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Version préliminaire

43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Thursday, February 6, 2025 - Vol. 47 N° 83

Special consultations and public hearings on Bill 83, an Act to foster the practice of medicine in the public health and social services network


Aller directement au contenu du Journal des débats


 

Journal des débats

11 h (version non révisée)

(Onze heures vingt-cinq minutes)

La Présidente (Mme Poulet) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance à la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes ici présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 83, Loi favorisant l'exercice de la médecine au sein du réseau public de la santé et des services sociaux.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire : Non, Mme la Présidente, aucun remplacement.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci. Est-ce qu'il y a consentement pour que le député de Saint-Jérôme puisse faire ses remarques préliminaires? Il y a consentement? M. le député de Saint-Jérôme, vous auriez 1 min 12 s environ... une minute.

Alors, nous débutons, ce matin, par les remarques préliminaires puis nous entendrons les témoins suivants : la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec et la Fédération des médecins spécialistes du Québec. Alors, j'invite maintenant le ministre de la Santé à faire ses remarques préliminaires. M. le ministre, vous disposez de six minutes, et la parole est à vous.

M. Dubé : Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente. Premièrement, j'aimerais saluer les différents participants à cette commission, mes collègues du côté gouvernemental, encore une fois, ça fait très plaisir de se retrouver dans ces lieux-là, où on a passé, avec mes collègues de l'opposition aussi... Ça rappelle des souvenirs de 2023. Alors, très, très content d'être de retour ici aujourd'hui, pour un... pour un projet de loi qui s'inscrit dans notre volonté — et je le répète souvent — d'améliorer l'accès pour les patients du Québec.

Et, rapidement, j'aimerais peut-être revenir sur les objectifs du projet de loi, pour qu'on soit très clairs, c'est d'avoir... pour les nouveaux médecins qui... qui pratiquent au public et au Québec à la fin de leurs études. D'ailleurs, la grande majorité des Québécois sont d'accord avec ce projet de loi. D'ailleurs, plusieurs nous disent qu'on ne va pas assez loin. Mais j'aimerais rappeler quelques statistiques, que je trouve importantes. On observe une tendance à la hausse des médecins qui sont formés dans le public et qui partent vers le privé. Je vous donne quelques chiffres. On a plus de... près de 23 000 médecins au Québec qui pratiquent, là, autant du côté des médecins spécialistes que des omnipraticiens, mais c'est près de 800 médecins qui... qui ont passé au privé, et c'est une hausse de 70 % depuis 2020. Et si je regarde les statistiques aujourd'hui, il y a plus de 2 300 médecins qui ont été formés au Québec qui pratiquent maintenant en Ontario. Alors, quand on regarde les coûts, notamment, notamment les coûts de... qui incluent la résidence, de former un médecin, on est dans des chiffres qui varient entre 400 000 $ et 800 000 $. Alors, c'est sûr que ce... cette désaffiliation du réseau, pour nous, est un phénomène qu'il faut corriger.

Et notre objectif, avec ce projet de loi, il est très clair, c'est de s'assurer que les médecins, à la fin de leur formation, vont non seulement venir pratiquer au public, mais pratiquer chez nous, au Québec, dans notre réseau, qui en a tant besoin. Alors... Et la période qui est suggérée dans le projet de loi, c'est d'avoir un minimum de cinq ans. Maintenant, ce n'est pas la seule façon, et je vais le répéter souvent en commission, comme je l'ai répété depuis qu'on a déposé notre plan de santé, le projet de loi ici s'inscrit dans un ensemble de mesures, dans un ensemble de mesures que nous avons clairement dévoilées dans notre plan de santé en 2022.

Et comme certains intervenants l'ont suggéré, puis il y en a plusieurs qui vont passer en commission, soit aujourd'hui ou la semaine prochaine... il y a plusieurs intervenants, comme je l'ai dit tout à l'heure, qui nous disent : Vous n'allez pas assez loin avec ce projet de loi là. Puis je pense non seulement au Collège des médecins, mais il y avait un article, ce matin, de l'institut CIRANO, dans La Presse, ce matin, qui faisait état des autres éléments qui pourraient peut-être...

M. Dubé : ...venir se joindre au projet de loi ou dans des règlements, mais je pense entre autres à la Coalition santé, et nous avons pris connaissance de certains mémoires, et, lorsqu'on aura tous les mémoires, on pourra peut-être revoir un peu l'ensemble des personnes... des recommandations qu'ils nous font. Donc, ce n'est pas la seule façon d'arriver à nos objectifs, mais c'en est une.

Maintenant, j'aimerais aussi rappeler aux Québécois que non seulement on peut aller plus loin dans ce projet de loi là — donc on est d'accord à le bonifier, on écoutera les intervenants — mais, en même temps, il y a beaucoup de gestes qu'on a posés aussi pour améliorer l'accès qui sont complémentaires au projet de loi, et je donne un exemple : par exemple, l'interdiction de pratique qui est faite, par exemple, dans certaines provinces, la meilleure parité entre les tarifs, qui est aussi bien claire dans certaines provinces, des allers-retours des médecins qu'on... dont on... sont dénoncés souvent entre le privé et le public. Il va y avoir des commentaires entre autres sur la propriété des GMF. Donc, ce sont des éléments qui ont été soulevés dans ces mémoires-là, et, je l'ai dit, il y a d'autres mémoires, mais je pense qu'il est important de bien écouter tout le monde avant de finaliser et d'arriver avec le projet de loi final.

• (11 h 30) •

Maintenant, j'ai dit aussi qu'on avait fait d'autres gestes pour améliorer l'accès. Je pense entre autres ici — et je pense que les Québécois, mais non seulement les fédérations, l'ont apprécié — je pense au GAP, entre autres. On a aussi commencé à simplifier le processus des PREM, on a enlevé de la paperasse. On fait de plus en plus un effort dans notre réseau pour améliorer les heures en chirurgie, que ce soit chez nous ou à l'extérieur. On a augmenté de façon substantielle les admissions en médecine, je le rappelle, là, on est passé de 800 admissions en médecine en 2018 à près de 1100 maintenant. Alors, je le répète, le projet de loi n'est pas la seule mesure pour améliorer l'accès, mais il fait partie d'un ensemble de mesures que l'on fait.

Maintenant, en terminant, je sais qu'il y a beaucoup d'autres choses qui est en cours, beaucoup d'autres choses qui est en cours, entre autres la négociation avec les fédérations médicales, et j'aimerais demander à ceux qui vont passer ici de se concentrer, s'il vous plaît, sur le projet de loi, parce qu'on peut vouloir diverger le sujet, moi, ce que j'aimerais dire aux Québécois : Concentrons-nous sur ce qu'on a à faire aujourd'hui. Les Québécois veulent ce projet de loi là, et on a la chance d'écouter tout le monde. Profitons de cette période-là que nous avons ensemble pour améliorer la situation. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci, M. le ministre. Alors, j'invite maintenant la porte-parole de l'opposition officielle et députée de La Pinière à faire ses remarques préliminaires, et vous avez 3 min 36 s. Alors, la parole est à vous.

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Alors, je salue toutes les personnes présentes, les collègues et les équipes de même que nos invités qui viennent nous présenter leurs mémoires.

Alors, c'est... on sait que dans la population, puis même dans les professions médicales et chez les élus, la grande préoccupation de l'état du réseau de la santé actuellement et de l'accès aux services, c'est vraiment crucial, c'est d'une importance capitale, parce que, quand on est malade, on veut se faire soigner, et donc je comprends la proposition qui est faite par ce projet de loi. Sur le principe, on comprend ça, parce qu'on veut tous améliorer.

Maintenant, on a des questions sur l'application de tout ça, la mise en application. Je pense que ce ne sera pas simple, la façon de s'y prendre pour s'assurer que les médecins ne quittent pas le réseau, mais qu'ils travaillent dans le réseau, et, dans les mémoires qui ont été soumis, et on va en entendre parler, on évoque des moyens autres que ce qui est proposé dans le projet de loi pour améliorer l'accès au réseau. J'ai hâte d'en entendre parler, des moyens pratiques et pourquoi on n'arrive pas à le faire, parce que l'objectif, c'est vraiment de s'assurer que tous et chacun aient un accès à un médecin en temps opportun, quand on est malade et qu'on a besoin de soins ou qu'on a besoin de prévention pour ne pas tomber malade et être dans une situation encore plus grave.

Alors, ça va être intéressant de voir les discussions. On souhaite que ce soit au meilleur pour la population. Et je me permets d'ajouter que c'est... j'ai un petit peu de difficulté à suivre...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

Mme Caron : ...et je me permets d'ajouter que c'est... j'ai un peu de difficulté à suivre le gouvernement. Je comprends l'objectif, je comprends ce qu'on veut faire, mais, le lendemain du dépôt du projet de loi, il y a eu un appel d'offres qui a été lancé pour des cliniques où ces nouveaux médecins qui sont ciblés par le projet de loi ne pourront pas aller pratiquer, en tout cas, pas dans leurs cinq premières années. Alors, le ministre nous parlait d'un ensemble de mesures qui sont prises pas uniquement maintenant, mais dans le temps pour arriver à l'objectif. Alors, ça prend une cohérence dans tout ça, et puis on va voir... on va travailler pour tenter de s'assurer que l'objectif du projet de loi est atteint. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci. Alors, j'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député de Rosemont à faire ses remarques préliminaires. Et vous avez une minute et 12 secondes.

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. Je fais court dans les salutations, je manque de temps. Effectivement, j'ai des flash-back, là, de pl 15, je ne sais pas si c'est sain pour ma santé mentale, mais des flash-back de ça. Je suis sûr que le ministre, en disant nous inviter à nous en tenir exclusivement sur ce qu'il y a dans le projet de loi, n'en appelait pas à une restriction du débat. Je suis sûr que ce n'est pas ça qu'il faisait, parce que ce n'est pas ça que je vais faire. On est pour le principe, bien sûr, on est pour le principe, mais je m'intéresserais plus aux causes du passage vers le privé. En ce moment, le ministre semble s'inquiéter, avec raison, du passage des médecins vers le privé. Mais je vous dirais, Mme la Présidente, c'est un petit peu comme si le ministre des Finances s'étonnait de voir de plus en plus de contribuables éviter l'impôt après avoir lui-même créé des échappatoires. On est un peu devant la situation qui a été créée par le gouvernement qui est devant nous, c'est-à-dire qu'on n'arrête pas de créer de nouvelles occasions d'aller travailler dans le privé pour les médecins et ensuite on s'étonne que, regarde donc ça, ils s'en vont au privé.

Alors, de ça, je vais discuter assurément et je sais que je ne serai pas le seul. Mais il y a des groupes qui sont très intéressants à suivre, et on ne se privera pas de faire ce débat-là, parce que, pour le moment, ça touche qu'une seule partie.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci beaucoup, M. le député de Rosemont. J'invite maintenant le député des Îles-de-la-Madeleine à faire ses remarques préliminaires pour une durée d'une minute et 12 secondes.

M. Arseneau : Merci, Mme la Présidente. Mes salutations seront brèves, mais je suis heureux d'être ici avec vous pour reprendre le débat sur le système de santé. Oui, on a passé beaucoup de temps sur le pl 15, mais je remarque qu'on a un projet de loi pour modifier le pl 15 qu'on vient tout juste d'adopter. Ce n'est quand même pas rien sur la gouvernance, les articles 5 et 6 en particulier. Donc, il faut constamment remettre sur le métier l'ouvrage. Mais, pour aborder le projet de loi en tant que tel, disons qu'on souscrit à l'objectif de favoriser l'exercice, évidemment, de la médecine par les médecins formés au Québec, ici, au Québec, et dans le réseau public. On questionne, par contre, le fait qu'on cible particulièrement les jeunes médecins diplômés et pas l'ensemble des médecins qui pratiquent au Québec. Il y a beaucoup de phénomènes externes qu'on ne touche pas avec ce projet de loi là et, nous, on le sait, on devra élargir un peu l'éventail des solutions, parce que celles-ci nous semblent très, très pointues et ne pas nécessairement être applicables de façon si facile qu'on veut le laisser croire.

Donc, on aura beaucoup de questions à poser à nos groupes qu'on recevra au cours des prochaines heures.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci, M. le député. Maintenant, j'invite le député de Saint-Jérôme pour ses remarques préliminaires pour une durée d'une minute.

M. Chassin :Merci. Bonjour à tous. Évidemment, la ministre l'a dit, c'est dans un ensemble de mesures qu'il faut consolider le projet de loi dans un ensemble qui est décrit par le plan santé, qui voulait faire du système de santé un système plus efficace et plus humain. Et, pour moi, c'est le deuxième, le deuxième volet qui est particulier. Quand on regarde le projet de loi, on parle de favoriser l'exercice de la médecine au sein du réseau public. Mais est-ce qu'on peut parler de favoriser, si le projet de loi oblige tout nouveau médecin, si on impose aux étudiants et aux résidents? C'est là où j'ai un questionnement sur le principe. Est-ce qu'on essaie de s'attaquer au symptôme, finalement, pourquoi les médecins partent du réseau public? J'ai peur qu'on cherche à éviter un certain nombre de débats, Mme la Présidente, mais je pense qu'on peut se concentrer sur le projet de loi puis voir que, même là, il y a... Ce n'est pas juste la carotte, ce n'est pas la carte du tout, ce n'est même pas le bâton, c'est comme la prison qu'on cherche à exercer. Ça fait que ça, c'est mon problème. Merci.

La Présidente (Mme Poulet) : Alors, merci. Nous allons maintenant débuter les auditions. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Alors, je vous invite à commencer...

La Présidente (Mme Poulet) : Vous parlez de votre exposé? Allez-y. La parole est à vous.

M. Amyot (Marc-André) : Merci, Mme la Présidente. Je suis accompagné aujourd'hui de deux spécialistes en médecine de famille, le Dr Pierre Martin premier vice-président de la FMOQ et aussi président de l'Association des médecins omnipraticiens de la Mauricie, et du Dr Guillaume Charbonneau, à ma droite, deuxième vice-président de la FMOQ, mais aussi président de l'Association des médecins omnipraticiens de l'Ouest du Québec. Ça, c'est l'Outaouais. Nous remercions les membres de la commission de nous recevoir aujourd'hui et de tenir compte de l'expertise des médecins de famille et de la FMOQ dans l'analyse du projet de loi n° 83.

• (11 h 40) •

D'abord, je vais être bien clair aujourd'hui, les médecins de famille il y a la FMOQ soutiennent et militent en faveur d'un système de santé publique accessible, universel et gratuit pour les patients. Ils rejettent cependant le projet de loi n° 83 qui vise à obliger les nouveaux médecins de famille à exercer cinq ans dans le réseau public avant de pouvoir devenir non participant. Le projet de loi ne s'attaque pas aux véritables causes du manque d'attractivité du réseau public. C'est une fausse bonne idée et ça va nuire à l'accessibilité. On sait que le gouvernement cherche des solutions. Nous, ce qu'on souhaite, ce n'est pas cinq ans dans le public et 25, 30 ans dans le privé. Nous, ce qu'on souhaite, c'est des médecins de famille qui vont faire l'entièreté de leur carrière dans le réseau public 25, 30, 35 ans et même plus dans le réseau public. La question, pourquoi les médecins quittent-ils le réseau public? Par dépit, par fatigue administrative, lourdeur bureaucratique, absence de flexibilité, surcharge de travail, des conditions de pratique difficiles, manque et mauvaise allocation des ressources, absence de soutien clinique et administratif, absence d'intégration des soins qui est un des principaux ingrédients des systèmes de santé dans le monde qui sont davantage performants que nous.

Les médecins de famille font l'objet de multiples contraintes les PREM, les AMP. Le ministre dit : Je veux assouplir. On a... Je veux assouplir les PREM. On a proposé 23 mesures pour tenter d'assouplir la méthode de PREM et on souhaite continuer de discuter là-dessus. Mais je vous donne un exemple concret maintenant. Un médecin qui termine sa formation à Montréal ou à Québec, qui décide de s'installer, qui souhaiterait s'installer à Montréal parce que son conjoint n'a pas fini sa formation en médecine ou dans un autre domaine, ou son conjoint travaille, conjoint, conjointe, travaille à Montréal ou à Québec. S'il n'y a pas de PREM à Montréal ou à la périphérie, sa seule option, c'est de s'installer soit dans le privé ou soit dans le réseau public et encaisser une pénalité de 30 % dans le régime actuel. Alors, vous pouvez avoir l'impression que les médecins de famille peuvent s'installer où ils veulent et faire ce qu'ils veulent. Vous comprenez que c'est bien le contraire de ça.

La rémunération et l'appât du gain ne sont certes pas la première motivation des médecins qui quittent le réseau public. Et ça, là-dessus, on s'appuie sur des contacts qu'on a eus au comité de valorisation de la médecine familiale, où on a invité des médecins qui travaillent dans le privé à nous partager les raisons qui faisaient qu'ils quittaient le réseau public.

Pourquoi le p. l. n° 83, c'est une mauvaise solution, une fausse bonne idée? Bien parce que ça envoie un message négatif. Le p. l. n° 83 traite les symptômes et pas la cause du problème. Je vous donne un exemple. On est des médecins. On va vous donner des exemples concrets de patients. Un patient qui tousse, qui crache, qui fait de la fièvre, on diagnostique une pneumonie chez ce patient-là. Le traitement, c'est des antibiotiques. Le projet de loi n° 83, il donne des médicaments pour la fièvre et donne des médicaments pour la toux, mais il ne traitent pas la pneumonie. Notre patient, c'est le réseau de la santé. Qu'est-ce qui va arriver? La pneumonie, elle va empirer. Il faut s'attaquer aux causes du problème. C'est un projet de loi qui est discriminatoire, qui vise seulement les médecins. Et ça, ça cible 2 % à 5 % des diplômés en médecine de famille et c'est 15 à 20 médecins par année, ce qui est négligeable face à la pénurie d'au moins 1 500 médecins de famille au Québec. On veut donner un accès à un médecin de famille, mais il y a quand même une pénurie d'au moins 1 500 médecins de famille. Ça, là, au privé, c'est 4 % des médecins, alors que pour d'autres professions, les IPS, les psychologues, les pharmaciens, ça va jusqu'à 40 % qui travaillent dans le privé. Puis on a vu encore cette semaine pénurie de pharmaciens. On a vu dans les semaines précédentes pénurie de psychologues dans le réseau. Nous ne sommes toutefois pas plus d'accords avec le fond d'un tel projet de loi, quel que soit le professionnel de la santé visé. Ça compromet l'attractivité de la médecine familiale...

M. Amyot (Marc-André) : ...ajouter des contraintes découragera les futurs étudiants en médecine de choisir la médecine familiale. Je rappelle que, depuis sept ans, c'est au moins 550 postes de résidence en médecine familiale qui n'ont pas été comblés. Ça amène des incohérences et un flou juridique. Le projet de loi ne précise pas comment il va s'appliquer aux médecins en congé parental, en invalidité ou qui exercent temporairement hors Québec. Comment ça va s'appliquer?

Quelles sont nos solutions? Bien, abandonner la coercition et valoriser la médecine de famille, cesser le dénigrement des médecins de famille dans l'espace public, revoir les règles des PREM et des AMP qui limitent les choix d'installation et de pratique des médecins, améliorer les conditions de travail, pas seulement pour les médecins, mais pour tous les autres professionnels de la santé dans le réseau public et favoriser... et ce message-là, il est universel à tous les partis politiques, à tous les législateurs, favoriser la collaboration avec la FMOQ, les médecins de famille et les autres acteurs du réseau plutôt que d'imposer des solutions unilatérales. Et on vous propose dans notre mémoire, à la 10e recommandation : adopter un mécanisme de réévaluation des impacts de cette possible loi sur l'attractivité de la médecine familiale puis produire un bilan annuel, justement pour s'assurer des effets, qu'ils soient positifs ou négatifs, et s'assurer qu'on puisse apporter les correctifs.

Je profite de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui pour vous partager nos grandes préoccupations par rapport à la propriété des cliniques médicales. Vous avez vu ce qui est arrivé avec les cliniques ELNA, propriétés d'investisseurs indépendants non médecins? Ça nous préoccupe énormément. Peut-être qu'il n'y aura pas une catastrophe quand ça va se régler, mais, à l'heure actuelle, ce n'est que partie remise. Si le problème se règle avec ELNA, ce n'est que partie remise. Alors, aujourd'hui, on souhaitait que les législateurs soient sensibilisés à cette problématique-là.

Et le modèle d'affaires des entreprises non médecins, c'est de faire... c'est de faire des profits. L'objectif en affaires, c'est de rentabiliser, rentabiliser la clinique médicale. Mais qu'est-ce que ça a comme risques? Bien, ça risque des fermetures de cliniques qui sont moins rentables, des pertes de lieux de consultation de proximité pour les patients, pertes d'accès aux dossiers médicaux pour les patients et les médecins, exploitation des données médicales à des fins commerciales, pression sur les médecins pour maximiser le rendement financier.

Nous, ce qu'on propose, c'est de réserver la propriété des cliniques aux médecins québécois, aux médecins québécois pour protéger le caractère public du réseau. Au même titre que, pour être propriétaire d'une pharmacie, il faut être pharmacien, pour être propriétaire d'une clinique de radiologie, il faut être radiologiste, pourquoi alors, pour être propriétaire d'une clinique médicale, tout le monde peut être propriétaire d'une clinique médicale? Qu'est-ce qui nous protège d'investisseurs américains... venir investir dans des cliniques médicales au Québec, alors que ce qui nous distingue au Canada, au Québec, par rapport aux États-Unis, une des grandes distinctions, c'est notre réseau de la santé. Protégeons-nous contre ce risque-là.

En conclusion... Je suis pas pire dans mon temps. En conclusion, projet de loi n° 83, c'est une réponse politique inadéquate. On traite des symptômes sans s'adresser à la source du problème et on dévie l'attention des vrais problèmes du réseau. Le gouvernement fait une erreur de diagnostic et, par le fait même, une erreur de traitement. Il ne fera qu'aggraver la crise d'attractivité en médecine familiale. La FMOQ propose des solutions basées sur l'amélioration des conditions de pratiques et la collaboration plutôt que la coercition. Et je le répète, et je le répète, les médecins de famille et la FMOQ sont totalement en faveur d'un régime de santé public, mais ils ont besoin du bon diagnostic pour appliquer le bon plan de traitement.

Et, concernant la propriété des cliniques médicales, je vous exhorte et... je vous exhorte de prévoir, dans le projet de loi n° 83, un mécanisme qui ferait, comme pour les pharmacies ou les cliniques de radiologie, que la propriété des cliniques médicales appartienne majoritairement à des médecins. Ce ne serait pas arrivé, ce qui est arrivé aux cliniques ELNA avant Noël et qui met en péril des lieux de consultation pour les patients, si ces cliniques-là avaient été la propriété des médecins. Pourquoi? Parce que l'objectif d'un médecin, ce n'est pas de faire de l'argent avec la clinique médicale, c'est de...

M. Amyot (Marc-André) : ...un lieu de pratique où il va pouvoir dire... 

La Présidente (Mme Poulet) : Je vous remercie. Je m'excuse de vous interrompre...

M. Amyot (Marc-André) : ...offrir des services à la population. Merci.

La Présidente (Mme Poulet) : ...votre période est terminée. Alors, je vous remercie de votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. M. le ministre, la période... la parole est à vous pour une période de 14 minutes et 30 secondes.

M. Dubé : Très bien. Alors, encore une fois, bienvenue, docteur Amyot, et à vos collègues, là, qu'on rencontre quand même assez régulièrement. J'aimerais peut-être, avant de passer la parole à mes collègues députés, rappeler aux Québécois deux choses. Dans mon introduction, tout à l'heure, j'ai bien dit... Puis je vais employer votre expression, vous parlez de médicaments versus de traitements, versus de bien comprendre. J'ai bien expliqué, docteur Amyot, qu'on a posé plusieurs gestes, au cours des dernières années, qui font partie du traitement. J'ai bien expliqué aussi que le projet de loi n° 83 n'était pas la seule mesure.

• (11 h 50) •

Alors, aujourd'hui, de dire... Puis je vous donne un exemple, là, je vous donne un exemple. Vous me dites : J'aimerais rappeler qu'il faut simplifier le processus de PREM.  Ça fait deux ans qu'on a commencé à simplifier le processus de PREM. Vous avez demandé à un groupe de travail qu'on a mis en place, là, ils ont fini les recommandations, des recommandations ont été proposées. Je vous ai vu cette semaine puis je vous ai dit qu'on va le sortir. Ça répond exactement à votre demande. Ça fait que je voudrais juste que les Québécois comprennent que ce que vous venez de dire n'est pas tout à fait exact. Il y a plusieurs mesures, il y a plusieurs traitements qu'on a faits, au cours des dernières années, qui vont dans ce sens-là, et je pense au GAP, je peux vous donner une foule de mesures. Alors, de venir dire qu'on ne fait que de faire de la coercition, j'ai un petit problème avec ça. Alors, on va prendre le temps de répondre à vos questions, mais je voulais faire cette précision-là.

Maintenant, sur la question de la propriété des GMF, quand on s'est rencontré, je vous ai dit que j'avais beaucoup d'ouverture à questionner ça. Alors, oui, on a fait des choses, oui, on est ouvert à faire d'autres choses, mais, aujourd'hui, je veux vous entendre sur la proposition qui est là. Il y a plusieurs groupes, il y a plusieurs groupes qui ont fait des recommandations spécifiques. Je ne vous entends pas là-dessus, je ne vous entends pas. Alors, je vais laisser mes collègues poser des questions par rapport aux recommandations qui viennent d'autres groupes, mais de dire aujourd'hui qu'on n'a rien fait puis qu'on est contre la médecine familiale, j'ai un gros problème avec ça.

Alors, vous pouvez garder ce discours-là, aucun problème avec ça, mais je voudrais dire aux Québécois que c'est faux, c'est très faux. Alors, je laisse la parole à mes collègues.

La Présidente (Mme Poulet) : Oui, merci. Mme la députée de Bonaventure, la parole est à vous.

Mme Blouin : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, bonjour, tout le monde, bonjour à vous. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Il y a certains éléments, comme le souligne le ministre, qui suscitent ma curiosité. En fait, j'aimerais savoir... J'imagine que vous avez entendu qu'il y a une majorité de Québécois qui appuient le projet de loi, une majorité de Québécois qui inclut plusieurs groupes, dont le Collège des médecins, Collège des médecins qui trouve qu'on ne va pas assez loin aussi avec ce projet de loi là, tout comme l'article dans La Presse de ce matin, dont le ministre faisait mention tout à l'heure. Alors, ça pique ma curiosité, à savoir : Comment est-ce que vous expliquez une position si opposée des différents groupes dont le Collège des médecins?

M. Amyot (Marc-André) : Bien, je vous dirais, le ministre a dit : Il y a 2 300 médecins qui ont été formés au Québec, qui sont partis à l'extérieur. Il doit avoir une raison pour laquelle ils sont partis à l'extérieur, ça doit être que les conditions de pratique ailleurs sont plus intéressantes qu'au Québec. Et je n'ai jamais dit que le gouvernement n'avait rien fait, au contraire, on reconnaît que le ministre a augmenté le nombre d'étudiants... des cohortes d'étudiants en médecine, et ça, on le salue, encore faut-il qu'il choisisse la médecine familiale. Et quand je vous dis les obligations auxquelles font face les médecins de famille, elles sont considérables, ces obligations-là, et elles ont un effet rebutant auprès des étudiants en médecine. Alors, je vous ai donné l'exemple qu'un médecin ne pouvait pas s'installer à Montréal, s'il n'y avait pas de PREM. On a beaucoup de médecins qui souhaiteraient revenir au Québec, de l'extérieur de l'Ontario, qui ont été formés. Mais, s'ils n'ont pas de PREM à Montréal, ils ne peuvent pas revenir ici ou bien faire l'objet d'une pénurie en Outaouais. Je peux te laisser aller, Guillaume. Il est de l'Outaouais, il est à la frontière de l'Ontario.

M. Charbonneau (Guillaume) : Parce qu'on s'entend qu'on manque de médecins partout au Canada. Nous, on essaie d'attirer les médecins de l'extérieur pour qu'ils viennent renforcer nos troupes. Puis on arrive à en convaincre, mais un des défis qu'on a -ces gens-là ont plusieurs options - on les convint de venir en Outaouais, puis là, après ça, ils découvrent qu'en plus, il y a des PREM, qu'il y a d'AMP, des contraintes qu'ils n'ont pas dans leurs autres choix...

M. Charbonneau (Guillaume) : ...c'est la réputation qu'on a dans le reste du Canada, auprès des médecins, c'est qu'au Québec il y a beaucoup de contraintes, c'est compliqué, de s'installer au Québec. Donc, il faut faire attention, quand on en rajoute.

Puis peut-être une chose de plus, parce que je pense que l'intention est bonne, là, il y a un certain consensus de dire que c'est une bonne idée, on veut améliorer l'accès, mais est-ce que ce projet de loi là va vraiment améliorer l'accès? Vous rencontrerez les étudiants, tout à l'heure, là... Là, on parle de contraintes, l'ensemble des étudiants...

M. Dubé : Si vous me permettez, c'est parce que je veux avoir le temps de poser des questions, parce qu'on...

M. Charbonneau (Guillaume) : Mais on va donner une mauvaise réputation du système public auprès des étudiants en médecine. Vous allez les rencontrer tout à l'heure.

M. Dubé : O.K., mais je vais revenir parce que je regarde les intervenants, là... Vous me dites ceux qui sont d'accord avec votre position. Moi, je vous demande ceux qui sont en désaccord avec ma position puis je vous donne un exemple : Pourquoi on fait, dans certaines provinces, puis c'est clair que... l'interdiction d'aller au privé pour les médecins. Alors, quand vous me faites la comparaison avec l'Ontario ou des médecins qui s'en vont, expliquez-moi pourquoi il y a des gens qui nous font cette recommandation-là puis que vous... ça qu'on vous demande : Pourquoi nous, dans notre projet de loi ou dans les règlements, on ne devrait pas prendre en compte ces recommandations, comme celle de l'interdiction d'aller pratiquer au privé? J'aimerais vous entendre sur ce point spécifique là.

M. Amyot (Marc-André) : Ils n'ont pas de PREM, ils n'ont pas d'AMP.

M. Dubé : Ce n'est pas ça, la question.

M. Amyot (Marc-André) : C'est des mesures incitatives en Ontario.

M. Dubé : Ce n'est pas ça, la question.

M. Amyot (Marc-André) : C'est ce qui la rend très attractive. 

M. Dubé : ...vous. Je dis : Est-ce que c'est clair pour les Québécois que, dans la plupart des provinces, il y a une interdiction d'aller au privé? Est-ce que vous êtes d'accord avec ça?

M. Amyot (Marc-André) : C'est clair. Dans certaines provinces, vous l'avez dit notamment l'Ontario, mais en contrepartie de ça...

M. Dubé : Voilà, oui. Puis c'est avec ça que l'Outaouais est en compétition.

M. Amyot (Marc-André) : ...ils ont... ils n'ont pas de...

La Présidente (Mme Poulet) : ...interrompre, je m'excuse de vous interrompre. Pour le Journal des débats, la transcription, j'aimerais ça qu'une seule personne à la fois puisse parler.

M. Dubé : Alors, je voulais juste finir ma question. Je veux laisser aux députés la chance de vous poser les questions par rapport aux recommandations qui sont faites parce que moi, ce que j'entends beaucoup depuis qu'on a déposé le projet de loi, l'automne dernier... les gens vous disent : Vous n'allez pas assez loin. Je peux comprendre que la fédération médicale dise ce que vous dites, ce matin, je respecte ça, mais ce que je vous dis : Laissez poser la question, prenez le temps de dire spécifiquement, sur les quatre commentaires qui nous viennent de certains groupes comme le Collège des médecins, comme l'Institut Cyrano, comme le groupe de médecine qui demande la pratique au public. Répondez à cette question-là, s'il vous plaît.

