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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Thursday, August 26, 2021 - Vol. 45 N° 84

Special consultations and public hearings on mandatory vaccination against COVID-19 for caregivers in the health sector and other categories of workers in prolonged contact with the public


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Remarques préliminaires

Mme Marilyne Picard

Mme Marie Montpetit

M. Vincent Marissal

M. Joël Arseneau

Mme Claire Samson

Auditions

M. Christian Dubé

M. Horacio Arruda

Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ)

Fédération de la santé et des services sociaux de la CSN (FSSS-CSN)

Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ)

Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ)

Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS)

Autres intervenants

M. Luc Provençal, président

Mme Joëlle Boutin

Mme Lise Lavallée

M. Sylvain Lévesque

M. Monsef Derraji

Mme Isabelle Lecours

*          M. Richard Massé, accompagne M. Horacio Arruda

*          Mme Nancy Bédard, FIQ

*          Mme Caroline Senneville, FSSS-CSN

*          M. Jeff Begley, idem

*          M. Vincent Oliva, FMSQ

*          M. Karl Weiss, idem

*          M. Louis Godin, FMOQ

*          M. Marc-André Amyot, idem

*          M. Robert Comeau, APTS

*          Mme Josée Fréchette, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures cinquante-huit minutes)

Le Président (M. Provençal)  : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur la vaccination obligatoire contre la COVID-19 du personnel soignant du réseau de la santé et d'autres catégories de travailleurs qui sont en contact prolongé avec les citoyens.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Blais (Abitibi-Ouest) est remplacée par Mme Boutin (Jean-Talon); Mme Guillemette (Roberval), par M. Lévesque (Chauveau); M. Ciccone (Marquette), par M. Derraji (Nelligan); M. Nadeau-Dubois (Gouin), par M. Marissal (Rosemont).

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Nous débuterons, ce matin, par les remarques préliminaires. Puis nous entendrons, par la suite, les personnes et organismes suivants : le ministre de la Santé et des Services sociaux, le Dr Horacio Arruda, directeur national de la santé publique, et la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec.

J'ai besoin maintenant de deux consentements. Nous avons débuté à 9 h 56. Alors, je vous demande qu'il y ait un consentement pour poursuivre au-delà de l'heure prévue qui était de 12 h 20. Consentement? Merci.

Je demande aussi... la députée d'Iberville... Oui, je demande le consentement pour que la députée d'Iberville puisse avoir un 30 secondes dans les remarques préliminaires. Et c'est un temps qui est ajouté, il n'est pas retranché à personne. Est-ce qu'il y a consentement? J'aimerais ça qu'on me dise consentement. Oui?

Des voix : Consentement.

Remarques préliminaires

Le Président (M. Provençal)  : Ça va. J'invite maintenant la députée de Soulanges à faire ses remarques préliminaires. Mme la députée, vous disposez de six minutes. La parole est à vous.

Mme Marilyne Picard

Mme Picard : Merci beaucoup, M. le Président. Je vais faire ça un petit peu plus court, comme on a commencé plus tard aujourd'hui. Je voulais saluer, tout d'abord, les collègues de l'opposition et les collègues aussi de la partie gouvernementale. Je pense que cette commission est ici pour qu'on écoute les 18 intervenants. Et c'est un exercice démocratique très important sur un enjeu qui l'est tout autant. On l'a vu, que la vaccination obligatoire a des implications sur l'intégrité physique et aussi sur le droit au travail.

Donc, je tiens à remercier particulièrement tous les groupes qui vont être devant nous aujourd'hui et demain. Nous allons entendre vos préoccupations et vos suggestions. Nous le prendrons tous en considération, tous les groupes parlementaires ici. Merci, M. le Président.

• (10 heures) •

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. J'invite maintenant la porte-parole de l'opposition officielle et députée de Maurice-Richard à faire ses remarques préliminaires pour une durée de quatre minutes. La parole est à vous.

Mme Marie Montpetit

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Bonjour, bonjour à tous. On se réunit, bien entendu, aujourd'hui, pour aborder un sujet important et sensible, celui de la vaccination obligatoire, mais ultimement ce qui nous réunit et ce qui doit guider nos discussions, c'est par quel moyen on va revenir à une vie normale. Si le gouvernement souhaite éviter de reconfiner de nouveau, de faire de nouveau des couvre-feux, ce qu'on veut savoir, c'est quel moyen supplémentaire va-t-il prendre pour qu'on parvienne à un taux de vaccination qui va enfin nous permettre de sortir de cette crise et de la mettre derrière nous.

La vaccination obligatoire des employés de la santé est une demande que le Parti libéral a fait au mois de janvier. On est rendu à la fin du mois d'août. Devant la montée de la quatrième vague, il est clair, pour nous, qu'on doit aller beaucoup plus loin. La cheffe du Parti libéral du Québec, Dominique Anglade, a demandé, dimanche dernier, au gouvernement d'exiger la vaccination de tous les employés du gouvernement, de l'éducation, des services de garde en installation ainsi que de l'Assemblée nationale et pour toutes les personnes qui fréquentent les campus collégiaux et universitaires.

Ce qui devrait guider nos actions, à l'heure actuelle, durant cette pandémie, c'est la science. Qu'est-ce qu'on sait de la science? C'est que les vaccins, ils sont sécuritaires. C'est notre seule voie de sortir de cette pandémie. Les vaccins sont une protection pour faire face à la quatrième vague et aux autres vagues qui pourraient suivre. Les vaccins nous protègent de potentiels reconfinements et les vaccins sont la façon de revenir à une vie normale.

Je vais en profiter aussi pour remercier tous les Québécois qui se sont faits vaccinés à ce jour et souligner combien leur choix aussi fait une différence pour toute la société. Certains ont hésité, certains ont eu des préoccupations, ont eu des questionnements mais ont finalement fait le choix de se faire vacciner pour se protéger, pour protéger les autres mais aussi pour protéger toute la société. Et ça, c'est une grande marque de solidarité.

En janvier dernier, comme je le disais, notre formation politique demandait la vaccination obligatoire pour le personnel de la santé. Et nous sommes certains que, si ça avait été fait à l'époque, on aurait pu éviter des éclosions, notamment, on se rappellera, dans le CHSLD Lionel-Émond où il y a eu des éclosions dues au fait qu'il y avait un taux de vaccination des employés qui étaient très bas, et éclosions qui se sont suivies par des décès.

Donc, je suis heureuse, aujourd'hui, que le gouvernement prenne enfin cette voie, tardivement, mais au moins il la prend. On souhaite qu'il la prenne de façon aussi complète, on pourra y revenir, et nous espérons aussi qu'il va élargir la portée de l'annonce qu'il a faite. J'espère que cette commission va nous amener à une réelle réflexion. J'invite, en ce sens, le gouvernement à faire preuve d'ouverture et d'écoute. J'ai entendu, d'ailleurs, hier, la présidente du Conseil du trésor fermer la porte à la vaccination obligatoire des employés de l'État, un peu comme son collègue, le ministre de la Santé l'avait fait il y a quelques mois pour les travailleurs du réseau de la santé.

On ne peut pas se permettre encore de se réveiller en retard, parce que, soyons sérieux, la commission qui nous réunit aujourd'hui, elle se réunit beaucoup trop tard. Le gouvernement aurait dû profiter de la dernière session, aurait dû profiter de l'été pour faire les discussions que nous allons faire aujourd'hui pour être sûr, justement, d'être prêt à faire face à la quatrième vague, qui est déjà débutée.

J'ajoute aussi qu'on se réunit avec assez peu d'information sur le plan de match du gouvernement en matière de vaccination obligatoire. Peut-être pourra-t-il nous l'expliquer tantôt, mais le ministre a été assez avare de détails sur l'échéancier et sur les modalités. On espère que les réflexions ont été faites en amont, justement, de l'annonce qui a été faite également. C'est important, parce que, rappelons-le, si ce n'est pas la vaccination, les outils que le gouvernement utilise à ce jour, c'est le reconfinement et c'est le couvre-feu. Donc, on doit faire ces débats-là avec respect, avec ouverture, mais, une chose est claire, il faut être clair sur les enjeux. Les décisions qui seront prises par le gouvernement ou le délai à les prendre pourront retarder un retour à une vie normale, et c'est pour ça qu'on souhaite de façon très, très claire que la vaccination obligatoire soit élargie, et le soit rapidement. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député de Rosemont à faire ses remarques préliminaires pour une durée d'une minute. À vous la parole.

M. Vincent Marissal

M. Marissal : Merci, M. le Président. Chers collègues, c'est pour moi un début dans le bain du domaine de la santé. Je peux dire que l'eau est assez chaude pour arriver. Tant mieux, parce qu'on a beaucoup de choses à discuter. La pandémie, depuis 18 mois, nous a amenés en terrain inconnu, nous amène à prendre des solutions inusitées, voire exceptionnelles. C'est certainement le cas quand on force, par exemple, la vaccination d'un groupe ou qu'on demande un passeport vaccinal pour des activités courantes auxquelles on est habitué.

Je précise là-dessus que nous avions demandé, ma formation politique, une commission parlementaire aussi sur le passeport vaccinal. À constater les contradictions, depuis quelques jours, de la part du gouvernement, je pense que c'est toujours nécessaire d'avoir une commission parlementaire pour cette chose inusitée. Malheureusement, on ne nous l'a pas accordée. On va quand même faire celle sur la vaccination obligatoire. Parce que je pense que la clé ici, le maître mot ici, ça doit être la cohérence, parce que, sans cohérence, il n'y aura pas d'adhésion. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, M. le député. J'invite maintenant le porte-parole du troisième groupe d'opposition et député des Îles-de-la-Madeleine à faire ses remarques préliminaires pour une durée d'une minute. La parole est à vous.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Merci beaucoup, M. le Président. Merci à tous les participants. En fait, nous, pour entrer dans le vif du sujet, au Parti québécois, on estime que cette mesure inédite a besoin, évidemment... être discutée en profondeur, comme l'est aussi la mesure du passeport sanitaire, qui, malheureusement, n'a pas fait l'objet d'un tel débat, un tel débat qui est absolument essentiel, parce qu'on parle maintenant non plus d'une vaccination, à laquelle, évidemment, on souscrit, une vaccination non pas, là, qui est encouragée mais qui est obligée par la contrainte.

Donc, on a de nombreuses questions et des attentes à savoir pourquoi le gouvernement, aujourd'hui, estime que c'est le seul moyen d'atteindre les objectifs de vaccination souhaités pour sortir de cette pandémie, comme on le souhaite tous. On déplore que l'on procède à l'envers, avec une décision qui est déjà prise, en amont des discussions avec les experts, avec les juristes, avec les éthiciens, avec les représentants des différentes catégories d'emploi qui seront en jeu. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, M. le député. J'invite maintenant la députée d'Iberville à faire ses remarques préliminaires pour une durée de 30 secondes.

Mme Claire Samson

Mme Samson : Merci, M. le Président. M. le Président, je dois vous dire que je déplore sincèrement que cette commission ne soit pas habilitée à formuler des recommandations, encore moins à voter. Je pense que la commission aurait dû pouvoir jouer pleinement son rôle. Et l'idée d'être une figurante dans une activité de marketing du gouvernement ne me plaît pas tellement. D'entendre... De prétendre entendre des intervenants sans les écouter, c'est beaucoup mépriser ces intervenants-là et les élus. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, Mme la députée, pour ces remarques préliminaires.

Auditions

Nous allons maintenant débuter les auditions. Je souhaite la bienvenue au ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à commencer votre exposé. À vous la parole.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, merci beaucoup, M. le Président. On est en séance de commission parlementaire pour étudier une question qui est très cruciale à ce stade-ci de nos efforts de la lutte contre la COVID au Québec. Je tiens à saluer mes collègues parlementaires des deux côtés de la Chambre, qui vont siéger sur cette commission, puis j'apprécie à l'avance votre travail, mais je suis aussi accompagné de ma sous-ministre à la Santé, Mme Dominique Savoie, qui fait un travail colossal depuis le début de la pandémie. Depuis le début de la pandémie, on a toujours gardé le même objectif, à savoir de protéger les clientèles les plus vulnérables contre le virus pour limiter les hospitalisations puis, ultimement, les décès.

Il faut peut-être faire très rapidement un petit portrait de la situation des vagues précédentes. En fait, dans les vagues précédentes, c'est plus de 380 000 cas qui ont été déclarés depuis la pandémie. Parmi ceux-ci, 45 000 étaient chez les travailleurs de la santé, soit plus de 10 % des cas. Seulement lors de la première vague, ce pourcentage était encore plus élevé avec 25 % des cas. Soulignons, à titre d'exemple, que le risque d'infection des travailleurs de la santé, lors de la première vague, était neuf fois plus élevé que chez les adultes en général.

Maintenant, au niveau de la quatrième vague, en ce début de quatrième vague, nous sommes confrontés à une hausse, qui est préoccupante, des nouveaux cas et à une tendance à la hausse des hospitalisations. La situation dans nos milieux de soins est fragile et les intervenants de la santé sont au coeur de nos préoccupations. En ce moment, alors que plus de 10 000 cas de la COVID ont été déclarés en six semaines, 5 % sont des travailleurs de la santé. En date du 23 août dernier, plus de 2 500 employés étaient encore absents du travail en lien avec la COVID, dont plus de 130 étaient absents parce qu'ils avaient contracté la COVID et plus de 1 500 étaient en retrait préventif. La situation est très préoccupante, et surtout avec les effets de la rentrée et du retour au travail, qui ne se sont pas encore fait sentir, avec le variant Delta, qui gagne en plus du terrain. Nous devons, donc, redoubler de vigilance.

• (10 h 10) •

Maintenant, quelques mots sur la vaccination. La vaccination, la bonne nouvelle, c'est que notre couverture vaccinale continue d'augmenter chaque jour. Le Québec affiche, d'ailleurs, l'un des meilleurs taux de vaccination au monde. En date du 26 août, la couverture vaccinale avait atteint 86 % chez les 12 ans et plus pour la première dose et 77 % pour la deuxième dose, pour un total de plus de 12 millions de doses qui ont été administrées dans les derniers mois. J'en profite pour remercier encore une fois tous les Québécois qui sont allés se faire vacciner.

Maintenant, pour la vaccination des travailleurs de la santé, la campagne de vaccination est un succès à bien des égards, notamment auprès des travailleurs de la santé, dont 91 % avaient reçu une première dose en date du 25 août et 86 % avaient reçu leur deuxième dose. Cela démontre l'accueil favorable de la vaccination chez ces personnes et témoigne de la culture de protection des travailleuses et travailleurs de la santé déjà bien implantée dans le réseau de la santé et des services sociaux. Les travailleurs de la santé ont été parmi les premiers groupes priorisés lors du début de la vaccination en décembre dernier, en même temps que les personnes les plus vulnérables.

Par contre, nous étions quand même inquiets du taux de vaccination des travailleurs de la santé et, pour augmenter ce taux, nous avons, d'ailleurs, adopté, le 9 avril dernier, un arrêté ministériel pour rendre les tests de dépistage obligatoires trois fois par semaine pour les travailleurs de la santé qui n'avaient pas reçu de première dose. Cette mesure nous a permis d'atteindre de nouveaux objectifs, mais son effet ne se fait plus ressentir. J'aimerais rappeler que le 91 % ne touche que le personnel du réseau de la santé publique. La balance du 9 %, c'est environ 30 000 employés qui ne sont pas vaccinés et qui côtoient toujours des populations vulnérables.

Pour ce qui est du personnel de la santé privée, nous n'avons pas les données exactes au privé puisqu'ils sont des employés d'entreprises privées. Par contre, on note, dans le réseau privé conventionné, des taux légèrement inférieurs à ceux du public. De plus, nous avons des indications des propriétaires et des comités d'usagers que, dans le réseau privé en général, le taux de vaccination des employés serait légèrement inférieur à ceux du public.

Rappelons aussi que ce qu'on veut éviter, c'est des infections de travailleurs dans les milieux de vie et de soins, qu'ils soient publics ou privés, et qui peuvent entraîner encore d'autres bris de services. Dans un contexte où les ressources sont extrêmement sollicitées, nous ne pouvons pas nous permettre de retirer davantage de personnel pour des raisons qui auraient pu être évitées grâce à une vaccination adéquate.

Depuis le début de la campagne de vaccination, nous avons mis tout en oeuvre pour assurer l'accessibilité de la vaccination à un maximum de citoyens dans toutes les régions du Québec. Des efforts particuliers ont été déployés pour rejoindre des groupes ciblés, de nombreuses campagnes de publicité ont été faites pour cibler les différents groupes d'âge, les différentes communautés, pour informer et inciter à... la population à la vaccination. Et, tout récemment, nous avons annoncé l'implantation du passeport vaccinal pour les activités non essentielles, à compter du 1er septembre, pour éviter que certains lieux deviennent des foyers d'éclosion et conserver une certaine normalité pour la population qui est adéquatement vaccinée. Et toutes ces actions ont permis d'augmenter notre couverture vaccinale.

Maintenant, après les clientèles vulnérables, qui étaient, comme tout le monde se rappelle, notre groupe numéro un, nous avons toujours mis une priorité sur les travailleurs de la santé et leur protection, qui est notre groupe numéro deux. De plus, dans cette optique de protéger le personnel, nous avons maintenu une discussion constante avec les syndicats des employés de la santé, et il a été convenu, en mars dernier, de communiquer l'importance de la vaccination à tous leurs membres, et nous tenons à remercier les syndicats pour avoir fait cette collaboration avec nous, qui est si importante.

Mais, malgré les chiffres exceptionnels, nous voulons continuer d'augmenter notre taux de vaccination pour les employés de la santé. Aujourd'hui, nous franchissons une étape de plus en voulant rendre la vaccination obligatoire auprès de tous les intervenants en santé. Notre objectif avec cette mesure est de protéger nos personnes plus vulnérables mais aussi de maintenir la capacité hospitalière et maintenir notre niveau de services et de soins, notamment en réduisant l'absentéisme.

Notre proposition, qui suit la recommandation de la Santé publique, est, donc, de rendre la vaccination obligatoire pour tous les intervenants en santé et services sociaux qui sont en contact rapproché pendant plus de 15 minutes avec les usagers sur une base quotidienne, et ce, à compter du 15 octobre prochain. Cela concerne les intervenants des milieux publics et privés, les CLSC, les centres hospitaliers de soins généraux et spécialisés et psychiatriques, les CHSLD, les centres de protection de l'enfance et de la jeunesse, les centres de réadaptation, les établissements privés non conventionnés, les entreprises d'économie sociale en aide à domicile, ce qu'on appelle les EESAD, les RI, les RTF et les résidences privées pour aînés, les RPA.

Cela inclut les intervenants du réseau, par exemple le personnel en soins infirmiers et cardiorespiratoires, les préposés aux bénéficiaires, les services auxiliaires et métiers, le personnel de bureau, les techniciens et professionnels de l'administration, les techniciens et professionnels de la santé et des services sociaux mais aussi les stagiaires, les médecins et le personnel d'encadrement. Ça inclut également les intervenants du privé qui sont hors réseau comme les GMF, les bénévoles, les proches aidants et le personnel des milieux de vie, tout comme les techniciens ambulanciers paramédics, les chirurgiens dentistes, les spécialistes en chirurgie buccale et maxillo-faciale et les optométristes oeuvrant dans un établissement.

Tous ces intervenants devront fournir à leurs employeurs une preuve de vaccination complète. S'ils refusent de fournir cette preuve, ils devront être réaffectés à d'autres tâches visées par leur type d'emploi lorsque cela sera possible. S'ils refusent une réaffectation ou si celle-ci n'est pas possible, ils ne pourront réintégrer leur travail et seront sans rémunération.

Je suis très conscient que la vaccination obligatoire des travailleurs de la santé n'est pas une décision facile, mais nous croyons fermement qu'elle est nécessaire. J'en profite pour souligner, au nom de tous les Québécois, le travail exceptionnel de notre personnel de la santé depuis le début de la pandémie.

Maintenant, puisque cette mesure s'inscrit dans une démarche globale visant à protéger la population québécoise mais aussi parce que la vaccination obligatoire touche à l'intégrité physique des personnes et au droit du travail, il nous apparaît légitime de débattre de la question pour dégager un consensus dont bénéficiera l'ensemble de notre collectivité de même que nos équipes d'intervenants.

Je remercie encore une fois les membres de la commission et tous les intervenants qui viendront témoigner au cours des deux prochains jours. Je remercie... je vous remercie pour votre collaboration, qui sera, j'en suis certain, des plus fructueuse et constructive. Et, en terminant, j'aimerais aussi remercier le travail du Dr Massé dans ce dossier mais aussi pour tout le travail qu'il a fait au cours des derniers mois. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant initier la période d'échange. Alors, Mme la députée de Soulanges, la parole est à vous.

Mme Picard : Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour votre présence ici, en commission. Votre apport va être très important pour nous. J'aimerais savoir sur quoi vous vous basez pour prendre cette décision d'obliger les travailleurs de la santé à la vaccination obligatoire. On le voit dans plusieurs juridictions dans le monde qui imposent la vaccination obligatoire, et c'est surtout pour le personnel soignant comme c'est le cas en France et en Italie, au Royaume-Uni et en Grèce la vaccination est obligatoire pour les employés des maisons de retraite y compris le personnel non médical, et parfois ça suscite des incompréhensions. Pouvez-vous nous donner les détails sur le processus décisionnel qui vous a amené à envisager cette mesure?

M. Dubé : Très bien. Premièrement, bonjour. En fait, je vous dirais que, comme toutes les grandes décisions qui ont été prises depuis le début de la pandémie, ça nous prend un avis de la Santé publique pour être capable d'agir sur ces grandes questions là, parce que le gouvernement agit en réaction à des propositions de la Santé publique.

Dans le cas, ici, qui nous concerne, étant donné les différents points que j'ai expliqués, étant donné l'impact sur l'intégrité physique des personnes, ce que... l'avis de la Santé publique a été un avis préliminaire, un avis préliminaire parce qu'on a pris la décision, lorsqu'on a pris tous les éléments en cause, de dire que je pense que, dans le cas de cette décision-là, il était important pour nous d'avoir une réflexion avec nos collègues de l'Assemblée nationale. Donc, je vous dirais, comme à l'habitude, Santé publique, mais, dans ce cas-ci, un avis préliminaire plutôt qu'un avis définitif sur lequel on peut prendre une décision. Alors donc, on a maintenant cet avis préliminaire là qui le recommande.

Je crois aussi que vous pouvez très bien suivre, Mme la députée, puis je vais y aller rapidement, que la situation évolue très, très rapidement. Puis c'est certain que, dans les dernières semaines, étant donné les prévisions que le ministre fait à toutes les semaines puis qu'on a vues dans les journaux, je pense qu'il faut voir l'importance de régler ça rapidement.

Dernier point. Je pense qu'on s'est entendu clairement, puis je vous donnerais quelques exemples de critères qui ont guidé non seulement la Santé publique, vous pourrez en discuter avec le Dr Arruda et le Dr Massé, mais je dirais que le principal argument, c'est la vulnérabilité de la clientèle, ça, c'est le principal argument. Mais aussi il faut regarder les historiques d'éclosions que nous avons eues dans le domaine de la santé, dans nos milieux de vie, la relation de cause à effet des employés de la santé mais aussi versus des usagers. Et je pense que c'est important de dire que les effets positifs d'une vaccination obligatoire sont beaucoup plus grands que les préjudices qu'il pourrait y avoir.

Maintenant, je pense qu'il est important, puis je conclus là-dessus, Mme la députée, qu'il faut maintenir la confiance du public dans son réseau de la santé. Et, dans ce contexte-là, il faut limiter au maximum les risques qui nous viennent par les travailleurs de la santé et par l'ensemble du réseau. Donc, c'est pour ça qu'on en est arrivés à cette recommandation-là.

• (10 h 20) •

Mme Picard : Merci beaucoup. Vous avez récemment publié des données qui démontraient que la deuxième dose a un impact significatif sur la baisse des hospitalisations. Est-ce qu'on voit vraiment une différence entre la deuxième et la quatrième vague en termes d'impact de la vaccination?

Les chiffres publiés hier sont nettement en hausse avec 550 nouveaux cas, et les hospitalisations montent aussi, un plus huit, pour un total de 110 lits. Mais je pense qu'aujourd'hui ça a monté aussi, surtout au niveau des cas que j'ai vus. Quand qu'on compare les chiffres de la rentrée cette année par rapport à ceux de l'année passée alors qu'il y a des personnes qui n'étaient pas vaccinées, on voit que c'est beaucoup plus élevé. Pouvez-vous nous donner des exemples de l'efficacité de la vaccination?

M. Dubé : Bien, écoutez, j'ai publié... puis je ne veux pas prendre trop de votre temps pour aller dans le détail des chiffres, mais j'ai publié, la semaine passée, là, quand on regardait les trois premières semaines d'août, qu'on voyait que les cas avaient triplé par rapport à l'an dernier. La bonne nouvelle, puis il faut regarder où sont les bonnes nouvelles, il n'y a pas eu le même... du taux de croissance au niveau des cas des hospitalisations. Donc, ça, c'est la bonne nouvelle, donc c'est la preuve que la vaccination fonctionne malgré un variant beaucoup plus fort. Ça, c'est le premier point.

Mais, en même temps, et c'est pour ça qu'on le voit, il y a une différence très importante pour ceux qui ne sont pas vaccinés. Puis je prends.... Et c'est pour ça qu'on a demandé, ce matin, aux gens d'accélérer la publication des chiffres. Ce matin, on a déjà plus de 600 cas dans la... qui sont les cas d'hier, en fait, et on voit maintenant de façon très claire, à chaque jour... et malheureusement c'est très clair que les personnes qui rentent à l'hôpital ou qui vont aux soins intensifs sont à 90 % et plus des gens qui sont non vaccinés ou non adéquatement vaccinés.

Donc, le lien entre la vaccination puis la limitation des cas est de plus en plus clair, puis je pense que c'est pour ça qu'incluant les travailleurs de la santé il faut faire l'effort qu'on est en train de faire. Parce que, je le répète, les neuf personnes... les 9 % du réseau de la santé qui n'est pas vacciné, c'est quand même 30 000 personnes, c'est 30 000 personnes qui sont en contact avec des personnes vulnérables et qui ne sont pas vaccinés.

Mme Picard : Merci. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Boutin : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. le ministre, de votre présence en commission aujourd'hui, ainsi que Mme Savoie. Merci infiniment.

J'ai deux brèves questions que vous avez abordées un peu dans votre présentation, d'ailleurs. Est-ce que vous voyez une incidence ou une corrélation directe entre la vaccination des usagers et des travailleurs de la santé sur la chute des éclosions dans les milieux de vie?

M. Dubé : Mon Dieu! Si j'avais la chance de vous montrer un tableau, je vous le ferais. Parce que Mme Savoie sait que j'aime beaucoup les tableaux avec les équipes au ministère de la Santé. Mais il est très, très clair...

Une voix : ...

M. Dubé : En fait, c'est des choses qu'on regarde. Mais rapidement, là, parce qu'on n'a pas beaucoup de temps, lorsqu'on regarde, par exemple, dans la troisième vague, là, qui est celle où on a commencé à avoir le bénéfice de la vaccination, on avait, à un moment donné, au plus haut de la vague, environ 30 000 cas actifs. Et on a suivi, là, avec des courbes, maintenant, l'effet de la vaccination. Puis on est passé... seulement en allant dans les CHSLD et les RPA, qui sont nos principaux groupes, on a vu les cas dans les CHSLD passer de 4 % des cas, c'est-à-dire aux 30 000 cas actifs, à 1 % à l'intérieur de six semaines. C'est majeur. C'est-à-dire que les cas ont baissé de 20 000 à 10 000, mais les éclosions dans les CHSLD et les principaux sites ont baissé rapidement.

Ce qu'on a vu, par contre, puis je l'ai expliqué tout à l'heure... c'est qu'on a vu, après ça, une stabilisation des cas mais de la vaccination, et c'est pour ça qu'on a décidé, au mois de mars, de faire un effort supplémentaire puis de dire aux gens on était rendus à peu près à 60 % de taux de vaccination. Et on a fait l'effort supplémentaire mais toujours en respect des gens pour dire : Bien, écoutez, au moins ajoutez un test pour être capable d'avoir des tests pour être capable de... ceux qui n'étaient pas vaccinés. Ce qu'il est arrivé, c'est qu'on a monté jusqu'à 90 %. Et, dans la quatrième vague, on le voit très bien que ce 90 % des gens qui sont vaccinés a encore plus d'impact. Parce que, moi, la bonne nouvelle que je vois pour le moment, c'est qu'en ce moment on a beaucoup de cas, mais on en a très, très peu dans nos milieux de vie puis dans nos milieux de soins.

Donc, la vaccination, pour moi, non seulement elle fonctionne en termes d'impact, mais elle fonctionne aussi autant pour les employés que pour les usagers qui sont en contact avec... les employés qui sont en contact avec les usagers. Donc, on est certain que ça fonctionne et on a l'exemple de la troisième et la quatrième vague qui est très, très frappant.

Mme Boutin : Dans la même veine, bon, depuis le début de la campagne de vaccination, on a vu aussi que... on a constaté que, pour des patients qui étaient plus âgés ou plus fragiles, il y avait une baisse de l'efficacité des vaccins dans le temps, bien que, bon, oui, ça a eu un impact, là, comme vous venez de le mentionner, sur les éclosions. Mais est-ce que vous pourriez... on pourrait revenir un petit peu dans le temps pour revenir dans le contexte de la troisième vague au printemps dernier? Vous avez mentionné brièvement, là, lorsque vous parliez avec ma collègue de Soulanges, un historique concernant les éclosions et les dates clés concernant la vaccination des employés, l'effet de la vaccination. Est-ce que vous avez eu des moments charnières dans la troisième vague?

M. Dubé : Bien, peut-être pour reprendre, ce que je vous dirais, moment charnière, on a commencé à vacciner les usagers et les employés en même temps. Rappelez-vous, là, on était contents de commencer à faire ça au début de janvier. Et tout de suite on a vu, après six semaines, parce que c'est à peu près ça que ça nous a pris pour vacciner notamment dans les CHSLD... Et c'est pour ça qu'on vaccinait et les usagers et les employés. Alors, ça, c'est une date clé.

Comme j'ai dit, après avoir réalisé que ça allait bien de ce côté-là puis qu'on commençait à avoir plus de vaccins, rappelez-vous, parce qu'au début on n'en avait pas, de vaccin, il a fallu... Après ça, je pense qu'on est au mois de mars, là, j'essaie de vous donner des dates générales, c'est là qu'on a pu accélérer la vaccination dans nos travailleurs de la santé, parce que, là, on commençait à avoir de plus en... Ça peut paraître surprenant, mais, dans ce temps-là, on était contents de vacciner 10 000 personnes par jour, vous vous en rappelez.

Alors, c'est pour ça que je pense que dates clés : début janvier; mars, on commence à avoir plus de vaccins pour nos employés de la santé; puis, maintenant, je vous dirais, durant l'été, on a été capable de compléter tout le monde pour arriver au 90 %, 91 % qu'on est aujourd'hui. Mais, en même temps, 91 % avec une clientèle vulnérable, moi, pour moi, ce n'est pas assez.

Mme Boutin : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Merci beaucoup. Merci, M. le ministre, de prendre le temps de venir nous parler. Vous en avez probablement entendu parler, du médecin... de la médecin intensiviste qui travaille dans un hôpital de ma région, qui fait plusieurs sorties dans les tribunes publiques pour nous parler de ce qu'il se passe dans le réseau. Et elle nous partage les constats qu'elle fait à l'effet qu'actuellement c'est beaucoup de jeunes qui se retrouvent en soins à l'hôpital et c'est des jeunes qui n'ont pas nécessairement d'antécédents médicaux mais qu'ils ont un point en commun, c'est qu'ils sont non vaccinés. Et elle rappelle... puis je la remercie, parce qu'elle rappelle notamment l'importance de la vaccination, qui est une mesure importante de protection.

Mais, du côté du personnel soignant, y a-t-il eu des conséquences de manque de vaccination d'employés dans certaines unités? Et avez-vous des exemples?

• (10 h 30) •

M. Dubé : Oui, bien, malheureusement, la députée de Maurice-Richard a donné un bon exemple tantôt, là, que je peux reprendre, là. Je pense, entre autres, à l'unité des soins de cancérologie du CHU à Sherbrooke, là. On est au mois de juin, on est au mois de juin, puis il y a une éclosion qui est survenue dans la... au niveau de la cancérologie. Puis, écoutez, encore une fois, là, ce n'est pas pour accuser personne, mais l'éclosion, ce qu'on nous explique, aurait été déclenchée par un employé qui était contaminé — où il aurait été contaminé, on ne le sait pas — mais entraînant le décès de quatre patients. Et il y a eu 16 usagers qui ont été infectés par la suite, dont quatre décès.

Alors donc, quand on regarde ces cas-là... Je le répète, il y a eu un effort incroyable qui a été fait dans l'ensemble du réseau sur les travailleurs de la santé, mais, étant donné l'impact de ce nouveau variant là, qui était très peu présent au début, on l'a vu comment il a augmenté, je pense qu'en ce moment même... et je le répète, même à 91 %, étant donné le contexte, les clientèles très vulnérables, pour moi, on ne peut plus se permettre ce genre d'événement là et on est rendu à cette étape-là. On avait un plan très clair où on suivait le plan, mais je crois... et les gens comprennent très bien aujourd'hui qu'on s'est ajustés.

Maintenant, ce qui m'inquiète encore plus, c'est que je vous ai dit : On sait que c'est 91 % dans le réseau public, mais on n'a pas ces statistiques-là dans le réseau privé. Puis on en a, des RI, on en a, des RTF. Ma mère est dans une RPA. On en a partout, des gens qui font affaire avec le réseau privé, où il n'y a pas cette obligation-là parce que ce ne sont pas nos employés. Alors, c'est sûr que je le redis, c'est une décision qui est difficile, je pense aux EESAD, je pense à tout ça. Alors, pour nous, pour... Il y a des exemples malheureux, très malheureux, mais je pense qu'il faut faire un effort encore plus, malgré tous les efforts qui ont été faits jusqu'à maintenant.

Mme Lavallée : Je vous remercie, M. le ministre.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Chauveau.

M. Lévesque (Chauveau) : Oui, merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre, Mme la sous-ministre, chers collègues, merci. Je suis très heureux d'être là, ce matin, pour discuter de ce sujet-là superimportant. Et, M. le ministre, on le sait, là, il y a beaucoup de personnes présentement dans les... personnel du ministère de la Santé qui sont quand même en arrêt de travail pour toutes sortes de raisons, épuisement. On l'a vu, ça a bougé, beaucoup brassé, hein, on voit même des manifestations arriver où est-ce que les gens disent : On est à bout de souffle. Nos anges gardiens sont fatigués.

Moi, j'entends bien votre désir de vouloir améliorer la situation, protéger les vulnérables, les personnes les plus vulnérables, puis c'est très, très louable, mais la crainte que je peux avoir, là, quand on va imposer la vaccination obligatoire... Est-ce que ça pourrait entraîner certains bris de service à l'intérieur? Parce qu'il y a des gens, peut-être, qui vont être réfractaires, qui vont refuser. Vous l'avez nommé dans vos objectifs tout à l'heure, là. Est-ce que vous craignez certains bris de service à l'intérieur du réseau de la santé et des services sociaux?

M. Dubé : La réponse, c'est oui. Je pense que c'est pour ça qu'on a retardé cette décision-là le plus possible. Encore une fois, on est avec... Puis je pense que c'est une très bonne question, M. Lévesque, M. le député, parce que... Puis je dirais que c'est pour ça qu'on a pris vraiment le temps de dire : Est-ce qu'on a fait tout ce qu'il fallait faire avant d'aller à la vaccination obligatoire? Ça, c'est la première chose. Puis c'est sûr que ça peut... ça nous inquiète, parce qu'on le voit comment notre personnel a été surmené dans... Puis c'est pour ça que je les en remercie tous les jours que le bon Dieu amène, parce qu'ils ont fait un travail merveilleux. On ne fait pas ça par plaisir aujourd'hui, là, donc on se comprend bien.

Par contre, on sait, puis on l'a vu, que, dans les derniers mois, plus on avançait dans la vaccination, plus les gens appréciaient l'environnement sécuritaire qu'on leur donnait. Parce qu'il n'y a rien de pire, pour un employé de la santé qui est vacciné, de savoir qu'un de ses collègues, dans le même milieu de travail, n'est pas vacciné. Alors donc, je pense qu'il y a un équilibre entre : oui, il y a peut-être un risque d'en perdre quelques-uns, mais il y a aussi un risque de fournir... et l'objectif de fournir un meilleur environnement. Puis il n'y a pas personne, dans le domaine de la santé, qui ne pense pas, à chaque soir, en rentrant à la maison, à ses enfants ou à sa famille, puis de dire : Est-ce que j'ai contracté le virus? Non seulement c'est triste pour moi, mais pour ma famille. Puis on l'a vu, et vice versa, comment ça arrive, c'est souvent peut-être à la maison avec les enfants que les gens contractent le virus puis reviennent dans le milieu de la santé.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, nous allons maintenant céder la parole à la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Bonjour, M. le ministre. Bonjour, Mme Savoie. Heureuse d'avoir l'occasion d'échanger avec vous aujourd'hui.

D'entrée de jeu, M. le ministre, vous avez fait référence à un avis de la Santé publique. J'imagine que, par souci de transparence, vous pouvez partager ça avec les membres de la commission, aujourd'hui, et le rendre public?

M. Dubé : Je pense qu'il est encore un avis préliminaire. Je vous laisserai en discuter avec le Dr Arruda.

Mme Montpetit : Bien, vous avez souvent fait référence à la transparence. C'est une décision qui est importante, la vaccination.

M. Dubé : Tout à fait, tout à fait, tout à fait.

Mme Montpetit : Je vous invite à le partager pour qu'on puisse faire les échanges que l'on souhaite.

M. Dubé : Vous aurez amplement le temps de le discuter avec le Dr Arruda, qui sera ici dans quelques minutes.

Mme Montpetit : Parfait. Donc, j'entends que vous n'avez pas la volonté de le partager. C'est parfait, ça commence bien.

M. Dubé : Ce n'est pas ça que j'ai dit, j'ai dit que vous pouvez le discuter avec le Dr Arruda.

Mme Montpetit : Mais c'est votre décision de le rendre disponible ou pas.

M. Dubé : Très bien, très bien.

Mme Montpetit : Parfait. Moi, j'aimerais ça savoir... Parce que, bon, vous faites référence, encore là, à un avis de la Santé publique, alors que la Loi sur la santé publique, elle est quand même assez claire avec l'article 123, que je vous lis pour rappel, qu'au cours d'une urgence sanitaire, le ministre peut «ordonner la vaccination obligatoire de toute la population ou d'une certaine partie de celle-ci» sans délai et sans formalité.

Pourquoi avoir fait le choix d'attendre? On a eu ces échanges-là au mois de janvier, vous y avez fait référence vous-même, il y a eu... Bon, je ne suis pas sûre que j'aurais qualifié ça d'exemples malheureux, mais il y a eu des éclosions, il y a eu des décès, il y a des gens, aujourd'hui, qui ont des proches... qui ont perdu des proches dans des CHSLD, effectivement, et au CHU, en cancérologie, parce que, justement, il y a des employés qui n'étaient pas vaccinés, parce qu'on les a laissés dans des milieux de soins. Pourquoi ne pas avoir pris cette décision-là plus tôt? Et pourquoi aujourd'hui le faire? Et est-ce que ça va être la même logique pour les autres secteurs aussi, d'attendre encore?

M. Dubé : Bien, écoutez, je pense qu'on ne peut pas nous reprocher, là, de suivre les recommandations de la Santé publique, c'est ce qu'on fait depuis le début, puis je pense que vous êtes en accord avec ça que c'est ce qu'on fait depuis le début.

