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Version préliminaire

43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Tuesday, May 9, 2023 - Vol. 47 N° 13

Special consultations and public hearings on Bill 15, An Act to make the health and social services system more effective


Aller directement au contenu du Journal des débats


 

Journal des débats

9 h 30 (version non révisée)

(Dix heures)

Le Président (M. Provençal) :Je déclare la séance à la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques. La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 15, Loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace. Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Caron (La Pinière) est remplacée par Madame... pardon, Mme Setlakwe (Mont-Royal-Outremont).

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Nous entendrons ce matin les témoins suivants : l'Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec; le Collège des médecins; et l'Ordre des sages-femmes du Québec. Je souhaite maintenant la bienvenue à l'Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec. Je vous rappelle que vous disposerez de 10 minutes pour votre exposé. Et par la suite nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Alors, sur ce, je vous cède la parole. Merci d'être présents.

Mme Grant (Carole) : Alors, M. le Président, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, Mmes et MM. membres de la commission, alors, permettez-moi de me présenter, Carole Grant, infirmière auxiliaire...


 
 

10 h (version non révisée)

Mme Grant (Carole) : ...43 ans et présidente de l'Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec. Je suis accompagnée aujourd'hui de madame Stéphanie Fortier, infirmière auxiliaire et directrice de l'encadrement de la profession, et de madame Eva Sikora, avocate à la direction des affaires juridiques. Je vous remercie de m'offrir l'opportunité de m'exprimer et de répondre à vos questions aujourd'hui.

Nous tenons d'abord à saluer l'initiative gouvernementale pour améliorer l'accès aux services de santé, qui est en lien direct avec notre mission première : la protection du public. S'il y a un message à retenir de notre présence aujourd'hui, c'est qu'il est grand temps de distinguer les infirmières et les infirmières auxiliaires.

Même si la profession existe depuis bientôt 75 ans, elle demeure encore trop méconnue auprès de la population. On nous confond souvent avec les infirmières. Alors, je vais prendre un moment pour vous en expliquer la différence. La précision est nécessaire puisque le p.l. 15 ne semble pas en faire la distinction.

Il faut savoir que l'infirmière auxiliaire est la professionnelle la plus près du patient. Dans le cadre de notre travail, on prodigue des soins et des traitements infirmiers et médicaux lorsqu'ils font l'objet d'une ordonnance. C'est cet élément qui constitue la principale différence entre le travail d'une infirmière, qui, elle, peut procéder à l'évaluation de l'état de santé du patient. Notre rôle en est un de contribution, mais notre rapport est inestimable. Pour vous donner quelques exemples plus précis, on peut notamment penser aux prélèvements sanguins, à la contribution à la thérapie intraveineuse, aux soins de plaies ou à l'administration de médicaments. Grâce à notre rôle de proximité et notre jugement clinique, on est souvent les premiers à observer les manifestations cliniques qui permettent aux infirmières et aux médecins de bien exercer leurs fonctions. On est donc des alliées précieuses pour l'équipe de soins.

Les soins qu'on peut prodiguer sont vastes, et on peut assurément contribuer dans tous les milieux. On nous retrouve par exemple en hémodialyse, à l'urgence, au bloc opératoire, au soutien à domicile et, depuis peu, aux soins intensifs. Il est important de mentionner que la percée de nouveaux milieux comme les soins intensifs a été rendue possible sans modification à nos activités réservées, mais plutôt par une utilisation à notre plein champ d'exercice. Il s'agit là de solutions qui peuvent s'implanter rapidement.

Les enjeux de pénurie de main-d'oeuvre et le recours au temps supplémentaire obligatoire ont forcé les gestionnaires à innover et à repenser la manière de dispenser les soins. Par exemple, un projet pilote est en cours à l'hôpital Santa Cabrini en vue d'être exporté ensuite à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont pour intégrer les infirmières auxiliaires au prétriage et post-triage de l'urgence. Notre système de santé est fragile, alors il est étonnant que les infirmières auxiliaires doivent encore faire tomber les barrières pour pouvoir exercer leur plein champ d'exercice.

J'en parle depuis des années, l'application à géométrie variable du champ d'exercice dans les établissements est un obstacle majeur à l'efficience du réseau. Probablement par méconnaissance, des restrictions imposées sans fondement font en sorte qu'on se prive de notre main-d'œuvre qualifiée pour répartir plus judicieusement le travail. Si nous contribuons pleinement, les infirmières pourront se consacrer, elles, aux tâches qui leur sont propres.

J'aimerais porter à votre attention que nous sommes près de 30 000 infirmières auxiliaires au Québec. À mon arrivée à l'ordre, il y a six ans, 38 % d'entre elles travaillaient à temps complet. Aujourd'hui, nous sommes 61 %. On voit une grande ouverture du réseau à intégrer l'infirmière auxiliaire dans des nouveaux secteurs d'activité où elle n'était pas présente.

Par ailleurs, la relève est au rendez-vous, ce qui nous permet de dire qu'il y a encore là un bassin considérable qui pourrait répondre aux besoins grandissants du réseau de la santé. Comme vous le savez, un programme de formation accélérée a été mis sur pied, ce qui permettra de répondre encore plus rapidement aux besoins des ressources. Chaque année, on accueille plus de 2 000 nouveaux membres. Pour pouvoir les intégrer adéquatement et utiliser leur plein potentiel, il faut s'assurer de continuer à faire connaître notre rôle.

À défaut d'être connues, nous sommes sous-utilisées. Le p.l. 15 doit permettre notre apport maximal pour ainsi en faire bénéficier la population. À la lecture du projet de loi, nous avons soulevé quelques éléments à recadrer pour inclure les infirmières auxiliaires.

Le point de départ à cette démarche s'inscrit dans notre présence au sein des comités. Le p.l 15 reprend deux comités existants dans la LSSSS, soit le Comité des infirmières et infirmières auxiliaires, plus communément appelé CIA, et le Conseil multidisciplinaire des services de santé. Nous avons perdu du terrain sur ces deux instances. On en parle dans notre mémoire de façon plus détaillée, mais sachez que le p.l. 15 dilue le rôle du CIA en partageant ses responsabilités avec le conseil des infirmières. La composition mériterait aussi d'être clarifiée, car on ne nous nomme pas spécifiquement. Finalement, le rôle du CIA n'a pas été bonifié comme celui du CI, alors on se priverait de l'avis des infirmières auxiliaires sur des aspects....

Mme Grant (Carole) : ...telle que la trajectoire des soins. Par ailleurs, la composition du conseil multidisciplinaire a aussi été modifiée dans le p.l. n° 15. Concrètement, ça implique qu'en l'absence d'un CI en place, donc d'un CIA, les infirmières auxiliaires se retrouvent sans aucune tribune. Il faudrait donc que le p.l. n° 15 s'inspire de ce qui est actuellement prévu à la LSSSS pour corriger le tir.

Dans les nouveautés, le projet de loi a créé le Conseil interdisciplinaire d'évaluation des trajectoires et de l'organisation clinique. Encore une fois, nous sommes les seuls professionnels écartés de sa composition en raison du libellé de la disposition législative. Notre contribution y serait pourtant précieuse, compte tenu de notre rôle de proximité avec les patients et de notre vision quant à la réalité du terrain.

En analysant le projet de loi et en constatant la volonté du gouvernement de créer des gestionnaires de proximité, une solution nous est apparue bien évidente. L'implantation du p.l. n° 15 entraînera une nouvelle structure organisationnelle. Saisissons cette opportunité pour inclure l'infirmière auxiliaire. Après avoir expliqué la différence entre la profession infirmière et infirmière auxiliaire, on est convaincu qu'un changement de culture doit s'opérer sur le terrain. La direction des soins infirmiers prévue dans le p.l. n° 15 a notamment la responsabilité de contrôler la qualité des soins infirmiers dispensés et d'élaborer des règles de soin. Pour bien s'acquitter de son rôle, elle doit pouvoir compter sur la perspective infirmière auxiliaire. C'est en alliant nos deux forces qu'on soignera mieux la population.

Une foule d'initiatives prouvent déjà tous les bénéfices d'une pleine collaboration sur le terrain. Alors, il est grand temps de l'enchâsser dans la loi pour assurer la pérennité de telles mesures. Plus précisément, l'ordre souhaite que le p.l. n° 15 intègre une disposition prévoyant que la DSI doive s'adjoindre d'une conseillère en soins, infirmière auxiliaire ou, du moins, requérir l'avis d'une telle ressource pour toute question touchant la profession. Cela peut paraître innovant, mais pour changer une culture, il faut s'attaquer à la structure. Cette fonction existe déjà pour les soins infirmiers, alors qu'une infirmière auxiliaire serait la mieux placée pour apporter une vision juste en ce qui touche notre profession. C'est grâce à cette personne-ressource que nous viendrons contrer la méconnaissance de notre champ d'exercices pour utiliser pleinement les infirmières auxiliaires. Ces personnes auraient pour mandat d'assurer l'accueil et l'orientation des nouvelles, tout en étant les personnes-ressources sur le terrain pour les équipes. Auprès des gestionnaires, elles auraient le rôle de conseiller quant à l'amélioration de la qualité des soins et le développement de la pratique infirmière auxiliaire.

Cette solution proposée est d'ailleurs déjà appliquée dans un CIUSSS à Montréal. En 2019, un poste similaire à celui proposé a été créé. En quatre ans, le plein champ d'exercices a été priorisé et a engendré des retombées positives concrètes. Assurons-nous de le faire à travers la province pour que toute la population en bénéficie.

Notre mémoire aborde aussi plusieurs éléments en ce qui touche la collaboration entre les ordres professionnels et Santé Québec ainsi que ses établissements pour optimiser la protection du public. Je ne m'étendrai pas sur ces points, mais je tiens quand même à les nommer brièvement. Vous savez qu'un ordre professionnel protège la population, notamment par l'inspection professionnelle. Celle-ci est importante pour constater des problématiques dans différents établissements. On peut penser aux cas des résidences Floralies Lachine et LaSalle où les recommandations de notre inspection, faite sans préavis, ont permis de mieux orienter ces actions.

• (10 h 10) •

Autre exemple, nous avons aussi collaboré avec le Collège des médecins et l'Ordre des infirmières à l'enquête au CHSLD Herron. Je me permets de saluer que le p.l. n° 15 aille dans le même sens que nos recommandations en ce qui concerne les CHSLD privés non conventionnés. Sous réserve des dispositions transitoires, ils devront désormais être conventionnés. Ceci démontre bien qu'un canal de communication devrait exister entre les ordres professionnels et Santé Québec, qui a la responsabilité d'octroyer les autorisations d'exploitants. La disposition à cet effet au p.l. n° 15 devrait être étendue, comme expliquée dans notre mémoire. La collaboration d'un ordre professionnel avec le Commissaire aux plaintes devrait aussi être optimisée, comme le présente notre document.

Finalement, nous saluons la nouvelle obligation pour les établissements privés de vérifier les antécédents judiciaires des ressources humaines. Nous croyons qu'il serait nécessaire, pour protéger la clientèle vulnérable, d'étendre cette obligation à tous les milieux. Nous soumettons même l'idée dans notre mémoire de vous inspirer des mécanismes prévus au Code des professions. Je vous remercie pour votre écoute, et je réitère qu'il est grand temps d'accorder toute la place que méritent les infirmières auxiliaires. Nous sommes maintenant prêts à recevoir vos questions.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons immédiatement débuter cet échange avec M. le ministre pour 16 min 30 s, M. le ministre.

M. Dubé : Très bien. Alors, merci beaucoup, M. le Président, et merci d'être là ce matin, Mme Grant, avec vos collègues pour ce début de journée où on recommence nos commissions parlementaires. Je ne peux pas m'empêcher de... ça fait tellement longtemps que vous êtes...

M. Dubé : ...là, vous l'avez dit, de profiter de votre présence, mais aussi pour passer le message à vos infirmières, particulièrement les infirmières auxiliaires, qui ont fait un travail incroyable au cours des dernières années. Je sais qu'on s'est rencontrés souvent durant la pandémie, mais de vous voir dans une autre situation aujourd'hui, où on regarde le futur plutôt que l'urgent de tous les jours, je trouve ça rafraîchissant. Puis merci encore une fois pour tout le travail qui a été fait durant ce temps-là.

Je pense que le point que vous soulevez... puis d'ailleurs je l'ai expliqué en entrée de jeu ce matin à des journalistes, on va être très à l'écoute, dans les prochains jours, de tous les groupes qu'on rencontre, là, je le dis pour les Québécois qui nous écoutent, mais on va rencontrer sept ou huit ordres professionnels, comme le vôtre, on va rencontrer... je pense, c'est huit syndicats, là, syndicat tout confondu, incluant les fédérations, des groupes de... Puis je veux juste vous rassurer qu'en ce moment on n'est pas à l'heure de décisions, mais on est à l'heure de l'écoute. Puis, quand je dis ça, vous en avez un très, très bon exemple, que, quand on fait un projet de loi, on fait, je pense, des grands principes. Puis le grand principe qu'on a mis... puis je veux que les Québécois le comprennent, puis, si je ne l'ai pas, moi, bien compris, vous le préciserez, mais vous faites votre commentaire à l'effet, là, puis je le résume, que l'ordre des infirmières auxiliaires aimerait avoir un peu la même place que les infirmières cliniciennes, je vais le dire comme ça, dans cette nouvelle organisation là qu'on appelle le comité interdisciplinaire.

La raison pour laquelle c'est important, puis je vais vous laisser revenir là-dessus, c'est qu'il y avait, avant... en ce moment, je devrais dire, là, avant les changements qu'on propose, une très forte influence du médical et peut-être moins du côté des soins infirmiers. Et, quand on a reçu les états généraux, entre autres, qui ont été pilotés au cours des dernières années par l'Ordre des infirmières, une des choses pour mieux valoriser la profession d'infirmière, là, puis là je dis toutes infirmières confondues, c'était de monter ça au même niveau que le médical. On est d'accord là-dessus? Oui. Je pense que le comité interdisciplinaire réalise ça, c'est-à-dire que les infirmières vont être au même niveau que les médecins, mais on va avoir la même chose au niveau des travailleurs sociaux. C'est ça, le comité interdisciplinaire, puis les gens travaillent mieux ensemble.

Mais vous, ce que vous nous dites ce matin, puis c'est pour ça que je veux bien comprendre, vous ne sentez pas que, quand on réfère aux infirmières, on... dans ce comité interdisciplinaire là, que vous n'avez pas la place qui vous revient parce que votre rôle est différent au niveau du patient. Puis c'est là-dessus que je voudrais vous entendre. Parce que je l'ai toujours dit : Si on doit bonifier, je veux savoir — on ne bonifie pas juste pour bonifier ou pour changer — en quoi ça va aider le patient? Alors, je vous pose la question : Une présence, disons, plus ferme ou précisée à l'intérieur du projet de loi, qu'est-ce que ça donnerait aux patients, que les infirmières auxiliaires aient une plus grande voix sur ce comité interdisciplinaire là?

Mme Grant (Carole) : Pour répondre à votre... Merci beaucoup pour votre ouverture, là, puis avoir souligné le travail des infirmières auxiliaires pendant la pandémie. Je pense qu'on... Oui, il est vrai de dire qu'on était présents. J'ai même beaucoup de retraités qui sont revenus pour aller faire de la vaccination. Pour répondre à votre question, M. le ministre, je vais vous dire que j'ai fait... quand je suis arrivée il y a six ans, j'ai fait le tour de tous les établissements du réseau au complet, j'ai rencontré tous les P.D.G. et toutes les directrices de soins, et je suis à même de constater que les directrices de soins étant infirmières, elles ne connaissent pas le champ de pratique de l'infirmière auxiliaire, et ce sont elles qui... qui s'occupent de l'organisation du travail.

Alors, quand on dit qu'on est deux ordres professionnels avec deux, deux titres d'emploi différents, jusqu'à quel point, à l'intérieur d'un même établissement, le champ de pratique de l'infirmière auxiliaire... est à géométrie variable. Je vais vous donner l'exemple que je donne toujours, puis ça fait souvent un sourire les gens, c'est, ça dépend de la région, ça dépend de l'établissement, ça dépend de l'étage puis ça dépend avec quelle infirmière je travaille. C'est aussi, aussi difficile que ça. Alors, à chaque fois, l'infirmière auxiliaire, elle passe son temps à revendiquer le travail pour lequel elle fait. On partage une partie de notre champ de pratique avec l'infirmière. Mais, tantôt, je vous ai dit qu'on était le professionnel le plus près du patient. C'est vrai, c'est nous qui sommes le plus près du patient. Puis, si on permet à l'infirmière auxiliaire de faire son plein champ de pratique, on va permettre à l'infirmière de faire son travail autre que ce qui fait partie de notre champ pratique...

M. Dubé : Alors... Oui.

Mme Grant (Carole) : ...et, si on fait partie du comité, on va être capables de revendiquer cette place-là, l'expliquer puis permettre une...

Mme Grant (Carole) :  ...une plus grande connaissance du travail de l'infirmière auxiliaire.

M. Dubé : Alors, si je vous entends bien, puis c'est une question que je vous pose, oui, on a monté les infirmières au même niveau que les autres dans ce comité-là, mais vous dites une plus grande participation des infirmières auxiliaires permettrait de mieux expliquer votre rôle et de mieux valoriser cette profession-là. Parce que je vous le dis, pas plus tard qu'hier, j'étais à La Pocatière, j'ai visité l'urgence. J'aime ça faire des petites visites surprises. Puis les infirmières qui étaient à l'urgence étaient toutes des infirmières auxiliaires, ce qui n'est pas... ce qui est loin d'être le cas partout. Puis ces gens-là, qui étaient en passant sur un quart de 12 heures, hein, étaient très, très fiers de dire qu'ils sont capables de faire le travail qui est besoin en complémentarité, c'est sûr, avec un médecin ou d'autres personnes. Mais c'étaient des infirmières auxiliaires, et ça, je pense que je comprends votre demande, c'est de dire : Est-ce que tout le monde fait ça de la même façon à l'échelle du Québec? La réponse est non, c'est ça que vous dites, et c'est méconnu la... comment je dirais, la... tout le service ou la profession qui peut être amenée par une auxiliaire comparée à d'autres. C'est ça que je comprends bien de votre point.

Mme Grant (Carole) : Oui, tout à fait.

M. Dubé : J'ai une collègue ici qui est infirmière.

Mme Grant (Carole) : Oui, on se connaît.

M. Dubé : Vous la connaissez, je vais lui laisser... métier, elle se meurt de vous poser des questions, alors je vais la laisser poser la question puis je reviendrai si on a du temps.

Mme Dorismond : Bonjour à vous.

Mme Grant (Carole) : Bonjour.

Mme Dorismond : Bonjour. Pour continuer dans le même sens que le ministre, bien, j'aimerais ça que vous expliquiez aux Québécois qu'est-ce qui est méconnu. Et moi je pense à la loi n° 90 au niveau du champ de pratique de l'infirmière auxiliaire, c'est surtout ça qui est méconnu dans les établissements, de dire aux Québécois qu'est ce que vous êtes capables de faire avec cette loi-là. Je vous laisse la parole.

Mme Grant (Carole) : Écoutez, la loi n° 90, elle a été mise en place en 2003. Alors quand je dis que je suis encore en train d'essayer de permettre à l'infirmière auxiliaire de faire son plein champ d'exercice, vous avez raison, Mme Dorismond, c'est d'ailleurs à cause de la loi n° 90. Mais, pour vous permettre à l'infirmière auxiliaire de faire son plein champ d'exercice, quand on introduit...

L'exemple que je peux vous donner, là, qui est flagrant quand on introduit des infirmières auxiliaires, entre autres la dernière introduction qu'on a fait qu'on a travaillé beaucoup avec, avec cet établissement-là aux soins intensifs, la méconnaissance du champ de pratique, c'était assez spécial.

L'exemple que je peux vous donner, l'infirmière ne peut pas donner de médicament par intraveineuse. Ça, c'est pour tout le monde. Je pense que tout le monde sait c'est quoi. Par contre, elle peut préparer ce médicament-là. Alors, la conseillère en soins me disait : Bien, elle ne peut pas le donner, elle ne peut pas le préparer. Oui, oui, elle peut préparer le médicament, le donner à l'infirmière, puis l'infirmière va le donner.

Alors, il y a une très grande méconnaissance. Puis dans certains cas, c'est des petites choses anodins que la loi n° 90 a données... Entre autres, je vais vous donner l'exemple que vous donniez tantôt, M. le ministre. Quand on a commencé la vaccination, je ne vais pas nommer la région, mais il y a une région où on disait : Il n'y a que des infirmières qui peuvent donner des vaccins. Je ne vous nommerai pas, vous le savez. Bon. Alors, et on dû débattre.

Ça fait depuis 2003 qu'on donne des vaccins. On est des spécialistes du vaccin. Là, on va se le dire, la médication, c'est la chose qu'on fait le plus. Alors, dans certains cas, on ne pouvait pas... on donnait des... on pouvait donner tous les médicaments narcotiques dans certains cas, mais ils ne voulaient pas qu'on donne les anticoagulants. Ça reste toujours un médicament, là. Alors, dans certains cas, il faut à chaque fois dire : Oui, ça existe. Là, on a des appels à l'ordre, il faut expliquer à chaque fois, et ça devient une bataille qui ne devrait pas avoir lieu parce qu'on pense que dans ce cadre-là, dans le cadre de la loi n° 90...

• (10 h 20) •

J'ai parlé des vaccins, mais on a d'autres choses qui ont été ajoutées, là, entre autres les immobilisations plâtrées. On peut faire des plâtres. Mais je vais vous dire que les gens qui ont cette formation-là et qui le font dans la province du Québec, là je pense que j'ai juste assez d'une main pour le dire, puis peut être que je me trompe, mais à quelques, à quelques chiffres près. Quand on a fait la tournée, on a aussi discuté de tout ça avec un monsieur Paré que vous connaissez bien, qui était P.D.G. à ce moment-là. Et il y a ça surprise a été : Ah! l'infirmière auxiliaire peut faire ça. Ça fait qu'on sent qu'il y a une méconnaissance du plein champ d'exercice.

Mme Dorismond : Donc, dans le fond, il faudrait comme élaborer la loi n° 90 un peu partout dans les établissements pour vous permettre de faire vraiment votre champ de pratique.

Mme Grant (Carole) : Bien, ne serait-ce que...

Mme Dorismond : La première étape, la première étape.

Mme Grammond (Chantal) :  ...l'uniformiser, ça serait déjà pas pire. Oui, exact.

Mme Dorismond :  Parfait. L'autre question que j'avais, dans les autres provinces canadiennes, là, pour répondre à votre mémoire, dans toutes les provinces canadiennes, l'Ordre des infirmières et infirmières auxiliaires sont ensemble. Pourquoi vous tenez à séparer la chose? Et je me demandais aussi s'il y avait des pourparlers aussi avec l'OIIQ dans ce sens.

Mme Grammond (Chantal) :  Je vais répondre à...

Mme Grant (Carole) : ...à la dernière question, il n'y a pas de pourparlers entre les deux ordres. On travaille en complémentarité. On a des formations qui sont complètement différentes. L'infirmière auxiliaire, elle est... c'est une professionnelle qui est formée dans un centre de formation professionnelle, et non au cégep, et non à l'université, mais pour l'instant, au moment où on se parle, ça ne fait pas partie de nos discussions, non.

M. Dubé : J'ai deux autres collègues qui ont des questions pour vous, alors je vais leur donner la priorité, peut-être, M. le Président.

Le Président (M. Provençal) :Mme la députée de Bellechasse.

Mme Lachance : Bonjour. Merci d'être là. Je veux aller un peu dans le même sens, parce que vous l'avez dit, il y a une méconnaissance, il y a une méconnaissance dans le système, alors imaginez chez les citoyens, chez les patients. Pour la plupart des gens, un infirmier ou une infirmière, c'est un infirmier ou une infirmière. Donc, ce n'est pas évident de savoir quelles sont les tâches et comment on peut uniformiser ça.

Mais la question que je me pose, c'est dans une optique d'optimiser votre champ de pratique. Si j'entends bien, vous réclamez qu'il y ait une uniformisation des tâches que vous pouvez réaliser dans les milieux de soins, mais d'une manière... à la grandeur du Québec, mais le fait... Est-ce qu'il n'y a pas là une manière de scinder le travail puis de faire en sorte qu'on ait moins de flexibilité en période de rareté puis, voire, de pénurie de main-d'oeuvre?

Mme Grant (Carole) : Bien, vous savez, du côté de l'infirmière auxiliaire, on ne m'a pas parlé de pénurie de main-d'oeuvre, puis, comme je vous dis, on a toujours 2000 personnes qui arrivent par année. On a fait... on a travaillé avec le ministère pour mettre une formation accélérée. Pour moi, il n'y a pas de pénurie de main-d'oeuvre.

Mme Lachance : Mais quand on parle de tâches, tu sais, qui sont réalisées, vous avez mentionné, tout à l'heure, certaines tâches sont réalisées, et par l'infirmière, et par l'infirmière auxiliaire pour n'utiliser que le féminin, là, et, dans un contexte comme ça, si on retranchait certaines tâches, est-ce que ça ne pourrait pas créer une difficulté à ce niveau-là?

Mme Grant (Carole) : Bien, je pense qu'il ne faut pas retrancher. Il faut travailler en interdisciplinarité. Ça ne veut pas dire que l'infirmière... Je vais vous donner un exemple. On a un pansement à faire, dans certains cas, c'est juste l'infirmière qui peut le faire, sur certains départements, mais l'infirmière auxiliaire, elle a toute la formation pour le faire. Alors, on s'assoit le matin, on se parle, on s'organise puis on dit comment on fait, est-ce que c'est toi qui fais les pansements aujourd'hui ou c'est moi, comment on travaille ensemble? Ça ne veut pas dire de trancher ça à ce point-là, puisqu'on partage beaucoup de tâches avec l'infirmière, mais pourquoi on ne permet pas, dans certains cas, à l'infirmière auxiliaire, qui a toute la formation pour le faire, de le faire?

Le Président (M. Provençal) :Mme la députée, M. le ministre aurait une question à poser, complémentaire.

M. Dubé : Bien, en fait, je parlais avec Mme Savoie puis je disais : Il me semble qu'à un moment donné on a voulu amener les infirmières auxiliaires soit dans des salles d'opération ou... puis il y a eu une résistance très forte là-dessus. Je reviens à mon exemple d'hier. Quand je les ai vues aux urgences, j'ai dit : Pourquoi ça marche aux urgences puis que ça ne pourrait pas marcher, par exemple, dans nos salles d'op? Qu'est-ce qui manque... poser ma question ouverte : Il manque-tu quelque chose aux infirmières auxiliaires pour être capable de pratiquer dans les salles d'opération?

Mme Grant (Carole) : Il ne manque rien. Je suis obligée de vous dire ça. Par contre, je suis obligée de vous dire aussi que c'est drôle que vous me posiez cette question-là, M. Dubé, parce que l'introduction d'infirmières auxiliaires en salle d'opération, ça a commencé par le CHUL, et je travaillais sur ce projet-là, donc je connais bien la dynamique, la méconnaissance du champ de pratique de l'infirmière auxiliaire était au cœur des discussions qui avaient lieu. Et cette pratique-là, elle s'est transmise. Il y en a maintenant de plus en plus, des infirmières auxiliaires, mais la même chose à l'urgence.

M. Dubé : donc, ce serait un bel exemple d'étendre ça à l'échelle...

Mme Grant (Carole) : Tout à fait.

M. Dubé : Parce qu'on le sait, nos médecins se plaignent qu'ils d'infirmières pour ouvrir les salles d'opération, mais on dirait qu'il y a un questionnement que l'infirmière auxiliaire ne peut pas faire le travail. Est-ce que ça vient des médecins, des autres infirmières? D'où vient cette résistance-là?

Mme Grant (Carole) : Bien, la résistance, elle vient du côté, comme je dis, de la méconnaissance du travail de l'infirmière auxiliaire, parce que, quand on a introduit des infirmières auxiliaires au CHUM en salle d'opération, on a dû réorganiser complètement le travail. Vous aviez une infirmière par salle, maintenant, vous avez une infirmière par deux salles et des infirmières auxiliaires avec les médecins dans les salles. Donc, l'infirmière auxiliaire, elle peut très bien être l'assistante du médecin, là, à l'intérieur de la salle, autant en externe qu'en interne. C'est le projet pilote qui a été transporté après dans d'autres centres d'activités.

M. Dubé : Bien, en tout cas, c'est pour ça que je disais tout à l'heure que je vais attendre qu'on rencontre les médecins puis qu'on rencontre les autres, parce que, là, on peut leur reposer la question, on peut dire : Mais qu'est-ce qui bloque si vous me dites que ces gens-là ont la formation? Je vais laisser mes autres collègues continuer...

M. Dubé : …peut-être...

Des voix : ...

Mme Dorismond : Tout à l'heure, vous avez dit : Pas de pénurie de main-d'œuvre. Et là, j'ai fait le lien aussi avec la bourse qu'on a mise en place pour augmenter. J'aimerais ça savoir : Avez-vous des chiffres là-dessus pour l'augmentation des infirmières auxiliaires avec les...

Mme Grant (Carole) : C'est difficile pour moi de vous donner des chiffres fixes. Pourquoi? Parce qu'il y a plusieurs cohortes qui ont... les cohortes n'ont pas toutes... ne sont pas toutes parties en même temps. J'ai des cohortes qui terminent, qui vont passer l'examen au mois de juin, puis j'en ai d'autres qui vont passer l'examen en septembre. Parce que force est de constater qu'il y avait énormément de préposées aux bénéficiaires qui voulaient devenir infirmières auxiliaires, alors les établissements avaient beaucoup de difficulté à les libérer. Puis on comprend. Alors il y a eu des cohortes qui ont commencé à la date où elles devaient commencer, mais il y a des cohortes. Ça fait qu'il va y en avoir tout le temps, constamment. Par contre, on a travaillé très fort au niveau informatique pour les mettre à part, pour avoir une idée de... par rapport au début combien qu'on en a qui ont terminé. Ça fait qu'au moment où je vous parle, les premières vont faire leurs examens en juin, donc.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Le temps est écoulé, M. le ministre. Alors nous allons poursuivre avec le député de Pontiac et vous aurez 10 minutes 44 secondes.

M. Fortin :Merci. Merci, M. le Président. Bon mardi, tout le monde. Merci, Madame Grant, madame Fortier, madame Sikora d'être avec nous. Madame Grant, j'en profite pour vous remercier pour vos... Je ne veux pas redire le chiffre pour peur de me tromper, mais pour vos décennies de services et vos six ans à la tête de l'organisation.

Je suis sincèrement, là, heureux que du côté du gouvernement, on vous ait donné une tribune un peu pour faire valoir votre profession puis les différents rôles que vous pouvez jouer. Mais je vais essayer de vous ramener au projet de loi, au projet de loi qui est devant nous aujourd'hui, là. Si je me réfère à la page quatre et cinq de votre mémoire que vous avez déposé, vous indiquez essentiellement que le projet de loi 15 vient diluer le rôle du Comité des infirmiers et infirmières auxiliaires... infirmières et infirmiers auxiliaires, pardon. J'aimerais vous entendre là-dessus, à savoir comment vous aimeriez protéger et même bonifier ce rôle-là. Là, si on vous donne une page blanche, là, si on tasse le projet de loi, puis vous dites : O.K., bien, le comité fait ça en ce moment, il pourrait en faire davantage, peut-être mieux...mieux nous encadrer, mieux nous protéger, mieux faire valoir notre profession.

Mme Grant (Carole) : On avait un rôle qui était bien spécifique quand on était... quand on avait... je suis comme M. le ministre, on a encore, à l'intérieur de la LSSS, c'est un rôle qui est bien spécifique pour le CIA. Alors quand on regarde le PL 15, on a l'impression que ce rôle-là ou les responsabilités qui étaient dédiées aux comités d'infirmières auxiliaires est dédié au comité des infirmières. Alors, on a... puis c'est la perception qu'on a. Peut-être qu'elle est erronée, mais notre perfection... puis dans la LSSS, on était nommément nommés, là, on ne l'est plus. Alors, on se questionne sur : Est-ce qu'on va perdre au moins ce qu'on avait, là, dans... comme responsabilité à l'intérieur de la LSSS.

M. Fortin :Alors, ce que vous aimeriez, c'est que ce soit explicitement nommé pour s'assurer que, si je comprends bien, le comité reste en place, que ce ne soit pas juste un comité d'infirmières duquel vous pourriez ou pas faire partie.

Mme Grant (Carole) : Exactement. Tout à fait.

• (10 h 30) •

M. Fortin :O.K. Donc, explicitement le mentionner dans le projet de loi. O.K. En fait, il y a plusieurs de vos recommandations qui mènent un peu dans ce sens-là. Vous parlez de, tu sais... le fait que vous n'êtes pas explicitement nommés pour le comité des infirmiers, infirmières, la bonification absente, vous y faites référence plus tard. Est-ce qu'on vous a consultés avant de déposer le projet de loi? Est-ce que vous avez été sollicités par le gouvernement pour votre opinion sur des changements à venir au niveau de la gouvernance puis au niveau des différents comités?

Mme Grant (Carole) : À moins que je me trompe, moi, à ma connaissance, on n'a pas été consultés. Est-ce que... Non? Non, on n'a pas été consultés.

M. Fortin :O.K. Très bien. J'aimerais vous entendre sur le rôle de conseillère à la direction des soins infirmiers. Comment vous voyez ce rôle-là puis quel apport il pourrait avoir? Parce que c'est un changement qui m'apparaît utile, à vous entendre parler de votre profession puis de la méconnaissance que certaines, même, infirmières peuvent avoir de votre rôle puis de la façon que vous pouvez le jouer, puis des différentes tâches que vous pouvez effectuer. Mais d'avoir une personne enchâssée dans l'organisation à titre de conseillère, j'aimerais que vous... peut-être nous exposiez comment ça pourrait contribuer à faire changer les choses.

Mme Grant (Carole) : Oui, tout à l'heure, je vous ai dit que l'infirmière auxiliaire était la personne qui était le plus à proximité du patient. Ce qu'on veut, c'est aider l'efficience du réseau, ça fait qu'on se dit : Si on a quelqu'un qui connaît la profession, qui est capable...


 
 

10 h 30 (version non révisée)

Mme Grant (Carole) : ...de l'expliquer, qui est capable d'argumenter, c'est une plus-value à l'intérieur de certains comités parce que, souvent, ce sont des comités qui ont de l'influence ou qui vont avoir à faire des recommandations, alors ça permet à l'infirmière auxiliaire de prendre toute la place qu'elle... qu'elle a. Tantôt, je disais qu'on était 30 000 membres puis j'espère que le Collège des médecins n'est pas derrière moi, mais je fais souvent la blague de dire : On a plus d'infirmières auxiliaires qu'on a de médecins. Alors, on pense que notre place, elle est là, puis on est une professionnelle au même titre que les autres, puis on... La meilleure personne à la bonne place, là, pour bien, bien expliquer puis bien argumenter. On a des infirmières à l'intérieur du réseau qui sont, on va le... je vais le dire avec des guillemets, là, elles sont vendues infirmières auxiliaires, elles vont aider la profession, elles vont mettre en place des... des choses qui ne sont pas faites, entre autres, M. le ministre parlait tantôt de l'introduction d'infirmières auxiliaires à la salle d'opération, mais on avait une infirmière qui y croyait, mais, des fois, il faut... ça prend quelqu'un, là, qui est capable de défendre la profession à tout niveau.

M. Fortin :Donc, ce serait un peu un garde-fou par rapport aux infirmières qui eux connaîtraient moins ou seraient moins vendues, entre guillemets, là, comme vous dites, à la profession d'infirmière auxiliaire, juste pour s'assurer que dans chacun des établissements, il y a effectivement une voix au niveau de votre profession qui fait valoir quand vous pouvez êtres utiles, comment vous pouvez être utiles, puis comment le mettre en place.

Mme Grant (Carole) : Vous savez, dans les années 90, on voulait mettre l'infirmière auxiliaire seulement qu'en CHSLD, c'était ça, la vision du gouvernement vers ce temps-là. Alors, aujourd'hui, force est de constater que si on était juste dans les CHSLD, je pense qu'on aurait beaucoup de difficultés à l'intérieur du réseau, là, parce qu'on est vraiment partout. Quand on dit partout, la trajectoire de soins, là, urgences, hospitalisation, soins intensifs, soins à domicile, tout...on est toujours là.

M. Fortin :Dernière chose pour moi avant de passer la parole à ma collègue, vous avez mentionné dans votre allocution d'ouverture, là, la collaboration nécessaire entre le commissaire aux plaintes et l'ordre professionnel. J'aimerais vous entendre là-dessus. Juste, qu'est-ce que vous voyez qui manque en ce moment, qu'est-ce qui doit être ajouté et comment ça pourrait être bénéfique?

Mme Grant (Carole) : Ce que qu'on... ce qu'on dit, c'est on reçoit souvent les rapports de coroner, on reçoit souvent les rapports de... Comment ça s'appelle?

Mme Sikora (Eva) : Agrément Canada.

Mme Grant (Carole) : Agrément Canada, merci Eva, Agrément Canada, mais on reçoit rarement des rapports de commissaires, puis dans certains cas, bien, ça peut viser directement les membres, puis ça permettrait au syndic de faire lui-même son enquête. Comme on est là pour la protection du public, bien, si on avait une communication qui est directe ou une obligation du commissaire de nous déposer des documents, bien, ça serait un plus pour nous.

M. Fortin :Donc, c'est quelque chose qu'on pourrait mettre dans la loi, l'obligation du commissaire de vous... de rendre aux ordres professionnels, là, ses conclusions par rapport aux différentes enquêtes.

Mme Grant (Carole) : Je dirais que, présentement, c'est une option qui peut prendre, mais si c'était obligatoire, on aurait toujours les... le retour.

M. Fortin :Bien compris. Je vous remercie.

Le Président (M. Provençal) :Alors, on cède la parole à la députée de Mont-Royal—Outremont.

Mme Setlakwe : Merci. À mon tour de vous remercier pour votre présence ce matin, et je pense que je parle au nom de tous quand on vous remercie pour... vous et vos membres, pour la différence que vous faites auprès des Québécois et Québécoises, des patients, sachez que votre profession n'est pas... elle est reconnue, elle est appréciée, elle compte, puis en tout cas, durant la pandémie, on a réalisé à quel point vous étiez essentiel. Donc, merci.

Pour moi, le message est clair. Je veux juste être sûr que je vous entends bien, là, parce qu'on parle de valoriser votre rôle, puis ça, c'est important, valoriser votre profession, mais pour moi, c'est une question de qualité de soins aux patients, et vous le dites, là, vous êtes... vous agissez en... de façon... en proximité, vous êtes près du patient sur le terrain, et je dirais dans la chambre, au chevet... tu sais, dans le fond, la façon que je le vois, c'est une fois que le médecin est venu, l'infirmière, les infirmières ont comme un peu coordonné les soins, vous, vous êtes là, puis vous passer du temps avec le ou la patiente, et vous échangez, et vous manipulez, et vous êtes donc là en proximité. Donc, vous recevez, vous échangez et vous recevez de l'information, comment se fait-il qu'on ne vous permette pas d'après ça, rapporter cette information-là? Est-ce que je vous entends, dans le fond, quand vous... votre préoccupation de base, fondamentale, c'est un peu ça. Puis vous voulez vous... que ce... que cette appréciation des soins puis de ce que vous pouvez apporter, ce que vous pouvez apporter au... à la trajectoire soit reconnue dans la loi, et donc vous fassiez partie de... du conseil interdisciplinaire?

Mme Grant (Carole) : Tout à fait. Vous avez raison dans ce que vous dites. Vous avez raison de dire qu'on est les plus près des patients, vous avez aussi raison de dire qu'on est à son chevet constamment, là. Tout à fait. Et quand on parle de la personne vulnérable, on est peut-être la profession qui est la plus proche aussi quand on parle des gens âgés ou de tout ce que...

Mme Grant (Carole) : ...de tout ce qui a trait à la personne vulnérable. Mais l'idée, c'est : on est près du patient. Alors, donnez-nous la possibilité d'aller dire ce qui ne fonctionne pas, donnez-nous la possibilité d'aller dire comment on peut travailler ensemble, donnez-nous la possibilité de dire : Comment ça se fait qu'on est encore en train de défendre la loi 90 20 ans plus tard? Comment ça se fait qu'on n'est pas auprès du... On est auprès du patient, mais on est aussi des gens qui ont une formation puis qui ont du jugement clinique, là.

Mme Setlakwe : Non, tout à fait. Si on veut revoir la structure, il faut le faire au bénéfice du patient. Donc, c'est clair pour vous que vous n'êtes pas incluses dans la notion... dans le... Non. Il faut que ce soit dit explicitement, comme mon collègue l'a mentionné.

Et puis, bien, encore une fois, c'est ça, votre préoccupation, c'est d'être sous-utilisées et de ne pas faire partie du conseil interdisciplinaire. Et puis, à part de ça, je pense que vous avez... vous parlez, donc, de votre présence auprès des autres... des autres instances. Mais, vraiment, votre préoccupation principale, c'est de pouvoir rapporter ce que vous entendez. Parce que j'imagine qu'une fois... Tu sais, c'est vous... Moi, je me mets dans la peau du patient, là, le temps avec le médecin, il est court, il est précieux. Et puis après ça, bien, on peut faire toutes sortes de constats quand on est à ses côtés. Ça fait que vous recevez...

Bien, actuellement, est-ce que... Tu sais, dans le système actuel, quelle est votre doléance principale par rapport à ça? Puis est-ce que... Là, voyez-vous que, dans le p.l. 15, on y répond ou pas du tout?

Mme Grant (Carole) : Bien, écoutez, on pense que, dans le p.l. 15, il faut... il faut travailler les structures. On n'est pas contre le travail des structures, mais il faut travailler aussi la culture. Tu sais, dans certains cas, il faut prévoir qu'une professionnelle, c'est une professionnelle. Vous avez raison, quand... on entend beaucoup de choses comme professionnelles. Il faut être capable de le rapporter à l'infirmière, mais il faut aussi être capable de faire la différence entre : je suis auprès du patient puis je dois faire mon côté professionnel, là. Je ne sais pas si je réponds bien à votre question... pas certaine.

Mme Setlakwe : Oui, non, c'est assez... c'est assez clair.

Mme Grant (Carole) : O.K. Mais je dis souvent : Arrêtez de nous dire comment soigner, laissez-nous soigner.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Nous allons... Merci, Mme la députée. Nous allons poursuivre cet échange avec M. le député de Rosemont pour trois minutes 35 secondes.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Collègues. M. le Président, avant de commencer, je présume que vous avez diligemment recoupé le temps de la personne dont je ne peux signifier l'absence ici.

Le Président (M. Provençal) :Oui.

M. Marissal : Merci. Merci. Je viens de gagner 15 secondes. Merci d'être là. Merci beaucoup. J'ai l'impression, en vous écoutant, que vous êtes, dans les soins de santé, un peu ce que les travailleuses sociales sont en services sociaux, c'est-à-dire qu'on ne parle jamais de vous. On ne vous connaît pas. Pourtant, vous faites un travail essentiel, puis ça fonctionne bien.

J'ai deux questions, rapidement. Vous dites, dans votre mémoire, là, si je l'ai bien compris, puis il est quand même assez touffu, là, vous dites essentiellement que vous êtes méconnues, sous-utilisées puis que le projet de loi n° 15, en tout cas de ce qui vous concerne et dans sa forme actuelle, va vous marginaliser encore davantage. C'est ce que je comprends?

• (10 h 40) •

Mme Grant (Carole) : Bien, peut-être pas marginaliser, mais on se questionne sur quelle était l'intension à l'intérieur de certains comités, puisque, dans la LSSSS, on était nommément nommées puis là on ne l'est plus. Alors, c'est plus ça qui nous inquiète. Puis, comme on n'a pas... vous l'avez dit, on est méconnues, on n'a pas beaucoup de place pour déposer notre voix et déposer nos doléances, on essaie de le faire le plus possible dans le plus de places possible. Puis j'ai même... Souvent, quand j'interpelle les ministres, je leur dis toujours : Je vous invite à dire merci... Tu sais, les gens disent souvent merci aux infirmières, on est fiers, vous êtes essentielles, mais, pour la profession infirmière auxiliaire, c'est important. Puis, de plus en plus, j'entends les ministres dire «infirmières et infirmières auxiliaires». Alors, partout, on va pouvoir tabletter, prendre notre place, mettre notre mot, on va le dire. Et vous allez peut-être m'entendre sur tous les réseaux le dire, là, jusqu'à quel point on pense qu'on est essentielles à l'intérieur du réseau, pour l'efficience en tout cas, puis pour aider à désengorger beaucoup de choses. Quand on parle à l'urgence, on parlait des salles d'opération, je pense que notre place, elle est là, puis il faut... il faut la revendiquer partout.

M. Marissal : Mais vous faites bien. Vous faites bien de revendiquer votre place, effectivement, d'où l'analogie avec les TS, dont on ne parle à peu près jamais. Puis je vous dirais que, pour faire beaucoup de terrain, les inhalos nous disent la même chose aussi : Vous ne parlez jamais de nous. Pourtant, il n'y a pas grand-chose qui se ferait dans un hôpital. Puis, de toute façon, c'est une chaîne, hein? Vous en faites partie.

Moi, il y a quelque chose qui m'impressionne dans ce que vous dites, c'est que vous n'avez aucun problème de pénurie de main-d'oeuvre et de recrutement. Il est constant et assez populeux. Pourtant, vous dites vous-même que ce n'est peut-être pas la profession la plus valorisée au Québec, là, puis ça marche. Sur le terrain, quand on...

M. Marissal : ...c'est ce que vous faites. Alors, comment... C'est quoi, le secret pour vous assurer de la relève, du recrutement? Ce n'est pas la profession la plus payante non plus. Je sais bien qu'il n'y a pas juste l'argent dans la vie, là, mais ce n'est pas la profession la plus payante, là. Comment vous faites?

Mme Grant (Carole) : Dans nos membres présentement, on a énormément de gens qui viennent de l'immigration. On est à l'intérieur des 10 ordres les plus... qui accueillent le plus d'immigrants. On était... à un moment donné, on était les troisièmes. Alors, on a énormément de gens qui viennent de l'extérieur qui sont infirmières ou médecins dans leur pays puis qui veulent venir travailler ici et faire une formation qui est courte pour pouvoir gagner leur vie. Alors, ce sont des familles, ce sont des mères monoparentales, mais ce sont aussi des gens qui ont des connaissances autres. On fait beaucoup aussi d'accueil d'immigrants, là, permis sur permis, dépendamment du pays, on analyse beaucoup, on en fait énormément. Alors, on a beaucoup de demandes de gens de l'extérieur. On a aussi des cohortes de nouveaux qui sont ici, on a... on en a de partout. Ça fait que les écoles me disent qu'elles n'ont jamais eu autant de demandes. Bien sûr, c'est sûr que la formation accélérée, ça a été un plus en plus de ce qui existait déjà, parce que, présentement, on a les formations régulières puis on a des formations accélérées. Donc, quand je suis arrivée, il y a six ans, on en accueillait... autour de 1 600. Maintenant, c'est 2 000 par année.

M. Marissal : O.K. Merci.

Le Président (M. Provençal) :Nous allons terminer cet échange avec Mme la députée de Vaudreuil pour 2 min 12 s.

Mme Nichols : Merci. Merci, M. le Président. Le temps... le temps est compté, je vais être assez directe. C'est clair, là, puis je pense que le ministre le reconnaît aussi puis tout le monde le reconnaît, vous jouez un rôle superimportant. Puis, je pense, ce n'est même plus à prouver, là, c'est déterminant dans le système de la santé, vous le dites, c'est reconnu.

Mais je reviens sur un exemple. Vous avez donné, là, l'exemple que vous jouez, entre autres, dans les salles d'opération du projet pilote. Ça fonctionne bien. Qu'est-ce qui bloque? Qu'est-ce qui bloque? Parce qu'on comprend que ça bloque puis, d'un autre côté, on comprend aussi que vous voulez une... que des comités, il y en a déjà, vous voulez une autre... vous voulez une place sur le comité. Moi, dans ma tête, ça ne fonctionne pas. Il n'y a pas de pénurie de main-d'oeuvre, vous êtes disponibles, vous êtes là, vous êtes reconnus. Un projet pilote, ça fonctionne. Vous êtes déjà sur un comité. Qu'est-ce qui bloque dans tout ça? Est-ce que c'est les P.D.G. qui ne vous donnent pas votre place?

Mme Grant (Carole) : Je dirais que c'est... Tantôt, je disais qu'il faut travailler sur la structure, mais il faut travailler aussi sur la culture. Il y avait, pendant longtemps, l'impression qu'à l'intérieur de certains centres d'activités ce n'était que des infirmières ou des infirmières bachelières, appelez-les comme vous voulez, et par méconnaissance. Parce que, quand on arrête puis que les gens nous disent : On aimerait ça introduire des infirmières auxiliaires... Tantôt, je vous ai parlé des soins intensifs. Quand vous me demandez pour la salle d'opération, ça fait six ans que je suis présidente, c'était avant que j'arrive à l'ordre que ça s'est fait, donc ce n'est pas... ce n'est pas d'hier, là, ça se fait et ça fonctionne toujours. Ça se fait tellement bien que moi, je travaillais au CHUM, on est parti du site Notre-Dame, et on a pris tous les gens qui travaillaient là, puis on a fait un bloc, puis on les a transférés à Saint-Luc. Il n'y a pas eu de discussion, puis les médecins, ils ont même lever la main puis dire : Non, non, vous ne défaites pas mon équipe, là, je veux mon infirmière auxiliaire et je veux mon... je veux mon infirmière. Donc, quand on défait la culture, quand on explique le plein champ d'exercices, quand on travaille avec eux, habituellement, avoir une infirmière auxiliaire, c'est... c'est l'adopter.

Mme Nichols : Ça fait que c'est ça, l'enjeu.

Mme Grant (Carole) : C'est ça, l'enjeu.

Le Président (M. Provençal) :Merci de votre contribution. Merci de nous avoir mieux fait découvrir votre profession. Je pense qu'il y a eu des belles clarifications qui ont été faites et apportées par vous.

Sur ce, je vais suspendre momentanément les travaux pour laisser place au prochain groupe. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 10 h 45)

(Reprise à 10 h 51)

Le Président (M. Provençal) :Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant...

Le Président (M. Provençal) :...les représentants du Collège des médecins du Québec. Alors, vous allez disposer de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons aux échanges. Alors, sur ce, je vous cède immédiatement la parole.

M. Gaudreault (Mauril) :Merci. M. le Ministre Dubé, M. Provençal, président de la Commission, M. André Albert Morin, vice-président, tous les membres de la commission, bonjour. Je suis accompagné aujourd'hui à ma droite de la vice-présidente du conseil d'administration du collège, la Dre Nathalie Saad, pneumologue à l'Hôpital général juif à Montréal, et de notre nouveau directeur général, le Dr Pierre Gfeller, médecin de famille. Je suis moi aussi un médecin de famille. J'ai le privilège depuis cinq ans de présider le Collège des médecins du Québec.

