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Version finale

35th Legislature, 2nd Session
(March 25, 1996 au October 21, 1998)

Wednesday, June 3, 1998 - Vol. 35 N° 26

Consultations particulières sur le projet de loi n° 405 - Loi favorisant la protection des eaux souterraines


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Table des matières

Remarques préliminaires

Auditions


Autres intervenants
M. Claude Lachance, président
M. Michel Rivard
Mme Hélène Robert
M. Serge Deslières
*M. Pierre Rivard, AEEQ
*M. Georges Forest, idem
*Mme Anita Jarjour, idem
*Mme Denise Auger, RÉSEAU environnement
*M. Pierre Gélinas, idem
*M. Jean-Guy Dépôt, RNCREQ
*M. Alexandre Turgeon, idem
*M. Daniel Lachance, KAHNEKI:IO/O'NATUREL
*M. Bryan A. Deer, idem
*M. Charles E. Jacobs, idem
*M. Denis Bergeron, UQCN
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Quinze heures onze minutes)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre! Je déclare la séance ouverte. La commission des transports et de l'environnement se réunit aujourd'hui avec le mandat de procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 405, Loi favorisant la protection des eaux souterraines. Est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la secrétaire?

La Secrétaire: Oui. M. Sirros (Laurier-Dorion) remplace M. Bissonnet (Jeanne-Mance).

Le Président (M. Lachance): Merci. Alors, je rappelle ce qu'on peut appeler les règles du jeu concernant les consultations particulières. Il y a d'abord une partie qui s'appelle remarques préliminaires. Le ministre ainsi que le porte-parole de l'opposition officielle peuvent procéder à des remarques particulières pour une durée de 15 minutes maximum chacun. Par la suite, je vais inviter les organismes à prendre place à la table, et le ou les porte-parole de l'organisme auront 15 minutes de présentation. Nous aurons ensuite une période maximum de 30 minutes d'échange, pour un total de 45 minutes par organisme.

Pour aujourd'hui, les groupes: d'abord, il y aura l'Association des embouteilleurs d'eau du Québec, par la suite, le RÉSEAU environnement et, avant la suspension de nos travaux, le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec. À 20 heures, à la reprise de nos travaux, deux groupes avant l'ajournement: KAHNEKI:IO/O'NATUREL, à 20 heures, et finalement l'Union québécoise pour la conservation de la nature. Alors, je vous invite maintenant, M. le ministre, à procéder à vos remarques préliminaires. M. le ministre.


Remarques préliminaires


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci. M. le Président, chers collègues, d'entrée jeu, vous me permettrez de vous rappeler qu'au cours des derniers mois le Québec a vécu un certain nombre d'événements qui ont mis en perspective l'importance de la ressource eau et de sa gestion. Il s'agit, vous vous en souviendrez très certainement, des inondations de juillet 1996 au Saguenay, des débats ayant entouré l'idée de privatiser les réseaux d'aqueduc et d'égout, des projets d'exploitation des nappes d'eau souterraines à des fins commerciales ainsi que de l'exportation d'eau en vrac.

Mon gouvernement a pris la mesure de tous ces événements et a compris l'enjeu que pouvait représenter pour le Québec cette question de la gestion de l'eau. C'est pourquoi nous avons lancé un processus qui devrait mener le Québec, à l'aube du deuxième millénaire, à se doter d'une première politique de gestion de l'eau. Vous me direz que ce n'est pas trop tôt et vous aurez entièrement raison.

La première étape de cette démarche a été réalisée les 10, 11 et 12 décembre dernier avec la tenue du Symposium sur la gestion de l'eau. Ce Symposium s'est avéré un succès tant par la qualité des présentations, la richesse des échanges ainsi que par l'intérêt qu'il a suscité auprès des nombreux participants et des médias.

En plus de faire la démonstration de nouveau de l'importance de l'eau pour le Québec et ses citoyens, ce Symposium nous aura permis de dégager plusieurs enseignements. Pour les fins de mon propos, j'en retiendrai deux qui m'apparaissent essentiels: l'importance d'une saine gestion des nappes d'eau souterraines et la nécessité d'un débat public pour l'élaboration d'une nouvelle politique.

La saine gestion des nappes d'eau souterraines, pour une majorité d'intervenants, mérite la plus grande des attentions. En effet, il est apparu au cours des derniers mois que, si on prenait pour acquis les usages traditionnels que sont les captages d'eaux souterraines à des fins domestiques, agricoles et industrielles, la perception et la compréhension que l'on se faisait des captages aux fins commerciales étaient fort négatives. Pour plusieurs, cette activité est assimilée à l'appropriation d'une ressource sans retour pour la société. Je ne partage pas entièrement cette vision, mais elle me permet de mieux saisir les raisons qui ont provoqué les débats récents autour de certains projets de captage d'eaux souterraines à des fins commerciales.

Ensuite, le deuxième enseignement que je retiens de ce Symposium, c'est que la question de la gestion de l'eau au Québec est maintenant à maturité. Nos concitoyens sont prêts et souhaitent participer à ce débat sur le développement d'une politique de gestion de l'eau au Québec. Nous pouvons maintenant entreprendre la seconde phase de notre démarche.

J'annonçais d'ailleurs à cet effet le 28 novembre dernier qu'une consultation publique suivrait la tenue du Symposium. Cette consultation, qui répondra à une demande sans cesse croissante des citoyens, devra, pour assurer son succès et sa crédibilité, répondre à certaines conditions. Elle devra également comporter un échéancier réaliste, couvrir tout le territoire du Québec, être empreinte de rigueur, de clarté et de transparence.

Dans cette optique, afin de ne pas porter préjudice à ce débat public par des actions qui pourraient avoir une incidence notable sur la qualité des échanges et des discussions, il y a lieu de suspendre momentanément l'établissement de nouveaux captages d'eaux souterraines à des fins commerciales. C'est précisément l'objet du projet de loi que nous examinerons aujourd'hui à l'occasion de cette consultation particulière.

Comme je vous le mentionnais auparavant, l'eau souterraine a fait l'objet de nombreux débats lors du Symposium et, vous vous en souviendrez, durant les mois qui l'ont précédé. Ces débats ont surgi et se sont faits presque exclusivement autour de projets de captage d'eaux souterraines à des fins commerciales. De ce fait, ce dossier mérite une attention particulière. Le présent projet de loi vise donc à éviter que ce type de prélèvement de la ressource hydrique puisse nuire au débat qui sera tenu lors de la consultation publique à venir.

Différentes avenues ont été envisagées quant aux façons d'aborder la solution, dont, notamment, l'assujettissement de ces projets de captage à une évaluation et à un examen des impacts sur l'environnement. Cette solution n'a pas été retenue, car elle risquerait de mettre en place un processus plus long que la consultation publique et pourrait établir une procédure très différente pour quelques projets seulement. De plus, cette solution s'appliquerait à un secteur mineur du prélèvement des eaux souterraines, 0,008 %.

L'approche retenue vise plutôt à procéder à l'adoption d'un projet de loi établissant un moratoire sur l'émission d'autorisations de tout nouveau captage d'eaux souterraines à des fins d'embouteillage en vertu de l'article 32 de la Loi sur la qualité de l'environnement. Ce moratoire permettra d'atténuer les tensions locales liées à ce type de projet, le temps de procéder à la consultation publique sur la future politique de gestion de l'eau au Québec.

Il permettrait également l'adoption et le développement des outils de mise en oeuvre de la politique de protection et de conservation des eaux souterraines, laquelle a déjà été soumise pour commentaires à plus d'une centaine d'organismes depuis plus d'un an. Notons que ce projet de politique préconise la gestion des captages d'eaux souterraines en fonction des débits captés plutôt qu'en fonction du type de captage, comme c'est le cas actuellement. La politique prévoit également une conciliation des usages en fonction des débits disponibles.

Comme je le mentionnais, le moratoire s'appliquera aux nouveaux projets de captage d'eaux souterraines aux fins d'embouteillage commercial destiné à la consommation humaine. Il inclut également les projets à l'étude au ministère de l'Environnement et de la Faune. Les activités en cours d'exploitation ne sont toutefois pas touchées, à moins qu'elles ne comportent une augmentation de débit de captage.

Notons ici que seuls les projets de captage d'eaux souterraines aux fins d'embouteillage commercial destiné à la consommation humaine font actuellement l'objet d'autorisation en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement. Ce moratoire demeurera en force au plus tard jusqu'au 1er janvier 1999. Il pourrait être levé avant cette date, dans la mesure où le gouvernement en déciderait ainsi.

Je vous propose donc d'entendre les intervenants que nous avons invités et, par la suite, de procéder à l'étude du projet de loi article par article. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. M. le député de Laurier-Dorion et porte-parole de l'opposition officielle, pour vos remarques préliminaires.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Je ne serai pas très long, moi non plus, M. le Président, mais je tiens à réitérer ici un certain nombre de points qu'on a soulignés quand ce projet de loi a été introduit. Nous estimons, dès le départ, que c'est une mauvaise façon de légiférer. C'est un projet de loi qui passe à côté de la track en ce qui concerne le problème. Et ce sont des arguments qui ne tiennent pas debout, quand on les regarde tranquillement et soigneusement, M. le Président, ceux que le ministre nous propose.

(15 h 20)

Il est vrai que nous sommes dans un processus, semble-t-il, où on est en train d'élaborer une politique sur l'eau. Il est vrai qu'il y a aussi des citoyens qui se sont inquiétés par rapport à certains projets de captage des eaux souterraines dans des secteurs précis. Mais il est également vrai que, quand on légifère, normalement, il y a un certain nombre de principes dont on doit tenir compte. Et un qui est fondamental, c'est de traiter tout le monde d'une façon équitable, de légiférer pour régler des problèmes réels et de légiférer de façon à promouvoir le développement économique du Québec et toute l'amélioration de la vie de l'ensemble des Québécois, M. le Président.

Le ministre est pris, et je le répète, avec un projet de loi qu'il n'aurait pas aimé voir ici. Il est pris par une bourde que son premier ministre a faite lors d'un «scrum» de presse, au moment de ce colloque fort intéressant, d'ailleurs, auquel j'ai assisté et auquel le ministre référait, et le ministre est dans l'obligation d'essayer de couvrir cette gaffe de son premier ministre. Il le fait d'une façon qui, finalement, pointe du doigt un groupe d'intervenants dans le domaine, passe à côté de la track en ce qui concerne le véritable impact de toutes les activités de captage.

Il a d'ailleurs fait un petit lapsus dans sa présentation quand il a parlé de la nécessité de geler les captages de toutes les eaux à effet commercial. Et, à ma connaissance, ce n'est pas seulement, les embouteilleurs d'eau, pour consommation comme eau qu'ils utilisent pour des fins commerciales les eaux souterraines, il y a des piscicultures, il y a des compagnies qui ajoutent un peu de colorant pour vendre l'eau sous forme de jus. Ça aussi, c'est des activités commerciales avec l'utilisation de l'eau souterraine.

Et on s'est posé la question souvent et longuement en Chambre et ailleurs, de notre côté: Où est la raisonnabilité de ce projet de loi? On va voulu profiter – je vais le dire comme ça – de cette situation où on est devant l'adoption d'un projet de loi de cette nature-là pour demander au ministre de convoquer des gens pour qu'on puisse au moins échanger à la fois sur le projet de loi en question, mais peut-être aussi avoir un certain éclairage par rapport à l'ensemble de la problématique des eaux.

Nous avons suggéré de façon constructive au ministre une façon de faire pour régler le problème, qui est un problème réel, j'en conviens, qui est celui de l'inquiétude des citoyens. Mais, si les citoyens sont inquiets, c'est peut-être parce qu'ils n'ont pas toute l'information et qu'ils n'ont pas la possibilité de faire valoir, aussi, dans un forum neutre et indépendant, leur point de vue, leurs arguments, leur façon de voir la chose. Et nous avons donc dit, à ce moment-là: Pourquoi le ministre de l'Environnement, qui me surprend aujourd'hui en disant, comme ministre de l'Environnement, qu'il ne veut pas référer les choses au BAPE parce que ça risque d'alourdir le problème...

Si je comprends bien, le ministre n'est pas un partisan très prenant du BAPE, qui est quand même le Bureau des audiences publiques sur l'environnement, qui a été constitué justement pour permettre à la population de s'assurer que leurs craintes, leurs inquiétudes, l'information qui est disponible quant à l'impact environnemental d'un projet de loi puissent être débattues dans un forum neutre et indépendant. Et, normalement, c'est le ministre de l'Environnement qui défend le BAPE et non pas le met de côté comme c'est le cas actuellement.

D'ailleurs, le ministre possède déjà plusieurs et beaucoup de pouvoirs de réglementation quant à l'émission d'un certificat d'autorisation. Et, si jamais, dans une situation particulière, il avait jugé que ça prenait un peu plus, au lieu de geler pour une couple d'années – deux, trois ans, on ne sait pas trop – les activités commerciales, il aurait pu envoyer des projets spécifiques devant le BAPE. S'il ne voulait pas appliquer ça de façon générale pour tout le monde, il pourrait prendre l'argument qu'il vient de me donner en disant: Les citoyens, on va les calmer pour qu'on puisse avoir un débat public serein. Il aurait pu soumettre des projets qui soulèvent ces inquiétudes et ces passions devant le BAPE, permettre au débat de se faire normalement. Et, si on trouvait qu'effectivement les activités proposées ont un impact négatif sur l'environnement, là, le ministre aurait même un argument de taille pour dire à la compagnie en question: Non, je n'autorise pas votre projet parce que, selon la recommandation du BAPE, ça va être néfaste et négatif pour l'environnement dans ce coin-là.

Mais ma surprise a été de voir le ministre, d'une part, écarter ce recours à un processus qui est très raisonnable, qui découle de ses responsabilités comme ministre de l'Environnement, assez cavalièrement, le rejeter et revenir avec un projet de loi qui gèle, mais juste pour à peine 1 % de l'utilisation de l'eau souterraine, les activités commerciales d'un groupe d'utilisateurs.

Moi, je serais curieux de voir comment le ministre va répondre aux gens, aujourd'hui, quand on va lui dire: Mais, M. le ministre, pourquoi vous nous pointez du doigt? Pourquoi vous dites que, nous, on est les méchants, quand on sait qu'il y en a d'autres aussi qui utilisent l'eau? Pourquoi on est pires que les autres? Et, si toutes les activités sont des activités qui sont tellement dommageables, pourquoi, à ce moment-là, vous laissez de côté toutes les autres activités commerciales?

Et, par «activités commerciales», il faut qu'on s'entende, aussi. Il peut y avoir des municipalités, aussi. Il y en a beaucoup, de municipalités qui tirent leur eau à travers les nappes phréatiques, dans les eaux souterraines. Et il y a aussi beaucoup d'industries qui prennent leur eau de la municipalité pour des fins commerciales. Donc, ce n'est pas parce qu'une compagnie a ses propres puits, par exemple, sur ses propres terrains qu'elle est très différente, dans l'utilisation ultime qui est faite, d'une compagnie qui se branche sur le réseau de distribution d'eau qui vient de la municipalité qui, elle, a des puits au niveau des nappes phréatiques, M. le Président.

Alors, premier constat, c'est que ce projet de loi est complètement inéquitable dans son traitement vis-à-vis des utilisateurs. Le deuxième constat, c'est que ce projet de loi, tel qu'il est présenté, est complètement inutile quant à la protection des nappes phréatiques. Et troisième constat, c'est qu'il y a un refus d'utiliser un mécanisme qui pourrait effectivement permettre à la fois de protéger la ressource et de donner aux citoyens – si ma compréhension est bonne, c'est ce qu'ils réclament – la possibilité de vraiment saisir l'opinion publique de leur situation et de leurs informations de façon indépendante et autonome et de voir ces informations analysées et vues par un organisme dans lequel ils ont confiance.

Actuellement, le processus, c'est qu'il y a des compagnies qui veulent s'installer dans un coin. Ils tiennent des audiences publiques, ils s'entendent avec la municipalité, des fois, qui, elle, veut effectivement attirer, on le comprend bien, des investissements dans son coin. Et les citoyens se sentent souvent floués devant ce genre de situation, où ils disent: On n'a pas de porte d'entrée véritable dans ce débat-là, l'information est contrôlée, et ça saute.

Il est sûr et certain que, quand on a le sentiment qu'on est en train de se faire avoir, on cherche ailleurs pour faire sortir les objections, etc. Et souvent, l'ailleurs devient les médias, devient des prises de position qui des fois sont plus dramatiques dans leurs conséquences que peut-être ce qu'elles seraient dans la réalité ou, tout au moins, si elles étaient discutées dans une atmosphère de confiance que le BAPE pourrait présenter.

Alors, j'ai vraiment de la difficulté à comprendre, comme je le disais au tout début de cette intervention, le pourquoi de ce projet de loi, si ce n'est le fait qu'il y a une commande politique quelque part qui dit: Faites fi de la logique, faites fi de la raison, faites fi de la nécessité de légiférer normalement et protégez-moi quand je fais des gaffes. Et la commande, elle vient d'en haut.

Et ça amène le ministre même à dire que le BAPE, c'est trop compliqué, c'est trop lourd. C'est le ministre de l'Environnement qui dit ça, M. le Président. C'est sérieux! On comprend pourquoi il n'a d'ailleurs, dans d'autres dossiers, la ligne Hertel-des-Cantons, Hydro-Québec, pas dit mot. Il ne s'est même pas objecté quand le président du BAPE s'est prêté à cet exercice d'examen court-circuité des impacts environnementaux d'Hydro-Québec et de sa ligne, suite à la tempête de verglas. Mais, ça, c'est un autre dossier.

(15 h 30)

Revenons à nos moutons, ici. C'est dans ce cadre-là que nous avons suggéré que l'on puisse entendre tous les groupes, les embouteilleurs, les autres personnes, les citoyens, les environnementalistes, pour qu'on puisse essayer de... Parce qu'on cherche le même but. On cherche à avoir effectivement une politique de l'eau globale qui serait élaborée dans un climat de dialogue, d'information et où, finalement, les décisions qu'on va prendre ultimement seront des décisions qui seront pour le bien-être de toute la société, M. le Président. Mais, pour y arriver, il ne faut pas créer un autre problème. On essaie de résoudre des problèmes et non pas d'en créer. Il me semble que ce projet de loi crée des problèmes plus qu'il n'en résout. Et on a dit qu'on va au moins essayer de tirer le maximum de bénéfices de cet exercice, et le maximum, ce serait de faire venir les gens, leur demander à la fois ce qu'ils pensent de ce projet de loi, de la solution qui pourrait être envisagée, et peut-être aussi de profiter de cette occasion pour questionner les intervenants au niveau de leur vision de la politique d'eau, M. le Président.

Alors, sans plus tarder, on pourrait peut-être passer directement au premier groupe, qui est celui qui est le plus visé, j'ai l'impression. Je lis leur mémoire et je vais écouter avec intérêt comment est-ce qu'ils vont réagir face à ce projet de loi, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Ceci met fin aux remarques préliminaires.

Alors, j'inviterais le premier organisme et le porte-parole du premier organisme, l'Association des embouteilleurs d'eau du Québec, à bien vouloir prendre place à la table. Alors, si vous voulez bien vous identifier, le porte-parole, la personne qui va faire la présentation, ainsi que les personnes qui vous accompagnent. Vous avez 15 minutes pour nous faire part de votre...


Auditions


Association des embouteilleurs d'eau du Québec (AEEQ)

M. Rivard (Pierre): Pierre Rivard, président de l'Association des embouteilleurs d'eau du Québec.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. Rivard.

M. Rivard (Pierre): À ma droite, M. Georges Forest, hydrogéologue, qui nous accompagne pour répondre à des questions d'ordre technique. Mme Benhouhou, qui est complètement à ma gauche, hydrogéologue de formation également. Je suis accompagné également de Mme Latendresse et de Mme Jarjour, qui sont également de l'Association des embouteilleurs d'eau du Québec.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Merci.

M. Rivard (Pierre): M. le ministre, M. le Président, Mmes et MM. les membres de la commission, je voudrais tout d'abord vous remercier de nous avoir invités à participer aux audiences publiques de votre commission relativement au projet de loi n° 405, Loi favorisant la protection des eaux souterraines.

Nous sommes ici aujourd'hui pour vous exprimer le point de vue de notre association sur un moratoire sans précédent que nous estimons injustifié et qui paralyse le développement économique d'une industrie prometteuse. Notre industrie prélève en une année en eaux souterraines l'équivalent d'une petite municipalité d'environ 1 000 résidents, soit moins de 1 % de toute l'eau souterraine prélevée au Québec. C'est comme si on faisait un grand débat sur l'agriculture au Québec et que nous étions venus ici pour parler de la culture des champignons.

Vous ne serez pas surpris de nous entendre dire que nous sommes farouchement opposés à ce projet de loi. Nous considérons que le moratoire est injustifié, et ce, pour quatre raisons majeures: d'abord, parce que l'eau souterraine au Québec n'est pas menacée; ensuite, parce que ce moratoire jette un discrédit inacceptable sur notre industrie; troisièmement, parce qu'il nous impose un traitement inéquitable et discriminatoire; et enfin parce qu'il paralyse le développement économique de notre industrie. Ces quatre raisons justifient, à notre avis, que ce moratoire soit levé dans les plus brefs délais. Je voudrais prendre quelques instants pour vous expliquer plus en détail chacune de ces quatre raisons.

Premièrement, l'eau souterraine au Québec n'est pas menacée par les embouteilleurs. En fait, les immenses quantités d'eau souterraine renouvelable dont dispose le Québec sont très largement suffisantes pour approvisionner tous les utilisateurs québécois sans mettre en péril la ressource et sans créer de conflit d'usage. Le volume annuel total d'eau souterraine prélevée au Québec par tout le monde correspond à seulement 3 % de la recharge naturelle des zones habitées. La recharge représente les précipitations de pluie et de neige qui s'infiltrent dans les nappes d'eau souterraine. Cette recharge crée nécessairement un surplus d'eau. De ce surplus qui retourne dans la nature, c'est donc 3 % qui est prélevé par l'ensemble des utilisateurs. Les embouteilleurs d'eau, pour leur part, prélèvent moins de 1 % des 3 % de la recharge. Cela équivaut à 0,002 % de l'ensemble de la recharge naturelle des zones habitées.

Bien sûr, la très grande abondance de nos ressources ne dispense pas pour autant les utilisateurs d'une plus grande vigilance. J'aborderais cet aspect très important de la protection de la ressource à la fin de mon exposé. Nous avons d'ailleurs une proposition constructive à vous présenter à cet égard.

Donc, sur le plan de la disponibilité de la ressource, ce moratoire est nettement injustifié. Si nos ressources en eau souterraine étaient globalement menacées, nous présumons que le moratoire toucherait l'ensemble des utilisateurs de la ressource et non exclusivement les embouteilleurs. Vous serez sans doute d'accord avec nous, un moratoire constitue une mesure extrême.

Je voudrais terminer sur ce premier aspect en abordant brièvement la question de la concentration prétendue des captages d'eau souterraine par les embouteilleurs. Cette supposition a soulevé des inquiétudes au sein de certains groupes. Toutes proportions gardées, l'industrie de l'eau embouteillée n'est pas plus concentrée dans un endroit ou un autre que les autres industries, et même, si toute l'eau souterraine prélevée par les embouteilleurs était captée dans une seule et même région, l'impact demeurerait insignifiant. À titre d'exemple, si toute l'industrie de l'eau embouteillée était concentrée sur un seul kilomètre carré, la quantité d'eau que les embouteilleurs prélèveraient équivaudrait à l'ajout d'environ 1 000 résidences dans une région ou une municipalité.

Par ailleurs, les experts du ministère de l'Environnement et de la Faune analysent rigoureusement chaque dossier avant d'émettre des autorisations aux embouteilleurs et tiennent compte de la situation qui prévaut dans les localités concernées. Contrairement aux autres, les embouteilleurs sont les seuls qui doivent engager leur responsabilité en termes d'accès à l'eau souterraine à l'égard des utilisateurs locaux de la ressource. De plus, le ministre peut même exiger toutes les conditions additionnelles qu'il juge nécessaires, au besoin, pour protéger la ressource ou éviter un conflit d'usage. Par conséquent, le ministère de l'Environnement dispose donc de tous les outils nécessaires pour contrôler l'exploitation de la ressource par les embouteilleurs et il le fait très bien. En résumé, la concentration des activités de captage par les embouteilleurs est un faux débat.

La deuxième raison pour laquelle nous sommes opposés à ce moratoire, c'est parce qu'il jette un discrédit inacceptable sur notre industrie. L'image que ce moratoire projette de notre industrie tant au Québec qu'à l'étranger est négative. Nos interlocuteurs nous en font régulièrement la remarque. Ce moratoire donne l'impression que les embouteilleurs constituent une menace pour la ressource et qu'il faut, pour éviter que la situation ne se détériore davantage, adopter des mesures exceptionnelles. De plus, ce moratoire cautionne et alimente la polémique suscitée par certains groupes ainsi que des inquiétudes indues qui persistent encore dans la population.

Alors que les Québécois ont toutes les raisons d'être fiers du développement de l'industrie de l'eau embouteillée, ce moratoire entache la réputation d'une industrie dont les pratiques sont exemplaires. Doit-on rappeler que la réglementation québécoise qui encadre nos pratiques industrielles est l'une des plus strictes et des plus avancées en Amérique du Nord? Nos activités sont soumises aux conditions fixées par la Loi sur la qualité de l'environnement, le Règlement sur les eaux embouteillées, le Règlement sur l'eau potable, le Règlement sur les eaux souterraines, ainsi que toutes les conditions contenues dans le guide d'application pour l'examen des projets. Nous sommes donc très bien réglementés.