M. Amyot (Marc-André) : Bien, vous me demandez de commenter pourquoi ces gens-là sont favorables. Je vais les laisser vous l'exprimer, je ne peux pas m'exprimer pour eux, mais vous dites : La fédération... Je vous rappelle que ce n'est pas la fédération, ce sont les 10 000 médecins de famille, aujourd'hui, qui vous disent ça, là. Ce n'est pas juste la fédération.

M. Dubé : ...sont d'accord avec ça, vous me dites, là.

M. Amyot (Marc-André) : Oui, bien, majoritairement. Vous pouvez trouver des exceptions, M. le ministre, ça, c'est évident.

M. Dubé : ...laisser les députés continuer avec leurs questions, docteur.

La Présidente (Mme Poulet) : Mme la députée de Bonaventure. Et je rappelle, pour ceux et celles qui travaillent à la retranscription, on va leur faciliter la tâche : une seule personne parle à la fois, s'il vous plaît.

Mme Blouin : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, comme le ministre le disait, on utilise cette commission-là pour entendre les propositions, parce qu'on le répète, ce projet de loi là, c'est une mesure parmi un ensemble de mesures. Certaines personnes trouvent qu'on ne va pas assez loin. Donc, j'aimerais vous entendre sur quelles sont les autres mesures, quels sont les autres gestes qu'on doit envisager, outre ceux qui sont déjà en place ou en voie d'être réalisés pour favoriser la médecine publique.

M. Amyot (Marc-André) : Revoir le modèle d'organisation dans un contexte de pénurie de 1500 médecins de famille. Je vous ai parlé tantôt de l'intégration des soins. Il y a trois ingrédients, dans les juridictions, à travers le monde qui ont des systèmes de santé davantage performants, trois ingrédients, je vous les nomme : l'interprofessionnalisme... On est là, on travaille avec d'autres professionnels. Les GMF contiennent, là, des travailleurs sociaux, des infirmières, des psychologues. Encore faut-il que les CISSS fournissent ce personnel-là. Donc, l'interprofessionnalisme, l'intégration des soins... et l'intégration des soins, ça ne veut pas dire intégrer l'information. Le DSM va intégrer l'information, mais la trajectoire de soins des patients n'est pas bien définie, au Québec. Et la gouvernance médicale en première ligne... Puis, en première ligne, ce n'est pas une dépense que vous faites. Quand le gouvernement investit de l'argent en première ligne, il y a moins de complications. Il y a moins d'hospitalisations, moins de visites à l'urgence quand les patients sont bien pris en charge. Mais, encore une fois, je le rappelle, on vit avec une pénurie de 1500 médecins de famille, alors il faut trouver ensemble des adaptations.

Et moi, je vous offre, le gouvernement, le ministère, tous les gens impliqués, la collaboration entière des médecins de famille pour améliorer ce modèle...

M. Amyot (Marc-André) : ...d'organisation là.

M. Dubé : ...aller un petit peu plus loin. Vous venez de donner un exemple, là, très concret, qui prouve mon point de ce matin : les autres mesures qui sont en cours, dont j'aimerais parler. On vous a demandé d'embarquer avec nous dans une redéfinition de la première ligne pour aller plus loin que le GAP. Je veux avoir votre commentaire. Alors, je vous dis : Est-ce qu'il y a une amélioration de la première ligne qu'on peut faire? Définitivement. On a demandé à un groupe d'experts de venir compléter. On a demandé...

Alors, moi, je vous demande encore une fois d'être très, très transparent. Il y a plusieurs mesures qui sont en cours, il y en a qu'on a faites, il y a des mesures qui sont en cours, on est à la même place. Mais ce n'est pas ça que je vous demande, moi. Je vous demande, ce matin, là, quand j'entends des recommandations... Puis là j'en donne une autre. Là, on disait : l'interdiction de pratique. Dites-moi ce que vous pensez, par exemple, d'une des recommandations, d'éviter le va-et-vient entre le privé et le public. Quelle est votre opinion là-dessus?

• (12 heures) •

M. Amyot (Marc-André) : Bien, notre opinion d'encadrer davantage ça, elle est... elle est favorable.

M. Dubé : ...quoi, ça? Je veux juste être sûr que, quand vous me dites «favorable»... Ça veut dire quoi, dans la pratique? Que vous seriez prêt à interdire le va-et-vient?

M. Amyot (Marc-André) : De bien encadrer le va-et-vient.

M. Dubé : ...c'en est déjà une des quatre, là, où vous avez une certaine ouverture, d'encadrer?

M. Amyot (Marc-André) : D'encadrer et de s'assurer que ça soit... ça ne soit pas une utilisation... une mauvaise utilisation des ressources. Voilà ce que je veux dire.

M. Dubé : ...maintenant, une des...

M. Amyot (Marc-André) : Et souvent les...

M. Dubé : Oui?

M. Amyot (Marc-André) : Pardon. Allez-y. Excusez.

M. Dubé : Merci. Non, c'est parce que c'est tellement intéressant que je regarde les nombres de minutes qui nous restent. Catherine, veux-tu y aller? Ou j'en ai une autre, moi, qui me brûle les lèvres, là.

Mme Blouin : Allez-y, allez-y.

M. Dubé : Dans d'autres provinces, on a parlé tout à l'heure de l'interdiction de pratique au privé, mais il y a aussi beaucoup plus de similitudes ou de parité entre les tarifs qui sont chargés par ceux qui sont au privé. Qu'est-ce que vous pensez de ça, de jouer... d'attaquer peut-être cette différence-là qui est importante? Le député de Rosemont en a souvent parlé. Qu'est-ce que vous pensez de... Parce que c'est une des recommandations des autres groupes.

M. Amyot (Marc-André) : Je donne l'exemple de l'Ontario. Plutôt que d'utiliser une méthode coercitive comme au Québec...

M. Dubé : ...

M. Amyot (Marc-André) : ...ils ont... ils ont utilisé... Bien, c'est le constat, puis c'est la réputation qu'on a quand je discute. Vous avez des rencontres avec vos homologues des autres provinces, bien, j'ai des rencontres aussi avec des homologues des autres provinces, et c'est le constat qu'on a.

M. Dubé : ...je m'excuse, là, mais je vous ai posé...

M. Amyot (Marc-André) : Mais, en Ontario...

M. Dubé : Qu'est-ce que vous pensez de réduire l'écart entre les tarifs au privé versus au public? Question très claire.

M. Amyot (Marc-André) : Nous, ce qu'on dit, c'est : Il faut s'attaquer à la source du problème. Encore là, s'attaquer à la différentielle, c'est s'attaquer au symptôme et pas à la source du problème. En Ontario, plutôt que mettre une loi coercitive, ils sont... ils ont... ils ont mis des bourses pour favoriser que les étudiants en médecine restent en Ontario. Ça, ça aurait été une avenue qu'on aurait saluée. Et, si vous souhaitez mettre cette condition-là dans le projet de loi...

M. Dubé : ...qu'on paie déjà beaucoup plus les étudiants en médecine pour aller pratiquer en région qu'en ville. Il y a déjà des différences très importantes. Juste qu'on se le dise.

M. Amyot (Marc-André) : Les étudiants en médecine ou les...

M. Dubé : Bien, les gens qui vont pratiquer en région, ils ont des primes de rémunération pour être en région. C'en est une, ça. C'en est une, différence importante, là.

M. Charbonneau (Guillaume) : C'est vrai, mais il y a des... il y a des bourses d'installation qui ont été enlevées depuis une dizaine d'années qui nous aidaient à recruter dans les territoires éloignés, où on a beaucoup de misère à recruter.

M. Dubé : ...était très claire. Êtes-vous pour ou contre une plus grande similitude entre les tarifs au public puis au privé? Question...

M. Amyot (Marc-André) : On milite, encore une fois, en faveur de s'attaquer à la problématique plutôt qu'au symptôme.

M. Dubé : O.K., je vais prendre ça comme une non-réponse. Merci beaucoup. Très bien. Merci.

La Présidente (Mme Poulet) : Oui, il reste 26 secondes.

M. Dubé : Vas-y, Catherine.

Mme Blouin : ...en fait, on utilise cette tribune-là pour parfaire les projets de loi et compagnie. Donc, je n'ai pas beaucoup de temps, mais j'aimerais vous entendre à savoir quels groupes devaient être exemptés de cette... de l'obligation de pratique. Par exemple, pour nous, c'est clair que les forces armées, ça serait exempté de l'obligation de pratique. Quels seraient les groupes, à votre avis, qu'on devrait exempter?

M. Amyot (Marc-André) : Tous les groupes. Tous les médecins.

Mme Blouin : Parfait.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci beaucoup. Alors, maintenant, je cède la parole à la députée de La Pinière pour une période de...


 
 

12 h (version non révisée)

La Présidente (Mme Poulet) : ...min 32 s.

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Alors, merci pour votre exposé.

Alors, le ministre souhaite que le réseau soit un employeur de choix. Je comprends que, d'après votre exposé et votre mémoire, que vous trouvez que la mesure qui est introduite dans le projet de loi est coercitive et va avoir des effets contre-productifs. En même temps, on peut voir que dans la population, du point de vue du citoyen, ça semble être quelque chose qui pourrait être bon parce que les citoyens veulent avoir des médecins. C'est l'objectif de tout le monde ici. Mais ce que je vous demanderais, c'est... On comprend que vous trouvez que les causes véritables... on ne s'attaque pas aux causes véritables pour avoir un milieu de travail intéressant. Maintenant, pouvez-vous dire dans un langage que M. et Mme Tout-le-monde va comprendre quelles seraient les causes, là, véritables, pratico-pratiques auxquelles on pourrait s'attaquer pour atteindre l'objectif du projet de loi et qui feraient en sorte qu'on n'aurait pas besoin d'une telle mesure?

M. Amyot (Marc-André) : Bien, je peux peut-être mentionner... puis je te laisserai la parole, là, mais le soutien à la pratique. Dans les GMF, là, il y a des contrats. Les médecins s'engagent par contrat à fournir des services, à prendre un certain nombre de patients en charge, à donner de l'accessibilité en fonction des heures d'ouverture. De l'autre côté, le CISSS signe un contrat qui garantit... On va vous fournir des infirmières, des travailleurs sociaux, des psychologues pour donner un meilleur accès à la population en première ligne. Vous seriez abasourdis de voir le nombre de ces professionnels-là qui n'arrivent jamais dans les GMF. On a toujours l'impression qu'il y a une partie qui ne respecte pas sa partie du contrat.

Je peux peut-être, Pierre, te...

M. Martin (Pierre) : Écoutez, je vais vous raconter une anecdote, parce qu'actuellement moi, je... En passant, quand M. le ministre nous dit : Je veux améliorer l'accès, on est là, là. On est vraiment là. Et on... Dans les dernières années, on a fait beaucoup de gains organisationnels en travaillant en multidisciplinarité. La seule chose, c'est qu'il y a... le bât blesse à plusieurs endroits, actuellement.

Première des choses, on n'a pas un financement qui nous permet d'optimiser vraiment les ressources, les ressources organisationnelles de la clinique. Présentement, je suis en train de mettre sur pied une clinique avec des espaces de travail interdisciplinaires, avec une infrastructure de 12 500 pieds carrés, alors 12 500 pieds carrés, ça représente quand même beaucoup de sous en termes d'améliorations locatives. Le seul appui financier que je peux avoir du réseau, c'est 60 000 $. Alors, vous comprenez que déjà ça, on se dit : Est-ce qu'on est dans le bon... dans le bon véhicule pour améliorer l'accès?

Deuxième des choses, on a un ratio médecin-professionnel qui est trop faible présentement dans le cadre GMF. Alors, nos médecins, ce qu'ils nous disent, c'est : Est-ce qu'on pourrait... Est-ce qu'on ne serait pas mieux servis par nous-mêmes?

Et, moi, je représente un groupe de médecins qui ont entre huit et 40 ans de pratique. Et ils vont se réunir dans une semaine. Et l'une des questions qu'ils vont se poser, c'est : Est-ce qu'on continue encore dans le réseau public? On ne parle pas des jeunes docteurs, là, on parle de médecins qui ont à cœur de donner de l'accès puis qui se rendent compte qu'année après année les promesses ne sont pas là, les... On nous avait promis plus d'effectifs, on ne les a pas. Les effectifs qu'on a, professionnels, pour venir travailler dans les GMF, sont vampirisés par l'établissement. À la minute qu'il y a un manque dans l'établissement, ils viennent les chercher. Alors, on n'est pas capables de bâtir quelque chose de stable. Et, en travail multidisciplinaire, il faut former le personnel. Et, quand on les forme puis qu'on les perd puis on recommence, ça devient frustrant. Alors, une des façons qu'on a de regarder ça, c'est véritablement d'aller vers le privé et aller chercher le financement auprès de nos usagers.

Ceci étant dit, ce que l'on craint dans les paroles qu'on entend avec le projet de loi n° 83, c'est qu'on rende... au lieu de rendre le réseau public attractif puis faire en sorte que les médecins vont vouloir venir y travailler, c'est qu'on veut imposer la pauvreté à tout le monde sur le plan national. Et, ça, on craint ça. Puis je vais vous dire qu'on dit : Est-ce que c'est le point de départ? Il y a des gens qui se disent : Sauvons-nous tout de suite, on n'aura... on ne pourra peut-être pas le faire plus tard. Alors, vous comprenez qu'à un moment donné, ce projet de loi là introduit beaucoup de réflexion chez nos médecins sur le terrain, puis pas seulement sur les jeunes. La seule chose, c'est qu'en termes d'attraction, pour avoir une relève, pour attirer des jeunes docteurs, bien, le projet de loi nous met un petit peu de bâtons dans les roues, là. Mais peut-être saurons-nous attirer des médecins qui ont plus que cinq ans de pratique parce qu'ils vont voir dans notre organisation quelque chose qui est performant puis qui ne sera pas assujetti à des programmes qui changent à toutes les années. Le programme GMF, c'est quelque chose sur lequel tu ne peux pas te fier parce qu'à tous les ans ça change. Et ça, pour un organisateur de services, quelque chose excessivement démotivant. Et ça fait en sorte aussi que ça nuit à la créativité parce qu'on est toujours en...

M. Martin (Pierre) : ...en attente. Est-ce qu'on le fait? Parce que, si on le fait, ça va-tu suivre après? Et, à un moment donné, on décide de ne pas le faire.

D'autre part, les activités médicales imposées aux médecins, c'est une vampirisation de nos ressources médicales contre la première ligne. Et ça, année après année, depuis les événements malheureux de 2002 qui s'étaient passés à Shawinigan, on pensait qu'on serait sur un régime temporaire, parce qu'éventuellement on aurait les effectifs nécessaires pour ne pas se faire vampiriser tout le temps par les établissements. Mais, actuellement, qu'on parle que c'est 12 heures par semaine, l'équivalent de... mais ce n'est jamais ça. Moi, j'ai un médecin, il travaille en CHSLD, il est tellement obligé d'aller en CHSLD qu'il n'a plus le temps pour voir ses patients, puis il faut qu'on gère les crises auprès de ses patients. Puis ce n'est pas parce qu'il ne veut pas. Alors, à quelque part, si ce médecin-là décide de suivre la vague, d'aller vers le privé, il va pouvoir enfin libérer le temps nécessaire pour voir ses patients qu'il a dûment inscrits.

• (12 h 10) •

Puis, vous savez, nous autres, notre marché, à Trois-Rivières, c'est quoi? Nous, on... on donne des services à 25 000 de population, on est 10 docteurs, et il y en a 54 000 sur le guichet. Alors, écoutez bien, là, je veux dire, on a de l'ouvrage à faire pour améliorer cet accès-là. On veut être capables d'accueillir plusieurs professionnels, et le réseau public, présentement, ne nous le permet pas. Alors, laissez-nous au moins la soupape du privé pour être capables de rencontrer nos objectifs.

Mme Caron : Merci. Alors, je ne suis pas certaine que M. et Mme Tout-le-monde aient compris concrètement tout ce que vous avez expliqué, mais les... les sources, les causes... les causes du problème du... tu sais, concrètement, qu'est-ce qu'on pourrait faire au lieu d'avoir une mesure coercitive, je ne suis pas certaine que... d'avoir compris. Peut-être que vous pourrez nous en dire plus.

J'ai aussi compris que les... les PREM, les AMP amènent des... des difficultés dans l'organisation et dans la pratique, mais, en même temps, qu'est-ce qu'on a d'autre pour s'assurer que non seulement les... les professionnels, les médecins vont pratiquer en région, mais ne vont pas laisser, comme ça s'est passé par... par le passé, un secteur, admettons, plus défavorisé de Montréal? On donnait l'exemple, tantôt, d'un conjoint qui est à Montréal, et le médecin doit aller pratiquer ailleurs. Mais il y avait des secteurs de Montréal où c'était plus défavorisé, il n'y avait pas de médecin. Alors, est-ce qu'il y a des... est-ce qu'il y a des... des solutions à ça qui seraient... qui... qui fonctionneraient, qui seraient attractives pour les jeunes médecins?

La Présidente (Mme Poulet) : Il reste deux secondes.

M. Amyot (Marc-André) : ...

La Présidente (Mme Poulet) : Je m'excuse, j'ai... c'est tout le temps qu'on a pour l'opposition officielle. Maintenant, je cède la parole au député de Rosemont pour une période de 2 min 31 s.

M. Marissal : Merci. Bienvenue. Encore une fois, on va aller rapidement là. Je... je note, au passage, que le ministre a dérogé à sa propre demande et il a largement bifurqué de l'objet premier de ce projet de loi. Cela dit, s'il veut parler des tarifs privés et publics, il trouvera un interlocuteur intéressé en ma personne. Mais j'avais compris que ce n'est pas de ça dont il voulait parler ici aujourd'hui.

Alors, on va revenir à nos moutons, là : Il y a combien de membres, de jeunes membres de vos cohortes, dans les deux dernières années, qui sont allés directement au privé?

M. Amyot (Marc-André) : 20 médecins par année, 20 médecins de famille par année.

M. Marissal : 20 médecins, 20 médecins par année. O.K. Là, je n'ai pas beaucoup de temps, ça fait que je vais y aller directement. Vous êtes un syndicat. Un syndicat, ça représente des membres. Vos gens paient des cotisations, ils s'attendent à ce que vous défendiez des mandats que vous... que les membres vous donnent. Moi, je vois des problèmes... Suivez-moi. Moi, je vois des problèmes légaux, juridiques, voire constitutionnels dans ce projet de loi là. Ce n'est pas pour rien que le premier ministre lui-même, alors qu'on ne lui avait même pas demandé, a évoqué l'utilisation de la clause dérogatoire. Le gouvernement a choisi de ne pas aller là. Mais si vos membres vous donnent le mandat, notamment, de défendre la mobilité des personnes, vous n'avez pas bien, bien d'autre choix que de les défendre. Donc, on se dirige vers une autre... un autre... une autre partie de bras de fer, y compris juridique?

M. Amyot (Marc-André) : En passant, permettez-moi de rectifier. Vous dites : On est un syndicat. On est un regroupement de médecins. Ça... ça ne répond pas à la définition textuelle d'un syndicat. Cela dit...

M. Marissal : Je comprends, mais les gens qui paient des cotisations s'attendent à ce que vous les défendiez, et ces gens-là vont peut-être demander à ce que vous les défendiez.

M. Amyot (Marc-André) : La réponse, oui, courte, oui. Mais on parle actuellement de diminuer les barrières tarifaires entre les différentes provinces, de permettre une meilleure circulation. Là, ce qu'on fait, c'est davantage de protectionnisme pour obliger nos médecins formés ici à rester ici et... et les empêcher d'aller à l'extérieur.

M. Marissal : ...c'est philosophique. J'aime beaucoup, beaucoup la philosophie, mais je n'ai pas le temps en 2 min 31 s. Légalement, là, est-ce que vous êtes prêts à aller défendre ça devant les tribunaux?

M. Amyot (Marc-André) : On va faire l'analyse de la situation quand le projet de loi va être terminé. Peut-être que le projet de loi va être retiré, puis on n'aura...

M. Amyot (Marc-André) : ...besoin d'aller là. Alors, je n'irai pas dans les situations hypothétiques.

M. Charbonneau (Guillaume) : Puis peut-être dire, nos membres qu travaillent dans le public, veulent un système public fort. Les étudiants en médecine, la grande majorité veulent travailler dans le public. Puis le message qu'on leur envoie, là, c'est que le système public est tellement mauvais, tellement mauvais employeur, qu'on va être obligé de vous forcer pour...

La Présidente (Mme Poulet) : Merci. Je dois vous interrompre. Je m'excuse. Maintenant, je dois céder la parole au député des Îles-de-la-Madeleine pour une période de deux minutes 31 secondes.

M. Arseneau : ...c'est court. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je vous salue et j'aimerais vous poser deux questions brèves, avec des réponses qui seront également, je l'espère, mais le plus complet... possible. Vous dites essentiellement que... Nous, on veut améliorer la situation. On a l'impression et on a la conviction que les Québécois n'en ont pas pour leur argent dans l'investissement qu'ils font dans le système d'éducation, en particulier pour les médecins, mais pour les autres professionnels de la santé, à la limite, on pourrait aussi l'étendre. Il faut faire quelque chose. Les Québécois veulent qu'on agisse. Le gouvernement agit, on dit : Bon, bravo! Est-ce qu'il agit favorablement et de façon constructive? Vous dites : Non, ça va.  Le aggraver la pénurie de main-d'oeuvre. Est-ce que vous pouvez nous le démontrer? Si oui, on va voter contre ce projet de loi là.

M. Amyot (Marc-André) : Bien, vous dites : Les Québécois n'en ont pas pour leur argent, on est d'accord avec ça, mais pas à cause de la rémunération médicale. Le budget de la santé est passé de 40 à 60 milliards. L'enveloppe de rémunération des médecins de famille, est-ce qu'elle a augmenté pendant ce temps-là? Non, zéro. Combien de cadres supplémentaires sont arrivés dans les cinq dernières années? Est-ce que ça, ça donne des services aux patients, ça, ces cadres...

M. Arseneau : ...pour les médecins, pour d'autres juridictions, qui quittent pour le privé puis qui facturent une deuxième fois, alors que les contribuables ont payé chèrement pour le système de santé à 60 milliards, on n'en a pas pour notre argent, c'est ce qu'on pense. Est-ce que ça va aggraver la situation, le projet de loi?

M. Amyot (Marc-André) : Tout à fait.

M. Arseneau : Comment?

M. Amyot (Marc-André) : Rajouter... rajouter 1500 médecins de famille de plus au Québec, il n'y en a plus, de privé, parce qu'ils vont aller au public.

M. Arseneau : ...quel est l'impact négatif, l'effet pervers que vous voulez dénoncer?

M. Amyot (Marc-André) : Bien, comme Dr Charbonneau disait, le système n'est tellement pas attractif, que la façon de vous le démontrer qu'il n'est pas attractif, c'est...

M. Arseneau : ...moins attractif avec ce projet de loi là?

M. Amyot (Marc-André) : Il va l'être moins parce qu'on ne s'attaquera pas au vrai problème, on...

M. Arseneau : Alors, comment est-ce qu'on y perd?

M. Charbonneau (Guillaume) : Mais si les médecins ne sont tellement pas intéressés à travailler dans le système public, au moins... On n'est pas en faveur du privé, mais, au moins, quand ils vont dans le privé, ils donnent des services à des patients. Leur autre alternative, ça peut être d'aller travailler en esthétique, ça peut être d'aller travailler pour un autre employeur. On ne va pas les emprisonner, ces gens-là. Puis il y a des gens qui trouvent que le système n'est tellement pas intéressant qu'ils se font des groupes Facebook pour se trouver d'autres emplois ailleurs. On ne va pas les emprisonner, les médecins...

M. Arseneau : C'est au-delà du délai de cinq ans... Après cinq ans, c'est la débandade, c'est ce qu'on nous disait.

M. Charbonneau (Guillaume) : ...on n'attaque pas les problèmes d'attractivité de notre système public.

M. Arseneau : Au delà du délai de cinq ans qu'on veut imposer, c'est ça?

M. Charbonneau (Guillaume) : Oui.

M. Arseneau : D'accord. Merci.

M. Charbonneau (Guillaume) : Puis, après être enfermé pendant cinq ans, la première chose qu'on fait, bien, on se libère, on envoie un mauvais message à des gens qui ne le font pas habituellement.

M. Arseneau : Merci beaucoup...

La Présidente (Mme Poulet) : Merci. Alors, je cède maintenant la parole au député de Saint-Jérôme pour une période d'une minute 56 secondes.

M. Chassin :Moi aussi, je vais aller vite. Merci. Le ministre a parlé d'un comité qui a... qui s'est penché, en fait, sur les PREM et qui lui  a remis... ses recommandations. Avez-vous eu connaissance du rapport, vous?

M. Amyot (Marc-André) : On a eu connaissance du rapport et on est loin de la coupe aux lèvres, des 23 recommandations qu'on avait présentées au ministre et... Tout à fait.

M. Chassin :Je vais rapidement quand même. Il y a un aspect la propriété des cliniques que vous abordez. Est-ce qu'il y a des cliniques, de propriétés de médecins, de GMF, est-ce qu'il y en a qui ont fermé leurs portes ces dernières années?

M. Amyot (Marc-André) : Bien oui, il y en a qui ont fermé leurs portes, parce que certaines cliniques avaient plusieurs médecins âgés qui prenaient leur retraite...

M. Chassin :Mais ce n'est pas toujours... En fait, ce n'est pas juste parce que c'est privé que ça ferme. Des fois, il y a des circonstances qui peuvent faire qu'une clinique ferme, même si c'est propriété...

M. Amyot (Marc-André) : Il y a des circonstances de rationalisation où on a une tendance à concentrer dans des grosses cliniques. Alors, l'important de garder les cliniques de proximité...

M. Chassin :Je vais, je vais quand même vite. Donc, la réflexion sur, puis je trouvais ça intéressant, là, sur les AMP, en 2002, où on avait l'impression d'être dans un régime temporaire, mais, à l'évidence, 23 ans plus tard, ça ne l'est peut-être pas. Est-ce que ça pourrait être, puis là je cherche des avenues de solution, est-ce que ça pourrait être une solution d'inscrire, dans la loi, si c'est temporaire, par exemple, l'application des cinq ans?

M. Amyot (Marc-André) : Vous revenez à la 10e recommandation de notre mémoire, qui est de mettre un mécanisme d'évaluation, année après année, des effets de ce projet de loi là.

M. Chassin :Puis disons qu'au lieu d'interdire pendant cinq ans, on demande que, s'il y a la pratique privée, ça soit après avoir fait 40 heures par semaine dans le public. Ça pourrait être une solution?

M. Amyot (Marc-André) : Ça peut être quelque chose qui est évaluable, d'autant plus que certains professionnels peuvent faire ça, notamment les IPS, ils peuvent travailler 40 heures dans le public...

La Présidente (Mme Poulet) : Je m'excuse de vous interrompre, c'est tout le temps que nous avons. Désolée. Je suis la gardienne...

La Présidente (Mme Poulet) : ...temps, je suis vraiment désolée. Alors, je vous remercie de votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux prochains invités de prendre place.

(Suspension de la séance à 12 h 20)

(Reprise à 12 h 23)

La Présidente (Mme Poulet) : Alors, on reprend nos travaux. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Fédération des médecins spécialistes du Québec. Mesdames, Messieurs, bonjour. Je vous rappelle que votre groupe dispose de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Alors, je vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre exposé.

M. Oliva (Vincent) : Merci, Mme la Présidente. Mesdames et Messieurs les parlementaires. Donc, je me présente, Dr Vincent Oliva, président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec, accompagné de Dre Véronique Godbout, présidente de l'Association des orthopédistes. Dre Catherine Besner Morin, présidente des dermatologues et Me Pierre-Luc Desgagnés, qui est directeur général à la fédération.

Nous défendons un système de santé public fort et accessible. C'est au cœur de notre mission. Nos membres soignent chaque année près de 5 millions de patients québécois à travers plus de 30 millions de consultations médicales. Ils sont les premiers et les premières à vouloir améliorer l'efficacité du réseau de la santé et offrir aux patients un meilleur accès aux soins. Il importe de mentionner d'ailleurs que la fédération ne représente pas les médecins spécialistes qui ne pratiquent pas dans le réseau public. Avec le p.l. n° 83...

M. Oliva (Vincent) : ...le ministère de la Santé pense qu'il favorisera l'exercice de la médecine au sein du réseau de la santé en imposant au niveau médecins... aux nouveaux médecins l'obligation d'y exercer durant les cinq premières années de pratique et de demeurer au Québec à la suite de leur formation. Il affirme avec emphase que cela lui permettra de se doter de moyens nécessaires pour permettre un meilleur accès aux soins.

Nous savons que le ministère et le ministre aiment bien les comparaisons avec le hockey. On pourrait donc dire que la stratégie du p.l. 83, c'est celle d'un coach dont l'équipe tire de l'arrière 7 à 1 qui demande à ses joueurs de lâcher les gants : les spectateurs sont contents, mais il va perdre le match, c'est une diversion. En imposant des restrictions sans précédent présentées comme des solutions pour améliorer l'accessibilité aux soins, ce projet de loi aux relents de régime autoritaire risque d'aggraver les problèmes qu'il prétend résoudre. Le vrai problème : un réseau public à bout de souffle.

La FMSQ observe une tendance, depuis deux ans, chez certains médecins spécialistes, à se retirer du régime public, une situation qui nous préoccupe autant que le ministre. Cela dit, les données révèlent que le phénomène demeure marginal puisque, pour l'année 2023-2024, on parle de 1,79 % des médecins. L'immense majorité des médecins spécialistes veulent donc exercer au sein du réseau public.

Avant de blâmer les jeunes médecins et de leur taper sur la tête, il faudrait peut-être prendre le temps de comprendre pourquoi quelques professionnels, moins de 2 % d'entre eux, décident de quitter le public. Contrairement à une perception entretenue, ce n'est pas l'appât du gain qui motive cette décision. Elle est avant tout le résultat d'un manque d'organisation et la pénurie critique de ressources qui frappe le réseau de la santé.

Rappelons, par exemple, que plus d'un chirurgien se retrouve avec un nombre limité de priorités opératoires, dans certains cas une ou deux par mois. Quotidiennement dans les centres hospitaliers à travers le Québec, nos membres sont confrontés à des reports de chirurgies, à un manque criant de personnel, à une rationalisation des services, à une pénurie de lits, à une sous-utilisation des plateaux techniques et à des outils technologiques désuets. Quant aux cabinets offrant des services médicaux assurés, il faut rappeler que les coûts du loyer, de main-d'œuvre, des fournitures médicales n'ont cessé d'augmenter, sans aucun nouvel apport du gouvernement.

Nous savons tous et toutes que la consultation et l'écoute en vue de régler les problèmes ne font pas partie de la génétique du gouvernement actuel. C'est tout de même particulier de penser que la solution miracle du ministère de la Santé pour régler les enjeux du système reste celle qui est débattue aujourd'hui : obliger les jeunes médecins à travailler au public sans que le soutien, les infrastructures, le personnel soignant et les plateaux suivent. Soyons clairs, le ministère peut bien rêver d'ajouter des dizaines et des dizaines de médecins, il ne pourrait pas les faire pleinement travailler et donner des soins. Un premier test viendra d'ailleurs rapidement puisque, selon les derniers chiffres du Collège des médecins du Québec, c'est 235 médecins spécialistes qui se sont ajoutés à notre groupe au 31 décembre 2024. Le p.l. 83 imposera donc une obligation de service de cinq ans et des pénalités financières allant jusqu'à 100 000 $ par acte et 200 000 $ en cas de récidive pour ceux qui s'écartent.