Je voudrais d'abord remercier la commission d'avoir repoussé la date initiale de notre audition pour nous accorder le temps nécessaire d'analyser ce volumineux projet de loi. Il interpelle le collège à plus d'un titre. Nous voulons vous présenter nos points de vue sur trois grands volets particulièrement, l'accès aux soins pour les usagers et la manière dont ils pourront être entendus, les médecins et les moyens par lesquels ils pourront mieux soigner les Québécois de leur territoire et de leur participation à la cogestion médicoadministrative des établissements et les nouvelles instances créées dans le cadre de Santé Québec ainsi que de la place du privé dans le réseau.

Parlons tout d'abord, comme il se doit, des usagers. La protection du public est la raison d'être de notre ordre professionnel. Nous veillons à ce qu'il soit protégé par une médecine de qualité. Cela est possible que s'il y a accès aux soins et que les médecins peuvent œuvrer dans des conditions appropriées. Le collège a mené, en 2021-2022, avec le ministère de la Santé, de même qu'avec les fédérations médicales et avec d'autres partenaires, un vaste chantier sur l'accès aux soins. Le collège a aussi effectué une importante tournée des pôles en santé à travers le Québec, qui nous autorise à poser un regard critique, objectif et constructif sur ce projet et mesurer ses impacts potentiels sur les usagers, sur les médecins et le réseau.

L'idée que le projet de loi placera le patient au cœur du réseau de la santé et des services sociaux partout sur le territoire rejoint notre définition de la responsabilité sociale des médecins et des professionnels de la santé. Nous croyons que tous les professionnels de la santé ont la responsabilité de mieux répondre aux besoins des communautés qu'ils desservent. Mais il faut faire les choses correctement pour reconnaître à la fois les besoins de la population, les limites actuelles du réseau et respecter l'autonomie professionnelle des médecins. Nous remarquons à ce sujet que le projet de loi n° 15 tente de projeter la gestion hospitalière traditionnelle à l'ensemble du territoire. Des soins de proximité dont les soins à domicile ne se prodiguent pas cependant, ils ne se gèrent pas comme un hôpital.

Nous accueillons favorablement, par ailleurs, la gestion plus directe des listes d'attente en chirurgie et du flot des patients dans les urgences. Mais nous nous questionnons toutefois sur la capacité du réseau à atteindre cet objectif sans un véritable accroissement de l'offre en première ligne en soins de proximité. En cela, bien sûr, toute aide sera la bienvenue, dont celle des techniciens paramédicaux qu'il faudra enfin intégrer au système professionnel.

Le projet de loi ambitionne par ailleurs de porter la voix des usagers jusqu'au bureau du ministre et auprès du conseil d'administration de Santé Québec. On s'en réjouit. Cependant, quelques facteurs de réussite doivent être au rendez-vous, cependant. Par exemple, nommer les membres du Comité national des usagers sur les recommandations des comités locaux d'usagers, reconnaître l'importance des comités d'usagers, souvent vus comme un mal nécessaire bien plus qu'un partenaire, rehausser la présence des patients, dont les patients partenaires, dans les instances du réseau, leur contribution est inestimable.

Abordons les dispositions touchant la profession médicale. Les recherches et l'expérience le démontrent, un milieu de soins fonctionne mieux dans le cadre d'une cogestion clinique et administrative. C'est bon pour les soignants, c'est bon pour les patients, c'est bon pour les gestionnaires. En lisant le projet de loi, on constate qu'on évacue des médecins des rôles décisionnels touchant la trajectoire des soins. On s'appauvrit ainsi de leur savoir et de leur compétence et on risque de les démobiliser. Pour nous, la cogestion, c'est un équilibre entre médecins et gestionnaires dans les prises de décision au quotidien, qui fait en sorte que la voix des médecins se fait bien entendre dans les établissements, notamment par les conseils des médecins, dentistes et pharmaciens, les CMDP, et que les médecins qui exercent des fonctions médicoadministratives soient bien formés, mieux soutenus et disposent des ressources nécessaires. Jamais le collège ne se mêle de questions de rémunération. Cette fois-ci, cependant, on s'en mêle. Il faudra les rémunérer adéquatement.

Par ailleurs, nous favorisons la création des conseils interdisciplinaires d'évaluation des trajectoires et de l'organisation clinique pour l'ensemble des services...

M. Gaudreault (Mauril) :...sur le territoire, de même que nous favorisons aussi la nomination d'un gestionnaire pour chaque installation et souhaitons que son rôle, ses responsabilités, son autonomie et son imputabilité soient mieux définis et uniformes sur le territoire. Notre tournée des pôles en santé illustre combien les besoins de financement des infrastructures et des rehaussements technologiques sont grands partout. Écoutez, on est le 9 mai 2023, alors qu'une jeune ingénieure québécoise pilote sur Terre un véhicule qui roule sur la planète Mars, peut-on, s'il vous plaît, déclarer la fin des fax dans le réseau de la santé?

Les dispositions concernant la nouvelle gouvernance médicale suscitent bien des commentaires, sur trois aspects, principalement : les pouvoirs de sanction, les pouvoirs d'attribution des privilèges et les responsabilités populationnelles. Un sondage interne du collège, il y a quelques jours à peine, auprès de tous les médecins, auquel plus de 1 300 membres ont répondu, est révélateur de leur crainte de ne pouvoir soigner en toute autonomie. La très grande majorité veut que la cogestion demeure. Un médecin sur deux estime cependant que la réforme ne pourra se réaliser avec le projet de loi actuel.

Le collège partage ces inquiétudes, mais le projet de loi peut être amélioré pour y pallier, car il y a un risque réel de conflit d'intérêts et de rôles si ceux qui imposent les mesures disciplinaires sont les mêmes que ceux qui octroient les privilèges d'exercice. Il y a, à notre avis, trop de pouvoirs entre trop peu de mains. Il doit y avoir une séparation de ces pouvoirs, c'est fondamental. D'autant que le projet de loi ne prévoit aucune règle procédurale pour éviter l'arbitraire des décisions. Nous craignons d'ailleurs l'arbitraire dans la répartition des effectifs médicaux sur le territoire. Il ne faut pas que les privilèges d'exercice soient octroyés sur une base strictement administrative. Il faudra tenir compte de la responsabilité sociale de l'ensemble des professionnels de la santé. Et cette responsabilité collective en la population est l'affaire de tous, de tous les professionnels, et nous déplorons que le projet de loi soit silencieux là-dessus. Et la réforme proposée est également l'occasion de revoir les fameux PREM pour les adapter notamment aux fins de carrière.

Les médicaments, par ailleurs, sont une partie intégrante du traitement des patients. Le projet de loi ne permettrait à un établissement que de fournir ceux qui seront autorisés par l'INESSS ou la RAMQ. En oncologie, vous savez, on sauve des vies avec des médicaments qui ne sont pas autorisés, mais encadrés par des... par des protocoles rigoureux. La science évolue plus rapidement que la bureaucratie.

Nos commentaires maintenant sur Santé Québec. La séparation de la planification et des opérations entre le ministère et Santé Québec est une bonne chose, mais est-ce vraiment séparé lorsque le ministre nomme tout le monde? Du bas vers le haut, du haut vers le bas, nous constatons une centralisation et une hiérarchisation des pouvoirs décisionnels.

Sur les questions du privé en santé, le collège va être très bref et clair. Si le privé peut contribuer à élargir l'accès aux soins, à condition qu'ils soient gratuits pour tous et toutes, nous y sommes favorables. Nous voulons un système, un réseau public fort offrant toute la gamme des services gratuits au public, mais sans cannibaliser le réseau public.

Abordons maintenant brièvement le volet enseignement et recherche. S'il est une omission importante du projet de loi, c'est bien ce volet. Il est surprenant que le projet de loi fasse si peu de place aux missions d'enseignement et de recherche des établissements et de liens avec les institutions universitaires. À quoi sert sinon le U dans CIUSSS sinon que pour rappeler la vocation universitaire? La sensibilisation, d'ailleurs, à la responsabilité sociale et populationnelle doit débuter sur les bancs de classe.

• (11 heures) •

Enfin, nous attirons l'attention du législateur sur le virage environnemental que doit prendre le réseau. Le choix d'aménagement des infrastructures, le choix de certains médicaments, de certaines pratiques sont autant de contributions auxquelles le réseau de la santé doit s'atteler plus vite que tard.

En terminant, nous tenons à saluer la volonté du ministre de s'attaquer à la refonte du réseau de la santé. Nous soulignons aussi son ouverture. Nous lui suggérons quelques facteurs de réussite, que je répète : améliorer l'accès aux soins sur tout le territoire et inclure les soins de proximité, régler prioritairement l'enjeu de pénurie, maintenir une cogestion médicoadministrative, faire en sorte que la voix des usagers s'exprime partout dans le réseau, rehausser infrastructures et technologies. C'était l'essentiel de nos commentaires.

Le collège demeurera un partenaire de toute réforme du réseau qui élargira l'accès aux soins des usagers et améliorera le contexte de pratique des professionnels de la santé. Cela s'inscrit dans notre mandat de protection du public en offrant une médecine de qualité. Nous vous remercions de votre écoute et sommes prêts à répondre à vos questions.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup, Dr Gaudreault. Alors, M. le ministre, vous avez assurément quelques questions à poser.

M. Dubé : Merci, M. le Président. Mais trois choses. Si on est capable d'envoyer quelqu'un sur Mars, on devrait être capables de régler nos fax. Je pense qu'avec... Ce que j'aimerais peut-être souligner, Dr Gaudreault et votre équipe, là, premièrement, les gens...


 
 

11 h (version non révisée)

M. Dubé : ...Ceux qui vous connaissent depuis longtemps savent aussi comment vous avez... nous avez aidé lorsqu'on a fait le projet de loi no 11 l'an dernier sur les omnipraticiens, d'être capables de trouver des solutions puis de bonifier notre projet de loi qu'on avait discuté. Ça fait que je veux... je veux me rappeler de ça comme étant une des participations importantes qu'on a dans les prochains jours du Collège des médecins pour essayer de trouver, de rassembler tout le monde puis trouver des solutions. Ça fait que merci d'avoir pris le temps dans votre mémoire de le faire avec votre équipe. Puis je veux... Il y a des gens que j'apprécie beaucoup dans le réseau, puis je pense que le Dr Gfeller est peut-être un peu moins connu, mais vous avez été combien de temps au CUSM, Dr Gfeller, avant de passer au collège?

M. Gfeller (Pierre) : J'ai été presque cinq ans comme P.D.G. du CUSM. Auparavant, j'avais été six ans à Sacré-Coeur, au CIUSSS du Nord de l'île de Montréal comme P.D.G.

M. Dubé : Alors, vous êtes à la retraite maintenant? C'est ça que je comprends.

M. Gfeller (Pierre) : Oui. La retraite a duré six semaines. J'ai aimé ça.

M. Dubé : Six semaines de retraite. On aime nos médecins comme ça, six semaines de retraite. Merci beaucoup, Dr Gfeller, de votre contribution. Je vais aller rapidement. Moi, Dr Gaudreault, avec toute l'appréciation que j'ai pour vous, il y a une chose que je veux préciser parce que je le vois beaucoup dans des mémoires, puis je le... je l'entends sur la rue, puis je veux le préciser, il y a beaucoup de choses qui ne sont pas dans le projet de loi, qui ne peuvent pas et ne doivent pas être dans le projet de loi. Parce que je l'ai bien dit que le projet de loi no 15, c'est un élément du plan santé, mais on n'a pas besoin d'avoir une loi sur tout. O.K. Alors, je donne l'exemple, je donne l'exemple, et c'est pour ça que je faisais une petite référence rapide au projet de loi no 11, on a travaillé beaucoup sur l'accessibilité lorsqu'on a fait le projet de loi no 11, avec par exemple des mesures avec les GMF, la prise en charge puis, etc.

Ça fait que je veux juste dire, à chaque fois j'entends, puis c'est pour ça que j'écoute, puis je suis en mode écoute en ce moment, mais je vais vous répondre qu'il y a bien des choses qui ne peuvent pas être et qui n'ont pas besoin d'être dans le projet de loi. Vous avez le droit de les soulever, mais quand j'entends qu'on ne parle pas d'accessibilité, bien, c'est ce parce qu'on l'a traité ailleurs. Je voulais juste faire un peu cette précision-là.

Bon, maintenant, sur... Il y a un élément excessivement... Parce que j'aime beaucoup comment vous avez divisé ça, là. Vous avez dit : Les commentaires portent sur les usagers, sur le clinique. Puis, entre autres, vous avez parlé des infrastructures. Ça fait qu'on... Tout le monde s'est compris qu'encore une fois, dans les infrastructures, on n'a pas besoin de projet de loi pour avoir augmenté notre PQI à la hauteur de 22 milliards pour faire plus de modernisation d'hôpitaux. Je fais juste dire ça. C'est une autre... Vous avez raison de le soulever. Vous avez raison de dire que ça n'a pas de bon sens qu'on ait encore des fax dans le réseau entre un pharmacien puis un médecin.

Mais on n'a pas besoin de ce projet de loi pour ça. Je voulais juste donner cette... Mais par contre, où j'aimerais vous poser des questions pour clarifier des choses, c'est sur tout l'aspect clinique. Et ça va être difficile, là, de garder ça simple, mais c'est toute la question de cogestion auquel vous... vous parlez beaucoup. Pour moi, quand vous parlez de cogestion, on a beaucoup de cogestion dans le réseau en ce moment. Elle existe, la cogestion. Elle existe par exemple entre les départements, entre différents départements où on demande à nos gestionnaires, administratifs et cliniques, de travailler ensemble. Puis je pense que la... il y a eu beaucoup d'écrits là-dessus, entre autres des HEC, etc., qui ont dit : La cogestion, c'est un peu comme la médiation, hein? Il ne doit pas y avoir une autorité qui est plus forte que l'autre. C'est qu'on doit s'entendre pour que le patient soit le mieux servi possible, qu'il ait le plus de valeur possible.

Quand vous dites qu'on n'en parle pas dans le projet de loi, moi, je pense qu'on a envoyé un message très clair. Puis si vous me dites... Puis c'est pour ça que je veux vous écouter. On a parlé de s'assurer qu'on allait avoir de la gestion de proximité, des gestionnaires de proximité, qu'on avait un principe de subsidiarité. C'est un gros mot, là, mais qu'est-ce que ça veut dire, c'est que la décision doit se prendre le plus proche possible du terrain. Moi, là, quand vous me parlez de cogestion, puis je vous dis qu'il y en a déjà beaucoup, où est ce que vous trouvez qu'il manque de la cogestion? C'est ça que j'aimerais entendre parce que s'il y a un manque, s'il y en a beaucoup entre les professionnels, par exemple entre les médecins qui sont dans deux départements, est-ce qu'il en manque entre les autres professionnels? Et c'est là que je voudrais... Est-ce que... Parce que tantôt on entendait une infirmière auxiliaire, Mme Grant, qui disait : Bien, on n'est pas partie prenante au processus? Est-ce que c'est avec eux qu'il devrait y avoir plus de cogestion, par exemple, au niveau des comités interdisciplinaires? Parce que, moi, je pense qu'il y en a déjà beaucoup de cogestion, mais...

M. Dubé : ...vous en parlez beaucoup dans votre mémoire, ça fait que j'aimerais ça, vous entendre là-dessus.

M. Gaudreault (Mauril) :Bien, je parle beaucoup de responsabilité sociale, populationnelle des divers professionnels, hein, de tous les professionnels, non pas seulement des médecins, de faire en sorte de mieux répondre aux besoins des communautés, je vous le redis. Et je suis... on est... je suis très, très... Le collège est heureux de l'idée de la composition d'un comité interdisciplinaire avec les différents professionnels de la santé dans un établissement qui pourrait aussi planifier des activités hors établissement. Ça, je l'ai dit.

Qu'il y ait plus d'importance d'accordée aux autres professionnels, j'adhère à ça totalement, mais ça ne veut pas dire de diluer l'importance qu'ont les médecins puis les gestionnaires, les chefs de département là-dedans. Ça fait que ce qu'on trouve du projet de loi, c'est qu'il est un peu silencieux par rapport à l'importance des chefs de départements cliniques médicaux à l'intérieur des établissements de travailler en cogestion. Je ne veux pas revenir sur...

M. Dubé : Mais avez-vous l'impression... Puis peut-être... Moi, c'est... Parce que ça vient me titiller un peu quand vous dites que vous avez l'impression qu'on enlève la voix aux médecins. Puis, en même temps, je me dis : Est-ce que c'est parce qu'on donne la voix à d'autres professions que vous avez cette... Parce qu'il me semble qu'on peut garder la même voix aux médecins tout en donnant une voix plus grande, je dis, exemple, aux soins infirmiers. C'est ça que je voudrais comprendre...

M. Gaudreault (Mauril) :Tout à fait.

M. Dubé : ...parce que je ne pense pas que notre objectif, c'est d'enlever la voix aux médecins, mais c'était d'en donner plus aux autres.

M. Gaudreault (Mauril) : Je ne suis pas président d'une fédération, je suis président d'un ordre professionnel...

M. Dubé : Et voilà!

M. Gaudreault (Mauril) : ...qui est là pour protéger le public en assurant une médecine de qualité. Pour moi, une médecine de qualité, ça veut dire une médecine accessible, O.K., pour laquelle les médecins ont à travailler avec les autres professionnels de la santé. Si vous me dites, M. Dubé, que ce n'est pas inquiétant pour vous dans votre projet qu'il y ait une importance aussi grande de donnée aux divers professionnels de la santé qu'aux médecins, je ne vais qu'applaudir à cela.

M. Dubé : O.K., O.K.

M. Gaudreault (Mauril) :C'est une inquiétude, une préoccupation que nous avions à la lecture du projet.

M. Dubé : Non, mais c'est important qu'on dise ça, parce que vous êtes le premier à avoir dit... Puis ça, je faisais référence au p.l. n° 11, quand on a fait ça il y a un an. Vous avez dit : Élargissez le nombre de professionnels qui peuvent faire de la prise en charge. C'était votre grand message l'an dernier, puis on a modifié, on a bonifié le projet de loi pour tenir compte de ça.

Aujourd'hui, ce que je vous entends, c'est de dire : Cette même approche-là ne devrait pas être sur... Toute la responsabilité ne doit pas être sur les médecins, mais sur les autres professions comme infirmière, travailleur social.

M. Gaudreault (Mauril) :Tout à fait.

M. Dubé : Mais... Donc, je comprends mieux votre précision de dire si... vous êtes d'accord qu'on n'enlève pas aux médecins, mais on va donner plus aux autres.

M. Gaudreault (Mauril) :Pierre.

M. Gfeller (Pierre) : Si je peux me permettre, M. le ministre, on parle de cogestion, elle n'est pas nécessairement médico-administrative. D'abord, j'aimerais définir que la cogestion, c'est seulement un des volets de ce qu'on appelle la «gouvernance clinique». Qu'est-ce que c'est, la gouvernance clinique? C'est, si vous voulez, la contribution des professionnels, qu'ils soient médecins, infirmiers ou les autres professionnels, à la planification, à l'organisation, à la dispensation, à l'évaluation des soins et des services qui sont offerts. C'est à géométrie variable. Il y a des programmes dans le réseau de la santé et des services sociaux, je vais prendre les centres jeunesse, par exemple, qui ne sont pas très, très médicalisés, on est vraiment du côté psychosocial. Alors, la cogestion peut s'exercer dans un centre jeunesse entre un psychologue et une gestionnaire ou une travailleuse sociale et une gestionnaire. Donc, dans le fond, cogestion, c'est un volet. Ça a été surtout appliqué dans le milieu hospitalier avec les chefs de département, mais aussi des chefs de service. Par exemple, Dre Saad, elle est chef d'une clinique à l'Hôpital juif de Montréal, et elle a une cogestionnaire administrative qui travaille avec elle, et puis ensemble elles gèrent cette clinique-là.

• (11 h 10) •

Alors, ce qui ressort, c'est que la perception, M. le ministre... c'est que la concentration des pouvoirs dans un petit nombre d'individus, les P.D.G., les directeurs médicaux, ça dégage une perception à l'effet que les autres professionnels sont évacués de la gestion et sont évacués, si vous voulez, de la définition des programmes, comment on veut donner les services, et malheureusement c'est la perception actuelle, puis je pense que c'est ça que le mémoire veut vous signaler.

M. Dubé : O.K., parfait. Dr Gfeller, comme j'ai dit, là, je ne changerai pas d'idée, j'ai tellement confiance en vous, ça fait que... Je vais juste préciser une chose. Quand vous parlez de ça, de... vous dites : que la décision soit mise dans un nombre restreint d'individus... Ça, c'est très clair que ça vous inquiète. Bon. Moi, ce que j'aimerais vous entendre... Parce que tout le monde va être d'accord avec le principe de cogestion. Puis j'incite, là, ceux qui nous écoutent... Allez lire, là, ce qui a été préparé par les HEC en 2020, c'est très intéressant. Ça explique c'est quoi, la cogestion entre le médical puis l'administratif.

Par contre, ce que j'aimerais vous dire ou vous demander - c'est une question, une question ouverte : Qu'est-ce qu'on fait quand la cogestion ne fonctionne pas? Qu'est-ce qu'on fait quand la médiation ne fonctionne pas...

M. Dubé : ...et c'est là, à mon sens, que j'aimerais qu'on se challenge sur pourquoi, à la fin, il faut peut-être qu'il y ait un directeur médical ou qu'un P.D.G. qui soit capable de trancher quand la cogestion ne fonctionne pas. Puis ça, je veux vous entendre là-dessus.

M. Gfeller (Pierre) : Bien, je vous ai mentionné, il y a quelques... quelques secondes, c'est très variable selon les milieux. Je dirais que, dans les milieux universitaires et urbains, c'est plus répandu. Parce que, dans un grand territoire.. Par exemple, moi, je suis un habitant... je vis dans les Laurentides. Alors, c'est une région qui commence à Rosemère puis qui finit à Mont-Laurier. Alors, vous comprendrez que, pour le chef du département de médecine ou le chef du département de chirurgie, où il y a six hôpitaux, ce n'est pas évident. Alors, il y a des conditions qui sont liées à la géographie et à la démographie médicale, mais il y a des conditions aussi qui sont liées à l'absence de rémunération pour les chefs de département. Il y a...

M. Dubé : Vous en parlez aussi dans le mémoire, de ça. Je veux revenir sur ça.

M. Gfeller (Pierre) : Oui, il y a plusieurs années qu'on espère... puis là je parle... je mets mon ancien chapeau de P.D.G. et de D.G.... qu'on espérait que ce serait réglé par une négociation avec la fédération, surtout les médecins spécialistes et omnipraticiens. Ça n'a jamais été réglé. Donc, dans le fond, à l'heure actuelle, on a gratté les fonds de tiroir des établissements pour compenser ces gens-là, pour le temps qu'ils mettent du côté médical.

M. Dubé : Mais, selon vous, pas encore assez.

M. Gfeller (Pierre) : Bien, dans le fond, il faudrait les rémunérer de façon adéquate pour qu'ils puissent assumer ces responsabilités-là. Donc, la cogestion, c'est un idéal, Ça ne touche pas seulement les médecins, ça touche d'autres types de professionnels, qui, eux, sont déjà, la plupart du temps, salariés du réseau. Puis on a remarqué que les dispositions touchant les chefs de département n'ont pas été modifiées dans la loi. Bien, c'est l'impression générale que le pouvoir que les P.D.G. assument, et les directeurs médicaux, est important. Vous avez raison, quand ça ne fonctionne pas, par exemple, si la filière disciplinaire ne fonctionne pas, il faut trouver une autre façon pour que ça fonctionne. Alors, de ce côté-là...

M. Dubé : Bien, c'est un petit peu pour ça, parce que... en tout cas, moi, quand j'ai relu, là, deux fois votre mémoire, plus qu'une fois, hier, pour bien comprendre les grands thèmes... Mais vous êtes d'accord qu'il y a des choses qui doivent changer parce que... je ne pourrai pas passer la liste de tout ce que vous avez dit, puis vous êtes d'accord, mais en même temps vous êtes d'accord, non plus, que les patients n'ont pas assez. Vous l'avez même dit quand vous avez fait votre tournée. L'accès aux spécialistes, entre autres, n'est pas assez grand. Ça fait qu'on s'entend là-dessus, on s'entend là-dessus. Est-ce que... Et, quand je reviens sur la question de la cogestion... je m'excuse, parce que je ne sais pas comment qu'il me reste de temps, M. le Président.

Le Président (M. Provençal) :...

M. Dubé : Est-ce qu'il y a de mes collègues qui avaient peut-être une question? O.K. Sur la question de la cogestion, je veux y revenir parce que, pour moi, je veux bien la comprendre, puis, en tout cas, je veux que tout le monde la comprenne, comment on pourrait bonifier si on bonifie? Parce qu'il y a une question de culture, la cogestion, on s'entend. Et c'est pour ça que j'ai un peu de misère à dire : Est-ce qu'on a besoin d'aller dans un projet de loi pour parler de culture, pour parler de méthode de gestion? Et c'est ça que vous avez l'air de dire, puis je ne suis pas sûr que ça va dans un projet de loi. Mais je veux vous entendre là-dessus.

M. Gaudreault (Mauril) :Bien, peut-être pas, je ne sais pas, mais on avait l'impression qu'il fallait le mentionner par rapport à nos questionnements puis inquiétudes dans le sens que vous avez souvent...

M. Dubé : Mais pas dans nécessairement de le mettre dans le projet de loi.

M. Gaudreault (Mauril) :Bien, dans le sens que vous avez dit souvent qu'il était perfectible. Ça fait que, si on s'entend que c'est nécessaire d'assurer une meilleure cogestion entre tous les professionnels puis que c'est implicite dans votre projet de loi, d'accord, monsieur Dubé, là, mais il faut poursuivre cette culture-là de cogestion.

M. Gfeller (Pierre) : Si je peux me permettre d'ajouter, M. le ministre, c'est que, depuis qu'on discute du projet de loi n° 15, les mots «chef de département», «cogestion», «gouvernance technique», on ne les a pas entendus souvent.

M. Dubé : Puis ça, ça veut dire quoi, docteur Gfeller?

M. Gfeller (Pierre) : Bien, je pense qu'il peut y avoir une perception à l'effet que ce n'est pas à l'agenda ou que c'est quelque chose qui est remis en question suite au projet de loi.

M. Dubé : O.K. Bien, je pense, des discussions comme on a aujourd'hui servent peut-être à préciser ça, qu'on n'est pas du tout contre la cogestion. Au contraire, tu sais, ce qu'on se dit, c'est que, si... quand ça fonctionne bien, on continue comme ça. Le médical doit travailler avec l'administratif.

M. Gaudreault (Mauril) :...clinicienne avec nous, peut-être qu'elle pourrait dire son petit mot aussi.

M. Dubé : Oui, bien, avec plaisir, allez-y.

Mme Saad (Nathalie) : Puis je pense que, dans le concept de cogestion, il faut se rappeler que les professionnels de la santé, dont font partie les médecins, on est aussi le lien un peu avec les patients. Donc, on a parlé dans notre mémoire qu'on veut être... qu'on croit que les usagers devraient avoir une voix plus forte. Mais les médecins... dans le développement des trajectoires de soins, dans l'accessibilité, même si c'est implicite, si je comprends, dans certains des aspects, l'implication des médecins dans la gestion avec d'autres gestionnaires permettra des soins de proximité qui vont être pertinents aux patients. Puis je pense que c'est là aussi que la cogestion est importante entre professionnels de la...

M. Dubé : ...les chefs de service, là. Parce que qu'est-ce que vous pensez des chefs des service par rapport au projet de loi n° 15?

Mme Saad (Nathalie) : Les chefs de service...

M. Gaudreault (Mauril) :Les chefs de service, ça n'a jamais été inclus dans la loi. Puis on ne demande pas que ça soit dans la loi non plus. Mais les chefs de département existent dans la loi et à mon avis ils devraient continuer d'exister dans ce projet de loi là aussi.

M. Dubé : Excellent. Est-ce qu'il me reste...

Le Président (M. Provençal) :40 secondes.

M. Dubé : Je pense, de mémoire, que vous traitez du patient partenaire dans votre mémoire comme quoi c'est important. Puis vous, vous l'avez connu beaucoup, je pense, au CUSM, là, docteur, ça fait que vous êtes en accord que ça devrait être plus présent, ça, par contre dans le projet de loi?

M. Gaudreault (Mauril) :Oui, des patients... des patients tout court, des patients partenaires aussi, là, mais des patients, les usagers et les patients. On n'a pas besoin d'être un patient partenaire formé, exemple, là, dans une université, dans une des facultés de médecine du Québec, les patients, les patients sont, à mon avis, les premiers partenaires de l'équipe de soins par rapport à un problème qui les concerne, tu sais, en ce sens là, de façon générale, les patients.

M. Dubé : Excellent.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup, M. le ministre.

M. Dubé : Merci.

Le Président (M. Provençal) :On va poursuivre avec le député de Pontiac et vous avez huit minutes 35 secondes, M. le député.

M. Fortin :Merci. Merci, M. le Président. Bonjour à vous trois. Merci d'abord pour vos décennies collectives de service public et je reconnais à travers plusieurs de vos propos, là, justement, cette... bien, votre mission principale au collège, la protection du public. Mais cette volonté là de s'assurer qu'on offre le meilleur service, le meilleur système de santé possible aux patients.

Dans votre mémoire... Et là, je vais vous prendre au mot, je vais vous citer, là : « Le collège est d'avis qu'il ne sera donc pas possible d'améliorer significativement l'accès aux soins sur l'ensemble du territoire sans une planification et une gestion orientée vers les soins de proximité. » Là, votre mémoire, il est quand même... moi, je le trouve dosé, c'est-à-dire qu'il y a des parties sur lesquelles vous êtes d'accord. De toute évidence, il y a des parties sur lesquelles vous êtes critique et il y a des améliorations que vous proposez. Sur cet enjeu là, quand vous dites qu'il ne sera pas possible d'améliorer significativement l'accès aux soins sur l'ensemble du territoire, qu'est-ce qui manque au projet de loi pour faire ça?

M. Gaudreault (Mauril) :Bien, je pense qu'il faut... il faut sortir de l'hôpital et il faut sortir des établissements puis améliorer ce qui se passe à l'extérieur des établissements. Ce qui se passe dans les établissements, là, on va s'entendre, de façon majoritaire, là, ça va bien, là, ce qui se passe dans les établissements, on peut toujours améliorer ça de façon... on a parlé de cogestion tout à l'heure. Mais ce sur quoi il faut accorder plus d'importance, pour moi, c'est comment on peut prendre soin des patients avant qu'ils soient obligés d'y aller dans l'établissement, avant qu'il se présente à l'urgence, notamment. Et lorsqu'ils ont un épisode de soins qui nécessite une hospitalisation, comment on pourrait faire pour la raccourcir, qu'ils retournent chez eux plus rapidement. Donc, ça, ça veut dire des équipes de première ligne avec des professionnels de la santé, pas juste des médecins, là, des professionnels de la santé de première ligne, et... mais aussi des équipes de professionnels de la santé qui vont à domicile pour que les patients puissent poursuivre leur épisode de soins.

On a parlé de beaucoup de soins palliatifs à domicile, d'hospitalisation à domicile, de soins à domicile, de large façon, mais c'est de cela que nous parlons quand on parle de soins de proximité, il faut mettre autant d'efforts sur ce qui se passe dans l'établissement, sinon plus même que ce qui se passe à l'extérieur des hôpitaux.

• (11 h 20) •

M. Fortin :Parce que ce que vous dites, essentiellement, c'est qu'on n'arrivera même pas à régler ce qui se passe à l'intérieur de l'établissement si on ne règle pas ce qui est à l'extérieur. Quand vous dites que vous doutez de la capacité à vraiment améliorer les choses, par exemple, à l'urgence, là, c'est un peu ce que vous nous dites, c'est...

M. Gaudreault (Mauril) :Bien, s'il y a toujours trop de patients qui y vont, à l'urgence et s'il y a toujours trop de patients qui sont hospitalisés et qui ne peuvent pas quitter, alors que des patients à l'urgence attendent un lit hospitalier... C'est ça, le fonctionnement, ça fait que c'est un tout, tout cela, là. Ce n'est pas juste ce qui se passe dans l'hôpital. Si on veut améliorer ce qui se passe dans l'hôpital, il faut améliorer ce qui se passe à l'extérieur de l'hôpital.

M. Fortin :O.K. Alors, quand vous parlez... et je pense que je vous ai entendu correctement, là, tantôt vous avez parlé de centralisation et de hiérarchisation des pouvoirs décisionnels. Là, vous faites référence au directeur médical et au P.D.G. qui prennent une grande partie des pouvoirs que les CMDP, entre autres, avaient avant, c'est ça?

M. Gaudreault (Mauril) :Oui. Il faut faire attention. On a utilisé le mot « trop de pouvoirs en trop peu de mains », je ne dis pas que ce n'est pas nécessaire. Je m'adresse à vous, je m'adresse à tous les parlementaires, je m'adresse à vous, monsieur Dubé. Ce n'est pas nécessaire. Est-ce que c'est nécessaire de mettre ça dans une loi? Peut-être. C'est vous qui le savez plus que moi, mais il faut faire attention, par rapport à ces choix-là, de donner beaucoup d'autorité à certains représentants qui ne la partagent pas. C'est pour ça qu'on parle beaucoup de cogestion médicoadministrative là, et des... il y a des décideurs, je vais donner la parole à un gestionnaire, là, des décideurs qui prennent des décisions concernant l'accord de privilèges à des médecins et qui prennent...

M. Gaudreault (Mauril) :...des décisions tout aussi importantes par rapport à des sanctions disciplinaires versus ces mêmes médecins-là. On a un petit problème avec ça...

M. Gfeller (Pierre) : Comme le Dr Gaudreault, je suis aussi médecin de famille. J'ai commencé ma pratique dans les Hautes-Laurentides, dans un petit village de 2 000 habitants. On a un questionnement par rapport aux mécanismes qui sont mis en place, mais on comprend qu'au niveau hospitalier, c'est la façon de faire, c'est la façon avec laquelle on l'a fait dans le passé, on raffermit les pouvoirs de certains gestionnaires. Par contre, on se demande comment, ça, ça va se décliner quand on arrive dans les services au niveau de la communauté, entre autres dans les groupes de médecine familiale, dans les autres types de services de santé et de services sociaux, les soins à domicile qu'on retrouve à la maison.

Alors, est-ce qu'un modèle hospitalo-centrique, est ce que ça va être la bonne façon de gérer tout ce qui doit se passer dans la communauté? C'est un questionnement qu'on a, mais on comprend que pour le milieu, ces règles-là, elles sont issues du milieu hospitalier, elles se sont développées en milieu hospitalier. Donc, le questionnement, c'est au moment où on doit faire un virage première ligne. Parce que les urgences, c'est le reflet du système. Quand une urgence est pleine, c'est parce qu'il y a trop un monde qui se présente parce qu'ils n'ont pas été vus avant, parce que les patients ne sortent pas des lits, parce qu'il n'y a pas de place en CHSLD, on ne peut pas donner le service à domicile ou on n'est pas bien attaché avec le secteur communautaire. Donc l'urgence, c'est simplement un reflet du réseau. Alors, il faut vraiment faire un virage première ligne.

M. Fortin :Tantôt, on a entendu le ministre utiliser une expression. Il a dit : «Quand ça fonctionne bien, quand ce n'est pas brisé, on continue comme ça». Est-ce que les CMDP, en ce moment, ils sont brisés ou est-ce qu'ils fonctionnent bien?

M. Gaudreault (Mauril) :Bien, les... Bien, nous, nous pensons que le CMDP, c'est un... c'est une organisation qui doit... qui doit poursuivre, là. C'est... C'est des CMDP comme... comme c'est le cas actuellement. Mais des CMDP au même niveau que les conseils d'infirmiers et infirmières, et avec le conseil interdisciplinaire au... dans l'organigramme au-dessus de ces structures-là. C'est parfait, là, tu sais. Mais la dilution des... des, je dirais, des responsabilités du CMDP, il faut faire attention. Il faut poursuivre. Il y a des CMDP qui fonctionnent très bien. Il y en a d'autres avec lesquels c'est plus difficile, on s'entendre tous, là.

M. Fortin :Mais...

M. Gaudreault (Mauril) :De là la raison de faire en sorte de... Quand vous avez identifié des leaders médicaux dans un établissement, ce n'est pas tous les médecins qui sont des leaders, hein, on va s'entendre là-dessus. Quand vous avez identifié des leaders médicaux, ce que moi, je dis, ce que nous disons, c'est qu'il faudrait faire en sorte qu'ils soient mieux formés, mieux supportés pour faire une bonne job dans leur établissement...

M. Fortin :Quand vous parlez du risque de démobilisation et de désengagement, là, est-ce que vous faites référence à ces leaders-là?

M. Gaudreault (Mauril) :C'est ça. On fait référence à ces leaders-là par rapport au fait....

M. Fortin :Donc, on vient... On serait en train de prendre les leaders, les gens qui s'impliquent, les gens qui veulent faire en sorte que ça fonctionne, puis de démobiliser ces gens-là?

M. Gaudreault (Mauril) :Oui. Oui. Et de diminuer peut-être leurs tâches cliniques un peu puis mieux les rémunérer. Ça va tout ensemble aussi cela, par rapport à l'identification des personnes qui veulent bien assumer ce rôle là. Souvent, la façon avec laquelle ça se passe par rapport aux chefs de départements, un département où il y a huit médecins, puis ils font chacun leur tour de la chefferie du département. Exemples, bon, ça va être à ton tour cette année. Ça se passe comme ça des fois, là. Ça ce n'est pas bon parce que ce n'est pas, je le répète, tous les médecins qui sont... qui ont des habiletés puis des... des capacités de leader. Donc, il faut les identifier et les supporter.

M. Fortin :O.K. Dernière question. Je crois, puis je m'en excuse à ma collègue d'avoir pris tout notre temps, mais vous faites référence aux patients d'exception. Je veux absolument qu'on y touche dans les quelques secondes qui restent, là.

M. Gaudreault (Mauril) :Aux médicaments.

M. Fortin :Aux médicaments d'exception, pardon. Ça, c'est des gens, là...

M. Gaudreault (Mauril) :C'est pour des patients d'exception.

M. Fortin :Ça, c'est des patients qui vont perdre accès, qui pourraient perdre l'accès aux médicaments qu'ils utilisent en ce moment, notamment pour traiter leur cancer à travers ce projet de loi là. Alors, si je comprends bien votre demande, c'est de retirer cette disposition-là pour que les gens puissent continuer à avoir accès à ces médicaments-là.

M. Gaudreault (Mauril) :Ce n'est pas une demande comme une préoccupation. Il faut voir comment on peut faire ça ensemble pour faire en sorte que pour certains traitements et les protocoles de recherche, actuellement, c'est les... Les médicaments en question sont payés. Donc, il faut, comme société, comme tous ensemble, voir comment on pourrait donner accès, le plus possible, à tous ces patients-là, à ces médicaments dits d'exception et diminuer la lourdeur... la lourdeur, là, qui accompagne cela quand c'est nécessaire.

Le Président (M. Provençal) :Merci.

M. Fortin :J'apprécie. Merci, messieurs, madame.

Le Président (M. Provençal) :Alors. M. le député de Rosemont pour 2 min 52 s

M. Marissal : Merci, M. le Président. Bonjour.

M. Gaudreault (Mauril) :Bonjour.

M. Marissal : Et merci d'être là encore une fois. Rapidement, question très technique, vous avez parlé d'un sondage auprès de vos membres, auquel 1 300 de vos membres ont répondu. Est-ce que vous accepteriez de nous le partager?

M. Gaudreault (Mauril) :Oui.

M. Marissal : Et idéalement dans l'intégralité parce qu'un sondage, c'est un tout et non pas une partie, là.

M. Gaudreault (Mauril) :On va vous le...

M. Marissal : Mais pensez-y. Si vous voulez l'envoyer sur le Greffier, ici, ça nous ferait plaisir.

M. Gaudreault (Mauril) :Non, on va vous le partager volontiers, là...

M. Marissal : ...ça sera utile à nos réflexions. Vous disiez, tout à l'heure, que, quand le ministre nomme tout le monde, ce n'est pas de la décentralisation. Bon, on ne parlera peut-être pas de décentralisation, de centralisation, question de bien commencer la semaine avec le ministre qui ne veut pas qu'on parle de ça, là, mais parlons de concentration, peut-être, de pouvoir. Vous dites essentiellement : Quand le ministre nomme tout le monde, c'est de la concentration de pouvoir. Vous dites, par ailleurs, que les comités des usagers sont dépossédés de leurs pouvoirs qui étaient déjà restreints. O.K., j'ai la même analyse que vous, mais ce n'est pas grave, là. Qu'est-ce qu'on fait pour corriger ça?

M. Gaudreault (Mauril) :Moi, je ne dis pas que ça prend... Je suis d'accord que ça prend des décideurs, des gestionnaires décideurs dans des établissements pour que ça fonctionne, notamment quand ça fonctionne mal. Ça en prend, mais pas seulement ces seules personnes là. Il faut élargir un peu la capacité de ces décideurs-là avec les leaders médicaux, avec les... avec les patients, avec les usagers. Dans ma tournée, j'ai vu autant de gestionnaires, de médecins que d'usagers. Il y a plusieurs, plusieurs comités des usagers avec des personnes très volontaires qui voulaient travailler à faire en sorte d'améliorer la façon de faire mais qui étaient vues, je dirais, plus... pas comme un partenaire, tu sais, je vais y aller de façon correcte, là, ils n'étaient pas vraiment vus comme des vrais partenaires. Alors, là-dessus, je salue ce projet de loi là qui veut leur donner une voix plus grande, et on sera toujours d'accord avec cela.

Mais, encore une fois, je le dis, si tous ensemble, nous fonctionnons avec la même responsabilité de faire en sorte d'améliorer la situation, on va y arriver. Tout à l'heure, à l'extérieur, il y a des journalistes qui me demandaient la question : Pourquoi ça n'a pas marché il y a 10 ans, 20 ans? Pourquoi ça marcherait maintenant? Je pense que tout le monde se sent plus responsable de devoir participer à l'amélioration de tout ça.

M. Marissal : Mais techniquement, Dr Gaudreault, la question, c'est : Comment s'assure-t-on de ne pas déposséder les comités d'usagers, les... Autrement dit, comment on leur assure une voix réelle et non pas un mal nécessaire, comme vous disiez tout à l'heure?

M. Gaudreault (Mauril) :Oui. Bien, en travaillant ensemble avec eux puis en leur donnant une voix plus importante à tout ce qui se passe dans leur établissement.

M. Marissal : En tout respect, il n'y aura pas d'article dans le projet de loi qui va dire : Les usagers sont importants, nous devons les respecter, là. Est-ce qu'on doit s'assurer de leurs élections, de leur pérennité? Je cherche techniquement qu'est-ce qu'on met dans le projet de loi que vous ne voyez pas pour nous assurer, effectivement, que...

M. Gaudreault (Mauril) :Assurer? Bien, on parlait d'un comité national des usagers, bon, que leur nomination, on dit, vient du Québec ou du conseil d'administration. Pour nous, ça serait plus démocratique puis plus préférable de leur demander de nommer les personnes qui veulent les représenter sur le comité national avec les comités locaux. Je suis allé, il y en a plusieurs, des personnes, là, à mon avis, qui ont des expertises de patients qu'on utilise mal. J'ai été invité, l'année dernière, à aller à leur assemblée annuelle du Regroupement provincial des comités des usagers, j'ai pris la parole là. Ils étaient 480 dans la salle. Ça fait que c'est des gens, je pense, pour lesquels nous utilisons mal leurs compétences puis leur expérience.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Avant de céder la parole au député des Îles-de-la-Madeleine pour deux minutes 52, vous avez... le député de Rosemont vous a demandé si vous étiez prêt à partager votre sondage. J'ai compris que c'était oui. Alors, je vais vous inviter à le faire parvenir à la secrétaire de la Commission. Puis, l'autre question que je vous pose, est-ce que c'est un sondage qui peut être diffusé? C'est-à-dire, si on le dépose sur greffier, la population peut le consulter, est-ce que vous êtes en accord avec ça?

• (11 h 30) •

M. Gaudreault (Mauril) :Je n'ai pas de problème avec ça.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Je voulais m'assurer. M. le député des Îles.

M. Arseneau : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, j'ai peu de temps. Je vous salue. Je salue mes collègues également. Je vous remercie de votre contribution. Puis j'ai une question sur la première ligne ou l'avant-première ligne. Vous mentionnez les techniciens ambulanciers paramédicaux. Je suis certain que ça leur fera grand plaisir parce qu'ils se sentent un peu abandonnés dans cette réforme. Comment voyez-vous qu'on puisse aborder cette question-là dans le projet de loi actuel?

M. Gaudreault (Mauril) :Bien, moi... il faut leur... il faut leur donner la place qu'ils méritent. Ça va tout dans le sens d'améliorer les soins de première ligne aussi par rapport aux techniciens paramédicaux. Puis il faut favoriser aussi qu'ils puissent faire partie d'un ordre professionnel en bonne et due forme, un ordre professionnel qui est garant de la qualité des services et des actes qu'ils pourront poser. Ça fait que ça, je pense que ça serait à travailler avec l'Office des professions, mais je pense qu'on est rendus là pour ce qui est de vraiment, vraiment leur permettre de se réunir en ordre professionnel.

M. Arseneau : Vous avez aussi mentionné, tout à l'heure, que les urgences sont le reflet du système du réseau. Est-ce qu'il y a quelque chose, dans ce projet de loi là, qui nous...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

M. Arseneau : ...permet de penser qu'on va améliorer la situation dans les urgences.

M. Gaudreault (Mauril) :Moi, je pense que oui. Mais je reviens toujours avec la fameuse responsabilité sociale populationnelle de tout le monde. C'est en ce sens là. J'ai 75 ans, là, je ne suis pas un optimiste, là, mais je suis... bien, je suis optimiste, oui, mais, tu sais, je ne suis pas naïf non plus, tu sais, et je pense qu'on est rendus là, vraiment. Toute la communauté, tous les professionnels de la santé, tous les gestionnaires, tout le Québec veut améliorer l'accès à des soins pour nos Québécoises et néo-Québécois. C'est dans ce sens-là que je pense que le projet de loi peut améliorer les choses. Et c'est impossible pour moi, après une tournée que j'ai faite, voyant les difficultés d'accès un peu partout, de dire que le statu quo est une option. Non, il faut faire quelque chose.

M. Arseneau : Vous avez aussi mentionné, là, je cherche la référence exacte, vous parlez de la pénurie de main-d'oeuvre qui va certainement continuer encore plusieurs années. Est-ce qu'on n'a pas une obligation de mobiliser, en fait, toutes les ressources qui sont actuellement présentes ou qu'on pourrait attirer dans le réseau et que, justement, l'axe qu'on a emprunté, celui de la concentration des pouvoirs entre les mains d'un nombre plus restreint de gens encore, ça ne va pas créer exactement l'effet inverse, de démobilisation?

M. Gaudreault (Mauril) :Je ne sais pas. Moi, je pense que tout cela peut ne peut que favoriser. On va fonctionner encore avec la pénurie de main-d'oeuvre, mais la main-d'oeuvre actuelle, comment on pourrait faire en sorte qu'elle travaille mieux ensemble?

M. Arseneau : Mais il faut qu'elle soit mobilisée. Encore aujourd'hui, il y a deux chefs de département qui ont démissionné en Estrie, et ils disent : Le système est déshumanisé, ce n'est plus le patient au cœur des préoccupations, puis nous, on n'est pas écoutés. Vous parlez de soutenir et former les chefs de départements, mais on ne semble pas les écouter. Est-ce que c'est une lacune que vous constatez?

M. Gaudreault (Mauril) :Bien, c'est peut-être une démonstration de ce que je dis, qu'il faut mieux les supporter, mieux les former, mieux les écouter et mieux les rémunérer.

M. Arseneau : Merci.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Alors, nous terminons cet échange avec la députée de Vaudreuil.

Mme Nichols : Merci. Merci, M. le Président. Merci d'être d'être parmi nous. Hier, le ministre annonçait à Rimouski que les DRMG allaient avoir plus de pouvoir, notamment sur les AMP. Tu sais, qu'est-ce qui manque? Qu'est-ce qui manque au niveau des pouvoirs des RMG?

M. Gaudreault (Mauril) :Bien, les DRMG, c'est pour les départements régionaux de médecine générale. Je pense que vous parlez des départements régionaux de médecine spécialisée aussi, là.

Mme Nichols : Oui, les deux.

M. Gaudreault (Mauril) :C'est ça, O.K.. Bien, écoutez, moi, je pense que c'est la même chose, je m'excuse de dire ça si souvent, mais de partager tous ensemble la responsabilité pour comment on pourrait mieux répondre aux besoins des communautés à desservir. Et ça, je pense que c'est une avenue.

Mme Nichols : Mais quel pouvoir, entre autres, il manquerait? Quel pouvoir on pourrait leur donner dans le projet de loi pour...

M. Gaudreault (Mauril) :Bien, je ne sais pas. À titre d'exemple, moi, je viens de... j'ai toujours fait ma carrière à Chicoutimi, au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Il y a des néphrologues, à Chicoutimi, tu sais, il y a des urologues, il y a des a des... Il y a plusieurs départements médicaux qui sont bien pourvus, mais ils sont à Chicoutimi. Il y en a, de ces départements-là, qui vont, exemple, à Alma ou à Dolbeau pour offrir des services. Pas tous. Donc, si on met en évidence que, pour aller, exemple, dans un autre établissement de la région, ça prendrait un membre d'une discipline spécialisée, il faudrait voir à faire en sorte qu'il puisse se déplacer puis aller les rendre des services là, pas nécessairement, je l'ai dit, de façon administrative, mais choisir la bonne personne dans le département médical en question pour y aller. Et ça, je suis persuadé que la communauté médicale est d'accord avec ce que je dis dans ce sens-là, mais de faire correctement par rapport à définir, puis choisir la bonne personne pour y aller. Veux-tu dire un mot, Nathalie?

Mme Saad (Nathalie) : Oui. Je pense aussi que, quand on regarde les activités à l'extérieur des milieux où les ou les médecins sont concentrés, il faut qu'on s'assure que les structures soient en place pour offrir ces services-là. C'est vrai pour tous les professionnels, médecins et autres. De juste avoir, dans dans une structure, un médecin qui est déplacé, ça ne va pas répondre aux besoins d'accessibilité. Il faut que la structure soit mise en place autour du médecin, avec l'équipe interdisciplinaire qui est requise pour être capable d'arriver à avoir des soins qui vont être accessibles et qui vont être pertinents pour les patients qui vont les recevoir. Donc, ce n'est pas juste une question de mobilité, c'est une question d'infrastructures et d'organisation.

