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(Dix heures treize minutes)
Le Président (M. Boucher): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission des transports est réunie aux fins d'entendre les
personnes et les organismes en regard de la proposition gouvernementale
concernant l'organisation et le financement du transport en commun dans la
région de Montréal, déposée à
l'Assemblée nationale le 18 juin 1982.
Les membres de la commission sont: M. Bourbeau (Laporte), M. Tremblay
(Chambly), M. Clair (Drummond), M. Fallu (Groulx), Mme Harel (Maisonneuve), M.
Léger (Lafontaine), M. Dauphin (Marquette), M. Bissonnet (Jeanne-Mance),
M. Proulx (Saint-Jean), M. Rodrigue (Vimont) et M. Leduc (Saint-Laurent).
Les intervenants sont: M. Assad (Papineau), M. Rocheleau (Hull), M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Dussault (Châteauguay), M. Laplante
(Bourassa), M. O'Gallagher (Robert-Baldwin), M. Saintonge (Laprairie), M.
Rochefort (Gouin) et M. Lavigne (Beauharnois).
Ce matin, l'ordre du jour est le suivant: D'abord, l'Association
québécoise du transport et des routes Inc.; la Conférence
des maires de la banlieue de Montréal; la ville de Repentigny; la ville
de Le Gardeur, avec un mémoire pour dépôt seulement, alors,
considérons que le mémoire est déposé; la paroisse
de Saint-Sulpice; les villes de Berthierville, la paroisse de Saint-Antoine de
Lavaltrie, le village de Lavaltrie, la paroisse de
Sainte-Geneviève-de-Berthier et la paroisse de
Saint-Joseph-de-Lanoraie.
Ensuite, nous entendrons Ferland et Bélair, pour les
municipalités de Joliette, la Corporation municipale du village de
Saint-Jacques, la Corporation municipale de la paroisse de Saint-Jacques, la
Corporation municipale du village de Saint-Alexis, la Corporation municipale de
Sainte-Marie-Salomé, la Corporation municipale du village de Crabtree,
la Corporation municipale de Saint-Paul-de-Joliette, la Corporation municipale
de Saint-Roch-de-l'Achigan et la Corporation municipale de
Saint-Gérard-de-Magella.
Enfin, nous entendrons l'Association des consommateurs du Québec;
le Conseil régional de développement des Laurentides Inc.; M.
Claude Turcot, à titre personnel, et M. Hubert Leduc, à titre
personnel.
AQTR
Alors, sans plus tarder, j'inviterais l'Association
québécoise du transport et des routes Inc.,
représentée par M. Lionel Reeves, directeur général
de l'AQTR et M. Jean-Claude Therrien, vice-président administratif de
l'AQTR.
M. Reeves (Lionel): M. le Président, MM. les membres de la
commission, mon nom est Lionel Reeves, je suis le directeur
général de l'AQTR. La présentation vous sera faite par
notre vice-président, M. Jean-Claude Therrien, ing.
Le Président (M. Boucher): M. Therrien.
M. Therrien (Jean-Claude): M. le Président, M. le
ministre, messieurs les membres de la commission, l'Association
québécoise du transport et des routes accueille avec un
très vif intérêt la proposition gouvernementale concernant
l'organisation et le financement du transport en commun dans la région
de Montréal et remercie le ministre des Transports de bien avoir voulu
lui permettre de présenter son mémoire devant cette commission
parlementaire.
Nous reconnaissons le bien-fondé de l'action gouvernementale dans
le domaine et nous appuyons dans ses grandes lignes l'orientation politique
adoptée dans la proposition. L'AQTR est un organisme sans but lucratif.
Ses membres, individuels ou collectifs, ont comme dénominateur commun le
domaine du transport. Qu'ils proviennent du secteur public ou du secteur
privé, qu'ils oeuvrent au niveau des infrastructures des
opérations, de la planification ou de la gestion, leur adhésion
à l'association n'a qu'un seul objectif, le développement des
techniques de transport.
En conséquence, l'AQTR estime ne pas être impliquée
par les choix de cadres institutionnel et financier qui lui apparaissent de
nature plus politique que technique. Cependant, dans la mesure de ses
intérêts comme intervenant technique dans certains aspects du
transport urbain, l'association désire contribuer positivement à
l'élaboration de moyens réalistes qui faciliteront, nous en
sommes convaincus, la mise en oeuvre de la réforme proposée.
Les commentaires et suggestions de
l'AQTR peuvent être regroupés pour les fins du
présent mémoire sous cinq rubriques: 1. les personnes d'abord; 2.
recherche et technologie; 3. problèmes d'évaluation
économique; 4. présence de l'AQTR et, 5. l'agent des
études. Le texte qui suit présente de façon succincte
chacun de ces cinq points.
Les personnes d'abord. D'un strict point de vue technique, soit la
gestion optimale des systèmes impliqués, l'AQTR est d'avis que
les principaux éléments de la proposition gouvernementale
devraient être élargis à la dimension du transport urbain
des personnes plutôt que strictement le transport en commun. Il
apparaît évident qu'on doive s'assurer sur le territoire
concerné par des efforts intégrés de coordination des
sytèmes de transport adéquats pour répondre aux divers
objectifs tels qu'ils sont énumérés à la page 10 du
document gouvernemental: réponse aux besoins de mobilité et
d'accessibilité d'une grande partie de la population, diminution de la
pollution, économie de carburant que les Québécois doivent
acheter à l'extérieur, réduction du nombre d'accidents,
solution de rechange aux autoroutes et aux ponts dont le coût est
très élevé en milieu urbain, frein à
l'étalement urbain et utilisation d'une moins grande proportion du sol
pour le transport des personnes.
Comme le gouvernement, nous admettons qu'il faille accorder la
priorité au transport en commun. Cependant, d'autes formes de transport
collectif comme le covoiturage et le taxi collectif représentent, dans
certains contextes, des alternatives valables et économiques du
transport en commun qui répondent également à la plupart
des objectifs précités. D'ailleurs, plusieurs organismes
paramunicipaux en Amérique du Nord qui sont responsables du transport en
commun sont également responsables des programmes de promotion du
covoiturage et du taxi collectif. Nous croyons donc important que l'ORT
devienne également responsable de la promotion, de la coordination et de
la planification au niveau régional de tous les modes de transport
collectif en vue d'en faciliter la complémentarité et
l'efficacité. De plus, la planification des seuls modes de transport
collectif ne peut se faire d'une manière complètement
indépendante des autres modes. La plupart du temps, les autobus
partagent la même infrastructure que la circulation. Ce moyen de
transport en commun n'est donc pas indifférent à la
réglementation du stationnement, à la signalisation, à la
coordination des feux, au mobilier urbain et aux autres caractéristiques
propres des autres modes, que ce soient les poids lourds ou les deux roues.
La plupart des interventions à ce niveau sont
considérées de nature locale, mais ont des incidences
considérables sur la qualité des services, sur la
productivité du transport en commun et sur l'attraction exercée
par les autres modes de transport collectif. Pour la collectivité, pour
un meilleur usage des infrastructures disponibles, il sera toujours plus
avantageux de coordonner positivement les divers éléments
affectant le transport urbain des personnes. Il est préférable
que, dans un rôle de planification globale pertinente, l'on puisse
intervenir subtilement sur les éléments importants.
Vu que la plupart des intervenants se retrouvent déjà
à la même table de concertation, l'association juge souhaitable et
même nécessaire un tel élargissement des
préoccupations de l'ORT.
Deuxième point, recherche et technologie: Vu l'importance des
ressources impliquées dans le transport des personnes, l'AQTR recommande
fortement que, dans son propre intérêt, l'ORT fasse des efforts
tangibles dans les secteurs de la recherche et du développement
technologique des systèmes urbains de transport. On l'a dit, la chose
transport en commun est une grosse affaire dans la région de
Montréal. On y a affecté quelque 500 000 000 $ en 1981. Ce
montant risque d'atteindre 1 000 000 000 $ en 1985. C'est une industrie
monopolistique publique qui se doit d'évoluer en phase avec les autres
composantes du système économique. On doit bien s'assurer de la
plus grande productivité du système, d'un réexamen
continuel de l'adéquation offre-demande en fonction des comportements
observés et des normes de service établies.
Dans ce contexte évolutif, il est impérieux, pour
empêcher que le système de développement et d'exploitation
ne se sclérose, d'affecter un certain pourcentage du chiffre d'affaires,
disons de 1% à 2%, à des fins de recherche et de
développement, dans le but de maintenir un dynamisme technique et une
productivité de haut niveau qui ne peuvent actuellement être
assurés par des lois normales de concurrence de marché.
Dans ce même sens, lorsque l'on reconnaît la situation du
système de transport en commun comme étant celle d'un
consommateur de ressources, l'importance des produits engagés constitue
un marché pour des entreprises de production de matériel de
transport, de développement de matériel intellectuel, ainsi que
de formation et de maintien d'un personnel qualifié. Ceci justifie,
à notre avis, qu'on intègre dans la proposition gouvernementale
sur le transport en commun la dimension recherche dans les activités
fondamentales à promouvoir dans le nouveau contexte régional.
Ce genre de technologie, une fois apprivoisé et sans cesse
raffiné, peut devenir un atout social intéressant, susceptible
même, une fois maîtrisé, d'être exporté.
Troisième point: Problèmes d'évaluation
économique. Malgré les objectifs louables qui sont poursuivis
sous plusieurs aspects qui, souvent, sont considérés comme
techniques, l'association désire rappeler qu'il n'existe pas,
techniquement ou autrement, de solutions magiques au problème.
Les méthodes, entre autres, d'évaluation
économique, telles que formules de répartition de déficit,
mesures de bénéfices reçus, structures tarifaires, sont
toujours teintées d'un certain arbitrage et, de ce fait, il devrait
être reconnu que seules des négociations raisonnables entre les
intervenants impliqués peuvent amener une situation d'équilibre
ou un modus vivendi acceptable. La procédure retenue dans de tels
contextes devrait toujours être réévaluable afin
d'empêcher que des iniquités ou des distorsions ne s'instaurent
systématiquement.
Dans un tel environnement, l'AQTR encourage l'utilisation de
propositions débattues publiquement et présentées sous
forme de modèles qui permettent aux intervenants d'exprimer plusieurs
variantes et de stimuler les conséquences des diverses
décisions.
Quatrième point: Présence de l'AQTR. L'AQTR appuie
fortement le concept de commissions consultatives permanentes, attachées
à l'ORT, et souhaite ardemment, compte tenu des préoccupations
professionnelles de ses membres, être invitée à
siéger à cette commission aux côtés de
représentants d'usagers, de contribuables et d'autres groupes.
L'AQTR est, depuis ses débuts en 1965, une tribune
privilégiée où se discutent tous les sujets
d'intérêt de la chose du transport, dans une perspective
multimodale. Elle regroupe plus de 950 membres, ingénieurs,
économistes, urbanistes, politicologues, sociologues,
mathématiciens, géographes, technologues, techniciens
spécialisés, fabricants, entrepreneurs, consultants,
fournisseurs, transporteurs, administrateurs ou autres.
On les retrouve partout dans les organismes s'occupant de la chose du
transport et notamment à la CTCUM, à la
CTL, à la CTRSM, au COTREM, au BTM, au ministère des
Transports du Québec, dans l'une ou l'autre des municipalités de
la région de Montréal, au CN ou au CP, chez les consultants en
transport, à l'École polytechnique, aux Hautes Études
commerciales, au Centre de recherche en transports, chez Bombardier, chez GM ou
chez d'autres fabricants.
En outre, l'association entretient des liens étroits avec
d'autres associations, telles que l'Association des routes et transports du
Canada, l'Association canadienne de transport urbain, le Transportation
Research Board, l'Union internationale des transports publics, l'Association
pour le développement des techniques de transport, d'environnement et de
circulation de France et l'Institute of Transportation Engineers.
Incidemment, notre président n'a pu être avec nous ce matin
parce qu'il a été invité par l'ATEC, l'Association pour le
développement des techniques de transport, environnement et circulation
de France, à présider un atelier à son congrès
annuel la semaine dernière à Paris et les pourparlers sont fort
avancés pour organiser en 1984 un congrès conjoint international
avec l'AQTR à Montréal.
Cinquième point, l'agent des études. À l'instar
d'autres expériences vécues ailleurs, l'association estime que
deux catégories de problèmes fondamentaux se posent toujours
autour des justifications techniques de prises de décision et de
négociations sur des projets importants de transport.
Comme les problèmes de tutelle intellectuelle qui mettent en jeu
la qualité scientifique des études de transport et les
problèmes de tutelle politique et qui mettent en jeu aussi les
modalités d'accès à ces études pour les
différents demandeurs surtout défavorisés.
Pour contenir un tant soit peu ces difficultés manifestes, l'AQTR
suggère à l'ORT de se doter à l'intérieur de la
commission consultative permanente d'un agent des études de transport
urbain, assurant le soutien technique de la commission.
Cet agent se verrait confier les deux mandats suivants: a) s'assurer que
les études réalisées par l'ORT ou d'autres instances
soient d'une bonne qualité suivant les règles de l'art. À
cet effet, l'agent pourrait parfois faire appel à un groupe d'experts
bénévoles d'une compétence reconnue et indépendants
des demandeurs et des chercheurs. Ses appréciations ne porteraient que
sur un petit nombre d'études exemplaires dans le dessein de
définir peu à peu une jurisprudence en matière de
méthode scientifique et de déontologie; b) Donner accès
à des ressources d'études, en agissant d'abord comme un
"ombudsman" de données rassemblées par le personnel permanent de
l'ORT et en faisant ensuite et au besoin l'adjudication de ressources
supplétives à des demandeurs d'études
défavorisés. L'attribution de ces ressources serait cependant
toujours gérée par la commission consultative permanente. Ceci,
M. le Président et MM. de la commission, constitue l'essentiel des vues
et opinions de l'Association québécoise du transport et des
routes, qui vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci M. Therrien. Avant de
donner la parole au ministre pour les fins du journal des Débats,
j'aimerais mentionner que M. Cusano (Viau) remplace M. Assad (Papineau)
comme
intervenant à la commission. M. le ministre.
Une voix: Consentement, M. le Président.
M. Clair: M. le Président, permettez-moi d'abord de
remercier l'Association québécoise du transport et des routes
d'avoir étudié la proposition gouvernementale, d'y accorder un
appui au moins quant à l'orientation générale, et de
s'être présentée devant nous, ce matin avec un
mémoire.
L'Association québécoise du transport et des routes
constitue certainement sur le plan des spécialistes des questions en
transport, le creuset où se retrouvent des gens qui proviennent tant du
BTM, du COTREM, du CN, du CP, des commissions de transport, des constructeurs
de véhicules de transport de tous genres, le creuset, dis-je, où
tous ces gens se retrouvent pour étudier les grands problèmes en
matière de transport au Québec et ailleurs dans le monde. Ces
gens se retrouvent en dehors de leur cadre de travail parce que, bien
sûr, ils relèvent tous, j'imagine, à l'exception du
directeur général et des permanents, d'un employeur qui a son
point de vue sur les orientations en matière de transport au
Québec. Je dirais en quelque sorte que c'est un forum apolitique
où sont discutées les grandes questions de l'heure en
matière de transport, tant de transport des personnes que de transport
des marchandises, de transport routier et autres. (10 h 30)
Cet organisme regroupe des gens compétents sur le plan technique,
des experts en ces matières, et l'AQTR est en contact, comme on
l'indique, avec plusieurs autres associations à travers le monde.
La question première que je voudrais poser, question fondamentale
je pense, tout au cours de cette commission parlementaire, on a vu que
plusieurs intervenants remettaient sur la table la discussion à savoir
si le gouvernement doit, oui ou non, maintenir sa priorité au transport
en commun. La politique que nous poursuivons n'est pas antiautomobiliste, mais
dans la mesure où la situation économique, financière nous
force à faire des choix, la priorité par le gouvernement est
accordée à la poursuite des efforts de développement du
transport en commun, pas seulement au niveau des systèmes lourds de
transport, par exemple les trains, le métro de surface ou le
métro, mais également par toute une série d'autres
mesures, comme le taxi collectif et le covoiturage, qui sont prévues
dans un autre énoncé de politique sur le taxi. Alors, la position
du gouvernement, c'est donc de dire: On est à l'heure de faire des
choix, on ne peut pas, par exemple, dans la grande région de
Montréal, vouloir, au cours des dix prochaines années, investir 1
000 000 000 $ dans la construction routière ou autoroutière
urbaine ou périurbaine et, en même temps, investir 1 000 000 000 $
dans des moyens de transport en commun. Alors, on fait plutôt le choix,
on essaie d'être aussi nuancé que possible, de priorité au
transport en commun.
Mon collègue de l'Opposition, comme c'est son droit - je ne lui
en fait pas reproche - dit qu'on devrait plutôt décréter un
moratoire sur les moyens lourds de transport et se concentrer davantage sur une
meilleure utilisation des automobiles et ne pas continuer le
développement des systèmes lourds, si j'ai bien compris sa
position. On a vu des groupes, comme la CSN, venir nous dire, au contraire, que
par sa réforme, le gouvernement ne montre pas assez qu'il accorde une
priorité réelle au transport en commun. D'autres organismes sont
venus nous dire: Au contraire, le gouvernement a un préjugé
beaucoup trop favorable au transport en commun et pénalise les
automobilistes. On essaie, nous, de nous situer au milieu de ça dans une
position nuancée, mais toujours, cependant, de façon très
évidente de dire: Oui, c'est vrai qu'on doit tenir compte d'autres
moyens que le transport en commun; qu'on doit continuer au rythme de la
capacité de payer des intervenants, mais la priorité va au
transport en commun.
Puisque vous êtes membres d'autres associations internationales,
j'aimerais avoir votre point de vue. Par rapport à cette position que
j'essaie de définir et qui est aussi définie dans la proposition
gouvernementale, ailleurs dans le monde, comment fait-on le choix du transport
en commun par rapport au transport par automobile privée? Est-ce que
nous sommes le seul État au monde à devoir faire ce choix ou
à être en train de le faire? Si nous ne sommes pas le seul,
à votre connaissance, comment cela se passe-t-il ailleurs dans le monde?
Est-ce que la priorité du transport en commun, nous sommes le seul
à la retenir ou si c'est un choix qui semble assez partagé
ailleurs dans le monde?
M. Therrien: M. le ministre, je suif convaincu que les
professionnels, les techniciens du COTREM ont déjà fait la preuve
que cette préoccupation n'est pas unique à la région de
Montréal. Cette préoccupation d'améliorer le transport en
commun dans les grandes municipalités, dans les grandes concentrations
urbaines, elle est universelle. Surtout, dans le contexte économique
mondial actuel, dans le contexte de pénurie de pétrole, on
cherche ài améliorer le rendement des installations, des
systèmes qu'on a déjà mis sur place antérieurement.
C'est un problème international et toutes les associations que l'on
connaît, les publications qui sont faites dans le domaine font la preuve
que c'est la
tendance et même l'unique choix des grandes concentrations
urbaines.
Nous, les professionnels du transport, on ne peut que se
féliciter de cette préoccupation, surtout de cette tentative
d'améliorer les choses qu'on a. Cela fait longtemps que les
systèmes sont établis avec de très bons potentiels et tous
les efforts sont faits pour essayer d'abord d'améliorer leur rendement
avant d'investir dans de nouveaux équipements. Cela va suivant nos vues,
il n'y a pas de doute. Les obstacles non techniques à
l'efficacité de ces systèmes, au fur et à mesure qu'on les
abolit, soit les barrières municipales ou les barrières
financières, tout en sachant qu'il y a toujours des limites aux
ressources, sont pour nous des démarches dans la bonne direction parce
qu'ils ont comme effet, finalement, d'améliorer la productivité
des systèmes.
M. Clair: Quant au développement maintenant - si on pense
à la discussion qu'on a eue ici même à table - du
métro souterrain à Montréal et du métro de surface,
il y a un débat pour déterminer lequel des deux devrait recevoir
la priorité. Il y a, par contre, des organismes qui disent
carrément: Oubliez cela, mettez un "stop", un arrêt, un moratoire
sur les travaux de construction du métro de surface, c'est une mauvaise
orientation à prendre que de continuer d'investir dans les
systèmes lourds. Est-ce que l'association s'est penchée sur ces
problèmes spécifiques à l'île de
Montréal?
M. Therrien: M. le ministre, je ne pourrai pas vous dire que,
oui, on s'est penché spécifiquement sur ce problème comme
association. Nul doute que la majorité de nos membres qui sont
impliqués d'une façon ou d'une autre, soit comme membres
permanents d'un des organismes impliqués, soit comme consultants ou
comme fournisseurs, on est tous individuellement, à cause de notre
formation, comme je disais tantôt, favorables à essayer de
maximiser les installations déjà existantes. Les infrastructures
ferroviaires qui existent dans la région de Montréal sont mal
exploitées et le sont de plus en plus mal au fur et à mesure que
les anciens exploitants de ces installations abandonnent le service ou
l'utilisent à des fins qui sont en soi valables pour leurs objectifs,
par exemple le transport de marchandises. Mais on pourrait aussi, dans les
mêmes installations, les mêmes infrastructures, exploiter d'autres
systèmes de transport de personnes. On en est tous convaincus
unanimement, sans avoir fait d'atelier spécifique.
M. Clair: Quant au prolongement du métro de surface, ce ne
sont pas des questions qui ont été étudiées par
l'association comme telles.
M. Therrien: Pas comme telles. M. Clair: Que ce
soit...
M. Therrien: Pardon, M. le ministre. Il y a beaucoup de colloques
qui s'organisent. On a une de nos directions qui s'appelle transport des
personnes et il y a deux ou trois colloques par année, en plus de deux
ou trois sessions lors de notre congrès, qui font de ce sujet une des
priorités continuelles. Cela se discute et les unanimités sont
presque toujours là.
M. Clair: Que ce soit pour une meilleure utilisation des
équipements existants, ce qu'on poursuit, ou que ce soit pour la
construction de nouveaux équipements, ce qu'on se fait souvent dire
à l'oreille, mais rarement publiquement, et que je vous rapporte, c'est:
Les ingénieurs et les gens impliqués dans la construction
routière ont vu que les gouvernements ne pouvaient plus aller de ce
côté; maintenant, ils sont en train de modifier leur comportement,
puis ils sont devenus le "lobby" du transport en commun parce qu'ils savent que
les gouvernements ne construiront plus des réseaux routiers, car ils
sont à peu près complets. C'est un "lobby" d'ingénieurs
qui vise à faire continuer les gouvernements à dépenser de
l'argent dans le transport en commun maintenant qu'ils veulent en
dépenser moins dans le transport individuel privé. Qu'est-ce que
vous répondez aux gens qui font ces affirmations?
M. Therrien: Quand on a choisi d'exercer cette profession ou
cette technique, c'est un choix qu'on a fait individuellement et je crois que
c'est le propre de chacun d'essayer de se rendre le plus utile dans la
société. Même si on est impliqué dans cette
discipline ou dans ce type de discipline et qu'on ajuste nos capacités
en fonction de l'évolution des besoins de la société, ce
ne serait pas manquer d'objectivité de défendre sa position,
comme d'autres s'efforcent de défendre d'autres points de vue. C'est le
propre de chacun des intervenants de la société d'agir ainsi.
M. Clair: Merci. Une dernière question. Faisant
référence au covoiturage, je pense, et au taxi collectif qui sont
également des objectifs poursuivis par le gouvernement, vous soulignez
que plusieurs organismes paramunicipaux en Amérique du Nord qui sont
responsables du transport en commun sont également responsables des
programmes de promotion du covoiturage et du taxi collectif et vous proposez
que cela relève de l'organisme régional de transport.
Maintenant,
qui dit, par exemple, politique d'incitation au covoiturage dit
également politique incitative en matière de stationnement, par
exemple, qui est de responsabilité municipale. Vous parlez d'une
approche de transport urbain plutôt que de transport en commun.
Idéalement, ce serait peut-être la solution à retenir, mais
compte tenu de la souveraineté municipale, si on veut, en matière
de stationnement, par exemple, en matière de circulation dans la ville
de Montréal et dans les autres villes, est-ce que vous ne craignez pas
que cela devienne inopérationnel de confier à un même
organisme régional de transport la coordination de l'ensemble d'une
politique de transport urbain quand, en fait, légalement, une bonne
partie de la juridiction appartient à d'autres intervenants, la
construction autoroutière et lourde appartenant au ministère des
Transports, les rues appartenant aux municipalités, le service de la
circulation également, les stationnements étant privés ou
municipaux. Comment voyez-vous que ce serait possible de rendre
opérationnelle une telle structure? Ce serait en concentrant non
seulement des pouvoirs de promotion et de coordination, mais aussi des pouvoirs
décisionnels?
M. Therrien: Non, aucun pouvoir décisionnel en cette
matière. M. le ministre, il y a deux aspects à notre
recommandation. Premièrement, on veut que l'ORT se fasse le promoteur et
même le planificateur des autres modes de transport collectif, comme le
covoiturage et les taxis collectifs. Évidemment, ce seront aussi des
besoins d'abord locaux. Par exemple, le covoiturage a besoin de beaucoup
d'appui et d'une certaine organisation de façon qu'on n'évolue
pas chacun dans son coin avec des tâtonnements et des
inefficacités. L'ORT pourrait promouvoir ces modes et encourager les
différentes municipalités ou les exploitants de réseaux
locaux à les utiliser en fonction de telles techniques et en fonction de
l'expérience vécue dans telle autre municipalité, surtout
en fonction de l'expérience vécue ailleurs. Dans ce sens, on dit
que l'ORT serait le mieux placé pour encourager, promouvoir et planifier
ces modes, non pas dans leur implantation géographique, mais dans la
façon de les utiliser, dans la façon de les rendre les plus
optimaux.
L'autre aspect, c'est que l'ORT serait bien placé pour
coordonner. Quand on fait des études de planification pour le transport
des personnes, par exemple quand on fait une enquête origine-destination
à l'échelle métropolitaine, on ne se limite pas aux
déplacements en transport en commun quand on va chercher les
données. Les déplacements sont d'abord analysés en soi et
les modes sont ensuite identifiés pour répondre à ces
déplacements, de sorte que la planification se doit d'abord d'être
vue globalement. Si on veut améliorer par exemple le rendement des
autobus à l'échelle régionale, minimiser les
investissements que le gouvernement ou que l'ORT aura à faire sur les
véhicules, essayer d'améliorer les vitesses de parcours, on tombe
tout de suite dans des obstacles tels les règles de circulation, de
signalisation, par exemple, le problème des voies inversées, des
voies privilégiées; ce seront toujours des décisions
locales, sauf que l'ORT devra faire en sorte que des décisions se
prennent dans telle et telle localité. Évidemment, ce sera
peut-être difficile de lui donner un pouvoir décisionnel, ce que
nous ne recommandons pas. Nous recommandons qu'on fasse une priorité de
la coordination pour essayer d'optimiser la technique. (10 h 45)
M. Clair: Votre dernière recommandation concerne la
publicité des études faites sur ces questions. Dans le fond, ce
que je comprends, c'est que vous comptez que, si on démontrait, par pure
hypothèse, qu'une voie réservée à
Côte-des-Neiges permettrait d'économiser 5 000 000 $ en
fonctionnement du réseau de transport en commun, le fait de rendre cela
public, de le démontrer créerait une pression telle sur le
"décideur" qui a à permettre ou interdire une telle voie
réservée qu'il se verrait en quelque sorte forcé de
bouger, à cause de la vérité des coûts et de la
publicité qui entourerait cela. C'est la gageure que vous prenez.
M. Therrien: Exactement, le problème prendrait naissance
localement, mais ce serait l'ORT qui fournirait, comme on l'a vu, les moyens de
planification et d'exécution d'études et ces études
devraient servir justement à améliorer, dans un autre coin, dans
une autre municipalité, pour un autre exploitant soumis aux mêmes
obstacles de signalisation de circulation, à améliorer, dis-je,
cette façon de les faire connaître, non seulement aux
municipalités ou aux exploitants, mais au public aussi; cela devrait
améliorer.
M. Clair: Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Les habitués
de la commission parlementaire ont constaté que, chaque matin, avant que
commencent les questions à ceux qui viennent nous voir, le ministre nous
livre le fruit des réflexions de la nuit qui a
précédé et, en général, on a droit à
une mise à jour du cheminement de sa pensée sur le dossier. Ce
matin n'a pas fait exception, on dit que la nuit porte conseil et, dans son
allocution
qui précédait les premières questions aux
témoins tout à l'heure, le ministre a tenu à
préciser que sa politique ne visait plus à attaquer les
automobilistes. Nous sommes bien heureux de voir que le ministre a
décidé de modifier tout a coup son langage et d'adopter une
position qui est beaucoup plus nuancée et aussi un discours qui est
beaucoup plus nuancé que celui qu'on entendait la semaine
dernière, alors qu'il était beaucoup plus préoccupé
à nous dire qu'il s'agissait d'un choix de société, d'un
choix sur le transport en commun et que, pour les autres modes de transport, il
n'avait guère d'intérêt. Peut-être que le ministre,
en cours de route, a eu vent de certains sondages qu'on ne connaîtrait
pas ou qu'il a parlé à ses experts en marketing. Toujours est-il
que nous accueillons avec beaucoup de satisfaction ce discours qui est beaucoup
plus nuancé et qui fait en sorte qu'on peut peut-être
espérer que, dorénavant, on considérera le transport en
commun par automobile comme étant une forme de transport valable et
qu'il n'y aura pas, dorénavant, de politiques qui vont tenter de
contraindre les gens à une seule forme de transport, qui est le
transport en commun.
En terminant sur ma propre réflexion préliminaire à
des questions, j'aimerais simplement dire...
M. Clair: C'était pour vous aider à comprendre
enfin le discours que je tiens depuis deux semaines.
M. Bourbeau: ... que j'espère que, dorénavant, M.
le ministre, vous joindrez les actes aux paroles et que vous prouverez par des
gestes concrets que vos paroles n'étaient pas seulement des propos en
l'air. Je sais que beaucoup d'automobilistes au Québec attendent avec
impatience que vous leur donniez un répit en ce qui concerne l'avalanche
de taxes dont vous les affublez depuis quelques mois.
Pour revenir à nos gens qui sont devant nous ce matin, les gens
de l'AQTR, votre organisation, votre groupe, si je comprends bien, est
constitué principalement de techniciens du transport, de professionnels
du transport qui s'occupent de tenter de faire avancer la science, si je peux
dire, en matière de qualité de matériaux, de
contrôle, de gestion, de construction, etc. Est-ce que c'est à peu
près l'essentiel de vos préoccupations?
M. Therrien: Oui, c'est l'essentiel, effectivement; nos seuls
objectifs sont la connaissance et le développement des techniques de
transport. On ne répond à aucun intérêt, à
aucune défense des intérêts de nos membres en soit, ce sont
uniquement les techniques de transport qui font l'objet de nos
activités.
M. Bourbeau: Le ministre des Transports vous a interrogé
à quelques reprises et est même revenu à plusieurs reprises
sur un point. Il vous demandait votre opinion sur un point particulier,
à savoir, est-ce qu'on devrait continuer à investir dans les
systèmes lourds ou ne pas le faire. Évidemment, comme vous
représentez surtout des gens qui sont dans le milieu, des consultants,
des manufacturiers, on pourrait penser que si vous cédiez à votre
intérêt personnel, l'intérêt de plusieurs de vos
membres, vous seriez porté à recommander d'aller de l'avant avec
des investissements massifs qui pourraient profiter à bien des gens qui
font partie de votre organisation. J'ai constaté que malgré les
questions, que je qualifierais de suggestives, du ministre, vous avez
résisté d'une façon assez étonnante à la
facilité de dire qu'effectivement vous seriez d'accord avec un
investissement massif, et vous êtes revenu à deux, trois reprises
dans vos réponses sur le fait que vous préfériez
plutôt rentabiliser les systèmes existants. Enfin, si j'ai bien
compris, vous avez dit, je l'ai noté à quelques reprises, que
vous voulez utiliser davantage les infrastructures existantes, tenter de
maximiser l'usage de ce qui existe déjà. Est-ce que c'est
plutôt ce que vous souhaitez que d'investir maintenant dans des
systèmes très dispendieux comme les métros de surface,
etc?
M. Therrien: En fait, c'est dans la préoccupation
première de tout ingénieur, de tout autre professionnel du
milieu. La première composante du problème, c'est toujours une
limitation de ressources, de capacité de payer. C'est sûr que nous
sommes les premiers à pouvoir constater les besoins de transport ou les
difficultés, mais c'est notre rôle d'essayer de composer, d'autre
part, avec les ressources qui sont offertes. Et tout ingénieur se doit
de prendre d'abord les limites permissibles, autant financières que
spatiales, pour essayer d'en tirer le meilleur profit. D'une part, les besoins
sont là mais, d'autre part, les disponibilités sont toujours
présentes et c'est la préoccupation quotidienne. Je pense que 75%
des énergies des professionnels du milieu sont utilisées pour
d'abord délimiter la disponibilité des ressources et ensuite pour
régler le problème qui est connu, lui, beaucoup plus
facilement.
M. Bourbeau: Donc, vous parlez de disponibilité des
ressources. Je comprends, de ce que vous dites, que vous ne semblez pas croire
que les ressources actuelles permettraient d'aller beaucoup plus loin dans des
investissements massifs dans les systèmes lourds.
M. Therrien: Tout dépend du problème
à résoudre. Si un système lourd peut
améliorer le service quatre fois plus qu'un système léger,
c'est toujours la règle du bénéfice-coût qui prime.
Évidemment, ensuite on décidera du financement. Il y a toujours
une alternative. Il n'y a jamais une solution à un problème. Il y
en a une meilleure, une deuxième meilleure, une troisième. Et la
capacité de payer décide beaucoup, après.
M. Bourbeau: D'ailleurs, dans votre document, vous dites que le
coût du transport en commun à Montréal risque d'atteindre 1
000 000 000 $ en 1985. La proposition gouvernementale nous rassure en nous
disant que, selon les études du gouvernement, cela coûtera pas mal
moins. On parle de 878 000 000 $. Je pense que vous êtes beaucoup plus
réaliste que ne pourraient être les optimistes chercheurs du
gouvernement en parlant du milliard de dollars. Nous partageons
également ce point de vue. Et...
M. Therrien: C'est une façon seulement d'alléger le
texte. Cela n'a pas été fait. C'est peut-être une
façon d'ingénieur de dire les choses, du simple au double.
M. Bourbeau: Vous l'avez allégé en employant un
milliard. C'est plus léger que 878 000 000 $, si je comprends bien.
Le ministre est revenu sur le sujet du covoiturage, tout à
l'heure. Et vous en parlez dans votre mémoire comme d'une façon
de tenter de pallier le problème du transport en commun. Vous parlez du
covoiturage, et plusieurs en parlent depuis deux semaines, comme étant
une façon économique d'enlever un peu de pression sur le
transport en commun. Est-ce que votre groupe a une expérience quelconque
dans ce domaine? Est-ce que vous avez fait des recherches sur ce sujet? Est-ce
que vous avez une contribution à apporter au débat?
M. Therrien: Effectivement. L'Association
québécoise du transport et des routes s'est fait le parrain,
sinon le père, de l'Association covoiturage Québec, de concert
avec le ministère de l'Industrie et du Commerce du Québec, le
ministère canadien de l'Industrie et du Commerce, et le ministère
de l'Énergie, l'AQTR a servi de catalyseur ou de parrain à la
fondation de l'Association de covoiturage-Québec, qui a
présenté un mémoire, je crois, la semaine dernière.
Certains de nos membres siègent au conseil d'administration. Pour nous,
c'est une façon économique de répondre à certains
déplacements ou de les exploiter et qui sont presque inimaginables dans
le système conventionnel de transport en commun, d'autobus, par exemple,
sur des lignes fixes, à des horaires fixes, surtout dans des endroits de
densité faible ou pour des destinations qui ne coincident pas avec la
majorité des déplacements. Il y a des générateurs
de déplacement comme des industries, qui sont isolés, qu'il
serait très difficile de desservir par des moyens conventionnels de
lignes d'autobus à horaire fixe. Les véhicules qui existent soit
sur une base individuelle ou sur une base corporative pourraient très
bien répondre à ces besoins à même les
réseaux de rues et les ponts qui existent.
M. Bourbeau: D'après vous, puisque vous représentez
un grand nombre de gens ou d'organismes mais qui sont impliqués
directement dans le transport, là où il y a covoiturage, cela
peut-il marcher, cela peut-il avoir un succès suffisant pour que cela
vaille la peine qu'on s'y arrête?
M. Therrien: Oui, nous en sommes convaincus. Cela existe dans
quelques municipalités, aux États-Unis et même au Canada.
Cela a d'abord commencé avec les industries, industries et
employés. Pour nous, cela a d'autant plus de chances d'exister que cela
sera planifié et promu de façon valable et aussi permis.
M. Bourbeau: Permis, planifié et promu. M. Therrien: C'est
cela.
M. Reeves: C'est une expérience qui se vit quotidiennement
dans la plupart des grandes villes du monde. Il y a le taxiphone, il y a le
busphone; à Chicago ou à Los Angeles, le covoiturage est pas mal
développé et il est centralisé dans un organisme
régional où, disons, les gens n'ont qu'un
téléphone, un seul endroit à appeler pour connaître
s'il y a des moyens de se joindre à un groupe donné.
M. Bourbeau: À votre connaissance, est-ce qu'il y a encore
des "jitneys" qui fonctionnent dans quelques grandes villes ou si c'est
plutôt disparu. Je sais qu'il y en avait à Atlantic City il y a
quelques années, je ne sais pas s'il y en a encore? Etes-vous au
courant?
M. Reeves: Je m'excuse, des quoi?
M. Bourbeau: Ce qu'on appelle des "jitneys".
M. Reeves: Je pense que c'est plutôt pour la
villégiature, ce sont des voitures ouvertes.
Une voix: Ce sont des taxis plus grands que les nôtres.
M. Bourbeau: Ce sont de petits autobus qui appartiennent à
un individu qui a la
concession du transport sur un circuit donné. Un particulier qui
possède un véhicule a le droit de faire du transport sur un
parcours donné, à ses frais, évidemment, il conserve les
revenus aussi du travail qu'il fait. Vous n'êtes pas au courant de
cela?
M. Reeves: C'est une formule, j'imagine, comme le taxi collectif,
si on veut, ou les autobus scolaires. Il y a certains endroits où on se
sert de l'autobus scolaire comme instrument de déplacement collectif
local.
M. Bourbeau: Je voudrais revenir sur un point de votre
mémoire, qui est un peu intrigant. C'est la question de la double
tutelle à laquelle vous faites allusion. Vous parlez des
problèmes de la tutelle intellectuelle qui met en jeu la qualité
scientifique des études et également de la tutelle politique qui
met en jeu les modalités d'accès à ces études.
Est-ce que vous pourriez préciser un peu ce que vous entendez par ces
tutelles, ce que vous visez en parlant de ces tutelles?
M. Reeves: Ce qu'on entend d'abord par tutelle intellectuelle, et
c'est un problème qui existe pour nous, les professionnels du milieu
dans tous les organismes, qu'ils soient gouvernementaux ou privés, chez
les consultants autant que chez les industriels et que chez les fournisseurs,
c'est que les commandes d'études, les demandes sont souvent
accompagnées de directives ou même souvent de conclusions
présumées où se présentent des délais ou des
budgets qui ne sont pas à la même échelle que le
problème. Les techniciens doivent composer avec cela. Des occasions
comme aujourd'hui, cela nous permet de le dire sans faire
référence à absolument rien, mais de le dire. Cela fait
partie du jeu, mais on se sert souvent de conclusions techniques pour prouver
autre chose et l'ORT sera l'occasion d'autres domaines semblables. Alors, nous
voudrions trouver une façon d'éviter cette tutelle intellectuelle
concernant les chercheurs. (11 heures)
M. Bourbeau: Autrement dit, ce serait des cas où on vous
demanderait d'avance de conclure à quelque chose et de trouver les
arguments scientifiques pour étayer les thèses qu'on veut
prouver. C'est à peu près ça au fond.
M. Therrien: Oui, ça peut aller jusque-là, mais,
comme je vous le dis, la définition de la commande initiale n'est jamais
précise, exacte. Le problème se conçoit au cours de
l'étude, mais il y a toujours des préjugés qui sont...
Dès la naissance du besoin, du problème, il y a toujours une
solution qui apparaît, souvent spontanément, de façon
souvent objective, mais il ne faudrait pas partir trop souvent en essayant de
prouver cette solution par des études. Il faut essayer de laisser les
études objectives en soi et partir avec les conclusions; demander
peut-être plusieurs solutions aux études, mais laisser la
liberté au chercheur d'agir.
M. Bourbeau: Alors, M. le Président, c'est tout en ce qui
me concerne. Je pense que j'ai un collègue qui veut poser des questions.
Je ne sais pas s'il y en a du côté gouvernemental.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Vimont.
M. Rodrigue: M. le Président, je voudrais à mon
tour saluer les représentants de l'AQTR qui jouent un rôle
important dans le domaine du développement des modes de transport au
Québec. Je voudrais en particulier toucher à un chapitre de votre
mémoire qui, à bon droit, s'est penché sur les
problèmes de la recherche et de la technologie dans le domaine des
transports.
Vous semblez proposer que l'ORT soit l'organisme chargé de
s'occuper de planifier les questions de recherche et de développement -
vous dites plutôt que c'est au niveau régional, vous ne dites pas
que c'est l'ORT - et, en particulier, que ce soit la commission consultative
à l'intérieur de laquelle il y ait une sorte d'ombudsman qui
s'occupe de ces questions. Je m'interroge sérieusement, à savoir
si la commission consultative est vraiment, du moins dans le cadre des pouvoirs
qui lui sont consacrés par le projet de réforme, l'organisme qui
pourrait coordonner des activités de recherche avec une certaine chance
de succès. Étant donné que cette commission a surtout pour
fonction, du moins telle qu'on l'a conçue dans le projet de
réforme... Évidemment, on n'est pas allé au bout de cette
question. D'ailleurs, il y a des gens qui nous ont souligné que le
chapitre sur la commission consultative n'était pas très
élaboré; il y a sûrement place à discussion
là-dessus.
Compte tenu du mandat de cet organisme, qui est surtout de
connaître les problèmes auxquels ont à faire face les
usagers et ceux qui oeuvrent à l'intérieur du système de
transport et de les acheminer auprès des pouvoirs décisionnels
pour que ceux-ci puissent prendre les décisions appropriées, je
me demande vraiment si c'est l'endroit pour centrer la coordination de tout ce
qui se fait au point de vue de la recherche et de la technologie. Est-ce qu'il
n'y aurait pas des organismes plus appropriés pour jouer ce rôle?
Première question.
Deuxième question. Vous êtes dans le secteur, vous
côtoyez tous ceux qui de près ou de loin s'intéressent
à cette question, au problème du transport. Est-ce
qu'actuellement au Québec il se fait beaucoup de
recherche dans le domaine des transports collectifs?
Le Président (M. Boucher): M. le
député...
M. Rodrigue: Finalement, une sous-question. Est-ce qu'il y a
quelqu'un qui coordonne, qui fait la somme de ces recherches actuellement?
M. Therrien: Alors, à la première question, M. le
député, il y a les besoins en recherche de l'ORT et les fonctions
d'agent des études; je pense qu'il faut distinguer ces deux choses. Nous
recommandons au point 2: recherche et technologie, que dans les budgets
annuels, les budgets de fonctionnement de l'ORT, il y ait des sommes
prévues pour la recherche et le développement des techniques sans
que le besoin vienne du système lui-même. Ce ne seraient pas des
études commandées par le fonctionnement, mais des études
tendant à améliorer une situation, un besoin pur
d'améliorer les choses sans qu'un problème existe
déjà. Alors, cela ne se ferait pas par l'agent des études,
ce serait dans le processus de planification, dans les structures propres de
l'ORT, peut-être pas d'exécuter la recherche, mais de la faire
exécuter aux endroits appropriés, de la décider; et ce
n'est pas la commission consultative permanente qui ferait cela, c'est l'ORT,
dans sa structure de base. Il y a besoin de recherche pour suppléer
à la non-compétitivité qui existe. Dans l'industrie ou
quand on fonctionne en concurrence, le marché voit à ce qu'on
développe notre produit, qu'on l'améliore sans que ce soit le
client qui le demande. Dans des services comme ceux-là, les pressions de
l'extérieur n'existent pas. Nous demandons que ce soit défini au
départ, que cela se fasse, qu'il y ait une préoccupation
continuelle d'améliorer le produit; cette recherche serait
décidée par l'ORT, pas par la commission consultative. Tandis que
le rôle de l'agent des études qu'on met, c'est afin que si des
études doivent se faire sur les activités du système, soit
par rapport aux exploitants locaux, soit par rapport aux exploitants
régionaux, il y aura des besoins qui viendront du système, non
pas pour fin de notre recherche, mais pour fin de recherche de la solution. La
façon d'exécuter ces études, comment les faire
exécuter, suivant quelle méthodologie, ce serait le rôle de
l'agent des études de voir à ce qu'elles se fassent suivant les
règles de l'art. Cela n'est pas la recherche. Je ne sais pas si vous
saisissez un peu la distinction que j'y fais.
M. Rodrigue: La deuxième question, c'est: Actuellement,
est-ce qu'il y a beaucoup de travaux de recherche qui se font au Québec
dans ces domaines et est-ce que ces travaux sont coordonnés ou si cela
se fait un peu à droite et à gauche?
M. Therrien: Si vous voulez, on peut prendre les deux: la
deuxième et la troisième questions ensemble. L'AQTR a servi
aussi, de concert avec le ministère des Transports, à faire
exécuter une étude d'inventaire sur la recherche au
Québec, en même temps qu'il s'en faisait une sur la conjoncture,
sur la façon d'améliorer les services de recherche en transport.
Alors, les produits de ces deux études sont sur le point d'être
juxtaposés et les décisions viendront sous d'autres instances.
L'AQTR a participé à l'exécution de l'inventaire de la
recherche.
M. Rodrigue: Si je comprends bien, pour ce qui est de l'ORT, vous
le voyez plus comme un organisme commanditaire de recherche qu'autre chose.
M. Reeves: Comme l'industrie, comme une entreprise qui vit dans
la compétition, a habituellement des budgets de R&D, comme on dit en
anglais, recherche et développement... Étant donné que
cette industrie, le transport en commun, est une industrie, comme on dit,
monopolistique, si l'on veut, la compétition n'y étant pas, on
voudrait s'assurer que cette recherche soit maintenue, qu'elle soit toujours
présente. Mais pas nécessairement toujours par l'ORT. On a le
Centre de recherche du transport à l'Université de
Montréal, à Polytechnique. À l'Université McGill,
il se fait aussi du travail sur le transport. De plus on va chercher des
renseignements sur la recherche qui se fait partout dans le monde, qu'on a chez
nous à l'AQTR. Je pense que l'AQTR sert un peu de point de ralliement de
tous ces groupes, ici au Québec.
M. Therrien: Si vous permettez que je renchérisse sur
cela, M. le député. Justement, tantôt, j'ai peut-être
manqué cette précision que le besoin ou l'initiation de la
recherche devrait être le lot de l'ORT, mais que l'exécution
devrait, je pense, obligatoirement être faite ailleurs, dans les milieux
appropriés, soit dans les milieux universitaires, dans les laboratoires,
dans l'industrie des véhicules ou des produits et des matériaux.
Cela ne devrait pas se faire à l'ORT. Le besoin devrait venir de
là et les résultats appliqués à l'ORT.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Alors, je voudrais d'abord saluer M.
Reeves, directeur général de l'AQTR qui a l'avantage d'habiter le
comté de Saint-Laurent.
M. Reeves: Un beau comté!
M. Leduc (Saint-Laurent): L'un des plus beaux,
sûrement.
Alors, vu que la tarification subit l'influence des spécialistes
en transport - et sûrement que vous avez une opinion là-dessus -
et qu'elle a de l'influence sur l'utilisation et sur la non-utilisation du
transport en commun, est-ce que vous pensez que le modèle qu'on propose,
la formule de zones tarifaires est une formule qui peut être bonne pour
encourager le transport en commun, ou bien si l'on ne devrait pas plutôt
favoriser le tarif unique par territoire; un seul tarif pour le territoire de
la CUM comme certains ont proposé hier. Un seul tarif pour Laval;
peut-être un seul tarif pour la rive sud.
M. Therrien: On est d'accord sur le principe d'établir les
tarifs en fonction de la distance parcourue. Je pense que cela est une
prémisse de base qui ne peut pas être contestée, tout comme
dans les modes de transport privés, cela nous coûte d'autant plus
cher qu'on couvre de longues distances. On a aussi souvent entendu que les
lieux de résidence sont la plupart du temps un choix; donc, une
décision qui a été prise normalement avec
rationalité. Si on a trouvé des avantages à être
éloigné de son endroit de travail, je crois qu'il faut être
prêt aussi à en payer le prix. Alors, le principe de payer pour la
distance parcourue en fonction du service reçu, je crois que cela est
une loi de base dans tous les sytèmes. On doit essayer d'atteindre cet
objectif. Où sont les limites de ces zones? C'est un domaine où
l'AQTR ne voit pas son implication parce que cela reste un compromis entre...
L'idéal, c'est que ce soit variable de façon linéaire
continue, mais cela est absolument impossible. Donc, c'est par secteur. Les
limites des secteurs, c'est en dehors de notre mandat d'en discuter.
M. Leduc (Saint-Laurent): Qu'est-ce que vous pensez de la
proposition de la CSN qui disait que progressivement il faudrait
peut-être faire disparaître le tarif, les charges pour le transport
étant donné que c'est un service essentiel, peut-être qu'on
devrait le donner à tous les citoyens? Ces gens disent: Progressivement,
il faudrait faire disparaître le tarif. Est-ce que vous pensez que c'est
réaliste?
M. Therrien: À mon point de vue, non, je parle en mon nom
personnel, mais j'ai l'impression que c'est une évidence. On est
d'accord pour dire que c'est un service qui ne sera jamais rentable,
c'est-à-dire qu'il ne faudra jamais s'attendre à faire un revenu
du transport, mais la préoccupation d'un administrateur, c'est d'essayer
de faire payer autant que faire se peut celui qui reçoit le service.
Le transport en commun, c'est d'abord à l'avantage de l'usager,
mais on a aussi prouvé que le transport en commun sert des fins de
non-usagers sur une base commerciale ou autre. Donc, que l'usager paie en
fonction du service qu'il en retire; pour nous, c'est essentiel.
M. Leduc (Saint-Laurent): Dernière question. Vous dites:
Nous appuyons le projet du gouvernement dans ses grandes lignes. Est-ce qu'il y
a certains points sur lesquels vous n'êtes pas d'accord, en
particulier?
M. Therrien: On a soulevé cinq points qui ne sont pas
nécessairement des objections, ce sont des ajouts que l'on recommande au
projet, dans ses grandes lignes. On n'avait pas le mandat de dire qu'on
était d'accord sur tout, parce que l'essentiel du projet, comme le titre
le dit, c'est un projet d'organisation et de financement. Les techniciens du
transport ont depuis toujours reconnu ce fait que l'amélioration des
services se bute toujours à des problèmes de structures et de
financement. On est d'accord avec la proposition, le geste du gouvernement,
d'agir dans ce sens, mais on ne pouvait pas dire qu'on est d'accord avec tout,
parce qu'en fait on n'est pas en mesure de le faire dans notre mandat, dans nos
objectifs d'association.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, simplement pour remercier les
gens de l'AQTR d'être venus nous présenter un mémoire
très intéressant. Je profite de l'occasion pour rappeler
l'excellente collaboration dont le ministère des Transports du
Québec a toujours pu bénéficier de la part de l'AQTR et
assurer le vice-président et directeur général que le
ministère des Transports est très intéressé
à poursuivre et même à améliorer encore, si
possible, cette collaboration en matière de transport, puisqu'elle peut
apporter un éclairage tout comme l'AQTE, l'Association
québécoise des techniques de l'eau, en matière
d'environnement, en apporte au ministère de l'Environnement. Cela peut
être très utile et j'espère qu'on pourra continuer à
compter sur votre éclairage. Je vous remercie.
