidement maintenant. Regardons ça. On ne veut pas aller en cour, on va essayer de s'entendre. Mais une des façons de s'entendre, c'est peut-être d'aider les groupes d'environnement, l'UQCN, les gens qui parlent des petits barrages, enfin, tous ces groupes qui sont d'une façon... et bien sûr, les communautés autochtones, là-bas, et qu'on les aide financièrement à venir défendre leur point de vue. Là-bas, les territoires sont immenses. Les communications sont dispendieuses. Les experts vont être dispendieux à amener là, et je pense qu'on a une responsabilité. Alors, ça, je le demande au ministre.

M. le ministre, quand je vous dis: 2002, ça me semble bien court, là – mon confrère, tantôt, va en parler, des communautés autochtones – mais je veux juste vous lire les derniers communiqués que j'ai ici qui sont datés du 1er mars 1999. Radio-Canada, les Nouvelles: «Les Innu du Québec et du Labrador menacent de tout faire pour court-circuiter le projet. Ils reprochent aux gouvernements du Québec et de Terre-Neuve de poursuivre les négociations sans les consulter. Les leaders inuit préviennent les premiers ministres Bouchard et Tobin que le projet de 12 000 000 000 $ ne se réalisera pas sans leur consentement.»

Radio-Canada, les Nouvelles: «Les Inuit du Labrador et du Québec avaient bloqué la conférence de presse et – on continue – ils ne sont toujours pas invités à la table des négociations», etc., etc.

Ça part bien mal – ça part bien mal – et on sait tous maintenant que les communautés internationales vont nous regarder aller là-dedans. C'est l'ex-ministre de l'Environnement, le député de Brome, qui racontait comment il avait été invité, dans l'histoire de la Baie James, à aller à l'Université Harvard défendre la position du Québec. Il nous expliquait récemment comment, à l'Université Harvard, les Américains en savaient plus sur le projet de la Baie James qu'on en savait nous-mêmes. La communauté internationale va être friande de suivre comment on va se comporter avec ces gens-là, comment on va les écouter.

Bien sûr qu'on ne fera probablement pas 100 % de leurs demandes, mais je pense qu'on a une responsabilité de les écouter et j'implore le ministre, non seulement à écouter les groupes environnementaux – c'est déjà parti d'ailleurs, on commence à recevoir des invitations, etc., Rivière-aux-Saumons, bon – je vois qu'il y a déjà des changements, encore une fois, entre le premier discours du ministre et probablement celui qu'il va nous donner comme réponse tantôt.

Mais ce n'est pas un petit projet. Les gens qui nous écoutent, à soir, ce n'est pas le barrage sur la rivière du Nord qu'on est après faire, là, à Saint-Donat. Je veux dire, c'est immense, hein. On parle de deux rivières, on parle d'un lac artificiel qu'on va créer de toutes pièces. C'est un 1 000 km². Il y a un paquet de rivières qui vont tomber là-dedans. On parle de deux rivières, mais il y a aussi plein de petits affluents qui vont remplir ce réservoir-là. C'est immense, là.

Il y a d'autres questions aussi qu'on devra regarder. Le regroupement des petites centrales, il n'y a personne à Hydro-Québec qui a dit le contraire, pas plus que le ministre de l'Énergie, pas plus que le ministre de l'Environnement nous disent, eux, que les kilowattheures qui vont être produits là-bas, à Churchill, vont être de 0,056 $ du kWh, la vente aux États-Unis sera de 0,035 $ du kWh, donc, une perte par kilowatt de 0,021 $. Et leur présomption, c'est qu'on n'a pas pris dans le calcul les coûts de transport parce qu'on sait qu'on va se servir des mêmes lignes pour la partie habitée du territoire; la partie non habitée, on devra améliorer les lignes. Et la prétention des regroupements des petites centrales, c'est que le coût du transport n'a pas été pris en considération. On va devoir regarder cet aspect-là; c'est un point très important.

Je l'ai dit tantôt, tout l'aspect international de ce projet-là, parce que c'est pour l'exportation – purement pour l'exportation – nous allons être regardés à la loupe. Et, si on essaie d'en passer une petite vite aux environnementalistes, aux communautés inuit, autochtones, on joue contre notre sort, on joue contre nous autres et on va se ramasser, encore une fois, sur des tribunaux internationaux et on n'a pas fini. Si on ne veut pas revoir les communautés autochtones se promener en canot dans la ville de New York, comme on a vu déjà, on est mieux de les inviter à la table, on est mieux de les écouter, on est mieux de les comprendre. Et je pense que mon confrère, tantôt, va faire ça pas mal mieux que moi.

Le dernier point que je veux défendre avec le ministre, et on y reviendra pendant les questions, ça sera notre première question au moment où on va le faire article par article: Comment ce BAPE, entre les deux provinces, le pays, avec les deux compagnies d'électricité, quelle est son intention? Comment ça va être créé, tout ça? Là, nous, on crée la loi, mais comment il est créé? Est-ce que c'est le BAPE du Québec qui va s'imposer là? Est-ce que c'est un nouveau BAPE qu'on crée de toutes pièces, les deux provinces? Est-ce que c'est Hydro-Québec qui va être ce tribunal? Comment on incorpore là-dedans les différentes communautés, les groupes d'environnement? Où vont se tenir les audiences? Etc. Parce que, là, c'est bien beau de dire: On passe une loi, mais on voudrait bien savoir qu'est-ce qui va découler de cette loi-là.

Pour ce qui est des périmètres dans le temps, Hydro nous a dit: L'an 2002, la construction. Mais j'aimerais entendre le ministre aussi, est-ce que c'est ça, son agenda, ou est-ce que c'est plus tard? Lui, comme ministre de l'Environnement, est-ce qu'il veut prendre le temps d'aller au fond des choses ou s'il veut se laisser stampeder par Hydro-Québec?

Alors, moi, je vais arrêter ici. Je pense que j'ai des confrères qui veulent aussi faire quelques remarques préliminaires.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député d'Orford. M. le député de Jacques-Cartier, toujours au niveau des remarques préliminaires.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. À mon tour, je veux peut-être continuer dans la veine de notre débat d'hier soir, exprimer notre préoccupation quant au manque de consultation des nations innu.

Depuis hier soir, avec notre fax, moi, j'ai essayé de contacter le plus grand nombre de communautés montagnaises possible qui sont touchées. Il y a une alliance innu qui comprend, à la fois, les communautés montagnaises de Schefferville, de Sept-Îles, de Saint-Augustin, de Mingan et de La Romaine, plus les communautés innu du Labrador, qui est un genre de coalition qui vient d'être formée pour défendre les intérêts de la nation innu auprès des gouvernements, parce qu'il faut rappeler, encore une fois, que la frontière entre le Québec et le Labrador, pour les Innu, est complètement artificielle. Ils sont là, loin avant nous autres, et ça, c'est un ensemble qui s'appelle la nation innu.

Et ça m'a étonné, le fait que les leaders que j'ai pu contacter aujourd'hui n'aient nullement été consultés avant la confection du projet de loi n° 60. Et je pense que c'est une lacune très, très importante parce que je pense, pour refaire l'historique pour les membres de la commission, qu'on avait la grande annonce, à Churchill Falls, il y a un an, mais ça a floppé à cause du fait que M. Tobin était consulté, le premier ministre du Québec était consulté, le président d'Hydro-Québec, le président de Newfoundland Light and Power, tout ce monde très important était dans le coup, mais on avait oublié de mentionner ça aux personnes qui demeurent là-bas, la nation innu. Alors, ils ont fait quelque chose que, je pense, tous les citoyens du Québec peuvent comprendre; ils ont bloqué la route parce qu'ils n'étaient pas consultés sur un projet d'une ampleur qui va profondément changer leur façon de vivre, leurs coutumes, et tout ça. C'est un renversement total de leur vie traditionnelle.

Ils n'ont pas été mis dans le coup. Le président d'Hydro-Québec, M. Caillé, a pris la peine de les rencontrer pendant cinq minutes, M. le Président, pour leur donner la version anglaise du communiqué de presse. Quelle grande consultation! Quel grand effort de les amener, 25 ans après toute la controverse autour des projets de la Baie James! On n'a rien appris.

Alors, maintenant, on arrive... Et quand l'ancien chef de l'opposition officielle, le député de Vaudreuil, M. Johnson, a questionné le premier ministre, le 10 mars 1998, en Chambre, le premier ministre a dit que, forcément, les Innu seront partenaires avec notre projet de développement de la rivière Churchill. Forcément, les Innu seront partenaires, parole de notre premier ministre.

Alors, on a un enjeu très important ici, parce que je pense qu'on a tout intérêt, à la fois pour les intérêts du développement hydroélectrique, à la fois pour la création d'emplois dans notre société et surtout dans la région du Bas-du-Fleuve, je pense qu'on a tout intérêt à ce que ça marche. Mais, pour que ça marche, je pense qu'il faut associer préalablement les nations autochtones, et surtout, dans le cas ici, les Innu, qui sont un peuple, qui sont dispersés des deux côtés de la frontière, mais c'est une nation innu et on a tout intérêt à les mettre dans le coup dès le départ.

Alors, moi, et peut-être, si c'est l'impression, j'ai fait toutes les recherches qu'on peut faire dans 24 heures, M. le Président, et je n'ai aucune prétention que j'ai fait le tour complet, mais j'ai parlé aux deux des quatre membres de l'Alliance Innu aujourd'hui. J'ai même eu l'occasion de rencontrer deux représentants de deux de leurs chefs qui m'ont dit qu'ils n'étaient pas consultés préalablement sur le projet de loi n° 60. Ce n'est pas un bon départ, M. le Président, parce que je pense qu'on a tout intérêt, dès le départ... et on a les modèles existants.

(20 h 30)

Si on regarde la Convention de la Baie James et la protection de l'environnement, on a plusieurs comités conjoints, qui existent déjà avec les Inuit, avec les Cris, avec les Naskapis, qui produisent un rapport annuel, et on a tout un processus environnemental déjà mis en place pour s'assurer que la voix autochtone, la voix de notre partenaire sera associée, dès le départ, avec la démarche. Alors, ça existe; on n'est pas obligé d'aller trop loin pour trouver les modèles parce que ça existe dans notre législation. Ça existe dans nos pratiques, nos façons de faire, chez les Cris, chez les Inuit, chez les Naskapis.

Mais, pour le projet de loi n° 60, comme je l'ai dit, j'ai rencontré, un petit peu en catastrophe, ce soir, à 17 h 30, deux représentants des Innu avec le projet de loi, et ils m'ont questionné. Ça veut dire quoi? C'est quoi, la nature de l'entente? C'est quoi, la nature, des choses comme ça?

C'est difficile pour moi. Je suis un député de l'opposition. Avec la recherche, on a les personnes qui travaillent très fort chez nous, mais je n'ai pas un ministère, je n'ai pas le Secrétariat des affaires autochtones et tous les moyens du gouvernement pour répondre à ces questions. Mais ça m'étonnait qu'on n'ait pas pu, préalablement, au niveau de la courtoisie, d'une certaine diplomatie, s'asseoir...

Si c'était juste le projet de loi n° 60, c'est une chose, mais c'est un pattern qu'on voit à travers la législation qu'on a devant nous en cette session. Les sages-femmes, ça, c'est un enjeu majeur dans les communautés autochtones. Est-ce que les sages-femmes... Est-ce que les associations des femmes autochtones du Québec étaient consultées préalablement? Non. Non.

On est en train de changer le traitement, les dossiers confidentiels dans la loi sur la santé crie. Est-ce qu'on a avisé le Grand Conseil des Cris qu'on veut changer la loi pour le Grand Conseil des Cris? Non. C'est grâce au fax du député de Jacques-Cartier qu'on a, au moins, réussi à aviser ces personnes que l'Assemblée nationale a l'intention de changer la loi sur la régie régionale de la santé crie. Avez-vous des commentaires? Imaginez-vous, M. le Président, est-ce que les personnes qui sont visées, qui doivent vivre avec les conséquences de nos lois étaient consultées? La réponse était non.

Et peut-être que le ministre peut me corriger, parce que, moi, je ne prétends pas que, dans 24 heures, je peux faire le A à Z de toutes les consultations, mais les leaders montagnais que j'ai pu réussir à contacter aujourd'hui ne sont pas dans le coup. Et je dis: On a un problème ici parce que, si on veut réaliser le projet Churchill, si on cherche un succès bon pour la création d'emplois, bon pour augmenter la richesse à la fois de Terre-Neuve et du Québec, on a tout intérêt, comme le premier ministre a dit, que forcément – «forcément», ce n'est pas ma parole, c'est la parole du premier ministre – il faut avoir les autochtones comme partenaires dans ce projet. Et, quand c'est rendu qu'un simple député de l'opposition doit essayer de leur expliquer la portée du projet de loi, il y a quelque chose ici, on n'a pas fait notre devoir, on n'a pas travaillé comme il faut. Parce que, si on veut vraiment les impliquer, il faut les impliquer dès le départ.

J'ai échangé informellement avec le ministre hier soir, mais la lecture qu'ils ont faite rapidement avec moi aujourd'hui sur la seule phrase dans le projet de loi qui touche les autochtones est tout autre. Ils veulent être obligatoirement dans le coup. On va discuter ça en détail au moment où on arrivera à l'étude détaillée. Mais ils aimeraient avoir une obligation qu'ils seraient partie prenante dans l'étude environnementale. Ils aimeraient avoir l'occasion de fixer les termes de référence. C'est quoi, les questions qu'on va poser? C'est quoi, les impacts environnementaux qu'on veut chercher? C'est eux autres qui doivent vivre avec les conséquences au niveau de la chasse, de la pêche, de leur façon de vivre, et tout ça.

Alors, je pense qu'ils ont tout intérêt de nous aider à poser la question. Parce que, moi, j'ai compris la logique du ministre quand on a fait l'échange sur le débat de principe hier soir qu'on ne veut pas, nous, imposer des obligations, on ne veut pas, nous, obliger et mettre dans la loi que, forcément, vous devrez participer dans notre affaire. Mais il y a un autre volet de voir ça que je n'ai pas vu hier soir, mais que j'ai saisi aujourd'hui. Où est-ce qu'on va mettre dans notre loi que, nous, le gouvernement du Québec, nous, les gouvernements blancs ou comme vous voulez – parce qu'on tombe dans un vocabulaire qui est difficile à trouver – où est l'obligation qu'on va mettre sur nous-mêmes de créer une place pour les autochtones, qu'ils vont être consultés, qu'ils vont être partie prenante décisionnelle sur les grandes questions qu'on veut poser sur l'étude sur l'environnement?

Au lieu de dire que le gouvernement de Terre-Neuve, le gouvernement du Québec, le gouvernement du Canada vont s'asseoir, vont arranger des choses et présenter un fait accompli aux nations autochtones en disant: Ça va être comme ça qu'on va procéder, vous pouvez embarquer ou, si vous voulez rester à côté, c'est votre choix, parce que c'est là qu'il est dans le projet de loi maintenant... Et j'ai compris le ministre et c'est pour ça que je dis que je comprends son optique qu'il ne veut pas créer une obligation. Mais comment – et on va regarder ça plus précisément au moment où on tombera dans le texte quand même – est-ce qu'on va créer au moins un devoir pour ces trois gouvernements de s'asseoir, d'écouter, de consulter, d'avoir un certain pouvoir pour les Innu de dire que nous, dans cette étude, nous aimerions poser les quatre questions suivantes ou les dix questions suivantes?

Et, sans procéder, je pense qu'il faut une réponse sur l'impact sur la qualité de l'eau dans la rivière x ou sur les conséquences sur la forêt dans le domaine y, etc. C'est les grandes questions. Comme nous avons vu dans le projet de la Baie James, on ne parle pas ici d'un petit détournement qui va toucher 500 mètres. On va changer le climat, on va changer l'écologie même d'une grande région à la fois du Québec et du Labrador. Alors, je pense que, si on arrive au dernier moment, qu'on aimerait qu'on cherche le consentement des Innu pour le projet, je pense qu'il faut les faire embarquer tout de suite et il faut trouver un moyen via le projet de loi n° 60.

Et, moi, en toute innocence, j'ai pensé que ce travail était déjà fait avant de présenter le projet de loi à l'Assemblée nationale. J'ai dit: J'imagine que quelqu'un est allé voir les Innu et leur dire que oui, vous avez une certaine protection avec le BAPE. Les Innu de Terre-Neuve, vous avez d'autres protections avec la loi qui gouverne à Terre-Neuve. Il y a certaines lois au niveau fédéral. On est en train de mettre tout ça ensemble, et je pense que tout le monde est heureux. Au lieu de faire trois études, on en fait une ensemble. Il y a une certaine logique à ça. Je pense que tout le monde est heureux.

Mais où, dans tout ça, est-ce qu'on a trouvé la place pour le quatrième partenaire, c'est-à-dire la nation innu? Comme je l'ai dit – peut-être que le ministre peut me corriger – mais lors des consultations que j'ai faites au téléphone, en personne, aujourd'hui avec quelques représentants, ils ne sont pas dans le coup. Et je dis, M. le Président: On est mal parti et je pense qu'on a tout intérêt à voir s'il y a un moyen, dès le départ, de concevoir où est le rôle pour les Innu dans l'étude. J'imagine, pour faire diriger une étude, qu'il y aura un genre de panel, qu'il y aura des commissaires ou des personnes. Combien de places seront réservées pour les représentants des peuples innu? Est-ce qu'il faut le mettre dans la loi ou est-ce qu'au moins il faut faire un certain engagement que ça va être sept commissaires, deux, trois, quatre, je ne sais trop? Mais est-ce qu'il y a un moyen de pouvoir préciser qu'ils sont dans le coup, qu'ils sont impliqués?

(20 h 40)

Parce que c'est beaucoup de «peut» dans le projet de loi qui est ici. Mais, quand on dit qu'il y a un processus, une entente en vue avec le gouvernement du Canada et le gouvernement de Terre-Neuve, on va étudier quoi exactement? Ça va être quoi, les termes de référence? Ça va être les questions posées. C'est quoi, l'obligation des trois gouvernements de s'assurer que les nations innu sont partenaires avec le projet?

And, Mr. Chairman, because some of the people speak English, I was asked to make sure that I repeat some of these points in English for the Innu who live on the other side of the border of Labrador. But I think it's very important tonight, we are at the very first step of this project, and I think everyone around the table thinks that it might be very interesting that this project go forward, that there is an important thing here for Québec and for Newfoundland in terms of economic development, that there is an important aspect of job creation. But to do that, to get there, the Premier of Québec said: We must have the Innu as a partner; 10th of March 1998, in the National Assembly, our Premier took that commitment. So, I think if we're going to do it, our occasion tonight is to look at how, in the creation of this new environmental study which is the first step, Mr. Chairman.

Everyone knows that the first step is to do an environmental study. And how can we make sure that, in that environmental study, the Innu voice is heard? So, in terms of: Who sits on the panel or the commission that will be charged with this? Who will fix the terms of reference? Who will be the heard people? What will be the questions that will be asked? We're talking about a major project where the impact on the flora, the fauna, hunting, fishing, the climate, and so on and so forth, it's far reaching. And I think we're lucky in Québec because we've had a previous experience with the Bay James Agreement where, at James Bay, we created mixed committees to look at the environment, including the people, the Inuit people, the Cree people and the Naskapi.

So we have a model there where we have put together mixed committees to look at the environment. And that's what we're looking at again here tonight, and I think we have every interest because this is our first step. And I was very surprised, Mr. Chairman, to learn that some of the people of the Innu Alliance – which is the group that is the Innu of Schefferville, of SevenIslands, of Saint-Augustin, Mingan, La Romaine and the Innu of Labrador which have created an alliance – were not in any way consulted about bill 60 prior to having it presented in the National Assembly. It's a bad first step if we're seeking a partnership, if we're seeking a way to make sure that the Innu will join with everybody else.

We'll see that, in this project, there will be environmental consequences but there may be economic advantages. And it's the decision that we all have to take as to what extent do we balance the two off? If we want a perfect environment, if we have nothing but trees, we'll never build a road, we'll never build a city, we'll never do anything. Oh, that's unrealistic. But we can't pave any or everything either. We have to hit something that's in between the two and, in this project, given the climate of international opinion, the effect of voices that native people have found for themselves at the United Nations, at certain international tribunals, I think, as Quebeckers, as Canadians, we have every interest to make sure that, from the start, the Innu are associated with our project.

And to see that, step one, the environmental study. We have nothing more than: «Any interested Native party may also be a signatory to the agreement», which is something that, to me, is like an afterthought. We're writing up a bill...

M. le Président, on est en train de rédiger un projet de loi et on dit, à la toute fin: Bah! Il me faut une phrase sur les autochtones. Qu'est-ce qu'on peut trouver? Est-ce qu'il y a quelqu'un ici qui peut au moins nous ajouter? On ne veut pas quelque chose qui est trop engageant, on veut quelque chose qui est poli quand même. On va le mettre ici, dans l'article 1, on va dire: Toute partie autochtone intéressée peut également être signataire de l'entente, point.

Comme je dis, on a discuté ça hier soir. Moi, d'une façon très sélective, j'ai envoyé le débat qu'on a eu dans le salon bleu hier soir à quelques représentants innu. Les premiers sons de cloche que j'ai aujourd'hui: Ce n'est pas suffisant. Et, si vraiment on vise un partenariat, ça va être aux membres de la commission, ce soir, de voir s'il y aurait moyen de concevoir quelque chose qui est plutôt bâtir entre partenaires, entre des personnes égales. Alors, ça va être un défi peut-être pour nos juristes, mais je pense qu'on a tout intérêt, pour tous ceux autour de la table qui croient dans le succès éventuel de ce projet, dans la réalisation un jour de ce projet, de faire autrement. Parce que, dans les remarques préliminaires, le ministre a fait allusion au premier projet de Churchill, mais je veux souligner qu'il n'y a eu aucune étude environnementale qui a été faite à l'époque. On a tassé les autochtones, on a complètement négligé leurs besoins, c'était vraiment un inconvénient. On a dit: Tassez-vous, les gouvernements arrivent.

Trente ans après et malgré toute la controverse autour de la Convention de la Baie James, je pense que la Convention de la Baie James, quand même, il y a des choses fort intéressantes là-dedans, il y a un modèle là-dedans, il y a des leçons qu'il faut tirer de l'expérience de la Baie James. Et j'espère, ce soir, comme membre de la commission, qu'on aura l'occasion de regarder de près comment on peut plus respecter les autochtones à l'intérieur du projet de loi n° 60.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député de Jacques-Cartier, pour les remarques préliminaires. M. le député d'Argenteuil.


M. David Whissell

M. Whissell: Merci, M. le Président. M. le ministre, d'emblée, je pense qu'il serait bon de rappeler que l'opposition officielle est consciente que le développement des ressources hydroélectriques du Québec, du Labrador est une source de création d'emplois, de revenus économiques et que, par le passé, le développement de ces ressources a permis au Québec de faire preuve de leadership de façon mondiale. Le développement hydroélectrique au Québec a permis la création de firmes d'ingénierie reconnues mondialement, et nous avons ainsi pu prendre notre place au niveau mondial.

Cependant, on a vécu, l'automne dernier, l'annonce de ce projet – je me rappelle les écrans géants, les déplacements médiatiques – et on a annoncé un projet qui n'avait pas encore fait l'objet d'études environnementales. Aujourd'hui, on se ramasse ici avec un projet de loi qui a pour principale fonction de prévoir les études environnementales pour faire un projet qu'on a annoncé déjà il y a six mois, et ce projet-là devra respecter l'environnement. Mes collègues ici ont fait mention, depuis le début de la séance, qu'il y a de nombreux impacts environnementaux qui s'ensuivront, que les autochtones seront perturbés, seront déplacés, devront subir les inconvénients de ces infrastructures qui seront mises en place.

Mais ce qui est encore plus aberrant, M. le Président, c'est qu'on est ici ce soir pour une simple raison, c'est que le gouvernement qui est en place n'a pas signé l'entente d'harmonisation avec les autres provinces du Canada, et ça reflète l'entêtement du gouvernement actuel de vouloir bouder, de vouloir éviter tout ce qui est pancanadien. Il ne faut pas se leurrer. En tant que province, on a à cohabiter avec d'autres provinces et on a les mêmes objectifs environnementaux: protéger nos ressources, protéger l'environnement, protéger et mettre en valeur la faune.

Le gouvernement a mis de côté une possibilité, une avenue qui nous aurait évité d'être ici ce soir. Alors, le gouvernement actuel, M. le Président, alourdit le processus et non seulement il l'alourdit, mais il pourra peut-être éviter qu'on respecte l'environnement, qu'on respecte le droit des autochtones. Dans le passé, le Parti libéral du Québec – mon collègue en faisait mention plus tôt – sous le règne de M. Bourassa, a démontré clairement qu'il est possible de développer les ressources hydroélectriques au Québec, en Amérique du Nord en respectant les droits des autochtones et l'environnement.

(20 h 50)

Alors, ici, il faut quand même être conscient que le projet dont on fait mention est un projet qui inondera des milliers d'hectares de terres, qui déplacera des populations d'humains, qui déplacera des populations mammifères. On a parlé récemment du saumon de l'Atlantique dont le nombre est en décroissance de façon alarmante et on sait fort bien que ce projet pourra possiblement détourner les eaux de rivières où les saumons fraient. Alors, il y a quand même un impact environnemental majeur.

On est face à un projet de loi qui, après en avoir pris connaissance, est rempli de «peut». Et j'ai bien hâte qu'on questionne le ministre article par article parce que, quand on dit «peut prévoir», «peut conclure»...c'est rempli de «peut», M. le Président. Et, au point de vue environnemental, nous, en tant qu'opposition officielle, on doit s'assurer qu'on va écouter les groupes qui sont concernés par ce projet, qu'on va respecter les droits des autochtones, qu'on va garantir que les saumons de l'Atlantique ne disparaîtront pas à cause d'un projet hydroélectrique que le gouvernement a voulu annoncer en pleine campagne électorale pour essayer de s'attirer la sympathie des concitoyens du Québec.

Alors, M. le Président, ce projet de loi reflète fort bien ce que nous fait subir ce gouvernement. On a vécu Hertel–des Cantons, on a vu le déplacement du palais de justice, on a vu un paquet de choses, les côtes des Éboulements, et je pense que le projet de loi n° 60 est la continuité. S'il y a quelque chose de bien qu'on peut rappeler et qu'on peut dire de ce gouvernement, c'est la continuité. Ils sont partis dans une ligne qui est l'arrogance, le non-respect des droits des Québécois, des autochtones, de la faune, et ce projet de loi rencontre pleinement les objectifs du gouvernement.

