Journal des débats (Hansard) of the Committee on Health and Social Services
Version préliminaire
43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions
Wednesday, February 7, 2024
-
Vol. 47 N° 66
Special consultations and public hearings on Bill 37, an Act respecting the Commissioner for Children’s Well-Being and Rights
Aller directement au contenu du Journal des débats
11 h (version non révisée)
(Onze heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Provençal)
:À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant
constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des
services sociaux ouverte. Je... Je souhaite la bienvenue, particulièrement au
groupe du Cégep... de Thetford Mines? ...de Thetford Mines qui sont ici
présents dans la salle. Et je demande à toute personne dans la salle de bien
vouloir éteindre la sonnerie de leur appareil électronique.
La commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet
de loi n° 37, Loi sur le commissaire au bien-être et aux droits des
enfants.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Alors, M. Chassin (Saint-Jérôme) est remplacé par Mme Picard
(Soulanges); Mme Caron (La Pinière) est remplacée par Mme Garceau
(Robert-Baldwin); M. Fortin (Pontiac) est remplacé par Mme Prass
(D'Arcy-McGee) et M. Marissal (Rosemont) est remplacé par M. Cliche-Rivard
(Saint-Henri—Sainte-Anne).
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Ce matin, nous
entendrons les témoins suivants : l'Assemblée des premières nations
Québec, Labrador et la société Société Makivik.
Maintenant, je souhaite la bienvenue aux
représentants de l'Assemblée des premières nations Québec, Labrador. Alors, on
m'a informé que ça serait M. Ghislain Picard qui va faire son exposé de 10 minutes,
et, par la suite, nous...
Le Président (M. Provençal)
:...procéderons à la période
d'échange. Alors, M. Picard, je vous cède la parole immédiatement.
(Visioconférence)
M. Picard
(Ghislain) :(S'exprime dans une langue
autochtone) «Kwe», bonjour et «good morning to all». Tout d'abord, je tiens à
reconnaître le territoire non cédé où nous nous trouvons aujourd'hui. Donc, M.
le Président, M. le ministre Carmant, Mmes et MM. les députés et membres de la
commission, les personnes qui sont ici présentes aujourd'hui et celles qui nous
écoutent virtuellement. Nous vous remercions pour cette invitation à présenter
notre position et notre réflexion par rapport au projet de loi n° 37. Il est
d'autant plus important pour nous de vous faire part de nos préoccupations, car
il concerne ce que nous avons de plus précieux : nos enfants. Je suis
accompagné de représentants de la Commission de la santé et des services sociaux
des Premières Nations, Québec, Labrador : Marjolaine Sioui, directrice...
directrice générale, Michel Deschênes, analyste des politiques, et Richard
Gray, gestionnaire des services sociaux.
D'entrée de jeu, je tiens à réitérer que
les Premières Nations sont les mieux placées pour décider de leur avenir et
prendre soin de leurs enfants. Ce... Cette position a été exprimée à maintes
reprises lors de nombreuses commissions d'enquête et réitérée dans le cadre de
la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la
jeunesse, la Commission Laurent.
• (11 h 20) •
Quoique nous comprenons l'importance pour
votre gouvernement de mettre en œuvre la recommandation numéro un du rapport
Laurent, soit d'instituer un commissaire au bien-être et aux droits des
enfants, nous nous permettrons aujourd'hui d'être très critiques envers la
création d'un commissaire associé dédié au bien-être et aux droits des enfants
autochtones dans sa forme actuelle. Les fonctions prévues pour la nomination
par votre gouvernement de ce... de ce commissaire associé, pardon, se
limiteront à assister et à conseiller le commissaire duquel il relèvera. La
commission Laurent a pourtant été très claire, et je cite : « Le
gouvernement doit donner une voix aux enfants autochtones en nommant un
commissaire adjoint destiné aux enfants et aux jeunes autochtones et qui serait
nommé selon les mêmes modalités que la commissaire, suite aux suggestions des
autorités autochtones.» Fin de la citation.
Le rapport va même plus loin en réitérant
l'importance de supporter le droit à l'autodétermination et à l'autonomie
gouvernementale des Premières Nations en matière de protection de la jeunesse.
La commissaire Laurent n'a pas recommandé l'approche proposée par votre
gouvernement d'adopter une loi se voulant... se voulant applicable aux
Premières Nations et aux Inuits sans obtenir leur consentement. Elle a au
contraire suggéré de mettre sur pied un commissaire au bien-être et aux droits
des enfants, incluant les enfants autochtones, jusqu'à ce que les communautés
qui le souhaitent puissent se prévaloir d'un commissaire autonome.
Dans l'attente imminente de la décision de
la Cour suprême du Canada dans le renvoi relatif à la loi concernant les
enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations, des Inuits et des
Métis, il est déplorable de constater l'acharnement de ce gouvernement à
débattre qu'il est le seul à pouvoir exercer dans ce champ de compétence, alors
que la Cour d'appel a confirmé à l'unanimité le droit inhérent et générique à
l'autonomie gouvernementale des Premières Nations dans le domaine des services
à l'enfance et à la famille.
Un premier geste à poser est de mettre en
œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones
pour que les Premières Nations assurent librement leur développement, notamment
en matière sociale et culturelle, ainsi qu'à maintenir et renforcer leurs
propres institutions politiques, juridiques, sociales et culturelles
distinctes, incluant une institution comme un commissaire au bien-être de leurs
enfants.
En ce sens, j'ai eu l'occasion d'entendre
le témoignage du Protecteur du citoyen hier. Je salue ses propos et j'en
appelle à votre gouvernement d'en faire bon usage. Sa définition de la
co-construction me pousse à rectifier une information émise par M. le ministre
Carmant concernant la co-construction du règlement sur l'adoption et la tutelle
coutumières. Il est important que l'Assemblée sache que la co-construction de
ce règlement s'est faite à l'époque avec le gouvernement... le parti qui vous
précédait au gouvernement, le Parti libéral, et que ce sont plutôt les
Premières Nations et Inuits qui ont attendu cinq ans pour que ce règlement soit
adopté.
Les Premières Nations au Québec ont
collectivement adopté la Déclaration sur les droits des enfants des Premières
Nations. Le respect et la promotion...
M. Picard
(Ghislain) :...des droits sont la
responsabilité des parents, mais aussi des communautés, des nations et des
chefs des Premières Nations. Je tiens à réitérer que les Premières Nations
n'ont jamais cédé leurs droits ou délégué au gouvernement du Québec l'exercice
de leurs droits et elles n'ont jamais consenti à ce que celui-ci adopte une
institution non indépendante pour prendre en charge à leur place le mieux-être
de leurs enfants.
Let me be clear about our
position today. First Nations are determined to stand for our inherent rights,
and we will keep working hard on trying to minimize the negative impacts of
colonial laws on our children, youth, and families. We will keep encouraging
communities to exercise their full jurisdiction in child and family services.
Once again, the proposed Bill does not recognize the autonomy and jurisdiction
of First Nations, nor does it reflect what was recommended at the Laurent
Commission. It was in a spirit of collaboration that we accepted to participate
in the work of the working group coordinated by the Ministry of Health and
Social services, which resulted in more disappointments rather than the
acceptance of our recommendations.
Dans un
environnement où les projets de loi, les mémoires et des poursuites judiciaires
s'accumulent et se succèdent, que ce soit pour le dossier des langues
ancestrales, de la langue anglaise, de la sécurité publique, de la sécurisation
culturelle et des services sociaux, nous doutons d'une réelle volonté à
reconnaître nos droits inhérents et à opérer les changements qui s'imposent.
En conclusion, nous sommes d'avis que la
reconnaissance du droit générique implique que les Premières Nations doivent
jouer un rôle prépondérant dans la nomination du commissaire dédié aux enfants
des Premières Nations, dans la définition de ses responsabilités et dans la
surveillance de l'accomplissement de son mandat. Le commissaire dédié au
mieux-être et aux droits des enfants autochtones se doit d'être indépendant du
commissaire du fait des droits particuliers dont jouissent les enfants des
Premières Nations. En effet, les tribunaux canadiens, l'ONU et nos propres
instruments juridiques reconnaissent aux enfants des Premières Nations des
droits particuliers, tels que le droit de connaître leur culture, leur
histoire, leur langue et leurs traditions. Les Premières Nations ont des
visions distinctes du mieux-être et de l'intérêt de l'enfant. Le commissaire
dédié au mieux-être et aux droits des enfants autochtones doit jouir de toute
l'indépendance requise et être investi de pouvoirs et de responsabilités
sérieuses pour promouvoir adéquatement le mieux-être et le respect des droits
particuliers des enfants des Premières Nations et veiller à la protection de
leur intérêt. Une loi québécoise qui touche directement à nos droits inhérents
et qui ne tient pas compte que la... et qui ne tient compte que de la
perspective occidentale des droits, du mieux-être et de l'intérêt de l'enfant
est inacceptable. Le gouvernement du Québec doit sans équivoque accepter que
les perspectives des Premières Nations soient reflétées dans toute loi qui
touche à nos droits, à nos intérêts et à nos enfants. (S'exprime dans sa
langue) Merci pour votre écoute.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, chef Picard, pour
votre présentation. Nous allons maintenant initier cette période d'échange avec
M. le ministre. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.
M. Carmant : Merci beaucoup,
M. Picard. Merci à vous, nos invités. Premièrement, tu sais, je tiens à dire
que, dans la modification de la loi de la protection de la jeunesse, moi-même,
j'avais mis dans le préambule que les Premières Nations, Inuit sont les mieux
placés pour prendre soin de leurs enfants. Ça, il n'y a pas d'enjeu là-dessus.
Vous savez qu'il y a un enjeu fédéral puis provincial, là, qui cause
certaines... certaines considérations. On devrait avoir des réponses bientôt.
Une chose qui est importante pour moi, je
pense que j'ai entendu M. Picard dire qu'il ne veut pas que le commissaire
adjoint relève nécessairement du commissaire, mais je pense que... on peut...
on peut s'entendre, parce que le but n'était pas nécessairement qu'il relève,
là, comme, absolument du commissaire. Mais en fait, comme on a créé une entité
indépendante votée par l'Assemblée nationale, il fallait qu'on crée un
commissaire et plutôt que... Si on avait fait la même chose pour les Premières
Nations, on aurait fait deux... deux institutions distinctes. Donc, je me
demande si on peut rephraser les choses disant que, pour les... pour les
enfants autochtones... pour les enfants Premières nations, Inuit, le
commissaire va pouvoir jouer un rôle autonome. Ça, je pense que c'est... Est-ce
que ça pourrait être une piste de solution, selon vous?
M. Picard
(Ghislain) :Bien, écoutez, je l'indiquais
dans ma présentation...
M. Picard
(Ghislain) :...dans ma présentation, en
plaçant les Premières Nations dans notre cas, puisque les Inuits jouissent de
leurs propres entités politiques et administratives, nous avons toujours été
disposés à collaborer avec une démarche qui est... qui est proposée par... par
votre gouvernement, et c'est ce qu'on a fait dans le cadre du processus menant
à une reconnaissance et au respect du principe de l'adoption coutumière. Ça a
pris du temps, hein, ça a pris 10 ans, mais... mais je crois que tout
réside dans l'ouverture qui nous est proposée. Et malheureusement, et je citais
l'adoption coutumière à titre d'exemple, ça a été extrêmement fastidieux et
frustrant de notre côté de... de devoir toujours être en position d'attente avant
que les choses se manifestent, et pour moi, c'est très clair qu'on est prêt à
envisager toutes sortes de possibilités comme celles que vous évoquez. Mais
ceci étant dit, je pense que c'était important pour nous de... de vraiment
prendre en compte tous les détails de... de quelques propositions que ce soit
qui viennent de votre gouvernement. Peut-être ajouter demander à mes collègues
qui sont en présence avec vous aujourd'hui d'ajouter à mon commentaire? Je ne
sais pas si c'est Marjolaine ou Richard.
Mme Sioui
(Marjolaine) :Richard va compléter.
M. Gray
(Richard) :
Yes,
please. Thank you, Regional Chief Picard. So, just to add some supplemental
information. When we were discussing the projects of having a commissioner put
in place, we were adamant that we wanted our own independent commissioner for
First Nations, not someone who would fall under the commissioner that's
mentioned in the law here. So, our position stands the same. We want someone
who's independent. Why would this deputy commissioner be appointed by
government where the other one would be appointed by the National Assembly?
Another question that's very preoccupying for us. So, the question of
independence is very important in that aspect.
• (11 h 30) •
M. Carmant :
O.K. But it was just because that we
didn't want to create two distinct institutions.
M. Gray
(Richard) :
Yes.
M. Carmant :
But this, for you, it's non... it has
to be two distinct institutions.
M. Gray
(Richard) :
We
want our own independent commissioner.
M. Carmant :
O.K. that's very clear. Chef
Picard, vous mentionnez que, par exemple, justement... il y avait ces
négociations, là, pour l'adoption de tutelle pendant cinq ans. Dites-moi qu'est
ce qu'il y a de si difficile dans la communication, puis tout... ça a l'air, ça
a l'air, entre guillemets, pénible. Expliquez-moi, qu'est ce qu'on peut faire
pour faciliter les choses?
M. Picard
(Ghislain) :Bien, écoutez, M. le
ministre, merci pour votre question. Et le chantier s'est étendu sur une
dizaine d'années avant qu'on puisse arriver avec des propositions claires pour
changer les règlements et le Code civil, hein, et ça s'est fait sous l'égide du
gouvernement qui vous a précédé. Et pour nous, bon, on est finalement arrivés à
bon port, avec quelque chose qui satisfaisait les Premières Nations et même les
Inuits parce que c'était un processus qui allait au-delà de la géopolitique,
hein, conventionnée versus non conventionnée, et c'est... c'est la mise en
application, finalement, du règlement qui a tardé. Et on a eu une rencontre,
vous et moi, très tôt au début de votre mandat précédent, et c'est quelque
chose qu'on a mis sur votre table à vous comme ministre responsable. Et,
écoutez, je pense que la question devrait plutôt être posée du côté de votre
ministère, parce que nous, on est en attente. C'est une attente qui a duré cinq
ans. Donc, je pense qu'il y a des mises au point à faire sur... je vais dire,
peut-être le rôle de la bureaucratie ici, et c'est extrêmement éprouvant de
notre côté d'être toujours finalement mis dans une situation où on se doit,
nous aussi d'être imputables à nos propres autorités. Et lorsque les réponses
ne sont pas satisfaisantes selon nous, bien, c'est difficile de faire rapport à
ce moment-là.
M. Carmant : D'accord. Bien,
soyez assurés que les questions seront posées.
Justement, le Protecteur du citoyen and
Mr. Gray as well ont proposé d'ajouter...
11 h 30 (version non révisée)
M. Carmant : ...un règlement
sur le... pour pouvoir retarder la mise en œuvre du commissaire, et ce qui nous
permettrait peut-être d'entamer ces processus de discussion pour améliorer...
pour améliorer le statut, pour le rendre plus convenable à vos yeux? Est-ce que
ce serait quelque chose envers laquelle vous seriez favorables?
M. Picard (Ghislain) :
Richard, I'll ask you to add on, but... Mais est-ce que je
dirais peut-être à ce moment-ci, M. le ministre, je pense qu'il faudrait, avant
tout et d'abord, convenir de ce qu'on entend par coconstruction, hein? Le
Protecteur du citoyen a avancé comme principe hier, c'est une... c'est un élément
important dans le rapport qu'il a remis à l'automne dernier en 2023. C'est d'ailleurs
une conclusion que nous avons entièrement appuyée, nous, comme Assemblée des
premières nations. Donc, je semble retourner la question. Je vais quand même
relever l'importance de bien s'entendre sur la définition des processus qui
pourraient permettre sans doute cette collaboration, la notion de
co-construction, à quel moment elle prend effet, à quel moment elle prend fin.
Ça, c'est des aspects, je pense, à mes yeux, qui sont extrêmement importants. Richard.
M. Gray
(Richard) : Yes, just add supplemental
information to Chief Picard has expressed. Minister Carmant, based on our
experience in terms of consultation, the consulting process you put in place to
create this law if we are going to call that a codevelopment process, that's
not something, I don't think, we are interested in pursuing again. We really
have to talk about a process where we sit down as equal partners and we talk
about the real issues and matters that are addressed in terms of First Nations,
concerns...
M. Carmant : And what would you ask me to put in place to make sure that this
process occurs? I am totally in favor of coconstruction.
M. Gray
(Richard) : Well, we have your leadership, with
our leadership, discuss the mandate of creating this codeveloping process. And,
from there, we start talking about processes that we agreed on together.
M. Carmant :
OK. Absolutely.We will be in touch. Absolutely.
Vous savez, maître... chef Picard, j'ai toujours un peu... l'enjeu que ce que
je discutais hier, c'était peut-être parmi les 11nations puis les cas de la
quarantaine de communautés. Est-ce qu'on arriverait à avoir un consensus sur
une personne dédiée pour les Premières Nations? Est-ce que c'est quelque chose
qui, pour vous, serait un enjeu ou est-ce que la représentativité régionale...
Est-ce qu'il y aurait quelque chose à travailler là-dessus, ou vous pensez que
c'est quelque chose qui serait facile à régler?
M. Picard
(Ghislain) :Bien, il y a... Au départ, la
volonté politique est au rendez-vous. Je pense que ça, il faut le savoir, et
au-delà de la géopolitique à laquelle je référais un peu plus tôt... Et, encore
une fois, pas insister sur l'exemple, mais revenir sur l'exemple, parce qu'il a
été extrêmement probant, là, pour une situation, un dossier qui s'avérait très,
très important pour l'ensemble de nos communautés ou de l'ordre de la diversité
Premières Nations et Inuits, c'est cette collaboration qui a existé entre nos
nations et nos communautés pour permettre de proposer des changements au Code
civil et à la PJ... LPJ et vraiment trouver des conclusions qui soient
satisfaisantes pour les principaux intéressés.
Donc, à votre question, oui, c'est tout à
fait possible et, pour moi, je pense que, finalement, la zone de confort que
nous recherchons, et M. Gray l'a évoqué, c'est vraiment cette volonté de
vraiment... une volonté qui, dans certains cas, malheureusement, s'exprime mal
ou tarde à s'exprimer. Et je pense que ça, c'est important de vraiment jeter
des balises solides, des bases solides pour qu'un vrai, un véritable processus
de coconstruction puisse se concrétiser. Donc, je pense que les communautés,
malgré l'urgence, ne sont pas...
M. Picard
(Ghislain) :...nécessairement... ne se
considère pas nécessairement, je dirais, victime ou sujette, là, à un processus
qui soit interminable, mais, en même temps, il faut prendre le temps parce
qu'on est devant des situations qui sont très complexes. Je pense que la preuve
n'est plus à faire que nos communautés sont les premières victimes d'une loi
qu'elles n'ont pas elles-mêmes développée. Donc, je pense que les communautés
sont très, très au fait des situations qui prévalent à ce moment-ci.
M. Carmant : D'accord. Puis
une autre chose que je tiens à clarifier aussi, c'est que le comité consultatif
des jeunes des Premières Nations allait travailler avec le commissaire adjoint
des Premières Nations. Donc, il semblait y avoir une inquiétude sur la
sélection de ces jeunes-là et à qui ils allaient parler, mais nous, on... je
tiens à vous rassurer, là, que c'était avec le commissaire des Premières
Nations. Je veux que ce soit clair entre nous, là.
M. Picard
(Ghislain) : Bien, si je peux me permettre, M. le ministre, je
voulais juste ajouter un élément extrêmement important à ce que vous nous
partagez, je vous en remercie, mais, pour nous, il était extrêmement important
qu'il y ait une assurance que le filet ou les filets de sécurité sont au rendez-vous.
Ça, c'est quelque chose à mes yeux qui devrait être incontournable. Je pense
qu'encore une fois pour ne pas les isoler... Nos jeunes ont quand même un passé
qui contient des traumatismes importants et qui n'est pas le propre des jeunes
Québécois, je le dis en tout respect, et à ce moment-ci, je pense que c'est
important également de prendre en considération, et c'est quelque chose que
nous n'avons pas senti jusqu'à maintenant.
• (11 h 40) •
M. Carmant : Et qu'est-ce que
je pourrais faire ou comment on pourrait s'assurer que ce filet-là soit inclus
dans le texte? Qu'est-ce que vous suggéreriez?
M. Picard
(Ghislain) : Je vais me tourner du côté de mes collègues,
Marjolaine ou Richard.
Mme Sioui
(Marjolaine) :Je vais débuter, puis si mes
collègues veulent ajouter... Là-dessus, bien, c'est sûr que lors des travaux,
on avait fait une proposition, hein? La raison pour laquelle... puis, je pense,
tout à l'heure... ça vient rejoindre un peu les propos du chef Picard, où
est-ce que lorsqu'il arrive des décisions qui ont été prises, on se mobilise
ensemble, tout le monde, et, à travers le comité, c'est ce que les gens ont
fait pour proposer plutôt d'avoir un comité aviseur. La raison, c'est qu'on
veut, comme chef Picard l'a mentionné, mettre les filets de sécurité pour les
enfants, et tout. Et je pense que c'est bien exprimé aussi, on en fait mention
dans notre mémoire, au niveau des droits des enfants, de par la Déclaration des
Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, mais aussi par la
déclaration que les chefs ont adoptée sur les droits des enfants. Donc, on
reconnaît les droits des enfants à pouvoir... dont celui de s'exprimer. Et, de
par tout l'historique qu'on a vécu en tant que Premières Nations et Inuits, on
veut s'assurer que ces modes-là de consultation, et tout, vont être faits et
décidés par les Premières Nations. Donc, en complémentarité à ce qui avait été
recommandé, c'était de mettre un comité aviseur qui, lui, serait formé de
l'ensemble de représentations de chacune des nations et des Inuits et qui
pourrait justement donner ou aussi aviser le commissaire au niveau des droits
des enfants des Premières Nations et Inuits et l'autre commissaire par la même
occasion. Et, avec ça, c'est que, nous, de notre côté, on mettrait les
mécanismes avec le commissaire, de consultation, appropriés pour assurer toute
la sécurité culturelle de ces enfants-là au niveau de leur droit d'expression.
M. Carmant : D'accord. Moi,
ça me semble tout à fait raisonnable. Mr. Gray?
M. Gray (Richard) :
I don't have anything more to add. In
general, there was... I think in our brief we explained really well our
concerns and preoccupations. And this notion, this was proposed again in the
supposedly codeveloped process, you know, to have some advisory committee. I
think Commissioner Laurent was waiting to hear explanations around that, I hope
she's listening and I hope she understands our preoccupations around it. So,
voilà.
M. Carmant :
O.K. One last thing. I just want to... Oh!
excusez-moi. J'aimerais juste vous dire que, tu sais, vous le savez, je suis
bien conscient des enjeux et puis aussi de la façon dont vous prenez... vous
avez organisé le système. D'ailleurs, M.... chef Picard le sait, nous, on
déploie le programme Ma famille, ma communauté, qui est grandement basée sur ce
que font les Atikamekws. Donc, je pense qu'il y a beaucoup de choses qu'on
veut... qu'on aimerait coconstruire avec vous pour que, partout au Québec, on
prenne le mieux possible soin de nos enfants...
M. Carmant : ...et je vous
remercie d'avoir pris le temps d'étudier et d'écrire ce mémoire qui est très
élaboré, puis on va travailler là-dessus puis on va vous revenir. Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Merci, M. le ministre. Maintenant, je
vais céder la parole à la députée de Robert-Baldwin.
Mme Garceau : Merci beaucoup,
M. le Président. Merci, chef Picard et les gens qui vous accompagnent, c'est...
Votre mémoire, je l'ai lu attentivement. Je vous remercie de votre présence. Il
est très clair. Vos recommandations sont très claires. Et j'ai beaucoup aimé le
titre de votre mémoire qui représente vraiment, je crois, le coeur de vos... de
vos inquiétudes et aussi l'objectif, le mieux-être, le mieux-être de nos
enfants au coeur du droit à l'autodétermination des Premières Nations.
Et j'aimerais commencer tout d'abord
avec... Vous avez parlé, chef Picard, d'acharnement du gouvernement, manque de
volonté. On va aller au coeur du sujet, parce que je sens la grande frustration
et je la partage avec vous, parce que je ne comprends pas comment se fait-il
que, dans ce projet de loi, nous n'avons pas respecté toutes les
recommandations dans la commission Laurent, dont vous avez, je sais, vous avez
fait des représentations, il y a eu des mémoires et, de plus, il y a eu une
consultation avec le ministre préalablement au dépôt du projet. Donc, je
présume que vos recommandations, lesquelles vous avez faites devant la
commission Laurent, ont été réitérées et de l'importance de... de respecter les
droits inhérents des Premières Nations et aussi votre droit en ce qui a trait à
la protection de vos enfants; que vous êtes les mieux placés pour répondre à
leurs besoins et aussi à leurs droits. Et donc j'aimerais comprendre qu'est-ce
qui s'est passé. Qu'est-ce qui s'est passé entre les... vos... vos
recommandations, les témoignages devant la commission Laurent, la rencontre que
vous avez eue préalablement, et le fait qu'on ne retrouve pas, dans ce projet
de loi, exactement vos recommandations et celles qui ont été faites par la
commission Laurent, chef Picard.
M. Picard
(Ghislain) :Merci pour votre commentaire
et votre question. J'ai envie de dire que ce n'est peut-être pas à moi de
répondre à votre question, mais je vais quand même y aller, je dirais, peut-être,
beaucoup plus d'une observation. Et si... si, en quelque processus que ce soit,
les balises ont été prédéterminées et fixées par quelque parti que ce soit, il
est clair que le terrain... le terrain de jeu est extrêmement limité. Et je me
permets un parallèle, puisque vous y faisiez référence, la commission Laurent,
présidée par Mme Laurent... on a senti que... on a senti qu'il y avait au
rendez-vous la zone de confort qui nous était nécessaire, de pouvoir décrire
une situation que nous décrivons, et je vous ramène, je pense que nos premières
représentations devant une commission parlementaire remontent à 2005, et, à ce
moment-là, on avait... c'est sans doute un titre que vous allez aussi
apprécier, le premier mémoire que nous avons déposé s'intitulait Décrire les
choses... Dire les choses telles qu'elles sont. Et pour moi, c'est extrêmement
important de rappeler aux membres de votre commission aujourd'hui ces
éléments-là, puisque ça fait partie d'une histoire récente qui nous interpelle
toutes et tous. Donc, pour moi, c'est... pour revenir à la commission Laurent,
on nous a... on a reçu l'écoute sans d'idée préconçue, hein, sans de... de
limites, et pour avancer nos positions, nos constats d'abord, et une opposition
par rapport à cette réforme de la loi...
M. Picard
(Ghislain) :
...la protection de la
jeunesse. Donc, je pense que c'est vraiment un aspect, là, qui, à mes yeux, là,
d'être bien compris.
Mme Garceau : Donc, je crois
que Mme Laurent vous a très bien compris et les commissaires de la
commission également. Il se passe quelque chose au niveau du ministère, et ça,
il faut le corriger. Et donc moi, j'aimerais savoir aujourd'hui, dans ce projet
de loi, s'il est amendé avec toutes vos recommandations, toutes vos
recommandations à la lettre, incluant le processus de nomination d'un
commissaire dédié aux enfants autochtones, et je sais qu'on changerait la
terminologie, indépendant, avec tous les pouvoirs, les fonctions du commissaire
au bien-être, jusqu'au moment où certaines nations veulent se doter de leurs
propres institutions, ça, c'est au cœur de la recommandation, le respect de vos
droits. C'est ça que vous recherchez aujourd'hui, n'est-ce pas?
M. Picard
(Ghislain) :Écoutez, Mme, la réponse la
plus simple et la plus brève là-dessus, c'est... ça a toujours été l'esprit des
démarches dans lesquelles nous avons été impliqués et qui interpelle le
gouvernement du Québec et ses institutions, c'est-à-dire trouver une façon pour
que l'État s'harmonise avec la réalité identitaire, culturelle et sociétale de
nos communautés.
• (11 h 50) •
Mme Garceau : J'aimerais
revenir sur quelque chose que le ministre Carmant a mentionné hier, que vous,
vous ne vouliez pas avoir un comité consultatif d'enfants autochtones. Et j'ai
lu votre mémoire à ce sujet là. Je crois, la question ici, c'est, vous ne
voulez pas que le commissaire du bien-être québécois choisisse les enfants,
vous aimeriez que votre commissaire choisisse les enfants autochtones qui
feraient partie de ce comité consultatif qui serait évidemment en lien avec le
commissaire dédié aux enfants autochtones. Je voulais juste savoir votre
confirmation à ce sujet là.
M. Picard
(Ghislain) :Bien, je vais sans doute
demander à un de mes collègues de poursuivre, mais première réaction à votre question,
c'est vraiment d'assurer que l'environnement de nos jeunes, qui est déjà
extrêmement fragile, qu'on ne puisse pas le fragiliser davantage. Donc, il y a
un contexte social, culturel propre d'abord à nos nations, nos communautés et
en particulier les jeunes où la démographie confirme que ce sera bientôt une
majorité au sein de nos nations, de nos communautés. Donc, il faut être
extrêmement prudent dans l'approche et dans les mesures qui visent à finalement
leur procurer... leur assurer leur mieux être. Je peux demander, à peut-être,
Marjolaine ou Richard de compléter.
Mme Garceau : Oui.
Mme Sioui
(Marjolaine) :En fait, je reviens sur les
propos d'un petit peu plus tôt. Ce qu'on propose, c'était la mise en place d'un
comité aviseur formé de représentants de toutes les nations qui, lui, va
pouvoir conseiller le commissaire des Premières Nations, Inuits, commissaire
associé ou commissaire autonome maintenant, c'est pour qu'ils puissent savoir
comment on doit consulter avec les jeunes des Premières Nations. Donc, en fait,
c'est qu'on conseille la façon... la meilleure façon de sécuriser pour que les
jeunes soient consultés d'une façon culturellement adaptée.
Mme Garceau : Si je pousse ça
un petit peu plus loin votre idée, parce que j'ai retrouvé dans votre mémoire
ce comité consultatif en lien avec le commissaire dédié aux enfants
autochtones... pourrait décider, pourrait choisir les enfants qui feraient
partie, peut être, de ce comité consultatif d'enfants et que ce serait votre
approche selon votre processus.
Mme Sioui
(Marjolaine) :Bien, encore une fois,
c'est de déterminer les processus adéquats. Donc, qui de mieux placés que les
représentants des différentes nations pour pouvoir conseiller puis de
déterminer avec leur processus? Parce que, vous le savez, c'est différent d'une
communauté à l'autre...
Mme Sioui
(Marjolaine) :...on a tous des cultures
différentes et tout, mais on en vient avec un consensus sur la façon dont on va
mettre les mesures en place pour assurer cette consultation en bonne et due
forme.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Alors maintenant, je
vais céder la parole au député de Saint-Henri—Sainte-Anne.
M. Cliche-Rivard : D'abord,
merci beaucoup pour vos présentations à tous et à toutes. Merci d'être là. Je
reviens un petit peu sur la question de ma collègue. Bon, d'abord, il y a le
rapport Laurent qui fait des recommandations très claires. Ensuite, il y a
vos... vos discussions préalables à l'été 2023, si je comprends bien, pour
le projet de loi. Vous faites des demandes, vous faites des recommandations,
les orientations puis finalement le projet de loi sort, et je vais vous citer,
là, vous dites : Nous avons constaté avec regret que le projet de loi a
été rédigé sans tenir compte de la majeure partie des préoccupations émises par
les différents groupes. Nous peinons à nous expliquer la raison de ces refus,
souvent communiqués sans justification.
Et là, aujourd'hui, du côté ministériel,
on semble surpris. C'est comme si on ne s'attendait pas à ce que vous alliez
nous communiquer... alors que c'est bien évidemment... c'est bien évident que
si l'ensemble de vos recommandations ne sont pas suivies, que le projet de loi
ne fera pas votre affaire. Ça me semble la base. Ça me semble évident. Ce que
j'essaie de comprendre, c'est qu'est ce qui se passe pour qu'on en arrive là,
où finalement vous nous présentez ça aujourd'hui, puis ce qui semble
l'évidence, là, que finalement vous n'êtes pas écoutés et que de l'autre côté,
là, aujourd'hui, on semble avoir une ouverture. Où est-ce que la... où est ce
que la ligne se brise? J'ai beaucoup de misère à comprendre ça parce que ça me
semble une évidence même, là.
M. Picard
(Ghislain) :J'ai... j'ai envie de nous
retourner à tous et à toute la question. Je pense qu'elle s'applique à tout le
monde. Pas pour dire que toutes les réponses sont bonnes, mais
essentiellement... Écoutez, je suis... on est... on est devant votre commission
aujourd'hui et, écoutez, on fait presque systématiquement l'effort d'avancer
des positions devant toutes les commissions qui, à nos yeux, interpellent et
ont un impact potentiel sur les communautés que nous représentons. Puis les
processus nous engagent toujours avec une bonne foi qui est au rendez-vous de
notre part. Mais si... Écoutez, si à travers, puis je lance un chiffre en
l'air, une dizaine de recommandations, il y en a une sur 10 qui est retenue,
puis qu'elle est tout à fait accessoire, et qu'elle n'impacte pas le cœur même
d'un projet de loi, vous comprendrez qu'il est difficile pour nous d'aller
finalement confirmer, d'aller plutôt... de confirmer une satisfaction au niveau
de... des gens envers lesquels nous sommes imputables, les chefs et les membres
de nos communautés. Donc...
M. Cliche-Rivard : J'ai
30 secondes. Je me permets, là, pardon. Je veux juste savoir. Si le
ministre fait les modifications finalement que vous demandez, est-ce que ça,
c'est suffisant dans un processus de co-construction ou si finalement, il faut
plutôt revenir à la planche à dessin parce que... Autrement dit, est-ce qu'on
contribue vraiment au processus de réparation, si on vous fait arracher des
gains comme ça à la dernière minute après le projet de loi déposé, ou si
vraiment il faut revoir la façon complète de réfléchir, là?
M. Picard
(Ghislain) :Notre position claire et
précise est contenue dans les représentations que nous avons faites à la
commission Laurent. C'est le point de départ.
M. Cliche-Rivard : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Alors, on va
compléter cet échange avec le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci, M. le
Président. Merci, chef Picard. Merci à votre équipe également. Je pense que
votre message est très clair; votre mémoire, très complet également. Donc, moi,
j'aurais besoin d'un éclairage sur la façon dont on pourrait, si la
commission... le ministre accepte votre proposition de créer une instance
indépendante, si... Parce que vous touchez que les articles du chapitre trois
sur la nomination puis ses grands mandats, mais, pour ce qui est de
l'organisation... Puisqu'on crée une nouvelle institution... Lorsqu'on parle du
commissaire, on parle évidemment d'une équipe autour du commissaire, est-ce
que, dans votre proposition, vous créez une institution distincte, avec des
équipes distinctes, des budgets distincts, des... Et, en fait, c'est tout le
reste du projet de loi que vous n'abordez pas...
M. Arseneau : ...ça veut dire
qu'il doit être modifié en conséquence des modifications aux articles 14 à
18?
M. Picard
(Ghislain) :Bien, écoutez, je sais qu'on
est... on a très peu de temps. Je vais inviter mes collègues, peut-être, à
réagir à votre question.
Des voix : ...
