Journal des débats (Hansard) of the Committee on Health and Social Services
Version préliminaire
43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)
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Thursday, February 6, 2025
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Vol. 47 N° 83
Special consultations and public hearings on Bill 83, an Act to foster the practice
of medicine in the public health and social services network
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11 h (version non révisée)
(Onze heures vingt-cinq minutes)
La Présidente (Mme Poulet) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance
à la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je vous souhaite
la bienvenue et je demande à toutes les personnes ici présentes dans la salle
de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission est réunie afin de procéder
aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 83,
Loi favorisant l'exercice de la médecine au sein du réseau public de la santé
et des services sociaux.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements?
La Secrétaire : Non, Mme la
Présidente, aucun remplacement.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci.
Est-ce qu'il y a consentement pour que le député de Saint-Jérôme puisse faire
ses remarques préliminaires? Il y a consentement? M. le député de Saint-Jérôme,
vous auriez 1 min 12 s environ... une minute.
Alors, nous débutons, ce matin, par les remarques
préliminaires puis nous entendrons les témoins suivants : la Fédération
des médecins omnipraticiens du Québec et la Fédération des médecins
spécialistes du Québec. Alors, j'invite maintenant le ministre de la Santé à
faire ses remarques préliminaires. M. le ministre, vous disposez de six
minutes, et la parole est à vous.
M. Dubé : Alors, merci
beaucoup, Mme la Présidente. Premièrement, j'aimerais saluer les différents
participants à cette commission, mes collègues du côté gouvernemental, encore
une fois, ça fait très plaisir de se retrouver dans ces lieux-là, où on a
passé, avec mes collègues de l'opposition aussi... Ça rappelle des souvenirs de
2023. Alors, très, très content d'être de retour ici aujourd'hui, pour un...
pour un projet de loi qui s'inscrit dans notre volonté — et je le
répète souvent — d'améliorer l'accès pour les patients du Québec.
Et, rapidement, j'aimerais peut-être
revenir sur les objectifs du projet de loi, pour qu'on soit très clairs, c'est
d'avoir... pour les nouveaux médecins qui... qui pratiquent au public et au
Québec à la fin de leurs études. D'ailleurs, la grande majorité des Québécois
sont d'accord avec ce projet de loi. D'ailleurs, plusieurs nous disent qu'on ne
va pas assez loin. Mais j'aimerais rappeler quelques statistiques, que je trouve
importantes. On observe une tendance à la hausse des médecins qui sont formés
dans le public et qui partent vers le privé. Je vous donne quelques chiffres.
On a plus de... près de 23 000 médecins au Québec qui pratiquent, là,
autant du côté des médecins spécialistes que des omnipraticiens, mais c'est
près de 800 médecins qui... qui ont passé au privé, et c'est une hausse de
70 % depuis 2020. Et si je regarde les statistiques aujourd'hui, il y a
plus de 2 300 médecins qui ont été formés au Québec qui pratiquent
maintenant en Ontario. Alors, quand on regarde les coûts, notamment, notamment
les coûts de... qui incluent la résidence, de former un médecin, on est dans
des chiffres qui varient entre 400 000 $ et 800 000 $.
Alors, c'est sûr que ce... cette désaffiliation du réseau, pour nous, est un
phénomène qu'il faut corriger.
Et notre objectif, avec ce projet de loi,
il est très clair, c'est de s'assurer que les médecins, à la fin de leur
formation, vont non seulement venir pratiquer au public, mais pratiquer chez
nous, au Québec, dans notre réseau, qui en a tant besoin. Alors... Et la
période qui est suggérée dans le projet de loi, c'est d'avoir un minimum de
cinq ans. Maintenant, ce n'est pas la seule façon, et je vais le répéter
souvent en commission, comme je l'ai répété depuis qu'on a déposé notre plan de
santé, le projet de loi ici s'inscrit dans un ensemble de mesures, dans un
ensemble de mesures que nous avons clairement dévoilées dans notre plan de
santé en 2022.
Et comme certains intervenants l'ont
suggéré, puis il y en a plusieurs qui vont passer en commission, soit aujourd'hui
ou la semaine prochaine... il y a plusieurs intervenants, comme je l'ai dit
tout à l'heure, qui nous disent : Vous n'allez pas assez loin avec ce
projet de loi là. Puis je pense non seulement au Collège des médecins, mais il
y avait un article, ce matin, de l'institut CIRANO, dans La Presse, ce
matin, qui faisait état des autres éléments qui pourraient peut-être...
M. Dubé : ...venir se joindre
au projet de loi ou dans des règlements, mais je pense entre autres à la
Coalition santé, et nous avons pris connaissance de certains mémoires, et,
lorsqu'on aura tous les mémoires, on pourra peut-être revoir un peu l'ensemble
des personnes... des recommandations qu'ils nous font. Donc, ce n'est pas la
seule façon d'arriver à nos objectifs, mais c'en est une.
Maintenant, j'aimerais aussi rappeler aux
Québécois que non seulement on peut aller plus loin dans ce projet de loi là — donc
on est d'accord à le bonifier, on écoutera les intervenants — mais,
en même temps, il y a beaucoup de gestes qu'on a posés aussi pour améliorer
l'accès qui sont complémentaires au projet de loi, et je donne un
exemple : par exemple, l'interdiction de pratique qui est faite, par
exemple, dans certaines provinces, la meilleure parité entre les tarifs, qui
est aussi bien claire dans certaines provinces, des allers-retours des médecins
qu'on... dont on... sont dénoncés souvent entre le privé et le public. Il va y
avoir des commentaires entre autres sur la propriété des GMF. Donc, ce sont des
éléments qui ont été soulevés dans ces mémoires-là, et, je l'ai dit, il y a
d'autres mémoires, mais je pense qu'il est important de bien écouter tout le
monde avant de finaliser et d'arriver avec le projet de loi final.
• (11 h 30) •
Maintenant, j'ai dit aussi qu'on avait
fait d'autres gestes pour améliorer l'accès. Je pense entre autres ici — et
je pense que les Québécois, mais non seulement les fédérations, l'ont apprécié — je
pense au GAP, entre autres. On a aussi commencé à simplifier le processus des
PREM, on a enlevé de la paperasse. On fait de plus en plus un effort dans notre
réseau pour améliorer les heures en chirurgie, que ce soit chez nous ou à
l'extérieur. On a augmenté de façon substantielle les admissions en médecine,
je le rappelle, là, on est passé de 800 admissions en médecine en 2018 à près
de 1100 maintenant. Alors, je le répète, le projet de loi n'est pas la seule
mesure pour améliorer l'accès, mais il fait partie d'un ensemble de mesures que
l'on fait.
Maintenant, en terminant, je sais qu'il y
a beaucoup d'autres choses qui est en cours, beaucoup d'autres choses qui est
en cours, entre autres la négociation avec les fédérations médicales, et
j'aimerais demander à ceux qui vont passer ici de se concentrer, s'il vous
plaît, sur le projet de loi, parce qu'on peut vouloir diverger le sujet, moi,
ce que j'aimerais dire aux Québécois : Concentrons-nous sur ce qu'on a à
faire aujourd'hui. Les Québécois veulent ce projet de loi là, et on a la chance
d'écouter tout le monde. Profitons de cette période-là que nous avons ensemble
pour améliorer la situation. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci,
M. le ministre. Alors, j'invite maintenant la porte-parole de l'opposition
officielle et députée de La Pinière à faire ses remarques préliminaires, et
vous avez 3 min 36 s. Alors, la parole est à vous.
Mme Caron : Merci, Mme la
Présidente. Alors, je salue toutes les personnes présentes, les collègues et
les équipes de même que nos invités qui viennent nous présenter leurs mémoires.
Alors, c'est... on sait que dans la
population, puis même dans les professions médicales et chez les élus, la
grande préoccupation de l'état du réseau de la santé actuellement et de l'accès
aux services, c'est vraiment crucial, c'est d'une importance capitale, parce
que, quand on est malade, on veut se faire soigner, et donc je comprends la
proposition qui est faite par ce projet de loi. Sur le principe, on comprend
ça, parce qu'on veut tous améliorer.
Maintenant, on a des questions sur
l'application de tout ça, la mise en application. Je pense que ce ne sera pas
simple, la façon de s'y prendre pour s'assurer que les médecins ne quittent pas
le réseau, mais qu'ils travaillent dans le réseau, et, dans les mémoires qui
ont été soumis, et on va en entendre parler, on évoque des moyens autres que ce
qui est proposé dans le projet de loi pour améliorer l'accès au réseau. J'ai
hâte d'en entendre parler, des moyens pratiques et pourquoi on n'arrive pas à
le faire, parce que l'objectif, c'est vraiment de s'assurer que tous et chacun
aient un accès à un médecin en temps opportun, quand on est malade et qu'on a
besoin de soins ou qu'on a besoin de prévention pour ne pas tomber malade et
être dans une situation encore plus grave.
Alors, ça va être intéressant de voir les
discussions. On souhaite que ce soit au meilleur pour la population. Et je me
permets d'ajouter que c'est... j'ai un petit peu de difficulté à suivre...
11 h 30 (version non révisée)
Mme Caron : ...et je me
permets d'ajouter que c'est... j'ai un peu de difficulté à suivre le
gouvernement. Je comprends l'objectif, je comprends ce qu'on veut faire, mais,
le lendemain du dépôt du projet de loi, il y a eu un appel d'offres qui a été
lancé pour des cliniques où ces nouveaux médecins qui sont ciblés par le projet
de loi ne pourront pas aller pratiquer, en tout cas, pas dans leurs cinq
premières années. Alors, le ministre nous parlait d'un ensemble de mesures qui
sont prises pas uniquement maintenant, mais dans le temps pour arriver à l'objectif.
Alors, ça prend une cohérence dans tout ça, et puis on va voir... on va
travailler pour tenter de s'assurer que l'objectif du projet de loi est
atteint. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci.
Alors, j'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition et
député de Rosemont à faire ses remarques préliminaires. Et vous avez une minute
et 12 secondes.
M. Marissal : Merci, Mme la
Présidente. Je fais court dans les salutations, je manque de temps.
Effectivement, j'ai des flash-back, là, de pl 15, je ne sais pas si c'est sain
pour ma santé mentale, mais des flash-back de ça. Je suis sûr que le ministre,
en disant nous inviter à nous en tenir exclusivement sur ce qu'il y a dans le
projet de loi, n'en appelait pas à une restriction du débat. Je suis sûr que ce
n'est pas ça qu'il faisait, parce que ce n'est pas ça que je vais faire. On est
pour le principe, bien sûr, on est pour le principe, mais je m'intéresserais
plus aux causes du passage vers le privé. En ce moment, le ministre semble s'inquiéter,
avec raison, du passage des médecins vers le privé. Mais je vous dirais, Mme la
Présidente, c'est un petit peu comme si le ministre des Finances s'étonnait de
voir de plus en plus de contribuables éviter l'impôt après avoir lui-même créé
des échappatoires. On est un peu devant la situation qui a été créée par le
gouvernement qui est devant nous, c'est-à-dire qu'on n'arrête pas de créer de
nouvelles occasions d'aller travailler dans le privé pour les médecins et
ensuite on s'étonne que, regarde donc ça, ils s'en vont au privé.
Alors, de ça, je vais discuter assurément
et je sais que je ne serai pas le seul. Mais il y a des groupes qui sont très
intéressants à suivre, et on ne se privera pas de faire ce débat-là, parce que,
pour le moment, ça touche qu'une seule partie.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup, M. le député de Rosemont. J'invite maintenant le député des
Îles-de-la-Madeleine à faire ses remarques préliminaires pour une durée d'une
minute et 12 secondes.
M. Arseneau : Merci, Mme la
Présidente. Mes salutations seront brèves, mais je suis heureux d'être ici avec
vous pour reprendre le débat sur le système de santé. Oui, on a passé beaucoup
de temps sur le pl 15, mais je remarque qu'on a un projet de loi pour modifier
le pl 15 qu'on vient tout juste d'adopter. Ce n'est quand même pas rien sur la
gouvernance, les articles 5 et 6 en particulier. Donc, il faut constamment
remettre sur le métier l'ouvrage. Mais, pour aborder le projet de loi en tant
que tel, disons qu'on souscrit à l'objectif de favoriser l'exercice,
évidemment, de la médecine par les médecins formés au Québec, ici, au Québec,
et dans le réseau public. On questionne, par contre, le fait qu'on cible
particulièrement les jeunes médecins diplômés et pas l'ensemble des médecins
qui pratiquent au Québec. Il y a beaucoup de phénomènes externes qu'on ne
touche pas avec ce projet de loi là et, nous, on le sait, on devra élargir un
peu l'éventail des solutions, parce que celles-ci nous semblent très, très
pointues et ne pas nécessairement être applicables de façon si facile qu'on
veut le laisser croire.
Donc, on aura beaucoup de questions à
poser à nos groupes qu'on recevra au cours des prochaines heures.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci,
M. le député. Maintenant, j'invite le député de Saint-Jérôme pour ses remarques
préliminaires pour une durée d'une minute.
M. Chassin :Merci. Bonjour à tous. Évidemment, la ministre l'a dit, c'est
dans un ensemble de mesures qu'il faut consolider le projet de loi dans un
ensemble qui est décrit par le plan santé, qui voulait faire du système de
santé un système plus efficace et plus humain. Et, pour moi, c'est le deuxième,
le deuxième volet qui est particulier. Quand on regarde le projet de loi, on
parle de favoriser l'exercice de la médecine au sein du réseau public. Mais
est-ce qu'on peut parler de favoriser, si le projet de loi oblige tout nouveau
médecin, si on impose aux étudiants et aux résidents? C'est là où j'ai un
questionnement sur le principe. Est-ce qu'on essaie de s'attaquer au symptôme,
finalement, pourquoi les médecins partent du réseau public? J'ai peur qu'on
cherche à éviter un certain nombre de débats, Mme la Présidente, mais je pense
qu'on peut se concentrer sur le projet de loi puis voir que, même là, il y a...
Ce n'est pas juste la carotte, ce n'est pas la carte du tout, ce n'est même pas
le bâton, c'est comme la prison qu'on cherche à exercer. Ça fait que ça, c'est
mon problème. Merci.
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
merci. Nous allons maintenant débuter les auditions. Je souhaite maintenant la
bienvenue aux représentants de la Fédération des médecins omnipraticiens du
Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé,
puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission.
Alors, je vous invite à commencer...
La Présidente (Mme Poulet) : Vous
parlez de votre exposé? Allez-y. La parole est à vous.
M. Amyot (Marc-André) : Merci,
Mme la Présidente. Je suis accompagné aujourd'hui de deux spécialistes en médecine
de famille, le Dr Pierre Martin premier vice-président de la FMOQ et aussi
président de l'Association des médecins omnipraticiens de la Mauricie, et du Dr
Guillaume Charbonneau, à ma droite, deuxième vice-président de la FMOQ, mais
aussi président de l'Association des médecins omnipraticiens de l'Ouest du
Québec. Ça, c'est l'Outaouais. Nous remercions les membres de la commission de
nous recevoir aujourd'hui et de tenir compte de l'expertise des médecins de
famille et de la FMOQ dans l'analyse du projet de loi n° 83.
• (11 h 40) •
D'abord, je vais être bien clair
aujourd'hui, les médecins de famille il y a la FMOQ soutiennent et militent en
faveur d'un système de santé publique accessible, universel et gratuit pour les
patients. Ils rejettent cependant le projet de loi n° 83 qui vise à
obliger les nouveaux médecins de famille à exercer cinq ans dans le réseau
public avant de pouvoir devenir non participant. Le projet de loi ne s'attaque
pas aux véritables causes du manque d'attractivité du réseau public. C'est une
fausse bonne idée et ça va nuire à l'accessibilité. On sait que le gouvernement
cherche des solutions. Nous, ce qu'on souhaite, ce n'est pas cinq ans dans le
public et 25, 30 ans dans le privé. Nous, ce qu'on souhaite, c'est des médecins
de famille qui vont faire l'entièreté de leur carrière dans le réseau public
25, 30, 35 ans et même plus dans le réseau public. La question, pourquoi
les médecins quittent-ils le réseau public? Par dépit, par fatigue
administrative, lourdeur bureaucratique, absence de flexibilité, surcharge de
travail, des conditions de pratique difficiles, manque et mauvaise allocation
des ressources, absence de soutien clinique et administratif, absence
d'intégration des soins qui est un des principaux ingrédients des systèmes de
santé dans le monde qui sont davantage performants que nous.
Les médecins de famille font l'objet de
multiples contraintes les PREM, les AMP. Le ministre dit : Je veux
assouplir. On a... Je veux assouplir les PREM. On a proposé 23 mesures
pour tenter d'assouplir la méthode de PREM et on souhaite continuer de discuter
là-dessus. Mais je vous donne un exemple concret maintenant. Un médecin qui
termine sa formation à Montréal ou à Québec, qui décide de s'installer, qui
souhaiterait s'installer à Montréal parce que son conjoint n'a pas fini sa
formation en médecine ou dans un autre domaine, ou son conjoint travaille,
conjoint, conjointe, travaille à Montréal ou à Québec. S'il n'y a pas de PREM à
Montréal ou à la périphérie, sa seule option, c'est de s'installer soit dans le
privé ou soit dans le réseau public et encaisser une pénalité de 30 % dans
le régime actuel. Alors, vous pouvez avoir l'impression que les médecins de
famille peuvent s'installer où ils veulent et faire ce qu'ils veulent. Vous comprenez
que c'est bien le contraire de ça.
La rémunération et l'appât du gain ne sont
certes pas la première motivation des médecins qui quittent le réseau public.
Et ça, là-dessus, on s'appuie sur des contacts qu'on a eus au comité de
valorisation de la médecine familiale, où on a invité des médecins qui
travaillent dans le privé à nous partager les raisons qui faisaient qu'ils
quittaient le réseau public.
Pourquoi le p. l. n° 83, c'est une
mauvaise solution, une fausse bonne idée? Bien parce que ça envoie un message
négatif. Le p. l. n° 83 traite les symptômes et pas la cause du problème.
Je vous donne un exemple. On est des médecins. On va vous donner des exemples
concrets de patients. Un patient qui tousse, qui crache, qui fait de la fièvre,
on diagnostique une pneumonie chez ce patient-là. Le traitement, c'est des
antibiotiques. Le projet de loi n° 83, il donne des médicaments pour la
fièvre et donne des médicaments pour la toux, mais il ne traitent pas la
pneumonie. Notre patient, c'est le réseau de la santé. Qu'est-ce qui va
arriver? La pneumonie, elle va empirer. Il faut s'attaquer aux causes du
problème. C'est un projet de loi qui est discriminatoire, qui vise seulement
les médecins. Et ça, ça cible 2 % à 5 % des diplômés en médecine de
famille et c'est 15 à 20 médecins par année, ce qui est négligeable face à
la pénurie d'au moins 1 500 médecins de famille au Québec. On veut
donner un accès à un médecin de famille, mais il y a quand même une pénurie
d'au moins 1 500 médecins de famille. Ça, là, au privé, c'est
4 % des médecins, alors que pour d'autres professions, les IPS, les
psychologues, les pharmaciens, ça va jusqu'à 40 % qui travaillent dans le
privé. Puis on a vu encore cette semaine pénurie de pharmaciens. On a vu dans
les semaines précédentes pénurie de psychologues dans le réseau. Nous ne sommes
toutefois pas plus d'accords avec le fond d'un tel projet de loi, quel que soit
le professionnel de la santé visé. Ça compromet l'attractivité de la médecine
familiale...
M. Amyot (Marc-André) : ...ajouter
des contraintes découragera les futurs étudiants en médecine de choisir la
médecine familiale. Je rappelle que, depuis sept ans, c'est au moins 550 postes
de résidence en médecine familiale qui n'ont pas été comblés. Ça amène des
incohérences et un flou juridique. Le projet de loi ne précise pas comment il
va s'appliquer aux médecins en congé parental, en invalidité ou qui exercent
temporairement hors Québec. Comment ça va s'appliquer?
Quelles sont nos solutions? Bien,
abandonner la coercition et valoriser la médecine de famille, cesser le
dénigrement des médecins de famille dans l'espace public, revoir les règles des
PREM et des AMP qui limitent les choix d'installation et de pratique des
médecins, améliorer les conditions de travail, pas seulement pour les médecins,
mais pour tous les autres professionnels de la santé dans le réseau public et
favoriser... et ce message-là, il est universel à tous les partis politiques, à
tous les législateurs, favoriser la collaboration avec la FMOQ, les médecins de
famille et les autres acteurs du réseau plutôt que d'imposer des solutions
unilatérales. Et on vous propose dans notre mémoire, à la 10e
recommandation : adopter un mécanisme de réévaluation des impacts de cette
possible loi sur l'attractivité de la médecine familiale puis produire un bilan
annuel, justement pour s'assurer des effets, qu'ils soient positifs ou
négatifs, et s'assurer qu'on puisse apporter les correctifs.
Je profite de l'occasion qui m'est donnée
aujourd'hui pour vous partager nos grandes préoccupations par rapport à la
propriété des cliniques médicales. Vous avez vu ce qui est arrivé avec les
cliniques ELNA, propriétés d'investisseurs indépendants non médecins? Ça nous
préoccupe énormément. Peut-être qu'il n'y aura pas une catastrophe quand ça va
se régler, mais, à l'heure actuelle, ce n'est que partie remise. Si le problème
se règle avec ELNA, ce n'est que partie remise. Alors, aujourd'hui, on
souhaitait que les législateurs soient sensibilisés à cette problématique-là.
Et le modèle d'affaires des entreprises
non médecins, c'est de faire... c'est de faire des profits. L'objectif en
affaires, c'est de rentabiliser, rentabiliser la clinique médicale. Mais
qu'est-ce que ça a comme risques? Bien, ça risque des fermetures de cliniques qui
sont moins rentables, des pertes de lieux de consultation de proximité pour les
patients, pertes d'accès aux dossiers médicaux pour les patients et les
médecins, exploitation des données médicales à des fins commerciales, pression
sur les médecins pour maximiser le rendement financier.
Nous, ce qu'on propose, c'est de réserver
la propriété des cliniques aux médecins québécois, aux médecins québécois pour
protéger le caractère public du réseau. Au même titre que, pour être
propriétaire d'une pharmacie, il faut être pharmacien, pour être propriétaire
d'une clinique de radiologie, il faut être radiologiste, pourquoi alors, pour
être propriétaire d'une clinique médicale, tout le monde peut être propriétaire
d'une clinique médicale? Qu'est-ce qui nous protège d'investisseurs
américains... venir investir dans des cliniques médicales au Québec, alors que
ce qui nous distingue au Canada, au Québec, par rapport aux États-Unis, une des
grandes distinctions, c'est notre réseau de la santé. Protégeons-nous contre ce
risque-là.
En conclusion... Je suis pas pire dans mon
temps. En conclusion, projet de loi n° 83, c'est une réponse politique
inadéquate. On traite des symptômes sans s'adresser à la source du problème et
on dévie l'attention des vrais problèmes du réseau. Le gouvernement fait une
erreur de diagnostic et, par le fait même, une erreur de traitement. Il ne fera
qu'aggraver la crise d'attractivité en médecine familiale. La FMOQ propose des
solutions basées sur l'amélioration des conditions de pratiques et la collaboration
plutôt que la coercition. Et je le répète, et je le répète, les médecins de
famille et la FMOQ sont totalement en faveur d'un régime de santé public, mais
ils ont besoin du bon diagnostic pour appliquer le bon plan de traitement.
Et, concernant la propriété des cliniques
médicales, je vous exhorte et... je vous exhorte de prévoir, dans le projet de
loi n° 83, un mécanisme qui ferait, comme pour les pharmacies ou les cliniques
de radiologie, que la propriété des cliniques médicales appartienne majoritairement
à des médecins. Ce ne serait pas arrivé, ce qui est arrivé aux cliniques ELNA
avant Noël et qui met en péril des lieux de consultation pour les patients, si
ces cliniques-là avaient été la propriété des médecins. Pourquoi? Parce que
l'objectif d'un médecin, ce n'est pas de faire de l'argent avec la clinique
médicale, c'est de...
M. Amyot (Marc-André) : ...un
lieu de pratique où il va pouvoir dire...
La Présidente (Mme Poulet) : Je
vous remercie. Je m'excuse de vous interrompre...
M. Amyot (Marc-André) : ...offrir
des services à la population. Merci.
La Présidente (Mme Poulet) : ...votre
période est terminée. Alors, je vous remercie de votre exposé. Nous allons
maintenant commencer la période d'échange. M. le ministre, la période... la
parole est à vous pour une période de 14 minutes et 30 secondes.
M. Dubé : Très bien. Alors,
encore une fois, bienvenue, docteur Amyot, et à vos collègues, là, qu'on
rencontre quand même assez régulièrement. J'aimerais peut-être, avant de passer
la parole à mes collègues députés, rappeler aux Québécois deux choses. Dans mon
introduction, tout à l'heure, j'ai bien dit... Puis je vais employer votre
expression, vous parlez de médicaments versus de traitements, versus de bien
comprendre. J'ai bien expliqué, docteur Amyot, qu'on a posé plusieurs gestes,
au cours des dernières années, qui font partie du traitement. J'ai bien
expliqué aussi que le projet de loi n° 83 n'était pas la seule mesure.
• (11 h 50) •
Alors, aujourd'hui, de dire... Puis je
vous donne un exemple, là, je vous donne un exemple. Vous me dites :
J'aimerais rappeler qu'il faut simplifier le processus de PREM. Ça fait deux
ans qu'on a commencé à simplifier le processus de PREM. Vous avez demandé à un
groupe de travail qu'on a mis en place, là, ils ont fini les recommandations,
des recommandations ont été proposées. Je vous ai vu cette semaine puis je vous
ai dit qu'on va le sortir. Ça répond exactement à votre demande. Ça fait que je
voudrais juste que les Québécois comprennent que ce que vous venez de dire
n'est pas tout à fait exact. Il y a plusieurs mesures, il y a plusieurs
traitements qu'on a faits, au cours des dernières années, qui vont dans ce
sens-là, et je pense au GAP, je peux vous donner une foule de mesures. Alors,
de venir dire qu'on ne fait que de faire de la coercition, j'ai un petit
problème avec ça. Alors, on va prendre le temps de répondre à vos questions,
mais je voulais faire cette précision-là.
Maintenant, sur la question de la
propriété des GMF, quand on s'est rencontré, je vous ai dit que j'avais
beaucoup d'ouverture à questionner ça. Alors, oui, on a fait des choses, oui,
on est ouvert à faire d'autres choses, mais, aujourd'hui, je veux vous entendre
sur la proposition qui est là. Il y a plusieurs groupes, il y a plusieurs
groupes qui ont fait des recommandations spécifiques. Je ne vous entends pas
là-dessus, je ne vous entends pas. Alors, je vais laisser mes collègues poser
des questions par rapport aux recommandations qui viennent d'autres groupes,
mais de dire aujourd'hui qu'on n'a rien fait puis qu'on est contre la médecine
familiale, j'ai un gros problème avec ça.
Alors, vous pouvez garder ce discours-là,
aucun problème avec ça, mais je voudrais dire aux Québécois que c'est faux,
c'est très faux. Alors, je laisse la parole à mes collègues.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
merci. Mme la députée de Bonaventure, la parole est à vous.
Mme Blouin : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Alors, bonjour, tout le monde, bonjour à vous. Merci d'être
avec nous aujourd'hui. Il y a certains éléments, comme le souligne le ministre,
qui suscitent ma curiosité. En fait, j'aimerais savoir... J'imagine que vous
avez entendu qu'il y a une majorité de Québécois qui appuient le projet de loi,
une majorité de Québécois qui inclut plusieurs groupes, dont le Collège des
médecins, Collège des médecins qui trouve qu'on ne va pas assez loin aussi avec
ce projet de loi là, tout comme l'article dans La Presse de ce matin, dont le
ministre faisait mention tout à l'heure. Alors, ça pique ma curiosité, à
savoir : Comment est-ce que vous expliquez une position si opposée des
différents groupes dont le Collège des médecins?
M. Amyot (Marc-André) : Bien,
je vous dirais, le ministre a dit : Il y a 2 300 médecins qui ont été
formés au Québec, qui sont partis à l'extérieur. Il doit avoir une raison pour
laquelle ils sont partis à l'extérieur, ça doit être que les conditions de
pratique ailleurs sont plus intéressantes qu'au Québec. Et je n'ai jamais dit
que le gouvernement n'avait rien fait, au contraire, on reconnaît que le
ministre a augmenté le nombre d'étudiants... des cohortes d'étudiants en
médecine, et ça, on le salue, encore faut-il qu'il choisisse la médecine
familiale. Et quand je vous dis les obligations auxquelles font face les
médecins de famille, elles sont considérables, ces obligations-là, et elles ont
un effet rebutant auprès des étudiants en médecine. Alors, je vous ai donné
l'exemple qu'un médecin ne pouvait pas s'installer à Montréal, s'il n'y avait
pas de PREM. On a beaucoup de médecins qui souhaiteraient revenir au Québec, de
l'extérieur de l'Ontario, qui ont été formés. Mais, s'ils n'ont pas de PREM à
Montréal, ils ne peuvent pas revenir ici ou bien faire l'objet d'une pénurie en
Outaouais. Je peux te laisser aller, Guillaume. Il est de l'Outaouais, il est à
la frontière de l'Ontario.
M. Charbonneau (Guillaume) : Parce
qu'on s'entend qu'on manque de médecins partout au Canada. Nous, on essaie
d'attirer les médecins de l'extérieur pour qu'ils viennent renforcer nos
troupes. Puis on arrive à en convaincre, mais un des défis qu'on a -ces gens-là
ont plusieurs options - on les convint de venir en Outaouais, puis là, après
ça, ils découvrent qu'en plus, il y a des PREM, qu'il y a d'AMP, des contraintes
qu'ils n'ont pas dans leurs autres choix...
M. Charbonneau (Guillaume) : ...c'est
la réputation qu'on a dans le reste du Canada, auprès des médecins, c'est qu'au
Québec il y a beaucoup de contraintes, c'est compliqué, de s'installer au
Québec. Donc, il faut faire attention, quand on en rajoute.
Puis peut-être une chose de plus, parce
que je pense que l'intention est bonne, là, il y a un certain consensus de dire
que c'est une bonne idée, on veut améliorer l'accès, mais est-ce que ce projet
de loi là va vraiment améliorer l'accès? Vous rencontrerez les étudiants, tout
à l'heure, là... Là, on parle de contraintes, l'ensemble des étudiants...
M. Dubé : Si vous me
permettez, c'est parce que je veux avoir le temps de poser des questions, parce
qu'on...
M. Charbonneau (Guillaume) : Mais
on va donner une mauvaise réputation du système public auprès des étudiants en
médecine. Vous allez les rencontrer tout à l'heure.
M. Dubé : O.K., mais je vais
revenir parce que je regarde les intervenants, là... Vous me dites ceux qui
sont d'accord avec votre position. Moi, je vous demande ceux qui sont en
désaccord avec ma position puis je vous donne un exemple : Pourquoi on
fait, dans certaines provinces, puis c'est clair que... l'interdiction d'aller
au privé pour les médecins. Alors, quand vous me faites la comparaison avec
l'Ontario ou des médecins qui s'en vont, expliquez-moi pourquoi il y a des gens
qui nous font cette recommandation-là puis que vous... ça qu'on vous
demande : Pourquoi nous, dans notre projet de loi ou dans les règlements,
on ne devrait pas prendre en compte ces recommandations, comme celle de
l'interdiction d'aller pratiquer au privé? J'aimerais vous entendre sur ce
point spécifique là.
M. Amyot (Marc-André) : Ils
n'ont pas de PREM, ils n'ont pas d'AMP.
M. Dubé : Ce n'est pas ça, la
question.
M. Amyot (Marc-André) : C'est
des mesures incitatives en Ontario.
M. Dubé : Ce n'est pas ça, la
question.
M. Amyot (Marc-André) : C'est
ce qui la rend très attractive.
M. Dubé : ...vous. Je
dis : Est-ce que c'est clair pour les Québécois que, dans la plupart des
provinces, il y a une interdiction d'aller au privé? Est-ce que vous êtes
d'accord avec ça?
M. Amyot (Marc-André) : C'est
clair. Dans certaines provinces, vous l'avez dit notamment l'Ontario, mais en
contrepartie de ça...
M. Dubé : Voilà, oui. Puis
c'est avec ça que l'Outaouais est en compétition.
M. Amyot (Marc-André) : ...ils
ont... ils n'ont pas de...
La Présidente (Mme Poulet) : ...interrompre,
je m'excuse de vous interrompre. Pour le Journal des débats, la transcription,
j'aimerais ça qu'une seule personne à la fois puisse parler.