Tout en étant complètement déphasées, ces mesures vont entraver les carrières médicales et l'attractivité de la formation médicale au Québec. À cet égard, il faut souligner que le ministère va à contre-courant des juridictions comparables. Il préfère ne manier que le bâton en laissant la carotte au vestiaire, en s'imaginant qu'il va ainsi faciliter le recrutement. Nous déplorons un tel traitement réservé à nos membres. Il convient de préciser qu'aucun... aucune autre juridiction au Canada n'impose aux médecins des obligations contraignantes de cette nature. Pour attirer les étudiants et les résidents, la plupart misent plutôt sur des incitatifs financiers et des bourses en échange d'une obligation de service.

D'autres questions importantes demeurent aussi en suspens quant au p.l. 83. Qu'adviendra-t-il des médecins qui choisiront de poursuivre des fellowships ou des formations de pointe à l'étranger? Qu'en sera-t-il des médecins au parcours atypique, par exemple engagés dans des missions humanitaires ou des projets de recherche qui permettront à des médecins de revenir avec une expérience unique?

D'autres professionnels de la santé sont fortement affectés par les départs au privé. Près de 40 % des psychologues quittent le réseau public au cours des cinq premières années de leur pratique. Au 5 octobre dernier, 265 infirmières praticiennes spécialisées, les IPS, exerçaient hors du réseau public. La situation des technologistes médicaux est tout aussi préoccupante. Selon leur association, seulement 50 % des besoins étaient comblés en avril 2024. Ces exemples illustrent l'inefficacité prévisible du projet de loi pour résoudre les enjeux d'accessibilité aux soins spécialisés.

En plus d'imposer des obligations contraignantes aux seuls médecins, le p.l. 83...

M. Oliva (Vincent) : ...créer l'illusion que les mesures qu'il propose ou l'intégration de quelques dizaines de médecins spécialistes non participants au régime suffiront à résoudre les problématiques d'accès. De plus - et cela ne peut pas passer inaperçu - le ministère n'a jamais démontré beaucoup d'ouverture aux recommandations des fédérations médicales quant aux plans d'effectifs médicaux, les fameux PEM. Le p.l. 83 veut obliger les jeunes à pratiquer au Québec, alors qu'on ne sait même pas s'ils auront des PEM, en clair, s'ils pourront travailler ou non.

• (12 h 30) •

Un autre argument massue du ministère pour légitimer son projet de loi tient au coût important de la formation médicale, soutenant ainsi que les jeunes médecins auraient une dette envers l'État. D'après le gouvernement, la formation d'un médecin, incluant la résidence, représenterait un coût de plus de 435 000 $ pour les contribuables. Le gouvernement a fait preuve d'opacité quant à ses calculs. En plus d'être contestables, ces chiffres du ministère semblent intégrer le salaire des résidents dans les coûts de formation des médecins. Or, les résidents rendent des services médicaux essentiels à la population entièrement dans le réseau public et à des coûts raisonnables. Ils posent des diagnostics, prescrivent des traitements, procèdent à des interventions chirurgicales et médicales et sauvent des vies. En clair, il s'agit d'une rémunération versée en échange de services médicaux rendus à des patients. C'est un salaire négocié avec l'État. Pas une subvention aux études.

De manière générale, il importe de mentionner que le Québec a fait le choix, depuis les années 60, de maintenir les frais de scolarité et de formation à des niveaux comparativement bas par rapport au reste de l'Amérique afin de favoriser l'accès à l'éducation pour le plus grand nombre. L'ensemble des étudiants universitaires québécois, y compris ceux des secteurs de la santé et des services sociaux et d'autres secteurs, bénéficient donc d'études subventionnées par l'État, couvrant leur parcours académique, quelle qu'en soit la durée, sans pour autant être contraints à une obligation de service en retour.

Dans le cadre d'une stratégie visant à améliorer l'accès aux soins, le ministère a instauré en 2023 un programme de bourses d'étudiants destiné aux infirmières praticiennes spécialisées. Ce programme prévoit l'octroi d'une bourse de 6 000 $ en échange d'un engagement à travailler 6 000 heures dans un établissement ciblé. En cas de défaut d'engagement, l'IPS doit rembourser l'intégralité de la bourse reçue. En voulant poursuivre le même objectif, le ministre a opté pour une approche nettement plus coercitive à l'égard des médecins, leur imposant des obligations pour exercer dans le réseau et au Québec, assorties de sanctions disproportionnées et sans offrir la moindre contrepartie. Plutôt que de recourir à la coercition, une approche qui valorise et soutient la pratique médicale en rendant le public plus attractif serait beaucoup plus efficace. Il faut investir dans les soins aux patients.

En conclusion, le p.l. 83, dans sa forme actuelle, est une fausse solution à un problème marginal. Au lieu de renforcer le système public, il risque de le fragiliser davantage en brisant la confiance entre l'État et ses professionnels. Si le ministère croit vraiment en son initiative, souhaite vraiment une solution pérenne, il peut indiquer à cette assemblée qu'il retire son projet de loi pour s'asseoir avec nous et les autres fédérations. C'est comme ça qu'on va identifier le bon problème et la bonne chose à faire. Nous vous tendons la main à nouveau. En politique, la coercition est une méthode tentante, elle apparaît politiquement rentable, et on obtient des applaudissements faciles, elle s'avère finalement toujours inefficace. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci de votre exposé. Alors, nous allons maintenant commencer la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous pour une période de 14 minutes 30 secondes.

M. Dubé : Très bien. Merci beaucoup. Alors, Docteur Oliva et vos collègues, merci beaucoup. Je vais faire un peu la même approche pour commencer, avant de passer peut-être la parole aux collègues députés qui sont... ont plusieurs questions. Je vais vous dire, j'ai... vous venez de me titiller quand vous me dites que l'accès est un problème marginal au Québec. J'ai un petit problème avec ça quand...

M. Oliva (Vincent) : ...était un problème marginal. J'ai dit que le nombre de médecins qui vont au privé est un problème marginal.

M. Dubé : O.K. Parce que quand j'entends qu'on a encore 900 000 personnes sur le CRDS, là, j'espère que j'avais peut-être mal compris votre point. Parce qu'on n'a pas la même définition de ce qui est marginal.

Juste quelques corrections parce que peut-être qu'encore une fois j'ai mal entendu. La première, à savoir que cette interdiction-là, d'aller au privé, n'existe pas ailleurs au Canada. Elle existe en Ontario. On pourra en discuter amplement, mais je veux juste corriger, là. Il y a une interdiction, les médecins, de pratiquer au privé.

Deuxième chose...

M. Oliva (Vincent) : Je... Mme la Présidente, je parlais de l'obligation de travailler dans la juridiction.

M. Dubé : Oui. O.K. Donc, c'était... Parce qu'il y a deux choses dans le projet de loi : il y a la pratique au privé puis il y a la pratique au Québec. Alors, votre point était sur la pratique...


 
 

12 h 30 (version non révisée)

M. Dubé : ...au Québec.

M. Oliva (Vincent) : Exact.

M. Dubé : O.K. Très bien.

M. Oliva (Vincent) : L'obligation de travailler en sol québécois ou en Amérique, le seul autre endroit, c'est Cuba.

M. Dubé : Bon. Quand... Deuxième chose. Vous avez dit : C'est... Bien, on va essayer de ne pas trop se comparer avec Cuba, c'est un très bon point. Il y a une chose... Juste pour corriger, parce qu'il y a certains points que vous avez soulevés, avec lesquels je suis d'accord, alors, je vais le laisser... Mais vous avez parlé d'une prime aux IPS de 6 000 $. C'est 60 000 $. O.K. C'est 60 000 $.

M. Oliva (Vincent) : Je suis content, très content pour elles.

M. Dubé : Bon. Bien, voilà! Ils n'ont pas le même salaire que les médecins, mais ça, c'est d'autre chose. Je voulais aussi vous entendre avant de passer la parole à mes collègues, parce que vous avez soulevé un point que je trouve très important à clarifier parce que, sur ça, des fois on s'entend sur ce qu'on ne s'entend pas, mais sur ce point-là, on est d'accord, c'est toute la question du fellowship. Puis dans le projet de loi, puis on aura la chance de le discuter quand on sera avec mes collègues dans l'article par article, mais il n'y a... je veux juste faire une différence, là, pour que les Québécois comprennent que l'obligation qu'on demande est après la formation. On se comprend, là? Ça, ça veut dire qu'un étudiant en médecine familiale ou par exemple, parce que c'est beaucoup plus fréquent, en médecine spécialisée, qui déciderait après son cours à McGill, à l'Université Laval, peu importe, de décider d'aller faire son fellow à Boston pour prendre une spécialisée... une spécialité en, peu importe, pourrait aller faire son fellow en autant qu'il ait l'obligation de revenir à Québec. Donc, je vous donne cet exemple-là juste pour des choses qu'on va clarifier, parce que de dire qu'on est contre la formation, juste pour qu'on s'entende bien, là, c'est une clarification que je voulais faire.

Et, en fin de compte, ce que je vais vous demander, si vous pouvez prendre juste une minute pour l'expliquer, c'est où les autres endroits? Je vous donne un exemple. Il y a en ce moment des exceptions au projet de loi qu'on va vouloir faire, puis on le fait habituellement par l'intermédiaire des règlements. Je vous donne un exemple. C'est sûr qu'en ce moment, quand on forme des étudiants, par exemple, pour le Nouveau-Brunswick, le Nouveau-Brunswick reconnaît la qualité de notre formation en médecine dans une université, les gens peuvent venir ici pour être formés, mais il y a quand même une obligation, un, de pénalité. Puis on n'a pas envie de changer ça aussi. Si ces gens-là, après être venus au Québec se faire former, retournent en... il n'y aura pas de... Alors, il va y avoir des exceptions qu'on va être capables. Et moi, ce que j'aurais aimé vous entendre... Là, je comprends, vous dites globalement que vous êtes contre, mais je respecte votre opinion, mais je vous donne l'exemple, là. Je viens de vous donner deux exemples d'exemption. Je vous ai parlé de la formation, puis je vous ai parlé, par exemple, mais il y a... Je vous ai parlé du Nouveau-Brunswick, mais on fait ces exceptions-là pour la formation des médecins au niveau militaire. Alors, je veux juste vous entendre un petit peu là-dessus.

M. Oliva (Vincent) : Merci. Si vous me permettez, effectivement, je vais répondre. En fait, c'est que cette obligation de travailler au Québec... Actuellement, il n'y a pas d'exode des médecins hors Québec. Il y a des médecins qui vont dans d'autres provinces, mais il y a des médecins d'autres provinces qui viennent au Québec. Même chose à l'international. Donc, le flux... Le flux n'est pas négatif, là...

M. Dubé : ...elle est très différente, là. On en a 2 300 qui sont partis dans d'autres provinces, puis il y en a 500 qui sont venus. Je comprends qu'il y a des...

M. Oliva (Vincent) : Il y a 3 000 médecins diplômés hors Québec qui travaillent au Québec.

M. Dubé : Je vous parle avec l'Ontario, là.

M. Oliva (Vincent) : Bien, peut-être avec l'Ontario, mais si on prend globalement, il n'y a pas d'exode, il n'y a pas de flux négatif de médecins du Québec. Alors, c'est une mesure... On ne comprend pas d'où elle sort.

M. Dubé : Mais dites ça au député de Pontiac. La limite de l'Ontario, là, elle fait une grosse différence. O.K. C'est beau.

M. Oliva (Vincent) : Oui. On est d'accord que dans certaines régions géographiques, c'est effectivement le cas. Mais vous allez faire quoi, les mettre en prison?

M. Dubé : Bien, écoutez, c'est... Je vous demande d'autres... Je vous demande d'autres suggestions.

M. Oliva (Vincent) : Bien, ça n'a pas de sens.

M. Dubé : Ce n'est pas si...

M. Oliva (Vincent) : Ça n'a pas de sens, cette histoire-là. On est le seul endroit en Amérique qui allons contraindre des gens qui ont des études à travailler dans leur cas comme on vient dans...

M. Dubé : Oui, mais je viens de vous donner un exemple.

M. Oliva (Vincent) : On ne fait même pas ça dans les pays communistes, M. le ministre.

M. Dubé : Non, mais, Dr Oliva, avec tout le respect que je... Je viens de vous donner l'exemple du Nouveau-Brunswick, là. Alors, je vous dis, il n'y a pas personne qui va aller en prison.

M. Oliva (Vincent) : Il n'y a pas de faculté de médecine au Nouveau-Brunswick. Ils viennent tous se former au Québec puis ils retournent au Nouveau-Brunswick.

M. Dubé : Bien non, mais c'est exactement pour ça que je vous dis : Quelles sont les exceptions, qui, pour vous, seraient...

M. Oliva (Vincent) : Tous. Tous. Il n'y a pas... On n'a pas besoin de contraindre les médecins à rester au Québec. Je pense que les médecins veulent travailler au Québec...

M. Dubé : ...laisser continuer...

M. Oliva (Vincent) : ...veulent tous travailler au Québec. La grande majorité reste au Québec. Il y a quelques médecins qui partent. Je peux vous donner l'exemple de ma belle-sœur qui est une pédiatre qui veut faire des soins intensifs, qui n'a pas trouvé de PREM, qui est au Sick Kids à Toronto puis qui a hâte de revenir ici, qui attend un PREM à Sainte-Justine. Des exemples comme ça, il y en a plein. Il y a des médecins, des fois, qui trouvent un conjoint à l'extérieur, puis qui restent, d'autres fois qui trouvent un...

M. Oliva (Vincent) : ...médecin puis qui les ramène. C'est la liberté d'aller où les médecins... Réglez votre système public, donnez les conditions compétitives, puis les médecins vont vouloir travailler comme partout ailleurs sur la planète. Parce que moi, dans mon service au CHUM, sur une quarantaine de radiologistes, j'en ai 10 de l'extérieur. J'ai huit Français, un qui vient de la Belgique, un qui vient de la Roumanie. C'est ça, la... Vous voulez garder les gens en prison. Vous dites «le fellowship», mais si le médecin veut pratiquer deux, trois ans puis faire plus longtemps qu'une formation en fellowship, vous allez faire quoi? Vous allez dire non? Ça n'a pas de sens. Alors, nous, on n'est pas d'accord avec ça.

• (12 h 40) •

M. Dubé : Bien, je viens de vous dire le contraire, là. Je vais vous donner l'exemple du fellowship.

M. Oliva (Vincent) : Oui. Mais on va être soumis à des gens qui vont dire oui ou non. Écoutez, ces contraintes-là, on n'y croit pas. Elles ne sont pas nécessaires.

M. Dubé : Alors, je vais laisser à mes collègues, là. On s'en va dans la bonne direction.

M. Oliva (Vincent) : Oui.

M. Dubé : C'est correct. C'est bon. Très bon.

La Présidente (Mme Poulet) : Alors, oui, Mme la députée de Bonaventure. Il reste 18 secondes.

Mme Blouin : Merci, merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, bonjour à vous. Merci de prendre le temps d'être avec nous aujourd'hui.

J'ai posé une question au groupe qui était avant vous et je n'ai pas vraiment eu de réponse, alors je mise beaucoup sur vous, sans pression, bien sûr. J'imagine que vous savez que les Québécois, en très forte majorité, appuient le projet de loi. Ça inclut différents groupes dont le Collège des médecins. Alors... Puis même que le Collège des médecins dit qu'on ne va pas assez loin. Il aimerait qu'on ait des mesures encore plus costaudes. Donc, j'aimerais savoir comment vous expliquez que votre position soit si opposée à celle de ces groupes-là, qui incluent le Collège des médecins?

M. Oliva (Vincent) : D'abord, on n'encourage pas le privé, on ne représente pas le privé. Vous pouvez fermer le privé tant que vous voulez, fermez-le, ça ne changera rien. Ça ne donnera pas plus de soins aux Québécois. C'est ça notre mot.

Puis j'aimerais, Dre Godbout, qui est orthopédiste, ici, O.K., qui a plusieurs de ses membres qui vont dans le privé, qui rentrent et qui sortent, O.K., pas parce qu'ils aiment le privé... Mais, Véronique, Dre Godbout, on se tutoie, Véronique, j'aimerais que tu expliques aux parlementaires pourquoi est-ce que les médecins rentrent et sortent du privé... du public comme ça.

Mme Godbout (Véronique) : Merci de m'avoir invitée. Ce n'est pas dur à comprendre en fait. Les orthopédistes, là, qui est probablement la spécialité actuellement où il y a le plus de spécialistes qui vont et viennent, privé-public, c'est parce que le public n'est pas capable de leur donner assez de temps. On est capables d'avoir en moyenne une journée par semaine à l'hôpital pour opérer, puis ça, c'est une moyenne. Donc, il y en a qui ont moins, rare ont plus. Puis ils sont capables de nous donner une journée de clinique externe par semaine. Donc, le reste du temps, l'hôpital n'est pas capable de... Si, nous, on dit : Bien là, j'ai d'autres patients à voir, je vais y aller, ah bien, on peut te trouver un local, s'il y en a un, mais il n'y aura pas d'infirmière avec toi, il n'y aura pas de préposé, il n'y a personne qui va booker les rendez-vous. Donc, dans ce contexte-là, les gens s'organisent et puis ils font leurs activités au public pendant quelques semaines puis ensuite ils vont se désaffilier pendant une semaine ou deux, là, selon leurs habitudes, je ne sais pas, pour pouvoir offrir... continuer à offrir des services, pour pouvoir continuer à travailler. Parce qu'à l'hôpital le réseau public n'est pas capable de faire ça. Ceux qui ne vont pas au privé, qu'est-ce qu'ils font pendant leurs trois autres jours/semaine, vous allez me demander, bien, ils vont en cabinet pour voir plus de patients puis faire augmenter les listes d'attente.

M. Dubé : Bien, peut-être, je voudrais juste commenter. Merci, Catherine, pour la question. Je veux juste qu'on rappelle, là, ce que j'ai dit comme introduction à la commission ce matin, là, avant la présentation de la FMOQ, qu'on travaille depuis plusieurs années sur différentes initiatives. À travers la pandémie, il y a eu une baisse des chirurgies, là, un secteur qui vous préoccupe plus. On est rendus maintenant à avoir rattrapé le niveau de chirurgie... non, je veux juste terminer... au niveau justement à cause de l'aide du privé. Aujourd'hui, là, en 2024-2025, là, on fait autant de chirurgies qu'on en faisait avant. O.K.?

Deuxièmement, avec les conventions collectives qu'on vient de signer avec la FIQ, il va y avoir quand même une chose qui est importante, on va avoir plus de personnel justement pour appuyer dans nos salles d'op. Ça, c'est au public.

Puis troisièmement, on est en demande avec vous, mais je n'en parle pas trop, mais pour être capables d'avoir accès à plus d'heures disponibles entre autres dans les temps défavorables. Ça, ça va faire une différence aussi.

Alors, je veux juste qu'on comprenne bien ce que j'ai fait comme introduction ce matin. Il y a plusieurs choses qui sont en cours en ce moment qui expliquent la situation et qui nous permettent d'améliorer la situation actuelle. Alors, je comprends ce que vous dites, mais je veux juste qu'on mette les choses claires. Puis, moi, je le clarifierai dans les prochaines semaines. Il y a beaucoup d'efforts qui se font pour être capables d'améliorer l'environnement en ce moment.

Mme Godbout (Véronique) : Je suis contente de l'entendre. Merci beaucoup. Pour février mars, Shawinigan a dû annuler sept salles d'opération. Pour février et mars, le CIUSSS Centre...

Mme Godbout (Véronique) : ...on a dû annuler neuf salles d'opération... neuf priorités opératoires, incluant d'autres choses. Ils ont dû couper des journées aussi. Puis ça, c'est juste pour février-mars. Donc, la... la réalité, c'est que c'est... ce n'est pas... la résultante n'est pas sur le terrain encore.

M. Dubé : Bien, ce que je pense qu'il peut y avoir des disparités régionales importantes qu'on est en train de clarifier. Mais je veux juste dire que, dans l'ensemble, on fait autant de chirurgies aujourd'hui qu'on en faisait à l'époque prépandémique, ce qui est tout un rattrapage par rapport à toutes les difficultés qu'on a eues. Je veux juste le mentionner, là. Je vous laisse continuer, Mme...

Mme Godbout (Véronique) : Les... Oui, je vais laisser la parole aux autres.

La Présidente (Mme Poulet) : Mme la députée de Bonaventure.

Mme Blouin : Oui, merci. Donc, comme le ministre le mentionnait, le projet de loi actuel, c'est une mesure parmi un ensemble de mesures qui sont en cours de réalisation ou qui ont été réalisées. Moi, j'aimerais vous entendre à savoir quelles sont les autres mesures, quels sont les autres gestes qu'on devrait envisager. Il y a eu des propositions, par exemple, comme le Collège des médecins, qui nous suggère de... d'avoir des tarifs maximums au privé, ou encore de mieux encadrer le va-et-vient entre le public, le privé. J'aimerais savoir qu'est-ce que vous pensez de ces mesures-là, et quelles sont vos propositions.

M. Oliva (Vincent) : Encore une fois, Mme la Présidente, le... le problème, là, n'est... n'est pas de... Le problème de... du privé, en fait, est un symptôme, n'est pas... n'est pas la cause du problème. Le problème, c'est que le réseau public ne fonctionne pas. Puis là, on essaie de trouver des solutions pour colmater le privé. Mais le privé, c'est une soupape qui se développe parce que le public déborde et ne donne pas assez de ressources pour donner des soins. On rajouterait 200 orthopédistes demain matin, ils ne feraient pas une chirurgie publique de plus, ils se marchent sur les pieds. Puis peut-être qu'on pourrait entendre Dre Besner Morin également parce qu'elle a plusieurs de ses membres qui sont dans le privé. Peut-être, Catherine, pourrais-tu expliquer pourquoi est-ce que les dermatologues s'en vont au privé.

Mme Besner Morin (Catherine) : Bonjour. Merci de pouvoir être là. Effectivement, les dermatologues au privé, c'est vraiment un phénomène grandissant et grandissant rapidement. Juste pour vous donner un exemple, en 2004, on avait quatre dermatologues désaffiliés puis là, maintenant, on est rendus à 52 pour 200 qui travaillent au public. Quand... Donc, c'est quelque chose qu'en tant que présidente c'est vraiment dans ma mire, là, le... la désaffiliation. Puis nous, ce n'est pas de la désaffiliation temporaire, on parle de désaffiliation permanente. Puis, c'est... la raison principale, c'est vraiment le problème des frais de cabinet, c'est-à-dire que, depuis plusieurs décennies, les dermatologues, on s'est fait mettre un peu en dehors des hôpitaux. Ce que je veux dire par là, c'est qu'il y a des PEM, mais c'est un peu des faux PEM affichés, parce que quand tu vas cogner à la porte, concrètement, de l'établissement puis tu dis que tu veux travailler là, ils te répondent qu'ils n'ont pas les secrétaires, ils n'ont pas les locaux, puis ils n'ont pas les infirmières, donc ils vont te proposer soit maintenant rien puis ils vont dire : Bien, prends les gardes puis prends le PEM, mais, en réalité, tu n'as aucune place dans l'établissement, ou ils vont dire : On va te donner un jour, puis, ensuite de ça, mais tes quatre autres jours viens les combler d'une façon différente. Puis, ensuite de ça, donc, nous, depuis des décennies, on s'est organisés pour offrir des soins au public à l'extérieur des établissements, puis c'est des bons...

La Présidente (Mme Poulet) : Merci beaucoup. C'est tout le temps que nous avons. Alors, on va poursuivre les discussions avec le... avec le député de Pontiac pour une période de 7 min et 32 s.

M. Fortin :Très bien. Merci. Merci, Mme la Présidente. Bonjour à tout le monde. Bonjour à vous tous d'être... d'être là. Je veux juste quand même prendre quelques instants, là, par rapport à vos propos sur des... et le ministre appelle ça des régions où ça va... où c'est peut-être plus difficile, là. Mais, dans ma région, M. le ministre, vous le savez, qu'on est rendus à 50 % de chirurgies qui sont faites dans le privé. 50 %. Alors là, on n'est pas dans le... la normalité québécoise, là. Si vous voulez... si vous voulez dire que c'est une exception, ça va, mais c'est la réalité dans une région, alors... Et ces médecins-là, ils n'ont pas quitté pour le privé parce qu'ils voulaient nécessairement aller au privé, c'est parce qu'il y en a une, peut-être deux salles d'opération à Gatineau qui sont ouvertes aujourd'hui, là, sur sept. Ça, c'est la réalité dans certaines régions du Québec.

Moi, ce que je veux savoir du projet de loi, là, c'est : À la fin de la journée, est-ce que ça va nous permettre de garder ou d'attirer plus de médecins, et nos meilleurs médecins, entre autres, là, vers le réseau public québécois? Et la grande inquiétude qu'on a, de notre côté, c'est que les étudiants qui souvent, entre autres pour leur spécialité, appliquent à bien des places à travers le Canada, là, ne choisissent pas de venir au Québec. Ça, c'est une inquiétude qu'on a par rapport au projet de loi, c'est-à-dire quelqu'un qui commence soit sa résidence ou ses études, qui applique à Montréal, à Toronto, à Vancouver, parce que, dans des spécialités, il y en a très peu, des postes de résident, entre autres, qui fassent...

M. Fortin :...le choix d'aller ailleurs pour ne pas être assujetti à ces obligations-là. Est-ce que c'est quelque chose qui vous préoccupe également?

M. Oliva (Vincent) : Absolument. Puis je pense que la Fédération des médecins étudiants va être là puis pourra sûrement nous dire leur perspective et est-ce que ça va leur tenter de faire leur cours de médecine au Québec si une telle loi était adoptée, mais, en réalité, il faut comprendre qu'une fois que le cours de médecine est fait, il y a un système de... je m'excuse de l'anglicisme, de match pancanadien, où les étudiants qui veulent faire une spécialité appliquent dans un système de... Ils peuvent être matchés dans une autre province. Alors, toute cette fluidité-là... On ne peut pas être les seuls à demander : Bien, vous, vous avez fait un cours, vous allez rester au Québec, alors que tous les étudiants des autres provinces ne sont pas soumis à ça, puis, je vous l'ai dit, d'ailleurs, nulle part en Amérique.

• (12 h 50) •

Alors, je pense qu'il faut miser sur le fait que, premièrement, on a des racines, hein? Moi, je suis allé me former aux États-Unis puis je n'avais pas le goût de rester là-bas parce que je suis francophone, puis on est déjà protégé par ce fait-là. Donc, c'est superflu d'ajouter ces espèces de barrières.

Et, encore une fois, je pense que, si les étudiants doivent s'engager sachant, un, que les règles du jeu peuvent changer en cours de route, puis, après ça, on peut leur dire : Bien non, tu vas être obligé de travailler au Québec, je pense que ça va être un incitatif extrêmement négatif pour eux, alors que ce n'est pas nécessaire. On a juste à leur donner ce qu'il faut pour travailler. On a parlé tantôt de l'orthopédie, d'autres spécialités chirurgicales, puis Dr Besner Morin commençait à parler des dermatologues. Il faut savoir qu'il y a quelques spécialités, puis, ici, c'est deux spécialités représentatives, mais, sur 36 spécialités, il y en a une minorité, en fait, où les gens... au privé, la majorité n'en ont presque pas, de médecins au privé, mais la dermato, c'en est une parce qu'ils ont des frais de cabinet extrêmement élevés qui n'ont pas été indexés depuis des dizaines d'années, O.K., donc, c'est ce que Docteur Besnr Morin commençait à dire, leurs frais de cabinet sont très élevés, puis ils se font jeter en dehors des hôpitaux, ils n'ont pas de ressources, donc ils s'en vont au privé. Parce que c'est de plus en plus pénible de travailler au public pour ces médecins-là, qui se font, souvent, mettre dehors des hôpitaux.

Alors, je ne dis pas que c'est comme ça mur-à-mur, parce qu'il y a beaucoup d'autres spécialités où ils ont des ressources pour travailler. Le point, c'est qu'on mettrait 1 000 médecins spécialistes de plus demain matin, il n'y aurait probablement plus... pas plus de soins publics qui se donneraient aux Québécois. C'est ça, notre point. Donc, c'est un symptôme qu'ils s'en aillent au privé. Ce n'est pas la cause du problème. La cause, c'est que le système ne fonctionne pas bien. On doit y investir, on doit mieux l'organiser, on doit donner du meilleur financement, puis c'est... Puis je m'excuse, mais ce n'est pas avec 1,5 milliard de coupures qu'on va améliorer ça.

M. Fortin :Je... j'étais content d'entendre... puis je sais... je sais que c'est probablement l'aboutissement d'un processus que vous ne voulez pas voir aboutir, là, mais j'étais content d'entendre le ministre nous dire que, bon, bien, même si on va de l'avant avec notre projet de loi, même si on l'adopte comme tel, il va y avoir des... appelons ça des exceptions, là, parce que, de la façon qu'il est écrit, là, honnêtement, nous, on ne les voit pas, les exceptions, on ne voit pas le mécanisme d'appel ou le mécanisme d'exception, de la façon que le projet de loi est écrit.

Est-ce que vous avez quand même... même si on... ou est-ce que vous avez commencé à considérer ça devrait être quoi, la liste d'exceptions? Parce que nous, on en voit, le ministre en a nommé deux, mais la liste, elle est longue, là, d'exceptions possibles. On pense aux gens qui ont... qui font de l'enseignement, on a nommé les militaires, l'INESSS, les médecins qui travaillent en santé publique, la recherche universitaire. Il y a des Québécois qui s'expatrient pour des très bonnes raisons, là, par exemple ceux qui sont recrutés par la NASA, mais est-ce que, comme le docteur Saint-Jacques, entre autres, qui a travaillé quelques années ici, au Québec, avant d'aller à l'extérieur et dont on est très fiers... on ne veut pas, je pense, empêcher qui que ce soit d'acquérir une spécialité comme celle-là. Alors, est-ce que... Est-ce que vous avez commencé à élaborer ça? Parce que nous, de ce qu'on voit du projet de loi, là, on ne le trouve pas, le mécanisme d'appel ou d'exception.

M. Oliva (Vincent) : Écoutez, on n'y a pas réfléchi de façon exhaustive, parce que, premièrement, il y en aurait beaucoup, il faudrait couvrir toutes sortes de situations, mais, encore une fois, on ne voit pas la nécessité et on n'y croit pas. Puis, vous savez, les exceptions puis les dérogations du ministère, je m'excuse de parler comme ça, mais je suis déjà passé par là, comme chef de département, là, où je n'avais pas assez de peine, puis je voulais faire venir un candidat qui est formé jusqu'aux dents en neuro-intervention avec trois ans de fellowship, puis il n'y avait pas de poste puis on nous disait non. Et puis on perdait ces candidats-là, parce que la compétition c'est Toronto ou Vancouver. Puis ça, c'étaient des candidats formés à l'extérieur, pour qui on ne faisait pas de place. Ça fait que l'organisation, les plans d'effectifs...

M. Oliva (Vincent) : ...d'effectif, tout ça. Ça, c'est beaucoup plus important que mettre ce genre de contraintes. Donc, s'embarquer dans une liste d'exceptions où on va se chicaner après ça avec les gens qui doivent exercer ces exceptions-là, puis devoir se justifier puis se mettre à genoux devant des gens qui ne comprennent pas toujours comment ça marche, puis nos besoins, on ne veut pas embarquer là-dedans.

Une voix : Très bien.

La Présidente (Mme Poulet) : Alors, merci beaucoup. Oui, Mme la députée de La Pinière, allez-y, il reste 37 secondes.