M. Gfeller (Pierre) : Puis ça doit être basé aussi sur la géographie et la démographie. On ne fera jamais de chirurgie cardiaque dans mon hôpital à Mont-Laurier où j'ai travaillé, c'est clair, parce que la démographie n'est pas là. Donc, si on déplace des médecins, il faut que l'infrastructure soit là, il faut qu'on tienne compte des compétences particulières des spécialistes, et puis il faut que le service soit pertinent, surtout dans le contexte actuel de manque de main-d'oeuvre. On ne peut pas éparpiller les services partout à faible volume, d'autant plus que ça amène des problèmes de qualité.

M. Gaudreault (Mauril) :...de la chirurgie cardiaque, on va continuer à en faire à Chicoutimi, par exemple.

Le Président (M. Provençal) :Alors, je remercie...

Le Président (M. Provençal) :...les représentants du Collège des médecins du Québec pour leur collaboration et leur contribution.

Nous suspendons les travaux momentanément pour pouvoir permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 11 h 36)

(Reprise à 11 h 42)

Le Président (M. Provençal) :Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'Ordre des sages-femmes du Québec. Alors, mesdames, vous avez un 10 minutes pour votre présentation, et nous poursuivrons par la suite avec des échanges avec les membres de la commission. Vous avez maintenant la parole.

Mme Pelletier (Julie) : Merci. M. le Président, M. le ministre, Mme la secrétaire, Mmes et MM. les députés, bonjour. Merci pour cette invitation à participer à la commission. Je m'appelle Julie Pelletier, je suis sage-femme et présidente de l'Ordre des sages-femmes du Québec. Je suis accompagnée de madame Annie Bronsard, qui est sage-femme aussi. Elle est vice-présidente de l'ordre et cheffe de service du Centre parent enfant de l'Hôpital Sainte-Croix à Drummondville.

D'entrée de jeu, nous souhaitons nommer que nous sommes ici en tant qu'ordre professionnel. Notre mission est de protéger le public. Nous nous en acquittant par la surveillance de la profession ainsi que par la vigilance et la proaction pour le développement d'une profession de qualité qui répond aux besoins de la population.

La collaboration, le respect, la rigueur, l'innovation et l'intégrité sont les valeurs de l'ordre. C'est les valeurs qui ont guidé notre analyse des impacts potentiels du projet de loi n° 15 sur la sécurité des soins offerts aux femmes et aux familles. Nous nous sommes également appuyés sur le principe d'évaluation et de jugement par les pairs pour apprécier la qualité de l'acte professionnel.

Nous avons évalué les changements proposés à la lumière de la nécessité pour nos membres de pouvoir pratiquer en toute autonomie, conformément à leurs normes professionnelles. Depuis la légalisation, en 1999, les sages-femmes ont toujours exercé en pleine autonomie, jamais en subordination d'une autre profession. Le taux de satisfaction élevé de la clientèle reflète que les sages-femmes s'acquittent très bien de cette responsabilité.

Nous tenons à vous assurer que nous sommes en accord avec les objectifs généraux du projet de loi. La proximité et l'écoute sont des principes fondateurs de la pratique des sages-femmes. Pour assister aussi à la réalité terrain de la situation en périnatalité, en obstétrique, nous sommes également d'avis qu'un statu quo n'est plus possible. Nous souhaitons que le législateur saisisse l'opportunité de promouvoir réellement la valeur de la première ligne, celle qui débute avant qu'on doive mettre les pieds dans un centre hospitalier.

Nous espérons conscientiser le législateur à la valeur de la profession sage-femme pour toute la sphère sexuelle et reproductive. Comprendre la richesse de notre profession pourrait mener à propulser une offre de services, en ce moment, marginale, vers une offre accessible à toute la population.

Par ce projet de loi, vous souhaitez améliorer l'efficacité du système de santé. Nous saisissons cette opportunité pour vous proposer d'aller encore plus loin. Nous vous proposons des moyens pour que la profession sage-femme puisse, dans un avenir rapproché, desservir une plus grande partie de la population. La pandémie a contribué à mettre en lumière l'apport possible et même essentiel des sages-femmes en dehors du cadre connu depuis les années 90.

Avant de vous proposer nos innovations, nous tenons à souligner la relation respectueuse et constructive que nous entretenons avec nos collègues des autres ordres professionnels en santé. Nous collaborons régulièrement, et ce, au plus grand bénéfice de la population. Les recommandations qui suivent reflètent une volonté de poursuivre les collaborations d'égal à égal. Nous voulons avec vous aller plus loin. Le travail concerté lors de la pandémie et le chantier d'élargissement des pratiques professionnelles sont des exemples de collaboration interprofessionnelle efficace et centrée sur les besoins de la population. La collaboration est porteuse de changement. Nous devons toutefois souligner notre inquiétude en lien avec cette nouvelle notion qui s'ingère au projet de loi n° 15, c'est-à-dire la subordination de la pratique sage femme à la pratique médicale.

Voici maintenant les premières priorités de l'Ordre des sages-femmes dans le cadre du projet de loi n° 15. D'abord, l'ordre recommande la création d'une direction sages-femmes. La pratique des sages-femmes est orientée vers la prévention, le dépistage et le maintien de la santé sexuelle et reproductive, ainsi que celle de la santé familiale. Depuis, l'expertise des sages-femmes se situe dans la prestation de soins intégrative de proximité, majoritairement en dehors du centre hospitalier, de placer un département de sages-femmes sous la gouverne d'une direction à vocation principalement hospitalière représente un risque bien réel pour l'accès des services de première ligne que sont les services de sages-femmes. Nous sommes particulièrement conscientes du nombre restreint...

Mme Pelletier (Julie) : ...de nos membres pour le moment dans les établissements. Or, l'ordre souhaite que ses membres puissent dispenser davantage de services à un plus grand nombre d'usagères au sein de différentes directions de programmes des établissements. Cette offre de services nécessitera de pouvoir s'asseoir avec les autres directions dans un mode de cogestion.

Ensuite, l'ordre recommande que l'évaluation de l'acte des sages-femmes soit effectuée par des pairs au sein du conseil professionnel. À la lumière de l'histoire de l'intégration des sages-femmes au réseau de la santé et de l'ingérence médicale encore malheureusement bien présente et fréquente sur le terrain, pas avec les autres ordres, mais vraiment sur le terrain, un conseil des sages-femmes autonome demeure une entité importante dans les établissements. L'autonomie professionnelle des sages-femmes doit être respectée, particulièrement lors de l'élaboration de règles de soins spécifiques au service de sages-femmes, et ce, conformément à leurs normes et déontologie professionnelle. Ce qui est considéré comme étant les meilleures pratiques peut différer d'un professionnel à l'autre pour plusieurs raisons, entre autres le type de clientèle desservie, le lieu de pratique et les normes professionnelles respectives.

Donc, nous recommandons que soit clarifié, à l'article 184, le fait que les professionnels doivent répondre à des règles propres à leur département et non pas uniques à l'exercice de tous les professionnels. Dans le même sens, nous recommandons la réintroduction de la notion du Conseil des sages-femmes autonomes dans le projet de loi, avec les responsabilités et pouvoirs inhérents à leur... à sa raison d'être. Nous reconnaissons aussi que, dans certains établissements, la fusion entre un CMDP et un CSF peut être souhaitée telle que prévu actuellement dans la LSSSS. Advenant cette fusion, nous recommandons l'équité entre les professionnels représentés pour maintenir une répartition égale des leviers de pouvoir, tout en respectant les spécificités propres à chaque profession. Considérant les responsabilités prévues par le projet de loi pour les conseils professionnels, l'Ordre est d'avis que la collaboration interprofessionnelle doit plutôt être investie au sein du Conseil interdisciplinaire d'évaluation des trajectoires et de l'organisation clinique. Ainsi, nous recommandons au législateur d'assurer que le conseil interdisciplinaire prévoie la représentation des sages-femmes dans sa composition.

Concernant l'appréciation de l'acte et la discipline en établissement, l'autorégulation et l'évaluation par les pairs sont des fondements du système professionnel. Les pairs sont en mesure d'évaluer les compétences, la conduite et l'éthique de leur profession. L'examen par les pairs est crucial pour maintenir des normes de pratique élevées, garantir la qualité des services offerts aux usagers et assurer la sécurité du public. Nous recommandons donc la nomination d'une sage femme examinatrice nationale pour le traitement des plaintes impliquant un contrôle et une appréciation de la qualité de l'acte sage-femme et que l'article 614 soit modifié afin que soit nommé au sein du comité de révision, deux membres pairs du professionnel l'examiné.

Enfin, dans le but de répondre de manière concertée et adaptée aux besoins de la population, nous recommandons, à l'article 195, l'ajout des effectifs sages femmes aux plans d'effectifs médicaux et dentaires régionaux, cela permettra de mieux coordonner l'accessibilité aux services de périnatalité dans un territoire donné.

Nous souhaitons aussi nommer que la profession de sage-femme au Québec est le résultat de représentations citoyennes répétées au fil des années. Il est essentiel que le projet de loi prévoie un rôle consultatif parmi les fonctions des comités d'usagers à l'égard de la mise en place des trajectoires et des règles de soins les concernant.

De plus, nous pensons que les clientèles devraient être représentées selon leurs besoins. En effet, les besoins des usagers malades sont différents des gens qui requièrent des services de promotion de la santé ou de dépistage. En l'occurrence, les personnes qui recourent à des services de santé sexuelle et reproductive doivent avoir une voix dans la prise de décisions concernant la trajectoire et les soins proposés.

• (11 h 50) •

En terminant, nous souhaitons réaffirmer notre volonté de collaborer afin de trouver des solutions pour le maintien des services sécuritaires en obstétrique. Nous souhaitons que le gouvernement saisisse cette opportunité pour aller plus loin dans la réorganisation du réseau afin de mettre en valeur l'autonomie des sages-femmes, au plus grand bénéfice de la population.

Nous tenons à nouveau à remercier la commission, le gouvernement de nous avoir invités à participer aujourd'hui et d'exprimer nos recommandations. Nous sommes prêtes à recevoir vos questions, commentaires avec grand plaisir.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup pour votre exposé. M. le ministre, je vous cède immédiatement la parole pour... cet échange.

M. Dubé : Merci. Merci. Et comme on dit toujours, merci pour la... votre mémoire et pour le travail que vous avez fait et que vous faites, en fait, tous les jours en plus du mémoire.

Deux choses, peut-être, vous avez dit le mot marginal tout à l'heure, mais j'aimerais ça peut-être que... un peu comme l'ont fait les infirmières auxiliaires ce matin, si... moi, j'aimerais ça, vous preniez peut-être deux, trois minutes pour décrire le nombre de sages-femmes qu'on a au Québec, quelle est la proportion par... Là, je sais qu'on fait souvent le lien, et moi le premier, entre les accouchements qui sont...

M. Dubé : ...je dirais, vous vous êtes fait connaître par ça. Dites-nous un peu qu'est-ce que c'est, la profession en ce moment. J'aimerais ça qu'on comprenne, parce que, quand vous dites : On veut passer d'un rôle marginal à autre chose, ça veut dire quoi, en ce moment, les sages-femmes? Après ça, on regardera ce que ça dit en termes du projet de loi n° 15.

Mme Pelletier (Julie) : Parfait. Donc, les sages-femmes sont des professionnelles de santé exclusivement en exercice dans les établissements de santé, donc elles exercent exclusivement dans le réseau public. Nous avons près de 300 membres, à l'ordre.

M. Dubé : O.K. 300.

Mme Pelletier (Julie) : 300. Donc, si on se compare, par exemple, aux médecins de famille accoucheurs, on n'est pas très loin du nombre de médecins de famille accoucheurs, mais nous, notre exercice, il est exclusivement en périnatalité, en obstétrique. Donc, la sage-femme, présentement, va être responsable du suivi de la grossesse, de l'accouchement et du suivi postnatal jusqu'à six semaines, de la mère de l'enfant, bon, et de l'accompagnement de la famille par la suite. L'exercice est vraiment principalement dans les maisons de naissance ou dans les services de sages-femmes, là où il n'y a pas de maison de naissance, quand le volume n'est pas suffisant, là, à cette structure-là. Donc, c'est un fonctionnement vraiment...

M. Dubé : Mais j'ai mal compris, là, vous êtes, et dans les établissements, et dans les maisons, vous avez ce droit-là au niveau des deux?

Mme Pelletier (Julie) : Oui. L'exercice de la sage-femme, son port d'attache, si je peux m'exprimer comme ça, c'est la maison de naissance ou le service, et la particularité de l'exercice sage-femme, ce qui en fait quelque chose d'extraordinaire, si vous voulez mon avis, c'est que c'est la personne qui vient chercher les services qui va choisir son lieu de naissance.

M. Dubé : C'est ça, de le faire...

Mme Pelletier (Julie) : Exactement. Donc, dans les maisons de naissance qu'il y a des chambres de naissance, mais on a aussi cette capacité, ces compétences-là, d'accompagner les personnes qui accouchent dans leur domicile...

M. Dubé : ...pour ceux qui le veulent.

Mme Pelletier (Julie) : ...lorsqu'elles le souhaitent, et aussi dans les centres hospitaliers lorsque c'est le choix de la personne qui va donner naissance.

M. Dubé : O.K. Une autre statistique que j'aimerais avoir, parce que je veux que nous, on comprenne, comme législateurs, mais que les Québécois le comprennent aussi, un peu comme on a fait avec les infirmières auxiliaires... vous dites que vous avez à peu près le même nombre de sages-femmes que des médecins qui font des accouchements. C'est quoi la proportion, en termes... Est-ce que vous avez 5 %, 10 %, 20 % des accouchements au Québec? Êtes-vous capable de nous dire ça?

Mme Pelletier (Julie) : Les dernières statistiques étaient autour de 4.5 %.

M. Dubé : 4 %.

Mme Pelletier (Julie) : ...des naissances, oui.

M. Dubé : Des naissances.

Mme Pelletier (Julie) : La particularité du service de sage-femme, par contre, c'est le suivi en continuité et la qualité du service rendu. Donc, une personne qui vient chercher les services d'une sage-femme va utiliser significativement moins les autres services comme l'urgence, comme les centres de prélèvements, comme l'appel à un 8-1-1 parce que...

M. Dubé : Parce que votre activité n'est pas liée uniquement à l'accouchement.

Mme Pelletier (Julie) : Exactement.

M. Dubé : C'est pour ça que vous avez le même nombre de personnes, mais vous faites 4 % au lieu d'en faire 50 %, je vais dire ça comme ça. O.K.

Mme Pelletier (Julie) :  C'est un service qui se compare difficilement avec les autres offres de service qui sont dans le système présentement.

M. Dubé : O.K. Bien là, je vois que j'ai de mes collègues qui aimeraient vous poser des questions, ça fait que je vais les laisser poser puis, s'il nous reste du temps, je reviendrai un petit peu sur votre participation au comité interdisciplinaire. J'aimerais ça, reparler de ça, mais je vais laisser... M. le Président.

Le Président (M. Provençal) :Oui. Alors, Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Dorismond : Pour continuer aussi dans le même sens, là, de faire la différence entre le champ de pratique du médecin accoucheur et vous-même, je salue grandement vos suggestions, là, pour aller plus loin dans l'intégration des services de sages-femmes, mais jusqu'où vous êtes prêtes à aller? J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

Mme Pelletier (Julie) :  Oui, bien, un exemple intéressant qu'on a vu pendant la pandémie, c'est les sages-femmes qui sont allées... qui ont maintenu leurs services, il n'y a jamais eu de bris de service dans les maisons de naissance, mais qui sont aussi allées prêter main-forte sur les départements d'obstétrique. Il y a des sages-femmes qui sont allées faire de la vaccination COVID, il y a des sages-femmes qui sont allées... qui ont été responsable des projets PRAIDA, donc, pour les femmes réfugiées ou demandeurs d'asile, des sages-femmes dans les maisons bleues, donc les maisons bleues sont des installations du réseau qui desservent une clientèle à très grande vulnérabilité.

Donc, ces sages-femmes là exercent déjà dans un modèle un petit peu plus étendu, mais elles pourraient faire encore plus, les sages-femmes, elles pourraient être la référence pour la gestion des fausses couches, au lieu de passer par l'urgence, on pourrait appeler une sage-femme. On pourrait continuer beaucoup plus longtemps les suivis en allaitement. Donc, on sait que l'allaitement, c'est gage de santé et de santé publique à long terme, donc elles pourraient s'impliquer davantage dans les suivis en allaitement. Donc, on pourrait faire aussi beaucoup plus de santé préventive au niveau du dépistage du cancer du col, des ITSS. On pourrait aussi être plus impliquées dans les services de contraception.

Donc, effectivement, notre nombre est restreint, mais on a une vision, à l'ordre, d'avoir plus de sages-femmes qui pourraient desservir un plus grand nombre de personnes, surtout dans les communautés, dans les régions éloignées où le volume de naissances est moins élevé. On a des sages-femmes sur place qui pourraient, oui, s'occuper des suivis de grossesse, des grossesses normales, mais aussi donner des...

Mme Pelletier (Julie) : ...des services à une plus grande partie de la population, donc optimiser leur présence sur le terrain en collaboration avec les autres professionnels. Donc, les sages-femmes, leur expertise, c'est la périnatalité, l'obstétrique, on ne peut pas les déplacer dans un département, je vais dire, de néphrologie, elles sont vraiment spécifiquement là. Donc, leur expertise pourrait être optimisée dans ce domaine-là.

Mme Dorismond : Santé mentale, périnatale, est-ce que... Oui.

Mme Pelletier (Julie) : Bien, nous, on n'est pas psychologues, on n'est pas psychiatres, mais on oeuvre dans un pan assez psychosocial aussi. Le suivi de la sage-femme l'est intégratif, donc santé mentale, milieu social, environnement de la femme, alimentation. Donc, on ne fait pas juste s'occuper de la grossesse, mais vraiment que l'environnement autour de cette personne-là soit le plus optimal possible. Puis on va le faire avec la première grossesse, quand la femme revient nous voir pour une deuxième grossesse, troisième... mais on bâtit là-dessus aussi. Donc, la continuité fait vraiment partie intégrante de nos suivis.

Mme Dorismond : Merci. Je vais laisser la parole à mon autre collègue.

Mme Bronsard (Annie) : Bien, dans ce contexte-là, la sage-femme pourrait être un peu comme le rôle de l'infirmière pivot au centre, dans certaines régions où la population est à densité un peu plus faible entre les différents professionnels.

Mme Dorismond : Merci.

Le Président (M. Provençal) :Mme la députée de Bonaventure.

Mme Blouin : Oui. Merci beaucoup. Bonjour à vous, bonjour à tous les collègues aussi. Merci d'être ici et de nous renseigner sur votre profession. C'est vraiment, vraiment important, très intéressant surtout. Moi, j'ai vu aussi, dans vos recommandations, vous recommandez, notamment, la création d'une direction sage-femme. Et là je suis curieuse de comprendre un peu de quelle façon ça serait une valeur ajoutée, autant pour votre profession que pour l'usagère, par exemple.

Mme Pelletier (Julie) : On a proposé cette direction-là pour être cohérent avec la structure du projet de loi actuelle. Donc, notre grande préoccupation, c'est l'accès puis c'est l'autonomie de nos membres pour donner les services que les personnes demandent. Donc, de placer un département sous une direction médicale qui est le... en ce moment, qui en a déjà vraiment beaucoup à gérer avec l'hôpital, les services hospitaliers, on ne trouve pas que c'est une bonne idée d'aller placer les services de sage-femme là pour une question d'efficacité. En ce moment, c'est les responsables des services de sage-femme qui s'occupent de la gestion de la maison de naissance en cogestion avec les directions de programmes. Et c'est très fluide et ça fonctionne bien. Ce n'est pas brisé.

Donc, on comprend l'idée, là, de vouloir intégrer davantage les sages-femmes, mais, dans ce contexte-là et dans la structure proposée par le projet de loi, ce qui nous semblait cohérent, c'est de proposer une direction sage-femme. Par contre, on est très ouvertes à d'autres idées. On fait confiance à votre équipe de trouver des façons de placer les sages-femmes dans le réseau, qui ne se retrouveront pas sous une direction médicale qui a déjà beaucoup d'hospitaliers, beaucoup de médicaux, beaucoup de curatifs à gérer.

Nous, on est de première ligne, on est hors centre hospitalier. Je vais reprendre les mots de mon collègue, Dr Gaudreault, tout à l'heure, il faut sortir de l'hôpital. Donc, nous, c'est vraiment ça, notre vision. Mais, encore là, on est conscientes qu'il y a peu de sages-femmes dans les établissements présentement, on en souhaite beaucoup plus bientôt.

Donc, la direction, c'est ce qu'on vous propose, mais je répète qu'on est ouvertes, vraiment, à travailler avec vous, à trouver d'autres solutions, à travailler avec vous, à travailler avec le regroupement, qui est l'association professionnelle, avec les groupes de femmes pour trouver quelle est la meilleure stratégie pour que l'accessibilité demeure la priorité, et la proximité surtout.

Mme Blouin : Est-ce que je comprends que le projet de loi n° 15 pourrait aussi être un levier pour votre profession? Vous pouvez l'utiliser comme ça.

• (12 heures) •

Mme Pelletier (Julie) : C'est ce que nous souhaitons, vraiment, parce que, depuis 99, la profession s'est intégrée, s'est construite de façon assez autosuffisante. Aujourd'hui, on est beaucoup plus dans une vision, à cause de la pénurie notamment, mais pas que, dans une vision intégrative de collaboration avec les autres professionnels de la santé. Donc, il faut réfléchir à une meilleure intégration de nos services pour pouvoir être à toutes les tables où il y a des décisions de trajectoire qui se prennent aussi, au bénéfice des gens qui viennent chercher nos services.

Mme Blouin : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Mme la députée de Bellechasse.

Mme Lachance : Merci, mesdames. On va continuer dans le même ordre. Parce que vous parlez de l'intégration de vos services, et vous avez fait référence dans votre mémoire à l'ingérence médicale. Pouvez-vous me donner des exemples de situations où c'est du vécu? Et comment aussi on peut dénouer ces situations-là?

Mme Pelletier (Julie) : Oui, bien, c'est sensible comme sujet parce que... comme je vous ai dit, on a des très bonnes collaborations avec nos collègues des autres ordres, notamment le Collège des médecins, que je salue sa présentation plus tôt, malheureusement, sur le terrain, la profession, la question du ministre est un exemple parfait, est encore méconnue dans le réseau et avec nos collaborations aussi, terrain médical. Donc, il y a... Pour qu'un service de sage-femme s'installe, il doit y avoir des ententes avec les équipes médicales locales, et malheureusement, parfois, ces équipes-là vont utiliser le levier de l'entente pour circonscrire la pratique des sages-femmes. Et, dans ces cas-là, ce que ça occasionne, c'est que les sages-femmes ne peuvent pas occuper leur plein champ de pratique...


 
 

12 h (version non révisée)

Mme Pelletier (Julie) : ...et incidemment c'est la population qui va s'en trouver perdante. Par exemple, d'obliger un type d'accouchement, que cet accouchement-là doit se passer à l'hôpital, sinon ne signera pas l'entente, c'est des choses qui se sont vues. Donc, c'est ces formes d'ingérence là qui nous font craindre, encore une fois, d'être placés sous une direction médicale qui aura, ce directeur-là, vraiment beaucoup de pouvoir sur l'organisation des services.

Mme Lachance : Est-ce qu'il me reste encore une petite minute? Bon, vous avez mentionné, tout à l'heure, que votre champ de pratique se définissait davantage à l'extérieur du milieu hospitalier que dans le milieu hospitalier, donc dans les maisons de naissance, ou à domicile, ou, en tout cas, dans le lieu que la future mère, la famille décidera. Parfois, il arrive qu'il y ait des transferts vers des milieux hospitaliers pour plusieurs raisons, des raisons médicales mais parfois des raisons peut-être, je ne sais pas comment je pourrais les appeler, plus... l'anxiété, nervosité, etc. Lorsque vous arrivez en milieu hospitalier, comment se fait le transfert? Parce que, tout à l'heure, vous avez parlé des ententes qui sont préalablement définies, mais, si vous avez un transfert mais qui ne conduit pas nécessairement à une césarienne, à titre d'exemple, comment se fait, comment s'opérationnalise le transfert?

Mme Pelletier (Julie) : Bien, il y a deux façons de voir l'accouchement à l'hôpital. En fait, il y a... parfois, c'est le choix de la personne qui va donner naissance. Donc, la sage-femme ne fera pas le transfert clinique de la responsabilité. Elle va garder les soins, l'accouchement va se faire sous ses soins à l'hôpital, et, à l'occasion, va requérir la collaboration d'une infirmière ou d'un médecin plutôt au niveau de l'organisation et des ressources. Et il y a le volet aussi d'un transfert médicalement justifié, donc une condition qui fait que la grossesse ou l'accouchement devient à risque. Et là on va carrément transférer la responsabilité clinique au médecin, ce qui peut se faire en prénatal, durant la grossesse, ou au moment même de l'accouchement. Et donc ça, ça prend des ententes. Généralement, ça se passe assez bien dans l'idée générale, mais encore là, localement, des fois, il demeure des enjeux, là, pour la fluidité.

Le Président (M. Provençal) :M. le ministre.

M. Dubé : Oui, bien, je veux revenir, tout à l'heure, parce que vous l'avez dit, là, c'est probablement une profession qui est peut-être méconnue à l'échelle du Québec. Puis vous avez quand même une formation universitaire qui est donnée principalement...

Mme Pelletier (Julie) : À Trois-Rivières.

M. Dubé : À Trois-Rivières, à l'UQTR. Je veux juste bien comprendre votre question, parce que j'aurai l'occasion, lorsqu'on va retourner au projet de loi de façon détaillée, là, ce qu'on appelle à l'article par article, parce que votre demande... Avant, vous n'étiez pas au CMDP, donc il n'y avait pas de représentation des sages-femmes.

Mme Pelletier (Julie) :  Il y a un conseil des sages-femmes.

M. Dubé : Il y a un conseil des sages-femmes, mais vous n'étiez pas dans le CMDP comme tel. C'est ça que je comprends. Là, avec notre projet de loi, on vous met dans le CMDP, et c'est pour ça que j'appelle le CMDP sage-femme, hein? Bon. Qu'est-ce qui vous déplaît dans ça qui fait que vous avez l'impression d'être encore sous la férule du médecin? C'est ça que je comprends. Et c'est parce qu'à un moment donné il y a une question de nombre, hein, puis vous êtes quand même un nombre plus limité. Alors, je veux juste bien comprendre qu'est-ce qui vous préoccupe puis qu'on pourrait, lorsqu'on aura ces discussions-là, dire : Est-ce que notre comité interdisciplinaire est constitué de tous ceux... Parce que vous avez quand même une formation universitaire.

Mme Pelletier (Julie) : Tout à fait.

M. Dubé : Tu sais, je trouve ça important de vous entendre là-dessus. Allez-y. Il nous reste quoi, là?

Le Président (M. Provençal) :Deux minutes.

M. Dubé : Deux minutes. Mais c'est important, là. Qu'est-ce qui ferait une différence pour vous?

Mme Pelletier (Julie) : Sur la question du conseil interdisciplinaire, on est très favorables et on veut en être absolument. Donc, on est pour la collaboration interprofessionnelle.

M. Dubé : Mais il y a plusieurs façons d'y être, par exemple, c'est ça que je veux comprendre.

Mme Pelletier (Julie) : Bien, à une notre lecture du projet de loi, le conseil interdisciplinaire, c'est une entité, et il y a les conseils professionnels qui sont une autre entité. Donc, on souhaite être du Conseil interprofessionnel et on souhaite pouvoir garder la possibilité d'avoir un conseil de sages-femmes comme c'est présentement prévu dans la loi.

M. Dubé : Vous voulez garder le Conseil des femmes, O.K.

Mme Pelletier (Julie) : De garder le conseil des sages-femmes. Présentement, la LSSS prévoit la fusion des CMDP et des CSF. Il n'y a aucun établissement, au Québec, qui ont fait ce choix-là sauf un, et c'est le Grand Nord au Québec, où il y a des très petites équipes. Vous conviendrez que c'est beaucoup plus pratique d'être ensemble. Par contre, au Québec, dans les CISSS et les CIUSSS, aucun établissement n'a fait ce choix-là. Pourquoi? Parce que, je le rappelle, les services de sages-femmes sont majoritairement hors centre hospitalier, les préoccupations de Le CMDP sont toutes autres.

M. Dubé : Ça, vous avez dit ça tout à l'heure.

Mme Pelletier (Julie) : Et il y a... il y a ces préoccupations-là, il y a la fluidité de pouvoir modifier les services, les ressources, de s'adapter aux besoins qui, de notre avis, va être beaucoup plus complexe dans un CMDP qui ont un tas d'autres priorités à s'occuper. Bien que...

Mme Pelletier (Julie) : Une sage-femme pour avoir un avis sur comment mieux donner les soins dans une unité de dialyse par exemple, ce n'est pas son expertise. Donc d'utiliser une ressource sage femme pour aller prendre du temps au CMDPSF, pour nous, ce n'est pas une utilisation judicieuse de la ressource sage femme.

M. Dubé : Est-ce que ça irait plus du côté des soins infirmiers, des SI?

Mme Pelletier (Julie) : Ça irait plus du côté d'un conseil de sages-femmes qui, je vous le rappelle, fonctionne très bien présentement.

M. Dubé : On est ici pour poser des questions.

Mme Pelletier (Julie) : Et je suis ici pour y répondre, et ça me fait plaisir.

M. Dubé : Et voilà. J'aime ça, moi, de même.

Mme Pelletier (Julie) :  Mais le concept de sage-femme en ce moment, ce n'est pas qu'il ne fonctionne pas bien. Nous, de notre avis, il est sous-utilisé dans les établissements. Il devrait être davantage utilisable.

M. Dubé : Il me reste-tu du temps, là?

Le Président (M. Provençal) :Non, il ne vous reste plus de temps.

M. Dubé : Et j'aurais aimé ça vous en poser une autre.

Mme Pelletier (Julie) : On continuera plus tard.

M. Dubé : Je suis certain que mes collègues ici...

Le Président (M. Provençal) :La réponse a été très habile. M. le député de Pontiac. Ah! Oui, Mme la députée de Mont-Royal—Outremont.

Mme Setlakwe : Merci, M. le Président. Oui, oui, je vais continuer un peu dans des questions d'ordre général pour en apprendre davantage sur sur votre champ d'intervention puis d'entrée de jeu, moi, je vais être très candide,  moi, j'ai eu trois enfants, j'ai allaité trois trois bébés et je n'ai pas eu recours à une sage-femme, je suis allée dans la voie traditionnelle, mais, croyez-moi, je sais très bien qu'il y a une mère, une femme enceinte se pose un million de questions qui débordent souvent le... Tu sais, on se retrouve devant notre pédiatre, mais elle m'a souvent dit : Il y a plusieurs questions qui touchent la puériculture, qui touchent l'allaitement, etc. Là, assez sur mon expérience à moi, mais ça, ça m'amène à bien comprendre les enjeux, les questions, puis j'aimerais ça qu'on en... puis j'ai une ouverture d'esprit, là, une grande ouverture d'esprit puis j'ai visité une maison bleue dans ma circonscription, secteur Côte-des-Neiges, et j'ai vraiment apprécié l'importance de la mission, à quel point la maison bleue et les sages-femmes font une énorme différence auprès des clientèles vulnérables.

Ma question est la suivante parce qu'on a touché à des exemples précis de gestes que vous posez, de conseils que vous donnez, de soins qui permettent de désengorger nos urgences, améliorer la première ligne. Vous avez parlé de gestion de fausses couches, allaitement, service de contraception, toute la sphère sexuelle et reproductive, éducation. Moi, j'aimerais savoir : Donnez-nous d'autres exemples pour qu'on puisse vraiment saisir, bien saisir la plus-value que vous apportez, puis, quand on va faire l'étude détaillée, ça va, ça va nous aider. Puis à partir de quand exactement vous intervenez? Tu sais, on a toujours dit, par exemple, à Sainte-Justine, c'est un maire... c'est une... c'est un centre mère-enfant, dès que la femme est enceinte jusqu'à ce que l'enfant ait 18 ans. Je vous laisse la parole. Je pense que j'ai assez... La question est assez large.

Mme Pelletier (Julie) : Oui, mais le service de sages-femmes, on l'a nommé, c'est intégratif. Donc, les sages femmes ont cette compétence-là, qui est... pour l'obstétrique, qui est au niveau du médecin de famille finalement, mais avec moins... avec un champ d'exercice qui est beaucoup plus restreint. Donc, la sage-femme présentement exerce dès que la femme est enceinte, elle peut avoir recours aux services de sa sage-femme jusqu'à ce que le nouveau-né ait six semaines de vie. Donc, on se retrouve vraiment dans une posture où notre champ d'exercice est très large dans cette très petite fenêtre de soins qui est le champ de pratique de la sage-femme. Et sur un autre ordre d'idée, on demande aussi l'élargissement de la pratique professionnelle des sages-femmes, là, pour justement être en mesure d'investir tout ce champ de possibilités.

• (12 h 10) •

Donc, on a parlé en dehors du suivi de grossesse, de l'accouchement et du postnatal immédiat, on a parlé de gestion des fausses couches, oui, gestion des avortements aussi. Donc, l'avortement médical a fait beaucoup couler d'encre dans les derniers mois. Donc nous, on souhaite en être. On a les compétences pour évaluer l'âge de la grossesse. On a les compétences de prescrire la médication, de faire le suivi par la suite, de recommander la contraception et de la prescrire. Donc, on voudrait aussi être davantage impliqués. L'accès à l'avortement n'est encore malheureusement pas suffisant au Québec. Donc, on voudrait aussi participer à ça. La gestion des fausses couches, on en a parlé la vaccination, la vaccination au niveau des femmes enceintes, mais des nouveau-nés, pourquoi pas? Et pourquoi pas de la famille? On a des gens dans nos bureaux, pourquoi pas saisir cette opportunité-là d'avoir des gens en présence pour parler de vaccination. Et dépistage des ITSS, donc, présentement, les sages-femmes peuvent dépister les ITSS, mais seulement durant la grossesse. Pourquoi pas utiliser ces compétences-là à une population plus large? Pourquoi pas l'utiliser pour les partenaires sexuels aussi? Donc, on est dans cette vision-là, l'histologie, dépistage, cancer du col, on peut faire des Pap tests aux femmes enceintes, mais on ne peut pas les faire en dehors de ça. Donc, on est accessible. Ça fait partie du projet de loi n° 15, oui, mais aussi de notre demande d'élargissement du champ de pratique — je m'égare peut être du sujet aujourd'hui — support à l'allaitement au-delà de six semaines. Évidemment. On a des sages-femmes expérimentées, formées, qui vont chercher de la sur formation en allaitement. Elles doivent s'arrêter à six semaines...

Mme Pelletier (Julie) : ...pourquoi pas pouvoir continuer à accompagner les femmes? Vous en avez parlé, on a des questions quand on est parent, et, quand on a accès à une sage-femme et qu'à six semaines on n'a plus accès, c'est vraiment dommage.

Support, soutenir les services en obstétrique. En Gaspésie, ça s'est passé aussi, il y a quelques mois, quelques étés, où les sages-femmes sur place sont allées soutenir les services d'obstétrique pour éviter le bris de service. Donc, ça, c'est important. Les femmes ont pu demeurer dans leur communauté pour donner naissance, et ne pas devoir se déplacer à une heure, deux heures, trois heures de route. Donc, les sages-femmes peuvent contribuer à ça aussi. Notre service est majoritairement hors centre hospitalier, mais notre vision, c'est de pouvoir aussi travailler en collaboration. On est un ordre professionnel. Notre souhait, c'est que les femmes aient des services sécuritaires, pas juste la clientèle des sages-femmes, toute la population. Donc, c'est dans cette vision-là qu'on se trouve. Est-ce que je réponds à votre question?

Mme Setlakwe : Vous répondez très bien à ma question. Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :...il vous reste un trois minutes.

M. Fortin :Merci, M. le Président. Je veux juste revenir sur un point. Tantôt, là, la discussion sur le conseil des sages-femmes que vous avez eue avec le ministre, là, vous avez utilisé un exemple précis qu'une sage-femme n'est peut-être pas... ce n'est peut-être pas la meilleure utilisation de son temps d'aller faire des recommandations par rapport à la dialyse. À l'inverse, est-ce que d'avoir, justement, un conseil des médecins, dentistes, pharmaciens, sages-femmes... est-ce que ça vous inquiète que des médecins, des dentistes, des pharmaciens viennent faire des recommandations dans ce que vous faites, puis qu'ils ne comprennent peut-être pas... ou qui n'ont peut-être pas la même vision, le même paradigme que vous quand vous offrez des soins?

Mme Pelletier (Julie) : Assurément, et ce n'est pas parce que... Nos collègues médecins, on les apprécie, on en a besoin. Quand les relations sont bonnes, c'est merveilleux, parce que la clientèle en bénéficie. Cependant, on est encore méconnues dans le réseau, malheureusement. Et donc on a aussi des normes professionnelles, des règles cliniques qui sont différentes, et dans un CMDP, dans le projet de loi, tel qu'il est maintenant, surreprésenté de médecins par rapport aux autres professionnels, on a, effectivement, une grande crainte que cette volonté, cette culture, aussi, de hiérarchie médicale, si on peut le nommer comme ça, viennent vraiment faire défaut à l'autonomie de nos professionnels, d'avoir leurs propres règles de soins et leur propre mode de fonctionnement, qui répond à leur déontologie et leurs normes professionnelles.

M. Fortin :Parce que le ministre vient jouer de façon assez importante, là, dans la façon qu'est organisée la gouvernance clinique, notamment pour des sages-femmes, mais on ne vous a pas consultées, au préalable, sur ce projet de loi là. De toute évidence, là, vous n'avez pas demandé pour ça, là, clairement.

Mme Pelletier (Julie) : Ça ne vient pas de nous.

M. Fortin :O.K., c'est bon. Ça vient d'ailleurs, on aura compris. Vous avez beaucoup de recommandations intéressantes. Vous en avez une sur le plan des effectifs médicaux, dentaires et des sages-femmes. Vous voulez ajouter des effectifs sages-femmes au plan des effectifs médicaux et dentaires. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi est-ce que ça ne fonctionne pas, de la façon que c'est fait en ce moment?

Mme Pelletier (Julie) : On a parlé, tout à l'heure, de l'offre de service marginale, mais ça fait un peu écho à ce que vous nommez ici dans notre recommandation. C'est que l'offre de service sages-femmes, elle n'est pas comptabilisée dans une offre de service en obstétrique quand on va, justement, faire les PREM, la planification des ressources. Et cette planification-là, elle a un impact aussi sur l'offre qu'on va faire dans les universités, combien de professionnels on va former, combien d'argent on va donner à ce programme de formation là pour qu'à la clé on ait plus de sages-femmes. Donc, pour nous, c'est vraiment un objectif important. De là, on dit d'avoir plus de sages-femmes rapidement, et des sages-femmes qui vont rester en exercice. Donc, de les prévoir dans les plans d'effectifs, ça va faire boule de neige aussi sur le reste des instances qui vont planifier les ressources sages-femmes, dont les universités... l'université, en ce moment, qui fait la formation, là.

M. Fortin :O.K., mais ça, il faut que ce soit fait en collaboration avec l'ordre, parce qu'encore là il y a beaucoup de gens dans l'organisation du réseau, que ce soit un P.D.G., un directeur médical, ou, peu importe, là, qui ne comprennent peut-être pas l'étendue ou la perspective de votre pratique. Alors, il faut que vous soyez consultées à travers ça. Ça ne peut pas juste venir du P.D.G. d'un établissement.

Mme Pelletier (Julie) : Bien, on trouve aussi, comme nos collègues du Collège des médecins, qu'il y a beaucoup de pouvoirs donnés à peu de personnes dans le projet de loi. Ça nous préoccupe. Je comprends que ça peut s'arrimer ailleurs, là, que dans le projet de loi, mais ça nous préoccupe quand même. Et pour le plan des effectifs, on pense aussi que c'est une bonne façon de propulser l'offre de service des sages-femmes dans le réseau, qui est, en ce moment encore, malheureusement, marginale. Quand on appelle au GAP, jamais on n'offre les services des sages-femmes, en tout cas, pas souvent. Donc, il faut mettre les sages-femmes sur la table...

Mme Pelletier (Julie) : ...pour que toutes ces instances-là qui gravitent autour du réseau pensent aux services de sages-femmes aussi.

M. Fortin :Très bien. Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Alors, M. le député de Rosemont.

M. Marissal : Oui, merci, M. le Président. Bonjour et merci d'être là. On va y aller rapidement parce que je n'ai pas beaucoup de temps. Vous avez parlé tout à l'heure, là, d'une subordination à la profession médicale. J'entends ce que vous dites. J'entends, par ailleurs, ce que... les questions que pose le ministre, qui me semble être quand même assez ouvert, là, en tout cas, c'est ce qu'il me semble, là. C'est... D'après vous, là, ce serait juste une erreur de rédaction ou une rédaction incomplète, là, par exemple, l'article 184, dont vous avez parlé, ou si vous y voyez une intention? Est-ce que c'est à dessein ou c'est juste parce que c'est imparfait puis qu'on peut retravailler l'article?

Mme Pelletier (Julie) : Le 184...

M. Marissal : Par exemple.

Mme Pelletier (Julie) : ...vous parlez des directives cliniques?

M. Marissal : Oui. Je parle plus précisément de la subordination dont vous parliez de votre profession à la profession médicale.

Mme Pelletier (Julie) : Cette subordination-là, même si on ne la souhaite pas... et elle est présente pas partout, c'est localement, dépendant, je dirais, et on souhaite que l'écriture de l'article 184 soit clarifiée. On ne pense pas que le législateur a nécessairement souhaité une uniformisation de toutes les règles cliniques, mais, dans la façon que c'est écrit présentement, ce qui nous inquiète, c'est que l'interprétation du terrain pourrait mener à cette forme de hiérarchie là appliquée sur nos membres, et ce n'est pas souhaitable, vraiment pas, pour nous.

M. Marissal : C'était ça, le sens de ma question. Je me suis probablement mal exprimé, là, dans mon préambule, mais... Donc, vous n'y voyez pas un dessein de subordonner la profession sage- femme, après toutes ces années de lutte que sont les vôtres?

Mme Pelletier (Julie) : Non, on ne pense pas que le législateur avait cette intention-là, mais on pense qu'il y a des interprétations possibles du projet de loi qui pourraient mener à ça.

M. Marissal : O.K. Et vous dites, par ailleurs, que c'est délicat, puis je vous entends bien, là, je pense que je comprends ce que vous voulez dire quand vous dites «hiérarchisation médicale», «ingérence», mais soyons clairs, là, ce que... ce que vous dites, là, c'est que, dans certains endroits, ce n'est pas encore évident pour les sages-femmes de pratiquer de façon libre, autonome et professionnelle.

Mme Pelletier (Julie) : C'est exactement ce qu'on dit, en fait. Dans les milieux où la profession est installée depuis 20 ans, 25 ans, même depuis les projets pilotes, les équipes ont appris à se connaître, et c'est généralement beaucoup plus fluide. Dans les services en installation, malheureusement, c'est encore trop souvent le parcours du combattant, et les sages-femmes doivent se faire une place.

Et je vais encore une fois reprendre les mots de mon collègue. Quand des services de sages-femmes s'installent, il faut qu'elles soient accompagnées. Il faut qu'elles soient soutenues par l'établissement pour installer des services rapidement et cohérents avec les besoins de la population. Il ne faut pas que ça soit une demande qui vienne, répétée depuis 10 ans, des usagères du réseau qui veulent un service. Donc, il faut que... Là, je vais me permettre de dire que, là, il faut que ça vienne d'en haut. Il faut que... il faut que le gouvernement, il faut que le ministère de la Santé offre ces services-là aussi, et pas que ça vienne seulement d'une demande de la population.

M. Marissal : C'est bon. Merci.

Le Président (M. Provençal) :M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

• (12 h 20) •

M. Arseneau : Merci beaucoup, M. le Président. Merci de votre présentation et de vos réponses très, très claires et du travail très précis que vous avez fait, là, pour nous indiquer certains articles qui devraient être amendés. Beau travail, vraiment.

Le... M. le ministre vous a posé la question tout à l'heure, là, sur le pourcentage des naissances que vous accompagnez actuellement, 4,5 %. Moi, je voudrais indiquer que l'objectif de la politique de périnatalité 2008-2018, sur une période de 10 ans, c'était d'atteindre 10 % des naissances. On est à 4,5 % 15 ans plus tard.

Alors, moi, je voudrais vous poser une question à savoir s'il y a certaines de vos recommandations, là, qui sont essentielles pour qu'on puisse minimalement atteindre l'objectif de 2018 et le dépasser, parce que ça me semble... il me semble qu'il y ait un élément, là, de reconnaissance du travail qui est encore à gagner de votre point de vue. J'en veux pour preuve, d'ailleurs, qu'en Gaspésie le premier service a été offert en 2019. Aux Îles-de-la-Madeleine, on se bat encore pour obtenir une reconnaissance et une place des sages-femmes, alors que les femmes le revendiquent, et que des sages-femmes sont disponibles, et qu'on a une pénurie d'obstétriciens. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, sur les défis puis comment ce projet de loi là pourrait nous permettre d'atteindre d'autres objectifs qui, évidemment, là, correspondent aux besoins aussi d'un très grand nombre de femmes.

Mme Pelletier (Julie) : Plan des effectifs, d'abord et avant tout, mais aussi... Je reviens à la direction sage-femme, qui pourrait être une autre entité, mais une place pour que les sages-femmes soient présentes dans la trajectoire, dans l'offre de services, pour qu'on pense à ces services-là aussi quand on planifie les ressources pour la clientèle enceinte ou en santé sexuelle et reproductive. Donc, que ça soit via une direction sage-femme...

Mme Pelletier (Julie) : ...ou d'une autre entité qui va dépendre directement, là, du P.D.G. ou du Conseil Inter. Il faut que les sages-femmes aient une voix dans ces décisions-là.

M. Arseneau : Vous avez évoqué la situation en Gaspésie, où les sages-femmes ont pu justement permettre d'offrir un service qui a permis de retenir un certain nombre de femmes qui, autrement, si j'ai bien compris, auraient dû être déplacées dans les grands centres pour accoucher. Est-ce que, justement, l'élargissement du rôle et de la reconnaissance des sages-femmes peut contribuer, selon vous, là, justement, à combler ne serait-ce qu'une partie de la pénurie de main-d'œuvre de professionnels?

Mme Pelletier (Julie) : Absolument, absolument. Parce que présentement, on a des sages-femmes qui exercent dans un modèle qui est très, qui est excellent, qui est souhaité par la population, mais on a des sages-femmes qui aussi font... comme docteur Gaudreault parlait tout à l'heure, je m'excuse de le paraphraser de nouveau, mais en fin d'exercice, qui pourraient maintenir une prestation de service qui n'est pas nécessairement reliée à faire de la garde, des accouchements, des nuits. Présentement, ils ne peuvent pas le faire. Donc, cette façon là de réorganiser le réseau, oui, par le projet de loi 15 de notre ministre, mais aussi par l'élargissement des pratiques professionnelles. C'est deux chantiers qui vont devoir avancer parallèlement pour qu'on puisse garder ces professionnelles-là en place. Ce n'est pas pour rien qu'on fait encore juste 4,5 % des naissances. On perd des membres à chaque année parce qu'elles ne sont plus en mesure d'offrir la disponibilité de la garde, entre autres choses.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Mme la députée de Vaudreuil, vous allez compléter cet échange.

Mme Nichols : Oui, merci, M. le Président. Merci, merci de votre présence. Merci pour les explications. C'est vrai que c'est un peu moins connu, donc, ce que vous apportez, c'est vraiment très enrichissant. Moi, ce que je comprenais, puis en lisant le mémoire, puis en vous écoutant, là, c'est deux choses complètement différentes. Quand je le lisais de mémoire, je comprenais que c'était une pratique qui était indépendante puis un petit peu... indépendante, parallèle. Puis, quand je vous écoute, bien, je comprends que non, non, on a besoin, au contraire, d'une certaine collaboration. Puis le ministre insiste beaucoup sur l'interdisciplinarité. Donc, il y a une ouverture définitivement de votre côté sur cet aspect-là?

Mme Pelletier (Julie) : Pour l'interdisciplinarité? Absolument. C'est la voie de l'avenir, si vous me demandez notre avis, là. À l'époque où les services de sage-femme ont été légalisés et implantés dans le réseau, on était à une époque où il n'y avait pas nécessairement une pénurie de main-d'œuvre comme on connaît aujourd'hui. Donc, les services de sage-femme étaient autosuffisants, fonctionnaient bien. Aujourd'hui, on est face à une pénurie de main-d'œuvre aussi chez les sages-femmes. Donc, je pense qu'on a besoin de cette collaboration-là pour être en mesure de continuer à offrir des services de qualité à la population qui veulent des enfants.

Mme Nichols : Puis il y a quand même... j'ai regardé, il y a 300 membres, là, je pense. Voulez-vous recruter? Vous recruter comment? C'est des gens qui ont une formation...

Mme Pelletier (Julie) : Bien, la majorité de nos membres sont des personnes diplômées de l'Université du Québec à Trois-Rivières, donc un programme de pratique sage-femme. Mais on a aussi des sages-femmes qui ont été formées en dehors du Canada, donc qui vont venir faire une équivalence de formation de diplôme ici, soit qu'elles vont avoir une équivalence, là, directe. Mais majoritairement, elles vont avoir aussi à faire un programme d'appoint à l'Université du Québec à Trois-Rivières. Donc un programme qui dure un an. On va aussi chercher des sages femmes ailleurs au Canada. On a deux ARM, un avec la France, un avec la Suisse, là, qui va fêter son premier anniversaire dans quelques semaines. On a travaillé avec l'UQTR, avec le regroupement des sages-femmes du Québec, avec les groupes de femmes pour qu'à l'UQTR, la formation se voit raccourcie sans diminuer la qualité, mais pour rehausser le nombre de diplômés, en fait, pour accélérer la diplomation des sages-femmes. Donc, c'est plein d'actions en ce moment qui prennent cours pour qu'on ait plus de sages-femmes rapidement.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup, mesdames, pour cet échange.

 Alors, la commission suspend ses travaux jusqu'après l'annonce des avis touchant les travaux des commissions, soit vers 15 h 15. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 12 h 25 )


 
 

15 h (version non révisée)

(Reprise à 15 h 20)

Le Président (M. Provençal) :À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la santé et des services sociaux reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 15, Loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace. Cet après-midi, nous entendrons les témoins suivants : la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, la Fédération des médecins spécialistes du Québec, la Confédération des syndicats nationaux, conjointement avec la Fédération de la santé et des services sociaux, CSN, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec et l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux.

Je vais maintenant souhaiter la bienvenue aux représentants de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. Alors, vous savez que vous avez 10 minutes pour faire votre exposé. Par la suite, nous aurons nos échanges. Puis je vous souhaite.... je vous cède, excusez-moi, immédiatement la parole.

M. Amyot (Marc-André) : Alors, bonjour à tous. Je suis accompagné du docteur Sylvain Dion, à ma gauche, premier vice-président de la Fédération, et de maître Pierre Belzile, qui est directeur des services juridiques. Alors, M. le Président, M. le ministre, Mesdames, Messieurs les députés...

