(Dix heures trois minutes)
Le Président (M. Provençal)
: À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant
constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des
services sociaux ouverte.
La commission est réunie afin de procéder aux consultations
particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi n° 73, Loi modifiant diverses dispositions en matière de procréation assistée.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme Sauvé (Fabre) est remplacée par Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis);
M. Zanetti (Jean-Lesage) est remplacé par Mme Labrie (Sherbrooke).
Le
Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Mme la secrétaire. Y a-t-il des droits de vote par procuration?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme Picard (Soulanges) dispose d'un droit de vote par
procuration au nom de Mme Blais (Abitibi-Ouest) et Mme Montpetit
(Maurice-Richard) dispose d'un droit de vote par procuration au nom de Mme
Charbonneau (Mille-Îles).
Le Président (M. Provençal)
: Ça va. Merci. Ce matin, nous débuterons par les remarques
préliminaires puis nous entendrons par visioconférence les groupes
suivants : la coalition des familles LGBTQ+ et l'Association des pédiatres
du Québec.
Remarques préliminaires
J'invite maintenant
M. le ministre délégué à la Santé et
aux Services sociaux à faire ses remarques préliminaires. M. le
ministre, vous disposez de six minutes. À vous la parole.
M. Lionel Carmant
M. Carmant : D'accord. Merci
beaucoup, M. le Président. Je suis très heureux d'être ici aujourd'hui pour...
Bien, d'abord, excusez-moi, d'entrée de jeu, bonjour à mes collègues qui
travaillent avec moi, avec nous. Bonjour aux oppositions, également, qui sont
là ce matin. Bonjour à mon équipe, également, bonjour à l'équipe du ministère
et à tous ceux... tous les employés de l'Assemblée nationale qui sont ici ce
matin.
J'étais parti un peu trop rapidement, là, dans
mon bonheur d'être ici aujourd'hui pour participer aux consultations
particulières concernant le projet de loi n° 73 portant sur la procréation
médicale assistée. Comme vous le savez, ce projet de loi visant à rétablir le
financement public du programme est une promesse-phare de notre gouvernement, à
laquelle nous nous étions engagés durant la dernière campagne électorale. Les
équipes du ministère ont travaillé très fort depuis plusieurs mois afin d'en
arriver à une version améliorée et balisée pour la procréation médicale
assistée, et je les en remercie sincèrement.
Comme vous le savez, en 2015, le programme
a été abandonné, étant jugé trop dispendieux, privant ainsi des milliers de familles qui souhaitent avoir des
enfants d'avoir accès à un programme public. Cette situation sera désormais
chose du passé lorsque le projet sera adopté. J'invite d'ailleurs mes collègues
des oppositions à collaborer afin que le programme puisse être en application
rapidement pour le bonheur des familles québécoises.
De plus, afin de s'assurer de proposer un
programme de procréation médicale assistée pérenne, sécuritaire, d'éviter les
dépassements de coûts et les dérives éthiques, notre gouvernement a créé un
comité d'experts en vue de guider et de conseiller les équipes responsables du
déploiement du nouveau programme. Les mesures proposées dans le projet de loi déposé sont issues en partie des
recommandations de ce comité d'experts ainsi que de l'avis du Commissaire à la santé et au bien-être, qui
date de 2014.
À l'été 2019, le ministère de la Santé et
des Services sociaux a également procédé à des consultations auprès des acteurs
du milieu de la procréation médicalement assistée ainsi que de nombreux
partenaires gouvernementaux et externes en vue de l'élaboration du projet de
loi. Parmi les partenaires consultés dans le cadre de ces travaux, notons le Collège
des médecins du Québec, des cliniques de procréation assistée — en
fait, il y en a sept — des
cliniques de fertilité situées en région — huit d'entre elles — et
des groupes de citoyens, par exemple, la Coalition des familles LGBT+ et
l'Assocation Infertilité Québec.
Concrètement,
cela veut dire que le nouveau programme de procréation assistée permettra, un,
l'accès à des services assurés dans le cadre d'un programme balisé et
fondé sur les meilleurs standards de pratique; le rétablissement de la
couverture publique des traitements de fécondation in vitro, mais de manière
concertée et structurée; de fournir des services
sécuritaires et de qualité en évitant de créer des délais; d'améliorer le
rapport coûts-efficacité en encourageant les
pronostics favorables; de viser une plus grande équité pour tous ceux qui
souhaitent avoir des enfants — genre, orientation sexuelle, lieu de
résidence, programme d'adoption. Ce sont également des mesures qui visent à
permettre une planification adéquate des services, tout en tenant compte de la
capacité de payer de l'État.
J'aimerais revenir un
petit peu sur les balises du régime public. Plus précisément, il est ainsi
proposé que, pour être admissibles au programme de service de fécondation in
vitro, les personnes doivent présenter soit une condition médicale
d'infertilité, soit être dans l'incapacité de se reproduire. Les couples
hétérosexuels, les couples homosexuels femme-femme ainsi que les femmes seules
pourront être admissibles. Les critères d'admissibilité au programme viseront
également à ne pas accentuer les risques obstétricaux pour les femmes qui
recevraient des traitements ou les risques néonataux pour les enfants qui en
seraient issus.
Afin
d'assurer un meilleur contrôle financier du programme, des critères
d'admissibilité et des balises strictes ont aussi dû être définis. Par exemple,
les services pour les femmes de 41 ans et plus ainsi que pour les
personnes ayant eu une stérilisation volontaire, comme par exemple une
vasectomie, ne seront pas assurées. Toutefois, ces personnes pourront obtenir les services en assumant les
frais, et certaines dépenses pourront être admissibles à un crédit d'impôt,
comme c'est déjà le cas.
Le projet de loi
prévoit des leviers supplémentaires pour bien planifier l'offre de services en
PMA et surveiller les coûts. Par exemple, on
veut mettre en place des critères d'évaluation des besoins régionaux pour
l'attribution des permis de CPA et
aussi développer un système d'information qui sera mis en place pour gérer la
procréation médicale assistée. La
gestion de l'admissibilité sera gérée par la RAMQ. Le système
d'information permettra également de surveiller
l'état de santé des femmes et des enfants qui sont issus de la PMA. Ces moyens
nous permettront d'assurer un suivi rigoureux des dépenses et de la performance
du programme PMA.
Nous devons aussi
rehausser la qualité, la sécurité et l'éthique des activités en PMA. Il faut
encadrer la disposition des embryons surnuméraires, par exemple, et continuer à
s'appuyer sur le Collège des médecins du Québec pour encadrer la pratique professionnelle
de la médecine en prévoyant que les lignes directrices soient mises en jour
selon l'évolution de la connaissance scientifique.
• (10 h 10) •
De plus, nous
exigerons un certificat de conduite professionnelle délivré par le Collège des
médecins du Québec à tout médecin qui demande un permis de CPA. Un comité
central d'éthique clinique à la disposition des professionnels exerçant dans le
domaine de la procréation médicale assistée devra également être mis sur place.
Lors des
consultations réalisées, les médecins oeuvrant en PMA ont manifesté le besoin
de pouvoir recourir à une instance à laquelle soumettre des cas qui les
confrontent à des inconforts moraux ou pour lesquels la conduite clinique à
suivre n'est pas claire. Il nous faudra renforcer les pouvoirs d'inspection et
prévoir le pouvoir de désigner des enquêteurs. Cela permettra aux inspecteurs
de déployer tous les moyens requis pour exercer leur travail.
Il est aussi proposé
que toutes les activités de PMA soient exercées par un centre de procréation
assistée titulaire d'un permis délivré par le ministre, ce qui n'est pas le cas
actuellement et ce que... pour les activités de FIV.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci
beaucoup. J'invite maintenant la porte-parole de l'opposition officielle et
députée de Maurice-Richard à faire ses remarques
préliminaires pour une durée maximale de quatre minutes. À vous la parole,
madame.