Mme Sioui
(Marjolaine) :Bien, écoutez, on n'est pas
allés plus loin dans le mémoire, parce que ce qu'on souhaite au départ, c'était
la structure indépendante. Puis, encore une fois, bien, avec les processus de
consultation qu'on doit avoir en place, c'est quelque chose qui devra être
discuté avec, bien sûr, les nations pour... Puis on le dit bien dans notre
mémoire aussi, c'est jusqu'au moment où les Premières Nations qui le souhaitent
pourront se créer une autre institution de par leur propre façon. Donc, on le
voit comme une mesure là, présente, mais le souhait, dans tout ça, c'est
d'avoir nos propres institutions.
M. Picard
(Ghislain) :Si je peux me permettre,
peut-être, d'ajouter à la réponse de Marjolaine. En fait, le mot-clé ici, c'est
harmonisation, hein, comment on peut trouver une façon d'harmoniser le cadre
législatif québécois avec la réalité de nos communautés jusqu'au moment où les
communautés décideront autrement. Et ça, cette capacité-là, elle existe pour
nous. Et pour nous, même lorsqu'on arrivera à cette étape-là, il n'est pas
question de... je veux dire, de changer la face du monde, là. Je pense que les
communautés ont toujours été très, très coopératives pour assurer que leurs
processus soient également harmonisés avec ce qui existe déjà.
M. Arseneau : Oui, je
comprends. En fait, moi, j'essaie juste de voir en prospective sur le travail
du législateur, est-ce qu'on peut arriver à nos fins et répondre à vos demandes
dans le cadre du projet de loi actuel ou est-ce qu'on aurait besoin d'un
deuxième projet de loi pour créer un commissaire qui ait une fonction
spécifique en lien avec les enfants des Premières Nations et des Inuits. Moi,
c'est ça, un peu, la question qui me turlupine actuellement. Mais elle est
ouverte et mon temps est fermé. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, je tiens à remercier les
représentants de l'Assemblée des premières nations Québec-Labrador pour leur
participation, leur présence à nos travaux. Et merci beaucoup d'avoir rédigé un
mémoire comme vous l'avez fait, très étoffé.
Alors, sur ce, je vais suspendre les
travaux pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 12 h 01)
12 h (version non révisée)
(Reprise à 12 h 07)
Le Président (M. Provençal)
:Avant de souhaiter la bienvenue au
prochain groupe, je vais avoir besoin de votre consentement pour qu'on ait un
cinq minutes additionnel pour pouvoir respecter le temps qui est alloué aux
échanges. Consentement?
Des voix : Consentement.
Le Président (M. Provençal)
:Merci. Je souhaite la bienvenue aux
représentants de la Société Makivik. Vous disposez de 10 minutes pour cet...
pour votre présentation, et, par la suite, nous allons procéder à l'échange.
Alors, je vous invite immédiatement à procéder.
M. Arteau (Jean-François) : Merci
beaucoup, M. le Président, merci aux membres de la commission, aussi, de nous
accueillir ce matin. Alors, vous avez, devant vous, les représentants de la
Société Makivik. On vous expliquera un petit peu dans le détail ce qu'est
Makivik. On a aussi la directrice générale de la Régie régionale de la santé et
des services sociaux du Nunavik, Jennifer Munick-Watkins, et on a en ligne,
avec nous, la directrice générale de Nunavimmi Ilagiit Papatauvinga, qui est le
NIP — c'est plus facile à prononcer, NIP — et qui est une
organisation, justement, qui oeuvre en matière de protection de la jeunesse.
Son nom, c'est Mina Beaulne. Alors, Fabien Pernet, aussi, nous accompagne.
Fabien est à la Société Makivik, tout comme moi, il est conseiller stratégique
au président, alors que je suis avocat et conseiller spécial au président de
Makivik, qui est Pita Aatami, qui vous envoie, incidemment, ses salutations.
Alors, rapidement, vous présenter... je ne
crois pas qu'on va prendre 10 minutes, M. le Président, pour vous présenter
notre mémoire, vous l'avez lu, bien évidemment... donc, vous peut-être faire un
survol ensemble de ce qu'on couvre dans le mémoire. Pour l'essentiel, d'abord,
Makivik, qui est Makivik. Bon, Makivik s'est créée en 1978, donc après la
Convention de la Baie-James. Souvent, les gens pensent que Québec a négocié la Convention
de la Baie-James. Non, c'était une association précédente, qui s'appelait l'association
des Inuit du Nord-du-Québec, NQIA, qu'on appelait à l'époque. Donc, Makivik est
née aussi, d'une façon un peu curieuse, d'une loi refondue...
M. Arteau (Jean-François) : ...Québec.
C'est étonnant quand même, parce que Makivik est un organisme à but non
lucratif, bien sûr, mais qui est créé non pas en vertu de la partie III de
la Loi sur les compagnies, comme tous les OBNL, mais en vertu d'une loi
refondue adoptée par l'Assemblée nationale du Québec.
Donc, Makivik, son rôle, bien sûr,
principal, c'est un rôle de représentation politique au nom des Inuits du
Nunavik, qui sont au nombre d'à peu près 14 000, qui, bien sûr à forte
majorité dans les 14 villages nordiques du Nunavik. Mais quand même, de
plus en plus, à peu près un millier vivent à Montréal, dans la ville de
Montréal. Makivik a aussi un rôle en développement économique. Makivik, c'est
une force économique canadienne qui est assez méconnue, mais Makivik est
propriétaire des Canadian North, par exemple, qui est une compagnie d'aviation
importante, est propriétaire d'Air Inuit, propriétaire de compagnies de
transport maritime, propriétaire de diverses compagnies comme la géomatique, la
création de modes. Bon, la géomatique, justement, Makivik est un moteur
économique extrêmement important.
• (12 h 10) •
On a pris, bien sûr, connaissance du
projet de loi no 37. On a participé, bien sûr, aux consultations qui ont
eu lieu précédemment au dépôt du projet de loi. On a fait des représentations à
ce moment-là. Et, un peu comme le chef régional Picard vous le mentionnait
auparavant, on n'a pas l'impression d'avoir été entendus beaucoup non plus.
Bon. En fait, l'élément principal qu'on veut soulever avec vous ce matin, c'est
que ce commissaire aux enfants autochtones, pour nous, ça ne... ça n'a pas de
signification particulière parce qu'on ne s'identifie pas comme autochtones.
C'est à dire que de la même façon que, nous, on ne s'identifie pas comme des
nord-américains, mais on va s'identifier comme Algonquins, comme Cris, par
exemple, comme Inuits, comme Atikamekws, mais pas comme autochtones.
La réalité autochtone, si on veut
l'appeler comme ça, est extrêmement explosée. Marjolaine Sioui en parlait
justement. La réalité des Inuits du Nunavik n'est pas la même que la réalité
des Inuits du Nunavut, par exemple. La réalité d'un village du Nunavik
d'Akulivik n'est très certainement pas la même que celui du village de... ou de
Kuujjuaq. Donc, tout ça est tellement éclaté qu'on comprend assez mal comment
une personne pourrait exercer ces fonctions-là pour l'ensemble des autochtones
des 11 nations du Québec. En fait, on pense pour l'essentiel que c'est
impossible. Alors, si cette personne devait avoir une connaissance sommaire,
relative, même une expérience dans une des communautés, c'est une des exigences
de la loi, c'est bien, mais ça ne sera pas suffisant. Pourquoi? Parce qu'il n'y
a personne de mieux que les Inuits pour savoir ce qui est bien pour les Inuits.
Et les Inuits le disent de plus en plus, depuis 50 ans, pour l'essentiel,
hein? La Convention de la Baie-James, quand on y pense, ça fait déjà
50 ans quand même qu'elle est signée. Il y a bien des chapitres qui ne
sont pas encore mis en œuvre, malheureusement, mais on y arrive. Tout n'est pas
gris, tout n'est pas noir, bien sûr, des choses avancent, à un point tel où les
Inuits dans des aspirations de gouvernement autonome, d'autodétermination ou
d'autres diraient de décolonisation, bien, ils font les efforts nécessaires
pour se prendre en main. Et se prendre en main, ça veut aussi dire :
Respecter la connaissance que les Inuits ont des enfants qui vivent sur le
territoire et des difficultés majeures qui sont vécues sur le territoire. On ne
prétend pas que tout est rose, bien au contraire, des choses ne sont pas roses.
Les choses doivent s'améliorer, et c'est entre autres pour ça que les Inuits
eux-mêmes ont... ont décidé de créer NIP, Nunavimmi Ilagiit Papatauvinga, qui
est dirigée par Mina Beaulne, qui est avec nous ce matin.
Donc, il y a des efforts importants qui
sont faits, et on comprend mal comment un commissaire associé aux enfants
autochtones pourrait nous aider là-dedans, sinon qu'en produisant encore une
fois... puis ce n'est pas pour rien que je dis encore une fois, des rapports,
des données, des notes, des pochettes. Ça fait 50 ans qu'on a des notes
puis des pochettes. Là, on est à l'étape de l'action, et les Inuits sont prêts
pour faire ça. Donc, ce qu'on vous recommande pour l'essentiel, puis je vais laisser
mon collègue Fabien poursuivre, c'est une création... la création d'une entité
indépendante qui pourrait être sous le chapeau de Makivik ou pas, ça n'a pas
vraiment d'importance, mais une structure inuite, en tout cas, décidée par les
Inuits, gérée par les Inuits et pour les Inuits. Des Inuits sont, depuis à peu
près toujours, l'objet de recherches. Il y a des centaines... Et ce n'est pas
une blague, il y a des centaines de chercheurs qui viennent au Nunavik tous
les... tous les ans, beaucoup en matière de santé, en matière d'éducation, en
matière de services policiers par exemple, et qui sont donc... les Inuits, des
objets de recherches. Et trop peu souvent, on a les résultats de cette
recherche-là. Alors, le temps des recherches est révolu. C'est maintenant le
temps de l'action, et il n'y a pas de meilleure façon que de confier aux Inuits
eux-mêmes les... leur propre destinée.
C'est le message principal qu'on voulait
vous transmettre ce matin, puis je vais laisser Fabien parler des autres
éléments qu'on retrouve au mémoire. Merci.
M. Pernet (Fabien) : Merci
beaucoup. Alors, dans le cadre de ce que Jean-François vient de mentionner, on
voulait...
M. Pernet (Fabien) : ...identifier
quelques éléments qui pourraient quand même être susceptibles de bonifier le
projet de loi, puis c'est des éléments qu'on a mentionnés de manière répétée
durant les consultations qui ont eu lieu cet été. Jean-François a mentionné
qu'on n'avait pas eu le sentiment d'avoir été écoutés, et, effectivement,
l'ensemble de nos recommandations n'ont pas été entendues. Alors, on les ramène
aujourd'hui, on vous les explique, on vous les propose.
Les éléments des données, par exemple, la
question de l'identification des... de l'identité inuite, dans les données,
c'est un élément qui va être essentiel. Le commissaire, le commissaire associé,
parmi leurs mandats, envoient un rapport. Alors, un rapport sur les enfants
autochtones, ça ne nous intéresse pas, pour les raisons que Jean-François a
mentionnées. Par contre, des données amalgamées sur les services que reçoivent
les enfants inuits, ça peut avoir un intérêt, c'est ce qui existe au Nunavut.
Le Nunavut a une institution similaire et, chaque année, produit un rapport qui
donne des statistiques sur les services en matière de santé, de protection de
la jeunesse, de services de garde, d'éducation que reçoivent les enfants, très
intéressant. Comment faire ça dans le cadre de cette loi? Ça prend une
identification correcte des enfants inuits où qu'ils reçoivent leurs services,
c'est-à-dire que des enfants reçoivent un grand nombre de services à Montréal,
mais ils sont noyés dans les données, leur identité n'est pas identifiée.
Alors, comment, dans ce contexte-là, on peut être capable de savoir quel est le
niveau de service, quelle est la discrimination systémique dont pourraient
souffrir les enfants inuits? On n'est pas capable. Alors, c'est dans ce
contexte-là qu'une identification inuite des... de l'identité inuite dans les
données nous paraît absolument essentielle pour assurer un tel mandat. Puis on
souhaite le faire dans un... dans un cadre de souveraineté inuite sur les
données. Alors, ça aussi, c'est un... c'est un... des mots peut-être avec
lesquels vous n'êtes pas familiers, mais c'est très simple. La souveraineté
inuite sur les données, on parle de données qui concernent des enfants inuits,
les données devraient appartenir aux Inuits. Et c'est la même chose pour le
Québec. Lorsque le fédéral lui demande des données, est-ce que le Québec
partage ses données ou l'intégralité de ses données sur les services avec le
fédéral? Bien, pas toujours, ou en tout cas celles qui l'intéressent. La
souveraineté inuite sur les données, c'est la même chose. Alors, ça, c'est un
élément, la question des données.
Deuxième élément qu'on... sur lequel on
souhaite insister, c'est la question du pouvoir d'enquête. En matière de lésion
de droit en protection de la jeunesse, c'est important pour nous... c'était la
recommandation de la commission Laurent, mais c'est important pour nous que ce
pouvoir d'enquête soit transféré au commissaire associé ou à une institution
indépendante, encore mieux, à ce sujet-là. Puis une des raisons pour lesquelles
c'est important, c'est que — Jean-François aime parler de la
Convention de la Baie-James — il y a des droits spécifiques pour les
Inuits qui viennent avec la Convention de la Baie-James. Dans un contexte où un
commissaire doit protéger les droits des enfants inuits, il faut absolument
tenir compte de ces droits spécifiques pour exercer ce mandat, et on considère
qu'un commissaire qui tiendrait compte de ces droits spécifiques pourrait
remplir ce mandat d'une manière beaucoup plus pertinente pour les enfants
inuits que la CDPDJ, qui ne tient pas compte nécessairement de ces droits
spécifiques à l'heure actuelle. Alors, ça, c'est le deuxième élément.
Puis finalement, la question de
l'indépendance du commissaire, on y revient. Évidemment, on nous a toujours
présenté l'indépendance du commissaire, nommé par l'Assemblée nationale. Quand
on regarde le texte du projet de loi, il semblerait que le commissaire associé
soit nommé par le gouvernement. Ce n'est pas tout à fait ce qu'on avait entendu
jusqu'à maintenant. Oui, le commissaire associé serait nommé par l'Assemblée,
mais il y a peut-être une petite nuance ici. Puis, en termes d'apparence, on se
demande pourquoi est-ce que, pour les autochtones, pour les Premières Nations,
les Inuits, ça serait le gouvernement plutôt que l'Assemblée nationale. Je
pense qu'on peut se poser cette question. Mais, plus largement, on considère que,
s'il y a un mandat à l'égard des enfants inuits, il y a une responsabilité de
ce commissaire à l'égard des Inuits qui doit vraiment être mise de l'avant. Et
donc on demande à ce sujet-là que les Inuits, par l'intermédiaire de Makivik
notamment, qui est l'institution chargée de faire la représentation politique,
soient capables de faire le même type de questionnement que l'Assemblée
nationale serait capable de faire, pour s'assurer que les services qui sont
rendus, les questionnements, les rapports, les interprétations, même, des
données soient conformes à la réalité du Nunavik.
Alors, je m'arrêterais là. Je pense que ça
décrit l'essentiel de ce qu'on demande dans notre rapport, vous avez vu les
recommandations, mais voilà, on souhaitait vous les présenter et vous les
expliquer.
Le Président (M. Provençal)
:Merci pour cette présentation. Alors,
nous allons débuter l'échange avec M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Carmant : Oui, merci
beaucoup. Merci à vous trois... à vous quatre d'être présents aujourd'hui. Vous
savez, on a travaillé ensemble sur des projets, on... par exemple Agir tôt, on
a amené un modèle, et vous l'avez adapté à la réalité du Nunavik. Ça a été un
grand succès, puis j'en... ça, j'en suis très fier, de la collaboration qu'on a
eue avec vous. Puis, tu sais, j'aimerais qu'on ait ce même type de
collaboration.
Quand vous parlez de... d'un commissaire
indépendant, l'enjeu que...
M. Carmant : ...que l'on
craignait, bien, que l'on prévoyait, c'est justement : Est-ce qu'il va
falloir nommer 14 ou 12, 13 commissaires indépendants? Nous, on s'est
beaucoup mis sur le modèle du Protecteur du citoyen. Et, dans le Protecteur du
citoyen, c'est des vice-présidents qui sont nommés par le gouvernement. Donc,
peut-être me dire s'il y a un moyen d'arriver à un tel... tu sais, ne serait-ce
qu'en leur donnant quand même une certaine autonomie, ça, je suis tout à fait
d'accord. Mais est-ce qu'il y a quand même une certaine ouverture? Parce que,
s'il faut créer 13 institutions différentes, vous savez, ça va... c'est
complexe, là.
M. Arteau (Jean-François) : Évidemment,
c'est un bon point que vous soulevez, M. le ministre, et on y a pensé aussi. Ce
serait un peu ridicule que de nommer 14 personnes ou 11 personnes par
l'Assemblée nationale. Et généralement, c'est le plus haut dirigeant d'une
organisation qui est nommé par l'Assemblée nationale. Ses collaborateurs, des
vice-présidents, par exemple, sont nommés par le gouvernement, ça, c'est
correct.
• (12 h 20) •
Maintenant, c'est... évidemment que c'est
un élément d'importance pour nous, mais ce qui est encore plus important, c'est
la connaissance que cette personne-là doit avoir des Inuits. Alors que le
commissaire ou la commissaire principale travaille en collaboration avec la
structure indépendante qui serait créée au Nunavik, c'est tout à fait normal
puis c'est tout à fait souhaitable. Nous aussi, on veut collaborer puis vous
soulevez Agir tôt, c'est vrai que ça s'est très bien passé. Puis c'est vu chez
nous comme étant un modèle de réussite. Donc, il y a moyen de très bien faire.
Maintenant, en nommant quelqu'un qui est responsable des autochtones, on n'y
arrivera pas. On n'arrivera pas à nos fins parce que cette personne-là, toute
bonne soit-elle, ne pourra pas avoir une connaissance fine des Inuits du
Nunavik et des Atikamekw d'Obedjiwan ou de Manawan, par exemple, et des Cris de
Waswanipi, ou je ne sais trop où. C'est trop difficile. Donc, une connaissance
partielle, ça rend des résultats partiels. Fabien en a parlé, la Convention de
la Baie-James, c'est quelque chose de particulier quand même, ce n'est pas ...
ce n'est pas une entente comme ça, ce n'est pas un document comme ça. C'est un
traité qui concerne, pour la Convention de la Baie-James et du Nord du Québec,
que les Cris et les Inuits. Les Naskapis aussi, un autre traité, qui s'appelle
la Convention du Nord-Est québécois. Ces droits-là, qui sont protégés par la
Constitution canadienne, sont extrêmement importants. Et malheureusement, les
Atikamekw, pour revenir à l'exemple des Atikamekw, ne bénéficient pas de ces
mêmes droits-là. Alors, un commissaire associé qui aurait une connaissance
assez fine pour bien faire les distinctions, à savoir que les droits sont
protégés par l'article 35 de la Constitution, puis je vous rassure, je ne
vous donnerai pas un cours de droit constitutionnel ce matin, là, bon, qui sont
protégés par la Constitution et qui sont au même niveau, dans la hiérarchie des
lois, qu'une loi fédérale, par exemple, que la Constitution canadienne, ça me paraît
très peu probable.
Alors, nous, on se dit : On est prêts
à collaborer, on est prêts à travailler avec le Québec, comme Makivik et la
région de... l'a démontré plusieurs, plusieurs fois, mais entendez-nous.
Laissez-nous vous... vous instruire en quelque sorte et laissez-nous apprécier
la situation et laissez-nous vous proposer des recommandations qui vont avoir
un effet véritable chez nous, plutôt que d'avoir un rapport sur les autochtones
en général du Québec. Certains vivent en milieu urbain, d'autres... Bon, ce
n'est pas... ce n'est pas à vous que je vais enseigner ça, là, mais donc les
réalités sont complètement différentes. C'est pour ça que c'est important
d'avoir un ancrage au Nunavik.
M. Carmant : Et comment vous
verriez la nomination de ce commissaire? Tu sais, où le placeriez-vous dans
l'organigramme? Tu sais, c'est parce que, tu sais, c'est ça que j'ai besoin de
comprendre, dans votre vision à vous.
M. Arteau (Jean-François) : Bien,
il faut que ce soit une organisation ethnique. Donc, il faut que ça représente
les Inuits du Nunavik, comme... comme un peu NIP avec... c'est une organisation
ethnique. Elle parle... au nom des Inuits du Nunavik. Donc, est-ce que ça doit
être placé sous Makivik? Moi, je pense que oui. Moi, je pense que ce serait un
endroit approprié pour ça, parce que Makivik, c'est une organisation qui existe
depuis longtemps, qui bénéficie de budgets importants, qui a une organisation
bureaucratique solide, forte. Oui, en procurant par contre à cette personne-là
toute l'indépendance nécessaire, parce que Makivik, c'est un corps politique,
il y a des élections à Makivik à tous les trois ans. Ça vient vite, M. le
ministre, à tous les trois ans, bon, on vient de sortir d'une élection à la
présidence. Des fois, c'est compliqué, bon. Donc, ça prendrait une
indépendance, mais elle devrait, cette structure-là, relever de Makivik pour
s'inscrire justement dans une démarche ethnique, pour que tout ça soit
consolidé. Makivik a une vue générale sur l'ensemble des services qui sont offerts
aux Inuits, que ce soit en santé, en éducation, en affaires municipales, alors
que l'ARK, qui est par exemple, l'administration régionale Kativik, qu'on peut
assimiler à une MRC, est non ethnique, l'ARK ne parle pas au nom des Inuits du
Nunavik, elle parle au nom de la population du Nunavik, et ce n'est pas qu'une
vue de l'esprit, là. Il y a véritablement une perspective qui est différente
quand on est une organisation publique que lorsqu'on est une organisation
ethnique, comme Makivik.
M. Carmant : Et quel serait
le lien avec votre réseau de la santé locale dans... si ce poste là est situé
au niveau de Makivik?
M. Arteau (Jean-François) : Bien,
c'est sûr qu'un poste, tu sais, comme celui-là ne peut pas travailler de façon
isolée. Il va devoir travailler avec la Régie de la santé, il va devoir
travailler avec NIP...
M. Arteau (Jean-François) : ...il
va devoir travailler avec les établissements, les hôpitaux, Inuulitsivik,
Tulattavik, ça, c'est sûr, il va devoir travailler avec les protections de la
jeunesse qui sont déjà en place. Mais quand même, justement, parce qu'elle ne
sera pas, cette structure-là, dans le réseau de la santé, ne serait-ce que pour
ça, ça va lui procurer une certaine indépendance. Et il ne s'agit pas de juger,
là, on n'est pas dans... on n'est pas dans une démarche de blâme ou de
punition, là, pas du tout. On est dans une démarche de création d'un monde
meilleur. Donc, il faut arriver avec des solutions qui sont pratiques, qu'on
peut mettre en œuvre rapidement. Il ne s'agit pas de savoir c'est la faute à
qui, c'est la faute à tout le monde et tout le monde peut participer à la
solution. Et une structure comme celle-là devrait proposer des solutions plutôt
que de lancer des blâmes. Lancer des blâmes, ça ne fait pas avancer une société
beaucoup, beaucoup, ça.
M. Carmant : O.K. Et
seriez-vous d'accord avec ce... que ce commissaire-là ait une vue globale sur
tous les facteurs de prévention associés au développement des enfants?
M. Arteau (Jean-François) : Absolument.
Et il ne travaillera pas en silo non plus par rapport au gouvernement du
Québec. Une telle structure, une telle personne va devoir aussi être alignée
sur les grandes orientations du Québec, c'est bien entendu, mais quand même
avec une saveur très particulière. Et je pense que c'est l'ensemble du système
de la protection de la jeunesse qui va en profiter, si on... si on arrivait à
une telle solution.
M. Carmant : D'accord.
Parlant de... au niveau de la protection, comment se déroulent les choses
actuellement au Nunavik?
M. Arteau (Jean-François) : Peut-être
que...
Des
voix :
...
Mme Munick-Watkins
(Jennifer) :
OK,
I'm just going to speak to Mina, quickly.
Mina… (S'exprime
dans une langue autochtone).
O.K. Good. Thank you very
much. I'll speak in English. I'm the executive director of the Regional Health
Board in Nunavik. Thank you for the invite.
Currently, we have two
directors of youth protection on the Hudson coast with Inuulitsivik and on the
Ungava coast with the Ungava Tulattavik Health Centre in Kuujjuaq. And we have
Mina, my colleague here, who will be speaking right after me to answer your
question, Minister.
It's been quite a rough
post-COVID, as you're aware. I've been meeting with your colleagues at the MSSS
quite often. But all to say it's the number of cases with children being placed
under the DYP has evolved more from putting out fires than from emergency cases
to trying to get more social workers on site.
It's always been a
problem, and post-COVID didn't help the situation in our region. There… Our
biggest problem now with the DYP are daycare spaces for children that are
placed under the youth protection. We did lobby with the Regional Government
who oversees the daycare spaces in the region, and we will be meeting again
next week with Makivik Corporation who lobby on behalf of Inuit and who will be
hopefully meeting with the Regional Government in regards to this growing
problem that we have for the DYP.
Our recruitment is always
an issue as well because of the lack of infrastructure we have. As you're
aware, we're quite backlogged with housing within the health network, so that
didn't help the situation as well. We're somewhat two to three years behind.
And hopefully, in the next 2023, 2024, 2025 phases, that we'll have more
housing for staffs that work under the two establishments that review the DYP.
And we do have the two
youth protections, and Mina, who do work with MSSS regularly in regards of
recruitment, if we need more staff that need to be recruited across our 14
communities in Nunavik. All to say I have… we have a good working relationship
with the three, including with Mina, that try to ensure that we have a good
staffing in all communities. But, like I said, it was more of a struggle on the
Hudson coast with Inuulitsivik with the crisis of social workers and nurses and
physicians. But it really depends. In the winter, it was a lot harder,
summertime as well because the recruitment, with holidays, people, the
turnover… But we manage to have a good working relationship between the two
establishments and the Health Board.
M. Carmant : Does… make a difference with the family process that you are
installing? Has that been very helpful…
Mme Munick-Watkins
(Jennifer) : ...the whole family process is
new, as you know, that treatment center's new facility opened less than a year
ago and they do have quite a backlog of clientele that want to attend as a
family. But I look forward and I am very hopeful for the future of... that may
help evolve our region to become healthier. Healthier communities, safer
communities for our children.
But as I speak to you, I
visited last week with the MSSS to, you know... on the Hudson coast and they
were very straightforward with... that they want a recovery center as well on
their coast in the future. But I'm very hopeful for...
M. Carmant :
Ok, so maybe we can talk about that.
Mme
Munick-Watkins (Jennifer) : Sure.
M. Carmant : Un autre point
qui est important, alors, dans le processus, on crée un commissaire, le comité
consultatif des enfants, est-ce que... des jeunes et enfants, est-ce que vous
le créeriez, également, avec le même, un peu, processus de consultation qu'on
nous a proposé au niveau de Premières Nations?
• (12 h 30) •
M. Arteau (Jean-François) : Oui.
Oui, c'est un modèle intéressant. On consulterait bien sûr... qui est une
association qui représente les jeunes du Nunavik, donc... se joindrait à la
consultation, mais on trouve que c'est une approche intéressante et on
créerait, oui, une structure semblable à celle que vous proposez.
M. Carmant : O.K. Et vous
seriez capable d'avoir un groupe, là, qui sort des... je pense, les 14 villages
sur les deux côtes?
M. Arteau (Jean-François) : Oui,
parce qu'encore une fois chacun vit des réalités différentes, alors on
essaierait d'avoir des gens de l'ensemble du Nunavik, peut-être même à
Chisasibi, parce qu'il y a plusieurs Inuits à Chisasibi.
M. Carmant : O.K., d'accord.
Est-ce qu'il y avait... Mais il y aurait quand même des enjeux de déplacement
ou... Comment vous...
M. Arteau (Jean-François) : Oui,
mais Internet, ça va mieux, quand même, au Nunavik, avec le programme que le
gouvernement a lancé, d'ailleurs, avec StarLink, et tout ça, c'est beaucoup
plus fiable que c'était. Il y a la fibre optique qui s'installe de temps à
autre. Donc, ce n'est pas c'est pas rare, maintenant, qu'on a des rencontres de
façon virtuelle. Donc, ça fonctionne beaucoup mieux que ça fonctionnait, et
probablement qu'une structure comme celle-là pourrait fonctionner, dans une
certaine mesure, virtuellement.
M. Carmant : D'accord. Est-ce
que vous pensez que le commissaire pourrait faire partie, avoir, organiser des
rencontres, quand même, avec les différents commissaires? Peut-être pas
partager toutes les données, comme vous mentionnez, mais, tu sais, c'est quand
même avoir une certaine collaboration entre les divers commissaires.
M. Arteau (Jean-François) : Certainement.
Ah oui! On est tout à fait disposés à collaborer et à partager les données, ça,
ce n'est pas un problème. Ce qu'on veut éviter, c'est une méconnaissance de la
réalité du Nunavik qui mènerait à des recommandations qu'on ne pourrait pas
mettre en œuvre au Nunavik. On l'a vécu quelques fois, par les années passées,
et ça, malheureusement, c'est du temps perdu. Alors, encore une fois, comme les
Inuits sont les meilleurs pour connaître leur réalité et les solutions qu'on
peut apporter à la situation, qui est difficile, il faut le dire, bien, c'est
pour ça qu'on propose une structure indépendante au Nord. Mais, en ce qui
concerne la collaboration, le partage des données, évidemment qu'on est très
ouverts à ça.
M. Carmant : D'accord. Donc,
si on met un règlement retardant l'entrée en vigueur des différents
commissaires, est-ce que ce serait une possibilité pour vous dans le projet de
loi actuel?
M. Arteau (Jean-François) : Certainement.
Ça nous donnerait le temps d'être mieux consultés. Ça nous donnerait le temps
aussi de vous transmettre de façon plus précise, peut-être, ce qu'on voudrait
voir arriver.
M. Carmant : D'accord. Bien,
merci beaucoup.
M. Arteau (Jean-François) : Merci.
M. Carmant : Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, Mme la députée de
Robert-Baldwin.
Mme Garceau : Merci beaucoup
de votre présence aujourd'hui et de vos représentations fort importantes. Je
voulais... En lisant votre rapport, je sais que vous avez mentionné des
consultations préliminaires avec le ministre, avant le dépôt du projet de loi,
et j'ai été quand même frappée par votre constat de cette rencontre-là et que
vous avez mentionné que vous ne vous sentiez pas écoutés, il y avait une
absence de considération des perspectives inuites et il y avait un manque de
légitimité. Et dans votre... Et je voulais avoir plus de détails à ce sujet-là,
concernant cette rencontre et qu'est-ce que vous avez exprimé comme souhaits
concernant ce projet de loi.
M. Arteau (Jean-François) : Bien,
c'est une bonne question... pour le contenu plus précis, je vais laisser mon
collègue Fabien y répondre, mais peut-être deux ou trois éléments de contexte.
Consultation, ça a toutes sortes de sens, là, bon. Chez nous, la consultation,
on l'entend par une écoute, on veut être écouté. Évidemment, on ne prétend pas
avoir un droit de veto, là. Quand les gens nous consultent, c'est normal que ça
arrive que les recommandations qu'on fasse ne soient pas retenues. Ça, c'est
correct, ça fait partie de la game...
12 h 30 (version non révisée)
M. Arteau (Jean-François) : ...maintenant,
ce qui n'est pas normal, c'est de ne pas comprendre ce qu'on représente et de
volontairement ignorer un certain nombre de choses.
Je reviens encore à la Convention de la
Baie James. Il y a une tendance naturelle à standardiser les choses. Ce serait
donc plus simple si tout le monde était pareil, mais ce n'est pas ça la vraie
vie. Donc la Convention de la Baie James, au Nunavik, elle est particulière,
elle a un sens particulier, et la méconnaissance dont on fait preuve, ces
années-ci, à l'égard de la Convention de la Baie James est absolument
ahurissante. C'est comme si ça n'existait pas. On s'en est longtemps targué
parce qu'on disait que c'était le premier traité de revendications
territoriales moderne, et tout ça. Juste pour que vous sachiez, ce n'est même
pas un traité qui avait été négocié à l'époque, c'est une entente hors cours
pour le développement d'Hydro-Québec. Bon. On a beaucoup évolué de plus, mais...
depuis.
Mais la méconnaissance qu'on a de ça fait
en sorte que l'écoute qu'on nous porte est souvent fausse. Et je ne veux pas
prêter de mauvaises intentions aux gens qui mènent la consultation, ce n'est
pas ça du tout, là. Ce n'est pas des gens qui ont des intentions malicieuses ou
malveillantes, ce n'est pas ça du tout. C'est une méconnaissance, et cette
méconnaissance là, bien évidemment que ça a des répercussions sur, par exemple,
le fait de bien entendre et de bien comprendre ce qu'on recommande et de
parfois de juger un peu de haut en disant : Bien, ça ne marchera pas, puis
comment ça qu'avec eux autres, c'est toujours compliqué, puis ce n'est jamais
pareil, puis ils ne veulent pas remplir tel truc, puis les données, c'est donc
compliqué, tout ça est éparpillé partout? C'est juste normal que ce soit comme
ça, puis je vais laisser Fabien peut-être compléter ma réponse.
M. Pernet (Fabien) : Oui.
Bien, merci. Je pense que je vais rebondir sur la question de la
méconnaissance. Je pense que c'est... c'est quelque chose qui a... qui a marqué
en fait les consultations qu'on a eues. Bon, il y a eu les délais, c'était très
court. On a fait des rencontres à très brève échéance pendant... en réalité, en
ayant assez peu d'information au début. On a pris le temps avec la régie
régionale, avec... avec... de créer une première position, des premiers
éléments de position et de recommandations qu'on a portées, on en avait une
liste, une dizaine, bon, puis pour la dizaine, lorsqu'on nous a présenté ce qu'allait
devenir finalement une partie du projet de loi, des éléments qui allaient
construire le projet de loi, on a bien vu que les éléments qu'on a proposés n'étaient
pas... n'étaient pas retenus. Donc, on a fait le constat que ce qu'on proposait
ne figurait pas parmi les priorités qu'ils souhaitaient être inclus au projet
de loi.
Et pourquoi la méconnaissance? C'est parce
que, dans bien des cas, ce qu'on nous a présenté, c'était ce qu'on voulait
développer pour le commissaire, et on a cherché à adapter, à tirer un petit peu
ça : Qu'est ce que ça pourrait vouloir dire du côté du commissaire
associé? Et là, il y avait un écart majeur, parce que nous, ce qu'on souhaite,
c'est qu'on parte de notre réalité, la réalité inuite, de la réalité du
Nunavik, et qu'on construise à partir de ça ce que serait cette institution. Et
ce n'est pas ça qu'on a eu comme... comme impression. Il y avait des
paramètres, il y avait un commissaire, puis à côté, on a créé quelque chose d'autre
qui... et le résultat, c'est que ça ne correspond pas vraiment à ce qu'on... à
ce qu'on demande. Alors, en quelques mots, ce serait... ce serait ça l'impression.
Mme Garceau : O.K. On sait
très bien que le ministère n'a pas repris les recommandations de la commission
Laurent concernant le commissaire dédié aux Affaires autochtones. Je comprends
ce que vous avez mentionné concernant que, pour vous, il faudrait changer
évidemment la terminologie pour que ça représente votre culture, vos droits.