M. Therrien: Merci, M. le ministre.
Le Président (M. Boucher): Alors, au nom de tous les
membres de la commission, je remercie M. Reeves et M. Therrien pour la
présentation de leur mémoire au nom de l'Association
québécoise du transport et des
routes Inc. (11 h 15)
Le Président (M. Boucher): ... pour la présentation
de leur mémoire au nom de l'Association québécoise du
transport et des routes Inc.
Conférence des maires de la banlieue de
Montréal
J'appelle maintenant la Conférence des maires de la banlieue de
Montréal, représentée par M. Antonio Di Ciocco, maire de
Saint-Léonard, M. Maurille Séguin, président, et M. Yves
Ryan de Montréal-Nord.
M. le maire.
M. Séguin (Maurille): M. le Président, M. le
ministre, MM. les députés membres de la commission, la
conférence des maires apprécie cette occasion de vous
présenter son mémoire. Cette prise de position de la
conférence des maires se veut une adoption presque intégrale du
mémoire de l'Union des municipalités, intitulé:
"Commentaires de l'Union des municipalités du Québec sur le livre
blanc du gouvernement du Québec: Le transport en commun, un choix
régional."
Elle s'appuie aussi sur un document technique présenté par
la Communauté urbaine de Montréal intitulé: "Proposition
gouvernementale concernant l'organisation et le financement du transport en
commun dans la région de Montréal." Ces deux documents sont en
annexe au mémoire de la conférence. Je vous ferai grâce de
leur lecture, puisque celle-ci a déjà été faite par
ceux qui vous les ont présentés, je crois, la semaine
dernière.
Nos réflexions et commentaires expriment les interventions des
différents partenaires au sein de notre organisme et reflètent le
résultat des travaux d'un comité de la conférence
mandaté d'étudier les implications de la proposition
gouvernementale relative au partage des responsabilités et au partage
des coûts, y compris une nouvelle structure tarifaire.
Le comité de la conférence était composé des
maires Jean Corbeil, d'Anjou, Sam Elkas, de Kirkland, membres du comité
exécutif de la Communauté urbaine de Montréal, et aussi de
M. Antonio Di Ciocco, maire de Saint-Léonard, qui m'accompagne
aujourd'hui. M. Ryan, maire de Montréal-Nord, est aussi membre du
comité exécutif de la conférence.
L'organisme régional de transport. La proposition de cadre
institutionnel du gouvernement reproduite ci-après - vous avez vu le
tableau lors du dépôt du mémoire -devrait s'accompagner
d'une condition relative à la représentation de la CUM au sein de
cet organisme, à savoir une représentation paritaire entre les
deux parties intervenantes, soit un nombre égal de sept
représentants de la ville de Montréal et sept
représentants des municipalités de la banlieue.
Le transport en commun, mode de déplacement
privilégié. L'Union des municipalités du Québec
termine ses commentaires sur l'organisme régional de transport en
soulignant: "Le transport collectif ne doit pas être perçu comme
le miracle du transport urbain."
Nous sommes, pour notre part, surpris de constater que le gouvernement
qui perçoit le transport en commun comme mode de déplacement
privilégié semble être convaincu qu'une conjoncture
économique difficile, des hausses vertigineuses du prix de l'essence et
la pollution sous diverses formes inciteront la population à
privilégier le transport en commun. Cette probabilité est bien
aléatoire. Une méconnaissance de la perception du citoyen de la
CUM quant à sa propre perception de la qualité de vie risquerait
de fausser les prévisions quant aux perspectives d'utilisation du
transport en commun.
La situation actuelle. La banlieue, à notre avis, est un
important bassin d'emplois. Basant une projection linéaire des emplois
générés par les municipalités de banlieue de 1971
jusqu'en 1981 sur l'essor économique et l'évolution de
population, une projection récente de la Conférence des maires,
des chiffres de population jusqu'en 1996 basée sur l'analyse des quinze
dernières années démontrait qu'à cette date la
population de la banlieue dépasserait celle de Montréal dans une
proportion d'environ 6%. La banlieue génératrice d'emplois doit
être considérée plus largement par le gouvernement
lorsqu'il fait état que "78% des emplois sont localisés sur l'Ile
principalement au centre-ville."
Coordination entre les diverses entreprises en ce qui concerne la
desserte. Nous souscrivons à la pensée du ministère
relative à la coordination entre les diverses entreprises. D'autre part,
l'absence de l'une des plus grandes commissions de transport au Canada, la
CTCUM, des débats sur ce dossier et la présence du COTREM,
organisme qui n'a jamais exploité, à notre connaissance, de
réseaux de transport, dans ce même débat n'est pas, a
priori, le gage d'une perspective meilleure en matière de coordination.
Quant à la concurrence, la CTCUM, la CTRSM et la CTL desservant des
territoires distincts de la région montréalaise, une explication
de l'absence de biens fonctionnels pour leurs usagers ne saurait s'y baser, non
plus que les dédoublements ou la non-articulation des services entre
eux.
Les municipalités en tant qu'intervenantes. Le rôle des
municipalités en tant qu'intervenantes dans l'organisation des
transports collectifs étant si restreint par rapport à celui des
entreprises publiques et
privées de transport, des ministères, du BTM et du COTREM
que le gouvernement peut à peine les inclure dans la multitude des
intervenants dont la présence complique l'organisation du transport en
commun quand il veut départager leurs diverses responsabilités,
le contrôle des élus locaux sur la qualité, la nature et
l'abondance des services est à toutes fins limité en
période de conflit comme en temps régulier. Le transport en
commun sert d'exemple en matière de services où le payeur n'est
pas décideur.
La participation directe des usagers et des citoyens à
l'orientation des services du transport collectif. Bien que les
municipalités soient les premières à prôner la
participation de la population à l'orientation des services auxquels
elle a droit, cette participation n'aura d'effets positifs qu'en autant que
cette intervention ne vienne pas alourdir davantage les modes
décisionnels préconisés. Dans tous les services qui la
concernent, la population est représentée, au niveau
décisionnel, par ses élus. La consultation du citoyen est saine
tant et aussi longtemps qu'elle ne sert pas de paravent à la
médiocrité d'une administration.
La réalité des déplacements de l'extérieur
vers l'intérieur de la CUM et la contribution financière de
Laval. Le service qui bénéficie beaucoup aux citoyens de la
région de Montréal prouve particulièrement son injustice
en matière de tarification lorsqu'on considère la
réalité des déplacements de l'extérieur vers
l'intérieur de la CUM et, vice versa, des usagers des villes desservies
par le réseau de la CTL, lesquels ne participent pas au financement du
transport en commun; lorsqu'on tient compte également qu'en termes de
potentiel fiscal Laval bénéficie d'un écart de 0,16 $ des
100 $ par rapport aux municipalités de la CUM et qu'elle n'est pas
assujettie à la taxe foncière comme le sont les
municipalités de la CUM. Cette injustice s'accentue si on
considère cet écart en termes d'années de contribution au
transport en commun. Il y a plus de douze ans que les gens du territoire de la
CUM défraient les coûts de transport et que les gens de banlieue
hors CUM en bénéficient tout aussi bien, sinon davantage que ceux
du territoire de la CUM.
Les automobilistes et les entreprises, bénéficiaires
non-usagers. Pour justifier la taxation des automobilistes et des entreprises
considérés par le gouvernement dans son document comme
bénéficiaires non-usagers, de meilleures objections que celles du
congestionnement aux heures de pointe et de l'impact d'un arrêt des
services de transport en commun devront venir appuyer cette proposition
gouvernementale à notre avis. Quant à la structure interzonale,
dans sa forme actuelle, nous croyons qu'elle pénalise les
résidents de banlieue, qui ne sont pas considérés comme
des citoyens à part entière. Comme principaux utilisateurs du
train, cette pénalisation est d'autant plus injuste qu'il en coûte
beaucoup plus cher pour exploiter les réseaux d'autobus et de
métro tels qu'ils existent aujourd'hui que le train tel qu'il existe
aujourd'hui.
Le territoire de la CUM devrait former une seule et unique zone
tarifaire. Cette solution aurait en outre pour résultat de favoriser le
développement économique de toutes les parties du territoire,
à notre avis.
M. le Président, avant de conclure, j'aimerais adresser un
commentaire un peu plus personnel au ministre des Transports, M. Clair. Je
pense, M. Clair, personnellement, que j'ai toujours aimé mieux regretter
avoir fait quelque chose que regretter n'avoir rien fait. M. le ministre, vous
avez fait quelque chose. Vous avez essayé de régler d'abord et
avant tout, si j'ose m'exprimer ainsi, le problème du gouvernement du
Québec quant à ses exigences financières et vous
méritez des félicitations pour avoir tenté de le faire.
Cependant, le problème des municipalités de la banlieue de
Montréal n'est pas réglé par votre proposition, dans sa
forme actuelle du moins. En conclusion, les enjeux d'une telle proposition
pouvant être lourds de conséquences en matière de partage
des coûts comme de partage des responsabilités;
Les usagers du transport en commun sur le territoire de la
Communauté urbaine de Montréal résidant en banlieue
étant pénalisés par rapport à ceux de
Montréal et à ceux qui résident hors CUM, des taux
différents étant proposés pour un déplacement d'un
point à un autre à l'intérieur de la CUM, selon le lieu de
résidence, il en coûterait moins cher à un citoyen
montréalais qu'à un citoyen de banlieue pour un même
déplacement;
L'UMQ ayant recommandé un moratoire relativement aux
responsabilités et compétences attribuées aux MRC;
Les mécanismes d'implantation du système interzonal
étant inconnus à ce jour;
La proposition gouvernementale ne respectant pas les principes de la
fiscalité municipale;
En conséquence, M. le Président, M. le ministre, membres
de la commission, afin de permettre aux parties impliquées de faire
effectuer toutes les études requises avant de poursuivre ce dossier, la
Conférence des maires de la banlieue de Montréal demande
très respectueusement au gouvernement un moratoire d'au moins deux
ans.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Séguin.
M. le ministre.
M. Clair: Permettez-moi d'abord de remercier M. Séguin et
les maires qui l'accompagnent de leur présence en
commission parlementaire et d'avoir accepté de produire un
mémoire à la commission afin de donner leur point de vue. La
ville de Montréal avait donné son point de vue. Le
président de la Communauté urbaine de Montréal, M. Des
Marais, avait donné, à titre de président seulement, le
point de vue qui était le sien, et je pense que c'est important qu'on
ait aussi celui de la Conférence des maires de la banlieue de
Montréal.
En ce qui concerne le mémoire, il est court mais il est dense.
J'aurais plusieurs questions. Je vais tenter de me limiter aux plus
fondamentales. La première touche le transport en commun, mode de
déplacement privilégié. Je cite le texte à la page
5 du mémoire au début. Je pense que tout le paragraphe est
important. "L'UMQ termine ses commentaires sur l'organisme régional en
soulignant: Le transport collectif ne doit pas être perçu comme le
miracle du transport urbain - ce avec quoi je suis en total accord. Je ne crois
plus aux miracles depuis longtemps. - Nous sommes pour notre part surpris de
constater que le gouvernement, qui perçoit le transport en commun comme
mode de déplacement privilégié, semble être
convaincu qu'une conjoncture économique difficile, des hausses
vertigineuses d'essence et la pollution sous diverses formes inciteront la
population à privilégier le transport en commun. Cette
probabilité est bien aléatoire et une méconnaissance de la
perception du citoyen de la CUM quant à sa propre perception de la
qualité de vie risquerait de fausser les prévisions quant aux
perspectives d'utilisation du transport en commun." (11 h 30)
Je trouve ce paragraphe fondamental parce que, comme j'ai eu l'occasion
de l'indiquer hier, les demandes en investissements pour le transport
privé, c'est-à-dire de construction d'autoroutes ou
d'augmentation de la capacité des autoroutes existantes, totalisent pour
les dix prochaines années, dans la région de Montréal,
sûrement 1 000 000 000 $. Le dépôt d'un plan de transport en
1979 par mon prédécesseur a été accueilli comme il
l'a été par la communauté urbaine à
l'époque. Maintenant, selon mes informations, dans le dépôt
du schéma d'aménagement de la Communauté urbaine de
Montréal, ce plan de transport a été, je pense, dans son
ensemble, retenu comme proposition de départ quant au schéma
d'aménagement de la Communauté urbaine de Montréal. Il y a
donc, à mon humble avis, vu la capacité de payer des citoyens,
justement un choix.
Comment voulez-vous que les citoyens et citoyennes se déplacent
prioritairement dans la région métropolitaine, des gens qui
viennent de l'extérieur de la CUM, dans un premier temps et, d'autre
part, pour les déplacements à l'intérieur de la
Communauté urbaine de Montréal? Je pense qu'on ne peut pas
refuser de faire un choix; sans cela on va continuer avec la même
attitude que celle qu'on a eue au cours des 20 dernières années,
c'est-à-dire à investir massivement, au-delà de nos
capacités dans les deux, dans le développement d'infrastructures
autoroutières, l'augmentation de la capacité des routes et
autoroutes, et dans le transport en commun. Ce qui va donner ce qu'on a dans le
coeur de la ville de Montréal aujourd'hui, des milliers de logements qui
ont été détruits, l'incapacité de poursuivre ces
investissements. Et cela ne relève pas juste d'aujourd'hui, cela a
été commencé, je pense, en 1970, l'autoroute est-ouest. On
se retrouve donc, en plein coeur, avec une échancrure dans le tissu
urbain, on se retrouve avec des difficultés à poursuivre des
investissements autoroutiers et aussi une difficulté à poursuivre
des investissements en matière de transport en commun. Je pense qu'on
serait irresponsable de part et d'autre si on ne faisait pas un choix.
Après cela, on examinera comment on se répartit la
facture, comment on essaie d'avoir une tarification qui permette aux
exploitants d'avoir un aussi haut niveau d'autofinancement que possible. La
première question à laquelle la Communauté urbaine de
Montréal et le gouvernement du Québec ne peuvent ne pas
répondre, c'est: Est-ce qu'on continue à y aller dans les deux,
sans faire de choix ou si sans essayer d'écraser les automobilistes ni
de les rejeter, on essaie de dire: II faut privilégier quelque chose, on
doit aller vers le transport en commun?
Je vous avouerai que ce paragraphe m'inquiète
énormément. Comment voulez-vous que les gens qui résident
à l'extérieur de la Communauté urbaine de Montréal
viennent en priorité à la communauté ou sur le territoire
de la communauté?
Deuxièmement, à l'intérieur de la communauté
urbaine, est-ce que la conférence des maires de la banlieue fait un
choix ou refuse de le faire, en étant consciente que ce choix est
toujours relatif, ce n'est pas absolu? On doit se donner des priorités.
Ce qui m'inquiète beaucoup aussi, c'est par rapport aux infrastructures
routières, par exemple. On n'a pas révisé, au
ministère des Transports, je le reconnais, l'impact de cela, mais, au
cours des cinq dernières années, vous avez perdu 130 000
habitants qui sont allés s'établir à l'extérieur de
la Communauté urbaine de Montréal, sans qu'il y ait donc un
accroissement vraiment important de la population dans la grande région
métropolitaine. Je discutais, lundi dernier, à Laval, avec les
commentateurs du matin, qui suivent, dans des hélicoptères ou
dans des avions, la circulation tous les matins. Je ne leur ai pas tordu le
bras, c'est eux qui ont dit: La pression sur les ponts,
particulièrement sur la rive sud, continue de s'accroître
justemement parce que, même s'il n'y a pas d'acroissement réel
important de la population, il y a plus de gens qui sont à
l'extérieur du territoire de la communauté et qui continuent
à faire le choix de l'automobile parce que les gouvernements,
l'organisation du transport en commun en dehors de l'île est plus
déficiente. Ils ont ajouté: Immanquablement, la pression va
continuer de s'accroître sur les ponts, poussant ainsi le gouvernement,
tôt ou tard -peut-être qu'on peut retarder l'échéance
à dix ans - à devoir encore augmenter la capacité de ces
infrastructures. Alors, ma question, je vous la pose, est fondamentale: Est-ce
que la conférence des maires de banlieue a fait un choix, a l'intention
d'en faire un? Est-ce que le schéma d'aménagement
déposé, qui prévoit retenir en gros le plan de transport
intégré de 1979, est une volonté d'aboutir ou s'il est
déposé à titre éventuel? J'aimerais vous entendre
là-dessus.
M. Séguin: M. le Président, le ministre,
fidèle à lui-même, a tout de suite identifié un des
points les plus importants peut-être de notre mémoire. C'est un
problème de fond. Si je tente à ma façon, M. le ministre,
de rendre votre question un peu plus spécifique, vous me demandez
peut-être: Est-ce que la conférence des maires préconise
une infrastructure routière, telle que Cavendish par exemple,
plutôt que les trains de banlieue dans l'ouest de l'île? Est-ce que
je suis dans la bonne direction? Est-ce que c'est là que vous voulez me
diriger?
M. Clair: Oui. Par exemple, en ce qui concerne la 20, dans
l'ouest - elle doit être refaite - on me demandait d'augmenter sa
capacité à six voies. Cela coûte trois quarts de millions
de plus, si ma mémoire est bonne - je vous donne ça en ordre de
grandeur - et je dis que le gouvernement ne peut pas investir dans tout en
même temps. On consacre des efforts à l'augmentation de la
capacité du train de banlieue, je ne peux pas en même temps
demander qu'on augmente la capacité des infrastructures
autoroutières. Je pense qu'il y a un choix à faire. L'exemple que
vous donnez est tout à fait pertinent.
M. Séguin: Alors, ce que la conférence des maires
tente de vous souligner ici, par le paragraphe que vous avez cru bon de relire,
c'est qu'on s'inquiète quant à cette croyance du gouvernement qui
pense inciter la population à privilégier le transport en commun.
Étant très près de nos citoyens, surtout ceux qui sont
à l'extrémité de l'île de Montréal, qui est
très bien étendue et n'est pas un cercle parfait comme on le voit
sur la carte en arrière de vous, si on considère les gens aux
extrémités allongées de l'fle de Montréal, on se
dit que les gens qui sont allés s'installer là, en particulier je
peux parler de l'ouest de l'île puisque j'y habite, avant même que
la CTCUM s'y rende, les gens qui ont fait ce choix initialement étaient
organisés et prêts à utiliser le service routier. Est-ce
que, si on n'étend pas le réseau routier et qu'on favorise le
transport en commun, on forcera ces gens à utiliser le transport en
commun? Je me dis qu'il y a des gens qui n'utiliseront jamais le transport en
commun. Certes, il y en aura qui seront convaincus de laisser leur voiture
à la maison, ou une des deux ou trois voitures, comme c'est beaucoup le
cas dans certaines municipalités, et de prendre le transport en commun,
mais il y en a qui ont absolument besoin de leur voiture, une fois rendus au
centre-ville, pour se déplacer dans la journée. Par exemple, si
on considère simplement une de ces routes qui vient de l'ouest de
l'île et va vers le centre-ville de Montréal, on n'a qu'à
examiner ceux qui ont une immatriculation Z, par exemple, qui sont des gens qui
ont besoin de leur automobile pour gagner leur vie. Il ont besoin de se
déplacer avec cette automobile, ce sont des automobiles de compagnies,
des automobiles fournies, des automobiles avec lesquelles ils voyagent. Ces
gens-là ne se serviront jamais du transport en commun. Est-ce que des
études ont été faites par vos techniciens pour tenter
d'évaluer combien de ces gens ne sont réellement pas et ne seront
jamais des candidats usagers, qui ne deviendront jamais des usagers? Je n'ai
pas vu ça dans le document que vous avez présenté, je n'ai
pas vu d'étude à cet effet.
M. Clair: Je n'ai pas de difficulté à admettre que
le service de transport en commun ne desservira jamais en totalité, ne
pourra jamais répondre à la totalité des
déplacements, des besoins de la population. Je pense que c'est
évident. Ma question, c'est plus en termes de choix, de priorité.
Je pourrais être encore plus spécifique. Par exemple, des
intervenants sont venus nous dire: Moratoire sur le prolongement du
métro, du métro de surface, des moyens lourds de transport. Comme
ministre des Transports, je veux savoir ce que vous en pensez. Si la
perspective de la Communauté urbaine de Montréal est d'avoir un
moratoire sur le prolongement du métro, du métro de surface et
des moyens lourds de transport, ça vient de changer toute ma perspective
budgétaire, financière, à moyen et à long terme;
c'est important que je le sache. J'avais cru comprendre que la
communauté urbaine et la conférence des maires de banlieue
faisaient implicitement le choix du transport en commun en continuant à
privilégier des investissements au rythme de la capacité de payer
de tout le monde en matière de transport en commun et des
moyens lourds. Si vous me dites, aujourd'hui: On remet cette option en
cause, vous avez tout à fait raison dans votre conclusion; faisons un
moratoire de deux ans sur l'ensemble et révisons nos
priorités.
M. Séguin: M. le Président, j'aimerais rappeler au
ministre des Transports que je n'aimerais pas non plus qu'il me prête des
intentions que je n'ai pas soulignées. On n'a pas demandé de
moratoire sur le prolongement du métro ou sur les trains de surface; ce
qu'on demande, c'est un moratoire de deux ans sur la proposition
gouvernementale quant à l'organisation d'un organisme régional de
transport. On ne demande pas un moratoire sur l'expansion du métro telle
qu'elle est préconisée en ce moment.
Le transport en commun, on croit qu'il est nécessaire et on croit
qu'on doit le pousser de l'avant. Notre position n'a pas changé de ce
c&té. Ce qu'on souligne dans le paragraphe en question, c'est que si
vos techniciens ont prévu une certaine augmentation de revenu, à
cause d'un nouvel achalandage, ce nouveau revenu ne sera peut-être pas
présent parce que je crains que vous ne réussissiez pas à
changer les habitudes de transport d'une grosse majorité des
banlieusards.
M. Clair: Quant aux prévisions d'achalandage que nous
avons déposées - on voit, par exemple, actuellement avec
l'intégration des deux trains, les augmentations que cela a pu
entraîner - je pense que sur cela, que ce soit avec la CTCUM, la CTL ou
la CTRSM, il n'y a pas beaucoup de différence, si l'on veut, quant
à la limite qu'on reconnaît nous aussi de la croissance des
achalandages. Ce n'est pas que je veux vous embêter, mais je trouve que
c'est fondamental, M. Séguin; je veux dire que je serais porté
à vous la retourner. Si la Communauté urbaine de Montréal
désire poursuivre ses investissements dans le métro et le
métro de surface, cela doit être parce qu'elle aussi a
regardé la croissance des achalandages; on sait que, que ce soit pour le
métro, le métro de surface, pour le train, il n'y a rien de tout
cela qui est rentable. On le sait, c'est déficitaire et il s'agit de se
partager le plaisir de payer la facture. Alors, là-dessus, je suis
porté, comme je vous disais, à vous retourner à nouveau la
question. J'avais cru comprendre que le choix d'une priorité dans les
immobilisations devait aller au transport en commun, compte tenu du choix qui
avait été fait et que semble poursuivre la communauté
urbaine en matière de moyens lourds de transport. La question que je
pose ce matin, en rapport avec le paragraphe, c'est: Est-ce que cette
volonté est remise en cause ou non? Je suis tout à fait
prêt à recevoir les deux réponses, mais je veux
juste...
M. Séguin: La réponse la plus simple, M. le
Président, que j'aimerais faire au ministre, c'est non; ce n'est pas
remis en cause.
M. Clair: Ce n'est pas remis en cause. M. Séguin:
Non.
M. Clair: Bon, parfait.
En ce qui concerne la coordination entre les diverses entreprises pour
la desserte, vous dites: "Nous souscrivons à la pensée du
ministère relative à la coordination entre les diverses
entreprises; cette dernière n'est néanmoins qu'inadéquate
et non pas absente. D'autre part, l'absence de l'une des plus grandes
commissions de transport du Canada, la CTCUM, des débats sur ce dossier
- je comprends leur venue en commission parlementaire, c'est-à-dire
l'absence de la CTCUM en commission parlementaire - et la présence du
COTREM, organisme qui n'a jamais exploité de réseau de transport,
dans ce même débat, n'est pas a priori le gage d'une perspective
meilleure en matière de coordination." Bien des gens sont venus nous
parler, au cours de ces quatre jours de consultation, de voies
réservées, de nécessité de réaliser
l'intégration tarifaire, de nécessité d'avoir des parcs
d'incitation, d'aller vers le covoiturage, le taxi collectif, et
peut-être même d'en confier la responsabilité aux organismes
de transport en commun ou encore à l'organisme régional de
transport. (11 h 45)
Toutes les idées ont été exprimées. Une
chose est certaine, c'est que sur, plusieurs des éléments de
coordination, tels qu'exposés à la page 6, soit le gage d'une
perspective meilleure en matière de coordination, vous semblez porter un
jugement sur le COTREM qui a pris l'initiative de pousser sur des parcs
d'incitation sur la rive sud, de pousser sur les commissions de transport pour
en venir à l'intégration tarifaire, de pousser sur des dossiers
de voies réservées, sur le retrait éventuel de la CTCUM de
Longueuil pour tenter de rationaliser. Les gens de la CTRSM sont venus nous
expliquer pourquoi ce serait avantageux en termes opérationnels que la
CTCUM se retire du vieux Longueuil. Tout autant de sujets qui, à
proprement parler, je pense, honnêtement, n'ont pas été au
cours des dernières années la préoccupation
première des commissions de transport, mais davantage du COTREM et du
ministère des Transports.
Je comprends que le COTREM n'est pas un exploitant. Il n'est pas
question qu'il le soit et qu'il ne le devienne jamais, et je ne dis pas cela
pour défendre le COTREM mais plutôt pour vous poser la question:
S'il n'y a
pas d'organisme régional de transport, s'il n'y a qu'une table de
discussion où on peut, comme on aurait pu le faire depuis dix ans pour
que les exploitants se réunissent et discutent de tout cela... Les faits
sont que ces exploitants ne s'en sont pas beaucoup préoccupés
parce que cela n'était pas leur mandat premier, parce que
l'environnement juridique ne le favorisait pas; cela ne s'est pas produit. S'il
n'y a pas d'endroit où la perspective, la dimension régionale de
coordination entre les différents modes de transport, les
différents exploitants... S'il n'y a pas de coordination à un
niveau régional, décisionnel, quelle autre possibilité le
ministère des Transports, par l'entremise d'un organisme comme le
COTREM, a-t-il de tenter de faire cette coordination? Comment, si vous
êtes d'accord avec l'objectif d'améliorer la coordination entre
les diverses entreprises, comment, si l'ORT n'est pas la solution, si le COTREM
ne l'est pas, comment voyez-vous qu'elle puisse se faire?
M. Séguin: M. le ministre, je ne pense pas que la
conférence, à quelque moment que ce soit, ait mentionné
que l'ORT ce n'est pas bon. Au contraire, on dit que c'est peut-être un
petit peu prématuré. C'est pourquoi on demande un moratoire de
deux ans justement pour améliorer cette coordination et amener au beau
milieu de cette coordination entre le COTREM et le ministère des
Transports un organisme qui a une vraie participation à faire, qui a une
poutre très importante, et c'est la CTCUM qui a manqué
jusqu'à ce jour, à notre humble avis.
M. Clair: Si je comprends bien, dans le fond, vous dites... et je
le reconnais. S'il y a une chose que je retiens de la commission, c'est bien
celle-là, c'est que, finalement, il y a beaucoup plus
d'appréhension à l'égard de la proposition du gouvernement
que d'adversité. Dans ce sens, ce que vous dites, c'est d'aller moins
rapidement et avant de passer à un organisme régional de
transport, comme le président de la communauté urbaine
lui-même le souhaitait, lançons le mouvement d'abord au moyen
d'une table de concertation, décisionnelle ou non, pour essayer
d'habituer les gens à travailler dans une perspective régionale.
Est-ce que je comprends qu'un tel organisme régional de transport
léger - pour employer l'expression de M. Des Marais - cela vous
paraît le premier pas à franchir?
M. Séguin: M. le Président, encore une fois, le
ministre a bien saisi la pensée de la conférence. Ce que vous
venez d'énoncer est exact et nous croyons de plus que, s'il y a cette
table de concertation, la CTCUM y sera un partenaire important.
M. Clair: Merci. Ma dernière question concerne la
structure interzonale. J'aimerais d'abord faire là-dessus un petit
commentaire. Lorsqu'on affirme que la structure tarifaire favorise les
banlieues hors CUM par rapport aux banlieues de la Communauté urbaine de
Montréal, je pense que l'objectif de la proposition n'est pas
celui-là. Au contraire, l'objectif est de traiter de façon
privilégiée, si l'on veut, par une structure tarifaire plus basse
tous les courts déplacements dans la Communauté urbaine de
Montréal, qu'ils aient lieu dans l'est, l'ouest ou dans le coeur de
l'agglomération. On proposait aussi une surtarification pour les
territoires B, Laval et Longueuil. Cela faisait suite d'ailleurs à une
préconsultation que j'avais faite auprès de M. Des Marais en
janvier ou février dernier. On visait à répondre à
cette préoccupation. La proposition est peut-être perfectible,
mais je pense que là-dessus, l'orientation qu'on voulait se donner,
c'était d'aller dans ce sens.
En ce qui concerne la structure interzonale, vous basant sur le principe
de "on paie les mêmes taxes de transport via la taxe foncière, on
devrait donc avoir la même structure, un tarif unique sur l'ensemble de
l'île", c'est certainement une position qui se défend. Il n'y a
aucun doute là-dessus, c'est très défendable comme
position. Maintenant, cette équité fiscale ne devrait-elle pas se
retrouver dans ce qui est défrayé, par l'usager du transport en
commun, de la même façon, quand on sait que sur un court
déplacement, où qu'il ait lieu sur la Communauté urbaine
de Montréal, c'est-à-dire cinq kilomètres et moins,
l'usager défraie 50% des coûts qu'il occasionne et que quelqu'un
qui voyage sur quinze kilomètres ne défraie que 17% des
coûts qu'il occasionne? Comme le miroir de l'équité de
traitement en ce qui concerne la fiscalité foncière, n'y a-t-il
pas aussi une équité de traitement à avoir en ce qui
concerne les usagers? Dans vos municipalités comme au gouvernement, de
plus en plus on essaie de faire payer en quelque sorte les
bénéficiaires des services rendus en fonction du
bénéfice reçu. Ne voyez-vous pas une autre
équité à établir en fonction de la tarification
selon le bénéfice reçu, d'une part, et, d'autre part,
reliant le mémoire des gens de l'AQTR précédemment qui,
comme on le sait... À travers le monde, c'est possible, c'est fait,
c'est déjà en fonctionnement. Une tarification en fonction de la
distance, cela ne semble pas avoir présenté de problèmes
particuliers. La réflexion des gens de l'AQTR, dans le fond, ne
mérite-t-elle pas d'être retenue dans l'entreprise privée?
Dans le transport en commun privé interurbain, c'est une règle
qui n'est jamais remise en cause par personne, à savoir que quand on
voyage sur une plus longue distance, on paie plus. Ce n'est pas
parce que c'est un service public qu'on devrait retenir une règle
différente, d'autant plus qu'à long terme, cela pourrait apporter
plus de revenus aux exploitants, donc diminuer leur niveau de
déficit.
Deux questions. L'équité du traitement égal en ce
qui concerne la taxe foncière, n'y a-t-il pas un miroir à cela en
ce qui concerne les déplacements, à savoir que chacun supporte
à peu près le même pourcentage des coûts qu'il
occasionne? Deuxièmement, dans le fond, n'est-ce pas aussi une
règle économique fondamentale de base, à savoir que les
services de transport sont généralement tarifés en
fonction de la distance parcourue, dans le privé? Pourquoi n'en
serait-il pas de même dans le public?
M. Séguin: M. le ministre, quand on parle
d'équité fiscale, ce n'est pas quelque chose qu'on peut analyser
à partir de maintenant, sans tenir compte de la rétrospective et
de l'histoire même de la CUM. Je regarde encore cette carte qui est en
arrière de vous, et de loin on pourrait penser que c'est Paris, parce
que ce sont des beaux cercles concentriques. On pourrait penser que c'est
Munich parce que c'est la même chose. Montréal, c'est pas mal
différent. Montréal, c'est une île longue, allongée,
avec Longueuil qui est à peu près dans le centre-ville et Laval
qui n'en est pas tellement loin. Quand les parrains de la CUM ont fondé
la CUM, ils ont tenu compte du fait qu'il y avait une île, sans tenir
compte du fait que des gens de Sainte-Anne-de-Bellevue ou de
Pointe-aux-Trembles - à l'époque, ils ne faisaient pas partie de
Montréal, si on regarde seulement les deux extrémités de
l'île - n'ont rien en commun avec le centre-ville, surtout quand on les
compare avec les gens de Longueuil. Il y a déjà douze ans
d'histoire. Ces gens qui étaient installés à
l'époque sur le territoire de la CUM n'ont pas demandé de faire
partie de la CUM. C'est le gouvernement qui a décidé à un
moment: Vous autres, parce que vous habitez sur cette île... Il a
même lancé là-dedans l'île Bizard; on n'en cherchera
pas les raisons pour le moment, mais l'île Bizard s'est retrouvée
aussi dans le territoire de la CUM parce qu'il y avait un pont qui la reliait
à l'île de Montréal. Mais il n'y a rien en commun et ces
gens-là ont payé depuis déjà douze ans. Je pense
que si on parle d'équité financière, il faut tenir compte
du fait que ces gens ont déjà investi beaucoup. Ils ont
déjà investi énormément et il faut que les gens de
Laval, de Longueil, de Brossard, tiennent compte de cela. Cela fait assez
longtemps que ces gens payent pour nous, c'est à notre tour de payer et
je les invite à payer.
M. Clair: Je vous remercie, M. Séguin.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
saluer les gens de la Conférence des maires de la banlieue de
Montréal. Tout à l'heure, le ministre nous a dit, au sujet de son
ministère, qu'il reçoit beaucoup de demandes de la part du
secteur privé, du transport privé - ce sont les mots qu'il a
utilisés - pour qu'on complète l'infrastructure routière
dans la région de Montréal et il nous a expliqué que,
quant à lui, son gouvernement a décidé de choisir le
transport en commun; c'est ce qu'il a appelé un "choix de
société". C'est une belle formule qui est très attrayante
à première vue, mais qui pourrait être utilisée
à toutes les sauces, il faut en convenir. Dans ce "choix de
société", qui est le choix du transport en commun, et dans
l'argumentation qui mène à ce choix, il y a, à mon avis,
une équivoque. Car on tente de séparer deux choses: d'une part,
le transport en commun, qui est le choix privilégié du
gouvernement et d'autre part, on identifie un peu au système
privé les autoroutes, les routes et le fait qu'on ne devrait pas
continuer à compléter le système routier. Or, cela semble
indiquer que les autobus n'utilisent pas le système routier, que les
taxis collectifs ou même les taxis ne l'utilisent pas, que le covoiturage
ne l'utilise pas.
En mettant en contradiction, si je peux dire, les deux systèmes,
on simplifie à l'extrême; cela devient même simpliste, parce
que ce n'est pas exact qu'il y ait opposition entre les deux. Cette opposition,
justement, elle est de nature à créer dans l'esprit de tout le
monde un peu d'ambiguïté, même beaucoup
d'ambiguïté. Je me demande: Est-ce qu'il faut vraiment choisir
entre les deux? Entre le système autoroutier et ce qu'on appelle le
transport en commun, comme si le système autoroutier n'était pas
utilisé pour le transport en commun. Moi, je trouve qu'il y a un danger
si on doit vraiment ne privilégier que le système en commun autre
qu'autoroutier. C'est se retrouver éventuellement l'otage, comme
collectivité, d'un seul fournisseur. Si on ne privilégie que la
forme collective de transport, on sait qu'à un moment donné il
peut y avoir des grèves et que tout le monde deviendra alors l'otage
d'un seul fournisseur, celui qui fournit le transport en commun. Les hommes
d'affaires en général savent fort bien qu'il est bien plus sage
de magasiner dans plusieurs magasins que dans un seul, de façon à
pouvoir étaler les risques. Quant à moi, je me demande si on ne
devrait pas plutôt avoir une politique qui favoriserait au maximum
l'utilisation de tous les systèmes existants, de toutes les
infrastructures existantes, que ce soient des
infrastructures routières, ferroviaires, métro ou autres,
et tenter d'obtenir le maximum, le meilleur usage de ce qui existe
présentement.
Je pense qu'en faisant un petit effort, on pourrait retirer de ce qui
existe présentement, des centaines de millions de dollars qu'on a
investis depuis vingt ans dans le transport en commun et dans le système
autoroutier, je pense qu'on pourrait retirer beaucoup plus que ce qu'on nous
retire actuellement, par l'usage de techniques douces dont on parle de plus en
plus, par une meilleure utilisation des voies réservées, non
seulement sur les ponts, mais dans les grands axes de dégagement et
à l'intérieur même de la CUM; il y a des voies rapides, des
grandes artères où on pourrait dégager des voies rapides
pour les autobus, pour le taxi collectif ou même peut-être pour le
covoiturage, afin de favoriser évidemment ces formes de transport. Je ne
pense pas qu'on doive renier le passé, tout ce qui s'est fait dans le
passé, pour tenter de reconstruire à neuf d'autres choses, comme
des systèmes lourds, le train et le métro de surface, etc. Je
pense qu'on a actuellement suffisamment d'infrastructures pour la demande. La
demande n'augmente pas, comme on le voit dans toutes les études,
l'achalandage de toute la CUM est moindre aujourd'hui qu'il y a 30 ans. Il y a
moins de gens qui se déplacent aujourd'hui par le transport en commun
à Montréal qu'en 1950. Pourtant, on a triplé,
quadriplé, l'offre de transport. (12 heures)
Donc, le problème n'est pas là. Et il est bien reconnu que
c'est la tendance des technocrates de vouloir tout raser ce qui s'est
déjà fait et de tout recommencer en mettant sur pied de nouvelles
structures. Souvent, c'est une façon déguisée de
déplacer le problème et dire: maintenant qu'on a une nouvelle
structure, on a réglé le problème. Mais le
problème, la plupart du temps, on le sait, ne se règle pas de
cette façon. Il ne se règle pas de cette façon dans le
transport en commun. Il ne se règle pas dans le système scolaire
et ne s'est jamais réglé de cette façon. Je pense qu'il
est bien préférable, l'expérience nous le démontre,
de tenter d'améliorer ce qui existe présentement, d'en retirer le
maximum.
Je voudrais revenir à votre mémoire. Vous y annexez toute
une série d'analyses techniques, préparées par la CUM. Si
vous le faites, c'est que vous endossez ces analyses. Est-ce que vous auriez
objection à ce que je vous pose quelques questions sur des points de vue
contenus dans ces analyses?
M. Séguin: Allez-y. Posez vos questions et je tenterai d'y
répondre. Vous avez vu au tout début du mémoire que
personnellement, je n'ai pas participé à la partie technique, la
partie en annexe du mémoire. M. Di Ciocco a eu une certaine
participation. Disons qu'à nous trois, on tentera de vous fournir une
réponse.
M. Bourbeau: De toute façon...
M. Séguin: On prendra note de votre question.
M. Bourbeau: ... elles sont d'ordre général. Je ne
veux pas entrer dans des détails très spécifiques. Par
exemple, je vois ici dans une des analyses techniques, que l'on parle de
l'incertitude entourant les prévisions des revenus et des
dépenses, dans la proposition gouvernementale, à la page 8. Un
peu plus loin, à la page 11, on dit que le livre blanc répond
plus aux exigences financières du gouvernement du Québec
qu'à celles des municipalités: De plus, celles-ci auront à
assumer la facture d'une telle réforme dans l'éventualité
où les projections ne se concrétiseront pas. Donc, dans l'espage
de trois pages, à deux reprises, vous parlez de l'incertitude concernant
les prévisions et vous dites que les municipalités auront
à supporter la facture. Est-ce que vous entretenez vraiment des doutes
sérieux sur l'exactitude des projections des coûts faites dans le
livre blanc par le gouvernement?
M. Séguin: Bien, je pense que la question du
député de Laporte rejoint un peu celle du ministre Clair
tantôt, sa première question de fond, quant aux prévisions
de changer les habitudes de transport des résidents du territoire de la
CUM. Si, toutefois, on ne réussissait pas à changer, comme on
l'espère, les habitudes de transport, je crois que les revenus, les
prévisions sont faussées et les revenus qui sont prévus
théoriquement ne se matérialiseront pas.
Quant au deuxième volet de votre question, concernant le
problème du gouvernement qui est résolu d'abord plutôt que
celui des municipalités, je l'ai souligné aussi dans un
à-côté. Il n'est pas dans le texte de notre mémoire.
Je l'ai souligné tantôt au ministre avant de conclure.
M. Bourbeau: Un peu plus loin dans les documents techniques
où on parle de la tarification, vous mettez en doute la
problématique qui concerne la tarification sur la distance parcourue et
vous dites que cela va amener une suite, que cette sous-tarification
entraînerait une perte de revenus. La sous-tarification existe en
fonction du fait que les courtes distances sont tarifées au même
titre que les longues distances. Il n'y a pas de nuance actuellement dans la
tarification entre ceux qui font de courtes distances et ceux qui font de
longues distances. Vous dites que les
affirmations qui sont contenues dans le livre blanc sont
complètement erronées. Un peu plus loin, à l'égard
des coûts, vous dites exactement la même chose. Encore là,
vous dites que ce sont des affirmations gratuites et que les coûts
d'exploitation, que la proposition tarifaire sur les revenus... vous dites:
Maintenant que nous avons constaté que l'effet de la proposition
tarifaire sur les revenus avait été mal évaluée,
examinons la question des coûts. L'analyse du ministère portant
sur l'effet de l'intégration des tarifs et les modes sur les coûts
d'exploitation est erronée et incomplète. En deux pages, vous
nous dites, en résumé, que le gouvernement s'est trompé
quant à son analyse des coûts et quant à son analyse des
revenus. Ce n'est pas vous qui le dites, ce sont des fonctionnaires de la CUM.
Est-ce que vous partagez ce point de vue?
M. Séguin: M. le Président, j'apprécie la
dernière précision que le député vient de faire,
à savoir que ce n'est pas réellement notre mémoire, c'est
celui des techniciens de la CUM. Nous l'avons annexé à notre
mémoire à titre de référence parce que nous avons
appuyé plusieurs énoncés techniques du document
présenté par la CUM. Je crois que la majorité des
questions que vous soulevez en ce moment aurait dû probablement
être posée à ceux qui ont présenté le
mémoire de la CUM, avec tout le respect que je vous dois.
M. Bourbeau: Nous l'avons fait mais, étant donné
que vous avez jugé bon d'annexer toutes ces études à votre
mémoire et que la CUM ne l'avait pas fait, nous n'avions pas les
documents en main. Nous avons questionné le président de la CUM
sur l'ensemble de ces problèmes, mais là nous avons l'occasion de
voir les documents qui ont étayé la thèse de la CUM et
c'est la première fois, en fait, qu'ils nous sont
présentés. Je me demandais si, par hasard -et j'en suis sûr
- vous avez eu l'occasion de les étudier vous-mêmes, puisque vous
les avez annexés.
Finalement, dans le document, il y a une autre chose qu'on doit dire et,
cette fois, je crois bien que vous allez être plus en mesure d'y
répondre. Vous commentez la décision gouvernementale de plafonner
sa contribution à deux titres: premièrement, la plafonner en ce
qui a trait à la contribution des municipalités et,
deuxièmement en réduisant la subvention aux frais du métro
de 100% qu'elle était à 60% et ce, rétroactivement
à 1980.
Vous posez également une question, vous dites que, selon la
proposition gouvernementale, les besoins de l'ORT sont estimés à
54 000 000 $ pour la première année et ses revenus à 57
000 000 $, ce qui laisse une somme de 3 000 000 $ probablement pour administrer
l'organisme. Vous dites: II est à présumer que la
différence servira à payer les coûts d'exploitation de
l'ORT. Vous dites: Qu'adviendra-t-il si les revenus de l'organisme
s'avèrent insuffisants pour compenser la commission de transport,
absorber sa part du service de la dette, etc.? Je vous pose la question,
puisqu'elle est dans votre document: D'après vous, qu'est-ce qui va
arriver si les revenus de l'ORT ne sont pas suffisants pour faire face à
ces obligations?
M. Séguin: Ce qui va arriver, M. le Président,
c'est tout simplement que ce sera un autre organisme de transport qui sera
déficitaire, comme tous les grands organismes de transport que l'on
connaît; il faudra tenter d'approprier des fonds d'autres services pour
payer les coûts de ce transport. Cela est un danger que l'on
soulève tout simplement.
M. Bourbeau: En ce qui concerne la mesure de plafonnement qui est
envisagée par le gouvernement, est-ce que vous pensez que cela aura un
effet sur la quote-part des municipalités?
M. Séguin: Je ne saisis pas bien le sens de votre
question.
M. Bourbeau: Le gouvernement nous dit que, dorénavant, il
va subventionner le transport en commun comme avant, à 40% des revenus
autonomes, mais que sa part à lui ne pourra pas excéder celle des
municipalités. Chez vous, à la CUM, depuis quelques
années, la part du gouvernement est plus élevée que celle
des municipalités. L'an dernier, je pense que le gouvernement a
payé pas loin - je ne me souviens pas des chiffres - de 40% à
Montréal. Alors, selon la nouvelle formule, le gouvernement ne paiera
pas plus que les municipalités, donc la part du gouvernement va baisser
et celle des municipalités devrait normalement augmenter, à moins
que le coût total du transport en commun ne diminue.
M. Séguin: C'est peut-être une incitation à
contrôler davantage les dépenses, justement. Si les
municipalités sont appelées à payer 0,50 $ plutôt
que 0,40 $ ou 0,25 $ ou presque rien, quand on est obligé de payer la
moitié de la facture, on a tendance à contrôler cette
facture d'une façon plus sérieuse que si on n'en paie que les
25%, par exemple. Je crois que le résultat net de cela sera que les
dépenses seront peut-être contrôlées davantage.
M. Bourbeau: Est-ce que vous estimez qu'en donnant le
contrôle de la CTCUM aux élus locaux, ce qui semble être
acquis,
puisque c'est assez clair dans la proposition gouvernementale, vous
allez réussir à contrôler davantage les coûts
d'exploitation de la CTCUM?
M. Séguin: C'est un gros mandat, M. le Président,
mais je crois que, étant plus près des besoins des usagers, les
élus municipaux, les élus locaux seront peut-être mieux
placés pour décider où et quand les fonds seront
utilisés, pour quelle dépense et quelle expansion du service de
transport en commun.
M. Bourbeau: Je vois que vous êtes accompagné par le
maire Ryan, de Montréal-Nord. Je présume que vous n'auriez pas
d'objection à ce que je lui pose quelques questions en ce qui concerne
le secteur spécifique de Montréal-Nord. Montréal-Nord
devait, originalement, être desservie...
M. Séguin: M. le Président, je pense que M. Ryan se
meurt de répondre à une question. La question que vous voulez lui
poser, j'en suis certain, trouvera bonne réponse.
M. Ryan (Yves): À votre service, M. le
Président.
M. Bourbeau: M. Ryan, vous êtes maire de
Montréal-Nord. Dans le plan qui avait été
déposé il y a trois ou quatre ans par le COTREM, enfin par le
gouvernement, il y avait un métro qui devait éventuellement
être prolongé vers Montréal-Nord. C'était, je pense,
ce qu'on appelait le plan Gascon, originalement. Subséquemment, il y a
eu des modifications et il n'y a plus de métro qui va à
Montréal-Nord. On nous dit que, plutôt que d'avoir un métro
vers Montréal-Nord, éventuellement il y aura un métro de
surface. Le ministre nous a annoncé la semaine dernière que,
quant à lui, il privilégierait le métro de surface
plutôt que la prolongation du métro, métro de surface qui
ne passe pas par le centre de la ville comme l'ancien métro, mais qui
passe à l'extérieur de la ville dans des régions à
population plus ou moins dense. Ce métro devait originalement amener les
gens au centre-ville à toute allure, à toute vitesse, mais on
s'est rendu compte subséquemment qu'il ne pourrait pas se rendre au
centre-ville parce que le tunnel sous le mont Royal ne pouvait pas prendre
cette charge additionnelle.
Quant à vous, M. Ryan, étant donné que vous
êtes sur place, que vous êtes maire de Montréal-Nord depuis
longtemps, que vous connaissez les besoins du milieu, lequel des deux moyens
privilégieriez-vous à supposer que le gouvernement aurait les
moyens financiers de réaliser l'une ou l'autre de ces deux
structures?
M. Ryan (Yves): M. le Président, j'aurai une dette de
reconnaissance pour longtemps envers le député, ex-maire,
d'ailleurs, lui-même de Saint-Lambert, pour sa question. Je pense que
c'est connu, et c'est connu de partout, que la population de
Montréal-Nord, à l'heure actuelle, est une des plus
désenchantées sous ce rapport. Je vais vous dire pourquoi, vous
le savez d'ailleurs. Parce que déjà la communauté avait
décidé, dans les bonnes années soixante-dix, de prolonger
le métro jusque là. Le gouvernement précédant
celui-ci a établi un moratoire par la suite. Le gouvernement actuel a
maintenu ce moratoire, a pris quelques autres décisions, et a
apporté quelques autres modifications. Mais, finalement, comme vous
l'avez dit, on a abouti avec un métro régional de surface dont on
nous a dit qu'il serait plus rapide, d'ailleurs moins coûteux, et
construit plus rapidement.
Alors, comme vous l'avez bien dit, les dernières
découvertes des comités... Dieu sait qu'il y en a des
comités là-dessus! je pense qu'avec tout ce qui sort depuis
quelque temps on va être obligé d'avoir un personnel
spécial dans nos villes seulement pour écrire des
mémoires, parce qu'on est toujours pris par surprise, toujours pris de
court, surtout que, de ce temps-ci, c'est une période d'élection.
Il y en a qui ont de la misère, il y en a d'autres qui en ont moins,
mais c'est difficile pour nous de répondre à tout ça. Dans
ce cas-ci, on vient de découvrir, je pense, au COTREM qu'avec le
métro de surface, tel qu'ils sont en voie de le patenter, ça
prendrait deux ou trois minutes de plus à un citoyen de
Montréal-Nord pour se rendre dans le centre-ville que ça prend
actuellement par le métro-bus. Quand on est rendu là, je ne
blâme pas le ministre et le gouvernement de vouloir continuer à
ménager quelques cents de plus et d'y penser deux fois avant de
réaliser le métro régional de surface.
J'ai pris le long chemin pour répondre à votre question
parce qu'il n'y a pas plus belle occasion de vous exprimer notre
désenchantement. Quant à notre choix, notre vrai choix, parce que
ça demeure toujours le même, on a payé le plein prix comme
tout le monde et on aimerait bien avoir un métro souterrain comme tout
le monde, du même type qui est en usage présentement. Si la
volonté des élus de la communauté urbaine avait
été respectée au cours des années et si elle
n'avait pas été compromise par d'autres mégaprojets qui
ont compromis notre crédit pour une bonne série d'années -
ce sur quoi je m'entends avec pas mal de monde ici - il est bien évident
qu'on aurait notre métro et c'est ce qu'on continue de désirer.
Je vous dirai qu'on a déjà posé la question à la
population de chez nous dans un recensement pour avoir un peu le "feeling".
Vous allez me dire que ce n'était pas scientifique comme
recensement; ce sont les scientifiques qui vont nous dire cela mais les
leurs ne le sont pas toujours nécessairement. (17 h 15)
On a interrogé les gens, du temps qu'on nous a parlé du
métro de surface ou qu'on a vanté ses mérites, quoique je
dois dire qu'il n'y a pas eu tellement de consultation, tel qu'il avait
été promis, parce qu'il n'y avait pas tellement de progrès
dans le domaine du métro de surface. On leur a demandé: Qu'est-ce
que vous préférez? Un métro souterrain, comme il en existe
présentement un à Montréal? On aurait pu dire: Le
métro à M. Drapeau, par exemple. Préférez-vous un
métro régional de surface sur la voie ferrée, tel que
proposé par le gouvernement provincial? Je peux vous dire que, dans le
recensement, il y a 18 000 personnes qui ont répondu qu'elles
favorisaient le métro souterrain, il y en a 7000 qui ont répondu
qu'elles favorisaient le métro régional de surface et, vu le
manque de véritable information, il y en a 8000 qui ont dit qu'elles
étaient incertaines.