M. Dubé : Alors, je voulais
juste finir ma question. Je veux laisser aux députés la chance de vous poser
les questions par rapport aux recommandations qui sont faites parce que moi, ce
que j'entends beaucoup depuis qu'on a déposé le projet de loi, l'automne
dernier... les gens vous disent : Vous n'allez pas assez loin. Je peux comprendre
que la fédération médicale dise ce que vous dites, ce matin, je respecte ça,
mais ce que je vous dis : Laissez poser la question, prenez le temps de
dire spécifiquement, sur les quatre commentaires qui nous viennent de certains
groupes comme le Collège des médecins, comme l'Institut Cyrano, comme le groupe
de médecine qui demande la pratique au public. Répondez à cette question-là,
s'il vous plaît.
M. Amyot (Marc-André) : Bien,
vous me demandez de commenter pourquoi ces gens-là sont favorables. Je vais les
laisser vous l'exprimer, je ne peux pas m'exprimer pour eux, mais vous
dites : La fédération... Je vous rappelle que ce n'est pas la fédération,
ce sont les 10 000 médecins de famille, aujourd'hui, qui vous disent ça, là. Ce
n'est pas juste la fédération.
M. Dubé : ...sont d'accord
avec ça, vous me dites, là.
M. Amyot (Marc-André) : Oui,
bien, majoritairement. Vous pouvez trouver des exceptions, M. le ministre, ça,
c'est évident.
M. Dubé : ...laisser les
députés continuer avec leurs questions, docteur.
La Présidente (Mme Poulet) : Mme
la députée de Bonaventure. Et je rappelle, pour ceux et celles qui travaillent
à la retranscription, on va leur faciliter la tâche : une seule personne
parle à la fois, s'il vous plaît.
Mme Blouin : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Alors, comme le ministre le disait, on utilise cette
commission-là pour entendre les propositions, parce qu'on le répète, ce projet
de loi là, c'est une mesure parmi un ensemble de mesures. Certaines personnes
trouvent qu'on ne va pas assez loin. Donc, j'aimerais vous entendre sur quelles
sont les autres mesures, quels sont les autres gestes qu'on doit envisager,
outre ceux qui sont déjà en place ou en voie d'être réalisés pour favoriser la
médecine publique.
M. Amyot (Marc-André) : Revoir
le modèle d'organisation dans un contexte de pénurie de 1500 médecins de
famille. Je vous ai parlé tantôt de l'intégration des soins. Il y a trois
ingrédients, dans les juridictions, à travers le monde qui ont des systèmes de
santé davantage performants, trois ingrédients, je vous les nomme :
l'interprofessionnalisme... On est là, on travaille avec d'autres
professionnels. Les GMF contiennent, là, des travailleurs sociaux, des
infirmières, des psychologues. Encore faut-il que les CISSS fournissent ce
personnel-là. Donc, l'interprofessionnalisme, l'intégration des soins... et
l'intégration des soins, ça ne veut pas dire intégrer l'information. Le DSM va
intégrer l'information, mais la trajectoire de soins des patients n'est pas
bien définie, au Québec. Et la gouvernance médicale en première ligne... Puis,
en première ligne, ce n'est pas une dépense que vous faites. Quand le
gouvernement investit de l'argent en première ligne, il y a moins de
complications. Il y a moins d'hospitalisations, moins de visites à l'urgence
quand les patients sont bien pris en charge. Mais, encore une fois, je le
rappelle, on vit avec une pénurie de 1500 médecins de famille, alors il faut
trouver ensemble des adaptations.
Et moi, je vous offre, le gouvernement, le
ministère, tous les gens impliqués, la collaboration entière des médecins de
famille pour améliorer ce modèle...
M. Amyot (Marc-André) : ...d'organisation
là.
M. Dubé : ...aller un petit
peu plus loin. Vous venez de donner un exemple, là, très concret, qui prouve
mon point de ce matin : les autres mesures qui sont en cours, dont
j'aimerais parler. On vous a demandé d'embarquer avec nous dans une
redéfinition de la première ligne pour aller plus loin que le GAP. Je veux
avoir votre commentaire. Alors, je vous dis : Est-ce qu'il y a une
amélioration de la première ligne qu'on peut faire? Définitivement. On a
demandé à un groupe d'experts de venir compléter. On a demandé...
Alors, moi, je vous demande encore une
fois d'être très, très transparent. Il y a plusieurs mesures qui sont en cours,
il y en a qu'on a faites, il y a des mesures qui sont en cours, on est à la
même place. Mais ce n'est pas ça que je vous demande, moi. Je vous demande, ce
matin, là, quand j'entends des recommandations... Puis là j'en donne une autre.
Là, on disait : l'interdiction de pratique. Dites-moi ce que vous pensez,
par exemple, d'une des recommandations, d'éviter le va-et-vient entre le privé
et le public. Quelle est votre opinion là-dessus?
• (12 heures) •
M. Amyot (Marc-André) : Bien,
notre opinion d'encadrer davantage ça, elle est... elle est favorable.
M. Dubé : ...quoi, ça? Je
veux juste être sûr que, quand vous me dites «favorable»... Ça veut dire quoi,
dans la pratique? Que vous seriez prêt à interdire le va-et-vient?
M. Amyot (Marc-André) : De
bien encadrer le va-et-vient.
M. Dubé : ...c'en est déjà
une des quatre, là, où vous avez une certaine ouverture, d'encadrer?
M. Amyot (Marc-André) : D'encadrer
et de s'assurer que ça soit... ça ne soit pas une utilisation... une mauvaise
utilisation des ressources. Voilà ce que je veux dire.
M. Dubé : ...maintenant, une
des...
M. Amyot (Marc-André) : Et
souvent les...
M. Dubé : Oui?
M. Amyot (Marc-André) : Pardon.
Allez-y. Excusez.
M. Dubé : Merci. Non, c'est
parce que c'est tellement intéressant que je regarde les nombres de minutes qui
nous restent. Catherine, veux-tu y aller? Ou j'en ai une autre, moi, qui me
brûle les lèvres, là.
Mme Blouin : Allez-y,
allez-y.
M. Dubé : Dans d'autres
provinces, on a parlé tout à l'heure de l'interdiction de pratique au privé,
mais il y a aussi beaucoup plus de similitudes ou de parité entre les tarifs
qui sont chargés par ceux qui sont au privé. Qu'est-ce que vous pensez de ça,
de jouer... d'attaquer peut-être cette différence-là qui est importante? Le
député de Rosemont en a souvent parlé. Qu'est-ce que vous pensez de... Parce
que c'est une des recommandations des autres groupes.
M. Amyot (Marc-André) : Je
donne l'exemple de l'Ontario. Plutôt que d'utiliser une méthode coercitive
comme au Québec...
M. Dubé : ...
M. Amyot (Marc-André) : ...ils
ont... ils ont utilisé... Bien, c'est le constat, puis c'est la réputation qu'on
a quand je discute. Vous avez des rencontres avec vos homologues des autres
provinces, bien, j'ai des rencontres aussi avec des homologues des autres
provinces, et c'est le constat qu'on a.
M. Dubé : ...je m'excuse, là,
mais je vous ai posé...
M. Amyot (Marc-André) : Mais,
en Ontario...
M. Dubé : Qu'est-ce que vous
pensez de réduire l'écart entre les tarifs au privé versus au public? Question
très claire.
M. Amyot (Marc-André) : Nous,
ce qu'on dit, c'est : Il faut s'attaquer à la source du problème. Encore
là, s'attaquer à la différentielle, c'est s'attaquer au symptôme et pas à la
source du problème. En Ontario, plutôt que mettre une loi coercitive, ils
sont... ils ont... ils ont mis des bourses pour favoriser que les étudiants en
médecine restent en Ontario. Ça, ça aurait été une avenue qu'on aurait saluée.
Et, si vous souhaitez mettre cette condition-là dans le projet de loi...
M. Dubé : ...qu'on paie déjà
beaucoup plus les étudiants en médecine pour aller pratiquer en région qu'en
ville. Il y a déjà des différences très importantes. Juste qu'on se le dise.
M. Amyot (Marc-André) : Les
étudiants en médecine ou les...
M. Dubé : Bien, les gens qui
vont pratiquer en région, ils ont des primes de rémunération pour être en
région. C'en est une, ça. C'en est une, différence importante, là.
M. Charbonneau (Guillaume) : C'est
vrai, mais il y a des... il y a des bourses d'installation qui ont été enlevées
depuis une dizaine d'années qui nous aidaient à recruter dans les territoires
éloignés, où on a beaucoup de misère à recruter.
M. Dubé : ...était très
claire. Êtes-vous pour ou contre une plus grande similitude entre les tarifs au
public puis au privé? Question...
M. Amyot (Marc-André) : On
milite, encore une fois, en faveur de s'attaquer à la problématique plutôt
qu'au symptôme.
M. Dubé : O.K., je vais
prendre ça comme une non-réponse. Merci beaucoup. Très bien. Merci.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
il reste 26 secondes.
M. Dubé :
Vas-y, Catherine.
Mme Blouin : ...en fait, on
utilise cette tribune-là pour parfaire les projets de loi et compagnie. Donc,
je n'ai pas beaucoup de temps, mais j'aimerais vous entendre à savoir quels
groupes devaient être exemptés de cette... de l'obligation de pratique. Par
exemple, pour nous, c'est clair que les forces armées, ça serait exempté de
l'obligation de pratique. Quels seraient les groupes, à votre avis, qu'on
devrait exempter?
M. Amyot (Marc-André) : Tous
les groupes. Tous les médecins.
Mme Blouin : Parfait.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. Alors, maintenant, je cède la parole à la députée de La Pinière pour
une période de...
12 h (version non révisée)
La Présidente (Mme Poulet) : ...min
32 s.
Mme Caron : Merci, Mme la
Présidente. Alors, merci pour votre exposé.
Alors, le ministre souhaite que le réseau
soit un employeur de choix. Je comprends que, d'après votre exposé et votre mémoire,
que vous trouvez que la mesure qui est introduite dans le projet de loi est
coercitive et va avoir des effets contre-productifs. En même temps, on peut
voir que dans la population, du point de vue du citoyen, ça semble être quelque
chose qui pourrait être bon parce que les citoyens veulent avoir des médecins.
C'est l'objectif de tout le monde ici. Mais ce que je vous demanderais, c'est...
On comprend que vous trouvez que les causes véritables... on ne s'attaque pas
aux causes véritables pour avoir un milieu de travail intéressant. Maintenant,
pouvez-vous dire dans un langage que M. et Mme Tout-le-monde va comprendre
quelles seraient les causes, là, véritables, pratico-pratiques auxquelles on
pourrait s'attaquer pour atteindre l'objectif du projet de loi et qui feraient
en sorte qu'on n'aurait pas besoin d'une telle mesure?
M. Amyot (Marc-André) : Bien,
je peux peut-être mentionner... puis je te laisserai la parole, là, mais le
soutien à la pratique. Dans les GMF, là, il y a des contrats. Les médecins s'engagent
par contrat à fournir des services, à prendre un certain nombre de patients en
charge, à donner de l'accessibilité en fonction des heures d'ouverture. De l'autre
côté, le CISSS signe un contrat qui garantit... On va vous fournir des infirmières,
des travailleurs sociaux, des psychologues pour donner un meilleur accès à la
population en première ligne. Vous seriez abasourdis de voir le nombre de ces
professionnels-là qui n'arrivent jamais dans les GMF. On a toujours l'impression
qu'il y a une partie qui ne respecte pas sa partie du contrat.
Je peux peut-être, Pierre, te...
M. Martin (Pierre) : Écoutez,
je vais vous raconter une anecdote, parce qu'actuellement moi, je... En
passant, quand M. le ministre nous dit : Je veux améliorer l'accès, on est
là, là. On est vraiment là. Et on... Dans les dernières années, on a fait
beaucoup de gains organisationnels en travaillant en multidisciplinarité. La
seule chose, c'est qu'il y a... le bât blesse à plusieurs endroits,
actuellement.
Première des choses, on n'a pas un
financement qui nous permet d'optimiser vraiment les ressources, les ressources
organisationnelles de la clinique. Présentement, je suis en train de mettre sur
pied une clinique avec des espaces de travail interdisciplinaires, avec une
infrastructure de 12 500 pieds carrés, alors 12 500 pieds
carrés, ça représente quand même beaucoup de sous en termes d'améliorations
locatives. Le seul appui financier que je peux avoir du réseau, c'est 60 000 $.
Alors, vous comprenez que déjà ça, on se dit : Est-ce qu'on est dans le
bon... dans le bon véhicule pour améliorer l'accès?
Deuxième des choses, on a un ratio
médecin-professionnel qui est trop faible présentement dans le cadre GMF.
Alors, nos médecins, ce qu'ils nous disent, c'est : Est-ce qu'on
pourrait... Est-ce qu'on ne serait pas mieux servis par nous-mêmes?
Et, moi, je représente un groupe de
médecins qui ont entre huit et 40 ans de pratique. Et ils vont se réunir
dans une semaine. Et l'une des questions qu'ils vont se poser, c'est : Est-ce
qu'on continue encore dans le réseau public? On ne parle pas des jeunes
docteurs, là, on parle de médecins qui ont à cœur de donner de l'accès puis qui
se rendent compte qu'année après année les promesses ne sont pas là, les... On
nous avait promis plus d'effectifs, on ne les a pas. Les effectifs qu'on a,
professionnels, pour venir travailler dans les GMF, sont vampirisés par l'établissement.
À la minute qu'il y a un manque dans l'établissement, ils viennent les
chercher. Alors, on n'est pas capables de bâtir quelque chose de stable. Et, en
travail multidisciplinaire, il faut former le personnel. Et, quand on les forme
puis qu'on les perd puis on recommence, ça devient frustrant. Alors, une des
façons qu'on a de regarder ça, c'est véritablement d'aller vers le privé et
aller chercher le financement auprès de nos usagers.
Ceci étant dit, ce que l'on craint dans
les paroles qu'on entend avec le projet de loi n° 83, c'est qu'on rende...
au lieu de rendre le réseau public attractif puis faire en sorte que les
médecins vont vouloir venir y travailler, c'est qu'on veut imposer la pauvreté
à tout le monde sur le plan national. Et, ça, on craint ça. Puis je vais vous
dire qu'on dit : Est-ce que c'est le point de départ? Il y a des gens qui
se disent : Sauvons-nous tout de suite, on n'aura... on ne pourra
peut-être pas le faire plus tard. Alors, vous comprenez qu'à un moment donné,
ce projet de loi là introduit beaucoup de réflexion chez nos médecins sur le
terrain, puis pas seulement sur les jeunes. La seule chose, c'est qu'en termes
d'attraction, pour avoir une relève, pour attirer des jeunes docteurs, bien, le
projet de loi nous met un petit peu de bâtons dans les roues, là. Mais
peut-être saurons-nous attirer des médecins qui ont plus que cinq ans de
pratique parce qu'ils vont voir dans notre organisation quelque chose qui est
performant puis qui ne sera pas assujetti à des programmes qui changent à
toutes les années. Le programme GMF, c'est quelque chose sur lequel tu ne peux
pas te fier parce qu'à tous les ans ça change. Et ça, pour un organisateur de
services, quelque chose excessivement démotivant. Et ça fait en sorte aussi que
ça nuit à la créativité parce qu'on est toujours en...
M. Martin (Pierre) : ...en
attente. Est-ce qu'on le fait? Parce que, si on le fait, ça va-tu suivre après?
Et, à un moment donné, on décide de ne pas le faire.
D'autre part, les activités médicales
imposées aux médecins, c'est une vampirisation de nos ressources médicales
contre la première ligne. Et ça, année après année, depuis les événements
malheureux de 2002 qui s'étaient passés à Shawinigan, on pensait qu'on serait
sur un régime temporaire, parce qu'éventuellement on aurait les effectifs
nécessaires pour ne pas se faire vampiriser tout le temps par les
établissements. Mais, actuellement, qu'on parle que c'est 12 heures par
semaine, l'équivalent de... mais ce n'est jamais ça. Moi, j'ai un médecin, il
travaille en CHSLD, il est tellement obligé d'aller en CHSLD qu'il n'a plus le
temps pour voir ses patients, puis il faut qu'on gère les crises auprès de ses
patients. Puis ce n'est pas parce qu'il ne veut pas. Alors, à quelque part, si
ce médecin-là décide de suivre la vague, d'aller vers le privé, il va pouvoir
enfin libérer le temps nécessaire pour voir ses patients qu'il a dûment
inscrits.
• (12 h 10) •
Puis, vous savez, nous autres, notre
marché, à Trois-Rivières, c'est quoi? Nous, on... on donne des services à
25 000 de population, on est 10 docteurs, et il y en a 54 000 sur le
guichet. Alors, écoutez bien, là, je veux dire, on a de l'ouvrage à faire pour
améliorer cet accès-là. On veut être capables d'accueillir plusieurs
professionnels, et le réseau public, présentement, ne nous le permet pas.
Alors, laissez-nous au moins la soupape du privé pour être capables de rencontrer
nos objectifs.
Mme Caron : Merci. Alors, je
ne suis pas certaine que M. et Mme Tout-le-monde aient compris concrètement
tout ce que vous avez expliqué, mais les... les sources, les causes... les
causes du problème du... tu sais, concrètement, qu'est-ce qu'on pourrait faire
au lieu d'avoir une mesure coercitive, je ne suis pas certaine que... d'avoir
compris. Peut-être que vous pourrez nous en dire plus.
J'ai aussi compris que les... les PREM,
les AMP amènent des... des difficultés dans l'organisation et dans la pratique,
mais, en même temps, qu'est-ce qu'on a d'autre pour s'assurer que non seulement
les... les professionnels, les médecins vont pratiquer en région, mais ne vont
pas laisser, comme ça s'est passé par... par le passé, un secteur, admettons,
plus défavorisé de Montréal? On donnait l'exemple, tantôt, d'un conjoint qui
est à Montréal, et le médecin doit aller pratiquer ailleurs. Mais il y avait
des secteurs de Montréal où c'était plus défavorisé, il n'y avait pas de
médecin. Alors, est-ce qu'il y a des... est-ce qu'il y a des... des solutions à
ça qui seraient... qui... qui fonctionneraient, qui seraient attractives pour
les jeunes médecins?
La Présidente (Mme Poulet) : Il
reste deux secondes.
M. Amyot (Marc-André) : ...
La Présidente (Mme Poulet) : Je
m'excuse, j'ai... c'est tout le temps qu'on a pour l'opposition officielle.
Maintenant, je cède la parole au député de Rosemont pour une période de
2 min 31 s.
M. Marissal : Merci.
Bienvenue. Encore une fois, on va aller rapidement là. Je... je note, au
passage, que le ministre a dérogé à sa propre demande et il a largement
bifurqué de l'objet premier de ce projet de loi. Cela dit, s'il veut parler des
tarifs privés et publics, il trouvera un interlocuteur intéressé en ma
personne. Mais j'avais compris que ce n'est pas de ça dont il voulait parler
ici aujourd'hui.
Alors, on va revenir à nos moutons,
là : Il y a combien de membres, de jeunes membres de vos cohortes, dans
les deux dernières années, qui sont allés directement au privé?
M. Amyot (Marc-André) : 20
médecins par année, 20 médecins de famille par année.
M. Marissal : 20 médecins, 20
médecins par année. O.K. Là, je n'ai pas beaucoup de temps, ça fait que je vais
y aller directement. Vous êtes un syndicat. Un syndicat, ça représente des
membres. Vos gens paient des cotisations, ils s'attendent à ce que vous
défendiez des mandats que vous... que les membres vous donnent. Moi, je vois
des problèmes... Suivez-moi. Moi, je vois des problèmes légaux, juridiques,
voire constitutionnels dans ce projet de loi là. Ce n'est pas pour rien que le
premier ministre lui-même, alors qu'on ne lui avait même pas demandé, a évoqué
l'utilisation de la clause dérogatoire. Le gouvernement a choisi de ne pas
aller là. Mais si vos membres vous donnent le mandat, notamment, de défendre la
mobilité des personnes, vous n'avez pas bien, bien d'autre choix que de les
défendre. Donc, on se dirige vers une autre... un autre... une autre partie de
bras de fer, y compris juridique?
M. Amyot (Marc-André) : En
passant, permettez-moi de rectifier. Vous dites : On est un syndicat. On
est un regroupement de médecins. Ça... ça ne répond pas à la définition
textuelle d'un syndicat. Cela dit...
M. Marissal : Je comprends,
mais les gens qui paient des cotisations s'attendent à ce que vous les
défendiez, et ces gens-là vont peut-être demander à ce que vous les défendiez.
M. Amyot (Marc-André) : La
réponse, oui, courte, oui. Mais on parle actuellement de diminuer les barrières
tarifaires entre les différentes provinces, de permettre une meilleure
circulation. Là, ce qu'on fait, c'est davantage de protectionnisme pour obliger
nos médecins formés ici à rester ici et... et les empêcher d'aller à
l'extérieur.
M. Marissal : ...c'est
philosophique. J'aime beaucoup, beaucoup la philosophie, mais je n'ai pas le
temps en 2 min 31 s. Légalement, là, est-ce que vous êtes prêts
à aller défendre ça devant les tribunaux?
M. Amyot (Marc-André) : On va
faire l'analyse de la situation quand le projet de loi va être terminé.
Peut-être que le projet de loi va être retiré, puis on n'aura...
M. Amyot (Marc-André) : ...besoin
d'aller là. Alors, je n'irai pas dans les situations hypothétiques.
M. Charbonneau (Guillaume) : Puis
peut-être dire, nos membres qu travaillent dans le public, veulent un système
public fort. Les étudiants en médecine, la grande majorité veulent travailler
dans le public. Puis le message qu'on leur envoie, là, c'est que le système
public est tellement mauvais, tellement mauvais employeur, qu'on va être obligé
de vous forcer pour...
La Présidente (Mme Poulet) : Merci.
Je dois vous interrompre. Je m'excuse. Maintenant, je dois céder la parole au
député des Îles-de-la-Madeleine pour une période de deux minutes 31 secondes.
M. Arseneau : ...c'est court.
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je vous salue et j'aimerais vous poser deux
questions brèves, avec des réponses qui seront également, je l'espère, mais le
plus complet... possible. Vous dites essentiellement que... Nous, on veut
améliorer la situation. On a l'impression et on a la conviction que les
Québécois n'en ont pas pour leur argent dans l'investissement qu'ils font dans
le système d'éducation, en particulier pour les médecins, mais pour les autres
professionnels de la santé, à la limite, on pourrait aussi l'étendre. Il faut
faire quelque chose. Les Québécois veulent qu'on agisse. Le gouvernement agit,
on dit : Bon, bravo! Est-ce qu'il agit favorablement et de façon
constructive? Vous dites : Non, ça va. Le aggraver la pénurie de
main-d'oeuvre. Est-ce que vous pouvez nous le démontrer? Si oui, on va voter
contre ce projet de loi là.
M. Amyot (Marc-André) : Bien,
vous dites : Les Québécois n'en ont pas pour leur argent, on est d'accord
avec ça, mais pas à cause de la rémunération médicale. Le budget de la santé
est passé de 40 à 60 milliards. L'enveloppe de rémunération des médecins de
famille, est-ce qu'elle a augmenté pendant ce temps-là? Non, zéro. Combien de
cadres supplémentaires sont arrivés dans les cinq dernières années? Est-ce que
ça, ça donne des services aux patients, ça, ces cadres...
M. Arseneau : ...pour les
médecins, pour d'autres juridictions, qui quittent pour le privé puis qui
facturent une deuxième fois, alors que les contribuables ont payé chèrement
pour le système de santé à 60 milliards, on n'en a pas pour notre argent,
c'est ce qu'on pense. Est-ce que ça va aggraver la situation, le projet de loi?
M. Amyot (Marc-André) : Tout
à fait.
M. Arseneau : Comment?
M. Amyot (Marc-André) : Rajouter...
rajouter 1500 médecins de famille de plus au Québec, il n'y en a plus, de
privé, parce qu'ils vont aller au public.
M. Arseneau : ...quel est
l'impact négatif, l'effet pervers que vous voulez dénoncer?
M. Amyot (Marc-André) : Bien,
comme Dr Charbonneau disait, le système n'est tellement pas attractif, que la
façon de vous le démontrer qu'il n'est pas attractif, c'est...
M. Arseneau : ...moins
attractif avec ce projet de loi là?
M. Amyot (Marc-André) : Il va
l'être moins parce qu'on ne s'attaquera pas au vrai problème, on...
M. Arseneau : Alors, comment
est-ce qu'on y perd?
M. Charbonneau (Guillaume) : Mais
si les médecins ne sont tellement pas intéressés à travailler dans le système
public, au moins... On n'est pas en faveur du privé, mais, au moins, quand ils
vont dans le privé, ils donnent des services à des patients. Leur autre
alternative, ça peut être d'aller travailler en esthétique, ça peut être
d'aller travailler pour un autre employeur. On ne va pas les emprisonner, ces
gens-là. Puis il y a des gens qui trouvent que le système n'est tellement pas
intéressant qu'ils se font des groupes Facebook pour se trouver d'autres
emplois ailleurs. On ne va pas les emprisonner, les médecins...
M. Arseneau : C'est au-delà
du délai de cinq ans... Après cinq ans, c'est la débandade, c'est ce qu'on nous
disait.
M. Charbonneau (Guillaume) : ...on
n'attaque pas les problèmes d'attractivité de notre système public.
M. Arseneau : Au delà du
délai de cinq ans qu'on veut imposer, c'est ça?
M. Charbonneau (Guillaume) : Oui.
M. Arseneau : D'accord.
Merci.
M. Charbonneau (Guillaume) : Puis,
après être enfermé pendant cinq ans, la première chose qu'on fait, bien, on se
libère, on envoie un mauvais message à des gens qui ne le font pas
habituellement.
M. Arseneau : Merci
beaucoup...
La Présidente (Mme Poulet) : Merci.
Alors, je cède maintenant la parole au député de Saint-Jérôme pour une période
d'une minute 56 secondes.
M. Chassin :Moi aussi, je vais aller vite. Merci. Le ministre a parlé
d'un comité qui a... qui s'est penché, en fait, sur les PREM et qui lui a
remis... ses recommandations. Avez-vous eu connaissance du rapport, vous?
M. Amyot (Marc-André) : On a
eu connaissance du rapport et on est loin de la coupe aux lèvres, des 23
recommandations qu'on avait présentées au ministre et... Tout à fait.
M. Chassin :Je vais rapidement quand même. Il y a un aspect la
propriété des cliniques que vous abordez. Est-ce qu'il y a des cliniques, de
propriétés de médecins, de GMF, est-ce qu'il y en a qui ont fermé leurs portes
ces dernières années?
M. Amyot (Marc-André) : Bien
oui, il y en a qui ont fermé leurs portes, parce que certaines cliniques
avaient plusieurs médecins âgés qui prenaient leur retraite...
M. Chassin :Mais ce n'est pas toujours... En fait, ce n'est pas juste
parce que c'est privé que ça ferme. Des fois, il y a des circonstances qui
peuvent faire qu'une clinique ferme, même si c'est propriété...
M. Amyot (Marc-André) : Il y
a des circonstances de rationalisation où on a une tendance à concentrer dans
des grosses cliniques. Alors, l'important de garder les cliniques de
proximité...
M. Chassin :Je vais, je vais quand même vite. Donc, la réflexion sur,
puis je trouvais ça intéressant, là, sur les AMP, en 2002, où on avait
l'impression d'être dans un régime temporaire, mais, à l'évidence, 23 ans plus
tard, ça ne l'est peut-être pas. Est-ce que ça pourrait être, puis là je
cherche des avenues de solution, est-ce que ça pourrait être une solution
d'inscrire, dans la loi, si c'est temporaire, par exemple, l'application des
cinq ans?
M. Amyot (Marc-André) : Vous
revenez à la 10e recommandation de notre mémoire, qui est de mettre un
mécanisme d'évaluation, année après année, des effets de ce projet de loi là.
M. Chassin :Puis disons qu'au lieu d'interdire pendant cinq ans, on
demande que, s'il y a la pratique privée, ça soit après avoir fait 40 heures
par semaine dans le public. Ça pourrait être une solution?
M. Amyot (Marc-André) : Ça
peut être quelque chose qui est évaluable, d'autant plus que certains
professionnels peuvent faire ça, notamment les IPS, ils peuvent travailler 40
heures dans le public...
La Présidente (Mme Poulet) : Je
m'excuse de vous interrompre, c'est tout le temps que nous avons. Désolée. Je
suis la gardienne...
La Présidente (Mme Poulet) : ...temps,
je suis vraiment désolée. Alors, je vous remercie de votre contribution aux
travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants
afin de permettre aux prochains invités de prendre place.
(Suspension de la séance à 12 h 20)
(Reprise à 12 h 23)
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
on reprend nos travaux. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants
de la Fédération des médecins spécialistes du Québec. Mesdames, Messieurs,
bonjour. Je vous rappelle que votre groupe dispose de 10 minutes pour votre
exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission. Alors, je vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre
exposé.
M. Oliva (Vincent) : Merci,
Mme la Présidente. Mesdames et Messieurs les parlementaires. Donc, je me
présente, Dr Vincent Oliva, président de la Fédération des médecins
spécialistes du Québec, accompagné de Dre Véronique Godbout, présidente de
l'Association des orthopédistes. Dre Catherine Besner Morin, présidente des
dermatologues et Me Pierre-Luc Desgagnés, qui est directeur général à la
fédération.
Nous défendons un système de santé public
fort et accessible. C'est au cœur de notre mission. Nos membres soignent chaque
année près de 5 millions de patients québécois à travers plus de 30 millions de
consultations médicales. Ils sont les premiers et les premières à vouloir
améliorer l'efficacité du réseau de la santé et offrir aux patients un meilleur
accès aux soins. Il importe de mentionner d'ailleurs que la fédération ne
représente pas les médecins spécialistes qui ne pratiquent pas dans le réseau
public. Avec le p.l. n° 83...
M. Oliva (Vincent) : ...le
ministère de la Santé pense qu'il favorisera l'exercice de la médecine au sein
du réseau de la santé en imposant au niveau médecins... aux nouveaux médecins
l'obligation d'y exercer durant les cinq premières années de pratique et de
demeurer au Québec à la suite de leur formation. Il affirme avec emphase que
cela lui permettra de se doter de moyens nécessaires pour permettre un meilleur
accès aux soins.
Nous savons que le ministère et le
ministre aiment bien les comparaisons avec le hockey. On pourrait donc dire que
la stratégie du p.l. 83, c'est celle d'un coach dont l'équipe tire de l'arrière
7 à 1 qui demande à ses joueurs de lâcher les gants : les spectateurs sont
contents, mais il va perdre le match, c'est une diversion. En imposant des
restrictions sans précédent présentées comme des solutions pour améliorer
l'accessibilité aux soins, ce projet de loi aux relents de régime autoritaire
risque d'aggraver les problèmes qu'il prétend résoudre. Le vrai problème :
un réseau public à bout de souffle.
La FMSQ observe une tendance, depuis deux
ans, chez certains médecins spécialistes, à se retirer du régime public, une
situation qui nous préoccupe autant que le ministre. Cela dit, les données
révèlent que le phénomène demeure marginal puisque, pour l'année 2023-2024, on
parle de 1,79 % des médecins. L'immense majorité des médecins spécialistes
veulent donc exercer au sein du réseau public.
Avant de blâmer les jeunes médecins et de
leur taper sur la tête, il faudrait peut-être prendre le temps de comprendre
pourquoi quelques professionnels, moins de 2 % d'entre eux, décident de
quitter le public. Contrairement à une perception entretenue, ce n'est pas
l'appât du gain qui motive cette décision. Elle est avant tout le résultat d'un
manque d'organisation et la pénurie critique de ressources qui frappe le réseau
de la santé.
Rappelons, par exemple, que plus d'un
chirurgien se retrouve avec un nombre limité de priorités opératoires, dans
certains cas une ou deux par mois. Quotidiennement dans les centres
hospitaliers à travers le Québec, nos membres sont confrontés à des reports de
chirurgies, à un manque criant de personnel, à une rationalisation des
services, à une pénurie de lits, à une sous-utilisation des plateaux techniques
et à des outils technologiques désuets. Quant aux cabinets offrant des services
médicaux assurés, il faut rappeler que les coûts du loyer, de main-d'œuvre, des
fournitures médicales n'ont cessé d'augmenter, sans aucun nouvel apport du
gouvernement.