Alors, M. le Président, en conclusion, j'ai bien hâte de demander au ministre pourquoi qu'il n'a pas voulu signer l'entente d'harmonisation avec les autres provinces. Et, quand on dit, dans le projet de loi, un ensemble de «peut» – «peut prévoir», «peut si» – j'ai bien hâte de voir ce que le ministre va nous répondre.

Alors, sur ce, je laisse la parole à un de mes collègues.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député d'Argenteuil. Mme la députée, non? Ça va? Alors, on serait prêt à aborder l'article 1.


Motion proposant d'entendre l'Alliance Innu

M. Kelley: M. le Président, conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale:

«Que la commission des transports et de l'environnement, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 60, entende l'Alliance Innu, The Innu Alliance.»

Le Président (M. Lachance): Je peux avoir copie de votre motion? Je comprends qu'il s'agit d'une motion préliminaire?

M. Kelley: Oui.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le ministre.

M. Bégin: Je voudrais savoir – peut-être ai-je mal entendu – c'est entendre ce soir l'Alliance?

M. Kelley: Je dois avouer à ce moment, parce qu'on est ici, c'est plutôt un geste symbolique de ma part parce qu'il n'y a pas de moyen de les entendre ce soir. Mais je veux au moins faire le point que je trouve qu'il y a des consultations préalables qu'on aurait dû faire comme commission, qu'on n'a pas réussi à faire. Et je ne prendrai pas la parole plus longtemps que ça, mais je trouve regrettable, avant de toucher la question comment on va faire la formulation de la participation de la partie autochtone, qu'on n'ait pas eu l'occasion de les questionner, comme parlementaires, formellement, ce soir. Mais, comme je dis, avec les moyens que j'avais, je ne pouvais pas arriver avec un groupe qui peut venir en catastrophe ce soir, mais je veux juste faire le point, M. le Président, et M. le ministre, que je pense qu'on aurait dû le faire.

Le Président (M. Lachance): Évidemment, la motion est recevable, mais... M. le ministre.

M. Bégin: Bien voilà, techniquement, elle est recevable. Elle ne peut pas être réalisée, j'en conviens. Je comprends le sens de la démarche dans la mesure où ce n'est que pour indiquer ce qu'il vient de mentionner. Je n'ai pas d'objection et je serais prêt à dire que j'aurais été d'accord pour entendre les groupes en question. Mais, si c'est pour simplement faire cette résolution-là, je n'ai aucun problème à accepter la chose. Mais on comprend qu'on n'ira pas plus loin parce que les gens ne sont pas là.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Jacques-Cartier.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Je comprends, mais je pense que ce n'est pas une question si on aime ou si on n'aime pas, je pense que le point est très, très sérieux, qu'il y a un travail préliminaire qu'on aurait dû faire et qu'on n'a pas fait. Et c'est ça que je trouve regrettable ici. Est-ce que c'est, pour le député de l'opposition, 24 heures pour organiser que les groupes autochtones puissent être ici ce soir pour nous guider dans l'adoption du projet de loi n° 60? Je ne pense pas. J'ai essayé de le faire. Malheureusement, je n'ai pas réussi à trouver un groupe qui puisse venir ici ce soir. Je suis un petit peu embêté moi-même de faire la formulation de la phrase en question, mais je pense qu'on a tout intérêt, pour le succès de ce projet, de consulter les autochtones pour voir qu'est-ce qu'ils veulent mettre. Parce que, quand je dis: «Toute partie autochtone intéressée peut également être signataire de l'entente», ils n'aiment pas ça.

J'ai eu quelques sons de cloche de la façon autre qu'on peut formuler ça. Et, tout en disant que j'ai compris la logique du ministre quand nous avons discuté de ça hier soir... Il ne voulait pas imposer, et ça, je comprends aussi la façon dont il a vu ça. Il a dit: Moi, je ne veux pas que le grand gouvernement à Québec impose une obligation. Mais, par contre, qu'est-ce que les Innu ont répondu aujourd'hui quand j'ai envoyé le texte à la fois du débat d'hier et de la réplique du ministre? J'ai dit: Comment est-ce qu'il peut assurer quand même qu'ils vont être dans le coup, qui est une autre façon de voir le débat «peut» et «doit» ici?

Alors, je pense qu'on a tout intérêt... Parce que, comme je dis et je répète, c'est le premier ministre du Québec qui dit: Forcément, les Innu seront partenaires. Comment est-ce qu'on va procéder ici, ce soir, avec la première étape, quand on n'a pas leur avis? Et c'est dommage, dans 24 heures, on ne peut pas organiser un groupe ici ce soir, mais pour 24 heures, ou attendre pour faire ça correctement, je pense qu'on a tout intérêt à les recevoir comme témoins avant de procéder. Parce que, moi, je suis mal à l'aise, j'ai une couple de formulations que je peux proposer plus tard quant à la formulation de l'article 1. Mais ce n'est pas à moi à négocier à la place des Innu et ce n'est pas moi qui peut parfaitement défendre leurs intérêts ici. Loin de ça.

Alors, je trouve ça dommage et je comprends, on est en fin de session, on avait les après-midi où il y avait très peu de commissions au mois de mai et on n'avait pas de travail, mais on attend juste à la fin parce que c'est notre vieille tradition parlementaire et il faut tout faire dans 24 heures parce que le 24 juin arrive. Mais ici, on a un projet à long terme. Alors, si ça prend 48 heures ou si ça prend à mardi de la semaine prochaine pour organiser une consultation comme il faut où des représentants des communautés innu en question peuvent venir témoigner ici, je pense qu'on a tout intérêt de le faire parce que c'est...

On ne parle pas ici d'un projet de loi de 125 articles, on peut passer à travers assez rapidement. Mais, si on parle d'un partenaire... Partenaire, c'est dans l'air. Et le gouvernement a été fortement critiqué parce que, quand le député de Joliette et ministre délégué aux Affaires autochtones a publié son document de politique du gouvernement en affaires autochtones: partenariat, développement, action...

Une voix: Des belles phrases.

M. Kelley: ...il a été fort critiqué par l'Assemblée des premières nations parce qu'elle n'a aucunement été consultée. Le gouvernement a dit: C'est ça, notre politique. Parfait. On procède. Mais on ne peut pas procéder comme ça. Si c'est un partenaire, il faut les consulter, c'est de son évidence même.

Alors, dans le projet de loi, ce soir, moi, je pense que le gouvernement du Québec a tout intérêt à voir est-ce qu'il y aurait moyen, dès le départ, d'avoir les Innu comme partenaires dans ce projet? C'est quoi, la mécanique? C'est quoi, la formulation dans le projet de loi? Et, comme je dis, je comprends le ministre quand il a dit qu'on ne veut pas imposer une obligation, vous n'avez pas le choix, vous êtes dedans l'entente. Je comprends la logique du ministre, mais je comprends également l'objection qui a été faite de l'autre côté en disant: Moi, j'aimerais avoir un mot à dire sur qui qui vont être les commissaires, les membres du panel qui vont regarder ça. Moi, j'aimerais avoir un mot à dire sur c'est quoi, les questions qu'on va poser. Moi, j'aimerais avoir un mot à dire sur la portée de l'étude.

(21 heures)

Et, comme je dis, on a le modèle déjà qui découle de la Convention de la Baie James où on a les panels mixtes sur l'environnement sur le territoire de la Baie-James. À la fois les Cris, les Inuit, les Naskapis sont consultés, ce qui fait partie de notre vue et des études environnementales au nord du 55e parallèle. Alors, on a une occasion en or, ici, de les faire embarquer tout de suite.

Mais, pour le faire, je pense qu'il faut les consulter pour voir... Vous voulez voir quoi, exactement, dans le projet de loi n° 60? Si le tout petit bout de phrase qui est ici, ce n'est pas suffisant, comment est-ce qu'on peut le bonifier? Est-ce qu'on change le mot «peut» pour «doit»? Est-ce que c'est mieux? Et peut-être que c'est trop.

Moi, je n'aime pas trop les lois qui sont trop restrictives non plus. Il faut toujours laisser une certaine marge de manoeuvre, une certaine flexibilité. Mais comment est-ce qu'on peut assurer les nations innu, dès le départ, qu'au niveau des questions qu'on va poser, au niveau des personnes qui vont siéger sur ce panel qui va regarder les impacts environnementaux, on peut s'assurer qu'elles vont être représentées?

Alors, sur la formulation, sur les précisions, comment écrire ça, ça va prendre un travail collectif. Mais je pense qu'avant de le faire on a tout intérêt à s'asseoir avec les Innu. Et, si c'est d'ajourner la session de la commission ce soir, organiser ça comme il faut et faire ça mardi dans l'avant-midi ou vendredi, peu importe, qu'on puisse avoir au moins une consultation mesurée, bien pensée, des Innu avant de procéder à l'adoption de la loi n° 60... je pense que, si on perd une couple de jours maintenant mais que ça nous donne une meilleure chance d'arriver à la fin avec une entente sur la réalisation de ce projet, ça va être un temps très bien investi.

Parce que, comme je dis, M. le Président, je suis étonné, avec l'échantillon qui – puis je l'ai avoué dès le départ – n'est pas exhaustif... Mais l'échantillon que je peux faire aujourd'hui, le leadership montagnais-innu, ils n'ont pas été consultés préalablement. Nos partenaires, les personnes qu'on dit qu'on va travailler ensemble, qu'on va réaliser ce projet, n'ont pas été consultés sur la première étape des démarches.

Je dis: Il faut ralentir un petit peu. Il faut dire que peut-être, si ça prend d'ici mardi pour les inviter comme il faut, s'asseoir ici, au banc des témoins, les écouter sur le projet de loi n° 60, procéder après, ça ne prendrait pas des heures pour faire nos cinq articles. On peut faire ça... Mais si, en attendant 48 heures ou mardi ou lundi de la semaine prochaine, en contrepartie, on peut avoir un meilleur projet de loi, moi, je pense que c'est un pari fort intéressant pour le ministre. En plus, c'est un pari fort intéressant pour le gouvernement du Québec.

Et c'est la proposition que je fais. Si on peut arranger un moment pour consulter les Innu ou adopter les autres articles et suspendre un ou... Je ne sais pas comment ça fonctionne, M. le Président, mais je pense qu'on a tout intérêt à investir un petit peu de temps, convoquer, inviter les représentants des Innu. On ne parle pas de consultations qui vont durer des journées, mais au moins, passer une heure ou deux avec les représentants innu pour bonifier notre projet de loi, on a tout intérêt à le faire.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député. M. le ministre.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Je voudrais soulever deux aspects dans mon intervention, un sur la forme et l'autre sur le fond. Quant à la forme, au départ, je croyais que c'était simplement que le député de Jacques-Cartier voulait mettre aux galées qu'il aurait aimé entendre les personnes, mais qu'il sait que c'est impossible de les entendre ce soir et qu'en conséquence c'était purement, je dirais, symbolique. Je vois, par son intervention qui s'est développée, que ce n'est plus ça, son intention, mais bien de dire: Nous devrions reporter nos travaux à un autre moment, le temps d'inviter les gens qui voudraient venir le faire, donc, de venir devant nous. Je pense qu'il y a, sur le fond des choses, une confusion très claire entre ce que nous faisons et ce que pourrait vouloir le député de Jacques-Cartier.

Le projet de loi qui est là vise à donner au Québec une possibilité de discuter, d'échanger avec le Canada, avec Terre-Neuve et avec les communautés autochtones intéressées. Ce n'est pas une négociation. C'est se donner les moyens de pouvoir échanger avec eux. Donc, ce projet de loi concerne strictement le Québec comme entité qui veut se donner la capacité de discuter, d'échanger et de signer des ententes ou une entente avec les parties intéressées.

Alors, à ce stade-ci, l'intérêt n'est pas de savoir ce que pense le Canada, ce que pense Terre-Neuve, ce que pensent les communautés autochtones. C'est après que ça viendra. On veut juste être capable, légalement, d'entreprendre de telles démarches et de les mener à terme dans la mesure où les parties conviendront.

La même confusion existe en disant: Il serait bon qu'on puisse convenir, par exemple, de quelle manière ou quelles sortes de questions les autochtones pourraient poser dans le cours du processus. Justement, l'entente vise à convenir avec eux comment ça va pouvoir être fait. Quel est l'organisme qui va être en place, combien seront-ils, comme communautés présentes, sur cet organisme-là, qui entendront-ils, dans quel cadre, jusqu'à quel point? Tout ça, c'est justement l'objectif que l'on vise ce soir, de se donner la capacité de convenir des choses.

Les communautés autochtones vont se réunir et dire: Nous, on voudra, avec le Canada, le Québec, Terre-Neuve, convenir de telle et telle chose. Ils vont faire ça de leur côté. Ils vont se donner des représentants. Ils vont donner le mandat de venir rencontrer Québec, Terre-Neuve et le Canada pour convenir des choses. Terre-Neuve va faire la même chose de son côté et le fédéral va faire la même chose de son côté.

Quand les quatre personnes que je viens de mentionner auront l'habilité, le mandat, elles vont se parler sur le fond des choses et convenir d'une entente. C'est ça que nous voulons. À ce stade-ci, ce n'est pas la négociation, ce n'est pas la discussion avec les autres parties. C'est nous, comme Québec, qu'est-ce que nous voulons nous donner comme instrument d'intervention? C'est le sens unique de ce projet de loi là.

Alors, si on confond entre l'habilitation législative et la conclusion d'une entente, je pense qu'on fait une erreur de fond, une erreur grave. Ça n'est pas du même ordre d'idées du tout, du tout. Quand bien même on voudrait discuter avec les autochtones du Canada et de Terre-Neuve aujourd'hui, on n'a pas la capacité légale de le faire, on n'a pas l'instrument juridique pour le faire. Donc, on ne peut pas le faire.

En fait, M. le Président, à ce stade-ci, ce n'est pas pertinent. Ce qui sera pertinent, c'est que, une fois qu'on aura donné le mandat au Québec de pouvoir conclure une telle entente, les négociateurs de chacune des parties négocient et en arrivent à une entente. Et, quand cette entente-là existera, là on aura ce que l'on désire de part et d'autre. Chacun y aura mis du sien, aura apporté ce qu'il a de mieux à offrir à l'entente.

Alors, voilà pourquoi je ne crois pas qu'il soit pertinent d'aucune façon de vouloir entendre les Inuit, comme d'entendre le Canada ou comme d'entendre Terre-Neuve. C'est après que ça le sera. Mais, au moment où on se parle, on n'a même pas la capacité de faire ça, puisqu'on n'a pas l'habilitation législative. C'est ça qu'on cherche à faire ce soir.

Alors, dans ce sens-là, M. le Président, il est bien sûr que nous ne pouvons pas consentir à une telle chose puisqu'il s'agirait de reporter la commission parlementaire pour discuter de ce projet de loi qui vise à donner au Québec l'instrument juridique requis pour justement entreprendre les négociations, les discussions avec les autochtones, Terre-Neuve et le Canada.

Le Président (M. Lachance): À ce stade-ci, à moins d'un consentement, je dois vous indiquer que l'article 209 concernant les droits de parole est très clair: «Un député peut s'exprimer une seule fois sur une même question.» Ça signifie que le temps de parole n'est pas fractionné, que ce soit pour l'auteur de la motion ou encore pour le ministre...

M. Kelley: ...si je peux répliquer, parce que je pense que c'est important de le faire.

Le Président (M. Lachance): Bien, écoutez, si quelqu'un d'autre peut le faire... Le député qui fait la motion et le porte-parole gouvernemental, il y a même une période qui était prévue, d'un seul trait, de 30 minutes – c'est très technique – et les autres députés qui voudraient participer sur la motion, ils ont un droit de parole aussi, de la même façon, une seule fois sur la même question, de 10 minutes. Alors, moi, je veux bien être souple, mais c'est ça, le règlement. C'est assez inusité aussi.

M. Kelley: Juste une question. Je comprends...

Le Président (M. Lachance): Sur la question de règlement?

M. Kelley: ...et je ne veux pas gaspiller le temps de la commission. Je peux faire le jeu, présenter une autre motion pour m'établir un autre droit de parole ou on peut épuiser le sujet.

Alors, c'est aux membres de la commission et, si vous voulez, la plume est prête. Je peux écrire une autre motion pour m'établir... Mais je pense que le ministre a soulevé des questions qui sont fort intéressantes.

(21 h 10)

Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'il y a consentement? Est-ce qu'il y a consentement?

M. Bégin: Non.

Le Président (M. Lachance): Alors, je regrette, M. le député de Jacques-Cartier. M. le député d'Argenteuil.


M. David Whissell

M. Whissell: Oui, merci, M. le Président. Je pense que ça vaut la peine qu'on continue le débat parce que le ministre doit réaliser quand même... J'écoutais ses propos puis je me disais: Ça ne se peut pas. On fait face à un gouvernement qui a deux discours. On a un premier ministre qui a fait une annonce d'un mégaprojet qui n'avait pas fait l'objet d'études environnementales encore – donc, on ne savait pas si ce projet-là était pour se réaliser – et qui, dans son discours, a dit: Nous allons construire ce projet qui va créer des emplois et nous allons respecter les autochtones.

Et, d'un autre côté, on est ici aujourd'hui avec un projet de loi... Et le ministre a beau dire ce qu'il veut, le projet de loi est clair, on fait mention des autochtones. On dit: «Toute partie autochtone intéressée peut également être signataire de l'entente.» On fait référence à ces gens. Et, en commission parlementaire, on refuse de donner le temps à ces gens-là de venir se faire entendre, de se faire écouter, d'exprimer leur opinion vis-à-vis ce projet de loi qui les concerne, parce qu'on parle des autochtones dans le projet de loi n° 60.

Et le ministre est catégorique, il dit: Ce n'est pas important au stade où nous en sommes. Je pense que c'est important qu'on donne le droit de parole à ces groupes. Le ministre a beau dire qu'on n'est pas rendu aux étapes environnementales, mais on revient au projet de loi et c'est toujours: «Toute partie autochtone intéressée peut». C'est toujours le «peut» avec ce gouvernement-là. Et c'est le gouvernement du fait accompli, que j'appelle. On met les gens face à une situation, et vous devez embarquer. Et je pense, M. le Président, que c'est important que les citoyens du Québec réalisent que la session, ça fait longtemps qu'elle est commencée. Ça fait longtemps que le ministre avait le loisir de présenter son projet de loi, de l'appeler en commission.

Et là on est deux semaines avant la fin de la session, et il faudrait accepter ce projet de loi à toute vapeur, sans respecter le droit des autochtones, sans leur permettre de se faire entendre, de venir nous exprimer leur point de vue, parce qu'ils en ont, des points de vue. Ces gens-là, c'est des citoyens à part entière du Canada. On aura beau vouloir dire qu'est-ce qui est un Québécois, qu'est-ce qui ne l'est pas, qu'est-ce qui est un Canadien, qu'est-ce qui ne l'est pas, ces gens-là, ils ont les mêmes droits que vous et moi.

Et je pense que le ministre, dans toute son intégrité, devrait respecter ces gens-là et permettre qu'on reporte nos travaux de 24, 48 heures pour laisser ces gens-là venir s'exprimer, dans une démocratie, dans un pays libre. Et je pense que c'est important. Et je reviens encore là-dessus, ça fait longtemps que la session est commencée. Et là on est ici ce soir, on demande que ces gens-là aient la possibilité de se faire entendre et on va le leur refuser. Je pense que c'est irrespectueux. C'est un manque flagrant de transparence, et je pense que le ministre devrait revenir sur ses propos et accorder la requête de mon collègue, ici.

Alors, écoutez, on parle de donner des instruments pour protéger la faune, protéger l'environnement, protéger les autochtones, ces populations-là qui vont subir... Il ne faut pas oublier qu'il va y avoir un impact majeur avec la construction de ce mégaprojet. C'est des milliers de kilomètres de terres qui vont être inondés. L'impact est flagrant, est évident

Écoutez, on demande 48 heures, peut-être quatre jours de délai supplémentaire. Dans un projet de loi, M. le Président, qui inclut cinq articles – ça rentre sur une page – alors, écoutez, une fois qu'on va avoir écouté les autochtones, qu'on va avoir étudié, analysé, digéré leurs demandes, leur point de vue... Il ne faut pas oublier que ces gens-là, ils ont une opinion au même titre que vous, que le gouvernement, que l'opposition a le droit de se faire une opinion. Écoutez, on fait mention, dans le projet de loi, spécifiquement des autochtones puis on ne les écoute même pas à l'Assemblée nationale du Québec.

Alors, M. le Président, je pense que le ministre devrait revenir sur sa position et permettre qu'on ajourne nos travaux, le temps d'entendre les autochtones, qui ont le droit de se faire entendre.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député. M. le député d'Orford, sur la motion du député de Jacques-Cartier.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui. Je suis conscient que, dans cet édifice, à l'occasion, il y a des débats parlementaires où on essaie de gagner du temps pour toutes sortes de raisons stratégiques. J'assure les gens qui rient de l'autre bord que, quand nous sommes arrivés ici, nous avons clairement indiqué que nous voulions passer ce projet de loi. Je n'ai pas dit ce soir, j'ai dit que nous voulions passer ce projet de loi, M. le ministre. C'était notre intention. Nous nous sommes rencontrés, Jeff et moi, avant le souper et il allait souper avec une communauté autochtone. Il m'en a fait part. Il m'a dit: Est-ce que tu penses qu'on pourrait les recevoir après le souper? Je vais en parler au ministre; ce que j'ai fait, à l'arrière du trône, aussi. Je vous ai indiqué que nous pourrions être intéressés à écouter un groupe, lequel groupe se montre intéressé à être entendu, mais au début de la semaine prochaine.

Pardon? Je ne le savais pas à ce moment-là. Non, je ne le savais pas à ce moment-là, M. le ministre. Ils étaient après souper au moment où je vous ai parlé. Non, je ne crois pas qu'ils soient... Oui, ils étaient ici pour le souper, effectivement. Moi, je n'ai pas soupé avec eux. Jeff a soupé avec eux.

M. Whissell: M. le Président, est-ce qu'il a la parole?

M. Kelley: Parce qu'il est parti à 19 heures.

M. Benoit: Parce qu'ils avaient à quitter.

M. Whissell: Question de règlement. Est-ce que le député a la parole?

Le Président (M. Lachance): Allez-y, M. le député d'Orford. M. le député d'Orford, vous avez la parole.

M. Benoit: Ce que j'essaie d'expliquer au ministre: nous sommes de très bonne volonté dans ce débat-là. Nous voulons aider le ministre à passer le projet, mais, comme dans Hertel–des Cantons, nous le mettons en garde. Le député de Johnson peut rire. Nous l'avons mis en garde, il y a une année, qu'il était après s'embourber dans une histoire. Il a eu beau envoyer le vice-premier ministre à sa place, il a eu beau vous envoyer, il a eu beau envoyer le premier ministre, il est embourbé par-dessus les oreilles avec une ligne électrique que personne ne veut avoir, et ça va avoir coûté une fortune à tout le monde, cette histoire-là.

Nous, on vous met en garde, M. le ministre, avec la même sagesse qu'on a mis, le député de Johnson, le vice-premier ministre responsable de l'Estrie puis le premier ministre, que vous êtes après vous embourber. Il y a un groupe. On ne vous demande pas 55 groupes, on ne vous demande pas 10 groupes, on ne vous demande pas deux groupes, on vous demande un groupe, une communauté qui vit sur une terre ancestrale qui lui appartient, qu'on va zigonner avec les bulldozers, qu'on va inonder. Ces gens-là seront marqués pour des générations à venir. On vous le demande et, pendant ce temps-là, vous trouvez ça comique. Moi, j'ai bien de la misère avec ça, M. le Président. On leur demande d'écouter. Nous, on vous dit: On est prêt. Après la période des questions, mardi – Jeff – je pense qu'on pourrait avoir la communauté autochtone ici. Ils ont la fin de semaine pour s'organiser. Et, nous, on vous dit: Dès la fin de la période des questions, mardi, donc onze heures et demie, nous serions dans cette salle et nous pourrions entendre ces gens-là. Votre projet de loi, vous l'auriez à la fin de la journée de mardi. C'est assez clair, ça.

Vous pouvez toujours faire ce que vous avez fait avec les gens des Éboulements, avec les gens d'Hertel– des Cantons, dire que ce sont des groupuscules ou des gosseux de poils de grenouille, comme l'a si bien dit le distingué député de Joliette aux gens d'Hertel–des Cantons. Nous, on vous dit: J'espère que vous avez appris le message. Il y a assez de médias qui vous ont dit que vous étiez maintenant hautains, que vous n'écoutiez plus, que c'était la fin d'un gouvernement quand tout le monde est des groupuscules et qu'on possède la vérité. C'est notre job, à l'opposition, de vous le rappeler, de vous dire qu'il y a des gens... C'est leurs terres, c'est leur devenir, c'est leur histoire. Ils veulent être entendus. Nous, on vous dit plus que ça: On va vous le passer, votre projet de loi. On vous dit: Entendez-les après la période des questions, mardi. Les travaux de la Chambre ne doivent pas être compliqués, là, on se tourne les pouces ici depuis des mois parce que vous n'avez pas de projets à déposer. Ça ne doit pas être compliqué de trouver une demi-heure, trois quarts d'heure, mardi.

C'est ça qu'on vous offre. Vous les avez exclus de la conférence de presse, ça vous a revolé en pleine face. Ça a coûté 1 100 000 $. Tobin puis Bouchard avaient l'air de deux tatas pas à peu près. 1 100 000 $, deux innocents en Chine, et puis pas de conférence de presse. J'avais l'impression que vous auriez appris, après Les Éboulements, après Hertel–des Cantons. Mais non! On recommence. Puis là c'est gros, ce que vous êtes après... Je pense que le député, ici, vous l'a dit: C'est gros, ce qu'on est après entreprendre. Et nous, on vous aide de notre collaboration dans cette démarche-là. Vous ne voulez pas l'avoir, vous avez un maudit problème. Ne les invitez pas. Vous vivrez avec. Hertel–des Cantons, vous vivez avec. Ça va coûter un bras, tout ce merdier dans lequel vous vous êtes placés, parce que vous n'avez écouté personne, pas plus les gosseux de poils de grenouille que vous avez traités que l'opposition, que le maire, que le préfet, que tout le monde dans l'Estrie. Le CRE, le Conseil régional de l'environnement, vous a dit: Ne touchez pas à ça! Le CRD vous a dit: Ne touchez pas à ça! Le préfet de la place, qui est adoré par tout le monde, un bon gars, vous ne l'avez pas écouté, etc. Bien oui, il est rouge. Absolument! Il est rouge. Il y a du très bon monde chez les rouges. Il a été élu démocratiquement. Il a été élu à la MRC puis il a été élu dans sa municipalité.

