Journal des débats (Hansard) of the Committee on Health and Social Services
Version préliminaire
43rd Legislature, 1st Session
(début : November 29, 2022)
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Tuesday, March 14, 2023
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Vol. 47 N° 3
Special consultations and public hearings on Bill 10, An Act limiting the use of personnel placement agencies’ services and independent labour in the health and social services sector
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9 h 30 (version non révisée)
(Neuf heures cinquante-trois minutes)
Le Président (M. Provençal)
:Alors, à l'ordre, s'il vous plaît!
Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et
des services sociaux ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leur
appareil électronique.
La commission est réunie afin de procéder
aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi
numéro 10, Loi limitant le recours aux services d'une agence de placement
de personnel et de la main-d'œuvre indépendante dans le secteur de la santé et
des services sociaux.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Alors, M. Chassin (Saint-Jérôme) est remplacé par Mme Tremblay
(Hull) et Mme Lachance (Bellechasse) est remplacée par Mme Bogemans
(Iberville).
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Nous débuterons ce
matin par des remarques préliminaires, puis nous entendrons par la suite les
témoins suivants : la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec,
l'Association des établissements privés conventionnés et l'Alliance du
personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux. Comme
la séance a débuté à 9 h 53, je vous demande si on va pouvoir prolonger pour
récupérer le temps. Ça va? Merci beaucoup. J'invite maintenant le ministre de
la Santé à faire ses remarques préliminaires. M. le ministre, vous disposez de
six minutes. La parole est à vous.
M. Dubé : Très bien. Alors,
merci beaucoup, M. le Président, et je veux saluer non seulement mes collègues
du côté gouvernemental aussi, mais mes collègues de l'opposition pour un autre
projet de loi important. Puis je salue les gens de la FIQ qui sont là, qui
seront les premiers intervenants. Je vais juste dire quelques mots un peu pour
situer le projet de loi qu'on appelle sur les agences privées. Je pense que c'est
important de faire une genèse rapide du fait que le gouvernement fait affaire
avec les agences depuis très longtemps, mais on a observé une augmentation
marquée du recours aux agences depuis quatre ans. Seulement dans l'année 2022,
mars 2022, qui s'est terminée en mars 2022, on a... Près de 1 milliard en
agences privées pour, entre autres, notamment en grande partie les infirmières
et les préposés aux bénéficiaires.
En fait, ce qui devait être une exception
en termes de... est devenu en fait un mode de gestion au cours des dernières
années, et les conditions de travail des conventions collectives avec des
clauses qui sont souvent vues comme très rigides pour les infirmières, entre
autres, ont poussé de nombreuses infirmières à sortir du réseau ou à choisir
les agences pour pouvoir profiter de meilleures conditions, que ce soient des
conditions par rapport aux vacances, au niveau de l'ancienneté, les heures
défavorables...
M. Dubé : ...la présence des
TSO. Donc, malheureusement, malheureusement, plusieurs infirmières ou préposés
ont décidé de quitter vers les agences. Puis, en fait, les agences, bien, ont
profité de cette situation-là, puis le nombre d'agences a proliféré.
Maintenant, tout le monde convient que le
statu quo avec les agences n'est pas une option à long terme. Le recours aux
agences provoque en ce moment une grande iniquité entre le personnel du réseau
public et le personnel des agences, en raison justement des taux horaires pour
les agences qui sont beaucoup plus élevées, qui donnent plus de flexibilité,
comme je l'ai dit, sur certaines heures défavorables, ou plus de flexibilité
pour les vacances.
En fait, il faut penser aussi l'instabilité,
en termes de service patient, où il y a beaucoup de changements, souvent, d'une
agence pour remplacer du personnel qui devrait être là de façon permanente.
Donc, la conséquence des agences, c'est non seulement une instabilité du côté
des soins, mais c'est aussi une question d'équité pour les employés. C'est une
question de qualité, je viens de le dire, mais il y a aussi une question
monétaire pour le gouvernement. On le verra, un peu plus tard, dans des
rencontres qu'on va faire durant la journée ou demain, les agences font un
bénéfice important en profitant d'une marge entre le prix qu'ils paient pour
les infirmières et le revenu qu'ils reçoivent de l'agence. Et on peut dire que
cette marge-là peut varier de 50$ à 55 $ de l'heure, c'est important, entre
un revenu qui est chargé et le prix qu'ils paient l'infirmière, bien que ce
prix-là est encore plus élevé que ce qui est prévu aux conventions collectives.
On a là... Puis là, quand je donne cette marge-là comme exemple, c'est sans
compter des gens qui ont chargé jusqu'à 400 $ de l'heure durant la
pandémie ou dans certaines régions. Et, si on fait un calcul simple, sur à peu
près 1 milliard, c'est entre 300 et 400 millions de plus que le gouvernement a
payé pour le même service. Je pense que ce n'est pas rien qu'une question
d'argent, c'est une question d'équité.
Et je le répète, je pense que la question
n'est plus : Est-ce qu'on peut continuer comme ça? La réponse, c'est non.
Maintenant, qu'est ce qu'on fait? Un des grands objectifs du plan de santé, c'est
de s'assurer qu'on va devenir l'employeur de choix pour notre personnel, dont
nos infirmières, dont nos préposés aux bénéficiaires. Et ce qu'il faut, c'est
être capable maintenant de les attirer et de les retenir. Et, pour faire ça,
bien, c'est sûr qu'on travaille sur d'autres éléments du plan de santé, dont ma
collègue au Trésor, avec des nouvelles conventions collectives, puis je salue
les travaux qui avancent de ce côté-là.
Maintenant, je le répète, pendant que ces
initiatives-là, comme, par exemple, les conventions collectives, sont en
discussion, ça nous prend une transition parce qu'on ne peut pas, du jour au
lendemain, se sevrer des agences privées, étant donné l'importance qu'elles ont
dans le réseau présentement. Je vous dirais qu'en attendant qu'on ait ces
bénéfices de ces nouvelles conventions là, entre autres, on pourra travailler
sur l'encadrement des agences. C'est ce que nous allons faire ensemble dans les
prochains jours, prochaines semaines.
Je terminerai en disant que je suis
certain qu'on aura la collaboration des oppositions pour mieux encadrer. Je
pense que c'est ça, l'objectif du projet de loi, mieux encadrer dans cette
période de transition. On le reconnaît, la situation n'est pas acceptable, mais
je demande aussi aux agences, comme je le demande à toutes les parties
prenantes du réseau, on veut faire des changements, et tout le monde doit
accepter de faire des changements si on veut réussir à remettre notre réseau
sur les rails. Je comprends que des méthodes, des principes comme les agences
ont été acceptés par le passé. Je le comprends. Maintenant, ce n'est plus
acceptable. Il faut trouver cette transition-là.
Et je le rappelle, on a tous l'intérêt
commun pour le patient. On devrait penser aux patients, on devrait penser aux
Québécois pour des services de qualité, et j'espère qu'on pourra avoir un
projet de loi qui répond à ça dans les prochaines semaines. Merci, M. le
Président.
• (10 heures) •
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, M. le ministre.
J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle et député de
Pontiac à faire ses remarques préliminaires pour une durée de 3 min 36 s. Je
vous cède la parole.
M. Fortin :Merci. Merci, M. le Président. Il y a des parties dans
lesquelles on va être d'accord avec le ministre, puis là où il nous dit que le
statu quo n'est pas acceptable, on est d'accord avec lui, parce que...
10 h (version non révisée)
M. Fortin :...surtout parce que le statu quo n'est pas un statu quo.
Le statu quo, c'est une augmentation fulgurante du recours aux agences et aux
frais que l'État paie pour avoir des services de la part de ces agences-là. Ça
ne peut pas continuer comme ça a progressé au cours des quatre prochaines
années, là. C'est simplement insoutenable. Et ce projet de loi là, il était
attendu, il était souhaité de la part de plusieurs intervenants du milieu de la
santé. Cependant, de la façon qu'il est écrit en ce moment, quand le ministre
dit qu'il va vouloir notre collaboration, bien, ça va être pour améliorer le
projet de loi, parce qu'il demeure à ce jour extrêmement vague. Je ne fais que
regarder des notes explicatives, M. le Président. Le projet de loi octroie au
gouvernement le pouvoir de déterminer la période durant laquelle un organisme
peut recourir aux services d'une agence. Le projet de loi confère au ministre
de la Santé le pouvoir d'autoriser un organisme du secteur de la santé à
recourir aux agences. Le projet de loi octroie au ministre de la Santé des
pouvoirs d'inspection et d'enquête.
Donc, de façon précise, là, le projet de
loi, c'est un peu un chèque en blanc au ministre de la Santé. Il s'octroie des
pouvoirs supplémentaires sans mettre sur la table pour l'instant, d'un côté,
comment il va les utiliser, mais, de l'autre côté, l'impact que son projet de
loi va avoir de façon concrète à court terme dans le réseau de la santé. On n'a
pas, et j'espère qu'on va l'avoir au cours de nos échanges en commission
parlementaire, le détail de l'impact pour différentes régions du Québec, entre
autres, d'un projet de loi comme celui-là. Je donne un exemple bien simple, M.
le Président. Il y a plusieurs régions du Québec qui ont des infirmières, des préposés
venus de Montréal, qui viennent en région à travers les agences. Mais, si
demain matin les agences ne sont pas là, combien de travailleurs de moins il va
y avoir dans le réseau de la santé de chaque région?
Alors, il y a des choses qui doivent être
mesurées. Il y a des impacts d'un projet de loi comme celui-là qui doivent être
mesurés et pour lesquels on n'a pas eu encore le niveau de détails souhaité de
la part de la partie gouvernementale.
Alors, oui, à l'esprit du projet de loi,
oui au besoin d'une réforme de la façon que les agences sont utilisées pour
limiter, pour encadrer, pour, à terme, ne plus avoir d'agences de façon
systémique, là, comme on l'a en ce moment. Mais on a beaucoup de questions sur
l'impact aux patients, puis comment le ministre va s'assurer que son plan de
ressources humaines fonctionne. Parce qu'on le sait, là, les besoins, ils sont
immenses dans le réseau. Si je ne me trompe pas, c'est 122 000... Si on s'entend
sur les chiffres, 122 000, dans quatre corps d'emplois uniquement, là, nouveaux
employés dont on aura besoin au cours des prochaines années.
Alors, oui, on peut très concrètement
encadrer le recours aux agences, limiter le recours aux agences, mais encore
faut-il s'assurer qu'on soit capable d'attirer des gens vers le réseau. Et ça,
pour l'instant, ça demeure loin d'être clair, M. le Président. On va vouloir
énormément de précisions au cours des prochaines semaines d'étude avec le
ministre. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, M. le député. J'invite
maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député de
Rosemont à faire ses remarques préliminaires pour une durée d'une minute 12 secondes.
Je vous cède la parole.
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Chers collègues, je devrais être bien, bien de bonne humeur ce matin
puis je ne parle pas de ce qui s'est passé hier soir, nécessairement, mais je
parle du projet de loi, parce que ça fait deux ans que je répète ici qu'il faut
qu'on se sèvre des agences de placement. Je dis : Je devrais être bien,
bien content parce que si je lis le titre, c'est à peu près ça que ça veut
faire. Je ne suis pas persuadé, cela dit, que c'est l'outil pour le faire,
parce que pour le moment, quant à moi, ça ressemble plus à un recueil de
décrets qui permet aussi par ailleurs de maintenir les agences. Je pense, par
exemple, à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont dans mon coin. Le projet de loi
adopté aujourd'hui, ça ne change rien dans les prochains mois pour l'hôpital Maisonneuve-Rosemont.
On peut encore faire appel aux agences.
Alors, cela dit, je donne la chance au
coureur. Je suis ici aussi pour améliorer le projet de loi. Moi, j'ai espoir qu'on
puisse shaker les colonnes du temple des agences. Et temple est le bon mot ici
parce que c'est devenu des petits rois dans le réseau de la santé, qui font la
loi et l'ordre. Moi, je pense qu'on doit se débarrasser de ces profiteurs. On
doit surtout trouver le moyen de ramener notre monde dans le réseau public.
Et je termine, M. le Président, en disant
que je ne souhaite pas que ce projet de loi devienne un outil de négociation
par la bande pour les conventions collectives pour lesquelles ici, moi, dans ma
position, je n'ai aucun pouvoir. Et je ne souhaite pas, et je le dis, là, avant
qu'on commence, être instrumentalisé avec un outil qui fait pression par la
bande à la table de négos, où je ne suis pas et où la présidente du Conseil du
trésor se trouve mais n'est pas ici pour répondre de ses actes. Merci.
Le Président (M. Provençal)
:...vous avez eu le temps de pouvoir
vous exprimer, monsieur. Merci beaucoup. J'invite maintenant le député des Îles
de la Madeleine faire ses remarques préliminaires pour une durée de 1 min 12 s.
M. Arseneau : Merci beaucoup,
M, le Président. Alors, comme mes collègues, je suis heureux de pouvoir
commencer à discuter de l'élimination du recours à la main-d'œuvre indépendante
et je constate d'emblée que le titre, ce n'est pas d'éliminer ce recours, c'est
de limiter le recours. Et les pouvoirs que se donne le ministre à l'intérieur
du projet de loi permettent tout autant d'éliminer le recours que de continuer
à avoir accès ou, en tout cas, de permettre ces ressources-là si on n'atteint
pas nos objectifs. On comprend qu'il faut y aller par étapes, ça, on souscrit à
ça, mais on voudrait savoir le comment. Et évidemment, le projet de loi est
très très court, quelques articles seulement. On constate qu'il ne va pas non
plus, évidemment, à la source du problème. Évidemment, ce n'est pas ici que ça
se réglera, mais il va falloir qu'il y ait un travail considérable qui soit
fait pour s'assurer que l'exode massif des employés du secteur public cesse, et
ça, ça passe par l'amélioration des conditions de travail, on le comprendra. Je
me réjouis d'entendre le ministre sur à peu près l'ensemble de l'argumentaire
qu'on lui a fait valoir au cours des trois dernières années. Maintenant, on
travaillera de façon collaborative pour améliorer le projet de loi. Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, M. le député, pour
ces remarques préliminaires.
Nous allons maintenant débuter les
auditions. Je souhaite maintenant la bienvenue à la Fédération
interprofessionnelle de la santé du Québec. Je vous rappelle que vous disposez
de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période
d'échanges avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter
et à débuter votre exposé. À vous la parole.
Mme Bouchard (Julie) : Alors,
Bonjour. Julie Bouchard, présidente de la FIQ. Mesdames et Messieurs, membres
de la Commission, merci d'avoir accepté d'entendre notre analyse et nos
recommandations. Je suis Julie Bouchard, la présidente de la Fédération
interprofessionnelle de la santé du Québec, la FIQ. Je suis accompagnée de
Patrick Guay, vice-président et responsable politique des relations de travail,
et de Vanessa Bevilacqua, conseillère syndicale au secteur sociopolitique.
Nous sommes ici aujourd'hui au nom de nos
80 000 membres, ces professionnels en soins, infirmières, infirmières
auxiliaires, inhalothérapeutes et perfusionnistes clinique, qui sont restés
dans le réseau public et dont le fardeau s'est alourdi, parfois au prix de la
qualité des soins qu'elles assurent ou même de leur santé. C'est pour elles que
FIQ réclame la fin des iniquités en matière de conditions de travail, qu'elle
exige l'élimination progressive, mais ferme des agences privées de placement en
santé.
Or, le projet de loi 10 n'est pas
celui tant attendu par la Fédération. Comme vous avez pu le constater à la
lecture de notre mémoire, les effets délétères de la main-d'oeuvre indépendante
sont nombreux et sérieux. Son poids sur les finances publiques, l'impact sur la
continuité des soins et l'organisation du travail et surtout l'accélération et
l'augmentation de l'exode des professionnels en soins du réseau public dans un
système déjà en pénurie de main-d'oeuvre n'en sont que quelques exemples. Par
le fait même, il est primordial que les travaux ultérieurs de la Commission
permettent de modifier le projet de loi numéro 10 afin que celui-ci soit
réellement contraignant et qu'il permette de s'attaquer à ce qui aurait dû être
son essence même, soit l'élimination du recours à la MOI dans le réseau public
de santé.
• (10 h 10) •
À cet effet, la FIC a déjà identifié les
éléments problématiques et établit des recommandations quant à la manière de
les corriger. Si le but du gouvernement est réellement de sevrer le réseau
public de la MOI, l'intention du projet de loi ne doit pas s'arrêter à la
limitation du phénomène, mais bien aller jusqu'à son élimination complète.
Autrement, tant et aussi longtemps que le réseau public sera fragilisé, les
agences auront le beau jeu pour imposer leurs règles, et ce, toujours à leur
avantage, évidemment.
D'ailleurs, tant qu'il y aura des agences
privées, il y aura de la contestation de leur part. Nous le constatons
d'ailleurs aisément avec les dernières offensives contre l'appel d'offres du
gouvernement diffusé en décembre dernier et contestées devant l'Autorité des marchés
publics et devant les tribunaux. Ces démarches risquent de mettre en péril les
intentions du gouvernement à l'effet de réduire sa dépendance au monopole des
agences privées.
Afin de donner un coup de barre et de
contrer la réplique des agences privées, la FIQ est également d'avis que le
gouvernement aurait dû choisir d'inclure des balises claires dans ce projet de
loi plutôt que de les réserver à un règlement...
Mme Bouchard (Julie) :...inclure le cadre limitatif de la MOI dans
un règlement permet justement au gouvernement de le modifier sans consultation,
sans opposition, sans débat avec les partis d'opposition et la société civile,
incluant les syndicats. Fonctionner par règlement permet peut-être une plus
grande flexibilité au gouvernement. En revanche, cela évite un processus
démocratique et transparent, pourtant essentiel pour s'attaquer à un enjeu aux
impacts multiples et diversifiés pour le réseau de la santé. Si toutes les
contraintes aux recours à la MOI sont prescrites dans un règlement, elles
peuvent être modifiées selon les intérêts politiques et économiques du moment.
En officialisant bien dans une loi, on ne peut s'attaquer de façon durable à la
MOI dans le réseau de la santé et des services sociaux
Parmi ces éléments qui auraient dû se
retrouver dans le projet de loi, outre les cibles annuelles du recours à la
MOI, notons les échéanciers, la durée de la période transitoire, les
définitions des catégories de régions ciblées, c'est-à-dire urbaines, mitoyennes
et éloignées, et les critères de base des appels d'offres gouvernementales.
La FIQ espère aussi que les membres de la
commission retiendront les éléments suivants. Premièrement, les soins aux
patients comme tels. Alors que nous savons que le recours des établissements à
la MOI déstabilise les équipes de travail et altère la continuité et la qualité
des soins, le projet de loi ne prévoit aucune condition spécifique à cet égard.
Il s'agit ici d'une responsabilité extrêmement importante relevant des directions
des soins infirmiers et autres directions cliniques.
La FIQ recommande que le projet de loi n°
10 prévoie que les directions de soins infirmiers des établissements soient
responsables et imputables de l'élimination du recours aux agences de santé
privées, et ce, en collaboration avec la Direction nationale des soins et
services infirmiers et l'ensemble du MSSS.
Deuxièmement, afin de mettre fin aux
disparités entre les professionnels du réseau public et celle des agences, la
FIQ est d'avis que le projet de loi n° 10 devrait inclure les mesures qui
seront prises par le gouvernement afin de mettre fin aux iniquités entre les
conditions des professionnelles en soins du réseau public et celles des agences
durant la période transitoire devant mener à terme à l'élimination du recours
aux agences. Ces mesures devraient viser à ce que des personnes salariées du
réseau de la santé soient privilégiées par rapport à la MOI, car il est non
seulement important d'encadrer l'utilisation du personnel des agences, mais aussi
et encore plus d'améliorer les conditions de travail des professionnelles en
soins du réseau.
Voici des exemples de ce qui devrait
prévaloir pendant la période de transition jusqu'à l'élimination complète de la
MOI :
Que les taux facturés par les agences
soient réduits au maximum et que les agences ne puissent facturer à taux et
demi le temps supplémentaire effectué par les salariés assignés par son
intermédiaire;
Que la MOI soit soumise aux mêmes
inconvénients que les professionnels en soins, notamment en ce qui concerne
l'octroi obligé ou non de quarts en temps supplémentaires;
Advenant qu'il y ait des quarts de travail
favorables à pourvoir, que les établissements soient forcés de privilégier leur
personnel pour les quarts favorables;
Qu'un mandat temporaire soit donné à la
Commission de la santé et des services sociaux afin qu'elle évalue les impacts
de la main-d'œuvre indépendante sur la rémunération des salariés de l'État, sur
les patients et sur la qualité des soins, en gardant comme objectif principal
l'élimination de la MOI. De plus, ce mandat devra aboutir à la proposition
d'une politique visant à établir un processus pour déterminer un tarif maximum
que les agences de placement peuvent exiger des établissements de santé afin de
permettre de garder un équilibre dans la dotation des effectifs permanents au
sein des établissements de santé. Il est aussi impératif de faire cesser la
sollicitation des agences auprès des professionnels en soins du réseau afin de
mettre fin à l'exode qui perdure depuis plusieurs années, et ce, bien avant la
pandémie.
Pour cette raison, la FIQ recommande que
le projet de loi interdise aux agences de placement d'assigner une
professionnelle en soins ayant déjà un lien ou l'ayant quitté depuis moins d'un
an avec un établissement public dans la même région administrative ou dans une
région limitrophe.
Le projet de loi n° 10 ne constitue
absolument pas un gage de limiter la MOI, encore moins de l'éliminer. Si le...
Mme Bouchard (Julie) : ...croyait
plaire aux professionnels du réseau public et à l'organisation syndicale qui
les représente en grande majorité, avec ce semblant de position ferme contre
les agences privées, force est de constater qu'il n'a réussi à berner personne.
Si l'intention du gouvernement est qu'à terme les professionnels en soins des
agences reviennent travailler dans le réseau public, il devra non seulement
améliorer le projet de loi n° 10, mais aussi il devra concrétiser un autre pan
de son plan santé, soit faire du réseau public un employeur de choix.
Autrement, les professionnels en soins des agences se dirigeront vers d'autres
employeurs privés. Mais cette question est distincte du présent projet de loi,
car avant de penser à intégrer ces professionnels dans le réseau, il faut d'abord
cesser leur exode en mettant définitivement fin aux agences de placement
privées.
La FIQ souhaite donc que ces
recommandations alimentent la réflexion des membres de la commission afin que
l'étude détaillée à venir puisse déboucher sur une bonification significative
du projet de loi n° 10 pour le bien des professionnels en soins, certes, mais
aussi pour les patients et, bien entendu, pour la survie de notre réseau public
de santé. Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je
vous remercie pour votre exposé. Maintenant, je vais céder la parole à M. le
ministre. Vous avez 16 min 30 s pour cet échange avec les membres.
M. Dubé : Très bien. Alors,
M. le Président, merci beaucoup, et merci beaucoup, Mme Bouchard, et pour vos
collègues, pour la présentation. Je comprends que je dois chercher de façon
parcimonieuse le remerciement de votre part d'avoir déposé le projet de loi. Je
cherche encore le merci, mais je vais le prendre comme un merci. Les gens
disent souvent : Est-ce que le verre est à moitié vide ou à moitié plein?
Je vais laisser les Québécois juger si vous trouvez qu'il est à moitié plein ou
à moitié vide, mais je pense qu'au moins on peut dire... On va prendre les
bonnes nouvelles où elles sont. Vous êtes d'accord avec le principe.
Vous m'avez demandé ce projet de loi là en
décembre dernier, je vous ai dit : On va le faire, bon. Là, vous me
dites : Il n'est pas parfait, il est perfectible. On va travailler
là-dessus, mais il y a une chose que j'aimerais que les Québécois comprennent
aussi, et vous l'avez dit dans votre présentation, qui a de très bons éléments,
premièrement, les agences, en ce moment, contestent devant les tribunaux, non
seulement l'appel d'offres qu'on a fait, mais d'autres éléments. Alors, il faut
être excessivement prudent, en ce moment, de bien comprendre ce contexte-là, et
vous avez eu raison d'y référer. Moi, je n'y référerai plus durant la
présentation, mais je pense que les Québécois doivent comprendre que les
agences sont en processus légal, en ce moment, notamment sur l'appel d'offres
que nous avons déposé. J'arrête ça là pour que les gens comprennent que, des
fois, il y a des éléments qu'on ne pourra pas traiter.
• (16 h 20) •
Deuxièmement, je pense qu'il est
important, Mme Bouchard, puis vous connaissez très bien le tabac, pour employer
l'expression... un projet de loi, ça se complète par des règlements. Ce n'est
pas parce que le projet de loi ne donne pas tous les détails d'une loi... les
règlements viennent compléter un projet de loi, puis ça, c'est important que
les Québécois le comprennent parce qu'étant donné ce que je viens de dire,
étant donné ce que je viens de dire, dont je ne reparlerai plus, le
gouvernement doit se garder une flexibilité dans ces règlements parce qu'on ne
sait pas ce qui va se passer. Alors donc je voudrais juste que les gens
comprennent que ce n'est pas pour être malcommode ou parce qu'on ne veut pas
être transparent, qu'il y a des éléments qu'on aimerait garder par des règlements.
Je veux juste qu'on comprenne ça.
Troisièmement, j'ai dit... et souvent le
dire, M. le Président, devant la commission, devant les Québécois qui nous
écoutent : Des fois, ce qui est dit ici, à la commission, par les
parlementaires est tout aussi important que ce qu'on écrit, hein, on le dit
souvent, c'est quoi l'objectif de la loi, c'est quoi les principes. Pourquoi je
fais référence à ça? C'est que je vais le redire, puis je l'ai dit à mes
collègues lorsqu'on avait discuté, ce qu'on appelle le briefing technique, Mme
Bouchard, puis c'est important que vous l'entendiez, là, c'est que, sur la
question des règlements, j'avais dit à mes collègues qu' essentiellement, pour
dls raisons que je viens d'expliquer, le projet de loi, quand on va faire les règlements,
puis je vais l'expliquer dans les prochains jours, quand on discutera l'article
par article, que l'essentiel des règlements devrait reprendre les mesures qu'on
avait durant les mesures d'urgence...
M. Dubé : ...quand vous m'avez
demandé, tout à l'heure, de s'assurer que la question du taux maximum, de
s'assurer, par exemple que les régions sont différentes. Tout ce que vous
m'avez demandé tout à l'heure, là, ça, ça va se retrouver dans les règlements.
Et je le répète, les règlements vont aller chercher ce qui était
essentiellement dans les décrets des mesures d'urgence. Alors donc, il n'y aura
pas de surprise et ce n'est pas comme si on arrivait avec un projet... une page
blanche. On trouve une solution temporaire basée sur des mesures qui ont été
établies pendant les mesures d'urgence.
Bon, maintenant, est-ce que, durant la
période de discussion... puis je pense que ça serait important de le redire,
madame Bouchard. Puis je vais vous laisser essayer peut-être de remplir le
verre, un peu, durant le reste de mes questions, donc de remonter un peu plus
qu'à moitié vide. On n'en parlera pas. Puis je veux rassurer le député de
Rosemont que je respecte beaucoup, puis il a raison d'avoir un grand sourire ce
matin, là, parce que c'est vrai que le projet de loi, il est bon. Mais je pense
que c'est pour ça qu'il a un sourire, mais ce que je veux dire, madame
Bouchard, c'est que je veux rassurer le député de Rosemont, on ne parlera pas
des conventions collectives ici. On n'en parlera pas. Je le dis : Ce
projet de loi 10 sur les agences privées, c'est un élément du plan de santé que
vous m'avez demandé, qu'on a décidé d'acquiescer. On va essayer de remplir le
verre un petit peu pour bien expliquer ce qu'il y a dans le verre, mais ce que
je vous dirais : On ne parlera pas de convention collective.
Par contre, vous l'avez bien dit à, puis
les Québécois, il faut qu'ils comprennent ça. Le projet de loi ici, c'est pour
dire : Pendant que des gens travaillent à améliorer les conventions
collectives, nous, on doit trouver une période de transition. Mon objectif,
soyez clair, c'est non seulement d'encadrer les agences, mais de s'en départir
quand on sera capables de le faire puis qu'on aura retenu ou attiré assez de
personnel pour être capable de le faire. Et c'est pour ça qu'on aura une
certaine flexibilité dans les règlements. C'est aussi simple que ça. Ce qui est
important qu'on doit avoir. Puis je l'ai dit, madame Bouchard, c'est important
qu'on pense à l'intérêt des Québécois, pas au corporatisme des parties
prenantes. Ce qui est important, c'est de penser aux Québécois. Puis, en ce
moment, ils ont besoin de services puis on va essayer de trouver la meilleure
transition. Je vous ai entendue, vous avez parlé du verre à moitié vide.
J'aimerais ça entendre... vous entendre sur le reste de vos demandes.
Mme Bouchard (Julie) : En
réponse, M. le Président, donc vous comprendrez que, pour moi, si le projet de
loi aurait eu toutes les contraintes auxquelles on s'attendait, avec ce qu'on a
mentionné autant dans notre mémoire que lors de ma présentation, vous auriez
probablement eu un réel merci sur la place publique, monsieur Dubé. Maintenant,
pour moi, évidemment, et pour l'ensemble des 80 000 professionnels en
soins que l'on représente. Le verre doit être vide... pas vide, non, pardon, il
doit être plein le vide... le verre, pardon, mais en tout temps. Et quand on a
vu le projet de loi lui-même, c'est le mordant qu'il manquait. La contrainte
pour les agences de placement et le fait que vous décidiez, monsieur Dubé,
d'agir avec des règlements faisait en sorte que vous vous donniez l'entière...
M. Dubé : Mais, Mme Bouchard,
madame Bouchard, je veux juste vous interrompre, parce qu'on n'a pas beaucoup
de temps, là. Il y a deux choses. Prenons un exemple. Vous dites : Il n'y
a pas de contrainte. Dans le projet de loi, là, ça n'existait même pas des
mesures dans le temps des décrets. On a mis des pénalités. C'en est une
contrainte, ça. Les gens qui ne respecteront pas la loi ou les règlements, les
deux, il va y avoir des pénalités. Il n'y en avait pas de pénalité dans le
temps des mesures, il n'y en avait pas. O.K. Vous me dites : Est-ce qu'il
va y avoir des contraintes? J'en donne des contraintes, là. Est-ce qu'il va y
avoir un taux maximum? Oui, il va y avoir un taux maximum. Il y en avait un,
taux maximum dans les mesures durant les périodes... durant la crise. On va en
mettre, on va en mettre des taux maximums. J'ai même dit que les taux maximums
puis c'est pour ça que je l'ai dit au président tout à l'heure, madame
Bouchard. Dites pas qu'il n'y en aura pas, il va y en avoir. J'ai une
contrainte dont je ne reparlerai plus. Vous l'avez dit qu'il y avait une
contrainte, vous l'avez dit, cette contrainte-là, là, c'est ce qui se passe en
ce moment du côté légal. Moi, je vous dis : Dans les décrets, il y avait
des taux maximums, il n'y avait pas de pénalité, on...
M. Dubé : ...les régions.
Alors, je fais juste vous dire que le projet de loi et les règlements, ça va
ensemble. On va travailler ensemble pour expliquer comment tout ça va
fonctionner. C'est ce qu'on va faire durant la commission parlementaire. Mais
je pense qu'il n'est pas exact de dire qu'il n'y en aura pas de contrainte,
qu'il n'y aura pas de dent, qu'il n'y aura pas de mordant, il va y en avoir. Il
faut juste travailler sur le projet de loi, où on a mis déjà des pénalités, et
sur les règlements, qui vont mettre le mordant dont vous demandez.
Mme Bouchard (Julie) : Mais,
M. le Président, pour nous, il faut comprendre qu'est-ce qu'on aurait aimé voir
apparaître immédiatement dans le projet de loi, ce sont l'ensemble des balises,
ce sont l'ensemble des contraintes et non attendre. Et il y a une chose sur
laquelle on s'entend, c'est que tout ceci doit être fait de manière
progressive. Maintenant, du moment où est-ce que c'est fait par règlement, ça
veut dire que c'est votre latitude, au gouvernement actuel. Donc, ce n'est pas
en commission parlementaire que les débats vont se faire, ce n'est pas
démocratique.
M. Dubé : Mais prenons un exemple,
Mme Bouchard. Prenons un exemple. Parce que, là, je vois qu'on commence à se...
On remplit le verre. Au moins, on s'entend sur quelques éléments. C'est bon
signe. Moi, je vous dis, là, ce qui est important... Prenons juste la date
d'application par région, prenons ça comme discussion. Si on est capables de
fixer une date puis que le ministre a une flexibilité de dire : Bien,
maintenant, là, pour la région de Montréal... je donne un exemple, pour que les
Québécois comprennent, pour la région de Montréal, on l'a déjà dit
publiquement, là, que ça ne sera pas une surprise, ça serait peut-être la
région qu'on voudrait éliminer les agences le plus rapidement possible parce
que, par principe, c'est plus facile de les éliminer dans la grande région de
Montréal que les éliminer sur la Côte-Nord. Est-ce que vous êtes d'accord avec
ça? Êtes-vous d'accord avec ça?
Mme Bouchard (Julie) : Tout à
fait, tout à fait.
M. Dubé : Oui. Bon, bien,
voyez-vous, le verre se remplit. Moi, ce que je dis, c'est que, si on met une
date fixe dans le règlement, ou dans la loi, encore pire, est-ce qu'on va avoir
la flexibilité de le faire avant si ça va bien? Mettons que les conventions
collectives vont bien puis on est capables de ramener des gens, est-ce qu'on
devrait avoir avantage de se garder la flexibilité de le faire plus tôt? Je
pense que oui.
Alors, c'est juste ça que je pense qu'il
faut discuter. Une loi, c'est une loi, puis, quand on a la change, bien, il
faut revenir. Un règlement, ça donne une flexibilité, mais qui n'est pas
nécessairement un désavantage, madame Bouchard. Ça fait que c'est juste pour ça
que j'apprécie vos commentaires, mais je veux juste que, dans le cas... quand
vous allez suivre le projet de loi, puis avec tous les autres intervenants qui
vont venir, je veux juste qu'on comprenne non seulement les limites de ce qu'on
a, pour les raisons que j'ai expliquées, mais qu'il faille avoir une certaine
flexibilité. Les règlements nous permettent ça. Est-ce que ça... Est-ce qu'on
remplit le verre?
Mme Bouchard (Julie) : Pas
encore, par encore.
M. Dubé : Mais il n'est pas
plein encore.
Mme Bouchard (Julie) : C'est
un gros... Non, c'est un gros verre.
M. Dubé : Non, mais je vous
connais, vous êtes exigeante.
Mme Bouchard (Julie) : Oui,
très. Très exigeante.
M. Dubé : Continuez,
continuez.
Mme Bouchard (Julie) : Vous
parlez... Je vais rebondir sur la flexibilité dont vous parlez. Mais cette
flexibilité-là, elle est pour qui? Est-ce qu'elle est pour, justement, voir de
quelle manière les agences vont riposter face à votre projet de loi ou encore
aux règlements qui vont s'ensuivre? Est-ce que c'est justement pour vous donner
toute la latitude d'aller modifier les cibles, d'aller modifier les délais,
comme vous le dites? Alors, pour nous, tout ceci, et je le répète, aurait dû se
trouver dans un projet de loi, et on est vraiment là pour discuter, entre
autres, du projet de loi n° 10 et de faire avancer justement l'ensemble de nos
revendications...
M. Dubé : Non, mais je suis
content que vous reveniez, je suis content que vous reveniez avec les délais,
parce que, regardez, là, j'ai dit : Quand on va être en... On est en
commission, là, puis on va faire l'article par article dans quelques semaines,
O.K., après vous avoir écouté, vous et les autres intervenants. Quand on va
dire que l'objectif du règlement, c'est un, deux, trois, quatre, dont les
dates, puis tout ça, ça va être dit publiquement, puis on va dire : Ce
règlement-là va être déposé très rapidement, puis voici ce qu'ils vont dire...
Je l'ai dit au président tantôt, c'est aussi important ce qui est dit que ce
qui est écrit, et c'est ça, une commission parlementaire. Alors, ce que je vous
dis aujourd'hui, on va suivre les débats des prochaines semaines. Notre
objectif, c'est d'être très clairs de ce qu'il va y avoir dans les règlements
pour être capables de travailler dans les circonstances dans lesquelles on
travaille présentement.
• (10 h 30) •
Mme Bouchard (Julie) : Mais,
pour nous, il y a quand même une différence entre ce qui est dit et ce qui est
écrit, puisque, lorsque c'est écrit...
M. Dubé : Mais il ne sera pas
écrit. Madame Bouchard, je veux juste dire... Madame Bouchard, vous avez
raison, je dis que ça va s'écrire rapidement. C'est ça que je vous dis
aujourd'hui, là. Ce n'est pas une question de mois, d'années, c'est une
question de semaines, d'être capables... On a tous avantage, tout le monde,
pour le service des Québécois, de mettre ces règlements-là le plus rapidement
possible, parce qu'on a dit : La situation aujourd'hui n'est pas
acceptable. Elle n'est pas acceptable, on est tous d'accord avec ça, vous et
moi, là-dessus, on s'entend, puis tous les Québécois. Donc, les règlements, ils
ne prendront pas de temps à venir, mais il y aura eu des engagements sur les
règlements, étant donné les circonstances qu'on connaît...
10 h 30 (version non révisée)
Mme Bouchard (Julie) : ...M. le
Président, j'aurais aussi un commentaire à mentionner. Pourquoi avoir inscrit
«limiter» et non «éliminer» les agences de placement de main-d'oeuvre
indépendantes comme titre du projet de loi? C'est quelque chose qui nous questionne
énormément puisque, pour nous, c'est vraiment une élimination progressive qui
est nécessaire pour le réseau de la santé.
Le Président (M. Provençal)
:M. le ministre.
M. Dubé : Bien, M. le
Président, tantôt je l'ai dit clairement, là, c'est sûr qu'initialement, dans
la personne.... Dans la période de transition, on ne les élimine pas, on ne les
élimine pas, on fait une transition, on les encadre. Mais je vous ai dit en
même temps que, lorsqu'on va le regarder par régions, on va dire : à
partir d'un certain temps, il n'y en aura plus, ça, c'est l'élimination. Ça
fait qu'on a le même objectif, c'est de les éliminer. Mais il faut faire une
transition qui est raisonnable.
Mme Bouchard (Julie) : D'accord.
Le Président (M. Provençal)
:Autre commentaire, Mme Bouchard?
Mme Bouchard (Julie) : Non, pour
l'instant, ça me convient.
Le Président (M. Provençal)
:Est-ce que, de la part des membres,
il y aurait des gens qui voudraient adresser une question?
M. Dubé : Bien, peut-être que,
s'il n'y en a pas... Il nous reste combien de temps à peu près avec Mme Bouchard?
Le Président (M. Provençal)
:Il vous reste 1 minute 40.
M. Dubé : Bien, je veux, je
veux profiter... Je ne sais pas, pour mes collègues, est-ce qu'il y avait
une... il y avait une question ou… Oui, c'est bon. Bien, je pense que la... j'ai
hâte de vous... J'ai hâte de vous entendre. Puis on a bien dit qu'on ne voulait
pas faire de lien avec... Mais, vous... Il y a une chose, tout à l'heure, qui m'a...
que j'ai trouvé intéressante, que vous avez dite, là, puis je veux faire
attention pour ne pas que M. Marissal me dise qu'on va dans la convention,
mais est-ce que la période d'un an, ça, c'est important, de ce que vous avez
dit, la période d'un an où une agence ne peut pas aller chercher quelqu'un du
réseau, vous avez fait une différence très importante entre l'établissement
puis l'installation. Pouvez-vous juste me redire ce que vous avez dit? Parce qu'en
ce moment, cette limitation-là, il y a... je sais qu'il y a des agences qui
jouent avec, parce qu'elles ne peuvent pas prendre quelqu'un qui est dans une
région ou dans un établissement, mais aller dans un autre... est-ce que c'est
là que vous vouliez aller? Je sais que c'est très technique, là, pour les gens
qui nous écoutent, mais c'était...
Le Président (M. Provençal)
: ...il reste 40 secondes.
M. Dubé : Mme Bouchard, ou peut-être
que je pourrais vous demander en dehors des ondes, là, mais je trouvais ça
intéressant, que vous aviez ce point-là, spécifique.
M. Guay (Patrick) : Bien, Si
je peux répondre à Monsieur Dubé, M. le Président, la différence, c'est que
nous... c'est, justement, considérant que... (Interruption) Je vais juste
enlever un côté, je n'aime pas ça, pouvoir m'entendre. Pour répondre, c'est
parce qu'on veut, justement, considérant qu'on sait que pour certaines régions,
ça peut être difficile de se... de ne plus avoir de main-d'œuvre indépendante,
notamment, l'Abitibi, l'Outaouais, d'où je proviens. On sait que cette façon de
faire là permettrait de garder certaines personnes, le temps d'éliminer
graduellement la main-d'œuvre. Donc, c'est pour ça que s'il y a quelqu'un qui
quitte Montréal pour venir aider ou prêter main forte dans cette même région,
on pourrait le permettre à ce moment-là, le temps qu'on élimine la main-d'oeuvre
dépendante.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup pour cette précision.
Nous allons maintenant céder la parole au député de Pontiac. Et je veux
rappeler aussi, quand on s'interpelle, qu'on doit toujours interpeller les gens
par non pas le nom, mais par... comme M. Marissal, c'est le député de
Rosemont. C'est une petite remarque, un petit rappel. Alors, maintenant, M. le
député de Pontiac, vous avez 9 min 54 s.
M. Fortin :Merci,
M. le Président. Je vais tenter de retenir mon instinct initial qui serait de
répondre au ministre dans plusieurs des affirmations qu'il vient de faire, là.
Je vais quand même me permettre de le faire un petit peu. M. le ministre, si
vous cherchez des mercis, vous avez 89 personnes assises à côté de vous,
derrière vous à tous les jours, là, qui peuvent vous donner une petite tape
dans le dos gratuitement. Mais je ne pense pas que vous pouvez vous attendre à
ça quand vous déposez des projets de loi. Pour citer les propos et la mémoire
de la FIQ, là, qui représente une profonde déception, une coquille vide qui
manque de mordant, quand les gens utilisent des mots comme berner, il y a une
réalisation à avoir de votre côté aussi, là, que ce projet de loi là ne répond
pas à leurs attentes. Et c'est un projet de loi qui est demandé. Alors, un
projet de loi d'habitude, quand il est demandé, puis quand le ministre me dit :
Bien, je réponds aux attentes des gens, on est en droit de s'attendre à quelque
chose un petit peu plus satisfaisant que ça.
Mme Bouchard, bonjour, M. Guay,
Mme Bevilacqua...
M. Fortin :...le ministre nous a dit : Ça se complète par
règlement. Avez-vous la même impression que moi, que le ministre n'a pas juste
l'intention de le compléter par règlement, ce projet de loi là, mais de
l'écrire au complet par règlement?
M. Guay (Patrick) : Effectivement,
si je peux répondre, effectivement, c'est ce qu'on croit. Le pl 10, tel
qu'écrit présentement, c'est une coquille vide, on l'a dit dans notre mémoire.
Nous, ce que nous voulions dans ce mémoire-là, c'est vraiment les mesures qui
soient contraignantes, les cibles de réduction de... On voulait avoir les
définitions des régions justement, qu'est-ce qui est urbain, qu'est-ce qui est
mitoyen, qu'est-ce qui est éloigné. C'est ce qu'on voulait avoir dans ce projet
de loi là. Malheureusement, ce n'est pas inscrit, et ce qu'on laisse présager
finalement, c'est que, si on y va par règlement, bien, au gré... au fur et à
mesure que le gouvernement... ou de la conjoncture, mais ça va changer. Et
c'est cette crainte-là qu'on a. Donc, c'est pour ça qu'on voulait que ce soit
clairement identifié dans le projet de loi, malheureusement, cela n'est pas
inscrit.
M. Fortin :Est ce qu'il y a... Si le ministre devait, disons, convenir
de certains de vos arguments, c'est lui peut-être de mettre un peu d'eau dans
son vin, dans son verre de vin à moitié plein, là, est-ce que, d'après vous, ça
se fait mettre un taux horaire maximum dans un projet de loi? Est-ce que ça lui
enlève une quelconque flexibilité au cours des trois prochaines années, de
dire : Voici le taux horaire maximum, on va le mettre dans le projet de
loi. Tout le monde va s'entendre là-dessus. Ça va être clair. En partant, on ne
décidera pas ça autour de la table du Conseil des ministres, derrière les
portes closes. Ça va être fait en public. Tout le monde va le savoir. Il faut
savoir à quoi s'en tenir. Y a-tu quelque chose qui limiterait... qui limite son
action, s'il s'y prend comme ça?
M. Guay (Patrick) : Bien,
dans l'une des recommandations qu'ont fait justement, c'est d'avoir un mandat
temporaire soit donné à la Commission de la santé, justement, et des services
sociaux afin qu'elle évalue cet impact-là pour justement donner... de donner le
maximum du taux horaire. Donc, lorsqu'on demande qu'un mandat soit donné
temporairement, mais c'est par ça... c'est ce qu'on s'attend à la commission...
que la commission fasse, là.
M. Fortin :O.K. Alors, est-ce qu'il y a un des éléments... Là, j'ai
parlé du taux horaire, là, mais est-ce que, si le ministre en venait à avoir
une délimitation claire des régions dans son projet de loi, ces fameuses
régions qu'il veut régler en un an, deux ans, trois ans, s'il devait y avoir
une délimitation claire, est-ce que ça, ça limite sa flexibilité d'action
éventuelle selon vous, ou ça fait juste clarifier les choses pour tout le monde,
mettre tout le monde au même niveau en partant, puis après ça on sait
exactement où on s'en va?
M. Guay (Patrick) : Non, la
réponse est simple, c'est non. Ça ne limite aucunement son pouvoir, au
contraire, ça clarifie la situation.
M. Fortin :O.K. Merci. Le ministre de la Santé nous répète
régulièrement, et c'est un souhait qui est évident, là, je pense, pour tout le
monde, que le réseau public de santé devrait être un employeur de choix. Si je
prends, parce qu'il ne veut pas parler de convention collective, si je prends
le projet de loi indépendamment, je le regarde juste dans l'optique du projet
de loi n° 10, est-ce qu'il y a quelque chose là-dedans? Est-ce que, selon vous,
le projet de loi en soi améliore la position du réseau public comme employeur
de choix?
• (10 h 40) •
Mme Bouchard (Julie) : Bien,
premièrement, c'est... évidemment, on n'est pas ici pour parler de négociation
ou encore de convention collective dans le contenu de ça. Par contre, que ce
soit le projet de loi n° 10 ou encore les conditions de travail, un dossier ne
va pas sans l'autre. On se doit et on est dans l'obligation de mener les deux
dossiers en même temps, puisque si l'amélioration des conditions de travail
dans le réseau de la santé publique ne se fait pas, automatiquement, le projet
de loi n° 10 deviendra un échec puisque les professionnelles en soins qui
oeuvrent dans le privé actuellement ne reviendront pas dans le réseau public.
Elles n'ont pas quitté le réseau public pour rien, c'est parce que les conditions
de travail qui y sont étaient épouvantables.
Alors, c'est la seule et unique raison qui
a fait que ces infirmières, infirmières auxiliaires et inhalothérapeutes là ont
fait un exode du public vers le privé. Et maintenant, si on veut les faire
revenir dans le réseau, on se doit de mener les deux dossiers du même front
pour pouvoir aller créer cet équilibre-là.
M. Fortin :Parce que, dans le fond, ce que vous êtes en train de dire,
c'est que le projet de loi n° 10, en soi, là, il ne va pas nécessairement
convaincre quelqu'un qui a choisi de quitter le réseau, là, demain matin, de
dire : À moins qu'on...