Nous savons tous et toutes que la
consultation et l'écoute en vue de régler les problèmes ne font pas partie de
la génétique du gouvernement actuel. C'est tout de même particulier de penser
que la solution miracle du ministère de la Santé pour régler les enjeux du
système reste celle qui est débattue aujourd'hui : obliger les jeunes
médecins à travailler au public sans que le soutien, les infrastructures, le
personnel soignant et les plateaux suivent. Soyons clairs, le ministère peut
bien rêver d'ajouter des dizaines et des dizaines de médecins, il ne pourrait
pas les faire pleinement travailler et donner des soins. Un premier test
viendra d'ailleurs rapidement puisque, selon les derniers chiffres du Collège
des médecins du Québec, c'est 235 médecins spécialistes qui se sont ajoutés à
notre groupe au 31 décembre 2024. Le p.l. 83 imposera donc une obligation de
service de cinq ans et des pénalités financières allant jusqu'à
100 000 $ par acte et 200 000 $ en cas de récidive pour
ceux qui s'écartent.
Tout en étant complètement déphasées, ces
mesures vont entraver les carrières médicales et l'attractivité de la formation
médicale au Québec. À cet égard, il faut souligner que le ministère va à
contre-courant des juridictions comparables. Il préfère ne manier que le bâton
en laissant la carotte au vestiaire, en s'imaginant qu'il va ainsi faciliter le
recrutement. Nous déplorons un tel traitement réservé à nos membres. Il
convient de préciser qu'aucun... aucune autre juridiction au Canada n'impose
aux médecins des obligations contraignantes de cette nature. Pour attirer les
étudiants et les résidents, la plupart misent plutôt sur des incitatifs financiers
et des bourses en échange d'une obligation de service.
D'autres questions importantes demeurent
aussi en suspens quant au p.l. 83. Qu'adviendra-t-il des médecins qui
choisiront de poursuivre des fellowships ou des formations de pointe à
l'étranger? Qu'en sera-t-il des médecins au parcours atypique, par exemple
engagés dans des missions humanitaires ou des projets de recherche qui
permettront à des médecins de revenir avec une expérience unique?
D'autres professionnels de la santé sont
fortement affectés par les départs au privé. Près de 40 % des psychologues
quittent le réseau public au cours des cinq premières années de leur pratique.
Au 5 octobre dernier, 265 infirmières praticiennes spécialisées, les IPS,
exerçaient hors du réseau public. La situation des technologistes médicaux est
tout aussi préoccupante. Selon leur association, seulement 50 % des
besoins étaient comblés en avril 2024. Ces exemples illustrent l'inefficacité
prévisible du projet de loi pour résoudre les enjeux d'accessibilité aux soins
spécialisés.
En plus d'imposer des obligations
contraignantes aux seuls médecins, le p.l. 83...
M. Oliva (Vincent) : ...créer
l'illusion que les mesures qu'il propose ou l'intégration de quelques dizaines
de médecins spécialistes non participants au régime suffiront à résoudre les
problématiques d'accès. De plus - et cela ne peut pas passer inaperçu - le
ministère n'a jamais démontré beaucoup d'ouverture aux recommandations des
fédérations médicales quant aux plans d'effectifs médicaux, les fameux PEM. Le
p.l. 83 veut obliger les jeunes à pratiquer au Québec, alors qu'on ne sait même
pas s'ils auront des PEM, en clair, s'ils pourront travailler ou non.
• (12 h 30) •
Un autre argument massue du ministère pour
légitimer son projet de loi tient au coût important de la formation médicale,
soutenant ainsi que les jeunes médecins auraient une dette envers l'État.
D'après le gouvernement, la formation d'un médecin, incluant la résidence,
représenterait un coût de plus de 435 000 $ pour les contribuables.
Le gouvernement a fait preuve d'opacité quant à ses calculs. En plus d'être
contestables, ces chiffres du ministère semblent intégrer le salaire des
résidents dans les coûts de formation des médecins. Or, les résidents rendent
des services médicaux essentiels à la population entièrement dans le réseau
public et à des coûts raisonnables. Ils posent des diagnostics, prescrivent des
traitements, procèdent à des interventions chirurgicales et médicales et
sauvent des vies. En clair, il s'agit d'une rémunération versée en échange de
services médicaux rendus à des patients. C'est un salaire négocié avec l'État.
Pas une subvention aux études.
De manière générale, il importe de
mentionner que le Québec a fait le choix, depuis les années 60, de maintenir
les frais de scolarité et de formation à des niveaux comparativement bas par
rapport au reste de l'Amérique afin de favoriser l'accès à l'éducation pour le
plus grand nombre. L'ensemble des étudiants universitaires québécois, y compris
ceux des secteurs de la santé et des services sociaux et d'autres secteurs,
bénéficient donc d'études subventionnées par l'État, couvrant leur parcours
académique, quelle qu'en soit la durée, sans pour autant être contraints à une
obligation de service en retour.
Dans le cadre d'une stratégie visant à
améliorer l'accès aux soins, le ministère a instauré en 2023 un programme de
bourses d'étudiants destiné aux infirmières praticiennes spécialisées. Ce
programme prévoit l'octroi d'une bourse de 6 000 $ en échange d'un
engagement à travailler 6 000 heures dans un établissement ciblé. En
cas de défaut d'engagement, l'IPS doit rembourser l'intégralité de la bourse
reçue. En voulant poursuivre le même objectif, le ministre a opté pour une
approche nettement plus coercitive à l'égard des médecins, leur imposant des
obligations pour exercer dans le réseau et au Québec, assorties de sanctions
disproportionnées et sans offrir la moindre contrepartie. Plutôt que de
recourir à la coercition, une approche qui valorise et soutient la pratique
médicale en rendant le public plus attractif serait beaucoup plus efficace. Il
faut investir dans les soins aux patients.
En conclusion, le p.l. 83, dans sa forme
actuelle, est une fausse solution à un problème marginal. Au lieu de renforcer
le système public, il risque de le fragiliser davantage en brisant la confiance
entre l'État et ses professionnels. Si le ministère croit vraiment en son
initiative, souhaite vraiment une solution pérenne, il peut indiquer à cette
assemblée qu'il retire son projet de loi pour s'asseoir avec nous et les autres
fédérations. C'est comme ça qu'on va identifier le bon problème et la bonne
chose à faire. Nous vous tendons la main à nouveau. En politique, la coercition
est une méthode tentante, elle apparaît politiquement rentable, et on obtient
des applaudissements faciles, elle s'avère finalement toujours inefficace.
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
de votre exposé. Alors, nous allons maintenant commencer la période d'échange.
M. le ministre, la parole est à vous pour une période de 14 minutes
30 secondes.
M. Dubé : Très bien. Merci
beaucoup. Alors, Docteur Oliva et vos collègues, merci beaucoup. Je vais faire
un peu la même approche pour commencer, avant de passer peut-être la parole aux
collègues députés qui sont... ont plusieurs questions. Je vais vous dire,
j'ai... vous venez de me titiller quand vous me dites que l'accès est un
problème marginal au Québec. J'ai un petit problème avec ça quand...
M. Oliva (Vincent) : ...était
un problème marginal. J'ai dit que le nombre de médecins qui vont au privé est
un problème marginal.
M. Dubé : O.K. Parce que
quand j'entends qu'on a encore 900 000 personnes sur le CRDS, là,
j'espère que j'avais peut-être mal compris votre point. Parce qu'on n'a pas la
même définition de ce qui est marginal.
Juste quelques corrections parce que
peut-être qu'encore une fois j'ai mal entendu. La première, à savoir que cette
interdiction-là, d'aller au privé, n'existe pas ailleurs au Canada. Elle existe
en Ontario. On pourra en discuter amplement, mais je veux juste corriger, là.
Il y a une interdiction, les médecins, de pratiquer au privé.
Deuxième chose...
M. Oliva (Vincent) : Je...
Mme la Présidente, je parlais de l'obligation de travailler dans la
juridiction.
M. Dubé : Oui. O.K. Donc,
c'était... Parce qu'il y a deux choses dans le projet de loi : il y a la
pratique au privé puis il y a la pratique au Québec. Alors, votre point était
sur la pratique...
12 h 30 (version non révisée)
M. Dubé : ...au Québec.
M. Oliva (Vincent) : Exact.
M. Dubé : O.K. Très
bien.
M. Oliva (Vincent) : L'obligation
de travailler en sol québécois ou en Amérique, le seul autre endroit, c'est
Cuba.
M. Dubé : Bon. Quand... Deuxième
chose. Vous avez dit : C'est... Bien, on va essayer de ne pas trop se
comparer avec Cuba, c'est un très bon point. Il y a une chose... Juste pour
corriger, parce qu'il y a certains points que vous avez soulevés, avec lesquels
je suis d'accord, alors, je vais le laisser... Mais vous avez parlé d'une prime
aux IPS de 6 000 $. C'est 60 000 $. O.K. C'est 60 000 $.
M. Oliva (Vincent) : Je
suis content, très content pour elles.
M. Dubé : Bon. Bien,
voilà! Ils n'ont pas le même salaire que les médecins, mais ça, c'est d'autre
chose. Je voulais aussi vous entendre avant de passer la parole à mes
collègues, parce que vous avez soulevé un point que je trouve très important à
clarifier parce que, sur ça, des fois on s'entend sur ce qu'on ne s'entend pas,
mais sur ce point-là, on est d'accord, c'est toute la question du fellowship. Puis
dans le projet de loi, puis on aura la chance de le discuter quand on sera avec
mes collègues dans l'article par article, mais il n'y a... je veux juste faire
une différence, là, pour que les Québécois comprennent que l'obligation qu'on
demande est après la formation. On se comprend, là? Ça, ça veut dire qu'un
étudiant en médecine familiale ou par exemple, parce que c'est beaucoup plus fréquent,
en médecine spécialisée, qui déciderait après son cours à McGill, à l'Université
Laval, peu importe, de décider d'aller faire son fellow à Boston pour prendre
une spécialisée... une spécialité en, peu importe, pourrait aller faire son
fellow en autant qu'il ait l'obligation de revenir à Québec. Donc, je vous
donne cet exemple-là juste pour des choses qu'on va clarifier, parce que de
dire qu'on est contre la formation, juste pour qu'on s'entende bien, là, c'est
une clarification que je voulais faire.
Et, en fin de compte, ce que je vais vous
demander, si vous pouvez prendre juste une minute pour l'expliquer, c'est où
les autres endroits? Je vous donne un exemple. Il y a en ce moment des
exceptions au projet de loi qu'on va vouloir faire, puis on le fait
habituellement par l'intermédiaire des règlements. Je vous donne un exemple. C'est
sûr qu'en ce moment, quand on forme des étudiants, par exemple, pour le
Nouveau-Brunswick, le Nouveau-Brunswick reconnaît la qualité de notre formation
en médecine dans une université, les gens peuvent venir ici pour être formés,
mais il y a quand même une obligation, un, de pénalité. Puis on n'a pas envie
de changer ça aussi. Si ces gens-là, après être venus au Québec se faire
former, retournent en... il n'y aura pas de... Alors, il va y avoir des
exceptions qu'on va être capables. Et moi, ce que j'aurais aimé vous entendre...
Là, je comprends, vous dites globalement que vous êtes contre, mais je respecte
votre opinion, mais je vous donne l'exemple, là. Je viens de vous donner deux
exemples d'exemption. Je vous ai parlé de la formation, puis je vous ai parlé,
par exemple, mais il y a... Je vous ai parlé du Nouveau-Brunswick, mais on fait
ces exceptions-là pour la formation des médecins au niveau militaire. Alors, je
veux juste vous entendre un petit peu là-dessus.
M. Oliva (Vincent) : Merci.
Si vous me permettez, effectivement, je vais répondre. En fait, c'est que cette
obligation de travailler au Québec... Actuellement, il n'y a pas d'exode des
médecins hors Québec. Il y a des médecins qui vont dans d'autres provinces,
mais il y a des médecins d'autres provinces qui viennent au Québec. Même chose
à l'international. Donc, le flux... Le flux n'est pas négatif, là...
M. Dubé : ...elle est
très différente, là. On en a 2 300 qui sont partis dans d'autres
provinces, puis il y en a 500 qui sont venus. Je comprends qu'il y a des...
M. Oliva (Vincent) : Il
y a 3 000 médecins diplômés hors Québec qui travaillent au Québec.
M. Dubé : Je vous parle
avec l'Ontario, là.
M. Oliva (Vincent) :
Bien, peut-être avec l'Ontario, mais si on prend globalement, il n'y a pas d'exode,
il n'y a pas de flux négatif de médecins du Québec. Alors, c'est une mesure...
On ne comprend pas d'où elle sort.
M. Dubé : Mais dites ça
au député de Pontiac. La limite de l'Ontario, là, elle fait une grosse différence.
O.K. C'est beau.
M. Oliva (Vincent) :
Oui. On est d'accord que dans certaines régions géographiques, c'est
effectivement le cas. Mais vous allez faire quoi, les mettre en prison?
M. Dubé : Bien, écoutez, c'est...
Je vous demande d'autres... Je vous demande d'autres suggestions.
M. Oliva (Vincent) : Bien,
ça n'a pas de sens.
M. Dubé : Ce n'est pas
si...
M. Oliva (Vincent) : Ça
n'a pas de sens, cette histoire-là. On est le seul endroit en Amérique qui allons
contraindre des gens qui ont des études à travailler dans leur cas comme on
vient dans...
M. Dubé : Oui, mais je
viens de vous donner un exemple.
M. Oliva (Vincent) : On
ne fait même pas ça dans les pays communistes, M. le ministre.
M. Dubé : Non, mais, Dr Oliva,
avec tout le respect que je... Je viens de vous donner l'exemple du
Nouveau-Brunswick, là. Alors, je vous dis, il n'y a pas personne qui va aller
en prison.
M. Oliva (Vincent) : Il
n'y a pas de faculté de médecine au Nouveau-Brunswick. Ils viennent tous se
former au Québec puis ils retournent au Nouveau-Brunswick.
M. Dubé : Bien non, mais
c'est exactement pour ça que je vous dis : Quelles sont les exceptions, qui,
pour vous, seraient...
M. Oliva (Vincent) : Tous.
Tous. Il n'y a pas... On n'a pas besoin de contraindre les médecins à rester au
Québec. Je pense que les médecins veulent travailler au Québec...
M. Dubé : ...laisser
continuer...
M. Oliva (Vincent) : ...veulent
tous travailler au Québec. La grande majorité reste au Québec. Il y a quelques
médecins qui partent. Je peux vous donner l'exemple de ma belle-sœur qui est
une pédiatre qui veut faire des soins intensifs, qui n'a pas trouvé de PREM, qui
est au Sick Kids à Toronto puis qui a hâte de revenir ici, qui attend un PREM à
Sainte-Justine. Des exemples comme ça, il y en a plein. Il y a des médecins,
des fois, qui trouvent un conjoint à l'extérieur, puis qui restent, d'autres
fois qui trouvent un...
M. Oliva (Vincent) : ...médecin
puis qui les ramène. C'est la liberté d'aller où les médecins... Réglez votre
système public, donnez les conditions compétitives, puis les médecins vont
vouloir travailler comme partout ailleurs sur la planète. Parce que moi, dans
mon service au CHUM, sur une quarantaine de radiologistes, j'en ai 10 de
l'extérieur. J'ai huit Français, un qui vient de la Belgique, un qui vient de
la Roumanie. C'est ça, la... Vous voulez garder les gens en prison. Vous dites
«le fellowship», mais si le médecin veut pratiquer deux, trois ans puis faire
plus longtemps qu'une formation en fellowship, vous allez faire quoi? Vous
allez dire non? Ça n'a pas de sens. Alors, nous, on n'est pas d'accord avec ça.
• (12 h 40) •
M. Dubé : Bien, je viens de
vous dire le contraire, là. Je vais vous donner l'exemple du fellowship.
M. Oliva (Vincent) : Oui.
Mais on va être soumis à des gens qui vont dire oui ou non. Écoutez, ces
contraintes-là, on n'y croit pas. Elles ne sont pas nécessaires.
M. Dubé : Alors, je vais
laisser à mes collègues, là. On s'en va dans la bonne direction.
M. Oliva (Vincent) : Oui.
M. Dubé : C'est correct.
C'est bon. Très bon.
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
oui, Mme la députée de Bonaventure. Il reste 18 secondes.
Mme Blouin : Merci, merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, bonjour à vous. Merci de prendre le temps
d'être avec nous aujourd'hui.
J'ai posé une question au groupe qui était
avant vous et je n'ai pas vraiment eu de réponse, alors je mise beaucoup sur
vous, sans pression, bien sûr. J'imagine que vous savez que les Québécois, en
très forte majorité, appuient le projet de loi. Ça inclut différents groupes
dont le Collège des médecins. Alors... Puis même que le Collège des médecins
dit qu'on ne va pas assez loin. Il aimerait qu'on ait des mesures encore plus
costaudes. Donc, j'aimerais savoir comment vous expliquez que votre position
soit si opposée à celle de ces groupes-là, qui incluent le Collège des médecins?
M. Oliva (Vincent) : D'abord,
on n'encourage pas le privé, on ne représente pas le privé. Vous pouvez fermer
le privé tant que vous voulez, fermez-le, ça ne changera rien. Ça ne donnera
pas plus de soins aux Québécois. C'est ça notre mot.
Puis j'aimerais, Dre Godbout, qui est
orthopédiste, ici, O.K., qui a plusieurs de ses membres qui vont dans le privé,
qui rentrent et qui sortent, O.K., pas parce qu'ils aiment le privé... Mais,
Véronique, Dre Godbout, on se tutoie, Véronique, j'aimerais que tu expliques
aux parlementaires pourquoi est-ce que les médecins rentrent et sortent du
privé... du public comme ça.
Mme Godbout (Véronique) : Merci
de m'avoir invitée. Ce n'est pas dur à comprendre en fait. Les orthopédistes,
là, qui est probablement la spécialité actuellement où il y a le plus de
spécialistes qui vont et viennent, privé-public, c'est parce que le public
n'est pas capable de leur donner assez de temps. On est capables d'avoir en
moyenne une journée par semaine à l'hôpital pour opérer, puis ça, c'est une
moyenne. Donc, il y en a qui ont moins, rare ont plus. Puis ils sont capables
de nous donner une journée de clinique externe par semaine. Donc, le reste du
temps, l'hôpital n'est pas capable de... Si, nous, on dit : Bien là, j'ai
d'autres patients à voir, je vais y aller, ah bien, on peut te trouver un
local, s'il y en a un, mais il n'y aura pas d'infirmière avec toi, il n'y aura
pas de préposé, il n'y a personne qui va booker les rendez-vous. Donc, dans ce
contexte-là, les gens s'organisent et puis ils font leurs activités au public
pendant quelques semaines puis ensuite ils vont se désaffilier pendant une
semaine ou deux, là, selon leurs habitudes, je ne sais pas, pour pouvoir
offrir... continuer à offrir des services, pour pouvoir continuer à travailler.
Parce qu'à l'hôpital le réseau public n'est pas capable de faire ça. Ceux qui
ne vont pas au privé, qu'est-ce qu'ils font pendant leurs trois autres
jours/semaine, vous allez me demander, bien, ils vont en cabinet pour voir plus
de patients puis faire augmenter les listes d'attente.
M. Dubé : Bien, peut-être, je
voudrais juste commenter. Merci, Catherine, pour la question. Je veux juste
qu'on rappelle, là, ce que j'ai dit comme introduction à la commission ce
matin, là, avant la présentation de la FMOQ, qu'on travaille depuis plusieurs
années sur différentes initiatives. À travers la pandémie, il y a eu une baisse
des chirurgies, là, un secteur qui vous préoccupe plus. On est rendus
maintenant à avoir rattrapé le niveau de chirurgie... non, je veux juste
terminer... au niveau justement à cause de l'aide du privé. Aujourd'hui, là, en
2024-2025, là, on fait autant de chirurgies qu'on en faisait avant. O.K.?
Deuxièmement, avec les conventions
collectives qu'on vient de signer avec la FIQ, il va y avoir quand même une
chose qui est importante, on va avoir plus de personnel justement pour appuyer
dans nos salles d'op. Ça, c'est au public.
Puis troisièmement, on est en demande avec
vous, mais je n'en parle pas trop, mais pour être capables d'avoir accès à plus
d'heures disponibles entre autres dans les temps défavorables. Ça, ça va faire
une différence aussi.
Alors, je veux juste qu'on comprenne bien
ce que j'ai fait comme introduction ce matin. Il y a plusieurs choses qui sont
en cours en ce moment qui expliquent la situation et qui nous permettent
d'améliorer la situation actuelle. Alors, je comprends ce que vous dites, mais
je veux juste qu'on mette les choses claires. Puis, moi, je le clarifierai dans
les prochaines semaines. Il y a beaucoup d'efforts qui se font pour être
capables d'améliorer l'environnement en ce moment.
Mme Godbout (Véronique) : Je
suis contente de l'entendre. Merci beaucoup. Pour février mars, Shawinigan a dû
annuler sept salles d'opération. Pour février et mars, le CIUSSS Centre...
Mme Godbout (Véronique) : ...on
a dû annuler neuf salles d'opération... neuf priorités opératoires, incluant
d'autres choses. Ils ont dû couper des journées aussi. Puis ça, c'est juste
pour février-mars. Donc, la... la réalité, c'est que c'est... ce n'est pas...
la résultante n'est pas sur le terrain encore.
M. Dubé : Bien, ce que je
pense qu'il peut y avoir des disparités régionales importantes qu'on est en
train de clarifier. Mais je veux juste dire que, dans l'ensemble, on fait
autant de chirurgies aujourd'hui qu'on en faisait à l'époque prépandémique, ce
qui est tout un rattrapage par rapport à toutes les difficultés qu'on a eues.
Je veux juste le mentionner, là. Je vous laisse continuer, Mme...
Mme Godbout (Véronique) : Les...
Oui, je vais laisser la parole aux autres.
La Présidente (Mme Poulet) : Mme
la députée de Bonaventure.
Mme Blouin : Oui, merci.
Donc, comme le ministre le mentionnait, le projet de loi actuel, c'est une
mesure parmi un ensemble de mesures qui sont en cours de réalisation ou qui ont
été réalisées. Moi, j'aimerais vous entendre à savoir quelles sont les autres
mesures, quels sont les autres gestes qu'on devrait envisager. Il y a eu des
propositions, par exemple, comme le Collège des médecins, qui nous suggère
de... d'avoir des tarifs maximums au privé, ou encore de mieux encadrer le
va-et-vient entre le public, le privé. J'aimerais savoir qu'est-ce que vous
pensez de ces mesures-là, et quelles sont vos propositions.
M. Oliva (Vincent) : Encore
une fois, Mme la Présidente, le... le problème, là, n'est... n'est pas de... Le
problème de... du privé, en fait, est un symptôme, n'est pas... n'est pas la
cause du problème. Le problème, c'est que le réseau public ne fonctionne pas.
Puis là, on essaie de trouver des solutions pour colmater le privé. Mais le
privé, c'est une soupape qui se développe parce que le public déborde et ne
donne pas assez de ressources pour donner des soins. On rajouterait
200 orthopédistes demain matin, ils ne feraient pas une chirurgie publique
de plus, ils se marchent sur les pieds. Puis peut-être qu'on pourrait entendre
Dre Besner Morin également parce qu'elle a plusieurs de ses membres qui sont
dans le privé. Peut-être, Catherine, pourrais-tu expliquer pourquoi est-ce que
les dermatologues s'en vont au privé.
Mme Besner Morin (Catherine) : Bonjour.
Merci de pouvoir être là. Effectivement, les dermatologues au privé, c'est
vraiment un phénomène grandissant et grandissant rapidement. Juste pour vous
donner un exemple, en 2004, on avait quatre dermatologues désaffiliés puis là,
maintenant, on est rendus à 52 pour 200 qui travaillent au public. Quand...
Donc, c'est quelque chose qu'en tant que présidente c'est vraiment dans ma
mire, là, le... la désaffiliation. Puis nous, ce n'est pas de la désaffiliation
temporaire, on parle de désaffiliation permanente. Puis, c'est... la raison
principale, c'est vraiment le problème des frais de cabinet, c'est-à-dire que,
depuis plusieurs décennies, les dermatologues, on s'est fait mettre un peu en
dehors des hôpitaux. Ce que je veux dire par là, c'est qu'il y a des PEM, mais
c'est un peu des faux PEM affichés, parce que quand tu vas cogner à la porte,
concrètement, de l'établissement puis tu dis que tu veux travailler là, ils te
répondent qu'ils n'ont pas les secrétaires, ils n'ont pas les locaux, puis ils
n'ont pas les infirmières, donc ils vont te proposer soit maintenant rien puis
ils vont dire : Bien, prends les gardes puis prends le PEM, mais, en
réalité, tu n'as aucune place dans l'établissement, ou ils vont dire : On
va te donner un jour, puis, ensuite de ça, mais tes quatre autres jours viens
les combler d'une façon différente. Puis, ensuite de ça, donc, nous, depuis des
décennies, on s'est organisés pour offrir des soins au public à l'extérieur des
établissements, puis c'est des bons...
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. C'est tout le temps que nous avons. Alors, on va poursuivre les
discussions avec le... avec le député de Pontiac pour une période de 7 min
et 32 s.
M. Fortin :Très bien. Merci. Merci, Mme la Présidente. Bonjour à tout
le monde. Bonjour à vous tous d'être... d'être là. Je veux juste quand même
prendre quelques instants, là, par rapport à vos propos sur des... et le
ministre appelle ça des régions où ça va... où c'est peut-être plus difficile,
là. Mais, dans ma région, M. le ministre, vous le savez, qu'on est rendus à
50 % de chirurgies qui sont faites dans le privé. 50 %. Alors là, on
n'est pas dans le... la normalité québécoise, là. Si vous voulez... si vous
voulez dire que c'est une exception, ça va, mais c'est la réalité dans une
région, alors... Et ces médecins-là, ils n'ont pas quitté pour le privé parce
qu'ils voulaient nécessairement aller au privé, c'est parce qu'il y en a une,
peut-être deux salles d'opération à Gatineau qui sont ouvertes aujourd'hui, là,
sur sept. Ça, c'est la réalité dans certaines régions du Québec.
Moi, ce que je veux savoir du projet de
loi, là, c'est : À la fin de la journée, est-ce que ça va nous permettre
de garder ou d'attirer plus de médecins, et nos meilleurs médecins, entre
autres, là, vers le réseau public québécois? Et la grande inquiétude qu'on a,
de notre côté, c'est que les étudiants qui souvent, entre autres pour leur
spécialité, appliquent à bien des places à travers le Canada, là, ne
choisissent pas de venir au Québec. Ça, c'est une inquiétude qu'on a par
rapport au projet de loi, c'est-à-dire quelqu'un qui commence soit sa résidence
ou ses études, qui applique à Montréal, à Toronto, à Vancouver, parce que, dans
des spécialités, il y en a très peu, des postes de résident, entre autres, qui
fassent...
M. Fortin :...le choix d'aller ailleurs pour ne pas être assujetti à
ces obligations-là. Est-ce que c'est quelque chose qui vous préoccupe
également?
M. Oliva (Vincent) : Absolument.
Puis je pense que la Fédération des médecins étudiants va être là puis pourra
sûrement nous dire leur perspective et est-ce que ça va leur tenter de faire
leur cours de médecine au Québec si une telle loi était adoptée, mais, en
réalité, il faut comprendre qu'une fois que le cours de médecine est fait, il y
a un système de... je m'excuse de l'anglicisme, de match pancanadien, où les
étudiants qui veulent faire une spécialité appliquent dans un système de... Ils
peuvent être matchés dans une autre province. Alors, toute cette fluidité-là...
On ne peut pas être les seuls à demander : Bien, vous, vous avez fait un
cours, vous allez rester au Québec, alors que tous les étudiants des autres
provinces ne sont pas soumis à ça, puis, je vous l'ai dit, d'ailleurs, nulle
part en Amérique.
• (12 h 50) •
Alors, je pense qu'il faut miser sur le
fait que, premièrement, on a des racines, hein? Moi, je suis allé me former aux
États-Unis puis je n'avais pas le goût de rester là-bas parce que je suis
francophone, puis on est déjà protégé par ce fait-là. Donc, c'est superflu
d'ajouter ces espèces de barrières.
Et, encore une fois, je pense que, si les
étudiants doivent s'engager sachant, un, que les règles du jeu peuvent changer
en cours de route, puis, après ça, on peut leur dire : Bien non, tu vas
être obligé de travailler au Québec, je pense que ça va être un incitatif
extrêmement négatif pour eux, alors que ce n'est pas nécessaire. On a juste à
leur donner ce qu'il faut pour travailler. On a parlé tantôt de l'orthopédie,
d'autres spécialités chirurgicales, puis Dr Besner Morin commençait à parler
des dermatologues. Il faut savoir qu'il y a quelques spécialités, puis, ici,
c'est deux spécialités représentatives, mais, sur 36 spécialités, il y en
a une minorité, en fait, où les gens... au privé, la majorité n'en ont presque
pas, de médecins au privé, mais la dermato, c'en est une parce qu'ils ont des
frais de cabinet extrêmement élevés qui n'ont pas été indexés depuis des
dizaines d'années, O.K., donc, c'est ce que Docteur Besnr Morin commençait à
dire, leurs frais de cabinet sont très élevés, puis ils se font jeter en dehors
des hôpitaux, ils n'ont pas de ressources, donc ils s'en vont au privé. Parce
que c'est de plus en plus pénible de travailler au public pour ces médecins-là,
qui se font, souvent, mettre dehors des hôpitaux.
Alors, je ne dis pas que c'est comme ça
mur-à-mur, parce qu'il y a beaucoup d'autres spécialités où ils ont des
ressources pour travailler. Le point, c'est qu'on mettrait 1 000 médecins spécialistes
de plus demain matin, il n'y aurait probablement plus... pas plus de soins
publics qui se donneraient aux Québécois. C'est ça, notre point. Donc, c'est un
symptôme qu'ils s'en aillent au privé. Ce n'est pas la cause du problème. La
cause, c'est que le système ne fonctionne pas bien. On doit y investir, on doit
mieux l'organiser, on doit donner du meilleur financement, puis c'est... Puis
je m'excuse, mais ce n'est pas avec 1,5 milliard de coupures qu'on va
améliorer ça.
M. Fortin :Je... j'étais content d'entendre... puis je sais... je sais
que c'est probablement l'aboutissement d'un processus que vous ne voulez pas
voir aboutir, là, mais j'étais content d'entendre le ministre nous dire que, bon,
bien, même si on va de l'avant avec notre projet de loi, même si on l'adopte
comme tel, il va y avoir des... appelons ça des exceptions, là, parce que, de
la façon qu'il est écrit, là, honnêtement, nous, on ne les voit pas, les
exceptions, on ne voit pas le mécanisme d'appel ou le mécanisme d'exception, de
la façon que le projet de loi est écrit.
Est-ce que vous avez quand même... même si
on... ou est-ce que vous avez commencé à considérer ça devrait être quoi, la
liste d'exceptions? Parce que nous, on en voit, le ministre en a nommé deux,
mais la liste, elle est longue, là, d'exceptions possibles. On pense aux gens
qui ont... qui font de l'enseignement, on a nommé les militaires, l'INESSS, les
médecins qui travaillent en santé publique, la recherche universitaire. Il y a
des Québécois qui s'expatrient pour des très bonnes raisons, là, par exemple
ceux qui sont recrutés par la NASA, mais est-ce que, comme le docteur
Saint-Jacques, entre autres, qui a travaillé quelques années ici, au Québec,
avant d'aller à l'extérieur et dont on est très fiers... on ne veut pas, je
pense, empêcher qui que ce soit d'acquérir une spécialité comme celle-là.
Alors, est-ce que... Est-ce que vous avez commencé à élaborer ça? Parce que
nous, de ce qu'on voit du projet de loi, là, on ne le trouve pas, le mécanisme
d'appel ou d'exception.
M. Oliva (Vincent) : Écoutez,
on n'y a pas réfléchi de façon exhaustive, parce que, premièrement, il y en
aurait beaucoup, il faudrait couvrir toutes sortes de situations, mais, encore
une fois, on ne voit pas la nécessité et on n'y croit pas. Puis, vous savez,
les exceptions puis les dérogations du ministère, je m'excuse de parler comme
ça, mais je suis déjà passé par là, comme chef de département, là, où je
n'avais pas assez de peine, puis je voulais faire venir un candidat qui est
formé jusqu'aux dents en neuro-intervention avec trois ans de fellowship, puis
il n'y avait pas de poste puis on nous disait non. Et puis on perdait ces
candidats-là, parce que la compétition c'est Toronto ou Vancouver. Puis ça,
c'étaient des candidats formés à l'extérieur, pour qui on ne faisait pas de
place. Ça fait que l'organisation, les plans d'effectifs...
M. Oliva (Vincent) : ...d'effectif,
tout ça. Ça, c'est beaucoup plus important que mettre ce genre de contraintes.