Une voix: ...

M. Benoit: Oui. Je ne vous parlais pas à vous.

(21 h 20)

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Orford, vous avez la parole.

M. Benoit: Oui. Mais vos citoyens ne vous reconnaissent pas en ce moment une très grande habileté à avoir géré ce dossier-là. Puis ça va coûter... Il n'a pas la parole, M. le Président. J'ai 10 minutes, alors...

Le Président (M. Lachance): M. le député de Johnson, c'est le député d'Orford qui a la parole. À moins de...

M. Boucher: ...qui sont prononcés actuellement, M. le Président, je pense qu'il faudra réagir.

Le Président (M. Lachance): Disons que c'est à la limite, mais c'est parlementaire. M. le député d'Orford, est-ce que vous désirez continuer?

M. Benoit: Alors, encore une fois, on a dit, au moment... L'autre point, M. le Président, parce qu'il faut faire attention à ce ministre-là, mais là on va arriver avec les vraies choses.

À 11 heures, mardi, il nous disait, et je vous lis textuellement ce qu'il nous disait, c'est les galées de son discours: «Dérivation de deux rivières, qui sont la rivière Saint-Jean et la rivière Romaine. La rivière Romaine, il y aura création d'un lac ou d'un réservoir de 1 000 km.» Ça, c'était 11 heures, mardi. Le ministre parle, on est là tous bouche bée et nous l'écoutons.

Au même moment, à Radio-Canada – écoutez bien ça – Patrice Roy, mardi, 8 juin: Deux rivières sur la Côte-Nord devaient être dérivées vers le Labrador. Hydro-Québec se contentera d'une seule rivière. Le réservoir a maintenant 700 km². Au même moment où le ministre nous dit qu'il y a deux rivières, qu'il y a 1 000 km, un communiqué de presse d'Hydro-Québec nous annonce qu'il ne va y avoir qu'une rivière et puis que ça va être 700 km². Moi, je n'en reviens pas encore. Est-ce qu'il a induit la Chambre en erreur? Est-ce qu'il le savait? S'il le savait, il a induit la Chambre en erreur. Il l'a dit au même moment.

Ou bien il ne le savait pas. Il est inconcevable dans l'État québécois qu'Hydro-Québec puisse faire des affaires comme ça et que le ministre de l'Environnement ne soit pas informé. Et puis vous comprendrez que, de ce côté-ci de la Chambre, on veuille être un peu informé par des groupes qui vont être les premiers impliqués dans ce débat-là. Puis que le ministre refuse, c'est inacceptable.

Et, encore une fois, moi, mon intention, c'était de sortir d'ici à 21 heures ce soir. Mais, à partir du moment où cette communauté autochtone... Parce que oui, l'opposition a fait sa job, oui, le député les a rencontrés, oui, le député a communiqué avec eux, ce que vous n'avez pas fait. Et, à partir du moment où j'ai su, en entrant, à 20 heures, quand je suis allé voir le ministre, qu'il y avait une communauté autochtone qui voulait être entendue, je le lui ai indiqué. Je croyais honnêtement qu'on pourrait les entendre ce soir, c'était notre intention, et nous serions sortis d'ici à ving et une heures trente probablement.

Nous avons appris du député que nous ne pouvions pas les entendre ce soir pour toutes sortes de raisons techniques. Très bien. Nous sommes prêts à les entendre, nous, on vous dit dès la rentrée mardi. Votre projet de loi, vous l'aurez mardi soir, mais nous aurons écouté cette communauté. Vous ne voulez pas l'entendre, vous vivrez avec, comme vivez avec dans Hertel–des Cantons, comme vous vivez avec dans Les Éboulements et un peu partout où vous êtes connus des groupuscules; et puis des groupuscules, ça a l'air que vous n'écoutez pas ça, vous autres. Alors, ne les écoutez pas.

Le Président (M. Lachance): Sur la motion du député de Jacques-Cartier, est-ce que quelqu'un d'autre veut intervenir? Quelqu'un qui n'est pas encore intervenu? M. le député de Johnson?


M. Claude Boucher

M. Boucher: Oui, M. le Président. Je n'aurais pas beaucoup d'intérêt à intervenir dans le dossier parce que l'opposition nous a dit qu'elle voulait le projet de loi puis en même temps elle nous dit qu'elle ne le veut pas, de toute évidence. Et, comme on a fait référence à Hertel–des Cantons, j'aimerais rappeler à l'opposition que, s'il n'y a pas eu un débat dans un cadre formel, il y en a eu un sur la place publique, il y en a eu un dans les médias.

Et, je le répète, le 30 novembre, le peuple de mon comté a parlé et il a dit ce qu'il pensait de la décision gouvernementale. Et, comme le vote du Parti québécois a augmenté sur le territoire même où a passé la ligne, M. le Président, il faudrait rappeler à nos amis d'en face qu'ils peuvent faire l'évaluation la plus populaire de toutes sortes de façons, la seule évaluation qui est valable, c'est celle du vote. C'est là que le peuple parle, et il a parlé.

Et le gouvernement, par le projet de loi qui est sur la table, nous propose une façon de consulter les gens, prévoit un mécanisme pour le faire et je comprends mal l'opposition qui déplore ce qui est arrivé dans Hertel–des Cantons puis qui par ailleurs tente de bloquer systématiquement ce projet de loi là et, de toute évidence, veut le faire. Voilà, M. le Président, c'est des langues de bois et c'est avec ça qu'on vit. Merci.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Shefford.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. J'ai bien entendu le dépôt de la motion du député de Jacques-Cartier. Je siège avec certains de mes collègues sur cette commission-là où on étudie la loi sur Hertel–des Cantons. Ce que j'ai entendu aujourd'hui, ce soir, me désole énormément. On peut se poser des questions sur le modèle québécois dont nous parle souvent le premier ministre, dont nous parle le gouvernement. Est-ce que c'est ce modèle québécois là qui fait en sorte que maintenant on se déconnecte de la population, qu'on devient arrogant? On a parlé beaucoup d'arrogance, M. le Président. Tout simplement, ce qu'on demande, c'est d'entendre un groupe autochtone directement concerné par le projet de loi. On refuse d'entendre ces gens-là. On dirait que ce gouvernement-là a le monopole de la vérité et, de plus en plus, devient arrogant.

M. le Président, le député de Johnson nous parlait de la commission sur Hertel–des Cantons. C'est la première fois, dans ma carrière de parlementaire – et je suis convaincu que plusieurs ici, à l'entour de la table, ont le même sentiment ou ressentiment – c'est la première fois, par exemple, dans Hertel–des Cantons, où on prend un acte qui est illégal et on le rend légal par un projet de loi.

Cet après-midi, je siégeais sur une autre commission où ça semble la règle maintenant de bulldozer les gens. On apprenait dans un projet de loi sur les chevaux que le gouvernement nommait la moitié du conseil d'administration à vie. On se demande quel genre de projet de loi nous est déposé, à qui on s'informe pour faire des projets de loi. Seulement à ses amis? Seulement au modèle québécois? Puis le modèle québécois, il semble que le gouvernement, c'est les amis du parti.

On sait très bien, M. le Président, que les communautés autochtones ne sont pas nécessairement tentées de voter pour le parti ministériel. Je pense, M. le Président, que c'est carrément de la vengeance. Ce qu'on fait présentement, là, c'est écarter les gens qui ne sont pas de la gang. Puis, dans un projet de loi dont je vous parlais, après-midi, on nomme ses chums à vie. Par contre, les gens qui sont directement concernés par les projets de loi, eux, on ne veut pas les entendre. On les traite de groupuscules ou, comme disait le distingué député de Joliette, comme le soulignait notre collègue d'Orford, on les traite de «gosseux de poils de grenouille». Puis je pense que le député de Johnson, s'il veut être honnête puis nous conter toute l'histoire, lui aussi, à l'occasion, s'est battu avec ces gens-là. Il a changé de discours depuis le dépôt du projet de loi, et j'imagine qu'on lui a tordu un bras, qu'on lui a parlé du modèle qu'on voulait avoir de leurs députés, leur modèle québécois, donc.

M. le Président, je pense que c'est une simple question de civisme d'écouter ces gens-là, les gens qui sont directement concernés par le projet de loi. En 1994 – puis vous vous en souviendrez, M. le Président – lors de l'élection, on parlait de L'autre façon de gouverner . Il semble que l'autre façon de gouverner, ce n'est pas celle qui a été mise en évidence en 1994. L'autre façon de gouverner qu'on a, c'est de tout simplement privilégier ses amis; eux, on les écoute. Mais les gens qui n'ont pas l'opinion, qui n'ont pas les propos que l'on veut entendre, on les bâillonne carrément.

M. le Président, j'ai comme l'impression que le gouvernement retarde lui-même ses travaux. On accuse souvent l'opposition de retarder les travaux, sauf que, dans la réalité qui nous occupe ce soir, il serait très simple d'accepter de rencontrer ces gens-là. Ils étaient ici ce soir. Ça aurait été le simple civisme de les écouter, ça n'aurait pas retardé les travaux de la commission. Le député d'Orford nous disait, il y a quelques instants, qu'il était prêt, que l'opposition était prête à donner son accord et adopter un projet de loi en ce sens-là, sauf qu'il y a une façon d'agir.

Et puis, si le gouvernement avait voulu immédiatement écouter ces gens-là, peut-être qu'on ne serait pas ici à essayer de convaincre le gouvernement en parlant un après l'autre. Naturellement, la pédagogie nous demande de répéter et de répéter, sauf que ça nous prend quelqu'un non seulement qui nous entend, mais quelqu'un qui nous écoute. Donc, ça aurait été la moindre des choses non seulement d'entendre ce groupe autochtone, mais aussi de les écouter. Le gouvernement, présentement, a un grand problème d'écoute. Ce serait la moindre des choses que le ministre lève la main et demande la parole puis nous dise oui à l'opposition. Ça serait très simple d'écouter ce groupe-là, le projet ne serait pas retardé plus tard que la fin de la session. Ça nous éviterait d'en arriver à ce genre de conversation comme on a ici ce soir.

Donc, M. le Président, moi, je suis déçu. Je suis déçu du gouvernement, comme beaucoup de citoyens. Le député de Johnson nous disait que c'est eux qui ont été élus. Je lui rappelle que la grande majorité des gens ont voté contre le gouvernement, et ça, il doit en tenir compte.

(21 h 30)

Une voix: Dans l'Estrie.

M. Brodeur: Y compris dans l'Estrie. Donc, M. le Président, moi, je suis déçu. Je suis gêné aussi, comme Québécois, de ne pas avoir pris la peine d'entendre ces gens-là. Donc, le gouvernement se donne le monopole de la vérité, refuse d'entendre les gens directement concernés, comme on a refusé d'entendre beaucoup de gens sur Hertel–des Cantons. Ce qu'on fait, on invite ses amis à donner des opinions; je veux bien, sauf que les gens qui sont directement concernés n'ont pas eu la chance de s'exprimer devant les autorités compétentes, soit le BAPE, afin d'émettre une opinion sur la ligne Hertel–des Cantons.

On parle de groupuscules et on nous parle de ça à tort. Le député d'Orford en a été témoin, le député de Richmond aussi. J'ai des gens de mon comté qui ont été directement affectés par la ligne Hertel–des Cantons, et les citoyens qui suivent le dossier sont affectés aussi, en ce sens que la démocratie est bafouée au Québec, présentement. Et on a encore l'exemple ce soir, dans le projet de loi n° 60, que la démocratie est à nouveau bafouée.

M. le Président, on a l'impression que le gouvernement ne veut entendre que ses amis ou les gens qui disent pareil comme eux. Je suis convaincu que, si le gouvernement n'avait eu aucun doute que ce groupe aurait dit comme eux, probablement qu'il l'aurait entendu. Si le gouvernement n'avait eu aucun doute que ce groupe de personnes aurait voté pour le Parti québécois à la prochaine élection, je suis convaincu qu'il aurait entendu ce groupe-là.

Sauf qu'on se retrouve devant encore une situation que je qualifierais d'inacceptable, que les citoyens du Québec qualifient aussi d'inacceptable, soit de tout simplement appliquer la démocratie à laquelle le Québec était habitué... et je vous dis, M. le Président, «était habitué» parce que, aujourd'hui, et particulièrement depuis l'élection du Parti québécois le 30 novembre, s'est installée une arrogance sans précédent, arrogance qui a été reprise dans plusieurs éditoriaux, dans plusieurs journaux, et je pense que le gouvernement fait la sourde oreille, joue à l'autruche, se cache en-dessous des bureaux.

M. le Président, aussi, je fréquente les commissions parlementaires depuis quelques semaines. On entend très peu – très, très peu – les députés ministériels. Je prends mes collègues à témoin et puis je suis arrivé sur la commission parlementaire il y a quelques minutes, mais je suis convaincu, en écoutant la télé, qu'on n'a pas entendu ces députés-là s'exprimer sur ce sujet-là. Je ne sais pas s'ils expliqueraient réellement les enjeux à leurs commettants chez eux, dans leur bureau de comté, et s'ils diraient à leurs commettants: Si vous êtes d'accord avec moi, on vous écoute. Si vous n'êtes pas d'accord, bien, vous repasserez. Et puis, tout simplement, en les repoussant du revers de la main comme on a fait avec le groupe autochtone de ce soir, comme on a fait avec les gens d'Hertel–des Cantons, comme on a fait avec un paquet de gens qui ne sont pas d'allégeance du Parti québécois.

Donc, M. le Président – vous me dites qu'il ne me reste qu'une minute – je tends la main au ministre pour qu'on puisse en arriver à une entente le plus rapidement possible, entendre les gens qui sont directement concernés par le projet de loi. M. le Président, c'est tout simplement du savoir-vivre de la part du gouvernement et, si le gouvernement du Québec entache la démocratie, qui la fera appliquer? C'est la question que je vous pose. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député.

Mme Normandeau: M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Bonaventure...

Mme Normandeau: Si vous permettez, en fonction de l'article 132 du règlement, je souhaiterais prendre la parole sur la motion qui a été présentée par mon collègue de Jacques-Cartier...

Le Président (M. Lachance): Ça me prend...

Mme Normandeau: ...sur la base du fait que je suis critique officielle en matière de Ressources naturelles.

Le Président (M. Lachance): Ça me...

Mme Normandeau: Alors, M. le Président, peut-être demander...

Le Président (M. Lachance): Oui. Un instant, madame!

Mme Normandeau: ...aux membres de la commission...

Le Président (M. Lachance): Un instant! Un instant!

Mme Normandeau: ...s'il y a consentement.

Le Président (M. Lachance): Ça me prend le consentement des membres de la commission. Vous n'êtes pas membre de la commission.

M. Benoit: Juste un point d'éclaircissement, M. le Président. Notre consoeur est porte-parole en matière d'énergie et vous réalisez que le projet de loi – l'esprit même du projet de loi – il y en a trois: il y a l'énergie, il y a l'environnement et, bien sûr, les communautés autochtones. Elle est l'experte de l'opposition en matière d'énergie, et il me semble que, devant l'imbroglio dans lequel on se trouve, je pense que l'éclairage qu'elle pourrait nous apporter pourrait nous aider. Et j'ai de la misère à comprendre...

Je comprends qu'on ne veut pas écouter des groupuscules, mais peut-être qu'on pourrait écouter la porte-parole de l'opposition en matière d'énergie.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Orford, vous avez très bien plaidé, sauf que le règlement est clair, il est extrêmement clair, et ça me prend le consentement unanime des membres de la commission pour céder la parole à la députée de Bonaventure.

M. Bégin: Encore eût-il fallu qu'ils la nomassent, ce qu'ils n'ont pas fait.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Encore eût-il fallu qu'ils la nomassent.

M. Benoit: Est-ce que nous pouvons en venir à un vote nominal, M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Non. Il n'y a pas de vote nominal là-dessus. Il peut y avoir un vote nominal sur la motion qui a été déposée par le député de Jacques-Cartier, mais il n'y a pas vote nominal sur le fait d'accepter ou de refuser...

M. Benoit: On va refuser à un parlementaire de parler, même s'il est le porte-parole officiel d'un sujet dont nous traitons.

Le Président (M. Lachance): Je comprends qu'il n'y a pas consentement; je dois appliquer le règlement.

M. Benoit: Bon! Alors, non seulement les groupuscules ne peuvent pas parler, mais là voilà que les députés de l'opposition, dont c'est leur sujet, ne peuvent pas parler non plus à l'Assemblée nationale. On rempironne, M. le Président, on rempironne.

Le Président (M. Lachance): Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la motion du député de Jacques-Cartier? Il n'y en a pas. Alors, nous allons prendre en considération l'article 1.

M. Kelley: Il faut voter sur ma motion.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que vous demandez...

M. Kelley: Est-ce que c'est adopté? J'imagine fort bien.


Mise aux voix

Le Président (M. Lachance): Je m'excuse, je m'excuse, oui. Est-ce que la motion est adoptée?

M. Benoit: Est-ce que vous pouvez relire la motion, M. le Président, avant qu'on vote dessus, pour être sûr que les gens ont bien compris la motion?

M. Kelley: Vote nominal, s'il vous plaît.

M. Benoit: Et un vote nominal.

Le Président (M. Lachance): Je vais essayer de comprendre la calligraphie de notre collègue:

«Conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, que la commission des transports et de l'environnement, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 60, entende l'Alliance Innu.»

Alors, c'était ça, la motion. Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Rejeté.

Le Président (M. Lachance): Rejeté.

M. Benoit: Un vote nominal, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Alors, M. le secrétaire, si vous voulez faire l'appel pour le vote nominal.

Le Secrétaire: M. Kelley (Jacques-Cartier)?

M. Kelley: Pour.

Le Secrétaire: M. Benoit (Orford)?

M. Benoit: Pour.

Le Secrétaire: M. Whissell (Argenteuil)?

M. Whissell: Pour.

Le Secrétaire: Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys)?

Mme Jérôme-Forget: Pour.

Le Secrétaire: M. le ministre de l'Environnement?

M. Bégin: Contre.

Le Secrétaire: M. Gagnon (Saguenay)?

M. Gagnon: Contre.

Le Secrétaire: M. Boucher (Johnson)?

M. Boucher: Contre.

Le Secrétaire: M. Côté (La Peltrie)?

M. Côté (La Peltrie): Contre.

Le Secrétaire: M. Deslières (Salaberry-Soulanges)?

M. Deslières: Contre.

Le Secrétaire: M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Abstention.

Le Secrétaire: C'est 5 contre, 4 pour, 1 abstention.

Le Président (M. Lachance): Alors, la motion est rejetée.

M. le député de Jacques-Cartier.


Motion proposant d'entendre le Mamit Innuat

M. Kelley: Je propose la motion préliminaire suivante:

«Conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale;

«Que la commission des transports et de l'environnement, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 60, entende le Mamit Innuat, regroupement des Montagnais du Québec.»

Le Président (M. Lachance): Alors, évidemment la motion est recevable. M. le député de Jacques-Cartier, sur votre motion.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Bien, moi, M. le Président, je ne voulais pas procéder comme ça. Je ne veux pas présenter des motions. Je voulais avoir simplement un droit de réplique aux propos du ministre parce que je pense que la question ici est fondamentale pour le succès de ce projet.

Le ministre a parlé tantôt de la confusion dans la pensée du député de Jacques-Cartier, et ça, ce n'est pas très important. Qu'un député de l'opposition soit confus, ce n'est pas grave. Mais ce que j'insiste, ce soir, pour dire, c'est qu'il y a les questions sans réponse chez les Innu, nos partenaires. Et ce que j'essaie de faire ce soir, c'est de dire aux membres de la commission et de refléter, de la façon la plus fidèle possible, leur questionnement; ils ne comprennent pas le projet de loi n° 60. Alors, moi, je pense qu'on a tout intérêt à faire même un genre d'exercice pédagogique, à les inviter à s'asseoir ici. Je ne demande pas...

Le ministre a fait une blague tantôt que je veux présenter sept motions pour chacune des communautés; je n'ai aucunement l'intention de le faire. J'ai voté pour le projet de loi en principe, hier soir. Je suis prêt à dire: S'il veut, d'ici 20 minutes, disposer des articles 2 à 5, ce soir, on peut les adopter tous.

M. Benoit: Exact.

(21 h 40)

M. Kelley: Moi, je n'ai rien contre ça. Je n'ai aucun intérêt à retarder le travail de la commission. Je dis qu'est-ce que je dis ce soir, parce que je crois sincèrement...

Le ministre dit que c'est juste préalable et que ça nous donne la loi habilitante pour les consulter après. Peut-être que c'est clair dans sa tête. Peut-être que c'est clair dans sa pensée. Mais les Innu ne comprennent pas.

Alors, si, comme membre de la commission d'un projet qui est d'une grande envergure – on parle de milliards de dollars, de milliers d'emplois – très important – entre autres je vois le député de Saguenay, en face, très important pour sa région quant à la création d'emplois – qu'est-ce que je demande, aujourd'hui? Qu'on prenne une couple de jours de plus avant d'entamer l'article 1.

Si le ministre veut 2 à 5, dans 15 minutes, on est prêt à le donner. Mais je dis: Préalablement... Et je ne demande pas qu'on fasse 30 groupes. Je ne dis pas que je veux entendre 10 groupes. Je ne dis pas que je veux entendre cinq groupes. On peut s'asseoir, convenir sur un groupe qui peut venir ici pour m'expliquer et pour expliquer aux autres membres de la commission l'impression des nations innu sur la phrase suivante: «Toute partie autochtone intéressée peut également être signataire de l'entente.»

Parce que, M. le Président, de bonne foi, j'ai discuté ça informellement avec le ministre, on a convenu sur une certaine lecture de cette phrase, et j'étais honnêtement surpris quand j'ai lu la même phrase, ce soir, aux deux leaders innu. Ils ont une compréhension complètement différente. Alors, oui, il y a un problème ici, il faut clarifier les choses.

Je ne veux aucunement éterniser nos travaux, mais je dis: Pour un projet si important pour Terre-Neuve, pour le Québec, de demander aux membres de la commission qu'on prenne une couple de jours de plus avant de l'adopter avant la fin de la session... Je ne demande pas la lune; je ne demande pas qu'on reporte ça à l'automne. Je dis: Est-ce qu'il y aurait moyen qu'on puisse s'asseoir avec un représentant ou des représentants? L'Alliance Innu regroupe toutes les communautés. C'est pourquoi j'ai proposé ça préalablement, de les recevoir.

Peut-être qu'après avoir fait une heure d'échange avec eux autres on va constater que la formulation qui est là est la meilleure et on va l'adopter telle quelle. Mais peut-être qu'on va, en écoutant les personnes des nations innu, dire: Oui, je vois comment ils peuvent interpréter ça autrement. Si on change une couple de mots, si ça rend ça plus clair, si c'est plus engageant envers le gouvernement qu'il y aura une place ou un rôle pour les autochtones à jouer dans cette étude, je dis: Tant mieux, parce qu'on parle d'un projet qui va durer 10 ans. Et qu'est-ce qu'on exige, ce soir, de notre côté? C'est de prendre un autre trois ou quatre jours pour attacher ça comme il faut, M. le Président, avant de l'adopter.

Mais, comme j'ai dit, le gouvernement essaie de nous prêter des intentions. Nous avons voté pour, hier soir. Moi, je suis quand même pour le principe, parce que je pense que c'est un projet de loi intéressant pour le Québec et ce n'est pas ça que je veux remettre en question. Mais, si je dis: Si on prend une couple de journées pour inviter un petit peu plus formellement...

Oui, c'est vrai que le groupe que j'ai rencontré ce soir avait des billets d'avion sur un vol de 19 heures. Je ne savais pas ça quand je les ai reçus, et ce n'est pas de ma faute; ils avaient d'autres engagements qu'ils ont pris à Sept-Îles, ce soir.

Le député de Johnson trouve ça drôle, mais je répète la vérité. Il y avait une autre rencontre ce soir à Sept-Îles. Ils sont prêts à revenir prochainement.

Alors, si le ministre veut adopter de 2 à 5 tout de suite, pas de problème. Mais est-ce que quelqu'un peut me dire, dans l'organisation de nos travaux, si on laisse en suspens l'article 1, si, après ça, ça prend le consentement de l'opposition pour faire la prise en considération et l'adoption finale dans une même séance. Je pense qu'on devrait être assez bon de plaider auprès de nos leaders qu'on peut faire ça.

Alors, il n'y a aucun problème. On veut qu'on adopte le projet de loi avant la fin de nos travaux, d'ici le 23 juin, et ce n'est pas ça qui est en question. Mais je propose et je suggère au ministre et, comme je dis, je veux un dialogue, mais, si le ministre insiste que je dois proposer une motion à chaque fois pour établir un droit de parole, c'est laborieux, mais je peux le faire. Mais je pense avant tout que, si on veut clarifier la situation, la confusion que le ministre a mentionnée, ce n'est pas chez moi. Moi, je répète les questions que les leaders innu m'ont posées ce soir, pas plus que ça.

Alors, la confusion qui existe, la confusion qui est importante pour la société québécoise, c'est que le projet de loi, dans la tête du leadership innu, n'est pas clair. Alors, arranger nos travaux pour passer une heure avec eux autres avant de l'adopter, je ne demande pas la lune, M. le Président, mais je pense qu'on a tout intérêt, si on veut le succès du projet, parce que, moi, je parle du succès du projet, moi, je fais écho – et je ne fais pas ça tout le temps – aux paroles du premier ministre qui a dit: Forcément, les Innu seront partenaires.

Si on veut le faire, si on veut les associer dès le départ, on a une occasion en or. On ajourne. On adopte 2 à 5. On adopte le titre. Qu'est-ce que le ministre veut, de notre côté, pour faire preuve de notre bonne volonté? Mais j'aimerais entendre des représentants innu sur une phrase, avant de l'adopter, et après ça, comme j'ai dit, peut-être qu'on va décider à la fin que c'est la meilleure formulation possible, mais peut-être qu'il y aura d'autres suggestions.

Alors, moi, je suis prêt à tenir le pari de les recevoir aujourd'hui sur un projet qui va créer de l'emploi pour des dizaines d'années, qui va créer des profits importants pour Hydro-Québec, pour la société de Terre-Neuve, je pense que ça vaut la peine. Ça vaut la peine, M. le Président, et je m'arrête ici.