Nous, au conseil municipal, étant, comme on l'a dit tantôt
je pense, passablement près de nos gens, on a eu l'occasion
d'établir cela souvent. Je pense qu'on continue de militer en faveur du
métro souterrain sans aucune hésitation. On ne comprendra jamais
que tant de gens se soient mêlés de ce qui avait
déjà été décidé pour l'orienter
autrement, pour le défaire et pour nous en priver.
M. Bourbeau: M. Ryan, jusqu'en 1980, le gouvernement
subventionnait 60% des coûts d'investissement, des coûts de
capitalisation du métro et les municipalités de la CUM
absorbaient la différence. On a vu au cours des années, depuis
1965, un développement progressif du métro et, je dirais,
harmonieux, selon un rythme relativement lent, mais soutenu. Tout à
coup, en 1980, le gouvernement a dit: Dorénavant, nous payons 100% des
coûts du métro, et on a assisté à une explosion des
coûts de construction du métro. Dans une commission parlementaire,
je faisais remarquer au ministre qu'on y allait très vite dans la
construction du métro, à coups de 100 000 000 $. Le ministre m'a
dit: Faites bien attention de ne pas aller parler de cela aux gens de la CUM
parce que vous ne vous ferez pas élire à la CUM si vous critiquez
cela.
Si l'on était ici seulement pour se faire élire, on n'en
parlerait peut-être pas, mais regardons l'ensemble des
intérêts des contribuables. Si le gouvernement paie 100% des
coûts du métro, je présume que vous voulez l'avoir demain
matin chez vous et probablement la ville de Pointe-aux-Trembles aussi et on
pourrait le construire jusqu'à Saint-Lambert et jusqu'à
Drummondville, parce que cela ne coûterait rien à personne.
Évidemment, on est porté à penser que cela ne
coûterait rien à personne, mais on sait fort bien que cela
coûte quelque chose à tout le monde. Mais si le gouvernement
revient, comme il nous le dit maintenant, à l'ancienne formule,
où il paie 60% et les municipalités 40% - enfin 30% et 10%
à la région - est-ce que vous souhaitez encore avoir le
métro tout de suite ou si vous préférez y penser un peu?
Est-ce que cela change votre optique par rapport à l'obtention du
métro?
M. Ryan (Yves): Mon optique, M. le Président, demeure
celle qui favorise le métro souterrain. Quant à la forme de
financement, on fera toujours notre part comme on l'a toujours faite et comme
on doit la faire, un peu - je fais un aparté -comme dans la question du
zonage tarifaire. Vous imaginez cela d'ici, un système comme celui qui
est proposé, ce qui fait l'objet du mémoire de ce matin: diviser
la ville de Montréal-Nord, de deux tiers à un tiers, je parle du
territoire, peut-être même au point de vue de la population, de
mettre 50% de la population dans une autre zone et lui faire payer du
côté nord d'Henri-Bourassa, à l'est du boulevard Pie-IX,
plus cher pour se rendre au centre-ville que ceux qui vont rester du
côté sud? C'est une affaire qui nous apparaît absolument
illogique.
En parlant de zones, pour nous ramener aux années trente et
cinquante, si l'on n'a pas d'autres moyens de l'appliquer que ceux dont on a
pris connaissance dans le programme proposé par le gouvernement, je
pense qu'on serait mieux de se raviser parce qu'il n'y a pas un chrétien
d'homme ici, ni à Montréal-Nord, qui va pouvoir vendre cela comme
logique à la population.
Alors, on fera notre part comme on l'a toujours faite. On paie depuis
1967 pour le transport en commun comme toutes les autres municipalités;
j'entends celles qui étaient membres du club du transport, avant
l'arrivée des villes du West Island. Je pense qu'au point de vue de
l'efficacité, au point de vue de l'avenir, même si les coûts
sont un peu supérieurs et passablement supérieurs, je pense que
faire passer un métro de surface entre deux villes comme vous le faites,
et vous y avez fait allusion tantôt, entre deux villes où la
population ne se trouve pas, avec des sytèmes comme ceux que vous
proposez... Vous savez, il y a deux choses actuellement en discussion ce matin.
La commission parlementaire, c'est sur l'organisation régionale du
transport, mais la question que vous me posez, c'est sur l'autre
problème de transport en commun, le métro régional de
surface qui, chez nous... Je sais que c'est interrelié, mais, chez nous,
on tient quand même cela comme deux choses. Notre
préférence pour le métro demeure,
mais l'autre organisation nous fait peur avec son zonage. Regardez cela
de toutes les façons, on est toujours sous-traité. C'est une
population de 100 000 âmes, c'est la deuxième ville la plus
populeuse de l'île de Montréal et on a toujours été,
de ce côté, sous-traité et traité en dernier lieu.
Je pense que c'est mon simple devoir, et sans aucune démagogie, avec le
sens du réalisme le plus fondamental dont je puisse faire preuve, de
vous dire ce que je vous dis ce matin au nom de la population que je
représente.
C'est un métro que ça nous prend parce que le métro
régional de surface ne répondra jamais aux besoins; il va venir
perturber l'autre organisation et le régional va aussi venir perturber
tous les circuits d'autobus qu'on a obtenus au cours des années et pour
lesquels il a fallu se battre. Cela vient perturber cela. Ils sont rendus
qu'ils sont presque en train de nous dire que, dans deux ans, les circuits
d'autobus vont tous aller du nord au sud plutôt que d'aller de l'est
à l'ouest. Alors, tous ceux qui se sont chicanés pendant des
années pour obtenir du transport de surface voient même
déjà, avertis deux ans d'avance, leurs circuits enfin
établis... Et tenez compte de notre population, messieurs, M. le
Président, 100 000, tout cela va être perturbé parce qu'on
nous arrive toujours avec des nouvelles formules tous les ans.
Je vous avoue franchement qu'on est désenchanté,
déconcerté, découragé, mais on va se battre avec la
dernière des énergies pour tâcher d'éviter que ces
choses ne se produisent. Je peux également vous dire, au nom de notre
population, qu'on est toujours prêt à collaborer avec des formules
qui tiennent debout, qui répondent véritablement aux besoins et
qui ne sont pas seulement le produit d'une haute technocratie qui est parfois
bien loin de la réalité, comme certains le disent souvent avec
justesse.
M. Bourbeau: M. Ryan, sur la question du métro de surface
- et je voudrais revenir une dernière fois là-dessus - par
rapport au métro. Évidemment, on nous dit parfois, et c'est ce
que le ministre nous lance parfois, que cela est beaucoup plus
économique de construire un métro de surface qu'un métro,
que cela peut coûter cinq fois moins cher. Il faut quand même se
demander, se dire que le métro de surface n'existe pas, il faut partir
de zéro. Donc, il faut partir soit du centre-ville ou de la station du
Collège. On peut certainement se dire que, même si cela
coûte cinq fois plus cher, si on a à faire cinq fois moins long de
distance pour se rendre à Montréal-Nord, parce que le
métro souterrain est rendu beaucoup plus près de chez vous que
peut l'être un métro de surface qui n'existe pas, on pourrait
probablement faire la preuve qu'il n'en coûte pas plus cher de faire un
mille de métro que cinq milles de métro de surface et je crois
que c'est dans ces termes qu'on doit regarder cela.
D'autre part, le métro a l'avantage qu'il serait au centre de
l'agglomération urbaine, enfin de Montréal-Nord ou de
Saint-Léonard, alors que le métro de surface est condamné
à utiliser les emprises des voies ferrées qui sont
nécessairement à l'extérieur des municipalités et
non pas au centre. On veut demander aux gens de se déplacer pour aller
rejoindre les structures, alors qu'on a l'occasion d'avoir des structures qui
viennent chercher les gens où ils sont. Je pense que c'est important de
faire cette distinction.
M. Ryan (Yves): Je vous rappellerai, je crois l'avoir
mentionné tantôt, que, pour partir de l'est du territoire de
Montréal-Nord - une ville qui est grande comme ma main -il va falloir
que quelqu'un, pour tâcher de monter dans le métro régional
de surface, prenne un autobus à l'est de Lacordaire, transfère
à Charleroi, retransfère pour le métro et s'en aille
transférer à la ligne de Deux-Montagnes pour aller dans le bas de
la ville; c'est pour cela que cela va lui coûter trois minutes de plus.
Si vous voulez vraiment décourager la population d'utiliser le transport
en commun, alors que, d'autre part, M. le ministre dit avec beaucoup de raison
qu'il veut privilégier le transport en commun, je vais vous dire tout de
suite qu'en ce qui concerne Montréal-Nord, vous êtes en train de
le sous-privilégier encore plus qu'il ne l'était. Il y a
peut-être de beaux rêves en couleur qui sont faits sur papier, mais
je vous mets sérieusement en garde, connaissant le territoire et la
population, ses aspirations, ses besoins, et je crois que vous n'avez pas
présentement la formule.
M. Bourbeau: M. Ryan, un dernier commentaire que je voudrais
faire en ce qui concerne ce problème. Je voudrais quand même vous
faire valoir la position du Parti libéral, parce que je sais qu'on va
certainement tenter de faire de la démagogie, tantôt, avec la
conversation qu'on vient d'avoir. Je pourrais vous dire qu'en ce qui concerne
ce problème nous, du Parti libéral, tenons à avoir une
position responsable. Notre position, je pense bien, peut s'exprimer comme
suit: premièrement, nous pensons que ce qui compte en premier lieu
actuellement, avant de se lancer dans des programmes très coûteux
au Québec, c'est de rétablir les finances publiques, mettre de
l'ordre dans les finances, je dirais même éviter la faillite primo
vivere, en ce qui nous concerne. C'est pour cela que nous avons demandé
depuis un certain temps de mettre un frein pour l'instant aux dépenses
colossales que le gouvernement nous promet encore dans le domaine du transport
en
commun en investissant dans les systèmes lourds. Non pas que nous
ne voulons pas donner aux gens de Montréal-Nord satisfaction, justice et
équité, mais je pense qu'avant de se lancer dans des
dépenses de centaines de millions de dollars, et même de 1 000 000
000 $, selon le plan de Belleval, il faut faire les comptes pour voir où
on en est et se demander si, maintenant, on peut acquitter les factures qui
vont nous être présentées dans un an ou deux, une fois que
les finances du Québec auront été rétablies. Cela
peut aller lentement, cela peut aller plus vite, évidemment, cela va
dépendre du parti au pouvoir.
Deuxièmement, ce qu'on devrait faire, c'est rentabiliser les
structures existantes, essayer de retirer le maximum de ce qui existe en termes
de transport en commun, et après cela, quand on aura fait ces deux
opérations, on pourra faire le point pour voir si vraiment la demande
existe. On peut se dire qu'on sera drôlement porté à
regarder attentivement la possibilité de choisir plutôt le
métro que le métro de surface. Je peux également
"dessouffler une balloune" qui a été soufflée il y a
quelques jours, à savoir que le Parti libéral serait porté
à privilégier plutôt l'ouest que l'est de la ville de
Montréal. Je pourrais dire que le Parti libéral ne favorise
personne. Nous pensons que les systèmes de transport doivent aller
où sont les gens, et non pas l'inverse et que, dans la mesure où
la population se trouve beaucoup plus dans l'est que dans l'ouest, il y aurait
certainement, de la part d'un gouvernement libéral, une tendance
très forte à aller desservir en premier lieu les populations les
plus importantes et les plus denses. En ce sens, la population de
Montréal-Nord est une des plus denses qui n'est pas desservie
actuellement. On peut résumer ainsi la position de notre parti a ce
sujet.
M. Ryan, et ceux qui vous accompagnent, au nom de ma formation, je vous
remercie de vous être dérangés et de nous avoir
éclairés. Pour l'instant, en ce qui me concerne, c'est tout. J'ai
l'impression que j'ai des collègues qui auraient peut-être
quelques questions à vous poser. Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: M. le Président, je veux m'associer à
mes collègues qui m'ont précédé pour souhaiter la
bienvenue aux représentants de la conférence des maires de
banlieue. Quant aux dernières interventions du député de
Laporte, elles me suggèrent uniquement un commentaire, c'est que les
Montréalais et les Québécois auront droit, au cours de la
prochaine campagne électorale, à un programme tout aussi ambigu,
de la part du Parti libéral, que celui qu'il nous a
présenté le 13 avril 1981 et, avec de fortes chances, avec les
mêmes résultats qu'il a connus.
La première question que je voudrais poser au président de
la conférence des maires de banlieue est sur l'organisme régional
de transport. Je n'ai pas lu votre position quant à la proposition
gouvernementale qui propose la parité de représentation entre les
municipalités de la communauté urbaine et les
municipalités à l'extérieur de la Communauté
urbaine de Montréal. J'aimerais connaître votre point de vue sur
cet aspect de la proposition gouvernementale.
M. Séguin: M. le Président, quant à la
parité CUM-hors CUM que le député de Gouin mentionne, la
conférence n'a pas d'objection à cette constitution. Ce qu'on a
souligné, c'est qu'à l'intérieur même de la CUM nous
avons cru bon spécifier que la parité que la loi 46 a
accordée au comité exécutif de la CUM devrait aussi
être transportée à l'ORT et quand
éventuellement.
M. Rochefort: Vous n'avez pas d'objection à ce qu'au sein
de l'organisme régional de transport on retrouve autant de
représentants des municipalités de l'extérieur de la
communauté urbaine qu'il y aura de représentants des
municipalités de la Communauté urbaine de Montréal.
Là-dessus, cela ne vous cause pas de problème. Ne croyez-vous pas
qu'il y aura des situations où les intérêts de l'ensemble
des citoyens de la Communauté urbaine de Montréal seront
suffisamment en danger pour qu'il soit nécessaire qu'on ait une
représentation majoritaire exactement comme vous l'avez souhaité
à l'occasion du débat sur la loi 46, où vous souhaitiez
avoir une parité avec Montréal justement pour être en
mesure, selon ce que vous disiez, de défendre vraiment les
intérêts de vos citoyens au sein de cette communauté? Ne
pensez-vous pas que le même raisonnement pourrait s'appliquer à
l'organisme régional de transport? Vous ne croyez pas que, rendus
à l'organisme régional de transport, si jamais il devait voir le
jour, les représentants des municipalités de la banlieue, comme
les représentants de la ville de Montréal, auront les mêmes
intérêts et qu'ils devront ensemble défendre les
intérêts de l'ensemble des citoyens de Montréal et que de
les mettre dans une situation paritaire avec les municipalités extra-CUM
pourrait leur rendre la tâche très difficile pour défendre
les intérêts des Montréalais? (12 h 30)
M. Séguin: Je pense qu'on est consistant dans notre
position. Si on a demandé la parité au comité
exécutif de la CUM par le projet de loi no 46 à l'époque,
c'est qu'on avait tellement souffert d'être le partenaire minoritaire
dans cet organisme
qu'on n'oserait même pas penser imposer cela à nos nouveaux
partenaires dans l'ORT, si et quand éventuellement.
M. Rochefort: Je prends bonne note de votre position. Quant
à votre demande, dans le premier paragraphe, sous le titre "Organisme
régional de transport", où vous demandez justement que la
parité reconnue dans la loi no 46 vous soit reconnue aussi dans la
représentation de la CUM à l'organisme régional de
transport, est-ce que vous ne croyez pas, justement, que c'est une question qui
n'a pas à être débattue ici, mais qui, compte tenu de
l'énoncé politique qui dit que le gouvernement est d'avis que les
représentants locaux devraient être désignés par la
Communauté urbaine de Montréal et qu'on connaît une
nouvelle formule de vote à la communauté, qui est celle de la
double majorité, est-ce que, dis-je, vous ne croyez pas que c'est
là que cette discussion et que cette décision, quant à la
formule de représentation des différentes constituantes de la CUM
pour représenter la CUM à l'ORT, devraient être faites?
M. Séguin: La demande que l'on fait pour un 7/7 à
l'intérieur de l'ORT sur les 14 des 28/31, c'est tout simplement une
police d'assurance pour s'assurer que s'il y avait, par exemple, des absents
à l'assemblée de la CUM - on sait que Montréal est
déjà fortement majoritaire en tant qu'individus -il serait tout
à fait possible qu'on se retrouve avec une composition qui ne serait pas
paritaire et résultant d'une assistance à une assemblée
quelconque.
M. Rochefort: Je suis un peu surpris de vous entendre me faire
cette réponse. Je ne veux pas reprendre le débat de la loi 46,
ici. Quant à moi, je considère qu'il est réglé et
il est comme il est, le projet de loi 46 est devenu loi. Il me semble qu'on ne
peut pas quand même pousser cela jusqu'à ajouter une police
d'assurance dans une éventuelle loi qui concernerait l'organisme
régional de transport. Il me semble que vous avez obtenu ce que vous
souhaitiez, qui était la parité, donc, qui vous assure que, pour
que toute décision soit valable, vous devez être un partenaire
à cette décision au sein de la CUM, et qu'auquel cas,
normalement, vous devriez être en mesure de vous assurer, si le
débat est suffisamment important pour demander une police d'assurance
que tout le monde soit là pour vous assurer une représentation
équitable au sein de l'organisme intérieur de la
délégation de la CUM.
M. Séguin: M. le Président, le député
de Gouin nous permettra d'être peut-être légèrement
paranoïaques et de nous méfier beaucoup des intentions de nos
partenaires, ayant vécu avec eux depuis assez longtemps maintenant.
M. Rochefort: Je me permettrais un seul commentaire, M. le
Président de la conférence des maires de banlieue, c'est que
j'espère que cette attitude ne sera pas l'attitude qui va régner
au sein de la nouvelle CUM, puisque je crois que le débat est clos quant
aux différentes positions qui ont été
énoncées au moment de ce débat et que maintenant il est
important que cet organisme, que cette institution fonctionne rondement et
efficacement, parce qu'il faut bien voir, comme on a eu l'occasion de le dire
pendant le débat, qu'on n'est pas en rivalité, en concurrence, la
banlieue et Montréal, mais bien la CUM par rapport à Toronto,
à New York, à Chicago et à des agglomérations comme
celles-là. Je souhaite que les attitudes de tous les partenaires soient
très positives et qu'on mette nos énergies à faire
fonctionner la CUM à plein rendement pour s'assurer du meilleur
développement économique de l'ensemble de la CUM.
J'aurais une deuxième question qui concerne la participation des
usagers... Oui?
M. Séguin: M. le Président, si vous permettez,
j'espère que la prochaine question concernera le sujet du mémoire
qui est présenté aujourd'hui et qu'on ne rehachera pas le
débat qui s'est fait autour de la commission parlementaire, et du projet
de loi 46. Je sais que le député de Gouin avait certaines
objections à notre demande sur la parité, mais je pense que cela
est un fait accompli; maintenant, il ne faut surtout pas reprendre ce
débat aujourd'hui.
M. Rochefort: Justement, M. le Président. Comme je
l'indiquais au président de la conférence des maires de banlieue,
mon intention n'est pas de reprendre le débat mais justement de
considérer que c'est un débat clos. Compte tenu des nouvelles
dispositions de cette loi, je croyais comprendre que les polices d'assurance
étaient toutes là.
Ma deuxième question porte sur la participation directe des
usagers. Je citerai deux phrases de votre mémoire. Vous dites: Cette
participation n'aura d'effet positif que pour autant que cette intervention ne
viendra pas alourdir davantage les modes décisionnels
préconisés et, deuxièmement, vous dites: La consultation
du citoyen est saine tant et aussi longtemps qu'elle ne sert pas de paravent
à la médiocrité d'une administration. Je voudrais vous
entendre développer cet aspect de la participation des usagers.
M. Séguin: Bien, on a entendu les gens qui ont
présenté le mémoire avant celui
qu'on présente en ce moment dire que pour à peu
près tout le monde, c'est le "pay as you go"; on paie les services qu'on
reçoit. A priori, c'est plein de bon sens et la conférence
endosse cette pensée.
Si on parle de la participation directe des usagers à partir de
maintenant, il semblerait raisonnable de dire: Si quelqu'un fait quatre fois la
distance que fait une autre, il devrait payer trois ou quatre fois le tarif ou
du moins payer un peu plus cher. Tout cela, c'est très beau, mais cela
ne tient pas compte d'une réalité que l'on a vécue depuis
plusieurs années, celle que j'ai mentionnée tantôt. C'est
qu'il y a longtemps que depuis 1967, comme le disait tantôt mon
collègue, M. le maire Ryan, les participants ou les membres du club du
métro paient la note; depuis 1970, d'autres municipalités se sont
jointes en tant que membres de la CUM et finalement le West Island participe
à part entière aux coûts du métro. Il y a un
historique de déboursés, lesquels déboursés doivent
entrer en ligne de compte quand on parle de la participation directe des
usagers parce que les usagers sont aussi bien ceux hors CUM que ceux de la CUM
et il faut aussi que les usagers hors CUM reconnaissent le fait qu'ils ont
bénéficié de ces services pendant un grand nombre
d'années sans défrayer la moindre note.
M. Rochefort: Oui, je comprends dans votre réponse que
vous faites allusion à la question des tarifs et de la participation
financière, et je partage en partie votre avis, mais je me questionnais
surtout sur la participation directe des usagers, des citoyens à
l'orientation des services du transport collectif; à la page 7 de votre
mémoire. Finalement, la question que je me pose à la suite de la
lecture de ces deux paragraphes que j'ai faite tantôt, c'est: Quelle
forme de participation aux grandes orientations souhaitez-vous voir retenue
pour les citoyens, pour les usagers, puisque vous dites que cette participation
n'aura d'effets positifs que pour autant que cette intervention ne viendra pas
alourdir davantage les modes décisionnels préconisés et
que la consultation du citoyen sera saine tant et aussi longtemps qu'elle ne
servira pas de paravent à la médiocrité d'une
administration? Quelle forme de participation des usagers aux discussions des
orientations du transport en commun dans la grande région de
Montréal souhaiteriez-vous voir retenue?
M. Séguin: Je pense que la participation de la population,
usagers ou non, ou bénéficiaires non-usagers, si vous voulez,
doit se faire par l'entremise des élus locaux, des élus
municipaux. Cette participation doit se faire par l'entremise des maires des
municipalités dans un premier temps.
M. Ryan (Yves): Si vous me permettez, M. le Président, je
citerai un exemple bien précis. Dans le cas du métro
régional de surface, il a été formellement promis à
la population de Montréal-Nord qu'elle serait consultée et
informée. On avance dans le projet sans que jamais le principe comme tel
ne fasse vraiment l'objet de consultations et d'authentique information de la
population de Montréal-Nord. C'est un exemple que je prends et je pense
que cela illustre bien ce que dit monsieur. Ce sont sûrement les
institutions les plus rapprochées du peuple. C'est le gouvernement local
qui est le mieux placé, en collaboration avec les autres qui proposent
des choses, pour organiser ces consultations localement de façon
qu'elles soient efficaces et valables.
M. Rochefort: Donc, vous considérez, si je peux conclure
sur cet aspect de la question, que la représentation des usagers, des
citoyens, devrait se faire par l'intermédiaire uniquement de leurs
élus locaux.
M. Ryan (Yves): Qui eux peuvent, en retour, former toutes sortes
de comités pour justement assurer l'input et la participation des
citoyens. Les élus ne parlent pas toujours ex cathedra, ils doivent
s'alimenter à la bonne source. Ce n'est pas seulement une fois par
quatre ans qu'on a la bonne source, il faut y aller une fois de temps en
temps.
M. Rochefort: Comment voyez-vous cela le contrôle des
élus sur la CTCUM? Quelle forme ce contrôle pourrait-il
prendre?
M. Ryan (Yves): Via le comité exécutif.
M. Rochefort: Que la CTCUM en relève directement, mais
est-ce que vous croyez qu'on devrait changer les commissaires de la CTCUM pour
des élus membres du conseil de la communauté urbaine, par
exemple?
M. Séguin: Je pense qu'on déborde un peu le
débat. La CTCUM étant un organisme qui doit offrir un service
à la population, il est tout à fait raisonnable que les
représentants officiels de cette population aient un mot à dire
quant à l'étendue du service, la qualité du service, le
quand et le pourquoi des dépenses en particulier de ces services.
M. Rochefort: Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous dites, messieurs, je pense que
vous avez raison, que sur le territoire de la CTCUM il existe des services de
transport en commun qui
bénéficient également à des
municipalités et à des citoyens qui sont en dehors de ce
territoire. Vous dites que c'est injuste, et d'autant plus injuste que cela
fait longtemps que cela existe. Vous dites par ailleurs: Nous, on voudrait un
moratoire de deux ans. Est-ce que vous êtes encore prêts à
attendre deux ans avant que ces municipalités collaborent ou bien si
vous avez une formule immédiate pour y remédier de façon
à faire participer ces intervenants?
M. Séguin: M. le Président, la conférence
des maires n'a pas de formule miracle immédiate qu'on peut mettre en
application maintenant. Ce qu'on a tenté de souligner en demandant un
moratoire d'au moins deux ans, c'est une absence importante en ce qui concerne
la coordination et la concertation qui se sont faites. Cette absence est
l'input de la CTCUM qui est le plus grand exploitant d'un service de transport
en commun. Je crois que cela a été un manque sérieux. Les
deux ans de moratoire leur donnerait l'occasion de donner un input valable qui
serait pour le bénéfice de tous. On est prêt à
attendre la contribution des participants hors CUM jusqu'à ce que cet
input se soit fait entendre.
M. Leduc (Saint-Laurent): Dites donc, on a attendu assez
longtemps, on peut attendre encore deux ans avant qu'ils participent aux
dépenses.
M. Séguin: C'est un peu cela.
M. Leduc (Saint-Laurent): Cela va.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: M. le Président, M. le député
de Gouin a couvert la question que je voulais couvrir mais je voudrais, face au
petit scénario, au petit numéro que nous a joué tout
à l'heure le député de Laporte, qui était
très partisan d'ailleurs, mettre en garde les gens...
M. Bissonnet: Partisan, vous l'êtes beaucoup plus que
nous.
M. Dussault: Je vous remercie. Je voudrais mettre en garde les
gens de Montréal-Nord et leur maire. S'ils n'ont pas eu l'occasion de
suivre à la télévision durant les derniers jours tous les
débats qui ont eu lieu à cette commission, ils ne seront pas en
mesure de constater des contradictions qui existent de ce côté. Ce
matin, on vous encourage à travailler très fort, de ce
côté derrière vous, pour obtenir votre métro.
Pourtant, dans les jours qui ont précédé, on nous a dit
ici, que même en sacrifiant le projet de métro, pour M. le
député de Saint-Laurent, ils ne privilégiaient pas les
équipements lourds. Alors, c'est deux poids, deux mesures: quelqu'un
vient parler ici dans un sens, on parle le même langage; quelqu'un vient
parler dans un autre sens, on parle un autre langage.
Alors, M. le maire de Montréal-Nord, on a bien entendu votre
point de vue. Vous le défendez et c'est votre droit. Ne vous laissez pas
leurrer par ces gens qui ont intérêt à vous raconter des
histoires et qui ne travaillent pas nécessairement dans le sens que vous
désirez. C'est tout ce que je voulais dire, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Châteauguay. M. le député de
Jeanne-Mance. (12 h 45)
M. Bissonnet: M. le Président, je voudrais souhaiter la
bienvenue à mes ex-collègues de la conférence des maires
et en particulier à ceux qui sont du territoire de l'est: MM. les maires
de Saint-Léonard et de Montréal-Nord. Les questions que j'ai
à poser au président, c'est que le président de la
communauté urbaine a soumis un mémoire personnel à cette
commission où il faisait état de la disparition du COTREM. Pour
reprendre ma question, en 1979, comme le maire de Montréal-Nord l'a dit,
il y avait un projet de métro qui faisait l'objet des décisions
de la communauté urbaine. Il y a eu un projet déposé par
le ministre de Belleval, à l'époque, et il y a eu encore une
deuxième fois le même projet qui a été
reproposé à la population. Ce projet là a
été dûment signé entre le gouvernement du
Québec et la communauté urbaine.
Le président de la CUM nous disait qu'il proposerait... -
à l'intérieur du livre blanc qui a été
déposé - il y a le BTM, le COTREM - selon le président de
la CUM, il y aurait lieu de faire disparaître le COTREM. Est-ce que vous
avez, à l'intérieur de la conférence des maires,
discuté de l'organisme COTREM?
M. Séguin: De l'organisme COTREM?
M. Bissonnet: De l'organisme, du COTREM qui est impliqué
actuellement dans le transport en commun et du BTM. Vis-à-vis le BTM et
le COTREM, est-ce que la conférence des maires a étudié la
situation?
M. Séguin: Étudié la situation sous quel
angle? Je ne vois pas le fond de votre question.
M. Bissonnet: En fait, il y a deux organismes. Il y a la CTCUM.
À l'intérieur de la CTCUM, il y a le BTM qui est le consultant de
la CTCUM en transport en commun et en transport nettement
particulier. Est-ce qu'il est nécessaire d'avoir COTREM dans
l'avenir, compte tenu du groupe BTM, groupe qui contient à peu
près un centaine d'ingénieurs...
Une voix: 325.
M. Bissonnet: ...325 ingénieurs. Là on a deux
organismes, est-ce qu'il serait utile de conserver le BTM et le C) TREM d'autre
part, qui est un consultant auprès du ministre des Transports en
matière de transport, dans le nouvel organisme qui est
proposé?
M. Séguin: M. le Président, la conférence
des maires ne préconise pas d'abolir l'un ou l'autre des organismes,
soit COTREM, BTM ou CTCUM. Je pense qu'il y a peut-être de la place pour
les trois organismes, pour autant qu'ils se respectent entre eux et qu'ils se
parlent et qu'il y ait une certaine coordination des besoins de la
population.
M. Bissonnet: Cela va. En ce qui a trait à la zone
tarifaire. Vous avez parlé tantôt d'une île, une ville.
Est-ce que vous vous prononcez de façon définitive sur la
proposition qui est faite au sujet de cette zone tarifaire où on
retrouve à l'intérieur de la même île, six zones
où, en fait, le citoyen qui demeure à Pointe-aux-Trembles, qui
est maintenant un résident de Montréal est dans la zone 5, alors
que, par contre, Montréal-Nord et Montréal sont divisées
en deux quartiers. Est-ce que vous vous prononcez définitivement contre
un seul tarif à l'intérieur de la CTCUM, à
l'intérieur de la ville de Montréal, ou des tarifs
divisés?
M. Séguin: M. le Président, en ce qui concerne les
zones tarifaires, il y a certainement plusieurs façons qui peuvent
être utilisées pour tenter d'être le plus équitable
possible envers tout le monde.
La position que la conférence des maires a prise officiellement,
c'est qu'elle retient une seule zone tarifaire sur tout le territoire de la
CUM. Cela serait suffisant compte tenu du fait que ces mêmes participants
à l'intérieur du territoire de la CUM ont déjà un
historique de paiement qui est déjà vieux de plusieurs
années.
M. Ryan (Yves): Si on fait la mise de fonds, on ...
M. Séguin: C'est la mise de fonds qui a déjà
été faite comme cela.
M. Ryan (Yves): Et on n'aurait pas l'intérêt?
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre.
M. Clair: Oui. M. le Président, le maire de
Montréal-Nord a fait un vibrant plaidoyer en faveur du plan qu'on avait
appelé, je pense, le plan de M. Gascon, du nom du président du
BTM, qui prévoyait la bifurcation de la ligne no 5 vers
Montréal-Nord...
M. Ryan (Yves): Le plan d'envoyer le métro où il y
avait des gens.
M. Clair: Pardon?
M. Ryan (Yves): Le plan d'envoyer le métro où il y
avait des gens.
M. Clair: Oui, je comprends que cela fasse partie de votre
plaidoyer, effectivement.
M. Ryan (Yves): Le plan Gascon.
M. Clair: Maintenant, depuis 1979, le gouvernement a
déposé le plan de transport intégré de 1979 au
sujet duquel, comme on le soulignait, il y a eu un accord de signé avec
la Communauté urbaine de Montréal. Si je comprends bien, le
dépôt du schéma d'aménagement pour la
Communauté urbaine de Montréal prévoit effectivement la
ligne no 6 et la ligne no 5 en direction d'Anjou. Connaissant le point de vue
formel du maire de Montréal-Nord, j'aimerais poser deux questions, l'une
au maire de Saint-Léonard et l'autre au président de la
conférence des maires de banlieue.
Est-ce que le maire de Saint-Léonard partage le point de vue du
maire de Montréal-Nord quant à l'orientation du métro
souterrain, de la ligne no 5? Je m'adresse maintenant au président de la
conférence des maires de banlieue. À défaut d'avoir pu
recevoir un mémoire de la Communauté urbaine de Montréal,
relativement à la position de la conférence des maires de
banlieue sur le choix d'un métro souterrain vers Montréal-Nord ou
d'un métro souterrain vers Anjou et d'un métro de surface vers
Pointe-aux-Trembles, est-ce que ce choix a été
arrêté par la conférence des maires de banlieue en faveur
ou contre l'une ou l'autre des possibilités ou si c'est encore vague?
J'aimerais vous entendre à ce sujet. D'abord le maire de
Saint-Léonard et ensuite le président de la conférence des
maires de banlieue.
Autrement dit, pour le président de la conférence des
maires de banlieue, quel est l'état actuel du dossier? Est-ce que le
maire de Montréal-Nord plaide une cause perdue, puisque la
communauté aurait accepté la proposition du gouvernement ou si,
au contraire, il plaide encore une cause qui est entendue par la
Communauté urbaine de Montréal?
M. Di Ciocco (Antonio): M. le Président, en ce qui
concerne la position de la ville de Saint-Léonard, vous devez
peut-être reconnaître que même la ville d'Anjou a
été désignée par la communauté urbaine comme
un centre-ville satellite de l'est de la ville de Montréal. Je pense que
nous avons fait un excellent travail en implantant le centre-ville satellite
à Saint-Léonard; déjà, on a le building Allstate
qui a une valeur de plus de 3 000 000 $ à 4 000 000 $; on va implanter
dans les prochains mois, par exemple, le plus grand marché public
à Québec. Alors, on a des investissements majeurs et c'est pour
cette raison que moi, comme maire, ainsi que les citoyens exigent que le
prolongement de la ligne no 5 s'oriente vers Anjou.
Votre question est un peu difficile à répondre parce qu'on
ne voudrait pas, par exemple, créer des divisions avec les autres maires
qui appartiennent à la conférence, mais, comme premier citoyen de
la ville de Saint-Léonard, je voudrais défendre le prolongement
de la ligne no 5 qui pour moi est prioritaire. Deuxièmement, on veut
qu'elle s'oriente vers Anjou, en passant par Saint-Léonard.
Le Président (M. Boucher): M. Séguin.
M. Séguin: M. le Président, le ministre a mis le
doigt sur un point assez sensible, compte tenu du fait que je suis justement
assis entre deux parties. Je trouve la question un peu difficile, mais je vais
tenter d'y répondre de toute façon. Je suis tout à fait
tenté de dire: Aucun commentaire, mais je vais vous offrir un
commentaire et j'espère que cela répondra à votre
question.
La position officielle de la conférence des maires se veut
d'abord une position... Il faut comprendre ici le pourquoi de l'existence
même de la conférence des maires. La conférence des maires
a été formée pour s'assurer que les maires des
municipalités environnantes de la ville de Montréal puissent se
réunir, se parler, se concerter et se défendre contre les
agressions de la ville de Montréal.
Quand il y a une position claire, nette et précise où les
municipalités de banlieue ont un certain intérêt et
Montréal un intérêt différent, la position de la
conférence des maires est très claire. Cependant, il arrive,
à l'occasion, un dossier comme celui que vous avez habilement
soulevé où certaines municipalités membres de la
conférence s'opposent entre elles. La position officielle de la
conférence à ce moment-là, c'est de laisser les
municipalités concernées présenter leur cas
individuellement et le tout est jugé au mérite par les
gouvernements supérieurs. La position de la conférence, c'est
qu'elle ne se prononce pas officiellement pour l'une ou l'autre des
municipalités.
M. Clair: Une toute dernière question. Après la
signature d'un accord avec la Communauté urbaine de Montréal,
après que le BTM eut orienté - c'est mon impression; je n'ai pas
la preuve, mais j'imagine - ses travaux en fonction de la ligne no 5 vers
Anjou, vous paraîtrait-il raisonnable, à ce moment-ci, recevant
avec intérêt les commentaires du maire de Montréal-Nord et
ses préoccupations légitimes, que la Communauté urbaine de
Montréal demande au BTM, puisque cet organisme relève de la
Communauté urbaine de Montréal, de reprendre les discussions sur
l'à-propos de prolonger la ligne 5 vers Anjou ou vers
Montréal-Nord, alors que j'avais cru comprendre que les orientations
tant au niveau de la Communauté urbaine de Montréal que du
gouvernement avaient été prises? Est-ce que la conférence
des maires de banlieue considérerait que, pour donner une nouvelle
occasion de débattre la question ou de réviser l'ensemble du
dossier, le BTM soit mandaté pour réviser tout cela et reprendre
les études tant en ce qui concerne Montréal-Nord que la ville
d'Anjou ou s'il vous apparaîtrait que ce serait une étude de
planification de plus et que cela ne pourrait que répéter celles
qui ont déjà été faites?
M. Séguin: M. le ministre, la conférence des maires
recevra favorablement toute proposition visant à tenter
d'améliorer le service de l'une ou l'autre de ses municipalités
membres, pour autant que ce ne soit pas au détriment d'une autre
municipalité membre.
M. Clair: M. le Président, en terminant, deux ou trois
commentaires rapides, parce que je vois qu'il est presque 13 heures.
Premièrement, même si on n'a pas parlé beaucoup de la
dimension financière du transport en commun dans la répartition
de la facture, je voudrais assurer la conférence des maires de banlieue,
comme j'ai eu l'occasion de le faire lorsque j'ai eu le privilège de les
rencontrer, que l'objectif du gouvernement n'est pas d'alourdir la charge des
municipalités de la Communauté urbaine de Montréal.
D'ailleurs, je me suis fais reprocher tout au cours de ces auditions le fait
que le gouvernement voulait centrer tous ses efforts pour soulager sa facture
et celle de la Communauté urbaine de Montréal. Je comprends que
tout le monde voudrait payer moins et avoir le plus possible. C'est très
légitime d'avoir cette attitude. Je veux, en tout cas, vous assurer que
notre objectif n'est certainement pas d'alourdir indûment les taxes
foncières de la Communauté urbaine de Montréal. On est
pleinement conscient qu'elles sont très élevées.
En ce qui concerne le choix entre la ligne 5 et la ligne 6, j'ai eu
l'occasion d'indiquer, comme le signalait le député de
Laporte, que, dans la mesure de l'éclairage qui est fourni au
ministre des Transports et aussi, je pense, dans l'esprit du décret du 4
mars 1980, j'ai plutôt tendance à favoriser la ligne no 6.
Cependant, comme au premier chef cette décision d'orientation quant
à la priorité à la ligne no 6 ou no 5 et non pas quant
à la bifurcation, mais quant à la priorité dans
l'ordonnancement des travaux... Alors, pour favoriser le débat, j'ai
indiqué en cours de commission que nous n'avions aucune objection
à rendre publique, dès que cela pourrait être
consigné dans un même document, toute l'information pertinente sur
quelle ligne devrait recevoir la priorité, compte tenu de la
capacité financière de tout le monde qui est limitée.
Puisque le plan triennal de la Communauté urbaine de Montréal
prévoit, en 1982, 71 000 000 $ d'investissements, en 1983, 86 000 000 $,
en 1984, 98 000 000 $, c'est évident que les investissements sont
limités.
Pour terminer sur une note humoristique, je dirais, il y a un citoyen
qui m'a envoyé un extrait d'un article du journal Le Droit, d'Ottawa, du
vendredi 15 octobre 1982, quant à l'avenir de l'automobile et du
transport en commun. Je lis parce que c'est intéressant. Cela s'intitule
"L'autobus plutôt que l'automobile, l'essayer c'est l'apprécier".
Voilà l'article: "L'appétit vient en mangeant et c'est aussi ce
que prétend OC Transpo qui vient de démontrer que 73% des
automobilistes qui utilisent normalement leur voiture apprécient le
service d'autobus après l'avoir expérimenté durant un
mois. OC Transpo avait choisi ses 100 cobayes au moment où ils garaient
leur voiture dans un stationnement du centre-ville. Ils se sont vu offrir
gratuitement chacun un laissez-passer de la société pour un mois
à condition d'accepter de répondre à certaines questions
après. Les commentaires entendus furent alors, selon le
communiqué, des plus louangeurs. Le service d'autobus est plus flexible
que le covoiturage, c'est meilleur marché, l'express est fabuleux, finis
les problèmes de stationnement furent quelques-uns des propos les plus
souvent émis. (13 heures)
La gamme moyenne des travailleurs rejoints par le sondage se situait,
à 43%, pour des individus entre 18 et 25 ans; pour les revenus, 36%
gagnaient 10 000 $ ou moins par année et 32% gagnaient entre 10 000 $ et
20 000 $. Les classes les plus aisées n'étaient cependant pas
épargnées; 21% des automobilistes qui ont accepté le
laissez-passer d'un mois gagnaient entre 20 000 $ et 30 000 $ et 4%, entre 30
000 $ et 40 000 $. OC Transpo précise que le sondage a été
fait par une firme indépendante, ce qui en augmente encore, selon les
dirigeants de la société, la véracité." Juste pour
dire qu'à Ottawa, en tout cas, ils ont fait des expériences qui
peuvent nous amener à ne pas désespérer. Tous les
automobilistes, un jour, ne se convertiront pas au transport en commun, mais,
avec des mesures d'incitation, c'est possible qu'une bonne partie de la
population soit desservie par le transport en commun, par des méthodes
douces d'incitation qui, sur cela, ont fait l'unanimité, devrait
être augmenté au cours des prochaines années. En terminant,
M. le Président, je voudrais remercier M. Séguin, M. le maire de
Saint-Léonard, M. le maire de Montréal-Nord, d'être venus
nous communiquer leur point de vue aussi franchement qu'ils l'ont fait en
commission parlementaire. Je vous remercie.
M. Séguin: M. le Président, cela a
été un plaisir pour nous de présenter le mémoire.
Si le ministre me le permet, j'aimerais tout simplement réitérer
notre demande au gouvernement de respecter un moratoire de deux ans afin de
mieux coordonner les vrais besoins de tous les intervenants. Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci. Alors, au nom de tous
les membres de la commission...
M. Ryan (Yves): Un mot additionnel simplement pour souligner que
ma défense des intérêts de la population de
Montréal-Nord en matière de transport en commun n'est aucunement
influencée ou inspirée par des motifs de partisanerie politique.
Je ne voudrais surtout pas que ce débat et cette question si importante
en soient jamais entachés et que surtout j'en sois jamais
responsable.
Le Président (M. Boucher): Merci. Alors, au nom de tous
les membres de la commission... M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: Seulement quelques secondes. Si M. le maire de
Montréal-Nord avait compris que je voulais le taxer de partisan, je
pense que cela a été vraiment une mauvaise compréhension.
C'est vraiment au député de Laporte que c'était
attribué et uniquement à lui, M. le maire.
M. Ryan (Yves): En tant que je suis concerné, je vous
exonère tous de tout blâme sous ce rapport.
Le Président (M. Boucher): On ne commencera pas cela. La
commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures alors que nous
entendrons la ville de Repentigny.
(Suspension de la séance à 13 h 03)
(Reprise de la séance à 15 h 06)
Le Président (M. Boucher): À l'ordre,
s'il vous plaît!
Ville de Repentigny
À la suspension de 13 heures, j'ai annoncé qu'à la
reprise j'appellerais la ville de Repentigny, représentée par M.
Louis-Philippe Picard, maire, Mme Monique Leroux, conseiller, M. Maurice
Rivest, conseiller, M. Georges Nevischiuck, conseiller, M. Richard Maillette,
conseiller, M. Philippe Deschamps, conseiller, M. Louis Lepage, gérant
de la municipalité, M. Yvon Deschamps, gérant adjoint de la
municipalité, M. Jean Fafard, greffier, et M. René Landry.
M. le maire, je vous laisse la parole pour faire l'exposé de
votre mémoire et la présentation des gens qui vous accompagnent.
Je pense qu'il en manque.
M. Picard (Louis-Philippe): Oui, M. le Président. Je vous
remercie de l'occasion que vous nous offrez de discuter avec les membres de la
commission des transports du problème du transport dans notre
région. Vous avez ici, à ma droite, M. le maire Laurin, de
Charlemagne, qui appuie le rapport que nous avons fourni et qui va nous
assister dans nos délibérations.
M. le Président, MM. les membres de la commission, les citoyens
de la ville de Repentigny croient à une forte identification à
leur coin de pays. Pour nous, demeurer à Repentigny, ce n'est en aucune
façon demeurer à Montréal. Géographiquement, nous
ne sommes pas sur l'île de Montréal; politiquement, nous ne sommes
pas membres de la Communauté urbaine de Montréal. Nous ne nions
pas toutefois faire partie d'une aire d'influence métropolitaine, quelle
que soit son étendue, mais nous avons toujours cru, et nous le croyons
encore, qu'il est de notre devoir et qu'il en va de notre identité de
nous opposer et de résister aux forces centripètes qui tentent de
nous attirer dans le creuset montréalais.
Le gouvernement actuel, par sa politique proposée sur le
transport en commun à Montréal, privilégie une approche
purement technocratique. Sans tenir compte des particularités humaines
et sociologiques de notre région, il propose de fondre en un seul bloc
toutes les municipalités situées à l'intérieur de
la région métropolitaine de recensement.
M. le Président, nous refusons catégoriquement une telle
attitude. Les citoyens de Repentigny, tel qu'ils l'ont éloquemment
indiqué dans un sondage, ne veulent pas être forcés,
à leur corps défendant, à participer à des
organismes suprarégionaux de régies de transport en commun. Mais
cette réaction n'est pas seulement un sursaut d'identité. Elle se
fonde aussi sur des réflexions et des convictions profondes.
La ville de Repentigny se retrouve à l'extrémité
est de la zone d'intervention de l'organisme régional de transport. Sa
population ne représente pas plus que 1% de la population totale du
territoire du même organisme. À ces titres, nous ne
prévoyons pas recevoir un service de transport en commun des plus
élaborés. Par contre, nous avons la certitude que l'effort
financier qui sera exigé de notre population n'aura aucune mesure avec
les services qu'elle recevra.
La réflexion gouvernementale porte sur une interrogation que nous
aimerions, M. le Président, reprendre au compte de la ville de
Repentigny. En effet, comment assurer le transport en commun tout en limitant
les coûts non plus cette fois pour Montréal ou le gouvernement de
la province de Québec, mais bien pour la population de Repentigny?
Nous ne pouvons pas apporter une réponse unique à cette
question. Nous rappelons cependant qu'un rapport préparé par le
comité d'étude sur l'occasion d'établir une corporation
intermunicipale de transport sur le territoire situé au nord-est de
l'île de Montréal, formé par le présent gouvernement
par arrêté en conseil daté du 2 novembre 1978, portant sur
cette question, a déjà été présenté
au ministre au mois de février 1981. Ce mémoire concluait
à une libéralisation des permis et des tarifs et à la
possibilité pour les transporteurs privés de traverser notre
territoire à "porte ouverte".
Mais, M. le Président, quelle que soit la solution à notre
problème, il est certain que nous nous opposons fermement à celle
qui actuellement nous est proposée par le gouvernement, parce qu'elle ne
répond pas aux besoins d'un transport en commun à un moindre
coût pour notre ville, parce qu'elle va à l'encontre du
désir de nos citoyens d'éviter les organismes géants et
niveleurs, parce qu'elle implique l'absorption de notre identité dans le
creuset montréalais, parce qu'elle ne permettra pas à notre
région d'être maître du développement et du
coût de son transport en commun et parce qu'elle relève d'une
pensée technocratique qui privilégie l'approche des grands
ensembles au détriment d'une réalité peut-être moins
spectaculaire, mais plus humaine.
M. le Président, c'est le document que notre région veut
soumettre respectueusement à l'attention de la commission parlementaire
sur le transport.
Le Président (M. Boucher): Merci beaucoup, M. Picard. M.
le député de Vimont, adjoint parlementaire aux Transports.
M. Rodrigue: M. le Président, je veux d'abord saluer les
représentants de la ville de Repentigny qui ont bien voulu accepter de
présenter un mémoire à cette commission et en même
temps leur signaler que le ministre a pris connaissance de leur mémoire,
mais
qu'il s'excuse de ne pouvoir être présent à ce
moment-ci, étant donné qu'il est retenu au Conseil des ministres.
Cependant, autant le ministre que les membres de son cabinet ont pris
connaissance du mémoire. À la suite des échanges que nous
aurons à la période des questions, ces points de vue leur seront
également acheminés s'il y a des choses, des précisions
que vous apportez au mémoire que vous avez présenté.
Je pense que vous posiez la bonne question dans votre mémoire,
à la page 3, lorsque vous dites: "En effet, comment assurer le transport
en commun tout en limitant les coûts, non plus cette fois à
Montréal, mais bien à Repentigny?" La proposition gouvernementale
soumet une structure en deux paliers, finalement: un premier palier, qui est le
palier local, et là où il existe déjà des
commissions de transport, comme c'est le cas à Laval où j'habite,
ou encore à Montréal, à la Communauté urbaine de
Montréal, ou encore sur la rive sud. Les municipalités de ces
territoires se regroupent pour administrer la commission de transport local.
Évidemment, la question qui se pose est la suivante: Y a-t-il un besoin
de transport local à Repentigny? Justement, la réforme ne
répond pas à cette question. Elle dit aux élus locaux: II
vous appartient de décider du niveau de services. Si vous vous regroupez
entre municipalités et si vous décidez qu'il y a des besoins en
termes de transport en commun à l'intérieur de votre MRC ou d'un
groupe de municipalités données, vous avez la possibilité
d'y répondre en établissant un système de transport en
commun local et à ce moment-là, évidemment, de
décider des modes de transport en commun à utiliser. (15 h
15)
On a parlé depuis le début - je pense bien que vous avez
été conscients de ces discussions - de modes légers de
transport en commun; exemple, l'utilisation de voitures taxis, d'autobus de
petite dimension, etc.
Il est évident qu'une région comme Repentigny, au
même titre qu'une région comme Laval ou encore comme l'ouest de
Montréal, a des besoins différents des autres. Nous comprenons
très bien ça et c'est pourquoi, dans le projet de réforme,
nous proposons que les autorités locales aient la possibilité de
déterminer elles-mêmes le niveau de service dont elles pensent
avoir besoin.
Je pense que, dans vos commentaires, vous vous référez
davantage au palier régional qui a été proposé
finalement. Là, vous craignez que cette structure régionale n'en
vienne à vous imposer des services dont vous ne jugeriez pas avoir
besoin et, par voie de conséquence, des coûts que vous ne voudriez
pas absorber. Je pense que c'est un peu ça, finalement, qui est votre
crainte, fondamentalement, si je ne m'abuse.
Là-dessus, il y a eu des suggestions de faites devant cette
commission, voulant que la structure régionale soit une structure non
décisionnelle. C'est une question qui va être examinée
attentivement par le ministre et le gouvernement. Cependant, il y a un facteur
très important qu'il faut considérer. C'est qu'il nous
apparaît assez impensable - je citais le cas de Laval, parce que j'habite
Laval - que, par exemple, l'ORT décide de bâtir une ligne de
métro de cinq ou six milles de long à Laval - compte tenu des
prix que ça coûte - sans avoir l'accord des autorités
locales, c'est-à-dire celles de Laval en l'occurrence. Car, comment
voulez-vous marier, à l'intérieur du tissu urbain, de tels
investissements et de tels équipements, si les autorités locales,
qui ont la responsabilité finalement de faire le plan d'urbanisme, ne
sont pas consultées et n'ont pas à donner leur accord pour une
telle intégration? Cela nous apparaîtrait un peu farfelu et
abusif. Dans ce sens, nous partageons certainement votre point de vue qu'il ne
devrait pas y avoir possibilité, au niveau des autorités
régionales, d'imposer des services non désirés à
une municipalité.