Donc, s'embarquer dans une liste d'exceptions où on va se chicaner après ça
avec les gens qui doivent exercer ces exceptions-là, puis devoir se justifier
puis se mettre à genoux devant des gens qui ne comprennent pas toujours comment
ça marche, puis nos besoins, on ne veut pas embarquer là-dedans.
Une voix : Très bien.
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
merci beaucoup. Oui, Mme la députée de La Pinière, allez-y, il reste
37 secondes.
Mme Caron : Merci. En résumé,
ce que je comprends des interventions, c'est que même si on oblige les nouveaux
médecins à travailler dans le public, ils vont être dans le public, pour
certains d'entre eux, à se tourner les pouces parce qu'on n'a pas les plateaux
ou on n'a pas le personnel pour les soutenir et pour qu'ils puissent faire des
chirurgies ou autres interventions. C'est ça que je comprends.
M. Oliva (Vincent) : Plusieurs
d'entre eux, absolument.
Mme Caron : Merci.
La Présidente (Mme Poulet) : Parfait!
Merci beaucoup. Alors, je cède la parole au député de Rosemont pour une période
de 2 min 31 s.
M. Marissal : Merci. Bonjour,
bienvenue. Vos collègues de la FMOQ disaient tout à l'heure que la meilleure
option, à ce moment-là, ce serait de retirer le projet de loi. Scoop, ça
n'arrivera pas. Il n'y a aucune loi qui interdit de rêver, mais ça n'arrivera
pas.
M. Oliva (Vincent) : Ce sera
votre décision, M. Marissal. Ce sera votre décision.
M. Marissal : Non, non, non,
ce n'est pas la mienne. Non, au contraire, ce n'est pas du tout la mienne.
M. Oliva (Vincent) : Je suis
content de l'entendre.
M. Marissal : Non, non, je
n'ai qu'une modeste, modeste voix au chapitre, ici, je vous assure, et pas
beaucoup de temps. Donc, est- ce que vous demandez, comme vos collègues, de
retirer ce projet de loi là ou on peut le rafistoler pour qu'il soit acceptable
à vos yeux?
M. Oliva (Vincent) : Oui,
oui, absolument. C'est ce qu'on a demandé. On demande qu'il retire le projet de
loi, puis qu'il s'assoie avec nous, puis qu'on propose des solutions. On en
est... on est certainement ouverts à s'asseoir, qu'il nous dise exactement
quels problèmes il veut régler, puis on va lui apporter des solutions, mais pas
celle-là.
M. Marissal : O.K. Vos membres,
là, à qui on dirait... les jeunes, là, qui sortent, là, puis qui vont
pratiquer, à qui on dirait, d'aventure si on adapte le projet de loi tel
quel : Il faut absolument que tu fasses cinq ans, qui seraient tentés de
contester sur une base des droits et libertés, là, ce qui est pas totalement
farfelu, là, votre position par rapport à ça, c'est quoi?
M. Oliva (Vincent) : On n'est
pas assez... on n'est pas allés aussi loin que ça parce que c'est des questions
hypothétiques. On verra quand on sera rendus là. On croit à la démocratie
parlementaire, on dit ce qu'on pense, puis rendus là, effectivement, on pense
que c'est une atteinte aux droits et libertés, mais on ne s'est pas avancés
aussi loin que ça de voir est-ce qu'on va contester ou pas.
M. Marissal : ...est une
atteinte aux droits et libertés et quels droits et libertés?
M. Oliva (Vincent) : La
liberté de pratique. On a quand même un diplôme canadien, hein, d'abord. Je
veux dire, notre droit de pratique est partout au Canada. Alors, sous quel
prétexte on contraindrait les médecins à rester au Québec alors que ça ne se
fait pas ailleurs? On ne comprend pas cette... cette hypothèse ou cette
proposition.
M. Marissal : Ah! ce n'est
pas tant le prétexte que la loi.
M. Oliva (Vincent) : Oui, je
comprends.
M. Marissal : Je veux dire,
c'est la loi qui le forcerait. Donc, vous avez le problème avec... Onrevient au
même point de départ, là, vous avez le problème avec la loi et, le problème, il
est juridique.
M. Oliva (Vincent) : Oui,
absolument. Mais... mais, encore une fois, nous, on utilise les voies qui nous
sont offertes et puis, si le projet de loi est adopté, on verra. Mais on ne
voit pas pourquoi les médecins seraient contraints à ça, alors que toutes les
autres professions, je veux dire, les avocats, on a besoin d'avocats, on a
besoin de juristes, on a besoin d'aide juridique, on a besoin de toutes sortes
de professionnels qui... qui donneraient des services publics. Quelqu'un qui
fait de la philosophie, de la poésie, etc., on ne lui donne pas de...
La Présidente (Mme Poulet) : Merci.
Je m'excuse de vous interrompre. On va poursuivre les discussions avec le
député des Îles de la Madeleine pour une période de 2 min 31 s.
M. Arseneau : Merci beaucoup.
Merci, mesdames, messieurs. On a peu de temps. Qu'est-ce que vous dites aux
Québécois qui disent et qui ont l'impression qu'avec ce projet de loi là, on va
quand même retenir certains médecins? Peut-être pas beaucoup, mais on va en
retenir certains au Québec et on va en retenir certains au public, puis ça sera
toujours ça de pris. Vous, vous semblez nous dire que, par rapport au Québec,
chez les spécialistes, on a un solde migratoire positif de l'ordre de 238 sur
les cinq dernières années. Ce sont des données, là, qui sont fiables,
j'imagine.
M. Oliva (Vincent) : Les
données du Collège des médecins disent qu'il y a 235 médecins de plus en
2024. Donc... donc il y a eu...
M. Arseneau : La différence
entre ceux qui quittent le Québec et ceux qui viennent.
M. Oliva (Vincent) : Le solde
est, disons, interprovincial, puis entre les autres nations, et il est à peu
près kifkif. Il y en a un petit peu plus qui viennent de l'international que
des médecins québécois qui partent, puis avec les autres provinces, c'est à peu
près kifkif. Donc, il n'y a pas de... il n'y a pas d'exode des médecins soit au
profit du Canada ou de l'international. Donc, on ne voit pas la nécessité
derrière cette clause-là, puis là on parle spécifiquement de l'obligation de
travailler au Québec.
M. Arseneau : D'accord. Pour
ce qui est du privé, vous l'avez expliqué tout à l'heure. En fait, je pense
qu'il y a plusieurs exemples, c'est... Les gens vont au privé pour soigner les
gens si je comprends bien...
M. Arseneau : ...je pense
qu'il y a plusieurs exemples. Les gens vont au privé pour soigner les
Québécois. Si je comprends bien, ils ne sont pas nécessairement non
participants, ils sont désaffiliés. Quelle... Est-ce que vous pouvez nous
expliquer la différence entre le médecin spécialiste non participant et le
médecin désaffilié? Parce qu'il semble y avoir une confusion, du moins pour
moi, à savoir si on peut essentiellement facturer ce qu'on veut ou on facture
selon des tarifs.
• (13 heures) •
Mme Godbout (Véronique) :
Bien, juste peut-être... Moi, je... Je veux répondre à votre première question,
là, pour rassurer la population québécoise. Le problème, ce n'est pas le nombre
de médecins. Ça fait que même si on a un projet de loi qui dit fait qu'il y
aurait plus de médecins au Québec, s'ils n'ont pas de ressources, ça ne va pas
plus donner de services aux Québécois. Ça fait que le problème, il n'est pas au
niveau du nombre de médecins, mais il est plutôt au niveau des ressources que
les médecins qui sont en place et/ou les futurs médecins ont accès. Là, qu'ils
soient participants ou non participants, c'est comme un autre débat, là, mais
c'est... Je ne pense pas qu'on ait le temps de parler de ça.
M. Arseneau : Donc, ce
que vous dites essentiellement, c'est que si on empêchait les jeunes médecins,
pendant les cinq premières années, d'aller au privé, bien, on aura moins de
services parce qu'on donne des services au privé que les Québécois ne peuvent
pas obtenir au public présentement. C'est ça?
Mme Godbout (Véronique) :
Oui. Bien, c'est que, même s'il y a plus de médecins, ils n'offrent pas plus de
ressources. Il n'y aura pas plus de salles d'op. En salle d'opération, il y a
un médecin qui opère.
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci. Je m'excuse encore de vous interrompre. Je suis la gardienne du temps.
Je suis vraiment désolée, mais on va poursuivre les discussions avec le député
de Saint-Jérôme pour 1 min 56 s.
M. Chassin :
Merci de votre présence. J'ai l'impression que le ministre veut s'éloigner du
modèle cubain, ce qui fait qu'on marque des points. Est-ce que... Puis là je
pose un peu cette question-là comme ça, mais est-ce que, quand on pense aux
patients, parce que, dans le fond, c'est ça aussi, hein, de remettre le patient
au cœur des décisions dans le réseau, qu'est-ce qui est le mieux pour le
patient? Est-ce que c'est, par exemple, un orthopédiste qui va faire une
chirurgie par semaine au public ou est-ce que c'est quatre chirurgies par
semaine en combinant public-privé, mais tout en étant participant, par exemple,
dans un CMS et puis que ce soit gratuit, là, sans frais pour le patient? Moi,
je me pose cette question-là du point de vue du patient. J'ai l'impression de
répondre facilement, mais peut-être que vous allez me dire que non, et qu'il y
a vraiment, je ne sais pas, une équivalence.
M. Oliva (Vincent) :
Bien, je peux vous dire que ce que nous, ce qu'on veut, c'est traiter le plus
de patients possibles. Je pense que les Québécois, ce qu'ils veulent, c'est se
faire traiter et que ce soit à l'hôpital ou dans un CMS subventionné, tant
qu'ils ne payent pas, je pense que c'est ça qui est l'idéal. Et c'est ce qu'on
veut aussi.
M. Chassin :
Je comprends.
M. Oliva (Vincent) : On
aimerait que tous les patients se fassent traiter de façon universelle sans
qu'ils payent. Ceci étant dit, l'exemple, ici, de mes collègues, à la droite et
à la gauche, ce qu'ils disent, c'est : Vous rajouteriez des médecins, puis
ils ne traiteraient pas plus de patients.
M. Chassin :
J'ai envie de vous laisser répondre, mais comme il me reste à peu près
20 secondes, je vais peut-être juste à ajouter : Est-ce que d'avoir
au lieu d'une espèce d'obligation de pratiquer au public pendant cinq ans, est-ce
que d'avoir une obligation de pratiquer 40 heures par semaine au public,
ça se pourrait puis qu'au-delà de tout ça, bien, on fait ce qu'on veut?
M. Oliva (Vincent) : On
n'a pas étudié cette question sous cet angle.
M. Chassin :
Non? D'accord, mais merci quand même. Je le suggère comme ça.
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, merci beaucoup. Je vous remercie à vous quatre. Je vous remercie de
votre participation à nos travaux. Alors, je suspends nos travaux, et on
retourne... On sera de retour à 14 heures. Merci.
(Suspension de la séance à 13 h 03)
13 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 14 heures)
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la santé et des services sociaux reprend
ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques pour le projet de loi n° 83, Loi favorisant l'exercice de la médecine au sein du réseau public de la
santé et des services sociaux.
Cet après-midi, nous entendrons les
témoins suivants : la Fédération médicale étudiante du Québec, la
Fédération des médecins résidents du Québec et la Coalition solidarité santé.
Alors, je souhaite la bienvenue à la
Fédération médicale étudiante du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Alors, je vous invite donc à commencer votre
exposé.
Mme Lavoie (Mathilde) : Alors,
Mme la Présidente, M. le ministre, membres de la commission, je vous remercie
de nous recevoir aujourd'hui afin de porter la voix de la relève médicale. Je m'appelle
Mathilde Lavoie, étudiante en médecine et présidente de la Fédération médicale
étudiante du Québec, la FMEQ. Je suis accompagnée de M. Maxence Pelletier-Lebrun,
vice-président, et Mme Félicia Harvey, déléguée aux affaires politiques.
La FMEQ représente près de 5 000 étudiants
en médecine issus des quatre facultés du Québec, qui sont réparties sur 10 campus
québécois ainsi qu'un au Nouveau-Brunswick. Depuis 50 ans, elle défend les
intérêts de ses membres sur les plans académique, social, politique et du bien-être.
À l'image de ses membres, la FMEQ s'investit depuis sa création pour préserver
un système de santé publique fort et accessible. En effet, nous avons déposé
plusieurs mémoires sur des enjeux majeurs dans les dernières années, notamment
sur la valorisation de la médecine familiale et de la médecine en région, la
planification des effectifs médicaux et la privatisation en santé. Nous
collaborons également avec différents acteurs du système de santé, notamment au
sein de la table nationale de valorisation de la médecine de famille et la
table de la planification des effectifs médicaux.
Notre fédération partage l'objectif du
ministre de favoriser l'exercice de la médecine au sein du réseau public.
Toutefois, nous estimons que le projet de loi, en misant sur des mesures
coercitives, n'est pas le bon véhicule pour atteindre ce but ni pour entamer
une discussion de fond. Nous déplorons que le projet de loi ait été élaboré
sans consultation préalable des partenaires clés en santé, dont l'expertise est
essentielle pour garantir des mesures adaptées et efficaces. Mentionnons
également que les données concernant les départs vers le privé ne sont pas
rendues publiques et, malgré nos efforts pour les obtenir, elles demeurent
difficiles d'accès. Sans fondations communes, la tenue d'un débat éclairé est
impossible. Et sans connaître les causes réelles des départs vers le privé, on
ne peut pas s'y attaquer. Actuellement, le projet de loi proposé est nettement
inadéquat car le diagnostic reste à établir.
Alors qu'une pénurie de main-d'œuvre
touche l'ensemble du réseau de la santé, que le gouvernement tient d'importantes
négociations et que Santé Québec commence son déploiement, nous regrettons que
ce projet de loi cible les étudiants plutôt que de proposer des mesures structurantes.
Notre position est claire : nous ne sommes pas en accord avec ce projet de
loi, comme 85 % de nos membres qui se sont exprimés dans un récent
sondage. C'est pourquoi la FMEQ demande au gouvernement d'abandonner le projet
de loi n° 83.
Nous exposerons aujourd'hui nos
inquiétudes par rapport au projet de loi, mettrons en évidence ses effets
pervers et proposerons nos solutions pour atteindre notre objectif partagé,
celui de favoriser l'exercice de la médecine au sein du réseau public.
Mme Harvey (Félicia) : Plusieurs
éléments du projet de loi sont problématiques à nos yeux. D'abord, l'article 1
définit le service public en s'appuyant sur la Loi sur l'assurance maladie, ce
qui est excessivement restrictif et ne reflète pas la diversité des pratiques
médicales. Plusieurs médecins contribuent à la société sans pour autant être
inclus dans cette définition. Par exemple, nommons les médecins en santé
publique ou dans la fonction publique qui occupent des postes dans des
organismes comme l'INESSS, la CNESST, le MSSS, et maintenant Santé Québec. On
peut également penser aux professeurs de médecine et aux chercheurs. Ces
médecins servent bel et bien le réseau public et le Québec, mais ne sont pas
considérés dans l'article 1.
De plus, le projet de loi ne précise pas
comment seront comptabilisés les cinq années de service. La FMEQ s'inquiète que
certains groupes soient discriminés, notamment les mères médecins qui prennent
un congé de maternité ou les médecins qui nécessitent un congé maladie. Aucun mécanisme
d'exception ou d'appel...
14 h (version non révisée)
Mme Harvey (Félicia) : ...était
prévu, alors qu'il est impossible d'anticiper toutes les situations qui
pourraient nécessiter de la flexibilité. Par ailleurs, les amendes prévues sont
disproportionnées par rapport à la faute commise. Nous n'avons trouvé aucun
précédent comparable au Québec pour ces sanctions injustifiées qui pourraient
totaliser plus de 1 million de dollars par semaine. Les articles cinq et
six obligeraient des étudiants en... âgés en moyenne entre 19 à 25 ans, à
signer un engagement contraignant pour des obligations qui ne prendraient effet
qu'une décennie plus tard en raison de la durée des études médicales. Ils ne
possèdent pas de boule de cristal pour prédire leur situation géographique,
familiale ou financière à la fin de leurs études. À juste titre, aucun autre
étudiant québécois n'est tenu de signer une entente de services obligatoire dès
le début de leur formation.
De plus, le projet de loi ne prévoit
aucune disposition pour les étudiants qui abandonnent leurs études, changent de
programme universitaire ou encore les médecins qui se réorientent
professionnellement. Nous croyons que tous les étudiants et travailleurs
québécois doivent pouvoir se réorienter sans faire face à des pénalités. Ces
mesures soulèvent également de nombreuses inquiétudes parmi nos membres quant à
leur avenir professionnel, notamment ceux qui souhaitent entreprendre un
fellowship, soit une surspécialisation, souvent effectuée à l'étranger, afin de
ramener des connaissances et des pratiques innovantes au Québec. Il ne faudrait
pas décourager les médecins de s'engager dans des formations avancées
essentielles pour maintenir la culture d'excellence médicale au Québec.
Par ailleurs, les articles cinq et six
confèrent une carte blanche aux gouvernements actuels et futurs quant au
contenu des ententes, sans balise claire pour encadrer leurs modalités d'application.
Rappelons que la gratuité scolaire partielle instaurée lors de la Révolution
tranquille est un choix de société visant à accroître la scolarisation et à favoriser
le bien public, elle repose notamment sur l'égalité des chances, une valeur
fondamentale dans notre société. Tous les universitaires québécois bénéficient
d'études subventionnées et il est injustifié de cibler exclusivement des
étudiants en médecine en invoquant un contrat social. Au Québec, de nombreux
étudiants poursuivent plusieurs diplômes ou allongent leurs études sans qu'on
ne remette en question la valeur ajoutée de leur formation par la société. Bien
que la FMEQ encourage ses membres à pratiquer dans le réseau public, elle
rejette l'argument du contrat social qui va à l'encontre de la vision
québécoise de l'éducation comme d'un bien commun.
M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : La
FMEQ souhaite mettre en lumière certaines conséquences négatives qui
surviendront si le gouvernement va de l'avant avec son projet de loi. Après l'obtention
de leur doctorat en médecine, les étudiants sont admissibles à l'ensemble des
programmes de résidence canadiens et appliquent fréquemment hors du Québec, vu
la grande compétitivité du processus d'admission. Le projet de loi prévoit qu'un
étudiant qui choisit de faire sa résidence au Québec devra signer un engagement
au début de sa résidence, alors qu'il n'y sera pas contraint s'il choisit un
programme de résidence hors Québec. Cela ajoute une motivation supplémentaire à
quitter la province. Prenons comme exemple un étudiant accepté dans un
programme de résidence au Québec, à Gatineau et hors Québec, à Ottawa. Alors qu'il
ignore ce à quoi ressemblera sa vie future, l'étudiant peut éviter de signer un
contrat et conserver sa pleine autonomie professionnelle en quittant le Québec.
Plutôt que d'améliorer la rétention des médecins au Québec, nous craignons que
le projet de loi entraîne un départ important d'étudiants en médecine vers les
autres provinces.
Après le dépôt du p.l. 83, la FMEQ a mené
un sondage auprès de ses membres. Parmi les 1 400 répondants.
57 % envisagent de postuler à un programme de résidence hors Québec si le
projet de loi est adopté, ce qui représente plusieurs centaines d'étudiants.
Rappelons que ce sont des étudiants qui, dans la très grande majorité, veulent
travailler dans le système public. Seulement, le discours politique actuel les
inquiète et ne crée pas un climat où les étudiants se sentent accueillis dans
le réseau public québécois. Le projet de loi envoie plutôt aux étudiants le
message qu'ils sont la source des problèmes du réseau, ce qui est évidemment
faux.
La signature de contrats avec les
étudiants en médecine a déjà été tentée et s'est soldée par un échec. Jusqu'à
récemment, les étudiants canadiens hors Québec devaient signer une entente dans
laquelle ils s'engageaient à pratiquer dans une région désignée par le ministre
pour une durée de quatre ans. L'amende de 300 000 $ prévue en cas de
non-respect a été retirée de la LSSSS dans le cadre du projet de loi 15. Il a
été jugé que, plutôt que d'améliorer la rétention de ces étudiants, plusieurs
quittaient le Québec pour effectuer leur résidence afin de se soustraire à l'entente.
La table sur la planification de l'effectif médical au Québec, pilotée par le
MSSS, arrive aux mêmes conclusions et avance qu'il serait contreproductif d'envoyer
un message aux médecins formés au Québec de quitter la province après leur
formation. En proposant une entente similaire aux étudiants québécois, le
gouvernement reconduit une mesure inefficace en espérant des résultats
différents.
Pour atteindre notre objectif commun de
favoriser l'exercice de la médecine au sein du réseau public, la FMEQ propose
la création d'une table nationale de concertation sur la place du privé au
Québec. Cette table, qui rassemblerait tous les acteurs en santé, créerait un
climat favorable aux échanges productifs. En collaboration, ils pourraient
rassembler et partager leurs données afin de dresser un portrait clair du privé
au Québec. Elle permettrait aussi d'élargir le débat sur le privé en dehors du
cadre limitant du projet de loi et d'évaluer l'efficacité de différentes
mesures structurantes. L'instance que nous proposons devrait se tenir à des
échéanciers serrés et avoir des livrables précis. Le but est qu'à la même
date...
M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : ...l'an
prochain, nous ayons établi les causes réelles des départs vers le privé et que
nous ayons en poche des mesures efficaces et réalistes que nous pourrons
déployer rapidement. Un sujet aussi important nécessite un réel débat de
société. L'heure n'est pas à rabouter le système de santé, mais à développer
des solutions structurantes et pérennes. C'est la santé de notre réseau et
celle de la population québécoise qui est en jeu.
La Présidente (Mme Poulet) : Parfait.
Merci beaucoup. Alors, nous allons maintenant commencer la période d'échange.
M. le ministre, vous avez une période de 16 minutes... 30 minutes... 30... 16
min 30 s, pardon.
• (14 h 10) •
M. Dubé : Oui. Très bien.
Premièrement... content de vous revoir, puis merci beaucoup pour votre
présentation, parce que je pense que c'était un des objectifs importants, parce
que c'est les jeunes étudiants ou étudiants actuels qui sont le plus impactés
par cette mesure-là, parce que c'est d'eux qu'on parle en termes de finissants.
J'aurais peut-être quelques précisions à
faire. Entre autres, je pense, j'en ai fait quelques-unes sur le «fellowship»
ce matin. Je veux juste préciser une chose, là. Quand vous dites qu'ils auront
un choix au moment de la résidence, on pourra en discuter en détail dans la
commission, mais... ou lorsqu'on fera l'article par article avec mes collègues,
mais on va demander une signature au début du bac aussi. Alors, je veux juste
qu'on se comprenne. C'est que quelqu'un qui s'est engagé au début du processus,
bien, je n'ai pas besoin d'attendre d'avoir une signature d'engagement à son...
à sa résidence — vous me suivez, là? — il a déjà pris un
engagement au début. Ça fait que je voulais juste faire cette précision-là.
J'aime beaucoup votre point puis je suis
content que vous le souleviez, parce que toute la table de consultation qu'on a
faite sur les PREM... Je l'ai mentionné un peu ce matin avec la FMOQ, puis,
pour que les Québécois qui nous écoutent... Là, je m'excuse d'avoir l'air d'un
vieux professeur, mais les PREM, c'est l'engagement qu'on demande entre autres
aux médecins de famille, particulièrement, de s'engager dans une région
spécifique, puis ça, c'est quelque chose qui existe depuis une vingtaine
d'années. Bon. On a entendu beaucoup de critiques là-dessus dans les dernières
années vous avez absolument raison, puis ce que je me suis engagé... avec le Dr
Bergeron... On a fait un groupe de travail l'an dernier et, je l'ai dit ce
matin, qui a été extraordinaire, dans le sens que les gens qui ont participé — puis
je dois remercier, entre autres, ce qu'on appelle encore les DRMG, là, puis le
Dr Guilbault, que le député de Pontiac connaît bien, là, qui est un médecin de
famille qui travaille... qui pratique en Outaouais — sont arrivés à
un consensus avec la FMOQ et d'autres groupes d'être capables de dire qu'est-ce
qu'on doit faire pour faciliter et simplifier encore plus le PREM. Puis je ne
veux pas présupposer de dire les résultats de ça, mais ils vont être exactement
en ligne avec ce qui est demandé par le réseau, par les médecins, les jeunes
médecins, etc.
Donc, je veux juste dire aujourd'hui — puis
c'est pour ça que j'ai fait cette précision-là ce matin — il y a
beaucoup de choses qui sont dites, que ce n'est pas le projet de loi qui va
faire la différence, moi, je... ou qu'il va être négatif, mais je veux juste
que les Québécois comprennent bien qu'on a beaucoup d'actions en parallèle qui
sont... qui ont été faites et qui sont en cours qui vont aussi rendre ça
beaucoup plus agréable, plus facile et moins coercitif. Je vais le dire comme
ça, là, pour employer un mot à la mode aujourd'hui. Mais, au lieu de prendre
trop de temps pour vous l'expliquer, parce que je vais attendre d'avoir toutes
les présentations qui sont faites, mais je ferai peut-être quelques
clarifications.
Celle du «fellowship» m'inquiète beaucoup.
Si vous avez la perception qu'on veut enlever de la formation, c'est tout à
fait le contraire. Moi, j'ai dit que la formation... ou l'engagement se fait
après la formation. Donc, l'engagement de pratique au public et au Québec va se
faire après la formation. Alors, si quelqu'un décide... Puis je pense que c'est
la bonne chose. On veut des spécialistes, on veut des omnis qui vont aller
chercher les meilleures pratiques dans le monde, on ne veut pas décourager ça,
au contraire. Alors, si, en ce moment... Puis je pense que le député de Pontiac
l'a bien dit tout à l'heure. C'est un expert, lui, en commissions
parlementaires, bien plus que moi. Il me dit : Bien, en ce moment, si ce
n'est pas clair dans le projet de loi, ça se peut très bien, puis notre
travail, quand on sera en commission, ça sera de le préciser. Mais je veux
juste dire : s'il y a quelque chose, pour moi, là, que je veux clairer
l'air aujourd'hui, c'est que les «fellowships» et les autres exceptions — puis
ça, je pense qu'on pourra discuter c'est quoi, les autres exceptions...
Il y a une dernière que je voudrais faire
par rapport à ce qui a été dit sur Cuba aujourd'hui, parce que la dernière
chose que je veux comparer, là, c'est le... nos résidences en médecine avec des
pays comme ça. Pourquoi je veux faire cette précision-là? Puis je veux vous
donner un exemple concret. En ce moment, là, ce n'est pas nouveau, ce qu'on
demande, c'est déjà au Québec...
M. Dubé : ...un exemple
concret. En ce moment, là, ce n'est pas nouveau ce qu'on demande, c'est déjà au
Québec. Puis je vous donne l'exemple, là, juste pour que les Québécois
comprennent, là, J'ai, au Nouveau-Brunswick, dans le cadre d'une entente qu'on
a avec le Québec actuellement, j'ai quatre postes de résidence, là. Ça, ça
existe, là. C'est déjà en cours, là. J'ai quatre postes de résidence qui sont
offerts dans des spécialités, autres que la médecine familiale vous allez me
dire, là, mais avec un contrat d'engagement qui est signé avec ces médecins-là,
là. On ne parle pas de pays communistes, là, c'est ici que ça se fait en ce
moment. Et ça a été accepté avec les étudiants et pour s'assurer qu'il y aura
une pratique au Québec. Et s'il y a... et si ce n'est pas fait, il y a une
pénalité importante. Alors, je veux juste... Il y aura des clarifications qu'on
fera après les présentations. C'est difficile de toutes les faire aujourd'hui,
mais je viens de vous donner quatre exemples, là, de clarifications que je veux
faire, mais on aura la chance d'en discuter parce que, souvent, ce qui va
arriver, c'est que vous allez nous dire : O.K. On s'est peut-être mal
compris ou c'est moi qui a mal compris, ça arrive des fois aussi. Vous pourrez
nous revenir après, mais c'est difficile dans le peu de temps qu'on a.
Ça fait que je vais laisser mes collègues,
les autres députés poser les questions, mais je veux juste vous dire que
j'apprécie beaucoup vos commentaires, beaucoup, parce que c'est vous qu'on
vise. Puis je veux être sûr qu'on est capables de tenir compte de vos points
pour être capables de faire, au besoin, comme on fait d'habitude, des
changements nécessaires. Mais je voulais juste... Je suis excessivement positif
par rapport à vos commentaires. Puis on fera les précisions. Parce qu'on se
rencontre, habituellement, au moins une ou deux fois par année, alors je ne
suis pas surpris de certaines de vos réponses, mais, en même temps, je veux
juste clarifier l'air, peut-être, sur certains éléments. Ça fait que je
laisse... Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
Mme la députée de Bonaventure.
Mme Blouin : Merci. Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, bonjour à vous trois. Merci d'être avec
nous aujourd'hui pour parler de ce projet de loi là. J'avais très hâte de vous
rencontrer, parce qu'évidemment c'est de vous dont il est question ici. Alors,
merci de prendre le temps de venir nous parler de ça. Projet de loi qui, je
tiens à le rappeler, sert à favoriser l'accès à la médecine publique aux
Québécois. Donc, d'ailleurs, toutes nos actions, tous nos gestes sont guidés
avec cet objectif-là, que je pense que vous partagez.
Je sais que vous n'avez pas de boule de
cristal, mais, avant de parler vraiment en profondeur du projet de loi,
j'aimerais que... vous entendre sur vos carrières respectives. Vous, peut-être
répondre à tour de rôle, est-ce que vous prévoyez d'abord pratiquer au sein du
réseau public?
Mme Lavoie (Mathilde) : Oui,
mais je pense qu'en ce moment on n'est pas là pour parler de nous,
spécifiquement. On représente les 5 000 étudiants du Québec et ceux
du campus de Moncton. Par contre, c'est sûr qu'en étant ici et en ayant une
implication bénévole au sein de notre fédération, c'est sûr qu'on est des
personnes qui aimons le public comme notre fédération et les
5 000 étudiants qu'on représente. Mais je pense que si on peut se
recentrer, là, c'est sûr qu'en ce moment le discours, il n'accueille pas, là,
les étudiants. Mais je peux continuer par rapport...
Mme Blouin : ...je peux aussi
poursuivre. Je suis curieuse de savoir pourquoi ça vous dérangerait, vous et
vos... les étudiants que vous représentez, de travailler cinq ans au Québec au
public?
M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Je
crois que l'enjeu ici, c'est que... on va parler des exceptions à d'autres
moments, mais on peut en énumérer plusieurs, les exceptions qui ne sont pas
comprises, qu'on pense à un jeune médecin engagé qui va aller faire de la
médecine humanitaire après sa formation, on ne croit pas que ce serait possible
avec le projet de loi, qu'on parle des fellowships qui serait peut-être inclus,
qu'on parle d'un médecin qui va faire... aller chercher de l'expertise à
l'international. Tu sais, je pourrais vous donner... Exemple, si la commission
s'était tenue il y a 10 ans de ça, on aurait demandé de faire une
exception pour les astronautes puis on nous aurait dit de redescendre sur
terre, parce qu'on n'est pas capables de prévoir à l'avance toutes les
exceptions. Je crois qu'on est tous contents que David Saint-Jacques nous
représente à l'international et même en dehors de la Terre. Je crois que ça...
je crois que ça, ce que ça montre, c'est qu'on risque de tuer l'innovation et
la diversité des pratiques médicales si on décide d'établir une liste
d'exceptions qui est «settée» dans le béton à l'avance. Et la beauté de la
médecine, c'est que ça évolue vite, il y a des nouvelles technologies qui
arrivent, il faut avoir la liberté de changer sa pratique dans l'avenir
également.
Mme Blouin : Mais je veux...
je veux vous rassurer aussi, là, mais je pense qu'on va quand même être
capables d'exempter certains groupes de façon intelligente puis on va compter
sur la collaboration de tous pour le faire.
Vous avez possiblement entendu parler du
Collège des médecins qui dit qu'il est en faveur du projet de loi, qui nous
demande même des mesures un peu plus costaudes. J'aimerais ça savoir qu'est-ce
que vous pensez des mesures qu'il suggère. En fait, on parle de mieux encadrer
peut-être le va-et-vient entre le public, le privé, on parle de peut-être avoir
des tarifs maximums au sein du privé. J'aimerais vous entendre là-dessus.
Est-ce que vous trouvez que c'est des mesures intéressantes?
Mme Lavoie (Mathilde) : Mais,
premièrement, je pense que, tu sais, globalement, il y a quand même un... un
consensus, là, avec les fédérations ce matin, nous également qu'en ce moment le
projet de loi n'est pas le bon terrain de jeu, là, pour...