De plus, ce moratoire met en doute non seulement l'expertise du ministère de l'Environnement, mais aussi celle des experts et scientifiques québécois. Il met également en doute celle que nous possédons nous-mêmes dans ce secteur d'activité grâce, notamment, à une main-d'oeuvre hautement spécialisée.

La troisième raison pour laquelle nous sommes opposés à ce moratoire est parce qu'il est inéquitable et discriminatoire. Pourquoi? Parce que, premièrement, il s'applique exclusivement à la seule industrie dont le captage de la ressource est assujetti à une autorisation et à des conditions strictes du ministère de l'Environnement. Deuxièmement, parce que l'industrie de l'eau embouteillée est celle qui utilise la plus petite quantité d'eau souterraine, soit moins de 1 % de toute la ressource actuellement prélevée au Québec. En fait, si les ressources en eau souterraine du Québec ne sont pas menacées, il faut dire qu'elles le sont encore moins par l'usage qu'en font les embouteilleurs d'eau.

(15 h 40)

Enfin, la dernière raison majeure pour laquelle nous sommes opposés à ce moratoire est une raison d'ordre économique. Depuis quand décrète-t-on, au Québec, un moratoire sur le développement économique d'une industrie non polluante, respectueuse de l'environnement, créatrice de milliers d'emplois et qui offre, par surcroît, un produit de santé pour les consommateurs? Cette mesure extrême est sans précédent et elle envoie des signaux contradictoires et inquiétants aux embouteilleurs et à la population. Nous considérons que le gouvernement est en contradiction. D'une part, il décrète un moratoire qui interdit tout projet de développement dans l'industrie de l'eau embouteillée; d'autre part, il a soutenu, dans le document de référence du Symposium, que notre industrie pourrait facilement doubler sa taille sans que cela entraîne globalement une pression indue sur la nappe aquifère. Bref, nous réclamons la levée immédiate de ce moratoire car il paralyse le développement de notre industrie et nuit à la libre concurrence et fait en sorte que plusieurs embouteilleurs ont écarté d'importants projets d'investissement au Québec.

En conclusion, je pose la question: Pourquoi imposer un moratoire aux embouteilleurs? Deux explications ont déjà été évoquées: la première consisterait à éviter que de nouveaux projets nuisent au débat lors de la consultation publique à venir; la seconde consisterait à favoriser la protection des eaux souterraines.

Prenons la première, celle qui consiste à éviter de nuire au débat qui se tiendra prochainement. Il est vrai qu'une partie de la population est craintive face aux divers projets de captage des embouteilleurs d'eau, mais il faut souligner ici le manque flagrant d'information ainsi que le haut niveau de confusion qu'a suscités au sein de la population le débat engendré par la privatisation des réseaux d'aqueduc municipaux ou les divers projets d'exportation d'eau en vrac. Pour notre part, nous avons consacré d'importants efforts pour informer les citoyens et les principaux groupes intéressés à l'effet que les ressources ne sont pas menacées par les embouteilleurs, bien au contraire. Malheureusement, ce moratoire compromet les efforts que nous avons consentis à cet égard et donne l'image d'une industrie qui menace la ressource. Ainsi, plutôt que d'éviter de nuire au débat, ce moratoire le biaise et l'envenime davantage. Cette première raison est donc difficilement justifiable.

La seconde raison qui a été évoquée consisterait à favoriser la protection des eaux souterraines, comme en fait foi le titre du projet de loi. Si c'est effectivement l'objectif poursuivi, permettez-moi de vous souligner que ce projet de loi fait fausse route. En raison de notre intérêt pour un développement durable et harmonieux de la ressource, nous en sommes les plus ardents défenseurs. Vous en conviendrez, il ne serait pas dans notre intérêt de surexploiter une nappe d'eau souterraine. Ce serait, comme on dit, se tirer dans le pied, notamment parce qu'une surexploitation de la ressource hypothéquerait nos approvisionnements et notre avenir.

C'est pourquoi nous avons une proposition constructive à faire pour favoriser la protection de la ressource. Nous proposons que ce projet de loi élargisse les mesures de protection actuellement en place. À cet égard, le ministère a déjà élaboré, depuis 1994, un projet de règlement sur le captage des eaux souterraines. Celui-ci vise justement à assujettir tous les utilisateurs importants de la ressource à un minimum de contrôle. La mise en oeuvre de ce règlement qui fait déjà partie du projet de politique et de conservation des eaux souterraines, déposé en avril 1996, pourrait être devancée. C'est ce que nous proposons.

En effet, si l'objectif visé par ce moratoire consiste à favoriser la protection des eaux souterraines, nous estimons que ces mesures pourraient être adoptées dès maintenant en attendant que le gouvernement élabore et mette en place une politique de l'eau. La mise en oeuvre immédiate de ce règlement assurerait une protection transitoire de la ressource en soumettant les projets de captage des exploitants qui utilisent d'importantes quantités d'eau souterraine à l'autorisation du ministère de l'Environnement et à une partie des conditions qui s'appliquent déjà aux embouteilleurs. Nous vous invitons à solliciter l'opinion des autres groupes qui se présenteront devant vous au cours des audiences publiques. Peut-être pourriez-vous dégager un consensus à l'égard de cette proposition.

L'adoption de cette proposition serait, à notre avis, une mesure infiniment plus constructive et positive qu'un moratoire qui n'a aucun impact sur la protection de la ressource et qui n'a que des conséquences négatives. Je vous remercie.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. Rivard. Je vois que vous êtes quelqu'un de discipliné: vous êtes bien entré à l'intérieur de l'enveloppe de temps qu'on vous avait impartie.

M. Rivard (Pierre): On avait exactement 15 minutes, oui?

Le Président (M. Lachance): Peut-être un petit peu moins, quelques secondes de moins. Alors, M. le ministre.

M. Sirros: C'est très bien embouteillé.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Est-ce qu'on met le bouchon tout de suite ou si on...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lachance): Alors...

M. Bégin: Il dit que c'est très bien embouteillé. Est-ce qu'on met le bouchon tout de suite ou si on continue un petit peu? Ha, ha, ha!

Une voix: On continue encore un peu.

Le Président (M. Lachance): Je rappelle que chaque formation politique a 15 minutes pour échanger avec les porte-parole de l'Association des embouteilleurs d'eau du Québec, ainsi qu'avec chacun des autres groupes qui viendra par la suite. M. le ministre.

M. Bégin: Merci, M. le Président. M. Rivard, merci pour votre présentation. Au-delà de la discipline, je pense que vous avez bien cerné les enjeux que vous vouliez mettre devant nous.

Je reviendrais peut-être sur votre document... je ne sais pas si c'est votre discours plutôt que le mémoire que vous avez envoyé. Je reviendrais à la page 10 de ce mémoire où on lit: «Il est vrai qu'une partie de la population est craintive face aux divers projets de captage des embouteilleurs d'eau, mais il faut souligner ici le manque flagrant d'information ainsi que le haut niveau de confusion qu'a suscités au sein de la population le débat suscité par la privatisation des réseaux d'aqueduc municipaux ou les divers projets d'exportation d'eau en vrac.» Est-ce que, dans ce paragraphe-là, vous ne reconnaissez pas en fait qu'il y a effectivement eu et qu'il y a encore, je ne dirais pas simplement de la confusion, mais également une certaine crainte, un certain émoi dans des parties de notre population à l'égard des captages et que, dans ce que vous dites là, c'est peut-être pourquoi il est arrivé, alors qu'il n'était pas là avant mais que, dans les faits, il a existé, et que cet émoi-là... Je vous pose la question: Est-ce que cet émoi, cette crainte, est-ce que ces manifestations, ces menaces de poursuites judiciaires, d'injonctions, etc., est-ce que vous ne croyez pas que c'est un climat qui n'est pas serein, qui n'est pas satisfaisant pour procéder à un débat public sur l'eau afin d'établir une politique sur l'eau?

M. Rivard (Pierre): Effectivement, quand même, le débat a été envenimé, mais ce sur quoi il faut revenir, c'est à la case départ. C'est que, depuis un an ou un an et demi à peu près, l'eau a été citée dans plusieurs cas et ça a apporté une confusion des plus totales. Je recommencerais au départ: quand la ville de Montréal a voulu privatiser son réseau d'aqueduc, les personnes se sont rendu compte à quel point l'eau était importante, effectivement que ça pouvait amener des contestations, et ça a amené quand même l'eau à la première quasiment dans tous les journaux durant un certain temps. Par après, vous avez eu également, effectivement, des projets d'embouteilleurs, des projets de certains embouteilleurs qui sont actuellement réglementés et qui utilisent à peine, comme on dit encore une fois, 0,008 %, O.K.? ...ont été mal exprimés, malheureusement...

Puis je dirais qu'il y a une partie de la situation, c'est qu'au niveau du ministère de l'Environnement, qui a les mécanismes en place, il n'a pas pu, peut-être, expliquer à la population pour lui dire franchement: Écoutez, les embouteilleurs, actuellement, sont assujettis à une réglementation qui est dans le sens qu'ils doivent faire des études, ils doivent obtenir un permis et, de ce fait-là, ils ne peuvent pas faire ce qu'ils veulent, ce qui est tout à fait un cadre réglementaire qui est, je dirais, très rigide. Or, il n'y a pas eu de position de prise. Effectivement, ça a amené, encore une fois, un climat qui n'est peut-être pas serein, et ça a suivi avec, effectivement, l'exportation de l'eau en vrac, où on a amené encore un autre débat, encore une fois.

Mais il faut revenir à la case départ, c'est-à-dire qu'actuellement l'industrie de l'eau embouteillée est réglementée. Je vous citais les règlements qu'on a actuellement. C'est des règlements, quand même, qui permettent d'avoir un bon contrôle. On parle de la Loi sur la qualité de l'environnement, du Règlement sur les eaux embouteillées, du Règlement sur l'eau potable, du Règlement sur les eaux souterraines ainsi que de toutes les conditions qu'on a dans le guide d'application. Actuellement, on est les seuls, parmi tous ceux qui captent de l'eau au Québec, à être assujettis à cette réglementation-là. Donc, quiconque peut capter la quantité qu'il veut sans aucune restriction, sans aucune réglementation.

(15 h 50)

M. Bégin: M. Rivard, j'ai mentionné dans mon discours, d'une part, que je reconnaissais effectivement que la quantité d'eau qui était prélevée par les embouteilleurs que vous représentez était de 0,008 %. Alors, là-dessus, je crois qu'il n'y a pas de chicane, il n'y a pas de problème. Il y a cependant, et vous le reconnaissez, eu un climat qui a dégénéré, malgré la présence de nos lois, malgré la présence de nos règlements d'application par nos fonctionnaires, malgré les explications que vous avez tenté... Je ne sais pas lesquels d'entre vous qui êtes ici, là, mais ceux et celles qui ont voulu faire des projets, qui ont tenté de les expliquer à la population ont rencontré une cristallisation d'opinions qui est extrêmement négative et qui ne permet pas de faire du travail de manière correcte, dans un climat serein.

Est-ce que vous ne pensez pas, depuis, par exemple, que nous avons annoncé qu'il y aurait un moratoire, que les choses se sont calmées? Bien sûr que ça prend un certain temps, mais, en même temps, ça va nous permettre de revoir tous ensemble, comme collectivité, la problématique où... ailleurs, il n'y a pas de drame, c'est-à-dire qu'ailleurs on ne crée pas d'émoi, on ne crée pas de débat de fond, avec des menaces judiciaires. Avoir donc un débat serein, calme, et qu'à la fin de cette période-là on puisse reprendre tous ensemble de quelle manière on exploitera telle nappe phréatique, que ce soit pour l'agriculture, que ce soit pour l'industrie, que ce soit pour l'alimentation d'une municipalité, ou encore les individus, et, finalement, j'inclus, parce qu'ils sont tous ensemble, les embouteilleurs.

Donc, est-ce que vous ne pensez pas que d'ici quelques mois, après qu'on aura traversé cette période-là, on aura un climat qui permettra à tout le monde de dire: Écoutez, on a eu la chance de s'exprimer, on se donne maintenant des règles, ces règles sont les suivantes? Elles seront peut-être tout à fait identiques à celles-là en ce qui vous concerne, mais elles pourraient peut-être aussi être différentes. Et là dire: Voici, dans ce cadre-là, on va procéder. Et je pense qu'on va être capables, vous allez être capables de faire vos projets sans avoir les difficultés que vous avez connues l'an dernier.

M. Rivard (Pierre): M. le ministre, on lance un faux débat, on lance un faux message. Pourquoi les embouteilleurs? Vous avez actuellement 99 % et plus de l'eau qui est captée sans aucune réglementation. Si on indique «au nom de la protection de la ressource», adoptons dès maintenant le projet de règlement sur le captage de l'eau souterraine. C'est une façon positive d'en venir à une protection de la ressource. Quand vous dites que le climat s'est peut-être calmé, on a paralysé l'industrie de l'eau, il y a des capitaux et des investissements qui devaient se faire et qu'actuellement nos membres ont retardés, et qui peuvent continuer justement... pas seulement retardés, carrément annulés, et se faire à l'extérieur du Québec. Ça fait que je me dis: On a le mécanisme en place, vous avez le mécanisme au niveau de la réglementation, vous avez des contrôles à appliquer, les embouteilleurs ont tout intérêt à s'entendre avec les municipalités, le faire dans un climat serein, et le ministère de l'Environnement a les outils nécessaires pour appliquer la réglementation; allons de l'avant et, plutôt, adoptons une politique de captage pour l'ensemble des utilisateurs.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Oui, M. le Président. Mais, M. le Président, je n'en reviens tout simplement pas. Le ministre a dit – et je pense que la réponse a été très pertinente: Ne croyez-vous pas que les choses se sont calmées? Effectivement, quand on paralyse quelqu'un, on l'empêche de faire son travail. Pouvez-vous chiffrer un peu le... On parle d'impacts de cette inéquité, du gel des projets d'investissement. Ça implique, j'imagine, des emplois, à un moment donné. Ça implique que peut-être on perde ces investissements de l'autre côté de la frontière, dans certains cas. Pouvez-vous essayer de chiffrer le coût réel de ce moratoire au niveau des emplois, au niveau des investissements? Et est-ce que vous trouvez que, dans la période où on vit, un emploi de moins pas créé, c'est quelque chose qu'on peut accepter tout simplement parce que le ministre n'est pas prêt à mettre en application une solution qui semble d'ailleurs, quand on regarde tous les mémoires, faire l'objet d'un consensus assez large? On dit que le projet de loi est inéquitable par rapport aux embouteilleurs, ça lance un discrédit sur l'industrie.

M. Rivard (Pierre): Oui.

M. Sirros: C'est quoi, en termes réels, le discrédit? Il y a des projets qui pourraient se faire, j'imagine? Êtes-vous au courant s'il y a des investissements qui ne se font pas, qui sont prêts à partir?

M. Rivard (Pierre): Il y a définitivement une inquiétude énorme au sein de l'industrie, puis je pense qu'il y a des décisions qui vont être à prendre qui vont lancer le message, à savoir si, justement, les investissements vont se faire et si des emplois vont être créés. C'est la situation qu'on vit actuellement. Encore une fois, je le répète, on est dans une situation où on est des petits utilisateurs. On n'est pas les seuls à posséder la ressource. On a une quantité quand même abondante. Mais il ne faut pas oublier qu'il y a des provinces, à l'extérieur du Canada et également aux États-Unis, qui peuvent facilement se revirer et avoir les investissements également.

M. Sirros: Là, ce que vous dites, c'est que ce projet de loi coûte des emplois au Québec.

M. Rivard (Pierre): Pardon?

M. Sirros: Ça coûte des emplois au Québec, ce projet de loi.

M. Rivard (Pierre): Ça coûte des emplois.

M. Sirros: Vous ne pouvez pas mettre un nombre, mais vous êtes certain que ça coûte des emplois.

M. Rivard (Pierre): Écoutez, tout dépendra de la façon dont le débat va continuer. Si on s'en va encore une fois dans des dédales administratifs ou des moratoires qui se continuent, c'est évident qu'on pourrait...

M. Sirros: Ici, on parle au moins de 1999.

M. Rivard (Pierre): Oui. C'est évident qu'on pourrait le quantifier éventuellement puis même mettre des chiffres, mais c'est certain que le climat actuellement ne favorise aucunement l'investissement et, au contraire, remet en question bien des projets.

M. Sirros: Et vous dites, à la page 9 de votre mémoire, que le gouvernement lui-même, durant le Symposium, disait qu'effectivement l'industrie...

M. Rivard (Pierre): Pourrait doubler.

M. Sirros: ...pourrait facilement doubler.

M. Rivard (Pierre): Doubler, oui, oui.

M. Sirros: Donc, si on dit, d'une part, qu'on peut facilement doubler, il ne doit pas y avoir de problèmes au niveau de l'augmentation de l'activité et son impact, selon le gouvernement.

M. Rivard (Pierre): Vous avez tout à fait raison. Ça a été mentionné dans le cadre du Symposium, c'est le ministère de l'Environnement qui le mentionnait, que l'industrie pourrait facilement doubler sa taille sans aucun problème, que ça pourrait créer dans l'ensemble du Québec... Oui, il y a peut-être M. Forest qui aimerait ajouter un point.

M. Forest (Georges): Si vous permettez. En termes d'informations techniques – je vois même qu'il semble y avoir consensus d'un bord et de l'autre de la table, et probablement d'autres intervenants – c'est qu'effectivement ce n'est pas un débat technique. Pour nous, techniciens, et probablement que mes autres collègues qui vont venir faire des représentations démontreront que ce n'est pas un débat technique, ce projet de moratoire, présentement, c'est peut-être un projet de perception, comme le ministre a mentionné, mais le titre du moratoire, on se réfère à un niveau de protection de la nappe et non de protection de l'impression qu'on peut avoir de la situation. Donc, pour nous, techniciens, c'est un peu navrant, et je pense qu'on l'a mentionné tout à l'heure, c'est un discrédit pour l'ensemble de l'appareil technique, si vous voulez, des spécialistes, que d'adopter ce moratoire-là. Et c'est loin d'être un message de confiance qu'on envoie envers la population par rapport aux structures actuellement en place pour gérer cette ressource-là.

M. Sirros: Il est aussi dit en page 8 que vous êtes la seule industrie dont le captage de la ressource est assujetti à une autorisation et à des conditions strictes du ministère de l'Environnement.

M. Rivard (Pierre): C'est bien ça, oui.

M. Sirros: Alors, tous les autres utilisateurs des eaux souterraines font ce qu'ils veulent?

M. Rivard (Pierre): Ils font ce qu'ils veulent. Actuellement, on pourrait donner des exemples de piscicultures, des exemples... il faudrait exclure des municipalités. Mais, si on regarde au niveau de large débit, piscicultures, terrains de golf – vous voulez partir un terrain de golf, vous puisez de la nappe que vous voulez – industrie agroalimentaire. On peut en nommer abondamment, sans aucune réglementation, sans aucune demande de permis, sans aucun contrôle, je dirais.

M. Sirros: Est-ce que ça vous surprend, j'imagine, à ce moment-là, que cette question ne soit pas abordée par le projet de loi?

M. Rivard (Pierre): Il y a actuellement un projet de loi du côté du ministère de l'Environnement...

Une voix: Un règlement.

M. Rivard (Pierre): ...un règlement qui est sur le captage des eaux souterraines. C'est ce qu'on propose d'amener. Le captage étendrait la réglementation qui existe déjà en partie aux embouteilleurs. C'est notre proposition qu'on amène aujourd'hui.

M. Sirros: Avez-vous une hypothèse de travail? Comment vous expliquez donc que, comme vous êtes la seule industrie qui est assujettie à un certificat d'autorisation et que vous avez moins de 1 % de l'utilisation de la ressource... Comment il se fait que c'est vis-à-vis vos projets d'utilisation d'eau que tout ce débat est survenu?

(16 heures)

M. Rivard (Pierre): Je reviendrais avec peut-être une série d'événements. C'est une industrie qui est en croissance, c'est certain. C'est certain qu'il y a un bon potentiel économique, un bon potentiel d'emplois. Effectivement, il y a une série d'événements qui se sont succédé en un temps quand même très rapide. Quand on parle du niveau de l'aqueduc à en venir jusqu'aux projets d'exportation en vrac, on parle d'environ six mois où il y a eu un effet médiatique terrible; l'eau était citée dans tous les journaux quasiment à tous les jours. Donc, les gens n'ont pas fait, malheureusement... on n'a pas fait de distinction entre eau de l'aqueduc, eau de surface, nappe phréatique, embouteilleurs ou en vrac. Le tout a amené une confusion des plus totales.

M. Forest (Georges): Puis, excusez-moi, j'ajouterais également peut-être un autre élément qui permet d'expliquer ça aussi. C'est qu'il ne faut pas oublier que, comme les embouteilleurs, ce sont les seuls qui doivent présenter des études, demander des autorisations, c'est les seuls qui sont visibles par rapport à la population, face à la population, dans l'exploitation de la nappe souterraine, nous, on fait des études pour des embouteilleurs d'eau puis on voit à côté des industries ou des gens qui installent des puits et puis captent des quantités similaires sinon supérieures et sans même que leur voisin le sache. Donc, c'est bien normal que l'industrie de l'eau embouteillée soit visible. Compte tenu du débat qu'il y a depuis un an, c'est bien entendu que c'est eux que certaines personnes ont pu cibler.

M. Sirros: Comme on est transparents, puis on affiche ce qu'on fait, puis on demande l'autorisation pour le faire...

M. Forest (Georges): On devient la cible.

M. Sirros: ...on a tiré sur nous. Mais comment est-ce que vous réagissez donc face à un gouvernement ou à un ministre qui dit: Moi, j'embarque dans ce jeu-là puis je vous tape sur les doigts, à ce moment-là?

Mme Jarjour (Anita): Comment est-ce qu'on réagirait à? Voulez-vous répéter?

M. Sirros: Comment est-ce que vous réagissez? Comment vous vous sentez face à cette situation?

Mme Jarjour (Anita): Nous sommes présents. Nous sommes présents pour en discuter, justement. Nous nous sentons très visés par quelque chose qui, comme M. le ministre a dit plus tôt, a créé un temps d'arrêt assez draconien. Boum! On arrête. Plus d'investissement, plus rien qui se passe au Québec dans l'industrie de l'eau embouteillée.

J'aimerais répondre un peu à une question que vous avez posée il y a 30 secondes. Toute la réglementation à laquelle nous sommes assujettis est due à la santé publique. C'est la quantité et la qualité de l'eau, et c'est pour ça que nous sommes tellement médiatisés, nous croyons.

M. Sirros: Peut-être en conclusion, donc on arrive à la proposition que vous mettez de l'avant. Vous dites: Écoutez, ça n'a pas de sens de nous traiter de cette façon-là. Ce n'est pas de cette façon qu'un gouvernement responsable devrait agir normalement quand on légifère. Ce n'est pas bon pour l'industrie, ce n'est pas bon pour les emplois, ce n'est pas bon pour le Québec. Ce n'est pas bon même pour le débat que vous voulez tenir, parce que l'argument principal du ministre, c'est de dire: Je vais vous renfermer dans une pièce et mettre de l'isolant autour pour que personne ne voie et n'entende quoi que ce soit et, pendant ce temps-là, on va tenir un débat. Mais vous êtes un acteur majeur dans le débat, j'imagine. Si le ministère de l'Environnement, lui, dit que vous pouvez doubler, etc., vous devez être un de ceux qui doivent participer dans l'élaboration de cette politique et de ce débat.

À votre point de vue, comment est-ce que ça crée un climat meilleur si, un des acteurs dont vous êtes, on vous pointe du doigt en vous disant que vous êtes des méchants? Vous sentez-vous à l'aise, à ce moment-ci, de participer à un débat sereinement, avec tout le loisir d'être à l'aise dans des prises de position?

M. Rivard (Pierre): Je ne verrais pas comment on pourrait être à l'aise, on est cités quasiment comme les boucs émissaires au Québec. On prend moins de 1 % et, actuellement, c'est les embouteilleurs qui sont la cause, apparemment, selon certains dires, d'une exportation indue de l'eau. Ça fait qu'on ne peut pas, dans un climat vraiment quand même serein... Vraiment, c'est un faux débat. On se sent comme les boucs émissaires.

Puis ce qu'on amène comme proposition constructive, c'est qu'il y a eu beaucoup d'années consacrées de la part du ministère de l'Environnement, l'industrie de l'eau embouteillée au Québec a développé beaucoup d'experts – des hydrogéologues, géologues de formation, on pourrait en nommer plusieurs, puis je pense qu'on peut en être fiers – mais là, actuellement, on jette un discrédit sur quasiment tout ce qui a été accumulé au cours des dernières années. Allons plutôt vers une proposition positive. Allons adopter le règlement de captage qui est depuis avril, si je ne me trompe pas, 1994. Et je pense que c'est une façon, au nom de la protection de la ressource, c'est la meilleure façon de montrer à tous les capteurs, à tous les utilisateurs, qu'actuellement on veut vraiment protéger la ressource au Québec.

