(Huit
heures cinquante minutes)
Le Président (M.
Provençal)
: Alors,
bon matin à tous. Je vous informe que les règles de procédure habituelles
prévues au règlement de l'Assemblée nationale s'appliqueront pour nos séances
jusqu'à nouvel ordre. Cela étant dit, je vous invite à respecter les mesures
sanitaires en vigueur concernant la distanciation physique et le port du
masque.
Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services
sociaux ouverte. Je vous invite... Excusez-moi. Je souhaite la bienvenue et je
demande à toutes les personnes de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
appareils électroniques.
La commission est
réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions
publiques sur le projet de loi n° 11, Loi visant à augmenter l'offre de
services de première ligne par les médecins omnipraticiens et à améliorer la
gestion de cette offre.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Non, M. le Président.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci beaucoup. Ce matin,
nous débuterons par les remarques préliminaires puis nous entendrons les
groupes suivants : la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, la
Fédération des médecins résidents du Québec,
la Fédération médicale étudiante du Québec et la Fédération des médecins spécialistes du Québec.
Comme la séance a
débuté à 8 h 50, y a-t-il consentement pour poursuivre nos travaux
au-delà de l'heure prévue? C'est-à-dire
qu'on ajouterait un 10 minutes, ce qui veut dire qu'on va poursuivre nos
travaux jusqu'à 11 h 55. Consentement?
Des voix :
Consentement.
Remarques préliminaires
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. J'invite maintenant M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. M. le
ministre, vous disposez de 5 min 34 s pour les remarques
préliminaires.
M. Christian Dubé
M. Dubé : Alors, merci beaucoup, M. le Président. Bonjour à tous. Je vais aller
rapidement dans les recommandations d'usage, mais je suis très content
de voir mes collègues en ce retour d'année au salon bleu.
Je pense, ce qui est
important avec le projet de loi n° 11, c'est qu'on a l'occasion d'élargir
l'organisation de la première ligne. Les médecins de famille sont des acteurs
clés, mais, on le sait, il y a aussi beaucoup d'autres professionnels qui
peuvent contribuer à la première ligne. Notre plan pour la santé, dont on parle
beaucoup ces temps-ci, repose sur quatre fondations, puis le projet de loi
n° 11 s'inscrit dans trois de ces quatre fondations-là, à savoir les
ressources humaines, les données puis les systèmes informatiques.
En fait, on doit se
donner les capacités d'avoir les données nécessaires pour mieux gérer mais
aussi pour améliorer notre première ligne, qui est la base de notre système de
santé avec les omnis mais, je le répète, aussi avec les autres professionnels.
Nous avons
actuellement plus de 900 000 patients orphelins sans médecin de
famille. Avec le vieillissement de la
population, le temps d'attente dans les urgences, la diminution de la prise en
charge, c'est clair que les Québécois n'ont pas ce qu'il y a de mieux.
Ce manque d'accessibilité n'est pas acceptable.
Essentiellement,
notre projet de loi repose sur trois mesures de gestion : connaître
l'offre et la demande pour mieux desservir le patient, l'utilisation des
meilleures pratiques, entre autres avec des systèmes d'information modernes et
plus de pertinence grâce au triage en amont de la prise de rendez-vous.
En fait, ce que la
pandémie nous a appris, c'est que les faiblesses que notre réseau avait avant
la pandémie ont été exacerbées depuis les deux dernières années, dont notamment
l'accessibilité à nos urgences, à des chirurgies, à des rendez-vous. Mais, malgré tout, la pandémie a mis en lumière qu'on
pouvait faire mieux et qu'on pouvait innover.
Depuis que notre
gouvernement est en place, nous avons eu de longues discussions avec la FMOQ,
mais malheureusement nous n'avons pas pu nous entendre pour une prise en charge
additionnelle. En fait, pendant les trois dernières années, la prise en charge
s'est détériorée. Et pour dénouer cet imbroglio, nous croyons fermement que
nous devons avoir des données disponibles pour nos gestionnaires pour bien
comprendre l'offre et l'ajuster en fonction de la demande dans des régions
spécifiques. Ça fait donc partie de notre stratégie de décentralisation.
Maintenant, parlons de
l'offre. Je parle ici d'avoir une meilleure information qui nous permettrait de
mieux répartir les médecins sur le territoire et d'identifier les endroits où
nous devons développer des services, c'est-à-dire augmenter l'offre. Pour bien
comprendre l'offre médicale, il faut bien comprendre, pour chaque région,
l'occupation et les engagements des médecins, de leur GMF, ou de leur clinique,
ou même de leurs autres occupations.
Je veux être bien clair, notre but n'est pas de
contrôler tous les médecins, mais d'être capables de savoir où il nous manque
des rendez-vous, dans quelles régions. Un peu comme on l'a fait pour la
vaccination. Nous voulons donc mieux outiller nos gestionnaires régionaux pour
une meilleure répartition des ressources.
Maintenant, sur le côté de la demande. Avec les
systèmes de prise de rendez-vous modernes, maintenant, il est très facile de
faire une évaluation locale et nationale de la demande. Le défi est que ceux
qui ont besoin d'un rendez-vous puissent
l'obtenir dans un délai raisonnable. À terme, ça doit devenir aussi facile de
prendre rendez-vous avec un médecin sur nos plateformes que ça l'a été
avec Clic Santé sur la vaccination. On souhaite que toute la population ait
accès à un service de qualité dans un délai raisonnable et on est déterminés à
fournir tous les outils nécessaires pour y arriver.
Quelques mots sur les meilleures pratiques.
Depuis le début des discussions avec la FMOQ, nous avons ajusté notre tir pour
tenir compte de certains facteurs. On doit travailler tous ensemble pour
accéder aux meilleures pratiques, pour changer les choses et pour innover.
Voici deux
gros changements que nous avons mis sur la table depuis le début des
négociations, premièrement sur la charge de travail. La pratique de la médecine
a beaucoup changé. Nos jeunes médecins veulent une meilleure
conciliation travail-famille. On l'a compris. Ils veulent travailler
différemment. Donc, on veut que la prise en charge soit faite par un groupe de
médecins, comme une GMF, et non pas par un seul médecin. Les Québécois sont d'accord
avec cette approche.
Maintenant, sur la pertinence, il faut s'assurer
que la porte d'entrée de la première ligne ne soit pas uniquement les médecins
de famille. On peut s'assurer de la pertinence avant la prise de rendez-vous.
Cette méthode de gestion est déjà pratiquée
et doit être mise en place, car elle est complémentaire à notre objectif
d'ajuster l'offre et la demande. Je
pense, entre autres, au guichet d'accès à la pertinence qui a été fait dans la
région de Rimouski, et on aura la
chance d'y revenir. Ça, c'est de l'innovation et ça pave la voie à notre
volonté d'avoir un système de santé plus humain et performant.
En conclusion, ce projet de loi répond aux
engagements que notre gouvernement a pris pour le futur de notre système de santé : améliorer la gestion des
ressources humaines, de l'utilisation des données et des systèmes d'information
pour améliorer l'efficacité.
On tend la
main aux médecins pour améliorer l'accès des Québécois à une première ligne. On
veut collaborer. Ce n'est pas un projet de loi de punition. C'est un
projet de loi de gestion. J'ai très hâte d'entendre les commentaires de tous
les parlementaires. Merci beaucoup pour votre présence. M. le Président, merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le porte-parole
de l'opposition officielle et député de
Nelligan à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de
3 min 43 s. Je vous cède la parole.
M. Monsef Derraji
M. Derraji : Merci, M. le Président.
Très heureux et très honoré de faire partie de cette commission pour la
première fois en tant que porte-parole de notre formation politique en santé et
en services sociaux.
Pourquoi nous sommes là aujourd'hui? Pourquoi
nous sommes là aujourd'hui, M. le Président, c'est parce que la situation est très critique, il y a plus de
1 million de Québécois qui n'ont pas de médecin de famille. Un résultat
d'un laxisme qui a duré plus que quatre ans, et un réveil, un réveil du
gouvernement quatre ans plus tard.
Je tiens
juste à rappeler ces chiffres, M. le Président, parce que je viens avec une
bonne volonté pour entendre le ministre sur comment il compte régler la liste
d'attente énorme. Ce qu'on nous avance sur la table aujourd'hui avec ce
projet de loi est, selon moi, insuffisant.
J'ai lu l'ensemble des mémoires que nous avons
reçus et j'essaie de trouver encore une fois quelqu'un qui a dit que c'est une très bonne idée, ce projet de
loi. Donc, j'ai bien hâte d'entendre les groupes, je... entendre à débattre
avec le ministre pour voir réellement est-ce que ce qu'on va mettre
aujourd'hui va régler le problème de la liste d'attente et qu'aujourd'hui ce
que nous avons est une situation critique.
Les patients
non traités aujourd'hui, c'est des patients avec des maladies chroniques, c'est
des patients qui vont se ramasser dans le réseau de la santé et
justement encombrer la deuxième et la troisième ligne.
La situation est urgente, et je ne pense pas que
des mots comme la «refonte» ou des belles phrases marketing pour dire qu'on va régler le problème régleront le
problème. Le système de santé, et surtout la première ligne, a besoin de
courage. Et ce courage, ce n'est pas en gérant les rendez-vous comme on gère
dans le secteur manufacturier. Gérer l'offre et la demande, oui, c'est
important, mais on ne gère pas l'offre et la demande dans le secteur privé
comme on gère l'offre et la demande dans le secteur de la santé.
Pensons à la santé mentale. Pensons aux listes
d'attente de plusieurs patients qui attendent de voir leur médecin de famille.
Oui, gérer les rendez-vous est important. J'ai bien hâte d'entendre les
médecins généralistes, qu'est-ce qu'ils pensent.
Et je vais juste terminer, M. le Président, avec
une citation, avec une citation d'un médecin généraliste à qui j'ai demandé son
autorisation hier, permettez-moi une seconde juste de la chercher, parce que
c'est très important : «Ce qui est fâchant avec le
projet de loi n° 11 de M. le ministre, c'est qu'il est évident qu'il ne
permettra pas d'atteindre l'objectif souhaité par le ministre, et ensuite on
blâmera à coup sûr les médecins de famille pour cet échec, on brandira à
nouveau la correction, et ce sera encore une fois l'échec.»
On démarre très mal, M. le Président, l'étude de
ce projet de loi, parce qu'à savoir les personnes intéressées, c'est les
médecins de famille, parce que c'est avec eux qu'on va régler le problème des
listes d'attente, et j'ai bien hâte à voir jusqu'à quel point le ministre est
prêt pour amender son projet de loi. Merci, M. le Président.
• (9 heures) •
Le
Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, M. le député. J'invite maintenant
le porte-parole du deuxième groupe
d'opposition et député de Rosemont à faire ses remarques préliminaires pour une
durée maximale de 56 secondes.
M. Vincent Marissal
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Je ne m'étirerai pas dans les salutations, même si elles sont
sincères, puisque j'ai 56 secondes. Je l'ai dit tout à l'heure aux médias,
je le redis ici, ça mettra la table, il n'y a pas que dehors qui fait fret, il y a l'air de faire frette entre
les médecins et le ministre. Il fait fret entre le réseau et le ministre, ces
temps-ci, on ne réglera pas les
problèmes avec une énième confrontation. J'espère qu'on va être capable de
s'entendre avec les partis de l'opposition aussi.
J'ai lu, moi aussi, les mémoires cette fin de
semaine. Je n'ai pas trouvé beaucoup d'appuis pour ce projet de loi. Et ce projet de loi, qui, quant à moi, a une
approche beaucoup trop strictement comptable, ne touche pas non plus le
vrai problème de la rémunération des médecins. Je pense que, de toute façon, il
faudra en faire des alliés plutôt que des ennemis dans une relance que l'on
veut de toute façon dans le réseau de la santé. Moi, je ne parle pas ici au nom
des médecins, je parle ici au nom des
patients du Québec, des malades, des gens qui ont besoin de médecins de
famille. On a le devoir de leur trouver des solutions, pas de se taper
une confrontation préélectorale.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, M. le député.
J'invite maintenant le porte-parole du troisième groupe d'opposition et député
des Îles-de-la-Madeleine à faire ses remarques préliminaires pour une durée
maximale de 56 secondes.
M. Joël Arseneau
M. Arseneau : Merci beaucoup, M. le
Président. Alors, salutations à tous. Dans le peu de temps qui m'est imparti, j'aimerais dire que le projet de loi
n° 11, selon nous, dans sa forme actuelle, ne va pas atteindre l'objectif
qu'on souhaite, c'est de donner aux Québécois un meilleur accès aux
soins de santé de première ligne. C'est probablement fort contre-productif. On ne va pas refonder le système de santé avec
ça. C'est un mémoire qui est très parcellaire et qui vise avant tout,
selon nous, à faire en sorte qu'on atteigne l'objectif que s'était fixé le
gouvernement d'un médecin pour chaque
Québécois. Et on estime que cet objectif-là aujourd'hui n'est pas celui à
atteindre, mais plutôt d'avoir accès à des soins de santé de façon plus
générale.
À la lecture des mémoires, on s'aperçoit que la
plupart ne voient pas cette vision du gouvernement vers une amélioration de
l'accès aux soins pour les Québécois. Les médecins, on les entendra tout à
l'heure, sont en colère. Ils ne sont pas vus
comme des partenaires, mais comme des boucs émissaires face au gouvernement qui
n'atteindra pas son objectif électoral. Alors...
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le député.
M. Arseneau : Alors, merci, on en
reparle.
Le Président (M. Provençal)
: J'invite maintenant la députée
d'Iberville à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de
51 secondes. Mme la députée.
Mme Claire Samson
Mme Samson : Alors, j'aimerais bien
vous saluer, mais je n'ai pas le temps. Alors, M. le Président, vous me verrez
très sceptique quant à la contribution de ce projet de loi à l'amélioration des
soins de santé au Québec. Et je n'ai pas compris d'entrée de jeu pourquoi le
leader du gouvernement voulait repousser l'étude de ce projet de loi là quelque
part dans le temps, je ne le sais pas, probablement pour nous passer ça à la
un, deux, trois à la fin de session. Alors, j'écouterai avec beaucoup
d'attention, et merci.
Auditions
Le
Président (M. Provençal)
: Merci. Merci pour ces remarques préliminaires.
Nous allons maintenant débuter les auditions.
Je souhaite la bienvenue aux représentants de la
Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour
votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite à vous présenter puis à commencer
votre exposé. Je vous cède la parole.
Fédération
des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ)
M. Amyot (Marc-André) : Alors,
bonjour. Marc-André Amyot, président de la Fédération des médecins
omnipraticiens du Québec. Je suis accompagné par Dr Sylvain Dion, qui est
toujours en pratique active, qui est le premier vice-président de la FMOQ.
Alors, M. le Président, et je remercie les
membres de la commission de nous recevoir. D'entrée de jeu, nous ne comprenons
pas pourquoi nous en arrivons aujourd'hui à devoir commenter le projet de loi
n° 11 en pleine pandémie, alors que
nous travaillons d'arrache-pied à la combattre avec les autres professionnels
de la santé, et, pas besoin de le rappeler, pandémie qui est loin d'être
terminée.
Les médecins de famille sont au front partout
dans le réseau. Les médecins de famille sont bien conscients de la problématique
d'accès aux soins primaires. Et je vous le dis, M. le Président, les médecins
de famille font partie de la solution, mais ils ne sont pas la cause de tous
les problèmes du réseau de la santé, et c'est odieux de laisser présager qu'ils
en sont la cause. Également, il faut comprendre qu'ils n'en sont pas l'unique
solution.
Nous avons toujours été de bonne foi dans nos
négociations, et le mémoire le détaille très bien, chronologiquement. Depuis
l'été dernier, à la demande du ministre, nous avons proposé des mesures
innovantes jamais mises sur la table afin d'améliorer l'accès à un médecin de
famille. On parle d'inscription de groupes, d'inscription à une équipe de
soins. Le guichet d'accès populationnel... Le guichet d'accès pertinence, vous
aurez une présentation du docteur Éric Lavoie puis du CISSS du
Bas-Saint-Laurent, on adhère entièrement à ça. Et avec une pénurie de
1 000 médecins de famille au Québec, on ne peut plus assurer seuls
l'entièreté des besoins de la population. Ces besoins-là doivent être répartis
sur d'autres professionnels qu'uniquement le médecin de famille. On parle des
infirmières cliniciennes, des IPS, des travailleurs sociaux, psychologues,
physiothérapeutes, pharmaciens, dentistes, inhalos, il y en a plein d'autres.
On partage les besoins de la population sur une équipe de soins et on ne
réserve au médecin de famille que ce qui nécessite l'expertise du médecin de
famille.
Alors que le ministre déclarait aux
journalistes : Le projet de loi est une main tendue aux omnipraticiens,
les médecins ont perçu une autre sorte de main tendue. Ils ont perçu du
gouvernement que le gouvernement avait placé une épée de Damoclès sur notre
tête. Et je dois m'inscrire en faux quand on dit qu'on refusait de négocier ou
qu'on négociait de mauvaise foi. Les données, on répond présent. D'ailleurs,
dans les GMF, on a contribué à une entente dans laquelle les GMF transmettent
leur offre de service, l'entièreté des rendez-vous à l'orchestrateur. Les
données, on les a. On était cependant inquiets de l'utilisation nominative pour
faire la chasse aux sorcières d'aller chercher les docteurs moins productifs.
Et on a partagé cette inquiétude-là avec le ministre, il nous a rassurés avec
la lettre d'entente n° 364. Vous avez copie,
dans notre mémoire, de cette lettre d'entente là. L'encre n'était pas encore
sèche, de cette lettre d'entente là, on nous arrive avec le projet de loi
n° 11 et on ajoute par-dessus le projet de loi n° 19. On a demandé aux représentants du ministère :
Expliquez-nous, expliquez-nous le projet de loi n° 11 dans le contexte de
364 et du projet de loi n° 19. De deux choses l'une : ou bien
ils ont été incapables, et ça, c'est pour le moins inquiétant, ou bien ils
n'ont pas voulu, puis, ça aussi, c'est inquiétant.
Elle est où, la collaboration, la bonne foi et
la main tendue quand on essaie d'avoir des explications sur le projet de loi
n° 11? C'est une chose, Trivago, pour réserver une chambre d'hôtel puis
pour réserver un vaccin, mais c'est une tout autre chose pour les autres
problèmes de santé. Où est le GAP? Où est l'équipe de soins dans le Clic pour
avoir rendez-vous avec un médecin? Vous trouvez ça sérieux de comparer une
réservation de chambre d'hôtel à une consultation médicale? C'est bien mal
connaître la complexité des besoins de la population. C'est bien mal connaître
la réalité du travail des médecins de famille en première ligne. Prenez, par
exemple, avec les hausses de demandes en santé mentale : Vous pensez qu'un
Clic Santé va régler tout ça? J'en doute.
Notre travail ne peut pas se résumer à des
quotas de patients, à des nombres de patients à l'heure. On ne travaille pas
avec de la marchandise, nous traitons des humains, nous traitons des patients
avec des problèmes de santé complexes.
Parlons du dénigrement maintenant. Le
19 octobre, le premier ministre, dans son discours inaugural, a remercié
tous les médecins de... tous les... pardon, remercié tous les travailleurs de
la santé, tous les travailleurs de la santé, sauf un groupe : les médecins
de famille. Non seulement il ne les remercie pas, mais il menaçait d'intervenir
auprès de ceux qu'il jugeait insuffisamment productifs. Et boum! Arrive le
projet de loi n° 11. Version actualisée de la triste loi 20. On
ravive les obligations et les pénalités, et, M. le Président, les médecins de
famille ne seront pas les boucs émissaires des problèmes de santé et des ratés
du réseau de santé. On fait partie de la solution, oui, clairement, mais les
médecins de famille ne peuvent pas être l'unique solution. Le ministre parle de
revoir les fondations du système de santé, et on répond : Bravo! On
répond : Présent. Mais un système de santé fort repose sur une première
ligne forte, oui, mais sa révision avec le projet de loi n° 11 ne
s'attaque qu'aux médecins. Désolant et réducteur.
Et c'est une méconnaissance profonde de la
première ligne et du travail des médecins de famille. Les médecins de famille
ne comprennent pas ce mépris du gouvernement à leur égard. Et, malgré ce
dénigrement-là, qu'est-ce qu'ils ont fait pendant la cinquième vague? Ils ont
fait la même chose que pendant toutes les autres vagues. Ils ont répondu
présent au front, dans les unités COVID, à l'urgence, dans les cliniques COVID,
dans les GMF et les cliniques médicales. Ils ont ouvert des rendez-vous en
populationnel à la clientèle qui n'avait pas de médecin de famille. Ils ont
ouvert des plages pour transférer des P4-P5 de l'urgence, des problèmes mineurs
qui peuvent être traités dans des cliniques médicales pour justement laisser la
place aux patients plus malades, aux patients COVID dans les salles d'urgence.
Ils ont répondu présent. Ils l'ont fait, pas pour procurer des votes ou une
élection, ils l'ont fait parce que c'était leur devoir, ils l'ont fait parce
que la population en avait besoin. Les politicailleries, les médecins de
famille n'en ont rien à faire. Puis ils sont écoeurés d'être méprisés et
intimidés. Il faut que ça change.
Le projet de loi
n° 11 n'amène aucun changement, bien au contraire. Vous pensez que les
médecins sont insensibles aux besoins de la population? C'est bien mal
connaître les médecins de famille de penser ça puis c'est d'autant plus
blessant pour eux.
Aujourd'hui, les 10 000 médecins de
famille se joignent à moi pour vous faire part de leurs inquiétudes sur
l'avenir de la profession et l'attractivité de la médecine familiale auprès des
jeunes étudiants en médecine. Depuis 2013, c'est 400 postes de résidence
en médecine familiale qui n'ont pas été comblés. C'est 400 médecins, pour
les 30 prochaines années, qui ne seront pas là. Seulement l'an dernier,
c'est 75 postes non comblés. Puis vous pensez que ça va être mieux cette
année? Je suis profondément inquiet. Le p.l. n° 11
est discriminatoire et s'attaque particulièrement aux femmes. 70 % des
médecins de famille de moins de 60 ans sont des femmes. Je ne peux
concevoir que cela ne vous inquiète pas au plus haut point. Il est urgent
d'agir avant qu'il ne soit trop tard.
• (9 h 10) •
Nous avons proposé des solutions innovantes
depuis juillet qui sont restées lettre morte. Le ministre va vous parler
d'engagement. La tournée des associations... On a fait la tournée des
associations régionales cet automne où, justement, on leur parlait de prise en
charge de groupes, d'équipes de soins, de guichet d'accès pertinence, de collaboration interprofessionnelle, de revoir le
mode d'organisation. Les médecins ont répondu présent avec beaucoup de
positif. Je leur mentionnais : On ne peut pas continuer à faire les mêmes
choses de la même façon et espérer un résultat différent. Ils adhéraient à ça.
Où sont les garanties du p.l. n° 11? Effectivement,
il y a des garanties dans le p.l. n° 11, des grandes
garanties : garantie de démotivation, garantie de retraite prématurée,
garantie d'exode vers le privé, garantie d'exode vers d'autres provinces,
garantie d'épuisement professionnel, garanti que les étudiants en médecine vont
davantage choisir une autre spécialité. En fait, le p.l. n° 11,
c'est une garantie d'échec.
Le p.l. n° 11 ne
contient aucune mesure structurante qui permettra un meilleur accès aux soins
de première ligne. Ce n'est pas un projet de loi sur l'accès. C'est un projet
de loi sur le contrôle étatique de la profession médicale qui ne fera que
dévaloriser la pratique de la médecine familiale encore davantage.
Enfin, enfin, M. le Président, les lignes
probablement les plus importantes de mon allocution : encore une fois, M.
le Président, on tend la main au gouvernement, on tend la main au gouvernement
afin de collaborer à mettre en place des solutions concrètes pour les Québécois
et respectueuses de la réalité des médecins de famille, dans un climat sain,
exempt de menaces, exempt de coercition, exempt de pénalité, empreint de bonne
foi, de bonne volonté et de collaboration au bénéfice de la population.
M. le Président, j'exhorte le gouvernement à
travailler avec nous pour valoriser la médecine familiale, la rendre davantage
attractive pour les étudiants. Les Québécois méritent une telle concertation.
Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant
débuter la période d'échanges. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Dubé : Très bien. Alors, merci
beaucoup, M. le Président. Et, Dr Amyot, très content encore de vous avoir
ce matin. Puis je tiens à vous féliciter pour votre élection à titre de
président de la FMO et... de la FMOQ, pardon, et je pense que vous arrivez à un
moment qui est charnière par rapport à ce que nous vivons en ce moment en temps
de pandémie.
Je vous connais un peu, Dr Amyot. Je pense
que, quand je suis arrivé au gouvernement il y a quatre ans, un petit peu moins
de quatre ans, j'étais, à ce moment-là, au Conseil du trésor, et vous étiez
déjà le bras droit du Dr Godin. Donc, ce n'est pas la première fois qu'on
se rencontre. Puis je tiens à souligner tout le travail que vous avez fait pour
la fédération depuis que vous y êtes. Encore une fois, félicitations pour votre
présidence.
Maintenant, aussi, je ne ferai pas de
commentaire sur les mots, je dirais, un petit peu durs dont vous nous faites
part ce matin parce que je comprends, je comprends très bien que vous
représentez les médecins, et vous avez le droit à votre opinion. Moi, j'ai dit,
tout au cours de nos discussions, que j'aurais un ton conciliant. Je pense que
c'est ça qui est important, si on veut trouver des solutions innovantes. Puis
je respecte l'approche que vous prenez. La mienne va être différente au
cours... Elle l'a été au cours des dernières années puis elle va l'être encore
au cours des prochains mois.
Je pense qu'il est important aussi de bien dire
aux Québécois que l'objectif du projet de loi — puis je l'ai mentionné tout à
l'heure puis j'en viendrai à une question : les Québécois doivent avoir un
meilleur système, un meilleur système qui leur permet de prendre des
rendez-vous de façon beaucoup plus organisée qu'ils le font en ce moment. Je
pense qu'au cours des négociations qu'on a eues depuis, je vais le dire, trois
ans, là, parce que ma prédécesseure, Mme McCann, elle avait commencé même
en 2018, 2019, donc ça fait longtemps qu'on négocie, mais malheureusement,
pendant ce temps-là, ce n'est pas une diminution de la prise... ce n'est pas
une augmentation de la prise en charge qu'on a vue, Dr Amyot, c'est une
diminution. On est passés, de 2018, de 400 000 personnes qui étaient
sur le guichet d'accès à plus de 900 000 aujourd'hui. Donc, il y a quelque
chose qui ne fonctionne pas. Et de continuer d'essayer de faire les choses de
la même façon, je pense que ce n'est pas dans la bonne direction.
Alors, je comprends très bien vos commentaires
ce matin, vos mots qui sont durs, mais moi, je regarde plus des solutions que
l'on pourrait trouver, des solutions pratiques. Et il y en a eu, il y en a eu.
Je pense que, je le répète, le gouvernement a fait, au cours des derniers mois,
des avancées importantes dans la négociation. Moi, je me rappelle, quand on a
commencé à discuter avec vous ou avec votre prédécesseur, c'était : un
médecin, un patient. Puis on s'est dit... vous nous dites toujours : Il
manque de médecins, il manque de médecins. Je résume, là, presque quatre ans de
discussions. On a dit : D'accord, avec les besoins des nouveaux médecins,
les plus jeunes qui ne veulent pas, peut-être, se mettre 1 000 ou
1 200 patients en commençant, est-ce qu'on pourrait trouver des
solutions? On a mis quelque chose de très gros sur la
table l'année passée, l'automne dernier, en disant : Non, maintenant, ça va
être le GMF qui va prendre cet engagement-là et non un seul jeune médecin pour
profiter, justement, des principes de GMF.
Alors, moi, ma première question pour vous ce
matin, Dr Amyot : Cet élément-là, qu'on a mis sur la table, qu'est-ce
que vous en pensez?
M. Amyot (Marc-André) : Bien, on
partage votre opinion, M. le ministre, par rapport à réorganiser le réseau, par
rapport à répartir les besoins populationnels, la collaboration. Effectivement,
c'est nous qui avons mis sur la table, en juillet, la prise en charge de
groupes à une équipe de soins, parce que la prise en charge individuelle, là,
les médecins de famille, ils sont à bout.
Je voudrais également revenir sur le fait...
puis merci de me permettre de vous préciser, la prise en charge a diminuée. Bien, il y a une bonne explication.
Avant la pandémie, à chaque mois, il y avait de plus en plus de Québécois
qui avaient un médecin de famille, et, progressivement, on se rendait vers
l'objectif, lentement mais sûrement. Et, vous regardez les chiffres, mois après
mois avant la pandémie, le nombre d'inscrits au Québec augmentait, on avait
presque atteint 83 %. Depuis deux ans, depuis deux ans, il y a la
pandémie. La pandémie, là, ça a créé tout un bouleversement
dans le réseau de la santé, puis les médecins de famille ont été sollicités
partout, partout dans le réseau.
Permettez-moi de vous dire, le Québec a une
situation particulière par rapport au Canada. Les médecins de famille effectuent entre 36 % et 40 % de
leurs travaux en deuxième ligne, à l'urgence, en hospitalisation, en
obstétrique, soins palliatifs,
gériatrie, alors qu'au Canada, c'est seulement 24 %. Nos effectifs sont
sollicités en deuxième ligne, et, pendant
la pandémie, ça a été davantage, davantage sollicité dans les cliniques COVID, dans
les unités d'hospitalisation COVID, dans...
Le Président (M. Provençal)
: Je vais céder la parole à M. le ministre.
M. Amyot
(Marc-André) : Alors, c'est
normal que la prise en charge ne soit pas... n'ait pas été au rendez-vous. Il y
a une limite à ce que les médecins de famille peuvent faire.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. M. le ministre aurait une
suite.
M.
Dubé : Très bien. Ma
question portait seulement sur la prise en charge par le GMF plutôt que des
médecins individuellement. Je pense qu'on s'entend. C'est un élément
important qui a été amené à la négociation.
Deuxième point. Moi, ce que je crois, quand vous
dites, Dr Amyot, puis je veux respecter votre opinion, vous dites qu'il
manque des médecins de famille par rapport à la situation qu'on a en ce moment.
Est-ce que vous ne pensez pas que lorsqu'on aura des meilleures données,
c'est-à-dire de bien connaître l'occupation des médecins... pas pour être
capable de faire de la coercition, ça, c'est un mot que vous utilisez que moi
je n'utilise pas. Moi, ce que je vous dis, c'est : Vous ne seriez pas les
premiers à pouvoir bénéficier du fait qu'on pourrait avoir une meilleure
information? Quelle est la charge réelle des médecins dans chacune des régions?
Parce que je vous entends dire, puis ça, c'est... Je veux que les Québécois
m'entendent très clairement, là, aujourd'hui, vous dites que les médecins sont
occupés ailleurs. Contrairement à d'autres provinces, nos médecins généralistes
travaillent beaucoup plus dans les hôpitaux, ont des fonctions différentes. Je
comprends très bien ça, mais une des choses qu'on veut faire pour être capable
de mieux discuter et de finir nos négociations, c'est d'avoir les mêmes
données, d'avoir des données qui nous permettent de faire, justement, ce
calcul-là. Je pense que vous seriez les premiers à bénéficier d'une meilleure
information sur une base régionale, et je m'explique.
Ça, c'est important que les Québécois
comprennent ça. Durant la pandémie, Dr Amyot, j'ai été le seul, comme
ministre, à avoir accès aux dossiers des médecins pour être capable de voir
quelle était leur charge : Est-ce que des gens travaillaient dans les GMF
ou ils travaillaient aussi dans les CLSC? Est-ce qu'ils avaient une charge à
l'hôpital? Cette information-là, ce n'est pas uniquement le ministre qui
devrait l'avoir, c'est les DRMG. Ça, c'est... Les DRMG, c'est les médecins qui,
localement, dans chacune des régions, peuvent avoir un impact sur la
répartition des tâches. Moi, je crois... Et j'aimerais vous entendre :
Est-ce que vous trouvez normal qu'un directeur régional n'ait pas accès à
l'information sur l'occupation de ces médecins dans sa région?
• (9 h 20) •
M. Amyot (Marc-André) : Bien, merci
de me permettre de préciser par rapport à ça. Bien sûr, vous avez raison. Et
j'ai toujours, tout le long de ma carrière, mentionné «the power of data»,
effectivement. Et on s'est entendu, M. le ministre, dans les programmes GMF,
pour transmettre ces données-là, transmettre ces données-là à l'orchestrateur
pour avoir accès à l'analyse. On était inquiets. M. le ministre, je vous
partage...
M. Dubé : Oui, mais, je m'excuse, ce
n'est pas ça, ma question, là. Là, vous êtes en train de me parler des
rendez-vous, puis ce n'est pas ça que je dis. Ce que je dis, c'est que la
première partie du projet de loi, avant la prise de rendez-vous, Dr Amyot, elle est très claire. Elle est très, très
claire. Ce qu'on dit, c'est qu'on veut bien comprendre quelle est
l'occupation des médecins dans chacune des RLS, des régions, mais aussi des
GMF. C'est ça qu'on veut avoir pour être capable de dire : Est-ce qu'on a
la bonne offre de médecins? Et moi, je vous dis... puis ça, c'est avant la
prise de rendez-vous, ce que je vous dis, Dr Amyot : Est-ce que vous
êtes d'accord que vous seriez peut-être les premiers
à bénéficier pour montrer que, si on avait cette information-là, on serait
capables de s'entendre qu'il manque des médecins?
En ce moment, là, je ne
parle pas de prise de rendez-vous. Le premier bloc du p.l. n° 11,
c'est de dire : Il faut bien comprendre l'offre médicale dans chacune des
régions. Vous seriez peut-être les premiers bénéficiaires à être capables de nous dire : Bien, vous voyez, il
manque de médecins. Mais on ne s'entend même pas sur cette
information-là. J'aimerais ça, vous entendre là-dessus, s'il vous plaît.
M. Dion (Sylvain) : Deux
commentaires, M. le Président, sur cette question-là. Des données, il en existe
déjà. On s'appuie sur des données de facturation. Déjà là, les partis, FMOQ,
ministère, utilisent ces données pour établir ce qu'on appelle les plans
régionaux d'effectifs médicaux année après année. Donc, ces données-là
existent. Elles ne sont peut-être pas idéales parce qu'elles sont souvent a
posteriori, malheureusement, parce qu'on attend toujours que les données de
facturation soient toutes compilées.
M.
Dubé : Mais, quand vous
dites, docteur, qu'elles sont disponibles, elles ne sont pas disponibles au
DRMG, localement.
M. Dion (Sylvain) : RLS par RLS,
nous avons ces données-là. Moi, je siège sur un DRMG...
M. Dubé : Oui, mais, quand je vous
dis, là, qu'on est capables de voir... moi, je suis capable de voir puis
j'ai... on a engagé un docteur qui a déjà été avec la FMOQ, qui a travaillé
avec nous au cours des derniers mois, qui nous dit : Cette information-là,
qu'on a besoin pour bien comprendre qui est disponible dans chacune des
régions, les DRMG ne l'ont pas, ne l'ont pas. Et moi, je pense que c'est
fondamental pour tous les Québécois de dire : On a un «payroll» de
3 milliards et quelques pour 10 000 médecins, puis je pense que
le minimum que les Québécois devraient savoir : Quelle est l'offre
médicale par région?
M. Dion
(Sylvain) : Et c'est ce que
je disais. Ces données-là, elles existent. Elles sont déjà partagées. Je siège
sur un DRMG et je sais comment est-ce que les médecins, RLS par RLS, les
groupes de médecins, travaillent à...
M. Dubé : Est-ce qu'ils connaissent
la charge de personnes par RLS et par GMF de tous ces médecins-là?
M. Dion (Sylvain) : Il faut
bien comprendre, M. le ministre...
M. Dubé : Non, mais répondez à
ma question : Est-ce que le DRMG, localement, a toute cette information? Moi, on me dit que c'est seulement le ministre qui
peut l'avoir et que cette information-là — juste me laisser finir ma question, s'il vous plaît — et
c'est d'ailleurs pour ça qu'on veut modifier la loi de la RAMQ, parce que cette
information-là, selon nous, selon certains critères, devrait être
transférée au DRMG.
M. Dion (Sylvain) : Nous avons
déjà une information quantitative, mais il faut regarder ces informations-là
sur une base qualitative aussi. Parce que ce n'est pas tout de dire que tel
médecin travaille tant d'heures à tel milieu ou
tel autre milieu, il y a des conditions également qui doivent être prise en
compte. Et c'est ce qui préoccupe d'ailleurs la fédération sur
l'utilisation de ces données-là. Mais qu'on ait de meilleures données pour
faire ces gestions-là, locales... D'ailleurs, dans ce qu'on a discuté avec le
gouvernement l'automne dernier, c'était dans ce sens-là, c'était d'améliorer
l'accès en travaillant avec nos instances locales DRMG qu'on visait à améliorer
l'accès, et ça, on est partant pour aller là-dedans. Mais c'est toujours sur
l'utilisation de ces données. Et, M. le ministre, votre projet de loi demeure
quand même relativement vague, et nos juristes nous disent qu'il pourrait y
avoir, à ce moment-là, abus sur l'utilisation de ces données.
M. Dubé : Ah bon. O.K. Alors,
au moins, on s'entend sur une chose, docteur, là : cette information-là,
en ce moment, n'est pas disponible à nos gestionnaires locaux. Puis, dans le
plan de la santé qu'on va voir au cours des prochains mois... puis, vous allez
voir, c'est un mot sur lequel je vais revenir souvent, c'est la
décentralisation. Et, si on veut être capables que les régions, les GMF,
localement, aient de l'information, aient le bon nombre de médecins, ce qui est
votre prétention, qu'il nous manque des médecins...
Puis moi, je serais le premier à savoir... à
être intéressé à ce qu'on puisse discuter ensemble, que, dans chaque région, on
puisse faire l'analyse. C'est ce qu'on a fait avec le Dr Dulude, qu'on a
engagé, qui est un ancien DRMG, justement, qui nous dit qu'il est possible...
puis ça, je veux que les Québécois l'entendent : c'est qu'avec les
méthodes qui pourraient être utilisées, qui sont utilisées déjà dans certaines
régions, on pourrait prendre entre 600 000 et 700 000 patients
supplémentaires sans augmenter la charge de travail des médecins. Ça, là, c'est
ce que le Dr Dulude nous dit, qui est un ancien DRMG, qui est un médecin, et
qui a déjà pratiqué et qui a en plus déjà travaillé pour la FMOQ.
Ça fait que je veux juste vous dire que ces
méthodes-là, dont on parle — je
parle depuis le début des méthodes de gestion — il faut être ouvert à ces
nouvelles techniques-là. Puis je pense que la journée que les Québécois vont savoir qu'on a l'information de
façon régionale pour que nos gestionnaires puissent agir localement, ça va
faire une grande différence. Mais ça, il faut avoir l'ouverture d'esprit pour
être capable de travailler de cette façon-là.
Alors, je suis content que vous reconnaissez
qu'en ce moment cette information-là n'est pas disponible de façon à donner à
nos gestionnaires locaux le travail nécessaire.
Est-ce qu'il me reste encore un peu de minutes?
Le Président
(M. Provençal)
: Il reste une minute.
M. Dubé : Oui. Bon, maintenant,
sur la prise de rendez-vous elle-même, je pense qu'on a travaillé... puis j'ai
très hâte, là, qu'on puisse... et je sais que vous les avez rencontrés,
Dr Amyot, j'ai très hâte qu'on puisse avoir les gens du DRMG, justement,
de la région de Rimouski—Rivière-du-Loup
pour montrer combien on peut parler de rendez-vous additionnels disponibles.
Est-ce que
vous êtes capable de me dire quel est le pourcentage de rendez-vous
additionnels qui a été demandé aux médecins dans la région de Rimouski suite à
ce projet pilote là, qui a été mis en place, là, il y a un peu plus qu'un
an? Est-ce que vous avez le nombre de... pourcentage additionnel de rendez-vous
qui a été...
M. Amyot (Marc-André) : Le
nombre de rendez-vous? Je n'ai pas le nombre de rendez-vous additionnels, mais
le projet GAP, accès pertinence, a permis de diminuer de 50 % la
consultation à un médecin de famille en répartissant sur d'autres
professionnels. Et je vous l'ai dit, M. le ministre, on adhère entièrement à
ça.
M. Dubé : Je suis content de
vous entendre dire ça.
Le Président (M. Provençal)
: M. le ministre, on va...
M. Dubé : Parce que je vais
vous dire la réponse que j'ai eue, puis je finis...
Le Président (M. Provençal)
: Votre temps...
M. Dubé : Bien, je reviendrai.
Je reviendrai.
Le Président (M. Provençal)
: S'il vous plaît. Merci, M. le ministre.
M. Dubé : Merci. Merci
beaucoup, M. le Président.
Le
Président (M. Provençal)
: Alors, maintenant, je
vais céder la parole au député de Nelligan. Vous disposez de 10 min
et 10 s. À vous.
M. Derraji : Merci, M. le
Président. En fait, vous avez confirmé, lors de votre échange avec M. le
ministre, qu'on n'a pas parlé de qualité de soins. On parle d'une centrale de
réservation. À un certain moment, je me posais la question : Est-ce que je suis vraiment dans une commission de santé
et services sociaux? Elle est où, la qualité de soins? Il est où, le
travail multidisciplinaire? Il est où, l'apport des autres professionnels de la
santé? J'ai senti un certain malaise, parce
que vous étiez sur la table des négociations avec le ministre et son équipe.
Est-ce que vous vous sentez trahi parce qu'il y a ce projet de loi,
parce qu'on ne vous a pas écoutés?
M. Amyot (Marc-André) : En fait,
dans la négociation, M. le Président, on a l'impression d'avoir été invités à
un dîner de cons. Et on proposait, proposait, proposait des solutions, et
jamais ça n'aboutissait. Avant Noël, on
avait presque une entente de principe avec les responsables du ministère, et
ça, on trouve ça profondément triste pour la population.
M. Derraji : Il y a 1 million
de Québécois aujourd'hui qui veulent des réponses. Il y a beaucoup de gens qui
nous suivent aujourd'hui en commission parlementaire. Le ministre essaie,
depuis quelques semaines, de parler de sa réforme, révolutionner le réseau de
la santé. On parle de beaucoup d'éléments que le ministre essaie de mettre sur
la table pour un peu reprendre le contrôle
qu'ils ont perdu dans le système de la santé. C'est quoi, votre réponse
aujourd'hui aux Québécois qui attendent un médecin de famille? Est-ce
que le gouvernement s'y prend de la bonne façon ou bien, d'ici la prochaine échéance électorale, en octobre, on sera
toujours à 1 million de Québécois qui attendent un médecin de
famille?
M. Amyot (Marc-André) : Je l'ai dit
et je le répète, le p.l. n° 11 n'amène en rien des
solutions pour l'accessibilité. Ces
solutions-là, elles doivent passer par la collaboration, la concertation
avec... Et je vous l'ai dit, on fait partie
de la solution, mais on n'est pas la seule solution. Et p.l. n° 11 s'adresse à qui? À la seule solution que le gouvernement a
trouvée, c'est contraindre les médecins de famille.
• (9 h 30) •
M.
Derraji : Vous avez dit, au
début, que vous étiez... vous avez l'impression d'être dans un dîner de cons.
Mais pourquoi vous avez accepté de continuer l'échange avec l'équipe du
ministre si c'était voué à l'échec?