Maintenant, il faut faire une différence. Quand vous parlez de l'article 123 ou 126, qui est corollaire à ça, il y a une grande différence entre obliger la vaccination, c'est de dire de forcer quelqu'un à le piquer. C'est ça que la loi peut permettre jusqu'à l'extrême dans certains cas. Ce n'est pas de ça qu'on parle ici. Ce qu'on parle ici, c'est de dire aux gens : Si jamais vous ne voulez pas être vacciné, vous ne pourrez plus travailler. Il y a une grande, grande différence ici. Parce que je pense, et ça sera au Dr Arruda de vous expliquer, là, ce que la loi nous permet puis les mesures d'urgence nous permettent, on pourrait aller obliger quelqu'un de dire : Vous êtes... vous travaillez, et je vous pique. Ce n'est pas de ça qu'on parle ici.

Alors, pour répondre à votre question, je pense... puis j'ai bien expliqué, dans mon texte, un peu plus tôt, Mme la députée, puis j'apprécie votre question... j'ai expliqué qu'on a suivi plusieurs étapes, plusieurs étapes depuis le début, tout en trouvant l'équilibre entre respectant le droit des employés, leur vie personnelle, la façon dont on les traite, on traite leur intégrité mais aussi d'être capable d'avoir le plus de volontariat possible. L'arrivée de la quatrième vague nous met devant cette situation-là, puis on va agir.

Mais on croyait qu'il était important, pour une décision aussi cruciale, de venir consulter nos collègues et les experts. Il y aura plus de 15 experts qui seront ici au cours des deux prochains jours. Je pense que c'est la bonne façon de travailler.

Mme Montpetit : Vous avez... D'entrée de jeu, dans votre allocution, vous avez dit que la vaccination obligatoire aux travailleurs de la santé allait s'appliquer à tous les employés et, par la suite, vous avez nuancé en disant qu'elle allait s'appliquer seulement aux employés, aux travailleurs de la santé qui sont dans un contact rapproché pendant plus de 15 minutes avec la clientèle. Je vous laisserai certainement expliquer plus clairement ce qu'est un contact rapproché dans d'autres circonstances que cette commission.

Moi, ce que je veux savoir plus précisément, c'est pourquoi vous avez fait le choix d'exclure certains patients. Ce qu'on a appris dans les trois dernières vagues, c'est qu'il y a eu de la transmission entre les employés. Il y a eu de la transmission notamment dans les salles de pause, dans les cafétérias, dans les couloirs. Et là vous prenez la décision... Ça fait un peu demi-mesure d'exclure du personnel qui, lui, pourrait se retrouver en contact avec des soignants qui, eux, sont en contact avec des patients. Donc, j'aimerais savoir pourquoi vous prenez ce risque, pourquoi vous prenez le risque d'exclure des patients et de ne pas inclure... des travailleurs de la santé, pourquoi ne pas inclure tous les travailleurs de la santé qui sont dans un milieu de soins, notamment.

M. Dubé : O.K. Bien, en fait, ça a été une discussion qu'on a eue avec... encore une fois, je m'excuse de me répéter, mais c'est la logique qu'on a suivie, c'est de regarder l'équilibre entre les différents critères que j'ai expliqués tout à l'heure, le critère, entre autres, de vulnérabilité. C'est sûr qu'il n'y a pas la même vulnérabilité d'un employé qui est en administration ou dans un bureau puis quelqu'un qui est dans une salle de chirurgie.

Mais ce qu'on a fait, c'est qu'on a demandé à l'équipe du Dr Arruda... Puis c'est pour ça qu'encore une fois je remercie le Dr Massé, avec toute son équipe, qui ont fait un travail... C'est eux qui sont arrivés avec la recommandation, Mme la députée, là, qui sont arrivés puis qui ont dit : Écoutez, on veut que ce soient tous les travailleurs de la santé, mais le principe, c'est d'avoir un contact important avec le patient. Et, ce contact-là, ils l'ont défini par un contact de plus de 15 minutes avec un patient. Moi, je vous dis, avec les premiers calculs qu'on a faits, ça rejoint à peu près 500 000 personnes.

Mais 300 000 personnes du réseau public, 300 000 personnes qui sont vaccinées à 90 %, 91 %, ça fait quand même 30 000 personnes, dans le public, qui ne sont pas vaccinées. Et, dans le privé, si on prenait les mêmes pourcentages, puis je pense qu'ils sont un peu plus bas, on a...

Une voix : ...

M. Dubé : Non, mais juste pour terminer... Non, mais juste pour terminer...

Mme Montpetit : Est-ce que vous pouvez nous confirmer qu'il n'y a eu aucune éclosion qui est venue du personnel que vous allez exclure de votre directive?

• (10 h 40) •

M. Dubé : Je ne peux pas vous confirmer ça, madame, parce qu'on a... Mais ce que j'aimerais vous dire, juste pour terminer mon point, on parle ici, là, de 30 000 personnes qui ne sont pas vaccinées dans le réseau public et on parle d'au moins la même chose du côté du réseau privé. Alors, quand on pense aux RPA, on pense aux RI, du personnel, des employés, des patients vulnérables qui sont souvent handicapés, etc., je pense qu'il y a une décision importante de prendre par rapport à 50 000, 60 000, 70 000 personnes qui ne sont pas vaccinées et qui sont en contact avec les patients, et c'est pour ça qu'on prend cette décision-là. Voilà.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Nelligan.

M. Derraji : Merci, M. le Président. Bonjour. J'ai vu que vous aimez les tableaux, donc, moi aussi, j'aime aussi les tableaux. Donc, on parle d'un plan de réaffectation d'un minimum de 60 000 employés. Donc, il y a 30 000 dans le secteur public, 30 000 dans le secteur privé. Donc, j'ai entendu que vous allez proposer la réaffectation. Si c'est un refus, c'est un congé sans solde. C'est quoi, vos prévisions par rapport aux prochains trois mois au niveau de la réaffectation des employés?

M. Dubé : C'est pour ça, tout à l'heure, que je répondais à la question du député de Vanier, moi, je crois... et c'est pour ça qu'on a donné une date d'application, M. le député, du 15 octobre. En fait, ce qu'on dit aux employés de la santé, là : Il vous reste une chance, au cours des deux prochains mois, pour être capable d'aller chercher non seulement votre première dose, mais d'aller chercher votre deuxième dose aussi, parce qu'on sait que l'intervalle minimum est de quatre semaines. Donc, c'est sûr qu'on sent qu'il va y avoir un certain dérangement s'il y a des gens qui continuent de prendre cette décision-là.

Mais je vous rappellerais, en même temps, qu'au pire, au pire de la première vague, on avait 12 000 personnes du réseau de la santé qui étaient absentes pour toutes sortes de raisons, on est à 2 000 présentement. Alors, c'est sûr qu'on a un peu plus de flexibilité qu'on en avait dans la première vague. Mais c'est sûr, encore une fois, et c'est pour ça qu'on donne... Et les discussions que vous aurez de par votre commission avec les représentants syndicaux, puis je suis excessivement content de la collaboration qu'on a eue avec eux, posez-leur leurs questions.

Parce que je pense qu'on a vu une augmentation des taux. On était à 85 % il y a un mois, on est rendu à 91 %. Donc, il a continué d'avoir une augmentation. Puis je pense qu'en expliquant bien les choses je serais pas mal surpris, surtout en donnant un environnement de meilleure qualité à nos employés, pour leurs familles, qu'on va avoir une...

M. Derraji : ...vous expliquez... Comment vous expliquez qu'à l'intérieur du réseau de santé, où vous êtes responsable, il y a 30 000 personnes qui, jusqu'à maintenant, elles, n'ont pas eu ni la première ni la deuxième dose, qu'aujourd'hui, vu que vous allez passer au mode obligation, ils vont aller se précipiter pour la première et la deuxième dose et respecter le délai du 15 octobre?

M. Dubé : Bien, écoutez, je vous ai dit, on prend des moyens qu'on trouve excessivement difficiles. On va réaffecter, mais comme vous avez dit, si on n'est pas capable de réaffecter un certain nombre de personnes, ces gens-là devront prendre un congé sans solde. Alors, c'est triste, mais c'est ça. Ce n'est pas notre objectif. Alors...

M. Derraji : C'est quoi, le profil...

M. Dubé : ...je pense qu'il faut... Mais je veux juste terminer. Il faut être capable de comparer des désavantages. C'en est un, on est très conscients de ça.

M. Derraji : C'est quoi, le profil des employés, les 30 000 qui refusent, jusqu'à maintenant, la vaccination? Est-ce qu'on parle des médecins? Est-ce qu'on parle de pharmaciens? Est-ce qu'on parle d'infirmières? Est-ce qu'on parle de préposés aux bénéficiaires? C'est quoi, le profil?

M. Dubé : Le profil, il est variable, il est variable par profession, il est variable par expertise, il est variable par région. On a des régions, par exemple, comme à Montréal, où le taux de vaccination des employés est beaucoup plus bas. On a des types de professions qui sont un peu plus bas. Je vous dirais que c'est généralisé mais avec des pourcentages qui varient. Et c'est pour ça que je crois, selon moi, qu'une bonne discussion comme on va avoir dans les prochains jours, notamment avec le travail... puis je le répète que le syndicat nous a... les différents syndicats nous ont aidés, je pense qu'il y a encore de la place pour convaincre des gens de bien les informer et de monter le taux de participation.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. M. le ministre, ce n'est pas que je suis impoli, mais je n'ai pas de temps, alors je vais couper les mondanités. J'ai 2 min 30 s puis j'ai deux questions.

D'après certaines statistiques, là, il peut y avoir jusqu'à 30 % de personnel non adéquatement vacciné même dans certains hôpitaux. Vous avez parlé de Montréal, c'est le cas, effectivement. C'est quoi, votre plan de contingence? Parce que vous admettez vous-même qu'il y en a une partie qui vont partir, effectivement, et vous admettez qu'il peut y avoir bris de service, ce qui n'est quand même pas rien dans des hôpitaux qui sont déjà à l'extrême limite de ce qu'ils peuvent faire.

Et, par ailleurs, est-ce qu'il y a toujours cette fameuse mobilité du personnel d'un établissement à l'autre, en particulier du personnel qui vient des agences privées et qui contribue aussi à la propagation et à la contamination?

M. Dubé : Bon, comme vous n'avez pas beaucoup de temps, je vais aller à l'essentiel. Deux choses. Vous me demandez quelles vont être les bris de service. On l'a vu dans les vagues précédentes, quand on manque de personnel, qu'est-ce qu'on fait? Malheureusement, on coupe dans les chirurgies, on coupe dans les chirurgies, on coupe dans des services qui sont essentiels. C'est sûr que, s'il y a beaucoup de personnes qui partent, il va y avoir un impact. En ce moment, on a réussi à revenir à 100 % de nos chirurgies. On ne rattrape pas le retard, mais au moins on est revenus à 100 %. La pire nouvelle qu'on pourrait annoncer aux Québécois, c'est que... s'il y a beaucoup de personnes du réseau qui s'en vont, c'est qu'on va être obligé de baisser encore une fois les chirurgies. C'est ça qui va être notre choix, puis ce n'est pas notre premier choix, et c'est pour ça qu'on donne jusqu'au 15 octobre à nos employés pour le faire.

Maintenant, spécifiquement à votre question dans certaines régions, pour moi, la différence dans certaines régions s'explique aussi peut-être par une communication plus grande qu'on devrait faire dans certaines régions. Parce qu'il y a des... j'ai des secteurs où on est à 95 %, 96 % dans le secteur de la santé aussi. Alors, c'est pour ça, M. le député, puis je termine là-dessus, qu'on se donne jusqu'au 15 octobre pour donner aux gens le temps, ceux qui n'ont pas encore été convaincus, de le faire.

M. Marissal : Si on est à 70 % dans certains hôpitaux, là, donc 30 % de personnel non vacciné, vous venez d'admettre que vous avez raté votre programme de communication. Parce que, 18 mois plus tard, il est un peu tard, M. le ministre, pour venir nous dire : Ah! bien, on va faire de la sensibilisation.

M. Dubé : Vous pouvez commenter ça. Moi, je vous dirais qu'avec toute la collaboration qu'on a eue de nos syndicats, de nos P.D.G. qui ont fait un travail incroyable, de... tout le monde a fait un travail, il y a encore des endroits où on peut mieux faire. Puis je pense que c'est ça qu'on va continuer à faire dans les prochains jours. On le fait chaque jour. On a demandé à nos employés d'être disponibles, on leur a donné toutes sortes de façons de le faire.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, M. le ministre.

M. Dubé : On va continuer à le faire, M. le député.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je cède maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, par manque de temps, je vais aller droit au but également avec quelques courtes questions. M. le ministre, quand vous faites référence à un avis public dont on ne peut pas avoir copie pour l'instant, est-ce qu'il s'agit bel et bien d'un avis du Comité d'éthique de la santé publique ou d'une autre organisation?

M. Dubé : Non, premièrement, ce n'est pas un avis public, là, ce que j'ai parlé tout à l'heure, puis ce n'est pas l'avis du comité d'éthique, c'est un avis qu'on a demandé à la Santé publique, que j'ai qualifié d'un avis préliminaire, et cet avis-là n'est pas encore disponible de façon publique.

M. Arseneau : Mais vous êtes bien conscient que le seul avis que le public a, que les gens de la santé ont, c'est celui du Comité d'éthique en santé publique, qui mise sur les valeurs de réciprocité et de solidarité pour une vaccination volontaire.

M. Dubé : Oui. Et c'est pour ça, d'ailleurs... M. le député, votre question est très pertinente. C'est pour ça qu'on a demandé au Dr Arruda, à son équipe, de nous dire... émettez-nous un avis, parce qu'on est tous d'accord qu'on a besoin de la vaccination obligation pour la santé. Puis, étant donné qu'on décidait de passer par une commission, je pense qu'il aurait été prématuré, pour faire un avis final avant d'entendre tout le monde qui va être ici, autant les députés que les experts qui sont consultés.

M. Arseneau : Vous avez parlé, tout à l'heure, de quelques semaines encore pour convaincre les gens qui n'ont pas été se faire vacciner adéquatement, mais on utilise la contrainte, en fait. Pourquoi utiliser seulement la contrainte à ce stade-ci?

M. Dubé : Bien, écoutez, je pense que poser la question, c'est y répondre, M. le député.

M. Arseneau : Est-ce que vous ne craignez pas, à ce moment-là, que ce soit contre-productif puis qu'on ait des fameux bris de service auxquels vous avez fait référence? Et est-ce que vous les avez mesurés? Parce que vous êtes... vous dites que vous êtes un amant des tableaux, mais vous l'êtes aussi, en tout cas du moins votre gouvernement, des sondages. Quelle est la perception que vous avez sur l'effet de la contrainte sur le personnel de la santé? Quels seront les résultats?

M. Dubé : Écoutez, on l'a vu... M. le député, on l'a vu dans plusieurs cas qu'il y a des gens, puis pour toutes sortes de raisons personnelles, culturelles, etc., qui ont besoin de prendre plus de temps pour être convaincus de ce qu'il faut faire, et, dans ce sens-là... Puis j'ai expliqué, là, j'ai pris le temps, tout à l'heure, d'expliquer toutes les étapes, comment on a fait pour en arriver avec un consensus pour que les gens comprennent que c'était important dans la santé. On est passé de 40 à 60...

M. Arseneau : L'objectif final, c'est quoi, 100 %?

M. Dubé : Bien, c'est sûr qu'il faut aller chercher... Parce qu'on a dit — il y a un objectif précis dans la santé — que chaque cas est dangereux. On a donné des exemples, la députée de Maurice-Richard en a donnés. On peut vous en donner plusieurs, exemples, où, malheureusement, un seul employé non vacciné peut causer un tort important. On ne dit pas que c'est...

M. Arseneau : ...peuvent aussi transmettre le virus.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Le temps étant déjà écoulé, je cède maintenant la parole à la députée d'Iberville.

• (10 h 50) •

Mme Samson : Merci, M. le Président. Bon, on parle ici de 30 000, 50 000, 60 000 employés du service de la santé qui ne sont pas vaccinés. M. le ministre, de combien de ceux-ci le système est-il capable de se passer avant de s'écrouler?

M. Dubé : Écoutez, Mme la députée, j'ai expliqué, tout à l'heure, que... Alors, on a eu, au pire de la première vague, 12 000 employés qui étaient en absence de travail. On en a présentement un petit peu plus que 2 000. C'est sûr qu'on ne veut pas retourner là, et je pense que c'est pour ça qu'on s'est donné un délai et qu'on veut être capable de le respecter. Et on va être capable de convaincre nos employés que c'est la bonne chose à faire étant donné l'urgence de la situation.

Mme Samson : Les employés qui ne sont pas complètement vaccinés aujourd'hui doivent passer trois tests négatifs par semaine, si je ne m'abuse. À partir du moment où le vaccin est efficace contre le Delta à 66 %, là, c'est les derniers chiffres qui sont sortis, est-ce que les gens qui se font vacciner sont moins bien protégés que ceux qui passent les trois tests négatifs par semaine?

M. Dubé : Écoutez, il faut faire attention avec les études qui sont sorties, c'est des études aux États-Unis et en Angleterre qui ne tiennent pas compte de l'intervalle entre la première dose et la deuxième dose. On parle de temps d'intervalle, dans ces pays-là, qui a été de quatre semaines. Nous, on a eu un intervalle beaucoup plus long grâce à une excellente recommandation du Dr Arruda, qui a demandé à avoir un intervalle beaucoup plus long entre la première puis deuxième dose, donc ces études-là ne s'appliquent pas à nos statistiques à nous. Puis on le verra, dans les prochaines semaines, comment ça se développe.

Le Président (M. Provençal)  : 15 secondes. C'est beau? Merci. Je vous remercie, M. le ministre, pour votre collaboration et votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin que l'on puisse accueillir le prochain témoin.

(Suspension de la séance à 10 h 52)

(Reprise à 11 heures)

Le Président (M. Provençal)  : Je souhaite la bienvenue au Dr Horacio Arruda, directeur national de la santé publique. Je vous rappelle que vous disposez 10 minutes pour votre exposé, après quoi, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé. À vous la parole.

M. Horacio Arruda

M. Arruda (Horacio) : Bonjour, M. le Président. Bonjour, M. le ministre, chers élus, mesdames et messieurs. Je me présente, je suis le Dr Horacio Arruda, directeur national de santé publique et sous-ministre adjoint à la santé publique au ministère de la Santé et des Services sociaux. Je suis accompagné de mon collègue, qui va se présenter, le Dr Richard Massé. Vas-y, Richard.

M. Massé (Richard) : Bonjour. Je suis conseiller médical stratégique auprès du directeur national de santé publique. Je suis présent depuis le mois de mars 2020 aux côtés du Dr Arruda.

M. Arruda (Horacio) : Merci. Donc, permettez-moi de vous faire encore mes salutations, et je vous remercie de nous permettre d'être entendus à cette commission, qui est très importante, pour cet objet très particulier, qui se prend dans un contexte de mesures d'urgence.

Mesdames et messieurs, nous sommes plus que jamais à un point crucial de nos efforts de lutte contre la COVID-19. Au Québec, comme par les campagnes passées, la réponse de la population québécoise à l'invitation du gouvernement avec... à la vaccination contre la COVID-19 a été un grand succès, particulièrement quand l'on se compare avec les taux qui ont été atteints aux niveaux international et national. Même si la vaccination demeure le meilleur outil de lutte contre la pandémie, l'arrivée du variant Delta accentue encore notre défi. Nous sommes encore loin de pouvoir abandonner la vigilance qui nous a si bien servis ces derniers mois. M. le ministre a bien raison d'affirmer que la prudence est de mise. Dans ce contexte particulier d'urgence sanitaire, de l'arrivée du variant Delta et surtout après tous les efforts qui ont été consentis pour promouvoir et rendre accessible la vaccination à toute la population, l'adoption d'une mesure obligeant la vaccination adéquate des intervenants de santé et des services sociaux s'avère nécessaire au point où nous en sommes.

Par ailleurs, c'est important de le mentionner, que nous continuerons certes tous les efforts pour convaincre la population à se faire vacciner par des approches habituelles qui sont les pierres angulaires de nos programmes de vaccination. C'est ainsi que nous pourrons limiter la propagation du virus de manière stratégique là où les conséquences sont les plus grandes, soit dans nos installations du réseau et dans les milieux qui accueillent les clientèles les plus vulnérables.

Bien sûr, il ne s'agit pas d'obliger tout le monde mais plutôt les personnes qui sont en contact rapproché, pendant plus de 15 minutes, avec les usagers sur une base quotidienne. Les milieux ciblés sont les CLSC, les centres hospitaliers, les CHSLD, les centres qui accueillent les jeunes en difficulté, les milieux de vie accueillant des personnes ayant une perte d'autonomie, les entreprises qui offrent des services de soutien à domicile, le milieu des services préhospitaliers d'urgence. Je n'en fais pas une liste exhaustive, car nous aurons le temps, en commission, de regarder cela de plus près, mais vous comprenez le principe. Cela concerne les intervenants qui ont un contact direct avec les usagers pendant assez longtemps pour présenter un risque réel de contamination. Ces intervenants sont de différents types. Cela inclut le personnel soignant, dont les médecins, les stagiaires, les sages-femmes, mais aussi, entre autres, les bénévoles, le personnel enseignant oeuvrant au sein du réseau de même que les responsables des milieux de vie et leur personnel.

Évidemment, il y aura des exceptions, car certaines personnes ont des contre-indications à la vaccination. Je tiens toutefois à rappeler que ces contre-indications sont très rares et qu'elles sont, en général, applicables à un seul type de vaccin, il y a presque toujours possibilité d'offrir un type de vaccin ou un autre.

L'adoption d'une telle mesure n'est pas unique au Québec. Cette option s'inscrit en cohérence avec la position de nombreuses juridictions à travers le monde qui ont opté pour cette solution. Ailleurs dans le monde aussi, les autorités de santé publique font des recommandations en ce sens. En France, par exemple, le personnel des hôpitaux, des cliniques et des maisons de retraite ainsi que les professionnels et bénévoles auprès des personnes âgées ont jusqu'au 15 septembre 2021 pour se faire vacciner. L'Italie et la Grèce ont pris des mesures similaires.

La vaccination obligatoire doit être utilisée en ajout des autres mesures de protection recommandées. Et, rappelons-le, le vaccin est la solution la plus efficace pour venir à bout de cette pandémie, et, si nous voulons en finir avec une telle crise, il faut nous assurer que plus de gens possible soient immunisés. Avec l'émergence des variants et la recrudescence des cas que nous observons en ce moment, c'est le choix le plus sensé à faire, et le but de cette commission est de voir comment nous allons adapter cette mesure au contexte québécois et à la volonté de la population.

Merci à vous, chers élus de l'Assemblée nationale, de nous partager vos suggestions et vos préoccupations afin de soutenir le gouvernement dans sa décision. Je vous remercie et je vous souhaite une bonne commission.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons débuter la période d'échange avec Mme la députée de Soulanges.

Mme Picard : Merci, M. le Président. Merci à vous deux d'être présents pour la commission aujourd'hui. Un merci tout spécial à Dr Massé pour toutes vos années de contribution à la fonction publique et surtout votre grande contribution pour la pandémie actuelle.

J'ai une question vraiment toute simple pour vous : Sur quoi vous vous êtes basés pour rendre cette décision, pour prendre cette décision?

M. Arruda (Horacio) : Je pourrais commencer, et Dr Massé pourra compléter. Il faut comprendre qu'on s'est basés sur le fait que, premièrement, on a offert la vaccination, on a fait plusieurs démarches antérieures, je vous dirais, là, pour promouvoir la vaccination, diminuer les barrières, expliquer, promouvoir, aller vacciner sur les sites et sur les lieux, mais malheureusement, avec l'arrivée du Delta comme tel, compte tenu aussi du fait qu'il existe encore un risque important pour les personnes vulnérables et pour les... pour un certain sous-groupe de travailleurs de la santé et dans le contexte où, avec la quatrième vague, oui, on va avoir plus de cas, mais on risque d'avoir des hospitalisations aussi chez des plus jeunes, des besoins pour le système de soins, bien, dans les faits, comme stratégie complémentaire à ce qu'on a déjà fait, compte tenu qu'on a quand même mis des efforts assez intenses, on considère maintenant, compte tenu du variant Delta, compte tenu qu'il y a encore un bassin important de personnes vulnérables, compte tenu qu'on veut protéger les travailleurs de la santé aussi de la transmission entre eux et les maintenir au travail... parce que chaque travailleur de la santé qui est absent est une ressource de moins, qui va avoir un impact non pas seulement sur les gens qu'on traite, en termes de COVID-19, mais aussi sur les soins en général, des infarctus, d'autres urgences qui pourraient, à mon avis, être impactées.

Et, dans ce contexte-là, aussi on s'est basés sur la connaissance qu'on a eue des éclosions antérieures. On sait que les travailleurs de la santé ont été une très forte proportion des cas, notamment en première vague, et même en deuxième, et encore vrai tout récemment. À chaque jour, on a au moins une vingtaine, même jusqu'à 40 travailleurs de la santé qui s'infectent et on a besoin de ces personnes-là pour maintenir les soins. Donc, ce sont des milieux à haut risque. C'est basé sur notre expérience antérieure, sur le désir, un, de protéger les vulnérables, deux, de protéger notre système de soins mais aussi les travailleurs de la santé.

Je ne sais pas si Dr Massé veut ajouter quelque chose.

M. Massé (Richard) : Bien, je pense, vous avez fait le tour des arguments, mais j'ajouterais le fait d'avoir un rôle exemplaire vis-à-vis de l'ensemble de la société. Donc, c'est moins un enjeu épidémiologique que le fait de dire : Bien, tout le monde devrait aller chercher la vaccination. Mais, si les travailleurs de la santé y vont complètement, ça montre le signal que c'est essentiel pour tout le monde d'aller chercher la vaccination.

M. Arruda (Horacio) : Merci, Richard, de parler de cette exemplarité-là qui est importante, et ça fait un peu partie de nos processus déontologiques, de ne pas mettre à risque nos patients.

Mme Picard : Merci...

Le Président (M. Provençal)  : Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Boutin : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Dr Massé, merci, Dr Arruda, d'être aujourd'hui présents en commission pour répondre à nos questions. Écoutez, j'ai deux questions qui sont en complémentarité avec celle de ma... la députée de Soulanges. Vous savez, le gouvernement, jusqu'à maintenant, a toujours suivi les avis, les recommandations de la Santé publique, et puis là, bon, vous venez de recommander que la vaccination obligatoire soit faite pour les travailleurs de la santé. J'aimerais savoir quels sont les critères qui vous guident dans la décision pour définir, décider qu'un corps d'emploi particulier se qualifie ou devrait, justement, se faire vacciner de manière... obligatoirement.

• (11 h 10) •

M. Arruda (Horacio) : Je vous remercie. Il faut comprendre que notre avis est préliminaire actuellement, d'ailleurs les travaux de la commission vont peut-être nous aider à cerner aussi certains sous-groupes qui n'auraient été pas nécessairement identifiés dans la liste, mais le principe général, là, c'est un intervenant, une personne qui peut être à la fois un professionnel de la santé ou une personne, par exemple en hygiène et salubrité, qui va être en contact avec des personnes en milieu vulnérable pour un minimum de 15 minutes. La raison pour laquelle on fait ça, dans le fond, c'est qu'on... c'est que les gens doivent avoir un contact physique ou dans la même pièce qu'une personne qui est malade et qui est très vulnérable. Ça, c'est un des critères majeurs, je vous dirais, c'est celui qui définit l'intervenant de santé. Après ça, il y a toute une série d'analyses qui sont faites, notamment avec nos équipes de ressources humaines, qui connaissent bien les corps d'emploi, etc.

Nous, on n'est pas rentrés dans la définition précise des corps d'emploi, on en a quelques-uns, mais, dans les faits, le principe principal, c'est : Vous êtes un intervenant de soins de santé ou vous travaillez dans un milieu de santé où vous êtes en contact avec des personnes vulnérables, habituellement pour un temps qu'on calcule de 15 minutes, donc vous devez être protégé, à la fois pour vous protéger vous, pour rester en fonction, et aussi protéger la population. Dr Massé?

M. Massé (Richard) : On fait attention aussi pour ne pas déborder pour des gens qui n'auraient pas ces contacts avec les personnes vulnérables, parce que peut-être que vous nous poserez la question : Mais pourquoi pas telle autre, pourquoi pas telle autre? Puis c'est là l'enjeu important de dire : On s'en tient à ces critères-là, parce qu'on a toujours maintenu que ce n'était pas l'option numéro un d'avoir la vaccination obligatoire mais que, dans certains cas, et c'est le cas maintenant, on est obligés de le prendre et on doit vraiment le... bien le cercler, bien le confiner.

Mme Boutin : ...complémentaire, là. Considérant qu'on a fait beaucoup d'efforts de sensibilisation pour encourager les gens à se faire vacciner, encourager tous les travailleurs à se faire vacciner également, est-ce que, selon vous, on devrait, à terme, quand on va être au maximum des efforts, là, de sensibilisation... est-ce que, selon vous, à terme, on devrait obliger, forcer la vaccination obligatoire à tous les travailleurs qui sont en contact direct avec des personnes que vous jugez vulnérables selon vos critères?

M. Arruda (Horacio) : Il faut comprendre que, comme on le dit, là, la mesure principale qu'on fait habituellement... et qu'on va continuer à faire, hein? Ce n'est pas parce qu'on va implanter cette mesure de vaccination obligatoire auprès de certains travailleurs qu'on va arrêter nos efforts de faire comprendre et de convaincre, hein, ça va continuer. C'est un élément qui s'ajoute aussi sur un autre élément qui est très important, il faut garder nos mesures de protection qu'on utilise, mesures de protection personnelle, et les guides de pratiques qui vont être là, là. Ce n'est pas parce qu'on est vaccinés deux doses qu'il faut automatiquement tout libérer avec le variant Delta.

Donc, je pense qu'actuellement ce qu'on a convenu, là, où on en est en date d'aujourd'hui, puis on va entendre, bien entendu, les travaux de la commission, c'est qu'on veut protéger les gens vulnérables. Où sont-ils? Ils sont dans les milieux de soins, ils sont dans les CHSLD, ils sont dans des résidences pour personnes âgées. Et la catégorie de personnel qui est en contact suffisant avec la personne pour l'exposer, c'est eux qui sont visés par la recommandation préliminaire qu'on a mise en place.

Maintenant, pour ce qui est de l'avenir, je pense que je ne veux pas fermer aucune porte, mais actuellement c'est véritablement là-dessus, parce qu'on considère que ces personnes-là sont à risque, ces personnes-là peuvent contaminer leurs... les patients, et puis, trois, ils sont absolument essentiels au maintien des services de santé. Et ce n'est pas seulement la COVID-19, mais toutes les autres opérations urgentes ou moins urgentes qui pourraient être impactées par un système de soins qui est surchargé.

Mme Boutin : Merci beaucoup. Je pense que ma collègue de Repentigny à quelques questions également.

Le Président (M. Provençal)  : ...je vous cède la parole.

Mme Lavallée : Merci beaucoup. Merci à vous deux d'être présents et partager vos connaissances. Ma question, c'est que vous avez retenu le critère des personnes qui travaillent dans le régime de santé mais qui sont en contact pour... sur une base de 15 minutes avec des patients. Est-ce qu'il devrait y avoir d'autres critères à être envisagés pour certaines catégories de travailleurs du réseau?

M. Arruda (Horacio) : Bien, dans les faits, c'est... ce critère-là englobe déjà une très grande proportion. Premièrement, il faut se le dire, il y a une bonne... quand même relative bonne couverture des travailleurs de la santé, là. Là, ce qu'on va aller chercher, c'est un noyau plus, je dirais, minimal, qui, pour toutes sortes de raisons, des fois, c'est de l'hésitation, attendent un peu plus tard. Donc, c'est une mesure qui va s'ajouter encore à celle qu'on convainc, comme tel, par rapport à ça.

Dr Massé, voulez-vous ajouter?

M. Massé (Richard) : Bien, dans le fond, vous ouvrez la porte à dire : S'il arrivait quelque chose de différent dans le futur, est-ce qu'on pourrait évoluer? Par exemple, si on avait un variant différent qui se présentait puis que la situation épidémiologique changeait, c'est évident qu'il pourrait y avoir une révision de l'avis du Dr Arruda puis dire : Bien, peut-être que, compte tenu de la situation, on doit maintenant revoir les critères qui ont été utilisés pour dire qui devrait être vacciné de façon obligatoire.

Mme Lavallée : Puis mon autre question, ça serait : Est-ce que la nature du travail des gens qui travaillent dans le réseau devrait déterminer si elle est visée ou non par l'obligation d'être vacciné?

M. Arruda (Horacio) : Oui, dans le sens où la nature du travail que les gens font, c'est : il faut qu'ils soient en contact physique avec la personne. Prenons un exemple, quelqu'un qui est dans un secrétariat administratif, qui n'a pas de contact avec les patients, n'est pas nécessairement plus à risque qu'un autre individu dans un bureau qui n'est pas dans un centre hospitalier. Ça fait que c'est véritablement la question du soignant.

Prenons, par exemple, quelqu'un qui fait de l'hygiène et de la salubrité, hein, qui vient désinfecter des chambres, des fois, il y a des chambres multiples, pendant qu'il fait une désinfection, il est dans le même espace physique, et ça peut prendre plus que 15 minutes, une bonne désinfection de chambre, donc, à ce moment-là, ces personnes-là, c'est par... à travers le type de contacts qu'ils ont avec la clientèle qui est l'élément particulier.

Mme Lavallée : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Chauveau.

M. Lévesque (Chauveau) : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Dr Arruda, Dr Massé, merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. Ma collègue de Jean-Talon vous a parlé des corps d'emploi, la façon, là... votre processus décisionnel. Moi, de mon côté, ce qui... On va le reconnaître, là, la proposition sur la table, c'est quand même assez contraignant, c'est du rarement-vu, même peut-être jamais-vu au Québec, là. Peut-être, historiquement, ça s'est passé il y a fort longtemps, mais, de mémoire d'homme, moi, je ne m'en souviens pas, là.

J'aimerais ça comprendre vos étapes pour faire une... prendre une décision, faire une proposition comme ça. Comment vous fonctionnez pour prendre cette décision-là, votre processus décisionnel, là, les étapes que vous avez passé au travers? Parce que c'est quand même assez contraignant ce que vous proposez aujourd'hui au ministre de la Santé.

M. Arruda (Horacio) : C'est clair qu'en santé publique je tiens à vous dire que la vaccination obligatoire, c'est quelque chose qui est permis dans la loi, mais il faut avoir fait certaines conditions, parce qu'on vient brimer et un petit peu même aller contre certains principes de la charte des droits et libertés. Mais il faut comprendre que les juges peuvent comprendre que, si une menace est présente et qu'on a mis en place toutes les autres stratégies d'effort qui sont faites, il faut avoir une bonne raison pour le justifier. Bon, l'arrivée du variant Delta, hein, le fait qu'on a fait des efforts... Puis on va continuer à les faire, hein, je ne sais pas si vous comprenez, là. Ça, je tiens à le dire, là, d'ici le moment où ça va être obligatoire, appliqué, on ne va pas dire : On attend, on va continuer à aller convaincre des gens, parce que chaque personne vaccinée première dose, un, et deuxième dose, se protège elle-même, donc ça ne devient pas un patient. Et, dans les faits, on a absolument besoin de ces gens-là pour les maintenir.

Et on sait que la capacité du réseau de la santé, par rapport à la première vague, elle a beaucoup diminué de par le fait qu'il y a beaucoup plus de gens qui ont été absents, il y a plusieurs travailleurs de la santé qui, pour des raisons d'immunité ou autres, ne sont pas au travail. On a dû prendre des ressources, aussi, pour les utiliser pour les campagnes de vaccination, pour les centres de dépistage. On a demandé la contribution de Je contribue, là, mais on est dans un niveau, actuellement, où, à la veille d'une quatrième vague, qui a été exponentielle ailleurs, avec des impacts importants sur les hospitalisations et les soins intensifs... on arrive, à ce stade-ci, après avoir fait des efforts, à prendre une mesure d'exception auprès d'un sous-groupe de la population, qu'on pense qui est majeur parce qu'il est en contact avec les plus vulnérables, parce qu'il est essentiel qu'il puisse continuer à donner des soins. Et ce personnel-là, aussi, quelque part, va nous permettre de maintenir le système de soins, je vous dirais, en fonction sans mettre en péril, je vous dirais, des retards qu'on a déjà faits par rapport à des délestages mais aussi parce que les lits de soins intensifs sont occupés par des jeunes patients atteints, ne sont pas accessibles pour des chirurgies semi-urgentes ou autres.

Donc, il faut comprendre le contexte, et je vais laisser Dr Massé ajouter, on arrive à un moment charnière, si vous permettez, parce qu'aussi, plus tard, avec la vaccination des enfants et des plus jeunes, on va avoir cette immunité collective qui va probablement nous ramener, espérons-le, vers un mode plus normal. Dr Massé?

M. Massé (Richard) : En plus de l'effort de promotion puis d'accessibilité puis renforcer dans chacun des milieux, on a fait quelque chose qu'on ne fait pas si souvent que ça, c'est de demander, obliger, dans le fond, à ce que tous les travailleurs qui ne sont pas vaccinés, qui n'ont pas une dose au moins de vaccin soient dépistés trois fois par semaine. Ça aussi, c'est déjà un niveau de contrainte qui est un peu spécial, mais ça tenait compte de la situation à ce moment-là.

Puis là, comme M. le ministre l'a exprimé en début de session ce matin, on voit que ça a plafonné. Depuis le mois de juillet, on avait une baisse du nombre de personnes qui venaient chercher leur vaccination. Donc, on doit passer à une étape supérieure, complémentaire aux autres, comme Dr Arruda l'a mentionné.

M. Lévesque (Chauveau) : Merci.

• (11 h 20) •

Le Président (M. Provençal)  : Autres questions? Oui, Mme la députée de Lotbinière...

Une voix : ...

Le Président (M. Provençal)  : ...Frontenac.

Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Bonjour, M. Arruda, Dr Massé. Pouvez-vous nous dire si c'est une situation inusitée de former... de forcer, excusez-moi, la vaccination au Québec? Puis est-ce que vous pouvez nous faire un bref historique de la vaccination?

Le Président (M. Provençal)  : ...secondes.

M. Arruda (Horacio) : Bien, rapidement, je suis très légèrement plus jeune que le Dr Massé, mais, de mémoire d'homme ou de... du moment où moi, je suis au Québec, on n'a pas utilisé la vaccination obligatoire. Ça a toujours été quelque chose où on est allés par le «convaincre» plutôt que le «contraindre». Et je tiens à vous dire que c'est le principe qu'on essaie de faire habituellement, justement pour respecter les droits de la personne. Pour, par contre, en arriver à ça... Il y a des situations, par exemple, où, pour pouvoir faire un stage en médecine, vous devez être vacciné contre telle, telle maladie parce que, si vous n'êtes pas vacciné contre telle, telle maladie, vous ne pourrez pas faire votre stage dans tel département. Donc, ce n'est pas une vaccination obligatoire, mais c'est une condition administrative pour... Mais la vaccination obligatoire d'une population, même dans la H1N1, ça n'a pas été une chose qu'on a utilisée. Il faut vraiment avoir de bonnes raisons. On est rendus quand même à une quatrième vague.

Le Président (M. Provençal)  : Docteur...

M. Arruda (Horacio) : On voit l'impact que ça a sur...

Le Président (M. Provençal)  : Je dois vous remercier...