M. Sirros: Comment vous expliquez la non-application du règlement qui existe, la non-application du règlement qui réglerait votre problème, d'après ce que j'ai vu dans les autres mémoires, qui réglerait le problème de presque tout le monde?

M. Rivard (Pierre): Je laisserais peut-être M. Forest en parler.

M. Forest (Georges): Il faut comprendre que ce règlement-là, qui est sur les tables de travail depuis quand même plusieurs années, ça amène, bien entendu, des restrictions aux utilisateurs. C'est des règlements, donc c'est des permis, c'est des études. On peut comprendre que dans un débat de société et économique en même temps, il y a différentes tendances. Bon, on n'aime pas se faire imposer des restrictions.

Et on peut comprendre aussi que, a priori, en tant qu'initiés, on reconnaît qu'il n'y a pas un gros problème avec les eaux souterraines au Québec. Donc, avant de mettre en place un règlement qui est restrictif, il faut en mesurer les conséquences. Je pense que c'est ce que le ministère fait depuis plusieurs années. Maintenant, je pense que le dossier a quand même assez mûri et qu'on est prêt à l'utiliser de manière, justement, à arriver aux fins de l'actuel projet de loi, c'est-à-dire de protéger la ressource eau avec un minimum de restrictions, un minimum de contrôles qui consistent en l'application de ce règlement-là, qui existe physiquement, qui existe au Conseil des ministres. C'est une action qui pourrait être mise en place. Nous, en tant qu'hydrogéologues, on considère que c'est une première mesure qui est déjà très avancée en termes de réflexion, qui pourrait s'appliquer rapidement.

M. Sirros: Moi, j'évoquais, dans mes remarques préliminaires, la question du BAPE. Est-ce que, comme mesure alternative à l'application du règlement, vous pouvez effectivement envisager que, dans des cas spécifiques qui soulèvent des questions, on pourrait référer le dossier en question au BAPE avant l'autorisation de permis? Est-ce que ça, ça serait – j'imagine – plus acceptable qu'un moratoire? Peut-être pas aussi global que l'application du règlement, mais est-ce que, à votre point de vue, c'est quelque chose qui est envisageable?

M. Rivard (Pierre): Je pense sincèrement que le ministère de l'Environnement a tous les outils nécessaires actuellement.

M. Sirros: Oui, mais le ministre semble dire que non, parce qu'il impose un moratoire. Il dit: Je n'ai pas assez pour apaiser tout le monde, j'applique le moratoire. Et, moi, je lui dis: O.K. Là, vous avez le moratoire. Et vous dites: Face au moratoire, appliquez donc le règlement que vous avez. Le ministre dit: Je ne veux pas l'appliquer encore, j'imagine, pour les raisons que vous évoquez, «on va assujettir trop de monde à des règlements», et j'ai un problème avec le débat public que je vais mener. C'est ce qu'il dit. Alors, pourquoi, à ce moment-là, s'il y a un ou deux projets qui posent des problèmes, pourquoi on ne vide pas cette question-là dans un laps de temps qui ne va pas être plus long que quatre mois devant le BAPE, où les gens présentent ça, puis là on va voir quel est l'impact environnemental, quel est l'impact sur les autres utilisations, puis le ministre pourra prendre une décision éclairée quant à l'émission ou non de son certificat d'autorisation? Vous ne trouvez pas?

M. Rivard (Pierre): Mais je reviens – excusez-moi – sur un point. Le ministre a déjà les outils actuellement.

M. Sirros: O.K. Je comprends que vous n'aimez pas le BAPE plus qu'il faut. Ha, ha, ha!

M. Rivard (Pierre): Bien, écoutez, dans le sens que, quand vous parlez d'étude d'impact, les embouteilleurs qui veulent s'implanter dans une région ne le font pas sans preuves, sans études et sans, je dirais, un genre de contrat social. Donc, le ministère de l'Environnement délivre le permis ou peut ne pas le délivrer. Et la municipalité a l'occasion de s'exprimer.

M. Sirros: Là on entre dans le domaine politique, parce que le ministre dit: Moi, je ne veux pas avoir à décider si, oui ou non, je délivre le permis, parce que la situation est trop tendue, il y a trop de gens qui s'opposent, puis, moi, je veux mener un débat. Donc, ma réponse est d'arrêter tout. Et, moi, je vous dis: Au lieu d'arrêter tout, étant donné qu'il y a effectivement cette effervescence de la part des citoyens dans des régions particulières, est-ce que le ministre ne serait pas bien servi – et vous aussi, finalement – par l'opportunité, dans l'intérim de cette politique globale, peut-être, de faire un véritable débat public sur les projets en question devant le BAPE, qui serait vu comme instance indépendante et extérieure? Ça éclaircirait le ministre quant à l'émission de son certificat d'autorisation, ça lui permettrait même de dire aux gens qui s'opposent, si tel est le cas, que: Voici, même le BAPE arrive à la conclusion que l'impact est minime, etc., et je procède.

Ça ne lui permettrait-il pas ainsi de ne pas stopper le développement, de ne pas vous pointer du doigt et permettre de tenir son débat, notre débat sur la politique générale, dans un climat un peu plus correct que celui dans lequel nous sommes placés avec ce moratoire?

M. Rivard (Pierre): Définitivement, je pense que le ministère de l'Environnement, encore une fois – vous allez me trouver têtu, mais... ha, ha, ha! – a les mécanismes voulus. Je pense que la première démarche qui avait été initiée, soit dans le cadre du Symposium, de faire venir des experts et d'avoir un état rationnel de la situation, était une des très bonnes démarches. Malheureusement, on sait qu'au début du Symposium, sans même avoir entendu les experts, déjà on déclarait un coupable. Vous conviendrez avec moi que c'est inhabituel, très inhabituel.

M. Sirros: J'en conviens.

M. Rivard (Pierre): Donc, le Symposium a quand même... Si on enlève la bourde qui a pu être faite au départ, peu importe, il y a eu des experts qui se sont prononcés en donnant l'état de la situation. Je pense qu'effectivement M. le ministre de l'Environnement a également prévu des consultations publiques qui vont se tenir au cours des prochains mois, auxquelles, d'ailleurs, l'Association des embouteilleurs d'eau et également d'autres experts vont sûrement se faire un devoir de participer et, encore une fois, d'apporter un éclairage qui est nouveau à la population. Je pense que les mécanismes sont en place, il s'agit maintenant de les appliquer.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Limoilou. Et j'indique qu'il reste 7 min 40 s au parti ministériel.

(16 h 10)

M. Rivard (Limoilou): Je sais que ma collègue veut parler aussi, alors je vais faire rapidement, M. le Président. Il faut quand même rappeler d'entrée de jeu, là, qu'actuellement l'industrie de l'eau n'est pas arrêtée. Les compagnies actuelles qui ont leur permis continuent d'embouteiller et de vendre. J'admets toutefois que ça met un frein à de nouveaux investissements, mais la demande additionnelle est comblée par les distributeurs actuels, qui ne sont pas touchés. Ils sont touchés par des moratoires pour de nouveaux projets.

Moi, je suis obligé, M. le Président, de me souvenir d'une chose. En 1983, dans la région de Québec, il y a des gens qui ont eu peur d'avoir peur. On a construit des stations d'épuration des eaux. Et, à ce moment-là, un cas unique en Amérique du Nord, la Communauté urbaine de Québec a été obligée de tenir comme des audiences publiques. On a appelé ça un Bureau d'évaluation environnementale pour renseigner, informer les gens qui avaient des craintes pour la santé, le bruit, les odeurs, etc. Et l'effet bénéfique de ça, c'est que, par après, on a pu construire les stations d'épuration en toute quiétude.

S'il arrivait, dans ce cas-ci, que durant le moratoire justement les deux parties... Le ministre a indiqué qu'il y aurait des consultations, de l'information. Moi, je reviens à ce que M. Rivard dit dans son mémoire, à la page 10, le manque d'information, le manque flagrant d'information – j'en conviens – possiblement du gouvernement qui aurait peut-être pu être plus explicatif. Puis également, je crois aussi que l'industrie a eu une déficience là-dedans. S'il y avait eu plus d'information, peut-être que les gens auraient été plus rassurés.

Remarquez bien que, si nous allons de l'avant avec le moratoire et qu'on le passe dans les prochaines semaines, ce n'est pas agréable, surtout lorsqu'on pense qu'on va geler des projets d'investissement, mais il reste quand même que des fois c'est peut-être bon de faire du surplace pendant quelque temps pour pouvoir donner le feu vert à beaucoup d'investissements par après. Et, moi, je retiens encore une fois, là, que le manque flagrant d'information est de part et d'autre. On sait, lorsqu'un débat commence, que ça dérape rapidement. Bien souvent, c'est des émotions et on s'entête de part et d'autre et on refuse de l'information. Moi, je suis capable de vivre... En tout cas, moi, si on va de l'avant avec le moratoire, en autant qu'il n'est pas de plus de six mois, pour nous permettre durant ce surplace-là de faire de l'information pour rassurer des gens, pour qu'enfin on puisse donner des permis et que cette industrie continue à se développer selon des règles qu'on aura à adopter... C'est bien plus un commentaire, M. le Président, que des questions, mais je suis d'accord sur le manque flagrant d'information.

Le Président (M. Lachance): Est-ce qu'il y a des réactions aux propos du député de Limoilou. Ça va?

M. Rivard (Pierre): Je pense que c'est un commentaire. C'est ça?

Le Président (M. Lachance): Oui.

M. Rivard (Pierre): Je suis d'accord avec le fait qu'il y ait eu un manque flagrant d'information de plusieurs parties.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Deux-Montagnes.

M. Sirros: Vous n'êtes pas d'accord avec le surplace?

Le Président (M. Lachance): Pardon?

M. Sirros: Vous n'êtes pas d'accord pour faire du surplace?

M. Rivard (Pierre): Non, non, non. Ça, définitivement pas. Je n'ai pas...

M. Rivard (Limoilou): Si vous le permettez, M. le Président, je veux quand même établir, là, le surplace. La durée du moratoire, que j'appelle du surplace, n'empêche pas l'industrie actuelle, celle qui a déjà des permis, de répondre à la demande. On empêche des investissements pendant quelques mois et, après ça, ça sera le feu vert. Mais il ne faut pas dire qu'on prive la clientèle et le marché mondial de la ressource eau.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Oui, merci, M. le Président. Bon, voilà. Moi, je suis de Deux-Montagnes. Je suis tout près de Lachute, de Saint-André, Saint-Placide, donc dans un secteur pas très loin de Piedmont non plus, alors dans un secteur quand même où il n'y a pas une concentration sur 1 km. Mais, en passant, j'ai une petite question: Messieurs, est-ce que vous connaissez un endroit au Québec où il y a 1 000 résidences dans 1 km², alimentées par de l'eau souterraine, dans 1 km² par eau souterraine? Est-ce qu'il y a un endroit?

M. Forest (Georges): L'image qui a été utilisée, c'est qu'il y a plusieurs endroits au Québec effectivement où il y a des villages de 1 000 résidences qui sont alimentées par un seul puits qui, en fait, est dans 1 pi², madame.

Mme Robert: Oui, plusieurs au Québec?

M. Forest (Georges): Il est dans 1 pi². L'image qu'on a utilisée, c'est qu'il peut y avoir un seul puits qui alimente 1 000 résidences. Et ce puits-là, il est en dedans de 1 km². Vous comprenez? Non?

Mme Robert: Oui, mais, en fait, O.K....

M. Forest (Gorges): Dans le sens que les 1 000 résidences, elles n'ont pas chacune leur puits. Je veux dire, il y a un réseau d'aqueduc qui s'approvisionne à partir d'un puits. Donc, ce n'est même pas 1 km², c'est 1 m².

Mme Robert: Mais est-ce qu'il y a en beaucoup de ça? On n'en connaît pas beaucoup...

M. Forest (Gorges): Il y en a plusieurs.

Mme Robert: ...de 1 000 résidences sur un puits.

M. Rivard (Pierre): Il y a plusieurs.

M. Forest (Georges): Il y en a plusieurs, madame.

Mme Robert: Ça, j'aimerais les connaître, en tout cas. On en connaît de 400, 500, mais, 1 000, je n'en connais pas, moi, en tout cas. J'aimerais bien avoir le relevé de ça, en tout cas, par curiosité.

M. Rivard (Pierre): On pourrait vous envoyer une liste.

Mme Robert: Ma question revient à autre chose. Je pense que le ministre a très bien souligné le questionnement, les craintes que des gens ont vis-à-vis du captage des eaux souterraines. Mais, ici, il faut bien se situer. On parle beaucoup d'utilisateurs d'égal à égal. On a été habitué, au Québec, sauf depuis quelques années... Ça, c'est très clair, mais ce n'était pas aussi ouvert. Vous avez parlé de toute la question de l'exportation en vrac et tout ça qui a fait s'alarmer les gens davantage. Je dis bien que l'eau au Québec est utilisée gratuitement: l'eau pour boire, pour transformer, pour nourrir les animaux, pour irriguer les fermes, etc., l'eau est gratuite. L'eau, quand on parle d'utilisateurs qui embouteillent, c'est de l'eau vendue, c'est de l'eau monnayée. Et là on vient de toucher à un questionnement, un changement de valeurs qui est très profond. Et, à mon avis, tout le débat se situe là.

La question, c'est la façon dont elle est posée. On pourrait parler de toutes les techniques pour mesurer la nappe phréatique. Bon, ça, je suis d'accord, on est avancé là-dessus et je pense qu'on est capable, mais il reste qu'il y a de l'eau monnayée, il y a de l'eau pas monnayée. Qui me dit que les agriculteurs qui sont – et c'est la crainte que, moi, j'ai sentie à Saint-Placide – alentour du puits où l'eau sera captée, un jour, n'auront pas à payer leur eau pour nourrir leurs animaux ou arroser leurs champs parce que l'eau d'en bas, elle vaut des sous? Et je pense que c'est le débat du fond. Et je me pose la question.

On parle d'utilisateurs, oui, d'égal à égal. Vous dites que vous êtes un peu mis, dans ce moratoire, sur la sellette... parce que vous êtes les seuls mis sur la sellette. Moi, je dis: Vous êtes les seuls qui, à l'heure actuelle, monnayez de l'eau, tandis que les autres ne la monnayent pas, ou à travers un produit... Et c'est un peu cette question-là qui, à mon avis, est reposée. Alors, je vous la lance. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Rivard (Pierre): Quand vous dites «monnayez l'eau», vous faites référence à différentes... Il y a des entreprises agroalimentaires qui utilisent de l'eau. À ce que je sache, elles ne fonctionnent pas avec des subventions.

Mme Robert: Non, non, je parle de l'eau, qui a toujours eu un caractère gratuit, en ce sens que si j'ai de l'eau dans ma maison par un puits, bon, c'est mon puits. Si j'ai de l'eau pour nourrir mes animaux sur la ferme, etc., c'est de l'eau qui est là, point à la ligne. Tandis que le puits qui vient de s'installer à côté pour capter, c'est de l'eau qui est monnayée, avec tout ce que ça peut amener. Ça aussi, c'est dans l'air et ça a ressorti très fortement avec toute la question de l'exportation de l'eau, etc. C'est de l'eau qui devient monnayée. Alors, c'est la question que je vous pose.

M. Rivard (Pierre): O.K. Vous voulez dire qu'au niveau de la perception, effectivement, on se ramène, dans ce cas-là, à la confusion à laquelle on a assisté effectivement au cours des derniers mois. D'ailleurs, dans un des mémoires qu'on a présentés, au niveau de l'Association, on suggérait d'avoir des gens d'agences, de bassins, avec des consultations, que les gens puissent participer autant que les municipalités, autant que les différents utilisateurs, pour justement avoir un éclairage qui est quand même très clair de la situation.

Il n'y a pas un embouteilleur actuellement qui a intérêt à s'implanter dans une région pour partir une polémique ou avoir une mauvaise perception. C'est-à-dire qu'il faut s'asseoir, je pense, puis c'est ce que les gens ont fait, mais dans un climat qui était peut-être moins propice à des discussions, effectivement.

Le Président (M. Lachance): Alors, voilà, je regrette, mais l'enveloppe de temps qui nous était impartie est épuisée, à moins que, moi, j'aie des indications différentes des membres de la commission.

M. Sirros: ...deux minutes. Moi, je n'ai pas de problème, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Bon. Alors, moi, avec le consentement des membres de la commission, pas de problème. M. le député de Salaberry-Soulanges.

M. Deslières: Ça va? Merci, M. le Président. M. Rivard, tout à l'heure, dans votre présentation, vous avez utilisé, je pense, consciemment, à cinq ou six reprises, le fait que le moratoire était une position extrême. Juste vous rappeler que le législateur, dans différents domaines, en certaines circonstances, utilise le moratoire pour voir clair. Il y a une situation sociale, une situation économique, une situation culturelle, une situation environnementale qui font en sorte qu'on veut voir clair pour établir les règles du jeu, pour permettre aux différents acteurs de bien définir leur action, leur développement. Et, moi, j'ai comme l'impression qu'après ce débat-là la situation va être claire et pour vous et pour l'ensemble des intervenants et que ça va vous favoriser. Premier des commentaires.

(16 h 20)

Deuxième élément. Quand vous nous dites, dans votre présentation: Ça met notre industrie... en tout cas, ça retarde des projets de développement. Moi, je regardais vos documents et je me disais: C'est une industrie bien structurée qui a sûrement une planification à court, mais surtout à moyen et à long terme, de ses investissements. Vous ne viendrez pas nous faire accroire que le moratoire pour six mois va faire en sorte que l'industrie des embouteilleurs au Québec permette de mettre en péril l'ensemble des investissements. M. Rivard.

M. Rivard (Pierre): Ça fait déjà six mois. Ça fait six mois qu'on en parle...

M. Deslières: Oui, mais on est conscients...

M. Rivard (Pierre): ...et on parle d'un autre six mois. Donc, vous parlez d'un an, de paralyser une industrie...

M. Deslières: Vous n'avez jamais... Pardon?

M. Rivard (Pierre): Vous parlez de paralyser une industrie durant un an, qui est en progression et en croissance.

M. Deslières: Oui, mais vous me permettrez de vous dire, monsieur, avec toute la connaissance que j'ai de votre industrie, que c'est quelque chose de structuré. Vous avez sûrement établi une planification de vos investissements à moyen terme et à long terme, parce que vous êtes sérieux.

M. Rivard (Pierre): On est très sérieux. Puis, je reviens sur un point que vous mentionniez tout à l'heure.

M. Deslières: C'est parce que ça me fait... Oui?

M. Rivard (Pierre): Vous mentionniez tout à l'heure «position extrême». J'ai, à l'occasion, et les gens qui sont ici, on voyage et on rencontre des interlocuteurs à travers, je dirais l'Amérique du Nord et le monde, puis on peut vous dire qu'actuellement les gens décrivent comme étant une position extrême qui a été prise, pour un moratoire. Ça fait que je ne sais pas quelle est l'interprétation qu'on en fait, mais nous, actuellement, on rencontre d'autres associations, on rencontre d'autres intervenants, on rencontre des investissements étrangers, puis c'est la position extrême qui a été dénotée actuellement au Québec, de bâillonner une industrie qui est en croissance.

M. Deslières: Oui. Mais, M. Rivard, vous êtes...

Le Président (M. Lachance): En complément, M. le député.

M. Deslières: Oui, oui. Dernière question, M. le Président, vous m'avez permis quelques minutes. Vous êtes au Québec, vous connaissez les règles du jeu, ça a été utilisé par tous les gouvernements dans certaines situations, un moratoire pour voir clair, établir les règles du jeu. Parce que c'est un enjeu important, on parle d'une politique d'eau. Et, conséquemment, je pense que le gouvernement a agi en responsable de dire: Écoutez, on va vider la question, tout le monde va se mouiller – sans jeu de mots – et après, ça va vous permettre de connaître un développement harmonieux, selon le contexte, selon ce qui va ressortir de nos débats, du débat. Je pense qu'on était dû pour un débat national. Ça va vous permettre, à votre industrie, de se développer et non pas d'arriver toujours avec des écueils, que vous avez connus, dont vous avez fait mention que ce n'était pas ce que vous souhaitiez pour l'avenir.

M. Rivard (Pierre): Moi, je reviens sur un point. Le gouvernement a ciblé le bouc émissaire, les embouteilleurs, en ayant les outils qu'il faut pour appliquer la réglementation. Puis, actuellement, la conséquence est que, depuis six mois, on a paralysé l'industrie et on parle encore d'un autre six mois. Puis, quand vous parlez que l'industrie est bien structurée, vous avez tout à fait raison, l'industrie est très bien structurée puis les investissements étrangers, à un rythme de décision et à un rythme de croissance qui se passent actuellement, est-ce qu'ils peuvent se permettre d'attendre un an? On peut se poser très sérieusement la question. Ça, on peut vous le dire, on l'entend de façon régulière.

M. Sirros: Est-ce que je peux, 30 secondes, M. le Président, étant donné...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Sirros: Non, je pense qu'on va finir ici, mais c'est la dernière remarque du député qui m'a allumé.

M. Deslières: Ha, ha, ha! C'est intéressant, c'est intéressant!

M. Sirros: Si je comprends bien, si au moins c'était un moratoire global et général applicable à tous les utilisateurs, vous n'auriez pas d'arguments ici ce matin, en disant: Vous nous pointez du doigt. Et peut-être l'argument du ministre, à l'effet qu'il voulait calmer tout le monde, aurait un certain poids. Est-ce que je me trompe?

M. Rivard (Pierre): Ça diminuerait effectivement, si vous faites un moratoire pour tout le monde; mais n'empêche que les embouteilleurs l'auraient quand même aussi. Ça, il ne faut pas...

M. Sirros: Oui, oui, mais vous ne pourriez pas nous dire, à ce moment-là, que vous, vous êtes pointés du doigt. Le ministre aurait pu dire qu'il protège la ressource pendant le temps nécessaire. Ça aurait été au moins cohérent. J'arrête là.

M. Rivard (Pierre): Mais restons de façon positive. La réglementation est existante.

M. Sirros: Mais il ne voulait pas le faire parce que ça touchait 100 %; puis 1 %, c'est faisable.

M. Bégin: Est-ce que je me trompe, M. Rivard, en disant que même si d'autres avaient été là, il y aurait eu le moratoire quand même et l'effet que vous déplorez aurait existé quand même? Alors, l'effet d'être moins pointés du doigt, ce n'est pas ça qui soulage le fait de ne pas pouvoir faire un projet. C'est ça que je comprends de votre intervention.

M. Rivard (Pierre): Excusez-moi, j'ai manqué le début de votre intervention.

M. Bégin: Ce que le député de Laurier-Dorion dit, c'est que si on avait imposé le moratoire à tout le monde, le côté d'être pointés du doigt serait disparu. Mais vous avez dit: Oui, mais ce n'est pas ça qui est important en soi, c'est de pouvoir ou de ne pas pouvoir exploiter une source. Alors, le fait de l'avoir imposé à tout le monde vous aurait également empêchés de faire cette exploitation.

M. Rivard (Pierre): Je pense qu'on embarque dans des suppositions.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bégin: Mais c'est celles de mon collègue.

M. Rivard (Pierre): Les faits sont actuellement que...

M. Bégin: C'est pour ça que tu n'as pas raison. Alors, merci infiniment.

Le Président (M. Lachance): Merci aux membres de l'Association des embouteilleurs d'eau du Québec pour votre contribution aux travaux de cette commission, M. Rivard et les personnes qui vous accompagnent.

J'invite maintenant les représentants de RÉSEAU environnement à bien vouloir prendre place à la table.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Lachance): Alors, s'il vous plaît, on va reprendre nos travaux. M. le ministre. J'aurais besoin de votre collaboration, M. le ministre.

Alors, je vous invite, à titre de porte-parole de RÉSEAU environnement, à vous identifier et à identifier la personne qui vous accompagne, s'il vous plaît.


RÉSEAU environnement

Mme Auger (Denise): Bonjour, M. le ministre, M. le Président, Mmes et MM. les députés membres de la commission. Je suis Denise Auger, je suis conseillère en communications et affaires publiques à RÉSEAU environnement. Je remplace notre président, M. Jean-Louis Chamard, qui est présentement à l'extérieur du pays. Aujourd'hui, je suis accompagnée du Dr Pierre Gélinas, qui est professeur et chercheur à l'Université Laval. M. Gélinas se consacre depuis plus de 30 ans à l'hydrogéologie du Québec et il fait partie du comité de travail sur les eaux souterraines de RÉSEAU environnement.

Notre exposé se divisera en deux parties. Premièrement, je vais vous donner quelques informations sur notre association et rappeler brièvement les positions défendues par RÉSEAU environnement dans le dossier des eaux souterraines au cours des dernières années. Par la suite, M. Gélinas présentera notre position concernant le projet de loi n° 405.

Quelques mots donc sur RÉSEAU environnement. RÉSEAU environnement est le plus important regroupement de l'industrie environnementale au Québec. Il compte 1 500 membres, dont 300 entreprises, 70 municipalités et une vingtaine d'organismes gouvernementaux et parapublics. La majorité de nos membres oeuvrent quotidiennement dans le domaine de l'eau au Québec, ce sont des ingénieurs-conseils, des hydrogéologues, des gestionnaires municipaux, des industriels, techniciens et chercheurs universitaires. Nos positions sont donc élaborées par des bénévoles de RÉSEAU environnement qui détiennent une vaste expérience dans le domaine.