M. Amyot
(Marc-André) : Parce qu'on
est de bonne foi. Parce qu'on se soucie des besoins de la population.
Parce qu'on veut être là pour la population. Parce qu'on sait qu'on fait partie
de la solution.
M. Dion
(Sylvain) : Les médecins de
famille ne sont pas inconscients des problèmes d'accès, actuellement. O.K.?
On en souffre dans nos bureaux, également, quand les patients nous disent
qu'ils ont eu de la difficulté à voir un patient. Et qui
plus est, ceux qui n'en ont pas, c'est la croix et la bannière. Donc, c'est
pour ça qu'on était à la table de
négociation. C'est pour ça qu'on a négocié tout l'automne dernier avec une
solution structurante. Le ministre parlait, tout à l'heure, d'approche
de groupes, de guichet d'accès pertinence. C'est ce qu'il y a dans le projet
d'entente qu'on a soumis au ministre de la Santé avant les fêtes et pour lequel
on n'a pas eu de retour. Et qui plus est, on a continué à négocier même si on
avait un projet de loi.
Dans le projet de loi actuel, il n'y a rien qui
touche ça. On parle de donner accès à des données. Oui, ça peut être intéressant pour mieux planifier les
effectifs médicaux d'un système de prise de rendez-vous pour des médecins. Il
va falloir que ce soit un système de prise de rendez-vous pour les
autres professionnels, parce qu'un patient qui a besoin de services, ce n'est peut-être pas d'un médecin de famille,
c'est peut-être d'un physiothérapeute, d'une infirmière, d'une IPS.
Donc, c'est important.
M. Derraji : Mais vous avez raison,
parce que vous avez eu plus que 14 minutes d'échange avec le ministre, je n'ai pas entendu l'équipe multidisciplinaire,
alors que, la première ligne, on s'entend tous, c'est l'équipe
multidisciplinaire.
Prenez juste le cas de la santé mentale. Combien
de Québécois attendent la santé mentale? Combien de vos membres traitent la
santé mentale? Je veux bien parler de gestion de l'offre, mais on n'est pas
dans le secteur manufacturier, on est dans le secteur de la santé. Qu'est-ce
que vous en pensez?
M. Amyot (Marc-André) : Exactement.
C'est réducteur de penser qu'on peut régler tous les problèmes d'accessibilité avec un Clic Santé. Et ce n'est
pas comme ça. On parle de pertinence, on parle de collaboration, d'équipes
de soins, de davantage de support.
M. Derraji : J'ai un autre point et
je veux vous partager les chiffres : 2019, 24 postes vacants; 2020,
38 postes vacants; 2021, 76 postes
ignorés. Pensez-vous que le projet de loi n° 11 va encourager les jeunes
médecins à aller en médecine de famille ou bien fuir carrément la
discipline?
M. Amyot (Marc-André) : Bien au
contraire, ça va les faire fuir la discipline, comme vous dites. Vous écouterez les étudiants, vous écouterez les
résidents, vous écouterez même le Collège des médecins, ces inquiétudes du
Collège des médecins par rapport au projet de loi n° 11.
M. Derraji : Est-ce que vous avez
l'impression qu'on part en guerre contre vous parce qu'on est dans une année
électorale et que ça prend quelqu'un, un méchant sur lequel on va mettre le dos
que les Québécois n'ont pas de médecin de famille parce que les médecins de famille
sont paresseux? Est-ce que vous avez cette impression aujourd'hui?
M. Amyot (Marc-André) : Moi, la
politique, je ne connais pas beaucoup ça.
M. Derraji : Moi non plus. Je vous
pose juste une question.
M. Amyot (Marc-André) : Je suis
naïf. Je suis naïf.
M. Derraji : Comme vous.
M. Amyot (Marc-André) : Je
trouverais ça profondément triste que ça soit le cas. Je trouverais ça... Moi,
ce n'est pas ce que je veux. Moi, je ne veux pas entrer en guerre avec
personne. Moi, je veux donner. Je veux que les médecins donnent des services à
la population. Je veux collaborer. Je ne veux pas entrer en guerre avec
personne.
M.
Derraji : Mais je vais vous
partager un avis d'un médecin : «Ce qui est fâchant avec le projet de loi
n° 11, c'est qu'il c'est qu'il est évident qu'il ne permettra pas
atteindre l'objectif souhaité par le ministre, et ensuite on blâmera à coup sûr
les médecins. Donc, peu importe ce que vous allez faire, on va vous blâmer.
Vous êtes contre le projet de loi, on va
vous blâmer. Vous êtes pour le projet de loi, il n'y a pas de résultat, on va
vous blâmer. C'est quoi, la solution, docteur?
M. Amyot (Marc-André) : On est une
cible trop facile. La solution, c'est vraiment d'exprimer que cette fois-ci,
là, c'est assez, on ne sera pas les boucs émissaires des problèmes, de tous les
problèmes du réseau de la santé.
M. Dion
(Sylvain) : Et la solution, c'est de travailler ensemble et de
retirer ce qui, actuellement, cause préjudice à la profession des
médecins de famille. Vous parlez de l'attractivité, mais je crains également
que nos médecins, on a quand même 25 % de nos médecins qui ont plus de
60 ans, n'accélèrent leur prise de retraite. Et là qui qui va perdre?
C'est la population. Il est urgent qu'on puisse s'entendre.
M. Derraji : Donc, on ne règle pas
la multidisciplinarité dans ce projet de loi, on ne règle pas l'attractivité dans ce projet de loi. Selon vous, c'est une
centrale de réservation. Nommez-moi un seul point positif dans ce projet de loi.
M. Amyot (Marc-André) : Je n'en vois
pas.
M.
Dion (Sylvain) : Le hub, il est intéressant pour qu'on puisse avoir
une meilleure idée de l'offre et la demande, parce que c'est un point qui
existe, mais ça ne règle pas tout, et ce n'est pas la loi qui va régler ça. On
a déjà convenu comment utiliser le hub, on a une lettre d'entente là-dessus, et
nos médecins ont adhéré, et on a supporté nos médecins à adhérer au hub. On
n'avait pas besoin d'un projet de loi pour ça.
M. Derraji : Oui.
Donc, selon vous, aujourd'hui, quand on parle de la refonte du système de
santé, c'est comme une farce, pour vous, là, on ne règle, rien. Il n'y a pas de
prise en charge. Les listes d'attente vont s'allonger. Mais moi, ce qui me
préoccupe aujourd'hui, au nom de ces patients québécois, c'est que j'ai des
gens qui souffrent d'une maladie chronique, et le projet de loi ne règle pas.
Donc, de quelle refonte on parle?
M. Amyot
(Marc-André) : Vous avez raison, c'est de mal adresser la
problématique et c'est de laisser croire à la population que ce projet de loi
là va régler les problèmes, qui est triste et odieux.
M. Derraji : Docteur,
vous êtes à la place du ministre. Je vous invite à réécrire leur projet de loi.
Vous allez mettre quoi pour améliorer l'accès des patients québécois?
M. Amyot
(Marc-André) : Je vais parler de collaboration interprofessionnelle,
je vais parler de pertinence, mais surtout je vais m'asseoir avec les
intervenants avant d'établir le projet de loi, pour dire : Qu'est-ce que
vous pensez? Comment on peut...
M. Derraji : Mais
vous étiez avec le ministre, vous avez même qualifié que c'est un dîner de
cons, mais ça sert à quoi, vous parler?
M. Amyot
(Marc-André) : D'autant plus qu'on n'a jamais discuté du contenu du
projet de loi n° 11 dans les négociations. On n'a jamais été interpelés
là-dessus. Si on avait été interpelés, on serait intervenu, on aurait discuté.
Jamais, jamais on n'a été interpelés par rapport au contenu du projet de loi
n° 11. C'est ce qui nous dit : On a vraiment été invités à un dîner
de cons.
M. Derraji : Vous
parlez d'un projet pilote dans une région, on va les rencontrer, ce projet
pilote a réglé quelques problèmes. C'est quoi, votre interprétation de ce
projet pilote par rapport au projet de loi actuel?
M. Amyot
(Marc-André) : On ne fait aucunement mention du guichet d'accès
pertinence dans le projet de loi n° 11. C'est un manque, c'est... Ça ne
règle en rien, le projet de loi n° 11, si on n'inscrit pas la
collaboration, le guichet d'accès pertinence dans la refonte du système de
santé. Ça ne règle en rien.
M. Derraji : Oui.
On démarre très mal le projet de loi n° 11. On a d'autres groupes qu'on va
rencontrer. Pensez-vous qu'on a encore le temps de rattraper les erreurs dans
ce projet de loi? Si c'est oui, comment?
M. Amyot
(Marc-André) : La première chose, je vous l'ai dit, c'est les deux
dernières lignes de mon intervention. Nous,
on veut collaborer, mais il faut collaborer de bonne foi. Expliquez-nous. On
demande au gouvernement : Expliquez-nous quel est le rôle de p.l. n° 11 dans 364, dans p.l. n° 19.
Ils ne veulent pas nous l'expliquer.
M. Derraji : Mais selon vous, réparer l'erreur, c'est quoi,
retirer le projet de loi n° 11 et revenir à la négociation avec vous
avec une entente concertée?
M. Amyot
(Marc-André) : Vous feriez un bon ministre de la Santé.
M. Derraji : Bien,
probablement, octobre 2022. Mais, blague à part, est-ce que vous demandez le
retrait du projet de loi n° 11 et revenir à la table de négociation avec
vous?
M. Amyot
(Marc-André) : Tout à fait, sur une base solide, de bonne foi.
M. Derraji : Et,
si c'est le cas, la FMOQ dit aux Québécois aujourd'hui : La liste
d'attente va baisser. Si c'est oui, de combien?
M. Amyot (Marc-André) :
Tout à fait.
M. Derraji : Et
de combien?
M. Amyot
(Marc-André) : 500 000.
M. Derraji : Donc,
aujourd'hui, le ministre refuse la baisse de la liste d'attente à 500 000,
et il met un projet de loi qui ne va rien régler.
M. Amyot (Marc-André) : Oui.
M.
Derraji : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le député. Je
cède maintenant la parole au député de Rosemont. Vous disposez de
2 min 37 s.
M. Marissal :
Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Allons-y rapidement et dans
l'ordre. Il me semble que dans le projet de loi n° 11, de un, on ne règle
pas vraiment le problème d'accessibilité, mais en plus on met la charrue devant les boeufs. J'aimerais ça vous
entendre sur deux aspects qui touchent votre pratique quotidienne, là, de un,
l'orchestrateur, pour lequel on a donné un contrat sans appel d'offres de
36 millions puis qui ne marche pas, puis qui n'a même pas été homologué au
préalable, c'est un peu bizarre, et les primes. Si vous parlez à mes collègues,
notamment de Laurier-Dorion,
d'Hochelaga-Maisonneuve, ils vont vous dire qu'on a déshabillé Paul pour
habiller Jacques. Alors, je ne sais
pas en quoi, ça, c'est de la bonne gestion de main-d'oeuvre puis favoriser
l'accessibilité des médecins de famille. Puis là on se retrouve avec un
projet de loi qui est, quant à moi, un énoncé politique préélectoral. Je peux
vous entendre sur PetalMD, l'orchestrateur, puis sur les PREM. Quelle est votre
interprétation des changements qui ont été faits aux PREM?
M. Amyot
(Marc-André) : Bien, concernant les PREM, il y a un COGEM, comité
d'organisation et de gestion des effectifs médicaux qui analyse, un comité
bipartite FMOQ-ministère qui fait des recommandations au ministre. Mais ultimement le ministre peut décider
de ce qu'il veut, comme il veut, sans respecter les recommandations du
COGEM. C'est un peu ce qui est arrivé cette année. Concernant le hub...
M. Marissal :
...ferait-il ça? Ça n'a aucun sens. Pourquoi ferait-il ça?
• (9 h 40) •
M. Amyot
(Marc-André) : Je... moi, je vous l'ai dit, je ne suis pas un
politicien, je ne sais pas. Moi, je suis un
clinicien. Je vous laisse à vos interprétations, la vôtre est aussi bonne que
la mienne. Puis concernant le hub, effectivement, le déploiement est
cahoteux, mais, encore une fois, il y a quand même des choses positives avec le
hub dans la mesure où ça devra fonctionner. Et là... Et ça devra fonctionner.
Il doit y avoir une collaboration avec les médecins pour que ça s'applique, ça
passe le test de la réalité. Il faut que ça passe le test de la réalité. Quand
on met un projet, un projet de loi, là, le projet de loi n° 11 ne passe
pas le test de la réalité. Le hub, il doit y avoir des discussions avec les
médecins de famille pour que ça soit applicable et fonctionnel. Je ne sais pas,
Sylvain...
M. Dion
(Sylvain) : Le hub est intéressant pour mesurer l'offre et la demande
parce qu'actuellement on reste peut-être un peu dans le néant. Mais là ça ne
touche que les médecins de famille, et ça, il faut bien le comprendre. Il faut
changer de paradigme. La première ligne, c'est d'autres professionnels, avec
des médecins de famille, qui vont répondre aux besoins. Il va falloir qu'on
soit capable d'intégrer tout ce beau monde là à l'intérieur d'une structure qui va être capable de mesurer ce qui est offert
et ce qui est... et le besoin effectif des patients. Donc, ça, c'est important.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Dr Dion. Je cède maintenant la
parole au député des Îles-de-la-Madeleine.
Vous disposez de 2 min 37 s.
M. Arseneau :
Merci, M. le Président. Drs Dion, Amyot, merci. J'ai trois petites
questions, trois courtes réponses seraient appréciées. Mise en contexte :
Pourquoi les listes se sont allongées? On parlait de 500 000, 800 000, le ministre a même évoqué
1,5 million de personnes en attente. Selon vous, c'est la pandémie,
c'est... pour les Québécois qui nous écoutent.
M. Amyot
(Marc-André) : C'est clairement la pandémie. Avant la pandémie, il y
avait une augmentation progressive du nombre de patients pris en charge. On
s'orientait vers 83 %. Ça a commencé à descendre quand la pandémie est
arrivée. Puis il y a tout l'effet aussi des postes non comblés en médecine
familiale. Je vous l'ai dit tantôt, ces docteurs-là, on ne les a pas sur le
terrain. C'est 400 docteurs qu'on n'a pas depuis 2013. Ils offriraient des
services, ces docteurs-là. Et ce n'est pas avec un projet de loi n° 11
comme ça qu'on va attirer. Je vous laisse, oui, vos courtes questions.
M. Arseneau :
Deuxième question. On sent que vous résistez au fait que le gouvernement
veut, comme le premier ministre l'a annoncé à l'automne dernier, là, identifier
les médecins qui ne font pas un bon travail. Qu'est-ce que vous avez à craindre
de cette approche-là d'identifier, là, les médecins qui ne font pas un bon
travail selon le premier ministre?
M. Amyot
(Marc-André) : Mais quelle mauvaise façon d'aborder ça, de dire que
les médecins ne font pas un bon travail parce qu'ils n'ont pas un quota x
de patients, parce qu'ils ne voient pas x patients, là. Ce n'est pas de la
marchandise qu'on gère. Si ma clientèle, c'est de la santé mentale,
toxicomanie, pensez-vous que je suis capable de régler les problèmes en dedans
de 10 minutes quand je vois le patient? Ça n'a pas de bon sens, penser
comme ça.
M. Arseneau :
Est-ce que c'est une question d'informations nominatives ou d'évaluer la
façon dont les médecins font leur travail ou c'est vraiment pour la pratique,
pour la défense de la pratique en toute autonomie pour donner le meilleur
service?
M. Amyot
(Marc-André) : Les deux.
M. Arseneau : Merci. Et je vais
poser ma troisième question. Les gens ont souvent dit, en tout cas, dans
l'espace public on a souvent dit que les médecins résistaient, là, à ouvrir la
première ligne à d'autres professionnels. Qu'est-ce qui a changé pour
qu'aujourd'hui vous nous dites qu'il faut collaborer avec les autres professionnels?
M. Amyot
(Marc-André) : Le constat de l'ampleur des demandes en première
ligne. On ne peut plus y arriver seuls parce qu'on manque d'effectifs.
M. Dion (Sylvain) : Et les lois ont
évolué beaucoup, et on s'est apprivoisés, dans le réseau de la santé, en première ligne notamment. Vous avez déjà entendu
la fédération avoir des positions beaucoup moins ouvertes, mais là on
s'est apprivoisés avec le travail des infirmières, des pharmaciens et d'autres
professionnels, et on est rendus là. Puis il
y a un constat de la réalité que je vous ai bien dit tout à l'heure, là, on
voit que la population souffre, il faut être capable de trouver une
façon de répondre à ces besoins-là ensemble.
M. Arseneau : D'où le nouveau
paradigme que vous proposez et qu'on propose également.
M. Dion (Sylvain) : Oui.
M. Amyot (Marc-André) : Tout à fait.
M. Arseneau : Merci.
Le
Président (M. Provençal)
: Merci. Je cède maintenant la parole à la députée
d'Iberville. Vous disposez de 2 min 20 s.
Mme Samson : Merci. Bonjour,
messieurs. Messieurs, il y a un commentaire que j'entends assez souvent de la
part de mes concitoyens, c'est le fait qu'ils sont si longtemps sur la liste
d'attente et que les médecins choisissent leurs patients. Est-ce qu'il n'y
aurait pas lieu d'avoir un système premier arrivé, premier servi? Ce n'est pas
normal que quelqu'un attende depuis cinq ans. C'est vrai que souvent ce sont
des patients plus lourds, plus âgés, qui nécessitent peut-être un suivi plus
assidu. Mais pourquoi les gens me disent ça? Est-ce que c'est vrai que les
médecins choisissent leurs patients puis que ceux qui sont plus malades ne sont
pas choisis?
M. Dion (Sylvain) : Je ne dirais pas
que ça n'arrive jamais, mais il faut bien comprendre qu'au GAMF il y a un système de priorisation, là, a, b, c, d, e, et
les médecins sont invités à prendre les patients qui sont plus vulnérables.
C'est sûr qu'il y a des patients... Un jeune patient, là, qui n'a pas besoin de
suivi médical, là, il ne sera pas priorisé. Ceci dit, les patients lourds, là,
puis on parle souvent de la santé mentale ou la toxicomanie, les médecins de
famille ont besoin de soutien pour ça. Et ça
fait plusieurs années qu'on réclame, nous autres, des autorités ministérielles,
d'avoir du soutien pour suivre ces patients-là, conjointement avec
d'autres professionnels, psychologues, intervenant social, éducateur. Donc, il va falloir qu'on ait également
cet environnement-là pour nous permettre de les accueillir, ces patients-là,
et de les prendre en... et d'assurer le suivi.
Mme Samson : O.K. Ma deuxième
question, puis vous... Dites-moi que je me trompe, là, c'est fort possible, et
je ne suis pas médecin, je ne suis qu'une patiente assidue, j'ai toujours eu
l'impression que les CLSC n'étaient pas utilisés à leur plein potentiel. Et,
pour moi, les CLSC, c'est plus que de faire des changements de pansements, là,
mais ça pourrait être une espèce de triage aussi où on est capable d'orienter
un patient, est-ce que c'est toxicomanie, est-ce que c'est... et de l'orienter
vers le bon médecin de famille. Parce qu'au CLSC, là, moi, je vais vous dire,
là, j'allais pour des changements de pansements à tous les jours. Un jour, j'ai
dit à l'infirmière, j'ai dit : Écoutez, là, ils me l'ont réparé, le cerveau, ils ne me l'ont pas enlevé, là, je suis
capable de faire ça toute seule, donnez-moi le stock puis je vais
m'arranger à la maison, pendant ce temps-là vous allez faire d'autre chose.
M. Amyot (Marc-André) : C'est une
bonne question. Dr Dion travaille en CLSC.
M. Dion (Sylvain) : Les CLSC, avec
les ressources humaines qu'ils ont, font partie de la solution de l'accès en
première ligne. Et je pense qu'il est grand temps qu'on intègre davantage ce
qui se fait en CLSC, ce qui se fait en GMF, ce qui se fait dans d'autres
structures également de soins en première ligne, les organismes communautaires,
pour mieux répondre aux besoins, et qu'on
documente également ce qui se fait. Parce qu'à un moment donné on manque
un peu de cette information-là, que font les autres professionnels et qu'on...
On parle beaucoup des données sur les médecins de famille, mais il va falloir
qu'on ait également accès à d'autres données sur l'ensemble des ressources
humaines pour être capables de mieux travailler ensemble.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie beaucoup, Dr Dion.
Mme Samson : Je vous remercie.
Le
Président (M. Provençal)
: Je vous
remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les
travaux quelques instants afin que l'on puisse accueillir, par visioconférence,
le prochain groupe. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à
9 h 47)
(Reprise à 9 h 57)
Le Président (M.
Provençal)
: Je souhaite la bienvenue aux
représentants de la Fédération des médecins résidents
du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite à vous présenter puis à débuter votre
exposé. À vous la parole.
Fédération des médecins résidents du Québec (FMRQ)
Mme Ruel-Laliberté (Jessica) : Merci, M. le Président. Bonjour à tous, Mmes et
MM. membres de la commission. Je suis Jessica Ruel-Laliberté, présidente
de la Fédération des médecins résidents du Québec, en compagnie de
Me Patrice Savignac Dufour, qui est notre directeur général.
La Fédération des
médecins résidents du Québec remercie la Commission de la santé et des services
sociaux de lui permettre de faire valoir son point de vue relativement au
projet de loi n° 11, Loi visant à augmenter l'offre
de services de première ligne par les médecins omnipraticiens et à améliorer la
gestion de cette offre.
Tout d'abord,
permettez-moi de vous présenter brièvement notre organisation et les membres
qui la composent. La Fédération des médecins résidents du Québec regroupe les
associations de médecins résidents des quatre
facultés de médecine du Québec, soit plus de 4 000 médecins en
formation postdoctorale qui offrent des services à la population au sein
des établissements de santé du Québec, tant en médecine familiale que dans les
autres médecines... que dans les autres spécialités médicales, chirurgicales et
de laboratoire.
Après une formation
doctorale en médecine de quatre à cinq ans, les postdoctorants et postdoctorantes
en médecine familiale font une formation qu'on appelle une résidence d'une
durée minimale de deux ans, et certains font une troisième année de
spécialisation, notamment en médecine d'urgence, en soins palliatifs ou en
obstétrique. Les médecins résidents travaillent en moyenne 72 heures par
semaine incluant les gardes.
Cette réalité, qui
est celle de nos membres, fait que nous sommes particulièrement préoccupés,
presque insultés lorsque nous entendons ou
lisons des généralisations suggérant que les jeunes travailleraient moins que
les moins jeunes parce qu'ils accorderaient plus d'importance à la
conciliation travail-famille. Les valeurs évoluent, et c'est bien sûr tant
mieux que les personnes, jeunes et moins jeunes, se soucient davantage de leur
bien-être et de celui de leurs proches, mais cela se fait souvent, par
ailleurs, au prix d'agendas encore plus compliqués à gérer et rarement d'une
diminution du temps de travail.
Pour revenir aux
particularités de la médecine familiale, les médecins résidents de cette
spécialité sont directement impliqués dans la dispensation des soins aux
patients pendant leur résidence, sous la supervision le plus souvent indirecte de médecins en exercice dans les
hôpitaux, à l'urgence, sur les étages des hôpitaux, dans les groupes de
médecine de famille, dans les services à domicile, en bref, partout où l'on
retrouve généralement des médecins.
Nous souhaitons,
d'entrée de jeu, exprimer aux membres de la commission que c'est toujours un
honneur pour nous d'être invités à vous partager notre avis sur des pièces
législatives. Nous vous soumettons ici, très respectueusement, que, compte tenu
de la nature du projet de loi qui est devant nous aujourd'hui, le moment de son
dépôt et de la convocation en commission
parlementaire, alors que nos membres sont toujours en mode crise à combattre
une vague de COVID-19 sans précédent dans
les hôpitaux, nous a laissés fort perplexes. Mais nous avons tout de même
fait le nécessaire pour être au rendez-vous.
Cela dit, j'aimerais
maintenant faire le point avec vous sur nos préoccupations quant aux
modifications proposées dans le projet de loi qui nous occupe aujourd'hui.
Alors que nous avons salué le changement de ton du gouvernement lors de
l'annonce du projet de loi n° 11 par le ministre Dubé, l'analyse détaillée
des enjeux derrière le texte proposé nous a, par la suite, inquiétés.
• (10 heures) •
Le projet de loi
n° 11 semble proposer de faire revivre une mauvaise loi de l'ère du
ministre Barrette. Convenons que le projet de loi n° 11 ne propose, en
effet, que très peu de contenu. Il propose de réhabiliter l'ancien projet de
loi n° 20 de l'ère libérale, qui est devenu la Loi favorisant l'accès aux
services de médecine de famille et de médecine
spécialisée, la loi A-2.2. Cette loi est une pièce législative ayant été
tablettée et dont les dispositions n'avaient jamais été mises en
vigueur.
Le projet de loi
n° 20 de 2015, qui visait les médecins de famille, était une loi de
coercition et attaquait de front l'autonomie professionnelle des médecins en
tentant de faire de parfaits boucs émissaires pour tenter d'oublier
l'incapacité du gouvernement de remplir ses promesses d'amélioration du système
de santé. Les citoyens du Québec ont rejeté cette approche d'affrontement lors
de l'élection de 2018. Il est donc plutôt surprenant, maintenant, à moins d'un
an des élections québécoises, que de voir le gouvernement actuel tenter de
reprendre des recettes qui ont déjà montré leur inefficacité.
Lors de l'étude du projet de loi n° 20, qui
a mené aux dispositions que le projet de loi n° 11 propose de faire
revivre, la FMRQ avait vivement dénoncé les mesures proposées, qui ne tenaient
pas compte du temps requis pour offrir des soins de qualité ni des autres responsabilités qui incombent
aux médecins de famille, telles que l'administration, la recherche,
l'enseignement.
Le
projet de loi n° 20 était basé sur une fausse prémisse suggérant que les
médecins de famille ne travaillaient pas assez. On tentait d'escamoter, ce
faisant, toute la complexité de notre système de santé et on évacuait
commodément des enjeux budgétaires majeurs
comme les questions de disponibilité des ressources humaines et matérielles, de
l'accessibilité et de la suffisance des plateaux techniques et de l'important
rôle des autres ressources du réseau.
Ce qui est clair pour
nous, c'est que de proposer de faire revivre les dispositions de la
loi A-2.2 risque de nous ramener à cette époque où l'on... pouvoir dicter
les façons de travailler aux médecins de famille par des méthodes de gestion
désuètes conçues pour améliorer l'efficacité des chaînes de montage dans des
usines de produits industriels. C'est comme
si on oubliait que les médecins sont des êtres humains qui soignent d'autres
humains, ce qui nous amène à nous interroger sur les intentions du gouvernement
quant aux dispositions les plus coercitives de la loi A-2.2.
Le projet de loi
n° 11 propose de modifier un nombre limité d'articles de cette loi et donc
de les faire entrer en vigueur, mais qu'en
est-il des autres articles de la loi de l'ère du ministre Barrette, puisque le
projet de loi n° 11 ne propose pas de les abroger?
Lors de l'annonce du
projet de loi, le ministre a dit vouloir compter sur plus de données pour
mettre en place un réel système d'indicateurs de performance du réseau de la
santé. Selon nous, gérer le système de santé à partir de statistiques liées au
nombre de patients inscrits ou au nombre d'actes médicaux facturés ne peut
garantir que les Québécoises et les Québécois soient assignés dans les délais
médicalement requis. Agir essentiellement en première ligne en fonction de ces
chiffres revient à vendre du rêve. Il faut assurer l'arrimage entre la
première, la deuxième, la troisième et la quatrième ligne, une approche
incontournable pour des propositions d'organisation de soins qui soient porteuses. Ce n'est pas en pénalisant
financièrement les médecins que nous arriverons à régler le problème
d'accessibilité, alors qu'un manque de médecins fait également partie du
problème.
Avant d'imposer des
objectifs de productivité à nos médecins de famille, il faudrait discuter du
manque de soutien administratif dans les cliniques et des trop nombreuses
obligations administratives imposées aux médecins de famille. Il faudrait aussi
pousser plus loin les initiatives de complémentarité interprofessionnelle avec
les autres professionnels de la santé.
La médecine de
famille est une spécialité très diversifiée au Québec. Elle va bien au-delà de
la prise en charge de patients en cabinet ou du fait de soigner tous les
membres d'une même famille. La formation des médecins de famille fait en sorte
que ceux-ci sont répartis dans plusieurs milieux pour les soins aux patients,
tel que dans les hôpitaux, les salles d'urgence, aux soins intensifs, en obstétrique.
Quoiqu'on en dise et
peu importent les standards pancanadiens de plus en plus imposés à nos facultés
du Québec, il demeure que la prise en charge
en cabinet n'est pas l'unique aspect de leur formation, et peu importe,
d'ailleurs, ces médecins offrent et offriront des soins qui répondent à
des besoins bien réels de la population québécoise, mais dans le cadre d'une pratique diversifiée. Mettons
ça au clair, un médecin de famille, actuellement, qui offre des soins en
faisant de l'urgence, des accouchements ou qui forme actuellement nos nouveaux
médecins, ne fait pas un mauvais travail.
La FMRQ est d'avis
que l'objectif d'utiliser des statistiques pour contrôler la pratique de nos
médecins de famille sans égard à leur profil de pratique serait une grave
erreur et se solderait par un échec. La diversité de la pratique est le fondement de la formation en médecine de famille au Québec,
et cette diversité de pratique est au coeur des promesses qui sont
faites à la relève médicale pour attirer les étudiants vers cette discipline.
On faire miroiter une pratique autonome, à
la mesure de chacun, qui peut se moduler au cours de la carrière. Cela est
ainsi depuis très longtemps, et c'est toujours la chose qui est mise de
l'avant pour les attirer.
Comment
pouvons-nous être surpris, avec des mesures comme celles du p.l. n° 20 que l'actuel projet de loi n° 11 propose de reprendre en version 2.0, que la relève
médicale hésite à choisir la médecine de famille? Lorsque le gouvernement a imposé, en 2015, des mesures qui
limitent la pratique... la liberté de pratique et modifient les perspectives
de carrière de façon soudaine, c'est à ce moment que nous avons noté une
augmentation importante des postes de résidence
non comblés en médecine familiale. Au lieu de célébrer la contribution de ceux
qui ont choisi cette discipline, on les accuse de ne pas faire leur part
et on leur ajoute des mesures toujours plus contraignantes.
Ce que nous vous
proposons aujourd'hui, c'est de faire des choix audacieux d'une médecine du
21e siècle, où un patient n'attend plus parce qu'on a égaré son dossier
papier, c'est d'investir nos énergies vers une médecine moderne qui embrasse notamment la télémédecine comme une voie de
pratique complémentaire. La pandémie nous a menés collectivement vers un nouveau paradigme, il y a
donc assurément moyen de penser notre système de santé autrement.
M. le Président,
voilà un aperçu global de notre avis sur le projet de loi. Nous répondrons
maintenant aux questions avec plaisir. Un grand merci.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie pour votre présentation. Nous allons maintenant
procéder à un échange avec M. le ministre. M. le ministre, vous disposez
de 15 min 15 s.
M. Dubé :
Très bien. Merci, M. le Président. Premièrement, j'aimerais beaucoup remercier
la FMRQ pour la participation, aujourd'hui. Je pense que j'ai eu l'occasion de
vous rencontrer, vous ou vos prédécesseurs, là, dans les dernières années. Puis
j'aimerais juste, peut-être, rappeler à la population que, pour moi, la relève
médicale, c'est ce qu'il y a de plus important. Alors donc, je suis content que
vous preniez le temps aujourd'hui de venir nous parler de vos préoccupations. Puis, ça, je l'apprécie, même
si ce n'est pas toujours dans un contexte idéal, parce que je comprends qu'on est tous en pandémie et qu'il faut
peut-être... J'ai toujours dit qu'il faut être capable de travailler sur les
dossiers urgents. L'urgence, c'est la
pandémie mais, en même temps, des dossiers qui sont importants, qu'on doit
faire avancer. Puis je pense qu'on a déjà eu ces discussions-là.
Je
comprends aussi que vous êtes d'accord avec moi que le plan de santé, le plan
de reconduction qu'on est en train de mettre
en place, va tenir compte des apprentissages qu'on a eus dans la pandémie. Je
suis tout à fait d'accord avec votre
point. Et notamment, lorsque j'entends des jeunes comme vous qui viennent dire
que la télémédecine, tout ce qu'on a
appris durant la pandémie, peut être mis à profit, ça, pour moi, je pense que
c'est... je suis content de l'entendre. Parce qu'on a vu qu'il y avait
des choses qui étaient peut être impensables, il y a même quelques années,
comme la télémédecine, comme une nouvelle façon de pouvoir accéder... permettre
aux Québécois d'accéder à leur médecin de famille,
ont été développées durant la pandémie. Donc je suis content que vous
reconnaissez... Puis moi, c'est pour ça que je parle beaucoup, dans le plan de santé, d'innovation. Ça fait
qu'est-ce qu'on est capable de jouer d'équilibre entre la résistance au
changement puis les nouvelles pratiques? Je suis très, très content d'entendre
ce que vous dites.
Maintenant,
j'aimerais préciser une chose. Dans votre présentation, vous avez beaucoup
parlé de la loi n° 20, beaucoup parlé du retour à la
loi n° 20. Si vous saviez comment ce n'est pas du
tout mon intention. Et c'est drôle que c'est
vous qui reveniez là-dessus, parce que moi, je ne veux pas en parler, de la loi
n° 20, moi, j'ai... Et c'est important que je
le précise, parce que tout à l'heure j'ai manqué un petit peu de temps, avec
votre prédécesseur, le Dr Amyot, et j'aimerais vous le dire, parce que
c'est vous, la relève, là, puis je veux juste qu'on se comprenne bien, pour
moi, on a voulu faire un projet de loi qui se concentre uniquement sur
l'importance d'avoir les données pour la gestion. Il n'y a aucune mesure, dans
ça...
Puis je suis
d'accord, là. Ce n'est pas parce qu'on l'a oublié qu'on ne veut pas parler de
multidisciplinarité puis de pertinence. C'est n'est pas parce qu'on l'a oublié,
c'est parce qu'on a voulu simplifier ce qu'on a besoin de savoir. Puis ce qu'on
a besoin de savoir, c'est, par exemple, est-ce qu'il manque des médecins. Et
moi, si je suis à votre place... Je prends ça avec beaucoup d'importance, ce
que vous avez dit, et c'est ça que j'ai voulu expliquer tout à l'heure au Dr
Dion puis au Dr Amyot, peut-être que les fédérations, la vôtre, celle de la
fédération des médecins, seraient les premiers à prendre avantage d'avoir une
meilleure information de ce qu'ils font.
J'ai pris une note,
tout à l'heure, vous avez parlé du profil de pratique. Ça, pour moi, c'est de
la musique à mes oreilles. Vous avez raison, pour être capable de bien
comprendre ce que font les médecins de famille dans une région donnée, il faut
comprendre leur profil de pratique. On a chez nous, au Québec, puis on est
différent de toutes les autres provinces, effectivement, à cause des activités
médicales, puis des AMP qu'on demande, on a beaucoup de médecins qui prennent
une direction de la médecine générale, qui, à mon avis, est une très belle
profession, mais qui, pour des raisons qui ont été demandées par les
gouvernements précédents, doivent faire des activités médicales autres, ce qui
fait qu'on a maintenant des médecins qui travaillent... des omnis qui
travaillent dans des urgences, qui travaillent dans toutes sortes d'activités,
mais, lorsqu'on veut voir comment on a accès au bon médecin, au bon endroit,
dans la bonne région, bien, savez-vous, on ne s'entend pas qu'est-ce qu'ils
font, on n'est pas capables d'avoir ces données-là, ce que vous, vous appelez
le profil de la pratique, le profil de la pratique dans une région.
• (10 h 10) •
Alors, je voudrais
juste que les Québécois comprennent bien, là, ce qu'on essaie de faire avec ce
projet de loi, là, mais surtout ce qu'on n'essaie pas de faire. Moi, là, quand
vous m'avez dit qu'il est important qu'on comprenne bien le profil de pratique
dans une région, c'est exactement ce que le projet de loi veut faire, dans sa
première partie, bien comprendre est-ce qu'on a les bons médecins au bon
endroit puis est-ce que ça tient compte de ce qu'on leur demande de faire. On
en connaît, des bons médecins généralistes, qui sont maintenant en train de
pratiquer aux urgences. Je pourrais vous les nommer, vous les connaissez tous.
On les voit dans la pandémie depuis 2 ans. Moi, je suis le premier à
vouloir reconnaître que, quand on regarde ça par région, bien, il faut tenir
compte de cette information-là. J'ai demandé au Dr Dion, tout à l'heure, vous
l'avez entendu, on n'a pas cette information-là. Nos DRMG dans les différentes
régions n'ont pas cette information-là. Donc, comment voulez-vous, quand on
discute les PREM, une fois par année... qu'on soit un peu dans l'arbitraire,
parce qu'on n'a pas cette information-là?
Alors moi, je voulais
vous dire deux choses. Je vous dirais de ne pas lâcher. Je vous dirais que vous
vous en allez vers probablement une des plus belles professions qu'on a au
Québec dans le réseau de la santé. Moi, je vous dis que le réseau de la santé,
on peut le travailler différemment. Et peut-être que la question que je vous
poserais, c'est : Est-ce que vous pensez que, lorsque je me limite aux
deux fonctions qu'on est en train de faire, avec le projet de loi n° 11...
Je veux juste que vous compreniez bien, que vous me dites que c'est clair,
maintenant qu'on a eu cette discussion-là, puis qu'on aura la chance de
continuer. Parce qu'il ne s'arrêtera pas après la commission parlementaire, là.
On s'est déjà rencontrés, on va se rencontrer encore. Vous êtes la relève.
Alors, ma question est simple : Est-ce que vous pensez que le projet de
loi, pour ce qu'il fait, là, pas pour ce qu'il ne fait pas, on a essayé de
garder ça très simple, est-ce que vous pensez que ça peut aider à avoir un
meilleur profil dans chacune des régions pour être capable de vous aider à
savoir s'il manque des médecins?
Mme Ruel-Laliberté
(Jessica) : Merci pour votre intervention. En fait, ce qui est
important pour nous, c'est de savoir quelle va être la suite, après l'accès à
ces données-là. Est-ce qu'on veut imposer des profils de pratique, tu sais, à
des docteurs qui sont déjà en pratique? Est-ce qu'on veut déplacer d'une région
à une autre un docteur qui est déjà en pratique? Tu sais, qu'est-ce qu'on veut
faire avec ces données-là par la suite? C'est ça qui nous inquiète grandement.
Nos membres ont besoin de savoir...
M. Dubé : Est-ce
que je peux vous répondre tout de suite?
Mme Ruel-Laliberté
(Jessica) : Oui.
M.
Dubé : Parce que je ne sais pas comment il me reste de temps, mais
c'est tellement une bonne discussion que j'aimerais vous répondre tout de suite
à cette première question, là. Moi, pour moi, là, je l'ai dit, là, ce n'est pas
un projet de coercition, puis de bâton, puis de carotte, c'est un projet de
gestion. À votre question, moi, quand on me dit que... Ce que je veux essayer
de savoir, c'est est-ce qu'il me manque de médecins à un endroit, ce n'est pas
pour être capable de l'envoyer ailleurs, c'est au contraire pour être capable
d'avoir une discussion.
Puis je le vois, là,
je vais vous donner un exemple. J'ai demandé à des gens qui ont déjà été
médecins de famille, qui le sont encore, qui ont eu une expérience, on leur a
demandé : Dites-nous, regardez toutes les... Parce que moi, je l'ai dit
tantôt aux docteurs, là, on l'a, l'information, moi, je l'ai, comme ministre.
Malheureusement, nos DRMG ne l'ont pas. La journée que j'ai demandé au Dr
Dulude de me dire : Est-ce que j'ai des problèmes partout?, il dit :
Non, non, non, il y a des endroits, là, où je n'ai pas besoin d'ajouter de
l'offre, il y en a amplement, mais il y a d'autres endroits qui en manquent.
Alors,
moi, je vous dis, la question, c'est d'être capable, puis je crois...
J'aimerais ça qu'on garde ce message là ce matin, là, c'est peut-être
que vous et vos autres associations, vous êtes les premiers à vouloir
bénéficier qu'on se prouverait qu'il en manque, des médecins à des endroits.
C'est très différent, ça. Puis j'espère que vous pouvez le réaliser et m'aider
à mettre en place ce petit projet de loi là, tout petit, qui dit que... dont le
premier objectif, c'est de s'assurer qu'on a le bon profil au bon endroit puis
que, s'il en manque, on va en rajouter. Est-ce que c'est clair pour vous quand
je vous fais cette précision-là?
Mme Ruel-Laliberté
(Jessica) : Oui, effectivement, c'est plus clair. Merci pour la
précision. Si je peux ajouter, aussi, je pense qu'il est important qu'on arrête
le «doctor bashing», vous m'excuserez l'expression anglaise, puisque je n'ai
pas de termes français derrière ça. Je pense que ce n'est pas ce que vous avez
fait, M. Dubé, puis je ne suis pas en train de vous mettre quoi que ce
soit là-dessus. Je dis juste que, lorsqu'on envoie, tu sais, des projets de loi
qui sont perçus par les médecins en pratique comme si leur profil de pratique
n'était pas suffisant ou qu'ils sont perçus comme s'ils ne travaillaient pas
assez, alors qu'ils se donnent corps et âme dans d'autres activités que la
prise en charge...
M. Dubé :
Vous avez tellement raison. Puis je suis content que vous le précisiez. Parce
que, s'il y en a bien un qui n'a pas fait de «doctor bashing», depuis que je
suis là... Puis au contraire, je l'ai dit depuis le début de la pandémie, ces
gens là en font bien plus que tout le monde leur en demande. Et j'apprécie un
médecin généraliste qui a décidé d'être à l'urgence. Puis on peut les nommer,
là, vous les connaissez tous, là, ceux qui ont fait des miracles depuis deux
ans. Alors, j'apprécie que vous dites ça, parce que c'est ça, le changement de
ton qu'on doit avoir et bien comprendre où se campe le projet de loi n° 11.
Alors, quand
j'entends mes collègues qui disent que ça ne traite pas de ci puis ça ne traite
pas de ça... Ce n'est pas ça qu'on voulait, ce n'est pas ça qu'on voulait. On
voulait... on voulait dire : Écoutez, donnez-nous des outils de gestion
qui vont nous permettre d'avoir une meilleure communication, puis, si, dans une
région donnée... Puis là j'ai la chance d'avoir des gens qui négocient, en ce
moment, des gens de calibre qui négocient avec la fédération de médecins, qui
connaissent le réseau, qui connaissent le terrain, comme le Dr Dulude qui
est capable de nous dire : Bien, il y a des endroits qui n'en manquent
pas, puis c'est correct, mais dans les endroits où il en manque, par exemple,
qu'est-ce qu'on va faire pour aider la pratique?