L'APNQL qui est derrière vous a fait une
proposition concernant qu'un... le commissaire, parce que là on prend l'élément
d'indépendance. Hein, on se comprend, là, c'est ça qui est au cœur de vos
revendications, c'est que ça soit un commissaire qui va respecter les droits
des Premières Nations et des Inuits. Et donc la recommandation de l'APNQL, c'était
d'avoir un commissaire indépendant dédié aux enfants de Premières Nations et d'Inuits,
avec un comité consultatif qui serait représenté de différents membres des
nations pour venir appuyer conseiller ce... ce commissaire qui aurait tous les
pouvoirs, toutes les fonctions, tout serait transféré de la Commission des
droits de la personne et de la jeunesse à ce commissaire. Qu'en pensez-vous? Je
voulais avoir votre point de vue à ce sujet-là.
M. Arteau (Jean-François) : Bien,
aux premiers abords... au premier abord, comme ça, c'est une bonne idée. C'est
une meilleure idée en tout cas que ce qui est proposé dans le projet de loi,
sans l'ombre d'un doute. Mais quant au transfert des pouvoirs de la Commission
des droits de la personne et des droits de la jeunesse, nous aussi on est
100 % derrière ça. Il faut qu'il y ait un transfert véritable qui soit
opéré, autrement, le commissaire associé, si on veut garder cette
terminologie-là, n'aurait...
M. Arteau (Jean-François) : ...pas
suffisamment de pouvoirs, là. Bon, il y aurait un pouvoir de recommandation,
comme je le disais tantôt, de faire des notes, des rapports, ce qui n'est pas mauvais,
là, je ne veux pas dénigrer ça, mais ce qui n'est pas ce qu'on recherche, pour
l'essentiel.
Bon, maintenant, avoir un commissaire
indépendant aux autochtones, bien là, on tombe dans la même dynamique,
c'est-à-dire que les Inuits sont tellement différents, et pas que
géographiquement, là, ils sont différents dans leurs droits, dans leur
histoire. Bon, ça, on dit ça, de bien des points de vue, que ça va demeurer
difficile d'avoir quelqu'un, tout indépendant soit-il, qui représente
l'ensemble des autochtones. Nous, en tout cas, les Inuits, on se distingue
toujours de ça, en disant : On a une réalité différente, on a... on vit
dans un endroit différent, on ne vit pas dans des communautés autochtones, en
vertu de la Loi sur les Indiens, on vit dans des villages nordiques, qui sont
des municipalités, comme Lévis, Terrebonne ou n'importe où, avec un maire, six
conseillers municipaux. Donc, la réalité est complètement différente, et c'est
la Convention de la Baie-James qui a changé ça. Donc, à cause de ça, bien,
généralement, au plan national... au plan fédéral, je devrais dire, plutôt, on
demande à ce que les Premières Nations soient ensemble, les Inuits ensemble,
les métis ensemble. Bien, au Québec, la résonance de ça, c'est que les Inuits
soient aussi distincts des autres, c'est-à-dire qu'ils aient leur propre
structure, leur propre façon de fonctionner, en collaboration, bien sûr, avec
les Premières Nations et avec le Québec.
Mme Garceau : Donc, deux
commissaires?
M. Arteau (Jean-François) : Donc,
deux commissaires, oui.
Mme Garceau : Ça, vous seriez
d'accord avec ça?
M. Arteau (Jean-François) : Ça,
on serait partants pour ça. Oui, exact.
• (12 h 40) •
Mme Garceau : O.K. Avec quel
genre de processus, en termes de nomination, et dans quel délai? J'aimerais
vous entendre là-dessus, en termes... Parce qu'il y a eu des discussions de
peut-être reporter ce chapitre III de la nomination du commissaire, donc,
associé, là. Mais si on allait de l'avant? Moi, j'aimerais vous entendre là-dessus,
au niveau du processus de la nomination, et dans un délai de combien de temps.
M. Arteau (Jean-François) : Bien,
c'est une bonne question que vous posez, parce qu'en fait on ne veut pas rater
le train, là, le train passe, le projet de loi arrive, donc ce serait un peu
dommage, je pense, de faire fi de la réalité autochtone parce que les
autochtones des Premières Nations et les Inuits ont des visions différentes. Je
pense qu'on doit quand même procéder rondement, parce que ça ne va pas bien, la
protection de la jeunesse, là, il y a des enjeux majeurs, là. Il y a des
enfants par centaines qui sont signalés par année, qui sont placés dans des
familles inuites, non inuites, sur le territoire, à l'extérieur du territoire.
Le portrait n'est pas jojo, là, donc je ne pense pas qu'on ait le luxe
d'attendre très, très longtemps.
Ceci dit, la réglementation pourrait faire
en sorte que les Inuits soient consultés correctement, Makivik, la régie de la
santé, NIP, ..., bon, pour proposer la nomination de quelqu'un comme
commissaire aux enfants inuits, tiens, appelons-le comme ça. Mais on parle de
quelques mois, là, on ne parle pas de plusieurs années, là. On ne voudrait pas,
encore une fois, retarder tout le processus sous prétexte d'un élément
procédurier, là, qui est la consultation. Chez les... on n'est pas nombreux,
hein, on est 14 000... chez les Inuits, la consultation se fait
rapidement, tout le monde connaît tout le monde, les organisations se
connaissent bien. Donc, quant à l'appréciation à l'interne, au Nunavik, d'un
tel élément, ça peut se faire assez rondement, là, assez rapidement.
Mme Garceau : O.K. J'aimerais
vous entendre concernant les enjeux liés à la protection de la jeunesse, les
difficultés, si vous pourriez nous donner des détails à ce sujet.
M. Arteau (Jean-François) : Oui.
Les enjeux sont nombreux. Comme le disait Jennifer tout à l'heure, Jennifer
Munick-Watkins, le recrutement, c'est un enjeu primordial. C'est difficile, de
façon générale, de recruter au Québec, alors imaginez-vous, quand c'est
difficile de recruter à Montréal, ce que c'est à Akulivik. C'est extrêmement
difficile. Donc, les gens qu'on est capables de recruter sont des gens remplis
de bonne volonté, remplis d'enthousiasme, et tout ça, qui ont, bien souvent, peu
ou pas d'expérience, et qui vont passer, et ça, c'est un peu un drame, parce
que le taux de roulement est tellement élevé que c'est impossible d'installer
une mémoire corporative. Donc, quelqu'un arrive, c'est nouveau, il y a très peu
de ressources autour de lui, malheureusement, il est souvent laissé à lui-même.
Je vous parle, dans un village, là. Kuujjuaq, c'est différent. Bien, Kuujjuaq,
c'est un village aussi, mais c'est la capitale, si on veut. Dans les plus
petits villages, la réalité est différente.
Et il y a aussi l'élément de la langue.
Évidemment, les gens qu'on recrute sont souvent des francophones, qui vont
parler anglophone, mais qui, à peu près jamais, ne vont parler inuktitut. Donc,
pour intervenir dans des sujets aussi sensibles que ceux-là, et de ne pas
parler la langue maternelle des Inuits, de ne pas parler inuktitut, c'est
extrêmement difficile. C'est pour ça, entre autres, qu'on a créé NIP. NIP
intervient auprès des familles, en inuktitut, «the Inuit way», comme on dit, à
la façon des Inuits, en respectant leurs valeurs. Puis ce n'est pas une
question de respect, c'est une question d'intégration. Je veux dire, ce sont
des Inuits qui interviennent auprès des Inuits. Il n'y a pas de meilleure
solution que celle-là. Alors, Chantale ou Mario qui vient nous aider, elle est
remplie de bonne volonté, cette personne-là, mais, malheureusement, elle ne
restera pas longtemps.
Et cette idée qu'on avait, pendant un bout
de temps, que le Grand Nord, c'était le Klondike, qu'on allait faire beaucoup...
M. Arteau (Jean-François) : ...privilégié,
ça ne s'avère pas, ça. On ne vient pas au nord pour devenir riche, là, on vient
au nord pour aider et, malheureusement, c'est difficile, ces années-ci, de
recruter des gens.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Alors, je vais céder
la parole au député de Saint-Henri—Sainte-Anne.
M. Cliche-Rivard : D'abord,
merci beaucoup pour votre présentation. Merci d'être ici. J'ai lu votre mémoire
avec attention puis je voudrais y revenir parce que les mots sont importants.
Puis vous êtes parmi probablement le mémoire où les mots sont peut-être les
plus percutants. Et je pense que c'est important que la commission les ait en
tête : «Tel que le projet de loi est présenté, nous sommes d'avis que cette
institution est inutile et que le commissaire ne possède tout simplement pas la
légitimité d'exercer son mandat auprès des enfants inuits». Vous parlez d'une
timidité déconcertante lorsque l'on replace dans le contexte la défavorisation
de l'enfance au Nunavik. Quand même. Et vous me dites que, finalement, il n'y a
absolument... vous dites que le mandat est vidé de sa pertinence. Donc, quand
même, ce sont des mots très forts. Finalement, le message que vous envoyez
aujourd'hui, c'est que vous n'avez pas du tout été entendus sur ce que vous
recommandiez, non?
M. Arteau (Jean-François) : Exactement.
C'est à dire, on n'a pas suffisamment été entendus et on nous a vraiment mal
compris. De deux choses l'une. Et les éléments qu'on a portés à l'attention du
gouvernement du Québec étaient, je pense, tout à fait fondés. Il aurait été
bien de les écouter davantage. Mais, comme le disait Fabien tout à l'heure,
quand on essaie d'adapter un système auquel on tient beaucoup, beaucoup pour
satisfaire d'autres personnes, c'est bien différent que de partir de leurs
préoccupations à eux puis de bâtir une solution avec eux. Et ce n'est pas le
sentiment qu'on avait, ce n'est pas du tout le sentiment qu'on avait.
Alors, quand on dit qu'il n'y a pas de
légitimité, qu'elle est vidée de son sens, tout ça, c'est tout à fait vrai à
cause de la méconnaissance dont j'ai fait état tout à l'heure. Les Inuits sont
un peu tannés, je vais vous le dire un peu bêtement, d'être regardé un peu de
haut en se disant : Bien, vous auriez dû faire ça ou il y avait tel
programme de disponible pour vous. Pourquoi vous n'avez pas fait ça? Ça, là,
fait 45 ans qu'on essaie de faire ça, ça ne marche pas. Bien, ce serait le
fun qu'on comprenne qu'un moment donné les Inuits qui ont survécu pendant des millénaires
dans des conditions absolument effroyables doivent bien avoir deux ou trois
solutions intéressantes à proposer. Mais si on ne les écoute pas suffisamment
et si on ne leur donne pas les moyens et les ressources financières nécessaires
pour se prendre en main, on en reste au niveau du discours.
M. Cliche-Rivard : Qu'est ce
qu'il dirait, un éventuel commissaire, de la façon de fonctionner du
gouvernement aujourd'hui?
M. Arteau (Jean-François) : Un
commissaire inuit?
M. Cliche-Rivard : Oui.
M. Arteau (Jean-François) :
Il dirait que ça ne correspond pas à la réalité inuite. Il dirait que les
Inuits, ce n'est pas comme ça qu'ils fonctionnent, ce n'est pas comme... Je le
disais tantôt, ce n'est pas «The Inuit way». «The Inuit way», c'est bien
différent de ça. On discute avec les gens, il y a toute une structure familiale
qui est différente de celle que toi... vous et moi on connaît, bon. Il n'y a
rien de pareil. Évidemment qu'on habite le même territoire, évidemment qu'on partage
des valeurs, il y a des valeurs qui sont universelles, mais la façon de les
exprimer, la façon de les intégrer, ces valeurs-là, sont différentes. Et dans
un domaine aussi sensible que la protection de la jeunesse, on ne peut pas
intervenir efficacement si on n'est pas Inuk.
M. Cliche-Rivard : Et vous
étiez là dès le début, de A à Z, vous en parlez dans votre mémoire, vous avez
collaboré, vous avez été disponible, vous avez rendu des recommandations.
M. Arteau (Jean-François) : Absolument,
tous ensemble d'ailleurs, dans un effort collectif, oui.
M. Cliche-Rivard : Et là vous
dites : On est un peu tannés, là.
M. Arteau (Jean-François) : Ça
serait le fun qu'on passe à autre chose, oui.
M. Cliche-Rivard : Parce que
ce refrain là, vous l'avez depuis... on ne nommera pas l'année, là, je pense,
ça fait...
M. Arteau (Jean-François) : Depuis
plusieurs, plusieurs... trop d'années, on va dire ça comme ça.
M. Cliche-Rivard : Bien, un
énorme merci pour votre travail.
M. Arteau (Jean-François) : Merci
à vous.
M. Cliche-Rivard : Je pense
que ce n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd, même si je n'aime pas
beaucoup l'expression, là, mais on va y faire suite. Merci.
M. Arteau (Jean-François) : Merci,
merci grandement.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. On va conclure cet
échange avec le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup pour votre présentation. J'avais noté la même phrase
que mon collègue ici concernant le fait que vous jugez les nouvelles
institutions inutiles pour vous, évidemment pour vos communautés, et que vos
commentaires et propositions n'avaient pas été entendus ni considérés, d'autant
plus qu'ils avaient été présentés, là, dans des délais très serrés et peu
respectueux, dites-vous.
Maintenant, j'apprécie le fait que vous
soyez constructif dans la mesure où vous dites : Bon, ça ne fait pas notre
affaire, mais on va quand même commenter le projet de loi puis... Mais je
voudrais quand même voir plus précisément sur vos attentes ou vos besoins,
concernant, par exemple, l'idée, si on devait aller de l'avant avec un
commissaire inuit. Vous parlez d'avoir tous les pouvoirs de façon indépendante
et les pouvoirs d'enquête nécessaires. Dans le projet de loi actuel, le
commissaire, ma compréhension, c'est qu'il doit...
M. Arseneau : ...d'abord et
avant tout avoir pour fonction de promouvoir le bien-être des enfants, le
respect des enfants, ses droits, et tout ça, et les pouvoirs d'enquête à
l'heure actuelle ne sont pas là. Vous semblez dire que les pouvoirs d'enquête,
c'est essentiel. J'aimerais que vous nous... vous puissiez nous illustrer
pourquoi c'est si important pour vous. Et puis est-ce que, quand on parle des
pouvoirs d'enquête, c'est ajouté aux autres pouvoirs et devoirs, là, sur la
promotion, et tout ça?
M. Pernet (Fabien) : Bien, je
vais peut-être apporter un premier élément de contexte, là, pour comprendre
l'importance des pouvoirs d'enquête. De notre point de vue, c'est beaucoup la
commission Viens, là, qui a établi cet élément-là, la discrimination systémique
dans les services publics. Alors, parce qu'elle est là, parce qu'elle a été
établie, les pouvoirs d'enquête sont, en réalité, un moyen d'intervenir
vis-à-vis de cette discrimination systémique, soit avec des enquêtes
systémiques, justement, en tant que telles, de quelle manière on peut
travailler le système pour s'assurer qu'on évite cette discrimination
systémique dans les services qui sont offerts aux enfants inuits, ça, c'est un
élément.
Puis le deuxième élément, c'est... on
parlait de la défavorisation, de facteurs de défavorisation, tout n'est pas
noir, là, au Nunavik, pour l'enfant, ce n'est pas là, mais quand on parlait des
signalements en protection de la jeunesse, tu as dit «des centaines», au final,
c'est des milliers, des milliers sur 14 000 personnes, une population
de 14 000, c'est absolument énorme. Puis les conséquences que ça a, de
cette intervention du système, c'est qu'on a des enfants qui... qui partent au
Sud, qui vont à Montréal dans des familles non inuites, toutes très bien
intentionnées pour offrir un milieu de vie à ces enfants-là, mais la continuité
culturelle, elle n'est pas là.
• (12 h 50) •
Alors, il y a un système qui vient
intervenir, puis on sait aussi les conséquences, oui, on va protéger l'enfant
en protection de la jeunesse, mais la judiciarisation dans les parcours de vie,
elle est là, elle est connue, ça peut être l'itinérance, ça peut être d'autres
sortes de problématiques comme celle-là. Alors, c'est le genre de choses qui
nous font dire que ça prend aussi des pouvoirs d'enquête individuels, puis
qu'il soit fait d'une manière qui ressemble beaucoup plus à la prise en compte
des droits spécifiques. La CDPDJ, elle le fait avec son cadre, sa charte, puis
on ne dit pas que c'est mauvais, là, mais on dit que c'est insuffisant par
rapport... et que ça ne tient pas suffisamment compte des droits des Inuits.
Alors, ça aussi, c'est un élément qui nous semble important pour contrer cette
défavorisation.
M. Arseneau : Merci. C'est
très clair.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Alors, je remercie
les représentants de la société Makivik pour votre présence, votre
collaboration et votre contribution.
Je vais suspendre les travaux jusqu'à
15 heures. Et on se revoit cet après-midi. Merci beaucoup. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 51)
14 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 15 heures)
Le Président (M. Provençal)
:Rebonjour à tous. La Commission de la
santé et des services sociaux reprend ses travaux. Je demande à toutes les
personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 37, Loi sur
le commissaire au bien-être et aux droits des enfants. Cet après-midi, nous
entendrons les témoins suivants : l'Ordre des psychoéducateurs et
psychoéducatrices du Québec; le Barreau du Québec; Mme Mélanie Gagnon,
présidente par intérim de la Fédération des familles d'accueil et ressources
intermédiaires du Québec; et le collectif ex DPJ.
Maintenant, je vais souhaiter la bienvenue
aux représentants de l'Ordre des psychoéducateurs et psychoéducatrices du
Québec. Alors, je vous rappelle, vous aurez 10 minutes pour votre exposé,
et par la suite nous allons procéder aux échanges avec les membres de la
commission. Je vous cède immédiatement la parole.
M. L. Soucis (Félix-David) : M.
le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés membres de la commission,
bonjour. Je me présente, Félix-David Soucis, je suis président de l'Ordre des
psychoéducateurs et psychoéducatrices du Québec. Mon expérience professionnelle
se caractérise par une pratique auprès de différentes clientèles issues de la
petite enfance allant jusqu'à l'âge adulte. Je suis accompagné de Nathalie
Lacombe, psychoéducatrice et coordonnatrice aux affaires professionnelles et au
soutien à la pratique et détenant également plusieurs années d'expérience dans
le réseau scolaire, et de Rose St-Gérard, psychoéducatrice et coordonnatrice à
l'admission par équivalence et au soutien à la pratique à l'ordre, elle
détient, pour sa part, plusieurs années d'expérience dans le réseau de la santé
et des services sociaux, dont plusieurs années auprès des Premières Nations et
Inuit. Nous remercions la commission pour cette invitation. Il nous fait
plaisir de vous présenter aujourd'hui les réflexions et les recommandations de
l'ordre concernant le projet de loi n° 37, Loi sur le commissaire au
bien-être et aux droits des enfants.
Avant d'aller de l'avant avec nos
recommandations, laissez-moi d'abord vous parler de la psychoéducation. Les
psychoéducatrices et les psychoéducateurs sont issus d'une formation de
deuxième cycle et interviennent auprès des personnes de tout âge aux prises
avec des difficultés d'adaptation psychosociale ou susceptibles d'en vivre de
la vie de la petite enfance aux personnes aînées. Ils préconisent une approche
systémique en travaillant de manière à poser un regard tant sur la personne en
difficulté, sur son environnement, incluant sa famille et ses interactions avec
les divers milieux qu'ils fréquentent. Les psychoéducatrices et les
psychoéducateurs sont présents dans le réseau de l'éducation, celui de la santé
et des services sociaux, notamment en protection de la jeunesse, dans le réseau
communautaire, dans les services de la petite enfance ainsi qu'en cabinet
privé. Par leurs compétences, ils font notamment partie des professionnels
autorisés pour évaluer une personne dans le cadre d'une décision du Directeur
de la protection de la jeunesse ou du tribunal en application de la Loi sur la
protection de la jeunesse, ce qui justifie d'autant plus notre présence ici
aujourd'hui.
La profession est intégrée au système
professionnel depuis près de 25 ans. L'ordre compte présentement près de 6 000 membres
et leur nombre est en constante croissance depuis sa création. De ce nombre,
plus de 50 % œuvrent auprès des enfants et des jeunes adultes. En tant qu'ordre
professionnel, notre.
15 h (version non révisée)
M. L. Soucis (Félix-David) : ...d'assurer
le plus haut niveau de qualité de l'exercice de ses membres, toujours dans le
but de protéger le public. L'ordre prend également position pour que les
personnes vulnérables aux prises avec des difficultés d'adaptation ou
susceptibles d'en vivre reçoivent des services de qualité adaptés à leurs
besoins.
L'ordre accueille favorablement ce projet
de loi n° 37 qui prévoit la nomination du Commissaire au bien-être et aux
droits des enfants. La protection des enfants constitue une valeur fondamentale
en psychoéducation. Il s'agit d'un sujet d'une très grande importance pour l'ordre,
motivant son désir de contribuer à la bonification de ce projet de loi. Nous le
faisons aujourd'hui en partageant ses recommandations issues de l'expertise de
ses membres qui exercent auprès des enfants et des jeunes adultes.
L'ordre émet trois grandes recommandations :
la première, la création d'une Charte des droits des enfants; la deuxième,
donner un pouvoir d'action au commissaire; la troisième, faire de la prévention
une priorité pour la société québécoise pour le bien-être des enfants et leurs
familles.
Premièrement, la création d'une Charte des
droits des enfants. Actuellement, plusieurs lois permettent de prendre en
compte les droits des enfants, mais aucune ne permet de les valoriser
spécifiquement. L'élaboration de cette charte viendrait notamment réaffirmer
comme priorité le bien-être de nos enfants pour la société québécoise. L'intérêt
des enfants devrait être omniprésent dans l'ensemble des décisions politiques
et gouvernementales. Actuellement, la référence commune que nous utilisons à
tort pour aborder le bien-être des enfants est la Loi sur la protection de la
jeunesse, qui, rappelons-le, devrait être une référence de dernier recours. La
société québécoise devrait se doter d'une référence sociétale positive visant à
déterminer ce que nous devons préserver pour leur bien-être plutôt que négative
qui définit ce que nous devons éviter à tout prix. De plus, cette charte permettrait
à l'ensemble des parties prenantes d'utiliser un langage clair et commun autour
des droits des enfants.
Deuxièmement, donner plus de pouvoir d'action
au commissaire. L'ordre constate que le mandat du commissaire n'inclut pas de
pouvoir d'action au suivi des recommandations qu'il émettra. Il y a donc lieu
de s'interroger quant aux retombées concrètes de celles-ci. Il est donc
nécessaire que le commissaire puisse être muni d'un pouvoir d'action qui lui
permet... lui permettant d'agir promptement lorsque les intérêts des enfants ou
des jeunes sont lésés. Pour effectuer une différence significative dans la
société, la création du poste de commissaire doit dépasser celui d'un
porte-voix. Il ne faut... Il ne faut pas tout simplement reproduire les mécanismes
déjà en place. Le commissaire doit pouvoir agir de façon tangible pour protéger
les droits et le bien-être des enfants et des jeunes.
Troisièmement, faire de la prévention une
priorité pour la société québécoise pour le bien-être des enfants et leurs
familles. Pour être en phase avec les termes utilisés dans le rapport de la
Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse,
construire une société bienveillante envers ses enfants implique d'agir en
prévention d'abord et avant tout. Il est primordial que la protection de la
jeunesse redevienne une instance de dernier recours. À cet effet, tous les
acteurs de notre société doivent être en mesure de s'ajuster aux besoins
inhérents du développement de l'ensemble des enfants qu'ils côtoient. Pour ce
faire, le commissaire devra s'assurer que toutes les parties prenantes se
sentent concernées et que les recommandations du commissaire puissent être
modulées en fonction des réalités de chacune des instances. Que ce soit un
parent, un voisin, une école, un CLSC ou encore un centre de réadaptation, nous
avons tous un rôle à jouer face aux enjeux développementaux que peuvent vivre
les enfants. C'est en développant une meilleure cohésion sociale autour de
ceux-ci que nous parviendrons à mieux les soutenir.
Finalement, malgré ces grandes
recommandations, nous croyons qu'un commissaire au bien-être et aux droits des
enfants jouerait un rôle déterminant sur le développement de ceux-ci. Le succès
de ce dernier sera tributaire de sa capacité à entretenir un lien de confiance
avec toutes les parties prenantes. C'est par sa capacité à mettre de l'avant
les meilleures pratiques préventives, en bénéficiant de réels pouvoirs d'action,
que ce dernier parviendra à renforcir notre filet social et permettre à notre
société bienveillante de fleurir comme il se doit.
Je tiens à vous informer que l'ordre se
portera la disposition de la commission pour tout soutien ultérieur en marge de
ce projet de loi. Un grand merci pour votre attention. M. le Président, nous
sommes maintenant disposés à répondre à l'ensemble de vos questions.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. M. le ministre.
M. Carmant : Oui, merci, M.
le Président. Merci à vous trois pour la présentation. Je connais bien les
psychoéducateurs, évidemment, de par mon parcours professionnel avant la
politique...
M. Carmant : ...sachez que nos
deux sous-ministres, adjointe et associée, sont des psychoéducatrices, donc on
aime beaucoup les psychoéducateurs.
Je vais commencer un petit peu à aller
ailleurs. On a reçu...puis, tu sais, là, je veux parler de prévention, là, on a
reçu les Premières Nations et Inuits ce matin. Puis, moi, je vous dirais que
vous êtes probablement notre ordre qui est le plus agile, là, dans
l'innovation, une des choses qu'on aimerait mettre sur pied, c'est faciliter,
parce qu'ils ont beaucoup de problèmes de recrutement, qu'ils nous ont
mentionné... Une des meilleures façons de les équiper, c'est de leur permettre
de développer les professionnels à partir de leur population. Qu'est-ce qu'on
pourrait faire pour les aider à développer des professionnels, reconnaître leur
expertise? Parce que le recrutement du Sud, ça, ce n'est pas la solution à long
terme, là, il faut... Comment vous voyez ça? Comment on pourrait installer
quelque chose qui pourrait être partagé avec les autres ordres?
• (15 h 10) •
M. L. Soucis (Félix-David) : Bien,
en 2016, M. le ministre, l'Office des professions soulevait déjà, hein, faisait
déjà ces constats-là, que, justement, la venue d'activités réservées dans le
domaine de la santé mentale et des relations humaines avait limité
l'accessibilité des Premières Nations et Inuits aux intervenants issus, là, de
celles-ci. Ce qui amenait aussi, là, notamment, là, une certaine... en fait,
une difficulté à pourvoir les postes en protection de la jeunesse, mais aussi
pour assurer la continuité culturelle qui était nécessaire, là, pour les
différentes communautés. À l'époque...
M. Carmant : Qui entraîne des
signalements.
M. L. Soucis (Félix-David) : Exactement.
M. Carmant : Et surtout en
première ligne, et, ensuite, ça fait des signalements.
M. L. Soucis (Félix-David) : Exactement.
Donc, on avait mis, à l'époque... en fait, on a mis de l'avant, pas nous, mais
je parle en collaboration, plutôt, avec le Secrétariat aux affaires
autochtones, un projet qui venait, là, justement, travailler sur... qui
permettait d'autoriser les membres des premiers peuples à l'exercice de ces
activités en compagnie, notamment, là, de l'Ordre des travailleurs sociaux et
thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, donc, depuis déjà 2016. Donc,
cette participation-là a aussi accru, là, notamment, là, vraiment, notre...
bien, en fait, notre sensibilité aux peuples autochtones qui voulaient, là, en
fait... dans lesquels on voulait justement développer certaines formations
puis, en fait, pouvoir aider à développer certaines compétences. Je regarde
Rose parce que Rose a contribué grandement à la venue de ce projet-là, elle
pourra compléter pour parvenir à différentes informations, là, que vous
désiriez avoir, mais, justement, là, il était convenu qu'on puisse avoir les
formations, leur permettre, justement, d'intervenir dans un contexte légal
reconnu, également, puis pour lequel, pour le moment, on est toujours en
attente, là, de différentes approches. Donc, l'ordre a toujours été très
attenant à ce niveau-là, mais on est simplement partenaires et non pas porteurs
du dossier, là, par rapport à ça.
M. Carmant : Et la balle est
dans le camp de... du gouvernement?
M. L. Soucis (Félix-David) : Absolument.
M. Carmant : O.K., bon à
savoir. Merci. Toujours en parlant de première ligne, parce que moi... tu sais,
vous avez mis trois priorités, d'accord avec vous, mais moi, la première, c'est
clairement la première ligne, tu sais, puis, moi, j'ai besoin d'un défenseur de
la première ligne, là, puis c'est comme ça qu'on va arrêter les signalements
excessifs, là.
Une des grandes causes de signalement,
c'est les troubles du comportement. Vous êtes probablement l'ordre
professionnel qui nous aide le plus là-dedans. Un des enjeux qu'on a, c'est que
nos professionnels dans le réseau, ils passent beaucoup trop de temps à écrire
des rapports et pas assez de temps à voir des usagers. Qu'est-ce qu'on peut
faire pour améliorer ça? Quelles sont les pistes de solution, surtout en
interdisciplinaire, là? Des fois, on voit les usagers en interdisciplinaires
puis on a comme cinq rapports de 10 pages différentes de chacune des professions.
J'ai essayé d'aborder ça avec... je pense que c'était votre prédécesseur qui
était là, celui qui était président du regroupement, là, mais il n'y a rien qui
bouge, puis ça, je sais que ce n'est plus dans notre cour, mais j'ai mis la
balle au jeu puis je n'ai jamais eu de retour là-dessus.
M. L. Soucis (Félix-David) : Vous
voulez parler d'une meilleure... en fait, d'une meilleure cohésion pour avoir
accès... peut-être juste préciser la question, sur quoi vous voulez avoir
l'information? Si vous voulez avoir davantage...
M. Carmant : C'est moins
de... c'est pourquoi... L'enjeu, c'est que nos professionnels ne peuvent pas
répondre à une question clinique de façon abrégée, ils doivent toujours faire
des rapports complets, ce qui entraîne une perte de performance importante, là,
puis ce qui entraîne des délais d'accès importants aussi aux services de
première ligne.
M. L. Soucis (Félix-David) : Tout
à fait. Bien, écoutez, je pourrai toujours regarder ça, là, notamment, puisque
c'est la première fois, là, que j'en entends parler aussi...
M. L. Soucis (Félix-David) : ...vous
n'en avez pas reçu nécessairement l'information, mais certainement c'est
quelque chose qui devrait être abordé, notamment, avec les autres ordres, mais
aussi de voir comment qu'on pourrait développer, bien, en fait, des modèles
d'évaluation qui vont pouvoir suivre puis qui vont pouvoir justement répondre
aux besoins, notamment, oui, de notre code de déontologie, ça, c'est très
important, mais, en même temps, de répondre aux besoins de la population. Tout
à fait.
M. Carmant : O.K. Ça fait que
je vous relance là-dessus. Bon, pour votre rapport, la Charte des droits, j'ai
lu votre intérêt là-dessus. Pouvez-vous m'en dire plus? Pourquoi c'est votre
première... vous mettez ça en haut de la liste?
M. L. Soucis (Félix-David) : Bien,
en fait que, comme je le disais dans mon mot préalable, trop souvent puis, je
dirais, sur le terrain, M. le ministre, une des choses qui est très... qui est
très présente, c'est que, surtout lorsqu'on a à intervenir auprès d'une
famille, la première chose à laquelle on pense, c'est souvent la Loi sur la
protection de la jeunesse, qui est très importante, en passant, je ne suis en
train de dire je ne suis pas en train de dire qu'elle n'est pas importante, au
contraire, elle est très importante, mais elle est formulée à la négative.
Souvent, qu'est-ce qu'on a comme réflexion, qu'est-ce qu'on a comme réflexe
relativement à cette loi-là? C'est une loi qui vient cibler les motifs de
compromission du développement de l'enfant, on parle de négligence, on parle d'abus
physiques, abus sexuels, etc.
La volonté d'avoir une charte, c'est
d'avoir, en fait, un ailleurs, une assise légale qui viendrait nous permettre
d'établir nos valeurs fondamentales comme société québécoise puis mettre en
place aussi les principes de base d'une société qui valoriserait l'intérêt de
l'enfant. Donc, il y a, oui, il y a une connotation peut-être plus légale d'un
certain point, mais aussi une connotation qui devrait être, comment je pourrais
dire ça, pédagogique à la fois. Je pense à l'intervenant que... Le
psychoéducateur que je suis maintenant, si j'arrive... si j'interviens auprès
d'une famille puis que je suis en mesure d'orienter, d'accompagner la famille
avec une forme... d'un document qui est très fort, très puissant, qui est une charte,
bien, en fait, je vais être capable d'apporter la famille à un autre... vers
quelque chose qui est plus positif, alors que... plutôt de dire : Bien, je
suis ici pour le motif de compromission qui est un tel.
L'autre chose, ça peut être également un
outil pédagogique très important pour les enfants qu'ils puissent connaître. En
fait, c'est surtout ça qui est important, c'est qu'ils puissent connaître leurs
droits, qui... qu'ils sachent où se référer, et également pour les familles,
les autres institutions, pour s'assurer que tout le monde est à la même page
puis qu'on sache faire autant dans une perspective préventive de la société.
Donc, il faut avoir ce langage commun là, il faut que ce soit fort, il faut que
ça soit clair. Puis on trouve... Bien, en fait, ce qu'on trouvait, c'est que la
Loi sur la protection de la jeunesse, bien qu'elle est très importante, elle
devrait vraiment être une référence de dernier recours en cas de compromission
du développement.
M. Carmant : Oui, puis c'est
pour ça que je vous parlais, d'entrée de jeu, là, de la première ligne qui...
dont la faiblesse entraîne beaucoup des signalements de négligence. O.K.
Qu'est-ce ce que... Qu'est-ce que vous pensez, là, du... Vous insistez sur le
rôle d'intervention du commissaire, mais, en fait, on a déjà plusieurs
institutions qui sont là pour intervenir. Donc, tu sais, vous dites : Il
ne faut pas dédoubler, mais, en fait, en dédouble si on lui donne, d'abord et
avant tout, un rôle d'intervention.
M. L. Soucis (Félix-David) : Bien,
quand que je parle d'intervention, M. le ministre, c'est surtout quand on parle
de... En psychoéducation, il faut comprendre, hein, quand on éduque, quand on
informe, c'est une intervention en soi. Donc, quand on est dans une perspective
préventive, c'est important... l'information et l'éducation en est une. Donc,
c'est dans ce sens-là qu'on parle d'intervention. Donc, c'était vraiment dans
cette perspective-là.
Comment on voit le rôle du commissaire à
ce niveau-là, c'est, puis je vais vous détailler pour que vous compreniez,
c'est l'importance de pouvoir avoir accès à l'ensemble des différents
partenaires, aux différentes instances qui sont en relation avec l'ensemble des
enfants, pour avoir une information qui est complète. Quand je parle de ça, je
parle des enfants, bien sûr, mais je parle aussi des familles, des parents. Je
parle aussi des écoles, des établissements scolaires, des ministères également,
dans lesquels on pourrait aller chercher de l'information qui va être colligée.
Puis l'information doit être aussi colligée sur le plan régional, parce qu'on
s'entend, la situation à Montréal versus la situation à Val-d'Or, aux
Îles-de-la-Madeleine est complètement différente d'un endroit à l'autre.