Mme Caron : Merci. En résumé, ce que je comprends des interventions, c'est que même si on oblige les nouveaux médecins à travailler dans le public, ils vont être dans le public, pour certains d'entre eux, à se tourner les pouces parce qu'on n'a pas les plateaux ou on n'a pas le personnel pour les soutenir et pour qu'ils puissent faire des chirurgies ou autres interventions. C'est ça que je comprends.

M. Oliva (Vincent) : Plusieurs d'entre eux, absolument.

Mme Caron : Merci.

La Présidente (Mme Poulet) : Parfait! Merci beaucoup. Alors, je cède la parole au député de Rosemont pour une période de 2 min 31 s.

M. Marissal : Merci. Bonjour, bienvenue. Vos collègues de la FMOQ disaient tout à l'heure que la meilleure option, à ce moment-là, ce serait de retirer le projet de loi. Scoop, ça n'arrivera pas. Il n'y a aucune loi qui interdit de rêver, mais ça n'arrivera pas.

M. Oliva (Vincent) : Ce sera votre décision, M. Marissal. Ce sera votre décision.

M. Marissal : Non, non, non, ce n'est pas la mienne. Non, au contraire, ce n'est pas du tout la mienne.

M. Oliva (Vincent) : Je suis content de l'entendre.

M. Marissal : Non, non, je n'ai qu'une modeste, modeste voix au chapitre, ici, je vous assure, et pas beaucoup de temps. Donc, est- ce que vous demandez, comme vos collègues, de retirer ce projet de loi là ou on peut le rafistoler pour qu'il soit acceptable à vos yeux?

M. Oliva (Vincent) : Oui, oui, absolument. C'est ce qu'on a demandé. On demande qu'il retire le projet de loi, puis qu'il s'assoie avec nous, puis qu'on propose des solutions. On en est... on est certainement ouverts à s'asseoir, qu'il nous dise exactement quels problèmes il veut régler, puis on va lui apporter des solutions, mais pas celle-là.

M. Marissal : O.K. Vos membres, là, à qui on dirait... les jeunes, là, qui sortent, là, puis qui vont pratiquer, à qui on dirait, d'aventure si on adapte le projet de loi tel quel : Il faut absolument que tu fasses cinq ans, qui seraient tentés de contester sur une base des droits et libertés, là, ce qui est pas totalement farfelu, là, votre position par rapport à ça, c'est quoi?

M. Oliva (Vincent) : On n'est pas assez... on n'est pas allés aussi loin que ça parce que c'est des questions hypothétiques. On verra quand on sera rendus là. On croit à la démocratie parlementaire, on dit ce qu'on pense, puis rendus là, effectivement, on pense que c'est une atteinte aux droits et libertés, mais on ne s'est pas avancés aussi loin que ça de voir est-ce qu'on va contester ou pas.

M. Marissal : ...est une atteinte aux droits et libertés et quels droits et libertés?

M. Oliva (Vincent) :  La liberté de pratique. On a quand même un diplôme canadien, hein, d'abord. Je veux dire, notre droit de pratique est partout au Canada. Alors, sous quel prétexte on contraindrait les médecins à rester au Québec alors que ça ne se fait pas ailleurs? On ne comprend pas cette... cette hypothèse ou cette proposition.

M. Marissal : Ah! ce n'est pas tant le prétexte que la loi.

M. Oliva (Vincent) : Oui, je comprends.

M. Marissal : Je veux dire, c'est la loi qui le forcerait. Donc, vous avez le problème avec... Onrevient au même point de départ, là, vous avez le problème avec la loi et, le problème, il est juridique.

M. Oliva (Vincent) : Oui, absolument. Mais... mais, encore une fois, nous, on utilise les voies qui nous sont offertes et puis, si le projet de loi est adopté, on verra. Mais on ne voit pas pourquoi les médecins seraient contraints à ça, alors que toutes les autres professions, je veux dire, les avocats, on a besoin d'avocats, on a besoin de juristes, on a besoin d'aide juridique, on a besoin de toutes sortes de professionnels qui... qui donneraient des services publics. Quelqu'un qui fait de la philosophie, de la poésie, etc., on ne lui donne pas de...

La Présidente (Mme Poulet) : Merci. Je m'excuse de vous interrompre. On va poursuivre les discussions avec le député des Îles de la Madeleine pour une période de 2 min 31 s.

M. Arseneau : Merci beaucoup. Merci, mesdames, messieurs. On a peu de temps. Qu'est-ce que vous dites aux Québécois qui disent et qui ont l'impression qu'avec ce projet de loi là, on va quand même retenir certains médecins? Peut-être pas beaucoup, mais on va en retenir certains au Québec et on va en retenir certains au public, puis ça sera toujours ça de pris. Vous, vous semblez nous dire que, par rapport au Québec, chez les spécialistes, on a un solde migratoire positif de l'ordre de 238 sur les cinq dernières années. Ce sont des données, là, qui sont fiables, j'imagine.

M. Oliva (Vincent) : Les données du Collège des médecins disent qu'il y a 235 médecins de plus en 2024. Donc... donc il y a eu...

M. Arseneau : La différence entre ceux qui quittent le Québec et ceux qui viennent.

M. Oliva (Vincent) : Le solde est, disons, interprovincial, puis entre les autres nations, et il est à peu près kifkif. Il y en a un petit peu plus qui viennent de l'international que des médecins québécois qui partent, puis avec les autres provinces, c'est à peu près kifkif. Donc, il n'y a pas de... il n'y a pas d'exode des médecins soit au profit du Canada ou de l'international. Donc, on ne voit pas la nécessité derrière cette clause-là, puis là on parle spécifiquement de l'obligation de travailler au Québec.

M. Arseneau : D'accord. Pour ce qui est du privé, vous l'avez expliqué tout à l'heure. En fait, je pense qu'il y a plusieurs exemples, c'est... Les gens vont au privé pour soigner les gens si je comprends bien...

M. Arseneau : ...je pense qu'il y a plusieurs exemples. Les gens vont au privé pour soigner les Québécois. Si je comprends bien, ils ne sont pas nécessairement non participants, ils sont désaffiliés. Quelle... Est-ce que vous pouvez nous expliquer la différence entre le médecin spécialiste non participant et le médecin désaffilié? Parce qu'il semble y avoir une confusion, du moins pour moi, à savoir si on peut essentiellement facturer ce qu'on veut ou on facture selon des tarifs.

• (13 heures) •

Mme Godbout (Véronique) : Bien, juste peut-être... Moi, je... Je veux répondre à votre première question, là, pour rassurer la population québécoise. Le problème, ce n'est pas le nombre de médecins. Ça fait que même si on a un projet de loi qui dit fait qu'il y aurait plus de médecins au Québec, s'ils n'ont pas de ressources, ça ne va pas plus donner de services aux Québécois. Ça fait que le problème, il n'est pas au niveau du nombre de médecins, mais il est plutôt au niveau des ressources que les médecins qui sont en place et/ou les futurs médecins ont accès. Là, qu'ils soient participants ou non participants, c'est comme un autre débat, là, mais c'est... Je ne pense pas qu'on ait le temps de parler de ça.

M. Arseneau : Donc, ce que vous dites essentiellement, c'est que si on empêchait les jeunes médecins, pendant les cinq premières années, d'aller au privé, bien, on aura moins de services parce qu'on donne des services au privé que les Québécois ne peuvent pas obtenir au public présentement. C'est ça?

Mme Godbout (Véronique) : Oui. Bien, c'est que, même s'il y a plus de médecins, ils n'offrent pas plus de ressources. Il n'y aura pas plus de salles d'op. En salle d'opération, il y a un médecin qui opère.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci. Je m'excuse encore de vous interrompre. Je suis la gardienne du temps. Je suis vraiment désolée, mais on va poursuivre les discussions avec le député de Saint-Jérôme pour 1 min 56 s.

M. Chassin : Merci de votre présence. J'ai l'impression que le ministre veut s'éloigner du modèle cubain, ce qui fait qu'on marque des points. Est-ce que... Puis là je pose un peu cette question-là comme ça, mais est-ce que, quand on pense aux patients, parce que, dans le fond, c'est ça aussi, hein, de remettre le patient au cœur des décisions dans le réseau, qu'est-ce qui est le mieux pour le patient? Est-ce que c'est, par exemple, un orthopédiste qui va faire une chirurgie par semaine au public ou est-ce que c'est quatre chirurgies par semaine en combinant public-privé, mais tout en étant participant, par exemple, dans un CMS et puis que ce soit gratuit, là, sans frais pour le patient? Moi, je me pose cette question-là du point de vue du patient. J'ai l'impression de répondre facilement, mais peut-être que vous allez me dire que non, et qu'il y a vraiment, je ne sais pas, une équivalence.

M. Oliva (Vincent) : Bien, je peux vous dire que ce que nous, ce qu'on veut, c'est traiter le plus de patients possibles. Je pense que les Québécois, ce qu'ils veulent, c'est se faire traiter et que ce soit à l'hôpital ou dans un CMS subventionné, tant qu'ils ne payent pas, je pense que c'est ça qui est l'idéal. Et c'est ce qu'on veut aussi.

M. Chassin : Je comprends.

M. Oliva (Vincent) : On aimerait que tous les patients se fassent traiter de façon universelle sans qu'ils payent. Ceci étant dit, l'exemple, ici, de mes collègues, à la droite et à la gauche, ce qu'ils disent, c'est : Vous rajouteriez des médecins, puis ils ne traiteraient pas plus de patients.

M. Chassin : J'ai envie de vous laisser répondre, mais comme il me reste à peu près 20 secondes, je vais peut-être juste à ajouter : Est-ce que d'avoir au lieu d'une espèce d'obligation de pratiquer au public pendant cinq ans, est-ce que d'avoir une obligation de pratiquer 40 heures par semaine au public, ça se pourrait puis qu'au-delà de tout ça, bien, on fait ce qu'on veut?

M. Oliva (Vincent) : On n'a pas étudié cette question sous cet angle.

M. Chassin : Non? D'accord, mais merci quand même. Je le suggère comme ça.

La Présidente (Mme Poulet) : Alors, merci beaucoup. Je vous remercie à vous quatre. Je vous remercie de votre participation à nos travaux. Alors, je suspends nos travaux, et on retourne... On sera de retour à 14 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 13 h 03)


 
 

13 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 14 heures)

La Présidente (Mme Poulet) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la santé et des services sociaux reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques pour le projet de loi n° 83, Loi favorisant l'exercice de la médecine au sein du réseau public de la santé et des services sociaux.

Cet après-midi, nous entendrons les témoins suivants : la Fédération médicale étudiante du Québec, la Fédération des médecins résidents du Québec et la Coalition solidarité santé.

Alors, je souhaite la bienvenue à la Fédération médicale étudiante du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Alors, je vous invite donc à commencer votre exposé.

Mme Lavoie (Mathilde) : Alors, Mme la Présidente, M. le ministre, membres de la commission, je vous remercie de nous recevoir aujourd'hui afin de porter la voix de la relève médicale. Je m'appelle Mathilde Lavoie, étudiante en médecine et présidente de la Fédération médicale étudiante du Québec, la FMEQ. Je suis accompagnée de M. Maxence Pelletier-Lebrun, vice-président, et Mme Félicia Harvey, déléguée aux affaires politiques.

La FMEQ représente près de 5 000 étudiants en médecine issus des quatre facultés du Québec, qui sont réparties sur 10 campus québécois ainsi qu'un au Nouveau-Brunswick. Depuis 50 ans, elle défend les intérêts de ses membres sur les plans académique, social, politique et du bien-être. À l'image de ses membres, la FMEQ s'investit depuis sa création pour préserver un système de santé publique fort et accessible. En effet, nous avons déposé plusieurs mémoires sur des enjeux majeurs dans les dernières années, notamment sur la valorisation de la médecine familiale et de la médecine en région, la planification des effectifs médicaux et la privatisation en santé. Nous collaborons également avec différents acteurs du système de santé, notamment au sein de la table nationale de valorisation de la médecine de famille et la table de la planification des effectifs médicaux.

Notre fédération partage l'objectif du ministre de favoriser l'exercice de la médecine au sein du réseau public. Toutefois, nous estimons que le projet de loi, en misant sur des mesures coercitives, n'est pas le bon véhicule pour atteindre ce but ni pour entamer une discussion de fond. Nous déplorons que le projet de loi ait été élaboré sans consultation préalable des partenaires clés en santé, dont l'expertise est essentielle pour garantir des mesures adaptées et efficaces. Mentionnons également que les données concernant les départs vers le privé ne sont pas rendues publiques et, malgré nos efforts pour les obtenir, elles demeurent difficiles d'accès. Sans fondations communes, la tenue d'un débat éclairé est impossible. Et sans connaître les causes réelles des départs vers le privé, on ne peut pas s'y attaquer. Actuellement, le projet de loi proposé est nettement inadéquat car le diagnostic reste à établir.

Alors qu'une pénurie de main-d'œuvre touche l'ensemble du réseau de la santé, que le gouvernement tient d'importantes négociations et que Santé Québec commence son déploiement, nous regrettons que ce projet de loi cible les étudiants plutôt que de proposer des mesures structurantes. Notre position est claire : nous ne sommes pas en accord avec ce projet de loi, comme 85 % de nos membres qui se sont exprimés dans un récent sondage. C'est pourquoi la FMEQ demande au gouvernement d'abandonner le projet de loi n° 83.

Nous exposerons aujourd'hui nos inquiétudes par rapport au projet de loi, mettrons en évidence ses effets pervers et proposerons nos solutions pour atteindre notre objectif partagé, celui de favoriser l'exercice de la médecine au sein du réseau public.

Mme Harvey (Félicia) : Plusieurs éléments du projet de loi sont problématiques à nos yeux. D'abord, l'article 1 définit le service public en s'appuyant sur la Loi sur l'assurance maladie, ce qui est excessivement restrictif et ne reflète pas la diversité des pratiques médicales. Plusieurs médecins contribuent à la société sans pour autant être inclus dans cette définition. Par exemple, nommons les médecins en santé publique ou dans la fonction publique qui occupent des postes dans des organismes comme l'INESSS, la CNESST, le MSSS, et maintenant Santé Québec. On peut également penser aux professeurs de médecine et aux chercheurs. Ces médecins servent bel et bien le réseau public et le Québec, mais ne sont pas considérés dans l'article 1.

De plus, le projet de loi ne précise pas comment seront comptabilisés les cinq années de service. La FMEQ s'inquiète que certains groupes soient discriminés, notamment les mères médecins qui prennent un congé de maternité ou les médecins qui nécessitent un congé maladie. Aucun mécanisme d'exception ou d'appel...


 
 

14 h (version non révisée)

Mme Harvey (Félicia) : ...était prévu, alors qu'il est impossible d'anticiper toutes les situations qui pourraient nécessiter de la flexibilité. Par ailleurs, les amendes prévues sont disproportionnées par rapport à la faute commise. Nous n'avons trouvé aucun précédent comparable au Québec pour ces sanctions injustifiées qui pourraient totaliser plus de 1 million de dollars par semaine. Les articles cinq et six obligeraient des étudiants en... âgés en moyenne entre 19 à 25 ans, à signer un engagement contraignant pour des obligations qui ne prendraient effet qu'une décennie plus tard en raison de la durée des études médicales. Ils ne possèdent pas de boule de cristal pour prédire leur situation géographique, familiale ou financière à la fin de leurs études. À juste titre, aucun autre étudiant québécois n'est tenu de signer une entente de services obligatoire dès le début de leur formation.

De plus, le projet de loi ne prévoit aucune disposition pour les étudiants qui abandonnent leurs études, changent de programme universitaire ou encore les médecins qui se réorientent professionnellement. Nous croyons que tous les étudiants et travailleurs québécois doivent pouvoir se réorienter sans faire face à des pénalités. Ces mesures soulèvent également de nombreuses inquiétudes parmi nos membres quant à leur avenir professionnel, notamment ceux qui souhaitent entreprendre un fellowship, soit une surspécialisation, souvent effectuée à l'étranger, afin de ramener des connaissances et des pratiques innovantes au Québec. Il ne faudrait pas décourager les médecins de s'engager dans des formations avancées essentielles pour maintenir la culture d'excellence médicale au Québec.

Par ailleurs, les articles cinq et six confèrent une carte blanche aux gouvernements actuels et futurs quant au contenu des ententes, sans balise claire pour encadrer leurs modalités d'application. Rappelons que la gratuité scolaire partielle instaurée lors de la Révolution tranquille est un choix de société visant à accroître la scolarisation et à favoriser le bien public, elle repose notamment sur l'égalité des chances, une valeur fondamentale dans notre société. Tous les universitaires québécois bénéficient d'études subventionnées et il est injustifié de cibler exclusivement des étudiants en médecine en invoquant un contrat social. Au Québec, de nombreux étudiants poursuivent plusieurs diplômes ou allongent leurs études sans qu'on ne remette en question la valeur ajoutée de leur formation par la société. Bien que la FMEQ encourage ses membres à pratiquer dans le réseau public, elle rejette l'argument du contrat social qui va à l'encontre de la vision québécoise de l'éducation comme d'un bien commun.

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : La FMEQ souhaite mettre en lumière certaines conséquences négatives qui surviendront si le gouvernement va de l'avant avec son projet de loi. Après l'obtention de leur doctorat en médecine, les étudiants sont admissibles à l'ensemble des programmes de résidence canadiens et appliquent fréquemment hors du Québec, vu la grande compétitivité du processus d'admission. Le projet de loi prévoit qu'un étudiant qui choisit de faire sa résidence au Québec devra signer un engagement au début de sa résidence, alors qu'il n'y sera pas contraint s'il choisit un programme de résidence hors Québec. Cela ajoute une motivation supplémentaire à quitter la province. Prenons comme exemple un étudiant accepté dans un programme de résidence au Québec, à Gatineau et hors Québec, à Ottawa. Alors qu'il ignore ce à quoi ressemblera sa vie future, l'étudiant peut éviter de signer un contrat et conserver sa pleine autonomie professionnelle en quittant le Québec. Plutôt que d'améliorer la rétention des médecins au Québec, nous craignons que le projet de loi entraîne un départ important d'étudiants en médecine vers les autres provinces.

Après le dépôt du p.l. 83, la FMEQ a mené un sondage auprès de ses membres. Parmi les 1 400 répondants. 57 % envisagent de postuler à un programme de résidence hors Québec si le projet de loi est adopté, ce qui représente plusieurs centaines d'étudiants. Rappelons que ce sont des étudiants qui, dans la très grande majorité, veulent travailler dans le système public. Seulement, le discours politique actuel les inquiète et ne crée pas un climat où les étudiants se sentent accueillis dans le réseau public québécois. Le projet de loi envoie plutôt aux étudiants le message qu'ils sont la source des problèmes du réseau, ce qui est évidemment faux.

La signature de contrats avec les étudiants en médecine a déjà été tentée et s'est soldée par un échec. Jusqu'à récemment, les étudiants canadiens hors Québec devaient signer une entente dans laquelle ils s'engageaient à pratiquer dans une région désignée par le ministre pour une durée de quatre ans. L'amende de 300 000 $ prévue en cas de non-respect a été retirée de la LSSSS dans le cadre du projet de loi 15. Il a été jugé que, plutôt que d'améliorer la rétention de ces étudiants, plusieurs quittaient le Québec pour effectuer leur résidence afin de se soustraire à l'entente. La table sur la planification de l'effectif médical au Québec, pilotée par le MSSS, arrive aux mêmes conclusions et avance qu'il serait contreproductif d'envoyer un message aux médecins formés au Québec de quitter la province après leur formation. En proposant une entente similaire aux étudiants québécois, le gouvernement reconduit une mesure inefficace en espérant des résultats différents.

Pour atteindre notre objectif commun de favoriser l'exercice de la médecine au sein du réseau public, la FMEQ propose la création d'une table nationale de concertation sur la place du privé au Québec. Cette table, qui rassemblerait tous les acteurs en santé, créerait un climat favorable aux échanges productifs. En collaboration, ils pourraient rassembler et partager leurs données afin de dresser un portrait clair du privé au Québec. Elle permettrait aussi d'élargir le débat sur le privé en dehors du cadre limitant du projet de loi et d'évaluer l'efficacité de différentes mesures structurantes. L'instance que nous proposons devrait se tenir à des échéanciers serrés et avoir des livrables précis. Le but est qu'à la même date...

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : ...l'an prochain, nous ayons établi les causes réelles des départs vers le privé et que nous ayons en poche des mesures efficaces et réalistes que nous pourrons déployer rapidement. Un sujet aussi important nécessite un réel débat de société. L'heure n'est pas à rabouter le système de santé, mais à développer des solutions structurantes et pérennes. C'est la santé de notre réseau et celle de la population québécoise qui est en jeu.

La Présidente (Mme Poulet) : Parfait. Merci beaucoup. Alors, nous allons maintenant commencer la période d'échange. M. le ministre, vous avez une période de 16 minutes... 30 minutes... 30... 16 min 30 s, pardon.

• (14 h 10) •

M. Dubé : Oui. Très bien. Premièrement... content de vous revoir, puis merci beaucoup pour votre présentation, parce que je pense que c'était un des objectifs importants, parce que c'est les jeunes étudiants ou étudiants actuels qui sont le plus impactés par cette mesure-là, parce que c'est d'eux qu'on parle en termes de finissants.

J'aurais peut-être quelques précisions à faire. Entre autres, je pense, j'en ai fait quelques-unes sur le «fellowship» ce matin. Je veux juste préciser une chose, là. Quand vous dites qu'ils auront un choix au moment de la résidence, on pourra en discuter en détail dans la commission, mais... ou lorsqu'on fera l'article par article avec mes collègues, mais on va demander une signature au début du bac aussi. Alors, je veux juste qu'on se comprenne. C'est que quelqu'un qui s'est engagé au début du processus, bien, je n'ai pas besoin d'attendre d'avoir une signature d'engagement à son... à sa résidence — vous me suivez, là? — il a déjà pris un engagement au début. Ça fait que je voulais juste faire cette précision-là.

J'aime beaucoup votre point puis je suis content que vous le souleviez, parce que toute la table de consultation qu'on a faite sur les PREM... Je l'ai mentionné un peu ce matin avec la FMOQ, puis, pour que les Québécois qui nous écoutent... Là, je m'excuse d'avoir l'air d'un vieux professeur, mais les PREM, c'est l'engagement qu'on demande entre autres aux médecins de famille, particulièrement, de s'engager dans une région spécifique, puis ça, c'est quelque chose qui existe depuis une vingtaine d'années. Bon. On a entendu beaucoup de critiques là-dessus dans les dernières années vous avez absolument raison, puis ce que je me suis engagé... avec le Dr Bergeron... On a fait un groupe de travail l'an dernier et, je l'ai dit ce matin, qui a été extraordinaire, dans le sens que les gens qui ont participé — puis je dois remercier, entre autres, ce qu'on appelle encore les DRMG, là, puis le Dr Guilbault, que le député de Pontiac connaît bien, là, qui est un médecin de famille qui travaille... qui pratique en Outaouais — sont arrivés à un consensus avec la FMOQ et d'autres groupes d'être capables de dire qu'est-ce qu'on doit faire pour faciliter et simplifier encore plus le PREM. Puis je ne veux pas présupposer de dire les résultats de ça, mais ils vont être exactement en ligne avec ce qui est demandé par le réseau, par les médecins, les jeunes médecins, etc.

Donc, je veux juste dire aujourd'hui — puis c'est pour ça que j'ai fait cette précision-là ce matin — il y a beaucoup de choses qui sont dites, que ce n'est pas le projet de loi qui va faire la différence, moi, je... ou qu'il va être négatif, mais je veux juste que les Québécois comprennent bien qu'on a beaucoup d'actions en parallèle qui sont... qui ont été faites et qui sont en cours qui vont aussi rendre ça beaucoup plus agréable, plus facile et moins coercitif. Je vais le dire comme ça, là, pour employer un mot à la mode aujourd'hui. Mais, au lieu de prendre trop de temps pour vous l'expliquer, parce que je vais attendre d'avoir toutes les présentations qui sont faites, mais je ferai peut-être quelques clarifications.

Celle du «fellowship» m'inquiète beaucoup. Si vous avez la perception qu'on veut enlever de la formation, c'est tout à fait le contraire. Moi, j'ai dit que la formation... ou l'engagement se fait après la formation. Donc, l'engagement de pratique au public et au Québec va se faire après la formation. Alors, si quelqu'un décide... Puis je pense que c'est la bonne chose. On veut des spécialistes, on veut des omnis qui vont aller chercher les meilleures pratiques dans le monde, on ne veut pas décourager ça, au contraire. Alors, si, en ce moment... Puis je pense que le député de Pontiac l'a bien dit tout à l'heure. C'est un expert, lui, en commissions parlementaires, bien plus que moi. Il me dit : Bien, en ce moment, si ce n'est pas clair dans le projet de loi, ça se peut très bien, puis notre travail, quand on sera en commission, ça sera de le préciser. Mais je veux juste dire : s'il y a quelque chose, pour moi, là, que je veux clairer l'air aujourd'hui, c'est que les «fellowships» et les autres exceptions — puis ça, je pense qu'on pourra discuter c'est quoi, les autres exceptions...

Il y a une dernière que je voudrais faire par rapport à ce qui a été dit sur Cuba aujourd'hui, parce que la dernière chose que je veux comparer, là, c'est le... nos résidences en médecine avec des pays comme ça. Pourquoi je veux faire cette précision-là? Puis je veux vous donner un exemple concret. En ce moment, là, ce n'est pas nouveau, ce qu'on demande, c'est déjà au Québec...

M. Dubé : ...un exemple concret. En ce moment, là, ce n'est pas nouveau ce qu'on demande, c'est déjà au Québec. Puis je vous donne l'exemple, là, juste pour que les Québécois comprennent, là, J'ai, au Nouveau-Brunswick, dans le cadre d'une entente qu'on a avec le Québec actuellement, j'ai quatre postes de résidence, là. Ça, ça existe, là. C'est déjà en cours, là. J'ai quatre postes de résidence qui sont offerts dans des spécialités, autres que la médecine familiale vous allez me dire, là, mais avec un contrat d'engagement qui est signé avec ces médecins-là, là. On ne parle pas de pays communistes, là, c'est ici que ça se fait en ce moment. Et ça a été accepté avec les étudiants et pour s'assurer qu'il y aura une pratique au Québec. Et s'il y a... et si ce n'est pas fait, il y a une pénalité importante. Alors, je veux juste... Il y aura des clarifications qu'on fera après les présentations. C'est difficile de toutes les faire aujourd'hui, mais je viens de vous donner quatre exemples, là, de clarifications que je veux faire, mais on aura la chance d'en discuter parce que, souvent, ce qui va arriver, c'est que vous allez nous dire : O.K. On s'est peut-être mal compris ou c'est moi qui a mal compris, ça arrive des fois aussi. Vous pourrez nous revenir après, mais c'est difficile dans le peu de temps qu'on a.

Ça fait que je vais laisser mes collègues, les autres députés poser les questions, mais je veux juste vous dire que j'apprécie beaucoup vos commentaires, beaucoup, parce que c'est vous qu'on vise. Puis je veux être sûr qu'on est capables de tenir compte de vos points pour être capables de faire, au besoin, comme on fait d'habitude, des changements nécessaires. Mais je voulais juste... Je suis excessivement positif par rapport à vos commentaires. Puis on fera les précisions. Parce qu'on se rencontre, habituellement, au moins une ou deux fois par année, alors je ne suis pas surpris de certaines de vos réponses, mais, en même temps, je veux juste clarifier l'air, peut-être, sur certains éléments. Ça fait que je laisse... Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Poulet) : Oui, Mme la députée de Bonaventure.

Mme Blouin : Merci. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, bonjour à vous trois. Merci d'être avec nous aujourd'hui pour parler de ce projet de loi là. J'avais très hâte de vous rencontrer, parce qu'évidemment c'est de vous dont il est question ici. Alors, merci de prendre le temps de venir nous parler de ça. Projet de loi qui, je tiens à le rappeler, sert à favoriser l'accès à la médecine publique aux Québécois. Donc, d'ailleurs, toutes nos actions, tous nos gestes sont guidés avec cet objectif-là, que je pense que vous partagez.

Je sais que vous n'avez pas de boule de cristal, mais, avant de parler vraiment en profondeur du projet de loi, j'aimerais que... vous entendre sur vos carrières respectives. Vous, peut-être répondre à tour de rôle, est-ce que vous prévoyez d'abord pratiquer au sein du réseau public?

Mme Lavoie (Mathilde) : Oui, mais je pense qu'en ce moment on n'est pas là pour parler de nous, spécifiquement. On représente les 5 000 étudiants du Québec et ceux du campus de Moncton. Par contre, c'est sûr qu'en étant ici et en ayant une implication bénévole au sein de notre fédération, c'est sûr qu'on est des personnes qui aimons le public comme notre fédération et les 5 000 étudiants qu'on représente. Mais je pense que si on peut se recentrer, là, c'est sûr qu'en ce moment le discours, il n'accueille pas, là, les étudiants. Mais je peux continuer par rapport...

Mme Blouin : ...je peux aussi poursuivre. Je suis curieuse de savoir pourquoi ça vous dérangerait, vous et vos... les étudiants que vous représentez, de travailler cinq ans au Québec au public?

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Je crois que l'enjeu ici, c'est que... on va parler des exceptions à d'autres moments, mais on peut en énumérer plusieurs, les exceptions qui ne sont pas comprises, qu'on pense à un jeune médecin engagé qui va aller faire de la médecine humanitaire après sa formation, on ne croit pas que ce serait possible avec le projet de loi, qu'on parle des fellowships qui serait peut-être inclus, qu'on parle d'un médecin qui va faire... aller chercher de l'expertise à l'international. Tu sais, je pourrais vous donner... Exemple, si la commission s'était tenue il y a 10 ans de ça, on aurait demandé de faire une exception pour les astronautes puis on nous aurait dit de redescendre sur terre, parce qu'on n'est pas capables de prévoir à l'avance toutes les exceptions. Je crois qu'on est tous contents que David Saint-Jacques nous représente à l'international et même en dehors de la Terre. Je crois que ça... je crois que ça, ce que ça montre, c'est qu'on risque de tuer l'innovation et la diversité des pratiques médicales si on décide d'établir une liste d'exceptions qui est «settée» dans le béton à l'avance. Et la beauté de la médecine, c'est que ça évolue vite, il y a des nouvelles technologies qui arrivent, il faut avoir la liberté de changer sa pratique dans l'avenir également.

Mme Blouin : Mais je veux... je veux vous rassurer aussi, là, mais je pense qu'on va quand même être capables d'exempter certains groupes de façon intelligente puis on va compter sur la collaboration de tous pour le faire.

Vous avez possiblement entendu parler du Collège des médecins qui dit qu'il est en faveur du projet de loi, qui nous demande même des mesures un peu plus costaudes. J'aimerais ça savoir qu'est-ce que vous pensez des mesures qu'il suggère. En fait, on parle de mieux encadrer peut-être le va-et-vient entre le public, le privé, on parle de peut-être avoir des tarifs maximums au sein du privé. J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que vous trouvez que c'est des mesures intéressantes?

Mme Lavoie (Mathilde) : Mais, premièrement, je pense que, tu sais, globalement, il y a quand même un... un consensus, là, avec les fédérations ce matin, nous également qu'en ce moment le projet de loi n'est pas le bon terrain de jeu, là, pour...

Mme Lavoie (Mathilde) : ...avoir les objectifs escomptés. On reconnaît, là, la mission du Collège, là, qui est de justement protéger la population québécoise contre une médecine non réglementaire, là, non sécuritaire. On ne pense pas qu'il y ait d'enjeux à ce niveau-là. On a également demandé une rencontre, là, avec le Collège pour comprendre les fondements de leur position puis en apprendre davantage. Toutefois, là, ils ne nous ont pas encore de rencontre en amont de la commission. Donc, je tiens quand même à préciser cela, mais avec justement la table qu'on propose, ça sera une occasion, avec toutes les données, avec une collaboration, de parler des mesures que le Collège propose et d'autres que... qui ne sont pas entièrement sur le projet de loi précis, là, du p. l. 83.