Alors, je voulais
juste qu'on précise ça entre vous et moi. Puis, ça, je pense que ça peut
contribuer à changer le ton. Mais j'apprécie énormément ce que vous venez dire,
parce qu'on n'est pas du tout dans le «doctor bashing», au contraire, on n'a
pas les moyens de faire ça. On a les besoins d'attirer des gens comme vous
encore plus. Puis moi, je serais le plus heureux, puis je le sais que je vais
être cité, là, je serais le plus heureux si on augmentait le nombre de médecins de famille. Je serais le plus
heureux de ça, mais ça me prend des données pour être capable de montrer
qu'un bon médecin de famille qu'on a travaillé pour faire de la prise en
charge, bien, en ce moment, il n'en fait pas parce
qu'il travaille à un endroit puis que c'est mieux pour les Québécois parce que
c'est la bonne personne à travailler aux urgences. Mais ça, si je ne
suis pas capable de le prouver, si je ne suis pas capable d'avoir les données
pour le faire, ça ne fonctionnera pas.
Alors, je j'apprécie
beaucoup l'ouverture que vous me donnez de pouvoir parler de ça parce que ça
fait une grosse différence. Je ne sais pas comment qu'il me reste le temps...
Le Président
(M. Provençal)
: Trois
minutes.
M. Dubé :
Trois minutes, mon Dieu! J'aurais tellement d'autres questions à vous poser.
Sur la question des rendez-vous, hein, vous êtes plus jeune que moi, là... Je
dis ça puis c'est... je ne veux pas sentir... Il n'y a personne qui va me citer
disant... comme si c'était paternaliste, quand je dis ça, là, mais tout le
monde s'entend que je suis un petit peu plus vieux que vous, et j'aimerais vous
parler des nouveaux outils, hein?
J'ai dit que, dans le
plan de santé, oui, on va s'occuper des ressources humaines, puis les médecins
de famille, c'est une grande composante des ressources humaines du réseau de la
santé. Mais j'ai aussi dit qu'il fallait avoir des nouveaux outils et accès aux
données. Accès aux données, là, vient à parler : O.K., c'est comment on
peut échanger l'information sur le profil puis s'assurer qu'on a des bons
médecins aux bons endroits. Sur les données, vous,
là, est-ce que vous l'avez regardé, le système de prise de rendez-vous, à date?
Est-ce que vous avez eu la chance de
voir qu'est-ce qui s'est fait jusqu'à maintenant là-dessus ou vous avez...
Parce que je voudrais connaître... Habituellement, les jeunes sont
beaucoup plus ouverts aux systèmes informatiques. Est-ce que vous avez la
chance de regarder un petit peu de ce côté-là?
Mme Ruel-Laliberté
(Jessica) : Effectivement, tu sais, on a accès, bon, à votre
plateforme Clic Santé. On a vu quand même des succès liés à la vaccination. Ça,
on ne peut pas l'enlever. Par contre, notre question reste quand même que, derrière ce système de rendez-vous-là,
est-ce qu'on ne veut pas venir contrôler pour dire : Bien, ce GMF là
va devoir ajouter des plages, qu'il le
veuille ou pas, puis arrangez-vous pour trouver des plages puis des
disponibilités pour les médecins qui sont disponibles. C'est là que ça
nous inquiète.
M. Dubé : O.K. Bon, c'est ça, mais
laissez-moi vous dire, parce que j'ai expliqué, dans mon discours... puis on manque de temps, là, puis je vais essayer d'y
aller très rapidement. On a modifié deux choses, durant nos négociations
depuis trois ans, au moins deux grandes. La première, c'est... pour des jeunes
comme vous, on dit : On ne fera pas... on n'exigera pas la prise en charge
individuelle, on va parler de la prise en charge de la GMF. Ça, je pense que ça
devrait vous aider à ne pas avoir ce fardeau-là, lorsque vous commencez à
pratiquer. Je pense que c'est une grande différence. La deuxième différence,
c'est qu'on est prêts à discuter la prise de rendez-vous, mais en autant qu'il
y ait un échange, et ça, c'est la
pertinence. Puis, vous avez raison, je pense que notre objectif, il est très
clair avec la pertinence.
Puis surtout j'ai très hâte qu'on ait le groupe
de Rimouski qui vient nous le présenter. Eux autres, ils ont prouvé, depuis un
an, qu'en ayant un guichet d'accès à la pertinence, avant la prise de
rendez-vous, ça n'a pas occasionné de jours supplémentaires ou de rendez-vous
supplémentaires, parce qu'on a enlevé des rendez-vous qui étaient non
pertinents parce qu'ils ont été réglés par d'autres professionnels. Puis ça, ce
n'est pas théorique, ce que je vous dis, là, c'est arrivé, là, depuis un an à
Rimouski.
Ça fait que je veux juste... Vous avez très bien
dit, le rendez-vous n'est pas là pour augmenter la charge, mais pour s'assurer que le médecin de famille a des
rendez-vous qui sont pertinents et que ceux qu'on peut envoyer ailleurs,
aux pharmaciens, aux IPS, à tous les autres professionnels qui travaillent...
D'ailleurs, on a fait des changements, dans des projets de loi, pour que ces
professionnels-là puissent avoir accès. Alors, je veux vous rassurer que ce
n'est pas pour augmenter la charge de
travail. Mais la prise de rendez-vous va avec les guichets de pertinence, comme
on a mis en place à Rimouski. Puis je suis content que vous posiez cette
question-là parce qu'à mon sens les deux vont ensemble.
• (10 h 20) •
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le ministre. Nous allons poursuivre maintenant
avec le député de Nelligan, pour les 10 min 10 s suivantes.
M. Derraji : Merci, M. le Président.
Merci à vous deux. Excellente présentation. Des propos très clairs. Et, je tiens à le rappeler moi-même aussi, nous sommes
en train d'étudier le projet de loi n° 11, et en aucun cas on ne parle
d'un projet de loi n° 20, et je veux vraiment
qu'on reste sur le projet de loi n° 11. Et j'entends le ministre et
j'aimerais bien vous interpeller par rapport à quelque chose.
Si nous sommes là aujourd'hui, c'est que le
ministre, dans son argumentaire très, très gouvernemental, essaie de trouver
une solution à un laxisme qui dure depuis trois ans par rapport à l'accès à un
médecin de famille. La liste d'attente, aujourd'hui, est de l'ordre de
1 million. Ce que je viens de comprendre, encore une fois, de l'échange du
ministre, de M. le ministre avec vous, c'est que c'est un projet de loi pour la
gestion de l'offre et la gestion des rendez-vous. Je vais revenir à une
question primordiale : Pensez-vous qu'au-delà du Trivago et au-delà de la
gestion des rendez-vous et voir s'il y a un manque de rendez-vous dans tel GMF
versus un autre, est-ce que les Québécois, au bout de la ligne, vont avoir
accès à un médecin de famille?
Mme Ruel-Laliberté (Jessica) : Cette
question s'adresse à moi ou ministre Dubé?
M. Derraji : Non, à vous. Je n'ai
pas le droit, je n'ai pas le droit encore...
M.
Dubé : ...pas à répondre,
mais... je n'ai pas le droit de répondre à sa question, mais ça serait...
peut-être, la réponse serait très différente, disons. Mais c'est
correct. C'est bon. C'est bon.
M.
Derraji : Mais, vous savez,
il va répondre à cette question. Il est obligé de répondre à cette question,
mais un peu plus tard. Mais maintenant, vous, qu'est-ce que vous en
pensez?
Mme Ruel-Laliberté (Jessica) : Bon,
est-ce que le projet de loi n° 11 va régler la pénurie des médecins de
famille au Québec? Je pense que probablement pas. Je pense que les médecins de
famille ont surtout besoin de plus de soutien administratif, de soutien
clinique avec d'autres professionnels dans leur clinique ou leur cabinet. Il y
a des heures précieuses, tu sais, de prise en charge qui sont perdues,
actuellement, pour remplir la paperasse puis avec nos systèmes désuets qu'on
fonctionne encore avec des fax. Je pense qu'il faut faire vraiment attention
avec le projet de loi qui pourrait amener
une dévalorisation de la médecine familiale non pas par la manière dont le
projet de loi est écrit, mais la
manière dont le projet de loi est perçu par la relève médicale actuellement. Et
c'est là qu'il faut faire attention.
M. Derraji : Et vous avez raison. Je
vais prendre une minute par rapport à ça parce que je suis du même avis avec
vous. Vous l'avez dit en anglais, le «docteur bashing» j'avais la même
impression que vous, l'automne dernier. Et
je suis content que le ministre... et je le reconnais, je ne l'ai jamais
entendu, sérieux, je tiens à le dire, là, je n'ai jamais entendu une
déclaration directe du ministre; probablement de quelqu'un d'autre de son
gouvernement, mais pas le ministre.
Mais c'est très important que vous nous rappeliez cette règle, c'est
qu'aujourd'hui, si on veut diminuer la liste d'attente des Québécois, on
doit travailler avec vous et non pas contre vous.
Ce
que j'ai compris... que le projet de loi laisse une idée qui ne vous aide pas.
On vient gérer vos affaires. La règle numéro un, j'ai passé plus de 10 ou
15 ans avec des GMF, avec qui j'ai monté beaucoup de projets : on
s'attaque à l'autonomie. C'est la règle primordiale du mode de fonctionnement
de nos GMF. Et on dit : Écoutez, prenez plus de place, et le ministre veut
savoir combien il y a de rendez-vous. Mais, au bout de la ligne, on passe à
côté de la multidisciplinarité et l'attractivité. Est-ce que vous pensez
réellement que ça prenait un projet de loi pour savoir s'il manque des
rendez-vous dans une région ou une autre?
Mme Ruel-Laliberté
(Jessica) : Bien, notre réponse à ça, c'est non, puis notre réponse à
ça, c'est vraiment que, que ça passe via un projet de loi, actuellement. Ça
nous inquiète. Puis ça nous inquiète, comme je l'ai dit, puis je le répète,
vraiment, pour la manière dont ce projet de loi là a été perçu par nos membres.
Je ne vous parle pas de la population générale, je vous parle des gens qui sont
en train de faire leur choix par rapport à est-ce que je m'en vais en médecine
familiale ou pas.
On l'a vu, en 2015,
comment ça a été perçu par nos finissants, on l'a vu dans l'augmentation du
nombre de postes non comblés en médecine de
famille, il y a eu une accalmie. On a vu, en 2018, 2019, tranquillement, on
s'éloignait de la loi n° 20, bon, les gens,
les finissants voulaient peut-être aller plus en médecine familiale. Puis là,
tout de suite, on revient avec un nouveau
projet de loi qui est perçu par nos membres puis par nos étudiants qui
finissent leur externat actuellement comme si on voulait les contrôler.
Puis ça, ça ne donne pas le goût aux finissants d'aller en médecine familiale. Puis ça, il faut faire vraiment
attention, parce qu'on pourrait avoir un exode dans une autre province puis on
pourrait avoir encore plus de postes non comblés.
M. Derraji : Vous avez raison. J'ai vu les chiffres : 24 non comblés en 2019,
38 non comblés en 2020, 76 en 2021. Donc, vous êtes sûre que ce projet de loi
va exacerber la pression que, les gens, on s'attaque à leur autonomie et que
l'attractivité ne sera pas réglée, pire,
elle sera empirée? Est-ce que j'ai bien compris ou saisi ce que vos membres
pensent?
Mme Ruel-Laliberté
(Jessica) : Oui, elle sera empirée. Pas juste stable, empirée.
M. Derraji : O.K., empirée. On ne le souhaite pas. Parce que mon but, c'est
atteindre à répondre aux Québécois, aujourd'hui, qui ne veulent pas une
centrale de gestion de rendez-vous, mais ils veulent avoir un médecin de
famille, le 1 million. C'est
quoi, votre proposition aujourd'hui pour diminuer la liste d'attente de
1 million de Québécois et que... Vous dites, aujourd'hui, là :
Je viens parler d'une centrale de réservation, de gestion de rendez-vous, mais
je n'ai rien trouvé d'autre qui peut m'aider à avoir plus de patients.
Avez-vous des propositions?
Mme Ruel-Laliberté
(Jessica) : Bien, en fait, on l'a dit puis on va continuer de le dire,
pour nous, la solution passe par
l'utilisation d'autres professionnels. Je suis contente d'avoir entendu
ministre Dubé, par rapport à ça, qui semblait dire que certains
rendez-vous pourraient être attribués à d'autres professionnels. Par contre,
c'est... lorsqu'on lit le projet de loi
n° 11, ce n'est pas ça, ça n'en parle pas, là. Ça fait que, bref, pour
nous, ça passe vraiment par l'utilisation d'autres professionnels puis
surtout par plus de soutien administratif. Actuellement, là, vous perdez des heures cruciales chaque semaine avec des médecins
de famille qui font du travail administratif qui pourrait être fait par
d'autres. Puis ces heures-là, on peut les utiliser pour voir un patient.
M. Derraji :
O.K. C'est excellent. On avance, on avance dans la solution. Donc, pourquoi on
est rendus à 1 million? On est rendus à 1 million parce qu'il n'y
avait rien qui a été fait, les 3 dernières années, par rapport à ça. Parce que, je tiens juste à le rappeler aux gens
qui nous suivent, on était à 400 000, on est rendus à 1 million.
Donc, selon vous, ce laxisme de trois, quatre ans qui nous a conduit à
1 million... Pourquoi on est rendus à 1 million de patients en
attente d'un médecin de famille?
Mme Ruel-Laliberté
(Jessica) : Je vais laisser Me Patrice Savignac Dufour répondre.
M. Savignac Dufour
(Patrice) : Bien, en fait, il y a certainement plusieurs raisons
derrière la question que vous posez, mais il y a certainement une pandémie, là,
qui est venue vraiment faire quelque chose de très, très, très particulier, et
c'est aussi... Tu sais, tout le monde est pour ça d'organiser le système de
santé en valorisant l'entrée à la première ligne par un médecin de famille.
Mais, à un moment
donné, aussi, dans le discours public, il faudrait que tout le monde, les
parlementaires, se disent que... On vend du rêve. On dit à des gens :
Inscrivez-vous sur des listes. Et la population sait ça, là, vous avez beau
être sur une liste d'attente pour une chirurgie, s'il n'y a pas les ressources
pour qu'on vous fasse la fameuse chirurgie, vous n'êtes que sur une liste
d'attente. Donc, c'est la même chose. Quand il y a une obsession politique sur
la question de mettre des gens sur des listes d'attente avec des... alliés à
des noms ou à des groupes de médecins, en soi, ça ne donne pas de service et ça
ne garantit pas que les services vont être là quand vous allez en avoir de
besoin. Donc, il faut cesser de travailler uniquement sur la question
statistique.
Puis je comprends
l'intérêt politique, à un an des élections, de parler du nombre de personnes
qui sont sur une liste de médecins. On
comprend ça. Mais, à un moment donné, il faudrait peut-être avoir des mesures
structurantes et ne pas nous dire, en
2015, avec Dr Barrette : Il faut sortir les médecins omnipraticiens des
hôpitaux, tu sais; quatre ans plus
tard, avec Mme McCann, nous dire : À l'avenir, c'est les IPS qui vont
régler les problèmes en première ligne. Et là, on est en 2022, puis là
on nous sort un nouveau plan maintenant, là. Là, tout passe par des sites
Internet. Il me semble qu'on est à côté des problèmes fondamentaux, là, qui est
la question d'accès à des soins de santé...
M. Derraji :
Excusez-moi. Des problèmes fondamentaux, là... Moi, aujourd'hui, là, en tant
que législateur, je m'adresse à 1 million de Québécois qui ont des
attentes. Aujourd'hui, le ministre et son gouvernement sont en train de mettre
sur la table un élément de refonte du système de santé. Vous, est-ce que vous
considérez que ce projet de loi constitue quelque chose de central, dans la
refonte, ou bien, encore une fois, vous l'avez très bien dit, on vend du rêve, c'est du marketing, c'est une année
électorale, et on est en train de mettre des choses sur la table? En quelques
mots, parce qu'il ne reste pas beaucoup de temps, s'il vous plaît.
M. Savignac
Dufour (Patrice) : Moi, je vais vous dire, le projet de loi
n° 11, c'est un projet de loi qui existe pour aider le gouvernement pour
sa négociation avec la FMOQ. On utilise les parlementaires dans un rapport de
force qui ne devrait pas relever du législatif. C'est ça, le projet de loi
n° 11.
• (10 h 30) •
M. Derraji :
Donc, vous pensez que le ministre va... (panne de son) ...le projet de loi, il
ne va pas aller à l'étude, pour accélérer sa négociation avec la FMOQ?
M. Savignac
Dufour (Patrice) : Tout le monde voudrait bien arrêter de parler du
projet de loi n° 20, mais il y a un
choix qui a été fait. On utilise la loi n° 20,
et c'est l'article 11 qui est modifié, là, dans le fameux projet de loi
n° 11, c'est l'article 11 de la fameuse loi n° 20.
M. Derraji :
Est-ce que vous êtres en train de nous dire qu'on est en train de perdre notre
temps, dans la commission, et que le ministre va signer une entente avec la
FMOQ?
M. Savignac
Dufour (Patrice) : Moi, je vous dis que le ministre a certainement des
excellentes intentions, mais que le projet de loi n° 11, il a une seule
et... un seul et unique but, c'est aider dans une négociation qui devrait
concerner les représentants du MSSS et la FMOQ. Et je trouve qu'il y a une
vilaine instrumentalisation du législatif dans quelque chose qui devrait
relever d'une négociation des conditions de travail des omnipraticiens.
M. Derraji :
Merci.
Le Président
(M. Provençal)
: La suite de nos
échanges sera avec le député de Rosemont.
M. Marissal :
Merci, M. le Président. Bonjour, vous deux. Dre Ruel-Laiberté, vous avez eu la
bénédiction du ministre pour le choix de
votre carrière, c'est bien. Si vous vous activez sur Twitter, vous allez
peut-être avoir le titre de bon médecin. Cela dit, ce que vous nous
dites, c'est que le projet de loi n° 11 est tout sauf motivant et qu'il va
amener la démobilisation des gens comme vous qui veulent faire de la médecine
familiale. Pouvez-vous élaborer un peu là-dessus?
Mme Ruel-Laliberté
(Jessica) : En fait, le projet de loi n° 11 a déjà eu un impact.
Il suffit d'avoir un réseau de docteurs sur Facebook pour avoir vu un nombre
incroyable de publications en lien avec des médecins de famille qui avaient
débuté leur pratique puis qui ont vu ça comme une gifle ou une claque dans la
face. Parce que, comme je vous ai dit, le projet de loi n° 11, c'est un court
projet de loi. Est-ce que c'est une mauvaise intention? Bon, on peut en
discuter longtemps. Par contre, la manière dont c'est perçu par les jeunes
médecins puis par ceux qui vont avoir à faire un choix bientôt, c'est qu'on
veut contrôler leur autonomie professionnelle, on veut contrôler ce qu'ils vont
faire, on va les obliger à faire de la prise
en charge, même si, au final, ce que le ministre Dubé nous dit aujourd'hui,
c'est que ce n'est pas ça ou...
Il faut vraiment
revenir sur comment ça a été perçu par les jeunes qui vont faire un choix
bientôt. Puis ces jeunes-là qui ne vont pas aller en médecine familiale, chaque
jeune qu'on perd, c'est une perte importante pour le Québec. Chaque année, on
perd plus de jeunes qui vont vers le... qui quittent le Québec pour faire leur
résidence, que de gens des autres provinces qui viennent faire leur résidence
au Québec. Puis chaque année, ce bilan migratoire là, il augmente. Chaque
externe qu'on perd, chaque finissant en médecine qu'on perd puis qui s'en va
faire sa résidence ailleurs, ça ne veut pas dire qu'il va revenir, puis ça
c'est une perte pour le Québec.
M. Marissal :
O.K., je ne veux pas être impoli, mais je n'ai pas de temps, alors je vais être
obligé d'accélérer un petit peu pour une deuxième question, si le temps me le
permet.
Mme Ruel-Laliberté
(Jessica) : Excusez.
M. Marissal :
Non, non, je vous en prie, vous avez bien répondu, merci. Vous écrivez :
«Tout miser sur l'inscription de la population auprès d'un médecin de famille
est un choix politique, pas une fin en soi ni une panacée. L'accès réel aux soins ne s'en trouve aucunement garanti.»
Pouvez-vous élaborer là-dessus aussi? Parce que moi aussi, je suis un
peu plus vieux que vous, là, puis l'obsession des gouvernements pour un médecin
de famille par patient, là, moi, je me rappelle du « boeuf de Matane», là,
quand je recule dans ma mémoire, là, ça fait que ça ne fait pas... ce n'est pas tout à fait récent que les
gouvernements font ça. Qu'est-ce que vous voulez dire par obsession politique?
Mme Ruel-Laliberté
(Jessica) : Bien, en fait,
on a senti qu'il fallait absolument s'inscrire au guichet d'accès à un médecin
de famille. Par contre, à l'heure actuelle, ce n'est pas parce qu'on est
inscrit qu'on a accès à des services. Tout comme
on faisait l'image avec : ce n'est pas parce qu'on est inscrit en étant en
attente d'une chirurgie que notre hanche est
opérée, là. Dans le sens que, lorsqu'on est en liste d'attente pour obtenir un
médecin de famille, on n'obtient pas
plus de service. Ça fait que pour l'instant, l'obsession, c'est de s'inscrire,
s'inscrire, se réinscrire, bien, ça ne donne pas plus de service
actuellement.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
M. Marissal : Mes vieilles
hanches vous remercient de votre commentaire.
Le Président (M. Provençal)
: Nous poursuivons avec le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci beaucoup pour
votre présentation. Tout d'abord, je vois votre inquiétude sur ce que veut
faire le ministre de cette information-là. Elle est claire. Il a voulu vous
rassurer en disant que c'était un outil de gestion pour une meilleure
communication, sauf que les liens de dialogue, certainement affectés, si on
s'en tient à l'échange qu'il a eu avec la FMOQ tout à l'heure... Mais est-ce
que les conclusions ne sont pas déjà connues? Le ministre avoue qu'il a déjà
cette information-là et, à l'automne, le premier ministre a dit, sur la base de
cette information-là, il y a les bons
médecins, puis il y a les méchants médecins, ceux qui ne font pas un bon
travail. Est-ce que ce n'est pas
cette chasse aux sorcières là que le gouvernement risque de vouloir évidemment
entreprendre qui vous fait peur?
Mme Ruel-Laliberté (Jessica) : C'est
clair, c'est 100 % ce qu'on ne voulait pas nommer puis que vous faites
pour nous, ça fait que... merci. Mais effectivement de commencer à nommer qu'il
y a des bons puis des mauvais médecins, ça, ça nous inquiète grandement. De ne
pas savoir aussi très clairement comment on va utiliser cette information-là
puis qu'est ce qu'on va en faire, puis est-ce qu'on va obliger des médecins, tu
sais, à changer leurs profils de pratiques, ça nous inquiète. Puis on l'a dit
dans notre allocution aujourd'hui, un médecin qui fait de l'urgence, qui
accouche des patientes, qui fait des soins palliatifs, ce n'est pas un mauvais
médecin de famille, ces médecins-là, ils offrent des services aussi, mais
différemment. Ça fait que, pour nous, c'est vraiment important de ne pas
commencer à faire des catégories de médecins, puis des bons puis des mauvais.
Pour nous, ça ne passe pas.
M. Arseneau : D'accord. On voit
aussi l'intérêt, là, évidemment, du gouvernement de ne pas s'associer à l'époque de la réforme Barrette et de ne pas
vouloir entendre parler de la loi n° 20. Mais vous venez de
le mentionner, le projet de loi n° 11 repose
essentiellement sur les bases du projet de loi n° 20,
donc la prochaine étape risque d'être effectivement
des sanctions aux médecins qui ne sont pas bons selon le point de vue du
gouvernement. Merci de nous le rappeler.
Mais jusqu'à
quel point... Pour les citoyens qui nous écoutent puis qui veulent quand même
avoir accès à des soins de santé,
pouvez-vous nous dire qu'est-ce qui a changé puis comment est-ce que cette
nouvelle approche de multidisciplinarité, selon vous, peut se déployer
maintenant, alors qu'on le souhaiterait et on le souhaitait depuis des années?
M. Savignac Dufour (Patrice) : Bien,
il y a eu beaucoup de changements législatifs qui ont été faits, notamment avec le concours du Collège des
médecins. Tu sais, il y en a eu des... on fait ça depuis trois, quatre ans, là.
Il y a — peut-être que la pandémie a ralenti, là — il
y a eu les pharmaciens, il y a eu les IPS, il y a eu plein de professionnels
de la santé, mais il y a comme même cette idée politique que, tu sais, quand on
fait un changement législatif auprès de pouvoirs d'un ordre professionnel, là,
trois mois plus tard, le système de santé va être modifié.
Tu sais, il faut donner le temps aux réformes
aussi. Il y a eu énormément de nouveaux professionnels de la santé qui ont pris des nouveaux pouvoirs
diagnostiques puis, tu sais, quand on dit : Les médecins sont
protectionnistes, puis tout, non, non, non, là, on a, tout le monde,
participé, la FMOQ, la FMSQ, nous, à promouvoir que d'autres professionnels de la santé puissent mettre
l'épaule à la roue. Mais il faut donner le temps aussi à ce que ces
choses-là... Tu sais, c'est vrai pour la pratique de nos membres, là,
qu'on craint que le projet de loi n° 11 peut changer
du jour au lendemain, c'est vrai pour tous
les autres professionnels. Alors, les IPS que Mme McCann nous promettait, elles
ne sont pas nécessairement toutes là en termes de nombre. Bien, il faut
continuer à travailler dans ce sens-là. Et je pense qu'il y a beaucoup de
choses qui ont été faites qui n'ont peut être pas encore donné tous les
résultats, mais, des fois, il faut être patient quand on réforme le plus gros
système au Québec, là.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Nous concluons cet
échange avec la députée d'Iberville.
Mme Samson : Bonjour, madame,
bonjour, monsieur. Bon, d'abord, il est vrai que lorsque, comme dans toute industrie, quand on veut des données et des
statistiques, c'est parce qu'on veut pouvoir les moduler, ultimement
s'en servir pour changer le modèle. Maintenant, j'aimerais... je compterais sur
vous pour démolir deux préjugés que j'ai. Le
premier, c'est que le projet de loi risque d'accélérer le départ à la retraite
de beaucoup de médecins de famille qui vont se délester de leurs listes
de patients avec leurs collègues. Et ça va régler le problème des autres qui
ont besoin de prendre plus de postes. Mon autre préoccupation, c'est que comme
les médecins omnipraticiens ont beaucoup d'occupations dans les urgences, la
maternité, etc., moi, j'ai peur que le projet de loi fasse en sorte que les
hôpitaux communautaires se vident et que ces hôpitaux-là doivent faire appel à
plus de délestage par manque de médecins généralistes. Dites-moi que j'ai tort,
s'il vous plaît.
Mme Ruel-Laliberté
(Jessica) : Bien, en fait, on tombe dans la suite de l'application de la
loi, tu sais, qui pourrait mener à des changements de profils de pratique. Vous
comprendrez que mes membres, ce n'est pas les médecins en fin de pratique, là.
Donc est-ce que ça va amener ces médecins-là à prendre leur retraite? Je pense
que je vais vous référer à la FMOQ pour ça. Moi, mes membres, ils commencent,
ça fait qu'on va espérer qu'ils veulent rester. Par contre, pour ce qui est de
la suite de la loi n° 11 puis des changements de
profils de pratique qui pourraient amener certains à devoir valoriser la prise
en charge et donc à ne plus pouvoir faire d'AMP, qui sont, tu sais,
nécessaires, dans des régions, pour offrir, par exemple, une couverture à
l'urgence et en maternité, bien, c'est sûr que c'est une de nos craintes.
Mme Samson : Merci. C'est tout pour
moi.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Nous vous remercions de votre contribution
à nos travaux.
Alors, je
suspends pour que nous puissions laisser place au prochain groupe. Merci.
Suspension. S'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 10 h 40)
(Reprise à 10 h 51)
Le Président (M. Provençal)
: Nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux
représentants de la Fédération médicale étudiante du Québec.
Alors, je vous invite à nous présenter, pendant les
10 prochaines minutes, votre position et surtout à vous présenter l'une et
l'autre. À vous la parole.
Fédération médicale
étudiante du Québec (FMEQ)
Mme
Bisson-Gervais (Vanessa) :
Merci, M. le Président. Donc, je me présente, je m'appelle Vanessa Bisson-Gervais,
je suis étudiante de troisième année en
médecine à l'Université McGill, également déléguée aux affaires politiques de
la FMEQ.
Mme Blouin
(Victoria) : Bonjour, je
m'appelle Victoria Blouin, je suis étudiante en troisième année de médecine
à l'Université de Montréal et je suis vice-présidente de la FMEQ.
Mme Bisson-Gervais (Vanessa) : Donc,
brièvement, la FMEQ, la Fédération médicale étudiante du Québec a été fondée en 1974. On représente plus de
4 000 étudiants et étudiantes en médecine répartis dans les quatre
facultés et sept campus du Québec qui offrent un programme de médecine.
La FMEQ a pour mission la représentation et la défense des intérêts des
étudiants sur les plans académique, social et du bien-être. Depuis quelques
années, on joue également un rôle politique dans la sphère publique. On a
produit une dizaine de mémoires sur des sujets de santé publique, d'organisation des soins et d'éducation médicale à travers nos
journées d'action politique auxquelles certains députés ou ministres ont
eu l'occasion de participer dans les 18 dernières années.
Mme Blouin
(Victoria) : La FMEQ salue
la volonté du gouvernement de régler rapidement la problématique d'accès
à un médecin de famille au Québec. Nous ne pouvons toutefois pas ignorer les
impacts à moyen et à long terme de ce projet de loi sur la volonté des
étudiants en médecine de poursuivre une carrière en médecine de famille, de
même que les conséquences d'une approche unidisciplinaire du gouvernement face
à une première ligne qui est en difficulté depuis plusieurs années.
Dans les dernières années, le nombre de postes
vacants de résidence en médecine familiale ne cesse d'augmenter. Au
jumelage 2021, le moment où les étudiants en médecine choisissent dans
quelle spécialité ils vont poursuivre le reste de leur carrière, 75 postes
en médecine familiale n'ont pas été comblés. En 2020, il y avait 36 postes
non comblés, en 2019, 29 et en 2018, 69 postes qui avaient été non comblés
en médecine familiale.
La FMEQ et plusieurs autres acteurs du milieu
médical se sont demandé un peu les raisons qui poussent les étudiants en
médecine à ne pas aller vers la médecine de famille. Donc, en juin 2021, nous
avons distribué un sondage à nos finissants en médecine pour connaître un peu
ces raisons. Les raisons que les étudiants ont nommées pour ne pas choisir la
médecine de famille incluent les restrictions de la pratique, donc une part de
prochaines lois provenant du gouvernement qui pourrait changer leur pratique,
et une incertitude qui s'installe par rapport à la médecine familiale au
Québec. Ils nomment également l'organisation complexe de la pratique, notamment
les plans régionaux d'effectifs médicaux, les PREM, les activités médicales
particulières, les AMP, etc., peu d'intérêt suscité lors du parcours médical,
une certaine phobie de faire seulement du bureau en tant que médecin de famille
et plusieurs autres éléments qui nous ont été très intéressants pour se
positionner par rapport à ce projet de loi.
Mme Bisson-Gervais (Vanessa) : Donc,
on sait que garantir l'accès à un médecin de famille pour tous les Québécois,
c'est une promesse électorale que plusieurs gouvernements ont tenté de remplir
au cours des dernières années. Si l'objectif premier est d'assurer les soins à
la population, la FMEQ est d'avis que le ministère se doit de mettre en oeuvre
une réelle approche interdisciplinaire dans les soins de première ligne. Le
projet de loi n° 41, l'entente du Collège des médecins du Québec
concernant les responsabilités attribuées aux IPS de même que le déploiement du guichet d'accès à la première ligne sont un
pas dans la bonne direction, mais ne suffisent pas à combler les besoins en
première ligne et en prévention. La FMEQ est d'avis que médecin de famille doit
cesser d'être l'acteur principal et parfois le seul acteur dans la prise en
charge des problèmes de santé pour lesquels d'autres professionnels sont formés
à compétences égales, voire supérieures.
Le projet de loi n° 11 précise que le
gouvernement peut déterminer la mesure dans laquelle un médecin doit se rendre
disponible et précise certaines plages horaires visées, dont les soirées et en
week-end. La FMEQ reconnaît que des plages horaires variées pourraient
permettre un accès plus équitable aux soins médicaux pour les patients, mais,
si l'enjeu fondamental, c'est un nombre insuffisant d'actes médicaux effectués
par les médecins de famille en cabinet, ce n'est pas des plages horaires
modifiées qui régleront la problématique. On croit, à la FMEQ, qu'il faut
reconnaître le rôle essentiel que jouent les médecins de famille québécois pour
soutenir notre système de santé en cabinet, en milieu particulier et également
en centre hospitalier, notamment à travers les AMP. Les contraintes d'horaires
qui s'ajoutent aux contraintes existantes sur la pratique des médecins de
famille risquent d'être perçues de manière négative par nos étudiants, qui
hésitent de plus en plus à choisir la médecine de famille comme carrière, comme
on l'a mentionné plus tôt.
Le projet de loi n° 11 autorise également
la RAMQ à communiquer certains renseignements sur la pratique des médecins de
famille afin de mettre en oeuvre et de surveiller l'application des politiques
prévues par la loi. À la FMEQ, on n'est pas contre la collecte de données sur
le réseau de la santé ni sur les professionnels qui y travaillent, évidemment,
mais ça confirme la crainte existante de nos étudiants que le gouvernement se
réserve le droit de dicter leur pratique future en tant que médecins de famille
et de les sanctionner au besoin.
On craint également que ça accentue la
hiérarchisation qui existe déjà, en fait, entre les omnipraticiens et les
médecins des autres spécialités, qui, eux, ne sont pas visés par de telles
contraintes ou une telle surveillance, puis, encore une fois, que ça nuise
davantage au choix des étudiants de poursuivre une carrière en médecine de
famille.
Mme Blouin (Victoria) : La FMEQ
est heureuse d'avoir été invitée à participer à ces consultations particulières
sur le projet de loi n° 11 afin de partager notre perspective sur les enjeux
de la première ligne au Québec et discuter de la relève en médecine familiale.
La FMEQ soutient les efforts afin d'améliorer l'accessibilité aux soins de
première ligne de qualité pour la population québécoise, mais nous invitons à
reconsidérer les interventions politiques qui peuvent contribuer à
l'instabilité entourant la pratique de la médecine familiale telle que perçue
par nos étudiants, augmenter l'incertitude
que nos étudiants ont par rapport à leur carrière future et, au final, tout
simplement décourager les étudiants en médecine à s'identifier au rôle
d'omnipraticien et de choisir la médecine familiale comme carrière.
La FMEQ souhaite formuler quelques
recommandations supplémentaires pouvant aider à répondre aux besoins en matière
de relève médicale pour la première ligne au Québec.
Tout d'abord, établir un plan de valorisation de
la médecine familiale clair, en collaboration avec les acteurs médicaux du Québec, notamment le Collège des
médecins, les facultés de médecine, la FMOQ, la FMRQ et nous-mêmes, la FMEQ,
afin de mettre en oeuvre une stratégie concertée de promotion de la médecine
familiale auprès des étudiants.
Soutenir les facultés de médecine dans leurs
efforts de valorisation de la médecine familiale, notamment par la création de
nouveaux groupes de médecine familiale universitaire où ils pourront prodiguer
de l'enseignement à nos étudiants en médecine et aux résidents.
Entretenir un discours politique positif à
l'égard du travail des médecins de famille et du rôle essentiel qu'ils jouent dans le système, en plus d'offrir une
stabilité dans l'encadrement de la pratique de la médecine familiale au Québec.
Bonifier les montants attribués aux groupes de
médecine familiale universitaires et aux omnipraticiens pour la prise en charge
d'externes en médecine afin d'améliorer l'exposition des étudiants pendant leur
parcours médical.
Augmenter le nombre de places dans les
programmes de compétences avancés afin de favoriser la diversité de la
pratique.
Favoriser une diversité et une flexibilité des
AMP, particulièrement pour les nouveaux médecins.
Et enfin
poursuivre et accélérer le déploiement du Guichet d'accès à la première ligne à
travers toutes les régions du Québec. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Provençal)
:
Alors, merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons initier cet échange avec
M. le ministre. Je vous cède la parole, M. le ministre.
M. Dubé : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, à vous
deux, merci d'être là. Je suis content de vous revoir, parce qu'on a eu la chance quelques fois, au cours
des dernières années, là, des deux dernières années, même si ce n'était
pas toujours facile, de se voir à travers la pandémie. Mais merci beaucoup.
Je vais commencer par, premièrement, vous dire à
quel point j'apprécie vos suggestions. Vous en avez plusieurs, je les ai
reprises en note, là : un plan de valorisation de la médecine familiale,
d'être capable de soutenir les facultés de
médecine pour promouvoir la médecine familiale, d'être capable d'avoir un discours
positif par rapport à la médecine générale, je suis tout à fait d'accord
avec ça, être capable de bonifier les dollars pour, entre autres, les GMF,
notamment celles où on peut accélérer la participation des étudiants.
J'aime beaucoup le fait de ce que vous dites par
rapport à favoriser les AMP, là, les activités médicales prescrites, et ce que
vous dites sur le guichet de la pertinence. Je vais vous faire une confidence
aujourd'hui, à toutes les deux, il y a
beaucoup de ces recommandations-là qui vont dans le plan de santé qui va être
déposé dans les prochaines semaines. Parce que ce n'est pas la première
fois que vous me le dites, puis je peux vous dire qu'il y en a beaucoup que vous allez retrouver
dans le plan de santé. Ça fait que c'est le premier engagement que je vous
prends aujourd'hui. Puis merci
beaucoup d'avoir eu, je dirais, la décision de prendre cette approche positive
là. Je l'apprécie énormément, premièrement.
• (11 heures) •
Deuxièmement, je veux en profiter pour parler de
la perception, parce que j'entends ça beaucoup depuis ce matin, puis, surtout quand on pense à la relève,
c'est important de clarifier des choses. J'ai... Plus j'entends... Puis
j'entends aussi ceux qui sont intervenus, puis j'entends aussi
l'opposition, que le projet de loi n° 11 peut avoir un impact puis une
perception très négative. Et, vous savez, en gestion du changement, souvent, on
dit que la perception est la première chose
à vouloir régler parce que s'il y a une mauvaise perception, peu importe la
communication qu'on peut faire... Alors, moi, j'aimerais peut-être clarifier
une couple de petites choses avec vous pour continuer cette discussion-là.
Premièrement, je... Vous avez la meilleure
approche, c'est d'avoir une perception positive en faisant des suggestions.
Alors donc, pour moi, votre enjeu de perception, il est beaucoup derrière moi.
Maintenant, j'aimerais vous rassurer sur des changements. Moi, je suis ouvert à
des changements, puis il y en a un que j'ai fait pour les jeunes, les plus
jeunes médecins. Puis, quand je dis ça, là, c'est... Je veux être très clair
que je vous ai entendu quand on s'est
rencontrés puis qu'il y avait ce besoin-là de limiter — vous
vous souvenez des discussions qu'on a eues — la pression sur les nouveaux médecins qui
arrivent puis qui ne sont pas prêts à s'engager tout de suite à prendre
1 000 ou 1 500 patients. Puis
il fallait changer la façon de penser. Et c'est pour ça que moi, rapidement,
après ces rencontres-là, j'ai dit : On doit repenser la façon dont
on définit la prise en charge. Et la prise en charge, pour moi, ne doit plus
être maintenant la question d'un médecin, mais elle doit être la question de
plusieurs personnes. Donc, quand j'entends que le projet de loi ne traite pas
de l'interdisciplinarité, ce n'est pas son objectif. Je l'ai dit tout à l'heure
à ceux qui vous ont précédés, vous l'avez entendu. Mais moi, je veux juste vous
rassurer que c'est important pour moi de vous dire qu'on est très conscients, dans
les changements, depuis qu'on se parle avec les différentes fédérations, que
cette prise en charge là doit se faire différemment pour tenir compte de la
nouvelle façon de faire, incluant une prise en charge par, justement, les GMF,
et non par le médecin lui-même. Très ouvert à ça.
La deuxième chose, c'est sur la pertinence. Puis
là ça revient à votre dernière recommandation ou suggestion, là, je ne me
souviens pas du terme que vous avez utilisé. C'est le guichet d'accès à la
pertinence. Ça, pour moi, c'est fondamental. Vous savez, ce qu'on gère, nous,
en ce moment là, comme ministère puis comme gouvernement, c'est l'argent des
Québécois. Puis l'argent des Québécois... on ne parle pas d'un système privé
ici, là, qui est dans une compagnie, là, c'est l'argent des Québécois qui est
géré et qui est redistribué aux médecins de famille pour donner le meilleur
service. Le guichet d'accès à la pertinence fait exactement ça. Il y a
quelqu'un qui l'a dit tout à l'heure, il y a eu beaucoup d'actions qui ont été
mises par notre gouvernement pour donner plus de place aux IPS, plus de place
aux pharmaciens, plus de place aux autres professionnels, mais à date on n'a
pas eu l'effet bénéfique de ça. On ne l'a pas senti. Peut-être que, quelqu'un
disait tantôt, c'est trop récent. Peut-être, mais le guichet d'accès à la
pertinence, c'est exactement ce qu'il veut faire. Exactement ça. Et moi, je...
C'est pour ça que je vous dis. : Ne soyez pas surprises que ce que vous me
dites comme suggestion, de donner plus de place au guichet de la pertinence, il
va être dans le plan de santé parce qu'il est important. Parce que, justement,
ce qu'on veut, c'est avoir, puis je parle
aux Québécois quand je dis ça... c'est d'être capables d'avoir un filtre avant
la prise de rendez-vous. Ce qu'on veut, c'est qu'il y a des gens...
Puis, ils l'ont montré à Rimouski, 50 % des gens qui appelaient au guichet
à la pertinence sont redirigés ailleurs qu'à un médecin de famille, 50 %,
c'est énorme, là. C'est-à-dire qu'en ce moment ce n'est pas juste un problème
avec les médecins. Puis c'est exactement ce qu'on est en train de dire. Si on
veut profiter de l'expertise que vous êtes en train de développer et de
l'expérience des médecins, il faut leur envoyer les bons cas, les bons
dossiers, et, pour être capables de faire ça, il faut qu'en amont il y ait de
la pertinence qui soit déterminée par des agents administratifs, par des
infirmières et même par des médecins qui, eux autres, disent : Maintenant,
50 % des cas, oui, on va les envoyer aux bons médecins, mais, en même
temps, on va les envoyer aux pharmaciens puis aux IPS. Vous me suivez?
Donc, je suis très content d'entendre votre
suggestion. Et, pour moi, la dernière chose que je ferais... Puis je veux vous
rassurer, parce que, si ce n'est pas clair, je vais vous demander de commenter
là-dessus. On n'a pas besoin d'un projet de loi pour faire de
l'interdisciplinarité. On n'a pas besoin de ça. Quand les gens nous
disent : Bien, écoutez, votre projet de loi n° 11 ne parle pas
d'interdisciplinarité... On n'a pas besoin d'un projet de loi pour ça, c'est
déjà tout possible de faire ça. Ce qui est important, puis c'est là qu'est ma
question, est-ce que tout le monde comprend bien, puis vous inclus, qu'on a
besoin de bien savoir quelle est la charge sur les médecins pour que ça soit
attractif pour vous, comme nouveaux professionnels?