Donc, je sais que pour, après ça, pouvoir
analyser ces données-là, la santé publique ou les autres instances, par exemple
l'INESSS, vont pouvoir avoir cette analyse-là, bien définir quels sont les
enjeux selon l'ensemble des parties prenantes et, par la suite, pouvoir donner
des recommandations, de l'information, de l'éducation dans une perspective
préventive pour s'assurer que chacune des parties prenantes... Puis, quand on
dit ça, c'est qu'il faut que l'intervention soit spécifique également, elle ne
doit pas seulement être : Voici ce qu'il faut faire pour la prévention.
Elle doit être ciblée pour chacune des parties prenantes. L'implication de
l'école, par exemple, au niveau...
M. L. Soucis (Félix-David) : ...d'un
plan de lutte, hein, d'un plan de lutte à la violence et de l'intimidation, l'école
n'aura pas le même rôle que le parent à travers ça. La sensibilisation ne sera
pas la même pour le parent ou pour... ou pour l'école, et même pour l'enfant,
et même pour l'enseignant, je dirais. Donc, c'est important de pouvoir moduler,
d'avoir des interventions, puis, encore une fois, je parle d'information et
d'éducation, pour que chacune des parties prenantes se sentent concernées,
puissent comprendre c'est quoi leur rôle et par la suite les mettre de l'avant
de façon claire et tangible.
M. Carmant : Merci. C'est
beaucoup plus clair pour moi. Merci. M. le Président...
Le Président (M. Provençal)
: ...députée de Marie-Victorin.
Mme Dorismond : Bonjour à
vous, à vous tous et rebonjour. Je suis contente de voir aujourd'hui, cet
après-midi. Moi j'avais une question sur votre proposition numéro quatre. Dans
l'article 10, vous demandez de modifier... Pour nous, c'est vraiment clair
que c'est nécessaire qu'une personne soit vouée exclusivement au bien-être...
et du respect des droits des enfants. Donc, dans l'article 10, vous
dites : Pourrait être modifié en précisant que le commissaire peut faire
des recommandations au ministre lorsqu'il enquête sur la mise en œuvre des
programmes et la prestation des services qui sont destinés aux enfants et qui
relèvent des organismes publics. Vous parlez de quoi au juste? Vous parlez
que...
• (15 h 20) •
M. L. Soucis (Félix-David) : Bien,
je ne crois pas que c'est de nous. Je ne pense pas que c'est nous, Mme...
Mme Dorismond : Non?
M. L. Soucis (Félix-David) : ...Mme
la députée.
Mme Dorismond : Je me suis
trompée.
M. L. Soucis (Félix-David) : Ça
ne me dit rien cette recommandation-là. Donc, c'est possible que... soit que
j'ai erré, là...
Le Président (M. Provençal)
:On va aller tout de suite à la
députée de Bonaventure, le temps...
Mme Dorismond : Je me suis
trompée de mémoire. Désolée. Je vais revenir.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Bonaventure.
Mme Blouin : Oui. Merci, M. le
Président. On a beaucoup de mémoires, donc on pardonne la collègue.
M. L. Soucis (Félix-David) : Je
comprends.
Mme Blouin : Bonjour à vous.
Le Président (M. Provençal)
:Et là on a eu une perte de mémoire.
Mme Blouin : Je... D'abord,
bonjour. Merci de prendre ce temps-là avec nous aujourd'hui. Moi, en fait... On
entend parler depuis hier, vous l'avez effleuré aussi, on dit que c'est
important d'être sur le terrain. Le ministre parle de l'importance aussi
capitale de la première ligne. Et moi, j'aimerais un peu avoir votre vision
concrète, si on veut, du rôle du commissaire, en fait. Ça devrait ressembler à
quoi son quotidien? Ça devrait être quoi, par exemple, la proportion de sa
tâche qui devrait être réalisée sur le terrain, si on veut? Donc, j'aimerais
vous entendre un peu là-dessus, à savoir : Si c'était vous qui avais à
faire sa description de tâches, qu'est ce qu'on y retrouverait en priorité?
M. L. Soucis (Félix-David) : En
fait, c'est une très bonne question. Merci beaucoup, Mme la députée. C'est une
très bonne question. Puis un des aspects qu'on soulève dans notre mémoire,
c'est l'importance d'avoir les ressources, hein, les ressources nécessaires à
sa disposition pour être en mesure d'exercer son... son... son plein potentiel.
Bien, si... moi, il serait partout... en même temps. Vous me suivez? Donc,
c'est important qu'il soit en mesure de bien comprendre l'ensemble des réalités
régionales, comme je le disais un peu plus tôt à M. le ministre, mais également
de pouvoir... comment je pourrais dire ça, pour bien comprendre ce qui se
trouve sur le terrain, comprendre le pouls de l'ensemble des parties prenantes,
encore une fois, quand je parle, donc, des familles, bien entendu, mais je
parle aussi des organismes communautaires, qu'il comprenne c'est quoi les
enjeux en lien avec une problématique pour qu'ensuite il puisse avoir...
consulter également, puis comprendre, puis réussir à avoir des recommandations
qui lui sont propres. Pour ça, il va falloir réellement réfléchir à... comment
je pourrais dire ça... comment on va réussir d'une part à y avoir accès aussi,
comment les enfants vont pouvoir y avoir accès. Est-ce qu'on parle de réseaux
sociaux? Mais pour ceux qui ont un statut socioéconomique précaire, qui n'ont pas
accès aux réseaux sociaux, est-ce que c'est un pignon sur rue? Est-ce que c'est
un numéro de téléphone? Est-ce que c'est un intervenant dans l'école? Donc,
comme vous voyez, les possibilités sont... sont multiples, puis ça va dépendre
vraiment des ambitions qu'on va avoir pour ce dernier.
Donc, si c'était de moi, je crois qu'il va
falloir avoir vraiment une perspective qui est beaucoup plus large, beaucoup
plus de terrain, mais qu'en même temps qui... On s'entend très bien, il ne
pourra pas sillonner le Québec partout, là, en même temps, mais il va devoir
nécessairement avoir un œil sur l'ensemble des parties prenantes relativement
aux différents enjeux.
Donc, je ne sais pas si ça répond à votre
question, mais voilà, c'est un peu notre perspective d'avoir vraiment une
vision de l'ensemble des choses... de l'ensemble des réalités qui sont sur le
terrain au Québec, mais pour aussi être en mesure de les analyser et d'arriver
avec des recommandations qui sont très... très probantes en lien avec les
données qui le sont également.
Mme Blouin : Oui, ça répond
bien à ma question. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Laporte.
Mme Poulet : Oui. Merci, M.
le Président. Merci à vous trois de votre présence. Dans votre mémoire, à la
page sept, vous mentionnez... vous faites référence au rapport de synthèse de
l'étude mondiale sur les institutions indépendantes de défense des droits de
l'enfant, qui soutient que les enfants évoluent au sein de différents systèmes,
et que les politiques gouvernementales entraînent des répercussions sur leur
bien-être. Est-ce que vous pouvez davantage développer sur ce rapport et les
constats qui ont été faits?
M. L. Soucis (Félix-David) : Bien,
en fait, ce qu'on comprend, c'est... Par rapport à cet article-là, ce qu'il
faut comprendre, c'est, comme je le disais tout à l'heure, ça va... ça...
M. L. Soucis (Félix-David) : ...l'enfant
va être vraiment tributaire, en fait, de ce qu'on décide pour lui, hein, va
vraiment être tributaire de ce qu'on décide pour lui puis de ce qui va réussir
à tomber sur le terrain par la suite. Donc, quand il est en mesure de... plus
que les décisions sont éloignées, mais plus qu'elles doivent justement réussir
à tomber sur... à réussir à retomber sur le terrain de façon concrète et,
également, là, de façon ajustée en fonction des difficultés. Donc, c'est pour
ça que, quand on parle du commissaire, on doit être en mesure, oui, d'avoir ces
mesures-là, ces décisions-là qui sont... mais... qui font sens au niveau de
l'intérêt de l'enfant sur le terrain. Donc, c'est dans cette perspective-là,
là, qu'on avait cité, là, cette...
Mme Poulet : O.K. Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, Mme la députée. Nous
en sommes maintenant à l'étape où la députée de Robert-Baldwin va prendre la
relève.
Mme Garceau : Bonjour. Merci
beaucoup pour votre présence virtuelle et votre mémoire. J'ai bien apprécié
votre mémoire parce que vous êtes des gens de terrain, et on est là-dedans, on
est en train d'évaluer, évidemment, comment mieux rencontrer les besoins des
enfants sur le terrain, la défense de leurs droits sur le terrain et,
évidemment, de veiller à leurs meilleurs intérêts. Et je voulais voir... parce
que vous veniez de parler des pouvoirs du commissaire, et, à la page deux, vous
parlez précisément : «Dans un autre ordre d'idées, des préoccupations sont
émises quant au réel pouvoir d'action du commissaire.» Donc, pour vous, vous
envisagez quoi? Un commissaire aurait quel genre de pouvoir à faire d'avoir un
impact réel sur le terrain pour nos enfants et des familles?
M. L. Soucis (Félix-David) : Oui,
bien, comment vous avez pu le voir, là... hier, surtout, là, il y a différentes
instances qui sont similaires, hein, quand on parle de la CDPDJ, le Protecteur
du citoyen, le Protecteur de la nationale de l'élève également, qui ont des
fonctions similaires, bien que quelque peu différentes au travers de ça. Donc,
ce qu'on vient dire dans le cadre de notre mémoire, c'est que, pour
instaurer... Dans le fond, c'est qu'il faut que ce commissaire-là soit... je ne
sais pas, c'est Mme Laurent qui disait qu'il faut qu'il soit au-dessus de la
mêlée, mais il faut qu'il ait aussi une vision d'ensemble, mais il faut qu'il
ait aussi une logique de reddition de comptes envers les recommandations qu'il
va pousser. Je veux dire, il faut que ce soit davantage qu'un porte-voix, il
faut qu'on soit... il faut qu'il soit en mesure d'avoir les ressources
nécessaires pour aller au-delà de ces recommandations, quand je parle de
ressources nécessaires sur le plan des ressources légales telles que le projet
de loi, que les ressources humaines, en fait, pour pouvoir faire ces suivis-là
en lien avec les recommandations pour s'assurer qu'une fois qu'elles sont
faites auprès de différentes instances, qu'elles soient publiques, privées, ou
peu importe, qu'elles soient mises de l'avant puis qu'elles soient réellement
appliquées ou du moins qu'on puisse en recevoir un suivi.
Mme Garceau : Avez-vous des
recommandations particulières à ce niveau-là, au niveau du... de suivi, en ce
qui a trait aux recommandations qu'un commissaire pourrait faire?
M. L. Soucis (Félix-David) : Bien,
on sait que la Loi sur les coroners a changé. Puis, tu sais, je ne suis pas
juriste, là, on s'entend, nous, on... c'est juste qu'on a une relation, nous,
comme ordre professionnel avec le coroner qui nous demande, notamment, de... en
fait, là, suite au changement de novembre 2022 de la Loi sur les coroners de...
justement, là, de l'informer qu'on a pris connaissance des recommandations mais
aussi de l'informer des mesures qu'on entend prendre pour corriger la
situation. Donc, est-ce qu'une forme de mesure pourrait... est-ce que cette
forme de mesure pourrait convenir à ce présent projet de loi? Je laisserais
peut-être, là, à la commission d'en juger, mais je crois qu'on doit vraiment
aller plus loin que ça pour justement maintenir cette confiance-là puis, tu
sais, assurer que ce ne soit pas qu'une conférence de presse avec un rapport,
puis qu'on tourne la page par la suite, puis qu'on passe à autre chose. Il faut
s'assurer qu'il y ait un réel suivi, un réel pouvoir d'action qui va amener des
découlants qui sont concrets sur le terrain.
Mme Garceau : Un processus de
mise en œuvre des recommandations du commissaire, que...
M. L. Soucis (Félix-David) : Complètement.
Mme Garceau : ...que ce soit
prévu dans le projet de loi de façon spécifique.
M. L. Soucis (Félix-David) : Exactement.
Oui... Bien, en fait, on parlait... On parle beaucoup de leadership, hein, je
pense qu'on a parlé beaucoup de leadership dans le cadre des différentes
rencontres hier, mais j'irais davantage sur une autorité. J'irais jusque là,
d'avoir cette autorité-là de devoir... d'avoir une reddition de comptes, un
devoir de reddition de comptes envers le commissaire pour s'assurer qu'on
puisse avoir des suivis qui sont à la hauteur de l'importance de son mandat.
Mme Garceau : Vous mentionnez
à la page neuf, et je voulais...
Mme Garceau : ...avoir plus de
précisions à ce sujet-là, parce que vous avez ces interactions directes avec
les enfants et les familles qui sont en difficulté, qui sont dans des
situations vulnérables. Et je cite, là : En fait, il est aisé de trouver
plusieurs institutions, organismes, des personnes qui doutent et décrivent
quotidiennement des... des difficultés que vivent les enfants et les jeunes
adultes au Québec. C'est pour cette raison que l'ordre affirme que, pour effectuer
une différence significative dans la société, la création du poste de
commissaire doit dépasser celui d'un porte-voix.» Pourriez-vous juste préciser
votre pensée à ce sujet-là? C'est quoi les difficultés? Et est-ce qu'il y a une
lacune en ce moment dans notre système, une lacune, en termes d'inaction de
certaines institutions, qui fait en sorte qu'on a besoin d'avoir un commissaire
pour gérer le tout?
• (15 h 30) •
M. L. Soucis (Félix-David) : Bien,
il y a deux choses, il y a deux choses là-dedans, il y a la capacité de faire
ces recommandations-là, en fait, de pouvoir les faire et de faire un suivi,
mais il y a aussi la capacité d'y répondre à ces recommandations-là.
On a vu, il y a un article qui est paru le
4 janvier dernier dans La Presse à cet effet-là où le coroner, différentes
instances publiques tardaient à répondre au coroner des recommandations qui
pouvaient s'ensuivent. Je ne suis pas en train de faire un procès, là, aux
instances publiques, ce n'est pas ça du tout. Mais la question qu'on devrait se
poser, c'est pourquoi on n'est pas en mesure de donner le suivi? Est-ce que
c'est un manque de ressources? Est-ce que c'est un manque de capacité, donc, de
capacité de données ou un manque de capacité de suivi? Vous comprenez? Donc, il
y a plusieurs, par exemple, d'autre commissaire, autre commissaire ou
protecteur du citoyen qui peuvent faire ces recommandations-là, mais nous, ce
qu'on veut rajouter par rapport à ce commissaire-là, le commissaire aux droits
et au bien-être de... au bien-être et aux droits des enfants, c'est de
s'assurer qu'il ait ce pouvoir-là d'aller chercher puis qu'il ait les
ressources nécessaires, autant au niveau de... au niveau du côté où on reçoit
les... les recommandations mais aussi au niveau de les... de pouvoir en faire
le suivi. Donc, c'est sur deux niveaux qu'il va falloir réfléchir au niveau de
cette recommandation.
Mme Garceau : Vous référez à
quoi, de façon spécifique, quand vous parlez des difficultés que vivent les
enfants et les jeunes adultes au Québec? Qu'est-ce que vous, en termes de
psychoéducateurs et éducatrices, qu'est-ce que vous avez témoigné, en termes de
difficulté?
M. L. Soucis (Félix-David) : Bien,
en fait, il y en a plusieurs. Il y en a... il y en a beaucoup. En fait, il y a
beaucoup de fers de lance sur lesquels on essaie d'aller, mais celui qui est
primordial, c'est réellement celui de la prévention. Puis le mot phare que...
tu sais, puis ce qu'on dit puis ce qu'on répète, c'est qu'on veut tout faire,
puis la raison pour laquelle ce qui nous motive le plus à se présenter
aujourd'hui, c'est vraiment que la protection de la jeunesse devienne une
référence de dernier recours. On doit vraiment tout faire en sorte, puis ça,
c'est notre responsabilité collective. Puis quand on parle de prévention, puis,
tu sais, il n'y a pas un rôle sociétal... comme ordre qui... bien, en fait, qui
est dans le domaine de la santé mentale et de relations humaines, puis je
pourrais dire que l'ensemble de mes homologues seraient d'accord à dire que la
prévention, c'est le fer de lance d'une société en santé. Si on est capable de
réussir à combiner l'ensemble de nos... de notre effort collectif à l'endroit
de la prévention, je crois qu'on peut arriver à quelque chose, il s'agit juste
de nous donner les moyens et les ressources pour y parvenir. Donc, je vous
dirais que la prévention, vraiment, c'est notre plus grand fer de lance, à ce
moment-ci.
Mme Garceau : Je voulais,
juste un instant, à la page 10, vous parler d'un projet. C'est un projet
de «regroup» diverses... d'instances gouvernementales avec des partenariats
avec les... les Autochtones représentant la région régionale de la santé et
services sociaux du Nunavut, les conseils de Cris, comment ça fonctionne, ce
regroupement-là?
M. L. Soucis (Félix-David) : C'est
un... c'est un... En fait, c'est un comité sur lequel on travaille depuis quand
même plusieurs années, sur lequel on a vraiment... on a collaboré avec
l'ensemble des partenaires ici présents... euh, ici présents, ici présents dans
le document que je vais dire, sur la... dans notre mémoire, mais qui servait
justement à se concerter autour de comment on pouvait faire pour favoriser,
dans le système allochtone bien entendu, hein, dans notre système allochtone,
comment qu'on pouvait favoriser, autoriser des intervenants autochtones à
pratiquer les activités réservées. Donc, dans le cadre de ce chantier-là, il
était question d'aborder... oui, au niveau de la formation, au niveau de... de
l'ensemble, en fait, pour favoriser justement le travail des personnes, en
fait, des Premières Nations inuites à travers leur... leur communauté, pour
ensuite justement qu'ils soient en mesure d'assurer la sécurisation culturelle
par la suite de leur peuple.
Mme Garceau : O.K. Merci.
J'ai-tu encore du temps?
Le Président (M. Provençal)
:il reste...
Mme Garceau : Une minute. Je
voulais juste voir avec vous. Vous avez parlé d'un processus de sélection du
commissaire, vous voulez que ce processus là soit...
15 h 30 (version non révisée)
Mme Garceau : ...transparent
en termes de la nomination. Est-ce que vous avez un processus en tête?
M. L. Soucis (Félix-David) : Oui,
bien, en fait, on ne l'a pas mis en recommandation parce qu'on fait entièrement
confiance, là, en... au Parlement, là, pour justement avoir un processus qui
est transparent, et tout ça, c'est plus un point de vigilance, hein? Quand on
parle de processus neutre et objectif, c'est de s'assurer de la confiance que
ce commissaire-là va pouvoir... en fait, que la confiance qu'on va pouvoir lui
donner... c'est de s'assurer que la population sache que la façon dont il a été
nommé n'est pas de façon partisane, par exemple, on s'entend? Puis je ne suis
pas en train de dire qu'il va y avoir une nomination partisane. C'est juste d'avoir
cette sensibilité-là, de s'assurer qu'il n'y ait pas de... d'apparence de
conflit d'intérêts dans le processus de nomination du commissaire. Donc, quand
on parle de processus neutre, hein, on parle de quelque chose qui doit être
neutre, qui est exempt de partisanerie, mais aussi, au niveau objectif, qu'on
sache quels sont les critères qui l'ont mené... quels sont les critères qui
mènent cette personne-là à être la bonne personne pour être le commissaire.
Donc, c'est vraiment plus une vigie pour s'assurer qu'on ait l'adhésion de la
population puis qu'ultimement il soit en mesure de bien... comment je pourrais
dire ça, avoir la confiance qu'il mérite pour exercer son mandat.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Ça va être maintenant
au tour de... du député de Saint-Henri-Sainte-Anne.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup à tous et à toutes pour votre présentation très intéressante. Merci
pour le mémoire aussi. Les recommandations sont claires. J'ai une question sur
quelque chose qui n'est pas là, notamment sur la question des pouvoirs et de la
CDPDJ. Je me demandais si vous, vous aviez pris une position ou si vous aviez
une position, là, suivant ce que Mme Laurent dit dans son mémoire. Où est-ce
que vous en êtes, vous, là-dessus, sur le transfert au commissaire, oui ou non?
M. L. Soucis (Félix-David) : Il
faut que ce soit clair. Peu importe s'il lui donne ou non, je crois que ça va
être important d'informer la population, hein, d'informer la population sur
quels sont les mandats qu'on lui donne, au commissaire, pour s'assurer qu'il n'y
ait pas de... d'imbroglio non plus entre les différentes parties. Donc, est-ce
qu'il doit être séparé, est-ce qu'il doit être... est-ce que les pouvoirs
doivent lui être délégués ou non, on ne s'est pas prononcés là-dessus, mais l'importance
qu'on transmet, puis ce qui est important pour, surtout, la population, pour
les enfants, c'est que son rôle soit bien communiqué à l'ensemble de la
population pour qu'on sache pouvoir lui... se référer à ce dernier-là de
bonne... de la bonne façon.
M. Cliche-Rivard : Puis, à
votre avis, actuellement, est-ce que le rôle qu'on donne à la CDPDJ, il est
pleinement rempli ou si les faits ou ce que Mme Laurent indique nous amèneraient
à plutôt transférer ces pouvoirs-là vers un autre acteur, selon vous?
M. L. Soucis (Félix-David) : Je
ne pourrais pas me prononcer sur... je veux dire, je ne pourrais pas me
prononcer sur cette question-là par rapport à la CDPDJ. Ce n'est pas notre
mandat nécessairement, bien qu'on peut... on peut avoir certains troncs communs,
si on veut, au niveau de la protection de la... les intérêts des enfants
notamment, mais je ne pourrais pas me prononcer nécessairement, là, on ne s'est
pas penchés sur la question.
M. Cliche-Rivard : Parfait.
Je comprends tout à fait. Question... Il y a des belles recommandations, comme
par exemple de faire de la prévention une priorité. Ça, je vous entends. Dans
un projet de loi, comment on... comment on inscrit ça ou comment on s'assure
que la loi soit limpide à l'effet que cette priorité-là soit vraiment enchâssée
dans le texte? Comment on peut faire ça?
M. L. Soucis (Félix-David) : L'idée
avec laquelle on s'est posé... en fait, l'idée avec laquelle on a réfléchi
cette question-là, c'est toujours dans une perspective de... psychoéducative,
hein? Quand on parle de prévention, c'est : Comment qu'on réussit à l'enchâsser?
Maintenant, on n'est pas juristes, on ne pourra pas nécessairement bien le
définir. C'est vraiment l'idée avec laquelle vous, la commission, allez pouvoir
réfléchir aux alentours de cette importance de la prévention là. Donc, est-ce
qu'on parle de réellement avoir des pouvoirs d'action, comme on soulève, de la
façon dont ça va pouvoir être modulé? Est-ce que ses rôles vont pouvoir être
clarifiés? Est-ce qu'on va être en mesure de bien comprendre comment il va
pouvoir intervenir avec les parents, qui ne sont pas nécessairement présents
dans le projet de loi également? Donc, comment qu'on réussit à rassembler l'ensemble
des parties prenantes?
Il y a une partie également, dans le
projet de loi, qui parle, dans la section deux, des pouvoirs, hein, on parle
beaucoup que le commissaire peut notamment. À notre... À notre avis, l'importance...
il devrait... en fait, il doit notamment. Donc, il doit consulter l'ensemble
des parties prenantes pour réellement avoir un pouvoir préventif avec l'ensemble
des parties prenantes qui sont présentes... qui seront présentes, en fait, tout
dépendamment des enjeux qui seront... qui seront soulevés.
M. Cliche-Rivard : Puis vous
lui dites en même temps d'avoir un rôle très tangible de suivi de
recommandations puis de s'assurer que ça, ça soit mis en place. Donc, ce que
vous cherchez, c'est quand même un équilibre entre les deux, là, ce n'est pas
seulement préventif. Vous voulez donner un mordant supplémentaire pour la mise
en œuvre des recommandations.
M. L. Soucis (Félix-David) : C'est...
Oui, c'est un bon résumé, là, je pourrais dire. C'est... Bien, on veut... on
veut s'assurer que les recommandations puissent être appliquées. Mais
attention, comme je disais un peu plus tôt, il faut s'assurer aussi que les
personnes qui reçoivent les recommandations aient les ressources pour s'assurer
de les remplir. Donc, c'est un équilibre qui n'est pas évident, mais auquel il
va falloir réfléchir aussi, à comment que... si on parle, par exemple, des
enjeux...
M. L. Soucis (Félix-David) : ...d'accès
aux services. Si les services sont inexistants, c'est très dur donner des
services à une population. Vous me suivez? Donc, c'est vraiment s'assurer de
ça.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Merci, M. le député. Nous allons
poursuivre avec le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci, M. le
Président. Merci à vous pour votre présentation. Puis c'est intéressant de voir
que près de la moitié de vos membres travaillent auprès des enfants, des jeunes
adultes. Donc, c'est du concret, c'est du terrain. Donc, votre participation
est appréciée.
Je vais continuer sur la question de la
prévention. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'entendre les autres
témoins hier, dont M. Bouchard qui disait : Il faut non seulement
parler de prévention, mais prévention de la maltraitance et en faire une
obsession. Quel est votre point de vue sur, justement, l'état de situation des
jeunes et la maltraitance en particulier puis du lien que M. Bouchard
faisait avec un problème, un enjeu de santé publique?
M. L. Soucis (Félix-David) : Bien,
ça revient encore une fois... puis, tu sais, si je peux me permettre de revenir
un peu sur notre perspective, hein, qui est davantage avec l'écosystème dans
lequel on vit nécessairement en protection de la jeunesse. Quand on regarde le
niveau de signalements, quand on regarde l'importance des signalements,
l'importance de la prévention, elle est là, donc elle est là, ici. Donc, je
suis totalement d'accord avec les propos de M. Bouchard dans l'optique où
il faut vraiment réussir à mobiliser l'ensemble des parties prenantes autour de
ça, que ce soit, oui, certainement au niveau de la maltraitance, mais pour
l'ensemble des problématiques également. Donc, il y en a plusieurs. Puis je
pourrais vous en donner plusieurs, mais il y a plusieurs enjeux qui méritent
des actions de prévention, dont la maltraitance qui est tout à fait très
importante parce qu'on s'entend, la maltraitance vient à, justement, des
signalements et vient, justement, surcharger cette instance-là qui devrait
réellement être une mesure de dernier recours. Donc, pour ce qui est de
l'ensemble des problématiques, je pense qu'elles méritent toutes d'être
abordées. Mais, oui, la maltraitance est tout aussi importante que l'ensemble
des cas.
• (15 h 40) •
M. Arseneau : Oui. Mais vous,
vous êtes... ou, en tout cas, vos membres sont sur le terrain. Est-ce que vous
estimez qu'on est dans une crise de santé publique eu égard à la maltraitance
envers les enfants et qu'il faut intervenir en amont?
M. L. Soucis (Félix-David) : Bien,
je n'irais pas jusque là, je n'ai pas... on n'a pas colligé ces
informations-là. Je ne pourrais pas vous dire. On sait que c'était un important
problème, là, on n'a pas... Je veux dire, on sait que c'est un important
problème, la hausse des signalements. Mais pour vous dire exactement si on
parle d'une crise, et tout ça, on ne peut pas nécessairement s'avancer
là-dessus, mais on sait que c'est un réel problème pour lequel il faut
réellement adresser les mesures préventives. Ça, on est tout à fait d'accord.
M. Arseneau : Oui, je
comprends. Je veux aussi revenir sur la recommandation n° 6.
Vous dites qu'il faut prévoir et offrir un accompagnement approprié répondant
aux besoins particuliers des enfants et des jeunes pour la transition à la vie
adulte. Et je trouve ça fort intéressant. Est-ce que vous pourriez élaborer un
peu? Quels sont, justement, les services ou les besoins auxquels il faut
répondre à cet égard?
M. L. Soucis (Félix-David) : J'ai
eu une discussion il y a plus tard que deux semaines, justement, sur le sujet
où je présentais à certains intervenants de la protection de la jeunesse le
projet de loi pour lequel j'abordais quels sont les services pour cette
transition vers la vie adulte. Et je vous dirais que je n'ai pas reçu beaucoup
de choses. J'ai reçu, en fait, certaines interactions où on me disait que, bien
que la Loi sur la protection de la jeunesse, il y a eu des modifications qui
sont venues justement favoriser la préparation des enfants vers la vie autonome,
le problème, c'est que pour les jeunes qui présentent des difficultés au
niveau... bien, en fait, qui fréquentent les centres de réadaptation, qui
fréquentent les services de la protection de la jeunesse, après 18 ans...
à 18 ans moins un jour, oui, ils ont des services, mais à 18 ans
moins un jour, il n'y a plus rien et des poussières. En fait, il y a des
poussières, peut-être, ou certains accompagnements jusqu'à un certain temps.
M. Arseneau : On les laisse
tomber.
M. L. Soucis (Félix-David) : Bien,
est-ce qu'on peut dire qu'on les laisse tomber ou il n'y a pas de services?
Bref, il y a nécessairement un trou de services selon les dires des
professionnels.
M. Arseneau : Bien, c'est que
vous parlez de besoins spécifiques et criants pour ces jeunes adultes. Il doit
y avoir un mieux à faire, disons.
M. L. Soucis (Félix-David) : Tout
à fait, tout à fait. Puis il y aurait une réflexion... Puis, tu sais, on
pourrait penser aussi à d'autres centres de réadaptation, notamment les centres
de réadaptation physique, qui ont des offres de services de 0-100 ans. Je
ne suis pas en train de dire qu'il faudrait avoir une offre de services
0-100 ans, mais on s'entend que la transition vers la vie autonome en
appartement ou encore la vie socioprofessionnelle est un enjeu excessivement
important pour des enfants qui, on pourrait dire, ont un certain handicap
socioémotionnel. On peut se le dire comme ça. Donc, c'est important de pouvoir
les accompagner avec les services spécifiques pour pouvoir les soutenir
réellement à favoriser une vie autonome, mais pleine et entière également.
M. Arseneau : Merci beaucoup.
M. L. Soucis (Félix-David) : Ça
fait plaisir.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, je tiens à remercier
Mmes Lacombe, Saint-Gérard et M. Soucis pour leur contribution et
leur participation à nos travaux. Sur ce, je vais suspendre les travaux pour
permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup à vous trois pour
votre contribution. Bonne fin de journée.
Des voix : Merci, merci,
merci.
(Suspension de la séance à 15 h 44)
(Reprise à 15 h 47)
Le Président (M. Provençal)
:Nous reprenons nos travaux. Nous
allons maintenant recevoir Maître Catherine Claveau, Maître Martin et Maître
Pelletier du Barreau du Québec. Vous avez 10 minutes pour votre
présentation et par la suite, nous aurons un échange. Merci.
Mme Claveau (Catherine) : M.
le Président, M. le ministre responsable des services sociaux, Mesdames et
Messieurs les députés, je suis maître Catherine Claveau, bâtonnière du Québec.
Je suis accompagnée aujourd'hui de Maître Anne Martin, membre de notre groupe
d'experts en droit de la jeunesse et de Maître Fanie Pelletier, du Secrétariat
de l'Ordre et affaires juridiques du Barreau du Québec. Nous vous remercions
d'avoir invité le Barreau du Québec à participer aux consultations entourant le
projet de loi n° 37, qui prévoit la nomination par l'Assemblée nationale d'un
commissaire au bien-être et aux droits des enfants.
Depuis plusieurs années, le Barreau du
Québec a soulevé à maintes occasions les importants enjeux provoqués par
l'insuffisance, voire l'absence des ressources de première et de deuxième ligne
en protection de la jeunesse. Nous avons également insisté sur le fait que
cette situation est amplifiée par des disparités régionales importantes, de
même que par la situation particulière en milieu autochtone. De plus, animé par
sa mission de protection du public ainsi que de celle reliée à l'accès à la
justice, le Barreau du Québec demeure grandement préoccupé par les trop longs
délais de traitement des signalements, tant à l'égard de ceux qui doivent être
judiciarisés que ceux qui méritent toute notre attention immédiate de la part
de la Direction de la protection de la jeunesse. C'est pourquoi nous saluons le
dépôt de ce projet de loi qui s'attarde sur ces difficultés et cherche à venir
en aide aux enfants les plus vulnérables. Nous comparaissons devant vous
aujourd'hui afin de mettre en lumière certaines perspectives de bonification du
texte et de vous offrir d'autres outils...
Mme Claveau (Catherine) : ...pour
garantir la protection des enfants.
Premièrement, le Barreau du Québec
rappelle que la Commission des droits de la personne et des droits de la
jeunesse, la CDPDJ, a d'ores et déjà le mandat de veiller au respect des droits
garantis par la Charte des droits et libertés de la personne pour les enfants
et les jeunes adultes. Elle dispose également d'un pouvoir d'intervention en
matière de protection de la jeunesse. De ce fait, nous nous interrogeons sur le
modèle proposé dans le projet de loi visant à permettre tant au Commissaire au
bien être et aux droits des enfants qu'à la CDPDJ de soutenir les enfants dans
l'exercice de leurs droits et de mener des enquêtes sur les services offerts
aux enfants par des établissements ou des organismes publics.
En effet, nous craignons qu'en pratique,
l'ajout d'un autre organisme fasse en sorte qu'il y ait deux enquêtes
parallèles pour la même situation, et ce, même si le commissaire devra respecter
les champs de compétence de la CDPDJ. Nous estimons également que, dans le
contexte actuel de pénurie de main-d'œuvre et les objectifs de saine gestion
des finances publiques, il apparaît judicieux d'éviter de dupliquer les mandats
octroyés à de tels organismes. Le Barreau du Québec est donc d'avis qu'un seul
organisme devrait avoir comme fonction de s'occuper de tous les enfants.
• (15 h 50) •
Le projet de loi prévoit en outre que le
commissaire pourra, d'office ou à la demande de l'Assemblée nationale, faire
enquête dans l'exercice de ses fonctions et produire un rapport à cette fin.
Nous sommes d'avis que le projet de loi pourrait être bonifié par l'ajout de la
possibilité pour le commissaire de faire des recommandations au ministre
lorsqu'il enquête sur la mise en œuvre des programmes et sur la prestation de
services qui sont destinés aux enfants et qui relèvent des organismes publics.
Le Barreau du Québec tient également à
porter à votre attention une situation particulière qui mérite réflexion. Il
s'agit du besoin de protection du patrimoine des enfants, particulièrement des
enfants dont la situation est prise en charge par la DPJ. Vous devez savoir
que, plusieurs fois par année, les avocats sont consultés sur le rôle de la DPJ
dans les situations d'enfants dont un parent décède, alors que l'autre parent
ou le tuteur n'est pas suffisamment impliqué pour s'assurer de la protection
des intérêts patrimoniaux de leur progéniture. Ainsi, nous proposons que le
commissaire puisse se voir confier ce rôle d'assister les enfants se retrouvant
dans cette situation.
Vous me permettrez maintenant de
poursuivre sur le thème du commissaire associé dédié au bien-être et aux droits
des enfants autochtones. Le projet de loi prévoit la nomination et les
responsabilités d'un commissaire associé dédié au bien-être et aux droits des
enfants autochtones. Celui-ci relèverait du commissaire et assisterait dans
l'exercice de ses fonctions afin que les intérêts des enfants et des jeunes
adultes autochtones soient pris en considération.