M. Arruda (Horacio) : ...

Le Président (M. Provençal)  : Le temps est écoulé. Je vais céder la parole maintenant à la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Bonjour, Dr Arruda. Bonjour, Dr Massé. Bien contente de vous voir. Merci beaucoup de prendre le temps aujourd'hui d'être avec nous, de répondre à vos questions, on sait combien vos avis sont toujours très éclairants. Merci énormément.

D'entrée de jeu, Dr Arruda, le ministre, tout à l'heure, dans son audition, nous disait qu'il vous a demandé un avis. Pourriez-vous m'indiquer à quel moment cet avis sur la vaccination obligatoire vous a été demandé, à quel moment il a été transféré, aussi, au ministre et sur quel secteur la demande a été faite?

M. Arruda (Horacio) : Si vous me permettez... Là, je vais vous dire, moi, j'ai une très mauvaise mémoire de ce qui s'est passé hier, il se passe tellement de choses. J'ai de la misère même des fois à définir quelle année je suis, puis ce n'est pas pour vous mentir, je vous dis bien honnêtement. Dr Massé, qui travaillait avec l'équipe d'immunisation... Ce qu'il faut que vous compreniez, c'est que, bon, il y a eu une demande, mais nous, on a fait une proposition en disant : Qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer le statut vaccinal...

Mme Montpetit : Je m'excuse, Dr Arruda...

M. Arruda (Horacio) : Mais, je vous dirais, c'est à peu près... c'est arrivé au courant... Richard, peux-tu mentionner quand est-ce qu'on a commencé à soulever la question de la vaccination obligatoire, s'il te plaît?

M. Massé (Richard) : Bon, en fait, ça fait longtemps que cette option-là est connue. On l'a mise dans la loi il y a 20 ans, là, donc on savait que c'était une option éventuelle potentielle. Au mois de juin, quand on a vu qu'il y avait un plafonnement de la vaccination chez les intervenants de santé puis qu'il y avait encore une proportion quand même significative de personnes qui n'étaient pas vaccinées, on pensait qu'on devait aller plus loin, puis on a eu les discussions avec les autorités ministérielles et avec le conseil exécutif, puis là, après, on a documenté, travaillé à regarder toutes les options, comme Dr Arruda l'a mentionné, et puis on a, à ce moment-là, cheminé dans la recommandation qui est dans l'avis préliminaire du directeur national.

Mme Montpetit : Donc, ce que vous me confirmez aussi, c'est que vous vous appuyez, justement, sur la Loi sur la santé publique pour prendre cette direction-là?

M. Massé (Richard) : C'est une chose qui était prévue dans la Loi sur la santé publique mais qui n'a pas été appliquée parce qu'il n'y avait pas des circonstances qui permettaient de le faire, sauf qu'il y avait déjà certaines vaccinations, par exemple pour l'hépatite B, qui étaient des mesures... je vais les qualifier, comme Dr Arruda, de plus administratives, là, dans lesquelles les gens devaient avoir cette vaccination-là pour faire leurs stages, ce qui correspond à faire vacciner toutes les personnes qui rentraient dans le réseau de santé.

Mme Montpetit : Parfait.

M. Massé (Richard) : Mais je ne veux pas diverger, là, c'est une autre chose un petit peu différente.

Mme Montpetit : Non, pas du tout. Bien non, je... C'est parce que ça nous permet de clarifier le commentaire qui a été fait par le ministre tout à l'heure sur l'article 123 de la Loi sur la santé publique, où il disait : Ce n'était pas cet article-là qui s'applique dans le contexte, mais ça met la table, en fait. Puis, si vous pouvez nous revenir plus précisément sur le moment, sur les dates, ce serait bien apprécié. Et vous avez émis un avis sur quel...

Une voix : ...

Mme Montpetit : Vous avez émis un avis sur quel secteur précisément? Est-ce que c'est seulement sur les travailleurs de la santé ou c'est plus largement?

M. Arruda (Horacio) : Oui, notre avis préliminaire, actuellement, comporte seulement sur les travailleurs de la santé parce que c'est là qu'on pense que le maximum de critères, bon, nécessaires pour en arriver à une vaccination obligatoire peut être défendable...

Mme Montpetit : Parfait.

M. Arruda (Horacio) : ...actuellement.

Mme Montpetit : Je m'excuse, je... Vous savez, on n'a jamais beaucoup de temps dans ces exercices-là. Donc, ce n'est pas...

M. Arruda (Horacio) : Non, je comprends. Je vais essayer de... Réponses courtes. Réponses courtes et directes.

Mme Montpetit : Voilà. Merci. Pas dans un souci d'impolitesse, de vous couper. Vous avez... Dr Arruda, aussi, vous avez fait référence, dans les dernières semaines, au fait qu'il fallait atteindre un 95 % de taux de vaccination pour arriver à une immunité collective. Déjà, je voudrais préciser, parce qu'il y a différents éléments qui ont été cités. On parle bien de 95 % de l'ensemble de la population et non pas de 95 % des gens qui sont admissibles à la vaccination présentement?

M. Arruda (Horacio) : Actuellement... Bien, il faut comprendre... Si vous me permettez, premièrement, je tiens à dire, le succès de la campagne de vaccination au Québec, les taux qu'on a atteints sont exceptionnels, je veux dire, c'est des bons taux. Le variant Delta, ce qu'il amène, par contre, c'est une protection moins grande, une plus grande transmissibilité, ce qui fait que l'immunité collective qu'on avait identifiée ou le chiffre qu'on avait identifié antérieurement de 75 % ou 80 %, maintenant, avec le variant Delta, n'est probablement pas suffisant. La vaccination des tout-petits... des cinq à 11 ans et éventuellement des tout-petits va nous amener, à ce moment-là, à des niveaux d'immunité collective qui vont probablement empêcher le virus. Mais actuellement, là, le 95 %, c'est un rêve, mais c'est... j'avais dit 90 % et peut-être potentiellement 95 %, c'était sur la population, je vous dirais, admissible actuellement.

Mme Montpetit : Parfait. Quel délai on se donne pour atteindre cet objectif-là?

M. Arruda (Horacio) : Bien là, il faut comprendre aussi une chose, c'est qu'on est... si vous me permettez, on est... comment je pourrais dire, on doit attendre l'arrivée du vaccin pour les 12... cinq à 12 ans et pour les plus petits. D'après les informations qu'on a eues, ça devait être début octobre, mais là il semblerait qu'on va pouvoir le faire entre octobre et novembre... entre... autour de novembre, décembre et, pour les plus petits en bas de cinq ans, en janvier 2022. Mais je dois vous dire, cette... Et on est déjà en travail avec nos établissements scolaires pour augmenter cette vaccination-là qui, elle, va venir diminuer de façon importante le nombre de susceptibles dans la population québécoise.

Mme Montpetit : Est-ce que vous avez, et je comprends, avec ce que vous dites, une certaine certitude... puis là vous pourrez modérer le mot «certitude», mais qu'une fois qu'on aura des vaccins qui pourraient être homologués pour les moins de 12 ans on atteindrait, donc, d'office ce 95 % sans ajouter de mesures supplémentaires?

M. Arruda (Horacio) : Bien, je pense que... Est-ce que c'est 95 % ou 90 %, ou 92 %, là, ça va être difficile pour moi, mais je pense que, compte tenu, habituellement, du succès qu'on a auprès de ces clientèles et des parents, de l'approche qu'on va faire en milieu scolaire pour aller chercher ces clientèles-là... Habituellement, on atteint des bons taux de couverture vaccinale, effectivement, auprès de ces populations-là.

Mais, vous savez, avec la COVID-19, un élément : les nouveaux variants. Donc, vous comprenez que je n'ose pas rien garantir ou promettre dans le contexte où, s'il y avait un nouveau variant, on serait peut-être obligés d'utiliser un autre type de vaccin, elle va retarder cet élément-là, et puis il y a toute la question potentielle de la troisième dose.

Mme Montpetit : Et, si on... Présentement, pouvez-vous me rappeler, là, sur la population générale, on est à quel pourcentage de taux de vaccination?

M. Arruda (Horacio) : Il me semble que, sur la population générale... attendez, il faudrait que je revérifie, il me semble, c'est... Je vais regarder, vérifier, attendez une seconde. Je ne sais pas si tu l'as, Richard, de mémoire. Je vois tellement de chiffres.

M. Massé (Richard) : On a 76 % des gens admissibles, là, qui...

M. Arruda (Horacio) : Une dose.

M. Massé (Richard) : ...qui ont reçu une dose.

Mme Montpetit : ...population générale?

M. Massé (Richard) : Non, mais population générale, là, c'est ça, oui, si on prend toute la population, O.K., mais, chez les gens admissibles, c'est plus de 80 % qui ont reçu une dose. Deux doses, on est en bas de 70 %, là, 69 % actuellement. Mais, comme Dr Arruda dit, les populations les plus jeunes, c'est plus de 12 % des gens. Et donc, comme on les rejoint d'habitude de façon très efficace, les parents sont très sensibles aussi à la protection de leurs enfants, à ce moment-là, si on vaccine une très grande majorité de ces gens-là, vous voyez tout de suite l'augmentation au niveau des taux, qui vont amener une diminution de la transmission mais pas cesser complètement la transmission, mais assez pour éviter une transmission soutenue.

Mme Montpetit : Et pouvez-vous nous exprimer qu'est-ce qui va arriver, justement, si on ne l'atteint pas, ce 95 % ou 90 %, si on ne l'atteint pas, cette immunité collective?

M. Arruda (Horacio) : Bien, il va y avoir des éclosions, il va y avoir des cas. Puis là il faut aussi comprendre, par contre, en quatrième vague, un des éléments importants, c'est le maintien des systèmes hospitaliers. Compte tenu qu'une bonne proportion de gens sont vaccinés, compte tenu qu'on a vacciné aussi nos plus vulnérables, l'impact, en termes de mortalité puis de morbidité, va être moindre, mais ça va être beaucoup plus, je vous dirais, la relation d'impact sur le système de soins qui va devenir notre indicateur pour voir si on doit intervenir.

Mais il faut aussi comprendre que, même avec la vaccination à double dose, on doit maintenir certaines mesures de prévention en milieu de soins et ailleurs dans le milieu de travail par les guides qui sont mis en place avec la CNESST, comme tel, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas atteint ces immunités collectives, les méthodes barrières. Mais notre objectif n'est pas de reconfiner, je vous dirais, la population ou de fermer des secteurs d'activité complètement, comme tel, d'où aussi l'utilisation du passeport vaccinal pour diminuer... plutôt que de fermer certains secteurs, de maintenir des secteurs ouverts.

• (11 h 30) •

Mme Montpetit : Malheureusement, ce n'est pas à vous que je vais apprendre, Dr Arruda, que le virus a déjoué bien des objectifs qu'on avait ou que le gouvernement avait dans les trois premières vagues. Je suis... J'aimerais vous entendre quand même davantage sur pourquoi vous ne, je ne sais pas, recommandez pas ou pourquoi attendre, en fait, pour élargir la vaccination obligatoire à d'autres secteurs quand on voit que plusieurs d'autres sociétés, dont autres provinces près de nous, ont engendré ce pas-là, justement, pour s'assurer d'augmenter le taux de vaccination mais aussi de limiter les éclosions, garder les écoles ouvertes, s'assurer, dans le fond, de freiner la transmission le plus possible, là. Pourquoi vous ne le recommandez pas à ce stade-ci?

M. Arruda (Horacio) : Les discussions qu'on a eues en Santé publique, entre collègues de santé publique et notamment avec Dr Massé, puis etc., c'est que c'est à un endroit où on trouve, actuellement, où le plus grand gain, et bénéfice, et impact vont avoir lieu. Parce qu'il ne faut pas oublier que la vaccination obligatoire, c'est véritablement une mesure d'exception. Il faut avoir véritablement une logique très solide. Et je pense qu'on commence par ça, mais on va être à l'écoute, si vous me permettez, des débats. Ce n'est pas parce qu'on ne sera pas présents avec vous... mais on va vous écouter pour voir aussi où en est la société québécoise par rapport à...

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, Dr Arruda. On va céder maintenant la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Oui. Bonjour, messieurs. Merci d'être là. J'ai très, très peu de temps, je continue là-dessus. Est-ce qu'il y a... Là-dessus, sur élargir, éventuellement, la vaccination obligatoire à d'autres secteurs, puisque ça semble être assez réglé pour le réseau de la santé. Voyez-vous, là, comme spécialistes de la santé publique, des bénéfices et des indications de bénéfices, je parle d'indications scientifiques, évidemment, là, pas de feeling de population, là, à élargir notamment dans le réseau de l'éducation? Puis c'est d'actualité parce que les enfants puis les ados rentrent à l'école là, là.

M. Arruda (Horacio) : Je considère... Puis je fais toujours attention à ce que je dis, parce que je l'ai dit le 13 mars, l'année dernière, ce que je vous dis aujourd'hui peut changer demain, là, pour toutes sortes de raisons, mais actuellement je considère que le système de santé, les travailleurs de la santé qui sont... qui exposent les personnes vulnérables sont dans un contexte complètement différent de celui qui peut se passer au niveau scolaire. Parce que les complications au niveau scolaire pour les enfants... oui, il va y avoir des cas, mais les complications ne sont pas de la même nature. Oui, ça contribue à diminuer la transmission puis aux effets indirects, mais je pense que le bénéfice n'est pas de la même nature que celui des travailleurs de la santé. Et, dans le contexte qu'il faut peser le bénéfice contre les droits des individus aussi, quelque part, je vous dirais qu'à ce stade-ci on n'en est pas là.

D'ailleurs, on a introduit des éléments pour la rentrée scolaire, comme le masque, pour diminuer notamment la transmission dans le milieu. Mais je pense que, là, quand on arrive à extensionner, on arrive vers une cascade qui nous amènerait vers la vaccination obligatoire de tous. Et, nous, en tout cas, en termes de santé publique, par rapport au principe d'équilibre entre le fait de violer une liberté de quelqu'un versus le gain de santé publique, on pense que c'est véritablement au niveau du soin, mais on va être à l'écoute de vos délibérations.

M. Marissal : Bien, vous avez vu comme moi qu'à Montréal en particulier les 12-17 ans ont un taux assez faible de vaccination adéquate de 54 %. Évidemment, on ne peut pas prendre tous les ados puis les forcer à se faire vacciner, là, je comprends, la mesure est liberticide, là, mais on a quand même un sacré problème là, non?

M. Arruda (Horacio) : Écoutez, on a une... Écoutez, dans une perspective purement santé, je pourrais vous dire qu'on a un problème, effectivement, quand les taux de vaccination ne sont pas élevés. Mais on va continuer les efforts. Je veux juste vous dire qu'à la rentrée scolaire, là, c'est bien important, il va y avoir des efforts supplémentaires pour vacciner ces clientèles-là, au niveau scolaire, dans des quartiers ciblés, permettre même aux parents de se faire vacciner. On ne lâchera pas les approches, je vous dirais, là, agressives de diminution des barrières, d'explications, puis etc. Et...

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, Dr Arruda. Je dois céder maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Merci, M. le Président. Bonjour, docteur. J'y vais directement avec quelques questions courtes. Tout d'abord, l'avis préliminaire, effectivement, on aimerait en avoir copie, enfin, quand elle sera définitive. Et quand pensez-vous pouvoir remettre cet avis définitif?

M. Arruda (Horacio) : Il faut comprendre que l'avis est préliminaire. Comme je vous l'ai dit, je savais que la commission allait avoir lieu puis je voulais être à l'écoute. Vous savez, le directeur national doit prendre en compte ce que la population veut, vous êtes les élus et représentants de ce qu'ils sont. Ça fait que je vais vous dire : Assez rapidement, là, mais je ne peux pas vous donner une date précise, mais, un, il faut prendre état de ce que vous allez faire en termes de commission, puis on va peaufiner l'avis, qui va devenir final, et il sera rendu public dès qu'il sera rendu final probablement.

M. Arseneau : Et ce sera avant le 1er septembre, l'entrée en vigueur de la mesure?

M. Arruda (Horacio) : Quelle date sommes-nous? Je veux juste... 26 août. Très près. Parce que je ne veux pas... il y a, des fois, des processus...

M. Arseneau : D'accord. Je voulais savoir, dans votre façon de voir les choses, quelle est la durée d'application de cette mesure. Est-ce que c'est jusqu'à l'éradication complète de la COVID-19? Est-ce que c'est jusqu'à ce qu'on atteigne une certaine immunité collective? Est-ce que vous avez fait une recommandation à cet égard? Puisque des gens pourraient refuser, être en congé sans solde, ce qui équivaudrait à une perte d'emploi éventuellement.

M. Arruda (Horacio) : Nous, on considère que c'est une mesure temporaire, O.K.? Mais, compte tenu de ce qui va se passer au cours des prochaines semaines, la rentrée scolaire, là, la rentrée tout court va amener une augmentation des contacts qui vont avoir plus ou moins d'impacts sur notre système de soins. Ça fait que je vous dirais que, pour nous, c'est une mesure temporaire. Ça ne veut pas dire qu'il faudra attendre complètement un... On va voir le niveau qu'on va être capable d'atteindre, on va évaluer la situation, mais ce n'est pas une mesure ad vitam aeternam et ça ne sera surtout pas une mesure qu'on va réappliquer à chaque fois qu'il va y avoir un nouveau virus qui va apparaître dès le départ.

M. Arseneau : D'accord. Vous êtes évidemment conscient que le seul avis qu'on a en main, c'est celui du Comité d'éthique de la santé publique de l'INSPQ qui va à l'encontre de vos conclusions. Comment est-ce qu'on peut, nous, en tirer des conclusions?

M. Arruda (Horacio) : Bon, je sais que l'avis de... du comité d'éthique, parce que c'est un comité indépendant, est en train de se faire mettre à jour. Quand ils ont su qu'il allait y avoir une commission... Ils vont mettre à jour l'avis. Mais il faut aussi comprendre, puis Dr Massé pourra compléter, qu'il a été pris dans un contexte qui était complètement différent, hein? Je veux dire, l'avis a été fait à une période où on n'avait pas de données sur l'efficacité du vaccin...

Le Président (M. Provençal)  : Je dois vous interrompre, Dr Arruda.

M. Arruda (Horacio) : ...on n'avait pas de variant Delta.

Le Président (M. Provençal)  : Dr Arruda, je dois vous interrompre.

M. Arruda (Horacio) : Donc, je pense que c'était complètement un autre contexte.

Le Président (M. Provençal)  : Et je vais céder maintenant la parole à la députée d'Iberville.

Mme Samson : Bonjour, messieurs. Dr Arruda, une mesure temporaire, mais je n'ai jamais entendu parler d'une dévaccination dans l'histoire des peuples, là, mais enfin...

M. Arruda (Horacio) : Non, mais je vous dirais, il y a... vous comprendrez que les travailleurs de la santé qui arrivent de plus en plus... il y a toutes sortes de travailleurs de la santé qui... des cohortes de travailleurs de la santé qui sont gradués à chaque année, là. Une fois qu'ils vont avoir été vaccinés, oui, ils vont avoir été vaccinés, on l'espère, s'il y a besoin d'un rappel plus tard...

Mme Samson : D'accord. Je vais vous poser ma question, Dr Arruda, si vous le permettez. À partir du moment... et c'est un peu la même question que j'ai posée au ministre ce matin, à partir du moment où le vaccin est efficace dans à peu près 66 % contre le Delta, que les employés qui ne sont pas vaccinés aujourd'hui doivent subir trois tests par semaine, à partir du moment où on apprend également que les gens vaccinés sont plus asymptomatiques que les non-vaccinés, est-ce que les gens vaccinés ne sont-ils pas plus un risque pour eux-mêmes et pour les autres? Alors, pourquoi ne pas permettre au personnel de la santé qui ne veut pas être vacciné de continuer de se prêter à l'exercice des trois tests négatifs par semaine?

M. Arruda (Horacio) : Bon, il faut comprendre que le 66 % dont vous parlez, là, c'est la question de faire l'infection mais pas nécessairement les complications. Quand on parle d'hospitalisation ou de faire une maladie grave qui va se retrouver aux soins intensifs, on est dans l'ordre de 95 % et plus. Ça, c'est un élément très important. Une réduction même de 66 % des infections, c'est assez significatif pour avoir un impact sur les éléments.

Et on veut protéger nos travailleurs de la santé. Je veux dire, un travailleur de la santé qui va faire l'infection, qui va être peu symptomatique, qui pourrait la transmettre, c'est une chose, mais lui-même est protégé d'une maladie importante, et on ne veut pas qu'il soit hospitalisé, qu'il soit... qu'il ait des soins intensifs et qu'on manque de personnel au niveau du réseau.

Donc, il est encore très clair que la vaccination, malgré le variant Delta, même si ce n'est pas parfait, est un gain très significatif, et toutes les autorités de santé publique vont dans ce sens-là.

Je ne sais pas, Dr Massé, si vous voulez ajouter.

Le Président (M. Provençal)  : Bien, je suis obligé de vous remercier, Dr Arruda et Dr Massé, pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin que l'on puisse accueillir le prochain groupe. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 11 h 40)

(Reprise à 11 h 44)

Le Président (M. Provençal)  : Bonjour. Bienvenue à la Commission de la santé et des services sociaux. Alors, je vais maintenant souhaiter la bienvenue aux représentants de la Fédération interprofessionnelle de la santé. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Après quoi, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à débuter votre exposé. Merci.

Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ)

Mme Bédard (Nancy) : Donc, bonjour, M. le Président, Mmes, MM. les parlementaires. Merci de nous accueillir aujourd'hui. Je me présente, Nancy Bédard, je suis présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec et je représente 76 000 professionnels en soins, dont des infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes et perfusionnistes cliniques. Et je suis accompagnée de Mme Marie-Anne Laramée, conseillère syndicale au secteur sociopolitique.

D'entrée de jeu, je tiens à réitérer la position des fédérations. Nous sommes résolument en faveur de la vaccination et nous partageons l'objectif que le plus grand nombre possible de professionnelles en soins soit vacciné. Cependant, nous estimons qu'il est nécessaire de vous exposer nos réserves en ce qui a trait au caractère obligatoire de la vaccination. Nous avons donc un objectif partagé, mais nous nous questionnons sur le moyen retenu.

Les fédérations considèrent qu'il est de leur devoir de vous faire part de nos préoccupations et des effets pervers qui pourraient survenir si le gouvernement maintient sa décision de recourir à la vaccination obligatoire pour les professionnelles en soins. Nous comprenons que les décisions relatives à la pandémie ont un caractère parfois urgent et qu'elles peuvent évoluer rapidement. Cependant, nous déplorons que cette consultation se tienne alors que la décision d'imposer la vaccination est déjà prise et que nous n'avons toujours pas accès aux bases scientifiques qui guident le gouvernement, notamment les dernières données et conclusions de la Santé publique.

Alors que le gouvernement veut imposer la vaccination aux travailleuses de la santé du réseau, le ministère de la Santé et des Services sociaux est en mode allègement des mesures dans nos établissements. Dans une directive du 6 août dernier, on met fin aux zones chaudes et tièdes, on réautorise la mobilité du personnel, et les patients seront à nouveau plusieurs dans la même chambre. À moins qu'un rehaussement des mesures soit en cours de préparation, il va falloir nous l'expliquer, et, encore une fois, ces contradictions n'aident en rien. Notamment, dans cette directive, on mentionne notamment le taux élevé de vaccination des travailleurs de la santé pour justifier ces allègements des mesures.

Dès le début de la campagne de vaccination contre la COVID-19, la FIQ et la FIQP ont recommandé fortement la vaccination à leurs membres. Nous souhaitons bien évidemment que le plus grand nombre possible de professionnelles en soins soit vacciné. Depuis avril dernier, avec l'arrêté ministériel 024, les professionnelles en soins visées ont des tests de dépistage trois fois par semaine minimum pour effectuer leur travail, et les fédérations n'ont pas remis en question cet arrêté. La campagne de vaccination volontaire donne des résultats nettement supérieurs à la population en général. Selon les taux publiés par l'INSPQ le 22 août, 92,1 % du personnel de la catégorie 1 des établissements publics et des ETC ont reçu une première dose de vaccin et près de 88 % sont déjà pleinement vaccinés de façon volontaire, et ces taux ne cessent de monter actuellement. Notons que les données publiées ne reflètent pas la réalité d'aujourd'hui puisque les délais de traitement sont de trois à cinq semaines.

Ces taux ont été obtenus par l'encouragement, l'information et la collaboration. On n'est pas face à un faible taux et à un faible pourcentage de vaccination devant lequel tout aurait été tenté. Les fédérations croient que le gouvernement aurait avantage à saluer l'engagement professionnel des professionnels en soins en faveur de la vaccination, à reconnaître leurs efforts, à s'appuyer sur l'expérience positive et les résultats impressionnants de leur campagne de vaccination.

En pandémie, malgré le contexte difficile et le manque évident de personnel, qui existait bien avant l'urgence sanitaire, les professionnelles en soins adoptent les recommandations et ont des comportements exemplaires. Elles jouent un rôle essentiel pour sensibiliser la population et contrer l'hésitation à recourir à l'ensemble des mesures sanitaires, dont le masque, le lavage de mains, la distanciation et la vaccination, en plus de leur présence de tous les instants auprès de leurs patients. On ne peut en aucun cas remettre en doute l'engagement des professionnelles en soins dans la lutte contre la COVID-19.

Si le gouvernement maintient sa décision de recourir à la vaccination obligatoire pour les professionnelles en soins, cette façon de faire pourrait impliquer certains effets pervers. L'obligation vaccinale pourrait affecter davantage la confiance des professionnelles en soins envers les autorités de santé. La littérature nous dit qu'en général c'est un élément déterminant dans la volonté des travailleurs de la santé de recommander la vaccination. Le gouvernement tient, à l'endroit des professionnelles en soins, un discours de protection, mais elles se souviennent, et elles le vivent encore trop aujourd'hui, de bien des incohérences et des batailles à mener pour assurer leur protection et celle des patients. Si l'obligation vaccinale était perçue comme une nouvelle manifestation de gestion autoritaire, on peut anticiper que cela puisse affecter davantage certaines professionnelles en soins.

• (11 h 50) •

Deuxièmement, en mettant l'accent sur un seul moyen dans son discours, le gouvernement pourrait bien malgré lui diminuer l'adhésion à l'ensemble des mesures. Les autres moyens de prévention de santé et sécurité au travail restent tout aussi importants pour diminuer la propagation dans nos milieux.

Troisièmement, on doit tenir compte de l'état actuel du réseau de la santé, qui est fortement ébranlé par une très grave pénurie, et ce, sans précédent. Faute d'obtenir une adhésion volontaire à la vaccination, certaines travailleuses de la santé pourraient cesser de travailler ou être réaffectées, et cela pourrait aggraver davantage la pénurie de main-d'oeuvre et déstabiliser encore plus les équipes de travail.

Les fédérations croient fermement qu'on doit avoir un portrait précis de la situation des professionnelles en soins non vaccinées. Sont-elles enceintes, en retrait préventif, immunosupprimées, en arrêt de travail? Ont-elles des contraintes médicales ou font-elles partie de cette infime portion qui hésite toujours en raison d'un contexte particulier? Sont-elles en contact prolongé avec les patients? Ce portrait est nécessaire pour que le gouvernement puisse déployer des stratégies pertinentes et poursuivre la sensibilisation.

Ce qui est tout aussi important pour les fédérations, c'est qu'on doit continuer de mettre en oeuvre un ensemble de mesures pour assurer la protection des professionnelles en soins et de leurs patients, et certainement pas d'alléger les mesures, il faut les maintenir. La vaccination est un moyen de prévention crucial, certes, dans cet ensemble de moyens, mais elle ne doit pas devenir le seul sur lequel reposerait la stratégie pour freiner la propagation de la COVID-19 et éviter la transmission dans nos lieux de travail.

La FIQ et la FIQP suggèrent donc de continuer d'appliquer et de mettre en oeuvre les mesures de prévention suivantes. Les fédérations sont convaincues qu'il est impératif d'améliorer la qualité de l'air dans les établissements du réseau de santé en augmentant le changement d'air à l'heure. Plusieurs CHSLD, au Québec, n'ont aucune ventilation mécanique et, lorsqu'il y en a de disponibles, elles sont souvent vétustes.

On doit poursuivre aussi le dépistage et augmenter l'accès aux tests rapides. Le dépistage est une mesure peu invasive pour les professionnelles en soins et il permet de retirer, en temps opportun, du milieu de travail toute personne porteuse du virus.

On doit maintenir la vigilance en ce qui concerne la prévention et le contrôle des infections. Il s'agit d'un élément sur lequel il y a eu des lacunes. Les professionnelles en soins ont besoin de mises à jour fréquentes pour appliquer les méthodes de travail les plus sécuritaires possibles et le soutien doit être sur tous les quarts de travail. Certains employeurs ont recommencé à recourir aux déplacements à outrance du personnel pour toutes sortes de raisons. Une des importantes leçons de la première vague, c'est qu'on doit continuer à limiter la mobilité du personnel, et la directive à cet effet doit être établie et appliquée de façon stricte. Les masques N95 doivent continuer d'être fournis aux professionnelles en soins qui travaillent en zones chaudes et tièdes. Vous savez que les fédérations ont dû se battre devant les tribunaux pour y avoir accès.

Le bon taux de vaccination des professionnelles en soins provient aussi d'initiatives paritaires, mais les fédérations pensent que, de ce côté, il faut poursuivre en ce sens. Cela implique un travail étroit du gouvernement et du ministère avec les syndicats. Nous sommes des partenaires en santé et sécurité au travail, on devrait avoir accès aux données les plus à jour possibles. Sans les informations pertinentes, le syndicat ne peut remplir pleinement son rôle de représentation et d'information auprès de ses membres. La confiance entre les professionnelles en soins et le gouvernement s'est effritée au cours de la pandémie en raison de l'approche et du choix des moyens du gouvernement. On a demandé aux professionnelles en soins de faire des quarantaines réduites pour retourner le plus rapidement au travail. Elles ont été requises au travail même si elles avaient des symptômes de la COVID. Elles ont dû se battre jusque devant les tribunaux pour être protégées adéquatement.

L'imposition de la vaccination obligatoire s'ajoute à cette série de mesures où le moyen n'a rien à voir avec la collaboration et l'adhésion. Dans l'éventualité où certaines de nos membres étaient visées par différentes mesures découlant de la non-vaccination, je veux que ce soit clair que la FIQ et la FIQP les représenteront en vertu de nos obligations prévues au Code du travail.

Depuis le début de la pandémie, nous avons été présentes et nous avons soutenu certaines directives. Nous avons aussi prévenu le gouvernement des effets dévastateurs de son approche autoritaire face à d'autres directives. Nous avons levé des drapeaux jaunes et des drapeaux rouges. Aujourd'hui, les professionnelles en soins sont nombreuses à avoir démissionné, à être parties pour des retraites prématurées. Certaines parlent d'exode, certaines parlent d'hémorragie. Les bris de service se multiplient et la perspective de voir d'autres travailleuses quitter le réseau de la santé est extrêmement difficile à envisager. L'état fragile du réseau couplé à cette confiance effritée nous fait conclure que, même si la vaccination et sa nécessité pour tous sont des consensus forts, l'obligation vaccinale pourrait avoir des effets néfastes qui doivent être évités à tout prix. C'est le drapeau rouge que nous vous levons aujourd'hui. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec la députée de Soulanges.

Mme Picard : Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, mesdames, d'être parmi nous aujourd'hui pour nos travaux de la commission. Vous avez soutenu qu'il y a certaines infirmières et d'autres professionnels en santé qui sont en arrêt de travail ou qui sont enceintes dans le pourcentage des personnes non vaccinées. Est-ce que vous avez une idée du pourcentage de ces personnes-là? Et surtout avez-vous une idée du pourcentage des membres qui sont non vaccinés qui travaillent actuellement dans le réseau?

Mme Bédard (Nancy) : Malheureusement, non. Alors, c'est des données qui nous manquent actuellement, et c'est les questions qu'on pose... alors c'est les questions qu'on pose aujourd'hui. Dans les travailleuses qui ne sont pas vaccinées, bien, c'est toutes ces séries-là de savoir, bien, lesquelles. Est-ce qu'on en a un gros pourcentage? Parce qu'on va se le dire, on a un très grand pourcentage qui sont vaccinés. C'est exemplaire, là, on est près de 90 % qui sont vaccinés, et ça, c'est les données qui datent de plusieurs semaines. Donc, si je regarde pour nous, 76 000 membres, il y a peut-être un 6 000 professionnels en soins, actuellement, qui ne seraient pas vaccinés. Sur ces 6 000, on en a quelques milliers qui sont en absence pour diverses raisons. Donc, c'est ces données qu'on aurait apprécié avoir pour être capable de voir qu'est-ce qu'on a à faire de plus? Où il faut aller? Comment comprendre qu'elles ne sont pas vaccinées actuellement?

Mme Picard : Et vous avez mentionné aussi d'attendre, de patienter avant de prendre peut-être cette mesure-là. Est-ce que vous ne pensez pas, comme la quatrième vague est en montée actuellement, que d'attendre peut jouer contre nous?

Mme Bédard (Nancy) : Bien, il nous manque énormément d'éléments. Vous savez, on avait énormément de rencontres aller jusqu'au mois de juin. Puis, aller jusqu'au mois de juin, avec l'équipe du ministre Dubé, tout le monde était satisfait. On avait des éléments, le variant Delta avait commencé, tout était en contrôle. Et la directive que je vous ai parlé, du 6 août, qui a été envoyée aux directions, je vous parle du 6 août, disait qu'effectivement, parce que les professionnels en soins étaient fortement vaccinés, on pouvait aller dans l'allègement de toutes autres mesures qui, depuis le début des vagues qu'on a eues, faisaient en sorte qu'on pouvait commencer à baisser la garde sur certains éléments.

Donc, c'est ces incohérences-là ou ces incompréhensions-là qu'on apporte comme questionnement et qui, aujourd'hui, font en sorte qu'on est restés un peu surpris, tout à coup, de cette sortie et de cette approche face aux travailleurs de la santé quand, les dernières rencontres qu'on a eues, on n'était pas du tout dans ce contexte-là et les directives et les incohérences, actuellement, qui sont appliquées dans les établissements.

Mme Picard : Merci, M. le Président. J'ai d'autres collègues qui veulent poser des questions.

Le Président (M. Provençal)  : Alors, Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Boutin : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Mme Bédard, d'être aujourd'hui en commission avec nous, c'est très apprécié. Et je tiens également à remercier, là, vos membres qui ont fait un... et qui continuent de faire un travail exceptionnel dans le réseau de la santé, là. Je pense que, sans vos membres, on serait bien mal en point au Québec.

Vous l'avez dit à plusieurs reprises, et on est quand même conscients, là, de la situation, le contexte pandémique a accentué la pression qu'il y a actuellement sur les travailleurs de la santé, puis ça, c'est... ça s'ajoute aux enjeux de pénurie de main-d'oeuvre, là, qu'on connaît actuellement. Puis la pression s'est accentuée notamment lorsqu'il y a eu des retraits préventifs, des retraits parce qu'il y a des gens qui ont eu des cas de COVID. J'en connais particulièrement, là, dans mon réseau d'amis, là, plusieurs infirmières qui ont vécu ça, que ces retraits-là, cette pression-là a mis encore plus de pression à ceux qui restaient, les équipes tactiques, là, qui prenaient le relais.

Dans cette optique-là et dans également l'optique que la Santé publique, bon, fait la recommandation de la vaccination obligatoire afin de limiter l'absentéisme, est-ce que vous croyez... ne croyez-vous pas que la vaccination obligatoire pourrait diminuer la pression sur le personnel soignant? Comment est-ce que vous expliquez, là, votre réserve face à cette recommandation de la Santé publique aujourd'hui?

• (12 heures) •

Mme Bédard (Nancy) : Je vais vous le dire en deux phases. C'est-à-dire que, quand vous me parlez de professionnels en soins qui ont eu la COVID, et tout ça, il faut regarder les phases où on était. Au jour où on est là, avec le taux de vaccination qu'on a dans les derniers mois, le contexte de contamination des professionnels de la santé à la COVID, on ne nous a pas exposé ces éléments-là. Puis même, les éclosions dans les établissements, depuis que les forts taux de vaccination des professionnels en soins sont là, on n'a eu aucune donnée, puis, même jusqu'aux rencontres à la fin juin, on n'en avait plus.

Donc, c'est sûr qu'on peut dire qu'on a eu des expériences de la première vague. La première vague, on s'est battus pour que nos professionnels en soins puissent avoir des masques, des protections, vous le savez, je vous l'ai dit tout à l'heure. Donc, c'est sûr qu'on peut se référer à la première, la deuxième vague, où, là, on n'était pas encore dans la vaccination. Mais ce qu'on a eu comme tableau, c'est qu'on n'était plus dans cet espace-là depuis les hauts taux de vaccination.

Le deuxième élément, si j'avais mes professionnelles en soins autour de moi pour répondre au fait que, bien, la pression est sur celles qui restent, bien, celles qui sont parties, depuis un an et demi, c'est l'approche autoritaire qui les a fait partir, c'est la surcharge, c'est le temps supplémentaire obligatoire, c'est les services qu'on donne, et on n'a plus assez de professionnelles en soins pour les donner, on ne module pas assez les services sur leur dos. Et c'est ce qu'elles vous diraient. Ça, là, c'est ce qui est le pire, actuellement, qui empêche les patients d'avoir des soins, d'être capable de donner l'ensemble des soins, et ce n'est pas la contamination de la COVID dans les milieux de travail et le fait que les patients ne soient pas... que nos membres ne soient pas vaccinés. Alors, si j'avais l'ensemble des professionnels en soins autour de moi, ils vous donneraient une série d'éléments qui fait que ça n'a plus de sens, la charge de travail.

Et ça, c'est un aspect de non-qualité, non-sécurité, et ça a été un aspect de non-précaution pour nos travailleuses de la santé actuellement, et c'est pour ça qu'elles tombent au combat, qu'elles partent, et ça n'a aucun rapport, pour l'instant, avec le petit taux qui reste et la contamination de COVID. Je serais préoccupée par beaucoup d'autres éléments qu'on ne met pas l'emphase actuellement pour faire le lien entre la capacité du réseau de donner des soins que celle des travailleurs... qu'il me manque encore beaucoup de données pour savoir le nombre qui reste qui ne sont pas vaccinés.

Mme Boutin : Mais vous, actuellement, vous n'avez pas ces chiffres-là, là, les gens qui sont en retrait ou les taux d'absentéisme dus, justement, à la COVID?

Mme Bédard (Nancy) : Non.

Mme Boutin : O.K. Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Oui. Bonjour, Mme Bédard. Intéressants, les éléments que vous apportez ici, mais... Puis je salue aussi tous vos membres qui se sont fait vacciner, parce que je pense que c'est le moyen le plus fort pour combattre cette maladie-là, ce microbe-là qui affecte... On ne se le cachera pas, c'est une pandémie mondiale, donc c'est un problème qui n'est pas au juste au Québec, et moi, je trouve ça préoccupant.

Et, devant cet effort collectif là, puis comme on est déjà dans la quatrième vague, de quelle façon on pourrait s'y prendre? Vous dites qu'on ne peut pas obliger les... celles qui n'ont pas été vaccinées à... ça serait mal reçu que celles qui ne sont pas vaccinées, on les oblige, mais quelle autre solution vous envisagez? Parce qu'il reste que vous avez quand même un fort pourcentage de vos membres qui a accepté de se faire vacciner, étant conscientes des risques qu'elles prenaient pour leur santé, en travaillant dans un milieu qui est... où on a accès avec beaucoup de personnes vulnérables aussi, là.