Ce sont les deux remarques que je voulais faire à la suite de la
présentation de votre mémoire et peut-être, finalement,
vous poser une question. Lorsque vous abordez l'aspect de l'effort financier,
est-ce qu'il y a eu des évaluations de faites concernant l'effort
financier qui pourrait être requis? Est-ce qu'il y a eu des analyses de
faites sur ce plan, en termes d'achalandage dans votre région et du type
de services qui devraient être rendus à ces populations et des
coûts que cela entraînerait?
M. Picard: Oui justement, M. le Président, on est heureux
d'arriver avec une réponse aux questions qui sont posées parce
que dans notre région, comme nous l'avons expliqué dans le
mémoire, nous avons fait une enquête sur le transport public.
C'est le gouvernement qui nous avait mandaté par arrêté en
conseil, en 1978. Alors nous arrivons riches d'une documentation qui n'a
peut-être pas été celle de toutes les municipalités
qui sont venues faire valoir leur point de vue.
Alors, nous avons au tableau 01 du rapport que nous avons
déposé au ministère des Transports au mois de
février 1981 - je parle du rapport sur le transport public -document qui
a été préparé par notre groupe régional,
intermunicipal, et parachevé par une firme qui a été
engagée par le gouvernement, que Repentigny, avec sa population
d'environ 30 000, a des déplacements vers Montréal de l'ordre de
327 dans une journée; retour-destination: 343. Alors, si l'on prend un
siège d'autobus aller-retour, cela veut dire que nous utilisons environ
330 sièges d'autobus par jour, pour
un apport de la municipalité qui est exigé par la CTCUM
d'environ 247 000 $ par année. Alors si l'on veut chiffrer, on va faire
des chiffres: 247 000 $ divisés par 330 usagers/jour par siège,
cela représente 700 $ de subvention par la ville de Repentigny pour les
systèmes de transport, par siège.
Si l'on continue le même raisonnement, puisque vous demandez des
chiffres, nous avons engagé des comptables agréés pour
faire l'analyse des chiffres qui étaient dans le rapport. Ces 700 $
représentent environ 20% de la participation du gouvernement pour
l'usager. La municipalité représente 20%. Alors si vous arrivez
à 100%, un siège d'autobus coûte au gouvernement, à
l'usager et à la ville de Repentigny 3500 $ à 4000 $ par an. Ce
qui veut dire qu'un transporteur automobile qui prendrait quatre passagers par
jour aurait un revenu d'environ 12 000 $ à faire le même service,
deux fois par jour et avoir l'utilisation de son automobile sept jours par
semaine. Alors, les coûts sont exorbitants en comparaison avec le service
reçu. C'est justement pourquoi nous voulons défendre le point que
dans la proposition du gouvernement, pour la ville de Repentigny, c'est non,
c'est impossible financièrement. Surtout que dans le livre qui nous a
été envoyé pour fins d'études, c'est très
bien écrit que le partage des responsabilités financières
doit être étroitement relié aux avantages retirés
par les différentes catégories de bénéficiaires.
Alors, il serait impossible de vous prouver, selon la documentation que nous
avons étudiée, sur laquelle nous avons travaillé, qu'un
service de transport en commun dans Repentigny pourrait être rentable
pour la population; cela nous ruinerait dans le contexte proposé par le
gouvernement. C'est pourquoi, au député de Gouin, je me permets
de dire que, selon le contexte proposé, pour nous, c'est non au
transport public, hormis que le gouvernement aurait des possibilités
différentes à proposer. Nous en avions proposé
nous-mêmes lorsque nous avons remis le document au ministère des
Transports au mois de février 1981, on peut peut-être les regarder
encore avec vous, si vous voulez cet après-midi.
Par contre, si on n'entre pas dans l'ORT, l'organisme régional de
transport, qui est ce bloc énorme que vous nous suggérez, c'est
parce que nous sommes dans la région métropolitaine de
recensement; si on n'entre pas dans ce groupe on n'a pas de subvention pour
exploiter aucune forme de transport public.
Il y a une disparité sur laquelle le gouvernement devra trouver
une solution. Si vous entrez, vous payez ou bien vous n'entrez pas, vous n'avez
rien et vous le payez tout tout seul.
M. Rodrigue: Concernant les besoins de transport local à
Repentigny, est-ce que vous percevez un besoin à ce niveau? Est-ce que
c'est votre intention d'essayer d'organiser à l'intérieur
même un transport interne? Est-ce qu'il y a un besoin de ce
côté?
M. Picard: Pour répondre aux questions qui nous
étaient posées pour la préparation de notre
mémoire, la question no 3, c'était l'obligation pour les
municipalités situées à l'intérieur du territoire
de l'organisme régional de transport de participer à
l'organisation et au financement du transport en commun, ORT, régional,
le gros bloc. À cela, nous ne sentons pas la nécessité
d'adhérer au groupe et de trouver des solutions à quelque
système de transport en commun que ce soit.
M. Rodrigue: ...
M. Picard: À l'intérieur des données des
livres sur lesquels nous avons travaillé.
M. Rodrigue: J'ai bien compris cela. Cependant, le projet de
réforme qui est devant nous propose deux niveaux d'action pour ce qui
est du développement des réseaux de transport en commun, il y a
le niveau local et le niveau régional. Vous me dites que le niveau
régional, c'est non, mais le niveau local, lui?
M. Picard: Le niveau local avait été
étudié à la demande du gouvernement pour 24
municipalités. Dans le contexte dans lequel nous avons travaillé
sur le livre blanc, vous avez isolé quatre municipalités sur les
vingt-quatre. Alors, nous ne pouvons pas, dans un si court laps de temps, vous
donner une réponse à votre question. Si cela avait
été fait à l'échelle régionale, oui,
possiblement, nous aurions pu trouver des solutions parce que nous les aurions
trouvées dans le rapport. Étant donné que les autres
municipalités ne sont pas dans la région métropolitaine de
rencensement, il n'y a que les villes de Repentigny, Le Gardeur, Charlemagne et
Saint-Sulpice qui ont été isolées du reste de la
région. Nous avions fait une étude couvrant 24
municipalités; le livre blanc qui arrive quelque temps après ne
couvre que quatre municipalités, les autres étant isolées
du tout.
M. Rodrigue: Une dernière question. Combien y a-t-il de
gens de Repentigny qui viennent travailler à Montréal ou qui
doivent venir vers le centre-ville de Montréal? Avez-vous des
statistiques là-dessus, sur une base régulière
évidemment?
M. Picard: Oui, M. le Président, nous avons établi
des statistiques du côté de la Corporation intermunicipale
industrielle. L'an passé, nous avions 13 500 employés dans la
ville de Repentigny, dont environ 5000 travaillaient dans Repentigny ou
dans la région immédiate et de 8000 à 9000 à
l'extérieur. Maintenant, cela peut être du côté de
Montréal, du côté de Montréal-Est. C'est dans une
région plutôt immédiate que plus loin.
M. Rodrigue: La destination comme telle n'est pas connue. Vous ne
savez pas s'ils allaient aux raffineries qui sont tout près ou s'ils
allaient plutôt dans le centre.
M. Picard: Nous avons seulement 327 travailleurs par jour qui
utilisent l'autobus pour se déplacer.
M. Rodrigue: Oui, qui se déplacent par autobus, sauf
que...
M. Picard: En 1980.
M. Rodrigue: Sauf que les autres peuvent se déplacer par
automobile, se rendre à la tête du métro de Montréal
et là, filer jusqu'au centre-ville. Cela nous aurait donné une
idée de l'achalandage qu'il pouvait y avoir de ce côté.
Cela va, je vous remercie.
M. Picard: Oui.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Vimont.
M. le député de Laporte.
M. Bourbeau: II me fait plaisir de saluer les gens de Repentigny,
plus précisément, M. le maire. J'aurais quelques questions
à vous poser. La ville de Repentigny est une ville en plein essor. En
favorisant le transport en commun, comme semble vouloir le faire la proposition
gouvernementale, est-ce que cela ne favoriserait pas le développement
économique de la ville de Repentigny?
M. Picard: La ville de Repentigny s'est développée
dans un contexte de transport public que vous connaissez. On a 14 000
emplois-jours. Il y en a 325 qui voyagent par autobus. On ne peut pas dire que
c'est le transport public qui a créé la prospérité
de Repentigny. C'est évident de par les chiffres.
M. Bourbeau: Qu'est-ce que vous pensez de la politique de
l'étalement urbain? Est-ce que cela dérange Repentigny que le
gouvernement veuille non pas favoriser l'étalement urbain, mais contrer
l'étalement urbain? Cela ne doit pas aller à l'encontre des
intérêts de votre municipalité, puisque si on tente
d'empêcher l'étalement urbain, cela se fait au détriment
des municipalités comme la vôtre.
M. Picard: M. le Président, si on parle d'étalement
urbain, si je comprends bien, c'est le zonage, je suppose. Vous
référez au zonage agricole? Dans les documents que nous avons
ici, même si on traite de transport, on parle aussi de zonage agricole
qui empêche l'étalement urbain. Je ne sais pas si c'est cela que
vous voulez souligner parce que notre municipalité a été
durement frappée par le zonage agricole. On a un très fort
pourcentage de notre territoire qu'on ne pourra pas bâtir. Si le
territoire vert reste le même que présentement, au rythme auquel
on se développe, on aurait pour environ deux ans, deux ans et demi,
trois ans au maximum de développement; après cela, on met la clef
dans le développement de Repentigny. Cela nous faisait dire à
notre député que, si le gouvernement avait établi une
telle politique il y a 25 ans, la ville de Repentigny, qui est un joyau du
Québec, n'existerait pas du tout.
M. Bourbeau: C'est bien sûr que, si tout le territoire
était zoné agricole, vous n'auriez pas pu vous
développer.
M. Picard: Alors, vous parlez d'étalement urbain par
rapport au zonage agricole. C'est sûr qu'ici, dans le projet du transport
en commun, on dit: "En accord avec cette préoccupation, la Loi sur la
protection du territoire agricole protège les bonnes terres agricoles et
limite, par conséquent, l'étalement urbain". Chez nous, les
terres agricoles ne sont pas exploitées dans le contexte de la loi
agricole et on espère pouvoir élargir la zone, ce qui nous
permettrait peut-être à ce moment-là de favoriser un
système de transport adéquat pour une partie de la population qui
serait intéressée à utiliser le transport en commun.
M. Bourbeau: Vous auriez un bassin de population un peu plus
important qui vous permettrait de rentabiliser le transport,
peut-être.
M. le maire, à Repentigny, comment se présentait la
situation jusqu'à récemment? Je crois comprendre que, depuis pas
tellement longtemps, le transport en commun chez vous est donné par la
Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal.
Comment cela se passait-il avant que la CTCUM commence à desservir votre
territoire? Qui vous donnait le service de transport en commun? (15 h 30)
M. Picard: Avant que la CTCUM soit chez nous, M. le
Président, c'était Métropolitain transport et des
transporteurs privés. Nous en avions un de Berthier, deux du
côté de Joliette et Métropolitain transport qui assuraient
le transport et l'usager payait lui-même le coût de son billet. Ce
sont à peu près les mêmes proportions, d'après les
chiffres que nous
avons, qui voyagent présentement par Métropolitain
transport, compte tenu de l'augmentation de notre population. Par contre, la
ville n'avait rien à payer, mais lorsque la CTCUM a exproprié
Métropolitain transport, nous n'avons pas été
consultés sur l'expropriation, non plus que sur le service, mais, par
des lois qui ont été adoptées par le gouvernement, soit
les lois 56 sur le transport, 73 et 112, celui-ci nous oblige à payer la
facture selon la comptabilité tenue par la CTCUM pour le service du
transport sur notre territoire.
M. Bourbeau: Y avait-il un problème de transport en commun
au moment où on a fait passer le transport privé chez vous, qui
ne coûtait rien à la municipalité, à un transport
public qui coûte quelque chose? Ce changement est-il venu parce qu'il y
avait un manque de service aux usagers, parce que le service n'était pas
adéquat? Est-ce que c'était trop cher pour les usagers? Y
avait-il un problème ou si c'est arrivé comme cela sans qu'il y
ait de problème?
M. Picard: M. le Président, le problème n'existait
pas dans la ville de Repentigny pour les usagers ou la ville elle-même.
Il existait peut-être pour Métropolitain transport, mais pas pour
nous, parce que la ville ne donnait aucune subvention pour le transport et
l'usager payait son billet.
M. Bourbeau: Ah bon! À un moment donné, la
compagnie Métropolitain transport ne pouvait plus continuer à
donner le service? Ce n'était pas assez rentable pour elle?
M. Picard: Je ne le sais pas, il faudrait peut-être
interroger les autorités concernées. Je sais que cela a
été exproprié par la CTCUM.
M. Bourbeau: À un moment donné,
Métropolitain transport, qui est une compagnie privée, a
été expropriée par la CTCUM. Vous dites que vous n'avez
pas été consultés. La CTCUM a commencé à
donner le service chez vous, sûrement un service qui est adéquat;
quand on connaît la CTCUM, c'est sûrement un bon service.
M. Picard: Identique à celui que nous avions
précédemment.
M. Bourbeau: Identique. Boni
M. Picard: II n'y a pas de changement.
M. Bourbeau: Et les coûts aux usagers sont
inférieurs ou supérieurs?
M. Picard: Cela a dû suivre le coût de la vie. Je
pense que c'est 1,75 $ pour aller et 1,75 $ pour revenir; cela fait 3,50 $. Ce
qu'étaient les coûts en 1979, malheureusement je n'ai pas les
chiffres.
M. Bourbeau: Comme c'est la CTCUM qui donne le service, il va
certainement y avoir des déficits; quand on connaît la
rentabilité du transport en commun public, c'est aussi vrai que c'est
vrai que le soleil va se lever demain. Alors, là, vous allez être
pris pour payer des déficits. Si je comprends bien, cela fait trois ans
que la CTCUM vous donne du service. Est-ce que vous avez eu des factures depuis
trois ans? Quel est le montant des factures que vous avez dû payer?
Est-ce que cela va en augmentant d'année en année?
M. Picard: M. le Président, c'est exactement les chiffres
que j'ai donnés tout à l'heure, lorsque la CTCUM a
commencé à fonctionner sur notre territoire. L'étude a
été faite par un bureau de conseillers. Les chiffres que j'ai
donnés sont relatifs à des projections qui avaient
été faites sur le transport exploité par la CTCUM, mais
nous n'avons reçu aucune facture, nous sommes dans le même cas que
les autres municipalités qui étaient préalablement
desservies par Métropolitain transport. Depuis 1980, nous demandons
à répétition des factures, nous les demandons avec la
sagesse de dire que nous allons les contester, parce que nous n'avons pas
été partie aux ententes et nous rejetterons probablement les
coûts qui nous seront facturés. Mais cela fait déjà
trois ans et nous n'avons pas encore de facture.
M. Bourbeau: Qu'est-ce qu'on vous répond quand vous
demandez d'avoir des factures pour le transport en commun à la CTCUM? On
vous dit qu'elles ne sont pas disponibles ou que la comptabilité n'est
pas tenue? Quelles sont les raisons?
M. Picard: D'après la loi 73, ils sont censés tenir
une comptabilité séparée pour le transport qu'ils font sur
notre territoire. Les chiffres auraient dû être connus dès
la première année. Je ne suis pas dans le secret des dieux, mais
apparemment dans la loi on a marqué qu'il y avait un indice de richesse
pour chacune des municipalités qui étaient desservies. On doit
faire des ajustements selon des indices de richesse. Cela apparaît
peut-être dans le texte assez facile à traduire en chiffres, mais
en pratique c'est peut-être plus difficile. C'est peut-être un des
points qui empêchent l'envoi des factures.
M. Bourbeau: Mais la facturation selon l'indice de richesse,
est-ce que c'est dans la loi qui a déterminé l'expropriation?
M. Picard: Non, la loi qui a fait l'expropriation, c'est la loi
56. La loi qui faisait la répartition des coûts, c'est la loi
73.
M. Bourbeau: Est-ce que cela veut dire que, si dans une
municipalité donnée l'indice de richesse est plus
élevé, on va charger plus cher que dans une municipalité
où l'indice de richesse est moins élevé?
M. Picard: Oui.
M. Bourbeau: C'est une forme de redistribution de la richesse
collective, quoi? C'est un genre de mesure sociale qu'on utilise pour faire
payer les coûts du transport en commun? Est-ce que c'est ce que vous nous
dites, actuellement?
M. Picard: Je vous dis que, dans la loi, c'est ce qui est
écrit, il se tient une comptabilité séparée sur
notre territoire par l'exploitant, qui est la CTCUM, et celle-ci doit nous
envoyer une facture. Mais il doit sûrement y avoir un empêchement
quelconque, puisque cela fait trois ans, et nous n'avons pas encore eu de
facture.
M. Bourbeau: Sur la question de l'indice de richesse, cela
m'étonne un peu de voir cette notion dans le décor, parce que, en
général, quand on parle d'envoyer des factures, c'est sur la base
des services rendus au coût et c'est la première fois que
j'entends dire que, dans un dossier comme celui-là, on introduirait une
notion comme celle de l'indice de richesse. Cela n'a strictement rien à
voir avec les coûts qui ont été occasionnés et si la
CTCUM a dépensé chez vous, par exemple, 200 000 $ pour une
année de service, elle devrait vous facturer 200 000 $ et ce n'est pas
à elle à se faire des programmes sociaux. Je pense que le
gouvernement a ce qu'il faut pour redistribuer la richesse par
l'intermédiaire de ses programmes sociaux. Vous êtes bien
sûr que l'indice de richesse compte comme un facteur de
répartition de la facture.
M. Picard: Je n'ai pas le texte devant moi. Vous commencez
à me faire douter, mais j'en ai presque la certitude. De toute
façon, on doit répéter, M. le Président, que cela
fait trois ans qu'il y a fonctionnement et cela fait trois ans qu'on n'a pas eu
de factures. Il faudrait peut-être demander au responsable pour savoir
quel est l'empêchement d'envoyer les factures, dans les
circonstances.
M. Bourbeau: De toute façon, la conclusion de cette
discussion, c'est que vous n'avez pas encore de facture et vous avez bien
hâte de savoir ce que cela va vous coûter pour les trois
années. Avez-vous un ordre de grandeur de ce que cela peut être
pour l'année courante?
M. Picard: Pour 1980, au moment de l'étude qui a
été remise au ministère, en février 1981,
c'était une subvention de 247 000 $ environ, d'après les calculs
des experts; 247 000 $ pour la ville de Repentigny.
M. Bourbeau: Pour un an?
M. Picard: Pour un an, pour la ville de Repentigny.
M. Bourbeau: Cela, c'est l'année 1980. M. Picard:
Oui.
M. Bourbeau: Cela veut dire que, depuis ce temps, il y a presque
deux autres années qui se sont écoulées et cela devrait
augmenter d'année en année. Vous vous attendez de recevoir une
facture assez lourde, je présume, éventuellement.
M. Picard: On ne s'attend pas à cela de gaieté de
coeur. On craint de recevoir une facture qu'on aura de la difficulté
à payer.
M. Bourbeau: Est-ce qu'il y a encore des entreprises de transport
privé qui circulent sur le territoire de Repentigny, actuellement?
M. Picard: Oui, nous avons les mêmes que
précédemment. Nommément, je pense que c'est Brissette
Transport, Laurentide, Brandon Transport, et qui passent à porte
fermée. C'est pourquoi, dans le mémoire, on demandait qu'elles
passent à porte ouverte. Elles pourraient faire le service sans
être subventionnées et elles seraient utiles à une
population comme auparavant.
M. Bourbeau: Cela, c'est intéressant. Vous me dites qu'il
y a trois compagnies de transport qui passent chez vous et qui ne peuvent pas
ouvrir les portes. Je présume que les autobus ne sont pas pleins,
d'après ce que vous semblez dire. Ils pourraient, sans charge
additionnelle, prendre des passagers à Repentigny, les amener à
Montréal, sans aucun coût pour la collectivité et en
rentabilisant même les finances de ces transporteurs. C'est ce que vous
dites, je pense.
M. Picard: Oui. Et ce qui est surprenant, M. le Président,
c'est que ces compagnies partent de Joliette ou de Berthier, prennent des
passagers chez eux, se rendent à Montréal la porte close sur une
grande partie de leur territoire et c'est encore assez rentable pour que
l'entreprise
privée le fasse. Tandis que, quand la CTCUM passe sur notre
territoire, de par la loi, on est obligé de payer une facture.
M. Bourbeau: Vous faites référence au fait que,
très souvent, les transporteurs privés réussissent
à fonctionner à des coûts de beaucoup inférieurs
à ce que peut coûter, pour la collectivité, le transport
public. Si je comprends bien, vous aimeriez qu'on revienne à la
situation qui existait avant que la CTCUM vous desserve, en ce sens que vous
préféreriez ne plus être desservis par la CTCUM, et avoir
à payer une quote-part importante, et faire en sorte que le transport
chez vous soit assuré par ces transporteurs privés qui passent
à travers la ville actuellement, qui n'ont pas le droit de prendre des
passagers, mais qui pourraient bien le faire si on leur en laissait l'occasion,
et tout cela, sans avoir à forcer la municipalité à
contribuer de quelque façon au déficit. Est-ce que je vous
comprends bien? Est-ce que c'est la suggestion que vous faites ou avez-vous
d'autres commentaires à ajouter?
M. Picard: Dans le mémoire, c'est une des suggestions.
D'ailleurs, je pense qu'on la retrouve dans le livre blanc du gouvernement. On
avait aussi pensé au covoiturage et, si on pousse un peu plus loin, M.
le Président, si vous me permettrez un mot anglais, le Dial-a-Bus System
qui avait été étudié. Avec tous nos moyens
électroniques, il serait si facile, pour si peu d'usagers et 350 jours,
de peut-être avoir une console où on pourrait enregistrer les
destinations, les départs de Repentigny, les points d'arrivée en
ville et aider des gens par le covoiturage. 3 n l'avait déjà
proposé préalablement. C'est peut-être une façon de
minimiser les coûts du transport, si le gouvernement pouvait nous trouver
une solution d'aide, ou même sans aider, par ces moyens
électroniques, s'il pouvait rendre service aux gens par le
covoiturage.
Si vous me permettez, M. le Président, vous connaissez
peut-être le système. Les gens appellent, par exemple, à
l'hôtel de ville, et l'heure du départ le matin est
enregistrée, l'endroit où ils vont, et, l'heure du retour le
soir. Celui qui peut rendre service fait la même chose. C'est
enregistré dans le cerveau électronique, compilé et,
après cela, il y a entente entre les parties pour le covoiturage. Cela
existe déjà aux États-Unis, on en avait parlé il y
a déjà quelques années, c'est une proposition qui
était restée pendante. Peut-être que dans le nouveau projet
de loi, si vous avez un nouveau projet de loi, on pourrait regarder de plus
près cet angle au transport public, le covoiturage.
M. Bourbeau: Je pense que c'est une notion qui a
été véhiculée à de nombreuses reprises
depuis deux semaines ici, la question du covoiturage et des autres
systèmes de transport dits légers ou doux. Finalement, une
dernière question, M. le maire. La ville de Repentigny est une ville
choyée en ce qu'elle est une des rares villes qui aura le
bénéfice, un jour, d'avoir chez elle, un métro de surface
puisque, dans le projet de Belleval, on parle de la ligne no 6, la ligne du
métro de surface qu'a favorisée le ministre des Transports,
métro de surface qui devait partir du centre-ville de Montréal,
en passant en dessous du tunnel Mont-Royal et en bifurquant vers l'est, devait,
en passant à l'extérieur des municipalités de
Montréal-Nord, Rivière-des-Prairies, et bifurquant à
l'extérieur de Pointe-aux-Trembles, se rendre éventuellement
jusque dans le beau comté de L'Assomption jusqu'à la ville de
Repentigny. Est-ce que vous êtes heureux de savoir qu'un jour vous aurez
le métro de surface? Seriez-vous disposé à payer votre
juste part des coûts et des déficits, si jamais il y en a, ou
l'immobilisation de ce magnifique instrument que constituera un jour le
métro de surface?
M. Clair: Peut-être un point d'information pour M. le maire
de Repentigny justement. Sauf erreur, actuellement dans la planification, pour
plusieurs années, il arrêterait à Pointe-aux-Trembles au
moins.
M. Bourbeau: Ah! bon. Une voix: Je l'espère.
M. Bourbeau: Je pense bien qu'étant donné qu'on
l'avait annoncé originalement comme devant aller jusqu'à
Repentigny, une fois qu'il serait rendu à Pointe-aux-Trembles, ce ne
serait pas grand-chose de lui faire traverser le pont.
M. Clair: Dans l'accord...
M. Bourbeau: De toute façon, je signalerais que j'ai
posé la question au maire de Repentigny et que...
M. Clair: ... juste un point pour nous éclairer.
M. Bourbeau: ... le ministre encore là tente de
téléguider les réponses. Le maire est parfaitement
compétent, je pense, pour répondre aux questions que je lui pose,
sans avoir à être influencé par le ministre.
M. Clair: Je voudrais simplement insister sur le fait que mon
collègue, le député de L'Assomption, ministre des
Finances, des Institutions financières et Coopératives, bien
soucieux de respecter l'autonomie municipale, avait insisté au
moment du décret, prévoyant le plan de transport
intégré, pour qu'il y ait bien une virgule après "s'il y a
lieu", et le texte continue. Vous pourrez vérifier dans le texte.
M. Bourbeau: S'il y a lieu.
M. Clair: Ou quelque chose comme cela.
M. Bourbeau: Je vérifierai la virgule, c'est
sûrement une virgule électorale.
M. Clair: ... l'autonomie municipale.
M. Bourbeau: Quand la ligne de métro de surface sera
construite jusqu'à Pointe-aux-Trembles, maintenant, semble-t-il, mais
également, s'il y a lieu, jusqu'à Repentigny, seriez-vous
disposé à recevoir le métro de surface et à en
payer les coûts?
M. Picard: M. le Président, nous avons, lors de
l'étude, compilé les chiffres sur les trains de banlieue vers le
sud et vers l'ouest. Une seule compagnie avait à ce moment environ 50
trains de banlieue par jour vers l'ouest et deux vers le sud, aucun vers l'est.
On avait souligné à nos représentants - à ce
moment, M. Parizeau et M. Léger - qu'il y avait une disparité
dans le transport public et que lorsqu'il y avait des déficits encourus
par le Canadien National ou le Canadien Pacifique pour ces trains de banlieue,
souvent c'était comblé par un palier de gouvernement
supérieur, à même les taxes des citoyens, de l'est comme de
ceux du reste de la province de Québec, mais tout de même, nous
n'avions rien du côté est. Vous dire qu'on ne souhaite pas
ardemment un système de transport adéquat vers l'est, ce serait
vous mentir. Quant à la participation financière, je pense que
vous êtes au courant que les lignes CN et CP sont présentement la
propriété d'un organisme régional de Montréal,
alors ils vont vers l'ouest et vers le sud alors que, vers l'est, il n'y a
rien. Si jamais vous pensiez à élaborer une ligne vers l'est,
nous espérons que le gouvernement fera plus que la part qui est
suggérée dans les deux volumes que nous avons
étudiés. (15 h 45)
M. Bourbeau: Personnellement, je vous remercie. Je n'ai plus
d'autre question. Je vous félicite pour votre excellente collaboration
aux travaux de cette commission.
Le Président (M. Boucher): Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Rapidement, M. le maire de Repentigny, vous avez fait
état de votre fierté légitime de ce qu'était
devenue la ville de Repentigny; vous en avez d'ailleurs parlé comme d'un
des joyaux du Québec. Je voulais vous demander si vous pensiez que
Repentigny aurait pu devenir ce qu'elle est si elle n'avait pas
été à proximité d'une région
métropolitaine, si, par exemple, cela aurait été possible
dans une autre région ou si c'est la présence d'un centre urbain,
d'un centre-ville, d'une région métropolitaine qui a eu une
incidence directe aussi sur ce qu'avait pu devenir finalement la ville de
Repentigny?
Je vous pose une autre question tout de suite pour ne pas prolonger les
débats. Vous avez fait état de l'étude menée en
1978 et je pense - je voudrais seulement vérifier avec vous - que c'est
une étude qui a été reprise en 1980 où les chiffres
avaient été déposés au ministère des
Transports en 1980. C'est une étude menée en 1978. C'est bien
cela?
Vous allez pouvoir me le préciser. Dans cette étude, il y
avait donc, l'indice de fréquentation des transports en commun
évalué à un peu plus de 300 par jour dans les transports
en commun à Repentigny. Vous faisiez également mention d'un
chiffre de 8000, j'imagine, véhicules automobiles ou de 8000 personnes
qui se déplaçaient de Repentigny vers d'autres destinations
à des fins de travail. Ces 8000 personnes, si c'est le cas, se
déplacent dans des véhicules automobiles. Je voulais vous
demander à combien vous estimiez le nombre de personnes qui
résident et travaillent à Repentigny même? Ces 8000
personnes, j'imagine, pour la plupart d'entre elles, se dirigent vers la
région métropolitaine: à combien estimez-vous le nombre de
personnes qui utilisent les transports en commun métropolitains?
M. Picard: M. le Président, je voudrais vous souligner
notre joie et notre plaisir de voir qu'à la commission parlementaire il
y a une dame qui siège avec vous, parce que nous avons le même
bonheur à la ville de Repentigny. Lors de la dernière
élection, nous avons réussi à faire élire une dame,
qui est Mme Leroux et qui nous accompagne aujourd'hui.
Après avoir souligné cette présence, je voudrais
mentionner aussi qu'il n'est pas surprenant qu'une représentante
féminine ait été frappée par le fait que j'aie
parlé d'un joyau dans la province de Québec en parlant de la
ville de Repentigny. Je lui dirai, M. le Président, qu'il est
évident que, selon ce qu'on appelle, nous, le développement des
banlieues et que d'autres appelleront l'étalement urbain, toutes les
têtes de pont ont connu un développement assez sensationnel, que
ce soit du côté de Laval, que ce soit du côté de
Lachenaie présentement ou de la ville de Repentigny. C'est
sûrement dû au fait d'un grand centre qui, à un moment
donné, peut-être déborde pour des raisons familiales, plus
souvent
qu'autrement, ou que, pour des raisons sociologiques, les gens aiment
sortir de la grande ville pour - comme on dit familièrement -
élever leur famille, se rapprocher un peu des espaces de verdure plus
étendus. C'est probablement dans ce contexte que la ville de Repentigny
s'est développée. De toute façon, il y a 25 ans, nous
n'étions environ que 2500; nous avons, dans le recensement provincial de
l'an passé, environ 34 000 personnes et on sait qu'on est au moins 36
000 ou 37 000 parce qu'on développe encore. On a émis pour 15 000
000 $ de permis, cette année. Je pense que cela ne se
répète pas à l'échelle de la province. C'est selon
une planification à long terme qu'a été établi un
plan de zonage et d'urbanisme qui intéresse les aménageurs
immobiliers et qui semble intéresser aussi ceux qui ont de jeunes
familles et qui veulent vivre en banlieue dans des espaces de verdure.
Pour revenir à la deuxième question, à savoir quand
a été faite l'étude, nous avons été
nommés, par arrêté en conseil, en 1978, au nombre de 24
municipalités. Nous avons siégé assez tranquillement, au
début. Le rapport a été complété en 1980.
Alors, les chiffres que j'ai donnés tout à l'heure étaient
de 1980. Le rapport a été étudié à la fin de
1980 par les élus qui avaient été mandatés par
arrêté en conseil et il a été déposé
au ministère des Transports au mois de février 1981. Ce sont des
chiffres tout de même assez récents. Les chiffres que je vous ai
donnés quant au coût, quant au nombre d'usagers pourraient
être révisés et réactualisés, comme l'a fait
le groupe COTREM. Si vous augmentez le nombre de passagers, il est fort
possible que seulement avec l'inflation, vous augmentiez le coût du
transport, ce qui fait qu'on aimait mieux, M. le Président, vous
déposer un document officiel et des chiffres officiels. C'est pour cela
qu'on a travaillé sur ce document. Si vous l'actualisiez, le nombre
d'usagers va probablement grandir; par contre, la somme va probablement
déborder de beaucoup le montant que nous avons soumis au
ministère.
Quant aux personnes qui travaillent à Montréal, j'ai eu
l'occasion de le dire tout à l'heure, il y a 14 000 employés/jour
à Repentigny. Nous en avons, d'après le rapport du début
de 1981, 327 qui viennent à Montréal par autobus et 343 qui en
reviennent. C'est l'occupation des sièges d'autobus. Si vous prenez un
siège d'autobus, cela veut dire qu'il y a environ 330 ou 340 personnes
qui utilisent un siège d'autobus/jour, pour les coûts qu'on a
mentionnés tout à l'heure. C'est peut-être un exercice
mathématique, mais il faut le faire pour réaliser que cela
dépasse la capacité de payer des citoyens. Cela dépasse
même une norme logique.
Mme Harel: Me permettez-vous, M. le maire? J'espère
d'ailleurs que Mme Leroux et moi-même n'allons pas, ni elle ni moi,
rester seules comme nous le sommes malheureusement trop souvent dans nos
réunions respectives.
M. Picard: On est avec vous.
Mme Harel: Au sujet des 14 000 employés/jour dont vous
parlez, combien d'emplois sont créés dans la ville même de
Repentigny?
M. Picard: J'ai répondu tout à l'heure à
cette question, M. le Président.
Mme Harel: 3000?
M. Picard: C'est environ 4500 ou 5000 emplois qui sont
créés dans la ville de Repentigny ou dans la région
immédiate.
Mme Harel: Donc, c'est un peu plus ou à peu près 10
000 personnes qui ont à se véhiculer à l'extérieur
de Repentigny pour gagner leur vie. Il y a eu beaucoup de débat à
cette commission, notamment sur le comportement des usagers du transport, quel
qu'il soit, et on faisait souvent état de ce comportement habituel de
l'usager de l'automobile. Vous ne pensez pas que les citoyens de Repentigny,
comme l'ensemble des citoyens du Québec et des sociétés
industrielles, sont assez durement touchés par une crise
économique qu'elle peut les inciter à changer de comportement?
Dans les chiffres récents que nous avait soumis un groupe qui s'est
présenté en commission parlementaire la semaine dernière,
on y disait que le propriétaire d'une automobile consacrait en 1980 plus
de 3200 $ à son automobile. Ce montant représentait en moyenne de
25% à 30% de son salaire après impôt. C'est la
dépense moyenne que cela occasionne. On se demande vraiment si en 1982,
même si cette étude est récente, les usagers de
l'automobile n'ont pas des incitations beaucoup plus grandes, compte tenu des
difficultés devant lesquelles plusieurs se retrouvent, à
justement modifier leur comportement.
M. Picard: M. le Président, je pense que M. le ministre
est la personne qui s'est penchée sur le problème et qui a
tenté de trouver des solutions. On l'a exprimé tout à
l'heure pour notre région, s'il y avait lieu d'établir un
transport public, c'est peut-être du côté du covoiturage,
surtout après la preuve faite d'après les chiffres de 1980 que
chaque siège d'autobus employé pour notre municipalité
coûte environ 3500 $ par année. Si vous montez quatre personnes
dans une automobile par jour pour aller et retour -cela fait seulement deux
voyages - cela veut
dire que le gars fera 14 000 $ par année avec son automobile.
Cela serait assez payant. Si on utilise la formule du covoiturage telle qu'elle
est élaborée dans le mémoire et qu'on utilise en plus la
formule électronique du Dial-a-Bus System, je pense qu'on pourrait
arriver, comme le dit si bien Mme la députée, à trouver
une solution de rechange qui serait peut-être de beaucoup plus
économique et qui donnerait un service de porte à porte, ou
presque, deux fois par jour. Et celui qui le ferait aurait l'utilisation de son
automobile sept jours par semaine.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre. M. le
député de Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Compte tenu de la population de Repentigny et de
l'affluence que la CTCUM a dans ses autobus, je n'ai pas de chiffres, mais je
m'imagine que la plupart des gens, une grande majorité de vos
concitoyens ont actuellement le système de covoiturage. La plupart des
gens se voiturent à trois ou quatre ensemble, probablement, dans
Repentigny. Actuellement, vous n'avez pas de chiffres, évidemment, mais
est-ce que, selon votre expérience du milieu de Repentigny, il y a
beaucoup de personnes qui voyagent ensemble pour aller travailler, soit dans
l'est de Montréal ou...
M. Picard: M. le Président, notre région a toujours
été avant-gardiste. Il se peut que nous soyons les
précurseurs du système que propose M. le ministre parce que, de
toute évidence, il n'y en a que quelques centaines qui voyagent par
autobus sur le nombre énorme de gens qui se déplacent vers
Montréal. Si vous me le permettez, M. le Président, une autre
formule que nous tentons d'établir à Repentigny, c'est de rendre
la ville autonome dans ses services et d'avoir le plus grand nombre de
personnes, d'une deuxième ou parfois d'une troisième
génération, qui pourront travailler dans la ville de Repentigny
ou dans la région immédiate pour éviter ces grands
déplacements. Nous avons eu l'occasion de lire des volumes sur d'autres
pays. Plus particulièrement - je le cite parce quie c'est
intéressant d'y faire une recherche - à Moscou, vous avez des
villes satellites. C'est beaucoup plus gros que ce que nous connaissons
à Montréal, mais, à vingt-cinq ou trente milles de la
grande région métropolitaine, pour dégager le
centre-ville, on fait des villes satellites, mais qui deviennent autonomes.
J'explique le mot "autonome". C'est qu'il y a un pourcentage raisonnable
d'usines, un pourcentage raisonnable de commerces qui créent des
emplois, qui sont générateurs d'emplois pour ceux qui travaillent
dans la région immédiate au lieu de faire des déplacements
énormes. C'est une formule qu'on a tenté d'appliquer à
Repentigny. On ne l'a peut-être pas fait avec le succès qu'on
aurait voulu mais, M. le Président, on avait à peine 800 à
1000 emplois, il y a une dizaine d'année, et nous en sommes rendus
à 5000 dans notre région immédiate, sur 14 000. C'est
déjà un beau succès. Peut-être qu'avec une autre
génération nous allons pouvoir combler la marge, ce qui fera que
les gens seront appelés à moins se déplacer pour aller
travailler.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, je voudrais d'abord m'excuser
auprès du maire et des conseillers de Repentigny d'avoir dû
m'absenter au début de la présentation de leur mémoire
pour aller participer à la réunion du Conseil des ministres. Je
devais absolument m'y rendre.
Je serai très bref. Simplement, à partir des
échanges que j'ai entendus, je pourrais peut-être apporter
seulement trois précisions à la suite des questions et
commentaires du député de Laporte.
En ce qui concerne la base de la répartition de la facture de
Métropolitain provincial, on m'indique qu'il en était question et
on se demandait comment il se faisait que c'était basé sur le
seul critère du potentiel fiscal. Je crois que c'est ça la
question. La réponse est que la Communauté urbaine de
Montréal, dans la loi, a déjà réparti à
l'intérieur de la communauté urbaine les factures aux
différentes municipalités sur cette base qui est la même
pour Métropolitain provincial. Elle pourrait certainement être
améliorée, surtout en dehors de l'île de Montréal.
Pour la Communauté urbaine de Montréal, c'était la
demande, l'unanime, je pense, à ce point de vue pour la CUM.
En ce qui concerne le déficit d'exploitation de
Métropolitain provincial avant 1980, de 1977 à 1980, le
gouvernement a effectivement subventionné le déficit
d'exploitation de l'ensemble du réseau Métropolitain provincial
pour un total de 8 300 000 $ pour ces quatre années.
En ce qui a trait au dernier point, il y avait beaucoup de commentaires,
il était beaucoup question de l'ensemble de la réforme pour la
ville de Repentigny relativement à l'organisme régional de
transport. Ce que j'ai surtout retenu, en ce qui concerne la ville de
Repentigny, c'est que ce que vous souhaitez dans le fond c'est de pouvoir opter
pour un transporteur privé. Cela est également dans la
réforme, pour le territoire sur lequel vous êtes situés; le
pouvoir est laissé, justement, aux autorités locales de faire un
premier choix entre un transporteur privé et un transporteur public et
ensuite, de fixer un niveau de service
désiré en fonction, bien sûr, de la
possibilité de rentabiliser un service privé. Dans ce
sens-là, je veux simplement préciser que cela ne va pas à
l'encontre de la proposition gouvernementale. Cela va dans le même sens.
On visait à offrir un choix: D'un côté il y a du service de
transport en commun existant déficitaire, par ailleurs il y a, dans un
certain nombre de corridors, des transporteurs privés qui pourraient
s'entendre avec les municipalités pour offrir un niveau de service qui
convienne au milieu concerné. Donnons-leur donc simplement le choix et
le pouvoir d'effectuer ce choix avec des transporteurs privés. (16
heures)
M. le Président, je n'ai pas d'autres... Oui.
M. Picard: M. le Président, je remercie le ministre de ses
commentaires. C'est vrai que les deux points qu'il a soulignés sont dans
le volume. Par contre, je réitère que si nous ne sommes pas dans
l'ORT, qui est la région métropolitaine de recensement, nous
pourrons peut-être avoir un service par transporteur privé ou par
une organisation d'une autre nature. Mais si ma compréhension est bonne
sur le texte des deux volumes, nous n'aurions pas droit à la subvention
provinciale.
M. Clair: Dans le territoire C, oui, la subvention aux revenus
pourrait s'appliquer. C'est dans le territoire D qu'il n'y aurait pas de
subvention. La création d'un organisme régional de transport,
c'est une chose. C'en est une autre que le transport de nature locale dans le
territoire de l'organisme régional. Autrement dit, le
périmètre et la structure, ce sont deux choses
différentes. À supposer qu'il n'y ait pas de mise en place d'un
organisme régional de transport à court terme, c'est
évident qu'il va quand même falloir maintenir des programmes de
subvention dans le périmètre défini; on ne peut pas
purement et simplement laisser tomber tout le monde en dehors de la Commission
de transport de Laval, de la rive sud et de la Communauté urbaine de
Montréal.
Autrement dit, je reçois vos commentaires quant à la
constitution d'un organisme régional de transport. Je les accepte comme
tels. Mais je dis: à supposer qu'il n'y ait pas création d'un
organisme régional de transport, le problème que vous avez avec
les quotes-parts de Métropolitain provincial demeure quand même
entier. De toute façon, il faut s'attaquer à la solution de ce
problème et, de toute façon, il faut offrir la
possibilité, je pense, de choisir entre un transporteur privé et
un transporteur public selon un niveau de service défini par les
autorités locales.
M. Picard: M. le Président, avec votre permission. Pour la
préparation de notre mémoire, M. le ministre, nous avions des
questions qui ont été posées. La troisième question
était... bien, je la trouve assez claire, peut-être que j'ai une
compréhension différente. L'obligation pour les
municipalités situées à l'intérieur du territoire
de l'organisme régional de transport, qui est l'ORT, de participer
à l'organisation et au financement du transport en commun. Mais dans les
textes, si nous ne sommes pas à l'intérieur de l'ORT,
apparemment, nous n'aurions pas le privilège de jouir des subventions
gouvernementales.
M. Clair: Effectivement, si vous n'étiez pas dans le
territoire de l'organisme régional. C'est simplement la distinction, M.
le maire, entre le territoire de l'organisme régional et la constitution
d'un organisme régional. Dans le fond, le périmètre
défini, c'est un périmètre subventionnable; mais c'est
évident que, même à l'intérieur du
périmètre subventionnable, les règles qu'on va appliquer
vont être les mêmes partout, à savoir: subventions par le
gouvernement, mais participation par les municipalités
concernées, pour le service offert dans un territoire donné, au
déficit s'il y en a un.
M. Picards M. le Président, conscient de ce que nous
comprenons maintenant, avec les explications de M. le ministre, je
réitère, au nom de notre municipalité, un non
catégorique à l'ORT pour notre municipalité.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Une seule remarque, M. le ministre. Maintenant, on
offre un choix aux gens de Repentigny, soit que les autorités locales
choisissent un transport privé ou qu'elles choisissent un transport
public. Par contre, on a exproprié une compagnie et on leur a
imposé un choix. Deuxièmement, en ce qui a trait aux quotes-parts
qui sont payées par les municipalités, dont les villes de
Valleyfield, Châteauguay et Repentigny, depuis trois ans, comme les
autres municipalités, elles n'ont pas reçu leurs quotes-parts.
J'ai communiqué avec un des commissaires à la CTCUM et vous
auriez avantage, M. le ministre, à discuter avec le ministre des
Affaires municipales parce que, apparemment, il y a quelque chose qui fait que
la CTCUM est dans l'impossibilité d'envoyer des quotes-parts à
ses municipalités à cause de la loi no 57 parce qu'il y a
certaines complications et un impact fiscal. Ce sont là mes
informations, mais je n'ai pas assez de détails pour vous en dire
davantage aujourd'hui.
M. Clair: Je ne vois pas...
M. Bissonnet: II semble cependant que ce serait la raison pour
laquelle la CTCUM n'est pas capable actuellement d'envoyer des factures aux
municipalités concernées, c'est-à-dire Valleyfield,
Châteauguay et les autres. Il y a apparemment une difficulté en
rapport à la loi 57 sur la réforme fiscale.
M. Clair: Je n'ai jamais été ...
M. Bissonnet: C'est la raison qu'on m'a donnée, mais je
n'ai pas eu le temps de rencontrer encore le commissaire à cet
égard, ce que je ferai dans les prochains jours.
M. Clair: ... informé de ce point-là. D'ailleurs,
j'ai déjà indiqué que devant le retard j'adressais une
demande...
M. Bissonnet: II est temps.
M. Clair: ... au président de la Commission de transport
de la Communauté urbaine de Montréal d'envoyer les quotes-parts
parce que je pense qu'il est normal que les municipalités n'attendent
pas indéfiniment. Quant à l'avenir, c'est justement ce qu'on vise
à corriger, c'est que des quotes-parts ne soient plus envoyées
à des municipalités sans que celles-ci aient eu à se
prononcer sur le niveau de services qu'elles désirent et ce qu'elles
sont prêtes à payer. À ce compte-là, je pense qu'il
serait beaucoup plus démocratique de cette façon-là. Mais,
encore une fois, au moment où la loi affiliant Métropolitain
provincial à la CTCUM a été adoptée, c'était
dans un geste ponctuel qui a dû être posé par le
gouvernement pour éviter que le service soit purement et simplement
abandonné dans l'ouest de la ville de Montréal et sur tout le
réseau Métropolitain provincial.
Une voix: Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci.
M. Tremblay: C'est assez surprenant puisque sur la rive sud de
Montréal la CTRSM a fait parvenir les quotes-parts aux
municipalités, cela a été contesté par les
municipalités et amené devant la Commission municipale du
Québec et celle-ci s'est prononcée en disant que la CTRSM
était justifiée de faire parvenir les factures.
M. Bissonnet: Pour répondre brièvement à
votre question, j'ai eu une communication téléphonique et, dans
les prochains jours, j'aurai plus d'explications. Je trouve que c'est
complètement anormal que des municipalités obligées
d'équilibrer leur budget ne reçoivent pas les factures. C'est
donc pour cela que j'ai appelé et j'aurai une réponse plus
définitive à ce problème dans les prochains jours.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le maire.
M. Picard: M. le Président, je pense que c'est un
problème particulier sur les expropriations de Métropolitain par
la CTCUM. C'était la loi 56 du temps et la loi 73 qui faisaient une
répartition de la comptabilité.
Pour éclairer l'Assemblée, ce n'est pas
nécessairement la loi 57 sur la fiscalité parce que c'est une loi
spéciale de distribution par une comptabilité tenue pour les
territoires de Beauharnois et Châteauguay, et, de notre
côté, Repentigny, Joliette et Berthier.
M. Clair: Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci. Au nom de tous les
membres de la commission, je remercie les représentants de la ville de
Repentigny, particulièrement M. le maire Picard, qui est un ex-citoyen
de Rivière-du-Loup, une ville qu'on pourrait considérer comme un
autre joyau parmi les villes du Québec.
M. Picard: Cela est endossé, M. le Président. On
vous remercie de votre sollicitude à notre égard.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le maire.
Paroisse de Saint-Sulpice
J'invite maintenant les représentants de la paroisse de
Saint-Sulpice. Me André Comeau, si vous voulez procéder à
la lecture de votre mémoire.
M. Comeau (André): M. le Président, M. le ministre,
MM. les membres de la commission, madame. Saint-Sulpice, comme vous pouvez le
constater sur la carte, est située à la limite est de l'aire
d'intervention prévue pour l'ORT. Cette situation géographique
peut-être un peu particulière lui permet d'espérer
possiblement un statut particulier ou lui permet peut-être
d'espérer qu'elle a le choix de faire partie ou non de l'ORT.
Les gens de la paroisse de Saint-Sulpice voudraient vous signaler que ce
choix, s'ils l'ont, ils voudraient l'exercer en ayant à coeur les
intérêts des contribuables. Cet intérêt exige que
nous décidions en ayant en tête cette question toute simple, mais
d'actualité en période de crise économique: Comment vivre
selon nos moyens?
À la lecture de la proposition gouvernementale concernant
l'organisation et le financement du transport en commun dans
la région de Montréal, plusieurs craintes traversent notre
esprit. Si l'adhésion à l'ORT implique et signifie l'obligation
d'assumer une part substantielle des coûts et des déficits
d'exploitation du transport en commun à Montréal, la dilution de
notre pouvoir de décision quant au type de transport en commun
nécessaire à notre municipalité, qui est quand même
particulière, eu égard aux autres municipalités de cette
agglomération, s'il s'agit d'une subordination des priorités
montréalaises qui ne sont pas nécessairement les nôtres, la
Corporation municipale de la paroisse de Saint-Sulpice ne peut que s'y
opposer.
Nous sommes convaincus, surtout en période de difficile
conjoncture économique, qu'il en va des organisations comme de toute
autre chose: il faut qu'elles soient adaptées aux besoins et aux moyens
réels d'une population. Pour la paroisse de Saint-Sulpice,
adhérer à l'ORT, c'est emprunter, en quelque sorte, le Concorde
pour se rendre de Trois-Rivières à Québec. Pour avoir
assisté aux délibérations du conseil sur ce sujet et avoir
compris le sentiment des gens face à ce problème, cette structure
ou cette participation au financement du transport pour la région de
Montréal paraît exorbitante eu égard aux besoins
réels en transport de la municipalité et eu égard
également au nombre d'usagers voyageant de la paroisse de Saint-Sulpice
à Montréal.
On pourrait trouver dans le même mémoire auquel on faisait
référence, l'étude Léa Benoît, des
données sur le nombre de passagers de Saint-Sulpice à
Montréal. Ce sont vraiment des chiffres minimes. Je pense que c'est
là le principal message qu'on m'a demandé de vous transmettre, M.
le Président, M. le ministre, madame et messieurs de la commission.
Le Président (M. Boucher): Merci, Me Comeau. M. le
ministre.
M. Clair: Je voudrais d'abord remercier l'avocat de Saint-Sulpice
d'être venu nous communiquer le point de vue de la paroisse de
Saint-Sulpice. Je n'aurai qu'une seule question. Je pense que le mémoire
est court et clair. Pour discuter de la possibilité qu'un transporteur
privé offre le service à la place d'un transporteur public,
est-ce que la paroisse de Saint-Sulpice préfère s'en remettre
à la décision d'autres instances, comme à la Commission
des transports du Québec qui pourrait, par exemple, déterminer
qui, quand et à quel tarif un transporteur privé circulerait sur
votre territoire, ou si les autorités municipales de Saint-Sulpice
souhaitent être impliquées dans la décision quant à
un service offert par un transporteur privé?
M. Comeau: De fait, je pense que la proposition ou la solution
que vous avancez ou dont vous parlez est peut-être celle dont j'ai le
plus entendu parler avec les gens de la paroisse. Le principal problème,
c'est qu'il y a sur le territoire des transporteurs privés qui circulent
souvent à portes fermées. On aimerait qu'il y ait une
libéralisation de cette situation de façon que des transporteurs
qui passent là puissent avoir les portes ouvertes.
M. Clair: Ma question est: Est-ce que la municipalité
souhaite être impliquée dans la décision ou si elle
préfère la laisser à d'autres?