• (14 h 20) •

Une voix : Ma collègue va poursuivre.

La Présidente (Mme Poulet) : Oui, Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Dorismond : Bonjour. Bienvenue à la commission. Vous savez, depuis ce matin, je n'ai pas entendu parler... L'enjeu principal, c'est améliorer l'accès à la population québécoise. Puis, vous savez, le réseau privé, ce n'est pas tout le monde qui a accès. Et on parle surtout des... de la clientèle vulnérable qui n'ont pas... surtout pas accès. Puis cette clientèle-là, des fois, elle a des maladies chroniques, ils sont considérés assez lourds. Comment vous voyez ce volet-à, pour cette clientèle-là, de faire en sorte qu'elle ait accès à un médecin de famille puis qu'on améliore l'accès dans le réseau public?

Mme Harvey (Félicia) : Oui, comme on disait tantôt, là, la FMEQ se penche depuis plusieurs années sur ce genre d'enjeux, là, puis c'est pour ça qu'on a... on a une position, là, propublic, et qu'on défend, là, un système de public accessible et universel. Puis une autre... C'est une des raisons pourquoi on propose la table. C'est pour bien comprendre les enjeux. On en a parlé beaucoup aujourd'hui, mais c'est de comprendre pourquoi il y a des départs, puis aussi comprendre vers où on s'en va avec le privé-public. Le Québec a toujours eu ces deux systèmes, ou du moins depuis plusieurs années. Mais nous, on pense qu'on est rendu au point de se dire : Où on en est maintenant, où on va, d'avoir une vision de savoir où on va avec ça justement pour les populations que vous avez nommées, pour les enjeux qui ont été nommés aujourd'hui. C'est pour ça qu'on pense qu'on est rendu à ce point-là de... d'avoir... et que ça soit une table, que ça pourrait être... tu sais, le mot n'est pas important, mais c'est vraiment d'avoir ces discussions-là avec tout le monde autour de la table, comme un peu il se fait en ce moment, là, avec la commission sur les écrans. Donc, avant de proposer un projet de loi, d'avoir les discussions, tu sais, de... de voir tout ce qui est possible, puis ensuite de légiférer. Mais on ne pense certainement pas que ça passe par ce projet de loi là qui est coercitif, là, même si c'est le mot à la mode, mais c'est quand même ce qui est proposé, là, dans le projet de loi.

Mme Dorismond : Bien, en revenant en lien avec la FMOQ, ils ont parlé beaucoup de conditions de travail, de surcharge de travail. Vous ne croyez vous pas que de permettre aux nouveaux étudiants, cinq ans, d'aller donner un coup de main aux nouveaux collègues, ça ne serait pas une bonne idée.

Mme Harvey (Félicia) : Nous, évidemment, on encourage nos membres et on milite pour cela que nos membres aillent dans le public au Québec. Par contre, juste pour clarifier, là, les étudiants en médecine et les jeunes médecins goûtent au système public. En effet, là, durant notre formation, on va être deux ans à l'externat, donc en stages, là, non rémunérés où on est tous les jours au public, nous trois le sommes en ce moment. Puis ensuite on va avoir la résidence qui est entre 2 à 6 ans, où tous les résidents sont au système public. Donc, ils côtoient le système public, et c'est de là que la... notre proposition d'une table est intéressante, c'est que la FEMQ serait extrêmement intéressée de s'attaquer aux raisons des départs, que ce soit pour les jeunes médecins ou tous les médecins, là, qui quittent le système public. Mais nous, ce qu'on voit, c'est que nos membres, en grande majorité, veulent travailler au système public et travaillent au système public. Les résidents travaillent, là, comme on a dit ce matin et le côtoient, là, quotidiennement pendant plusieurs années.

Mme Dorismond : Puis qu'est-ce que vous pensez des autres mesures qui ont été proposées, comme le Collège des médecins qui dit qu'on ne va pas assez loin? Vous, vous parlez d'une table, puis de légiférer après. Pourtant, les autres nous demandent de légiférer, puis d'aller encore plus loin que les... que la proposition qu'il y a là.

Mme Harvey (Félicia) : Oui. Bien, comme le ministre pourrait être présenté tantôt, là, on reconnaît, là, les efforts que le gouvernement fait pour améliorer le système public, puis ça, on les salue et on travaille comme le ministre disait aussi, là, quand on a présenté dans les présentations sur plusieurs tables à ce sujet-là. Par contre, évidemment, pour le CMQ, précisément, parce que les autres groupes, là, je ne sais pas exactement c'est lesquels, mais nous, évidemment, on ne va pas... on n'est pas d'accord avec eux pour aller plus loin dans des mesures coercitives, on demande, là, l'abandon de ce projet de loi là. Mais pour toutes les autres mesures qui sont abordées, ou même dans le mémoire, là,  du ministre sur ce projet de loi, on serait très ouverts à en discuter, là, à la table. On pense que ça serait le bon milieu pour avoir ces discussions-là pour évaluer si ça serait des mesures efficaces et réalistes au Québec.

Mme Dorismond : Avez-vous des mesures efficaces à proposer...

Mme Harvey (Félicia) : ...pour évaluer si ce serait des mesures efficaces et réalistes au Québec.

Mme Dorismond : Avez-vous des mesures à proposer?

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Juste... Notre formation en médecine, ce qu'on nous apprend avant tout, c'est de devenir des bons scientifiques. Et qu'est-ce que ça fait un scientifique? Ça récolte les données probantes, ça évalue l'efficacité de différentes mesures. Et après ça, ça part avec un plan qui est vraiment adapté à la situation terrain. Puis nous, on va adopter la même position de faire les choses bien pour qu'on ne se retrouve pas en commission dans cinq ans, dans 10 ans, avec les mêmes problèmes encore. Puis je crois qu'il y a une question aussi d'accès aux données. Je sais que la ministre est quand même sensible à ça avec son tableau de bord que j'aime peut-être autant que lui, mais en ce moment, c'est très difficile d'avoir les données sur les départs. On reçoit souvent des données caviardées. La FMOQ doit travailler les données de la RAMQ à la mitaine, en fichier Excel. Je crois qu'on va tous être d'accord à ce stade-ci pour avoir un meilleur accès à ces données-là pour qu'on puisse avoir des discussions éclairées puis un vrai débat de société.

La Présidente (Mme Poulet) : Mme la députée de Bonaventure.

Mme Blouin : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, supposons qu'on fait... Je veux revenir aux exemptions. Supposons qu'on fait vraiment un travail de fond et qu'on arrive à exclure tous les groupes qui devraient l'être, est-ce que vous seriez en faveur de ce projet de loi là?

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Je crois que c'est ce qu'on disait tantôt. On ne peut pas prévoir tous les groupes à l'avance.

Mme Blouin : On va y aller en monde parallèle. On réussit à tout exclure les autres. Est-ce que... Est-ce que vous êtes d'accord avec le projet de loi?

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Ça reste quand même qu'il y a une question à savoir pourquoi seulement les étudiants en médecine seraient ciblés par cette mesure-là, alors qu'il y a plusieurs ordres professionnels qui vont vers le privé, que ce soit les physiothérapeutes, les psychothérapeutes.

Mme Blouin : Mais est-ce que vous seriez en faveur?

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Non. Nous, on demande son abandon aujourd'hui.

Mme Blouin : Merci.

La Présidente (Mme Poulet) : Est-ce qu'il y a d'autres questions du côté de la banquette gouvernementale? Il reste 30 secondes. C'est beau? Parfait. Alors, merci beaucoup. Alors, je cède maintenant la parole au député de Pontiac pour une période de 8 min 35 s.

M. Fortin : Très bien. Merci. Merci, Mme la Présidente. Merci à vous trois d'être ici aujourd'hui, mais également pour votre... pour votre mémoire qui est recherché, réfléchi et tout à fait pertinent envers les questions qu'on se pose aujourd'hui. Je veux vous rassurer d'abord, tant vous que M. le ministre, qu'il n'y a personne qui aime le tableau de bord autant moi. Ça me donne des munitions à tous les jours, ce tableau de bord là. Là, je comprends que vous vous prônez l'abandon du projet de loi. Vous l'avez dit, vous avez été claire. Mais est-ce que je comprends qu'une des... une des raisons qui vous poussent à dire que ce projet de loi là, c'est un projet de loi qui est nocif et qu'il doit être retiré, c'est justement le sondage que vous avez fait auprès de vos membres qui vous disent : Bien, nous autres, on considérerait aller à l'extérieur du Québec, là. Je ne pense pas qu'il n'y ait personne, ici, bien j'ose croire, qui souhaite que les étudiants aillent étudier ailleurs parce qu'on a mis une pièce législative qu'ils considèrent restrictive.

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Oui, puis tu sais, je crois que c'est ça, que la solution risque d'avoir des effets pervers qui sont plus négatifs que le problème actuel. On parle entre 25 et 50 étudiants par année alors que, là, c'était plusieurs centaines d'étudiants qui nous ont dit qu'ils considéreraient aller ailleurs. Puis le ministre a dit que ça ne ciblerait pas les étudiants qui signent en début. C'est vrai, il y a quand même 5 000 étudiants en ce moment dans les facultés de médecine qui pourraient décider d'aller ailleurs. Peut-être qu'ils fondent une famille. Ils décident de s'établir parce qu'ils ont passé sept ans en Ontario, par exemple. Ce n'est pas des étudiants qu'on veut perdre au Québec. Donc, ça pourrait avoir des effets négatifs sur le réseau public, puis pour plusieurs décennies même.

M. Fortin : Je veux juste... Je veux juste bien comprendre ce point-là, parce que le ministre, tantôt, si moi, j'ai bien compris son intervention, il nous a dit : La signature, elle devra être faite au début des études. Vous, votre interprétation du projet de loi, là, c'était que c'était un choix de le signer au début ou au moment du début de la résidence. C'est bien ça?

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : C'est-à-dire, je veux dire, il y a deux articles différents, l'article 5 et l'article 6. Nous, on parlait de l'article 5 qui touche la signature au début de la résidence.

M. Fortin : De la résidence.

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Alors que le ministre parlait du... de l'article 6.

M. Fortin : C'est ça. O.K. On se comprend. Alors, ce qui vous inquiète à travers ça, c'est que les étudiants qui appliquent pour des résidences à plusieurs endroits différents en ce moment, là, notamment pour des spécialités, on l'a mentionné tantôt, là, ils vont peut-être plus se tourner vers l'extérieur du Québec que le Québec, là.

Mme Harvey (Félicia) : Nos craintes, là, justement, pour l'article un, comme le ministre a dit, s'il fait signer à des jeunes qui rentrent dans un programme entre 19 à 25 ans, évidemment que là, à ce moment-là, ils ne pourront plus reculer. Mais un autre point qui nous inquiète, ce n'est pas seulement l'idée des départs, c'est aussi qu'on est contre ce genre de mesures là au Québec. On est contre les mesures coercitives envers des jeunes étudiants. On est contre cibler un seul groupe de personnes et dire : Vous, vous avez un contrat social. C'est que, nous, on pense fondamentalement que ce n'est pas comme ça qu'on fonctionne au Québec, qu'il faut travailler pour avoir un meilleur système public. Puis les étudiants, on l'a dit et on le répète, veulent travailler dans un système public. Puis en ce moment, ce genre de contraintes là, ça inquiète nous, mais aussi d'autres étudiants au Québec. On a eu des discussions avec l'Union étudiante québécoise... du Québec, pardon, qui s'inquiète, qui se dit : Est-ce que ça va créer un précédent? Puis maintenant, ça ouvre la porte à des mesures, à d'autres groupes d'étudiants qu'on va dire: Bon, bien, maintenant, on vous met des modalités de comment vous allez avoir une profession au Québec si vous décidez d'étudier au Québec. Je l'ai dit tantôt, mais je le répète, c'est un choix de société d'avoir des études subventionnées. Et nous, on croit vraiment dans ce principe-là, puis on croit qu'il doit être respecté.

M. Fortin : Très bien...

M. Fortin :... Vous y avez touché un peu tantôt, je pense,  en réponse aux questions d'une des députées, là, en disant : Bien, tu sais, des solutions autres, nous, on veut les évaluer, on veut s'assurer qu'on le fait correctement. Mais en avez-vous évalué d'autres? Par exemple, si on... quand on regarde les juridictions autres, là, qui ont peut-être mis des mécanismes pour tenter de garder les médecins soit au public, soit dans leur province, là, la question de la tarification maximale dans le privé, est-ce que c'est quelque chose que vous avez regardé, que vous avez étudié puis qui vous apparaît porteur ou pas?

• (14 h 30) •

Mme Harvey (Félicia) : C'est des mesures qu'on a étudiées dans le cadre de mémoires, là, comme je disais,  par le passé. Par contre, ça ne touche pas directement nos membres, là, parce que, tu sais, nos membres sont encore aux études. Donc, on va revenir avec le point qu'on disait un peu tantôt, de l'évaluer, mais c'est qu'on veut l'évaluer aussi parce qu'on... comme je dis, on ne peut pas aller chercher ces informations-là auprès de nos membres puis avoir cette discussion-là sans la FMSQ et la FMOQ, et donc les médecins qui sont là en ce moment. C'est difficile, mais c'est évidemment des solutions qu'on envisage, parce qu'on est d'accord avec le ministre qu'il faut proposer quelque chose, il faut continuer d'avancer, on veut aussi travailler pour un système de santé public. Donc, oui, c'est des mesures qu'on a déjà envisagées puis qu'on pense qu'il reste à évaluer.

M. Fortin :Le ministre nous a dit tantôt en réponse aux commentaires que la seule place où il y a quelque chose comme ça, là, c'est Cuba. Il vous a dit : Bien, faites attention, là,  l'Ontario a un système similaire. Je ne sais pas si vous l'avez regardé. Mais nous, la compréhension qu'on a du modèle ontarien, c'est que ce n'est pas une pénalité comme ça, là, c'est un modèle où il y a une subvention qui doit être remboursée si on ne remplit pas les obligations qui sont mentionnées, ce n'est pas une pénalité uniforme à tout le monde comme c'est le cas ici, là.

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Il faut mentionner également qu'il n'y a pas de limite sur la pratique dans une province donnée, ce qui serait proposé avec le projet de loi du ministre aujourd'hui.

M. Fortin :Tout à fait. Ils peuvent pratiquer au Manitoba, au Québec ou ailleurs...

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Exact.

M. Fortin :...tant qu'ils restent au Canada.

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Voilà.

M. Fortin :O.K.

M. Dubé : Je voulais vous donner une précision.

M. Fortin :Prenez le temps qu'il faut.

M. Dubé : Je peux? Je l'apprécie. Tout à l'heure, quand j'ai parlé du Nouveau-Brunswick, là, je veux juste qu'on se comprenne, quand la province, le Nouveau-Brunswick envoie les quatre étudiants dont je parlais tout à l'heure, ce que le Nouveau-Brunswick demande en échange de cette signature-là de l'engagement, c'est de revenir pratiquer au Nouveau-Brunswick. Vous comprenez? Donc, ça se fait déjà, là. Le Nouveau-Brunswick dit : Moi, je demande à l'étudiant... Qu'on soit d'accord ou pas. Mais je veux juste qu'on comprenne ce qui existe déjà, là.

M. Fortin :On s'entend, M. le ministre, mais la situation n'est pas la même que ce qui est mis de l'avant aujourd'hui, là. Puis on pourra....

M. Dubé : Puis il y a une pénalité de 400 000 $.

M. Fortin :Non, non, mais... On pourra en discuter, mais ce n'est pas la même que celle de l'Ontario à laquelle vous avez fait référence tantôt.

M. Dubé : Non, non, c'est vrai, c'est ça, il y a deux cas différents.

La Présidente (Mme Poulet) : Alors, si vous me permettez, on va poursuivre les échanges avec le parti de M. le député de Pontiac.

M. Fortin :Merci, Mme la Présidente. En fait, je passerais la parole à ma collègue, si c'est possible. Merci, merci.

La Présidente (Mme Poulet) : Oui. Mme la députée de La Pinière, allez-y.

Mme Caron : Oui. Merci, Mme la Présidente. Alors, merci pour votre présentation. Vous avez été très, très éloquents, tous les trois, et en plus vous amenez une idée constructive, une proposition constructive de réunir les joueurs autour de la table nationale de concertation. Est-ce que dans ces... Parce que vous mentionnez que cet espace réunirait le gouvernement, le ministère de la Santé et Services sociaux, les fédérations médicales étudiantes et d'autres acteurs du système de santé. Est-ce que je peux en déduire que dans ces autres acteurs il y aurait Santé Québec aussi, même s'ils ne sont pas nommés précisément là, ou non?

M. Pelletier-Lebrun (Maxence) : Ce sont des acteurs pertinents pour le réseau, effectivement.

Mme Caron : D'accord. Merci. Dans les études que vous avez faites, dans les consultations que vous avez faites, ce que je comprends, c'est que vous craignez perdre de vos collègues. Vous avez dit aussi que les causes des départs étaient inconnues. Dans les deux mémoires qu'on a eus tout à l'heure de la Fédération des omnipraticiens et celle des spécialistes, ils ont... on nous parlait beaucoup du milieu, de... en fait, du matériel ou des ressources à la disposition des médecins, dans le public, dans le milieu de travail, dans l'environnement de travail. Puisque tous les trois, vous y travaillez déjà, est-ce que vous voyez déjà aussi que... c'est-à-dire, est-ce que ces mêmes causes-là, vous les voyez aussi, ou vous pensez que c'est plus autre chose... sur autre chose qu'il faut travailler?

Mme Harvey (Félicia) : Non, je dirais qu'on est en accord, là, avec les enjeux qui ont été nommés. C'est sûr qu'on n'a pas tous les mêmes années de pratique derrière la cravate que nos collègues, mais on reconnaît, là, le manque de ressources, puis, je dirais aussi, ça a été nommé à quelques reprises, là, mais le manque d'autres personnels aussi, là, qui sont nécessaires, là. On est dans une médecine, on l'a dit tantôt, avec des cas complexes. Ça se traite, oui, avec des médecins, mais avec plein d'autres professionnels qui sont essentiels. On a parlé des chirurgies, mais on pourrait parler de plein d'autres exemples qui nécessitent plusieurs professionnels. Donc, oui, on reconnaît ce qu'eux ont nommé. Il y a aussi la paperasse, puis le ministre, tu sais, travaille à des solutions à ce niveau-là. Mais nous, ce qu'on disait, c'est qu'on pourrait, à la...


 
 

14 h 30 (version non révisée)

Mme Harvey (Félicia) : ...c'est travailler à des solutions à ce niveau-là, mais nous, ce qu'on disait, c'est que... c'est qu'on pourrait, à la table, aller encore plus loin, vraiment, aller voir qu'est-ce qui fait quitter les plus jeunes, qu'est-ce qui fait quitter les moins jeunes, qu'est-ce qui fait quitter les pas jeunes du tout, puis essayer de s'attaquer vraiment à ces causes-là. Il y en a qui ont été nommées. On pourrait en découvrir d'autres et...

La Présidente (Mme Poulet) : Merci. Je m'excuse de vous interrompre. On va poursuivre la discussion avec le député de Rosemont pour une période de 2 min 52 s.

M. Marissal : Bonjour. Merci d'être là et merci pour votre mémoire. Je vais y aller rapidement, parce que je n'ai pas beaucoup de temps, là, en citant au texte certains de certains passages de votre mémoire. «Également, certains réaliseront... pardon, que la pratique médicale ne leur convient pas seulement une fois leur permis de pratique obtenu». Vous faites la lecture, là, du projet de loi, que ces gens-là seront pénalisés si d'aventure, même une fois le diplôme obtenu, ils considèrent que ce n'est fait pour eux pour des raisons qui leur appartiennent.

Mme Harvey (Félicia) : En fait, je n'ai pas le projet loi devant moi, mais c'est dans l'idée que c'était écrit «d'y exercer la médecine au Québec». Et nous, on voulait montrer que : Qu'est-ce qui se passe d'un étudiant qui signe ça à 19 ans et qui change de programme, je l'ai nommée un peu tantôt, là, qui se réoriente, ou même un médecin qui a son diplôme et qui décide pour n'importe quelle raison qu'il ne pratique pas la médecine. Il n'y a pas d'information, là, à ce sujet-là dans le projet de loi.

M. Marissal : Et la même chose quand vous écrivez «un étudiant doit avoir le droit d'abandonner ou de changer de programme d'études», ce qui est assez fréquent.

Mme Harvey (Félicia) : Oui.

M. Marissal : «Un médecin doit aussi avoir le droit de changer de domaine professionnel et ne pas pratiquer la médecine sans pénalité». Donc, même question, là. Vous la lecture froide que vous faites du projet de loi, excusez-moi, je perds la voix, la lecture froide que vous faites du projet de loi, c'est que ça ne serait plus permis et qu'il y aurait des pénalités.

Mme Harvey (Félicia) : On veut s'assurer que ce ne soit pas le cas, et c'est pour ça qu'on le nommait. Oui, exactement, là, dans la lecture, «d'y exercer la médecine au Québec».

M. Marissal : Cela dit, entre vous et moi, là, de façon très précise, cette discussion-là, elle est purement philosophique puisque vous rejetez d'emblée le projet de loi. Puis je ne ferai pas semblant qu'on ne s'est pas parlé avant. On a fait notre travail et vous avez fait votre travail. Je sais que vous êtes opposés à ce projet de loi là, mais vous apportez quand même des précisions, notamment sur l'article 6 qui, selon moi, ouvre la porte à des allers-retours infinis sur quelles seraient les exceptions. Là, je viens de faire ce qu'on ne fait pas dans mon ancien métier, je viens de vous mettre la réponse dans la question. Alors, est-ce que c'est ce que vous considérez aussi?

Mme Lavoie (Mathilde) : Oui, absolument. On ne peut pas prévoir toutes les exceptions puis on ne sait pas à qui ça va s'appliquer pour le futur également, là.

M. Marissal : O.K. Bon, pour... «for the record», comme on disait aussi dans mon ancien métier, j'ai fait ça parce que je n'ai pas assez de temps pour vous poser toutes les questions. Alors, je suis obligé de prendre quelques raccourcis. Et je vous remercie pour votre temps et votre précieuse collaboration.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci. Alors, je cède la parole au député des Îles de la Madeleine pour le même, la même durée, 2 min 52 s.

M. Arseneau : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous trois pour la présentation. Et pour la suggestion, là, de créer une table, une instance, un forum, je pense que c'est très constructif. Et merci de nous en faire la proposition. Je voudrais aborder deux éléments. Premièrement, la place du privé. Est-ce que vous jugez, quand vous dites qu'on n'aborde pas de manière fondamentale le problème de l'expansion du privé, je joue paraphrase, vous reconnaissez qu'il y a un problème avec la place grandissante du privé tout de même?

Mme Lavoie (Mathilde) : Oui, on reconnaît qu'en ce moment le privé a une place importante, qu'on mérite d'aborder la question, là, de puits sans fond. Puis également, nous, on s'est positionné en faveur d'un système public et on dénonce justement, là, des fois certaines tentatives, là, que certaines compagnies ont auprès de nos membres. On ne souhaite pas leur offrir une tribune. On a le... Ce choix-là, en tant que fédération, on sait que ça existe, mais on reconnaît également qu'en ce moment, c'est un phénomène marginal qui mérite quand même d'avoir notre attention, là, pour ne pas que ça... que ça continue de la sorte.

Mme Harvey (Félicia) : Puis j'ajouterais aussi que... On l'a dit ce matin, mais le gouvernement, avec ce projet de loi là, propublic, on... Puis l'objectif, je pense que c'est clair pour tout le monde, on est en accord, mais ouvre aussi la porte au privé. Donc, nous, on dit : Bien là, il faut se faire un plan pour l'avenir. Où on va? Est-ce qu'on l'ouvre? Est-ce qu'on la ferme? Parce que si on ouvre la porte puis on se plaint que les gens y vont... Donc on aimerait avoir un plan sur où on va.

M. Arseneau : Est ce que ça se peut qu'on appelle ça de la dissonance cognitive, là? Si c'était un individu qui se faisait ces deux propositions-là en parallèle. Mais vous parlez des contraintes, les PREM par exemple, et les AMP, mais j'ai déjà discuté avec vous pour ce qui est par exemple de la distribution des effectifs...

M. Arseneau : ...les médecins, pour les régions, par exemple, vous êtes quand même favorable à ce qu'on puisse distribuer, entre guillemets... s'assurer du déploiement des médecins partout sur le territoire. Puis ça, c'est quand même un enjeu réel.

Mme Langelier (Marie-Pier) : Oui, rapidement. J'avais dirigé l'an passé un mémoire sur la formation médicale délocalisée et, ce qu'on voyait, c'est que les meilleurs modèles à l'international, c'est des modèles qui sont basés sur des contingentements qui sont non coercitifs, qu'il y a un programme de mentorat, des entrevues qui sont différenciées pour la région. Donc, ce qui se fait de mieux à l'international, c'est de donner envie au monde d'aller dans le réseau, ce n'est pas les attacher au réseau. Il faut que le réseau public redevienne l'employeur de choix. Puis c'est vraiment... S'il y a un message à retenir, c'est : Faites en sorte que les étudiants en médecine aient envie de venir dans le réseau public et ils vont venir, vous pouvez être certains de ça, parce qu'ils veulent pratiquer au public, les étudiants en médecine.

• (14 h 40) •

M. Arseneau : Je vous remercie beaucoup, c'est très éclairé.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci beaucoup. Alors, je cède la parole au député de Saint-Jérôme pour une période de 2 min 12 s. Merci.

M. Chassin :Merci. Alors, merci pour votre présentation. Je comprends que vous êtes en faveur de l'objectif du projet de loi, puis là, sans jouer sur les mots, quand je lis la note descriptive, dans le fond, là, les notes explicatives au début du projet de loi, c'est effectivement un projet de loi qui vise à favoriser l'exercice de médecine au sein du réseau public, mais les outils qui sont utilisés, c'est : «Le projet de loi oblige tout nouveau médecin...» ou, encore: «ça permettra au gouvernement d'imposer aux étudiants...» Donc, autrement dit, «favoriser», pour vous, ce n'est pas un synonyme de coercitif comme ça l'est dans le projet de loi.

Mme Harvey (Félicia) : ...puis on croit que des mesures structurantes, puis sans répéter tout ce qu'on vient de dire, bien, ça favoriserait l'exercice au public. Puis d'enchaîner les gens à un système, on craint aussi que ça donne l'idée d'un devoir accompli. Après cinq ans, ça crée le momentum de se poser la question : Bon, je reste tu, je ne reste pas, là, j'ai fini mon cinq ans? Puis on ne veut pas...

M. Chassin :...d'aller au privé si on a déjà fait notre cinq ans au public, ah! bien là, on est libérés justement.

Mme Harvey (Félicia) : Exact, puis ça serait ça avec cinq ans ou n'importe quelle durée. Ce n'est pas le message qu'on veut envoyer.

M. Chassin :Puis, en fait, c'est intéressant. Autrement dit, je comprends aussi qu'il y a des médecins qui sont dans des situations un peu particulières. Si on est sous-ministre adjoint, comme Dr Bergeron, bien, on n'est pas au public, alors qu'on est au public, en quelque sorte, c'est ça?

Mme Harvey (Félicia) : C'est exactement ça, le point de diversité de pratiques, là, qu'on abordait au début, là.

M. Chassin :...beaucoup d'expérience, hein, n'est-ce pas? Puis là je vous pose une question, peut-être, sur une solution, très rapidement...

Des voix : ...

La Présidente (Mme Poulet) : Pardon! On poursuit.

M. Chassin :...parce que je n'ai pas eu le temps. Mais si on avait... au lieu de faire cinq ans dans la carrière, si on avait, par exemple, 40 heures par semaine à faire au public, puis, après, bien, si vous voulez faire plus d'heures puis si vous voulez changer au privé, c'est autre chose, vous pouvez?

Mme Lavoie (Mathilde) : Bien, je pense que c'est une solution qui pourrait être étudiée lors d'une table.

M. Chassin :...

Mme Lavoie (Mathilde) : Exactement, vous l'aurez compris. Mais je pense également que, tu sais, à voir nos patrons aller, c'est souvent bien au-delà de 40 heures qu'ils travaillent et qu'ils nous côtoient également en stage. Mais ça pourrait être en effet quelque chose à étudier, comme toutes les autres mesures qui ont été mentionnées ce matin et plus encore.

M. Chassin :Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Poulet) : Parfait. Merci. Alors, je vous remercie tous les trois pour votre contribution à nos travaux. Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux prochains invités de prendre place.

(Suspension de la séance à 14 h 43)

(Reprise à 14 h 47)

La Présidente (Mme Poulet) : Alors, je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Fédération des médecins résidents du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Alors, je vous invite donc à présenter et à commencer votre exposé.

M. Soufi (Ghassen) : Mme la Présidente, chers membres de la commission, je vous remercie pour cette invitation aujourd'hui. Je suis le Dr Ghassen Soufi, médecin résident en psychiatrie et président de la Fédération des médecins résidents du Québec. Je suis accompagné, à ma droite, de Me Savignac Dufour, directeur général de la FMRQ.

La FMRQ représente les médecins affiliés aux quatre facultés de médecine au Québec, soit plus de 4 000 médecins résidents. Ceux-ci offrent des soins à la population québécoise dans le cadre d'une résidence qui dure au minimum deux ans et qui peut s'étaler jusqu'à sept ans. Les médecins résidents travaillent exclusivement dans le réseau de la santé et peuvent poser les mêmes diagnostics et les mêmes gestes que les médecins en exercice. Ce travail s'effectue à raison de 72 heures par semaine en moyenne, parfois jusqu'à 19 jours consécutifs.

Les médecins résidents se trouvent partout au Québec dans le cadre de leur formation. À titre d'exemple, je suis affilié à l'Université McGill, mais je travaille présentement au CHUM. Dans deux semaines, je serai à Puvirnituq et à Inukjuak dans le Grand Nord québécois pour y offrir des soins en santé mentale. Puis, dans quatre semaines, je travaillerai aux Îles-de-la-Madeleine. Dans le but de travailler dans un centre académique au Québec, je vais compléter un fellowship en Californie à compter de juillet, bien que ma formation de résidence sera alors terminée.

Nous souhaitons d'abord exprimer aux membres de la commission que c'est toujours un honneur pour la FMRQ d'être invitée à partager sa position sur des pièces législatives, surtout celles qui touchent aussi directement nos membres que le projet de loi à l'étude aujourd'hui. Notre position vis-à-vis les enjeux qui sont soulevés dans le projet de loi n° 83 est on ne peut plus claire. La FMRQ a toujours été et sera toujours en faveur d'un système public de santé fort, accessible et efficace, qui puisse disposer de toutes les ressources nécessaires afin d'offrir des soins de la plus haute qualité à la population québécoise. Nos membres travaillent à 100 % dans le réseau public et ils veulent tous y poursuivre une pratique après la fin de la résidence. Ainsi, précisément parce que nous souhaitons être cohérents avec cet objectif, il nous est impossible d'appuyer le projet de loi sous aucune forme, car nous faisons l'analyse qu'il ne mènerait bien au contraire...