M. Fortin :...les conditions de travail, là, moi, qu'est ce qui
m'amène vers le réseau public? Si je me mets dans les souliers d'une infirmière
qui a quitté dernièrement ou d'une préposée, ou d'une thérapeute, là, pour des
corps d'emploi que vous représentez, ce que vous êtes en train de dire,
c'est : En soi, là, ça prend quelque chose dans la convention collective,
dans les conditions de travail pour les attirer. Sinon, si c'est juste de dire
vous ne pouvez plus travailler en agence dans un an, dans deux ans, en trois
ans, ce n'est pas ça qui va les ramener dans le réseau public, là. Et je vous
comprends bien?
Mme Bouchard (Julie) : Exactement.
Il faut obligatoirement que les deux dossiers soient menés en même temps pour
pouvoir arriver à quelque chose d'intéressant parce que sinon, on n'y arrivera
pas.
M. Fortin :Avez-vous l'impression, à travers le moment où le ministre
présente son projet de loi - vous êtes au cœur des négociations, des
conventions collectives- avez-vous l'impression que le ministre s'en sert un
peu comme un outil pour sa négociation plus que d'autres choses? Est-ce qu'on
tenterait n peu de mettre la...
Le Président (M. Provençal)
:Il ne faut pas donner d'intention au
ministre, par exemple.
M. Fortin :Non, mais je demande, je ne lui prête pas, je demande aux
intervenants si c'est leur interprétation. Mais est ce qu'il n'est pas en train
de mettre... est-ce qu'il est en train de mettre la charrue avant les bœufs un
petit peu?
Mme Bouchard (Julie) : Excusez,
mon micro ne voulait pas s'ouvrir.
Ce qu'il faut comprendre, c'est que le
moment est très important puisque nous sommes en négociations actuellement.
Maintenant, tout ce qui est de conditions de travail ou autres doit se négocier
à la table. Mais, aujourd'hui, on est là pour réellement parler du projet de
loi n° 10 qui est
actuellement sur la table. Donc, évidemment, il faut que ce soit fait
correctement. Il faut améliorer les conditions de travail des professionnels en
soins. Donc, encore une fois, les deux dossiers doivent être ramenés en même
temps, travaillés très sérieusement pour arriver à quelque chose d'intéressant,
pour s'assurer que les professionnels en soins qui oeuvrent actuellement dans
le privé reviennent vers le public, en donnant des conditions de travail
nettement supérieures à ce qu'elles ont présentement au niveau privé.
M. Fortin :O.K. Avez-vous, de votre côté, vu une quelconque analyse du
projet de loi sur l'impact qu'il pourrait avoir dans certaines régions?
L'impact que ça aurait, là, par exemple, vous avez fait référence tantôt, M.
Guay, à l'Abitibi entre autres, à l'Outaouais, à la Côte-Nord, là. Est-ce que
vous avez vu une analyse d'impact de ce que ça pourrait avoir sur un réseau
régional ou un autre? Moi, ça fait partie des grandes inquiétudes qu'on a par
rapport à ça, qu'on ne nous a pas présentés à savoir si ça a été mesuré, si ça
a été analysé, si les mesures qui pourraient être déterminées par règlement,
là, pourraient avoir un impact démesuré dans certaines régions.
M. Guay (Patrick) : Malheureusement,
non. Considérant que le projet de loi, il est muet à cet aspect-là, on ne sait
même pas ce qu'est-ce une région éloignée, on ne sait même pas qu'est-ce qui
est un centre urbain. Donc, pour pouvoir analyser ça, il faudrait bien que le
projet de loi le prévoie ou minimalement les définitions de qu'est ce qu'est
une région éloignée, là.
M. Fortin :O.K. Moi, je pense qu'il me reste 30 secondes à peu
près, M. le Président.
Moi, je ferais une recommandation par
rapport aux derniers propos que le ministre a tenus. Il a dit très
clairement : Les règlements, là, on va les faire en quelques semaines.
Mais, si on est capable de les faire en quelques semaines, c'est parce que vous
les avez déjà en tête. Si vous les avez déjà en tête, il n'y a pas de raison
qu'ils ne soient pas présentés ici à la Commission de la santé. Comme le
recommande la FIQ : Si vous savez ce que vous voulez faire, présentez-les
donc pour que tout le monde soit sur la même longueur d'onde.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, M. le député.
Maintenant, je vais céder la parole au député de Rosemont. Vous avez 3 min
18 s.
M. Marissal : Avant que je
commence, M. le Président...
Le Président (M. Provençal)
:Oui?
M. Marissal : ...est-ce que
les collègues ici ont un... je cherche le mot à matin, là - s'opposent au fait
que je récupère le temps de mon collègue de la troisième section? L'idée ici
étant de ne pas gaspiller de précieux temps qui autrement serait perdu.
Le Président (M. Provençal)
:Ça prend... On ne peut pas. On peut,
mais avec consentement.
M. Marissal : Bien sûr.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la secrétaire, me permettez-vous de...
M. Marissal : De conférer,
confirmer?
M. Dubé : Moi, je n'ai pas
de problème.
Le Président (M. Provençal)
: Moi, pense qu'avec consentement... Je vois que le...
Est-ce qu'il y a consentement?
M. Dubé : Il y a
consentement.
1mari Merci, M. le Président. Donc, ça me
fait à peu près six minutes si je comprends bien.
Le Président (M. Provençal)
:Effectivement.
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Merci, collègues. Allons-y dans l'ordre. Bonjour, messieurs, dames
de la FIQ. Content de vous revoir. J'ai plusieurs questions. Allons-y
rapidement quand même parce que je n'ai pas tant de temps que ça, a malgré
tout. Recommandation 4 : La FIQ recommande que toutes les balises...
M. Marissal : ...à
l'élimination progressive de la MOI, cible annuelle des recours de...
échéancier, définition. Bref, vous connaissez leurs recommandations mieux que
moi. Quand vous parlez d'un échéancier, là, évidemment on parle d'un échéancier
pour éliminer les agences, là, sauf peut-être de très, très, très rares
exceptions là qu'on connaît, vous pensez à combien de temps?
Mme Bouchard (Julie) : Il n'y
a pas nécessairement de temps qui sont établis parce qu'il faut prendre le
temps de faire les choses correctement, justement pour ne pas les laisser dans
des situations précaires, entre autres, les régions qui, pour nous, sont
éloignées. On n'a qu'à penser à l'Outaouais, Abitibi-Témiscamingue,
Bas-Saint-Laurent, même la Côte-Nord, qui sont très dépendantes de la
main-d'œuvre indépendante. Alors, il faut quand même se donner le temps.
Maintenant, si pour ces régions très
éloignées là, on parle de trois ans, quatre ans, deux ans, pour nous, c'est
juste de s'assurer que les choses soient faites correctement pour s'assurer que
l'ensemble des citoyens aussi aient accès à des soins de santé. Parce que c'est
beaucoup la main-d'œuvre indépendante qui oeuvre dans ces centres d'activité là
pour l'instant.
M. Marissal : Bien qu'on ne
connaisse pas avec précision le contenu des règlements... puis, en passant,
vous trouvez qu'il y a beaucoup de règlements, qu'il y a un certain flou puis
qu'on navigue à vue dans le brouillard, bienvenue dans mon monde, ça arrive
souvent avec ce gouvernement qu'on y va par règlement, mais le fait d'ouvrir
des règlements dont on ne connaît même pas la teneur en plus, là, et qui
permettent a contrario de continuer avec les agences, est-ce qu'on ne s'éloigne
pas de facto de l'objectif qui est de les éliminer?
Mme Bouchard (Julie) : Je ne
suis pas certaine d'avoir...
M. Marissal : Le règlement
permettrait aussi, pour peu que je comprenne, là, de continuer avec les agences
là où il est impossible de les éliminer. Donc, nous continuerons donc avec les
agences pour un temps indéterminé dans certains endroits. Je précise d'ailleurs
que Rosemont n'est pas une région éloignée, puis que l'Hôpital
Maisonneuve-Rosemont va garder les agences jusqu'à preuve du contraire.
Mme Bouchard (Julie) : Bien,
d'ailleurs, dans le projet de loi actuel, si je peux me permettre, chaque
établissement va devoir émettre, là, leurs contraintes pour lesquelles elles
doivent, là, faire affaire avec un... de la MOI, et ensuite auront
l'autorisation de la part du ministre. Mais en aucun moment on voit c'est quoi
exactement qui serait légitime pour donner l'approbation. Est-ce que c'est la
pénurie de main-d'œuvre? Parce qu'effectivement, si la pénurie de main-d'œuvre
en fait partie, alors on va avoir de la main-d'œuvre indépendante pendant les
10 prochaines années encore. Est-ce que c'est un pourcentage? Donc, ça, on ne
le voit pas nulle part. Donc, même ça pour nous est un questionnement. Et,
justement, pourquoi y aller via règlement, alors qu'on est prêts dans les
prochaines semaines à déposer certains règlements? Pourquoi ne pas le prendre
tout de suite et le mettre immédiatement dans le projet de loi et s'assurer que
l'ensemble de la population au Québec, l'ensemble des syndicats, l'ensemble des
agences de placement de main-d'œuvre soit déjà au courant de qu'est-ce qui s'y
trouve et de pouvoir faire par eux-mêmes leurs propres revendications, leurs
propres commentaires, ou encore pouvoir se doter tout simplement de la
démocratie qui est extrêmement importante dans un dossier comme ça?
M. Marissal : Bien, je vous
pose la question parce que ce qui m'a frappé quand on a déposé le projet de
loi, là, il y a trois semaines maintenant, autour de, parmi les gens les plus
heureux, à part le ministre, il y avait l'Association des agences de placement.
J'ai rarement vu des gens menacés d'extinction être aussi heureux, ce qui me fait
croire qu'ils ont plutôt compris qu'on pourrait leur maintenir des régions très
problématiques ou des sous-régions comme Maisonneuve-Rosemont. Donc, le projet
de loi actuel, là, si on l'adopte comme tel, là, est-ce qu'il change quelque
chose pour HMR, l'Abitibi-Témiscamingue, la Côte-Nord, l'Outaouais ou si on
fait tout simplement... on ne fait pas tout simplement que prolonger l'usage
des agences par décret sur lequel nous n'avons aucun pouvoir en plus?
• (10 h 50) •
Mme Bouchard (Julie) : Ça peut
être une possibilité. Maintenant, peut être que l'association des agences était
contente du projet de loi, mais ce matin, dans un article du journal, je pense
que c'est plus la panique dans leurs troupes. Maintenant, pour nous, c'est
inconcevable de continuer de cette manière-là puisque ce sont l'ensemble des
contribuables du Québec qui déboursent des montants faramineux pour les
agences. Ce sont de nos anciennes collègues qui ont fait le choix, évidemment,
de quitter des conditions de travail aussi difficiles pour un environnement
plus facile, entre autres concernant la conciliation travail famille...
Mme Bouchard (Julie) : ...le
gouvernement se doit d'être le seul employeur et doit s'assurer de l'équité des
conditions de travail, de l'équité au niveau salarial. Et si, comme le
gouvernement l'a mentionné aussi souvent sur la place publique... veulent
devenir un employeur de choix, ça commence par l'élimination progressive de la
main-d'oeuvre indépendante et de s'assurer que l'ensemble des travailleuses et
des travailleurs du réseau de la santé aient de meilleures conditions de
travail et soient en mesure de donner des soins de qualité et sécuritaires à
l'ensemble de la population.
M. Marissal : Peut-être une
dernière, là.
Le Président (M. Provençal)
:30 secondes.
M. Marissal : Vous
recommandez que le projet de loi indique des conditions et des critères visant
à assurer le droit des patients à recevoir des soins pendant la période
transitoire. Est-ce que ce n'est pas déjà le cas? N'est-ce pas déjà dans la
loi?
Mme Bouchard (Julie) : Bien,
actuellement, ce n'est pas l'ensemble de la population qui ont accès à des
soins. Alors, pour nous, ça fait partie d'une responsabilité du gouvernement de
s'assurer que l'ensemble des citoyennes et des citoyens aient accès à
l'ensemble des services, dont les soins, entre autres, dont ils ont besoin.
M. Marissal : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Merci. Alors, je tiens à vous
remercier pour votre contribution aux travaux de la commission. Je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre aux prochains invités de prendre
place. Merci beaucoup à vous trois.
Mme Bouchard (Julie) : Merci.
Bonne fin de journée. Au revoir.
(Suspension de la séance à 10 h 52)
(Reprise à 10 h 55)
Le Président (M. Provençal)
:Je souhaite maintenant la bienvenue à
l'Association des établissements privés conventionnés. Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et puis nous procéderons à la
période d'échange. Maintenant, je vous invite à vous présenter et à débuter
votre exposé. À vous la parole.
M. Nadon (Jean) : Bonjour à
tous. M. le Président, M. le ministre, Mmes et M. les commissaires, merci de
nous avoir permis d'exprimer notre opinion sur le projet de loi n° 10 et
d'échanger avec vous. Je me présente, je suis Jean Nadon, président du conseil
d'administration de l'Association des établissements privés conventionnés. Je
suis accompagné de Mme Annick Lavoie, directrice générale de l'association.
L'AEPC regroupe 28 propriétaires...
M. Nadon (Jean) : ...gestionnaires
qui représentent 29 établissements et installations, 57 centres
d'hébergement et de soins de longue durée et deux centres de réadaptation
répartis dans 11 régions du Québec. Notre mission est de promouvoir
l'excellence des soins et des services de proximité offerts par nos membres, de
soutenir la place de l'entreprise privée conventionnée dans le domaine de la
santé et des services sociaux et de mettre en valeur les intérêts de nos
membres et leur contribution essentielle. La EPC est un partenaire
incontournable des services d'excellence adaptés aux personnes en grande perte
d'autonomie ou ayant des besoins spécifiques. Les propriétaires gestionnaires
des EPC sont majoritairement des familles qui sont à la deuxième ou troisième
génération à la barre de leur établissement ou des communautés religieuses.
Notre regroupement à l'intérieur du réseau de la santé et des services sociaux
existe depuis plus de 65 ans.
Les EPC offrent des soins et des services
de qualité supérieure dans des environnements sécuritaires et agréables. Nous
sommes des experts en soins et... services de longue durée et en réadaptation
physique. Nous privilégions une approche empreinte de respect et de dignité,
d'environnements empathiques, où le résidant, dont la vulnérabilité est très
grande n'est pas un numéro, mais plutôt une personne à part entière avec une
histoire et des rêves. Les employés oeuvrant dans les EPC sont triés sur le
volet, et une attention particulière est portée sur leurs compétences. Ainsi,
les CHSLD étant des milieux de travail uniques et marqués par la notion
d'humanitude des milieux de vie, le savoir-être des employés est primordial.
Au cours des six décennies, les EPC ont
développé une culture ouverte et de proximité, facilitant les échanges
bilatéraux avec les résidents et leurs représentants, de même qu'avec les
employés. Cette gestion de proximité nous permet de travailler en étroite
collaboration avec les employés et les syndicats, favorisant une synergie
positive. Vous aurez compris que cette philosophie qui... transparaît dans
notre mémoire.
La EPC est favorable à l'intention du
législateur de vouloir encadrer le recours aux agences privées de placement
dans les milieux de soins et d'hébergement. À ce chapitre, les données sur
l'utilisation accrue de la main-d'œuvre indépendante provenant des agences
privées de placement de personnel depuis la pandémie sont accablantes et
exigent une réflexion en profondeur sur une problématique qui est
multifactorielle.
Nous sommes ainsi d'avis que le projet de
loi 10 doit être vu comme une occasion de revoir nos façons de faire
collectives. Les agences privées de placement et de personnel doivent être
mieux encadrées que cela soit pour la qualité des compétences de la
main-d'œuvre que pour le prix demandé aux établissements. Nous estimons
également que les moyens de dissuasion contenus dans le p.l. 10 avec
l'imposition de pénalités financières et d'infractions pénales pour pour le
recours à la MOI viennent limiter les moyens dont disposent les gestionnaires
du réseau dans un contexte de pénurie de main-d'œuvre.
Nous vous soumettons avec respect quelques
questions. Sera-t-il envisageable que le fardeau des conséquences de
l'utilisation de la main-d'œuvre indépendante soit inversé et incombe davantage
aux agences de placement plutôt qu'aux établissements? L'échéancier du projet
de loi pourrait-il être ajusté compte tenu de la réalité des EPC et de
l'environnement dans lequel ils évoluent? La facturation des agences privées de
placement devrait-elle refléter l'expérience et les compétences attestées de
l'employé? Les taux horaires exigés pour les différents types d'emplois ne
devraient-ils pas... ne pas dépasser ceux octroyés par le réseau de la santé?
Est- ce que la création d'une agence de placement gouvernemental permettrait de
récupérer un certain nombre d'employés des agences privées de placement qui
recherchent une plus grande flexibilité dans les horaires de travail?
Le PL 10 nous a donné beaucoup de
matière à réflexion, et nous nous sommes attardés... aux pistes de solution sur
l'attraction et la rétention du personnel. Nous pensons que l'introduction de
nouvelles technologies des systèmes numériques avec interopérabilité et les
accès à des données fiables en temps réel permettraient une grande efficacité.
Et pourquoi ne pas mettre en œuvre les bases des notions expérience client et
expérience employé dans les façons de gérer du réseau et des établissements? Ne
serait-il pas gagnant de porter attention à ce que préoccupent les jeunes et
les futurs gradués? Ils sont intéressés par tout ce qui est l'environnement, la
qualité des milieux de vie de travail et la flexibilité dans le travail.
Plusieurs pistes de solution sont envisageables, nommément les certifications
employeurs de choix environnemental telles que BOMA Best ou celles centrées sur
l'humain telles que... ainsi que l'encadrement du travail, comme l'autogestion
des horaires de travail, les quarts de travail de 12 h et l'abolition du
temps supplémentaire obligatoire. Merci. Je laisse la parole à Annick Lavoie.
• (11 heures) •
Mme Lavoie (Annick) : Merci,
monsieur Nadon d'avoir mis la table à des questions importantes qui ouvrent la
porte à une réflexion en profondeur. La EPC est d'avis que ce vaste chantier
commande une mobilisation de l'ensemble des partenaires du réseau afin de
trouver des solutions réalistes et pérennes. De plus, le délai d'application
doit tenir compte des réalités de chaque partenaire...
11 h (version non révisée)
Mme Lavoie (Annick) : ...le
réseau de la santé doit revenir redevenir un employeur de choix. Et pour cela,
des changements doivent être introduits dont l'implantation est essentielle,
tant au niveau local que national. Nous parlons ici de changements qui
dépassent le strict cadre du projet de loi n° 10. Merci à vous tous d'être
les leaders.
Les EPC sont évidemment disposés à aider
le ministère dans le déploiement de projets pilotes visant à réduire l'utilisation
progressive de la main-d'oeuvre indépendante et d'accroître l'attractivité des
milieux de travail pour le personnel. Dans la rédaction de notre mémoire, nous
nous sommes attardés à ce que nous croyons être les principales causes de l'utilisation
abondante, ces dernières années, des agences privées de placement. Nos
commentaires se fondent sur les expériences de nos membres observées sur le
terrain et des impacts néfastes de ces causes. Nous apportons bien humblement
quelques pistes de solution pour chacune des causes identifiées. Nous sommes d'avis
que l'utilisation accrue de la MOI est un symptôme d'un problème à causalité
multifactorielle. Pour l'imager, je dirais que ce n'est que la pointe de l'iceberg.
Si vous acceptez cette prémisse, vous serez d'accord pour dire que de couper le
pic de l'iceberg n'empêchera pas ce qui est sous l'eau d'exister. Nous
souhaitons éliminer le recours à la MOI, mais... et il faut vraisemblablement s'attaquer
à ce qui le cause. De manière microscopique...
Bien entendu, en toile de fond à cette
réflexion, les dommages collatéraux causés par la pandémie de COVID-19. Les
effets négatifs qu'a eus la pandémie sur notre société sont réels et
importants. Ils sont évidemment amplifiés dans le réseau de la santé, car ce
sont les travailleurs de la santé qui étaient en ligne de front durant de trop
nombreux mois. Brièvement, parmi les causes identifiées, la pénurie de main-d'oeuvre,
si nous la regardons de manière microscopique, du fait de leur mission unique
et de leur taille, les EPC ne peuvent aucunement compétitionner contre les
CISSS et les CIUSSS au moment de recruter du personnel ou de requérir aux
agences de placement.
Cette incapacité va encore plus loin, en
effet, les établissements d'enseignement et les centres de formation
professionnelle sont approchés par les CISSS et les CIUSSS dans l'attribution
de stages, ce qui nuit forcément à la relève de nos différents titres d'emploi.
De manière macroscopique maintenant, le réseau de la santé est de moins en
moins un employeur de choix, il faudra développer des stratégies de recrutement
qui mettent l'emphase sur des milieux stimulants, qui misent sur l'autonomie, l'initiative,
la reconnaissance.
Autre cause possible, les conditions de
travail. Le psychologue Abraham Maslow parlait de la théorie de la motivation
qu'il interprétait à travers la représentation pyramidale de la hiérarchie des
besoins des individus. Le deuxième palier de cette pyramide représente les
besoins de sécurité. Il parle ici de stabilité, de prévisibilité et de calme.
Nous croyons que si les conditions de travail, aussi généreuses soient-elles
monétairement, ne permettent pas de satisfaire les besoins de sécurité des
employés, le réseau n'arrivera pas à retenir son personnel ni à en attirer.
Dans cette optique, il est peu probable que le projet de loi N° 10 vienne
à lui seul dans le... ramener dans le réseau le personnel de la santé qui tente
inlassablement de retrouver un certain contrôle et une stabilité dans son
environnement de travail. C'est pourquoi que... c'est pourquoi nous croyons que
des actions structurantes en amont et en parallèle doivent venir soutenir le
projet de loi n° 10. Pour les EPC, un élément qui vient nuire à l'environnement
de travail est la réduction parfois complète de la liste de rappel en raison du
rehaussement des postes à temps complet. Lorsqu'un employé s'absente, il n'y a
personne sur la liste de rappel pour venir le remplacer, et bien qu'un plan de
contingence soit mis en place, il est possible que l'établissement soit dans l'obligation
d'avoir recours à la MOI. Cela dit, en passant, dans les EPC, le recours au
temps supplémentaire obligatoire est une mesure de très grande exception et est
quasi nulle.
En terminant, nous demandons au
législateur de tenir compte des particularités des EPC dans les modalités d'application
de la loi afin de préserver la pérennité de ces milieux de vie uniques. Merci.
Nous sommes heureux de répondre à vos questions.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup pour votre exposé.
Alors, M. le ministre, vous débutez cet échange avec ce groupe.
M. Dubé : Oui. Très bien, M.
le Président. Puis, un, je vous remercie beaucoup pour votre présentation. Puis
je comprends très bien vos inquiétudes et vos recommandations. Je laisserais
peut-être la parole à mes collègues députés de poser...
M. Dubé : ...des questions,
parce qu'on a quand même plusieurs questions sur votre document. Alors, je
laisserais, là, les députés qui voudraient, intervenir.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de... Chicanez-vous
pas, là.
M. Dubé : Ils veulent tous.
Ils veulent tous.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Hull.
Mme Tremblay : Oui. Alors,
bonjour. Vous parlez, là, dans les recommandations de retarder l'échéancier,
là, pour les EPC, de manière à ce qu'ils se joignent au mouvement un petit peu
plus tard. Par ça, vous n'avez pas peur de créer un certain déséquilibre,
finalement, puis avoir une difficulté de rétention, finalement, d'amener les
gens vers vous, là? Pourquoi... j'essaie de comprendre pourquoi ça serait
bénéfique pour vous de ne pas le faire maintenant, mais de le faire beaucoup
plus tard. Puis ça pourrait retarder le processus dans lequel... On veut en
venir, à terme, à... il y a une période de transition, mais, à terme, de
finalement éliminer. Ça retarderait, finalement, cela. J'ai peur du
déséquilibre. Ça, j'aimerais ça vous entendre là-dessus.
Mme Lavoie (Annick) : M. le
Président, la réponse est simple, c'est que, justement, on a ce déséquilibre
entre les CISSS et les CIUSSS et nous. Donc, on a de la difficulté à faire de
l'attraction puis d'attirer des gens dans... On sait, là, la mission CHSLD
n'est pas une mission, là, qui est très, très valorisée au niveau médiatique,
et tout ça. Donc, on a ce fardeau-là, mais, en plus, comme les CISSS et les
CIUSSS vont chercher directement les futurs gradués dans les écoles de
formation, il en reste très peu pour nous.
Donc, ce qu'on dit, c'est qu'on va être
pris avec très peu de gens qu'on va être capable d'engager et on va être en
bris de service. Et, comme on traite une population qui est extrêmement
vulnérable, c'est la population la plus vulnérable au Québec, on ne peut pas
être en bris de service, tout simplement, donc c'est juste pour ça. Donc, si on
pouvait être les derniers à passer, ce serait bien, comme les régions, là, les
EPC en dernier.
M. Nadon (Jean) : Juste pour
ajouter, ce qu'on s'attend, c'est plus un plan d'action avant, c'est d'être
prêts. C'est sûr qu'on est des petits établissements, on est plus vulnérables,
et c'est sûr, les agences, c'est vraiment un filet de sécurité quand on arrive
un samedi soir, s'il manque une infirmière. C'est ce qu'on dit. Ça fait que
c'est pour ça que, tu sais, le but, ce n'est pas de retarder pour retarder,
c'est d'avoir un plan d'action pour être prêt. Comme qu'on dit, ce n'est pas de
la seule façon de faire, d'éliminer les agences, je pense qu'il y a des...
Quand on parle de l'expérience employé, je pense qu'il faut se mettre de
l'avant, puis j'apprécie, M. le ministre, que vous preniez ça en compte.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Bonaventure.
Mme Blouin : Oui. Donc, merci
d'être là pour nous exprimer votre point de vue. J'aimerais en savoir plus,
notamment sur vos réalités qui sont particulières. Est-ce possible concrètement
de nous dire c'est quoi les impacts négatifs du recours à la main-d'œuvre
indépendante pour vous, donc des exemples concrets, notamment?
M. Nadon (Jean) : Bien, le
recours à la main-d'œuvre indépendante, il n'y a aucune plus-value d'en avoir.
Ça coûte plus cher, il n'y a pas de stabilité pour nos équipes, tous nos
projets n'avancent pas, avec la main-d'œuvre indépendante. Donc, c'est sûr que
l'objectif, dans nos établissements, c'est d'avoir zéro main-d'oeuvre
indépendante, c'est réellement d'aller... C'est sûr, avec ce qui est arrivé
dans les dernières années... on sort quand même de la pandémie, ça fait que
c'est sûr qu'il y a plusieurs choses qui ont été un petit peu retardées. Tu
sais, quand on parle de l'expérience client, expérience employé, il y a des
choses qui ont été retardées. On est en train de les remettre en place, et
c'est d'avoir un peu ça... C'est pour ça que je vous dis qu'en fin du compte,
c'est le dernier recours qu'on va avoir, mais présentement, aujourd'hui, les
enlever, on serait vulnérables. Quand on pense à certains établissements qui
ont peut-être une quarantaine de lits, qui ont une infirmière pour la nuit,
mais on est pour, d'avoir une vision, mais c'est de le faire intelligemment.
Mme Blouin : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée d'Iberville.
• (11 h 10) •
Mme Bogemans : Quelles
seraient vos recommandations en ce sens-là, tu sais, quand vous dites que vous
voulez qu'on l'étudie puis vous dites...
Mme Lavoie (Annick) : Bien,
en fait, c'est vraiment de regarder à mettre en place des mesures structurantes
pour attirer les gens dans le réseau, redevenir un employeur de choix. On l'a
déjà été. J'ai été dans le réseau pendant 21 ans. C'est un beau réseau. Donc,
il faut redevenir cet employeur de choix. C'est vraiment d'écouter ce que les
employés ont à dire et de voir de quelle manière on est capable de concilier
cet agencement-là, leurs besoins, répondre à leurs besoins de sécurité, et
comment on est capable de faire fonctionner un réseau. Donc, c'est toutes ces
mesures structurantes qui doivent être mises en amont puis en parallèle avec le
projet de loi, là.
Mme Bogemans : Puis, selon
vous, particulièrement en CHSLD, quelles seraient les mesures...
Mme Bogemans : ...mettre de
l'avant.
Mme Lavoie (Annick) : Mais,
écoutez, cc'est sûr et certain que si on regarde de permettre, bon, dans les
EPC, nous, on a une structure particulière de budget, et ce sont des heures
cliniques autorisées qu'on a d'octroyées, et de nous permettre de pouvoir
peut-être faire une surstructure. Donc c'est d'avoir deux ou trois personnes de
plus de prévues dans la structure de base de façon à ce que, si jamais
quelqu'un n'est pas là, bien, on a un backup déjà sur le terrain. Donc ça, pour
nous, ce serait une façon pour les EPC. Ce n'est pas la même chose du tout dans
les CISSS et les CIUSSS, là, on s'entend. Ça, ça serait une mesure. De rendre
la flexibilité au niveau de l'horaire. On parle de l'autogestion des horaires,
bien, je pense que ça, c'est une belle façon de répondre au besoin de
prévisibilité que les employés ont. Ça fait que, ça, c'est quelques exemples.
Une voix : Parfait, merci.
Le Président (M. Provençal)
:Prochaine question? Oui, Mme la
députée de... Oui, Mme la députée de...
Mme Dorismond : Marie-Victorin.
Le Président (M. Provençal)
:...Marie-Victorin.
Mme Dorismond : Tout à
l'heure, j'ai bien compris, dans le fond, au niveau de votre gestion avec la
main-d'œuvre indépendante, vous l'utilisez vraiment en filet de sécurité. Donc,
ma question... tu sais, vous avez parlé aussi du plan d'action, de travailler
en amont. Ça fait que ça serait quoi la première étape pour vous, pour répondre
à vos enjeux, comme plan d'action qu'on devrait mettre?
M. Nadon (Jean) : Mais je
pense qu'on se compare. Dans le mémoire, c'est justement de... On travaille, en
ce moment, avec nos employés sur justement des facilités d'attirer ou la
rétention. Quand on parle des horaires de 12 heures, d'essayer d'avoir une
fin de semaine sur quatre pour... exemple pour les infirmières, d'aller plus
loin. C'est justement qu'on veut une ouverture, une ouverture avec nos employés
pour accommoder et retenir nos employés, ça fait que c'est de se donner un peu
le temps de le faire et puis de devenir un employeur de choix pour être non
dépendant du... non dépendant des agences. Puis, en ce moment, il y a aussi un
dossier harmonisation des heures-soins dans les CHSLD. C'est tous des petits
éléments. C'est super important d'avoir les soins requis, d'avoir une... peu importe
le centre d'hébergement, d'avoir les heures-soins octroyées par le ministère
pour donner une qualité de service puis aussi être moins fragiles. Puis ça fait
partie aussi des... quand on parle juste des rénovations par rapport... dans
les CHSLD, c'est tout d'éléments qu'il faut mettre en place pour y arriver.
Mme Dorismond : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Hull.
Mme Tremblay : Donc, on
connaît le coût finalement d'avoir recours à ces agences-là. Donc moi,
j'aimerais ça que vous nous parliez de l'impact financier parce qu'il y a quand
même eu plusieurs fermetures, là, d'établissements, là. Donc, est-ce que ça
n'aurait-il pas eu lieu... est-ce que ça n'aurait pas eu un impact, là? Parce
que le recours à ces agences-là, on le sait, là, ça a quand même... est quand
même important.
Mme Lavoie (Annick) : Écoutez,
les fermetures ne sont pas dans le réseau des EPC, donc je ne pourrai pas
parler pour eux parce que je ne connais pas leur réalité. Par contre, au niveau
des établissements privés conventionnés, l'impact est... c'est certain que
lorsqu'on arrive après les CISSS et les CIUSSS dans nos appels pour avoir
quelqu'un de la main-d'œuvre indépendante, on se ramasse en bas de la liste
permise par le Centre d'acquisition gouvernemental, alors là, on est dans les
gros prix, et en plus bien souvent l'agence va dire : Bien là, je suis
obligée de te charger temps double parce que, cet employé-là, bien, il est en
temps supplémentaire. Est-ce c'est vrai, est-ce que ce n'est pas vrai? Aucune
idée. Mais nous, on reçoit la facture pareil, là. Donc, c'est ça quand on parle
d'encadrer les agences, bien, c'est cet appétit gourmand là qui devrait être
contrôlé parce que ce n'est pas, ce n'est pas raisonnable, puis même pour les
employés du réseau, ce n'est pas équitable, là. Donc c'est cette optique-là,
là, qu'on parle.
Mme Tremblay : Oui. Puis là,
vous...
Le Président (M. Provençal)
:Oui...
Mme Tremblay : Oui?
Le Président (M. Provençal)
: Allez-y, Mme la députée.
Mme Tremblay : Ça va. Donc,
dans la mémoire, vous parlez également d'une agence de placement
gouvernementale qui pourrait être créée. C'est quoi les... Dans votre tête,
c'est une agence. C'est quoi les services que ça pourrait offrir ce type
d'agence là? Est-ce que ça permettrait une certaine mobilité de la
main-d'œuvre? Qu'est-ce que vous avez en tête en lien avec ce sujet-là?
Mme Lavoie (Annick) : Ça
pourrait être effectivement la mobilité de certains employés du réseau.
Quelqu'un qui travaille dans le réseau puis qui dit : Bien, moi, je serais
prête à donner. Je suis à temps partiel, je serais prête à peut-être donner mon
nom pour aller à l'occasion comme ça. Donc, c'est une espèce de banque
d'individus qui pourraient accepter de se promener, et puis, évidemment, on
essaierait d'avoir dans les mêmes secteurs de façon à garder une certaine
stabilité au niveau des...
Mme Lavoie (Annick) : ...différents
soins qui sont à donner. Et ça permettrait, si c'est une agence
gouvernementale, ça permettrait, à ce moment-là, de contrôler les coûts, de
contrôler un paquet de facteurs qu'on n'a pas de contrôle actuellement, parce
que ça vient des agences de placement privé. Donc, à ce moment-là, on aurait ce
contrôle-là. Il serait sous les mêmes unités syndicales que celles du réseau.
Donc, il n'y aurait pas de différence
autre que la flexibilité de la personne qui dit; Bien, j'aimerais ça y aller un
petit peu plus souvent, moins souvent, tout simplement.
Une voix : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Bonaventure.
Mme Blouin : Oui. Est-ce que
le projet de loi, dans sa forme actuelle, soulève des enjeux particuliers,
donc, pour les établissements privés conventionnés, d'autres enjeux que vous
n'auriez pas soulevés, par exemple?
Mme Lavoie (Annick) : Je vous
dirais que l'enjeu principal, pour nous, c'est vraiment l'échéancier, parce
qu'on est tout à fait d'accord avec l'idée et le principe d'encadrer en ce
moment et de s'en aller vers une abolition de l'utilisation de la MOI, on est
tout à fait d'accord avec ça. C'est juste l'échéancier, pour nous, est un peu
trop court, puis on se dit : On va être en bris de service. Ça, c'est...
Pour la population qu'on dessert, nous, c'est vraiment hors de question.
Et évidemment le fardeau, des pénalités
sur les établissements plutôt que sur les agences, pour nous, c'est de
dire : Bien, on est pris, là, on n'a pas d'autre solution que d'utiliser
la MOI en ce moment, alors pourquoi on devrait être pénalisés financièrement?
Ça peut mettre également en péril la viabilité de certains petits
établissements, là.
Mme Blouin : Et, à votre
avis, comment est-ce qu'on pourrait bonifier le projet de loi?
Mme Lavoie (Annick) : C'est
une excellente question, c'est une excellente question. Écoutez, je pense qu'il
y aura à regarder quels sont les règlements. Parce que le projet de loi est
assez succinct, alors ce sera les règlements qui viendra vraiment donner une
structure à ce projet de loi là. Alors, c'est là où on pourrait... qu'on
s'offre à vous aider à trouver des pistes de solution si vous le souhaitez.
Mme Blouin : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:M. le ministre.
M. Dubé : Combien il reste de
temps, M. le Président?
Le Président (M. Provençal)
:Trois minutes.
M. Dubé : Trois minutes.
Bien, peut-être en lien avec les questions de mes collègues, je veux juste
faire bien attention, parce que l'engagement qu'on a pris, puis je dis ça nos
deux invités aujourd'hui, c'est de faire abstraction de ce qu'on peut faire par
convention collective versus par projet de loi, puis, je pense, vous l'avez
bien dit. Et je veux juste rappeler aux Québécois qui nous écoutent aujourd'hui
qu'il y a plusieurs des suggestions que vous avez faites qui se rapportent à
des éléments de conventions collectives, hein, je veux juste qu'on se comprenne
bien. Ça fait que j'aimerais mieux... Je suis très content que vous les
souleviez, mais ce n'est peut-être pas à propos pour nous de commenter sur ces
suggestions-là en ce moment, vu qu'on a dit qu'on voulait avancer en parallèle,
madame Bouchard l'a très, très bien dit tout à l'heure, en parallèle. Le projet
de loi et pour encadrer les agences, le projet de loi 10 qu'on discute en ce moment,
mais que l'amélioration des conventions collectives doit se faire en parallèle.
Alors, il y a beaucoup de suggestions.
Bon, il y en a une que je trouve qui... Puis je veux juste me permettre de
commenter, parce que je suis content que la question vous a été posée, puis
c'est une suggestion que vous faites, c'est ce que vous avez appelé soit un
manque de personnels qui a la mobilité. Puis je pense que si c'est possible
pour les agences privées de faire ça, pourquoi ça ne serait pas possible? C'est
un peu ça que vous nous dites aujourd'hui, mais je veux juste que les Québécois
comprennent que c'est peut-être une bonne idée, mais c'est difficile pour nous
de commenter parce que ça, exemple, ça rentre dans le principe des conventions
collectives, étant donné l'ancienneté, la mobilité, puis tout ça, hein, on se
comprend bien.
• (11 h 20) •
Mais je trouve intéressant... Puis je
pense que c'est ça... Puis là je pense au député de Rosemont qui nous a fait
cet avertissement au début de notre session de s'assurer qu'on sépare les deux.
Je veux comprendre, mais, quand on a des recommandations ou des suggestions
comme celles-là que vous avez faites, je veux juste bien l'expliquer aux gens.
Puis ça ne vous empêche pas d'en parler, mais, pour nous, comme législateur,
étant donné qu'on ne veut pas se mêler des conventions en ce moment puis que
ça, c'est le rôle de notre négociateur qui est le Trésor... Ça fait qu'on se
comprend bien là-dessus, je voulais juste, M. le Président, porter cet
exemple-là comme précision pour dire qu'on va respecter ces règles-là. Est-ce
que ça va pour tout le monde? Je ne sais pas s'il reste du temps, mais...
Le Président (M. Provençal)
:Une minute.
M. Dubé : Quand vous avez
parlé des... À moins que mes collègues...
M. Dubé : ...Est-ce que
ça va? Il y a de très bonnes questions d'ailleurs. Quand on parle du coût,
parce que oui, c'est vrai, vous êtes conventionnés, puis pour que les gens
comprennent ce que ça veut dire, c'est que vous devez, contrairement mettons, à
un CHSLD privé, hein, vous devez avoir les mêmes règles de conventions
collectives qu'un établissement, un CHSLD public. C'est ça, la différence. Il y
a le CHSLD public, il y a le conventionné puis il y a le privé. Vous êtes un
peu comme entre les deux. J'essayais juste de comprendre pourquoi vous dites
que vous êtes un peu... Parce que, ça, c'est un point intéressant que vous avez
soulevé, vous dites : Je veux juste que vous pensiez qu'on est souvent les
derniers de la chaîne. Puis vous pensez que vous passez même après les privés?
Une voix : ...
M. Dubé : Ah! O.K. c'est
ça que je voulais bien comprendre. Parce que votre point est excessivement
intéressant. Vous avez dit : Ne pensez pas juste à le limiter par région,
mais le limiter par service. Donc... Puis expliquez-moi pourquoi vous pensez
que vous êtes en bas de la chaîne. Je veux juste bien comprendre votre point
là-dessus.
Le Président (M. Provençal)
:10 secondes.
M. Dubé : Ou peut-être
qu'un collègue pourra continuer, là.
Mme Lavoie (Annick) : Parce
que les CISSS et les CIUSSS sont beaucoup plus gros que nous. Alors évidemment,
quand ils font une demande...
M. Dubé : Au volume.
Mme Lavoie (Annick) : Oui,
le volume.
M. Dubé : O.K., O.K.,
O.K. Parfait.
Mme Lavoie (Annick) : Quand
ils font une demande, on passe après.
Le Président (M. Provençal)
:Merci. Alors, je vais maintenant
céder la parole au député de Pontiac. Vous disposez d'une banque de
12 min 18 s
M. Fortin :Merci. Merci, M. le Président. Merci à vous deux,
M. Nadon et Mme Lavoie, pour votre présentation puis les questions
que vous avez répondues initialement. Moi, je... Une des choses qui nous a
frappés dernièrement, là, c'est l'ampleur des chiffres qui ont été présentés
par... par le gouvernement quant à son recours aux agences dans certains...
certaines régions entre autres, là, mais de façon... Même de façon générale, je
pense que ça a frappé beaucoup de gens, l'évolution au cours des quelques
dernières années du recours aux agences. Moi, j'aimerais ça savoir avant qu'on
rentre... Parce que, là, vous demandez un traitement un peu différent, puis
c'est normal, vous êtes là pour nous expliquer votre réalité, là, mais
j'aimerais ça comprendre l'étendue de votre situation à vous dans les
établissements conventionnés. L'avez-vous mesuré, le pourcentage d'heures que
des établissements, disons, pour lesquels ils ont recours à la main-d'oeuvre
indépendante ou aux agences?
Mme Lavoie (Annick) : Je
vous dirais qu'avant la pandémie on avait un ratio d'utilisation de la MOI qui
tournait aux alentours de 7,2 %, alors que le réseau public était plus aux
alentours de 11 %, 11,5 %. Avec la pandémie, on s'entend pour dire
que, quand ça vidait un étage complet de personnel parce qu'on devait retirer
les gens qui avaient été en contact, même s'ils ne l'avaient pas attrapée, tu
sais, au début, là, dans la première vague, c'est sûr que le pourcentage a
monté puis on était plus, dans les trois années, là, de la pandémie, vraiment
un peu plus aux alentours de 12 %, 13 %. Puis le réseau était un
petit peu plus haut, mais sensiblement identique, là. Là, ce qu'on tente de
refaire, c'est de revenir à ce qu'on était avant la pandémie. Mais c'est...
C'est sûr que, pour le moment, c'est difficile avec la pénurie de la
main-d'œuvre, qui existait avant, mais qui s'est comme amplifiée.
M. Fortin :O.K. Puis donc là vous me dites que vous êtes passé de
7,5 % à à peu près 12 %, 13 % dans les trois dernières années,
disons. Qu'est-ce que ça représente comme coût, ça, par exemple, là? J'essaie
de comprendre le pourcentage d'augmentation de vos coûts parce que,
nécessairement, une infirmière préposée d'agence vous coûte plus cher que celle
qui est salariée. Qu'est-ce que... Qu'est-ce que ça représente pour vous, cette
différence-là sur votre... vos marges?
Mme Lavoie (Annick) : Bien,
je vous dirais que ça ne représente rien de différent parce que, comme je le
disais tout à l'heure, nous, notre budget est fait différemment et on
fonctionne avec des heures cliniques autorisées. Donc, l'utilisation de la MOI
rentre dans nos heures cliniques. Si on dépasse nos heures cliniques, à ce
moment-là le propriétaire a une pénalité. Il doit payer. Mais si on est en deçà
de nos heures cliniques, on n'a pas de pénalité. Donc, il y a... Au niveau
monétaire, la seule... la seule chose, c'est de dire : Bien, si ça nous
coûte plus cher, entre guillemets, d'utiliser une agence parce qu'ils nous
chargent à un prix faramineux, bien, c'est le ministère en bout de piste qui
écope. Puis c'est là où on fait : Bien, ça ne marche pas, là.
M. Fortin :Mais c'est ça mon point. Vous ne l'avez pas mesuré...
Mme Lavoie (Annick) : Non,
non.
M. Fortin :Combien ça coûte de plus au ministère.
Mme Lavoie (Annick) : Non.
M. Fortin :O.K. Donc, le 5 % de différence, vous ne savez pas ce
que ça peut représenter parce que vous avez... Il y a plus... Il y a des taux.
Mais... O.K. je vais le dire comme ça. Ce que vous nous dites aujourd'hui...
M. Fortin :...c'est que le taux que vous payez est plus haut que le
taux... ou le taux que le ministère paie à travers vos services, là, il est
plus haut que le taux que les CHSLD ou les... publics ou les CIUSSS paient,
eux, de leur côté. C'est votre prétention un peu, là, parce que vous avez dit
vous êtes en bout de ligne souvent, donc vous finissez par payer plus, puis...
Donc...
Mme Lavoie (Annick) : Mais on
ne paie pas d'emblée plus cher, mais, si on est obligé d'utiliser les agences
qui ne sont pas dans la liste et qui nous chargent plus cher, à ce moment-là,
oui, on va payer plus cher. Cette donnée-là, je ne l'ai pas présentement, mais
je pourrais l'avoir par contre, parce qu'on fait ces calculs-là, là, de façon
périodique, là, à l'association. Je pourrais vous revenir avec la réponse.
M. Fortin :O.K. Oui, je pense, à travers la commission, M. le
Président, ça serait bien.
Mme Lavoie (Annick) : Parfait,
on vous enverra ça.
M. Fortin :Le fait que vous demandez un délai différent ou un report,
là, pour les établissements conventionnés, j'essaie de comprendre... Si vous
êtes à la même place que le réseau public, qui est à peu près à, selon vos
chiffres, là, 12 %, 13 % de recours, là, il a peut-être augmenté dans
le réseau public aussi, là, mais vous êtes là. Pourquoi vous auriez besoin d'un
rapport si vous êtes sensiblement au même pourcentage de recours aux agences
qu'eux?
M. Nadon (Jean) : ...on ne
peut pas parler pour les autres. Nous, on parle pour nous. On demande de nous
prendre une particularité parce qu'on est des plus petits établissements, mais
on ne peut pas parler non plus pour le public. Ça fait que c'est sûr, quand
qu'on dit de retarder, d'avoir un plan d'action avant de l'implanter dans les
EPC, bien, c'est pour ça, ça fait que c'est de là vient notre proposition.
Mme Lavoie (Annick) : Je
rajouterais peut-être un petit commentaire. On est à mission unique, on ne peut
pas faire du déplacement d'employés. Dans un CIUSSS, un CISSS, qui est énorme,
s'il manque quelqu'un dans un département en particulier, ils peuvent prendre
quelqu'un d'une place puis l'envoyer, donc il y a moins d'utilisation de MOI de
cette façon-là. Nous, on est à mission unique, donc on va être vraiment
obligés. Donc, si vous comparez deux pourcentages, le pourcentage des EPC et le
pourcentage des CISSS et des CIUSSS, bien, il faut prendre le pourcentage des
CHSLD publics versus les nôtres. Parce que c'est la mission qui fait, en
quelque sorte, qu'on ne peut pas laisser un poste vacant sur... pour le soin
des plus... les plus vulnérables.
M. Fortin :Est-ce qu'il y a des établissements qui n'utilisent pas de
main-d'oeuvre indépendante du tout?
Mme Lavoie (Annick) : Oui.
M. Fortin :Alors, pourquoi le gouvernement donnerait un report pour
ces établissements-là?
Mme Lavoie (Annick) : Je n'en
ai pas une quantité industrielle, j'en ai peut-être deux, deux sur 59.
M. Fortin :O.K., mais il y en a, là, il y en a qui n'en utilisent pas
du tout.
Mme Lavoie (Annick) : C'est des
régions éloignées en plus.