M. Comeau: En ce sens-là, les élus seraient
intéressés à exercer là-dessus une forme de
contrôle, à savoir quel type de service ils veulent. Pour cette
région, la principale façon d'assurer un transport en commun
serait de permettre, avec la Commission des transports du Québec ou
autrement, qu'on puisse faire entendre devant cette commission les besoins en
matière de transport et que la loi permette que ces permis puissent
être utilisés différemment. On aimerait que des
transporteurs ne circulent pas inutilement sur leur territoire, qu'on puisse
les utiliser. C'est peut-être le voeu principal de ces gens.
M. Clair: Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Robert Baldwin. (16 h 15)
M. O'Gallagher: Je vous remercie, monsieur, de votre
mémoire. C'est très pertinent. Je pense que vous êtes un
peu comme les résidents de la banlieue de Montréal qui subissent
leur implication dans la Communauté urbaine de Montréal et
ensuite dans la CTCUM. On a vu des coûts complètement hors
contrôle pour le service de police ou pour le transport en commun. Je
pense que vous avez raison d'être craintif devant cette pointe de
l'iceberg qui nous amène une autre structure politique, administrative
ou bien technocratique, comme l'a mentionné celui qui vous a
précédé. Je pense que vous avez bien raison de faire
attention et de ne pas embarquer dans une telle affaire à moins que, sur
l'île de Montréal, on ne démontre qu'on est capable de
gérer le système de transport et les autres services à la
population d'une façon telle qu'on les fournisse à des prix
comparables à d'autres villes sur le continent nord-américain. Je
vous remercie beaucoup de votre mémoire et d'avoir signalé ce
danger.
M. Comeau: Si vous me permettez une remarque, M. le
Président, je pourrais
ajouter que la paroisse de Saint-Sulpice est contiguë aux autres
municipalités qui suivent, soit Berthierville et les autres, et que,
finalement, elle adopte la même position que ces autres
municipalités qui, elles, sont situées à
l'extérieur du territoire de l'organisme régional de transport.
De fait, dans la proposition gouvernementale, Saint-Sulpice fait partie du
territoire, mais, selon son choix, elle préférerait faire partie
des municipalités situées à l'extérieur du
territoire et, évidemment, elle appuie la position de ces autres
municipalités qui vont demander des solutions nouvelles pour leur
territoire situé à l'extérieur de l'ORT.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, simplement pour remercier le
représentant de la municipalité de paroisse de Saint-Sulpice de
s'être présenté devant nous. Merci.
Le Président (M. Boucher): Au nom des membres de la
commission, je vous remercie, Me Comeau.
Berthierville et municipalités
environnantes
Le prochain mémoire est présenté par les villes de
Berthierville, paroisse de Saint-Antoine-de-Lavaltrie, village de Lavaltrie,
paroisse de Sainte-Geneviève-de-Berthier et paroisse de
Saint-Joseph-de-Lanoraie.
J'inviterais M. Joyal, Me André Comeau, M. Jude
Guèvremont, M. Paul-Émile Lavallée et M. Jacques Tarte,
ainsi que M. Roland Henault. Me Comeau, est-ce que c'est vous, le
porte-parole?
M. Comeau: Oui, M. le Président. Je représente
également les municipalités de Berthierville, paroisse de
Saint-Antoine-de-Lavaltrie, village de Lavaltrie, paroisse de
Sainte-Geneviève-de-Berthier, paroisse de Saint-Joseph-de-Lanoraie et
Lanoraie- d'Autray. Je suis accompagné du maire de Berthierville, M.
Jude Guèvremont, à ma droite, et du maire de la paroisse de
Sainte-Geneviève-de-Berthier, M. Paul-Émile Lavallée,
à la droite de M. le maire Guèvremont.
M. le Président, M. le ministre, MM. les membres, les territoires
des municipalités représentées cet après-midi
s'étendent sur la rive nord du Saint-Laurent des limites
périphériques de la région urbaine de Montréal
jusqu'à Berthier, soit à mi-chemin entre Montréal et
Trois-Rivières. En tant que citoyens du Québec, nous ne pouvons
qu'applaudir à l'intérêt que porte le gouvernement du
Québec au problème du transport en commun dans la région
de Montréal. Comme tout le monde le sait, la solution de ce
problème est un élément propre à améliorer
la vigueur économique de Montréal et, par le fait même,
celle de tout le Québec.
La proposition gouvernementale - et c'est normal, je le pense - prend
comme point de mire l'agglomération de Montréal et tente
d'apporter une solution à son problème de transport en commun.
Nous soumettons, cependant, qu'en ce faisant les auteurs de la proposition ont
rapidement, peut-être du revers de la main, éludé la
question du transport en commun dans les zones périphériques et
rurales. En voulant trop régler les problèmes de la région
montréalaise, on a peut-être oublié que les autres
régions pouvaient avoir aussi des problèmes de transport en
commun. Sans s'y arrêter vraiment, on a donc réglé leur
sort, le tout exprimé dans quelques lignes. Cette économie de
mots nous permet de citer au texte: Au niveau des subventions, "l'arrêt
des subventions pour les services fournis à l'extérieur du
territoire de l'organisme régional". Au niveau de l'organisation, la
proposition gouvernementale privilégie "l'octroi de contrats de service
à un transporteur existant, public ou privé, sous le
contrôle du conseil local et selon les devis préparés par
le conseil." En quelque sorte, la proposition gouvernementale nous dit: Si vous
voulez du transport en commun, organisez-le, donnez-le à contrat et,
surtout, payez-le. Cette solution nous semble inique à l'égard de
nos citoyens, pour les raisons suivantes: Elle pénalise une population
qui, au rythme de l'étalement du tissu urbain, s'est installée en
périphérie de la zone urbaine de Montréal. Elle oblige
cette population à supporter entièrement le coût des
services de transport qui sont jugés par plusieurs comme essentiels,
alors qu'au même moment on lui demande un effort pécuniaire devant
servir au mieux-être de la région métropolitaine. Elle
diminue par le fait même la qualité de vie que tout citoyen du
Québec est en droit d'exiger. En conséquence, à titre
d'élus du palier gouvernemental le plus près des citoyens, nous
ne pouvons tolérer sans rien dire que la politique gouvernementale fasse
de nos citoyens des citoyens de seconde zone, d'autant plus que les
conséquences de la politique proposée par le gouvernement nous
semblent aller complètement à l'encontre des principes et des
objectifs qui sous-tendent les solutions proposées pour
Montréal.
De la proposition gouvernementale, nous pouvons discerner les objectifs
suivants -vous les connaissez probablement mieux que moi - qu'il suffit
d'énumérer rapidement: Consolider le tissu urbain,
améliorer la qualité de vie, établir un financement selon
le principe de l'équité. Tous ces critères et objectifs
appliqués non plus à Montréal, mais à la
région périphérique qu'est la nôtre
doivent amener le gouvernement à revoir son jugement sur notre
situation et à modifier son attitude à l'égard des
municipalités de notre territoire. De fait, si le gouvernement veut
consolider le tissu urbain montréalais, il n'est pas justifié de
détruire le tissu périphérique et suburbain. Les citoyens
qui s'y trouvent ont autant le droit d'y vivre que d'autres le droit de vivre
à Montréal. D'ailleurs, tenter d'asphyxier les régions
suburbaines, c'est prendre le risque d'enrayer une délicate
mécanique régionale et, par le fait même, c'est aller
à l'encontre des intentions gouvernementales en matière
économique. Si le gouvernement veut améliorer la qualité
de vie de ses citoyens, il doit aussi le faire à l'extérieur de
Montréal. Or, l'existence d'un service de transport en commun est un des
éléments de cette qualité de vie. Si le gouvernement veut
aménager l'espace urbain de façon plus efficace, il n'est pas
justifié, en ce faisant, de porter des coups à
l'intégrité du tissu suburbain. Refuser aux régions
périphériques une aide pour le transport en commun
nécessaire, voire même essentiel, c'est inviter les citoyens de
notre région à la quitter et à venir s'établir dans
la région montréalaise, le tout au détriment, bien
sûr, de notre région.
Si le gouvernement veut atteindre un financement basé sur le
principe de l'équité, il faut aussi que ce principe soit à
la base de sa réflexion sur la situation du transport en commun dans
notre région. Or, qui dit équité dit aussi prise en
considération des situations particulières et recherche de
solutions également particulières. Pour notre région, les
solutions montréalaises ainsi que l'intention gouvernementale de couper
des subventions hors du territoire de l'ORT ne nous semblent pas des
applications bien respectueuses du principe d'équité.
L'équité exige que le gouvernement procède, avec toutes
les parties concernées, à la recherche de solutions originales,
justes et propres à notre région.
En conclusion, les corporations municipales de Berthierville, paroisse
de Saint-Antoine-de-Lavaltrie, village de
Lavaltrie, paroisse de Sainte-Geneviève-de-Berthier et paroisse
de Saint-Joseph-de-Lanoraie et Lanoraie-d'Autray soumettent respectueusement
à cette commission que la politique gouvernementale sur le transport en
commun à Montréal oublie et relègue à
l'arrière-plan les problèmes propres à la région
périphérique qu'est la nôtre, le tout sans solution durable
et équitable. La solution proposée pour Montréal est telle
que nos citoyens sont appelés à payer par leurs impôts, par
la taxe sur l'essence et par les frais de péage des autoroutes une
portion du coût de transport en commun dans la région de
Montréal. Tout en contribuant financièrement au transport en
commun à
Montréal, nos citoyens sont laissés à
eux-mêmes face à leurs propres problèmes de transport en
commun. La règle de l'équité exige, au contraire, que les
régions plus riches de la province participent à l'instauration
d'un service public, comme le transport en commun, dans les régions les
moins favorisées, dont la nôtre.
La proposition gouvernementale refuse actuellement aux citoyens des
zones périphériques le droit de faire un choix entre des types de
transport et impose à nos citoyens une solution plus onéreuse,
alors même que le Québec traverse une période de difficile
conjoncture économique.
Enfin, lors d'un sondage dans nos régions, la très grande
majorité de nos contribuables ont reconnu leur incapacité et
celle de leur municipalité à assumer le coût de ce
transport en commun qui, de l'aveu du gouvernement, ne peut qu'augmenter
à un rythme soutenu. Il est urgent que les parties concernées,
soit les transporteurs, les municipalitées et le gouvernement,
procèdent, pour notre région, à la recherche d'une
solution originale et équitable.
Il est justifié de considérer la possibilité de
permettre aux transporteurs privés de desservir tous les coins de notre
région, cette libéralisation des permis et des tarifs leur
permettant de nous offrir des services adéquats.
En raison de ce qui précède, il est essentiel que le
gouvernement accepte d'assumer également les coûts
inhérents au maintien d'un service de transport en commun hors du
territoire de l'ORT.
Le Président (M. Boucher): Merci, Me Comeau. M. le
ministre.
M. Clair: M. le Président, je voudrais, dans un premier
temps, remercier les maires présents de représenter un certain
nombre de municipalités de leur région sur la question du
transport en commun dans la grande région de Montréal et de nous
fournir leur point de vue sur cette réforme.
Je n'aurai qu'un commentaire et une seule question. Mon commentaire est
le suivant: Les limites de la zone subventionnable pour le transport en commun
ont été établies en fonction d'un certain nombre de
critères, à savoir le nombre de passagers, par exemple,
l'achalandage et la nature du transport en commun. Est-ce qu'il s'agit d'un
transport en commun local ou régional? Auquel cas on dit: Oui, c'est
subventionnable. Mais s'il s'agit de transport interurbain, on ne subventionne
pas le transport interurbain entre Matane et Rimouski, entre Drummondville et
Sherbrooke; il n'y a pas beaucoup de raisons pour lesquelles on aurait deux
poids deux mesures, pour lesquelles on subventionnerait du transport
interurbain dans la région de
Montréal et qu'on ne le ferait pas ailleurs au Québec. On
a essayé de définir un périmètre qui tienne compte
de cette différence de notion de transport interurbain, du transport
intercité, et du transport régional, c'est-à-dire du
transport où il y a un volume suffisamment grand de déplacements
entre une banlieue où des gens résident, mais travaillent
ailleurs, comme dans le cas de Repentigny tantôt; il y a un va-et-vient
important. Je pense que, dans votre région, on a considéré
que le va-et-vient, les déplacements quotidiens domicile-travail
étaient moins nombreux, beaucoup moins importants; les chiffres nous le
montrent d'ailleurs, il y a à peine quelques centaines d'usagers par
semaine. On a plutôt considéré que c'était du
transport interurbain.
Si vous nous demandiez de modifier la zone subventionnable... J'ai eu
l'occasion de le dire, la zone que nous avons établie n'est pas
définitive; on verra, après la consultation, qui veut être
inclus et qui ne veut pas être inclus. On a vu que des
municipalités situées plus près que vous de
Montréal - Repentigny et Saint-Sulpice préféraient, elles,
ne pas être incluses dans l'organisme régional de transport, alors
que vous, vous le souhaitez.
Finalement, dans le fin fond, vous parlez d'équité. On
essaie d'en avoir nous aussi. Il n'y a qu'une seule et unique question - les
limites du territoire, ça peut être modifié facilement,
c'est une hypothèse que nous avons déposée - une question
fondamentale, c'est que, si vous demandez que le gouvernement subventionne en
partie le transport en commun, comme il le fait dans le reste de la
région de Montréal, on peut certainement l'étudier. Mais
il y a une chose qui est évidente, c'est que, si on veut être le
moindrement équitable, les mêmes règles qui s'appliquent
dans le reste de la région vont s'appliquer à vous, à
savoir qu'à supposer qu'on modifierait les limites et que vous ayez
droit à des subventions, ça veut dire que vous allez devoir aussi
contribuer financièrement au déficit de ces réseaux de
transport en commun. On ne peut pas dire aux gens de la rive sud de
Montréal, de Laval, de Sainte-Thérèse, de Valleyfield, de
Châteauguay, de partout dans la région: Écoutez, le
gouvernement subventionne, mais vous allez faire votre part vous aussi - ce qui
semble accepté dans les trois grands territoires; en tout cas, c'est la
règle depuis qu'il y a du transport en commun - et faire une exception,
dire aux gens de Berthier que, dans leur région, le gouvernement va
subventionner seul le déficit, les deux vont ensemble. S'il y a une
contribution du gouvernement au déficit d'exploitation du réseau
de transport en commun, il y a une contribution inévitable qui vient de
la part des municipalités. À ce compte, c'est la question que je
pose: quand vous souhaitez être subventionnables - ce qui serait
certainement à examiner, ce n'est pas impossible - est-ce que vous
êtes prêts à payer votre quote-part? Est-ce que vous
désirez la payer? (16 h 30)
M. Guèvrernont (Jude): M. le Président, pour
répondre au ministre, on a fait des assemblées publiques
conjointement avec les deux municipalités, Berthierville et la paroisse
de Sainte-Geneviève-de-Berthier, et nos contribuables nous ont dit
qu'ils ne veulent pas subventionner un transport en commun.
M. Clair: Si vous ne voulez pas le subventionner, alors
qu'ailleurs, quand le gouvernement subventionne, les municipalités
subventionnent, pourquoi, en toute équité, pour employer
l'expression qui est utilisée dans le mémoire, le gouvernement
subventionnerait-il, alors qu'il ne subventionne nulle part ailleurs au
Québec?
M. Guèvremont: Pour vous répondre, M. le ministre,
il y a quelques années, on était desservi par Transport
métropolitain, de Montréal à Berthierville sur la route
138. Je pense que cette compagnie avait des subventions gouvernementales pour
les transporteurs, entre Montréal et Berthierville, qui pouvaient aller
dans toutes les municipalités sur la route 138. Il y a environ 26 mois,
le gouvernement a adopté une loi et la CTCUM a remplacé
Provincial Transport. Comme à Repentigny, on n'a pas reçu la
facture, on s'attend de la recevoir, mais ce n'est pas prévu dans nos
budgets. Ce sera peut-être contesté. On a eu des rencontres entre
municipalités; on en a discuté, c'est dans notre mémoire,
puisqu'on l'a préparé ensemble. Dans la loi, c'est bien dit que
lorsque le gouvernement participe à une subvention, il faut que la
municipalité y participe en même temps. Si l'usager participe
financièrement à la part de la municipalité, je ne verrais
pas pourquoi le gouvernement ne pourrait pas verser une subvention quand
même.
Tantôt, vous avez donné des statistiques contenues dans le
rapport de Lee, Benoît et Associés qui regroupait toutes les
municipalités, au nombre de 24, à l'est de Montréal; ce
rapport vous a été soumis. On a environ 27 personnes par jour au
terminus de Berthierville. Ces personnes peuvent venir d'autres
localités. Si les gens de Berthierville financent leurs propres taxes
municipales, ce sont des personnes qui peuvent venir d'autres
municipalités dans notre bassin; elles peuvent venir des îles, de
Saint-Barthélémy, de Saint-Cuthbert ou de plusieurs
municipalités qui nous entourent. Cela ne veut pas dire que ces 27
personnes sont de la ville même, mais ce sont 27 personnes qui
embarquaient au terminus à Berthier. Dans ce sens, les
contribuables de Berthier ne sont pas pour payer des montants qui
pourraient être assumés par d'autres municipalités, par des
gens qui sont d'en dehors, en plus.
C'est dans ce sens que la population a répondu qu'elle
n'était pas prête à payer parce que, pour le nombre de
personnes et le montant approximatif qui est dans le rapport de Lee,
Benoît et Associés, seulement la part municipale est
au-delà de 1000 $ par personne. Je pense que c'est un montant fort
appréciable pour une petite ville de 4310 personnes. On a un taux de
taxe très élevé. On ne voudrait pas alourdir encore le
fardeau de nos contribuables par des taxes supplémentaires.
M. Clair: M. le maire, je prends votre argument à l'effet
que cela coûterait - je n'ai pas les chiffres mais je prends les
vôtres - environ 1000 $ par passager. Si ce n'est pas raisonnable de
demander à une municipalité de payer - je comprends que le
gouvernement, c'est plus gros et qu'on paie tous pour cela - est-ce qu'il ne
vous apparaît pas que ce n'est pas beaucoup plus raisonnable de demander
au gouvernement de le faire? Finalement, ce sont quand même nos taxes et
nos impôts qui paient cela. Est-ce que la solution la plus acceptable
dans votre territoire, ce n'est pas justement celle que l'on propose, à
savoir de n'obliger ni la municipalité, ni le gouvernement à
subventionner aussi massivement un certain nombre d'usagers qui font du
transport interurbain, comme ceux qui voyagent entre Rimouski et Matane, qui ne
sont pas subventionnés par le gouvernement, et de remettre le plus
rapidement possible ce transport à une entreprise privée?
M. Guèvremont: Je suis d'accord avec vous, M. le ministre,
lorsque vous dites que ce sont nos taxes. Ce sont les miennes aussi, lorsqu'il
s'agit de donner de l'argent à Montréal ou à
Québec, où il y a du transport en commun, car j'y participe
directement avec mes impôts moi aussi.
M. Clair: Si je comprends dans le fond, c'est que vous dites sur
les deux points et sur le dernier point notamment: II est essentiel que le
gouvernement accepte de supporter les coûts inhérents au maintien
de services de transport en commun dans notre région. Il est
justifié de considérer la possibilité de permettre aux
transporteurs privés de desservir tous les coins de notre région.
Dans le fond, sans vous mettre en contradiction, votre position, c'est que si
cela n'est pas raisonnable pour vous de payer, ce n'est peut-être pas
plus raisonnable de demander au gouvernement de le faire et que l'idéal
- ce n'est pas justifié - c'est au plus tôt de voir s'il n'y a pas
moyen de remettre purement et simplement la responsabilité à un
transporteur privé qui desservirait votre coin.
M. Guèvremont: Pour vous répondre, M. le ministre,
à ce sujet, dans notre localité, nous sommes desservis par deux
réseaux d'autobus, à part celui de la CTCUM, soit Voyageur et
Brissette, mais ils voyagent de Berthier à Montréal à
portes fermées. Ils ne peuvent prendre aucun piéton ailleurs que
dans les limites de Berthier.
M. Clair: Dans votre esprit, s'ils étaient
autorisés à assurer le service, cela réglerait le
problème?
M. Guèvremont: Avec la nouvelle loi, le 31
décembre, on présume que la CTCUM va se retirer du dossier.
Qu'est-ce qui va se passer?
M. Clair: Autrement dit, voici ma question, est-ce que dans votre
esprit les transporteurs privés, il y a deux transporteurs privés
qui vous desservent déjà, peut-être pas demain matin ou le
1er janvier, car il faut se donner le temps d'ajuster l'ensemble de la
réforme et de voir à ce qu'elle soit applicable, mais, un jour
donné, l'un ou l'autre ou les deux transporteurs privés qui vous
desservent déjà sont prêts à remplacer la CTCUM?
M. Guèvremont: Je crois qu'à ce jour, on a
rencontré un transporteur, Brissette Autobus, puis on a contacté
Voyageur Transport. Ils n'ont pas pu venir à notre réunion, mais
ils nous ont dit qu'ils étaient très intéressés
à nous desservir; ils ont des horaires peut-être qui iraient pour
les usagers; il s'agirait de prendre entente. À l'heure actuelle, ils
ont un permis qui ne leur permet pas d'exercer dans les limites entre notre
localité et Montréal à part de prendre des voyageurs
à Berthierville et de les amener directement à Montréal ou
vice versa.
M. Clair: Juste une petite question d'information. Brissette,
dites-vous?
M. Guèvremont: Brissette Transport.
M. Clair: Que dessert Brissette Transport actuellement?
M. Guèvremont: Brissette Transport a un permis qui va de
l'île Saint-Ignace jusqu'à Montréal.
M. Clair: C'est l'île Saint-Ignace-Berthier dans le
fond.
M. Guèvremont: Mais il y a deux municipalités qui
sont au sud de Berthier, l'île-Saint-Ignace, l'île-Dupas,
Berthierville.
M. Clair: D'accord, je comprends. Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Robert Baldwin.
O'Gallagher: Merci, M. le Président. M. le maire, j'ai une
couple de questions à vous poser. Si je comprends bien, vous avez un
problème, mais ce n'est pas un gros problème. Vous avez 27
passagers par jour, approximativement, qui voyagent de Berthierville à
Montréal. Si jamais la CTCUM, qui a pris les usagers de
l'agglomération de Montréal, se retire du portrait, cela va
résoudre votre problème, votre fardeau. Un bon jour, vous allez
recevoir un compte. Vous n'avez pas hâte de le recevoir, mais vous avez
hâte que ce soit hors du portrait. Si jamais la CTCUM se retirait au mois
de janvier, comme vous l'avez dit, le problème pourrait être
résolu soit par Brissette ou Voyageur. Avez-vous pensé à
d'autres solutions? Le covoiturage a été mentionné par le
maire de Repentigny tout à l'heure. S'il y a seulement 27 personnes de
la région, il me semble qu'on pourrait résoudre ce
problème à 50% par le covoiturage. Votre problème pourrait
être résolu si on vous débarrasse de la CTCUM.
M. Guèvremont: M. le Président, le covoiturage
existe actuellement. Je n'ai pas de statistiques des personnes de Berthierville
qui travaillent à Montréal. Il peut en exister actuellement qui
s'entraident. Une semaine, c'est une qui prend son automobile et en voyage deux
ou trois autres; l'autre semaine, c'est une autre. Elles alternent. À
Berthierville, on a quelques usines. Il y a une grosse partie de la population
qui travaille à Berthierville. Le bassin qu'il y a autour de
Berthierville vient travailler à Berthierville, mais il y a quelques
personnes qui travaillent à l'extérieur. Chez nous, ce sont
surtout les étudiants qui vont dans les universités à
Trois-Rivières ou à Montréal.
M. O'Gallagher: Y a-t-il un va-et-vient entre Berthierville et
Joliette? Joliette est un endroit plus industrialisé.
M. Guèvremont: On a un transporteur entre Berthierville et
Joliette.
M. O'Gallagher: Vous en avez déjà un. M.
Guèvremont: Oui.
M. O'Gallagher: Ce n'est pas subventionné, c'est
privé.
M. Guèvremont: C'est privé.
M. O'Gallagher: Ce n'est subventionné ni par la
municipalité, ni par le gouvernement provincial.
M. Guèvremont: Aucune subvention.
M. O'Gallagher: Cela fonctionne. Cela démontre que c'est
possible de faire fonctionner l'entreprise privée dans le domaine du
transport en commun à des prix où c'est rentable.
M. Guèvremont: Je ne pourrais pas vous dire que c'est
rentable. Je sais qu'il y a une compagnie à Joliette qui vient
quotidiennement à Berthier. On a un transporteur qui va de Berthier
à Saint-Gabriel.
M. O'Gallagher: Merci.
M. Guèvremont: Si c'est rentable ou non, je ne le sais
pas. On n'a jamais demandé les...
M. O'Gallagher: Cela fonctionne depuis combien de temps?
M. Guèvremont: À ma connaissance... M.
Lavallée pourrait répondre à cela.
M. Lavallée (Paul-Émile): Une quinzaine
d'années.
M. Guèvremont: Une quinzaine d'années.
M. O'Gallagher: Cela doit être rentable. Il faut
présumer que c'est rentable.
M. Guèvremont: Je sais qu'il y a un service, mais pas
toutes les heures. Il y a des services aux heures de pointe seulement. On donne
un service selon les besoins.
M. O'Gallagher: Aux heures de pointe, selon les besoins de la
population. Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre.
M. Clair: Simplement...
M. Lavallée: M. le Président, si vous me permettez,
j'aurais une remarque à faire et deux questions d'éclaircissement
à poser.
Le Président (M. Boucher): Pourriez-vous approcher votre
micro, s'il vous plaît?
M. Lavallée: Étant donné qu'on est en dehors
de l'ORT, j'avais cru comprendre d'un renseignement qui a été
donné tout à l'heure au maire de Repentigny qu'il pouvait se
retirer de l'ORT, c'est-à-dire de la structure, mais qu'il pouvait quand
même être subventionné. C'est la première
précision que je voudrais avoir. Ma remarque était que dans le
passé... Dans la province, ce n'est
pas subventionné partout, vous avez donné l'exemple de
plusieurs endroits. Par contre, il y a une nouvelle structure qui va être
mise en vigueur prochainement. Maintenant, on nous demande de contribuer
à la subvention qui sera versée à I'ORT. C'est nouveau. Au
Heu d'être subventionné, on subventionne les autres à
même la municipalité.
Ma troisième remarque, c'est une question. Étant
donné qu'il y a tout près de trois ans que nous sommes desservis
par la CTCUM, nous allons recevoir un compte. Qu'est-ce qui va arriver de notre
compte de taxes et de la partie qui est payée par le ministère
pour les édifices gouvernementaux? Pourra-t-on leur envoyer un compte
rétroactif de trois ans ou si c'est la municipalité qui va
être obligée d'assumer cette perte?
M. Clair: Pourriez-vous répéter votre
dernière question, s'il vous plaît? Je prenais une note, je ne
pensais pas qu'il y avait... (16 h 45)
M. Lavallée: Vous êtes au courant que nous devons
recevoir un compte de la CTCUM. Ce compte est rétroactif à tout
près de trois ans. Que va-t-il arriver à la partie que le
ministère des Affaires municipales payait en ce qui concerne les "en
lieu" de taxe, les commissions scolaires, les édifices gouvernementaux,
la pépinière provinciale, toutes ces choses? Les
municipalités vont-elles en subir la perte? Où va-t-on pouvoir
envoyer un compte rétroactif de trois ans?
M. Clair: Je vais commencer par la dernière question. Je
n'ai jamais entendu dire qu'on pouvait taxer rétroactivement; quand une
facture nous arrive, elle est répartie sur l'ensemble des
propriétaires fonciers. C'est évident que si le taux de taxation
augmente de 0,05 $ les 100 $ d'évaluation pour un, il augmente pour tout
le monde. La notion de taxation rétroactive, je n'ai jamais vu de cas
où cela pouvait se faire; d'ailleurs, c'est en soi un peu
hypothétique. À quoi cela servirait de taxer
rétroactivement alors qu'en fait, dans le compte de l'année
courante, qu'on paie pour les années une telle, une telle et que ce soit
indiqué sur le compte ou qu'on paie dans une année donnée
pour ces années antérieures, cela a exactement le même
effet?
En ce qui concerne Repentigny, ce que j'ai essayé d'expliquer au
maire de Repentigny et que je voudrais que vous compreniez bien aussi, c'est
que ce n'est pas, en fait, l'appartenance à un organisme régional
de transport qui va déterminer si oui ou non vous avez une quote-part;
c'est de savoir si oui ou non vous avez reçu un service. Qu'il y ait ou
qu'il n'y ait pas d'organisme régional de transport, les quotes-parts
s'en viennent. Cela n'a rien à voir l'un avec l'autre, c'est
déjà le cas. Ce que nous proposons, nous, c'est de vous donner le
pouvoir, si vous voulez du service, de le déterminer puis de dire quel
niveau de service vous voulez puis si vous voulez payer, vous payez. Le
contraire aussi, si vous n'en voulez pas, vous ne payez pas et il n'y en a pas.
C'est une situation beaucoup plus limpide que celle qui existe actuellement
où c'est la CTCUM qui décide si, oui ou non, il y a du service
chez vous et combien cela vous coûte. C'est ce qu'on propose de corriger
pour avoir une situation beaucoup plus claire.
Quant à dire maintenant: C'est nous qui subventionnons pour les
autres, comme je l'expliquais tantôt, si vos municipalités
voulaient faire partie du territoire subventionnable, je suis bien prêt
à examiner la chose, mais ce que je vous dis, c'est que si, moi, je
subventionne comme ministre des Transports alors que toutes les
municipalités paient leur part, c'est bien évident que l'un ne va
pas sans l'autre. Les subventions du gouvernement vont de pair avec la
contribution des muncipalités, chacun paie; c'est la façon dont
la facture est répartie en matière de déficit de transport
en commun. Ce que je disais au maire de Repentigny tantôt, je vous le dis
aussi. Quant aux limites, c'est envisageable, les deux sont envisageables
d'inclure ou d'exclure des municipalités, mais il y a une chose
certaine, c'est que le gouvernement doit traiter l'ensemble des
bénéficiaires du transport en commun de la même
façon. On ne subventionne pas ailleurs au Québec le transport
intercité. Il n'y a pas de raison pour laquelle on le ferait dans la
région de Montréal si on ne le fait pas ailleurs, d'une part, et,
d'autre part, si partout où on subventionne, on demande une contribution
des municipalités, à Sherbrooke, Chicoutimi,
Trois-Rivières, Québec, Montréal, partout, c'est bien
évident que la même règle vaut pour toutes, c'est une
simple règle d'équité.
M. Lavallée: Si vous avez remarqué, M. le ministre,
je vous ai dit que je vous posais une question puis que je faisais une
remarque. Ma remarque, c'est justement cela. Avec nos taxes, la taxe sur
l'essence, comme les fonctionnaires sont venus nous le dire à Berthier,
le péage sur les autoroutes... Comme vous le savez, nous autres, pour
aller à Montréal, sur une distance de 45 milles, on a trois
postes de péage, donc au lieu de 0,75 $, cela nous coûte 1,50 $.
Avec cet argent, on subventionne la ville de Montréal. La remarque que
je vous faisais est que c'est complètement inverser les rôles.
Jusqu'à cette année, on était subventionné, mais
là, on nous demande de subventionner les autres. C'est pour cela que je
vous faisais une remarque et que je vous posais une question.
M. Clair: Je comprends le point de vue. Je dirai implement que si
la municipalité ne fait pas partie du territoire, il n'y a pas de taxe
additionnelle sur l'essence. Quant au péage, la décision du
gouvernement a été prise de cesser de subventionner le
déficit de l'Office des autoroutes et de lui demander de s'autofinancer
et d'aller chercher une contribution régionale à partir des
postes de péage pour les postes situés dans la région
métropolitaine de Montréal, et je reçois votre
commentaire.
M. Lavallée: Si vous me le permettez, M. le
Président...
M. Clair: M. le Président, je m'excuse, je ne voudrais pas
être désagréable envers M. le maire, mais comme on avait
convenu...
M. Lavallée: C'est parce que je repose la question
à M. le ministre.
M. Clair: Justement, M. le maire, la commission parlementaire a
pour objet de recevoir des témoins et de poser des questions aux
témoins. Je n'ai pas d'objection quant à moi, mais je sais que
c'est la règle et j'ai peur d'être rappelé à l'ordre
par le président.
M. Bissonnet: M. le Président, je pense que la question
est pertinente à la région de Berthier qui, évidemment,
défraie une partie de l'autoroute parce qu'il n'y a pas de subvention.
Autant c'est utile d'aller à Montréal en transport en commun,
autant cela leur coûte cher pour y aller.
M. Clair: Quant à moi, M. le Président, je n'aurais
pas d'objection à continuer le débat. C'est simplement qu'en
commission parlementaire ce sont les membres de la commission qui posent des
questions aux intervenants et non pas l'inverse. Il y a d'autres occasions pour
le faire.
Le Président (M. Boucher): Vous pouvez toujours faire vos
commentaires d'une façon interrogative, mais les réponses ne sont
pas nécessairement obligatoires.
M. Lavallée: M. le Président, si vous me le
permettez, M. le ministre a donné une explication que je n'ai pas
tellement comprise; cela me prend un peu de temps à comprendre. Il m'a
dit qu'on n'aurait pas de taxe à payer sur la gazoline pour
subventionner Montréal; est-ce que cela peut vouloir dire que notre taxe
sur l'essence va diminuer ou s'il va y avoir une taxe supplémentaire
à la ville de Montréal?
M. Clair: Si la municipalité de Berthier ne fait pas
partie de l'organisme régional de transport, il n'y a pas de plus ou de
moins; vous n'en faites pas partie. La taxe demeure la même que celle qui
existe actuellement.
M. Lavallée: Les fonctionnaires qui sont venus chez nous
nous ont dit que c'était subventionné par la taxe sur l'essence
et les postes de péage de l'autoroute.
M. Clair: C'est tout à fait exact, mais sur la taxe
perçue à l'intérieur du périmètre. Regardez,
il y a une carte qui est jaune, rose et bleue. La perception de revenus
additionnels se limite à cette région. On voit le bout de ligne,
Berthier, juste au nord, Berthier est très loin du
périmètre de l'organisme régional de transport et elle
n'en fait pas partie. Je comprends que - vous avez tout à fait raison -
vos gens sont appelés à contribuer en partie au financement du
transport en commun par le biais des postes de péage situés
à l'intérieur de la région métropolitaine de
recensement, mais mon seul point était de dire qu'en ce qui concerne la
taxe sur l'essence perçue dans la région métropolitaine
vous n'en faites pas partie.
M. Guèvremont: M. le Président, je pense que, comme
M. le ministre l'a dit tantôt, ce n'est pas le rôle des personnes
de poser des questions, mais j'aurais seulement une question d'information, si
vous me le permettez. Au 1er janvier 1983, est-ce que la CTCUM va céder
son passage à d'autres personnes? Son permis, est-ce que la CTCUM va le
garder quand même pour desservir jusqu'à Berthierville? Dans la
même question, si les municipalités riveraines, sur la route 138,
s'organisent - c'est une supposition -avec des transporteurs privés, qui
va émettre les permis et à qui les donnera-t-elle?
M. Clair: C'est cela qui est très difficile. Vous touchez
un point qui est central. C'est que ces permis qui appartiennent à la
CTCUM ont été expropriés. Comment pourra-t-on passer, au
1er janvier ou à une autre date, d'un transporteur public à un
transporteur privé? Il n'y a pas de décision de prise
là-dessus. Il y a deux grandes possibilités. La première,
c'est que la Commission des transports du Québec soit autorisée
à tenir des audiences pour savoir quel transporteur privé le fera
et dans quelles circonstances. Il pourrait desservir vos municipalités
sans que celles-ci soient appelées à payer et sans que le
gouvernement soit appelé à payer. C'est une première
possibilité. Une autre possibilité, c'est que toutes les
municipalités de votre corridor se regroupent dans ce qu'on appelle un
comité intermunicipal ou un conseil local de transport et que ces
municipalités, elles, fassent le choix du transporteur privé qui
devrait les desservir, qu'elles déterminent combien il y a d'autobus par
semaine ou par
jour à telle ou telle place, qu'il y ait un contrat de services
ou, une entente signée entre un transporteur privé et vos
municipalités, plutôt que d'émettre un permis.
Quand on émet des permis, cela a une valeur et ces permis, il
faudrait éviter qu'on soit obligé, un jour, de les
réexproprier, alors qu'ils ont déjà été
expropriés une fois. Il ne faudrait pas s'organiser pour qu'ils soient
expropriés une deuxième fois. La façon dont cela se
passerait? Est-ce que ce sera le 1er janvier? Je ne pense pas, à cette
date, qu'on puisse agir aussi rapidement. Peut-être que cela prendra
quelques mois de plus mais il y a deux grandes façons de le faire. Soit
que, comme on le propose, vous vous réunissiez en un conseil local de
transport, que vous soyez habilités à faire une entente avec un
transporteur privé et que vous preniez les décisions avec le
transporteur privé pour vous assurer qu'il n'y a pas de déficit,
que cela fait son affaire ainsi que la vôtre. Ou, encore, que la
Commission des transports soit mandatée pour tenir des audiences. Je
vous avouerai que ma préférence est bien plus de vous faire
confiance, que les municipalités desservies dans tout le corridor se
réunissent et disent: Nous mandatons tel transporteur privé et
voici le niveau de service qu'on veut dans chacune de nos municipalités.
Voilà ce qui fait notre affaire, et cela ne nous coûte rien. Je
préférerais cette avenue.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Robert Baldwin.
M. O'Gallagher: Si je comprends bien, M. le ministre, vous faites
l'expropriation de Montréal métropolitain et vous envoyez le
compte aux municipalités. Maintenant, les municipalités vont
être obligées d'exproprier la CTCUM. Sûrement que le
ministère ou la Commission des transports peut régler ce
problème.
M. Clair: Même si cela prenait l'adoption d'une loi, M. le
Président, il n'est pas question qu'on réexproprie les permis de
la CTCUM et qu'on demande aux municipalités de les payer. Elles les ont
payé une fois, elles n'ont pas à les payer deux fois.
M. O'Gallagher: Elles n'ont pas encore reçu le compte.
M. Clair: Je disais "elles ont" dans le sens que les quotes-parts
sont déjà prévues dans la loi.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: M. le Président, M. le ministre, pour
être bien clair, la situation de la CTCUM finit le 31 décembre.
Nous sommes au 15 octobre. Qu'est-ce qui va se passer après le 1er
janvier?
M. Clair: C'est ce que j'ai expliqué.
M. Bissonnet: Je tiens à vous dire qu'il ne reste pas
grand temps. Actuellement, il y a des lignes qui sont desservies, il y a des
permis. Même si les municipalités s'entendent - elles vont se
réunir - il faut qu'elles fassent une demande à la Commission des
transports. Si c'est un transporteur privé qui a la permission de la
Commission des transports d'exploiter la ligne Montréal-Berthier en
arrêtant à tous les villages, Lanoraie, tout cela, à ce
moment, il faut que cela se fasse selon les lois qui nous régissent.
Donc, il faudrait un projet de loi pour permettre à ces
municipalités, d'ici à la fin de la session, d'alléger les
procédures, leur permettre, si elles le décident selon leur
autonomie, d'avoir une firme privée pour les desservir au lieu d'une
firme publique, pour ne pas payer des déficits.
M. Clair: M. le Président, je pense qu'on s'entend.
L'objectif des municipalités, c'est le même que celui du
gouvernement, c'est d'aller vers un transporteur privé si j'ai bien
compris. Pour le faire, dans la proposition, on suggérait que ce soit
à compter du 1er janvier, le 1er janvier s'en vient vite. Si ce n'est
pas possible le 1er janvier, je pense qu'on n'est pas à trois mois
près de la fin du monde. Ce sera toujours possible, si on n'a pas le
temps de le faire par loi le 1er janvier, qu'on maintienne le système
existant pour trois mois de plus, qu'on se donne le temps de se retourner de
bord et voir quelle est la meilleure façon à prendre pour aller
le plus rapidement possible vers un transporteur privé. Notre objectif,
autrement dit, c'est que, tant les municipalités que nous, dans votre
région, on arrête de payer le plus rapidement possible pour ce
service parce qu'on pense que c'est possible de le faire par un transporteur
privé sans assumer des déficits, ni vous ni nous. Je pense qu'on
est d'accord là-dessus. Le 1er janvier, ce n'est pas par loi. Il n'y a
pas de loi adoptée qui dit qu'au 1er janvier c'est fini. C'était
l'objectif qu'on s'était fixé, que le 1er janvier cette question
soit réglée. Si elle n'est pas réglée le 1er
janvier, on fera tout ce qu'on peut pour la régler le plus vite possible
après.
M. Bissonnet: Tout dépend des permis de route qui sont
accordés par la Commission des transports. S'ils se terminent le 31
décembre, ils se terminent. S'ils se poursuivent...
M. Clair: Les permis sont des permis
ad vitam aeternam. C'est justement cela le problème.
M. Bissonnet: Ah, bon! Cela va prendre une loi.
M. Clair: Cela prend une loi, absolument.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. Au nom
des membres de la commission, je remercie les représentants de
Berthierville, Saint-Antoine-de-Lavaltrie, Berthier, paroisse, et
Saint-Joseph-de-Lanoraie pour la présentation de leur
mémoire.
M. Clair: M. le Président, juste un mot, si vous me
permettez, pour remercier aussi les deux maires présents et remercier
également les autres maires qui ont accepté de travailler avec
vous. Je pense, MM. les maires, que c'est très important que le plus
rapidement possible, comme vous avez commencé à le faire, vous
travailliez à ce dossier à partir de toutes les
municipalités qui sont dans le corridor de transport. Je pense en
particulier qu'avec les municipalités de Repentigny et de Saint-Sulpice
qui ont l'air à penser pas mal comme vous autres, cela serait important
que vous commenciez à vous en parler pour savoir comment cela peut se
faire - cela pourrait nous être très utile, quant à nous -
comment cela devrait se faire, le transfert de la CTCUM vers un transporteur
privé. Je pense que cela pourrait nous être très utile si
déjà vous commenciez à travailler avec ces gens. (17
heures)
M. Bissonnet: M. le ministre, juste pour conclure. On vous
remercie. Je crois que, dans toutes les municipalités, vous êtes
presque tous ensemble déjà, cela ne sera pas difficile pour vous
d'en venir à une entente commune.
Une voix: Merci.
Ville de Joliette et municipalités
environnantes
Le Président (M. Boucher): Merci. J'appelle maintenant les
municipalités de Joliette, du village de Saint-Jacques, de la paroisse
de Saint-Jacques, du village de Saint-Alexis, de la paroisse de Saint-Alexis,
de Sainte-Marie-Salomée, du village de Crabtree, de Saint-Paul de
Joliette, de Saint-Roch-de-l'Achigan et de Saint-Gérard-Magella
représentés par Me Michel Bélair, M. Raymond Gaudreau et
Mme France Fortin de la municipalité de Saint-Paul.
Me Bélair.
M. Bélair (Michel): M. le Président, M. le
ministre, MM. les députés, premièrement, j'aimerais
excuser l'absence cet après-midi de celui qui a rédigé le
mémoire qui vous a été soumis, soit M. Michel Ferland qui
est hospitalisé. J'espère que je vais avoir au moins un peu de sa
compétence pour pouvoir vous entretenir de ce mémoire. Je dois
souligner également l'absence de M. Raymond Gaudreau qui va
peut-être arriver un peu en retard. M. Gaudreau est transporteur
lui-même et je suis certain que son point de vue aurait été
intéressant à entendre. Je voudrais aussi souligner la
présence de M. Denis Desrochers à mes côtés, qui est
maire de la corporation municipale de Saint-Paul.
M. le Président, notre mémoire vous a déjà
été soumis. Je vais me contenter, si vous me le permettez, d'en
faire seulement un bref résumé. Premièrement, j'aimerais
situer les corporations municipales qui vous ont soumis ce rapport. La
première chose qu'on pourrait en dire, c'est qu'elles sont toutes
situées dans la zone D; donc, elles sont à l'extérieur du
territoire juridique des trois commissions de transport existantes et elles
sont également non participantes. Donc, elles ne seront pas
contrôlées par le futur organisme régional de transport.
Évidemment, la conséquence de cette situation est qu'en ce qui a
trait au transport interurbain, à tout le moins, ces
municipalités ne contribueront en aucune façon au financement des
services de transport. Face à la proposition gouvernementale, les
municipalités s'empressent de soumettre leur accord sur la proposition,
plus particulièrement en ce qu'elles ne seront pas justement tenues de
financer le transport public.
Par contre, les municipalités sont conscientes des implications
de ce projet quant à leurs contribuables et plus particulièrement
ceux qui sont usagers. Le premier point qu'il conviendrait de souligner est
peut-être l'arrêt des subventions au fonctionnement dès le
1er janvier 1983. La première conséquence de cet arrêt de
subvention est forcément que les coûts d'exploitation encourus par
les usagers et qui devront être assumés par les usagers vont
être augmentés de façon appréciable, et je m'en
réfère tant au document qui a été soumis qu'aux
réunions d'information qui ont eu lieu soit à Repentigny ou soit
à Saint-Jacques pour les municipalités concernées.
Je me permets de citer un passage du rapport où on nous dit que
le bilan financier du territoire D implique une tarification d'équilibre
qui n'engendre pas de déficit pour les services de transport en commun.
De même, on nous dit: Ces tarifs devront être majorés dans
une proportion variant selon les corridors de desserte, afin de combler les
déficits engendrés par la desserte. Donc, on doit absolument, du
côté des usagers, s'attendre à une augmentation radicale
des coûts. On a essayé d'évaluer un peu en quoi pouvait
consister cette augmentation. Lors de
la réunion qui s'est tenue le 13 août 1982, à
Saint-Jacques, on nous a soumis, parmi certains documents, un tableau faisant
état des comparaisons des tarifs actuels et des tarifs proposés
pour la région. Les déplacements, à ce moment-là,
venaient d'un comptage qui a été effectué par la CTCUM en
avril 1982. Pour, par exemple, la région de Saint-Gérard-Magella,
le tarif mensuel était de 80,50 $ - on calculait à ce moment 44
voyages par mois, 44 allers simples par mois - donc 80,50 $, le tarif actuel
pour se rendre de Saint-Gérard-Magella au centre-ville de
Montréal. En comparaison, on nous donnait le tarif mensuel
proposé qui s'établissait à 102 $.
Les fonctionnaires qui étaient présents à cette
assemblée nous informaient, par la suite, que ces données - en ce
qui a trait plus particulièrement au tarif mensuel proposé -
n'étaient pas véritables puisqu'on evait tenir compte - ce qui
n'avait pas été fait - de la fin des subventions et qu'en
conséquence on pouvait majorer ces taux d'environ 40%. Si on fait cette
majoration, on peut constater, par exemple, pour Saint-Gérard-Magella
que le coût du tarif mensuel, qui est actuellement de 80,50 $, passerait
à 142,80 $, le tout évidemment approximativement.
De même, si on prend la municipalité de Saint-Paul, le
tarif mensuel actuel est de 87,50 $. Le tarif mensuel proposé
était de 111 $. Si on se voit forcé de le majorer, à cause
de la fin des subventions, on se retrouve avec un tarif mensuel de 155,40 $ qui
devra être supporté par les usagers.
Alors, les municipalités sont très conscientes de ce
coût qui devra être supporté par leurs contribuables. Vu
l'importance de cette augmentation, tenant compte évidemment de la
difficulté des usagers d'absorber, en grande majorité, une telle
hausse, il y a lieu de craindre, croyons-nous, que le tout se traduise,
à court ou à moyen terme, par une diminution draconienne des
services offerts ou par, éventuellement, l'abandon de certains
tronçons du réseau qui ne seraient pas particulièrement
rentables.
Nous craignons également cette diminution à court terme,
soit dès la période de ce que je qualifierais de période
intérimaire d'un an ou deux, soit la période pendant laquelle la
CTCUM fera encore le transport mais abandonnera et cédera le
réseau, en tout ou en partie, à des transporteurs privés.
À ce niveau-là, M. le Président, les municipalités
que nous représentons aujourd'hui recommandent que le ministre des
Transports prenne toutes les dispositions requises pour assurer une politique
tarifaire honnête et économiquement rentable pour les usagers. De
quelle façon pourraient être prises ces mesures? Il y a
évidemment le contrôle de la Commission des transports qui peut
être exercé. Il y aurait également la possibilité de
subventionner, d'une façon ou d'une autre, ce transport, fort
possiblement de façon indirecte, tel qu'on pourra en discuter plus
loin.
Puisqu'on en est, M. le Président, au coût des services,
j'aimerais faire un aparté quant au coût des services offerts
depuis le mois d'octobre 1980 par la CTCUM. J'ai constaté aujourd'hui
que ce problème a déjà été amplement
traité par les représentants des municipalités qui nous
ont précédés, soit, par exemple, M. le maire de Repentigny
et M. le maire de Berthierville. On se retrouve avec une possibilité de
factures - tout le monde est au courant que telles factures devraient arriver
aux municipalités - pour les périodes allant d'octobre 1980, si
je me souviens bien, jusqu'au 1er janvier 1983. Or, aucune des
municipalités que nous représentons n'a fait de prévisions
budgétaires quant à ces dépenses.
Il y a également un autre problème que nous pourrions
peut-être souligner et qui est celui d'assumer le coût des services
rendus par Métropolitain provincial même pour la période
allant de janvier 1977 à octobre 1978. A cet effet, une mise en demeure
émanant de Métropolitain transport a déjà
été envoyée, en date du 23 mars 1981, à 68
corporations municipales qui étaient desservies à l'époque
par Métropolitain Transport, réclamant la somme de 1 000 000 $
pour assumer de ces services.
Ce point a peut-être été réglé, sauf
que cela se serait produit hors de notre connaissance. Nous l'espérons.
Quant à nous, cela demeure toujours litigieux et nous aimerions, dans la
mesure du possible, que ce cas soit réglé.
Pour en revenir, M. le Président, à la facture que les
municipalités devraient s'attendre à recevoir, même si ce
n'est pas partie de la proposition gouvernementale, nous croyons que le
gouvernement devrait aller dans le même sens que cette même
proposition, à savoir ne soumettre aucuns frais pour les
municipalités qui ont bénéficié de ces services
sans les avoir jamais d'aucune façon demandés. Alors, ce
problème pourrait très bien être réglé,
croyons-nous, par voie législative, que ce soit à
l'intérieur du projet de loi à venir ou par un projet de loi
subséquent.
Un autre problème a soulevé l'intérêt des
corporations municipales quant à la période que je pourrais
qualifier d'après la période intérimaire, soit lorsque les
réseaux ou les permis devront être remis à des
transporteurs privés. On ignore évidemment de quelle façon
ce transfert sera fait. Chose certaine, il ne devrait pas y avoir une coupure
draconienne à partir du 1er janvier 1983. Je crois que c'est
physiquement impossible. Maintenant, de quelle façon pourrait-on
susciter l'intérêt d'un
transporteur privé pour lui confier la responsabilité d'un
service à l'intérieur d'un réseau, alors que pour
plusieurs parties de ce même réseau, l'entreprise était
déjà déficitaire lorsque exploitée possiblement par
Métropolitain provincial, mais déficitaire lorsque
exploitée par la CTCUM?
Nous voyons plusieurs obstacles à ce qu'un service soit
confié à un transporteur privé. Premièrement - je
crois que cela a déjà été soulevé d'ailleurs
- on se voit confronté avec l'article 45 du Code du travail. Il est
évident qu'aucun transporteur privé n'est capable actuellement
d'assumer la charge de la convention collective qui a été
signée, qui lie la CTCUM et qui en vertu de l'article 45 devrait lier
également le transporteur qui va prendre le réseau. Alors, il
serait utile croyons-nous que des éclaircissements soient faits quant
à la façon dont tel transfert pourrait s'effectuer.