Mme Marie Montpetit
Mme Montpetit : Je vous
remercie beaucoup,
M. le Président. Je n'utiliserai pas mes quatre minutes
complètes, mais je vais quand même en profiter pour vous saluer, saluer
le ministre, ainsi que son équipe, et les collègues de sa formation politique
qui l'accompagnent, ainsi que mes collègues qui sont avec moi et ceux des
autres formations.
Très brièvement, simplement
pour dire que le ministre peut compter sur notre entière collaboration pour
procéder à ce projet de loi bien important et que nous sommes ici en mode
écoute, dans le cadre des consultations, pour
écouter les différents groupes qui seront présents et qui vont nous partager
leur expertise. On a déjà reçu quelques mémoires, plusieurs mémoires
même, qui font état de modifications souhaitées au niveau des différentes
expertises pour venir bonifier le projet de loi. Donc, on travaillera en ce sens pour voir s'il peut être parfait
encore davantage. Merci.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci
beaucoup. J'invite maintenant la porte-parole du deuxième groupe d'opposition
et députée de Sherbrooke à faire ses remarques préliminaires pour une durée
maximale d'une minute. À vous la parole.
Mme Christine Labrie
Mme Labrie :
Merci, M. le Président. Je vais être très brève aussi. D'abord, on accueille
très positivement le projet de loi. Il était très attendu par de nombreuses personnes. Notre intention, c'est de travailler de
manière constructive pour qu'il soit adopté rapidement aussi. On va
surtout veiller à ce que les critères d'admissibilité ne soient pas
discriminatoires. Donc, je remercie à l'avance tous les groupes qui ont déposé
des mémoires, qui vont être entendus ici, en commission. On va porter bien
attention aux recommandations.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci
beaucoup. J'invite maintenant le porte-parole du troisième groupe d'opposition et député des Îles-de-la-Madeleine à faire ses remarques préliminaires pour une
durée maximale
d'une minute. Je vous cède la parole.
M. Joël Arseneau
M. Arseneau : Merci, M. le
Président. Alors, bonjour, M. le ministre, chers collègues, l'équipe
ministérielle.
Nous saluons le dépôt du projet de loi
n° 73. Nous attendions avec impatience, d'ailleurs, le dépôt de ce projet
de loi, tout comme les couples infertiles du Québec. J'offre d'ailleurs toute
mon empathie et ma compassion envers ces couples infertiles, parce qu'on sait
que fonder une famille, c'est un des plus grands accomplissements d'une vie, et se retrouver devant l'obstacle de
l'infertilité amène évidemment beaucoup d'anxiété, de désespoir souvent.
Et heureusement il y a des solutions qui existent, et maintenant, avec le
projet de loi, on va pouvoir contribuer à rendre ce rêve réalisable pour
plusieurs.
Nous offrons donc toute notre collaboration au
ministre délégué lors de l'étude de ce projet de loi. Nous aurons en tête
plusieurs points, notamment la qualité de l'offre de services de procréation
assistée assurée à la population, la mise en place du programme et la
définition des services assurés ainsi que les conditions. La qualité, la
sécurité et l'éthique de la pratique doivent aussi être des priorités que nous
suivrons avec attention. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, M. le député. Merci pour vos remarques
préliminaires.
Nous allons suspendre les travaux quelques
instants afin de permettre à nos témoins de se joindre à nous. Alors,
suspension, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 10 h 14)
(Reprise à 10 h 25)
Auditions
Le Président (M. Provençal)
: Alors, je vous souhaite la bienvenue, à la représentante
de la coalition des familles LGBTQ+. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi
nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission.
Je vous invite à vous présenter puis à commencer
votre exposé. Je vous cède la parole.
Coalition des familles LGBT+
(Visioconférence)
Mme
Greenbaum (Mona) : Merci
beaucoup. Donc, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les parlementaires, merci de votre invitation à venir
présenter notre mémoire. Donc, je m'appelle Mona Greenbaum, je suis directrice
générale de la Coalition des familles LGBT+ et également administratrice au
Conseil québécois LGBT. La Coalition des familles LGBT+ est un organisme
qui représente les familles avec parents et futurs parents lesbiens, gais,
bisexuels et trans.
Ayant pris
part à de multiples étapes de la consultation, la Coalition des familles LGBT+
apprécie particulièrement les éléments suivants proposés dans le projet
de loi, donc : la prise en charge des frais correspondant à
six cycles d'insémination, incluant les coûts pour paillettes de sperme;
la prise en charge d'un cycle de fécondation in vitro; puis la prise en
charge de tous les frais liés à la conservation de la fertilité des personnes
trans adultes pendant cinq ans et des mineurs trans à partir de leur
transition jusqu'à l'âge de 25 ans.
Donc, dans les 10 minutes qui me sont
allouées, j'aimerais cependant parler de certains points clés de notre mémoire
que vous avez reçu. En fait, il y a trois éléments principaux, dans le
projet de loi, qui nous concernent.
Le premier concerne l'interdiction pour les
femmes de plus de 40 ou 41 ans, selon la modalité, d'avoir leur traitement
de procréation assistée assuré par le gouvernement. Avec cet article, le
gouvernement rendrait l'accès à la parentalité de ces femmes très difficile. De
manière générale, nous sommes en accord avec le principe voulant que les
interventions médicales présentant un taux de succès limité ne soient pas
couvertes par des fonds publics et aussi le fait que toute procédure mettant
potentiellement en danger la vie d'un enfant à naître soit interdite.
La fertilité des femmes connaît un déclin
évident avec l'âge. Ceci dit, le niveau de fertilité de chaque femme dépend
d'un grand nombre de facteurs, et son âge ne constitue qu'un de ces facteurs.
C'est la raison pour laquelle nous
connaissons tous des femmes âgées de 42 ans, voire davantage, qui ont
conçu et donné naissance à des enfants en santé, parfois même sans recours à la procréation assistée. Nous
estimons donc que les femmes de 41 ans et plus devraient pouvoir
être évaluées de façon holistique par leur médecin spécialiste et que l'accès
aux inséminations et à la fécondation in vitro devrait être permis dans les cas
où la situation de santé et le potentiel de fertilité de la femme sont
considérés comme raisonnablement prometteurs.
Nous considérons donc que l'exclusion
systématique des femmes âgées de 41 ans et plus constitue une
discrimination médicalement et éthiquement non justifiable et doit donc être
enlevée du projet de loi.
Le deuxième élément qui les concerne est
l'invisibilité de la gestation pour autrui dans ce projet de loi. Au Québec,
l'article 541 du Code civil souligne la nullité des contrats entre
gestatrice et parents. En dépit de ce manque d'encadrement, la gestation pour
autrui est complètement légale et la pratique est tellement commune au Québec
qu'on ne peut l'ignorer. La popularité de cette pratique dans la province est
illustrée avec le dépliant que je vous ai soumis en
annexe 1 de notre mémoire. Ce document provient du centre de reproduction
de McGill, l'une des plus grandes cliniques
de fertilité au Canada, basé à Montréal. Et puis le document explique comment
procéder pour fonder une famille avec la gestation pour autrui avec
l'aide de leur clinique.
Nous attendons
depuis 2016 qu'on se penche sur la révision du droit familial, incluant la
situation de la gestation pour autrui. Profitant du momentum de la campagne
électorale de 2018 pour ramener la question de la réforme du droit familial à
l'avant-scène politique, la Faculté de droit de l'Université de Montréal a
organisé, en septembre 2018, un débat
entre les représentants des quatre principaux partis politiques. Il y
avait M. Simon Jolin-Barette, de la CAQ, Mme Véronique Hivon,
du Parti québécois, M. Marc Tanguay, du Parti libéral, et Mme Ève
Torres, de Québec solidaire. Ce qui était clair — et puis j'étais présente — selon ces candidats des quatre partis
politiques, c'était la nécessité d'inclure la gestation pour autrui dans
cette réforme. Pour les hommes gais qui ont un projet parental, la gestation
pour autrui est la seule façon d'avoir un lien génétique avec leur enfant. Même
s'il ne s'agit probablement que d'une question de temps, la majorité des hommes
gais ne peuvent plus attendre.