Moi, je pense que le projet de loi n° 11...
puis, ça, je vais travailler très fort sur la perception dans les prochaines
semaines, parce que vous avez posé les bonnes questions, c'est de s'assurer que
les gens comprennent que le projet de loi n° 11 va
servir à s'assurer que, s'il y a des gens qui ont trop de charges de travail
parce qu'ils l'ont pris ailleurs, qu'ils l'ont pris dans les urgences, qu'ils
l'ont pris dans des CLSC et qu'ils ne sont pas capables de prendre la prise en
charge... Le projet de loi n° 11 va nous aider à déterminer que,
peut-être, dans certaines régions, on a besoin de plus de médecins.
Puis je veux juste être sûr que je vous ai bien
compris, parce que, pour moi, c'est la meilleure façon de changer la perception
négative du projet de loi n° 11. Si les gens... comprendre que le premier
objectif, c'est de bien comprendre combien qu'il nous manque de médecins dans
certaines régions, si c'est la façon de régler le problème... Je ne dis pas que
c'est la seule parce que je pense que l'organisation du travail fait partie de
la solution aussi, mais le nombre de médecins... Je veux juste que vous me
dites... que vous me disiez, pardon, qu'on se comprend bien qu'on a besoin de
changer la perception là-dessus. Je vous laisserais répondre à ça, s'il vous
plaît.
Mme Bisson-Gervais
(Vanessa) : Bien oui, je pense effectivement que... Comme on disait,
on n'est pas contre la collecte de données sur le système de santé, les médecins,
les infirmières qui y pratiquent. Notre compréhension de la chose, c'est que
cette question-là du nombre de médecins dont on a besoin dans chacune des
régions ou chacune des... en ville versus en région, c'était une problématique
qui était peut-être déjà répondue par la table de concertation sur les
effectifs médicaux, où est-ce qu'on détermine le nombre, par exemple, de postes
en résidence, le nombre de postes... le nombre de places en médecine, puis,
ensuite de ça, c'est une répartition qui est faite au niveau des régions.
Je n'ai pas, je pense, l'expertise nécessaire
pour dire si les données collectées vont pouvoir changer exactement la
répartition qui est faite à ce moment-là. On sait qu'il y a déjà des besoins
non comblés en région en termes de médecins spécialistes et de médecins de
famille, mais, à la FMEQ, encore une fois, on n'est pas contre la collecte de
données comme telle sur les médecins de famille, mais on s'inquiète de la
perception — encore
une fois, le mot «perception» — que ça va avoir sur le choix de nos
étudiants à choisir cette pratique-là.
M. Dubé : Bien, écoutez, c'est pour
ça que tout à l'heure... que... puis j'apprécie, là, quand on ne sait pas...
Moi, je vais vous dire que j'ai été... pardon, j'ai été très surpris que cette
information-là n'était pas connue de nos gestionnaires locaux. J'ai été très
surpris de ça. Je dois vous dire, quand on dit que c'est l'argent des
Québécois, je pense que la première chose qu'on veut, surtout dans une
approche, en tout cas, que moi, je préconise dans le plan de la santé, c'est la décentralisation, d'aller dans
les régions... d'aller dans des régions pour tenir compte des réalités propres
aux régions. Bien, j'ai été le premier surpris à savoir que nos DRMG n'avaient
pas l'accès à cette information.
Alors, c'est pour ça tout à l'heure, que j'ai
questionné les représentants de la FMOQ, mais moi, je veux vous rassurer que
notre objectif d'être capable d'aller collecter cette information-là qui... À
mon sens, les Québécois le comprennent, là, il y a un problème. S'il y a,
aujourd'hui, 1 million de médecins... il y a 1 million de patients
qui n'ont pas un médecin de famille, bien, il faut trouver des solutions puis
il faut savoir qui pourrait et comment on pourrait prendre cette prise en charge
là, comme on a dit, pas par des médecins, naturellement, mais peut-être par les
GMF ou par d'autres façons, par plus de pertinence, plus de
multidisciplinarité. Mais, pour ça, il faut savoir quelle est la charge de travail dans les régions. Alors
donc, je sais que, peut-être, vous n'avez pas toutes cette information-là.
Moi, je ne l'avais pas, mais, maintenant, je sais une chose, c'est qu'elle ne
se rend pas jusqu'à la région. Et, comme nos DRMG ont un travail de tous les
jours pour bien gérer l'offre locale, bien, c'est sûr que ça fait...
• (11 h 10) •
Puis, deuxièmement, sur la perception qu'on ne
veut pas ajouter de médecins, vous avez donné des statistiques, là, qu'il y a
des gens qui se sont retirés un peu de leur intérêt, mais je voudrais dire que
les précédents gouvernements ont quand même beaucoup coupé l'accès à la
médecine générale. Je pourrais vous montrer des statistiques, là, puis je ne veux pas faire de politique ce matin, là,
mais, dans les années qui ont précédé notre gouvernement, là, on a,
comme on dit, capé le nombre de médecins généralistes. Elle a été arrêtée, la
croissance, alors qu'il aurait fallu l'augmenter.
Alors, aujourd'hui, on est prêts à faire ça,
nous, puis on l'a fait dans les trois dernières années. Depuis notre arrivée,
on a augmenté le nombre de médecins de famille. Ça ne s'est jamais fait avec le
gouvernement précédent. Alors, deuxièmement, pour être capable de continuer à
faire ça, ça me prend des données puis ça me prend de savoir où on doit le
faire. Puis ça, c'est important que je le dise à ceux qui rentrent dans la
profession, on va vous donner un environnement de travail avec des outils de
travail qui vont vous permettre d'avoir un environnement de qualité. Et c'est
ça que je vais continuer à travailler avec vous dans les rencontres qu'on va
avoir dans les prochains mois, dans les prochaines semaines, pour s'assurer
qu'on change cette perception-là. On n'est pas là pour contrôler. On est là
pour gérer ensemble pour s'assurer que les Québécois ont accès à un médecin de
famille ou à un professionnel qui vient
donner le service dont ils ont droit et dans un délai raisonnable. C'est ça
qu'on appelle l'accès adapté, et c'est ça qui va nous permettre de
faire...
Alors, je veux... J'en profite ce matin pour
vous rassurer toutes les deux, mais surtout pour les étudiants que vous représentez, qui ont fait un travail
incroyable, entre autres, durant des temps difficiles, d'étudier, de venir nous
aider dans la vaccination. Je veux en profiter pour vous remercier parce
qu'il y a plusieurs d'entre vous qui sont venus nous donner un coup de main.
Alors, je ne sais pas combien de temps qu'il me
reste, mais, M. le Président, je pense que le plan de valorisation... Puis je vais terminer sur votre première suggestion.
Quand on va mettre... En tout cas, vous allez voir, là, et vous me le
reprocherez si jamais vos suggestions ne sont pas dans le plan de santé qu'on
va développer, qu'on va déposer dans quelques semaines... J'ai très hâte de
voir qu'est-ce qu'on va suggérer pour le plan de valorisation, parce que c'est
ça que vous demandez, puis pour que nos... on ait plus d'étudiants en médecine
qui soient intéressés. Et nous, on va augmenter la façon d'avoir plus de
médecins de famille pour que votre environnement de travail soit meilleur. Je
veux juste vous rassurer là-dessus et je vous remercie encore des suggestions
que vous avez faites ce matin. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le ministre. Nous allons
maintenant poursuivre cet échange avec le député de Nelligan.
M. Derraji : Merci, M. le Président.
Merci pour votre exposé. Merci pour votre mémoire, pas mal de bonnes
propositions. Et je vais saisir l'occasion que j'ai, devant moi, deux jeunes de
la relève, et moi, je pense que vous êtes les bonnes personnes pour parler de
la pratique de médecine de famille. Et je vais saisir aussi l'occasion de
parler de l'organisation des soins. Je laisse le ministre
parler de l'organisation du travail parce que, là, je viens de comprendre que
le but de son projet de loi, c'est de la collecte de l'information, de la
collecte de la donnée, parce qu'il ne peut pas agir s'il n'a pas les données,
si j'ai bien compris. Il peut me répondre la prochaine fois quand il va parler
avec un autre groupe, parce que c'est comme ça qu'on avance dans ce projet de
loi. Il saisit bien comment répondre à mes questions.
Donc, on a besoin...
On a des besoins de médecins dans une région. Le ministre a choisi le projet de
loi... a choisi une commission parlementaire pour déposer un projet de loi pour
collecter de l'information pour savoir s'il manque de médecins dans une région
et agir en conséquence, parce qu'il n'y a pas une maximisation de l'utilisation
de rendez-vous. Donc, au bout de la ligne, on va se réunir trois jours pour
écouter des groupes, étudier le projet de loi, pour, au bout de la ligne, aider
le ministre et le ministère à savoir les données des rendez-vous disponibles et
non disponibles. Et, au bout de la ligne, on va laisser 1 million de
Québécois en attente d'un médecin de famille.
Du moment que vous
êtes la relève, vous voyez l'évolution de l'organisation des soins. Les
dernières années, on a parlé beaucoup des ordonnances collectives. On a parlé
de l'organisation des soins, de l'importance d'une équipe multidisciplinaire, de l'importance de l'IPS, de l'importance de
l'infirmière clinicienne. Pensez-vous réellement, à la lumière... et
vous avez lu le projet de loi n° 11, pensez-vous vraiment qu'on est en
train de parler de la qualité des soins et de l'organisation des soins ou on
est en train de monter un tableau de bord pour voir les rendez-vous qui
manquent?
Mme Bisson-Gervais
(Vanessa) : Je pense que c'est un peu difficile pour nous de se
prononcer sur cette question-là. Notre compréhension du projet de loi,
effectivement, c'était une collecte de données. Là, moi, je viens de comprendre
qu'il allait y avoir d'autres éléments qui allaient être présentés dans le plan
de santé. Je ne suis pas certaine qu'on puisse se prononcer sur cette
question-là.
M. Derraji : Je
comprends, mais je vais essayer de la rendre beaucoup plus facile pour vous.
Vous êtes là par rapport à un projet de loi. On n'est pas encore en train de
parler d'un plan de santé parce que je n'ai même pas encore vu ce plan de
santé. Il est dans la tête du ministre. Ce que j'ai devant moi, c'est un projet
de loi n° 11. Vous avez envoyé un mémoire sur le projet de loi n° 11.
Vous représentez la relève. Vous vivez des problèmes par rapport à la
profession, notamment les postes vacants : 2019, 24, 2020, 38 boudés,
2021, 76. J'entends le ministre qui dit que ça remonte à beaucoup plus
longtemps. Il avait quatre ans pour agir. Il n'a pas stoppé l'hémorragie. Il
ramène un projet de loi pour collecter les données. Ma question est très
simple : Est-ce que, vraiment, on est sur la bonne voie pour
l'organisation des soins ou bien pour juste uniquement collecter les données
pour autre chose, et, au bout de la ligne, on laisse 1 million de
Québécois en attente d'un médecin de famille?
Mme Bisson-Gervais
(Vanessa) : Je pense que c'est... Pardon, O.K. Donc, oui, je pense que
c'est une inquiétude qu'on a. Effectivement, on réalise que les postes en
médecine de famille ne sont pas comblés. Oui, on mentionne qu'on va augmenter
les places en médecine comme telles, mais, si c'est un... En termes de pourcentage,
là, c'est... En termes relatifs, si on n'attire pas les étudiants en médecine
vers la profession de médecin de famille, oui, il y aurait ultimement un enjeu
où est-ce que des médecins... En fait, des patients n'auraient pas accès à un
médecin de famille si le pourcentage relatif d'étudiants qui souhaitent aller
en médecine de famille reste le même malgré une augmentation absolue
d'étudiants dans les programmes.
M. Derraji : On
s'entend aujourd'hui que ce projet de loi ne règle pas votre problématique.
Donc, c'est bien beau, parler d'un plan de santé, mais vous, en tant que
représentantes de la relève dans ce domaine, avez-vous vu une proposition pour
améliorer l'accès à la médecine de famille? Avez-vous vu une mesure pour
améliorer l'attractivité, sachant que tous
les indicateurs, parlons d'indicateurs du moment qu'on cherche d'autres
indicateurs... ça fait trois ans que les gens boudent la médecine
familiale. Pensez-vous qu'on est sur une bonne voie?
Mme Blouin
(Victoria) : La FMEQ salue l'effort de rendre plus accessible la
première ligne puisque c'est, pour nous aussi, une des priorités, mais
effectivement je ne crois pas que c'est dans ce projet de loi-ci qu'on va
régler le problème d'attirer les étudiants en médecine vers la médecine familiale.
M. Derraji : Oui,
je partage la même conclusion que vous, que le projet de loi n'a pas pour but
d'améliorer l'attractivité, sachant que c'est un des problèmes. Si on n'a pas
assez de médecins, ça sert à quoi d'aller chercher une collecte de données dans
une région si, au bout de la ligne, la conclusion va être : on n'a pas
assez de médecins? Donc, c'est un cercle vicieux. On n'a pas assez de médecins
parce qu'on a fait la collecte de données, il n'y a pas assez de disponibilité, et on va revenir à la même... au même cercle
vicieux, il faut remplir les places ignorées et boudées.
Je vais revenir à
l'organisation des soins parce que j'ai en face de moi deux personnes très
intelligentes. C'est quoi, la meilleure façon pour l'organisation des soins
dans le contexte de la médecine familiale avec ce qu'on a présentement, avec la
structure qu'on a présentement, les GMF? Parce qu'au bout de la ligne vous vous
adressez aussi à la population qui a des attentes. 1 million de Québécois
n'ont pas de médecin de famille. C'est pour cela que nous sommes là aujourd'hui, là, c'est parce qu'il y a 1 million qui
attendent, là, des solutions. Comment on peut améliorer l'organisation
des soins, chose que vous ne voyez pas dans le projet de loi?
Mme Blouin (Victoria) : Pour
nous, la réponse à l'organisation des soins passe par l'interdisciplinarité, de
décharger le médecin de famille, et les médecins de famille en général, d'être
l'acteur central dans la prise en charge de la première
ligne pour que, comme vous dites, les patients qui ont besoin d'accéder à la
première ligne et de recevoir des soins n'aient pas seulement à contacter un
médecin et à avoir un médecin comme acteur principal, mais puissent bénéficier
de l'expertise de tous les professionnels qui sont autour.
M. Derraji : Et on répond quoi
aux gens qui disent que le médecin de famille ou médecin en GMF a d'autres
charges, les urgences, les tournées en CHSLD, et on veut qu'il maintienne une
bonne présence en clinique, en GMF? Donc, la collecte des données, est-ce que,
selon vous, va mettre l'emphase sur ça? Est-ce qu'elle va régler et mettre...
Expliquez aux Québécois la charge de travail de ce médecin de famille ou bien
on passe à côté.
• (11 h 20) •
Mme Bisson-Gervais (Vanessa) : Je
pense que la collecte de données va nous donner un indicatif de ce qui se passe en cabinet, mais il faut... À la FMEQ, on
croit qu'il faut quand même reconnaître les particularités du système de
santé au Québec. On a des médecins de famille qui travaillent, comme vous venez
de le mentionner, en CHSLD, dans les milieux de soins particuliers, en hôpital,
en urgence, en obstétrique. Donc, ça semble être un projet de loi qui s'oriente
plus vers la pratique en cabinet. Nous, l'élément qu'on souhaite aussi
souligner, c'est qu'il ne faut pas du tout mettre fin à cette diversité de
pratiques là avec les AMP parce que c'est, au contraire, ce qui attire nos
étudiants à poursuivre une carrière en médecine de famille, avoir la
possibilité de moduler leur pratique au fil des ans. Puis c'est pour ça qu'on
souhaite, d'ailleurs, la bonification des programmes de compétences avancées.
M. Derraji : Oui, très
d'accord, et je suis un partisan du travail multidisciplinaire, et vous avez
raison de le mentionner. Prenons le cas d'un patient diabétique ou autre qui
souffre d'une maladie chronique, ce n'est pas vrai que ça prend uniquement l'intervention d'un médecin généraliste, et Dieu
sait que, dans pas mal de GMF, il y a pas mal de succès par rapport à
cette prise en charge.
Je reviens aux discours. Depuis l'automne, vous
avez vu les sorties du premier ministre par rapport aux médecins de famille. Il
y a un groupe avant vous qui a dit : Il y a comme du «bashing».
Excusez-moi l'expression. Comment vos membres reçoivent un peu le discours
politique sur les médecins de famille? Il y a des gens qui disent : Bien, écoute, il y a des médecins
paresseux. Je le mets entre guillemets parce que je ne fais que rapporter.
C'est pour cela que le projet de loi veut savoir qu'est-ce que les
médecins font. Est-ce qu'il y a des plages horaires disponibles? Comment vous
recevez ce message et comment vos membres reçoivent ce message politique?
Mme Blouin (Victoria) : C'est
certain que le discours qu'on dirait négatif au niveau politique, mais
également au niveau facultaire et médiatique... c'est certain que ça nuit à la
perception des étudiants en médecine de la médecine familiale. Il faut
comprendre que, les étudiants, on étudie la médecine au sens large. On a un
doctorat en médecine. On est au tout début de notre carrière et on doit choisir
vers quelle spécialité on s'orient, et, afin de choisir la médecine de famille,
il faut que les étudiants s'identifient comme omnipraticien et aient envie de
devenir un omnipraticien. Donc, c'est certain que, si, en ouvrant la télé ou en
ouvrant les réseaux sociaux, ce qu'on voit, c'est des commentaires péjoratifs
sur le travail des médecins et leur rôle dans le système de santé... c'est
certain que ça n'encourage pas nos étudiants à s'identifier comme omnipraticiens.
M. Derraji : Oui, vous avez...
Mme Bisson-Gervais (Vanessa) : J'ajouterais...
Pardon.
M. Derraji : Non, non allez-y.
Mme Bisson-Gervais (Vanessa) : J'ajouterais
à ça que c'est un problème chronique, là. Ça fait des années, là, qu'on parle
justement... qu'on entretient un discours négatif envers la médecine de
famille, puis ça s'est répercuté dans les statistiques du match en médecine de
famille. Donc, ça va prendre beaucoup d'efforts, là, pour régler ce
problème-là.
M. Derraji : Il y a une phrase
qui m'a marqué un peu dans votre mémoire, la phobie de la pratique de bureau
exclusive. Vous ne pensez pas que le projet de loi... Au bout de la ligne,
cette centrale de réservation, avoir accès aux données, est-ce que ça ne va pas
aller vraiment dans ce sens de la pratique de bureau, donc, ne voir que la
pratique exclusive au bureau?
Le Président (M. Provençal)
: Je vais...
Mme Blouin (Victoria) : À ce
qu'on sache, ce projet de...
Le Président (M. Provençal)
: Allez y, madame, je vais vous laisser quelques... un petit
instant pour une réponse rapide, s'il vous plaît.
Mme Blouin (Victoria) : À ce
qu'on sache, ce projet de loi-ci ne touche pas les activités médicales
particulières. Donc, je ne crois pas qu'on peut s'avancer sur l'effet que ça
aura éventuellement sur la pratique en cabinet versus hors cabinet.
Le
Président (M. Provençal)
: Merci
beaucoup.
M. Derraji :
Merci.
Le Président
(M. Provençal)
: Alors, nous
poursuivons avec le député de Rosemont.
M. Marissal :
Merci, M. le Président. Avant que mon temps ne commence à s'égrener, étant
donné que notre collègue d'Iberville semble s'être absentée, nous pourrions,
mon collègue et moi, chouraver son temps. Ça nous ferait 30 secondes de
plus.
Le Président (M.
Provençal)
: Alors, écoutez, pour cette
intervention-là, si le député de Nelligan nous le permet, on répartirait le
temps entre le deuxième et le troisième groupe.
M. Derraji :
...mais j'ai une minute, parce que je n'ai pas vu qu'elle n'est pas là, puis je
peux récupérer plus tard, si ça ne vous dérange pas.
Le Président (M.
Provençal)
: Ça va. Consentement?
M. Marissal :
Consentement.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci. Alors, à vous la
parole, M. le député.
Une voix :
...
M. Marissal :
Le... Pardon?
M. Arseneau :
C'est quoi, le temps total qu'on a?
M. Marissal :
Combien on rajoute de temps, M. le Président?
Le Président (M. Provençal)
: Une minute et quelques secondes. Alors, vous avez un peu plus de trois
minutes maintenant.
M. Marissal : C'est fou, ça prend deux minutes pour négocier une minute. On n'est pas
efficaces, M. le Président. Bien, bonjour à vous deux, là. On ne vous a pas
oubliées, là. On était en train de régler des petits problèmes
d'intendance ici.
Je vais continuer sur
la lancée de mon collègue de Nelligan. Quand on a entendu le premier ministre
se lever, dans son discours inaugural en octobre dernier, puis, l'expression
est de moi et pas de lui, là, casser du sucre sur le dos des médecins de
famille en disant que sa patience aura des limites et qu'il mettra de l'ordre
là-dedans, quitte à sanctionner les... je suis curieux. Moi, je ne suis pas
familier avec les facultés de médecine. Je n'ai pas étudié là du tout. Comment c'est reçu parmi vous? Ça vient du
premier ministre, quand même, qui dit essentiellement que vous n'en
faites pas assez, là.
Mme Bisson-Gervais
(Vanessa) : Bien, je pense que les étudiants en médecine ne se sont
pas identifiés aux médecins de famille qui sont déjà en pratique. Nous, on est
encore en formation puis on ne sait pas... Certains ne savent pas encore s'ils
vont poursuivre une carrière en médecine de famille ou en spécialité, mais effectivement
il y a eu une réponse assez rapide de nos étudiants sur le sujet, qui ont perçu
tout ça de manière négative. La FMEQ a d'ailleurs sorti un communiqué sur le
sujet. Le contexte, c'est qu'il y avait des négociations qui étaient en train
de se produire. Puis, de notre part, c'est un peu comme si, en bon français,
papa, maman se chicanaient puis les enfants étaient un peu pris au milieu de
ça. C'était un peu comme ça que ça a été perçu.
M. Marissal :
D'accord. Le ministre semble assez ouvert à vos suggestions. Il vous a lancé
quelques fleurs, d'ailleurs, c'est bien.
Alors, une question très, très large, là, pour le temps qui reste. On fait quoi
avec le projet de loi n° 11? Puisqu'il est devant nous, là, puis,
jusqu'à preuve du contraire, on va devoir l'étudier, là, mais est-ce qu'on peut
réchapper ça? Qu'est-ce qu'on fait avec ça?
Mme Bisson-Gervais
(Vanessa) : Je pense qu'en tant que Fédération médicale étudiante du
Québec on ne sera pas portés à voter sur le projet de loi, évidemment. Nous, on
n'est pas arrivées avec... Comme vous l'avez vu, on n'est pas arrivées avec des propositions concrètes pour modifier ce
projet de loi là. On est arrivées avec une approche vraiment de la
relève, qu'est-ce que ça veut dire pour la relève. Puis on souhaitait amener
certains autres points, là, certains autres éléments à ça, mais je n'ai pas de
réponse pour vous par rapport au projet de loi qui est devant nous,
malheureusement.
M. Marissal :
D'accord. Si je vous dis le nom, je vous donne le nom du Dr Samuel Giard, ça
vous dit probablement quelque chose. Il y a eu deux, trois articles sur lui,
là, récemment. Il a fait un sondage maison parmi les
finissants et les finissantes, là, donc, prochains médecins. Ses chiffres...
Bon, c'est un sondage maison, et puis évidemment ça ne fait pas le tour. Ce
n'est pas exhaustif, là, mais il y a quand même un assez faible nombre de
finissants et de finissantes qui se destinent à la médecine familiale,
43 %. C'est en deçà de ce qui serait souhaitable. Mais il y a surtout une majorité, 95 %, ça ne peut pas être
beaucoup plus clair que ça, qui pense que le climat politique autour de la pratique de la médecine est négatif.
Vous en avez parlé un peu tout à l'heure avec mon collègue de Nelligan,
mais j'aimerais vous entendre un peu plus là-dessus puisqu'un jour vous finirez
puis vous entrerez officiellement dans la profession. De quoi est-il question
quand on dit que le climat politique est négatif?
Mme Bisson-Gervais
(Vanessa) : Pour nos étudiants, je pense que c'est le fait que... Bon,
premièrement, la promesse d'avoir un médecin de famille, c'est un enjeu
récurrent en campagne quand les gouvernements sont en mandat. Donc, c'est un
sujet qui revient d'emblée très souvent chaque année, aux deux ans, aux trois
ans. Donc, c'est très présent. Puis, à ça, il y a des positions qui sont émises
de la part de certains partis politiques, des gouvernements, puis, veux veux pas, ça vient affecter la
perception que nos étudiants ont. Je souhaiterais quand même parler du fait que
les facultés de médecine ont un rôle à jouer dans la perception de la médecine
de famille, puis le discours facultaire est problématique également. Donc,
c'est l'ensemble de tout ça qui fait que nos étudiants ne souhaitent pas aller
en médecine de famille.
M. Marissal :
Je vous remercie.
Le Président
(M. Provençal)
: Alors, nous
complétons avec le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau :
Merci beaucoup. Merci beaucoup pour votre présentation, mesdames. Je voudrais
revenir sur le sondage, les résultats du sondage que vous avez... dont vous
nous avez fait part. Sur le plan quantitatif, il y a plus de désavantages que
d'avantages si on regarde seulement, là, les arguments, mais évidemment il ne
faut pas regarder le dossier uniquement sur le plan quantitatif, mais aussi
qualitatif. J'aimerais que vous nous parliez de ce que vous avez décrit comme la crise de recrutement. Alors,
comment est-ce que ça se traduit? Vous avez fait le choix de la médecine
de famille, je crois, vous deux, ou pas
encore? Non, pas nécessairement. Mais comment ça se traduit, là, dans les
facultés?
Mme Blouin
(Victoria) : En fait, dans les facultés de médecine, les étudiants,
rendus à leur quatrième année de médecine, leur dernière année, doivent
participer à ce qu'on appelle le jumelage. Donc, ils doivent envoyer des
candidatures à différents programmes, notamment à la médecine familiale et aux
autres spécialités, et ensuite de faire un choix
après un processus de sélection. Donc, on remarque que c'est peu d'étudiants
finissants qui mettent en premier choix la médecine de famille. Donc, on a
plusieurs étudiants qui poursuivent leur carrière en médecine familiale, mais
que ce n'était pas, pour eux, un premier choix, mais bien un plan de secours,
si je peux me le permettre. Donc, ils ont appliqué dans une autre
spécialité pour commencer, et, vu le contingentement, n'ont pas nécessairement
été pris, et ont ensuite choisi de poursuivre en médecine familiale.
Donc, on voit qu'il
n'y a pas beaucoup d'étudiants qui le choisissent en premier. Et, parmi ceux
qui sont pris, ce n'est pas tout le monde pour qui c'était nécessairement le
premier choix. Je pense qu'on peut attribuer ça vraiment à l'attractibilité
pour... envers la médecine familiale pour les étudiants, notamment, avec tous
les éléments que je vous ai nommés tantôt. Là, c'est les restrictions de la
pratique. Il y a l'organisation des soins et l'organisation de la pratique qui
est assez complexe. Avec les PREM, les AMP, ça fait peur à nos nouveaux
étudiants qui veulent s'ouvrir les portes vers une carrière diversifiée qu'ils
vont pouvoir moduler au fil des années, et selon leurs intérêts, et ils se
heurtent à une perception d'un système qui est lourd et rigide et qui ne
correspond pas nécessairement à leurs valeurs pour leur carrière future.
• (11 h 30) •
M. Arseneau :
Et je ne veux pas mettre des mots dans votre bouche, mais, avec le projet de
loi qui y est déposé aujourd'hui, cette perception-là pourrait même être
exacerbée sur le plan... négativement.
Mme Blouin
(Victoria) : On craint effectivement que ce soient certaines
contraintes supplémentaires. Bien que
certains éléments soient... n'affectent pas directement, là, la perception des
étudiants, mais on craint, effectivement, là, que les contraintes, par
exemple, d'horaires puissent contribuer à cette perception de lourdeur de la
pratique par nos étudiants.
M. Arseneau :
Est-ce que c'est la question des horaires ou c'est la question de l'autonomie
professionnelle? J'imagine que, comme jeune
étudiant qui veut embrasser une nouvelle carrière, l'idée de pouvoir se
défoncer là-dedans puis de développer une pratique, sauver le monde...
Est-ce que de dire qu'on va être sous la tutelle plus importante encore du
gouvernement, c'est ce qui... c'est ce qui vous affecte ou c'est simplement une
gestion de rendez-vous?
Mme Blouin
(Victoria) : Sous toute réserve de ne pas avoir sondé directement nos
membres sur cette question, je supposerais
que c'est plutôt le fait que ça soit encadré et surveillé, qu'il y ait même
mention de sanctions, parfois, si on ne respecte pas les contraintes. Je
pense que c'est plus le contexte que les heures, nécessairement.
M. Arseneau :
Et, pour ce qui est de l'interdisciplinarité, vous voyez... vous l'avez
peut-être mentionné, mais j'aimerais que vous nous expliquiez comment vous
voyez, par exemple, le rôle avec les IPS, tout ça. Vous, ça fait partie, là, de
votre vision?
Mme Bisson-Gervais
(Vanessa) : Oui, bien, la pratique conjointe avec les IPS, c'est
quelque chose qu'on valorise. Il y a
effectivement des enjeux d'éducation médicale qui viennent... qui se présentent
aussi dans ce contexte-là, mais nos étudiants... On est un peu la
nouvelle vague, là, je dirais, depuis une dizaine d'années, où on est-ce qu'on est, je crois, plus ouverts à la pratique
multidisciplinaire parce qu'on reconnaît que ça va avoir un impact positif sur
notre pratique individuelle.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Je vais suspendre quelques instants pour que
nous puissions accueillir le prochain groupe. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 11 h 35)
(Reprise à 11 h 45)
Le Président (M. Provençal)
:
Nous reprenons. Je souhaite la
bienvenue aux représentants de la Fédération des médecins spécialistes du
Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé. Après quoi, nous procéderons à la période d'échanges avec les membres
de la commission. Je vous invite à vous présenter puis à débuter votre exposé.
À vous la parole.
Fédération des médecins
spécialistes du Québec (FMSQ)
M. Oliva
(Vincent) : Parfait.
Bonjour. M. le Président, Mmes et MM. les parlementaires, bonjour à tous,
bonjour à toutes. Je suis Dr Vincent Oliva, radiologiste d'intervention et
président de la Fédération des
médecins spécialistes du Québec. Je suis accompagné de Me Pierre-Luc
Desgagné, qui est directeur général de la fédération. Donc, je tiens à
remercier la commission pour son invitation.
Je vous rappelle que la FMSQ, c'est plus de
10 000 médecins spécialistes répartis en 59 spécialités de
toutes les disciplines médicales, chirurgicales, d'imagerie et de laboratoire.
Depuis deux ans, nous sommes à combattre la plus importante pandémie de
l'histoire moderne, et, depuis deux ans, les médecins spécialistes sont
présents dans tous les forums, dans toutes
les tribunes pour expliquer l'évolution de maladies. Depuis deux ans, on est
présents pour soigner nos patients. On est présents pour réorganiser les
soins et assurer un leadership avec les établissements de santé. On est tous
dans le même bateau : spécialistes, omnipraticiens, personnel infirmier et
autres professionnels de la santé. Nous ne
souhaitons pas nous immiscer dans le débat entourant la prise de rendez-vous
par les omnipraticiens, mais nous croyons fermement que la meilleure façon de
travailler avec les fédérations médicales reste la négociation, en
particulier en situation de crise, alors que personne d'entre nous ne compte
ses heures. Dans ce contexte de pandémie, il nous apparaît surprenant de se
retrouver aujourd'hui à débattre d'une telle initiative. En bon français, le
timing n'est pas idéal.
Aujourd'hui, je vous entretiendrai de trois
thèmes qui nous interpellent, soit l'accès aux renseignements personnels des
médecins, la gestion des informations en lien avec les effectifs médicaux et le
retour de certaines dispositions de ce qui a été appelé le projet de loi
n° 20.
D'abord, il m'apparaît important de vous
mentionner que l'accès est la première préoccupation des médecins que je
représente. Nous demeurons toujours ouverts à discuter et à trouver des
solutions visant l'accès aux soins. Dans un récent sondage conduit par la firme
Léger auprès de nos membres, c'est avant toute chose l'accès qui a été ciblé
comme un élément central dans les priorités de travail de la fédération. C'est
d'autant plus vrai avec l'avènement de la pandémie, tous les jours, les
médecins spécialistes qui sont disponibles 24 heures sur 24, et ce,
7 jours sur 7 pour veiller à la prise en charge des patients québécois et
leur prodiguer les soins requis.
Les médecins veulent travailler, ils veulent
opérer, ils veulent soigner. C'est dans ce contexte qu'on a pris connaissance
du projet de loi n° 11. On peut tous souscrire aux objectifs du
gouvernement en matière d'accès aux soins, nous faisons cause commune, mais on
peut se questionner sur les moyens suggérés, des moyens qui n'apparaissent pas
en phase avec ce que nous vivons actuellement, en pleine cinquième vague, et
qui peuvent laisser une impression de déphasage. Oui, il y a un problème
d'accès. On en est conscients, on veut le régler, mais on croit que la solution
ne passe pas par une approche légaliste, une espèce de camisole. Ça ne passe
pas par l'imposition de ratios aux médecins qui sont déjà débordés par la
paperasse, les suivis de laboratoires, l'absence de personnel, le manque
d'outils technologiques. Repenser la prise en charge pour favoriser l'accès,
c'est selon nous la voie à suivre, et on peut y arriver, notamment en
continuant de travailler sur la pertinence des actes médicaux.
À la fédération, nous avons réglé plusieurs
problèmes d'accès aux soins par la responsabilisation de groupes, par un effort et une prise en charge collective
plutôt qu'individuelle, par des solutions locales plutôt que du mur-à-mur.
Contrairement à certaines idées reçues, les médecins ne travaillent pas en vase
clos. Ils travaillent en collaboration avec les pharmaciens, les infirmières,
les physiothérapeutes, les technologues, pour ne nommer que ceux-là. Nous
suggérons que cette voie continue d'être celle à suivre, une voie faisant appel
au leadership médical et à la cogestion, une solution qui responsabilise les
médecins et les rend imputables. De nombreux exemples de cogestion dans nos
centres hospitaliers existent, et le tout fonctionne très bien.
Nous sommes également préoccupés par le niveau
d'information que souhaite obtenir le ministère de la Santé et des Services
sociaux dans le cadre de ce projet de loi. Dans la pratique, avec comme
objectif de mieux gérer les effectifs
médicaux, l'État se donnerait le droit d'accéder à l'ensemble des bases de
données de la Régie de l'assurance
maladie du Québec, pas seulement pour les médecins, mais
pour tous les professionnels rémunérés, optométristes, dentistes, sages-femmes,
etc.
Pour vous donner une idée, juste pour les
médecins spécialistes, c'est un amalgame de données comptant 40 millions
de lignes d'information auxquelles le ministère pourrait accéder immédiatement
si le projet de loi venait à être adopté. Il pourrait accéder aux noms des
médecins et à tous les renseignements personnels que détient la régie. Pour
nous, c'est difficilement acceptable.
Ce n'est pas pour cette raison et dans ce but
que la Loi sur l'assurance maladie a été adoptée et sanctionnée. Pour être bien
clair avec les parlementaires, les données dont on parle ici sont des données
de facturation. La seule raison pour laquelle la régie dispose de ces données,
c'est qu'elle doit rémunérer les médecins dans le cadre de leur travail. Ce
n'est pas simplement, par exemple, en regardant le nombre d'actes que pose un
médecin qu'on peut juger de sa performance.
Une telle approche ne permet pas d'apprécier les soins qui sont donnés aux
patients. La fédération, en somme, s'oppose à toute divulgation
d'informations personnelles ou nominatives concernant ses membres.
De plus, à l'heure où le gouvernement propose à
l'Assemblée nationale de revoir l'ensemble du cadre de gestion des
renseignements personnels dans le secteur de la santé dans un autre projet de
loi, le projet de loi n° 19, on s'interroge sur les raisons qui viennent
créer une exception parapluie dans le cadre du projet de loi n° 11.
D'une part, ce n'est pas l'objet du projet débattu aujourd'hui. D'autre part,
on touche à bien plus que simplement l'accès à la première ligne, on parle de
l'ensemble des données de la RAMQ.
• (11 h 50) •
En conclusion, M. le Président, il faut rappeler
que la fédération est toujours ouverte à discuter de mesures qui favorisent
l'accès aux soins de santé. Pendant la pandémie, nos membres ont été et sont
demeurés présents, attentionnés, disponibles, collaborateurs. Notre mission,
c'est de soigner nos concitoyens par temps clair comme par temps dur.
Par le passé, les gouvernements précédents, à
plus d'une demi-douzaine de reprises, ont eu tendance à utiliser l'Assemblée
nationale pour imposer des solutions; elles n'ont à peu près jamais donné de
résultats escomptés. Ce rappel historique me donne l'occasion de vous enjoindre
à la prudence, en particulier à l'égard de la protection des renseignements
personnels. Mais, du même souffle, je tiens à vous assurer que la fédération et
ses membres collaboreront de près à la bonification de l'accès aux soins. Nous
croyons cependant que le remède à certains maux du réseau se trouve dans des solutions locales et sur mesure plutôt que
par l'imposition de solutions du haut vers le bas.
Pour toutes ces raisons, la fédération émet de
sérieuses réserves sur l'actuel projet de loi et invite les parlementaires à la
prudence dans l'imposition de solutions en santé par le biais d'une loi. Nous
demeurons bien sûr disponibles pour répondre à vos questions. Merci.
Le
Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup pour
votre exposé. Nous allons débuter cet échange avec M. le ministre. Je
vous cède la parole, M. le ministre.
M.
Dubé : Alors, merci
beaucoup, M. le Président. Dr Oliva, M. Desgagné, merci beaucoup d'être là
aujourd'hui. Puis je suis d'accord avec vous que ce n'est pas facile de garder
un équilibre entre l'urgent et l'important. L'urgent, c'est la pandémie,
vous avez absolument raison. Mais, si on veut changer les choses, il faut
prendre, des fois, un petit peu de recul
puis de regarder aussi l'important. L'important, c'est ce qu'on est en train
d'essayer de faire, ça fait que merci beaucoup d'être là.
J'ai la prétention de penser que vous pouvez
apporter énormément à cette discussion-là. J'ai eu la chance de travailler avec
vous, là, depuis deux ans, avec vous puis vos collègues, puis on s'est toujours
entendus pour trouver des solutions, alors je suis certain que vous pouvez
apporter beaucoup de valeur à ce projet de loi là.
D'entrée de jeu, je vous dirais, Dr Oliva, qu'on
est ouverts aux améliorations du projet de loi. Il y a beaucoup de choses
là-dedans. Puis je vous entends sur des questions de protection de données, si
effectivement, lorsqu'on aura la possibilité
de regarder... quand on aura la possibilité de regarder le projet de loi qu'on
appelle article par article, on va tenir compte de vos commentaires dans
votre... pour s'assurer que nos objectifs d'avoir accès à de l'information ne sont pas contraires aux objectifs de protection
de données, de facturation, etc. C'est... Je suis très conscient de ce que
vous mentionnez comme point aujourd'hui, puis on fera les améliorations
nécessaires, on raffinera, au besoin.
Moi, Dr Oliva, je suis beaucoup projeté vers
l'avenir. Puis j'entendais les commentaires qu'on a eus, tout à l'heure, dans d'autres discussions, je pense que
tout le monde comprend bien maintenant que ce qu'on veut faire... puis,
encore une fois, je le dis, du raffinement, mais, dans le cas des médecins généralistes,
il faut bien comprendre quelle est leur
charge de travail en ce moment, avec les AMP, les autres fonctions qu'ils ont.
Ça, les gens, je pense, comprennent bien notre intention, maintenant,
de... C'est la première partie du projet de loi.
La deuxième... puis c'est pour ça que
j'entendais tantôt certains de mes collègues qui disaient : Oui, mais qu'est-ce que ça va apporter? Mais la journée
qu'on a bien défini la charge de travail puis est-ce qu'on doit augmenter
les médecins dans certaines régions aussi, bien, c'est sûr que la question de
la prise de rendez-vous puis de la façon dont on va rendre ces médecins-là
disponibles pour des gens qui auront maintenant soit un médecin de famille ou
qui auront accès à un médecin de famille par des guichets de pertinence ou à
d'autres professionnels, c'est sûr que la deuxième partie du projet de loi,
elle est là pour ça. Je pense qu'il ne faut pas l'oublier, que ce projet de loi
là, il n'est pas compliqué, il a deux
objectifs, c'est de bien connaître l'occupation de nos médecins pour être
capable de s'assurer que, s'il y a des changements à faire, on les fait,
notamment d'augmenter le nombre de médecins dans les régions mais aussi de
s'assurer que les Québécois peuvent leur avoir accès, notamment par des guichets
de pertinence ou par des rendez-vous. Ça fait que je veux juste mettre ça...
Sur
la question de la pertinence, vous avez été, Dr Oliva, vous et votre
association, puis même au moment où j'étais
au Trésor, les premiers à reconnaître l'importance de la pertinence dans les
actes. Et ça, je dois le dire aux Québécois qui nous écoutent, c'est un
gros enjeu de notre réseau de la santé. Puis vous le savez parce que vous avez
été celui qui m'a fait aussi évoluer, au
cours des derniers mois, des dernières années, en disant : La pertinence,
ce n'est pas juste une question de savoir si l'acte est à la bonne
rémunération, mais est-ce qu'on pourrait l'enlever, est-ce qu'on pourrait
peut-être mettre nos énergies ailleurs? Et je pense que cette ouverture
d'esprit là que vous avez, à la FMSQ, me
fait penser comment c'est important de revenir sur le guichet d'accès à la
pertinence. Puis je le répète, là, pour ceux qui nous écoutent
aujourd'hui, ce qui a été fait à Rimouski, on n'a pas besoin de projet de loi
pour ça. Il faut juste l'implanter ailleurs
puis donner les ressources pour que la pertinence puisse être faite comme vous
le faites à la FMSQ.
Sur l'accès à la
première ligne, bien, écoutez, moi, je vous dirais, Dr Oliva, puis je veux
vous entendre, c'est sûr, on l'a vu, qu'il y
a un enjeu, puis je voudrais vous entendre là-dessus, parce que, vous savez,
là, moi, j'aime beaucoup les données puis je pense que c'est ça que les
Québécois nous demandent, c'est d'essayer de trouver des solutions. Et, quand je regarde le nombre de rendez-vous qui
se prennent entre les omnis... un omni rencontre un patient, puis dire :
Bien là, je ne peux pas, moi, vous aider,
mais je vais vous référer à un spécialiste, donc aux gens de votre association,
et le temps que ça prend, des fois, c'est
très long, hein? Les gens disent : Malheureusement, dans certaines
spécialités — puis
là je pense à la dermatologie, je pense
qu'il y en a qui sont plus difficiles que d'autres — il
y a énormément de délais. Puis ça, ce n'est pas un enjeu de première
ligne, mais c'est un enjeu de deuxième ligne.
La question que
j'aimerais vous poser, puis je vous ai déjà entendu là-dessus, c'est :
Comment vous pensez qu'on peut s'assurer que, là... Puis moi, je regarde les
données, là, depuis un certain temps, parce qu'avant on n'avait pas ces
données-là, là on les a, puis ça nous permet de poser les bonnes questions.
Puis c'est ça que les Québécois s'attendent
de nous comme gestionnaires. Il y a 600 000, 700 000 rendez-vous
qui sont en attente entre les omnis et les spécialistes. C'est beaucoup,
ça, là, là. Il y a 700 000 rendez-vous qui sont en attente pour
différents professionnels. Parlez-moi de pertinence, parlez-moi comment vous,
vous voyez ça, qu'on pourrait améliorer ça, parce que ce n'est pas juste un enjeu de première ligne, là, c'est un
enjeu de collaboration entre les deux groupes. J'aimerais ça, vous entendre
là-dessus, s'il vous plaît.