M. Fortin :En plus. O.K. Parce que c'est un peu le point du ministre,
c'est dire : Là où c'est plus facile, bien, on va couper le recours plus
tôt, là où c'est plus difficile, on va le couper plus tard. Alors, si vous,
vous avez des endroits qui fonctionnaient bien, là, entre guillemets,
c'est-à-dire sans recours à la main-d'oeuvre indépendante, je me pose la
question si offrir un report ne ferait pas nécessairement en sorte... peut-être
en sorte d'ouvrir une porte, là, éventuellement.
Mme Lavoie (Annick) : Non, je
ne verrais pas... Ils n'utiliseront pas plus la main-d'oeuvre indépendante
s'ils ne l'utilisent pas en ce moment, là. Ce n'est pas dans leur intention.
M. Fortin :Si le gouvernement s'en tient à son plan de match actuel,
et, disons, dans un an, et là on se fie à la parole du ministre parce que ce
n'est pas dans le projet de loi, mais dans un an, à Montréal, le recours aux
agences n'existe plus, j'imagine qu'à Montréal vous avez des établissements
conventionnés qui utilisent les agences, est-ce que... En fait, la prétention
du ministre, là, c'est que, pour les CISSS et les CIUSSS, s'il n'y a plus le
recours aux agences, il y en a qui vont revenir dans le réseau public.
Qu'est-ce qui ferait en sorte que ce serait plus difficile pour vous de les
attirer vers des établissements que de les attirer vers des CISSS et des
CIUSSS?
• (11 h 30) •
Mme Lavoie (Annick) : Bien,
simplement parce que c'est mission unique, ce n'est pas une mission qui est
nécessairement très attractive, les CHSLD, on ne se le cachera pas. Et,
deuxièmement, les opportunités d'avancement pour les employés sont beaucoup
moindres. Tu sais, quand tu rentres dans un CISSS ou un CIUSSS, tu vas... tu
peux essayer la salle d'opération, puis là, ah! ça te tente d'aller plutôt à
l'urgence, tu sais, tu as possibilité de te promener un petit peu partout et
d'avoir une variété d'activités que tu n'as pas dans une mission unique, là.
M. Fortin :Est-ce que le report que vous demandez... J'essaie juste de
le comprendre, de le saisir, puis qu'on lui donne les paramètres qu'il faut,
là, si le ministre choisit d'accepter votre demande. Est-ce que ce serait pour
un corps d'emploi spécifiquement? Est-ce qu'il y en a que c'est plus difficile ou
plus simple pour vous? Par exemple, là, vous avez des infirmières, vous avez
des préposés aux bénéficiaires. Est-ce qu'il y a un corps d'emploi pour lequel
c'est... serait... dire : Oui, je ne pense pas qu'on a tant de besoin d'un
rapport pour un tel corps d'emploi mais pour l'autre peut-être, ou l'autre...
11 h 30 (version non révisée)
M. Fortin :...très certainement.
Mme Lavoie (Annick) : Je
vous dirais que les infirmières, c'est probablement le corps d'emploi, là, le
plus difficile à recruter, clairement, là. Puis je ne sais pas si M. Nadon
a autre chose.
M. Nadon (Jean) : ...mais
aussi on est plus vulnérable par rapport, exemple, le soir ou la nuit, on a peu
d'infirmières. Ça fait que c'est sûr que si on a une cancellation ou si notre
liste de rappel n'est pas assez longue, c'est ce qu'on peut faire affaire avec
les agences.
M. Fortin :O.K. Puis combien de temps vous voulez pour le rapport...
le report? Avez-vous un temps indiqué?
M. Nadon (Jean) : Mais,
encore là, ce n'est pas du temps, c'est qu'est-ce qu'on fait dans ce temps-là
qui est important. Ça fait que c'est pour ça que, pour moi, en fin du compte, c'est
de s'asseoir, puis de faire un plan, et de le mettre en œuvre. Et puis je n'ai
pas de date en tant que telle, mais il faut... pour nous, c'est d'avoir un plan
sérieux, puis je pense qu'on est capable de l'atteindre.
M. Fortin :O.K. Ça va pour moi, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
:Merci. Alors, je vais céder la parole
au député de Rosemont. Sept minutes.
M. Marissal : Merci, M.
le Président. Pardon?
Le Président (M. Provençal)
:Sept minutes.
M. Marissal : Merci,
merci. Bonjour. Merci d'être là. On se voit souvent, ces temps-ci.
M. Nadon (Jean) : Exact.
M. Marissal : Le monde
est petit. Vous estimez que les moyens de dissuasion contenus dans le p. l. no 10,
l'imposition de pénalités financières et d'infractions pénales, c'est pas mal l'idée
du projet de loi, qui viendra par règlement, là, par le recours, vient limiter
les moyens dont disposent les gestionnaires du réseau dans un contexte de
pénurie de main-d'oeuvre. O.K. Mais comment on fait autrement? Mettons, là, qu'on
dit : O.K. ça limite trop avec des pénalités puis des sanctions, comment
fait-on? Autrement dit, le bâton, on le trouve où?
Mme Lavoie (Annick) : C'est
une bonne question, je vous dirais. C'est vraiment de s'asseoir tous les
partenaires ensemble et de réfléchir en dehors de la boîte. Si on veut des
résultats différents de ceux qu'on a actuellement, il faut penser différemment.
Donc, je n'ai pas les... Je n'ai malheureusement pas les solutions, mais je
pense qu'on doit se servir de l'intelligence collective et de travailler
ensemble à trouver une solution ou des solutions qui vont être réalistes et
pérennes pour éviter justement l'utilisation de la main-d'œuvre indépendante.
M. Marissal : O.K. Je ne
peux pas être contre ce que vous venez de dire, mais je n'ai pas vu encore de
projet de loi sur l'intelligence collective, là. J'essaie de voir comment on va
limiter les agences, parce que ce que vous dites par ailleurs, c'est que, vous,
vous allez vous retrouver dans une situation assez pénible où vous n'aurez plus
de main-d'œuvre ou encore moins, puis vous n'aurez pas le choix d'aller vers la
main-d'œuvre, la MOI. Puis ceux-ci continueront leurs bonnes pratiques de vous
imposer des tarifs autres que ceux prévus. Mais vous n'avez pas le choix, sinon
vous tombez en bris de service, puis vous m'arrêtez si je dis des niaiseries,
là, mais c'est ce que je comprends de votre exposé, là. C'est que vous allez...
Si vous n'utilisez pas cette main-d'œuvre-là, vous tombez en bris de service.
Vous ne pouvez pas tomber en bris de service, ça va de soi, mais ce faisant,
vous risquez de contrevenir à la loi, donc, vous faire taper sur les doigts. C'est
ça? Est-ce que je comprends bien?
M. Nadon (Jean) : Mais c'est
sûr qu'on est pour un encadrement rapide des agences. C'est sûr le
fonctionnement, on tombe souvent en région avec, même si on regarde des appels
d'offres, à autres parce que dans certaines régions, c'est... les compagnies
viennent souvent de la région montréalaise, et on est obligés de prendre des
petites agences à gauche et à droite dans certaines régions. Puis c'est pour ça
que ça serait difficile. Peut-être le faire aussi sur, comme on dit sur...
Quand on parlait de faire un plan, c'est qu'il y a des étapes à faire et non du
jour au lendemain. Vous n'avez pas... Parfait. C'est nous autres qui se fait
taper sur les doigts.
M. Marissal : Mais pour
les encadrer, je reviens à ma première question, ça prend ça. Ça prend un
régime de sanctions ou ça prend un régime.
M. Nadon (Jean) : Des
sanctions vers les agences ou vers nous?
M. Marissal : Bien, moi,
je ne vise pas l'un ou l'autre, là. Bien, personnellement, je les éliminerais,
les agences, là.
M. Nadon (Jean) : Oui,
oui. Je pense qu'on est tous à la même place.
M. Marissal : Mais je
comprends que, vous, vous craignez de vous faire taper sur les doigts parce que
vous n'aurez pas le choix de.
M. Nadon (Jean) : Bien,
c'est un peu que... C'est un peu simpliste de taper sur les doigts sur les
établissements à court terme sans avoir des solutions pour arriver là. C'est ce
qu'on veut dire, tu sais, c'est le principe.
M. Marissal : Dites-moi,
les deux sur 59, là, quel est le secret de la Caramilk pour ces gens? Comment
ils font pour y arriver? Peut-être que c'est repicable ailleurs, là.
M. Nadon (Jean) : Bien,
je pense, c'est toujours d'avoir une gestion de proximité, d'avoir des projets,
d'être... C'est sûr qu'on a... La plupart, c'est des entreprises familiales et
c'est évident qu'on a des plans b, des fois, un peu différents avec nos
employés. Quand on dit qu'il y en a zéro, là, c'est...
M. Nadon (Jean) : ...ça fait
que, des fois, on se splitte, il y en a un qui rentre quatre heures plus vite
et tout ça. C'est de travailler avec des ententes locales aussi comme qu'on
peut faire et qu'on a déjà commencé, qu'on est en train de faire, c'est d'être
près de nos employés, puis, oui, c'est notre force.
M. Marissal : Eh bien, je
fais le lien avec ce que vous disiez tout à l'heure, madame, que vous avez déjà
été un employeur de choix. Bon, deux sur 59, je comprends que ce n'est pas un
gros pourcentage, là, mais ça pourrait se faire selon des ententes
particulières ou en tout cas travailler de façon à avoir des horaires
planifiés, planifiables localement, par exemple. Ce que je veux dire par là,
c'est que vous n'êtes pas condamnés à avoir les CISSS et les CIUSSS prendre des
personnels, passer après, puis prendre les agences. Vous pouvez moduler vos
fonctionnements pour que ce soit justement agréable de travailler. Ce que vous
dites, il n'y a pas beaucoup de diversité de travail, mais il y a des gens qui
recherchent ça dans la vie d'avoir un travail où c'est prévisible puis ils sont
très, très bons là-dedans, puis ils aiment ça., puis tant mieux parce que ça
nous en prend. Alors, pourquoi est-ce qu'on n'est pas capable de répliquer le
modèle ailleurs?
Mme Lavoie (Annick) : Il
faudrait juste réajuster le tir. Je n'ai pas mentionné que c'était le réseau
EPC qui était un employeur de choix par le passé puis qu'il ne l'est plus.
C'est le réseau de la santé...
M. Marissal : Ah! bon.
Mme Lavoie (Annick) : ...qui
n'est plus un employeur de choix. Il l'a déjà été, il ne l'est plus. Dans les
EPC, on est toujours un employeur de choix.
M. Marissal : D'accord.
Alors, vous faites bien de préciser parce que j'avais compris que vous parliez
de votre réseau. Alors, vous faites de le préciser.
Un dernier, dernier point, vous avez parlé
de pourcentages tout à l'heure, là, avec mon collègue libéral, mais le
pourcentage, des fois, ça ne dit pas grand-chose, là. On a entendu beaucoup
d'histoires, dans les médias, d'agences qui ont probablement profité à un
certain point des situations et de votre vulnérabilité et qui se sont mis à
appuyer pas mal fort sur le crayon, là. Qu'est-ce que vous en savez auprès de
vos membres?
Mme Lavoie (Annick) : Mais on
a certains membres qui, effectivement, nous ont rapporté ce genre de problématique,
des membres qui mentionnaient que la qualité du personnel qui était envoyé
n'était pas au rendez-vous, des PAB qui...
M. Marissal : O.K. Ça, c'est
intéressant parce que moi, j'ai fait une tournée, pas du Québec au complet, là,
c'est beaucoup trop vaste. Mais j'ai visité pas mal de régions dans les
derniers mois, puis j'ai entendu ça souvent, même dans les hôpitaux, là, puis
dans des établissements purement publics, là, qu'on nous a dit : On nous
envoie des fois pas mal n'importe qui.
Bon, moi, mon rôle ici, comme
parlementaire, ce n'est pas d'agiter des épouvantails pour faire peur au monde,
là, mais c'est déjà assez pénible dans le réseau de la santé, si en plus on
envoie n'importe qui formé sur le coin d'une table en huit heures. Ça, vous
confirmez que ça existe dans le réseau, dans votre réseau en tout cas?
Mme Lavoie (Annick) : Tout à
fait. On a, à l'occasion, des gens qui ne sont pas formés adéquatement et, à ce
moment-là, on est obligé... Si on est capable de dire : Bien, on ne veut
pas l'avoir, la personne on la retourne. Quand tu l'as déjà eue une fois, tu
dis : Ah! bien, non, je ne veux pas l'avoir parce qu'elle n'a pas toutes
les compétences. Si elle arrive, puisque tu ne le sais pas, puis tu le vois sur
place, bien, ce qu'on fait, c'est qu'on les paire, on les met avec quelqu'un
qui est expérimenté pour être sûr qu'il n'y a pas de danger puis que la
sécurité des résidents est toujours assurée, là. Pour nous, ça, c'est la
priorité numéro un, là. Évidemment, on va éviter de reprendre le même
personnel.
M. Marissal : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Je vous remercie beaucoup pour votre
intervention puis votre présentation. Je vais maintenant suspendre les travaux
pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup de votre
collaboration et de votre contribution. Merci.
Des voix : Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 40)
(Reprise à 11 h 43)
Le Président (M. Provençal)
:Nous recevons maintenant, et je leur
souhaite la bienvenue, l'Alliance du personnel professionnel et technique de la
santé et des services sociaux. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes
pour exposer. Je vais vous inviter à vous présenter et à débuter votre exposé.
À vous la parole.
M. Comeau (Robert) : Merci,
M. le Président. Alors, M. le Président, M. le ministre, Mesdames, Messieurs
les députés, je suis Robert Comeau, je suis le Président de l'APTS, qui est
l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services
sociaux. Je suis accompagné à ma droite d'Émilie Charbonneau, qui est deuxième
vice-présidente, à ma gauche de M. Bertrand Schepper et au bout là-bas, M.
Guillaume Plourde, qui sont tous deux responsables à la recherche au secteur de
l'action sociopolitique. Nous vous remercions de nous recevoir aujourd'hui pour
que nous puissions vous faire part du point de vue de notre organisation au
sujet du projet de loi 10.
L'APTS, bien, c'est une organisation
syndicale qui représente plus de 65 000 professionnels et
techniciennes qui pratiquent dans le réseau de la santé et des services
sociaux. Nos membres travaillent dans le secteur du diagnostic, en
réadaptation, en nutrition, en intervention psychosociale, en soutien clinique
et également en prévention. On œuvre également en centres hospitaliers, bien
sûr, en CLSC, CHSLD, centres jeunesse et dans les centres de réadaptation.
D'abord, on veut souligner que l'APTS
rejoint entièrement le ministre sur la nécessité d'affranchir le réseau de sa
dépendance aux agences de placement et à la main-d'oeuvre indépendante. Les
dépenses reliées à cette sous-traitance sont en croissance constante et privent
notre réseau des moyens dont il a besoin pour offrir des services accessibles
et de qualité. Également souligner que le projet de loi, bien que court, nous a
quand même beaucoup donné de matière à réflexion. Vous ne serez sans doute pas
surpris que l'APTS soit pour l'émancipation des établissements et... des
agences, pardon, et de la main-d'œuvre indépendante, mais nous nous sommes
beaucoup interrogés sur les conditions nécessaires à ce que le réseau
s'affranchisse convenablement et définitivement du privé.
Lors de cet exposé, nous nous en tiendrons
d'abord succinctement et strictement au contenu du projet de loi pour mettre en
évidence des enjeux notables, notamment en matière de gouvernance et de
centralisation. Nous explorerons ensuite une source non négligeable de dépenses
gouvernementales en santé et services sociaux pourtant occultée dans le projet
de loi, c'est-à-dire les services achetés. Et, finalement, nous conclurons sur
les conditions gagnantes pour que l'exercice d'affranchissement du privé auquel
souhaite se livrer le gouvernement soit couronné de succès.
D'abord, on aimerait vous rappeler les
quatre principes qui animent l'APTS et qui nous ont servi de prisme lors de
notre lecture du projet de loi, c'est-à-dire la démocratie, la transparence,
l'indépendance et, bien sûr, l'imputabilité. Commençons par le caractère
démocratique de notre réseau qui, malheureusement, est mis à mal de
l'article 1 du projet de loi. Si d'emblée l'APTS comprend que le ministre
veuille avoir les coudées franches pour s'attaquer à notre dépendance au
secteur privé, notre organisation s'inquiète de voir que l'outil dont il se
dote pour ce faire soit celui du règlement...
M. Comeau (Robert) : ...s'octroyer
le droit de déterminer de façon unilatérale les balises qui vont encadrer les
prix, les obligations, l'imputabilité, les pénalités, et plusieurs autres,
c'est centraliser entre les mains du ministre l'ensemble des pouvoirs et priver
la société civile de toute participation aux échanges qui vont façonner l'accès
à ses services de santé et de services sociaux. C'est pourquoi notre
organisation préconise l'inclusion de ces modalités à même le projet de loi
afin qu'elles puissent être étudiées et débattues de manière démocratique.
Pour que notre réseau soit démocratique,
justement, il faut aussi que la gestion soit transparente. Là encore, l'ajout
de l'article 338.3 à la loi de santé et services sociaux, qui prévoit que
le ministre peut autoriser le recours à des agences en raison de circonstances
exceptionnelles, est problématique. La question qui se pose est évidemment
celle-ci : Qu'est-ce qui constitue, en fait, une circonstance
exceptionnelle? Il est nécessaire d'y répondre à même le projet de loi, selon
nous, d'une part, pour que la société civile puisse juger du bien-fondé de ces
autorisations et, d'autre part, pour nous assurer que l'exceptionnel ne
devienne pas banal.
Pour que notre réseau soit démocratique
mais aussi efficace, il faut de plus qu'il soit exempt de quelconques conflits
d'intérêts. L'APTS est donc préoccupée par les dispositions qui concernent le
processus d'enquête en cas de violation ou d'infraction au règlement. Non
seulement c'est au ministre que revient le droit d'autoriser la tenue d'une
enquête, mais celle en plus... lui pourra choisir qui enquêtera sur les
établissements présumément fautifs. Vous en conviendrez, c'est une pente
glissante quand on sait que les administrateurs des établissements sont
également nommés par le ministre. Pour éviter toute apparence de conflit
d'intérêts, l'APTS recommande donc de confier ce mandat à la Vérificatrice
générale, dont l'indépendance ne devrait pas être remise en question.
Toujours dans le même souci de
transparence et d'imputabilité, notre organisation croit que les établissements
devraient être audités à tous les trois ans et que leurs rapports financiers
devraient être déposés annuellement par le ministre devant la commission parlementaire
compétente pour fin d'étude. Finalement, nous croyons qu'un article interdisant
catégoriquement le recours aux agences de placement, sauf lors de situations
exceptionnelles bien définies, doit être inclus au texte de loi.
M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM.
les députés, j'aimerais maintenant vous amener dans un carré de sable un peu
différent de celui tracé par le projet de loi 10 mais qui lui est similaire à
bien des égards et mérite également notre attention, votre attention, celui des
services à acheter. Deux choses distinguent principalement les dépenses en
main-d'œuvre indépendante des services à acheter. D'une part, les services
achetés incluent des fournitures, comme l'achat, par exemple, de produits de
contraste en imagerie médicale. D'autre part, lorsque les services sont rendus
en dehors de l'établissement, comme dans le cas où un établissement, un hôpital
sous-traite complètement sa liste d'attente en imagerie médicale à une clinique
privée. Cette distinction faite, je vous réfère à l'annexe deux dans notre
mémoire pour constater par vous-même que ce poste de dépense est trois fois
plus lourd que celui de la main-d'œuvre indépendante et qu'il ne cesse
d'augmenter. Et ça, ça nous préoccupe.
• (11 h 50) •
Comme nous représentons notamment le
personnel des plateaux techniques, nous nous sommes livrés aussi à quelques
extrapolations en nous basant sur les tarifs facturés par la compagnie Philips
pour les travaux d'entretien et de réparation d'équipements en imagerie par
résonance magnétique. Si ces travaux étaient effectués à l'interne par nos
technologues en génie biomédical, qui sont tous employés du réseau, rémunérés à
l'échelon le plus élevé, il nous en coûterait trois fois moins cher, et nous
parlons ici de dizaines de millions de dollars. Donc, en ignorant les services
achetés, le ministre fait fi d'une partie du problème et se prive de sommes
importantes. L'APTS recommande donc à la Commission d'intégrer, dans le projet
de loi 10, un article indiquant clairement l'intention du ministre de
s'attaquer aux dépenses en services achetés à court ou à moyen terme.
Finalement, M. le ministre, je ne vous
apprends rien en disant que légiférer ne suffit malheureusement pas. En ce
sens, nous sommes surpris qu'aucun exercice de planification de la main-d'œuvre
ne soit prévu et qu'un plan de transition n'ait pas été déposé en amont au
début du projet de loi 10. Avec un taux de chômage inférieur à 6 %, le
choix ne manque pas et plusieurs optent déjà, malheureusement, pour une
réorientation de carrière. Un retrait immédiat des agences de placement et de
la main-d'œuvre indépendante à ce stade-ci aurait aussi un impact direct sur la
stabilité déjà précaire des équipes et, à terme, des conséquences néfastes sur
l'attractivité et la rétention du personnel au sein du réseau. Pour que la
transition agence réseau soit réussie, une amélioration substantielle des
conditions de travail dans le réseau est incontournable. À vouloir réduire les
listes d'attente à tout prix en exerçant sur le personnel la pression indue du
TSO ou de la gestion à la performance, le ministère ne fait que contribuer à la
dégradation des conditions d'emploi. Comment s'étonner ensuite que les salariés
quittent et que l'on se retrouve dépendant du...
M. Comeau (Robert) : ...pour
maintenir une apparence d'offre de soins, de services. Pour que la transition
soit réussie, le ministère doit s'assurer que les conditions d'emploi du réseau
public soient suffisamment attrayantes pour que le personnel des agences
choisisse d'y travailler et pour que le réseau... et pour celles et ceux qui
agissent dans les réseaux actuellement, choisisse, bien sûr, d'y rester. Il
doit assumer une bonne rémunération à son personnel et une conciliation
famille-travail-vie personnelle plus harmonieuse. Et ce type de proposition là,
bien sûr, ça se fait à la table de négociation, et nous ne pouvons que conclure
à l'inviter à s'y présenter et à discuter avec nous de bonne foi. Si nous avons
des objectifs communs comme celui de nous affranchir des agences de placement,
bien, c'est évident qu'on va trouver un terrain d'entente et on va pouvoir
aller ensemble. Je vous remercie de votre attention.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup pour votre exposé.
Nous allons maintenant débuter cette période avec M. le ministre.
M. Dubé : Très bien.
M. Comeau, puis vos collègues, là, merci beaucoup d'être là aujourd'hui
parce que je sais que c'est un élément qui... sur lequel vous êtes très
sensibles.
Bon, je pense que vous avez... Moi, il y a
quelques éléments, là, sur lesquels je vais... parce que je pense, entre
autres, quand vous parlez des conditions d'emploi, puis je vais refaire le même
même commentaire. Il y a les négos, puis il y a le projet de loin n° 10. Par contre, rien ne nous empêche de vous poser des
questions sur vos suggestions sans donner un semblant d'accord ou de désaccord.
Vous comprenez? Je pense que je veux juste le répéter.
Vous avez fait un commentaire sur le plan
de la main-d'œuvre, puis j'aimerais juste le mentionner. Vous avez dit :
Il n'y a pas de plan de main-d'œuvre. Je vous challengerais un petit peu
là-dessus, là, humblement. Il y en a un, mais il n'est pas beau et on l'a bien
dit. D'ailleurs, le député de Pontiac l'a mentionné dans une de ses
interventions ce matin. On a même dit c'était quoi nos besoins en personnel
pour les cinq prochaines années quand on additionne la question des retraites
et la question des départs, parce que, malheureusement, un de nos grands
enjeux, ce n'est pas tellement d'attirer les jeunes. Ils viennent, mais ils
viennent chercher de l'expérience, puis, quand ils se rendent compte des
conditions de travail, il y en a beaucoup qui quittent. Ça fait que je voudrais
juste clarifier que la planification de la main-d'œuvre, on l'a faite, puis
d'ailleurs c'est ce qui nous fait faire des exercices qui sont très difficiles
en ce moment. Quand on regarde, planifier cinq ans, c'est bon, on le fait, on
regarde, ce que je viens de dire, mais on planifie aussi pour l'été, puis on se
rend compte qu'on a des quarts de travail qui ne sont vraiment pas comblés.
Vous le savez, là. Ça fait que je voulais juste donner cette précision-là parce
que je sais que vous connaissez très, très bien le réseau.
Il y a un élément technique, puis avant
d'en venir aux éléments techniques, vous avez dit : Si on travaille
ensemble, par exemple, sur la question de la main-d'œuvre, il y a des terrains
d'entente. J'aime ça entendre ça. J'aime ça parce que c'est ça qu'il faut. Je
l'ai dit, je vais le dire encore plusieurs fois, puis je pense que mes
collègues de l'opposition même sont d'accord avec ça, le statu quo du côté de
la main-d'œuvre indépendante, il n'est pas acceptable. On s'entend tous. Puis
je l'entends comme vous le dites, ce n'est pas rien qu'une question de coût,
c'est important, là, mais il y a toute une question d'équité envers les
employés du public, puis, etc. Bon.
Il y a un point technique que je voudrais
juste vous questionner puis, encore une fois, là, je ne pense pas que, ça, ça
va dans la convention. Ça fait que je vais poser la question. Vous avez parlé
d'obtenir les états financiers des agences. Pouvez-vous me dire... Je ne l'ai
pas trouvé dans votre mémoire. Est-ce que quelqu'un pourrait me... oui, m'en
donner un peu plus là-dessus?
M. Plourde (Guillaume) : Oui.
À vrai dire, il ne s'agit pas des états financiers des agences, mais des états
financiers des établissements du réseau, les RS471 en particulier.
M. Dubé : Ah! O.K.
M. Plourde (Guillaume) : Ou
les...
M. Dubé : Ah! pour voir leurs
coûts.
M. Plourde (Guillaume) : Effectivement,
les coûts, parce que ce qu'on a remarqué à la consultation de ces états
financiers, comme vous vous êtes supposément le savoir, c'est que la partie sur
la main-d'œuvre indépendante, toutes ces données-là ou tous ces montants-là ne
sont pas audités, ça fait qu'ils ne sont pas tenus aux plus hauts standards de
l'exercice comptable qui doit être fait. Ça fait que pour ces raisons, on croit
que la commission, en tout cas, doit au moins étudier ça ou faire intervenir
les personnes impliquées dans ces rapports-là.
M. Dubé : Comme qui exemple
le Vérificateur général ou...
M. Plourde (Guillaume) : Entre
autres, ou encore les membres... les P.D.G. des établissements ou les
secrétaires des établissements pour expliquer au moins, au niveau de ces...
comment se ventilisent... ventilent au moins ces sommes-là qui ne sont pas
auditées.
M. Dubé : O.K. Mais je veux
juste comprendre du côté de la vérification que vous voulez faire, c'est sur
les agences... pas sur les agences, mais sur les CISSS et les CIUSSS eux-mêmes?
M. Plourde (Guillaume) : Oui.
M. Dubé : O.K. mais le fait...
M. Dubé : ...ça parce que,
moi, quand je suis arrivé, il n'y avait aucune donnée sur les agences. On ne savait
pas parce que c'est géré, je vais le dire comme ça, en silo, puis chacun des
CISSS et des CIUSSS faisait... Et, quand on a vu, justement, comment ça pouvait
représenter des montants importants, puis là je vous dis ça, c'est après la
première année de la pandémie, bien, on a demandé d'avoir une consolidation. Ça
fait que l'information... Là, si, aujourd'hui, je suis capable de vous dire
que, pour la catégorie un, qui sont, entre autres, les infirmières, les
préposés aux bénéficiaires... je pense que le chiffre exact, j'ai dit 1
milliard ce matin, c'est à peu près de 960 millions, c'est parce qu'on le
sait maintenant. Je voulais juste dire, c'est ça qui fait qu'aujourd'hui on
dit : Statu quo, pas acceptable.
Et, quand on prend... je veux juste
qu'on... Votre question est très à propos, mais je veux juste préciser le
besoin de vérification quand vous dites ça, parce qu'on l'a maintenant, cette
donnée-là. Puis c'est ça qu'on va suivre maintenant qu'on met ce projet de loi
en place pour diminuer ça le plus rapidement possible. Vous, vous demandez une
vérification de ces chiffres-là?
M. Plourde (Guillaume) : Bien,
en tout cas, de les tenir au plus haut niveau de vérification qu'on connaît. Vu
qu'on sait que ces données-là ne sont pas auditées, bien, on aimerait, en tout
cas, qu'elles soient au moins auditées aux trois ans, là, comme on l'a écrit au
niveau de nos recommandations.
M. Dubé : O.K., bien, je
comprends mieux votre point, mais, moi, ce que j'aimerais vous dire, juste pour
vous rassurer, là, puis rassurer les Québécois, ce n'est pas depuis longtemps
qu'on a décidé de colliger cette information-là pour savoir c'était quoi, le
problème. Alors, quand je vous dis aujourd'hui... puis j'en parlerai plus tard
dans d'autres rencontres qu'on aura, mais, si vous regardez les pourcentages de
marge de profit que les agences se prennent, bien, vous allez voir que c'est
faramineux. Alors, on le sait maintenant, on le sait maintenant, puis c'est
pour ça qu'on veut agir, parce que maintenant on connaît l'ampleur du problème.
Ça fait que je voulais juste clarifier ce point-là.
Pour les autres éléments... Puis, M.
Comeau, là, j'apprécie votre commentaire, mais je veux juste vous dire :
Je comprends que vous le dites puis qu'est-ce que ça représente pour votre
organisation, mais moi, j'ai toujours en tête la question du patient. Tu sais,
je comprends ce que vous me dites, qu'il faudrait regarder, peut-être aller
dans des services achetés, puis etc., mais... Puis je comprends parce que vous
avez plus de membres qui sont là, je respecte ça, là, mais, en même temps, je
vous dirais, en ce moment-là, si je regarde ma pile, là, c'est sûr que les
agences... les montants, vous... tantôt vous avez dit : C'est peut-être
une dizaine de millions, ici on parle d'une centaine de millions, là, des
centaines de millions. Ça fait que je ne suis pas en désaccord avec votre
suggestion, je fais juste dire, c'est... Il faut y aller... Ma grand-mère
disait : Qui trop embrasse mal étreint, là. Il faut essayer de se limiter
dans nos interventions.
Et je laisserais mes collègues continuer
dans leur questionnement, je suis certain qu'ils ont des très bonnes questions
aussi.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, oui, madame la députée de
Marie-Victorin.
• (12 heures) •
Mme Dorismond : Bonjour à
vous quatre, bonjour. Avec votre présentation, je sens que votre verre semble
être plus rempli qu'à moitié plein. Donc, merci pour cette belle présentation.
Par rapport au PMO, donnez-moi à peu près deux ou trois solutions sur l'attraction
et la rétention de votre catégorie. Puis l'autre question que j'avais aussi,
avez-vous de l'information sur vos membres qui ont fait le saut en agence ou
qui sont revenus dans le réseau public? Et combien? Puis quels types
d'emplois... dans votre catégorie, je sais que vous en avez beaucoup, ça fait
que quels types d'emplois qu'il y a plus d'enjeux en lien avec la MOI?
M. Comeau (Robert) : On a
beaucoup le travail social, on a quand même pas mal de travailleurs en
main-d'oeuvre indépendante, là. Génie biomédical. On en a aussi au point de vue
de l'imagerie médicale, des laboratoires. De plus en plus dans les centres
jeunesse, donc on peut parler d'éducateurs sur des quarts de travail qui sont
plus... qui sont moins favorables, je vous dirais. Donc, ça touche quand
même... Dans nos 109 titres d'emploi, on en a quand même pas mal qui sont
visés.
Sur la question de pourquoi les gens
quittent, bien, actuellement, quand on leur parle, nous, de négociation, sans
rentrer évidemment dans le sujet, là, ce n'est pas l'objet ici, là, mais ce
qu'ils entendent de la partie patronale actuellement, c'est : On aimerait
que vous travailliez plus. Tu sais, c'est 35 h semaine, mais nous, on vous
offre maintenant 37 h et demie, puis on parle même peut-être d'un 40 heures.
Juste l'effet de laisser planer ces choses-là est un petit peu déstabilisant,
puis la conciliation travail-vie personnelle devient plus difficile, je vous
dirais, à ce moment-là. Et on essaie de garder nos gens en leur disant :
Bien non, on va trouver d'autres solutions au lieu d'augmenter le nombre
d'heures plus pour que vous soyez capable d'organiser votre vie aussi autre que
celle du travail. Alors, il y a vraiment ces signaux-là qui sont envoyés,
actuellement, qui nous...
12 h (version non révisée)
M. Comeau (Robert) : ...qui
nous refroidisse un petit peu. Les gens quittent, oui, pour le salaire, mais
pas uniquement pour ça, c'est vraiment beaucoup autour de l'organisation de la
vie personnelle, comment je peux concilier, avoir une famille, une vie
équilibrée, versus faire mon travail puis m'investir dans mon travail aussi, en
forme... que je sois en forme pour le faire aussi puis que je sois disponible
pour ma clientèle aussi et non pas être toujours sur la pression. Donc, c'est
sensiblement la même chose que nos collègues infirmières, je vous dirais, mais
dans beaucoup d'autres types d'emplois aussi.
Une voix : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Bonaventure.
Mme Blouin : Oui. Bien, pour
faire du pouce un peu sur la question de ma collègue, en fait, pour savoir
quelles sont vos pistes de solution, j'aimerais aussi savoir, vous, à titre d'organisations
syndicales, ce serait quoi, les actions que vous seriez prêts à poser pour
encourager les travailleurs qui sont présentement... qui ont recours... qui
sont des employés, plutôt, des agences. C'est quoi, les actions que vous seriez
prêts à poser pour les encourager à revenir dans le réseau?
M. Comeau (Robert) : On a
fait ça dans le passé, je vous dirais... pas nécessairement dans les agences,
mais c'est quelque chose qui pourrait être envisageable d'aller dans les
collèges, dans les universités pour aller présenter le réseau public, leur
dire : Venez vous investir dans le réseau public, ce sont toutes des
belles professions, c'est stimulant. Il n'y a pas rien de très, très, je vous
dirais, banal, on voit toujours l'exceptionnel dans les réseaux publics. Puis,
avant ça, on avait quand même une traction, les gens écoutaient beaucoup ce qu'on
a à dire, mais maintenant on y va à peu près plus parce que c'est... Il n'y a
pas d'écoute, là, je vous dirais. On pourrait faire ce type d'opération là
également avec les agences. On est ouverts à toutes les solutions, je vous
dirais, on reconnaît cette urgence-là au même niveau que vous, puis il n'y a
comme pas de limite, mais juste y penser ensemble, là.
Mme Blouin : Merci.
M. Comeau (Robert) : ...
M. Dubé : ...si vous
permettez, M. le Président, Monsieur Comeau, la question de ma collègue, j'aimerais
ça revenir sur tantôt avec... ce que vous venez dire, avec la planification de
la main-d'oeuvre. Quand on regarde le nombre de personnes qui quittent le
réseau annuellement, là, puis je parle principalement infirmières, les gens que
vous représentez au niveau technique, là, je vais le dire comme ça, qui est
très important, on pense aux laboratoires, puis etc., on disait qu'on perd à
peu près 30 000 personnes par année, dont 10 000 pour fins de retraite, ce qui
est normal, ça, c'est de l'attrition normale d'un réseau, à peu près 20 000 qui
partent, puis c'est beaucoup, ça, c'est... 20 000 sur 300 000, c'est des
pourcentages qui ne se voient pas dans des grandes organisations. Donc, il y a
un problème de fond.
Êtes-vous capable dans vos... Puis là je vais être
concret avec le groupe que vous représentez, donc ça revient à la question de
mes collègues. Voyez-vous des catégories d'âge? Parce que moi, ce que j'entends,
là, parce qu'on a commencé à demander des statistiques là-dessus, c'est plus
les... C'est sûr que l'attrition, bien, c'est des gens à la retraite, tandis
que ceux qui quittent, pour le 20 000 dont je vous parlais tantôt, c'est plus
les jeunes. Ça fait qu'est-ce que vous voyez ça dans votre association, des
gens qui viennent, ils prennent une certaine expérience puis ils vont soit dans
les agences ou dans d'autres organismes privés? J'aimerais ça vous entendre sur
l'âge. Parce que, si on comprend ce... je ne peux pas faire un autre
angliciste, on dirait que j'en fais plusieurs ces temps-ci, là, mais, si on
voit cette tendance-là, c'est parce qu'on répond moins aux exigences des jeunes
qui aujourd'hui la question concept travail-famille est plus importante qu'elle
l'était peut-être il y a plusieurs années j'aimerais ça vous entendre
là-dessus.
Mme Charbonneau (Émilie) : On
n'a pas de statistique par âge, mais l'âge moyen de nos membres, nos
travailleuses, nos travailleurs, c'est 35 ans, donc, dans notre catégorie d'emploi.
M. Dubé : Votre moyenne
globale...
Mme Charbonneau (Émilie) : À
peu près.
M. Dubé : ...pour l'APTS.
Mme Charbonneau (Émilie) : Oui,
exact, exact. Donc, si on peut prendre un cas de figure, comme vous pouvez voir
dans le mémoire, il y a celui de la grande famille de l'imagerie médicale.
M. Dubé : Oui.
Mme Charbonneau (Émilie) : 64 %
mentionnaient vouloir quitter et, de ce 64 % là, 38.2 % voulaient
aller vers le privé. Mais toute l'autre partie, c'est une réorientation de
carrière. Donc, il y a eu un problème fondamental quand même, juste dans la
tâche qui est fait aussi. Puis, quand on va voir notre monde sur le terrain,
bien, ils disent : On ne se sent pas reconnus, on est débordés. Puis on ne
l'a pas abordé de front, mais, par exemple, pour nos plateaux techniques, les
services achetés, c'est ça, le grand fléau. Nos gens se retrouvent à
dire : Bien, l'autre côté, ma collègue fait de l'écographie puis elle n'a
pas la pression que je vis, elle n'a pas... elle a de la reconnaissance, elle a
un horaire de travail qui lui convient et elle est payée trois fois plus cher.
Donc, c'est sûr et certain que les gens vont aller vers ce type de pratique là
professionnelle.
M. Dubé : O.K. Donc, mais... O.K.,
mais... Parce que, là, vous soulevez plusieurs points, puis c'est pour ça... On
est ici pour ça, là, pour vous écouter...
M. Dubé : ...Vous dites,
votre moyenne d'âge est 33 ou...
Mme Charbonneau (Émilie) : 35.
M. Dubé : 35 ans. Ce
n'est quand même pas vieux, mais par contre c'est une moyenne. Mais êtes-vous
capable de voir... Je veux juste me concentrer sur la première question,
êtes-vous capable de voir que vos gens viennent chercher de l'expérience chez
nous, puis, après quelques années... parce que c'est ça que j'entends, plus du côté
des infirmières, je le vois beaucoup, il y a une espèce de plafond de verre
avec... Je ne veux pas d'âgisme, là, mais il y a un plafond de verre avec des
gens plus âgés parce qu'il y a plus de protection, l'ancienneté, et cetera.
Mais, vous, le voyez-vous aussi sur la question des jeunes? Ou c'est... vous
n'avez pas fait encore cette analyse-là?
Mme Charbonneau (Émilie) : On
n'a pas ventilé les chiffres en ce sens-là. Mais est-ce que les gens viennent
dans le réseau chercher de l'expérience pour repartir? Je vous dirais, c'est le
contraire, ils sont découragés de leur expérience, ils manquent de formation,
puis ils se redirigent vers des endroits où est-ce qu'ils sont capables d'avoir
de la formation puis exercer leur profession en toute cohérence avec leur code
de déontologie.
M. Dubé : O.K. Deuxième
point, quand vous dites qu'ils font trois fois leur salaire, on va pouvoir en
reparler cet après-midi, là, parce qu'on va avoir le représentant de
l'association, là, trois fois leur salaire, votre... selon la convention
collective, là, je n'ai pas les chiffres devant moi, mais le technicien, entre
le début puis... La fourchette, c'est quoi? Technicien sur... En imagerie
médicale, c'est combien, le taux horaire?
Mme Charbonneau (Émilie) : En
fait, c'est le coût facturé.
M. Dubé : Oui.
Mme Charbonneau (Émilie) : Donc,
je ne suis pas dans le taux horaire. Tu sais, Justement...
M. Dubé : Ah Non. Ah oui, OK,
là, vous parlez du coût facturé qui est trois fois le... Ah oui. O.K. Mais
c'est... Oui, je ne veux pas rentrer, là... mais je veux juste que les
Québécois comprennent, parce que, quand vous dites «trois fois», c'est... c'est
beaucoup, là. C'est qu'admettons quelqu'un que vous payez, je ne sais pas, je
vais dire 28 $ de l'heure, mettons, pour fins de discussion, la personne
qui s'en va dans... admettons, cette personne-là, elle a 28 $ de l'heure
dans le public, s'en irait dans le privé et, elle, on la payerait peut-être un
peu plus cher, mais pas trois fois 28, qu'on se comprenne bien. Elle va
peut-être être facturée, on se comprend bien, elle va peut-être être facturée à
trois fois ce taux-là, mais c'est l'agence qui garde le profit.
Mme Charbonneau (Émilie) : Tout
à fait.
M. Dubé : O.K. Je voulais
juste que...
Mme Charbonneau (Émilie) : Oui.
M. Dubé : Parce
qu'habituellement, en tout cas, on pourra en reparler, mais, habituellement,
l'agence, puis vous le voyez, là, l'agence va facturer, des fois, 100, 150,
même 200 %, ça, c'est comme une fois et demie, deux... Vous vous demandez
si c'est exagéré, oui, c'est exagéré. Mais là, je voulais comprendre votre
«trois fois», là. Parce que, oui, on a des agences qui ont chargé jusqu'à
400 $ de l'heure, mais ce n'est pas la... C'est épouvantable, là, ça.
C'est... c'est presque criminel, ça.
Mme Charbonneau (Émilie) : Mais
de là l'importance, puis je reviens un petit peu aux jases qu'on a eues au
début, de là l'importance d'auditer, par exemple, pour les contrats en services
achetés. On ne sait pas tout ce qu'il comprend, mais on sait qu'il y a une
explosion des coûts. Donc, comment ces contrats-là sont construits? On sait que
des grands bouts de nos listes d'attente sont transférés au privé. Mais,
lorsqu'on demande d'avoir accès à ces contrats-là, pour savoir ce qu'il
contient, notamment, le taux horaire des services qui sont achetés, bien, on
n'y a pas accès. De là l'idée d'avoir une transparence au niveau de la
comptabilité puis des services qui sont achetés. On sait, il y a un grand pan
qu'on vient de découvrir, celui des agences, sur les services qui nous coûtent.
C'est épouvantable.
M. Dubé : Oui.
Mme Charbonneau (Émilie) : L'autre
bout de notre angle mort, qu'on doit absolument s'occuper, c'est celui des
services achetés, puis non seulement, des contrats de ces services achetés là.
M. Dubé : Je comprends, je
comprends.
Le Président (M. Provençal)
:Vous venez de... vous avez levé un
nouveau drapeau par rapport à ce qu'on aura à faire comme travail, ce que M. le
ministre aura à faire. Mais maintenant, je vais céder la parole au... Hein?
Une voix : ...
Le Président (M. Provençal)
:Oui. Je passe la parole au député de
Pontiac.
M. Fortin :Merci, M. le Président. Bonjour, bonjour à vous quatre.
Merci, merci d'être là puis de nous partager certains de vos constats, de votre
expertise puis de votre expérience, là, c'est grandement apprécié et grandement
utile dans l'étude du projet de loi qu'on a devant nous.
Je vais commencer. Peut-être juste une
remarque, là. M. le ministre nous dit : Charger 400 $, c'est presque
criminel, là, payer 400 $, ce n'est pas bien, bien mieux, là. Un contrat,
ça... Ça marche des deux bords aussi.
• (12 h 10) •
Une voix : ...
M. Fortin :N'empêche, il y a quelqu'un qui a accepté de payer
400 $ de l'heure pour ça, alors il y a de l'imputabilité à y avoir,
disons.
Le Président (M. Provençal)
:On a un échange, par contre, avec les
gens, s'il vous plaît.
M. Fortin :Moi, j'essaie de comprendre la différence entre l'annexe I
puis la... Bien, en fait, je la comprends, la différence entre l'annexe I puis
l'annexe deux, là. Mais pourquoi vous essayez de... Vous nous présentez la...
Dans l'annexe deux, l'évolution des dépenses en main-d'oeuvre indépendante pour
la catégorie quatre. Ce que vous essayez de démontrer, c'est que vous êtes une
grande partie, j'imagine, des dépenses totales en main-d'oeuvre indépendante.
C'est ça?
M. Plourde (Guillaume) : Si
je peux me permettre, à vrai dire, c'est un peu le contraire. La catégorie
quatre est probablement la catégorie qui est le moins affectée des quatre
catégories par la main-d'oeuvre indépendante. Par contre, ce qu'on essaie
d'illustrer par ce fait même là, quand...
M. Plourde (Guillaume) : ...vous
me parlez, là, spécifiquement, là, de la MOI en catégorie 4, à l'annexe 1, on
le compare uniquement aussi aux services achetés sur les plateaux techniques.
Pourquoi les plateaux techniques? Parce que c'est les comptes les plus
facilement identifiables pour nous au niveau des S4 71. À partir de delà, quand
on prend juste les plateaux techniques, on se rend compte que là on dépasse
de... grandement les sommes en MOI en catégorie 4, d'où l'importance de
s'attaquer au problème des services achetés, il y en a un.
M. Fortin :O.K.
M. Plourde (Guillaume) : À
partir de delà, ce qu'on essaie de faire dans l'autre annexe, c'est de vous
dire : C'est bien beau, toute la MOI, là, en termes généraux, en termes
macros. Mais, effectivement, vous manquez, là, d'un autre angle mort, les
services achetés pour l'ensemble du réseau. Il y a quelque chose à faire là.
C'est ça qu'on est en train de dire avec la démonstration de ces annexes-là.
M. Fortin :O.K. Dans le fond, vous démontrez que les services achetés,
c'est un immense chiffre, là, en comparaison avec tout le reste? O.K.
M. Plourde (Guillaume) : Bien,
si vous voulez des chiffres, plus précisément, l'ensemble de la MOI, là, tous
centres d'activité, là, confondus, avec les calculs qu'on donne selon les AS
471, là, on arrive, là, à peu près à 1,2 milliard pour la MOI totale dans le
MSSS. Quand on arrive puis on fait le même exercice pour les services achetés,
on arrive à 3,5 milliards.
M. Fortin :O.K. Mais ça, c'est votre recommandation numéro.... je l'ai
vue en quelque part, là, sur les services achetés, là, numéro 6 : «Qu'un
article indiquant clairement l'intention du ministère de poursuivre une
diminution des dépenses en services achetés à court ou moyen terme soit intégré
au p.l. no 10.» Mais je lis votre recommandation, puis elle est très... elle
est très peu contraignante, disons, c'est de demander une espèce de... Tu sais,
vous voulez que le gouvernement déclare une intention. Est-ce que vous ne
pensez pas que ça a besoin d'être un petit peu plus contraignant puis de
vraiment faire partie d'une interdiction éventuelle? Je vous demande votre
point de vue, là. Je n'essaie pas de le débattre, j'essaie juste de le
comprendre.
Mme Charbonneau (Émilie) : Bien,
en fait, c'est sûr et certain qu'on s'en va vers... Le but de notre... nous,
c'est qu'il n'y en ait plus, de privé. Donc, notre but, ce n'est pas de le
contrôler, c'est de le retirer. Puis il faut lire la recommandation 6 en vertu
de la recommandation 1 puis des recommandations qui sont au préalable. On
demande quand même, dans le fond, d'avoir accès au règlement, qu'il soit
intégré au projet de loi pour qu'on puisse en débattre.