Le deuxième obstacle, ce serait évidemment la
différence des coûts d'exploitation entre les transporteurs
publics et les transporteurs privés. On sait que les contribuables
usagers doivent déjà s'attendre à une augmentation
appréciable des coûts. Maintenant, on constate que les
transporteurs publics sont déjà subventionnés directement
dans un premier temps, et qu'ils sont également subventionnés
indirectement: par exemple, ils bénéficient de subsides à
l'achat d'un véhicule; ils bénéficient également
d'une exemption de la taxe fédérale sur un achat de pièces
excédant 1000 $. Il doit probablement y avoir d'autres exemples. Nous
nous demandons de quelle façon un transporteur privé est en
mesure d'assumer un service adéquat, tout en maintenant un coût
raisonnable. Nous demandons, M. le Président, quelle hausse l'usager
contribuable est prêt à supporter et à assumer pour que le
transport en commun interurbain soit toujours rentable pour cet usager.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Clair: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
remercier les municipalités des corridors de Joliette, si on peut les
appeler ainsi, de s'être regroupées pour préparer un
mémoire commun. Je pense que cela va exactement dans le sens de la
proposition gouvernementale qui est à l'effet justement de travailler
par corridor, plutôt que d'avoir une approche pour chacune des
municipalités, ce qui compliquerait le dossier à un niveau
inhumain. On n'aurait jamais de solution pour chacune des municipalités.
On doit donc travailler par corridor, et dans ce sens là je les remercie
d'avoir déjà commencé à travailler ensemble.
Les deux obstacles qui ont été soulevés à
l'endroit des transporteurs privés, on en est conscient, notamment en ce
qui concerne l'article 45 du Code du travail. Il est évident que quelle
que soit la solution, il devra y avoir par voie législative ou
autrement, je l'ignore, mais à ce moment-ci on travaille sur cela - une
solution à apporter à ce problème. La même chose en
ce qui concerne la rentabilité de certains tronçons qui
étaient non rentables et qui pourraient être
transférés à des entreprises privées qui ne sont
pas intéressées à aller perdre de l'argent, c'est bien
évident. (17 h 15)
Maintenant, commentaire également sur les niveaux de tarifs, ce
que ça donnerait si la CTCUM n'était plus subventionnée.
Les chiffres que vous avez donnés, par exemple, pour
Saint-Gérard-Magella, de 82 $ à environ 140 $, ça
correspond dans les ordres de grandeur à ce que nous avons. Cela, c'est
avec la structure de coûts de la CTCUM et avec le niveau de service de
celle-ci, tel que c'est présentement. Je donne, par exemple, pour
Saint-Gérard-Magella la fréquence des autobus par semaine qui est
de 174 dans les deux directions, c'est-à-dire 87 dans une direction et
87 dans l'autre, pour un total d'achalandage hebdomadaire de 239. Cela veut
dire que l'autobus passe 174 fois pour 239 usagers.
Il est évident que dans une structure de coûts comme celle
de la CTCUM avec un niveau de service semblable, ça ne peut pas faire
autrement que de créer des déficits exponentiels qui vont finir
par écraser les municipalités. C'est pourquoi on propose
plutôt d'aller vers des transporteurs privés. À ce titre,
si on élimine les contraintes, comme l'article 45 du Code du travail,
etc., si on parvient à avoir une solution, je pense qu'il va être
possible d'avoir un niveau de service qui corresponde aux besoins de 239
usagers par semaine. Avec 174 autobus qui passent, je pense que l'offre
précède la demande largement, et dans ce sens je ne pense pas
qu'on demande tant une amélioration... C'est 120, je m'excuse; c'est
pire, ce n'est pas 239 usagers, mais 120 usagers pour 174 autobus. C'est
évident que c'est ridicule, que ça ne peut pas rester comme
ça.
Si je prends le total du corridor de desserte L'Assomption-Joliette, par
exemple, l'achalandage hebdomadaire total que j'ai, c'est 4228 pour l'ensemble
du corridor. Je prenais tantôt Saint-Gérard-Magella; si je prends
l'ensemble du corridor, c'est 4228. Je comprends les contraintes de la loi et
les craintes des municipalités qu'un transporteur privé puisse
avoir de la difficulté, mais comme j'ai eu l'occasion de le dire
plutôt en commission parlementaire, je ne comprends pas pourquoi, entre
Drummondville, par exemple, et Montréal, il y a un transporteur
privé qui offre un service pour un achalandage d'à peu
près 3000 à 3500 passagers hebdomadaires, dans des conditions
d'entreprise privée, à porte fermée à part
ça, sur quasiment toute la longueur du trajet, alors qu'avec 4228 pour
un corridor qui finalement - je comprends que Drummondville est un peu plus
loin ressemble quand même à celui de Drummondville... Je pense
qu'à ce moment-là on doit faire tout ce qu'on peut pour aller
voir s'il n'y a pas moyen d'offrir l'alternative par un transporteur
privé.
C'est dans ce sens, je pense, qu'on doit aller. Éliminer les
contraintes d'une façon ou d'une autre, mais aller vers l'entreprise
privée, sans quoi, avec un niveau de service du genre de celui qu'on a
actuellement, la structure de coûts de la CTCUM, il est évident
qu'on ne fournira plus à corriger les déficits de semaine en
semaine. Je pense qu'il faut aller vers l'entreprise privée dans ces
cas-là; tout faire pour qu'on puisse y arriver le plus rapidement
possible et ne pas se limiter à l'approche de dire: Qui va payer le
déficit? À ce point de vue là, si on reste avec la CTCUM
à long terme - je dis exactement la même chose que je disais aux
gens de la région de Berthier tantôt - il est évident que
si vous nous demandez de continuer à subventionner un tel service, ce
serait complètement inéquitable pour le gouvernement de dire:
Dans le corridor de Joliette, on va subventionner et on ne demandera pas aux
municipalités de contribuer; alors qu'ailleurs dans la région
métropolitaine on va demander aux municipalités de contribuer. On
ne peut pas avoir deux poids deux mesures. Comme il ne semble pas y avoir
beaucoup d'issues, à la CTCUM, pour un transport en commun public
déficitaire, je pense qu'à ce moment-là on doit aller au
maximum vers la solution du transporteur privé.
M. le Président, c'était le commentaire que je voulais
faire. À proprement parler, j'ai juste une question. Est-ce que les
municipalités que vous représentez ont fait le choix, quant
à elles, de dire: Nous préférons aller vers l'entreprise
privée et ne pas supporter de déficit ou si, au contraire, elles
seraient plutôt prêtes à fonctionner dans ce qui est la
règle - c'est là pour rester - que, quand le gouvernement paie,
les municipalités paient également? Est-ce qu'il y a une
décision de prise dans vos municipalités à ce sujet?
M. Desrochers (Denis): Au départ - je crois que c'est bien
important - vous avez fait justement mention du suicide, pardon du
déficit que...
M. Clair: C'est un vrai suicide à long terme.
M. Desrochers: Oui, justement. Surtout pour nous, si cela arrive,
c'est encore pire. Métropolitain provincial existait avant. On n'a eu
aucune consultation quand l'expropriation de Métropolitain a
été faite en faveur de la CTCUM. Après, il y a eu
consultation, c'est-à-dire que la première consultation - c'est
une approche que les municipalités ont eue - c'est d'avoir un compte, la
possibilité de défrayer le déficit de la CTCUM. Je pense
que le ministre avait fait part que c'était peut-être illogique de
recevoir ce compte. Peut-être qu'il ne l'a pas dit dans ces termes; mais
je le perçois de cette façon.
M. Clair: C'est comme cela que je l'ai dit. C'est une situation
qu'on veut corriger. En 1979, le gouvernement a dû intervenir d'urgence
et il a appliqué les règles qui étaient applicables, a ce
moment-là, pour tout le monde. C'était dans une situation
d'urgence qui devait être temporaire. Maintenant, on dit: II faut s'en
sortir, de cette situation pour l'avenir. On ne peut pas laisser durer cette
situation indéfiniment.
M. Desrochers: Présentement, on fait face - je reviens au
début - à ce compte-là qui va peut-être nous
être présenté en octobre ou en novembre. En octobre, il
vient à échéance. Ce sera peut-être en novembre. En
tant que municipalités, on ne veut pas accepter ce compte parce qu'il
nous est imposé et personne n'a prévu à son budget les
montants requis par la CTCUM.
Ensuite, concernant le choix du transporteur, on favoriserait le
transporteur privé. Ce serait peut-être une solution parce qu'on a
la preuve que, présentement, dans la région, si on parle de ligne
et de tronçon, Joliette est le bout du tronçon et on dessert
d'autres municipalités qui sont plus éloignées et qui sont
desservies par les transporteurs privés. Vous preniez le cas de
Drummondville. Eux, ils ont un bon bout, la plupart ou les trois quarts de
leurs trajets qui sont à portes fermées et ils peuvent quand
même fonctionner. Nous, on a un bout de nos municipalités desservi
par des transporteurs privés et, quand ils arrivent au bout du
tronçon, ils sont obligés de fermer leurs portes. Peut-être
que cela pourrait les rentabiliser encore plus de desservir les
municipalités qu'on représente. En tout cas, je me fais le
porte-parole d'une couple de maires qui m'ont dit: Tu peux nous
représenter. Là-dessus, je pense qu'on est unanime à dire
la même chose, soit de procurer un service aux usagers, parce qu'on sait
très bien qu'il est impossible de penser à n'avoir aucun service
de transport en commun. Mais à quel coût? Quand on pense aux
coûts exorbitants qu'on présentait tantôt selon nos calculs,
personne n'a les moyens de prendre l'autobus et de le voir passer une fois par
jour.
M. Clair: Plus qu'une fois par jour. 174
fois divisé par 7 jours.
M. Desrochers: Écoutez bien! Là-dessus, j'aimerais
ajouter une chose. 174 fois par semaine, si on prend le cas de Saint-Paul, il y
a 25 passagers par semaine. En tout cas, peut-être que les fonctionnaires
diront un peu plus, mais d'après nos calculs, c'est à peu
près cela. Pardon?
Une voix: ...
M. Desrochers: Quand même, je pense qu'ils ont
visité un peu pour sortir des chiffres. J'ai l'impression qu'ils ne
doivent pas toujours rester dans leur bureau.
J'imagine que 25 pour 174 cela fait une fréquence que nous
n'avons aucune possibilité de diminuer parce que la CTCUM ne nous
consulte pas sur la qualité de ses services et sur son taux de
fréquence.
M. Clair: C'est justement ce que la proposition corrigerait dans
le sens que, dans le fond, ce qu'on vous dit, comme je le disais un peu
tantôt aux gens de Berthier, c'est: Regroupez-vous, les
municipalités en dehors du territoire métropolitain
immédiat, et entendez-vous pour déterminer quel niveau de
services vous voulez. On vous donnera le pouvoir de le faire et d'aller vers un
transporteur privé pour lequel vous n'aurez pas à supporter des
déficits.
M. Desrochers: Mais, M. le ministre, il y a les contraintes de
l'article 45 qui font qu'ils sont obligés d'avoir les mêmes
privilèges pour les employés. On sait très bien que c'est
vrai que les chauffeurs de la CTCUM sont très dispendieux parce qu'ils
ont peut-être des choses qu'un transporteur privé ne donne pas
à ses employés; ceux-ci peuvent quand même fonctionner de
la même façon et le service n'en souffre aucunement. Par contre,
avec les exigences de la loi... de l'article 45 - je reviens toujours avec
"loi" parce que je me dis qu'un article c'est quasiment une loi imposée
- ils ne peuvent pas fonctionner.
Quand je parlais des municipalités qui sont desservies par un
transporteur privé et que cela fonctionne très bien, j'imagine
que c'est rentable parce que, sans cela, elles ne le feraient pas. Si on leur
donnait une chance de rentabiliser encore plus, parfait. Si c'est parfait pour
vous, ce serait parfait pour nous. On accepterait immédiatement. On
dirait même demain matin: D'accord, faites le transport, arrangez les
horaires afin qu'ils soient le plus convenables pour tout le monde parce qu'on
sait très bien que passer 174 fois dans la municipalité,
ça ne convient pas à tout le monde.
Si on parlait d'une fois le matin, une fois le midi et une fois le soir,
ce serait préférable pour tout le monde. Quelqu'un qui part
à 10 heures de Joliette pour aller magasiner à Montréal
n'est pas prêt à revenir à 11 heures, mais à 4
heures ça fait son affaire de revenir, par exemple.
Si on parlait de deux ou trois fois par jour de service doublé,
ce serait suffisant.
M. Clair: On dit la même chose là-dessus, je pense.
Je suis conscient, et c'est pour ça que je vous dis qu'il y a des choses
qui devront être réglées par loi, comme l'article 45. Bien
sûr, il faudra s'assurer que les droits de tout le monde sont
protégés là-dedans mais je pense que, par rapport au
nombre d'employés de la CTCUM, le plus grand nombre de chauffeurs
d'autobus ne travaille pas sur la ligne vers Joliette. C'est probablement
très facile à absorber pour la CTCUM, sans problème, sans
faire perdre d'emploi à personne. C'est l'objectif, c'est pour ça
qu'on est conscient des contraintes législatives.
C'est évident que, si on vous propose d'aller vers les
transporteurs privés, il faut se donner juridiquement les moyens d'y
aller parce qu'on ne peut pas, comme je le disais tantôt, exproprier
à nouveau le permis de la CTCUM et vous le faire payer par un
transporteur privé. Cette histoire-là ne mènera nulle
part. On est déjà allé assez loin avec cela. Trouvons
légalement des moyens de se sortir de cela et de mettre un terme
à cette situation.
Quant aux quotes-parts déjà accumulées, mon dernier
commentaire, M. le Président, c'est que vous avez probablement appris
que les municipalités desservies par Métropolitain sud sur la
rive sud de Montréal ont reçu, quant à elles, il y a
déjà deux ans, je pense, leur première quote-part.
Un règlement est intervenu entre la CTRSM, le gouvernement et les
municipalités et il sera peut-être possible d'en venir
également à un règlement. Je pense qu'il serait trop
tôt aujourd'hui pour essayer de régler cela. Notre priorité
est d'arrêter une décision et de changer le régime actuel.
J'ai terminé, M. le Président.
Le Président (M. Rochefort): Allez-y. (17 h 30)
M. Desrochers: Je pourrais peut-être poser une question sur
le sens de subventionner indirectement comme M. Bélair l'a
mentionné tantôt. Je vous pose une question directe: On parlait
des privilèges au point de vue de l'achat d'autobus et de l'acquisition
de pièces. Pourquoi n'y aurait-il pas possibilité d'avoir les
mêmes privilèges pour les transporteurs privés?
M. Clair: En matière de transport interurbain, lors du
dernier congrès de l'APAQ où vous étiez, je crois...
M. Desrochers: Non, je n'y étais pas.
M. Clair: ... l'Association des propriétaires d'autobus du
Québec...
M. Desrochers: En passant, je ne suis pas propriétaire
d'autobus.
M. Clair: Oui, je sais, mais il me semblait vous avoir vu
là-bas. Sur le transport interurbain par des transporteurs
privés, le ministère va créer, avec l'Association des
propriétaires d'autobus du Québec, les privés, un groupe
de travail pour étudier toute la question du transport en commun
interurbain. C'est là que ce sera traité. Jusqu'à
maintenant, nulle part non plus, à ma connaissance, au Canada, le
transport en commun interurbain n'est subventionné. Il y a aussi des
problèmes dans le transport en commun interurbain, mais le gouvernement,
nulle part, à ma connaissance, n'a pris l'initiative de commencer
à payer l'acquisition des autobus. Il faut être bien conscient que
le budget du ministère des Transports est déjà le
troisième plus gros budget du gouvernement du Québec. Si on
commence à acheter des autobus pour les transporteurs privés,
cela va coûter très cher, c'est évident. Il y a beaucoup de
transporteurs privés, d'autobus. Je pense qu'on traite cela
séparément. On examine l'ensemble de la situation, cette
année, dans cette matière.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Au nom de mes collègues, j'aimerais souhaiter
la bienvenue à M. Bélair, à M. Desrochers et à Mme
Fortin. Je constate que M. le maire semble bien connaître son tabac,
spécialement dans cette région. Le ministre a dit qu'il y avait
environ 120 passagers qui étaient transportés vers la
région de Montréal. Vous avez mentionné des coûts.
Il peut y avoir des arguments de part et d'autre.
Habituellement, quand le gouvernement fait des prévisions, il
fait toujours des sous-estimations; lorsque arrivent les vrais coûts,
c'est toujours au-delà de ce qu'il avait estimé.
Vous avez donné deux exemples. Dans le cas de
Saint-Gérard-Magella, d'après mes calculs, il en coûtera
à un usager environ 1750 $ par année pour voyager. Dans l'autre
exemple que vous avez donné, vous parlez d'à peu près 1860
$. Maintenant, il peut y avoir des journées de maladie, etc.; donc, on
n'argumentera pas sur cela. Pourriez-vous nous dire quel est le salaire de ceux
qui dépensent 1734 $ pour aller gagner leur vie? Je suis sûr et
certain que ce ne sont pas des hauts fonctionnaires à 55 000 $ par
année qui se rendent de Joliette ou de Saint-Gérard-Magella
à Montréal. Avez-vous une idée du salaire de ces gens?
M. Desrochers: Comme tabaculteur, je ne peux pas répondre
à cela. M. Bélair pourrait le faire.
M. Bélair: Une chose est certaine, ils n'ont pas un
salaire qui leur permet de se payer une voiture.
M. Cusano: Bon.
M. Bélair: Cela nous donne au moins une indication.
M. Cusano: S'ils sont là-bas, ils doivent avoir une auto
pour voyager.
M. Desrochers: Si je peux me permettre, après avoir
calculé les coûts, c'est peut-être là qu'ils voient
la possibilité de faire les paiements sur une auto.
M. Cusano: D'accord. Une autre petite question. Vous semblez
être très inquiet, vous craignez que, pour une certaine
période, la CTCUM coupe ses services. Vous êtes inquiet de cela.
Vous continuez en disant que vous souhaitez, lorsqu'on en arrivera à
cette situation, qu'il y ait des représentants des municipalités
qui soient appelés autour d'une table de concertation pour discuter du
problème. Est-ce que cette suggestion a été faite au
ministre et quelle a été la réponse?
M. Bélair: Cette suggestion a été faite
à l'intérieur du rapport. Maintenant, comme je vous le disais
tantôt, je n'ai fait que résumer brièvement le rapport.
M. Cusano: II n'y a pas eu de consultation de la part du
ministre?
M. Bélair: Pas à cet effet. Pas à ma
connaissance, à tout le moins.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Viau. M. le ministre.
M. Clair: Oui. M. le Président, je n'ai pas d'autres
questions.
M. Bélair: Est-ce que je pourrais ajouter un mot?
Tantôt, on nous a dit, dans le même sens, en tout cas, dans la
même pensée que moi: Si vous pouviez concrétiser vos
idées et les mettre en application. Je peux dire que c'est notre seul
souhait, à nous autres: d'abord un transporteur privé, d'abord un
service adéquat aux usagers, sans avoir une fréquence
exagérée et à un coût raisonnable.
M. Clair: M. le Président, c'est une communauté de
vues totale. La seule chose qu'il s'agit de faire, c'est de traduire cette
volonté politique commune que nous avons dans les faits. Je pense que,
comme vous
l'avez indiqué, sur le plan juridique, il y a des complications,
et sur le plan des services aussi cela va être important qu'on puisse
compter sur votre collaboration pour, dans le fond, la déterminer. Moi
je ne veux pas que ce soit ni la CTCUM ni le ministre des Transports qui dise
si l'autobus doit passer à Crabtree 76 fois ou 3 fois par jour. Je ne
veux pas que ce soit moi qui décide de cela. Je ne veux pas que ce soit
le COTREM. Je ne veux pas que ce soit la CTCUM. Je veux que ce soit vous
autres. Peut-être que ce qui serait intéressant de faire le plus
rapidement possible, compte tenu que vous êtes prêts à aller
dans ce sens, serait de demander à mes gens du COTREM peut-être
d'avoir une rencontre préliminaire avec vous pour voir comment on peut
mettre en marche une alternative dans votre région, autrement dit, qu'on
n'attende pas la loi pour commencer à se préparer à faire
face à la situation, mais que, dès à présent, on
puisse commencer à étudier qui, quand, comment, combien de fois
par semaine ou par jour seront desservies telles et telles municipalités
de vos deux corridors.
Comme on dit, ça nous enlèverait une grosse épine
du pied si on pouvait compter sur votre collaboration comme vous nous l'offrez
pour que les décisions, dans le fond, ce soit vous autres qui les
preniez et que nous, on serve simplement de soutien technique pour faire le
transfert de transporteur public à transporteur privé lorsque la
loi à cet effet sera adoptée.
M. Desrochers: M. le Président, M. le ministre, soyez
sûr que dès que vous ferez une soirée d'information ou de
consultation, on sera présent. Mais il y a une affaire. Nous autres on
peut vous désigner ceux qui ont les autobus pour faire le service, par
exemple, mais le coffre d'outils, c'est vous qui l'avez. Nous autres, on ne
peut pas se servir de ces outils. Je pense que c'est dans ce sens. Quand bien
même on ferait peut-être 50 soirées d'information ou de
rencontres, l'aboutissement de cela, c'est vous seul qui pouvez le faire.
C'est-à-dire que quand je dis vous, en termes légaux, c'est un
fait...
M. Clair: En termes légaux, vous avez tout à fait
raison. Mais là où je veux que ce soit vous autres qui preniez la
décision, c'est: combien de fois l'autobus passe à tel ou tel
endroit. Nous on veut bien mettre le coffre d'outils à votre disposition
pour vous aider à prendre de meilleures décisions, mais je pense
que ça c'est votre bout à vous autres où vous pouvez nous
être très utiles parce que encore là, moi, je veux bien
faire adopter le cadre législatif qui va permettre cela, mais ce n'est
pas moi qui vais aller le faire à votre place.
M. Desrochers: Soyez-en sûr. Vous n'avez qu'à nous
procurer la clé et on va trouver le cadenas.
M. Clair: Parfait.
Le Président (M. Boucher): Je vous remercie. Au nom des
membres de la commission, je remercie les représentants qui sont venus
présenter leur mémoire tout en offrant, au nom des membres de la
commission, des voeux de prompt rétablissement à Me Ferland.
M. Desrochers: Merci, je vais les lui transmettre.
Le Président (M. Boucher): J'appelle l'Association des
consommateurs du Québec, représentée par M. Jean-Claude
Beauchamp, président, Mme Nicole Laliberté,
vice-présidente et agente de communication, ainsi que Mme Lucille
Brisebois, membre du conseil d'administration. M. Beauchamp.
Association des consommateurs du Québec
M. Beauchamp (Jean-Claude): M. le Président, M. le
ministre, MM. les membres de la commission, Mme la députée, je
remercie les membres de cette commission de l'occasion qui nous est fournie
aujourd'hui d'exprimer le point de vue de ceux qui, en fin de compte, assument
les coûts de ce service qu'on appelle le transport en commun.
L'Association des consommateurs du Québec, un organisme à but non
lucratif, regroupe depuis 1948 des consommateurs désireux de prendre en
main leur destinée. L'association rejoint directement au Québec,
par ses membres et ses publications, plus de 20 000 personnes. Les membres de
l'Association des consommateurs du Québec sont groupés en onze
sections locales dans différentes villes dans toute la province et l'ACQ
maintient en activité huit centres d'information pour les
consommateurs.
Depuis plus de 30 ans, vouée à la défense des
intérêts des consommateurs, l'association s'est fixé comme
objectif de porter un regard critique sur la société de
consommation, d'en analyser les tendances et leurs implications, d'informer et
d'éduquer le consommateur, mais aussi de le représenter chaque
fois que ses intérêts semblent mis en cause. L'ACQ s'est,
jusqu'à tout récemment, peu préoccupée du transport
en commun, sinon à travers une réflexion plus large sur la
nécessité de définir les services essentiels et d'assurer
une continuité du service offert au public. Ailleurs dans la province,
nos groupes locaux sont intervenus à Trois-Rivières et à
Québec, en particulier, sur les problèmes reliés au
transport local. Dans ce dossier dont on n'entend parler qu'au moment
de crises, à l'occasion d'arrêts de travail et de
négociations pour le financement des réseaux, les usagers sont
exclus du débat et font les frais des conflits de pouvoir. Nous sommes
donc heureux d'avoir l'occasion de participer à une discussion plus
large sur ce choix régional qu'a fait le gouvernement quant au mode de
transport en commun pour l'agglomération de Montréal.
De façon générale, l'intérêt des
citoyens du Québec commande que les bénéficiaires d'un
service en assument majoritairement les coûts, que la dépendance
du Québec en matière de pétrole soit réduite et que
l'environnement soit préservé. De façon plus
particulière, l'intérêt des citoyens de
l'agglomération de Montréal commande une rationalisation des
réseaux, une rationalisation des investissements en matière
d'équipement, une meilleure répartition des coûts entre les
divers bénéficiaires, consommateurs, municipalités,
commerçants et gouvernement. Il exige un centre-ville et de grandes
artères moins engorgées et moins pollués, un réseau
intégré, rapide, accessible à courte distance, efficace,
fiable et donc, sécuritaire et sans interruption, à coût
abordable. Il requiert un centre de décision avec pouvoirs effectifs
plutôt que virtuels, que les citoyens consommateurs soient
consultés et que les usagers consommateurs participent aux
décisions qui les concernent.
Le gouvernement du Québec propose un nouveau mode d'organisation
et de financement du transport en commun pour l'agglomération de
Montréal. L'ACQ souscrit, de façon générale,
à la réforme proposée et n'entend pas se lancer dans une
analyse approfondie des structures proposées. Toutefois, l'ACQ
s'interroge sur le niveau d'intervention et sur le pouvoir réel des
intervenants locaux face à l'organisme régional à
créer. Il ne faudrait pas que l'ORT, sous couvert de planification et de
coordination, rende illusoire ou impraticable l'exploitation intelligente des
réseaux de transport sous juridiction locale. À la limite, il
nous semble que l'ORT risque d'être le lieu où les vraies
décisions se prendront, les autres en découlant, de telle sorte
que les élus locaux n'auraient guère de choix, leur pouvoir
étant ainsi plus virtuel qu'effectif.
Il ne semble faire aucun doute qu'il faille réviser la structure
actuelle de même que son financement. De même, il faut se pencher
sur le type de services offerts, sur la qualité et le coût de ces
services.
Pour les usagers consommateurs, il se peut qu'une structure en vaille
une autre, c'est à l'usage que l'on jugera. Ce qui importe, c'est le
service rendu: rapide, accessible, efficace, fiable, ininterrompu, et ce
à coût abordable.
La structure actuelle, à multiples intervenants avec des pouvoirs
s'entremêlant et se chevauchant, a créé de nombreux ennuis
aux usagers consommateurs et a forcé les Québécois, dans
leur ensemble, à financer un service qui se détériore. Il
faudrait se garder de penser - comme le laisse croire le livre blanc - que les
élus sont les meilleurs représentants des usagers.
L'intérêt des élus et celui des usagers est rarement le
même, sauf peut-être en temps d'élection. Il serait
plutôt dangereux de reconnaître les élus comme uniques
défenseurs de l'intérêt public. (17 h 45)
La nécessité d'un réaménagement du cadre
financier des transports en commun, bien que non ainsi présentée,
nous apparaît comme la cause principale de la réorganisation des
structures. Quoi qu'il en soit, non seulement faut-il en arriver à une
rationalisation des investissements dans les équipements, mais il faut
aussi assurer une meilleure répartition des coûts entre les divers
bénéficiaires.
Nous croyons toutefois qu'il faudra se garder d'augmenter trop
rapidement et trop fortement la contribution des usagers consommateurs au
financement du service de transport, fût-il intégré. Une
structure tarifaire, même définie optimale, entraîne souvent
des effets non souhaitables, comme un affaissement de la demande globale, par
exemple, qui grèveraient dès le départ toute la
réforme envisagée.
Les consommateurs sont, en général, prêts à
payer quand ils ont l'impression d'en avoir pour leur argent. Depuis quelques
années, ils ont plutôt l'impression de payer déjà
trop cher un service qui porte à peine son nom: moins d'autobus et de
métro, temps d'attente de plus en plus long, engorgement aux heures de
pointe, personnel grossier ou indifférent, circuits modifiés sans
avis, arrêts du service fréquents et de plus en plus longs.
La réforme préconise un modèle de participation sur
le mode consultatif. Les associations de consommateurs demandent depuis fort
longtemps une participation du consommateur au processus de décision.
Dans cette optique, il nous aurait semblé plus opportun
d'intégrer une représentation de l'usager consommateur au niveau
des commissions de transport et de l'ORT. Nous comprenons que l'État
choisit plutôt de faire reposer l'ensemble des décisions sur les
élus, quitte à tester par avance certaines questions
auprès d'une commission consultative qui pourrait tenir des audiences
publiques sur des sujet d'importance.
L'intention est louable, mais plusieurs questions devront obtenir
réponse, non seulement quant au rôle exact et aux pouvoirs de
cette commission, mais aussi surtout quant à qui doit représenter
qui ou qui doit participer en lieu et place de qui. Il faudrait aussi savoir si
l'on cherche à représenter un large éventail
d'intérêts particuliers ou si l'on ne souhaite pas plutôt
assurer l'expression d'un consensus chez les
usagers consommateurs.
Les citoyens consommateurs sont parfois consultés, mais la
consultation ne mène d'habitude pas bien loin. En fin de compte, cela
finit toujours par n'être que de belles sessions de "placotage"
d'où ne sortent que des voeux pieux. Les citoyens consommateurs veulent
avoir un mot à dire dans l'élaboration et l'application de la
politique du transport en commun. Ils veulent être assurés que
cette étape ne sera pas laissée entre les seules mains des
fonctionnaires et des politiciens, craignant l'influence trop grande de la
technostructure et du lobby des élus municipaux des grandes
agglomérations.
À l'instar de Transport 2000, l'ACQ réclame la
participation des usagers consommateurs au conseil d'administration des
commissions de transport et de l'organisme régional de transport parce
que les décideurs véhiculent prioritairement leurs valeurs
propres et qu'autrement les valeurs des usagers n'y seraient pas
véhiculées; parce que aussi le secteur des services publics ne
peut être laissé aux seules mains des pourvoyeurs de services. Les
politiques à établir et les moyens de les mettre en oeuvre, de
même que la définition des services et l'évaluation de la
façon dont ils sont rendus touchent le tissu social, le mode et la
qualité de vie et exigent que toutes les valeurs
véhiculées par la société soient prises en
compte.
Le livre blanc, à partir de la page 67, traite des
conséquences de la réforme proposée. Il semble que
l'objectif soit de faire en sorte que le coût global augmente moins
rapidement que dans la situation que nous connaissons. C'est un bien bel
objectif, quoique nulle part la démonstration ne soit faite de ce que
l'on épargnera, par exemple, "par l'intégration tarifaire des
réseaux et des modes, qui devrait permettre d'éliminer les
dédoublements et une concurrence coûteuse entre les services",
selon la proposition gouvernementale.
Nous tenons pour acquis que tout ce qu'envisage la proposition
gouvernementale fonctionne. Il est des conséquences que le livre blanc
passe sous silence, entre autres et surtout, devrions-nous dire, la
continuité du service en cas de conflit de travail. Ce dont les usagers
consommateurs ont le plus souffert depuis une décennie, c'est des
arrêts fréquents et parfois fort longs du service, suivis
généralement d'une augmentation des tarifs et d'une diminution du
service. Faut-il penser qu'une fois les réseaux intégrés
il s'arrêteront tous de fonctionner en cas de conflit?
Je voudrais ici ouvrir une parenthèse pour indiquer aux membres
de la commission que, lors de la dernière réunion de notre
exécutif, les membres de l'exécutif ont exprimé le souhait
que j'indique à la commission que nous appuyons les divers intervenants
qui ont insisté sur l'importance de développer des moyens
alternatifs de transport, comme les taxis collectifs, les "jitneys" et le
covoiturage.
L'ACQ souscrit au principe de l'intégration des réseaux de
transport en commun pour l'agglomération de Montréal. Elle
souscrit aussi au fait que chaque catégorie de
bénéficiaires assume le plus possible sa part du coût du
transport en commun. Elle soumet, toutefois, qu'une augmentation trop rapide du
tarif aurait un effet désincitatif pour l'usager qui peut encore opter
pour l'automobile et pénaliserait grandement les usagers qui n'ont pas
d'autre façon de se déplacer.
L'ACQ croit que ce ne sont pas les structures qui rendent fonctionnelles
les politiques, mais les femmes et les hommes qui y oeuvrent. Partout, l'ACQ
soutient que le modèle proposé ne faisant place qu'à un
seul groupe d'intérêts: les politiciens, les conflits de pouvoir
risquent de demeurer et les intérêts des usagers consommateurs
d'être plus souvent qu'autrement laissés pour compte. Bien que
favorable à la consultation, l'ACQ ne juge pas le mécanisme
suffisant et demande qu'une place soit faite aux usagers consommateurs au sein
des conseils d'administration des commissions de transport et de l'organisme
régional de transport.
L'ACQ rappelle, enfin, l'insatisfaction généralisée
quant aux interruptions longues et fréquentes du service et souligne
que, si une solution n'est pas apportée à ce problème,
même la plus parfaite structure au monde n'arrêtera pas la
désaffection d'une clientèle qui ne demande, par ailleurs,
qu'à être acquise. Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Beauchamp. Avant
d'aller plus loin, je pense qu'on pourrait s'entendre sur le temps qui reste
à la commission, compte tenu que l'ajournement est à 18 heures.
Est-ce que les membres sont d'accord pour continuer jusqu'à
épuisement des mémoires?
Des voix: Oui. Consentement.
Le Président (M. Boucher): Alors, consentement. M. le
ministre.
M. Clair: M. le Président, permettez-moi d'abord de
remercier M. Beauchamp et la dame qui l'accompagne, Mme Laliberté, de
s'être intéressés à la proposition de réforme
du transport en commun du gouvernement et de nous avoir présenté
un mémoire au nom de l'Association des consommateurs du
Québec.
Je serai bref, je n'aurai qu'une seule question, mon adjoint
parlementaire voulant lui aussi en poser une. Ce qui ressort de votre
mémoire et qui est un peu unique, si
on veut, c'est une méfiance assez évidente à
l'égard des élus; cela ressort à quelques endroits. Il n'y
a pas eu beaucoup de mémoires qui ont mis en cause la confiance à
l'égard des élus. J'aimerais que vous m'expliquiez ce qui
entraîne cette méfiance à l'égard des élus.
Ce pourrait être des usagers qui soient élus, à supposer
qu'on puisse faire une immense assemblée des 750 000 usagers du
transport en commun de la région de Montréal qui éliraient
un conseil d'administration pour gérer le transport dans la
région de Montréal; cela demeurerait des élus. Pourquoi
être plus méfiant à l'égard des élus
municipaux que d'être méfiant à l'égard de
vous-même qui êtes élu, j'imagine, par une structure
démocratique, comme les élus à l'Assemblée
nationale et les élus municipaux au suffrage universel? Pourquoi cette
méfiance? Peut-être qu'il y a quelque chose que je n'ai pas
compris à l'égard des élus.
Le Président (M. Boucher): M.
Beauchamp.
M. Beauchamp: M. le Président, j'ai assisté toute
la journée aux audiences de la commission et j'ai entendu les
interventions des élus municipaux, qui se disaient les plus près
de la population finalement. Mais ce qui est encore plus près qu'un
élu municipal du service de transport en commun, c'est l'usager
lui-même.
Si on faisait une enquête auprès des élus
provinciaux, auprès des élus municipaux, auprès des hauts
fonctionnaires qui sont tous des "décideurs" et qui interviennent dans
l'organisation du transport en commun, si on faisait une enquête
auprès de ces gens-là pour voir combien il y en a qui utilisent
quotidiennement les transports en commun, j'ai l'impression - on ne l'a pas
vérifié -qu'on pourrait avoir des surprises. On
réaliserait peut-être que finalement une bonne partie de ces gens
font partie de cette catégorie de personnes dont il a été
question ce matin et qui, pour toutes sortes de raisons, ne peuvent pas
utiliser le transport en commun, à cause de leurs occupations, de
l'obligation de se déplacer de leur travail, etc.
Celui qui est le plus près du service, donc qui le vit
quotidiennement, c'est l'usager. Lorsqu'on examine la position gouvernementale,
on constate - c'est une des raisons pour lesquelles on parlait de pouvoir plus
virtuel qu'effectif - on peut se tromper, mais on a l'impression que les
pouvoirs qui sont réservés aux élus locaux ont beaucoup
plus trait au service lui-même, à la qualité du service,
à l'ampleur du service qui va être donné, aux horaires, aux
circuits, etc. On dit: Pour ce genre de problème, finalement, n'est-ce
pas l'usager qui est le mieux placé pour indiquer à un organisme
les choix les plus pertinents? Pourquoi créer une étape qui
s'appelle une étape de consultation au moyen d'une commission
consultative? Les élus municipaux nous ont dit: On va faire aussi de la
consultation auprès de nos électeurs. Pourquoi créer une
étape additionnelle dans le processus pour obtenir l'opinion de ceux qui
sont les principaux intéressés, c'est-à-dire les usagers?
C'est dans ce sens que ce n'est peut-être pas une méfiance qui est
indiquée à l'endroit des élus, mais c'est le sentiment
qu'il y a peut-être d'autres façons de faire participer les
usagers autrement que par une commission consultative, des façons qui
éviteraient finalement de créer des étapes inutiles ou des
paliers de pouvoir inutiles qui n'amélioreront pas le
système.
M. Rodrigue: II y a eu quelques groupes qui ont
réclamé devant la commission la participation des usagers,
certains au comité consultatif, mais d'autres au conseil
d'administration. Cela pose une question. Vous y avez peut-être
réfléchi, je vous la pose. De quelle façon
désigne-t-on les usagers dans un tel organisme? De quelle façon
peut-on élire les représentants des usagers? Doit-on les
élire, les désigner? Comment les regroupe-t-on? En vertu de quel
mode? C'est tout cela. Finalement, le principe est fort admissible. Comment y
arriver pour que ce soit véritablement une représentation des
usagers bona fide? C'est un problème. Je vous le soumets. Quand on se
pose la question, on bute un peu là-dessus. Il y a peut-être des
exemples que vous pourriez nous donner et qui nous éclaireraient
à ce sujet.
M. Beauchamp: Ici, au Québec, on a quand même
développé une certaine pratique dans ce domaine, celle de faire
participer les usagers. On pense par exemple aux CLSC, aux milieux
hospitaliers, les cliniques juridiques, etc. Il y a un tas d'organismes
où finalement on a prévu une participation de l'usager.
Évidemment, dans ces secteurs, cela pose aussi un problème,
puisque le patient dans un hôpital ne sera pas patient toute sa vie, et
donc cela posait les problèmes de déterminer qui était un
usager, etc. Je pense que les problèmes que cela pourrait poser sont
parfaitement solubles. Par exemple, avec la proposition gouvernementale, on a
l'impression qu'on généraliserait l'utilisation d'une carte.
Alors, les détenteurs de ces cartes pourraient déterminer qui
sont les usagers réguliers du réseau. Pour répondre
à votre question, on n'a pas vraiment approfondi cette question. On fait
un énoncé de principe; on dit qu'il faudrait que les usagers
participent. Les modalités pour déterminer de quelle façon
les faire participer, cela reste peut-être un problème important,
mais il y a sûrement des solutions
facilement identifiables à ce point de vue là.
M. Rodrigue: À titre d'information, je voulais vous
préciser qu'en ce qui concerne la continuité des services, vous
posez une question concernant la continuité des services et quel
organisme à l'avenir va s'occuper de gérer les services de
transport. En réalité, ce sont les transporteurs locaux qui
continueront à le faire, soit la CTL, la CTCUM ou encore la CTCRSM. Ce
sont ces organismes-là plus, évidemment, les regroupements
municipaux qui décideraient de se mettre sur pied pour organiser le
transport en commun sur leur territoire. Ils ont le choix entre faire une
nouvelle commission de transport, négocier des services avec une des
commissions existantes ou, encore, faire affaires avec un transporteur
privé. Selon que c'est la commission de transport actuelle qui, sur son
territoire, continue de donner des services et qui, même, les prolonge
avec l'accord d'un certain regroupement de municipalités, c'est elle qui
continue d'exploiter le service, donc c'est elle qui est l'employeur. Si c'est
un transporteur privé, c'est lui l'employeur; là, c'est le Code
du travail qui s'applique tout simplement. (18 heures)
M. Beauchamp: M. le Président, pour commenter
l'énoncé fait par M. le député, ce qui nous
préoccupe, comme association de consommateurs, c'est le fait que la
proposition gouvernementale implique, dans certains cas, qu'on élimine
des choix. On parle d'intégration des transports en commun, on essaie
donc de rationaliser le transport en commun et cela implique
l'élimination de certaines possibilités. Cela a été
souligné ce matin, par exemple, lorsqu'on parlait pour
Montréal-Nord d'un métro de surface qui impliquerait probablement
l'abandon de certains circuits d'autobus existants. On se dit: qu'est-ce qui
arrive en cas de grève? Est-ce que tout le réseau arrête de
fonctionner en même temps? Est-ce que la population devient vraiment
paralysée à cause d'une situation comme celle-là? On vous
dit que cela nous préoccupe parce que la rationalisation c'est une
chose, mais maintenir des choix et même les développer c'en est
une autre - et notre position serait plutôt de dire: c'est important pour
le gouvernement, non pas de réduire les choix mais de les multiplier -
de telle sorte que la population puisse choisir et ne soit pas l'otage d'un
seul système.
M. Rodrigue: II est évident, je pense bien, que tous les
élus vont chercher les systèmes qui vont donner, à la
fois, les meilleurs rendements au meilleur coût. Il y a des dispositions
de certaines lois qui ont été adoptées il n'y a pas
tellement longtemps qui, effectivement, ont vu leur application pour la
première fois cette année sur le territoire de la
Communauté urbaine de Montréal, en particulier la CTCUM. Compte
tenu des perturbations qu'on avait connues à l'occasion de conflits
antérieurs, on doit constater que ces lois, la Loi des services
essentiels, qui a été appliquée cette année,
à Montréal, a quand même limité très
sérieusement les dégâts - si vous me permettez l'expression
- en ce sens que si vous examinez le nombre de jours d'arrêt de travail
qu'on a eus à l'occasion du présent conflit avec ce qu'on avait
connu dans le passé, c'est tout un monde de différence. Il y a
déjà une loi qui a été adoptée pour assurer
le fonctionnement des services essentiels et le gouvernement a fait son lit
là-dessus: il a déclaré qu'il considérait
essentiels les services de transport dans la région de
Montréal.
C'est un changement majeur par rapport aux situations antérieures
et on l'a vécu pour la première fois cette année. Les
perturbations du service ont été, quand même...
Évidemment, pour celui qui est pris dans la circulation à 5
heures, ce n'est jamais mineur, mais cela n'a duré qu'une journée
ou deux alors que dans le passé cela avait duré des semaines.
Évidemment, en maintenant les transporteurs actuels, les
commissions de transport actuelles, chacune conserve donc sa juridiction. Il
n'est pas dit que tous ces groupes négocieront en même temps et
qu'on risque d'être perturbé en même temps. Ils auraient pu
s'intégrer dans le passé, ils ne l'ont pas fait, sur le plan des
négociations. Il y a sûrement une raison à cela.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: M. le Président, il me fait plaisir de voir
ici l'Association des consommateurs du Québec. C'est mon premier contact
avec vous. Le chef de mon parti m'a nommé responsable du dossier de la
protection des consommateurs. J'espère qu'ensemble nous pourrons
souligner des points importants. Que vous ayez un regard critique, c'est
très bien. Lorsque vous parliez des élus je peux vous donner des
exemples pratiques: la Commission de transport de la rive sud où les
élus ont le contrôle de la commission; la CTCUM, on n'en parlera
pas il n'y a pas de contrôle par les élus... la Commission de
Laval, il semble que la municipalité de Laval, par les élus, ait
un meilleur contrôle actuellement sur la commission de transport.
On parle des élus: dans une municipalité moyenne de 20 000
habitants et plus, les conseillers municipaux, par mon expérience en
tant que maire et connaissant bien les conseillers municipaux de ma
municipalité, les problèmes qui les touchent
souvent le plus sont ceux qui viennent des usagers du transport: abris
d'autobus, nouveaux arrêts pour les autobus, changements d'arrêts.
Ils vont même jusqu'à faire des pressions électorales en
temps d'élections. Très important. On va profiter,
évidemment - cela revient un peu à ce que vous dites - lorsqu'il
y a une élection on va dire à ceux qui se présentent:
c'est ça et il faut que cela soit changé avant les
élections. Mais là, les élus trouvent des
difficultés dans les municipalités - je parle de la CUM -
à faire adopter une pétition par les usagers; par
résolution du conseil on a de la difficulté à faire le
désir et le vouloir de ces usagers - il y a des élus qui prennent
les autobus aussi - qui savent ce qu'ils veulent, connaissent leurs
besoins...
Donc, avec la loi 46, comme mon collègue le député
du comté de Vimont vous l'a mentionné, les usagers et votre
association, en particulier, auront maintenant l'avantage de porter le
débat devant une commission permanente des transports à la CUM.
Il faut demander aussi au gouvernement de modifier les lois constituantes de la
CSL de la Rive-sud pour qu'une même commission permanente des transports
puisse siéger, où les citoyens qui font partie de ces commissions
de transport pourront s'adresser et rendre publiques leurs revendications.
Vous mentionnez dans votre rapport que ce que veut le consommateur,
l'usager, c'est un service. On est tous d'accord avec cela. Le service le plus
rapide, sûrement, accessible, c'est sûr, efficace, fiable,
ininterrompu et à coût abordable. Nous allons tous vous dire que
lorsqu'il y a grève, lorsqu'il y a conflit, ce n'est pas l'élu
qui est le plus souvent touché, c'est l'usager.
Vous parlez évidemment de coût et lorsqu'on parle de
transport en commun en 1982, le coût devient une source importante de
discussion. Dans votre rapport vous mentionnez - je pense que vous avez raison
de le faire - que les bénéficiaires d'un service doivent en
assumer majoritairement les coûts. C'est certain. Il suffit d'aller dans
les détails techniques. On augmente le coût d'accès aux
autoroutes, on augmente le coût de l'essence. Les tarifs,
évidemment, suivent cette même structure d'augmentation, en ce qui
concerne l'essence en particulier.
Vous mentionnez que les usagers doivent être membres des
commissions de transport. Dans tous les mémoires qui ont
été présentés jusqu'à maintenant, le seul,
à ma connaissance, qui a parlé des usagers de façon assez
élaborée a été celui de Transport Québec et
une autre association dont...
Une voix: Transport 2000.
M. Bissonnet: ... Transport 2000. Je l'appelle Transport
Québec, parce que je trouve que c'est une association qui travaille fort
pour les usagers du transport. Alors, de quelle façon pourrait-on
incorporer... Il va falloir élire quelqu'un. Vous avez une association
qui est composée de 20 000 personnes au Québec, avez-vous
prévu un mécanisme? Je vous pose la question. De quelle
façon va-t-on arriver à nommer quelqu'un pour représenter
les consommateurs? Selon moi, au niveau local, le conseiller élu, que ce
soit dans une municipalité importante ou une petite municipalité,
est vraiment confronté avec ces problèmes-là
quotidiennement. On apporte un autre mécanisme, l'usager. De quelle
façon prévoyez-vous suggérer au ministre que les usagers
soient représentés? De quelle façon arriverait-on à
élire des usagers dans les commissions de transport?
M. Beauchamp: M. le Président, je pense avoir donné
des éléments de réponse tantôt à une question
qui m'était posée. C'est sûr que cela pose des
problèmes d'organiser la représentation des usagers dans un
organisme comme celui-là. Mais, ce n'est pas un problème qui est
insoluble non plus. Il y a une façon de l'organiser. On a donné
un exemple en disant que les usagers des transports en commun vont utiliser une
carte pour avoir accès au réseau. C'est une façon
d'identifier les usagers. De quelle façon organiser une
représentation structurée? On n'a pas fait une démarche
approfondie à ce point de vue-là. On pense que c'est quand
même, encore une fois, un problème qui peut se résoudre
assez rapidement, soit une base régionale, soit pour l'ensemble de la
région, mais avec un certain nombre de représentants des usagers.
Finalement, si les usagers participaient aux décisions, au lieu
d'être simplement des gens qu'on consulte et dont on interprète
ensuite les propositions via une commission consultative et qu'on tente de
traduire par des politiques.
Vous savez, les associations de consommateurs ont maintenant
l'expérience de la différence entre participer à un
organisme au sein d'un conseil d'administration comme "décideurs" et
participer à des organismes consultatifs. Ils sont conscients qu'il y a
une très nette différence entre les deux; dans un cas, vous avez
un pouvoir effectif et, dans l'autre cas, un pouvoir très réduit,
pour ne pas dire que vous n'avez pas de pouvoir. Ce qu'on dit, c'est
qu'organiser la représentation des usagers n'est sûrement pas plus
compliqué, en tout cas, que faire l'intégration des transports en
commun. Après tout ce qu'on a entendu à cette commission
parlementaire, cela semble poser énormément de problèmes.
Un problème comme celui de la représentation des consommateurs
est sûrement mineur comparativement au
problème de l'intégration des transports en commun dans la
région métropolitaine de Montréal.
Je sais que cela ne vous apporte pas une réponse complète.
Ce qu'on vous dit, c'est que cela devrait faire l'objet de consultations
auprès des organismes qui représentent les usagers, comme
Transport 2000, ou des organismes, comme le nôtre, qui
représentent les consommateurs, pour voir de quelle façon cela
peut s'organiser. Ce qu'on vient vous dire, c'est qu'on pense que la
façon de rendre cet organisme le plus effectif possible pour
améliorer les réseaux et les décisions qui ont trait
à la qualité du service dans son sens large, c'est
d'intégrer des usagers dans la structure de décision.
M. Bissonnet: En guise de conclusion, M. le Président, je
souhaite que l'Association des consommateurs du Québec se
préoccupe davantage de toute la question du transport en commun.
Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, en terminant, permettez-moi de
remercier les membres de l'Association des consommateurs du Québec pour
l'intérêt qu'ils portent déjà au transport en commun
et à la proposition de réforme du gouvernement du Québec.
Leurs commentaires ont été vivement appréciés. Je
vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci. Au nom des autres
membres de la commission, je remercie M. Beauchamp et Mme Laliberté pour
la présentation de leur mémoire.
Conseil régional de développement des
Laurentides Inc.
J'appelle le Conseil régional de développement des
Laurentides Inc., représenté par Mme Hélène
Lanthier, agent de développement, et par M. Jacques Allard,
administrateur au CRD.
M. Allard (Jacques): M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. Allard.
M. Allard: ... M. le ministre, Michel Clair, MM. les
députés, au nom de M. Bernard Émard, président du
Conseil régional de développement des Laurentides Inc., je vous
prie d'excuser son absence.
Depuis ce matin, j'assiste à ma première commission
parlementaire et j'ai grandement apprécié la qualité des
interventions des groupes, de même que la pertinence des échanges
avec les représentants du gouvernement et des députés de
l'Opposition. Malgré l'heure tardive, M. le Président, je suis
assuré des mêmes dispositions.
Le Conseil régional de développement des Laurentides Inc.,
agit a titre d'interlocuteur de sa région en répondant à
l'invitation du ministre des Transports du Québec de lui
présenter un avis sur sa proposition de réforme du transport en
commun de la région de Montréal.
La région des Laurentides se délimite au sud par la
bordure naturelle de la rivière des Mille-Îles. Seize
municipalités de notre territoire sont touchées directement par
les termes de la réforme.
Dans la première partie, nous présentons la
problématique régionale du transport. Le CRD s'impliquait, autour
des années 1977-1978, avec ses partenaires gouvernementaux, dans la
remise en service du train de passagers sur la ligne
Montréal-Mont-Laurier, qu'on appelait plus communément le P'tit
Train du Nord. Ce service était un projet que se proposait de soutenir
l'Office de planification et de développement du Québec pour
favoriser l'accessibilité "des personnes les plus démunies aux
ressources récréatives des Laurentides."