Mme Bédard (Nancy) : Donc, votre question est tout à fait pertinente. Et, considérant le faible taux qu'il nous reste à vacciner, c'est pour ça que les données à savoir est-ce qu'elles sont vraiment au travail, ces personnes-là, comment il nous en reste qui sont vraiment au travail et qui correspondent, là, aux 15 minutes et au fait qu'elles ne seraient pas vaccinées, c'est des données qu'on n'a pas. Elles se retrouvent où? Et quelle approche on pourrait avoir, individuelle, un peu comme l'approche de l'Ontario, avec ces gens-là pour voir quelle raison qui fait en sorte qu'elles ne sont pas vaccinées? Et on pense qu'encore la sensibilisation, l'encouragement, peut-être qu'il y a des éléments en discutant avec elles qui pourraient aller chercher le taux, qu'on ne connaît pas, là, réel de nos professionnelles en soin qui sont actuellement dans le contexte du travail et plus de 15 minutes auprès des patients... qui fait en sorte que c'est, pour nous, le meilleur moyen.

Puis, pour tout le reste, je le redis... Puis, ce matin, j'écoutais, justement, Dre Mylène Drouin, de Montréal, qui, dans une entrevue, disait que les gens qui sont doublement vaccinés, ça diminue de 50 %, donc, pour le taux de propagation probable. Donc, ce n'est pas non plus un moyen universel, et de se dire que, si tout le monde est doublement vacciné, et les professionnels en soins doublement vaccinées... on est presque à quasi la totalité, on va se le dire, mais que c'est le message qu'il faut envoyer...

Il reste qu'une professionnelle en soins, quand elle rentre, elle doit faire toutes les autres mesures, mettre à la disposition toutes les autres mesures, de continuer toutes les mesures de protection, s'assurer que l'environnement est protégé, pas aller dans le sens de la directive du 6 août qui a été envoyée par le ministère. C'est tous ces éléments-là qu'il faut bien appliquer pour s'assurer que la barrière auprès de notre patient va être efficace.

Donc, oui, le vaccin, on l'encourage encore. Il faut travailler sur continuer de sensibiliser. C'est pour ça qu'on demande les données. Mais toutes les autres mesures, tous les autres éléments organisationnels doivent s'assurer d'être en place pour faire en sorte qu'on va s'assurer de protéger bien nos patients.

La vaccination seule en soi, on le sait, puis avec ce que je vous dis que j'ai entendu de Mylène Drouin ce matin, ce serait difficile de penser que, si tout le monde est doublement vacciné dans le... bien, si c'est ça, le seul élément qu'on dit, le double vaccin, oui, le vaccin, je suis d'accord, et c'est l'élément crucial, cependant, dans l'établissement de santé, ce n'est certainement pas le seul et les professionnelles en soins doivent continuer l'ensemble des mesures pour s'assurer de bien protéger les patients, et c'est ce qu'elles font actuellement.

Mme Lavallée : Merci.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Chauveau.

M. Lévesque (Chauveau) : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Mme Bédard, Mme Laramée, beaucoup... merci beaucoup d'être avec nous. Puis évidemment ça vaut la peine de saluer tous les efforts et le travail que vous faites, mes collègues l'ont souligné. Le ministre, ce matin, lors de son allocution, a souligné également tout l'apport. Et, dans mon comté comme dans tous les comtés du Québec, je suis convaincu qu'on est très fier du travail et des efforts que vous faites et, évidemment, je vous encourage à continuer. Merci aussi pour la promotion que vous avez faite auprès de vos membres pour inviter à la vaccination, c'est un taux élevé. Puis on n'a pas tout le temps des petites données, et tout, c'est bien clair.

Mais, ce matin, on est quand même réunis pour parler de cette proposition, qui est sur la table, d'arriver à la vaccination obligatoire. Puis il y a un élément qui n'a pas été abordé, c'est la manière de l'appliquer, cette vaccination obligatoire, mais aussi, je vous dirais, sur la manière de l'appliquer aux salariés. Est-ce que vous avez eu une réflexion sur la façon d'appliquer les... peut-être des conséquences, éventuellement, sur les membres? Est-ce que vous avez des propositions à faire sur une mécanique qui pourrait être adressée sur l'applicabilité de la mesure qui est sur la table?

Mme Bédard (Nancy) : Bien, à ce chapitre-là, c'est sûr que le fait de pouvoir penser qu'on aurait des professionnelles en soins qui pourraient avoir soit des mesures disciplinaires ou qui seraient contraintes à ne plus pouvoir travailler, je vous dirais que, là-dessus, pour nous, c'est très clair qu'on va regarder les cas par cas et qu'on va défendre nos salariées à ce chapitre-là.

Et, bon, là, j'ai entendu... Parce qu'on n'a pas eu, malheureusement, de rencontre, là. Je ne comprends pas le comportement du gouvernement entre le mois de juin où, à chaque semaine, on avait des rencontres, et là on a une directive le 6 août, et, tout à coup, on voit une conférence de presse que la vaccination est obligatoire, donc on était vraiment surpris de ça.

Donc, il nous manque énormément de suivis de la part du gouvernement, ce qui fait en sorte que, pour nous, il est clair que l'approche... Puis là, tantôt, le ministre Dubé a dit : Bien, finalement, là, c'est le 15 octobre, puis, d'ici ce temps-là, là, l'approche va être encore de collaboration, de sensibilisation, d'encouragement pour mieux comprendre. Et je pense que c'est l'avenue qu'il faut privilégier, et c'est ça qu'on aurait dû faire, c'est ça qu'on aurait dû annoncer, puis, après ça, regarder c'est quoi, le portait, et de se dire : Bien, qu'est-ce qu'on fait avec les quelques personnes qui pourraient rester? Et qu'est-ce qu'aura l'impact sur le réseau dépendamment du portrait au final? Alors, ça, ça aurait été ce que moi, j'aurais privilégié comme approche pour faire le dernier tour de piste qu'il nous reste à faire, notamment sur ce moyen qui est la vaccination.

M. Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Oui, Mme la députée de Lotbinière-Frontenac.

Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Bonjour, Mme Bédard. Moi, j'aimerais ça savoir... Vous vous êtes dit surprise de l'avis de la Santé publique sur la vaccination obligatoire, mais, depuis le début de la pandémie, on voit, là, qu'on est à la remorque de l'Europe, des États-Unis, puis, là-bas, la question... la situation est assez catastrophique. Donc, j'aimerais savoir d'où vient votre surprise.

• (12 h 10) •

Mme Bédard (Nancy) : Bien, d'abord, parce qu'on a travaillé en étroite collaboration avec le ministère, avec des rencontres fréquentes, comme je le disais tout à l'heure, à toutes les semaines depuis l'hiver dernier. Donc, il y a eu l'arrêté 024, qu'on n'a pas contesté, qu'on a été très collaboratifs aussi dans cette application-là. Et les données à venir, jusqu'à ce que les rencontres cessent en début d'été, ne portaient en rien avec l'aspect où on devrait aller dans l'obligation. Puis il y avait aussi un avis, en janvier dernier, sur le fait que, le caractère obligatoire, au Québec, on n'irait pas dans ce sens-là.

Et, pour nous, toutes les données qu'on avait avec le ministère, puis je vous parle d'il y a quelques semaines, là, n'étaient pas du tout le portrait qui faisait en sorte qu'on irait vers ce caractère-là. Au contraire, toutes les données qu'on avait, le Québec s'en sortait avec fierté, on était capable de voir que tout ce qu'on avait appliqué avait donné et atteint les objectifs qu'on avait partagés. Alors, c'est là qu'est venue la surprise de cette conférence de presse soudaine qui est sortie avec cette annonce.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je vais maintenant céder la parole à la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Bonjour, Mme Bédard, contente de vous revoir. Merci d'être avec nous aujourd'hui. C'est important de vous entendre et d'entendre la voix de vos membres aussi. J'avais beaucoup de questions, j'en ai encore beaucoup, mais j'en ai encore plus après votre... vos réponses et votre audition.

Dans un premier temps, ce que j'entends, dans le fond, c'est qu'à l'heure actuelle vous n'avez pas un portrait... puis là je ne veux pas mal vous citer, mais vous n'avez pas un portrait exact des membres qui ne sont pas vaccinés. Puis, quand vous dites... vous n'avez pas un portrait exact, c'est au niveau du nombre ou c'est au niveau de la répartition dans les milieux? Vous n'avez pas ces informations-là.

Mme Bédard (Nancy) : Effectivement, j'ai les mêmes tableaux qui sont disponibles pour tous, là. Donc, les pourcentages par région, oui, j'ai certains types d'emploi, mais les données qu'on n'a pas, c'est... Parce que, là, on va se le dire, on a parlé de 30 000, là, mais, moi, quand je regarde puis je fais une petite équation, pour mes professionnelles en soins, ça pourrait représenter 6 000 personnes. Alors, là-dessus, j'en ai peut-être déjà quelques centaines ou des... quelques milliers qui sont déjà en... qui ne sont pas au travail pour plusieurs raisons. On sait que nos immunosupprimés ne sont pas revenus au travail, on sait que nos travailleuses enceintes ne sont pas au travail, j'ai des gens en maladie, en CNESST, alors j'ai des absences, ces données-là.

Alors, qui qui reste, dans le réseau, qui n'est pas vacciné? Où sont-elles? Et qu'est-ce qu'on peut faire comme intervention ciblée? Et c'est quoi, les raisons? Ont-elles des raisons médicales? Ont-elles des contextes particuliers qui fait qu'il faudrait peut-être déboulonner un peu des mythes ou les rassurer encore sur ce... à ce chapitre-là? Et après on serait plus en mesure de se dire : Bien, peut-être que, là... On a-tu un réel problème ou n'en a pas? Alors, c'est ces éléments-là qui, actuellement, nous manquent pour continuer de faire notre travail, parce que je le redis encore, nous sommes fortement pour la vaccination auprès des professionnels en soins.

Mme Montpetit : Oui, puis je n'en doute pas, puis c'est pour ça que je voulais vous entendre là-dessus, parce que c'est quand même... ça détone un peu du discours qu'on a entendu le gouvernement faire à plusieurs reprises, puis le ministre de la Santé qui nous rappelle à chaque fois qu'il est question de vaccination, ou qu'il y a des éclosions, ou qu'il y a du dépistage qu'il travaille en étroite collaboration avec les syndicats, justement, pour faire de la sensibilisation, pour augmenter les taux de vaccination. Donc, c'est quand même assez détonant, ce que vous nous dites, par rapport au discours gouvernemental dans la collaboration qui est faite avec les syndicats pour sensibiliser auprès de leurs membres, justement, la vaccination, là.

Mme Bédard (Nancy) : Bien, ça adonne qu'il est vrai qu'on a eu notre collaboration exceptionnelle. Ce que je dis, c'est qu'entre la dernière rencontre que nous avons eue en début d'été et la sortie du premier ministre il n'y a eu aucune... il n'y a rien qui... Parce que, de tous les temps, le ministère nous a envoyé des demandes et nous invitait à des rencontres, et on nous faisait vraiment l'état des lieux, on nous expliquait ce qui avait changé, les préoccupations, qu'est-ce qu'il allait amener, et il nous avisait de vers où on s'en allait, puis il nous demandait ensemble : Est-ce qu'on fait autre chose? Qu'est-ce qu'on peut faire? Et, pour une première fois, il n'y a pas eu ça dans les dernières semaines.

Puis on va se le dire, c'était quand même une sortie extrêmement importante, là, la vaccination au niveau des professionnels en soins. Alors, je m'explique mal qu'est-ce qui fait qu'en début d'été on était là, puis, tout d'un coup, bien, on a décidé, cette fois-ci, de ne pas s'asseoir avec nous pour discuter, de nous mettre au fait de certains éléments, qui fait qu'on aurait peut-être pu analyser autrement certaines données.

Mme Montpetit : Vous avez fait référence aussi au décret du 6 août, où vous mentionnez, justement, qu'il y a... je vais le résumer comme ça, mais, dans le fond, une baisse de certaines mesures de protection qui avaient été mises en place lors des différentes vagues, donc, justement, les zones chaudes, les zones froides, qu'il y a une reprise aussi de la mobilité du personnel. Est-ce que ce n'est pas un peu contradictoire, justement, dans le contexte actuel? J'aimerais ça vous entendre, sur le terrain, qu'est-ce que ça peut vouloir dire dans un contexte où tous les experts sont en train de nous mettre en garde sur la transmissibilité du virus Delta, sur les hausses d'hospitalisations que ça pourrait entraîner, la pression sur notre réseau de la santé, etc., là. Donc, j'aimerais ça profiter que vous êtes là pour vous entendre sur ces décisions-là qui ont été prises.

Mme Bédard (Nancy) : Bien, écoutez, exactement. Quand je dis que ça n'aide en rien à... parfois, les professionnelles en soins, comment la confiance envers les autorités de la santé actuellement est effritée... Parce que, des directives contradictoires, on en a eu plein, à coup de dizaines par jour depuis le début de la pandémie, que ce soit en prévention des infections, que ce soit sur les mesures, que ce soit en termes de soutien. Et, bien, celle-là du 6 août, vous comprenez qu'elle était en ligne droite avec les discussions qu'on avait eues puis où on en était rendu au début de l'été. Et je n'ai pas eu d'autre directive, il n'y a pas eu d'autre élément. Donc, tout ce qu'on a... Alors donc, les professionnelles en soins ont écouté le premier ministre faire son annonce, puis elles, ce qu'il y avait dans la semaine d'avant, c'est une directive assouplissant, effectivement, toutes ces mesures.

Donc, toutes ces contradictions-là font aussi en sorte que nos professionnelles en soins, à un moment donné, dans cette approche autoritaire là, qui n'est pas soutenue par de la cohérence, bien... on s'explique un peu parfois des éléments d'incompréhension, parfois, que la population ou vous-mêmes vous pouvez vous demander. Vous avez certains questionnements. Et, oui, c'est contradictoire, oui, c'est incohérent, et ça n'aide en rien, effectivement, ce que nos professionnelles en soins peuvent penser parfois des décisions qui sont prises par les autorités de santé actuellement.

Mme Montpetit : J'aurais une dernière question avant de céder la parole à mon collègue de Nelligan, donc assez rapidement. Je vous entendais parler de la question des tests rapides aussi. Vous m'avez sûrement souvent entendue, dans les 10 derniers mois, plaider pour un déploiement massif de ces millions de tests qui sont toujours entreposés. J'aurais aimé ça vous entendre, justement, sur la différence que ça peut faire sur le terrain et à quel point ça devrait être une mesure qui devrait être favorisée encore davantage, là, dans le cadre de la quatrième vague.

Mme Bédard (Nancy) : Bien, absolument. Moi, j'ai certaines personnes qui m'ont même dit, même moi : Tu sais, si on est doublement vaccinés et qu'à un moment donné les données donnent... font en sorte qu'on pourrait quand même être porteurs du virus, c'est quand même une voie qui est importante. Toutes les professionnelles en soins sont d'accord de ne pas être des vecteurs de propagation. Et, pour elles aussi, ce test de dépistage là, quand c'est arrivé avec l'arrêté 024, sur le coup, elles se sont un peu questionnées pour toutes les raisons que je vous ai dites tout à l'heure. Mais, aujourd'hui, elles se plient trois fois par semaine à cet élément, et, pour elles, c'est important, et ça donne, effectivement, la protection importante. Là, ça donne une indication, quand quelqu'un pourrait être porteur du virus, qu'il doit retourner chez eux. Alors, on privilégie de continuer, nous, cette approche.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Nelligan.

M. Derraji : Merci, M. le Président. J'ai deux questions, il reste trois minutes. Merci, Mme Bédard. La première, vous avez bien dit : On vous impose la vaccination, mais on baisse les règles. Est-ce que vous ne voyez pas qu'il y a une contradiction?

Mme Bédard (Nancy) : Tout à fait. Alors... Et c'est des contradictions que les professionnels en soins vivent depuis plus d'un an et demi. Et celle-ci, bien, à la veille d'une annonce du premier ministre sur cette... sur la vaccination obligatoire, elle est tout à fait particulière. Donc, c'est pour ça qu'on voulait le soulever ce matin dans nos questionnements. Et juste se dire que mettre l'emphase, pour le gouvernement, sur la vaccination obligatoire, c'est là qu'on voit qu'on baisse la garde sur plusieurs éléments, et ça nous soulève des réelles questions au niveau des établissements de santé. Ça ne fait pas sens pour les professionnels en soins.

M. Derraji : Oui, mais on fait quoi avec les zones chaudes et froides ainsi que la mobilité? C'est des choses qu'on vit depuis la première vague, la deuxième, la troisième. Sûrement, on va les vivre au courant des prochains jours. Donc, le ministre parle de 30 000, il va y avoir des mesures pour certains employés qui vont refuser, donc aller jusqu'à un congé sans solde. Comment vous voyez la quatrième vague et le refus de certains employés? Et comment le réseau doit se comporter dans des zones où... on le sait depuis le début, les zones chaudes et froides, et la mobilité du personnel?

• (12 h 20) •

Mme Bédard (Nancy) : Il est clair que ce n'est pas le temps de baisser la garde sur l'ensemble des mesures et les apprentissages des premières vagues, notamment sur les éléments de directives comme étant le fait... oui, les zones chaudes, les zones tièdes, la protection en termes des N95, de donner le soutien avec les professionnels en prévention des infections sur l'ensemble des quarts de travail aussi. Ça, c'est les éléments les plus importants pour les professionnels en soins.

Puis je vous dirais qu'actuellement ce qui est le plus préoccupant pour les professionnels en soins, c'est le temps supplémentaire obligatoire qui fait qu'après 16 heures... Puis là, hier, j'étais à Saint-Jérôme, là, j'en avais... j'avais une infirmière en obstétrique qui était à son troisième 16 heures, elle était fatiguée. Vous savez, quand qu'on a les facultés affaiblies, dans... pour n'importe quel humain, les risques qu'il y ait des failles, ils sont là.

Donc, ce qu'il faut, c'est s'assurer que, la mobilité du personnel, la directive revienne le plus rapidement possible, qu'on garde le cadre de l'environnement sécuritaire et qu'on se préoccupe de la professionnelle en soins aussi dans sa surcharge de travail. Quand on est en surcharge de travail, qu'on a les facultés affaiblies, je m'excuse, mais les failles peuvent arriver, et il peut arriver énormément d'éléments qui ne sont pas souhaitables en termes de qualité et de sécurité des soins au niveau des patients. Et ça, c'est pour l'ensemble des soins, et ça inclut aussi la COVID-19.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je dois céder maintenant la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Rebonjour, Mme Bédard. On s'est vus la semaine dernière à la commission sur les soins de fin de vie. C'est un plaisir de vous revoir, mais vous êtes rompue à l'exercice, vous savez que je n'ai pas beaucoup de temps, ça fait que je parle vite puis j'ai une question.

Tout à l'heure, les Drs Arruda et Massé nous ont dit essentiellement que la décision de la vaccination obligatoire tient plus à l'exemplarité du milieu, que vous représentez en grande partie, qu'à des raisons épidémiologiques. Vous avez dit, par ailleurs, que vous n'avez pas été consultés, vous l'avez appris comme tout le monde en entendant le premier ministre.

(Interruption)

M. Marissal : Excusez-moi, il y a un chien ou quelque chose qui jappe ici. Je ne sais pas ce que c'est, mais c'est vraiment dérangeant. J'espère que ça ne sera pas pris sur mon temps.

Donc, tout ça dit, là, avez-vous l'impression d'être instrumentalisés, dans cette affaire-là, considérant ce que les Drs Arruda et Massé viennent de dire et le fait que vous n'avez pas été consultés et qu'en plus vous nommez des directives contradictoires qui vous ont été imposées la veille du point de presse du premier ministre?

Mme Bédard (Nancy) : Honnêtement, c'est sûr que j'ai eu beaucoup d'impressions, hein? Vous savez qu'on a entendu le... on a entendu M. Trudeau, on a entendu Mme Anglade, on a entendu bien des gens. Oui, à certains égards, on a entendu qu'au départ il n'y avait pas de commission, c'était une décision unilatérale. Là, on a une commission mais une commission où on n'a pas eu de document, une commission où on n'a pas de donnée, où il n'y aura pas de recommandation. Alors, ma réponse est peut-être floue, mais je veux juste vous dire que j'ai eu beaucoup d'impressions. Et surtout, l'approche de cette façon-là, je trouvais qu'elle n'était pas bonne pour les professionnels en soins. Et, oui, c'est populaire, oui, la vaccination a un consensus fort actuellement. Donc, j'ai eu beaucoup d'impressions, effectivement, qui n'étaient peut-être pas celles qu'habituellement je suis habituée d'avoir et que ce soit assez clair.

M. Marissal : On va rester sur cette impression. Merci, Mme Bédard.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je cède maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Merci, M. le Président. Alors, effectivement, moi non plus, je n'ai pas beaucoup de temps. Alors, ma question porte aussi sur les affirmations du Dr Arruda, qui a parlé, essentiellement, du fait que, selon sa perception, le pourcentage de professionnels en soins vaccinés plafonne. Et il a parlé d'hésitation. Peut-être que certaines ou certains ont besoin de temps. Et, comme résultante, on propose la contrainte. Est-ce que vos pensez que cette approche est contre-productive?

Mme Bédard (Nancy) : Tout à fait. Ce que Dr Arruda a dit sur soit qu'il y en a qui aient des hésitations ou un certain pourcentage, bien, c'est des données que lui a et qu'on n'a pas eues, comme, on n'a pas... on ne nous a pas partagées. Alors, je le répète, l'idée, c'est qu'on aurait aimé avoir les données que Dr Arruda a eues dans les dernières semaines. Et ce que je souhaite quand même vous dire, c'est qu'entre ce que Dr Arruda... et les données qu'on a eues, moi, ce que je sais, c'est que ça monte à tous les jours. Donc, il y a différents éléments, l'arrivée du... plus officiellement, là, du variant fait en sorte que peut-être celles qui hésitaient ou peut-être celles qui étaient soit en maladie qui reviennent au travail se font vacciner. Donc, pour plein de raisons et d'indicateurs qu'on n'a pas, à tous les jours, le taux de vaccination augmente, mais je ne les ai pas actuellement, puis je n'ai pas les données pour savoir où sont les efforts qui nous restent à faire et où il faut cibler nos interventions dans les prochaines semaines.

M. Arseneau : Vous avez nommé plusieurs politiciens de différents paliers de gouvernance, est-ce que vous pensez que cet élément-là de la vaccination obligatoire au personnel de la santé a été trop politisé par rapport à la situation que vous vivez?

Mme Bédard (Nancy) : C'est sûr que j'aurais bien apprécié faire partie des discussions et de mieux comprendre ce qu'apportait le gouvernement. Alors, habituellement, il y a des éléments qui peuvent faire du sens pour eux, où nous, on apporte certaines nuances dans nos discussions qu'on avait à chaque semaine. Donc, pourquoi ils ne l'ont pas fait cette fois-là? Pourquoi il y a eu une décision politique? On peut dire que c'est une décision scientifique, on peut dire que... mais habituellement, quand c'était le cas, on était au courant, on nous donnait les suivis. Alors, tout l'aspect politique du dossier, bien sûr qu'on le voit comme vous, et on pense que c'est un élément qui a énormément de réflexions à avoir avant d'aller là pour les professionnelles en soins, notamment, et pour le personnel de santé. Et, si c'est un aspect politique, bien, on va se le dire, on ne devrait pas

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Merci beaucoup, Mme Bédard. Je cède maintenant la parole à la députée d'Iberville.

Mme Samson : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Bédard. Mme Bédard, j'avais une question très rapide. Qu'est-ce qui, selon vous et vos membres, est le plus efficace : une double vaccination ou les trois tests négatifs par semaine, ou c'est pareil selon vous?

Mme Bédard (Nancy) : C'est l'ensemble des mesures, l'ensemble des mesures depuis la première vague, nos apprentissages qu'on a faits. Alors, c'est une panoplie de mesures qui font en sorte qu'on va contrer la COVID-19 et ce n'est certainement pas en mettant la lunette seulement sur une qui pourrait apporter des effets pervers et de risque de baisse de garde sur d'autres. Et toutes ces mesures-là ensemble sont très, très importantes dans le réseau de la santé pour nos membres.

Mme Samson : Donc, vous supportez davantage le statu quo que l'obligation d'être vacciné.

Mme Bédard (Nancy) : Tout à fait.

Mme Samson : O.K. Je vous remercie. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 14 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 27)

(Reprise à 14 h 02)

Le Président (M. Provençal)  : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la santé et des services sociaux...

Des voix : ...

Le Président (M. Provençal)  : Excusez-moi. Merci.

Des voix : ...

Le Président (M. Provençal)  : Alors, je me rends compte qu'on a quelques délinquants dans la salle.

La Commission de la santé et des services sociaux reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur la vaccination obligatoire contre la COVID-19 du personnel soignant du réseau de la santé et d'autres catégories de travailleurs qui sont en contact prolongé avec les citoyens.

Cet après-midi, nous entendrons les organismes suivants : la Fédération de la santé et des services sociaux, Confédération des syndicats nationaux, la Fédération des médecins spécialistes du Québec, la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec et l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux.

Je souhaite la bienvenue aux représentants de la Fédération de la santé et des services sociaux, Confédération des syndicats nationaux. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter puis à débuter votre exposé. Je vous cède la parole.

Fédération de la santé et des services
sociaux de la CSN (FSSS-CSN)

Mme Senneville (Caroline) : Oui. Bonjour, tout le monde. Alors, mon nom est Caroline Senneville, je suis présidente de la CSN. C'est l'acronyme de la Confédération des syndicats nationaux. Je suis accompagnée de Jeff Begley, qui, lui, est le président de la Fédération de la santé et des services sociaux. Alors, merci de nous recevoir.

J'aimerais... La CSN aimerait indiquer, dans un premier temps, qu'il est important de tenir cette commission parlementaire. Nous sommes en état d'urgence depuis 18 mois bientôt maintenant, puis, certes, urgence il y a eu, urgence il y a, mais il y a encore démocratie, et on trouve très important que, malgré l'urgence, malgré l'état sanitaire... ou, en fait, à cause de l'état sanitaire, qu'il puisse continuer à y avoir un débat social et politique dans les décisions difficiles qu'on a à prendre. Le dialogue social, c'est aussi un moyen, comme société, de nous donner les moyens de faire face aux défis de la pandémie, parce que le dialogue amène la... doit se faire dans la transparence. Ça amène la confiance et ça amène aussi l'adhésion des gens aux différentes mesures qui sont prises, et ça, ça nous aide à passer à travers la pandémie.

En fait, je tiens à souligner que c'était la Fédération de la santé et des services sociaux qui était initialement invitée. Elle a eu la gentillesse de m'inclure, parce qu'au-delà des travailleurs de la santé que la FSSS représente, et je laisserai Jeff parler de ça, bien, la CSN représente une foule, aussi, de salariés, de syndiqués qui pourraient éventuellement être touchés par des mesures comme ça, je les nomme rapidement : le personnel de soutien dans les écoles et dans les cégeps, notamment dans les services de garde dans les écoles; le transport scolaire; les groupes communautaires; on a des établissements privés en éducation et en santé; on a du personnel d'université, professeurs, chargés de cours, professionnels; on a des sages-femmes; on a des agents de la paix dans des services correctionnels. Alors, il y a seulement deux jours de commission, on a fait une journée santé, on va faire une journée éducation, mais, si ceci n'est qu'une première étape de d'autres débats, bien, on trouvait ça important que nous puissions accompagner la FSSS pour donner ce son de cloche là. Je tiens aussi à dire — vous le savez, mais je veux le préciser — la situation de la pandémie est, le moins qu'on puisse dire, évolutive. Donc, ce que nous allons dire aujourd'hui, bien, ça va pour l'état des lieux de la pandémie aujourd'hui et, bien sûr, pour l'ensemble de nos salariés.

La CSN et ses affiliés a toujours été pour la vaccination, puis, je vous le dis, on a travaillé et on continue de travailler très fort avec notre monde, dans tous les secteurs, pour que les gens se fassent vacciner, et cela a porté fruit, les taux de vaccination dans nos secteurs sont plus élevés que ceux de la population en général. Bien sûr, il reste des exceptions, et le projet de loi sur lequel on se penche va traiter... j'imagine, va traiter de ces exceptions-là, mais ça sera aux milieux de travail de gérer ces exceptions-là, des milieux de travail qui ont déjà été passablement taxés depuis 18 mois de pandémie.

Vous savez que, oui, il y a un décret d'urgence sanitaire, mais il y a des dizaines de décrets qui sont... qui ont été faits depuis le début de la pandémie, qui viennent encadrer et décréter unilatéralement les conditions de travail. Vous savez aussi que le personnel a été présent, a répondu présent. Vous savez qu'il y a des gens qui ont manqué... qui n'ont pas eu beaucoup de vacances pour gérer tout ça.

Donc, le projet de loi qui est sur la table va faire en sorte que les exceptions des gens qui ne sont pas vaccinés devront être traitées dans les milieux de travail qui sont déjà... comme je le disais, déjà fortement taxés. Puis les syndicats, eux, vont avoir la difficile tâche de jongler avec des analyses juridiques, hein, parce qu'on est dans une société démocratique, une société de droit, des analyses juridiques qui ne sont pas simples, qui sont incertaines, on est dans du droit nouveau, et qui sont même changeantes, hein, parce que l'état de la pandémie change. Le variant, on ne l'avait pas vu venir. Et ça, bien, les gens sur le terrain, ils devront le faire en conciliant, du mieux possible, le bien-être collectif mais aussi les droits individuels, qui ne cessent pas d'exister, le tout en préservant un climat de travail sain et solidaire entre leurs membres et sur les lieux de travail, bien sûr, au bénéfice de la population.

Et, face à ça, bien, il y a des écueils qui se présentent à nous, on a une position, et je vais céder la parole à M. Begley, là, qui va vous en parler plus concrètement.

Le Président (M. Provençal)  : Votre micro, s'il vous plaît.

M. Begley (Jeff) : Oui, voilà. Merci. Bien apprécié. C'est la phrase de l'année.

Donc, voilà, dans un premier temps, nous poursuivons le même objectif : Comment s'assurer que le plus de monde possible soit vacciné? Le gouvernement semble aujourd'hui privilégier un moyen coercitif pour y arriver. Nous, nous avons des préoccupations.

Le gouvernement, sans beaucoup de succès, a annoncé, au début du mois du mois d'août, cette idée de faire un moyen coercitif. C'était une surprise, on ne voyait pas venir ça. Que ça soit l'avis de l'INSPQ, que ça soit les travaux qu'on faisait avec le ministère, c'était toujours une approche pour inciter le monde puis faire en sorte que... être capable de répondre aux questions, et ça marche, ça marchait. D'ailleurs, très largement, le nombre de personnes vaccinées dans santé et services sociaux, c'est pas mal plus que dans le public en général.

D'ailleurs, nous avons eu des critiques vis-à-vis la gestion de la pandémie, particulièrement au niveau des moyens de protection, mais, sur la question de la gestion de la vaccination, depuis la fin du mois de mars, moi, je peux vous dire que je n'ai que des... vraiment, j'aurais des... tendance à lancer des fleurs. Je trouvais que le travail de collaboration ministère-employeurs-syndicats pour vraiment faire quelque chose pour augmenter la vaccination, ça fonctionnait. Maintenant, il choisit un autre moyen. Il y aura des contestations, c'est clair, si le gouvernement continue dans ce moyen-là.

• (14 h 10) •

Mais je veux insister, dans les une ou deux minutes qu'il reste, aussi pour dire qu'il y a des risques. Le monde a donné le maximum, puis on travaille des moyens coercitifs. Il y a des dizaines d'arrêtés ministériels depuis le début, et le monde répond chaque fois présent, mais, à un moment donné, ça va craquer, puis, oui, il y a beaucoup de nos membres qui sont déjà vaccinés et qui aimeraient ça que le monde soit vacciné. Puis le ministre, ce matin, il a dit : On a une marge de manoeuvre, parce qu'au pire on était 12 000 qui étaient en congé, puis maintenant il y en a juste 2 000, congé à cause soit de COVID, des congés maladie, etc. Le problème, c'est l'accumulation de la fatigue. Que ça soit via le COVID, avoir vécu dans des places où il y a eu des éclosions importantes et des décès, etc., la fatigue, ça s'accumule aussi. Et moi, je vous dis, le ministre aussi l'a dit ce matin, le risque de bris de service est réel. Ça va-tu être important? On va voir, si vous continuez dans ce sens-là, mais le risque est réel. Il y a du monde qui va dire : C'est la mesure qui fait en sorte... c'est la goutte qui fait déborder le vase.

Puis je termine en disant... on en a parlé ce matin aussi, en disant : Le taux de vaccination, ça a ralenti. C'est la période des vacances, puis, malgré ça, ça a continué, la vaccination. Puis, si on avait des données fiables pour être capables d'identifier qui ne se vaccine pas puis pourquoi, les femmes enceintes, des femmes qui allaitent, des immunosupprimés, etc., puis regarder vraiment les problèmes... Moi, je pense qu'on peut faire encore un bon bout.

Et là, dans mes questions, j'ose espérer, on aura peut-être une place aussi pour souligner les problèmes au niveau de la continuation des mesures de protection. Ça nous préoccupe au plus haut point. Mais, comme le temps, il passe, aussi juste vous dire : Les contestations, c'est clair qu'il y en aura, puis on va les évaluer une à une, mais c'est clair qu'il y en aura, puis je pense qu'il faut considérer tout ça, mais, particulièrement le bris de service...

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup.

M. Begley (Jeff) : ...moi, je trouve ça préoccupant.

Le Président (M. Provençal)  : Je m'excuse de vous couper, mais le temps est écoulé. Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. Mme la députée de Soulanges, je vous cède la parole.

Mme Picard : Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux. Merci pour votre présence ici aujourd'hui. Mme Senneville, vous avez vraiment raison, je pense que cette commission-là est très importante, ce débat devait avoir lieu, puis c'est un exercice démocratique qu'on fait aujourd'hui. Donc, merci pour votre présence.

M. Begley, vous évoquez des moyens coercitifs alternatifs dans votre mémoire. Avez-vous des idées? Avez-vous pensé à d'autres options que vous suggéreriez pour aller chercher...

M. Begley (Jeff) : Bien, moi, je trouve que les moyens d'incitation fonctionnent. Il y a eu vraiment, entre le mois de mars... lorsqu'on constatait que la vaccination, ça... dans le réseau de la santé et services sociaux, ce n'était pas à la hauteur que tout le monde souhaitait, puis il y avait des raisons qui l'expliquaient, on a pris des démarches pour l'améliorer, puis ça... entre la fin du mois de mars puis maintenant, c'est le jour et la nuit. Moi, je... C'est parce que... Moi, ce que je dis : Avec l'accumulation des mesures coercitives, il y a une fatigue. Moi, je pense que le monde, ils ont besoin beaucoup plus d'une tape dans le dos pour dire : Écoute, là, on peut-tu comprendre pourquoi vous ne voulez pas faire vacciner? À partir du moment où on sait c'est où, on est capables de jaser avec le monde, on est capables de continuer.

Mme Senneville (Caroline) : Si je peux me permettre, on parle beaucoup de vaccination obligatoire, hein, mais «obligatoire» n'a pas le même sens pour tout le monde, parce qu'en ce moment elle est un peu obligatoire, la vaccination, dans le domaine de la santé, les gens qui ne se font pas vacciner se font tester trois fois par semaine. Alors, effectivement, il y a le testage, il y a des tests rapides, il y a moyen de tester les gens rapidement sans que ça ait un impact sur le travail.

Il faut trouver aussi qui ne se fait pas vacciner, c'est combien, c'est pour quelles raisons, puis avoir des mesures ciblées et efficaces pour travailler dans un travail de confiance et de conviction. Puis ce qu'on vous dit, c'est que... Puis évidemment, tu sais, on ne vaccinera pas les immunosupprimés, ceux qui ont des conditions médicales. Nous, on dit : On le sait, que le risque... Ce n'est pas nécessairement pas recommandé pour les femmes enceintes, mais on peut comprendre qu'il y a plus de risques, on peut comprendre l'inquiétude des femmes enceintes et qui allaitent, on sait que c'est une situation temporaire. On pense qu'on devrait laisser les femmes qui allaitent... respecter leur choix et ne pas les obliger à se faire vacciner. Puis, pour les autres, bien, tester, convaincre, déplacer le travail, dans aucun cas le congédiement. Pour nous, c'est une situation sine qua non. On a le droit de refuser d'être vacciné au Québec, quelqu'un ne devrait pas perdre son emploi. Congé sans solde... Bien, la pandémie, ça fait 18 mois qu'elle existe. Bien fin qui saura quand est-ce qu'elle prendra fin. Donc, un congé sans solde qui s'étire sur des semaines et sur des mois, bien, ça peut ressembler aussi à des congédiements.

Alors, on vous dit deux choses par rapport à ça. Sur le terrain, ça va être l'enfer, parce que ça fait moins de monde, qu'on le veuille ou non, puis ceux qui vont rester, bien, c'est ceux qui vont avoir une surcharge de travail. Il n'y a plus de place pour ça. Deuxième chose qu'on vous dit, c'est qu'il y aura contestation juridique. Il y a un membre, sur... Quelque part, sur les 300 000 membres de la CSN, il y a quelqu'un qui va se retrouver dans une situation qu'il ne souhaitera pas. Il va dire : Je suis discriminé, ce n'est pas ça qui était dans mon contrat de travail. Il va vouloir déposer un grief. Et nous, on n'a pas le choix de défendre les griefs de notre monde. Si on ne défend pas les griefs de notre monde, on est poursuivis comme syndicat, donc... Et là on verra ce que l'arbitre de griefs fera, et cet arbitre-là aura à soupeser les droits collectifs des droits individuels. Parce qu'on est pour les droits collectifs, on est pour la vaccination, mais il y a des exceptions. Et, on vous le dit, aller dans ce chemin-là, bien, ça va faire en sorte qu'il y aura contestation juridique, et là, bien, je ne suis pas sûre qu'on s'aide mutuellement.

Mme Picard : Merci beaucoup. J'ai des collègues qui ont des questions, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Boutin : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. Begley, Mme Senneville, d'être ici, à la commission. Je trouve ça vraiment très intéressant, là, la conversation, là, que vous avez actuellement, là. Puis d'emblée j'aimerais vous remercier pour le travail exceptionnel que vos membres, là, font dans le domaine de la santé. Je pense que, cette année, plus que jamais, on s'en est rendu compte, à quel point vous êtes importants dans la société. J'aimerais également vous remercier d'avoir participé de manière très active à la promotion pour la vaccination. Je pense que vous êtes... vous avez été partie prenante puis des joueurs clés en cette matière-là.

Puis, dans cette veine-là, j'aimerais savoir : Est-ce que vous avez des données, vous, à savoir le nombre... bien, le pourcentage, mais surtout le nombre de vos membres qui sont adéquatement vaccinés, qui ont les deux doses? Puis je serais intéressée à connaître aussi ceux qui ne sont pas vaccinés et ceux qui ne peuvent pas être vaccinés, pour des raisons de santé surtout. Je ne sais pas si vous avez ces données-là, vous.

M. Begley (Jeff) : Justement, ça... à un moment donné, au mois d'avril, là, on a eu des données globales, on a même eu des données par établissement, mais, depuis le mois d'avril, c'est juste des données par catégorie. Donc, c'est difficile à vraiment pointer qui, par type d'emploi ou par... peu importe, y compris, même, par les établissements... On n'a plus ces données-là. Moi, je pense que ça aiderait à finir le travail d'inciter le monde si on avait ces choses-là.

Puis, sur la question de qui ne pourra pas être vacciné... Mais, bien sûr, j'ai vu un peu les réactions quand Caroline a mentionné, par exemple, quelqu'un en maternité. La procédure pour quelqu'un qui est en maternité, lorsqu'elle veut se faire vacciner... bien, un médecin a une responsabilité supérieure à expliquer la chose à quelqu'un qui est en maternité. Il doit y avoir une raison pour ça. Ça doit faire poser des questions. Est-ce qu'on va dire à ces personnes-là : Bien, «just too bad», vaccine-toi, sinon...