M. Oliva
(Vincent) : Bien, d'abord, M. le Président, M. le ministre de la Santé,
donc c'est une question assez large que vous soulevez, mais effectivement, la
pertinence, je pense que c'est un enjeu sur lequel je me suis déjà exprimé, puis que vous soulevez encore
aujourd'hui, puis je pense que c'est important de mettre en lumière ce que
c'est, la pertinence.
Dans le fond, la
pertinence, c'est d'éliminer les activités médicales qui ont peu de valeur
ajoutée pour le patient. Et puis ça a l'air simple à dire, mais il y en a quand
même beaucoup. Disons, le piège là-dedans, c'est d'essayer de ne pas pointer
des doigts. Parce qu'il faut réaliser que c'est l'affaire de tous, hein? Il y a
d'abord les patients, qui lisent, qui
veulent des soins, qui veulent des examens. Les omnipraticiens sont impliqués
là-dedans, réfèrent à des spécialistes. Les spécialistes sont impliqués.
Ça fait qu'autrement dit tout le monde est impliqué dans ça, puis il faut
changer nos comportements et faire en sorte que le bon soin est donné par le
bon professionnel au bon patient au bon moment.
• (12 heures) •
Alors,
il y a beaucoup d'intersections entre la première et la deuxième ligne, hein?
Il y a... Les omnipraticiens, on sait qu'ils ont des activités
particulières, on sait qu'ils font aussi de l'hospitalisation, ça fait qu'ils
ne font pas juste de la prise en charge. Et, la même chose, les médecins
spécialistes, entre autres à l'urgence, entre autres quand ils voient des
patients qu'ils suivent, bien, ils en font aussi, disons, de la première ligne,
entre guillemets, parce qu'ils font du suivi de patients, dans le fond, qui
pourraient être pris en charge par la première ligne. Alors, il y a beaucoup d'intersections entre, si on veut, nos
implications, et ça, ça ouvre à la question de l'interdisciplinarité, parce
qu'effectivement il y a d'autres
ordres professionnels, d'autres professionnels de la santé qui peuvent prendre
en charge ces maladies-là, ces patients-là.
Donc,
quand vous dites qu'il y a beaucoup de patients qui attendent une consultation
en médecine spécialisée, vous avez absolument raison. Et puis, là, tu
sais, je ne veux pas lancer des chiffres en l'air, mais ce n'est pas juste au
Québec que ce problème-là existe, si on veut. Partout sur la planète, il y a
des publications qui disent qu'il y a 20 % à 30 % des soins qu'on ne
serait peut-être pas obligés de donner ou qu'on pourrait donner différemment.
Alors, ce que ça veut dire, c'est que, sur
les 600 000 ou 700 000 patients qui sont en
attente, ils n'ont pas nécessairement tous besoin d'être vus par un
médecin spécialiste. Alors, c'est cette espèce de filtre qu'il faut mettre en
place. Il faut essayer de raccourcir la boucle. Parce que, là, actuellement, il
y a des patients qui voient un médecin de famille, qui sont envoyés au médecin
spécialiste, puis le médecin spécialiste dit : Bien, je vais l'envoyer faire
de la physio, puis, après ça, il me revient
puis je te le renvoie. Alors, ça fait en sorte qu'il y a beaucoup d'arrêts,
dans le fond, dans un système où on pourrait raccourcir beaucoup cette boucle
et puis faire en sorte que l'omnipraticien, au lieu de le voir deux ou
trois fois, il le voit une fois.
Puis il y a un des
outils, vous savez, qui commence à être déployé, c'est le Conseil numérique,
qui est, en gros, une plateforme où
l'omnipraticien demande conseil au spécialiste puis il lui demande : Qu'est-ce
que je dois faire avec mon patient? Est-ce que ça vaut la peine que je
te l'envoie? Et, si la réponse est non, bien, ça raccourcit la boucle. Ça donne du feed-back aussi à
l'omnipraticien ou ça lui donne des outils pour continuer à le prendre en charge,
et tout le monde, disons, travaille de façon plus efficace, sans se renvoyer
les patients. Alors, c'est des outils comme ça qu'on est en train de mettre en
place, sur lesquels on pousse beaucoup.
Puis vous avez raison, M. le ministre, l'idée de
la pertinence, ce n'est pas nécessairement de revoir... Tu sais, on comprend
que, dans l'entente, il y a de l'argent qui est impliqué là-dedans, mais, si on
revient à l'essence même de la pertinence, c'est
d'arrêter de faire les choses qui ne sont pas utiles pour les patients. Puis
ça, il y en a beaucoup, puis on a l'intention de travailler avec vous sur ces
solutions-là.
M. Dubé : Bien, écoutez,
Dr Oliva, puis je suis content de vous entendre là-dessus. Puis c'est pour
ça que je soulève ce point-là, parce que, tout récemment, vous avez annoncé,
par exemple, une nouvelle façon de regarder comment la prise de rendez-vous
peut se faire en dermatologie, là. Vous vous souvenez, il y a quelques
semaines, il y a eu des annonces là-dessus. Puis je veux le mentionner aux
Québécois qui nous écoutent parce que ces nouvelles façons là de travailler
grâce au Conseil numérique, grâce aux nouveaux outils, il ne faut pas les
prendre à la légère. Puis j'entendais, tout à l'heure, des gens qui
disaient : Oui, mais, écoutez, c'est juste des rendez-vous électroniques.
Je m'excuse, là, on a accès à ces outils-là maintenant qu'on n'avait pas avant.
Et je veux donner cet exemple-là, que la deuxième partie du projet de loi
n° 11, elle traite de ça. Elle dit : Maintenant, on a accès à des
outils qu'on n'avait pas avant, et ces outils-là permettent, comme on l'a fait
durant la vaccination, aux Québécois d'interagir beaucoup plus facilement avec
leur professionnel. Alors, il faut avoir une ouverture d'esprit de dire :
Ces outils-là, ils sont disponibles. Et on l'a vu dans des régions, mais on l'a
vu aussi avec votre pratique professionnelle de spécialiste, qu'il faut être
ouvert à ces changements-là. Ce n'est pas juste une question d'électronique,
c'est une question d'avoir la ressource au
bon endroit, d'avoir accès aux données, je reviens, mais aussi d'avoir accès à
ces nouveaux systèmes-là. Et moi, je suis content de le voir parce que,
du côté des spécialistes, c'est ce qu'on appelle le CRDS, pour être capable
d'avoir, justement, le centre de rendez-vous avec des spécialistes. Vous le
dites, il y a des améliorations à faire de ce côté-là, et je pense que nos médecins
de famille vont être encore bien plus heureux de vous entendre que cette
boucle-là dont vous parlez, entre le médecin de famille et le spécialiste, si
elle se fait plus facilement grâce à ces outils-là, notamment, tout le monde va
être heureux, parce que c'est ça les Québécois qu'ils veulent. C'est qu'ils
veulent en avoir pour leur argent, parce que lorsqu'on prend... je m'excuse
d'être aussi direct que ça, là, mais la masse salariale des omnis et des
spécialistes, on parle de plusieurs milliards ensemble. Alors, ce qu'il faut
que les Québécois comprennent, c'est que notre objectif, ce n'est pas de
contrôler, mais c'est de mieux gérer tout ce bassin de spécialistes là,
incluant les médecins de famille qui ont une spécialité en médecine de famille.
Donc, je veux juste que... puis j'apprécie votre
commentaire, parce que... et le dernier, c'est que je pense que vous avez
montré, votre association, qu'il était possible de s'entendre avec la
négociation. Puis j'aimerais ça... vous avez dit que vous préférez la
négociation, mais, en même temps, j'aimerais rappeler que, pour être capable de
bien négocier, il faut avoir les données, et, en ce moment, malheureusement,
avec les omnis, il n'y en a pas, de ces données-là de façon régionale. Et
j'apprécie beaucoup le commentaire que vous avez fait, et c'est ça qu'on va
faire avec le projet de loi n° 11,
c'est d'amener cette granularité-là jusqu'à la région. Et merci beaucoup pour
votre intervention, Dr Oliva. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Il vous reste encore une minute, si vous voulez...
M. Dubé : Bien, si... je
pensais que vous me faisiez un signe que c'était terminé. Est-ce qu'il y a
quelque chose qu'on oublie, Dr Oliva? Je vais prendre le risque d'une question
ouverte, là. Je vous donnerais la minute qu'il me reste pour me dire est-ce
qu'il y a quelque chose qu'on oublie, qui est importante, là, pour les
prochains jours?
M. Oliva (Vincent) : Bien,
écoutez, de répéter que l'accès, c'est clair que c'est notre priorité, là,
surtout avec cette pandémie qui a fait gonfler les listes d'attente, je pense
qu'il va falloir s'y mettre. Et puis, effectivement, vous mentionniez, tantôt,
les changements qui sont mis en place. Et puis, par exemple, les consultations
numériques avec la dermatologie. Puis c'est un bon exemple qu'on peut faire les
choses différemment, qu'il ne faut pas avoir peur du changement. Ça fait que
ça, je pense que c'est très important. Ensuite, il faut qu'on fasse plus avec
l'argent qu'on a. Ça, c'est critique parce
que, dans le fond... je m'excuse d'utiliser des expressions peut-être un peu
communes, mais on... des fois, on dirait qu'on brûle du gaz à faire du
sur place. Autrement dit, on n'est pas assez efficace et ça, ça rejoint la
pertinence. Ça veut dire qu'il y a des activités, en ce moment, qu'on fait, qui
ne sont pas nécessaires. Il faut comprendre que ça prend la place d'autres
patients qui attendent. Alors, ça, il faut absolument s'y mettre rapidement. Puis nous, on est prêt à se mettre à table. Et
puis, on tend... on a tendu la main, aussi, aux omnipraticiens. On collabore
très bien avec les omnipraticiens. On a échangé avec eux nos projets de
pertinence. Et puis, on va continuer à travailler ensemble pour améliorer
l'accès aux Québécois.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
M. Dubé : Merci, Dr Oliva.
Merci, M. Desgagné. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Nous allons poursuivre avec le député de Nelligan. À vous.
M. Derraji : Merci, M. le
Président. Merci à vous deux d'être là en commission. Merci pour le rapport. Je
n'ai pas malheureusement le temps nécessaire, comme le ministre, pour parler
avec vous sur le système de santé. Mais, sûrement, on va avoir l'occasion
d'échanger avec vous au courant des prochains jours.
Ma première
question, c'est en lien avec votre commentaire dans la page 11. Vous
dites : «Le projet de loi dépasse donc largement l'objectif d'accès à un
médecin en première ligne dans le traitement qu'il souhaite réserver aux renseignements
détenus par la RAMQ.» Vous insistez beaucoup, beaucoup sur les renseignements
depuis le début.
J'ai deux questions. À
part la question du renseignement, moi, ce qui m'inquiète aujourd'hui, c'est la
liste d'attente. Un million de Québécois en attente d'un médecin de famille.
C'est du jamais vu au Québec. Vous êtes responsable de la deuxième ligne. On
sait très bien qu'un patient qui souffre d'une maladie chronique, qui n'a pas
vu son médecin de famille, c'est des coûts plus tard pour le réseau de la
santé, et notamment vous. Ce que vous avez devant
vous aujourd'hui, et j'en suis sûr et certain, vous avez analysé très bien le
projet de loi n° 11. Pensez-vous que c'est ça, la solution, c'est
cela, la solution, pour diminuer la liste d'attente en médecine de famille?
M. Oliva (Vincent) : Alors, M. le
Président, en fait, pour répondre à cette question-là, je pense qu'il faut d'abord que je mette les choses en perspective, il
faut que je vous dise que ce qui nous touche directement ou potentiellement
et ce qui va chercher une corde sensible, c'est effectivement l'accès aux
renseignements. Ça, je pense qu'on a été clairs là-dessus, on ne pense pas que
d'avoir accès aux renseignements de la RAMQ, c'est la solution parce que les données de facturation ne sont pas un bon
instrument de mesure pour mesurer, dans le fond, la productivité des médecins.
Donc, c'est sûr qu'il y a aussi toute la
question de la divulgation des renseignements personnels qui nous gêne beaucoup.
Ça fait que ça, c'est la première chose.
Ensuite, bien, vous me posez des questions sur
des mécanismes qui touchent directement les omnipraticiens et sur comment
améliorer l'accès à la première ligne. Alors, ça, je veux dire, ce que je peux
vous dire, c'est qu'il y a un continuum
entre la première ligne et nous et qu'on est prêts à travailler sur des
solutions. Autrement dit, j'ai dit tantôt qu'il y avait des intersections, puis c'est sûr que, si on peut aider
là-dedans puis faire en sorte que ça dégage du temps pour les
omnipraticiens à assumer leurs responsabilités, sachant que nous aussi on a une
liste d'attente qui est très élevée... je
pense que les listes d'attente sont élevées pour tout le monde, hein, l'accès
au réseau est bouchonné actuellement, puis ça a été empiré beaucoup par
la pandémie... Ça fait qu'on est prêts à discuter de ces solutions-là.
Cependant, le coeur de ce projet de loi là touche les omnipraticiens. Et puis
je réserverais là-dessus mes commentaires parce que, de la même façon, si
jamais un projet de loi nous touchait de plein fouet dans nos mécanismes,
disons, de prise de rendez-vous, je n'aimerais pas que les omnipraticiens
fassent des commentaires. Donc, autrement dit, ça les regarde plus directement
puis je préfère les laisser, disons, commenter sur ces aspects-là.
• (12 h 10) •
M. Derraji : Oh! en fait, je vais
juste préciser parce que, malheureusement, je n'ai pas beaucoup de temps. En
fait, je n'invente rien, c'est votre rapport : «Le projet de loi dépasse
donc largement l'objectif d'accès à un médecin en première ligne dans le traitement
qu'il souhaite...» Et corrigez-moi si je me trompe, mon interprétation, c'est que, probablement, vous pensez que c'est une
étape, la médecine de famille, probablement, ça serait un autre accès
plus tard à autre chose. Je formule juste l'hypothèse. Parce que vous dites que
ça touche les médecins de famille, que ce n'est pas vous, vous laissez ça aux
médecins de famille, mais, quand même, vous êtes là pour un projet de loi qui touche la médecine familiale. Il ne touche pas la
médecine des spécialistes, il touche la première ligne, ce projet de loi, et
vous êtes là pour s'exprimer dans ce projet de loi.
Donc, je tiens juste à comprendre. C'est quoi,
votre crainte aujourd'hui? Est-ce que votre crainte que ça va au-delà de juste
l'accès aux renseignements? Est-ce que vous voyez une menace pour vous
prochainement? Que, si le législateur ouvre cette porte, ça serait quelqu'un
d'autre demain?
M. Oliva (Vincent) : Bien, vous
savez, il y a à peu près 55 000 travailleurs de la santé, là. Ça fait
beaucoup de citoyens qui seraient touchés
par ce projet de loi là parce que ça donnerait l'accès aux ministres, aux
ministères, aux établissements de santé à des données très précises, des
données personnelles nominatives de tous ces citoyens-là. Ça fait que, pour moi, c'est un débat qui dépasse
l'objet du projet de loi n° 11. Ça devrait faire plutôt l'objet d'une
commission sur l'accès aux
renseignements. Donc, c'est ça qui nous inquiète, c'est la divulgation de ces
renseignements-là. Je pense qu'on doit être sensibles à ça, comme
société. Il faut être très prudents. On n'est pas dans une société de Big
Brother, hein, il ne faut pas s'approcher de ça.
M. Derraji : Bien, je pense que je
partage votre préoccupation parce que, même au début, je me suis posé la question : Est-ce que je suis dans une
commission de santé et services sociaux? Parce que je n'ai pas entendu le
continuum de soins, je n'ai pas entendu une insistance sur le travail
multidisciplinaire. On va me dire oui, ça fait partie, mais la crainte... Et je vous pose la question, il y a
1 million de Québécois, aujourd'hui, qui attendent des solutions, il y a
1 million de Québécois, vous êtes aussi et vous serez touchés par
ça parce qu'encore une fois je ne vous apprends rien un patient qui souffre
d'une maladie chronique, qui n'a pas vu son médecin de famille, et que le temps
joue contre lui, il se ramasse directement à l'urgence et se ramasse chez vous,
et vous souffrez déjà avec une liste d'attente très élevée, et c'est là ma
question : Est-ce qu'aujourd'hui, dans ce qu'on voit au niveau marketing,
sur la place publique, avec la refonte d'un
système de santé, et qu'on a dit aujourd'hui que c'est le premier pas avec le
projet de loi n° 11, pensez-vous vraiment qu'on est en train de parler du
continuum de services ou bien, comme vous l'avez très bien dit, ce projet
de loi doit être dans la case de l'accès aux renseignements et être étudié à
part quand, notre problème, c'est l'accès à 1 million de Québécois?
M. Oliva (Vincent) : Bien,
nous, ce qu'on souhaite et... c'est premièrement que le gouvernement et les
omnipraticiens s'entendent, s'assoient, puissent discuter, puis s'entendre sur
des solutions. Et puis il y a des solutions communes qui peuvent être
appliquées aux omnipraticiens comme à nous parce qu'il y a un continuum, puis
ces solutions-là, on a commencé à en discuter et on en discute et on va
continuer à les faire avancer parce que l'accès des patients aux soins de santé, c'est ça qui nous empêche de dormir, là. En
ce moment, là, on n'est pas capable d'y parvenir parce
que... et on en a parlé, c'est sûr que le système de santé n'était pas parfait
avant la pandémie, hein, puis... mais ça a
été drôlement empiré. Ça a mis en relief la fragilité de notre réseau. Alors,
maintenant, on n'est pas dans une période où on pense où il faut se
confronter, je pense qu'il faut qu'on se mette à table ensemble puis qu'on
travaille ensemble main dans la main puis on pense que c'est possible.
M. Derraji : Donc, vous venez
de dire que ce n'est pas le moment de se confronter. Est-ce que je dois
comprendre que le gouvernement et le ministre de la Santé est en confrontation
avec la FMOQ? Parce que c'est ce qu'ils ont dit ce matin. Ils ont dit qu'on
avait une entente. On était en train de négocier. Vous avez dit maintenant :
Il faut s'entendre. Donc, je vois beaucoup de mots de négociation, de
s'entendre, arriver à une entente, et non pas un projet de loi dans vos propos.
Donc, qu'est-ce que selon vous, selon votre interprétation, sans vous mettre
aucun mot dans la bouche parce qu'il s'agit
de la FMOQ, et vous n'êtes pas des gens qui parlent au nom de la FMOQ, mais
votre interprétation du climat général que le gouvernement n'utilise pas
la voie de l'entente, de la négociation, mais plutôt de la confrontation.
Est-ce que j'ai bien saisi vos propos?
M. Oliva (Vincent) : Ce que je
dis, c'est que, nous, en ce moment, avec tous les partenaires du réseau, on
collabore puis on trouve des solutions. Ce qu'on souhaite, c'est que ce soit la
voie qui soit privilégiée par le gouvernement pour discuter avec les
omnipraticiens, puis c'est ce que c'est ce qu'on souhaite.
M. Derraji : D'une autre façon,
pas le projet de loi, mais plutôt une entente claire qui, au bout de la ligne,
va avoir un impact sur le million de patients.
M. Oliva (Vincent) : Bien sûr
qu'on pense que la voie législative n'est pas la voie privilégiée.
M. Derraji : C'est très clair.
C'est très clair. Pensez-vous que le projet de loi fait fuir les jeunes
médecins et est-ce qu'il va y avoir de la difficulté à combler les besoins au
niveau de la première ligne?
M. Oliva (Vincent) : Bien,
écoutez encore une fois, moi, là-dessus, je ne suis pas le premier touché par
ça, mais ce que ce que j'observe, c'est ce que j'entends, puis les étudiants en
médecine, les candidats qui considèrent à prendre la médecine de famille ou la
médecine spécialisée, effectivement, hésitent, et je pense que c'est ce climat
de mésentente, je dirais, je pense à l'attractivité de la profession, alors ça,
je suis sensible à ça aussi. Je pense que si le climat et est plus à la discussion et à la collaboration, ça va
faciliter l'adhésion des candidats à la médecine de famille.
M. Derraji : Et on s'entend que
ce projet de loi ne règle pas la question de l'attractivité. Je vais revenir à
la question du continuum de services parce
que ça m'intéresse beaucoup. On a vu l'impact de la pandémie sur la deuxième
ligne. On l'a vu le délestage. On a vu les
niveaux de délestage 1, 2, 3, 4, 5. On a vu plein, plein, plein de plans
sur la table. Là, aujourd'hui, la situation, elle est très critique au niveau
de la première ligne. Bon...
Le
Président (M. Provençal)
: Je
suis obligé de vous interrompre parce que le temps est écoulé, malheureusement
pour vous.
M. Derraji : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, on poursuit avec le député de Rosemont.
M. Marissal : Oui, merci, M. le
Président. Bonjour, messieurs, merci de votre présentation, qui est claire. Vous dites dans la recommandation n° 1 que vous voulez le retrait de l'article 6. Mais moi, j'écoute le
ministre, là, ce matin. Puis, depuis un moment que je le pratique, ça a
l'air d'être pas mal le nerf de la guerre de son affaire. Ça fait que si on
retire l'article 6, est-ce qu'on ne devrait pas passer le projet de loi à
la déchiqueteuse? Parce que sinon ça perd un peu de son objet. Comment vous
voyez la concrétisation de ce projet de loi là sans sa colonne vertébrale?
M. Oliva (Vincent) : Bien, M.
le Président, pour répondre à cette question, je pense que c'est au ministre de
la Santé qu'il faut poser la question. Nous,
ce qu'on dit, c'est que cet article 6 vient toucher beaucoup de
professionnels de la santé, dont les médecins spécialistes, puis
évidemment, il nous inquiète parce qu'on pense que ça n'est pas une solution
pour améliorer l'accès. Donc ça, c'est l'essence de nos propos. Maintenant,
j'ai quand même entendu le ministre de la
Santé dire qu'il était ouvert à faire des accommodements ou des modifications.
Donc ça, ça m'encourage.
M. Marissal : ...nous aussi.
C'est clair qu'on est ici pour ça, idéalement, mais je vois mal comment on peut
concrétiser ce projet de loi puisque ça
passe par ça, là. La charnière de cette affaire-là, c'est la collecte
d'informations puis la diffusion pour être capable de suivre presque en
temps réel la pratique des médecins de famille dans ce cas-ci.
• (12 h 20) •
M. Oliva
(Vincent) : Bien, écoutez,
moi, je peux parler de ce que je connais, puis j'ai été chef de département
pendant huit ans avant d'arriver à la FMSQ, puis comme chef de département, je
m'assoyais avec mon DSP, je regardais les
listes de travail et je lui disais : Bien, voici comment on répartit nos
effectifs pour être sûr qu'il n'y a pas de trou puis que l'accès est complet. Donc, j'ai l'autre... Un des
aspects sur lesquels j'ai insisté ou que j'ai mentionnés, c'est la cogestion, O.K., je pense qu'il y a moyen de
responsabiliser les médecins, de faire en sorte qu'ils sont imputables dans un rôle de cogestion. Et je pense
que, ça, c'est beaucoup plus porteur, c'est beaucoup plus granulaire, c'est
beaucoup plus efficace que de légiférer et d'essayer d'obtenir des
renseignements, dans le fond, qui ne sont pas nécessairement un bon
instrument de mesure.
Donc, c'est ça,
l'essence de nos propos, c'est de s'éloigner un petit peu, premièrement, du
cadre légal, puis surtout de l'accès aux renseignements, qui ne nous donneront
pas nécessairement de solutions pratiques sur comment améliorer l'accès, puis
de plutôt travailler sur le leadership médical, l'imputabilité, la cogestion.
Ça prend, oui, les médecins connaissent bien
l'activité médicale. Et ces notions-là doivent être incorporées dans les
notions de gestion pour s'assurer que les services sont bien rendus. Ça prend
aussi un gestionnaire. C'est pour ça que ça s'appelle la cogestion. Puis
je l'ai vécu, puis ça fonctionne très bien. Alors, moi, j'insiste beaucoup plus
sur l'imputabilité des gens en poste et sur les qualités de leadership des
médecins.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Nous allons poursuivre avec le député des Îles de la
Madeleine.
M. Arseneau : Merci beaucoup, M. le Président. Messieurs, merci
de votre présentation, trois recommandations très, très claires. Je vais
continuer un peu dans le même sens que mon collègue de Rosemont sur
l'article 6 et sur l'information, les données. Le ministre a mentionné
tout à l'heure qu'il voulait bien négocier, mais que, pour cela, il avait
besoin d'avoir les données. Ce qui vaut pour la FMOQ va falloir nécessairement
pour la FMSQ et pour toutes les autres professions. C'est ce que je comprends.
C'est ce qui vous titille un peu, là, ou qui vous inquiète.
M. Oliva
(Vincent) : Bien, oui, absolument. C'est que... Ça nous inquiète parce
qu'avec cet article-là, ça fait en sorte qu'il y a
55 000 travailleurs de la santé qui vont être touchés. Ces gens-là
ont donné leur accord pour que leurs renseignements soient utilisés, pour
qu'ils soient rémunérés, mais pas pour les donner au réseau, pour les utiliser
dans un contexte qui n'est pas celui à l'origine qui a été décidé, puis
surtout, qui ne sera pas la bonne cible. On ne pense pas que ça va servir à
bonifier l'accès.
M. Arseneau :
Bien, ce qui nous amène un peu... Pardonnez-moi, on manque de temps, à votre
deuxième recommandation où vous appelez le gouvernement à respecter la lettre
et l'esprit de la Loi sur l'assurance maladie. Est-ce que vous voyez dans le
projet de loi quelque chose qui vous fait douter du fait que le gouvernement
respecte et la lettre et l'esprit de la loi?
M. Oliva
(Vincent) : Me Desgagné, voulez-vous, peut-être faire un...
M. Desgagné
(Pierre-Luc) : Peut-être un mot, M. le Président, et je salue le
député des Îles de la Madeleine en même temps, M. le Président, peut-être un
élément important ici, c'est que la Loi sur l'assurance maladie, elle, n'a pas
été adoptée... son objet ne visait pas à transmettre un ensemble de données
personnelles qui vont au-delà de l'administration de la rémunération des
médecins. Alors, ce qui nous inquiète, c'est que, par le projet de loi, ce qui
est proposé, c'est qu'on va au-delà de l'objet même de la Loi sur l'assurance
maladie, qui est une loi qui visait à créer une régie qui, elle, reçoit des
informations personnelles aux fins de rémunération. Et c'est ça qu'on exprime
dans le mémoire.
M. Arseneau :
Je comprends. J'aurais une petite dernière question si j'ai 30 secondes.
Vous mentionnez à plusieurs reprises que vous voulez comprendre à quelles fins
on veut utiliser les renseignements. Est-ce que vous avez davantage de réponses
au sortir de cette consultation...
M. Oliva
(Vincent) : Non, je n'en ai pas plus. Puis moi, je vais être très
prudent, là, je ne fais pas de procès d'intention, là. Tout ce qu'on dit, c'est
que, pour nous, ce n'est pas la bonne voie à adopter. Par ailleurs, on est
prêts à discuter, se mettre à table et puis faire tout ce qu'il faut pour
améliorer l'accès et collaborer avec nos collègues omnipraticiens puis avec le
gouvernement puis le ministère.
M. Arseneau :
Merci.
Le Président (M.
Provençal)
: Nous concluons cet échange
avec la députée d'Iberville.
Mme Samson :
Merci, M. le Président. Messieurs, vous avez été on ne peut plus clairs, et ça
soulève une question. Quand on entend toute la collaboration des différentes
fédérations qui est offerte, on se demande pourquoi ça ne marche pas mieux.
Comment se fait-il qu'avec toute la bonne volonté de tout le monde, celle du
ministre, qui ne veut pas contrôler les
agendas, dévoiler des données, la volonté des fédérations d'améliorer les soins
à la population et leur accès... On ne comprend pas que ça ne marche pas mieux.
Il me semble qu'une réunion de trois heures devrait régler ça, là. Mais
je vous remercie, messieurs, vous avez été très clairs. Merci beaucoup. Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Je suspends les
travaux pour... jusqu'aux affaires courantes, excusez-moi. Merci. Bon appétit à
tous.
(Suspension de la séance à 12 h 27)
(Reprise à 15 h 36)
Le Président (M. Provençal)
: Alors, bonjour à tous.
Bienvenue à la Commission de la santé
et des services sociaux.
La commission est
réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions
publiques sur le projet de loi n° 11, Loi visant à augmenter l'offre de
services de première ligne par les médecins omnipraticiens et à améliorer la
gestion de cette offre.
Cet après-midi, nous
entendrons par visioconférence les groupes suivants : le Collège des
médecins du Québec, l'Association des infirmières praticiennes spécialisées du
Québec et Me Paul Brunet, président-directeur général du Conseil de
la protection des malades.
Je souhaite la
bienvenue aux représentants du Collège des médecins du Québec. Je vous rappelle
que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous
invite à vous présenter et à débuter votre exposé. La parole est à vous.
Collège des médecins du Québec (CMQ)
M.
Gaudreault (Mauril) : Bonjour, je me nomme
Mauril Gaudreault, je suis président du Collège des médecins du Québec, et
je suis accompagné du Dr André Luyet, qui est directeur général du
collège.
Bonjour,
M. Provençal, et salutations à tous les membres de la Commission de la santé
et des services sociaux. Bonjour également, M. Dubé. Je vous remercie de
nous donner l'occasion de formuler publiquement les commentaires du
collège sur le projet de loi n° 11 portant sur les services de première
ligne par les médecins de famille.
L'accès des citoyens
à la première ligne de soins est d'une grande importance pour nous, tellement
que nous avons mis sur pied un chantier multipartite sur cet enjeu. Je vous en
parlerai un peu plus tout à l'heure.
Sur le projet de loi
n° 11, nous avons trois préoccupations : premièrement,
l'élargissement de la première ligne pour
englober un plus grand nombre de professionnels de la santé; deuxièmement, la
revalorisation de la profession de médecin de famille; et troisièmement,
le partage des données et le recours obligatoire au guichet d'accès.
Notre première
préoccupation touche la capacité et la volonté du gouvernement d'élargir les
ressources de la première ligne.
Actuellement, le médecin de famille est la porte d'entrée. Faute de médecin de
famille, des centaines de milliers de Québécois, vous le savez,
rivalisent d'astuce et de détermination pour accéder aux soins. Nous sommes convaincus que pour élargir ce grave défaut
d'accès il faille élargir la première ligne pour y inclure d'autres professionnels
de la santé. Par exemple, l'accès pour un
problème musculosquelettique pourrait être un physiothérapeute. Dans d'autres
cas, ce pourrait être une infirmière praticienne spécialisée.
Cette première ligne
doit par ailleurs inclure un accès fluide à la médecine spécialisée ainsi
qu'aux services diagnostics de laboratoire et d'imagerie. Ceci suppose donc des
outils technologiques appropriés. Nous en sommes convaincus, le réseau doit
pouvoir travailler de front plutôt qu'à la chaîne, travailler ensemble plutôt
qu'en silo, offrir des soins intégrés pour et avec les patients.
On retrouve les
médecins de famille par ailleurs partout dans le réseau de la santé : dans
les hôpitaux, en clinique privée, dans les GMF, dans les CHSLD, dans les
résidences pour personnes âgées, chez les patients pour offrir des soins à
domicile, dont des soins palliatifs, et dans les universités à enseigner à la
relève. Dans la majorité des régions du Québec, leur rôle est incontournable
pour le suivi des patients hospitalisés. Ces médecins de famille, ils sont
écartelés entre leurs patients et l'ensemble de leurs autres obligations.
Le
rôle du médecin de famille a évolué, il faut le reconnaître. Les pathologies
qu'il traite sont plus nombreuses chez des patients de plus en plus âgés, de
plus en plus malades, qui nécessitent davantage de soins et de suivi.
Par ailleurs, les médecins souhaitent
maintenant un meilleur équilibre entre leur vie professionnelle, personnelle,
le travail et leur engagement
communautaire. La quantité des actes, donc, et/ou la disponibilité ne peuvent
plus être considérées comme les seuls
vecteurs d'une médecine de qualité. Pour une refondation de la première ligne,
il faut d'abord changer la perception que l'on se fait du médecin de
famille.
• (15 h 40) •
Ce qui m'amène à
notre deuxième préoccupation sur la valorisation de cette profession médicale.
Je suis médecin de famille au Saguenay
depuis 50 ans. Ce fut pour moi un choix et une véritable vocation. Mais
aujourd'hui, avec ce que j'entends de
la bouche du gouvernement notamment, si j'étais en train de refaire ma
formation postdoctorale, j'y penserais à deux fois. Et je ne serais pas
le seul. Je serais très hésitant à m'impliquer dans cette discipline.
Les chiffres ne
mentent pas, on peine à recruter d'année en année le minimum requis de
candidats. On n'atteint pas la proportion de 55 % d'étudiants que nous
désirons qu'ils aillent en médecine de famille depuis 10 ans. D'entendre
le gouvernement dire qu'il a en main la liste des médecins qui ne font pas leur
part, qui n'ont pas 1 000 patients
ou qui ne sont pas assez disponibles, c'est une dévalorisation inacceptable de
cette profession et c'est une vision très réductrice du rôle du médecin
de famille, et ça, ça m'attriste énormément. Le Collège des médecins a donc bien hâte d'entendre les détails du plan du
gouvernement pour réintéresser les étudiants à la médecine de famille.
Notre troisième
préoccupation porte sur le partage des données et l'obligation de recourir au
guichet d'accès. Et là-dessus je laisserais le soin au Dr Luyet d'aborder
cette question.
M. Luyet
(André) : Merci, Dr Gaudreault. Le partage des renseignements est
l'une des pierres angulaires du projet de
loi. Le collège veut s'assurer que les informations partagées seront utilisées
avec toutes les précautions nécessaires et qu'elles ne seront pas détournées à des fins coercitives à l'endroit
des médecins. Le projet de loi n° 11 autoriserait en effet la Régie
de l'assurance maladie du Québec à communiquer certains renseignements pour la
planification des effectifs médicaux à un établissement de santé ou encore à un
département régional de médecine générale.
Actuellement, seuls les
renseignements portant sur la rémunération des médecins leur sont transmis par
la Régie de l'assurance maladie du Québec. Ces données n'incluant pas
d'information permettant la planification des effectifs médicaux, le projet de
loi élargit le type de renseignements transmis et les fins auxquelles ils
seront utilisés. Ces changements permettront-ils d'identifier des médecins?
Sur la question, maintenant, de l'obligation de
recourir au guichet d'accès, le collège l'estime trop restrictive et craint que
des patients en fassent les frais. Par exemple, un médecin de famille devrait
pouvoir assurer le suivi d'un membre de la famille de l'un de ses patients,
sinon ce dernier devra passer par le guichet, et rien n'assure qu'il pourra
être traité par le même médecin de famille. Le recours obligatoire au guichet
d'accès pourrait aussi brimer les populations vulnérables peu enclines à
s'inscrire sur cette plateforme, comme les patients sans médecin de famille aux
prises avec un problème de toxicomanie. Par ailleurs, certains médecins ayant
des pratiques particulières ou spécifiques à certaines populations, comme la
santé mentale, l'obligation d'inscription au guichet empêcherait un suivi
approprié.
Enfin, le projet de loi ne vise que les médecins
de famille, oubliant les patients dont le suivi médical plus longitudinal est
assuré par des médecins d'autres spécialités, comme la pédiatrie, la
psychiatrie, la gériatrie ou la médecine interne.
M. Gaudreault (Mauril) :
Merci, Dr Luyet. En terminant, quelques mots sur notre chantier sur
l'accès aux soins et à la cessation d'exercice. Ce chantier multipartite, qui
comprend des membres des fédérations médicales mais aussi du ministère de la
Santé, a pour mandat d'optimiser, un, l'accompagnement des médecins en vue de
leur cessation d'exercice et le suivi de leurs patients, deux, la contribution
des différents professionnels de la santé, entre autres pour le suivi des
patients orphelins, et, finalement, la communication entre les médecins et plus
largement entre les divers professionnels de la santé.
Et ce chantier, il repose sur certains grands
principes, d'abord la responsabilité sociale des médecins d'assurer des
services à la population dans le territoire qu'ils desservent, ensuite, les
moyens utilisés pour accroître l'accès à la première ligne ne doivent pas
opposer quantité et qualité des soins, et finalement il faut permettre au
patient d'avoir accès aux bons soins au bon moment par le bon professionnel.
Voilà. Le Collège des médecins souhaite que l'on
réinvente ensemble les soins de première ligne. Il offre ainsi toute sa
collaboration au gouvernement pour ce faire. Nous vous remercions de votre
attention et sommes prêts à entendre vos commentaires ou encore à répondre à
vos questions.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup pour votre présentation. La première
personne avec laquelle vous aurez un échange, c'est M. le ministre. Alors, M.
le ministre, je vous cède la parole.
M. Dubé : Oui, merci beaucoup, M. le
Président. Dr Gaudreault, je voudrais partager une petite information
personnelle avec vous et mes collègues députés pour vous souhaiter un bon
anniversaire. Alors, il y a des sources d'information, puis je suis certain que
mes collègues ici...
M. Derraji : Bien, il faut lui
chanter bonne fête, hein, en direct, hein?
Des voix : ...
M. Dubé : Bien, il faut lui chanter
bonne fête, Dr Gaudreault. Voilà.
M. Derraji : Hein, écoute, bonne
fête.
M. Dubé : Allez-y, allez-y.
Des voix : ...
M. Dubé : Alors, Dr Gaudreault,
très content, encore une fois, de pouvoir avoir cette discussion-là avec vous
et avec votre collègue. J'aimerais dire aux Québécois qui nous écoutent
aujourd'hui à quel point, depuis que j'ai eu la chance de travailler avec vous,
que vous avez démontré beaucoup d'ouverture à l'innovation. Vous êtes, avec
votre association, parmi ceux qui avez, entre autres avec la ministre qui m'a
précédé, Mme McCann... l'organisation qui a fait plus, entre autres, pour
les infirmières spécialisées, pour être capable d'avoir accès à ces
services-là. Et, lorsque vous parlez, entre autres, d'élargir le cadre des
professions pour être capable de mieux desservir la première ligne, je pense que vous avez énormément de
crédibilité, parce que c'est vous qui avez été, avec vos collègues, à
l'instigation de ça. Et on pourra
entendre un peu plus tard les infirmières spécialisées, mais je tenais à le
mentionner parce que vous avez beaucoup de crédibilité dans les recommandations
que vous apportez. Je voulais que les gens en soient conscients.
Maintenant, sur vos trois objectifs, puis un peu
ce que j'ai dit ce matin à la Fédération des médecins résidents, moi, je salue d'emblée les trois points que vous soulevez,
qui sont des suggestions, et j'aimerais en reprendre quelques-uns pour
peut-être préciser votre pensée.
Premièrement, pour la capacité d'élargir les
ressources, vous avez parlé des physiothérapeutes, vous avez parlé, par exemple, des IPS, puis je vais y
revenir, parce que vous avez dit : Écoutez, il faut arrêter d'avoir les
silos puis que les gens puissent plus travailler ensemble puis même
d'élargir à d'autres professions. J'aimerais vous entendre, justement,
sur la question des IPS. Parce qu'il y a eu les changements à la loi qui ont
été faits par ma prédécesseure, mais où est-ce qu'on en est rendus dans
l'application, selon vous, de l'utilisation des IPS dans la prise en charge? Où
croyez-vous qu'on en est rendus aujourd'hui?
M.
Gaudreault (Mauril) : Bien, écoutez, d'abord, merci pour vos
souhaits de bonne fête, là. Merci beaucoup. Bien, écoutez, moi, bien, vous le
savez, hein, j'ai démontré beaucoup d'ouverture, là, depuis trois ans,
beaucoup, vraiment. Puis c'est le collège, maintenant, ce n'est pas juste
Mauril Gaudreault, là, qui démontre cette ouverture-là, puis je pense que
c'est la communauté médicale tout entière qui a beaucoup progressé dans la
vision qu'elle a de l'exercice de la médecine. Et, comme j'ai dit souvent, ce
n'est pas juste le Collège des médecins ou la communauté médicale qui allons
faire en sorte d'améliorer le réseau et d'améliorer l'accès, c'est tous
ensemble. Donc, c'est pour ça que je parle de silos; tous ensemble, on va
devoir avoir une vision beaucoup plus globale que celle que nous avons eue
jusqu'à maintenant.
Et au niveau de la
première ligne, à mon avis, il faudra travailler à la réinventer et aller dans
une façon de faire beaucoup, beaucoup, beaucoup plus interdisciplinaire. On est
rendus là, le collège, mais aussi les autres disciplines, les autres
professionnels de la santé. Je ne pourrais pas vous dire exactement où ça en
est par rapport à la relation entre les médecins et les infirmières
praticiennes spécialisées. Je pense qu'elle est bonne. Mais, encore là, vous
avez fait allusion à la commission parlementaire, quand j'étais allé discuter
et présenter nos recommandations, alors que c'est Mme McCann qui vous
précédait, et j'avais dit à ce moment-là : Si les gens ne communiquent pas
ensemble, si les gens ne se parlent pas, ça ne marchera pas. Ça va être la même
chose pour l'ensemble des autres professionnels qui devront former équipe. On
parle d'une équipe, hein, je veux dire, le médecin de famille, pour moi, n'est
plus la seule porte d'entrée, n'est plus le seul joueur. C'est un joueur
d'équipe. C'est peut-être un joueur important dans l'équipe, mais autant que
les autres disciplines puis les autres professionnels. Et, à mon avis, comment
je vois ça, là...
• (15 h 50) •
M. Dubé : Très
bien, mais on... Oui.
M.
Gaudreault (Mauril) : Comment je vois ça,
c'est qu'un patient devrait pouvoir s'adresser à un membre de l'équipe et non
pas seulement au médecin de famille. Et, lorsque le membre de l'équipe, c'est
bien clair là-dessus, lorsque le membre de l'équipe, qu'il soit un
physiothérapeute, une infirmière praticienne spécialisée, a besoin d'un avis de
la médecine spécialisée, bien, pourrait y avoir accès sans passer par le
médecin de famille nécessairement, de même que l'accès aux plateaux techniques
sophistiqués.
M. Dubé : Mais
ça, Dr Gaudreault, là, ça ne prend pas un projet de loi pour faire ça, là.
Le projet de loi qu'on avait besoin, c'était d'augmenter la portée des actes
que pouvait faire une infirmière. Ça a été fait, mais ça n'a pas encore été
appliqué autant que ça aurait pu, j'aurai la chance d'en parler avec les IPS
qui viendront un peu plus tard, mais je voulais juste vous mentionner que c'est
un bel exemple. Nous, on est prêts à élargir le nombre de professions qui
peuvent, mais il faut qu'il y ait une volonté de tout le monde de travailler ensemble
et de donner à ces gens-là le plein exercice des nouveaux pouvoirs qu'ils ont.
Alors, je voulais juste le mentionner parce qu'encore une fois on est d'accord,
on n'a pas besoin d'un projet de loi pour que maintenant les IPS puissent
prendre ces appels-là. On est d'accord là-dessus.
M.
Gaudreault (Mauril) : Et, si vous pensez
qu'on peut avoir un leadership important là-dedans avec vous, je vous assure,
là, qu'on va être là pour y travailler.