Le CRDL rendait publique, en septembre 1981, une étude
menée conjointement avec deux étudiants du département de
géographie de l'Université de Montréal, MM. Mario
Déry et Claude Robichaud, portant sur le transport en commun interurbain
dans les basses Laurentides. Le noeud du problème, pour cette partie de
notre région, est la desserte en transport organisé dans l'axe
routier est-ouest. (18 h 15)
Les problèmes rencontrés au niveau du transport dans les
Laurentides. La région des Laurentides est en perte de vitesse constante
depuis les dernières années sur le plan de ses services en
transport et en communications. En novembre 1981, deux circuits de transport
ferroviaire de passagers étaient coupés. Il s'agit, on s'en
souvient, de la ligne du P'tit Train du Nord entre Montréal et
Mont-Laurier et l'autre entre Montréal et Lachute, qui se rend à
Hull. Puis, peu après, c'était au tour de l'arrêt du
service du train de banlieue entre Montréal et
Sainte-Thérèse.
Aujourd'hui, c'est le service transport marchandises que la compagnie du
Canadien Pacifique demande d'abandonner. Sa requête fait actuellement
l'objet d'audiences publiques que tient la Commission canadienne des transports
dans la région. Sa demande touche les embranchements
Sainte-Agathe-Mont-Laurier et Saint-Jérôme-Sainte-Agathe. Si la
commission accédait à la demande du Canadien Pacifique, les
emprises de la voie ferrée seraient appelées à
disparaître. Il en serait ainsi décidé pour longtemps de ce
mode de transport pour notre région.
Une grave conséquence économique se fait
déjà sentir depuis l'abandon du service passagers par train
Montréal-Mont-Laurier. L'usager du transport en commun a dû subir
une augmentation du tarif du service par autobus qui s'est fait accompagner
d'une diminution de la qualité du service.
Des cas locaux de problèmes de transport en commun. Les
agglomérations du grand Sainte-Thérèse et de Lamater
Lachenaie, Mascouche, Terrebonne et Saint-Louis-de-Terrebonne - comptent depuis
quelques années déjà chacune un comité de transport
qui aura permis à la Commission de transport de Laval d'apporter,
grâce à leurs recherches et enquêtes auprès des
usagers, certaines améliorations du service d'autobus.
Chacune de ces agglomérations, cependant, en arrive à la
confrontation du même problème qui rejoint la situation des autres
municipalités des Basses-Laurentides: l'inexistence d'une desserte dans
les liaisons intermunicipales de l'axe est-ouest qui permettrait l'accès
aux ressources intrarégionales (parc industriel, services
gouvernementaux, institutions d'enseignement, équipements de loisir et
récréatifs).
Implications de la proposition gouvernementale et conséquences
immédiates. Les municipalités de notre territoire que la
proposition de réforme du transport en commun touche éprouvent
une certaine gêne à se voir soumettre l'achat d'un déficit.
Nos municipalités se disent cependant prêtes à discuter
d'un service de transport en commun amélioré pour leurs
citoyens.
Le taux de taxation que la proposition gouvernementale suggère
aux municipalités oscille, d'après les sources d'information au
COTREM, entre 0,02 $ et 0,08 $ les 100 $ d'évaluation. Or, pour une de
nos municipalités, cette différence amènerait une
variation de quelque 200 000 $ dans ses revenus fiscaux. Il est facile de
comprendre qu'une telle situation place nos municipalités dans
l'embarras au moment de préparer leur budget pour la prochaine
année alors que l'application de la réforme est prévue
dès le début de 1983.
Les lacunes de la réforme pour la région. Le train de
banlieue de Deux-Montagnes ne dessert efficacement que la population locale de
la municipalité de Deux-Montagnes. Aucun service de liaison n'existe
avec les municipalités avoisinantes qui permettrait l'utilisation par un
plus grand volume d'usagers de la région du service par train. Le
stationnement de la gare ne permet pas non plus la possibilité à
d'autres usagers d'y accéder avec leur automobile.
En général, la qualité du service à
l'intérieur du territoire des Laurentides laisse place à des
améliorations sensibles. Le temps des circuits est passablement long. Il
en prend une heure et demie pour un passager de Saint-Jérôme
à se rendre à la bouche du métro Henri-Bourassa. Les
horaires ne sont pas fixes, ce qui prolonge le temps d'attente. Les usagers
doivent marcher des distances assez grandes pour parvenir aux arrêts
d'autobus.
La proposition du gouvernement laisse en plan toute la question du
transport en commun dans l'axe est-ouest pour la région des
Basses-Laurentides.
On le sait, globalement le système de transport en commun dans
les Basses-Laurentides doit s'inscrire dans le cadre d'une région
à faible densité de population. La rentabilité du
transport en commun interurbain, dans ces conditions, est extrêmement
précaire et, partant, vouée à la dépendance des
subventions. Cependant, une réforme du transport en commun de l'ampleur
de celle proposée actuellement n'est-elle pas une occasion pour englober
les problèmes du territoire dans son ensemble?
La proposition gouvernementale écarte cavalièrement les
préoccupations directes des municipalités de notre région
en ne faisant que prévoir la possibilité de créer des
conseils locaux de transport pour les services interurbains à la charge
des MRC. La capacité de payer de nos municipalités ne grandira
pas pour autant. Nous croyons qu'il faudra regarder de plus près
l'impact financier de la considération pratique du problème en
transport des Basses-Laurentides dans la globalité de la
réforme.
Troisième partie: les études apportant des solutions
alternatives. Plusieurs autres études, nous venant de différentes
sources, apportent des considérations très intéressantes
à propos du projet de réforme du transport en commun de la
région de Montréal. En 1981, la CUM présentait le
résultat d'une étude: Proposition pour la création d'un
organisme régional de transport. En conclusion, cette étude
suggère des propositions en vue de puiser des revenus directs sur
l'automobile permettant d'atteindre un meilleur équilibre entre les
coûts sociaux occasionnés par l'automobile et le transport
collectif. Cette conclusion a l'avantage sur la proposition gouvernementale
d'éviter d'alourdir les finances municipales tout en fournissant un
service essentiel.
Transport 2000 Québec apporte dans son rapport des
considérations pécuniaires sur la valeur relative du transport
privé sur le transport public. Il relève aussi des tableaux sur
la consommation énergétique de différents modes de
transport. Les recommandations de son rapport abondent dans le sens de
réformes simples, peu coûteuses et d'une efficacité
reconnue. Ces réformes, visant à améliorer le service de
transport en commun, en arriveraient à une augmentation de la
clientèle, donc à la maximisation de la rentabilité des
équipements et à une diminution du coût de
fonctionnement.
Des études techniques de l'OPDQ ont analysé, en 1976, le
déplacement de la main-d'oeuvre de Montréal et des couronnes nord
et sud de l'île. Ces informations sont à jour, bien
définies dans des dossiers et nos municipalités impliquées
dans les réformes du transport en commun auraient un grand
intérêt à en connaître la teneur avant de se
prononcer sur les modalités de la réforme. C'est d'ailleurs une
demande que formulaient les représentants municipaux réunis
récemment en consultation.
Conclusions. Le Conseil régional de développement des
Laurentides demande au gouvernement de surseoir à l'application de sa
réforme. Les municipalités de la région revendiquent le
droit d'être consultées sur une proposition apportant des
améliorations du service de transport en commun. Les
municipalités devraient aussi avoir droit aux sources d'information sur
les chiffres relatifs au transport à la Commission de transport de
Laval, à la CTCUM ou à la CTRSM. Actuellement, la CTL se garde de
révéler des données précises sur les revenus
engendrés par son fonctionnement sur le territoire de la région
des Laurentides.
Ce qui nous est connu et nous amène à poser de pareilles
questions, c'est que le passager montant dans un autobus à
Rosemère, en direction de Montréal, paierait deux fois le montant
payé par le passager montant de l'autre côté du pont,
à Sainte-Rose, sur le territoire de Laval.
Finalement, au niveau des solutions qui pourraient être
envisagées, le Conseil régional de développement des
Laurentides et ses partenaires municipaux n'en sont qu'aux hypothèses
relevées aux diverses sources d'information spécialisée et
qui peuvent être accessibles, soit les études et rapports de la
CUM, Transport 2000 Québec. Notre région voudrait s'asseoir et
discuter en concertation réelle avec les commissions' de transport et le
gouvernement des implications à court, moyen et long terme de la
réforme proposée. En un mot, la région des Laurentides
demande encore du temps au gouvernement pour examiner la proposition
avancée.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Allard. M. le
ministre.
M. Clair: Je voudrais d'abord remercier le Conseil
régional de développement des Laurentides de s'être
penché sur la proposition de réforme du transport en commun dans
la grande région de Montréal et de nous produire un
mémoire à la commission parlementaire. Sans vouloir être
désagréable, je dirai qu'à partir même de la fin de
votre mémoire, j'ai été plutôt déçu
non pas de son contenu et du travail qui a été fait, mais de la
conclusion.
On demande encore du temps pour examiner les choses. On voudrait
s'asseoir et discuter en concertation réelle avec les commissions de
transport et le gouvernement. Bon. Tout cela a été possible.
Depuis 20 ans, tout le monde aurait pu discuter, la Commission de transport de
Laval aurait pu discuter avec des municipalités des Basses-Laurentides,
l'intégration tarifaire aurait pu se produire, le problème du
transport est-ouest aurait pu être résolu, des transporteurs
privés auraient pu offrir un service meilleur. Tout ça aurait pu
se passer, mais face à une situation qui ne cesse de se
détériorer, vous le reconnaissez dans votre mémoire, le
Conseil régional de développement des Laurentides conclut: On
demande encore du temps pour examiner la situation. Je serai bien honnête
avec vous, je pense que si tout ce qu'on veut faire, c'est regarder passer le
train et laisser se détériorer la situation, le gouvernement
pourrait se dire: Effectivement, on n'avancera pas sur une proposition. Mais je
pense que ce serait irresponsable de notre part. Je pense plutôt que
notre rôle, c'était justement, par rapport à un service qui
s'est détérioré avec les années, d'aller de l'avant
avec une proposition, de la mettre sur la table et de dire: Voyons comment on
peut organiser ce territoire des Basses-Laurentides en matière de
transport en commun, à la lumière de l'expérience acquise
ailleurs, par exemple, sur la rive sud de Montréal.
Ma crainte, c'est qu'on se contente d'attendre. Vous dites qu'on vous
propose l'achat d'un déficit. C'est fort bien dit et c'est un peu vrai
pour les municipalités concernées, s'il y a un déficit
à la Commission de transport de Laval pour son réseau hors
territoire. Mais parler du sujet, prévenir les municipalités
qu'il risque d'y avoir un problème là, ce n'est qu'être le
messager. Je ne vois pas pourquoi on frapperait le messager si, de toute
façon, les événements risquent de se produire, à
savoir qu'avec ou sans réforme, les municipalités des
Basses-Laurentides, alors que partout ailleurs elles contribuent au financement
du transport en commun, elles aussi vont devoir tôt ou tard y participer.
Là-dessus, je trouve que la position est ambiguë. On déplore
la détérioration, au cours des dernières années,
des facilités de transport et de communications, on demande une
amélioration des services, on refuse que les municipalités soient
appelées à contribuer, et on demande au gouvernement, en ce qui
concerne le Conseil régional de développement des Laurentides, de
surseoir à l'application de sa réforme, de laisser les
événements se produire sans tenter de les infléchir.
C'est tout ça que j'ai de la difficulté à
concilier. C'est sur ça que j'aimerais vous entendre m'expliquer ce qui,
surtout au niveau d'un conseil régional de
développement, amène cette position.
M. Allard: M. le ministre, vous citez le manque de consultation,
dans la région. Je pense qu'on ne peut pas le cacher, dans la
région des Laurentides, particulièrement dans les
Basses-Laurentides, il y a eu un boycottage des séances d'information du
ministère des Transports que vous représentez. Je pense que cela
s'explique. Le fait qu'il y ait eu un boycottage, on a peut-être
manqué le bateau d'avoir une consultation et des échanges de vues
fructueux. Ce n'est pas non plus pour être désagréables,
face à la situation que vous avez aussi amenée dans la
région, mais en même temps qu'il y avait une proposition de
transport en commun, d'intégration dans un organisme régional de
transport, il y a eu la majoration des péages sur l'autoroute. C'est un
des éléments expliquant évidemment le boycottage des
séances d'information et aussi peut-être le branle-bas de combat
de l'ensemble des municipalités qui se sont réunies très
rapidement, face à une situation que nous déplorons, au conseil
régional, comme étant injuste et inéquitable face aux
autres régions de la province de Québec.
Surtout avec les débats publics qui ont été faits
autour de la question des péages sur l'autoroute, du fait que
probablement la majorité des sommes supplémentaires
récupérées par la hausse des péages de l'autoroute
servirait à financer le transport en commun. Je pense que dans le
"timing" de la réforme pour la région, c'était
incompatible d'avoir un mouvement serein d'échanges et de consultations
pour discuter de deux graves problèmes. Les automobilistes
résidant dans la région qui vont financer le transport en commun
se voient pénalisés par rapport aux autres régions de la
grande région métropolitaine, la rive nord par rapport à
la rive sud ou le West Island, de même qu'aux autres régions
urbaines du Québec, la ville de Québec, Trois-Rivières et
ces choses-là. On paie plus que notre part pour financer le transport en
commun. C'est pour cette raison qu'on demande - je ne sais pas si vous pouvez
saisir un peu la logique -de suspendre présentement l'application de la
réforme dans notre région pour permettre peut-être de
reprendre le processus avec des éléments d'information qui nous
manquaient et aussi l'ensemble de la problématique des autoroutes.
M. Clair: Mais en ce qui concerne...
Mme Lanthier (Hélène): Si vous me le permettez,
j'aimerais ajouter quelque chose là-dessus.
M. Clair: Oui, allez-y.
Le Président (M. Boucher): Mme
Lanthier.
Mme Lanthier: Si vous me le permettez, M. le Président, je
reçois mal, un peu les remarques de M. Clair, parce que le fond du
problème est peut-être mal saisi. D'abord, un CRD n'est pas
nécessairement l'agent décideur dans une région; c'est un
organisme de concertation. Il ne va pas prendre des décisions pour les
gens qu'il représente. Premièrement, il va faire en sorte de
provoquer des consultations et d'assurer, si vous voulez, un suivi des
dossiers. Deuxièmement, le problème des transports, dans la
région des Laurentides, nous l'avons abordé en 1981 sous un
aspect global, intermunicipal, et cela s'est concrétisé par la
recherche dont il est fait mention en première page dans notre avis sur
la problématique du transport interurbain dans les Basses-Laurentides,
dans l'axe est-ouest qui est, comme on le sait, un problème difficile
à résoudre.
C'est un peu, en fait, le temps qui fait que les dossiers peuvent
avancer, un peu aussi les politiques gouvernementales. En fait, les dossiers
qui sont débattus au Conseil régional de développement
sont sous la contrainte de plusieurs facteurs. Cela ne veut pas dire que,
lorsqu'on a identifié un problème, on est capable d'y trouver des
solutions. Comme vous le savez, comme on vient de le mentionner, le transport
interurbain dans les Basses-Laurentides s'inscrit dans une région
à faible densité de population. Cela veut dire qu'à ce
moment-là c'est fortement déficitaire. Cela veut dire aussi que
c'est difficile d'organiser cela sans aide. Par exemple, on a un comité
auquel on a apporté un appui technique depuis 1979, le Comité
intermunicipal des transports de Lamater qui se bute à un dédale
de procédures administratives. En fait, ils ont identifié leurs
problèmes. Ils essaient d'y trouver des solutions. Ils ont
demandé une charte de commission. On a dit qu'ils ne desservaient pas
une population assez forte pour avoir une charte de commission. Il y aurait un
autre système de corporation intermunicipale. Il y aurait des
problèmes de... Comment appelle-t-on cela quand ils ont des droits et
qu'il faut leur enlever des droits? C'est de la...
M. Clair: Des droits acquis?
Mme Lanthier: Non. L'expropriation, etc.
M. Clair: D'accord.
Mme Lanthier: Les dossiers avancent, mais ils ne peuvent pas
avancer à une vitesse vertigineuse avec toutes les contraintes qu'on a.
C'est pour cette raison que j'ai trouvé désobligeantes les
remarques
de M. Clair. On demande une amélioration des services.
Finalement, dans la proposition, on ne tient absolument pas compte de la
problématique intrinsèque d'une région comme la
nôtre à faible densité de population, où des gens
ont de la difficulté à rejoindre les centres; des connexions
entre Saint-Jérôme et Lachute qui sont deux centres municipaux
assez grands, il n'y en a pas; de Terrebonne et Saint-Eustache, il y en a qui
choisissent de venir à Montréal avant de remonter à
Saint-Eustache en partant de Terrebonne.
C'est à des situations un peu difficiles comme celles-là
qu'on arrive. On demande une amélioration des services. On veut,
finalement, que vous preniez en considération la situation dans laquelle
sont les Basses-Laurentides. On ne dit pas qu'on n'est pas d'accord avec une
taxation municipale; on dit qu'on voudrait connaître le fond du
problème, les circuits qui sont rentables chez nous et les circuits qui
sont déficitaires. On voudrait payer à la mesure des
déficits. Actuellement, on prétend que la CTL dessert chez nous
des circuits qui sont autofinancés. On manque de données; on le
prétend, seulement, parce qu'on sait que nos usagers paient beaucoup
plus cher que les gens du territoire de Laval pour le même service. Il y
a place pour l'amélioration des services et ce sont des comités
d'usagers qui pourraient nous indiquer les services à améliorer.
À partir de ces données, les municipalités devraient
prendre leurs responsabilités.
La réforme est très intéressante pour faire prendre
conscience d'un service essentiel comme le transport interurbain. Vous devez
reconnaître que, chez nous, nos municipalités n'étaient pas
conscientes du service, du déficit, des lacunes du service, etc. Votre
proposition les fait s'éveiller à cette dimension, car
c'était un service qui nous était exporté par la CTL; on
n'avait rien à dire. On n'a absolument pas de données sur qui
l'utilise, à quelle fréquence, etc. C'est la CTL qui a ces
données. Il faut donc vous mettre dans notre situation. Nous, comme
organisme régional de développement, on a certaines
données, mais on ne peut pas aller plus vite que les gens qui sont
directement impliqués dans les décisions et dans les
responsabilités financières. J'espère que votre position
pourra être nuancée à partir de ce que je viens de
dire.
M. Clair: Madame, je dois dire que je n'ai pas voulu du tout
être désobligeant, mais ce que je voulais avoir comme
réponse, c'est, dans le fond, ce que vous venez de dire, parce que je
pense que le Conseil régional de développement pourrait
être appelé à jouer un rôle très positif dans
l'organisation du transport en commun. En posant la question, cela m'a permis
de comprendre beaucoup mieux votre point de vue sur la proposition de
réforme telle qu'elle est avancée.
C'est bien évident, en particulier dans les Basses-Laurentides -
je le reconnais, j'ai eu l'occasion de le dire aux maires qui sont venus -
compte tenu de la non-implication des élus dans le transport en commun
auparavant, que la proposition dans son ensemble, arrivant, en plus, je le
reconnais, avec des augmentations de tarifs sur les autoroutes, n'a pas
facilité l'échange de communications. Dans ce sens, votre
réponse est tout à fait pertinente, adéquate et je la
reçois positivement. Je ne voulais pas être désobligeant,
mais je voulais, cependant, bien faire comprendre, justement à cause de
l'importance du rôle que vous pouvez jouer, un certain nombre d'enjeux
fondamentaux dans votre région. La réponse est satisfaisante.
Une autre question en ce qui concerne, justement, le travail qui a
été effectué jusqu'à maintenant par le Conseil
régional de développement en matière de transport en
commun dans le territoire. Est-ce que le conseil a joué son rôle
de concertation dans l'ensemble de la région ou s'il a eu une approche
par corridor jusqu'à maintenant? Comment avez-vous fonctionné
avec les élus municipaux et comment le conseil entend-il jouer son
rôle de concertation dans l'ensemble de la région?
M. Allard: Je peux peut-être laisser Mme Lanthier vous
répondre. On a un exemple de concertation qui a été
effectuée dans la région, concertation sur la voirie municipale
de tous les comtés de la région. Il y a environ cinq
comtés. C'est un mémoire qui a été acheminé
à la direction régionale du ministère des Transports, chez
nous. Est-ce le contenu de l'approche que vous voulez discuter?
M. Clair: Je parle du genre de rôle que le conseil
régional souhaite jouer au cours des prochains mois, parce que, vous
savez, je n'ai jamais pensé que la proposition pourrait être mise
en place une journée déterminée et que tout serait
réglé le même jour dans l'ensemble de la région. En
particulier dans la vôtre, dans la région des Basses-Laurentides,
on a un peu plus de temps devant nous que dans le cas de la rive sud de
Montréal, par exemple, où le service devait être interrompu
au mois d'août dernier. Le service devait cesser en dehors du territoire
de la CTRSM. Alors, on n'avait plus de temps, c'était une course contre
la montre. Dans votre cas, on a du temps en avant de nous, effectivement, pour
trouver les meilleures solutions possible pour l'ensemble de la
région.
Ma question, c'est parce que j'interprétais "surseoir à
l'application de sa réforme" comme voulant dire purement et
simplement: On n'en veut pas, c'est tout. Dans mon langage, quand on
demande de surseoir, c'est sine die, c'est: Oublie cela. Si ce n'est pas
l'interprétation - vous allez préciser votre pensée
tantôt - au cours des prochains mois, si on a du temps devant nous,
comment le CRD pourrait-il être impliqué, comment voit-il son
rôle dans la définition des besoins, surtout dans l'axe
interurbain ou régional vers Montréal? Je n'ai pas d'objection
à ce qu'on regarde l'axe est-ouest - j'avoue que la proposition ne parle
nullement du transport dans l'axe est-ouest - mais d'abord, en priorité
par rapport aux problèmes que cela peut représenter sur les
lignes existantes de la Commission de transport de Laval, comment le conseil
entend-il jouer son rôle de concertation dans les mois à
venir?
M. Allard: Au dernier conseil d'administration, dont un des
membres au Conseil régional de développement est M. Paul Mercier,
maire de Blainville, le président du comité pour les
péages des autoroutes, il y a eu un débat de fond qui a
été amorcé pour la première fois dans la
région, soit le parallèle entre aller chercher des revenus face
à une augmentation de tarif sur les péages et le financement du
transport en commun. Pour une première fois, au conseil
d'administration, on a entrepris de faire ces liens-là. On a
décidé d'avoir un comité de travail qui va faire,
possiblement, une recherche pour avoir une concertation peut-être avec
les mêmes intervenants majeurs qu'il y avait autour du comité
contre la hausse des péages de l'autoroute, pour justement obtenir
l'ensemble des informations qui va nous permettre d'avoir un jugement
éclairé sur la situation dans son ensemble.
C'est presque une perche qui nous a été tendue dans le
débat sur le péage, le fait que cela servait à financer le
transport en commun. On va profiter de cette occasion pour faire avancer le
dossier du transport en commun qui était déjà, en partie,
fait au niveau de l'axe est-ouest et de l'emprise du chemin de fer
Montréal-Mont-Laurier.
Mme Lanthier: Là-dessus, pour autant que les informations
sont accessibles, il est possible de faire évoluer le dossier. Dans
notre cas, ce n'est peut-être pas, entre parenthèses, une
espèce d'esprit de clocher, mais il faut nous comprendre, on n'a jamais
été préoccupé par une commission de transport chez
nous. Mais on voudrait savoir si nos circuits sont déficitaires ou
rentables. Vous savez, on voudrait connaître le service qu'on a des
commissions de transport dans notre région, l'argent impliqué
là-dedans. Ce serait un point de départ pour nous aider à
réfléchir sur nos responsabilités, de voir si vraiment
c'est Laval qui défraie les services qu'on a sur notre territoire. On
n'en est pas sûr dans le moment. Éventuellement, comme
hypothèse, ça pourrait être le statu quo chez nous, parce
qu'on a comme hypothèse de travail que chez nous, ce qu'on nous donne
comme services, nos usagers le paient pleinement. Il nous faudrait davantage
d'information. Il nous faudrait une porte, une place où aller chercher
cette information. C'est un point de départ qui est
élémentaire. S'il y a des circuits déficitaires, regardons
et, à ce moment, à titre d'élus municipaux, on prend la
décision si on maintient ce service ou si on n'en veut pas. (18 h
45)
Ce qui arrive, c'est qu'on est dans une situation un peu
spéciale. On a un produit exporté. Alors, on ne se sent pas
tellement la responsabilité de ce service. Il nous manque des
éléments sur lesquels créer une concertation et une
consultation, soit des données informatives. Comment cela pourrait-il se
faire? C'est une opinion, à ce moment-ci. Je pense que l'ORT, c'est
peut-être quelque chose de bon à long terme, mais,
préalablement à cela, il pourrait y avoir une espèce de
comité préparatoire ou une commission où nos élus
seraient invités à prendre conscience de l'ampleur du
problème.
Une autre solution serait d'avoir une table de concertation avec la CTL,
qui est la commission qui nous dessert principalement chez nous, pour se
familiariser avec le problème. Quand on parle de surseoir à
l'application de la réforme, c'est dans l'esprit d'un moratoire, comme
plusieurs l'ont demandé jusqu'à maintenant, pour examiner la
situation, mais dans le moment on n'a pas les outils. Qui va nous les donner?
Est-ce qu'on va frapper chaque mois à la CTL pour avoir des
données? Quand est-ce qu'elle va les sortir, ces données, pour
qu'on puisse réfléchir sur ce qu'on a comme service?
M. Clair: M. le Président, avec les explications qui me
sont fournies tant par M. Allard que par Mme Lanthier, avec les réponses
qu'ils me donnent, leur attitude est beaucoup plus positive que celle que
j'avais pu percevoir à première vue. Si j'ai pu paraître
injuste tantôt, je voudrais le corriger, parce qu'effectivement les
propos que vous tenez sont tout à fait sensés et vont dans le
sens de ce que je pense quant à la mise en place éventuelle de la
réforme. Je vois qu'il y a beaucoup plus de communauté de vues en
échangeant qu'on pouvait le voir au premier abord, à une simple
lecture du mémoire.
L'engagement que je voudrais prendre auprès du conseil
régional de développement, c'est de vous assurer que, comme
conseil régional de développement, je vais demander au COTREM,
d'abord, d'être disponible pour une ou des rencontres éventuelles
et de
mettre à votre disposition tout ce qu'on a, tout ce qu'on
connaît, tout ce qu'on peut voir venir sur la problématique du
transport en commun dans la région des Basses-Laurentides. Je vais
également le demander à la CTL, lorsqu'elle aura terminé
ses travaux pour établir une comptabilité séparée
par ligne et voir comment tout cela devrait être exploité et
réparti en termes de coûts.
À ce point de vue, je ne peux que me réjouir de l'attitude
très positive qui est la vôtre, d'autant plus que je reconnais que
ce n'est pas facile à ce moment-ci dans la région, compte tenu
des augmentations de péage sur les autoroutes. J'ai eu l'occasion de
rencontrer vos maires, vous le savez sûrement, à Mirabel, de
discuter de toute cette question. J'avais fait une proposition en six ou sept
points, dont vous avez peut-être eu connaissance, aux maires des
Basses-Laurentides justement d'étudier l'ensemble des problèmes
reliés au transport des personnes dans les Basses-Laurentides. Si je me
fie à la réponse que j'ai obtenue, il semble que cela va
être difficile de constituer un comité tel qu'on le proposait,
avec le mandat que j'avais proposé. Cela ne nous empêche nullement
d'essayer dans une autre structure de discuter, d'échanger de
l'information sur l'ensemble de la problématique du transport des
personnes dans votre région. Je suis bien heureux de constater qu'on
pourra compter sur l'esprit positif du Conseil régional de
développement des Laurentides et je vous en remercie
sincèrement.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: II me fait plaisir, au nom de ma formation
politique, de vous souhaiter la bienvenue et je tiens à vous dire
immédiatement que cela a été très agréable
de vous entendre nous souligner les lacunes du transport en commun dans votre
région. J'assistais l'année dernière à un colloque
au cégep de Saint-Jérôme, où notre formation
politique avait un atelier sur le transport. Il avait été surtout
question de la desserte est-ouest, en particulier entre
Saint-Jérôme et Lachute, où il n'y avait absolument rien
comme service pour ceux qui veulent aller à Saint-Jérôme ou
à Lachute. IL y avait également eu le problème de
Saint-Jérôme ou de Joliette où il y avait un certain
transport en commun, mais qui n'était pas plus efficace, par des
transporteurs privés.
Donc, il est certain que la Commission de transport de Laval n'ayant pas
d'information, c'est bien difficile pour vous. Je pense que vous avez
sûrement démontré au ministre, cet après-midi, que,
dans le transport en commun dans votre région, depuis un an et demi ou
deux ans, vous avez fait plus que les efforts nécessaires. Je suis
convaincu que les députés de votre région sont
également conscients du problème de transport en commun surtout
à l'est et à l'ouest; j'en suis conscient. Je pense que,
même si on est montréalais, on va aussi dans les Laurentides.
Pour poursuivre le travail que vous faites, cela vous prend plus de
données et plus d'information. Que ce soit sur la rive sud, à
Laval ou à Montréal, les difficultés sont les mêmes.
À la CUM, on ne peut pas obtenir d'information relativement à
l'administration parce qu'on pense que c'est mal administré. Il est bien
difficile pour vous de faire une étude exhaustive et je pense que vous
êtes aussi dans une région de faible densité. Encore
là, il y a un problème. On parle de subventions et vous
êtes en dehors des zones A, B et C. Cette région-là, M. le
ministre, est un cas qui n'est peut-être pas exactement le même cas
que la région de Berthier. Je pense qu'il faut étudier davantage
les problèmes particuliers à cette région. Nous en sommes
conscients de ce côté-ci. Merci beaucoup.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Groulx.
M. Fallu: Bienvenue, Mme Lanthier et M. Allard. Nous sommes
habitués à travailler ensemble. Cela fait plaisir de se retrouver
dans un endroit un peu plus solennel que nos bureaux respectifs.
Je dois, d'abord, vous apprendre que, si vous avez, dans les
premières pages de votre mémoire, décrit la situation
déficiente du transport en commun, depuis la rédaction de votre
mémoire, on en a encore perdu un morceau. L'autobus de la CTL qui se
rendait à Mirabel en passant par nos villages n'existe plus.
M. le Président, les deux derniers jours nous ont permis, nous
des Basses-Laurentides, d'évoluer considérablement dans
l'approche du transport en commun, car la présentation du livre blanc
nous a amenés à prendre, j'allais dire, presque brutalement
conscience - aussi brutalement peut-être ou peut-être un peu moins,
je ne veux pas évaluer, que la hausse des péages autoroutiers -
des besoins de transport en commun dans la région.
Je dois, d'ailleurs, vous informer qu'hier les trois MRC, Lamater,
Des-Moulins, Satnte-Thérèse-de-Blainville, et la prochaine MRC,
c'est-à-dire Deux-Montagnes, ont accepté deux principes. Le
premier, c'est de se mettre à la tâche pour étudier le
problème du financement, savoir exactement ce qu'il en est, voir les
chiffres, voir les données, et toutes les trois ont accepté, ici
même à cette table, le principe de la participation au financement
des déficits. Le CRD vient dire aujourd'hui qu'il est d'accord aussi
pour promouvoir l'idée d'une concertation régionale. Il est
d'accord pour du transport
en commun. Il est d'accord aussi pour la participation régionale
à ce transport en commun. Comme région, je pense que nous avons
fait, depuis deux jours, une démarche qu'on aurait peut-être
dû faire depuis longtemps, mais qui arrive maintenant à terme. Le
reste, je crois, nous prend un peu de temps. Cela nous prend quelques mois au
moins pour nous asseoir avec les administrateurs de la CTL, du COTREM, les
fonctionnaires du ministère et les municipalités pour ajuster
notre comptabilité. Je pense que la volonté des élus
municipaux est là dorénavant.
On a déjà répondu à une série de
questions qu'on a posées. Il m'en resterait une, finalement. Le CRD
représente, évidemment, beaucoup plus que les Basses-Laurentides.
Il représente l'ensemble des Laurentides. Or, la proposition est muette
pour tout ce qui a trait au service actuel, peut-être subventionné
- personne ne le sait, semble-t-il - uniquement par le gouvernement,
peut-être subventionnable par des surplus accumulés, des
péages autoroutiers. La proposition est, néanmoins, muette pour
tout ce qui a trait au service de la CTL hors de la zone C, dans le nouveau
jargon administratif, c'est-à-dire allant jusqu'à Lachute,
Saint-Jérôme, Rawdon et Saint-Donat. Est-ce que le CRD a
commencé une réflexion sur ces lignes existantes pour le moins et
sur l'ensemble des besoins de transport dans la région qui se trouve au
nord des Basses-Laurentides?
M. Allard: Malheureusement, on ne peut pas affirmer qu'une
certaine concertation a été effectuée en dehors de cette
zone-là. Personnellement, je suis peut-être plus sensible à
ce qui se passera près de Saint-Jérôme, qui est dans mon
comté. Je pense qu'il faudra aussi que le conseil régional de
développement soit très conscient que la région est un
tout. En prenant Saint-Jérôme pour exemple, si un métro de
surface se rendait à Sainte-Thérèse, ce serait quelque
chose de très intéressant pour Saint-Jérôme,
à moyen ou à long terme, de voir la suite de ce métro
à l'aéroport de Mirabel ou à Saint-Jérôme. Si
on perd la voie ferrée, c'est le nord qui en souffre et, ensuite, c'est
le centre et le bas de la région. Cela dégringole l'un
derrière l'autre.
M. Fallu: Est-ce qu'on peut au moins se concerter pour que les
outils restent en place, que les rails et les dormants ne soient pas
enlevés pour le moins, puisque les trains ne passent plus?
M. Allard: C'est peut-être un des aspects du transport
ferroviaire le plus avancé comme dossier. Vous posiez des questions
tantôt sur l'ensemble du transport en commun. Je pense que les accents,
depuis cinq ans, soit depuis 1977 ou 1978, ont été mis beaucoup
sur le transport ferroviaire, qui était le transport de marchandises, le
transport de voyageurs, et peut-être aussi sur un métro-loisirs
pour une partie importante de notre économie au nord de
Saint-Jérôme, l'économie
récréo-touristique.
Je pense qu'on avait aussi fait la preuve, à la suite des 75 000
$ qu'on avait obtenus de l'OPDQ, qu'avec une organisation, une animation au
niveau de chacune des gares, des services et des équipements près
de ces gares, des sentiers de randonnées, c'était un transport en
commun rentable et même très en vogue auprès de la
population. Lorsque cela a été repris par Via Rail pour maintenir
cette animation, cela a tout simplement tombé à 10% de
l'achalandage qu'on avait réussi à obtenir en 1978. C'est tout un
lien, c'est peut-être la colonne vertébrale des Laurentides quand
on parle de Sainte-Thérèse, Saint-Jérôme et
Mont-Laurier, mais aussi ce qu'on avançait précédemment,
les dessertes est-ouest qui font partie de la problématique.
Tantôt, je faisais référence à la mise en
place d'un comité de travail, au conseil régional. Cela se voudra
peut-être un certain rapprochement avec ce qui a été dit
par le ministre des Transports à propos de reprendre la
problématique de la région, mais on voudra la voir dans la
philosophie de toucher l'ensemble du transport en commun et le transport dit de
loisir ou récréatif comme tel.
M. Fallu: Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, permettez-moi de dire que le
Conseil régional de développement des Laurentides était
très bien représenté. Non seulement le mémoire
était-il intéressant, mais je dois dire que les réparties
étaient très pertinentes, à-propos et
particulièrement éclairantes pour celui qui vous parle et pour
l'ensemble des membres de la commission. Vous avez peut-être un
commentaire à ajouter?
Mme Lanthier: S'il vous plaît. C'est le temps qui m'a fait
un peu réfléchir sur votre réponse, quand vous vous
êtes montré réceptif à l'accessibilité des
informations au COTREM. On a fait cette démarche, mais on se demande si
le COTREM a les informations qu'il nous faut. Nous voulons des informations sur
les services que la CTL exporte chez nous. Si on se fie aux réponses qui
nous ont été données par le COTREM, ce sont des
informations qui ne sont pas disponibles à cet endroit. Ce serait
à la CTL. Je ne sais pas si vous auriez la possibilité d'ouvrir
une porte à la CTL pour
le Conseil régional de développement. Je voulais le
spécifier parce que c'est important, finalement, dans notre
démarche future. (19 heures)
M. Clair: Sur cette question, le COTREM rencontre, lui aussi, non
pas un refus de la part de la CTL - je pense que l'administration de la ville
de Laval et la CTL sont disposées à le faire - mais ils sont en
train de faire les travaux qu'il faut pour voir comment dresser des
comptabilités séparées. L'offre que je faisais
était, bien sûr, que, dans la mesure où le COTREM
lui-même sera en possession de tous les renseignements, au fur et
à mesure où il le sera, il les rendra disponibles. Si vous
maintenez le contact avec les gens du COTREM, ils se feront un devoir de se
rendre disponibles eux-mêmes et aussi de vous communiquer, au fur et
à mesure où ils les auront, les données sur la CTL.
Mme Lanthier: Si vous me le permettez, M. le Président,
cela m'amène à une question. Si on met de l'avant une proposition
d'organisme régional de transport, il faudra que ces chiffres soient
connus à un moment donné.
M. Clair: Absolument, vous avez tout à fait raison. C'est
ce que j'expliquais hier au maire des Basses-Laurentides. C'est évident
qu'un certain nombre de principes qui me paraissent aller de soi, comme le
contrôle des élus sur leur transport en commun, sur la
définition des niveaux de services, cela ne peut pas aggraver la
situation financière; cela ne peut, au contraire, qu'amener un meilleur
contrôle. Quant à savoir combien ça coûte, je pense
qu'il faut qu'on commence immédiatement à créer les
conseils locaux de transport de façon informelle. Corridor par corridor
ou MRC par MRC, que chaque regroupement de municipalités commence par
analyser la situation chez lui pour voir ce qui est susceptible d'être
amélioré, quel niveau de services il désire, pour,
après cela, être en mesure de discuter avec la Commission de
transport de Laval, dans ce cas-ci, bien sûr, en connaissant les
chiffres, c'est évident. C'est la base même.
J'ai terminé, M. le Président. Merci encore aux deux
représentants du Conseil régional de développement des
Laurentides. Je pense que leur présentation a été
particulièrement éloquente. Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Au nom des membres de la
commission, je remercie Mme Lanthier et M. Allard pour la présentation
de leur mémoire.
Le prochain mémoire est au nom de M. Claude Turcot, à
titre personnel. On m'informe qu'il n'est pas présent actuellement.
Une voix: Je proposerais le dépôt du
mémoire.
Le Président (M. Boucher): Nous allons déposer le
mémoire de M. Turcot pour passer à M. Hubert Leduc, à
titre personnel. Vous comprendrez, M. Leduc, que compte tenu de l'heure et de
votre mémoire qui est assez volumineux, je demanderais votre
collaboration pour essayer de le résumer le plus possible afin de
permettre une période de questions suffisante. Les membres de la
commission ont pu en prendre connaissance et l'ont reçu suffisamment
tôt pour au moins le lire avant la présentation. Si c'est possible
de le résumer ou de passer aux conclusions ou aux recommandations, cela
nous permettrait de procéder à une période de questions
par la suite. Merci.
M. Hubert Leduc
M. Leduc (Hubert): J'y compte bien, M. le Président,
puisque j'ai moi-même un autobus à prendre vu que je dois me
rendre à Ottawa.
Le Président (M. Boucher): Bon.
M. Leduc (Hubert): Je tiens à vous remercier de m'avoir
convoqué à cette commission pour discuter, j'espère le
plus brièvement possible, de ce mémoire. Je tiens à
remercier aussi M. le ministre et MM. les députés de bien vouloir
m'entendre. Vous m'excuserez de vous avoir soumis un brouillon; c'est que je
n'ai eu que deux jours entre le moment où j'ai discuté de ce
mémoire avec les caisses populaires de la région et le
délai imparti pour le soumettre. Les conclusions qui vous ont
été envoyées par la suite sont le résultat de
discussions que j'ai eues avec les directeurs des caisses populaires de la
région.
Ce mémoire est une remise à jour d'un travail qui est
resté inachevé en 1958, à la mort du notaire Médard
Leduc qui, jusqu'à sa mort, a été pendant des
années le secrétaire du conseil de comté de Beauharnois et
qui, en plus de cela, a été la cheville ouvrière de
l'implantation des caisses populaires dans la région du diocèse
de Valleyfield et a été le secrétaire de l'union
régionale jusqu'à sa mort.
Le notaire Leduc, en 1957, a été appelé à se
pencher sur le problème du transport dans la région à la
suite d'une recommandation de la Commission canadienne des transports qui
demandait au ministre des Transports de permettre au New York Central de
supprimer son service ferroviaire entre Malone et Montréal. Le notaire
avait, à ce moment, préparé un premier mémoire qui
a été remis au gouvernement fédéral, mais, par la
suite, non satisfait parce que tout ce qu'il avait obtenu, c'était
un
moratoire jusqu'à l'inauguration du deuxième pont Mercier,
il était persuadé, en voyant le développement que prenait
Châteauguay, que tôt ou tard les embouteillages au pont Mercier
recommenceraient, pires qu'avant 1958, et que, deuxièmement, un service
assuré par autobus seulement deviendrait déficitaire peu de temps
après. Il ne s'est pas trompé et le mémoire que vous avez
devant vous reflète, en fait, ses prévisions. J'espère
qu'on pourra, un peu plus tard, entrer plus en détail dans la
discussion.
Pourquoi je me suis adressé aux caisses populaires et non pas aux
conseils municipaux. Pour une bonne raison. C'est que les conseils municipaux
dans la région ont des intérêts divergents et n'arrivent
pas à avoir ou à fournir une vue coordonnée sur l'ensemble
des problèmes de la région, alors que ce n'est pas le cas des
caisses populaires. Les caisses populaires ont une vue globale de tous les
problèmes de la région et sont au courant des besoins de chacun
des individus dans une région où à peu près tout le
monde est sociétaire d'une caisse populaire. Les directeurs des caisses
populaires estiment qu'il y a un besoin urgent d'un transport adéquat
dans la région. Quand je dis un transport adéquat, on fait
abstraction du transport actuel. Ce n'est pas un service. C'est, au contraire,
un boulet financier dont personne ne veut. Sans avoir de chiffres
précis, on est à peu près certain qu'il n'y a même
pas 2% de la population qui l'utilisent.
Les directeurs des caisses estiment qu'à l'heure actuelle, avec
le taux de chômage qu'il y a dans la région, le nombre
d'assistés sociaux, les retraités qui jouissent de maigres
pensions et le nombre de gens qui sont payés à des salaires
à peine supérieurs au salaire minimum, c'est au-delà de la
moitié de la population qui ne peut plus se permettre une automobile.
Avec un revenu inférieur à 10 000 $, comment pouvez-vous joindre
les deux bouts lorsque vous avez à payer un loyer, la nourriture, le
vêtement et que, selon ce que les directeurs de caisses estiment, il en
coûte environ entre 3000 $ et 3500 $ pour se véhiculer en aumobile
par année? Ceci rejoint, d'ailleurs, une remarque qui a
été faite par un des députés cet après-midi
qui a estimé cela à 3200 $.
Qu'est-ce qu'on peut proposer comme solution de rechange? Les directeurs
des caisses sont unanimes là-dessus. Si on demande aux gens de prendre
le système actuel, ils vont passer pour des fous. Il y a un des
directeurs de caisse qui m'a dit qu'un jour où son auto était en
panne il avait pris l'autobus pour aller à Montréal pendant qu'on
faisait la réparation au garage et que sa réaction, le lendemain,
avait été tout de suite d'aller chez un concessionnaire s'acheter
une automobile. C'est généralisé. On n'a pas le choix dans
la région. Il faut se véhiculer en automobile.
Mais c'est un cercle vicieux. L'infrastructure routière ne permet
pas de se rendre rapidement à Montréal. Nous sommes
situés, géographiquement, à 30 milles de Montréal.
Il n'y a même pas 50 kilomètres entre les deux hôtels de
ville, l'hôtel de ville de Valleyfield et l'hôtel de ville de
Montréal. La route la plus courte est de 37 milles. Si on veut y aller
par l'autoroute, c'est 50 milles, ça prend à peu près une
heure et, aux heures de pointe, ça peut prendre une heure et demie, deux
heures.
On a entendu aujourd'hui, par exemple, des représentants de
diverses régions qui, elles, sont pourvues d'autoroutes adéquates
qui, évidemment, rendent extrêmement peu alléchant,
à ce moment, le service par autobus dans la région. Même si
on voulait avoir un service par autobus, ceux-ci devraient prendre les
mêmes routes qui sont vraiment déficientes pour se rendre à
Montréal. Si on voulait investir dans des autoroutes pour se rendre de
Salaberry-de-Valleyfield à Montréal en passant par Beauharnois,
cela coûterait une fortune parce que vous devez enjamber par deux fois la
voie maritime et, à 1 000 000 $ le mille, pour une distance de 30
milles, cela fait déjà 30 000 000 $, plus les ponts; c'est une
dépense tout à fait disproportionnée par rapport aux
besoins de la population.
Que reste-t-il? Il reste une infrastructure qui n'est à peu
près plus utilisée aujourd'hui, qui est celle de la voie
ferrée du New York Central dont vous avez eu les explications dans le
mémoire. Est-ce une solution rentable? Chose certaine, cela ne peut pas
être pire qu'à l'heure actuelle, mais on peut s'attendre, si on
peut réduire le temps du voyage entre Salaberry-de-Valleyfield et
Montréal à 35 ou 40 minutes au pire, que le nombre de passagers
augmente du double et peut-être même du triple. En plus, avec un
transport régional par autobus greffé à ce transport, on
accroît de façon substantielle la clientèle de ce
service.
D'autre part, la région, comme vous l'avez vu par le
mémoire, est très mal desservie pour ses propres besoins sur le
plan régional, à part le besoin du sens
Montréal-Salaberry-de-Valleyfield. Pourtant, il y a un besoin
réel. Le même phénomène qui s'est produit à
Montréal il y a 20 ou 30 ans se produit à
Salaberry-de-Valleyfield et Beauharnois. Valleyfield et Montréal sont
des villes qui sont en train de se faire des banlieues. Les gens fuient les
centre-ville. Les gens qui vivent dans les municipalités autour sont
comme dans des dortoirs, mais viennent travailler, soit à
Salaberry-de-Valleyfield, soit à Beauharnois et n'ont pas de
transport.
J'imagine qu'il doit y avoir quelques questions. Je ne veux pas
m'avancer plus
dans le mémoire. Je sais que le temps avance et je suis
moi-même pressé.
Le Président (M. Boucher): Merci beaucoup, M. Leduc, pour
votre collaboration. M. le ministre.
M. Clair: Oui. Je serai très bref, M. le Président,
parce que je vais laisser à mon collègue, le député
de Châteauguay, l'occasion de poser des questions à M. Leduc. Je
voudrais simplement lui dire, tant à titre de ministre des Transports
qu'à titre personnel, à quel point j'ai toujours eu beaucoup
d'admiration pour les gens qui, individuellement, prenaient la peine de
rédiger un mémoire et de venir faire entendre leur point de vue
en commission parlementaire. Alors que des organismes ont des gens qui peuvent
les aider à préparer un mémoire comme cela, je pense que
cela mérite d'être particulièrement souligné,
l'effort d'un citoyen, M. Hubert Leduc, d'être venu nous donner son point
de vue sur le transport en commun dans sa région en particulier, avec
les suggestions qu'il nous a apportées. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais
saluer M. Leduc particulièrement et lui souhaiter la bienvenue à
Québec. Je sais qu'il a attendu toute la journée ici. Je voudrais
aussi excuser mon collègue, le député de Beauharnois,
auprès de M. Leduc, parce que M. Lavigne n'a pas pu être ici
aujourd'hui. Il le regrettait, parce qu'il aurait vraiment aimé pouvoir
poser des questions sur votre mémoire.
J'ai lu - je dois vous le dire - avec beaucoup d'intérêt
votre mémoire d'un bout à l'autre. J'ai constaté qu'il y
avait là-dedans beaucoup de documentation. Cela m'intriguait beaucoup.
Je suis allé vous voir tout à l'heure et c'est là que j'ai
appris que vous avez pu compter sur le travail immense qu'a fait votre
père. Vous ne me l'avez pas dit tout à l'heure, mais le notaire
dont vous parliez, c'est votre père. Cela vous a permis, finalement, de
nous faire bénéficier de beaucoup de connaissances qui se sont un
peu perdues dans le décor depuis plusieurs années. Il y a,
d'ailleurs, beaucoup d'éléments là-dedans qui avaient
été repris à un moment donné dans la
sous-région du sud-ouest; au moment où le COTREM avait fait la
promotion d'un train de surface, d'un métro de surface pour notre
région quand on parlait des REM, des gens avaient fait valoir certains
points de vue qui sont dans votre mémoire.
Ma curiosité a été un peu déçue quand
vous m'avez dit tout à l'heure qu'il y avait des choses là-dedans
pour Valleyfield et les villes autour, mais que cela ne touchait pas du tout
Châteauguay et qu'en fait même la solution que vous
préconisez n'était pas vraiment une solution pensée pour
d'autres fins que celles des gens de Valleyfield et des municipalités
autour. Je voudrais savoir pourquoi. Puisque vous avez beaucoup parlé
des caisses populaires tout à l'heure, je voudrais savoir quelles sont
les municipalités où les caisses populaires ont été
mises dans le coup. Votre mémoire prend, dans ce sens, une direction un
peu plus collective que ce qu'on peut en percevoir, car vous êtes un
individu qui se présente ici, à la commission. (19 h 15)
M. Leduc (Hubert): Les caisses populaires de la région D.
Celles de la région C, je ne les ai pas consultées pour une bonne
raison, c'est qu'elles ne risquaient pas de perdre le transport au mois de
janvier, alors que la région de Beauharnois-Salaberry, elle, pouvait le
perdre si le mandat de la CTCUM n'était pas prolongé
au-delà du 1er janvier.
Le fait qu'on avait subdivisé la région et qu'une partie
était dans la région C et l'autre dans la région D,
ça changeait toutes les données du problème. À
l'origine, Châteauguay faisait partie intégrante de la
région Beauharnois-Salaberry - ça faisait et ça fait
toujours partie du diocèse - mais Châteauguay était un
petit village de 1500 habitants et ce n'était même pas le
chef-lieu du comté; le chef-lieu était à Sainte-Martine.
La plupart des gens qui demeuraient à Châteauguay ne travaillaient
pas à Montréal, ils n'étaient pas des banlieusards;
c'étaient des gens qui vivaient là et qui fournissaient des
services aux agriculteurs de la région, car c'était une
région agricole où il y avait de très belles terres.
Mais dès l'avènement de la voie maritime du Saint-Laurent
et dès qu'il y a eu une décision prise au sujet du pont Mercier,
les spéculateurs se sont lancés du côté de
Châteauguay - au cours des années cinquante - et se sont mis
à acheter des terres agricoles pour les convertir aux fins
domiciliaires. Quand je vous dis que le notaire Leduc était au courant
de ça, c'est qu'il y a des contrats qui ont été
signés dans son bureau et c'était la même chose pour ses
collègues. Eux voyaient ça et ils voyaient tout de suite, avec
les projections démographiques de Châteauguay, que moins de dix
ans après l'ouverture du deuxième pont Mercier la circulation
serait pire qu'avant qu'on ait le pont jumelé, quand il fallait arriver
au goulot d'étranglement qu'était le tunnel Kahnawake. Vous
n'avez pas vécu ça, mais moi, je l'ai vécu. Le dimanche
soir, quand les Montréalais entraient, après avoir passé
la fin de semaine aux États-Unis, il fallait qu'ils attendent deux
heures; c'était loin d'être drôle. Si vous aviez une
correspondance à
faire, vous la ratiez lorsque vous arriviez à
Montréal.