• (10 h 30) •
Le projet de
loi n° 73 souligne l'importance d'aider les
personnes qui ont un projet parental et qui ont recours à la procréation
assistée. Ce projet de loi touche les couples hétérosexuels, les couples de lesbiennes
et les femmes célibataires. Cependant, pour
les couples d'hommes gais qui utilisent déjà ces services dans les cliniques du
Québec, ce serait injuste, voire même
discriminatoire, de ne pas donner accès à la même aide financière qui couvre
tous les autres Québécois et Québécoises.
Finalement, dans
l'article 34.7, le gouvernement propose que, «selon l'indication médicale,
un maximum de six inséminations artificielles» soient assurées. Cette assurance
couvre la visite, le lavage spermatique, les actes et services connectés, les
médicaments oraux ou injectables, et six paillettes de sperme provenant d'un
conjoint ou d'un donneur. Pour les
lesbiennes, qu'elles soient en couple ou célibataires, ces dispositions
constituent une aide considérable dans
la mesure où les frais liés aux inséminations, et particulièrement le coût des
paillettes de sperme, sont prohibitifs. La couverture par la RAMQ des
inséminations avec paillettes de sperme permet aux lesbiennes et aux femmes
célibataires fertiles de ne pas devoir recourir immédiatement à des traitements
de fécondation in vitro quand les inséminations simples sont conseillées
comme traitement de première intention.
Les cliniques de
fertilité, au Québec et ailleurs au Canada, utilisent de plus en plus des
banques de sperme américaines qui sont agrégées. La Clinique OVO utilise
Outreach Health Services, qui est un distributeur canadien de la banque de sperme Xytex, aux États-Unis. En
plus, on recommande Outreach Health Services, Can-Am Cryoservices et
Repromed, qui utilisent majoritairement des banques américaines conformes aux
normes de Santé Canada.
De plus en plus, les
membres de la communauté LGBT ainsi que notre société en général réalisent
l'importance de permettre à leurs enfants d'accéder à des informations sur
leurs origines. On a vu l'évidence de cette valeur
fondamentale avec l'adoption, en 2018, de la Loi modifiant le Code civil et
d'autres dispositions législatives en matière d'adoption. Cette loi
modifie certaines règles de confidentialité entourant l'identité des personnes
adoptées et des parents d'origine ayant
donné un enfant à en adoption. L'idée était particulièrement de donner aux
enfants adoptés la possibilité d'obtenir des informations sur leurs
antécédents.
Dans la même veine,
les programmes d'identité ouverte offerts par les banques de sperme et
d'ovules, ce qu'on appelle les donneurs «open ID», permettent aux enfants issus
d'un donneur de le contacter une fois qu'ils ou elles ont atteint l'âge adulte. La banque peut aussi prendre contact
avec le donneur au nom de l'enfant, sans lui divulguer directement les coordonnées. Les enfants issus
d'un donneur sont libres de choisir de recevoir ou pas des informations
à son sujet et de prendre contact ou pas avec le donneur.
Le projet de loi
n° 73 parle de la couverture, par la RAMQ, des paillettes de sperme en
général. Nous croyons que c'est très important de souligner que cette
couverture doit inclure toutes les paillettes de sperme et en particulier les
paillettes venant des donneurs à identité ouverte, car c'est dans l'intérêt des
futurs enfants d'avoir accès à cette
information, si l'enfant le désire. Cette recommandation est incluse aussi dans
le rapport sur la procréation assistée, de la Commissaire à la santé et
au bien-être, publié en 2014, par M. Robert Sirois.
En conclusion, même
si le projet de loi part d'excellentes intentions et comporte de nombreux
aspects positifs, il nous apparaît qu'il doit être clarifié à plusieurs aspects
pour bien représenter les intérêts des personnes des minorités sexuelles et de
genre. Merci de votre attention.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie pour votre exposé, madame. Je vais demander le
consentement pour poursuivre les travaux au-delà de l'heure prévue après
la dernière présentation. Consentement? Merci.
Nous allons
maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
Vous disposez de 16 min 30 s.
M. Carmant :
Merci. Bonjour, madame. Merci d'être présente ce matin. Merci de votre exposé
également.
Mme Greenbaum
(Mona) : Merci beaucoup.
M. Carmant :
Juste pour vous donner une idée de notre intention, c'était vraiment de pouvoir
permettre entre à peu près 3 000 à
3 500 cycles par année dans un système public et gratuit. Ce qu'on a
fait, c'est qu'on a décidé d'utiliser des balises cliniques pour en
arriver à une estimation relativement fiable de ce qu'allait être la demande versus d'autres juridictions où ils ont préféré
tout simplement utiliser un niveau à partir duquel on ne rembourserait plus.
Donc, je comprends
les certains défis que vous avez mentionnés, principalement celui de l'âge,
mais c'est probablement celui qui facilite le plus le contrôle. Puis on a des
données du Collège des médecins qui montrent qu'après
l'âge de 42 ans, là, les taux de succès sont en bas de 5 %. Et on
sait que le Commissaire au bien-être et à la santé nous avait également dit
que... suggérait que, pour que le programme soit public, il fallait au moins
qu'il ait une efficacité de plus de 5 % à 10 %.
Donc, tu sais, dans
le contexte, vous, est-ce que vous croyez que ce serait une meilleure solution
de tout simplement mettre un plafond aléatoire en permettant à des gens qui ont
peu de chances de succès ou c'est mieux d'utiliser des critères cliniques,
comme on sait vraiment... notre ministère a vraiment travaillé fort pour
élaborer ces critères-là? J'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme Greenbaum
(Mona) : Oui. En fait, ce que j'entends, là, sur l'idée, c'est
qu'après 42 ans il y a un taux qui est
en bas de 5 %. Mais en fait le
projet de loi parle des femmes qui ont moins de 41 ans, donc il y a une
différence entre, comme, 40 ans versus 42 ans. Donc, pour
certaines femmes, il y a vraiment possibilité, au début des années... au début
de quarantaine, pour tomber enceinte. Et puis moi, je connais plusieurs femmes
comme ça qui sont tombées enceintes à l'âge de 41 ans ou 42 ans.
Donc, je suggère que
ça soit sur une base de «first come, first serve», où il y a un plafond, mais
qu'on monte l'âge un peu plus. Parce que, comme, je comprends que peut-être à
partir de 43 ans le taux de succès est beaucoup plus bas mais il y a,
comme... entre 43 ans et 40 ans, il y a un petit écart, donc
peut-être on peut couvrir aussi ces femmes-là qui ont 41 ans ou
42 ans. Puis aussi il y a une autre chose à garder en tête, c'est qu'il y
a des différences, en termes de taux de succès, pour les femmes qui utilisent
leurs propres ovules versus les femmes qui reçoivent des dons d'ovules d'une
femme plus jeune. Et puis, dans ça aussi, le taux de succès peut être élevé.
Donc, nous, on
considère que ça serait intéressant que les médecins vont, avec toute leur
expertise... vont être capables de
dire : Ça, ça vaut la peine ou non, au lieu de juste arbitrairement mettre
ça à des femmes de plus que 40 ans.
M. Carmant :
O.K. Mais vous avez bien compris que le projet, il dit que la stimulation
jusqu'à 41 ans puis l'implantation d'embryon jusqu'à 42 ans... Vous
avez bien compris ça?
Mme Greenbaum
(Mona) : Mais de ce que j'ai compris, la façon que c'est écrit dans la
loi donne l'idée que c'est une personne qui a 40 ans plus 364 jours,
quelque chose comme ça. Mais, de la façon que c'est exprimé dans le projet de
loi, pour moi, mon interprétation, c'est que, dès qu'on a 41 ans, on n'est
pas éligible. Mais peut-être que j'ai mal
compris la façon que c'est exprimé. Mais, quand j'ai parlé à votre attaché
politique, ça, c'est ce qu'il m'a expliqué.