M. Amyot (Marc-André) : ...remercions les membres de la commission parlementaire de nous donner l'occasion de livrer nos commentaires à l'égard du projet de loi n° 15.

D'entrée de jeu, nous désirons dire que notre réseau de santé a effectivement besoin d'être plus efficace. Nous tenons également à mentionner que les médecins de famille ne sont pas réfractaires au changement. Bien au contraire, ils font et veulent faire partie de la solution. Cependant, les médecins de famille sont à la fois déçus et choqués du contenu du p.l.15 les concernant et de l'approche gouvernementale. Ils ont l'impression que le p.l. 15 a été écrit par des fonctionnaires qui souhaitaient obtenir davantage de contrôle et de pouvoirs sur la profession médicale. De plus, nous nous expliquons mal la discordance entre le discours public du ministre, qui parle de collaboration, de décentralisation, de dépolitisation, et le libellé actuel du projet de loi.

La collaboration. Les médecins de famille donnent le meilleur d'eux-mêmes pour offrir aux Québécois une gamme complète de services médicaux dans plusieurs secteurs d'activité. On doit cependant rappeler que le manque de planification dans l'appareil étatique, associé à un important déficit d'attractivité de la médecine familiale nous a menés aujourd'hui à une pénurie de plus de 1100 médecins de famille. Également, il ne faudrait pas oublier que, malgré tout et malgré cela, les médecins de famille ont répondu présent durant la pandémie pour accroître l'accès au réseau en période post-pandémique et lors de la crise des urgences à l'automne dernier.

De plus, la FMOQ tente constamment d'innover, et l'entente sur l'accès aux soins de première ligne en est un bel exemple : plus de 625 000 patients inscrits collectivement, et on en est très fiers, introduction des GAP et une meilleure orientation des patients vers le bon professionnel au bon moment, davantage de travail collaboratif et d'interdisciplinarité. Les médecins de famille répondent encore et toujours présent. Nous avons cependant besoin de la collaboration du gouvernement pour la suite.

La coercition. À l'opposé, une approche autoritaire, centralisatrice, coercitive et dans laquelle toute véritable consultation et négociation sont évacuées lance un bien mauvais message auprès des médecins de famille. Une telle façon d'agir nuit à l'efficacité des services mais aussi cause un tort sérieux à l'attrait qu'exerce notre spécialité auprès des étudiants en médecine. Je rappelle que, depuis 2013, ce sont 536 postes de résidence en médecine familiale qui n'ont pas été comblés. Seulement cette année, 67 postes non comblés en spécialité. Dans les autres spécialités, aucun poste n'a été comblé.

Le réseau de la santé québécois n'est pas mal en point en raison d'un manque de contrôle et de coercition, il est malade par manque de planification, d'organisation, de valorisation et de collaboration. Une approche négative telle que proposée dans le p.l. 15 risque d'aggraver la pénurie de médecins de famille et de provoquer des départs prématurés à la retraite.

La centralisation. En 2014, à l'occasion de la présentation du projet de loi n° 10 sur l'abolition des agences de la santé et la création des CISSS et des CIUSSS, nous avions dit au gouvernement que l'exercice de centralisation qu'il proposait était une erreur. L'histoire nous a donné raison. Malheureusement, le projet de loi n° 15, par la concentration des pouvoirs dans les mains d'un seul fonctionnaire, un directeur médical, et par la dénaturation des CMDP, risque d'amener à son tour des dérives importantes et des dommages collatéraux irréversibles.

La lecture combinée des articles 379 et 380 nous amène à conclure que le p.l. 15, à l'égard des médecins de famille, n'est rien d'autre qu'un dérivé du malheureux projet de loi n° 20 que le précédent gouvernement avait fait adopter en 2015. Un exemple : si le p.l. 15 est adopté tel quel, tous les médecins de famille seront dorénavant obligés d'être membres des nouveaux départements territoriaux de médecine familiale, les fameux DTMF. Le non-respect de cette obligation sera frappé par une peine sévère et sans appel, interdiction de facturer le régime public d'assurance maladie. Les personnes qui conseillent le ministre savent- elles que 3000 médecins de famille ont une pratique exclusive dans les cliniques médicales de première ligne hors établissement? Savent-elles seulement que ces médecins traitent des milliers de Québécois à tous les jours? Nous aurions pu les informer, mais nous n'avons tout simplement pas été consultés. Actuellement, 25 %, un quart des médecins de famille ont plus de 60 ans. Ces médecins exercent majoritairement en cabinet...

M. Amyot (Marc-André) : ...que pensez-vous qu'il se produira? Si le projet de loi vise à rendre plus efficace l'accès aux services médicaux de première ligne, les moyens retenus, la coercition et la centralisation, sont les pires que le gouvernement pouvait choisir. La grande perdante de l'opération sera la population elle-même. En lieu et place du CMDP où siègent nos collègues, le projet de loi confie au P.D.G. et à son directeur médical, un fonctionnaire, la responsabilité de s'occuper de la procédure de nomination. Le CMDP n'est donc plus concerné par la nomination ou le renouvellement des privilèges et les obligations qui doivent se rattacher à ces derniers. Cela va à l'encontre de son rôle de vigie sur la qualité de la pratique en établissement.

Cette nouvelle approche soulève des questions légitimes à l'égard de la transparence requise dans la façon de procéder. Loin de décentraliser les choses, le p.l. no 15, à ce niveau, les concentre davantage. Cela nous éloigne de la nécessaire participation des médecins à l'organisation des soins, l'essentielle cogestion. Et le Collège des médecins en parlait justement ce matin.

L'engagement des médecins. En vertu de la LSSSS actuelle, les DRMG sont fondés sur une structure élective. Les médecins du territoire contribuent, grâce au droit de vote dont ils disposent, à la composition du comité de direction du département. La présence des DRMG n'a eu au fil des ans que des effets bénéfiques sur l'accès aux services médicaux. L'approche professionnelle est leur marque de commerce. Ils ont démontré leur grande capacité d'engagement, de ralliement et d'organisation. On a vu les DRMG au front tout au long de la pandémie et être des acteurs clés dans l'actualisation de l'entente sur l'accessibilité.

Alors que les DRMG comptent parmi les organes les plus fonctionnels et performants du réseau, le gouvernement, par la voie du p.l. no 15, voudrait maintenant les affaiblir pour mieux les contrôler. En effet, l'article 374 prévoit que le chef des nouveaux DTMF, départements territoriaux de médecine familiale, rendront... seront nommés par les P.D.G. des établissements. En nommant de simples exécutants, certains semblent croire qu'ils rendront le réseau plus efficace. Mettre à mal cette structure régionale élective... élective, crédible et neutre... et légitime, qui a la confiance des médecins sur le terrain et la remplacer par des... pardon, des directions territoriales désignées est l'opposé d'une dépolitisation et d'une volonté de collaboration.

Le ministre mesure mal à quel point ce changement dans la gouvernance des départements régionaux est déjà mal reçu et causera des torts majeurs au réseau. Nous invitons fortement le gouvernement à revoir sa position à cet égard.

En conclusion, après les efforts pendant et après la pandémie, les médecins de famille sont déçus et choqués du contenu les concernant du projet de loi no 15 et de l'approche gouvernementale. Cette volonté bureaucratique injustifiée de contrôler les cliniques médicales, de concentrer les pouvoirs et d'exclure les médecins des organes décisionnels afin d'accroître l'efficacité va dans la mauvaise direction. De plus, un projet de loi mammouth de 1 180 articles, sans aucune consultation préalable des fédérations médicales et des partenaires médicaux, nous laisse tout simplement pantois. Je le répète, les médecins de famille font partie de la solution et ne sont pas réfractaires au changement, bien au contraire, mais ils croient au changement dans la collaboration. Nous sommes disposés à expliquer davantage les raisons qui motivent nos inquiétudes si les membres de la commission le souhaitent. Je vous remercie de votre attention, et il nous fera plaisir de répondre à vos questions. Merci.

• (15 h 30) •

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup, Dr Amyot, pour votre présentation. Alors, M. le ministre, sûrement quelques questions.

M. Dubé : Oui, sûrement. Sûrement, M. le Président. Alors, Dr Amiot puis vos deux collègues, merci beaucoup d'être là aujourd'hui. Je vous dirais que ma réaction initiale, c'est que je... C'est comme si je vivais un peu le jour de la marmotte. Parce qu'à peu près à ce temps-ci l'an dernier, à peu près à la même date, j'ai entendu à peu près les mêmes mots de la FMOQ quand on a déposé le projet de loi no 11. C'est à peu près exactement ce que j'ai entendu dans votre présentation. Puis quelques semaines plus tard, quelques mois plus tard, on a continué d'avoir des discussions, puis on a eu une entente spectaculaire pour les Québécois sur la prise en charge de plus... de près de 600 000 patients au 31 mars.

Alors, je vais prendre ça comme un bon signe aujourd'hui. Puis si c'est ça qui est arrivé il y a un an, puis je vous le dis très sérieusement, là, j'ai le sourire, là, et je vous vois rire, si c'est comme ça que ça a commencé l'année passée puis que ça a fini comme ça a fini...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

M. Dubé : ...bien, merci pour vos bons commentaires aujourd'hui. C'est exactement ce que je vous dis. Des fois, j'ai l'impression que ça peut être été écrit plus par les avocats que par vous, parce que moi, je ne sens pas ça dans nos discussions tous les jours. Vous dis ça comme ça, là.

Ceci étant dit, quand vous dites que le statu quo n'est pas acceptable, ce qui est vraiment ce que les Québécois pensent, on s'entend, là, on a un réseau de santé qui ne peut pas continuer comme ça. Puis vous me dites que les médecins de famille font partie de la solution, on est-tu d'accord, vous et moi, là-dessus, là? Je pense qu'on a montré que la prise en charge pouvait faire une grande différence, notamment. Et je vous le dis, je tiens à remercier ce qui s'est fait dans les dernières années parce qu'on n'en serait pas là aujourd'hui, on aurait déjà un problème encore plus grave.

Mais, moi, ce que j'aimerais, là, aujourd'hui, si vous pouvez faire partie de la solution, puis je le sais, donnez-moi des exemples de solutions que vous pouvez amener. Là, vous me parlez de tous les gros mots, puis je comprends, là, je comprends ça, puis ça fait peut-être faire partie de la même stratégie que l'an dernier, mais moi, je veux passer par-dessus ça, Dr Amyot. Puis dites... donnez-moi des exemples où vous pouvez faire partie de la solution qui ne sont pas dans le projet de loi.

M. Amyot (Marc-André) : Si vous permettez, M. le Président, l'exemple de l'entente sur l'accessibilité, on s'était fixé un objectif de 500 000. On a dépassé cet objectif-là, on est à 625 000. Un, il ne faut pas arrêter là. Deux, on ne peut plus faire les mêmes choses de la même façon et espérer un résultat différent. On s'est attardé au patient qui n'avait pas de médecin de famille, qui était au GAMF, c'était l'entente sur l'accessibilité spécifiquement pour ces patients-là. Maintenant, il y a tous les patients qui ont un médecin de famille. Comment on peut optimiser la consultation chez ces patients-là? Et la solution ne... ne repose pas uniquement sur les épaules des médecins de famille, elle repose sur d'autres professionnels, on l'a démontré. Et on veut élargir cette façon de faire là à nos patients inscrits individuellement également.

M. Dubé : ...parce que je n'ai pas beaucoup de temps, je dirais même que, grâce à vous, grâce au docteur Gaudreault du Collège des médecins, à ce temps-ci, l'an dernier, vous nous avez dit exactement les mêmes phrases : Ça ne peut pas être juste les médecins qui font partie de la solution, ça doit être une prise en charge par plusieurs professionnels. Qu'est-ce qu'on a fait? On a bonifié le projet de loi, vous vous en souvenez? À ce temps-ci, là, ça ne fait pas 12 ans de ça, là, ça fait un an. Et là vous me dites... qui dit : Ça devrait être d'autres professionnels de la santé. Bien, donnez-moi des exemples. Est-ce qu'on doit aller plus loin avec d'autres professionnels?

M. Amyot (Marc-André) : On doit aller plus loin concernant les patients inscrits individuellement. Cette notion de triage là qui est effectué actuellement par le GAP pour...

M. Dubé : Une autre bonne mesure qu'on a travaillée ensemble dans la dernière année, on est d'accord?

M. Amyot (Marc-André) : Tout à fait, tout à fait.

M. Dubé : O.K. O.K. On va y arriver, on va y arriver.

M. Amyot (Marc-André) : Puis vous me semblez beaucoup... vous semblez beaucoup insister là-dessus, M. le Président, le ministre semble beaucoup insister là-dessus, mais effectivement je vous le... je vous le répète, on fait partie de la solution, on va continuer à faire partie de la solution. Il reste encore...

M. Dubé : Mais donnez-moi d'autres exemples où vous pouvez faire partie de la solution, là.

M. Amyot (Marc-André) : Bien, concernant la clientèle inscrite, et on est actuellement...

M. Dubé : Mais ça veut dire quoi, ça, quand vous dites ça, là?

M. Amyot (Marc-André) : ...en train de réfléchir, on est actuellement en train de réfléchir avec Monsieur Jean-Louis Denis de l'Université de Montréal et ses équipes pour évaluer qu'est-ce qui se fait de bien dans d'autres juridictions au Canada et dans le monde...

M. Dubé : Prenons un exemple. Moi, je vais vous faire une suggestion, là, parce que, quand on a déposé le projet de loi 11, on a dit : Il y a des règlements qui vont venir, puis tout ça. Vous parlez même du projet de loi 11 dans votre... Dites-moi comment on va faire pour s'entendre pour que le 36 heures... C'est-à-dire qu'on a déjà discuté ça, là, dans l'entente, là, comment on va faire pour que les Québécois qui ont un médecin de famille, puis ils ne sont pas capables de le voir... Moi, je ne trouve pas ça normal qu'un Québécois qui dit : Moi, je suis chanceux, j'ai un médecin de famille. Il prend le téléphone, des fois il n'y a pas de réponse à la GMF. Des fois, on lui dit : Excusez, on n'a pas le temps, le médecin est trop occupé. Comment on va faire ça pour régler le 36 h? Moi, c'est des exemples concrets comme ça que je vous demande. Les Québécois qui nous écoutent aujourd'hui, là, ce n'est pas ça... ce n'est pas le système de santé qu'ils veulent avoir qu'on a. Alors, donnez-moi un exemple comment on va faire pour aller chercher le 36 h.

M. Amyot (Marc-André) : Dans l'entente sur l'accessibilité, il y a déjà une mesure qui couvre cet aspect-là, donc d'offrir...

M. Dubé : Est-ce qu'on la mesure en ce moment? Est-ce qu'on la mesure?

M. Amyot (Marc-André) : Bien, c'est ça, il faut commencer par la mesurer. Puis on est d'accord, là. Est-ce que c'est l'exception auquel on fait référence? Il y a quand même beaucoup de patients qui ont accès à leur médecin. Puis l'autre élément...

M. Dubé : Mais docteur Amyot, Dr Amyot, je veux juste faire le lien avec ce que vous avez dit tout à l'heure, juste pour que les gens comprennent quand vous prenez les gros mots coercition. Est-ce que vous de demander aux Québécois de comprendre que... puis ça va venir, qu'on va pouvoir être capable de leur répondre quand il y a un cas urgent en dedans de 36 h, c'est-tu de la coercition qu'on demande, ça?

M. Amyot (Marc-André) : Non. M. le Président, ça, ce n'est pas de la coercition, mais ce qu'on voit dans le projet de loi, ce qui est écrit, ça, c'est vraiment de la coercition. Puis...

M. Dubé : Mais donnez-moi un exemple de...

M. Dubé : ...la coercition, là, Dr Amyot.

M. Amyot (Marc-André) : Dans le projet de loi?

M. Dubé : Oui. Là, vous ne voulez pas donner d'autres exemples. Donnez-moi d'autres exemples de ce que c'est.

M. Amyot (Marc-André) : L'obligation de tous les médecins en cabinet de devoir demander des privilèges en établissement, ça, c'est de l'hospitalo-centrisme. On exige de tous les médecins en cabinet de demander des privilèges en établissement, et on concentre ce pouvoir-là dans les mains du directeur médical.

M. Dubé : Oui, mais quand vous dites «en établissement», pour que les gens comprennent, là, expliquez-moi qu'est-ce que vous voulez dire quand... Parce que c'est très technique, ce que vous expliquez, là. Allez-y plus loin, mais juste qu'on comprenne bien ce que vous voulez dire.

M. Amyot (Marc-André) : À l'heure actuelle, les médecins n'ont pas l'obligation d'obtenir de privilèges en établissement, à l'hôpital, pour pouvoir pratiquer en première ligne. Il y a quand même 3 000 médecins qui offrent des services aux patients de façon ambulatoire dans leur cabinet, dans leur GMF. Maintenant... Puis, je vous disais, 25 % des médecins ont plus de 60 ans. Maintenant, on va exiger de ces médecins-là de demander des privilèges au directeur médical pour pouvoir continuer à pratiquer, pour pouvoir. Ça, c'est inutile. On a déjà les AMP, à l'heure actuelle, puis c'est une méthode qui fonctionne très bien. Ce qui est proposé actuellement dans le projet de loi, ça va bien au-delà des AMP.

M. Dubé : O.K. Alors donc, là, je vous écoute puis vous me dites : Ça c'est pratique. Qu'est-ce qu'on devrait enlever dans le projet de loi sur cet aspect-là qui vous dérange tant que ça?

M. Amyot (Marc-André) : On devrait enlever toute la notion des privilèges aux directeurs médicaux et retourner ça au CMDP comme c'était avant.

M. Dubé : Oh! Qu'est-ce qui arrive... Parce que j'en ai parlé beaucoup avec docteur Gaudreault, que vous connaissez bien, là. Quand on s'entend avec les médecins, que ça soit sur... peu importe les questions, on a parlé beaucoup de cogestion ce matin... Mais qu'est-ce qu'il fait, quand on ne s'entend pas? Je ne dis pas qu'on ne s'entend pas, là. Habituellement, on s'entend très bien avec les médecins. Mais qu'est-ce que... quel est... est-ce que vous êtes d'accord avec le rôle du directeur médical? Quand on ne s'entend pas, ça prend quelqu'un qui doit être imputable, ça doit être quelqu'un qui est responsable. Qu'est-ce qu'on ferait dans ce cas là?

M. Amyot (Marc-André) : C'est intéressant. L'un n'empêche pas l'autre. Quand on nomme... quand le directeur général va nommer le chef du département territorial, il va avoir un lien d'autorité avec le directeur médical. Ce qu'on dit, là : Continuez de le faire et si on ne s'entend pas...

M. Dubé : Là, vous dites... Non, mais juste... les gens comprennent, parce que, là, on est dans le... on est dans, je dirais, le «inside baseball», là. Quand vous dites «en ce moment», c'est parce qu'il est élu par le Collège des médecins, par les...

M. Amyot (Marc-André) : Il est élu par les pairs, par les médecins. Là, vous souhaitez le nommer.

M. Dubé : Là, vous prenez ça comme un affront qu'il soit nommé par...

M. Amyot (Marc-André) : Par le directeur général, avec qui il va avoir un lien d'autorité. Alors là, il ne peut plus consulter de façon autonome parce qu'il y a un lien d'autorité. Quand je consulte mon employé, en général, il va dire la même chose que moi, sinon, vous savez ce qui va arriver. S'il me contredit, toujours un risque d'être remplacé.

M. Dubé : Mais le fait qu'il est nommé par ses pairs, est-ce que ça le rend plus indépendant des pairs?

• (15 h 40) •

M. Amyot (Marc-André) : Tout à fait. Tout à fait.

M. Dubé : Oh! O.K. Vous venez de me dire : Quand il est nommé par quelqu'un...

M. Amyot (Marc-André) : Il n'est pas nommé, il est élu. Il est élu par ses pairs et ça lui donne toute la légitimité de demander à ses pairs, après cette offre populationnelle là, qui est essentielle. Et quand on dit : Dans la cogestion, là, qu'est-ce qui arrive?, bien, rien n'empêche quand même le directeur médical de prendre la décision. Mais de le nommer, ça, ça lui donne... ça le hiérarchise par rapport au directeur médical, puis ça enlève toute la légitimité et l'indépendance qu'il a face aux médecins du territoire. Et c'est sur ce leadership-là et cette indépendance-là qu'on a réussi des avancées importantes.

M. Dubé : Bien, écoutez, moi ce que je pense, puis c'est pour ça que je prends un exemple très concret, ce que vous me dites, vous n'êtes pas en désaccord avec l'engagement envers la population?

M. Amyot (Marc-André) : Non.

M. Dubé : O.K. Déja, en partant...

M. Dubé : D'ailleurs, quand on a convenu d'une entente, c'était justement pour améliorer le service à la population. Puis j'ai dit, M. le Président, au ministre qu'on continuerait de discuter avec lui pour améliorer. Mais la façon de faire du projet de loi n° 15, elle est contre-productive, au même titre que le projet de loi n° 11, on a l'impression du jour de la marmotte. Je suis d'accord aussi avec le ministre, il me semble qu'on rejoue dans le même film. Ça ne nous empêchera pas de continuer à travailler, mais les façons de faire sont un peu préoccupantes. On nous met une épée de Damoclès sur la tête, puis, après ça, on dit... Bon, c'est une façon de faire qui n'est pas très appréciée et qui...

M. Amyot (Marc-André) : ...qui nous met des bâtons dans les roues, qui démotivent les terrains... les médecins sur le terrain.

M. Dubé : Bien, c'est là, peut-être, que j'aimerais prendre juste quelques minutes, là, parce que j'aimerais ça qu'on... Bien, ça fait quand même trois ans qu'on se parle, vous et moi, là, puis je trouve ça, des fois, un petit peu drôle quand vous dites qu'on n'a pas été consultés, là. On se parle au moins à toutes les deux semaines, si ce n'est pas plus des fois, là. Ça fait que je trouve ça un peu étrange que vous dites qu'on ne s'est pas consulté, mais ça, c'est votre opinion. Moi, j'aimerais ça qu'on convienne de certaines choses. Êtes-vous d'accord que ça doit changer? Êtes-vous d'accord qu'on doit changer?

M. Amyot (Marc-André) : On l'a déjà énoncé dès le début, d'entrée de jeu. Puis on a énoncé qu'on continuerait de faire partie de la solution.

M. Dubé : O.K. Vous êtes d'accord que les Québécois n'ont pas assez d'accès?

M. Amyot (Marc-André) : On est d'accord que les Québécois en quoi assez d'accès. Il ne faut pas faire reposer, sur les épaules des médecins de famille, ce déficit d'accès là.

M. Dubé : Alors, moi, quand j'entends que le premier argument, je vous ai demandé qu'est-ce qu'on devrait améliorer, vous dites... vous avez passé beaucoup de temps à m'expliquer que c'est qui devrait nommer le directeur médical. Qu'est-ce que ça change pour le patient, ça, le Dr Amyot?

M. Amyot (Marc-André) : Ça change l'engagement des médecins sur le terrain. Ça change ce leadership-là superimportant des DRMG. Je peux... Est-ce que je peux...

M. Dubé : Ah! bien, avec plaisir.

M. Dion (Sylvain) : Peut-être juste ajouter, M. le ministre, on a inscrit collectivement 625 000 patients depuis le 1er juin 2022. Ça s'est fait avec la collaboration des médecins et des DRMG, je n'entrerai pas dans le détail de ce que Dr Amyot a dit, là, cette entité autonome, légitimée auprès de ses pairs. Donc, c'est ça qu'on a fait. A contrario, ce que le projet de loi prévoit, si on ne s'était pas entendu, on leur aurait passé ça dans la gorge. Pensez-vous que les docteurs auraient accepté de se faire... de se faire forcer? C'est un petit peu comme le TSO, ça, hein? Sur une unité de soins, si on n'est pas capable de convenir, l'équipe de soins, pour faire du temps... pour faire du temps supplémentaire volontaire, on y va du TSO. C'est un petit peu ça. Ce que moi, je dis par rapport à la cogestion puis la collaboration, c'est qu'on a une obligation mutuelle, et les... et les gestionnaires et les médecins, de trouver le terrain d'entente. C'est ce qu'on a fait avec des patients qui n'avaient pas de médecin de famille, et c'est ce qu'on va continuer de faire avec les patients qui ont un médecin de famille.

M. Dubé : O.K., mais regardez, là, ce que je vous dis, puis je veux être très clair, on l'a réussi, ça, la prise en charge, on a réussi ensemble, il y a eu des... il y a eu toutes sortes d'ententes qui ont permis de vous intéresser, puis les médecins, à le faire. On ne rentrera pas dans la question de la rémunération, tout ça, là, il y a eu d'autres choses qui ont fait que ça a bien fonctionné. Moi, ce que je vous demande, c'est : Il y en a-tu d'autres, mesures, qui vont faire... Je vous ai parlé du 36 heures puis je n'ai rien entendu, là, je n'ai rien entendu, là. Comment on va faire pour que... Il y a 600 000 Québécois qui ont un médecin de famille, la plupart ne sont pas capables de les voir dans des délais raisonnables. Qu'est-ce qu'on va faire, dans les prochains mois, à part nommer le directeur médical? Qu'est-ce qu'on va faire avec ça?

M. Amyot (Marc-André) : Oui, bien moi... on en a une, solution. Malheureusement, elle appartient au gouvernement, aux fonctionnaires. Actuellement, là, les GMF, on signe un contrat avec les CISSS. Puis, dans le contrat, les GMF, ils s'engagent à donner des services, des heures d'ouverture, la majorité sont ouverts la fin de semaine, le samedi. Et les CISSS ne remplissent pas leur partie du contrat, ne fournissent pas les ressources aux GMF. Et, là-dessus, on va être intransigeants, là, on va devoir aller dans un mécanisme d'arbitrage pour faire respecter les contrats. Quand on signe un contrat puis qu'on met notre signature en bas, là, bien, ça a une valeur, ça. Bien, les CISSS, là, dans la majorité des endroits au Québec, ne respectent pas ces contrats-là. Oui, oui, oui, on va s'occuper, on va vous les fournir, prenez-les en charge, les patients, là, puis on va vous les fournir, les ressources. Ils sont où, les ressources? Ils ne sont pas là.

M. Dubé : Mais comment vous avez fait, docteur... Puis docteur Amyot, j'ai tellement de respect pour vous, parce qu'on a réussi à s'entendre que je suis certain qu'on va s'entendre encore, mais dites-moi, là, quand vous dites, là, vous mettez la faute sur les CISSS, là, vous avez quand même réussi à en prendre 600 000.

M. Amyot (Marc-André) : Avec la promesse qu'on aurait des ressources qui suivraient. Et ces ressources-là, elles ne sont pas au rendez-vous. Et...

M. Dubé : Est-ce que, par exemple, on est conscient... on est conscient qu'il y a eu des efforts puis qu'il manque de personnel dans le réseau? Parce que ça, j'entends ça de vous, j'entends ça des spécialistes, le grand problème, c'est le manque de ressources. Je pense que tous les Québécois qui nous entendent aujourd'hui sont d'accord avec ça.

M. Amyot (Marc-André) : Je comprends, mais...

M. Dubé : O.K. Donc, vous êtes d'accord qu'il nous manque de ressources, là.

M. Amyot (Marc-André) : Oui, mais, dans ce cas-là, ne nous promettez pas et ne signez pas, en bas d'un contrat, que vous allez nous fournir des ressources. Dites-nous : Arrangez-vous tout seul, faites-la tout seul, cette prise en charge là. C'est un contrat.

M. Dubé : Oui, mais il y a eu quand même... Mais, docteur Amyot, là, je ne veux pas rentrer dans le détail de l'entente, mais il y a eu d'autres choses...

M. Dubé : ...qui a été mis dans l'entente. Il y a eu des aménagements que vous pouviez aller chercher dans la rémunération des médecins, des arrangements, il n'y a pas juste eu des côtés négatifs à ça, il y a un côté positif pour les médecins. S'il y a eu tant de prises en charge, c'est parce que les médecins ont eu plus d'argent aussi, là.

M. Amyot (Marc-André) : Bien, il faut... il faut quand même que les... que les CISSS puissent respecter leur partie du contrat.

M. Dubé : D'accord avec vous, ça doit marcher des deux bords.

M. Amyot (Marc-André) : Exactement. Là, là-dessus, on va bien s'entendre, il faut que ça fonctionne des deux côtés.

M. Dubé : On va continuer de bien s'entendre. Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Un point de convergence. M. le député de Pontiac, à vous.

M. Fortin :Merci, M. le Président. Là, on va s'entendre sur une chose, M. le ministre, là, tout le monde qui va venir en commission parlementaire vont être d'accord pour dire que le statu quo ne peut pas continuer, mais ça ne veut pas dire que votre réforme puis de la façon que vous l'amener, c'est la chose à faire. Il y a quand même des différences majeures dans les points de vue que les différents intervenants vont avoir, puis ça ne veut rien dire par rapport... ça ne veut pas dire que c'est un appui au statu quo, là, le système ne fonctionne pas pour tous les patients au Québec.

Docteur Amyot, Docteur Dion, Maître Belzile, merci d'être là. Vous avez... Là, je vous cite, là : autoritaire, centralisatrice, coercitive, mépris. Vous dites que vous n'avez pas été consultés. Le ministre dit : On se parle, on se parle régulièrement. Mais, pour tous les enjeux d'organisation clinique, là, tous les changements dans le projet de loi, vous, vous n'avez eu aucune consultation par rapport à ça?

M. Amyot (Marc-André) : Non. Et on aurait avisé le ministre des risques associés à un projet de loi libellé comme ça.

M. Fortin :Mais parce que le problème qui vient avec ça, c'est que peu importe que ce soient les recommandations qui viennent de la FMOQ, qui viendront des autres groupes aujourd'hui, des sages-femmes qu'on a entendues ce matin, des infirmières auxiliaires, ça veut dire qu'il va falloir passer un paquet de temps en commission parlementaire pour proposer des amendements, parce que personne n'a été consulté d'avance. Le ministre a commencé son projet de loi en disant : Ah! bien, tout le monde a été consulté, tout le monde... Quand... Le jour de son dépôt, c'est ça qu'il a dit, mais là, à chaque fois qu'il y a un intervenant ici, aujourd'hui, ils nous disent : Nous, on n'a pas été consultés. Disons que ça part bien mal.

Là, je veux... je veux revenir à la gouvernance clinique, là. Moi, au cours des dernières semaines, il y a un enjeu qui est ressorti beaucoup, à travers les médias, ici, à l'Assemblée nationale, on en a parlé à la période des questions avec le ministre, il y a eu des manifestations à l'Hôpital de Lachine. L'Hôpital de Lachine, il y a eu beaucoup des professionnels de la santé qui sont sortis en disant : Un instant, là, ce que vous nous proposez, ça ne marche pas. Puis, dans ces... ces professionnels-là qui sont sortis, il y avait des gens du CMDP qui sont sortis, il y avait des gens du DRMG qui sont sortis. Là, parce qu'ils sont élus par leurs pairs, parce qu'ils veulent des... ils voulaient des changements positifs, si ces gens-là sont nommés à travers les nouvelles instances que le ministre met en place, d'après vous, ils vont-tu être capables de sortir sur la place publique puis dire les mêmes affaires qu'on a entendues?

M. Amyot (Marc-André) : Vous avez tout à fait raison, et c'est le commentaire que ces institutions-là, le DRMG et les CMDP, nous ont dit également qu'ils n'auraient pas pu, dans un contexte de la nouvelle loi, faire ces interventions-là dans l'Hôpital Lachine en appui de la communauté.

M. Fortin :Bien, ça, ça, c'est particulièrement préoccupant, parce qu'à la fin de la journée, là, le ministre, que ce soit lui-même, que ce soient les gens du CIUSSS local ont pris les décisions qui devaient être prises pour le bien de la communauté, mais je ne suis pas sûr qu'on l'aurait fait si on n'avait pas entendu les voix fortes qu'on a entendues de la part du milieu, de la part des professionnels de la santé du milieu. Puis j'inclus les médecins là-dedans, mais il y en avait beaucoup d'autres, là.

Parce que ce qu'on voit, là, dans le projet de loi... Puis je pense qu'une des choses que vous tentez de nous dire, c'est qu'aujourd'hui il y a un CMDP qui a des pouvoirs, bien sûr, sur l'organisation du travail, la planification, la priorisation. Ces gens-là sont élus, c'est bien ça? Là, on va passer à un directeur médical nommé, nommé par le ministre, le P.D.G., peu importe. À l'autre extrême... à l'autre extrême, dans un autre ordre d'idée, le DRMG élu va passer, entre autres, va donner une partie de ses pouvoirs au DTMF nommé.

• (15 h 50) •

M. Amyot (Marc-André) : Tout à fait.

M. Fortin :Qu'est-ce que ça vous dit ça, qu'on préfère des instances nommées qui ont du pouvoir plutôt que des instances élues par leurs pairs?

M. Amyot (Marc-André) : Ça nous dit davantage de contrôle sur la profession médicale, ça nous dit moins de cogestion, ça nous dit plus de centralisation.

M. Dion (Sylvain) : Si le DTMF avait été nommé par le CIUSSS, je ne suis pas certain qu'il serait... qu'il aurait pris le bâton du pèlerin pour défendre les services de proximité comme l'a fait le chef de DRMG actuel.

Une voix : ...

M. Dion (Sylvain) : Pour l'Hôpital de Lachine, c'en est un bel, exemple, ça.

M. Fortin :Ça, ça, moi, je trouve ça... comme parlementaire, là, je trouve ça particulièrement préoccupant parce que ce sont des contre-pouvoirs, ce sont des contrepoids à une action gouvernementale qui n'est pas toujours en lien avec ce que le milieu peut vouloir, ce que la communauté peut vouloir, ce que les professionnels de la santé...

M. Fortin :...peuvent vouloir également.

Je reviens au CMDP, parce que, là, il leur reste une partie des responsabilités, là. Vous... Des médecins, disons, parce que c'est ce que vous représentez, c'est ceux que vous représentez, à qui vous avez parlé? Avec les responsabilités qui restent au CMDP, qui va vouloir faire partie de ce groupe-là?

M. Amyot (Marc-André) : C'est très inquiétant, ça. C'est très inquiétant, cette concentration. Puis, Dr Gaudreault, ce matin, le mentionnait, le Collège des médecins, la CMDPQ, Dr Arata, il y a deux semaines également, concernant les CMDP, tous les médecins sont très inquiets de cette concentration des pouvoirs là dans les mains du directeur médical et dans cet affaiblissement du CMDP qui a un rôle de qualité de l'acte, mais dans son rôle de qualité d'évaluation de l'acte, il doit aussi évaluer les privilèges qu'il octroie en fonction des compétences et de la formation des médecins. Donc, ça fait partie de la qualité de l'acte, ça, l'octroi des privilèges.

M. Fortin :Une des choses que vous avez mentionné, là, qui nous apparaît particulièrement, disons, alarmante, parce que c'est un peu ce vous faites, sonner un signal d'alarme, c'est qu'il y a une bonne partie de vos médecins qui, disons, ont un certain âge, pourraient être à l'âge de la retraite s'ils choisissaient de le faire, là, disons, et que, là, en leur... parce que vous en avez 3000 qui pratiquent uniquement en clinique, là, j'imagine qu'il y en a que c'est souvent en fin de carrière, en fin de pratique, qu'ils vont se tourner vers cette façon d'octroyer des soins là. Si je comprends bien votre propos, vous êtes en train de nous dire qu'il pourrait y en avoir une grande partie ou une partie de ceux-là qui pourraient être poussés vers la retraite par le projet de loi.

M. Amyot (Marc-André) : Tout à fait. Et nous, on allume la lumière rouge en disant : Danger. Danger d'utiliser les leviers qui sont dans le projet de loi n° 15. Grand danger. Ça va démotiver les médecins sur le terrain, ça va en pousser à la retraite, ça va en pousser au privé vers d'autres provinces et c'est la population qui va... c'est la population qui va être la plus pénalisée dans tout ça.

M. Fortin :Mais c'est là que ça devient difficile, là, c'est, si la population est pénalisée, s'il y a des gens qui perdent leur médecin de famille parce que celui-là choisit de quitter, de prendre sa retraite à cause d'obligations nouvelles, c'est là qu'on a peut-être un enjeu, là.

Je veux vous poser la question des services sociaux. On n'en voit pas dans le projet de loi, on n'en parle pas, on passe de CISSS et de CIUSSS, là, santé et services sociaux, à Santé Québec, Outaouais, Abitibi, etc. On fait peu ou pas référence... en fait, presque pas référence aux services sociaux. Je sais que les médecins de famille finissent par en porter un poids quand les services sociaux ne sont pas adéquats dans une région. J'aimerais ça vous entendre sur le fait qu'on n'en parle quasiment pas dans ce projet de loi.

M. Amyot (Marc-André) : Ça augmente la charge des médecins de famille. Prenez, par exemple, à Amqui, là. On l'a entendu dans les nouvelles, l'accès à tous les services de santé mentale, il n'y en a presque pas. Alors, tout ça pèse sur les médecins de famille. Quand je disais : Il ne faut pas faire porter aux médecins de famille l'ensemble des problématiques, mais il n'en demeure pas moins que, souvent, c'est la seule ressource accessible disponible au Québec, le médecin de famille. Alors, de tout lui faire reposer sur les épaules, c'est la mauvaise voie.

M. Fortin :C'est quoi, le plus grand enjeu dans le réseau de la santé en ce moment?

M. Amyot (Marc-André) : La pénurie de main-d'œuvre et la collaboration. La collaboration.

M. Fortin :La pénurie de main-d'œuvre, là, on n'en parle pas dans le projet de loi. Le projet de loi ne vient pas régler ça. En fait, le projet de loi nous force à parler d'autre chose que la pénurie de main-d'œuvre, nous force à nous concentrer sur autre chose que la pénurie de main-d'œuvre, alors que c'est le plus grand enjeu. Ça m'apparaît une omission, disons, pour être gentil, là, une omission majeure de la part du ministre. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal) :Merci. Alors, M. le député de Rosemont, je vous cède de la parole.

M. Marissal : Merci, M. le Président.  Messieurs, bonjour, rebonjour, je devrais dire, on voit souvent ces temps-ci, visiblement pas les mêmes contacts que vous avez avec le ministre, à voir comment le... ça s'est échauffé tout à l'heure. Mais au-delà de vos échanges, là... Puis, des fois, je m'ennuie de mon ancienne job, puis je regarde mes anciens collègues, là, qui ont tous de la bonne copie. Moi, ça me ferait une maudite bonne chronique. Mais à part une autre chicane, là, entre le gouvernement puis les omnis, puis tantôt, on va avoir les spécialistes, là, peut être que vous avez mis la table, là, ça change quoi pour le commun des mortels, là? Vous dites, par exemple, là : On a pris 625 000 patients, vous les avez pris, vous avez inscrit quelque part, puis ils ne peuvent pas voir le médecin, puis il y en a 600 000 qui ont un médecin de famille qui ne peuvent pas voir leur médecin non plus. Je vous pose la question parce que, tout à l'heure, le ministre a dit : Vous...

M. Marissal : ...vous avez signé ça après le projet de loi n° 11. C'est vrai que vous l'aviez décrié sérieusement, le projet de loi n° 11, probablement avec raison d'ailleurs. Après ça, vous avez négocié ça. Vous avez inscrit 625 000 patients sur le GAMF, là. O.K., soit. Mais il y en a combien là-dessus qui ont réellement un accès, là, en 36 heures?

M. Amyot (Marc-André) : Ils ont tous un accès, ces patients-là, puis plus que ça, parce qu'ils passent maintenant par le GAP et ils sont orientés vers la meilleure ressource. Puis, en passant, là, ces 625 000 patients inscrits collectivement, les médecins offrent au GAP 625 000 plages annuelles, puis c'est le GAP qui les gère, là, c'est le GAP qui...

M. Marissal : Alors, prenons les autres...

M. Amyot (Marc-André) : ...décide de prendre un patient puis de le mettre dedans. Alors, c'est... Et ils sont disponibles, là.

M. Marissal : Prenons les autres, là, qui ne peuvent pas voir, là, leur médecin en 36 heures. Le ministre a l'air de dire que c'est de votre faute. C'est-tu de votre faute?

M. Amyot (Marc-André) : Non seulement ce n'est pas de notre faute, j'apporterais un élément. Ça me fait penser... Le ministre me demandait des solutions tantôt. Je dirais... On a des docteurs qui veulent travailler plus actuellement. Puis, normalement, au Québec, quand on travaille plus que 40 heures, on a au moins la même rémunération, parfois temps et demi, parfois temps double. Bien, j'ai des docteurs qui veulent travailler plus. Puis, après un certain temps, après une certaine prestation de services, qu'est ce qu'on fait, qu'est ce qu'on fait? On les coupe de 75 %. Et on a demandé aux fonctionnaires, à qui on veut donner plus de pouvoirs... Bien, on trouve que c'est inacceptable. Dans le contexte où les urgences sont bondées, remplies et qu'on veut réorienter ces patients-là, bien, les docteurs qui lèvent la main puis qui disent : Moi, j'en ferais plus, je travaillerais plus... Non, on continue de vous couper à 75 %. Pensez-vous que ça les intéresse de travailler plus, ces docteurs-là? Et on a demandé à ces mêmes fonctionnaires-là... Moi, je suis inquiet de donner des pouvoirs à ces fonctionnaires-là, qui ne sont pas capables de régler cette problématique-là ici et maintenant.

M. Marissal : O.K. La coupe de 75 % du salaire dont vous parlez, est-ce que c'est en vertu d'une entente que vous avez signée?

M. Amyot (Marc-André) : Tout à fait, mais on l'a signée à une autre époque. Et là, maintenant, il faut revoir les façons à la lumière de ce qui se passe actuellement.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Alors, député des Îles-de-la-Madeleine, 2 min 52 s

M. Arseneau : Merci, M. le Président. Dr Amyot, bonjour, ceux qui vous accompagnent. Bon. Vous êtes déçu, choqué, c'est clair, vous avez des termes très durs envers l'approche, vous parlez d'une posture vainement agressive qui vise à dicter unilatéralement les conditions de pratique, vous parlez d'un passage de la collaboration à la coercition, à la concentration de pouvoirs, vous craignez énormément les effets. Moi, je veux savoir quelles sont les conséquences pour la collaboration, pour les médecins. Quelle est la conséquence de ne pas mettre les médecins dans le coup, du point de vue du patient?

M. Amyot (Marc-André) : Bien, des dérives, parce que ce sont les médecins qui à chaque jour les voient, ces patients-là, vivent les difficultés d'accès de ces patients-là, et les médecins représentent la voix de ces patients-là : difficulté d'accès aux plateaux techniques, aux examens radiologiques, difficulté d'accès aux services de santé mentale, aux services sociaux.

M. Arseneau : Avez-vous le... Vous avez aussi parlé du projet de loi n° 20, qualifiant le p.l. n° 15 de dérive du p.l. n° 20. Ça fait longtemps qu'on n'en avait pas entendu parler. C'est quoi, le lien entre le projet de loi qui n'a jamais été mis en œuvre puis celui-ci?

M. Amyot (Marc-André) : Bien, ça... on est dans le même modus operandi, là, des obligations et la coercition, on est dans la méthode bâton. Et d'ailleurs, en introduction il y a deux semaines, en message préliminaire, le ministre indiquait qu'il avait intégré la loi Barrette dans ce projet de loi là. Quand même inquiétant.

M. Arseneau : Et est-ce qu'un exemple de ça, c'est les 3 000 médecins dont vous parliez qui sont en cabinet puis qu'on va forcer à s'inscrire, à demander des privilèges?

M. Amyot (Marc-André) : En établissement.

• (16 heures) •

M. Arseneau : Et est-ce que je comprends bien que les faits, c'est que c'est des gens qui sont en cabinet, oui, mais qui rencontrent des patients, puis on va les détourner de leurs patients pour leur faire faire des tâches en milieu hospitalier? Est-ce que c'est ça?

M. Amyot (Marc-André) : On risque de leur faire ça. Mais, effectivement, vous avez tout à fait raison, alors qu'on a besoin d'eux en cabinet.

M. Arseneau : C'est ça. Donc, on va priver un certain nombre de patients d'une visite au médecin pour faire faire au médecin d'autres tâches en milieu hospitalier, c'est ça que vous décrivez?

M. Amyot (Marc-André) : Tout à fait. Voilà.

M. Arseneau : D'accord. Est-ce que vous avez l'impression que le projet de loi - je vais finir là-dessus, là - nous détourne des problèmes quotidiens, là, que l'on vit à l'heure actuelle? Est-ce qu'on avait besoin d'une réforme de structures?

M. Amyot (Marc-André) : Bien, on aurait préféré continuer à travailler en collaborant dans la bonne direction, et, effectivement, on doit travailler à se présenter en commission parlementaire...


 
 

16 h (version non révisée)

M. Amyot (Marc-André) : ...analyser un projet de loi, ce n'est pas ça qu'on veut, on veut collaborer pour donner de meilleurs services à la population.

Le Président (M. Provençal) :Merci. Alors, Mme la députée de Vaudreuil, vous terminez cette... ce premier échange.

Mme Nichols : Merci. Merci, M. le Président. Merci. Vous avez parlé, là, d'emblée, au début de votre présentation, qu'il y avait 70 postes, à peu près 70 postes qui étaient non comblés en médecine familiale au Québec, c'est beaucoup, surtout que je regardais les statistiques, là, depuis 2009, on a plus de médecins qu'on en avait... qu'on en avait au Québec, est-ce que ce projet de loi là va venir aider, ou est-ce que c'est des contraintes supplémentaires?

M. Amyot (Marc-André) : Absolument pas. C'est des contraintes supplémentaires et une diminution d'attractivité de cette profession-là qui n'est déjà pas attractive.

Mme Nichols : Donc, les jeunes, ça... parce que j'ai entendu l'annonce, là, du ministre hier, là, entre autres à Rimouski, avec les AMP, il n'y a rien d'attractif là-dedans pour les...

M. Amyot (Marc-André) : C'est un risque énorme, ce projet de loi là, s'il est adopté tel quel. Et on souhaite que le ministre adapte ce projet de loi là suite aux auditions en commission parlementaire comme... comme vous le faites actuellement, et que le... l'étude article par article puisse bonifier ce projet de loi là.

Mme Nichols : On dit depuis le début qu'il y a une certaine ouverture, qu'on... que le ministre écoute, alors s'il y a des messages à passer, gênez-vous pas.

Les PREM, les PEM, les PREM, est-ce qu'il y a un commentaire en lien avec les PEM, les PREM qui sont dans le projet de loi, ou est-ce que vous... est-ce que ça va aider à combler, justement, ces postes-là?

M. Amyot (Marc-André) : Il faut... il faut aller... On a déjà déposé, quand le ministre parlait de solutions, on a déjà déposé 20... 20 mesures au ministère, des mesures pour mieux répartir les médecins sur le territoire, des mesures à saveur incitatives plutôt que des mesures coercitives et des obligations. On est vraiment... Et la vitesse avec laquelle on discute de ces mesures-là est très ralentie.

Mme Nichols : Merci.

Le Président (M. Provençal) :C'est beau. Merci beaucoup. Merci beaucoup aux représentants de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec pour votre exposé et pour ces échanges qui, souhaitons-le, seront constructifs. Alors, merci beaucoup. Je suspends les travaux pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16 h 04)

(Reprise à 16 h 08)

Le Président (M. Provençal) :Nous allons poursuivre nos travaux. Je reçois maintenant la Fédération des médecins spécialistes du Québec. Je vous rappelle que vous aurez 10 minutes pour votre présentation, et, par la suite, nous allons procéder à nos échanges. Alors, je vous cède immédiatement la parole.

M. Oliva (Vincent) : Parfait. Bonjour M. le Président de la commission, Mmes et MM. les parlementaires. Bonjour à toutes et tous. Je suis Dr Vincent Oliva, radiologiste d'intervention et président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec, et m'accompagnent aujourd'hui Dr Serge Legault, qui est chirurgien général à la Cité de la santé et vice-président de la fédération, Dre Corinne Leclerc, qui est obstétricienne-gynécologue à l'Hôtel-Dieu d'Arthabaska, à Victoriaville, et représentante des régions intermédiaires au conseil d'administration de la fédération, et finalement Me Pierre-Luc Desgagné, qui est notre directeur général à la fédération.

Donc, notre système de santé est une de nos richesses, mais il est à la croisée des chemins. Oui, la pandémie a mis le réseau de la santé à genoux, mais ses failles étaient déjà présentes bien avant. Nous sommes face à un mur et nous sommes inquiets. Vous étudiez aujourd'hui une énième réforme de structure du réseau de la santé. Cette fois-ci, il y a une obligation de résultat si on veut que les Québécoises et les Québécois aient encore confiance, alors que le réseau est plombé par un manque chronique de personnel et par une culture de gestion qui peut faire fuir nos meilleures ressources. Le coup de barre dont le réseau a besoin est d'abord et avant tout dans l'organisation et la coordination des soins, qui doivent être parfaitement en phase avec les besoins des patients. Ça, c'est l'expérience médicale du terrain qui nous l'enseigne.

• (16 h 10) •

Permettez-moi donc de vous proposer aujourd'hui de bonifier le projet de loi afin qu'on ne perde pas de vue que nos vrais patrons à nous tous, ce sont les patients. Le ministre de la Santé a raison de proposer de séparer les orientations de la gestion des opérations. D'une part, le ministère de la Santé doit être en mesure de mieux anticiper les transformations qui nous attendent : il y a plus d'aînés, les pathologies sont plus complexes, les méthodes d'investigation et de traitement se multiplient. Santé Québec devra donc tenir compte de ces tendances pour changer la façon dont on donne des soins, comme on l'a fait avec la télémédecine et l'hospitalisation à domicile. Depuis plusieurs années, on a implanté dans les unités de soins et les départements des hôpitaux la cogestion médicale : un médecin et un gestionnaire, une infirmière ou un technologue qui assument la responsabilité de gérer ensemble les soins, mais aussi les ressources matérielles d'un département. C'est une direction à deux têtes où on mise sur la complémentarité des expertises pour mieux gérer nos ressources, et ça fonctionne.

Quand on regarde le projet de loi, ce principe de cogestion disparaît dans les niveaux hiérarchiques supérieurs, et c'est une erreur. Notre réseau peut...

M. Oliva (Vincent) : ...compter sur d'excellents gestionnaires, mais ils ont besoin d'un contrepoids qui reste médical. Je suis en pratique hospitalière depuis 32 ans, j'ai été chef de département pendant huit ans et j'ai constaté à quel point il était difficile de faire entrer de l'innovation dans nos milieux de soins. Il y a des contraintes, des formulaires, des lenteurs administratives. C'est souvent un chemin de croix. Que ce soit pour utiliser des nouvelles technologies médicales, des nouveaux traitements ou tout simplement s'assurer que le patient aura accès à des soins à domicile parce qu'il retourne seul à la maison, c'est souvent aux médecins que revient la tâche de secouer la machine et de défendre les patients. Le projet de loi prévoit pourtant condamner les médecins qui mènent ces batailles à des sanctions. C'est exactement ce qui est écrit dans le projet de loi qui est devant nous. M. le ministre, nous comprenons la direction que vous voulez prendre, mais il y a un décalage important entre votre vision et le projet de législation. Les médecins seront sous représentés dans les instances dont les décisions entraînent des répercussions importantes pour les patients.