• (14 h 20) •

Mme Boutin : Si je comprends bien, si vous aviez des données beaucoup plus ciblées sur les raisons et sur les... justement, les gens qui ne sont pas vaccinés, pour quelles raisons, est-ce que c'est la santé, ce serait plus facile peut-être d'avoir des mesures plus ciblées, dans le fond?

M. Begley (Jeff) : Exact.

Mme Boutin : O.K. Merci. Madame... Ma collègue...

Le Président (M. Provençal)  : Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Merci. Bienvenue à la commission. Tout à l'heure, vous avez dit que le taux de vaccination était plus élevé parmi vos membres que le taux dans la population. Donc, il y a beaucoup de personnes qui ont compris l'importance d'être vacciné pour se protéger contre la COVID, et c'est tout à votre honneur aussi d'avoir défendu cette importance-là, là. Je pense que vous avez toujours manifesté que vous étiez pour la vaccination. Et, dans la perspective où la vaccination s'avère le meilleur moyen de prévention contre la COVID, ne pensez-vous pas qu'actuellement celle-ci devrait être obligatoire pour les personnes salariées pour qui le vaccin n'est pas contre-indiqué? On est dans la quatrième vague.

Mme Senneville (Caroline) : ...vais vous donner des éléments de réponse. Vous savez, reportons-nous au début de la pandémie, là, on manquait de masques, hein? Il y a des gens, là, qui sont rentrés dans des CHSLD avec leur propre masque, à qui on leur a interdit de le porter. On leur a dit : Vous enlevez votre masque. Il y a des gens qui sont rentrés au travail avec pas de protection. Ils mettaient un sarrau puis une serviette dans le cou. Il a fallu déposer des griefs pour faire reconnaître qu'il y avait une transmission par aérosols puis que, quand on était en contact avec les patients, ça prenait un masque N95, parce que ce n'était pas ça qui était souhaité au début.

Alors, tous les moyens sont bons pour lutter contre la pandémie. Puis je pense qu'un des pièges qui nous guettent avec le vaccin, c'est de dire que, maintenant que le vaccin existe, tout le reste, on peut laisser tomber. Non, le vaccin, c'est une corde de plus à notre... à notre arc, et il y a des données qu'on ne sait pas, là. Ça dure combien de temps, l'effet du vaccin, hein? Ce qu'on sait, là, c'est que le vaccin est superbon pour empêcher les gens de mourir puis d'aller à l'hôpital, puis ça, nos membres, ils sont contents de ça parce que c'est eux autres qui travaillent à l'hôpital. C'est moins sûr sur comment il transmet, comment il ne transmet pas.

Alors, nous, ce qu'on dit, c'est : Oui, le vaccin, c'est une arme de plus. Il ne faut absolument pas laisser tomber les autres armes. Ça pourrait... Ça pourrait, comme je disais, être un piège puis faire en sorte que... Puis on ne les connaît pas tous, les variants. On est rendus au Delta, puis il y aura peut-être un Epsilon et un... etc. là. Donc, il va vraiment falloir s'assurer que tout est là. Alors... Et on le sait, on le sait, qu'il y a des personnes vaccinées qui peuvent être porteuses, même si elles sont asymptomatiques.

Donc, oui, c'est le meilleur moyen, travaillons le plus possible, mais, nous, ce qu'on vous dit, ça... Tu sais, si on avait... Moi, si j'avais une baguette magique, là, je vaccinerais tout le monde, mais je n'ai pas une baguette magique. On vit dans une société de droit, puis le vaccin, c'est un choix. On a le droit à l'intégrité physique de notre personne. Puis il y a des gens qui peuvent, pour des bonnes... Puis il y en a qu'on le sait, que ça sera pour peut-être de moins bonnes raisons, mais ça fait partie de leurs droits. Alors, comment on conjugue ces droits-là? Parce que, comme je le disais, bien, il faut... on vit en société, puis il faut protéger... il faut protéger les deux.

Puis nous, on a toutes sortes de membres, hein? Sur 300 000 membres, à la CSN, il y a des gens qui vont nous dire : Bien, j'aimerais ça que tout le monde soit vacciné, puis il y en a d'autres qui ont peur. On vit un temps de pandémie, les gens sont insécures, les gens sont craintifs, puis ceux qui refusent le vaccin, ce ne sont pas tous des antivax. Je pense qu'il faut continuer notre travail de... il faut continuer notre travail de conviction parce que... Est-ce que le remède va être pire que le mal? C'est ça aussi qu'il faut se poser quand on pose... Ou, tu sais, si ça fait en sorte qu'il y a moins de monde sur le plancher, si ça fait en sorte que le personnel est surutilisé...

Puis je vais vous dire une autre affaire, hein, la Santé publique, là, elle avait dit, au début de la pandémie : Pas de roulement de personnel. Il y en a eu, roulement de personnel. Pourquoi il y en a eu, roulement de personnel? Parce que c'était ça ou avoir des bris de service. Alors, est-ce qu'on va se retrouver dans une situation où tu n'es plus capable de faire rentrer de monde parce que tu as un petit pourcentage de gens qui n'était pas vacciné? On va faire quoi, bris de service ou on va faire rentrer la personne pareil, tu sais? Alors, on a voulu encadrer le travail des agences, puis, moi aussi, je vais lancer une fleur au gouvernement, là. On sait que le gouvernement est préoccupé par le travail des agences, mais, à un moment donné, quand, sur le terrain, il n'y en a pas, de service, bien, il faut trouver du monde.

Mme Lavallée : Alors que... Je vous entends quand vous parlez du vaccin, mais on a des données qui sortent actuellement où on a plus de cas à l'heure actuelle qu'à la même période l'année passée et où on se rend compte que la vaccination a ses effets, donc... au niveau de l'entrée des gens à l'hôpital, donc c'est... Oui, il y a peut-être d'autres façons, mais il reste que les résultats sont là, ils sont parlants, et votre rôle à vous est important.

Vous voulez prévenir les problèmes de santé parmi vos membres puis, Dieu merci, vous avez une grosse majorité de vos membres qui ont accepté de se faire vacciner, mais ne croyez-vous pas qu'à partir du moment où on est dans la quatrième vague c'est d'autant plus important que les personnes qui sont réticentes puis qui n'ont pas de raison de ne pas se faire vacciner, pas de raison médicale... qu'ils devraient se faire vacciner et que ça devrait peut-être être obligatoire? Je repose ma question. Est-ce que vous pensez que, dans l'état actuel, la situation actuelle où on essaie de lutter contre une... et c'est une pandémie qui est mondiale... que vous avez un rôle à jouer là-dedans?

Mme Senneville (Caroline) : Tout à fait, mais ce qu'on vous dit, c'est que, si vous la rendez obligatoire puis que des gens subissent des conséquences par rapport à leurs conditions de travail, il va y avoir contestation juridique. Moi, je ne suis pas arbitre de griefs, je ne suis pas juge. C'est le genre de dossier qui peut monter jusqu'à la Cour suprême, puis peut-être qu'au bout du compte, là, la réponse qu'on va avoir, juridique, c'est : Bien, dans l'équilibre des droits, vous pouvez inciter fortement une personne à être vaccinée, vous pouvez mettre toutes les conditions en place, mais vous ne pouvez pas, par exemple, la congédier, vous ne pouvez pas la mettre sans solde pendant des mois parce que c'est considéré comme étant un congédiement déguisé, parce que... quand tu ne travailles pas pendant plusieurs mois. Donc, on ne le sait pas. L'état du droit... C'est une pandémie nouvelle, là, la dernière fois, c'était il y a 100 ans. Le droit a beaucoup évolué en 100 ans, surtout le droit du travail.

Alors, nous, ce qu'on vous dit, c'est qu'il y a quelqu'un quelque part qui va contester, et ça sera porté devant les lieux où ça devra être porté. Alors, est-ce qu'on est capables de trouver d'autres solutions que des solutions, je dirais, très fortes, en termes de relations de travail, qui seraient des suspensions très prolongées ou des congédiements?

Mme Lavallée : Merci.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Chauveau.

M. Lévesque (Chauveau) : ...combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Provençal)  : 1 min 50 s.

M. Lévesque (Chauveau) : Parfait. Mme Senneville, M. Begley, merci beaucoup pour votre beau travail. Je veux saluer, évidemment, les efforts que vous avez faits, puis l'ensemble de vos membres, la très vaste majorité se sont vaccinés, puis, je pense, c'est un effort, puis, nos anges gardiens, on y tient, mais je vais quand même me faire un peu l'avocat du diable. Parce que j'entends ce que vous dites au niveau des syndicats. Le personnel, il en manque, le personnel est épuisé, le personnel... les cas augmentent aussi, puis ça fait que le personnel est surchargé, et ce n'est pas d'hier.

Justement, vous ne pensez pas que, par respect pour toutes ces personnes qui ont posé ce geste civique de se faire vacciner... puis là je ne parle pas des gens qui ont des conditions médicales particulières, qui... effectivement, ça pourrait être dangereux pour leur santé, je ne parle pas de ces cas-là, mais je parle que, pour l'augmentation des cas potentiels dans les hôpitaux, dans les CHSLD, dans les résidences de personnes âgées... d'autant plus que le ministre, ce matin, a dit que, dépendamment des vagues, on est passés à 45 000 cas parmi les travailleurs de la santé, ça a déjà été 10 % des cas, 20 %, 25 % de l'ensemble des cas qu'on a de COVID, vous ne pensez pas, ne serait-ce que pour... par respect pour les autres personnes qui travaillent à côté d'eux, que ce ne serait pas pertinent que tous les travailleurs de la santé puissent être vaccinés et que, justement, on ne vienne pas alourdir leur fardeau par le fait que les travailleurs tombent au combat, donc on va augmenter la charge, et qu'il y ait encore plus, peut-être, de gens malades, pour vos membres, à traiter?

Mme Senneville (Caroline) : Je vais être courte. Ce n'est pas ce que je pense... ce n'est pas ce que moi, je pense qui est important. Parce que, oui, je crois en la vaccination, puis, oui, on le dit à nos membres.

Ce qu'on vous dit, c'est que, dans l'état du droit actuel, une obligation, tu sais, qui fait en sorte que les conséquences sont graves en termes de droit au travail, les gens vont utiliser les mécanismes prévus dans les lois des relations de travail, puis ça va arriver, que je sois d'accord ou que je ne sois pas d'accord. Moi, comme présidente de la CSN, il n'y a aucun des 300 000 membres que je représente à qui je peux dire : Tu n'as pas le droit de déposer un grief.

Le Président (M. Provençal)  : Je m'excuse, je dois vous couper la parole et la céder à... au député de Nelligan pour la suite.

• (14 h 30) •

M. Derraji : Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux. Merci pour le mémoire et merci pour votre présentation. Je sens, entre les lignes, et je comprends que vous insistez beaucoup sur le mot «risque réel», et vous avez mentionné le bris de service. Donc, j'imagine que vous avez fait vos devoirs avant la commission, et vous êtes en mesure, aujourd'hui, de nous donner des exemples de bris de service et les risques réels que, si on va de l'avant avec la vaccination obligatoire, c'est quoi les risques réels qu'on risque d'avoir, et ils se manifestent sous quelles formes.

M. Begley (Jeff) : Bien, nous avons vu, lors des premiers, là, et maintenant avec la quatrième vague qui s'en vient... je peux vous donner un ou deux exemples très concrets où nous sommes déjà en pénurie du personnel. Justement, hier soir, on parlait avec nos délégués, là, il y en avait une de Granby, dans une petite résidence, elle a indiqué très clairement, là, qu'il y a un risque certain d'un bris de service chez eux à cause de la situation. Puis moi, je n'ai pas demandé le pourquoi du membre qui travaille la nuit qui ne voudra pas se faire vacciner.

M. Derraji : Le ministre, ce matin...

M. Begley (Jeff) : Et... Oui?

M. Derraji : Le ministre, ce matin, nous parlait de 30 000 employés dans le secteur public. Vous, vous avez... vous représentez quand même une bonne partie de ces membres. Pensez-vous que 30 000 reflètent vraiment le nombre de personnes affectées par cette mesure ou vous pensez qu'il y aura plus que 30 000 personnes affectées?

M. Begley (Jeff) : Bien, moi, ce que j'ai compris, c'est qu'il y a 30 000 personnes, au moment où on se parle, qui ne sont pas vaccinées. Donc, c'est le pourcentage de membres dans le réseau de la santé et des services sociaux. Chez nous, on représente peut-être près de 35 %, 40 % des membres qui travaillent dans le réseau, là. Bien, ça voudrait dire, sur ce 30 000 là, c'est autour de 10 000, mettons, mais moi, je ne pense pas qu'il y a 10 000 personnes qui vont partir, mais ce ne sera pas 10 personnes non plus, là. Regarde, à un moment donné, le membre dit : On n'en peut plus.

M. Derraji : Je comprends. Vous avez aussi des membres au niveau des écoles, au niveau des services de garde. Est-ce que vous craignez une extension de la vaccination que ce soit dans les écoles ou les garderies? Et quel impact cela pourrait avoir?

Mme Senneville (Caroline) : Bien, si tu permets, Jeff, je l'ai dit d'entrée de jeu, là, notre position vaut... c'est le même impact. On ne connaît pas... La situation, dans les écoles, elle est moins... voyons, documentée que celle dans le réseau de la santé, mais ce n'est pas... ce ne sont pas des emplois faciles, là, surtout dans les services de garde, hein, tu es mis à pied tous les étés, tu as des horaires brisés, il y a une grave pénurie, donc... Et ce n'est pas mieux s'il n'y a pas de personnel pour être en service de garde puis que tu mets tout le monde... tous les jeunes ensemble. Alors, ça peut... effectivement, ça peut occasionner des bris de service à ce moment-là.

Mais moi, je le répète, tu sais, c'est comme s'il fallait... quand on parle de vaccination obligatoire, c'est comme s'il fallait partir le bazooka tout de suite. À partir du 1er septembre, le passeport sanitaire va avoir effet. Tous nos membres, là... je suis sûre que tous nos membres, là, ils vont dans des restaurants, vont dans des cinémas, vont dans des gyms. Ils ne pourront plus, là. Ça, ça va avoir un effet sur le personnel qui travaille et en santé et en éducation. Ça commence le 1er septembre, on n'a même pas vu ça agir. Il nous manque des données. Est-ce qu'il y a une région en particulier, un corps d'emploi en particulier où on a des problèmes, sur lesquels on pourrait avoir des plans d'action ciblés pour faire en sorte que ça augmente la vaccination?

Alors, on peut bien rendre la vaccination obligatoire, on peut bien mettre des mesures coercitives, tu sais, déplacer les gens, pas de problème, les faire tester, pas de problème, puis évidemment on va gérer les exceptions médicales, mais, nous, ce qu'on vous dit, c'est qu'il y a des gens qui ne le feront pas. Puis qu'est-ce qu'on fait avec ces gens-là? Puis c'est quoi, la balance des inconvénients entre les droits individuels, les droits collectifs? C'est ça qu'il faut examiner. Puis, s'il y a des gens qui devront faire le choix entre être vaccinés puis garder leur emploi, dans l'état de pénurie de main-d'oeuvre actuel, disons que...

M. Derraji : Je vous entends, je vous remercie. Il y a un autre point qui a été soulevé aujourd'hui par un autre groupe, c'est à savoir... Parce qu'au fait il y a un parallèle par rapport à ça, je pense, ça commence à être... à faire consensus, ce point, vous l'avez très bien mentionné, c'est la baisse de mesures de protection. Si je vous pose la question aujourd'hui, vous représentez quand même beaucoup de membres, est-ce que vous pensez que le gouvernement fait fausse route en diminuant les mesures de protection? Ou bien, selon vous, la vaccination, il faut pousser la vaccination, mais il ne faut pas baisser la garde par rapport aux mesures de protection? Parce qu'au bout de la ligne, vous l'avez très bien dit tout à l'heure, il y a le taux d'efficacité du vaccin, mais ce n'est surtout pas le moment qu'on baisse les gardes et qu'on baisse les mesures de protection. Est-ce que vous partagez ce constat? Et, si c'est oui, avez-vous des exemples à nous partager aujourd'hui?

Mme Senneville (Caroline) : Bien oui, je partage ce constat-là très certainement pour les milieux de travail — je vais laisser au gouvernement puis à l'INSPQ dans la société en général, là — mais il faut que les équipements de protection individuelle soient disponibles en grand nombre pour tout le monde. Un exemple : la ventilation dans les écoles. Alors, on ne sait pas ce que ça va donner, la vaccination dans les écoles. Puis, pour l'instant, on ne vaccine pas les 0-12 ans.

Alors, il faut trouver... il faut que tout... Puis les variants, on ne connaît pas ce que sera le prochain variant, quel sera son degré de contagiosité, l'efficacité. Alors, il faut... on est face à quelque chose de gigantesque, d'inconnu, qui perdure dans le temps, et il faut que toutes les mesures soient là, puis il faut que nous-mêmes, comme personnes puis comme travailleurs, travailleuses, on n'oublie pas de se laver les mains puis qu'on respecte la distanciation sociale. C'est... Je le répète, on est 100 % pour le vaccin, c'est essentiel dans la lutte qu'on mène contre la pandémie, mais le vaccin à lui seul ne fera pas la job.

M. Begley (Jeff) : Puis je... Si je pourrais peut-être ajouter quelques exemples très concrets. Mme Bédard, ce matin, vous avez raison, elle a mentionné quelques-uns, j'en ajoute un autre. Auparavant, on faisait des tests qui avaient... Mettons, quelqu'un qui fait une intervention qui est à haut risque, puis il y a eu une défaillance de son équipement de protection individuel, on n'attendra pas des symptômes, automatiquement un test. Là, maintenant, on dit : Si vous êtes double vacciné, ce n'est pas nécessaire. Grave erreur, grave erreur. Puis j'ajoute les exemples que Mme Bédard a donnés ce matin, on partage cette analyse-là.

M. Derraji : Donc, vous partagez... au fait, vous mentionnez, c'est une grave erreur, mais vous partagez... Au fait, vous arrivez à la même conclusion que le groupe de Mme Bédard, ce matin, au niveau des mesures de sécurité.

M. Begley (Jeff) : Tout à fait. Il faut les renforcer, surtout avec le Delta. C'est... On nous dit que c'est encore plus contagieux, là, ce n'est pas le temps de lâcher, au contraire, c'est le temps de renforcer. Les masques N95, il faut les sortir quand il faut. Bref, absolument, absolument.

M. Derraji : Si je comprends votre logique, au lieu d'aller à la vaccination obligatoire, le gouvernement n'aurait dû pas baisser les règles des mesures de sécurité, au contraire, les amplifier, surtout le fait que le Delta est très contagieux, et probablement laisser le temps faire, en fait, son effet, et on va atteindre le pourcentage d'immunité qu'on espère tous de 95 %. Est-ce que c'est ce que je peux comprendre en... lors de votre présentation?

M. Begley (Jeff) : Ça résume assez bien, je trouve, en termes de dire... Incitation avec des mesures renforcées, là, c'est ça, l'objectif. Ça fait qu'on pense que comme cela... mieux que l'obligation.

M. Derraji : J'ai entendu le N95. Pour moi, quatrième vague, pour moi, ce n'est même pas une question qu'on doit se poser aujourd'hui. Rassurez-nous, s'il vous plaît, vous pensez que vos membres n'ont pas à leur disposition le masque N95?

M. Begley (Jeff) : Il y a des problèmes qui se pointent de temps en temps. Ce n'est pas le majeur, mais ça reste quand même un problème, oui.

Mme Senneville (Caroline) : Puis moi, je pense que, pour reprendre votre phrase, on peut aider le temps. Tu sais, quand M. Begley dit : Bien, des mesures incitatives, là, ça ne veut pas dire attendre, tout, tu sais... Je veux dire, on peut être actif et travailler sans tomber dans le coercitif.

• (14 h 40) •

M. Derraji : ...éviter le coercitif, il faut commencer par garder les mesures de sécurité, c'est ce que je peux comprendre de votre intervention, y compris les masques, y compris les tests, que vous constatez que le protocole des tests n'est plus à l'ordre du jour.

Mme Senneville (Caroline) : Absolument.

M. Derraji : O.K. Je vous remercie.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je cède maintenant la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. M. Begley, Mme Senneville, bonjour. Merci d'être là. Selon vous, là, vous dites que c'est une grave erreur de cesser les tests de dépistage systématiques. Selon vous, combien de gens ont été détectés et donc retirés du réseau en raison d'un test positif? Avez-vous des données là-dessus par mois ou sur une période, là, que vous auriez?

M. Begley (Jeff) : Non. Des données spécifiques pour le monde retiré, non, non.

M. Marissal : C'est bon. J'ai très, très peu de temps, alors, si la réponse est non, on va mettre fin à cette question-ci. Je vous fais une petite charade, là. C'était non de la part du gouvernement il y a un mois, c'est devenu oui. C'est basé sur un avis préliminaire. Il y a un risque de bris de service, le ministre l'a dit lui-même. Vous, vous dites : C'est exagéré. Je suis assez d'accord avec vous. Et vous dites, et là encore je suis assez d'accord avec vous, qu'il y aura contestation. Alors, la question, là : Pourquoi le gouvernement va là selon vous?

Mme Senneville (Caroline) : Bien, écoutez, il y a le bout où c'est la pandémie, puis on cherche par tous les moyens de faire augmenter le taux de vaccination. Puis, pour nous, ce n'est pas une mesure gouvernementale, ça. Pour nous, c'est une mesure d'un employeur. Parce qu'une mesure gouvernementale, ça s'appliquerait à l'ensemble des milieux de travail, ça s'appliquerait à l'ensemble de la situation. Moi, ce que je dis, c'est que, par rapport à la santé puis aux services publics, le rendre obligatoire de façon très coercitive, ça risque de mettre des bris de service, ça risque d'être contesté, et surtout ça fait porter aux milieux de travail la gestion de la vaccination obligatoire. Est-ce que c'est une question sociétale qu'on devrait se poser, évidemment, s'appuyer sur l'INSPQ? Il faudra voir. Alors, peut-être, tu sais, il y a... Et là, pour nous, tu sais, je pense que c'est ça qu'il faut voir.

M. Marissal : La FIQ, avant vous, parlait d'une décision politique. Êtes-vous d'accord avec l'impression ou la conclusion de Mme Bédard?

M. Begley (Jeff) : Mais, si je pourrais... Puis ça ferait bien avec votre dernière question aussi. Moi, je trouvais que le docteur... Massé... J'oublie son nom.

M. Marissal : Massé.

M. Begley (Jeff) : Je m'excuse, Massé, pardon. Il y a une phrase que j'ai écrite qu'il a dite, il a dit : Au-delà de la question de...

M. Marissal : Épidémiologique, c'est... Oui, je comprends.

M. Begley (Jeff) : Exactement, il y a la question de donner un exemple au reste de la population. Ça, c'est politique, ça.

M. Marissal : Donc, vous êtes d'accord avec Mme Bédard de la FIQ?

M. Begley (Jeff) : Donc, je pense, il m'apparaît que oui.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup.

M. Marissal : Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Je vais maintenant céder la parole au député de Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Merci beaucoup, M. le Président. Mme Senneville, M. Begley, merci d'être là. Rapidement, si je comprends bien l'argument du gouvernement selon lequel on met... on veut mettre cette mesure en place de la vaccination obligatoire pour soulager les hôpitaux puis éviter que les professionnels en soins tombent malades, vous n'achetez pas cet argumentaire. Pourquoi?

Mme Senneville (Caroline) : Ouf! Ce n'est pas... Plus il y a de gens de vaccinés, mieux c'est pour tout le monde, y compris les gens dans les hôpitaux, hein? Alors, le diable étant dans les détails, c'est quel chemin on prend pour les faire vacciner. Nous, ce qu'on dit, c'est que, dans la société de droit dans laquelle on est, on ne peut pas enfermer les gens dans une pièce puis les vacciner de force. Ces gens-là ont des droits individuels, ils ont des droits liés au droit du travail, ils vont les exercer. Donc... Et moi, je vais être très claire là-dessus, s'il y a des membres de la CSN qui nous écoute en ce moment, là, qui nous écoute en télédifféré, allez-vous faire vacciner. Ça va vous aider vous, votre famille, puis, si vous êtes dans un hôpital, ça va alléger votre tâche. Je vais aller jusqu'au bout dans mon travail de conviction pour ça, mais...

M. Arseneau : Mais je comprends que... Si vous me permettez, j'ai peu de temps. Est-ce que vous dites qu'on pourrait atteindre le même objectif de vaccination sans mesure coercitive, c'est-à-dire qu'on pourrait convaincre plutôt que contraindre? Et, si c'est le cas, que faites-vous de l'urgence qui est invoquée par plusieurs, par le gouvernement surtout, là, l'urgence, la quatrième vague, il faut faire vite? Est-ce que vous pensez qu'on ait un peu de temps pour le faire, pour convaincre et arriver aux mêmes objectifs?

Mme Senneville (Caroline) : On a commencé, on va continuer. Puis, je vous dirais, le système qui est en marche actuellement, là, où si tu n'es pas vacciné, tu es testé trois fois par semaine, je pense que ça a fait ses preuves. Il n'y a pas eu d'éclosion dans les hôpitaux, donc il y a des... On peut mettre... On peut être très actif tout en n'étant pas coercitif. Donc, il faut mettre tous les moyens en oeuvre. Puis c'est quoi, l'objectif, aussi? Est-ce que l'objectif, c'est 100 % du monde partout?

M. Arseneau : On se pose la même question, effectivement.

Mme Senneville (Caroline) : Nous, on ne sait pas c'est quoi, l'objectif.

M. Arseneau : Est-ce que vous pensez qu'on peut l'atteindre? Est-ce que c'est futile de penser qu'on puisse atteindre 100 %?

Mme Senneville (Caroline) : Bien, juste avec les cas médicaux puis les personnes enceintes, par exemple, ça ne sera pas possible.

M. Arseneau : D'accord. C'est tout le temps qu'on avait. Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je cède maintenant la parole à la députée d'Iberville.

Mme Samson : Merci, M. le Président. Bonjour, madame. Bonjour, monsieur. Votre propos est on ne peut plus clair : continuons de tenter de convaincre les gens et non pas de les contraindre. Je pense que votre plus grosse préoccupation, c'est aussi le bris de service. Moi, c'est ce qui me préoccupe beaucoup, c'est l'exode des travailleurs. On sait que tous les milieux du travail sont en pénurie de main-d'oeuvre, il y a des opportunités pour tout le monde. Et, moi, ma crainte, c'est ça, c'est qu'on affaiblisse encore davantage le système, ce qui pourrait être plus catastrophique que le COVID encore, là. S'il fallait qu'on ne soit plus capable de soigner les gens dans nos hôpitaux ou dans nos centres de séjour, ce serait bien terrible.

Alors, je vous remercie. Bravo pour l'effort que vous avez fait et que vous continuez de faire auprès de vos membres, en espérant que le gouvernement écoute. Merci.

Mme Senneville (Caroline) : Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Je vous remercie de votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin que l'on puisse accueillir le prochain groupe. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 14 h 46)

(Reprise à 14 h 58)

Le Président (M. Provençal)  : Je souhaite la bienvenue aux représentants de la Fédération des médecins spécialistes du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échanges avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter puis à débuter votre présentation. À vous la parole.

Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ)

M. Oliva (Vincent) : Parfait. Bonjour. Merci, M. le Président. Mmes et MM. les parlementaires, bonjour à tous et à toutes. Donc, je suis accompagné du Dr Karl Weiss, qui est président de l'association des médecins infectiologues, et je suis moi-même radiologiste d'intervention et président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec.

Donc, on vous remercie d'abord de nous avoir invités. Nous représentons 10 000 médecins spécialistes de 59 spécialités de toutes les disciplines médicales, chirurgicales, de laboratoire. Et puis il m'apparaît important de souligner d'entrée de jeu que les médecins sont les travailleurs de la santé avec le plus haut taux de vaccination, soit 97 % qui ont reçu au moins une dose et presque 96 % qui ont reçu deux doses, donc qui sont pleinement vaccinés. Donc, nous avons donné l'exemple.

Nous croyons cependant qu'il faut aller un peu plus loin encore et que l'ensemble du personnel d'un milieu de soins devrait être vacciné, peu importe son niveau de contact avec les patients. Cette position est justifiée par le fait qu'il faut éviter les éclosions et les transmissions dans les milieux de soins. Cette position est aussi celle qui est privilégiée par l'Association médicale canadienne. Elle rejoint celle de nombreux autres pays, comme la Belgique, la France, l'Italie, la Hongrie, la Grèce, des provinces canadiennes, comme la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick.

• (15 heures) •

Dans toutes ces juridictions, si le cadre juridique diffère, ce qui ressort, c'est que, dans le contexte particulier de la lutte à la COVID, les droits collectifs priment sur les libertés individuelles. À l'étranger, nous remarquons que, dans le cadre mis en place qui prévoit souvent un délai raisonnable pour se faire vacciner et... il y a une possibilité d'un transfert ou d'une mesure afin d'éviter les contacts avec la population et, enfin, le cas échéant, une suspension administrative.

Rappelez-vous que, dans plusieurs pays, le débat sur une politique de vaccination obligatoire n'a pas commencé en 2021, car, au siècle dernier, il y a eu une obligation liée à soumettre la population à la vaccination contre la variole. Il s'est poursuivi un débat sur la vaccination contre la poliomyélite entre les années 50 et 60. Mais, peu importe la perspective historique, une chose est claire, la seule façon de lutter et d'éradiquer une maladie avec un fort potentiel infectieux, c'est d'avoir une forte couverture vaccinale de la population.

Un patient doit pouvoir aller se faire soigner sans craindre d'être infecté, un point, c'est tout. Nous ne voulons pas revivre le scénario du printemps 2020, alors que, dans les CHSLD et les résidences pour personnes âgées, certains hôpitaux et des plus petits centres ont été aux prises avec des éclosions majeures et funestes. Nous demandons aux parlementaires et au gouvernement de ne pas limiter l'obligation au personnel soignant pour le bien des patients. Nous demandons des modalités d'application qui soient simples et faciles de compréhension pour les médecins, le personnel et les patients.

Notre réseau de la santé est fragile, nous l'avons vu. Des éclosions ont créé des ruptures de service dans plusieurs régions du Québec faute de personnels soignants, qui ont dû s'isoler. L'heure n'est plus aux demi-mesures, il faut protéger nos milieux de soins pour nous permettre de soigner la population sur l'ensemble du territoire québécois dans toutes les spécialités. C'est d'ailleurs ce principe qui a toujours été mis en application dans le cadre de l'immunisation des travailleurs de la santé, des stagiaires et de leurs professeurs. Le législateur a d'ailleurs toujours recommandé aux professionnels de la santé de prendre les mesures nécessaires pour protéger leur santé et veiller à ne pas mettre en danger la santé des autres personnes qui se trouvent sur les lieux de travail.

Donc, des impacts non négligeables de l'absence de socialisation et de contact vont marquer une génération, et ça, c'est nos confrères pédiatres qui nous l'ont rappelé, et donc ce sont des effets collatéraux qu'il ne faut pas non plus à négliger. Mais, pour ceux qui nous diraient qu'ils sont résistants à la vaccination, on va leur répondre que les effets secondaires de la vaccination sont bien moindres que les effets de la maladie. À ceux qui sont inquiets des effets allergologiques, nous disons : Il est possible de vous faire vacciner en toute sécurité. À ceux qui brandissent le libre choix, nous disons : Nos patients, nos malades, nos compatriotes ont aussi des droits.

L'accès à la médecine spécialisée a été grandement affecté par la COVID. Les activités médicales qui n'étaient pas jugées urgentes ont dû être délestées, elles n'étaient pas pour le moins importantes. Des chirurgies orthopédiques, des activités de dépistage du cancer, des chirurgies électives ont dû être déplacées, reportées ou annulées. Au plus fort de la crise, c'est près de 200 000 patients qui étaient en attente. Pendant ce temps, nous ne pouvions faire ce que nous devions faire : soigner nos patients, les opérer, les suivre, tout faire pour les guérir.

Pour toutes ces raisons, la fédération appuie sans réserve la vaccination obligatoire du personnel soignant tout en demandant de l'étendre à l'ensemble du personnel des milieux de soins. Donc, je vais maintenant passer la parole à Dr Weiss, qui va faire des commentaires complémentaires. Dr Weiss.

M. Weiss (Karl) : Oui. Merci beaucoup, Dr Oliva. Mmes et MM. les parlementaires, merci de me recevoir. Je suis désolé pour les inconvénients logistiques. Alors, je suis Karl Weiss, président de l'Association des médecins microbiologistes infectiologues du Québec, nous sommes 225, à peu près, spécialistes en maladies infectieuses au Québec, chef de la division des maladies infectieuses à l'Hôpital général juif de Montréal.

J'aimerais partager avec vous les points suivants. Le premier point, c'est que l'épidémiologie mondiale actuelle nous montre qu'environ seulement 10 % de la population mondiale est vaccinée et qu'on est en présence d'un virus qui est difficilement contrôlable et avec lequel on risque de vivre pour plusieurs années encore. Donc, ce qui est important pour nous, au Québec, c'est d'avoir et de créer une espèce de bulle québécoise, qui s'harmoniserait dans une bulle canadienne, pour pouvoir continuer à avoir une vie normale à l'échelle sociétale mais aussi à l'échelle de notre système de santé, où l'on puisse continuer de donner les soins qu'on a continué de donner.

L'efficacité de la vaccination actuelle, au Québec, où plus de 75 % de la population de 12 ans et plus a reçu deux doses de vaccin, démontre qu'on est un des endroits, actuellement, les mieux vaccinés au monde. Et, dans ce contexte-là, je pense que c'est important de pouvoir continuer sur cette lancée et de pouvoir conserver les acquis au sein de notre société, d'où l'importance, dans un contexte mondial de manque de vaccins, de difficulté à vacciner, de problèmes logistiques, de problèmes politiques, d'avoir, à l'intérieur de notre société, la capacité de continuer de fonctionner.

Le deuxième point, dans le combat contre la COVID-19, il est important de se rappeler que c'est un agrégat de mesures, et non pas une mesure unique, qui est fondamental, mais la vaccination est la clé de voûte du succès de tout, tout comme le masque, tout comme une ventilation adéquate et tout comme le dépistage et le traçage.

Dans un troisième point, j'aimerais rappeler que les données canadiennes de surveillance à l'échelle du Canada nous démontrent que, depuis le mois de janvier, environ 91 % des gens hospitalisés et 93 % des gens admis dans les unités de soins intensifs sont des gens qui ne sont pas vaccinés. Et on s'aperçoit que l'âge moyen des gens hospitalisés diminue de façon très importante. Alors qu'au début les gens étaient âgés d'environ 68 ans, ils le sont à peu près de 55, ce qui démontre que la population hospitalisée et malade devient de plus en plus jeune. Et donc c'est des gens qui utilisent beaucoup plus souvent et beaucoup plus longtemps les soins intensifs avec comme impact une diminution de capacité d'avoir des soins intensifs disponibles pour un ensemble de soins à la population québécoise.

Dans un troisième point, on voit qu'à peu près, quand on regarde les gens de 18 à 65 ans, environ 4 % à 5 % de ces gens-là hospitalisés sont des travailleurs de la santé et que ces travailleurs de la santé ont nécessité parfois des intubations, des soins... ou des séjours aux soins intensifs, etc. On se rappelle également qu'au cours de la première vague, où de nombreux Québécois sont malheureusement décédés, les chevaux de Troie ont été les travailleurs de la santé qui ont introduit le virus dans les milieux de vie, qui étaient les CHSLD à ce moment-là.

On n'a plus, je dirais, de doute au sujet de l'efficacité de la vaccination. Les études qui ont été faites en Israël, en Grande-Bretagne, aux États-Unis, le document publié par le CDC, aux États-Unis, en date du 29 juillet 2021 démontrent que la vaccination diminue de huit fois l'incidence de l'infection, 25 fois l'incidence de l'hospitalisation, 25 fois l'incidence de la mortalité. Une étude qui vient d'être publiée dans la région de Los Angeles, hier, démontre que les patients non vaccinés ont cinq fois plus de chances de tomber malades et 29,2 fois plus de chances d'être hospitalisés. La vaccination a été donnée à plus de 1,3 milliard de personnes sur la planète, et l'efficacité du vaccin, comme sa sécurité, n'est plus à prouver. Je dirais que, dans l'histoire, jamais un vaccin n'a été autant étudié que ce vaccin-là. Et donc, en ce qui concerne la sécurité vaccinale, on n'a plus de doute même si, bien sûr, sur le nombre, il peut y avoir à l'occasion des effets secondaires qu'il ne faut pas minimiser.

Il ne faut pas non plus oublier que de plus en plus de données montrent que la COVID longue, elle, devient un problème important. Des données aux États-Unis ont démontré qu'un tiers des patients jeunes en bonne santé qui avaient fait une COVID légère, et je tiens à souligner le mot «légère»... qu'un tiers de ces patients-là, six mois plus tard, restaient avec des plaintes et des séquelles qui vont augmenter l'utilisation des ressources du milieu de la santé.

Donc, dans ces conditions-là, pour des raisons qui sont éthiques, pour des raisons logistiques, pour des raisons pratiques, pour des raisons de support et de droit des Québécois à recevoir des soins sécuritaires et aussi pour pouvoir continuer à offrir toutes sortes de soins sécuritaires à la population, l'Association des médecins microbiologistes infectiologues, qui fait partie de la Fédération des médecins spécialistes du Québec, supporte le fait d'avoir une vaccination obligatoire et universelle pour l'ensemble des travailleurs de la santé. Et je tiens à souligner que, comme beaucoup de travailleurs de la santé, lorsqu'un je suis rentré en médecine, on m'a demandé d'être vacciné.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, Dr Weiss.

M. Weiss (Karl) : Merci. Je vous remercie.

Le Président (M. Provençal)  : Excellente présentation de votre part. Alors, nous débutons cet échange avec la députée de Soulanges.

• (15 h 10) •

Mme Picard : Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup d'être parmi nous aujourd'hui. Selon vous, quelle activité devrait se limiter la pratique d'un médecin qui ne présente pas de preuve de vaccination?

M. Oliva (Vincent) : Bien, je peux peut-être vous répondre. En fait, votre question, c'est : Un médecin qui ne serait pas vacciné, qu'est-ce qu'on fait avec?

Mme Picard : Exact.

M. Oliva (Vincent) : C'est ça, c'est ça, la question. Bien, écoutez, j'ai dit tantôt qu'on n'était pas aux demi-mesures. Et puis je pense que, comme médecins, on a la responsabilité de donner l'exemple et d'être vacciné, puis je ne pense pas qu'un médecin qui n'est pas vacciné devrait pratiquer, tout simplement.

Mme Picard : Merci beaucoup.

M. Oliva (Vincent) : S'il n'est pas vacciné à cause d'une contre-indication médicale, à ce moment-là, je pense qu'il faut qu'il y ait des assouplissements puis peut-être qu'il soit testé, peut-être qu'il pourrait être en télétravail, mais, quelqu'un qui refuse de se faire vacciner puis qui n'a pas de raison médicale de ne pas se faire vacciner, je pense qu'il devrait tout simplement se mettre en pause et ne pas pratiquer la médecine.

Mme Picard : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : ...Jean-Talon.

Mme Boutin : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Dr Oliva et Dr Weiss, de votre présentation, et qui a le mérite d'être très claire par rapport à votre position. Écoutez, bien, ma question va un petit peu dans le même sens que la dernière intervention du Dr Weiss, une question d'un point de vue éthique. Ne croyez-vous pas qu'il est de la responsabilité morale que les travailleurs de la santé, parce qu'ils sont en contact avec des populations vulnérables au quotidien, aillent se faire vacciner? C'est ma première question.