Rappelons que la commission Laurent avait
recommandé la création d'un poste de commissaire adjoint au bien être et aux
droits des enfants autochtones. Il appert cependant que la commission
préconisait l'indépendance de ce commissaire adjoint par rapport au Commissaire
au bien-être et aux droits des enfants, alors que l'article 15 du projet
de loi prévoit plutôt un assujettissement, un assujettissement du commissaire
associé au commissaire.
En cohérence avec ses propositions
antérieures quant au soutien et à la promotion de l'autodétermination des
peuples autochtones, le Barreau du Québec préconise lui aussi de prévoir un
poste indépendant de commissaire dédié au bien-être et aux droits des enfants
autochtones. De plus, en vertu de ce principe d'autodétermination, il
conviendrait de prévoir un processus de nomination autodéterminé par les
communautés autochtones elles-mêmes, par le biais, par exemple, des
organisations ou des entités de gouvernance autochtone.
Précisons qu'à ce sujet, le projet de loi
ne contient aucun mécanisme de soutien dédié aux communautés souhaitant établir
leur propre commissaire autochtone. La commission Laurent prévoyait pourtant le
devoir pour le commissaire de soutenir les communautés et... les communautés et
les nations autochtones qui souhaiteraient se doter d'une institution dédiée au
bien-être et aux droits des enfants autochtones. Le Barreau du Québec propose
donc aux législateurs d'ajouter au projet de loi, après consultation auprès des
interlocuteurs autochtones, des modalités de nomination éventuelle d'un ou de
plusieurs commissaires autochtones, accompagnées d'une garantie de soutien,
notamment financier, pour les communautés ou les regroupements souhaitant se
prévaloir de cette option.
Forts de ces propositions, nous estimons
enfin que le préambule proposé par le projet de loi pourrait être revu afin de
refléter adéquatement l'intention du législateur de promouvoir le bien-être et
le respect des droits de tous les enfants et de veiller à la protection de
leurs intérêts. En terminant, le Barreau tient à réitérer qu'il salue le dépôt
de ce projet de loi. Par la même occasion, nous offrons toute notre
collaboration au ministre et à cette commission afin que les modifications nécessaires
au projet de loi soient apportées...
Mme Claveau (Catherine) : ...pour
qu'il atteigne pleinement ses objectifs. D'autres commentaires se trouvent dans
notre mémoire, et il nous fera plaisir d'en discuter avec vous. Nous vous
remercions encore une fois pour cette invitation à comparaître et sommes
maintenant disposés à répondre à vos questions.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, Me Claveau. Alors, M.
le ministre, je vous cède immédiatement la parole.
M. Carmant : Merci, M. le
Président. Bonjour, Maître Claveau, Maître Martin, Maître Pelletier, merci
d'être avec nous, deux fois en une semaine, maître Claveau. Bien, je suis un
peu surpris par votre premier commentaire parce que la CDPDJ a accueilli quand
même très positivement le projet et voit une belle complémentarité entre son
rôle et celui du commissaire. Est-ce que vous nous suggérez de mettre le
commissaire à l'intérieur de la CDPDJ ou... comment vous voyez ça? Vous dites
que vous voulez... vous trouvez ça particulier de créer une deuxième instance.
Pouvez-vous élaborer?
Mme Claveau (Catherine) : Disons
que, tu sais, l'important, c'est de clarifier les pouvoirs de chacun, et
l'option, effectivement, d'ajouter des pouvoirs à la CDPDJ existante serait
effectivement une option, c'est-à-dire on aurait un seul organisme qui
intégrerait, à l'intérieur de cet organisme-là, le poste de commissaire et les
responsabilités du commissaire.
L'important, pour nous, c'est vraiment que
l'objectif de ce projet de loi là soit atteint, c'est-à-dire que tous les
enfants soient protégés, que tous les enfants sachent à qui s'adresser. Et
faire attention, justement, là, que les rôles de chacun soient bien précis et,
pourquoi pas, faire... Et effectivement, là, le fait de rapatrier ces responsabilités
à la CDPDJ pourrait être une option.
M. Carmant : D'accord. Puis
une autre chose aussi, vous avez mentionné que le projet de loi ne comporte
aucune obligation de rendre accessible le commissaire à tous les enfants. Ça me
semblait une évidence. Comment pourrions-nous le clarifier?
Mme Claveau (Catherine) : Je
vais laisser la parole à Maître Martin, qui pourrait peut-être pouvoir répondre
à cette question-là.
Mme Martin (Anne) : En fait,
c'est... Comme le dit maître Claveau, en fait, ce qu'on ce qu'on souhaite, tout
dépendamment de la structure qui sera envisagée, c'est vraiment de clarifier
quel rôle appartient à quel organisme, puisque, lorsqu'on regarde les
différentes lois déjà existantes, par exemple, la Charte des droits et
libertés, par exemple, à l'article 75 de la loi, on a une responsabilité pour
la commission de promouvoir les droits... les droits de l'enfant, et on a un
peu la même chose qu'on retrouve dans le projet de loi du commissaire... pour
le commissaire.
Alors, c'est sûr que ce qu'on souhaite
vraiment, ce n'est pas tant de choisir la structure que le Barreau souhaite,
mais de s'assurer que ce soit accessible. Et la commission Laurent avait bien
précisé, dans son rapport, avait analysé la structure unique, en fait, et
souhaitait vraiment que ce soit accessible à l'ensemble des enfants, et ça,
c'était très clair. D'ailleurs, on le retrouve dans le préambule. Et c'était
dans cette optique-là, pour eux, que c'était évident, que ça devait être une
seule entité. Et, dans la mesure où dans le projet de loi actuel, on regarde,
on va vers... en respect de d'autres entités, comme la CDPDJ, le Protecteur du
citoyen et le Protecteur national de l'élève, on se rend compte qu'il y a
plusieurs, quand même, responsabilités qui peuvent être partagées par chacune
d'elles.
Alors, le souhait du Barreau, c'est
vraiment, étant donné qu'on veut porter la voix des enfants, on veut que cet
organisme-là soit accessible à l'ensemble des enfants, et, pour porter leur
voix, bien, bien, il faut avoir un contact direct avec eux. Donc, c'est... On
veut... on croit que c'est accessible aux enfants, mais, dans la structure
actuelle, on croit aussi qu'il faut s'assurer de clarifier les rôles et responsabilités
de chacun pour que, dans les faits, que, sur le terrain, ce soit vraiment
accessible à l'ensemble des enfants, notamment à ceux de la protection de la
jeunesse, qui ont une vulnérabilité supplémentaire.
M. Carmant : Merci. Donc, si
je prends les modifications «considérant» que vous avez noté, ça répondrait à
votre demande. Parce que moi, je les trouvais tous très raisonnables, là. C'est
un oui?
Mme Martin (Anne) : Me
Claveau, est-ce que vous voulez que j'y aille?
Mme Claveau (Catherine) : Oui.
Mme Martin (Anne) : Oui.
Alors, évidemment, bien, les ajouts qu'on a faits à notre mémoire, oui, on
croit qu'ils sont tout à fait pertinents, mais on vous invite également, là, à
se questionner, à regarder les structures de chacun, puisque je retiens aussi,
hier, du protecteur de l'élève, et à quelques...
Mme Martin (Anne) : ...l'occasion,
dans son... dans... dans son allocution, il a parlé aussi de certaines...
clarifié certaines confusions, s'assurer que ce soit accessible et clair pour
la population. Et c'est ça qu'on retient, le barreau, entre autres, s'assurer
que ce soit vraiment accessible dans la structure qui est proposée et non la
structure qui est... qui avait été proposée par la... par Mme Laurent.
M. Carmant : D'accord.
Mme Claveau (Catherine) : Si
vous me permettez de compléter, M. le ministre?
M. Carmant : Oui.
Mme Claveau (Catherine) : Il
est vraiment important, nous estimons, dans le projet de loi, de préciser où
les enfants pourront se diriger lorsqu'ils vont avoir besoin, qu'ils ne soient
pas pris dans un dédale d'organismes, qu'ils sachent vraiment, qu'il y ait une
première ligne claire et qu'on le guide bien vers les ressources pour le...
pour le protéger.
M. Carmant : Oui, je vous...
je vous... je vous suis, tout à fait. Puis, en ça, je pense que c'est le défi
pour nous aussi, là, ce... dans l'étude détaillée.
Pour le commissaire associé, je pense que
ce qu'on voulait, c'est vraiment... vous avez utilisé le mot «assujetti», là,
puis ce n'était pas notre intention. Mais d'un autre côté, nous, ce qu'on
voulait éviter, c'est d'avoir deux structures totalement indépendantes, puis
même les Inuits nous ont demandé une troisième structure totalement
indépendante votée par l'Assemblée nationale, ça devient un peu complexe, tout ça.
Mais nous, on veut l'autonomie et le... et le... et l'écosystème des Premières
Nations avec les enfants puis avec leurs populations. Ça fait que ça, je pense
qu'on peut le clarifier. Est-ce que c'est dans ce sens-là que vous faisiez vos
commentaires, par rapport à l'indépendance? Vous voudriez... Vous aussi, vous
parlez d'une structure votée à l'Assemblée nationale, qui... pour chacun de ces
commissaires-là, là. Et là, on en a trois, peut-être qu'on va en avoir 13, si
on écoute les demandes de tout le monde.
• (16 heures) •
Mme Pelletier (Fanie) : Oui,
en effet, M. le ministre. En fait, l'indépendance que l'on préconise, c'est
toujours dans l'optique de... du droit à l'autodétermination des peuples
autochtones. Alors, maintenant... Puis même au niveau du mode de nomination,
vous voyez, on préconise que même le mode de nomination du ou des éventuels
appelons-les commissaires autochtones aux Premières nations et Inuits soit...
même que le processus de nomination soit déterminé par les communautés elles-mêmes.
Donc, est-ce qu'il serait nommé par l'Assemblée nationale, là, on n'allait pas
jusque-là. On préconise vraiment que ce soient les communautés ou disons les
corps dirigeants, pour utiliser l'expression, là, de M. Picard, qui décident à
la fois du mode de nomination et de la structure éventuelle.
M. Carmant : D'accord. Hier,
on a reçu Maître Leblanc, je pense, qui... que vous connaissez, là, que... Je
voyais les membres de votre comité-conseil, et Mme Audet, puis elles nous ont
parlé de... que parfois, les enfants qui allaient en cour, là, n'avaient pas
l'occasion de rencontrer leur avocat. Comment on explique cette situation-là,
puis comment on la corrige?
Mme Claveau (Catherine) : C'est
une situation pour laquelle... n'a pas été portée à notre attention, M. le
ministre. Ce sont peut-être des cas d'espèce. Je pense qu'il ne faut pas
généraliser. Nous, c'est important, tous nos avocats sont tenus aux mêmes
obligations déontologiques. C'est-à-dire que, s'ils décident de faire du droit
de la jeunesse et représenter des enfants, ils ont une obligation déontologique
de les rencontrer et de bien les représenter. Donc, pour nous, de ce que... ce
que... ce qui a été dit hier, la commission ne... n'a pas été mise à notre
attention et n'a pas... et on ne supporte pas cette prétention-là non plus. Et,
vraiment, pour nous, ce qui est important... Puis nous offrons d'ailleurs
plusieurs formations en droit de la jeunesse. Puis nous nous montrons
d'ailleurs disponibles pour améliorer l'offre de formation, pour faire en sorte
que nos membres puissent bien améliorer l'accompagnement, le cas échéant. Mais
à notre connaissance, on ne peut pas faire une généralité de ce qui a été dit
en commission à ce sujet-là.
M. Carmant : Bien, je suis
quand même surpris, parce que Maître Leblanc est sur ce que vous appelez votre
groupe d'experts en droit de la jeunesse, là, c'est un peu particulier qu'elle
ne vous l'ait jamais soulevée, cette problématique-là.
Mme Claveau (Catherine) : Disons
que ça peut être une surprise de notre part également. Mais Me Leblanc est une
de nos expertes sur le comité, cet enjeu-là n'a pas été soulevé lors des
discussions. Mais Me Leblanc, ce qu'on comprend, ce qu'elle est impliquée dans
d'autres instances et elle accompagne d'autres personnes. Mais c'est... Nous
ne... nous ne supportons pas la déclaration qu'elle a faite sous un autre
chapeau que celui de faire partie de notre comité d'experts, ici, au Barreau du
Québec.
M. Carmant : D'accord. Et, si
c'est le cas, est-ce...
16 h (version non révisée)
M. Carmant : ...qu'il y a
quelque chose que l'on peut faire pour corriger la situation?
Mme Claveau (Catherine) : Bien,
encore une fois, comme je vous dis, si vous... Moi... nous... ce qui est... ce
qu'il faut faire, c'est accompagner nos membres, donc bien les former, leur
rappeler leurs obligations déontologiques. On ne peut pas s'improviser
procureur à l'enfant si on ne s'en occupe pas bien. Et moi, j'ai bien confiance
que nos membres ont ça derrière... ont... la majorité de nos membres ont
conscience de ça et sont conscients de cette obligation déontologique là. Et
nous sommes encore une fois très volontaires pour les accompagner, pour
améliorer leur formation ou même du coaching ou quoi que ce soit. C'est une
situation... si vraiment elle est réelle, nous, on offre notre collaboration
pour l'améliorer... c'est certainement le cas.
M. Carmant : Bien, je vous
remercie beaucoup, puis on va faire un suivi. Une autre chose qu'on aimerait, c'est...
hier, on parlait d'une formation particulière pour ce qui est... en droit de la
famille, qui sont les représentants des enfants. On m'a dit que l'idée avait
déjà été soulevée. Moi, je serais prêt à vous accompagner, à aller vers ça, là.
Pouvez-vous me donner plus de détails?
Mme Claveau (Catherine) : Bien,
effectivement, c'est quelque chose... Bien, je pense, effectivement, ça... une
recommandation de la commission Laurent, à laquelle nous adhérons également.
Malheureusement, elle n'a pas encore été concrétisée, mais c'est quelque chose
qu'on a encore sur notre table à dessin. Donc, nous, l'offre de formation, on
ne souhaite que l'améliorer. Donc, je répète que c'est important pour nous d'accompagner
nos membres pour qu'ils soient le plus compétents possible. Alors, l'idée de
créer une formation adaptée à ces situations-là, qui pourrait contenir du légal
et du psychosocial, c'est quelque chose qui est tout à fait réalisable pour
nous et avec plaisir, on pourrait accompagner le ministère s'il y a... on peut
réfléchir à une formation complète, là, pour les procureurs en droit de la
jeunesse.
M. Carmant : O.K. puis ça se
serait sous quel format? Selon vous, ça nécessiterait quel type... tu sais, au
niveau universitaire,
Mme Claveau (Catherine) : Bien,
écoutez, il faudrait...
M. Carmant : ...ou formation
continue ou...
Mme Claveau (Catherine) : Bien,
nous, dans le plan de notre formation continue, vous savez, les membres du
Barreau sont tenus de suivre au moins 30 heures de formation obligatoire
dans deux années de pratique, puis évidemment leur obligation professionnelle
fait en sorte qu'ils doivent suivre des formations dans leur... dans les
domaines où est-ce qu'ils exercent. Donc, dans le cadre de cette obligation de
formation obligatoire, là, on pourrait offrir des formations aux avocats.
M. Carmant : D'accord. Juste
pour revenir peut-être avec le... Comment vous voyez la collaboration entre le
commissaire, la CDPDJ et votre organisme, et le Barreau? Comment vous... est-ce
que vous pouvez me dire quelle serait la collaboration idéale entre ce trio-là?
Mme Claveau (Catherine) : À
quel niveau, M. le ministre?
M. Carmant : Bien, au niveau
de la prise en charge des dossiers, puis de l'évaluation?
Mme Claveau (Catherine) : Bien,
écoutez, c'est... bien, écoutez, nous, on offre toujours notre collaboration,
mais par rapport à, entre autres,bien, l'aspect formation. Maintenant, si vous
avez besoin de nos conseils pour la... pour la... pour voir comment on peut
bonifier ce projet de loi là pour améliorer les choses, on offre notre
collaboration, évidemment, mais on verra à quel niveau on peut... Il faut quand
même que ça rentre dans notre champ d'expertise, je dirais, qui est... et dans
notre mission, qui est la protection du public, puis d'améliorer l'accès à la
justice.
M. Carmant : Mais... tu sais,
j'aimerais faire de vous une partie de ce trio de représentation des enfants.
Jusqu'à quel point seriez-vous volontaires?
Mme Claveau (Catherine) : ...je
pense que nous le sommes déjà, M. le ministre, des parties prenantes comme
procureur à l'enfant, surtout pour les plus démunis qui ne peuvent pas s'exprimer,
on est là pour les représenter. Donc, je pense que c'est quelque chose qui est
déjà en cours, mais, si on peut contribuer à améliorer la protection des
enfants en jouant notre rôle de procureur à l'enfant ou procureur aux parents,
ou aux familles, faisons-le.
M. Carmant : D'accord.
Sinon, je vous demanderais également quelle est votre vision, vous, de la
collaboration du commissaire avec les autres partenaires que l'on a rencontrés
jusqu'à présent, là, le protecteur de l'élève, le protecteur du citoyen, etc.
Pouvez-vous me partager votre vision?
Mme Claveau (Catherine) : Bien,
écoutez, je pense que... dans notre mémoire, les grands principes y sont. L'important
pour nous, je le répète, c'est important que les rôles de chacun soient
clarifiés pour que l'ensemble des besoins de tous nos enfants soient répondus
et qu'ils sachent, les enfants qui ont des besoins sachent à quelle... à quelle
porte cogner lorsqu'ils ont... ils ont un besoin à répondre. Donc, clarifier
les rôles de chacun, pour nous, ça nous paraît très important.
M. Carmant : Ainsi que pour
les familles, je suppose.
Mme Claveau (Catherine) : Effectivement.
M. Carmant : O.K. Et...
M. Carmant : ...et est ce que
vous avez des conseils ou des suggestions quant aux moyens pour faire ce...
pour... pour justement faire connaître ces... ces différents rôles,
principalement pour le commissaire évidemment, qui va être un nouveau joueur?
Mais je pense qu'il y a encore pas mal de discussions avec le rôle de la CDPDJ.
Puis comme comment vous voyez qu'on peut améliorer?
Mme Claveau (Catherine) : Bien,
c'est sûr que la première chose, c'est qu'il faut les clarifier. Il faut voir
aussi, par exemple, comme la... au niveau de la CDPDJ, il y a des lois qui
restreignent leurs pouvoirs. Par exemple, il y a l'article 23 b qui...
qui... qui limite son pouvoir d'intervention en cas de lésions lorsque le
tribunal en est saisi. Alors ça, c'est... tu sais, ça pourrait passer par
l'élargissement des pouvoirs, donc changer... changer les textes de loi à la
base. Puis une fois que ça, c'est fait, lorsqu'on aura bien défini qui fait
quoi, mais je pense que ça... on a une responsabilité, de votre côté, de faire
une campagne de promotion, de... de faire en sorte que toutes les parties
prenantes puis aussi les enfants du Québec sachent encore une fois à quelle
porte cogner lorsqu'ils ont des besoins et des demandes.
• (16 h 10) •
M. Carmant : Merci. Bien
justement, j'allais... justement ma prochaine question, c'était ça. 23 b
semble avoir vraiment un grand flou, là, même entre les avocats et la CDPDJ à
propos de ce... cet article de loi. Pouvez-vous me... voire me dire c'est quoi,
votre... votre interprétation de 23 b...
Mme Claveau (Catherine) : Oui.
M. Carmant : ...puis la CDPDJ
peut ou ne peut pas agir à ce moment-là?
Mme Claveau (Catherine) : Écoutez,
ça... ça... nous, nous avons... nous avons, nous aussi, là, écouté la... la
commission, et c'est par vos questions, là, que nous avons... nous avons revu
cet article-là. Ce n'est pas quelque chose qui a été analysé par nos experts à
la base en vue de cette commission-ci, donc, nous serions bien mal placés, là,
pour vous donner une opinion comme ça, très très carrée et directe, là, en
pleine commission. Mais je pense que ça mérite effectivement d'être revu,
peut-être voir effectivement s'il y a un conflit d'interprétation qui empêche
une meilleure protection des enfants. Il y a peut-être... et ça serait peut-être
opportun de la revoir, puis de voir si on ne pourrait pas élargir justement les
pouvoirs de la CDPDJ, en modifiant cet article-là.
M. Carmant : Vous faites mon
bonheur. Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Merci, M. le ministre. Alors, nous
allons poursuivre avec Mme la députée de Robert-Baldwin.
Mme Garceau : Merci. Bonjour,
Me Claveau, Me Martin et Me Pelletier. Merci d'être ici. Merci également pour
votre mémoire et vos recommandations, et des éclaircissements concernant
certains sujets.
Si vous me permettez, Me Martin, parce que
je vois que vous faites, là, partie du comité d'experts, ce comité interne
concernant la protection de la jeunesse, dites-moi de votre expérience, à
combien de reprises est-ce que vous avez constaté la présence de la CDPDJ
devant les tribunaux?
Mme Martin (Anne) : En fait,
de mon côté, depuis 20 ans que je pratique en Chambre de la jeunesse, je vous
dirais, de mon côté, dans mes dossiers à moi, je ne les ai jamais vus dans la
salle de cour. Et je sais par contre que, bon, en lien avec l'article 23 b
justement, l'interprétation qui peut peut-être porter à confusion, à savoir
qu'à partir du moment où le tribunal fait une... une enquête, une audience sur
une question de lésion de droits, à ce moment là, ça... ça retire, si on veut,
le pouvoir d'enquête du CDPDJ sur cette question-là, pour éviter justement
d'avoir peut être deux conclusions différentes, ce qu'on a nommé dans notre
rapport comme enquêtes en parallèle. Donc, ils sont présents à certains égards,
parce qu'on leur transmet... on a l'obligation en fait de leur transmettre, de
leur notifier les demandes, toutes demandes en lésion de droits suivant le...
l'article 76 de la loi. Et ils ont accès aussi, là, à obtenir une copie du
jugement pour pouvoir en faire une analyse de l'ensemble des situations pour
lequel le tribunal a déclaré les droits d'un enfant lésés. Donc, ils ont ce
pouvoir d'enquête là, là, outre le fait qu'ils n'ont pas le pouvoir d'enquêter
sur la même question qui est soumise au tribunal. Mais la question que vous me
posez, moi, je ne les ai jamais vus dans mes dossiers au quotidien.
Je vous dirais que je pratique depuis 21
ans environ en Chambre de la jeunesse, les 18 premières années, je vous dirais,
de ma carrière, les demandes en lésion de droits étaient très, très, très
rares. Ces demandes en lésion de droits là, je vous dirais qu'on en a
davantage, et c'est différent d'une région à l'autre depuis les cinq... quatre,
cinq dernières années. Donc, je pense qu'il y a un ajustement, là. Et
effectivement, là, quant aux... à l'article 23 et aux nuances qui y
apparaissent, je pense qu'il y aurait matière à aller clarifier pour
s'assurer...
Mme Martin (Anne) : ...que les
enfants puissent se faire entendre, de par leurs avocats aussi, puisque les
avocats n'ont pas tous des mandats conventionnels, beaucoup de mandats légaux,
dans leur travail. Donc, la réponse, c'est que moi, je ne les ai jamais vus.
J'ai eu connaissance qu'ils sont venus, je vous dirais, peut-être à quelques
occasions, dans la salle de cour, deux occasions.
Mme Garceau : Mais la CDPDJ,
en termes de leurs pouvoirs, par l'entremise des dispositions législatives,
aussi le pouvoir d'intervenir, là, pour la défense des droits des enfants dans
ce genre... pas juste lésion de droit, là, dans d'autres aspects, quelle est
votre expérience? Et même, je ne sais pas, en termes de votre comité, est-ce
qu'il y a eu des discussions à ce sujet-là?
Mme Claveau (Catherine) : Bien,
si vous me permettez, avant de laisser la parole à Me Martin, Me Marceau...
cette question-là, évidemment, elle n'a pas fait... on n'a pas fait... on n'a
pas répertorié, là, les dossiers qui allaient à la CDPDJ, ce n'était pas
l'essence de ce projet de loi ci, donc c'est difficile pour nous de répondre.
Me Martin, effectivement, a une bonne connaissance terrain, mais ça reste en
Estrie. Donc, je pense que c'est difficile pour nous de donner vraiment une
réponse précise, là, par rapport à cette question-ci.
Mme Garceau : Mais je sais,
maître Claveau, je crois que c'était au mois de juillet, 2023, votre cri du
cœur concernant, là, qu'il y avait matière d'agir de façon urgente en matière
de protection de la jeunesse. Et un de vos points liés à la protection de la
jeunesse, c'était ça, lésion de droit, c'était... il y avait une augmentation
de lésions de droits, il y avait aussi les délais indus, en termes des
tribunaux, et c'est pour ça que je posais la question.
Mme Claveau (Catherine) : Oui,
c'est ça. Je pense que Me Martin y a répondu tout à l'heure. Effectivement,
tous les enjeux reliés à la situation en protection de la jeunesse, tu sais, il
y a une situation qui était et qui demeure malheureusement en crise. Et ça a
fait en sorte que, dans les dernières années, il y a eu de plus en plus de
recours en lésion, ce qu'on ne voyait pas avant. Ça a tout un lien avec le fait
que, malheureusement, les droits des enfants, là, sont encore plus mis à mal
ces années-ci qu'il y a plusieurs années.
Mme Garceau : Vous avez
mentionné, puis c'est également dans votre mémoire, qu'on devrait avoir une
seule entité. Ça reprend vraiment l'esprit des recommandations dans le rapport
de la commission Laurent, d'avoir... qu'une entité porte la voix des enfants.
Et, dans le rapport, il y avait une recommandation qui n'est pas reflétée dans
le projet de loi, là, à l'article six, c'est autre chose, en termes de... La
recommandation de la commission Laurent est à l'effet de transférer tous les
pouvoirs et responsabilités de la CDPDJ au commissaire. Quelle est votre
position à ce sujet?
Mme Claveau (Catherine) : On
n'a pas pris... on ne prend pas position sur ce sujet-là, puis vous me corrigez
si je me trompe, mais il me semble que la commission... que la commissaire Laurent,
lors de l'audition, a exprimé que ce n'était pas quelque chose qui était
souhaitable maintenant, mais que, peut-être, on commencerait par, justement, la
nomination d'un commissaire puis, éventuellement, on pourrait voir si
effectivement il y aurait lieu, là, de rapatrier les pouvoirs de la CDPDJ au
commissaire. Mais nous, notre point est que l'important, c'est que les enfants
sachent, et tous les enfants, qu'ils soient protection ou hors protection,
aient une personne, un commissaire qui s'occupe d'eux. Et, comme il y a déjà
des instances qui existent, protecteur de l'élève, protecteur à la CDPDJ, c'est
important de clarifier les rôles.
Puis une façon, justement, de faire en
sorte qu'il n'y ait pas trop d'instances, ça pourrait... de faire en sorte
d'ajouter des pouvoirs à la CDPDJ, qui a déjà, quand même une certaine
structure, il pourrait y avoir des économies d'échelle. On est aussi dans une
situation de pénurie de main-d'oeuvre, alors je pense qu'il faut quand même
avoir tout ça en tête lorsqu'on crée des nouveaux organismes, voir si
effectivement on peut atteindre notre objectif, qui, je nous le rappelle, est
de protéger tous les enfants du Québec.
Mme Garceau : Oui, parce que,
comme vous avez mentionné dans votre rapport, puis c'est quand même
préoccupant, puisque vous êtes la bâtonnière du Barreau et donc vous recevez
les plaintes concernant toutes sortes d'enjeux liés à la protection de la
jeunesse... Parce que vous avez dit que, depuis le rapport de la commission
Laurent, la situation ne s'est pas améliorée.
Mme Claveau (Catherine) : Malheureusement,
non.
Mme Garceau : C'est quand
même préoccupant, Me Claveau.
Mme Claveau (Catherine) : Effectivement.
Notre préoccupation demeure, mais, tu sais, ce qu'on...
Mme Claveau (Catherine) : ...là,
on est vraiment rendu à une étape où est-ce qu'on n'a pas le choix, il faut
travailler de concert avec toutes les parties prenantes, dont les ministères,
le ministère Santé et services sociaux, ministère de la Justice, pour trouver
des solutions pour améliorer la situation. On n'a pas le choix.
Mme Garceau : O.K. Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Il vous reste deux minutes.
Mme Garceau : Je n'ai rien
d'autre. Ça va.
Le Président (M. Provençal)
:Ça va? O.K.
Mme Garceau : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, M. le député de
Saint-Henri-Sainte-Anne.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci à toutes pour votre présentation. Je reviens sur un élément
qu'on... vous avez mentionné mais dont on n'a pas beaucoup parlé, l'élément
additionnel sur les recommandations que pourrait faire le commissaire au
ministre relatif à un programme, donc de... comme un rôle de conseil. Je me
demande si on... où est-ce qu'on doit tracer la ligne, là, sur le rôle
indépendant du commissaire versus son rôle de conseil auprès d'un organisme ou
d'un ministère sur la prestation de services. Est-ce qu'on en a une ligne qu'on
risquerait de franchir en lui donnant ce rôle-là?
• (16 h 20) •
Mme Claveau (Catherine) : Vous
référez à quelle partie de notre mémoire?
M. Cliche-Rivard : Je l'ai
noté tout à l'heure, là, vous ajoutez, à 2.3 Recommandations, donc :
«faire des recommandations au ministre lorsqu'ils enquêtent sur la «mise en œuvre
de programmes».
Mme Claveau (Catherine) : Oui.
Me Martin, est-ce que vous êtes en mesure de répondre?
Mme Martin (Anne) : Bien, en
fait, ce qu'on souhaitait par l'ajout à l'article 10, c'est de prévoir
que, dans le cadre du pouvoir d'enquête du commissaire... c'est qu'il puisse
être en mesure et qu'il, à l'intérieur de son rapport, puisse être en mesure de
faire des recommandations et que... évidemment, qu'il y ait un suivi à ces
recommandations-là, donc, parce qu'il y a certaines nuances à la rédaction de
l'article cinq, je crois, alinéa deux, paragraphe neuf, si je ne m'abuse. Donc,
ce qu'on souhaite vraiment, c'est qu'il y ait une possibilité que ce
commissaire-là puisse faire des recommandations avec les constats qu'il fera.
Par rapport à votre question, c'est sûr que, lorsqu'on parle de pouvoir
d'enquête prévue à l'article neuf, et ça rejoint nos propos qu'on a un peu
depuis le début de l'allocution, c'est le fait que... et on les a entendus, les
autres organismes qui ont été devant vous hier, ils ont des pouvoirs d'enquête
eux aussi, la CDPDJ a des pouvoirs d'enquête. Donc, effectivement, il y a
matière à se questionner sur la structure. Parce que vous avez posé la question
hier : Est-ce que le commissaire pourrait enquêter sur vos façons d'enquêter?
C'est vous qui avez posé cette question-là, question qui était quand même très
intéressante, pour voir... Alors, c'est là. Est-ce qu'on a un commissaire qui a
une vision horizontale de ce qui se fait à l'intérieur des autres organismes,
où il a un certain regard sur... en respectant le pouvoir d'enquête des autres
organismes, comme le Protecteur national de l'élève, le Protecteur du citoyen,
qui peut se retrouver à enquêter dans les mêmes matières que le CDPDJ? Et on
l'a vu en décembre dernier et en février dernier. Donc, on doit se poser... on
doit se poser ces questions-là, parce qu'aussi, pour les établissements, on se
retrouve avec multiples demandes d'accès pour les mêmes enquêtes.
M. Cliche-Rivard : Sur
23 B, est-ce que c'est vraiment un problème d'interprétation, selon vous?
Là, c'est votre expertise ou si la commission ne joue pas le rôle qu'elle
devrait jouer?
Mme Claveau (Catherine) : Alors,
c'est une question à laquelle on ne peut pas répondre, M. le député. C'est...
Comme je vous dis, nous, on s'est vraiment concentré sur ce projet de loi là,
qui est par... nomination d'un commissaire. Leur pouvoir maintenant, quant à la
suffisance du rôle de la CDPDJ, ce n'est pas une question sur laquelle on s'est
penché. Ça fait qu'il ne fait pas partie, là, non plus, là, de notre position à
laquelle on s'est penché.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup à vous toutes.
Le Président (M. Provençal)
:...M. le député. Alors, nous allons
terminer cet échange avec le député des Îles de la Madeleine.
M. Arseneau : Merci, M. le
Président. Merci à vous toutes pour le mémoire, pour les explications que vous
avez données jusqu'à présent. Je veux revenir quand même sur la question de la
confusion possible du chevauchement des rôles des différents organismes. Vous
venez de mentionner que vous avez écouté les propos tenus par les gens qui ont
comparu hier. Visiblement, ça vous... ça ne vous a pas rassuré. Parce qu'à peu
près tous ceux qu'on a entendus, que ce soit la CDPDJ ou les autres, nous ont
dit : Bien, on va harmoniser ça, il s'agit de savoir les rôles des uns et
des autres puis tout va bien aller. Vous maintenez vos craintes, si je
comprends bien.
Mme Claveau (Catherine) : Bien,
je pense qu'à ce moment-ci... si on regarde le projet de loi tel qu'il est, on
a émis nos craintes. Maintenant, je pense qu'il y a place pour précisions,
améliorer les précisions quant aux rôles de chacun...
Mme Claveau (Catherine) : ...donc,
si c'est clarifié aussi ou... Tu sais, il y a des options, on clarifie les
rôles ou on centre les pouvoirs à un seul... à un organisme plutôt que deux.
Donc, je pense qu'il y a différentes options, lesquelles ont... ça mérite de se
pencher, peut-être, pour améliorer le projet de loi. Puis, encore une fois, toujours
en gardant en tête, l'objectif de la loi, là, c'est de permettre à tous les
enfants du Québec d'avoir une porte à laquelle cogner pour... lorsqu'on doit
respecter leurs droits.
M. Arseneau : D'accord. Je
vais aller à d'autres recommandations de d'autres organisations, parce que vous
êtes du Barreau, vous avez peut-être une opinion là-dessus. Sinon,
dites-moi-le. Mais, quand on parle de l'accréditation des avocats, hier, il en
a été quand même abondamment question, là, qui représentent les enfants
incapables de donner un mandat, est-ce que vous auriez une opinion là-dessus,
sur l'idée d'instituer un mécanisme?
Mme Claveau (Catherine) : Moi,
c'est un peu comme j'ai expliqué au ministre, là, tout à l'heure, nous, on
croit vraiment que, de toute façon, tu sais, on a... on a des obligations
déontologiques de base qui font en sorte qu'on ne peut pas agir pour un client
si on n'est pas à l'aise avec toute la... les notions de droit de base et les
notions même sociojudiciaires qui font en sorte qu'on représente bien cette
personne-là. Donc, nous, c'est vraiment un effort peut-être plus d'accroître la
formation continue, de s'assurer que ceux qui acceptent ces mandats-là suivent
les bonnes formations. Mais on n'irait pas jusqu'à faire une accréditation,
parce qu'en fin de compte il faudrait faire des accréditations dans tous les
domaines de droit, ce qui n'est pas nécessairement... Ce n'est pas une panacée
non plus, tu sais. On accrédite les médiateurs, les arbitres, par exemple,
parce que c'est des créneaux différents, mais pas... par domaines de droit.