Mme Lavoie (Mathilde) : ...avoir
les objectifs escomptés. On reconnaît, là, la mission du Collège, là, qui est
de justement protéger la population québécoise contre une médecine non
réglementaire, là, non sécuritaire. On ne pense pas qu'il y ait d'enjeux à ce
niveau-là. On a également demandé une rencontre, là, avec le Collège pour
comprendre les fondements de leur position puis en apprendre davantage. Toutefois,
là, ils ne nous ont pas encore de rencontre en amont de la commission. Donc, je
tiens quand même à préciser cela, mais avec justement la table qu'on propose,
ça sera une occasion, avec toutes les données, avec une collaboration, de
parler des mesures que le Collège propose et d'autres que... qui ne sont pas
entièrement sur le projet de loi précis, là, du p. l. 83.
• (14 h 20) •
Une voix : Ma collègue va
poursuivre.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Dorismond : Bonjour.
Bienvenue à la commission. Vous savez, depuis ce matin, je n'ai pas entendu
parler... L'enjeu principal, c'est améliorer l'accès à la population
québécoise. Puis, vous savez, le réseau privé, ce n'est pas tout le monde qui a
accès. Et on parle surtout des... de la clientèle vulnérable qui n'ont pas...
surtout pas accès. Puis cette clientèle-là, des fois, elle a des maladies
chroniques, ils sont considérés assez lourds. Comment vous voyez ce volet-à,
pour cette clientèle-là, de faire en sorte qu'elle ait accès à un médecin de
famille puis qu'on améliore l'accès dans le réseau public?
Mme Harvey (Félicia) : Oui,
comme on disait tantôt, là, la FMEQ se penche depuis plusieurs années sur ce
genre d'enjeux, là, puis c'est pour ça qu'on a... on a une position, là,
propublic, et qu'on défend, là, un système de public accessible et universel.
Puis une autre... C'est une des raisons pourquoi on propose la table. C'est
pour bien comprendre les enjeux. On en a parlé beaucoup aujourd'hui, mais c'est
de comprendre pourquoi il y a des départs, puis aussi comprendre vers où on
s'en va avec le privé-public. Le Québec a toujours eu ces deux systèmes, ou du
moins depuis plusieurs années. Mais nous, on pense qu'on est rendu au point de
se dire : Où on en est maintenant, où on va, d'avoir une vision de savoir
où on va avec ça justement pour les populations que vous avez nommées, pour les
enjeux qui ont été nommés aujourd'hui. C'est pour ça qu'on pense qu'on est
rendu à ce point-là de... d'avoir... et que ça soit une table, que ça pourrait
être... tu sais, le mot n'est pas important, mais c'est vraiment d'avoir ces
discussions-là avec tout le monde autour de la table, comme un peu il se fait
en ce moment, là, avec la commission sur les écrans. Donc, avant de proposer un
projet de loi, d'avoir les discussions, tu sais, de... de voir tout ce qui est
possible, puis ensuite de légiférer. Mais on ne pense certainement pas que ça
passe par ce projet de loi là qui est coercitif, là, même si c'est le mot à la mode,
mais c'est quand même ce qui est proposé, là, dans le projet de loi.
Mme Dorismond : Bien, en
revenant en lien avec la FMOQ, ils ont parlé beaucoup de conditions de travail,
de surcharge de travail. Vous ne croyez vous pas que de permettre aux nouveaux
étudiants, cinq ans, d'aller donner un coup de main aux nouveaux collègues, ça
ne serait pas une bonne idée.
Mme Harvey (Félicia) : Nous,
évidemment, on encourage nos membres et on milite pour cela que nos membres
aillent dans le public au Québec. Par contre, juste pour clarifier, là, les
étudiants en médecine et les jeunes médecins goûtent au système public. En
effet, là, durant notre formation, on va être deux ans à l'externat, donc en
stages, là, non rémunérés où on est tous les jours au public, nous trois le
sommes en ce moment. Puis ensuite on va avoir la résidence qui est entre 2 à
6 ans, où tous les résidents sont au système public. Donc, ils côtoient le
système public, et c'est de là que la... notre proposition d'une table est intéressante,
c'est que la FEMQ serait extrêmement intéressée de s'attaquer aux raisons des
départs, que ce soit pour les jeunes médecins ou tous les médecins, là, qui
quittent le système public. Mais nous, ce qu'on voit, c'est que nos membres, en
grande majorité, veulent travailler au système public et travaillent au système
public. Les résidents travaillent, là, comme on a dit ce matin et le côtoient,
là, quotidiennement pendant plusieurs années.
Mme Dorismond : Puis
qu'est-ce que vous pensez des autres mesures qui ont été proposées, comme le
Collège des médecins qui dit qu'on ne va pas assez loin? Vous, vous parlez
d'une table, puis de légiférer après. Pourtant, les autres nous demandent de
légiférer, puis d'aller encore plus loin que les... que la proposition qu'il y
a là.
Mme Harvey (Félicia) : Oui.
Bien, comme le ministre pourrait être présenté tantôt, là, on reconnaît, là,
les efforts que le gouvernement fait pour améliorer le système public, puis ça,
on les salue et on travaille comme le ministre disait aussi, là, quand on a
présenté dans les présentations sur plusieurs tables à ce sujet-là. Par contre,
évidemment, pour le CMQ, précisément, parce que les autres groupes, là, je ne
sais pas exactement c'est lesquels, mais nous, évidemment, on ne va pas... on
n'est pas d'accord avec eux pour aller plus loin dans des mesures coercitives,
on demande, là, l'abandon de ce projet de loi là. Mais pour toutes les autres
mesures qui sont abordées, ou même dans le mémoire, là, du ministre sur ce
projet de loi, on serait très ouverts à en discuter, là, à la table. On pense
que ça serait le bon milieu pour avoir ces discussions-là pour évaluer si ça
serait des mesures efficaces et réalistes au Québec.
Mme Dorismond : Avez-vous des
mesures efficaces à proposer...
Mme Harvey (Félicia) :
...pour évaluer si ce serait des mesures efficaces et réalistes au Québec.
Mme Dorismond : Avez-vous
des mesures à proposer?
M. Pelletier-Lebrun
(Maxence) : Juste... Notre formation en médecine, ce qu'on nous
apprend avant tout, c'est de devenir des bons scientifiques. Et qu'est-ce que
ça fait un scientifique? Ça récolte les données probantes, ça évalue
l'efficacité de différentes mesures. Et après ça, ça part avec un plan qui est
vraiment adapté à la situation terrain. Puis nous, on va adopter la même
position de faire les choses bien pour qu'on ne se retrouve pas en commission
dans cinq ans, dans 10 ans, avec les mêmes problèmes encore. Puis je crois
qu'il y a une question aussi d'accès aux données. Je sais que la ministre est
quand même sensible à ça avec son tableau de bord que j'aime peut-être autant
que lui, mais en ce moment, c'est très difficile d'avoir les données sur les
départs. On reçoit souvent des données caviardées. La FMOQ doit travailler les données
de la RAMQ à la mitaine, en fichier Excel. Je crois qu'on va tous être d'accord
à ce stade-ci pour avoir un meilleur accès à ces données-là pour qu'on puisse
avoir des discussions éclairées puis un vrai débat de société.
La Présidente (Mme Poulet) :
Mme la députée de Bonaventure.
Mme Blouin : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Donc, supposons qu'on fait... Je veux revenir aux
exemptions. Supposons qu'on fait vraiment un travail de fond et qu'on arrive à
exclure tous les groupes qui devraient l'être, est-ce que vous seriez en faveur
de ce projet de loi là?
M. Pelletier-Lebrun
(Maxence) : Je crois que c'est ce qu'on disait tantôt. On ne peut pas
prévoir tous les groupes à l'avance.
Mme Blouin : On va y
aller en monde parallèle. On réussit à tout exclure les autres. Est-ce que...
Est-ce que vous êtes d'accord avec le projet de loi?
M. Pelletier-Lebrun
(Maxence) : Ça reste quand même qu'il y a une question à savoir
pourquoi seulement les étudiants en médecine seraient ciblés par cette
mesure-là, alors qu'il y a plusieurs ordres professionnels qui vont vers le
privé, que ce soit les physiothérapeutes, les psychothérapeutes.
Mme Blouin : Mais est-ce
que vous seriez en faveur?
M. Pelletier-Lebrun
(Maxence) : Non. Nous, on demande son abandon aujourd'hui.
Mme Blouin : Merci.
La Présidente (Mme Poulet) :
Est-ce qu'il y a d'autres questions du côté de la banquette gouvernementale? Il
reste 30 secondes. C'est beau? Parfait. Alors, merci beaucoup. Alors, je
cède maintenant la parole au député de Pontiac pour une période de
8 min 35 s.
M. Fortin :
Très bien. Merci. Merci, Mme la Présidente. Merci à vous trois d'être ici
aujourd'hui, mais également pour votre... pour votre mémoire qui est recherché,
réfléchi et tout à fait pertinent envers les questions qu'on se pose
aujourd'hui. Je veux vous rassurer d'abord, tant vous que M. le ministre, qu'il
n'y a personne qui aime le tableau de bord autant moi. Ça me donne des
munitions à tous les jours, ce tableau de bord là. Là, je comprends que vous
vous prônez l'abandon du projet de loi. Vous l'avez dit, vous avez été claire.
Mais est-ce que je comprends qu'une des... une des raisons qui vous poussent à
dire que ce projet de loi là, c'est un projet de loi qui est nocif et qu'il
doit être retiré, c'est justement le sondage que vous avez fait auprès de vos
membres qui vous disent : Bien, nous autres, on considérerait aller à
l'extérieur du Québec, là. Je ne pense pas qu'il n'y ait personne, ici, bien
j'ose croire, qui souhaite que les étudiants aillent étudier ailleurs parce
qu'on a mis une pièce législative qu'ils considèrent restrictive.
M. Pelletier-Lebrun
(Maxence) : Oui, puis tu sais, je crois que c'est ça, que la solution
risque d'avoir des effets pervers qui sont plus négatifs que le problème
actuel. On parle entre 25 et 50 étudiants par année alors que, là, c'était
plusieurs centaines d'étudiants qui nous ont dit qu'ils considéreraient aller
ailleurs. Puis le ministre a dit que ça ne ciblerait pas les étudiants qui
signent en début. C'est vrai, il y a quand même 5 000 étudiants en ce
moment dans les facultés de médecine qui pourraient décider d'aller ailleurs.
Peut-être qu'ils fondent une famille. Ils décident de s'établir parce qu'ils
ont passé sept ans en Ontario, par exemple. Ce n'est pas des étudiants qu'on
veut perdre au Québec. Donc, ça pourrait avoir des effets négatifs sur le
réseau public, puis pour plusieurs décennies même.
M. Fortin :
Je veux juste... Je veux juste bien comprendre ce point-là, parce que le
ministre, tantôt, si moi, j'ai bien compris son intervention, il nous a
dit : La signature, elle devra être faite au début des études. Vous, votre
interprétation du projet de loi, là, c'était que c'était un choix de le signer
au début ou au moment du début de la résidence. C'est bien ça?
M. Pelletier-Lebrun
(Maxence) : C'est-à-dire, je veux dire, il y a deux articles
différents, l'article 5 et l'article 6. Nous, on parlait de
l'article 5 qui touche la signature au début de la résidence.
M. Fortin :
De la résidence.
M. Pelletier-Lebrun
(Maxence) : Alors que le ministre parlait du... de l'article 6.
M. Fortin :
C'est ça. O.K. On se comprend. Alors, ce qui vous inquiète à travers ça, c'est
que les étudiants qui appliquent pour des résidences à plusieurs endroits
différents en ce moment, là, notamment pour des spécialités, on l'a mentionné
tantôt, là, ils vont peut-être plus se tourner vers l'extérieur du Québec que
le Québec, là.
Mme Harvey (Félicia) :
Nos craintes, là, justement, pour l'article un, comme le ministre a dit, s'il
fait signer à des jeunes qui rentrent dans un programme entre 19 à 25 ans,
évidemment que là, à ce moment-là, ils ne pourront plus reculer. Mais un autre
point qui nous inquiète, ce n'est pas seulement l'idée des départs, c'est aussi
qu'on est contre ce genre de mesures là au Québec. On est contre les mesures
coercitives envers des jeunes étudiants. On est contre cibler un seul groupe de
personnes et dire : Vous, vous avez un contrat social. C'est que, nous, on
pense fondamentalement que ce n'est pas comme ça qu'on fonctionne au Québec,
qu'il faut travailler pour avoir un meilleur système public. Puis les
étudiants, on l'a dit et on le répète, veulent travailler dans un système
public. Puis en ce moment, ce genre de contraintes là, ça inquiète nous, mais
aussi d'autres étudiants au Québec. On a eu des discussions avec l'Union
étudiante québécoise... du Québec, pardon, qui s'inquiète, qui se dit :
Est-ce que ça va créer un précédent? Puis maintenant, ça ouvre la porte à des
mesures, à d'autres groupes d'étudiants qu'on va dire: Bon, bien, maintenant,
on vous met des modalités de comment vous allez avoir une profession au Québec
si vous décidez d'étudier au Québec. Je l'ai dit tantôt, mais je le répète,
c'est un choix de société d'avoir des études subventionnées. Et nous, on croit
vraiment dans ce principe-là, puis on croit qu'il doit être respecté.
M. Fortin :
Très bien...
M. Fortin :... Vous y avez touché un peu tantôt, je pense, en réponse
aux questions d'une des députées, là, en disant : Bien, tu sais, des
solutions autres, nous, on veut les évaluer, on veut s'assurer qu'on le fait
correctement. Mais en avez-vous évalué d'autres? Par exemple, si on... quand on
regarde les juridictions autres, là, qui ont peut-être mis des mécanismes pour
tenter de garder les médecins soit au public, soit dans leur province, là, la
question de la tarification maximale dans le privé, est-ce que c'est quelque
chose que vous avez regardé, que vous avez étudié puis qui vous apparaît
porteur ou pas?
• (14 h 30) •
Mme Harvey (Félicia) : C'est
des mesures qu'on a étudiées dans le cadre de mémoires, là, comme je disais,
par le passé. Par contre, ça ne touche pas directement nos membres, là, parce
que, tu sais, nos membres sont encore aux études. Donc, on va revenir avec le
point qu'on disait un peu tantôt, de l'évaluer, mais c'est qu'on veut l'évaluer
aussi parce qu'on... comme je dis, on ne peut pas aller chercher ces
informations-là auprès de nos membres puis avoir cette discussion-là sans la
FMSQ et la FMOQ, et donc les médecins qui sont là en ce moment. C'est
difficile, mais c'est évidemment des solutions qu'on envisage, parce qu'on est
d'accord avec le ministre qu'il faut proposer quelque chose, il faut continuer
d'avancer, on veut aussi travailler pour un système de santé public. Donc, oui,
c'est des mesures qu'on a déjà envisagées puis qu'on pense qu'il reste à
évaluer.
M. Fortin :Le ministre nous a dit tantôt en réponse aux commentaires
que la seule place où il y a quelque chose comme ça, là, c'est Cuba. Il vous a
dit : Bien, faites attention, là, l'Ontario a un système similaire. Je ne
sais pas si vous l'avez regardé. Mais nous, la compréhension qu'on a du modèle
ontarien, c'est que ce n'est pas une pénalité comme ça, là, c'est un modèle où
il y a une subvention qui doit être remboursée si on ne remplit pas les
obligations qui sont mentionnées, ce n'est pas une pénalité uniforme à tout le
monde comme c'est le cas ici, là.
M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Il
faut mentionner également qu'il n'y a pas de limite sur la pratique dans une
province donnée, ce qui serait proposé avec le projet de loi du ministre
aujourd'hui.
M. Fortin :Tout à fait. Ils peuvent pratiquer au Manitoba, au Québec
ou ailleurs...
M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Exact.
M. Fortin :...tant qu'ils restent au Canada.
M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Voilà.
M. Fortin :O.K.
M. Dubé : Je voulais vous
donner une précision.
M. Fortin :Prenez le temps qu'il faut.
M. Dubé : Je peux? Je
l'apprécie. Tout à l'heure, quand j'ai parlé du Nouveau-Brunswick, là, je veux
juste qu'on se comprenne, quand la province, le Nouveau-Brunswick envoie les
quatre étudiants dont je parlais tout à l'heure, ce que le Nouveau-Brunswick
demande en échange de cette signature-là de l'engagement, c'est de revenir
pratiquer au Nouveau-Brunswick. Vous comprenez? Donc, ça se fait déjà, là. Le
Nouveau-Brunswick dit : Moi, je demande à l'étudiant... Qu'on soit d'accord
ou pas. Mais je veux juste qu'on comprenne ce qui existe déjà, là.
M. Fortin :On s'entend, M. le ministre, mais la situation n'est pas la
même que ce qui est mis de l'avant aujourd'hui, là. Puis on pourra....
M. Dubé : Puis il y a une
pénalité de 400 000 $.
M. Fortin :Non, non, mais... On pourra en discuter, mais ce n'est pas
la même que celle de l'Ontario à laquelle vous avez fait référence tantôt.
M. Dubé : Non, non, c'est
vrai, c'est ça, il y a deux cas différents.
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
si vous me permettez, on va poursuivre les échanges avec le parti de M. le
député de Pontiac.
M. Fortin :Merci, Mme la Présidente. En fait, je passerais la parole à
ma collègue, si c'est possible. Merci, merci.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui.
Mme la députée de La Pinière, allez-y.
Mme Caron : Oui. Merci, Mme
la Présidente. Alors, merci pour votre présentation. Vous avez été très, très
éloquents, tous les trois, et en plus vous amenez une idée constructive, une
proposition constructive de réunir les joueurs autour de la table nationale de
concertation. Est-ce que dans ces... Parce que vous mentionnez que cet espace
réunirait le gouvernement, le ministère de la Santé et Services sociaux, les
fédérations médicales étudiantes et d'autres acteurs du système de santé.
Est-ce que je peux en déduire que dans ces autres acteurs il y aurait Santé
Québec aussi, même s'ils ne sont pas nommés précisément là, ou non?
M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Ce
sont des acteurs pertinents pour le réseau, effectivement.
Mme Caron : D'accord. Merci.
Dans les études que vous avez faites, dans les consultations que vous avez
faites, ce que je comprends, c'est que vous craignez perdre de vos collègues.
Vous avez dit aussi que les causes des départs étaient inconnues. Dans les deux
mémoires qu'on a eus tout à l'heure de la Fédération des omnipraticiens et
celle des spécialistes, ils ont... on nous parlait beaucoup du milieu, de... en
fait, du matériel ou des ressources à la disposition des médecins, dans le
public, dans le milieu de travail, dans l'environnement de travail. Puisque
tous les trois, vous y travaillez déjà, est-ce que vous voyez déjà aussi que...
c'est-à-dire, est-ce que ces mêmes causes-là, vous les voyez aussi, ou vous
pensez que c'est plus autre chose... sur autre chose qu'il faut travailler?
Mme Harvey (Félicia) : Non,
je dirais qu'on est en accord, là, avec les enjeux qui ont été nommés. C'est
sûr qu'on n'a pas tous les mêmes années de pratique derrière la cravate que nos
collègues, mais on reconnaît, là, le manque de ressources, puis, je dirais
aussi, ça a été nommé à quelques reprises, là, mais le manque d'autres
personnels aussi, là, qui sont nécessaires, là. On est dans une médecine, on
l'a dit tantôt, avec des cas complexes. Ça se traite, oui, avec des médecins,
mais avec plein d'autres professionnels qui sont essentiels. On a parlé des
chirurgies, mais on pourrait parler de plein d'autres exemples qui nécessitent
plusieurs professionnels. Donc, oui, on reconnaît ce qu'eux ont nommé. Il y a
aussi la paperasse, puis le ministre, tu sais, travaille à des solutions à ce
niveau-là. Mais nous, ce qu'on disait, c'est qu'on pourrait, à la...
14 h 30 (version non révisée)
Mme Harvey (Félicia) : ...c'est
travailler à des solutions à ce niveau-là, mais nous, ce qu'on disait, c'est
que... c'est qu'on pourrait, à la table, aller encore plus loin, vraiment,
aller voir qu'est-ce qui fait quitter les plus jeunes, qu'est-ce qui fait
quitter les moins jeunes, qu'est-ce qui fait quitter les pas jeunes du tout, puis
essayer de s'attaquer vraiment à ces causes-là. Il y en a qui ont été nommées. On
pourrait en découvrir d'autres et...
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci. Je m'excuse de vous interrompre. On va poursuivre la discussion avec le
député de Rosemont pour une période de 2 min 52 s.
M. Marissal : Bonjour. Merci
d'être là et merci pour votre mémoire. Je vais y aller rapidement, parce que je
n'ai pas beaucoup de temps, là, en citant au texte certains de certains
passages de votre mémoire. «Également, certains réaliseront... pardon, que la
pratique médicale ne leur convient pas seulement une fois leur permis de
pratique obtenu». Vous faites la lecture, là, du projet de loi, que ces gens-là
seront pénalisés si d'aventure, même une fois le diplôme obtenu, ils
considèrent que ce n'est fait pour eux pour des raisons qui leur appartiennent.
Mme Harvey (Félicia) : En
fait, je n'ai pas le projet loi devant moi, mais c'est dans l'idée que c'était
écrit «d'y exercer la médecine au Québec». Et nous, on voulait montrer que :
Qu'est-ce qui se passe d'un étudiant qui signe ça à 19 ans et qui change
de programme, je l'ai nommée un peu tantôt, là, qui se réoriente, ou même un
médecin qui a son diplôme et qui décide pour n'importe quelle raison qu'il ne
pratique pas la médecine. Il n'y a pas d'information, là, à ce sujet-là dans le
projet de loi.
M. Marissal : Et la même
chose quand vous écrivez «un étudiant doit avoir le droit d'abandonner ou de
changer de programme d'études», ce qui est assez fréquent.
Mme Harvey (Félicia) : Oui.
M. Marissal : «Un médecin
doit aussi avoir le droit de changer de domaine professionnel et ne pas
pratiquer la médecine sans pénalité». Donc, même question, là. Vous la lecture
froide que vous faites du projet de loi, excusez-moi, je perds la voix, la
lecture froide que vous faites du projet de loi, c'est que ça ne serait plus
permis et qu'il y aurait des pénalités.
Mme Harvey (Félicia) : On
veut s'assurer que ce ne soit pas le cas, et c'est pour ça qu'on le nommait.
Oui, exactement, là, dans la lecture, «d'y exercer la médecine au Québec».
M. Marissal : Cela dit,
entre vous et moi, là, de façon très précise, cette discussion-là, elle est
purement philosophique puisque vous rejetez d'emblée le projet de loi. Puis je
ne ferai pas semblant qu'on ne s'est pas parlé avant. On a fait notre travail
et vous avez fait votre travail. Je sais que vous êtes opposés à ce projet de
loi là, mais vous apportez quand même des précisions, notamment sur l'article 6
qui, selon moi, ouvre la porte à des allers-retours infinis sur quelles
seraient les exceptions. Là, je viens de faire ce qu'on ne fait pas dans mon
ancien métier, je viens de vous mettre la réponse dans la question. Alors, est-ce
que c'est ce que vous considérez aussi?
Mme Lavoie (Mathilde) : Oui,
absolument. On ne peut pas prévoir toutes les exceptions puis on ne sait pas à
qui ça va s'appliquer pour le futur également, là.
M. Marissal : O.K. Bon,
pour... «for the record», comme on disait aussi dans mon ancien métier, j'ai
fait ça parce que je n'ai pas assez de temps pour vous poser toutes les
questions. Alors, je suis obligé de prendre quelques raccourcis. Et je vous
remercie pour votre temps et votre précieuse collaboration.
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci. Alors, je cède la parole au député des Îles de la Madeleine pour le
même, la même durée, 2 min 52 s.
M. Arseneau : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous trois pour la présentation. Et pour
la suggestion, là, de créer une table, une instance, un forum, je pense que c'est
très constructif. Et merci de nous en faire la proposition. Je voudrais aborder
deux éléments. Premièrement, la place du privé. Est-ce que vous jugez, quand
vous dites qu'on n'aborde pas de manière fondamentale le problème de l'expansion
du privé, je joue paraphrase, vous reconnaissez qu'il y a un problème avec la
place grandissante du privé tout de même?
Mme Lavoie (Mathilde) : Oui,
on reconnaît qu'en ce moment le privé a une place importante, qu'on mérite d'aborder
la question, là, de puits sans fond. Puis également, nous, on s'est positionné
en faveur d'un système public et on dénonce justement, là, des fois certaines
tentatives, là, que certaines compagnies ont auprès de nos membres. On ne
souhaite pas leur offrir une tribune. On a le... Ce choix-là, en tant que
fédération, on sait que ça existe, mais on reconnaît également qu'en ce moment,
c'est un phénomène marginal qui mérite quand même d'avoir notre attention, là,
pour ne pas que ça... que ça continue de la sorte.
Mme Harvey (Félicia) : Puis
j'ajouterais aussi que... On l'a dit ce matin, mais le gouvernement, avec ce
projet de loi là, propublic, on... Puis l'objectif, je pense que c'est clair
pour tout le monde, on est en accord, mais ouvre aussi la porte au privé. Donc,
nous, on dit : Bien là, il faut se faire un plan pour l'avenir. Où on va?
Est-ce qu'on l'ouvre? Est-ce qu'on la ferme? Parce que si on ouvre la porte puis
on se plaint que les gens y vont... Donc on aimerait avoir un plan sur où on
va.
M. Arseneau : Est ce que
ça se peut qu'on appelle ça de la dissonance cognitive, là? Si c'était un
individu qui se faisait ces deux propositions-là en parallèle. Mais vous parlez
des contraintes, les PREM par exemple, et les AMP, mais j'ai déjà discuté avec
vous pour ce qui est par exemple de la distribution des effectifs...
M. Arseneau : ...les médecins,
pour les régions, par exemple, vous êtes quand même favorable à ce qu'on puisse
distribuer, entre guillemets... s'assurer du déploiement des médecins partout
sur le territoire. Puis ça, c'est quand même un enjeu réel.
Mme Langelier (Marie-Pier) : Oui,
rapidement. J'avais dirigé l'an passé un mémoire sur la formation médicale
délocalisée et, ce qu'on voyait, c'est que les meilleurs modèles à
l'international, c'est des modèles qui sont basés sur des contingentements qui
sont non coercitifs, qu'il y a un programme de mentorat, des entrevues qui sont
différenciées pour la région. Donc, ce qui se fait de mieux à l'international,
c'est de donner envie au monde d'aller dans le réseau, ce n'est pas les
attacher au réseau. Il faut que le réseau public redevienne l'employeur de
choix. Puis c'est vraiment... S'il y a un message à retenir, c'est :
Faites en sorte que les étudiants en médecine aient envie de venir dans le
réseau public et ils vont venir, vous pouvez être certains de ça, parce qu'ils
veulent pratiquer au public, les étudiants en médecine.
• (14 h 40) •
M. Arseneau : Je vous
remercie beaucoup, c'est très éclairé.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. Alors, je cède la parole au député de Saint-Jérôme pour une période
de 2 min 12 s. Merci.
M. Chassin :Merci. Alors, merci pour votre présentation. Je comprends
que vous êtes en faveur de l'objectif du projet de loi, puis là, sans jouer sur
les mots, quand je lis la note descriptive, dans le fond, là, les notes
explicatives au début du projet de loi, c'est effectivement un projet de loi
qui vise à favoriser l'exercice de médecine au sein du réseau public, mais les
outils qui sont utilisés, c'est : «Le projet de loi oblige tout nouveau
médecin...» ou, encore: «ça permettra au gouvernement d'imposer aux étudiants...»
Donc, autrement dit, «favoriser», pour vous, ce n'est pas un synonyme de
coercitif comme ça l'est dans le projet de loi.
Mme Harvey (Félicia) : ...puis
on croit que des mesures structurantes, puis sans répéter tout ce qu'on vient
de dire, bien, ça favoriserait l'exercice au public. Puis d'enchaîner les gens
à un système, on craint aussi que ça donne l'idée d'un devoir accompli. Après
cinq ans, ça crée le momentum de se poser la question : Bon, je reste tu,
je ne reste pas, là, j'ai fini mon cinq ans? Puis on ne veut pas...
M. Chassin :...d'aller au privé si on a déjà fait notre cinq ans au
public, ah! bien là, on est libérés justement.
Mme Harvey (Félicia) : Exact,
puis ça serait ça avec cinq ans ou n'importe quelle durée. Ce n'est pas le
message qu'on veut envoyer.
M. Chassin :Puis, en fait, c'est intéressant. Autrement dit, je
comprends aussi qu'il y a des médecins qui sont dans des situations un peu
particulières. Si on est sous-ministre adjoint, comme Dr Bergeron, bien, on
n'est pas au public, alors qu'on est au public, en quelque sorte, c'est ça?
Mme Harvey (Félicia) : C'est
exactement ça, le point de diversité de pratiques, là, qu'on abordait au début,
là.
M. Chassin :...beaucoup d'expérience, hein, n'est-ce pas? Puis là je
vous pose une question, peut-être, sur une solution, très rapidement...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Poulet) : Pardon!
On poursuit.
M. Chassin :...parce que je n'ai pas eu le temps. Mais si on avait...
au lieu de faire cinq ans dans la carrière, si on avait, par exemple,
40 heures par semaine à faire au public, puis, après, bien, si vous voulez
faire plus d'heures puis si vous voulez changer au privé, c'est autre chose,
vous pouvez?
Mme Lavoie (Mathilde) : Bien,
je pense que c'est une solution qui pourrait être étudiée lors d'une table.
M. Chassin :...
Mme Lavoie (Mathilde) :
Exactement, vous l'aurez compris. Mais je pense également que, tu sais, à voir
nos patrons aller, c'est souvent bien au-delà de 40 heures qu'ils
travaillent et qu'ils nous côtoient également en stage. Mais ça pourrait être
en effet quelque chose à étudier, comme toutes les autres mesures qui ont été
mentionnées ce matin et plus encore.
M. Chassin :Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Poulet) : Parfait.
Merci. Alors, je vous remercie tous les trois pour votre contribution à nos
travaux. Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux
prochains invités de prendre place.
(Suspension de la séance à 14 h 43)
(Reprise à 14 h 47)
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Fédération des
médecins résidents du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Alors, je vous invite donc à présenter et à commencer
votre exposé.
M. Soufi (Ghassen) : Mme la
Présidente, chers membres de la commission, je vous remercie pour cette
invitation aujourd'hui. Je suis le Dr Ghassen Soufi, médecin résident en
psychiatrie et président de la Fédération des médecins résidents du Québec. Je
suis accompagné, à ma droite, de Me Savignac Dufour, directeur général de la
FMRQ.
La FMRQ représente les médecins affiliés
aux quatre facultés de médecine au Québec, soit plus de
4 000 médecins résidents. Ceux-ci offrent des soins à la population
québécoise dans le cadre d'une résidence qui dure au minimum deux ans et qui peut
s'étaler jusqu'à sept ans. Les médecins résidents travaillent exclusivement
dans le réseau de la santé et peuvent poser les mêmes diagnostics et les mêmes
gestes que les médecins en exercice. Ce travail s'effectue à raison de
72 heures par semaine en moyenne, parfois jusqu'à 19 jours
consécutifs.
Les médecins résidents se trouvent partout
au Québec dans le cadre de leur formation. À titre d'exemple, je suis affilié à
l'Université McGill, mais je travaille présentement au CHUM. Dans deux
semaines, je serai à Puvirnituq et à Inukjuak dans le Grand Nord québécois pour
y offrir des soins en santé mentale. Puis, dans quatre semaines, je
travaillerai aux Îles-de-la-Madeleine. Dans le but de travailler dans un centre
académique au Québec, je vais compléter un fellowship en Californie à compter
de juillet, bien que ma formation de résidence sera alors terminée.
Nous souhaitons d'abord exprimer aux
membres de la commission que c'est toujours un honneur pour la FMRQ d'être
invitée à partager sa position sur des pièces législatives, surtout celles qui
touchent aussi directement nos membres que le projet de loi à l'étude
aujourd'hui. Notre position vis-à-vis les enjeux qui sont soulevés dans le
projet de loi n° 83 est on ne peut plus claire. La FMRQ a toujours été et
sera toujours en faveur d'un système public de santé fort, accessible et
efficace, qui puisse disposer de toutes les ressources nécessaires afin
d'offrir des soins de la plus haute qualité à la population québécoise. Nos
membres travaillent à 100 % dans le réseau public et ils veulent tous y
poursuivre une pratique après la fin de la résidence. Ainsi, précisément parce
que nous souhaitons être cohérents avec cet objectif, il nous est impossible
d'appuyer le projet de loi sous aucune forme, car nous faisons l'analyse qu'il
ne mènerait bien au contraire...