M. Oliva (Vincent) : Oui, absolument. On est, en fait, exactement sur la même page que vous sur cette question-là.

Mme Boutin : J'aimerais avoir une petite clarification par rapport à quelque chose que vous avez dit. Vous avez dit que, oui, vous vouliez et vous recommandiez... vous étiez pour la vaccination obligatoire pour les travailleurs de la santé mais que vous souhaitiez la voir étendue un petit peu à tous les travailleurs qui sont du réseau de la santé. Est-ce que... Ma question, c'est : Est-ce que vous pourriez clarifier ce point-là, savoir de quels travailleurs? Est-ce qu'on parle des adjointes administratives ou tous les gens qui sont en contact dans le réseau? Puis est-ce que... Tant qu'à ça, seriez-vous pour l'obliger à un plus large éventail de travailleurs qui seraient en contact avec des populations vulnérables?

M. Oliva (Vincent) : Bien, je vous dirais que tous les travailleurs qui sont dans des milieux de soins, que ce soient des hôpitaux, des cliniques... disons, des cliniques de médecine, alors peu importent la clientèle et les patients, oui, on pense que tout le personnel devrait être vacciné. Même s'ils ont des postes administratifs, c'est aussi des gens qui sont en contact avec d'autres travailleurs, ils se croisent dans des cafétérias, dans des couloirs. Et donc le risque zéro n'existe pas. Et statistiquement ils vont contaminer des patients parce qu'ils vont contaminer d'autre personnel, c'est statistique, surtout que ce variant-là est très contagieux.

Donc, nous, on n'est pas dans les demi-mesures, on se range du côté de la science. On ne voit pas de bonne raison de ne pas se faire vacciner et on pense que tout le personnel qui sont en contact avec des patients ou avec des milieux de soins devrait être vacciné.

Mme Boutin : Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Merci. Merci beaucoup pour votre présence ici. Tout à l'heure, je pense que c'est Dr Weiss qui a parlé des séquelles du COVID chez des jeunes. Donc, on voit que, bon, il n'y a pas juste le moment où on attrape le COVID, mais il y a des séquelles à long terme. Est-ce que vous êtes capables de nommer certaines séquelles que vous constatez, actuellement, chez les personnes qui ont eu le COVID?

M. Oliva (Vincent) : J'inviterais peut-être Dr Weiss à répondre à cette question-là. Dr Weiss.

M. Weiss (Karl) : Oui, bien sûr. Écoutez, c'est des séquelles... D'abord, je tiens à souligner que, souvent, il y a des séquelles chez des gens qui sont jeunes et en bonne santé, donc en pleine force de l'âge, des gens qui travaillent, qui sont sur le milieu du travail et qui peuvent être aussi des travailleurs de la santé.

Donc, souvent, ce sont des séquelles qui sont difficiles à bien délimiter parce que ce ne sont pas des choses qui empêchent les gens d'avoir une vie, on va dire, relativement normale. Mais je vous donne un exemple de patient qu'on voit, quelqu'un qui a été capable de faire de l'exercice de façon intense, qui disait : Vous savez, je courrais 10 kilomètres, et là je ne suis plus capable d'en courir deux ou trois, je suis fatigué. Des gens qui se disent : Écoutez, à 4 heures de l'après-midi, je ne suis plus capable de travailler, je ne suis plus capable de me concentrer, j'ai des problèmes de concentration. Des gens qui se plaignent de fatigue qui est disproportionnée par rapport à ce qu'ils avaient auparavant.

Donc, c'est toutes sortes de symptômes qui vont... qui sont très, très, je vous dirais, larges, qui touchent à la fois le système locomoteur, donc des douleurs articulaires mais souvent des problèmes, je dirais, de... problèmes de trouble de concentration, de problèmes d'allure presque neurologique à l'occasion, peut-être, ou des problèmes d'essoufflement, de problèmes de fatigue. Et donc c'est un ensemble de facteurs qu'il ne faut pas négliger.

Et d'ailleurs un article, aux États-Unis, vient d'être publié, dans le New England, il y a environ une semaine, qui montrait qu'aux États-Unis environ un tiers, comme je disais, des gens relativement jeunes qui avaient contracté la COVID, pas très malades, se plaignaient six mois plus tard de ne pas être revenus à leur état normal prémaladie. Et ça, je pense qu'il ne faut pas négliger cet aspect-là, surtout pour des jeunes, et il ne faut pas oublier que nos travailleurs de la santé sont des gens relativement jeunes qui pourraient faire partie de ce groupe-là. Et évidemment tomber malade, ça veut dire qu'ils ne sont pas plus disponibles non plus pour le réseau, ça veut dire que ces gens-là devront devenir des gens qui ne seront plus capables de fournir des services à la population ou d'en fournir moins.

Le Président (M. Provençal)  : Oui, M. le député de Chauveau.

M. Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup, M. le Président. Dr Oliva, Dr Weiss, merci beaucoup pour votre présentation. Moi, j'apprécie beaucoup quand des gens prennent position, qu'ils soient contre, qu'ils soient pour mais qu'ils soient clairs, qu'ils soient directs. Puis je pense qu'on a un devoir, tous, aujourd'hui, là, on fouille, on cherche la meilleure stratégie possible... mais de trouver la bonne manière de faire mais d'avoir une position claire. Quand on souffle le chaud, le froid, on est pour, on est contre, ni pour ni contre, mais, bien au contraire, disaient certains... Vous avez une position claire, je vous en félicite.

Vous avez nommé deux éléments majeurs, tout d'abord... qui me plaisent énormément. Le patient doit se rendre sans crainte d'être infecté lorsqu'il se rend à l'intérieur des services de santé et services sociaux. Ça, c'est un élément majeur que vous avez nommé. Et vous avez aussi nommé le fait que les travailleurs de la santé, malheureusement... puis ce n'était pas un souhait de personne, mais ont joué le rôle de cheval de Troie à l'intérieur des établissements, notamment nos CHSLD, résidences pour personnes âgées mais également dans les hôpitaux du Québec. Vous l'avez nommé, cet élément-là.

Alors, quand vous parlez, là, qu'il reste quand même quelques médecins qui ont refusé... Je vais avoir deux questions. Il y a encore quelques médecins qui refusent... Est-ce qu'ils refusent de se faire vacciner? Présentement, c'est-tu des médecins qui, idéologiquement, refusent de le faire ou c'est pour des raisons, on l'a vu tout à l'heure, là, qu'il pourrait y avoir des situations où les personnes ne peuvent pas se faire vacciner? Est-ce que vous avez cette statistique-là sur les 3 %, 4 % qui n'ont pas été vaccinés à ce jour chez vos membres?

M. Oliva (Vincent) : Je vais répondre ce que je peux répondre et je lasserai Dr Weiss, disons, compléter si jamais il y a des éléments à compléter. Bon, c'est des statistiques qui ne viennent pas de nous, O.K., mais ce qu'on en sait, c'est que ces médecins-là, premièrement, ne sont pas tous des médecins spécialistes, parce que c'est un amalgame des médecins omnipraticiens et spécialistes, puis on n'a pas, disons, la séparation. Alors, je ne sais pas si... quelle proportion de ces membres-là sont des membres de la Fédération des médecins spécialistes. Ça fait que ça, je le dis pour précision.

Autre chose, puis Dr Weiss pourra peut-être corroborer, je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de ces médecins-là... qu'il y ait des raisons médicales de ne pas se faire vacciner, parce que c'est un pourcentage qui est symbolique, c'est extrêmement symbolique. Les gens qui ne peuvent pas se faire vacciner, puis c'est principalement des causes d'allergies qui sont majeures, c'est extrêmement rare, et ça ne compose pas... ça n'explique pas le pourcentage dont on parle ici.

Donc, je crois que, dans ça, il y a certains médecins qui sont résistants pour cause de croyances. Ça fait que, ça, je sais qu'il y en a une, proportion certaine. C'est à peu près ça que je peux vous dire de plus précis. Je ne sais pas si Dr Weiss a des éléments de précision.

M. Weiss (Karl) : Non. Seulement peut-être pour renforcer ce qui vient d'être dit par mon collègue, en réalité, la contre-indication à être vacciné est un phénomène exceptionnel. Souvent, c'est des gens qui ont été vaccinés une première fois et que, lors du premier... l'administration du premier vaccin, vont faire une réaction allergique très sévère. Ces gens-là peuvent toujours être évalués par nos collègues allergistes qui ont l'expertise pour le faire. Et c'est un phénomène qui est extrêmement rare. Donc, quand on regarde ce genre de cas là, au Québec, hein, on parle de quelques peut-être dizaines de personnes tout au plus. Donc, on ne peut pas... ça ne peut pas expliquer des pourcentages qui peuvent être de l'ordre qu'on voit parmi les différents groupes des travailleurs de la santé.

Puis la deuxième chose, ce qu'il faut savoir, c'est qu'en tout cas, dans les données canadiennes, qui sont très, je dirais, préliminaires, sur le nombre de personnels de santé qui ont été hospitalisés, les médecins représentent quand même un très petit pourcentage des gens hospitalisés dans le groupe des 18 à 65 ans. Donc, c'est un groupe qui est extrêmement petit. Donc, c'est... Le nombre de médecins qui, je vous dirais, est contre la vaccination est très faible, d'autant plus qu'on sait que les gens, les médecins ont été très exposés, pour beaucoup en tout cas, aux patients COVID, là, en tout cas, certainement pour les médecins spécialistes. Et on l'a vu durant les première, deuxième et troisième vagues. Donc, s'il y a quelques, je dirais, irréductibles, c'est bien sûr fort possible dans une société, mais je ne pense pas qu'en tout cas l'allergie expliquerait le pourcentage restant.

• (15 h 20) •

M. Oliva (Vincent) : Si vous permettez, M. le député, si je peux juste ajouter quelque chose, c'est que j'insisterais pour dire que ces médecins-là, ceux qui sont résistants pour cause de croyances, je les inviterais à reconsidérer leurs positions puis à aller se faire vacciner.

M. Lévesque (Chauveau) : Très sage de votre part, M. Oliva... Dr Oliva. Peut-être rapidement, j'aimerais ça qu'on entende les conséquences que la... les premières vagues, première, deuxième, troisième vague, ont pu avoir de votre côté, considérant que le ministre de la Santé, tout à l'heure, a nommé qu'il y a eu 380 000 cas environ, au Québec, à date, et qu'on pourrait attribuer au réseau de la santé, là, des travailleurs, des personnes qui travaillent dans le milieu de la santé et services sociaux environ 45 000 cas. C'est ce que j'ai entendu, ce matin, en tout cas, jusqu'à preuve du contraire.

Ça a apporté, vous l'avez mentionné tout à l'heure, des conséquences sur d'autres types d'intervention. Puis je répète encore une fois, vous avez mentionné que, malheureusement, les travailleurs de la santé ont joué le rôle de cheval de Troie, de diffuseurs du virus, malheureusement. Ce n'était pas leur but, ce n'était pas leur souhait, mais c'est quand même le cas. J'aimerais que vous nous parliez rapidement des quelques conséquences, parce qu'évidemment les médecins spécialistes procèdent à de nombreuses interventions à chaque année. Et je vous en remercie infiniment pour votre travail, d'ailleurs.

M. Oliva (Vincent) : Bien, je vous dirais que, premièrement, il y a eu du délestage. Malheureusement, il y a eu du délestage, on a dû faire de la place dans les hôpitaux pour accueillir des patients qui souffraient de la COVID. On a dû monopoliser des soins intensifs, ce qui fait que ça a, évidemment, retardé et annulé de nombreuses chirurgies. Le délestage a été au-delà des activités chirurgicales, il a été dans à peu près toutes les spécialités, dans des consultations médicales, dans du dépistage, dans des tests diagnostics, ce qui fait qu'il y a eu des cancers non diagnostiqués, il y a eu aussi des cancers qu'on a tous vus dans notre pratique, là... des patients qui se présentaient avec des stades de cancer plus avancés, donc avec un niveau de guérison qui était plus difficile à obtenir. Donc... Et ça, je pense qu'on va payer, médicalement, de la... les patients, dans le fond, vont payer un petit peu de leur santé, et on va tous payer pour ça collectivement pour des années, plusieurs années, parce que ça va avoir un effet sur, si on veut, les résultats à long terme de traitement du cancer.

Donc... Puis là je parle de cancérologie, mais c'est beaucoup plus large que cela, parce qu'évidemment des patients qui ont des maladies de l'appareil locomoteur qui devaient avoir des chirurgies orthopédiques, évidemment, ils deviennent moins mobiles à cause de ça, ils sont moins actifs, ils ne peuvent pas travailler, des problèmes de cataracte, etc. Donc, tout le retard accumulé, ça va être un effort colossal pour le rattraper. Puis, chose certaine, on ne veut pas retourner là, parce que c'est une facture qui est beaucoup trop onéreuse, là, pour ce qu'on peut se payer sur un système de santé qui est déjà, à la base, fragile. On avait déjà une attente qui n'était pas optimale, on essayait d'améliorer les choses puis on était en train d'y parvenir, mais là ça nous a drôlement freinés, puis on ne veut certainement pas retourner à la situation qu'on a vécue lors des vagues précédentes.

Donc, je ne sais pas, Dr Weiss, si vous avez quelque chose à ajouter de particulier sur ce point-là.

M. Weiss (Karl) : Oui, peut-être je rajouterai la chose suivante. Je vous dirais juste que la première vague a en effet été une transmission des travailleurs de la santé vers les patients, pour toutes sortes de raisons, mais que, par la suite, avec l'arrivée de toutes les mesures, le masque, les mesures de prévention, contrôle des infections qui ont été mises en place dans les installations et la vaccination... Et ça vous montre d'ailleurs que toutes ces mesures-là mises ensemble, ce dont je vous parlais, les agrégats, fonctionnent. Quand vous avez environ plus de 85 % des travailleurs de la santé qui ont reçu au moins une dose de vaccin, ça vous montre que, là, on est revenus à des activités relativement normales, et la transmission de la COVID à l'intérieur du réseau hospitalier n'a plus rien à voir avec ce qu'elle était à ses débuts.

Et ça vous montre donc que c'est très encourageant lorsque vous avez des mesures importantes en place, lorsque vous avez un haut... un fort taux de gens vaccinés. Et on le voit dans la proportion de personnes âgées qui, elles aussi, bien sûr, sont vaccinées. Mais, lorsqu'on voit le nombre de personnes âgées, aujourd'hui, qui est hospitalisé, les gens qui viennent des CHSLD, c'est beaucoup moins que ce qu'on avait dans le passé. Et c'est un... je vous dirais, un reflet éclatant que les politiques de vaccination massive et de mise en place de précautions ont fonctionné.

Donc, il faut le poursuivre, il faut le continuer pour rester sur cette lancée, et surtout pas mettre en péril un système de santé où on veut revenir à une vie normale, où on puisse donner des soins, et qu'on ne soit pas pris à remettre en place toutes les mesures qu'on a connues dans le passé.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Je vais maintenant céder la parole à la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Merci, M. le Président. Bonjour, Dr Oliva. Bonjour, Dr Weiss. Merci de prendre le temps, dans vos agendas certainement bien chargés, d'être avec nous aujourd'hui.

Dr Oliva, je voudrais revenir sur ce que vous avez abordé, sur la question des travailleurs, dans la directive, en fait, dans les intentions du ministre qui ont été communiquées d'inclure seulement les travailleurs qui sont en contact rapproché avec des patients pendant une période de plus de 15 minutes. Vous avez parlé de demi-mesures, parce que, justement, ça vient exclure certains travailleurs qui sont dans des milieux de soins. Vous êtes certainement aux premières loges, hein, comme médecins spécialistes, de ce qui se passe dans les hôpitaux, sur les chaînes de transmission notamment.

Ce que j'entends... Quand vous nous parlez de demi-mesures, ce que j'entends, c'est que ce ne serait pas prudent. Il n'y a pas d'argument, il n'y a pas de raison d'exclure certains travailleurs dans ces milieux, parce que ça pourrait, justement, entraîner de nouveau des transmissions vers d'autres travailleurs de la santé, vers des soignants qui sont en contact aussi avec des patients, là. C'est bien ce que j'entends, là.

M. Oliva (Vincent) : C'est bien ce que j'ai exprimé. Puis je pense que notre position est claire. Dans le fond, on comprend qu'il y a des... disons, des décisions qui peuvent être d'ordre politique ou organisationnel. Et nous, on se... disons, on se rattache le plus possible à la science. Et la science, ce qu'elle nous dit, c'est que le risque zéro n'existe pas. Donc, on ne... disons, si on veut... sur une base statistique, on veut réduire le risque le plus possible, et donc c'est pour ça qu'on ne fait pas de distinction. Nous, ce qu'on appuie, ce qu'on... Bien, premièrement, on salue la décision du gouvernement et... mais on l'étend, si on veut, on est un petit peu plus large, un peu plus inclusif dans notre position.

Donc, je ne sais pas si Dr Weiss veut ajouter quelque chose.

M. Weiss (Karl) : Non, tout à fait. Je pense que c'est une décision qu'on supporte pleinement sur le fait surtout qu'il faut savoir qu'on parlait d'une notion, à un moment donné, de 15 minutes mais qui est inapplicable et irréaliste dans un contexte de soins de santé. Il ne faut pas oublier aussi parfois qu'il y a des interactions du personnel de support clérical et du personnel clinique, donc les gens pourraient, par exemple, aller ensemble à leur lieu de travail, pourraient aller dîner, sur l'heure du midi, ensemble, etc. Donc, cette coupure-là, dans la vraie vie, elle n'existe pas. Donc, pour nous, je pense qu'il faut avoir un aspect universel.

D'ailleurs, quand on parle, par exemple, de vaccination des employés de la santé, quand on rentre au niveau du système de santé, même quelqu'un qui travaille comme assistante administrative, on lui fait les mêmes tests et on peut lui demander les mêmes vaccins qu'à quelqu'un d'autre, parce qu'elle est au... elle court un certain risque dépendamment aussi des besoins qui peuvent changer à un moment donné. Donc, je pense qu'on devrait garder cet aspect de couverture universelle, ne pas se préoccuper des types d'emploi ou de la durée d'exposition potentielle à des patients, parce que c'est une création artificielle.

Mme Montpetit : Je vous remercie. Également, toujours en restant, justement, sur des considérations, et j'entends bien, scientifiques plutôt que politiques, puis ma question, Dr Oliva, s'adressera peut-être plus à Dr Weiss comme microbiologiste et infectiologue, est-ce que, justement, on devrait... Parce que, bon, la discussion qu'on a aujourd'hui, oui, concerne les travailleurs de la santé mais aussi l'élargissement à d'autres secteurs. Est-ce que, dans le contexte actuel, avec tous les impondérables, avec tous les imprévus aussi, avec la transmission que l'on sait qui est augmentée au niveau de la présence du variant du Delta... est-ce qu'on devrait, justement... est-ce que le gouvernement devrait envisager d'élargir la vaccination obligatoire non seulement aux travailleurs de la santé, mais aussi à des travailleurs d'autres secteurs, notamment dans les écoles qui... auprès du personnel éducatif?

M. Weiss (Karl) : Bien, écoutez...

M. Oliva (Vincent) : Oui, je vais laisser Dr Weiss répondre à cette question-là, parce que c'est une opinion d'expert.

Mme Montpetit : Absolument.

M. Oliva (Vincent) : C'est lui, l'expert.

Mme Montpetit : C'est exactement ce que je cherchais. Merci.

M. Oliva (Vincent) : Parfait.

• (15 h 30) •

M. Weiss (Karl) : Écoutez, moi, je pense que l'objectif initial de tout ce qui a été mis en place au Québec, c'était de protéger le système de santé pour ne pas qu'il soit inondé et pour qu'on puisse continuer de fonctionner normalement comme une société. Donc, le coeur de... je vous dirais, de nos activités, c'est d'abord de protéger le système de santé et donc de mettre l'emphase sur cet aspect-là, avec aussi la capacité de pouvoir appliquer les mesures, parce que c'est une chose de dire qu'on veut une vaccination universelle, ça devient un deuxième point de savoir est-ce qu'on peut l'appliquer ou pas. Donc, vraiment, il faut mettre l'emphase et il faut avoir, vraiment, la capacité d'application de la mesure sur l'ensemble du système de la santé.

Pour moi, le système de santé, comme vous l'a mentionné Dr Oliva, c'est plus vaste qu'uniquement les soins aigus ou les CHSLD, mais ça peut comprendre aussi un ensemble d'installations, de personnels qui travaillent avec les gens du milieu de la santé. Je prends l'exemple, par exemple, à la limite, des gens qui seraient dentistes, qui seraient à l'extérieur d'un système de santé, mais qui sont quand même reliés au système de santé.

Dans un deuxième temps, si on veut essayer de faire un parallèle avec ce qu'on a pu faire dans le passé, après ça, ça devient un choix de société, un choix moral, un choix éthique, mais aussi un choix de société. Est-ce qu'on devrait vacciner des travailleurs qu'on considérerait essentiels pour le fonctionnement d'une société? Et, à ce moment-là, bien, par exemple, pour le H1N1, lorsqu'on avait pensé à des catégories particulières, on pensait aux policiers, aux pompiers, donc aux gens qui pourraient avoir un rôle important à jouer pour le fonctionnement de la société. Le problème de l'étendre après ça, je vous dirais, à plus de monde, c'est qu'on est déjà, au Québec, dans une capacité de vaccination qui est très élevée. On a, au Québec, 85 % des gens qui ont reçu une dose, de plus de 12 ans, ce qui signifie que 85 % de la population québécoise est déjà prête et apte à être vaccinée. Puis c'est un des taux les plus forts sur la planète, sur lequel je pense qu'en termes de société on peut être fier. Une fois que j'ai dit ça, il y a un autre peut-être 5 % à 8 % de la population qui peut être convaincue, d'un côté ou de l'autre, selon les circonstances, à aller se faire vacciner. Puis il y a un certain groupe après ça qui, je dirais, est irréductible et sur lequel je n'ai pas d'idée intelligente sur comment aborder le sujet.

Donc, moi, en ce qui me concerne, je pense que, dans un premier temps, il y avait encore des découvertures importantes de vaccination pour les travailleurs de la santé et je pense que l'effort et l'emphase initiale urgente, dans le contexte actuel de préserver notre système, pour préserver notre société doit, d'abord et avant tout, être mis à ce niveau-là. Puis, sur le reste, on voit que la proportion de gens vaccinés est déjà extrêmement élevée. Va s'ajouter à ça des considérations logistiques, il ne faut pas s'en cacher. Vous savez que beaucoup de pays dans le monde, avec succès, en tout cas, des pays qui sont en avance sur nous sur la vaccination, ont déjà commencé les troisièmes doses. Et je pense qu'inévitablement on va devoir administrer à certains groupes de la population québécoise une troisième dose d'ici, on va dire, quelques mois. Donc, ça va rajouter une couche de difficulté. Et, dans ce contexte-là, il va falloir choisir ses priorités et ses batailles.

Mme Montpetit : Si je peux renchérir sur la question de la troisième dose, Dr Weiss, c'est un privilège de vous avoir aussi ici comme expert dans cette discussion-là, on a vu que certaines sociétés sont déjà avancées sur la troisième dose justement pour aller protéger des clientèles vulnérables, les plus de 60 ans, les personnes immunosupprimées, les greffés, par exemple, les gens en chimiothérapie. Est-ce que vous croyez qu'assez rapidement il va falloir aussi qu'une décision soit prise en ce sens pour protéger certaines clientèles?

M. Weiss (Karl) : Oui, alors, tout à fait. Je pense que le meilleur exemple est Israël. Israël, vous savez, a vacciné à une vitesse effrénée sa population. Donc, quasiment au mois de février 2021, quasiment plus de 90 % des gens de plus de 60 ans avaient reçu leurs deux doses. Et ce que ça a montré, c'est que l'efficacité, et c'est connu, ça, les vaccins... les virus contre les... les virus à ARN, lorsqu'on donne des vaccins comme la COVID, la durée de protection, ce n'est pas une protection qui va durer pendant des années. Donc, ça prend des doses-rappels. Et donc, on a vu qu'avec l'augmentation du variant Delta dans leur population, ils ont dû se lancer dans une campagne de troisième dose chez les plus de 60 ans. Et deux millions de personnes ont déjà été vaccinées, ont reçu leur troisième dose.

Et les dernières données scientifiques qu'on voit commencent à montrer un impact sur la diminution des hospitalisations, etc. Donc, on sait, par exemple, que l'Allemagne a commencé sa troisième dose, que la France devrait commencer, je pense, le 12 septembre dans les... l'équivalent des CHSLD, à administrer des troisièmes doses. Et les États-Unis ont aussi commencé une troisième dose pour des populations à risque, c'est une recommandation qui est sortie du CDC.

Donc, il est clair qu'au Québec on devra penser que les gens de plus de 60 ans, tout à fait, comme vous l'avez très bien souligné, que les populations à risque, donc les greffés, les hémodialysés, les gens qui ont des maladies sous-jacentes, etc., et possiblement, après ça, les travailleurs de la santé et les groupes de travailleurs essentiels devront également recevoir une troisième dose. Donc, il est clair que d'ici, on va dire, une échéance de six à huit mois, toutes ces catégories-là de travailleurs risquent de se retrouver dans un contexte de troisième dose.

Mme Montpetit : Parfait. Je pense qu'il ne me reste plus de temps. Alors, je vous remercie beaucoup, à tous les deux, pour vos réponses. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je cède maintenant la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Bonjour, MM. Oliva et Weiss. Comme j'ai très, très peu de temps, je vais aller directement au coeur de ma première question. Vous avez dit, tout à l'heure, Dr Oliva, qu'un médecin qui n'est pas vacciné devrait... ne devrait pas pratiquer la médecine. Vous avez même élargi, ou je pense que c'est M. Weiss, Dr Weiss, qui vient d'élargir aux dentistes. Je pense que ça va de soi parce qu'ils ont une certaine proximité, notamment, avec la bouche des patients. Mais comment les tester? Comment les détecter?

Donc, deux questions, là-dessus. Est-ce que, de un, ils devraient être soumis au même régime que les autres employés de la santé? C'est-à-dire : Tu n'es pas vacciné, tu ne pratiques pas, tu es... tu t'en vas chez toi en attendant, sans solde, il va sans dire. Et sinon, dans le cas, par exemple, des médecins qui sont plus au privé, il y en a plusieurs, et les dentistes en particulier, est-ce que, par mesure de réciprocité, les patients pourraient-ils exiger de voir la preuve vaccinale de quelqu'un qui s'apprête à leur jouer dans la bouche?

M. Oliva (Vincent) : Bien, écoutez, je vais réitérer notre position, là, fédérative qui est claire, à savoir qu'effectivement un médecin qui refuse de se faire vacciner et qui n'a pas de preuve vaccinale ne devrait pas pratiquer. Et oui, il devrait être en pause sans solde. Puis c'est notre position, puis elle est claire. Donc, par ailleurs, pour les questions d'ordre logistique, parce qu'il y a de l'organisation dans ça, là, que comment c'est appliqué, etc. Écoutez, moi, j'ai une preuve vaccinale, j'ai «downloadé» mon code, et puis je l'ai mis dans l'application, puis j'ai ma preuve vaccinale. Alors, je m'attendrais à ce que l'institution me demande une preuve vaccinale pour pratiquer la médecine, tout simplement.

M. Marissal : Oui, mais vous savez comme moi qu'un dentiste, par exemple, parce que Dr Weiss ouvrait à ça, puis effectivement, là, ce n'est pas couvert, notamment, dans le réseau de la santé, mais c'est de la santé, là, la bouche fait partie de mon corps, c'est un entrepreneur, là, privé, là. Alors, il se surveille lui-même. Moi, si je veux aller au restaurant, il faut que je montre ma passe vaccinale. Lui, il peut me traiter puis jouer dans ma bouche, puis je ne peux pas lui demander la preuve qu'il est bien traité, qu'il est bien vacciné?

M. Oliva (Vincent) : Je ne vous dis pas ça. En fait, moi, évidemment, je ne représente pas les dentistes.

M. Marissal : Non. Bien sûr.

M. Oliva (Vincent) : Et donc c'est difficile pour moi de répondre à la question comme vous la posez. Si vous me demandez, est-ce que je crois que les dentistes devraient être vaccinés? Absolument, les dentistes devraient être vaccinés.

M. Marissal : Comme tout le monde.

M. Oliva (Vincent) : Après ça, comment c'est appliqué, quels sont les conséquences s'ils ne sont pas vaccinés, ça, c'est des considérations d'ordre organisationnel, si on veut, là.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup.

M. Oliva (Vincent) : Voilà.

Le Président (M. Provençal)  : Je vais devoir...

M. Oliva (Vincent) : Mais ma position est claire.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Alors, je cède la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : M. le Président. Drs Oliva et Weiss, merci d'être là. D'entrée de jeu, j'aimerais savoir... revenir sur vos propos concernant le fait qu'il n'y a pas de raison de refuser la vaccination, si j'ai bien compris, là. Mais, en même temps, vous parliez peut-être de possibilité d'exemption médicale pour certains de vos membres ou pour du personnel de la santé. Je voudrais clarifier les choses, parce que s'il y a... Une des objections qu'on entend souvent, c'est le fait que, bien, enfin, on affirme qu'il n'y a pas suffisamment de données sur l'effet à long terme des vaccins ou... Ce discours-là revient constamment. Qu'est-ce que vous leur répondez à ces gens-là qui se disent : Il n'y a pas assez de données?

M. Oliva (Vincent) : Je peux faire peut-être un petit bout de chemin, puis laisser Dr Weiss compléter, parce qu'évidemment il a une expertise pointue, mais ce que je vous dirais, c'est que... Puis le commentaire que j'ai fait, c'est par rapport à quelqu'un qui ne pourrait pas se faire vacciner pour une contre-indication médicale. Alors, évidemment, tu sais, puis Dr Weiss pourra compléter, je sais qu'il y a des allergies sévères qui existent, et puis c'est rarissime, comme on dit. Alors, ça s'applique à une petite poignée de personnes. Donc, je ne voudrais pas qu'on généralise puis qu'on commence à s'imaginer qu'il va y avoir des exemptions importantes, parce que c'est vraiment symbolique. Ça, je tiens à le dire. Cependant, pour cette petite poignée de personnes, s'il y a un expert médical qui nous dit : Tel, tel citoyen, tel... évidemment, qu'il soit médecin ou autre, mais en particulier un médecin, tel médecin ne peut pas médicalement se faire vacciner parce que ça met sa vie en danger, bien là, évidemment, je pense qu'il faut être, disons, logique et souple. Ce n'est pas un problème d'intention, c'est vraiment un problème d'incapacité, puis, à ce moment-là, ce serait envisageable, là, de penser que ce médecin-là pourrait montrer une... tu sais, se faire tester ou se mettre plutôt en télétravail, quelque chose comme ça. C'est une suggestion, mais encore une fois, ça s'appliquerait vraiment à une toute petite poignée de personnes. Je ne sais pas si Dr Weiss a des choses à ajouter là-dessus.

• (15 h 40) •

M. Weiss (Karl) : Bien, écoutez, si vous voulez parler de la sécurité, juste pour vous donner un ordre de grandeur, dans l'Union européenne, j'ai regardé hier, 522 millions de doses administrées, aux États-Unis, 364 millions de doses, au Canada, 52 millions de doses. Donc, si vous regardez ça et vous rajoutez quelques autres pays qui ont utilisé ces différents vaccins, on n'est pas loin du milliard de doses de vaccin à ARN administrées sur la planète. Il y a rarement eu dans l'histoire des vaccins qui ont été administrés en aussi grande quantité et qui, en plus, étaient suivis d'une façon aussi serrée et avec autant, je vous dirais, de sécurité autour d'eux.

Donc, s'il y avait eu des effets secondaires très majeurs des vaccins à long terme, avec une technologie où on nous parle beaucoup des vaccins ARN, il faut savoir que c'est une technologie qui date des années 90, donc ce n'est pas quelque chose de nouveau, c'est une technologie nouvelle comme pour les vaccins virus, mais qui a déjà été utilisée à d'autres effets. Donc, l'aspect sécuritaire n'a jamais été étudié autant que ça, et habituellement, je vous dirais, avec des données qui auraient été 100 fois moindres, dans un environnement normal, un autre vaccin aurait été accepté par la plupart des agences de sécurité médicamenteuse dans le monde avec des données qui seraient 10 % de ce qu'on a pour ce vaccin. Donc, l'aspect que...

Le Président (M. Provençal)  : Je vous...

M. Weiss (Karl) : Cet aspect-là est quand même... remet en perspective.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup pour votre collaboration à nos travaux.

Je suspends les travaux quelques instants afin que l'on puisse accueillir le prochain groupe. Merci à vous deux.

(Suspension de la séance à 15 h 42)

(Reprise à 15 h 46)

Le Président (M. Provençal)  : Je souhaite la bienvenue aux représentants de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échanges avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter puis à commencer votre exposé. Je vous cède la parole.

Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ)

            M. Godin (Louis) : Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames et messieurs les députés. Je suis Louis Godin, président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. Je suis accompagné aujourd'hui du Dr Marc-André Amyot, qui est président de l'Association des médecins de Laurentides-Lanaudière et premier vice-président de la fédération.

 Nous avons transmis, au cours des dernières heures, un court mémoire qui fait état de la position de la Fédération de la... de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, et je vous remercie de nous permettre... de nous recevoir aujourd'hui pour discuter de l'enjeu de la vaccination obligatoire chez les gens oeuvrant dans le réseau de la santé, un enjeu qui est primordial, mais qui est aussi à la fois très sensible. On est conscients que ça peut amener des discussions difficiles, que ça vient toucher le principe... souvent les principes de droits et libertés et de consentement au traitement. Mais, pour nous, la situation actuellement l'exige.

D'entrée de jeu, on doit vous préciser que, comme médecins, notre présentation sera basée essentiellement sur des aspects scientifiques et sur les différentes recommandations qui sont faites par les sociétés savantes et notamment à Santé publique. Vous comprendrez que, tenant compte de cela, nous sommes les fervents promoteurs de la vaccination, surtout quand on parle d'un vaccin qui a été amplement distribué et administré aujourd'hui dans le monde à plus d'une centaine de millions de doses, avec des résultats clairs en termes de sécurité et d'efficacité. Il est clair pour nous que, sans la vaccination, il deviendra impossible de freiner l'évolution de la COVID-19. On est actuellement en présence du variant Delta, qui, malgré un succès de notre campagne de vaccination volontaire actuellement au Québec, nous met dans une situation où on doit aller un petit peu plus loin. Il est effectivement impératif, si l'on veut contrôler cette pandémie-là et en même temps diminuer la pression sur notre système de santé pour nous permettre de continuer à bien traiter nos concitoyens québécois qui attraperont la COVID, mais aussi pour nous permettre de continuer à prodiguer les soins pour toutes les autres pathologies auxquelles nos concitoyens ont à faire face, il est impératif que le plus grand nombre de Québécois doivent être vaccinés. J'entendais ce matin le Dr Arruda mentionner qu'un taux de vaccination pouvant aller à 90 %, 95 % serait probablement une cible idéale à atteindre. Donc, vous comprenez que, pour nous, la vaccination est la pièce majeure de tout ce qu'on peut faire pour contrôler cette pandémie.

• (15 h 50) •

Donc, dans ce contexte, il est clair que nous croyons que tous les médecins exerçant au Québec et qui ont des contacts avec des patients devraient obligatoirement être vaccinés. On sait que la quasi-totalité des médecins omnipraticiens actuellement exerçant au Québec sont déjà vaccinés, et les médecins qui ne le seraient pas demeurent... sont probablement un nombre anecdotique. La vaccination des médecins doit être un acte non négociable pour nous. Les seules exceptions nous apparaissent... sont pour nous les médecins qui, sur une base personnelle, ont une contre-indication médicale reconnue et documentée. Dans de tels cas, on convient que des mesures d'accommodement pourraient et devraient être déterminées pour les médecins qui se retrouvent dans cette situation-là.

De plus, selon nous, le principe de vaccination obligatoire devrait s'appliquer à tous les professionnels et travailleurs de la santé de même que l'ensemble du personnel administratif qui les accompagne dans leurs tâches. Tous ceux qui ont des contacts directs ou indirects avec des patients, par exemple en partageant des espaces communs, devraient être obligatoirement vaccinés.

Notre position s'inclut dans une vision globale du réseau. Dans cette perspective, notre soutien à la vaccination signifie que nous ciblons tous les milieux où des soins de santé sont prodigués, que ce soit en établissement, clinique médicale, résidence privée pour aînés, etc.

On s'entend que la vaccination obligatoire du plus grand nombre d'individus dans le réseau de la santé peut contribuer de façon très importante à vaincre le virus. Les raisons légitimes justifiant le fait de ne pas se faire vacciner sont très rares. Donc, même si c'est une situation qui est difficile, qui vient bousculer certains des principes qui sont chers à la société québécoise, nous pensons qu'il faut aller au bout de l'exercice dans l'ensemble du réseau de la santé et rendre la vaccination obligatoire. La médecine est claire, personne n'est à l'abri du virus. Et il est capital que les travailleurs de la santé minimisent le risque qu'ils peuvent représenter tant à l'égard de la clientèle du réseau qu'à l'endroit de leurs collègues de travail. Les capacités hospitalières du Québec n'étant pas sans limites, le personnel affecté aux soins de santé des Québécois doit impérativement être vacciné, et ce, le plus rapidement possible.

Cela posé, nous sommes cependant conscients, et on doit vous le signaler, que la vaccination obligatoire pourrait avoir des répercussions sur l'état des ressources humaines au sein du réseau de la santé. Ça pourrait avoir un certain impact négatif sur l'organisation des services, notamment en première ligne dans les cliniques médicales, qu'elles soient GMF ou non, par le fait que certains membres du personnel pourraient décider de ne pas être vaccinés et quitter. Mais nous pensons que le risque que nos travailleurs de la santé et que nos médecins soient infectés et que nos patients soient infectés par nos interventions valent largement cet inconvénient-là.

En résumé, nous recommandons : que tous les médecins québécois ayant des contacts avec des patients se fassent obligatoirement vacciner; qu'en plus des médecins, toutes les personnes qui travaillent dans le réseau de la santé et des services sociaux et qui ont des contacts directs ou indirects avec des soignants ou des patients se fassent obligatoirement vacciner; que la vaccination obligatoire s'applique à tous les milieux où des soins sont donnés à la population, que ce soit en établissement ou hors établissement, incluant les cliniques médicales.

En conclusion, nous tenons à vous préciser que nous ne prenons nullement à la légère comme citoyens le fait de rendre obligatoire la vaccination pour un bon nombre de nos concitoyens. Nous sommes conscients de la portée très importante d'une telle mesure, mais l'analyse que nous faisons, à titre de médecins, de l'état actuel de la situation nous oblige à plaider pour la vaccination obligatoire dans le réseau de la santé et des services sociaux. Voilà, M. le Président, essentiellement, un court résumé de l'avis que nous avions à vous soumettre. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons débuter la période d'échange avec la députée de Soulanges.

Mme Picard : Merci, M. le Président. Bonjour et merci beaucoup d'être parmi nous aujourd'hui. Ma question est somme toute assez simple, là. J'aimerais savoir si vous pensez qu'il y a d'autres milieux professionnels où cette mesure serait pertinente. Je pense entre autres aux écoles spécialisées où il y a des petits cocos qui sont un peu plus fragiles, où les intervenants sont proches des enfants qui n'ont souvent pas de masque. Donc, je veux savoir votre opinion là-dessus.