M. Soufi (Ghassen) : ...à l'érosion du système de santé publique qui nous est si cher. Bien qu'il soit très court, ce projet de loi entraînerait d'importants changements au niveau de la pratique médicale au Québec qui vont bien au-delà de l'idée réductionniste qui y est présentée, selon laquelle forcer la main des jeunes médecins résoudrait tous les problèmes. Le projet de loi no 83 propose deux principales mesures qui risquent toutes deux d'éroder nos efforts de renforcer la pratique médicale au Québec. La première consiste en l'obligation de travailler dans le secteur public pendant cinq ans pour les futurs médecins. Et la deuxième consiste en l'imposition de contrats à l'entrée en médecine ou en résidence, qui obligerait les finissants à exercer la médecine au Québec sous peine de pénalités financières. Nous allons traiter de ces deux éléments séparément.

• (14 h 50) •

Premièrement, sur la question de l'obligation de pratiquer dans le secteur public, il ne faut pas trop se creuser la tête afin de voir quelle est la réelle vision du gouvernement en la matière. On nous présente dans ce projet de loi le réseau public comme un purgatoire dans lequel il faudrait faire une besogne qui n'est pas désirable, une période obligatoire qui prescrite, comme un service militaire. Ce que nous entendons de nos membres, c'est effectivement qu'on dévalorise cette pratique médicale au public qui au contraire est le choix de l'écrasante majorité des jeunes médecins. Lorsque je me suis engagé personnellement à compléter mes études en médecine et à poursuivre ma formation en psychiatrie, j'ai toujours su que mon service au public durerait l'entièreté de ma carrière. Tous mes collègues en médecine et dans le milieu de la santé, au sens plus large, comprennent que nous sommes formés par l'État québécois afin, en bout de ligne, de prodiguer des soins aux Québécois. Sommes-nous en train de suggérer que l'éducation n'est plus un investissement social, mais plutôt un bien, un bien de consommation qui a un prix et qui doit être remboursé à la fin des études par des clients que sont les apprenants? C'est une logique pour nous qui est très dangereuse. Personne ne commence son long parcours en médecine de plus de 10 ans en se disant qu'il a hâte de pratiquer au privé. Au contraire, ce sont plutôt les obstacles qui se dressent en cours de chemin, qui forcent les jeunes médecins à explorer d'autres avenues que le public.

Comme nous l'avons déjà expliqué devant cette commission, certains médecins résidents peinent à trouver un poste en fin de résidence. Cela s'explique notamment par des contraintes administratives limitant la pratique et le manque de ressources et d'infrastructures permettant la pratique de certaines spécialités au sein du réseau public. On pense notamment aux salles d'opération, ce qui a été mentionné aujourd'hui, aux ressources humaines. Des fois, il s'agit tout simplement qu'il n'y a pas de poste, malgré le besoin de personnel criant. Tous ces enjeux demeureront inchangés, que le projet de loi soit adopté ou non. Le privé recrute déjà abondamment dans le réseau public, que ce soit au niveau des médecins ou des autres professionnels de la santé. Et ce projet de loi n'y changera rien, sinon que de déplacer les yeux des recruteurs du privé vers d'autres médecins.

Deuxièmement, sur la question de l'imposition de contrat à l'entrée du doctorat en médecine ou à l'entrée de la résidence. Le 19 avril 2023, nous étions assis à la même table, ici, en commission parlementaire, et nous avons exprimé les mêmes inquiétudes par rapport aux clauses orphelins. Celles-ci prévoyaient imposer des conditions de pratique futures à des étudiants en médecine comme condition d'entrée en résidence. M. Dubé, vous nous aviez donné ce que vous avez appelé un cours didactique sur l'historique de la rédaction du p.l. no 15, qui est devenu Santé Québec. Et vous nous aviez dit, et je cite : Je veux qu'on respire. Le fameux article 392 a été retiré et on vous en remercie. Mais à peine deux ans plus tard, nous y voilà, on y revient. Il est difficile de trouver à l'Assemblée nationale un cas plus discriminatoire que celui des articles 5 et 6 du projet de loi, qui limitent géographiquement l'exercice professionnel des médecins. Ceci constituerait un énorme précédent visant un groupe social particulier, en l'occurrence les jeunes médecins, sans qu'il n'y ait de justificatif sur le comment ni le pourquoi de viser ce groupe de médecins.

Comme l'ont expliqué les représentants de la FMOQ et de la FMSQ plus tôt, il existe déjà une certaine mobilité pour les diplômés en médecine à travers le Canada, de sorte qu'ils peuvent postuler en résidence à travers le pays au complet. Bien évidemment, il y a certains finissants québécois qui vont se former ailleurs et également des finissants qui viennent se former au Québec. Il reste que la très, très grande majorité des finissants québécois choisissent de rester travailler au Québec, comme on l'a entendu aujourd'hui. Maintenant, advenant que le projet de loi no 83 soit adopté tel qu'il est rédigé, les diplômés non québécois choisiront-ils de venir compléter leur formation et, ultimement, de travailler ici? Évidemment non. Encore pire, nos propres finissants, ici au Québec, verront-ils ces mesures discriminatoires comme un énième obstacle à franchir et décideront-ils d'aller poursuivre leur formation ailleurs? Ce sont toutes des questions que l'on se pose, et on espère que les rédacteurs du projet de loi se les sont posées également.

Notre mémoire comporte également des éléments plus techniques que vous pourrez feuilleter enfin vers les dernières pages concernant des cas particuliers où il serait interdit de pratiquer et au public et au privé, particularités qu'on espère être accidentelles. Bien qu'il s'agisse de technicalités assez pointues, cela renforce pour nous cette impression que le projet de loi était rédigé à la va-vite, sur le coin d'une table, sans réelle considération des ramifications très importantes qui pourraient suivre. Si vous aviez besoin de plus d'éléments pour confirmer cette perception, il ne faut pas regarder plus loin que les...

M. Soufi (Ghassen) : ...qui ont suivi immédiatement l'annonce du projet de loi. On nous a présenté des chiffres ahurissants au sujet des coûts de formation des médecins résidents, des centaines de milliers de dollars. Avec un minimum d'analyse, il apparaît évident que ces chiffres sont dopés par nos propres salaires, les salaires que nous recevons en vertu des 72 h par semaine qu'on travaille. C'en est franchement insultant. Sans inclure nos salaires, ces coûts de formation sont en fait comparables à d'autres apprenants, en foresterie, en agriculture, en médecine vétérinaire. Songe-t-on à imposer à ces jeunes professionnels des obligations discriminatoires similaires à celles qui sont proposées dans le projet de loi n° 83? Évidemment, non, ça irait à l'encontre de notre contrat social québécois.

Dans ces mêmes sorties médiatiques, on nous a aussi fait peur avec l'idée d'un exode vers le privé. Pourtant, ce projet de loi, tel qu'il est rédigé actuellement, n'empêcherait aucunement les jeunes médecins de prodiguer des soins non assurés par la RAMQ au privé, tels des soins en esthétique. Où est la logique? Le gouvernement a déjà le pouvoir d'intervenir pour empêcher le passage des médecins vers le réseau privé s'il pensait qu'il y avait là une réelle menace pour le réseau public, et ce, sans créer de discrimination envers les jeunes médecins. Le fait qu'il n'intervienne pas de cette manière en dit long. Il nous est évident que le projet de loi ne sert qu'à instrumentaliser la relève médicale afin de donner l'impression qu'on tente de régler des enjeux du réseau public. Loin de résoudre ces enjeux, ce projet de loi passe un petit coup de maquillage rapide ici et là, mais ne tente aucunement de traiter la verrue qui se cache en dessous, et elle qui continue de grandir. Ce n'est pas une coïncidence que l'annonce de ce projet de loi est arrivée en pleine négociation de toutes les fédérations médicales, mais, pour nous, une chose est claire, la relève médicale ne devrait pas écoper par un manque de courage politique, ce courage d'adresser les vrais enjeux avec tous les acteurs du réseau de la santé et non seulement les jeunes médecins. Merci.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci beaucoup pour votre exposé. Alors, nous allons maintenant débuter la période d'échange avec M. le ministre.

Une voix : ...

La Présidente (Mme Poulet) : Alors, Mme la députée d'Argenteuil. La parole est à vous.

Mme Grondin : ...quel plaisir, merci beaucoup. Merci beaucoup, messieurs. En fait, je tente de prendre le pouls des gens dans mon comté. Moi, je viens de la région d'Argenteuil, région isolée, même si on est à 40... 50 minutes de Montréal. Difficultés pour la majorité d'une population vieillissante, les médecins ne souhaitent pas venir dans Argenteuil. Il y a des enjeux tant au niveau de l'hôpital, mais surtout au niveau du GMF. Bien que les... la gestion et les services fonctionnent bien, il n'y a pas... ce n'est pas tant les obstacles, mais c'est plus les médecins qui ne sont pas très intéressés à venir jusque dans Argenteuil, de ce que j'entends de la part des médecins qui sont déjà là.

En fait, moi, j'ai une grande question. Puis j'aimerais ça être capable de répondre à mes citoyens jusqu'à un certain point, tu sais, la moitié du budget du Québec s'en va en santé. Il y a beaucoup de gens dans mon comté qui n'ont pas de médecin, qui n'ont pas accès. Ce que j'entends dans les échanges, en fait, c'est que le projet de loi demande un engagement aux futurs médecins de cinq ans pour pratiquer dans le réseau québécois, dans le réseau public. On forme quoi, à peu près 1 100 médecins par année. Dans les candidats en médecine, il y a comme 5 000 demandes. Êtes-vous en train de me dire qu'il y a... sur les 5 000 gens qui seraient intéressés à s'en aller en médecine, on ne trouvera jamais de gens qui voudront s'engager pour cinq ans dans le réseau public?

M. Soufi (Ghassen) : Pour nous, ce n'est pas une question du cinq ans. Pour moi, je veux m'engager pour toute ma carrière, et c'est comme... c'est comme ça que je comprends la médecine, que je comprends mon engagement envers le système public. On ne demande que ça de travailler dans le public. Encore faut-il qu'on ait les ressources, les structures qui sont existantes, les ressources humaines, les plateaux techniques, etc., les postes également qui... il faut qu'ils soient disponibles. Tout ce qu'on demande, c'est d'être consultés, c'est de discuter, de pouvoir comprendre quels sont les enjeux qui plaguent notre système de santé publique parce que les médecins résidents travaillent à 100 % en public puis tout ce qu'on demande, c'est de continuer à y pratiquer après la fin de notre résidence, encore faut-il qu'on ait les moyens pour le faire.

La Présidente (Mme Poulet) : Oui, Mme la députée de... de Bonaventure, allez-y.

Mme Blouin : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour à vous deux. Merci d'être avec nous aujourd'hui pour parler de cette mesure parmi tant d'autres...

Mme Blouin : ...et tant d'autres, qui est ce projet de loi aujourd'hui qui veut favoriser l'accès à la médecine publique. Donc, très intéressée de discuter avec vous aujourd'hui.

Vous avez ouvert peut-être une porte tout à l'heure. Alors, j'aimerais vous entendre. Je sais que vous avez entendu parler du Collège des médecins qui est en faveur du projet de loi, qui trouve qu'on ne va pas assez loin, qui demande des mesures encore plus costaudes. Donc, j'aimerais savoir ce que vous pensez de ces mesures-là. Est-ce que vous en avez d'autres à proposer aussi?

• (15 heures) •

M. Soufi (Ghassen) : Mais on a lu les propositions du Collège des médecins du Québec sur la place du privé en santé, les lignes directrices qu'ils ont publiées, puis on est 100... à 100 % d'accord sur toute la ligne, sur toutes les propositions qui sont énumérées dans leurs lignes directrices, mais, en aucun cas, à ce que le CMQ... on a lu que le CMQ chercherait à discriminer envers les jeunes médecins, ce n'est pas parmi leur ligne directrice, mais on est d'accord avec tout ce qui est... tout ce qui est énoncé dans leur projet. On a hâte d'entendre Dr Gaudreault à ce sujet, la semaine prochaine, parce que ce n'est pas quelque chose qu'on a entendu le CMQ dire, puis on se questionne, à savoir toute cette idée de... les jeunes médecins, les jeunes étudiants, la signature de contrats, l'imposition, les restrictions. Un ordre professionnel ne peut pas discriminer à l'endroit de stagiaires en vertu de la Loi visant à assurer la protection des stagiaires en milieu de travail. On a hâte d'entendre le Dr Gaudreault de la CMQ nous parler de ça la semaine prochaine, parce qu'on est d'accord sur toute la ligne avec les points qu'ils ont énoncés.

Mme Blouin : Donc, les tarifs maximums au privé, mieux encadrer les allers-retours public-privé, ça, vous êtes d'accord avec ça? Est-ce qu'il y a d'autres mesures de ce type-là que... Est-ce que vous avez d'autres propositions en ce sens-là?

M. Soufi (Ghassen) : Mais on voudrait bien en parler. La FMEQ a soulevé, tout à l'heure, l'idée d'une table de concertation. Tout à fait ouvert. Comme l'ont dit plusieurs personnes aujourd'hui, on ne nous a pas consultés au préalable par rapport à tous ces éléments-là. On a toutes sortes d'idées. On est sur le terrain, on travaille dans le réseau public de 2 à 7 ans, on voit ce qui se passe, on a... on aurait beaucoup à dire. Encore faudrait-il nous consulter avant de se retrouver ici en commission parlementaire, avec un projet de loi qui semble viser seulement les jeunes devant nous.

Mme Blouin : C'est à ça que ça sert, la commission parlementaire, aussi. Donc, c'est le moment où on peut faire les débats, où on est là pour entendre les groupes. On sait, on a toujours dit que le projet de loi était perfectible. Donc, on commence en vous entendant, à écouter ce que vous dites. Et, ensuite, on va procéder à l'étude article par article et on va pouvoir s'entendre selon les commentaires qu'on a eus.

Moi, je prends pour acquis que plus il y a de médecins dans le réseau, moins grande sera la charge collective envers tous les médecins. Donc là, je me demande en quoi est-ce qu'une période obligatoire de cinq ans au public peut nuire à l'objectif d'avoir plus de médecins au public. Parce qu'à la suite de la question de ma collègue, nous, on croit fermement qu'on va arriver à combler toutes les demandes d'admission, donc toutes les places qu'on a, et trouver suffisamment d'étudiants en médecine. Donc, comment est-ce qu'une période obligatoire de cinq ans au public, ça va nuire à l'objectif d'avoir plus de médecins?

M. Soufi (Ghassen) : On a entendu le témoignage plus tôt aujourd'hui de la FMSQ, notamment en chirurgie orthopédique. On vous a expliqué que, peu importe le nombre de nouveaux médecins qu'on ajoute, s'il n'y a pas de poste pour eux, mais ils ne peuvent pas pratiquer. S'il n'y a pas les ressources techniques, les ressources humaines, s'il n'y a pas les professionnels qui peuvent les aider dans la pratique... Parce qu'au final, la médecine, c'est un travail d'équipe. Ça ne se fait pas seulement une personne dans un cabinet qui voit des patients. Il faut que tout le monde soit uni pour qu'on puisse travailler à travers ça. Puis augmenter le nombre de médecins, si on n'a pas le... la situation adéquate pour prodiguer des soins à la population québécoise, ça n'amènera rien, que ce soit cinq ans, que ce soit 10 ans, 30 ans, peu importe.

Mme Blouin : O.K. Bien, en... Oui. Puis je tiens juste à réitérer qu'on peut marcher puis mâcher de la gomme en même temps, là. Je vous répète que le projet de loi, en fait, c'est une mesure parmi un ensemble de mesures. Donc, il y a plusieurs choses qui ont été adressées, aujourd'hui, sur lesquelles on travaille, qui sont soit en voie de réalisation ou sur le point d'être réalisées. Donc, je pense que c'est important quand même de le mentionner. Alors, c'est pour ça que la question précise de savoir est-ce que ça va nuire d'avoir un cinq ans ferme? Je comprends que non.

M. Savignac Dufour (Patrice) : Mais peut-être pour répondre aussi à la question de Bonaventure, tu sais, normalement, quand on arrive avec une législation en commission parlementaire puis on en débat, il y a eu des consultations publiques avant, il y a eu des débats publics. On n'a pas participé, nous autres, à une question : Est-ce qu'on va régler le problème de santé en discriminant les jeunes médecins, là? Tu sais, le projet de loi n° 15, il n'est pas arrivé un bon matin en commission parlementaire, puis on s'est mis à réfléchir, là. On a... il y a eu un paquet de consultation publique qui a précédé la présentation du projet de loi n° 15, puis on a fait un débat en commission parlementaire après. C'est pour ça qu'on parle d'ovni législatif dans notre mémoire. Ce n'est pas... ce n'est pas fort, pas trop fort comme image, là, c'est sorti l'automne dernier : Tiens, on va régler le problème du système de santé, toi, on va discriminer les jeunes médecins. D'où ça sort? Puis vraiment, là, on nous dit que là on va faire le débat, maintenant, en commission parlementaire. Et le temps qu'on a mis à se préparer pour aujourd'hui, là, si on l'avait passé à essayer de trouver des solutions comme ça a été fait avec le Collège des médecins, MSSS, régie et Collège des médecins, si on avait pu participer à ces discussions-là... vous en arrivez avec un paquet de solutions. Là, vous nous mettez des mesures discriminatoires, méchante...


 
 

15 h (version non révisée)

M. Savignac Dufour (Patrice) : ...méchante discussion, là.

La Présidente (Mme Poulet) : Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Dorismond : Oui, j'aimerais ça revenir en lien avec les propositions que la fédération des spécialistes des médecins ont parlé en lien avec l'orthopédie, puis... Bon, c'est juste pour vous dire que, lors de la dernière négociation avec les infirmières, on a vraiment rajouté tout le volet flexibilité pour mettre du personnel en soutien avec vous en bloc opératoire surtout, et on était au courant déjà, en p. l. 15, de la difficulté. Les médecins sont venus discuter de ça. Depuis... depuis l'époque de la p. l. 15, on travaille là-dessus pour travailler en amont, pour faire en sorte que vous puissiez venir travailler en collaboration avec les professionnels de la santé. Et on a mis aussi des formations accélérées pour permettre d'autres professionnels, comme les infirmières auxiliaires dans le bloc opératoire, pour rajouter un coup de main pour aider les chirurgiens à pratiquer puis accélérer le processus.

M. Soufi (Ghassen) : Tout à fait, puis on salue tous ces efforts. On l'a nommé dans notre... dans notre mémoire également. On salue les efforts du gouvernement d'augmenter les admissions en médecine. Ça aussi, ça va vraiment augmenter le nombre de médecins en pratique, mais ça, c'est d'ici cinq, 10 ans. Mais, en attendant, continuons à penser à des solutions ensemble, continuons à discuter, continuons à essayer de voir quels sont les problèmes et comment on peut les adresser au lieu de légiférer tout de suite avec un élément qui risque de... de brusquer les... les jeunes médecins en se disant : Bien comment ça se fait qu'on nous dit que, nous, on doit se plier à de nouvelles mesures discriminatoires, de nouvelles restrictions, alors qu'on n'a même pas les moyens de trouver un poste, on n'a même pas l'option de pouvoir travailler dans le secteur public dans lequel on veut rester à la fin de notre résidence. C'est ça, ce qu'on veut dire.

La Présidente (Mme Poulet) : Oui, Mme la députée de Soulanges.

Mme Picard : Bonjour. J'ai un petit peu de misère à saisir. Je vous entends depuis tantôt. En fait, vous dites que la totalité ou presque des résidents continue au public. Donc, qu'est-ce que vous craignez des mesures du projet de loi? Je ne comprends... j'ai de la misère à saisir.

M. Soufi (Ghassen) : C'est simple pour nous, en fait, parce que, pour l'instant, la très, très grande majorité, l'écrasante majorité des médecins résidents continue de travailler au public après la fin de leur résidence. Ça, c'est dans un système public qu'on voit à travers notre résidence. On voit ses difficultés et ses faiblesses. On voit qu'il y a besoin de travail, mais on y reste quand même. Si maintenant on nous dit : Mais tu sais quoi? On va te punir en te disant que tu dois travailler là pendant cinq ans, puis dans ce système qui commence à craquer, qui commence à couler. Comment est-ce que vous pensez que les... que les jeunes médecins vont sentir? Ils vont... ils vont voir que ce travail dans le réseau de la santé public est dévalorisé, puis qu'on fait notre cinq ans, puis, boum, on part, on a rendu notre dette au public. Évidemment, ce n'est pas ça qu'on veut. Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, personnellement, quand je me suis engagé à poursuivre ma formation en médecine et en psychiatrie, c'était pour poursuivre une carrière pour toute ma vie dans le secteur public. Je ne veux pas qu'on mette des nombres d'années, de nombres de mois ou quoi que ce soit à cette... à cette obligation de pratiquer au public, parce que ça... ça dévalorise, cette pratique dans le système public. Au contraire, cherchons ensemble à trouver des solutions pour augmenter l'attractivité du système de santé public

La Présidente (Mme Poulet) :  Oui, Mme la députée de Marie-Victorin, allez-y.

Mme Dorismond : Tout à l'heure vous avez dit que vous étiez en accord, la plupart du temps sur le Collège des médecins, ça fait que j'aimerais ça vous entendre : Qu'est ce que vous pensez des tarifs?

M. Savignac Dufour (Patrice) : Écoutez, c'est une position très... une question très technique, là. Je pense que ça vaudrait la peine d'être discuté. Nous, on n'a pas de fermetures à regarder toute mesure qui fait du sens puis qui respecte les droits fondamentaux des gens qui pourraient faire en sorte de limiter le privé. On souhaite tous un régime public qui est efficace puis qui rend des services à la population. Ce qu'on essaie de dire ici aux parlementaires, c'est que le projet de loi n° 83 va avoir l'effet exactement contraire des objectifs recherchés. Et tu sais, s'il n'y en a pas de problème dans le fond, mais pourquoi on légifère? Parce que, là, on nous dit : Bien, tu sais, s'il n'y en a pas de problème, pourquoi vous êtes en... contre le projet de loi? Mais, s'il n'y a pas de problème, pourquoi on a un projet de loi? On parle d'un projet de loi quand même, qu'il y a des mesures attentatoires aux droits fondamentaux, là, ce n'est pas rien, là. Alors, le projet de loi n'a pas sa raison d'être parce que le problème n'existe pas. Le problème n'est pas les jeunes médecins dans le privé, là, c'est 97 % de nos membres, ils finissent dans le public, puis le 3 % qui vont dans le privé. Il faudrait chercher à comprendre les raisons. On a donné plein d'explications dans notre mémoire. Ce n'est pas... La plupart du temps ce n'est pas volontaire les départs dans le privé, c'est lié à des problèmes dans le public. Ça fait que ce n'est pas en retenant les gens dans le public qu'on va régler le problème si on n'est pas capable de leur fournir du travail dans le public. Ah! ça tourne en rond, là. Et donc il faut régler les problèmes du public pour plus que le monde doive aller au privé. C'est ça qu'il faut trouver comme solution.

La Présidente (Mme Poulet) : Mme la députée de Bonaventure.

Mme Blouin : Je veux juste revenir sur mieux encadrer les tarifs maximums. En fait, imposer des tarifs maximums pour les soins qui sont offerts au privé. On le fait dans... dans plusieurs provinces au Québec... pourquoi est-ce qu'on... dans plusieurs provinces au Canada, pardon, pourquoi on ne devrait pas le faire au Québec?

M. Soufi (Ghassen) : Mais on en a énuméré plusieurs dans notre mémoire...

Mme Blouin : ...dans plusieurs provinces au Canada, pardon. Pourquoi on ne devrait pas le faire au Québec?

M. Soufi (Ghassen) : ...ouverts à toutes les solutions possibles, et on les explorera en temps et lieu, incluant celle-là.

Mme Blouin : O.K. Puis est-ce que vous avez d'autres mesures à proposer?

M. Soufi (Ghassen) : On en a énumérées plusieurs dans notre mémoire, puis ça vaut, justement, la peine d'en discuter, que ce soit une table de concertation, que ce soit... dans un forum quelconque. On veut en parler avec... avec les acteurs de... du système de santé publique, pour arriver à des solutions qui n'imposent pas, mur à mur, des... des mesures discriminatoires envers une... une minorité des... des médecins, qui sont les jeunes médecins, qui rentrent en pratique.

• (15 h 10) •

M. Savignac Dufour (Patrice) : Puis l'idée, ce n'est pas de reporter le débat, là. On veut trouver des solutions puis on va travailler avec vous pour trouver des solutions. Mais là c'est mal parti, là, avec, là, ce projet de loi qui nous est présenté, là, comme premier appel à la discussion, là.

Mais il y a un problème, là, au Québec, là, des... et c'est un problème, ce que vous soulevez, il y a un problème entre les régions, et il y a plein de façons de régler ça. Vous avez... M. le ministre parlait de la question, là, des... des réseaux locaux de services, les RLS, qui ont été créés à une époque. Bien, ça a eu l'effet contraire. On a créé les... les réseaux locaux de services, on a restreint l'entrée... la pratique régionale pour les... et c'est là qu'on a commencé à avoir des postes vacants en médecine de famille au Québec. On a légiféré, le gouvernement du Québec de l'époque l'a fait, pour essayer de régler un problème qui était criant, qui existe encore.

Vous avez soulevé, tantôt, des cas de... de répartition de la rareté, la répartition des médecins sur le territoire du Québec, puis l'idée qu'on a eue c'est de restreindre la portée de la pratique, et ça a eu l'effet contraire, on s'est retrouvé comme jamais avec des postes pas comblés, en résidence, en médecine de famille. Mais c'est ça, notre crainte, qu'encore une fois des nouvelles mesures contraignantes vont faire le contraire de l'objectif recherché.

M. Dubé : ...

La Présidente (Mme Poulet) : Il reste... 37 secondes.

M. Dubé : Bon. Mais j'aimerais revenir sur la... la question, tout à l'heure, de dire... J'entends deux choses. Puis j'apprécie beaucoup votre présentation parce que... Je suis un peu surpris, mais c'est correct. On est là pour écouter, hein? D'un côté, vous dites : On n'a aucun problème à s'engager vers le public, mais, quand il s'agit de l'écrire, vous semblez avoir un gros problème, et c'est là que je trouve une dichotomie dans votre discours. Il y a vraiment une dichotomie dans votre discours.

Vous venez... vous avez fait un plaidoyer incroyable sur votre intérêt, vous, personnellement, de pratiquer au public. Vous l'avez dit, je suis impressionné de ce que vous faites, de l'engagement, mais j'ai un petit peu de difficulté à me mettre à la place des Québécois qui vous entendent puis qui disent : En ce moment, on refuse 4 000 étudiants par année en médecine, puis il n'y en a pas... parmi les 5 000 étudiants qui font une demande — ce que ma collègue a demandé — qu'on n'est pas capables d'en trouver 1 000 qui vont s'engager à dire : Je vais m'engager pour le public à la fin de ma formation. Je veux juste dire aujourd'hui que je trouve qu'il y a une différence entre le discours et l'engagement. Je voulais juste vous dire ça. Merci beaucoup.

M. Soufi (Ghassen) : Si je peux glisser quelques mots...

M. Dubé : Je ne pense pas qu'il nous reste du temps mais...

La Présidente (Mme Poulet) : Il reste 19 secondes.

M. Dubé : 19 secondes? Allez-y.

Une voix : ...

La Présidente (Mme Poulet) : ...parfait. Allez-y.

M. Soufi (Ghassen) : Oui. C'est... c'est... comme je vous l'ai dit tout à l'heure, cet engagement, c'est pour... c'est pour une carrière. Dès qu'on met un nombre d'années dessus, qu'est-ce qu'on est en train de dire du système public? Qu'est-ce qu'on est en train de dire du système public? Qu'on doit y exercer pendant X nombre d'années, comme si c'était une punition. Ça ne devrait pas être une punition. On devrait tous vouloir y aller puis on devrait aller au public à 100 %.

M. Dubé : ...que de pratiquer au public, c'est une punition?

La Présidente (Mme Poulet) : ...ministre. Alors, je cède maintenant la parole au député de Pontiac. Vous allez poursuivre... vous allez pouvoir poursuivre les discussions.

M. Fortin :Non, M. le ministre, je pense que... ce que moi, j'ai compris du propos, c'est que c'est le message que vous envoyez avec le projet de loi. Du moins, c'est ce que j'interprète des propos de... de nos... des participants, là. Enfin.

Merci d'être là, merci de... de votre message et de la... de la clarté de vos explications. Mais vous n'y allez pas avec le dos de la cuillère, là. Moi, j'ai entendu : atteinte aux droits, discriminatoire. Je vois : inutile, illégal, nuisible, pour décrire le projet de loi. Dites-moi donc le fond de votre pensée, là. Ce que vous demandez, c'est le retrait, que vous dites qu'il n'y a absolument rien de positif là-dedans, que ce n'est pas souhaitable pour la société, là. C'est ce que j'entends, là.

M. Soufi (Ghassen) : Exactement. On... on demande le retrait total du... du projet de loi.

M. Fortin :O.K. Là, je veux... je veux juste essayer... Parce que vous amenez un concept, là, dans votre... dans votre mémoire, puis vous y avez fait référence, là, qu'on vient limiter la pratique médicale privée mais à moitié. C'est-à-dire qu'on... que le projet de loi permettrait de... permettrait encore à certains médecins formés ici, ceux qui devraient être ciblés par le projet de loi, là, d'aller... de se consacrer à une pratique...

M. Fortin :...qui n'est pas couverte par la RAMQ, comme les soins esthétiques par exemple, mais qui, en même temps, viendrait empêcher quelqu'un de travailler dans une clinique médicale spécialisée pour des chirurgies, par exemple, remboursées par la RAMQ. Alors, qu'est-ce que... mais je comprends que vous demandez le retrait, là, mais l'idée... il me semble que l'idée, ce n'est pas... c'est un peu l'inverse, là, de ce que le ministre devrait vouloir faire, non?

M. Soufi (Ghassen) : ...comprenait nous également, mais, en lisant le projet de loi, on s'est... on a eu cette interprétation du texte, puis c'est là où on se demande quelle est réellement la cohérence. Est-ce qu'on cherche vraiment à améliorer l'accès à la population québécoise aux soins de santé dans le public avec ces écrits-là? Puis, à la lecture, ce n'est pas la lecture qu'on en fait. Au contraire, pour nous, ça va venir amenuiser l'offre de services de la population québécoise au public de par le fait qu'on va faire notre cinq ans, puis les gens vont percevoir ça comme : Bien, là j'ai le droit, je vais partir, tandis qu'au contraire on devrait bonifier les conditions de travail dans le secteur public pour qu'on veuille y attirer les meilleurs médecins, pour que nos finissants veuillent... veuillent rester et aller prodiguer des soins, aller faire leur formation puis venir donner des soins, quels qu'ils soient, à la population québécoise.

M. Fortin :On va... On va se pencher, là, collectivement sur votre interprétation de la chose, puis j'espère que... j'espère qu'elle est erronée, je ne peux pas croire... ou j'espère qu'on va la corriger le cas échéant, là, mais je ne peux pas croire, M. le ministre, que, encore... j'y reviens encore une fois, là, dans une région comme la mienne, où il y a 50 % des chirurgies qui sont faites en CMS, on viendrait restreindre le droit de pratiquer là et qu'on enverrait ces mêmes chirurgiens là dans... soit dans le privé privé, complètement privé, là, ou dans le public, où ils peuvent opérer une journée par mois, une journée. Un chirurgien orthopédique en Outaouais, là, travaille 12 journées par année en chirurgie. Ce n'est pas exactement servir le public à son meilleur, ça, M. le... M. le ministre.

J'ai compris dans votre exposé que vous êtes inquiets non seulement d'un peu ce que la FMEQ disait avant vous, là, qu'il pourrait y avoir un exode de certains... de certains étudiants qui décideraient automatiquement d'aller à l'extérieur du Québec, mais qu'on pourrait éloigner certains étudiants du reste du Canada qui, à travers le système CARMS ou un autre, là, pourraient être intéressés à venir prendre une position au Québec. Dans le fond, là, votre interprétation, c'est : si on met une obligation sur ces étudiants-là qui sont, j'utilise le mot en anglais, là, matchés par le système CARMS, bien, ils ne viendront juste plus, là.