M. Dubé : ...déjà,
parce que dans votre chantier, là, multipartite, là, je pense que c'est la
bonne façon de s'assurer que ce qui a été fait dans les dernières années puisse
maintenant être pratique.
Votre deuxième point,
j'y crois beaucoup. Puis vous avez entendu peut-être les différentes
associations qui sont venues ce matin, plus particulièrement les regroupements
de médecins résidents. Je veux parler du travail... de la conciliation du
travail-famille, qui est un point important pour vous. Moi, j'aimerais ça
savoir si... Puis je pense que vous l'avez noté, mais je voudrais l'entendre de
vous, qui êtes quelqu'un... et votre corporation, comme vous dites, qui êtes
innovant, on a changé le discours en tant que gouvernement au cours des
dernières années. Avant, la pression sur la prise en charge était sur un
individu, et, après des discussions puis des négociations qui, j'espère, vont
continuer avec les médecins de famille, on s'est bien rendu compte que cette
conciliation du travail-famille pouvait être améliorée si c'était, par exemple,
un bloc de médecins qui pouvait prendre charge plutôt qu'une seule personne.
J'aimerais vous entendre là-dessus parce que je n'ai peut-être pas eu le temps
de discuter, ce matin, avec les présentations. Mais vous, comme expérience et
comme responsable du Collège des médecins, pensez-vous que cet élargissement-là
d'aller vers le GMF comme responsable plutôt que le seul médecin peut nous
aider? J'aimerais vous entendre là-dessus.
M.
Gaudreault (Mauril) : Bien, je vais vous
dire ce que j'ai souvent dit depuis trois ans également, j'ai souvent parlé de
responsabilité sociale de la communauté médicale. Tu sais, j'aime ça, cette
introspection-là. Et les gens me demandaient qu'est-ce que je voulais dire. Je
leur disais : Allier une éthique de responsabilité individuelle entre un patient et son médecin ou son
professionnel de la santé, on est bon là-dedans, à une éthique de
responsabilité collective entre un groupe de professionnels, un groupe
de médecins et une population à desservir. Et on y revient aussi dans notre
mémoire. Et je pense que, ça, il faudra travailler tous ensemble là-dessus
également.
Oui, pour répondre à votre
question, c'est ma façon de voir cette responsabilité-là. Mais j'en profiterais
pour vous dire que la valorisation dont on parle, notre deuxième point, il
faudra tous ensemble y travailler. Parce que malheureusement, pour toutes
sortes de raisons, elle a été dévalorisée, cette profession, elle est moins
attrayante et moins intéressante. Et
Mme Catherine Lajoie, la présidente de la Fédération médicale étudiante du
Québec, a dû vous le dire ce matin, là, par rapport à un intérêt moins
grand des étudiants à y aller. Bien, on a comme responsabilité de société de
valoriser mieux cette profession-là pour la rendre plus attrayante pour les
étudiants.
M.
Dubé : Tout à fait. Puis c'est pour ça que je veux vous
entendre là-dessus parce que — vous
me direz, M. le Président, s'il me reste encore un peu de temps — je
l'ai vu, là, ce matin, puis je pense qu'on l'a bien noté, puis mes collègues députés ici... d'accord, il y a vraiment
un enjeu de perception. Puis, lorsque ça a été dit qu'on voulait augmenter
la charge de travail, puis que les médecins devaient prendre plus de patients,
puis tout ça, je pense qu'on est rendus plus loin que ça. Et c'est pour ça,
moi, que je veux clarifier cet équilibre-là de travail-famille dont vous avez
parlé, parce que, pour moi, il est beaucoup
plus facile pour un jeune médecin de penser qu'il peut travailler maintenant
dans une équipe et que cette équipe-là peut prendre l'engagement de mieux
servir la population sans nécessairement sentir toute la pression sur
lui ou sur elle. Et je pense que ça, c'est un changement majeur, puis je pense
qu'on doit continuer à pousser ça. Puis je vois de votre hochement de tête, là,
je ne veux pas vous dire quoi dire, mais, pour moi, c'est tellement important, et ça va nous permettre de revitaliser
la profession. Parce que si les gens sont plus heureux dans leur
environnement de travail parce qu'il y a un meilleur esprit d'équipe et que ces
gens-là se sentent épaulés par leurs collègues, quand il arrive un événement
dans leur vie ou, peu importe, bien, je pense que c'est tous ça qu'on veut, créer un meilleur environnement de travail,
mais ça, je pense qu'il faut changer cette perception-là qu'on est seulement
après la prise en charge. Alors, vous voulez réagir à ça?
M. Gaudreault (Mauril) : Bien, la prise en charge, ça ne fait pas souvent partie de
mon vocabulaire. C'est plus, je dirais, une
équipe qui s'occupe des soins à donner à un patient ou une patiente et non pas
une prise en charge. Il faut le faire avec le patient, donc, cette action-là de
lui donner les soins appropriés, donc... Mais c'est... Vous l'avez très bien
dit, là, je ne parle pas juste des nouveaux médecins. Les médecins, de plus en
plus, veulent faire partie d'une équipe et le faire en respect de tous
les autres professionnels, en respectant leur autonomie. Donc, je pense, c'est
ce travail-là qu'il faudra ensemble viser. Et c'est pour ça que je dis
ensemble, tous les acteurs, y compris... Le collège sera partie prenante là-dedans. Mais peut-être que... Notre directeur
général est aussi un médecin psychiatre, là, je suis sûr qu'il aurait
quelque chose à dire là-dessus, puis j'aimerais ça l'entendre.
M. Dubé : J'y viens, j'y viens, au
docteur psychiatre, parce que je veux parler des données, hein, je veux parler
des données. J'ai toujours dit, puis mes collègues de l'opposition avec qui
j'ai travaillé, là, dans les dernières années, sont d'accord qu'un projet de
loi, il est toujours perfectible. Puis je pense que c'est pour ça, d'ailleurs,
qu'on fait une commission parlementaire, on n'a pas la prétention d'avoir la
vérité. Ce n'est pas pour rien qu'on invite une... je ne sais pas, une
douzaine, une quinzaine de groupes à venir nous faire des commentaires.
Bon, sur le partage des données, vous l'avez
bien dit, on part d'une loi, qui est la loi, entre autres, de la Régie
d'assurance maladie, qui a été faite pour certains objectifs. Puis là je
voudrais entendre votre collègue, parce que qu'est-ce
qui pourrait... Je pense que les gens reconnaissent bien qu'on a un besoin...
D'ailleurs, la Commissaire à la santé, qui
vient de faire un rapport important, dit qu'on a besoin d'avoir les données.
Vous l'avez lu, le rapport de Mme Castonguay, qui dit :
Écoutez, pour bien gérer, il faut avoir les données, puis il nous manque de
données sur, justement, les médecins, comment on peut faire les choses.
Est-ce que
vous... Qu'est-ce qui pourrait être amélioré dans notre projet de loi qui
permettrait aux gestionnaires locaux, comme les DRMG, d'avoir l'information
nécessaire, tout en s'assurant, comme vous avez dit, là, qu'il n'y a pas
d'enjeu de recourir à... de s'assurer qu'on prend toutes les précautions
nécessaires pour que les informations soient pour les bons besoins? J'aimerais
peut-être ça vous entendre, parce que s'il y a des corrections à faire ou à
réduire la portée de l'article 6, qui a
un objectif très clair, c'est d'améliorer la gestion. Je voudrais vous entendre
peut-être là-dessus, si vous pensez qu'on peut améliorer
l'article 6.
M. Luyet (André) : Bien, peut-être
prendre juste une minute pour répondre à la question que me référait mon
président, là. C'est sûr que l'organisation des services, la réponse aux
besoins de santé de la population doit se réfléchir de plus en plus en termes
d'équipe, d'équipe élargie, d'équipe médicale, d'équipe de professionnels et
d'équipe aussi avec tous les organismes présents, là, qui offrent des services
communautaires, là, à la population. Alors,
si on parle d'une offre de service intégré, je pense qu'il faut mettre ensemble
tous ces acteurs-là qui ont un rôle important, important à jouer. Donc,
la première ligne, c'est beaucoup plus large, puis à l'intérieur de cette
première ligne-là, il y a des professionnels, puis à l'intérieur de ces
professionnels-là, il y a des médecins et des médecins qui ne doivent plus
travailler tout seuls, entre eux et en vase clos. Alors, c'est très clair qu'il
faut penser de manière beaucoup plus large la notion d'équipe et d'équipe
élargie, là, pour mettre à contribution tous les acteurs présents.
• (16 heures) •
Pour ce qui est des renseignements, c'est sûr
que ça... c'est... une bonne prise de décision implique qu'on ait des
renseignements puis des informations de qualité. Mais il y a certaines
précautions aussi à prendre, là, pour savoir quelles sont les informations qui
sont nécessaires et à quelles fins on va les utiliser et à quelles fins on ne
devrait pas les utiliser, parce que ça
pourrait avoir... ça pourrait atteindre des buts qu'on ne veut pas atteindre.
Et puis de quelle façon on va communiquer ces renseignements-là aussi,
parce qu'on est régi par certaines... un encadrement légal aussi pour fournir les renseignements. Donc, on peut les fournir, mais
il faut être bien certain qu'on respecte toutes les lois qui encadrent la
transmission de données là, notamment avec le Code des professions.
M. Dubé : Il va me manquer de temps,
mais je serais intéressé à avoir des suggestions sur comment ça peut être ramené à ces éléments-là que vous suggérez.
Mais là je manque de temps, je vais passer la parole à mon collègue.
Mais, si vous voulez, on peut continuer cette discussion.
M. Luyet (André) : En fait, il
faudrait préciser. Il faudrait préciser de quels renseignements on a besoin
pour prendre des décisions éclairées, là... l'offre de service.
M. Dubé : Excellent. Merci beaucoup,
docteur.
Le Président
(M. Provençal)
: Alors, messieurs, nous allons poursuivre nos
échanges avec le député de Nelligan.
M.
Derraji : Merci. Merci à
vous deux. J'ai aimé la question et surtout le dernier échange avec M. le
ministre, mais si vous voulez, vous pouvez continuer, parce que je suis
vraiment curieux sur votre interprétation.
M. Luyet (André) : Sur
l'interprétation du transfert de données?
M. Derraji : Oui, oui, absolument.
M. Luyet (André) : En fait, notre
préoccupation est surtout sur les précisions qu'on aimerait avoir concernant
quelles données seront requises et par quelles modalités elles seront
transmises pour s'assurer qu'on le fasse de façon correcte, et quelle
utilisation en sera faite. Donc, c'est plutôt un besoin d'éclaircissements ou
de précisions qui est souhaité à ce moment-ci.
M. Derraji : Et, selon vous, est-ce
que le projet de loi ne précise pas assez ou votre demande, c'est plus, nous,
en tant que législateurs, rendus à l'étape où on va étudier article par
article, votre demande... à ce que le législateur soit beaucoup plus clair,
avec des énoncés très clairs sur le comment, le pourquoi et c'est quoi la
donnée?
M. Luyet (André) : Oui.
M. Derraji : C'est clair, dans un
monde idéal. J'en suis sûr et certain que vous avez... vous connaissez très
bien votre pratique. Il y a une ligne rouge où vous dites : Ça, ce n'est
pas important. On ne peut pas aller là, et ça, c'est une donnée qu'on peut partager,
on n'a aucun problème. Vous êtes à l'aise à partager quelles données et par
rapport à quoi exactement?
M. Luyet (André) : Bien, en fait,
c'est surtout qu'est ce qu'on est autorisé à fournir comme données. Il y a des
données qui sont publiques, qu'on peut donner individuellement. Le numéro de
pratique, la spécialité du médecin. Mais il y a des données qu'on n'est pas
autorisés à donner sous forme de liste, alors... et il y a des données qu'on pourrait donner avec l'autorisation, qui
demandent le consentement aussi du médecin. C'est un peu l'encadrement
juridique qu'on a actuellement.
Si on veut décloisonner, si on veut ouvrir, ça,
il faut qu'on puisse pouvoir le faire avec les coudées franches, là, au plan
légal. Mais de quoi le ministre, de quoi la RAMQ a besoin pour la planification
des effectifs, par exemple, lorsqu'on
dit : On va avoir besoin de données qui vont être utilisées à planifier
les effectifs? Alors, dans ce contexte-là, quelles sont les données dont
vous avez besoin et comment on pourrait vous les transmettre?
Alors, à ce moment-ci, ce n'est pas une
fermeture ou un désir d'opacité. On veut collaborer, mais on veut savoir qu'est
ce que vous voulez avoir exactement, pour faire quelle utilisation et atteindre
quel but, et de quelle façon on peut vous les fournir en respect de tout
l'encadrement réglementaire et législatif qu'il y a.
M. Derraji : Je vous remercie
pour...
M. Gaudreault (Mauril) :
Et si je peux ajouter, à notre lecture du projet de loi, pour les patients, on
estime que le projet protège très bien leurs informations. Mais, pour nous,
cela est moins clair, en ce qui concerne les médecins.
C'est ça qu'on veut clarifier, baliser, et faire en sorte que vos attentes ou
les attentes du législateur soient plus claires.
M. Derraji : Je vous remercie, parce
que j'ai trouvé l'échange, vers la fin... de M. le ministre avec vous était
pertinent, constructif pour notre commission. Donc, si j'ai bien compris pour
vous, en tant que médecins, vous voulez que le législateur soit beaucoup plus
clair sur la qualité de la donnée, de l'information qu'il veut transmettre?
Est-ce que j'ai bien saisi votre demande?Mais par rapport à l'objectif
général, il est louable, pour vous, parce que cela
va permettre au législateur de planifier les effectifs en conséquence et
d'agir. Est-ce que j'ai bien saisi votre demande?
M. Luyet (André) : Oui.
M.
Derraji : Merci beaucoup, c'est très clair. Maintenant, ça va me
permettre de... Moi, j'en suis sûr et certain que le ministre il a déjà ouvert
la porte par rapport à l'étude du projet de loi. Je pense que rendu à cet
article on va avoir des échanges par rapport
aux choses à divulguer, les choses que vous ne voulez pas, surtout avoir la
qualité de données. Je partage ce
point avec M. le ministre parce que ça nous prend une bonne qualité de données
pour pouvoir agir. Mais j'invite le ministre, s'il a l'information, de la
dévoiler. Ça va aider plus les groupes à dire : Bien, écoutez, ça,
ça va vous aider davantage pour bien planifier les effectifs. Mais je trouve
que là, on a vraiment un bon point avec vous. Et je vous remercie pour cette
clarté.
Je vais revenir à
quelque chose que vous avez dit, docteur, sur la prise en charge. Je suis de
l'école de la prise en charge, et surtout de
nos jours, avec la rareté des médecins, on voit qu'il n'y a pas beaucoup de
gens qui s'inscrivent au niveau de la médecine familiale. Le rôle de
l'infirmière, de l'infirmière clinicienne, le rôle des adjointes aussi à
l'intérieur du GMF, le rôle du pharmacien, le rôle du pharmacien communautaire,
le rôle de toute la communauté, j'ai bien saisi la responsabilité sociale que
vous avez mentionnée. Mais vous ne pensez pas que mettre tout le fardeau sur le
GMF, en quelque sorte, ça va diluer l'impact pour le patient qui aimerait avoir
cette relation intime avec son médecin de famille? Ou bien, le contraire, la
prise en charge par une équipe, ça va améliorer la qualité des soins?
M. Gaudreault
(Mauril) : Je vais peut-être oser un début de réponse. Moi, je
suis persuadé que le patient... il y a des patients qui vont vouloir continuer
à voir leur médecin de famille, il y a d'autres patients qui vont être très à
l'aise puis très bien dans le cadre de cette relation avec un autre
professionnel du groupe de médecins de famille. Et le patient ou la patiente pourra toujours demander une discussion, un
entretien ou une visite au médecin qui fait partie de l'équipe. Mais de
façon... je suis sûr que de façon générale, les patients, exemple, vont être
très satisfaits d'être suivis par une infirmière
praticienne spécialisée, juste pour ne nommer qu'elle. Ça fait que ça va
dépendre des patients, évidemment, mais ça fait en sorte que ce n'est
pas le seul médecin de famille qui a la lourdeur de prendre charge, de prendre
soin de personnes. Vous aurez compris que prise en charge, je n'aime pas ça.
M. Derraji :
Oui, oui, oui. Non, je l'ai bien compris parce que dans une ancienne vie, on
m'a dit que ce mot, parfois, ne veut rien
dire. Mais vous étiez très clair et des propos justes, je vous remercie. Et
d'ailleurs, c'est le modèle de l'Ontario où on a l'obligation de
résultat de recevoir un appel 48 heures après un autre appel et
72 heures après l'appel d'avoir un contact avec un professionnel. Donc, si
c'est ça, la tendance, bonne chance. Bon recrutement par rapport à nos infirmières spécialisées,
pharmaciens. Bien, je pense, ça va élargir le soin. Le ministre, il vous écoute
aussi. Combien il me...
Le Président
(M. Provençal)
: Trois minutes.
M. Derraji :
Trois minutes. Je vais revenir à la liste.
Le Président (M.
Provençal)
: Je peux vous donner plus de
temps, si vous voulez.
M. Derraji :
Oui. Non, mais c'est vraiment... Vous avez... Non, mais votre dernière
question, elle était... Au fait, c'est ça qui a, surtout avec le...
M. Dubé :
Vos questions sont excellentes d'ailleurs.
M. Derraji :
On est là pour améliorer le projet de loi. Mais sérieux, c'est l'essence même
du projet de loi. Et avec le collège, ils étaient très, très, en fait, précis
par rapport à la qualité. C'est la première fois que j'entends un groupe parler
de ça. Et ça, c'est très bon pour nous et pour l'avancement des travaux. Je
vais revenir à la liste, 1 million de patients. Vous, vous êtes sur le
terrain, vous êtes en contact avec vos membres. On veut tous... on a tous un
objectif commun de réduire la liste. C'est quoi, selon vous, la meilleure approche
en termes de temps, effectifs, rareté, postpandémie? Comment on va y arriver?
M. Luyet
(André) : Bien, on va continuer dans le même sens que ce qu'on discute
depuis quelques minutes. Si on pense différemment l'offre de services,
peut-être que les citoyens ont besoin de services professionnels. Et si on
regarde l'ensemble des intervenants qui peuvent rendre ces services-là et quand
on pense d'une manière beaucoup plus interdisciplinaire, et multidisciplinaire,
puis intraprofessionnelle aussi, je pense qu'on vient de multiplier les
personnes qui peuvent intervenir auprès de la population.
Alors, si on pense
uniquement en termes de médecins et qu'on cherche uniquement à augmenter le
nombre, je pense que la réflexion va être incomplète. Il faut penser à comment on
s'organise entre nous en mettant à profit l'ensemble des compétences,
l'ensemble des formations de tous les soignants et d'intégrer tout ça pour
répondre aux besoins de santé de la population.
• (16 h 10) •
M. Derraji : C'est excellent. Ça a été déjà démontré dans des cas avec les
ordonnances collectives, où il y avait une délégation de pouvoirs. Certaines
infirmières cliniciennes, j'ai été témoin d'excellents résultats. Pensez-vous
qu'on en a assez, d'ordonnances collectives? Que le Québec, avec des
ordonnances collectives, surtout donner la possibilité aux IPS, aux infirmières
cliniciennes, de faire partie de la solution, vous vous êtes à l'aise par
rapport à ça?
M.
Luyet (André) : Bien, les ordonnances collectives, elles n'ont pas
encore porté tous leurs fruits, donc il faut aller encore plus loin dans celles
qui existent déjà et on pourrait définir d'autres également.
M. Derraji : C'est l'occasion, le ministre... Saisissez l'occasion, le ministre vous
écoute. Sur quel point on doit élargir les OC, les ordonnances
collectives?
M. Gaudreault (Mauril) : Moi, je veux revenir sur... si... Je pense qu'il
faut profiter des discussions concernant ce projet de loi et de toute
l'organisation de la première ligne, il faut en profiter pour déclarer — à mon
avis, on devrait faire ça, là, haut et fort — qu'il n'est pas nécessaire
que chaque Québécois ait un médecin de famille. Il est nécessaire que chaque
Québécois puisse être pris en charge par une équipe lorsque cela l'exige, mais
ce n'est pas nécessaire que tous les Québécois aient un médecin de famille.
Quand on parle qu'il y a 800 000 ou près de... plus de 1 million de Québécois qui n'ont pas de
médecin de famille, là-dedans, là, il y en a qui n'en ont pas besoin, de
médecins de famille. Ça fait que ce n'est pas vrai qu'on a tous besoin
d'un médecin de famille. On a besoin d'un professionnel de la santé quand c'est
nécessaire, donc d'une équipe.
M. Derraji :
Oui, au fait, c'est toute une rencontre avec vous aujourd'hui parce que vous
ramenez beaucoup de choses sur la table. Je vais retenir cette dernière
phrase : Les Québécois n'ont pas besoin d'un médecin de famille, mais ils
ont besoin d'une équipe et d'une prise en charge. Vous venez de dire «pris en
charge».
M. Luyet
(André) : Bien, il aurait dû dire, comme à son habitude, parler du
partenariat patient.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, nous allons poursuivre cet échange avec le député de Rosemont
pour les 3 min 47 s suivantes.
M. Marissal :
Merci, M. le Président. Dr Gaudreault, on ne pourra pas dire que vous êtes
corporatiste, en tout cas, vous qui avez été médecin de famille pendant
50 ans, puis vous venez de nous dire une vérité qui sort malheureusement
trop peu souvent de la bouche des gens qui devraient le dire : Ce n'est
pas vrai que tous les Québécois et les Québécoises ont besoin tout le temps
d'un médecin de famille 24/7. Je suis très heureux de vous l'entendre dire. Maintenant, j'ai très peu de
temps, mais j'ai trois questions. On va essayer de faire ça méthodiquement.
Vous dites qu'il faut
élargir la première ligne, que le médecin ne soit pas nécessairement toujours
la première entrée. C'est vrai. On parle des physios, ça se fait dans d'autres
pays, ça marche très bien, en particulier. Est-ce que le p. l. n° 11 fait ça ou est-ce qu'il ouvre une porte
efficace pour faire ça? Ensuite, protection des données, quels risques
voyez-vous à une ouverture que vous jugez peut-être trop grande des données de
la RAMQ? Puis ensuite une question un peu plus personnelle pour vous, Dr
Gaudreault : Vous avez été médecin de famille pendant 50 ans, vous l'avez dit, quel était le pourcentage de gens que
vous aviez en double, en triple, autrement dit médecin de famille qui a une
famille? Parce que, si je comprends bien, ce
ne sera plus nécessairement possible dans la mouture actuelle de la loi. Je
me tais, je vous laisse aller. Merci.
M. Gaudreault (Mauril) : Bien, je vais répondre à la première question
puis je vais laisser le Dr Luyet la deuxième. Pour finir, peut-être avec
votre troisième question. Écoutez-moi, moi, je pense que... excusez, mais
répétez vite, vite, vite votre première question, excusez.
M. Marissal : Est-ce que le p.l. n° 11, dans sa forme actuelle, fait ça, ouvrir la
première ligne multidisciplinaire?
M.
Gaudreault (Mauril) : Oui. Bien, je pense qu'il ne fait pas ça
au moment où on se parle, mais il prête... il nous donne l'occasion de faire
ça. C'est ça, c'est ça, c'est là-dessus qu'on veut insister, l'occasion de
refonder toute la première ligne, donc... Et on l'a dit, je ne veux pas être
trop long dans ma réponse puisque vous n'avez pas beaucoup de temps, mais on
est prêts à collaborer avec vous. Pour nous, c'est une ouverture à une
discussion plus large pour véritablement remodeler toute la première ligne.
M. Marissal :
C'est noté puis c'est bien noté. Allez-y.
M.
Gaudreault (Mauril) : Dr Luyet, deuxième question.
M. Luyet
(André) : Bien, ce qui est craint, c'est que des données qui
permettraient d'identifier des médecins et qui permettraient aussi de voir le
nombre de prises en charge et de mettre vraiment l'emphase sur un certain nombre de prises en charge pour déterminer une
qualité d'exercice d'un médecin, alors qu'on pense que l'accessibilité, c'est important, c'est un déterminant de la
qualité, mais il y a d'autres indicateurs aussi à prendre en compte là-dedans,
et ça nous inquiéterait, là, que d'y aller uniquement sur une volumétrie sans
voir la lourdeur, la complexité, d'autres dimensions de la qualité, de voir des
pratiques, des profils de pratique différents. Je pense à des médecins qui font
des soins palliatifs, je pense à des médecins qui font de la santé mentale, qui
ont des clientèles vulnérables, qui font des soins à domicile. Bien, c'est tous
des profils, là, où le 1 000 inscriptions ne rend pas vraiment compte
de toute la complexité puis de toutes les nuances, là, des... qu'on peut
rencontrer dans la pratique médicale.
M. Marissal : C'est clair. Merci.
M. Gaudreault (Mauril) : Et votre troisième question, M. Marissal.
Écoutez, dans ma pratique, j'ai déjà eu près de 3 000 patients, et il y avait là-dedans des familles
complètes, des familles... plusieurs familles d'un même quartier,
plusieurs familles d'un même village, et j'avais, j'ai déjà eu, en
reconnaissance, là, une grand-mère qui était venue avec sa fille et sa
petite-fille, et je les suivais toutes les trois.
M. Marissal : Merci de vos réponses.
Le Président (M. Provençal)
: La suite appartient au député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci beaucoup, M. le
Président. Merci, messieurs, pour votre présentation. J'aimerais tout d'abord
poser une question sur... enfin, sur ce que vous avez mentionné à l'égard du
partage des données en disant qu'il ne faudrait pas détourner cette nouvelle
initiative à des fins coercitives. Est-ce que vous pouvez préciser votre
crainte, vos inquiétudes à cet égard?
M. Luyet
(André) : Bien, si le nombre
d'inscriptions devient le seul critère pour évaluer la qualité
d'exercice d'un médecin ou sa contribution à desservir la population, c'est...
et qu'on identifie les médecins qui n'ont pas 1 000 inscriptions, par
exemple, et qu'on met des mesures pour les contraindre sans prendre en compte
d'autres variables, d'autres dimensions, c'est préoccupant. Donc, c'est des
données de groupe, des données qui renseignent sur, je dirais, l'intensité de
la disponibilité médicale dans un secteur, la couverture médicale dans un
secteur. Alors, pris dans cette optique-là, pour une planification des
effectifs, pour une meilleure répartition des effectifs, pour tenir compte des
pénuries puis des besoins de la population, oui. Mais, si c'est pour identifier
des individus, puis sur la base uniquement d'un nombre d'inscriptions, on met
en place des mesures de contrôle et des mesures punitives, ça ne nous
apparaîtrait pas être une bonne utilisation des données.
M. Arseneau : Est-ce que... Juste
pour être plus précis, est-ce que c'est la raison pour laquelle vous demandez
de baliser, de mieux baliser ou est-ce que c'est deux volets, c'est-à-dire
qu'on doit d'une part baliser pour des questions, là, d'informations
nominatives et ainsi de suite, pour la protection de la vie privée, par
exemple, puis, parallèlement, il faut aussi non seulement baliser les données,
mais baliser l'utilisation des données qu'on aura obtenues? Est-ce que c'est le
même enjeu ou c'est deux enjeux séparés?
M. Luyet (André) : Non. Non, c'est
deux enjeux différents.
M. Arseneau : D'accord.
M. Luyet (André) : D'abord,
qu'est-ce qu'on a besoin d'avoir comme données pour faire le travail qu'on
décide... qu'on veut faire, là, en termes de planification des effectifs, en
termes de l'application de certaines lois. Et le ministère a besoin d'avoir de
l'information. Alors, de quelle information il a besoin? Parce qu'on ne
transférera pas tous les dossiers professionnels en bloc au ministère, puis ce
ne serait pas pertinent de le faire, ce ne serait pas utile de le faire puis ce
seraient des... beaucoup trop d'informations par rapport aux besoins présentés,
là.
M. Arseneau : Donc, si je comprends
bien, il y a un double balisage qu'il faut faire sur le type de données et sur
l'utilisation des données.
Alors, je vais passer à une autre question,
parce qu'on manque un peu de temps. Ma question s'adresse au docteur
Gaudreault. Vous parlez du guichet d'accès qui pourrait s'ouvrir à d'autres
professions. Ça me semble une excellente idée, ça va dans le sens des
propositions qu'on a déposées la semaine dernière. Mais est-ce qu'il n'y a pas,
comment dire, des conditions à réunir préalablement? Est-ce que c'est aussi
simple que ça d'ouvrir le guichet à d'autres professions? Et il me semble
avoir... qu'il y ait d'autres éléments à régler pour favoriser l'élargissement
de la première ligne.
• (16 h 20) •
M. Gaudreault (Mauril) :
Bien oui, il va falloir former les équipes, hein? On parle d'équipes, on parle
de travail d'équipe, et il va falloir les former, les équipes, évidemment. Tu
sais, il y en a actuellement, là, mais il va falloir mettre plus d'accent
là-dessus pour que les différents membres d'une équipe, que le guichet d'accès
puisse leur donner un accès à toutes les personnes de l'équipe et non pas
seulement aux médecins de famille, je répète... oui, mais il va falloir
travailler au préalable là-dessus, là. Et on travaillera, bien sûr, avec vous
sur toute la construction de cette première ligne que nous désirons faire.
M. Arseneau : Donc, c'est cette
recommandation-là, ce n'est pas... évidemment pas pour l'amélioration du projet
de loi n° 11. Ce serait dans une démarche en parallèle a posteriori.
M. Gaudreault
(Mauril) : Bien, il faut en profiter pour peut-être...
peut-être profiter de ce projet de loi pour vraiment, vraiment, vraiment
construire une nouvelle première ligne puis une nouvelle façon de la voir. Peut
être que ça ne prend pas un projet loi, comme M. Dubé le disait tantôt,
mais ça prend une volonté.
M. Arseneau : Merci beaucoup.
Le
Président (M. Provençal)
: Merci
beaucoup pour votre contribution aux travaux de cette commission. Je suspends
les travaux quelques instants afin qu'on puisse accueillir le prochain groupe.
M. Dubé :
M. le Président?
Le Président
(M. Provençal)
: Oui,
excusez.
M. Dubé :
Est-ce qu'on pourrait... je pense j'ai senti de la part de mes collègues, là,
un besoin de remercier pour la participation qu'on vient d'avoir. Je trouve que
vous avez un apport excessivement important à ce que les Québécois recherchent,
c'est de trouver un service de qualité, comme ils ont pu avoir de vous depuis
plusieurs années. Merci beaucoup pour votre présentation, docteur. Merci
beaucoup.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci.
(Suspension de la séance à
16 h 21)
(Reprise à 16 h 29)
Le Président
(M. Provençal)
: Alors,
je souhaite la bienvenue aux représentantes de l'Association des infirmières
praticiennes spécialisées du Québec.
Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons
à la période d'échanges avec les membres de la commission. Je vous invite à
vous présenter et à commencer votre exposé. À vous la parole.
Association des infirmières praticiennes spécialisées du
Québec (AIPSQ)
Mme Laliberté (Christine) : Merci.
Merci beaucoup, M. Provençal, M. le ministre Dubé, l'ensemble des députés
membres de la commission, de nous laisser la
chance de nous exprimer aujourd'hui. Mon nom est Christine Laliberté, je suis infirmière dans le réseau de la santé
depuis plus de 30 ans, infirmière praticienne spécialisée en soins de
première ligne depuis 2009, et je
suis présidente de l'Association des infirmières praticiennes spécialisées du
Québec, l'AIPSQ.
Alors, je suis en
compagnie de ma collègue Isabelle Levasseur, infirmière praticienne en soins de
première ligne et vice-présidente de l'association, qui est présente avec moi
aujourd'hui pour répondre aux questions et selon les besoins.
• (16 h 30) •
Alors, l'association
est un organisme à but non lucratif, sans visées syndicales corporatives, qui
représente plus de 800 infirmières
praticiennes membres pour chacune des cinq classes de spécialités au Québec,
donc néonatalogie, première ligne,
soins aux adultes, santé mentale et soins pédiatriques. On retrouve les
infirmières praticiennes, notamment en première ligne dans les GMF, CLSC
et autres endroits de la première ligne, aux soins à domicile, dans les CHSLD,
mais aussi en centres hospitaliers sur des étages spécialisés, en cliniques
externes, aux soins intensifs, et parfois comme consultante aux urgences, parmi
les milieux où on peut les retracer, les retrouver.
Les infirmières
praticiennes veulent contribuer à la solution, mais, tout comme les médecins,
ne sont pas l'unique solution. Notre collègue de la FMEQ l'a bien nommé ce
matin, le médecin doit cesser d'être l'acteur principal, et les Québécois
doivent connaître davantage ce que chaque ressource professionnelle peut leur
apporter. Le projet de loi n° 11 vise à intégrer des
solutions pour améliorer l'accessibilité aux médecins de famille et mieux comprendre l'offre régionale. L'AIPSQ l'abordera
sous l'angle de solutions complémentaires qui permettent de décentraliser
les soins vers les médecins de famille pour les diriger vers un ensemble de
professionnels. Le médecin fait partie du groupe,
et on ne doit plus réfléchir en termes d'aider le médecin, mais bien d'aider le
patient, qui est notre partenaire dans ses
soins, mais aussi le spécialiste de sa propre condition de santé. Il est
impératif qu'on mette de l'avant l'expertise et les forces de chaque
membre de l'équipe, que ce soit l'infirmière clinicienne, les infirmières
praticiennes, les physios, médecins, pharmaciens et autres.
Et pour faciliter ce
processus, chacun doit occuper totalement son champ d'exercice, et on doit
mobiliser ensemble nos compétences. Alors
qu'un physiothérapeute prend en charge une personne qui a une blessure à la
cheville, le médecin ou l'infirmière
praticienne ou sa collègue infirmière clinicienne peuvent donner un accès à
d'autres patients, et c'est des actions comme ça qui vont faire que, dès
maintenant, on est capable de laisser de la place pour prendre de nouvelles
personnes et assurer un suivi.
L'association a
identifié des zones de travail qui embourbent les horaires de nos collègues
médecins, qui dédoublent les services ou qui créent de l'attente pour accéder à
un rendez-vous. Alors qu'on cherche des solutions, il y a déjà des projets tels que celui mentionné à Rimouski, ce matin,
SABSA, mais aussi Archimède, un projet clinique d'avant-garde qui est au
Québec depuis 2017 qui met l'accent sur des trajectoires de soins qui
répartissent l'accès aux services en fonction de la raison de consultation.
Étant responsable du projet, il me ferait plaisir, M. le ministre, d'en parler avec vous au besoin. Le projet est très
discret sur la place publique. Il dénote beaucoup d'intérêt, par contre,
dans les milieux où, justement, il y a des vides de services actuellement.
Nos recommandations sont donc un reflet des
enjeux qu'on pourrait rapidement régler pour favoriser l'accès, entre autres, aux médecins de famille, mais à
l'ensemble du groupe professionnel. Alors, premièrement, les inscriptions.
Actuellement, le travail des infirmières praticiennes
n'est pas visible, car les inscriptions sont uniquement faites aux médecins. On
ne connaît pas exactement le nombre de patients suivis par l'infirmière
praticienne et la vulnérabilité de sa
clientèle. Une inscription à son nom permettrait d'obtenir cette information,
mais aussi à l'infirmière praticienne d'inscrire des nouveaux patients à
son nom si jamais la cohorte du médecin qui travaille avec elle était complète.
Comme l'ont mentionné certains, on ne peut pas se fier uniquement sur
l'infirmière praticienne pour désengorger le système de santé, mais si chacun
d'entre nous fait une action dans ce sens, ça pourrait rapidement modifier l'accessibilité. Actuellement, même si les IPS
posent des diagnostics depuis janvier 2021, tous les patients qui présentent
une vulnérabilité doivent passer par le médecin pour avoir un code d'identification
à la vulnérabilité et ça encombre des plages de rendez-vous non nécessaires
chez le médecin.
Au-delà des
inscriptions, une imputabilité de groupe est essentielle, comme l'a dit
M. Gaudreault. Actuellement, lorsqu'il
y a un départ, que ce soit pour une retraite, un congé prolongé, en raison de
contraintes, entre autres associées au cadre GMF, ça devient difficile
de donner accès à ces patients parce que ça donne l'impression que le médecin
et le GMF sont moins performants. D'où la nécessité d'une souplesse dans les
indicateurs du cadre GMF qui encourage au travail de collaboration en équipe.
Et l'association pourrait contribuer aux réflexions qui seront faites sur le
sujet.
De plus, au départ d'un médecin, l'infirmière
praticienne perd sa clientèle déjà en suivi depuis plusieurs années, et
celle-ci se retrouve au guichet d'accès à un médecin de famille. Ajoutant à ça
qu'un patient désinscrit perd les codes de vulnérabilité, par exemple, liés à
un diabète ou à un trouble de dépression majeure. Ça exige une visite médicale
dans le but de les remettre et ça amène des visites inutiles. Les codes
devraient être permanents lorsque c'est approprié. Bien que les inscriptions ne
soient pas au nom des infirmières praticiennes, les activités qu'elles font sont
enregistrées à la RAMQ manuellement par l'infirmière praticienne ou une
secrétaire, et ça pourrait aller plus rapidement si ça migrait directement par
les dossiers médicaux électroniques, tout comme pour les médecins.
L'inscription non faite par une infirmière praticienne fait en sorte que ce
n'est pas possible de prendre en charge un bébé naissant pour lequel on fait
déjà le suivi de la maman, du papa et de la fratrie. Les enfants se retrouvent
au guichet d'accès, perdant la continuité familiale, et c'est un apport
important pour la population de le maintenir.
Deuxièmement, la répartition territoriale. Le
but du projet de loi étant de réduire la liste d'accès ou d'attente au guichet
d'accès, plutôt, il devient important d'éviter que les cliniques de quartier
ferment, car, dans ce cas, c'est encore la population qui paie le prix en se
retrouvant au guichet d'accès. Dans le cas d'un mandat lié au projet Archimède,
plusieurs cliniques dans cette situation nous contactent. Le risque, c'est
qu'au moment où le nombre de médecins diminue vers quatre ou cinq individus,
ils n'arrivent plus à soutenir les heures d'ouverture pour remplir leurs
obligations. Ils se voient obligés de fermer la clinique. Et parfois les
médecins vont quitter la région, prendre une retraite prématurée pour éviter de
recommencer ailleurs, et c'est donc de nombreux patients qui se retrouvent au
guichet d'accès. Pour éviter cette situation, la répartition des médecins, des
infirmières praticiennes et des autres professionnels de la santé devrait être
équilibrée pour éviter les fermetures de ces cliniques, et, à ce moment-là...
sinon, on assiste à un va-et-vient constant des patients au guichet d'accès.
Troisièmement, les trajectoires de service. Nous
encourageons la création d'un modèle qui permette que la personne consulte le
bon intervenant selon sa raison de consultation. Ainsi, dans le projet
Archimède, c'est la raison de consultation
qui détermine qui verra la personne. Ça peut être une infirmière clinicienne,
une praticienne, un médecin, un
physio. L'équipe est large. Donc, un bébé qui a un rhume peut être vu par
l'infirmière clinicienne, qui va solliciter, par exemple, l'infirmière
praticienne seulement si nécessaire. L'infirmière praticienne va assurer la
couverture du sans rendez-vous seule,
sans présence médicale, ne dédoublant pas leur présence. Le physio voit la
personne qui est blessée, par exemple, à l'épaule, libérant une plage de
sans rendez-vous pour un autre patient. Les heures d'ouverture sont partagées entre les praticiennes et les médecins,
ce qui rend possible de maintenir l'accessibilité 68 heures par semaine,
7 jours sur 7. C'est un équivalent seulement de trois médecins temps
complet qui sont présents, étant donné la garde obstétricale, en centre de réadaptation ou en santé mentale. Et c'est
donc un partage d'équipe qui permet de maintenir l'offre de service.
Afin que le modèle puisse se poursuive, il faut aussi penser, dans la prise de
rendez-vous via le système de prise de rendez-vous informatisé, qui a une
répartition intelligente par raison de consultation, et il doit aussi éviter de
focusser sur le débit dans les rendez-vous, qui ne permettent pas de prendre le
temps d'écouter nos patients s'exprimer et de tenir compte de leur réalité.
Et quatrièmement, la santé mentale. Nous
complétons nos suggestions en vous parlant de la part des IPS dans l'évaluation
des troubles mentaux. En pleine pandémie, au moment où l'accès à ce service est
limité, les IPS pourraient contribuer davantage. Les IPS en santé mentale
pourraient offrir de la psychothérapie, si on facilite le processus pour obtenir le permis de
psychothérapeute, et s'ajouteraient aux psychologues et autres sources
professionnelles. Un lien avec un psychiatre pour chaque IPS en santé
mentale faciliterait l'accès. Les IPS des autres classes de spécialité ne
peuvent pas du tout évaluer les troubles mentaux et amorcer un plan de
traitement sans qu'un médecin, une infirmière praticienne ou un psychiatre voie
les patients. Donc, en moyenne, les infirmières praticiennes de la première
ligne ont au moins 35 % de la clientèle qui présentent des troubles
mentaux, voire jusqu'à 70 %, 80 %. Modifier un règlement qui date de
2014 et accompagner les infirmières praticiennes dans cette voie permettrait à
nouveau de libérer des plages horaires des médecins.
Finalement, il y a un autre moyen libérer les
médecins, c'est de permettre aux infirmières praticiennes de référer
directement aux médecins spécialistes. Actuellement, on doit passer par le
centre de répartition des demandes de
service, et le médecin est obligé de signer en tout temps, et c'est lui qui
reçoit les résultats du patient. Ça amène une lourdeur à sa tâche et un
risque dans la continuité de perdre le service. Et finalement un lien de
consultation entre les cinq classes de
spécialités d'IPS pourrait aussi réduire les possibles références aux médecins
spécialistes. Et finalement, si ces dernières pouvaient admettre et
libérer les patients en centre hospitalier, on favoriserait l'accès pour les personnes en attente de chirurgie en première ligne qui
doivent consulter pour leurs douleurs en attendant d'avoir ladite chirurgie.
Donc, M. le ministre,
MM., Mmes les députés, merci de ce temps qui nous a été accordé. Et nous sommes
prêtes à échanger avec vous. Merci.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci beaucoup pour
votre exposé. Alors nous débutons avec M. le ministre.
M. Dubé :
Alors, écoutez, Mme Laliberté, Mme Levasseur, je pense que les
Québécois qui nous écoutent aujourd'hui doivent être très contents de votre
performance parce que vous avez été, premièrement, très rapides. J'essayais de
prendre des notes, mais je n'étais pas capable de tout écrire. Alors, va falloir
que je réécoute votre présentation puis que je réalise, en fait, votre mémoire.
Mais je dois vous dire que c'est toute une performance que vous avez donnée
aujourd'hui.
Et j'aimerais en
profiter peut-être pour saluer non seulement le travail que vous faites, mais
peut-être la vision que vous avez eue de pousser la participation des IPS,
comme on les appelle depuis quelques années. Je pense qu'on... On a rencontré juste avant, je ne sais pas si vous avez eu la
chance de l'écouter, mais le Dr Gaudreault, qui a été un fidèle
supporteur de votre avancée, je vais le dire comme ça, et je pense qu'il doit
être content aussi, lui, de vous avoir...
d'avoir poussé pour l'élargissement, justement, de vos fonctions au cours des
dernières années. Je tiens à vous dire que
c'est tellement rafraîchissant de vous entendre et de voir comment vous
participez de plus en plus à la première ligne.