M.
Carmant : O.K. Il y a quand même une année pour le transfert
d'embryon, de plus, là, donc c'est vraiment 42 ans, la limite, là.
Mme Greenbaum
(Mona) : Donc, si j'ai bien compris, une femme de 42 ans est
toujours couverte?
M. Carmant :
Pour le transfert d'embryon, oui.
Mme Greenbaum
(Mona) : O.K. O.K. Alors, ça, c'est bien de savoir, parce que ce n'est
pas clair dans la façon que c'est
écrit qu'on parle de 40 ans et plusieurs jours, mais
avant le 40e anniversaire. Donc, peut-être que c'est une question de clarification. Excusez-moi, il y a un énorme écho quand je
parle, donc c'est difficile pour moi de concentrer.
• (10 h 40) •
M.
Carmant : ...totalement
excusée, ce n'est pas les conditions optimales, malheureusement. Aussi, je
voulais savoir, au niveau des couples femme-femme versus femme seule,
vous étiez à l'aise avec le fait que ce soit un projet de... tu sais, un projet
de procréation familial? Est-ce qu'il y avait des enjeux, pour vous, à ce
niveau-là?
Mme Greenbaum
(Mona) : Qu'une femme célibataire veuille fonder une famille?
M. Carmant :
Oui, versus un projet pour un couple femme-femme.
Mme Greenbaum
(Mona) : Mais moi, je pense qu'il ne doit y avoir aucune différence du
tout. Il n'y a aucune indication qu'une
personne célibataire va avoir un enfant qui va avoir des problèmes, donc... Et
puis je pense que, même, ce serait contre les droits de la personne d'exclure,
juste comme ça, des personnes célibataires. En fait, si je me souviens
bien, en 2013 ou 2014, avec le rapport de M. Robert Sirois, il y a eu un avis
juridique de l'Université de Sherbrooke qui a regardé la question des couples
de lesbiennes et des femmes célibataires, si ça serait possible de les exclure,
puis, en termes de la Charte des droits et libertés, c'était contre la charte.
Donc, ce n'est vraiment même pas une chose qu'on peut envisager de faire cette
distinction.
M. Carmant :
Je veux juste être sûr de bien comprendre, là, pour clore le débat du début.
Donc, vous, vous seriez à l'aise avec un plafond sur le nombre de procréations
par année, plutôt que sur une base clinique?
Mme Greenbaum
(Mona) : Mais je comprends la nécessité, oui. Donc, je comprends qu'on
essaie de mettre des balises pour avoir un
programme qui est soutenable, d'après moi, ça fait du sens. Mais que la balise
exclue certaines personnes a priori, sans avoir évalué leur... je trouve
ça discriminatoire.
M.
Carmant : D'accord. Merci. Pouvez-vous me dire, dans la communauté
LGBTQ, quel est le pourcentage ou quelle est
la proportion de gens qui ont recours à la procréation médicalement assistée?
Avez-vous ces données-là?
Mme Greenbaum
(Mona) : Mais... Oui. Je ne sais pas le chiffre exact, ça, je n'ai vraiment
aucune idée, et puis... Mais c'est même très difficile de savoir combien de
personnes il y a dans notre communauté. Ça dépend de la définition, ça dépend
de qui pose la question. Donc, on ne sait pas, comme, par exemple, pour les
personnes gaies, est-ce que c'est 5 %, 10 %, 15 %, on n'a
vraiment pas un chiffre. Mais je peux vous dire que c'est plus présent dans la
communauté des personnes LGBT que dans la société en général. Mais par contre,
quand on parle de nombre absolu, il y a beaucoup moins de personnes LGBT dans
le système de procréation assistée parce qu'on est moins nombreux. Donc, c'est
sûr que, proportionnellement, c'est plus élevé dans notre communauté, mais en
termes de nombre absolu, si vous allez dans une salle d'attente dans une
clinique de fertilité, il y a beaucoup plus de personnes hétérosexuelles que
des personnes LGBT.
M. Carmant :
Je comprends. Et par rapport au... j'avais une question également sur le don de
sperme. Vous avez mentionné un enjeu en ce qui a trait... les banques anonymes
versus les banques dont on connaît le donneur. Nous, on... moi, je pense qu'on
n'a aucun enjeu là-dessus, là, quant à la restriction, je pense que les deux
devraient être permis et remboursés. Vous, c'était quoi, l'enjeu que vous
voyiez par rapport à cette... Vous voulez qu'on n'utilise plus du tout les
banques anonymes?
Mme Greenbaum
(Mona) : Mais non, ce n'est pas ça du tout. Mais en fait, quand les
lois ne définissent pas bien les choses, nous, on a eu souvent l'expérience
que, quand on met les règlements en place, après l'adoption d'une loi, qu'il y
a certaines choses qui sont oubliées. Donc, une clinique peut décider
aléatoirement qu'on va seulement accepter la couverture des paillettes de
sperme qui proviennent des donneurs anonymes. Et nous, on veut que toutes les
paillettes de sperme soient incluses dans ça, puis pas juste les donneurs anonymes,
parce que c'est...
De plus en plus, on
reconnaît dans note société que c'est important pour nos enfants d'avoir accès
à leurs origines, à leurs antécédents. Et puis c'est très varié, il y a
certaines personnes, certains futurs parents qui vont choisir des donneurs
anonymes, il y a d'autres qui vont vouloir choisir des donneurs à identité
ouverte. Ce que nous, on propose est dans l'intérêt de l'enfant, et puis je
pense qu'il y a assez de recherche sur ça.
Donc, c'est important
que le choix est disponible, parce que, s'il y a une couverture seulement d'un
type de paillette de sperme, c'est sûr que, pour des raisons financières, il y
a des personnes qui vont être poussées dans la direction de prendre la
gratuité, et puis ils vont faire peut-être des choix qui ne sont pas dans le
meilleur intérêt de leur futur enfant.
M.
Carmant : D'accord.
Un autre point que vous avez soulevé, c'était les couples homosexuels
homme-homme et les hommes seuls également. C'est sûr que c'est quelque
chose qui était important pour nous. Et je tiens à vous dire que mon collègue
Simon Jolin-Barrette, il travaille toujours là-dessus. Idéalement, j'aurais
aimé qu'il passe avant moi. Mais quel est votre point de vue par rapport à ça
exactement, là, au niveau légal? Parce qu'il y a surtout des aspects légaux,
là, qui me... qui est un souci pour nous à ce stade-ci, là.
Mme Greenbaum
(Mona) : Oui. Mais comme j'ai mentionné, c'est une pratique qui est complètement
légale et puis c'est très commun. Comme, j'ai mis en annexe de notre mémoire,
là, le dépliant qui est sur le site de... le CUSM, le Centre de la reproduction
de McGill, qui explique comment procéder avec la gestation pour autrui. Donc, ce n'est pas quelque chose caché ou qu'on
fait sous la table, c'est vraiment une pratique qui se fait. Il n'y a rien
d'illégal dans ça.
Et puis on procède,
en plus, avec les avocats pour mettre des contrats en place. C'est sûr que ces
contrats ne sont pas solides, parce qu'ils montrent seulement l'intention, mais
pas comme... Et puis c'était, comme... c'est des choses qu'on a vues devant les tribunaux, ça oblige les couples, qu'ils
soient gais ou hétéros, de faire ce qu'on appelle une adoption par consentement spécial, pour reconnaître
le deuxième parent. C'est compliqué, ça ne marche pas d'une façon
«smooth», au Québec, mais ce n'est pas illégal, et puis c'est une pratique qui
existe.