Je peux prendre mon 30 minutes. Si le ministre pense que je suis en train de faire un filibuster, c'est loin de ça. J'ai présenté une deuxième motion uniquement pour avoir un droit de réplique, parce que le ministre a dit que le député est confus. Ça arrive des fois. Peut-être que ça arrive tout le temps, mais ça, ce n'est pas du tout important dans nos débats, ce soir. La chose qui est très importante pour la société québécoise, il faut associer la nation innu dès le départ. Je propose un moyen de le faire qui, je pense, ne pose aucun problème pour l'adoption du projet de loi n° 60, qui ne pose aucun problème pour l'organisation de nos travaux, qui va bonifier le projet de loi n° 60; j'y crois fermement. C'est pourquoi je fais la plaidoirie ce soir, parce que je pense qu'on a tout intérêt à le faire. On n'a rien à perdre. Sinon, le ministre peut continuer. On peut dire qu'on va être vos partenaires, on va vous consulter un jour.

Ils veulent être consultés sur la portée du projet de loi n° 60. Les Innu veulent le comprendre. Je trouve que c'est une demande tout à fait recevable, M. le Président, et, si ça nous prend une couple de journée pour donner suite à la demande, pourquoi pas? Et si, pour démontrer notre bonne foi, on procède à l'adoption des articles 2 à 5, on laisse en suspens l'article 1, on adopte le reste de l'article 1, il reste juste la phrase en question... On suspend, je ne sais pas...

Mais est-ce qu'il y aurait moyen, avant d'adopter ça... parce que, pour le ministre, la réponse qu'il m'a donnée était exacte.

Une voix: C'est ça.

M. Kelley: La réponse que sa collègue la ministre de la Santé et des Services sociaux a donnée sur le projet de loi n° 27 – qui est en train de toucher la loi sur la santé crie qui découle de la Convention de la Baie James, qui est un traité – elle a dit: Ah! je n'étais pas obligée de mentionner ça aux Cris. Ce n'était qu'une affaire de concordance.

M. le Président, il faut changer notre façon de penser. Il faut changer notre façon de faire, et si c'est juste: Les autochtones sont une question de concordance, si c'est juste une mécanique technique entre nous, on peut toujours garder ce langage, mais ça n'a pas porté fruit dans le passé.

Pourquoi je fais cette plaidoirie ce soir? Je crois fermement que, si on offre, dès maintenant une ouverture chez les Innu, nos chances de succès dans ce projet seront meilleures. Merci beaucoup.

(21 h 50)

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, sur la motion du député de Jacques-Cartier.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Alors, je suis arrivé ici, ce soir, à 19 h 55 environ, et le député d'Orford m'a mentionné qu'il proposerait – ou son groupe parlementaire – une motion pour entendre un groupe qui soupait avec son collègue, le député de Jacques-Cartier. Alors, j'ai dit: Pas de problème à les entendre. J'ai même attendu, avant de commencer les travaux, que le député de Jacques-Cartier soit arrivé, puisqu'il devait arriver avec le groupe. Et, maintenant, on nous formule une demande pour entendre ce groupe.

Mais, curieusement, on apprend que ce groupe, rappelons-nous, a été convoqué par le député de Jacques-Cartier par des fax, quand il a vu hier que les groupes n'étaient pas convoqués. Alors, des groupes qui viennent de la Côte-Nord sont venus à Québec rencontrer le député de Jacques-Cartier, ont soupé avec lui jusqu'à huit heures, le soir, mais ils ne peuvent pas être présents à la commission parlementaire qui commence à huit heures. On fait une motion pour les entendre, mais on dit: Ils ne peuvent être là, ils sont partis.

M. le Président, il faut être sérieux. Si toute cette démarche a été entreprise...

M. Kelley: Question de règlement, M. le Président.

M. Bégin: ...pour les faire entendre...

M. Kelley: Question de règlement, M. le Président.

M. Bégin: ...je ne comprends pas qu'ils soient partis...

M. Kelley: Question de règlement, M. le Président.

M. Bégin: ...à deux minutes...

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Bégin: Oui.

Le Président (M. Lachance): Sur la question de règlement, si c'en est vraiment une.

M. Kelley: Non, non, juste pour rappeler à la présidence, moi, je n'ai pas le pouvoir de convoquer personne. Et je pense que c'est très important de dire que je n'ai pas le pouvoir de convoquer les témoins. Vous êtes le président de la commission, pas moi, et je n'ai aucunement le pouvoir de convoquer personne.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Bégin: M. le Président, je suis d'accord avec le député de Jacques-Cartier qu'il ne peut convoquer personne. Mais, lorsque l'on fait une démarche pour faire venir des gens à Québec, qu'ils viennent ici, après s'être déplacés, d'après ce que je comprends sur plusieurs centaines de kilomètres, dans un court laps de temps, qu'ils soupent avec le député de Jacques-Cartier, que le député de Jacques-Cartier nous dise: Je voudrais les entendre, mais qu'il dit: Malheureusement, ils sont partis... Et il faut comprendre que le député d'Orford m'a informé lui-même de cette démarche au préalable, juste avant de commencer la session.

Alors, je suis très étonné que les gens qu'on veut entendre étaient avec nous quelques minutes auparavant, mais que, tout à coup, au moment de les entendre, alors que c'est si important, ils sont partis. Je ne comprends pas. Je ne comprends absolument pas le député de Jacques-Cartier.

Je dis: La motion est sans objet. C'est même étonnant qu'on fasse une telle démarche au moment où on avait ces gens-là près de nous. Puis le député d'Orford, son collègue, était d'accord et, surtout, connaissait le système puisqu'il m'a demandé de faire entendre ce groupe-là, et j'ai dit oui. Et, au lieu de les garder ici, à Québec, avec eux, qu'on puisse les entendre ici, il les renvoie chez eux. Je trouve que c'est bizarre comme comportement. Après avoir faxé pour les convoquer ici puis les entendre puis, tout à coup, on les envoie. C'est quoi, cette façon de faire?

M. Kelley: Non, mais est-ce que je peux...

M. Bégin: Alors, M. le Président, je pense que la motion, elle n'est pas faite dans le but d'entendre ces gens-là, puisqu'on les a envoyés. Si on avait vraiment voulu les avoir, on les aurait gardés ici après les avoir convoqués.

M. Benoit: M. le Président.

M. Bégin: Nous avons entendu...

M. Kelley: M. le Président, est-ce que je peux répondre, parce que je suis...

M. Bégin: Non, parce que...

Une voix: ...son droit de parole.

M. Kelley: ...interpellé directement dans ça, M. le Président?

Le Président (M. Lachance): Vous n'avez pas terminé, M. le ministre?

M. Bégin: Non, non, pas du tout, pas du tout, je n'ai pas terminé, puisque des questions...

M. Benoit: M. le Président.

M. Bégin: ...ont été soulevées tout à l'heure, et j'aimerais qu'on en reparle.

M. Benoit: Juste un instant. Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Oui, sur la question de règlement.

M. Benoit: Le ministre est après faire un jugement d'intention. Oui, j'ai parlé au ministre. Je lui ai dit que le député de Jacques-Cartier était après souper, qu'il était de notre intention d'entendre des groupes. Il m'a demandé: Est-ce que ce sera ce soir? Ma réponse a été: Je ne le sais pas, ils sont après souper. Quand le député est arrivé, il m'a indiqué que ces gens-là avaient des billets, ils avaient dû quitter. L'autre erreur du ministre, nous n'avons...

Le Président (M. Lachance): Ce n'est pas une question de règlement, ça, M. le député.

M. Benoit: ...oui, question de règlement...

Le Président (M. Lachance): M. le député, là...

M. Benoit: ...nous n'avons pas invité les gens, c'est ces gens qui sont venus à Québec.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Orford, vous avez la possibilité, dix minutes, tantôt, de prendre la parole, à la suite du ministre. Alors, vous pourrez le faire. M. le ministre, on continue.

M. Kelley: M. le Président.

M. Bégin: Alors...

M. Kelley: M. le Président. Quand même...

M. Bégin: M. le Président, est-ce que c'est une question de règlement?

M. Kelley: M. le Président, sur une question de règlement, moi, je pense qu'on a la possibilité de rétablir les faits.

Le Président (M. Lachance): Oui, vous aurez l'occasion de le faire tantôt; votre collègue, M. le député d'Orford.

M. Kelley: Non, non, mais moi-même, parce qu'on m'a prêté des intentions dans le discours du ministre. On m'a dit que j'ai convoqué les personnes. . On est en train de détourner... Moi, je veux juste rappeler les faits, tout simplement. Après ça, le ministre peut les interpréter comme il veut. Qu'est-ce que j'ai fait après notre débat, hier soir, au salon bleu? J'ai pris la peine d'envoyer son discours, le discours de mon collègue le député d'Orford, mon discours, juste les envoyer, pour dire: Le projet de loi n° 60 a été soulevé en Chambre hier soir, avez-vous des commentaires?

Le Président (M. Lachance): Vous avez déjà eu l'occasion, M. le député de Jacques-Cartier, de...

M. Kelley: Non, non, mais je pense... Parce que je veux rectifier les faits...

M. Lachance: Non, non, non.

M. Kelley: ...parce qu'on a dit que je les ai convoqués à Québec. Je n'ai pas fait ça.

M. Benoit: C'est ça.

M. Kelley: Et de dire ça, le ministre est en train d'induire la commission en erreur.

M. Gagnon: M. le Président, vous avez dit... C'est une question de règlement. C'est quoi, son article? Avez-vous donné la parole?

Le Président (M. Lachance): Ce n'est pas une question de règlement, vous le savez très bien. Je suis assez souple, mais je pense qu'il faudrait revenir.

M. le ministre, vous aviez la parole. Et, ensuite, si quelqu'un du côté de l'opposition veut répliquer aux propos du ministre, vous pourrez le faire. M. le ministre.

M. Bégin: Merci, M. le Président. Donc, nous aurions pu les entendre. J'étais disposé et mes collègues étaient également disposés à les entendre. Tout à l'heure, le député d'Argenteuil mentionnait que nous aurions dû adopter l'entente sur l'harmonisation, que tous les problèmes auraient été réglés, et donc que nous n'aurions même pas eu besoin d'entendre les groupes puisque tout était réglé.

Malheureusement, je crois qu'il y a méprise sur le sens qu'on doit donner à cet accord puisque, dans une décision qui a été rendue par la Cour fédérale, la juge Reed a déclaré, le 27 avril dernier, que cette entente sur l'harmonisation des lois «is so devoid of factual content that it is impossible to decide what it means». Alors, vous comprenez que c'est un instrument juridique de faible portée.

Je cite le passage suivant du jugement de la juge Reed, à la page 2, qui dit: «In response, the respondent...» «The respondent», dans ce cas-ci, c'est la ministre de l'Environnement, Mme Stewart. «In response, the respondent asserts that the agreements are not justiciable because they are not decisions of the Federal Board Commission or other Tribunal and, in any event, they do not add any legal effect.» Et le reste du jugement est à l'avenant. C'est que cet accord d'harmonisation ne sert à rien. Il n'a pas de contenu, il n'a pas d'effet légal et qu'il ait été signé ou pas par le Québec n'aurait rien changé, de toute manière. Il aurait fallu, pour agir, le faire.

Alors, de vouloir dire que les méchants séparatistes n'ont pas voulu signer l'accord d'harmonisation – s'ils l'eussent fait, nous aurions évité d'avoir à adopter une loi – c'est des mots creux puisque ça n'a aucun effet. Et ça, ce n'est pas une opinion du ministre de l'Environnement du Québec, c'est la juge fédérale Barbara Reed. Et je réfère à un article paru dans The Gazette , le 8 mai 1999, et, évidemment, j'ai ici copie de la version anglaise du jugement de la Cour fédérale. Et tout est à l'avenant de ce que j'ai dit tout à l'heure. Alors, l'entente sur l'harmonisation ne voulait rien dire.

M. Whissell: M. le Président, est-ce que le ministre est prêt à déposer le document?

M. Bégin: Ah! Tout à fait! Absolument! Ça me fait extrêmement plaisir de le déposer et dire que justement on n'aurait rien changé. Ça prouve que ça n'aurait pas servi à grand-chose.

Par ailleurs, hier et cet après-midi, on a parlé, qu'est-ce que voulaient dire les mots – pardon, je cherche l'expression – ah oui: «toute partie autochtone intéressée», d'où ça pouvait venir et que ça ne pouvait pas être valable de qualifier les groupes autochtones de «toute partie intéressée».

Alors, j'ai fait une petite recherche pour découvrir que, dans la Convention de la Baie James, à laquelle nous référaient si gentiment les députés de l'opposition hier, nous retrouvons l'expression «la partie autochtone inuit intéressée», «la partie autochtone intéressée». C'est curieux. Dans la Convention de la Baie James qui, à moins d'abus de ma part, a été signée par le premier ministre de l'époque, M. Robert Bourassa, qui, je sache, ne pouvait pas être taxé de vouloir qualifier de manière indue les représentants de la Convention de la Baie James,c'est pourtant le sens des mots qui a été retenu, pas le sens, mais les mots mêmes qui ont été retenus parce qu'ils permettent de désigner les parties autochtones.

(22 heures)

Et là il y en a plusieurs groupes: il y a les Innu, il y a les Montagnais, il y a différentes communautés de Montagnais qui peuvent être intéressés. Et ce n'est pas au gouvernement du Québec de dire: Vous êtes obligés de venir être partie à une entente. Nous vous offrons cependant, nous vous tendons la main pour que vous puissiez être associés, si vous le voulez bien. Alors, vous êtes une partie autochtone intéressée par rapport à une partie autochtone qui serait non intéressée. Par exemple, les Montagnais de Uashat au Lac-Saint-Jean, à la Pointe-Bleue, ne seraient pas une partie autochtone intéressée. C'est une partie autochtone, mais pas intéressée, alors que les Montagnais de Sept-Îles, ceux de Natashquan, ceux de La Romaine, eux, sont des parties autochtones intéressées.

Alors, voilà pourquoi il faut utiliser ces expressions-là. Et on leur dit: Non seulement vous ne devez pas être..., on ne décide pas à votre place, c'est vous qui allez pouvoir le faire, mais nous vous tendons la main. Venez avec nous convenir de quelle façon nous allons faire l'évaluation environnementale des travaux que nous envisageons de faire. Ça vous intéresse, ça vous concerne, vous devriez être partie à cette entente. Nous donnons l'instrument pour que nous puissions être avec vous dans ce processus-là. Alors, on leur tend la main. Je pense qu'il s'agit là d'un acte responsable, un acte civique important et qui indique à quel point nous considérons qu'il est nécessaire de le faire.

D'ailleurs, le texte de l'article 1 dit bien, dans son premier paragraphe, que le ministre de l'Environnement peut conclure une entente avec le gouvernement du Canada. Est-ce que c'est incorrect de dire ça? Est-ce qu'on devrait dire: Doit conclure une entente avec le gouvernement du Canada? Est-ce qu'on doit dire: Le gouvernement avec le gouvernement de Terre-Neuve, conclure une entente? Est-ce que c'est ça qu'on va dire? Non. Hein? Bien, il semble que ça ne serait pas correct. Mais qu'on dise: Le gouvernement du Québec peut conclure une entente avec le Canada, peut conclure une entente avec Terre-Neuve, peut conclure, avec une partie autochtone intéressée, une entente, mais ça m'apparaît tout à fait être du même ordre, aussi respectueux à l'égard des uns qu'à l'égard des autres. Et c'est une main tendue, je le répète. On ne peut pas être plus respectueux des autres que de dire: Nous sommes intéressés à partager avec vous une expédition extrêmement importante à tous égard pour vous, pour nous, pour le Canada, pour Terre-Neuve. S'il vous plaît, si vous êtes prêts, venez, on va être avec vous.

Alors, M. le Président, on est donc en présence d'un texte de loi qui reprend des expressions qui ont été utilisées par le Parti libéral lorsqu'ils étaient au gouvernement et qu'ils ont conclu une entente avec les Cris à la Baie James. Alors, dans ce cas-là, c'était correct. Je pense qu'il est également correct de reprendre une expression qui a été jugée appropriée, puisque je n'ai rien entendu depuis 25 ans, 10 ans. Les mots utilisés dans cette entente n'ont aucun sens et c'est irrespectueux de nos conventions, de nos habitudes, de tout ce que vous voulez. Au contraire, on invoque de part et d'autre cette Convention pour dire: Vous allez trop loin, nous avons tel droit, vous ne le respectez pas. Et donc, on discute sur une base d'entente puis de respect.

Alors, il m'apparaît que nous devons nous donner le moyen de faire une telle entente avec les différentes communautés qui sont là. Et nous aurons l'occasion, j'en suis persuadé, après l'adoption de la loi, de conclure une entente avec les groupes autochtones comme nous aurons l'occasion d'en conclure une avec le Canada et avec Terre-Neuve. Puis nous n'aurons pas besoin de l'accord d'harmonisation parce que, de toute façon, on sait que cet accord-là, aux dires même de la ministre fédérale, n'a aucun effet légal, ne change rien à rien. Et c'est pour ça que le Québec n'a pas voulu le signer, parce que nous prétendions qu'au-delà du manque d'effet il y avait, de la part du gouvernement fédéral, un non-respect des volontés du Québec de signer cette entente dans la mesure où la Loi sur la qualité de l'environnement, qui n'était pas adoptée à ce moment-là, comme la Loi sur pêches et océans, constituaient des empiétements sur les juridictions québécoises et que nous ne signerions jamais, tant et aussi longtemps que ces empiétements-là ne seraient pas enlevés.

Or, le gouvernement fédéral n'a pas voulu donner suite depuis quatre ans, et on sait maintenant depuis 15 jours, trois semaines – ça a été adopté au Parlement – qu'ils n'ont pas modifié leur loi, qu'ils continuent à vouloir empiéter sur les champs de compétence des provinces, en particulier sur ceux du Québec. Et, en conséquence, nous ne signerons pas l'accord d'harmonisation, puisque ça serait dire: Nous acceptons que vous veniez travailler dans nos champs de compétence. Et nous ne l'acceptons pas.

Alors, M. le Président, nous aurions été prêts à entendre les groupes que le député de Jacques-Cartier avait invités à venir à Québec, et le groupe, en tout cas, avait accepté de venir, a même accepté de souper jusqu'à quelques moments avant l'audience, et que...

M. Kelley: Ce n'est pas vrai, M. le Président.

M. Bégin: Mais c'est les paroles mêmes des députés.

M. Benoit: Ce n'est pas vrai, ce n'est pas vrai, ce n'est pas vrai.

M. Kelley: Non, mais ce n'est pas vrai, M. le Président.

M. Bégin: Alors, nous aurions été prêts à les entendre et voir que c'était vraiment important, ce qu'ils avaient à nous dire. Alors, malheureusement, pour des raisons que nous n'avons pas à juger, mais certainement pas dans l'irrespect de l'autre côté, ce groupe n'est plus ici, n'est pas disponible, et on nous dit: Vous n'êtes pas corrects. Vous auriez dû, vous devriez les entendre. Bien, l'occasion était là. Les députés de l'opposition n'ont pas été capables de retenir ces gens-là ici, à Québec. Alors, je pense qu'on doit, au-delà de tous les autres arguments que j'ai mentionnés tantôt, souligner que ces efforts du député de Jacques-Cartier, aussi louables soient-ils, n'ont pas porté fruit et, en tout cas, des fruits trop petits pour durer jusqu'à 20 h 15, ce qui aurait permis à tout le monde d'entendre ce que ce groupe avait à nous dire. Je suis désolé.

M. Kelley: Ce n'est pas ça.

M. Bégin: C'est pourtant ça que vous nous avez dit, votre collègue et vous-même, et on a même attendu à 19 h 57. Nous étions prêts à les entendre, on vous attendait. Vous êtes arrivés à 20 h 5, et on pensait que vous étiez accompagnés des groupes. Vous ne l'étiez pas. Ce n'est pas de notre faute.

M. Benoit: Ce n'est pas de notre faute non plus.

Le Président (M. Lachance): Alors...

M. Bégin: Merci, M. le Président.

M. Kelley: Ce n'est pas à moi d'organiser les travaux de la commission. C'est étonnant, étonnant.

Le Président (M. Lachance): ...M. le député d'Argenteuil, sur la motion du député de Jacques-Cartier.


M. David Whissell

M. Whissell: M. le Président, c'est embêtant, c'est aberrant, c'est impossible, ce qu'on entend ici. Savez-vous, la force de ce gouvernement, c'est de s'accaparer une situation bien précise qui leur est défavorable, qui démontre clairement à la population leur incompétence d'administrer le Québec, de prendre cette situation-là et de la mettre à leur avantage. Et, en plus, à la fin, ils osent mettre le blâme sur l'opposition. On vient d'entendre le ministre qui reproche à l'opposition de ne pas avoir emmené les groupes innu à la commission parlementaire. Je n'en reviens pas, je n'en reviens pas!

Je pense que le ministre devrait se rappeler que c'est lui, le ministre de l'Environnement, que c'est son gouvernement, c'est le gouvernement Bouchard qui est à la tête du Québec, et que ce n'est pas à l'opposition officielle de faire preuve de leadership, d'aller au-devant des coups puis d'inviter les groupes ici. Au moins, nous, on a la décence de les rencontrer, de les écouter, de les informer, de leur parler de leurs droits, de les informer sur le projet de loi, parce que le gouvernement a peur, n'ose pas se rapprocher de ces groupes-là. Et c'est aberrant, c'est scandaleux. On nous parle d'un jugement au niveau fédéral, on nous cite des parties. Mon Dieu que ça nous fait penser à Hertel–des Cantons! L'arrogance! L'arrogance d'un deuxième mandat d'un gouvernement qui est à bout de souffle!

Ce n'est pas possible, là. M. le Président, il y a quelques instants, le ministre de l'Environnement du Québec était à reprocher à l'opposition de ne pas avoir écouté les groupes innu. Voyons donc, ça n'a pas de sens!

M. Benoit: Ça n'a pas d'allure, ça n'a pas d'allure!

M. Whissell: Le gouvernement est constitué par le Parti québécois. Vous, M. le Président, vous avez quorum et vous avez le loisir d'écouter ces groupes-là, et on nous reproche de ne pas les écouter, c'est la faute de l'opposition. Voyons donc! Voyons donc, ça n'a pas de sens!

Et, en plus, on dit que ces groupes-là étaient ici ce soir. Ils n'étaient pas ici pour venir se faire entendre à la commission, ils sont venus rencontrer l'opposition officielle parce qu'ils ne sont pas capables de rencontrer le gouvernement, que le ministre reste caché dans son bureau, qu'il n'est pas capable d'affronter ces gens-là, de les écouter. Puis là on ose nous accuser de ne pas les emmener à la commission parlementaire. Bien, ça prend tout un culot, M. le Président, et je pèse mes mots, tout un culot!

(22 h 10)

Je vous rappelle, M. le Président, que notre porte-parole ici en matière d'environnement a précisé à maintes et maintes reprises que l'opposition officielle est pour le projet de loi. Cependant, on parle d'un projet dont les travaux vont débuter en l'an 2002. Aïe! 2002, on est en 1999; dans trois ans. Et on demande au gouvernement, on demande au ministre, en le regardant dans les yeux: Reportez vos travaux à la commission de trois jours pour qu'on puisse entendre des citoyens, des groupes qui ont le droit de venir s'exprimer dans un projet de loi qui les concerne.

M. le Président, dans le projet de loi n° 60, on parle des autochtones. On les cite, on en fait mention puis on ne les a même pas écoutés en commission parlementaire. Imaginez-vous si on les a consultés. Puis rappelez-vous la fameuse conférence de presse que le premier ministre M. Bouchard nous a servie en précampagne électorale. Ils avaient tellement été consultés, les Innu, on sait ce qu'ils ont fait. Ça a sorti, ça a fait un flop. Ça a coûté plus de 1 000 000 $ pour faire une belle conférence de presse. Puis le ministre aujourd'hui a le culot de nous accuser, nous qui écoutons ces gens-là, qui prenons le temps de – vous pouvez le dire – manger avec eux, de les écouter.

Des voix: ...

M. Whissell: Et le ministre, lui, est là puis il nous accuse. Et ça, c'est le même gouvernement qui nous dit: Il faut faire preuve de transparence, de concertation, de cohabitation. Le ministre tantôt utilisait le terme «cohabiter». On cohabite tellement avec les autochtones qu'on ne les invite même pas à un projet de loi qui va les impliquer d'un bout à l'autre dans un processus qui va durer probablement plusieurs mois sinon plusieurs années, qui va venir chambarder leurs terres, leur milieu de vie, leurs habitudes, leurs coutumes, leur milieu faunique puis on ne les écoute même pas en commission parlementaire.

Ce n'est pas compliqué, ce qu'on demande au ministre: Reportez vos travaux de quelques jours pour un projet qui va commencer dans trois ans – trois ans, M. le Président, c'est quasiment 1 000 jours – puis on demande au premier ministre de suspendre les travaux pour trois jours pour laisser le temps à ces groupes-là de se préparer, de se concerter entre eux – parce qu'ici on ne fait pas de concertation – de se faire une opinion puis de venir l'exprimer publiquement ici, à l'Assemblée nationale, en toute transparence. Puis le ministre, lui, a le culot de nous remettre ça sur le dos. Moi, je n'en reviens pas. Il faut bien être à l'Assemblée nationale pour voir des choses pareilles, M. le Président.

Alors, le ministre a la possibilité d'échanger avec des groupes, d'échanger avec l'opposition officielle pour respecter ces gens-là, aller chercher leur opinion. Le ministre a beau nous dire: Ce n'est pas important qu'on entende ces gens-là à l'étape où nous en sommes rendus parce que de toute façon il va y avoir des études d'impact plus tard puis on va les écouter, ces gens-là, parce qu'on les respecte. Mais, imaginez-vous, on est ici à l'étape 1 puis on a un discours qu'on respecte les autochtones puis on ne veut même pas les écouter. Puis pire que ça, on accuse l'opposition officielle d'être les responsables de leur absence.

Alors, comment voulez-vous que ces gens-là aient confiance au gouvernement du Québec, un gouvernement qui, depuis qu'il est élu, depuis six mois, depuis le 30 novembre, n'a rien fait? M. le Président, ce gouvernement-là n'a absolument rien fait pour les citoyens du Québec et, à chaque fois qu'ils ont déposé un projet de loi à l'Assemblée nationale, ça a été des scandales, ça a été de l'arrogance. Et on n'a pas besoin d'aller bien, bien loin: Hertel–des Cantons, côte des Éboulements, le bâillon qu'on a subi la semaine passée. C'était la première fois dans l'histoire de l'Assemblée nationale qu'on utilisait un bâillon dans de telles circonstances, sans même que les députés aient le droit de s'exprimer.