Cela fait plus de 30 ans que RÉSEAU environnement s'intéresse à la protection et à la conservation de la ressource eau. L'association travaille également dans les secteurs de l'air, des sols et des matières résiduelles. Donc, ce n'est pas la première fois que RÉSEAU environnement transmet des propositions au gouvernement concernant le dossier des eaux souterraines. Nous nous étions prononcés, en 1996, sur le projet de politique de protection et de conservation des eaux souterraines déposé par le ministère de l'Environnement et de la Faune.

(16 h 30)

RÉSEAU environnement avait souscrit aux principes et orientations proposés par le ministère et donné son appui à ce projet de politique qui constituait une première véritable tentative visant à protéger, conserver et gérer d'une manière globale cohérente et intégratrice cette ressource si précieuse mais trop souvent négligée que sont les eaux souterraines.

RÉSEAU environnement avait alors noté que le ministère avait bien cerné la problématique et les véritables enjeux et mis en évidence les limites de nos connaissances sur certaines formes de contamination diffuse. Par contre, il n'avait pas donné de précisions concernant l'évolution passée des changements survenus à la nappe phréatique ni ceux qui sont anticipés. À notre avis, une des plus importantes mesures proposées dans le plan d'action était l'obligation d'implanter des périmètres de protection. Nous étions aussi en accord avec le fait que le ministère proposait de réaliser des bilans périodiques sur l'état général de la ressource eau.

De plus, RÉSEAU supportait les objectifs du MEF en regard de la prévention de la surexploitation. L'économie d'eau est un dossier qui nous tient à coeur. Nous le défendons sur toutes les tribunes qui nous sont offertes et nous en faisons la promotion chaque été depuis plus de 20 ans par la mise en place dans plus de 100 municipalités du programme d'économie d'eau potable. Nous avions noté que le projet de politique du ministère ne mettait pas beaucoup d'emphase sur les mesures d'économie d'eau. Pourtant, ces mesures représentent un moyen efficace de prévention de la surexploitation.

Ce sont là certains des points sur lesquels RÉSEAU environnement avait réagi concernant le projet de politique de protection et de conservation des eaux souterraines. Par la suite, il y a eu, en décembre dernier, le Symposium sur la gestion de l'eau au Québec. RÉSEAU environnement a d'ailleurs participé à l'organisation de cet événement et remis au gouvernement un document exprimant ses positions. Je vous en mentionne quelques-unes.

RÉSEAU environnement proposait de considérer les eaux souterraines comme un bien collectif et de les protéger contre l'exploitation excessive et de privilégier l'usage des eaux souterraines comme source d'approvisionnement en eau potable pour l'usage personnel et municipal. Nous notions aussi que nous ne détenions pas d'inventaire des principaux aquifères du Québec. Par le fait même, nous n'avons pas une connaissance précise de la qualité de l'eau réellement exploitable dans la plupart des régions. Nous devons donc pallier le manque de connaissances sur les eaux souterraines afin d'établir des modes de gestion efficaces. RÉSEAU environnement a aussi mentionné qu'il est essentiel de se pencher sur l'état des réseaux d'aqueduc et d'égout et des investissements requis pour les rénover, sur le partage des responsabilités entre les divers intervenants gouvernementaux, municipaux et privés et sur la gestion de l'eau par bassins versants. C'étaient là quelques-uns des points amenés par RÉSEAU environnement dans le cadre du Symposium sur la gestion de l'eau au Québec.

Vous verrez que les recommandations du comité de travail qui s'est penché sur le projet de loi n° 405 figurent dans la même veine que celles défendues récemment par RÉSEAU environnement.

Je laisse maintenant la parole à M. Gélinas qui va vous présenter nos recommandations concernant le projet de loi n° 405.

Le Président (M. Lachance): M. Gélinas.

M. Gélinas (Pierre): Bonjour. M. le ministre, M. le Président, mesdames, messieurs, je voudrais tout d'abord remercier la commission d'avoir invité RÉSEAU environnement à présenter sa position concernant le projet de loi n° 405.

Je dois vous dire qu'avant même la lecture de ce projet de loi le comité de travail que je représente pensait devoir commenter un texte législatif englobant toute la problématique de la protection de la ressource eau souterraine, mais le projet de loi n° 405 ne décrète qu'un moratoire de quelques mois seulement, et ce, envers l'activité en matière de captage des eaux souterraines, qui est déjà la plus encadrée sur le plan légal québécois, soit l'exploitation de l'eau souterraine à des fins d'embouteillage. En effet, quatre articles composent ce projet de loi, incluant un article sur les dispositions pénales.

Nous croyons que cette loi s'avère peu pertinente pour protéger d'une exploitation abusive la nappe d'eau souterraine. En effet, actuellement, l'industrie de l'embouteillage est déjà assujettie à des exigences environnementales, alors que le prélèvement de l'eau souterraine à des fins industrielles, piscicoles, agricoles peut engendrer une surexploitation des nappes de même que des conflits d'usages beaucoup plus importants et qu'aucune mesure légale ne les contraint. De plus, le projet de loi tel qu'il est énoncé ne toucherait que quelques individus ou industries qui feraient une demande de permis de captage durant la période entre juin et décembre 1998.

Nous ne pouvons souscrire à la thèse que les eaux souterraines seront entièrement protégées en contrôlant uniquement une industrie qui prélève moins de 1 % de toute l'eau souterraine captée au Québec et qui, dans les faits, est déjà soumise à l'article 18 de la loi n° 52, qui a été sanctionnée le 16 décembre 1996 et qui modifiait deux lois, soit celle sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments et la Loi sur la qualité de l'environnement. Donc, pour être techniques un peu, on va parler de numéros.

L'article 18 de la loi n° 52, qui réfère à l'article 16 de cette même loi en modifiant le paragraphe s de l'article 46 de la Loi sur la qualité de l'environnement, autorise dorénavant le gouvernement à adopter des règlements pour régir l'exploitation des eaux souterraines en fonction des différents usages, y compris le captage d'eaux souterraines, dont l'utilisation et la distribution sont régies par la Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments. Ces règlements peuvent notamment, premièrement, subordonner, dans les cas qu'ils indiquent, l'exploitation des eaux souterraines, y compris celles qui sont menacées de contamination, à l'autorisation du ministre, laquelle peut contenir toute condition que le ministre juge nécessaire. Deuxièmement, ces règlements peuvent prescrire des normes portant sur les volumes d'eau prélevés – donc, c'est le cas des eaux embouteillées – la qualité de l'eau et la préservation de la qualité. Ces règlements permettent, troisièmement, de prescrire des normes applicables aux installations de captage. C'est peut-être ici le point le plus important, il s'agit ici de protéger la santé des individus et des communautés, et je crois que c'est un problème beaucoup plus important que le problème de quantité, qu'on mentionnait tout à l'heure. Quatrièmement, ces règlements permettent de prescrire la préparation de registres, rapports et autres documents et en prescrire la communication au ministre. Donc, toute l'information peut être disponible si besoin est.

Donc, en vertu de cette modification, l'article 46s de la Loi sur la qualité de l'environnement, qui est en vigueur, ne vise plus uniquement la qualité de cette ressource dans les cas où elle était menacée de contamination, comme aux Îles-de-la-Madeleine ou dans la région de Mercier, par exemple, mais il intègre dorénavant l'aspect quantitatif par le biais d'un ensemble de mesures exigibles par le ministre. Toutes les dispositions législatives existent donc déjà pour bien évaluer les projets de captage à des fins d'embouteillage.

De plus, un nouvel addendum au guide d'application en vigueur depuis février 1998 oblige notamment à procéder à l'inventaire de tous les ouvrages de captage existants dans un rayon de un kilomètre de tout puits projeté. Cet addendum prévoit également que la société exploitante – des eaux embouteillées, par exemple – s'engage par écrit à effectuer à ses frais les travaux nécessaires pour rétablir une disponibilité ou pour installer l'équipement visant à assurer l'approvisionnement continu en eau à un propriétaire qui aurait été lésé par des prélèvements d'eau.

La loi n° 52 permet donc au gouvernement de légiférer pour rendre équitable l'examen de tous les utilisateurs majeurs d'eau souterraine. En conséquence, RÉSEAU environnement propose donc que le gouvernement adopte le projet de règlement sur le captage des eaux souterraines, qu'on a mentionné tout à l'heure, qui regroupe un ensemble de mesures beaucoup plus équitables et efficaces.

En effet, ce projet de règlement soumet à des autorisations du ministre tout prélèvement de plus de 30 000 m³ par année, ce qui correspond à peu près à 80 m³ par jour, ce qui est même plus petit que la plupart des projets d'embouteillage, peu importe l'usage qui en est fait, que ce soit l'eau potable, l'abreuvement des animaux, l'irrigation, la pisciculture, le lavage des légumes, la géothermie, les usages industriels, etc. Ce projet de règlement oblige la détermination de périmètres de protection autour des ouvrages de captage alimentant les réseaux d'aqueduc. Donc, c'est la protection du public qui est visée. Troisièmement, il précise des normes de distance à respecter par rapport aux installations septiques des résidences isolées. Il prévoit aussi des analyses d'eau obligatoires pour tout nouvel ouvrage de captage au Québec, et ce, à la fois pour protéger le public mais en même temps pour augmenter les connaissances sur les eaux souterraines, dont les hydrogéologues ont tellement besoin. Ce futur règlement prescrit des normes de construction particulières – comme, par exemple, la cimentation des tubages de puits – pour les ouvrages de captage aménagés dans les secteurs les plus vulnérables – comme le roc à moins de trois mètres de la surface – afin d'éviter des cas de contamination bactériologique comme à l'île d'Orléans.

Donc, ce projet de règlement a déjà franchi toutes les étapes d'approbation au ministère de l'Environnement et de la Faune. Il a été soumis à de nombreuses consultations et a fait l'objet d'un consensus auprès des différentes parties impliquées, soit l'Association des eaux souterraines du Québec, donc les foreurs et puisatiers, l'Union des municipalités du Québec, l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales, l'UMRCQ, l'Union des producteurs agricoles, l'UPA, etc. De plus, il a reçu l'appui du ministre des Affaires municipales, du ministre de la Santé et des Services sociaux, du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec. Il a été présenté lors des deux sessions d'information publiques qu'à tenues le MEF, en mai 1996, sur le projet de politique de protection et de conservation des eaux souterraines. Il a été soumis au Secrétariat à la déréglementation en 1997, et les autorités de ce Secrétariat ne le retiennent plus depuis quelques mois. Il a été présenté le 27 novembre dernier au Conseil des ministres.

(16 h 40)

Donc, en conclusion, RÉSEAU environnement presse le gouvernement de retirer son projet de loi n° 405 parce qu'il est inefficace et ne vise qu'une très faible portion des eaux souterraines sans réellement améliorer la protection de la ressource. Par contre, compte tenu que les eaux souterraines constituent un patrimoine naturel que l'on doit respecter, que le projet de règlement sur le captage des eaux souterraines est conforme à l'article 46 de la Loi sur la qualité de l'environnement, qu'il contient un volet de protection beaucoup plus englobant que le projet de loi n° 405, qu'il vise l'ensemble des usages de l'eau souterraine, qu'il a franchi à ce jour toutes les étapes de consultation, qu'il a fait l'objet d'un consensus auprès des diverses parties impliquées, donc RÉSEAU environnement demande que le projet de règlement sur le captage des eaux souterraines fasse l'objet d'une prépublication dans la Gazette officielle du Québec dans les plus brefs délais.

Donc, pour résumer un peu notre position, si on regarde le débat sur l'eau, il y a l'eau de façon globale; les eaux souterraines, c'est un milieu où toutes les choses se tiennent. Depuis 10 ou 15 ans, le gouvernement a bien fait son travail. Il y a eu des études de fond qui ont été faites sur la quantité et la qualité de l'eau. Les politiques sont des politiques sages. Les règlements sont adaptés, ont reçu toutes les approbations. Donc, c'est le temps de passer à l'action. Comme hydrogéologues, sachant que les pratiques actuelles sont dangereuses pour une bonne partie de la population – les mauvais aménagements de puits – et que les outils existent pour régler cette situation-là, donc on s'étonne que l'étape suivante ne se fasse pas tout de suite. Et, au lieu de faire un moratoire, on presse le gouvernement à pousser un peu ce nouveau règlement là.

D'autre part, en regardant ce qui s'est discuté tout à l'heure, il semble bien que la panique sur l'eau embouteillée, c'est un problème de médias, qu'il existe énormément de chemin à faire au niveau de l'information au public. Je crois aussi que les ressources internes du ministère de l'Environnement ne sont pas suffisantes pour informer adéquatement toute la population. Donc, si j'avais une recommandation à faire aussi, c'est de jeter un coup d'oeil favorable sur cette section, qu'on appelle la section des eaux souterraines, qui est gravement sous-alimentée au niveau des ressources. Quand j'étais étudiant, en 1968, il y avait un secteur des eaux souterraines où il y avait des foreuses, il y avait des gens qui allaient sur le terrain un peu partout, qui faisaient de la cartographie, etc. De nos jours, je pense qu'il reste seulement quatre ou cinq personnes qui sont responsables de l'ensemble de tous les dossiers, donc ce qui est anormal pour une ressource qui est si importante et si riche de potentiel pour le futur. Merci.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. Gélinas. M. le ministre.

M. Bégin: Mme Auger, M. Gélinas, merci beaucoup. Je vais juste reprendre peut-être au passage ce que vous venez de dire en terminant. Il y a eu une période faste où on a dépensé beaucoup d'argent, on est aujourd'hui dans une période où on doit payer un peu pour ce qu'on a fait, et je ne sais pas où est exactement l'équilibre entre cette grande période faste et le moment où on a à se resserrer la ceinture pour être capable de rencontrer nos obligations.

J'ai écouté avec attention et, surtout, j'ai regardé votre mémoire, et je vous avoue que je me trouve un petit peu devant un dilemme qui est le suivant. Vous nous dites: «Que, tel que proposé dans le projet de politique de protection et de conservation des eaux souterraines du gouvernement du Québec, le statut juridique des eaux souterraines soit modifié pour en faire un bien collectif, au même titre que les eaux de surface», un. D'autre part, vous nous dites: Nous voudrions que le projet de règlement soit publié, prépublié, et qu'on le mette en vigueur. Troisièmement, qu'on exclue le projet de loi. Est-ce que vous ne pensez pas que le statut juridique de l'eau, comme vous le posez, c'est-à-dire de savoir si c'est un bien collectif et non pas, comme on le perçoit à date, au moment où on se parle, comme étant un bien privé... est-ce que vous ne pensez pas que c'est une grosse prémisse qui mérite une bonne discussion dans la population avant de conclure?

M. Gélinas (Pierre): En fait, c'est un drôle de débat. Le gouvernement se mêle des eaux souterraines comme si c'était un bien collectif, puisqu'on prétend le réglementer. On le voit un peu partout dans les interventions. Le ministère exige des certificats d'autorisation pour certaines activités de l'eau souterraine. Donc, l'eau souterraine en soi a été perçue dans le passé comme étant une ressource immobile, un peu comme du sable ou du gravier ou un minerai qui est en place sous terre. L'eau souterraine se déplace comme l'air, comme l'eau de surface, mais seulement plus lentement. Donc, la perception publique, c'est que l'eau qui est dessous notre terrain, c'est notre eau. En fait, c'est l'eau du voisin l'année passée, c'est l'eau du deuxième voisin il y a deux ans. Donc, c'est une ressource qui se promène.

Si le ministère veut réglementer en disant que x mètres cubes par année, 30 000 m³ par année, ou 50 000 m³, ou 100 000 m³... si on prétend mettre des chiffres, c'est qu'on considère que l'eau n'est pas uniquement l'eau qui est sous cette propriété-là. Donc, c'est de l'eau qui se promène un peu partout. De là à dire qu'on peut la déclarer comme bien collectif – je pense qu'il y a déjà eu toutes sortes de consultations qui ont été faites au niveau des ministères – ce n'est peut-être pas une supposition a priori, parce que le ministère peut quand même réglementer les usages de certaines ressources. Mais, à mon opinion, ça serait une bonne façon d'entrevoir une politique de protection et de conservation de l'eau souterraine, en disant que c'est le bien de tous.

Si on regarde les débats dans la population, les gens, curieusement, défendent leur puits comme si c'était leur eau. Par contre, lorsque quelqu'un touche à l'eau un peu plus loin, ils considèrent que c'est leur eau aussi. Donc, les gens considèrent à la fois que leur eau chez eux, c'est leur eau, et que l'eau de tout le village ou même du comté ou de la MRC, c'est leur eau aussi. Donc, dans ce sens-là, c'est plus une question de perception de la population qu'un problème réel.

M. Bégin: Je comprends, mais ce que vous nous dites, c'est que le statut juridique de cette eau souterraine devienne un bien collectif. Ce qui veut dire, pour que je comprenne bien, c'est le côté avocat chez moi qui l'emporte... si je lis ça, je comprends que l'eau devrait appartenir à l'État, puisque, et selon ce que vous me dites, déjà, il se comporte comme s'il était propriétaire, puisqu'il en gère la façon de la capter et de l'opérer. Et si on fait ça... je ne dis pas que je suis pour ou contre, je fais juste dire: Est-ce que ceci ne constitue pas un changement tel qu'il faille minimalement en parler ensemble – ensemble, c'est toute la collectivité québécoise – avant de s'en aller dans une direction? D'autant plus que je comprends que, sur cette base-là, on aurait adopté la politique, puisqu'elle serait à peu près dans ce cadre-là. Est-ce que vous ne trouvez pas qu'on s'en va dans un grand, grand débat, ou qu'on prendrait une décision au moment où il y a un très grand débat qui est en cause, et qu'on tirerait la conclusion avant d'avoir eu ce débat-là?

M. Gélinas (Pierre): En fait, il y a deux parties à la question. La politique de l'eau souterraine, c'est là où on discutait du bien collectif ou de l'appropriation de l'eau par l'État. Le règlement ne fait pas mention réellement de ça. Le règlement est plus technique et touche à des choses directes qui peuvent affecter les relations entre les citoyens d'un côté ou de l'autre. Je pense que le principal mérite du règlement, c'est de protéger la population. On disait tout à l'heure que les normes sur l'aménagement des puits... par exemple, la construction des puits, la cimentation entre le tubage et la formation, c'est probablement – si on voulait me permettre une image – c'est comme si on avait des tuyaux d'égout installés à chaque fois qu'on creuse un puits. Autrement dit, il y a un espace qui permet aux eaux de surface contaminées d'aller dans la nappe, puis, à ce moment-là, on permet ça. On sait maintenant que ce n'est pas bien. On sait qu'il existe des normes ailleurs. Tout ça fait partie du règlement. Donc, les parties techniques du règlement sur le captage des eaux souterraines, d'après moi, ne mettent pas en jeu la discussion qui va venir après.

Sur la politique de l'eau, je suis entièrement d'accord avec vous, il faut aller faire un débat public, parler de l'ensemble de l'eau. Mais je craindrais beaucoup qu'en voulant régler le problème de toute l'eau, y compris l'hydroélectricité, les bateaux, etc... dans 20 ans, on va être encore ici à se poser des questions, alors qu'il y a des urgences à certains endroits. Au niveau des eaux souterraines, l'ensemble des règlements et des interventions sont pas mal du même secteur. Les eaux de surface, les lacs, la navigation et l'hydroélectricité, c'est un autre bateau. Donc, je pense que, au niveau des eaux souterraines, on est rendu assez loin pour au moins faire des pas qui sont significatifs, qui vont protéger la population, qui vont protéger la ressource et, en même temps, je suis sûr qu'on va participer au débat sur la politique de l'eau. Mais je ne vois pas comment le moratoire ici peut affecter ce débat-là.

(16 h 50)

M. Bégin: Vous avez fait référence à ce qui se passait dans certaines régions où il y a eu un débat public pour le moins animé et vous avez mis ça sur le compte de, peut-être, un manque d'information de la part du ministère de l'Environnement. Tout à l'heure, un de mes collègues soulevait, et même je pense que le président ou celui qui présentait le mémoire précédemment, M. Rivard, faisait état aussi que peut-être l'industrie elle-même n'avait pas assez fait d'information. Il le disait en rétrospective, là, et je le voyais comme étant simplement un constat que peut-être, à l'époque – les choses, maintenant, sont connues – on n'avait peut-être pas mis assez d'information auprès de la population.

Mais est-ce qu'on n'est pas devant un constat très clair qu'au moment où ce moratoire a été annoncé il y avait, et là c'est à tort ou à raison, de la part de ceux qui participaient à ce débat-là – il ne s'agit pas de juger... est-ce qu'il n'y avait pas un climat tel que, quelle que soit la position, juste ou non, réglementaire ou non, on assistait à une polarisation dans la population telle qu'on allait vers un cul-de-sac, vers des affrontements tout à fait inacceptables dans une société comme la nôtre où on a à décider correctement, entre nous, de la conciliation des usages par différentes personnes de la même ressource? Est-ce que vous ne pensez pas que le climat dans lequel on était à ce moment-là faisait en sorte qu'on n'était pas capable de prendre ces décisions comme on doit et on veut les prendre en société?

M. Gélinas (Pierre): J'ai suivi avec intérêt tous les débats qu'il y a eu depuis un an et demi à ce niveau-là. Effectivement, il y a une panique dans la population. Ce qui est difficile à comprendre, c'est pourquoi il y a une panique, qui a semé la panique...

M. Bégin: Pourquoi elle a eu lieu.

Une voix: Pourquoi il y a une panique.

M. Gélinas (Pierre): Pourquoi il y a une panique? Qui a semé la panique? Je ne le sais pas non plus. Je sais que les médias, en période estivale, n'ont rien à faire...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gélinas (Pierre): ...donc ils s'empressent d'animer les débats.

M. Bégin: Disons qu'on va émettre ça comme une hypothèse.

M. Gélinas (Pierre): Disons.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gélinas (Pierre): Par contre, dans la population en général, personne n'a d'idée réellement c'est quoi, l'eau souterraine. On voit la forêt, on voit des arbres, on voit des lacs, on voit des marécages, on voit des rivières. L'eau souterraine, qui, au total, est à peu près 100 fois plus grand comme réservoir que tous les lacs, toutes les rivières, tous les fleuves du Québec, personne ne la voit, donc on l'oublie, on pense qu'il y en a un verre. C'est une ressource immense. On y touche à peine, on l'égratigne à peine en faisant ce qu'on fait. Actuellement, toute l'exploitation des villes... Tout à l'heure, quelqu'un a demandé une question: Est-ce que ça peut exister, 1 000 maisons sur un kilomètre carré qui s'alimentent par un puits? Prenez Cap-de-la-Madeleine, il y a 30 000 de population, il y a 30 à 40 puits, on alimente toute la ville à l'intérieur de 25 km² d'aquifère, et ça fait 40, 50 ans qu'on n'a pas vidé l'aquifère. Donc, si on pompe des millions de mètres cubes par année pour alimenter une population de 30 000 en pleine ville alors que la moitié est en asphalte, il y a des ressources immenses, énormes. Donc, ce dont on a besoin, c'est un contrôle un peu de ces ressources-là.

Quand je disais qu'au ministère on manque de ressources au niveau de l'information publique, ce n'est peut-être pas uniquement le ministère de l'Environnement. C'est l'ensemble des services gouvernementaux, disons, qui doivent expliquer aux gens de quoi il s'agit. Les universités sont responsables aussi, les cégeps, et éventuellement la population devient de plus en plus éduquée. Mais il y a une incompréhension totale. Puis, quand il y a incompréhension, bien, il y a panique. Prenons la vache folle. En Europe, on a tué je ne sais pas combien de millions de vaches parce qu'il y en avait peut-être une qui était contaminée. Puis on ne sait pas ce que c'est, mais ça fait peur. Pour l'eau souterraine, c'est un peu la même chose: quelque chose de pratiquement insignifiant quelque part, un petit captage qui, voisin d'un autre qui est à peu près cinq fois plus gros, sème la panique, alors qu'on ne voit pas pourquoi. Donc, si le débat est médiatique... des audiences publiques, ça va médiatiser ça. Je suis sûr, moi, qu'il va y avoir plus d'effervescence encore. Puis, s'il y a un BAPE, il va y en avoir encore plus, ça va prendre un an.

M. Bégin: Je vous avoue que vous m'étonnez par le dernier bout de votre intervention, en disant que plus on va informer le monde, plus l'effervescence va être grande. Est-ce que je vous ai bien compris ou bien si... C'est ce que vous dites?

M. Gélinas (Pierre): En fait, si on regarde ce qui s'est passé au cours de la dernière année, c'est un peu ça. Chaque fois que quelqu'un qui pouvait donner de l'information se prononçait, on dirait que ça soulevait encore... c'est un peu comme un caillou qu'on lance dans une mare d'eau. Le premier impact crée...

M. Bégin: Des remous additionnels.

M. Gélinas (Pierre): ...des groupes de citoyens qui se forment un peu partout.

M. Bégin: Alors, si je comprends bien, le fait qu'on veuille faire une grande consultation publique, ce n'est pas une bonne chose parce que ça va réveiller des passions. Est-ce que je vous caricature en disant ça?

M. Gélinas (Pierre): Non, bien, ce n'est pas ça que je voulais dire. En faisant une consultation publique, il ne faut pas polariser le débat. Moi, je suis allé, comme vous, au Symposium sur la gestion de l'eau...