M. Soufi (Ghassen) : Exactement. Parce que le système de jumelage pour l'entrée... l'entrée en résidence, c'est quelque chose de très complexe, c'est pancanadien. Les appliquants... Les finissants de leurs études en médecine peuvent choisir d'appliquer un peu partout, puis ensuite ils font leur liste des programmes qu'ils mettent en premier, en deuxième, en troisième, etc. Donc là, présentement, c'est... c'est ouvert, on peut appliquer partout, on peut matcher partout. Évidemment, les finissants québécois restent en très grande majorité au Québec. Puis il y a des personnes qui viennent parce qu'ils sont intéressés par la formation qu'on a à leur offrir ici, au Québec, ils sont intéressés à venir pratiquer ici, au Québec, à la fin de leur résidence. Donc là, si le projet de loi était adopté tel qu'il est écrit, si on est un étudiant de médecine à l'extérieur du Québec puis qu'on regarde ça, pourquoi est-ce qu'on viendrait, alors qu'il y a des... il y a des conditions qui y sont associées qui n'existent pas ailleurs? On a entendu Dr Oliva de la FMSQ plus tôt dire que ça n'existe nulle part qu'à Cuba, ce genre de mesures. Donc, pourquoi est-ce qu'on viendrait restreindre ainsi le... la liberté de mouvement de ces étudiants-là? On ne comprend pas.

M. Fortin :Pouvez-vous juste nous en dire un petit peu... Vous avez... Vous avez arrêté sur... ou vous avez fait un point sur les coûts de formation, là, sur les arguments qu'on... que le ministre... que la partie gouvernementale a évoqués publiquement, suite au dépôt du projet de loi, à savoir les coûts de formation sont énormes pour... les coûts payés par le gouvernement, disons, sont énormes. Mais là vous dites : Oui, mais la grosse, grosse, grosse partie de ça, c'est nos salaires, là, c'est les salaires des résidents, ça ne tient pas la route. Alors, c'est quoi... pour vous, c'est quoi, le coût de la formation d'un médecin pour l'État québécois?

M. Soufi (Ghassen) : ...qu'on en a fait état dans notre mémoire.

Une voix : ...

M. Soufi (Ghassen) : C'est ça, c'est à peu près de deux à trois fois moins, parce qu'en résidence... Moi, je suis dans ma cinquième année de résidence, j'ai reçu un salaire pendant les cinq années. Si on soustrait de ce calcul mon salaire au courant des cinq dernières années, ça fait un chiffre qui est à peu près de deux à trois fois moins élevé que ce qui est présenté... que ce qui a été présenté dans les sorties publiques durant l'automne, à peu près.

M. Fortin :Dernière chose de ma part, vous avez... vous avez dit quelque chose, que vous trouvez ça intéressant que le projet de loi soit déposé dans le contexte des négociations. Le ministre nous a toujours dit, là, qu'il ne fallait pas mêler les négociations à l'étude de nos projets de loi, mais est-ce que... est-ce que votre interprétation, c'est : le ministre veut utiliser le projet de loi puis... comme outil de négociation puis peut-être s'en servir, peut-être ne pas s'en servir après l'adoption?

M. Soufi (Ghassen) : Il est... Il est difficile de ne pas se poser la question par rapport à ça.

M. Fortin :Très bien.

La Présidente (Mme Poulet) : Oui, Mme la députée de La Pinière.

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Alors, merci à vous deux...

Mme Caron : ...pour la présentation, ce que j'entends de votre part, et corrigez-moi si je n'ai pas bien compris, ce que j'entends, c'est que, selon vous, les jeunes médecins, ceux qui sont aux études, qui sont en résidence, veulent que le système public fonctionne, veulent pratiquer au public. Et, par contre, une fois qu'ils sont prêts à avoir un poste, il n'y a pas toujours des postes qui sont disponibles ou alors il n'y a pas des plateaux de travail, donc, une salle d'opération ou autres qui sont disponibles... ou le personnel de soutien, je vais l'appeler comme ça, pour vous permettre d'exercer, de faire... de soigner plusieurs personnes. Les conditions ne sont pas réunies.

Donc, vous ne pouvez pas... Le médecin ne peut pas arriver une journée, puis dire : Bien, moi j'ai trois patients qui ont besoin d'une opération, je vais aller... je vais les opérer tous parce que ça prend de la disponibilité. Une salle d'opération, ça prend des infirmières, ça prend les gens même pour donner les rendez-vous, etc. Alors, vous... même si on aurait 1000, 2000, 3000, 4000, 5000 nouveaux médecins diplômés chaque année, s'ils n'ont pas les outils pour travailler, ils ont beau être dans le public, ils ne feront rien, ils vont se tourner les pouces un petit peu comme ce que je disais aux personnes précédentes. Et ce qui vous heurte dans ça, c'est qu'on cible uniquement les jeunes médecins, on leur dit : Oui, vous allez venir travailler dans le réseau. Même si vous n'avez pas les outils, vous allez venir travailler dans le réseau pendant cinq ans, puis, si vous ne le faites pas, bien, c'est 20 000 à 100  000 $ d'amende qu'on va... qu'on va vous imposer. Et si vous récidivez, bien, ça va être de 40 à 200 000 $. Et c'est là qui est l'os, je pense.

• (15 h 20) •

M. Soufi (Ghassen) : Et ce qui nous heurte également, c'est qu'il semble y avoir un décalage entre les besoins de la population puis l'offre de services qui est présente. Donc, si quelqu'un gradue, finit sa résidence, puis il est disposé à prodiguer des soins à la population québécoise dans une région particulière, puis qu'il y a ce besoin particulier dans la région, des fois, il y a toutes sortes de barrières administratives qui font en sorte qu'il y a des contraintes qui sont liées à l'obtention de ce poste-là spécifiquement ou le poste est lié à des restrictions de pratique quelconque qui font en sorte que, même si le besoin populationnel est là et même si le médecin qui vient graduer est là, il ne peut pas pratiquer dans ce poste-là, dans cette région-là. Puis toutes ces incongruités-là...

La Présidente (Mme Poulet) : ...poursuivre les discussions avec le député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. Merci, merci à vous deux. C'est très éclairant, votre position, elle est non équivoque. Dr Soufi, vous avez dit tout à l'heure, et je vous cite : «Personne ne commence 10 ans d'études en médecine, en se disant : J'ai hâte de pratiquer au privé.» Mais se peut-il qu'après 10 ans de pratique, des médecins se disent : J'en ai marre du public et je m'en vais au privé?

M. Soufi (Ghassen) : Si on se pose ces questions, c'est à savoir : Qu'est-ce qu'ils ont rencontré durant leurs années de formation au public, qu'ils ont vu comme étant difficile? Comment ça se fait que leurs séjours, leurs pratiques, que ce soit en résidence ou avant, durant leurs études prédoctorales en médecine, ont fait en sorte qu'ils ont trouvé ce milieu-là difficile, ou peut- être leurs intérêts, comme je viens de l'expliquer, ils n'y trouvaient pas un poste pour combler leurs intérêts et, donc, ils se sont tournés vers quelque chose d'autre.

M. Marissal : Ça existe, le scénario que j'ai pris, à l'inverse du vôtre, il existe?

M. Soufi (Ghassen) : Oui, tout à fait. 

M. Marissal : O.K. Donc, le problème, il est plus après 10 ans qu'avant 10 ans, là.

M. Soufi (Ghassen) : Oui.

M. Marissal : Bon, ce que je pense aussi. Me Savignac, je ne suis pas avocat, mais j'ai couvert assez de débats constitutionnels, j'ai développé des réflexes pavloviens. Quand j'entends des choses comme «mesures attentatoires aux droits fondamentaux», j'ai tendance à aller voir les chartes des droits et libertés puis chercher l'article que ça touche. Vous avez dit aussi : Il n'y a rien dans la législation d'aussi discriminatoire envers un groupe d'âge. Je ne vous demanderai pas de nous montrer ce que vous avez trouvé puisque vous n'avez rien trouvé. Mais puisqu'il s'agit, selon vous, de mesures attentatoires - vous êtes avocat, vous - c'est quoi, la suite?

M. Savignac Dufour (Patrice) : Bien, tu sais, on s'était dit : On ne donnera pas envie au premier ministre de brandir la clause dérogatoire dans les amendements. Mais, sérieusement, tu sais, on espère de ne pas être obligé de se rendre là, mais c'est clairement discriminatoire, les articles 5 et 6, il n'y a même pas de débat possible, là. Alors, s'il y a des avis juridiques du PG qui ont été donnés au ministère qui dit que ça, ce n'est pas discriminatoire, là, refaites vos devoirs, quelqu'un, là, c'est comme... c'est un cas patent, là. Et, à ma connaissance, on a fouillé, moi, ça fait 25 ans que je m'intéresse à la question des clauses orphelin dans d'autres vies, et il n'y a pas de précédent par l'Assemblée nationale là. Tu sais, il y a eu des ententes, le gouvernement, à titre d'employeur, ça c'est une chose. Mais, peut-être, les années 80, sur l'aide sociale, des clauses particulières pour les plus jeunes, peut-être, ce cas-là, mais ce serait une première, ce serait une... 

M. Savignac Dufour (Patrice) : ...c'est ta première, là.

M. Marissal : Qui ne serait pas sans suite? C'est à vous de répondre. Ce n'est pas à moi.

M. Soufi (Ghassen) : Je ne sais pas.

M. Marissal : Qu'est-ce que vos membres en disent?

M. Soufi (Ghassen) : Bien, nos membres, je pense qu'ils sont... ils se rangent derrière nous, dans le sens où, comme Patrice Savignac Dufour l'a dit tout à l'heure, on a...

La Présidente (Mme Poulet) : ...mais on va poursuivre la discussion avec le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Merci beaucoup à vous deux. Dr Soufi, j'ai bien hâte de vous accueillir aux Îles-de-la-Madeleine pour continuer votre résidence.

J'aimerais savoir, je vais vous demander un exercice de synthèse, c'est l'avant-dernière intervention, là, qu'est-ce qui vous irrite le plus ou vous choque le plus, là, avec l'ensemble du portrait que vous nous avez fait. Est-ce que ce sont les mesures que vous jugez discriminatoires, le fait de ne pas être consultés, le fait que vous accusiez le ministère d'avoir utilisé de fausses données, les sanctions qui vous semblent démesurées, le fait qu'on s'attaque à un faux problème avec des solutions bancales?

M. Soufi (Ghassen) : Je pense que ce qui est... ce qui est le plus... ce qui ressort le plus, c'est le fait que nous sommes tout à fait disposés à œuvrer pour trouver quels sont les réels problèmes qui font en sorte que notre système de santé public est en train de s'éroder graduellement. Puis on est tout à fait disposés à vouloir travailler puis à chercher des solutions pour revigorer le système de santé public parce qu'on veut y rester. Et je pense que ce qui nous... ce qui nous choque un peu le plus, c'est de... c'est de voir ce projet de loi apparaître comme... comme on l'a dit tout à l'heure, comme un OVNI, alors qu'on n'avait pas été consultés au préalable, alors qu'on avait toutes sortes d'idées à discuter puis à présenter. Je pense que c'est ça qui choque le plus.

M. Arseneau : Je vois que vous jugez aussi le projet de loi contre-productif. Parce que vous dites : Si on se sent captifs pendant cinq ans, le désir d'aller ailleurs puis... ou plutôt que d'améliorer le système de l'intérieur, c'est ce que j'interprète, là, va être beaucoup plus fort. Est-ce que c'est... c'est bien ce que vous craignez?

M. Soufi (Ghassen) : Exactement. C'est quoi, le message qu'on envoie, non seulement aux jeunes médecins qui rentrent en pratique mais également à l'ensemble du reste du réseau de la santé public? De dire que, bien, on va on... va contraindre ces jeunes médecins là à pratiquer comme une punition au réseau public? Alors que ça devrait être un objectif qu'on souhaite chérir et maintenir pour l'entièreté de sa carrière. C'est vers ça qu'on veut de diriger.

M. Arseneau : Est-ce que vous avez le sentiment un peu qu'on reporte le problème, si on retient captifs les jeunes médecins diplômés, qu'au bout de cinq ans ils vont partir en masse, beaucoup plus nombreux que ce qu'on voit aujourd'hui? C'est ce que vous dites?

M. Soufi (Ghassen) : ...est possible. On ne le sait. Ce qu'on sait, par ailleurs, c'est que pendant que ces mesures-là vont prendre effet, tout le reste va continuer, toutes les... tous les maux qu'on connaît déjà du réseau vont continuer. Puis cette mesure-là, ce projet de loi là ne vient pas régler ces maux.

M. Arseneau : Et puis, pour ce qui est de la résidence, étant donné que c'est un système pancanadien essentiellement, on n'aurait pas nécessairement de problèmes au Québec à avoir des résidents. C'est peut-être que... Vous semblez dire que les Québécois iraient ailleurs, mais il y a des gens d'ailleurs qui viendraient ici parce que le nombre de places est limité. Non? Ou, carrément, tous les médecins de tout le pays boycottaient la résidence ici au Québec?

M. Soufi (Ghassen) : Non. Personne ne boycotterait de venir faire sa résidence ici au Québec. Mais certains réfléchiraient, réfléchiraient à venir ici ou s'établir ailleurs, aller faire leur résidence ailleurs. Il y a tout plein de personnes, comme j'ai dit tout à l'heure, qui finissent leurs études en médecine puis qui veulent venir aux universités québécoises, parce qu'on a des expertises quelconques, on a un beau réseau de la santé public dans lequel ils veulent travailler, peut-être qu'ils veulent s'établir ici. Donc là, avec ce projet de loi, on vient leur donner un argument de plus pour se dire : Bien, peut-être pas, peut-être que je vais considérer mes options puis voir ailleurs.

La Présidente (Mme Poulet) : Parfait. Merci beaucoup. Alors, maintenant, je cède la parole au député de Saint-Jérôme.

M. Chassin :Merci, Mme la Présidente. Peut-être, avant de vous poser une question, je vais peut-être pouvoir répondre à une question. Mais donc, Me Savignac Dufour, vous posiez la question : Mais d'où ça sort? J'aurais tendance à dire il y a un excellent article dans Le Devoir qui va vous dire que ça sort d'une cabane à sucre à Sutton. Mais, ceci étant, c'est, dans le fond, toute une réflexion peut-être plus large que juste le serment de l'engagement. Parce qu'effectivement, si on s'engage à aller servir finalement cinq ans au public, bien, il y a aussi une question de dire «sous peine de», parce qu'il y a des pénalités, là, qui sont importantes. Et donc, c'est... c'est là que... Dans le fond, votre discours, c'est qu'on génère une perception, hein? En politique, on est quand même habitués, je pense, à l'idée de gérer des perceptions. Est-ce que... Est-ce que, selon vous... parce que, ce que je comprends, en fait, c'est que ça... comme c'est attentatoire, n'est-ce pas, fort probablement que le ministère a comme un avis juridique là-dessus ou une certaine étude des conséquences peut-être judiciaires à votre connaissance ou juste par logique.

M. Savignac Dufour (Patrice) : On espère qu'ils auront requéri des avis juridiques. Mais le premier ministre a été rapide à brandir la clause dérogatoire. Ça fait que je pense que ce n'est peut-être pas si clair que ça qu'ils ont eu des avis juridiques positifs, que c'est légal.

M. Chassin :Oui, c'est ça. Parce qu'il y a peut-être eu des avis juridiques pas nécessairement positifs, je ne sais pas s'ils sont... pour utiliser les mots en santé, très appréciés des avis publics et accessibles, mais sait-on jamais...

M. Chassin :...je ne sais pas si, en termes de classe de clauses orphelins, on compare un peu ça à ce qu'on a déjà vu dans le passé. C'est vrai qu'il y a une question finalement de... Est-ce qu'on se demande si on fait payer à une jeune génération les défauts du public? C'est un peu comme ça, vous le voyez?

M. Soufi (Ghassen) : C'est un peu l'impression qu'on a, parce que les... comment dire, la... l'érosion, la dégradation du système de santé publique ne s'effectue pas seulement à travers les médecins, et pas seulement à travers les jeunes médecins. C'est quelque chose qui incombe à l'entièreté, à l'entièreté du réseau. La pratique de la médecine, c'est un travail d'équipe.

M. Chassin :Oui, c'est ça.

M. Soufi (Ghassen) : C'est toutes sortes de personnes qui travaillent ensemble dans une clinique, dans un hôpital, dans une salle d'opération. Si on enlève une partie, le tout ne va pas marcher. Donc, c'est...

La Présidente (Mme Poulet) : Je vous remercie de votre participation à nos travaux. Alors je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux prochaines... aux prochains invités de prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 30)

(Reprise à 15 h 34)

La Présidente (Mme Poulet) : Alors, je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Coalition Solidarité Santé. Je vous rappelle...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

La Présidente (Mme Poulet) : ...je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Alors, je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé.

Mme Verdon (Sophie) : Bonjour. Sophie Verdon, je suis coordonnatrice de la Coalition Solidarité Santé. Je suis accompagnée de Hugo Vaillancourt, qui est président de la coalition, de Philippe Crevier, qui est membre du comité de coordination de la Coalition Solidarité Santé.

Donc, on n'a pas fait de mémoire, comme le délai était très court pour présenter aujourd'hui. La Coalition Solidarité Santé, on existe depuis maintenant 34 ans, on a 42 membres, on représente des centaines de milliers de personnes du réseau de la santé et services sociaux. On revendique les valeurs qui représentent les pierres angulaires de notre réseau public, soit un système accessible, universel et gratuit. Pour nous, la privatisation, c'est vraiment un gros problème, actuellement, dans le réseau de la santé et services sociaux, ça crée beaucoup d'inégalités, des injustices. Il y a des risques concernant la qualité des soins, ça a été documenté, récemment, par la journaliste Marie-Claude Malboeuf, à La Presse. Puis il y a des coûts à cette privatisation-là, accrus à notre système public.

Il n'existe pas, aussi, d'étude concluante qui prouve que le privé, c'est une bonne chose pour notre système de santé, et il existe des études, comme l'étude du... qui prouvent que le privé cause des problèmes au niveau des coûts globaux, de la qualité des soins, des risques et même, mais surtout, au niveau du taux de mortalité des patients, ce qui est quand même très grave. Le taux de mortalité est plus élevé dans un contexte de privatisation. Donc, nous, on se demande pourquoi continuer dans la privatisation.

Sur le terrain, on est chaque jour témoin des immenses difficultés d'accès à la première ligne médicale, des personnes en attente de spécialistes, de chirurgies. Il y a une crise, puis ça prend un remède qui agit rapidement et surtout définitivement pour ramener le caractère public de notre système de santé. Selon nous, le problème, c'est le privé. La solution, c'est vraiment de s'en débarrasser. Il n'y a pas de place pour le privé dans notre réseau public. On va aller plus loin que de proposer un cadre pour contrôler le privé, on propose carrément de s'en affranchir. Le privé draine les ressources du public, ça le rend attrayant, inefficace et vétuste. Il y a beaucoup de preuves qui sont disponibles, qui remettent en question toutes les justifications de la privatisation des services de la santé. Cette approche-là, ça n'améliore pas nécessairement la qualité des soins puis ça peut même l'aggraver, comme je l'ai nommé précédemment. Nous, ce qu'on propose, c'est vraiment de freiner la privatisation du réseau de la santé de manière globale, et non pas à l'aide de demi-mesures comme celle qui est proposée par le projet de loi no 83. Le réseau de la santé doit vraiment être valorisé et planifié, puis les valeurs communes d'universalité, de gratuité doivent être remises au cœur de la mission du réseau de la santé et services sociaux. Plus le secteur privé à but lucratif se développe, plus il va attirer les médecins ainsi que plusieurs travailleuses et travailleurs du réseau de la santé et services sociaux.

Nous, on considère, à la Coalition Solidarité Santé, que c'est urgent que le gouvernement dépose un plan de déprivatisation, et pas juste des projets de loi comme le projet de loi no 83, qu'on considère comme une mesure cosmétique qui ne s'attaque pas réellement au cœur du problème. On croit que vous devez démontrer votre volonté réelle de renforcer le réseau public, de le valoriser pour garantir une offre réellement publique, universelle, accessible et gratuite. C'est l'angle de vue qu'on va aborder aujourd'hui. Je vais laisser Hugo Vaillancourt compléter concernant le projet de loi no 83.

M. Vaillancourt (Hugo) : Oui, nous, la question des médecins non participants, les médecins qui choisissent de pratiquer en dehors du régime public, on trouve que c'est une question qui est impossible à régler tant que le gouvernement ne fera pas preuve d'une volonté politique claire d'enrayer la privatisation en santé puis de réaffirmer l'importance d'un réseau public universel et gratuit. Selon nous, le gouvernement actuel a normalisé la présence du privé dans le réseau de la santé au-delà des brèches qui existaient déjà avant son arrivée au pouvoir, ce n'est pas un phénomène qui est nouveau au Québec.

Pour nous, le projet de loi no 83 est insuffisant, il risque d'être inefficace, puis, en fait, même d'avoir des effets pervers inattendus. Pour nous, ce n'est pas un... nous, le projet, ce n'est pas un substitut à faire de la pratique au Québec, au régime public, la pratique la plus attrayante au pays, et on croit aussi qu'il y a un manque historique et actuel sur la planification du développement du bassin de médecins au Québec et qu'on doit envisager ça à l'avenir. Il y a plus de 800 médecins qui sont non participants, au Québec, comparé à 14 au Canada, et cet état de... et la situation ailleurs au Canada...

M. Vaillancourt (Hugo) : ...pas parce qu'ils ont choisi de contraindre les gradués en médecine à pratiquer... à pratiquer d'une manière différente que les autres médecins du régime public ni à pratiquer dans leur province. Nous, l'Ontario a carrément interdit la pratique de la médecine en dehors du régime de couverture d'assurance publique. On croit qu'on devrait s'inspirer de cet exemple-là. Et on croit que c'est contre l'intérêt du public de permettre aux médecins de devenir non participants au Québec.

• (15 h 40) •

Le projet de loi n° 83 ne cible aucunement les médecins non participants actuels, seulement les cohortes à venir de nouveaux médecins. Et on ne comprend pas pourquoi on ne contraindrait pas les... pourquoi on contraindrait les médecins moins expérimentés et qui sont au début de la carrière à pratiquer au public, et pourquoi on ne ciblerait pas, un, les médecins plus expérimentés, dont le réseau au besoin, et en particulier les médecins qui posent problème actuellement dans cette situation-là. Il faut se demander aussi c'est quoi les impacts inattendus et les incitatifs pervers que l'obligation qui est envisagée de pratiquer au Québec et de pratiquer sous le régime public pendant cinq ans pourrait causer. Notamment, il y a un risque qu'on normalise le fait de devenir un médecin non pratiquant après cinq ans, qu'il se développe une perception que, bien, le cinq ans, c'est le temps qu'on fait dans le réseau public, puis ensuite c'est normal de passer à autre chose.

On se pose la question aussi, si ça pourrait dissuader des personnes d'entamer des études en médecine au Québec. On n'a pas de boule de cristal, on ne sait pas ce qui va arriver, mais on croit qu'il y a réellement des risques d'effets inattendus, d'incitatifs pervers, alors que la solution nous apparaît évidente au problème, c'est tout simplement d'interdire... d'interdire la pratique d'être un médecin non participant.

La meilleure manière de faire cette transition-là, je crois que ça appartient... Je crois que ça appartient aux déciseurs... aux décideurs de faire un plan de match là-dessus. Là, en ce moment, il existe des outils sous la Loi de la santé et des services sociaux, notamment l'article 30 qui permet, quand la situation dans le réseau public l'exige, de ramener les médecins non participants au bercail et de les obliger à pratiquer sous le régime d'assurance publique. Alors, je ne sais pas, il nous reste quelques minutes, je ne sais pas...

Mme Verdon (Sophie) : Philippe, il reste deux minutes, si tu veux compléter.

M. Crevier (Philippe) : Bien, écoutez. Nous, notre message, c'est qu'il y a une crise actuellement, là, d'accès à la première ligne. On la voit, nous, à travers les organisations membres de la coalition à chaque jour sur le terrain. Il y a déjà beaucoup de privé au Québec. C'est l'exception canadienne, là. On le voit avec le nombre de médecins non participants. Et ce qu'on aimerait, c'est que les décisions, les orientations politiques soient basées sur la reconnaissance que la recherche nous enseigne que les systèmes de santé qui font beaucoup de place au privé ne sont pas efficaces. Donc, on s'attend, là, en toute logique, là, face à cette crise-là puis face à cette... à ce que la recherche nous enseigne que... qu'on cherche un moyen d'agir rapidement en rapatriant les médecins non participants dont on a besoin, ici, maintenant, dans le réseau et en empêchant, là, définitivement leur pratique de se développer dans le privé. On trouve quand même inconcevable que quelques médecins, pour des considérations individuelles, en arrivent à remettre en question ce qui est un acquis de société, le fondement de notre cohésion sociale. Et on aimerait que le gouvernement soit affirmatif et cohérent avec ce que nous enseigne la recherche. Il y a des moyens qui ont été pris dans les autres provinces, et ça fonctionne de toute évidence. Alors, qu'est-ce qui nous empêche de faire la même chose au Québec? C'est une question qu'on se pose. Et sinon, bien, comme, je pense, l'ont dit d'autres intervenants avant nous, c'est sûr que le secteur public qui est en difficulté actuellement mériterait de faire l'objet d'un renforcement important. Ça le rendrait plus attrayant pour tout le monde et c'est peut-être, là, une des bonnes garanties qu'on puisse se donner, que les gens n'auront pas le goût de le quitter puis d'aller pratiquer dans le privé. Donc il y a une série de mesures que le gouvernement pourrait faire pour empêcher, là, agir sur la problématique de la privatisation du réseau de la santé et des services sociaux globalement. Et puis c'est la discussion qu'on est venus avoir avec vous aujourd'hui.

La Présidente (Mme Poulet) : Alors, merci beaucoup. Nous allons procéder à la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Dubé : Très bien. Alors, premièrement, merci beaucoup pour votre présentation. Je l'apprécie beaucoup. Je ne veux pas trop me prononcer, mais il y a beaucoup de choses avec lesquelles vous avez mentionné aujourd'hui, où je suis pleinement d'accord...

M. Dubé : ...alors, mais je vais poser des questions peut-être un petit peu sur votre coalition. Vous dites que vous avez 42 membres. Donnez-moi quelques exemples, parce que je pense que ça m'aiderait à comprendre. Par exemple, est-ce qu'il y a des médecins spécialistes ou omnis qui sont membres chez vous? Est-ce... J'essaie juste de voir un peu parce que malheureusement, puis je sais que vous dites que vous n'avez pas eu le temps de préparer un mémoire ou en tout cas de le déposer, mais j'aimerais en savoir un petit peu plus à savoir à qui je parle pour être certain que je peux vous poser le reste des questions.

Mme Verdon (Sophie) : Oui, absolument. Donc, nous, on est une coalition d'organisations syndicales et communautaires en santé et services sociaux, donc toutes les centrales syndicales puis beaucoup de... des tables de concertation, des groupes de défense des droits des personnes handicapées, par exemple.

M. Dubé : ...pourriez m'envoyer peut-être la liste de votre membership? Parce que ça, je pense que ça m'aiderait si on continue les discussions avec vous. Puis je le fais de façon très ouverte, là, parce que je pense qu'on a beaucoup de bonnes discussions avec plusieurs de vos membres en ce moment sur d'autres dossiers, donc.

Et ce qui m'amène peut-être à quelques questions avec... Parce que, comme je vous dis, je n'ai pas eu l'avantage d'avoir votre mémoire avant, mais je pense que... Moi, je souscris, j'ai toujours dit que le privé, surtout dans une... dans une situation que l'on vit depuis la pandémie, s'est avéré assez complémentaire au public, mais que le public, c'est ce qu'on doit renforcer. Je l'ai dit souvent, je n'ai pas changé d'idée là-dessus et j'ai même démontré au cours des dernières années que, quand je suis capable de... disons, de... puis j'ai utilisé un mot très intéressant que mes collègues d'en face ont repris souvent, le «sevrage» du privé, hein? Alors donc, j'ai démontré clairement que, quand on est capable de le faire, puis qu'il y a une volonté de faire, on est allé jusqu'à des projets de loi, puis d'ailleurs, mes collègues, ici, dans cette commission-là, nous ont aidés à le faire par rapport aux agences privées. Donc, je veux juste dire qu'on s'entend sur le principe, on veut renforcer le système public, mais il faut le faire d'une certaine façon.

Et ce que je trouve intéressant, puis là je ne suis pas capable de voir les noms, alors je m'en excuse, mais l'intervenant... j'allais dire : Celui qui a un casque d'écoute, non, vous en avez deux, alors c'est celui que je vois à ma gauche...

Des voix : ...

M. Dubé : Pardon? M. Vaillancourt. Bien, il y a des gens qui ont... J'aimerais ça vous entendre sur l'échéancier que vous pensez qui pourrait être raisonnable. Parce que vous me dites : C'est aux décideurs à voir l'échéancier qu'on pourrait faire pour aller exactement vers ça. Puis là on... prenons des mesures comme d'interdire, par exemple, les non-participants, vous me parlez de l'article 30, Dr Bergeron est tout familier avec ça. Mais dites-moi un échéancier que vous trouveriez raisonnable, parce que, vous savez, quand on veut faire des changements majeurs comme ça, puis je donne l'exemple des agences privées, on s'est donné trois ans pour le faire. Parce qu'on s'est dit : Si on essaie de faire ça du jour au lendemain... puis même on est obligés d'ajuster un peu l'agenda, il faut... il faut avoir... C'est quoi, votre échéancier que vous pensez qui serait raisonnable dans les circonstances?

M. Vaillancourt (Hugo) : En ce moment, sur le plan législatif, la Loi sur la santé et les services sociaux prévoit un outil pour quand il y a des situations de pression particulière sur le réseau, le ministre peut décréter que les médecins non participants reviennent participer sur le réseau.

M. Dubé : Je m'excuse, je vous coupe, je m'excuse, j'ai peut-être mal posé ma question. Moi, je n'en suis pas sur le droit qu'on a, je n'en suis pas là, ou sur la... c'est sur l'échéancier qu'on pourrait se donner pour ne pas... pour ne pas mettre plus à mal le système qu'on a déjà.

M. Vaillancourt (Hugo) : Écoutez, en ce moment, il y a un problème qui a été soulevé, les allers-retours que des médecins font entre être non participant et être participant.

M. Dubé : ...le va-et-vient.

M. Vaillancourt (Hugo) : ...oui, le va-et-vient, des gens qui ont appelé ça l'autoréférencement. C'est sur des délais assez courts, ça fait que ça ne doit pas être si long que ça dire aux médecins non participants de revenir pratiquer sur le réseau public, là. Je crois que, si vous leur donnez 30 jours... ils n'auront pas vraiment le choix, et vous allez avoir des médecins que, s'ils veulent continuer à être payés pour les gestes médicaux qu'ils posent, bien, ils vont accueillir des gens, ils vont accepter la couverture de... Ils ne seront peut-être pas contents de le faire, mais ils ont leur clinique, ils ont leur infrastructure, ils ont leur équipement et ils ont leur personnel. Moi, je ne vois pas pourquoi...

M. Dubé : Mais je vous dis je suis... on est quand même conscient, là, puis j'apprécie... J'espère que l'échange... les gens peuvent prendre des notes parce que, des fois... vous me direz, si ça va à votre goût, Mme la Présidente, mais pourquoi ça me... ça m'intéresse de... Puis là je prends cet exemple-là, par exemple, d'enlever les non-participants...