Imaginez-vous, on est rendu dans une Assemblée nationale, en 1999, qui ne donne même plus le droit de parole aux députés, aux gens qui sont élus par la population du Québec. Imaginez-vous, les autochtones, comment ça peut être loin puis comment ça pèse peu dans les critères puis dans l'importance que le gouvernement accorde aux citoyens. M. le Président, c'est aberrant, ce qu'on entend ici.

Honnêtement, ce soir, quand je me suis joint à mes collègues au niveau de la commission des transports et de l'environnement, on s'en venait ici pour vous proposer des mesures concrètes. On n'est pas ici pour bloquer le projet de loi. On n'est pas ici pour mettre des bâtons dans les roues du développement du projet de Churchill Falls. On est ici pour vous dire: Il y a un groupe qui va être grandement impliqué dans ce dossier-là. On est en train de travailler sur un projet de loi qui les implique, qui les concerne, qui va affecter leur vie puis on n'ose même pas les écouter. C'est aberrant, M. le Président. Et, en plus, on demande à ces gens-là de leur faire confiance.

Tantôt, un des députés du gouvernement, en face, qui, à part le ministre – je dois le souligner – n'ont pas grand chose à dire en commission parlementaire... Je l'ai vécu au niveau du projet de loi sur la FAPAQ. À part le ministre qui parlait, il n'y a personne qui parle dans ce gouvernement-là. Il y a des ministres qui sont là pour passer des projets de loi en rapidité, en catastrophe. On n'a pas le temps de vous écouter, messieurs. On n'a pas le temps d'écouter la population du Québec, on n'a pas le temps d'écouter les groupuscules... Mettez la connotation que vous voulez, il y a eux qui ont raison et après ça il n'y a rien d'autre.

Alors, M. le Président, en terminant parce que le temps m'est limité, on est pour le projet de loi – et je me répète, M. le ministre – on vous demande seulement de suspendre les travaux pour trois jours, que ces travaux-là recommencent mardi, après la période de questions, par l'écoute d'un groupe. On ne parle pas de cent groupes, un groupe qui va venir nous exprimer son opinion. Et je pense que c'est l'occasion pour le gouvernement du Québec de démontrer sa confiance envers ces groupes-là qui devront subir les contrecoups du projet. Alors, je pense que mon temps est terminé, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): C'est bien ça, M. le député. M. le député de Saguenay.


M. Gabriel-Yvan Gagnon

M. Gagnon: Merci, M. le Président, je serai relativement bref, tout simplement pour relever certains faits qui ont été exprimés ici. D'abord, moi, je suis un petit peu étonné du genre de conclusion que les députés de l'opposition tirent de la situation qui est devant nous.

L'étonnement, on peut le résumer de la façon suivante. Il y a une demande qui est faite au ministre pour écouter un groupe, il indique son ouverture et, dès que l'ouverture est reconnue, le groupe part. Là on nous dit... et on veut en tirer également toutes sortes de conclusion, on nous indique que ces personnes n'auraient pas compris le sens et la portée de l'article 1. Écoutez, on pourrait peut-être tirer d'autres conclusions. La connaissance que j'ai, moi, des groupes autochtones me conduirait plutôt à conclure ou à déduire qu'ils ont compris plutôt le sens de l'article, si effectivement ils étaient prêts à venir. Et je trouve que, quand des personnes nous indiquent qu'elles désirent parler du fond et qu'elles – c'est leur droit – utilisent les techniques qu'elles font actuellement, je pense qu'on pourra nous aussi tirer nos propres conclusions sur la véritable volonté de parler du fond. Et on a également certaines interrogations, comme députés, et j'ai hâte qu'on puisse y aller. Merci.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Merci, M. le Président. Alors, je viens de prendre connaissance du projet de loi et je veux revenir également sur certains points qui ont été soulevés.

Le Président (M. Lachance): On parle toujours de la motion du député de Jacques-Cartier.

Mme Jérôme-Forget: O.K. Alors, de ne pas entendre les autochtones.

Une voix: C'est ça.

Mme Jérôme-Forget: Alors, je vais me limiter à cette... Donc, je vais vous radoter, si c'est ça que vous voulez entendre – c'est ça? – l'importance d'avoir les autochtones.

Le ministre a parlé du fond et de la forme, plus tôt, et on a invoqué l'urgence d'un projet de loi, et mes collègues ont soulevé l'importance d'entendre des groupes autochtones pour entendre leurs revendications et leur compréhension de ce projet de loi. Or, mon grand-père me disait toujours une chose au niveau de l'urgence: Prenez votre temps, nous sommes pressés.

On a invoqué également que ces gens étaient là pour le dîner ce soir, qu'ils auraient dû être là à 20 heures. Il faut comprendre que, quand on rencontre des groupes autochtones, il y a deux choses qui se passent, c'est que l'agenda n'est pas nécessairement fixé par les autres que par eux-mêmes.

(22 h 20)

Ayant été moi-même impliquée à divers moments dans différentes situations et étant impliquée pour négocier différents accords avec ces gens-là, je peux vous dire que leur agenda et leur temps est bien le leur. Surtout qu'il semblerait qu'ils auraient été informés à la dernière minute de cet événement.

Alors, que ces gens-là aient été, peut-être, blessés de se faire... d'être mis au courant à la dernière minute du projet de loi, c'est là une possibilité, mais il est clair qu'ils avaient la possibilité de participer. Mais leur agenda... Dans ces groupes, un des phénomènes remarquables, c'est qu'ils ont très peu de porte-parole, qui sont ordinairement un peu comme des queues de veau, qui se promènent un peu partout à travers la province. Alors, ce sont des gens qui sont toujours en avion et qui se promènent et qui se déplacent énormément.

Alors, de dire aujourd'hui qu'ils auraient dû planifier, qu'ils auraient pu être là et qu'il y a eu de la mauvaise foi, je pense que c'est de prêter des intentions non pas seulement à mon collègue, mais à ces gens-là de dire qu'ils auraient dû être absolument disponibles ce soir pour venir nous rencontrer.

Il s'agit à mon avis d'une situation importante parce que, comme le ministre a très bien dit: Il y a le fond, il y a la forme.

L'importance d'entendre les groupes. Vous savez, pour ces groupes, le gouvernement, ça paraît comme une entité qui est loin. Les traditions de ces gens sont complètement différentes. Le type de consultations qu'ils ont, généralement, est complètement différent de ce que nous connaissons. Un vote, dans cette communauté-là, peut prendre des semaines et ils se promènent et ils consultent vraiment les gens. Et les déplacements que ça nécessite, il est clair que ça représente un défi de taille.

Par ailleurs, ce n'est pas parce que leur approche est différente qu'il faut mettre de côté les aspirations que nous avons, nous, de communiquer avec eux et qu'eux veulent communiquer avec nous. Est-ce que c'est à nous à nous adapter à eux ou à eux à s'adapter à nous? Je pense qu'il y a, de part et d'autre – de part et d'autre – des efforts à faire pour être bien sûr qu'on arrive à se comprendre.

Et là le point que je veux faire, M. le Président, pour entendre ces groupes, c'est: je pense que la société dans laquelle on vit, elle va de plus en plus faire appel à entendre de tels groupes. C'est la base de la société civile, c'est la base de notre façon de communiquer avec différents groupes. Vous avez des organismes qui sont séparés du gouvernement, qui n'appartiennent ni au secteur privé ni au secteur gouvernemental, mais qui jouent un rôle important dans la société.

Or, je pense que nous avons là aujourd'hui une occasion, à cause de ce projet de loi dont le but est de vouloir harmoniser le processus d'évaluation environnementale et de créer un organisme responsable pour la mise en oeuvre de ce processus de consultation... je pense qu'on aurait intérêt à s'associer ou à faire appel à ces gens-là pour les entendre dans la démarche qu'on est en train d'entreprendre.

On peut bien faire reproche aujourd'hui à l'opposition d'avoir fait appel à ces gens-là pour les consulter et qu'ils ne soient pas ici ce soir. Je dois dire que mon collègue député, qui a communiqué avec ces gens-là à la dernière minute, je le trouve extrêmement habile parce que j'aurais trouvé difficile, à la dernière minute, de faire appel à un tel groupe et de communiquer pour avoir de l'information.

Tout ça, ça se passe en vitesse, tout ça nous arrive rapidement, et je comprends que c'est la façon de fonctionner du gouvernement. Mais, comme on le disait plus tôt – mon collègue député d'Argenteuil, c'est bien ça? – c'est un mécanisme qu'on met en place, il faut se le rappeler, pour l'an 2002. Alors, je pense que le feu n'est pas pris dans la maison.

Alors, on a fait également mention de la Baie James. Le ministre faisait mention de la Baie James et il semblerait que les termes qui sont utilisés ici sont les mêmes. Rappelons-nous que, depuis la Baie James, il y a eu beaucoup d'eau qui s'est écoulée, il y a eu beaucoup d'eau qui s'est écoulée sous les ponts. Et ces groupes ont bien changé quant à leurs revendications. Ce n'est plus ce qui se passait à l'époque. Il va falloir qu'on réalise que ces gens-là ont pris conscience de leurs responsabilités et également du pouvoir qu'ils détenaient.

Et donc, je comprends l'intérêt, et l'intention était la bonne, possiblement. Mais il n'en demeure pas moins, je pense, M. le Président, que d'entendre ces gens-là, ça aurait démontré beaucoup de sagesse, beaucoup de prévention pour ne pas s'attirer les critiques de ces peuples-là qui sont susceptibles de soulever ce point. Et je pense que, pour le gouvernement et pour tous les Québécois, il eut été préférable qu'on s'associe à ces groupes, qu'on les intègre au point de départ pour être bien sûr qu'ils comprennent l'intention du gouvernement. Parce que, pour une personne qui n'est pas souvent habilitée à comprendre les projets de loi, même s'il y a trois articles, c'est un langage aride, c'est un langage qu'ils comprennent parfois difficilement. Et donc, c'était une occasion rêvée pour le gouvernement, et en particulier pour le ministre de faire voir l'intention qu'il avait avec ce projet de loi, une intention à mon avis louable, puisqu'il veut effectivement harmoniser avec ses collègues, mettre en place un organisme et s'assurer qu'il y a une consultation.

Alors, M. le Président, vous m'avez souligné que mon temps était presque écoulé, mais je pense qu'il est très important, dans cette situation-là, de faire attention, puisqu'il n'appartenait pas à mon collègue, finalement, d'organiser une rencontre à cette réunion-ci. Je pense qu'il vous appartenait d'organiser la rencontre ce soir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Johnson.


M. Claude Boucher

M. Boucher: Merci, M. le Président. Mon père n'avait pas les expressions que le père de notre collègue députée qui vient de parler avait, mais il avait l'habitude de me dire qu'il était important de voir de proche ce qui est loin dans le temps et de percevoir avec une certaine distance ce qui se passe maintenant.

Le projet dont il est question est loin dans le temps – 2008 – mais il faut tout de suite se pencher sur ce projet-là et prendre des décisions importantes quant aux mécanismes qu'on va se donner pour le réussir. Les décisions importantes sont l'objet du projet de loi. Le projet de loi vise à ce que le gouvernement se donne des mécanismes pour concerter les gens, concerter en impliquant la consultation puisque, actuellement, on n'a pas les moyens de le faire. C'est précisément, au fond, ce que veut l'opposition. L'opposition veut qu'on consulte les gens. C'est ce qu'on fait. C'est ce que nous allons faire.

Alors, il est difficile de comprendre l'attitude de l'opposition, difficile d'autant plus que le député d'Argenteuil disait tout à l'heure que le gouvernement n'avait pas daigné entendre, écouter, recevoir l'appel des personnes dont il parlait. À notre connaissance, ils n'ont pas appelé le ministre, ils n'ont pas tenté de le rejoindre. Alors, ce qu'il a dit était une erreur. Si le ministre avait refusé de leur parler, là il aurait eu raison, mais ce n'est pas le cas. Le ministre n'a aucunement refusé de leur parler. Hein? Le ministre n'a pas reçu l'appel.

(22 h 30)

Et je demeure convaincu, quant à moi, dans ce projet-là, M. le Président, que justement ces gens-là, qui sont intelligents, ont pris connaissance du projet de loi et se sont dit: Mais c'est un excellent projet de loi. Mais je pense qu'avec le député de Jacques-Cartier, un projet de loi si court, il a pu leur expliquer rapidement l'objet du projet de loi et, ceci étant dit, ils ont décidé de retourner à la maison, puisque, effectivement, le projet de loi est simple à comprendre, il leur convient, et ils sont retournés chez eux, tout à fait.

Alors, au fond, ce n'est pas le combat des Innu que l'opposition livre, c'est leur combat, un combat d'opposition normal dans un Parlement comme le nôtre, un combat d'opposition systématique à tout ce qui a de l'allure, tout ce qu'on fait qui est bon. Alors, M. le Président, évidemment, nous allons nous rendre à minuit comme ça. Alors, nous allons parler jusqu'à minuit, de la façon la plus intéressante possible pour que ça soit agréable de le faire. Nous savons, nous connaissons déjà les intentions de l'opposition. Elles sont claires, tout le monde le reconnaît ici, l'opposition aussi le reconnaît, avec un certain sourire, n'est-ce pas?

Une voix: Il n'y a pas de sourire ici.

M. Boucher: Ha, ha, ha! Il n'y a pas de sourire. M. le Président, moi, je pense que ce projet de loi là est un excellent projet de loi qui permet au gouvernement de consulter justement les gens, de les concerter, de convenir avec les gens de ce que sera ce projet-là, et l'opposition devrait collaborer, puisque c'est un projet de loi qui va dans l'intérêt de l'ensemble du Québec. Et je pense que, si le père de la Baie-James était ici aujourd'hui, certainement qu'il dirait à ses collègues de l'opposition: Assez, c'est assez. Passons maintenant aux choses sérieuses. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Orford.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui. Je vais conclure ce débat, M. le Président, pendant les 10 prochaines minutes. J'aimerais que tous ceux du gouvernement qui ont dit à peu près n'importe quoi écoutent attentivement les faits, parce qu'on les a interprétés de n'importe quelle façon.

Premiers faits: à 16 heures, hier après-midi, j'ai parlé sur le projet de loi n° 60 et j'ai dit que j'appuyais le gouvernement; le député de Brome-Missisquoi a parlé à 16 heures, a dit qu'il appuyait le gouvernement, que nous voterions pour; et le député de Jacques-Cartier a parlé vers 16 heures, il a dit qu'il appuyait le gouvernement et que nous voterions pour – 16 heures, hier. À 17 heures, hier après-midi, le député de Jacques-Cartier, parce que le gouvernement ne fait pas son ouvrage, lui, il décide de contacter et de faire parvenir le projet de loi, qu'ils n'ont jamais vu – 17 heures, hier après-midi, mardi.

À 15 heures, cet après-midi, la communauté autochtone est à Québec, elle est dans un ministère, on ne sait pas quel ministère. Ils entrent en communication avec le député de Jacques-Cartier, lui demandent de le rencontrer. Il est 15 heures, cet après-midi. À 17 h 45, le député de Jacques-Cartier passe dans mon bureau pour m'aviser qu'il ira souper avec une communauté autochtone et qu'il aimerait qu'on les entende ce soir. Je rencontre le bureau du whip à 18 heures, avant de partir pour souper, pour indiquer au bureau du whip qu'il est de mon intention, s'il est possible, que nous entendions le groupe autochtone ce soir.

À 20 h heures, je rencontre le ministre, j'indique au ministre que... Pendant ce temps-là, mon confrère est après souper. Je n'ai pas rencontré la communauté autochtone, je ne sais pas dans quel restaurant ils sont et je n'ai aucun moyen de le savoir. À 20 heures, je rencontre le ministre – les faits sont les suivants, M. le Président – je lui indique que mon confrère est après souper avec une communauté autochtone, qu'il est de notre intention de les entendre, s'il est possible, ce soir. Il me pose la question: Seront-ils ici? La réponse: Je ne suis pas sûr, je ne sais pas ce qui se passe entre mon confrère et la communauté autochtone. Nous attendons jusqu'à 20 h 4 min, 20 h 5 min. Notre confrère de Jacques-Cartier arrive; la communauté autochtone avait des billets d'avion, ils ont quitté et il m'indique qu'il aimerait que nous puissions les entendre la semaine prochaine. Nous faisons la demande au ministre, le ministre se bute et décide que nous sommes après faire un filibuster.

J'ai commencé mon discours ce soir en lui disant que nous étions pour le projet de loi. Et j'indique au député de Johnson, avec son grand sourire d'insignifiant, que nous allons voter ce soir pour le projet de loi, M. le Président. Et avant minuit, ce soir, le ministre aura son projet de loi.

Le Président (M. Lachance): M. le député, un peu de respect, là! Je pense que les propos que vous venez d'utiliser – vous êtes un gentleman – je pense qu'ils ne sont pas de mise et j'espère que le débat va se poursuivre sur un ton correct, comme ça a été le cas depuis le début de nos travaux.

M. Benoit: M. le Président, on nous a prêté toutes les intentions, toutes les intentions. Le ministre va être bien surpris, nous sommes pour le projet de loi, nous lui avons dit moult fois. Nous le lui redisons, et, avant minuit ce soir, il l'aura, son projet de loi. Mais ce qu'il n'aura pas, c'est de ne pas avoir écouté la communauté autochtone. Et ça, l'histoire de la rivière Churchill s'écrira... Elle s'écrit ce soir, elle s'écrira en l'an 2002 quand les travaux commenceront, elle s'établira, cette histoire-là, en l'an 2008 quand ils commenceront à vendre l'électricité, et la communauté autochtone, elle aura à traîner ça longtemps, qu'on n'ait pas voulu l'entendre ce soir. Nous sommes pour le projet de loi. Avant minuit ce soir, le ministre aura son projet de loi, et le député de Johnson, qui nous a prêté des intentions depuis 20 heures ce soir, devra reconnaître qu'il est dans l'erreur depuis le début. Ils devront reconnaître aussi qu'ils font erreur de ne pas entendre, de ne pas écouter cette communauté-là, parce qu'eux, nous sommes après exproprier leur terre, parce qu'eux, nous allons encore une fois ne pas écouter leur histoire, parce qu'eux, nous n'allons pas entendre leurs aspirations, M. le Président. Et ça, c'est grave en démocratie.

On peut toujours dire – comme ils ont fait toute la soirée, de rire quand nous parlions de la communauté autochtone – ils pourront toujours dire que c'est un groupuscule, ils pourront toujours dire qu'on a essayé de magouiller, depuis hier, quand on a fait parvenir le projet de loi n° 60, parce qu'eux n'ont pas daigné le faire. Bien, ils vont avoir ce qu'ils méritent. La prochaine fois que le premier ministre ira là, ils auront encore dépensé 1 500 000 $, et ils ne seront pas entendus. C'est ça qu'ils sont après faire, M. le Président. Nous les mettons en garde comme nous les avons mis en garde dans Hertel– des Cantons, et ils n'ont jamais voulu écouter. Ils possédaient la vérité dans Hertel–des Cantons. Il a fallu que Roger Nicolet leur dise le contraire de tout ce qu'ils avaient prétendu, il a fallu que la juge leur dise.

Nous, ce soir, nous le redisons: Vous aviez une occasion unique, vous avez voté contre à deux occasions. Nous allons revoter dans quelques instants. J'imagine que vous allez encore revoter, cette fois-ci, pour ne pas entendre le regroupement des sept communautés là-bas; c'est votre droit. Nous, je vous le dis franchement, nous sommes arrivés ici à 20 heures ce soir, l'intention est toujours la même, d'aider le gouvernement dans ses études d'environnement. Nous n'avons pas changé notre point de vue. Ce qui a changé entre-temps, c'est qu'il y a un groupe qui a voulu se faire entendre, et nous continuons à prétendre que nous devions l'entendre.

Vous ne voulez pas les entendre, vous vivrez avec. Nous, soyez assurés que, si vous ne voulez pas les entendre, nous, on s'organisera pour les entendre. Soit en privé, soit via le fax, soit via l'Internet, nous, on va les écouter et nous, on défendra leur point de vue. Si vous, c'est un groupuscule, si vous, dans vos tours d'argent, vous possédez la vérité, si vous, vous voulez sourire comme vous avez fait tout le temps de la veillée quand nous parlions de la communauté autochtone, c'est votre droit. Je ne peux pas vous empêcher de rire, je ne peux pas vous empêcher de sourire, je ne peux pas vous empêcher de ne pas les entendre. Mais vous ne nous empêcherez pas de les écouter, de comprendre ce qu'ils ont à dire, de véhiculer leurs aspirations, de véhiculer leur histoire, et ça, le Parti libéral du Québec va le faire. Et, moi, je m'engage, au nom de notre communauté, de notre parti politique, à me rendre dans cette communauté-là pas plus tard que cet été, aller entendre ce qu'ils ont à dire, parce que, vous, vous ne voulez pas le faire. Bien, nous, on va le faire et on va le faire avec toute la sagesse qu'une opposition qui croit en la démocratie doit le faire.

Et la démocratie, ce soir, se porte très mal, et l'histoire de la rivière Churchill, nous sommes après écrire tout un chapitre, M. le ministre, ce soir, et ça ne sera pas la page la plus heureuse de votre histoire comme ministre de l'Environnement. Et le ministre des communautés autochtones devrait être ici aussi. Ça, c'est une autre affaire. Comment pouvons-nous regarder un projet comme celui-là et ne pas avoir le ministre qui est responsable de la communauté autochtone avec nous? C'est absolument incroyable. Nous avons assez d'expérience, au Québec, avec ces situations conflictuelles, difficiles pour les traiter autrement que vous êtes après le faire. Robert Bourassa a appris, il nous a laissé un héritage, il nous a laissé une leçon. Je pensais que des gens comme vous auriez appris cette leçon-là. Vous ne voulez pas le comprendre, c'est votre droit.

M. le Président, je conclus en vous demandant de prendre un vote nominal et je vous indique immédiatement que le Parti libéral vote, a voté et votera, à chaque fois que la communauté autochtone veut être entendue, que nous les entendions dans le projet de la rivière Churchill. C'est leur territoire, ils ont été là avant nous, c'est leur propriété, et nous devons les entendre. D'autre part, nous sommes convaincus que nous devons procéder avec ce projet-là, que nous devons créer la richesse collective au Québec. Mais, pour le faire, nous avons besoin de l'aide des alliés. M. Bouchard disait: Les Innu seront partenaires. Bien, partenaires, c'était de les entendre, M. le Président. Des partenaires, c'est des gens qui collaborent avec vous. Et vous savez, le succès d'une négociation, c'est quand tout le monde est capable de s'entendre, de partager des points de vue, arriver à des objectifs. Ici, ce n'est pas une négociation, on ne veut même pas les écouter. Je vous invite à prendre le vote et je vous indique immédiatement que nous voterons pour entendre – encore une fois – les communautés inuit de cette région.


Mise aux voix

Le Président (M. Lachance): Alors, je comprends que le vote nominal est demandé.

M. Benoit: Oui.

Le Président (M. Lachance): Alors, M. le secrétaire.

Le Secrétaire: M. Kelley (Jacques-Cartier)?

M. Kelley: Pour.

Le Secrétaire: M. Benoit (Orford)?

M. Benoit: Pour.

Le Secrétaire: M. Whissell (Argenteuil)?

(22 h 40)

M. Whissell: Pour.

Le Secrétaire: Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys)?

Mme Jérôme-Forget: Pour.

Le Secrétaire: M. le ministre de l'Environnement?

M. Bégin: Contre.

Le Secrétaire: M. Gagnon (Saguenay)?

M. Gagnon: Contre.

Le Secrétaire: M. Boucher (Johnson)?

M. Boucher: Contre.

Le Secrétaire: M. Côté (La Peltrie)?

M. Côté (La Peltrie): Contre.

Le Secrétaire: M. Deslières (Salaberry-Soulanges)?

M. Deslières: Contre.

Le Secrétaire: M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Abstention.

Le Secrétaire: Donc, il y a 4 pour, 5 contre, 1 abstention.

Le Président (M. Lachance): Alors, la motion est rejetée.


Étude détaillée

Nous sommes prêts à prendre en considération l'article 1 du projet de loi n° 60. M. le ministre.


Habilitation à conclure une entente avec les gouvernements du Canada et de Terre-Neuve et les parties autochtones intéressées

M. Bégin: Merci, M. le Président. Comme je l'ai expliqué, l'article 1 du projet de loi vise à permettre au ministre de l'Environnement de conclure, avec le gouvernement du Canada, le gouvernement de Terre-Neuve et les parties autochtones intéressées, une entente qui permettra d'établir le processus, un processus unifié, donc qui s'appliquera à l'ensemble des parties d'évaluation environnementale, pour le parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill qui est proposé par Hydro-Québec et le Newfoundland & Labrador Hydro.

Il s'agit donc de permettre – ce qui n'est pas possible actuellement – de conclure avec ces parties une entente qui va établir de quelle façon on va procéder pour faire cette évaluation environnementale, et, dans le cadre du processus de discussion pour trouver, prenons, de quelle façon on procédera, toutes les parties pourront faire valoir leurs représentations, dire: On devrait le faire de telle façon, on devrait couvrir tel champ, on devrait pouvoir poser telles questions. Le comité ou le bureau ou l'organisme chargé d'entendre les parties sera composé de telle et telle personne, par exemple, tant du gouvernement fédéral, tant du gouvernement de Terre-Neuve et tant du gouvernement du Québec, tant des parties autochtones. Et, chez les parties autochtones qui seront là, tant pour les parties montagnaises ou encore pour les parties et nous. Bref, rétablir un processus qui conviendra à toutes les parties, mais qui évitera des dédoublements, des duplications et qu'il y ait une seule façon de le faire.

Je pense, M. le Président, que c'est le minimum que l'on puisse faire pour faire un projet de cette nature en respectant bien sûr toutes les questions environnementales, mais aussi les parties, leurs droits, leurs façons de faire, leurs visions de ce que devrait être le développement économique dans un territoire aussi important que celui dont il s'agit.