• (16 h 40) •
Juste pour... encore,
pour les gens qui nous écoutent, là, je trouve ça non seulement rassurant, mais
dites-moi un petit peu, moi, je connais un peu certaines statistiques, mais il
y en a combien... il y avait combien d'IPS il y a quelques années versus
aujourd'hui? Puis il s'en forme combien, là? Juste pour que les gens voient ça
dans la perspective, là, de si on avait une baguette magique, là, on en
voudrait combien, hein? Alors j'aimerais ça que vous me donniez un peu ces
statistiques-là pour que les gens voient. Moi, je connais un peu les chiffres,
mais j'aimerais ça que les gens vous entendent un peu là-dessus.
Mme Laliberté
(Christine) : Oui, en fait, si on recule à deux ou trois ans, il y
avait environ 500 à 600 infirmières praticiennes spécialisées et
certifiées. Aujourd'hui, on est plus de 800 certifiées, et, bien,
l'objectif est d'aller à 2 000, et on espère pouvoir collaborer à un plus
grand nombre que de 2 000 parce qu'on a beaucoup à apporter à la
population. Ça nous fait plaisir de contribuer justement à faire modifier la
façon dont le système de santé fonctionne. Donc, merci, merci pour votre remerciement
aussi à ce niveau-là.
M. Dubé :
C'est parce que je pense que c'est important. Il s'en forme combien à peu près,
à ce moment-là, d'infirmières annuellement?
Mme Laliberté (Christine) : Bien, dépendant des universités — Isabelle,
tu peux m'accompagner là-dedans — mais
il y a sûrement au-delà de 150 à 200 infirmières praticiennes en
formation. On a un enjeu de milieux de stages qui est à travailler. Mais
actuellement on est environ autour de 150 à 200 par année.
M. Dubé :
C'était une question un peu biaisée, là, que je demandais parce que je sais
qu'il faut augmenter le nombre puis je vais en parler justement avec
Mme McCann, qui est très sensible, elle aussi, à avoir participé à ça. Donc, dans le plan de la santé, je pense que
d'élargir le nombre de formations, d'agrandir le nombre d'IPS en formation,
ça va être très important pour justement accomplir plus de ce côté-là.
J'aimerais que vous
me parliez un peu d'Archimède parce que je n'ai pas eu la chance... Un peu de
la même façon, on a parlé beaucoup de
Rimouski et comment se faisait l'accès à la pertinence, hein, puis je ne veux
pas... mais j'aimerais ça que vous nous parlez un peu du projet
Archimède. Et puis comment peut servir de ça justement pour mieux utiliser les
autres professionnels, dont vous, pour enlever de la charge aux médecins?
Parlez-moi un peu du projet Archimède, s'il vous plaît.
Mme Laliberté
(Christine) : Bien, en fait, je vous dirais qu'aujourd'hui je suis
extrêmement satisfaite d'entendre là où on s'en va avec le réseau de la santé.
Archimède est là depuis 2017, et la façon de voir est vraiment la bonne ressource, au bon moment, pour la bonne
raison de consultation. Ce qui veut dire que, quand le patient appelle à
la clinique, par exemple, là, pendant la période COVID, ça a été plus difficile
parce qu'on avait vraiment réparti les raisons de consultation, et tout ce que
nos collègues infirmières cliniciennes pouvaient.
M. Dubé :
Je vous arrête, je vous arrête, pas par impolitesse, je m'en excuse, là...
Mme Laliberté
(Christine) : Oui, allez-y.
M. Dubé :
...mais je veux bien comprendre qui fait la première étape, le premier triage.
Est-ce que c'est l'infirmière praticienne? C'est ça que je veux, comprendre un
peu comment ça fonctionne.
Mme Laliberté
(Christine) : Oui.
M. Dubé :
Parce que pendant que vous êtes là, j'aimerais ça que les Québécois voient la
différence de votre implication dans le
projet, quand je dis votre implication des IPS dans ce processus-là de triage
dont on parle. Allez-y. Je vais essayer de ne pas vous interrompre.
Mme Laliberté
(Christine) : Oui. En fait, dans les premiers mois du projet
Archimède, on a évalué les raisons de consultation par des appels aux patients
avec le secrétariat et on a créé une liste de raisons de consultation. Et dès l'appel au secrétariat, nos secrétaires
sont hyperimportantes pour nous dans le processus, le patient va seulement
nommer la raison de consultation, et elle va
l'orienter vers le bon professionnel donc, par exemple, au sans rendez-vous,
justement, si on aura par exemple des
otites, des sinusites, des choses comme ça, nos collègues infirmières
cliniciennes vont amorcer les évaluations. Si elles peuvent libérer le
patient, elles vont le libérer. Elles travaillent avec le droit de prescripteur, avec les ordonnances collectives au
maximum de ce qu'on est capable de faire. Nous, les infirmières praticiennes, on va être dédiées plus aux
douleurs abdominales, étourdissements, les raisons de consultation plus
difficiles et on va compléter les interventions
ensemble au besoin. Il n'y a jamais de médecins, infirmières praticiennes
simultanément au sans rendez-vous ensemble parce qu'il y a peu de
médecins dans la clinique, et donc on se partage le travail en équipe. Pour les
suivis, les médecins ont des patients désignés.
Les infirmières
praticiennes ont aussi leurs patients désignés. Même si ce n'est pas inscrit
comme on en parlait beaucoup aujourd'hui, ils sont quand même désignés à
l'infirmière praticienne par la clinique, et le patient va prendre rendez-vous
avec l'un ou l'autre, mais aussi avec les autres ressources de l'équipe. Ça
pourrait être pour un suivi de diabète, une infirmière clinicienne. Ça pourrait
être pour quelque chose de psychosocial avec la travailleuse sociale. Des
douleurs, avec notre physiothérapeute. Et on se partage comme ça les suivis
pour essayer de rendre l'accès, par, entre autres, un médecin ou une infirmière
praticienne, plus accessible pour d'autres patients que ma collègue, par
exemple, infirmière clinicienne n'aurait pas le confort de gérer. Alors, c'est
vraiment comme ça qu'on va déterminer nos fonctions dans le... dans notre
équipe.
M. Dubé :
Puis, je voudrais vous demander... Bien, vous me surveillerez, M. le Président,
parce que je ne veux pas dépasser mon temps, là, mais je voudrais vous demander
est-ce que vous avez vu, justement, une baisse de l'activité du côté des
médecins de famille en faisant cette approche-là qui permet de se concentrer.
Mme Laliberté
(Christine) : Ils n'ont plus de patients dans l'horaire, M. Dubé.
Non, non, blague à part, pas du tout. C'est que les médecins voient d'autres
patients plus complexes pendant que, nous, on fait ça. Puis des fois ils voient
aussi des patients moins complexes. Ça dépend de l'accessibilité de notre équipe.
Donc, ça peut arriver que ça soit moins lourd, mais ils sont quand même là pour
s'assurer que, dans la complexité, ils soient disponibles. Puis on travaille
vraiment en collaboration selon nos forces et nos compétences. Il n'y a plus de
hiérarchie dans notre équipe. C'est la consultation puis le besoin du patient
qui est priorisé.
M. Dubé :
Parce que... J'y reviendrai parce qu'on va rencontrer les gens de Rimouski un
peu plus tard cette semaine, mais qui nous
disaient... Ils avaient une statistique qui était intéressante, puis ils
disaient que ça a enlevé 50 % de la charge aux médecins parce que,
justement, on a pu rediriger. Dans votre cas, êtes-vous capable de quantifier
ça?
Mme Laliberté
(Christine) : En fait, c'est qu'on n'enlève pas la charge parce qu'ils
en voient autant, mais ils en voient
d'autres. Donc, on peut en voir plus ensemble, mais en le faisant d'une façon
différente, on peut prendre plus en charge de patients par notre équipe
à ce moment-là.
M. Dubé :
Et ce principe-là d'Archimède, là, je ne veux pas faire des jeux de mots, il
est applicable où en ce moment, à part votre clinique?
Mme Laliberté
(Christine) : Il était à l'étude à notre clinique, mais je vous dirais
que toutes les équipes qui s'y intéressent sont les petites cliniques ou à
risque de fermeture, où il y a moins de services, comme par exemple les Îles de
la Madeleine, à Beauport, à Portneuf, dans les Laurentides. Il y a différents
endroits.
M. Dubé :
Ça doit intéresser le député...
Mme Laliberté
(Christine) : Oui, M. Arseneau.
M. Dubé :
Oui, d'accord. Bien, écoutez, on y reviendra parce que je veux profiter aussi
de votre présence. Vous m'avez dit quelque
chose qui m'a vraiment frappé, c'est l'inscription aux médecins versus ce que
vous suggérez, là, d'avoir l'inscription, je vais dire, directement à
l'IPS, là, si je le disais comme ça. On n'a pas besoin de projet de loi pour
faire ça.
Mme Laliberté
(Christine) : Bien, en fait, il y a sûrement des modifications que je
ne connais pas qui doivent être faites, mais ce serait une possibilité. Puis on
parlait beaucoup aujourd'hui d'imputabilité de groupe. J'ai beaucoup aimé la
façon dont M. Gaudreault l'a nommée, là, dans le fond. Mais je pense que
ce qui est important, c'est que la personne
ait quelqu'un à qui s'identifier dans un groupe pour qu'elle voie toujours la
même personne le plus possible. Le sentiment
d'appartenance va être plus important, mais l'imputabilité de groupe pour qu'au
départ de quelqu'un on prenne le relève ensuite.
M. Dubé :
O.K. Parce que je vais manquer de temps, là, mais celle-là était importante.
Puis on pourra avoir la chance.
Mme Laliberté
(Christine) : Allez-y. Oui.
M. Dubé : Mais je voudrais que mes collègues puissent... J'apprécie les signes de
main de mon collègue d'en face qui va m'aider. Est-ce que... Est-ce
qu'il me reste encore un peu de temps?
Le Président
(M. Provençal)
: ...
M. Dubé :
Combien?
Le Président
(M. Provençal)
: Six minutes.
M. Dubé :
Six minutes. Mon Dieu! Ça va bien.
Une voix :
...
M. Dubé : Oui. Bien oui. Voilà! Juste revenir là-dessus, là, sur la question de
l'inscription, là, ce qu'on discutait. Quand je vous dis qu'on n'a pas besoin
d'un projet de loi pour avoir cette inscription-là, vous avez vu, puis je l'ai
expliqué un petit peu plus tôt ce matin, que, comme gouvernement, on a fait des
changements pour tenir compte de la réalité en disant : On ne pousse plus
justement que ça soit l'inscription d'un médecin, mais du GMF ou de la
clinique. Donc, on veut se sortir de ce carcan-là, que ce n'est pas
nécessairement un médecin que ça prend, et c'est ça qu'on dit carrément dans le
projet de loi, qu'on veut justement élargir.
Donc, vous pensez que
vous n'auriez aucun problème avec ça, qu'une infirmière, une IPS puisse faire
partie de cette approche-là, où on est inscrit, le GMF. Mais là je veux faire
la différence. Pourquoi vous dites que c'est le nom de la personne qui doit
être juste? Je veux juste... Parce que quand on va avoir à discuter l'article
par article, mes collègues vont me demander, est-ce qu'on se contente du GMF ou
de la clinique? Tiens, je vais le dire comme ça parce que ce n'est pas juste
les GMF qu'on vise, c'est des cliniques, c'est même des CLSC, c'est tout ça. Est-ce
que pour vous, le nom de la personne est important? Parce que je ne veux pas me
retrouver avec le même problème du médecin, transférer ça à une infirmière.
Vous me suivez? J'aimerais ça vous entendre là-dessus, là, s'il vous plaît.
Mme Laliberté
(Christine) : Bien, en fait, ce qui serait le mieux, c'est une
inscription au groupe complet, au groupe complet. Puis à l'intérieur du
groupe...
M. Dubé :
Groupe, vous dites le GMF où la clinique, là. C'est ça que vous dites?
Mme Laliberté
(Christine) : Exactement. Dans notre groupe, on devrait identifier,
pour chaque patient, des intervenants pour donner un sentiment d'appartenance
plutôt que de façon...
M. Dubé :
Ça va être dans notre projet de loi, ça. Ça, ça peut...
Mme Laliberté
(Christine) : Non, je ne pense pas.
M. Dubé :
Ça se fait par voie de régie interne du groupe. Parce que je comprends bien
votre point. Je veux juste être...
• (16 h 50) •
Mme Laliberté
(Christine) : Je penserais. Là, je me fie sur vous, là, pour savoir
s'il faut que ça soit dans la loi, pas dans la loi.
M. Dubé :
Non, non, ça, on va en discuter entre nous autres, là, mais...
Mme Laliberté
(Christine) : Tout à fait.
M. Dubé :
Puis je ne pense pas, d'ailleurs, mais, en tout cas... mais continuez. Je
voulais juste comprendre pourquoi vous
trouvez que c'est important que le patient ait le nom du professionnel, qu'il
soit médecin ou... Je voulais juste vous entendre là-dessus. Donc, c'est
plus pour la qualité du service.
Mme Laliberté
(Christine) : Oui, le suivi, la continuité, le sentiment
d'appartenance, on les connaît, on sait, ils viennent nous voir pour différents
problèmes. On est capable... on a quand même un historique de son histoire de santé, puis on peut l'accompagner beaucoup mieux
que si on voit toujours des gens qu'on ne connaît pas. Pour eux aussi,
c'est une rassurance, je croirais.
M. Dubé : Je
laisserais mes collègues peut-être... Oh, je vois que vous avez une question,
Mme Levasseur, je vous laisse aller.
Mme Levasseur (Isabelle) : Oui, je
voulais juste dire qu'en fait, aussi, ce qui va être important, c'est que
l'inscription au groupe ne limite pas non plus les infirmières praticiennes à
prendre ou à accepter plus de patients. Parce
qu'actuellement, ce qu'on voit, c'est que l'inscription se fait au nom d'un
médecin de famille, et, si l'infirmière praticienne est capable
d'absorber plus de patients, malheureusement, elle s'en voit brimer parce que
les médecins de famille ont la crainte, en fait, d'un départ d'une infirmière
praticienne et de se retrouver, entre guillemets, avec ces patients-là. Donc,
ça va venir... dans le fond, l'inscription au groupe va venir un peu diminuer
cette crainte-là, mais ça va être important de ne pas... de s'assurer que ça ne
soit pas limité, en fait, parce qu'on voit dans plusieurs endroits que c'est ce
qui arrive actuellement.
M. Dubé : Et on pourra regarder,
puis vous aller suivre la commission, parce que quand on va arriver à l'article
par article, s'il fallait faire certaines modifications, puis là je donne
l'exemple de la loi de la Régie de l'assurance
maladie sur la nomination, bien, on le fera parce que si ça fait partie des
suggestions que vous faites, qui, basées sur votre présentation, aujourd'hui,
peut faire une grande différence. On va être très ouvert à ça, je vais vous
dire.
Parlez-moi de la répartition territoriale.
Est-ce qu'il me reste encore du temps? Oui.
Le Président (M. Provençal)
: Oui, deux...
M. Dubé : Deux minutes. Répartition
territoriale. Vous avez dit quelque chose, là, qui m'a fait titiller un peu,
là, c'est d'éviter les fermetures des petites cliniques. Parlez-moi de ça un
peu parce que, lorsque, par exemple, des médecins prennent leur retraite, etc.,
dans des régions où il y a moins de... Parlez-moi un peu de ça, comment le
travail de l'IPS peut faire une différence? Ça, ça m'intéresse beaucoup.
Mme Laliberté (Christine) : Bien, en
fait, c'est que, dans ces cliniques-là... C'est un peu ce qui est arrivé au GMF
Saint-Vallier où est situé Archimède. Notre clinique était à risque de
fermeture. On a proposé au gouvernement un
essai de ce modèle. Donc, ces cliniques-là, dans le fond, quand elles
deviennent insuffisantes pour remplir les obligations, par exemple, d'heures d'ouverture, pourraient
avoir des infirmières praticiennes, mais aussi d'autres personnes, un peu comme
dans le modèle Archimède, sans être toutes le même nombre, pour pouvoir assurer
la survie de la clinique. Et on peut aussi faire une équité dans la
répartition des médecins dans le territoire, justement, pour éviter les
fermetures. Parce qu'on l'a vu dans le passé, des cliniques ont été fermées, et
des médecins sont allés dans des grosses cliniques, puis on n'a rien pu faire. C'est ce qu'on voudrait éviter, parce que
tous ces patients-là s'en vont au guichet. Alors, on a quand même un
aller-retour de patients vers le guichet, qui ne sont jamais les mêmes, mais
qui vont toujours finir par se ramasser là parce qu'il n'y a plus personne pour
s'occuper d'eux. Alors, si on maintenait toutes ces cliniques-là en place avec
de l'aide dans une équipe interprofessionnelle, le patient pourrait rester là,
et on irait en chercher d'autres aussi au guichet.
M. Dubé : On va creuser ça un peu
parce que ça, c'est important. Parce qu'on a entendu tellement de petites
cliniques qui ont dû fermer, et il y a des gens qui ont perdu leur médecin de
famille, on va dire comme ça, là, mais... O.K., bon, bien, parfait. Est-ce que
ça va, M. le Président?
Le Président (M. Provençal)
: Oui.
M.
Dubé : Encore une fois, si
je n'ai pas l'occasion de vous remercier, je vais le faire tout de suite. Merci
beaucoup pour votre participation. Très apprécié.
Le Président (M. Provençal)
: Nous allons poursuivre avec le député de Nelligan.
M.
Derraji : Merci, M. le
Président. Et moi-même, je tiens à vous dire : Merci pour votre
présentation. Merci pour le rapport.
J'ai plein de questions, mais je vais commencer
par le triage. Je suis très convaincu du rôle des IPS. Je peux dire que vous
jouez un rôle extrêmement important. Je l'ai même moi-même vu sur le terrain.
Donc, j'espère qu'on va avoir des IPS un peu partout. Ça, ça va être une autre
demande qu'on peut formuler au ministre pour qu'il réactive le tout. Je sais,
tout à l'heure, il a parlé de la baguette magique, mais on va le pousser pour
avoir cette baguette parce qu'on a besoin d'IPS un peu partout.
Maintenant, au niveau du triage. Vous, parce que
c'est la question primordiale, si on est là aujourd'hui... on a 1 million... il y a un changement de
mentalité pour les patients qui sont en attente d'un médecin de famille. Là,
ils vont appeler le GMF, vont appeler la clinique, ils vont appeler leur
CLSC, donc s'attendre. Qui va faire le triage? Et ce que vous êtes sûres et certaines qu'au niveau du triage ce n'est pas là
où il y a le problème? Ça veut dire que, quelqu'un qui peut, excusez-moi
le terme, «dispatcher» un peu par la suite le patient au bon professionnel...
Mme Laliberté (Christine) : Bien, en
fait, il y a... maintenant, on a des trajectoires qu'on a créées pour dire vers
quelles ressources professionnelles ce serait mieux de diriger des patients,
des individus. Alors, la première chose, ce serait devoir à préparer les gens qui reçoivent les appels
pour pouvoir le faire. Ce n'est pas obligé d'être une infirmière. Une
infirmière, c'est quand on veut évaluer; là, ça va prendre une infirmière, mais
juste pour procéder à la raison de consultation et bien diriger, si on prépare
bien nos collègues qui sont adjoints administratifs, parce qu'ils font partie
de l'équipe eux autres aussi, il faut les considérer aussi importantes, et, à
ce moment-là, ils vont pouvoir bien diriger les patients vers la bonne
ressource dans la clinique.
M. Derraji : Ce que j'aime dans vos propos, vous l'avez dit, pas une fois, pas deux,
sentiment d'appartenance, faire ça,
sentir que les autres professionnels... Et je tiens juste à vous dire, je ne
sais pas si vous avez entendu l'échange, tout à l'heure, avec le Collège
des médecins, moi, pour moi, aujourd'hui, moi, sérieux, aujourd'hui, là, je
vois un changement majeur au niveau de la conception du travail
multidisciplinaire. Moi, je pense que je vois le sourire dans votre visage, ça, c'est extrêmement important
parce que, si c'est comme... si c'est en règle, juste ça, c'est un départ de
solution. C'est un premier pas vers la bonne direction.
Maintenant, comment
peut vous donner plus d'outils pour... Au bout de la ligne, on veut que les
patients aient leurs rencontres et qu'on n'a
plus de maladies chroniques ou bien, au moins, gérer bien leurs maladies
chroniques. Vous avez dit qu'au
niveau du triage c'est bon. Vous avez parlé de la problématique des petites
cliniques. Mais est-ce qu'il n'y a pas la problématique de manque de ressources
dans les cliniques? Ce n'est pas toutes les cliniques qui ont, un, les
compétences nécessaires. Les IPS en... vous avez dit, 2 000 ou 800? C'est
combien d'IPS, madame?
Mme Laliberté
(Christine) : On est 800 certifiées actuellement, oui.
M. Derraji :
800 certifiées. On est très loin de couvrir le territoire québécois. Comment on
peut, avec les moyens qu'on a maintenant sur la table, répondre à cette
demande? Et je sais qu'il y a les infirmières cliniciennes aussi, donc...
Mme Laliberté
(Christine) : Bien, c'est ce que je vous dirais. En fait, il faut le
voir en équipe. Il n'y a pas que des médecins, que des IPS, il y a plein
d'autres professionnels de la santé. Donc, il faut les mobiliser ensemble, ces gens-là, puis utiliser complètement leurs
compétences puis leurs champs d'exercices, dans le sens qu'on voit souvent
les professionnels sous-utilisés, et c'est ça qui fait la différence. Donc, il
faut leur laisser la place, les accompagner, du mentorat entre équipes, on le
fait entre membres de nos équipes, on est habilités à faire ça et s'aider pour
mieux répondre à la population. C'est comme ça qu'on va y arriver.
M. Derraji : C'est de la musique à mes oreilles, c'est excellent. Donc, maintenant,
vous venez en commission nous
dire : Écoutez, inscrivez les gens GMF, cliniques, CLSC, c'est un début de
solution. Je ne veux pas dire c'est la solution parce que... Selon vous,
on est sur la bonne voie?
Mme Laliberté
(Christine) : Oui.
M. Derraji :
O.K. Parlons maintenant des autres. Vous avez dit quelque chose qui... Au fait,
c'est une très bonne proposition, référence aux spécialistes. Vous avez
l'habitude de travailler avec les ordonnances collectives. Vous avez une
panoplie d'ordonnances collectives. N'hésitez pas, s'il y a des lacunes ou des
choses à améliorer, dites-le-nous parce que ça va vous donner des outils. Moi,
je les appelle... C'est comme les ustensiles pour faire ou préparer un plat,
mais c'est les outils pour faire avancer la prise en charge — que
le Collège des médecins n'aime pas. Moi, je
l'aime. Prise en charge des patients, référence aux spécialistes, concrètement,
qu'est-ce que vous demandez?
Mme Laliberté
(Christine) : Bien, en fait, juste une petite correction, les
infirmières praticiennes n'utilisent pas les ordonnances collectives. C'est une
pratique autonome, ce sont les infirmières cliniciennes et on pourrait vraiment
renforcer ça chez elles.
Pour les praticiennes,
formation de deuxième cycle universitaire, autonomie, pose de diagnostic, plan
de traitement... Prise en charge, on n'aime pas ça personne, mais on s'occupe
d'une cohorte d'un groupe de personnes pour leurs besoins de santé. Référence
en spécialité, on est obligés, même si légalement on a le droit, au moment où
on se parle, il y a des changements qui doivent être faits pour qu'on puisse
référer directement aux médecins spécialistes par les centres de répartition
des demandes. Donc, on est obligés d'avoir une signature de médecin et c'est
lui qui reçoit les rapports, donc on a comme des manipulations à faire, de
donner... avec le médecin pour pouvoir envoyer une demande et c'est lui qui
reçoit le rapport de consultation. Parfois, on le reçoit en copie, pas tout le
temps, et on peut perdre le suivi dans la prise en charge. Puis le médecin, ont
le surcharge de choses qu'il n'a pas besoin d'avoir. Et ça, ça pourrait le
rendre plus accessible aussi.
M. Derraji :
Donc, selon ce que vous... Si j'ai bien compris, c'est que vous demandez à ce
que vous ayez cette autorisation de faire la référence. L'interprétation du
résultat revient à un acte médical par le médecin généraliste. Vous
n'interprétez pas?
Mme Laliberté
(Christine) : Non, il revient à nous.
• (17 heures) •
M. Derraji :
À vous, donc vous interprétez que ce soit le... en fait, bien, vous recevez le
rapport de la part du médecin spécialiste.
Mme
Laliberté (Christine) : Tout à fait, on reçoit un rapport avec des recommandations
et on va donner suite aux recommandations du médecin spécialiste. Alors, ce
rapport-là, parfois, va... bien, en fait, tout le temps, va transiter par le
médecin. Parfois, on reçoit une copie, mais il y a des délais dans la prise en
charge parce qu'on ne reçoit pas nos rapports en tout temps, directement. On
n'a pas cette possibilité de faire notre lien directement avec eux, légalement,
oui, mais pas par le fonctionnement actuel.
M. Derraji :
Oui. Les diagnostics, les différents tests de routine, que ce soit pour les
cancers x, y z, hommes, femmes, pensez-vous que, ça aussi... Parce que,
parfois, il y a des appels pour voir le médecin, mais la patiente a juste
besoin d'une référence pour faire son diagnostic. Est-ce que, ça, c'est quelque
chose que vous voyez aussi, que, si ça tombe dans la clinique, bien, c'est un
rendez-vous de moins, c'est du temps gagné pour le médecin?
Mme Laliberté
(Christine) : Oui. Bien, c'est des choses qu'on peut faire nous-mêmes.
Tout ce qui touche les analyses de laboratoire, l'imagerie, ça, il n'y a pas de
problème, on fait nos prescriptions, on reçoit nos résultats, on gère, on fait
le suivi, et ça ne passe pas par le médecin.
M. Derraji :
Combien il me reste... Désolé.
Le Président
(M. Provençal)
: Il vous reste deux
minutes.
M. Derraji :
O.K. Dernière question sur la trajectoire, la trajectoire du patient. Au bout
de la ligne, au fait, ce que la plupart des intervenants veulent, c'est une
bonne prise en charge, la plupart, que ce soit d'un point de vue médecin, infirmière, infirmière praticienne,
infirmière clinicienne. Pensez-vous que l'inscription à un groupe de médecins
de famille, on ne va pas perdre la qualité des soins au service ou, au
contraire, le fait que le patient a une bonne prise multidisciplinaire,
interdisciplinaire va améliorer la prise en charge?
Mme Laliberté
(Christine) : On va gagner en amélioration de prise en charge.
Habituellement, justement, là où il y a plus
de lourdeur, de chronicité, on a encore plus avantage à travailler tissé serré
en équipe. On donne un meilleur service, on rassure nos patients, les
familles parce qu'on est plus disponibles en équipe. Donc, on n'a pas à faire
des visites répétées vers le médecin. L'infirmière praticienne ou l'infirmière
clinicienne, dépendant du besoin, en fait, va rencontrer un autre intervenant — ça
peut être un suivi de diabète aux trois mois par notre collègue infirmière clinicienne — et, une fois par année, avec le médecin ou
l'infirmière praticienne, et on va se parler, entre-temps, s'il y a des choses qu'elle ne peut pas compléter, mais que,
nous, on peut faire et — par
exemple, prescrire un nouveau médicament — on va pouvoir
compléter avec elle. Donc, on les met vraiment à profit.
M. Derraji :
J'ai une question de nombre. Si on applique ça à une clinique x, on peut
passer de combien de nombre à combien de
nombre? Genre, avec ce mode de fonctionnement, inscriptions médecin, on a
1 000, on passe à ce mode que vous dites, on passe à, quoi,
2 000, 3 000?
Mme Laliberté
(Christine) : En fait, l'objectif, c'est de passer à 2 000, 3 000.
Mais, quand on parle de 2 000,
3 000, bien là on est en équivalence médecin. Mais ce
n'est pas le médecin qui voit les 2 000, 3 000, c'est l'équipe.
M. Derraji :
Compris. Non, non, j'ai bien saisi. Je veux juste rester sur... Pour la
population qui suit nos travaux, le but,
c'est qu'on améliore la qualité des soins. Il n'y a pas de retour sur la
qualité des soins, mais on améliore la prise en charge du nombre. Donc,
au lieu de voir 1 000, on va aller chercher 2 000 ou 3 000, si
tout le monde travaille ensemble. Est-ce que j'ai bien saisi la réponse?
Mme Laliberté
(Christine) : Vous avez bien saisi. Je vais vous donner un exemple de
médecins finissants qui ont pris en charge
800 patients dans leur première année de pratique en travaillant deux
jours à la clinique, trois jours dans
des AMP ailleurs, et c'est parce que l'équipe était là pour s'occuper de la
clientèle, la patientèle, comme on veut, pendant leur absence. Donc, la
prise en charge a été augmentée par jeune médecin parce que l'équipe était là
pour soutenir en leur absence.
M. Derraji :
Bien, merci beaucoup. Merci. C'est des propos d'une importance extrême dans
le but qu'on partage tous. Merci vraiment pour votre présentation et
l'excellent rapport. Continuez votre beau travail.
Mme Laliberté
(Christine) : Merci beaucoup.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci.
M. Derraji : Et, si vous voulez plus de collègues, dites-le-moi. Je vais... C'est
sûr, il va me voir au salon bleu demander plus d'IPS, hein? Je suis là.
M. Dubé :
...d'être très ouvert, très ouvert.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci beaucoup, M.
le député. Alors, nous poursuivons avec M. le député de Rosemont. À vous.
M. Marissal : Merci, M. le
Président. Merci, mesdames, pour votre présentation. Vous avez raison de dire
depuis des années qu'on devrait vous écouter davantage. Vous venez d'en faire
la preuve encore une fois.
Je vais faire vite parce que je n'ai même pas la
moitié du temps des six minutes du ministre, tout à l'heure, qui trouvait qu'il
n'avait pas beaucoup de temps. Alors, j'y vais vite. Je regarde vos 14 recommandations,
là. À part deux, peut-être, la R1 et la R8,
là, je ne vois pas beaucoup de liens avec le projet de loi qu'on a devant nous.
Pourtant, c'est du bon stock, là. Il est pas mal... Pas mal tout,
là-dessus, serait applicable puis ferait une grosse différence, je pense, là. Mais on est quand même, ici, pognés à
étudier le projet de loi n° 11, là. Ça fait que je me demande juste
pourquoi le projet de loi n° 11 dans ce cas là? Qu'est-ce que vous
en retenez, vous? Parce que vous êtes sur une voie parallèle qui s'en va à la
bonne place, là, je pense. Mais moi, je suis là, comme... O.K., mais qu'est-ce
qu'on veut avec que le projet de loi n° 11, d'abord?
Mme Laliberté (Christine) :
Bien, en fait, le projet de loi n° 11, dans le fond, on vise l'accessibilité
aux médecins, améliorer, prendre les patients en charge qui étaient au guichet
d'accès aux médecins de famille. On propose
des solutions pour aider à désalourdir les processus pour arriver à faire ça
sans nécessairement mettre l'emphase unique sur une pression chez le
médecin de famille, qui fait partie de notre équipe aussi. Donc, il y a
plusieurs enjeux dans le projet de loi qui recoupent nos propositions d'une
façon indirecte.
Je vous donne l'exemple du guichet d'accès
obligatoire. Bien, qu'est-ce que je fais avec le petit bébé de ma patiente qui
a déjà deux enfants suivis avec moi? Je suis obligée de lui dire : On
l'envoie au guichet d'accès. On demande des heures... de voir des patients
avant 8 heures, après 19 heures. Mais oui, mais, si on le passe en
équipe, est-ce qu'on est encore plus capables de le faire avec un suivi? Est-ce
qu'on serait plus capables de prendre de patients en suivi aussi? Comment les
accompagner?
Donc, nous, c'est la vision qu'on avait à la
lecture du projet de loi. C'est... O.K., on mise dans un endroit. Puis je pense que ça prend un point de départ.
Puis effectivement il fallait que ça arrive pour qu'on en parle ensemble.
Donc, c'est une bonne chose. Maintenant, il
faut regarder comment on le fait avec une équipe. C'est ce qu'on vous propose
aujourd'hui.
M. Marissal : Non, c'est parce que le ministre dit souvent...
Et puis, là-dessus, on va s'entendre que ça ne prend pas toujours un projet de
loi. Des fois, il y a des affaires qui se font sans projet de loi. Puis, des
fois, le gouvernement nous dépose des projets de loi, puis les
règlements viennent après, ça fait qu'on ne sait même pas exactement quel est
l'objet du projet de loi.
Cela dit, je vais arrêter là mon éditorial,
mais, en axant beaucoup sur l'entrée par le médecin, parce que c'est ça qu'on a
l'impression que le projet de loi n° 11 fait, là, vous avez l'air d'être
d'accord avec moi, vous opinez du bonnet,
est-ce qu'on n'est pas en train de faire le contraire de ce que vous proposez?
Autrement dit, que ce ne soit pas juste l'entrée par le médecin, ça peut
être plus simple que ça. Donc, on pourrait le faire entrer par quelqu'un
d'autre, spécialiste ou autre, là. Allez-y. Je n'ai plus de temps.
Mme Levasseur (Isabelle) :
Bien, c'est pour ça, dans le fond, qu'on a voulu participer à cette commission parlementaire. C'était pour démontrer que
l'accessibilité puis l'entrée des patients ne se fait plus uniquement par le
médecin de famille. Ce n'est plus nécessaire. J'ai beaucoup aimé la
phrase de Dr Gaudreault, tantôt, qui disait que ce n'était pas nécessaire que tous les Québécois aient un
médecin de famille, et c'est vrai. Ils doivent appartenir à une clinique, à un
groupe de professionnels, mais ils n'ont pas
tous besoin d'un médecin de famille. Donc, c'est ça qu'on vient démontrer
aujourd'hui. Puis on ne doit plus uniquement penser à l'accessibilité via cette
personne uniquement.
M. Marissal : Bon, le ministre
a l'air de mourir d'envie de dire quelque chose. Ce n'est pas moi qui donne les
tours de parole ici, mais...
M. Dubé : Mais, je ne sais
pas...
M. Marissal : ...mais, s'il me
reste 30 secondes, je lui donne.
M. Dubé : Écoutez, M. le
Président, c'est tellement un bon commentaire que mon collègue de Rosemont
vient de faire. Je veux juste dire que c'est pour ça que j'ai dit, ce matin,
qu'un gros changement, c'est qu'on veut que la prise en charge, on n'aime pas
le nom, soit faite par la GMF et non par le médecin. C'est un très gros
changement. Donc, ça rejoint votre point. Puis c'est pour ça que je pense que
les IPS sont d'accord avec l'approche. On ne veut plus que ça soit le médecin,
qui a déjà assez de pression. Et, dans le projet de loi, on fait bien référence
à la clinique, à la GMF et non au médecin. C'est un très gros changement. Mais
merci de le préciser.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, pour la suite, avec le député des Îles. Merci
beaucoup, M. le député de Rosemont.
M. Arseneau : J'ai combien de
temps, M. le Président?
Le
Président (M. Provençal)
: 3 min
47 s.
M. Arseneau :
Moi, je propose, puisque le ministre veut intervenir lorsqu'on a des questions
à poser, je propose qu'on puisse aussi intervenir quand on lui pose des
questions. Comme ça, ça va être un beau petit party.
Alors, merci beaucoup
pour votre présentation. C'est toujours extrêmement enrichissant et éclairant.
Mais on reste avec une question, tu sais, un peu la publicité, là : Si
ça existait, on l'aurait. Ce modèle-là, Archimède, que vous nous présentez,
qu'est-ce qui freine son développement à travers le Québec, si ça fonctionne?
• (17 h 10) •
Mme Laliberté
(Christine) : Bien, en fait, je pense qu'il n'y a pas rien qui freine,
mais je pense qu'on veut plus de résultats probants. Il y a eu une pandémie qui
est arrivée, comme pour tout le monde. Au cours du processus, on a démontré de
nouvelles choses, pendant la pandémie, sur le fonctionnement. Il y a l'après-pandémie,
donc. Mais je pense qu'une discussion s'impose sur le modèle Archimède avec le
ministre Dubé, justement, pour voir qu'est-ce qui peut être fait avec le modèle
Archimède pour les équipes qui en ont besoin.
M. Arseneau :
...son intérêt et le nôtre.
Mme Levasseur (Isabelle) : J'oserais
ajouter quelque chose. Le modèle actuel des GMF, en fait, est beaucoup axé
uniquement sur la vision médicale. Donc, je pense que c'est ça qu'il faut qu'on
change aussi au Québec. Tu sais, la gestion médicale des groupes de
médecins de famille, je pense que c'est révolu aussi, puis il faut qu'on laisse
de la place aux autres intervenants pour penser à la gestion, en fait, puis à
l'accessibilité dans chacune des cliniques.
M. Arseneau :
Vous faites quand même un certain nombre de recommandations sur le fait,
par exemple, qu'il soit permis aux IPS d'admettre des patients, que les IPS
soient en mesure de référer des patients, que, bon, l'expertise des IPS... Bon,
comment on reconnaît l'expertise des IPS? Est-ce que c'est par règlement?
Est-ce que c'est par une loi, ou c'est par
la bonne volonté des médecins, ou est-ce qu'il faut changer quelque chose dans
le système?
Mme Laliberté
(Christine) : En fait, je dirais que c'est tous les découlants du
projet de loi n° 43 qui nous a permis de poser les diagnostics et
d'établir les plans de traitement. Il y a plusieurs règlements et lois qui
suivent qui ont besoin d'ajustements. Et il y a aussi, surtout pour nous, ce
qui est important pour, justement, l'accessibilité, le règlement en lien avec
la santé mentale qui empêche les infirmières praticiennes, toutes les
infirmières praticiennes d'évaluer les troubles mentaux. Et là, en pandémie, on
le voit encore plus, comment c'est important. Mais je voudrais souligner juste
une petite chose de peur de ne pas pouvoir le dire. Je vois une énorme
différence dans les réflexions aujourd'hui,
en commission parlementaire, comparativement à 2019. La marche est
excessivement améliorée, je dirais, pour y parvenir.
M. Arseneau : J'aimerais vous entendre
dire une dernière petite chose. Vous avez parlé des Îles-de-la-Madeleine tout à l'heure. Vous
pouvez nous expliquer le problème et la solution? Vous avez 30 secondes.
Mme Laliberté
(Christine) : Le modèle Archimède en préparation, peut-être pour être
implanté dans votre beau territoire, si ça fonctionne. Mais je ne voudrais pas
m'avancer avant les gens qui sont chez vous à ce sujet.
M. Arseneau :
Bien entendu. Mais, ce que je veux dire, c'est que ça s'applique dans les
régions...
Mme Laliberté
(Christine) : Absolument.
M. Arseneau :
...là où, j'imagine, l'expertise est nécessaire et le partage des
responsabilités. C'est ça?
Mme Laliberté
(Christine) : Tout à fait.
M. Arseneau :
D'accord. Merci. J'imagine que mon temps est terminé.
Le Président
(M. Provençal)
: 30 secondes
encore.
M. Arseneau :
Ah! 30 secondes encore.
Mme Laliberté (Christine) : Ajouter
quelques IPS gestionnaires dans les cliniques, là, en cogestion, ça pourrait
peut-être vous aider aussi à faire bouger un peu le modèle. On est prêtes à
vous accompagner là-dedans, nous autres.
M. Arseneau :
Merci beaucoup.
Le Président
(M. Provençal)
: Je
vous remercie beaucoup pour votre contribution aux travaux de notre commission.
Je
suspends les travaux quelques instants pour accueillir un nouveau groupe.
Merci. Suspension, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 17 h 13)
(Reprise
à 17 h 18)
Le Président
(M. Provençal)
: Nous reprenons nos
travaux. Je souhaite la bienvenue à Me Paul G. Brunet, président-directeur
général du Conseil pour la protection des malades, ainsi que les deux personnes
qui l'accompagnent. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échanges avec les membres de
la commission. Je vous invite à vous présenter puis à débuter votre exposé. Et
je vous cède la parole.
Conseil pour la protection des malades (CPM)
M. Brunet
(Paul G.) : Merci, M. le Président. Merci de nous accueillir. M. le
ministre, messieurs dames les membres de
l'Assemblée nationale, merci de nous accueillir dans vos murs pour la
consultation sur le projet de loi n° 11.
Le Conseil pour la
protection des malades fêtera en 2024 ses 50 ans d'existence. On est très
fiers et on espère que vous serez avec nous, que vous nous accompagnerez. Je
suis justement accompagné de M. Daniel Pilote et de Mme Micheline
Boucher Granger, les deux... nous-mêmes comme des membres du conseil d'administration
du Conseil pour la protection des malades.
Alors, sans plus
tarder, je laisserai la parole à mon collègue Daniel Pilote et je reviendrai en
conclusion sur différentes observations. Daniel.
• (17 h 20) •
M. Pilote
(Daniel) : Oui. Bonjour, tout le monde. Tout d'abord, j'aimerais
remercier la Commission de la santé et des services sociaux de nous recevoir.
Donc, je vais vous
parler un peu de qu'est-ce que je crois qu'on devrait améliorer, bien sûr.
Donc, moi, je trouve, avec le projet de la loi n° 11,
on exige aux médecins de famille qu'ils doivent se rendre disponibles. Donc,
moi, je trouve que, malheureusement, le système de rendez-vous dépasse les
capacités des médecins de famille. Justement, comme je regardais dernièrement,
en novembre, il y avait 876 000 patients en attente puis
1,4 million de prises en charge avec 10 000 spécialistes. Si
vous regardez ça un peu, 10 000 spécialistes, ça donne... il faudrait
avoir au moins 83 patients, hein, pour chaque médecin, chose que, bien
sûr, il faut prendre en considération, la région, hein, et le nombre de
populations, mais ça donnerait à peu près ça. Donc, très difficile.
Donc,
c'est sûr qu'il y a eu un problème, hein, comme j'ai pu le constater,
4 200 personnes qui ont été rejetées. Donc, malheureusement,
qu'est-ce qui arrive? C'est que, comme mon P.D.G., M. Brunet, disait...
Me Brunet disait que, justement, un quart de ces personnes ont de la
misère a à avoir des... (panne de son) ...donc, ça, c'est un problème, là, à
faire, à organiser. Donc, c'est sûr et certain et... Juste un petit moment.
Donc, qu'est-ce que j'aimerais que je... Je
vous fais un peu un bref... parce que, c'est ça, là, je ne vous lirai pas tout
qu'est-ce que j'ai écrit, ça prendrait trop de temps.
Alors donc, c'est sûr
et certain qu'il y a beaucoup, là-dedans, des personnes qui sont en condition
de handicap, en perte d'autonomie ou en âge
avancé, hein? Donc, moi, je suggère que la télémédecine soit en avant-garde
aussi comme option, pas nécessairement juste ça, là, comme option. Et là il y
en a qui vont dire : Oui, mais le docteur ne peut pas être là. Oui, on
pourrait utiliser, justement, des... On pourrait utiliser des infirmières ou
infirmiers auxiliaires, O.K.? Il y en a 30 000. Et ils pourraient, eux
autres, aller à la maison, si jamais il y a des auscultations à faire ou, comme
on dit, s'il faut prendre des signes vitaux.