Pour nous, ce qui serait pertinent, c'est vraiment de... peut-être d'améliorer
l'offre de formation, d'offrir une formation de base à tous ceux, tous les
jeunes avocats, par exemple, qui... faire du droit de la jeunesse, leur
recommander, leur faire un guide des meilleures pratiques comme on en fait
beaucoup, donc les accompagner et... Puis, comme je le répète, de toute façon,
ils ont des obligations déontologiques à respecter. Et de faire une accréditation,
pour nous, ce ne serait pas nécessaire d'aller jusque là.
M. Arseneau : D'accord.
Est-ce que vous avez une opinion sur la question de reconnaître par un
considérant les enfants comme un sujet de droit?
Mme Claveau (Catherine) : Bien,
ça, là-dessus, je vous dirais qu'on... ça n'est pas une de nos recommandations
parce qu'à l'instar du professeur Goubau, pour nous, c'était déjà acquis, la...
C'est reconnu déjà dans notre Charte des droits et libertés, donc on n'a pas
besoin de le réitérer dans un préambule ou quoi que ce soit dans ce projet de
loi là. Pour nous, c'est déjà clair, donc ce n'est pas quelque chose qu'on juge
nécessaire d'ajouter.
M. Arseneau : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, je tiens à remercier Maître
Claveau, Me Martin et Maître Pelletier pour votre contribution à nos travaux.
Je vais suspendre ces derniers pour
permettre au prochain groupe de prendre place. Alors, merci beaucoup, mesdames,
de votre participation. Bonne fin d'après-midi.
(Suspension de la séance à 16 h 27)
(Reprise à 16 h 31)
Le Président (M. Provençal)
:Nous reprenons nos travaux. Je
souhaite la bienvenue à Mme Mélanie Gagnon, et Mme Gagnon est la présidente par
intérim de la Fédération des familles d'accueil et ressources intermédiaires du
Québec. Elle est accompagnée de M. Éric Martineau. Alors, vous aurez
10 minutes pour votre exposé et, par la suite, nous allons procéder à
l'échange. Alors, je vous cède immédiatement la parole.
Mme Gagnon (Mélanie) : Merci,
M. le Président. Bonjour, je me présente, Mélanie Gagnon. Je suis présidente de
la fédération par intérim, de la Fédération des familles d'accueil et des
ressources intermédiaires du Québec, connue sous le nom de la FFARIQ. Je suis
accompagnée de Mee Martineau, qui est un de nos avocats à la FFARIQ. La FFARIQ
tient à remercier les membres du... de la Commission de lui permettre de
s'exprimer, les... d'exprimer ses commentaires et les demandes des familles
d'accueil dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 37.
Dans ce contexte, la FFARIQ fait valoir la
position de ses membres, mais aussi celle de l'intérêt de l'enfant. Depuis
maintenant 50 ans, nous sommes le seul regroupement exclusivement dédié à
la défense et au soutien des familles d'accueil à l'enfance au Québec, et, bien
sûr, au bien-être et à la stabilité des enfants. La FFARIQ représente près de
3000 familles d'accueil, mais surtout représente environ 5000 enfants
partout au Québec. Je suis moi-même famille d'accueil depuis 22 ans. J'ai
accueilli chez moi hier mon 106ᵉ petit coco et, venant de la Côte-Nord, j'ai...
Des voix : ...
Mme Gagnon (Mélanie) : Merci.
Venant de la Côte-Nord, j'ai également eu la chance d'avoir un enfant... des
enfants autochtones. Je suis également présidente de la Côte-Nord depuis
maintenant 10 ans à la fédération, présidente en Gaspésie depuis trois ans
et vice-présidente depuis cinq ans à la Fédération au niveau provincial. Donc,
le pouls des familles d'accueil, je baigne dedans à tous les jours.
C'est porté par nos familles d'accueil
inspirantes et bienveillantes que nous constatons que le projet de loi répond
partiellement à la première recommandation du rapport de la commission Laurent,
que l'ensemble des propos et mandats de la CDPDJ soient transférés à un nouvel
organisme ou à une nouvelle entité pouvant se consacrer entièrement et
exclusivement à la défense des droits de ces enfants. Dans la forme actuelle,
le projet de loi laisse... pardon, le projet de loi actuel ne respecte pas la
recommandation...
16 h 30 (version non révisée)
Mme Gagnon (Mélanie) : ...La
FFARIQ appuie la création d'un poste de commissaire au bien-être et aux droits
des enfants du Québec. C'est une fonction essentielle pour lutter contre toute
forme de maltraitance, discrimination, malveillance envers les enfants du
Québec. Nous réclamons depuis longtemps la nomination d'un protecteur à l'enfant.
Actuellement, la Commission des droits de
la personne et des droits de la jeunesse, la CDPDJ, possède tous les pouvoirs
généraux pour veiller au respect des principes et des droits de tous les
enfants du Québec. Cependant, un manque d'organisation caractérise la CDPDJ
depuis plusieurs années. La redondance dans ses enquêtes et le manque de
transparence ne contribuent pas à l'identification des solutions tangibles et
efficaces pour les enfants de la DPJ. Le but de ces consultations étant de
bonifier le projet de loi, la FFARIQ propose que le commissaire au bien-être
des droits des enfants et l'ensemble des pouvoirs en matière de protection de
la jeunesse... en termes clairs, l'ensemble des pouvoirs et des mandats de la
CDPDJ doit lui être transféré. La mission du commissaire doit être dédiée
entièrement et exclusivement aux enfants. Le commissaire doit être autonome,
indépendant et impliqué, avoir son propre budget et détenir de réels pouvoirs.
Il doit avoir... il doit agir comme protecteur, bienveillant et intervenir
rapidement. Il ne doit pas être la police de la DPJ, mais la voix de ses
enfants. Il... il lui faudra donc à sa disposition tous les leviers et tous les
outils nécessaires à l'exercice de cette mission. Sa fonction devra être la
promotion des droits de l'enfant et faire une enquête et faire toutes les
recommandations aux ministères requis.
Je vous donne un petit exemple. Vous savez
qu'il existe des PFAP, des familles d'accueil... des familles d'accueil de
proximité. Les familles d'accueil quand ils sont PFAP, la fédération peut
remarquer que les enfants ont des lésions de droit. Ils n'ont pas le droit aux
circulaires. Ils n'ont pas droit aux 5 $ d'allocation. Et pour nous, ça,
ces enfants-là... on devrait avoir le droit aussi à ces montants-là. Pour nous,
c'est vraiment une discrimination à l'enfant. Qu'est-ce que le commissaire
viendrait faire? Bien, il viendrait nous donner un levier pour qu'on... dénoncer
ces choses-là. Parce que les familles d'accueil, malheureusement, on n'est pas
entendus... on n'a pas beaucoup de place où se faire entendre, et c'est aujourd'hui
un privilège qu'on a de pouvoir venir vous dire ces choses-là ici. Ces petits
cocos là ont des besoins aussi très importants, et souvent un grand-papa, une
grand-maman, mon oncle, une matante se ramassent avec peu de moyens pour
combler tout ça.
Pour accomplir cela, le commissaire
devrait avoir aussi des ressources financières et humaines nécessaires. Il ne
faut cependant pas créer de nouvelle structure, cela n'engendrerait que de la
confusion et des coûts sociaux inutiles. Il faut un organisme centralisé et en
plein pouvoir pour faire respecter les droits des enfants. La FFARIQ souligne
que la nomination d'un commissaire par l'Assemblée nationale est importante
puisque cela fera en sorte qu'il y aura une reddition de comptes... devra être
faite à l'Assemblée des élus et, par le fait même, à la population québécoise.
La FFARIQ se réjouit aussi qu'un commissaire dédié aux enfants autochtones soit
également prévu dans le projet de loi devant nous.
La création du poste de commissaire au
bien-être et aux droits des enfants remet de l'avant l'importance d'adopter la
Charte des droits des enfants. La FFARIQ demande au législateur québécois de
proposer et d'adopter rapidement cette charte. La commission Laurent a d'ailleurs
une recommandation sur ce sujet. La FFARIQ est d'avis que la charte devra
affirmer expressément le caractère fondamental de certains de ces droits et de
consacrer par la voie législative certains principes qui s'en découlent.
Elle devra aussi reconnaître que les
enfants ont le droit d'évoluer dans une famille et un environnement
bienveillant. Le projet de loi n° 37 offre un espace pour réaffirmer
clairement le droit des enfants. Comme vous le savez, les besoins sont grands
et d'autant plus grands pour les enfants en protection de la jeunesse, en
famille d'accueil. Les enfants de la DPJ représentent d'énormes...
Mme Gagnon (Mélanie) : ...un
défi pour nos familles d'accueil. Nos enfants arrivent, si petits soient-ils,
avec une si lourde valise à porter, et c'est avec nos familles d'accueil qu'ils
portent ces valises-là, ces familles d'accueil qui sont essentiellement vitales
pour ces petits êtres, qui arrivent, souvent, bien écorchés.
Les intervenants de la DPJ priorisent le
contrôle des familles d'accueil, et non l'intérêt de l'enfant. Il n'est pas
rare de voir des familles d'accueil sans intervenants pendant de très longues
périodes. Depuis l'adoption de la loi sur la représentation des ressources, la
LRR, les membres de la FFARIQ sont laissés à eux-mêmes. Le manque de
communication et des pistes de solutions pour recadrer les moyens utilisés par
les familles d'accueil auprès des enfants créent une grande source de
mécontentement. La FFARIQ rappelle aujourd'hui que les familles d'accueil ont
un rôle central à jouer, et c'est précisément pourquoi elles souhaitent que les
familles d'accueil soient reconnues et incluses dans les différents changements
juridiques, administratifs, organisationnels et culturels à venir. Les familles
d'accueil doivent pouvoir avoir tous les outils nécessaires entre les mains
pour bienner... pour veiller, pardon, au bien-être et à la protection des
enfants qu'elles accueillent.
• (16 h 40) •
L'arrimage entre les acteurs doit être
fait pour une meilleure compréhension de la situation des enfants québécois. Un
filet social tissé serré doit être aussi mis en place pour soutenir et faire
grandir les enfants les plus vulnérables, vivant des situations difficiles. Il
est donc indispensable que les acteurs concernés et les réseaux soient
responsables et travaillent de façon concertée afin d'impliquer des solutions
personnalisées à chacun des besoins de ces enfants. Les consultations sur le
projet de loi n° 37 permettent à la FFARIQ de réitérer que c'est un devoir
de répondre positivement et proactivement aux besoins des enfants les plus
vulnérables au Québec. Il est maintenant temps de mettre de l'avant l'intérêt
de l'enfant avec des modifications importantes et réelles, porteuses pour
l'ensemble des personnes qui prennent soin des enfants, sans oublier qu'il
s'agit, toutefois, d'une responsabilité commune.
Le projet de loi n° 37 doit permettre
la nomination d'un commissaire au bien-être et aux droits des enfants, avec des
pouvoirs d'action réels, des ressources humaines et budgétaires à la hauteur
des besoins des enfants de la DPJ. Le réel chien de garde du bien-être et du
respect des droits des enfants doit être plus puissant, proactif et complet
possible pour l'intérêt supérieur de tous les enfants du Québec. Ne pas
légiférer dans ce sens fera de nos enfants les perdants. Ces enfants sont
l'avenir de notre société, à qui nous... et nous avons la responsabilité de garantir
leur bien-être et leurs droits. Comme le dit un proverbe africain, et cela est
plus vrai que jamais, il faut tout un village pour élever un enfant. Merci de
votre écoute.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Alors, M. le
ministre, on va débuter cette période d'échange.
M. Carmant : Oui, merci
beaucoup, Mme Gagnon. Encore une fois, aussi, je tiens à vous remercier, là,
personnellement pour ce que vous faites puis le dévouement envers les enfants.
Des familles d'accueil, on en a besoin partout au Québec puis on sait que c'est
un grand don de soi et, vraiment, de la bientraitance. Là, on parlait de
bienveillance... et même, plus loin, la bientraitance. Bien, ce que vous
faites, c'est exactement ça.
J'aimerais comprendre c'est quoi, votre
interaction entre... c'est quoi l'interaction entre les familles d'accueil et
la CDPDJ. Quand est ce que vous avez à travailler avec eux, exactement?
Mme Gagnon (Mélanie) : On va
travailler avec eux surtout quand on veut déclarer des lésions de droits des
enfants, si on va vers des lésions de droits de soins ou des choses qu'on peut
se rendre compte. Quand un coco nous raconte des choses, on pourrait aller là.
Mais je dois vous dire, malheureusement, que, dans les dernières années, ce
n'est pas répondu très présent à nos demandes, quand on demande quelque chose.
M. Carmant : C'est à dire?
Vous appelez, puis...
Mme Gagnon (Mélanie) : On a
des réponses défavorables à un arrêt de dossier.
M. Carmant : Pouvez-vous
élaborer? Comme, ils vous disent non, puis ils raccrochent...
Mme Gagnon (Mélanie) : Bien,
ils disent que la DPJ s'occupe du dossier, qu'ils ont pris en compte les
choses, et ça s'arrête là. Ça ne va pas plus loin.
M. Carmant : Est-ce qu'ils
font des vérifications, au moins, avec la DPJ ou... Comment ça fonctionne?
Mme Gagnon (Mélanie) : Je ne
suis pas à la CDPDJ.
M. Carmant : O.K., vous
n'avez pas le...
M. Carmant : ...alors
comment ça se passe exactement puis qu'est-ce... comment vous verriez une
différence si on transférait la CDPDJ ou les ressources de la CDPDJ vers le
commissaire, qu'est ce que ça changerait dans les faits?
Mme Gagnon (Mélanie) : Ils
auraient juste ça à s'occuper. C'est à l'enfance. Ils seraient à juste à
veiller au bien-être des enfants. Ils seraient... Ce ne serait que son champ
d'action, une priorité, ça serait l'importance pour lui.
M. Carmant : Et vous
pensez que c'est un enjeu budgétaire, de ressources humaines?
Mme Gagnon (Mélanie) : Moi,
je pense... Je crois vraiment à la nouvelle commission et nommer vraiment
quelqu'un que ça répondrait vraiment aux besoins des enfants québécois.
M. Carmant : Donc, ce
serait un manque d'intérêt de la CDPDJ?
Mme Gagnon (Mélanie) : Je
ne me prononcerai pas sur ça, en ne connaissant pas tous les aspects de ce
dossier.
M. Carmant : O.K. Vous
avez parlé d'un enjeu, d'une iniquité entre... avec les familles d'accueil de
proximité. Pouvez-vous m'expliquer, voir si je peux mieux comprendre puis
peut-être vous aider concrètement?
Mme Gagnon (Mélanie) : Oui,
parfaitement. Oui, c'est que quand on place un coco chez une personne
significative, elles deviennent PFAP. Les établissements ont un certain temps
pour les évaluer. Et pendant ce temps, le jeune ne reçoit pas les mêmes
services qu'un enfant qui viendrait chez moi, puis je n'ai pas de lien
significatif. C'est-à-dire budgétairement, ils ne recevront pas les circulaires
ministérielles pour les vêtements, pour le sport et des choses comme ça. Il ne
reçoit pas non plus le 5 $ par jour, la DP. Donc, c'est à la charge de la
personne significative. Il y a certains établissements qui vont rembourser,
mais c'est tellement différent d'un établissement à l'autre qu'on ne peut
pas... on ne peut pas comparer. Je vous dirais que c'est vraiment... Tu sais,
le coco est lésé parce qu'il n'a pas les mêmes soins. Et je vais même jusqu'à
vous dire que ça pourrait arriver qu'on ait des enfants qui arrivent avec des
grands problèmes, on va dire dentaires, et que là il n'y a personne qui s'en
occupe, c'est souvent le grand-parent ou quoi que ce soit, qui va engendrer des
coûts phénoménaux. Et c'est impensable. Je trouve ça impensable de voir que cet
enfant-là n'a pas le droit à avoir une qualité de vie comme tous les autres
enfants au Québec.
M. Carmant : Donc, la
famille d'accueil de proximité n'est pas reconnue. C'est ça?
Mme Gagnon (Mélanie) : La
PFA, quand elle n'est pas reconnue. Quand elle tombe reconnue, elle devient
FAP.
M. Carmant : O.K.
Postulant. O.K. Oui, c'est ça, le P. Je me demandais c'est quoi. Le prénom?
Mme Gagnon (Mélanie) : Oui.
M. Carmant : D'accord.
M. Martineau (Éric) : Excusez-moi,
là, juste un élément, là. D'ailleurs, au niveau des communautés autochtones, c'est
le même problème, là, je tiens à le souligner. Pour avoir intervenu, c'est la
même chose, là. Il y a des gens qui appellent les milieux de garde qui sont
dans les mêmes situations. Je tenais à le dire, parce qu'il y a eu quand
même... J'ai vu, tu sais, des Premières Nations qui sont venues. Depuis deux
jours, on en a parlé, mais ce n'est pas exclusif aux familles d'accueil. Sous
ce jour, si on veut, des CIUSSS, là, ça existe. Le même phénomène se produit
actuellement.
M. Carmant : Avec les
Premières Nations?
M. Martineau (Éric) : Oui.
M. Carmant : Qu'est-ce
qui se passe?
M. Martineau (Éric) : C'est
exactement la même chose, là. C'est-à-dire que ce n'est pas nécessairement...
Tu ne seras pas nécessairement reconnu comme famille d'accueil, de proximité.
Je vous dirais même, les critères sont un petit peu plus serrés selon
l'interprétation qu'ils peuvent en faire, donc, ce qui laisse quand même un pan
important de jeunes autochtones qui... qui ont la même... qui ont un montant
qui va être donné aux familles d'accueil de base, là, tout simplement. Donc,
c'est des choses qui mériteraient d'être dénoncées. Et je pense que c'est lui,
le commissaire aux droits de l'enfant... Le peu de visibilité que, tu sais, on
réussit en parlant en commission parlementaire, oui, faire des sorties au
niveau médiatique, on essaie de le mentionner, par exemple, à nos vis-à-vis,
dans des... divers comités, là, avec les avis du ministère. Mais évidemment,
souvent, à moins de sortir l'argument que c'est du clinique, ça ne nous regarde
pas. Ça fait que c'est sûr que, pour nous, le commissaire aux droits de
l'enfant devient quelqu'un qui pourrait être la courroie de transmission de ces
choses-là, là. C'est là, à ce moment-là, que ça devient fondamental pour nous,
là.
M. Carmant : D'accord.
Ça, j'apprécie. Puis vous avez mentionné également la charte comme étant
quelque chose d'important. Quel... Quels droits vous incluriez dans la charte
par rapport à, tu sais, le... votre rôle de famille d'accueil?
Mme Gagnon (Mélanie) : Je
vais laisser la parole à mon avocat.
M. Martineau (Éric) : Oui,
bien... Oui, c'est ça. Bien, écoutez, à ce niveau-là, je vous dirais oui,
peut-être réaffirmer l'ensemble des droits qui sont prévus à la charte
québécoise, mais je pense que l'idée derrière ça, c'est plutôt de venir...
M. Martineau (Éric) : ...réaffirmer.
On a tendance à oublier que la charte s'applique aux enfants, aux jeunes. Ça
fait que je pense que c'est plus symbolique. Oui, il y a des choses à
réaffirmer, mais le problème, on le vit, là, c'est comme si ça n'existait pas.
Tantôt, on parlait de la commission... la CDPDJ, mais je pense que c'est un
petit peu ça, souvent, peut-être que la population québécoise, je ne le sais
pas, c'est comme, on va tout faire tourner autour des adultes, des mineurs,
mais on oublie ces gens-là, que ça s'applique également à ces jeunes-là. Puis,
pour la plupart, puis il y en a beaucoup, hein, en bas de six ans, cinq ans et
compagnie, ils ne sont pas capables d'affirmer leurs droits, là. Donc, c'est
là, je pense qu'il faut que ça soit réaffirmé, que ça rentre dans l'esprit
populaire, également. Moi, c'est de cette façon-là que je le vois.
M. Carmant : O.K. Moi, j'ai
un peu une inquiétude que si on donne au commissaire tous les... tu sais, les
rôles de la CDPDJ, avec les lésions de droits, etc., que tout son côté
prévention puis organisation des services en amont, là, tu sais, il n'y aura
pas le temps de faire les deux. Vous, comment vous voyez ça, ce double rôle,
là, c'est...
• (16 h 50) •
Mme Gagnon (Mélanie) : Moi,
je pense que quand quelque chose est bien préparé, on peut y arriver, on peut y
arriver. On peut faire de la prévention et agir aussi, c'est... on est capable.
Je vous le dis, on est capable.
M. Carmant : Ça fait
longtemps qu'on essaie.
Mme Gagnon (Mélanie) : Bien,
je vous le dis, on est capables. C'est d'avoir... c'est d'avoir... Bien, moi,
je crois au commissaire et je crois qu'avec une équipe bien bâtie, avec des
bonnes... comme on disait tantôt, une équipe humaine qui va voir l'ampleur du
travail, on est capable. Rien n'est impossible, dans la vie, tout est possible.
M. Carmant : Vous ne pensez
pas que l'urgent a tendance à noyer l'important?
Mme Gagnon (Mélanie) : C'est...
Oui, tu peux y aller.
M. Martineau (Éric) : Oui...
non, mais je n'ai pas bien entendu ce que vous avez dit.
M. Carmant : Vous ne pensez
pas que l'urgent a tendance à noyer l'important? Dans toutes les sphères de
notre vie, là.
M. Martineau (Éric) : Bien, veux-tu
y aller ou...
Mme Gagnon (Mélanie) : Non,
je te laissais...
Bien, écoutez, pour moi, l'urgent et
l'important... l'important, c'est urgent, pour moi.
M. Martineau (Éric) : Moi, ce
que j'entends, depuis deux jours... on va parler beaucoup de prévention dans
l'amont, en aval. On regarde ça, le projet de loi, comme étant surélevé, qu'il
va un peu avoir un regard sur l'ensemble des organismes, puis c'est bien, la
prévention, tu sais, on l'entend, par exemple, au niveau du tabagisme, hein,
puis ces choses-là, mais ça reste que le tabagisme n'a pas disparu
complètement. Où je veux en venir, à quelque part, c'est que le moment pratique
sera toujours là. On a beau se leurrer, dire qu'on va faire de la prévention,
mais le gros des enjeux demeurera toujours, au jour le jour, pour les avocats
qui pratiquent en jeunesse. Je comprends que le commissaire aura un ensemble
sur... un ensemble des éléments pour les jeunes du Québec, je comprends, mais
ce n'est pas vrai que tous les jeunes vont mal au Québec, là, hein? Puis
l'ensemble des problèmes, il est référé où? Il est référé du côté de la
protection de la jeunesse, puis les besoins sont là. Ça fait que c'est évident
qu'il y a des éléments de prévention à faire, mais il restera quand même qu'au
jour le jour, là, il y a des besoins criants de ces enfants-là qui sont dans
des difficultés particulières. Puis le gros du problème est là.
Ça fait que c'est évident que, pour nous,
de mettre ça de côté... Je pense que ça prend quelqu'un de spécialisé puis qui
est capable d'intervenir, d'être à l'affût de ces choses-là. Puis on l'a dit,
Mélanie l'a dit tout à l'heure, Mme Gagnon, c'est... au niveau de la police, ce
n'est pas l'objectif. Je pense que c'est d'être une espèce de contrepouvoir,
parce que la DPJ, ça va être... Tu sais, tout descend, je pense que c'est un
organisme qui a beaucoup de pouvoirs, mais, avec ces pouvoirs-là, des fois, ça
peut amener certains excès. Et c'est là, peut-être, que le commissaire aux
droits de l'enfant peut être une espèce de... tu sais, pour éviter les
débordements. Puis moi, je pense, quelqu'un qui est à l'affût, qui est aiguisé
à ça, puis spécialisé là-dedans, puis pas mêlé avec d'autres types de
problèmes, puis sans rien enlever à la CDPDJ, qui fait de belles choses, là, ce
n'est pas ça, l'objectif, là, mais il faut quand même garder ça en tête. Ça
demeure quand même les enfants, ça devrait être une priorité au Québec. Je
pense qu'avant toute priorité... moi, je pense que c'est la première des
choses. Puis, pour moi, s'il y a quelque chose qui est fondamental, puis pour
la Fédération des familles d'accueil, c'est ça. Puis, je pense, de mettre
quelqu'un qui va être gardien un peu, en quelque sorte... Si ça peut répondre à
votre question, c'est de même que j'y répondrais.
M. Carmant : D'accord. M. le
Président, je passerais la parole à...
Le Président (M. Provençal)
:Oui, à Mme la députée de Laporte.
Mme Poulet : Oui, merci...
Mme Poulet : ...M. le
Président. Merci à vous deux. C'est très intéressant, très percutant. Ça me...
Bravo pour qu'est-ce que vous faites!
Dans votre mémoire, à la page 6, vous
mentionnez d'appliquer des programmes d'information et d'éducation destinés à
renseigner les enfants eux-mêmes sur leurs doigts... leurs droits. Ça serait...
pour qui exactement, pour les familles d'accueil, les intervenants et les
établissements? Est-ce que ça serait possible d'élaborer un peu plus à ce
niveau- là, s'il vous plaît?
Mme Gagnon (Mélanie) : Bien,
moi, je vous dirais que c'est pour l'ensemble de la population. Le rôle de
famille d'accueil a... est méconnu au Québec. C'est... ce n'est pas connu,
c'est... c'est... on est un peu des des extraterrestres quand on est vu. Quand
je sors avec mes 11 enfants, je suis regardée comme si j'étais sortie de
nulle part et c'est... Le premier renseignement, c'est de vraiment dire c'est
quoi le rôle des familles d'accueil, c'est quoi notre travail.
Pour ce qui est des familles d'accueil,
nous, à la fédération, on a la chance que notre équipe a bâti notre plateforme
de formation, des formations adaptées aux besoins des enfants qu'on garde,
qu'on s'occupe. Donc, chaque enfant, on peut avoir une formation, là, sur
différents problèmes. Pour ce qui est des intervenants et des établissements,
je vous dirais qu'ils ont besoin de formation sur notre rôle aussi de famille
d'accueil. Souvent, même les intervenants ne savent pas c'est quoi le rôle de
la famille d'accueil. C'est un peu des prestataires de services, et tu t'en
occupes, tu es une garderie et ce n'est pas ça. Tu sais, les familles d'accueil
ouvrent leur cœur grand pour aimer des enfants écorchés de la vie, des enfants
qui ont des graves blessures et qu'il faut aider, et ce n'est pas toujours
facile, là. Ce n'est pas... la vie n'est pas toujours rose. Il faut que les
gens comprennent.
Moi, je dis toujours : Être famille
d'accueil, c'est la plus belle chose de ma vie que j'ai pu faire. Mais
malheureusement aussi c'est la pire quand on voit des enfants ne reçoivent pas
les services dont ils ont besoin, ça, c'est... à mon sens à moi, ça n'a pas
d'allure. Quand on voit un coco qui n'est pas bien. Et que quand on crie à
l'aide à la DPJ et qu'on n'en a pas d'aide, on est désabusés, et c'est l'enfant
qui n'a pas d'aide. Cette semaine, j'avais quelqu'un qui m'a appelé. Le petit
coco a mis le feu dans sa chambre, délibérément par un mal d'être. Aidons ces
enfants-là. Moi, je pense que le commissaire, en ce sens-là, pourra épauler nos
familles d'accueil et les aideront. Des petits, des enfants qui n'ont pas
d'identité à neuf mois de naissance, ne sont pas inscrits au registre, n'ont
pas de carte d'assurance maladie, la famille d'accueil n'a aucun pouvoir autre
que de dire aux centres jeunesse : Pouvez-vous le faire, s'il vous plaît?
Si on avait un commissaire, on irait là. Ces droits de ces enfants-là ne sont
pas respectés. Donc, en informant la population, en formant tout le monde, en
informant nos familles d'accueil aussi de leurs droits, de qu'est ce qu'ils
peuvent faire.
Je vous dirais pour ce qui est des avocats,
on ne les voit pas. On ne les voit pas, les avocats de nos cocos ou très
rarement. Ils ne nous appellent pas pour savoir. Un enfant de trois ans ne peut
pas aller témoigner de quand il revient à la maison, c'est des crises sans
finir parce qu'il ne va pas bien. C'est qui peut témoigner de ça? C'est la
famille d'accueil. On ne l'appelle pas, on ne la considère pas, et c'est ça
qu'on veut faire entendre. Et on veut être aidé pour dire qu'on doit être la
voix de ces enfants-là et on doit être capable de leur nommer les choses. Pour
ce qui est des formations auprès des avocats, je demanderais peut être un Me
Martineau de pouvoir en rajouter.
M. Martineau (Éric) : Qu'est
ce que je peux vous dire à ce niveau-là? Là, pour l'avoir vécu personnellement,
je suis un avocat qui est arrivé sur le tard puis j'ai eu, dans le cadre de mon
stage, à faire un petit peu de droits de la jeunesse, puisque ce j'ai
observé... tu sais, mon premier réflexe, c'est que j'avais une crainte à
dire : Câline, c'est lourd à porter, hein, d'aller représenter des jeunes
sur des... des jeunes sur des mandats légal. D'un autre côté, je voyais des
avocats, peut-être de venir de d'autres secteurs d'activité, puis je ne suis
pas certain qu'ils étaient nécessairement... il faut que je fasse attention à
ce que je vais dire, là, mais qui étaient... comment on pourrait dire? J'essaie
de trouver les mots, mais on dirait que je ne trouve pas le bon mot pour
ménager les choses. Mais je vous dirais que...
M. Martineau (Éric) : ...ce
qui serait important, c'est que ces jeunes là soient rencontrés. Parce que, des
fois, la DPJ peut prendre une décision qui va avoir un impact fondamental, on
va tirer des... on a parlé des PFAP puis des FAP, mais il y a un phénomène
grandissant actuellement où qu'il y a des jeunes qui sont retirés, le DPJ va
les retirer, mais ces gens-là sont... ces jeunes-là sont retournés en famille
d'accueil par les juges, mais, plus souvent qu'autrement, il y a de
l'obstruction qui est faite. Puis ces jeunes-là pourraient être entendus, mais,
quand l'avocat s'implique et amène la situation, il est capable de venir faire
ressortir le volet de l'enfant puis ce qu'il veut, puis rester dans cette
famille-là. Mais quand l'avocat ne va pas rencontrer ces gens-là, les familles
d'accueil ne va pas entendre ce point de vue là. Puis il va juste se présenter
puis dire : Bien, moi, je me fie à ce que la DPJ a fait. J'ai... je prends
la position du DPJ, ça devient un petit peu plus compliqué.
• (17 heures) •
Puis des histoires, j'en ai des dizaines
et des dizaines depuis une dizaine d'années comme ça, qui sont problématiques
puis qui mériteraient d'être dénoncées puis être fouillées, parce qu'il y a
réellement une problématique, là, actuellement, à ce niveau-là, là, beaucoup de
jeunes que les juges retournent, mais il y a l'obstruction qui se fait. Et des
fois la CDPDJ est intervenue, et, dans les dernières années, il y a eu des
retraits. Puis actuellement, c'est là qu'eux ils avaient un rôle important pour
ramener les choses, parce que les familles d'accueil ne peuvent pas d'office...
ne sont pas parties au dossier. Donc, de quelle façon qu'on ramène ça? Si les
avocats des enfants, en plus, ne s'impliquent pas toujours parce qu'ils ne
comprennent pas la réalité, ils ne comprennent pas ce qu'un petit enfant de
trois ans, de deux ans peut avoir, le lien que ça va avoir s'il est déplacé.
Qui va parler pour eux? Puis quand, nous, on le dénonce, puis on nous
dit : Bien, écoutez, c'est du clinique. Je vais dans les médias. Mélanie
va... tu sais, la fédération va aller dans les médias, on le dénonce, mais
personne ne s'y intéresse. Moi, je veux quelqu'un qui s'intéresse à ça, je
pense. La fédération veut ça puis je suis convaincu que Mme Gagnon veut la même
chose. On est tous là, là, ça fait que je pense que c'est là qu'il faut qu'il y
ait une formation au niveau des avocats pour comprendre, là, que... Quand il y
a des jeunes, même s'ils ne peuvent pas exprimer, il y a des notions de base
que tu dois être en mesure de comprendre.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Robert-Baldwin.
Mme Garceau : Bonjour à vous
deux. Merci beaucoup d'être ici. Mme Gagnon, vous avez mentionné, c'était dans
votre rapport aussi que ça prend un village pour élever un enfant, mais c'est
sûr et certain que, si on n'avait pas des femmes comme vous et des familles
d'accueil, je ne sais pas qu'est-ce qui se passerait avec beaucoup de nos
enfants au Québec. Donc, merci pour tout ce que vous faites et les familles
d'accueil, si vous pouvez transmettre le message, je crois, de nous tous, parce
que vous faites un travail incroyable, c'est vital pour le bien-être de ces
enfants-là, surtout, lorsqu'on fait face... Et on le sait, on en a déjà parlé,
c'est dans les médias, il y a un système défaillant concernant la DPJ, vous en
avez parlé. Je sais que toute cette question de... c'est dans votre mémoire.
C'est une des premières recommandations. Le transfert de pouvoirs,
responsabilités au commissaire, vous l'avez à cœur, là, on le ressent avec
beaucoup de passion, de conviction. J'ai vu que vous parlez que la CDPDJ a tous
les outils, tous les pouvoirs d'être le chien de garde. Donc, est-ce que vous
nous dites aujourd'hui qu'il a manqué à son devoir d'être le chien de garde?
Mme Gagnon (Mélanie) : Je
vous dirais que je dois répondre à la négative... dire que, oui, il a manqué et
que certains dossiers auraient pu être épaulés par la CDPDJ.
Mme Garceau : Et, en termes
de... Parce que je sais que vous avez mentionné à la page, c'est la mise en
contexte, qui est quand même assez préoccupante. Et donc j'aimerais beaucoup
vous entendre là-dessus. Il y a deux sujets : l'absence d'application ou
la mauvaise priorisation de la mise en œuvre de ses recommandations, on parle
de la commission Laurent, cause actuellement un tort immense aux enfants.
Qu'est-ce que vous voulez dire par ça?
Mme Gagnon (Mélanie) : Bien,
on a des enfants, comme je vous parlais tout à l'heure, les enfants en PFAP,
ils sont lésés dans leurs droits, des listes... on le sait, les signalements à
la protection de la jeunesse, c'est quand même assez phénoménal. Et des enfants
qui... des lésions de droits à tous les jours, je vous dirais, qu'à la
fédération...
17 h (version non révisée)
Mme Gagnon (Mélanie) : ...on a
souvent des appels puis on accompagne nos familles d'accueil dans... pour
essayer que les droits de ces enfants-là soient respectés. On le sait que, la
fédération, on représente des ressources, mais on a à cœur les enfants qui sont
dans ces ressources-là. Donc, c'est vraiment là-dessus, là, que je vous dirais.
Mme Garceau : O.K. Et vous
parlez aussi de «la fonction de la Directrice nationale de la protection de la
jeunesse ne répond pas aux nombreux besoins et fait ressortir l'importance plus
que jamais de nommer un commissaire au bien-être et aux droits des enfants.» J'aimerais
vous entendre là-dessus également.
Mme Gagnon (Mélanie) : Bien,
écoutez, la directrice, je vous dirais que je n'en entends pas souvent parler.
Il faudrait qu'elle soit avant-plan, debout, hein, pour protéger nos enfants,
pour les défendre. Il me semble que c'est comme un peu absent.
Mme Garceau : Est-ce que vous
avez... Oui?