Les dispositions prévues par le texte viennent notamment réduire considérablement les responsabilités du Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens, ce qui est extrêmement préoccupant. Certains élus affirment que les CMDP ont trop de pouvoir dans un hôpital. Permettez-moi de rappeler certains faits. Le CMDP est composé de médecins, dentistes et pharmaciens oeuvrant dans un établissement. Son exécutif élu a simplement un rôle-conseil auprès du C.A. d'un établissement et de son P.D.G. Entre autres, il s'assure de la qualité des soins prodigués aux patients, s'occupe de faire des recommandations sur le recrutement de nouveaux candidats, sur les champs de pratique des médecins, il gère les plaintes des patients avec des recommandations disciplinaires le cas échéant. Le CMDP agit aussi comme chien de garde et contrepoids médical auprès de la haute direction dans la défense des patients.

Soyons clairs, ça prend des soignants proches du terrain pour assumer de telles responsabilités. Or, le PL 15 donne dorénavant aux P.D.G. d'établissement la responsabilité de déterminer les champs de pratique des médecins d'un établissement, de juger de leur niveau de compétence au moment de leur recrutement, de décider quelles activités médicales ils devront effectuer, par exemple, sur la garde et à quel endroit, dans un territoire déterminé, pourront également établir des sanctions disciplinaires et des pénalités financières envers les médecins.

On parle beaucoup de rehausser l'imputabilité dans le projet de loi, mais, quand on s'attarde au texte, c'est une imputabilité à sens unique. On y élargit la palette des sanctions qu'un P.D.G. peut imposer à un médecin, mais l'établissement et son P.D.G. n'encourent aucune sanction si leur obligation de créer des conditions favorables à l'accès à la médecine spécialisée prévue au PL 15 n'est pas respectée. C'est un déséquilibre. Pourtant, au cours des derniers mois, plusieurs centaines de médecins spécialistes nous ont témoigné des difficultés qu'ils rencontrent pour prodiguer des soins convenablement. Près de 300 lettres ont été envoyées à leur P.D.G. d'établissement pour mettre en lumière les besoins prioritaires des équipes médicales. Bon nombre de ces lettres sont demeurées sans réponse. Pourtant, les directions d'établissement avaient devant eux des médecins qui veulent travailler plus, soigner mieux et surtout aider ceux qui attendent depuis déjà trop longtemps. Vous comprendrez que cette concentration de pouvoir et ce déséquilibre d'imputabilité nous inquiètent.

Par ailleurs, plusieurs réponses confirmaient le bien-fondé de nos demandes et nous incitons quelques unes dans notre mémoire. Sur la structure de Santé Québec, bien que nous saluons l'initiative de décentraliser la prise de décision opérationnelle, le risque demeure de trop concentrer les pouvoirs au sein d'un seul palier de gouvernance qu'est l'agence au détriment d'une gestion de proximité. Pour assurer une telle gestion, il importe de laisser un niveau d'autonomie et de marge de manœuvre suffisant pour les établissements, d'impliquer des professionnels de la santé et de développer une culture d'agilité au sein du réseau. Ce qui est bon pour un hôpital universitaire à Montréal ne l'est peut-être pas pour un hôpital en région. Laissons un peu de marge de manœuvre aux gens du terrain. Le «top-down» du ministère de la Santé envers le réseau a parfois été désastreux. Il faut éviter de refaire les mêmes erreurs avec Santé Québec.

Quant à la composition du C.A. de Santé Québec, il est étonnant de constater qu'aucun médecin n'y soit présent d'office, alors que c'est elle qui aura la responsabilité de mettre en œuvre les orientations en santé. De plus, nous croyons fermement que des représentants universitaires doivent y être présents, tout comme un représentant du secteur de l'innovation. Les dernières années nous ont prouvé que l'engagement des médecins spécialistes et leur collaboration avec le ministère et le gouvernement du Québec pouvaient faire la différence dans l'amélioration de la qualité...

M. Oliva (Vincent) : ...et de l'accessibilité des soins pour les patients. Citons par exemple l'hospitalisation à domicile, le programme Agir tôt pour les jeunes, la couverture complète des régions éloignées en anesthésie, chirurgie et gynécologie. Ce sont là des parfaits exemples de collaboration négociée ayant porté ses fruits et qui démontrent que, lorsque le gouvernement énonce clairement ses priorités, nous livrons la marchandise. Le ministre a évoqué publiquement qu'il estime que certains médecins pourraient en faire plus. Sur ce point, nous partageons la préoccupation d'assurer une couverture médicale homogène et une responsabilité populationnelle. Y a-t-il lieu de revoir l'organisation et la charge de travail médical? Probablement. Assoyons-nous pour en discuter et je vous garantis qu'on va trouver des solutions. On l'a fait dans le passé, on va continuer à le faire.

Cette méthode permet d'arriver à des solutions concertées qui ont prouvé leur efficacité. C'est par la discussion et la négociation qu'on trouve ensemble la façon d'y arriver. Cette idée fixe de coercition ne mène à rien. Par exemple, nous sommes ouverts à la conclusion d'ententes concernant les activités médicales particulières, les AMP, ou sur une offre de services bonifiée. Mais nous émettons ici une réserve importante et fondamentale. Nos conditions de pratique, qui pourraient inclure des AMP, ne peuvent être traitées dans le cadre d'un projet de loi. Elles doivent être négociées avec nous en fonction des besoins du département territorial et en tenant compte de l'expertise médicale et des réalités parfois très divergentes de 35 spécialités. Il faut que le bon médecin prenne en charge le bon patient. Et malgré son grand intérêt, une commission parlementaire n'est pas un forum de négociation approprié.

En terminant, M. le Président, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, la Fédération vous remercie vivement de lui avoir donné l'opportunité de s'exprimer sur ces questions éminemment cruciales pour l'avenir de notre réseau public de santé. Ne perdons pas de vue que ce projet de loi donnera ses effets dans quelques années seulement. Dans l'intervalle, les médecins spécialistes vous demandent de les aider à faire ce qu'ils font de mieux : soigner leurs patients. Merci.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup, Dr Oliva, pour votre exposé. M. le ministre, je vais vous donner la parole, puis j'aimerais ça de temps en temps que vous vous adressiez à la présidence. Il faut que ce soit plus... moins direct en termes d'échanges. S'il vous plaît. Merci beaucoup.

M. Dubé : ...M. le Président. Alors docteur Oliva, docteur Legault, je ne me souviens pas de votre nom, mais vous êtes à l'hôpital d'Arthabaska? J'étais là vendredi. Je vous salue.

Une voix : Oui.

M. Dubé : Alors, merci beaucoup de cette présentation, là, monsieur Desgagné aussi. Premièrement, j'apprécie énormément votre ton, docteur Oliva, parce qu'on peut avoir des différences. Puis là je vous parle, M. le Président, là, mais on peut avoir des différences, mais je pense que vous me connaissez assez. Puis on a vécu un peu la pandémie ensemble, là, je pense qu'on peut se dire les vraies choses tout en respectant... tout en le faisant dans le respect.

• (16 h 20) •

J'ai beaucoup, beaucoup de points où on est en accord, de bonifier le projet de loi, de travailler sur l'organisation des soins, les succès que vous nous avez permis de faire, que ça soit en télémédecine... je ne veux pas que tous les passer, il y en a beaucoup. Je suis... quand j'ai lu votre mémoire, puis je dois vous dire que je ne peux pas avoir... je ne peux pas apprécier tout ce que vous dites dans le mémoire parce que je l'ai eu de façon assez récente, puis je ne peux pas vous le reprocher parce que vous n'avez pas eu beaucoup de temps pour le préparer. Ça fait que je vous le dis en même temps, merci d'avoir pris le temps, parce que ce n'est pas évident, là. Et je salue... parce que ça... on est dans notre jargon, là, mais quand vous dites que vous êtes d'accord avec le principe des AMP, pour moi, je pense que c'est important pour les Québécois de comprendre qu'est-ce que ça veut dire, le principe des actes... des AMP, c'est de dire : Les omnis comme les spécialistes seraient demandés de pouvoir avoir certaines activités particulières en autant qu'on s'entende. Bon, maintenant, je veux juste dire, puis là je vais rester doux dans mes commentaires. Ça fait que... je prépare... c'est que ça fait longtemps que les AMP sont dans la loi pour les spécialistes, mais on n'a jamais réussi à s'entendre. Alors, notre défi, ce n'est pas tellement de le mettre dans la loi que d'y trouver la discussion qui va mener à une entente. Alors, je vais juste dire ça comme ça. Vous comprenez très bien ce que je veux dire.

Ce que je pense qui est grand défi, parce que je suis certain que mes collègues de l'opposition vont vous poser la question, avez-vous été consultés, hein? Bon, ils demandent ça à tout le monde. Pus il faut se rappeler... Il faut se rappeler, puis...

M. Dubé : ...c'est correct, c'est leur travail aussi de poser des bonnes questions. Mais il faut se rappeler, et vous et moi, on en a parlé beaucoup avec M. Desgagné, on ne pouvait pas vous parler avant de déposer le projet de loi, c'est des règles de l'Assemblée nationale.

Alors moi, le point que je veux vous dire, et c'est pour ça que j'apprécie votre ton aujourd'hui, parce qu'on veut trouver ensemble, pour les Québécois, une façon d'améliorer notre réseau de santé, et les 10 000 médecins omnis et 10 000 médecins spécialistes font partie de la solution. Ça, c'est clair pour tout le monde.

Moi, ce que je vous dis, c'est qu'entre aujourd'hui et le moment où on va finaliser le projet de loi, il pourrait se passer encore plusieurs semaines. Je vous l'ai dit et je le redis devant tout le monde aujourd'hui, c'est là qu'on a le droit de se parler parce que, là, le projet de loi qui a été déposé, quand je dis qu'il peut être bonifié, qu'il peut être amélioré, je ne changerai pas des principes. Je vais être très ferme dans les principes, puis je veux que les Québécois l'entendent, sur les principes d'avoir un accès à un meilleur réseau de santé. On va être ferme là-dessus.

Est-ce qu'on peut trouver des accommodements? Est-ce que ça doit être dans le projet de loi? Est-ce que ça doit être dans la prochaine entente de trois ans qu'il va falloir négocier? Est-ce que c'est dans les règlements? On va trouver la façon d'atterrir au bon endroit. Mais je veux juste vous dire que les prochaines semaines seront déterminantes, puis d'ailleurs, les gens le savent. On a commencé à se parler depuis que le projet de loi, il a été déposé.

Ça fait que je voulais juste vous rassurer là-dessus que non seulement j'apprécie le ton... Maintenant, il y a quelques points que je voudrais faire, puis je vais surveiller le temps parce que ça passe très vite, là, puis je veux profiter de ça. Il y a un principe pour moi qui est important, qui peut être mal compris, mal compris dans le projet de loi, c'est le projet... ce qu'on appelle le principe de subsidiarité. Alors, quand on dit et qu'on entend qu'on veut tout contrôler puis, etc. que c'est de la centralisation, c'est tout à fait le contraire, puis ça va être à nous... Peut-être qu'on l'a mal expliquée, mais la subsidiarité, c'est qu'on veut prendre des décisions le plus proche possible du terrain. C'est ça que ça veut dire, puis ça, c'est l'article 29 qui dit ça, puis il va falloir peut être mieux l'exprimer qu'est ce que ça veut dire, ça veut dire prendre la décision proche du terrain et non au CISSS et au CIUSSS.

Alors, les professionnels comme vous qui pratiquez depuis tout ce temps-là... puis j'ai même dit tantôt, au Dr Legault, que je ne le reconnaissais pas, parce qu'habituellement je le vois avec son petit capuchon sur la tête, vous êtes des gens assez d'expérience pour savoir qu'est ce que je veux dire de prendre la décision proche du terrain et non au CISSS puis au CIUSSS, et c'est d'ailleurs pour ça que vous êtes aussi d'accord qu'on sépare les opérations du ministère. Ça, je pense qu'on s'entend. Bon.

Puis il y a autre chose que je veux dire aussi pendant que je suis dans des choses positives, c'est on a mis en place il y a quelques années l'Institut de la pertinence, l'Institut de la pertinence, qu'on appelle maintenant l'IPAM, là, elle a été excessivement bénéfique pour des choses, notamment de donner des fonds nécessaires pour faire des activités et faire des activités, améliorer nos systèmes informatiques, etc. Puis il y aura probablement des exemples qui seront donnés dans les prochaines semaines.

Moi, ce que je veux que les Québécois comprennent, puis c'était pour ça que je voulais être capable d'avoir cette discussion-là, tout à l'heure, avec le Dr Amyot, du côté des omnis, c'est d'être capable de dire : Le quotidien des Québécois, il est sur quoi? Il est sur les chirurgies qui sont en retard puis que ça s'est exacerbé avec la pandémie, il est sur ce qu'on appelle le CRDF, hein, le centre de rendez-vous pour un spécialiste, puis il est sur les urgences.

Si, là, vous demandiez aux Québécois, parce qu'on leur parle, c'est quoi les trois grands problèmes qu'on a? Puis là, je dirais avec autant les omnis que les spécialistes, mais c'est ces trois-là. Moi, ce que je vais vous demander dans les prochaines semaines, là, oublions les détails du projet de loi, puis tout ça, qu'est ce qu'on peut faire ensemble le plus rapidement possible pour qu'on règle ces trois choses-là : les chirurgies qui sont en retard, les 800 000 rendez-vous en attente sur le CRDS et les urgences.

Puis pourquoi je vous parle des urgences? Parce que, là, je suis tout à fait d'accord avec vous puis j'aimerais ça vous laissez parler, c'est, que les urgences, ce n'est pas juste la faute des spécialistes, c'est un... puis ça là, j'en parle beaucoup avec les gens du ministère, avec Mme Savoie, je vous demande qu'est ce que vous voulez faire, vous pouvez faire. Mais nous aussi, il y a des choses qu'on peut faire pour améliorer.

Alors aujourd'hui, je vous dis sur ces trois choses-là, là, c'est CRDS, urgences et chirurgiens en retard, qu'est-ce...

M. Dubé : ...qu'on peut faire à court terme qui peuvent nous aider, que ça soit dans le projet de loi ou pas, là, mais je veux vous entendre spécifiquement là-dessus.

M. Oliva (Vincent) : Alors, M. le ministre, merci pour votre question. M. le Président, je répondrais au ministre qu'il y a beaucoup de choses à faire, il y a des solutions qui sont connues. C'est clair que les médecins sont mobilisés, puis on l'a dit souvent : Donnez-nous accès à des salles d'opération, à des cliniques externes, on va les occuper. Alors, ça, c'est le fond du problème, là, c'est qu'actuellement on n'a pas accès à ce qu'on appelle ces plateaux-là.

M. Dubé : Pouquoi, parce qu'il manque de...

M. Oliva (Vincent) : Bien, c'est-à-dire qu'il y a une crise de personnel très large, O.K., ça, c'est clair qu'elle est présente. Mais, au-delà de ça, il y a des enjeux quand même d'organisation parce qu'il y a des outils qui ne fonctionnent pas bien. Vous parliez tantôt des CRDS, mais les CRDS, c'est un système de rendez-vous avec une architecture qui est vieille, qui doit être révisé, si bien qu'il y a des médecins spécialistes qui se gardent des plages entières pour voir des patients, puis, des fois, au lieu d'avoir 12 patients, ils ont trois patients parce que les plages ne sont pas remplies, les rendez-vous ne sont pas bien donnés, donc...

M. Dubé : Donc, des enjeux technologiques, de logiciels, etc., là.

M. Oliva (Vincent) : Des enjeux technologiques, des enjeux de coordination aussi, des enjeux de laboratoire qui n'arrivent pas à temps, donc de l'organisation des soins, puis pas juste un manque de ressources humaines. Oui, il y a un manque de ressources humaines, mais avec les ressources humaines qu'on a, on peut faire beaucoup mieux.

M. Dubé : Puis ça, ce que vous dites, c'est plus du côté du ministère ou... en tout cas, on verra dans Santé Québec, mais c'est des choses que nous, on peut améliorer.

M. Oliva (Vincent) : Regardez, je ne suis pas en train de montrer des doigts, de pointer personne.

M. Dubé : Non, non, on n'est pas là.

M. Oliva (Vincent) : Parce que tout le monde a sa part de responsabilité, puis je l'ai dit dans mon allocution, si on peut optimiser la participation des médecins spécialistes, on va le faire, O.K.? Donc, je pense que c'est un effort collectif. Le message, c'est qu'on est au rendez-vous, les médecins sont mobilisés. Vous avez vu, peut-être, dans vos tableaux de bord, que les chirurgies en attente de plus qu'un an ont réduit de façon substantielle depuis quelques mois. Donc, ça, ça témoigne de la mobilisation des médecins, dont on est au courant parce qu'on leur parle souvent, les associations chirurgicales, les anesthésistes, les pathologistes, puis on sait qu'ils sont au rendez-vous et ils vont être au rendez-vous. Donc, tout ça, c'est des bonnes nouvelles.

M. Dubé : Puis c'est un chiffre, là, vous permettez, M. le Président, si je peux... On est quand même parti d'un sommet où il y avait plus de 23 000 chirurgies qui étaient en retard, à peu près, vers le mois de novembre. Ça, c'est le sommet. Puis on est revenu à peu près à 17 000. Alors, merci pour cet effort-là, parce que ça s'est fait quand même dans des conditions très difficiles. Je pense que c'est important de le...

M. Oliva (Vincent) : On s'était parlé, vous l'aviez demandé, vous parliez souvent des chirurgies, puis moi, je vous avais dit : Bien, les médecins sont mobilisés, donnez-nous des...

M. Dubé : On peut-u faire mieux, on peut-u aller plus rapidement?

M. Oliva (Vincent) : Je pense qu'on peut faire plus rapidement. Je pense que tant qu'on aura des disponibilités opératoires, je pense que les médecins vont être au rendez-vous. Alors, le goulot...

M. Dubé : J'espère qu'on aura des bonnes nouvelles dans les prochains jours là-dessus.

M. Oliva (Vincent) : Peut-être. Je l'espère. Mais toujours est-il que vous demandiez ce qu'on peut faire, bien, ce qu'on peut faire, c'est travailler ensemble et puis...

M. Dubé : Mais le CRDS, là, à part le problème de logiciel, juste pour que les gens comprennent comment ça fonctionne en ce moment, l'omni qui demande un rendez-vous, lisez un peu pour qu'on comprenne qu'est-ce qu'on peut faire de chacun des deux... vous parlez d'informatique, mais de votre côté, qu'est-ce qui peut être fait?

M. Oliva (Vincent) : D'accord. M. le Président, si vous permettez, je laisserais Dr Legault répondre parce qu'il est très impliqué dans la mécanique des services.

• (16 h 30) •

M. Legault (Serge) : Merci, Vincent. M. le Président, M. Dubé. Bien, le CRDS, c'est aussi un enjeu technologique, mais je pense que des fautes, on peut en trouver d'un côté comme de l'autre. Avant l'arrivée du CRDS, qui était une bonne idée, les médecins...

M. Dubé : Centre de rendez-vous d'un spécialiste, pour que les gens comprennent notre jargon, là.

M. Legault (Serge) : O.K. Alors, avant l'arrivée du CRDS, les gens avaient une façon de faire qui était la leur, qui variait beaucoup de région en région. Alors, le médecin avait ses référents, puis ça fonctionnait comme ça. Donc, le CRDS est venu remplacer un système qui était dysfonctionnel mais qui fonctionnait relativement bien. Ça a été une révolution dans le milieu. Au début, ça a été difficile pour les enjeux informatiques, etc., et puis avec l'avènement des nouvelles technologies, malheureusement, je pense que les nouvelles technologies n'ont pas suivi. Je ne veux pas pointer du doigt, ce n'est pas l'habitude de la FMSQ de le faire, mais on se rend compte qu'en s'assoyant avec nos partenaires au ministère, on est capable de mettre le doigt sur les bobos qu'il faut essayer d'améliorer.

On est rendus à rêver à un CRDS 2.0. Le CRDS 2.0, ça va faire que ça ne sera pas seulement les omnipraticiens qui vont pouvoir utiliser le système, ça va être d'autres professionnels de la santé. Puis je pense que tout le monde veut ça, l'interdisciplinarité, mais le pari...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

M. Legault (Serge) : ...informatique est immense, et on voit, du côté des spécialistes, qu'il y a un réel désir de changer du côté du ministère, ce qui n'était pas nécessairement le cas au début parce que c'était la statistique, puis le 800 000, puis : Vous ne faites pas votre job, puis les docteurs ne veulent pas le faire. Je pense que, si on est capable de mettre en place... sur place une façon de faire qui va plaire et au patient et au médecin, qui va faciliter l'expérience patient et qui va faciliter le fait que le médecin a tous les prérequis quand il voit le patient, ça ne peut pas ne pas fonctionner.

M. Dubé : ...travaille là-dessus en ce moment. Puis je pense qu'il y a même des sommes de l'IPAM qui vont être utilisées pour aller... je parlais de l'IPAM tantôt, pour être capable de faire ça. Ça fait que disons qu'on va voir une solution à court terme, moyen terme dans le CRDS, selon vous?

M. Legault (Serge) : J'espère qu'à moyen terme ça va donner de quoi. Mais, si je peux prendre la balle au bond, si vous me permettez, M. le Président. Je ne sais pas à qui je dois m'adresser. Ceci... les améliorations du système se font en cogestion. Le projet de loi n° 15 nous inquiète parce qu'on a l'impression que la cogestion, qui est au centre de l'amélioration de notre système de santé, est évacuée avec le p.l. 15. C'est une grande inquiétude pour nous.

M. Dubé : Mais ça, on en a parlé beaucoup avec le... avec le docteur Gaudreault ce matin, là. Je pense, c'est la même réflexion, puis on va revenir quand je discuterai avec vous dans les prochaines semaines.

Je veux juste revenir sur les urgences, parce que c'était mon troisième point. Puis, souvent, ce que j'entends dans le réseau, c'est : Une des raisons... les gens attendent particulièrement longtemps sur les civières, puis là on a des gens qui sont dans... du côté des établissements, c'est le temps de consultation. Puis ça, je veux vous entendre là-dessus, parce que vous et moi, on a échangé souvent. Je voudrais vous entendre là-dessus, Dr Oliva.

M. Oliva (Vincent) : Parfait. Merci pour la question. M. le Président, je répondrais au ministre de la Santé que, dans la cellule de crise qu'il a lui-même créée, le temps de consultation n'a pas été retenu comme une des mesures pour améliorer l'engorgement des urgences. Alors, oui, c'est vrai que le temps de consultation, ça peut toujours être amélioré. Ce qu'il faut savoir, c'est que, si un patient attend à l'urgence avec une condition urgente, O.K., qui nécessite qu'un médecin spécialiste soit là puis que le médecin spécialiste ne se déplace pas, jamais on ne va cautionner ça. Jamais. Puis, de toute façon, il s'expose à des mesures disciplinaires. Donc, là n'est pas l'enjeu.

L'enjeu est, par exemple, pour un chirurgien qui a passé sa journée à la salle d'opération et qui a un patient à 10 h le soir, qui a par exemple une diverticulite mais qui va être hospitalisé de toute façon, le chirurgien, lui, est au bloc opératoire le lendemain matin à 7 h. Alors, c'est possible qu'il dise : Bien, on part les antibiotiques, puis je vais le voir demain matin. Alors, oui, sur papier, le délai de consultation est là, mais l'enjeu pour le patient... il n'y a pas de dommage. Puis le chirurgien, bien, il opère ces deux jours-là. Alors, il ne peut pas passer la nuit à voir des patients puis les jours à opérer. Alors...

M. Dubé : Vous avez eu une grande contribution à la cellule de crise sur les urgences. Je veux juste que les Québécois savent qu'on va continuer à travailler là-dessus parce que...

M. Oliva (Vincent) : Ça, c'est clair.

M. Dubé : ...ça, pour moi, que des gens... puis on l'entend, là, puis mes collègues de l'opposition me le rappellent régulièrement, que des délais d'attente de 20 heures, 25 heures sur une civière, ce n'est pas acceptable au Québec, ce n'est pas acceptable.

M. Oliva (Vincent) : Ça, on est tous d'accord. Ici, j'apporte des nuances, et ce que je dis, c'est que les endroits où, par exemple, un patient reste là parce qu'un médecin ne se déplace pas, ça, ça n'est pas acceptable. Et, si ça arrive, c'est clair qu'on va tout faire pour régler ces problèmes-là.

Ce qu'on dit, c'est que la majorité du problème d'engorgement des urgences, c'est parce qu'il n'y a pas de lit d'hospitalisation. Puis, actuellement, je sais que la cellule de crise a créé un sous-comité où ils veulent augmenter la fluidité hospitalière, veulent congédier plus rapidement des patients. Il y a aussi, comme vous savez, la surcapacité qui a été mise en place pour monter des patients de l'urgence sur les étages pour désengorger. Alors, tout ça, c'est des mesures qu'on discute, qui se mettent en place.

M. Dubé : Je vous laisserai mes collègues, mais merci pour ces ouvertures-là. Je pense, ça a été très instructif pour les Québécois qui vous écoutent. Merci beaucoup. Merci.

Le Président (M. Provençal) :M. le député de Pontiac.

M. Fortin :...temps je dispose, M. le Président?

Le Président (M. Provençal) :Vous allez disposer de 10 minutes 44.

M. Fortin :Combien de temps avait le ministre?

Le Président (M. Provençal) :Pardon?

M. Fortin :À peu près 20 minutes. Le ministre avait à peu près 20 minutes?

Le Président (M. Provençal) :Non, il a eu 16 minutes 30.

M. Fortin :Oui, 16 minutes. Moi, je suis complètement découragé, M. le ministre. Cette discussion-là que vous venez d'avoir avec les gens de la FMSQ, là, vous auriez pu l'avoir au ministère, vous auriez pu l'avoir autour d'une table à souper. Vous n'avez même pas parlé du projet de loi n° 15, pas une fois. Vous avez parlé de tout le reste, là, discussion hyperintéressante, mais jamais vous n'êtes rentré dans les détails de pourquoi ils sont venus ici, le projet de loi n° 15. Alors, je... Vous êtes rendu un habile politicien, disons, mais on est loin du gestionnaire chevronné de l'époque, qui se serait concentré sur les enjeux.

Bonjour, Dr Oliva...

M. Fortin :...Dr Legault, Dre Leclerc, Me Desgagné, parlons du projet de loi no 15. Dans une de vos recommandations qui fait... qui parle de... des activités médicales particulières, vous demandez de suspendre l'application des articles du projet de loi, là, jusqu'à ce qu'on ait le temps, que vous ayez le temps, avec le gouvernement, de convenir de certaines particularités. Pouvez-vous nous dire qu'est ce que vous voulez dire puis qu'est-ce que ça ferait en sorte d'appliquer tout de suite, là, les dispositions qui sont prévues dans le projet de loi?

M. Oliva (Vincent) : Alors, M. le Président, ce qu'on... ce qu'on dit essentiellement, c'est que si on veut mettre en place des activités médicales particulières ou bonifier les services à la population, il faut qu'on s'assoie puis qu'on s'entende sur le genre de service à donner. Puis, c'est une question peut-être facile à poser, mais c'est des réponses très complexes parce qu'en médecine spécialisée, comme je l'ai mentionné, il y a 35 spécialités avec des réalités toutes différentes. Alors, premièrement, il faut savoir qu'il y a des médecins qui travaillent en dehors de l'hôpital, dans des cabinets, mais il y en a 5 % à peu près. Alors, on dit souvent que ces médecins-là pourraient peut-être participer plus, mais il faut comprendre que, premièrement, c'est une minorité. Puis ensuite certains de ces médecins-là sont en cabinet parce qu'ils ne sont pas capables d'exercer leur profession en hôpital, parce qu'ils n'ont pas accès aux cliniques externes. Ils n'ont pas assez d'heures d'ouverture. Alors... Puis dans certaines spécialités, c'est moins critique que d'autres. Par exemple, la dermatologie. On peut parfaitement exercer la dermatologie en cabinet parce qu'il s'agit de consultations où ils n'ont a pas nécessairement besoin de plateaux lourds. Autrement dit, c'est complexe parce que c'est granulaire. Et nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut s'asseoir et convenir de quelles sont les activités médicales particulières qui vont aider la population. Il faut toujours revenir à ça. Qu'est-ce qui va aider les patients? Puis à chaque endroit où les médecins spécialistes pourraient aider davantage la population, on va être au rendez-vous puis on va les négocier.

M. Fortin :Sur cette discussion là, sur la granularité, là, sur les différentes dispositions, vous ne l'avez pas eue encore. C'est ce que je comprends.

M. Oliva (Vincent) : C'est à dire qu'on ne l'a pas eue en fonction du projet de loi. Évidemment, on a des discussions fréquentes avec le ministère. On échange sur les enjeux dans certaines spécialités. On a... On discute depuis plus qu'un an de solutions potentielles pour ramener certains médecins à l'hôpital dans certaines spécialités où on sait que c'est un enjeu, mais jamais on ne nous a dit : Voici ce qui s'en vient dans le projet de loi no 15, puis on peut-tu discuter de comment régler ces enjeux-là. Ce qu'on a fait, c'est que de notre côté, on voyait bien qu'il y avait des enjeux puis on disait : Bien, voici telle ou telle solution. Est-ce qu'on doit moduler la rémunération? Est-ce qu'on doit mettre des incitatifs? Mais, bref, il faut s'asseoir puis en discuter de façon sérieuse, mais surtout en fonction des besoins spécifiques de la population, qui sont très différents d'une région à l'autre.

• (16 h 40) •

M. Fortin :C'est là que le... le propos du ministre tantôt, là, honnêtement, qui disait : On ne pouvait pas vous consulter parce que, bien, il faut déposer le projet de loi à l'Assemblée. Avant, on ne pouvait pas vous en parler. En même temps, le ministre, avant de déposer son projet de loi à l'Assemblée, là, il est allé dans les médias et il leur a dit qu'il créerait l'Agence Santé Québec, que ça serait constitué d'une petite équipe avec un P.D.G., que les membres du conseil d'administration seraient nommés par le gouvernement, que ce serait un Hydro-Québec de la santé, que les 35 P.D.G. des CISSS et CIUSSS ne se rapporteraient plus à Mme la sous-ministre comme c'est le cas, mais au P.D.G. de Santé Québec. Et il nous a même dit... il a même poussé l'audace jusqu'à dire que des drames comme celui qu'a vécu la... la veuve de l'ex-premier ministre Bourassa, bien, ça ne se produirait plus.

Alors, votre explication, M. le ministre, me semble bien, disons, bien inappropriée, mais c'est la vôtre. Vous avez mentionné, Dr Oliva, que vous voyez une imputabilité à sens unique dans le projet de loi. J'aimerais ça comprendre ce que vous êtes en train de nous dire, là, exactement.

M. Oliva (Vincent) : Bien, ce qu'on est en train de dire, c'est qu'on voit là-dedans qu'il y a des... potentiellement des leviers pour contraindre les médecins à participer plus. Ce à quoi on vous dit : Vous n'avez pas besoin de contraintes, on est prêt à s'asseoir puis à en discuter. Il y a des pénalités là-dedans. Alors, c'est sûr que la culture de la coercition, pour nous, ça ne fait pas avancer les choses. Ce qu'on voit donc, c'est qu'il y a un encadrement plus... beaucoup plus serré des médecins. Mais du côté des... des administrateurs et des P.D.G., on ne voit pas ça. En fait, on l'a... on l'a dit dans notre mémoire, les P.D.G., dans le p.l. no 15, auraient beaucoup plus de pouvoir. Et si on veut, les... les instances qui l'entourent, on ajoute des couches autour...

M. Oliva (Vincent) : ...puis, par exemple, on a parlé des CMDP. Je l'ai dit tantôt, CMDP, c'est un conseil de médecins, pharmaciens et dentistes qui sont là pour alimenter le P.D.G., puis s'asseoir avec lui, et puis s'assurer qu'il est bien alimenté par le terrain, puis, des fois, qu'il rende des comptes aussi. Parce que, si, par exemple, un P.D.G. dans un hôpital ferme le bloc opératoire un peu trop tôt, bien, son CMDP va s'asseoir avec puis va dire : Pourquoi les blocs ferment à cette heure-là? Alors, oui, ça peut être embêtant, un petit peu comme l'opposition officielle, des fois, qui pose des questions au gouvernement, mais c'est un contrepoids qui est nécessaire.

Alors, quand on parle d'imputabilité, c'est... c'est ça qu'on dit, c'est qu'on ne voit pas, là-dedans, l'imputabilité des décideurs qui, en plus, dans le cas du P.D.G., du directeur médical, récoltent plus de pouvoirs et s'entourent de plusieurs couches de conseillers qui éloignent un petit peu les médecins du terrain du P.D.G.. Puis c'est important aussi de comprendre que, dans la cogestion, nous, on dit : Ça prend des professionnels, ça prend des médecins, pas juste des médecins, ça prend des professionnels mais pas nécessairement des professionnels qui sont engagés dans la machine, ça prend des professionnels du terrain qui sont en pratique médicale. C'est très différent.

M. Fortin :Le ministre nous traite gentiment régulièrement de malcommodes, les députés de l'opposition, mais là je comprends que...

Une voix : ...

M. Fortin :Ah! bien oui, avec amour, bien sûr. Mais disons que les malcommodes du réseau, pour lui, le CMDP, là on utilise un moyen pour leur enlever certains pouvoirs pour le remplacer par un directeur médical, mais... mais tout dans le projet de loi n° 15, lors du discours public du ministre, c'est toujours : Ah! mais il va y avoir une accessibilité supplémentaire, il va y avoir des soins supplémentaires qui vont être disponibles avec le projet de loi. Avec la nomination d'un directeur médical, est-ce que vous voyez un lien direct avec l'amélioration des soins à la population à travers cette mesure-là?

M. Oliva (Vincent) : Ça dépend comment il exerce son pouvoir. Ce qu'on dit, c'est que ce pouvoir-là nous apparaît un peu plus isolé de la voix du terrain. Et puis, pour nous, le terrain, c'est eux qui lèvent... qui soulèvent les préoccupations des patients. C'est ça qui nous préoccupe. Puis on l'a mentionné aussi au conseil d'administration de Santé Québec où il n'y a pas d'emblée de médecin pour donner des orientations sur la mise en œuvre des soins de santé. On trouve ça très particulier.

M. Fortin :Merci. Merci, Dr Oliva.

Le Président (M. Provençal) :Mme la députée de Mont-Royal-Outremont, s'il vous plaît.

Mme Setlakwe : Merci, merci. Je vais aller rapidement. Merci d'être là. Vous avez mentionné au début : Il ne faudrait pas faire fuir nos meilleures ressources. Est-ce qu'il y a quelque chose dans le projet de loi qui vous... qui vous inquiète, qui pourrait mener à ça? Qu'est-ce que vous vouliez dire exactement?

M. Oliva (Vincent) : Alors, M. le Président, je faisais, entre autres, référence à beaucoup du personnel de la santé qui ont quitté le navire et puis qui ont déjà... disons, parfois changé de profession parce qu'ils trouvaient l'environnement trop difficile. Je ne veux pas lever des épouvantails pour faire peur à la population, mais, si on s'en va vers un système trop coercitif, évidemment, c'est clair qu'il y a des médecins qui ne voudront pas suivre. Il ne faut pas oublier qu'il y a beaucoup de médecins qui sont près de l'âge de la retraite. Ça fait que déjà, s'ils travaillent dans un environnement de type très coercitif, bien, ils pourraient tout simplement cesser d'exercer.

Encore une fois, je ne veux pas faire peur, mais oui, il y a toujours un risque d'exode vers le privé aussi. On le sait que le privé se développe. Nous, on ne défend pas ça. Ce qu'on défend, c'est la médecine publique universelle. On dit qu'il faut continuer à investir dans notre réseau public de la santé, dans nos hôpitaux, parce que c'est les assises de notre système de santé. Alors, ça, je pense que c'est important, parce que, oui, le privé vient en appoint... Puis là il faut faire attention, il y a deux types de privé. Il y a du privé complètement hors RAMQ, O.K., puis il y a du privé, en fait, j'appellerais plus la pratique de cabinet ou de CMS où les patients ne paient pas. Alors, il y a du privé conventionné puis du privé complètement... où les patients paient. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut... il faut investir dans notre réseau public puis s'assurer qu'on donne des soins gratuits ou universels à la population.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup.

Mme Setlakwe : Je ne sais pas si j'ai le temps pour une petite dernière.

Le Président (M. Provençal) :Je vous la laisse.

Mme Setlakwe : Est-ce qu'il y a quelque chose dans le projet de loi... Parce que là on a une belle représentation aussi de la région d'Arthabaska, mais que ce soit cette région-là ou une autre, est-ce qu'il y a quelque chose dans le projet de loi qui pose problème ou qui ne tient pas compte des réalités de la pratique en région? Et à l'inverse...

Mme Setlakwe : ...qui pourrait nuire aux grands centres.

M. Oliva (Vincent) : M. le Président, si vous permettez, je passerais la parole à Docteur Leclercq, qui pourrait nous parler un petit peu des régions.

Le Président (M. Provençal) :...

Mme Leclercq (Corinne) : Oui. Bien, en fait, le projet de loi, je pense qu'il faut faire attention, puis il faut surtout s'asseoir pour se trouver des solutions, qu'on négocie ensemble plutôt que se soit imposé. On en a trouvé, des solutions pour les régions, les plans de contingence qu'on appelle, qu'on appelle les plans de remplacement. Ça fait quand même cinq ans qu'au point de vue des trois spécialités de base, chirurgie, obstétrique et anesthésie, qu'il n'y a pas eu de manque médical à ce niveau-là. Donc, il faut continuer à encourager le volontariat des médecins, peut-être, avec différentes mesures incitatives afin d'amener un apport supplémentaire dans les régions. Et on est bien conscients que toutes ces régions-là ont besoin d'aide.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Alors, M. le député de Rosemont.

M. Marissal : Oui, merci, M. le Président. Merci à vous quatre d'être là. Je n'ai pas beaucoup de temps, là, je vais essayer d'y aller rapidement. Je veux juste faire une mise au point. Le ministre disait tout à l'heure qu'on demande beaucoup aux groupes s'ils ont été consultés préalablement. En fait, je corrige, on n'a même pas besoin de le demander, ils nous le disent, qu'ils n'ont pas été consultés. Ça, c'est la première des choses.

Et le ministre dit : Je ne pouvais pas en parler, mon projet de loi n'était pas déposé. C'est le même ministre qui a rencontré les «top guns» dans un huis clos, à Montréal, avant le dépôt du projet de loi. Je présume que ce n'était pas pour parler de la prochaine saison des sucres, c'était pour parler du projet de loi. Ça fait que je pense qu'on est capables de se parler même si le projet de loi n'est pas déposé, là. Je voulais juste être sûr, là, qu'on se comprenne bien sûr le travail qu'on a à faire ici.

Dr Oliva, il y a combien de vos membres qui se sont désaffiliés de la RAMQ complètement dans la dernière année?

M. Oliva (Vincent) : Écoutez, M. le Président, je ne peux pas vous donner de chiffres exacts, mais c'est marginal, c'est... On parle de centaines de médecins à peu près, là, qui sont sortis du régime d'assurance maladie, donc, sur 10 000 médecins spécialistes.

M. Marissal : Vous dites que l'ouverture vers le privé risque un exode, ça, ce sont vos mots, là, vers le privé. Vous dites par ailleurs que les médecins, en ce moment, n'ont pas accès aux plateaux, ce qui est un fait, là, c'est un fait assez connu, là. Vous avez lu l'article 2 du projet de loi, qui ne fait plus de distinction entre les établissements privés et publics. La fourniture des soins passe par l'un par l'autre indistinctement. Qu'est-ce que vous en comprenez, justement, sachant qu'il y a une offre au privé puis qu'il y a juste un bassin de personnel soignant et de médecins, s'il y en a un qui va au privé, il part du public?

M. Oliva (Vincent) : M. le Président, quand on parle de privé, là, je voudrais être bien clair que vous parlez de privé couvert par la RAMQ, n'est-ce pas? On parle de gestion privée, mais toujours dans le contexte où les patients sont couverts par la Régie de l'assurance maladie. Là-dessus, on a toujours dit qu'on reconnaît qu'il y a un apport du privé. Je pense que, sans le privé, on aurait eu encore plus de difficultés pendant la pandémie. Mais c'est un équilibre extrêmement sensible et glissant. Et il ne faut surtout pas que ça se fasse au détriment de la pratique hospitalière, parce que c'est là que l'activité lourde se fait. Et donc, effectivement, c'est toujours un équilibre qui est dangereux. Nous, on a toujours exprimé de la prudence par rapport à ces milieux-là et je pense qu'il faut que l'on continue à exercer de la prudence.

• (16 h 50) •

M. Marissal : Vous l'avez dit vous-même, vous voudriez opérer plus. Et le ministre dit souvent : Je ne peux pas opérer à la place des médecins spécialistes. Là, ça, c'est rassurant, là, de savoir que le médecin... que le ministre n'opère pas en plus. Mais, cela dit, vous n'avez pas accès à vos plateaux. Alors, vous avez déjà un problème d'accessibilité aux plateaux?

M. Oliva (Vincent) : Absolument.

M. Marissal : Où est-ce qu'il est, l'équilibre sensible et délicat dont vous parlez? Où est-ce que ça casse?

M. Oliva (Vincent) : Quand je parle d'équilibre, je parle de ne pas déshabiller le réseau hospitalier pour habiller les milieux privés.

M. Marissal : Ce n'est pas déjà le cas?

M. Oliva (Vincent) : Écoutez, c'est une discussion plus complexe que ça, parce qu'il y a du personnel qui sont déjà sortis du réseau et qui peuvent être récupérés. Alors, c'est vrai qu'il y a des centres privés comme des CMS qui nous disent : Bien, la majorité de notre personnel, on va le chercher chez du personnel qui a déjà quitté le navire ou qui sont à la retraite ou à la préretraite. Donc, ce n'est pas évident tant que ça qu'il y a un déshabillage. Mais ce qui est sûr, c'est qu'il faut exercer une vigilance là-dessus.

M. Marissal : Et est-ce qu'on devrait minimalement s'assurer qu'un médecin ne se désaffilie pas de façon sporadique, partir avec ses dossiers qu'il a accumulés au public pour aller faire du privé? On s'entend-tu minimalement là-dessus, que ça ne devrait pas se faire?

M. Oliva (Vincent) : Nous, ce qu'on ne souhaite pas, c'est que les médecins quittent le régime public, parce qu'on pense que c'est là qu'on doit investir nos soins et que les médecins doivent être investis. Ceci dit, si des médecins quittent parce...

M. Oliva (Vincent) : ...ils ne sont pas capables d'exercer leur profession dans le réseau public, bien, c'est peut-être qu'il faut améliorer le réseau public et le rendre plus attractif.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Nichols : Oui, merci, M. le Président. Merci. Merci d'être... merci d'être parmi nous. J'ai bien lu le mémoire. J'entends aussi vos représentations. Puis je reconnais, là, qu'il y a... bien, je pense, tout le monde reconnaît, là, qu'il y a une volonté d'améliorer certaines, disons, des lacunes puis qu'il y a une collaboration qui s'installe... qui s'installe aussi. Il y a un petit cas de figure, par exemple, que je suis sûr que vous êtes au courant, dans l'Outaouais, puis je pense que mon collègue de Pontiac en a déjà parlé, de la nouvelle tendance, là, qui s'installe un peu, puis c'est vraiment particulier à l'Outaouais, que les nouveaux spécialistes s'en iraient directement en cabinet plutôt que de passer, justement, par l'hospitalisation, de faire comme prévu. Ils ne font pas de garde en hôpital finalement. Tu sais, moi, ma question, c'est en lien avec la capacité de service, de l'exploiter, de le maximiser. Puis, je pense, évidemment... je suis d'avis que ce n'est pas nécessairement au gouvernement de venir s'en mêler. Je vous vois opiner du bonnet.

M. Oliva (Vincent) : Oui, M. le Président, on est très préoccupés par par la situation dans le réseau, mais en particulier en Outaouais, là. Je suis allé sur place, puis j'ai vu que, là-bas, c'était la tempête parfaite, parce qu'il y a beaucoup de personnel qui a quitté le réseau. Il y a.... aussi, ils sont près de la frontière et puis ils ont des conditions beaucoup plus attractives en Ontario, ce qui fait que, souvent, ils quittent au profit de la province voisine. Donc, c'est clair que ça diminue l'offre de service, et, souvent, les médecins manquent d'accès. Je pense que le bloc opératoire, aux nouvelles récentes, fonctionnait à peu près à 40 %. Ils ont une affiliation avec McGill, puis ils ont renvoyé tous les résidents à McGill, parce que les résidents n'étaient pas capables d'opérer assez pour apprendre. Alors, qu'il y ait des médecins qui quittent l'hôpital puis qu'ils aillent en cabinet parce qu'ils ne peuvent pas exercer, c'est clair que c'est une partie de la raison. Maintenant, on sait que, dans certaines circonstances, il peut y avoir des médecins qui quittent l'hôpital parce qu'ils ne veulent pas la charge de garde. C'est une petite minorité, mais, pour ces exemples-là, pour ces cas-là en particulier, on l'a dit, on est prêts à regarder des activités médicales particulières avec des mesures qui les inciteraient fortement, disons, à retourner en hôpital...

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup.

Mme Nichols : En lien avec les spécialistes.

M. Oliva (Vincent) : En lien avec les spécialistes.

Le Président (M. Provençal) :Merci. Alors, merci beaucoup à la Fédération des médecins spécialistes du Québec et à leurs représentants de votre présence, de votre contribution à nos travaux.

Sur ce, je vais suspendre les travaux brièvement pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16 h 54)

(Reprise à 17 heures)

Le Président (M. Provençal) :Alors, nous allons reprendre nos travaux. J'invite M. le ministre à venir s'asseoir à la table.

Des voix : ...

Le Président (M. Provençal) :Non, non, non. Vous savez, M. le ministre, je veux respecter mon horaire.

M. Dubé : ...

Le Président (M. Provençal) :Exact. Alors, avant toute chose, je demande le consentement pour que le député de Matane-Matapédia puisse prendre la parole en remplacement du député des Îles-de-la-Madeleine. Alors, consentement?

Des voix : ...

Le Président (M. Provençal) :Alors, avec votre permission, je reprends la parole. Ça me fait plaisir maintenant d'inviter la Confédération des syndicats nationaux et le représentant de la Fédération de la santé et des services sociaux de la Confédération des syndicats nationaux. Alors, vous avez un 10 minutes pour votre exposé, et, par la suite, nous procéderons aux échanges. Je vais vous céder immédiatement la parole, madame.

Mme Senneville (Caroline) : Oui, bonjour. Alors, Mme Caroline Senneville, je suis présidente de la CSN. Je suis accompagnée, oui, de Réjean Leclerc, président de la Fédération de la santé et des services sociaux, de Danny Roy, président de la Fédération des...


 
 

17 h (version non révisée)

Mme Senneville (Caroline) : ...professionnelles, Anne Thibault-Bellerose, conseillère syndicale spécialiste de la santé, Jessie Caron, avocate.

Alors, la CSN, si vous ne le saviez pas, est l'organisation qui représente le plus grand nombre de salariés syndiqués dans le secteur de la santé, est la seule organisation syndicale à en représenter dans chacune des quatre catégories.

Donc, nous voici réunis pour parler du projet de loi n° 15, projet de loi qui vise à rendre le réseau de la santé et des services sociaux plus efficace. Bien sûr, comment être contre, hein, le service plus efficace, le réseau plus efficace après tout ce qu'on a connu? Mais justement, revenons-en un petit peu sur tout ce qu'on a connu, puis je pense que ça vaut la peine d'en parler, puis il y a des gens ici qui l'ont vécu.

On n'en est pas à notre première réforme, 1995, virage ambulatoire, 2003, création des CSSS, début de la fusion et ce que j'appellerais l'hôpitalocentrisme dans le réseau de la santé, 2015, création des CISSS et des CIUSSS tel qu'on le connaît, encore plus de fusions, seulement 34 établissements sur l'ensemble du territoire québécois, donc plus de centralisation en même temps qu'on a vécu l'austérité. Aucune de ces réformes majeures là n'a fait l'objet de larges consultations et, en 2003, ça a même été adopté sous le bâillon. Bref, 30 ans de désorganisation.

Notre mémoire présente 34 propositions différentes, je ne les lirai pas, ça serait plate à mort. J'aimerais plutôt mettre l'accent sur trois objectifs que, nous, on s'est donnés par rapport au système, à l'organisation du réseau de la santé.

Le premier qu'on souhaite, c'est vraiment décentraliser. Alors, c'est ce qu'on souhaite, et on sait que ça a été beaucoup porté dans le discours du ministre, mais, honnêtement, on ne le voit pas vraiment dans le projet de loi, ce qu'on voit, c'est la création d'une structure à côté, ce n'est pas parce qu'on déplace qu'on décentralise. Et aussi ce qu'on ne voit pas, puis pour nous, c'est très important, bien sûr, nous sommes un syndicat, c'est la décentralisation des relations de travail. Et les relations de travail, ce n'est pas un détail dans le domaine de la santé, c'est le coeur même. Sans personne, sans salariés, sans employés pour livrer du service, bien, il n'y en a pas. Alors, nous, on s'attendait à ce que la flexibilité souhaitée par le gouvernement puisse... Pour trouver des... des solutions taillées sur mesure dans le milieu de travail, bien ça, on voulait que ça se... ça soit transposé, mais on trouve que ça risque d'être difficile à trouver parce qu'on sent une centralisation, les décisions ne seront pas prises sur le terrain. En fait, au contraire, on voit que la gestion locale, la capacité de prendre des décisions relativement aux relations de travail, on ne le sent pas. Oui, des cadres imputables, mais imputables, ils seront où? Ils feront quoi? Ils seront imputables comment? Quelles seront leurs marges de manoeuvre? Parce qu'au moment où on se parle, tout doit être approuvé par la direction centrale, ce qui donne des toasts qui revolent. Et ça démontre que les établissements, bien, centralisés ne répondent pas à l'objectif de rendre les relations de travail à échelle humaine.

J'aimerais aussi dire que la centralisation par la création d'un employeur unique, pour nous, ça, ça a un effet très centralisateur, notamment des relations de travail, ça va créer de facto, à notre avis, la fameuse liste d'ancienneté unique qui va permettre la mobilité, ce n'est pas qu'on soit fondamentalement contre, mais on trouve que le vrai problème dans la santé, c'est plus l'attraction ou la rétention de la main-d'œuvre que la mobilité de la main-d'oeuvre. Et quand on aura cette mobilité de main-d'oeuvre là, mais peut-être que ça aura des effets inconnus, voire pervers. Quelle sera l'attractivité, par exemple, des grands centres par rapport aux régions, ou vice versa? Nul ne le sait.