Et il y a aussi
d'autres choses qui peuvent exister, hein, bien sûr, justement. Bien, il y a
les systèmes de caméras infrarouges qui
peuvent exister, justement, parce que tout le monde, quasiment tout le monde a
des téléphones intelligents dans
les... je parle, dans les personnes, justement... Si je parle, tantôt, des
infirmières ou infirmiers auxiliaires, eux
autres, ils peuvent avoir, justement, des appareils pour aider le médecin à
mieux prendre, comme on dit, un examen plus approfondi avec un infirmier
ou une infirmière auxiliaire.
Donc, ces systèmes de
technologie là, ça serait... De toute façon, comme vous voyez, en pandémie, on
utilise pas mal ces systèmes-là. Donc, ça serait des systèmes qui seraient
efficaces, mais à condition que la professionnelle puisse être là avec le
médecin, justement, pour aider les personnes qui ne peuvent pas, justement, se
déplacer. Imaginez les économies de temps et d'argent avec, justement... éviter
à ces gens-là de se déplacer, en télémédecine, mais à condition qu'ils aient une personne qui puisse être là en parallèle
pour les aider. Donc, grosso modo, je ne sais pas si vous avez reçu ma
mémoire, mais c'est indiqué dessus.
Alors j'aimerais
remercier la commission. Merci beaucoup. Mesdames et messieurs, je vous
remercie. Alors, je vous passe la... parole, excusez-moi, à Micheline Boucher
Granger.
Mme Boucher
Granger (Micheline) : Oui. Bonjour. Merci, Daniel. Merci de me
permettre d'être présente à cette
commission. Nous sommes tous et toutes conscients et conscientes des problèmes
au niveau du système de santé et des
services sociaux exacerbés en cette période de pandémie. Nous savons
pertinemment que les solutions réelles et pratiques sont déjà amenées par des professionnels de la santé, toujours
dans le but de l'amélioration des soins. Me Paul Brunet va élaborer à
cet effet.
Je souhaite fermement que le gouvernement, par
l'entremise du ministère de la Santé, va profiter du contexte actuel pénible et
difficile afin de collaborer avec les professionnels de la santé de tous les
ordres afin d'en arriver à des solutions réelles, efficaces et efficientes. Les
patients et les patientes méritent un système de santé et des services sociaux qui répondent à leurs besoins. Je souhaite
ardemment que les argents économisés... le redressement adéquat des mesures du système de santé
et des services sociaux soient réinvestis pour des soins encore plus élaborés
et améliorés et, conséquemment, que
la population bénéficie des effets d'une meilleure gérance à tous les paliers
du système de santé.
Je vous remercie pour votre attention. Me Paul
Brunet, à vous la parole.
M. Brunet (Paul G.) : Bon, M.
le Président, il doit rester quelques secondes à peine. Je ne voudrais pas...
Le Président (M. Provençal)
: Il vous reste trois minutes.
M. Brunet (Paul G.) : Bon, je
ne voudrais pas qu'on se quitte sans prendre pour acquis que vous avez déjà
pris connaissance du mémoire. C'est un mémoire terrain. Il est constitué de
doléances qui viennent du terrain, des usagers, des patients, de celles et ceux
qui souffrent parce qu'ils ne peuvent pas avoir accès à un médecin.
J'entendais des médecins, mais surtout des
syndicats de médecins dire, dans les médias : C'est effrayant. Pendant
qu'on étudie le projet de loi n° 11, on n'aurait pas le temps de discuter
puis de négocier. Ça fait 10 ans, au moins, que, moi, personnellement, je
parle d'accès à la première ligne. Les syndicats n'ont rien fait. Alors, il est
un peu tard. Je ne dis pas que tout ce que le ministre propose va dans le
mauvais sens, je dis simplement que, là, on a une occasion, ensemble,
d'améliorer le projet de loi. Si les médecins veulent collaborer, tant mieux,
mais je pense qu'il est un peu tard pour nous dire qu'on voulait avoir le temps
d'en discuter. Il est trop tard. Ça fait au moins 10 ans que j'entends les
syndicats, M. Godin et d'autres, dire : Ah! laissez-nous... Ça ne
marche pas. Alors là, il y a une initiative qui est sur la table... mais
améliorons le projet de loi, s'il vous plaît, M. le ministre.
Le Président (M. Provençal)
: Est-ce que je dois conclure que votre
présentation est complétée?
M. Brunet (Paul G.) : Oui,
monsieur.
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci beaucoup. Alors, nous allons débuter nos échanges avec vous, M. le
ministre.
M. Dubé : Je serais presque
tenté, M. Brunet, de vous dire que je n'ai rien à ajouter. Vous avez...
Écoutez, vous avez tellement raison, vous avez tellement raison. Mais je vais
quand même profiter des quelques minutes que j'ai. Mais je dois vous dire que
vous avez raison. Et, pour moi, ce projet de loi là donne justement
l'occasion... Puis je dois vous dire... je ne sais pas si vous avez eu la
chance d'écouter les discussions qu'on a eues cet après-midi avec mes
collègues, elles sont d'une qualité incroyable. Puis, si on est capables de continuer
à avoir cette qualité de discussion là au cours des prochains jours et des
prochaines semaines, je vais vous dire qu'on va changer les choses. Alors, je tiens à le dire, là, mes collègues, ici,
aujourd'hui, de l'opposition font un travail incroyable. Puis merci, M. le
Président, de vivre ça ensemble. Je vous le dis, là.
Maintenant, Me Brunet, moi, je vais commencer
par le patient, parce que j'ai toujours dit que c'est l'argent des
contribuables, puis les contribuables, c'est des patients, mais ils sont trop
patients. Vous avez dit que ça fait 10 ans,
là. Ces patients-là, ils sont en trop patients. Puis, quand je vois comment,
pour moi, dans ma... le changement de culture qu'on veut faire, c'est
que les patients, bien, c'est des clients puis ils ont le droit d'avoir de
l'information puis ils ont le droit d'avoir des services.
Quand je regarde les derniers rapports, que ce
soit de la Protectrice du citoyen, que ce soit de la Commissaire à la santé, elle a dit : Comment ça se fait
qu'il n'y ait pas plus de participation des conseils de protection ou des
comités de patients? C'est très rare que vous êtes invités en tant que
patients à dire ce que vous avez besoin. Alors, aujourd'hui, si quelqu'un me
demande qu'est-ce que...
J'espère
qu'on ne vous a pas perdu, là, parce que, là, je ne vous vois plus à l'écran,
mais... Est-ce que vous nous entendez encore?
Une voix : Moi, j'entends très bien.
M. Dubé : O.K., vous êtes
revenu? Excusez-moi, je pensais qu'on vous avait perdu.
Le
Président (M. Provençal)
:
Attendez, M. le ministre. On va reprendre, on va revenir en ondes, parce que
c'est important que les gens qui nous suivent puissent entendre ce que
vous avez à dire et aussi... Vous pouvez y aller.
• (17 h 30) •
M. Dubé : Oui? C'est bon? Ça
continue? O.K. O.K. J'espère que je n'ai pas trop pris de temps, là. Mais, moi,
ce que je vous dis, c'est que je veux vous écouter aujourd'hui. Parce que,
quand j'ai pris connaissance de votre mémoire, je pouvais avoir la perception,
puis peut-être à tort, que vous dites : Mais qu'est-ce qu'on vient faire,
parler de p.l. n° 11,
alors que notre préoccupation, c'est la qualité des soins, puis tout ça? Mais
vous avez vu que, cet après-midi, il y avait des perceptions que je pense
que juste le début de la commission nous permet de régler.
Je vous en donne un. Il y avait une perception,
jusqu'à encore il y a quelques minutes, que ce qu'on voulait forcer, c'est forcer les médecins à prendre plus
de patients. Et ce n'est pas ça, parce qu'on a dit : Il y a un gros
changement depuis nos discussions avec les syndicats de médecins pour
dire : Ce n'est plus le médecin, c'est le GMF, c'est le groupe, c'est la
clinique. Ça, c'est toute une grosse différence. Et la journée qu'on s'entend
que c'est ça qu'on veut faire, bien là c'est
sûr qu'il faut entendre les autres groupes, comme on fait des IPS. Demain, ça
va être les pharmaciens. Vous me suivez? Donc, c'est pour ça que ce que
je veux entendre de votre part... Il y en a un qui est très important, qui... pour ce que M. Pilote vient de faire... (panne
de son) ...il y a beaucoup de... et puis je ne sais pas, là, s'il peut
peut-être fermer votre son? Je n'aime pas ça m'entendre, pour être honnête avec
vous.
Mais je veux
revenir à un point, sur ce que M. Pilote a dit sur les soins à domicile
avec les deux professionnels, là. Ça, pour moi, là, c'est tellement
important. Puis je vais vouloir comprendre, dans les prochains jours... Puis
moi, j'ai eu la chance, là, de parler des soins... ce qu'on appelle les soins à
domicile, intensifs, où, justement, il y a eu beaucoup de restrictions que les
médecins ont imposées pour être capables de prendre en charge des patients
quand ils sont à domicile ou qu'ils sont dans un environnement particulier, que
ce soit le CHSLD ou d'autres. Et ça, j'aimerais ça... je ne sais pas si vous
voulez en parler aujourd'hui, parce qu'on n'a pas beaucoup de temps.
Mais j'aimerais ça vous entendre là-dessus,
parce qu'il y a eu beaucoup de restrictions à des médecins qui sont arrivés
avec des nouvelles idées, là. Je pense à la région de Verdun, où ils veulent
faire les choses différemment, mais qu'il y
a beaucoup de résistance. Je vous vois hocher de la tête, Me Paquet, là... Me
Brunet, pardon. Pouvez-vous m'en
parler un petit peu, de ça, parce que c'est drôlement important, là, de
profiter du p.l. n° 11 pour poser ces questions-là, puis de voir quels genres de changements qu'on
doit faire pour faciliter l'accès à des gens qui sont à domicile, par exemple.
M. Brunet (Paul G.) : Bien,
succinctement, M. le ministre, on a discuté avec des gens, les gens à Verdun,
là, dont le Dr Dechêne. C'est de faire en sorte qu'on ait des vrais soins à
domicile à l'avenir, avec de vraies assistances médicales, infirmières, pour
que les gens qui sont à mobilité réduite, ou qui ne peuvent pas se déplacer,
qu'on puisse les soigner, les soigner jusqu'à la fin.
Dans d'autres juridictions, il y a des gens qui
meurent à domicile, je pense que c'est près de 30 % ou 40 %, alors
qu'au Québec, c'est à peine la dizaine de pour cent. Il n'y a pas de raison
qu'on ne puisse pas avoir des soins à la maison comme ça devrait l'être, comme
ce qu'ils étaient autrefois. Ça, ça fait baisser certainement l'achalandage
dans les urgences. Ça crée moins de pression sur les lits d'hospitalisation des
personnes âgées qui sont en perte... Aussitôt qu'ils sont mal, on est obligé de
les amener à l'hôpital. On sauve beaucoup, et je pense qu'on aurait des soins
beaucoup plus humains et complets à domicile.
M. Dubé : Dr Brunet, juste une
question technique, là, pour les collègues, parce que peut-être qu'ils savent
déjà tout ça. Mais est-ce que les gens, de la façon dont ils pratiquent à
Verdun... J'ai même entendu des gens qui déménagent à Verdun pour être capables
d'avoir ce genre de soins là, là. C'est rendu quand même quelque chose, là, il
y a vraiment des bonnes pratiques. Mais est-ce que ça oblige d'avoir et un
médecin et une infirmière qui le font, ou ça peut être juste l'infirmière?
M. Brunet (Paul G.) : Moi, M.
le ministre, là, je ne suis pas un clinicien, je me fie aux experts. Mais ce
que je sais, ce que j'entends, c'est quand il y a des médecins qui peuvent
aussi aller à domicile avec les infirmières qu'on a affaire à des soins
beaucoup plus complets, et qui évitent l'hospitalisation de ces personnes-là.
Quand ils doivent recevoir des soins à tout bout de champ, on les envoie en
ambulance, alors qu'on pourrait régler plusieurs de leurs problèmes, et surtout
à la fin de leur vie... parce que souvent, il y a des gens qui sont très
malades et qui veulent rester chez eux pour
mourir. Qu'on ait ces soins-là jusqu'à la fin, comme ça existe dans une
proportion beaucoup plus importante dans d'autres juridictions.
M. Dubé : On essaiera de
reparler à Dr Dechêne, là, qui a piloté ce projet-là depuis de nombreuses
années, qui semble avoir beaucoup de résistance, puis je voudrais comprendre,
peut-être plus tard, un jour, d'où viennent les résistances.
Je voudrais revenir aux commentaires de
Mme Boucher-Granger sur les apprentissages de la pandémie. Vous avez dit
que c'est une occasion d'améliorer les services, d'améliorer les soins.
Qu'est-ce que vous avez en tête? Je veux juste vous entendre peu là-dessus,
Mme Boucher-Granger.
Mme Boucher
Granger (Micheline) : De ce
qui en est, le système de santé, ça fait plusieurs années qu'il y a des
difficultés, et avec la pandémie, c'est sûr que ce n'est pas rien pour
faciliter la tâche ou les choses. Et c'est sûr qu'il y a beaucoup à faire pour
venir à bout de coordonner les actions, autant des professionnels, soit
médecins, ou infirmières, ou paramédicaux. Et il y a moyen de travailler en
collaboration. Et moi, j'ai enlevé des termes tantôt... j'ai parlé, pour donner plus de temps à Me Brunet, mais travailler en
collaboration, le gouvernement et les professionnels de la santé de tout
ordre... Et j'ai mentionné, il y a quand même des difficultés au niveau du
système de santé, ça, on ne peut pas la
cacher à personne, mais il y a moyen de faire plus, ça, c'est sûr, et de façon adéquate
pour le bien-être des patients et des patientes. Et, ça,
tout le monde va en bénéficier autant sur le plan de la santé physique,
psychologique et aussi sur le plan financier.
Alors, dans le mémoire, je pense qu'on n'a pas
eu le temps d'en parler trop non plus, Me Brunet a élaboré dans son mémoire parce qu'il y a possibilité
d'augmenter l'efficacité au niveau des urgences, entre autres, parce qu'il y a
un programme, un projet à l'Hôpital Sacré-Coeur. Me Brunet pourrait
élaborer à ce sujet.
M. Dubé : Est-ce que... Il nous
reste combien de temps?
Le Président (M. Provençal)
: Six minutes.
M. Dubé : O.K. Alors, Me
Brunet, pouvez-vous m'en parler un peu du projet de Sacré-Coeur?
M. Brunet (Paul
G.) : Oui.
M. Dubé : Parce que, pour moi,
c'est important, là. Puis, je pense, pendant que vous êtes là, de vive voix,
parlez-nous en un peu du projet de Sacré-Coeur.
M. Brunet (Paul G.) : Alors, ce
sont des chercheurs avec des médecins qui ont mis sur pied une espèce de
logiciel ou d'algorithme qui permet, imaginez-vous, que quand le patient arrive
au triage à l'urgence — ça
ressemble un peu à ce que vous avez parlé, au Canada, hier, en passant — le
patient arrive à l'urgence et, tout de suite, selon le niveau de triage qu'on lui
donne, on ne le fait pas attendre, on l'envoie tout de suite dans une clinique
près de chez lui ou près de l'établissement où il se trouve pour recevoir les
soins ou une attention clinique — des fois, ce n'est pas nécessairement un
médecin — dont
il a besoin maintenant. Il ne devrait plus y avoir personne ou presque qui
attend des heures et des heures à l'urgence avec ce système-là. Il est en
fonction à Sacré-Coeur, dans d'autres hôpitaux de Montréal et en France
également. Le système a fait des petits en Europe. Nous autres, au Québec,
beaucoup de résistance me dit-on, M. le ministre, là-dessus. Ça fait que, tu
sais, en fait, notre petit mémoire, là, c'est plein de morceaux d'affaires qui
font qu'on est capables de faire plus et faire mieux puis ça ne coûtera pas
nécessairement plus cher. Quand une usagère m'a dit récemment :
M. Brunet, quand on m'appelle et on menace de me punir parce que je n'ai
pas répondu deux fois, la deuxième fois à l'appel, c'est un numéro
confidentiel, j'ai peur que ce soit un fraudeur. Y as-tu moyen que les
médecins, leurs cliniques ou l'hôpital s'identifient quand ils appellent
Tu sais, c'est des petites choses, mais des
centaines de choses, M. le ministre, qui vont faire la différence. J'ai
confiance parce que... attitude. Vous ne prétendez pas savoir tout comme
d'autres l'ont déjà dit antérieurement. Et
je pense qu'on est capables, mais il va falloir avoir une belle collaboration
de nos professionnels. On a une occasion en or de le faire. Je sais
qu'il y a une campagne... Mais, moi, ça fait assez longtemps que je suis
porte-parole que, si on travaille ensemble, on est capables de faire mieux. On
n'a pas le choix, là. Le système est vraiment trop fragile pour résister à ce
dont on a besoin.
M. Dubé : Bien, écoutez, il y a
une chose... Merci pour les bons mots, Me Brunet, mais il y a une chose que la
Commissaire à la santé... Puis je veux vous rassurer parce que j'ai pris
connaissance de son rapport, là, en détail la semaine dernière. Puis elle dit
que les comités d'usagers, les groupes d'usagers sont excessivement importants
et qu'ils sont sous-utilisés. Il y en a trois. Vous allez me dire que vous êtes
le plus important — puis
pas obligé d'être d'accord ou en désaccord — mais vous êtes un des groupes
les plus vocaux. Et, moi, je pense qu'il n'y a pas assez de place aux comités d'usagers dans les
discussions qu'on a. Alors, de vous entendre aujourd'hui, c'est très important.
Je dois vous avouer que je ne le savais pas qu'il y avait un projet à
Sacré-Coeur. Là, vous avez excité ma curiosité, je vais aller voir. Parce que
c'est d'avoir cette discussion-là, qu'on a depuis quelques heures, qu'on peut
voir comment il est immense le réseau de la santé. Il y a beaucoup de gens qui
ont beaucoup de bonne volonté d'arriver avec des bonnes idées. Si le p.l. n° 11 sert à ramasser ces idées-là puis travailler
autrement, bien, mon Dieu! on aura déjà accompli quelque chose de très
important.
Alors, moi, là-dessus... J'essaie de regarder
mes notes... Ah oui! Les outils électroniques, ça, ça m'excite un peu. Vous en
avez parlé tout à l'heure, M. Pilote.
M. Pilote (Daniel) : Oui.
• (17 h 40) •
M. Dubé : Là, je pourrais vous
en parler pendant des heures. On a un groupe, là, au Québec. On a un groupe au
Québec qui... Je ne le nommerai pas parce qu'on va me dire que je fais de la
publicité pour ce groupe-là, mais qui a développé des outils électroniques
incroyables de soins à domicile, et qui sont utilisés un petit peu partout dans
le monde, sauf au Québec, et qui donnent aux gens qui font des soins à domicile
un outil pour suivre... pas écrire ça puis avec des feuilles de papier puis de
la paperasse, là. C'est fait directement dans l'ordinateur ou sur un téléphone
portable. Et vous, je regarde, là, je suis certain que vous êtes très intéressé
par ça, parce que vous en parlez, des outils électroniques. Alors, moi, je vais
vouloir entendre les gens pour dire comment on peut outiller les gens, et c'est
pour cela que dans le plan de relance de la santé, la partie des données, on en
a parlé beaucoup aujourd'hui, des données de gestion, mais aussi avoir les
outils électroniques pour ça. Alors, je veux juste vous dire que je suis très
sensible à cette demande-là, de passer au XXIe siècle puis d'aller
chercher l'accès. Et ce n'est pas vrai les personnes plus âgées, ou peu importe, n'ont pas d'intérêt pour
les outils électroniques. Puis je suis content de vous entendre là-dessus.
Puis soyez assuré que vous parlez à quelqu'un qui est très intéressé à pousser
l'utilisation... et je suis content d'entendre que ça vous intéresse aussi.
C'était peut-être mon commentaire que je voulais faire là-dessus.
Le Président (M. Provençal)
: ...
M. Dubé : S'il reste deux
minutes, à moins qu'un docteur... que Me Brunet, vous ayez d'autres points
à faire, je serais presque confortable à les passer à mes collègues s'il reste
du temps... Avez-vous d'autres points, Me Brunet, ou... Ça va? Merci beaucoup
d'avoir participé à ça aujourd'hui.
Une voix : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: J'ai bien écouté ce que le ministre a dit, faites-vous-en
pas.
M. Dubé :
Je me sens d'une générosité incroyable. Incroyable.
Le Président
(M. Provençal)
: Alors, on poursuit
avec le député de Nelligan.
M. Derraji : Merci, M. le Président. Et, en fait, je vais seconder le ministre.
Merci pour votre présence, la qualité de votre rapport. Pas mal de très
bonnes propositions, que c'est très facile à implanter.
J'ai vu votre message
par rapport à la boîte vocale d'un hôpital sur la Rive-Sud. Moi, j'en suis sûr
et certain que c'est quelque chose que c'est facile à mettre en place.
J'ai toujours... Là,
c'est un peu un peu du côté de littérature où on est très fort à Montréal et au
Québec, c'est le patient partenaire. On parle beaucoup, beaucoup du rôle du
patient partenaire dans les soins. Et ce que j'aime dans les propos de... je
dirais, depuis l'intervention du Collège des médecins, par la suite, les IPS,
et vous maintenant, c'est cette volonté de
travailler ensemble. Et effectivement le patient doit jouer un rôle. Le patient
est partenaire de ses soins. On ne peut pas exclure le patient du
continuum des services.
Et j'ai bien aimé le
ministre quand il parlait des moyens technologiques. Moi, j'ai visité des
hôpitaux en Espagne, n'est-ce pas, où tout est informatisé, Écoute, un passage
sur un lit de patient, et tu as la prise de ta glycémie déjà centralisée. J'espère, j'espère parce que c'est l'avenir avec le
vieillissement de la population. On paie beaucoup, les Québécois paient beaucoup le système santé, et
j'espère qu'on va y arriver parce que c'est comme ça qu'on va évoluer
nos soins.
Je reviens à une de
vos propositions sur la réorganisation de la première ligne et surtout le
point 3.1, vous parlez beaucoup du PREM et vous soulevez une incohérence.
Comment expliquer ce qui suit? Montréal compte 645 000 citoyens non
inscrits, la Montérégie, la moitié, et le ministère alloue davantage de
nouveaux médecins en Montérégie, soit 99 versus 80 pour Montréal. C'est quoi
votre interprétation?
M. Brunet
(Paul G.) : Bien, je pose la question. Moi, j'ai des idées en tête,
mais je n'oserais pas manquer de respect...
M. Derraji :
Ça m'intéresse, vos idées. C'est vos idées. Parce que même le ministre est
intéressé, il vient de vous le dire.
M. Brunet
(Paul G.) : Oui, oui, mais c'est le ministre qui a donné ces
médecins-là de plus, alors que Montréal en manquait déjà. Alors, ça serait
intéressant de savoir ce que le ministre a fait et pourquoi il l'a fait. J'ai
des médecins qui m'ont dit : Paul, nous autres aussi, on voudrait savoir
pourquoi vous en avez donné en Montérégie, alors qu'il nous en manque à
Montréal déjà. La question est posée, là, M. le député. Je ne sais pas la
réponse.
M. Derraji : Je vais demander l'autorisation au ministre, je vais donner... Je vais
donner l'autorisation au Président... Je
vais donner une minute au ministre, parce que je n'ai pas beaucoup de temps, à
vous répondre. La parole est à vous, M. le ministre.
M. Dubé :
Je vais avoir tellement le goût de retourner à la commission parlementaire, M.
le Président, je vous le dis, là, je suis abasourdi.
Je veux juste vous
dire, puis on pourra avoir la chance d'en parler, mais ce qui nous a guidés,
c'est le nombre de médecins par 100 000 habitants ou par
1 000 habitants. Puis, il y avait des différences incroyables entre,
je vais vous dire, la grande région de Montréal et le centre de Montréal. Et
tout ce qu'on a fait, c'est essayer de rétablir un équilibre qui s'était perdu.
Il y avait beaucoup moins de médecins par 1 000 habitants ou par
100 000 habitants. Puis on pourra en parler. Mais je peux vous dire
que des chiffres étaient très clairs, que ce n'est pas parce qu'il y a trop de
médecins à Montréal, mais c'est qu'il en manquait encore plus ailleurs, et
particulièrement dans le nord de l'île et le sud de l'île. Je ne veux pas
prendre trop de votre temps, mais c'était très clair que les chiffres...
M. Brunet
(Paul G.) : Les experts qui nous ont guidés ou expliqué, ils nous ont
dit que le PREM ne tiendra pas compte du fait que les gens qui travaillent à
Montréal vont voir un médecin à Montréal. Alors, ça distortionne inutilement la
population de la Montérégie, puisque ces gens-là consultent souvent à Montréal
puisque c'est leur lieu de travail. Et on m'a dit que le PREM ne tiendrait pas
compte de ça.
M. Derraji :
Je vous donne ma promesse. On va continuer. Je note l'ouverture du
ministre, on va en reparler avec vous, on va revoir un peu est-ce que c'est
vrai, pourquoi il n'y a pas assez de médecins dans une région versus une autre. Mais j'ai entendu le ministre, je vous
promets qu'on va suivre, qu'on va aller chercher plus d'infos pour régler ça.
Il y a un autre point
que j'ai aimé, la page 6. Vous parlez... «Améliorer le délai d'accès aux
médecins spécialistes», et vous évoquez le point qui, selon moi, est
primordial, c'est tout ce qui est santé mentale, et on le sait, à part offrir
un service en psychothérapie, augmenter l'offre en psychologues, en thérapeutes
en première ligne du réseau public. Là, on
parle, encore une fois et ce que nous avons commencé à échanger depuis le début
de l'après-midi, l'offre
multidisciplinaire liée à un GMF, CLSC, aux cliniques. Est-ce que, selon vous,
en tant que patient, ou représentants, ou
partenaires dans les soins, c'est la meilleure façon de voir l'offre de soins
et, de facto, diminuer la liste des patients qui sont en attente d'un
médecin de famille?
M. Brunet (Paul
G.) : Je ne peux pas vous dire qu'il y a un lien entre les deux. Ce
que je souhaite c'est dans d'autres juridictions, un peu comme le ministre l'a
proposé dans l'entrevue que j'ai entendue hier, c'est qu'il n'y a pas de raison
que rendu au triage on ne puisse pas prendre en charge un patient, quel que
soit le besoin qu'il puisse avoir, en tout cas, avec les professionnels qui
sont en cause, mais arrêter de toujours centraliser le besoin sur le médecin.
Ce n'est pas vrai — et
il y a même des jeunes médecins qui l'ont dit — ce n'est pas vrai que c'est
plus les médecins qui devraient prendre en
charge le patient. Une fois rendu au triage ou même dans les guichets, il y a
des besoins qui peuvent être pris en charge par d'autres professionnels,
mais on a de la misère.
Souvenez-vous qu'en 2019, dans le projet de loi
n° 41 ou n° 43, sur les actes qu'on voulait
donner aux infirmières, j'ai proposé pourquoi, comme en Ontario, en Alberta, on
n'offre pas la possibilité que des infirmières praticiennes accueillent des
patients aussi sur des problématiques mineures. Ça fait 20 ans que ces
filles-là font ça ailleurs. Ici, on n'est
pas capable. J'ai hâte qu'on crève la balloune de la centralisation sur les
médecins. Et c'est pour ça que
j'étais un peu déçu quand j'ai lu le projet de loi n° 11. Ils parlent juste des
médecins, mais il n'y a pas juste eux autres qui devraient pouvoir
aider, parce qu'ailleurs, ils le font.
M. Pilote (Daniel) : Puis-je
intervenir? Excusez-moi, puis-je intervenir?
Le Président (M. Provençal)
: Oui, vous pouvez intervenir,
M. Pilote. La parole...
M. Pilote
(Daniel) : Oui, merci, juste
pour vous dire que, justement, les médecins de famille, ce n'est pas des
secrétaires parce qu'ils n'arrêtent pas de remplir des certificats médicaux.
Ça, là, ça prend du temps immense, c'est pour ça, là, que comme Me
Brunet, il faut un peu diluer tout ça, là, tous ces besoins-là, là, avec les
médecins de famille...
M. Derraji : Vous avez raison,
mais... vous avez raison. Je ne sais pas si vous avez entendu l'intervention du
Collège des médecins du Québec. Sérieusement, là, si vous n'avez pas eu
l'occasion, je vous invite vraiment à aller la
voir. Ils sont plus dans un mode de collaboration, un mode
d'interdisciplinarité. Moi, je pense qu'il y a cette réelle volonté de
voir, je dirais, l'accompagnement et le continuum de services dans sa globalité
avec plusieurs intervenants.
Je vais
terminer avec les CLSC puisque que là, on parle, maintenant, CLSC, cliniques,
GMF, donc l'offre... si c'est... on s'en va vers ça, bien, l'offre, on va
l'agrandir un peu. Ce que vous êtes en train de nous dire à la page 6,
toujours : «L'État continue d'investir régulièrement dans les CLSC,
surtout dans les briques, alors que l'offre médicale en ces lieux est
fort limitée. Il faut renforcer l'offre médicale dans ce lieu plus propice à
l'interdisciplinarité. C'est excellent, infirmiers praticiens et infirmières
praticiennes, psychologues, travailleuses sociales.» Donc, selon vous, le rôle
que jouaient les CLSC depuis longtemps dans la pratique médicale au Québec, si,
avec ce mode de gouvernance, inscrire le
patient dans un GMF ou clinique, ou CLSC, avec l'interdisciplinarité, selon
vous, c'est la meilleure solution pour les patients. Est-ce que c'est ce
que vous voulez dire?
• (17 h 50) •
M. Brunet (Paul G.) : Bien, en
fait, le message que je veux livrer au nom des gens que je représente, c'est, oui, l'interdisciplinarité, c'est tellement
important que cela se réalise dans des CLSC, en soins à domicile ou dans les
GMF. L'important, c'est de pouvoir prendre soin du patient pour les
besoins qu'il a et ne pas juste passer tout le temps par le médecin. C'est ça qui est à mon avis...
continue a être un problème ou, et bien que le projet de loi ne vise que les
médecins, il va falloir qu'on ouvre. Quand j'ai vu qu'il n'y avait pas
d'autre loi dont on proposait des amendements, pas de règlement non plus, je me
dis : My God! on parle juste des médecins encore. Et j'ai beaucoup de
respect pour les médecins, mais je pense qu'ils savent, surtout celles et ceux
qui oeuvrent notamment dans les GMF ou en CLSC et qui sont dynamiques, qu'il y a de la place pour les autres
professionnels et c'est elles et eux, pas juste les médecins, qui vont
régler le problème d'accès à la première ligne. Je n'y crois plus.
M. Derraji : ...préoccupation, pourquoi je voulais confirmer
avec vous ce que vous voulez dire. Parce que vouloir mettre au même pied GMF,
clinique et CLSC vient avec des responsabilités. Vous savez, l'effet de
pénurie, de rareté de main-d'oeuvre au niveau de plusieurs
professionnels, on ne peut pas dire qu'on ouvre... on offre l'accès aux soins
dans un GMF, aux cliniques, aux CLSC si ça ne vient pas avec les ressources
parce qu'au bout de la ligne on ne va pas
offrir la qualité des soins qu'on va garantir avec ce projet de loi. Parce que
là on va régler l'inscription, on va régler la gestion de rendez-vous,
mais il faut que ça vienne avec des professionnels. C'est là où je voulais voir
avec vous, est-ce que, un, vous êtes ouverts? C'est ce que j'ai constaté. Vous
dites qu'on ne doit pas orienter les interventions au niveau médical, mais plus interdisciplinarité, c'est excellent. Mais
pour régler ça, ça vient avec des professionnels et d'autres
professionnels.
Je vais terminer avec un point. Et vous avez
très bien fait de mentionner, Dre Dechêne, est-ce que vous pensez qu'au niveau du projet de loi n° 11 on
a oublié les soins à domicile ou bien vous pensez que le projet de loi
n° 11 peut aider à avoir les soins à domicile? Parce que là on
parle d'un patient qui se déplace en clinique, qui se déplace en GMF, qui se déplace au CLSC, mais qu'est-ce
qu'on fait avec des patients qui sont à domicile, qui ne peuvent pas se
déplacer pour x, y raisons?
M. Brunet (Paul G.) : Bien,
vous soulevez un bon point. Comme des médecins m'ont dit... parce que, même si parfois j'ai dit des mots contre certains
syndicats de médecins, j'ai des amis médecins qui me disent : Il ne
faudrait pas que le projet de loi n° 11 résulte en une mégaclinique
sans rendez-vous à travers le Québec et que les médecins ne puissent plus
s'occuper de leurs patients. C'est important, le lien avec le patient et le
médecin. Il ne faudrait que les bienfaits du projet de
loi n° 11 se traduisent par un sans rendez-vous, un méga sans rendez-vous
et que les patients perdent le fil et le lien qu'ils ont avec leur médecin
déjà.
M. Derraji :
Vous avez raison. Et là je vais un peu piquer le ministre. C'est à cause de
Trivago. En fait, je ne sais pas c'est qui qui était derrière ça, ce mot, mais
sérieux, je ne sais pas si... aucun jugement, hein, mais, dans la tête des
gens, on est en train de créer un monstre pour gérer des rendez-vous. Or, à la
lumière de ce que j'ai lu, je me suis
dit : Est-ce que j'ai bien lu le même projet de loi? Or, que ce n'est
pas... Écoute, je ne sais pas qui a sorti ça, là, mais j'espère que ce n'est pas vos équipes, mais vous
avez raison, vous avez raison de soulever... J'espère qu'on va prendre le temps nécessaire pour ne pas laisser des
patients... Malgré tout ce qu'on va faire au niveau des cliniques, GMF, CLSC,
c'est les soins à domicile. Merci pour votre présence et intervention. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, on y va avec la suite. Et c'est maintenant le
député de Rosemont.
M. Marissal :
Merci, M. le Président. Le ministre a dit tout à l'heure qu'il était presque
confortable à nous donner deux minutes. Moi,
je suis totalement confortable à aller, d'autant que... Une fois n'est pas
coutume. Non, non, je vais partager avec mon collègue des Îles de la Madeleine,
bien sûr. Merci d'être là à vous trois pour votre présentation.
La conclusion de
votre mémoire, puis là je m'adresse peut-être plus à un maître Brunet, là, qui
est assez, en tout cas, non équivoque,
disons. Tout bien considéré, le projet de loi n° 11,
dans sa forme actuelle, manque malheureusement la cible de l'amélioration pérenne de l'accès aux soins de première
ligne. Là, je vais vite parce que, malgré les quelques secondes, je n'en ai pas
tant que ça. Vous avez aussi dit tout à l'heure : Les fédérations, les
syndicats, les fédérations de médecins disent : On veut négocier,
on veut être entendus. Vous, vous dites : On n'a plus le temps, là, plus
le temps de faire ça, on a déjà perdu 10 ans. Donc, si je comprends bien
votre logique, vous, c'est : Vaut mieux un projet de loi comme ça, même si
ça braque les médecins, puis on a entendu les omnis ce matin, là, mais il vaut
mieux aller comme ça que de donner une autre chance à la négo ou de négocier
tout simplement.
M. Brunet
(Paul G.) : Bien, en fait, ce que l'on souhaite, c'est que le projet
de loi n° 11 soit amélioré, qu'il s'ouvre aux autres possibilités d'avoir
des professionnels en première ligne parce qu'on ne réglera pas le problème
d'accès en première ligne seulement avec les médecins. Et c'est pour ça que je
pense que le projet de loi n° 11 mérite d'être
amélioré. Sinon, je ne suis pas certain que je ne serai pas encore avec vous
dans cinq ou 10 ans pour commenter un autre projet de loi parce
qu'on aura raté la cible. Si on améliore le projet de loi n° 11 avec les
médecins et avec les autres professionnels qui peuvent travailler en première
ligne, je pense qu'on peut faire quelque chose de bien.
M. Marissal :
Oui, puis je pense qu'on chante pas mal tous la même chanson, ici, aujourd'hui,
là. Au-delà de quelques divergences parfois plus ou moins profondes entre ce
côté-ci de la table et l'autre, je pense que tout le monde cherche ça, là. Puis
on sera très, très intéressé à vous entendre. Vous savez où nous joindre si
vous avez des suggestions à faire. Oui, effectivement, on doit faire avancer
l'accessibilité aux soins. Puis effectivement, ça ne doit pas passer seulement par le tout au médecin qui
est maître et dieu dans ses terres, et qui décide, effectivement, qui il prend,
qui il ne prend pas. Cela dit, vous avez
entendu probablement les médecins omnipraticiens, ce matin, ils sont en beau
fusil, là. Ils ne voient pas beaucoup d'avantages à ce projet de loi là, là. Ça
fait que je pense qu'on part de loin quand même, non?
M. Brunet
(Paul G.) : Écoutez, je ne veux pas commettre d'indiscrétions, mais
c'est la première fois en presque 25 ans que je porte parole que, pour la
première fois... le Dr Godin parlait de temps en temps, mais sur un projet de loi, que le président de la FMOQ essaie
à me rejoindre, ça, c'est une première. Malheureusement, on ne s'est pas parlé,
là, mais j'ai senti qu'il y avait quelque chose dans le projet de loi
n° 11, là, qui les fâchait royalement parce que c'est la première
fois que le président de la FMOQ essayait de me rejoindre — en
tout cas, dans ces circonstances.
M. Marissal :
Il n'est pas trop tard, hein, vous avez probablement son numéro de téléphone.
Vous pouvez vous parler.
M. Brunet
(Paul G.) : Il y a une belle chanson d'une chanteuse... «It's too late
baby now.»
M. Marissal :
Bon, ça, ça fait ma journée, mais je vais quand même vous parler de CLSC. Les
CLSC... ce n'est pas la première fois qu'on en parle, puis, tu sais, les gens
l'ont oublié, surtout les plus jeunes, là, mais ça s'appelle Centre local de
services communautaires. Ça avait pas mal tout pour faire la job qu'on essaie
de faire. C'est-tu réchappable, ça, les CLSC, parce que moi, je pense que oui.
Je pense qu'on n'a pas besoin de réinventer tout le temps le... c'était quoi?
La roue à trois trous, qu'il disait, l'ancien ministre, là? Mais ça existe,
hein, ça existe, mais c'est peut-être un peu
ringard parce que les gouvernements successifs l'ont ringardisé, mais ça
existe. Ma question est vraiment «loadée», là, mais est-ce que c'est
réchappable, les CLSC?
M. Brunet (Paul
G.) : Écoutez, il y a des CLSC qui sont très actifs dans leurs régions
respectives, là. Il ne faut pas mettre tous les CLSC... mais il y en a d'autres
qui sont malheureusement bureaucratisés. Ils ne prennent plus de patients. Ça ferme à quatre heures. Alors, tu
sais, il faudrait brasser un peu la cage de certaines organisations, parce que
vous l'avez dit, je pense que Mme Marois était impliquée à l'époque. Elle
vient d'ailleurs des CLSC si ma mémoire est bonne. Alors, il y a de
l'ouvrage extrêmement important qui pouvait et qui se fait à certains endroits.
Il n'y a pas de raison que les CLSC ne retrouveraient pas tout l'honneur qu'ils
méritent.
M. Marissal :
Je vous remercie. Merci à vous trois.
Le Président (M. Provençal)
: Nous allons terminer cet échange avec le député des Îles
de la Madeleine.
• (18 heures) •
M. Arseneau : Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour votre
présentation. Moi aussi, c'est la conclusion de votre mémoire qui a
attiré mon attention parce qu'on avait essentiellement la même conclusion en
pensant que le projet de loi n° 11,
dans sa forme actuelle, rate sa cible. Et là, je vous entends dire,
essentiellement, qu'il faut profiter de ce rendez-vous législatif pour faire
des bonifications, faire des améliorations, apporter des améliorations au
réseau. Puis, si je vous comprends bien, vous dites : Bien, si tout
ce qui n'est pas dans le projet de loi n° 11 y était, puis ce qui y est déjà, c'est accessoire, là, mais il peut
rester ou partir, nous, on serait d'accord. Est-ce que je vous ai bien compris?
M. Brunet
(Paul G.) : Oui, mais, encore une fois hier, j'entendais le ministre dans une entrevue, à Radio-Canada, le
matin, et je me suis étouffé avec mon café parce qu'il disait : Il faut
que tous les professionnels, quel que soit l'ordre auquel ils appartiennent,
soient là pour prendre les patients en charge, de celui dont il a besoin ou
d'un autre professionnel. Alors, je me suis dit : My God! je vais aller
voir le projet de loi, mais je n'ai pas trouvé d'autres... qui étaient visés
par le projet de loi, en tout respect pour le ministre, autant dans les notes
explicatives, dans les articles. Il faudrait agrandir le cercle de ce dans quoi
on veut intervenir, permettre enfin à d'autres professionnels d'être plus présents dans des soins de première ligne pour
vrai et pas nécessairement sous la houlette d'un médecin, s'il vous plaît. Mais
quand, au triage, on dit qu'il a besoin d'un travailleur social ou d'une
psychologue, c'est auprès d'elle ou de lui qu'on devrait l'envoyer, pas de le faire passer encore par une
réquisition d'un médecin généraliste. On n'est plus capable de voir ça.
M. Arseneau : Mais, en fait,
votre discours résonne très bien dans ce que, nous, on avait proposé — vous
en avez peut-être pris connaissance la semaine dernière — il y
avait une série de 12 propositions qui n'étaient pas toutes nouvelles,
mais qui touchaient aux soins à domicile, aux CLSC, à l'élargissement de la
première ligne à d'autres professionnels,
toute la question d'avoir le bon professionnel au bon moment pour le patient
avec évidemment sa condition.
J'aimerais
savoir si... Vous l'avez évoqué tout à l'heure, mais en ayant entendu,
j'imagine, l'ensemble des propositions des mémoires qui ont été
présentés aujourd'hui, donc l'ensemble des propositions, est-ce que vous, qui
représentez, là, les trois, que vous représentez évidemment, là, les patients
du Québec, est-ce que vous avez plus d'espoir
que l'an dernier sur l'idée qu'on va y arriver? Parce que, moi, je vois un peu
comme les autres, là, une espèce de consensus, non pas sur la question
des données qui sont vraiment, là, au coeur du projet de loi, mais sur tout ce
qui l'entoure, tout ce qui a été discuté aujourd'hui?
M. Brunet (Paul G.) : Je n'ai
pas entendu la présentation. Ce que j'ai apprécié d'abord, c'est la présence
d'un ministre qui ne prétend pas tout savoir, qui semble être ouvert. Est-ce
que c'est pour des fins électoralistes? Je ne
le sais pas. Je ne le connais pas assez à ce moment-ci. Mais quand il arrivera l'adoption
de la loi... le projet de loi, c'est là
que je verrai de quel bois véritablement ce gouvernement ou le ministre se sera
chauffé parce qu'il y a des propositions sur la table, d'ouvrir à
d'autres professionnels, et j'espère qu'on va en tenir compte. Mais c'est mon
souhait ou un de mes souhaits les plus humbles, si vous voulez.
M. Arseneau : Merci beaucoup.
M. Brunet (Paul G.) : Merci.
Le
Président (M. Provençal)
:
Alors, je vous remercie tous les trois pour votre contribution et votre
collaboration à l'avancement de nos travaux.
La commission ajourne ses travaux à demain
mercredi 2 février, après les affaires courantes. Merci à tous et
bonne fin de journée.
(Fin de la séance à 18 h 03)