Donc, le message qui
sera envoyé à la population, c'est que les personnes... les couples de
lesbiennes, les couples hétérosexuels, les femmes célibataires, tout le monde
va bénéficier de cette loi, mais les couples d'hommes gais vont être mis à
côté. Puis je comprends que M. Simon Jolin-Barrette est en train de
travailler sur le projet de loi et puis que
ça va sortir bientôt, mais malheureusement j'entends la même histoire depuis 2016 : on
est toujours au point de
déposer le projet de loi, et ça n'arrive jamais. Et puis là on est en plus
dans un contexte de pandémie, donc c'est possible que, même si...
Le plus récent que
j'ai entendu, c'est que ça va être en 2021, mais, avec la pandémie, peut-être
que ça va être poussé à plus tard. Et puis,
c'est ça, comme, après quatre ans d'attente, les hommes gais commencent à
perdre patience, et puis le signal qui est envoyé avec ce projet de loi,
c'est qu'ils vont être discriminés.
M. Carmant :
O.K. Donc, nous, on a... à cause de ce vide juridique de filiation, on est un
peu, donc... Et on ne veut pas non plus
retarder notre projet, qu'on veut pousser de l'avant le plus rapidement
possible. Mais, merci, ça clarifie les choses pour moi, là. C'est encore
cette impression que ça laisse, là. Je comprends.
Est-ce qu'il y a des
enjeux, pour vous, par rapport au consentement et le projet qu'on vient de déposer?
Mme Greenbaum
(Mona) : Consentement en termes de...
M. Carmant :
Bien, le consentement par rapport... soit les dons de sperme ou la procédure en
général.
Mme Greenbaum (Mona) : Mais je pense
qu'il y a déjà des choses... Ça, c'est une question que vous devez poser aux
cliniques, les personnes qui vont représenter les cliniques de fertilité. Parce
que je sais qu'il y a des formulaires de consentement. C'est sûr que ce qu'on
revendique depuis toujours, c'est d'avoir les taux de succès, les impacts à
court terme, à moyen terme, à long terme sur les personnes qui vont recevoir
les traitements et puis sur leurs enfants, après leur naissance. C'est des informations
qui sont difficilement accessibles, à moins qu'on ait accès aux journaux
médicaux.
Donc, c'est sûr que, parfois, je crois que ça
peut être un consentement qui n'est pas à 100 % éclairé, mais je sais
qu'il y a déjà des balises en place dans les cliniques. Donc, ça, c'est une
question que je pense que vous devez poser aux différentes... J'ai vu que vous
avez une panoplie de plans de cliniques de fertilité qu'ils vont présenter dans
les prochaines... déjà.
Donc, je pense que c'est à eux... Est-ce
qu'il y a eu des enjeux spécifiques
qui ont été soulevés?
M.
Carmant : Pas encore. Mais moi,
j'aurais peut-être une dernière question pour vous. On est
intéressés à mettre un programme de suivi de la PMA, tant au niveau
grossesse que pour les jeunes qui vont naître du programme. Est-ce qu'il y a des enjeux de votre côté à ce
niveau-là?
Mme Greenbaum (Mona) : Mais c'est quelque
chose qu'on demande depuis toujours, donc je suis très contente d'entendre ça.
• (10 h 50) •
M. Carmant : À moins que quelqu'un
ait une autre question de mon côté, on est prêts à passer la parole.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, merci, M. le ministre. Maintenant, je cède la
parole à la députée de Maurice-Richard pour
11 minutes.
Mme Montpetit : Je vous remercie
beaucoup, M. le Président. Bonjour. J'espère que vous m'entendez bien. On a un
petit défi logistique, aujourd'hui, de... Mais nous, on vous entend somme toute
assez bien, malgré l'écho auquel vous faites référence. Merci, merci beaucoup pour
le mémoire que vous nous avez soumis il y a un moment déjà. C'est très
apprécié, ça nous permet de clarifier votre appréciation du projet de loi.
J'aimerais revenir sur différents points, puis
le ministre en a abordé déjà plusieurs qui ont permis de clarifier votre
position par rapport à certains éléments. Je me permettrai peut-être un seul
commentaire sur un élément qu'il a souligné quand il mentionne qu'il y a un
certain vide juridique par rapport à la question... Vous souleviez l'enjeu
d'équité par rapport, justement, aux couples homosexuels homme-homme. Le
ministre soulignait le fait qu'il y a un vide juridique. Bien respectueusement,
je pense que c'est à lui de clarifier ces questions-là et de demander des avis
juridiques en ce sens. Et, s'il en a, j'imagine qu'il n'y a plus de vide
juridique et qu'il pourra instruire la commission de ceux-ci, parce que c'est
certain que ça va faire partie des échanges qui auront lieu.
Et moi, j'aimerais ça vous entendre davantage,
justement, sur la question de l'équité. Vous avez fait référence au fait que
c'est un... Je ne veux pas mal vous citer, mais je crois que, dans votre
présentation, vous avez utilisé le mot «discriminatoire», que c'est un
projet de loi qui est discriminatoire ou discriminant pour les hommes, les
couples homosexuels. Donc, j'aimerais ça vous entendre davantage sur cet
enjeu-là.
Mme Greenbaum (Mona) : O.K. Mais
d'abord j'aimerais juste souligner que ce n'est pas juste les couples d'hommes
gais qui font recours à la gestation pour autrui. En termes, il y a beaucoup
d'hétérosexuels qui utilisent ces services aussi. Donc, c'est sûr que, pour les
hommes gais, c'est une des seules options pour fonder une famille. À part de
ça, il y a l'adoption, on peut adopter des enfants nés ou résidant au Québec. À
l'international, pour nous, très difficile parce que ça dépend des lois des
pays d'origine. Donc, la GPA, c'est important pour notre communauté encore,
même, de souligner qu'en termes de nombre absolu ce n'est pas juste les hommes
gais. On est beaucoup moins nombreux que les personnes hétérosexuelles qui font
la gestation pour autrui.
En termes de vide juridique, mais oui, je suis
d'accord d'un sens que, oui, il n'y a pas l'encadrement légal, ça manque. Mais,
de l'autre côté, ce n'est pas illégal. Donc, je veux souligner qu'il y a une
grande différence entre un manque d'encadrement, en fait, comme... La seule
chance, c'est que les contrats ne sont pas légalement reconnus. Mais ce n'est pas illégal, et puis, à cause de ça,
c'est une pratique qui se fait au Québec et puis qui se fait ouvertement
et fréquemment. Donc, on le fait quand même et puis on reconnaît les parents,
pas par un contrat mais par l'adoption par
consentement spécial. Donc, il y a... le parent biologique est reconnu
légalement à la naissance. La femme qui porte l'enfant doit renoncer à sa
parentalité, puis le deuxième parent doit ajouter sa filiation. Donc, c'est ce
qu'on appelle une adoption par consentement spécial parce que le
conjoint va consentir que son conjoint devienne le deuxième parent reconnu sur
l'acte de naissance. Donc, ça se fait. On contourne ce manque d'encadrement par
d'autres pratiques qui sont complètement encadrées.
Puis, comme, si j'avais comme une garantie que
le projet de loi sur la réforme du droit familial sera adopté en 2021, je
dirais : O.K., on peut attendre. Mais j'entends la même histoire depuis
2016, qu'on va avoir comme un projet de loi, et puis finalement ça tombe
toujours à l'eau. Et puis, entre-temps, il y a des hommes gais qui souffrent à
cause de ça. Donc, oui, c'est une discrimination. Et puis, à la fin, même si on
adopte le projet de loi sur la réforme du droit familial au début de 2021, ce
qui serait impossible, mais même si on le faisait, on sera obligés de retourner
à une loi, au ministère de la Santé, pour encadrer les frais avec la RAMQ.
Donc, c'est comme... On a l'opportunité maintenant, donc
pourquoi ne pas le faire, ce n'est pas illégal, le faire tout de suite. Et
puis, quand on va avoir, finalement, cet encadrement légal pour le GPA, au
Québec, pourquoi pas, donc ça va être déjà prêt avec la RAMQ, et puis on va
aller de l'avant, c'est clair. Les quatre partis politiques sont d'accord.