Mais, pour l'instant, j'aimerais quand même aussi défaire un mythe, là, des tables de négociation nationales, il n'y en a que sept, ça répond aux quatre catégories d'emplois selon l'affiliation nationale... selon l'affiliation syndicale, pardon, et on est... on est très loin des 130 annoncées dans les médias et beaucoup plus proche de ce que le ministre souhaitait avec quatre tables.

Deuxième objectif qu'on souhaite pour la santé, la déprivatisation. On parlait, tout à l'heure, on a vu les médecins, là, monsieur, il a posé la question sur l'article 2, moi, c'est l'article 647 qui m'a fait tiquer, où on parle du marché des services de santé, alors, pour nous, oui, c'est une marchandisation, c'est même une version mercantile de la santé. Ce n'est pas nouveau, depuis des décennies, la part du privé augmente dans la prestation de services. Puis, au moment où on se parle, il y a des services pour lesquels la population n'a tout simplement pas accès si elle n'a pas d'assurance collective, coûts d'assurance collective qui augmentent d'ailleurs année après année, des soins dentaires, des soins psychologie, des soins de physiothérapie, si vous n'êtes pas assurés, vous n'en avez pas. Le projet de loi n° 15 prévoit de nombreux articles qui viennent encadrer les entreprises privées, ça prévoit même des sanctions administratives et pénales, nous accueillons cela très favorablement, mais l'existence même de cette... de cette surveillance, est-ce qu'elle ne montre pas de facto que les dérapages du privé existent? Projet de loi numéro 10 qui a voulu mettre fin aux agences, le...

Mme Senneville (Caroline) : ...la problématique avec les entreprises privées, c'est d'abord un problème de transparence. Qu'est-ce qu'ils font avec l'argent qu'on leur donne? Et il y a eu plein d'études. On pourrait faire quelques thèses de doctorat sur combien coûtent plus cher. Chose certaine, ils se réservent une marge de profit. Et nous, on pense que ce n'est pas une bonne utilisation des deniers publics que d'offrir des profits à même nos deniers à des gens qui font de l'argent avec la maladie des gens. Ce qu'on... on ne veut certainement pas perde de l'expertise au sein du public et on craint que le projet de loi, tel qu'il est écrit, laisse au privé les profits et au public la charge d'administrer et de surveiller, la charge administrative, de surveiller le privé, sans parler du risque de cannibalisation des ressources. On le sait, on est en manque de main-d'œuvre. Alors, si les gens vont... quittent déjà le navire, si on leur offre un radeau de sauvetage pour quitter encore plus vite le navire, bien, on n'est pas sortis de l'auberge.

Troisième grand objectif, la démocratisation. On se pose la question : Quels seront les processus démocratiques qui vont permettre aux élus de questionner le P.D.G. ou le conseil d'administration de Santé Québec? Est-ce que ça servira de paravent, de fusible? Quand tout va sauter, on fera sauter le fusible. Est-ce que ça va amener une déresponsabilisation? Est-ce que... Comment va vivre la coopération entre les ministères? Par exemple, je pense au ministère de la Famille, au ministère de la Santé, pour avoir... pour agir en prévention, pour avoir une vision globale et 360 du système de la santé. Parce que notre système de santé, c'est bien plus qu'une offre de soins et de services. Notre système de santé, c'est une richesse collective qui appartient à l'ensemble de la population du Québec qu'on s'est donné il y a une bonne cinquantaine d'années. Alors, il faut la maintenir. Il faut que ça demeure public et accessible. Et, en ce sens là, il faut très certainement que le C.A. soit constitué de la collectivité dans toute sa diversité, donc des administrateurs qui viennent de la société civile et qui font aussi que les employés sont représentés au sein de ce conseil d'administration là.

Et, plus fondamentalement, je vais me replacer dans la même séquence qu'au début. Oui, c'est une réforme majeure, plus de 1 200 articles. D'ailleurs, c'est un peu cruel de nous demander de faire quelque chose en 10 minutes là-dessus, mais, bon. Nous, on pense que ça aurait demandé une large consultation de type états généraux, un endroit où l'ensemble de la population aurait pu partager les objectifs, partager les solutions présentées, ce qui aurait amené une plus grande adhésion. Et je n'ai pas terminé, je vais laisser mes camarades faire un témoignage, en commençant par M. Roy.

Le Président (M. Provençal) :Il reste deux minutes.

• (17 h 10) •

M. Roy (Danny) : Pour nous, la promesse-phare du ministre sur la décentralisation et devenir un employeur de choix sont intimement liés. Je vais vous expliquer. Quand j'ai intégré le CLSC de la Jacques-Cartier dans les années 90, il était un employeur de choix. Mon supérieur immédiat détenait de véritables pouvoirs sur l'organisation des services. Je connaissais tous mes collègues et membres de la direction. Nous adaptions rapidement nos services afin de répondre aux besoins de notre communauté. Avec les multiples fusions centralisatrices, mon employeur s'est peu à peu transformé en une structure hiérarchique lourde et lointaine. Pour nos membres, les services ont perdu de leur sens, de la proximité, de la cohérence et de l'adaptabilité. Pire encore, avec la multiplication de la reddition de comptes, les intervenants ont perdu du temps d'intervention et perdu de l'efficacité. Aujourd'hui, je suis le numéro d'employé 299 279 aux côtés de 15 000 collègues. Comment est-il possible de penser qu'en centralisant davantage les pouvoirs, qu'en créant un employeur avec 300 000 personnes, vous arriverez à des résultats différents de vos prédécesseurs?

M. Leclerc (Réjean) : Pour l'heure, l'orientation ministérielle ainsi que le projet de loi nous inquiètent grandement en mettant le service public au même niveau que le privé, d'autant que nous le vivons dans d'autres catégories, notamment en hébergement et en préhospitalier. On prétend à la gratuité parce que les coûts facturés sont assumés par la RAMQ, la Régie de l'assurance maladie, mais on assiste à un dangereux glissement vers l'américanisation du système québécois et, à preuve, le récent... l'adoption récente du règlement en télémédecine, qui crée une brèche sans précédent. Le projet de loi, via son agence unique, va consacrer le lien de dépendance avec le privé, qui est à la recherche de profit à tout prix. Il est même de notoriété publique que le personnel est épuisé et désabusé et on s'attendait à du support et non pas à une gestion axée sur le contrôle de type «top down» avec un gestionnaire «top gun», car c'est la réforme de la dernière chance. Il faut bien faire les choses, prendre le temps de les faire...

M. Leclerc (Réjean) : ...et l'exercice d'aujourd'hui ne nous permet pas d'aller au fond des choses compte tenu des enjeux fondamentaux et du temps imparti.

Le Président (M. Provençal) :Merci pour votre présentation. M. le ministre.

M. Dubé : Merci, M. le Président. Alors, Mme Senneville, et vos collègues, je veux vous remercier parce qu'un peu comme je l'ai dit dans certaines présentations, c'est quand même peut-être la première fois qu'on se voit en réel plutôt qu'en Teams, et vous et vos équipes avez été excessivement importantes, là, dans les dernières années qu'on a vécues ensemble. Et je veux vous remercier de tout le travail qui a été fait, je tiens à le souligner.

Moi, je vais me concentrer sur l'organisation du travail parce que je pense que c'est un point thème, là, de ce qui va nous permettre de trouver des solutions dans les prochaines semaines, prochains mois pour faire débloquer cet important projet de loi là. Je vais revenir sur quelques-uns de vos commentaires, parce que, là, on va parler... moi, je parle toujours pour les patients, mais là on va parler des employés, bon. Quand on entend... Parce que des employés heureux, ça rend les patients heureux, alors c'est pour ça qu'on parle beaucoup de l'employeur de choix versus l'expérience patient. Sur l'employeur unique, moi, je veux juste... vous avez dit quelque chose sur la mobilité puis je veux juste bien comprendre. Vous avez dit : Ce n'est peut-être pas la priorité d'avoir la mobilité qu'on appelle réseau, mais c'est quand même quelque chose qui est demandé par, entre autres, les infirmières depuis longtemps. Moi, ce que j'aimerais vous entendre, rapidement, là, parce que j'aurai d'autres questions... Si c'est ça que les infirmières veulent être capables d'avoir, une ancienneté réseau qui serait reconnue, c'est quoi qu'il faudrait faire pour qu'on puisse le donner, mais d'avoir, je ne sais pas, moi, une transition nécessaire pour que ça ne  vienne pas, peut-être, enlever du personnel à Montréal au détriment peut-être des... J'aimerais vous entendre là-dessus, parce que, d'un côté, vous me dites : Ce n'est pas la priorité, mais moi, ce que j'entends sur le terrain, les gens disent : Oui, on veut ça. Alors, je veux vous entendre là-dessus parce que, pour moi, c'est important.

Le Président (M. Provençal) :Mme la Présidente.

Mme Senneville (Caroline) : Oui, j'essaie d'allumer mon micro.

Le Président (M. Provençal) :Non, ça va.

Mme Senneville (Caroline) : Ah! O.K.. Ah oui, c'est ça. C'est contre-intuitif, une lumière rouge. On l'a déjà demandé en négociation, la... il y a 40 ans de ça. Bien, je l'ai dit, je pense qu'avant de faire bouger les gens il faut d'abord les attirer, les retenir. Ça, c'est vraiment important. On ne le sait pas, quel effet ça va avoir. Vous savez que, si vous travaillez à Montréal dans une cuisine d'hôpital, vous n'avez pas d'argent pour vous payer un logement. Alors, qu'est-ce qui va se passer par rapport à ça? Tu sais, on l'a vu quand il y a eu des travaux dans le pont-tunnel Lafontaine, il y a des gens qui ont carrément démissionné du secteur public pour aller travailler sur la Rive-Sud parce qu'ils se disaient... Alors, qu'est-ce que ça va donner si les gens peuvent aller où ils veulent? Nous ne le savons pas. C'est juste ça qu'on dit par rapport à l'ancienneté réseau ou à la mobilité complètement dans le réseau. Alors...

M. Dubé : Mais est-ce que ça pourrait être, au contraire, un facteur d'attraction? Parce que, quand je regarde... Regardez, on a répondu à votre demande, de façon générale, de limiter l'utilisation des agences, O.K., parce qu'un des facteurs d'utilisation des agences, c'était que les gens pouvaient travailler où ils voulaient, il n'y avait pas de problème de mobilité. Alors, moi, c'est pour ça que je vous redemande. Je comprends, vous dites, pour vous, ce n'est pas une priorité, mais ce que j'entends, c'est que c'en est une. Est-ce que ça ne pourrait pas être un facteur d'attraction parce qu'on donnerait cette mobilité-là aux employés? Parce que, si ça fait 40 ans que c'est demandé...

Mme Senneville (Caroline) : Non, on l'a demandé il y a 40 ans.

M. Dubé : Ah bon, O.K., mais, en tout cas, il y en a d'autres qui l'ont demandé plusieurs fois aussi, là.

M. Leclerc (Réjean) : Mais c'est un peu comme certains autres groupes avant nous qui distinguent ce qui pourrait se négocier, parce que c'est vraiment ce à quoi vous faites référence, de ce qui se retrouve dans une loi. Honnêtement, là, présentement, là, puis je vais... on se l'est déjà dit, la négo, c'est un endroit, ici, on est dans un autre, mais ça n'a pas été demandé. Le ministère, le Conseil du trésor, personne n'est en demande, et là on vient ici, on lit un projet de loi sur quelque chose qui n'a jamais été demandé, de un. De deux, il faut faire des tests, il faut voir quel sera... parce que, pour une catégorie...

M. Dubé : Bien, c'est pour ça que je vous demande s'il y a une période de transition qui pourrait être faite. Parce qu'ouvrir les portes de la mobilité réseau du jour au lendemain, pas sûr que c'est la bonne chose. Auriez-vous une... Étant donné que c'est une demande importante des infirmières, entre autres, auriez-vous une ouverture à ce que ça puisse se faire avec une période de transition?

M. Leclerc (Réjean) : Demandons-le au bon endroit, M. le ministre.

M. Dubé : Parfait. Puis je suis d'accord avec vous, parce que, comme j'ai dit aux gens qui vous ont précédés, on...

M. Dubé : ...il n'y aura pas ça demain matin. On a encore des semaines de discussions à avoir, ça fait que j'ai de l'ouverture à en parler. Moi, ce que je veux comprendre. Parce que l'employeur unique... puis on va en reparler beaucoup avec mes collègues de l'opposition dans les prochaines semaines, prochains mois, l'employeur unique a des avantages et a entre autres, un avantage pour nous comme employeur. Je le dis, là, pour l'employeur, d'avoir... je vais appeler ça une simplification de la gestion syndicale. Bon. De passer... d'avoir un certain nombre de syndicats par catégorie, puis en fait, vous êtes dans les quatre catégories d'emplois. Qu'est-ce qui vous dérange le plus dans ça? Est-ce que c'est de perdre, par exemple, des gens qui sont... par exemple ce qu'on appelle en liberté... en libération syndicale? Vous avez... Mais je veux vous entendre là-dessus parce que moi, je l'entends beaucoup sur le terrain, puis je veux en profiter. Je ne sais pas combien vous avez de personnes qui sont en libération syndicale, mais pensez-vous que d'aller à un employeur unique, vous allez perdre le nombre... un nombre de personnes important qui sont en libération syndicale?

Mme Senneville (Caroline) : Bien moi, je vais répondre sur le bout... pas pantoute, parce que...

M. Dubé : O.K... mais vous en avez combien? Juste...

Mme Senneville (Caroline) : Non, non, mais je veux dire... Je ne le sais pas, mais, je veux dire, il reste le même nombre de salariés puis le même nombre de problèmes à régler.

M. Dubé : Donc, donc, ce que vous me dites, c'est que, si, je ne sais pas, vous avez 200 ou 300 personnes qui sont en libération syndicale, le fait d'aller en employeur unique, ce n'est pas ça qui va changer?

Mme Senneville (Caroline) : Pas nécessairement, absolument pas...

M. Roy (Danny) : Monsieur Dubé, le problème de l'employeur unique, ça n'a rien à voir avec les libérations syndicales.

M. Dubé : Bon, mais c'est parce que j'essaie de...

M. Roy (Danny) : ...mais que je vous apporte la réponse. Vous êtes directement, exactement... Vous avez dit : C'est bon pour la gestion, on va gérer plus facilement. Dr Couillard puis Dr Barrette pensaient exactement la même affaire. Qu'est-ce qui est arrivé dans le réseau de la santé puis des services sociaux? On est de moins en moins attractifs, M. Dubé.

M. Dubé : Mais moi, je vais vous retourner la balle parce que... puis c'est important, je sais qu'on n'a pas beaucoup de temps pour discuter, mais je veux que ça soit un sujet de discussion dans les prochaines semaines. Quand on a un employeur unique puis on peut avoir une convention à l'échelle nationale, on peut garder, comme vous venez de dire, des éléments à l'échelle locale. Puis je prends un exemple. Je prends un exemple. Lorsqu'on parle d'organisation du travail, puis c'est là-dessus que vous insistez. Moi, ce que j'ai de la misère à comprendre, c'est comment ça se fait quand on veut, par exemple, faire des horaires de 12 heures, si c'est ça que les infirmières veulent, puis je le dis, là, parce que je suis allé spécifiquement à l'Hôpital de La Pocatière pour comprendre comment ça se fait que... des réseaux au niveau local, ces gens-là ont été capables d'avoir des horaires de 12 h alors que, souvent, c'est le syndicat local qui est le Bloc. Je suis très direct avec vous, là. Moi, cette simplification-là que ça devienne... puis je vais peser mes mots, que ça ne devienne plus un choix syndical, mais un choix individuel. Êtes-vous d'accord avec ça que quelqu'un qui veut avoir un horaire de 12 heures pour lui permettre d'avoir une meilleure conciliation travail-famille... est-ce que ça devrait être un choix syndical ou un choix individuel?

M. Leclerc (Réjean) : Bien, moi, je vous dirais, M. le ministre, en toute objectivité, le système, le régime de relations de travail implique qu'il y a un agent négociateur. Ça, c'est le premier... la première chose. Il n'y a pas des individus qui négocient leurs propres conditions de travail, c'est les représentants.

M. Dubé : Mais ce n'est pas ça ma question.

M. Leclerc (Réjean) : Je vais vous répondre, je suis en train de vous répondre. Si le projet de changer des horaires dans un établissement donné se dépose à une table et que les discussions ont cours, il faut qu'on soit en négociation. Et là votre... le régime des négociations local empêche cette dynamique-là, parce qu'on est dans des matières locales, vous comprenez, puis vous savez de quoi je parle. Parce que le régime de négociation, vous le connaissez bien.

M. Dubé : Mais ce que je veux que les...

• (16 h 20) •

M. Leclerc (Réjean) : Donc il y a des matières nationales puis il y a des matières locales.

M. Dubé : Je comprends très bien, mais je veux que les Québécois qui nous comprennent, là, parce que, là, on rentre un peu dans... excusez, là, je vais utiliser, là, une... baseball dans des choses très techniques, là, mais moi, j'ai de la misère à accepter qu'une infirmière qui, localement, voudrait participer à de la gestion locale de son horaire, d'être capable... Pourquoi ça devrait être le syndicat qui lui interdise ça, alors que, si elle veut le faire et que ses collègues de travail veulent le faire, pourquoi qu'on ne s'adapterait pas à cette demande-là locale?

Mme Senneville (Caroline) : Oui, tout à fait, mais ce n'est pas l'employeur unique qui va faire... qui va permettre ça. Les relations de travail, là, il y a le mot relation, il faut qu'on se parle. Puis d'ailleurs, les dispositions locales, là...

M. Dubé : Donc, vous êtes d'accord...

Mme Senneville (Caroline) : ...elles nous ont été imposées en 2003 sous bâillon, ce n'est pas nous qui les avons demandées, ça fait que... ces négociations locales là. Alors...

Mme Senneville (Caroline) : ...l'employeur unique, est-ce que ça va faire que tout le monde va négocier la même affaire en même temps que la Côte-Nord puis à Montréal-Nord? Ce n'est pas parce qu'on a le mot «nord» dans le mot que c'est la même chose.

M. Dubé : Non, non, mais ce n'est pas... mais, Mme Senneville...

Mme Senneville (Caroline) : Puis des relations de travail, ça se fait sur le terrain, ça se fait quand il se passe quelque chose ici, maintenant.

M. Dubé : Oui.

Mme Senneville (Caroline) : Il faut qu'il y ait un cadre qui soit capable d'être responsable, il faut qu'il y ait un vis-à-vis syndical pour dire : Aïe! Chose, on a un problème, comment on le règle? Ensemble, parce que sinon, c'est là qu'il se passe des affaires de toasts au beurre de pinottes puis de griefs.

M. Dubé : Mais je vous ai... mais je vous ai posé une question, mais je n'ai pas eu la réponse, là. Je veux qu'on se comprenne bien. Êtes- vous d'accord avec le principe qu'un employé qui veut avoir une gestion locale de son horaire, d'être capable de faire un 12 heures, que ça devrait être une décision individuelle et non syndicale? Êtes-vous d'accord avec ça?

Mme Senneville (Caroline) : À partir du moment où on est syndiqué, on est dans un régime collectif de relations de travail.

M. Dubé : Donc, vous dites non.

Mme Senneville (Caroline) : Mais le régime collectif peut prévoir qu'il y a des individus...

M. Dubé : O.K.

Mme Senneville (Caroline) : ...qui a des choix.

M. Dubé : Donc, ça veut-tu dire... et là, je vais être malcommode, là.

Mme Senneville (Caroline) : Oui.

M. Dubé : Ça veut-tu dire que l'intérêt syndical est plus grand que l'intérêt de l'employé?

Mme Senneville (Caroline) : C'est... Mais la loi... Bien là, on va se... D'abord, là, on va commencer. La liberté d'association, c'est prévu aux chartres. O.K.? La liberté de négocier, la liberté de faire des moyens de pression pour avoir un vrai rapport de force en négociation, full pin Cour suprême. Je m'excuse, Jessie, si je te vole ton scoop,  mais ça, ça existe dans la vie. O.K., et ça existe pour une raison, c'est pour éviter l'arbitraire et le favoritisme, et ça aussi, ça existe dans le milieu de travail. Alors, tout se négocie.

À partir du moment où il y a un patron vient voir un syndicat en disant : On a telle difficulté, on veut rencontrer tel objectif. Nous, on va répondre présent, et il n'y a rien dans la vie qui ne se négocie pas. Puis est-ce qu'on peut négocier que des infirmières qui veulent 12 heures? C'est possible, oui, et on va le faire dans tel cadre.

M. Dubé : Donc, votre réponse, c'est oui.

Mme Senneville (Caroline) : Mais, dans le régime qu'on a actuellement, c'est impossible de faire des négociations locales si l'employeur et le syndicat ne se mettent pas d'accord. Et l'employeur peut tout aussi bien que nous s'asseoir sur son bacon puis dire : Non je ne les rouvre pas, les négociations locales. Et ça, ce n'est ni vous ni moi, je le répète, bâillon, 2003.

M. Dubé : Bon, on essaie... On ne va pas trouver un coupable, mais on va essayer de trouver une solution. Moi, ce que je vous demande, puis c'est pour ça que je vous donne un exemple de terrain que je n'ai pas vu il y a six mois, là, j'ai a vu ça hier, j'ai vu ça hier à La Pocatière, des jeunes infirmières qui ont dit : Nous, notre choix, c'est ça, puis on s'est déjà fait bloquer. Moi, je veux comprendre. On veut de l'attraction du personnel, on veut de la rétention du personnel. Dites-moi là, c'est quoi les solutions à ça? Moi, je pense que p. l. 15 amène des solutions dans une simplification de l'environnement syndical. Je pense que ça amène ça et je veux que vous me dites qu'est ce que ça n'amène pas si on n'est pas capable. Puis ça, c'est important, Mme Senneville. Là, vous le savez, il faut trouver une façon de retenir notre personnel, puis c'est ça qu'ils veulent, bien. Je pense qu'il faut leur donner ces outils-là.

Le Président (M. Bachand) :M. Roy.

M. Roy (Danny) : Je... Vous avez dit tantôt «simplification de gestion, c'est ça que le p. l. 15 amène». Simplification de gestion, ça n'apporte rien pour les personnes salariées. J'étais à la dernière table de négociation, on a demandé énormément...

M. Dubé : Je ne suis pas sûr que je comprends votre...

M. Roy (Danny) : On a demandé énormément...

M. Dubé : Répétez-moi ça, là.

M. Roy (Danny) : Oui. Simplification de gestion pour vous, ça ne veut pas nécessairement dire que ça apporte un meilleur employeur pour les personnes salariées. À la dernière négociation, M. Dubé, on a déposé plein de demandes pour plus de souplesse pour l'organisation du travail puis la conciliation travail-vie personnelle, et votre gouvernement les a bloquées parce qu'il avait peur que les services ne soient pas rendus à la hauteur. Et quand vous dites que ça va simplifier d'avoir ça dans un grand... Dans une grande négociation nationale, c'est faux. Vous allez arriver à des principes de façon générale qui ne seront pas utiles dans des milieux comme la Côte-Nord ou Montréal-Nord.

M. Dubé : Mais c'est ça que j'ai de la misère à comprendre, puis encore une fois, là...

M. Roy (Danny) : On peut vous l'expliquer.

M. Dubé : Oui, oui, non, non. Mais c'est pour ça que je vous pose les questions. Il y a des endroits où, en ce moment, quand ça se fait selon une bonne négociation, c'est possible. Et pourquoi ce droit de blocage là, là? Là, vous dites : Des fois il vient de l'employeur ou il vient... mais ce n'est pas un choix personnel. C'est ça, moi, que j'ai de la misère à comprendre puis que je vais vous dire bien des employés disent souvent : Comment ça se fait qu'on ne peut pas trouver des solutions à ça.

Mme Senneville (Caroline) : Vous savez, nos demandes de négociation, puis une entente de principe, c'est voté en assemblée générale, un membre, un vote. Ça, là, ce n'est pas se promener dans un corridor d'hôpital et d'entendre des commentaires aussi valables peuvent-ils être.

M. Dubé : Mais, là, là, je vous demanderais de... oui, O.K.

Mme Senneville (Caroline) : Oui. Mais c'est une méconnaissance. Tu sais, nous, là, on fait ça puis on fait... Dans le système de santé, on fait des assemblées générales qui durent sur quatre jours, on couvre les trois quarts de travail, on fait ça de nuit, puis à un moment donné, le vote monte, le...

Mme Senneville (Caroline) : ...le monde vote, pardon. Est-ce qu'il y en a qui ne sont pas satisfaits? Peut-être. Puis est-ce qu'on peut changer? Bien oui, mais on négocie à tous les trois ans, on le fera.

M. Dubé : Bien, c'est ça. Mais je veux... je veux qu'on se comprenne, là, juste, c'est important aujourd'hui, parce qu'on aura le temps de continuer là-dessus. On ne veut pas changer la mécanique aujourd'hui. Ce qu'on fait avec le projet de loi n° 15, c'est de dire : À la prochaine convention collective. Ça, il faut que tout le monde comprenne ça. Ce n'est pas la convention qu'on fait en ce moment. La convention que Mme LeBel négocie avec vous est négociée présentement. Celle dont on parle ici, dans p. l. n° 15, c'est pour la prochaine fois. On va respecter toutes les règles de négociation, on ne veut pas changer les règles actuelles, ça sera à la prochaine.

Maintenant, ce que je dis, vu qu'on a le temps de se préparer puis vu qu'on a besoin de trouver des façons d'attirer, moi, je me dis : Est-ce que la simplification de passer à un employeur unique, la simplification pourrait nous aider? Si vous me dites non, on va continuer d'en parler, mais, moi, ce que j'entends des employés, c'est qu'ils voudraient avoir... que leurs choix individuels, là, je le répète, soient beaucoup plus respectés une fois que la négociation au niveau national ou local soit faite. On pourra avoir la chance d'en parler. Je ne sais pas s'il me reste...

Mme Senneville (Caroline) : ...des gestionnaires qui auraient à gérer plein de choix individuels.

M. Dubé : Bien, mettez-les au...

Mme Senneville (Caroline) : Je vous le dirais, là, on a négocié des primes, ça a pris deux mois avant que ça paraisse sur la paie, là, parce que c'était très lourd.

M. Dubé : Mais, Mme Senneville, mettons... Mais mettons nos gestionnaires au défi d'être capables de...

Le Président (M. Provençal) :La discussion va être terminée, M. le ministre. On va laisser la parole au député de Pontiac. 

M. Fortin :Merci, M. le Président. Je trouve... je trouve l'échange intéressant que le ministre nous dise : Ah! mais l'infirmière devrait avoir un droit de... un droit de regard sur son horaire individuel, sur des heures qu'elle veut faire, par exemple, quand, à La Tuque, il n'y a pas très longtemps, c'était exactement le contraire qu'on a fait, il y a des infirmières qui avaient des horaires de 12 heures qu'elles appréciaient, puis le gouvernement les a forcées à changer leurs horaires, puis que... Et le ministre nous dit : L'exemple de La Pocatière, j'étais à La Pocatière hier, oui, il était aussi dans le Centre-du-Québec il y a quelques jours, puis il y a des infirmières qui ont refusé de lui parler parce qu'il était en train d'imposer, à travers le CIUSSS de la Mauricie-Centre-du-Québec, des conditions de travail qui sont loin d'être, disons, souhaitées ou acceptables par des infirmières, puis il nous dit que c'est un modèle qu'il veut exporter à la grandeur de la province. Alors, disons que pour... pour ça, M. le ministre, on va repasser.

Mais je vous l'avoue, là, l'échange que vous venez d'avoir... Puis je vous salue. Désolé, je ne vous ai pas salués. Mais l'échange que vous venez d'avoir avec le ministre, c'est un peu... c'est un peu chaotique comme échange, là. Donc, je veux juste vous donner l'opportunité, là, la question de l'employeur unique, là, c'est quoi, votre grande préoccupation, là? Mettez-la sur la table pour qu'on comprenne tous d'où vous venez, là.

• (16 h 30) •

Mme Senneville (Caroline) : Diminution du sentiment d'appartenance, diminution de la loyauté, incompréhension par rapport à la mission. Puis c'est exactement ce que mon collègue a dit, on a fusionné, fusionné, fusionné. Les gens, là, avant, ils travaillaient dans tel département, de tel hôpital, ils savaient pour quoi ils se levaient le matin puis pour qui ils travaillaient, puis, s'ils avaient des difficultés, ils pouvaient en parler à quelqu'un qui était capable d'entendre le problème. Maintenant, tout ça est noyé dans une masse informe. Sur la Côte-Nord, on est... Tu sais, on parle de la mobilité, là, mais la mobilité, elle est possible sur la Côte-Nord sur 1 400 kilomètres de côte, et je suis bardassée d'un jour à l'autre, d'une mission à l'autre. Puis ce n'est pas la même chose d'être préposé aux bénéficiaires dans un hôpital que de l'être dans un CHSLD, par exemple.

Alors, c'est ça qu'on craint avec une gestion «top down», avec des «top guns», mais c'est vraiment ça. Il faut que les milieux... Puis c'est autant pour les cadres, hein, on veut rajouter des cadres intermédiaires, il faut qu'il y ait une marge de manœuvre puis il faut qu'il y ait... Des relations de travail, c'est un miroir. Il faut que le cadre, quand il veut régler une problématique là, là, qu'il soit capable d'appeler quelqu'un au syndicat aussi qui a une marge de manœuvre puis qui est capable de dire : Aïe! Là, on a un problème, comment on le règle? Parce que sinon, tout ce qu'on fait, là, c'est des griefs qui s'accumulent, qui coûtent cher à plaider notamment pour la partie patronale. Et ça crée de l'insatisfaction, et les gens quittent le réseau pour ça, parce qu'ils ont l'impression d'être dans un magma.

M. Fortin :Le ministre utilise toujours cette... Je m'excuse, M. Leclerc, allez-y.

M. Leclerc (Réjean) : Ah! excusez. Moi, je voulais juste rajouter : plusieurs experts établissent l'efficacité à travers des plus petits groupes qu'on appuie, que la gestion appuie pour dispenser des soins et des services, alors que là on nous parle d'un employeur unique qui va se retrouver de la rivière aux Outaouais jusqu'à baie de Gaspé avec une vision mur-à-mur. C'est incompatible, c'est incompatible.

M. Fortin :O.K. Le ministre utilise souvent l'exemple pour dire que son projet de loi, c'est un projet loi décentralisateur de... Bien, il va y avoir des... il va y avoir un gestionnaire, là, dans un hôpital, un CLSC, un CHSLD. Est-ce que vous...


 
 

17 h 30 (version non révisée)

M. Fortin :...quoi que ce soit, dans le projet de loi, qui nous ferait croire que ces gens-là ont, un, des pouvoirs de décision locale, des moyens de décision locale puis des moyens d'échanger avec vos instances également, là.

M. Roy (Danny) : Mis à part ce qu'il y a à l'article 132, c'est très faible. Et puis on a essayé de trouver des façons de suggérer des recommandations, et c'est tellement à contresens, la décentralisation, au projet de loi, qu'on est incapables de trouver des prises pour le faire. J'ajouterais aussi, sur l'employeur unique, voilà pas plus tard que deux semaines, on a rencontré les techniciennes en imagerie médicale de Sainte-Justine, et la plupart ont dit que, s'ils pouvaient sortir de Sainte-Justine, parce qu'ils font une heure de voiture le jour... le matin et le soir, ils le feraient d'emblée. Il y avait un réel danger d'une pénurie de techniciens en imagerie médicale à Sainte-Justine. C'est un autre élément qu'il faut vraiment analyser avant de prendre... mettre en place l'employeur de choix.

M. Fortin :Mais ça, c'est un peu ce que le CUSM nous disait ce matin, également, là, dans les pages du journal, là. Mais donc, si je comprends bien votre point sur ce mouvement-là par rapport à l'ancienneté, mouvement potentiel là des techniciennes de Sainte-Justine, des professionnels du CUSM ou d'ailleurs... Et même, le ministre l'a évoqué, tantôt, il disait :  Je ne suis pas certain que c'est une bonne affaire. Mais il faudrait peut-être faire attention, là, avant d'adopter une loi qui le décrète sans avoir les balises nécessaires. Vous n'avez pas vu, vous, vous n'avez jamais lu une étude qui dirait exactement ce qui se passait? Parce que là, on a les gens du CUSM, qui, d'un côté, nous disent : Aïe! ça aurait un impact chez nous, on a un exemple que vous amenez ici, mais on ne l'a jamais mesuré, ça, à savoir qu'est-ce que ça donnerait. Alors, je comprends que c'est un peu ça, votre propos, c'est : est-ce qu'on peut faire le travail nécessaire pour savoir qu'est-ce que ça va avoir comme impact avant de l'adopter, juste comme ça?

Mme Senneville (Caroline) : Tout à fait. Ce n'est pas une opposition de principe, mais c'est qu'une fois que c'est mis en place puis que les effets pervers se font sentir... Bien, peut-être qu'on est mieux d'agir en prévention.

M. Fortin :Vas-y, Michelle.

Mme Setlakwe : ...j'ai peut-être une question, parce que vous avez fait allusion au règlement récent sur la télémédecine, vous avez des craintes par rapport à ça. J'aimerais ça que vous élaboriez, s'il vous plaît, sur... parce que... en tout cas, moi, ce que j'entends, puis j'ai parlé à une institution hospitalière qui l'a mise en œuvre, puis on voit que ça va se... Je vois, personnellement, des éléments intéressants. Qu'est-ce qui vous inquiète?

Mme Senneville (Caroline) : Bien, on est tout à fait pour la télémédecine. Le problème, c'est que quand on ne fait pas de télémédecine et qu'on est médecin au Québec, on doit choisir si on est public ou privé. Quelqu'un qui fait de la télémédecine peut faire les deux. Alors, pour nous, c'est un cheval de Troie, là, dans notre système de santé publique.

Mme Setlakwe : Dans ce sens-là, ça va créer une brèche, selon vous?

Mme Senneville (Caroline) : Bien oui. Ça a créé une brèche. Le règlement a été adopté.

Mme Setlakwe : Est-ce que... Là, vous avez énormément de recommandations? Vous avez annoncé trois grands objectifs, mais est-ce qu'il y a quelque chose de très positif qui ressort du projet de loi? Bien là, le négatif, vous en avez parlé beaucoup, mais qu'est-ce qui est positif, selon vous, et qui va permettre d'améliorer l'efficacité du système?

M. Leclerc (Réjean) : Bien, c'est une question de vision. L'intention est de réformer la façon de faire que le ministre Barrette a mis de l'avant, le ministre Barrette a centralisé. Et là on centralise davantage. Je pense que l'idée d'ouvrir à des discussions beaucoup plus larges, d'intégrer tous les acteurs pour changer le fondement de centraliser et de donner autant de place au privé qu'au secteur public, viendrait placer cette opportunité d'améliorer le système, pas seulement à travers l'organisation administrative du système, mais à travers toutes les composantes, y compris la délivrance des services, en services sociaux, en hébergement, en santé. Ce n'est pas seulement l'hôpital. C'est important, l'hôpital, mais il y a aussi plein d'autres aspects du système qui nous permettent d'éviter d'hospitaliser, notamment les personnes âgées, notamment l'hébergement, qui, elle, est très privatisée, en ce sens qu'il y a beaucoup de fournisseurs qui sont au privé, puis on l'a vu, lors de la pandémie, comment ça a causé beaucoup de problèmes, parce qu'il y avait un manque de services, les services n'étaient pas égaux entre eux.

Mme Senneville (Caroline) : L'ajout de cadres, tout... selon ce qu'ils font, où est-ce qu'ils sont, puis... c'est bon, mais peut-être aussi de revamper les missions, parce que tout a été centré, grâce... Tu sais, ce n'est pas la même chose, être dans un centre jeunesse, ce n'est pas la même mission, ce n'est pas... Les CLSC. Pour nous, on est déçus aussi de voir qu'il n'y a pas un rôle renforcé des CLSC. Un GMF n'est pas un CLSC, ils font beaucoup moins de choses que fait un CLSC. Alors, peut-être cette vision-là de vouloir mettre des cadres, qui pourront valoriser aussi les autres missions que celles de l'hôpital.

Mme Setlakwe : Merci.

Le Président (M. Provençal) :Alors, je vais maintenant céder la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Bonjour à vous cinq, je ne vous nommerai pas, je n'aurais plus de temps pour poser des questions après, mais je vous salue, néanmoins...

M. Marissal : ...sur l'employeur unique, un des craintes que j'entends beaucoup sur le terrain, à Montréal, en particulier dans l'est de Montréal, c'est qu'une forte proportion des employés n'habite pas Montréal, surtout les plus jeunes, parce qu'ils n'ont pas les moyens d'acheter, ni même de louer, ça fait qu'ils sont l'autre bord, de tous les bords, le nord, vers Laval, vers l'est, donc Lanaudière, puis ensuite vers la Rive-Sud. Vous, ce que vous nous dites, puis c'est une question un peu plantée, là, j'en conviens, mais ce n'est pas grave, je n'ai pas de temps pour faire de la nuance, c'est que, si on ouvre largement, ces jeunes-là, qui doivent venir travailler à Montréal parce que c'est là qu'ils ont le poste, puis qu'il y a un poste qui ouvre à Pierre Boucher ou à la Cité de santé de Laval, ils ne vont pas rester à HMR, ils vont partir.

Mme Senneville (Caroline) : Bien, c'est une des craintes qu'on a. Mais vous nous posez plein de questions sur l'employeur unique. C'est peut-être parce qu'on est un syndicat, là. Mais ça, là...

M. Marissal : Je ne fais pas de fixation sur les syndicats.

Mme Senneville (Caroline) : ...non, non, non, mais on le gérera. Mais, à notre avis, sur la déprivatisation du réseau, la démocratisation du réseau, c'est très important aussi.

M. Marissal : Oui, oui, j'y arrive, j'y arrive, j'y arrive. Je voulais juste vous entendre sur le risque encore plus grand d'exode de personnel dont on me parle. Puis ce sont les gestionnaires du réseau qui en parlent. Ce ne sont pas les syndicats.

Mme Senneville (Caroline) : Ça pose question du transport en commun, ça pose la question du logement abordable, ça pose des questions de société.

M. Marissal : Je précise, ce ne sont pas les syndicats qui m'en parlent, hein, c'est beaucoup plus les gestionnaires des établissements. Vous dites que nous devrions modifier l'article 1 du projet de loi pour introduire le caractère public, universel et gratuit du réseau de santé et des services sociaux. Oui, je veux bien, mais ça change quoi dans les faits, puisqu'on a déjà engagé largement la privatisation des soins de santé au Québec?

Mme Senneville (Caroline) : Bien, en tout cas, si on l'indique, on espère que ce ne sera pas juste... parce que ça serait écrit sur du papier, ça va suivre, ça va être la pierre fondatrice sur laquelle on va continuer à faire fonctionner le système et le modifier.

M. Marissal : Oui, mais la LSSSS dit déjà ça. Il n'empêche que la privatisation galopante est déjà... est déjà partie à fond la caisse avec ce gouvernement là, et le précédent d'ailleurs. Alors, qu'est-ce que ça va changer? Puis moi, j'aimerais bien que ça change quelque chose. Mais qu'est-ce que ça va changer?

M. Leclerc (Réjean) : Bien, si vous me permettez, moi, j'y verrais un plan de transition du privé vers le public. On parle de transition dans un sens. Nous, on est dans l'idéologie qu'il faut ramener le privé dans le secteur public, un, parce que c'est moins cher, deux, parce que ce glissement-là, ça ne nous donne pas l'impression qu'avec ce projet de loi là, ça va s'arrêter. D'après nous, ça va aller de plus en plus vers le privé. Donc, tant qu'à faire des plans de transition, faisons-en un. Premièrement, est-ce que c'est nécessaire d'aller au privé? Parce que, là, on s'aperçoit qu'il y a des soins qui sont payants qu'on laisse dans le secteur privé puis les cas les plus lourds, qui coûtent, ça, on laisse ça au public. Et là ça crée une surcharge, c'est les mêmes... le même personnel qui sont... c'est comme des vases communicants. Donc, faisons un plan pour rapatrier les services privés dans le secteur public, comme ça, on va parler d'un nouveau fondement, et là on va innover.

Mme Senneville (Caroline) : Et ça, c'est un défi, parce qu'une fois que c'est rendu au privé, là, c'est difficile de rapatrier. Projet de loi sur les agences de placement, c'est un bon exemple. Les psychologues...

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, nous allons poursuivre avec le député de Matane-Matapédia.

• (17 h 40) •

M. Bérubé : Merci, M. le Président. Bonjour à vous de la CSN. Dans votre mémoire, vous parlez, en page 14 : Un nouveau palier, une nouvelle vision de l'imputabilité ministérielle, et puis vous parlez de la création de l'agence. Et il y a un extrait très intéressant en haut de la page 15 qui devrait interpeller l'ensemble des parlementaires autour de cette table, c'est le rôle que les députés vont jouer pour défendre leur communauté. À titre d'exemple, hier, le ministre était à Rimouski. Alors, j'ai fait 100 kilomètres pour aller le voir. Et la veille, j'ai envoyé mes sujets qui sont importants dans ma circonscription. Je veux quand même souligner qu'il est déjà venu dans mon bureau, je l'ai bien apprécié, puis on a échangé sur les dossiers. Mais comment ça pourrait se faire pour des élus avec le P.D.G. de l'agence? Alors, est-ce que c'est aussi accessible que celui d'Hydro-Québec ou celle d'Hydro-Québec? Alors, comme vous avez élaboré là-dessus, et je vous cite : «Les députés pourront-ils encore être les porte-voix des problèmes d'accès ou de qualité de soins des services vécus dans leur communauté à l'Assemblée nationale», j'aimerais vous permettre d'élaborer là-dessus. Moi, ça fait 16 ans que je suis député à l'Assemblée nationale et je suis reconnu pour m'occuper de façon assez proactive des dossiers de mon comté. Mais qu'est-ce qui arriverait du rôle de chacun des parlementaires avec une agence, selon vous?

Mme Senneville (Caroline) : Bien, ça fait partie des deux recommandations qu'on a, d'abord que le P.D.G. de Santé Québec soit nommé par les deux tiers de l'Assemblée et que le gouvernement prévoit un mécanisme qui va permettre aux élus de l'Assemblée nationale, lorsqu'ils le jugent nécessaire, de questionner facilement et de manière publique le P.D.G de Santé Québec. C'est ce qu'on souhaite.

M. Bérubé : Je vous mets en garde sur le deux tiers, parce que présentement, le gouvernement a plus que les deux tiers des sièges. Ça ne veut pas dire que ce sera toujours la même qu'on.

M. Bérubé : ...figuration.

Mme Senneville (Caroline) : C'est ça.

M. Bérubé : Peut-être qu'il y aura une réforme du mode de scrutin un jour. Je sais que vous y croyez, comme nous d'ailleurs. Quant à questionner le P.D.G., c'est très aléatoire, là. À peu près le seul moment où on a dans l'année, c'est l'étude des crédits. Et d'ailleurs, cette année, il n'y avait pas de P.D.G. d'Hydro-Québec qui était présent à l'étude des crédits. Ça vous donne un exemple. C'est le seul moment où mes collègues et moi on peut vraiment questionner. Sinon, il n'y a pas de ligne directe, il n'y a pas un téléphone direct, il n'y a pas un courriel direct. Alors, comment on plaiderait nos dossiers? Et mon collègue de Rosemont avec l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont et mes autres collègues avec leurs hôpitaux, leurs problèmes d'accès, je pense qu'il y a, là, un enjeu démocratique. Et dans votre mémoire, vous faites référence à un ministre actuel du gouvernement du Québec qui, lui, avait eu des choses à dire là-dessus.

Mme Senneville (Caroline) : Oui, il avait que...

M. Bérubé : Qu'est ce qu'il avait dit? C'est lequel déjà?

Mme Senneville (Caroline) : Vous l'avez dans notre mémoire? Je n'ai pas la page par cœur. C'est M. Caire qui a dit que créer une agence, c'est créer une agence de favoritisme. Créer une agence, c'est créer une instance qu'on éloigne du contrôle parlementaire.

M. Bérubé : S'il l'a dit. Bon, alors... Bien, je... je ne doute pas de sa parole. C'est un enjeu quand même important, parce que plaider pour ces communautés... D'ailleurs, on a le même problème en éducation. C'est plus dur maintenant d'être capable de plaider. Moi, je trouve qu'il y a un idéal démocratique qui est important. Et merci de l'avoir abordé parce que le rôle des parlementaires, c'est fait beaucoup de ça aussi. Quelque chose que vous voudriez ajouter là-dessus?

Une voix : Non, merci, M. le député.

Le Président (M. Provençal) :Malheureusement. Alors, je vais céder la parole à la députée de Vaudreuil.

Mme Nichols : Merci, M. le Président. Je reviens sur les enjeux avec le privé. C'est clair, là, vous en parlez. Vous dites qu'il y a une tendance de plus en plus vers le privé, puis vous sentez déjà, là, la mobilisation puis l'effervescence. Vous dites que ça va être dur de les rapatrier et de les ramener après ça dans le public. Bien sûr, le gouvernement, je veux dire, a une job à faire là-dessus. De votre côté, qu'est-ce que vous faites pour les... est-ce que vous mettez en place des... un plan, des méthodes, des incitatifs pour les garder?

Mme Senneville (Caroline) : C'est ce qu'on fait tous les matins en se levant, notamment en négociant des conventions collectives, mais en les défendant sur le terrain, ici, parce que la négociation, c'est une fois aux trois puis des fois cinq ans, là. Mais il y a une... Il y a une culture organisationnelle, il y a une culture des relations de travail véritablement à changer, je vous dirais, dans le système de santé. Puis moi, je ne viens pas de la santé, mais je trouve que les relations de travail sont parfois même infantilisantes dans le domaine de la santé. Et c'est vraiment ce changement de culture là qu'il faut opérationnaliser pour que les gens se sentent valorisés dans ce qu'ils font. Vous savez, il n'y a personne qui travaille dans les services publics pour se rendre riche. Puis laver les planchers dans une usine, puis laver le plancher dans une chambre de CHSLD avec une vieille dame, ce n'est pas la même chose. Puis ces gens-là, peu importe le travail qu'ils font, ils sont attachés à leur mission, ils sont attachés aux gens qu'ils desservent. Et il a fallu vraiment, beaucoup, beaucoup les écœurer pour qu'ils décrochent.

Mme Nichols : Là, je saute vraiment du coq à l'âne parce que je n'ai vraiment pas beaucoup de temps. Seriez-vous d'accord pour que les augmentations soient différenciées entre les fonctions temps plein puis les fonctions temps partiel?

Mme Senneville (Caroline) : Bien, c'est interdit par la loi, la disparité de traitement entre les temps partiels puis les temps pleins, là. Donc... Bien, c'est une affaire. Puis pour tout ce qui a trait à la négociation, je vais laisser les tables de négociation le faire.

Mme Nichols : C'est parce que je me dis que s'il y a un problème d'attractivité de main-d'œuvre, bien, il y a peut-être quelque chose à faire à ce niveau-là.

M. Leclerc (Réjean) : Mais parfois les relations entre les individus, les relations entre les gestionnaires et les employés peuvent suffire. Quand un gestionnaire te dit : Moi je... Tu sais, la phrase : Ça vient d'en haut. Je ne peux pas agir, ça vient d'en haut. Quand on se fait dire ça à l'année longue, bien, l'individu, il décroche. Il se tait. Il fait du présentéisme ou il quitte. Là, on est à la fin d'un cycle où plusieurs employés quittent. Imaginez combien de fois ils ont soit pris la parole pour défendre la chose, se sont tus et, là, ils quittent. Ça fait qu'on termine un cycle où le personnel a été passablement malmené. Et là on veut implanter une réforme au lendemain d'une pandémie, au lendemain d'une... en pleine surcharge de travail. Moi, je crois qu'il faut prendre le temps de bien réfléchir de l'impact de l'implantation de ce genre de projet de loi majeur. On ne parle pas d'une anecdote.

Le Président (M. Provençal) :On vient de terminer l'échange. Je vous remercie beaucoup.

Mme Nichols : Merci.

Le Président (M. Provençal) :Merci aux représentants du syndicat de... Confédération des syndicats nationaux et la Fédération de la santé et des services sociaux, volet CSN, d'avoir été présents cet après-midi. Merci beaucoup. On suspend pour laisser place...

(Suspension de la séance à 17 h 46)

(Reprise à 17 h 52)

Le Président (M. Provençal) :...recevons maintenant les représentants de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Alors, madame Picard et vos collègues, je vous donne 10 minutes pour votre présentation, et, par la suite, nous procédons à la période d'échange. À vous la parole. Merci.

Mme Picard (Magali) : Merci beaucoup. Alors, bonsoir... bonjour ou bonsoir, tout le monde. Oui, en effet, mon nom est Magali Picard. Je suis la présidente de la FTQ. Je vous rappelle, la FTQ représente plus de 600 000 travailleuses et travailleurs au Québec, autant du secteur privé que de secteur public, dans le réseau de la santé, près de 40 000 travailleuses et travailleurs, plus spécifiquement.

Alors, je suis accompagnée aujourd'hui par ma collègue Sylvie Nelson. Sylvie, elle est la présidente du Syndicat québécois des employées de service, section locale 298. Ainsi... Je suis accompagnée de Maxime Ste-Marie, président du Conseil provincial des affaires sociales, qu'on appelle chez nous le CPAS, du Syndicat canadien de la fonction publique, ainsi que de Colin L'Ériger, qui est conseiller au service de la recherche à la FTQ.

D'abord, je tiens à vous remercier pour cette invitation-là. On est très heureux de pouvoir partager notre analyse et en même temps nos commentaires sur le projet de loi n° 15. C'est un projet, comme vous le savez, titanesque. C'est un projet de loi titanesque. Donc, on a choisi de nous concentrer sur certains sujets comme les conditions de travail et également les relations de travail.

Les problèmes de santé... du système de santé sont rendus trop gros pour être ignorés. Donc, le statu quo est intenable, et on en est très conscients. La population demande des changements en profondeur, et on est à la même place. Donc, on a tout intérêt à travailler en collaboration dans ce dossier-là.

Vous savez, il y a également des éléments qui ne font pas notre affaire dans le projet de loi dans la forme actuelle, puis on ne s'empêchera pas, bien entendu, de le dire, même si on reconnaît qu'il y a des besoins importants de changement.

On s'inquiète, on s'inquiète vraiment de la privatisation du réseau et on est convaincus que Santé Québec, c'est la solution... on n'est pas convaincus, désolée, que Santé Québec va être la solution qui va régler tous les problèmes que nous connaissons actuellement dans le réseau de la santé. La fusion des unités d'accréditation, on a de la misère à voir ça d'un bon oeil, bien entendu.