M. Fortin :Oui.
Mme Charbonneau (Émilie) : Donc,
à partir de ce moment-là, nous, on dit : Si, en plus, on adjoint la
question des services achetés, bien, on va pouvoir débattre des vraies choses
si on est capables de débattre du règlement. Par la suite, les services
achetés, on dit : On veut mettre des mesures de contrôle autour de ces
services achetés là qui sont celles de la Vérificatrice générale afin de
pouvoir vérifier : Est-ce qu'on fait bien les choses? Est-ce qu'on est
capables de suivre qu'est-ce qu'on s'est donné comme projet? Puis par la suite
on se dit : En plus de ça, donnons-nous des audits aux trois ans pour être
sûrs et certains que qu'est-ce qu'on s'est donné comme projet de société, bien,
on s'assure d'être capables de le maintenir dans le temps.
Donc, la recommandation 6, elle est vague,
mais elle est quand même encadrée par nos intentions, qui sont couvertes par
l'ensemble des autres recommandations. C'est incarné, là.
M. Fortin :O.K. Mais je suis d'accord avec vous sur les... Quand vous
dites... parlez des premières recommandations, là, on dit : O.K. Bien, ça
devrait être... On devrait pouvoir en débattre, de ce qui est la structure du
projet de loi, comme appelait ça... comme M. le ministre appelait ça tantôt,
là. Effectivement, là, là, ça demeure un projet de loi qui est très, très, très
flou, disons, où on sait que le ministre se donne des pouvoirs, mais on ne sait
pas lesquels, comment, de quelle façon, ça va être quoi, les taux maximums,
etc. Donc, je suis d'accord avec vous là-dessus.
Le message que... Je reviens aux services
achetés. Par exemple, le message que vous nous envoyez quand vous nous
dites : Par exemple en imagerie médicale, il y a une grande partie de nos
membres qui considèrent dans les prochaines années quitter le réseau, d'autres
qui... et une partie de ceux-là importante qui considère aller vers le privé,
c'est que ces colonnes oranges là, elles vont continuer d'augmenter, hein?
Donc, si vous ne faites rien. M. le ministre, commission de la santé, peu
importe, vous allez avoir un problème encore plus grave que celui que vous êtes
en train de régler?
Mme Charbonneau (Émilie) : On
dit : Il ne faut pas l'oublier.
M. Fortin :O.K.
Mme Charbonneau (Émilie) : Puis,
dans tout ça, il y a toute la mixité de la pratique aussi. La perméabilité de
la pratique des médecins engendre la possibilité aux services achetés
d'exister. Si la perméabilité... Par exemple, on va dire : les médecins
radiologistes ont une clinique en face d'un hôpital. Bien, dans la même
journée, ils peuvent s'en aller de l'hôpital à la clinique privée sans aucun
problème. Donc, ce type de fonctionnement là encourage les services achetés et
la création de cliniques qui viennent se substituer aux services publics.
M. Comeau (Robert) : La
particularité de la catégorie 4, je vous dirais, c'est... Nous, ça... On ne
peut pas avoir des...
M. Comeau (Robert) : ...on a
des listes d'attente, en fait. En catégorie 1, elle doit vraiment gérer au
jour le jour les urgences. On ne peut pas accepter des bris de service. Chez
nous, c'est des listes d'attente qui s'allongent. La solution qui a été trouvée
pour donner le service, c'est de donner des parties de listes d'attente au
secteur privé. Et c'est là, c'est là que ça fait augmenter les coûts, et nos
gens voient ça aller, bien, ils ont le goût d'aller plus à l'endroit où c'est
plus... un petit peu plus payant, moins stressant, puis qu'il y a un peu plus
de reconnaissance. Bien, il y a ça aussi, là. Ce n'est pas attrayant, là, le...
M. Fortin :Est-ce que les coûts sont encore plus... De façon générale,
là, est-ce que les coûts sont encore plus disproportionnés dans la
catégorie 4 que dans la catégorie 1, vous pensez? Ou vous n'avez
pas de preuve de ça ou de...
M. Plourde (Guillaume) : On a
une intuition que oui, mais effectivement...
M. Fortin :Pourquoi?
M. Plourde (Guillaume) : Bien,
parce que des urgences privées, à date, il n'y en a pas, ça fait
qu'effectivement, là, ça se fait plutôt... le cadre du travail infirmier en
urgence va se faire plus au public puis, dans les risques liés à AS-471, bien,
on ne représente pas les infirmières, là, ça fait que, déjà là, on a... C'est
un peu flou, des fois, les AS-471, là. Il y a comme une ventilation de plus
qu'on pourrait même aller chercher, là, avec des audits, là, selon nous, là, à
travers les comptes pour savoir exactement quel type d'emploi a été engagé, là,
en service acheté, main-d'oeuvre indépendante ou dans quel centre d'activité,
là, parce que c'est le seul outil qu'on a. Puis ce qu'on est capable de voir
puis capable d'identifier pour notre catégorie à nous, c'est les chiffres que
vous voyez là, là.
M. Fortin :O.K. Et...
M. Schepper (Bertrand) : ...j'ajouterai
aussi que votre jeu va être le même, même si... Une fois que les agences ne
seront plus parties du paysage, les gens en agence vont probablement aller
chercher un endroit où travailler, ils pourraient très bien aller travailler
dans des cliniques ou à des services achetés. Et donc, à ce compte-là, ça ne
veut pas nécessairement dire que fermer les agences va nécessairement enlever,
entre guillemets, privées, du système... comme employeur.
M. Fortin :Mais, à l'intérieur de la catégorie 4, j'imagine, il y
a des professions où c'est... D'avoir recours à une agence, c'est peut-être
plus difficile pour certains des patients, certains de la clientèle qui doivent
être suivis de façon régulière, là, que, par exemple, une infirmière d'urgence
qui voit des patients différents à tous les jours. Est-ce qu'il y a, à
l'intérieur de la catégorie 4... et je pense, vous avez mentionné
travailleurs sociaux tantôt, mais est-ce qu'il y en a d'autres qui vous
inquiètent particulièrement au niveau du service aux patients qui ne peut pas
avoir ce suivi régulier du même intervenant de façon régulière et pour lequel
le recours à la main-d'oeuvre indépendante fait en sorte que c'est impossible
pour le patient d'avoir ce service régulier là?
Mme Charbonneau (Émilie) : Bien,
tu sais, nous on a nommé les travailleurs sociaux, mais toute la grande famille
des professionnels en santé mentale, les techniciennes, les professionnels en
santé mentale, travailleurs sociaux, psychologues, techniciens en travail
social, psychoéducateurs, ergothérapeutes, techniciens en éducation
spécialisée. Donc, on a un ensemble de familles. Puis là c'est sûr que, quand
on se met à énumérer, on va se dire : On va-tu en oublier un? Je vous
dirais, la grande famille de nos professionnels et techniciennes en santé
mentale sont touchés par cet enjeu là de continuité de soins.
M. Fortin :Et je vous en nomme un, vous ne l'avez pas nommé... bien,
vous l'avez nommé à travers d'autres professions, mais de façon directe, là,
les intervenants de la DPJ. Pour moi, c'est exactement le type d'emploi, là, où
je ne peux pas croire qu'une famille, qu'un enfant va avoir différents
intervenants à chaque fois parce qu'on fait affaire avec de la main-d'oeuvre
indépendante. Est-ce que c'est un secteur où vous voyez de plus en plus de
main-d'oeuvre indépendante dans...
Mme Charbonneau (Émilie) : Oui,
c'est un de nos secteurs, effectivement, où on a de plus en plus recours à la
main-d'oeuvre indépendante. Puis, là-dedans, c'est tous nos éducateurs
spécialisés. Il y a des types d'emplois qui sont transversaux, qui travaillent
en plus qu'une mission. On a nos travailleurs sociaux, nos criminologues, nos agents
en relations humaines. De plus en plus, oui. Justement, on ne peut pas avoir de
bris de service quand il est question de nos enfants.
• (16 h 20) •
M. Fortin :Oui. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Alors, ça sera
maintenant la parole au député de Rosemont.
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Pouvez-vous me rappeler le temps? Parce qu'on a changé...
Le Président (M. Provençal)
:3 min 18 s.
M. Marissal : Merci. 3 min 18
s. Merci, merci d'être là. Je fais court dans les salutations pour garder du
temps pour les questions. Ce qu'on fait ici, là, c'est un une pièce du gros
casse-tête, là. Dans l'ensemble, il y en a d'autres, pièces, là. On nous a par
exemple annoncé un projet de loi très bientôt, là, sur agence santé Québec,
appelons ça comme ça pour faire court, pour ne pas perdre de temps. Est-ce
qu'on peut imaginer ou est-ce que vous, vous pouvez imaginer que la gestion du
recours au MOI pourrait éventuellement passer sous, justement, cette agence
santé Québec, puisqu'elle s'occuperait de l'opérationnalité de la chose?
Mme Charbonneau (Émilie) : En
fait, c'est exactement l'analyse qu'on en fait, de penser que... c'est pour ça,
justement, que la réglementation n'est pas claire à l'article 1, que ça va
être une prérogative de la prochaine agence...
Mme Charbonneau (Émilie) : ...Qui,
dans le fond, va tout légiférer l'efficacité, donc un transfert de... de ces
pouvoirs-là. Oui.
M. Marissal : Mais le
ministre, puis je ne veux pas le mal citer, là, lui mettre des mots dans la
bouche, là, je vais essayer de faire ça correctement, là, mais, tu sais, il
dit : le gouvernement donne les orientations puis, la gestion quotidienne,
là, ce qu'on pourrait appeler la cuisine, là, sans vilain jeu de mots puis sans
vouloir être péjoratif, c'est l'agence qui va faire ça, donc toutes les
opérations. Ça serait dans... Je ne dis pas que je suis d'accord, là, loin de
là, là, mais ça serait assez logique, donc, de détacher la gestion de la MOI
puis de donner ça à l'Agence Santé Québec puis de dire : Gère-moi ça. Mais
quelles sont les craintes, à ce moment-là, que vous avez par rapport à ça?
Mme Charbonneau (Émilie) : Dans
quel cadre législatif ça va se faire, quelle sera l'imputabilité, quelle sera
la transparence. Cette agence-là, elle va exister comment? Dans quel cadre?
C'est toutes ces questions-là. Puis tant qu'on n'aura pas le projet de loi, tu
sais, qui va venir encadrer cette agence publique là, tout est sur... tout est
sur la table, là. Mais, s'il y a une déconnexion fonctionnelle et politique,
bien, ça va être quoi, les recours au niveau du fonctionnel?
M. Marissal : O.K., donc vous
avez un problème d'imputabilité, c'est votre... votre principale crainte, elle
est quant à l'imputabilité d'une...
Mme Charbonneau (Émilie) : La
transparence aussi. Puis, ça va être quoi, les recours par la suite, comment ça
va... Comment ça va fonctionner.
M. Marissal : O.K. Je vous
amène rapidement sur un autre sujet, la PMO, pour la planification de la
main-d'œuvre. C'est assez technique, là, ça intéresse assez peu les gens dans
les chaumières quand on parle de ça, là, pourtant, c'est assez fondamental.
Puis vous dites qu'on n'en a pas fait. Je crois que la dernière remonte à 2001,
ça fait 22, 23...
M. Comeau (Robert) : Ça
dépend des Secteurs.
M. Marissal : Qu'est-ce que...
qu'est-ce que vous cherchez par là? Est-ce qu'on peut faire... Combien de temps
ça prend, faire ça? Puis pourquoi vous dites qu'on navigue à l'aveugle? Parce
que, je présume que, depuis 20 ans, si on n'en a pas fait, certains
pourraient dire : Bien, c'est parce qu'on n'en a pas besoin, là.
M. Comeau (Robert) : il y a
eu la pandémie quand même. Avant la pandémie, je vous dirais qu'on était
contributifs à l'exercice de planification de main-d'oeuvre où on était
invités, les organisations syndicales, à venir donner notre point de vue, à
amener des nouvelles réalités avec d'autres organisations, les ordres
professionnels. Et c'est depuis la pandémie qu'il n'y a plus de ces
rencontres-là. On ne dit pas qu'il n'y a pas d'exercice qui a été fait, mais on
n'a pas contribué à un exercice, s'il y en a un, puis on n'est pas... On n'a
pas les résultats fins de ça, là, on n'a pas les détails, donc.
M. Marissal : O.K., mais,
vous, vous contribuez quand même...
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Je m'excuse, M. le
député de Rosemont.
M. Marissal : C'est bon.
Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, c'est au député des
Îles-de-la-Madeleine de conclure cet échange.
M. Arseneau : Merci, M. le
Président. Alors, je vous remercie d'être là. Je vous... je salue le mémoire et
l'efficacité, là, la précision des éléments que vous y avez glissés.
On est exactement au même endroit, là,
quand il est question de la gouvernance, du déficit démocratique. Quand vous
parlez des craintes que l'exceptionnel ne devienne banal, en fait, c'est déjà
le cas. C'est comme ça qu'on en est arrivés là, là, j'imagine, parce qu'on
n'avait pas souhaité au départ, j'espère, dépasser... dépenser plus de
1 milliard de dollars en main-d'oeuvre indépendante. Et pourtant, on y est
parce, bien, évidemment, la pente était glissante. La question des conflits
d'intérêts aussi, et tout.
Une petite question sur la différence
entre les grands centres et les régions. Vous parlez, notamment, de grands
travaux qui devront être menés par le ministère. Vous voyez quoi, pour
s'assurer, justement, qu'on atteigne l'objectif, d'ici deux ou trois ans, de
pouvoir combler, là, ces pénuries de main-d'oeuvre autrement que par la
main-d'oeuvre indépendante dans les régions comme la Basse-Côte-Nord,
l'Abitibi, la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine, de façon succincte?
Mme Charbonneau (Émilie) : Vous
pourrez compléter par la suite.
En fait, qu'est-ce qu'on mentionne, c'est
qu'à l'heure actuelle nos régions éloignées sont structurellement dépendantes
des agences et des services achetés. Ce qu'on constate, c'est le phénomène
«fly-in/fly-out». Donc, c'est des travailleuses, des travailleurs qui viennent
simplement pour ça, mais qui n'incarnent pas l'occupation du territoire.
Donc...
M. Arseneau : Donc, on a
besoin de leur offrir des maisons, des conditions de travail, des primes?
Mme Charbonneau (Émilie) : Bien,
un peu de tout ça. Mais je pense qu'on doit s'asseoir puis y réfléchir, à
qu'est-ce qu'on a envie de faire pour l'occupation de nos territoires puis pour
la pérennité des services et des populations qui sont sur place. Puis, pour ça,
je pense qu'une des façons qui serait intéressante, justement, on l'a
mentionné, puis il y a d'autres acteurs qui l'ont mentionné, celui du plan,
hein? C'est quoi, le plan qu'on va mettre en place pour nos travailleuses, nos
travailleurs, mais aussi pour les résidents et les résidentes de ces
régions-là?
M. Arseneau : Absolument.
J'ai peu de temps, puis j'ai une question. En fait, le... Pour moi, ce qui est
l'essentiel de votre mémoire, c'est le fait que vous nous permettez d'avoir un
regard plus large sur le... la pente glissante qu'on a déjà amorcée vers le
privé, tous azimuts, non seulement pour la main-d'œuvre indépendante, mais, en
fait, que la main-d'œuvre indépendante se déplace pour aller dans nos hôpitaux
publics, dans nos centres de soins publics, ou qu'on déplace les patients vers
des cliniques privées. Essentiellement, on a exactement le même problème. C'est
ce que je comprends, là. Quand vous parlez des services achetés, en fait,
c'est...
M. Arseneau : ...juste le
personnel qui n'est pas au même endroit, mais c'est une fuite de capitaux du
public vers le privé qui déstructure complètement notre système et qui fait en
sorte qu'on court à notre perte avec ça. C'est... Est-ce que je vous ai bien
saisi?
Mme Charbonneau (Émilie) : Tout
à fait, que ce soit les GMF, que ce soit les hôpitaux privés, c'est une
collectivisation des risques pour une capitalisation des profits.
M. Arseneau : Et là vous nous
dites aussi que ce n'est pas 1,2 milliard, mais c'est... On doit rajouter
3,5 milliards. C'est quand même... C'est comme si le projet de loi ne
touchait pas le bon objectif, si on veut parler de finances publiques, mais en
tout cas, et de système public, en fait.
Mme Charbonneau (Émilie) : Oui,
c'est ça, en service acheté, 3,5. Ce qu'on mentionne, c'est que, si on veut
atteindre l'objectif philosophique qui est nommé dans le projet de loi, on doit
absolument s'attaquer aussi aux services achetés.
M. Arseneau : Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
:Merci. Merci beaucoup de votre
contribution à nos travaux.
Je suspends ces travaux jusqu'aux avis
touchant les travaux des commissions vers 15 h 15. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 27)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 20)
Le Président (M. Provençal)
:À l'ordre, s'il vous plaît! La
Commission de la santé et des services sociaux reprend ses travaux. Je demande
à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs appareils électroniques.
Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi numéro 10, loi
limitant le recours aux services d'une agence de placement de personnel et à de
la main-d'oeuvre indépendante dans le secteur de la santé et des services
sociaux.
Cet après-midi, nous entendrons les
témoins suivants : l'Association des ressources intermédiaires d'hébergement
du Québec, le Regroupement québécois des résidences pour aînés, l'Association
des entreprises privées de personnels soignants du Québec et la Confédération
des syndicats nationaux.
Je souhaite maintenant la bienvenue à l'Association
des ressources intermédiaires d'hébergement du Québec. Je vous rappelle...
Le Président (M. Provençal)
:...que vous avez 10 minutes pour
faire votre exposé. Par la suite, il y aura échange avec les membres de la
commission. Je vous invite à vous présenter et à réaliser votre exposé. Merci.
M. Bourgoin (Luc) : Merci.
Alors, M. le Président, M. le ministre, chers membres de la Commission, avant
toute chose, l'Association des ressources intermédiaires d'hébergement du
Québec, que je vais appeler l'ARIHQ, souhaite remercier les membres de la
Commission pour cette invitation à venir témoigner dans le cadre de la
commission parlementaire qui porte sur le projet de loi numéro 10.
Mon nom est Luc Bourgouin. Je suis
économiste de formation et je suis également directeur général de l'ARIHQ
depuis quelques mois et, auparavant, j'étais directeur général de l'Association
de la construction du Québec, pour laquelle j'ai oeuvré pendant une vingtaine
d'années. Et je suis également accompagné de mon collègue Carl Veilleux, qui
est président du conseil d'administration de l'ARIHQ, que je vais laisser le
soin de se présenter à l'instant.
M. Veilleux (Carl) : Oui.
Bonjour. Donc, Carl Veilleux. Je suis membre du conseil d'administration de
l'ARIHQ depuis plus de huit ans, que... Et je le préside depuis 2021. Je suis
également le directeur général de Société Emmanuel-Grégoire, qui est un
organisme à but non lucratif situé dans l'est de Montréal qui, depuis plus de
40 ans, poursuit sa mission d'aider les personnes avec des difficultés
d'adaptation sociale puis qui gèrent, à travers ses programmes, une ressource
intermédiaire pour personnes âgées en perte d'autonomie de 52 lits, située
dans Montréal-Est.
M. Bourgoin (Luc) : Écoutez,
dans un premier temps, je vais vous présenter le rôle de l'ARIHQ, hein, et
brosser un portrait des ressources intermédiaires. C'est une présentation qui
va vous permettre de bien comprendre le contexte particulier dans lequel
s'inscrivent nos propos. Dans un deuxième temps, on va vous présenter certaines
recommandations de notre mémoire afin d'alimenter la période d'échange qui
suivrait notre presse de présentation.
Les ressources intermédiaires sont des
milieux d'hébergement de longue durée qui visent au maintien et à l'intégration
de la communauté d'usagers qui sont inscrits au service d'un établissement
public, un CISSS ou un CIUSSS, en leur procurant un milieu de vie adapté à
leurs besoins et en leur dispensant les services de soutien ou d'assistance
requis par leurs conditions. Les ressources intermédiaires accueillent des
usagers dans différents programmes-services, les principaux étant le soutien à
l'autonomie, la personne âgée, la déficience physique, la déficience intellectuelle,
la santé mentale, le trouble du spectre de l'autisme et les problèmes de
toxicomanie.
À ce titre, l'ARIHQ est un organisme à but
non lucratif fondé en 1992 qui a pour mandat de rassembler, représenter et
soutenir les ressources intermédiaires dans l'accomplissement de leur mission.
Pour ce faire, l'ARIHQ a été reconnue par le ministère de la Santé et des
Services sociaux comme organisme représentatif de l'ensemble des
1200 ressources intermédiaires d'hébergement du Québec destinées à des
adultes, qui offrent des services à plus de 18 550 vulnérables à travers toutes
les régions du Québec. La plupart de ces conditions font l'objet d'une entente
nationale négociée tous les cinq ans entre l'ARIHQ le ministère de la Santé et
des Services sociaux, dont la version actuelle a été signée par les parties le
16 juillet 2021 et est en vigueur jusqu'au 31 mars 2025.
Alors, au moment de la signature de
l'entente, personne n'était en mesure de prédire l'ampleur des défis auxquels
le réseau de la santé ferait maintenant face en raison de la pénurie de
main-d'œuvre. C'est dans ce contexte et considérant la nécessité de mettre en
place des mesures particulières pour soutenir les ressources intermédiaires que
l'ARIHQ s'adresse aujourd'hui à la Commission de la santé et des services
sociaux.
L'ARIHQ tient d'abord à saluer le ministre
dans sa décision de déposer le projet de loi 10 et évidemment, le
leadership aussi qu'il a démontré pour limiter graduellement le recours aux
services d'une agence de placement de personnel et de la main-d'oeuvre
indépendante dans le secteur de la santé et des services sociaux. Il s'agissait
d'ailleurs d'une des recommandations du mémoire prébudgétaire qu'on a déposé
récemment.
En raison de la pénurie de main-d'œuvre
qui frappe tout le réseau de la santé, les ressources intermédiaires ont de la
difficulté à recruter et à retenir du personnel qualifié dans leurs
installations. Beaucoup d'entre elles sont alors contraintes de faire appel à
de la main-d'oeuvre indépendante pour éviter de se trouver en situation de bris
de services envers leurs résidents. Alors que certaines ressources
intermédiaires ont recours à de la main-d'oeuvre indépendante de manière
sporadique, par exemple, pour remplacer un employé absent pour cause de maladie,
d'autres dépendent carrément des agences de placement de personnel pour combler
des quarts de travail réguliers et offrir des services de soutien et
d'assistance de base à leurs résidents. Considérant les coûts élevés que
représente la réutilisation, et les défis de coordination importants que cela
implique pour les gestionnaires, il s'agit d'un véritable... une véritable
menace...
M. Bourgoin (Luc) : ...la
viabilité et au développement des ressources intermédiaires.
On tient donc à préciser que le recours à
la main-d'œuvre indépendante et aux agences de placement de personnel est un
symptôme de la pénurie de main-d'œuvre. Une solution qui viserait uniquement à
limiter leur utilisation par des acteurs du milieu de la santé sans s'attaquer
aux véritables causes du manque de personnel qualifié dans l'ensemble du réseau
et des régions du Québec risque de rater sa cible. Parallèlement à
l'application du projet de loi n° 10, il est donc impératif que les
mesures soient mises en place pour accompagner les ressources intermédiaires
afin de réussir cette transition.
Les principales tâches des employés en
ressource intermédiaire consistent à offrir des services de soutien et
d'assistance à leurs résidents. Cela comprend des services communs comme
l'alimentation, l'hygiène personnelle, l'organisation d'activités et autres
services particuliers en fonction des besoins propres à chaque résident. À
l'heure actuelle, aucune orientation ministérielle ne précise un type d'emploi
particulier pour dispenser des services de soutien et d'assistance au sein
d'une ressource intermédiaire.
Lorsqu'on parle de pénurie de main-d'œuvre
et de nécessité de recourir à une agence de personnel en ressource
intermédiaire, les fonctions à combler sont généralement celles de préposés aux
bénéficiaires ou d'auxiliaires aux services de santé et sociaux.
L'une des principales causes du manque de
personnel dans les ressources intermédiaires relève de la dépendance aux
agences de placement et elle découle de l'écart salarial entre les ressources
intermédiaires et le réseau public. Lors de la dernière entente nationale, une
mesure d'atténuation de l'écart salarial a été mise en place justement pour
réduire cet écart, mais celui-ci s'est creusé de nouveau depuis.
Selon des données récentes recueillies par
l'ARIHQ auprès de certains membres, il existe un écart toujours grandissant de
près de 4 $ l'heure entre le salaire moyen des employés de ressource
intermédiaire et le salaire des préposés aux bénéficiaires qui travaillent dans
le réseau public. Et là je m'abstiens de parler des autres avantages tels que
les assurances collectives, le régime de retraite du gouvernement et les autres
avantages consentis par le secteur public.
Difficile de recruter et retenir du
personnel dans ces conditions, d'où notre recommandation 1 qui consiste à
bonifier la mesure d'atténuation de l'écart salarial.
Actuellement, la compétition entre les
secteurs public et privé pour embaucher de la main-d'oeuvre qualifiée est une
menace à la qualité des services aux résidents, et ça entraîne une migration du
personnel d'un milieu à l'autre et ça accentue les difficultés de recrutement
pour tout le monde. Une politique salariale harmonisée sur l'équité et le
principe à travail égal, salaire égal doit être urgemment déployée à travers
les différents milieux d'hébergement. C'est pour cette raison que notre
recommandation 3 vise à mettre sur pied un comité afin d'harmoniser les
conditions de travail du personnel préposés aux bénéficiaires dans tous les
réseaux.
Comme dans tous les milieux d'hébergement
de longue durée, le recours nécessaire à la main-d'oeuvre indépendante est de
plus en plus important dans le contexte de pénurie de main-d'œuvre. Dans
certaines ressources intermédiaires, les employés d'agences peuvent représenter
jusqu'à 40 % de la main-d'œuvre. Considérant que le taux horaire moyen de
la main-d'œuvre est presque trois fois plus élevé que le salaire régulier d'un
employé à ressource intermédiaire, c'est une situation qui est plus
qu'alarmante. Non seulement ce n'est pas viable économiquement, mais la qualité
des services aux usagers n'est pas la même, considérant que la formation des
employés d'agences est souvent incertaine et qu'ils ne connaissent pas les
milieux de vie dans lesquels ils sont envoyés.
• (15 h 30) •
Et, contrairement aux autres milieux
d'hébergement de longue durée, les ressources intermédiaires n'ont reçu aucune
aide gouvernementale pour faire face à la pénurie de main-d'œuvre, alors
qu'elles sont... qu'elles doivent faire face aux mêmes défis. À défaut d'un
soutien financier pour augmenter les conditions salariales des employés à
ressource intermédiaire et absorber une partie des coûts supplémentaires
découlant de l'utilisation de la main-d'oeuvre indépendante jusqu'à l'entrée en
vigueur des dispositions réglementaires, le réseau des ressources
intermédiaires va tout simplement être incapable de se conformer au projet de
loi n° 10. Par ailleurs, l'ARIHQ s'inquiète à l'idée que c'est des
sanctions pénales...
Le Président (M. Provençal)
: Je vous invite à conclure, s'il vous plaît.
M. Bourgoin (Luc) : Oui. Oui,
j'ai presque terminé. Écoutez, l'ARIHQ s'inquiète à l'idée que des sanctions
pénales soient imposées aux gestionnaires de ressource intermédiaire ayant
recours à la main-d'oeuvre pour maintenir des services de soutien et
d'assistance de base à leurs usagers. Une meilleure définition des
responsabilités...
15 h 30 (version non révisée)
M. Bourgoin (Luc) : ...et des
parties, en cas de bris de service, et de la reconstitution d'une banque de
personnel d'urgence par les établissements de santé et de services sociaux nous
semblent des solutions plus adéquates.
Il y a plusieurs autres recommandations
intéressantes qu'on a développées dans notre mémoire, mais je vais m'arrêter
ici pour maximiser notre période d'échange. Et, voilà, on est prêts à recevoir
vos questions.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup pour votre exposé. Je
m'excuse, mais je dois gérer le temps. Alors, M. le ministre, on va débuter
notre période d'échange avec l'Association des ressources intermédiaires d'hébergement
du Québec. À vous la parole.
M. Dubé : Alors, monsieur
Bourgoin, je me demandais où je vous avais vu avant, mais là, je viens de
comprendre, dans votre passé. Merci beaucoup, monsieur Veilleux, d'être là
aussi, c'est très apprécié que vous preniez le temps de...
Puis on a Regardé votre... Votre mémoire.
J'ai repris plusieurs des éléments dont vous avez parlé ce matin lors de mon
introduction, en termes de qualité, de volume, les coûts, puis tout ça, je
pense que je vais laisser mes collègues peut-être poser quelques questions
spécifiques.
On a bien dit, vous l'avez bien dit, que
ça prend des meilleures conditions dans le réseau pour être capables de mieux
compétitionner le... Ça fait que, ça, je pense, là-dessus, on s'entend aussi.
Puis votre message est très clair.
Des mesures d'atténuation, on en a déjà.
Puis je vous entends dire qu'elles ne sont pas suffisantes, ça fait que ce sera
à nous de prendre des décisions là-dessus.
Avant de passer la parole à mes collègues,
je voudrais que vous expliquiez aux Québécois, parce que, souvent, on a un
jargon dans le réseau, là, puis, moi, je le l'ai... Je commence à l'apprendre.
Quand on parle des RI, une ressource intermédiaire, vous avez dit tantôt...
puis je pense que c'est... les... il y a beaucoup de Québécois qui nous
écoutent aujourd'hui qui... expliquez-nous. Vous dites vous avez à peu près
1200 ressources intermédiaires, donc, ça, c'est le nombre d'endroits où
les gens... Mais vous avez dit : à peu près 1800 personnes. Je veux
juste que vous expliquez...
M. Bourgoin (Luc) : 18 500.
M. Dubé : 18 500. Bon, c'est
ça. Excusez-moi.
M. Veilleux (Carl) : Ça, c'est
des usagers qui sont hébergés puis qui reçoivent des services en ressources
intermédiaires.
M. Dubé : Bon, c'est ça, parce
que je voulais... Bon, c'est ça que je voulais expliquer, ou que vous expliquez
aux Québécois, une RI typique, c'est une dizaine de personnes, une quinzaine de
personnes? C'est ça que j'aimerais que les gens comprennent et comment c'est
difficile pour vous, quand vous avez... Vous avez dit quatre ou cinq personnes
qui sont des employés, comment c'est difficile lorsqu'on doit, des fois, avoir
deux ou trois personnes d'agences, c'est... finalement, c'est 75 % du
personnel. Je pense que c'est important que les gens... J'aimerais ça que vous
preniez juste peut-être quelques minutes puis expliquer c'est quoi une RI
typique, qu'est ce que ça fait puis... Parce que c'est un de nos
établissements, une de nos installations dont on a le plus grand nombre dans le
réseau, 1200, c'est beaucoup, là, alors... Puis la clientèle que vous avez.
Juste prendre deux minutes là-dessus. Ce n'est pas connu.
M. Veilleux (Carl) : Oui.
Bien, je vous remercie pour votre question parce qu'effectivement, là, on essaie
de l'expliquer souvent, puis le concept est un peu hermétique. La ressource
intermédiaire, ce qu'il faut comprendre, c'est que, bon, on travaille en
partenariat avec le réseau de la santé. On héberge une clientèle vulnérable,
Luc, tantôt, a fait état, là, des différents types de clientèle qu'on héberge,
donc personnes âgées en est une, il y a la santé mentale, la déficience
intellectuelle, la toxicomanie. Donc, le spectre est assez large.
Après ça, le type de milieu. Il y a des
petits milieux qui vont accueillir huit, neuf usagers, et il y a des plus gros
milieux qui vont en accueillir jusqu'à une centaine, là. Donc, on a tout le
spectre. Je dirais que la moyenne, là, on est peut-être à une trentaine de
places, là, tu sais, par... en ressources intermédiaires. Puis, ce qu'il
faut... ce qu'il faut comprendre, c'est que vraiment, les ressources
intermédiaires sont réparties à... Dans toutes les régions du Québec. L'idée, c'est
d'avoir des milieux d'hébergement qui sont dans les localités où les gens vivent.
Donc, ça... Le réseau des ressources intermédiaires a permis d'offrir ces
services-là. Donc, on est à contrat exclusivement avec l'État, donc par l'entente
nationale.
M. Dubé : Puis parlez-moi du
nombre d'employés, vous avez dit, une RI typique, là.
M. Veilleux (Carl) : Une RI
typique. Bien, en fait, on peut pratiquement y aller avec un employé par usager
hébergé, là, règle du pouce, là, ça ressemble à ça.
M. Dubé : Ça fait que... O.K.,
si vous avez une dizaine...
M. Veilleux (Carl) : La
ressource intermédiaire que j'opère, là, par mon organisme à but non lucratif, on
a 52 résidents, puis c'est autour... le personnel, là, c'est entre 45 et
50 et quelques, là.
M. Dubé : Mais, ça, c'est pour
du 24-sept?
M. Veilleux (Carl) : 24-sept,
365 jours par Année.
M. Dubé : C'est important
parce que quand vous dites que vous avez une cinquantaine d'employés,
admettons, vous devez couvrir le 24 heures avec ces 50 employés-là.
M. Veilleux (Carl) : Absolument.
M. Dubé : Ça fait que pour une
faction normale de 8 h ou de 10 h, peu importe, là, les factions que
vous avez, c'est... c'est les mêmes 50 personnes qui se répartissent sur
trois...
M. Veilleux (Carl) : Bien, effectivement,
quand on vient couvrir tous les quarts de travail, c'est pour ça qu'on arrive à
un nombre d'employés qui est aussi élevé. Mais il n'y a pas 50 personnes à
un moment donné dans la ressource, là.
M. Dubé : Oui. Mais, en même
temps, sur une faction, quand il vous manque quelqu'un, c'est important, c'est
sur une faction où il y a peut-être, je ne sais pas, une dizaine de personnes
qui sont là, puis vous avez deux, trois, des fois, quatre personnes qui
viennent combler, qui viennent d'agences. C'est ça?
M. Veilleux (Carl) : Exactement.
Bien, en fait, là, dans... dans le cas de la Main-d'œuvre indépendante. Ce qu'il
faut comprendre, comment on l'expliquait tantôt, c'est, dépendamment de la
grosseur du milieu, soit qu'une ressource de 100 lits, par exemple, il
manque un employé, bon, en tout et partout, il y a toujours moyen, là, avec les
autres employés...
M. Dubé : ...les plus
petites...
M. Veilleux (Carl) : ...les
plus petites, c'est... Imaginez une ressource qui a neuf usagers. Vous
comprendrez qu'à tout moment il peut y avoir une fois deux personnes, une
personne qui est sur place...
M. Dubé : Non, c'est ça. O.K.
M. Veilleux (Carl) : ...s'il
manque une personne sur deux, c'est 50 % du personnel qui est absent, là.
M. Dubé : Bien, c'est ça que
je voulais que tout le monde comprenne puis c'est pour ça que j'avais mal
compris le chiffre que vous avez dit tout à l'heure, alors merci...
M. Bourgoin (Luc) : Oui, et
puis peut-être une précision.
M. Dubé : Oui.
M. Bourgoin (Luc) : Oui,
c'est ça, il y a 18 500 personnes confiées, mais il y a
10 000 employés. Donc, c'est à peu près un ratio 1,8/1 pour
le...
M. Dubé : O.K., c'est
intéressant. O.K.
M. Bourgoin (Luc) : Exact.
Puis il y a... 80 %, ce sont des femmes parmi les...
M. Dubé : Bien, je vais
laisser mes collègues poser les autres questions parce qu'on est plus
préoccupés de voir l'impact justement de la main-d'œuvre indépendante sur les
RI. Ça fait que, si vous permettez, M. le Président, je vais laisser...
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Dorismond : Bonjour à
vous deux. Vous avez parlé tout à l'heure de 40 % de MOI, puis je vais
reprendre les mots un petit peu du ministre, dans certains RI qui sont intégrés
dans les CISSS et les CIUSSS... et vous avez les ressources du CISSS ou du
CIUSSS à l'intérieur du RI. Ça fait que moi, j'aurais besoin de savoir, c'est
quoi, la différence, avec le 40 % de MOI à l'intérieur de ça. Est-ce qu'on
parle vraiment de vos ressources de RI, de vos employés ou on parle des
ressources qui proviennent du réseau public?
Et l'autre chose que j'aimerais savoir
quel type de RI où est-ce qu'il y a plus de main-d'oeuvre indépendante, là,
dans la MOI, dans votre 40 %. Est-ce qu'on parle du type familial, qui est
plus petit, ou on parle des gros? Ça, j'aurais besoin de savoir ça.
Et l'autre chose, vraiment là, au niveau
de tout ça, l'impact du projet de loi dans sa... dans sa portée actuelle, là,
la prestation des services de soutien ou d'assistance dans les RI, c'est quoi,
les impacts potentiels pour vous?
Et l'autre chose que j'aimerais savoir
aussi, c'est quel type d'accompagnement qu'on pourrait vous faire au ministère
de la Santé et des Services sociaux que vous souhaiteriez pour... trouver des
solutions? Merci.
M. Veilleux (Carl) : C'est
bon. Il y avait plusieurs volets à votre question.
Mme Dorismond : Oui.
M. Veilleux (Carl) : Peut-être
juste me rappeler votre premier volet, là, je... c'est juste que j'ai commencé
à prendre des notes un peu tard.
Mme Dorismond : Oui. Bon, le
40 %, là, vous avez dit 40 % de MOI.
M. Veilleux (Carl) : Oui.
Mme Dorismond : Donc, en
reprenant les mots du ministre, les différents types de RI, les gros qui sont
intégrés dans les CISSS et les CIUSSS, vous avez des ressources du CISSS et des
CIUSSS...
M. Veilleux (Carl) : Oui.
C'est bon, là, votre question me revient.
Mme Dorismond : ...et la
différence, là, tu sais, vous, vous avez des employés purement du RI, de
l'établissement privé, mais les ressources qui sont intégrées, est-ce que vous
les calculez dans votre 40 % ou pas?
M. Veilleux (Carl) : O.K.
Bien, la réponse à votre question, c'est non, on ne le calcule pas. Par contre,
c'est une... Tu sais, c'est une problématique qui a deux impacts. Imaginez une
ressource intermédiaire. La ressource intermédiaire est responsable d'un
certain service, O.K.? Tout ce qui est soutien, soins, assistance, là, sur une
base quotidienne, c'est la ressource intermédiaire qui est responsable de cette
partie-là. La partie soins de santé, où un travailleur social, par exemple, va
relever des CIUSSS et des CISSS.
Donc, si on parle de la partie soins de
soutien, assistance, là, c'est des préposés aux bénéficiaires qui sont vraiment
à l'embauche de la ressource intermédiaire, puis c'est là qu'on parlait
jusqu'à... On a des membres qui vont jusqu'à 40 % en ce moment de
main-d'oeuvre indépendante. Ce n'est pas la moyenne, là, c'est les cas de
figure plus élevés. Donc là, il y a une problématique. Là, c'est
vraiment : J'ai un préposé aux bénéficiaires qui ne rentre pas, qui est
malade ou j'essaie d'embaucher, je suis en recrutement perpétuel, je n'arrive
pas à combler mes quarts de travail, j'ai un quart, deux quarts, souvent c'est
les quarts de nuit qui sont plus difficiles à combler. Je suis au bout de mes
options, qu'est-ce qu'il me reste? Bien, ma dernière alternative, c'est de
faire appel à une agence qui, en échange d'une tarification salée, va nous
envoyer un membre du personnel qui, en général, n'est pas toujours le même,
puis il y a un paquet de problématiques qui vient avec ça. Donc, c'est
peut-être la première partie de la réponse à votre question.
• (15 h 40) •
Mme Dorismond : Puis vous
n'avez aucun problème au niveau de la catégorie 1? Tu sais, normalement,
il y a souvent des infirmières assistantes cheffes qui sont bien souvent
installées en RI qui sont là, 24/7, là.
M. Veilleux (Carl) : Oui...
c'est d'autres personnes qu'on accueille dans nos ressources intermédiaires, ce
n'est pas toutes les mêmes ressources, en fonction de leur grosseur, du type de
service puis de soins qui donnent qu'il va y avoir des gens avec la fréquence
dont vous faites mention, là. Des fois, ça peut être une journée semaine à
temps partiel. Mais, là aussi, ça peut être des gens d'agences qui sont envoyés
pour remplacer le personnel qui serait normalement de l'établissement, c'est...
Cet aspect-là n'a pas nécessairement une incidence financière sur la ressource
intermédiaire, parce que clairement que ce n'est pas la ressource qui défraie
les honoraires pour ça. Ce que ça amène, c'est un roulement de personnel qui
est beaucoup plus élevé. En général, c'est là que la problématique est parce
que le personnel d'agence, c'est rare qu'ils soient stables dans leur poste
pour une période prolongée.
Mme Dorismond : Donc, l'enjeu
de la MOI, c'est plus dans ce type de RI là plus que familiale...
M. Veilleux (Carl) : Bien, en
fait, quand vous dites... vous savez, c'est qu'il y a les RTF, qui sont les
ressources de type familial, mais elles ne sont pas représentées par notre
association.
Mme Dorismond : O.K.
M. Veilleux (Carl) : La distinction
entre une ressource intermédiaire et une ressource de type familial, c'est que
la ressource de type familial, le gestionnaire doit vivre avec sa clientèle à
l'intérieur de la ressource. Mais c'est une autre association qui représente ce
groupe-là.
Mme Dorismond : O.K. Merci.
Puis l'accompagnement du ministère des Services sociaux, que vous souhaiteriez
pour vous accompagner là-dedans?
M. Veilleux (Carl) : Bien, en
fait, il y a plusieurs choses là-dedans. C'est sûr qu'à court terme, on vit au
niveau des ressources intermédiaires une période de crise. Il y a une pression
financière en ce moment, puis là on parle d'un MOI, là, mais on s'inscrit dans
un contexte qui est beaucoup plus large que ça. Il y a de l'inflation, il y a
un paquet de problématiques, là, dont je ne ferai pas état, que tout le monde
connaît autour de la table, qui font que le financement est à regarder, et puis
par-dessus ça s'ajoute le problème de la pénurie de main-d'oeuvre et de la
main-d'oeuvre indépendante.
Vous savez, les ressources intermédiaires
ont un contrôle sur leurs dépenses, jusqu'à un certain point, mais absolument
aucun contrôle sur leurs revenus, parce que l'ensemble de la rémunération qui
est prévue est encadrée ou enchâssée dans l'entente nationale qui est négociée,
puis, quand l'entente a été négociée, la problématique de la main-d'oeuvre
indépendante n'était sur le radar de personne. Maintenant, on se ramasse avec
une situation... Vous comprendrez qu'une ressource intermédiaire qui va
chercher 40 % de son personnel à un taux horaire qui va jusqu'à trois fois
ce qui est normalement payé... La mathématique ne fonctionne plus.
Donc, il y a plusieurs ressources
intermédiaires qui dans le moment sont prises avec cette problématique-là, puis
il faut regarder une... Mais parce qu'il n'y a aucune ressource qui fait ça de
gaieté de cœur, comme ça : Ah! C'est beaucoup plus facile, appelons une
agence, là. Donc, c'est ça, la problématique est là. Donc, il faut regarder des
mesures... Nous, ce qu'on demande, c'est des mesures d'accompagnement à court
terme, notre mémoire fait appel ou fait mention... certains trucs ou certaines
propositions concrètes dans ce sens-là. Une bonification de la MAES, par
exemple, qui est la mesure d'atténuation de l'écart salarial, pourrait être une
piste qui est envisagée.
Donc, à court terme, il y a des choses à
faire, puis à long terme, bien, nous, ce qu'on demande, c'est... On veut bien,
là, on est aussi contre les agences, on est contre toute instance qui nous
charge une tarification démesurée pour un service. Mais la bouée de sauvetage,
elle est où? Quand on prend le téléphone pour appeler l'agence, c'est parce
qu'on n'en a plus, d'options, là. Il n'y a absolument aucune, aucune raison de
le faire sensée financière, donc... Mais l'alternative, elle est où? Puis
souvent, ce que ça crée, O.K, dans ce qu'on va voir dans les milieux, dans les
ressources intermédiaires, c'est que le gestionnaire ou le propriétaire de
ressources intermédiaires, bien, il va faire un quart de travail de plus, il va
travailler encore en fin de semaine, il ne prendra pas de vacances, puis là il
s'épuise.
On étire l'élastique. Puis, honnêtement,
on a de plus en plus d'appels de détresse, à l'association, de ressources qui
ont dit : On n'est plus capables. Financièrement, on ne peut plus, les
agences, là, ça ne marche plus, là. Ils nous envoient du personnel qui n'est
pas toujours à la hauteur de nos attentes, les usagers sont maltraités. Puis
nos gestionnaires, c'est des gens de cœur. Honnêtement, venez les rencontrer,
vous allez voir jusqu'à quel point ils sont là pour leurs usagers, ils sont là
pour les... ils veulent qu'il y ait des bons services, puis au final, bien,
c'est toujours aux sacrifices... c'est là... ils font leurs sacrifices
eux-mêmes de dire : Bien, je vais m'en occuper moi-même, je vais faire les
toilettes partielles, je vais faire... je vais en faire plus. Mais il y a une
limite à ça, puis on est sur le bord du point de rupture pour beaucoup de
ressources.
Mme Dorismond : Merci.
M. Bourgoin (Luc) : Et la
main-d'oeuvre... indépendante n'a pas non plus la formation requise pour
occuper les fonctions. Donc, ça crée un écart, là, dans les...
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Hull.
Mme Tremblay : Oui. Bonjour,
merci d'être avec nous aujourd'hui. Est-ce que... Bon, leur... Bon, il y a un
coût important, vous l'avez dit. Est-ce qu'il y a eu des fermetures ou est-ce
qu'il y a des fermetures qui pourraient venir, là, si on continue à avoir ce
recours-là à ces agences-là? Est ce qu'il y en a eu, des fermetures? C'est
quoi, les dangers qui vous guettent? Tu sais, on veut mettre fin à ça, mais
dans... Qu'est-ce qui se passe, là, présentement, là?
M. Veilleux (Carl) : On n'a
pas... En fait, je n'ai pas de statistiques, on n'a pas de fermetures qu'on
pourrait attribuer directement à la MOI, là, il n'en est pas... En ce moment,
on n'a pas de cas de figure de cette nature-là. Cependant, pour nous, notre
meilleure façon d'évaluer, c'est en fonction des appels de détresse qu'on
reçoit. L'association représente ses membres depuis plusieurs années, plus de
25 ans, puis ce qu'on voit, c'est, depuis la fin de la pandémie...
On est sortis de la pandémie, là, avec un
réseau des ressources intermédiaires, honnêtement, qui a fait bonne figure,
O.K. Je pense qu'au niveau de la pandémie, en ressources intermédiaires,
gestion - on parlait de gestion de proximité, là - on est des beaux exemples de
ça, des gestionnaires impliqués qui sont là le soir, la fin de semaine, mais
ils sont sortis de la pandémie épuisés, O.K. Puis là, on n'a pas encore fini la
reddition de comptes par rapport à la pandémie, là, on est encore dans
l'administratif pour ça, puis là on se retrouve dans une crise de main-d'oeuvre
puis de main-d'oeuvre indépendante, donc c'est comme une couche de plus qui se
rajoute, puis les appels de détresse, honnêtement, sont nombreux.
Puis, financièrement, bien, quand ça
n'arrive plus, puis en plus tu y mets tout ton cœur, toute ton âme, toutes tes
heures, toutes tes fins de semaine, il y a un grand, grand sentiment de
découragement, là, qui...
M. Bourgoin (Luc) : Et j'ai
eu l'occasion de parler à certains...