M. Bégin: Malheureusement, j'étais à Kyoto.

M. Gélinas (Pierre): Oui, mais, pendant une partie en tout cas, il y avait un débat, pendant un avant-midi, c'était sur la protection des eaux souterraines, puis, finalement, il n'y a pas eu de discussion sur la protection des eaux souterraines, il y a eu un débat entre les opposants et les pour de l'eau embouteillée. Alors qu'une très grande partie de l'eau souterraine au Québec... des villes qui s'alimentent en ça n'ont pas eu un mot à dire. Il n'y a rien eu sur la gestion de l'eau souterraine à l'échelle des bassins. Il n'y a rien eu sur qu'est-ce que l'agriculture a comme responsabilité dans la préservation de la qualité de l'eau souterraine. Il n'y a rien eu de débat sur ça. Tout a été polarisé sur un tout petit point. Puis, si les débats sur la gestion de l'eau se polarisent dès le départ, finalement, on n'ira pas bien loin. Dans 10 ans, comme je disais, on va se retrouver ici encore puis on va toujours parler de la future politique de l'eau, alors qu'en fait il y a des connaissances qui ont été acquises, le ministère a fait son travail depuis déjà sa création, puis, avant ça, c'étaient les Richesses naturelles. Donc, vous devez, comme gouvernement, gérer de façon responsable.

Le Président (M. Lachance): Il reste deux minutes.

Mme Robert: Oui, une petite question.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Merci. C'est parce que, dans le cahier que vous nous avez donné, on parle beaucoup d'information. Effectivement, le débat est peut-être difficile, on manque d'information et on se fait donner des informations souvent différentes. Vous écrivez dans votre cahier, à la page 5: «Afin d'obtenir un portrait global des ressources en eau souterraine et pour connaître la meilleure façon de les gérer, il faut davantage d'études de marché, d'inventaires hydrologiques puis d'enquêtes sociologiques.» Donc, à l'heure actuelle, on n'a pas tout ce qu'il faut?

M. Gélinas (Pierre): On n'aura jamais tout ce qu'il faut. Ce qu'on veut dire par là, c'est un peu comme la forêt québécoise, on connaît l'ensemble de la forêt, on peut même, sur une photographie aérienne, faire le contour de la forêt. Pour les eaux souterraines, c'est un peu la même chose. On sait que toutes les roches, tous les sols contiennent de l'eau souterraine. Par contre, quelles sont les formations qui sont les plus prometteuses? Par exemple, si une ville de 10 000 ou 20 000 habitants veut s'alimenter en eau, il va falloir chercher un peu, trouver l'endroit où les graviers sont les plus épais, où la formation est la plus perméable, où l'eau est de meilleure qualité. Ce type de connaissance là, on ne l'a pas de façon systématique. Par exemple, je travaille sur un projet avec le COBARIC, la gestion par bassin de la rivière Chaudière; on n'a pas de ces inventaires-là. On a des inventaires des terres agricoles, on a des inventaires de la roche, on a des inventaires d'à peu près n'importe quoi, mais on n'a pas d'inventaires systématiques des aquifères ou des formations qui contiennent des eaux souterraines. Mais, partout il y a de l'eau souterraine. Si on creuse un puits, partout, il y a toujours de l'eau dans un tube. Mais, à savoir s'il y en a beaucoup, peu, moins, plus, de meilleure qualité, ça, on ne le sait pas de façon détaillée. Donc, c'est cette partie-là que la politique prévoyait, une politique des eaux souterraines faisait que le ministère de l'Environnement travaillait avec des MRC pour établir les inventaires de base qui permettaient de gérer cette ressource-là.

Le risque qu'on court actuellement... J'ai dit tout à l'heure que l'eau souterraine se déplace extrêmement lentement. Si on ne connaît pas ces ressources-là, on risque de la contaminer. C'est seulement dans 100 ans ou 50 ans qu'on va s'apercevoir que c'est contaminé. À ce moment-là, si on veut retourner en arrière, bien, c'est trop tard, il n'y a rien à faire. Ça coûte extrêmement cher, guérir plutôt que prévenir. Donc, la prévention passe par une connaissance des ressources, et, dans ce sens-là, on ne connaît pas assez bien nos ressources.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Merci, M. le Président. Moi, je tiens à vous remercier pour une présentation que j'estime à la fois raisonnée et raisonnable. Je veux revenir sur quelques aspects du mémoire, mais, au départ, je pense que je veux relever quelque chose que les autres ont dit, que, vous, vous avez repris, et c'est toute la question de la quantité des eaux souterraines disponible, la magnitude de la ressource. J'ai une crainte face à ça qui est qu'on s'installe dans une notion de: Mon Dieu! elle est tellement immense, cette ressource-là, puis il y en a tellement qu'on n'a pas besoin de se soucier plus qu'il faut de ça ou qu'on peut se permettre de l'égratigner ou de la grafigner, etc. Ce n'est pas ça que vous dites, au contraire.

M. Gélinas (Pierre): Non.

(17 heures)

M. Sirros: Au contraire. Et je veux tout de suite vous rassurer, je vois ça dans votre mémoire, que ce n'est pas ça que vous dites. D'ailleurs, c'est soutenu par la proposition que vous faites d'appliquer tout de suite le Règlement sur les eaux souterraines. Mais je veux juste soulever ça pour l'ensemble des membres de la commission, il ne faut pas qu'on se laisse entraîner dans une notion qu'on peut faire tout ce qu'on veut avec la ressource parce qu'elle est abondante. Et de là découle ce que je trouve très raisonnable, que, vous, vous proposez aussi, que les autres avant vous ont proposé, et d'ailleurs en provenance des embouteilleurs qui ont un intérêt, je dirais, à ne pas être réglementés, dire qu'ils sont pour l'application immédiate au règlement. Je pense que le ministre a gagné quelque chose, si ce n'était pas déjà fait. C'était probablement déjà fait, de toute façon.

Mais je veux vous remercier également pour la clarté de la séquence des étapes qui ont été franchies dans ce règlement. Et c'est peut-être sur ça que j'aimerais qu'on passe les cinq ou 10 minutes qui nous restent. Parce qu'il y a un débat. Le ministre l'a touché un peu tantôt en disant: Comme on n'a pas encore clarifié le statut juridique de l'eau, qui va être peut-être clarifié à l'intérieur d'un débat global, d'une politique globale, peut-être qu'on devrait attendre avant d'adopter un règlement qui peut-être différent selon le statut qu'on lui donne, si j'ai bien compris.

Mais est-ce que je me trompe en disant que, peu importe quelle forme la politique de l'eau globale va prendre ultimement, quand elle viendra, ça va nous prendre une réglementation sur l'utilisation des eaux souterraines? Sinon, on va accréditer la thèse qu'elle est abondante puis qu'on peut faire tout ce qu'on veut avec, puis on peut continuer juste à réglementer 1 % de l'utilisation.

Et, si c'est ça, quels problèmes verriez-vous, si vous faites un effort mental de trouver des problèmes à l'application du règlement tel qu'il est, dans le contexte où on n'a pas encore une politique globale et où on va en avoir une? Pouvez-vous identifier des problèmes à l'application du règlement?

M. Gélinas (Pierre): Est-ce que vous parlez du règlement qui n'est pas encore adopté?

M. Sirros: C'est ça, qui est devant le Conseil des ministres. D'ailleurs, c'est ça que je voulais aussi relever. Ça a passé toutes les étapes: consultations publiques devant le comité de déréglementation, approbation par les ministères les plus immédiatement touchés – ministère de l'Agriculture, ministère des Affaires municipales, etc. – devant le Conseil des ministres depuis le 27 novembre.

Alors, en fait, ce que j'essaie d'avoir de votre part: qu'est-ce qui peut retarder ce projet de règlement? Sans vous embarquer dans des considérations politiques, est-ce que, selon vous, il y a des problèmes qui découleraient – des problèmes réels, techniques – de l'application de ce règlement?

M. Gélinas (Pierre): Bon, je peux prendre les points un par un. Dans le règlement, on prévoyait, disons, demander des autorisations pour des captages de 30 000 m³ par année ou plus. Il n'y a rien de particulier. Ça permet au gouvernement, disons, de maintenir des inventaires, de connaître mieux la ressource. C'est un peu comme on prend des statistiques sur un ensemble de choses.

Obliger la détermination de périmètres de protection autour d'ouvrages de captage alimentant des réseaux d'aqueduc. Ça, c'est extrêmement important. Actuellement, je pense que c'est suggéré par les responsables du ministère, de toute façon. À chaque municipalité, on dit: Bon, vous n'êtes pas obligé; par contre, ça s'en vient et c'est dans votre intérêt. Par contre, le fait que le règlement ne soit pas là, on ne peut pas forcer quelqu'un à appliquer le périmètre ou encore le faire respecter. Donc, il y a un aspect qualité de la vie qui peut en découler.

Préciser des normes sur les installations septiques des résidences isolées. Il existe déjà des normes. Ça peut varier un petit peu par rapport à ce qui existait.

Prévoir des analyses d'eau obligatoires pour tout nouveau captage. Ça, ça peut, politiquement... C'est un peu comme si on forçait chaque nouveau propriétaire de maison qui se fait faire un puits à faire une analyse qu'il doit payer. Donc, il y a peut-être un élément... Ça veut dire probablement que, pour 50 $ ou 100 $, qui peut-être le coût d'une analyse, ça peut peut-être avoir un effet que certains ne veulent pas. En tout cas. Mais c'est pour la protection du public, aussi.

Prescrire des normes de construction particulières. Ça, d'après moi, c'était extrêmement important. Actuellement, il y a eu des enquêtes à l'île d'Orléans où la majorité des puits sont contaminés. On appelle ça de l'autocontamination, en voulant dire que ça vient de la fosse septique, ou du champ qu'on cultive, ou du voisin de l'autre bord de la rue. Donc, l'eau plonge directement d'un puits à l'autre. Finalement, disons, il y a une contamination générale de la nappe puis, en même temps aussi, des causes de maladie.

Ça, c'est facile. Techniquement, disons, aux États-Unis et ailleurs au Canada, ça existe depuis 50 ans, des règlements comme ça. Pourquoi on ne les a pas au Québec? Peut-être que certains des foreurs qui ne sont pas équipés ou n'ont pas l'équipement font pression, je ne sais pas. Je ne pense pas. J'ai parlé à des gens de l'Association des puisatiers, puis tout ça, puis eux autres sont parfaitement en faveur de ça. S'il y en a qui sont mal équipés, c'est leur problème. Donc, en fait, moi, je ne vois pas de problème particulier à l'application de ça. Probablement qu'il y a d'autres raisons que le ministre pourrait... Au niveau technique, d'après moi, il n'y a pas de problème particulier. Il y a eu des études de faites, par exemple sur la détermination des paramètres. Il y a des études en cours puis il y a des modèles qui existent; donc, on peut le faire.

M. Sirros: Donc, vous, vous vous expliquez mal, si je comprends bien, pourquoi cette inaction de la part du ministre et du gouvernement.

M. Gélinas (Pierre): Je sais qu'il y a eu beaucoup de consultations. Je ne suis pas au courant de tous les groupes avec lesquels un gouvernement doit composer, mais ce qu'il y a dans le règlement, c'est ce qu'on voit ailleurs, un peu partout au Canada puis aux États-Unis. Donc, peu importe la raison, d'après moi, on devrait aller de l'avant ou, s'il y a des points particuliers, expliquer pourquoi on ne peut pas aller plus loin.

M. Sirros: Votre proposition, vous la faites dans le sens de dire que, si jamais le règlement était en application, ça servirait à calmer tous ceux qui sont préoccupés, anxieux face à des projets de captage des eaux souterraines dans certaines municipalités, parce qu'ils auraient le sentiment de sécurité à l'effet qu'il y a un règlement qui gère ça, qui examine les distances, les volumes et tout ce que vous avez énuméré, et qu'à ce moment-là il y aurait un certain sentiment de sécurité face aux projets qui auraient été autorisés. Si je comprends bien.

M. Gélinas (Pierre): Même sans aller si loin, la modification qui a été faite à la Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments, déjà, l'article 46s a été modifié. Donc, le ministre peut exiger toute étude temporisée. Il peut appeler ça un moratoire, qui dure une certaine période, mais un moratoire effectif. C'est-à-dire qu'entre un moment où un dossier rentre pour examen puis le moment où il y a un certificat d'autorisation, ça prend, dans le cas des eaux souterraines embouteillées ou de projets majeurs, ça peut prendre plus qu'un an. Donc, en fait, le ministre a les pouvoirs qu'il faut pour réglementer, contrôler, répondre à la population, etc. Il n'a peut-être pas toutes les ressources en période de vache maigre, mais il a certainement les pouvoirs.

M. Sirros: Donc, vous ne m'éclairez pas plus que je ne l'étais avant sur le pourquoi de cette inaction, et je vous comprends. Alors, on reste tous comme ça. Au lieu d'agir, on décrète du surplace. Merci beaucoup.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, M. Gélinas et Mme Auger, pour votre contribution aux travaux de cette commission. On peut prendre cinq minutes, monsieur.

M. Bégin: Pas plus que cinq minutes.

Le Président (M. Lachance): D'accord. Alors, on va suspendre pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 8)

(Reprise à 17 h 13)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre! La Commission des transports va reprendre ses travaux. Nous allons maintenant entendre les représentants du Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec. Alors, je vous invite à bien vouloir vous identifier, s'il vous plaît.


Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec (RNCREQ)

M. Dépôt (Jean-Guy): M. le ministre, M. le Président, Mme, MM. les membres de la commission de l'environnement, mon nom est Jean-Guy Dépôt, je suis président du Conseil régional de l'environnement de l'Estrie et vice-président du Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec. Je suis aujourd'hui accompagné de mon confrère Alexandre Turgeon, qui est le directeur général du CRE de la région de Québec et également secrétaire du RNCREQ. Étant donné que j'ai un problème avec une petite grippe, je vais donner la parole à mon confrère.

M. Turgeon (Alexandre): Alors, bonjour. Le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec est un organisme reconnu par le ministère de l'Environnement et de la Faune, lequel lui confie le mandat d'être le porte-parole des orientations communes des régions, d'assumer un rôle de concertation, d'animation et d'information, d'offrir des ressources et un soutien aux conseils régionaux de l'environnement.

Le Regroupement national regroupe les 16 conseils régionaux de l'environnement actuellement reconnus au Québec. De façon plus spécifique, le Regroupement national a notamment pour objectifs de contribuer au développement et à la promotion d'une vision globale du développement durable au Québec, et de représenter l'ensemble des conseils régionaux de l'environnement, et d'émettre des opinions en leur nom.

Les conseils régionaux de l'environnement ont, quant à eux, le mandat de contribuer au développement d'une vision régionale de l'environnement et au développement durable et de favoriser la concertation de l'ensemble des intervenants régionaux en ces matières. Pour les années 1997-1998, les conseils régionaux de l'environnement comptaient parmi leurs membres 265 organismes environnementaux, 170 gouvernements locaux, 51 organismes parapublics ainsi que 250 corporations privées et membres individuels.

De façon plus spécifique, les conseils régionaux ont notamment pour objectifs de regrouper, représenter des organismes, groupes environnementaux ainsi que des organismes publics, privés, des entreprises, des associations, des individus intéressés par la protection de l'environnement et par la promotion d'un développement durable d'une région, et de favoriser la concertation et les échanges avec les organisations de la région, et d'assurer l'établissement de priorités et de suivi en matière d'environnement dans une perspective de développement durable.

Alors, tout juste avant le début des travaux du Symposium sur l'eau, en décembre 1997, le premier ministre du Québec annonçait l'imposition d'un moratoire sur le captage des eaux souterraines destinées à être commercialisées en bouteille pour les fins de consommation humaine. Or, le Symposium a démontré qu'il existe actuellement au Québec plusieurs préoccupations et questionnements concernant l'état de la ressource et de sa qualité, la question de l'embouteillage commercial ne constituant qu'une petite partie de la problématique globale, la justification d'un moratoire limité au captage des eaux à des fins de commercialisation.

Lors de la présentation de son projet de loi, le 25 mars dernier, le ministre de l'Environnement a justifié l'imposition du moratoire puisque la question du captage de l'eau à des fins commerciales soulève justement des politiques qui ne sont pas, je dirais, pertinentes pour les fins d'un débat serein. Nous croyons que cette volonté est légitime, mais nous avons d'abord tenu à mettre en contexte la source de ces inquiétudes.

Le Regroupement national comprend très bien les inquiétudes et préoccupations de la population à l'égard de la gestion de l'eau. Ces inquiétudes sont d'ailleurs clairement décrites dans un sondage Sondagem- Le Devoir publié tout juste avant le Symposium sur l'eau. Le Regroupement national croit que ces inquiétudes s'expliquent en partie par le manque d'information de la population sur l'ensemble de la problématique de la gestion de l'eau au Québec, et particulièrement à l'égard des eaux souterraines.

Lors de la synthèse du Symposium sur l'eau, André Delisle rappelait qu'il y a un besoin qui semble faire consensus entre tous les acteurs qui sont en cause dans cette problématique des eaux souterraines, c'est sur le besoin d'une politique de gestion qui propose les usages et qui encadre tous ces usages, et qui en fasse l'évaluation de leur potentiel par rapport à leurs impacts. Donc, une politique de gestion qui permette à tous de se faire une opinion sur la base de faits qu'on n'a pas pour le moment. Donc, conclusion à la fin du Symposium.

Il faut aussi ajouter, à la source de ces inquiétudes, la tendance gouvernementale à favoriser la déréglementation en matière d'environnement, à la désuétude de nombreux règlements en ce domaine, à la décroissance évidente du ministère de l'Environnement et de la Faune depuis les dernières années et, enfin, au faible niveau d'influence de ce ministère dans les orientations gouvernementales.

Il faut ici rappeler que la Loi sur la qualité de l'environnement est une loi dont la conception remonte à la fin des années soixante et dont les mécanismes d'intervention qu'elle prévoit sont devenus soit insuffisants, soit carrément dépassés ou inefficaces eu égard à la complexité des enjeux en matière d'environnement et de développement durable. Alors que de telles lois-cadres régissant l'environnement ont été réactualisées et révisées en profondeur en fonction des nouveaux enjeux plusieurs fois au cours des dernières années aux États-Unis, en Europe et ailleurs au Canada, le Québec travaille toujours avec une loi qui n'a jamais été révisée en profondeur depuis son adoption, en 1972. Enfin, la question de la propriété de l'eau soulève aussi beaucoup de polémiques en raison de l'accroissement de l'appropriation par l'entreprise privée d'une ressource qu'on croît encore collective.

Nous croyons qu'une intervention temporaire visant à mieux encadrer le développement de l'exploitation de la ressource d'eau souterraine est justifiée, dans l'esprit du respect du processus d'audiences publiques qui doit s'amorcer bientôt. Le Regroupement national croit toutefois que cette intervention ne doit pas viser uniquement l'apaisement des inquiétudes de la population à l'égard de l'usage de l'eau souterraine en bouteille par rapport aux usages dits traditionnels, soit domestiques, industriels et commerciaux, de cette même ressource. Le fait que les projets soumis avant le 25 mars soient exclus – et ici le ministre pourra nous corriger si on se trompe par rapport à quels projets sont soumis par le présent projet de loi: est-ce que les projets soumis avant le 25 mars au ministère de l'Environnement pour une demande de certificat d'autorisation sont exclus du présent projet de loi? – et que le moratoire ne s'adresse qu'aux projets d'eau embouteillée éloigne le législateur du but poursuivi: la protection de la ressource.

La question de la protection devrait ici porter davantage sur l'effet cumulatif de l'addition de toute nouvelle ponction sur la nappe d'eau souterraine. Ce n'est pas tant le pourcentage relatif à des usages qui soulève des inquiétudes, mais la concentration géographique de plusieurs usages et de l'effet possible d'épuisement ou de détérioration de la ressource. Dans le cadre de l'amorce d'un débat qui vise à élaborer une politique de l'eau, il importe de mettre en place des mesures afin d'éviter que certains ne profitent des vides juridiques et réglementaires et de l'absence de cette politique pour s'approprier des droits acquis sur la ressource.

À partir du moment où une société fait le choix de se pencher sur l'élaboration d'une politique de l'eau, il importe de différer les autorisations. Elles devront éventuellement être accordées sur la base de connaissances plus approfondies de la ressource et sur la consultation populaire à l'égard de sa gestion.

Un projet de loi favorisant la protection des eaux souterraines doit viser autant la sécurité des approvisionnements en fonction des différents usages et des taux de renouvellement que la qualité de la ressource pour le bénéfice des générations actuelles et futures. C'est pourquoi le Regroupement national propose d'étendre la portée du moratoire au développement de tous les autres usages de l'eau souterraine au Québec. Les embouteilleurs d'eau ne semblent pas être les plus grands utilisateurs de cette ressource, comparativement à d'autres secteurs d'activité qui dépendent étroitement de cette ressource. Parmi ces secteurs, on retrouve le secteur agroalimentaire, les piscicultures et autres industries.

(17 h 20)

Toutefois, il est important de rappeler que, au-delà des pourcentages d'utilisation globale, il est important, avant d'autoriser de nouveaux utilisateurs à utiliser la ressource d'une nappe d'eau, de regarder l'impact cumulatif qu'apportera ce nouvel utilisateur, un seul usage de trop pouvant compromettre l'approvisionnement des autres usagers.

L'équité commande donc que le moratoire soit étendu à tous ces secteurs, car, en plus de capter un pourcentage élevé de ces eaux, ces utilisateurs ne sont pas réglementés face au captage des eaux souterraines. Seuls les embouteilleurs sont soumis à une réglementation qui impose des études hydrogéologiques poussées avant d'obtenir un certificat d'autorisation. Si cette réglementation avait été imposée initialement afin de protéger le consommateur, puisqu'il s'agit d'un produit alimentaire, aujourd'hui, ce type de réglementation ne pourrait qu'être bénéfique si elle était appliquée à tous les grands captages d'eaux souterraines au Québec.

Enfin, nous tenons à rappeler que le mémoire du Conseil exécutif national du Parti québécois, Pour une politique globale de l'eau , souhaitait étendre la protection à tous les utilisateurs. «Il serait nécessaire, rappelait le mémoire, de prévoir un mécanisme de contrôle du pompage des eaux souterraines pour préserver les nappes phréatiques, et ce, autant pour l'agriculture, les entreprises commerciales que pour les industries.» Le Regroupement national recommande donc d'étendre la portée du moratoire à tous les utilisateurs de cette ressource.

Enfin, si le moratoire est décrété pour permettre la tenue d'un débat public dans un climat serein, ce moratoire doit prendre fin lorsque le débat sera terminé. Dans notre esprit, cette intervention conservera sa nécessité jusqu'à ce que le Québec adopte une politique ferme en matière de gestion de l'eau. Le moratoire doit par conséquent durer jusqu'à l'adoption de la politique par le gouvernement.

Nous sommes déjà au début de juin et le gouvernement ne s'est toujours pas prononcé ni sur la nature du processus du débat public ni sur l'échéancier. Conséquemment, proposer une date maximale d'adoption d'une politique au 1er janvier 1999 semble très irréaliste. La courte période maximale d'application du moratoire ne permettra pas, à notre avis, l'établissement d'un consensus suite au débat public annoncé et encore moins l'acquisition de connaissances suffisantes pour éclairer toute prise de décision en ce sens. Le Regroupement national propose donc de reporter la date de la fin du moratoire après l'adoption par le gouvernement de la politique sur l'eau.

Enfin, le Regroupement national tient à rappeler que le BAPE est le seul organisme apte à prendre en charge le mandat de tenir le débat public sur l'eau. Sa structure, son organisation, son expérience, son impartialité et sa crédibilité, tout comme la qualité de ses commissaires et analystes, le rendent incontournable. Le gouvernement actuel respecterait ainsi son engagement de soumettre les grandes politiques du gouvernement à des consultations devant le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. Je vous remercie.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. Turgeon. M. le ministre.

M. Bégin: Merci, M. Turgeon et monsieur... Pardon, j'ai oublié votre nom.

M. Dépôt (Jean-Guy): Dépôt.

M. Bégin: M. Dépôt. Alors, vous comprenez que vous allez dans le sens contraire de ce qui a été dit antérieurement par les deux autres qui se sont présentés ici aujourd'hui, qui étaient contre le fait d'un moratoire, en proposant, de votre côté, que ce moratoire-là, d'une part, soit élargi à l'ensemble de ceux qui font du captage d'eaux souterraines et, d'autre part, d'étendre dans le temps ce même moratoire là. Donc, on est vraiment en face de deux positions opposées.

Mais ce n'est pas là-dessus que j'aimerais porter votre attention, c'est plutôt sur la dernière page, page 6 de votre mémoire, deuxième paragraphe. Vous dites: «La courte période maximale d'application du moratoire ne permettra pas, à notre avis, l'établissement d'un consensus suite au débat public annoncé, et encore moins l'acquisition des connaissances suffisantes pour éclairer toute prise de décision en ce sens.»

Prenons une hypothèse à ce stade-ci, que le débat public ou la consultation sur l'eau commencerait en septembre et se terminerait en décembre, qu'il ne serait pas possible de prétendre que nous avons suffisamment de matière pour établir une politique de l'eau, en prenant pour acquis ce qui est déjà des choses exigeantes, qu'il y a un projet de politique sur la conservation des eaux souterraines et un projet de règlement qui a fait l'objet d'une large consultation. Est-ce que vous ne pensez pas que ce sera possible justement, compte tenu de la présence de ces éléments-là, d'avoir, oui, un consensus ou encore d'avoir suffisamment de matière pour prendre une décision?