Or, M. le Président, je pense que c'est le coeur même du projet de loi et je pense que le reste peut s'expliquer. J'ai déjà indiqué pourquoi on parlait de «toute partie autochtone intéressée», en référence à la Convention de la Baie James. Ce qui a déjà fait l'objet de l'épreuve du temps ne devrait pas être remis en question, à moins de raison majeure. Or, on ne nous a indiqué aucune raison pour laquelle cette expression ne devrait pas être réutilisée, bien au contraire. Elle n'a fait l'objet d'aucune discussion, d'aucun grief. Donc, nous sommes en terrain solide, et je pense qu'on devrait le faire.

Par ailleurs, dans le troisième alinéa, on dit que ça doit être déposé à l'Assemblée nationale dans les 10 jours de sa conclusion. On comprend que c'est l'Assemblée nationale qui autorise le ministère de l'Environnement à conclure de telles choses. Il est donc normal que l'Assemblée soit saisie de l'entente aussitôt qu'elle aura été signée et conclue pour qu'elle puisse en prendre connaissance et faire le suivi sur l'autorisation accordée au ministère de l'Environnement. Alors, voilà, M. le Président, ce dont il s'agit à l'article 1.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. M. le député d'Orford.

M. Benoit: Oui, pour éclairer sur l'article 1. J'aimerais que le ministre m'explique comment il a pu, dans son discours à 11 heures hier matin, nous dire, et je relis ses paroles: Dérivation de deux rivières qui sont la rivière Saint-Jean et la rivière Romaine. Il y aura création d'un lac ou d'un réservoir de 100 000 km². Et, au même moment, Radio-Canada – j'ai les galées ici – nous dit: Deux rivières – alors, Patrice Roy le mardi 8 juin, donc au même moment – sur la Côte-Nord devaient être dérivées vers le Labrador. Hydro-Québec se contentera d'une seule rivière, etc.

Comment le ministre, au même moment, nous parlait de deux rivières de 1 000 km², comment pouvait-il ne pas savoir ce qui se passait à Hydro-Québec, dans son gouvernement, au même moment?

M. Bégin: M. le Président, si on lit le premier paragraphe de l'article 1, on voit que c'est le parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill proposé par Hydro-Québec et Newfoundland & Labrador. Donc, c'est un projet qui émane d'Hydro-Québec et de Newfoundland Hydro. Lorsque j'ai fait mon discours à 11 heures avant-hier matin – il était 11 heures du matin, – je n'étais pas informé que le projet avait été modifié, que...

M. Benoit: M. le ministre, hier matin...

M. Bégin: Non, il y a 12 heures d'intervalle, je voulais le dire. J'ai fait mon discours à 11 heures le matin, immédiatement après la période de questions, et la nouvelle est sortie au téléjournal, je crois, à 22 heures, le soir. Je n'ai pas été informé qu'il y avait eu, de la part d'Hydro et d'Hydro Labrador... qu'il y avait une modification.

C'est ce genre de choses qui va arriver tout au long du processus, puisque justement, dans le cadre de l'entente qui va être signée entre les parties, il peut arriver qu'il y ait des changements quant à la date, quant à la puissance installée, quant au trajet. En fait, c'est l'objectif même du processus d'information. Alors, il peut arriver qu'il y ait des modifications. Il pourra être modifié encore au moment où il sera déposé devant la commission, qui procédera d'une manière différente. Suite à des questions qui seront posées par la directive, il pourrait arriver que ça entraîne des modifications nouvelles. Alors, qu'il y ait des changements en cours de route, il n'y a rien de surprenant là-dedans. Bien sûr que la coïncidence, j'aurais préféré qu'elle n'arrive pas comme elle est arrivée, mais ça fait partie du processus comme tel. Alors, c'est ce que je peux vous offrir comme explication.

M. Benoit: C'est un peu exceptionnel, on parle de rivière qu'on va détourner. Ce n'est pas un petit ruisseau en quelque part, c'est une rivière. Le ministre n'est pas au courant. Au même moment où il parle, Hydro-Québec est après nous dire qu'ils ne font pas ce que le ministre est après dire. C'est fort, là! Je veux dire, ça nous illustre un peu le poids du ministre de l'Environnement dans cet État-là. Hydro-Québec décide de ne pas détourner une rivière soudainement, le ministre n'est pas au courant.

Et là on a un cas typique. Au moment où il parle, Radio-Canada nous dit qu'Hydro-Québec est après faire autre chose. C'est incroyable! Moi, j'aurais honte. Je veux dire, si j'étais ministre de l'Environnement, je serais sans connaissance. Il y a du monde qui se ferait parler à Hydro-Québec, je dois vous dire ça.

Ceci dit, M. le Président, quand vous dites «en vue d'établir un processus unifié», j'aimerais ça que le ministre nous explique ça. Parce qu'on met un BAPE, et puis là Terre-Neuve et nous, on va mettre du monde dans ce BAPE là. C'est quoi, le «processus unifié»? Comment ça va fonctionner, ce processus unifié là? C'est des beaux grands mots, ça, mais ça veut dire quoi, ça, un «processus unifié»?

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Bégin: Par sa question, le député d'Orford répond un petit peu à la première partie de la question, en ce sens que le ministre de l'Environnement n'est pas chargé, en vertu de ce projet de loi là, de réaliser un projet qu'il a lui-même, il est chargé d'établir un processus pour évaluer le projet qui va être soumis par d'autres. Donc, le ministre de l'Environnement n'a pas de contrôle sur le contenu, à ce stade-ci, du projet.

Là où il pourra y avoir un certain contrôle, c'est lorsqu'on aura adopté ce projet de loi là, que le promoteur ou les promoteurs auront déposé leur projet, et là on aura un projet ou on le connaîtra de façon précise à ce moment-là, et ce projet sera soumis au processus dont nous aurons convenu entre les différents gouvernements et les parties intéressées autochtones.

Et là on entendra, selon les règles que je vais vous mentionner... On va, entre les parties qui sont mentionnées dans l'article 1 du projet de loi, établir comment on va procéder. Est-ce que ça sera par exemple un représentant du gouvernement du Québec, un représentant du gouvernement de Terre-Neuve, un du Canada, un des communautés autochtones intéressées? Est-ce que ce sera deux de chacun de ces groupes-là? Est-ce qu'un en aura deux et l'autre en aura un? C'est ce que le projet de loi va nous permettre de convenir entre les différentes parties.

Par exemple, Terre-Neuve a une disposition dans sa loi sur la qualité de l'environnement qui lui permet de renoncer à sa procédure pour adopter celle d'une autre province. Bon. Alors, ils peuvent dire: Je suis le processus fédéral, par exemple, ou je suis le processus québécois.

Alors, si leur façon de faire est par exemple de prévoir trois personnes et que, dans la loi fédérale, c'est prévu deux personnes, bien ça pourrait être deux personnes ou ça pourrait être tout autre chose dont on conviendra entre nous, puisque nous nous donnons la capacité juridique de convenir d'autre chose que ce que nous avons, pour une raison simple: parce que nous sommes dans une situation tout à fait différente de celle que nous avons dans les faits.

(22 h 50)

Mais, dans les principes, nous aurons les mêmes règles sensiblement, c'est-à-dire établissement de la directive qui va être émise au promoteur une fois qu'il aura déposé son projet pour que les études soient faites correctement en vue d'être soumises éventuellement au BAPE qui là sera en mesure d'évaluer si, par rapport à la directive qui aura été émise, on a vraiment bien répondu, si les réponses sont satisfaisantes, jusqu'à quel degré elles le sont ou elles ne le sont pas et éventuellement entraîner des modifications au projet ou encore déclarer que ce projet tel que présenté est satisfaisant. Alors, c'est le processus qui est là. Justement, au moment où on se parle, nous n'avons pas la réponse sur ce que ça sera, nous nous donnons la capacité de le négocier avec les parties concernées pour qu'on ait un processus unifié, unique, plutôt que d'avoir trois procédures différentes avec des règles différentes.

Par exemple, si on voulait nommer sur le BAPE... si on disait par exemple qu'il fallait qu'on ait quelqu'un de l'extérieur du Québec, dans la forme actuelle, on pourrait se poser une grosse question: Est-ce que c'est légal de nommer une personne qui n'est pas québécoise? Est-ce que l'on pourrait, sans nommer, par exemple, une partie autochtone, la nommer sur le BAPE sans d'abord modifier la liste des personnes qui composent le BAPE, nommer donc ces personnes-là comme membres du BAPE, puis, une fois qu'elles sont membres du BAPE, que le président du BAPE choisisse parmi ses membres ces personnes-là pour être sur le Bureau? C'est ce que nous faisons actuellement au Québec. Mais, vous voyez, le processus est très complexe.

Alors, nous allons pouvoir convenir, par exemple, qu'il y aura... Si les parties autochtones intéressées disent: Trois, c'est convenu on est d'accord, voilà, on compose le comité de trois personnes des communautés autochtones intéressées, une du fédéral, une de Terre-Neuve, une du Québec; ou une autre règle. Tout ça, c'est à venir.

M. Benoit: Est-ce que la Régie de l'énergie va être impliquée là-dedans?

M. Bégin: Non, la Régie de l'énergie n'est impliquée d'aucune manière à ce niveau-là, puisqu'il s'agit de faire une évaluation environnementale.

M. Benoit: M. le Président...

Le Président (M. Lachance): Un instant. M. le député de Saguenay avait demandé la parole avant.

M. Gagnon: M. le Président, M. le ministre, moi, dans l'article qu'on a devant nous, j'ai certaines inquiétudes lorsqu'on lit: «Toute partie autochtone intéressée». Vous référez aux expressions utilisées depuis le début des années soixante-dix avec la Convention de la Baie James. Vous dites: Ça a traversé l'épreuve du temps et ça devrait encore être solide. Mais, entre-temps, depuis 1970, il y a eu l'acte constitutionnel de 1982 et, en 1996, il y a eu le dépôt de la Commission royale d'enquête sur la question autochtone, Erasmus-Dussault.

Et Erasmus et Dussault, dans cet ouvrage-là, ont élaboré une thèse sur un troisième ordre de gouvernement qui... Et moi, mon inquiétude quand je lis cet article-là: est-ce que, par une action semblable, on ne serait pas en train de donner une assise territoriale à ce troisième ordre de gouvernement? Et j'aimerais vous entendre là-dessus parce que je ne suis pas convaincu que, parce que c'était là depuis 1970, c'est encore aussi résistant, compte tenu des autres gestes juridiques que l'on connaît depuis ce temps-là.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Bégin: Alors, cher collègue, je sais que vous êtes un avocat et je vais référer à votre expérience antérieure en vous disant que quand, dans le Code de la procédure civile, on dit qu'une partie intéressée peut faire une procédure, la qualification de l'intéressé est toujours faite en fonction du débat dans lequel on est.

Alors, actuellement, quelles sont les personnes intéressées? «Toute partie autochtone intéressée peut être signataire de l'entente». Est-ce que ça veut dire que toute communauté autochtone du Québec peut être intéressée à l'entente? La réponse, à mon point de vue, c'est non; mais, par contre, que des personnes situées à proximité ou directement dans le territoire où se déroulent certains projets. À mon point de vue, ça nous permet de dire, à l'égard de certains: Oui, vous êtes intéressé; à l'égard d'autres: Non, vous ne l'êtes pas.

«Intéressé» ne veut pas dire: vous êtes propriétaire du terrain et en conséquence nous devons, avant d'aller chez vous, déterminer, obtenir votre consentement. Ce n'est pas ça, le sens d'«intéressé», mais c'est des personnes ou des parties autochtones situées dans le coin qui peuvent partager le besoin que nous avons, le gouvernement de Terre-Neuve, le gouvernement du Canada, le gouvernement du Québec, de faire en sorte que les travaux se fassent dans un respect de l'environnement, l'environnement n'étant pas la propriété d'une personne, mais plutôt un processus pour s'assurer que tous ceux et celles qui sont concernés, si vous me permettez un autre mot qui serait analogue, pour qualifier ceux qui vont pouvoir être dans l'entente.

Alors, c'est le sens du mot. Il ne s'agit pas de reconnaître quoi que ce soit sur le plan territorial ni des discussions qui ont lieu entre d'autres organismes que le ministère de l'Environnement. À cet égard, il y a des personnes qui s'en occupent, il y a même un ministère qui a l'autorité sur les questions autochtones. Ce n'est pas du tout le sens de la démarche que nous établissons ici.

M. Gagnon: Ma préoccupation, elle est beaucoup plus dans des gestes comme celui-ci qui pourrait être considéré comme étant significatif lors d'un examen judiciaire, conforter cette thèse-là de ce troisième ordre de gouvernement puis lui donner une assise territoriale qui viendrait bousculer l'ordre des choses que l'on connaît.

M. Bégin: En tout cas, ce n'est pas le sens de la démarche qui est faite. Au cours de la discussion, bien sûr que nous nous assurerons de le faire dans le respect des droits de chacun, mais aussi de ne pas faire de gestes qui auraient un sens allant à l'encontre de nos prétentions sur quelque sujet que ce soit, que ce soit sur le plan territorial ou autre, et tout ça va se faire dans le respect des prétentions que le Québec a à cet égard. Et on sait qu'il y a des négociations territoriales qui existent et qui ont cours, et c'est dans ce cadre-là que ça se fera, mais ce n'est pas l'objet de la démarche que nous entreprenons.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil.

M. Whissell: M. le Président, quel beau théâtre! Voilà maintenant trois heures qu'on débat sur une motion pour écouter les autochtones et voilà maintenant qu'on se préoccupe, qu'on s'inquiète des autochtones. Quelle belle récupération! J'espère qu'il y a des gens qui nous écoutent à la maison, ce soir, parce que c'est tout un théâtre!

Le Président (M. Lachance): À cette heure-ci, ce n'est pas sûr, M. le député.

M. Whissell: C'est tout un théâtre que le gouvernement, que le ministre est en train de servir à la population du Québec. On s'inquiète, on se préoccupe des Innu, puis, il y a à peine 10 minutes, nous débattions d'une motion depuis presque trois heures à l'effet de les entendre mardi matin.

J'ai écouté le ministre répondre à la première question de mon collègue d'Orford. C'était bourré de «si», «si», «si», «si». Et le ministre dit qu'il s'agit d'un processus qui va être long, qui va nécessiter des études, des évaluations, d'entendre les différents groupes. Et, nous, nous avons proposé, mon collègue de Jacques-Cartier, une motion à l'effet de reporter nos travaux de trois jours. Trois jours! Et le ministre est là, il nous parle d'un processus qui va être long. Est-ce que trois jours auraient été vraiment catastrophiques dans le dossier sur lequel nous travaillons?

Alors, la question que je demande au ministre – et il n'y a pas répondu lors de nos interventions sur la motion: Quel aurait été l'impact sur le projet de Churchill Falls de reporter de trois jours nos travaux pour écouter un groupe – pas 10, un groupe – mardi matin? Quel aurait été l'impact sur ce projet?

M. Bégin: M. le Président, la question n'est pas de savoir quel est l'impact qu'aurait eu telle ou telle chose. La question est de savoir: Est-ce que, oui ou non, dans le cadre de l'étude du projet de loi que nous avons là, il y a des groupes qui étaient prêts à être entendus et que nous aurions entendus ce soir à 20 heures? J'ai déclaré que nous étions prêts à les entendre, c'était ce soir qui était convenu pour l'étude du projet de loi et, en conséquence, comme les personnes n'étaient pas là, nous n'étions pas d'accord pour reporter de quelque délai que ce soit.

Et, là-dessus, ça me fait penser que, tout au long de la discussion, il y a eu un certain changement dans le vocabulaire. Au tout départ, c'était: Allons-nous rencontrer les groupes ce soir? Par la suite, c'est devenu: Pas nécessairement ce soir, mais mardi. Par la suite, c'est devenu: Pas nécessairement mardi, mais avant le 23 juin. Et, finalement, ça a été de dire: Bien sûr, dans la mesure où nos leaders s'entendent. Il y a eu ce glissement tout à coup, tout au long, qui passait de la certitude de ce soir à quelque chose qui était mardi prochain, à quelque chose qui était avant le 23 et dans la mesure où nos leaders s'entendent. Et ça, c'est ce que j'ai entendu très, très, très clairement. Alors, un petit glissement bien intéressant à remarquer.

Alors, la question n'est pas de savoir si c'est trois jours, mais de savoir si, oui ou non, à 20 heures ce soir, alors que la commission était convoquée, nous étions prêts – et je l'ai dit très clairement – à entendre les autochtones. Ils n'étaient pas là, malheureusement, et les travaux devaient se continuer, et c'est ce que nous faisons présentement.

(23 heures)

Deuxièmement, M. le Président, je rappelle que nous sommes rendus à l'étude article par article, alors c'est le temps de discuter du fond. Nous avons amplement eu l'occasion de discuter de la motion. Il y en a eu deux, ils auraient pu en faire une troisième. Ils ont choisi de ne pas en faire une puis je pense que ce n'est pas le temps de la reprendre à l'intérieur de ce débat-là. Alors, je suis prêt à répondre à des questions qui portent sur l'article 1 ou l'article 2, si vous voulez passer à cet article-là.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Jacques-Cartier, toujours à l'article 1.

M. Kelley: Non, non, je sais fort bien. Juste en rappelant que la partie autochtone avec laquelle j'ai eu l'occasion de discuter ce soir, sans avoir une formulation autre, trouve que la phrase en question est trop passive. Ils cherchent un moyen de s'assurer qu'ils sont forcément plus impliqués.

Alors, comme j'ai dit, M. le Président, ils ont pris connaissance du projet de loi hier soir. Alors, ils ne vont pas revenir à la charge avec une autre formulation dans 24 heures. Le ministre peut trouver ça tout à fait normal; mais, moi, je trouve qu'il faut leur laisser le temps de réfléchir. Mais est-ce qu'il y aurait moyen d'ajouter, au moins à l'intérieur d'une phrase, une obligation de consultation? On peut laisser «peut également être signataire». On peut laisser le «peut être signataire», mais préalablement ajouter «doit être consulté et peut également être signataire de l'entente» ou quelque chose comme ça.

Je ne suis pas juriste mais je cherche une formulation, parce que la première réaction... Et, comme je dis, c'était pour un groupe qui a vu le projet de loi pour la première fois il y a 24 heures, qui n' pas eu le temps de faire les consultations auprès de leurs avocats. Alors, ils répondent un petit peu sur le coup, mais ils trouvent que la phrase qui est là n'engage pas assez... uniquement le gouvernement du Québec, parce que je sais que le ministre ne peut pas engager le gouvernement de Terre-Neuve ni le gouvernement du Canada – il y aura autre chose – mais les autochtones du Québec ont certaines garanties à l'intérieur de notre Loi existante sur la qualité de l'environnement et le processus du BAPE.

Qu'est-ce qu'on leur propose ce soir? De signer un chèque en blanc dans une entente à laquelle on va arriver un jour avec le gouvernement de Terre-Neuve et le gouvernement qui peut être signataire – il n'y a pas de garantie, il n'y a rien. Alors, ils sont en train d'échanger les droits et les obligations qui découlent de la Loi sur la qualité de l'environnement. Pourquoi? Ils ne savent pas.

Et je comprends la logique de la réponse du ministre hier soir, en Chambre, de ne pas imposer l'obligation qu'il doit être signataire préalablement, mais est-ce qu'il y aurait moyen, au moins, de mettre plus précis, dans la phrase, une obligation de consultation, une obligation pour assurer... Parce que, comme je dis, le ministre peut toujours tirer sur le messager; moi, j'ai pris la peine de les consulter aujourd'hui. J'ai dit à maintes reprises: Je ne prétends aucunement que c'était une consultation exhaustive, mais c'était leur première réaction.

Alors, est-ce qu'il y a moyen ce soir de modifier la phrase qui pourrait au moins rassurer les Innu qu'ils seront dans le coup?

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Bégin: M. le Président, nous ne voulons pas les consulter, nous voulons qu'ils soient partie prenante de l'entente; c'est beaucoup plus que de la consultation. La consultation, c'est: On entend puis, après ça, on fait ce qu'on veut. Puis ce n'est pas ça qu'on veut.

Ce qu'on veut, c'est qu'ils soient partie, signataires, donc qu'ils soient d'accord avec chacun des mots de la convention. Et c'est partenaires, c'est la même chose. On peut conclure une entente avec le gouvernement du Canada. On ne dit pas «doit conclure une entente avec le gouvernement du Canada». On peut conclure, comme on peut conclure avec le gouvernement de Terre-Neuve, pas on doit conclure. On ne doit pas consulter Terre-Neuve, on ne doit pas consulter le fédéral, on peut conclure une entente.

Ce que l'on comprend, c'est que Terre-Neuve est intéressée à conclure une entente, le Canada est intéressé à conclure une entente et les parties autochtones sont intéressées à conclure une entente pour s'assurer que ce qu'ils prétendent qui est leur façon de voir, leur façon d'être, leur façon de regarder les choses soient bien tenues en compte. Ce qu'ils font, c'est qu'ils acceptent la main qui est tendue, comme elle est tendue au fédéral, comme elle est tendue à Terre-Neuve. Nous nous assoyons ensemble, nous rédigeons une convention disant: Nous allons mutuellement nous comporter comme ceci. Et, une fois conclue, on agit en conséquence.

Alors, c'est la même façon de dire et c'est beaucoup plus que de la consultation, c'est du partenariat au sens le plus total qu'on puisse imaginer, c'est qu'on est partie à l'entente. Je ne vois pas qu'est-ce qu'on peut dire de drôle là-dedans. Nous disons: Nous voulons que vous soyez avec nous, que vous signiez au bas de la page pour être certains qu'on est d'accord. Et ce n'est que là qu'on commence à faire nos travaux dans l'ordre qui est prévu dans la convention. Je pense que c'est le maximum que nous puissions faire.

M. Kelley: Mais, moi, comme je fais écho aux premières réactions, je trouve très important... On parle du gouvernement de Terre-Neuve, le gouvernement du Canada, les deux ont leur ministère de l'Environnement. Ils ont leurs experts, ils ont une assise juridique constitutionnelle bien établie.

Par contre, quand on parle des autochtones du Québec et du Canada, les choses sont nettement moins claires; c'est pourquoi les jugements de la Cour suprême, entre autres, à maintes reprises, pour clarifier l'état du droit autochtone. Je pense que le ministre va convenir avec moi, c'est d'une clarté beaucoup moindre que les pouvoirs relatifs d'un gouvernement fédéral et des gouvernements des provinces.

Alors, comme je dis, première réaction de l'Alliance Innu à ce qui est proposé, ici, ce soir, ça manque d'un certain engagement, ça prend un certain engagement d'être impliqué plus tôt dans le processus, dès le départ. Moi, je ne suis pas juriste. Alors, la formulation d'avoir au moins une obligation de consultation ajoutée ici, si on ne peut pas le faire, on ne peut pas le faire. Mais, moi, je veux juste dire simplement: Après une première lecture très rapide, les Innu sont... il n'y a pas assez de devoir de l'État envers eux autres dans la formulation actuelle.

Alors, qu'est-ce que je cherche? Parce que j'ai compris également la logique, que le ministre ne veut pas imposer l'obligation non plus. J'accepte ça, je le comprends. Mais est-ce qu'il y a une position mitoyenne entre les deux qui, au moins, va indiquer clairement qu'à l'intérieur des négociations de cette entente éventuelle avec le gouvernement de Terre-Neuve, avec le gouvernement du Canada, ils seront obligatoirement consultés? Ça va arriver de toute façon, je ne mets pas ça en question. Mais, pour rassurer ces populations, si on indique clairement ici: On a un devoir de consultation, un devoir de négociation... Je ne sais pas comment le formuler, mais est-ce qu'il y aurait moyen de mettre ça, ici, juste comme police d'assurance, parce que c'est ça qu'ils cherchent?

C'est ça que j'essaie de faire comprendre aux membres de la commission, qu'ils trouvent la formulation existante inadéquate. Et le ministre peut dire: Ça va de soi, mais ils ne le voient pas, ça, comme ça. Alors, si, en ajoutant une couple de mots, on peut avoir une meilleure garantie de la compréhension qu'ils sont vraiment impliqués, je pense que ça vaut la peine. Sauf si quelqu'un peut me dire, au niveau juridique, qu'on ne peut pas mettre le «devoir» à l'intérieur de la phrase. Mais, sinon, pourquoi ne pas le faire? Je ne comprends pas, pour les rassurer, c'est quoi, l'obstacle ou la résistance de M. le ministre. Mais, comme je dis, à première vue, pour un groupe qui n'a eu que 24 heures pour réfléchir à la question, il a trouvé la formulation actuelle trop passive. Est-ce qu'il y a d'autre moyen, sans changer l'objectif ultime du ministre, d'ajouter un bout de phrase ou quelque chose comme ça, qui peut peut-être rassurer les Innu à ce stade-ci?

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Bégin: M. le Président, nous voulons, et c'était le sens de toute la démarche, conclure une entente avec trois autres parties. Nous voulons le faire et nous nous donnons les moyens juridiques pour y arriver en proposant ce projet de loi là.

Alors, nous avons cherché à formuler le texte de manière à permettre le maximum de choses – pas le minimum, pas le moins, mais le plus. Le moins, ce serait, par exemple, et je peux comprendre le sens de ce que dit le député de Jacques-Cartier, mais c'est moins que ce que nous offrons, c'est-à-dire de les consulter. Les consulter, c'est les entendre, c'est écouter ce qu'ils ont à dire, mais c'est aussi, après avoir fait ça, la capacité de faire autrement. Alors que de dire: Soyez partie, c'est de dire: On va discuter, on va échanger, on va négocier, et là, finalement, après tout ce que ça prendra de temps...

M. Kelley: ...on laisse qu'est-ce qui est là, là. On ajoute une autre phrase comme police d'assurance.

M. Bégin: Non.

(23 h 10)

M. Kelley: Je ne dis pas qu'on change qu'est-ce qui est là. On ajoute un devoir de consultation à l'intérieur, mais on laisse le «peut être signataire». Je comprends le sens.

M. Bégin: Non.

M. Kelley: Et si le ministre ne veut pas... J'ai fait...

M. Bégin: Non, ce n'est pas une question que je ne veux pas, c'est que nous détruisons ce que nous sommes en train de bâtir, nous allons à moins. Dire qu'on va consulter...

M. Kelley: Mais qu'est-ce qu'on a là reste là. Comment est-ce qu'on peut avoir moins?

M. Bégin: Oui. Mais, même là... Si on dit qu'on peut conclure puis qu'on doit consulter, bien là, à ce moment-là, on vient de dire: Écoutez, on fera bien ce qu'on voudra; alors que le sens, c'est: Nous voulons qu'il y ait une entente avec les parties et nous allons discuter avec elles – pas les consulter – nous allons discuter, et c'est la hauteur de la barre que nous plaçons, pas là mais plus haut.