M. Soufi (Ghassen) : ...à
l'érosion du système de santé publique qui nous est si cher. Bien qu'il soit
très court, ce projet de loi entraînerait d'importants changements au niveau de
la pratique médicale au Québec qui vont bien au-delà de l'idée réductionniste
qui y est présentée, selon laquelle forcer la main des jeunes médecins
résoudrait tous les problèmes. Le projet de loi no 83 propose deux
principales mesures qui risquent toutes deux d'éroder nos efforts de renforcer
la pratique médicale au Québec. La première consiste en l'obligation de
travailler dans le secteur public pendant cinq ans pour les futurs médecins. Et
la deuxième consiste en l'imposition de contrats à l'entrée en médecine ou en
résidence, qui obligerait les finissants à exercer la médecine au Québec sous
peine de pénalités financières. Nous allons traiter de ces deux éléments
séparément.
• (14 h 50) •
Premièrement, sur la question de
l'obligation de pratiquer dans le secteur public, il ne faut pas trop se
creuser la tête afin de voir quelle est la réelle vision du gouvernement en la
matière. On nous présente dans ce projet de loi le réseau public comme un
purgatoire dans lequel il faudrait faire une besogne qui n'est pas désirable,
une période obligatoire qui prescrite, comme un service militaire. Ce que nous
entendons de nos membres, c'est effectivement qu'on dévalorise cette pratique
médicale au public qui au contraire est le choix de l'écrasante majorité des
jeunes médecins. Lorsque je me suis engagé personnellement à compléter mes
études en médecine et à poursuivre ma formation en psychiatrie, j'ai toujours
su que mon service au public durerait l'entièreté de ma carrière. Tous mes
collègues en médecine et dans le milieu de la santé, au sens plus large,
comprennent que nous sommes formés par l'État québécois afin, en bout de ligne,
de prodiguer des soins aux Québécois. Sommes-nous en train de suggérer que
l'éducation n'est plus un investissement social, mais plutôt un bien, un bien
de consommation qui a un prix et qui doit être remboursé à la fin des études
par des clients que sont les apprenants? C'est une logique pour nous qui est
très dangereuse. Personne ne commence son long parcours en médecine de plus de
10 ans en se disant qu'il a hâte de pratiquer au privé. Au contraire, ce
sont plutôt les obstacles qui se dressent en cours de chemin, qui forcent les
jeunes médecins à explorer d'autres avenues que le public.
Comme nous l'avons déjà expliqué devant
cette commission, certains médecins résidents peinent à trouver un poste en fin
de résidence. Cela s'explique notamment par des contraintes administratives
limitant la pratique et le manque de ressources et d'infrastructures permettant
la pratique de certaines spécialités au sein du réseau public. On pense
notamment aux salles d'opération, ce qui a été mentionné aujourd'hui, aux
ressources humaines. Des fois, il s'agit tout simplement qu'il n'y a pas de
poste, malgré le besoin de personnel criant. Tous ces enjeux demeureront
inchangés, que le projet de loi soit adopté ou non. Le privé recrute déjà
abondamment dans le réseau public, que ce soit au niveau des médecins ou des
autres professionnels de la santé. Et ce projet de loi n'y changera rien, sinon
que de déplacer les yeux des recruteurs du privé vers d'autres médecins.
Deuxièmement, sur la question de
l'imposition de contrat à l'entrée du doctorat en médecine ou à l'entrée de la
résidence. Le 19 avril 2023, nous étions assis à la même table, ici, en
commission parlementaire, et nous avons exprimé les mêmes inquiétudes par
rapport aux clauses orphelins. Celles-ci prévoyaient imposer des conditions de
pratique futures à des étudiants en médecine comme condition d'entrée en
résidence. M. Dubé, vous nous aviez donné ce que vous avez appelé un cours
didactique sur l'historique de la rédaction du p.l. no 15, qui est devenu
Santé Québec. Et vous nous aviez dit, et je cite : Je veux qu'on respire.
Le fameux article 392 a été retiré et on vous en remercie. Mais à peine
deux ans plus tard, nous y voilà, on y revient. Il est difficile de trouver à
l'Assemblée nationale un cas plus discriminatoire que celui des articles 5
et 6 du projet de loi, qui limitent géographiquement l'exercice professionnel
des médecins. Ceci constituerait un énorme précédent visant un groupe social
particulier, en l'occurrence les jeunes médecins, sans qu'il n'y ait de
justificatif sur le comment ni le pourquoi de viser ce groupe de médecins.
Comme l'ont expliqué les représentants de
la FMOQ et de la FMSQ plus tôt, il existe déjà une certaine mobilité pour les
diplômés en médecine à travers le Canada, de sorte qu'ils peuvent postuler en
résidence à travers le pays au complet. Bien évidemment, il y a certains
finissants québécois qui vont se former ailleurs et également des finissants
qui viennent se former au Québec. Il reste que la très, très grande majorité
des finissants québécois choisissent de rester travailler au Québec, comme on
l'a entendu aujourd'hui. Maintenant, advenant que le projet de loi no 83
soit adopté tel qu'il est rédigé, les diplômés non québécois choisiront-ils de
venir compléter leur formation et, ultimement, de travailler ici? Évidemment
non. Encore pire, nos propres finissants, ici au Québec, verront-ils ces
mesures discriminatoires comme un énième obstacle à franchir et décideront-ils
d'aller poursuivre leur formation ailleurs? Ce sont toutes des questions que
l'on se pose, et on espère que les rédacteurs du projet de loi se les sont
posées également.
Notre mémoire comporte également des
éléments plus techniques que vous pourrez feuilleter enfin vers les dernières
pages concernant des cas particuliers où il serait interdit de pratiquer et au
public et au privé, particularités qu'on espère être accidentelles. Bien qu'il
s'agisse de technicalités assez pointues, cela renforce pour nous cette
impression que le projet de loi était rédigé à la va-vite, sur le coin d'une
table, sans réelle considération des ramifications très importantes qui
pourraient suivre. Si vous aviez besoin de plus d'éléments pour confirmer cette
perception, il ne faut pas regarder plus loin que les...
M. Soufi (Ghassen) : ...qui
ont suivi immédiatement l'annonce du projet de loi. On nous a présenté des
chiffres ahurissants au sujet des coûts de formation des médecins résidents,
des centaines de milliers de dollars. Avec un minimum d'analyse, il apparaît
évident que ces chiffres sont dopés par nos propres salaires, les salaires que
nous recevons en vertu des 72 h par semaine qu'on travaille. C'en est
franchement insultant. Sans inclure nos salaires, ces coûts de formation sont
en fait comparables à d'autres apprenants, en foresterie, en agriculture, en
médecine vétérinaire. Songe-t-on à imposer à ces jeunes professionnels des
obligations discriminatoires similaires à celles qui sont proposées dans le
projet de loi n° 83? Évidemment, non, ça irait à l'encontre de notre
contrat social québécois.
Dans ces mêmes sorties médiatiques, on
nous a aussi fait peur avec l'idée d'un exode vers le privé. Pourtant, ce
projet de loi, tel qu'il est rédigé actuellement, n'empêcherait aucunement les
jeunes médecins de prodiguer des soins non assurés par la RAMQ au privé, tels
des soins en esthétique. Où est la logique? Le gouvernement a déjà le pouvoir
d'intervenir pour empêcher le passage des médecins vers le réseau privé s'il
pensait qu'il y avait là une réelle menace pour le réseau public, et ce, sans
créer de discrimination envers les jeunes médecins. Le fait qu'il n'intervienne
pas de cette manière en dit long. Il nous est évident que le projet de loi ne
sert qu'à instrumentaliser la relève médicale afin de donner l'impression qu'on
tente de régler des enjeux du réseau public. Loin de résoudre ces enjeux, ce
projet de loi passe un petit coup de maquillage rapide ici et là, mais ne tente
aucunement de traiter la verrue qui se cache en dessous, et elle qui continue
de grandir. Ce n'est pas une coïncidence que l'annonce de ce projet de loi est
arrivée en pleine négociation de toutes les fédérations médicales, mais, pour
nous, une chose est claire, la relève médicale ne devrait pas écoper par un
manque de courage politique, ce courage d'adresser les vrais enjeux avec tous
les acteurs du réseau de la santé et non seulement les jeunes médecins. Merci.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup pour votre exposé. Alors, nous allons maintenant débuter la période
d'échange avec M. le ministre.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
Mme la députée d'Argenteuil. La parole est à vous.
Mme Grondin : ...quel
plaisir, merci beaucoup. Merci beaucoup, messieurs. En fait, je tente de
prendre le pouls des gens dans mon comté. Moi, je viens de la région
d'Argenteuil, région isolée, même si on est à 40... 50 minutes de
Montréal. Difficultés pour la majorité d'une population vieillissante, les
médecins ne souhaitent pas venir dans Argenteuil. Il y a des enjeux tant au
niveau de l'hôpital, mais surtout au niveau du GMF. Bien que les... la gestion
et les services fonctionnent bien, il n'y a pas... ce n'est pas tant les
obstacles, mais c'est plus les médecins qui ne sont pas très intéressés à venir
jusque dans Argenteuil, de ce que j'entends de la part des médecins qui sont
déjà là.
En fait, moi, j'ai une grande question.
Puis j'aimerais ça être capable de répondre à mes citoyens jusqu'à un certain
point, tu sais, la moitié du budget du Québec s'en va en santé. Il y a beaucoup
de gens dans mon comté qui n'ont pas de médecin, qui n'ont pas accès. Ce que
j'entends dans les échanges, en fait, c'est que le projet de loi demande un
engagement aux futurs médecins de cinq ans pour pratiquer dans le réseau
québécois, dans le réseau public. On forme quoi, à peu près 1 100 médecins par année.
Dans les candidats en médecine, il y a comme 5 000
demandes. Êtes-vous en train de me dire qu'il y a... sur les 5 000 gens qui seraient
intéressés à s'en aller en médecine, on ne trouvera jamais de gens qui voudront
s'engager pour cinq ans dans le réseau public?
M. Soufi (Ghassen) : Pour
nous, ce n'est pas une question du cinq ans. Pour moi, je veux m'engager pour
toute ma carrière, et c'est comme... c'est comme ça que je comprends la
médecine, que je comprends mon engagement envers le système public. On ne
demande que ça de travailler dans le public. Encore faut-il qu'on ait les
ressources, les structures qui sont existantes, les ressources humaines, les
plateaux techniques, etc., les postes également qui... il faut qu'ils soient
disponibles. Tout ce qu'on demande, c'est d'être consultés, c'est de discuter,
de pouvoir comprendre quels sont les enjeux qui plaguent notre système de santé
publique parce que les médecins résidents travaillent à 100 % en public
puis tout ce qu'on demande, c'est de continuer à y pratiquer après la fin de
notre résidence, encore faut-il qu'on ait les moyens pour le faire.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
Mme la députée de... de Bonaventure, allez-y.
Mme Blouin : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Bonjour à vous deux. Merci d'être avec nous aujourd'hui pour
parler de cette mesure parmi tant d'autres...
Mme Blouin : ...et tant
d'autres, qui est ce projet de loi aujourd'hui qui veut favoriser l'accès à la
médecine publique. Donc, très intéressée de discuter avec vous aujourd'hui.
Vous avez ouvert peut-être une porte tout
à l'heure. Alors, j'aimerais vous entendre. Je sais que vous avez entendu
parler du Collège des médecins qui est en faveur du projet de loi, qui trouve
qu'on ne va pas assez loin, qui demande des mesures encore plus costaudes.
Donc, j'aimerais savoir ce que vous pensez de ces mesures-là. Est-ce que vous
en avez d'autres à proposer aussi?
• (15 heures) •
M. Soufi (Ghassen) : Mais on
a lu les propositions du Collège des médecins du Québec sur la place du privé
en santé, les lignes directrices qu'ils ont publiées, puis on est 100... à
100 % d'accord sur toute la ligne, sur toutes les propositions qui sont
énumérées dans leurs lignes directrices, mais, en aucun cas, à ce que le CMQ...
on a lu que le CMQ chercherait à discriminer envers les jeunes médecins, ce
n'est pas parmi leur ligne directrice, mais on est d'accord avec tout ce qui
est... tout ce qui est énoncé dans leur projet. On a hâte d'entendre Dr
Gaudreault à ce sujet, la semaine prochaine, parce que ce n'est pas quelque
chose qu'on a entendu le CMQ dire, puis on se questionne, à savoir toute cette
idée de... les jeunes médecins, les jeunes étudiants, la signature de contrats,
l'imposition, les restrictions. Un ordre professionnel ne peut pas discriminer
à l'endroit de stagiaires en vertu de la Loi visant à assurer la protection des
stagiaires en milieu de travail. On a hâte d'entendre le Dr Gaudreault de la
CMQ nous parler de ça la semaine prochaine, parce qu'on est d'accord sur toute
la ligne avec les points qu'ils ont énoncés.
Mme Blouin : Donc, les tarifs
maximums au privé, mieux encadrer les allers-retours public-privé, ça, vous
êtes d'accord avec ça? Est-ce qu'il y a d'autres mesures de ce type-là que...
Est-ce que vous avez d'autres propositions en ce sens-là?
M. Soufi (Ghassen) : Mais on
voudrait bien en parler. La FMEQ a soulevé, tout à l'heure, l'idée d'une table
de concertation. Tout à fait ouvert. Comme l'ont dit plusieurs personnes
aujourd'hui, on ne nous a pas consultés au préalable par rapport à tous ces
éléments-là. On a toutes sortes d'idées. On est sur le terrain, on travaille
dans le réseau public de 2 à 7 ans, on voit ce qui se passe, on a... on
aurait beaucoup à dire. Encore faudrait-il nous consulter avant de se retrouver
ici en commission parlementaire, avec un projet de loi qui semble viser
seulement les jeunes devant nous.
Mme Blouin : C'est à ça que
ça sert, la commission parlementaire, aussi. Donc, c'est le moment où on peut
faire les débats, où on est là pour entendre les groupes. On sait, on a
toujours dit que le projet de loi était perfectible. Donc, on commence en vous
entendant, à écouter ce que vous dites. Et, ensuite, on va procéder à l'étude
article par article et on va pouvoir s'entendre selon les commentaires qu'on a
eus.
Moi, je prends pour acquis que plus il y a
de médecins dans le réseau, moins grande sera la charge collective envers tous
les médecins. Donc là, je me demande en quoi est-ce qu'une période obligatoire
de cinq ans au public peut nuire à l'objectif d'avoir plus de médecins au
public. Parce qu'à la suite de la question de ma collègue, nous, on croit
fermement qu'on va arriver à combler toutes les demandes d'admission, donc
toutes les places qu'on a, et trouver suffisamment d'étudiants en médecine.
Donc, comment est-ce qu'une période obligatoire de cinq ans au public, ça va nuire
à l'objectif d'avoir plus de médecins?
M. Soufi (Ghassen) : On a
entendu le témoignage plus tôt aujourd'hui de la FMSQ, notamment en chirurgie
orthopédique. On vous a expliqué que, peu importe le nombre de nouveaux
médecins qu'on ajoute, s'il n'y a pas de poste pour eux, mais ils ne peuvent
pas pratiquer. S'il n'y a pas les ressources techniques, les ressources
humaines, s'il n'y a pas les professionnels qui peuvent les aider dans la
pratique... Parce qu'au final, la médecine, c'est un travail d'équipe. Ça ne se
fait pas seulement une personne dans un cabinet qui voit des patients. Il faut
que tout le monde soit uni pour qu'on puisse travailler à travers ça. Puis
augmenter le nombre de médecins, si on n'a pas le... la situation adéquate pour
prodiguer des soins à la population québécoise, ça n'amènera rien, que ce soit
cinq ans, que ce soit 10 ans, 30 ans, peu importe.
Mme Blouin : O.K. Bien, en...
Oui. Puis je tiens juste à réitérer qu'on peut marcher puis mâcher de la gomme
en même temps, là. Je vous répète que le projet de loi, en fait, c'est une
mesure parmi un ensemble de mesures. Donc, il y a plusieurs choses qui ont été
adressées, aujourd'hui, sur lesquelles on travaille, qui sont soit en voie de
réalisation ou sur le point d'être réalisées. Donc, je pense que c'est
important quand même de le mentionner. Alors, c'est pour ça que la question
précise de savoir est-ce que ça va nuire d'avoir un cinq ans ferme? Je
comprends que non.
M. Savignac Dufour (Patrice) : Mais
peut-être pour répondre aussi à la question de Bonaventure, tu sais,
normalement, quand on arrive avec une législation en commission parlementaire
puis on en débat, il y a eu des consultations publiques avant, il y a eu des
débats publics. On n'a pas participé, nous autres, à une question : Est-ce
qu'on va régler le problème de santé en discriminant les jeunes médecins, là?
Tu sais, le projet de loi n° 15, il n'est pas arrivé un bon matin en
commission parlementaire, puis on s'est mis à réfléchir, là. On a... il y a eu
un paquet de consultation publique qui a précédé la présentation du projet de
loi n° 15, puis on a fait un débat en commission parlementaire après.
C'est pour ça qu'on parle d'ovni législatif dans notre mémoire. Ce n'est pas...
ce n'est pas fort, pas trop fort comme image, là, c'est sorti l'automne
dernier : Tiens, on va régler le problème du système de santé, toi, on va
discriminer les jeunes médecins. D'où ça sort? Puis vraiment, là, on nous dit
que là on va faire le débat, maintenant, en commission parlementaire. Et le
temps qu'on a mis à se préparer pour aujourd'hui, là, si on l'avait passé à
essayer de trouver des solutions comme ça a été fait avec le Collège des
médecins, MSSS, régie et Collège des médecins, si on avait pu participer à ces
discussions-là... vous en arrivez avec un paquet de solutions. Là, vous nous
mettez des mesures discriminatoires, méchante...
15 h (version non révisée)
M. Savignac Dufour (Patrice) : ...méchante
discussion, là.
La Présidente (Mme Poulet) : Mme
la députée de Marie-Victorin.
Mme Dorismond : Oui, j'aimerais
ça revenir en lien avec les propositions que la fédération des spécialistes des
médecins ont parlé en lien avec l'orthopédie, puis... Bon, c'est juste pour
vous dire que, lors de la dernière négociation avec les infirmières, on a
vraiment rajouté tout le volet flexibilité pour mettre du personnel en soutien
avec vous en bloc opératoire surtout, et on était au courant déjà, en p. l. 15,
de la difficulté. Les médecins sont venus discuter de ça. Depuis... depuis l'époque
de la p. l. 15, on travaille là-dessus pour travailler en amont, pour
faire en sorte que vous puissiez venir travailler en collaboration avec les
professionnels de la santé. Et on a mis aussi des formations accélérées pour
permettre d'autres professionnels, comme les infirmières auxiliaires dans le
bloc opératoire, pour rajouter un coup de main pour aider les chirurgiens à
pratiquer puis accélérer le processus.
M. Soufi (Ghassen) : Tout à
fait, puis on salue tous ces efforts. On l'a nommé dans notre... dans notre
mémoire également. On salue les efforts du gouvernement d'augmenter les
admissions en médecine. Ça aussi, ça va vraiment augmenter le nombre de
médecins en pratique, mais ça, c'est d'ici cinq, 10 ans. Mais, en
attendant, continuons à penser à des solutions ensemble, continuons à discuter,
continuons à essayer de voir quels sont les problèmes et comment on peut les
adresser au lieu de légiférer tout de suite avec un élément qui risque de... de
brusquer les... les jeunes médecins en se disant : Bien comment ça se fait
qu'on nous dit que, nous, on doit se plier à de nouvelles mesures
discriminatoires, de nouvelles restrictions, alors qu'on n'a même pas les
moyens de trouver un poste, on n'a même pas l'option de pouvoir travailler dans
le secteur public dans lequel on veut rester à la fin de notre résidence. C'est
ça, ce qu'on veut dire.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard : Bonjour. J'ai un
petit peu de misère à saisir. Je vous entends depuis tantôt. En fait, vous
dites que la totalité ou presque des résidents continue au public. Donc, qu'est-ce
que vous craignez des mesures du projet de loi? Je ne comprends... j'ai de la
misère à saisir.
M. Soufi (Ghassen) : C'est
simple pour nous, en fait, parce que, pour l'instant, la très, très grande
majorité, l'écrasante majorité des médecins résidents continue de travailler au
public après la fin de leur résidence. Ça, c'est dans un système public qu'on
voit à travers notre résidence. On voit ses difficultés et ses faiblesses. On
voit qu'il y a besoin de travail, mais on y reste quand même. Si maintenant on
nous dit : Mais tu sais quoi? On va te punir en te disant que tu dois
travailler là pendant cinq ans, puis dans ce système qui commence à craquer,
qui commence à couler. Comment est-ce que vous pensez que les... que les jeunes
médecins vont sentir? Ils vont... ils vont voir que ce travail dans le réseau
de la santé public est dévalorisé, puis qu'on fait notre cinq ans, puis, boum,
on part, on a rendu notre dette au public. Évidemment, ce n'est pas ça qu'on
veut. Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, personnellement, quand je me suis
engagé à poursuivre ma formation en médecine et en psychiatrie, c'était pour
poursuivre une carrière pour toute ma vie dans le secteur public. Je ne veux pas
qu'on mette des nombres d'années, de nombres de mois ou quoi que ce soit à
cette... à cette obligation de pratiquer au public, parce que ça... ça
dévalorise, cette pratique dans le système public. Au contraire, cherchons
ensemble à trouver des solutions pour augmenter l'attractivité du système de
santé public
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
Mme la députée de Marie-Victorin, allez-y.
Mme Dorismond : Tout à l'heure
vous avez dit que vous étiez en accord, la plupart du temps sur le Collège des
médecins, ça fait que j'aimerais ça vous entendre : Qu'est ce que vous
pensez des tarifs?
M. Savignac Dufour (Patrice) : Écoutez,
c'est une position très... une question très technique, là. Je pense que ça
vaudrait la peine d'être discuté. Nous, on n'a pas de fermetures à regarder
toute mesure qui fait du sens puis qui respecte les droits fondamentaux des
gens qui pourraient faire en sorte de limiter le privé. On souhaite tous un
régime public qui est efficace puis qui rend des services à la population. Ce
qu'on essaie de dire ici aux parlementaires, c'est que le projet de loi n° 83
va avoir l'effet exactement contraire des objectifs recherchés. Et tu sais, s'il
n'y en a pas de problème dans le fond, mais pourquoi on légifère? Parce que,
là, on nous dit : Bien, tu sais, s'il n'y en a pas de problème, pourquoi
vous êtes en... contre le projet de loi? Mais, s'il n'y a pas de problème,
pourquoi on a un projet de loi? On parle d'un projet de loi quand même, qu'il y
a des mesures attentatoires aux droits fondamentaux, là, ce n'est pas rien, là.
Alors, le projet de loi n'a pas sa raison d'être parce que le problème n'existe
pas. Le problème n'est pas les jeunes médecins dans le privé, là, c'est
97 % de nos membres, ils finissent dans le public, puis le 3 % qui
vont dans le privé. Il faudrait chercher à comprendre les raisons. On a donné
plein d'explications dans notre mémoire. Ce n'est pas... La plupart du temps ce
n'est pas volontaire les départs dans le privé, c'est lié à des problèmes dans
le public. Ça fait que ce n'est pas en retenant les gens dans le public qu'on
va régler le problème si on n'est pas capable de leur fournir du travail dans
le public. Ah! ça tourne en rond, là. Et donc il faut régler les problèmes du
public pour plus que le monde doive aller au privé. C'est ça qu'il faut trouver
comme solution.
La Présidente (Mme Poulet) : Mme
la députée de Bonaventure.
Mme Blouin : Je veux juste
revenir sur mieux encadrer les tarifs maximums. En fait, imposer des tarifs
maximums pour les soins qui sont offerts au privé. On le fait dans... dans
plusieurs provinces au Québec... pourquoi est-ce qu'on... dans plusieurs
provinces au Canada, pardon, pourquoi on ne devrait pas le faire au Québec?
M. Soufi (Ghassen) : Mais on
en a énuméré plusieurs dans notre mémoire...
Mme Blouin : ...dans plusieurs
provinces au Canada, pardon. Pourquoi on ne devrait pas le faire au Québec?
M. Soufi (Ghassen) : ...ouverts
à toutes les solutions possibles, et on les explorera en temps et lieu,
incluant celle-là.
Mme Blouin : O.K. Puis est-ce
que vous avez d'autres mesures à proposer?
M. Soufi (Ghassen) : On en a
énumérées plusieurs dans notre mémoire, puis ça vaut, justement, la peine d'en
discuter, que ce soit une table de concertation, que ce soit... dans un forum
quelconque. On veut en parler avec... avec les acteurs de... du système de
santé publique, pour arriver à des solutions qui n'imposent pas, mur à mur,
des... des mesures discriminatoires envers une... une minorité des... des
médecins, qui sont les jeunes médecins, qui rentrent en pratique.
• (15 h 10) •
M. Savignac Dufour (Patrice) : Puis
l'idée, ce n'est pas de reporter le débat, là. On veut trouver des solutions
puis on va travailler avec vous pour trouver des solutions. Mais là c'est mal
parti, là, avec, là, ce projet de loi qui nous est présenté, là, comme premier
appel à la discussion, là.
Mais il y a un problème, là, au Québec,
là, des... et c'est un problème, ce que vous soulevez, il y a un problème entre
les régions, et il y a plein de façons de régler ça. Vous avez... M. le
ministre parlait de la question, là, des... des réseaux locaux de services, les
RLS, qui ont été créés à une époque. Bien, ça a eu l'effet contraire. On a créé
les... les réseaux locaux de services, on a restreint l'entrée... la pratique
régionale pour les... et c'est là qu'on a commencé à avoir des postes vacants en
médecine de famille au Québec. On a légiféré, le gouvernement du Québec de
l'époque l'a fait, pour essayer de régler un problème qui était criant, qui
existe encore.
Vous avez soulevé, tantôt, des cas de...
de répartition de la rareté, la répartition des médecins sur le territoire du
Québec, puis l'idée qu'on a eue c'est de restreindre la portée de la pratique,
et ça a eu l'effet contraire, on s'est retrouvé comme jamais avec des postes
pas comblés, en résidence, en médecine de famille. Mais c'est ça, notre
crainte, qu'encore une fois des nouvelles mesures contraignantes vont faire le
contraire de l'objectif recherché.
M. Dubé : ...
La Présidente (Mme Poulet) : Il
reste... 37 secondes.
M. Dubé : Bon. Mais
j'aimerais revenir sur la... la question, tout à l'heure, de dire... J'entends
deux choses. Puis j'apprécie beaucoup votre présentation parce que... Je suis
un peu surpris, mais c'est correct. On est là pour écouter, hein? D'un côté,
vous dites : On n'a aucun problème à s'engager vers le public, mais, quand
il s'agit de l'écrire, vous semblez avoir un gros problème, et c'est là que je
trouve une dichotomie dans votre discours. Il y a vraiment une dichotomie dans
votre discours.
Vous venez... vous avez fait un plaidoyer
incroyable sur votre intérêt, vous, personnellement, de pratiquer au public.
Vous l'avez dit, je suis impressionné de ce que vous faites, de l'engagement,
mais j'ai un petit peu de difficulté à me mettre à la place des Québécois qui
vous entendent puis qui disent : En ce moment, on refuse 4 000
étudiants par année en médecine, puis il n'y en a pas... parmi les 5 000
étudiants qui font une demande — ce que ma collègue a demandé — qu'on
n'est pas capables d'en trouver 1 000 qui vont s'engager à dire : Je
vais m'engager pour le public à la fin de ma formation. Je veux juste dire
aujourd'hui que je trouve qu'il y a une différence entre le discours et
l'engagement. Je voulais juste vous dire ça. Merci beaucoup.
M. Soufi (Ghassen) : Si je
peux glisser quelques mots...
M. Dubé : Je ne pense pas
qu'il nous reste du temps mais...
La Présidente (Mme Poulet) : Il
reste 19 secondes.
M. Dubé : 19 secondes?
Allez-y.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Poulet) : ...parfait.
Allez-y.
M. Soufi (Ghassen) : Oui.
C'est... c'est... comme je vous l'ai dit tout à l'heure, cet engagement, c'est
pour... c'est pour une carrière. Dès qu'on met un nombre d'années dessus,
qu'est-ce qu'on est en train de dire du système public? Qu'est-ce qu'on est en
train de dire du système public? Qu'on doit y exercer pendant X nombre
d'années, comme si c'était une punition. Ça ne devrait pas être une punition.
On devrait tous vouloir y aller puis on devrait aller au public à 100 %.
M. Dubé : ...que de pratiquer
au public, c'est une punition?
La Présidente (Mme Poulet) : ...ministre.
Alors, je cède maintenant la parole au député de Pontiac. Vous allez
poursuivre... vous allez pouvoir poursuivre les discussions.
M. Fortin :Non, M. le ministre, je pense que... ce que moi, j'ai
compris du propos, c'est que c'est le message que vous envoyez avec le projet
de loi. Du moins, c'est ce que j'interprète des propos de... de nos... des
participants, là. Enfin.
Merci d'être là, merci de... de votre
message et de la... de la clarté de vos explications. Mais vous n'y allez pas
avec le dos de la cuillère, là. Moi, j'ai entendu : atteinte aux droits,
discriminatoire. Je vois : inutile, illégal, nuisible, pour décrire le
projet de loi. Dites-moi donc le fond de votre pensée, là. Ce que vous
demandez, c'est le retrait, que vous dites qu'il n'y a absolument rien de
positif là-dedans, que ce n'est pas souhaitable pour la société, là. C'est ce
que j'entends, là.
M. Soufi (Ghassen) : Exactement.
On... on demande le retrait total du... du projet de loi.
M. Fortin :O.K. Là, je veux... je veux juste essayer... Parce que vous
amenez un concept, là, dans votre... dans votre mémoire, puis vous y avez fait
référence, là, qu'on vient limiter la pratique médicale privée mais à moitié.
C'est-à-dire qu'on... que le projet de loi permettrait de... permettrait encore
à certains médecins formés ici, ceux qui devraient être ciblés par le projet de
loi, là, d'aller... de se consacrer à une pratique...
M. Fortin :...qui n'est pas couverte par la RAMQ, comme les soins
esthétiques par exemple, mais qui, en même temps, viendrait empêcher quelqu'un
de travailler dans une clinique médicale spécialisée pour des chirurgies, par
exemple, remboursées par la RAMQ. Alors, qu'est-ce que... mais je comprends que
vous demandez le retrait, là, mais l'idée... il me semble que l'idée, ce n'est
pas... c'est un peu l'inverse, là, de ce que le ministre devrait vouloir faire,
non?
M. Soufi (Ghassen) : ...comprenait
nous également, mais, en lisant le projet de loi, on s'est... on a eu cette
interprétation du texte, puis c'est là où on se demande quelle est réellement
la cohérence. Est-ce qu'on cherche vraiment à améliorer l'accès à la population
québécoise aux soins de santé dans le public avec ces écrits-là? Puis, à la
lecture, ce n'est pas la lecture qu'on en fait. Au contraire, pour nous, ça va
venir amenuiser l'offre de services de la population québécoise au public de
par le fait qu'on va faire notre cinq ans, puis les gens vont percevoir ça
comme : Bien, là j'ai le droit, je vais partir, tandis qu'au contraire on
devrait bonifier les conditions de travail dans le secteur public pour qu'on
veuille y attirer les meilleurs médecins, pour que nos finissants veuillent...
veuillent rester et aller prodiguer des soins, aller faire leur formation puis
venir donner des soins, quels qu'ils soient, à la population québécoise.
M. Fortin :On va... On va se pencher, là, collectivement sur votre
interprétation de la chose, puis j'espère que... j'espère qu'elle est erronée,
je ne peux pas croire... ou j'espère qu'on va la corriger le cas échéant, là,
mais je ne peux pas croire, M. le ministre, que, encore... j'y reviens encore
une fois, là, dans une région comme la mienne, où il y a 50 % des
chirurgies qui sont faites en CMS, on viendrait restreindre le droit de
pratiquer là et qu'on enverrait ces mêmes chirurgiens là dans... soit dans le
privé privé, complètement privé, là, ou dans le public, où ils peuvent opérer
une journée par mois, une journée. Un chirurgien orthopédique en Outaouais, là,
travaille 12 journées par année en chirurgie. Ce n'est pas exactement servir le
public à son meilleur, ça, M. le... M. le ministre.
J'ai compris dans votre exposé que vous
êtes inquiets non seulement d'un peu ce que la FMEQ disait avant vous, là,
qu'il pourrait y avoir un exode de certains... de certains étudiants qui
décideraient automatiquement d'aller à l'extérieur du Québec, mais qu'on
pourrait éloigner certains étudiants du reste du Canada qui, à travers le
système CARMS ou un autre, là, pourraient être intéressés à venir prendre une
position au Québec. Dans le fond, là, votre interprétation, c'est : si on
met une obligation sur ces étudiants-là qui sont, j'utilise le mot en anglais,
là, matchés par le système CARMS, bien, ils ne viendront juste plus, là.