M. Bourgoin (Luc) : ...oui,
certains intervenants, certains propriétaires de ressources intermédiaires. Et
ce qu'ils me disaient, c'est que, sans soutien financier et sans mesure d'aide,
ils ne seraient plus en mesure d'offrir un service, donc... puis ils seraient
obligés de couper le lien avec les établissements publics. Donc, il y en a quelques-uns
qui sont vraiment en situation précaire actuellement, là.
M. Veilleux (Carl) : Il y a
des ressources en ce moment qui brûlent leurs liquidités pour faire appel à de
la main-d'oeuvre indépendante parce que c'est la seule solution pour ne pas tomber
en rupture de service. Mais ça, je veux dire, ce n'est pas pérenne, là, on ne
peut pas, on ne peut pas continuer comme ça très longtemps.
Mme Tremblay : Oui. Ensuite,
bon, vous parlez, bon, de... mais vous ne souhaitez pas de pénalité, là, pour
les gestionnaires, là, donc, vous l'avez écrit dans votre mémoire, mais vous
parlez aussi, par le fait même, d'avoir accès peut-être à une banque de
main-d'oeuvre, là, au niveau des services de santé, sociaux. Est-ce que, tu
sais... Puis on souhaite, là, tu sais, limiter puis recourir, puis c'est ce que
vous souhaitez également aussi. Puis vous l'avez dit, hein, ça amène des
difficultés financières. C'est quoi, pour vous, les situations exceptionnelles
qui, tu sais... Parce qu'il faut établir certaines situations qui permettraient
justement d'avoir recours à des agences de placement... bon, avant de les
éliminer, probablement, totalement, mais peut-être qu'elles resteront, on ne
souhaite pas. C'est quoi, ces situations exceptionnelles là, puis qui permettraient
de limiter le recours, finalement, là?
M. Veilleux (Carl) : Bien, en
fait, j'ai le goût de vous répondre en disant... Parce que, dans le fond, ce
qu'on va... on veut éviter, on veut enlever les... l'utilisation injustifiée à
des agences. Mais, moi, j'essaie de mettre le doigt sur une situation où une
ressource intermédiaire, par une paresse quelconque, va décider de payer des
employés trois fois le taux horaire, je ne la vois pas. Honnêtement, là, à
partir du moment où la ressource intermédiaire décide de prendre le téléphone
pour appeler l'agence, je vous garantis qu'elle est au bout du rouleau. Ça fait
qu'en termes de mesures, là, de frein ou de ticket modérateur, là, je pense...
Je ne pense pas qu'elles pourraient être plus élevées, donc. Mais il faut le...
il faut offrir une alternative, parce que, si on enlève les agences puis qu'on
dit aux gestionnaires de ressources intermédiaires, aux propriétaires des
ressources intermédiaires : Bien, tu as deux choix, ou bien tu es en
rupture de service puis tu es en écart de qualité, puis, là, bien, il y a toute
une procédure administrative pour ça, ou bien c'est toi qui rentres. Je veux
dire, ça revient à ça, tu restes encore une autre fin de semaine dans ta
ressource puis tu donnes les services. Puis, ça, c'est possible pour une petite
ressource, là, mais une ressource de plus grande taille, qui manque
10 employés, bien, à un moment donné, le gestionnaire ne peut pas être
partout. Donc, il est là, il est là, le nœud du problème. On n'est pas contre l'objectif
qui est poursuivi, mais la période de transition, il faut mettre des choses en
place puis il faut qu'il y ait un mécanisme de dernier recours pour aider les
ressources en partenariat avec les...
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup pour cette
clarification. Le temps est écoulé pour la partie gouvernementale. Nous allons
maintenant procéder avec le député de Pontiac pour la suite de cet échange.
Alors, c'est à vous la parole.
M. Fortin :Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, bonjour, à vous
deux. Merci d'être là puis de partager votre... Votre expérience de terrain, de
toute évidence, là, mais votre expérience par rapport à ce que vous voyez dans
l'ensemble des... Des RI.
Vous avez terminé votre exposé tantôt en
disant, dans sa forme actuelle, là, on serait incapables de... de se conformer.
Donc, ça, c'est un peu la... Ce que vous venez d'expliquer là, là. C'est :
Si on adopte le projet de loi comme tel, puis que le ministre a des règlements
qui... qu'il a un peu présentés, là, un peu sous-entendu qu'il présenterait, ça
ne marchera juste pas pour vous autres, là.
M. Veilleux (Carl) : Bien, en
fait, ça dépend de l'échéancier, là. Comme je vous dis, on partage l'objectif,
après ça, et on essaie de comprendre puis de voir quelles sont les prochaines
étapes. Puis c'est sûr qu'une... puis il y a des clauses aussi pénales ou
punitives pour une ressource intermédiaire qui utiliserait des agences. Puis,
c'est cette partie-là, on... on aimerait se faire exclure. Parce que, comme je l'expliquais
tantôt, je pense que le ticket modérateur du prix de l'agence devrait agir de
par lui-même, là.
• (15 h 50) •
M. Fortin :O.K. Mais, ça, c'est une de vos pistes de solution, là,
hein, on enlève la partie des... des Sanctions qui seraient imposées aux
gestionnaires de RI. Mais même si on enlève la sanction, vous n'avez pas plus
le droit de le faire, là, en théorie. Donc, ce que vous dites, c'est que vous
aimeriez vraiment être exclus de la chose, du moins jusqu'à tant qu'on arrive à
une... plus de pérennité, là, disons.
M. Veilleux (Carl) : Bien,
effectivement, jusqu'à tant qu'il y ait... la situation se stabilise. Puis
peut-être je vais me permettre d'ouvrir sur une autre problématique. Tu sais,
dans notre mémoire, on parle d'harmonisation des conditions de travail. Je veux
dire, ça fait des décennies, là, que le réseau de la santé... Est dans cette
dynamique-là, de : un syndicat va négocier, il va en gagner un petit peu,
après ça, les RPA, puis, après ça, les ressources intermédiaires, puis
maintenant les maisons des aînés, puis les CHSLD privés non conventionnés,
puis, tout ça, des conditions de travail qui sont différentes, puis on se bat
tous pour le même monde. Je veux dire, à un moment donné, il faut prendre un
temps d'arrêt puis se dire que ça ne fonctionne pas, là. Je veux dire, surtout
en pénurie de main-d'oeuvre, on se bat tous pour la même... Le même personnel,
puis celui qui offre les...
M. Veilleux (Carl) : ...Moins
bonnes conditions de travail. Puis, souvent, c'est parce que c'est l'état de
fait d'une négociation quelconque, puis, de se retrouver à la traîne, tu sais,
celui qui n'est pas capable de retenir son personnel puis d'en recruter. Donc,
l'harmonisation des conditions de travail doit faire partie d'une réflexion
plus grande pour... Pour cesser ça, cette espèce de combat perpétuel pour aller
chercher le même personnel parce que ce que le bassin est vide.
M. Bourgoin (Luc) : Oui, tout
à fait. Mais j'ajouterais que, écoutez, on est conscients que le projet de
loi 10 va régler les problèmes au niveau du recours à la main-d'oeuvre
indépendante. C'est clair, on va limiter le recours à la main-d'oeuvre
indépendante. Mais on est conscients en même temps qu'il y a un besoin clair
pour ce type de main-d'œuvre là pour le moment, et il va falloir tout
simplement trouver une main-d'oeuvre alternative pour... Pour répondre aux
besoins. Si ce n'est pas de la main-d'oeuvre indépendante, ça va prendre une
main-d'oeuvre alternative qui va pouvoir combler ces besoins-là, parce que le
besoin, il est clair puis il est là. Oui, c'est bienvenu, sauf que ça prend
quelque chose pour palier.
M. Fortin :Bien, ça, si j'ai bien compris, ça, c'est votre
recommandation neuf, là, mandater les établissements de santé d'avoir une
espèce de... de Banque de personnel, là, qui peut être mis à votre disposition.
Donc, dans le fond, vous, vous êtes gestionnaire de RI, il vous manque
quelqu'un pour le quart du soir, vous n'êtes pas... vous n'avez pas le droit,
de par la loi, d'appeler de la main-d'oeuvre indépendante, vous vous tournez
vers le CISSS, le CIUSSS, vous dires : est-ce que vous pouvez m'envoyer
quelqu'un, là, je n'ai pas personne, là?
M. Veilleux (Carl) : Exact.
Bien, en fait, c'est une façon de travailler en partenariat avec les
établissements, ce qui se fait déjà. Tu sais, pour beaucoup d'établissements,
c'est à géométrie variable, là, il y a des établissements qui vont... qui vont
être partenaires là-dedans puis il y en a d'autres qui vont être plus
dans : Bien, c'est votre rôle de ressources intermédiaires, donc
débrouillez-vous. Donc, nous, on plaide pour une plus grande... un plus grand
partenariat là-dedans. Puis, bien, ce qu'on propose comme étant une banque de
personnel, c'est une piste de solution, une piste de réflexion à envisager
pour, justement, les cas où on est en... On veut éviter la rupture de service.
M. Fortin :Mais, ça, vous me dites que ça se fait déjà à certains
endroits, il y a... vous pouvez déjà, là, peut-être pas, peut-être pas chez
vous, là, mais, à certains endroits, les ressources intermédiaires peuvent
contacter les CISSS et les CIUSSS pour avoir accès à des ressources en période
de manque comme ça?
M. Veilleux (Carl) : Bien, en
fait, ce que... ce qui existe, en fait, je veux dire, on... Toutes les
ressources intermédiaires sont en dialogue pratiquement constant avec leurs
établissements. Ça fait que, tu sais, je disais qu'il existe déjà, c'est toute
la notion de partenariat qui est déjà là, comme je disais, c'est à géométrie
variable. Puis il y a... il y a... il y a des établissements qui vont être plus
ouverts que d'autres à discuter des solutions pour traverser une crise, là, de
pénurie de main-d'oeuvre. Donc, ça peut arriver, avec une ressource
intermédiaire, dire : Écoutez, je viens de perdre un membre de mon
personnel, je suis mal pris, j'en ai pour une semaine, le temps de... Bon. Puis
là, il y a un dialogue qui s'installe, puis il y a des... Il y a des solutions
créatives qui se déploient dans ce temps-là.
M. Fortin :O.K. Vous avez dit quelque chose d'intéressant tantôt à
propos de... Les moments où vous faites recours à la main-d'œuvre indépendante.
Puis là, vous avez... Je comprends que c'est un exemple, là, que vous avez
utilisé, sauf qu'en vous entendant utiliser cet exemple-là, je me demande si ce
n'était pas justement un peu ce qui se passe dans votre réseau. Vous avez
dit : Ça peut arriver des fois. Par exemple, c'est surtout les quarts de
la nuit où on va avoir de la difficulté à remplir, donc, là, on va prendre le
téléphone, appeler une agence pour essayer de combler ce quart-là. C'est un peu
le contraire de ce qu'on entend de... de beaucoup de parties du réseau de la
santé, là, qui... Où on entend que la main-d'oeuvre indépendante finit par
prendre les meilleurs quarts de travail, que, souvent, là, ce n'est pas
nécessairement les quarts les plus difficiles qu'on comble avec des agences.
Vous, ce n'est pas votre expérience en RI?
M. Veilleux (Carl) : Bien, je
pense qu'il y a une limite à... peut-être à la comparaison qu'on peut faire
avec les établissements de santé, là. On n'a pas les volumes, là. Tu sais, on
parlait tantôt, là, vous avez une ressource intermédiaire qui a cinq employés,
on dit qu'il y a 40 % de main-d'oeuvre indépendante là-dedans, là, mais ça
ne remplit pas un autobus. Donc, tout ça pour dire que la dynamique est très,
très différente. Souvent, c'est beaucoup à la pièce. On n'est pas dans des
contrats pour dire : vous allez combler, tu sais, 200 heures par
mois, là. C'est on va les appeler pour dire : bien là, j'ai un quart à
combler, ainsi de suite. Puis souvent les quarts les plus difficiles à combler,
bien, c'est les quarts de nuit puis les quarts de fin de semaine, parce que, le
personnel, quand les quarts se libèrent, bien, tu sais, ils vont migrer vers
des quarts de jour. Donc, chaque ressource a ses... des problématiques qui sont
différentes à cet égard-là. Mais, le parallèle avec le réseau de la santé, là,
il faut faire attention parce qu'on n'a pas les volumes.
M. Fortin :Est-ce que... Est ce qu'il y en a qui, dans votre analyse,
disons, de... lesquels de vos membres ont le plus recours aux agences? Est-ce
que c'est surtout les plus grands comme vous, là, avec 50, une cinquantaine
d'employés, ou est-ce que c'est des petits qui ont vraiment de la difficulté,
par exemple?
M. Veilleux (Carl) : Je vous
dirais que la... en tout cas, pour la... l'information qu'on en a, c'est... je
dirais que la variable régionale joue beaucoup plus fort que la grosseur de la
ressource. Il y a des régions, la région Montréal s'en sort un petit peu
mieux... moins... un petit peu mieux, probablement parce que le bassin de
recrutement est plus grand. Mais, dans Lanaudière, par exemple, secteur
Saint-Jérôme, là, il y a certaines... Il y a des ressources qui ont beaucoup,
beaucoup de difficultés en ce moment. Mais le bassin est vide, ils n'arrivent
pas à recruter, ils sont en recrutement constant. Ça fait des mois, sinon des
années qu'ils ont des postes...
M. Veilleux (Carl) : ...en permanence
qu'il n'arrive pas à combler.
M. Fortin :O.K. La dernière chose que je veux comprendre dans votre
mémoire, là, c'est en lien avec la recommandation cinq, vous parlez d'octroyer
une aide financière aux RI, contraintes de faire appel aux services d'agence de
placement. Là, dans le fond, j'imagine que vous parlez dans la période
transitoire, c'est ça?
M. Veilleux (Carl) : Oui,
parce que nous, on vit une crise en ce moment, là. J'entendais, ce matin, M. le
ministre dire que les règlements vont suivre rapidement. Mais, je veux dire,
nous, c'est hier qu'on avait... le mois passé, on avait des problèmes avec ça.
On a des ressources, je vais en parler tantôt, qui brûlent leurs liquidités à
faire appel à de la main-d'oeuvre indépendante. Donc, on a besoin d'une aide
rapidement pour faire face à ce problème-là. Puis il y a d'autres... il y a
d'autres groupes, puis là je parlais tantôt d'harmoniser, là. Mais ça aussi, il
y a des mesures, tu sais, les CHSLD privés non conventionnés qui ont eu des mesures
spécifiquement pour faire face à la main-d'oeuvre indépendante. Donc, les RPA
aussi ont eu certaines mesures. Les ressources intermédiaires, il n'y a rien
qui a été octroyé à ce stade-ci.
Donc, on aimerait pouvoir regarder des
mesures pour venir en aide aux ressources à très très, très court terme.
M. Fortin :Vous aimeriez pouvoir avoir le même genre d'entente que
certaines RPA non conventionnées ont pu avoir, c'est ça?
M. Veilleux (Carl) : Oui,
absolument.
M. Bourgoin (Luc) : Les CHSLD
privés non conventionnés aussi qui ont eu une aide financière qui apparaît très
intéressante. Parce que les ressources intermédiaires sont confrontées à une
augmentation générale des prix, les coûts de construction, évidemment, la
hausse du prix des soumissions puis évidemment aussi la pénurie de
main-d'oeuvre. Alors, s'il y avait une aide financière adaptée comme celle aux
CHSLD privés non conventionnés, je pense qu'on ferait un bout de chemin assez
intéressant, là.
M. Fortin :Puis ça, c'est quoi... Qu'est-ce qu'on vous a donné comme
raison, jusqu'à maintenant, pour intervenir dans les CHSLD non conventionnés,
dans certains cas, mais pas chez vous?
M. Veilleux (Carl) : Il n'y a
pas de raison qui nous a été donnée spécifiquement. Puis me permettre juste de
rebondir là-dessus, il y a une mesure d'écart... d'atténuation de l'écart
salarial qui existe en ce moment, qui est non applicable à la main-d'oeuvre
indépendante. Là, je vais juste illustrer par un cas de figure J'ai un employé
chez nous qui travaille. Pour chaque heure travaillée, je reçois une prime, une
prime de 5,50 $ qui m'est remboursée pour les heures travaillées par cet
employé-là. Cet employé-là tombe malade. Je suis absolument au bout de mes
options. Je prends le téléphone, j'appelle l'agence. On m'envoie un personnel
d'agence qui va me facturer 43 $ de l'heure. Mais le 5,50, je n'y ai plus
droit.
Donc, non seulement je suis au bout de mes
ressources, je me contrains à appeler une agence qui va me coûter trois fois le
prix, mais je perds le 5,50 qui, normalement, devrait être versé comme une
prime. Puis ça, je pense que c'est juste un angle mort de l'entente, quand ça a
été négocié, la main-d'oeuvre indépendante n'a pas fait partie de la réflexion
parce que ce n'était pas sous le radar des personnes. Mais ça, c'est une mesure
concrète à très, très, très court terme, qui pourrait aider, donner un petit
peu d'air aux ressources intermédiaires. Ce n'est pas la solution au complet,
mais c'est un petit bout.
M. Fortin :Mais ça revient à votre point tantôt qu'on ne fait pas ça
par plaisir, là. Quand on appelle une agence, c'est parce qu'on n'a vraiment
plus le choix, ça vient avec des conséquences financières, ça vient avec toutes
sortes de conséquences pour la fiabilité de la résidence.
M. Veilleux (Carl) : Absolument.
M. Fortin :O.K. Ça va pour moi, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
:Ça va aller? Merci. Alors, nous
poursuivons avec le député de Rosemont.
M. Marissal : Merci, M. le Président.
Bonjour. Merci d'être là. Il n'y a pas... on ne s'y trouve plus, comme disait
le ministre tout à l'heure, il y a l'organigramme de la grosse chose qui est la
santé au Québec aussi. Je veux juste être sûr de comprendre quelle est votre
relation d'affaires avec les CISSS et les CIUSSS.
M. Veilleux (Carl) : Donc...
Bien, en fait, l'Association des ressources intermédiaires représente ses
membres. Donc, les ressources intermédiaires, il y a une entente qui est
négociée avec le ministère de la Santé directement, donc l'entente nationale.
Après ça, cette entente-là descend dans les établissements et les
établissements vont être à contrat avec les ressources intermédiaires pour
donner les services d'hébergement, soins, assistance, là, dont on a parlé tantôt,
je ne sais pas si ça précise.
M. Marissal : Oui, mais en
fait, j'essaie de voir d'où vous tirez vos revenus.
M. Veilleux (Carl) : C'est le
ministère de la Santé...
M. Marissal : Directement.
• (16 heures) •
M. Veilleux (Carl) : ...directement.
Il n'y a aucuns frais. Les ressources intermédiaires ne peuvent faire aucune
facturation aux usagers qu'ils hébergent.
M. Marissal : O.K.Votre
personnel, vous le payez avec les subventions, appelons ça, des subventions,
là, avec les versements.
M. Veilleux (Carl) : C'est un
per diem, c'est un per diem qui est versé sous forme de rétribution. Mais oui,
cet argent-là est utilisé pour payer le personnel.
M. Marissal : O.K. Et pour
les mesures d'atténuation, parce que vous êtes sous-compétitifs. Il y a une
prime de 5,50 qui est versée de l'heure, mais vous ne l'avez pas lorsque vous
devez recourir aux agences.
M. Veilleux (Carl) : Exact.
M. Marissal : Mais,
nonobstant la prime de 5,50 $ de l'heure, est-ce que vous utilisez le même
fonds pour payer les ressources d'agence?
M. Veilleux (Carl) : Oui,
absolument. Il n'y a aucune autre source de revenus. Une ressource
intermédiaire qui opère, là, sa seule source, c'est le per diem qui vient du
ministère de la Santé. Donc, c'est le même argent pour payer tout.
M. Marissal : O.K.
M. Veilleux (Carl) : Donc,
juste... En tout cas, pour peut-être faire du pouce sur ce que vous venez de me
dire, là, si on prend de l'argent pour payer un préposé aux bénéficiaires
43 $ de l'heure, bien, c'est le service aux usagers qui souffre...
16 h (version non révisée)
M. Veilleux (Carl) : ...on n'a
pas plus... on a moins d'argent pour faire d'autres choses. Je ne sais pas
si...
M. Marissal : O.K., mais je
vous comprends puis je connais quelques RI, là, dans ma circonscription, là. Je
ne remettrais pas en doute vos services et même le côté essentiel de ce que
vous faites dans un contexte budgétaire qui est très difficile, là. Tous les
députés ici ont probablement eu des cas de RI qu'ils doivent défendre d'une
façon ou d'une autre devant le ministère ou le ministre parce qu'elles sont à
peu près toutes au bout de leur corde, là, de leur dernière cenne. Alors, je ne
remets pas ça en question.
Mais cela dit, quand vous dites que vous
devriez avoir ou recevoir la même prime de 5,50 $ de l'heure lorsque vous
engagez des agences, on va juste donner du gaz aux agences, là. Ça fait qu'on
va perdurer le problème, là.
M. Veilleux (Carl) : Non,
non, non. En fait, non... Je comprends votre point, mais l'argent va à la
ressource... le 5,50 $, là, qui vient de la MES, et il va à la ressource
intermédiaire, il ne va pas à l'agence au final.
M. Marissal : Oui, mais elle
vous permet néanmoins de continuer d'engager des agences, ce que nous voudrions
arrêter de faire.
M. Veilleux (Carl) : Ce que
nous voulons arrêter de faire également. En fait, nous, ce qu'on veut arrêter,
c'est de payer des prix exorbitants pour une main-d'œuvre qui fait la même
chose que celle qu'on engage directement.
M. Bourgoin (Luc) : Puis on s'entend
que 5,50 $ pour un taux horaire qui est le triple du... Écoutez...
M. Marissal : Définir
exorbitant. Qu'est-ce que... À quoi vous...
M. Veilleux (Carl) : Très,
très élevé... une figure de style, là, mais quand qu'on parle de 40 quelques
dollars de l'heure pour un préposé aux bénéficiaires qui, dans les faits, en
gagnent rarement plus que 20, il y a quelque chose là-dedans qui suscite l'imaginaire,
je ne sais pas, d'où exorbitant.
M. Marissal : Ou l'indignation,
c'est selon. Recommandation numéro sept est intéressante, là, créer un guichet
administré par le MSSS pour dénoncer les agences de placement personnel qui
contreviennent à une disposition des règlements. Autrement dit, ça, ce serait
votre chien de garde du projet de loi 10 une fois adopté, une espèce de 1-800
agence abusive, là, vous pouvez appeler ou faire une plainte de façon anonyme.
Parce que je présume que ce n'est pas si simple que ça pour vous de vous
plaindre directement à votre... à la personne qui vous envoie du monde.
M. Veilleux (Carl) : Bien,
dans les faits, puis là on va y aller avec l'histoire apprise pendant la
pandémie, parce que les agences ont joué un rôle pendant la pandémie pour
combler des quarts de travail, c'est qu'il n'y avait pas de dénonciation, parce
que les agences avaient beau ne pas respecter les décrets... Moi, je gère ma
ressource intermédiaire, je suis complètement désespéré, je suis rendu au stade
où je suis prêt à payer 40 $ de l'heure pour un préposé aux bénéficiaires,
je prends le téléphone, bien, les conditions qu'on me propose sont peut-être
inacceptables, mais, si je vais dénoncer puis que cette option-là disparaît, je
n'en ai plus, de bouée de sauvetage, puis c'est encore moi qui rentre le soir,
la fin de semaine. Donc, pourquoi j'irais dénoncer une situation... Je
comprends, tu sais, je veux dire, ce serait à dénoncer, mais ce que nos membres
nous disent, c'est : Bien, on n'ose pas, on n'ose pas le faire parce qu'on
a besoin de ce service-là quand même.
M. Marissal : Non, c'est
intéressant ce que vous dites, j'en prends note. Puis on est là pour améliorer
le projet de loi, là, mais je vois quelque chose d'intéressant là-dedans. Parce
que sinon, on met beaucoup, beaucoup le poids sur les gestionnaires, que ce
soit vous ou les CIUSSS ou les CISSS qui, même, seraient tout visés par les
sanctions pénales et administratives. Alors, peut-être qu'effectivement on
mettrait un peu de chaleur aussi sur les agences si on est capable d'avoir un
registre du genre. Mais qu'est-ce que vous auriez dénoncé? Vous dites l'exemple
de la COVID.
M. Veilleux (Carl) : Bien, le
décret, il y avait des plafonds qui n'étaient pas respectés, la facturation...
M. Marissal : O.K., vous
parlez d'argent, là.
M. Veilleux (Carl) : Bien là,
je parle d'argent, je peux... Outre ça, pour vrai, pendant la pandémie, je veux
dire, le seul... en tout cas, le niveau de formation du personnel d'agence, ils
nous envoient des gens qui souvent ne sont pas qualifiés.
M. Marissal : Oui, vous avez
dit ça tout à l'heure, puis on en a parlé ce matin aussi. Parce que moi, j'en
ai entendu beaucoup parler sur le terrain, puis ça, ça m'agace parce qu'il s'agit
de personnes vulnérables. Et vous avez dit : Les usagers sont maltraités.
M. Veilleux (Carl) : Bien, ce
n'est pas ça... Nous, on n'a pas dit ça.
M. Marissal : Oui, vous avez
dit ça.
M. Veilleux (Carl) : J'ai dit :
Les usagers sont mal traités?
M. Marissal : Vous avez dit
ça tout à l'heure, oui.
M. Veilleux (Carl) : O.K.
M. Marissal : Vous avez dit :
On nous envoie du monde pas nécessairement qualifié, les usagers sont mal
traités.
M. Veilleux (Carl) : Bien, je
pense... Parce que le mot maltraitance est très lourd de sens, là, je dirais
que les usagers ne reçoivent pas la qualité de services auxquels ils auraient
droit... là-dedans. Parce que les personnels d'agence qu'on va recevoir, bon,
il y a un certain nombre de formations normalement qu'on s'attend, PDSB, loi 90
pour donner des médicaments, secourisme, bon, genre de choses. Puis,
honnêtement, les personnes de l'agence nous arrivent, ils ne relèvent pas de
nous, donc on ne peut pas vraiment valider le type de formation qu'ils ont,
puis, bien, on constate que la formation n'est pas extraordinaire. Puis après
ça, bien, le lendemain, c'est une personne différente, ça fait que... puis le
surlendemain, c'est une autre personne différente, puis le sur surlendemain...
Ça fait que vous voyez le portrait un peu.
M. Marissal : Je comprends
bien. Ne prenez pas maltraitance au terme criminel du mot, là.
M. Veilleux (Carl) : Non,
bien, en fait, je fais attention, c'est un mot glissant, je trouvais...
M. Marissal : Il y a
différentes façons d'être maltraité, mais mal servi, en tout cas, ou pas bien
traité.
M. Veilleux (Carl) : Voilà.
M. Marissal : Mettons ça
comme ça, là.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup de votre contribution,
Messieurs. Vous m'excuserez, M. le député...
Le Président (M. Provençal)
:...de Rosemont. On doit clore cette
discussion.
Et nous allons suspendre les travaux pour
faire place au prochain groupe. Merci beaucoup de votre collaboration et de
votre contribution.
(Suspension de la séance à 16 h 06)
(Reprise à 16 h 10)
Le Président (M. Provençal)
:Nous reprenons nos travaux. Je
souhaite maintenant la bienvenue au Regroupement québécois des résidences pour
aînés. Vous avez 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, il y aura un
échange avec les membres de la commission. Alors, je vous invite à vous
présenter et à débuter votre exposé. À vous la parole.
M. Fortin (Marc) : Bien,
bonjour, M. le Président. Merci pour votre accueil. Mesdames et Messieurs les
députés, M. le ministre, je m'appelle Marc Fortin, je suis le président-directeur
général pour le Regroupement québécois des résidences pour aînés, le RQRA, et
je suis accompagné par le président du conseil d'administration du RQRA,
monsieur Hugo Boucher, ainsi que Marc Snyder de la firme Paradigm Stratégies,
qui accompagne le RQRA depuis 14 ans maintenant. Hugo, je te laisse te
présenter.
M. Boucher (Hugo) : Bonjour.
Moi, je suis président et chef de la direction d'Immo Première qui est
entreprise familiale fondée en 1991, qui possède et gère 10 résidences
pour aînés partout au Québec, Montréal, Montérégie, Drummondville et ici même
dans la ville de Québec. Plusieurs de nos résidences sont destinées à une
clientèle semi-autonome nécessitant des services...
M. Snyder (Marc) : ...Snyder,
vice-président aux relations gouvernementales de Paradigme Stratégies.
M. Fortin (Marc) : Pour
vous situez, le RQRA est la seule organisation qui représente les résidences
pour aînés. Le RQRA compte parmi son membership près de 53 % des
résidences, soit 800 résidences et 67 % des unités, soit
92 000 unités au niveau des RAP. Les RAP, il y a beaucoup de monde
souvent qui sont confus, une RPA ça comporte différents types de services, ça
peut être une RPA autonome, semi-autonome ou pleinement soins jusqu'à des fins
de vie. Donc, il y a différents types de RPA qui nécessitent différents
besoins.
Au Québec, en date de dimanche, on
comptait 1 496 RAP, si je suis aussi précis quand je parle du nombre
de RPA, c'est qu'il change sans arrêt. En effet, une ou deux fermeront cette
semaine, une ou deux fermeront probablement la semaine prochaine et une ou deux
autres la semaine suivante puis, si la tendance se maintient, une ou deux
autres fermeront toutes les semaines pour le restant de l'année, c'est vraiment
la tendance qu'on a depuis un an et demi. Cette diminution rapide du nombre de
RPA a plusieurs effets extrêmement préoccupants, préoccupants pour les
gestionnaires, mais surtout pour les résidents et les résidentes qui sont
touchés. La grande majorité de ces fermetures sont celles de petites RPA
situées en région, des RPA de 12 ou 20 ou 30 unités situées dans des
petites villes, dans des villages un peu partout au Québec. Ces fermetures sont
autant plus de drames humains que des gens sont déracinés de leur milieu de
vie. Prenons le cas hypothétique d'une personne qui a passé sa vie à Buckland
puis qui réside maintenant à l'Accueil Notre-Dame, qui sera dans l'obligation
de s'exiler à 52 kilomètres à Sainte-Marie si l'Accueil Notre-Dame venait
à fermer, ou une autre qui est originaire de New Glasgow dans les Laurentides,
obligée de déménager à 14 kilomètres à Saint-Jérôme en cas de
désertification de la Villa Sainte-Sophie, ou enfin une résidante de votre
résidence de votre circonscription, M. le Président, installé à la résidence
Saints-Anges, qui se voit forcée de déménager à 16 kilomètres à
Saint-Joseph. Des cas comme ça, il y en a quelques dizaines chaque semaine puis
ça peut... ça ne peut pas continuer pour nous. En parallèle, il faut aussi
penser au réseau de la santé et des services sociaux.
En effet, Mmes et MM. les députés, les
résidences pour aînés jouent un rôle capital en matière de ralentissement de
l'institutionnalisation. Nous avons récemment commandé une étude à une firme
d'analyse économique, ils nous ont produit un rapport étoffé que nous avons
partagé avec le ministère des Finances, ministère de la Santé et Services
sociaux. Et le rapport démontre aussi clairement que les RPA contribuent au
maintien de la santé physique et cognitive des aînés, de même qu'à leur
vieillissement dans la dignité. En se basant sur la littérature scientifique
puis sur la réalité financière actuelle des résidences pour aînés, nous avons
développé une modélisation économique qui démontre que les RPA évitent des
coûts substantiels aux gouvernements, qui se chiffrent entre 10 et
15 milliards de dollars sur une période de 10 ans. Puis, de
plus, cette méthodologie demeure très prudente et les coûts évités réels
surpassent de loin ceux qui sont estimés dans l'étude. C'était très conservateur.
Je suis arrivé au RQRA à
l'automne 2021 en pleine pandémie, quelques semaines avant l'arrivée
d'Omicron. Disons que depuis que je suis en poste, nous gérons d'une crise à
l'autre, mais ce n'est pas récent que la situation est difficile pour les RPA.
Puis j'ai récemment mis la main sur un mémo qui avait été transmis à mon
prédécesseur, dont je veux vous citer quelques phrases, puis inquiétez-vous
pas, ça va être assez court. La situation est critique, au cours des cinq
dernières années, près de 400 RPA ont dû fermer leurs portes, 78 % de
celles-ci se trouvent à l'extérieur des grands centres urbains. Augmenter les
salaires des préposés aux bénéficiaires sans améliorer la situation financière
des résidences pour aînés entraînera une accélération des fermetures. Celles-ci
causeront énormément de torts aux aînés qui devront se déraciner de leur milieu
de vie, sans compter la pression qui se répercutera inévitablement sur le
système public des CHSLD. Les impacts seront vécus par les aînés qui seront
forcés de déménager, par des employés qui vont perdre leur emploi, par des
communautés qui vont perdre des membres importants de leur histoire, et par le
système de santé public qui va devoir prendre en charge ces nouveaux
utilisateurs. C'est exactement le contraire d'une proposition gagnant-gagnant,
c'est une proposition où tout le monde est perdant. Je vous signale que ce mémo
date de janvier 2020, donc avant même le début de la pandémie. Ça fait que sur
ce, je passe la parole à M. Boucher.
M. Boucher (Hugo) : Bonjour.
L'enjeu de la main-d'oeuvre, c'est l'un des plus importants défis auxquels on
fait face quand on est dirigeant d'une RPA ou un gestionnaire. Malheureusement,
l'utilisation d'agences de placement, et encore plus durant la pandémie, a été
nécessaire pour nous permettre de répondre aux besoins des résidents vivant en
RPA. Les membres du RQRA souhaitent s'affranchir graduellement mais totalement
de leur dépendance à l'endroit des agences de placement de personnel. Elles
sont pour nous un fléau dont nous aimerions bien nous débarrasser le plus
rapidement possible, c'est pourquoi nous partageons en tout point la volonté du
ministre de la Santé et des Services sociaux de réduire l'empreinte des agences
de placement de personnel et de la main-d'oeuvre indépendante dans nos
organisations. En effet, nous reconnaissons les problématiques qui viennent
avec l'utilisation des agences de placement, mais la très grande majorité des
RPA ont recours à ces dernières pour continuer leur travail essentiel auprès
des aînés...
M. Boucher (Hugo) : ...les
Québécois. Entre 2016 et 2021, la part des dépenses en agence de placement sur
la masse salariale totale des RPA est passé de 1,4 % à 10,9 %. C'est
même maintenant 12,8 % pour celles de catégorie quatre qui offrent le plus
de soins. En vertu du Règlement sur la certification des résidences privées
pour aînés, les RPA doivent respecter, selon leur taille et leur niveau
d'autonomie, catégorie 1 à 4, des seuils minimaux de personnel, et ça,
24 h sur 24. C'est uniquement lorsqu'elles font face à une situation
susceptible d'enfreindre les exigences du règlement et d'ainsi mettre en danger
le résident que les RPA n'ont pas d'autre choix. Et ce n'est vraiment pas de
gaieté de cœur que de faire appel aux agences.
Comme nous l'avons déjà dit, nous
souhaitons nous affranchir de l'utilisation des agences et nous sommes heureux
que le gouvernement se penche sur la question. Cependant, nous sommes
extrêmement craintifs quant aux multiples bris de services si le projet de loi
est adopté tel quel. Dans l'état actuel du projet de loi n° 10 et en
l'absence de règlement, nous nous retrouvons dans une position étrange, celle
de ne pas souhaiter utiliser les services des agences, tout en sachant que nous
devons tout de même nous y résigner pour assurer le bien-être des aînés,
prodiguer les soins nécessaires et respecter les conditions de notre
certification. Dans ce contexte, nous demandons d'ajouter une exception
permettant aux RPA, à leur discrétion, de faire appel aux agences de placement
face à une situation de bris de service potentiel, il en va de la santé et de
la sécurité de nos résidents et résidentes. Sur ce, nous sommes prêts à prendre
vos questions.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup pour votre exposé.
Alors, M. le ministre.
M. Dubé : Très bien. Alors,
messieurs, merci pour votre présentation qui est très claire. Je pense qu'on a
des objectifs communs, hein? On a... je pense qu'on partage plusieurs de vos
points que vous venez d'illustrer. Je pense qu'avec ce qu'on vient d'entendre
sur les ressources intermédiaires que... Je pense que vous étiez en salle quand
ces gens-là étaient là. Je pense que les Québécois comprennent aujourd'hui
qu'on parle de 1 200 RI,
on parle de presque 1500 RPA. C'est deux types de ressources qui sont dans
le réseau, mais qui sont quand même... je vais l'appeler des ressources
privées, hein, qui sont excessivement importantes à notre réseau.
Ça fait que je pense que les Québécois,
par l'intermédiaire de ce projet de loi là, entendent bien les difficultés que
vous vivez présentement. Bon, je pense que je fais la comparaison que depuis le
début de la pandémie, il y a eu pas mal de mesures d'atténuation qui ont été
données. Mais ça n'a pas réglé tous les problèmes. Ça, je pense qu'on en est
très conscients puis je veux juste que les Québécois comprennent bien, parce
que vous avez eu des problèmes. Je veux juste le mentionner, là, mais tantôt
vous avez sauté rapidement là-dessus, mais je pense que c'est important que les
Québécois le comprennent. Vous avez maintenant des taux d'assurance qui sont
plus élevés, il y a une foule de... vous avez dit des mesures à respecter en
termes de contrôle des infections, etc., qui... Et je sais que notre
gouvernement, depuis le début de la crise, a fait... Vous a aidé là-dedans.
Mais effectivement, peut-être pas au niveau ou... l'ampleur de ce qui se passe,
et entre autres avec la main-d'oeuvre indépendante.
• (16 h 20) •
C'est pour ça que je pense que ce qu'on
essaye de faire en ce moment, puis je le dis, puis j'entends beaucoup de
commentaires positifs de l'opposition en ce moment. Ça fait que je trouve ça
excessivement intéressant. Nous, ce qu'on veut, c'est essayer de mieux cibler
comment on va s'affranchir des agences, parce qu'on a tous le même objectif, parce
que ce n'est plus un mode d'exception, c'est rendu un mode de gestion, puis on
ne peut pas jouer avec ça. Puis c'est vrai dans les CISSS et les CIUSSS, comme
c'est rendu chez vous, vous n'avez plus de choix. Ça fait que je pense que les
gens comprennent ça.
Bon, maintenant, comment on fait cet
affranchissement-là? C'est ça qui est notre plus grand défi. Vous avez dit tout
à l'heure, vous avez dit tantôt : C'est un fléau. Moi, j'ai déjà dit que
c'était un mal nécessaire. Je me souviens avoir déjà dit ça, peu importe les
mots, je pense qu'on est à la même place. Comment on fait, là, à très court
terme? Parce que vous comprenez, puis je l'ai dit, les mesures qu'on va mettre
dans les règlements, c'est sensiblement les mesures qu'on avait durant la
pandémie, durant les mesures d'urgence, tarifs maximums, etc. Vous voyez quoi
là-dedans? C'est quoi les mesures les plus importantes que je pourrais vous
demander, que vous connaissez bien parce que vous avez vécu, vous êtes là, vous
l'avez dit, là, avec... en 2021, vous étiez pas mal dans... vous avez
l'expérience. C'est quoi, les mesures que vous devriez... qu'on devrait, nous
autres, s'assurer qu'ils vont être là pour les RPA, qui permettraient justement
d'encadrer le plus rapidement possible?
M. Fortin (Marc) : Je vais
commencer. Je te laisse la parole, peut-être après, Hugo. Moi, je vous dirais
un plafond...
M. Fortin (Marc) : ...effectivement
parce que, même durant la pandémie....
M. Dubé : Un taux maximum
pour que les gens comprennent.
M. Fortin (Marc) : Un taux
maximum salarial alors. Et puis, même durant la pandémie, il y en avait un avec
le décret, puis on a essayé de faire prendre des actions parce qu'on avait
plein de factures d'agences qui étaient hors décret.
M. Dubé : Hors décret.
M. Fortin (Marc) : Donc qui
étaient... ils étaient... ils auraient dû être être mis à l'amende mais...
M. Dubé : Puis il y avait...
mais, excusez-moi, je voudrais... il n'y avait pas de pénalité dans ce
temps-là.
M. Fortin (Marc) : Il n'y
avait pas de pénalité, non.
M. Dubé : Il n'y avait pas de
pénalité,
M. Fortin (Marc) : Mais vous
avez raison.
M. Dubé : Mais taux
maximum...
M. Fortin (Marc) : Bien, taux
maximum avec pénalités parce qu'il faut que ça soit respecté. Il faut aussi
qu'il y ait un encadrement parce qu'il y a une créativité de la part des
agences. Ah! tiens, on charge des kilomètres entiers, on charge pour les
vérifications d'antécédents. Mais à chaque fois qu'on l'envoie quelque part, il
y a eu toutes sortes de créativité sur des charges, là, ça fait que vraiment un
encadrement sur la totalité des charges qui peuvent être chargées parce que
lorsqu'un employé travaille pour une agence, la vérification d'antécédents a
été faite une fois, 40 $. Il n'a pas besoin de charger le 40 $ chaque
fois que tu la places à un endroit. Ça fait vraiment tout encadrer ce côté-là,
avec le taux maximum. Aussi les qualifications, souvent, on l'apprend sur place
puis on a besoin de trois employés la nuit pour la certification, puis la
personne qu'ils nous a employée, on les regarde travailler, puis, bien non,
elle n'a pas les compétences de cette personne-là. Ça fait qu'il faut qu'on
soit capable de parer pour ça, mais ce n'est pas ça qui était dans le contrat,
ce n'est pas ça qui était demandé, puis souvent on est pris en otage dans ces
situations-là, donc aussi encadrer les compétences.
M. Dubé : Oui, mais
là-dessus... là-dessus, parce que j'ai senti mon collègue de Rosemont, très
sensible à l'aspect qualité, là, puis je pense que c'est très important ce que
vous dites. Comment vous pouvez vous prémunir comme ça? Parce que, comme vous
dites, des fois que vous appelez à la dernière minute, c'est le propre d'une
agence pour vous aider. Vous faites quoi quand la qualité n'est pas là?
M. Fortin (Marc) : Hugo.
M. Boucher (Hugo) : Qu'est-ce
qu'on fait quand la qualité n'est pas là? On n'a malheureusement pas le choix
d'accepter la personne quand même et on va toujours avoir un responsable de
corps, nous, dans nos résidences, qui lui, va s'assurer de vérifier le travail
de la personne, mais il ne peut pas non plus le faire à sa place. Mais c'est
certain qu'il va le vérifier, puis ça, ça amène les conséquences de beaucoup
d'épuisement. Quand on rentre au travail parce qu'on n'est jamais avec les
mêmes collègues qu'on ne connaît pas, qui ne connaissent pas la résidence il
faut tous leur montrer. C'est une raison pour laquelle plusieurs partent. Puis
souvent, ils se disent... C'est comme un cercle vicieux, ils se disent :
Bien là, si lui va en agence, puis moi, je tout le temps pris pour essayer de
les guider, mais moi aussi, tu sais, je vais y aller en agence.
Les agences dans nos résidences, c'est un
peu comme la gangrène ça, ça rentre une personne, puis après ça, il en prend
une autre, il en prend un autre, il en prend un autre, puis souvent ils vident
nos étages, surtout nos étages de soins, puis là on se retrouve avec juste des
agences sur place, ce qui fait que le service devient honnêtement, il faut le
dire, inférieur en qualité, là, il n'y a un doute. Puis moi, ce que je crois
pour... ce qui nous aiderait le plus sur le terrain pour s'affranchir des
agences, c'est vraiment le plafond salarial, mais dans le sens que, quand le
plafond salarial est deux fois et demie plus élevé que le salaire que la
personne paie sur le plancher, le plafond est utile à pas exagérer, à pas à
nous envoyer à des 70 $ de l'heure, mais il ne nous aide pas à nous
affranchir parce que les gens vont rester là quand même.
M. Dubé : Voulez-vous juste
bien juste bien expliquer ça? Parce que des fois on mêle deux tarifs, là, ça
fait que je...
M. Boucher (Hugo) : Bien, une
PAB...
M. Dubé : Vous êtes un
opérateur.
M. Boucher (Hugo) : Oui, une
PAB va nous charger....
M. Dubé : Vous en avez une
dizaine, bon, allez-y, là, avec... partez de la base, là. Comment
habituellement un employé, mettons un PAB ou... prenons un PAB parce que....
M. Boucher (Hugo) : Un PAB.
Un PAB, chez nous, à l'heure actuelle, va faire avec la prime environ 20 $
21 $ 19 $ et quelque chose avec la prime. Ça, c'est un autre sujet
quand elle va partir. Mais on n'est pas là pour ça aujourd'hui. Donc, si une
agence nous charge, je ne sais pas, moi...
Une voix : Souvent 45 $.
M. Boucher (Hugo) : 45 $.
En ce moment, c'est environ 45 $ que les agences nous chargent.
M. Dubé : C'est le prix
qu'ils vous chargent. Ce n'est pas le prix qu'ils paient le PAB qui vient chez
vous, là.
M. Boucher (Hugo) : Pour être
franc, puis tu sais, je ne peux pas... je n'ai pas comme de preuves à que je
dis, mais je discute avec énormément de gens d'agences, là, puis la grande
majorité s'en va dans la poche de l'agence, là, et ils leur donnent quelques
dollars de plus.
M. Dubé : Dans le cas des PAB.
M. Boucher (Hugo) : Dans le
cas des PAB. Mais nous, c'est surtout dans le domaine des RPA, oui, il y a un
problème avec les infirmières auxiliaires, et tout ça, 65 $, 68 $.
M. Dubé : Bien, on pourra
faire les deux parce que vous avez quand même... Bien, c'est sûr que vous avez
plus de PAB dans les RPA, que vous avez d'infirmières. Mais continuez sur votre
exemple PAB, là, parce que c'est important.
M. Boucher (Hugo) : Donc, ma
PAB, elle qui fait 20 $ de l'heure, va se faire recruter par une agence
qui va lui en donner 25 $ ou 23 $.
M. Dubé : D'accord.
M. Boucher (Hugo) : Puis qui
va charger 45 $. Persuadé qu'elle irait jusqu'à 65 $ si elle n'avait
pas de plafond, sûr et certain. Mais à 45 $, c'est encore trop élevé pour
empêcher que les agences... qu'on utilise les agences parce qu'ils vont même
avoir, un. Leur marge de profit, puis, deux, ils vont devoir payer plus que
nous on en a la capacité.
M. Dubé : Vous qui êtes
à l'échelle du Québec...
M. Boucher (Hugo) : Oui.
M. Dubé : ...vous avez dit
que vous avez... même dans la région ici à Québec.
M. Boucher (Hugo) : Oui, j'en
ai une à Québec.
M. Dubé : Est-ce...
M. Dubé : ...est-ce que la
compétition est assez forte entre chacune de vos régions ou c'est assez
différent? En termes, là... Quand vous dites vous appelez quelqu'un qui n'est
pas... déjà une entente avec ce qu'on appelle le centre d'acquisition, c'est
quoi, la compétition que vous êtes capable de dire : Bien, toi, tu me charges
tant, ou ce n'est pas compétitif du tout? J'aimerais ça que vous expliquez ça
aussi.
M. Boucher (Hugo) : La
compétition, si on est capable de négocier les prix d'une certaine façon?
M. Dubé : Oui.
M. Boucher (Hugo) : Impossible.
M. Dubé : O.K. Puis pourquoi?
M. Boucher (Hugo) : Parce
qu'ils vont au plus offrant. La demande est tellement criante qu'ils vont tout
simplement au plus offrant. Et quand... avant que vous interveniez, M. le
ministre, pour les... plafonner les primes, là, durant la pandémie, moi, j'ai
eu des éclosions dans mes résidences, là, puis j'ai eu du monde qui... des PAB
à 80, 85, 90, j'en ai vu, puis plus que...
Une voix : ...
M. Boucher (Hugo) : Dollars
de l'heure. Puis plus qu'une compagnie, puis les gens ne se gênaient pas, là.