Une autre raison pour laquelle je n'ai pas inclus Châteauguay,
c'est que, dans plusieurs documents, on préconise un train qui irait
jusqu'à Châteauguay. Or, quand on regarde géographiquement
à quel endroit est placée Châteauguay et à quel
endroit est située la gare, c'est faire revenir la population sur ses
pas, pour ensuite la faire aller à Montréal. Ce n'est pas
à Châteauguay que devrait être la gare, elle devrait
plutôt être à Kahnawake, près du pont du Canadien
Pacifique, pour une bonne raison, c'est que tout converge vers là, y
compris ce qui vient du côté de Delson, du côté de
Saint-Constant, du côté de Saint-Isidore; tout converge vers
là. Si vous la mettez à Châteauguay, vous perdez toute
cette clientèle additionnelle qui viendrait rentabiliser le train.
Avec le projet proposé, il y aurait une possibilité, mais
à condition qu'on ait un système de perception, avec des billets
différents poinçonnés à la barrière.
À ce moment-là, il y aurait moyen de faire un service
Valleyfield-Beauharnois-Châteauguay express Montréal, avec, entre
les trains, un deuxième train local qui, lui, viendrait de
Montréal et ferait la navette aller retour; ça, ce serait
possible. Mais ce train local devrait arrêter à LaSalle,
Montréal-Ouest et Westmount pour faire la desserte de ceux qui
descendent entre l'entrée de l'île de Montréal et
Montréal, ceux qui vont travailler à Verdun, ceux qui vont
travailler à LaSalle, ceux qui vont travailler du côté de
Dorval ou ceux qui veulent avoir une correspondance pour aller à
l'aéroport de Dorval. Cela va pour la région de
Châteauguay. Mais ceux, par exemple, qui sont dans la région de
Valleyfield, pour aller à Dorval, cela n'est pas tellement pratique. Ce
serait beaucoup mieux avec un bon service d'autobus local qui amènerait
une clientèle supplémentaire à Via Rail, pour les trains
qui sont en provenance soit de Toronto, soit d'Ottawa, qui vont vers Dorval. On
amènerait cette clientèle à Dorval et, ensuite, on
prendrait la petite navette qui va de la gare de Dorval jusqu'à
l'aéroport. Ce serait quelque chose de plus rentable.
M. Dussault: Dans le mémoire, à un moment
donné, vous faites remarquer que, dans la voie maritime du
Saint-Laurent, pour traverser le fleuve par les moyens de transport de type
train, la traversée est difficile parce que la voie maritime
arrête le train. Il peut même être arrêté
pendant une heure. C'est un des éléments qui ont fait
arrêter ce service dans le passé. Et pourtant, ce que vous
préconisez, c'est encore un train qui viendrait se buter au même
problème. Quelle est la solution, à ce moment-là?
M. Leduc (Hubert): La première des choses, c'est que,
quand le New York Central a fait valoir cet argument, il avait raison. C'est
qu'à ce moment-là il partait de Malone et traversait la voie
maritime trois fois. Une première fois à Valleyfield. C'est
là que le temps d'attente était le plus long pour une bonne
raison: c'est que les navires passent à seize milles à l'heure
à Valleyfield et cela oblige à fermer le pont à la
circulation routière aussi bien que ferroviaire - parce qu'il s'agit
d'un pont rail-route -pendant au moins dix minutes. Il y a déjà
là le risque d'une perte de dix minutes. Par contre, aux écluses
de Melocheville, ils ne peuvent pas rentrer à seize milles à
l'heure, les écluses ne dureraient pas longtemps. D'autre part, à
Kahnawake, la vitesse n'est pas de seize, mais de six milles à l'heure.
Ce qui fait que le temps d'attente peut être beaucoup plus court,
étant donné qu'on peut arrêter un navire beaucoup plus
facilement s'il est à six milles à l'heure que s'il est à
seize milles à l'heure. Alors, on peut fermer la circulation ferroviaire
pendant cinq minutes et, avec un bon système radio, il y a moyen, par
une entente avec l'administration de la voie maritime, de faire retarder le
passage du navire pour permettre aux trains de passer et de convenir avec le
ministère fédéral des Transports de donner la
priorité aux trains plutôt que de la donner aux navires. La
même chose aux écluses de Melocheville.
Évidemment, si vous arrivez avec un service à toutes les
demi-heures à partir de Châteauguay, il va falloir penser à
une autre solution, soit de faire un deuxième pont à un
demi-mille ou à trois quarts de mille en aval pour faire comme aux
écluses de Saint-Lambert et la même chose aux écluses de
Beauharnois, quoique, aux écluses de Beauharnois, ce serait beaucoup
moins coûteux qu'à Kahnawake, parce qu'à Kahnawake, il faut
faire une longue déviation et, en plus, les coûts seraient
beaucoup plus élevés à cause de certaines infrastructures;
entre autres, il faut faire du remplissage pour ramener, sur la demi-île
qui forme l'autre côté du canal, graduellement la voie
ferrée à la même hauteur que le pont de Caughnawaga, alors
que ce n'est pas le cas aux écluses de Melocheville. Ou bien, dans le
cadre du projet Archipel, s'il y avait un barrage qui permettait de faire un
tunnel en dessous de la voie maritime, cela réglerait le
problème.
M. Dussault: Si vous ne l'aviez pas évoqué, je
pense que vous vous doutiez bien que je l'aurais évoqué
moi-même, parce qu'effectivement cela m'apparaît la solution
à plus long terme. C'est vrai qu'à Kahnawake le problème
de la voie maritime est entier. On ne peut pas compter sur l'arrêt des
bateaux parce que c'est une règle
internationale qui fait qu'on n'arriverait jamais à obtenir un
tel privilège. Alors, au printemps, quand le rapport sur la
faisabilité du projet sortira, si les conclusions sont positives, on
pourra espérer, un jour prochain, avoir un autre moyen de traverser le
fleuve. À ce moment-là, votre projet de train devient
intéressant. Moi, je considère que c'est un projet qu'on doit
conserver dans nos tiroirs, mais nos tiroirs les plus proches, pour être
bien sûrs de ne pas rater le bateau ou le train quand cela arrivera.
Je vous remercie, M. Leduc, de votre mémoire. Je dois vous dire
que votre mémoire contraste beaucoup avec celui qui nous a
été fourni par les municipalités du sud-ouest où on
n'a pas trouvé beaucoup de solutions. Il semble que l'esprit
n'était pas à la recherche de solutions, mais était
peut-être à la recherche de contraintes à l'avancement de
notre projet. C'est très appréciable, au moins, qu'il soit venu
de votre région, en plus, pour faire valoir leur point de vue, des
citoyens particulièrement de Beauharnois où on voulait avoir un
service d'autobus et profiter des avantages que tout le monde aura dans notre
coin. Alors, je vous remercie et soyez certain qu'on l'apprécie
beaucoup.
M. Leduc (Hubert): J'aimerais bien terminer en disant que feu le
notaire était toujours à la recherche de solutions, solutions au
meilleur coût possible, les plus rentables et les plus populaires.
D'autre part, même si le projet Archipel ne voyait pas le jour, il reste
qu'il est possible, avec une déviation ou un deuxième pont-levis
ferroviaire, de faire un système, qui n'est pas parfait, mais au moins
qui permette le passage des trains sans provoquer trop de retard. Une question
m'a été posée souvent: Est-ce que les gens vont le
prendre? Il s'est passé quelque chose d'assez cocasse, il y a quelque
temps, à Ottawa. Le service de transport, OC Transpo a
procédé à une petite expérience avec une centaine
d'automobilistes inconditionnels. Ils sont allés dans un stationnement
d'Ottawa, un matin, où les automobilistes arrivaient pour se rendre
à leur travail et... Ah! le ministre en a parlé?
M. Clair: M. le Président, j'avais omis, d'ailleurs, de le
souligner, parce qu'à ce moment-la on ne m'avait pas indiqué que
c'était M. Leduc qui me fournissait les coupures de journal. Je les ai
utilisées et je pense qu'effectivement cela illustrait bien qu'il y a
quelque chose à faire du côté de la mentalité des
automobilistes.
M. Leduc (Hubert): Si vous voulez savoir la différence
entre les coûts des deux, je peux vous dire que cette solution vous
coûterait beaucoup moins cher que d'avoir à reconstruire une
autoroute pour relier
Valleyfield à Montréal.
M. Dussault: II ne faudrait pas décourager le ministre de
nous donner notre autoroute, parce que c'est toujours dans les projets.
Même si on essaie de favoriser le transport en commun, il reste qu'il y a
certains projets qui paraissent encore importants et, entre autres, notre
autoroute 30, particulièrement ce qui doit contourner la réserve
de Kahnawake. Ce sont des gens qui veulent avoir leur intimité. Alors,
M. le ministre, je voudrais profiter de l'occasion pour vous dire que cette
intimité, il faudrait la protéger, mais le ministre comprend
notre point de vue là-dessus.
M. Leduc (Hubert): Mais mettez les passagers dans le train
gratuitement et vous allez voir qu'ils vont laisser leur automobile, surtout si
vous avez le LRC.
M. Dussault: Tout cela devrait être
complémentaire.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Robert Baldwin
M. O'Gallagher: Tout simplement pour remercier M. Leduc de son
initiative d'avoir préparé ce mémoire. Il reste maintenant
au COTREM et au ministre d'étudier le fondement de vos propositions et
de voir si c'est rentable ou de faire un sondage parmi la population et de voir
l'utilisation d'un tel projet. De toute façon, j'aimerais vous remercier
de votre suggestion qui est assez bien fondée. Merci.
M. Leduc (Hubert): II y a une chose que je voudrais vous
souligner avant de partir. J'ai fait état d'un projet qui tient au coeur
d'un des politiciens de la région montréalaise qui veut relier
Montréal à New York avec une solution qui ressemble à
celle d'un parti assez loufoque qui voulait raser les Rocheuses. Il veut raser
les Adirondacks. Il y a le corridor du New York Central. Je dois vous dire que
j'en ai donné un bref aperçu. Tel qu'il est, à l'heure
actuelle, avec le LRC, vous pourriez faire Montréal-New York en cinq
heures. Cela vous donne un trajet qui est fort concurrentiel sans un gros
investissement, parce que le LRC, une fois que vous l'avez, vous le mettez sur
la voie ferrée et il s'en va. Vous relieriez Montréal-New York de
façon très rentable, surtout avec le corridor à
Valleyfield. Il est intéressant parce que vous avez une clientèle
supplémentaire qui viendrait d'Ottawa et, en passant par Utica, vous
avez aussi la clientèle qui viendrait de Buffalo, Syracuse et Rochester,
que vous n'avez pas avec le train du Delaware and Hudson. La clientèle
d'Ottawa, vous ne l'avez pas non plus, parce que c'est beaucoup trop long. Elle
est
obligée de venir à Montréal alors que, là,
vous raccourcissez le trajet d'une heure. Cela fait un trajet Ottawa-New York
en six heures. Cela devient presque concurrentiel avec l'avion, à
l'heure actuelle. (19 h 30)
M. O'Gallagher: Quand on va à New York...
M. Leduc (Hubert): En six heures, c'est presque concurrentiel
avec l'avion.
M. O'Gallagher: Montréal-Ottawa-New York.
M. Leduc (Hubert): Ottawa-New York en six heures, parce que cela
prendrait deux heures en tout pour se rendre à Valleyfield et quatre
heures et quart de Valleyfield à New-York. Disons que cela fait six
heures et quart en tout. Par avion, vous êtes souvent obligés de
correspondre à Montréal et, ensuite, de vous rendre à New
York. Si vous comptez le temps pour vous rendre à l'aéroport
d'Uplands, le temps pour vous rendre de l'aéroport Kennedy jusqu'au
coeur de New York, cela vous prend presque cinq heures.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Leduc, au nom de tous
les membres de la commission pour la présentation de votre
mémoire. Je dois dire que je n'ai personne à appeler étant
donné que nous sommes rendus à la fin de la liste. Je pense que
c'est le temps de tirer des conclusions. M. le député de
Jeanne-Mance.
Conclusions M. Michel Bissonnet
M. Bissonnet: M. le Président, au nom du Parti
libéral du Québec, j'aimerais remercier tous les organismes qui
se sont présentés à cette commission parlementaire pour
faire valoir leur point de vue. Nous avons entendu de nombreuses associations,
de nombreuses municipalités, différents groupements sociaux, par
exemple, Vélo Québec, des commissions de transport, des chambres
de commerce, des représentants de la Communauté urbaine de
Montréal, de nombreux syndicats, l'Union des municipalités du
Québec. Je conclus, ce soir, cette commission parlementaire au nom du
porte-parole officiel de notre parti en matière de transport, le
député de Laporte qui, malheureusement, n'a pu être ici ce
soir. Je dois souligner le travail de notre porte-parole officiel dans ce
dossier.
M. le Président, la question du transport en commun dans la
région de Montréal mérite qu'on y accorde le plus grand
sérieux. Le transport en commun représente des coûts de
fonctionnement de quelque 500 000 000 $ par année, ce qui en fait, sur
ce plan, le service public le plus important, bien au-delà des services
de police et des travaux publics.
La proposition gouvernementale concernant l'organisation et le
financement du transport en commun dans la région de Montréal est
très ambitieuse. Elle remet en cause un grand nombre de principes
fondamentaux et en introduit de nouveaux. Cependant, les audiences publiques de
la commission permanente des transports qui se terminent aujourd'hui auront
permis d'exposer au grand jour le caractère présomptueux et la
très grande faiblesse de l'argumentation et de l'analyse du gouvernement
dans ce dossier.
Le but avoué du gouvernement dans cet exercice de consultation
auprès des principaux intervenants intéressés par la
question du transport en commun dans la région de Montréal
était de réaliser un consensus autour de son projet. Force nous
est de constater aujourd'hui que, si consensus il y a, remarquablement il est
presque unanime à rejeter la proposition gouvernementale ou, du moins,
à mettre sérieusement en doute l'efficacité des structures
proposées et le réalisme du cadre financier
élaborés dans le livre blanc. À la suite de tous les
commentaires que nous avons eus de toutes les associations qui se sont
présentées à cette commission, il est évident que
le ministre doit rentrer chez lui pour refaire ses devoirs et nous soumettre un
autre projet.
Dès le mois de juin dernier, nous faisions connaître la
réaction du Parti libéral du Québec, par
l'intermédiaire du député de Laporte, face à la
proposition gouvernementale. Nous y soulignions les nombreuses carences du
document. Les représentations faites auprès de la commission sont
venues confirmer en tout point la justesse de notre position. Nous tenons,
d'ailleurs, à remercier tous ceux qui se sont présentés
devant cette commission. La position du Parti libéral entérine
certains principes sous-jacents à la réforme, puisqu'il s'agit de
principes que nous avons défendus depuis longtemps et qui sont, en fait,
reconnus. Les administrations locales sont responsables de déterminer et
d'exploiter les services de transport en commun sur leur territoire; à
titre d'exemple, la CTCUM. Depuis combien de temps veut-on que les élus
jouent un rôle évident à l'intérieur de la
Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal?
Les services de transport en commun dans la région de
Montréal doivent être intégrés sur le plan de la
tarification. Par contre, la proposition gouvernementale souffre de nombreuses
carences. À titre d'Opposition, notre position s'articule principalement
autour de quatre aspects
particulièrement inquiétants: la structure lourde et
bureaucratique de l'ORT, un autre palier de gouvernement, le reniement par le
gouvernement de ses engagements face à la CUM concernant le financement
des immobilisations du métro de Montréal; le biais favorable du
livre blanc envers les systèmes lourds proposés dans le plan
d'aménagement de 1979 préparé par le COTREM; l'esprit
même de la réforme qui discrimine, sans justification,
l'automobile.
Le Parti libéral du Québec prend carrément position
en faveur des systèmes légers. Par systèmes légers
nous entendons le covoiturage. Nous avons entendu au cours de ces audiences
beaucoup des intervenants nous parler du covoiturage. Les voies à
accessibilité limitée, responsabilité des
municipalités; les conseils de ville devront aller dans ce sens, M. le
Président. Le taxi collectif, nous en parlerons avec le ministère
des Transports parce qu'une commission parlementaire se penchera sur les
problèmes de l'industrie du taxi au Québec. Les parcs de
stationnement incitatifs, etc. Les systèmes lourds comprennent le
métro et le métro de surface proposé entre Saint-Laurent
et Repentigny, de même que les trains de banlieue.
Dans une perspective de développement, les systèmes
légers ont d'importants avantages sur les systèmes lourds. D'une
part, ils ne nécessitent pas d'investissement en infrastructures. Le
coût d'investissement des systèmes lourds prévu
dépasse le milliard. De plus, les systèmes légers, sur le
plan de l'exploitation, sont peu dispendieux pour l'État.
Notons, au départ, que la proposition gouvernementale s'inspire
de deux principes fondamentaux en matière de gestion et de
développement des systèmes de transport en commun. Le
gouvernement reconnaît que le transport en commun est un service à
caractère local et qu'on doit viser à donner aux
municipalités un niveau suffisant d'autonomie en cette matière.
Dès 1976, le groupe de travail sur l'urbanisation, la commission
Castonguay, recommandait que les autorités municipales aient la
responsabilité de définir leurs propres services de transport en
commun, de les gérer et de les construire.
Une étude importante du ministère des Transports
publiée en 1978, qui s'intitule Le prix du transport au Québec,
allait exactement dans le même sens, M. le Président. Les citoyens
doivent pouvoir exprimer leur choix quant à la quantité et
à la qualité des services par le processus politique qui est le
plus près d'eux, soit celui de la démocratie municipale. Le
gouvernement reconnaît ceci sans ambiguïté dans sa
proposition. Nous nous devons de souligner qu'à cet égard le
gouvernement ne fait que se ranger du côté des politiques de
revalorisation du pouvoir municipal que le Parti libéral a toujours
défendues.
M. le Président, je demanderais au député de me
laisser poursuivre calmement cette conclusion.
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît!
M. Bissonnet: Le transport en commun, selon l'esprit de la
proposition gouvernementale, serait un mode de transport urbain socialement et
économiquement supérieur à l'automobile. De plus, parce
que les systèmes légers misent principalement sur la
flexibilité de l'automobile, le livre blanc affiche ses
préjugés envers les systèmes lourds qui ne
dépendent nullement de l'automobile.
Les mesures de financement annoncées dans la proposition
gouvernementale sont essentiellement dirigées contre les automobilistes.
Nous connaissons les sources de la contribution régionale au
financement, péages autoroutiers. On n'a qu'à se repporter aux
dernières élections provinciales - je suis déjà
intervenu à l'Assemblée nationale dans ce sens, M. le ministre -
où on promettait de couper les systèmes de péage sur les
autoroutes. Taxes sur l'essence; qui ne connaît pas les taxes sur
l'essence au Québec? Taxes sur le stationnement; nouvelle formule,
pénalisation du centre-ville. Ces mesures viennent, d'ailleurs,
s'ajouter à d'autres annoncées récemment qui font que les
automobilistes québécois sont les plus taxés en
Amérique du Nord. Augmentation de la taxe de vente de 8% à 9% qui
touche durement tous les produits de l'automobile. La hausse des péages
autoroutiers. Hausse des tarifs des frais d'immatriculation, des permis de
conduire et, enfin, l'essence qui est la plus chère en
Amérique.
En voulant décourager ainsi l'utilisation de l'automobile, le
gouvernement tente d'imposer une vision de la société qui n'est
pas celle de la majorité des Québécois. Dans sa
proposition, le gouvernement cite des statistiques qui semblent
démontrer que l'utilisation des transports en commun augmente depuis
sept ans dans la région montréalaise. Ces statistiques
d'achalandage lui donnent bonne conscience. Elles sont, cependant, fort
trompeuses.
De nombreuses études démontrent qu'en fait l'utilisation
des transports en commun, mesurée en termes de passagers
transportés par kilomètre parcouru, a diminué
légèrement dans la région métropolitaine au cours
des années soixante-dix. Cette situation, en apparence paradoxale devant
le coût sans cesse croissant de l'usage d'une automobile, s'explique par
des facteurs que le gouvernement aime mieux taire car ils ne cadrent pas avec
sa vision du Québec qui se dirigerait vers un paradis socialiste. Au
lieu
de s'acharner ainsi sur l'automobiliste, le gouvernement serait mieux
avisé de reconnaître qu'ultimement il revient à chaque
individu de décider lui-même du mode de transport qu'il utilisera.
De plus, un équilibre rationnel entre l'automobile et le transport en
commun permet de diminuer le déficit d'exploitation des système
de transport en commun, en plus de lui procurer des revenus additionnels par le
biais de la taxe sur l'essence.
Dans cette optique, nous devons favoriser le développement des
systèmes légers de transport qui laissent une large place
à l'automobiliste: covoiturage, stationnement d'incitation, taxi
collectif, mini-bus, "jitneys". À titre d'exemple, on n'a qu'à
parler des problèmes de la région dont nous avons entendu le
mémoire il y a quelques instants, la région des
Basses-Laurentides, où le système des "jitneys" pourrait
probablement être très approprié. Ces options offrent un
potentiel immense aux heures de pointe. Non seulement permettent-elles de mieux
utiliser les infrastructures en place, mais elles contribuent à diminuer
la demande de pointe sur les services de transport en commun. C'est cette
demande qui, d'une part, conditionne le niveau requis d'investissements et,
d'autre part, se traduit par les coûts d'exploitation les plus
élevés.
Le Parti libéral pourrait souscrire au principe d'un forum
régional pour coordonner les actions des administrations locales en
matière de transport en commun. Nous croyons qu'une politique
d'intégration tarifaire, bien que très vague dans les
modalités d'application annoncées par le gouvernement, constitue
en soi une mesure juste et équitable pour les usagers du transport en
commun dans la région de Montréal. Cette intégration ne
peut se réaliser sans une certaine concertation entre les élus de
la région.
Nous avons, cependant, une très grande méfiance envers le
mandat de la structure que le gouvernement actuel propose pour l'ORT. Le mandat
de l'ORT, tel que défini dans la proposition du gouvernement, va bien
au-delà de la simple concertation entre les autorités locales. Le
gouvernement veut, en fait, créer un superorganisme régional dont
la mission ira de la coordination des services à la planification, la
construction, la promotion et le financement des systèmes. Ce mandat est
déjà trop large, mais, de plus, sur la base de ces assises, il y
a risque que l'ORT s'empare de fonctions d'exploitation qui doivent rester sous
la responsabilité des commissions de transport et des entreprises
privées. La concentration du pouvoir économique au sein des
divers organismes publics doit être arrêtée au
Québec, car elle amène en même temps une augmentation du
pouvoir syndical face à la population. Nous avons besoin d'une table de
concertation au service des communautés et non d'un bras
montréalais du ministère des Transports du Québec qui
viendra imposer des décisions venues d'en haut.
De plus, nous croyons fermement que l'ORT n'a pas à faire la
promotion du transport en commun. Nous l'avons dit plus haut: Le choix du mode
de transport en commun est l'affaire de chaque citoyen. Le gouvernement n'a pas
à financer de campagne de publicité en faveur d'un mode de
transport ou d'un autre, surtout si la clientèle ainsi
générée ne fait qu'ajouter au déficit énorme
des commissions de transport existantes.
Le principe du partage financier des coûts d'immobilisations et de
fonctionnement des systèmes de transport en commun entre les
différents niveaux de gouvernement n'est pas nouveau. Le gouvernement
veut, cependant, modifier sensiblement les règles du jeu et va
même jusqu'à renier sa signature sur certains accords intervenus
avec la CUM il y a à peine deux ans, avant les élections. Le
gouvernement décrète unilatéralement que sa contribution
aux immobilisations à caractère régional construites
après le 1er janvier 1980 passe à 60%, au lieu de 100%. Ce
faisant, le gouvernement revient sur ses engagements face à la
Communauté urbaine de Montréal de financer 100% des
infrastructures du métro de Montréal.
On se souviendra que les municipalités de la CUM n'ont
accepté de prendre la responsabilité du service de trains de
banlieue fortement déficitaire qu'à la suite de l'offre du
gouvernement du Québec de prendre totalement à sa charge le
financement de la construction du métro. Deux ans plus tard, le
gouvernement propose de se soustraire à cette obligation. Ce geste vient
diminuer encore davantage la crédibilité administrative de
l'actuel gouvernement. (19 h 45)
Ce qui est, par contre, plus grave, c'est que les municipalités
de la CUM ont, de bonne foi, élaboré des projets
d'investissements de plusieurs dizaines de millions sur la base de cette
entente. À titre d'exemple, dans ma municipalité, la ville de
Saint-Léonard a fait des études d'expertise pour le
réaménagement de la rue Jean-Talon pour sa connexité avec
le métro tel que proposé dans l'entente qui est dûment
signée. Le gouvernement ne peut et ne doit revenir en arrière. Le
gouvernement consacre le principe d'une contribution des non-usagers des
transports en commun. Après avoir joué avec les hypothèses
d'un impôt spécial sur la masse salariale des Montréalais
et des banlieusards et d'une surtaxe aux entreprises, il propose d'aller
chercher une cinquantaine de millions dans la poche des automobilistes. Nous
avons suffisamment discuté de cette
question plus haut dans ce document sans qu'il soit nécessaire
d'y revenir plus longuement.
Notre position est claire, à ce sujet. Le gouvernement n'a pas
à chercher à imposer, par la voie de la taxation, le choix d'un
mode de transport ou d'un autre. D'ailleurs, l'automobiliste est
déjà suffisamment accablé par son actuel gouvernement
provincial. L'automobile peut constituer une solution de rechange
économique au système de transport en commun lourd et
coûteux. On doit chercher à favoriser les options nouvelles,
articulées autour des infrastructures routières existantes et de
l'automobile, tel le covoiturage. Les nombreuses réformes des
dernières années, et ce, tant dans le domaine du transport en
commun que dans d'autres secteurs, ne sont, en fait, que des
échappatoires pour le gouvernement péquiste qui tente ainsi de
régler ses problèmes financiers. Les coûts d'exploitation
et d'immobilisations des systèmes de transport en commun ont crû
à un rythme annuel de 20% depuis 1977. Il est parfaitement normal que le
gouvernement tente de contrôler un poste tout à fait
débridé. La solution facile est de repasser la note à
d'autres.
Les prévisions du gouvernement contenues dans sa proposition
montrent que les parts relatives des contributions de chaque niveau de
gouvernement et des usagers resteront relativement stables. Cependant, ces
prévisions sont basées sur l'hypothèse que la croissance
des coûts baissera à 9,5% et que l'achalandage augmentera de 3%.
Ceci nous semble quelque peu irréaliste, surtout devant la performance
passée de l'actuel gouvernement au chapitre des prévisions de
revenus et de dépenses. Si les coûts devaient continuer à
augmenter à leur rythme actuel, les municipalités et les
automobilistes non-usagers verraient leur contribution augmenter beaucoup plus
rapidement que celle du gouvernement. Le gouvernement n'a, en effet, aucun
intérêt à voir augmenter les tarifs puisque sa contribution
est attachée à la contribution des usagers. Les
municipalités devront, quant à elles, essuyer un déficit
résiduel qui ira en augmentant au rythme des coûts. Si on
extrapole le taux de croissance des coûts actuels, qui est de 20%, on
constate que le déficit résiduel à financer pourrait
dépasser les 500 000 000 $ en 1985. La contribution des
municipalités à cet égard serait supérieure
d'environ 200 000 000 $ aux prévisions contenues dans le document
gouvernemental, soit un écart de plus de 100%. La croissance de la
contribution municipale serait de 37,6% par année pendant que le
gouvernement plafonne la sienne à 8,4%. Cette démonstration
montre bien la fuite en avant que constitue la proposition pour le
gouvernement.
La position du Parti libéral du Québec, face à la
proposition gouvernementale concernant le transport en commun dans la
région de Montréal, est claire. Elle s'exprime en trois
principaux volets: le contrôle au niveau local des systèmes de
transport en commun, une certaine intégration tarifaire qui vise
à rendre la situation plus juste et plus équitable pour
l'ensemble des usagers de la région et un profond désaccord sur
quatre aspects de la réforme: les pouvoirs étendus et la taille
de l'ORT, les promesses reniées du gouvernement quant au financement du
métro sur le territoire de la CUM, les taxes imposées aux
automobilistes au chapitre de la contribution régionale et la
présence d'administrateurs du gouvernement au conseil d'administration
et au comité exécutif de l'ORT.
Nous le répétons, le Parti libéral souscrit
à deux objectifs de la réforme, soit la réalisation d'une
certaine intégration tarifaire et l'accomplissement de l'autonomie
locale en matière de transport en commun. Dans l'ensemble, ces deux
objectifs n'ont pas été contestés par les principaux
intéressés qui ont présenté des mémoires
à cette commission. Ce que nous dénonçons, c'est
l'improvisation et la fuite en avant du gouvernement dans ce dossier,
particulièrement au chapitre du partage financier. Le ministre doit
reprendre son document et dissiper toute incertitude quant au partage futur des
coûts. Il doit aussi alléger le cadre institutionnel
proposé. Finalement, il doit faire preuve de plus d'imagination dans
l'élaboration de politiques de développement moins
coûteuses et qui utiliseront mieux les infrastructures en place. Le Parti
libéral compte mener une lutte vigoureuse au projet de réforme du
gouvernement. Nous souhaitons vivement que le gouvernement apporte beaucoup
plus de sérieux à ce dossier, qui est un des dossiers les plus
importants, que ce qu'il nous a manifesté jusqu'ici. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Jeanne-Mance. M. le ministre.
M. Michel Clair
M. Clair: M. le Président, depuis 1976, le Parti
québécois qui forme le gouvernement du Québec a
décidé d'accorder une priorité non pas exclusive, mais
réelle au niveau des décisions pour favoriser le
développement et la promotion du transport en commun, non pas contre les
automobilistes, non pas contre qui que ce soit, mais dans le but d'offrir une
option réelle aux personnes qui n'ont pas les moyens de se payer deux ou
trois automobiles et parfois même une voiture, une automobile
privée.
On a vu le gouvernement, par exemple, au cours des récentes
années, comme on nous l'a souligné au cours des débats
à la
commission - certains même nous le reprochant, les adversaires du
transport en commun - introduire la carte d'abonnement mensuel, un titre de
transport qui a permis d'accroître l'achalandage de façon
importante, d'au moins 10% soulignait la Communauté urbaine de
Montréal. Nous avons aussi essayé au maximum, par le biais du
COTREM, de faire en sorte que les moyens les moins dispendieux puissent aussi
être utilisés, ce qu'on appelle les techniques douces de
transport, pour faciliter le transport en commun, que ce soit la mise en place
de deux voies réservées, par exemple, et de parcs d'incitation
pour le stationnement sur la rive sud de Montréal.
Il y a eu aussi d'autres mesures que nous avons mises de l'avant: la
levée du moratoire sur le métro dans la région de
Montréal, le regroupement des achats d'autobus afin de favoriser le
développement de la construction d'équipements de transport au
Québec, toute une série de mesures qui ont visé à
concrétiser, encore une fois, cette priorité accordée par
l'actuel gouvernement au développement du transport en commun, qui n'est
pas, encore une fois, une priorité contre les automobilistes. Mais nous
nous sommes refusé, depuis 1976 - et nous continuons à le faire -
à nous contenter de continuer à investir dans les deux, dans le
transport par automobile et dans le transport en commun, sans faire de choix,
sans privilégier au moins des priorités.
Je pense qu'à ce compte-là on peut nous reprocher d'avoir
une priorité, comme le fait le Parti libéral du Québec,
mais je pense qu'on ne saurait nous reprocher, cependant, d'en avoir une,
priorité. Qu'on nous dise qu'on reproche au gouvernement de choisir le
transport en commun, c'est acceptable. C'est une matière d'opinion. Le
Parti libéral défend l'opinion inverse. Mais qu'on adopte
l'attitude du Parti libéral de refuser de faire un choix, je pense que
ce serait irresponsable. À ce compte-là, M. le Président,
je suis particulièrement heureux de représenter le gouvernement
en matière de transport en commun, tant à cause des
réalisations que nous avons accomplies depuis les six dernières
années en matière de promotion et de développement du
transport en commun qu'à cause des propositions que nous avons
déposées en juin dernier.
Pour en venir, justement, à cette proposition que nous avons
déposée en juin dernier, les spécialistes ont
décortiqué la proposition du gouvernement et ont commenté
sous différents aspects cette proposition gouvernementale. J'essaierai,
quant à moi, de la résumer en quatre grands points, comme je l'ai
fait à l'introduction. Quel est l'objectif poursuivi par le gouvernement
du Québec en proposant de restructurer le cadre institutionnel,
juridique, si on veut, du transport en commun et le cadre financier? En
réalité, en termes aussi simples que possible, l'objectif du
gouvernement était de répandre à quatre questions
fondamentales qui nous sont posées en matière d'organisation du
transport en commun dans la région de Montréal. La
première question, certainement la plus importante en ce qui concerne le
transport en commun dans la région de Montréal, c'est: Qui est
responsable politiquement de l'organisation et du fonctionnement du transport
en commun dans la région de Montréal? Quand on voit que les
usagers du transport en commun doivent, à l'occasion, écrire au
ministre des Affaires municipales, au ministre des Transports, au maire de
Montréal, au président de la communauté urbaine et
même au premier ministre, on voit qu'il y a là une absence de
leadership, de responsabilité en matière de transport en commun.
La réponse du gouvernement à cette question: Qui est responsable?
nous avons voulu la formuler le plus simplement possible en disant: Nous
proposons que la responsabilité du transport en commun de nature locale,
des autobus qui circulent dans les municipalités incombe aux élus
locaux, puisqu'il s'agit d'un service local.
Étant donné qu'il y a une dimension régionale entre
la Commission de transport de la rive sud de Montréal, la CTL à
Laval, la CTCUM sur l'île de Montréal, il existe aussi une
dimension régionale du transport en commun. À ce niveau, en
réponse à la question: Qui est responsable? nous avons
proposé la mise en place d'une table de concertation
décisionnelle qui naîtrait du regroupement de deux organismes
déjà existants, le Bureau de transport métropolitain, le
BTM, et le COTREM, qui serait sous le contrôle des élus locaux de
la région de Montréal, dans une structure aussi
légère, mais aussi représentative que possible de tous les
intérêts de la région de Montréal. Voilà pour
la question: Qui est responsable? et la réponse que nous avons
formulée.
Une deuxième question est également présente dans
l'esprit de tous ceux qui s'intéressent à la question du
transport en commun: Comment partager équitablement les coûts du
transport en commun, lesquels iront encore croissant au cours des prochaines
années? Comme nous le savons tous, le transport en commun, en fait, est
composé de trois éléments: le carburant - et on
connaît les effets de la crise de l'énergie - les salaires - et on
connaît, encore là, le rapport qui existe entre les salaires et
l'inflation qui est élevée au Canada, la plus
élevée du monde occidental - et le service de la dette, les
intérêts à payer pour rembourser la dette qui a
été contractée lors de l'acquisition d'autobus ou de la
construction du métro.
Encore là, comme le régime dans lequel
nous vivons nous favorise en faisant en sorte qu'on paie les plus hauts
taux d'intérêts du monde occidental, on comprend que les
coûts vont nécessairement continuer de croître. Face
à cette croissance des coûts, est-ce qu'on doit rester assis
à ne rien faire, incapable de réagir? La réponse du
gouvernement, c'est: Non, on ne demeurera pas passif; on va tenter de proposer
une alternative à ce qui nous conduirait immanquablement,
irrémédiablement à abandonner cette priorité si les
coûts croissent trop vite et s'ils sont mal répartis entre les
différents bénéficiaires du transport en commun.
On a donc proposé, pour essayer de mieux contrôler les
coûts, d'en confier la responsabilité aux élus locaux,
convaincus que, puisqu'ils ont à taxer leurs concitoyens pour payer les
déficits, ils sauraient, mieux que des commissions autonomes,
contrôler la croissance des coûts. Mais, également pour
partager ces coûts qui, de toute façon, vont continuer de
croître, le gouvernement a proposé non pas de se désengager
financièrement de son soutien au transport en commun, mais, au
contraire, d'essayer de trouver une façon de maintenir la
priorité au transport en commun, en étant capable de continuer
ensemble, dans la grande région de Montréal, à financer
des immobilisations qui nous apparaissent justifiées, qu'on propose de
continuer au rythme de la capacité de payer des citoyens et des
citoyennes, mais auxquelles on ne saurait renoncer sans renoncer à un
choix qui continue d'être partagé par l'ensemble des
autorités locales sur le territoire de la Communauté urbaine de
Montréal. (20 heures)
Afin de répondre à la question: Comment partager
équitablement la facture? le gouvernement propose de maintenir sa
contribution, qui fait de lui le principal bailleur de fonds au transport en
commun dans la région de Montréal, avant comme après la
réforme. Il propose, cependant, de bloquer l'accroissement aussi rapide
de 33 1/3% par année, tel que cela a été le cas pour le
gouvernement au cours des trois ou quatre dernières années. On
propose un système qui nous apparaît équitable où
nous disons aux municipalités: Nous allons continuer à être
le partenaire majeur du transport en commun, mais les municipalités vont
contribuer à un niveau aussi élevé au coût du
transport en commun et nous allons plafonner notre contribution comme
gouvernement à celle des municipalités. Des gens pourraient
penser qu'à ce moment, c'est se décharger de nos
responsabilités sur le dos des municipalités. La réponse,
c'est non, parce que le gouvernement propose d'accroître le nombre des
partenaires dans le financement du transport en commun, d'aller chercher chez
des gens qui paient déjà des taxes, comme la taxe sur le
carburant et les tarifs sur les autoroutes, une nouvelle contribution des
bénéficiaires non-usagers, comme la plupart des grandes villes
dans le monde l'ont déjà fait. Cela permettra de soulager le
gouvernement, mais aussi - c'est l'objectif que poursuit le gouvernement - de
soulager les municipalités qui ont à défrayer les
déficits résiduels par le biais de la taxe foncière.
Partager équitablement la facture, c'était un objectif
prioritaire. On propose de le faire en s'assurant que les coûts soient
mieux contrôlés, que les automobilistes et les entreprises soient
appelés d'une certaine façon à y contribuer, que les
payeurs de taxe foncière voient - on l'espère et on prend les
moyens pour - leur quote-part diminuer. Autant de moyens d'essayer de mieux
répartir la facture du transport en commun.
La troisième question qui nous était posée par la
situation du transport en commun, c'est: Qui s'occupe de la dimension
régionale du transport en commun? Sur cette question - on a eu
l'occasion de le voir au cours des cinq dernières journées
d'audiences - tout le monde reconnaît la nécessité absolue
qu'on coordonne mieux, qu'on rationalise, qu'on s'assure d'une meilleure
utilisation des fonds publics. En ce qui concerne la dimension régionale
du transport en commun dans la grande région de Montréal,
c'est-à-dire les interfaces entre la rive sud, la communauté
urbaine, Laval et la rive nord, Laval et la Communauté urbaine de
Montréal, la proposition du gouvernement est de regrouper autour d'une
même table des élus provenant de toute la grande région de
Montréal et de leur donner le pouvoir de fixer des orientations du
transport en commun dans la grande région de Montréal.
La quatrième et dernière grande question qui nous est
posée par la situation du transport en commun, c'est: Comment maintenir
une tarification raisonnable pour les usagers? L'action du gouvernement en
matière de transport en commun n'aurait aucun sens si elle ne visait
à privilégier une structure tarifaire qui soit équitable,
qui s'assure que les usagers du transport en commun où qu'ils soient,
où qu'ils résident dans la grande région de
Montréal, soient traités de façon similaire, de
façon équitable, ce qui n'est pas le cas actuellement, quand on
sait, par exemple, que, pour une carte d'abonnement mensuel, des gens qui
parcourent exactement tous les jours la même distance paient dans un cas
21 $, dans un autre cas 24 $ et, enfin, dans un troisième cas 45 $. Il
nous apparaissait que si on veut maintenir une contribution des usagers qui
soit raisonnable, si on veut qu'il y ait une équité en
matière de tarification dans la grande région de Montréal
pour les usagers du transport en commun, on devait proposer, comme nous l'avons
fait, une
structure qui traite de façon semblable l'ensemble des
usagers.
Voilà donc, M. le Président, pour les quatre grandes
questions qui étaient posées par la proposition de réforme
et les éléments de réponse que cette proposition
contenait. La commission parlementaire, dans ce sens, aura été
une occasion privilégiée pour en discuter. Je souligne,
d'ailleurs, que c'est le gouvernement lui-même qui avait proposé
la tenue d'une commission parlementaire. Nous avions proposé qu'elle se
tienne à Montréal. Le Parti libéral nous a refusé
son consentement là-dessus, mais je pense qu'à tout le moins, par
la télédiffusion des débats de cette commission, le public
aura eu l'occasion de prendre conscience des problèmes et des enjeux en
matière de transport en commun et l'occasion aussi de constater un
certain nombre de choses.
Quant à nous, nous sommes particulièrement heureux que
cette commission parlementaire ait pu permettre un débat public sur un
dossier très important, le transport en commun dans la grande
région de Montréal. Ne serait-ce qu'à cause de la
variété et du nombre de mémoires qui ont été
soumis à la commission parlementaire, soit 58 mémoires provenant
de différents organismes, je pense que cela a été un
succès. Le débat public a pu s'amorcer sur la situation du
transport en commun dans la région de Montréal. Quant à
l'équipe ministérielle, je dois dire que nous sommes très
fiers d'avoir eu l'occasion de fournir au grand public de la région de
Montréal l'occasion de voir quelle est la problématique et
quelles peuvent être les solutions.
Cette commission parlementaire a donc été, d'abord et
avant tout, l'occasion d'un débat public intéressant sur la
problématique du transport en commun dans la région de
Montréal. Deuxièmement, cela aura été aussi
l'occasion de constater l'absence complète de politique en
matière de transport des personnes de la part du Parti libéral du
Québec. Hormis d'essayer de reprendre à leur compte certaines
propositions du gouvernement en matière de taxi collectif, de
covoiturage, de meilleure utilisation des infrastructures existantes, la
position des membres du Parti libéral aura été sans cesse
ambiguë, incapables qu'ils sont de faire des choix, toujours habiles
à critiquer, mais si peu articulés lorsque vient le temps de
proposer des éléments concrets de politique en matière de
transport des personnes. J'avouerai que j'ai été très
déçu à ce point de vue, non pas de la collaboration
quotidienne qui m'a été offerte par le député de
Laporte, mais de l'absence de vision du présent et de l'avenir du
transport des personnes dans la grande région de Montréal. Quand,
sur des questions aussi fondamentales, par exemple, que le prolongement du
métro et du métro de surface, on a vu dans l'espace d'une heure
le député de Saint-Laurent nous dire qu'il était à
la fois pour et contre le prolongement du métro entre la station du
Collège et Côté Vertu, qu'on a vu le Parti libéral
dire qu'on devait poursuivre les immobilisations en ce qui concerne la
modernisation des trains de banlieue dans l'ouest de l'île de
Montréal, mais que cependant on devait cesser le prolongement du
métro de surface et du métro vers l'est, tout cela nous a fort
déçus. Au moins, en ce qui concerne le public, cela aura
été l'occasion de constater l'absence de politique en
matière de transport des personnes de la part des libéraux.
Troisièmement, je pense que la commission aura été
l'occasion de constater la volonté de tous ou d'à peu près
tous les groupes qui sont venus de maintenir et de développer le
transport en commun. Si les moyens peuvent différer, certains
préférant les techniques dites douces, comme le covoiturage,
comme les voies réservées, comme les parcs d'incitation; d'autres
préférant d'autres moyens, développement de
métrobus, d'express, de moyens lourds de transport, une chose ressort
clairement avec beaucoup de force, c'est la volonté de tous ceux qui
sont venus devant nous de maintenir et de développer le transport en
commun dans la grande région de Montréal.
Cette commission parlementaire aura été, pour le
gouvernement et pour l'ensemble de l'équipe ministérielle,
l'occasion de réitérer la priorité que nous, du
gouvernement du Parti québécois, nous désirons continuer
à maintenir au transport en commun dans la grande région de
Montréal. À ce titre, cela aura été l'occasion de
sentir à quel point cette priorité, ce besoin est ressenti par la
population, par les porte-parole de tous les groupes qui sont venus devant
nous, à savoir un transport en commun aussi efficace, aussi peu
coûteux, aussi de qualité et de quantité que nos moyens
financiers nous permettent à tous de nous l'offrir.
Cinquièmement, la commission parlementaire, par-delà la
chance offerte au Parti libéral - comme c'est son devoir de le faire,
c'est normal, d'ailleurs - de grossir les points de désaccord avec les
différents groupes, aura été aussi l'occasion pour le
gouvernement de constater un grand nombre de consensus sur de très
nombreux points fondamentaux quant à l'organisation et au fonctionnement
du transport en commun dans la région de Montréal. J'en
énumère quelques-uns. Par exemple, jusqu'à tout
récemment, les élus municipaux étaient pour le moins pas
très chauds quant à l'intégration tarifaire dans certaines
parties de la région métropolitaine de Montréal, alors
qu'aujourd'hui je suis heureux de constater qu'après 58 mémoires
je n'ai vu
personne venir s'opposer à cette proposition qui avait
été mise de l'avant par le gouvernement du Québec, il y a
déjà de cela trois ans: l'intégration tarifaire dans la
grande région de Montréal. C'est un consensus important, c'est la
première fois que cela se produit.
Un autre consensus, c'est l'acceptation, le désir même,
pour ne pas dire l'enthousiasme des élus municipaux à la
proposition du gouvernement de leur remettre, au niveau local, le
contrôle effectif du transport en commun dans leur territoire. Je pense
que, là encore, il s'agit d'un point important où les élus
municipaux et le gouvernement ont une communauté de vues
remarquable.
Autre consensus en ce qui concerne tous les territoires non
organisés en matière de transport en commun, c'est-à-dire
tout ce qui est actuellement desservi, soit par la Commission de transport de
Laval dans les Laurentides à l'extérieur de ville de Laval soit
par le réseau Métropolitain provincial ou le réseau
Métropolitain Sud, le consensus semble se dégager de façon
assez évidente quant à la nécessité de regrouper
les municipalités en fonction des corridors de transport,
c'est-à-dire de fonctionner sur une base très naturelle, le
regroupement naturel des municipalités desservies. Je pense qu'à
ce point de vue on a déjà fait des pas de géant puisqu'au
moins une demi-douzaine de regroupements de municipalités se sont
effectués au cours de l'été pour venir nous
présenter, en commission parlementaire, des mémoires conjoints
qui, au fond, vont dans le sens de la proposition gouvernementale, à
savoir une implication des élus même en dehors de l'île de
Montréal, de la rive sud et de Laval pour le contrôle du transport
en commun par ceux-ci.
Je pourrais continuer l'énumération des consensus qui sont
intervenus au cours de la commission. Déjà, constater ces trois
consensus très importants, c'est constater en même temps le
succès de cette commission, l'adhésion à de grandes
parties de la proposition du gouvernement et une invitation, en ce qui me
concerne, à continuer à aller de l'avant.
Finalement, cette commission aura été, M. le
Président, l'occasion de mesurer pleinement que les objectifs du
gouvernement sont partagés par l'ensemble de ceux qui sont venus, mais
que, cependant, il faudra mettre beaucoup de patience et beaucoup de travail
pour en venir à s'entendre avec l'ensemble des intervenants dans la
région de Montréal quant aux meilleurs moyens à prendre
pour atteindre ces objectifs.
Nous avions déposé une proposition d'ensemble. Nous
n'avons jamais cru, ni même espéré - cela aurait
été rêver -mettre cette proposition en place, un jour
donné, pour l'ensemble de la région de
Montréal. Nous étions fort conscients des limites à
ce qu'une région peut accepter comme transformation de son cadre
institutionnel, du fonctionnement des institutions. À ce point de vue,
ce n'est pas une déception, mais, au contraire, une invitation, quant
à nous, à poursuivre dans le même sens, à ne pas
renoncer aux objectifs que nous nous étions fixés en rendant
publique, en juin dernier, une proposition de réforme, mais à
continuer dans le même sens en tentant au maximum d'associer les
municipalités, les institutions, les commissions de transport, les
groupes de citoyens et d'usagers à la démarche qu'a
effectuée le gouvernement en déposant cette proposition.
M. le Président, je pense donc que la commission aura
été très positive. En plus de permettre un débat
public, de mettre à nu, je dirais, les positions du gouvernement et du
parti de l'Opposition, cela aura été l'occasion, pour celui qui
vous parle, de mieux apprécier l'ampleur de la réforme
proposée, de voir qu'il y aura certainement, comme on le pensait au
départ, nécessité d'étaler dans le temps cette
réalisation-là. C'est la raison pour laquelle j'envisage la
possibilité de revoir, au cours des prochaines semaines, avec mes
fonctionnaires, l'ensemble des mémoires et de les étudier encore
plus en détail.
Je peux affirmer d'ores et déjà que la meilleure avenue
à prendre sera probablement celle que j'indiquais au début de
cette commission. En ce qui concerne les mesures financières et les
mesures consensuelles, je dirais, on ira de l'avant le plus rapidement
possible; d'une part, en ce qui concerne les mesures financières parce
qu'on ne pourrait pas laisser dans l'incertitude bien des municipalités
quant à leur budget pour la prochaine année fiscale et, d'autre
part, en ce qui concerne les consensus, je ne vois aucune raison de retarder
au-delà du printemps prochain, soit le délai normal de
préparation d'un projet de loi, la mise en oeuvre des
éléments de la réforme qui font consensus. (20 h 15)
Par ailleurs, quant aux éléments, on m'a dit à
plusieurs reprises - même le dernier groupe qui est encore dans la salle,
le Conseil régional de développement des Laurentides, a
employé cette expression à plusieurs reprises - M. le ministre,
ce n'est pas tant que nous sommes contre, mais nous trouvons que vous voulez en
faire beaucoup à la fois. Dans un premier temps, nous voulons prendre le
contrôle de la dimension locale du transport et nous sommes
intéressés à poursuivre la discussion avec vous en ce qui
concerne la dimension régionale du transport. M. le Président, je
suis fort aise de relever cette offre de collaboration qui m'a
été faite par la plupart des intervenants et de
continuer la discussion de la façon la plus articulée, la
plus positive possible sur la proposition gouvernementale et les meilleurs
moyens à prendre pour assurer aux Montréalais et aux
résidents de toute la grande région de Montréal un service
de transport en commun aussi peu dispendieux que possible, aussi efficace que
possible, qui réponde aux besoins de la façon la plus
équitable pour l'ensemble des résidents de la région
métropolitaine de Montréal.
Je termine donc ici cette conclusion. Je la vois très positive,
quant à moi. Je pense que les travaux ont été très
enrichissants pour l'ensemble des membres de la commission parlementaire. On a
pu en apprendre tous et chacun. Je pense que, tant du côté
ministériel que du côté de l'Opposition, les débats
qui ont eu lieu ici nous ont grandement éclairés sur la situation
et sur les pistes de solutions qui peuvent se présenter pour nous.
Je remercie mes collègues ministériels qui ont
participé nombreux à cette commission parlementaire. Je pense
qu'ils ont fait la preuve, eux aussi, par leur présence et leur
participation à cette commission parlementaire, de
l'intérêt réel que notre formation politique a toujours
porté et continue de porter au transport en commun dans la grande
région de Montréal.
Je vous remercie vous-même, M. le Président, pour la
patience dont vous avez fait preuve quant à la longueur des
débats que nous avons eus. Je vous demande de transmettre
également au personnel du secrétariat des commissions les
remerciements de l'équipe ministérielle pour les longues heures
qu'ils ont passées avec nous au cours des deux dernières
semaines. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. Au terme
de ces 48 heures de débats sur le sujet de cette commission, il me fait
plaisir de remercier, tout d'abord, tous les intervenants qui, à la
suite de longues attentes, ont persévéré afin de
présenter leurs mémoires. Comme le ministre le disait, on a
présenté 58 mémoires. Je voudrais donc remercier tous ces
gens, remercier en même temps le personnel du secrétariat des
commissions et aussi les techniciens de la télévision qui ont
rendu possible le bon fonctionnement de cette commission. Je remercie, en
même temps, tous les membres de la commission, qui m'ont facilité
le travail dans leurs interventions et qui ont permis que nous puissions
terminer nos travaux dans un temps relativement court.
Je demanderais au député de Vimont, qui est rapporteur de
la commission, de faire rapport dans les plus courts délais à
l'Assemblée nationale au nom de tous les membres de la commission.
La commission des transports ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 20 h 19)