M. Kelley: Mais leur façon de voir ça, «peut» propose que peut pas...

M. Bégin: Non.

M. Kelley: Mais c'est leur lecture, M. le ministre, ce n'est pas ma lecture.

M. Bégin: Je comprends, mais c'est peut-être une mauvaise lecture. Je ne vais pas leur faire grief de la chose, mais les mots qui sont là sont des mots...

M. Kelley: Je propose peut-être que les représentants du ministère de l'Environnement doivent s'asseoir et faire un briefing technique auprès de ces personnes...

M. Bégin: Non. Mais ce n'est pas ça; c'est moins.

M. Kelley: Ce que je répète ce soir, M. le Président, c'est juste l'écho que j'ai des parties concernées qui cherchent une rassurance. Alors, je ne vois pas... Qu'on laisse ce qui est là, là, puis j'ajoute une phrase. Le ministre dit que je suis en train de réduire la portée; j'ajoute. Qu'est-ce qui est là demeure là. Je n'ai rien enlevé, mais j'ai juste ajouté comme police d'assurance un certain devoir. Si le ministre dit: O.K., j'ai fait mon devoir comme messager. Si le ministre dit que le messager ne reflète pas bien ce qu'il a entendu aujourd'hui, il peut le faire...

M. Bégin: Non. Ce n'est pas ça que je dis. Ha, ha, ha!

M. Kelley: ...mais, moi, j'ai fait mon devoir, M. le Président, parce que, moi, je pense qu'on a tout intérêt de s'assurer que le processus marche parce que, avant tout, c'est notre premier ministre qui a dit que ça doit marcher. Et j'ai pris la peine de consulter les partenaires visés. C'est les échos qu'on m'a donnés. On verra. Mais mon devoir est fait. Eux autres ont trouvé que la formulation actuelle n'est pas assez engageante, si je peux utiliser le mot, pour le gouvernement du Québec et ils veulent être plus associés. Alors, il y a un certain devoir. Si «consulter» n'est pas le bon mot, s'il y a une formulation autre que le ministre veut proposer, tant mieux, mais c'est ça, le sens de la représentation qu'ils ont faite aujourd'hui, comme je dis, en catastrophe; ce n'était pas planifié.

J'ai ri quand le ministre m'a dit d'inviter et d'organiser les travaux des commissions. Je veux bien, je ne suis pas le leader du gouvernement et, s'il y a quelqu'un qui convoque les commissions, s'il y a quelqu'un qui organise les travaux, c'est le leader du gouvernement et non le député de Jacques-Cartier.

Alors, le ministre peut prétendre que c'est le pouvoir puissant de l'opposition d'organiser nos travaux, mais, je regrette, M. le Président, j'ai su après la période de questions, aujourd'hui, comme tout le monde, qu'on est convoqués ce soir sur le projet de loi n° 60. Ce n'est pas moi qui ai décidé ça. Nous sommes ici. On a essayé, dans le meilleur du possible, d'arriver avec des questions informées, dans quelques heures. J'ai fait mon devoir, nous avons fait notre devoir comme opposition.

Si le ministre dit que la proposition que j'ai faite, qui essaie de répondre aux questions qui étaient soulevées aujourd'hui, est complètement inutile, bravo, je vais faxer de nouveau les galées de ce soir aux mêmes représentants demain, et ils vont juger des conséquences. Mais, moi, au moins, j'ai dit, j'ai pris l'engagement qu'ils cherchent, un certain engagement à l'intérieur de la phrase qu'ils ne trouvent pas. Ils ne remettent pas en question la volonté du ministre de les avoir comme signataires. J'en conviens, je ne remets pas ça en question, mais ils cherchent une certaine obligation d'être plus engagés dans le processus.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Bégin: Non. Je pense que j'ai dit ce que j'avais à dire là-dessus. Je comprends le sens de la démarche du député de Jacques-Cartier. Je respecte ce qu'il dit, mais je ne partage pas cependant son point de vue. Je pense sincèrement que l'objectif qu'il visait, je le comprends, mais il n'arrive pas à ce qui m'apparaît être un chemin qui serait acceptable. Je n'ai pas moi-même de choses à proposer. Je pense qu'on pourrait voter l'article tel qu'il est, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Johnson.

M. Boucher: Juste avant, moi, si le député de Jacques-Cartier avait la gentillesse de me transmettre, s'il le voulait, les coordonnées des gens qu'il a rencontrés, je serais heureux de les rencontrer ou de leur parler, personnellement, j'aimerais.

M. Kelley: Vous avez voté contre les consultations, mais maintenant vous voulez les consulter. Je comprends fort bien, mais ça ne me dérange pas.

M. Boucher: J'aimerais leur...

M. Benoit: Bien, oui, mais vous êtes au gouvernement. Il y a le ministère des Affaires autochtones, tu as un ministre. Vous avez tout ça; vous avez 800 attachés politiques, faites votre job, maudit! On a à peu près six attachés politiques, nous autres.

Le Président (M. Lachance): Vous voyez, M. le député de Johnson, que vous pouvez mener un débat animé. Alors, veuillez en prendre note.

Est-ce que l'article 1 est adopté?

Une voix: Adopté.

M. Benoit: Adopté sur division.

Le Président (M. Lachance): Adopté sur division. Article 2, M. le ministre.


Dispositions de l'entente

M. Bégin: Alors, on vient de dire que nous sommes d'accord pour qu'on conclue des ententes. Alors, qu'est-ce que sera cette entente? D'abord, elle vise à prévoir la constitution et aussi le fonctionnement d'un organisme qui serait responsable de la mise en oeuvre du processus une fois qu'il aurait été convenu entre les parties signataires. Donc, cet organisme-là aurait cette fonction de faire fonctionner l'ensemble.

Ensuite, l'entente, évidemment, peut, après avoir pris en compte ce que la Loi de la qualité de l'environnement du Québec prévoit, de même que ses règlements, prévoir les conditions qui vont être applicables à la réalisation de l'étude des impacts environnementaux.

Donc, c'est là qu'on voit le premier élément qui va ressembler à ce que nous avons, mais qui va tenir compte de ce que l'entente va prévoir concernant l'étude des impacts environnementaux, de même que sur la façon de tenir des séances d'information, d'abord. Parce qu'il faut, une fois que le projet est déposé, une fois qu'on a posé des directives et qu'on a tout ça, quand même informer la population pour qu'elle puisse préparer des réactions à ce qu'elle aura compris du projet du promoteur et faire des consultations publiques pour leur permettre justement, à ces personnes, d'exposer leurs prétentions. Alors, c'est des consultations publiques puis des audiences publiques sur le projet.

Ensuite, on arrive au troisième alinéa. Bien sûr qu'il faudra que ces dispositions-là de l'entente remplacent les dispositions actuelles de la Loi de la qualité de l'environnement à l'égard de ce projet-là, parce que, sinon, on se retrouverait à avoir deux jeux de lois pour faire appliquer au même projet, ce qui nous compliquerait évidemment la vie, pour ne pas dire nous la rendrait impossible.

Et nous avons, dans la deuxième partie du paragraphe, des expressions qui visent à s'assurer que ce que nous ferons ainsi, selon cette entente, sera réputé respecter les dispositions de la Loi sur la qualité de l'environnement et tout ce qui s'applique autour. Donc, on veut non seulement qu'il y ait une entente qui dise comment ça va être fait, deuxièmement, dire qu'on a le pouvoir de le faire, mais qu'en plus, quand ça sera fait, on dira: C'est réputé respecter les règles que nous avons actuellement dans nos lois. Alors, c'est le sens de l'article 2, M. le Président.

M. Benoit: Oui, M. le Président...

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Orford.

M. Benoit: ...quand on lit à l'article... D'abord, je pense qu'il y a une faute de français, là, «de la mise en oeuvre».

M. Bégin: Quel paragraphe?

M. Benoit: «Responsable de la mise en oeuvre».

M. Bégin: Oui, oui, ça va. C'est quoi, la faute?

M. Benoit: Pour moi, il manque un e, là.

M. Bégin: Où?

M. Benoit: «Responsable de la mise en oeuvre».

M. Bégin: J'ai tous les e qu'il me faut, moi, mais...

M. Benoit: Comment il est écrit, «oeuvre», dans votre projet?

M. Bégin: O-e-u-v-r-e.

M. Kelley: Oui, c'est différent. Vous êtes sur le texte de l'Internet.

M. Benoit: Oui, il manque un e. C'est ça.

M. Kelley: C'est ça, le texte, ici.

M. Benoit: O.K. Moi, j'ai celui de l'Internet.

M. Kelley: Il manque un e sur l'Internet.

M. Bégin: Le mien, il est bien beau.

M. Benoit: O.K. Alors, je ne sais pas comment ça peut se produire, une erreur comme celle-là, mais il y a une erreur, là. «Prévoir les conditions applicables à la réalisation de l'étude», quelles sont ces conditions applicables à la réalisation de l'étude, M. le ministre?

M. Bégin: C'est celles dont nous discuterons avec les autres parties et dont nous conviendrons avec elles qu'elles seront prévues dans l'entente. Elles ne sont pas prévues actuellement, mais elle devra les prévoir, comment l'étude d'impact va-t-elle se faire.

Alors, M. le député de Jacques-Cartier, tantôt, nous disait: Nous aimerions que les autochtones puissent, par exemple, poser des questions sur des préoccupations qui leur sont propres. Bien, on dira dans l'entente justement, à l'égard de ces questions qui les concernent, les autochtones, de quelle façon on devra y répondre. C'est l'objet de l'entente même.

M. Benoit: C'est-u dans les conditions gagnantes, ça, pour le référendum? Non?

M. Bégin: Certainement pour la réalisation du projet. Ha, ha, ha!

M. Benoit: C'est dans les conditions gagnantes de la réalisation de quel projet?

(23 h 20)

M. Bégin: Du projet de la du projet de la rivière Churchill. Mais tout le monde va être gagnant.

M. Benoit: Dans la rivière Churchill, à l'heure actuelle, les seuls qui sont perdants, d'après la conférence de presse où votre premier ministre est allé, ça a été les autochtones. D'après les deux premiers ministres, ils sont bien gagnants. Eux autres, les autochtones, au moment où on se parle, d'après eux, ils ne sont pas gagnants encore.

M. Bégin: Ah, c'est sûr qu'ils vont...

M. Benoit: Ce qu'on souhaite, de ce côté-ci, c'est qu'ils le soient, gagnants; qu'on les entende...

M. Bégin: C'est ce que nous prévoyons aussi.

M. Benoit: ...qu'ils soient partie prenante à tout ça. On vous l'a dit, de 20 heures à 22 heures.

Une voix: C'est pour ça qu'il faut qu'ils soient dans l'entente.

M. Benoit: Puis la meilleure façon pour qu'ils soient gagnants, c'est qu'on les entende. Là, vous avez décidé de ne pas les entendre. Ça part bien mal. Surtout après la conférence de presse que vous avez eue il y a quelques mois, je pensais que vous aviez appris. Mais, enfin!

Alors, «prévoir les conditions applicables»... Pour le moment, c'est très, très vague, ce projet de loi là. «Peut également...», mon confrère le disait tantôt, «peut également [...] prévoir les conditions», mais on ne les nomme pas. C'est très, très, très large. Mon leader, qui a pas mal plus d'expérience probablement que tous nous autres ici, me disait que, dans sa carrière, c'est probablement le projet de loi le plus large qu'il avait vu. Je veux dire, nous autres, il faut vous faire confiance pour aller voter pour ça. Et, après toutes les accusations que vous avez portées...

M. Bégin: Vous avez raison; je suis un bon gars.

M. Benoit: ...de 20 heures à 22 h 30, vous aurez votre projet de loi avant minuit.

M. Bégin: Ha, ha, ha!

M. Benoit: Et ceux qui ont douté de notre bonne volonté, de notre bonne foi dans ce projet de loi là, j'espère que, ce soir, ils pourront réaliser qu'ils ont erré toute la soirée et que, nous, quand on a parlé d'inviter la communauté autochtone, ce n'était vraiment pas stratégique, c'était du fond du coeur, comme démocrates, que nous voulions les entendre. Et ça, nous ne changerons pas de point de vue là-dessus.

M. Bégin: Pour le «peut», vous remarquerez qu'il est qualifié parce qu'on dit: «L'entente peut également, après avoir pris en compte les exigences de la Loi sur la qualité de l'environnement et de ses règlements, prévoir les conditions applicables...» Donc, ce n'est pas un chèque en blanc qui est donné au ministre de l'Environnement dans le cadre de la négociation et de la conclusion de l'entente avec les parties dont on parle depuis tantôt. Mais il y a un cadre qui est donné. C'est en tenant compte des exigences de la Loi sur la qualité de l'environnement, pas n'importe quel processus.

Autant on comprend qu'on ne peut pas le faire sans avoir une habilitation particulière et qu'on doit le faire le plus proche possible, mais il faut que ça soit en tenant compte de la Loi sur la qualité de l'environnement; pas n'importe quoi, un processus dont on est très fier au Québec, des deux côtés de la Chambre, d'ailleurs, là-dessus. Et on a toujours suivi avec respect les règles qui sont énoncées. Alors, on veut que, mutatis mutandis, avec les ajustements requis, on suive quand même le cadre que nous avons au Québec pour tenir compte du fédéral, tenir compte de Terre-Neuve et des parties autochtones intéressées mais, quand même, pas trop loin.

M. Benoit: Est-ce que ce processus ou cet organisme que vous allez mettre en place, ça va s'appeler une commission d'enquête, ça va s'appeler un tribunal, est-ce que ça va s'appeler une commission? Quel genre de structure ça a? Parce que c'est tellement vague ici. Il nous est difficile de cerner...

Si vous me disiez: Ça va être comme le BAPE, je dirais: Bon, bien, ça va être comme le BAPE. On sait comment ça fonctionne, le BAPE; on sait de quelle loi ça s'applique. Ici, là, on n'a pas trop, trop d'idées. Vous nous dites: On ne sait même pas qui va siéger là-dessus, les conditions applicables, on ne peut pas trop vous le dire... C'est vague à souhait. Pour que mon leader me dise que c'est un des projets de loi les plus vagues qu'il a jamais vus dans sa carrière, il faut que ça soit pas mal large.

M. Bégin: L'organisme en question ne sera pas chargé de faire lui-même, mais de s'assurer de la mise en oeuvre du processus. Donc, quand on va convenir de quelle manière nous allons fonctionner ensemble, l'organisme en question va s'assurer qu'on suive ça. Par exemple, qu'il y ait une directive qui soit émise; par exemple, qu'on ait des séances d'information de la population; par exemple, qu'on ait de la consultation, qu'on ait également des audiences publiques. S'assurer du processus, c'est ça; c'est ça, la fonction de l'organisme. Le reste viendra selon les ententes qu'on aura faites avec les parties.

M. Benoit: Comment loin êtes-vous rendu dans l'entendement dans tout ça avec le fédéral et Terre-Neuve?

M. Bégin: Il y a des discussions qui ont cours, il y a des échanges. Par exemple, pour nous autres, l'évolution principale, ça a été de dire: Nous constatons que, au-delà de toute volonté que nous aurions de nous entendre, nous n'avons pas l'instrument légal requis pour conclure quoi que ce soit. Alors, nous avons, de notre côté, pris cette position-là.

Par ailleurs, est-ce que Terre-Neuve va suivre radicalement sa procédure ou bien va plutôt se rapprocher de la position fédérale? C'est plutôt de ce côté-là que les choses se dirigent présentement.

Maintenant, le gouvernement de Terre-Neuve pourrait, d'ici un mois, deux mois, trois mois, dire: Bien, là, on voudrait que ça soit autrement. Tout ça, c'est en pleine évolution, c'est en pleine discussion, et on espère que, quand on aura notre instrument, on pourra conclure avec les autres parties. Mais c'est une chose qui est en pleine évolution au moment où on se parle.

Le Président (M. Lachance): M. le député de La Peltrie, vous aviez demandé la parole.

M. Côté (La Peltrie): Merci, M. le Président. M. le ministre, vous avez donné quelques indications, tout à l'heure, de ce que pourrait être l'organisme responsable de la mise en oeuvre du processus. Est-ce que cet organisme-là, ça pourrait être un organisme déjà existant qui pourrait être retenu ou s'il faut que ça soit un organisme qu'il faut qu'il soit absolument mis sur pied, indépendamment de ça?

M. Bégin: Théoriquement, ça pourrait être un organisme existant. Je dis bien «théoriquement», mais je doute fort que ça soit le cas, puisque ça serait confié soit à un organisme fédéral, soit à un organisme de Terre-Neuve, soit à un organisme du Québec – je ne sais pas qu'il y en ait du côté des parties autochtones intéressées. Donc, je pense plutôt qu'on va créer ensemble un tel organisme avec des représentants de chacune des parties, qui va s'assurer du suivi du processus.

M. Côté (La Peltrie): Mais, s'il y avait entente entre les trois parties, ça pourrait peut-être...

M. Bégin: Ah, c'est pour ça que je dis: Théoriquement, oui. Mais je doute fort que ça soit le cas. Théoriquement, oui.

M. Côté (La Peltrie): Merci.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 2 est adopté?

Une voix: Adopté.


Modalités de financement de l'entente

Le Président (M. Lachance): Adopté. L'article 3, M. le ministre.

M. Bégin: C'est particulier, mais les sommes qui sont nécessaires à l'application de l'entente visée à l'article 1 ne seront pas prises à même le budget du ministère de l'Environnement, mais à même le fonds consolidé du revenu et dans la mesure que déterminera le gouvernement. Donc, c'est une disposition, et c'est pourquoi j'ai lu, au moment du dépôt du projet de loi, que le lieutenant-gouverneur avait autorisé une telle dépense.

M. Benoit: J'imagine que le ministre, bien sûr, s'il a déposé un projet de loi comme celui-là, sait quelles sont les sommes d'argent, parce qu'on veut finir toutes ces études-là pour l'an 2000. Donc, ça veut dire que, dès l'année prochaine, et probablement même cette année, l'organisme sera en place. Quelles sont les sommes d'argent qu'on a déjà anticipé de mettre dans ce...

M. Bégin: Je n'ai pas la réponse à cette question au moment où on se parle. On saura mieux quand on aura fini les négociations, qu'on aura signé l'entente. Et là, qu'est-ce que ça va impliquer pour gérer ça? Par exemple, combien il y aura de groupes qui vont se présenter? L'organisme va-t-il siéger une, deux, trois, fois? Comment on va se rendre là?

Bref, à l'époque, on saura exactement à quoi s'en tenir. C'est pour ça que, au moment où on se parle, on dit «dans la mesure que détermine le gouvernement», mais ce sera en connaissance de cause. À ce stade-ci, c'est prématuré de répondre à cette question.

M. Benoit: Êtes-vous après me dire qu'on est après voter un projet de loi sans savoir ce que ça va coûter?

M. Bégin: Exactement, nous ne savons pas exactement ce que va coûter la chose puisque, par hypothèse...

M. Benoit: Ça fait dur.

M. Bégin: ...nous ne savons pas quelle sera l'entente que nous conclurons, quelles seront les conséquences de cette entente. On peut avoir un ordre de grandeur, mais il est évident qu'on ne le sait pas, au moment où on siège. Si, par exemple, on dit: Il y aura six mois de consultations ou d'audiences publiques, ou si on dit: Il y aura deux mois, juste à ce compte-là, le coût des, entre guillemets, futurs membres du bureau qui entendra ça, les dépenses de voyage, les dépenses de transcription de notes, les études qui ont été faites, ça ne sera pas du même ordre. Alors, au moment où on se parle, on ne connaît pas ces réponses-là. On le saura plus tard.

M. Benoit: Quel est l'ordre de grandeur que vous mentionnez?

M. Bégin: Je ne peux pas répondre, à ce stade-ci, à votre question.

M. Benoit: Donc, on signe un chèque en blanc ici, ce soir, comme parlementaires.

M. Bégin: Pas du tout, pas du tout. Nous disons que nous aurons les sommes requises pour tenir un processus de consultations publiques pour permettre le parachèvement du projet, en respectant les règles que nous aurons conclues avec d'autres parties concernées. Donc, personne ne sera intéressé à ce qu'il coûte plus cher que requis.

M. Benoit: Est-ce que ce n'est pas un peu exceptionnel qu'on vote un projet de loi, M. le ministre, puis qu'on dise: Bien, ça coûtera ce que ça coûtera, vogue la galère!

M. Bégin: Non, je ne suis pas d'accord avec la deuxième partie de votre proposition.

M. Benoit: Vogue la galère sur la rivière Churchill!

M. Bégin: Ha, ha, ha! Nous disons que nous voulons nous assurer d'un processus. Nous allons nous assurer que l'environnement soit protégé. Nous allons nous assurer que les parties intéressées soient présentes et qu'on le fasse de concert; alors, un processus unifié plutôt qu'un processus multiplié par trois, comme on aurait pu y arriver si nous n'avions pas agi de manière concertée.

Alors, on dit: On va essayer de faire ça le mieux possible. Mais, au moment où on adopte la loi, il est impossible de déterminer exactement ce que sera l'entente. Donc, il y a une partie qui reste incertaine, et cette partie-là sera quantifiée lorsqu'on aura conclu l'entente.

(23 h 30)

M. Benoit: Vous réalisez, M. le ministre, que, de toutes les questions que nous avons posées depuis que nous étudions ce projet de loi là, nous n'avons eu aucune réponse précise à aucune question que nous avons posée. Quand je vous disais que ce projet de loi, non seulement il était vague à souhait, les réponses du ministre sont deux fois plus vagues que le projet de loi. Alors, les gens qui nous ont accusés de ne pas faire confiance puis de ne pas appuyer, etc., étaient de mauvaise volonté ce soir, je tiens à le dire, parce qu'avec les réponses qu'on a eues, qui ne sont pas des réponses, avec un projet de loi où on a des mots «peut» et «sont prises dans le fonds consolidé du revenu, dans la mesure que détermine le gouvernement», ce n'est pas très précis, ça, là... et la réponse du ministre était rien qu'un peu plus évasive que le projet de loi. Alors...

M. Bégin: Je suis persuadé, monsieur...

M. Benoit: Pardon?

M. Bégin: Excusez, je pensais que j'avais la parole.

M. Benoit: Non, très bien.

M. Bégin: Je suis persuadé, M. le Président, que l'opposition ne votera jamais un projet de loi si elle n'est pas convaincue que le projet de loi a du sens et que ce qu'il y a là, le degré d'imprécision qui tient compte des circonstances, est absolument compréhensible dans les circonstances. Sinon, l'opposition serait en train de me dire que, même si tout est incorrect, elle vote quand même en faveur d'un projet de loi. Je suis certain que ce n'est pas ça qu'ils font.

M. Benoit: Non. Ce qui m'inquiète, c'est, quand j'écoute le ministre, hier... C'est parce que le ministre nous laisse sous-entendre qu'il a les réponses mais qu'il ne veut pas nous les donner. Quand, hier, j'entendais le ministre qui nous disait qu'il y a deux rivières puis 1 000 km², puis au même moment Hydro-Québec était après nous annoncer dans les médias nationaux, à travers le monde, que ça va être une rivière puis que ça va être 700 km²... Il est le ministre de l'Environnement, il ne sait même pas qu'on vient de lui enlever une rivière, dans le projet, puis qu'on vient de lui enlever 300 km². Vous comprendrez que, quand on pose des questions au ministre puis qu'il nous dit: Bien, on ne le sait pas, on va déterminer, c'est très inquiétant. Avec Hydro-Québec, hier, dans son dos, au moment où il était à la télévision après annoncer au bon peuple du Québec qu'on va faire un projet de loi... Qu'il ne sache même pas qu'Hydro-Québec vient de lui enlever une rivière, c'est très préoccupant.

La question qu'il faut se demander, en tout cas comme environnementaliste, c'est: Quel est le poids du ministère... du ministre, pas du ministère – j'ai une autre estime sur le ministère – quel est le poids du ministre de l'Environnement auprès d'Hydro-Québec, quel est le poids du ministre de l'Environnement auprès du Conseil des ministres? Et la réponse, bien, je pense qu'on la trouve tout seul quand le ministre nous annonce deux rivières puis qu'il y en a rien qu'une, au même moment, sur le même poste de télévision. Sérieux problème. Les nouvelles, hier soir, ce n'était pas compliqué. Ça commençait avec Hydro-Québec qui nous annonçait qu'il y avait une rivière, puis ensuite le ministre qui avait un projet de loi avec deux rivières, lui. Aie! C'est fort, ça, là. Je veux dire, on a l'air brillant, là.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Bégin: M. le Président, tout à l'heure, on demandait combien ça allait coûter, et j'ai répondu que ça peut varier selon les circonstances, puis on a un bel exemple de ce qui peut arriver. Le ministère de l'Environnement avec les gouvernements de Terre-Neuve, du fédéral et des parties intéressées vont, par ce projet de loi, établir de quelle manière la consultation publique – et je pense que c'est important, il faut que vous écoutiez ça – va être faite sur un projet qui n'est pas le projet du gouvernement du Québec, qui est le projet des promoteurs que sont Hydro-Québec et Hydro Labrador.

Donc, ces parties-là peuvent présenter un projet qui change dans le temps. Il peut être plus étroit, il peut être plus large. Et c'est compréhensible. Si on dit, par exemple, qu'il y aura une rivière plutôt que deux, c'est évident que les études d'impact vont être moins nombreuses, moins considérables, moins coûteuses. Inversement, si le projet est plus gros, ce qui peut être possible, bien, à ce moment-là, il y aura plus d'études, plus de conséquences et, donc, plus de coûts. Alors, les coûts vont varier en fonction du projet qui sera soumis. Et, si, au moment où on fait l'étude environnementale, on a une seule rivière, ça coûtera moins cher que si on en avait deux. Mais c'est exactement pour ça qu'on ne détermine pas les coûts. Et c'est des réponses qui m'apparaissent très précises.

Le Président (M. Lachance): M. le député de La Peltrie.

M. Côté (La Peltrie): Oui, je comprends qu'on ne peut pas déterminer les coûts, mais, au niveau du partage, est-ce que ça, c'est déjà déterminé? Ça, ça va être dans l'entente également?