M. Soufi (Ghassen) : Exactement.
Parce que le système de jumelage pour l'entrée... l'entrée en résidence, c'est
quelque chose de très complexe, c'est pancanadien. Les appliquants... Les
finissants de leurs études en médecine peuvent choisir d'appliquer un peu
partout, puis ensuite ils font leur liste des programmes qu'ils mettent en
premier, en deuxième, en troisième, etc. Donc là, présentement, c'est... c'est
ouvert, on peut appliquer partout, on peut matcher partout. Évidemment, les
finissants québécois restent en très grande majorité au Québec. Puis il y a des
personnes qui viennent parce qu'ils sont intéressés par la formation qu'on a à
leur offrir ici, au Québec, ils sont intéressés à venir pratiquer ici, au
Québec, à la fin de leur résidence. Donc là, si le projet de loi était adopté
tel qu'il est écrit, si on est un étudiant de médecine à l'extérieur du Québec
puis qu'on regarde ça, pourquoi est-ce qu'on viendrait, alors qu'il y a des...
il y a des conditions qui y sont associées qui n'existent pas ailleurs? On a
entendu Dr Oliva de la FMSQ plus tôt dire que ça n'existe nulle part qu'à Cuba,
ce genre de mesures. Donc, pourquoi est-ce qu'on viendrait restreindre ainsi
le... la liberté de mouvement de ces étudiants-là? On ne comprend pas.
M. Fortin :Pouvez-vous juste nous en dire un petit peu... Vous avez...
Vous avez arrêté sur... ou vous avez fait un point sur les coûts de formation,
là, sur les arguments qu'on... que le ministre... que la partie gouvernementale
a évoqués publiquement, suite au dépôt du projet de loi, à savoir les coûts de
formation sont énormes pour... les coûts payés par le gouvernement, disons,
sont énormes. Mais là vous dites : Oui, mais la grosse, grosse, grosse
partie de ça, c'est nos salaires, là, c'est les salaires des résidents, ça ne
tient pas la route. Alors, c'est quoi... pour vous, c'est quoi, le coût de la
formation d'un médecin pour l'État québécois?
M. Soufi (Ghassen) : ...qu'on
en a fait état dans notre mémoire.
Une voix : ...
M. Soufi (Ghassen) : C'est
ça, c'est à peu près de deux à trois fois moins, parce qu'en résidence... Moi,
je suis dans ma cinquième année de résidence, j'ai reçu un salaire pendant les
cinq années. Si on soustrait de ce calcul mon salaire au courant des cinq
dernières années, ça fait un chiffre qui est à peu près de deux à trois fois
moins élevé que ce qui est présenté... que ce qui a été présenté dans les
sorties publiques durant l'automne, à peu près.
M. Fortin :Dernière chose de ma part, vous avez... vous avez dit
quelque chose, que vous trouvez ça intéressant que le projet de loi soit déposé
dans le contexte des négociations. Le ministre nous a toujours dit, là, qu'il
ne fallait pas mêler les négociations à l'étude de nos projets de loi, mais
est-ce que... est-ce que votre interprétation, c'est : le ministre veut
utiliser le projet de loi puis... comme outil de négociation puis peut-être
s'en servir, peut-être ne pas s'en servir après l'adoption?
M. Soufi (Ghassen) : Il
est... Il est difficile de ne pas se poser la question par rapport à ça.
M. Fortin :Très bien.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
Mme la députée de La Pinière.
Mme Caron : Merci, Mme la Présidente.
Alors, merci à vous deux...
Mme Caron : ...pour la
présentation, ce que j'entends de votre part, et corrigez-moi si je n'ai pas
bien compris, ce que j'entends, c'est que, selon vous, les jeunes médecins,
ceux qui sont aux études, qui sont en résidence, veulent que le système public
fonctionne, veulent pratiquer au public. Et, par contre, une fois qu'ils sont
prêts à avoir un poste, il n'y a pas toujours des postes qui sont disponibles
ou alors il n'y a pas des plateaux de travail, donc, une salle d'opération ou
autres qui sont disponibles... ou le personnel de soutien, je vais l'appeler
comme ça, pour vous permettre d'exercer, de faire... de soigner plusieurs
personnes. Les conditions ne sont pas réunies.
Donc, vous ne pouvez pas... Le médecin ne
peut pas arriver une journée, puis dire : Bien, moi j'ai trois patients
qui ont besoin d'une opération, je vais aller... je vais les opérer tous parce
que ça prend de la disponibilité. Une salle d'opération, ça prend des
infirmières, ça prend les gens même pour donner les rendez-vous, etc. Alors,
vous... même si on aurait 1000, 2000, 3000, 4000, 5000 nouveaux médecins
diplômés chaque année, s'ils n'ont pas les outils pour travailler, ils ont beau
être dans le public, ils ne feront rien, ils vont se tourner les pouces un
petit peu comme ce que je disais aux personnes précédentes. Et ce qui vous
heurte dans ça, c'est qu'on cible uniquement les jeunes médecins, on leur
dit : Oui, vous allez venir travailler dans le réseau. Même si vous n'avez
pas les outils, vous allez venir travailler dans le réseau pendant cinq ans,
puis, si vous ne le faites pas, bien, c'est 20 000 à 100 000 $ d'amende
qu'on va... qu'on va vous imposer. Et si vous récidivez, bien, ça va être de 40
à 200 000 $. Et c'est là qui est l'os, je pense.
• (15 h 20) •
M. Soufi (Ghassen) : Et ce qui
nous heurte également, c'est qu'il semble y avoir un décalage entre les besoins
de la population puis l'offre de services qui est présente. Donc, si quelqu'un
gradue, finit sa résidence, puis il est disposé à prodiguer des soins à la
population québécoise dans une région particulière, puis qu'il y a ce besoin
particulier dans la région, des fois, il y a toutes sortes de barrières
administratives qui font en sorte qu'il y a des contraintes qui sont liées à
l'obtention de ce poste-là spécifiquement ou le poste est lié à des
restrictions de pratique quelconque qui font en sorte que, même si le besoin
populationnel est là et même si le médecin qui vient graduer est là, il ne peut
pas pratiquer dans ce poste-là, dans cette région-là. Puis toutes ces incongruités-là...
La Présidente (Mme Poulet) : ...poursuivre
les discussions avec le député de Rosemont.
M. Marissal : Merci, Mme la
Présidente. Merci, merci à vous deux. C'est très éclairant, votre position,
elle est non équivoque. Dr Soufi, vous avez dit tout à l'heure, et je vous
cite : «Personne ne commence 10 ans d'études en médecine, en se
disant : J'ai hâte de pratiquer au privé.» Mais se peut-il qu'après 10 ans
de pratique, des médecins se disent : J'en ai marre du public et je m'en
vais au privé?
M. Soufi (Ghassen) : Si on se
pose ces questions, c'est à savoir : Qu'est-ce qu'ils ont rencontré durant
leurs années de formation au public, qu'ils ont vu comme étant difficile?
Comment ça se fait que leurs séjours, leurs pratiques, que ce soit en résidence
ou avant, durant leurs études prédoctorales en médecine, ont fait en sorte
qu'ils ont trouvé ce milieu-là difficile, ou peut- être leurs intérêts, comme
je viens de l'expliquer, ils n'y trouvaient pas un poste pour combler leurs
intérêts et, donc, ils se sont tournés vers quelque chose d'autre.
M. Marissal : Ça existe, le
scénario que j'ai pris, à l'inverse du vôtre, il existe?
M. Soufi (Ghassen) : Oui,
tout à fait.
M. Marissal : O.K. Donc, le
problème, il est plus après 10 ans qu'avant 10 ans, là.
M. Soufi (Ghassen) : Oui.
M. Marissal : Bon, ce que je
pense aussi. Me Savignac, je ne suis pas avocat, mais j'ai couvert assez de
débats constitutionnels, j'ai développé des réflexes pavloviens. Quand
j'entends des choses comme «mesures attentatoires aux droits fondamentaux»,
j'ai tendance à aller voir les chartes des droits et libertés puis chercher
l'article que ça touche. Vous avez dit aussi : Il n'y a rien dans la
législation d'aussi discriminatoire envers un groupe d'âge. Je ne vous
demanderai pas de nous montrer ce que vous avez trouvé puisque vous n'avez rien
trouvé. Mais puisqu'il s'agit, selon vous, de mesures attentatoires - vous êtes
avocat, vous - c'est quoi, la suite?
M. Savignac Dufour (Patrice) : Bien,
tu sais, on s'était dit : On ne donnera pas envie au premier ministre de
brandir la clause dérogatoire dans les amendements. Mais, sérieusement, tu
sais, on espère de ne pas être obligé de se rendre là, mais c'est clairement
discriminatoire, les articles 5 et 6, il n'y a même pas de débat possible, là.
Alors, s'il y a des avis juridiques du PG qui ont été donnés au ministère qui
dit que ça, ce n'est pas discriminatoire, là, refaites vos devoirs, quelqu'un,
là, c'est comme... c'est un cas patent, là. Et, à ma connaissance, on a
fouillé, moi, ça fait 25 ans que je m'intéresse à la question des clauses
orphelin dans d'autres vies, et il n'y a pas de précédent par l'Assemblée
nationale là. Tu sais, il y a eu des ententes, le gouvernement, à titre
d'employeur, ça c'est une chose. Mais, peut-être, les années 80, sur l'aide
sociale, des clauses particulières pour les plus jeunes, peut-être, ce cas-là,
mais ce serait une première, ce serait une...
M. Savignac Dufour (Patrice) : ...c'est
ta première, là.
M. Marissal : Qui ne serait
pas sans suite? C'est à vous de répondre. Ce n'est pas à moi.
M. Soufi (Ghassen) : Je ne
sais pas.
M. Marissal : Qu'est-ce que
vos membres en disent?
M. Soufi (Ghassen) : Bien,
nos membres, je pense qu'ils sont... ils se rangent derrière nous, dans le sens
où, comme Patrice Savignac Dufour l'a dit tout à l'heure, on a...
La Présidente (Mme Poulet) : ...mais
on va poursuivre la discussion avec le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci beaucoup
à vous deux. Dr Soufi, j'ai bien hâte de vous accueillir aux
Îles-de-la-Madeleine pour continuer votre résidence.
J'aimerais savoir, je vais vous demander
un exercice de synthèse, c'est l'avant-dernière intervention, là, qu'est-ce qui
vous irrite le plus ou vous choque le plus, là, avec l'ensemble du portrait que
vous nous avez fait. Est-ce que ce sont les mesures que vous jugez
discriminatoires, le fait de ne pas être consultés, le fait que vous accusiez
le ministère d'avoir utilisé de fausses données, les sanctions qui vous
semblent démesurées, le fait qu'on s'attaque à un faux problème avec des
solutions bancales?
M. Soufi (Ghassen) : Je pense
que ce qui est... ce qui est le plus... ce qui ressort le plus, c'est le fait
que nous sommes tout à fait disposés à œuvrer pour trouver quels sont les réels
problèmes qui font en sorte que notre système de santé public est en train de
s'éroder graduellement. Puis on est tout à fait disposés à vouloir travailler
puis à chercher des solutions pour revigorer le système de santé public parce
qu'on veut y rester. Et je pense que ce qui nous... ce qui nous choque un peu
le plus, c'est de... c'est de voir ce projet de loi apparaître comme... comme
on l'a dit tout à l'heure, comme un OVNI, alors qu'on n'avait pas été consultés
au préalable, alors qu'on avait toutes sortes d'idées à discuter puis à
présenter. Je pense que c'est ça qui choque le plus.
M. Arseneau : Je vois que
vous jugez aussi le projet de loi contre-productif. Parce que vous dites :
Si on se sent captifs pendant cinq ans, le désir d'aller ailleurs puis... ou
plutôt que d'améliorer le système de l'intérieur, c'est ce que j'interprète,
là, va être beaucoup plus fort. Est-ce que c'est... c'est bien ce que vous
craignez?
M. Soufi (Ghassen) : Exactement.
C'est quoi, le message qu'on envoie, non seulement aux jeunes médecins qui
rentrent en pratique mais également à l'ensemble du reste du réseau de la santé
public? De dire que, bien, on va on... va contraindre ces jeunes médecins là à
pratiquer comme une punition au réseau public? Alors que ça devrait être un
objectif qu'on souhaite chérir et maintenir pour l'entièreté de sa carrière.
C'est vers ça qu'on veut de diriger.
M. Arseneau : Est-ce que vous
avez le sentiment un peu qu'on reporte le problème, si on retient captifs les
jeunes médecins diplômés, qu'au bout de cinq ans ils vont partir en masse,
beaucoup plus nombreux que ce qu'on voit aujourd'hui? C'est ce que vous dites?
M. Soufi (Ghassen) : ...est
possible. On ne le sait. Ce qu'on sait, par ailleurs, c'est que pendant que ces
mesures-là vont prendre effet, tout le reste va continuer, toutes les... tous
les maux qu'on connaît déjà du réseau vont continuer. Puis cette mesure-là, ce
projet de loi là ne vient pas régler ces maux.
M. Arseneau : Et puis, pour
ce qui est de la résidence, étant donné que c'est un système pancanadien
essentiellement, on n'aurait pas nécessairement de problèmes au Québec à avoir
des résidents. C'est peut-être que... Vous semblez dire que les Québécois
iraient ailleurs, mais il y a des gens d'ailleurs qui viendraient ici parce que
le nombre de places est limité. Non? Ou, carrément, tous les médecins de tout
le pays boycottaient la résidence ici au Québec?
M. Soufi (Ghassen) : Non.
Personne ne boycotterait de venir faire sa résidence ici au Québec. Mais
certains réfléchiraient, réfléchiraient à venir ici ou s'établir ailleurs,
aller faire leur résidence ailleurs. Il y a tout plein de personnes, comme j'ai
dit tout à l'heure, qui finissent leurs études en médecine puis qui veulent
venir aux universités québécoises, parce qu'on a des expertises quelconques, on
a un beau réseau de la santé public dans lequel ils veulent travailler,
peut-être qu'ils veulent s'établir ici. Donc là, avec ce projet de loi, on
vient leur donner un argument de plus pour se dire : Bien, peut-être pas,
peut-être que je vais considérer mes options puis voir ailleurs.
La Présidente (Mme Poulet) : Parfait.
Merci beaucoup. Alors, maintenant, je cède la parole au député de Saint-Jérôme.
M. Chassin :Merci, Mme la Présidente. Peut-être, avant de vous poser
une question, je vais peut-être pouvoir répondre à une question. Mais donc, Me
Savignac Dufour, vous posiez la question : Mais d'où ça sort? J'aurais
tendance à dire il y a un excellent article dans Le Devoir qui va vous dire que
ça sort d'une cabane à sucre à Sutton. Mais, ceci étant, c'est, dans le fond,
toute une réflexion peut-être plus large que juste le serment de l'engagement.
Parce qu'effectivement, si on s'engage à aller servir finalement cinq ans au
public, bien, il y a aussi une question de dire «sous peine de», parce qu'il y
a des pénalités, là, qui sont importantes. Et donc, c'est... c'est là que...
Dans le fond, votre discours, c'est qu'on génère une perception, hein? En
politique, on est quand même habitués, je pense, à l'idée de gérer des
perceptions. Est-ce que... Est-ce que, selon vous... parce que, ce que je
comprends, en fait, c'est que ça... comme c'est attentatoire, n'est-ce pas,
fort probablement que le ministère a comme un avis juridique là-dessus ou une
certaine étude des conséquences peut-être judiciaires à votre connaissance ou
juste par logique.
M. Savignac Dufour (Patrice) : On
espère qu'ils auront requéri des avis juridiques. Mais le premier ministre a
été rapide à brandir la clause dérogatoire. Ça fait que je pense que ce n'est
peut-être pas si clair que ça qu'ils ont eu des avis juridiques positifs, que
c'est légal.
M. Chassin :Oui, c'est ça. Parce qu'il y a peut-être eu des avis
juridiques pas nécessairement positifs, je ne sais pas s'ils sont... pour
utiliser les mots en santé, très appréciés des avis publics et accessibles,
mais sait-on jamais...
M. Chassin :...je ne sais pas si, en termes de classe de clauses
orphelins, on compare un peu ça à ce qu'on a déjà vu dans le passé. C'est vrai
qu'il y a une question finalement de... Est-ce qu'on se demande si on fait
payer à une jeune génération les défauts du public? C'est un peu comme ça, vous
le voyez?
M. Soufi (Ghassen) : C'est
un peu l'impression qu'on a, parce que les... comment dire, la... l'érosion, la
dégradation du système de santé publique ne s'effectue pas seulement à travers
les médecins, et pas seulement à travers les jeunes médecins. C'est quelque
chose qui incombe à l'entièreté, à l'entièreté du réseau. La pratique de la
médecine, c'est un travail d'équipe.
M. Chassin :Oui, c'est ça.
M. Soufi (Ghassen) : C'est
toutes sortes de personnes qui travaillent ensemble dans une clinique, dans un
hôpital, dans une salle d'opération. Si on enlève une partie, le tout ne va pas
marcher. Donc, c'est...
La Présidente (Mme Poulet) :
Je vous remercie de votre participation à nos travaux. Alors je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre aux prochaines... aux prochains
invités de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 30)
(Reprise à 15 h 34)
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Coalition
Solidarité Santé. Je vous rappelle...
15 h 30 (version non révisée)
La Présidente (Mme Poulet) : ...je
vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Alors, je
vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé.
Mme Verdon (Sophie) : Bonjour.
Sophie Verdon, je suis coordonnatrice de la Coalition Solidarité Santé. Je suis
accompagnée de Hugo Vaillancourt, qui est président de la coalition, de
Philippe Crevier, qui est membre du comité de coordination de la Coalition
Solidarité Santé.
Donc, on n'a pas fait de mémoire, comme le
délai était très court pour présenter aujourd'hui. La Coalition Solidarité
Santé, on existe depuis maintenant 34 ans, on a 42 membres, on représente des
centaines de milliers de personnes du réseau de la santé et services sociaux.
On revendique les valeurs qui représentent les pierres angulaires de notre
réseau public, soit un système accessible, universel et gratuit. Pour nous, la
privatisation, c'est vraiment un gros problème, actuellement, dans le réseau de
la santé et services sociaux, ça crée beaucoup d'inégalités, des injustices. Il
y a des risques concernant la qualité des soins, ça a été documenté, récemment,
par la journaliste Marie-Claude Malboeuf, à La Presse. Puis il y a des coûts à
cette privatisation-là, accrus à notre système public.
Il n'existe pas, aussi, d'étude concluante
qui prouve que le privé, c'est une bonne chose pour notre système de santé, et
il existe des études, comme l'étude du... qui prouvent que le privé cause des
problèmes au niveau des coûts globaux, de la qualité des soins, des risques et
même, mais surtout, au niveau du taux de mortalité des patients, ce qui est
quand même très grave. Le taux de mortalité est plus élevé dans un contexte de
privatisation. Donc, nous, on se demande pourquoi continuer dans la
privatisation.
Sur le terrain, on est chaque jour témoin
des immenses difficultés d'accès à la première ligne médicale, des personnes en
attente de spécialistes, de chirurgies. Il y a une crise, puis ça prend un
remède qui agit rapidement et surtout définitivement pour ramener le caractère
public de notre système de santé. Selon nous, le problème, c'est le privé. La
solution, c'est vraiment de s'en débarrasser. Il n'y a pas de place pour le
privé dans notre réseau public. On va aller plus loin que de proposer un cadre
pour contrôler le privé, on propose carrément de s'en affranchir. Le privé draine
les ressources du public, ça le rend attrayant, inefficace et vétuste. Il y a
beaucoup de preuves qui sont disponibles, qui remettent en question toutes les
justifications de la privatisation des services de la santé. Cette approche-là,
ça n'améliore pas nécessairement la qualité des soins puis ça peut même l'aggraver,
comme je l'ai nommé précédemment. Nous, ce qu'on propose, c'est vraiment de
freiner la privatisation du réseau de la santé de manière globale, et non pas à
l'aide de demi-mesures comme celle qui est proposée par le projet de loi no 83.
Le réseau de la santé doit vraiment être valorisé et planifié, puis les valeurs
communes d'universalité, de gratuité doivent être remises au cœur de la mission
du réseau de la santé et services sociaux. Plus le secteur privé à but lucratif
se développe, plus il va attirer les médecins ainsi que plusieurs travailleuses
et travailleurs du réseau de la santé et services sociaux.
Nous, on considère, à la Coalition
Solidarité Santé, que c'est urgent que le gouvernement dépose un plan de
déprivatisation, et pas juste des projets de loi comme le projet de loi no 83,
qu'on considère comme une mesure cosmétique qui ne s'attaque pas réellement au
cœur du problème. On croit que vous devez démontrer votre volonté réelle de
renforcer le réseau public, de le valoriser pour garantir une offre réellement
publique, universelle, accessible et gratuite. C'est l'angle de vue qu'on va
aborder aujourd'hui. Je vais laisser Hugo Vaillancourt compléter concernant le
projet de loi no 83.
M. Vaillancourt (Hugo) : Oui,
nous, la question des médecins non participants, les médecins qui choisissent
de pratiquer en dehors du régime public, on trouve que c'est une question qui
est impossible à régler tant que le gouvernement ne fera pas preuve d'une
volonté politique claire d'enrayer la privatisation en santé puis de réaffirmer
l'importance d'un réseau public universel et gratuit. Selon nous, le
gouvernement actuel a normalisé la présence du privé dans le réseau de la santé
au-delà des brèches qui existaient déjà avant son arrivée au pouvoir, ce n'est
pas un phénomène qui est nouveau au Québec.
Pour nous, le projet de loi no 83 est
insuffisant, il risque d'être inefficace, puis, en fait, même d'avoir des
effets pervers inattendus. Pour nous, ce n'est pas un... nous, le projet, ce n'est
pas un substitut à faire de la pratique au Québec, au régime public, la
pratique la plus attrayante au pays, et on croit aussi qu'il y a un manque
historique et actuel sur la planification du développement du bassin de
médecins au Québec et qu'on doit envisager ça à l'avenir. Il y a plus de 800
médecins qui sont non participants, au Québec, comparé à 14 au Canada, et cet
état de... et la situation ailleurs au Canada...
M. Vaillancourt (Hugo) : ...pas
parce qu'ils ont choisi de contraindre les gradués en médecine à pratiquer... à
pratiquer d'une manière différente que les autres médecins du régime public ni
à pratiquer dans leur province. Nous, l'Ontario a carrément interdit la
pratique de la médecine en dehors du régime de couverture d'assurance publique.
On croit qu'on devrait s'inspirer de cet exemple-là. Et on croit que c'est
contre l'intérêt du public de permettre aux médecins de devenir non
participants au Québec.
• (15 h 40) •
Le projet de loi n° 83 ne cible
aucunement les médecins non participants actuels, seulement les cohortes à
venir de nouveaux médecins. Et on ne comprend pas pourquoi on ne contraindrait
pas les... pourquoi on contraindrait les médecins moins expérimentés et qui
sont au début de la carrière à pratiquer au public, et pourquoi on ne ciblerait
pas, un, les médecins plus expérimentés, dont le réseau au besoin, et en
particulier les médecins qui posent problème actuellement dans cette
situation-là. Il faut se demander aussi c'est quoi les impacts inattendus et
les incitatifs pervers que l'obligation qui est envisagée de pratiquer au
Québec et de pratiquer sous le régime public pendant cinq ans pourrait causer.
Notamment, il y a un risque qu'on normalise le fait de devenir un médecin non
pratiquant après cinq ans, qu'il se développe une perception que, bien, le cinq
ans, c'est le temps qu'on fait dans le réseau public, puis ensuite c'est normal
de passer à autre chose.
On se pose la question aussi, si ça
pourrait dissuader des personnes d'entamer des études en médecine au Québec. On
n'a pas de boule de cristal, on ne sait pas ce qui va arriver, mais on croit qu'il
y a réellement des risques d'effets inattendus, d'incitatifs pervers, alors que
la solution nous apparaît évidente au problème, c'est tout simplement
d'interdire... d'interdire la pratique d'être un médecin non participant.
La meilleure manière de faire cette
transition-là, je crois que ça appartient... Je crois que ça appartient aux
déciseurs... aux décideurs de faire un plan de match là-dessus. Là, en ce
moment, il existe des outils sous la Loi de la santé et des services sociaux,
notamment l'article 30 qui permet, quand la situation dans le réseau
public l'exige, de ramener les médecins non participants au bercail et de les
obliger à pratiquer sous le régime d'assurance publique. Alors, je ne sais pas,
il nous reste quelques minutes, je ne sais pas...
Mme Verdon (Sophie) :
Philippe, il reste deux minutes, si tu veux compléter.
M. Crevier (Philippe) :
Bien, écoutez. Nous, notre message, c'est qu'il y a une crise actuellement, là,
d'accès à la première ligne. On la voit, nous, à travers les organisations
membres de la coalition à chaque jour sur le terrain. Il y a déjà beaucoup de
privé au Québec. C'est l'exception canadienne, là. On le voit avec le nombre de
médecins non participants. Et ce qu'on aimerait, c'est que les décisions, les
orientations politiques soient basées sur la reconnaissance que la recherche
nous enseigne que les systèmes de santé qui font beaucoup de place au privé ne
sont pas efficaces. Donc, on s'attend, là, en toute logique, là, face à cette
crise-là puis face à cette... à ce que la recherche nous enseigne que... qu'on
cherche un moyen d'agir rapidement en rapatriant les médecins non participants dont
on a besoin, ici, maintenant, dans le réseau et en empêchant, là,
définitivement leur pratique de se développer dans le privé. On trouve quand
même inconcevable que quelques médecins, pour des considérations individuelles,
en arrivent à remettre en question ce qui est un acquis de société, le
fondement de notre cohésion sociale. Et on aimerait que le gouvernement soit
affirmatif et cohérent avec ce que nous enseigne la recherche. Il y a des
moyens qui ont été pris dans les autres provinces, et ça fonctionne de toute
évidence. Alors, qu'est-ce qui nous empêche de faire la même chose au Québec?
C'est une question qu'on se pose. Et sinon, bien, comme, je pense, l'ont dit
d'autres intervenants avant nous, c'est sûr que le secteur public qui est en
difficulté actuellement mériterait de faire l'objet d'un renforcement
important. Ça le rendrait plus attrayant pour tout le monde et c'est peut-être,
là, une des bonnes garanties qu'on puisse se donner, que les gens n'auront pas
le goût de le quitter puis d'aller pratiquer dans le privé. Donc il y a une
série de mesures que le gouvernement pourrait faire pour empêcher, là, agir sur
la problématique de la privatisation du réseau de la santé et des services
sociaux globalement. Et puis c'est la discussion qu'on est venus avoir avec
vous aujourd'hui.
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, merci beaucoup. Nous allons procéder à la période d'échange. M. le
ministre, la parole est à vous.
M. Dubé : Très bien.
Alors, premièrement, merci beaucoup pour votre présentation. Je l'apprécie
beaucoup. Je ne veux pas trop me prononcer, mais il y a beaucoup de choses avec
lesquelles vous avez mentionné aujourd'hui, où je suis pleinement d'accord...
M. Dubé : ...alors, mais je
vais poser des questions peut-être un petit peu sur votre coalition. Vous dites
que vous avez 42 membres. Donnez-moi quelques exemples, parce que je pense
que ça m'aiderait à comprendre. Par exemple, est-ce qu'il y a des médecins
spécialistes ou omnis qui sont membres chez vous? Est-ce... J'essaie juste de
voir un peu parce que malheureusement, puis je sais que vous dites que vous
n'avez pas eu le temps de préparer un mémoire ou en tout cas de le déposer,
mais j'aimerais en savoir un petit peu plus à savoir à qui je parle pour être
certain que je peux vous poser le reste des questions.
Mme Verdon (Sophie) : Oui,
absolument. Donc, nous, on est une coalition d'organisations syndicales et
communautaires en santé et services sociaux, donc toutes les centrales
syndicales puis beaucoup de... des tables de concertation, des groupes de
défense des droits des personnes handicapées, par exemple.
M. Dubé : ...pourriez
m'envoyer peut-être la liste de votre membership? Parce que ça, je pense que ça
m'aiderait si on continue les discussions avec vous. Puis je le fais de façon
très ouverte, là, parce que je pense qu'on a beaucoup de bonnes discussions
avec plusieurs de vos membres en ce moment sur d'autres dossiers, donc.
Et ce qui m'amène peut-être à quelques
questions avec... Parce que, comme je vous dis, je n'ai pas eu l'avantage
d'avoir votre mémoire avant, mais je pense que... Moi, je souscris, j'ai
toujours dit que le privé, surtout dans une... dans une situation que l'on vit
depuis la pandémie, s'est avéré assez complémentaire au public, mais que le
public, c'est ce qu'on doit renforcer. Je l'ai dit souvent, je n'ai pas changé
d'idée là-dessus et j'ai même démontré au cours des dernières années que, quand
je suis capable de... disons, de... puis j'ai utilisé un mot très intéressant
que mes collègues d'en face ont repris souvent, le «sevrage» du privé, hein?
Alors donc, j'ai démontré clairement que, quand on est capable de le faire,
puis qu'il y a une volonté de faire, on est allé jusqu'à des projets de loi,
puis d'ailleurs, mes collègues, ici, dans cette commission-là, nous ont aidés à
le faire par rapport aux agences privées. Donc, je veux juste dire qu'on
s'entend sur le principe, on veut renforcer le système public, mais il faut le
faire d'une certaine façon.
Et ce que je trouve intéressant, puis là
je ne suis pas capable de voir les noms, alors je m'en excuse, mais
l'intervenant... j'allais dire : Celui qui a un casque d'écoute, non, vous
en avez deux, alors c'est celui que je vois à ma gauche...
Des voix : ...
M. Dubé : Pardon? M.
Vaillancourt. Bien, il y a des gens qui ont... J'aimerais ça vous entendre sur
l'échéancier que vous pensez qui pourrait être raisonnable. Parce que vous me
dites : C'est aux décideurs à voir l'échéancier qu'on pourrait faire pour
aller exactement vers ça. Puis là on... prenons des mesures comme d'interdire,
par exemple, les non-participants, vous me parlez de l'article 30, Dr
Bergeron est tout familier avec ça. Mais dites-moi un échéancier que vous
trouveriez raisonnable, parce que, vous savez, quand on veut faire des
changements majeurs comme ça, puis je donne l'exemple des agences privées, on
s'est donné trois ans pour le faire. Parce qu'on s'est dit : Si on essaie
de faire ça du jour au lendemain... puis même on est obligés d'ajuster un peu
l'agenda, il faut... il faut avoir... C'est quoi, votre échéancier que vous
pensez qui serait raisonnable dans les circonstances?
M. Vaillancourt (Hugo) : En
ce moment, sur le plan législatif, la Loi sur la santé et les services sociaux
prévoit un outil pour quand il y a des situations de pression particulière sur
le réseau, le ministre peut décréter que les médecins non participants
reviennent participer sur le réseau.
M. Dubé : Je m'excuse, je
vous coupe, je m'excuse, j'ai peut-être mal posé ma question. Moi, je n'en suis
pas sur le droit qu'on a, je n'en suis pas là, ou sur la... c'est sur
l'échéancier qu'on pourrait se donner pour ne pas... pour ne pas mettre plus à
mal le système qu'on a déjà.
M. Vaillancourt (Hugo) : Écoutez,
en ce moment, il y a un problème qui a été soulevé, les allers-retours que des
médecins font entre être non participant et être participant.
M. Dubé : ...le va-et-vient.
M. Vaillancourt (Hugo) : ...oui,
le va-et-vient, des gens qui ont appelé ça l'autoréférencement. C'est sur des
délais assez courts, ça fait que ça ne doit pas être si long que ça dire aux
médecins non participants de revenir pratiquer sur le réseau public, là. Je
crois que, si vous leur donnez 30 jours... ils n'auront pas vraiment le
choix, et vous allez avoir des médecins que, s'ils veulent continuer à être
payés pour les gestes médicaux qu'ils posent, bien, ils vont accueillir des
gens, ils vont accepter la couverture de... Ils ne seront peut-être pas
contents de le faire, mais ils ont leur clinique, ils ont leur infrastructure,
ils ont leur équipement et ils ont leur personnel. Moi, je ne vois pas
pourquoi...
M. Dubé : Mais je vous dis je
suis... on est quand même conscient, là, puis j'apprécie... J'espère que
l'échange... les gens peuvent prendre des notes parce que, des fois... vous me
direz, si ça va à votre goût, Mme la Présidente, mais pourquoi ça me... ça
m'intéresse de... Puis là je prends cet exemple-là, par exemple, d'enlever les
non-participants...