Puis c'est ça ou tu ne l'as pas.
M. Dubé : Puis dans... Si je
prenais, rapidement, des infirmières. Une infirmière, mettons, là, dont le
salaire... Puis là je vais prendre une auxiliaire, par exemple, mettons, qui
est à 25 $ ou 30 $, dépendamment où elle est dans l'échelle
salariale, on vous la recharge à quel prix?
M. Boucher (Hugo) : 62,
actuellement autour de 62, 65, 72 jusqu'à... il y en a jusqu'à 75, mais, moi,
les gens avec qui que je fais affaire à l'heure actuelle...
M. Dubé : C'est là que vous
dites que c'est presque le triple.
M. Boucher (Hugo) : Exactement.
M. Dubé : Parce que là vous
prenez la différence entre le coût qu'elle aurait dans le réseau par convention
collective versus le prix qu'on vous la charge.
M. Boucher (Hugo) : Exact.
Parce qu'avec taxes... Les taxes, nous, on n'a pas d'intrants, extrants,
étant... ayant des revenus non taxables, c'est comme si ça prenait la place des
bénéfices marginaux, tu sais, le 15 %. Ça fait que c'est vraiment le
triple, là, c'est un vrai triple, là, au fond, à la ligne en bas.
M. Dubé : O.K. Puis, dans le
cas des infirmières, est-ce qu'elles sont... Je connais un peu quand même la
réponse, mais je vous le demande à vous. Les infirmières sont-elles payées plus
comparé aux PAB dont vous... entre le salaire de base qu'elles ont...
M. Boucher (Hugo) : Dans les
RPA?
M. Dubé : Oui.
M. Boucher (Hugo) : Oui, oui,
oui. Bien, je vais parler pour chez moi, mais, dans nos résidences, là, à
l'heure actuelle, là, une infirmière auxiliaire va faire entre 25 et 35
dépendant de ses responsabilités.
M. Dubé : Oui, mais vous
venez de me dire selon convention. Moi, ce que je veux savoir, c'est :
Quand vous vous engagez une... pardon, une agence, puis qu'ils vont vous la
charger à 75 au lieu de...
M. Boucher (Hugo) : Ah! non,
non, non, elle aussi, ils lui donnent cinq, six...
M. Dubé : Bien, c'est ça je
veux savoir, c'est quoi à peu près...
M. Boucher (Hugo) : Selon les
discussions que j'ai avec eux, ils vont leur donner 5, 7, 8 $ de plus de
l'heure.
M. Dubé : Ça fait que la
marge que les gens se gardent...
M. Boucher (Hugo) : Elle est
énorme.
M. Dubé : On va dire juste un
chiffre, là, puis vous me direz si je me trompe, là, mais admettons que la
marge, c'est 40 $, entre le 70 puis le... 40 $, une infirmière va
faire une RPA... une infirmière qui est dans une agence va faire quoi, à temps
partiel, trois jours semaine, admettons? Parce que c'est une des raisons pour
lesquelles elles aiment les agences, parce que des fois ce n'est pas à temps
plein, on s'entend bien. Donc, 1 000 heures au lieu de
1800 heures, ça veut dire que l'agence fait 50 000 $ de profit
brut sur chaque infirmière? 50 $ fois 1 000 heures.
M. Boucher (Hugo) : Moi,
personnellement, selon mon expérience, je pense que ça pourrait ressembler à
ça.
M. Dubé : O.K. Je n'ai pas
d'autres questions, M. le Président, je vais laisser mes collègues.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, Mme la députée de
Marie-Victorin.
Mme Dorismond : Bonjour à
vous trois. Je veux revenir sur le titre d'infirmière. Parce que là vous avez
parlé d'infirmières auxiliaires, oui. Est-ce que vous avez des infirmières
techniciennes ou bachelières? Et c'est quoi, le prix?
M. Fortin (Marc) : Il y en a
dans certains RPA, définitivement. Puis les prix vont varier, les salaires vont
être plus élevés dépendant de leur expérience, mais ça peut aller... il y en a
qui vont faire du 110 000 $, 120 000 $ par année. Il y en a
qui...
Mme Dorismond : Combien?
• (16 h 30) •
M. Fortin (Marc) : Du
110 000 $, 120 000 $ par année. Ça, c'est ceux qui offrent des
soins jusqu'à la fin de vie, qui ne font que du soin. Il y a des RPA qui font
ça, dont Lokia, juste ici, à Québec aussi.
M. Boucher (Hugo) : Ça, ça va
être les gestionnaires, le plus haut placé...
M. Fortin (Marc) : Oui,
vraiment le plus haut placé... Puis sinon, les salaires vont varier entre
60 000 et 85 000, là, dépendant de l'expérience puis du type de résidence.
Mme Dorismond : Puis ça,
c'est le coût de la MOI...
M. Fortin (Marc) : Ça,
c'est... je vous parle du salaire annuel 60 000 et 80... à 85 000 par
année, là, ça fait que ça, ça va être le coût d'une infirmière qui va être
employée. Si vous parlez d'agence, habituellement, c'est plus rare qu'on va
prendre des infirmières...
M. Boucher (Hugo) : Ça n'est
jamais arrivé.
M. Fortin (Marc) : C'est
vraiment des auxiliaires et surtout des PAB qu'on va prendre chez des agences,
puis... Oui.
Mme Dorismond : O.K. Donc,
bon, ça règle ma première question. Dans le fond, le type d'emploi que vous
utilisez le plus, la main-d'œuvre indépendante, c'est PAB puis infirmières
auxiliaires. O.K.. Pouvez-vous me décrire aussi les circonstances dans
lesquelles les RPA ont recours à la main-d'œuvre indépendante?
M. Fortin (Marc) : Oui, bien,
je peux commencer, je te laisse parler après. Quand je parle à mes membres à
travers...
16 h 30 (version non révisée)
M. Fortin (Marc) : ...à travers
le territoire, c'est souvent, bon, une employée qui a appelée à 2 heures,
puis elle ne rentrera pas, puis on est samedi, puis elle ne rentrera pas ce
soir pour son chiffre, puis là, bien, il faut que tu appelles une agence parce
que tu as des seuils minimums à respecter puis tu as des services à donner,
donc il faut appeler une agence pour avoir une employée. Un gardien, le samedi
soir ou le vendredi soir, qui décide de ne pas rentrer, bien, ça prend un
gardien pour les seuils de nuit. Donc, ça, c'est souvent, puis l'ARIHQ dit la
même chose, c'est souvent les seuils de nuit et les seuils de fin de semaine où
il y a plus de problématiques, mais ce qui est plus alarmant, puis ce que je
vois avec autant mes grands groupes surtout aussi à travers le territoire, c'est
qu'il y a deux, trois employés qui rentrent en agence puis ils reviennent
travailler à la résidence à trois fois plus cher, puis là ils disent aux autres :
Ah, je peux travailler quand je veux, j'ai de la flexibilité. Puis là il y a
40, 50 % des employés qui s'en vont en agence. Ça fait que là on a des
grandes résidences qui se disent : je ne suis plus viable financièrement,
je vais être obligé de faire quelque chose. Puis là on parle de grosses
résidences, là. Puis là je suis rendu avec 60 % des employés d'agences, un
peu comme vous avez vécu dans certaines régions avec les hôpitaux, au niveau du
public, ce n'est plus viable ça. Ça fait que là, comment est-ce qu'on charge
ça? On ne peut pas charger ça aux aînés, mais, à un moment donné, est-ce que la
résidence va fermer parce qu'elle ne sera plus viable financièrement? Puis ça,
on en a discuté beaucoup, puis c'est vraiment problématique. Je veux dire,
nous, de la façon qu'on l'a... C'est toi qui l'avais classifié comme ça, Marc,
c'est un comportement parasitaire, c'est vraiment des parasites, c'est qu'ils s'insinuent,
ils s'intègrent à l'intérieur d'un système, ils n'offrent aucune valeur
ajoutée, zéro valeur ajoutée, puis ils ramassent une partie de l'argent en passant.
Ça fait qu'il n'y a personne qui gagne quoi que ce soit puis, au bout de la
ligne, ça fait juste augmenter les coûts d'opération, puis c'est les aînés qui
vont être obligés de payer parce que, sinon, les résidences vont fermer. Ça
fait que tu es pris avec vraiment une situation vraiment problématique. Il faut
se débarrasser des agences, c'est vraiment inutile. Tu le disais tout à l'heure,
1,9 % avant la pandémie, on est rendu à 12 %. Moi, j'ai une chaîne...
une grande chaîne de résidences qui me disait : Avant la pandémie, on
dépensait à peu près 100 000 $ en agence ici et là, juste pour des
besoins, on est rendu à 12 millions aujourd'hui, au mois de février 2022
pour l'année qui vient de finir. Ce n'est plus viable, ce n'est plus possible.
Ça que ça, il faut que ça change, cette situation-là, c'est définitif. C'est
pour ça qu'on supporte tout ce que vous faites, M. le ministre, dans cette
direction-là. Mais c'est sûr qu'on ne peut pas être pris non plus avec des...
M. Dubé : Ah, je ne suis pas
seul, hein, je vous dirais.
M. Fortin (Marc) : Oui, oui,
non, écoutez, mais on ne peut pas être pris avec des contraventions si on est
obligé de prendre une agence parce qu'il faut quand même donner des bains aux
aînés, il faut quand même changer leur couche, il faut leur amener les
médicaments. Ça fait qu'il faut avoir du service quand même, ça fait qu'on n'a
pas le choix, en ce moment, de faire affaire avec des agences quand même.
Veux-tu compléter?
M. Boucher (Hugo) : Oui,
quand on fait affaire avec des agences aussi, des fois, c'est les seuils
minimums, c'est des trucs... c'est des règlements qu'il faut... qu'on est
obligé de suivre pour le seuil minimum, mais il y a aussi l'aspect... Tu sais,
les RPA, souvent, là, les gens qui ne connaissent pas ça ne savent pas tout ce
qu'il y a comme sortes de RPA. Tu sais, moi, j'ai des RPA de 100 unités
avec 65 employés, là, c'est... on... il y a beaucoup, beaucoup de soins,
là. Donc, même si je respecte mon seuil minimum, mais que le matin j'ai 80 toilettes
partielles à faire, s'il me manque deux PAB, il m'en faut absolument une autre
ou d'une agence, minimum, pour pouvoir faire la toilette partielle. Il y a
aussi cet aspect-là, ce n'est pas juste des grosses résidences autonomes non
plus, là.
Le Président (M. Provençal)
:Merci. M. le député de Pontiac, je
vous... Prenez la relève.
M. Fortin :Merci, M. le Président. Je trouve la discussion extrêmement
intéressante, puis c'est intéressant de voir votre perspective à vous, là, puis
comment ça affecte votre modèle d'affaires puis le modèle d'affaires de ceux
qui n'ont pas réussi, là, qui ont... qui ont dû fermer leurs portes au cours
des dernières semaines, les derniers mois des dernières années puis ceux qui
vont devoir le faire, à moins qu'il se passe quelque chose bientôt. Je trouve
ça... Vous êtes dans une espèce de place pas hyper confortable, là, hein, c'est...
M. Fortin (Marc) : ...
M. Fortin :Bien, pas ici, là, je ne veux pas parler de la salle de la
commission, là, ça c'est... Mais, tu sais, vous dites au ministre puis à tout
le monde ici : On appuie ce que vous faites, on comprend où vous voulez
vous en aller, les agences, c'est des parasites, ça vient chercher le double,
le triple du salaire que la personne fait, qui elle donne des services à mes
résidents, là, mais eux, ils ne font pas grand-chose. Ça... En gros, c'est à
peu près ce que vous dites. En même temps, vous demandez, si j'ai bien compris
vos propos initiaux, M. Fortin, là, une exception, un peu pour les RPA. Alors,
s'il y a une exception qui est donnée au RPA, comment vous allez vous en sortir
à la fin de la journée?
M. Fortin (Marc) : Bien, c'est
sûr qu'on n'a pas le choix, on ne traite pas des animaux, on ne fait pas des
cannes de bines, on s'occupe d'aînés, d'êtres humains, puis un robot ne peut
pas faire le travail, donc ça prend des humains. On a mis toutes sortes de
programmes en place pour les récupérer à l'étranger, essayer d'aider les RPA
pour faciliter le recrutement puis réduire les coûts, on fait toutes sortes de
choses, des fois avec le MIFI, d'autres fois avec des firmes externes, on a
toutes sortes de programmes, mais ça...
M. Fortin (Marc) : ...les
humains maintenant, puis ça prend 12, 14 mois pour qu'ils viennent ici. Ça
fait que c'est quand même long. Ça fait qu'entre temps, nous, on essaie de
trouver des solutions. On sait que le ministère travaille sur des solutions.
Mais entre temps, on a besoin de s'occuper des gens puis on ne peut pas envoyer
un robot, ça fait que ça prend un humain. Donc, qu'est-ce qu'on fait? Bien, ça
ne nous fait pas plaisir. On n'a pas le choix. Puis, en ce moment, il y a près
de 500 RPA qui ont fermé depuis cinq ans, 300 dans les deux dernières
années. Pourquoi? Parce qu'on ne contrôle pas les revenus qui rentrent. C'est
contrôlé par le TAL, les aliments sont là, les soins sont là, le loyer est là,
puis il dit : Ah! c'est 2.2, oui, mais mes coûts augmentent entre huit et
14 % depuis trois ans. Ça fait qu'il n'y a plus personne qui arrive. Puis
là, tu rajoutes les agences par-dessus ça, ça fait que c'est sûr qu'on ne veut
pas les utiliser. Mais le bien-être de l'aîné est primordial. Ça fait que si on
ne peut pas s'occuper de l'aîné, il y a quelque chose qui ne marchera pas non
plus, là.
M. Fortin (Pontiac) :Pensez-vous, avec une exception qui est donnée aux RPA,
qu'éventuellement vous allez être... à terme, là, mettons que le projet de loi
est adopté tel quel, puis que la réglementation ressemble à ce que le ministre
suggère, puis qu'il y a une exception pour les RPA, temporaires. Pensez-vous
qu'éventuellement, vous allez être capables de reprendre le dessus à un moment
donné?
M. Boucher (Hugo) : Oui,
parce que je crois que le ministre, puis je ne connais pas les règlements qui
vont être mis en place...
M. Fortin
(Pontiac) :Ça, c'est un autre problème
ça.
M. Fortin (Marc) : Mais
j'imagine qu'il va y avoir un plafond salarial. En faisant le plafond, bien,
ils ne pourront plus opérer comme avant. Ça va ramener des gens dans le milieu,
autant public que privé. Donc on prend le gamble nous aussi que les gens vont
revenir. Si les gens ne reviennent pas, bien, on va tous être obligés de se
revoir puis dire qu'est-ce qu'on fait maintenant? Parce que là, ça ne marchera
pas. Mais on ne peut pas faire autrement que de dire : En mettant un
plafond salarial, en mettant certaines restrictions, en leur rendant la vie
dure, bien, les employés vont revenir dans le privé ou dans le public. Puis ça
va nous donner un coup de main puis ça va nous permettre de nous désaffranchir
des agences le plus possible.
M. Fortin
(Pontiac) :Mais ça, vous pensez que c'est
possible? Vous pensez que les employés qui ont quitté pour les agences peuvent
revenir s'ils n'ont pas un meilleur salaire aux agences?
M. Fortin (Marc) : Je crois
que oui. Les gens sont...
M. Boucher (Hugo) : Moi, j'en
suis persuadé.
M. Fortin
(Pontiac) :Pourquoi?
M. Boucher (Hugo) : Depuis le
début, moi, je ne crois pas à la théorie du... oui, mais les gens ne
retourneront pas travailler. Ils vont retourner travailler avec nous. On va
leur offrir des bonnes conditions. On va être prêts à leur offrir des bonnes
conditions, puis d'avoir un beau milieu de travail. En ce moment, c'est juste
qu'on a une compétition injuste, on n'est pas à armes égales avec eux. Puis
c'est ça, le problème. Puis, dans le fond, comme je disais tantôt, moi, selon
moi, quand je suis sur le terrain, mais moi, je ne suis pas un politicien, puis
je ne connais pas tous les règlements puis comment les faire, mais je sais
qu'il faut que le salaire qu'ils peuvent demander ne leur permette pas de nous
compétitionner autant que ça. En ce moment, il n'y a pas de compétition, ils
gagnent sur toute la ligne. Nous, on joue au hockey pas de bâton, puis eux, ils
en ont.
M.
Fortin (Pontiac) :Là où je vous
rejoins, c'est que la très grande majorité des PAB, entre autres, là, puis des
employés du réseau de la santé de façon générale, c'est les gens de grand cœur
qui font ça parce qu'ils aiment leur profession, ils aiment leur patient. Puis
effectivement, moi aussi, je pense qu'ils veulent travailler dans ce milieu,
dans un milieu de soins.
M. Boucher (Hugo) : Il ne
faut pas oublier qu'on a 90 % de nos employés actuellement, notre masse
salariale, qui est nos employés quotidiens, là, c'est 10 %, les agences,
mais 10 % qui coûte 30 %.
M. Fortin
(Pontiac) :Mais c'est 10 % au net,
au total des RPA. Parce que vous avez semblé dire qu'il y en a qui... petit à
petit, là, ça a pris beaucoup, beaucoup de place, puis j'imagine que c'est
beaucoup plus que 10 % pour eux autres, là.
• (16 h 40) •
M. Boucher (Hugo) : Il ya des
RPA qui, selon les régions, selon certains endroits, selon certains, qui
souffrent plus que d'autres, là, évidemment.
M. Fortin (Marc) : Les petites
RPA ne prendront pas les gens d'agence, ça coûte trop cher, donc ils vont faire
le travail eux-mêmes, mais ils se brûlent puis les appels de détresse que je
reçois parce que les gens sont brûlés, ils sont plus capables, ils font la
cuisine, ils changent les couches, ils préparent à manger, ils vont chercher la
nourriture en faisant l'épicerie, ils font tout là. Bien, à un moment donné,
ils se font sept jours par semaine, 24/7, le monde appelle en pleurant. Les
appels de détresse que je recevais dans la dernière année, là, c'est vraiment à
déchirer le cœur. Puis les gens, ils me disent : Moi, j'aime les aînés,
j'ai fait ça pour les aînés. Ça fait 20 ans que je fais ça. Les gens
pleurent au téléphone, là, je veux dire...
M. Fortin
(Pontiac) :Vous avez parlé, tantôt, de...
En fait, non, j'ai une dernière chose. Le projet de loi, là, il donne au
ministre le pouvoir d'autoriser, dans certaines circonstances exceptionnelles,
un organisme du secteur de la santé et services sociaux de continuer à recourir
pour une période précise, là, aux services d'une agence de placement. Alors, le
ministre, lui, peut décider, O.K.? J'ai un problème à tel endroit. Je dois
recourir à une agence, mais vous, dans votre... dans ce que vous connaissez de
votre fonctionnement avec le ministère de la Santé, là, mettons qu'il n'y a pas
d'exception pour des RPA, là, puis qu'à un moment donné, vous êtes mal pris,
vous êtes obligés de prendre le téléphone, d'appeler soit votre CIUSSS local ou
le ministère. Je ne sais pas trop comment ça pourrait marcher, là. Est-ce que
vous pensez que ce serait quelque chose d'efficace? Ou est-ce que... parce
qu'il est en train... le ministre est en train de dire : Moi, je vais
avoir le pouvoir de faire ça. Là, aujourd'hui, vous...
M. Fortin
(Pontiac) :...vous dites... vous nous
dites : On le fait mais en dernier recours déjà, ce n'est pas ça qu'on
veut faire. Donc, le ministre se donne le pouvoir de faire ce que vous faites
en dernier recours déjà. Est-ce que vous pensez que c'est un mécanisme qui peut
fonctionner, ça, qu'une RPA, à un moment donné, dise au ministre de la Santé,
là : J'ai besoin d'aide, donne-moi une exception, puis que vous allez
l'avoir à temps?
M. Boucher (Hugo) : Non, je
ne crois pas, je ne crois pas, non. La réponse, c'est non.
M. Fortin (Marc) : On
travaille avec les CISSS et les CIUSSS pour ça. Puis, je veux dire, si la
personne, à 4 h, elle t'appelle pour te dire : Je ne rentre pas à 6 h,
puis on est samedi, ou je ne rentre pas à 8 h ce soir, il n'y a personne au
CIUSSS qui va répondre le samedi de toute façon, ça fait qu'il va falloir qu'on
prenne un quart puis il va falloir qu'on l'appelle. On est des entreprises
privées, mais on est d'accord d'être impliqués, d'être inclus et de travailler
avec vous, mais il faut nous donner cette flexibilité pour un certain temps,
parce que c'est les aînés qui vont souffrir là-dedans. Je veux dire, si je ne
suis pas capable d'offrir le service, on va venir m'accuser de maltraitance
parce que la personne est restée dans sa couche plus longtemps, parce que je
n'avais pas... On ne peut pas avoir ça, là, les gens vont tout simplement
fermer parce qu'il va y avoir trop de risque, là. Ça fait que ça, on ne peut
pas avoir ça.
M. Fortin
(Pontiac) :O.K. Dernière chose de mon côté,
je vais revenir. On avait une discussion... Vous aviez une discussion, tantôt,
avec le ministre sur, par exemple, un préposé, là, qui ferait 21 $ chez
vous, l'agence lui offrirait 23 $, 24 $, 25 $, un petit peu
plus, vous chargerait 45 $. Donc là, il y a la question du salaire, du
plafond salarial, puis il y a la question du taux maximum. Lequel qui est le
plus efficace, là, selon vous? Parce que le taux maximum, c'est de 45 $
maximum, là, ça serait moins, mais c'est le 45 $ qu'ils chargent versus le
25 $ que la personne fait. Lequel qu'il faut... sur lequel il faut mettre
un plafond?
M. Fortin (Marc) : Bien, je
pense que ça doit être un plafond économiquement logique, c'est-à-dire que, si
aujourd'hui une préposée qu'on regarde avec les primes, maximum 21,27 $,
bien, une agence, maximum, peut charger 25 $ par exemple, ça fait que ça
nous donne un 3 $ de l'heure, mais il ne peut pas donner vraiment plus. Si
on veut vraiment s'affranchir... excusez-moi, c'est le genre de chose qu'il va
falloir mettre de l'avant, qui est un découragement économique pour les
agences. On ne peut pas les mettre à 40 $, ils vont continuer, ils vont...
Parce qu'ils n'ont aucune dépense, là, c'est une personne qui fait ça dans son
sous-sol des fois, elle n'a aucune dépense, avec un téléphone, internet, merci,
bonjour, elle a recruté des gens puis elle les place, là, il n'y a aucune
valeur ajoutée. Donc, il faut vraiment réduire leur taux potentiel au niveau du
plafond le plus possible parce que le moindrement on leur laisse juste un peu
trop de place, ils vont simplement être capables de quand même renchérir de
3 $, 4 $ l'heure, les personnes vont partir, puis ils vont être
capables de se mettre un 5 $, 10 $ dollars dans leurs poches.
M. Fortin
(Pontiac) :Dernière chose. Est-ce que...
Puis là vous avez avancé toutes sortes de chiffres, là, puis c'est un peu les
chiffres que vous avez utilisés chez vous mais aussi que vous connaissez de
l'industrie, là, est-ce que c'est possible de nous orienter... de nous fournir
qu'est-ce que vous pensez qui ferait du sens comme taux maximal, là, dans
chaque catégorie, là? Moi, je pense, ce serait utile. Je sais que la ministre
veut le faire par règlement, mais moi, je pense, ce serait utile pour nous
d'avoir cette conversation-là quand viendra le temps de l'étude détaillée.
Donc, si vous êtes capable de nous donner des suggestions là-dessus,
j'apprécierais.
M. Boucher (Hugo) : Puis,
au-delà de juste le salaire horaire qui est extrêmement important, si quand que
le résident... si quand l'agence rentre, elle doit tout montrer ses cartes de
perfectionnement qu'elle a tout en main, sinon, si elle ne le fait pas, elle a
une pénalité. Parce que là ça arrive, puis... mais il faut se mettre dans la
peau du gestionnaire, il n'a pas le choix, il est pris, ça fait qu'il va
l'accepter quand même, tu sais, puis il n'aura pas tant de conséquences que ça,
là.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup.
M. Fortin
(Pontiac) :Super, merci.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, je comprends qu'à la question
qui a été déposée... à la demande du député de Pontiac, vous allez nous faire
parvenir des données, des suggestions que vous allez envoyer au secrétariat et
que nous, nous allons distribuer à l'ensemble des membres de la commission. Je
tiens à vous remercier beaucoup, beaucoup pour votre collaboration, mais, avant
toute chose, on doit poursuivre avec le député de Rosemont.
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Merci d'être là. Je coupe court aux salutations, je n'ai pas de
temps. Soyez salués néanmoins. Moi, je pense comme vous que les gens qui ont
choisi ce secteur de travail là sont des passionnés. Je n'ai pas dit des
missionnaires, parce que souvent, comme c'est beaucoup de femmes, on dit :
Bien, elles font ça par passion, donc on va les payer moins. C'est détestable
comme une façon de voir les choses, mais je pense que, cela dit, les gens qui
travaillent dans le domaine sont passionnés. Je pense qu'elles vont, pour la
plupart, rester ou revenir.
Cela dit, il va y avoir nécessairement une
période de transition, nécessairement une période de transition. Je comprends
que vous, vous dites : Le plafond salarial aux agences, là, il devrait à
peu près s'approcher de ce qu'on paie au public, considérant que les filles d'agences...
je dis les filles d'agences parce qu'on dit toujours ça dans le secteur, les
gens d'agences ne touchent pas, n'ont pas accès aux bénéfices marginaux, là,
que sont les fonds de retraite, et tout. Ça fait kifkif, on arrive à peu près,
là. Je comprends que vous, vous dites : On doit se rapprocher à peu près,
là, du...
M. Marissal : ...qui est
versé par le public. OK. Mettons qu'on fait ça, moi, je serais d'accord, mais
il va y avoir une période de transition, on n'est pas naïfs, personne ici, là.
Qu'est-ce qu'on fait, dans cette période de transition, pour ne pas se faire
arnaquer, pour arriver à ce qu'on veut, c'est-à-dire s'affranchir des agences
puis ne pas faire peur non plus à des gens à qui on va dire tout d'un coup,
parce que, sais-tu, tu gagnais 28, tu vas en gagner 21. Je comprendrais ces
gens-là aussi de dire: Ça m'intéresse pas mal moins, là. Qu'est-ce qu'on fait?
M. Fortin (Marc) : Bien. Moi,
je dirais, trois créneaux... oui, on peut y aller graduellement aussi, mais le
premier, c'est le salaire. Le deuxième, c'est d'obliger les agences à donner,
par exemple, une fiche sur l'employé à chaque fois qu'un employé est choisi ou
doit être placé. La fiche montre quelles sont ses qualifications, ses
vérifications d'antécédents. On vient de leur mettre de l'administratif sur le
dos. Ils n'ont pas le choix de le faire, ce qu'ils ne font pas aujourd'hui.
Donc, quand ils vont engager des gens, les
formations vont être obligées d'être suivies, PAB, RPA, secourisme, transport
des aînés, tout le reste, donc obligées de mettre une fiche en place puis,
troisièmement, graduelle... faire une gradation au niveau salarial.
M. Boucher (Hugo) : Bien, ce
qu'on discutait, ça m'est venu en tête comme ça, là, mais, tu sais, ça pourrait
être graduel, là, tu sais, à la baisse, le temps que... le plafond pourrait
descendre tranquillement. Parce que c'est ça, je comprends que la personne, le
lendemain matin, tout le monde qui est dans les agences... dans les agences, on
ne peut plus appeler d'agence, on ne peut plus. Mais on peut faire une
transition plus graduelle de tout ça, puis je pense que nous, on va réfléchir
de notre côté. Puis justement, dans les données qu'on va vous envoyer, on va
essayer de voir comment on pense sur le terrain, en parlant aussi avec d'autres
opérateurs de RPA, plus petites, plus grosses, comment eux, ils pensent que ça
serait la meilleure chose. Puis on vous partagera tout simplement notre opinion
là-dessus, puis ça pour vous aider, là.
M. Fortin (Marc) : Pour pour
vous donner une idée, M. Marissal, parce que les besoins sont là. Donc, si la
loi, les règlements font en sorte que les gens reviennent, moi, vous m'en
donnez 1200, je vais tout les placer dans les RPA. On a mis un programme de
formation, pour les RPA, en place, avec la CPMT, puis on avait juste 300
places. En 2 heures, on a juste envoyé un courriel aux membres, dire: Qui veut
participer? En 2 heures, on avait 240 personnes déjà d'inscrites... qui avait
inscrit les personnes. Le lendemain après-midi, on était rendu à 660 PAB
d'inscrites pour leur formation, mais j'ai juste 300 places. Les besoins sont
là, mais, en faisant la bonne chose puis en mettant les bons règlements en
place, si on est capable de vraiment décourager les agences, à ce moment-là,
les gens devraient revenir dans le milieu.
Je pense que c'est de l'administratif, je
pense, c'est du salaire. C'est deux des éléments qu'il faut mettre en place.
Puis, quand je dis salaire, le troisième, c'est vraiment autour d'empêcher les
agences de faire de la créativité de comptable.
M. Marissal : Je comprends.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, M. Fortin. On termine
avec le député des Îles-de-la-Madeleine. Trois minutes 18.
M. Arseneau : Merci beaucoup,
monsieur le Président. Alors, je suis content de vous revoir. On a déjà eu
l'occasion de discuter de ces enjeux-là. Vous avez mis la table en disant qu'il
y avait des places qui disparaissaient presque au jour le jour. Est-ce que vous
pouvez nous donner un chiffre, soit un pourcentage, disons, depuis trois ans?
M. Fortin (Marc) : De
fermeture?
M. Arseneau : Oui.
M. Fortin (Marc) : Depuis...
Il y a eu 500 fermetures depuis cinq ans. Juste depuis janvier, on est rendu à
302...
M. Arseneau : Unités.
M. Fortin (Marc) : Pardon?
M. Arseneau : Des unités?
M. Fortin (Marc) : Non, des
résidences. Des unités, je pense que... nous disait comme 7 000, mais c'est à
peu près...
M. Snyder (Marc) : C'était....
Le chiffre qu'on a, c'est 473 fermetures en cinq ans...
M. Fortin (Marc) : Ça,
c'était en novembre, oui.
M. Snyder (Marc) : ...jusqu'à
l'automne dernier, et la disparition de 7000 unités de logement. Donc, un
nombre x... 473 résidences comprenant 7000 unités.
• (16 h 50) •
M. Fortin (Marc) : Avant, M.
Arseneau, il y avait des fermetures, mais il y avait aussi des nouvelles
résidences qui ouvraient. Malheureusement, les grosses résidences n'étaient pas
en région, ça fait que ça faisait toujours mal aux régions. Maintenant, ce
qu'on voit depuis un an et demi, les chiffres sont négatifs, ce qu'on n'a
jamais vu en 25 ans. Les chiffres sont négatifs, au niveau des unités, mois
après mois. Ça fait que ça, c'est beaucoup plus inquiétant, parce qu'on a un
besoin de 5000 logements pour les aînés par année pour les 20 prochaines
années.
M. Snyder (Marc) : On n'aura pas
ça cette année, je vous le garantis.
M. Fortin (Marc) : Non.
M. Arseneau : Je comprends.
Et puis ce que vous dites, et vous faites un lien avec ces fermetures-là, et la
hausse des coûts de main-d'oeuvre essentiellement. Est-ce que c'est le seul
facteur ou c'est le principal facteur, c'est ce qu'on doit comprendre?
M. Fortin (Marc) : Au niveau
des fermetures. Il y a vraiment trois créneaux, je vous dirais, le premier,
c'est financier, le deuxième, c'est la main-d'œuvre, le troisième, c'est l'alourdissement
réglementaire puis administratif qui s'installe avec la pandémie. Dans le
financier, il y a vraiment les assurances. Il y a vraiment le resserrement
bancaire à cause de la SCHL. Il y a les coûts de main-d'oeuvre, l'inflation qui
a explosé. Puis le TAL, qui ne comprend pas les RPA, puis il gère comme des
blocs appartements quand on a jusqu'à 65 % de nos frais mensuels qui sont
de la main-d'oeuvre. Ça fait que ça ne peut pas fonctionner. Le TAL est en
train d'étrangler les RPA. Puis, dans la main-d'œuvre, bien, on a les enjeux de
main-d'oeuvre, les enjeux de formation...
M. Fortin (Marc) : ...les
commissions scolaires ne sont pas capables de suivre, les cohortes cancellées
constamment. Ça fait qu'il y a beaucoup de problématique à trouver de la
main-d'oeuvre. Il y a beaucoup de défis...
M. Arseneau : D'accord.
Revenons sur le défi de la main-d'oeuvre...
M. Fortin (Marc) : ...puis au
réglementaires, là, il y en a une couple aussi...
M. Arseneau : ...parce qu'il
y a peu de temps.
M. Fortin (Marc) : O.K.
M. Arseneau : Juste une
dernière petite question factuelle. Le pourcentage PAB par rapport aux
infirmières auxiliaires, par exemple. Quand vous dites : Le défi de la
main-d'oeuvre, est-ce que c'est 80/20, c'est 80/10/10.
M. Boucher (Hugo) : Oh! c'est
au minimum 80/20/20. Je dirais que ça doit dépendre des résidences, mais moi,
disons que, dans mes RPA, là, il doit y avoir minimum 10 PAB pour une
infirmière, là.
1ars D'accord. Puis j'ai encore un petit peu
de temps, je veux parler, moi aussi, de la transition. Une fois qu'un projet de
loi serait adopté, comment vous voyez la transition, sur combien de temps?
Parce qu'on a quand même un échéancier qui nous a été donné, là. Est-ce que
vous voyez ça possible sur une période d'un an, deux ans, trois ans?
M. Fortin (Marc) : Ah non!
Deux ans, oubliez ça, trois ans, oubliez ça. Il faut que ça se fasse dans la
prochaine année, il y en a plein d'autres qui vont fermer sinon. On est
étranglés avec les soins, les soins sont abandonnés par la majorité des RPA...
M. Arseneau : Et ça, pour
l'ensemble du territoire québécois.
M. Boucher (Hugo) : L'ensemble
du territoire québécois.
M. Boucher (Hugo) : Bien, tu
sais, on parle souvent des petites résidences qui ferment, mais là, vous voyez,
dans les trois derniers mois, il y en a une de 150, 270, 102, 216, 88, puis 92
unités qui ont fermé. Là, ce n'est plus juste les petites, ça s'attaque aux
grosses. On est rendus...
M. Arseneau : On comprend
l'urgence. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup de votre contribution
puis votre collaboration à nos échanges. Très apprécié. On sera en attente de
vos suggestions.
Ceci dit, nous allons suspendre les
travaux pour laisser place au prochain groupe. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 16 h 53)
(Reprise à 16 h 56)
Le Président (M. Provençal)
: Nous reprenons nos travaux. Je souhaite maintenant la
bienvenue à l'Association des entreprises privées de personnel soignant du
Québec. Alors, monsieur Patrice Lapointe, alors je vais vous inviter à faire
votre présentation, 10 minutes, par la suite on fait nos échanges. Alors,
je vous cède la parole immédiatement.
M. Lapointe (Patrice) : Très
bien, merci, M. le Président. Et merci à vous tous pour l'invitation à me
présenter aujourd'hui devant vous. Nous sommes bien heureux d'avoir enfin la
chance de venir vous exposer notre point de vue dans le cadre de l'étude sur le
projet de loi. J'agis aujourd'hui à titre de président de l'Association des
entreprises privées de personnel soignant du Québec, mais je suis également ici
à titre de contribuable et de père de famille inquiet par rapport à ce que je
vois présentement au sein du réseau de la santé.
Au cours des 50 dernières années, les
agences de placement de personnel en soins ont exercé des fonctions vitales au
maintien des soins. Elles ont notamment permis de rehausser l'accès aux soins
de première ligne à tous les patients du Québec, les soins à domicile, l'effort
de vaccination COVID en entreprise, en pharmacie et même au sein du réseau de
la santé, l'accès aux soins dans les zones tampons permettant d'isoler les
patients atteints de COVID-19, ce qu'on appelle les sites non traditionnels,
par exemple, la présence d'infirmières en entreprise, dans nos écoles, et j'en
passe. Bref, depuis plus de 50 ans, nos entreprises collaborent avec le
réseau de la santé afin de répondre à des besoins bien précis. Alors que le
vieillissement de la population s'accentue tout comme la demande de soins pour
celle-ci, nous sommes convaincus que la solution aux problèmes visés par le
gouvernement ne réside pas dans une approche de la terre brûlée mais bien dans
la reconnaissance du rôle complémentaire des agences de placement, un rôle
historique et essentiel, ainsi que la mise sur pied d'une démarche de
collaboration durable. Il ne faut pas tout raser, il faut collaborer et
harmoniser davantage.
Bien que le recours au privé en santé a
longtemps été controversé, la pandémie a accentué notre pertinence et a fait
évoluer l'opinion de la population. Selon un sondage Léger, la grande majorité
des Québécois est favorable à l'idée d'augmenter le recours au privé pour
offrir des soins de santé de qualité à la population. D'ailleurs, plusieurs
engagements pris par le gouvernement du Québec démontrent clairement sa volonté
de miser sur la collaboration public-privé pour rehausser nos infrastructures
ou encore pallier des problématiques urgentes. Par ailleurs, nous sommes
conscients qu'il y a plusieurs problématiques réelles qui pourraient être
résolues par une application plus constante des contrats d'appels d'offres
ainsi qu'une plus grande collaboration entre les agences et le réseau de la
santé. Pour nous, il est clair que le chemin à suivre passe par la mise en
place de solutions structurantes pour mieux encadrer notre industrie.
Dans le mémoire que nous avons déposé
devant la commission, nous proposons d'ailleurs une série de recommandations, par
exemple la mise sur pied d'un fournisseur accrédité par le gouvernement du
Québec, rehausser la transparence des contrats publics attribués aux agences
afin que l'information soit facilement accessible au public, prévoir des cibles
préétablies d'heures à octroyer annuellement aux agences de main-d'œuvre
indépendantes entre 3 % à 5 %, par exemple, afin de concentrer les
efforts là où les besoins sont les plus criants, c'est-à-dire les régions
éloignées, les quarts défavorables, les soins à domicile, etc. Comme vous
pouvez le voir, nous sommes prêts à discuter, à faire des propositions
constructives, à faire le nécessaire pour améliorer le réseau de la santé et,
ultimement, offrir des soins de la plus grande qualité aux Québécois et aux
Québécois.
• (17 heures) •
Alors que le Québec est en pleine crise de
la main-d'œuvre, ce n'est certainement pas le moment de priver le réseau de la
santé de près de 11 000 travailleurs et travailleuses qui ont choisi
nos agences. En effet, selon un sondage réalisé entre le 6 et le
13 février dernier auprès de plus de 2 000 de nos employés, 80 %
d'entre eux ne reviendront pas dans le réseau public si les agences sont
abolies. Les professionnels de la santé ont choisi nos organisations pour une
multitude de raisons aussi diverses que légitimes. On peut parler d'une
personne semi-retraitée qui peut offrir un ou deux quarts de travail par
semaine au réseau de la santé. Ou encore une personne en situation
monoparentale qui peut travailler 16 h par jour une semaine mais uniquement
quelques heures par jour la semaine suivante. Une personne qui enseigne en
soins infirmiers qui peut offrir quelques quarts de disponibilité par semaine
durant l'année scolaire mais travailler de façon plus soutenue durant l'été. Ou
une personne migrante qui a des responsabilités envers sa famille restée à
l'extérieur du pays et qui doit s'absenter sur une base régulière pour les
visiter. Toutes des situations qui ne pourraient être possibles dans le réseau
public. Dans le contexte actuel, avons-nous vraiment le luxe de se passer de
ces... de ce que ces personnes ont à offrir au réseau? Poser la question, c'est
y répondre.
Les Québécois et les Québécoises ont plus
que jamais besoin de tous ceux et celles qui peuvent contribuer au réseau,
puissent le faire, même s'ils apportent leur contribution via un véhicule
d'emploi différent. Je réitère donc de nouveau la volonté de notre
association...
17 h (version non révisée)
M. Lapointe (Patrice) : ...à
travailler de concert avec le gouvernement de manière à déterminer les
meilleurs moyens pour contribuer au renforcement de la première ligne de soins,
en incluant les agences de placement comme partenaire stratégique faisant partie
d'un bouquet de solutions disponibles.
J'aimerais également aborder quelques
questions importantes concernant certaines informations véhiculées au sujet de
nos organisations. Alors que certains prétendent que nos entreprises causent un
problème de main-d'œuvre, les chiffres, eux, nous disent le contraire. En
effet, 70 % de notre personnel aurait effectivement réorienté sa carrière
dans un autre domaine plutôt que de rester dans le réseau de la santé, n'eût
été des agences. Cette donnée tirée des résultats de notre sondage interne
illustre parfaitement le rôle de rétention de personnel que jouent actuellement
nos organisations. Nous n'avons jamais cherché ni servi à remplacer les
effectifs déjà existants au sein du réseau. Nous agissons plutôt comme des
pompiers du système de santé grâce à notre agilité qui permet de mobiliser
rapidement des effectifs supplémentaires pour aider les secteurs les plus
vulnérables, et ce, au bon moment, au bon endroit, le tout au bénéfice des
patients.
Soulignons d'ailleurs le caractère
exceptionnel des deux dernières années pandémiques où la Croix-Rouge et l'armée
canadienne ont dû être appelées en renfort pour supporter le réseau de la
santé. Nous étions nous aussi à pied d'œuvre dans ce contexte critique. Un
autre argument que nous avons souvent entendu, c'est la forte prédominance des
agences dans le réseau. Contrairement à la croyance populaire, les statistiques
du ministère démontrent que les heures comblées par les agences sur une base
annuelle ne représentent que 3 à 4 % des heures totales travaillées dans
le réseau de la santé. D'ailleurs, l'étude économique réalisée par Raymond
Chabot Grant Thornton, que vous pourrez trouver en annexe de notre mémoire,
démontre... on peut voir clairement que le pourcentage des heures travaillées
est demeuré stable, exception faite de la pandémie durant laquelle l'efficacité
et la rapidité de déploiement des agences ont été mises à contribution.
De plus, le recours aux agences ne coûte
pas nécessairement plus cher au réseau. Notre contribution est néanmoins
cruciale pour garantir la continuité des services, notamment dans les régions
éloignées, ainsi que pour minimiser le temps supplémentaire obligatoire et la
détresse psychologique des travailleurs du réseau.
En terminant, un autre facteur qui
contribue à l'augmentation des prix dont nous avons été témoins est celui de l'hypercentralisation.
La création du Centre d'acquisition gouvernemental en 2020 poursuivait l'objectif
tout à fait louable d'optimiser la gestion des achats réalisés par les
différents ministères, tout en assurant le respect des règles contractuelles
applicables. Malheureusement, cet exercice de centralisation majeure a eu pour
conséquence de perdre une expertise précieuse bâtie à l'échelle locale dans le
réseau, au détriment de la connaissance fine des besoins réels des
établissements de santé, particulièrement dans les différentes régions du
Québec. Cet enjeu s'est récemment illustré par la publication d'un appel d'offres
public faisant fi des réalités régionales, en utilisant un tarif unique
provincial représentant une explosion potentielle des coûts à hauteur de 800 millions de
dollars pour l'État québécois sur la durée totale du contrat.
Pour conclure, alors qu'une criante
pénurie de main-d'œuvre secoue le milieu de la santé, notre association est
incapable de s'expliquer que le gouvernement choisisse de tourner le dos à 11 000 ressources
qualifiées qui prêtent actuellement main-forte au réseau de la santé en offrant
des soins aux Québécoises et aux Québécois. Pourtant, les résultats du récent
sondage auquel plus de 2 000 employés des membres de l'association
ont répondu le démontrent clairement, abolir le recours aux agences ne
garantira aucunement le retour du personnel dans le réseau et risque même de le
priver définitivement de professionnels qui, faute d'alternative, réorienteront
leur carrière. Des citations aussi frappantes que «Je préférerais travailler
chez McDonald's plutôt que de retourner en public» ont d'ailleurs été
rapportées dans les médias.
Plusieurs acteurs ont même reconnu que les
problèmes de main-d'œuvre attribués aux agences sont plutôt symptomatiques des
défaillances de la culture organisationnelle du réseau de la santé, qui ne peut
se réformer du jour au lendemain malgré toute la bonne volonté du monde. Le
gouvernement peut aménager, en collaboration avec notre association, des
mesures encadrant les activités des agences de placement, mais il est fort
probable qu'une interdiction quasi totale, comme celle prévue par le projet de
loi no 10, aura des effets néfastes pour les patients du réseau de la
santé. Ainsi, nous tendons la main au gouvernement et lui proposons des
solutions concrètes qui permettront de mettre en place les balises nécessaires
pour assurer la continuité de notre collaboration historique afin d'améliorer l'accès
aux soins de première ligne partout au Québec. Je suis maintenant prêt à
répondre à vos questions.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, M. Lapointe.
Alors, nous allons initier cette période d'échanges avec M. le ministre. Alors,
M, le ministre.
M. Dubé : Alors, M. Lapointe,
merci beaucoup. Merci d'être là puis d'avoir répondu à notre invitation. Vous
êtes le président, entre autres, de cette association-là, mais en même temps,
aussi, je pense que c'est important pour les Québécois de savoir que vous avez
votre propre agence de placement qui...
M. Lapointe (Patrice) : Tout
à fait.
M. Dubé : À moins que je
me trompe, là, qui s'appelle Services progressifs. Je ne me trompe pas?
M. Lapointe (Patrice) : C'est
bien ça, Services progressifs placement...
M. Dubé : Alors, je me
permettrai, dans la discussion que j'aurai avec vous, de...
M. Dubé : ...des fois, de
dire, est-ce que vous me répondez en tant que président de l'association ou en
tant que propriétaire d'une agence? Parce que j'aurai ce genre de question là,
je veux juste que les gens comprennent que vous avez un double rôle, étant
donné le fait que vous êtes propriétaire vous-même. Première chose.
J'ai mentionné ce matin, je ne sais pas si
vous l'avez entendu, je comprends ce que vous dites devant tout le monde, que
vous êtes prêt à collaborer, mais on est quand même, je veux dire, en
discussion légale, en ce moment, entre le gouvernement et vous. Et, quand vous
dites que, par exemple, vous employez l'argument que, si on faisait les tarifs
uniques qui ont été dans l'appel de propositions, il y aurait une augmentation
des coûts. Je ne répondrai pas là-dessus, parce que c'est un de vos arguments
dans l'injonction, puis c'est la dernière chose que je veux faire, aujourd'hui,
discuter. J'ai un total désaccord avec plusieurs des points que vous mettez
dans l'injonction, mais je n'en ferai pas le procès aujourd'hui, par respect
pour le processus légal que vous avez initié. Je veux juste qu'on soit très
clair.
M. Lapointe (Patrice) : Je
vous entends, M. le ministre.
M. Dubé : Très bien.
Maintenant, sur la question... Vous avez entendu, tout à l'heure, plusieurs des
commentaires, notamment les deux derniers qui vous ont précédés, je pense aux
RI, ressources intermédiaires, les RI du côté des agences... pas des agences,
pardon, mais des RPA. C'est des mots assez durs qui sont dits envers les agences,
très durs. Puis je pourrais les répéter, puis je ne suis pas sûr que ça
aiderait parce que je pense que les Québécois les ont entendus. Je vous le dis
honnêtement, là, je pense que tout le monde a entendu des termes assez sévères
comme, entre autres, pas de valeur ajoutée, puis je ne prends pas les pires,
là, je dis que... Et je sais que, dans votre rôle, puis je le respecte,
monsieur Lapointe, là, parce que vous êtes un entrepreneur, donc respecter un
peu... mais, en même temps, je veux juste...