Et, ceci étant dit, la FTQ est très pragmatique. Alors, on est capables d'aller au-delà de la critique et on est capables également de trouver des solutions concrètes et de proposer des améliorations au projet de loi. C'est dans cet esprit-là qu'on se présente devant vous aujourd'hui. Alors, c'est important de continuer le dialogue et de prendre le temps de bien faire les choses. Et il faut absolument éviter de répéter les erreurs des réformes antérieures, qui ont été des échecs.

Le CPAS récemment... a récemment sondé ses membres, je pense que vous allez trouver ces statistiques-là très intéressantes, et il y a beaucoup d'inquiétude sur le terrain. Ça, je sais que vous ne serez pas surpris d'entendre ça.

Alors, dès maintenant, je te passe la parole, Maxime. Maxime va vous parler des conditions de travail. Merci.

M. Ste-Marie (Maxime) : Merci beaucoup, Magali. Tel qu'annoncé par Magali, je vais vous parler de conditions de travail. Monsieur Dubé, je sais que vous êtes un homme de chiffres, c'est pour ça que j'ai des chiffres pour vous aujourd'hui. On a sondé nos membres. Écoutez, on représente 35 000 travailleurs. On a sondé rapidement, on s'est revirés de bord dès l'annonce du projet de loi, on est arrivés avec un sondage avec une firme externe, on les a mandatés pour faire la démarche la plus neutre et objective possible. Il y a 4 295 travailleuses et travailleurs qui ont répondu à notre sondage.

Je ne vous cacherai pas, l'élément principal que je vais vous parler aujourd'hui par rapport au sondage... ce n'est pas qu'on est contre cet élément-là, on est favorables à toute la question de l'ancienneté réseau, mais... excusez-moi de l'anglicisme, mais on veut vous trouver un «flag» où est-ce qu'il y a des dangers. Vous le savez, il y a plusieurs de vos P.D.G....

M. Ste-Marie (Maxime) : ...puis ils ont déjà sorti publiquement pour dire qu'ils ont des inquiétudes. On parle de la grande région de Montréal. Écoutez, je ne vous le cacherai pas, là, c'est 85 % de nos membres qui sont en faveur d'une ancienneté réseau. Donc, je ne vous cacherai pas que notre fédération est aussi en faveur. Par contre, c'est ça qui est alarmant, c'est 41 % des personnes sondées qui estiment probable ou très probable de changer de CISSS ou de CIUSSS si le projet de loi est adopté actuellement... dans sa forme actuelle, pardon. Qu'est-ce qui est davantage inquiétant, c'est la grande région de Montréal, ce pourcentage augmente à 56 %. Donc, il faut se poser des questions.

Moi, mon syndicat d'origine, c'est au CIUSSS de l'Est-de-l'Île-de-Montréal. Vous le savez, M. Dubé, vous connaissez bien l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont, mais l'analyse qu'on en fait avec 50 % des travailleuses, travailleurs qui veulent quitter la grande région de Montréal s'il y a une ancienneté réseau, c'est que les endroits où est-ce que ça va mal, ça va aller encore plus mal. Puis je prends l'exemple de Maisonneuve-Rosemont où est-ce que, vous le savez, là, je ne vais pas vous expliquer le cas de Maisonneuve... des installations vétustes, un manque de personnel, des problèmes aux urgences. Ces gens-là vont quitter en masse vers les régions. Et on a aussi regardé un petit peu c'était quoi la situation géographique, je sais qu'il y a certains P.D.G. aussi qui ont fait l'exercice. Il y a plusieurs des travailleurs de la région de Montréal qui habitent soit en couronne nord ou en couronne sud de Montréal. Donc, ces gens-là vont quitter pour se rapprocher de chez eux. Et donc, je le répète, notre crainte, c'est que les endroits où est-ce que ça va mal, ça va aller encore plus mal.

Ce qu'on vous lève, comme flag, désolé de l'anglicisme, c'est qu'il n'y a pas eu, selon nous, d'analyses de la part du gouvernement ça va être quoi... il n'y a pas eu d'évaluation sur le mouvement de la main-d'oeuvre. Je pense que c'est ce qui manque. Puis, comme je vous dis, je me répète, on est en faveur de l'ancienneté réseau, mais il va falloir le convenir ensemble. Je n'ai pas de solution miracle pour vous aujourd'hui, mais je pense qu'on est ouverts, la FTQ, c'est notre couleur, comme syndicat, on est ouverts à discuter avec vous, mais il va falloir paramétrer ce gros morceau là de votre projet de loi. L'ancienneté réseau, c'est inquiétant pour les grands centres.

L'autre chose aussi, par rapport au sondage, vous le savez, ce n'est pas une surprise pour personne, il y a des problèmes de conditions de travail, sur 35 000 de nos membres qu'on a sondés, vous le savez, il y a 50% des gens qui se disent insatisfaits de leurs conditions de travail. Donc, pour vous citer, tu sais, pour devenir un employeur de choix, je pense qu'on a encore beaucoup de travail à faire.

Dans sa forme actuelle, la FTQ ne pense pas que le projet de loi aura un impact si grand pour améliorer les conditions de travail. C'est 68 % aussi des répondants de notre sondage qui sont en accord qu'ils ne sont pas certains que le projet de loi va avoir une amélioration importante sur leurs conditions de travail.

On salue l'arrivée d'un gestionnaire, un gestionnaire par site. On sait que les réformes précédentes ont coupé beaucoup dans cet aspect-là. Je pense que la gestion de proximité, c'est un de vos éléments forts du projet de loi. Mais qu'est-ce qu'on se questionne, c'est... on se demande si les gestionnaires auront toute la latitude nécessaire pour trouver des solutions en collaboration avec nous, les syndicats, les travailleurs sur le terrain, ou est-ce qu'on se dirige vers une structure hiérarchique encore plus lourde ou vers une gestion de proximité?

• (18 heures) •

En quelques mots, avant que je passe la parole à ma collègue, Sylvie, je ne vous cacherai pas un grand questionnement qui reste vide suite à la lecture du projet de loi, c'est toute la question des services préhospitaliers au Québec. J'ai de la difficulté à comprendre qu'en 2023 on laisse encore la vie des Québécois et des Québécoises dans les mains de compagnies privées qui sont là pour faire du profit. Pour réutiliser les termes utilisés sur le terrain par les paramédics, on ferme des trucks en région, ça peut prendre des heures avant que les gens aient des services préhospitaliers. Je suis persuadé que vous êtes d'accord avec cette position-là, mais je ne comprends pas pourquoi que toute la question de la nationalisation des soins préhospitaliers au Québec ne fasse pas partie du projet de loi. Ça touche tellement de choses. À la blague, j'ai envie de vous dire : On n'était pas un article près dans ce projet de loi là, donc ça aurait été intéressant que toute la question des préhospitaliers y apparaisse au niveau de la nationalisation. Donc, merci beaucoup, c'était ma présentation. Je laisserais la parole à ma collègue, Sylvie Nelson, présidente du...

Mme Nelson (Sylvie) : Bonjour. Oui. Merci, Maxime. Écoutez, je veux vous parler un peu de relations de travail. On sait tous que le droit d'association, c'est protégé par la charte, et québécoise, et canadienne. On sait que les tribunaux lui accordent une protection accrue depuis quelques années, qu'on parle de choisir son syndicat, de négocier, de faire la grève. En fusionnant les unités d'accréditation, on pense que le projet numéro 15 vient sérieusement compromettre ce droit-là. De forcer les travailleurs et de forcer les travailleuses à se regrouper ensemble, qui ne correspond pas du tout à leur volonté, on est loin d'une solution gagnante. Ça va créer des unités monstres. On parle de 80000 à 9000. Avec quatre catégories de personnes. Si ça arrive, imaginez ça, après le vote, après ce vote-là, il serait impossible pour quelque syndicat que ce soit après d'essayer de changer, de choisir son syndicat.

Je voudrais aussi vous parler du maraudage, le maraudage à la FTQ...


 
 

18 h (version non révisée)

Mme Nelson (Sylvie) : ...ses syndicats affiliés, on ne veut pas s'engager dans une période de maraudage. Je ne pense pas que c'est ça que nos travailleurs, nos travailleuses veulent. Premièrement, on pense que les périodes de maraudage, présentement dans ce projet de loi là, c'est contre-productif. Vous comprendrez qu'en fusionnant les unités d'accréditation, toute l'attention de nos syndicats, de nos membres, ça va être porté sur le maraudage et peut être un peu moins sur le projet de loi. On pense que les gens, autant nos travailleurs, nos travailleuses, ils ont le moral... le moral des troupes n'est pas vraiment haut aujourd'hui, vous le savez, que notre moral des troupes, là, les chambardements, là, ça les atteint, le moral des troupes. Ils vivent dans une incertitude, nos membres, dans l'instabilité et aussi, c'est l'instabilité et l'incertitude pour les clients et aussi les résidents.

On comprend bien que l'objectif du gouvernement, c'est d'avoir un système plus efficace. Nous en sommes, on veut ça, nous autres avec, mais pour atteindre les objectifs du projet de loi, il n'est pas nécessaire, selon nous, de fusionner les accréditations, les unités d'accréditation. Au contraire, un régime de négociation ultra centralisé peut entraîner des effets pervers. Excusez-moi, je vais prendre un peu d'eau.

Mme Picard (Magali) : Il te reste cinq secondes.

Mme Nelson (Sylvie) : Je peux aller vite. Ça pourrait amener à une plus grande judiciarisation des relations de travail. Déjà, c'est compliqué avec les CISSS puis les CIUSSS, avec les griefs depuis la réforme Barrette. On a joué là-dedans aussi, là. On envisage peut-être... on ne voudrait pas que ça soit pire avec Santé Québec.

Le Président (M. Provençal) :Votre temps est écoulé.

Mme Nelson (Sylvie) : Les syndicats locaux...

Mme Picard (Magali) : C'est terminé.

Mme Nelson (Sylvie) : Ah! ce n'est pas terminé?

Le Président (M. Provençal) :Oui, mon temps est terminé, puis je l'ai même laissé filer un petit peu. M. le ministre.

M. Dubé : Bien, écoutez, on est désolé d'interrompre. Vous étiez sur une lancée, là, puis je pense qu'on sent vraiment votre intérêt. Je vais revenir. Puis, premièrement, remercier la centrale FTQ, Mme Picard particulièrement, parce que vous êtes là quand même depuis... c'est quand même assez récent, là, d'avoir pris cette grande charge-là. Et j'ai pris le temps de regarder vos recommandations puis je peux vous dire que ça ne sera pas la dernière fois que je vais le regarder parce qu'on en a eu quand même une bonne journée avec plusieurs représentants. Il y a trois choses sur lesquelles je voudrais revenir dans le temps qui m'est alloué.

Premièrement, je salue l'initiative que vous avez faite de faire un sondage de vos membres. Je salue ça. Je vous demande un peu si c'est possible d'obtenir ce sondage-là, si vous pouviez le rendre disponible. Parce que, ce n'est pas que je crois au sondage... parce qu'il faut que je sois constant. Et comme j'aime les chiffres, peut être que je pourrais regarder, mais j'aimerais ça, peut être que vous l'offriez à la commission ici pour qu'il soit disponible pour tout le monde.

Mme Picard (Magali) : ...l'offrir...

M. Dubé : O.K., bon, bien, écoutez, je l'apprécie beaucoup. Puis sur un des points que j'aimerais revenir, c'est sur le fait d'avoir testé la mobilité ou ce que je vais appeler l'ancienneté réseau. Et c'est un peu pour ça que je disais aux participants précédents, ce que j'entends sur le terrain, c'est ça que les gens veulent. Ça fait des années qu'ils demandent l'ancienneté réseau. Puis vous, vous me dites qu'il y a 80 quelque pourcent, là, si j'ai bien compris votre... Ce que j'aimerais vous dire, deux choses pour vous rassurer aujourd'hui puis rassurer les gens qui nous écoutent. Parce que vous avez soulevé un point particulièrement, peut être, préoccupant pour ceux qui diraient : Mais qu'est ce qui arrive demain matin si mon employé à l'hôpital Maisonneuve- Rosemont s'en va dans les Laurentides? Bon, peut être ma réponse préliminaire serait de dire : Bien, c'est peut-être une bonne nouvelle pour les Laurentides parce qu'il n'y aura pas moins... il n'y aura pas des nouvelles jobs qui vont s'offrir, mais il y a déjà des jobs qui ne sont pas remplis. Ça fait que, c'est sûr que, si quelqu'un part de Maisonneuve-Rosemont puis il va dans les Laurentides ou à La Prairie, bien, c'est une bonne nouvelle pour ces régions-là.

Mais ce que j'aimerais vous dire aussi, puis ça, c'est important, parce que j'ai pris un engagement lorsqu'on a déposé le projet de loi. Je me suis assis avec madame Lebel, la présidente du Conseil du trésor, puis j'ai dit : On va respecter un principe. Ce qui va être négocié dans le projet de loi, qui va être discuté avec mes collègues de l'opposition, ne s'appliquera que dans trois ans. Puis ça, c'est important de le dire parce que, quand vous me demandez... je veux juste vous le dire, parce je veux passer à une autre question, on va avoir le temps d'en parler. On va avoir le temps d'avoir des mécanismes de transition parce que ce n'est pas demain matin. Même si on passait le projet de loi dans deux semaines, là, vous allez dire : Vous rêvez en couleur, mais, mettons...

M. Dubé : ...on réussirait à faire ça. Est-ce que... Est-ce qu'on s'entend, tout le monde, que ces applications-là, un, ils doivent être négociés, puis l'ancienneté réseau devrait faire partie des négociations de conventions syndicales? On est d'accord?

Mme Picard (Magali) : Absolument. Je veux quand même vous dire, M. le ministre, que je viens d'un grand syndicat canadien, l'Alliance de la fonction publique, où on avait une unité d'accréditation, les groupes PA, qui regroupaient 85 000 et qui regroupent aujourd'hui 100 000 travailleurs, travailleuses avec une ancienneté à travers le pays. Donc, il y a des protocoles à mettre en place, on négocie ça puis on s'entend très bien, ce n'est pas une préoccupation.

M. Dubé : Vous en avez... Puis c'est drôle parce que vous avez été excessivement instrumentale quand on a fait le projet de loi avec mes collègues sur le projet de loi n° 10, et vous avez... on a parlé de ça, de mécanisme de transition. Mais je voulais juste rassurer la population mais particulièrement les employés, que oui, c'est ça qu'ils veulent, c'est ça que votre sondage dit, mais on aura le temps de regarder ça, parce que ça s'appliquerait à la prochaine négo, premièrement.

J'ai posé une question un petit peu délicate, là. Parce que lorsqu'on... Je vais revenir à l'employeur juste quelques minutes, là, parce que c'est important. On profite de l'opportunité qu'on sépare les opérations du ministère avec le réseau pour dire : Est-ce qu'on retourne les mêmes 36 CISSS et CIUSSS avec 36 conseils d'administration, puis etc., ou d'en profiter pour avoir un employeur unique avec des avantages puis certains inconvénients? On se comprend.

Moi, ce que j'aimerais savoir, parce que ce que j'entends aussi de nos gestionnaires, puis je l'ai dit tantôt... Comme principe, avez-vous une objection avec l'employeur unique? Parce que, quand je disais vos recommandations, vous n'avez pas de... en principe, vous n'êtes pas contre le principe de l'employeur unique. Parce que vous avez quelque chose d'intéressant, là, il faut que les gens comprennent qu'en ce moment il y a 136 conventions collectives. Le fait de passer... si, par exemple, on respectait le principe comme il est dans le Code du travail, d'avoir une convention par catégorie... En ce moment, il y a quatre catégories, il y a nos infirmières, il y a les techniciens, etc., il y a quatre catégories. Donc, il y aurait une simplification de l'environnement syndical énorme de passer de 136...

Je veux juste vous entendre là-dessus, de passer de 136 à quatre, qu'est-ce que vous verriez pour... Puis là je reviens au point du maraudage de votre collègue. Quel genre d'option qu'on a pour que ça puisse bien se faire, puis je le répète, sur les trois prochaines années? Parce que ça n'arrivera pas tout de suite, ça non plus. J'aimerais ça vous entendre, parce que je sens que vous avez une ouverture là-dessus, puis avec votre grande expérience, bien, j'aimerais ça vous entendre là-dessus.

Mme Picard (Magali) : Ma grande expérience de trois mois et demi à la FTQ. Heureusement que ça fait plus longtemps que ça que je suis dans le milieu syndical.

M. Dubé : ...retraite?

Mme Picard (Magali) : Je suis sortie de la retraite. Croyez-le ou non, il faut le faire. C'est ce qu'on voudrait que les gens en santé fassent également, mais bon. Mais, ceci étant dit, M. Dubé, on a plusieurs discussions, M. le ministre, actuellement, et effectivement on ne pense pas que la fusion des accréditations pourrait être souhaitable tant pour le gouvernement que pour les travailleurs et même les utilisateurs du réseau. Il existe, au Québec, d'autres façons de faire. On pourrait... Et on a regardé, on vous a écouté attentivement le 29 mars dernier, et on est en mode solution. On s'est dit : Comment faire pour respecter le projet de loi que vous déposez, projet de loi, on l'a dit, là, d'une ampleur assez impressionnante? Donc, il y a du travail en arrière de ça. Je suis convaincue qu'il y a bien des choses que vous savez déjà ou vous avez pensé qu'on n'a pas eu le temps d'analyser.

M. Dubé : Ça fait qu'on pourrait s'asseoir pour se parler de ça. Parce que vous avez... Oui.

• (18 h 10) •

Mme Picard (Magali) : Bien, moi, ce que... ce que je vous dis, là, c'est qu'on peut y arriver. On est capables de vivre avec l'employeur unique, on est capables de vivre avec l'ancienneté réseau. On est capables de partir de 136 tables à quatre ou sept tables. Parce qu'il y a aussi les établissements privés conventionnés qui ne sont pas... qui ne seraient pas dans les quatre tables visées actuellement. On est tous capables de faire ça...

M. Dubé : Je me mets à la place des gens qui nous écoutent aujourd'hui, là, puis mes collègues, on ne réglera pas ça aujourd'hui, mais le fait que je sente une certaine ouverture de trouver des options...

Mme Picard (Magali) : Moi, je vous dis... Oui.

M. Dubé : Parce que je veux juste dire : Il y aura des amendements. Ça, c'est sûr, on va s'entendre, là, qu'il y ait des... On a dit qu'il était perfectible, on pouvait bonifier. Mais, quand vous dites plus que quatre catégories, moi, j'ai une certaine ouverture à ça. Parce que est-ce qu'à la fin il pourrait y avoir cinq, six ou sept catégories? On n'est pas à une convention proche. Si on peut se marier plus proche de... du besoin de conventions... de conventions collectives qui se rapproche de ce qu'on a comme catégorie d'emploi, bien, il y aura... il y en aura sept, s'il faut. On a... on a une certaine ouverture à ça, je veux juste le mentionner.

Mme Picard (Magali) : Bien, vous me faites plaisir, M. le ministre. Moi, ce que je peux vous dire, là, on a regardé les statistiques, on est tous là, dans le fond, bien sûr, pour les Québécoises, Québécois, nous pour les travailleurs spécifiquement puis pour tout le monde en même temps. Vous savez, ce projet de loi là, on en a, des inquiétudes, mais on...

Mme Picard (Magali) : ...croit qu'il y a besoin... On a besoin d'un coup de barre majeur en santé. Si c'est celui-là, bien, tant mieux.

M. Dubé : Bien...

Mme Picard (Magali) : Puis, si on est capable de s'entendre... puis, dans les statistiques qu'on va vous partager, on va s'assurer que tout le monde l'ait, là, le fameux rapport, ça dit que nos membres, les gens, vos employés sur le terrain ont de la misère à croire que ça va bien fonctionner. Si on s'entend, là, puis on est capable de travailler ensemble, ça va être notre responsabilité de faire évoluer notre monde pour embarquer dans cette transition-là...

M. Dubé : C'est tellement important ce que vous me dites, madame Picard, parce que c'est...

Mme Picard (Magali) : Bien, on y croit.

M. Dubé : Bien, moi, j'y crois puis votre venue, en tout cas, je trouve ça très intéressant de... avec cette approche-là que vous avez, que je reconnais de mon ancienne vie, là, avec la FTQ avec qui j'ai négocié souvent. Je veux revenir sur... j'ai bien ri tout à l'heure, là, bien ri quand vous avez dit qu'on n'était pas à quelques articles proches sur la nationalisation de... juste vous dire un mot là-dessus. On y a pensé. On y a pensé. Parce que quand on a regardé les éléments importants, toute la question du préhospitalier était très proche de faire la coupure ou pas. Ce qu'on a décidé, puis je veux juste vous rassurer là dessus, c'est que tous les changements qu'il aurait fallu faire dans le préhospitalier, ça prenait plus qu'un article. Je veux juste vous dire ça, parce que, quand vous changez quelque chose, vous savez l'application que ça a. Ce qu'on a décidé de faire, puis je veux rassurer... vous rassurer là-dessus ou rassurer vos membres, on a décidé qu'on faisait deux choses. Sur le préhospitalier, on a décidé que les centres de services, les centres de services où il y a le plus de synergie. On va... on veut qu'ils aient les mêmes règles de gouvernance qu'on a dans toutes les sociétés d'État. Pourquoi? Parce que, pour moi... et ça, il y a des éléments dans le projet de loi qui sont là, on a dit : Si nos centres de services peuvent mieux travailler ensemble, je pense qu'on va être plus efficaces. Parce que, souvent... je prends en Montérégie, il y a plus qu'un centre de services. Et à ce moment-là, bien, il y a des éléments qui se recoupent. J'ai l'impression qu'on va faire déjà beaucoup d'amener, je vais appeler ça une certaine consolidation des centres d'appels, des centres de services, sans nécessairement nationaliser les propriétés, O.K.? Donc, ce n'est pas parce qu'on n'y croit pas, mais on veut y aller par étapes. Puis la première étape qu'on juge importante, c'est la consolidation ou, je dirais, la meilleure coordination, c'est le mot que je devrais dire, des centres d'appels.

Dernière petite question facile, puis ici, j'ai des collègues qui ont des questions à poser, c'est sur les libérations syndicales. Bon, moi j'ai... quand je dis que la... puis j'ai posé la question, vous avez peut-être entendu la question quand je l'ai posée au groupe précédent, c'est sûr que la libération syndicale, elle est importante en ce moment dans nos 136 conventions collectives, et cetera. Je ne sais pas comment ça s'applique chez... Avez-vous une idée, vous, vous avez... vous avez à peu près 35 000 personnes... vous ne le savez pas?

Mme Picard (Magali) : Je peux... Est-ce qu'on a une idée? Non, je ne pense pas qu'on a ce détail-là, de combien de gens sont libérés présentement.

M. Dubé : Bon, moi, ça, c'est quelque chose que j'aimerais vous dire. On va continuer de se parler dans les prochaines semaines parce que je voudrais comprendre... Parce que je me souviens, quand on était dans la période COVID qu'on essaie d'oublier, là, la question des libérations syndicales, c'est devenu assez important parce qu'on manquait d'employés qui étaient peut-être en libération, qui auraient pu venir aider à ce moment-là. Je voudrais juste savoir si notre simplification de l'organisation syndicale pourrait avoir un impact. Ça fait que si vous n'avez pas la réponse aujourd'hui...

Mme Picard (Magali) : Malheureusement, on n'a pas la réponse. Puis on sera prêts à regarder ça, certainement. Chose certaine, c'est au moment de l'implantation d'un changement comme celui-là, c'est clair que ça va demander pas mal de consultation, autant de la part de l'employeur, tout ça, il faudrait le regarder. On a déjà fait l'exercice où j'étais avant, et je vous dirais qu'on a... je pense qu'on minimise le travail qui est fait par les travailleurs en libération syndicale, justement pour atténuer des conflits de travail ou encore... tu sais...

M. Dubé : Oui, mais c'est pour ça que ma préoccupation, moi, ce n'est pas d'en enlever, c'est de... puis de nous rassurer mutuellement... bien... un, comprendre, il y en a combien. Je pense que ce serait important parce que... mais mon objectif, c'est que, si nous on a, mettons une convention collective pour les infirmières, peu importe, là, on va avoir besoin de discussions locales. Même s'il y a une convention nationale, on va avoir besoin de ces gens-là localement. Ça fait que je veux... ce n'est pas pour éliminer ou quoi que ce soit, mais c'est pour bien comprendre.

Mme Picard (Magali) : ...revoir la structure. On le comprend.

M. Dubé : Il me reste combien de temps?

Le Président (M. Provençal) :Trois minutes.

M. Dubé : Trois minutes. O.K., à date, on s'entend sur pas mal d'affaires, là, je trouve.

Mme Picard (Magali) : C'est quasiment dangereux.

M. Dubé : C'est quasiment dangereux. Gestion de proximité, bon, c'est quand même assez... vous l'avez bien dit, là, l'ancienne réforme a enlevé beaucoup de...

M. Dubé : ...cadres intermédiaires, on en ramène. J'ai eu la chance, là, d'en rencontrer plusieurs, là, dans les tournées que je fais. Vous avez dit un mot important tantôt, c'est quoi la latitude qu'on doit leur donner? Parce que, peut-être, en tout cas, ça, moi, je suis ouvert à ça. Le projet de loi n° 15 sert à dire de qui on a besoin pour faire quoi. Alors, quand on parle, par exemple, d'un directeur médical ou... tout ça, parlez-moi... parce qu'on a défini qu'on a besoin d'un gestionnaire de proximité, quelle est la latitude qu'il devrait avoir d'un point de vue, je dirais, syndical pour que lorsque cette personne-là, j'en ai rencontré de... les infirmières de 20 ans d'expérience qui ont été nommées... quelle est la latitude? de quoi vous vouliez dire, par ça? Ça, c'est important.

M. Ste-Marie (Maxime) : Écoutez, M. Dubé, c'est difficile à évaluer la latitude, mais je peux y aller... je peux répondre à votre question avec un témoignage de travailleur. Moi, je travaille en CHSLD puis je peux vous dire : J'ai vu l'évolution entre avant et après la réforme du ministre Barrette. Puis la latitude, je ne peux pas l'évaluer, mais ce que je peux vous dire, c'est que, pendant un certain temps, dans l'époque plus moderne postfusion des CISSS et des CIUSSS, dans mon CHSLD, il n'y avait pas de responsable du bâtiment, il n'y avait pas de responsable du bâtiment. Donc, oui, on avait des chefs d'unité, puis oui, c'était lui, mon supérieur immédiat, mais, ultimement, là, s'il y avait quelque chose qui était sur le terrain, qui n'avait pas d'affaire là, ou x affaires, il n'y avait pas de personne responsable de la bâtisse. Puis c'est important, autant pour les travailleurs que quand on croise dans ascenseur, on le sait, ça, c'est notre numéro un dans la bâtisse, autant pour les familles aussi, puis je le vis, puis là je ne vous conterai pas ma vie, mais ma mère est en CHSLD présentement, c'est rassurant de savoir c'est qui la personne responsable du site.

M. Dubé : Mais est-ce que vous sentez, parce que vous avez parlé de la latitude qu'il doit avoir, sentez-vous qu'en ce moment avec ceux qu'on a mis en place, je ne sais pas si ça s'applique dans votre CHSLD, mais est-ce qu'il a la latitude nécessaire?

M. Ste-Marie (Maxime) : Moi, je pense qu'il y a encore de la place pour avoir plus de latitude au niveau...

M. Dubé : Exemple, exemple, qu'est-ce que... qu'est-ce qui peut être plus...

M. Ste-Marie (Maxime) : Bien, écoutez, pour donner des exemples plus concrets, moi, je pense que la latitude devrait se transmettre au niveau de la culture. Moi, je pense, c'est la culture qui manque présentement du gestionnaire de site. Oui, vous les avez mis en place, mais je pense que la culture de savoir c'est quoi son rôle, est-ce qu'il est connu? Est-ce qu'il se promène le matin? Est-ce qu'il...

M. Dubé : Est-ce qu'il prend des décisions rapidement quand il y a besoin plutôt que de retourner en...

M. Ste-Marie (Maxime) : Exactement, exactement. Puis, tu sais, je pense que si vous voulez que votre réforme fonctionne, bien, je pense que, oui, c'est bon d'avoir un truc un peu plus universel que qu'est-ce qu'on a présentement, mais les... comment je pourrais dire, les enjeux locaux doivent être traités par les gestionnaires de premier niveau, il doit y avoir une certaine forme de flexibilité. Présentement, je ne la sens pas.

M. Dubé : On me dit que je manque de temps.

Le Président (M. Provençal) :C'est terminé. Merci. Alors, M. le député de Pontiac, c'est à vous.

M. Fortin :Oui, merci. Merci, M. le Président. Bonjour. Bonjour à vous quatre. Merci. Merci d'être là encore une fois et merci d'arriver avec des chiffres. Je trouve que c'est intéressant votre sondage, puis ça nous donne une perspective. On l'avait fait dans le projet de loi sur les... sur des agences, justement, de mesurer l'impact, région par région, que ça pourrait avoir, la difficulté d'application, et ça a permis éventuellement de voir la progression dans le temps de ces mesures-là, puis c'est peut-être vers ça que ça va mener, également, là, les chiffres que vous nous soumettez parce que c'est la première fois, nous, en tout cas, de notre côté, depuis que le ministre a déposé son projet de loi, depuis qu'il a évoqué la... l'idée d'amener l'ancienneté réseau qu'on a vraiment un portrait de ce que ça pourrait représenter. Puis la façon que le ministre en a parlé tantôt, que ça pourrait être un gain pour Lanaudière, les Laurentides, oui, mais si on prend à Paul pour donner à Pierre, on n'est pas bien, bien plus avancés dans le réseau, là. Alors, j'ai hâte de regarder les chiffres du sondage, mais, à première vue, vous avez... vous appelez ça, un flag, là, mais il y a un gros drapeau rouge, là, pour la région de Montréal, si je comprends bien, là.

• (18 h 20) •

Mme Picard (Magali) : L'enjeu principal, c'est effectivement la région de Montréal, je pense que tout le monde s'en doutait, mais c'est... Écoutez, c'est un sondage qui a été fait, l'échantillonnage est important. Maxime vous disait c'est 4 295 répondants, là, c'est du monde, ça, qui sont sur le terrain présentement. Donc, les chiffres, moi, je vous dis, nous parlent énormément. Effectivement, c'est Montréal qui ressort, où on sent qu'il y aurait vraiment une demande très, très forte de travailleurs qui voudraient sortir du réseau.

M. Fortin :Est-ce que vous voyez une différence selon le type d'emplois? Parce qu'il y a des gens qui, de toute évidence, sont peut-être plus capables de se payer le loyer, à Montréal, une infirmière fait plus que certains techniciens, fait plus que des travailleurs en cuisine, ou autre, alors est-ce que vous avez des...

M. Ste-Marie (Maxime) : On est très confiants avec notre sondage, là, je vous dirais, on a une marge d'erreur de 1,37 % présentement avec les résultats qu'on a obtenus. Puis, pour répondre à votre question, notre sondage est ventilé par âge, par catégorie d'emploi et par région, donc c'est ce facile, tout dépendant de voir les...

M. Ste-Marie (Maxime) : ...tout dépendant les questions puis les thèmes, mais c'est plus intéressant de savoir... Exemple, pour la question de l'ancienneté réseau, mais on peut le voir ventilé, on sait que ce sont les jeunes qui vont bouger. On peut vous dire quelle catégorie d'emploi... qui est plus est plus à risque, pardon, et on peut dire aussi les régions. Puis qu'est-ce qui est intéressant par rapport aux régions, puis le mouvement de personnel qui nous inquiète, c'est qu'on voit des très hauts pourcentages à Montréal et on voit les régions à très bas pourcentages. Donc, ça aussi, c'est intéressant, on sait que ceux de Montréal vont quitter, mais il n'y a personne qui va rentrer pour les remplacer. Ça fait que, quand on donne à pierre pour enlever à Paul, pour reprendre votre expression de tantôt, il y a quelqu'un qui... la région de Montréal ne va pas recevoir.

M. Fortin :Et puis un des enjeux, c'est qu'à Montréal il y a beaucoup de soins spécialisés, il y a des centres de santé mentale, il y a des institutions dont on ne peut pas se passer. Ce n'est pas un déplacement d'un patient qui choisit d'aller une urgence à l'autre, mais là il y a des soins spécialisés auxquels il faut faire particulièrement attention.

Mme Picard (Magali) : Je veux quand même être capable de rassurer, là, la population qui nous écoute. Ça serait négocié, tout ça, là. Tu sais, ce n'est pas vrai que... demain matin, parce qu'il y a une flexibilité ou qu'il y a une ancienneté réseau, que tous ceux qui vont vouloir partir... parce que je n'ai plus d'ancienneté que mon collègue qui travaille en Montérégie, bien, je m'en viens en Montérégie, indépendamment du fait qu'il y a un poste ouvert ou non. Ça existe déjà ailleurs. Je pense qu'il y a d'autres modèles à prendre. Il y a façon de le faire de façon intelligente. Puis ça, bien, on va travailler certainement pour faire en sorte qu'on ne vienne pas non plus, et de un, anéantir complètement à la continuité de soins que certains patients ont besoin de recevoir, l'expertise de mettre une région en péril parce qu'il y a un exode des experts. Tout ça devra être négocié puis... ça se fait, mais d'une façon intelligente, et il y a... lorsqu'il y a des postes ouverts, et tout ça, là. Donc, on veut vraiment porter une attention particulière à cette problématique-là.

M. Fortin :Bien... Puis je le comprends. Parce que, quand vous dites que 85 % des membres chez vous le veulent, à un moment donné, il y a presque un impératif d'aller de l'avant, mais encore là, comme vous dites, de le faire de façon intelligente. Madame Nelson, on vous a interrompue ou l'horloge vous a interrompu tantôt dans vos remarques, mais je pense que, quand vous avez dû arrêter de parler, vous étiez sur la période de maraudage, le fait que c'était contreproductif. Est-ce que je peux juste, peut-être, comprendre le fond de votre pensée là-dessus?

Mme Nelson (Sylvie) : Écoutez, c'est contreproductif. Nous, nous, quand on fait une période de maraudage, c'est sûr qu'on est souvent dans les milieux de travail. Vous comprendrez, on est dans les milieux de travail. Et je pense qu'au lieu de faire ça, au lieu de se battre entre nous autres pour savoir les membres vont s'en aller où... Puis, à la fin, on le voit, à la fin des périodes de maraudage, on l'a vu par expérience, là, on a gagné tant de milles, mais on a perdu tant de milles, puis, quand tu regardes à la fin, bien, ça s'équivaut pas mal. On devrait arrêter de perdre du temps sur des périodes de maraudage et, au lieu de cela, là, on a un projet de loi important, là, on devrait regarder qu'est-ce qu'on peut faire, effectivement, pour éviter une prochaine période de maraudage.

Ce n'est pas drôle d'obliger les gens à changer de syndicat comme ça, là. Je pense, c'est... Je ne pense pas que c'est la meilleure solution. Puis la meilleure solution, c'est de laisser les accréditations syndicales telles qu'elles sont présentement. Parce que je ne vous le cacherai pas, avec le projet de loi n° 15, la FTQ, dans le secteur de la santé, là, il n'en reste plus tellement, là, O.K.? On ne se le cachera pas, c'est ça, c'est ça, la vérité, tu sais. Mais je pense qu'il faut vraiment regarder à encadrer ça et être sûr de ne pas toucher aux accréditations syndicales. On se fait la guerre depuis longtemps là-dessus, là, on a... je pense qu'on est rendus à une autre époque.

M. Fortin :Dernière chose pour moi, c'est votre recommandation 6 sur les résidences privées, vous n'y avez pas vraiment touché encore, là, dans les remarques que vous avez faites, mais votre demande d'avoir un décret de convention collective pour les résidences privées.

Mme Nelson (Sylvie) : Oui, je vais vous parler de décret de convention collective. On a fait la demande, on a fait la demande, on a eu des rencontres avec le ministre Boulet, avec la ministre Boulet là-dessus. Et le fait qu'on n'ait pas d'employeur, de groupe d'employeurs qui veulent s'asseoir avec nous pour un décret de convention collective, même si la loi prévoit qu'un groupe syndical peut le faire lui-même, là, tu n'as pas besoin d'un autre employeur, bien, c'est difficile quand même d'en arriver à s'entendre. Je pense... Puis vous le savez, à la FTQ, là, puis partout, on demande un salaire minimum de 18 $ de l'heure. Bien, moi, j'ai des gens qui sont payés près du salaire minimum et j'ai des gens qui augmentent par année à cause de l'augmentation du salaire minimum. Ça n'a plus de bon sens, là. Puis les gens, là, vous savez, là, c'est des gens qui ont de la misère, ils ont deux, trois jobs pour arriver.

Autre chose, pendant que j'ai la parole, juste avant qu'il vous coupe, je vais juste... avant qu'il vous coupe puis que ça me coupe, je veux vous parler aussi des établissements privés non conventionnés. Je pense qu'on est en train d'en conventionner. Moi, je pense qu'on devrait accélérer ça. Suite à ce qui s'est passé, suite aux recommandations de la coroner Kamel, aussi, je pense qu'on devrait accélérer ça.

M. Fortin :Très bien.

Une voix : Pour nous, c'est une très bonne, ça.

Mme Nelson (Sylvie) : Oui.

Le Président (M. Provençal) :Il reste encore 1 min 30 s...

M. Fortin :...allez-y, allez-y.

Mme Setlakwe : Merci pour votre présentation, votre mémoire très étoffé, les résultats du sondage. Allons-y aussi... Parce qu'on nous rassure que certains changements n'entreront pas en vigueur tout de suite, mais ça nous rassure puis ça ne nous rassure pas parce que c'est quand même très inquiétant, là, l'exode de Montréal. Vous parlez d'actions urgentes. On s'entend tous que la population s'attend à des résultats pour des améliorations. Alors, on vous laisse un peu de temps pour élaborer sur ce que vous mettez de l'avant dans votre mémoire en termes d'actions urgentes.

Mme Picard (Magali) : Oui. Bien, actions urgentes, je pense que ces discussions-là, donc, qu'on a actuellement... Il y a un paquet d'avenues de décentralisation. On peut le faire, ça. On n'est pas obligé d'avoir... d'être en train de négocier pour être capable d'amener ces modifications-là. Il y a des catégories d'emploi... on est en négociation collective. Si on était capable d'aller chercher un contrat de travail qui... décent, avec des augmentations salariales décentes, qui amènerait des conditions d'emploi où on pourrait, et de un, garder nos gens dans le réseau puis attirer davantage, bien, ça, ça en est, des pratiques qu'on n'est pas... on n'est pas obligé d'attendre le projet de loi n° 15. On peut faire ça maintenant.

Au niveau gouvernemental, on a... il y a des catégories d'emploi... je sais que vous allez entendre l'APTS tout à l'heure, bien, il y a des gens présentement où... des professionnels où le salaire n'est pas du tout compétitif avec le privé. Donc, on pourrait dès maintenant régler tout ça, oui, par la convention collective, mais aussi par la loi de l'équité salariale.

Donc, il y en a, des outils pour faire en sorte, présentement, qu'on soit capable de garder nos gens, peut-être de ramener nos gens qui sont dans les agences privées au niveau public, et ça, bien, on est prêts... on est prêts à le faire avec le gouvernement maintenant. On n'est pas obligé d'attendre dans trois ans pour amener ces propositions-là qui sont... de notre côté, c'est des propositions concrètes qui pourraient faire un changement très rapide dans le réseau.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup.

Mme Setlakwe : Merci.

Le Président (M. Provençal) :Alors, M. le député de Rosemont, vous prenez la suite?

M. Marissal : Merci, M. le Président. Bonjour.

Mme Picard (Magali) : Bonjour.

M. Marissal : Bonjour. Merci d'être là. D'abord, rapidement, sur l'employeur unique, la mobilité de personnel, là, on a parlé de Montréal, effectivement. Seriez-vous favorables à une idée qui circule dans le réseau, surtout à Montréal, en fait, là, de verser une prime salariale aux gens qui travaillent à Montréal? Ça pourrait s'appliquer, j'imagine, dans d'autres secteurs urbanisés, mais, pour le moment, c'est plus Montréal. On me dit que ça se fait à Toronto, Vancouver, parce que, bon, ils ont les mêmes problèmes. Je ne sais pas, je teste l'idée. Moi, je n'en sais rien.

Mme Picard (Magali) : Très honnêtement, je pense que c'est nos négociateurs, nos nos membres qui pourraient répondre. Est-ce que ça viendrait de répondre oui ou non à ce besoin-là? Je ne me sens pas... À moins que mes collègues aient une réponse. Colin, si tu as quelque chose. Mais on n'a pas... on n'a pas pensé à cette proposition-là. On essayait de regarder, suite au sondage, qu'est-ce qui pourrait être fait, toujours dans une façon constructive. Est-ce qu'au départ il faudrait mettre certaines barrières entre les CIUSSS, les CISSS à l'intérieur de la grande région de Montréal? Est-ce que... Il y en aura certainement, des propositions. Peut-être que les primes... comme un peu on voyait, dans le temps, c'étaient des primes d'éloignement, là, ça serait des primes pour travailler dans les grands centres, on aura tout vu. Mais, à l'époque, moi, je me souviens qu'on payait les gens pour aller travailler en région, mais là ça serait l'inverse, ce qui est assez impressionnant. Ceci...

M. Marissal : Rosemont est une région éloignée avec...

Mme Picard (Magali) : Donc...

M. Marissal : Je vais y aller...

Mme Picard (Magali) : Oui, oui, tout est possible, tout est possible. Mais je ne serais pas honnête de vous dire qu'on a envisagé cette option-là. On ne l'a pas fait encore.

M. Marissal : C'est bon. Sur le droit d'association, évidemment, le rétrécissement du nombre d'accréditations... Vous dites : C'est un droit fondamental qui est garanti par les deux chartes. Je suis d'accord. Quand un droit fondamental est attaqué, le premier réflexe normalement, c'est d'aller devant les tribunaux. Bon, on n'en est pas là, là, d'accord, là, sauf que votre option... Est-ce que vous avez d'autres options éventuellement?

• (18 h 30) •

Mme Picard (Magali) : Bien, moi, je crois fortement à... Je suis une personne qui est peut-être un peu naïve, mais je crois sincèrement que, lorsque tout le monde est de bonne foi, on peut arriver à des ententes, à revoir un projet de loi, à être capable de faire des amendements sans être obligé d'utiliser les recours toujours juridiques. Ça a déjà été le premier réflexe des syndicalistes ou même d'où je viens. Cette fois-ci, je vous le disais, on est tous d'accord qu'on a besoin de changer notre réseau de la santé. Ça ne va pas bien. Est-ce que... Est-ce que la fusion des accréditations, pour nous, c'est une option? Non. Est-ce qu'il y a d'autres façons de faire? Oui. Est-ce qu'on est prêts à travailler, à en parler, à amener des propositions? Si l'écoute est là, si on sent qu'on a de la collaboration avec le gouvernement en place...

M. Marissal : Mais vous savez qu'ici ce n'est pas une table de négo, hein?

Mme Picard (Magali) : On le sait, ça. Faites-vous-en pas. On n'aurait pas le même discours.

M. Marissal : Puis même nous ici, on a assez peu, là, de leviers de négo devant un gouvernement majoritaire. Alors...

Mme Picard (Magali) : Fortement.

M. Marissal : ...ça va se décider dans le projet de loi. Vous ne pourrez plus le négocier après, là.

Mme Picard (Magali) : Non, mais on le fait avant, on va le faire avant. Vous avez quand même 1 183 articles à regarder. On nous dit que le bâillon... bon, probablement pas.

M. Marissal : Vous allez le faire avant? Expliquez-moi ça...


 
 

18 h 30 (version non révisée)

Mme Picard (Magali) : ...bien, on va, on va s'asseoir, on va s'asseoir. Moi, je sens qu'il y a une ouverture de la part du ministre Dubé à nous entendre. Et vous l'avez dit, le ministre Dubé l'a dit à la conférence de presse le 29 mars, qu'il était prêt à entendre les parties intéressées. On est une partie drôlement intéressée. Donc, oui, on veut faire ça, on veut... on veut être capables... Écoutez, si on peut éviter, là, la guerre entre les syndicats, une guerre sur le terrain, entre les travailleurs qui n'ont pas besoin de ça, puis qu'on leur laisse leur choix d'association, et puis qu'on peut arriver aux mêmes fins, même, je vous dirais, on pourrait arriver aux mêmes fins, mais davantage, je vous dirais, en travaillant justement en collaboration, je ne vois pas comment, en étant de bonne foi, on ne pourrait pas s'entendre. C'est notre option, c'est notre façon de voir la situation. S'il faut aller, on ira, mais ce n'est pas, ce n'est absolument pas...

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Maintenant, c'est le député de Matane-Matapédia qui prend la relève.

M. Bérubé : Merci, M. le Président. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Dans votre mémoire, en page 23, vous parlez de la nationalisation des services paramédicaux en santé. Effectivement, je vais vous donner de l'espace pour nous expliquer en quoi ça serait une bonne nouvelle. Mais je profite de la présence du ministre pour lui dire qu'il n'y a pas besoin de la loi 15 pour régler les horaires de faction partout au Québec, qui sont un problème pour les relations de travail avec les paramédicaux. Il peut régler ça à Matane, dans le Témiscouata, là, toute une liste, pas besoin d'attendre la loi. Alors, j'aurai passé mon message. Ceci étant dit...

Mme Picard (Magali) : Vous profitez de nous pour passez votre message.

M. Bérubé : Non, mais certains sont syndiqués chez vous, soit dit en passant. En quoi ce serait une bonne idée de nationaliser les services préhospitaliers paramédicaux? Je vous donne la tribune.

M. Ste-Marie (Maxime) : Bien, présentement, ce qu'on vit, puis nous, la particularité, puis c'est important peut-être pour les gens qui nous écoutent, à la FTQ, les paramédics qu'on représente, c'est vraiment des gens qui sont à l'extérieur des grands centres. Ça fait qu'on a beaucoup de gens qui sont en région, comme par chez vous, par exemple. Et ce qu'on entend sur le terrain présentement, c'est qu'il y a des bris de service. Moi, quand j'entends «bris de service» et «ambulances» dans la même phrase, les poils me dressent sur les bras. C'est inacceptable qu'en 2023 on vive encore des enjeux comme ça. Malheureusement, on fait le travail qu'on a à faire syndicalement, il y a peut-être un enfant qui va mourir, ça va passer dans les faits divers, et on passe au prochain appel. Moi, j'en appelle au ministre à regarder, puis je pense qu'il a démontré de l'ouverture tantôt, c'est sûr, comme fédération, à la FTQ, on aurait aimé avoir quelques articles de plus concernant la question de la nationalisation, mais moi, je pense qu'on se doit, puis c'est un peu dans la même vision que son projet de loi au niveau d'avoir un employeur unique, mais pourquoi ne pas avoir un employeur unique aussi pour les soins préhospitaliers, ou en tout cas de s'en inspirer? Moi, je pense qu'on doit... ce n'est pas une question de régions au Québec. Je pense que, peu importe où est-ce qu'on habite au Québec, on a le droit d'avoir des soins préhospitaliers de qualité. Puis, présentement, je pense que ce n'est pas le cas à cause des compagnies privées.

M. Bérubé : Merci.

Le Président (M. Provençal) :Allez-y.

M. Bérubé : Une autre question. Vous vous inquiétez de la nomination d'une personne qui n'est pas un élu ou une élue qui va gérer quand même un réseau important. Effectivement, on peut des fois se poser des questions sur les critères. On a vu, à Investissement Québec, que c'était proximité avec un ministre qui disait : C'est mon ami, bon, j'ai confiance. Mais en quoi ça vous inquiète que ce ne soit pas... qu'il n'y ait pas l'imputabilité d'un élu? On parle de l'agence, là.

Mme Picard (Magali) : Absolument. Bien, il y a bien des gens ici qui savent ce que ça représente, être dans un poste électif. Donc, c'est une imputabilité qui est extrêmement grande, où on doit faire preuve d'une transparence constante, où on doit écouter les gens autour de nous, les différents partenaires. Donc, vous savez, de créer des postes de gestionnaires non élus, ça amène un certain confort de temps en temps dans l'application, là, de la gestion et de la prise de décision. On consulte moins, on se sent sécure dans notre siège. On pense que, on pense que d'avoir des personnes avec des postes électifs vient de régler une grande partie de la problématique et force la consultation.

Le Président (M. Provençal) :Merci. Merci. Alors, Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Nichols : Oui, merci, M. le Président. Merci. Merci de votre mémoire. Merci des 12 recommandations. Je reviens sur une des recommandations en lien avec le privé. Bien sûr, là, on comprend, puis il y a eu d'autres groupes avant vous aussi, là, qui l'on dit, que le privé, c'est inquiétant. Puis vous parlez beaucoup des intentions du ministre aussi dans le projet de loi n° 15. On sent, là, la mobilisation. Vous devez le voir aussi, vous devez le voir vous autres aussi dans le milieu, puis que c'est compliqué, une fois qu'ils sont rendus au privé, de les ramener. Quelles mesures, puis c'est un peu bizarre comme question, mais quelles mesures préventives vous pouvez mettre de l'avant, ou quelles sont vos recommandations, justement, pour...

Mme Picard (Magali) : ...assurer les gens...

Mme Picard (Magali) : ...de revenir ou de ne pas partir.

Mme Nichols : Oui, oui, la rétention.

Mme Picard (Magali) : Bien, premièrement, là, il va falloir aussi, je pense, que le projet de loi... Et pourquoi on a envie de travailler en collaboration, c'est de changer le message aussi dans la population. On parle, on se bataille sur la place publique depuis des années, avec raison, parce que ça ne va pas bien, parce que les conditions d'emploi sont insoutenables. Bien, ça, ça n'attire pas personne. Ce qu'on entend, également, c'est que, dans les classes où on forme les préposés, les infirmières, les classes sont vides, actuellement. Ça, ce n'est pas juste de ramener les gens dans le réseau, mais c'est de ramener ce côté employeur de choix, de faire en sorte que les gens qui ont envie de faire carrière dans ce domaine-là sentent que c'est sain de le faire.

Donc, on a une responsabilité, au niveau des syndicats, de faire ce travail-là que l'on fait, mais de s'assurer de le faire d'une façon où on ne vient pas de rendre ces postes-là inintéressants pour la population. Donc, c'est pour ça qu'on a envie de croire à une réforme importante.

Mme Nichols : ...puis je ne le dis pas méchamment, mais, dans le privé, on le voit, là, ils s'adaptent puis... je parle privé, là, puis pour ne pas donner l'exemple, bon, Bombardier, là, tu sais, ils s'adaptent, ils mettent des conditions plus intéressantes. Pourquoi c'est si compliqué dans le...

Mme Picard (Magali) : Dans la fonction publique?

Mme Nichols : Dans la fonction publique.

Mme Picard (Magali) : Bien, je vous dirais que les besoins sont différents. La pandémie a aussi fait ressortir ce qu'il y avait à peu près de moins beau en ce qui a trait à ces postes-là. On a vraiment vécu une période extrêmement difficile. Ça n'a rien aidé, en ce qui a trait au système de santé au Québec. Chose certaine, s'adapter, c'est une chose, mais c'est une grosse machine, également, c'est énormément, on joue avec la... On n'est pas en train de parler de pièces d'avion, ici, mais bien de services à la population. Donc, ça va aussi avec tout ce qu'on peut vivre, et les imprévus de la vie, et ce qui fait en sorte qu'on a des gens dans des situations difficiles.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup pour le...