M. Bégin: Également, de quelle façon on répartira. On peut présumer que le gouvernement terre-neuvien comme le gouvernement québécois et le gouvernement fédéral auront la plus forte partie à contribuer. Est-ce qu'il y en aura une qui sera symbolique, importante, de la part des parties autochtones intéressées? Il est trop tôt pour le prévoir, mais on peut s'attendre à ce qu'elle ne soit pas nécessairement proportionnelle en nombre – 25-25-25-25, parce qu'il y a quatre parties – on peut penser qu'il y aura des variations. Mais ça, ça sera aux parties, justement dans le cadre des discussions, des négociations qu'elles vont faire, d'établir la chose.

M. Côté (La Peltrie): Donc, lorsqu'on dit dans l'article «dans la mesure que détermine le gouvernement», ça va être déterminé beaucoup plus dans l'entente que par le gouvernement.

M. Bégin: Bien, c'est-à-dire que l'entente va conditionner un peu l'obligation du gouvernement, mais, si on dit, par exemple, que nous finançons, comme le demandait le député d'Orford plus tôt dans la soirée, qu'il y ait des contributions financières, par exemple, du gouvernement pour aider les groupes environnementaux à préparer leur mémoire, bon, bien, si le gouvernement du Québec dit: On paie 50 % des projets, ou si on paie sur une base, je ne sais pas, moi, de dire 50 000 $ par groupe ou par projet ou par étude, bien, c'est évident que le gouvernement détermine, à ce moment-là, en faisant une telle décision, quelle est la part qu'il aura à contribuer. Mais c'est différent de dire: Comment on va se partager les coûts, par exemple, du Bureau qui entendra les audiences publiques? Bien, là, est-ce que ça sera 25-25-25? Ça dépendra du nombre de personnes, ça dépendra combien de temps elles siégeront, et on verra à ce moment-là que le gouvernement paiera seulement les pourcentages qu'ils auront convenu.

M. Côté (La Peltrie): Merci.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Oui, juste sur le même ordre d'idées, également sur les choses à négocier avant d'arriver à l'entente, est-ce que l'ajout ou la capacité, pour les nations innu, d'avoir accès aux expertises et aux ressources nécessaires pour participer pleinement dans l'étude est quelque chose qui va être examiné de près? On a vu ça dans d'autres ententes aussi, l'expertise requise. Le gouvernement du Québec a un ministère de l'Environnement, le gouvernement de Terre-Neuve a également un ministère de l'Environnement, le gouvernement du Canada a ses expertises; ces communautés sont des communautés plutôt pauvres qui n'ont pas les ressources, qui n'ont pas accès aux ressources – les biologistes, les autres experts requis – pour participer pleinement à une évaluation d'une étude de cette ampleur, parce qu'on parle d'un très grand projet. Alors, est-ce que ça être parmi les choses que les parties vont regarder ensemble, la possibilité d'un financement de la nation innu pour la participation aux travaux de l'étude?

M. Bégin: Je pense qu'il faut faire attention de confondre le rôle que peuvent jouer les parties autochtones concernées et celui de les assimiler entre autres à un groupe environnemental. L'entente que nous voulons conclure, c'est pour qu'ils soient partie à l'entente. Donc, on peut présumer, par exemple, que les Innu vont dire: Nous voulons avoir – prenons un chiffre, là – deux personnes qui vont être membres du Bureau qui va entendre. Premier rôle.

Après ça, ils peuvent dire: Nous voulons que, dans le cadre des études qui vont être faites par les promoteurs, on réponde à des questions, qui sont les suivantes: 1, 2, 3, 4, et qu'il y ait des rapports d'experts qui soient déposés là-dessus. Alors, on voit que, là, ce n'est pas un groupe environnemental, c'est un groupe qui est partie prenante et qui dit aux promoteurs: Voici comment nous voulons que les choses soient faites. Donc, les autochtones, les Innu, pourront dire: Nous voulons telle chose. Ça, c'est son rôle de partie à l'entente, ce qui est différent de dire: Comme groupe environnemental, je veux faire des représentations devant le groupe, et voici quels seront les moyens que je vais avoir à ma disposition. Il ne faut pas mêler les deux rôles, ce n'est pas du tout le même.

Ce n'est pas d'un groupe environnemental dont il s'agit là, c'est d'une partie prenante à l'entente. Et, dans ce cadre-là, ils vont déterminer ce qu'ils entendent faire et les moyens dont ils ont besoin. Mais ça ne sera pas pour se représenter devant eux-mêmes qu'ils vont être partie au Bureau, par exemple, qui est l'équivalent du BAPE. Je ne sais pas si vous saisissez bien.

M. Kelley: Non, non, mais, moi, je dis: Par la conséquence de cette étude... Parce qu'on va faire une entente globale, et je pense qu'Hydro et les promoteurs vont arriver avec un projet. Ils ont, avec leurs moyens, accès aux expertises qui sont très, très importantes. Oui, ça va être important, à l'intérieur du processus, d'avoir deux représentants, mais il faut considérer également que, parmi les partenaires, il y a les promoteurs qui ont des ressources très importantes; les gouvernements ont accès aux expertises, aux ressources; il y a une partie, ici, qui est peut-être la plus concernée au niveau de l'impact environnemental, qui n'a pas les moyens de participer pleinement.

(23 h 40)

M. Bégin: Mais je pense qu'il y a vraiment confusion dans les rôles. Quand le gouvernement agit comme partie à l'entente, ou que le gouvernement fédéral agit comme partie à l'entente, ou que le gouvernement de Terre-Neuve... Ils ne sont pas des gens qui vont faire des représentations à l'organisme chargé de l'application de la loi. Ils sont là pour être sur le Bureau, pour entendre ce que le promoteur a à dire, et ils vont poser des questions requises au promoteur pour qu'il fournisse des renseignements suffisants. Alors, ce n'est pas le rôle d'être un défenseur de telle cause, c'est une partie qui écoute et qui entend. Donc, il ne faut pas le voir comme étant un groupe environnemental. S'ils veulent savoir telle chose, ils vont avoir accès, puisqu'ils auront à leur portée les études que le promoteur va faire. Ils vont en prendre partie comme le gouvernement du Québec, comme le gouvernement de Terre-Neuve, comme le gouvernement fédéral, et ils vont s'assurer, s'ils n'ont pas réponse à leurs questions, que le promoteur les fournisse. Alors, ce sera le promoteur qui fera ça, mais ce n'est pas des gens qui vont aller se représenter devant eux-mêmes pour dire: Voici ce que nous pensons du projet du promoteur.

M. Kelley: Non, non, mais est-ce que le ministre comprend qu'il y a une différence? Le gouvernement du Québec peut choisir parmi les personnes qui ont des doctorats en biologie pour être notre représentant sur la commission, peu importe le panel qu'on va mettre ensemble. On peut aller à Laval, on peut aller à McGill, pour trouver les personnes avec une forte expertise pour faire l'évaluation du projet proposé par Hydro-Québec. Terre-Neuve, Canada ont accès à des personnes comme ça. Ce n'est pas nécessairement la quatrième partie. Je pense que, si on regarde les niveaux de scolarité dans les communautés Innu, il n'y a pas une grande liste de personnes avec un doctorat en études environnementales chez les Innu qu'ils peuvent nommer commissaires ou membres du panel.

Est-ce que le ministre est conscient qu'on ne part pas tout le monde sur un pied d'égalité ici? Et est-ce qu'il y a un moyen de donner un soutien pour permettre la participation de la partie autochtone, d'avoir une expertise de soit le gouvernement du Québec... On a déjà le ministère de l'Environnement; vous avez accès, comme ministre, aux experts, mais ce n'est pas le cas pour la partie autochtone.

M. Bégin: Écoutez, dans le cadre des discussions, des négociations qu'elles vont faire avec les trois autres parties, les trois autres gouvernements, les parties intéressées autochtones pourront faire les représentations que vous faites. La réponse sera donnée par les trois autre parties...

M. Kelley: C'était juste ma question.

M. Bégin: Bien non, mais je ne peux pas...

M. Kelley: Mais j'ai l'engagement du ministre que ça va être parmi les choses à regarder.

M. Bégin: Bien non, mais c'est que je ne suis pas, à ce stade-ci, en train de négocier. Je suis en train de dire que les parties vont pouvoir faire leurs représentations. Qu'est-ce que le gouvernement fédéral va vouloir avoir? Qu'est-ce que la partie de Terre-Neuve voudra avoir? Je ne sais pas.

M. Kelley: Mais, M. le ministre, ma question était juste: Est-ce que c'est parmi les choses que le panel va regarder?

M. Bégin: Ça peut être ça, mais ce n'est pas moi qui le décide. Il faut d'abord que les autochtones viennent.

M. Kelley: Non, mais je pense qu'on peut au moins démontrer, comme législateurs, ce soir, certaines volontés.

M. Bégin: Ah! Nous sommes ouverts à discuter.

M. Kelley: Je n'ai pas dit qu'on met dans le projet de loi une obligation.

M. Bégin: Non, non, je comprends.

M. Kelley: J'ai dit: On met sur le «record» que, parmi les choses que le panel qui va être créé, pas uniquement par le gouvernement du Québec, avec les autres partenaires... Mais est-ce qu'on peut prévoir, parmi les choses, qu'un jour il y aura recours au fonds consolidé du gouvernement du Québec, question d'assurer l'accès aux expertises pour les représentants, si on arrive à avoir des représentants innu?

Il y a beaucoup de présomptions dans ma question, mais est-ce que ça va être recevable de regarder la possibilité de donner des ressources ou l'accès aux expertises environnementales pour assurer la participation des Innu dans ce projet d'étude?

M. Bégin: Avant de conclure quelque entente que ce soit, nous aurons discuté, échangé, négocié avec les trois autres parties, et on conviendra ensemble de ce qui nous convient. Alors, ce sera sur tous les aspects qui concernent ce projet-là, celui-là que vous soulevez comme les autres. Et je ne préjuge de rien, je dis simplement que nous allons discuter et négocier et, s'il y a une entente avec ces parties-là...

Le Président (M. Lachance): M. le député de Johnson.

M. Boucher: Juste pour une information à notre collègue de Jacques-Cartier. Dans le dossier Hertel–des Cantons, Hydro-Québec a payé une firme d'ingénieurs pour faire l'évaluation d'un tracé de moindre impact. Elle a donné de l'argent à la MRC du Val-Saint-François qui a engagé une firme d'ingénieurs pour faire l'étude. Alors, j'imagine que ceci n'est pas impossible non plus que la communauté innu puisse recevoir de l'argent de la part d'Hydro pour s'assurer des services d'experts dans ces questions-là. Ça s'est fait en tout cas dans le dossier Hertel–des Cantons. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): C'était un commentaire. M. le député d'Argenteuil.

M. Whissell: M. le Président, à l'article 3, ici, le ministre est en train de donner un chèque en blanc à l'organisme qui pourrait être mis en place pour s'assurer des évaluations environnementales. Est-ce que le ministre peut nous garantir que, dans les argents qui seront consentis éventuellement, que ces argents-là en aucun temps ne serviront à financer des conférences de presse comme on a vécu, avec des feux d'artifice, avec des trompettes, pour vendre le projet? Est-ce que le ministre, oui ou non, de la façon que l'article est libellé, nous garantit que ces argents-là ne serviront pas à faire des conférences de presse? Oui ou non.

M. Bégin: Si vous me dites qu'après avoir négocié pendant, je ne sais pas, moi, un an et demi, avoir conclu une entente avec le gouvernement fédéral, le gouvernement de Terre-Neuve, les parties autochtones intéressées, il n'y aura pas de conférence de presse pour annoncer ça, ma réponse, ça va être non. Il y aura certainement une conférence de presse pour annoncer ça, et ça fera partie des gestes normaux que l'on doit faire. Alors, je ne sais pas si l'argent sera pris là ou ailleurs, mais il m'apparaît tout à fait légitime qu'on annonce des bonnes choses comme celle-là. Et il y aura certainement une conférence de presse.

M. Benoit: Est-ce qu'elle doit coûter 1 500 000 $? Est-ce que chaque conférence de presse va coûter 1 500 000 $?

M. Bégin: On verra dans le temps comme dans le temps.

M. Benoit: Imaginez-vous, le fédéral n'était même pas là la dernière fois. S'il faut que vous mettiez le fédéral en plus à la conférence de presse...

M. Bégin: On va leur demander de tout payer.

M. Benoit: Pardon?

M. Bégin: On va leur demander de tout payer.

M. Benoit: Non, bien, je ne pense pas, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Benoit: Mais, je pense, la question de mon confrère est tout à fait pertinente. On est là qu'on donne un chèque en blanc, et l'expérience qu'on a eue la dernière fois, c'est que, même sans chèque en blanc, vous avez dépensé 1 100 000 $ exactement. Vous avez commencé par dire 200 000 $, mais quatre jours après qu'on ait eu posé des questions, jour après jour, on s'est aperçu que c'était rendu à 1 100 000 $.

Et je vous rappellerai d'ailleurs ce que Lysiane Gagnon a dit dans son article. C'est intéressant comment Mme Gagnon, qui regarde ça de l'extérieur, qui est une analyste tout à fait sérieuse... Et la question de mon confrère est tout à fait pertinente. Mme Gagnon dira dans La Presse du 18 juin – donc, c'est la quatrième journée où on vous pose des questions: «Le scandale est réel. Il s'agit d'un cas patent de patronage, de détournement de fonds publics à des fins partisanes.» Elle n'est pas allée avec le dos de la cuillère.

Et votre premier ministre lui-même dira, le 20 juin, dans ce même débat: Bien, il y a la firme National puis il y a Luc Lavoie qui sont très bons. C'est vrai, je l'ai dit, je l'ai connu, et Hydro, par la suite, a engagé la firme. C'est ça qui est arrivé. Alors, votre premier ministre ne s'est jamais caché d'avoir recommandé son ancien chef de cabinet. Et puis Mme Gagnon dit: Bien, c'est ça, c'est un beau cas de patronage juste avant une période électorale.

Ceci dit, la question de mon confrère...

M. Bégin: Je ne pense pas que ça soit le cas, mais c'est Hydro-Québec qui a fait la conférence de presse.

M. Benoit: La question de mon confrère est pertinente: Combien de ces sommes d'argent, le chèque en blanc qu'on est après vous donner, vont aller dans des opérations... Surtout après votre réunion de la fin de semaine, là, à Saint-Hyacinthe où les gens allaient devant le micro puis disaient: Prenez les deniers publics pour faire la promotion de la souveraineté. Combien de ces argents-là qu'on est après vous voter en blanc vont servir à faire la souveraineté ou des conférences de presse pour aider au premier ministre à éventuellement faire la souveraineté ou...

M. Bégin: Je ne sais pas, je ne crois pas que nous ayons de tels projets. Cependant, on assiste à des dépenses de fonds publics du gouvernement fédéral qui dépassent les 100 000 000 $, même au-delà de 200 000 000 $, pour la promotion de l'unité canadienne. Il faudrait peut-être poser plus la question à ce niveau-là, si c'est ça qu'ils vont faire avec l'argent de nos taxes.

M. Benoit: Oui, mais là je ne vous parle pas du fédéral, je vous parle de vous, moi. Je vous parle de la conférence que Luc Lavoie et votre premier ministre ont organisée, qui a coûté 1 100 000 $...

M. Bégin: Nous allions annoncer les bonnes nouvelles.

M. Benoit: ...qui n'a jamais eu lieu. Je ne l'ai jamais vue, moi, la conférence de presse. Les soucoupes étaient là, les écrans cathodiques, toute la «outfit», les jets...

Le Président (M. Lachance): M. le député, je vous rappelle à la pertinence du projet de loi n° 60.

M. Benoit: Oui, bien, on est à l'article 4...

M. Bégin: Article 3.

M. Benoit: On est à l'article 3 sur les fonds consolidés qui vont être dépensés, monsieur. Je pense que c'est tout à fait pertinent. On veut savoir à quoi vont être dépensées ces sommes d'argent là. Je veux dire...

M. Bégin: Je pense, M. le Président, qu'on a amplement répondu à cette question. Et j'ai répondu que, quand nous aurons conclu une entente, certainement qu'il va y avoir une conférence de presse pour annoncer la bonne nouvelle, et qui sera une bonne nouvelle non seulement pour le gouvernement du Québec, mais pour l'ensemble de la population du Québec, pour la population de Terre-Neuve, pour les parties autochtones intéressées et pour le gouvernement fédéral.

M. Benoit: Et est-ce que vous aviserez les autochtones avant la conférence de presse que vous allez faire une conférence de presse chez eux?

M. Bégin: Ils seront partie à l'entente, par hypothèse. Alors, ils vont certainement être au courant de la chose et ils vont être partie prenante.

M. Benoit: Ils vont être partie prenante. Bon. Bien, là, c'est...

M. Bégin: C'est un gain.

M. Benoit: ...intéressant d'entendre ça.

M. Whissell: Alors, M. le Président, si je comprends la réponse du ministre suite à ma question, il n'y aura aucune conférence de presse avant que les études soient terminées?

M. Bégin: Je pense que, si c'est...

M. Whissell: Mais, M. le Président...

M. Bégin: Ce n'est pas le sens de ma réponse.

M. Whissell: Bien, c'est pour ça que je vous la repose, parce que votre réponse n'est pas claire. Puis, quand on arrive à l'article 4, puis on s'en vient, l'article 4, là, est très clair, hein: «Le ministre de l'Environnement – non, mais c'est important parce que c'est relié – est chargé de l'application de la présente loi.» Alors, on questionne sur l'article 3, sur les sommes, les argents des citoyens du Québec qui vont être mis dans la structure qu'on ne connaît pas qui servira probablement à faire des nominations politiques et on demande au ministre si cet argent-là va servir à faire des conférences de presse avec des feux d'artifice comme on a vécues. Il nous a répondu: peut-être; oui, à la fin. Puis ma question est: Est-ce qu'il va y en avoir avant qu'on ait un rapport final sur les études environnementales?

(23 h 50)

M. Bégin: M. le Président, il se fera toutes les conférences de presse requises par l'ampleur de ce projet aux dates qui seront requises et elles seront toujours faites de manière correcte pour informer la population de la situation, à ce moment-là. Alors, je suis persuadé que nous agirons de façon responsable et que le ministre chargé de l'application de la loi s'assurera que tout soit fait correctement. Mais c'est sûr qu'il y aura des conférences de presse.

M. Whissell: Est-ce que le ministre est conscient qu'au moins les conférences de presse servent à une chose avec le gouvernement qu'on a actuellement, c'est qu'elles servent à informer les autochtones, qu'on n'informe jamais, qu'on informe après coup, comme ce soir, comme à la dernière conférence de presse? Alors, si c'est la façon de fonctionner du gouvernement, faites-en des conférences de presse, au moins elles ont une utilité.

M. Bégin: Merci de votre autorisation.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 3 est adopté?

M. Bégin: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. L'article 4?

M. Bégin: Là, M. le Président, je pense que ça parle de soi.

Le Président (M. Lachance): Est-ce que l'article 4 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que l'article 5 est adopté? M. le député de d'Orford. L'article 5?

M. Benoit: Oui, bien, encore là, mon leader, qui est un homme d'expérience ici, un des plus vieux parlementaires, élu en 1980 – il en a vu pas mal passer des ministres de l'Environnement – me disait que c'est quelque chose de très exceptionnel que le dernier article d'un projet de loi soit comme ça. Je ne suis pas capable d'évaluer ça. Je n'ai pas cette expérience de législateur. Mais on me dit que ce n'est pas la formulation dont on se sert normalement dans les projets de loi. Et, encore une fois, c'est qu'on veut que le projet de loi soit assez vague, et on ne se prononce sur rien, pas plus sur le montant, pas plus sur les délais, pas plus sur l'organigramme, pas plus sur le processus, pas plus sur les conditions d'application. Finalement, on n'a eu aucune réponse. Et nous, c'est sur la volonté d'unifier un processus environnemental, c'est sur cette base-là seulement que le Parti libéral a appuyé ce projet de loi, parce que je vous garantis qu'à partir des réponses qu'on a eues et du projet de loi, c'est vague comme jamais on a eu un projet de loi.

M. Bégin: M. le Président, pour le bénéfice du député d'Orford, je vais lui recommander de reparler avec son leader, parce que, depuis que je suis en poste au ministère de l'Environnement, je me suis rendu compte qu'à peu près une bonne cinquantaine d'articles de la Loi sur la qualité de l'environnement, proposés et adoptés sous la responsabilité du leader de l'opposition, ne sont pas en vigueur parce qu'ils prévoyaient: La présente loi entrera en vigueur à la date fixée par le gouvernement, et environ 30 % à 40 % des lois contiennent une disposition semblable.

Alors, je voudrais que le député de Brome-Missisquoi révise ses anciennes lois, puisqu'il y a, au moins dans la Loi sur la qualité de l'environnement, un bon paquet d'articles qui ne sont pas encore en vigueur après cinq ans, et c'est lui qui les avait fait adopter avec une disposition comme celle-là. Je ne ferai pas la même chose. La loi entrera en vigueur à la date convenue par le gouvernement, mais ça ne sera certainement pas cinq ans plus tard.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Argenteuil.

M. Whissell: M. le Président, pourquoi le ministre n'est pas capable de nous donner une date exacte?

M. Bégin: Parce que le gouvernement convient que la loi entrera en vigueur à la date qu'il fixera, qui tiendra compte de tous les éléments.

M. Whissell: Je ne vous demande pas de me relire l'article, là. Je pose une question claire, quatre mots, là: Pourquoi n'y a-t-il pas de date fixe?

M. Bégin: Parce que le gouvernement veut déterminer la date pour l'entrée en vigueur de la loi.

M. Whissell: Alors, pourquoi le gouvernement veut-il déterminer la date ultérieurement?

M. Bégin: Parce qu'il veut tenir compte des événements qui sont pertinents relativement à l'entrée en vigueur de cette loi-là.

M. Whissell: On tourne en rond.

Le Président (M. Lachance): Et le ministre de l'Environnement n'est pas le gouvernement à lui seul.

M. Whissell: Alors, on tourne en rond.

Le Président (M. Lachance): Il fait partie du gouvernement.

M. Benoit: Il est le responsable de la loi.

M. Bégin: Oui, mais une fois qu'elle sera en vigueur.

M. Benoit: Pardon?

M. Bégin: Une fois qu'elle sera en vigueur.

M. Whissell: Alors, y a-t-il un ministre de l'environnement?

M. Bégin: Tant qu'elle n'est pas en vigueur, je ne suis pas responsable de la loi.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Mais, M. le Président, c'est curieux. Juste parce que c'est une loi habilitante, pleine de «peut», je ne vois pas... Vu que le ministre demande le pouvoir de commencer les pourparlers, pourquoi ne pas dire le moment où la loi est sanctionnée. Il a ces pouvoirs, il peut commencer les négociations avec Terre-Neuve, avec les Innu à la fin du mois de juin, dans six mois, dans un an. C'est à lui à organiser ces négociations.

Je ne vois rien dans le projet de loi qui empêche que, dès que c'est sanctionné... C'est une loi habilitante; le ministre est habilité à faire ces choses. C'est quoi, l'empêchement de dire qu'il est habilité à partir du 30 juin 1999? Je ne comprends pas l'objection à ça. Je suis juste curieux, pourquoi il ne veut pas? Il dit qu'il veut avoir le pouvoir pour s'asseoir avec les autochtones; on dit que, dès le moment de la sanction du projet de loi, il peut avoir ce pouvoir; et maintenant il résiste.

Le Président (M. Lachance): Je signale aux membres de la commission qu'il reste trois minutes sur le temps qui nous a été indiqué.

Alors, l'article 5 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que le titre du projet de loi, Loi sur l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Est-ce que le projet de loi n° 60 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Lachance): Adopté. Alors, pour les mots de la fin, M. le ministre.

M. Bégin: Je vous remercie infiniment, M. le Président, je remercie les membres de la commission de pouvoir avoir adopté ce projet de loi. Et je pense que ce sera pour le bénéfice de toutes les parties de cette future entente, et la réalisation de ce projet sera extrêmement importante pour les citoyens du Québec.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. M. le député d'Orford.

M. Benoit: Oui. Le gouvernement a traité l'opposition ce soir comme un groupuscule, tous les quolibets... On était que de bonne volonté et seulement de bonne volonté. Et je pense que nous devrons, confrères ici, faire parvenir aux communautés autochtones ce qui s'est dit à soir, et que les communautés autochtones réalisent que nous avons pris leur défense, que nous avons voulu qu'elles soient entendues, que le gouvernement a refusé de les entendre. Et, encore une fois, le gouvernement a traité l'opposition, ce soir, et je le dis franchement, comme un groupuscule.

Le Président (M. Lachance): Alors, comme la commission des transports...

Une voix: ...

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député d'Argenteuil?

M. Whissell: Alors, ce que je retiens ce soir, c'est qu'il n'y a pas urgence. On fait valoir qu'il y a urgence, le ministre a même parlé que ce serait un processus qui serait long, qui demanderait beaucoup de consultations. Notre demande était fort simple, on demandait d'entendre un groupe mardi matin, ça nous a été refusé. Et je pense qu'on nous a servi tout un spectacle, ce soir, M. le Président. Et, en conclusion, l'arrogance, c'est ce que je retiens de cette soirée.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Johnson.

M. Boucher: Moi, ce soir, ça a été pour moi un événement extraordinaire: je n'ai jamais assisté à une intervention avec autant d'incohérence politique que celle de l'opposition. Bon, ça fera partie de mon histoire de parlementaire: des gens qui s'opposent à un projet de loi puis qui votent pour après. Alors, c'est vraiment spécial.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Jacques-Cartier, en terminant, il reste quelques secondes.

M. Kelley: La seule chose qu'on a essayé de faire ce soir, pour l'information du député de Johnson, est d'écouter les personnes qui sont concernées par le projet de loi. Et, s'il trouve difficile à comprendre ce principe, on a beaucoup de problèmes. Le seul principe qu'on essaie d'invoquer ici: que les personnes qui sont touchées par les conséquences des lois adoptées par l'Assemblée nationale aient un droit de parole. Le député de Johnson a de la difficulté à comprendre ça, et c'est très dommage.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Saguenay, en terminant.

M. Gagnon: J'aurais aimé qu'on remette les choses dans leur véritable perspective. Là, il y a eu un groupe qui aurait été prêt, ce qu'on a compris par la suite. On a compris que l'opposition n'a pas fait le nécessaire, malgré l'ouverture que le ministre avait eue. On en tirera nos conclusions.

Le Président (M. Lachance): Alors, ceci étant, la commission des transports et de l'environnement s'est acquittée de son mandat, et j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 59)


Document(s) related to the sitting