Comme
j'ai mentionné, il y a eu comme un panel organisé par l'Université de Montréal,
et puis les quatre partis politiques ont prononcé en faveur de cet
encadrement, au Conseil du statut de la femme... prononce en faveur d'un encadrement. Donc, c'est vraiment... c'est
inconcevable. On va l'avoir, mais pourquoi ne pas donner l'aide aux hommes
gais maintenant et puis aux couples hétérosexuels aussi qui utilisent ces mêmes
services?
Mme
Montpetit : Je vous remercie, Mme Greenbaum, c'est très clair comme réponse,
puis je pense que vous... Les consultations, dans ce genre de projet de
loi, servent exactement à ce genre de propos, à ce genre de réflexion là. Et justement je suis convaincue que le ministre,
qui est entouré d'une armée peut-être vaste... mais certainement une vaste
équipe de juristes, peut faire preuve de
réflexion en ce sens et voir s'il n'y a pas moyen de donner un autre tour de
roue et retravailler en ce sens.
Parce
qu'effectivement régler un problème par un autre projet de loi qui... on ne
sait pas ni quand il sera déposé, ni
quand il sera adopté, ni surtout sa finalité, c'est toujours... C'est toujours
fragile, je pense, de présumer de la fragilité d'un projet de loi qu'on ne porte pas comme ministre. Je pense qu'il
faut essayer de voir s'il n'y a pas moyen... si ça n'a pas déjà été réfléchi — peut-être que oui — mais s'il n'y a pas moyen, justement, de
bonifier encore davantage le présent projet de loi sur lequel on
travaille, à voir si ça ne pourrait pas être revu, modifié, bonifié en ce sens.
Une autre question.
Vous avez fait référence à la question de l'âge. Puis je vois le temps qui
file, là, si on est toujours... il n'en
reste pas beaucoup, mais je voudrais
vous entendre sur la question. Justement, le projet de loi inclut... bien, inclut ou exclut, là, une façon de le
voir... mais inclut jusqu'à... les femmes jusqu'à 41 ans. Vous faisiez
référence, dans votre mémoire,
justement, de cet élément‑là, de l'absence de remboursement des
activités de procréation pour les femmes de plus de... C'est 41 ans
moins un jour, si je ne me trompe pas, ou 41 moins un jour, c'est bien ça, ou
42?
Mme Greenbaum
(Mona) : Oui.
Mme
Montpetit : Exactement. Donc, je voudrais vous entendre davantage sur
cet élément‑là également, à quel point c'est un enjeu pour la communauté
LGBTQ.
Mme Greenbaum
(Mona) : Oui, mais si je peux, comme, adresser particulièrement
comment ça touche la communauté LGBTQ+, c'est que, nous, les enfants, les bébés
n'arrivent pas spontanément, puis ce n'est jamais des accidents non plus, comme
il faut qu'on planifie. Et puis récemment il faut aussi voir comme une
accumulation d'argent pour être capable d'aller de l'avant. Donc, à cause de
ça, comme par exemple, avec la population en général on a toujours des personnes qui vont fonder leur famille à un âge plus
tardif, parce que ce n'est pas... Aussi, il y a toute la pression, la société qui dit que non, il ne faut
pas faire des enfants si vous êtes homosexuels. Donc, tout ça retarde le
processus.
Donc, c'est assez
fréquent, mais c'est de plus en plus présent dans le monde hétérosexuel, aussi,
pour les femmes qui sont sur le marché du travail, tout ça, mais comme pour la
communauté LGBT, c'est encore plus. Donc, on
va fonder nos familles plus tardivement. Donc, c'est la raison que ça nous
concerne que, comme le libellé, comme, 41 ans moins un jour, donc,
pour moi, ça veut dire que, si on a 41 ans, on n'est pas éligible. Donc,
je ne sais pas, comme je n'ai jamais lu de
cette façon d'exprimer la chose, mais, pour moi, quand j'entends 41 moins un
jour, pour moi, ça dit que c'est
jusqu'à 40 ans, puis après ça on n'est pas éligible. Mais il y a beaucoup
des femmes lesbiennes et puis, en
général, des femmes célibataires, qu'elles soient lesbiennes ou non, qui vont
vouloir fonder leur famille plus tard dans leur vie et qui peuvent être
en bonne santé, en bonne forme... qui peut avoir un haut taux de fertilité
aussi.
Donc,
c'est ça qu'on pense, que vraiment, comme, les spécialistes doivent être
capables d'évaluer ça eux-mêmes ou elles-mêmes et puis selon la situation de la
femme. Parce que c'est comme... Pour nous encore, comme j'ai mentionné
avec le GPA, pour les femmes lesbiennes, ce n'est pas juste comme ça qu'on va
tomber enceinte. On doit utiliser ces services
de procréation assistée et puis, encore, on est limitées dans nos choix. On ne
peut pas faire l'adoption d'un enfant en
Chine ou dans un autre pays, parce que ces pays‑là discriminent contre nous.
Donc, on est vraiment dépendants de la procréation assistée ici, au Québec.
Donc,
c'est ça qu'on pense, que ça serait plus équitable que la situation de santé
soit évaluée. Puis je comprends, O.K.,
il y a des balises, donc là... Et puis les cliniques mettent déjà leurs balises, hein? Comme, si vous allez sur les
sites, les cliniques ont déjà
mentionné leurs balises, ça varie d'une ou l'autre, mais c'est basé sur la
science et puis l'interprétation
des résultats scientifiques en termes de qu'est-ce qui est faisable ou non.
Puis ce n'est pas
dans l'intérêt de ces praticiens de prendre une personne qui n'est pas fertile,
où que ça va créer des problèmes de santé.
Ce n'est pas dans leur intérêt, ça va juste regarder mal sur leur clinique.
Donc, pourquoi est-ce qu'eux autres ils ont des balises qui sont plus
élevées? Et puis... mais, dans le projet de loi, c'est juste 40-41 ou 41 moins
un jour...
• (11 heures) •
Le Président (M. Provençal)
: Madame, je suis obligé de vous interrompre, le temps est terminé pour
l'échange avec l'opposition
officielle. Je vous remercie. Je cède maintenant la parole à la députée de
Sherbrooke. Vous disposez de 2 min 45 s.
Mme Labrie :
Bonjour, Mme Greenbaum. Je veux y aller aussi sur la question de la
gestation pour autrui. Moi, je ne sais pas à quel point c'est possible
d'inclure ça dans le projet de loi sans que la réforme du droit de la famille
ait eu lieu, mais je veux tester des possibilités avec vous.
Est-ce
que vous pensez, par exemple, qu'on devrait prévoir un article qui entrerait en
vigueur après que la pratique soit encadrée par la réforme du droit de la
famille? Ou est-ce que vous pensez que les détails des services assurés devraient être prévus dans un règlement
pour qu'on puisse les mettre à jour plus facilement, par exemple, après
la réforme du droit de famille ou après des nouveaux traitements qui pourraient
être développés? Ou vous pensez qu'on doit
l'inclure... qu'on peut déjà l'inclure tout de suite, là, dans le projet de
loi, même si ça n'a pas été encadré par le droit de la famille?
Mme Greenbaum
(Mona) : Mais, écoutez, encore, comme une pratique qui est légale et
puis qui se fait, pour moi, c'est comme... C'est faux de dire que ce n'est pas
encadré du tout. Il y a un certain encadrement. C'est un peu comme... ce n'est
pas l'idéal, mais ce n'est pas comme complètement pas encadré. Moi, je pense
que ça doit être couvert. Mais, au moins, donc, comme... peut-être comme
solution entre les deux, c'est d'avoir une disposition que ça entre en vigueur
immédiatement, parce que ça... Mais, encore, comme j'ai dit, je commence à être
un peu comme cynique, dans tout ça, parce que ça fait déjà quatre ans,
presque cinq ans qu'on attend ce projet de loi sur la réforme du droit
familial.