Une voix : ...

Mme Picard (Magali) : Bien oui, Sylvie, c'est encore fini.

Le Président (M. Provençal) :Malheureusement, madame.

Des voix : ...

Le Président (M. Provençal) :C'est ça. Alors, merci beaucoup de votre contribution, de votre collaboration.

On va suspendre pour donner place au prochain groupe. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 18 h 38)

(Reprise à 18 h 43)

Le Président (M. Provençal) :Nous allons compléter notre journée de travail avec... en recevant l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux. Je tiens à vous remercier beaucoup parce que vous avez quand même patienté. Alors vous avez 10 minutes pour votre exposé et, par la suite, on y va avec les échanges. À vous la parole.

M. Comeau (Robert) : Alors, merci M. le Président, M. le ministre, Madame Messieurs les députés. Donc, je suis Robert Comeau, je suis le président de l'APTS, qui est l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et services sociaux. Je suis accompagné d'Émilie Charbonneau, à ma droite, qui est vice-présidente, M. Bertrand Schepper, qui est à ma gauche, et Guillaume Plourde, à l'extrême droite, qui sont tous deux conseillers à la recherche dans le secteur sociopolitique chez nous. Bien, on vous remercie de nous recevoir pour que nous puissions vous faire part de notre opinion comme organisation sur le projet de loi n° 15.

L'APTS représente plus de 65 000 professionnels et techniciennes qui pratiquent dans le réseau de la santé et des services sociaux. Nos membres travaillent en diagnostic, en réadaptation, en nutrition, en intervention psychosociale, en soutien clinique ou en prévention et également en santé publique. On œuvre également en centre hospitalier, en CLSC, en CHSLD, dans des centres jeunesse, dans les centres de réadaptation et dans les milieux de vie substitut. Bref, nos membres se retrouvent partout dans le réseau et sont affectés directement par ce projet de loi, puis c'est donc leur voix que nous venons porter aujourd'hui.

Il y a un mois à peine, notre organisation a salué un projet de loi pour émanciper le réseau de sa dépendance aux agences de placement et à la main-d'œuvre indépendante. Une dépendance qui siphonne des moyens dont on a cruellement besoin pour offrir des services accessibles et de qualité dans le réseau. C'est donc avec incompréhension que nous accueillons le projet de loi n° 15, qui officialise l'ouverture à la privatisation. Si on sait que notre réseau va mal, on reconnaît moins volontiers que les assauts les plus néfastes qu'il subit viennent du gouvernement lui-même. Entre réformes, toujours plus centralisatrices, sous financement chronique, recours toujours plus accru au privé au détriment des ressources publiques, le même film me semble sur le point de rejouer. Le gouvernement semble déterminé à faire une place grandissante au secteur privé, comme c'est le cas en Alberta. Pourtant, la qualité des soins et des services sociaux est moindre dans les systèmes qui choisissent cette voie, au point de mener à la hausse considérable des taux de mortalité qui aurait pu être évitée. Notre organisation ne peut d'aucune façon cautionner l'augmentation et l'officialisation de la sous-traitance des soins de santé et de services sociaux dans le système québécois, et donc par le projet de loi actuel.

Donc, l'APTS enjoint le gouvernement de renoncer au projet de loi n° 15 dans sa forme actuelle et de mettre en place de véritables solutions pour sauver le réseau public, à commencer par un bouclier budgétaire qui permettra de stabiliser son financement. Si le gouvernement persiste dans cette voie et que des modifications significatives ne sont pas apportées, la catastrophe, selon nous, nous pend au bout du nez. C'est donc sans gaieté de cœur, mais plutôt pour limiter les dommages prévisibles, que l'APTS vous fait les recommandations suivantes.

L'accès aux services spécialisés des départements cliniques démontre l'ampleur de la place qu'on souhaite faire au privé. Tout laisse à présager que les seuls indicateurs...

M. Comeau (Robert) : ...qui seront pris en compte pour déterminer si un établissement peut envoyer des patients au privé seront les listes et les temps d'attente. Va-t-on évacuer la qualité des soins et services pour des raisons statistiques? Bien, si c'est le cas, le phénomène communément appelé le syndrome des portes tournantes sera exponentiel. Or, pour l'APTS, il est inconcevable que le recours au privé soit toléré de façon aussi laxiste. Le transfert de patients du public vers le privé devrait être vu comme un dernier recours et donc strictement encadré.

Donc, encore une fois, nous demandons au gouvernement de revenir sur sa décision d'ouvrir encore plus grandes les portes au secteur privé. S'il ne le fait pas, qu'il s'assure à tout le moins d'établir une procédure de vérification continue pour éviter que les Québécois qui sollicitent des soins et des services se fassent ballotter d'un établissement à l'autre au risque de compromettre leur santé.

L'APTS s'attendait aussi à voir dans le projet de loi une série de mesures relatives à la reddition de comptes et aux obligations des partenaires privés. La pandémie nous avait appris qu'il fallait plus d'imputabilité dans le système et particulièrement dans les établissements privés. Encore une fois, le projet de loi est trop timide en la matière. Nous invitons la commission à donner le droit à l'ensemble des recommandations de la Vérificatrice générale, à savoir qu'elle puisse avoir les coudées franches pour auditer les entreprises privées en santé et services sociaux et que les établissements privés soient dans l'obligation de fournir tous les rapports financiers, les documents ou renseignements jugés nécessaires par la Vérificatrice générale dans le cadre de ses fonctions.

L'APTS s'inquiète aussi du manque de mécanismes de vérification concernant les dispositions applicables aux établissements publics et privés. Aucune mesure n'est prise pour empêcher que le privé choisisse à sa discrétion et selon ses capacités les cas moins lourds et plus faciles à soigner. Un principe général de limitation doit être introduit dans le projet de loi afin que le recours au privé soit en tout temps un dernier recours. Nous recommandons en outre de mandater la Vérificatrice générale pour qu'elle enquête et évalue régulièrement le mécanisme d'accès et les obligations de prestation des soins et des services des établissements privés.

Alors, vous l'aurez compris, M. le Président, l'autre aspect du projet de loi qui est très problématique à nos yeux, c'est celui de la surcentralisation. En 2021, le premier ministre se désolait que notre réseau soit trop centralisé et affirmait qu'une gestion efficace était une gestion de proximité. Aujourd'hui, il marche dans les pas de ses prédécesseurs en consacrant un pouvoir à des kilomètres des réalités terrain. C'est problématique à bien des égards. Tout d'abord par la gouvernance, qualifiée par les analystes politiques de «plus grande opération de centralisation de l'histoire du Québec en matière de santé». L'Agence Santé Québec concentre massivement les pouvoirs entre les mains des cadres et du ministre. On imagine sans peine les dérives qui en découleront : une bureaucratie centrale qui ralentit les décisions sur le terrain et qui minent l'efficacité des soins et des services.

Comme le soulignait la Commissaire à la santé et au bien-être, le projet de loi ne confère pas l'opérabilité aux établissements, mais à Santé Québec. Ce constat contredit la déclaration du ministère selon laquelle le personnel sera également davantage impliqué dans l'organisation du travail et qu'il pourra faire part de ses demandes et contribuer aux solutions. Nous invitons donc la commission à revoir en profondeur la structure organisationnelle élaborée dans le projet de loi pour décentraliser significativement les pouvoirs. Cela peut notamment se faire en réservant des sièges à des représentants des travailleurs sur le conseil d'administration de l'agence, sur chacun des conseils d'établissement et sur divers comités.

• (18 h 50) •

La centralisation se répercute aussi au niveau des relations de travail, au détriment d'une réelle participation des travailleuses à l'organisation du travail. Le projet de loi prévoit modifier en profondeur le modèle de négociation des conventions collectives, pensant probablement faciliter les négociations en les concentrant autour d'une seule table. Derrière une apparente simplicité, les négociations seront encore plus complexes si l'on souhaite tenir compte des disparités régionales et des réalités diverses vécues par les différents types d'emplois que nous représentons.

Le projet de loi prévoit éliminer également les conventions collectives locales au profit d'une seule convention de matière locale pour l'ensemble des régions sociosanitaires. Ces matières sont un outil essentiel pour assurer une gestion de proximité pertinente des relations de travail. Les limiter, c'est une fois de plus s'éloigner de l'objectif de faire du réseau public un employeur de choix. C'est pourquoi l'APTS demande que les accréditations locales et la négociation des matières locales soient conservées telles qu'elles sont actuellement.

Il est très important de saisir aussi à quel point cette centralisation va avoir des impacts néfastes sur la santé et la sécurité au travail. Alors que les milieux de travail sont déjà pénibles et peu attirants, une nouvelle centralisation va retarder une fois de plus la résolution des enjeux de santé et sécurité au travail. Déjà, les CISSS et les CIUSSS parviennent à peine à répondre à leurs obligations légales...

M. Comeau (Robert) : ...prévention. Alors, comment pense-t-on que Santé Québec va performer davantage? On parle pourtant ici de la santé et la sécurité des travailleuses. La résilience de notre réseau passe forcément par ces personnes. Il sera donc très important que le... le ministère s'assure que toute réforme du système de santé et de services sociaux à venir n'entraîne pas de nouveaux retards dans la résolution de ces dossiers.

Alors, en conclusion, M. le Président, vous l'aurez compris, la réforme proposée nous inquiète au plus haut point. Elle va encore fragiliser notre réseau public en embrayant dans la voie de la privatisation. Elle va atrophier son caractère démocratique. Elle va dégrader la culture et les milieux de travail déjà pénibles en imposant une énième opération de centralisation. Elle va nous éloigner encore plus de la gestion de proximité en sapant le régime de négociation et en sabordant les efforts de santé et sécurité du travail, particulièrement au niveau local. Et tout ça pour, en bout de ligne, diminuer la qualité des soins et services et coûter plus cher aux contribuables.

Alors, pour toutes ces raisons, l'APTS enjoint au gouvernement de changer de cap, de renoncer au projet de loi n° 15 dans sa forme actuelle et d'enclencher un véritable processus de consultation pour aboutir à des solutions porteuses. Ces solutions devront s'articuler autour d'une véritable décentralisation, d'une vraie démocratisation et d'un modèle 100 % public et universel qui permettra de répondre aux besoins de toute la population du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal) :Bien, merci beaucoup, Monsieur Comeau, pour votre exposé. Avant de passer la parole à M. le ministre, nous avons besoin d'un six minutes additionnelles compte tenu du retard. Alors, j'ai besoin du consentement pour le six minutes. Merci. M. le ministre, on y va.

M. Dubé : Très bien. Alors, M. Comeau, merci beaucoup, à vous et à vos collègues, là. Vous êtes quand même notre dessert aujourd'hui, là, on a eu quelques présentations. Ça fait que content que vous soyez là pour venir faire le point.

Je vais quand même dire ce que ce que j'ai dit quelques fois aujourd'hui, je veux qu'on soit prudents avec... avec les mots. Parce que je vous ai entendu parler de surcentralisation, puis tout ça. Puis peut-être parce que je suis un peu plus fatigué en fin de journée, là, mais vous avez entendu d'autres réponses qu'on a données aujourd'hui, quand on parle de gestionnaires de proximité. Il y a plusieurs éléments, dans le projet de loi, où, au contraire, on démontre clairement, clairement, puis je pense à l'article 29, où on parle de subsidiarité. Qu'est-ce que ça veut dire, ça? C'est qu'on parle d'un principe, là, ce n'est pas... ce n'est pas anecdotique, ce que je dis, là, c'est que la décision la plus proche du terrain devra toujours être notre plus grand principe. Si ça, ce n'est pas de décentralisation, je me demande qu'est-ce que c'est que de la décentralisation. Quand c'est de séparer le ministère pour que les décisions puissent se prendre maintenant de façon plus autonome, dans Santé Québec, avec la même organisation qui va permettre d'aller de haut en bas et de bas en haut, des conseils d'établissement qui vont faire une meilleure reddition de comptes locale...

Je comprends tout ce que vous dites aujourd'hui puis j'espère que vous ne voulez pas dire qu'il ne faut rien changer. Parce que les Québécois, ce qu'ils nous demandent, là, M. Comeau, puis vous êtes... avez assez d'expérience syndicale, ils nous demandent de faire des changements importants, là. Ce n'est pas... pas une petite cure minceur de deux semaines avant le temps des fêtes qu'il faut faire, là. Ce qu'ils nous demandent, c'est de faire des changements importants, et de dire à chacun, incluant les syndicats : Qu'est-ce que vous pouvez faire pour nous?

Ça fait que, quand vous me parlez de... que c'est de la surcentralisation, puis etc., je veux juste vous dire de... Je sais, peut-être que ça a été rapide entre le temps qu'on a déposé le projet de loi puis qu'on vous a demandé de venir vous présenter, mais ce que j'aimerais, dans les prochaines semaines, on va avoir le temps d'en reparler parce qu'il va y avoir d'autres consultations, puis il va y avoir l'article par article. Je voudrais juste qu'on prenne le temps de regarder où vous trouvez qu'il y a de la centralisation, pour être bien clair. Parce que moi, je vous dis, je peux vous donner autant, sinon plus d'exemples qui a réellement de la décentralisation, mais j'y reviendrai.

Maintenant, je vais être très, très pratique. J'ai posé la même question à tout le monde puis je veux qu'on se comprenne quand vous parlez d'accréditation locale versus nationale. Le fait de passer... de transférer à l'agence, de créer cet employeur unique là, on va respecter la loi. Oui, ça va être dans trois ans, je l'ai expliqué à plusieurs autres parties aujourd'hui, mais la loi 30 est très claire. Si on ne change pas la loi 30, on va avoir quatre...

M. Dubé : ...accréditations pour un employeur. Il n'y aura plus 36 employeurs. Alors, le fait de dire que c'est un choix qu'on fait, le choix, c'est de transférer ça à une agence, il faut respecter la loi, il y aura quatre accréditations. Maintenant, une des... puis ça sera une accréditation nationale. Maintenant, ça ne nous empêche pas de travailler localement. On peut avoir une entente nationale, mais de travailler aussi sur certains éléments qu'on pourra discuter. Parce que je l'ai bien dit aux deux groupes précédents : On a trois ans pour respecter le principe que c'est applicable dans trois ans, puis je veux juste que les gens comprennent bien ça.

Maintenant, une des questions que j'ai pour vous, vous avez... vous l'avez bien dit, là, puis on en a assez parlé pendant la pandémie, vous avez entre autres les techniciens, vous avez 65 000 membres, des gens de laboratoire, etc., qui ont fait un travail incroyable durant la pandémie. Puis, comme je l'ai fait à d'autres, mais spécifiquement pour les employés techniciens, c'est des gens qui ont fait un travail incroyable, puis je veux les remercier. Maintenant, est-ce que ça sera le bon choix? Quand je dis, toujours, qu'on peut bonifier le projet de loi, je ne changerai pas des grands principes. Principe de décentralisation, ça, on va être là. Par contre, ce que j'aimerais savoir de votre part : Est-ce que vous trouvez que les quatre catégories que l'on a en ce moment devraient peut-être être bonifiées? Est-ce qu'on devrait peut-être aller à cinq ou six catégories? Est-ce que vous... les 65 000 que vous représentez, vous trouvez que vous avez assez d'homogénéité pour garder ça? Parce que, pour être sûr qu'on a une bonne représentation des employés, on pourrait décider, avec mes collègues, dans le projet de loi, de dire qu'on va créer une ou deux catégories additionnelles tout en respectant le principe de l'employeur unique. Vous me suivez? Ça fait qu'une des questions que j'ai, puis je vais vous laisser... je reviendrai sur la libération syndicale, parce que je l'ai posée à toutes les autres fédérations syndicales qui vous ont précédé, mais, sur la... est-ce que vous trouvez que votre catégorie représente bien ce que vous voulez faire ou vous auriez besoin de certaines modifications à ça?

M. Comeau (Robert) : Bien, pour nous, apporter des modifications, à ce moment-ci, à des catégories en les augmentant ou en divisant des catégories, pour nous, ça... engendre, pardon, un maraudage. Le mot qu'on n'aime pas dire parce que...

M. Dubé : Mais qui serait dans trois ans, là, on s'entend, là, qui ne serait pas présentement, là.

M. Comeau (Robert) : Qui serait dans trois ans, mais qui crée quand même, encore, un déséquilibre puis une querelle possible entre les organisations. Puis moi, je pense qu'on a vécu quelque chose de beau entre nous, les organisations syndicales, lors de la pandémie. On a eu l'occasion de se rencontrer pour gérer des crises au quotidien, avec vous, vous nous avez...

M. Dubé : Quelquefois.

M. Comeau (Robert) : Puis on a quand même, je pense, réussi à répondre à la commande là-dessus.

M. Dubé : Tout à fait, tout à fait.

M. Comeau (Robert) : Un maraudage entraîne toujours un petit peu une chicane puis un petit peu... Mais je pense que le réseau n'a pas besoin de ça actuellement. Avec surtout ce qui est à nos portes actuellement, là, gérons plus le projet de loi en tant tel que le parallèle.

M. Dubé : Ça fait qu'en ce moment... Non, mais c'est correct, c'est pour ça, j'aime en profiter pour vous demander si vous ne voyez pas ça. Maintenant, en termes de libération syndicale, parce que ça, je l'entends beaucoup autant des gestionnaires même que... Le fait d'aller un employeur unique, est-ce que ça pourrait avoir un impact? Vous avez entendu des questions que j'ai posées. Vous, combien de personnes ou combien de jours ou de personnes vous avez en libération syndicale dans vos 65 000 membres en ce moment?

M. Comeau (Robert) : Je ne sais pas par cœur, mais on prend ce qui est permis dans les conventions collectives puis on en ajoute aussi, qu'on finance nous-mêmes. Mais on est quand même conséquents avec ce qu'on dit, on aimerait avoir des gestionnaires de proximité, c'est clair, puis vous l'avez dit dans les interventions précédentes, ça sera le cas...

M. Dubé : Mais pourquoi vous faites le lien avec gestionnaire de proximité quand je vous parle de libération syndicale?

M. Comeau (Robert) : Parce que, quand on a un problème qui arrive sur le terrain, ça nous prend aussi quelqu'un de syndical sur le terrain pour pouvoir l'adresser.

• (19 heures) •

M. Dubé : Ah! O.K., dans ce sens-là.

M. Comeau (Robert) : Dans ce sens-là.

M. Dubé : O.K. Vous, vous parlez du représentant syndical local, c'est ça que vous voulez dire?

M. Comeau (Robert) : Oui.

M. Dubé : O.K.

M. Comeau (Robert) : Puis on ne veut pas une vie syndicale que nationale, on la veut locale aussi, justement, pour être au jour le jour avec les...

M. Dubé : Mais, si vous aviez l'information, dans les prochains jours, là, un peu comme je l'ai demandée aux autres, j'aimerais ça voir le nombre de personnes qui sont en libération syndicale, surtout, je dirais... Pourquoi je le demande? C'est dans un contexte où on a une pénurie de main-d'oeuvre. Puis, s'il faut faire des fois des efforts pour aller chercher des employés où on... qu'on peut les prendre.

J'ai une discussion tout à l'heure avec choix individuel versus choix syndical, puis j'aimerais vous entendre aussi là-dessus. Parce que, tantôt, je donnais l'exemple à un de vos prédécesseurs, de dire... Bien, j'entends souvent les employés qui disent : Mais moi, si c'était mon choix à moi, je voudrais peut-être avoir plus de marge de manœuvre dans les choix que je peux faire dans mon organisation de travail, mais souvent, c'est mon syndicat qui va dire : Bien, ça, ce n'est pas de matière locale ou c'est plus de matière... Je veux vous entendre là-dessus. Parce que vous avez entendu les discussions qu'on a eues...


 
 

19 h (version non révisée)

M. Dubé : ...c'est quoi votre principe à l'APTS?

M. Comeau (Robert) : Nous, on fait du droit collectif, donc c'est sûr qu'il faut... qu'il faut satisfaire, il faut répondre à la demande de la majorité de nos membres. Alors, les choix individuels... En tout cas, je vois mal l'agence, dans ce cas-là, aller voir chacune des personnes pour demander ce qu'elle veut. C'est pour ça qu'ils ont une organisation syndicale.

M. Dubé : Non, non, non. Mais localement, là, prenons un exemple concret, là, vous avez des employés, je ne sais pas, dans le laboratoire à Sainte-Justine, n'importe quoi, là. Je ne sais pas si  c'est vous qui coupez le laboratoire de Sainte-Justine. Mais, si ces gens-là voulaient avoir telle organisation de travail et que l'ensemble de ces gens-là, sur une base individuelle, décidaient de le faire, est-ce que vous auriez un problème avec ça?

M. Comeau (Robert) : Non. Si l'ensemble de gens y consentent, pourquoi pas le faire.

M. Dubé : O.K.

M. Comeau (Robert) : Ça ne peut pas être un frein, là.

M. Dubé : O.K. Là, je vais être très technique, là, il y a une recommandation que je n'ai vraiment pas compris puis je vais essayer de la retrouver. C'est la recommandation 6 que vous faites dans votre mémoire. Puis si...

Combien il me reste de temps, M. le Président?

Le Président (M. Bachand) :Sept minutes.

M. Dubé : Oh! Mon Dieu, on est... on est lousse.

Recommandations n° 6. Bougez pas! Je vais aller chercher ma...

Une voix : ...

M. Dubé : Vous l'avez ici. Merci, Mme Savoie.

Vous dites : «Que le projet de loi établisse une procédure de vérification unique pour éviter la possibilité de patient dumping par l'agence.» Ça veut dire quoi ça?

Mme Charbonneau (Émilie) : Le patient dumping?

M. Dubé : Oui.

Mme Charbonneau (Émilie) : Mais, premièrement, le patient dumping à ne pas mélanger avec le patient de dumpling, c'est une blague. Ah! Ha! on essaie de rire rendu à ce temps-là.

M. Dubé : À cette heure-là, on a besoin de rire un peu, vous avez raison.

Mme Charbonneau (Émilie) : Exact. C'est l'heure du souper, on a tous faim.

M. Dubé : Oui.

Mme Charbonneau (Émilie) : On pourrait référer... On l'a mentionné dans l'allocution de Robert, c'est toute la question des portes tournantes. Les portes tournantes dans le réseau de la santé et...

M. Dubé : Ah! O.K.

Mme Charbonneau (Émilie) : ...des services sociaux est induite par des services qui sont discontinus.

M. Dubé : O.K. là, je comprends.

Mme Charbonneau (Émilie) : Notre logique est à penser si on se base, par exemple, sur l'Alberta.

M. Dubé : Dumping dans le... Pas de dumpling, mais dans le sens de...

Mme Charbonneau (Émilie) : Par exemple...

M. Dubé : ...on perd la responsabilité. O.K. O.K.

Mme Charbonneau (Émilie) : Oui, par exemple, on a une opération au privé, on a une complication. La complication va être traitée au public. Donc, à ce sens-là...

M. Dubé : O.K. dans ce sens-là.

Mme Charbonneau (Émilie) : ...on rate l'objectif d'avoir une trajectoire de soins qui est continue avec l'introduction du privé.

M. Dubé : Ça, c'est un très, très bon point parce que,  quand on a eu le cas, je me souviens, à... Là, ce n'est peut-être pas dans vos syndiqués, mais on a eu un cas d'une dame qui voulait transférer, par exemple, déménager à Laval, puis la personne ne pouvait pas suivre, puis elle a été obligée de laisser son patient. On peut parler de ça. O.K. je comprends. Puis ça, bien, vous voulez que cette procédure-là arrête là. C'est pour ça vous mettez cette recommandation. O.K. Là, c'est plus clair. Excusez-moi, je n'avais pas compris.

Vous avez une recommandation aussi que je suppporte, donc ce n'est pas la seule, mais sur le VG, sur le Vérificateur général. Pouvez-vous juste élaborer ça parce que je pense que le VG continue de nous écouter même à cette heure-là. Dites-moi ce que vous voulez dire par ça, je trouve que c'est important.

M. Comeau (Robert) : Bien, c'est dans la reddition de comptes en fait. C'est sûr que les entreprises privées qui auront à donner des soins par l'agence, ce qu'on aimerait savoir, c'est, bien, les budgets, comment ils ont dépensé. Ça va être moins opaque finalement, que ce soit plus transparent pour la population du Québec qui va payer ces entreprises-là, tout comme le ministère le fait face à la population. Mais on aimerait aussi que le secteur privé fasse la même chose aussi, puis que la Vérificatrice ait accès à toutes les données possibles pour bien vérifier les choses aussi.

M. Dubé : Bon. Mais sur la question, je vais dire ça, de l'Alberta là, parce que vous en mentionniez, puis j'avertis mes collègues que s'ils veulent prendre des questions, on pourra peut-être... parce qu'il me reste encore un peu de temps.

Le Président (M. Bachand) :  Quatre minutes.

M. Dubé : Il reste quatre minutes, bon, je vais essayer d'y aller rapidement, là. Juste vous rappeler qu'on a fait une analyse... Parce que vous dites, ça a mal tourné en Alberta, il ne faudrait pas que ça tourne mal ici. Bon, juste vous rappeler, puis vous avez peut-être eu la chance, ou les gens de votre recherche parce que vous m'avez dit que vous aviez deux personnes de recherche ici.

On a demandé quand même à la Commissaire à la santé, Mme Castonguay, de faire une tournée de tout ce qui s'est fait comme organisation, puis je vois vous hochez de la tête, donc vous êtes au courant. Et j'ai eu la chance d'appeler les gens de l'Alberta, je veux vous le dire, là, pour voir qu'est-ce qui s'est passé il y a peut-être une dizaine d'années parce que je pense que c'est peut être une des premières provinces qui a fait un questionnement de leur gouvernance en termes de réseau de la santé. Et ils ont fait, après les changements de gouvernement, ils ont fait des reconfigurations, ils ont élevé le conseil d'administration, ils ont nommé un employeur, vous êtes au courant de tout ça. Ça fait que je veux juste vous dire qu'il ne faut pas juste prendre l'exemple d'Alberta pour ce qui n'a pas bien été, mais de regarder aussi tous les autres sur lesquels on s'est appuyés. Mais je voulais juste le mentionner qu'on n'a pas pris une photocopie de l'Alberta qui a mal été, puis de dire c'est ça qu'on va faire avec Santé Québec...

M. Dubé : ...je veux juste vous rassurer là-dessus, parce qu'on a été très, très sensibles à l'analyse qui a été faite, par Mme Castonguay, d'où prendre les meilleures pratiques, incluant ce qui se fait très bien en Europe. Notamment, au Danemark, dans certains pays scandinaves, ce principe-là d'agence qui sépare les opérations du ministère est excessivement reconnu et bien utilisé au cours des dernières années. Ça fait que je voulais juste... Mais si vous voulez commenter, gênez-vous pas, là, mais... Allez-y.

Mme Charbonneau (Émilie) : En lien avec le Danemark, on est bien d'accord, mais l'exemple qui est cité, c'est qu'au Danemark c'est 100 % public. Donc, ici, bien, il y a une agence, mais elle va gérer le privé puis va dispatcher ça à coup de règlements. Au Danemark, on a une réelle décentralisation, puis le transfert de pouvoir s'est fait d'une manière réelle, par exemple, vers les municipalités. Ça fait que nous, on est tous en accord avec le modèle du Danemark. Une agence, telle que proposée, dans un réseau qui est public, pourquoi pas?

M. Dubé : Oui, mais, c'est ça, si on enlève la notion... Vous avez raison, parce que ce que vous me dites, puis on est d'accord là-dessus, la façon dont on gère, je veux dire, la décentralisation, que les opérations sont d'une agence, c'est ça qu'on reconnaît. On est allés, justement, les rencontrer pour en parler l'an dernier, quand on était aux balbutiements.

La question du privé, c'est une autre chose, mais je peux vous dire, eux aussi, pour leur avoir parlé, qu'ils ont des gros problèmes, en ce moment, dans le retard des chirurgies, d'énormes problèmes dans les retards des chirurgies, et qu'ils sont en train de regarder comment ils pourraient utiliser le privé. Je fais juste vous dire ça qu'en ce moment c'est un des enjeux. Ce n'est pas nécessairement parce qu'on veut se distancer du public, au contraire, mais c'est qu'on doit donner aux Québécois un service, un service en chirurgie, un service... Alors, je veux juste mentionner ça. Parce que, vous avez raison, comme nous, ils priorisent le public, mais ils se posent de grandes questions par rapport aux retards qu'ils ont dans les chirurgies.

Mme Charbonneau (Émilie) : Tout à fait.

M. Dubé : Est-ce qu'il nous reste du temps?

Le Président (M. Provençal) :...une minute.

M. Schepper (Bertrand) : ...

M. Dubé : Oui, oui, oui, allez-y.

M. Schepper (Bertrand) : Pour répondre sur la question de l'Alberta, on est bien conscients que le modèle que vous présentez n'est pas le modèle de l'Alberta il y a 20 ans, par exemple, ou il y a 15 ans, à peu près. Ceci étant dit, quand on regarde les données de 2019, par exemple, compilées par les CISSS, on le voit, notamment, que, si, oui, par exemple, les listes d'attente sont moins longues et le temps d'attente en urgence est moins long, la qualité des soins de services, le retour après hospitalisation est plus élevé et, aussi, les coûts des séjours sont plus élevés qu'au Québec et même, que la moyenne canadienne. Donc, bien sûr, l'Alberta... on ne pense pas que vous allez refaire ce qui s'est fait, il y a 15 ans, en Alberta. Par contre, on voit les chiffres d'aujourd'hui, puis les chiffres d'aujourd'hui ne sont pas nécessairement favorables en termes de qualité des soins de services.

M. Dubé : Mais j'aimerais ça en parler, surtout que vous avez fait... vous avez un service de recherche, puis on pourra en reparler. Mais l'Alberta avait sept régions, ils ont fermé les sept régions. C'est pour ça...

M. Schepper (Bertrand) : Ils en ont même eu 19 ou 17, je pense, par le passé, oui.

M. Dubé : Bien, exactement. Puis, après ça, ils en ont enlevé, en plus. Ils sont allés tout à fait au contraire de ce qu'on veut faire, c'est la décentralisation. Alors, je veux juste dire que, quand vous avez référé à l'Alberta, là, je voulais juste peut-être préciser que...

Le Président (M. Provençal) :...terminé. Alors, M. le député de Pontiac, je vous cède la parole.

• (19 h 10) •

M. Fortin :Merci, M. le Président. Bonjour à vous quatre, merci d'être là. Est-ce que le ministre vous a convaincu que c'est de la décentralisation, son truc? Il a passé les cinq premières minutes, là, d'échange avec vous à essayer de vous convaincre que c'était de la décentralisation. Ça a-tu marché?

M. Comeau (Robert) : ...dans le texte qu'on lit et le discours qu'on entend, Il y a comme une différence. Nous, on a beaucoup d'inquiétudes sur la centralisation des relations de travail. On est plus dans le comment, comment ce sera fait, par qui, est-ce que les griefs seront gérés par agence Santé Québec, toute cette proximité-là, qu'on ne sent pas dans le texte actuellement. Ça fait que, oui, j'entends les propos, mais je ne le lis pas dans le projet de loi actuellement.

M. Fortin :Oui, puis je pense que vous n'êtes pas le seul, là. Vous l'avez noté vous-même, là, il y a beaucoup d'analystes qui disent que c'est le plus grand projet de centralisation qu'on a vu du réseau de la santé.

Je veux quand même revenir sur la discussion que vous avez eue à l'instant avec le ministre, par rapport à l'Alberta. Parce qu'il a beau nous dire : On ne s'est pas juste basés sur l'Alberta, là, il y a quand même des grandes similitudes, disons. Quand je regarde les chiffres que vous nous avez présentés... Puis, effectivement, là... Et je trouve que vous en avez fait une analyse intéressante, dans le sens où il y a des avantages pour le Québec, il y a des avantages pour l'Alberta. Mais depuis leurs changements, quand je regarde juste les chiffres que vous avez présentés, je n'en vois pas des énormes. Quand je fais juste regarder les leurs, sans les comparer aux nôtres, là, on dirait qu'il y a une certaine stabilité dans leurs chiffres, que ce soit au niveau des temps d'attente à l'urgence, de la durée totale du séjour à l'urgence, et même des coûts, là, qui étaient déjà pas mal plus élevés. Est-ce que vous avez vu, dans cette analyse-là, quelque chose qui a changé de...

M. Fortin :...drastique après l'introduction de leur modèle.

M. Schepper (Bertrand) : Bien, juste d'emblée, il faut dire que les chiffres qui sont présentés ici datent des trois ou quatre dernières années, parce que c'est les données disponibles pour l'entièreté du Canada. Donc, après ça, qu'on peut comparer avec le Québec, qui était l'objectif ici. Donc, non, on n'a pas de données qui datent au moment de la modification.

Ceci étant dit, il y a eu des diminutions de coûts dans le système albertain par rapport à 1995 ou 2005, si je ne me trompe pas, principalement parce qu'il y a eu des coupures dans le système et, à ce moment-là, ils ont  sauvé de l'argent, en termes de gouvernement. Ceci étant dit, il n'y a pas, aujourd'hui, par rapport aux cinq, 10 dernières années, des modifications majeures en Alberta, outre le fait, bon... l'enjeu de la pandémie, tu sais, et, autrement, donc, je vous invite quand même à peut-être moins prendre les données de 2020-2021 comme étant les plus solides, là. Mais non, il n'y a pas eu de modification majeure, sauf au moment où ça s'est mis en place, mais il faut quand même dire qu'il y a eu aussi d'importants conflits, notamment avec les médecins spécialistes, qui ont mené à ce que le système albertain est beaucoup plus privatisé que le système québécois.

M. Fortin :Mais ça... selon vous, ça, c'est venu, que le système soit privatisé en Alberta, puis on peut le regarder de plusieurs façons différentes, l'Alberta a peut-être une façon de penser différente que beaucoup d'autres endroits au pays, d'ailleurs, mais est-ce que ça vient de la création de leur agence, ça? Est-ce que le privé a vraiment pris encore, disons, toute sa place à ce moment-là?

M. Schepper (Bertrand) : On peut dire que la mise en place de l'agence a facilité la mise en place d'un système plus privé. Et aussi il faut le dire, nous on représente des gens qui travaillent, par exemple, en santé publique, hein, et les études qui ont étudié aussi le modèle anglais, qui est un pionnier dans la privatisation du système... le modèle anglais nous montre aussi ces études-là. Lors de la mise en place de l'agence, de leur équivalent d'agence ou de l'ouverture au privé, a eu un impact, sur une étude qui est à peu près sur 10 ou 12 ans, un impact où il y a eu un taux de mortalité évitable plus grand, plus grand aujourd'hui que lorsqu'ils ont mis... le système était en plus grande partie public. Donc, il y a une inquiétude à avoir, en termes de santé publique, sur le fait de faire une plus grande place au privé dans le système de santé, particulièrement dans les opérations.

M. Fortin :O.K.. La dernière recommandation que vous avez, celle en lien avec ce que vous appelez, là, le culte de la performance, là, si j'essaie bien... si j'essaie de comprendre, là, ce que vous êtes en train de dire, puis je vous avoue que je vois une certaine... puis je suis certain que vous pouvez le clarifier, là, une certaine contradiction dans votre propos. C'est que les employés se retrouvent, comme vous le dites, dans une situation de surcharge informationnelle, qu'on utilise presque trop les indicateurs, mais votre recommandation, c'est que le gouvernement impose à l'agence d'utilisation d'indicateurs de qualité des soins et de charge de travail. Alors, je veux juste comprendre le sens de votre recommandation puis qu'est-ce que vous souhaitez vraiment?

Mme Charbonneau (Émilie) : Bien, en fait, c'est surtout sur qui qui évalue les données pour les indicateurs de performance et nos intervenantes, nos travailleuses, nos travailleurs qui les remplissent. Puis ça prend parfois jusqu'à 50 % de leur temps de le faire. Leur travail est évalué en fonction de ça. Des indicateurs de qualité, ça prend en compte aussi l'autonomie professionnelle de nos travailleuses, nos travailleurs puis ça fait en sorte qu'on leur fait confiance puis qu'on n'est pas juste dans une gestion comptable de dossiers. Puis ça implique que le gestionnaire est impliqué dans... dans la charge de dossier puis qu'il n'est pas simplement en train de dire : Prends un dossier de plus.

Par exemple, en DPJ, là, on l'a vu en Montérégie-Est, là, les listes d'attentes ont diminué, on est contents, la liste d'attente a diminué. Les faits, c'est qu'on a imposé des dossiers dans des «caseloads», puis les dossiers restent là parce que les intervenantes, les intervenants ne peuvent pas les prendre. Donc, est-ce que l'objectif d'avoir des soins de qualité est atteint? Je crois que non, parce qu'on omet tout le pan de la qualité, de l'accès aux soins. L'accès aux soins, ce n'est pas une question juste de chiffres puis de trucs qu'on rentre dans une colonne, c'est aussi la capacité des intervenantes d'être en mesure de bien faire leur travail dans leur pleine autonomie professionnelle. Puis ça, je pense, c'est une responsabilité qui devient partagée avec le gestionnaire, ce n'est plus juste une question de : Est-ce que l'intervenant fait sa job ou pas? C'est : Est-ce que le gestionnaire met les conditions en place pour qu'il fasse bien son travail?

M. Fortin :Dernière chose pour moi avant de passer la parole à ma collègue. Vous parlez, à 3.2, là, une centralisation des comptes et des rapports. Puis je vous avoue, avec 1 183 articles, là, ça, ça... moi, ça m'avait échappé, ce bout-là, mais, bon, il y a 1 183 articles, j'imagine qu'on a tous manqué un bout ou un autre, là. Ce que... ce que vous êtes en train de dire, c'est que vous voulez comprendre les différences dans les rapports financiers des établissements régionaux, ce qu'on a tous, là, ce qu'on voit tous, quand le CISSS de l'Estrie ou de l'Abitibi, ou d'ailleurs, là, a des enjeux avec ces rapports financiers, quand ils excèdent leur budget, quand... ou à l'inverse, parce qu'il y a pénurie de main-d'oeuvre, quand ils ne dépensent pas tout leur argent, vous le voyez...

M. Fortin :...Alors là, ce que vous dites, c'est qu'avec la façon que c'est fait, la reddition de comptes actuellement, on ne voit pas ces rapports-là.

Mme Charbonneau (Émilie) : Bien, en fait, ce n'est pas une question qu'on ne les croit pas, les rapports. C'est qu'il va en avoir juste un qui va comptabiliser l'ensemble. Donc, il n'y aura plus de ventilation des chiffres. Tu sais, on l'a mentionné lors du passage en p.l. no 10, l'importance d'avoir une ventilation des chiffres pour avoir, par exemple, c'est quoi le montant qui est alloué aux agences. Puis, bien malheureusement on ne le voit pas dans le projet de loi actuel, mais tout qu'est-ce qui est des services achetés. Donc, une bonne ventilation des chiffres, c'est aussi une façon rigoureuse de voir où l'argent, l'argent des travailleuses, des travailleurs, des Québécoises, des Québécois, va. Donc, si on met ça dans, excusez l'anglicisme, un «bundle», on n'est plus capable de ventiler les chiffres, bien, comment qu'on fait un suivi des dépenses qui sont mises en place puis comment qu'on s'assure que l'argent soit bien alloué, puis que la dépense est faite en fonction des besoins sur le terrain?

M. Fortin :Là, je vous entends, surtout venant de l'Outaouais, là, c'est un enjeu qui revient souvent. Les gens de l'Outaouais veulent s'assurer qu'ils ont leur juste part. D'ailleurs, ils ont fait des recommandations de modifications, là, au projet de loi pour s'en assurer. Mais je vous entends là-dessus, là, le besoin d'avoir une transparence évidente à ce niveau-là. Merci.

Le Président (M. Provençal) :Mme la députée.

Mme Setlakwe : ...de minutes?

Le Président (M. Provençal) :2 min 40 s

Mme Setlakwe : Parfait. Je reviens sur... Merci à vous tous. Je reviens sur la décentralisation, là. On voit que vous... Vous êtes sceptiques. Je pense que... J'y vais... J'y vais doucement, là. Vous n'y croyez pas. Il y a vraiment comme un «disconnect», là, de... désolée de l'anglicisme, entre ce que le ministre met de l'avant, mais votre lecture du projet de loi. Puis là je trouvais... Il y a un passage intéressant dans votre... dans votre mémoire. Vous donnez des exemples concrets. Vous êtes allés en détail dans l'analyse de la loi sur la DPJ, et puis vous dites, bon, c'est un exemple parmi d'autres qui met en lumière l'affirmation de la commissaire quand elle est venue ici, qui dit que la loi ne confère pas l'opérabilité aux établissements, mais à Santé Québec. Mais c'est important que vous les mettiez de l'avant, ces exemples-là. Est-ce que vous en avez d'autres ou voulez-vous élaborer sur celui-là? Ça semble tellement central dans vos préoccupations, là, que ça vaut la peine qu'on...

Mme Charbonneau (Émilie) : L'autre exemple qu'on aimerait vous donner, c'est... puis on n'en fait pas... on n'en fait pas état dans le projet de loi, c'est tout Optilab. Le projet de loi no 15 est silencieux sur Optilab puis la gestion qu'on va en faire. À quel endroit va se retrouver Optilab dans cette centralisation-là? Optilab est un exemple de centralisation qui n'a pas fonctionné. Par exemple, Optilab, avec ses laboratoires satellites qui se retrouvent parfois à des milliers de kilomètres de distance de l'employeur, on a des exemples. Par exemple, à un moment donné, on s'est retrouvé avec des problèmes de qualité de l'air dans un laboratoire, par exemple en Abitibi-Témiscamingue. Puis, bien, Montréal, ça ne répondait juste pas. Donc, on fait quoi dans ce temps-là quand il n'y a plus de directives?

Donc, le problème de centralisation, pour nous, c'est, oui, un gestionnaire de proximité, puis on l'a mentionné à plusieurs reprises, la capacité de faire des choses, pas d'attendre une chaîne de commandement. On l'a vu, comme pendant la pandémie, ç'a été destructeur, cette attente là d'une chaîne de commandement. On est pour la décentralisation, mais à l'heure actuelle, le projet... le projet Optilab... Et on signe et on persiste parce qu'on est muet dans ce projet de loi là sur la centralisation d'Optilab. On continue de penser que ça fonctionne bien. Donc, pour nous, ça nous inquiète grandement.

• (19 h 20) •

Mme Setlakwe : Merci.

Le Président (M. Provençal) :M. le député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Bonsoir. Merci d'être là. Effectivement, vous êtes nos derniers pour la journée. Vous demandez plus de transparence, plus d'imputabilité aussi, là, notamment dans le cas des contrats privés. Vous avez déjà manifesté cette... ce souhait-là dans d'autres commissions, là, devant nous, ici notamment, en début de législature. Qu'est-ce que vous avez en ce moment comme... comme données sur les services achetés, par exemple, que vous recevez?

M. Plourde (Guillaume) : Ce qu'on a comme données au niveau des services achetés, c'est comme on vous l'avait dit la dernière fois, c'est les données qui se retrouvent au niveau des AS-471, les rapports financiers des établissements. Puis comme on vous l'a dit, là, dans le projet de loi, actuellement, ça, c'est un truc qui nous préoccupe, là, a survie peut-être, là, de ce genre de formulaire là au niveau des établissements territoriaux regroupés ou désignés, là, qui est prévu au niveau du projet de loi. Sur ça, on a fait un... on a fait un peu plus de recherche par la suite, là, à la suite de l'écriture du mémoire, là, somme toute, là. Puis l'année dernière, en termes de services achetés et, mettons, main-d'œuvre indépendante, si on les met ensemble, c'est à peu près 4,8 milliards de dollars, là, au niveau de l'ensemble du réseau. C'est quand même fastidieux.

Cependant, on n'a pas les détails de qui va contracter, qui a contracté. Quand on fait des demandes d'accès à l'information, c'est excessivement difficile à avoir, ce genre de données là. On nous... Non, on...

M. Plourde (Guillaume) : ...on nous dit qu'il y a les secrets professionnels, bien... ou, en tout cas, d'entreprise des contractants, mais il s'avère que c'est quand même des sommes purement publiques. Ultimement, nous, ce qu'on aimerait, c'est comme... on fait une recommandation à ce niveau-là, c'est d'avoir une espèce de registre qui comprend évidemment le nom de l'entreprise contractante, les services qui sont donnés, les sommes totales qui sont allouées à ces services-là pour pouvoir au moins minimalement savoir où est-ce que l'argent s'en va, ce 4,8 milliards.

M. Marissal : Mais ça, on a déjà tout ça, non? C'est le minimum que vous venez de donner, là...

M. Plourde (Guillaume) : Bien oui, c'est ça...

M. Marissal : Je pense que ce qu'on cherche, c'est plus la marge bénéficiaire, là.

M. Plourde (Guillaume) : Bien, dans le meilleur des mondes, on aimerait. Mais même là, des fois, les totaux, on ne nous les donne pas par demandes d'accès à l'information, sous prétexte que ça fait partie la stratégie de l'entreprise.

M. Marissal : O.K.. Donc, vous faites des demandes d'accès à l'information pour un contrat qui a été donné, qui a été rendu public dans un appel d'offres, puis vous n'avez pas toutes les données une fois...

M. Plourde (Guillaume) : Ça arrive souvent, dans certains établissements, qu'on nous dit non.

M. Marissal : Bienvenue dans mon monde, en passant, c'est malheureusement assez fréquent. Vous dites par exemple un rapport annuel, mais ça, c'est assez minimaliste, le rapport annuel normalement, c'est... Moi, j'ai un problème avec l'imputabilité en général, là, du projet de loi 15, là, je pense que je m'en suis ouvert assez largement sur toutes les tribunes disponibles, là, depuis un mois, là. Je trouve néanmoins que vous n'allez pas très loin dans votre demande d'imputabilité, notamment sur la transparence dans les fonds publics par un rapport annuel. Je présume qu'il y aura un rapport annuel de l'Agence santé Québec, là, ça... S'il n'y en a pas, on a un problème, là, mais je pense que vous ne pouvez pas aller plus loin que ça?

M. Plourde (Guillaume) : Bien, première des choses qu'on demande, ce n'est pas le rapport annuel de l'Agence Santé Québec, celui-là, il est déjà prévu. On demande celui-là de ses filières, ce qui va être, dans le fond, par exemple, Santé Québec Bas-Saint-Laurent, Santé Québec... CHUM, Santé Québec, et cetera, là, vous comprenez un peu la logique. Par contre, il faut dire, là, tu sais, c'est un projet qui est quand même fastidieux. C'est... on va en avoir probablement aussi d'autres... tout comme vous, là, on a eu un projet de loi à étudier en quelques semaines. Il va y avoir probablement d'autres choses aussi, là, qu'on va demander. Puis il y a beaucoup des recommandations au niveau de la reddition de comptes qui se retrouvaient dans la présentation de la vérificatrice générale à ce niveau-là. C'est pour ça qu'on a indiqué... identifié, à vrai dire, deux choses, soit c'est l'ensemble des recommandations ou un mandat de vérification au... du mécanisme d'accès, là, aux trois ans, avec l'obligation prévue aux établissements privés en... l'article 324, si je me souviens bien.

Le Président (M. Provençal) :Merci. La conclusion de cette dernière présentation, Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Nichols : Merci. Merci, M. le Président. Vous parlez de... je lisais dans votre mémoire, là, qu'il y avait... Vous étiez inquiet, particulièrement en lien avec les articles 27 puis les articles... l'article 656, c'est la recommandation 13. Quand vous parlez que le ministre garde d'importants pouvoirs puis sans réel contre-pouvoir. Pouvez-vous nous l'expliquer? Parce que vous parlez, entre autres, en lien avec le redécoupage, en lien avec les paramètres sur les projets expérimentaux. Peut-être juste un peu plus d'explications sur votre préoccupation. Ça semble quand même assez important comme préoccupation.

Mme Charbonneau (Émilie) : Bien, ça va avec la préoccupation... tu sais, il faut la lire avec le fait qu'on souhaite introduire des travailleuses et des travailleurs dans les strates décisionnelles pour qu'ils puissent participer à ça, qu'ils ne soient pas déconnectés de leur terrain. Donc, quand on parle qu'il n'y a pas de contrepoids, c'est qu'on est dans une structure à l'extérieur du ministère de la Santé et des Services sociaux. On dépolitise notre réseau de santé et de services sociaux, puis les gens, ils ne sont pas inclus. Que ce soit pour les régions sociosanitaires, où je pense que les travailleuses et travailleurs auraient voix au chapitre, que ce soit pour déterminer les trajectoires de services, qu'est-ce qu'on pense qui serait mieux pour servir notre monde, par exemple en Abitibi-Témiscamingue. C'est de là le contre-pouvoir. Le contre-pouvoir se fait par remettre de la démocratie dans ce projet de loi là. C'est pour ça que, dans sa forme actuelle, on s'y oppose, mais on est ouverts à ajouter des amendements ou même des solutions pour s'assurer que les travailleuses et les travailleurs se sentent concernés par qu'est-ce qui se passe. Parce que je pense que c'est ça qui est important. S'il y a une chose que le projet de loi 10 nous a apprise, c'est à quel point les travailleuses et les travailleurs ne se sentent plus concernés par le réseau de la santé et des services sociaux, ne sentent plus qu'ils ont un pouvoir, ne sentent plus qu'ils ont voix au chapitre, et ils ont ce besoin-là de s'impliquer dans des missions qui ont choisi puis qu'ils ont envie de continuer. Mais à quel prix? Puis c'est tout ça aussi, il ne faut pas le lire comme une obstruction, mais comme des pistes de solution où on a envie de travailler avec vous pour que les travailleuses et les travailleurs qu'on représente, bien, ils... ils aient encore envie de servir le monde, donc c'est vraiment...

Mme Charbonneau (Émilie) : ...dans cette optique-là qu'on a placé le contre-pouvoir, à l'intérieur même de l'agence.

M. Comeau (Robert) : Puis on voit aussi, au fil des législatures qui ont précédé, que tout le monde a une bonne idée pour régler le problème de réseau santé et services sociaux, on n'y est pas toujours parvenu, mais que les gens qui travaillent en ont, des solutions, puis ils sont capables de s'asseoir en petits groupes pour déterminer les solutions à des problèmes très simples, qu'on peut exporter ailleurs. Mais là, comme Émilie dit, ils ne se sentent plus investis dans ça, ils ont un peu jeté la serviette puis c'est d'autres qui vont décider dans quel milieu ils vont travailler puis la façon dont ils vont travailler

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup aux représentants de l'Alliance du personnel professionnel et technique des services sociaux. Merci pour votre contribution.

La commission ajourne ses travaux au mercredi 10 mai 2023, après les avis touchant les travaux des commissions, vers 11 h 15. Merci à tous.

(Fin de la séance à 19 h 27)


 
 

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