M. Godin (Louis) : C'est sûr qu'on est en faveur qu'il y ait le plus grand nombre de personnes qui soient vaccinées. C'est utopique, mais idéalement 100 % des gens devraient être vaccinés à l'intérieur de ça. Mais on sait la culture québécoise que l'on a, je veux dire, on est une société qui, tu sais, est beaucoup en faveur, je veux dire, des droits et des libertés. On est très, très jaloux de ce concept-là, mais en même temps on sait que c'est... On sait qu'on a des objectifs que l'on doit atteindre. On parle de 90 %, 95 % de la population. Donc, il est clair pour nous que, si jamais ce n'était pas suffisant que l'on oblige les gens du secteur de la santé, ça deviendra probablement un message très clair à l'ensemble de la société et peut-être un exemple à donner aux autres citoyens, de dire : Bien, regardez, allez vous faire vacciner.

Mais advenant le cas qu'on s'apercevrait que ce n'est pas suffisant pour atteindre le 90 %, 95 % nécessaire pour contrôler la pandémie, notamment avec l'arrivée du variant Delta, je pense qu'on devra penser sérieusement à étendre la vaccination à d'autres groupes, que ce soit dans le secteur privé ou dans le secteur public. Et naturellement des groupes comme celui-là, où on sait, je veux dire, qu'on a une exposition, comme le réseau de l'éducation ou des garderies, c'est des choses, je veux dire, auxquelles on devra penser, mais nous pensons qu'on doit faire le domaine de la santé dans un premier temps. On regardera rapidement où ça va nous mener, mais si on ne va pas à la cible que l'on veut atteindre, je veux dire, on devra aller plus loin. On doit se donner une immunité communautaire solide pour faire face à cette pandémie-là. C'est notre seule façon de s'en sortir.

Mme Picard : Merci beaucoup...

Le Président (M. Provençal)  : Oui. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Boutin : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Dr Godin et Dr Amyot, pour votre présentation. Et votre position a le mérite d'être claire. On aime ça, c'est assez concis et clair. Vous savez, l'objectif de cette commission, c'est d'entendre divers groupes, d'entendre les préoccupations, puis on a entendu toutes sortes de groupes jusqu'à maintenant, on en a 18 au total, mais aussi de mieux cerner dans le fond les modalités d'application de la vaccination obligatoire, les accommodements qui pourraient être applicables pour, justement, les cas d'exemption, et vous l'avez mentionné un petit peu, mais également les sanctions qui pourraient être mises en place, là, advenant le cas que des gens refusent catégoriquement d'être vaccinés, malgré qu'ils puissent être vaccinés. J'aimerais vous entendre un petit peu plus sur ça, parce que je trouve qu'on n'en a pas tant parlé.

M. Godin (Louis) : Bien, écoutez, je le diviserais en deux groupes, là. On aura les médecins qui ne peuvent pas être vaccinés pour une raison médicale. Et là je dis bien une raison médicale, là. Ce n'est pas parce que ça ne me tente pas ou j'ai lu qu'à quelque part c'était peut-être dangereux, là. C'est bien documenté, quand est-ce qu'on peut ou qu'on ne peut pas vacciner. C'est sûr que, ces gens-là, il faudra, soit dans un premier temps, essayer de les réaffecter, je vous dirais, à un secteur qui leur permet de continuer à faire certaines activités médicales. Et si ce n'est pas le cas, bien, je vais dire, il faudra trouver une façon de les compenser.

Chez les médecins qui auraient... qui feraient le choix de ne pas se faire vacciner quand même, bien, je veux dire, ils devront d'eux-mêmes se trouver un endroit pour pouvoir continuer à travailler où ils ne seraient pas dans une situation où ils devraient être vaccinés et, si ce n'est pas le cas, bien, ils en subiront les conséquences, c'est-à-dire qu'ils ne pourront plus exercer le travail qu'ils faisaient usuellement.

Vous savez, déontologiquement, on doit, comme médecins, travailler selon les règles de la science. Et la science nous dit actuellement : On est en pandémie, on a un virus qui a fait des ravages énormes. On n'a pas d'autre choix d'utiliser tous les moyens, puis le meilleur que l'on a, c'est d'être vacciné. Donc, si on pousse la réflexion un peu plus loin, sur un plan déontologique, on n'a pas le choix, comme médecins. Et si on ne le fait pas, bien, c'est comme si j'adoptais un comportement qui n'est pas selon ce que la science médicale me dit d'avoir comme individu.

Et ça peut paraître une position qui est relativement dure puis, au demeurant, c'était... Je vous dirais, c'est un sujet qu'on a longuement discuté. Pour des représentants de médecins, dont une des principales activités est de négocier leurs conditions de travail, ça peut paraître dur de dire : Bien, tu trouveras un autre travail où tu n'as pas besoin d'être vacciné ou tu devras faire autrement. C'est sûr qu'il pourra y avoir des conséquences sur certains patients à l'intérieur de ça. Mais qu'un médecin qui n'est pas vacciné, qui est à risque de s'infecter, dans l'état de situation, il y a un risque aussi pour les patients. Donc, c'est la position que l'on a prise par rapport à ça.

• (16 heures) •

Mme Boutin : Je comprends que vous représentez les médecins omnipraticiens. Puis on a eu une discussion un peu similaire avec les médecins spécialistes. Ça ne semble pas être vraiment un enjeu, dans le sens que vous avez un immense taux de vaccination, là, vous êtes presque à 100 %, là. Peut-être que les préoccupations viennent plus des autres travailleurs de la santé où est-ce que les taux sont un petit peu moindres. Est-ce que vous pensez qu'un code déontologique ou cette responsabilité morale là devrait s'appliquer à eux aussi?

M. Godin (Louis) : Bien, moi, écoutez, je ne connais pas dans le détail le code de déontologie de tous les autres professionnels de la santé, mais il m'apparaît que, quand tu es un professionnel de la santé, tu dois te comporter selon ce que la science te dit, et c'est ce qui base notre position. Toutes les études montrent l'efficacité du vaccin, même si on a certaines données... sur le vaccin Delta, ça serait un peu moins efficace, mais, lorsqu'on regarde pour les complications sérieuses, les hospitalisations, les décès, on a encore un taux d'efficacité qui frise les 100 %. Donc, je ne peux pas comprendre scientifiquement que l'on ait une position qui soit autre que celle-là.

Puis peut-être que le Dr Amyot peut rajouter là-dessus, parce que Dr Amyot est encore un clinicien qui évolue dans une salle d'urgence, des CDE, il en a vu, des patients. Puis, je veux dire, face à ce que l'on a vu, je ne vois pas comment on peut agir autrement.

M. Amyot (Marc-André) : Bien, effectivement, comme disait Dr Godin, notre position est basée sur la science. Vous avez fait référence à des sanctions ou... Ça, vraiment, ça dépasse les compétences, disons, de la médecine comme telle, là, mais eux aussi ont des ordres professionnels, et ces ordres professionnels là, ils ont un code de déontologie, qui doit ressembler un peu au nôtre. Et effectivement, là, la vaccination, c'est un geste qui protège les patients avec lesquels on a des contacts, là, effectivement. On en a vu beaucoup, là, des patients qui étaient très affectés, très malades, là, puis dans l'entourage près, là. Moi, je travaille à la salle d'urgence, là, il y a beaucoup, beaucoup de personnel, la majorité du personnel est vaccinée et comprend ça.

Mme Boutin : Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Merci. Merci beaucoup pour les éclairages que vous nous apportez aujourd'hui. Tout à l'heure... Je veux juste vérifier votre position là-dessus. C'est que, tout à l'heure, Dr Oliva avait mentionné qu'il était favorable à une vaccination obligatoire au personnel de la santé, peu importe son niveau de contact, et puis il mentionnait aussi ne pas limiter la vaccination au personnel soignant. Est-ce que je comprends que, pour vous, c'est aussi la même chose?

M. Godin (Louis) : Oui, oui, c'est aussi la même chose. On a signifié à un endroit : Tout le personnel qui a des contacts indirects avec les patients. Pour vous illustrer, vous pouvez très bien avoir du personnel administratif qui n'a aucun contact avec les patients, ils sont au poste de garde, mais ils n'ont pas de contact avec les patients, sauf qu'ils ont des contacts avec les soignants, et c'est la chaîne de contagiosité que l'on veut réduire au minimum. Souvent, ces gens-là, même s'ils n'ont pas de contact avec les patients, vont partager les mêmes locaux administratifs, les mêmes aires de repas, etc. Donc, pour nous, tous ces gens-là doivent être vaccinés. Les seules exceptions que l'on pourrait voir, c'est quelqu'un qui serait, et là ça sera très exceptionnel, dans une partie de l'établissement où on est sûr qu'il travaille tout seul, isolé, puis il n'a pas de contact avec personne. Mais, dans les faits, tout le monde qui travaille dans un établissement de santé, pour nous, devrait être vacciné.

Mme Lavallée : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Chauveau.

M. Lévesque (Chauveau) : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Dr Godin, Dr Amyot, merci beaucoup de votre présence aujourd'hui parmi nous. Très apprécié. Vos éclairages sont intéressants et, en plus — encore une fois, comme j'ai dit au président de la Fédération des médecins spécialistes tout à l'heure — sans équivoque, et ce que j'aime, c'est d'avoir des gens qui sont clairs, précis. On sait sur quel pied danser.

Maintenant, loin de moi l'idée de vouloir faire de la division quelque part, parce qu'on doit être tous unis face à cette pandémie-là, mais, tout à l'heure, lorsque j'écoutais deux des représentants syndicaux qu'on a eus avec nous, notamment au niveau des infirmières, notamment au niveau de la CSN aussi, qui représente plusieurs personnes du milieu de la santé, ce qu'on nous disait... on nous a beaucoup avertis entre l'enjeu des droits individuels par rapport à l'enjeu des droits collectifs. Visiblement, de votre côté, il n'y a pas ce dilemme moral là entre les deux. Alors, ça a été... ça semble avoir été résolu assez rapidement pour vous, puis j'aimerais comprendre votre cheminement un peu, parce que ça... ils ont insisté fortement sur cet aspect-là des droits individuels par rapport aux droits collectifs. Et, je vous le dis, là, comme élu, dans ma circonscription, puis j'ose imaginer que l'ensemble de mes collègues vivent la même chose, là, quand on reçoit des messages qui sont contre, c'est souvent ça qu'on reçoit, bon : Mes droits individuels, mes droits personnels, vous m'empêchez de faire des choses, je ne veux pas. Mais comment on fait pour résoudre ce dilemme moral là?

M. Godin (Louis) : Écoutez, c'est sûr qu'on a eu le même questionnement, hein, parce que, comme je vous le mentionnais, c'est une décision... c'est une position importante que l'on prend, parce que je ne sais pas le nombre de médecins, probablement qu'on en aura peu, du moins j'espère qu'on n'en aurait aucun, mais il y en aura probablement quelques-uns qui vont refuser de se faire vacciner, puis ils vont plaider le droit individuel à ne pas se faire vacciner.

Cependant, nous, notre réflexion là-dedans, c'est : quand je refuse de me faire vacciner, si la seule personne que je mettais en danger, c'était celui qui refuse de se faire vacciner, je vous dirais : On va respecter ça, parce que c'est ton choix. Je veux dire, tu ne veux pas te faire vacciner, tu auras peut-être la COVID, tu vas peut-être te retrouver aux soins intensifs pendant 20, 25 jours, intubé, avec beaucoup de séquelles suite de ça, puis tu vas peut-être avoir la malchance, je veux dire, d'en décéder.

Mais le problème, c'est que ça ne s'arrête pas là. Si tu ne te fais pas vacciner, tu peux contaminer ton voisin. Dans le cas d'un travailleur de la santé, tu peux contaminer ton patient, tu peux contaminer un confrère de travail, et là, à partir de ce moment-là, on doit mettre... on serait obligés de mettre sur pied encore d'autres mesures, que l'on veut éviter.

Et on a vu, avant que l'on ait les vaccins, qu'est-ce que ça a eu comme impact sur le système de santé. On a dû mobiliser toutes nos forces médicales pour s'occuper des gens qui avaient la COVID. On a dû déplacer nos gens de nos cabinets, nous, pour aller travailler à l'hôpital, dans les CHSLD, parce que c'était dramatique ce qui se passait là.

Donc, quand tu es dans une situation comme ça, bien, tu dois dire : On n'a pas d'autre choix de mettre de côté un peu notre liberté individuelle, parce que, là, c'est le bien-être collectif qui va être touché.

Et ce que l'on sait, c'est qu'au niveau de vaccination que l'on a actuellement on est encore à risque par rapport à notre situation collective et tous les effets que ça a, que ce soit à court terme, parce que, si on remplit à nouveau nos hôpitaux puis nos soins intensifs de gens qui ont la COVID, bien, il y a d'autres gens qu'on ne soigne pas, puis, si on pousse un peu plus loin, parce qu'on l'a vu, ça, dans nos cabinets, si ça nous amenait à devoir reconfiner, refermer notre société, regardons tous les impacts que ça a, ne serait-ce sur la santé mentale de l'ensemble des citoyens.

Donc, quand on analyse tout ça, on se dit : Bien là, regarde, on n'a pas le choix, là. Ce n'est pas de gaieté de coeur, on sait que c'est des principes fondamentaux, là, qu'on va bousculer, mais la COVID, là, c'est quelque chose de vraiment très inhabituel... et amène, je veux dire, une réaction qui va hors de ce que l'on fait normalement.

M. Lévesque (Chauveau) : Petite question rapide en terminant. Dr Godin, Dr Amyot, vous avez mentionné tout à l'heure que, bon, c'est sûr que ça risque de provoquer certains impacts négatifs à l'intérieur, bon, du personnel soignant, peut-être des GMF. J'ai posé la question au ministre de la Santé, ce matin, qui me répondait : Effectivement, on a des craintes à ce niveau-là. De votre côté, bien, c'est une question de balance d'inconvénients aussi, là, c'est de trouver qu'est-ce qui est le moins pire des deux. On n'est pas dans une situation toujours gagnant-gagnant, puis vous en avez parlé tout à l'heure. Moi, l'Hôpital Chauveau, dans ma circonscription, ils ont dû fermer l'urgence, déplacer des médecins, les concentrer au Concorde, à Québec. Évidemment, ça a réduit les services de proximité, on a réorienté les patients, puis c'est tannant, là. Mais, de votre côté, à l'intérieur de votre groupe, là, qu'est-ce que vous vous attendez un peu comme impact dans la balance des inconvénients là-dedans?

• (16 h 10) •

M. Godin (Louis) : Nous, on ne s'attend pas, je veux dire, à ce que ça soit un grand nombre de médecins qui, en bout de ligne, refusent de se faire vacciner. Ça sera vraiment à la marge, on est convaincus de ça. Bon, ça peut avoir peut-être un peu plus d'impact chez les autres travailleurs de la santé, de ce que l'on entend, et ça... Naturellement, on travaille avec ces autres professionnels là, donc ça peut avoir indirectement un impact sur notre travail, mais j'ai autant d'impact lorsqu'on doit retirer de nos médecins ou de nos professionnels de la santé soit parce qu'ils ont eu la COVID, soit parce qu'ils ont développé des complications suite à une infection, et ça a encore des impacts beaucoup plus grands. Mais il faut être conscient de ce risque-là, et ça n'aurait pas été correct de ne pas le mentionner. Je pense que c'est un élément qu'on devait... qu'on avait à vous mentionner comme parlementaires.

M. Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je vais maintenant céder la parole à la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Merci, M. le Président. Bonjour, Dr Godin. Bonjour, Dr Amyot. Très contente d'être avec... que vous soyez avec nous aujourd'hui. Merci beaucoup. Je voudrais revenir sur la question qui a été abordée par la partie gouvernementale, sur la question de ne pas exclure certains travailleurs qui sont dans le continuum de soins du patient. Je voulais juste clarifier quelque chose, parce que, dans la réponse que vous avez donnée, puis je présume que c'est plus large que ça, vous avez dit : Tout travailleur qui est en hôpitaux, je crois, mais j'imagine que vous faites référence... GMF, cliniques...

M. Godin (Louis) : GMF, cliniques, et, je vous dirais, même, on va plus loin, même tous les médecins qui travailleraient à l'extérieur du régime d'assurance maladie mais qui auraient des contacts avec les patients, tous ces gens-là doivent être touchés et doivent être vaccinés.

Mme Montpetit : Et tout travailleur, donc, qui est aussi en contact, comme vous le disiez, indirect.

M. Godin (Louis) : Tout à fait, parce qu'il y a un risque de contamination. On le sait, qu'on a eu beaucoup d'éclosions dans le milieu de la santé qui ont pris origine là. Retenons l'expérience de la première, deuxième et troisième vague. Donc, il faut tenir compte de ça.

Mme Montpetit : Bien, c'est ce que j'allais vous demander. Encore là, on a eu l'échange avec vos... votre fédération soeur, comme on l'appelle souvent, avec Dr Weiss et Dr Oliva, sur le fait que ça peut s'apparenter à une demi-mesure, dans le fond, si ce ne sont pas tous les travailleurs dans un espace qui sont inclus. Est-ce que, de votre point de vue... c'est ça, pouvez-vous nous en dire davantage sur les risques que ça pourrait impliquer de ne pas corriger, dans le fond, la directive actuelle qui a été mise de l'avant, là, par le gouvernement, s'il ne devait pas la réviser pour inclure tous les travailleurs?

M. Godin (Louis) : Bien, en fait, le... c'est qu'on... nous, ce qu'on recherche, c'est d'arriver au risque le plus infime possible, en sachant que le risque zéro n'existera pas. Donc, naturellement, les choses à corriger le plus, c'est ceux qui sont directement en contact avec le personnel soignant. Mais, lorsqu'on va un petit peu plus loin, tous les contacts que l'on a indirectement avec du personnel soignant... C'est-à-dire, quelqu'un qui peut entrer dans l'établissement ou dans la clinique, qui n'est pas vacciné, peut, à la rigueur, infecter un vacciné. On sait qu'il va être en général beaucoup moins malade, il va être contagieux beaucoup moins longtemps, mais je ne minimise pas mon risque autant que je pourrais le faire si je vaccine aussi cette personne-là, qui n'a peut-être pas un contact direct avec le patient mais qui en a un indirectement.

Donc, c'est pour ça que, pour nous, tant qu'à le faire, bien, faisons-le le plus possible. Il faut aller le plus près possible du risque zéro, en sachant qu'il n'existera cependant jamais, le risque zéro. On devra vivre avec la COVID pendant encore plusieurs mois, voire plusieurs années, on devra adapter nos comportements à l'intérieur de ça, mais, à très court terme, servons-nous des moyens les plus efficaces que l'on a. Puis on a la chance d'avoir des vaccins développés dans un temps record puis on a eu une bonne campagne dont on peut être fiers, mais il faut aller jusqu'au bout de l'exercice.

Mme Montpetit : Parfait. Je vais aborder aussi la question de la vaccination obligatoire en dehors du réseau de la santé et des services sociaux. Je me permets de le faire comme vous l'avez abordé d'entrée de jeu non seulement dans votre mémoire, mais aussi dans votre présentation au départ. Vous dites que vous êtes favorables, ce serait légitime... je ne veux pas vous mettre des mots en bouche, mais que ce serait légitime que le gouvernement envisage et... aille de l'avant, dans le fond, pour une... pour l'élargissement d'une vaccination obligatoire à certains secteurs.

M. Godin (Louis) : Bien, en fait, ce que l'on...

Mme Montpetit : Bien, je voyais... Allez-y. Allez-y. J'avais deux questions, mais j'irai par la suite.

M. Godin (Louis) : Bien, ce que l'on dit, là, c'est que commençons par le secteur de la santé, mais, en arrière de ça, il faut atteindre une cible minimale de vaccination en fonction de l'état épidémique dans lequel on est. Si, pour se rendre là... puis que toutes les autres mesures qu'on a mises de l'avant pour convaincre... puis on a fait des loteries, sensibilisation, des testages trois fois semaine... qu'on n'est pas capables de se rendre là, bien, faisons l'exercice jusqu'au bout là aussi. On verra les groupes les plus importants à vacciner. C'est sûr qu'actuellement, si on prend la situation, on sait que nos enfants de moins de 12 ans ne sont pas vaccinés. Donc, il y aura là, c'est sûr, je veux dire, un taux de contagion important à très, très court terme. Ce serait probablement un des groupes qui seraient principalement à privilégier en termes de vaccination. Mais, compte tenu qu'on touche un principe fondamental de la liberté de choix puis qu'on est sensibles à ça, bien, on se dit : Regardons qu'est-ce qui va se passer très rapidement avec les travailleurs de la santé. Peut-être que les gens des autres secteurs, en voyant qu'on fait ça pour tous les travailleurs de la santé, se diront : Bien, regarde, peut-être aussi bien que je me protège, moi, d'abord, un, là, puis ça va m'éviter, je veux dire, qu'on m'oblige de le faire parce que je me serai déjà fait vacciner. Mais ultimement on ne ferme pas la porte à ça.

Mme Montpetit : Puis, quand vous dites... très rapidement, c'est la question que je voulais vous poser : C'est quoi, le délai qu'on se donne, justement, pour aller de l'avant avec un élargissement? Parce que vous avez entendu certainement Dr Arruda, ce matin, justement, qui parle du 92 %, 90 %, 95 % d'immunité. Le plan pour y arriver n'est pas extrêmement clair... ou, en tout cas, le délai dans lequel on va y arriver non plus n'est pas très clair, là. Donc, on se donne quoi comme délai pour avancer dans cette voie-là?

M. Godin (Louis) : Bien, écoutez, c'est difficile pour moi de vous donner une réponse très, très précise, là, mais on parle d'un délai, là, de quelques semaines, là, pour nous, voire peut-être quelques mois, mais on n'est pas là en termes d'années, là. Nous, notre scénario idéal, ce serait qu'on puisse avoir une autorisation rapide des autorités pour qu'on puisse vacciner nos enfants de moins de 12 ans, ce qui serait déjà, je veux dire, un coup de pouce incroyable par rapport à ça. Et, une fois qu'on aura fait ça, on sera capables d'extrapoler rapidement, voir où on va être rendus. À partir du moment où on oblige les gens dans le milieu de la santé d'être vaccinés, on aura déjà... on sera déjà capables de projeter où on va être rendus à l'intérieur de ça.

On sait qu'actuellement, depuis l'adoption du passeport vaccinal, qui va rentrer en vigueur bientôt... on sait qu'on a une... il y a une recrudescence des premières doses qui se donnent. Bon, jusqu'où on va aller? Peut-être que ça sera suffisant, en sachant qu'il y aura probablement toujours quelques pourcentages d'irréductibles dans notre société, mais disons que, pour nous, là, plus vite on s'en va vers cette immunité collective là, mieux c'est. On a juste à se rappeler ce qui s'est passé depuis 18 mois.

Mme Montpetit : Ah! bien, on espère qu'on a tiré des enseignements de ces 18 mois là, justement, pour s'améliorer dans nos pratiques. À cet effet-là d'ailleurs, vous m'amenez à ma prochaine question, qui... Puis, si vous avez suivi un peu les échanges depuis ce matin, on a abordé la question des annonces qui ont été faites par le gouvernement au début du mois d'août, là, le décret qui vient diminuer certaines mesures de protection dans les milieux hospitaliers, au niveau des zones chaudes, des zones froides, de repermettre du transfert de personnel, aussi, entre les différents établissements. J'aimerais bien vous entendre à ce niveau-là. Est-ce que ce n'est pas un peu contradictoire aussi, dans le contexte où on dit que le variant est plus transmissible?

M. Godin (Louis) : Oui, mais je vous dirais que, parallèlement au fait que, par un geste quand même simple, qui est celui de se faire vacciner, on peut améliorer rapidement notre immunité collective, il faut aussi réussir à remettre notre système de santé le plus rapidement possible vers ce qui est normal, il faut que notre système de santé reprenne un peu sa façon de fonctionner qu'il avait avant. On a hypothéqué beaucoup notre système de santé à lutter contre la COVID. On a fermé des étages, on a presque dû dédier nos soins intensifs à des cas COVID seulement, parce qu'on en avait besoin. Là, il faut recommencer à fonctionner le plus normalement possible, et, pour moi...

Mme Montpetit : Je me permets de vous interrompre, Dr Godin. Je m'excuse. Le temps file. Mais ça, je le comprends bien, là, je... C'est plus dans le contexte actuel, où il y a quand même beaucoup d'inquiétude par rapport à la transmissibilité du variant Delta. On ne sait pas... Je veux dire, les experts, les épidémiologistes, les microbiologistes ont des inquiétudes, justement, sur les conséquences de ce variant-là qu'on ne connaît pas encore suffisamment. Est-ce que ce n'est pas un contexte un peu questionnable? Je ne dis pas qu'il ne faut pas le faire éventuellement, mais c'est au niveau du contexte, là.

• (16 h 20) •

M. Godin (Louis) : Ça, c'est toujours ce qui est difficile dans la situation actuelle, là. Je vais vous faire... pas une comparaison mais un autre fait. On va fermer les centres d'évaluation au début septembre pour retourner l'activité dans nos cabinets, à l'intérieur de ça. C'est sûr, on va être dans une période où probablement on va en avoir plus. À un moment donné, là, je veux dire, on peut se dire : On va retarder ça de 15 jours, mais il va se passer quoi dans 15 jours? Il faut être capable d'être le plus agile possible, se réajuster selon la situation, mais, en même temps, il faut s'assurer qu'on a l'accès aux soins le plus grand possible, là, pour les différentes pathologies, là. Je ne sais pas... Dr Amyot?

M. Amyot (Marc-André) : Oui, si vous permettez, je peux peut-être intervenir, là. On traite toutes sortes d'infections patients qui ont du Clostridium difficile, de la tuberculose, de la rougeole — des épidémies de rougeole, on en a eu — donc il faut apprendre à vivre avec ces pathologies infectieuses là. Puis on ne dédie pas nécessairement du personnel pour le patient qui a une tuberculose. On prend des mesures dans nos urgences, dans nos cabinets, là. On continue d'avoir des de protection et pour nous et pour les autres patients, mais on les voit quand même, ces patients-là, là. Il y a toutes sortes de pathologies infectieuses auxquelles on est confrontés dans les salles d'urgence, dans les hôpitaux, dans les cabinets. Alors, il faut... comme disait Dr Godin, là, il faut effectivement effectuer un retour à la normale. Et les gens sont vaccinés, la majorité des gens sont vaccinés. La majorité du personnel est vaccinée.

Donc, on n'est plus dans la situation où on avait, là, un nombre important de patients qui se présentaient, où le risque de ces patients-là était très important. Là, on parle de zones tièdes, c'est-à-dire vous arrivez à l'hôpital, à la salle d'urgence, vous êtes hospitalisé, vous faites de la fièvre, on ne sait pas trop si vous avez la COVID. La probabilité, maintenant, que vous ayez la COVID est plutôt faible, là, mais on prend quand même toutes les mesures puis les précautions nécessaires, que ce soit la COVID, la tuberculose ou toute autre... l'influenza... L'influenza, c'est la même chose, là, mais là on n'en a pas eu cette...

Le Président (M. Provençal)  : Je vous remercie. Je vais devoir céder la parole maintenant au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Drs Godin et Amyot, bonjour. Merci d'être là, de nous éclairer de vos lanternes.

Justement, vous avez dit tout à l'heure, je crois, vous êtes unanimes là-dessus, là, tous les deux : Quiconque travaille dans un établissement de santé devrait être vacciné, puisqu'ils sont réputés être vecteurs potentiels. Je suis assez d'accord avec vous, puisque la bibitte se promène encore. Mais, à ce compte-là, pourquoi ne pas exiger le passeport vaccinal chez les visiteurs, qui peuvent entrer à l'hôpital, y passer littéralement des heures? Il n'y a pas de limite de temps dans un hôpital, ils vont fréquenter plein de monde, ils vont tripoter plein de trucs. Pourquoi pas aussi les visiteurs, à ce moment-là?

M. Godin (Louis) : Je... Vous me... C'est une question sur laquelle on n'avait pas réfléchi directement, mais rapidement, M. Marissal, je vous dirais que, personnellement, je pense qu'on pourrait l'exiger, parce que...

M. Marissal : Donc, exiger le passeport vaccinal à l'entrée de l'hôpital.

M. Godin (Louis) : Le passeport vaccinal, et je mettrais certaines exceptions, là, je dirais, humanitaires, là, en ce sens que vous avez un patient, là, qui est vraiment en fin de vie, la famille veut y aller, là. Je veux dire, il ne faut pas tomber dans le piège... bien, pas dans le piège mais dans la situation qu'on a vécue au début de la pandémie. Mais, en dehors de ça, regarde, tu le visiteras quand il sera sorti de l'hôpital, là, parce qu'effectivement tu rentres un vecteur potentiel entre les murs de l'établissement puis tu peux contaminer des gens.

M. Marissal : Comme en France, donc fin de vie ou urgences. Quelqu'un arrive en ambulance, vous le suivez...

M. Godin (Louis) : ...urgences, ces choses-là.

M. Marissal : O.K., très bien. C'est très clair aussi de votre part.

Comment s'assurer de protéger le personnel qui ne veut pas se faire vacciner, qui va se faire renvoyer à la maison mais qui travaille dans une clinique privée avec certains de vos membres? C'est facile dans le réseau, là, public, ils sont syndiqués, ils sont suivis, mais vos membres, là, qui sont même désaffiliés parfois ou dans des cliniques privées, disent à l'infirmière auxiliaire ou à quelqu'un qui travaille... même la secrétaire : Tu ne veux pas te faire vacciner? Au revoir. Comment s'assurer que cette personne-là ne se fait pas congédier, dans les faits?

M. Godin (Louis) : Bien, nous, ce que l'on pense, c'est que, comme employeur, il devra chercher à avoir certains accommodements, mais celui dans la mesure du possible, en ce sens qu'écoutez, là, tu travailles dans un milieu de santé, il faut que tu te fasses vacciner. Et probablement qu'on devra envisager, comme on le voit dans certaines entreprises privées, ça commence à sortir, que ça devienne des conditions à l'embauche.

Vous savez, moi, comme...

M. Marissal : Donc, c'est une condition... c'est une condition au congédiement aussi, donc...

M. Godin (Louis) : Bien, tu sais, à un moment donné, là, tu arrives... tu amènes avec toi, à ton travail, un risque énorme pour les gens que tu dessers. C'est une situation, je veux dire, qui peut difficilement être acceptable.

M. Marissal : Je vous remercie. Je crois que je n'ai plus de temps.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Alors, la parole est au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Merci, M. le Président. Drs Godin, Amyot, merci d'être là, de votre disponibilité. J'aimerais poser deux questions. Vous parlez, évidemment, du fait qu'il faut protéger l'ensemble des Québécois qui vont requérir des soins auprès des médecins et dans les hôpitaux. Vous dites que la vaccination sur une base volontaire a bien fonctionné mais qu'il faut aller au bout de l'exercice parce que les niveaux atteints ne sont pas jugés nécessaires. Des groupes qui nous ont rencontrés ce matin, qui représentent d'autres professionnels de la santé, ont dit, effectivement, qu'il fallait... au bout de l'exercice, mais au bout de l'exercice volontaire. Pourquoi pensez-vous que, maintenant, il faut utiliser la contrainte, alors qu'eux nous disent qu'on pourrait obtenir les mêmes résultats en continuant encore quelques moments?

M. Godin (Louis) : Bien, écoutez, je pense qu'il y a beaucoup d'efforts qui ont été faits pour inciter à la vaccination. Quelqu'un qui n'a pas entendu parler de la nécessité de se faire vacciner, là, de façon très régulière au cours des derniers mois, il n'a probablement pas vécu au Québec, là. C'est clair.

Donc, comme je le mentionnais en début, on aurait aimé ça, puis... comme groupe et comme médecins, de dire : Vous n'avez pas... On n'a pas besoin de rendre ça obligatoire, mais, où on en est et dû au fait qu'en plus on a une menace qui exacerbe la situation avec le Delta, on n'a pas le choix, là, je veux dire, d'aller plus rapidement. On ne peut pas se permettre d'arriver avec une nouvelle flambée de cas, d'autant plus qu'on sait qu'actuellement on a un sous-groupe qu'on ne peut pas vacciner, parce que ce n'est pas homologué, là. Là, il y a le retour en classe, là, qui s'installe chez les moins de 12 ans. On sait qu'on va en avoir, des infections, là. Puis ça, ça va être amené à la maison, puis cette personne-là peut se retrouver dans le réseau de la santé. Donc, on est rendus là.

M. Arseneau : Donc, pour vous, je comprends bien qu'il y a urgence d'agir rapidement. Mais, quand on nous dit aussi que, pour soutenir le réseau... parce que, là, on a parlé des cas individuels, il faut protéger les patients, mais on veut aussi soutenir le réseau, et, quand on nous dit que... et je cite Mme Senneville, qui dit : On a l'impression que le remède peut être pire que le mal, qu'en pensez-vous?

M. Godin (Louis) : Bien, regardons ce qui s'est passé, je vous dirais, durant la première vague, et la deuxième, et la troisième, le nombre de gens que l'on a dû retirer du réseau de la santé soit parce qu'ils étaient infectés, soit parce qu'ils étaient en contact, soit parce qu'ils étaient épuisés d'avoir à donner ces soins-là à des gens qui étaient très malades, qui exigeaient beaucoup d'effort de la part du personnel soignant. Il y a ce risque-là aussi. Et c'est... on a... comme je le mentionnais, on n'est jamais au risque zéro, mais on pense, personnellement, que le risque qu'il y ait des gens qui quittent le réseau de la santé, pour toutes sortes de raisons, est moins... impacte moins que de faire... de se retrouver avec un taux de vaccination qui n'atteindrait pas les niveaux qui sont recherchés.

M. Arseneau : Et quel est, pour vous, le chiffre magique qu'il faut atteindre?

M. Godin (Louis) : Bien, écoutez, moi, je ne suis pas le... je ne suis pas un scientifique, là, je ne me prétends pas être un scientifique, mais j'entendais certains des intervenants aujourd'hui, on parle de 90 %, 95 %, j'entendais 92 % ce matin à la radio, probablement que ça tourne autour de ça.

M. Arseneau : Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Je remercie les Drs Godin et Amyot pour leur contribution à nos travaux.

Je suspends temporairement les travaux pour que nous puissions accueillir notre prochain groupe.

Merci beaucoup de votre contribution et de votre participation.

(Suspension de la séance à 16 h 29)

(Reprise à 16 h 33)

Le Président (M. Provençal)  : Je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Après quoi, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à débuter votre exposé. Je vous cède la parole.

Alliance du personnel professionnel et technique
de la santé et des services sociaux (APTS)

M. Comeau (Robert) : Merci, M. le Président. Alors, Mmes, MM. les députés, je suis Robert Comeau, président par intérim de l'APTS, qui est l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux, et je suis accompagné de Mme Josée Fréchette, cinquième vice-présidente de l'APTS.

Écoutez, c'est avec une organisation syndicale, qui est avec vous aujourd'hui, qui représente 60 000 membres, une organisation syndicale qui regroupe exclusivement des professionnels et les techniciens du réseau de la santé et des services sociaux... Nous pratiquons exclusivement dans le réseau public, nous sommes composés à 86 % de femmes, et l'APTS travaille aussi tant dans les centres hospitaliers, dans les CLSC, les CHSLD, les centres jeunesse, les centres de réadaptation physique, les centres de réadaptation en déficience intellectuelle, trouble du spectre de l'autisme et en dépendances. Notre organisation a donc en vue... a donc une vue à la fois globale et spécifique sur l'ensemble du réseau de la santé et des services sociaux.

Depuis le début de la pandémie, l'APTS a suivi de près les enjeux auxquels font face ses membres ainsi que les mesures de gestion de crise prises par le gouvernement, le tout dans une optique de soutien, de défense mais aussi de sensibilisation du personnel qu'elle représente. C'est donc forte de cette connaissance de ses membres, des services, des milieux et de la situation épidémiologique actuelle que l'APTS a mené sa réflexion que nous vous partageons aujourd'hui.

Bien, d'entrée de jeu, il est clair pour nous que nous voulons remercier le gouvernement de l'écoute qu'il porte à... en nous invitant dans cette commission, nous en sommes très, très heureux. J'aimerais profiter de cette tribune pour l'inviter à réintégrer le débat démocratique dans sa gestion de la pandémie en levant sans tarder l'état d'urgence. Comme nous le constatons avec l'annonce de la vaccination obligatoire des travailleuses et travailleurs de la santé, la suspension des mécanismes d'imputabilité politique peut avoir des conséquences importantes en matière de droits et libertés de nos concitoyennes et de nos concitoyens. Rappelons que c'est à elles et c'est à eux également qu'appartiennent les instances politiques et qu'il est alarmant que leur sort soit décidé derrière les portes closes du pouvoir. Ça m'attriste de le dire également, mais, après 18 mois de pandémie, il est temps d'envisager que ce qui nous semblait à première vue être une crise puisse, hélas, devenir une nouvelle normalité. Il est donc temps de laisser derrière nous la gouvernance par décrets et de réinviter l'ensemble de la société civile à se prononcer sur les enjeux auxquels nous faisons collectivement face. Voilà une chose qui est dite et qui est importante à notre organisation de vous livrer.

Maintenant, en regard du sujet qui nous intéresse aujourd'hui, je veux mentionner d'emblée que la position de notre organisation est claire et elle l'a toujours été depuis le départ, la sortie de crise et le retour vers la vie normale passeront par la vaccination du plus grand nombre de personnes possible. Je tiens d'ailleurs à remercier les membres de l'APTS, qui ont répondu de manière très positive à la campagne de vaccination. Je veux vous souligner qu'il y a près de 94 % de nos membres qui étaient vaccinés en première dose en date du 17 août dernier et près de 89 % ont reçu la deuxième dose du vaccin. Et on est quand même assez heureux de vous dire qu'on est... nous avons le taux de vaccination, pardon, le plus élevé chez les salariés du réseau.

Je veux aussi rappeler, c'est important, qu'il y a beaucoup de nos membres, professionnels et techniciens, je pense à des psychologues, technologues en imagerie médicale, des hygiénistes dentaires, des nutritionnistes, qui ont répondu à l'appel du gouvernement d'octobre dernier, c'est-à-dire de participer à l'effort collectif de vaccination. Moi-même, personnellement, j'ai offert quelques fins de semaine et soirées pour prêter main-forte à l'effort collectif. Et j'ai été très heureux de constater que beaucoup de nos membres ont répondu à l'appel, et c'est grâce à eux, grâce à elles, entre autres, qu'on peut avoir un bilan, au Québec, quand même très intéressant aujourd'hui.

Mme Fréchette (Josée) : Alors, avant d'ordonner celle-ci, je pense qu'il est important qu'on s'interroge collectivement sur le résultat qu'on espère obtenir. C'est d'autant plus fondamental qu'appliquer cette mesure unilatéralement va impliquer des ressources non négligeables, ressources qui pourraient être mieux allouées en sensibilisation et en amélioration de l'accès à la vaccination dans le réseau comme ailleurs.

Quatre questions pour commencer, et, croyez-moi, on va en avoir d'autres, à l'attention du ministre. Avant de recourir à la manière forte, avez-vous ventilé les statistiques concernant les travailleurs et travailleuses non vaccinés? Avez-vous évalué la proportion d'entre elles et eux qui pourraient être en arrêt de travail, avoir des contre-indications médicales, être en retrait préventif pour grossesse ou allaitement, ou en congé de maternité? En bref, est-ce que nos efforts sont mis à la bonne place pour lutter contre cette pandémie?

Je crois que ces questions sont très importantes, parce qu'il ne faut surtout pas perdre de vue que notre réseau n'évolue pas en vase clos en regard de l'évolution... j'avais de la misère... épidémiologique, pardon. Il s'inscrit dans un système d'interdépendance généralisé où chaque acteur humain comme institutionnel peut, à tout moment, devenir un vecteur de propagation s'il ne fait pas l'objet d'une attention suffisante de la part du gouvernement et matière de sensibilisation, d'éducation et d'amélioration à l'accès à la vaccination.