M. Martineau (Éric) : Juste à
ce niveau-là, juste pour vous dire, pour avoir... pour participer à différents
comités, j'ai vu son nom apparaître sur un organigramme en novembre dernier...
en novembre dernier. C'est ce que je sais qui existe à date.
Mme Garceau : Il n'y a pas eu
aucune communication avec les familles d'accueil au niveau de... compte tenu
des lacunes dans le système, les besoins criants des enfants en... liés à la
protection de la jeunesse?
M. Martineau (Éric) : Il n'y
a eu aucune prise de contact avec la Fédération, ou du moins au moins juste
pour se présenter, là.
Mme Garceau : Cette question
de représentation, la défense des droits des enfants devant les tribunaux et
aussi la représentation... Et je vous remercie, maître Martineau, pour vos
représentations à cet égard. Parce qu'on vient d'entendre maître Claveau, la
bâtonnière du Barreau du Québec, et on a posé les questions concernant est-ce
que les avocats qui représentent les enfants devraient suivre une formation,
est-ce qu'ils devraient avoir une accréditation spéciale, tel que recommandé
par la commission Laurent, surtout pour les enfants en bas âge qui sont
incapables de donner un mandat. Mais ce que vous avez souligné aujourd'hui est
quand même assez préoccupant, on l'a entendu également de d'autres personnes
lors de cette commission, que les enfants ne sont pas représentés par leurs
avocats, ils ne sont pas rencontrés. Leur voix n'est pas... On ne les entend
pas. Donc, qu'est-ce qu'on fait pour corriger cette situation? En soi, c'est
des lésions de droit, qu'un enfant n'est pas représenté devant les instances
judiciaires.
M. Martineau (Éric) : Écoutez,
comprenez-moi bien, là, il y a quand même un pourcentage significatif aussi qui
s'y intéresse, hein? J'ai des consoeurs, des confrères qui pratiquent, là,
puis, mon Dieu! S'ils étaient tous comme ça, ça serait extraordinaire, là. Ils
sont dévoués en maudit, là, excusez-moi l'expression. Mais ce n'est pas tout le
monde, O.K.? Le système, je dois vous avouer, je n'y ai pas nécessairement
pensé, là. J'aurais... Je n'ai pas réfléchi à la question puis j'hésite à me
prononcer à ce niveau-là, là. Nécessairement, une formation de base, ça, c'est
certain pour comprendre, parce qu'il y a un volet tellement clinique qui doit
être compris et maîtrisé. Sur le processus, je vous dirais, je n'ai pas
nécessairement de réponse à vous donner. Je suis convaincu, je pense, qu'il y a
des gens qui pourraient proposer des solutions à ce niveau-là, là, puis je ne
veux pas non plus trop m'avancer là-dessus. Mais quand même, une formation
minimale, que ce soit dans... au niveau universitaire, des cours obligatoires.
Quand qu'on pense qu'on s'en va, par exemple, notaire, il y a des cours qui
vont être obligatoires avant de passer à la maîtrise, est-ce qu'il y aurait la
même chose qui devrait être faite? Est-ce qu'il y aurait une espèce de
filtration? Parce qu'on va nous dire souvent, au Barreau : vous devez
maîtriser à peu près toutes les formes de droit. Bon. Mais quand tu joues avec
la vie d'un être humain versus un capital-actions, on n'est pas à la même
place, tu sais. Donc, aller faire de la représentation en jeunesse sans
comprendre nécessairement les enjeux, bien, assurément, ça ne serait pas de
trop qu'il y ait une barrière. Parce que, moi-même, je me l'ai mise
intentionnellement en me disant : ça n'a pas de bon sens. Mais ça devrait
se faire. Comment? Je n'ai pas la réponse pour vous, là.
Mme Garceau : Mais juste pour
prendre quelques paroles de Me Claveau à ce sujet-là. Parce qu'évidemment, je
suis avocate, là, de 30 ans, donc le programme Formation continue, je
continue à faire cette formation-là, mais il y a aussi le code d'éthique, le
code d'éthique, qui fait en sorte qu'on...
Mme Garceau : ...on doit
rencontrer nos clients afin de les représenter. Et donc il y a tout le côté du
code d'éthique, mais semble-t-il que ça, ce n'est pas suffisant s'il y a encore
des avocats qui représentent des enfants qui ne rencontrent pas les enfants
afin de bien les représenter devant les... Donc, il y avait cette
recommandation de la commission Laurent concernant un programme, et ça serait
le commissaire qui pourrait comme élaborer, superviser d'assurer que les
avocats qui veulent pratiquer, œuvrer dans le domaine de la protection de la
jeunesse pour représentation des enfants seraient accrédités. Est-ce que vous
seriez en faveur de ce genre de proposition?
Mme Gagnon (Mélanie) : Moi,
je pense qu'il faut qu'il soit en connaissance de cause. Quand on doit parler à
un enfant de quatre ans qui n'est plus avec maman et plus avec papa, il y a...
c'est déjà lourd, il faut qu'il y ait un minimum de formation pour être capable
de se mettre à la hauteur de cet enfant-là et de comprendre ses peurs. L'avocat
va le voir peut-être deux jours avant de passer au tribunal. C'est beau de voir
l'enfant, mais je vais vous ramener à dire qu'il faut qu'il voie la famille
d'accueil aussi, c'est voir l'enfant et la famille d'accueil en même temps...
Ces enfants-là, ils prennent... ont... je vais vous dire qu'ils s'enracinent
dans nos familles d'accueil, ils prennent confiance en nous. Et, s'il y a un
grand M. à cravate qui arrive, assurément qu'ils ne voudront pas parler, ils
ont besoin de quelqu'un à côté d'eux pour les rassurer. Et de dire que la
famille d'accueil va être entendue avec coco... On s'entend qu'un enfant de
10 mois, là, je ne m'attends pas à ce qu'un avocat va aller le voir, ça ne
donnera pas grand-chose, mais ma famille d'accueil, par exemple, en aurait
probablement long à dire.
• (17 h 10) •
Mme Garceau : Bien, c'est
surtout, compte tenu que vous avez mentionné tout à l'heure, le fait qu'il y a
des intervenants, des intervenants de la DPJ qui ne sont pas vraiment au
courant du travail que vous faites. C'est un sérieux problème. Il y a un manque
de formation. Parce que, là, ce que vous êtes en train de dire également, que,
lors d'évaluation d'une situation d'un enfant, vous n'êtes pas interpellé, on
ne vous questionne pas, vous n'allez pas comme témoin à la cour.
Mme Gagnon (Mélanie) : Oui,
on peut aller comme témoin à la cour. Là, quand il y a déplacement, on peut
aller à la cour. Mais où ce que je vous dire où est-ce qu'on est moins
consulté... je vous dirais, moins écouté, c'est... Je vous donne un exemple.
J'ai déjà vécu... Une jeune fille de 13 ans qui nomme ne plus vouloir aller
chez son parent, là, elle le nomme : Je ne veux plus y aller, je ne suis
pas bien, j'ai peur, je ne veux plus y aller. Et qu'on a des intervenants qui
persistent à vouloir faire une preuve, et persistent, et persistent. Et la
famille d'accueil dit : Aïe! ça ne marche pas, allumez, quelqu'un, cet
enfant-là est en train de développer des problèmes, il faut que quelqu'un
l'entende. Et son avocat, s'il ne l'appelle pas, il ne le saura pas. Il faut
que la famille d'accueil soit capable de lever un drapeau rouge à quelque part
et dire : Elle ne veut plus y aller, pouvons-nous la respecter? Puis là,
je parle d'un enfant de 12 ans, mais il y en a, des enfants qui sont
petits et qu'il le nomme. Et, pour qu'un enfant ne veuille plus voir son
parent, il faut qu'il y en ait fait quand même beaucoup. Parce que, même des
enfants bien écorchés accourent dans les bras des parents parce que ton parent
reste ton parent.
Le Président (M. Provençal)
:M. le député, on va faire la suite,
s'il vous plaît.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Je pense que je dois le dire, la même chose que mes collègues, là,
pour ce que vous faites, tous les deux, mais quand même particulièrement pour
les enfants, merci, fondamentalement. Je reviens peut-être du côté juridique, parce
que vous avez quand même été très clair, là, sur certains aspects. J'aimerais
ça qu'on revienne sur la charte des droits des enfants. Qu'est-ce que ça change
de manière substantive, qu'on l'ait ou qu'on ne l'ait pas, cette charte-là?
Demain matin, là, on l'adopte. Qu'est-ce que ça va changer?
Mme Gagnon (Mélanie) : Bien,
j'ose espérer qu'elle va être appliquée et respectée en belle et due forme.
C'est ça que ça va changer.
M. Cliche-Rivard : En ce
moment, ça ne l'est pas, les droits qui sont consentis ne sont pas respectés.
Mme Gagnon (Mélanie) : Je
vous dirais que... certains... certaines fois probablement.
M. Cliche-Rivard : O.K. C'est
une question de message, c'est une question que... vous espérez qu'une fois
qu'on adopte ça.
Mme Gagnon (Mélanie) : Bien,
comme Me Martineau l'a dit, réaffirmer. Le peuple québécois en majorité, il
faudrait que ce soit placardé haut et fort, c'est quoi, les droits des enfants.
Ça serait une bonne affaire, qu'ils le comprennent et qu'ils le sachent...
M. Cliche-Rivard : ...vous,
vous avez de la misère à comprendre qu'une recommandation aussi claire de
Mme Laurent n'est pas dans ce projet de loi là, c'est difficile à
comprendre.
Mme Gagnon (Mélanie) : Oui.
Parce que, pour nous, le droit des enfants est fondamental.
M. Cliche-Rivard : Avez-vous
la même position sur la Convention internationale des droits de l'enfant? Que
le Québec ne l'ait pas intégré... que ça ne soit pas applicable officiellement,
est-ce que c'est le même problème?
M. Martineau (Éric) : ...je
ne me souviens pas du numéro du décret, là, mais il est dans le préambule de la
Loi sur la protection de la jeunesse, là...
M. Cliche-Rivard : Moi, ce
qu'on m'explique, c'est qu'on s'est déclaré lié, mais qu'on n'a jamais
finalement fini le travail de ratifier puis de l'intégrer dans notre droit
interne québécois. Il y a un professeur qui est venu hier, qui nous en a parlé,
que c'était probablement un problème puis qu'on pouvait le régler aujourd'hui
dans ce projet de loi là. Avez-vous une position là-dessus?
M. Martineau (Éric) : Si
c'est un professeur qui le dit, j'aurais tendance à vous dire qu'il faudrait le
réaffirmer clairement.
M. Cliche-Rivard : Mais du
même côté, ça viendrait rajouter un cadre supplémentaire pour réaffirmer le
droit des enfants.
M. Martineau (Éric) : Bien,
ça l'uniformiserait... ça va l'universaliser dans le sens qu'en le mettant dans
une charte qui a une valeur supra législative versus le mettre dans une loi
particulière, qui est la LPJ, à mon avis, ça aurait une plus grande force, là,
effectivement. C'est clair que ça viendrait l'encadrer, parce que même dans des
débats autres qui sont en lien par exemple... Je ne veux pas partir sur des
grandes histoires, mais il y a des... il y a des débats actuellement qu'on vit,
dans le cadre de la LRR actuellement, puis qu'on a eu à débattre justement de
l'intérêt de l'enfant sur les modifications, puis évidemment, c'est clair... ou
des débats... ou dans des débats administratifs en lien avec les PFAP, qu'on
veut faire reconnaître, bien, c'est évident que ces choses-là, en étant en
droit interne, ça faciliterait les choses, pour tout vous dire. Bien, oui, on
présume... Je ne veux pas rentrer dans le débat juridique, mais qui est présumé
intégrer dans le droit interne, dans l'interprétation. Donc, si on vient le
réaffirmer, ça... ça clarifierait les choses, ça mettrait, à mon avis, la
charte au cœur des décisions... pas la charte, mais la Convention relative aux
droits des enfants, puis ça forcerait effectivement les décisions des tribunaux
à non seulement ne pas juste s'en servir au niveau interprétatif, mais vraiment
venir dire : Non, c'est du droit interne, puis on affirmerait avec force.
Oui, ça renforcerait. Ça fait qu'à cet égard je dirais oui, de le mettre dans
la Charte relative aux droits de l'enfant, absolument, là.
M. Cliche-Rivard : La Charte
relative aux droits de l'enfant, vous voulez qu'elle ait un statut quasi
constitutionnel, là. Ce n'est pas juste une loi comme une autre, il faut
qu'elle ait un volet supralégislatif quand même.
M. Martineau (Éric) : Bien,
je pense que, par la Charte québécoise, le problème, c'est un petit peu...
c'est de mettre le regard sur... supra législatif. Je pense que, par la force
des choses... Mais vous comprenez qu'on est dans l'interprétation puis on est
obligé de faire cet exercice là, mais pour le commun des mortels, ce n'est pas
le cas. Moi, je pense qu'il faut le faire puis peut-être l'élargir, absolument.
Puis en intégrant la Convention relative aux droits de l'enfant, mon Dieu, je
pense que ça... ça serait extraordinaire, là.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. M. le député des
Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci, M. le
Président. Me Martineau, Mme Gagnon, merci beaucoup de votre
témoignage, votre mémoire, et, Mme Gagnon, votre engagement non seulement,
là, avec tous les enfants dont vous avez pris la responsabilité, mais également
tous les comités sur lesquels vous siégez depuis des années, là, dans notre
région de l'est du Québec, la Côte-Nord, la Gaspésie. Bravo! Parce que je ne
sais pas comment vous faites. D'ailleurs, vous avez parlé de 11 enfants.
Quand vous sortez avec 11 enfants, là, en même temps, là, vous êtes...
vous avez la charge de 11 enfants, c'est bien ça?
Mme Gagnon (Mélanie) : À une
certaine époque, oui.
Le Président (M. Provençal)
:À une certaine époque, d'accord.
Dites-moi, on comprend bien aussi, là, votre appel à l'action puis votre espèce
de cri d'alarme pour que... pour qu'on agisse et que les pouvoirs de la CDPDJ
soient transférés au commissaire. Qu'est-ce qui vous fait penser que si on n'a
pas réussi avec la CDPDJ, qu'on va réussir avec le commissaire? Parce qu'on a
parlé tout à l'heure de pénurie de main-d'oeuvre. On imagine bien que si on
transfère les pouvoirs de l'un à l'autre, bien, il y a probablement des
transferts d'employés aussi. Je ne sais pas... Est-ce qu'il est mieux de
transférer les pouvoirs ou... en fait, c'est la question que je me pose... ou
transformer la façon de faire actuelle?
Mme Gagnon (Mélanie) : Écoutez,
moi, je crois... Je vous l'ai dit dans mon mémoire, c'est écrit de transférer
les pouvoirs. Je suis convaincue, car ils vont être dédiés que seulement à
l'enfance, c'est vraiment là, à la jeunesse. C'est... C'est vraiment... C'est
de faire.... J'avais une discussion avec une collègue, puis, tu sais, on
parlait qu'il y a bien des années la CDPDJ a eu le droit à l'enfance et qu'on
avait peur justement que les enfants soient laissés...
Mme Gagnon (Mélanie) : ...voilà
30 ans, là. Hier, j'écoutais Me Mylène Leblanc, qu'elle disait : Il y a 30
ans, on avait peur que nos enfants soient laissés de côté avec cette loi là, à
la CDPDJ. Et, malheureusement, aujourd'hui, 30 ans plus tard, on est devant le
fait. Est-ce... Comme Mme... Me Martineau disait, on n'attendra pas encore 30
ans. C'est assez, là. Ces enfants-là ont des droits, c'est... L'avenir de
demain, c'est les enfants. Puis, oui, en tant que de la fédération, je vous
parle des enfants de la protection de la jeunesse. C'est souvent eux qui ont
besoin. Parce que l'enfant qui vit dans une famille bienveillante est tout
bien, n'aura pas besoin du commissaire. Ça va être vraiment les enfants de la
DPJ. Je pense qu'ils ont assez payé longtemps. C'est maintenant le temps d'être
en action, je pense, pour ces enfants.
M. Arseneau : Oui, c'est ça.
Donc, vous tirez un trait sur le rôle de la CDPDJ et puis vous souhaitez autre
chose, j'ai bien compris ça. Maintenant, j'aimerais parler un petit peu... Vous
avez... brièvement, il me reste quelques secondes... vous avez parlé de la
prévention, puis ce que j'ai compris, c'est que c'est bien beau la prévention,
mais on est dans une situation de crise, puis... Bon, oui, la prévention, mais
il y a des actions beaucoup plus importantes, rapides, concrètes, présentes à
mener, c'est ça? Vous n'êtes pas contre la prévention, évidemment, mais
l'urgence, c'est...
• (17 h 20) •
Mme Gagnon (Mélanie) : La
prévention est toujours bien, mais, pour le moment, on est dans une... dans la
crise d'agir pour ces enfants-là. Je vous l'ai dit, ça fait 30 ans qu'ils
attendent. Ce serait le temps qu'ils arrêtent d'attendre.
M. Martineau (Éric) : La
prévention devra toujours être là, là, qu'importe, mais je pense que la
globalité des choses, c'est dans le pratique, dans l'action. Il y aura toujours
du roulement au niveau d'enfants qui sont placés par la DPJ, puis le gros du
problème est là. Ça fait que c'est un petit peu dans ce sens-là.
M. Arseneau : En termes de
priorités, c'est là que vous voyez les efforts à mettre.
M. Martineau (Éric) : Une
priorité, mais de constance. Ça demeurera quand même, malgré la prévention.
M. Arseneau : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, merci beaucoup, M. le député.
Je tiens à remercier Mme Gagnon et M. Martineau pour, entre autres, des
témoignages que vous nous avez donnés et pour votre collaboration à nos
travaux, pour qu'on puisse livrer un meilleur produit fini. Merci beaucoup, je
vous souhaite une bonne fin de journée.
Je suspends les travaux pour permettre au
prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 21)
(Reprise à 17 h 26)
Le Président (M. Provençal)
:Alors, nous allons poursuivre nos
travaux avec...
Des voix : ...
Le Président (M. Provençal)
:Il n'y a pas de problème. Je pense
que les travaux débutent avec le Collectif ex-placé DPJ. Alors, je veux vous
dire, là, soyons calmes, parce que je sens une certaine nervosité puis je veux
que vous soyez très à l'aise. Dites vous que vous êtes juste les trois puis
vous échangez ensemble. Alors, tout va bien se dérouler. Prenez votre temps. Il
n'y a pas de problème. Par contre, je suis obligé de vous dire que vous avez
10 minutes pour votre présentation d'abord.
Des voix : ...
Le Président (M. Provençal)
:Mais compte tenu que c'est moi qui
gère le temps, on verra. Alors, je vous cède la parole.
Mme Côté-Guimond (Jessica) :
Alors, merci de nous accueillir. Je me présente, Jessica Côté-Guimond, je suis
ex-placée et directrice du collectif et aussi co-fondatrice. Donc, le Collectif
ex-placé DPJ a été initié par d'anciens jeunes placés. Fondé le
13 septembre 2022, le collectif est un groupe formé de jeunes et d'adultes
ayant reçu des services de la protection de la jeunesse ainsi que de leurs
alliés. Sa mission première est de mettre en lumière et de rendre publics les
enjeux criants rencontrés par les enfants suivis par la DPJ et les jeunes
suivis sur le système de justice pénale pour adolescents. Le collectif répond
aux besoins des jeunes qui sont ou ont été suivis en protection de la jeunesse.
Il facilite la prise de parole et la mobilisation des ex-placés en offrant
aussi différentes activités de prévention, d'éducation, de soutien et
d'accompagnement aux jeunes majoritairement de 14 à 35 ans. Les services
offerts par le collectif sont largement inspirés des modèles d'associations
d'entraide existant en France, tels que les Repères ou les... ainsi que les
autres provinces canadiennes.
Le collectif tient aujourd'hui à
intervenir dans le cadre de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 37 concernant la création du poste de commissaire au
bien-être et aux droits des enfants. Nous sommes évidemment heureux de voir que
le gouvernement a mis de l'avant une des recommandations de la commission
Laurent. D'ailleurs, ce sont des ex-placés, membres du collectif, qui ont
ouvert les audiences...
Mme Côté-Guimond (Jessica) : ...publique
de cette commission et l'instauration d'un commissaire au bien-être et aux
droits était une de nos principales demandes. Donc, nous pouvons vous
remercier.
Bien que le projet de loi soit un pas dans
la bonne direction, nous souhaitons tout de même affirmer qu'il y a certaines modifications
qui doivent être nécessaires. Nous croyons que certaines clarifications
permettraient d'adopter une loi qui répondra réellement à son but premier, soit
de promouvoir le bien-être des enfants et surtout le respect de leurs droits,
veiller évidemment à l'intérêt supérieur des enfants.
Dans les échanges avec nos membres
concernés, trois enjeux principaux ont été soulevés, lesquels mes collègues
discuteront avec vous également. Le premier est en lien avec les rôles et
fonctions de la CDPDJ. La deuxième étant en lien avec les rôles et fonctions de
ce futur commissaire. Et enfin des liens en préoccupation, là, avec la
participation des jeunes au sein de ces comités que vous appelez consultatifs.
• (17 h 30) •
Nous sommes préoccupés par le fait que la
Commission des droits de la personne, la CDPDJ, maintienne les mêmes fonctions
et pouvoirs. Nous croyons qu'un profond changement de culture et une meilleure
priorisation des dossiers doivent être visés, et ce, peu importe la répartition
des rôles et des pouvoirs. D'ailleurs, je tiens à souligner qu'il y a une
étude, on vous a amené une copie si vous voulez la consulter, de
Mme Valérie Costanzo et Mme Mona Paré qui conclut, et je cite :
Les recours en lésion de droits ne font pas le poids pour rééquilibrer les
rapports de force inégaux entre les familles et la DPJ et qu'ils ne pallient
pas les problèmes d'ordre structurels du système de protection de la jeunesse.
Nous devons souligner que peu importe l'instance qui aura la responsabilité de
défendre et faire respecter les droits des enfants, nous devons nous assurer
d'octroyer le budget conséquent pour lui permettre d'accomplir réellement ses
fonctions. Les moyens financiers et humains pour faire une promotion, une
sensibilisation et une vraie défense de droits. Nous devons également nous
assurer d'une formation obligatoire et systématiquement offerte à tous les
intervenants concernant les droits des usagers afin de prévenir des lésions de
droits. Nous rappelons tout de même que la recommandation de la commission
Laurent est de transférer aux commissaires les pouvoirs et responsabilités de
la CDPDJ ainsi que les ressources afférentes. Si la CDPDJ souhaite maintenir
ses fonctions actuelles, nous sommes d'avis que la CDPDJ doit davantage prendre
les moyens légaux pour que soient corrigées les situations où les droits des
enfants sont actuellement lésés et ordonner des mesures, entre autres, de
paiement en dommages et intérêts quand il y a des enjeux de lésion de droits.
Aussi, nous croyons que la CDPDJ devrait offrir des services juridiques et de
médiation aux jeunes qui reçoivent des services en vertu de la LPJ ou de la
LSJPA. En comparaison, le défenseur de l'Alberta a le mandat, lui, d'offrir des
services juridiques aux jeunes recevant de ces services. Nous sommes également
d'avis qu'elle devrait offrir la formation obligatoire sur les droits de la
jeunesse auprès des futurs intervenants et professionnels, incluant évidemment
les avocats.
Je cède la parole à ma collègue, pour la
suite.
Mme Chénier-Richard (Karolane) : Bon,
bien, je m'appelle Karolane Chénier-Richard, je suis une ex-placée, j'ai été
placée en Abitibi-Témiscamingue en famille d'accueil, et je suis coordonnatrice
du Collectif des ex-placés de la DPJ.
Donc, tout d'abord, il y a une préoccupation
énorme, là, sur la priorisation des dossiers, puisque le mandat du commissaire
est trop large. La commission Laurent stipule qu'il faut accorder une priorité
aux jeunes en contexte de vulnérabilité. Cette préoccupation est liée à son
rôle de vigie. Bien qu'il soit important d'analyser l'état du bien-être des
jeunes dans l'ensemble du Québec, il y a une importance qu'on surveille l'état
des enfants, des jeunes et des jeunes adultes en contexte de vulnérabilité. Par
exemple, il y a une différence entre l'anxiété de performance dans les écoles
privées ou le suicide dans les centres jeunesse.
Les jeunes placés sont victimes de
l'intersectionnalité de plusieurs facteurs de risque qui se... et qui cumulent
plusieurs facteurs de vulnérabilité. Il est important d'évaluer les services
offerts pour enfin apporter les... des recommandations. Le commissaire doit
avoir le pouvoir et être imputable d'apporter des correctifs législatifs. Un
mécanisme de reddition de comptes doit être mis en place pour assurer un suivi
de recommandations qui permet d'agir en amont pour les jeunes en contexte de
vulnérabilité.
Il y a un enjeu concernant le possible
chevauchement des fonctions du commissaire avec les autres institutions telles
que la commission des...
17 h 30 (version non révisée)
Mme Chénier-Richard (Karolane) : ...les
droits de la personne et de la jeunesse ou ceux qui s'occupent des lésions de
droits. Nous croyons qu'il serait judicieux de préciser les rôles des instances
existantes qui vont collaborer avec le commissaire pour... afin réduire la
confusion sur les pouvoirs de chacun des acteurs. Il est également important de
mettre en place des ententes claires entre les partenaires pour afin... assurer
que la divulgation d'un renseignement confidentiel, la transmission d'informations
est essentielle pour défendre adéquatement les droits des jeunes. Il y a une
préoccupation par rapport aux moyens pour favoriser l'accès aux ressources.
Selon la commission Laurent, l'accessibilité aux ressources est très difficile
puisqu'ils sont rarement connus des jeunes et des familles. Il y a des enjeux d'être
en mesure de s'orienter dans les différentes instances vu la complexité des
processus, pour avoir accès à ces ressources. Il y a aussi une préoccupation
que le commissaire puisse assurer ses rôles avec toutes les ressources... les
ressources nécessaires et assurer un accès équitable partout au Québec. Je vais
céder la parole à ma collègue.
Mme Laliberté (Emily) : Bonjour,
je me présente Emily Laliberté, idéatrice et coordonnatrice des projets
Porte-voix et Droit de cité, deux initiatives à caractère social visant l'inclusion,
la pleine participation, la défense des droits et le rayonnement des voix des
jeunes placés en protection de la jeunesse sous la Loi sur le système de
justice pénale pour adolescents, ainsi que les jeunes adultes ayant une
expérience de placement comme les membres du collectif ex-placés DPJ que j'ai
le privilège d'accompagner aujourd'hui.
Depuis 2012, je développe des stratégies
de médiation favorisant le développement de la pensée critique et le
renforcement du pouvoir d'agir de communautés hautement marginalisées. Par l'animation
d'activités de libre expression, d'analyse sociale, la création d'œuvres
percutantes, j'ai accompagné la prise de parole de plus de 200 jeunes
issus des services de la DPJ. C'est pourquoi je souhaite m'exprimer sur la
place qui est faite à leur participation dans ce projet de loi. Je vais me
concentrer sur la composition du comité consultatif et les facteurs de réussite
soutenant la pleine participation des jeunes les plus vulnérabilisés dans ce
type de démarche. Bien que le projet de loi indique que le commissaire devra
recueillir les préoccupations et les opinions des enfants, celui-ci ne priorise
malheureusement pas actuellement les enfants les plus vulnérables de notre
société, tel que le préconise le rapport de la commission Laurent et celui du
Comité des droits de l'enfant de l'ONU au sujet d'instances similaires, je cite :
«Ce type de commissaire devra adopter une démarche proactive pour rejoindre
particulièrement les enfants de groupes en situation de vulnérabilité,
notamment les jeunes placés en protection de la jeunesse, les communautés
ethnoculturelles et autochtones.» Ce à quoi nous ajoutons également la prise en
compte d'autres facteurs de discrimination, tels que la classe sociale, la
diversité capacitaire, l'orientation sexuelle et l'identité de genre dans la
composition du ou des comités consultatifs qui seront créés afin de bien
visibiliser... l'intersectionnalité, pardon, des problématiques vécues.
Considérant que la Loi sur la protection
de la jeunesse reconnaît déjà à l'enfant le droit d'être informé, consulté et
entendu, mais que des facteurs structurels nuisent à cette participation,
comment pouvons-nous nous assurer qu'il en sera autrement pour le comité
consultatif? Comme nous avons pu le voir dans certains comités jeunesse
récemment, il y a un risque important d'instrumentalisation si les conditions
optimales à la participation ne sont pas réunies, des conditions opérationnelles,
telles qu'un budget prenant en compte la rémunération des jeunes, le
remboursement de leurs frais de transport, de repas, les outils numériques
adaptés à cette participation-là et des conditions humaines soutenant leur
réussite, telles que des espaces sécuritaires de partage et un accompagnement
adapté à toutes les étapes, incluant la socialisation à la participation, l'information
vulgarisée et le partage des expertises requises. Ce qui implique notamment que
les enfants et les jeunes soient informés sur les enjeux, en mesure de croiser
les informations afin de développer leur propre opinion, d'émettre des
recommandations éclairées et que celles-ci soient sérieusement prises en compte
par le commissaire.
Actuellement, la défense et la promotion...
la promotion et le renforcement des droits de la jeunesse se trouvent
principalement dans les mains d'adultes concernés plutôt qu'entre les leurs, ce
qui a une influence majeure sur leur développement, le sentiment de contrôle
sur leur vie ainsi que sur leur pleine participation à la vie démocratique par
la suite. À notre sens, le soutien adéquat à leur participation au sein du ou
des comités consultatifs ainsi qu'une véritable prise en compte de leur
expertise, contribuera en lui même au bien-être des enfants, des jeunes et de
leurs familles, ainsi qu'à un plus grand respect de leurs droits.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Alors, sur ce, M. le
ministre...
Le Président (M. Provençal)
:...je vous invite à faire la première
intervention.
M. Carmant : Oui, merci
beaucoup, M. le Président. Merci pour cet exposé, qui était très clair, à vous
trois.
La première question qui se pose,
c'est : comment le commissaire va rejoindre les jeunes, particulièrement
les plus vulnérables? Comment vous voyez ça?
Mme Chénier-Richard (Karolane) : Bien,
en fait, c'est que, selon nous, tu sais, comment ils vont permettre ça, en
fait, c'est qu'il va pouvoir aussi assurer une certaine accessibilité au niveau
des services, puisque, tu sais, comme je l'ai mentionné, en fait, c'est que les
services ne sont pas connus, en fait. Donc, un des rôles du commissaire, c'est
de permettre une certaine accessibilité, ça fait qu'en fait c'est de justement
aussi faire en sorte que les jeunes puissent être informés de leurs droits,
être informés des recours qui existent. Parce qu'en fait ce n'est pas quelque
chose qui est... qui est fait dans les... en fait, même à ce jour, il y a plein
de jeunes qu'on a rencontrés qui ne savent même pas qu'ils ont le droit à être
informés, à être accompagnés. Puis ça, je crois que c'est très problématique.
Donc, je crois qu'un commissaire qui va être principalement juste pour les
jeunes, les enfants, tout ça, même les jeunes adultes, va permettre de
justement se concentrer sur cet enjeu-là puis de pouvoir les accompagner de
façon plus adéquate. Parce que je crois qu'on a failli un peu à cette
responsabilité-là, qu'on avait envers nos enfants, les enfants du Québec. Ça
fait que je crois que ça va permettre ça.
• (17 h 40) •
M. Carmant : Et mais
vraiment, pratico-pratique, sur le terrain, est-ce que vous avez réfléchi à ça?
Mme Côté-Guimond (Jessica) : En
fait, si je peux aller en complément, là, je pense qu'il y a des défis,
effectivement, au niveau géographique, de s'assurer vraiment d'avoir des
bureaux de commissaire dans chacune des régions et de mettre en place des
comités non pas consultatifs, je trouve que c'est très important. Le mot
«consultatif jeunesse» est un peu problématique pour nous. Si on veut faire de
la réelle participation citoyenne, il ne faut pas tomber dans de la unique
consultation. On parle de participation, donc il y a une échelle, hein, de
participation. C'est important de prendre les bons termes.
Donc, le fait d'avoir des comités jeunesse
dans chacune des régions va aussi permettre de faire connaître ces... les
services qui sont offerts aux enfants. Ça peut être de différentes façons, là,
je veux dire, avec les médias sociaux d'aujourd'hui, avec des affiches.
J'entendais hier, là, le protecteur de l'élève dire qu'il a mis des affiches
dans toutes les écoles du Québec. Peut-être qu'on peut nuancer les choses. J'ai
deux enfants, ils n'ont jamais eu connaissance de ce protecteur-là. Mais, tu
sais, je pense que c'est effectivement très important de les faire connaître.
Mais le sous-financement de la CDPDJ, en 1995, il est venu amener ces enjeux-là
importants au niveau géographique, là. C'est écrit dans la commission Laurent,
que de réduire leurs budgets a eu des impacts sur les services en région.
Donc, c'est très, très important, là, pour
nous, qu'on rende ça accessible, et puis par tous les moyens nécessaires aussi.
Parce qu'on parle de fracture numérique, en centres jeunesse, des jeunes qui
n'ont parfois même pas accès à un téléphone ou que leurs intervenants leur
empêchent d'appeler ou vérifient le numéro qu'ils appellent. Donc, il y a des
enjeux au niveau de la confidentialité des communications, le droit à des
communications confidentielles avec la CDPDJ, qui sont... un droit qui est
énormément lésé en protection de la jeunesse. Donc, pour faire connaître, il
faudrait différents moyens, là, entre autres, pour que ça soit accessible. Mais
une ligne directe, ça serait une base, tu sais, un numéro direct.
Mme Laliberté (Emily) : Moi,
je pense, de mon humble avis et de la place dont je parle de... c'est le seul
endroit d'où je peux parler, moi, ce que j'ai vu sur le terrain, c'est vraiment
des enjeux d'opérationnalisation. Parce qu'en ce moment on fait un projet qui
s'appelle Droit de citer. Avec ce projet-là, en fait, on a, nous, reçu de la
formation de la CDPDJ, on s'est informés sur nos droits, on a discuté, on a
échangé, puis les histoires qui nous sont partagées, ce ne sont que des
histoires de lésion de droit. Donc, les jeunes, quand qu'ils apprennent qu'ils
ont ces droits-là, constatent qu'ils ont eu des lésions de droit dramatiques,
qu'ils ont eu des impacts sur leur vie au quotidien. Donc, moi, je m'explique
mal, alors que, dans la loi, moi, personnellement, le texte législatif, là, de
la Loi sur la protection de la jeunesse, il me convient, c'est qu'on ne
l'applique pas. Donc, il y a... pour moi, il y a un nœud quelque part au niveau
de l'opérationnalisation, au niveau des budgets, au niveau des ressources
humaines, au niveau des ressources numériques, justement. C'est... Remettre une
fiche à un enfant avec trois, quatre dépliants dedans, quand qu'il vient de
sortir d'une situation traumatisante dans son environnement, ce n'est pas...
Mme Laliberté (Emily) : ...une
manière d'informer. Tu sais, pour moi, la responsabilité de l'information,
c'est que l'enfant, il doit comprendre qu'est-ce qui se passe. Puis comprendre,
ça veut dire, bien, de comprendre les modalités, les codes. Juste... juste pour
nous venir ici aujourd'hui, tu sais, c'est quand même... il y a des... il y a
des codes, il y a un décorum. Tu sais, la participation, ça implique qu'on se
mette au niveau de la personne, qu'on soit à l'écoute de ses besoins, qu'on lui
donne les informations puis les moyens de prendre des décisions éclairées.