J'ai déjà entendu,
depuis 2016, que ça va être dans deux parties, il y aura comme une
partie sur la filiation et l'autre sur la
conjugalité. La partie filiation, qui inclut la gestation pour autrui, est plus
facile, c'est plus «straightforward», et puis l'élément sur la gestation
pour autrui comme... Il y a d'autres enjeux, peut-être qui sont plus
compliqués, mais il me semble que la portion
sur la gestation pour autrui, c'est l'élément le moins compliqué parce que tout
le monde est d'accord, les
quatre partis politiques sont d'accord qu'il faut comme... il faut
mettre... il faut reconnaître ces contrats-là.
Donc, pour moi, ce serait bien de le mettre en place aussi.
Ça fait que qu'est-ce
qui va arriver sur le terrain? C'est des couples qui vont arriver dans les
cliniques avec leur gestatrice, et puis on
va leur dire : Non, vous n'êtes pas éligibles. Donc, pour moi, c'est
comme... c'est le signe, c'est un manque de reconnaissance d'une façon de
fonder nos familles, qui fait partie de la réalité de la communauté LGBT.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député des
Îles-de-la-Madeleine. Vous disposez de 2 min 45 s.
M.
Arseneau : Merci, M. le Président. Merci, Mme Greenbaum, pour la
présentation. Et je vais également y aller sur le même thème, parce que
je trouve effectivement que... Lorsqu'on lit votre mémoire, vous parlez d'une
injustice envers les couples d'hommes gais, mais en réalité il s'agit
véritablement d'une approche discriminatoire, puisque, si on fait abstraction du fait que le Code civil
souligne la nullité des contrats, on a un nouveau programme qu'on met en
place et qui exclurait une catégorie de gens
qui ont le droit ou qui devraient avoir les mêmes droits, qu'ils soient... peu
importe qu'ils soient hétérosexuels ou
homosexuels, le droit, donc, d'avoir à la fois un enfant, un projet parental et
un lien génétique avec leur enfant. C'est bien ça, votre argumentaire?
Mme Greenbaum
(Mona) : Oui. Mais, c'est ça, je pense que je comprends la logique de
M. Carmant, qu'on n'a pas encore mis la
réforme du droit familial en place. Mais je pense que c'est très important
aussi de reconnaître que ça existe déjà, la gestation pour autrui, et
que ce n'est pas illégal.
Donc, ça peut être
comme... ça va envoyer un message très positif à la communauté LGBT d'inclure,
comme, cette couverture, qui ne va pas, comme, comprendre, comme, des milliers
de personnes, hein, on parle de... Je ne
sais pas, je n'ai pas des chiffres, mais ce n'est pas énorme, le nombre de
personnes qui vont faire la gestation pour autrui au Québec. Mais ça
envoie un message fort qu'on reconnaît que cette façon de fonder une famille
est valide et qu'on soutient cette communauté dans leur désir... ces hommes
gais, dans leur désir d'avoir des enfants.
M. Arseneau :
Tout à fait. Et il y a la question, en fait, d'une correction au Code civil qui
tarde à venir. Vous dites que c'est
certainement une question de temps, mais vous dites aussi que bien des hommes
gais ne peuvent pas attendre. Est-ce que vous avez des témoignages sur
une base régulière qui vous l'indiquent?
Mme Greenbaum
(Mona) : Mais oui, je vois ça, comme, chaque... À la coalition, chaque
six mois, on fait des ateliers pour les
futurs parents, et donc je rencontre beaucoup de futurs parents qui sont des
hommes gais, et puis le sujet, malheureusement, c'est l'argent, comme,
parce que ça coûte cher, la gestation pour autrui, et puis ça rend ça impossible.
Et puis c'est sûr
qu'il y a beaucoup de ces hommes... vont vouloir peut-être, comme autre option,
adopter des enfants. Mais l'adoption, dans
le programme de la banque mixte des centres jeunesses du Québec, il y a
quelques centaines d'enfants par année, pour une population de plus de
huit millions, qui sont ou qui vont devenir adoptables. Ce n'est pas comme
il y a des milliers des enfants, c'est juste un très petit nombre. Donc, on
peut être sur la liste d'attente pendant 10, 15 ans pour avoir un placement,
donc les options sont très limitées pour les hommes gais.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci beaucoup, madame. Je
suis obligé de vous interrompre. Je remercie la coalition des familles LBGTQ+
pour sa contribution aux travaux de la commission.
Je vais suspendre les
travaux quelques instants pour que nous puissions nous ajuster techniquement
pour recevoir le prochain groupe. Merci. Merci beaucoup de votre contribution,
madame.
Mme Greenbaum
(Mona) : Merci de votre invitation. Bonne journée.
(Suspension de la séance à 11 h 07)
(Reprise
à 11 h 13)
Le Président (M. Provençal)
: Je souhaite donc la bienvenue à la représentante de l'Association des pédiatres du Québec.
Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après
quoi nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission.
Je vous invite à vous présenter puis à commencer votre exposé. Vous avez
la parole, madame.
Association des pédiatres du
Québec (APQ)
(Visioconférence)
Mme Janvier
(Annie) : Bonjour. Je m'appelle Annie Janvier... Quand je parle, je
m'entends parler, ça fait que c'est assez compliqué. Mais, en tout cas, je vais parler en m'entendant parler. C'est comme s'il y avait un écho. Je m'appelle Annie
Janvier. Je suis pédiatre puis je suis clinicienne clinique à l'Université de Montréal et à Sainte-Justine. Et je présente le mémoire
au nom de l'APQ à la SNQ.
Nos
autres mémoires, en fait, de l'APQ-SNQ, traitaient essentiellement à sensibiliser le gouvernement à l'épidémie de grossesses multiples qu'il
y avait au Québec dans le temps. Dans le fond, un quart des bébés qui
naissaient de fertilisation in vitro allaient en néonatologie, car ils
étaient prématurés. Par la suite, on va vu une réduction des prématurés assez
importante et qui a amené une importante augmentation discrète de la qualité de
vie des enfants nés après la FIV d'à peu près
30 % à à peu près 5 %, qui
était dans les taux les plus bas au monde, parce qu'on balisait les
transferts d'embryon.
Par la suite, on a
réécrit un mémoire en 2013 pour, dans le fond, dire qu'il faudrait peut-être
d'autres balises que seulement le transfert d'un embryon, parce qu'il y avait
des coûts démesurés. Et il faut se souvenir des coûts de la PMA. Dans le fond, c'est les coûts des procédés
de fertilisation, mais c'est surtout, aussi, les coûts de santé des enfants
et des femmes. Et, si on avait compté ces coûts-là, lors du régime Barrette, on
aurait peut-être vu qu'on rentrait dans notre argent, parce qu'on sauvait
énormément de bébés qui n'allaient pas en néonatologie.
On a été tristes de
voir que, dans le fond, le programme fermait, en termes de pédiatres, et on
est... En fait, on applaudit le projet de
loi n° 73. Et il y a énormément de choses, dans le projet de loi, qui font
sens et qui vont permettre aux Québécois d'avoir des familles de manière
raisonnable, aussi, sans dépasser les coûts.
Je
me propose d'aller directement au résumé des recommandations, sans analyse des
problématiques, parce qu'on n'a pas beaucoup de temps. Notre mémoire est
vraiment basé sur trois choses, trois éléments principaux :
l'importance de transitionner
rapidement dans le système public; des considérations pédiatriques importantes;
et le contrôle de la qualité.
Ça fait que je vais
commencer par le résumé de nos recommandations. Comme principe directif de
transition vers le système
public : d'avoir des soins universels et équitables, dans le fond, qui peuvent être accédés par tout
le monde; de diminuer les conflits d'intérêts; de
réduire les coûts; d'homogénéiser les pratiques; d'encourager les bonnes
pratiques cliniques; puis la gestion responsable des embryons.