M. Dépôt (Jean-Guy): M. le ministre, tant mieux si on peut le faire pour le 1er janvier 1999. Au rythme où on va actuellement, on craint qu'on ne sera peut-être pas en mesure d'aller si rapidement pour atteindre cet objectif-là. Nous avons eu le Symposium à la mi-décembre, puis on vient de recevoir les documents. Je comprends que vous avez eu des problèmes de santé, puis ça a peut-être retardé certaines choses, mais là le débat n'est pas encore amorcé, l'échéancier n'est pas encore fixé. Est-ce qu'on va avoir le temps de faire tout ça? C'est ça qui est un peu notre inquiétude, à savoir si on va pouvoir faire tout avant le 1er janvier 1999.

M. Bégin: Oui. Allez.

M. Turgeon (Alexandre): En fait, je pense que, si le Symposium a eu lieu, le Symposium devrait, on l'espère, émerger... pas du Symposium, pardon, mais du débat public sur l'eau une espèce d'orientation générale qui serait donnée par les commissaires qui vont rendre rapport suite à ce débat public. Donc, je pense que, lors du débat public, il risque d'y avoir des visions un petit peu contradictoires et on va devoir, à un moment donné, faire un peu confiance aux commissaires qui vont tenir ces audiences-là et à un moment donné dire: Ça, ça représente peut-être le plus juste équilibre. Et, ensuite, le gouvernement va devoir prendre acte de ce rapport-là et présenter sa propre politique. Mais, entre le moment du débat public, le rapport sur le débat public et la politique, il y a un temps...

Tant mieux, comme M. Dépôt l'a dit, si on est capables de respecter, mais, pour nous, c'est important que le moratoire ne prenne pas fin avant que... qu'on ne se retrouve pas simplement, au 1er janvier, alors qu'on serait probablement encore en attente d'une politique, à la même situation qu'on l'était il y a six mois.

M. Bégin: Je reviens à ce que ceux qui vous ont précédés à la barre ont dit précédemment, à savoir qu'ils considéraient, les deux considéraient que le projet de règlement était prêt, que la politique était prête, était suffisante et que, en fait, on devrait même l'imposer tout de suite et que ça atteindrait l'objectif visé. Se rappelant cependant que le moratoire n'est pas pour dire: Il faut absolument savoir qu'est-ce que nous allons faire, nécessairement, mais pour permettre qu'il y ait un débat serein sur cette question-là. Comment conciliez-vous ces deux choses-là? Est-ce que ça vous apparaît incompatible ou cohérent?

M. Dépôt (Jean-Guy): Nous, on souhaite un débat serein, comme vous le dites, le plus rapidement possible, puis on pense qu'il y a urgence. On a pris du retard. C'est un peu aberrant qu'au Québec on ait tant d'eau puis qu'on n'ait pas encore de politique pour la gérer. On a beaucoup d'eau, ça, c'est reconnu, mais, si on ne la gère pas bien, éventuellement, peut-être qu'on aura un problème de qualité. Nous, on souhaite que le débat ait lieu d'une façon sereine, comme vous le souhaitez, mais le plus rapidement possible, puis je pense que la population va être rassurée dès qu'on va pouvoir lui donner plus d'indications dans ce sens-là.

Le Président (M. Lachance): Oui, M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Merci, M. le Président. C'est intéressant, parce que le ministre a dit que vous êtes à l'opposé des groupes qui vous ont précédés. Je ne suis pas sûr que les deux positions sont opposées, si ce n'est qu'une englobe peut-être l'autre. Englobe. Vous, vous dites deux choses et très clairement: Le gouvernement a agi de façon précipitée avec le projet de loi n° 405 – je pense que c'est vos mots. C'est insignifiant, finalement, comme projet, comme tel, par rapport à la protection de la ressource.

M. Bégin: ...

M. Sirros: Ils n'ont pas... Non, non, non.

(17 h 30)

M. Dépôt (Jean-Guy): On est plus polis que ça, M. Sirros. Ha, ha, ha!

M. Sirros: Vous avez été plus polis que ça, mais, à la page 3, vous dites: «La décision gouvernementale semble avoir été précipitée.» Bon, moi, je dis que c'est précipité, et j'ai ajouté un peu un qualificatif, j'en conviens.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Sirros: Mais je ne pense pas que je suis très loin de ce que vous pensez au fond de vous par rapport à la protection de la ressource; quand on parle de 1 %, vous y revenez. Et vous suggérez, vous, un moratoire sur toutes les activités d'utilisation de l'eau souterraine, ce qui est cohérent et logique. Ç'aurait au moins la logique de ne pas traiter un groupe de façon inéquitable et discriminatoire, je dirais.

Par contre, on voit tout de suite que ça pourrait avoir un impact assez majeur au niveau de l'activité de développement économique, des activités économiques importantes, des investissements, des emplois, etc., soit au niveau de l'agriculture, soit au niveau de toutes sortes de choses. Et je comprends que nous sommes dans une situation, par rapport au problème précis qu'on essaie de régler avec le projet de loi n° 405, de manque d'information et d'inquiétude de la part de la population par rapport a des projets spécifiques de pompage d'eau dans son milieu. Le ministre, lui, il répond avec un moratoire juste sur les embouteilleurs. Ceux qui vous ont précédés disent: Pour apaiser ces craintes et pendant même qu'on évolue vers une politique globale de l'eau, appliquez donc le règlement sur le captage des eaux souterraines pour tout le monde. Ça, c'est quelque chose qui vous semble raisonnable comme point de départ, sans que ce soit nécessairement le point d'arrivée de la politique?

M. Turgeon (Alexandre): En fait, ce qu'il est important de regarder, c'est de voir que ce n'est pas tellement... Le discours sur les quantités, là, pour nous, c'est futile, parce qu'il peut y avoir une seule entreprise qui a un captage tout à fait marginal, en termes de captage au Québec, sur la quantité d'eau qu'il y a, mais ce captage-là peut être extrêmement problématique sur la nappe phréatique sur laquelle on veut le faire.

M. Sirros: D'accord.

M. Turgeon (Alexandre): Et ce captage-là, il peut être fait par des embouteilleurs, mais il peut être également fait par un autre usager à des fins commerciales. Et, pour nous, c'est pour ça que c'est important d'élargir la commande qui a été faite par le premier ministre alors que M. Bégin défendait nos intérêts à Kyoto, c'est important d'élargir la commande qui a été faite au niveau de ce projet de loi là pour bien englober... J'étais présent lorsque l'Association des embouteilleurs a parlé tout à l'heure, et vous avez même posé la question. Finalement, ce que vous dites, c'est uniquement que c'est inéquitable envers nous, que, si le moratoire s'applique à tout le monde... Nous, on pense que...

M. Sirros: Oui, mais ce que j'essaie de comprendre...

M. Turgeon (Alexandre): ...partout où il y a problème, ça devrait s'appliquer. Et on ne pense pas que le problème d'information au niveau des eaux souterraines se situe uniquement au niveau de la population, on pense que le problème d'information, il est généralisé. C'était même un constat à la fin du Symposium: Comment fonctionne le taux de renouvellement d'une nappe d'eau phréatique? Ce n'est pas pareil d'une nappe à l'autre, il y a différents facteurs, les études sont imprécises. Finalement, il faut y aller avec extrêmement de prudence dans cette question-là, il faut se donner des balises, il faut peut-être arrêter de juste régir par des quantités de captage. Au-delà de ça, c'est en vertu de l'article 22, au-dessus, on passe en audience publique. Ce n'est pas pareil d'une nappe d'eau à l'autre, il peut y avoir des problèmes selon l'endroit. Et c'est pour ça qu'on dit oui à l'aube d'un débat public sur cette question-là. On doit mettre les freins, on a le droit comme société. Je ne pense pas qu'il y ait des enjeux économiques qui sont tellement grands qu'ils ne nous permettent pas d'établir un moratoire et d'avoir un débat serein sur la question.

Combien d'erreurs sur le plan économique dont on doit aujourd'hui assumer les coûts? On a juste à penser à la décontamination des sols un peu partout au Québec. Je pense qu'il y a lieu d'être extrêmement vigilant pour ne pas arriver avec des pénuries pour les personnes qui sont actuellement des usagers. Que ce soient des agriculteurs, que ce soient des résidents, ces gens-là ont le droit...

M. Sirros: Mais est-ce que je peux vous ramener un peu sur ma question qui était de savoir: Advenant qu'un moratoire sur tout ne serait pas décrété, est-ce que vous seriez contre l'application, dans l'intérim, jusqu'au moment où on va poursuivre notre réflexion sur la politique de l'eau, du projet de règlement qui est devant le Conseil des ministres depuis le 27 novembre, au lieu de cette mesure complètement insignifiante? Vous parlez de mettre des freins, à un moment donné. C'est un peu comme si, à l'heure actuelle, on roule en voiture puis, pour arrêter, on ouvre la porte puis on met le pied dehors pour essayer de freiner la voiture. Voyez-vous, c'est complètement à côté de la track.

Est-ce que, au moins, ce ne serait pas plus raisonnable d'appliquer le règlement à tout le monde, même si c'était peut-être imparfait par rapport au niveau de nos connaissances à l'heure actuelle? Mais, au moins, ce serait équitable et ce serait un contrôle de l'utilisation d'une ressource applicable à tout le monde. Entre ça et un moratoire sur tout, est-ce que le compromis entre-temps ne pourrait pas être l'application du règlement?

M. Turgeon (Alexandre): Ça, on a trouvé que c'était une partie qui était extrêmement intéressante de la présentation de RÉSEAU environnement, la pertinence de mettre en vigueur le règlement sur le captage des eaux souterraines, surtout si on considère la lenteur que le Secrétariat à la déréglementation a pu amener dans ce projet-là. Maintenant qu'il a finalement, que cette instance que je qualifierais d'inutile a finalement laissé aller le règlement, s'il vous plaît, mettez-le en vigueur.

Est-ce que le règlement est suffisant et enlèverait la pertinence d'un moratoire uniquement sur les embouteilleurs? Je serais craintif à dire un oui immédiatement. A priori, je dirais, au pis aller, vaut mieux un moratoire sur une industrie qui peut causer des problèmes, même si on ne touche pas les autres industries qui peuvent elles aussi causer des problèmes, vaut mieux ça que rien du tout.

M. Sirros: Mais il vaudrait peut-être mieux une réglementation sur tout.

M. Turgeon (Alexandre): Oui.

M. Dépôt (Jean-Guy): Oui.

M. Sirros: Ce serait d'ailleurs même le Parti québécois qui serait d'accord, d'après ce que je peux lire: «Il serait nécessaire de prévoir un mécanisme de contrôle du pompage des eaux souterraines pour préserver les nappes phréatiques, et ce, autant pour l'agriculture commerciale et les industries.» Le mécanisme de contrôle, ce serait le règlement, si je comprends bien. Donc, ce n'est pas, comme le ministre disait, des positions complètement opposées.

Deuxième point de mon questionnement, c'est sur la notion du temps. Ça, ici, on nous dit que ça va finir le 1er janvier 1999. On nous dit qu'on l'adopte parce qu'il faut absolument avoir la paix dans ces coins-là pour qu'on puisse débattre de notre politique de l'eau. Et j'ai toujours compris, à moins que le ministre ait changé son fusil d'épaule, que la politique de l'eau, c'était une politique de l'eau globale – nappe phréatique, eau de surface – parce que finalement les deux sont pas mal interreliées, au bout de la ligne, c'est un ensemble.

Et, à moins que le ministre soit devenu faiseur de miracles, je vois mal comment, entre septembre – parce que l'été, je pense qu'on peut l'oublier pour ce qui est de ça – et décembre, on va réussir à faire tout le débat sur le statut juridique de l'eau. Qu'est-ce qui doit être mis dans une politique éventuelle de l'eau? Est-ce qu'on met la classification des rivières là-dedans? Est-ce qu'on met l'hydroélectricité là-dedans, l'utilisation qu'on fait de l'eau, etc.? Faire le débat, consulter le monde, analyser la chose, discuter entre élus, délibérer au gouvernement, adopter une proposition de politique, j'imagine, gouvernementale, tout ça à l'intérieur de trois mois, ça va être comme... Si c'est ça, c'est ridicule. Je vous le dis tout de suite, je n'ai pas d'autre mot pour le qualifier, ce serait bâclé, ce serait faire quelque chose juste pour dire qu'on l'a fait, mais insignifiant comme substance.

Et, si c'est ça, si ça ne peut pas être fait avant le 1er janvier, est-ce qu'il faudrait soit réextensionner un moratoire insignifiant ou... Pourquoi on adopte ce projet de loi, selon vous...

M. Dépôt (Jean-Guy): C'est pour ça que, nous, on suggère que...

M. Sirros: ...plutôt que quelque chose de raisonnable puis de...

M. Dépôt (Jean-Guy): C'est comme vous venez de l'expliquer, on suggère qu'on extensionne la date limite jusqu'à ce qu'on soit rendu à avoir adopté une politique, parce que, sans ça, si on n'a pas le temps... On ne gère pas toujours le temps comme on veut. Comme on l'expliquait tantôt, on a eu le Symposium en décembre. On devait avoir la documentation en février et on l'a eue mars puis, en fait, tout a été un petit peu retardé. Peut-être que le restant va être retardé, ça fait que prenons une précaution de plus pour dire: Bon bien, on fixe la date: quand on aura terminé, quoi.

(17 h 40)

M. Sirros: Ou on adopte le règlement à la place puis on vit avec le règlement tant et aussi longtemps qu'on n'a pas élaboré une politique. Quand on aura élaboré la politique, bien, on va voir s'il y a des ajustements à faire au règlement. Mais, entre-temps, on aurait une mesure de contrôle de toutes les activités. Ça, vous serez d'accord avec ça, vous?

M. Turgeon (Alexandre): En fait, ce qu'il faut voir: C'est quoi, le mécanisme transitoire pour assurer la protection sur une nappe? Nous, on pense que le ministère de l'Environnement n'a pas les outils actuellement et n'a surtout pas les ressources humaines pour gérer des dossiers ponctuels et pour être capable d'évaluer adéquatement s'il y a un problème avec un nouveau projet. Alors, si on n'est pas capable d'élargir le moratoire, c'est certain qu'il y a un vide, mais il reste que là où une industrie d'embouteillage veut s'installer, sur une nappe, ça peut causer des problèmes. Si le moratoire, ce n'est pas un mécanisme de transition... Si c'est un mécanisme de transition qui est trop fort, il faut peut-être voir c'est quoi, l'autre mécanisme.

On parle souvent du 1 % que les embouteilleurs prennent sur la quantité. Ce n'est pas avec 0,5 % du budget du gouvernement, avec des ressources constamment en décroissance, que le ministère de l'Environnement... Il n'y a pas suffisamment de fonctionnaires pour être capable de gérer ces dossiers-là. Il va falloir...

M. Sirros: C'est ce qu'on nous dit tout le temps.

M. Turgeon (Alexandre): Le ministère de l'Environnement, c'est un ministère qui est horizontal, qui couvre l'ensemble des activités gouvernementales. À un moment donné, il va falloir qu'on lui donne les moyens pour intervenir adéquatement dans l'ensemble des secteurs de l'activité qui sont appelés à réagir.

M. Dépôt (Jean-Guy): Si je peux rajouter. Nous, ce qu'on souhaite, dans le fond, c'est qu'on soit en mesure d'agir rapidement puis efficacement pour protéger la ressource. Comme on l'a mentionné tantôt, il y en a beaucoup, mais, tantôt, si on ne la protège pas correctement, si on n'est pas préventif, on peut arriver avec des problèmes. Déjà, on en a, des problèmes.

On a pris connaissance, entre autres, des trois documents bleus, que j'appelle, que le ministère de l'Environnement a produits sur la problématique de l'eau souterraine. On a constaté, entre autres, que dans les régions de Portneuf et de Lanaudière, bien, on en a déjà, des problèmes de contamination de l'eau souterraine par une surutilisation d'engrais, entre autres le nitrate, qui fait que, dans ces régions, on nous dit que la moitié des puits sont déjà contaminés par les nitrates. Là, c'est un petit peu inquiétant. La population a raison d'être inquiète.

C'est pour ça que nous, ce qu'on souhaite, que ce soit d'une façon ou de l'autre, c'est que le plus rapidement possible on puisse procéder à une meilleure gestion, autant de l'eau souterraine que de l'eau de surface. Parce que, moi, je suis de l'Estrie. En Estrie, 80 %, c'est de l'eau de surface. On a 11 lacs qui servent de réservoirs d'eau potable. Évidemment, il y a interconnexion, l'eau souterraine puis l'eau de surface, par résurgence, mais il faut le plus rapidement possible être en mesure de protéger ces réservoirs d'eau potable là.

M. Sirros: Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Alors, je remercie les porte-parole du Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec pour leur contribution.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 17 h 44)

(Reprise à 20 h 8)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des transports et de l'environnement poursuit ses travaux avec le mandat de procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 405, Loi favorisant la protection des eaux souterraines.

Alors, nous en sommes à entendre le groupe KAHNEKI:IO/O'NATUREL. Je demanderais aux personnes de bien vouloir approcher à la table des témoins. Je vous demande de bien vouloir vous identifier et d'identifier aussi les personnes qui vous accompagnent.


KAHNEKI:IO/O'NATUREL

M. Lachance (Daniel): O.K. I am talking on behalf of the group KAHNEKI:IO/O'NATUREL. Bryan, qui est à ma droite ici, a demandé si quelqu'un peut faire l'échange entre l'anglais et le français. Le fait que ça n'était pas disponible, la conversation, en partie, va avoir lieu en anglais et en français. Donc, je présente Bryan Deer, qui est du groupe KAHNEKI:IO, et moi-même, Daniel Lachance, du groupe O'NATUREL, Charles E. Jacobs, de KAHNEKI:IO, et Patrick Kerry, consultant pour le groupe Global Spring... O'NATUREL, KAHNEKI:IO. So I'll let Bryan make the presentation.

M. Deer (Bryan A.): Thank you, Mr. Minister, ladies and gentlemen, for the invitation to come here and speak with you. With that short notice... invitation only yesterday afternoon, so we are not quite as prepared as we had hoped.

(20 h 10)

We are here to inform you about our joint-venture into water industry. We formed this joint-venture in December of 1997. It is 51 % Native controlled. And we're here to inform you, because of your moratorium, here... We do not want the Native aspect to be forgotten or left on the side. My partner, Charlie, has a few more points that he would like to make.

M. Jacobs (Charles E.): O.K. Thank you, Minister, ladies and gentlemen. Reading the... it was translated to us in English and was sent to us, and it talks about the moratorium on the water, we try to understand, as a group, that you want to legislate a control on the water throughout Québec, and we feel, as a business, that we're going to be affected as a group. We're just a new-started business, but we have a unique structure in the water business. So myself and the group felt that it was important that we attended this meeting to find out more information on it, and that maybe a good understanding can come out of this meeting, for us and for all people in the business throughout Québec. So that's all I'm going to say for now. If there's any questions, we'll... Mr. Lachance will start.

M. Lachance (Daniel): As my partner just mentioned, tel que mes partenaires l'ont mentionné tantôt, c'est sûr, pour nous, l'importance de l'eau de source est aussi précieuse que vous la considérez en tant que ressource naturelle. Sauf que, comme Bryan l'a dit tantôt, nous n'avons pas reçu l'invitation bel et bien. On est ici ce soir pour des raisons... Mais, de plus, l'industrie de l'eau de source, nous aussi, en parallèle, on y tient beaucoup. Vous avez parlé tantôt des pourcentages d'eaux de surface et d'eaux en aquifères. On voit que le ratio, nécessairement, en proportion, c'est un pour quatre. Mais ce qui est assez surprenant, c'est que vous parlez beaucoup de légiférer l'eau et puis de faire des moratoires.

Moi, je suis de retour de la France. J'ai passé une semaine avec beaucoup de corporations, dont quelques-unes qui ont passé ce soir, et le groupe Danone, qui est situé en France, et le groupe Cristalline, qui est en France, et puis le plus gros problème, c'est au niveau des pesticides puis au niveau du contrôle qui n'est pas effectué, par rapport à avoir une réglementation sur les pesticides, qui justement endommagent les aquifères. Moi, je me posais la question justement s'il y a des législations par rapport à ça, avant de tomber à légiférer le domaine de l'eau, l'industrie de l'eau de source. Moi, je crois que ça devrait être une chose qui devrait être regardée de près. Parce que la France, ils ont pratiquement tous... en considération, ils ont tous endommagé leurs sources aquifères. Leur taux de nitrate est excessivement élevé. Donc, ce serait peut-être une alternative ou une possibilité, ici, pour les gens qui siègent ce soir, de comprendre peut-être qu'il peut y avoir aussi une implication au niveau de l'agriculture, puis de savoir justement jusqu'à quel point une législation qui fait foi des pesticides qui sont contrôlés par rapport à l'aquifère, qui est nécessairement endommagée à cause des pesticides...

Ça, c'est déjà une première étape, je pense, qui est à considérer avant de commencer à légiférer ou de dire que, nécessairement, il y a des lois qui devraient gérer l'industrie de l'eau de source. Je parle en général, aussi bien pour le gouvernement, aussi bien pour n'importe quelle autre personne qui serait impliquée dans le dossier.

Donc, tantôt, j'ai porté attention très clairement que ce n'est pas les sources qui manquent au Québec. La problématique n'est pas à ce niveau. C'est plutôt nécessairement au niveau de la gestion de l'eau et comment elle doit être gérée, l'eau. Moi, tantôt, ce que j'ai cru comprendre du docteur qui était ici – je ne me souviens plus – il représentait un groupe – j'en ai pris note ici – qui venait de l'Université de Montréal, RÉSEAU environnement, et puis ça n'a jamais été parlé nécessairement, des pesticides ou de ces choses-là qui endommagent nos ressources naturelles. Je crois que ça devrait être soulevé. Peut-être qu'il y a des gens chez vous qui pourraient nous répondre concernant justement la problématique, en France, qu'ils vivent actuellement. Donc, comme petit pays, ici, on a une ressource qui est à profusion. Nécessairement qu'il doit y avoir aussi des législations par rapport à l'agriculture et nécessairement préserver cette source qui est l'aquifère.

Donc, nous, notre rôle actuellement, c'est uniquement de venir ce soir pour vous dire qu'on a une entreprise qui est dans le domaine de l'industrie de l'eau de source. Et puis, que ça soient les embouteilleurs ou que ce soient les gens qui sont dans le domaine indirect, qui sont les spécialistes dans l'industrie, je crois que chacun a son rôle à jouer dans l'échange d'apprentissages de l'industrie de l'eau de source. Je crois que c'est un échange plutôt de... le respect vraiment de l'eau en soi: c'est quoi, l'eau, c'est quoi, sa richesse.

Donc, notre rôle actuellement ce soir, c'est juste de vous faire une présentation. Comme on dit, on n'a pas de mémoire ou quoi que ce soit. Comme je vous dis, c'est la question de temps et de circonstances, mais disons que notre présence, pour nous, c'était important. Et puis je pense que c'est important pour le gouvernement de voir qu'il y a des groupes qui peuvent amener aussi des expertises en parallèle de connaissances et des problématiques qui peuvent exister dans d'autres pays et qui ne veulent pas ou qui ne peuvent pas peut-être se répéter, si c'est bien fait. Donc, je tiens à vous mentionner que ça va se limiter probablement à cette présentation très petite en contexte, mais nécessairement qui dit beaucoup.

So I think I will complete with the fact that we are here and we appreciate the time that you gave to us tonight. And I think, roughly, it's about it. If you have any questions, we'll be...

Le Président (M. Lachance): Alors, merci. M. le ministre.

M. Bégin: Alors, je voudrais d'abord vous remercier d'être ici aujourd'hui pour faire votre présentation, même si vous énoncez qu'elle est quand même limitée. Pour le bénéfice de tout le monde, est-ce que vous pourriez présenter votre groupe, les objectifs qu'il vise et, par la suite, je pourrais... Je voudrais que vous le fassiez pour le bénéfice de tous les collègues qui, nécessairement, n'ont pas une connaissance parfaite de la langue anglaise. Juste le présenter. Par la suite, je reviendrai sur certaines questions ou commentaires que je pourrais faire par rapport à ce que vous avez énoncé.

(Consultation)

M. Jacobs (Charles E.): The reason why is to make an awareness that we, as Native people, in Canada and in Québec, are getting into the water business, the water-bottling business. We have plans in opening up a water-bottling plant in Kahnawake to create jobs, which are badly needed. We have a number of sources that we can work with. And right now, we are working on a source in Three Rivers. But the potential is there. There is a market out there, just as much as the next person. And to put – how would you say? – a quota on only who can work with water and sell it, we felt that, as Native people, we have a right to make the Québec Government aware of our actions now. And it's, say, a right as any Quebecker and any Native in Québec to work with it. That's our proposal.

M. Bégin: Alors, merci beaucoup.

Une voix: Il y a quelqu'un d'autre qui veut parler.