M. Carmant : Oui. Puis j'aime
beaucoup le concept, là, de comités consultatifs ou... ça, on verra le nom, là,
régionaux parce que je me disais : Tu sais, à un moment donné, c'est quoi,
la taille idéale? Tu sais, pour... pour... pour bien travailler, ce serait...
Tu sais, vous, est-ce que vous avez une petite idée, dans votre expérience, là,
tu sais, de la taille du groupe? Surtout si on inclut des gens plus vulnérables
qui sont moins peut-être portés à aller de l'avant, tu sais, comme... Comment
vous voyez ça, vous?
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Mais
si je peux me permettre de...
Mme Laliberté (Emily) : Vas-y,
vas-y
Mme Côté-Guimond (Jessica) : ...en
fait, je crois que c'est important d'avoir des groupes, comme je disais,
régionaux, puis que le... au niveau provincial, ce soient des représentants des
différentes régions qui siègent au niveau provincial pour permettre les
échanges, de permettre aussi d'avoir des jeunes un peu plus âgés, hein, aussi,
qui doivent siéger sur ces comités là, parce que, là, on le voit dans la loi
ici, vous arrêtez à 25 ans. C'est quoi, la jeunesse, la définition de la
jeunesse au Québec? Je ne suis pas certaine que vous arrêtez à 25 ans dans
votre définition. On fait juste regarder avec le Secrétariat à la jeunesse, on
va jusqu'à 30, au fédéral, 35 ans. Il faudrait qu'on se pose tout de suite
cette question-là. Je ne crois pas que d'arrêter à 25 ans, c'est une bonne
chose. Mais les comités... des comités jeunesse, là, vous êtes en train de me
déformer, mais les comités jeunesse, qui ne seront pas juste de la
consultation, justement, nécessitent une préparation en amont, nécessitent des
outils, nécessitent une reconnaissance, une adaptation aussi. Parce que c'est
souvent des rencontres qui vont avoir lieu en soirée. Si on a des rencontres,
par exemple, sur Zoom, est-ce que les jeunes ont accès à de l'équipement
technologique? On le voit un peu avec le nouveau comité que vous avez instauré,
là, avec Mme Lemay, il y a des enjeux importants. Les jeunes de nos comités qui
sont sur ce comité là nous disent : On se sent instrumentalisés, on a
l'impression que c'est qu'uniquement de la consultation. Par exemple, là, on
leur a présenté le projet de loi n° 37, le soir, et le lendemain matin, on le
déposait à l'Assemblée nationale. Donc, à quel point leur voix, leur parole,
leur prise de parole est prise en considération? Ils se sont sentis juste
consultés, et encore là, c'était pratiquement juste de l'information. Donc, c'est
très important, là, qu'on se penche vraiment sur les modalités de participation
et puis d'avoir des techniques comme Emily nous a amenées... des techniques de
médiation en utilisant l'art, en utilisant différents médiums pour faciliter
l'expression.
Quand on va chez les tout-petits, par
exemple, je vous citerais les travaux de Mme Vicky La fantaisie, qui a
développé toute une boîte d'outils pour faciliter la participation des
tout-petits. Il y a des gens, des chercheurs qui se spécialisent sur la participation
jeunesse. C'est important, là, de les mobiliser d'ailleurs, ils sont très
mobilisés autour des projets d'aires ouvertes, entre autres choses. Donc, il y
a toute une communauté qui est là, qui est existante, qu'on peut mobiliser
aussi pour mieux faire les choses.
Mme Laliberté (Emily) : ...vous
parliez... je veux juste compléter. Vous parliez de taille du comité, là. Moi,
ça fait 15 ans que je fais ça, là. Puis mettons qu'avec toute
l'intersectionnalité des enjeux, là, au lieu... au-delà de 15 jeunes
autour d'une même table, il faut vraiment être très compétent pour arriver à
faire ça. Mais le bout qu'on ne parle pas, on parle de nombre, mais j'aimerais
ça quand même souligner au niveau de la composition, parce que le projet de
loi, actuellement, là, il est extrêmement large, hein? On a entendu plein de
gens parler hier des enjeux, par exemple, du temps d'écran qui... que je ne dis
pas que ce n'est pas un enjeu, mais, quand on pense qu'il y a des enfants qui
ont... qui ont... qui vivent des lésions de droits actuellement, tu sais, pour
moi, la balance, elle est facile à faire en termes de priorité. Donc, d'avoir
les voix des personnes, les jeunes, les plus marginalisées autour des tables
sur les enjeux qui les concernent, pour moi, c'est absolument essentiel. Puis
ça, ça veut dire qu'il ne peut pas y avoir un comité qui va être composé d'une
personne autochtone, d'une personne racisée, d'une personne LGBTQ+, qui va
avoir toute la charge de porter le nom de toute sa communauté, ce n'est pas ça.
Il va falloir avoir des espaces de véritables prises de parole, informations...
discussions pour arriver à des... à des... voyons, j'ai de la...
Une voix : ...
Mme Laliberté (Emily) : Consensus,
merci, commun pour être capable par la suite que par...
Mme Laliberté (Emily) : ...expriment
des recommandations qui soient vraiment prises en compte. Puis moi, c'est mon
ajout personnel, j'aimerais bien qu'on documente ça, donc qu'on documente si
les recommandations des jeunes, des enfants, puis leurs prises de parole,
vraiment, fait une différence puis qu'on ne fait pas ça juste dans un projet de
loi, de manière cosmétique.
M. Carmant : Peux-tu élaborer
un peu plus sur la représentativité? Je ne suis pas sûr que j'ai bien compris.
Mme Chénier-Richard (Karolane) : Bien,
en fait, c'est de prendre plusieurs groupes de personnes, que ce soient des
personnes, tu sais, justement, autochtones, racisées ou personnes LGBTQ+ ou
autres, puis, en fait, d'assurer un lieu d'échange, tu sais, que ce ne soit pas
juste, tu sais, de la consultation, mais qu'on prenne réellement en compte ce
qu'ils... qu'est-ce qu'ils ont à dire, tu sais. Je veux dire, de ma part, je
pense, tu sais, d'avoir justement eu la chance, peut-être, dans le passé,
d'avoir participé à ce genre d'échange là, aurait fait en sorte que j'aurais pu
me sentir mieux écoutée, j'aurais pu aussi penser que j'ai quelque chose à
apporter, j'ai quelque chose à... tu sais, j'ai un pouvoir. Puis, en fait, ce
pouvoir-là, on ne me l'a pas laissé. Donc, c'est sûr que je crois que c'est une
priorité de laisser la place aux jeunes dans ces comités-là.
• (17 h 50) •
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Rapidement,
en complément, là, peut-être, tu sais, par exemple, le collectif est un
organisme communautaire, pourrait avoir un représentant du collectif pour
porter la voix des ex-placés dans ce comité national là, pourrait avoir aussi
des jeunes issus du mouvement Jeunes et santé mentale. Je veux dire, il y a
déjà beaucoup d'organisations communautaires qui existent, le regroupement des
Auberges du cœur, la Coalition interjeunes, bref, je ne vais pas toutes les
nommer ici, mais on collabore avec eux. Il y a des grandes consultations
jeunesse qui sont faites par la Coalition interjeunes. D'ailleurs, on a souvent
sollicité des députés pour venir à ces grandes consultations là, et la réponse
n'est pas très élevée non plus.
Donc, tu sais, c'est de voir aussi quelles
sont les instances, les groupes qui existent déjà, qui ont une préparation en
amont, qui peuvent échanger de manière collective sur leurs enjeux propres,
pour, après ça, aller porter la voix de leurs groupes, là. Donc, c'est un petit
peu ça qu'on voit, en fait.
Mme Laliberté (Emily) : Ce
qu'on dit, c'est que les personnes concernées... en une seconde, c'est que les
personnes concernées sont les meilleurs experts, expertes de leur condition,
c'est ça qu'on dit, sur tous les plans. Donc, c'est de mettre des groupes de
gens qui se ressemblent, qui vont vivre comme on le fait, là, avec Porte-voix
ou comme on l'a fait avec Droit de cité, rassembler ensemble des personnes qui
vivent des enjeux communs puis leur faire trouver des pistes de solution.
L'analyser ensemble, c'est extrêmement porteur.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Bonaventure.
M. Carmant : Je passe la
parole, oui. Merci beaucoup, hein, je pourrais continuer.
Mme Blouin : Merci. Merci
beaucoup, M. le Président. Bonjour à vous trois. Merci d'être avec nous
aujourd'hui. Une fois qu'on va adopter ce projet de loi là, l'Assemblée
nationale va procéder à la nomination du nouveau ou de la nouvelle commissaire
au bien-être et aux droits des enfants, et je me demandais, en fonction de
votre expérience, ce seraient quoi, les aptitudes, la formation ou encore les
compétences que devrait avoir cette personne-là, le profil recherché dans le
fond, pour une fonction si importante pour nos enfants?
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Bien,
dans notre mémoire, là, à la page quatre, vous avez quelques recommandations,
là. Je pense qu'on... je pense qu'on pense, ça...
Des voix : ...
Mme Côté-Guimond (Jessica) :
On pense des choses, mais il faudrait, au minimum, je crois, une dizaine
d'années d'expérience sur le terrain, à mon humble avis. Je pense aussi qu'une
personne issue du milieu du droit pourrait être une personne intéressante,
considérant qu'on est dans les enjeux de droits, donc il y a une importance de
bien interpréter la loi. Après, ça n'exclut pas, là, évidemment que des gens,
là, qui ont de l'expérience terrain, pourraient aussi être compétents, là,
évidemment, mais, tu sais, je pense à des gens qui ont déjà été protecteur du
citoyen, protecteur de l'élève, ont déjà une expertise dans les enquêtes, dans la
promotion, bref.
Après, ça dépend vraiment aussi, là, parce
qu'hier, à force d'écouter les audiences, je comprends que vous allez vraiment
dans une optique de prévention puis un peu moins de défense de droits, là,
c'est plus une promotion des droits, plutôt qu'une défense de droits, donc, il
y a peut-être ici, là, des questions à avoir.
Mais une chose qui est importante, qu'on
souligne ici, c'est que, nous, on n'est pas en accord, en fait, que ce soit
nommé par le premier ministre, ça, je crois que c'est une chose qui est
importante à souligner. Et, si on se compare encore une fois avec l'Alberta,
ils ont mis sur pied un comité d'analyse, de sélection des candidatures. Donc,
on demande, là, en fait... un peu comme le commissaire adjoint, il y a eu des
discussions, là, à savoir il faut que vous alliez rencontrer les différentes
communautés autochtones et inuites pour pouvoir choisir qui va être nommé,
bien, on demande, en fait, la même chose, là, demandez aux gens de la société
civile...
Mme Côté-Guimond (Jessica) : ...de
créer vraiment un comité, là, d'analyse des sélections des candidatures, qui
soit transpartisan et qui soit impartial. Pour nous, c'est vraiment quelque
chose qui serait une avancée puis qui serait en meilleure cohérence avec les nécessités
d'avoir un poste qui est impartial, oui.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Dorismond : Bonsoir à
vous trois, merci d'être là. Vous avez commencé un petit peu... Je me
demandais... comme le collectif d'ex-placé, c'est quoi votre rôle et votre
collaboration? Vous avez commencé un petit peu avec le ministre, là,
d'expliquer, mais où vous vous voyez là-dedans avec le commissaire au niveau de
la collaboration puis votre rôle comme collectif?
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Bien
en tant que collectif, nous, c'est sûr, comme je le disais, on aimerait bien
avoir des gens représentants de notre collectif qui soient impliqués dans ces
comités consultatifs jeunesse, mais d'avoir, là, aussi, comme je disais, une
possibilité pour nous d'être des mentors pour des jeunes qui ont peut-être
moins d'expérience parce qu'on parle souvent de la socialisation et la
participation, c'est très important. Donc, c'est aussi l'argument pourquoi je
dis qu'il ne faut pas arrêter à 25 ans. D'avoir des jeunes qui ont plus
d'expérience, plus de recul sur leur vécu permet aussi d'amener une autre
vision puis de soutenir ces jeunes-là, peut-être de les accompagner en dyade,
un mentor, un junior, pour vraiment les aider, là, à mieux se préparer, mieux
prendre en compte leur point de vue aussi, pour des jeunes qui ont peut-être
plus de difficultés à s'exprimer. Nous, au collectif, on a des jeunes qui ont
des troubles de langage, par exemple, donc ça demande beaucoup plus de
préparation en amont, des rencontres aussi. C'est des choses qui sont très
importantes à prendre en compte. Donc, nous, on croit qu'on pourrait
contribuer, là, aux travaux.
Puis on demande aussi à ce que le comité
de jeunes soit impliqué dans toutes les fonctions, là, pas uniquement, là, à
certaines fonctions. Il faut vraiment qu'on soit dans un système de soins
apprenants, là, ou appelons ça comme on voudra, mais que les jeunes puissent
être là pour venir sur le terrain prendre la parole des jeunes, contribuer aux recherches.
Nous, on est des co-chercheurs pairs, on travaille comme chercheurs pairs avec
d'autres chercheurs, on peut faire plusieurs choses. De pouvoir vous émettre
directement des recommandations, que les comités jeunesse puissent déposer un
rapport à l'Assemblée nationale, pourquoi pas? Qu'ils puissent venir même vous
le présenter. Ça serait un peu comme les parlementaires jeunesse, tu sais. Je
pense qu'il y a vraiment des choses à faire pour développer la participation
citoyenne de nos jeunes, puis nous, on peut y contribuer par notre expérience.
Mme Dorismond : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, on va poursuivre avec Mme la
députée de Robert-Baldwin.
Mme Garceau : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup, mesdames, d'être ici. Non seulement... est-ce que
votre rapport est très, très clair, vous avez des recommandations fort
intéressantes, mais vos représentations sont vraiment très intéressantes
également. Et je dois vous remercier parce que vous êtes vraiment... vous portez
la voix non seulement des ex-placés, mais des jeunes en ce moment qui sont dans
le système de la protection de la jeunesse où il y a des lésions de droits. Et
je peux vous assurer que nous prenons à cœur la défense des droits des enfants
et qu'ils soient protégés. Et donc je voulais... Parce que j'ai vu dans votre
mémoire, vous en avez discuté au niveau de la CDPDJ et le transfert des
pouvoirs et des responsabilités au commissaire. C'était une recommandation dans
le rapport de la commission Laurent, mais vous l'avez citée dans votre rapport
et vous justifiez vous-même ce transfert et qui est lié à un changement profond
de culture et une meilleure priorisation des dossiers. Et je voulais vous
entendre plus à ce sujet là, parce que ça vous amène, là, à recommander ce
transfert.
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Bien,
je tiens quand même à nuancer. Tu sais, on a voulu vraiment ramener la
recommandation de la commission Laurent parce qu'on se rend compte vraiment que
les jeunes qui sont présentement placés ne sont pas suffisamment défendus. Ce
qu'on dit, c'est que le constat qui est fait par la commission Laurent, c'est
que ça vient aussi des coupures qu'on a faites en 1995. Donc, nous, ce qu'on
demande, c'est... on serait à l'aise à ce que la CDPDJ maintienne ses fonctions
à la seule et unique condition qu'on augmente leurs budgets, qu'on...
Mme Côté-Guimond (Jessica) : ...on
s'assure qu'ils ont une équipe qui n'est pas uniquement de 17 personnes dans
l'équipe jeunesse. Je veux dire, ce n'est nettement pas suffisant. Il faudrait
des bureaux d'enquête peut-être dans chacune des régions. Il y a vraiment des
enjeux au niveau du manque de ressources à la CDPDJ. On pourrait même aussi
penser vraiment à un comité jeunesse à la CDPDJ, pas juste une table de concertation
jeunesse. Il y a beaucoup de choses qu'on peut faire. Je pense que c'est une
instance qui est nécessaire et importante au Québec mais que, présentement,
elle n'a vraiment pas assez de mordant pour défendre nos droits. La loi est
bien écrite, Mme Leblanc le disait hier, mais la CDPDJ, à notre avis, ne prend
pas suffisamment les moyens légaux qui lui est octroyé pour mettre fin à des
situations de compromission. On l'a vu avec le Protecteur du citoyen, qui est
sorti avec le cas de Trois-Rivières, là, je ne vous répéterai pas ce qu'ils
vous ont dit hier non plus, mais je crois que c'est vraiment important, peu
importe qui va avoir la défense des droits des jeunes, qu'on s'assure d'avoir
les moyens financiers et humains.
• (18 heures) •
Ma préoccupation première est que, si on
injecte tout l'argent dans un commissaire puis qu'on ne bonifie pas le budget
de la CDPDJ... c'est là, le problème. Il faut absolument bonifier si... Ils
veulent garder leurs fonctions, moi, je suis à l'aise, mais il faut bonifier
puis s'assurer qu'ils ont une équipe compétente, dédiée, qu'ils font vraiment
leur job, qu'il y ait des posters dans tous les milieux de vie, qu'il y ait
vraiment de quoi partout, tu sais, puis que... je veux dire...
Une voix : ...
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Pas
juste des posters, mais, tu sais... Puis peut-être juste en parallèle, là, je
trouve que c'est vraiment important de vous citer aussi ce que Mme Costanzo et
Paré ont dit concernant les communications, puis je vous la cite ici, elle
dit : «Il n'y a pas de continuité dans les communications entre le
tribunal et la CDPDJ. En ce sens, il semble exister un circuit incomplet entre
les institutions chargées d'intervenir en matière de lésion de droit. Il n'y a
pas de suivi assuré entre la CDPDJ et le tribunal. Il n'est pas possible de
savoir ce qui est advenu de la lésion de droit. Donc, si la CDPDJ se veut le
chien de garde du respect et de la promotion des droits, bien, il paraît
étonnant que l'effort concerté des instances de surveillance n'assure pas de
suivi dans les causes où il y a lésion de droit ni de mesure pour agir en
prévention.» Et ça, c'est un article qui vient d'Érudit, qui est des rapports
de professeurs-chercheurs qui se basent sur des données probantes. Donc, en
même temps, ça veut tout dire.
Puis le Protecteur du citoyen, hier, vous
rappelait l'importance d'avoir des ententes avec les partenaires, parce que la
DPJ va tout garder secret sous le motif de confidentialité des dossiers. Mais,
si on regarde un peu plus loin aussi dans le rapport de Mme Costanzo, bien, on
va voir aussi des lésions de droit importantes au niveau, là... par exemple,
ici, une cause, «le tribunal a blâmé la DPJ d'avoir lésé les droits des jeunes
au motif qu'il a été maintenu dans un centre d'hébergement où il a subi une
agression sexuelle et que la DPJ a failli à son besoin... à son devoir de
transparence en cachant des faits au tribunal et en défendant strictement une
position institutionnelle». On est aussi dans de l'ingérence criminelle liée à
des abus sexuels, et ce que nous, on dénonce et qu'on demande, c'est qu'il y
ait des enquêtes systémiques qui soient faites sur le recours ou le non-recours
aux ententes multisectorielles aussi. C'est très problématique que la DPJ cache
des faits aux tribunaux puis qu'il y a des jeunes qui viennent nous témoigner
qu'ils ont été victimes... que ça soit en famille d'accueil, en centre
jeunesse, qui ont été victimes d'abus entre jeunes ou avec des familles, des
adultes, puis que la DPJ cache ça. Je veux dire, c'est très, très, très grave,
là.
Mme Garceau : Ou ferme le
dossier, parce qu'il y en a eu aussi, des jeunes de 12, 13 ans...
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Bien,
il y a des jeunes qui sont décédés.
Mme Garceau : ...victimes
d'agression sexuelle, puis on a fermé le dossier, disant : Il n'y aura pas
de conséquences pour cette jeune dame ou jeune fille. Donc, ça, je le comprends
très bien, mais... Parce que vous avez utilisé des mots assez importants dans
votre mémoire, parce que vous avez parlé de changement profond de culture, puis
ça, c'est quelque chose que le ministre avait soulevé au mois de septembre
dernier, un changement de culture, mais... c'est ça que je voulais vous
entendre, quand vous utilisez ça, le changement profond, vous voulez dire quoi
exactement?
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Bien,
de vraiment octroyer les sommes nécessaires et une équipe dédiée uniquement...
Je veux dire, là, ils sont une équipe en CDPDJ, charte et jeunesse...
18 h (version non révisée)
Mme Côté-Guimond (Jessica) : ...le
ratio, il n'est pas... il n'est pas là du tout. Si on se compare avec l'Alberta,
là, hier, il y a des gens qui nous disaient qu'il fallait une équipe d'environ
une centaine de personnes au Québec pour... au niveau du pourcentage d'habitants,
avoir une équipe d'une centaine de personnes pour défendre les droits des
enfants au Québec. Pourquoi qu'on a juste 17 personnes aux enquêtes et une
seule personne dédiée vraiment à l'éducation des droits de la jeunesse, qu'une
personne pour tout le Québec en éducation, des droits de la jeunesse, qui vont
faire juste 30 formations en 2022-2023? C'est un problème.
Mme Garceau : Donc... O.K.
Excusez. Allez-y.
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Non,
non. Vous pouvez y aller.
Mme Garceau : Donc, pour
vous, si on augmente le budget, si on augmente le nombre de personnes, ça va
régler le problème de culture.
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Bien,
ça peut grandement contribuer, en fait, moi, je pense que oui, puis c'est aussi
ce que je crois que la CDPDJ, eux aussi demandent, ils ne l'ont peut-être it
directement hier, mais je crois que c'est des choses qu'ils ont déjà demandées,
entre autres choses.
Mme Garceau : O.K. Je voulais
aussi... la formation obligatoire, donc, vous, si vous pourriez peut-être
élaborer là-dessus au niveau... Oui, tous les intervenants sur les droits des
usagers afin de prévenir les lésions de droit, mais aussi en termes des
avocats. Les deux volets, je trouve que c'est très, très important.
Mme Chénier-Richard (Karolane) : Pour
nous, en fait, c'est vraiment important que les intervenants soient informés
des droits des jeunes. Tu sais, moi je suis technicienne en travail social
aussi et, durant mes études, en fait, je n'ai pas eu de formation, en fait, sur
les droits... sur les droits des jeunes, en fait, Tu sais, j'ai pu apprendre c'est
quoi, des motifs de compromission, mais ça finit un peu là. Donc, je pense qu'il
y a une importance de dire, tu sais, comment on veut agir de façon diligente, cmment
on veut agir en toute connaissance de cause quand on n'a pas de formation, on a
on ne sait pas c'est quoi, les droits, tu sais, exactement, des jeunes. Ça fait
qu'il y a une importance, tu sais, on envoie des gens sur le terrain, tu sais,
des jeunes intervenants qui vont acquérir, tu sais, de l'expérience, puis tu
sais, tout ça, mais on les garroche un peu, puis ils ne le savent pas. Tu sais,
je veux dire, ce n'est pas par manque de volonté ou par... tu sais, qu'ils
n'ont pas de... Bien, il y a juste la méconnaissance.
Ça fait qu'en fait de, justement, mettre
de l'avant des formations plus poussées, plus visées aussi. Parce que, tu sais,
un placement en vertu d'une loi d'exception, c'est quand même beaucoup dans la
vie d'un enfant, donc il faut prendre aussi en compte les droits des enfants.
Mme Laliberté (Emily) : Moi,
quelque chose qui m'a vraiment personnellement choquée dans toutes les
activités de défense de droit, de réflexion, de droit que j'ai fait avec les
jeunes, au niveau de la formation des intervenants, c'est quand on regarde la
DPJ comme employeur. Donc, quelqu'un qui va avoir une formation en
psychoéducation, en travail social, la statistique, là, il faudrait que je la
retrouve, mais c'était environ, genre, 50 % qui ont fait ces cheminements
scolaires là, qui se retrouvent, un jour, à occuper une fonction dans la
direction de la protection de la jeunesse. Comment ça se fait qu'il n'y
a pas de cours obligatoire? Tu sais, moi, je me pose vraiment la question :
Comment tu peux aller pratiquer... Vous parliez tout à l'heure de votre code d'éthique
comme avocate, mais comment on peut aller travailler en disant : Moi je
travaille dans l'intérêt supérieur de l'enfant sans avoir avoir lu les-
celle-là, c'est 270 pages, hein? Parce que là je la mélange avec l'autre,
mais les 270 pages de la loi 88, selon l'ordre, je les mélange, les deux - sans
l'avoir lu d'un couvert à l'autre, puis si elle est intéressée, puis nous, ça
fait un an qu'on le fait, puis c'est quand même... c'est complexe. Donc...
Mme Chénier-Richard (Karolane) : Tu
sais, je pense qu'il y a aussi le... central là-dedans, c'est l'intérêt de l'enfant,
tu sais, puis on doit prendre en considération que ça va être les adultes de
demain, ça fait que toute l'importance d'en prendre soin, de favoriser leur
bien-être, favoriser aussi la défense de leurs droits.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Je vais céder
maintenant la parole au député de Saint-Henri-Sainte-Anne.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup, M. le Président. D'abord, merci à vous toutes, excellent exposé puis
excellent mémoire, puis merci pour votre travail à tous les jours. Je vais
aller sur les points qu'on n'a pas nommés pour essayer de compléter sur votre
mémoire, notamment, vous voulez élargir la veille des...
M. Cliche-Rivard : ...bien
au-delà de ce qui est en vertu de la Loi sur les coroners. Je vous laisserais
peut-être nous l'expliquer.
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Absolument.
Présentement, nous, ce qu'on demande, c'est qu'il y ait vraiment une vigie
particulière qui soit faite auprès des jeunes qui sont placés aussi en
protection de la jeunesse, là. Il y a quand même un haut taux très préoccupant
de suicides en centre jeunesse aussi. Mais on croit que considérant les enjeux
de la transition à la vie adulte, là, c'est quand même 33 % de nos jeunes
qui sortent de la DPJ, qui vont connaître un jour ou l'autre une période
d'itinérance avant l'âge de 21 ans. Il y a des enjeux énormes au niveau
des surdoses, au niveau des enjeux en itinérance. Il y a beaucoup de décès
aussi qui vont se produire dans les rues. Donc, c'est très important pour nous
qu'il y ait un suivi sur les décès des jeunes, là, jusqu'à au moins minimum 25
ou 30 ans — ça dépend de la définition de la jeunesse — qui
soit faite.
Mais, tu sais, si vous regardez à la
page 14 également, là, je demande aussi qu'il y ait des enquêtes et des
vigies plus particulières aussi qui soient faites, notamment, là, comme je le
disais, les taux de décès des jeunes suivis en protection de la jeunesse, aussi
au niveau des contentions, des isolements, au niveau aussi des suivis et des
pratiques en pédopsychiatrie. Nous, on a des témoignages de jeunes qui nous
parlent de contentions à plusieurs reprises dans une journée comme étant la
pratique courante à Pinel, qu'on met des jeunes en isolement puis qu'on les
maintienne en camisoles de force. On juge que ce n'est pas du tout des
pratiques adéquates. Puis aussi, là, comme je le disais, là, des enquêtes plus
spécifiques au niveau des lieux propices à l'hébergement, parce que si on en
arrive à se suicider, c'est peut-être parce qu'on n'est pas bien puis qu'on n'a
pas eu les services.
• (18 h 10) •
M. Cliche-Rivard : En effet.
Vous dites donc 18-25 ans, puis vous dites aussi de porter une attention
particulière à ceux qui étaient sous la DPJ dans les deux dernières années, je
pense, c'est ce que vous dites dans le mémoire. Vous parlez aussi d'élargir le
mandat du commissaire ou la responsabilité du commissaire aussi au ministre de
la Justice, pas seulement au ministre responsable des Services sociaux. Est-ce
qu'on peut vous entendre là-dessus?
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Bien,
en fait, c'est qu'on n'est pas vraiment habilités à savoir qu'est-ce que
vraiment la fonction. On voyait dans votre projet de loi qu'il y a un ministre
responsable de l'application de la loi, là. On n'est peut-être pas les
meilleures placées pour parler de ça. On ne maîtrise pas tous ces éléments-là.
Mais on se demande justement, au niveau du positionnement, est-ce que ce ne
serait pas mieux, un peu comme la CDPDJ, qu'il soit sous la responsabilité du
ministre de la Justice ou peut-être au positionnement, là, du Protecteur du
citoyen? C'est juste des questions qu'on a, là.
M. Cliche-Rivard : Je
comprends. Vous dites aussi sept ans au lieu de cinq. Pourquoi c'est important
pour vous, le mandat de sept ans?
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Ça
vient de la commission Laurent, ça. La commission Laurent a demandé un sept ans
aussi à ce niveau-là. Je pense que c'est... ça permet d'avoir un meilleur suivi
des dossiers, surtout si on est dans des enquêtes, dans des études. Ça peut
prendre plus de temps également.
M. Cliche-Rivard : Un grand,
grand merci.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Alors, on va terminer
cet échange-là avec le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci, M. le
Président. Merci à vous trois pour votre éloquence, votre connaissance et le
partage que vous en faites, là, des différents éléments du dossier. Ça finit
bien la journée, là, vraiment. Je pense qu'il y a quelque chose là qui est
extrêmement pertinent à toutes nos discussions. Puis j'apprécie aussi, là,
votre pragmatisme. Il faut trouver des solutions. Vous arriver en disant :
Il faut s'organiser, là, pour défendre véritablement les droits. Puis vous
avez, je pense, proposé que l'on transfère... Vous, vous êtes favorables au
transfert des pouvoirs de la CDPDJ vers le commissaire, mais si ça ne se fait
pas, vous avez d'autres solutions. Alors, ça, je trouve ça fort, fort
intéressant.
Mais je veux revenir aussi sur la question
du changement de culture, parce qu'au début, quand vous avez parlé de ça,
j'avais l'impression que c'était davantage que la question des ressources ou...
des ressources financières ou humaines, mais l'approche. Est-ce que c'est ça
aussi ou c'est moi qui a interprété, là, que peut-être qu'il n'y avait pas
cette espèce d'esprit, là, de, justement, d'actions, de suivis, d'information,
d'éducation, de... Je ne sais pas, je voyais d'autres choses dans la culture,
mais je ne veux pas vous prêter des intentions ou des mots.
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Bien,
c'est sûr que, dans la culture, il y a tout l'aspect de l'opérationnalisation,
de comment qu'on déploie les moyens et les ressources nécessaires. Mais quand
on parle aussi de formation, une formation va vraiment pouvoir aider à changer
cette culture-là également. Tu sais, si on forme vraiment les intervenants...
Nous, on donne des conférences auprès des gestionnaires, des intervenants de la
DPJ. On leur pose la question : Avez-vous eu des formations sur les droits
en protection de la jeunesse? La plupart nous répondent non. Et même en lien
avec les modifications du p.l. n° 15 de l'an dernier,
il y a plein d'acteurs terrain qui ne sont pas encore aujourd'hui formés et
informés des modifications. Donc, nous, on les...
Mme Côté-Guimond (Jessica) : ...sensibilise
énormément sur la transition à la vie adulte, mais sur le terrain, les gens ont
des formations à la va-vite, il n'y a pas d'échange avec des ex-placés comme
nous pour mieux comprendre les enjeux, les rouages. Ce n'est pas juste des
formations théoriques, académiques qu'on parle. On parle de formation
expérientielle aussi, qu'on mette nos connaissances à profit, également, dans
ça. Donc, si on parle de formation, on parle d'implication de nous, les
premiers concernés, qui va aider à changer cette culture-là.
M. Arseneau : Et c'est le
deuxième volet que je voulais aborder, c'est mettre à profit les savoirs
expérientiels. C'est ce que vous proposez. Je... Il me reste une minute, mais
j'aimerais quand même que vous puissiez nous clarifier... Parce que, pour moi,
ce n'est pas clair encore, là, quand vous parlez de comité qui serait davantage
participatif, puis ce n'est pas juste une personne. Comment on arrive à faire
en sorte que ces rencontres-là donnent véritablement des résultats, puis que le
point de vue soit entendu, là? Une dernière fois, peut-être.
Mme Laliberté (Emily) : Bien,
c'est une grande question, là, parce qu'on parle de l'ensemble du territoire du
Québec, donc on parle de représentation régionale, donc d'enjeux spécifiques à
certaines régions, en plus. Puis nous, on parle par rapport aux anciens placés,
mais le mandat du commissaire est encore plus large que ça, hein? C'est tous
les enfants du Québec. Ça fait que de quelle façon ça va s'opérationnaliser sur
le terrain? Nous, on est là en fait, pour souligner l'importance puis la
nécessité que les voix des personnes les plus vulnérables, et, dans les
personnes les plus vulnérables, celles qui, de manière intersectionnelle, le
sont encore plus, soient prises en compte dans l'ensemble des décisions, des
recommandations. Puis ce qu'on voit, c'est que la loi, actuellement, la Loi de
la protection de la jeunesse, garantit le droit à la participation, hein, c'est
écrit, le droit d'être informés, entendus, mais dans l'opérationnalisation de
la chose, ce n'est pas ça qui se passe sur le terrain.
Ça fait que moi, personnellement, je ne
suis pas convaincue que c'est un enjeu législatif, mais bien plus qui va venir
aux parlementaires, finalement, aux personnes qui vont voter les budgets, qui
vont mettre le tout en place, d'avoir en tête qu'on doit avoir les personnes
concernées au coeur de chacune des décisions qui les concernent.
Mme Chénier-Richard (Karolane) : Puis,
tu sais, c'est aussi que ça va permettre, tu sais, justement, une accessibilité
des services, tu sais, avoir un meilleur budget, d'avoir des ressources
humaines, matérielles, tout ça. Tu sais, je pense qu'on se doit aussi de
favoriser l'égalité des chances, tu sais, d'avoir des services pour, justement,
favoriser leur bien-être, à ces enfants-là, puis que c'est aussi qu'ils ont la
chance, comme tout le monde, d'exploiter leur potentiel puis de le développer.
Puis, tu sais, il faut aussi prendre, tu sais, en considération, tu sais,
certains facteurs de risque ou certaines barrières, tu sais, qui font en sorte
que, des fois, certains groupes d'enfants auront moins de chance de se
développer pleinement. Ça fait que je pense que d'avoir un budget nécessaire
pour le faire, c'est...
Le Président (M. Provençal)
:Oui, allez-y.
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Très,
très rapidement, là. À la page 9, vous allez voir aussi, là, qu'on demande
vraiment à ce que ce soit précisé, dans le projet de loi, le rôle et les
fonctions du comité jeunesse aussi, chose qui n'est pas mentionnée
présentement. Et puis vous avez la liste, là, de tout ce qu'on demande, et
donc, peut-être vous inspirer un peu de ça pour bonifier la loi, s'il vous
plaît. On vous remercie.
Le Président (M. Provençal)
:C'est moi qui vous remercie, puis je
dois vous dire que vous avez très bien surmonté votre stress... Et, finalement,
vous avez fait mention d'un document à quelques reprises, alors Mme la
secrétaire va vous donner une adresse pour nous le faire... pour qu'on puisse
le recevoir et le partager avec les membres de la commission.
Mme Côté-Guimond (Jessica) : Je
l'ai en papier, si vous voulez. On peut l'envoyer par courriel, là...
Le Président (M. Provençal)
:On va aller vous voir.
Et, finalement, j'ajoute les travaux au
jeudi 8 février, après les avis touchant les travaux de la
commission, vers 11 h 15. Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 18 h 18)