Puis c'est surtout dans votre rôle de
président, là, que je me questionne, quand vous représentez une association
comme celle-là, vous avez un double rôle, selon moi, parce que vous avez...
puis moi, je regarderai, là, je vais vous expliquer quelques chiffres dont j'ai
pris connaissance parce que j'ai contacté certains CISSS et CIUSSS qui font
affaire avec vous. Ça fait que là, je vais être très précis dans ce que je vais
vous vous demander, mais les exemples que je vais donner... Puis ça, vous, vous
les tarifs que vous chargez, vous, votre agence, versus ce que d'autres de vos
membres ont chargé, la fourchette est large, à peu près aussi grand que la
chambre ici. Ça fait que je veux juste... puis c'est pour ça que je le
réexplique, vous avez certaines pratiques, vous, comme entrepreneur, mais il y
en a d'autres que c'est encore plus exagéré. Ça fait que je veux juste qu'on se
comprenne bien là-dedans. Puis je trouve ça très délicat dans votre rôle, parce
que vous défendez souvent l'indéfendable, je dois dire ça comme ça, je le dis.
Maintenant, quelque chose qui m'a beaucoup
agacé, puis je veux vous entendre, vous, comme propriétaire d'agence, je vous
donne une chance, là, m'a beaucoup agacé sur la qualité des personnes que vous
donnez... que vous mettez devant des gens qui font appel à vos services. Vous
avez entendu les commentaires, là. Est-ce que vous, vous donnez des fiches
employé, avant de présenter un employé devant des gens pour qui vous
travaillez?
M. Lapointe (Patrice) : Je
tiens à souligner d'abord...
M. Dubé : Là, je vous le
demande à vous pour votre entreprise qui s'appelle Services progressifs, ou
vous allez me répondre en tant que représentant. Là, je vous le demande pour
vous, en tant qu'entrepreneur.
M. Lapointe (Patrice) : En
tant qu'entrepreneur, on fournit systématiquement des fiches à nos clients. Et,
quand on fournit les fiches, ce sont un ensemble d'informations qui ont été
vérifiées, validées, incluant antécédents judiciaires. Donc, on fait un travail
très sérieux.
Maintenant, je veux quand même, si vous me
permettez avec respect, recadrer le débat, en ce sens que je ne suis pas ici
pour représenter mon entreprise aujourd'hui, bien que mon entreprise fasse
affaire avec le réseau de la santé. C'est une entreprise familiale de père en
fils, qui a été fondée par mes deux parents, ma mère est infirmière, et c'est
avec fierté qu'on fait ça.
• (17 h 10) •
M. Dubé : Donc, c'est pour ça
que je vous pose la question, monsieur Lapointe, là. Je comprends très bien
puis je veux respecter votre rôle d'entrepreneur... J'ai tout lu ça, là. Ce que
je vous le dis aujourd'hui, vous, vous fournissez une fiche, vous me dites ça,
là.
M. Lapointe (Patrice) : Quand
on nous demande de...
M. Dubé : Ah! Quand on vous
le demande seulement.
M. Lapointe (Patrice) : Pas
quand on nous le demande seulement, quand on reçoit des demandes de la part des
clients, on fournit des fiches, effectivement, et ce sont des des clauses qui
sont prévues au contrat d'appel d'offres.
M. Dubé : O.K. Alors... Mais
est-ce que vous êtes quand même conscient, pour les entreprises que vous
représentez aujourd'hui, pour l'association, que ces fiches-là ne sont pas
soumises dans bien des cas? Ce qu'on a entendu aujourd'hui, là, on n'a pas
inventé là.
M. Lapointe (Patrice) : On a
une problématique actuellement, en tant qu'industrie, c'est que les appels
d'offres qui ont été faits dans le passé prévoyaient un volet...
M. Lapointe (Patrice) : ...extrêmement
rigoureux. Donc, si on regarde d'ailleurs les chiffres historiques qui
proviennent de notre étude, on voit que, dans une dynamique historique, les
agences de placement étaient utilisées dans une optique d'économies de coûts
pour le réseau de la santé. Donc, là où on a vu un changement à cette situation-là,
c'est au moment où il y a eu un changement à la Loi sur les normes du travail
qui a été promulgué par un de vos collègues. Et ce qu'on est venu dire aux
agences de placement, c'est qu'elles avaient l'obligation légale, à partir du 1ᵉʳ janvier
2020, de payer minimalement le même salaire à leurs employés que celui qui
était offert aux employés du réseau de la santé publique. Donc, on a vu un
réseau de la santé qui avait une pratique historique d'utiliser des agences
dans une optique d'économies de coûts. Maintenant, les agences étaient dans une
position...
M. Dubé : C'est une des
raisons pour laquelle on va faire des paliers qu'on veut.
Je vais revenir parce que je n'ai pas
beaucoup de temps, puis je vais vous laisser... Mais je veux revenir maintenant
dans votre rôle, vous, d'entrepreneur. O.K.? Puis je vais vous donner quelques
chiffres, qui ne vous surprendront pas, là, je vais retourner à... pour que les
Québécois comprennent exactement de quoi on parle ici, là. Ça, c'est votre
entreprise, puis si vous n'êtes pas à l'aise de répondre, je comprends, vous
êtes un entrepreneur, donc, mais je vais vous faire des calculs parce que vous
êtes une personne d'affaires. Si je prends une infirmière auxiliaire, dont le
tarif minimum... ça, ça veut dire que, par convention collective, une
infirmière auxiliaire que vous engagez dans le réseau, elle peut être payée
entre 24 $ et 32 $ de l'heure. D'accord? Quand on a fait un arrêté
ministériel, quand on était en situation d'urgence, on a monté ce tarif-là pour
la même infirmière auxiliaire jusqu'à 47 $. En ce moment, votre
entreprise, dans la région de l'Abitibi, vous chargez, pour ce même service-là,
80 $. C'est-à-dire que vous chargez au CISSS d'Abitibi quatre 80,95 $
pour quelque chose qui est en convention collective au maximum 32 $ ou
47 $ dans l'arrêté ministériel. Cette marge brute là, j'ai fait le calcul
avec un autre collègue aujourd'hui, cette marge brute là, c'est 170 %.
C'est-à-dire que vous chargez en fait 33 $ de plus que le tarif maximum de
32 $. Ça veut dire que c'est du simple au double, puis ça, c'est sans
compter l'arrêté ministériel. Puis là, je veux y aller rapidement. Vous faites
ça en Abitibi avec des préposés aux bénéficiaires à 169 % de marge et avec
des infirmières cliniciennes pour 148 %. de marge. Je continue. Sur le
CISSS de la Côte-Nord, où vous agissez, c'est des endroits où votre service se
fait, je ne me trompe pas?
M. Lapointe (Patrice) : J'ai
beaucoup de difficulté à comprendre où vous arrivez avec une marge comme
celle-là, en ce sens où, quand on trouve...
M. Dubé : Bien, écoutez,
dites-moi...
M. Lapointe (Patrice) : ...on
envoie du personnel de Montréal en Abitibi...
M. Dubé : Non, non, mais là,
je vous parle de l'Abitibi, là.
M. Lapointe (Patrice) : Oui,
oui. Quand on envoie du personnel de Montréal en Abitibi, il faut prévoir une
prime d'éloignement, il faut prévoir un per diem. Il y a un ensemble de
facteurs dont on doit tenir compte...
M. Dubé : Je comprends tout
ça, mais je veux juste que les gens comprennent qu'en ce moment, le tarif
maximum pour une infirmière auxiliaire, c'est 32 $ selon la convention
collective. Vous vous dites toutes sortes de raisons. Je ne débats pas que des
gens nous ont expliqué que maintenant, avec le temps, vous avez trouvé des
façons. Quand je dis vous, là, c'est tout le monde de charger des frais accessoires,
etc. Mais en ce moment, la différence entre 80 $ que vous chargez en
Abitibi... puis ça, c'est nos chiffres, là, je veux dire, on l'a payé, là,
c'est des primes assez importantes. Puis je continue, là. La même chose sur la
Côte-Nord, hein? La Côte-Nord. Là, le tarif facturé, c'est 80 $. Encore
une fois, ça fait une prime d'à peu près... Je veux juste savoir si c'est bien
ça, c'est la réalité?
M. Lapointe (Patrice) : C'est
la réalité. Mais c'est important quand on compare des chiffres de comparer des pommes
avec des pommes et des oranges avec des oranges. Quand on regarde la
rémunération globale d'une infirmière du réseau de la santé, 31 % de son
salaire, ce sont des primes salariales, des fonds de pension. Donc, il y a une
sécurité d'emploi. Ce qu'il faut comprendre, c'est quand on demande à une
agence de venir supporter le réseau...
M. Dubé : Non, non, mais
regardez, je veux juste... parce que je n'ai pas beaucoup de temps, là, je
m'excuse, puis c'est important parce que, là, c'est quelque chose que les
Québécois doivent comprendre. Vous, là, c'est ce que vous allez charger au
CISSS.
Maintenant, ma deuxième question.
Dites-moi à peu près, là, puis je vous dis juste... Je les connais, les
chiffres, je vais vous les demander quand même. Puis, quand les gens viennent à
la commission puis ils ne nous disent pas le fond de leur pensée, des fois, ça
a toutes sortes d'impacts. Ça fait que, là, je vous redis la même chose, cette
madame-là que vous payez ou cet infirmier-là ou cette infirmière-là que vous
allez recharger, admettons, en Abitibi, à 80 $, combien vous la payez de
plus que son salaire autorisé maximum de 32 $?
M. Lapointe (Patrice) :
Premièrement, dans un premier temps, on n'a pas de personnel en Abitibi en ce
moment. Notre...
M. Lapointe (Patrice) : ...puisque
vous parlez uniquement de mon entreprise, je vais être clair sur ce sujet-là,
on n'a pas de personnel en Abitibi.
M. Dubé : Quand vous étiez en
Abitibi, et c'est des chiffres, là, que la CISSS m'a fournis, là, vous étiez en
Abitibi, vous chargiez 80 $ alors que le tarif maximum est de 32 $.
Combien vous payez l'infirmière dans ce temps-là?
M. Lapointe (Patrice) : C'est
de l'infirmière auxiliaire ce dont vous parlez?
M. Dubé : Je vous donne
l'exemple d'une infirmière auxiliaire, tarif, la fourchette, je l'ai dit,
24 $ à 32 $, tarif maximum 32 $. Vous l'avez chargé à 80 $
en Abitibi. Combien vous la payez, cette infirmière-là?
M. Lapointe (Patrice) : On va
la payer, en incluant le per diem de l'employée...
M. Dubé : Oubliez le per
diem, je veux savoir c'est quoi...
M. Lapointe (Patrice) : Oui,
mais il est inclus dans le prix du 80 $. On ne peut pas... On doit en
tenir compte.
M. Dubé : Donnez-moi les deux
séparés.
M. Lapointe (Patrice) : Donc,
ça va être une cinquantaine de dollars, incluant la prime d'éloignement qu'on
va reverser à l'employé.
M. Dubé : Alors, quelqu'un
qui a un tarif maximum de 32 $ selon la convention, puis ça, c'est le
maximum, il y en a qui sont à 24 $, là, vous les avez chargés à 50 $.
O.K.? Moi, je veux juste vous dire, sur votre site Web, qu'on est allé voir,
là, vous avez des offres d'emploi en ce moment à 70 $ pour des
infirmières. Est-ce que je me trompe?
M. Lapointe (Patrice) : Effectivement,
en région éloignée.
M. Dubé : O.K. mais...
M. Lapointe (Patrice) : C'est
important de faire la nuance.
M. Dubé : ...mais l'Abitibi,
je m'excuse, je ne vais pas dire que c'est une région éloignée, mais c'est plus
loin que Montréal, on
M. Lapointe (Patrice) : Quand
on envoie du personnel des grands centres au sens où c'est compris par les
agences de placement, c'est une région éloignée.
M. Dubé : Bon. Parlez-moi de
Lanaudière-Laurentides où vous faites affaire.
M. Lapointe (Patrice) : Je
n'ai pas les chiffres sous la main. Je ne venais pas répondre au nom de mon
entreprise, je venais répondre dans le cadre de l'adoption d'un projet de loi
qui va toucher l'ensemble d'une industrie. Et je pense que c'est important de
regarder l'arbre, mais de regarder la forêt quand on fait cet exercice-là.
M. Dubé : M. Lapointe, c'est
parce que... Écoutez, là, il y a des questions que j'aimerais beaucoup vous
poser. On est à un processus légal, le gouvernement, contre plusieurs de vos membres.
Je ne peux pas les poser aujourd'hui, ces questions-là. Je suis désolé, je suis
désolé. Je suis obligé d'aller spécifiquement sur vous puis de me dire :
Les chiffres que j'ai sur votre business, est-ce qu'ils sont exacts? Vous me
dites qu'ils sont exacts. Je m'excuse, mais c'est ça, la réalité. Puis en ce
moment, ce que je veux que les Québécois comprennent, c'est que si votre
marge... Puis il faut comprendre, là, si votre marge varie entre 30 $ à
50 $ de profit sur chaque heure qui était pour une infirmière...
M. Lapointe (Patrice) : Vous
oubliez les DRS. Donc, un employé qui est payé 50 $ de l'heure va coûter
plus de 60 $ de l'heure. Donc là, il reste une marge brute d'un peu moins
de 20 $. Ensuite de ça, il y a une organisation, donc ce qui reste
résiduel, là, c'est 5 $ à 7 $.
M. Dubé : O.K. Mais c'est ça.
Moi, j'ai de la misère à comprendre, M. Lapointe, là. On a fait des recherches,
on a fait pas mal de recherche. On est même allé sur Tik Tok. On est allé
sur Tik Tok.
M. Lapointe (Patrice) : Je
n'y suis pas.
M. Dubé : Bien, avant. Avant
qu'on aille... avant qu'on nous enlève le droit, puis il y a une infirmière qui
a dit : Moi, là, je suis très fière de vous dire, une infirmière qui est
dans une agence, pour un CHSLD, un week-end, là, j'ai été payée 90 $ de
l'heure. 90 $ de l'heure, vous n'allez pas me dire que l'agence fait juste
20 $ de marge sur cette personne-là.
M. Lapointe (Patrice) : Je
vais être parfaitement clair avec vous. Je ne suis pas ici devant vous aujourd'hui
pour défendre des pratiques qui sont abusives. C'est important de faire...
M. Dubé : Bien, moi, je
m'excuse, M. Lapointe...
M. Lapointe (Patrice) : C'est
important de faire la nuance...
M. Dubé : ...mais les vôtres,
est-ce que vous vous trouvez que des marges de 170 %...
M. Lapointe (Patrice) : Je
viens de vous expliquer, par une démonstration mathématique que ce n'est pas
une marge de 70 %, c'est une marge de plus ou moins 20 %.
M. Dubé : Oui, mais...
M. Lapointe (Patrice) : Et
une fois qu'on considère l'ensemble de nos coûts d'opération, il reste un
bénéfice net, résiduel de 5 %.
• (17 h 20) •
M. Dubé : Mais là, je vous
parle d'une... non, mais, M. Lapointe, là, comprenons-nous, là, je pense que je
suis assez à l'aise dans les chiffres, là, je vous parle d'une marge brute. Si
pour une marge brute, parce qu'on a bien compris que bien des gens, puis je ne
connais pas le détail de votre entreprise, la valeur ajoutée, puis là, je
m'excuse de revenir là dessus, la valeur ajoutée par une firme comme la vôtre,
elle est limitée. C'est ce que j'ai entendu de plusieurs joueurs.
Vous allez me dire, vous avez des frais,
je comprends. Mais ici l'essentiel du travail est fait par l'employé qui a été
engagé, puis qu'on charge à prime importante au-dessus du tarif qui est
autorisé par la convention. Je veux juste que les Québécois comprennent que ce
n'est pas pour rien que lorsqu'on a essayé d'estimer combien ça coûtait au
Québec, juste pour les catégories 1 à 4, donc des infirmières, on en a vu
les gens de l'APS on a vu les... cc'est au minimum 300 millions sur les
900 quelques millions, presque 1 milliard qui ont été payés. Mais ça vient
des chiffres, là. On n'a pas... on n'a pas inventé ces chiffres-là.
M. Lapointe (Patrice) : Écoutez,
selon les chiffres qui viennent du ministère, qu'on a établis à travers une
étude indépendante de la part d'une firme spécialisée, ils ont établi que les
agences de placement en moyenne, là, donc je ne vous parle pas de cas extrêmes
puis problématiques.
M. Dubé : Oui, mais quand
vous m'arrivez avec des moyennes, moi, je peux bien être tiède, là, puis j'ai
un pied dans le fourneau, puis j'ai un pied dans le frigidaire. Ça, c'est une
moyenne. Moi, ce que je vous donne, c'est des chiffres précis en Abitibi, dans
différentes régions. Et même à Montréal, on parlait...
M. Dubé : ...de
Lanaudière, là, l'infirmière sur TikTok qui dit qu'elle a été engagée à
90 $ de l'heure, là. ...je vous dis... Aujourd'hui, je vous parle, vous,
comme propriétaire de cette entreprise-là, mais je vous parle aussi comme
représentant, que vous venez défendre aujourd'hui, là. C'est ça que vous me
dites qui est votre rôle.
M. Lapointe (Patrice) : Je
tiens à préciser que je ne suis pas... ce n'est pas nous qui avons offert ces
conditions-là à cette infirmière-là. On fait une distinction importante entre
du personnel qu'on envoie à plusieurs heures de chez eux...
M. Dubé : Non, mais,
M. Lapointe...
M. Lapointe (Patrice) : Oui?
M. Dubé : À moins que
vous vous dissociiez de vos membres, ce sont vos membres qui chargent ça, là.
M. Lapointe (Patrice) : Je
ne représente pas l'ensemble des entreprises de placement, c'est important.
M. Dubé : Mais combien
qu'il y en a qui sont membres?
M. Lapointe (Patrice) : On
est 19 membres actuellement, 19 entreprises.
M. Dubé : O.K. Qui
chargent à peu près combien sur l'essentiel?
M. Lapointe (Patrice) : Je
n'ai pas de moyenne de prix. Malheureusement, la problématique qu'on a est la
suivante...
M. Dubé : Oui, bien,
c'est ça. Je pense vous venez défendre quelque chose qui est un peu
indéfendable, Monsieur Lapointe, aujourd'hui. C'est juste ça, je vous dis.
M. Lapointe (Patrice) : Je
ne suis absolument pas d'accord avec vous, mais je vous entends.
M. Dubé : O.K.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, M. le ministre, on va...
M. Dubé : Je n'ai pas
d'autre question.
Le Président (M. Provençal)
:De toute façon, votre temps est
écoulé.
M. Dubé : Je n'ai pas
d'autre question.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, M. le député de Pontiac.
M. Fortin :O.K. Je vais... je ne veux pas parler de votre entreprise,
là, je veux parler de l'association ou de ce que vous voyez de vos membres, vos
19 membres, là, O.K.? C'est quoi, la marge, dans l'industrie, là, c'est quoi,
la marge que vous faites en moyenne?
M. Lapointe (Patrice) : De
façon générale, les entreprises dans le domaine du placement font entre cinq et
7 % de marge avant impôt, donc environ 5 % après impôt.
M. Fortin :O.K. Alors là, vous avez entendu des gens des RPA, là,
avant vous, là, je sais que vous étiez dans la salle, là, ils ont dit : Ce
n'est pas anormal. Puis, ça, c'est des gens qui ont des entreprises à Montréal,
en... l'entrepreneur qui était ici, là, à Montréal, en Montérégie, à Drummondville,
puis à Québec, là, on n'est pas dans les régions éloignées, là, on est dans le
Centre-du-Québec. Il nous dit : Ce n'est pas anormal d'avoir une
infirmière ou une préposée aux bénéficiaires qu'on paierait normalement 21,
22 $ de l'heure, de se faire charger au-delà de 50 $ pour ça. Ce
n'est pas anormal, O.K. Puis là, si vous la payez, cette préposée-là,
25 $, 26 $, même si vous montez jusqu'à 30 $, là, quand c'est en
ville comme ça, là, il va où, le 20 $ supplémentaire? Vous faites quoi
avec?
M. Lapointe (Patrice) : Il
faut... Vous devez tenir compte des DAS, dans un premier temps. Ensuite de ça,
il y a des... il y a des frais supplémentaires qui sont des frais
administratifs de l'entreprise. Vous savez, on décrit les agences... La façon
dont ça a été décrit, on le déplore. Des entreprises qui sont des partenaires
du réseau de la santé depuis des décennies, qui...
M. Fortin :Oui, mais, de toute évidence, ils ne vous considèrent pas
vraiment un partenaire, là. Ils vous considèrent comme un mal nécessaire. Et,
vous l'avez entendu comme moi, ils ont utilisé le mot «parasite» tantôt, là.
M. Lapointe (Patrice) : Il
y a eu une perte de contrôle dans le réseau de la santé durant la pandémie.
Cette perte de contrôle là, d'abord, ça a été des contrats d'appels d'offres
qui ont cessé d'avoir des... Un processus qualitatif, et des contrats qui ont
été accordés à des entreprises qui font, qui pratiquent de la surfacturation.
Moi, vous savez, je ne suis pas ici devant
vous pour défendre ce... la surfacturation. Maintenant, c'est important de
remettre les choses en perspective et d'avoir une vision globale. On a des gens
qui parlent de l'absence de valeur ajoutée des agences, mais, dans la même
phrase, nous disent : mais, si j'appelle le CIUSSS le samedi ou le
dimanche, quand je suis bien, bien mal pris, ils ne me répandront pas, je n'ai
pas le choix de faire affaire aux agences. Ce qu'on apporte au réseau de la
santé, c'est de la flexibilité et de l'agilité qui lui manquent actuellement
dans sa forme actuelle. C'est important de bien comprendre. Et il faut avoir
une vision d'ensemble. Et, les chiffres sont clairs à cet effet-là, on parle
d'une différence de 30 sous de l'heure en moyenne. Je comprends qu'il y a
des... qu'il y a eu des situations problématiques, où ce n'est pas le cas.
M. Fortin :Donnez-moi deux secondes, là. Différence de 30 sous de
l'heure en moyenne : Vous, vous pensez que vous payez votre monde, là, les
travailleurs qui travaillent pour vous là, 30 sous de l'heure de plus que le
réseau de la santé en moyenne?
M. Lapointe (Patrice) : C'est...
Les données du ministère, ce qu'elles nous démontrent, c'est quand on tient
compte du coût global. Par exemple, on va prendre du personnel du réseau de la
santé, donc on doit tenir compte des avantages sociaux, on doit tenir compte du
fonds de pension. Il y a un ensemble de coûts qui font... puis les primes, qui
font que l'employé moyen du réseau, selon notre étude, coûte 57 $ et 91 de
l'heure au réseau, alors que pour une agence de placement, le coût moyen sur la
même période a été de 58 $ et 21. Donc, je n'exclus pas des situations
problématiques. Puis on s'est interrogés, nous aussi, sur cette... La
possibilité d'entreprises qui n'ont pas les qualifications requises, qui ne
procèdent pas à l'exercice sérieux des candidatures qu'ils proposent au réseau
de la santé et qui surfacturent, on s'est interrogés. Mais, à partir du moment
où les corporations d'approvisionnement octroient un contrat à une entreprise
qui charge 450 $ de l'heure, quel est mon pouvoir en tant qu'entrepreneur?
Quelle est la capacité de venir intervenir sur la situation?
M. Fortin :...pas mieux, là. Un gestionnaire qui donne un contrat à
450 $ de l'heure, là, ça n'a pas plus de mérite que l'agence qui pense que
c'est une bonne chose à faire, là.
M. Lapointe (Patrice) : Bien,
ce sont des contrats publics par appels d'offres qui ont consacré ces
contrats-là. Je veux juste qu'on le comprenne bien.
M. Fortin :O.K. Mais vous avez vous-même... Puis j'ai comme
l'impression que... que, là, vous arrivez avec certaines des recommandations
parce que...
M. Fortin :...vous êtes un peu accotés au mur, là, mais rehausser la
transparence des contrats publics attribués aux agences, il y a-tu quelque
chose qui vous empêche de publier certains de ces contrats-là?
M. Lapointe (Patrice) : Absolument
pas. Puis d'ailleurs, nous, voici ce qu'on veut dire quand on parle de
transparence. Dans le passé, les appels d'offres, les entreprises devaient
fournir des rapports trimestriels, on appelait ça des rapports de consommation
et, avec les discussions qu'on avait avec les corporations locales
d'approvisionnement, eux publiaient ces chiffres-là à l'ensemble des
fournisseurs. Donc, ça permettait une certaine autorégulation dans le marché.
Et nous, ce qu'on souhaitait, ce qu'on souhaiterait toujours d'ailleurs, c'est
que cette pratique-là soit remise de l'avant parce que, vous savez, moi, si je
suis une entreprise qui fait un bon prix, un prix raisonnable au réseau de la
santé, et que je ne reçois pas de demande, puis que je me rends compte qu'une
entreprise qui coûte 25 % plus cher que la mienne reçoit des demandes, je
peux agir, mais, pour le moment, à titre d'entreprise, c'est opaque ce qui se
passe derrière le rideau du réseau de la santé, pour nous. Donc, quand on
demande de la transparence, c'est uniquement d'utiliser des méthodes qui ont fait
leurs preuves dans le passé, quand on voit que le coût économique de faire
appel aux agences n'était pas celui qu'il est aujourd'hui, et de travailler
ensemble avec le gouvernement, avec l'Assemblée à retrouver cet équilibre-là
parce que...
M. Fortin :Mais là où vous avez... là où vous avez un point, là, puis
je vous en donne un, là, c'est que vous dites essentiellement : Il y a des
situations où le secteur public en ce moment, là, il n'est pas capable d'être
flexible avec ses employés, il n'est pas capable de... Des employés à temps
partiel, ce n'est pas tout le temps simple, des employés qui ont besoin d'aller
voir leur famille à l'extérieur du pays, ce n'est pas tout le temps simple,
c'est peut-être pour ça, peut-être pour ça qu'ils se tournent vers vous, là, il
y a toutes sortes de raisons pour lesquelles ils se tournent vers vous en ce
moment, mais le jour où le réseau de la santé est capable de faire ça, pourquoi
vous êtes là?
M. Lapointe (Patrice) : À ce
moment-là... Nous, ce qu'on dit, c'est qu'une structure aussi importante, qui
est gérée, qui est aussi grosse que le réseau de la santé, aura toujours des
besoins. Ceci étant dit, les besoins ont explosé durant la pandémie pour des
raisons évidentes, il y avait une crise globale dans le réseau de la santé, on
a répondu présent. Malheureusement, et on le déplore aujourd'hui devant vous,
il y a eu des abus dans ces circonstances-là, et je ne parle pas d'avoir une
tarification plus importante quand on envoie des gens à 6 heures de chez eux alors
qu'ils pourraient travailler de l'autre côté de la rue, ça, je pense qu'il
faut... c'est important de mettre en perspective, ça a beau pas être aussi loin
que la Côte-Nord ou le Grand Nord, mais l'Abitibi, quand on habite à Montréal
puis on pourrait travailler de l'autre côté de la rue, on veut un per diem, on
veut une prime d'éloignement, on veut que ce soit considéré qu'on vient prêter
main-forte dans une région qui serait en bris de soins si ce n'était pas des
agences.
M. Fortin :Je ne suis pas en désaccord avec vous là-dessus, il y a
une... il y a un prix, il y a une valeur à ça, être loin de sa famille pendant
un bout de temps, là, il y a une valeur à ça, mais le jour où le gouvernement
est capable de le faire, je reviens à ma question, vous servez à quoi dans ce
mode-là? Le gouvernement n'est pas capable de le faire là, aujourd'hui, là,
mais le jour où il est capable de le faire, s'il est capable d'avoir cette
flexibilité-là dans son réseau, est-ce que les agences sont encore un mal nécessaire?
M. Lapointe (Patrice) : C'est
une excellente question. Je ne nous qualifierais pas de mal nécessaire, je nous
qualifierais de la même façon que la Cour d'appel du Québec nous a qualifiés
dans un jugement en 2021, de partenaires historiques. Ceci étant dit...
M. Fortin :O.K., O.K., je reprends ma question, est-ce que vous êtes
encore nécessaires?
• (17 h 30) •
M. Lapointe (Patrice) : Oui,
oui, je m'excuse, j'y arrivais, c'était... je voulais juste rectifier le mal
nécessaire. Je suis désolé, monsieur. Essentiellement, les entreprises de
placement vont avoir un rôle possiblement moindre à ce moment-là, et c'est
correct. Historiquement, quand on est dans l'industrie depuis aussi longtemps
que nous, on sait que le réseau de la santé traverse des phases, il y a des...
Moi, je le compare souvent quand je veux l'imager, c'est un poumon. Donc, le
poumon, parfois, est... a moins besoin d'oxygène, il est plus autosuffisant,
et, les entreprises de placement, on a moins besoin d'elles. Donc, le recours à
la main-d'oeuvre diminue, mais de dire qu'on va arriver à zéro, ce n'est pas
vrai parce qu'il y a des classes d'employés, des gens qui ne souhaitent pas
intégrer le réseau de la santé... On le voit, 70 % de nos employés auraient
quitté le réseau de la santé s'ils n'avaient pas pu venir en agence, ils
l'auraient quitté, ils ne seraient plus... ils ne seraient plus au service du
réseau public, ils travailleraient dans des cliniques privées, ils
travailleraient dans des pharmacies, ils travailleraient en Ontario, ils
travailleraient dans d'autres provinces. Ces gens-là, on les a gardés au
service du réseau de la santé.
Donc, effectivement, on n'est absolument
pas contre le fait que le réseau se structure pour mieux répondre à ses besoins,
on le comprend, on est des entrepreneurs, on sait qu'en tant qu'organisation,
vous voulez gérer vos ressources, mais de prétendre que, demain matin, on n'a
plus besoin des agences, je ne pense pas que ce soit possible dans un réseau de
la taille du réseau, hein, c'est important de le spécifier. Même quand on parle
des agences comme d'un grand problème, on représente 3 % à 4 % des
heures travaillées annuellement dans le réseau de la santé.
M. Fortin :Est-ce qu'on... est-ce qu'on peut s'entendre, vous et moi,
là, pour dire qu'il y a des secteurs d'activité, qu'il y a des professions que
d'avoir recours à de la main-d'oeuvre indépendante qui n'est pas toujours,
disons, là, stable, dans le sens où c'est la même personne qui revient
régulièrement, là, ce n'est pas idéal, mais j'irais même plus que ça, pas
acceptable. On parlait ce matin, là, avec l' APTS des intervenants à la DPJ...
17 h 30 (version non révisée)
M. Fortin
(Pontiac) :...ça, c'est des gens qui se
présentent chez des familles, qui évaluent, qui voient un suivi, mais ils font
affaire avec des agences. Est-ce que vous pensez que vous donnez un service
approprié dans ces cas-là?
M. Lapointe (Patrice) : Il y
a deux cas de figure. Premièrement, si on parle du cas spécifique de la DPJ, il
faut bien remettre les choses en perspective. La DPJ a eu des problèmes qui lui
appartiennent et on a appelé les agences en renfort, on n'a pas créé le problème.
Les agences de placement n'étaient pas dans le réseau de la DPJ, et je ne pense
pas qu'il y avait une volonté des agences d'entrer dans le réseau de la DPJ.
Parce que je suis d'accord avec vous, un service aussi sensible que les
services à l'enfance, on veut du personnel puis on veut de la continuité de
soins.
Mais il y a deux cas de figure. Le premier
cas de figure, quand on fait un appel à une agence, c'est : il n'y a
personne en ce moment. Donc, on comble une chaise vide, on ne l'a pas vidée, la
chaise, on la comble. Donc, ça, ce n'est pas idéal, mais c'est le meilleur des
scénarios possibles. Dans le deuxième cas, ce n'est pas vrai que ce n'est pas
possible d'avoir de la stabilité avec une agence de placement, c'est tout à
fait possible. Le problème, c'est qu'historiquement, quand nos employés s'intègrent
aux équipes de travail dans les établissements de santé, c'est avec ça que je
suis plus familier personnellement, donc je vais référer à mon expérience
personnelle...
M. Fortin
(Pontiac) :Parce que... Oui, O.K.,
allez-y, allez-y.
M. Lapointe (Patrice) : ...il
y a des procédures, ce qu'on appelle des articles 39. Donc, le syndicat va
demander à ce que l'employé soit inclus dans son unité de négociation pour
récupérer les cotisations syndicales, d'une part, et, d'autre part, pour forcer
l'employé à faire partie maintenant de son unité de négociation syndicale. La
conséquence, c'est que la personne part. Donc, on veut de la stabilité. Quand
on atteint la stabilité, on défait ce qui est en place et on recommence.
Donc, de prétendre que c'est impossible
avec une agence de placement d'avoir de la stabilité, c'est faux, ça demande une
collaboration. Et je tiens à assurer le ministre que, si on a la possibilité de
collaborer avec le réseau de la santé, on préfère ça, et de loin, à une
dynamique procédurale. Le seul commentaire que j'ai à faire sur cette
question-là.
M. Fortin
(Pontiac) :Est-ce qu'à l'interne, là, à l'association,
vous avez votre propre... vos propres règles? C'est-à-dire, là, tu sais, on
entend toutes sortes d'affaires, du monde qui charge 400 $ de l'heure puis
du monde qui ont des taux démesurés, là. Vous le savez, tout le monde en parle
depuis un certain temps, vous avez vu l'augmentation, vous le savez qu'il y en
a, des contrats comme ça. Est-ce qu'à l'association vous vous dites... vous
vous êtes dit, à un moment donné : Oui, il faudrait peut-être qu'on fasse
le ménage à l'interne parce que là on va se faire vilifier sur la place
publique, là, puis avec raison? Mais pourquoi ça n'a pas changé?
M. Lapointe (Patrice) : C'est
une question extrêmement pertinente, puis je vous remercie de la poser. Quand l'association
a été fondée, dans ses statuts et règlements, ce qu'on a prévu, c'est que, pour
faire partie de l'association, il fallait être une entreprise en règle qui
participait aux contrats par appel d'offres public. Parce qu'à l'époque les
contrats d'appel d'offres publics avaient un volet qualitatif extrêmement
rigoureux. Une entreprise qui ne passait pas le volet qualitatif ne pouvait
même pas soumettre un prix, on lui renvoyait son prix sous pli scellé. Donc,
ça, c'était notre premier mécanisme, c'était de dire : Le donneur d'ordre
a établi un processus rigoureux, on va se fier à ce processus-là pour avoir des
entreprises qui peuvent faire partie de l'association.
Malheureusement, au fil du temps, ces
processus qualitatifs là ont été abandonnés, et maintenant on se retrouve dans
une position où le donneur d'ordre accorde lui-même un contrat public à une
entreprise qui surfacture. Et là le dilemme dans lequel on se trouve en tant qu'association,
c'est que, vous savez, si une association commence à dicter à ses membres quel
prix elles peuvent ou ne peuvent pas charger, ça s'appelle de la collusion et c'est
criminel.
M. Fortin
(Pontiac) :Mais vous êtes prêts à le
faire : établir une structure de prix afin d'évacuer les risques de
débordements.
M. Lapointe (Patrice) : En
collaboration avec le gouvernement. On ne peut pas faire ça par nous-mêmes. Si
on fait ça, c'est illégal.
M. Fortin
(Pontiac) :Mais vous ne l'avez jamais
proposé avant?
Le Président (M. Provençal)
:L'échange est très intéressant, mais,
M. le député de Pontiac, je suis obligé de vous dire que votre temps est
écoulé. Alors, on termine cet échange avec le député de Rosemont.
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Merci, monsieur Lapointe, d'être là. Je vous trouve particulièrement
courageux quand même d'affronter le vent de face comme ça. Puis il va venter
encore un peu dans les prochaines minutes. Bien, ma position a le mérite d'être
très claire, et votre position aussi. Très franchement, et c'est un éditorial
que je vais faire ici, là, moi, je pense que vous aviez une petite poule aux
œufs d'or qui vous faisait un coco par semaine, puis proverbialement vous en
avez voulu plus, jusqu'à trois douzaines par jour. Puis, bien, évidemment vous
avez tué la poule aux oeufs d'or, c'est ça qui est arrivé. Ça s'appelle de l'avarice,
en ce qui me concerne.
Et vous semblez dire que ce n'est pas de
votre faute, ce n'est pas de la faute de vos membres, c'est parce qu'on a
slaqué les appels d'offres pendant la COVID. Mais comment pouvez-vous vous
autoqualifier de partenaire historique qui rend des grands services à la
communauté si vos propres membres ont appuyé si fort sur le crayon...
M. Marissal : ...sous prétexte
qu'on était en COVID, qu'on était mal pris puis qu'on avait slaqué les appels
d'offres. Je n'appelle pas ça un partenaire historique, moi. En tout cas, s'il
y a une histoire là, il faut qu'elle cesse maintenant.
M. Lapointe (Patrice) : Vous
avez qualifié la position des agences. Vous me permettrez, avec beaucoup de
respect, M. Marissal, de qualifier vos propos d'amalgame, c'est-à-dire que,
quand on parle d'une industrie qui compte plusieurs entreprises,
malheureusement, quand on abandonne...
M. Marissal : Mais vous
représentez qui, M. Lapointe? Vous avez l'air de représenter juste les bons,
mais vous êtes ici au nom d'une association.
M. Lapointe (Patrice) : Oui.
M. Marissal : Je pose la
question autrement, là. Dans vos membres, là, les 19, là, il y en a-tu, là, qui
ont exagéré? Parce que vous...
M. Lapointe (Patrice) : Oui,
malheureusement. C'est une situation problématique.
M. Marissal : O.K. Mais
est-ce que vous pouvez assumer ça, plutôt que de nous dire qu'on fait des
amalgames puis qu'on ne comprend pas bien votre rôle historique? Vous
représentez des gens qui ont abusé de fonds publics. Il n'y a aucun appel
d'offres qui a été lancé au Québec qui chargeait 450 $ de l'heure pour une
infirmière. C'est des gens qui ont profité, puis... et honte aux gestionnaires
qui ont permis ça aussi, et ça, on réglera leur cas plus tard, honte à eux
aussi. Mais, franchement, vos membres, ils ont exagéré.
Alors, moi, j'ai une solution pour vous
bien, bien simple. Parce que les gens qui nous écoutent depuis tantôt, là, ils
vont être mêlés dans les chiffres, il y a eu beaucoup de chiffres. C'est
normal, c'est mêlant, des chiffres. J'ai une solution bien, bien simple :
ouvrez donc vos livres.
M. Lapointe (Patrice) : Avec
plaisir, M. Marissal.
M. Marissal : Avec tout, là,
y compris la marge bénéficiaire. Parce que, moi, je demande souvent des
demandes d'accès à l'information, là, notamment pour des contrats faits par le
MSSS avec certaines cliniques. Il manque toujours la dernière colonne, comme
par hasard c'est la marge bénéficiaire. Est-ce que vous vous engagez, là, à
nous envoyer ici, là, vos livres, les livres de vos membres, avec pas de
caviardage, sans caviardage?
M. Lapointe (Patrice) : Je ne
peux pas parler...
M. Marissal : Autrement dit,
je... la marge, vous avez dit : C'est autour de 5%, 7%, des fois c'est
20%.
M. Lapointe (Patrice) : Non,
pas... jamais 20%.
M. Marissal : Moi, je préfère
avoir des chiffres clairs. Alors, je vous l'offre, là, envoyez ça, là, très
clairement, là. On a des comptables autour de la table, là, on va être capables
de lire ça, là, bien comme il faut puis d'avoir une très bonne idée. Je pense
que vous vous rendriez service, puis là on aurait au moins quelque chose, une
base très, très stricte sur laquelle on pourrait parler.
M. Lapointe (Patrice) : Je ne
peux pas m'engager au nom de mes membres. Mais, en ce qui me concerne, en ce
qui concerne mon entreprise, je n'ai strictement rien à cacher. Je le répète...
M. Marissal : Oui, mais c'est
vos membres qui ont exagéré, vous l'avez dit vous-même.
M. Lapointe (Patrice) : Moi,
ce que je vous offre ouvertement, c'est, dans un forum qui permettra une
certaine confidentialité, pour une raison évidente, pour des raisons
d'affaires, hein... Je veux être transparent avec la commission, je ne peux pas
nécessairement ouvrir mes livres à l'ensemble du marché puis à l'ensemble de
mes compétiteurs, pour des raisons, j'imagine, que vous pouvez comprendre. Mais
je n'ai rien à cacher. Ce qu'on a fait durant la pandémie, on a fait œuvre
utile, on a supporté le réseau, on l'a fait de façon courageuse, alors qu'on
avait un grand vent de face, et souvent on était qualifiés de façon extrêmement
désagréable par rapport à ce que nos employés faisaient sur le terrain. Vous
comprenez, quand on attaque les agences... Vous, vous pensez attaquer les
propriétaires d'agences. Ce que vous cautionnez, c'est que des personnes dans
le réseau de la santé s'en prennent à nos employés, qui sont souvent dans une
position de vulnérabilité dans le réseau de la santé.
M. Marissal : Ah! non, non,
non, je ne porterai pas cette responsabilité-là, non, je ne porterai pas cette
responsabilité-là. Moi, à chaque fois que j'ai fait une citation, une
déclaration sur les agences, je prends toujours la peine de dire : Je ne
blâme pas les infirmières, les préposés aux bénéficiaires, les
inhalothérapeutes et les infirmières auxiliaires de choisir un meilleur rythme
de vie et un meilleur salaire. Je ne les blâmerai jamais. Puis j'ai visité assez
d'hôpitaux dans les derniers mois, là, pour vous dire que je ne les blâmerai
jamais. Quand je visite le Maisonneuve-Rosemont, là, je ne me promène pas en
disant : Toi, agence? Mauvaise, tu n'es pas fine. Ah! toi, tu es une bonne
infirmière, parce que tu es dans le public. Je ne fais jamais ça, puis je ne
ferai jamais ça.
• (17 h 40) •
M. Lapointe (Patrice) : Je
comprends que ce n'est pas votre intention.
M. Marissal : Ce que je dis,
c'est que vous êtes entrés dans le réseau, peut-être à l'époque pour une bonne
raison, puis c'est vrai que des fois on a besoin d'envoyer du monde dans le
Grand Nord, c'est vrai, puis des fois on fait ça. Mais vous avez exagéré puis
vous avez tué votre poule aux oeufs d'or, puis là vous êtes pris avec ça
aujourd'hui, puis nous, on est pris avec ça aujourd'hui. Alors, c'est ça, ma
position. Mais vous ne me ferez jamais dire que je porte la honte sur les
infirmières qui ont fait le choix de la conciliation avec leurs enfants, avec
leur conjoint pour gagner un meilleur salaire. On a des choses à régler ici
aussi avec le gouvernement, là, sur la façon dont on traite notre personnel,
mais je n'ai pas dit ça et je ne veux pas que ce soit dit sur mon compte.
Le Président (M. Provençal)
:De toute manière, M. le député, vous
avez fait, je pense, une très bonne précision sur vos propos.
Alors, le temps étant écoulé, je veux
quand même vous remercier. Oui, M. le député de Pontiac.
M. Fortin :Juste... Pour vous, là, M. Lapointe a pris un engagement d'ouvrir
ses livres auprès de la Commission, mais de le faire dans...
M. Fortin :...un forum, disons, qui ne mettrait pas, tu sais, auprès
de ses compétiteurs...
Le Président (M. Provençal)
:Non, non, non, on a bien compris.
M. Fortin :Est-ce qu'on peut compter sur vous, M. le Président, pour
trouver cette façon de faire là?
M. Dubé : Mais il y a un
engagement aussi qu'on a demandé, que ce soient tous les membres. Parce que,
là, si...
M. Fortin :Mais là je ne le sais pas, si monsieur Lapointe a pris
engagement à titre...
M. Lapointe (Patrice) : Je
n'ai pas la capacité de prendre cet engagement-là aujourd'hui.
M. Fortin :Mais vous l'avez pris pour votre entreprise?
M. Lapointe (Patrice) : Tout
à fait.
M. Fortin :O.K. Alors, allons-y... Commençons par là, puis on verra
pour le reste, là, mais...
M. Lapointe (Patrice) : Écoutez...
M. Dubé : Mais je pense que
le sens de la question, M. le député, c'était de dire : Est-ce que ça
pourrait faire partie des choses qu'on demande aux agences avec qui on fait
affaire? Je... Je ne sais pas. M. le député.
M. Marissal : Bien, la
commission est souveraine. Je pense que nous pouvons faire une demande
formelle. Monsieur Lapointe peut la transférer, la transmettre ou non. Je
comprends que vous ne pouvez pas vous engager pour ces gens-là, mais nous,
c'est notre demande et je pense qu'elle est... en tout cas, je ne veux pas
m'avancer pour mes collègues, là, mais je pense qu'elle est unanime, là.
Une voix : C'est ça.
Le Président (M. Provençal)
:Écoutez, moi, le seul engagement que
je peux faire comme président de la commission, advenant que vous décidiez de
nous transférer des informations, les informations ne seront que pour usage
interne ici. Il n'est pas question d'aller sur la place publique avec vos
données, parce que l'on comprend tous ici, autour de la table, vous êtes une
entreprise privée. Dans les entreprises, il y a une certaine compétitivité.
Alors, il n'y aura pas de fuite de ce côté-là. C'est le seul engagement que je
peux faire. Si vous me transmettez des données, il y a les membres de la
commission uniquement qui pourront les consulter.
M. Lapointe (Patrice) : Je
vous entends. Me permettez-vous de conclure en vous présentant ma position si
c'est terminé? Ou juste bien résumer ce qu'on propose aujourd'hui.
Le Président (M. Provençal)
:Je vous donne un mot de conclusion,
si vous voulez.
Le Président (M. Provençal)
:Je vous remercie. C'est gentil, M. le
Président. Ce qu'on vous demande à la commission, c'est de prendre en
considération que les agences de placement jouent un rôle important. Il y a eu
malheureusement des écarts qui peuvent s'expliquer par un ensemble de facteurs,
mais, au-delà, de cette situation-là, les agences de placement jouent un rôle
important et un rôle de soutien au réseau de la santé, notamment en maintenant
du personnel dans le réseau qui l'aurait quitté autrement et en offrant de la
flexibilité dans le réseau au besoin. Historiquement, on s'est toujours adaptés
aux besoins du réseau et on va continuer de le faire.
Le Président (M. Provençal)
:Ça, ça faisait partie de votre
présentation. Moi, là... On va mettre fin à la discussion, en tout respect,
parce que vous avez quand même eu, comme le... voulait monsieur... On l'a
mentionné, vous avez quand même eu le courage de venir ici en commission
parlementaire, de faire des échanges avec les membres de la commission. Mais,
ceci étant dit, si, je vous répète, si vous, vous transmettez des données sur
votre entreprise ou sur des gens qui font partie de votre association, je
m'engage à ce que ça ne soit consulté... et, quand je dis «consulté», ça va
être les yeux, là, uniquement par les membres de la commission.
M. Lapointe (Patrice) : ...merci.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup.
Sur ce, on va suspendre les travaux pour
faire place au prochain groupe. Merci beaucoup, M. Lapointe.
(Suspension de la séance à 17 h 45)
(Reprise à 17 h 48)
Le Président (M. Provençal)
:Nous allons terminer notre journée de
travail en souhaitant la bienvenue à la Confédération des syndicats nationaux.
Vous aurez 10 minutes pour votre exposé. Vous êtes des gens quand même
habitués, là, dans les commissions. Et, par la suite, nous allons procéder aux
échanges. Alors, je vous cède la parole.
Mme Senneville (Caroline) : Oui,
bonjour. Merci de nous recevoir. J'avais prévu qu'on se présente, mais chacune
des personnes qui m'accompagnent l'a fait. Alors, je vais aller directement au
but. Bien, d'abord, peut-être vous rappeler que la CSN, la Confédération des
syndicats nationaux, est la seule organisation syndicale qui a des membres dans
chacune des quatre catégories. Donc, on est bien contents d'être avec vous
aujourd'hui pour partager nos connaissances, bien contents d'être votre dessert
aussi pour la journée.