M. Dubé : ...ou le deuxième exemple du va-et-vient, puis je pourrais penser aux tarifs similaires entre le privé puis le public, tout ça. La raison pour laquelle je vous demande ça, c'est qu'on a souvent demandé aux gens qui sont venus avant vous qu'est-ce qu'ils pensaient des mesures qui sont mises de l'avant. Puis là je ne parle pas juste du Collège des médecins, là, je n'ai pas vu de mémoire, mais c'est ce que vous dites aujourd'hui, on devrait regarder d'autres mesures. Le projet de loi, selon vous, est trop spécifique puis il devrait aller plus large. Vous pensez quoi de ce qu'on voit, par exemple, sur la tarification qu'on appelle différentielle entre le privé et le public qui, dans certaines provinces, on dit : Bien, si vous êtes au privé, vous avez le droit d'être au privé, mais ça doit être la même tarification qu'au public? Est-ce que c'est une mesure aussi qui devrait être considérée, selon vous?

• (15 h 50) •

Mme Verdon (Sophie) : Bien nous, en fait, si je peux me permettre de répondre, là, on est contre toute forme de tarification, premièrement, puis le fait qu'il y ait du privé aussi...

M. Dubé : On regarde ce qui s'est passé au sud des États-Unis, là, récemment, mais ce n'est pas de ça que je parle, je ne parle pas des tarifs, là, je parle... vous me dites...

Mme Verdon (Sophie) : Non non, c'est ça.

M. Dubé : Je voulais faire une blague, j'ai manqué mon coup.

Des voix : ...

Mme Verdon (Sophie) : Bon, bien, vous la trouvez drôle.

Des voix : ...

M. Dubé : Merci, André. Excusez-moi, c'est bon de rire un peu de temps en temps, hein? Mais non, je reviens, là, je veux juste être clair. Il y a certaines provinces qui, techniquement, permettent le privé à la médecine, mais disent : Si vous êtes au privé, vous ne pouvez pas charger plus cher qu'au public. Alors, moi je veux juste dire...

Mme Verdon (Sophie) : Bien, pour nous, comme on l'a bien énoncé, on est contre la privatisation. Ça fait que, quand même que c'est le même tarif au privé, ça ne sera pas les mêmes conditions. Ça fait que je ne sais pas si ça répond à votre question, là.

M. Dubé : O.K. Donc, si vous aviez... puis je vous le demande parce que je trouve ça intéressant d'avoir... vous l'avez bien dit, puis nous, on les connaît, ces statistiques-là. On regarde en ce moment des gens qui sont... qui pratiquent au privé dans la terminologie de participants versus non-participants, il y en a 14 dans le reste du Canada puis il y en a 800 au Québec. Donc, l'enjeu, il est là. Alors, si je vous demandais dans quel ordre des autres mesures, à part celle qui est sur la table avec le projet de loi aujourd'hui, dans quel ordre vous les mettriez?

M. Crevier (Philippe) : Mais si je peux me permettre, est-ce que nous, on peut vous demander pourquoi on n'appliquerait pas la mesure la plus efficace qui est l'interdiction de la non-participation, dans le fond, comme c'est fait en Ontario? Qu'est-ce qu'on cherche à accomplir en mettant en place une demi-mesure quand on a à notre disposition cette mesure-là? C'est la question qu'on doit se poser. Puis...

M. Dubé : Ça, c'est... Écoutez, ça, c'est la bonne réponse quand vous ne voulez pas donner la réponse. Je vous dis, moi, nous, on s'est fait une tête, mais on est ici pour vous écouter. Alors, je repose ma question. Vous, avec la recommandation que vous nous faites, je vous dis : Il y a plusieurs façons d'arriver au bon endroit. On a besoin d'une transition. On a en ce moment un réseau qui a été mis à mal. On est capable de faire cet effort-là, on l'a prouvé dans d'autres secteurs du privé. Moi, ce que je vous demande: Pour être capable de faire une transition ordonnée de façon à renforcer le système public, dans quel ordre, selon vous, on devrait travailler? Moi, je suis ici pour écouter, là.

M. Crevier (Philippe) : Bien, mes collègues répondront s'ils le veulent, mais, pour moi, c'est un faux choix. On a à notre disposition une mécanique pour régler la problématique. Alors, pourquoi on considérerait d'autres options? Après, est-ce que ça prend un plan de transition, un plan de rapatriement dans le public des médecins qui pratiquent dans le privé? Sans doute. Alors, demain matin, si vous utilisez ce moyen-là aujourd'hui, on ne va pas fermer toutes les cliniques privées en 24 heures...

M. Dubé : Et un plan de transition qui s'échelonnerait sur un échéancier de combien de temps?

M. Crevier (Philippe) : On n'a pas de base pour répondre à cette question-là. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il y a une crise actuellement, il y a 800 médecins dont on a besoin de toute urgence dans le réseau pour réduire les listes d'attente qui sont sur votre tableau de bord qu'on surveille à chaque jour. On en a besoin maintenant. Puis ensuite, on a besoin d'empêcher des nouveaux médecins de s'en aller travailler dans le privé. L'enjeu fondamental, là, c'est que si on laisse s'accroître le bassin de médecins qui travaillent dans le privé puis qui facturent hors RAMQ, il va se développer un marché de l'assurance pour ça, comme ce qu'on voit aux États-Unis. Et on va se retrouver avec un système qui s'est américanisé, puis c'est la dernière chose dont les Québécois ont besoin, surtout dans un contexte d'incertitude comme on vit. Donc, nous, on se dit, on a des études qui démontrent qu'un réseau public...

M. Crevier (Philippe) : ...c'est un réseau qui est en meilleur contrôle de ses coûts, alors on se dit : Pourquoi les décisions du gouvernement ne seraient pas à l'effet de prendre la meilleure disposition possible pour empêcher cette privatisation-là? C'est ce qui va nous permettre une meilleure maîtrise des coûts de la santé puis de l'efficacité du réseau tout entier.

M. Dubé : Et quand même... Puis j'apprécie, là, parce que je pense que c'est... votre réponse, je la comprends. Mais je vais juste le dire dans mes mots pour être sûr que... Vous dites : Il faut agir puis il faut agir plus large parce que vous dites : On a, en plus, les moyens. Mais vous êtes quand même d'accord avec moi que ça prend une certaine transition. Parce qu'on ne peut pas faire ça demain matin, là, c'est... Il y a... Il y a... Il faut protéger l'intérêt du public, qui, en ce moment, n'est pas capable d'aller au public parce qu'il nous manque, peu importe, le professionnel ou qu'on n'a pas les bonnes salles d'opération, parce que les bénéfices de tous les actes qu'on a posés, les gestes qu'on a posés depuis plusieurs années, vont finir par payer, mais, en ce moment, on ne les a pas, on n'en a pas eu tous les bénéfices. Vous êtes d'accord qu'il y a une période de transition?

Mme Verdon (Sophie) : ...qui sont privés présentement.

M. Dubé : Pardon?

Mme Verdon (Sophie) : Parce qu'il y en a beaucoup qui sont privés présentement. Vous dites : On ne les a pas. Bien, si on les rapatrie, on va les avoir. Tu sais, c'est ça, le... un petit peu qu'est-ce qu'on dit, là.

M. Dubé : Mais, c'est ça, exactement. Moi... Mais je... Si vous ne voulez pas vous engager sur un échéancier, mais je voulais au moins vous entendre. Puis je comprends très bien votre réponse, là, parce que je veux que ce soit ça que les Québécois entendent. C'est que nous, ce qu'on a mis sur la table, on a mis le principe qu'il faut s'assurer qu'on va arrêter l'exode, l'exode vers le privé. C'est ça qu'on veut arrêter. C'est la première chose. Puis, deuxièmement, quel genre de mesures qu'on peut faire, complémentaires. Je l'ai dit en entrée de jeu ce matin, là, pour ceux qui ne m'ont pas entendu, là, j'ai dit : On a fait des gestes, il nous en reste à faire, mais celui-là, on est très ouverts à écouter les gens qui viennent nous dire comment on peut, soit par ce projet de loi ou d'autres mesures.

Puis je donne un exemple pour que les Québécois comprennent. Quand vous m'avez dit tout à l'heure, puis vous avez raison, il y a des gestes qu'on peut poser, qu'on n'a pas besoin du projet de loi, qui sont déjà prévus, par exemple dans la Loi de l'assurance maladie. Alors, c'est ça que je veux que les gens comprennent. C'est qu'on peut, s'il y a une attente de la part de la population qu'on doit aller plus loin... c'est un peu ce que le collège des médecins a dit, c'est ce que... c'est ce que j'entends de votre part. Puis on n'a pas nécessairement besoin du projet de loi. Dans le cas des nouveaux facturants, dans la loi actuelle, on doit passer par un projet de loi. On est obligés de le faire. Mais, si on va vers d'autres mécanismes qui viendraient renforcer le système public ou forcer le rapatriement de certains actes au privé, à ce moment-là, on peut utiliser d'autres mécanismes. C'est ça que je voulais discuter avec vous. Je suis quand même très ouvert à vos... à vos commentaires. Mais je voulais juste qu'on précise ça, que, moi, ce qui me préoccupe en ce moment, c'est la période de transition pour être capables, comme on l'a vu, puis je reviens avec les agences privées, de faire cette transition-là correctement pour que ce ne soient pas les patients qui en paient le prix.

Voilà. Avez-vous d'autres commentaires?

Mme Verdon (Sophie) : Bien, présentement, justement, bien, les agences privées, est-ce que vous trouvez que la transition s'est bien déroulée présentement? Parce que, oui, il y a eu la volonté puis la loi, mais le plan de transition, je ne sais pas à quel point c'était adapté, étant donné que le réseau était rendu tellement dépendant des agences privées. Ça fait que, tu sais, on ne veut pas se ramasser non plus avec ça ailleurs, là.

M. Dubé : Mais, voyez-vous... Bien, je vais répondre... Mais je vais répondre clairement à votre question. Est-ce que ça s'est fait sans heurts, la réponse, c'est non. Mais depuis qu'on a eu ce message-là très clair, il y avait deux gestes : il y avait les tarifs maximums et il y avait la période d'arrêt, hein? On avait dit... de trois ans. La minute qu'on a mis les tarifs maximums, il y a eu presque 50 % de nos objectifs qui ont été rencontrés. Tout le monde est au courant de ça. Vous le dites, là, vous regardez les systèmes d'information, les statistiques, elles sont publiques, c'est un grand succès du côté des taux. Est-ce qu'on a dû s'ajuster dans certaines régions parce que c'était plus difficile? La réponse, c'est oui. Mais le projet de loi le permettait aussi d'être capables de s'ajuster aux besoins, de dire, dans une région ou une autre, on va s'ajuster parce que ce n'est pas pareil partout. Alors, c'est pour ça que j'insiste aujourd'hui sur l'aspect transitionnel, s'il y avait d'autres éléments. Mais c'est pour ça que la comparaison, je pense, peut être faite.

Mme Verdon (Sophie) : ...d'autres intervenants qui vont pouvoir vous répondre peut-être un petit peu plus précisément sur les délais, et compagnie, là. Mais je voudrais revenir vous parler que le privé vient complémenter le public. Mais nous, on trouve que c'est faux, cette affirmation...

Mme Verdon (Sophie) : ...on l'a parce que chaque fois qu'on utilise le privé, ce n'est pas deux choses séparées, ça va ensemble. Chaque fois qu'on donne de l'argent public au privé, ce qui arrive souvent, ces temps-ci, dans plusieurs domaines de la santé et services sociaux, mais c'est de l'argent qui ne va pas au public. Donc, ça enlève au public pour aller au privé.

M. Dubé : C'est de mettre le moment où on inverse la tendance, mais on pourra...

Mme Verdon (Sophie) : Non, on l'attend, on l'attend.

M. Dubé : Je vais laisser les autres, parce que, je pense, j'ai dépassé mon temps, là, mais...

La Présidente (Mme Poulet) : Il reste 50 secondes.

• (16 heures) •

M. Dubé : Mais, écoutez, on est... on est d'accord, on est d'accord. Ça fait qu'à un moment donné j'ai dit : Je pense qu'on était très content pendant qu'on était en pandémie, là, puis je reviens en 2020, 2021, 2022, on était qu'il y ait des cliniques privées qui pouvaient faire des chirurgies quand on n'avait plus personne qui pouvait le faire. Je pense que c'est dans ce sens-là.

Aujourd'hui, quelle est la vision qu'on peut avoir? Comment on peut maintenant retourner puis de dire : Comment on renforce le système public? Moi, je pense qu'il y en a beaucoup sur la transition, mais... Mme la Présidente, j'apprécie beaucoup les commentaires... par le groupe. Puis n'oubliez pas de m'envoyer votre membership, là, je serais intéressé à continuer des discussions avec vous. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci. Alors, on va poursuivre les discussions avec le député de Pontiac.

M. Fortin :Merci, Mme la Présidente. Merci à vous trois d'être avec nous aujourd'hui, c'est très apprécié d'entendre votre perspective. J'ai un petit peu de misère à suivre l'argument, l'argumentaire de M. le ministre, là, qui nous dit, et je vous cite : Moi, je veux l'exode du privé... qui dépose un projet de loi pour favoriser, je lis juste le titre, là, favoriser l'exercice de la médecine au sein du réseau public, puis qui, le lendemain, dépose un appel de projets pour des cliniques médicales spécialisées privées. J'ai pas mal de difficultés à vous suivre puis je ne suis pas convaincu que... M. le ministre, quand vous dites que vous êtes d'accord avec le groupe, je ne suis pas sûr que vous avez la même vision que les gens qu'on écoute en ce moment. Enfin.

Moi, je veux juste... J'aimerais ça... M. Vaillancourt, vous avez parlé des du ressac possible sur... à propos du projet de loi. J'aimerais ça savoir ce qui vous inquiète. Qu'est-ce qui... qu'est-ce que vous pensez qui va arriver suite à l'adoption d'un projet de loi comme celui-là?

M. Vaillancourt (Hugo) : Tout d'abord, pour revenir sur un élément qui a été amené par le ministre, moi, je crois que la vraie question sur l'échéance, c'est combien de temps est-ce qu'il est prêt à dire à la population du Québec qui doivent attendre avant que ce médecin non participant là puisse devenir un médecin de famille ou puisse devenir un médecin spécialiste qui va les traiter?

Par rapport du ressac, on s'entend que la mesure qui est proposée, ce n'est pas une mesure qui se fait ailleurs dans les provinces canadiennes, là, de contraindre les gradués en médecine de pratiquer au Québec et de pratiquer sous le régime public sous des conditions qui ne s'appliquent pas aux médecins. Et le reste du Canada est parvenu à ce qu'il y ait seulement 14 médecins non participants sans avoir recours à cette mesure-là. Je crois qu'il y a beaucoup de gens, avant d'aller en médecine au Québec, devant ces conditions-là, avant d'aller étudier en médecine au Québec, vont se poser la question de : Est-ce que je suis prêt à m'embarquer là-dedans? Est-ce que je suis prêt à me faire réclamer les frais de mes études si, supposons que ma mère, elle reste à Terre-Neuve-et-Labrador, qu'elle tombe malade dans ma deuxième année de pratique, que je dois changer de province pour m'occuper d'elle et commencer à travailler dans une autre province, tu sais, ça peut entraîner des situations humaines, là. Il y a des gens qui vont y penser à deux fois, là, avant de dire : Aïe, je vais aller étudier au Québec en médecine. Peut-être qu'ils vont aller étudier au Québec... la médecine dans une autre province. Puis peut-être qu'après avoir fait leur province ailleurs ils vont décider de s'établir dans cette province-là, en fin de compte, parce qu'ils ont rencontré quelqu'un pendant leurs études. Tu sais, moi, je crois qu'on a tout intérêt à plutôt vouloir attirer les gens qui veulent venir étudier en médecine au Québec, tant ici et d'ailleurs, puis de vraiment investir dans notre système de public... dans notre système public de santé universelle, gratuit et accessible, pour que ces gens-là choisissent d'y pratiquer, parce qu'ils vont avoir l'opportunité de pratiquer dans un des meilleurs systèmes de santé au monde. Puis moi, je crois qu'au Québec c'est l'objectif qu'on doit avoir : avoir le meilleur système de santé public universel et gratuit au monde.

M. Fortin :J'apprécie votre réponse, M. Vaillancourt, parce qu'elle est basée dans le vécu des êtres humains, là. Ici, on fait des politiques publiques pour essayer de peut-être diriger certains comportements, mais il faut que ce soit ancré dans la réalité des gens, des Québécois. Et effectivement, là, il y a des gens qui peuvent se retrouver avec des situations comme ce que vous décrivez. Il y a des milliers de Québécois qui déménagent d'une province à l'autre à chaque année et leur famille qui peut déménager d'une province à l'autre. Alors, je comprends tout à fait ce que vous voulez dire. Dans votre réponse, vous avez dit : Moi, je pense, ou nous, on pense qu'il faut attirer des étudiants vers le Québec...


 
 

16 h (version non révisée)

M. Fortin :...on a entendu certains groupes, cet après-midi, qui nous ont dit qu'il y aurait des étudiants qui auraient peut-être une appréhension de venir étudier au Québec si, justement, ils sont empêchés de retourner chez eux par la suite, là, pour peut-être s'occuper d'un parent ou peu importe. Qu'un étudiant, par exemple, de l'Alberta qui considérait venir faire sa résidence au Québec, bien, y penserait peut -être à deux fois avant de le faire. Est-ce que ça fait partie du ressac ou des effets pervers que vous envisagez, ça?

M. Vaillancourt (Hugo) : Ça pourrait faire partie du ressac et des effets pervers, mais ça pourrait aussi s'appliquer à quelqu'un qui a grandi au Québec et qui veut aller faire sa mission au Québec, mais qui a de la famille à l'extérieur de la province. Tu sais, le Canada, il y a des familles qui existent qui ont des parents, des oncles, des tantes qui restent à d'autres endroits, puis ça peut tout à fait s'appliquer, pas juste aux gens qui viendraient étudier d'ailleurs, mais aux gens qui ont grandi ici, qui veulent rester ici pour faire leur médecine, mais qui ont de la parenté, des proches ailleurs... des situations humaines de même pourraient se présenter.

Aussi, d'autres craintes qu'on a nommées, un, c'est que ça normalise le fait de devenir médecin non participant après cinq ans, tu sais, que ça devienne un peu une impression que ton cinq ans, là, si tu fais ton temps dans le système public, surtout si on ne travaille pas à le revitaliser, là, puis à vraiment le remettre... en faire vraiment comme un exemple à l'échelle mondiale d'un système public universel, puis qu'une fois que les gens ont fait leur temps, bien, ils décident d'aller à la pratique privée ou de devenir médecin non participant... et qu'on perde ces gens-là parce que... tu sais, c'est possible. Ça fait qu'on craint de créer du ressentiment aussi.

M. Fortin :L'effet de la boîte de pénalité, là. Un joueur de hockey qui se retrouve dans une boîte de pénalité, il a juste hâte d'en sortir puis de retourner sur la glace, là, c'est un peu ça que vous nous dites, là. Le système public, dans ce contexte-là, pourrait s'apparenter à être une espèce de... pourrait être perçu comme une pénalité, là, par certains médecins qui auraient juste hâte de le quitter après cinq ans?

M. Vaillancourt (Hugo) : Oui, puis ça envoie le message que le réseau public, c'est quelque chose qu'il faut se forcer à aller dedans, tu sais. Ce n'est pas ça, le message qu'on veut envoyer, là, c'est un projet de société, le réseau public, le réseau universel. C'est quelque chose qu'on a construit pendant la Révolution tranquille, c'est quelque chose qu'on a entretenu, puis c'est quelque chose que la coalition défend depuis presque maintenant 35 ans, et qu'on est en train de perdre. Puis il faut le ramener, ça, puis ce qu'il faut, c'est de la volonté politique puis un engagement clair envers un système de santé publique universel, gratuit, inccessible... et «accessible», pas inaccessible, la langue m'a fourché.

M. Fortin :Très bien. Je vous remercie. Ça va pour moi. Je pense que ma collègue a quelques questions pour vous, également.

La Présidente (Mme Poulet) : Merci beaucoup. Alors, Mme la députée de La Pinière.

Mme Caron : Merci, Mme la Présidente. Alors, merci à vous trois pour votre présentation. Je pense que c'est... Vous l'avez dit très clairement, vous voulez enrayer la privatisation, vous souhaitez mettre fin complètement au secteur privé en santé, vous avez dit qu'il y a des recherches qui montrent qu'une plus grande place au privé rend un système public non efficient.

Alors, le ministre a parlé d'échéancier, mais moi, je vais plutôt vous demander si vous avez une feuille de route pour faire ça. Parce que, si on... du jour au lendemain, on dit, tous azimuts, on enraye le privé pour ramener tous ces médecins dans le réseau, bien là... On nous a dit, aujourd'hui que, même si on... tous les médecins restent dans le réseau, peu importe leur âge, qu'ils soient jeunes ou moins jeunes, dans le réseau, actuellement, ils ne peuvent pas pratiquer à temps plein comme ils voudraient le faire parce qu'il n'y a pas suffisamment de ressources autour d'eux, que ce soient des ressources humaines ou que ce soit les plateaux pour opérer, etc. Alors, quelle serait votre feuille de route ou quelles seraient les grandes étapes? Je ne vais pas aller dans le détail là, on n'a pas beaucoup de temps, mais quelles seraient les grandes étapes que vous verriez pour que ça puisse se faire, ça?

M. Crevier (Philippe) : Bien, si je peux me permettre, tantôt, vous disiez : On a de la misère à suivre le gouvernement puis le ministre de la Santé parce qu'il a l'air de dire une chose et son contraire. Je vous dirais que la feuille de route, la première chose, c'est d'avoir une vision claire de la part du gouvernement, que l'objectif c'est de développer un système de santé et services sociaux public. Et ça, on ne le voit pas. On le voit, oui, il y a eu une action sur les agences de main-d'oeuvre indépendantes. Dans le projet de loi qui est déposé, on ne la voit pas, cette volonté-là, de manière très claire. On a, tu sais, créé récemment Santé Québec puis on a ramené sur un pied d'égalité le public puis le privé, en termes d'outils pour...

M. Crevier (Philippe) : ...développer le réseau. Alors, ça commence par la vision. Ensuite, bon, la question des médecins, elle est centrale, elle est criante, là. Il y a beaucoup de privatisation qui est induite par la pratique des médecins dans le secteur privé. Donc ça, ça appelle à regarder un petit peu la... là, bien, la problématique qu'on a sous les yeux aujourd'hui, et leur statut, leur mode de rémunération, tout ça.

• (16 h 10) •

Ensuite, il y a toute la question de la planification. Nous, on trouve absolument ahurissant qu'on se retrouve, aujourd'hui en 2025, alors pourtant qu'on sait depuis des décennies qu'on va se retrouver avec une population vieillissante, qu'on a d'excellents démographes au gouvernement qui nous disent... qui peuvent nous faire des projections populationnelles par territoire, et qu'on se retrouve avec une aussi grande pénurie de médecins, surtout en première ligne quand on se compare avec les pays européens. Il nous en manque à peu près la moitié. On aurait besoin de doubler le nombre de médecins en première ligne. Avec des infrastructures en quantité insuffisante, ce qui met une pression pour développer des cliniques privées, des projets immobiliers, alors qu'on pourrait avoir des infrastructures publiques, et une capacité hospitalière nettement en bas de ce dont on aurait besoin. Donc, il y a la planification, puis ensuite, je vous dirais, pratico-pratique, là, on vient de... L'IRIS, l'Institut de recherche et d'information socioéconomique vient de publier une étude sur le nécessaire virage en soutien à domicile, qui démontre de manière très solide que, justement, un système de soutien à domicile public ferait économiser au système entier des milliards de dollars à terme. Mais on a une... la ministre déléguée aux Aînés qui, pas plus tard que la semaine dernière, a dit : Ah! Bien moi, le soutien à domicile, je vais compter sur le privé encore une fois. Et là, on a un système qui est inefficace parce que, pour que le... un système public.

La Présidente (Mme Poulet) : Je m'excuse, M., je dois vous interrompre. On va poursuivre les discussions avec le député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, Mme la Présidente. Merci vous trois d'être là, puis vous êtes là, puis vous êtes les derniers de la journée et de la semaine. Alors, je vais être sûr que nos violons sont accordés, parce qu'il arrive souvent, idéologiquement que le ministre et moi on ne s'entende pas, ça, c'est normal, là. On ne représente pas exactement la même tendance politique ici. Mais il arrive aussi parfois qu'on ne s'entende pas même sémantiquement. Là, je veux être sûr qu'on s'entend bien. Le ministre lui-même, tout à l'heure, a repris le terme «sevrage», on ne refera pas le débat. On ne va pas retourner là. Mais le ministre est sorti pas mal du cadre de 83 tout à l'heure pour avoir une discussion avec vous, me semble-t-il, sur une feuille de route, un plan de match, un échéancier nous menant à, devrais-je dire «sevrage» ou une... une utilisation moindre du privé? Est-ce que c'est ça que vous avez compris puis dites-moi donc, en fait, qu'est-ce que vous avez compris de l'échange avec le ministre juste pour qu'on puisse continuer après?

Mme Verdon (Sophie) : Qu'est-ce que... Qu'est-ce que vous voulez savoir? Qu'est-ce qu'on a compris de l'échange avec la ministre? Bien, moi, j'ai entendu qu'il était d'accord avec certains de nos points.

M. Marissal : Et c'est un peu surréaliste, là, mais je pense que, des fois, on entend des affaires, on... tu sais, on prend des tangentes, on tire des conclusions. Je veux juste comprendre. Vous avez compris quoi de la discussion sur l'élimination progressive du privé avec le ministre?

Mme Verdon (Sophie) : Pour moi, ce n'est pas clair, là, dans les faits, ça serait quoi, là. Je ne sais pas Philippe puis Hugo, si vous avez un complément de qu'est-ce que vous avez compris, là. J'ai compris peut-être qu'il était d'accord sur la forme, on va dire, mais sur les moyens à prendre puis sur la pratique réelle de se sevrer complètement du privé, pour moi ce n'est pas clair.

M. Vaillancourt (Hugo) : Mais, moi... moi, je vais essayer de ne pas dépasser...

M. Marissal : Si vous voulez lui poser une question, je vais lui laisser mon temps pour répondre.

M. Vaillancourt (Hugo) :  Oui. Mais en fait non. Tu sais, moi... moi, pour rester dans le cadre du projet de loi n° 83, je pense que c'est ce qui est à l'étude aujourd'hui, là. Moi, ce que j'avais de la difficulté à comprendre, c'est pourquoi il y aurait besoin d'une longue période de temps pour un retour au bercail ordonné des médecins non participants, alors que, un, la loi permet déjà de le faire rapidement et que, deux, il y a des médecins qui seraient affiliés au régime public très rapidement et que... et qu'il y a des gens qui attendent en ce moment, là, des gens qui ont besoin de soins, des gens qui ont besoin d'un médecin de famille qui attendent. Et ce n'était pas clair pour moi elle était où la barrière à ce retour ordonné là d'une manière qui est rapide. Puis tu sais, quand on s'en va en affaires, tu sais, on prend des risques, là. Quand tu décides de désaffilier puis de devenir un médecin non participant, puis de charger les gens de leurs poches pour la pratique de la médecine, tu sais que tu t'embarques dans quelque chose qui a une acceptabilité sociale qui est très douteuse puis que ça se peut que, du jour au lendemain, tu te fasses dire : Sais-tu quoi? Les gens n'aiment pas ça, il y a des grosses questions éthiques par rapport à ça, on met fin à cette pratique-là...

M. Vaillancourt (Hugo) :   ...pas ça. Il y a des grosses questions éthiques par rapport à ça. On met fin à cette pratique-là. Tu sais, comme on dit en anglais, c'est «the cost of doing business». Il y a des risques que tu prends lorsque tu t'embarques dans cette pratique-là. Puis «just too bad», il aurait dû y penser à deux fois avant de se désaffilier. Je comprends qu'il y avait un risque à s'embarquer... à charger les gens du fait qu'ils étaient malades, puis que du fait que le système public soit mal en point plutôt que de poursuivre...

La Présidente (Mme Poulet) : Alors, je vous remercie. On va poursuivre la discussion avec le député de Saint-Jérôme.

M. Chassin : Pour combien de temps?

La Présidente (Mme Poulet) : 2 min 38 s.

M. Chassin : 38. Merci. Évidemment, j'ai peu de temps, mais je vais essayer d'y aller un peu en rafale. Est-ce que vous avez regardé un peu l'horaire? Il y a... Il y a des membres de la coalition qui vont venir aussi. C'est ça, hein? Donc, je vous vois faire oui de la tête.

Mme Verdon (Sophie) : Oui, oui.

M. Chassin : Et puis là, je voudrais savoir aussi sur ce que vous avez dit, parce que ça m'a comme posé la question quant aux soins à domicile. Si on parle, par exemple, d'un groupe communautaire ou d'une coopérative de soins, donc privée, est-ce que c'est problématique selon vous parce que c'est privé ou parce que c'est, dans le fond, par exemple, sans but lucratif, ça pourrait être intéressant.

Mme Verdon (Sophie) : Non, mais ça, je l'ai dit d'entrée... J'ai oublié peut-être de le nommer d'entrée de jeu, là, parce que pour nous, c'est clair que le privé c'est du privé à but lucratif.

M. Chassin : Parce que...

Mme Verdon (Sophie) : Après la distinction entre les organismes communautaires puis, par exemple, les entreprises d'économie sociale, on ne va pas se positionner aujourd'hui là-dessus, mais là on parle du privé à but non à but lucratif, pardon.

M. Chassin : O.K. Puis donc, il y a une étude en fait, du CIRANO que, je pense, qui a été cité par le ministre, là, qui notamment indique qu'il y a des mesures incitatives ou coercitives dont les impacts ont été de rendre la médecine de famille moins attrayante, puis d'inciter les médecins à exercer au privé. Finalement, il y a un peu une conséquence contraire au but recherché. Est-ce que... Est-ce que... Bien, en fait, peut-être que vous ne l'avez pas regardée non plus, cette étude, mais je suis en train de la regarder moi-même. Donc, est-ce que c'est quelque chose qui vous semble étonnant? Vous avez regardé ça, puis vous êtes d'accord? Comment vous vous positionnez là-dessus?

M. Crevier (Philippe) : J'ai... Ma réaction, c'est si l'interdiction de pratique, elle est comme édictée, comme c'est le cas en Ontario, cette question-là ne se pose pas, là. Donc, c'est sûr que, quand on entre dans des mesures, effectivement, là, M. Vaillancourt l'a dit tantôt, il peut y avoir des effets inattendus, des effets boomerang, puis c'est... Il faut bien les considérer. Mais la mesure la plus simple, c'est de terminer cette possibilité-là qui remet en cause l'existence même du service public.

M. Chassin : Puis c'est sûr que j'ai envie de me poser un peu la question, si on réussit avec un mixte, tu sais, permettez-moi une certaine hypothèse, là, un mixte privé-public, d'avoir des meilleurs soins sans frais, est-ce que c'est souhaitable?

Mme Verdon (Sophie) : Bien, ce n'est pas vraiment possible, ce que vous dites. Je ne comprends pas, un mixte de privé-public. C'était quoi votre phrase tantôt si vous voulez répéter?

M. Chassin : Donc, si c'était possible...

La Présidente (Mme Poulet) : Je m'excuse. C'est tout le temps qu'il nous reste. Merci. Alors, je vous remercie tous les trois pour votre contribution à nos travaux. La commission ajourne ses travaux au mardi 11 février à 9 h 45, où elle poursuivra son mandat.

(Fin de la séance à 16 h 18)


 
 

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