Je vous soumets donc de nouvelles questions. Que vaudra... voyons, l'immunisation totale des travailleurs et travailleuses du réseau si le coronavirus se propage par l'intermédiaire des familles d'usagers en visite, des aidants naturels, du personnel des agences de placement, au sein des milieux de soins privés, dans d'autres divisions d'activités? Personnellement, je m'étonne et m'inquiète que le gouvernement s'entête à cibler un réseau qui a déjà répondu très positivement à la vaccination, alors que d'autres acteurs, d'autres secteurs, d'autres groupes sociodémographiques pourraient bénéficier d'un effort plus soutenu en la matière.

• (16 h 40) •

On se pose d'autant plus ces questions, à l'APTS, que ces mesures d'importantes... des mesures importantes de prévention, de contrôle et de gestion des éclosions ont été adoptées de manière rigoureuse dans les milieux de soins suite aux directives de la CNESST. Pensez aux équipements de protection individuelle, à la distanciation physique, au questionnaire des symptômes, aux plexiglas qui ont été fournis, etc. Compte tenu que toutes ces mesures, qui s'ajoutent à la couverture vaccinale très élevée du personnel... est-ce qu'on a évalué ce que ça nous ferait gagner en termes de protection de la hausser à 100 %? Est-ce qu'on a évalué le coût marginal que ça représente?

Et puis, enfin, et là on aurait vraiment besoin que le gouvernement nous éclaire, éclaire nos chandelles, pourquoi, je répète, pourquoi est-ce que l'alternative des trois tests de dépistage par semaine n'est plus viable pour les personnes non vaccinées? C'était un accommodement qui permettait, un, de prévenir rapidement et efficacement les éclosions dans les milieux, deux, de respecter la volonté du personnel et, trois, d'éviter les réaffectations et les potentiels bris de service. Et c'est d'ailleurs vers ça que l'Ontario et le Nouveau-Brunswick s'enlignent.

M. Comeau (Robert) : Bien, on vous a fait part, jusqu'ici, de certaines réserves et questionnements qu'on avait en tant qu'organisation à savoir si les efforts du gouvernement étaient mis à la bonne place et on a hâte d'entendre le ministre à ce sujet-là, ou les représentants du gouvernement.

On voudrait maintenant aborder le sujet des modalités de l'application de cette mesure, qui, si elles étaient floues, ce matin, sont devenues très préoccupantes à nos yeux suite aux précisions du ministre Dubé. Celui-ci nous a donc expliqué, ce matin, qu'à défaut de vouloir ou de pouvoir se faire vacciner, les travailleuses et travailleurs en santé pourraient être réaffectés à d'autres tâches et que, si... la réaffectation, pardon, n'est pas possible, qu'ils ou elles seraient suspendus sans solde.

Sans vouloir se lancer dans un débat de droit, notre organisation aimerait attirer l'attention du gouvernement sur le fait que certaines dispositions législatives pourraient faire que les tribunaux en soient saisis. Il faudrait alors que le gouvernement démontre que sa mesure poursuit un objectif légitime et que l'atteinte aux droits est minimale. Les organisations syndicales, quant à elles, n'auront d'autre choix que de représenter légalement leurs membres et de faire... faire faire les recours habituels pour faire reconnaître ces droits-là.

Nos questions au gouvernement sont donc les suivantes. Dans un contexte de crise sanitaire qui commande une administration avancée et prévoyante des ressources, est-ce qu'on veut vraiment s'engager dans ce bras de fer là? Ou, à l'inverse, est-ce qu'on ne ferait pas mieux de travailler main dans la main pour trouver des solutions efficaces pour lutter contre la COVID-19, pour fédérer les travailleurs et travailleuses de la santé autour de solutions sans polariser le débat et sans susciter la méfiance du personnel, là, qui a déjà été largement éprouvé par 18 mois de lutte de pandémie?

Ce matin, notre ministre Dubé précisait aussi que l'ensemble du personnel de la santé et des services sociaux en contact prolongé avec des citoyens était visé par cette mesure. C'est très inquiétant pour certaines missions prioritaires que le gouvernement a probablement oublié de prendre en considération, tout obnubilé qu'il est par la gestion de la crise de la COVID-19. Alors, sans minimiser d'aucune façon l'importance de cette crise, il faut se rappeler que la pandémie... la pandémie, pardon, n'est pas le seul enjeu auquel font face les Québécois aujourd'hui.

Et, s'il est évident que le gouvernement doit s'intéresser de près aux impacts de sa mesure sur l'évolution de la situation épidémiologique, il doit aussi impérativement élargir sa réflexion aux impacts qu'elle aura sur d'autres problématiques reliées à la santé, au bien-être et à la protection des citoyens et citoyennes. Pensons, par exemple, à la santé mentale, qui constituait déjà un enjeu...

Le Président (M. Provençal)  : Je vous remercie pour votre exposé. Le temps est écoulé.

M. Comeau (Robert) : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Nous allons maintenant commencer la période de questions. Mme la députée de Soulanges.

Mme Picard : Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup pour votre apport aux travaux. On va très certainement en tenir compte. Sur votre site Web, dans le volet prévention de la santé et la sécurité au travail de vos membres, il est indiqué que la prévention consiste à mettre en place des mesures ayant pour but d'éliminer ou de réduire les risques présents dans les milieux de travail qui ont un impact sur la santé physique. Dans cette optique, ne croyez-vous pas que la vaccination devrait être obligatoire pour les personnes qui n'ont pas de contre-indication médicale?

M. Comeau (Robert) : La prévention peut passer aussi par un volet quand même important en éducation puis en sensibilisation des gens. C'est sûr qu'imposer quelque chose, quand on ne comprend pas trop pourquoi on veut l'imposer, c'est moins durable, selon nous, que de donner de la formation, que d'avoir une approche plus collaborative avec les gens qui, habituellement, répondent d'une façon plus durable à ces enjeux-là. Alors, l'APTS, à travers les membres qu'elle représente, beaucoup font de la prévention. Et c'est vraiment cet axe-là qu'elle privilégie, plus que de décréter une mesure particulière.

Mme Picard : Merci.

Mme Fréchette (Josée) : Si je peux ajouter aussi, c'est que, nous, ce qu'on souhaite, c'est de passer le message d'une façon positive et pas d'y aller d'une façon coercitive. Alors, on encourage et on a toujours encouragé les gens, là, à la vaccination, mais il faudrait peut-être plus y aller vers une façon... encourager les gens et non de punir les gens qui refusent. Puis souvent les gens ont peut-être des raisons pour refuser la vaccination.

Le Président (M. Provençal)  : Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Boutin : Merci, M. le Président. Merci, M. Comeau et Mme Fréchette, pour votre présentation. Vous soulevez plusieurs préoccupations, et c'est le propre de cette commission, justement, d'entendre divers groupes, justement, pour mieux comprendre les préoccupations, les modalités d'application advenant le cas que la vaccination obligatoire va de l'avant.

Vous avez fait plusieurs constats, puis moi, j'imagine que vous avez consulté vos membres pour en venir à ces constats-là sur... Puis là je me demandais si vous aviez consulté vos membres spécifiquement sur la vaccination obligatoire. Sinon, pourquoi? Et, si oui, est-ce que vous connaissez un petit peu le pourcentage de vos membres qui se positionnent contre la vaccination obligatoire ainsi que les raisons pourquoi elles se positionnent contre la vaccination obligatoire?

M. Comeau (Robert) : Nous n'avons pas consulté nos membres étant donné les délais qui sont quand même très, très courts. Le gouvernement a émis, quand même, ce souhait-là il n'y a vraiment pas beaucoup de temps. Les gens sont en période de vacances. Nous, on se fie vraiment sur la réponse que nos membres ont eue à la vaccination tout court. Alors, quand je vous parlais, tantôt, 94 %, pour nous, on pense que ces gens, en plus de participer à l'effort, se sont eux-mêmes fait vacciner, donc on pense que la proportion plus de gens qui ne désirent pas se faire vacciner est vraiment minimale. Mais c'est vraiment... selon nous, c'est vraiment la réponse à la vaccination qu'ils ont reçue, là, qui constitue, là, la... ce qu'on peut vous apporter, en fait, comme statistiques, là, aujourd'hui, mais on n'a pas consulté nos gens spécifiquement, vraiment, c'est un enjeu de temps.

Mme Boutin : Bien, en fait, moi, ce que je constate... parce que tous les groupes nous ont un petit peu partagé leurs taux de vaccination, puis vous êtes très élevés, là, pour la première dose. Donc, même si c'est 86 %, la deuxième dose, 89 %, j'imagine que les gens sont en attente de leur deuxième rendez-vous. Puis peut-être que vous êtes au courant à savoir, le 11 % restant... parfois, il y a des gens qui sont juste un peu tardifs. Moi, j'en ai dans mon environnement, des gens qui viennent de prendre leur rendez-vous parce que, finalement, ont décidé d'y aller de l'avant. Est-ce que vous pensez que votre... vos membres vont être près du 100 % bientôt?

M. Comeau (Robert) : Nous sommes convaincus que la vaccination de deuxième dose va atteindre celui de la première dose sans... pour nous, sans aucun doute. C'est une question, vraiment, d'organisation d'horaire, retour de vacances, mais on pense que les gens ont pris leur rendez-vous, on en est à peu près certain sans avoir consulté formellement. Mais, pour avoir personnellement vacciné des gens, je vous dirais que les raisons qu'ils nous donnaient, c'est vraiment une question d'organisation de temps, pas eu le temps de prendre le rendez-vous, c'était trop compliqué, je veux y aller avec ma famille. Donc, je pense qu'on va... ça sera assez minimum... assez minimal, plutôt, le nombre de membres que nous aurons qui ne voudront pas se faire vacciner, ça, pour nous, on est assez convaincus de ça.

Mme Boutin : Bien, je vous remercie infiniment, c'est très encourageant. Puis j'imagine que vous avez joué un rôle très positif pour encourager vos membres, là, pour aller se faire vacciner, puis je vous remercie en ce sens-là. Merci.

M. Comeau (Robert) : Je vous remercie, Mme la députée.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Chauveau.

M. Lévesque (Chauveau) : Oui, merci beaucoup, M. le Président. M. Comeau, Mme Fréchette, merci de votre présence parmi nous aujourd'hui. Effectivement, je pense que le pourcentage de personnes, de vos membres qui sont vaccinés, c'est très, très bon, puis il faut continuer à encourager ces gens-là. Et vous avez raison aussi, je pense qu'il y a des gens de dernière minute aussi, les vacances ne sont pas terminées. J'en connais, dans mon entourage, qui ont le désir d'être vaccinés et le feront, évidemment.

Vous mentionnez beaucoup, par contre... Je vais jouer un peu à l'avocat du diable avec vous aujourd'hui, là. Vous parlez de, bon, continuer à faire de l'éducation, de la sensibilisation, inciter les gens davantage à aller se faire vacciner. Puis, écoutez, j'en suis, là, je pense que, si on veut être totalement objectif, c'est ce que fait... bien, le gouvernement, l'ensemble des acteurs de la société civile, depuis plusieurs, plusieurs mois, avec toutes les publicités à la radio, les publicités dans les médias, des groupes comme vous, des représentants qui faites les efforts, on l'a vu avec tous les groupes qu'on a rencontrés aujourd'hui, ça fait qu'il faut continuer à le faire.

Mais là on tombe dans une étape où il y a encore des gens qui, là, refusent de se faire vacciner de toute évidence. Et vous avez souligné un point, je pense, c'est Mme Fréchette qui l'a nommé, il y a certainement des bonnes raisons pour refuser. Je comprends qu'il peut y a voir des raisons médicales. Tout à l'heure, on a rencontré les représentants de la Fédération des médecins spécialistes et la fédération des omnipraticiens du Québec qui disaient : Oui, mais c'est quand même très, très, très faible, les raisons médicales. Pour vous, pourriez-vous me définir... Parce que vous auriez peut-être un 11 % de vos membres qui ne seraient pas vaccinés puis que... je ne veux pas prêter d'intention, c'est fort possible qu'il y en ait qui prennent la décision de le faire dans les prochaines semaines, là, mais, parmi les membres que vous avez, qu'est-ce que vous jugez comme étant de bonnes raisons pour refuser d'être vacciné?

• (16 h 50) •

Mme Fréchette (Josée) : Oui. Bien, bon, vous l'avez nommé tantôt, il y a des gens qui ont des raisons médicales, mais il y a aussi des gens qui sont en absence, dont on n'a pas nécessairement le taux puis on n'a pas... ils ne font pas partie des statistiques. Alors, il y a des gens qui sont en absence pour x raison, maladie, etc. Est-ce qu'ils sont vaccinés? On n'a pas... les employeurs n'ont pas nécessairement eu la preuve qu'ils ont été ou pas, parce qu'ils sont absents du travail. C'est vraiment une petite minorité, là, des gens qui, pour des raisons personnelles, refusent le vaccin.

Mais je dois vous dire que nos membres sont très sensibles à cette réalité-là et puis souhaitent sortir de la pandémie, parce que toute cette pandémie-là a causé, chez nos membres, de la surcharge de travail, de la réaffectation, des problématiques au niveau de la santé mentale aussi, des bris de service dans certains secteurs, donc... et des listes d'attente dans les centres jeunesse assez incroyables. Alors, ce sont nos membres qui vivent avec ces réalités-là. Donc, soyez sans crainte qu'ils sont conscients de ce que la pandémie a apporté et aimeraient... souhaitent ardemment que cette pandémie se termine. Et une des façons, bien, c'est aussi la vaccination pour mettre fin à cette pandémie.

M. Lévesque (Chauveau) : Parfait.

Une voix : ...

M. Lévesque (Chauveau) : Oui, pardonnez-moi, M. Comeau, oui?

M. Comeau (Robert) : Non, non, il n'y a aucun problème. Je voulais peut-être focusser un petit peu plus sur l'enjeu du risque de bris de service si... Parce que, nous, l'inquiétude est vraiment à ce niveau-là. Ce n'est pas beaucoup de gens, on ne parle pas de beaucoup de gens, mais ils sont quand même assez concentrés sur certains groupes, des groupes qui sont déjà, je vous dirais, en pénurie, en forte pénurie depuis beaucoup d'années, donc avant la pandémie.

Je pense aux centres jeunesse. On n'est pas sans savoir ce qui se passe dans les centres jeunesse, c'est difficile de recruter, de retenir nos professionnels, nos techniciens. Alors, ne serait-ce qu'envoyer sans solde à la maison quelques professionnels, quelques techniciens, on vient accentuer ce bris de service là. Et, pour nous, ça nous inquiète, parce que, bien, on est programmés, nous, pour offrir des services à la population et pour que la population ait accès à ces services-là et on craint qu'il y ait vraiment une rupture de service. C'est ce qu'on voulait... un message qu'on voulait vous dire ce matin... cet après-midi.

M. Lévesque (Chauveau) : Votre point est très intéressant, et je pense que c'est une bonne partie du débat qu'on a aujourd'hui. J'ai posé cette question-là au ministre ce matin, je l'ai posée à quelques autres intervenants, effectivement, le risque de perte... d'avoir des bris de service, les gens qui quittent parce qu'ils refuseraient systématiquement un vaccin, effectivement. Mais je me fais l'avocat du diable encore une fois, en sachant que vous avez 89 % de vos membres qui ont contribué à cet effort-là de façon volontaire grâce à l'éducation et à la sensibilisation, votre travail comme représentants syndicaux, vous ne trouvez pas, là, qu'il y a un peu un manque de solidarité à côté? Parce que ça a été dit, tout à l'heure, par d'autres spécialistes de la santé, du monde qui sont... c'est des médecins, là, ce qu'ils nous disent, c'est qu'il y a des chevaux de Troie, des gens qui ont importé, malheureusement, le virus à l'intérieur de milieux, tels que des milieux de santé, des gens vulnérables, CHSLD, etc.

Vous ne pensez pas, là, qu'il y a comme le travailleur que lui a fait l'effort, puis, de son côté, à côté de lui, il y a quelqu'un qui, malheureusement, va peut-être potentiellement... je le souhaite que non, mais qui pourrait importer le virus à l'intérieur du milieu de travail, qui pourrait infecter ce collègue-là, qui pourrait infecter d'autres personnes et qui vient accroître la quantité de travail pour tous ceux et celles qui sont déjà débordés dans leur milieu de travail. Vous ne pensez pas que, justement, dans la balance des inconvénients... je suis conscient que c'est un moment difficile, mais dans la balance des inconvénients, ce ne serait pas un élément positif à envisager.

Mme Fréchette (Josée) : Écoutez, on a vraiment travaillé avec nos membres et nos personnes salariées, là, à encourager la vaccination. Il y a une partie que... c'est vraiment un minimum, là, qui ne sont pas vaccinés ou qui refusent, mais les vecteurs de transmission ne sont pas que par nos membres, ils sont aussi par les gens qui arrivent de l'extérieur. Je l'ai énuméré tantôt, là, il y a tous les gens qui arrivent dans les établissements, qui vont chercher des services, et tout ça. Donc, eux aussi peuvent être des vecteurs de transmission. Mais nous n'avons pas tant de personnes, là, qui refusent vraiment de façon catégorique, là, la vaccination. Au contraire, les gens veulent se faire vacciner et puis veulent cesser cette pandémie-là.

Il y a aussi tous les équipements de protection individuelle qui sont fournis aussi par les employeurs. On a eu un peu de difficulté, au départ, les N95, là, les avoir, mais là, maintenant, ils ont accès, et on a fait la démonstration que les masques N95 pouvaient aussi protéger. Alors, il y a d'autres façons qu'on peut aussi encourager puis éviter aussi la propagation, mais ce n'est pas seulement le vaccin. Parce que vous savez qu'on peut être asymptomatique, vacciné et asymptomatique, et on peut aussi le transmettre. Donc, il ne faut pas oublier... puis il ne faut pas que les mesures de protection individuelle non plus... qu'on recule dans ces mesures-là, c'est important que ça demeure.

C'est sûr que, tu sais, notre rôle n'est pas nécessairement de s'assurer que tout le monde soit vacciné, là. C'est aussi le rôle de l'employeur ou du législateur, mais on veut faire attention aussi à nos membres et on veut aussi être dans le constructif, parce qu'on veut aussi... Vous savez, nos gens ont contribué énormément à la pandémie. On pense aux gens des laboratoires qui ont fait tous les tests, puis c'était parfois des 25 000 par jour, hein, des tests... les gens en imagerie médicale qui ont fait aussi les examens pour les poumons et toutes les radiographies qu'on devait faire et qui n'ont pas nécessairement eu toute la reconnaissance qu'ils auraient dû avoir, ces gens-là ont travaillé fort et ont tenu à bout de bras le réseau.

Donc, croyez-moi qu'on prend ça vraiment au sérieux et puis que nos membres aussi prennent la pandémie au sérieux.

M. Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : Oui, la députée de Lotbinière-Frontenac, à vous.

Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Bonjour. Tout à l'heure, vous avez parlé que vous n'aviez pas consulté vos membres avant de venir nous voir, mais vous dites qu'il n'y a pas beaucoup de membres... de vos membres qui sont contre la vaccination. J'ai un petit peu de misère à comprendre ça. Puis là vous dites que... tu sais, vous dites que vous être contre la vaccination obligatoire. J'aimerais vous entendre sur les solutions. Qu'est-ce que vous proposez? Nous, en tant que gouvernement, on fait de la prévention depuis plus d'un an pour essayer de rejoindre le personnel en santé puis pour qu'ils puissent se faire vacciner. Donc, c'est quoi, vos solutions? Merci.

M. Comeau (Robert) : Alors, nos gens, non, on ne les a pas consultés directement, mais, par contre, on a beaucoup de gens... on a tous nos représentants nationaux qui sont déployés partout au Québec, qui eux-mêmes sont en contact avec chacun de nos exécutifs dans chacune des régions du Québec, dont eux ont le pouls direct. Mais on n'a pas de statistique proprement dite, cause du délai que je vous parlais tantôt.

Les gens, là, ce qu'ils nous soulignent, puis les courriels que je reçois, là, ils ont un petit peu de difficulté à vivre, des fois, avec l'incohérence du gouvernement dans le déploiement depuis le début de la crise. Donc, au début, les masques n'étaient pas obligatoires. Ils le sont devenus plus tard. Pourquoi? Parce qu'on a su, plus tard, qu'il n'y en avait... puis on comprend ces raisons-là, là, on n'est pas dans... on comprend, il n'y avait pas de masque, donc on a priorisé à qui on donne les masques en premier. Mais il y a des gens qui analysent ça en premier lieu et qui font une analyse, et ils additionnent toutes, selon leurs croyances, ces incohérences-là. Et, à la fin, l'addition de tout ça fait qu'ils ne croient pas aux vaccins, ils ne croient pas... ça, si on additionne toutes les publications à gauche et à droite, ça leur appartient, on ne veut pas rentrer dans ça avec eux.

Mais ce qu'on sait, par contre, c'est que, comme organisation syndicale, nous, on a l'obligation de défendre ces gens-là. On vient porter atteinte à ces droits-là, là. Je pense qu'il y a d'autres organisations qui vous l'ont démontré, aujourd'hui, qu'on atteint un peu les droits fondamentaux de ces gens-là. Mais c'est clair que nous, on n'aura pas le choix de déposer des recours quand ces gens-là vont se sentir brimés si on impose la vaccination obligatoire. Comme organisation syndicale, nous, on doit défendre ce qui nous semble... qui porte atteinte aux droits tout en étant favorable. Et on fait quand même de la sensibilisation, on fait des campagnes tout comme vous. Vous en faites beaucoup, mais nous aussi, on tente d'en faire le plus possible. Nos gens ont des formations scientifiques. La vaccination, c'est la porte de sortie, c'est ce qui va nous faire sortir de cette crise-là.

Mais, du moment où... Tu sais, on n'a pas d'ascendant sur nos gens qui n'y croient pas. Ils ont leurs responsabilités, on a les nôtres. Ça fait que, vous voyez, ce n'est pas toujours évident de naviguer dans tout ça, là, mais je pense que l'effort conjugué du gouvernement, des organisations syndicales, des relations un à un qu'on a entre nous, de discuter avec des gens qui sont plus résistants, qui ont des questions... C'est pour ça que l'approche préventive, l'approche de sensibilisation, de formation et de sensibilisation, pour nous, est très importante dans cette démarche-là. On a atteint quand même 94 %, là, c'est quand même beaucoup, là. Et, comparativement à la société en général, on est quand même assez contents.

Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : C'est 94 % en première dose ou deuxième dose?

M. Comeau (Robert) : Exact, première dose. 88 %, deuxième.

Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : O.K. Je n'ai pas d'autre question.

Le Président (M. Provençal)  : Non, ça va? Alors, merci. Je vais céder maintenant la parole au député de Nelligan.

• (17 heures) •

M. Derraji : Merci, M. le Président. Merci à M. Comeau et Mme Fréchette pour votre présence et votre rapport. J'ai plusieurs questions. Je vais commencer, premièrement, par féliciter vos membres. Entendre 94 % première dose, 88 % deuxième dose, bravo, félicitations à l'ensemble de vos membres.

Ma première question, ça va aller sur les mesures de protection et de prévention. Je présume que vous avez suivi un peu les échanges depuis ce matin. Vous avez fait référence à quelques remarques de M. le ministre tout à l'heure. Mais j'aimerais vous entendre par rapport aux mesures de protection et de prévention. La FIIQ et la CSN constataient qu'il y a eu une baisse des règles de protection. Est-ce que vous partagez le même point de vue? Et est-ce que vous partagez que c'est le moment pour le gouvernement de baisser les règles de protection en pleine quatrième vague?

Mme Fréchette (Josée) : Non, ce n'est pas le moment de baisser les mesures de protection par rapport aux équipements de protection individuelle. Au départ, au début de la pandémie, on a fait beaucoup d'interventions auprès des employeurs parce que c'était assez difficile de protéger les gens. Et je peux vous en donner plusieurs exemples, là, dans les établissements, où les gens demandaient d'avoir des équipements de protection, et c'était très difficile d'y avoir accès. Vous le savez, il y a eu quand même des difficultés par rapport au N95. Et maintenant on en a accès. Puis il y a même des employeurs qui ont trouvé des façons de les désinfecter pour les réutiliser. Ils ont été très créatifs. Et ça, on salue ces initiatives-là.

Mais ce n'est pas le moment de lâcher les mesures de protection. On est encore en pandémie puis, là, on parle du Delta. Alors, on continue. Et puis, je vais répéter encore, le souhait, c'est de sortir de cette pandémie-là. Donc, il faut prendre les mesures, il faut continuer à protéger les gens, à protéger nos travailleurs, mais protéger aussi la clientèle, les patients, les usagers, là, du réseau de la santé et des services sociaux. Et ça passe aussi par l'équipement de protection individuelle. Donc, il faut maintenir ce qu'on a acquis depuis la dernière année, là, en matière de toutes les protections.

M. Derraji : Mais avez-vous constaté un recul ou vous pensez que c'est la même chose? C'est bon? Vos membres ne vous disent pas, ils ne vous partagent pas qu'il y a un recul par rapport aux mesures de protection et de prévention?

Mme Fréchette (Josée) : Non. On n'a pas entendu. Au contraire, il y a eu beaucoup d'améliorations, là, au niveau des mesures de protection. Nos gens, ils sont très conscients qu'il faut respecter ces mesures-là. Et puis, pour l'instant, nous, on pense que c'est acquis, là, par rapport à nos membres et puis qu'ils sont très favorables à continuer à se protéger. Puis ce qu'on remarque, c'est que les gens continuent à le faire.

M. Derraji : O.K. Vous avez mentionné au début que c'est le moment pour le gouvernement d'arrêter la gouvernance par décrets et de lever l'état d'urgence. C'est quand même... Vous venez nous dire que nous sommes encore en pandémie, quatrième vague, et votre première affirmation au tout début de l'ouverture de votre exposé, vous avez dit qui faut arrêter la gouvernance par décrets et la levée de l'état d'urgence. C'est quoi, le raisonnement qui vous a conduit aujourd'hui à affirmer cette affirmation?

M. Comeau (Robert) : Bien, au départ, la pandémie, c'est sûr que le Québec et le gouvernement étaient devant quelque chose qui était inconnu, qui se développait plus sur le continent européen, qui s'en venait par ici. Donc, on était plus dans l'inconnu, et c'était quand même... il fallait prendre des décisions rapidement. Là, maintenant, il y a beaucoup de choses qui sont mises en place, les équipements de protection individuelle, il y a beaucoup de sensibilisation qui a été faite, il y a beaucoup de publicité, on est rendu à la vaccination, des bons taux au Québec, on est quand même dans les meilleurs au monde, je vous dirais, dans ça. Bien, je trouve qu'il y a beaucoup de choses qui ont été faites. Là, on roule plus sur des choses qui ont déjà été bien établies. On croit que, maintenant, le gouvernement et les partis d'opposition qui ont été dûment élus par la population prennent le flambeau, questionnent le gouvernement, amènent des solutions alternatives. Et je crois que c'est le rôle de l'Assemblée nationale de le faire, de tous partis confondus. On pense que la gestion par décrets...

Je vous amène un exemple. Cet été, devant la pénurie de travailleurs en centre jeunesse, on a émis une directive qui vient donner un certain montant à certains travailleurs du centre jeunesse pour ne pas qu'ils s'en aillent, pour les retenir dans le réseau. Bien, si on nous avait consultés avant, si les partis d'opposition avaient eu la chance de questionner le gouvernement, on lui aurait dit que ce n'était pas une bonne idée de faire ça. Ce qui aurait été une bonne idée de faire, ça aurait été de le donner à tous les travailleurs du centre jeunesse, parce que ça a créé une division, ça a créé une scission. Et là on n'a pas du tout réglé le problème, on l'a augmenté. On aurait aimé ça, être consultés, puis on aurait aimé ça que nos représentants à l'Assemblée nationale posent des questions. Mais là, non, on doit toujours être en réaction. Ça fait que c'est pour ça qu'on pense qu'on devrait passer à autre chose.

M. Derraji : Mais, monsieur...

Mme Fréchette (Josée) : Et, si je peux ajouter aussi, c'est que, quand on gère par décrets puis qu'on ne consulte pas... Nous, on a quand même certaines solutions et du vécu sur le terrain, et parfois on peut oublier certaines personnes, certains départements, et on... il y a des... On peut aussi vous aider à relever certains angles morts importants, là, comme on le fait en ce moment, ou on peut vous diriger dans certaines directions — là, je me répète — mais pour pouvoir reconnaître les gens, nos membres, là, qui tiennent encore le réseau à bout de bras.

M. Derraji : Mais c'est très intéressant, M. Comeau et Mme Fréchette, ce que vous ramenez, et je tiens à vous rassurer que je ne suis pas porte-parole en santé, c'est ma collègue députée de Maurice-Richard qui est porte-parole. Je vais répondre à sa place, je vais me permettre. Mais sa porte, elle est grande ouverte par rapport aux questions de la santé, donc n'hésitez pas. Je sais que le gouvernement gère par décrets, mais n'hésitez pas à soulever ces problématiques, parce que c'est préoccupant, ce que vous venez de soulever, surtout que l'utilisation du décret a un certain... a un but. Ce que je viens d'entendre de votre bouche, surtout que vous êtes des gens de terrain, est tout à fait le contraire de ce qu'on espère d'une bonne et saine gouvernance. Donc, merci pour ces clarifications.

L'autre point que vous avez soulevé, et ça rejoint un peu ce que nous avons entendu ce matin de la part du ministre par rapport au refus, le refus d'un de vos membres, de ne pas accepter, pour une question qui lui revient en toute légitimité, d'avoir son vaccin. Vous avez dit que ni la réaffectation ni le congé sans solde ne vont pas régler le problème. Selon vous, si les deux options... les trois options que le ministre a exposées ce matin ne fonctionnent pas, est-ce que vous pensez qu'il va y avoir une fuite de, je dirais, de personnes du réseau qui vont aller chercher ailleurs, ou bien pensez-vous qu'il y a une solution pour pouvoir encourager ces gens à aller chercher leur vaccin?

Mme Fréchette (Josée) : Écoutez, il y a déjà une fuite de nos personnes salariées vers le privé ou vers ailleurs. Quand on pense aux psychologues, où il y a une pénurie importante et puis qui sont attirés énormément vers le privé parce que souvent, bien, les salaires sont quand même supérieurs, on a des craintes à ce niveau-là. Alors, si on force des gens à se faire vacciner ou on les envoie à la maison sans solde, bien, ces gens-là risquent de quitter le réseau, risquent de se trouver une autre place, et on est déjà en manque, on est déjà en pénurie de personnel.

Quand on n'avait pas le vaccin, au début de la pandémie, qu'est-ce qu'on faisait? On réaménageait les horaires ou on réaménageait le travail des gens pour soit faire du télétravail ou ne pas être en contact avec la clientèle. On a trouvé des solutions à ce moment-là. Alors, je ne vois pas pourquoi qu'on ne pourrait pas trouver de solutions, encore maintenant, pour maintenir le plus possible les gens dans le réseau et aussi de ne pas donner le fardeau sur les gens qui sont là et qui restent. Parce que c'est ce qui se passe, nos gens sont en surcharge de travail. Déjà, en ce moment, il y a beaucoup de difficulté à aller... à recruter. Alors, la rétention, l'attraction, elle est difficile. Et en prenant des mesures comme ça, bien, on risque encore de perdre des gens et puis de soit aller vers le privé, et nous, c'est sûr que ce n'est pas la voie qu'on encourage, et de perdre des gens, et puis de retourner encore dans le temps supplémentaire obligatoire, et toutes ces mesures qui découragent, et puis qui envoient souvent les gens en maladie. Donc, on n'est pas plus gagnants de cette façon-là.

M. Derraji : Oui. Je comprends vos préoccupations. Vous avez entendu, avant vous, la FMOQ et la FMSQ qui disaient que le Québec ne devrait pas limiter la vaccination obligatoire aux travailleurs de la santé. Et ils sont très... en fait, très clairs par rapport à ce point, donc, que ce soit en GMF, en clinique et autres. Comment vous interprétez, vous, cette prise de position de ces deux organisations qui représentent des médecins spécialistes et généralistes?

M. Comeau (Robert) : C'est sûr que c'est une prise de position professionnelle de leur formation médicale qui les oblige, là, puis c'est normal, on comprend tout à fait ça, là, à voir... à protéger au maximum la santé de la population québécoise. Mais nous, comme organisation syndicale, on ne peut pas adhérer à la vaccination obligatoire. On va adhérer, nous, par contre, à des mesures qui favorisent, comme je disais précédemment, la formation, l'information et la sensibilisation parce qu'on a le devoir de représentation. Alors, nos gens, comme vous le disiez, certaines personnes qui ne désirent pas, pour des raisons qui leur appartiennent, se faire vacciner, on devra les défendre, c'est notre rôle, et on va... ça va automatiquement se judiciariser. Ça, c'est presque écrit dans le ciel. Et les tribunaux décideront par la suite comment ça sera évacué. Mais notre rôle à nous, oui, on en fait, de la sensibilisation, de la prévention, mais c'est d'abord et avant tout de défendre les droits de nos membres.

• (17 h 10) •

M. Derraji : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Alors, je vais passer maintenant la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. M. Comeau, Mme Fréchette, merci de votre témoignage. Je ne pourrais pas être plus d'accord avec vous quand vous dites que la gouvernance par décrets a bien vécu, puis il serait peut-être temps de passer à autre chose. D'ailleurs, c'est doublement vrai ici, ironiquement, parce qu'en fait, la décision, elle est déjà prise, même si on en discute, et il n'y a pas de date de fin, ce qui est généralement le cas. Ça, c'est malheureux. D'ailleurs, j'ai souri intérieurement tout à l'heure quand j'ai entendu l'estimé collègue de Jean-Talon nous dire : Advenant que l'on aille de l'avant avec la vaccination obligatoire. Je pense qu'on peut enlever l'adverbe puis le conditionnel. Nous y irons de toute évidence. Le ministre nous a même donné une date de début. Alors, ça, c'était l'éditorial du jour, gracieuseté du député de Rosemont.

Vous avez dit : Il y aura certainement des contestations, compte tenu des contrats de travail et du Code du travail. Pouvez-vous, parce que je n'ai pas... j'ai quasiment mangé tout mon temps, pouvez-vous rapidement nous dire de quelle contestation et qu'est-ce que vous envisagez, puisque vous avez le devoir de défendre vos membres?

M. Comeau (Robert) : Bien, quand on oblige la vaccination, on vient un peu attaquer l'intégrité physique de la personne. Alors, sur cette base-là, sur cette liberté de ne pas se faire vacciner là, selon nos analyses, bien, c'est sur ça qu'on va contester, en fait. Ça veut dire que l'employeur ne peut pas exiger quelque chose qui est contraire aux chartes, actuellement. C'est sûr qu'il y a une jurisprudence d'un côté comme de l'autre, là, c'est un débat juridique, ça va suivre son cours, mais il est évident pour nous que ça va être judiciarisé, il y a des membres qui vont nous demander de les défendre. C'est notre rôle, le Code du travail nous y oblige, et nous allons le faire sans aucun problème. C'est pour ça que c'est difficile pour nous de prendre position sur : on est faveur ou non de la vaccination obligatoire. Là, on est plus sur : on avise le gouvernement qu'il y a des risques très importants de rupture de services, CRDI, centres jeunesse, je vous dirais, c'est très, très inquiétant, là. Et, bien, c'est plus dans ce sens-là, là, qu'on voulait apporter le débat avec vous aujourd'hui.

M. Marissal : Pour le commun des mortels, le CRDI, c'est...

M. Comeau (Robert) : Centre de réadaptation en déficience intellectuelle. Désolé, c'est le jargon santé et services sociaux.

M. Marissal : C'est bon. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Alors, merci...

Mme Fréchette (Josée) : Si je peux me permettre, il faut aussi évaluer le contexte, hein, on n'a pas encore vu, on entend qu'il y a une proposition sur la table, mais on n'a pas encore vu tout ce qui vient avec, et le contexte, et les écrits, là. Donc, on doit aussi faire des évaluations par nos experts, à voir qu'est-ce... ça va être quoi quand on parle de suspension. Mais là ce n'est pas encore déterminé. Donc, aussi, il faut voir qu'est-ce que le gouvernement va imposer avec cette mesure-là.

M. Marissal : Je vous remercie.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je cède maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Merci, M. le Président. Merci, M. Comeau, Mme Fréchette, d'avoir abordé la question de l'urgence sanitaire d'entrée de jeu, parce qu'il faut bien comprendre que l'exercice que l'on mène actuellement, il est vicié fondamentalement par le fait qu'on ne sait pas précisément de quoi on discute. Habituellement, lorsqu'on se réunit en consultations particulières, c'est sur un projet de loi, sur un mandat d'initiative. On a des documents sur lesquels on peut se prononcer, alors que là, évidemment, on sait que la décision est prise, mais on ne sait pas en quoi elle va être constituée exactement. Et la surprise viendra éventuellement suite à l'adoption d'un décret.

Maintenant, sur votre point de vue, en tant que tel, sur la vaccination obligatoire, en quelques mots, j'aimerais que vous reveniez sur le fait que vous doutez de l'efficacité de la vaccination obligatoire, vous dites que l'argumentaire fait défaut. Est-ce que vous pouvez ajouter là-dessus un peu?

M. Comeau (Robert) : Bien, on a un taux quand même important de vaccination. Si on déploie un effort important pour augmenter de quelques points de pourcentage alors que, comme on disait précédemment, dans un centre hospitalier, la clientèle entre librement, les fournisseurs entrent librement, les aidants naturels entrent librement et en sortent, est-ce que convaincre ce 2 % ou 3 % là de gens est significativement... est un effort significatif qu'on doit déployer pour atteindre ça? Un aidant naturel passe plus que 15 minutes auprès d'un patient, il peut passer des heures pour l'accompagner et tout ça. Le risque est quand même là. Alors, c'est un peu les incohérences qu'on soulevait, un petit peu, précédemment. Alors, on veut encore une fois imposer des choses aux techniciens professionnels de la santé. D'ailleurs, on sent qu'on se sert de ce groupe-là pour pouvoir l'imposer plus largement à la population.

Vous savez, on a déployé des efforts immenses pendant les 18 derniers mois. Nos gens sont à bout. Et ça, se faire faire ça, c'est comme dire : Bien, vous n'avez pas assez l'esprit professionnel et vous n'avez pas assez l'esprit scientifique pour y penser vous-mêmes, là, tu sais, on vous oblige à le faire. C'est comme mal pris, là, je vous dirais, là, par une bonne partie de nos membres. Ils le font, ils le font, ce sont des professionnels. Ce sont des gens scientifiques qui ont une bonne formation, mais ils sont un petit peu tannés, là, je vous dirais.

Et, en plus de la négociation qu'on n'a pas vraiment... On n'a pas d'entente de principe avec le gouvernement encore, là. Tout ça s'ajoute. Et nos gens, moi, je salue leur professionnalisme dans tout ça, de rester près de la clientèle et de rester la tête haute dans ça, parce que ce n'est pas le gouvernement, je vous dirais, actuellement, qui nous pousse dans le dos à donner d'excellents services, là. On est plus dans la contrainte, là.

Mme Fréchette (Josée) : Et si je peux ajouter, on n'a pas eu le temps de terminer, mais on avait une question très importante, là, à la fin de notre élection, c'est : On veut être rassurés par le gouvernement. On veut savoir c'est quoi leur plan de contingence.

M. Marissal : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : Je remercie M. Comeau et Mme Fréchette, pour leur contribution à nos travaux.

Compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux au vendredi 27 août 2021 à 8 h 35, où elle poursuivra son mandat. Merci à tous.

(Fin de la séance à 17 h 16)

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