• (17 h 50) •
D'entrée de jeu, puis prenez-le quand ça
passe, M. le ministre, je veux vous dire bravo et vous saluer pour le courage
de votre conviction par rapport aux agences de placement, les agences de
placement privé dans le système de santé. Parce qu'on va se le dire la
situation, elle est alarmante, et on partage avec vous que... cet objectif qu'à
terme on puisse mettre fin au recours aux agences de placement privé. Parce que
les statistiques le démontrent, il y en a beaucoup, mais alors là beaucoup. Et
je sais qu'on entend souvent parler des infirmières, surtout sur la place
publique, mais pas seulement. Vous savez, le nombre d'heures octroyées la
main-d'œuvre indépendante a augmenté de 347 %, sur une période de 10 ans,
là, de 347 % chez les préposés aux bénéficiaires, de 600 % chez les
préposés à l'entretien ménager, de 917 % pour les éducatrices et les
éducateurs et de 326 % pour les diététistes. En fait, quand on calcule le
nombre d'heures travaillées, toute la catégorie 1, qui est le personnel
infirmier au sens large, inhalothérapeutes, infirmières auxiliaires, bien,
c'est moins d'heures travaillées que le total de la catégorie 2 en 2020-2021.
Donc, c'est vraiment un phénomène qui, à notre avis, est hors de contrôle.
Et ça, bien, ça a un effet sur beaucoup de
gens au quotidien. Ça fait en sorte que le personnel du réseau de la santé et
des services sociaux est forcé de travailler, même parfois de superviser une
main-d'œuvre indépendante qui va, plus souvent qu'autrement, bénéficier de
meilleures conditions de travail qu'eux-mêmes, que ce soit du point de vue du
salaire, du choix de l'horaire, du choix des vacances, mais qui malheureusement,
par leur méconnaissance du lieu de travail où ils sont, parce qu'ils se
promènent d'un endroit à l'autre, bien ça occasionne une surcharge de travail
pour les gens du public qui sont sur le terrain, sur les... les gens réguliers.
Et ça pose aussi, pour nous, la problématique de la qualité des soins et de
l'augmentation du risque en termes d'accidents de travail, en termes de santé
et sécurité au travail...
Mme Senneville (Caroline) : ...Et
on va se le dire, c'est surtout très dévalorisant pour le personnel du réseau
de la santé et des services publics qui parfois se demande : Bien,
pourquoi je continue dans cette galère?
On peut se dire aussi que ça a un effet
sur nos finances publiques parce que ce n'est pas gratuit, ces coûts-là, ça se
calcule en milliards de dollars, donc ça a un effet sur nos finances. Parce que
les agences de placement, ce sont des organisations à but lucratif qui vont
chercher non seulement la rentabilité, mais aussi la profitabilité. Et, pour
nous, ça, ça pose vraiment problème quand vient le temps de donner des services
de santé à la population.
Alors, je vous dirais qu'on aurait
souhaité... On est contents de la loi, mais, M. le ministre ne sera pas
surpris, il y a toujours un mais, mais, quand même, on aurait préféré une loi
plus ferme et plus détaillée, parce que, le projet de loi, à notre avis, est un
peu ténu puis dépouillé de certaines informations sur la façon et le moment
dont le gouvernement compte agir. Le ministre va nous dire que l'essentiel sera
exposé dans de futurs règlements, soit, mais, ce faisant, nous, on croit que le
gouvernement rate, à ce moment-là, une occasion de montrer sa détermination
forte à intervenir, et à intervenir prestement.
Alors, en rafale, peut-être certains
éléments qu'on a été surpris qui marquaient dans le projet de loi, je vous
dirais : des définitions, qu'est-ce qu'on veut dire par main-d'oeuvre
indépendante, c'est... puis c'est le genre de choses qu'on retrouve
habituellement dans beaucoup de projets de loi, pas d'échéancier, on aurait
aimé voir que la... L'interdiction de faire... D'avoir recours à la
main-d'oeuvre indépendante, que ça soit précisé, que ce soit pour l'ensemble du
réseau de la santé et des services sociaux et de ses partenaires, et que ça
s'applique aussi à tous les types d'emploi. Je l'ai dit, là, on a... le focus
est beaucoup sur les infirmières et les infirmiers, mais il y a d'autres types
d'emploi, puis je pense par exemple à des personnes qui oeuvrent auprès
d'usagers et d'usagères en déficience intellectuelle ou qui ont une affectation
du spectre de l'autisme, je pense aux agents de sécurité aussi. Le taux
maximum, le taux horaire maximum qu'on peut payer, parce qu'on a vu, là, qu'il
y avait une montée plus qu'inflationniste, là, avec des gens payés 100 $...
bien, pas «payés», mais que ça coûtait 100 $ de l'heure pour avoir des
gens sur le plancher. Et aussi on a parlé de profits, bien, c'est quoi la marge
de profit qui est acceptable pour ces agences de... payées à même nos deniers
publics, et aussi que les exigences d'embauche soient la même, les mêmes pour
le personnel des agences que pour le personnel régulier.
Alors, oui, le règlement est à venir, mais
on... en tout cas, on trouve qu'il y a des choses qui devraient être dans le
projet de loi. Surtout que le projet qui entoure l'étude d'un projet de loi, le
processus, pardon, qui entoure l'étude d'un projet de loi est quand même plus
démocratique, plus ouvert, plus transparent que ce qui a trait à une
réglementation, et donc on penserait que votre volonté serait exprimée de façon
plus explicite, si le projet de loi était lui aussi plus explicite.
Je vous dirais que, nous, ce qu'on voit
dans notre boule de cristal, ce qu'on souhaiterait voir dans notre boule de
cristal, c'est de vraiment qu'à terme il n'y ait plus d'agences de placement et
qu'il n'y ait plus de main-d'oeuvre indépendante dans le réseau, tout en
constatant, bien sûr, que les agences ont pris tellement de place que ce n'est
pas quelque chose qui puisse se faire du jour au lendemain et que nous avons
besoin de mesures transitoires. Et, ça, à notre avis aussi, c'est quelque chose
qui pourrait être inclus dans le projet de loi, c'est-à-dire donc d'expliciter
des mesures transitoires avec des conditions détaillées, qui va expliquer le
recours qu'on va souhaiter de plus en plus exceptionnel à la main-d'oeuvre
indépendante, et de faire en sorte aussi qu'il soit interdit à un gestionnaire
du réseau de la santé et des services sociaux d'être à la fois cadre et
actionnaire ou de travailler pour une agence de placement, y compris une
certaine période de latence après que le cadre ait quitté le réseau.
Ce qu'on peut vous dire aussi, c'est qu'on
croit qu'il est essentiel de travailler à la racine du problème. Les agences de
santé, de placement en santé, ce n'est pas la cause du problème, mais c'est
bien la conséquence de problématiques qui se vivent au jour le jour dans notre
réseau. Et je vais rappeler au ministre... (panne de son) ...donnait dans le
plan santé qui est sorti il y a quelques mois, de faire du réseau de la santé
et des services sociaux un employeur de choix. Je pense que c'est... (panne de
son) ...point de vue syndical, pour nous, c'est un peu désolant de voir qu'on
agit si tardivement, alors que ce que vivent nos...
Mme Senneville (Caroline) : ...ce
que les syndicats dénoncent depuis des années et j'ai envie de vous dire des
décennies, mais c'est seulement quand on est rendu à l'extrême limite, voire au
bord du gouffre, qu'on décide de prendre action. Il faut donc réduire le
problème à la source comme en santé, sécurité pour résoudre le problème à la
source.
Le temps supplémentaire obligatoire, les
gardes obligatoires, la conciliation travail-famille, tous des choses qui
devront être améliorées, ainsi que l'accroissement de l'autonomie
professionnelle des gens, et qu'on leur donne.... En fait, ce que les gens
qu'on représente, ce qu'ils demandent, c'est qu'on leur donne les moyens de
bien faire leur travail. Bien sûr, vous allez me dire que cela va se faire dans
la négociation. On ne négociera pas ici en commission parlementaire. Ce n'est
ni le lieu ni la place. Dix minutes, c'est un peu court aussi.
Mais on a d'autres solutions proposées,
par exemple, la mise sur pied d'un comité permanent et surtout paritaire de
planification de la main-d'œuvre. Donc, c'est un comité qui pourrait avoir
comme mandat de procéder à un exercice sérieux de planification de la
main-d'œuvre, notamment d'élaborer un portrait des secteurs et des types
d'emplois vulnérables, de permettre d'anticiper les besoins de main-d'œuvre et
de mettre en place les ajustements qui sont requis en matière d'ajout
d'effectifs. Il faudra tenir compte de la problématique criante de
disponibilité de main-d'œuvre dans les régions éloignées, et particulièrement
dans le Grand-Nord, là, qui mérite d'être discutée de façon urgente.
Je termine en disant... C'est bien, on me
dit qu'il me reste une minute, alors je termine en disant que le réseau de la
santé et des services sociaux est à la croisée des chemins et ce que nous, on
souhaite à la CSN, c'est un réseau qui soit véritablement, assurément public,
donc un réseau qui est plus démocratique, qui est plus décentralisé et un
réseau que l'on veut déprivatiser, alors pas seulement stopper la
privatisation. Et on pense que le projet de loi va en ce sens- là de
déprivatiser ce qui est déjà envoyé dans le privé et que la main-d'œuvre
indépendante puisse œuvrer pour le bien être de toute la population au sein du
réseau public. Et voilà, je pense que donc je suis rentrée dans mes temps.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, Mme la Présidente.
Afin que chaque groupe à son temps, je vais avoir besoin d'un consentement pour
qu'on puisse déborder d'à peu près quatre minutes. Consentement? Merci
beaucoup. M. le ministre.
M. Dubé : Très bien. Merci
beaucoup, M. le Président. Et Mme Senneville et à vos collègues que je connais
bien, merci beaucoup d'être là aujourd'hui. C'est très apprécié. C'est très
rare que je me fais qualifier de dessert. C'est sûrement de vous dont vous
parliez et non de moi. Je pense que je pense que le député de Pontiac est
d'accord, alors, puis les autres collègues de l'opposition le sont aussi alors.
Mais merci beaucoup d'être là parce que je salue, je dirais, le côté
constructif de vos commentaires, puis ça je pense que c'est important de le
reconnaître, Mme Senneville, puis pour tous les membres que vous représentez. Vous
avez parlé de beaucoup d'éléments, puis je veux laisser mes collègues poser des
questions, mais je ferais peut-être une couple de commentaires en rafale pour
bien situer vos commentaires.
• (18 heures) •
Premièrement, vous avez parlé de questions
de coûts. Tout le monde reconnaît que ce n'est pas admissible de payer ces
genres de coûts là, puis on en a eu une démonstration un peu cet après-midi.
Quand vous me parlez de qualité, ça vient encore plus me chercher parce
qu'effectivement il y a beaucoup d'enjeux de qualité avec les agences.
Maintenant, vous avez fait... puis j'en suis très conscient. J'ai été très
transparent quand on a déposé le projet de loi, qu'on a un équilibre à garder
entre ce qui est dans le projet de loi versus les règlements parce que regardez
juste comment ça prend de temps préparer un projet de loi, faire une commission
parlementaire, avoir la discussion sur article par article et la minute, dans
un dossier aussi complexe, être capable de... être obligé de revenir en projet
de loi pour modifier un article si, dans un an on avait un problème ou dans six
mois, il faut trouver l'équilibre indiqué dans le projet de loi puisque dans
les règlements. Je suis très ouvert à trouver des arrangements, mais le
principe du projet de loi et des règlements, il va être là, puis on le
discutera en article par-dessus. Mais j'ai entendu, puis je vais laisser mes
collègues peut-être demander certaines précisions de ce que vous voudriez voir
à tout le moins clairement dans les règlements. Ça fait que je vais dire ça
comme ça pour le moment. D'accord?
Sur la question... et je rappelle parce
que les Québécois, des fois, sont... Moi, je ne l'étais pas avant, alors on
apprend tous qu'est ce que c'est le projet de loi versus les règlements. Les
règlements sont aussi une période d'édiction. Hein? Si on dit on va sortir...
puis vous êtes très familière avec ça, on va sortir un règlement, mais le
gouvernement a le devoir de le publier, il est édicté pendant 45...
18 h (version non révisée)
M. Dubé : ...puis ceux
qui pourraient dire : Bien, ce n'est jamais ce que vous avez dit en
commission parlementaire, vous auriez le droit de le dire : Voyons, ça n'a
pas de bon sens, ce n'est pas ça. Il y a cette période-là aussi qu'il faut
comprendre, je veux juste le mentionner.
Bon, maintenant, ce que j'ai beaucoup
aimé, vous avez dit deux choses, on est tous d'accord que ça prend une période
de transition. Puis je trouve ça très raisonnable de votre part parce que c'est
sûr que, si on avait une baguette magique puis on pouvait fermer ça demain
matin, je pense qu'on serait tous les plus heureux, mais ce n'est pas la
réalité. Ça fait que, dans les commentaires que mes collègues vont vouloir, j'aimerais
ça vous entendre, parce que vous connaissez bien le réseau, c'est... il y a des
questions de régions, il y a des questions de... Tantôt, vous avez dit :
Est-ce qu'on pourrait aller jusqu'à... jusqu'aux... par exemple, aux agents de
sécurité? Je comprends votre demande, mais je redis, qui trop embrasse mal
étreint. Là, on a une urgence, je pense, du côté beaucoup plus des infirmières
puis du personnel infirmier, je vais le dire comme ça, mais je veux quand même
vous entendre, vous êtes là pour ça, puis je l'apprécie, sur la transition.
Maintenant, vous savez parler des racines
du problème. Bon, j'ai promis au député de Maisonneuve que je ne parlerais pas
de négociation, mais c'est vous qui l'avez soulevé, c'est vous qui l'avez
soulevé. Ça fait que je veux juste dire, je veux juste dire, Madame Senneville,
puis à vos collègues, que nous avons, vous et moi... Qu'est-ce que j'ai dit? J'ai
dit de Rosemont?
Une voix : ...
M. Dubé : Ah mon Dieu! C'est
rendu que je pense... quand je pense à vous, je pense à Maisonneuve-Rosemont. C'est
bon, donc le message est passé.
Une voix : ...
M. Dubé : On progresse.
Le message est passé, M. le député, maintenant vous êtes le député de
Maisonneuve-Rosemont pour moi. O.K., c'est bon?
Une voix : ...
M. Dubé : Eh voilà! Bon,
O.K. Excusez-moi un petit aparté avec mon collègue, mais c'est vraiment de
bonne guerre.
Mais je veux revenir sur le point. J'ai
dit, ce matin, en entrée de commission, que le projet de loi n° 10 sur la
main-d'oeuvre, c'est une chose, mais, si on veut être capable de régler...
Vous, vous avez dit... ce n'est pas les racines du mal... vous avez dit les
racines du problème, je veux bien vous citer. Il faut aussi qu'on travaille en
parallèle sur les conditions de nos employés, et je suis 100 % d'accord
avec vous. Il va falloir qu'on travaille là-dessus rapidement, c'est tout ce
que je vais dire, parce que je ne veux pas parler des négos, mais j'apprécie
votre ouverture. Parce que je veux que les Québécois comprennent que, oui, on
peut faire des choses avec le projet de loi n° 10 sur la main-d'œuvre
indépendante, mais la meilleure façon de se débarrasser des agences, c'est d'avoir
des conditions à nos employés dans le public qui sont au moins aussi bonnes,
sinon meilleures que celles qui sont offertes en ce moment par les agences ou
dans le privé. Et ça, je le sais, madame Senneville, qu'on s'entend là-dessus.
Ça fait qu'on ne parlera pas des négos.
Mais, vous, en tant que représentants de cette grande association, de cette
grande famille-là, qui est la CSN, et je vais dire «nous», comme gouvernement,
on a ce devoir-là de faire ça en parallèle. Et, vous l'avez dit, c'est urgent,
bien, raison de plus pour qu'on travaille sur nos conventions le plus
rapidement possible. C'est tout ce que je voudrais dire là-dessus. Et vous
remercier d'être là. Je l'apprécie, là, parce que je le sais que vous en avez
beaucoup. Puis je vais laisser mes collègues, parce que, si je parle trop, ils
n'auront pas le temps. Ça fait que voilà.
Le Président (M. Provençal)
:C'était le temps que vous vous
taisiez.
M. Dubé : Oui? O.K., c'est
bon. Merci, M. le Président. Je vais prendre ça de votre part.
Le Président (M. Provençal)
:La députée de Bonaventure avait
demandé, puis, après ça, je vais... Marie-Victorin.
Mme Blouin : Il reste
combien de temps?
Le Président (M. Provençal)
:il reste 10 minutes.
Mme Blouin : Bien,
justement, j'aimerais rebondir sur ces mesures transitoires là. Donc, je
voudrais tout simplement savoir, en savoir plus, connaître votre vision, en
fait, sur ce seraient quoi, des mesures transitoires idéales et aussi ce serait
quoi, votre stratégie pour déployer tout ça afin, bien sûr, d'abolir, là, le
recours à la main-d'oeuvre indépendante. Mais ce serait quoi, votre stratégie
pour déployer ça et éviter les bris de service? Donc, je ne sais pas si vous
aviez des pistes?
Mme Senneville (Caroline) : Je
vais laisser M. Leclerc vous répondre.
M. Leclerc (Réjean) : bien,
écoutez... Bien, premièrement, bonjour à tous et à toutes. Merci de nous
accueillir.
Je vous dirais, essentiellement, qu'il
faudrait faire l'analyse des régions qui ont besoin de cette transition parce
que ce n'est pas ça à géométrie variable. Il y a des besoins, puis on le voit
dans les chiffres, là, qu'il y a des... qu'il y a de l'argent puis des sommes
déployées plus grandes dans certaines régions, et, là, de savoir à quoi sert la
MOI pour ces régions-là, pour être capables de cibler les actions à poser. Puis
là, M. le ministre a parlé de la négociation, mais il y a aussi la gestion
locale des CISSS et des CIUSSS, mais des établissements, puis ça déborde
également, là, les centres hospitaliers, ça déborde aussi dans les CHSLD, les
RPA. On est tous azimuts, là, à peu près. Donc il faudrait faire l'analyse des
besoins, pourquoi la MOI est exercée...
M. Leclerc (Réjean) : ...dans
ces contextes, puis on peut, je vais paraphraser la présidente de la CSN,
s'attaquer à la racine et non pas du mal, mais du problème, parce qu'on n'est
pas ici dans une démarche bien... Donc, en résumé, il faudrait que le plan soit
plus détaillé pour qu'on puisse intervenir sur plus de détails que simplement
sur une loi qui, elle, est trop... bien que très bien intentionnée, un peu trop
inconsistante, parce qu'on n'est pas capables de répondre à votre question
puisqu'il n'y a pas... où on n'est pas capables d'avoir non plus d'indication
quant au règlement qui va être adopté ultérieurement. Parce qu'on pourrait
répondre plus précisément, sans parler de négociation. Mais ça part de
l'analyse de la région qui, elle, va être visée par la transition, plus courtes
pour certaines, plus longues pour d'autres, mais toujours avec l'échéance de
2026. Pour nous, c'est incontournable, 2026, pour... ça... comme il faut.
Mme Blouin : Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée...
Mme Senneville (Caroline) : Oui,
moi, j'ajouterais peut-être rapidement que, quand on est en plein cœur de la
pandémie puis qui... devait véritablement mettre l'épaule à la roue, il y a eu
des décrets qui ont fait en sorte que les conditions de travail ont été
grandement améliorées et ça a été presque instantané, les gens étaient sur le
plancher pour répondre à l'urgence. Donc...
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Marie-Victorin
voudrait prendre la relève.
Mme Dorismond : Donc, bonsoir
à vous quatre. Moi, je voulais revenir sur une des revendications que vous
faites, c'est le fait que le règlement, il manque de détails. Là, on a écouté
plusieurs personnes aujourd'hui et on constate que les enjeux sont différents
pour chacune des personnes qui ont présenté certaines... Dans leurs
présentations, il y a différents enjeux. Vous l'avez dit tout à l'heure, les
territoires n'ont pas les mêmes besoins, vous avez besoin de transition dans
certains territoires. Et le ministre a parlé aussi du projet de loi, et c'est
plus long, et, tu sais, le règlement, ça va un petit peu plus vite et ça permet
aussi de la flexibilité pour répondre à ces certains enjeux-là qui sont
différents pour chacun des partenaires.
Moi, je me demandais, c'est quoi, les
détails. Puis, vous savez aussi, au niveau du règlement, il y a quand même un
délai avant qu'il soit adopté, et aussi, ça n'empêche pas qu'on puisse vous
consulter pour savoir si ça répond bien aux besoins, aux enjeux où vous avez
des difficultés. Ça fait que moi, j'aimerais vraiment savoir : C'est quoi,
le manque de détails que vous voulez avoir?
Mme Senneville (Caroline) :
Bien, M. le ministre... mais là, c'est moi qui vais citer le ministre, là.
Alors, vous avez dit qu'il y a un équilibre à atteindre. Puis c'est vrai, tu
sais, puis on... Dans notre système législatif, bien, il y a des lois puis il y
a des règlements, puis chacun remplit leur fonction. Mais, moi, je vous dirais,
le fait qu'il n'y ait pas de définition de rien, ça, vraiment, là, on pense que
ça devrait être dans le projet de loi. Moi, je vous dirais que, les exigences
d'embauche, je pense aussi que ça devrait être dans le projet de loi. C'est
préciser à qui s'adresse l'interdiction. À notre avis, ça devrait être
l'ensemble du réseau de la santé et des services sociaux et des partenaires,
mais ça, je pense que c'est quelque chose que... puis... en tout cas, sans
s'enfarger dans l'échéancier extrêmement précis, une espèce d'horizontale ou
quelque chose, ça permettrait d'affirmer, je vous dirais, la volonté
ministérielle. Ça, je pense... en tout cas, ceux que je vois, là, pour
l'instant.
• (18 h 10) •
Pendant que j'ai le micro, j'aimerais
rajouter quelque chose, là, sur aussi ce que le ministre a dit par rapport que,
pour l'instant, c'est beaucoup les soins infirmiers. Mais, je vous dirais, il
ne faut pas oublier les milieux de vie. Il y a les hôpitaux, mais il y a tous
les CHSLD, les RPA, les centres de réadaptation. Ce sont des endroits où les
personnes vivent. Et nous, on a vu, par exemple, dans des agences de placement,
des personnes à l'entretien ne parlent ni français ni anglais. Alors, quand tu
es dans un milieu de vie, quand c'est toujours la même personne qui vient
nettoyer ta chambre, qui établit un contact, tu es capable de parler, tu es
capable de dire : Ah! j'ai vu vos enfants, ils sont venus en fin de
semaine, des fois, tu apportes un verre d'eau, tu fais quelque chose. Alors, je
pense que c'est important, quand on parle de la qualité des soins, que, dans
les milieux de vie, il y ait une stabilité du plus grand nombre de personnels
possible et surtout ceux qui sont en lien avec les patients et les patients.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée.
Mme Dorismond : Comment ça se
fait, ce processus-là que vous parlez, de stabilité? Comment ça se...
Mme Senneville (Caroline) :
Bien, c'est en ne faisant pas recours aux agences. Parce que les agences, c'est
l'instabilité presque institutionnalisée parce que ce n'est jamais les mêmes
personnes, on ne sait jamais qui qui va être là. Alors, quand on a du personnel
régulier qui ont leurs quarts de travail ou leurs horaires de travail puis qui
travaillent...
Mme Senneville (Caroline) : ...sur
le même plancher, dans le même département. Alors, ça, c'est une façon qu'il y
ait une stabilité du personnel et, pour les gens dans ces milieux de vie, je
pense que c'est important aussi.
Mme Dorismond : Quand vous parlez
des RI, RPA, dans le fond, est-ce que vous représentez la clientèle, les
membres qui... des employés qui travaillent en RI?
Mme Senneville (Caroline) : Oui,
absolument.
Mme Dorismond : Oui.
D'accord.
Une voix : ...
Le Président (M. Provençal)
:Oui, il reste trois minutes.
M. Dubé : Peut-être... je
terminerais. Donnez-moi un ordre de grandeur de personnes, parce que vous avez
entendu peut-être les commentaires aujourd'hui, entre autres, des RI, des
représentants de l'Association des ressources intermédiaires, vous en avez...
Là, je vois...
M. Leclerc (Réjean) : Oui,
oui.
M. Dubé : Oui. Donnez-moi un
ordre de grandeur de personnes, parce que je pense que les Québécois ont
entendu qu'à peu près 18 000 employés dans les RI, entre autres, puis ça a un
impact majeur parce que ce sont des petites entreprises. J'aimerais vous
entendre là-dessus. C'est quoi que vous avez comme représentation avec eux.
M. Leclerc (Réjean) : Un peu
plus de 1000...
M. Dubé : ...
M. Leclerc (Réjean) : ...oui,
mais, en même temps, il y en a plusieurs qui ne sont pas syndiqués non plus,
ça, il faut en tenir compte. Parce que vous le dites vous-même, la personne est
chez elle, elle reçoit une clientèle chez elle, et elle est comme tributaire de
prendre soin de clientèles souvent difficiles, là. C'est des usagers, des
clients qui ne sont pas... qui ne sont pas récupérés par les institutions.
Donc, moi, à cet égard-là, je vous dirais
que le recours à la main-d'oeuvre indépendante ne permet pas d'équilibrer, je
vous dirais, l'offre de service qui, elle, est aléatoire en fonction des appels
d'offres, en fonction de plein de critères qui sont un peu en marge du régime
normal de négociation puis de... Bien, vous le savez autant que moi, s'ils sont
régis par des lois.
M. Dubé : Je suis d'accord
avec vous. Puis juste par curiosité, donc vous dites 1000 des 18 000 employés
qui sont... ceux qui sont syndiqués. Puis du côté des RPA, vous avez entendu
aussi des commentaires cet après-midi, vous en représentez combien d'employés
dans les RPA, si je peux vous demander?
M. Leclerc (Réjean) : Nous,
on en a à peu près, je vous dirais, une trentaine de syndicats. Ça fait qu'en
employé... Je pourrais vous revenir avec des chiffres plus précis, là, c'est
autour de ça à peu près, 2000, 3000 environ.
M. Dubé : O.K. Du côté des
RPA.
M. Leclerc (Réjean) : Les
RPA...
M. Dubé : O.K. Mais les
commentaires que vous avez entendus aujourd'hui de ces deux-là, vous comprenez
leurs enjeux très bie, là, il n'y a pas de surprise dans ce que vous avez
entendu cet après-midi.
M. Leclerc (Réjean) : Bien,
moi, je vous avouerais que cet après-midi, je n'ai pas eu le privilège
d'écouter la commission, j'étais sur d'autres dossiers... vous savez. Puis là
on n'est pas ici pour parler de négo, mais nous, on en parle à l'interne, de
négociation, pas vous...
M. Dubé : Je suis content, je
suis content de savoir ça. On peut travailler en parallèle.
M. Leclerc (Réjean) : Pour travailler
en parallèle, vous comprendrez, nous, on est convoqué ce soir, ça fait que je
ne voulais pas comme... Je voulais être prêt pour ce soir, mais pas tout mettre
le montage sur l'audition de la commission, préalablement.
Le Président (M. Provençal)
:Merci pour cette première portion.
Alors, on y va maintenant avec le député de Pontiac.
M. Fortin :Merci, merci, M. le Président. Bien, bonsoir maintenant.
Bonsoir à vous quatre. Merci d'être là puis de nous partager vos préoccupations,
vos pistes de solution même par rapport au projet de loi. Je sais que vous
n'avez peut-être pas eu la chance d'entendre tout le monde qui était là avant
vous, là, mais il y a les gens des établissements conventionnés qui sont passés
ici. Il y a eu les gens des RPA qui sont passés ici. Et il y en a qui ont
demandé, disons, une exclusion temporaire, là, des gens des RPA, en nous
disant : Bien, on ne sera juste pas capable d'arriver, ça ne marchera pas,
puis on n'aime pas ça plus que personne. C'est le dernier recours. Ça nous
coûte cher, ce n'est pas le fun, on ne veut pas le faire, mais on ne sait pas
comment est-ce qu'on va y arriver dans les délais prescrits. Vous pensez quoi
de leur demande à eux, parce que...
Puis là je vous le soumets, parce que ce qu'ils
nous disent, c'est : C'est un milieu de soins. On ne peut pas, là, ne pas
avoir quelqu'un sur place. Donc, on ne voit pas comment on va y arriver dans
ces délais comme ça. Vous, de votre côté, pensez-vous que c'est possible dans
ces milieux-là?
M. Leclerc (Réjean) : Bien,
moi, j'ai une réponse puis je vais vous la faire rapide cette fois-là. Dans les
Laurentides, nous avons vécu nous-mêmes, à la fédération, on a vécu
l'expérience d'un syndicat qui a parrainé un CHSLD pour le rendre conventionné,
parce que l'effet de ça, c'est que l'intention du ministère de la Santé, c'est
de conventionner certains RPA. Et, par la négociation, on a obtenu un nouveau
salaire...
M. Leclerc (Réjean) : ...qui
est tellement appréciable que les... ça a créé un effet d'attraction
instantané. Plein de gens ont délaissé d'autres RPA, d'autres CHSLD pour venir
se faire engager immédiatement. Et même l'employeur reconnaît l'effet attractif
d'une augmentation salariale de... autour, entre 2 $ et 3 $ de plus
de l'heure. Et ça a été immédiat, tellement que les autres ont été obligés de
s'ajuster puis d'offrir ce type d'augmentation salariale et de conditions
salariales qui, elles, se retrouvaient... Parce que les calculs ont été faits,
le propriétaire payait de toute façon auprès de l'agence les mêmes montants
qu'il redonne aujourd'hui aux travailleurs embauchés chez lui.
Mme Senneville (Caroline) : Les
conditions de travail dans les RPA sont particulièrement mauvaises. On a
beaucoup de gens qui travaillent à peine un peu... qui gagnent à peine un peu
plus que le salaire minimum. Alors, je pense que ça fait partie... c'est un
exemple frappant, là, mais, c'est ça, il faut connaître les conditions de
travail dans les RPA pour comprendre pourquoi il y a de la difficulté à recruter.
M. Fortin :Mais
vous l'avez... Vous l'avez dit tantôt un peu aussi, là, le... Les agences, puis
le recours, disons abusif, là, qu'on voit ces jours-ci aux agences, c'est la
conséquence de quelque chose et non... Et non pas la cause, là. Donc, je pense
qu'on l'entend bien dans cet argument-là, que vous venez de faire.
Mme Senneville (Caroline) : M. Roy
voulait, si ça ne vous dérange pas...
M. Fortin :Oui,
allez-y, allez-y.
M. Roy (Danny) : Bien,
juste ajouter que, oui, j'ai entendu, là, j'ai écouté un petit bout. La
question de la prévisibilité, elle est hyper importante dans cette
situation-là. C'est que, là, on est... Le projet de loi a une belle intention.
Il n'y a pas d'échéancier, il n'y a pas un échéancier qui est connu et reconnu
puis les moyens qui viennent avec. Les règlements ne sont pas là, ce qui permet
difficilement à tous les groupes, en fait, de se projeter dans le temps. Je
comprenais qu'il y avait de la difficulté à se projeter. Mais à partir du
moment où les règlements et il y a une meilleure visibilité dans la loi, je
pense que ça permettrait à tous les groupes de mieux se projeter dans l'avenir.
M. Fortin :Oui,
là-dessus... Bien, là-dessus, on va être d'accord, vous et moi, que du côté, du
moins, des échéanciers, c'est quelque chose qu'on peut inscrire dans la loi
puisque le ministre a été tellement clair, disons, par rapport aux échéanciers.
Il y a encore la question des différentes régions. Qu'est-ce que ça veut dire,
les villes, les régions éloignées et tout ça. Mais puisque c'est clair, M. le
ministre, il me semble que c'est quelque chose qu'on pourrait mettre dans la
loi, comme c'est suggéré ici. Vous avez... Vous êtes allé large, un peu, là,
dans qui pourrait être inclus. Vous avez parlé des agents de sécurité tantôt.
Est-ce que c'est parce que vous voyez des situations vraiment, vraiment
abusives où il y a eu des taux, là, absolument faramineux chargés pour des
agents de sécurité? Est-ce qu'on... Le portrait qu'on a eu beaucoup, c'était
peut-être pour d'autres professions, là, mais est ce que vous avez des données
là-dessus à nous partager?
Mme Senneville (Caroline) : Certainement.
Oui.
M. Leclerc (Réjean) : Bien,
moi, les données, je vais laisser ça à la présidente de la CSN qui a la feuille
devant elle, mais moi, je vais vous parler de... C'est parce vous dites... Il y
a une partie de votre question qui est importante. Il y a effectivement des
situations où les agents de sécurité, qui doivent faire partie de l'équipe. Tu
sais, souvent, on veut le prendre de l'extérieur, puis sous prétexte qu'il doit
avoir le permis du Bureau de sécurité privée en vertu de la loi. Mais il fait
partie de l'équipe, et souvent ce permis-là ne se colle pas avec la fonction
directe d'un agent de sécurité. Mais aussi, il faut comprendre qu'en ne faisant
pas partie de l'équipe, de l'embaucher et de le former, adapté à la situation
d'une clientèle vulnérable, des jeunes, au niveau de l'urgence, peu importe
l'endroit, il doit faire partie de l'équipe pour assurer la stabilité, parce
que c'est cet enjeu-là qui devient, pour l'agent de sécurité qui exerce sa
fonction, qui devient le... qui permet que le personnel se sente en sécurité
parce que c'est toujours la même personne qu'on a prévue, qu'on peut anticiper
sa réaction en cas d'urgence et aussi auprès des usagers puis de la clientèle.
• (18 h 20) •
Mme Senneville (Caroline) : On
n'est pas en sécurité dans une banque comme on l'est dans un hôpital. Ce n'est
pas du tout le même genre de personnes. Puis je dirais qu'au moment où on se
parle, c'est la catégorie d'emploi qui brise tous les records par rapport au
nombre d'heures. On est à 9,3 millions d'heures travaillées. C'est trois
fois plus que tout le personnel de la catégorie A.
M. Fortin :O.K. Mais est-ce que ça finit par coûter quelque chose de
complètement démesuré à l'État, selon vous, là? C'est-tu... Parce que
nécessairement, si on passe par l'agence, il y a quelqu'un qui prend un profit
là-dessus. Mais est-ce que les taux sont aussi démesurés que ce qu'on a vu par rapport
à d'autres catégories d'emplois? Tu sais, on parlait tantôt des taux de
400 $ ou même de, tu sais, n'importe quoi au-delà de 100 $,
150 $. Est-ce que c'est ce que vous voyez pour les agents de sécurité
aussi?
Mme Senneville (Caroline) : Ce
que je peux vous dire, puis excusez-moi, là, c'est quelque chose, ça va coûter
344 millions...
Mme Senneville (Caroline) : ...en
2020-2021. Alors, c'est beaucoup de sous.
M. Fortin :O.K., oui. O.K. Je comprends. Dans vos recommandations,
point 1, e, vous recommandez que le projet de loi n° 10 soit amendé
afin d'y inclure l'exclusion des établissements publics aux pénalités prévues à
l'article 4. Donc, pouvez-vous juste me l'expliquer celle-là, là,
qu'est-ce que vous voulez dire par ça, là?
Mme Senneville (Caroline) : Bien,
il n'y a pas de bidous de trop dans le système public, alors... tu sais, qu'on
se sert de l'argent public pour payer des pénalités, peut-être au détriment de
services, bien... Alors, on comprend l'intention, là, tout à fait. Qu'il y ait
des individus qui puissent être pénalisés, c'est une chose, mais c'est ça...
Autant on croit que ce n'est pas une bonne utilisation des deniers publics que
de payer des profits à des gens qui font de la business avec la santé du monde,
autant on pense que peut-être ce n'est peut-être pas l'idée du siècle non plus
que ça serve à payer des pénalités, même si on comprend le sens du message, là,
je vous dirais.
M. Fortin :O.K., mais vous la laisseriez pour le privé parce que là,
vous demandez l'exclusion des établissements publics. Donc, pour les RPA, par
exemple, vous la laisseriez, là.
Mme Senneville (Caroline) : Oui,
parce que ce n'est pas les deniers publics.
M. Fortin :O.K. Dernière chose, le Comité permanent paritaire de
planification de la main-d'oeuvre que vous avez demandé, est-ce que vous avez
cette... Qu'est-ce que ça amène de plus que les opportunités que vous avez
maintenant d'échanger avec le gouvernement sur la main-d'oeuvre, là? Comment
vous le voyez? Comment vous... comment vous voyez la structure de cette
nouvelle bibitte-là, disons, là?
Mme Senneville (Caroline) : Bien,
ça le formalise. Rien n'est impossible, mais, en même temps, tant que ce n'est
pas formalisé, que ce n'est pas écrit, que ce n'est pas... je veux dire, ça...
des fois, ça aide de formaliser les choses, je vais dire ça comme ça. Puis,
pour nous, l'important c'est que ce soit paritaire parce que le pouls sur le
terrain est là. Moi, je peux vous dire qu'il y a deux sinon trois négos de ça.
La confédération que je représente a dit au ministère de la Santé : Dans
10 ans, il va nous manquer 3 000 préposés aux bénéficiaires. Ça
fait qu'on voit des affaires sur le terrain, puis je ne suis pas en train de
dire qu'on possède la vérité, là, mais le fait que ce soit paritaire puis que
ce soit un lieu d'échange, bien, on peut croiser les renseignements qu'on a, de
part et d'autre, puis on peut trouver des solutions à terme. Puis je vous
dirais... puis je l'ai dit, le projet de loi arrive parce qu'on a tiré
l'élastique, la situation a empiré, empiré, empiré, c'est comme si... puis pour
moi, c'est le premier mérite de ce projet de loi là, c'est de dire : Oh,
un instant, on ne peut pas laisser ça perdurer. Alors, je pense que d'avoir un
forum où on puisse discuter de ça, dans un contexte où la pénurie de
main-d'oeuvre, que ce soit dans le privé ou dans le public, là, elle va
continuer parce que si elle est due aussi en partie à cause de données
démographiques, bien, c'est une manière qu'on suggère de pouvoir discuter puis
surtout, surtout trouver des solutions aux problèmes.
M. Fortin :Effectivement, des fois, il faut se rendre à quelque chose
qui est complètement intenable, là, pour se rendre compte que ça ne peut pas
durer comme ça. Puis à 100 millions dépensés juste sur la Côte-Nord en
agence, ce n'est pas intenable. Alors, je vais être d'accord avec vous
là-dessus.
Moi, ça fait le tour. Je vous remercie
pour les réponses aux questions. Puis c'est tout pour moi, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, oui, ça va être au tour
maintenant du député de Rosemont.
M. Dubé : De Maisonneuve.
M. Marissal : Merci, merci.
Merci d'être là à vous quatre. Vous trouvez que c'est court, 10 minutes,
Mme Sasseville, essayez 3 min 16 s pour voir. Ça fait que
je vais y aller rapidement.
Mme Senneville (Caroline) : Senneville...
corriger tout de suite, Senneville.
M. Marissal : Je vais y aller
rapidement. Dans les mesures transitoires, là, vous dites, au point 2, que
le personnel d'agence de placement et la MOI bénéficient des conditions de
rémunération équivalentes au personnel du réseau, donc taux horaires, avantages
sociaux, allocations, déplacements, etc., mais est-ce que ça ne va pas de soi,
ça? Je ne comprends pas pourquoi vous nous suggérez ça. Parce que je vois mal
comment on pourrait les payer moins si on veut les ramener dans le réseau.
Est-ce que vous voulez dire, par ailleurs...
Mme Senneville (Caroline) : En
fait, c'est l'inverse. C'est l'inverse. C'est-à-dire qu'au moment où on se
parle, la main-d'oeuvre indépendante peut et gagne... a des meilleures
conditions de travail. Alors, si par l'objet de la loi, on dit : Bien, la
main-d'oeuvre indépendante, vous ne pouvez pas la payer plus que les gens qui
sont sur le plancher à faire l'ouvrage. Bien, tout de suite, ça rend
l'attractivité des agences beaucoup moins grande.
M. Marissal : O.K., donc,
vous... ça, c'est le plafond pour ce qu'on payerait à des MOI. O.K., je
comprends, je l'avais pris à l'envers, je pensais que c'était le monde que vous
voulez ramener, parce qu'il y a tout un débat aussi, à savoir, et vous le
savez, si on demande... je prends le cas, là, type, là, d'une infirmière qui
est en agence depuis quelques années, de revenir... est-ce qu'on devrait lui
reconnaître, par exemple, ses années de service? Est-ce...
M. Marissal : ...qu'on devrait
l'engager à tel ou tel palier de rémunération. Vous en êtes où, là-dedans, dans
votre réflexion? Parce qu'il va falloir quand même qu'on les ramène dans le
réseau, là.
Mme Senneville (Caroline) : Tout
à fait, mais vous savez, on en a... à la CSN notamment mais pas juste là, mais
je vais parler de la CSN, c'est ça que... la centrale que je préside, on a une
énorme expertise là-dedans, et dans le privé et dans le public. Alors, des
fusions, c'est déjà arrivé. Intégrer du monde du privé au public, on l'a fait
dans le réseau collégial. On s'assoit, on se relève les marches puis on décide
ensemble comment on règle cette difficulté-là. Et ça, je vous dirais, il y a
énormément d'expertise là-dedans. Ça se fait beaucoup par la négociation de la
convention collective, là, parce que l'ancienneté, c'est... le monde... Tu
sais, c'est précieux pour quelqu'un, hein, son ancienneté. Puis l'ancienneté, c'est
la fidélité aussi au réseau, la fidélité à la mission publique, mais, une fois
qu'on a dit ça, tout se négocie.
M. Marissal : O.K. Puis vous
négocierez à la bonne table, ce n'est pas ici que ça va se faire. L'autre
point, là, qu'on limite la marge de profit des agences de placement. Définir
marge de profit, on vient d'avoir une conversation intéressante avec le
représentant d'une association d'agences. Comment on définit ça, le profit?
Parce que, pour moi, ce n'est pas tout à fait clair encore, là.
Le Président (M. Provençal)
:Très rapidement, s'il vous plaît.
Mme Senneville (Caroline) : Bien,
d'abord, ça prend de la transparence. Moi, je vous dirais, probablement que la
chose qui nous manque le plus, c'est ces gens... Tu sais, super, ils ont un
seul client, ou à peu près, qui paient toujours rubis sur l'ongle, puis je ne
suis pas sûre qu'il y a beaucoup de questions qui se posent. Alors, oui,
d'abord la transparence, puis c'est quoi, les vrais chiffres, puis de dire, à
un moment donné : Bien là, on comprend que vous avez besoin de sous pour
fonctionner, pour être, je vais dire rentable, mais il devrait y avoir un
plafond à la profitabilité.
Le Président (M. Provençal)
:Merci.
M. Leclerc (Réjean) : Si vous
me permettez, bien, je vais juste compléter en disant que le modèle de
plafonnement des bénéfices existe dans le préhospitalier parce que, justement,
il y a des entreprises privées dans le secteur préhospitalier, mais il n'y a
pas de profits à l'infini non plus, parce que, justement, c'est budgété par le
ministère.
Le Président (M. Provençal)
:M. le député...
M. Leclerc (Réjean) : C'est
comme ça...
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, M. Leclerc. M. le
député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Trois minutes
16?
Le Président (M. Provençal)
:C'est ça.
M. Arseneau : Merci. Alors,
merci à vous quatre. Je vais avoir le privilège de compléter la rencontre avec
vous aujourd'hui. Je reviens sur votre conclusion tout d'abord. Vous dites
qu'on doit faire le choix du réseau public accessible et de qualité. Donc, il y
a plusieurs sujets d'intérêt à l'heure actuelle dans ce débat. Encore
aujourd'hui, on avait une manchette de journaux où les cliniques voulaient
rapidement avoir un permis de clinique privée pour pouvoir, supposément,
désengorger, là, les listes d'attente. On a le projet de minihôpitaux.
Je ne veux pas vous demander de commenter
ça, parce que ça pourrait être long, mais je voudrais savoir comment vous vous
positionnez par rapport à d'autres commentaires qu'on a entendus aujourd'hui
sur les services achetés. Est-ce que vous, dans votre centrale, vous avez aussi
cet enjeu-là où non seulement il y a des individus qui, à travers les agences,
viennent dans les hôpitaux publics, mais il y a aussi du travail qui pourrait
se faire dans le public puis qui est sous-traité à des cliniques privées?
Est-ce que c'est une préoccupation pour vous?
• (18 h 30) •
Mme Senneville (Caroline) : Très
certainement. Puis je peux vous dire que le débat actuel sur les agences
démontre à quel point, quand on tombe sur la pente savonneuse de la
privatisation, combien c'est difficile de revenir en arrière. Alors, ça,
vraiment, là, et c'est ce qu'on craint notamment avec tous les projets privés.
Profitabilité aussi, hein, ça fait partie des préoccupations qu'on a. L'autre
préoccupation, c'est que, dans un contexte de pénurie de main-d'œuvre, bien, il
ne faut pas que... il faut que les ressources soient à la bonne place et bien
utilisées. On parle... On craint vraiment que ça soit vampirisé.
Puis il faut aller au-delà de la carte....
bien là, j'allais dire la carte soleil, mais ce n'est plus vraiment ça, la
carte de l'assurance maladie. On nous dit non, non, vous ne payerez pas, mais,
quand on rajoute le profit, ça ne nous coûte pas plus cher individuellement,
mais ça nous coûte plus cher collectivement. Puis je vous dirais que, dans tout
ce qui est privé, ce qui est surtout, surtout privé, ce sont les profits.
M. Arseneau : Tout à fait, on
est d'accord là-dessus. Le ministre parlait de 300 à 400 millions, là,
pour la main-d'œuvre indépendante ce matin. Donc, on imagine bien que, pour les
services achetés, si c'est 3,5 milliards par rapport à 1,2 milliard,
bien, c'est au moins trois fois 400 millions, donc 1,2 milliard de
dollars grossièrement.
Vous dites, dans vos recommandations, au
point 1b : un échéancier à court terme clair et contraignant. À court
terme, vous voyez ça comment? En termes de mois ou d'années?
Mme Senneville (Caroline) : Bien,
ça dépend des régions, je vous dirais, honnêtement, là, ça dépend des régions.
Il y a des endroits où on peut le faire...
18 h 30 (version non révisée)
Mme Senneville (Caroline) : ...très
rapidement, puis oui, c'est vrai, on a parlé de la Côte-Nord, parlé du Grand
Nord, l'Abitibi. Ce sont des régions où il va falloir... ça va nous demander
peut être plus d'analyse et plus de souplesse, puis c'est ça. Il y a d'autres
problématiques aussi, je pense par exemple à la pénurie de... la pénurie de
main-d'œuvre et de logements aussi. Donc ça fait partie, là, d'une
problématique qui n'est pas simple.
M. Arseneau : D'accord.
M. Leclerc (Réjean) : Je vais
peut-être... Si vous permettez, lorsqu'on a eu les discussions dans le contexte
de l'urgence sanitaire et qu'on va mettre de l'avant des mesures financières,
on voyait immédiatement le résultat. Ça nous a permis de passer à travers
certaines vagues.
M. Arseneau : D'accord.
Le Président (M. Provençal)
:On vient de compléter nos échanges de
la journée. Merci beaucoup aux représentants de la CSN pour la qualité des
échanges qu'on a eus avec vous et l'ensemble des partenaires de la journée.
La commission ajourne ses travaux jusqu'à
demain, mercredi 15 mars 2023, après les avis touchant des
travaux des commissions, où elle poursuivra son mandat.
Encore merci de votre disponibilité puis
de vos contributions.
Une voix : Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
:Bonne soirée.
(Fin de la séance à 18 h 33)