M. Bégin: Ah, oui!

M. Deer (Bryan A.): When we received our agenda, we noticed that there were no Native groups on the agenda presented. We were given an invitation, so we came here. It's better for the Québec Government to include Natives on an issue so important as water, which is esential to life, to include in sections like this before the law is passed, instead of having to deal with a situation that might be problematic after, as Mr. Sirros is well aware of. So, when we got your invitation, we came to let you know that there are Native companies who are going... we are one that is going to be involved in this. And any bylaw that you pass has to take that into consideration, because there are special conditions with that. Thank you.

(20 h 20)

M. Bégin: Très bien, ça va.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Bégin: Alors, je voulais dire tout à l'heure, peut-être, que, oui, il n'y a pas eu d'invitation particulière pour les groupes en particulier. C'est une invitation qui est faite à tous les groupes intéressés, et c'est ce qui a été fait. J'ai été heureux d'apprendre que vous vouliez être entendus. Donc, c'est une bonne occasion qui vous est donnée et qui nous est donnée d'entendre que les représentants de la communauté autochtone veulent mettre en place des entreprises qui concernent l'eau, et je pense que c'est extrêmement intéressant pour la suite des choses.

Cependant, quand on parlait de la protection de la ressource comme telle, par rapport, par exemple, à l'épandage de pesticides, il y a un long processus qui a été engagé au Québec depuis plusieurs années. Une loi a été adoptée concernant les pesticides en 1988, ça fait déjà 10 ans. Et nous sommes actuellement en consultation sur un règlement relativement à l'application des pesticides. Ça a été un processus très long, mais on espère être capable de terminer très bientôt cette consultation et, éventuellement, de publier le règlement.

C'est un fait qu'il faut protéger la qualité de cette eau, et je pense que vous avez raison de dire qu'on doit se préoccuper de cette qualité de l'eau, de la protéger. Ce n'est pas simplement parce qu'on ne la voit pas qu'elle ne peut pas être détruite, qu'elle ne peut pas être polluée, qu'elle ne peut pas être contaminée. Il faut donc prendre toutes les mesures nécessaires pour y arriver.

Ce pour quoi nous avons ce projet de loi aujourd'hui, ce n'est pas, à ce stade-ci, une question de qualité, mais c'est une question, plutôt... non plus de quantité, parce qu'on reconnaît, je pense, tout le monde, qu'il y a une quantité importante d'eau, avec toutes les nuances que l'on peut faire. Mais ce qui est important et ce pour quoi il y a un projet de loi, c'est qu'il y avait dans la population, dans certaines régions, un climat tellement agressif que les entreprises comme les gens qui étaient dans le milieu ne pouvaient plus se parler sur une base raisonnable, mais dans un climat d'affrontement, ce qui n'est pas, en toutes circonstances, une façon de régler les choses.

Donc, pour être en mesure de calmer le jeu, de faire en sorte que les gens se parlent plus correctement, nous avons jugé à propos de suspendre momentanément, pour une période très courte – on parle du 1er janvier 1999 – l'émission de nouveaux permis pour des nouvelles demandes. Parce qu'il faut savoir que tous les projets qui étaient déjà au ministère pour lesquels on avait fait une demande avant le dépôt du projet de loi ont le droit de recevoir une approbation positive s'ils rencontrent toutes les exigences du ministère ou du gouvernement. Les nouvelles qui ont été déposées après, évidemment, elles, sont l'objet du moratoire.

Alors, nous pensons qu'il est nécessaire de faire ça non seulement pour garder la paix, mais pour garder la paix pendant le temps où il y aura consultation. Et il faut savoir – je ne sais pas si vous en êtes informés – qu'il y a un débat qui a été entamé sur les questions de l'eau, non seulement pour les cas de l'eau souterraine, mais également un débat concernant la privatisation de l'eau; ça a été le cas pour la ville de Montréal. Il y a eu des cas d'exportation d'eau; c'est un projet qui a été déposé au Sommet économique. Il y avait donc différentes facettes de la question eau qui étaient soulevées en même temps. Il fallait, et nous pensons que, pour avoir un débat sur cette question-là, il est important d'avoir un climat serein. Et c'est pourquoi on propose le moratoire.

Donc, j'invite également votre groupe – et les consultations se feront bientôt – à se préparer pour faire valoir ses représentations à ce moment-là et avec une préparation peut-être plus longue que celle dont vous allez disposer aujourd'hui, pour faire valoir vos représentations sur un ou plusieurs aspects de la question de l'eau, parce que ça sera une discussion ouverte, générale, globale sur cette question-là.

Alors, voilà ce que je voulais dire relativement à ce que vous aviez mentionné tout à l'heure. Peut-être voulez-vous communiquer avec vos collègues pour leur dire l'essence ou l'essentiel de ce que je viens de dire.

M. Lachance (Daniel): Ça consiste en deux lois. C'est ça? Moi, je voulais juste vous mentionner que, concernant... Vous savez, l'industrie de l'eau de source au Québec est quand même très jeune. Moi, j'appuie beaucoup les embouteilleurs, le fait qu'ils ont une vision qui est le futur. Les vieux pays vont nous dicter le futur, mais on doit dresser la façon qu'on doit... ne pas faire les erreurs qu'ils ont faites, je crois que c'est ça, la décision.

Si vous parlez de problématiques qui peuvent être vraiment en partie solutionnées, vous savez, c'est simple, en soi. L'eau de source peut être pompée à profusion industrielle. Puis il y a de l'eau qui peut être tout à fait «immergente», qui vient de façon tout à fait naturelle, par la nature, puis qui peut être captée. Et cela peut être une définition comment on doit l'utiliser puis comment on doit la commercialiser à partir de la richesse qui est de base. C'est vraiment là qu'est la question. Parce que, pour avoir la meilleure personne qui pourrait décider, une eau qui part du point x, qui s'en va vers le point y, à qui elle appartient, les appartenances, ou quoi que ce soit, c'est des cours d'eau qui sont souterrains, pour faire les évaluations, comme monsieur a dit tantôt, ça prendrait des années avant de comprendre la complexité de tout ça.

Moi, je crois que vraiment il y a des façons de sauver des régions, quand vous parlez des populations qui pourraient être justement en question, tout à fait, qui ont le droit de poser ces questions. Sauf qu'il y a des endroits où on pourrait avoir de cette eau, qui est de la richesse, puis savoir comment justement la capter tout en respectant l'aspect agriculture et environnement. Et c'est la vision, je crois, de notre entreprise. C'est la vision qu'on s'est donnée comme entreprise et puis c'est nos valeurs qui précèdent l'industrie, la commercialisation. Donc, si la composante est respectée, vous savez, il y a une commercialisation qui peut se réaliser sans pour autant pénaliser des régions ou des populations. L'éducation, simplement par l'éducation puis connaître beaucoup plus ce qu'est vraiment la valeur de cette ressource, je crois qu'on est rendu à ce point.

Moi, comme je vous dis, ça m'est resté vraiment marqué de revenir de la France puis de voir jusqu'à quel point la France nous voit comme... Je vous parle de la France, en tout respect des autres pays de l'Europe qui sont aussi bien puis qui ont autant de charisme avec le Québec par rapport aux échanges d'affaires... Mais je m'aperçois qu'ils comptent beaucoup sur nous aussi pour partager cette expertise du respect de la ressource. Et je crois qu'il peut y avoir des échanges à ce point aussi dans le futur avec nos amis de l'Europe, parce qu'ils connaissent leurs problèmes, leurs problématiques sont énormes. En passant, ils sont insurmontables. De toutes populations, c'est non comparable à ici, au Québec, c'est une population qui est en accroissement continuel. Et puis c'est sûr que la pression des pays de ce type, avec la quantité de population, un jour, quelqu'un va venir cogner à la porte ici, ça, c'est évident. On ne doit pas non plus les repousser, mais peut-être justement faire une gestion. Une gestion, oui, ça se réalise par les intervenants. Je crois que c'est ça qui est le secret de l'eau, qui est la magie de l'eau, qu'on appelle l'or bleu.

Mais ce n'est pas fait pour tout le monde de comprendre. Je crois que j'ai des intervenants à côté de moi, qui sont à ma droite et à ma gauche, qui m'ont permis de comprendre beaucoup plus les valeurs de ce que vraiment on a comme eau, l'aspect précieux de l'eau. Et c'est ce qui a donné la fusion des deux, qu'on appelle, non autochtone et autochtone, et c'est ça qui en fait le succès actuellement. Donc, il y a tellement de possibilités, il s'agit juste d'avoir des gens qui ont une conscience sociale, c'est tout, une conscience de l'humanitaire, qu'on pourrait appeler aussi tout en même temps. Donc, je crois que c'est un peu notre mission d'entreprise.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Merci, M. le Président. À mon tour, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue. And thank you for taking the initiative to respond to a general invitation to come and talk about the bill that's presented. I just want to get a better feeling of the company at this point. Are you actually operating a bottling plant?

M. Deer (Bryan A.): No, we can't... No, we have contracted out right now.

(20 h 30)

M. Sirros: O.K. With the source being in Kahnawake?

M. Deer (Bryan A.): No, the source is just outside of Three Rivers.

M. Sirros: Outside Three Rivers. Is it operating, at this point? Are you in business or are you planning to be in business?

M. Deer (Bryan A.): No. We're in business right now.

M. Sirros: So you're not directly affected by the moratorium that's applied here, unless you want to set up a new...

M. Deer (Bryan A.): A new source.

M. Sirros: A new source. I guess what's interesting here is to get your views on some of the debate that's going on here. You understand where the moratorium is coming from, I assume? And you understand the issues that are involved here, with a lot of people saying: Why are you applying a moratorium on a specific industry when that industry really only uses less than 1 % of the subterranean waters? You're letting everybody else do whatever they please, and you're using this law under the pretext of the need to have a discussion and a debate in a serene environment about what we're going to do with our water resources.

One thing I hear you saying is that you want to participate in that debate, for one, and to bring your perspective to the issue of water management, which, I think, will be a welcomed thing, because, it doesn't matter if you're Mohawk, French, English, Greek, or whatever, water, we all need, so I'm sure we can come to some understanding of the need to protect and manage it properly.

And one of the things that was proposed this morning by two groups and accepted by the third one that came here, and I'm wondering where you stand on this, is: Instead of applying a moratorium specifically on companies that are bottling water, why not adopt a set of rules, a regulation that would insure that everybody follows everybody, including agriculture, fish, you know, everybody that uses subterranean water would follow a certain set of rules designed to protect the resource and apply that as of now, while we discuss the larger issues of water management, as opposed to doing this, which would stop you, for instance, from getting another permit to set up another bottling plant somewhere else, if you had another source that you wanted to tap into, at this point? What would be your views on that?

M. Deer (Bryan A.): I don't know. I see the possibilities of something along those lines. But I think a more important issue is not who's taking subterranean water, but the companies and industries that are putting...

M. Sirros: Stuff in.

M. Deer (Bryan A.): ...stuff in, polluting our environment. There should be more emphasis on stopping that than worrying about 1 %, or whatever, coming out of the ground for the bottling industry.

M. Sirros: So, you're more concerned about the laws that are governing the larger environment and how that affects the water.

M. Deer (Bryan A.): Yes, the disposal of waste products that are just flushed into our water system now.

M. Sirros: You got specific concerns that you want to address?

M. Deer (Bryan A): Well, in some ways, I see... It's my personal opinion, I don't know if the rest of the group, here, shares exactly, but, with the moratorium... I see some dangers with putting moratorium on. To me, it seems like a stepping stone to tougher laws and possible taxation of subterranean water, including wells, as it is the case in Europe, where, if the local farmer wants to put another well on his farm to irrigate his fields, there's a meter put on and he has to pay for the amount of water that comes out. And I don't think the population in Québec, Native and non-Native, would allow that.

M. Sirros: We're not talking about that over here.

M. Deer (Bryan A.): I see this, the moratorium, as a stepping stone to go that way.

M. Sirros: O.K. So that's one reason you're saying the moratorium doesn't make sense to you.

M. Deer (Bryan A.): It shouldn't...

M. Sirros: It shouldn't be there. What should be there? What should we do vis-à-vis water and the use of subterranean water?

M. Deer (Bryan A.): I don't know. What my partner just said was basically what I'd mentioned before. We have to make sure that our water, our table water is not contaminated. So that even if waste disposal, and agricultural run-off, and pesticides are reduced, our water, even in the lakes and everything, can clean itself, can become purer.

M. Lachance (Daniel): The basic problem in Europe, if you went in Europe... We don't have to explain it here, I think, if people traveled, normally... If they stayed only here, they don't understand what we are talking about. But mainly, you must understand that in Europe the population growth is completely different from here. The sources were tremendous. It's not because the resources were not in good condition. The fact that they were dumping pesticides for the last years... Years, I am talking of maybe 350 years, 400 years... And there is no way that you can go 40 or 60 feet down, and you would have to take practically all the terrestrial... France or Britain, to clean up everything is theoretically impossible. Practically, you have to pick up you baggage and leave, and go to live somewhere else on another planet.

So, basically, what I feel should be done is... Moratorium, I don't personally believe in it. The only thing I believe in is the fact that we have to pursue what Mr Bégin said before, the Minister Bégin, I have a great respect for that, continue and pursue the aspect of being a little bit more severe with the aspect of contamination of our aquifers. That should really be the goal of the Government. If really they want to protect the resource that is water, I think that should be the agenda of the Government. Be a little bit more strict, but...

M. Sirros: What about the authorization process for using subterranean water? And I am not just referring to bottling plants, but, I mean, we've got everybody that... Should there be an authorization process, should there be some mechanism to...

M. Lachance (Daniel): Yes. They could be people like... in the industry. There are meetings, there are people involved in the aspect of the «gestion», we call. Why don't you put a committee, and people that have the professional intention of protecting the sources... First of all, if you do it this way, you have not the population against you. People will be happy taking their own water, not taxed or have their own meters on. First of all, commit yourself to the biggest mass of the population. The rest, after, it's the bottlers. They're allowed to do the business, and I think they're allowed also to continue and pursue their activities. It creates employment, it creates interaction with other places in the world, where we become really... I am not talking only about the Liberal Party or the Québec Party or the Mohawk side, I am talking really as a vocation of what should be a resource. Because, if it is done that way, under the respect of an agreement, I think it would be the best for everybody, every party. That's the way we see it in our group, and that's the way...

M. Sirros: Let me turn it around in another way. Should anybody who feels like it, because they own a piece of property that has water underneath it, be able to do whatever they want in terms of pumping out the quantities of water they want? I just want to understand, that's all.

M. Lachance (Daniel): Mr Sirros, there are already laws that are in place right now that give the possibility to someone who wants to go in this industry. And it's not meant for everybody to be in the industry. It's very complex, as could be water.

M. Sirros: The problem is that, right now, from what I understand, the only use of subterranean water that requires some kind of authorization is if you want to bottle it to sell it. But if you want to build a well to pump out however much you want, to water your fields on which you've pourred pesticides, or whatever, or if you want to sort of raise fish in a tank, or if you want to put it in a bottle where you add a little bit of color to it and send it out as juice or whatever, you could do that without any authorization.

M. Lachance (Daniel): No, I am sorry. There is legislation in place right now, where there are certain groups or parts of the Government that... You have Agriculture Canada that is implicated. You have the MAPAQ that has «réglementation». So, you know, it's not meant for everybody, O.K.? As simple as you think water is, it's not as simple as the industry is.

(20 h 40)

M. Sirros: I'm not sure we're understanding each other, but...

M. Lachance (Daniel): It's like, tomorrow morning, you would like to start to grow apples.

M. Sirros: Yes.

M. Lachance (Daniel): If you know nothing about the apple business, I would consider yourself...

M. Sirros: But I know a lot about taking out water. What I'm trying to say is that, if I understand it correctly, and I think I'm right about this...

M. Lachance (Daniel): I don't understand your question, sorry.

M. Sirros: Yes. Right now, if I wanted to build a well on a piece of land that I own and there is water underneath, I can build the well, put in a pump and pump out all the water that I feel like, in whatever amounts, so long as I'm not bottling it to sell it. Is that right for you? Do you agree with that? Or should there be somebody that checks that, because it's water, in fact, that belongs to everybody? I guess I'm just asking: Is that O.K. with you? And if, next door to me, somebody wants to go and open up a plant, to put in a well, to take out the water, to bottle it, he can't do it unless he says: O.K.

Une voix: ...

M. Sirros: Which I think is all right. In fact, I think he should be saying – he or, soon, somebody to replace him, I hope... Joke, joke, just...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Sirros: Serious joke, anyway. You know, I hope that, in fact, anybody who wanted to use that should get some kind of authorization, that should depend on an analysis that's done by people, scientists that understand, you know, what the impact of taking out that water is going to be, that regulate the quality of the water.

And it doesn't even matter to me if you're using it because you want to bottle it or if you're using it for some other purpose, there should be a uniform regulation, I think, that applies to everybody, not just to one group. And I guess I'm asking: Do you agree with that or do you think it should just apply to one group?

M. Deer (Bryan A.): I think, the way you just put your story forth...

M. Sirros: O.K.

M. Deer (Bryan A.): ...that there should be some guidelines or regulations across the board, not just to affect bottling industry for selling spring water.

M. Sirros: Good. Second question: Are you aware of the regulation, the proposed regulation – it's not in force – that is sitting with the Government for the last six, seven months, that deals with this, but has not been enforced? Are you aware of the existence of that?

M. Deer (Bryan A.): Parts of it, yes.

M. Sirros: O.K. And would you agree that it be put into force to apply to everybody? And I'm not asking if you approve all the elements of it, because, you know, I don't think that...

M. Deer (Bryan A.): What I said, some...

M. Sirros: The general idea, you say: Yes, there should be some kind of rules, if I understand you correctly.

Le Président (M. Lachance): En concluant, M. le député.

M. Deer (Bryan A.): I don't know exactly what's on your table now, but I think perhaps there should be some sort of guidelines, like I said, across the board.

M. Sirros: En d'autres mots, c'est le quatrième groupe qui nous dit: Qu'on applique le règlement. Thank you very much.

Le Président (M. Lachance): Ça va?

M. Sirros: I'm told I've got to stop.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Limoilou. Je signale qu'il reste...

Des voix: ...

M. Sirros: It seems that we've run out of time.

Le Président (M. Lachance): Je signale qu'il reste trois minutes...

M. Rivard: Trois minutes?

Le Président (M. Lachance): ...au parti ministériel.

M. Rivard: Ça va être plus court que ça. I learned from Mr. Jacobs that, in France, they have some meters on wells. Is it right?

Une voix: On the Rhine.

M. Lachance (Daniel): Yes.

M. Rivard: And where do we have to pay for this water? To the municipality, the region, or the country?

M. Lachance (Daniel): That's very complex in France, as much as France is complicated. I think the best: you would have to call in France and ask the proper people to answer these questions. There's Générale des eaux, you can call, Lyonnaise des eaux, and they will be able to answer all these questions.

M. Rivard: O.K., merci.

Le Président (M. Lachance): D'autres interventions? Ça va? Alors...

M. Bégin: Merci beaucoup.

Le Président (M. Lachance): ...merci pour votre participation, votre présence ici ce soir.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Lachance): Alors, nous allons maintenant entendre le représentant de l'Union québécoise pour la conservation de la nature, que j'invite à prendre place à la table, M. Denis Bergeron. Alors, bienvenue, M. Bergeron. Vous avez 15 minutes pour nous livrer votre message avant la partie prévue pour les échanges.


Union québécoise pour la conservation de la nature (UQCN)

M. Bergeron (Denis): Alors, je remercie la commission d'entendre l'Union québécoise pour la conservation de la nature. Alors, brièvement, l'UQCN est un organisme environnemental qui existe depuis près de 20 ans. Il regroupe près de 3 000 membres individuels et regroupe également plus d'une centaine de groupes affiliés, à la grandeur de la province de Québec. L'UQCN publie plus précisément le magazine Franc-Vert , et nous nous occupons aussi de l'Écoroute de l'information, sur Internet.

Alors, considérant que c'est une oeuvre collective que je vais vous présenter et que je suis le seul représentant de l'organisme ici, je plaide la diligence de la commission quant aux éléments de réponse que je pourrai fournir après la présentation.

Alors, les différentes nappes hydrographiques souterraines du Québec sont encore relativement peu connues. La qualité à l'état naturel des eaux souterraines, l'influence de la qualité des eaux de précipitation sur celle des eaux souterraines, l'impact des activités humaines sur les aspects qualitatifs et quantitatifs de la ressource et les conséquences sur le réseau hydrique et les écosystèmes sont tous des éléments dont nos connaissances sont soit insuffisantes ou alors peu documentées. C'est, grossièrement, le constat qui est fait dans le document La problématique des eaux souterraines au Québec publié en avril 1996 par le ministère de l'Environnement et de la Faune.

Alors, c'est pour ces raisons que le plan d'action pour la mise en oeuvre de la politique – toujours du ministère – prévoit la préparation d'un certain nombre de guides, dont le guide des essais de pompage et de leur interprétation, le guide sur la cartographie hydrogéologique, le guide sur la détermination de la vulnérabilité des eaux souterraines, le guide sur la classification des eaux souterraines, pour développer des outils d'aide à la décision, ainsi que certains logiciels d'aide à la gestion, des logiciels de délimitation des périmètres de protection, des logiciels d'évaluation des risques de contamination et de simulation des systèmes hydrogéologiques permettant d'évaluer les impacts.

Cependant, ces guides ne sont pas encore disponibles, et les outils d'aide à la décision font cruellement défaut à ceux qui doivent aujourd'hui faire des choix lourds de conséquences pour l'avenir. On peut lire, à la page 50 du document du MEF intitulé Le plan d'action , au chapitre des guides des essais de pompage et de leur interprétation: «Le contexte hydrogéologique particulier d'une région doit être pris en compte d'une façon convenable, particulièrement lors du choix et de l'interprétation de la méthode d'interprétation. Il n'existe pas une recette passe-partout. Or, trop souvent, les essais sont réalisés selon quelques méthodes courantes appliquées, de surcroît, avec un certain manque de rigueur.» Plus loin, au chapitre du guide sur la détermination de la vulnérabilité des eaux souterraines, on lit encore: «Bien qu'il existe diverses méthodes de délimitation de la vulnérabilité des eaux souterraines, aucune ne fait consensus pour prétendre au rôle de méthodes privilégiées applicables à une gestion conséquente du territoire québécois.»

Alors, apparemment, tous ces guides ne sont pas encore prêts, et actuellement, les demandes d'autorisation sont traitées en vertu de l'article 32 de la Loi sur la qualité de l'environnement pour l'établissement d'une prise d'eau pour l'alimentation d'usines d'embouteillage. Elles doivent respecter les conditions de la Directive relative aux conditions de production et de distribution des eaux embouteillées et des eaux vendues au volume ainsi que de son guide d'application pour l'examen des projets de prise individuelle d'eau commerciale.

Dans un cas que nous avons analysé, la lecture d'études hydrogéologiques déposées dans le cadre d'une demande a permis d'y relever des constats surprenants et inquiétants à plusieurs égards. Ces constats portent sur le respect des obligations de la directive du MEF et révèlent une connaissance insuffisante de l'aire d'alimentation de l'aquifère, une prévision incomplète de l'aire d'influence, avec, en perspective, des conflits d'usage et des impacts environnementaux insoupçonnés. La portée estimée de l'aire d'influence de l'actuelle réglementation et celle du projet d'étude correspondraient-elles à la réalité ou pas?

(20 h 50)

Au sujet de l'aire d'alimentation, comment prévoir l'interférence avec d'autres captages et les conflits d'usage? Actuellement, la réglementation et le projet à l'étude ne permettent pas de définir avec précision l'aire d'alimentation, de définir le sens exact de l'écoulement de la nappe et des impacts sur les usages voisins. Durant les essais de pompage de 1996 sur le cas à l'étude, les puits des citoyens avoisinants ont été affectés dans un rayon bien supérieur à 1 km proposé par la directive et avec des conséquences permanentes. Le puits d'un des citoyens affectés se trouve à 1 500 m, mais nulle part ce conflit d'usage n'a été mentionné dans le rapport initial. Ce n'est qu'après coup suite à des plaintes, qu'on a admis que le puits en question avait été et sera encore affecté par le captage. Combien d'autres puits seront affectés et jusqu'à quelle distance le captage créera-t-il des impacts? Le rapport ne le prévoit pas avec certitude, comme l'exige la directive du MEF.

Alors, on pourrait ajouter aussi à ces inquiétudes une autre dimension aussi importante à nos yeux. Certains projets se sont amorcés dans la controverse et divisent dramatiquement les populations locales. Toutes sortes d'affirmations ont circulé sans qu'aucune n'ait été vérifiée. Les unes promettaient des centaines d'emplois, les autres des investissements faramineux. On a fait signer une pétition sans offrir de garantie formelle. Dès lors, qui refuserait la promesse d'un projet de plusieurs millions et l'attrait d'un emploi?

Cependant, les citoyens dont les puits ont été affectés... d'autres craignent de compromettre la vocation agricole de leur territoire. D'autres, enfin, sont surpris de devoir accorder un droit de regard à l'entreprise sur tout autre éventuel projet à proximité du leur. Certains, donc, s'opposent à la façon cavalière avec laquelle on autorise les projets, d'où la nécessité d'un moratoire pour discuter sereinement des nouvelles manières de faire. Il ne faut pas que le débat médiatique tienne lieu d'information, mais que la population se penche sur des faits. Sans la possibilité d'un débat serein à une tribune neutre, comment la population peut-elle se faire une opinion éclairée?