M. Dubé : ...ou le deuxième
exemple du va-et-vient, puis je pourrais penser aux tarifs similaires entre le
privé puis le public, tout ça. La raison pour laquelle je vous demande ça,
c'est qu'on a souvent demandé aux gens qui sont venus avant vous qu'est-ce
qu'ils pensaient des mesures qui sont mises de l'avant. Puis là je ne parle pas
juste du Collège des médecins, là, je n'ai pas vu de mémoire, mais c'est ce que
vous dites aujourd'hui, on devrait regarder d'autres mesures. Le projet de loi,
selon vous, est trop spécifique puis il devrait aller plus large. Vous pensez
quoi de ce qu'on voit, par exemple, sur la tarification qu'on appelle
différentielle entre le privé et le public qui, dans certaines provinces, on
dit : Bien, si vous êtes au privé, vous avez le droit d'être au privé,
mais ça doit être la même tarification qu'au public? Est-ce que c'est une
mesure aussi qui devrait être considérée, selon vous?
• (15 h 50) •
Mme Verdon (Sophie) : Bien
nous, en fait, si je peux me permettre de répondre, là, on est contre toute forme
de tarification, premièrement, puis le fait qu'il y ait du privé aussi...
M. Dubé : On regarde ce qui
s'est passé au sud des États-Unis, là, récemment, mais ce n'est pas de ça que
je parle, je ne parle pas des tarifs, là, je parle... vous me dites...
Mme Verdon (Sophie) : Non non,
c'est ça.
M. Dubé : Je voulais faire
une blague, j'ai manqué mon coup.
Des voix : ...
Mme Verdon (Sophie) : Bon,
bien, vous la trouvez drôle.
Des voix : ...
M. Dubé : Merci, André.
Excusez-moi, c'est bon de rire un peu de temps en temps, hein? Mais non, je
reviens, là, je veux juste être clair. Il y a certaines provinces qui,
techniquement, permettent le privé à la médecine, mais disent : Si vous
êtes au privé, vous ne pouvez pas charger plus cher qu'au public. Alors, moi je
veux juste dire...
Mme Verdon (Sophie) : Bien,
pour nous, comme on l'a bien énoncé, on est contre la privatisation. Ça fait
que, quand même que c'est le même tarif au privé, ça ne sera pas les mêmes
conditions. Ça fait que je ne sais pas si ça répond à votre question, là.
M. Dubé : O.K. Donc, si vous
aviez... puis je vous le demande parce que je trouve ça intéressant d'avoir...
vous l'avez bien dit, puis nous, on les connaît, ces statistiques-là. On
regarde en ce moment des gens qui sont... qui pratiquent au privé dans la
terminologie de participants versus non-participants, il y en a 14 dans le
reste du Canada puis il y en a 800 au Québec. Donc, l'enjeu, il est là. Alors,
si je vous demandais dans quel ordre des autres mesures, à part celle qui est
sur la table avec le projet de loi aujourd'hui, dans quel ordre vous les
mettriez?
M. Crevier (Philippe) : Mais
si je peux me permettre, est-ce que nous, on peut vous demander pourquoi on
n'appliquerait pas la mesure la plus efficace qui est l'interdiction de la
non-participation, dans le fond, comme c'est fait en Ontario? Qu'est-ce qu'on
cherche à accomplir en mettant en place une demi-mesure quand on a à notre
disposition cette mesure-là? C'est la question qu'on doit se poser. Puis...
M. Dubé : Ça, c'est...
Écoutez, ça, c'est la bonne réponse quand vous ne voulez pas donner la réponse.
Je vous dis, moi, nous, on s'est fait une tête, mais on est ici pour vous
écouter. Alors, je repose ma question. Vous, avec la recommandation que vous
nous faites, je vous dis : Il y a plusieurs façons d'arriver au bon
endroit. On a besoin d'une transition. On a en ce moment un réseau qui a été
mis à mal. On est capable de faire cet effort-là, on l'a prouvé dans d'autres
secteurs du privé. Moi, ce que je vous demande: Pour être capable de faire une
transition ordonnée de façon à renforcer le système public, dans quel ordre,
selon vous, on devrait travailler? Moi, je suis ici pour écouter, là.
M. Crevier (Philippe) : Bien,
mes collègues répondront s'ils le veulent, mais, pour moi, c'est un faux choix.
On a à notre disposition une mécanique pour régler la problématique. Alors,
pourquoi on considérerait d'autres options? Après, est-ce que ça prend un plan
de transition, un plan de rapatriement dans le public des médecins qui
pratiquent dans le privé? Sans doute. Alors, demain matin, si vous utilisez ce
moyen-là aujourd'hui, on ne va pas fermer toutes les cliniques privées en
24 heures...
M. Dubé : Et un plan de
transition qui s'échelonnerait sur un échéancier de combien de temps?
M. Crevier (Philippe) : On
n'a pas de base pour répondre à cette question-là. Nous, ce qu'on dit, c'est
qu'il y a une crise actuellement, il y a 800 médecins dont on a besoin de
toute urgence dans le réseau pour réduire les listes d'attente qui sont sur
votre tableau de bord qu'on surveille à chaque jour. On en a besoin maintenant.
Puis ensuite, on a besoin d'empêcher des nouveaux médecins de s'en aller
travailler dans le privé. L'enjeu fondamental, là, c'est que si on laisse
s'accroître le bassin de médecins qui travaillent dans le privé puis qui
facturent hors RAMQ, il va se développer un marché de l'assurance pour ça,
comme ce qu'on voit aux États-Unis. Et on va se retrouver avec un système qui
s'est américanisé, puis c'est la dernière chose dont les Québécois ont besoin,
surtout dans un contexte d'incertitude comme on vit. Donc, nous, on se dit, on
a des études qui démontrent qu'un réseau public...
M. Crevier (Philippe) : ...c'est
un réseau qui est en meilleur contrôle de ses coûts, alors on se dit :
Pourquoi les décisions du gouvernement ne seraient pas à l'effet de prendre la
meilleure disposition possible pour empêcher cette privatisation-là? C'est ce
qui va nous permettre une meilleure maîtrise des coûts de la santé puis de
l'efficacité du réseau tout entier.
M. Dubé : Et quand même...
Puis j'apprécie, là, parce que je pense que c'est... votre réponse, je la
comprends. Mais je vais juste le dire dans mes mots pour être sûr que... Vous
dites : Il faut agir puis il faut agir plus large parce que vous
dites : On a, en plus, les moyens. Mais vous êtes quand même d'accord avec
moi que ça prend une certaine transition. Parce qu'on ne peut pas faire ça
demain matin, là, c'est... Il y a... Il y a... Il faut protéger l'intérêt du
public, qui, en ce moment, n'est pas capable d'aller au public parce qu'il nous
manque, peu importe, le professionnel ou qu'on n'a pas les bonnes salles
d'opération, parce que les bénéfices de tous les actes qu'on a posés, les
gestes qu'on a posés depuis plusieurs années, vont finir par payer, mais, en ce
moment, on ne les a pas, on n'en a pas eu tous les bénéfices. Vous êtes
d'accord qu'il y a une période de transition?
Mme Verdon (Sophie) : ...qui
sont privés présentement.
M. Dubé : Pardon?
Mme Verdon (Sophie) : Parce
qu'il y en a beaucoup qui sont privés présentement. Vous dites : On ne les
a pas. Bien, si on les rapatrie, on va les avoir. Tu sais, c'est ça, le... un
petit peu qu'est-ce qu'on dit, là.
M. Dubé : Mais, c'est ça,
exactement. Moi... Mais je... Si vous ne voulez pas vous engager sur un
échéancier, mais je voulais au moins vous entendre. Puis je comprends très bien
votre réponse, là, parce que je veux que ce soit ça que les Québécois
entendent. C'est que nous, ce qu'on a mis sur la table, on a mis le principe
qu'il faut s'assurer qu'on va arrêter l'exode, l'exode vers le privé. C'est ça
qu'on veut arrêter. C'est la première chose. Puis, deuxièmement, quel genre de
mesures qu'on peut faire, complémentaires. Je l'ai dit en entrée de jeu ce
matin, là, pour ceux qui ne m'ont pas entendu, là, j'ai dit : On a fait
des gestes, il nous en reste à faire, mais celui-là, on est très ouverts à
écouter les gens qui viennent nous dire comment on peut, soit par ce projet de
loi ou d'autres mesures.
Puis je donne un exemple pour que les
Québécois comprennent. Quand vous m'avez dit tout à l'heure, puis vous avez
raison, il y a des gestes qu'on peut poser, qu'on n'a pas besoin du projet de
loi, qui sont déjà prévus, par exemple dans la Loi de l'assurance maladie.
Alors, c'est ça que je veux que les gens comprennent. C'est qu'on peut, s'il y
a une attente de la part de la population qu'on doit aller plus loin... c'est
un peu ce que le collège des médecins a dit, c'est ce que... c'est ce que
j'entends de votre part. Puis on n'a pas nécessairement besoin du projet de
loi. Dans le cas des nouveaux facturants, dans la loi actuelle, on doit passer
par un projet de loi. On est obligés de le faire. Mais, si on va vers d'autres
mécanismes qui viendraient renforcer le système public ou forcer le
rapatriement de certains actes au privé, à ce moment-là, on peut utiliser
d'autres mécanismes. C'est ça que je voulais discuter avec vous. Je suis quand
même très ouvert à vos... à vos commentaires. Mais je voulais juste qu'on
précise ça, que, moi, ce qui me préoccupe en ce moment, c'est la période de
transition pour être capables, comme on l'a vu, puis je reviens avec les
agences privées, de faire cette transition-là correctement pour que ce ne
soient pas les patients qui en paient le prix.
Voilà. Avez-vous d'autres commentaires?
Mme Verdon (Sophie) : Bien,
présentement, justement, bien, les agences privées, est-ce que vous trouvez que
la transition s'est bien déroulée présentement? Parce que, oui, il y a eu la
volonté puis la loi, mais le plan de transition, je ne sais pas à quel point
c'était adapté, étant donné que le réseau était rendu tellement dépendant des
agences privées. Ça fait que, tu sais, on ne veut pas se ramasser non plus avec
ça ailleurs, là.
M. Dubé : Mais, voyez-vous...
Bien, je vais répondre... Mais je vais répondre clairement à votre question.
Est-ce que ça s'est fait sans heurts, la réponse, c'est non. Mais depuis qu'on
a eu ce message-là très clair, il y avait deux gestes : il y avait les
tarifs maximums et il y avait la période d'arrêt, hein? On avait dit... de
trois ans. La minute qu'on a mis les tarifs maximums, il y a eu presque
50 % de nos objectifs qui ont été rencontrés. Tout le monde est au courant
de ça. Vous le dites, là, vous regardez les systèmes d'information, les
statistiques, elles sont publiques, c'est un grand succès du côté des taux.
Est-ce qu'on a dû s'ajuster dans certaines régions parce que c'était plus
difficile? La réponse, c'est oui. Mais le projet de loi le permettait aussi
d'être capables de s'ajuster aux besoins, de dire, dans une région ou une
autre, on va s'ajuster parce que ce n'est pas pareil partout. Alors, c'est pour
ça que j'insiste aujourd'hui sur l'aspect transitionnel, s'il y avait d'autres
éléments. Mais c'est pour ça que la comparaison, je pense, peut être faite.
Mme Verdon (Sophie) : ...d'autres
intervenants qui vont pouvoir vous répondre peut-être un petit peu plus
précisément sur les délais, et compagnie, là. Mais je voudrais revenir vous
parler que le privé vient complémenter le public. Mais nous, on trouve que
c'est faux, cette affirmation...
Mme Verdon (Sophie) : ...on
l'a parce que chaque fois qu'on utilise le privé, ce n'est pas deux choses
séparées, ça va ensemble. Chaque fois qu'on donne de l'argent public au privé,
ce qui arrive souvent, ces temps-ci, dans plusieurs domaines de la santé et
services sociaux, mais c'est de l'argent qui ne va pas au public. Donc, ça
enlève au public pour aller au privé.
M. Dubé : C'est de mettre le
moment où on inverse la tendance, mais on pourra...
Mme Verdon (Sophie) : Non, on
l'attend, on l'attend.
M. Dubé : Je vais laisser les
autres, parce que, je pense, j'ai dépassé mon temps, là, mais...
La Présidente (Mme Poulet) : Il
reste 50 secondes.
• (16 heures) •
M. Dubé : Mais, écoutez, on
est... on est d'accord, on est d'accord. Ça fait qu'à un moment donné j'ai
dit : Je pense qu'on était très content pendant qu'on était en pandémie,
là, puis je reviens en 2020, 2021, 2022, on était qu'il y ait des cliniques
privées qui pouvaient faire des chirurgies quand on n'avait plus personne qui
pouvait le faire. Je pense que c'est dans ce sens-là.
Aujourd'hui, quelle est la vision qu'on
peut avoir? Comment on peut maintenant retourner puis de dire : Comment on
renforce le système public? Moi, je pense qu'il y en a beaucoup sur la
transition, mais... Mme la Présidente, j'apprécie beaucoup les commentaires...
par le groupe. Puis n'oubliez pas de m'envoyer votre membership, là, je serais
intéressé à continuer des discussions avec vous. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci.
Alors, on va poursuivre les discussions avec le député de Pontiac.
M. Fortin :Merci, Mme la Présidente. Merci à vous trois d'être avec
nous aujourd'hui, c'est très apprécié d'entendre votre perspective. J'ai un
petit peu de misère à suivre l'argument, l'argumentaire de M. le ministre, là,
qui nous dit, et je vous cite : Moi, je veux l'exode du privé... qui
dépose un projet de loi pour favoriser, je lis juste le titre, là, favoriser
l'exercice de la médecine au sein du réseau public, puis qui, le lendemain,
dépose un appel de projets pour des cliniques médicales spécialisées privées.
J'ai pas mal de difficultés à vous suivre puis je ne suis pas convaincu que...
M. le ministre, quand vous dites que vous êtes d'accord avec le groupe, je ne
suis pas sûr que vous avez la même vision que les gens qu'on écoute en ce moment.
Enfin.
Moi, je veux juste... J'aimerais ça...
M. Vaillancourt, vous avez parlé des du ressac possible sur... à propos du
projet de loi. J'aimerais ça savoir ce qui vous inquiète. Qu'est-ce qui...
qu'est-ce que vous pensez qui va arriver suite à l'adoption d'un projet de loi
comme celui-là?
M. Vaillancourt (Hugo) : Tout
d'abord, pour revenir sur un élément qui a été amené par le ministre, moi, je
crois que la vraie question sur l'échéance, c'est combien de temps est-ce qu'il
est prêt à dire à la population du Québec qui doivent attendre avant que ce
médecin non participant là puisse devenir un médecin de famille ou puisse
devenir un médecin spécialiste qui va les traiter?
Par rapport du ressac, on s'entend que la
mesure qui est proposée, ce n'est pas une mesure qui se fait ailleurs dans les
provinces canadiennes, là, de contraindre les gradués en médecine de pratiquer
au Québec et de pratiquer sous le régime public sous des conditions qui ne
s'appliquent pas aux médecins. Et le reste du Canada est parvenu à ce qu'il y
ait seulement 14 médecins non participants sans avoir recours à cette
mesure-là. Je crois qu'il y a beaucoup de gens, avant d'aller en médecine au
Québec, devant ces conditions-là, avant d'aller étudier en médecine au Québec,
vont se poser la question de : Est-ce que je suis prêt à m'embarquer
là-dedans? Est-ce que je suis prêt à me faire réclamer les frais de mes études
si, supposons que ma mère, elle reste à Terre-Neuve-et-Labrador, qu'elle tombe
malade dans ma deuxième année de pratique, que je dois changer de province pour
m'occuper d'elle et commencer à travailler dans une autre province, tu sais, ça
peut entraîner des situations humaines, là. Il y a des gens qui vont y penser à
deux fois, là, avant de dire : Aïe, je vais aller étudier au Québec en
médecine. Peut-être qu'ils vont aller étudier au Québec... la médecine dans une
autre province. Puis peut-être qu'après avoir fait leur province ailleurs ils
vont décider de s'établir dans cette province-là, en fin de compte, parce qu'ils
ont rencontré quelqu'un pendant leurs études. Tu sais, moi, je crois qu'on a
tout intérêt à plutôt vouloir attirer les gens qui veulent venir étudier en
médecine au Québec, tant ici et d'ailleurs, puis de vraiment investir dans
notre système de public... dans notre système public de santé universelle,
gratuit et accessible, pour que ces gens-là choisissent d'y pratiquer, parce
qu'ils vont avoir l'opportunité de pratiquer dans un des meilleurs systèmes de
santé au monde. Puis moi, je crois qu'au Québec c'est l'objectif qu'on doit
avoir : avoir le meilleur système de santé public universel et gratuit au
monde.
M. Fortin :J'apprécie votre réponse, M. Vaillancourt, parce
qu'elle est basée dans le vécu des êtres humains, là. Ici, on fait des politiques
publiques pour essayer de peut-être diriger certains comportements, mais il
faut que ce soit ancré dans la réalité des gens, des Québécois. Et
effectivement, là, il y a des gens qui peuvent se retrouver avec des situations
comme ce que vous décrivez. Il y a des milliers de Québécois qui déménagent
d'une province à l'autre à chaque année et leur famille qui peut déménager
d'une province à l'autre. Alors, je comprends tout à fait ce que vous voulez
dire. Dans votre réponse, vous avez dit : Moi, je pense, ou nous, on pense
qu'il faut attirer des étudiants vers le Québec...
16 h (version non révisée)
M. Fortin :...on a entendu certains groupes, cet après-midi, qui nous
ont dit qu'il y aurait des étudiants qui auraient peut-être une appréhension de
venir étudier au Québec si, justement, ils sont empêchés de retourner chez eux
par la suite, là, pour peut-être s'occuper d'un parent ou peu importe. Qu'un
étudiant, par exemple, de l'Alberta qui considérait venir faire sa résidence au
Québec, bien, y penserait peut -être à deux fois avant de le faire. Est-ce que
ça fait partie du ressac ou des effets pervers que vous envisagez, ça?
M. Vaillancourt (Hugo) : Ça
pourrait faire partie du ressac et des effets pervers, mais ça pourrait aussi s'appliquer
à quelqu'un qui a grandi au Québec et qui veut aller faire sa mission au
Québec, mais qui a de la famille à l'extérieur de la province. Tu sais, le
Canada, il y a des familles qui existent qui ont des parents, des oncles, des
tantes qui restent à d'autres endroits, puis ça peut tout à fait s'appliquer,
pas juste aux gens qui viendraient étudier d'ailleurs, mais aux gens qui ont
grandi ici, qui veulent rester ici pour faire leur médecine, mais qui ont de la
parenté, des proches ailleurs... des situations humaines de même pourraient se
présenter.
Aussi, d'autres craintes qu'on a nommées,
un, c'est que ça normalise le fait de devenir médecin non participant après
cinq ans, tu sais, que ça devienne un peu une impression que ton cinq ans, là,
si tu fais ton temps dans le système public, surtout si on ne travaille pas à
le revitaliser, là, puis à vraiment le remettre... en faire vraiment comme un
exemple à l'échelle mondiale d'un système public universel, puis qu'une fois
que les gens ont fait leur temps, bien, ils décident d'aller à la pratique
privée ou de devenir médecin non participant... et qu'on perde ces gens-là
parce que... tu sais, c'est possible. Ça fait qu'on craint de créer du
ressentiment aussi.
M. Fortin :L'effet de la boîte de pénalité, là. Un joueur de hockey
qui se retrouve dans une boîte de pénalité, il a juste hâte d'en sortir puis de
retourner sur la glace, là, c'est un peu ça que vous nous dites, là. Le système
public, dans ce contexte-là, pourrait s'apparenter à être une espèce de...
pourrait être perçu comme une pénalité, là, par certains médecins qui auraient
juste hâte de le quitter après cinq ans?
M. Vaillancourt (Hugo) : Oui,
puis ça envoie le message que le réseau public, c'est quelque chose qu'il faut
se forcer à aller dedans, tu sais. Ce n'est pas ça, le message qu'on veut
envoyer, là, c'est un projet de société, le réseau public, le réseau universel.
C'est quelque chose qu'on a construit pendant la Révolution tranquille, c'est
quelque chose qu'on a entretenu, puis c'est quelque chose que la coalition
défend depuis presque maintenant 35 ans, et qu'on est en train de perdre. Puis
il faut le ramener, ça, puis ce qu'il faut, c'est de la volonté politique puis
un engagement clair envers un système de santé publique universel, gratuit,
inccessible... et «accessible», pas inaccessible, la langue m'a fourché.
M. Fortin :Très bien. Je vous remercie. Ça va pour moi. Je pense que
ma collègue a quelques questions pour vous, également.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. Alors, Mme la députée de La Pinière.
Mme Caron : Merci, Mme la
Présidente. Alors, merci à vous trois pour votre présentation. Je pense que c'est...
Vous l'avez dit très clairement, vous voulez enrayer la privatisation, vous
souhaitez mettre fin complètement au secteur privé en santé, vous avez dit qu'il
y a des recherches qui montrent qu'une plus grande place au privé rend un
système public non efficient.
Alors, le ministre a parlé d'échéancier,
mais moi, je vais plutôt vous demander si vous avez une feuille de route pour
faire ça. Parce que, si on... du jour au lendemain, on dit, tous azimuts, on
enraye le privé pour ramener tous ces médecins dans le réseau, bien là... On
nous a dit, aujourd'hui que, même si on... tous les médecins restent dans le
réseau, peu importe leur âge, qu'ils soient jeunes ou moins jeunes, dans le
réseau, actuellement, ils ne peuvent pas pratiquer à temps plein comme ils
voudraient le faire parce qu'il n'y a pas suffisamment de ressources autour d'eux,
que ce soient des ressources humaines ou que ce soit les plateaux pour opérer,
etc. Alors, quelle serait votre feuille de route ou quelles seraient les
grandes étapes? Je ne vais pas aller dans le détail là, on n'a pas beaucoup de
temps, mais quelles seraient les grandes étapes que vous verriez pour que ça
puisse se faire, ça?
M. Crevier (Philippe) : Bien,
si je peux me permettre, tantôt, vous disiez : On a de la misère à suivre
le gouvernement puis le ministre de la Santé parce qu'il a l'air de dire une
chose et son contraire. Je vous dirais que la feuille de route, la première
chose, c'est d'avoir une vision claire de la part du gouvernement, que l'objectif
c'est de développer un système de santé et services sociaux public. Et ça, on
ne le voit pas. On le voit, oui, il y a eu une action sur les agences de main-d'oeuvre
indépendantes. Dans le projet de loi qui est déposé, on ne la voit pas, cette
volonté-là, de manière très claire. On a, tu sais, créé récemment Santé Québec
puis on a ramené sur un pied d'égalité le public puis le privé, en termes d'outils
pour...
M. Crevier (Philippe) : ...développer
le réseau. Alors, ça commence par la vision. Ensuite, bon, la question des
médecins, elle est centrale, elle est criante, là. Il y a beaucoup de
privatisation qui est induite par la pratique des médecins dans le secteur
privé. Donc ça, ça appelle à regarder un petit peu la... là, bien, la
problématique qu'on a sous les yeux aujourd'hui, et leur statut, leur mode de
rémunération, tout ça.
• (16 h 10) •
Ensuite, il y a toute la question de la
planification. Nous, on trouve absolument ahurissant qu'on se retrouve, aujourd'hui
en 2025, alors pourtant qu'on sait depuis des décennies qu'on va se retrouver
avec une population vieillissante, qu'on a d'excellents démographes au
gouvernement qui nous disent... qui peuvent nous faire des projections
populationnelles par territoire, et qu'on se retrouve avec une aussi grande
pénurie de médecins, surtout en première ligne quand on se compare avec les
pays européens. Il nous en manque à peu près la moitié. On aurait besoin de
doubler le nombre de médecins en première ligne. Avec des infrastructures en
quantité insuffisante, ce qui met une pression pour développer des cliniques
privées, des projets immobiliers, alors qu'on pourrait avoir des
infrastructures publiques, et une capacité hospitalière nettement en bas de ce
dont on aurait besoin. Donc, il y a la planification, puis ensuite, je vous
dirais, pratico-pratique, là, on vient de... L'IRIS, l'Institut de recherche et
d'information socioéconomique vient de publier une étude sur le nécessaire
virage en soutien à domicile, qui démontre de manière très solide que,
justement, un système de soutien à domicile public ferait économiser au système
entier des milliards de dollars à terme. Mais on a une... la ministre déléguée
aux Aînés qui, pas plus tard que la semaine dernière, a dit : Ah! Bien
moi, le soutien à domicile, je vais compter sur le privé encore une fois. Et
là, on a un système qui est inefficace parce que, pour que le... un système
public.
La Présidente (Mme Poulet) : Je
m'excuse, M., je dois vous interrompre. On va poursuivre les discussions avec
le député de Rosemont.
M. Marissal : Merci, Mme la
Présidente. Merci vous trois d'être là, puis vous êtes là, puis vous êtes les
derniers de la journée et de la semaine. Alors, je vais être sûr que nos
violons sont accordés, parce qu'il arrive souvent, idéologiquement que le
ministre et moi on ne s'entende pas, ça, c'est normal, là. On ne représente pas
exactement la même tendance politique ici. Mais il arrive aussi parfois qu'on
ne s'entende pas même sémantiquement. Là, je veux être sûr qu'on s'entend bien.
Le ministre lui-même, tout à l'heure, a repris le terme «sevrage», on ne refera
pas le débat. On ne va pas retourner là. Mais le ministre est sorti pas mal du
cadre de 83 tout à l'heure pour avoir une discussion avec vous, me semble-t-il,
sur une feuille de route, un plan de match, un échéancier nous menant à,
devrais-je dire «sevrage» ou une... une utilisation moindre du privé? Est-ce
que c'est ça que vous avez compris puis dites-moi donc, en fait, qu'est-ce que
vous avez compris de l'échange avec le ministre juste pour qu'on puisse
continuer après?
Mme Verdon (Sophie) : Qu'est-ce
que... Qu'est-ce que vous voulez savoir? Qu'est-ce qu'on a compris de l'échange
avec la ministre? Bien, moi, j'ai entendu qu'il était d'accord avec certains de
nos points.
M. Marissal : Et c'est un peu
surréaliste, là, mais je pense que, des fois, on entend des affaires, on... tu
sais, on prend des tangentes, on tire des conclusions. Je veux juste
comprendre. Vous avez compris quoi de la discussion sur l'élimination
progressive du privé avec le ministre?
Mme Verdon (Sophie) : Pour
moi, ce n'est pas clair, là, dans les faits, ça serait quoi, là. Je ne sais pas
Philippe puis Hugo, si vous avez un complément de qu'est-ce que vous avez
compris, là. J'ai compris peut-être qu'il était d'accord sur la forme, on va
dire, mais sur les moyens à prendre puis sur la pratique réelle de se sevrer
complètement du privé, pour moi ce n'est pas clair.
M. Vaillancourt (Hugo) : Mais,
moi... moi, je vais essayer de ne pas dépasser...
M. Marissal : Si vous voulez
lui poser une question, je vais lui laisser mon temps pour répondre.
M. Vaillancourt (Hugo) : Oui.
Mais en fait non. Tu sais, moi... moi, pour rester dans le cadre du projet de
loi n° 83, je pense que c'est ce qui est à l'étude aujourd'hui, là. Moi, ce que
j'avais de la difficulté à comprendre, c'est pourquoi il y aurait besoin d'une
longue période de temps pour un retour au bercail ordonné des médecins non
participants, alors que, un, la loi permet déjà de le faire rapidement et que,
deux, il y a des médecins qui seraient affiliés au régime public très
rapidement et que... et qu'il y a des gens qui attendent en ce moment, là, des
gens qui ont besoin de soins, des gens qui ont besoin d'un médecin de famille
qui attendent. Et ce n'était pas clair pour moi elle était où la barrière à ce
retour ordonné là d'une manière qui est rapide. Puis tu sais, quand on s'en va
en affaires, tu sais, on prend des risques, là. Quand tu décides de désaffilier
puis de devenir un médecin non participant, puis de charger les gens de leurs
poches pour la pratique de la médecine, tu sais que tu t'embarques dans quelque
chose qui a une acceptabilité sociale qui est très douteuse puis que ça se peut
que, du jour au lendemain, tu te fasses dire : Sais-tu quoi? Les gens
n'aiment pas ça, il y a des grosses questions éthiques par rapport à ça, on met
fin à cette pratique-là...
M. Vaillancourt (Hugo) : ...pas
ça. Il y a des grosses questions éthiques par rapport à ça. On met fin à cette
pratique-là. Tu sais, comme on dit en anglais, c'est «the cost of doing
business». Il y a des risques que tu prends lorsque tu t'embarques dans cette
pratique-là. Puis «just too bad», il aurait dû y penser à deux fois avant de se
désaffilier. Je comprends qu'il y avait un risque à s'embarquer... à charger
les gens du fait qu'ils étaient malades, puis que du fait que le système public
soit mal en point plutôt que de poursuivre...
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, je vous remercie. On va poursuivre la discussion avec le député de
Saint-Jérôme.
M. Chassin :
Pour combien de temps?
La Présidente (Mme Poulet) :
2 min 38 s.
M. Chassin :
38. Merci. Évidemment, j'ai peu de temps, mais je vais essayer d'y aller un peu
en rafale. Est-ce que vous avez regardé un peu l'horaire? Il y a... Il y a des
membres de la coalition qui vont venir aussi. C'est ça, hein? Donc, je vous
vois faire oui de la tête.
Mme Verdon (Sophie) :
Oui, oui.
M. Chassin :
Et puis là, je voudrais savoir aussi sur ce que vous avez dit, parce que ça m'a
comme posé la question quant aux soins à domicile. Si on parle, par exemple,
d'un groupe communautaire ou d'une coopérative de soins, donc privée, est-ce
que c'est problématique selon vous parce que c'est privé ou parce que c'est,
dans le fond, par exemple, sans but lucratif, ça pourrait être intéressant.
Mme Verdon (Sophie) :
Non, mais ça, je l'ai dit d'entrée... J'ai oublié peut-être de le nommer
d'entrée de jeu, là, parce que pour nous, c'est clair que le privé c'est du
privé à but lucratif.
M. Chassin :
Parce que...
Mme Verdon (Sophie) :
Après la distinction entre les organismes communautaires puis, par exemple, les
entreprises d'économie sociale, on ne va pas se positionner aujourd'hui
là-dessus, mais là on parle du privé à but non à but lucratif, pardon.
M. Chassin :
O.K. Puis donc, il y a une étude en fait, du CIRANO que, je pense, qui a été
cité par le ministre, là, qui notamment indique qu'il y a des mesures
incitatives ou coercitives dont les impacts ont été de rendre la médecine de
famille moins attrayante, puis d'inciter les médecins à exercer au privé.
Finalement, il y a un peu une conséquence contraire au but recherché. Est-ce
que... Est-ce que... Bien, en fait, peut-être que vous ne l'avez pas regardée
non plus, cette étude, mais je suis en train de la regarder moi-même. Donc,
est-ce que c'est quelque chose qui vous semble étonnant? Vous avez regardé ça,
puis vous êtes d'accord? Comment vous vous positionnez là-dessus?
M. Crevier (Philippe) :
J'ai... Ma réaction, c'est si l'interdiction de pratique, elle est comme
édictée, comme c'est le cas en Ontario, cette question-là ne se pose pas, là.
Donc, c'est sûr que, quand on entre dans des mesures, effectivement, là,
M. Vaillancourt l'a dit tantôt, il peut y avoir des effets inattendus, des
effets boomerang, puis c'est... Il faut bien les considérer. Mais la mesure la
plus simple, c'est de terminer cette possibilité-là qui remet en cause l'existence
même du service public.
M. Chassin :
Puis c'est sûr que j'ai envie de me poser un peu la question, si on réussit
avec un mixte, tu sais, permettez-moi une certaine hypothèse, là, un mixte
privé-public, d'avoir des meilleurs soins sans frais, est-ce que c'est
souhaitable?
Mme Verdon (Sophie) :
Bien, ce n'est pas vraiment possible, ce que vous dites. Je ne comprends pas,
un mixte de privé-public. C'était quoi votre phrase tantôt si vous voulez
répéter?
M. Chassin :
Donc, si c'était possible...
La Présidente (Mme Poulet) :
Je m'excuse. C'est tout le temps qu'il nous reste. Merci. Alors, je vous
remercie tous les trois pour votre contribution à nos travaux. La commission
ajourne ses travaux au mardi 11 février à 9 h 45, où elle
poursuivra son mandat.
(Fin de la séance à 16
h
18)