La population est laissée à elle-même parce qu'un vide juridique permet l'exploitation de l'eau souterraine sans débat public. La population est actuellement contrainte de faire des choix sans balises parce que les outils d'aide à la décision, les guides d'interprétation ne sont pas encore écrits. La population est abandonnée par les instances régionales du MEF parce que ces dernières se retranchent derrière des procédures et que les fonctionnaires ne se sont pas posés plus de questions qu'il n'en faut. Est-il normal que des citoyens soient obligés de faire à leurs frais le travail du ministère de l'Environnement et cherchent à sa place à protéger les ressources pour les générations futures?

Nous manifestons notre inquiétude devant la dégradation de la confiance des citoyens envers les agents régionaux du MEF et d'autres instances. Les agents du MEF ont tenté de convaincre les citoyens qu'il n'y avait pas de danger pour leur nappe d'eau et soutenaient que ceux-ci s'énervaient pour rien. Mais, comme le niveau d'eau est déjà affecté lors de simples essais de pompage et que les conséquences à terme ne sont pas documentées, les citoyens lésés y ont vu un signe que le MEF ne veut pas les défendre. Ils n'ont plus confiance en ceux qui devraient normalement s'inquiéter en leur nom de la protection de la ressource.

Nous signifions nos inquiétudes quant aux orientations actuelles du MEF en termes de conciliation et de priorisation des usages, les demandes de droit de regard des industriels et les possibilités de compensation. Le promoteur aurait demandé au conseil municipal un droit de regard sur l'attribution d'autres permis sur son territoire. Et les citoyens se demandent si la présence d'un projet ne devenait pas un frein au développement d'autres activités reliées à l'eau. Ils n'ont pas eu, non plus, une tribune neutre et indépendante pour en discuter. Quand et comment pourront-ils s'exprimer dans un climat serein?

Advenant que la nappe subisse une baisse significative et que les producteurs locaux deviennent lésés à leur tour, qui paierait pour corriger la situation? Si l'eau baissait pour tout le monde, le promoteur serait affecté également. Demeurerait-il capable de respecter ses engagements? S'il faisait faillite, qui, du gouvernement ou de la municipalité, compenserait les citoyens? Qui devrait fournir ainsi l'aqueduc, c'est-à-dire l'eau potable aux citoyens? Si l'eau devenait de moins bonne qualité, comment départager les responsabilités sans une étude au préalable qui fasse le portrait exact de la situation régionale avant l'implantation d'un projet?

Il faut savoir qu'à quelques centaines de mètres de là la municipalité d'Ormstown a épuisé sa prise d'eau par surpompage pour alimenter son aqueduc et qu'elle vient maintenant, elle aussi, s'approvisionner près de Dorea, dans le même type d'aquifère. Si l'eau diminuait et qu'il faille accorder des priorités d'usage, quels usagers seraient les premiers? Les réseaux municipaux, les agriculteurs, les industriels? Et, si ces derniers demandaient compensation, qui paierait quoi à qui?

Dans les circonstances, devant l'absence de grille d'analyse pour la priorisation des usages, seule une audience publique pourrait permettre de définir les meilleures conditions de gestion de l'eau souterraine. Les citoyens n'ont pas les moyens de faire seuls ce travail, et c'est le rôle du gouvernement de les protéger.

Alors, en conclusion, les éléments de préoccupation qui portent sur la gestion de l'eau souterraine au Québec sont: que l'état actuel des connaissances des aquifères est incomplet et insuffisant, notamment la capacité d'évaluer la vulnérabilité des nappes et de délimiter les aires d'alimentation; il n'y a pas de moyens de faire de surveillance des quantités d'eau prélevées lors de captage industriel, que ce soit pour l'embouteillage, la pisciculture ou l'agriculture; aucune mesure n'est prise pour mesurer les impacts sur les propriétés avoisinantes pour éviter les pertes et les conflits d'usage ou encore pour les compenser.

Les expériences passées soulèvent des inquiétudes au sujet de la capacité technique des élus locaux et régionaux à cerner l'ensemble des enjeux gouvernementaux reliés au captage industriel, dans un climat alimenté par des pressions politiques et économiques. La perte de confiance du public envers la capacité des représentants du MEF ajoute à l'inquiétude.

Dans les circonstances, devant l'absence de grilles de décision pour la priorisation des usages, nous croyons que seule une audience publique pourrait permettre de définir des meilleures conditions de gestion de l'eau souterraine au Québec. Les citoyens n'ont pas les moyens de faire ce travail, c'est le rôle du gouvernement.

Et c'est pourquoi, considérant que les documents déjà publics de support au projet de politique de l'eau ont démontré les lacunes des connaissances et les carences actuelles des outils de gestion de l'eau souterraine au Québec; considérant qu'un projet de règlement propose des modifications importantes pour une gestion plus éclairée de la ressource qu'est l'eau souterraine; considérant que les récents projets de captage d'eau souterraine illustrent les incertitudes quant à la protection de la ressource dans le contexte de l'actuel procédure et que ces incertitudes pourraient se traduire par des impacts environnementaux; considérant également qu'aucune étude régionale préalable n'a été réalisée pour permettre de départager les responsabilités advenant un conflit d'usage ou autres impacts environnementaux;

Nous demandons d'adopter le projet de loi n° 405 et d'étendre ce moratoire sur le captage d'eau souterraine à tous les projets de captage d'eau, sans discrimination, qu'il soient industriels, commerciaux, agricoles et municipaux, en attendant l'audience publique sur la politique de la gestion de l'eau; que le délai d'application de ce moratoire soit utilisé par le gouvernement pour réaliser une consultation élargie sous l'égide du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, tel qu'il s'est engagé à le faire lors du Symposium sur l'eau, à l'automne 1997.

Bien évidemment, à signaler également que la date de 1999, dans le projet de loi, évidemment, compte tenu des délais qu'on a actuellement, serait peut-être irréaliste, dans les circonstances. Je vous remercie.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. Bergeron. M. le ministre.

M. Bégin: Merci, M. Bergeron. Tout au long de la lecture, vous faisiez état de lacunes qu'on connaissait dans la façon de faire la gestion des eaux souterraines. Par contre, vers la fin, vous référez à la page 5, au projet de règlement qui propose des modifications importantes pour la gestion plus éclairée de la ressource qu'est l'eau souterraine. Je ne sais pas si vous vous êtes prononcé, à date, sur la suffisance de ce règlement-là ou/et sur la suffisance de la politique de l'eau qui a été élaborée au stade de projet au moment où on se parle, si vous avez pris connaissance de ces documents-là, si vous êtes satisfait. Et je vais vous poser une question, dépendamment de la réponse que vous pourrez me donner à cette question-là. Est-ce que vous avez pris connaissance du règlement et de la politique qui ont été élaborés ou du projet? Et, si oui, est-ce que vous en seriez satisfaits s'ils étaient promulgués?

M. Bergeron (Denis): Écoutez, actuellement, je ne peux pas affirmer que moi-même, personnellement, j'ai pris connaissance de la politique de l'eau souterraine. Il y a une équipe à l'UQCN qui est présentement à élaborer notre position à ce sujet-là, et on attendait, d'ailleurs, la consultation publique sur la gestion de l'eau pour en faire part au gouvernement. Alors, je ne voudrais pas m'avancer, non plus, à arrêter une position au nom de mon organisme, alors qu'il y a des gens qui y travaillent.

M. Bégin: Ce pourquoi je posais cette question, c'est que, effectivement, je ne connaissais pas la position exacte de l'UQCN là-dessus, mais que, dans les présentations antérieures, il y a des gens qui ont dit qu'on devrait rendre en vigueur le projet de règlement qui est préparé à cet effet.

Et je voulais savoir: Si, mettons, par hypothèse, on le prépubliait maintenant, est-ce que ceci rencontrerait les exigences de l'UQCN à cet égard? Et, sous un autre angle, est-ce que ceci aurait pour effet de compromettre la confiance que les gens mettent dans la consultation à venir, en ce sens que: Est-ce que la publication de ce projet de règlement là et de cette politique-là serait considérée par ceux qui voulaient intervenir dans le débat comme étant une réponse donnée à l'avance, alors que le débat n'a pas eu lieu? Autrement dit, est-ce que les gens considéreraient que le gouvernement tire ses conclusions avant même d'avoir entendu les gens?

M. Bergeron (Denis): Bien, j'abonde dans le sens de l'interprétation que vous faites, M. le ministre, que, effectivement, considérant qu'on nous annonce depuis plusieurs mois un débat sur l'eau au Québec et qu'on promulgue ou qu'on publie un projet de règlement avant même que la consultation soit amorcée, ça pourrait effectivement laisser les gens présumer des conclusions que le gouvernement veut faire de la consultation.

(21 heures)

M. Bégin: Pourtant, c'est ce que quatre groupes, ou trois groupes, je dirais – parce que le dernier, à mon point de vue, n'a pas été dans ce sens-là – les trois premiers groupes qui se sont présentés ont demandé effectivement qu'on le prépublie. Et certains ont considéré même que ce serait une solution suffisante en soi pour régler le problème que nous tentons de résoudre par la présentation de ce projet de loi là. Je comprends que vous ne partagez pas ce point de vue là.

M. Bergeron (Denis): Non, pas du tout. Je crois que le moratoire était pertinent. Et même, nous, ce qu'on propose, c'est qu'il soit élargi à d'autres utilités que celle strictement des embouteilleurs d'eau.

M. Bégin: La raison pour la demande d'élargissement est-elle, comme ça a été évoqué antérieurement, soit pour une raison d'être, entre guillemets, équitable à l'égard des autres groupes par opposition aux embouteilleurs ou si c'est pour des raisons autres que vous voudriez qu'on l'élargisse?

M. Bergeron (Denis): Principalement pour des questions d'équité, c'est bien évident, et évidemment aussi avec une certaine limite pour ce qui est de l'application de ce moratoire-là à d'autres utilisateurs. Parce qu'il faut considérer qu'avec soit un approvisionnement en eau potable pour les municipalités ou soit pour ce qui est des agriculteurs, il y a certaines modalités qui pourraient être adoptées en fonction d'un moratoire. Mais c'est principalement pour une question d'équité, je crois, envers les embouteilleurs.

M. Bégin: À votre connaissance, est-ce qu'il y a eu des débats acrimonieux entre différents groupes de citoyens et de promoteurs? Et là je référerais soit à des agriculteurs soit à des industriels, relativement à l'eau, comme il y en a eu pour les cas de l'embouteillage? À votre connaissance, y a-t-il eu de tels débats quelque part dans le Québec?

M. Bergeron (Denis): Écoutez, le cas le plus connu et qu'on a suivi d'assez près, c'est le cas de Franklin. Je crois que les gens de Franklin vont venir vous présenter leur point de vue demain. Nous, ce que l'on a vu en coulisse, en quelque sorte, du débat, c'est que sans encadrement adéquat, je veux dire... Effectivement il y avait beaucoup de choses qui se disaient, il y avait beaucoup de ouï-dire, il y avait beaucoup de jeux, de trafics d'influence qui se faisaient, d'où la recommandation qu'on fait dans notre rapport d'engager un processus d'audiences publiques pour ce qui est... Mais ça, c'est peut-être quelque chose qu'on réitérera lors de la consultation sur l'eau. Mais, définitivement, considérant les enjeux qui se passent au plan local, un cadre de débat neutre que serait une audience publique permettrait de relativiser un peu plus les débats au plan local.

M. Bégin: J'aurais peut-être une dernière question, qui est relativement simple. Vous avez dit que, d'après vous, le délai qui était prévu dans le projet de loi pour le moratoire était insuffisant. Si vous aviez à prendre une décision, qu'est-ce que vous prendriez comme délai au lieu de janvier 1999?

M. Bergeron (Denis): Je ne fixerais pas le moratoire dans le temps. Je le mettrais à la conclusion de la consultation publique et de l'adoption de la politique de l'eau. Ça pourra peut-être servir d'élément motivateur pour pouvoir faire avancer l'audience publique et les conclusions du gouvernement le plus rapidement possible.

Le Président (M. Lachance): Merci. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Merci, M. le Président. Merci pour la présentation. J'aimerais vous entendre m'expliquer ce que, selon le vous, le projet de loi n° 405 essaie de régler.

M. Bergeron (Denis): Tout d'abord, je pense que c'est une solution à court terme pour régler un problème – comment dire? – d'intérêt subit et prononcé de plusieurs promoteurs quant à l'exploitation de l'eau souterraine au Québec pour des fins d'embouteillage et en fonction aussi, en réaction au débat local qui s'est passé, je pense, principalement dans la région de Franklin.

M. Sirros: Est-ce qu'on peut présumer que c'est principalement vis-à-vis un débat local acrimonieux que le ministre soulève?

M. Bergeron (Denis): Je crois que le débat local acrimonieux est peut-être l'expression de ce qui va peut-être se multiplier dans plusieurs autres régions du Québec, parce qu'on sait qu'il y a une chasse en quelque sorte aux nappes d'eaux souterraines, au Québec, depuis quelques mois. Et je crois que c'était peut-être l'instrument à court terme que le gouvernement avait privilégié pour pouvoir temporiser en quelque sorte le développement agressif.

M. Sirros: Et, si j'ai bien compris, le débat est devenu acrimonieux parce que personne n'avait la possibilité de s'adresser à un encadrement neutre et indépendant et objectif pour vraiment faire l'analyse sereine, si vous voulez, des vraies informations concernant les impacts des projets précis.

M. Bergeron (Denis): C'est ce qu'on croit. Et, également, ce qu'a révélé ce débat-là, c'est la méconnaissance qu'on a de l'exploitation des eaux souterraines comme telle. Brièvement, je l'ai mentionné dans la présentation, c'est que, je veux dire, il peut y avoir des conflits d'usage, il peut y avoir... Alors, je pense que c'est principalement ça qu'a révélé le débat de Franklin.

M. Sirros: D'où votre recommandation, si vous optez pour le moratoire, que ce soit un moratoire cohérent, dans le sens de dire: Si c'est une question de conflit d'usage, il faudrait étendre le moratoire. Et, si on n'a pas de connaissances substantielles pour prendre des décisions éclairées, la suite logique de ça, c'est de dire: Il faudrait donc avoir un moratoire sur tout nouveau projet de développement ou sur tout, finalement – logique, ce serait sur tout; arrêtons, on ne peut pas, évidemment... donc, sur tout nouveau, mais sur toutes les utilisations, sans quoi c'est à la fois incohérent puis inéquitable parce que ça permet de continuer à exploiter les ressources puis à avoir des conflits d'usage dans toutes sortes de secteurs sauf un, ce qui ne règle pas le problème. Et, en plus, ça ajoute l'iniquité de la façon d'agir. Donc, si je vous comprend bien, vous pouvez aussi dire oui au moratoire, en autant qu'il soit cohérent et équitable.

M. Bergeron (Denis): C'est ce qu'on souhaite.

M. Sirros: Donc, dans sa forme actuelle, la loi 405, si je vous lis bien, elle est... Je cherche le mot, là, pour ne pas vous faire dire des choses que vous ne voulez pas dire.

M. Bergeron (Denis): Imparfaite.

M. Sirros: Et le ministre me surveille. Alors, dans sa forme actuelle, le projet de loi n° 405 est insignifiant, quoi.

M. Bergeron (Denis): Imparfait.

M. Sirros: Imparfait! Voilà!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Sirros: On va accepter ce compromis.

M. Bégin: Ça, c'est bien! Ça, c'est une traduction, pas une traduction libre, une vraie.

M. Sirros: Une loi imparfaitement imparfaite. Alors, voilà, elle est imparfaite. Donc, elle ne devrait pas être adoptée dans la forme actuelle?

M. Bergeron (Denis): Elle devrait être élargie, peut-être...

M. Sirros: On dit la même chose. Elle ne devrait pas être adoptée dans sa forme actuelle?

M. Bergeron (Denis): ...à tout prélèvement majeur d'eau souterraine au Québec.

M. Sirros: O.K. Donc, après ça, si on regarde autour, on dit: Est-ce qu'il y a une autre façon d'agir? Moi, j'avais suggéré, à un moment donné, au ministre, qu'on pourrait, si on voulait vraiment régler la question qui a commencé nos échanges, des débats acrimonieux vis-à-vis des projets, etc... Pourquoi ne pas référer ces dossiers qui soulèvent ce genre de débat acrimonieux quant aux utilisations conflictuelles au BAPE et, devant une instance indépendante, objective, etc., faire l'analyse de l'impact de ces projets spécifiques?

M. Bergeron (Denis): Oui, c'est exactement l'esprit dans lequel on le traduit dans notre présentation.

M. Sirros: Et ma question serait: Est-ce que ça ne serait pas, ça, une façon plus équitable, plus juste et plus efficace de régler la question des conflits vis-à-vis des projets spécifiques que d'imposer un moratoire qui, on a convenu, est imparfait, une loi qui est imparfaite?

M. Bergeron (Denis): Mais là c'est parce qu'on s'engage déjà dans un débat qui devrait avoir été annoncé par le gouvernement.

M. Sirros: Non, on parle de deux choses différentes, j'ai l'impression. Parce qu'il y a un débat global sur l'eau que, vous et moi, on suggère qu'il soit mené par le BAPE.

M. Bergeron (Denis): Exact.

M. Sirros: Mais il y a aussi les audiences devant le BAPE pour faire l'analyse de l'impact environnemental de projets spécifiques, au lieu d'un moratoire.

M. Bergeron (Denis): Remarquez, si j'ai à le dire ici, oui, effectivement, ça devrait être soumis au Bureau d'audiences publiques, quoique je me réservais quand même la possibilité de pouvoir le faire dans le cas de la consultation sur l'eau. Alors, c'est un peu ça. C'est que, nous, on privilégiait quand même de pouvoir réussir à faire transparaître notre point de vue dans le cadre de la consultation élargie sur l'eau, qui n'est pas strictement une question d'eau souterraine, qui est aussi beaucoup plus large, en termes d'enjeu.

Mais, si on parle de dossiers pour ce qui est de l'exploitation de l'eau souterraine pour l'embouteillage, ça devrait faire, effectivement, l'objet d'une consultation publique. Je pense que la démonstration est faite que les cadres actuels de discussion au niveau local ne permettent pas de faire la part des choses quant à la pertinence ou non de réaliser un projet comme tel.

M. Sirros: Donc, si je comprends bien, juste pour résumer sur ce point-là, ça serait là une façon de régler cette question de débat conflictuel. On n'aurait pas besoin, à ce moment-là, d'un moratoire sur les projets d'embouteillage d'eau strictement, si on envoyait ces projets devant le BAPE.

Et, logiquement, il faudrait quasiment étendre ça pour tous les projets d'exploitation nouvelle de la ressource eau souterraine, que ce soit parce que quelqu'un veut pomper je ne sais pas combien de litres pour abreuver ses cochons ou pour l'embouteiller. Ça serait plus efficace que le moratoire sur une partie, il me semble.

M. Bergeron (Denis): Oui, bien, écoutez, j'abonde dans votre sens, M. Sirros.

M. Sirros: O.K.

(21 h 10)

M. Bergeron (Denis): Mais la particularité, c'est que, là, on parle d'eau embouteillée, on parle strictement d'eau embouteillée. Et, dans ce contexte-là, pour ce qui est d'une exploitation d'eau embouteillée, je crois que ce serait pertinent, effectivement, que ça fasse l'objet d'une consultation publique.

M. Sirros: O.K. Alors...

M. Bergeron (Denis): Parce que la démonstration est faite.

M. Sirros: Moi, dans ce questionnement-là et dans le peu de temps que nous avons, j'essaie de vous situer dans le spectrum, si vous voulez, des choix qui s'offrent à nous quant à la réponse à donner vis-à-vis un problème qu'on essaie de régler, ici, à l'Assemblée nationale. Le problème qu'on nous présente, c'est un débat en tout cas difficile de citoyens qui sont inquiétés par rapport à des projets d'embouteillage dans des régions, qui donne naissance à un projet de loi qui impose un moratoire sur l'industrie de l'embouteillage. Alors, moi, je me dis: Il nous semble inéquitable, inefficace par rapport à la protection de la ressource eau souterraine. Et là on se tourne vers des alternatives. Et là on s'entend, si je comprends bien, qu'une alternative beaucoup mieux et plus efficace serait, au lieu d'un moratoire comme celui-ci, de soumettre les projets d'embouteillage, tels que ceux qui ont soulevé ces débats-là, devant le BAPE. Est-ce qu'on s'entend?

M. Bergeron (Denis): Effectivement.

M. Sirros: On s'entend. Deuxième étape de mon questionnement sur le règlement qui existe et pour lequel, je pense, vous, vous avez été consultés, tout le monde a été consulté au mois de mai 1986. Ça a fait tout le cheminement. Il existe devant la table du Conseil des ministres, depuis novembre 1997 qu'on regarde. Parce qu'on dit: Il ne faut pas présumer de la politique globale de l'eau et adopter ou faire appliquer ce règlement avant de faire le débat sur la politique globale de l'eau. Encore une fois, une question dans le sens de dire: Au pire aller, si on adoptait le règlement tel qu'il est, est-ce que ça serait pire ou mieux de laisser perdurer la situation actuelle pour la protection de la ressource, quitte à la rajuster une fois que le débat aurait été fait?

M. Bergeron (Denis): Disons que mes connaissances personnelles me laissent dire que, lorsqu'un règlement est adopté, c'est très difficile de revenir dessus pour pouvoir le modifier. Alors, si un règlement était adopté, je pense qu'on aurait à vivre avec, et ça fausserait, comme je l'ai dit tout à l'heure à M. Bégin...

M. Sirros: Mais ça, c'est par méfiance...

M. Bergeron (Denis): Je crois que ça fausserait la perception...

M. Sirros: La réponse que vous me donnez, vous me la donnez en fonction de la méfiance que vous avez vis-à-vis la lourdeur de l'administration, qui risquerait d'adopter une politique qui va dans un sens puis de permettre de continuer un règlement dans un autre sens. En tout cas. Mais, je veux dire...

M. Bergeron (Denis): Non. Tout simplement, le gouvernement, de par son attitude, se conforme à adopter un règlement et ne voit peut-être pas avant quelques années le bien-fondé de pouvoir le modifier ou d'en changer. Alors, c'est un peu ça, l'appréhension qu'on a. C'est que, si le gouvernement donne suite et adopte un règlement, bien, on appréhende que, malgré... ou soit qu'il décide de simplement se désister d'une éventuelle consultation sur l'eau ou soit que, suite à une consultation sur l'eau, il ne modifie pas le règlement. Alors, je pense...

M. Sirros: Vous pourrez lui poser la question. Ça pourrait être quelque chose comme ceci: M. le ministre, si vous mettez en application de façon intérimaire le règlement qui existe, est-ce que vous pouvez vous engager, d'abord, à continuer de tenir le débat public sur l'eau et, deuxièmement, à ajuster le règlement si nécessaire, dépendant des suites sur l'eau? Il devrait être capable de vous répondre: Effectivement, si on adopte une politique qui va dans ce sens, je ne continuerai pas à appliquer un règlement qui va dans l'autre sens, si tel est le cas. On voit mal qu'il dise: Non, non, moi, je l'ai adopté une fois, le règlement, peu importe les autres décisions qu'on va prendre par après, je vais continuer à appliquer un règlement qui est à l'inverse de ce qu'on a voulu comme politique.

Donc, je reviens avec ma question: Dans ce contexte-là, d'un ministre qui normalement serait cohérent et mettrait en application sa volonté affichée d'avoir un débat sur l'eau, est-ce que, dans l'intérim, ça ne serait pas quand même une protection substantielle pour la ressource eau souterraine d'appliquer tout de suite le règlement, quitte à l'ajuster un peu plus tard, si nécessaire?

M. Bergeron (Denis): J'opterais plutôt en disant: qu'on amorce le plus rapidement possible le débat public sur l'eau, qu'on arrive à des conclusions puis que le gouvernement les traduise dans ses règlements qu'il pourra les adopter. C'est plutôt ça que, nous, on attend depuis décembre dernier, depuis la conclusion du Symposium par M. Bégin. Alors, je pense que l'essentiel, c'est d'en arriver à enclencher le plus rapidement possible le débat sur l'eau pour en arriver le plus rapidement possible à des conclusions et que le gouvernement puisse traduire de façon adéquate ce qui ressort de la consultation publique.

M. Sirros: Donc, autrement dit, vous êtes pour le statu quo, avec le BAPE comme préférence pour le règlement des dossiers particuliers.

M. Bergeron (Denis): Oui. De toute façon, le ministre de l'Environnement et de la Faune a quand même un outil sur la Loi de la qualité de l'environnement qui lui permet de pouvoir faire des consultations ad hoc éventuellement. Alors, peut-être qu'éventuellement ce serait un outil que le ministre pourrait regarder, privilégier pour régler les problèmes de conflit d'usage. Mais, actuellement, l'outil du moratoire est quand même, à court terme, un outil évidemment élargi et plus équitable.

M. Sirros: Alors, vous êtes pour l'imperfection. Merci beaucoup.

M. Bégin: Merci beaucoup.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci à l'Union québécoise pour la conservation de la nature et à son porte-parole, M. Denis Bergeron, pour sa participation aux travaux de cette commission.

Comme nous avons entendu les deux groupes qui étaient prévus à l'horaire de ce soir, j'ajourne les travaux à 11 heures ou environ, après les affaires courantes, demain, le 4 juin 1998.

(Fin de la séance à 21 h 17)


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