Ça
fait que, dans le fond, dans les recommandations qui vont vers la
transition vers le système public, on aurait un guichet unique géré par le système
public, qui gérerait aussi la liste d'attente, parce qu'on sait que la liste d'attente va être grande quand on va
ouvrir le programme. Des critères d'exclusion absolus et réversibles à toute PMA : absolus,
ça serait, par exemple, de la prison pour
violence criminelle contre les enfants, et réversibles, il y a
certains problèmes de santé qui peuvent être réversibles. De faire un
inventaire, aussi, de tous les embryons congelés dans les cliniques, avant le début du programme, et de prioriser le
transfert de ces embryons-là, dans le
fond, qui correspondent aux bonnes
pratiques cliniques. Donc, il y aurait...
on proposerait une période de transition, gérée par le public, de ne pas
compter les transferts d'embryons existants dans le programme de
remboursement. Dans le fond, ils ne compteraient pas dans le cycle, pour encourager que ces embryons
existants soient transférés. Il faudrait aussi considérer de prolonger la
période de financement du cycle, parce que, mettons, si une femme a quatre embryons,
elle ne peut pas se les faire transférer, les quatre, un à la suite de l'autre, en un an, puis faire
deux grossesses. De développer une banque de gamètes et d'embryons qui
serait, en fait, gérée par le public.
On
recommande aussi que la formation et la recherche, dans le fond, qui... aussi subventionnées par le public, se passent dans le système public. Et, avant
qu'on ferme le programme, 70 %
du programme se passait dans les cliniques privées et, dans le fond, nos
recommandations seraient que, dans les cinq prochaines années, 70 %
des traitements se passent dans le public et
30 % dans le privé. Donc, il faut développer rapidement les
infrastructures publiques, dont la clinique du CHUL, qui était en plan
depuis plusieurs années.
Le deuxième point
serait les considérations pédiatriques importantes. Selon nous, donc, le don de
gamètes, de connaître l'identité des donneurs; l'importance des diagnostics
préimplantatoires; et de nombreux enjeux éthiques qu'on n'a pas eu le temps
d'aborder aujourd'hui mais qui sont nombreux en PMA.
Et on recommanderait
de prioriser de préférence les gamètes issus de donneurs non anonymes et même,
si c'était possible, uniquement d'avoir des donneurs
non anonymes; de rembourser et d'encadrer le don d'ovules; de gérer les demandes de donneurs dirigés de manière
homogène; de rembourser complètement le diagnostic préimplantatoire, que
ça soit la FIV ou l'analyse génétique; et de faire aussi le suivi des
innovations en PMA. Donc, il y a beaucoup d'innovations qui sont faites dans le
privé, sans suivi des enfants ou des femmes, et il faudrait que ça fasse partie
d'un projet de recherche dans le système
public. On applaudit qu'il y ait un comité d'éthique provincial
interdisciplinaire qui va analyser les enjeux éthiques.
Dans le fond, le dernier point, c'est le
contrôle de qualité, qui est — en ce moment, dans les derniers
10 ans, ça s'est énormément développé en médecine — de
planifier quelque chose comme le projet de loi n° 73,
qui est très bien planifié, de le faire, et ensuite de
vérifier si ce qu'on pensait qui allait fonctionner fonctionne, et puis là,
ensuite, d'essayer de rectifier le tir quand il y a quelque chose qu'on avait
très bien planifié mais qu'il y a des gens qui ont été capables de contourner
le système puis qui font en sorte que ce qu'on pensait qui allait arriver
n'arrive pas. Donc, un contrôle de qualité avec une flexibilité et des balises
est très important. À notre avis, encadrer la stimulation ovarienne et les transferts de deux embryons,
aussi, pour viser un taux de grossesse multiples de moins de 10 %, et,
surtout, la création d'un registre de suivis numérisés, qui était déjà
recommandé, là, dans les années 2000, 2010, 2013, le Collège des médecins
l'a recommandé, mais qui n'existe toujours pas. Et, dans le fond, d'avoir une
responsabilité et une transparence du programme.
Donc, dans le fond, nos dernières
recommandations, c'est de redéfinir l'efficacité, c'est quoi, nous, nos buts en procréation assistée au Québec, les buts
québécois. Parce que les buts, dans la littérature de la fertilité, c'est
d'avoir une grossesse à 20 semaines. Nous, nos buts, dans le fond, ça
serait d'avoir la naissance unique d'un enfant en santé avec le moins de
risque possible pour sa mère. Ça, ça devrait être le but positif, et puis avec
des coûts raisonnables, bien entendu.
• (11 h 20) •
On recommanderait de pouvoir ajuster certaines
balises selon le suivi étroit du contrôle de la qualité. Il est possible qu'on
dise : Bien, peut-être que c'est mieux de mettre jusqu'à 40 ans, ou
jusqu'à 39, ou jusqu'à 42, selon l'argent qu'on a et selon la réussite du
programme. Aussi, de suivre les lignes directrices du Collège des médecins du
Québec, dans le fond, qui développeraient des processus décisionnels pour la
stimulation ovarienne et l'implantation de deux embryons.
Et, dans le fond, je vais terminer avec le
registre de suivis des enfants naissant à la suite d'une PMA, qui m'apparaît...
nous apparaît, l'APQ et la SNQ, quelque chose d'essentiel et d'incontournable.
Et il y a de nombreux spécialistes en développement qui ont déjà réfléchi à ce
registre provincial, depuis 10 ans, donc ça serait important de ne pas
réinventer la roue, ne pas recommencer un exercice complexe et coûteux puis,
dans le fond, de réduire les coûts et la
complexité de ce suivi-là pour les bâtir sur des systèmes qui existent. Donc,
intégrer des données déjà connues à
travers un «linkage», une numérisation de MED-ECHO, de RED, de CNN, du Canadian
Neonatal Network, du CNFUN, Follow-Up Network, et de
l'ABCdaire 18 mois qui est en train d'être déployé, au Québec, de
manière très importante — ils
font une numérisation du registre, parce qu'on voit que l'ABCdaire
18 mois, le pilote passe sur des pages faxées, ça ne marche plus de nos
jours — et
que la cogestion de ce registre-là soit faite par des spécialistes en
développement.
Puis, dans le fond, pour terminer, c'est d'avoir
un rapport annuel en ligne sur les activités de la PMA et sur la réussite de
ces activités-là, qui serait disponible à tous les concitoyens.
Je ne sais
pas si je suis rentrée dans mes 10 minutes, mais j'ai essayé un peu de
résumer mes recommandations.
Le Président (M. Provençal)
: Oui, vous êtes entrée dans votre temps, madame. Alors, je
vous remercie, Dre Janvier, pour votre exposé. Nous allons maintenant
débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous. Vous
disposez de 16 min 30 s.
M.
Carmant : Bonjour,
Dre Janvier, un plaisir de vous parler ce matin. Merci aussi pour le
mémoire, là, exhaustif qui a été déposé, que j'ai lu avec grand plaisir.
Premièrement, je veux juste m'assurer que vous
avez bien compris que, oui, il y aura un guichet d'accès géré par le public et qu'on va également mettre en
place les procédures pour faire le suivi tant des grossesses que des suivis
des enfants nés de la PMA. Juste être sûr
que c'est clair pour vous. Puis, si ce n'était pas clair dans le projet, peut-être qu'il faudrait nous le
mentionner.
Mme
Janvier (Annie) : Bien,
c'est clair, mais on pourrait aussi avoir un registre unique qui dirige les
gens vers le privé aussi. Dans le fond, l'idée, ça serait de les diriger
vers une clinique...
M. Carmant : Mais c'est exactement
ce qu'on propose. Est-ce que vous avez...
Mme Janvier (Annie) : Puis, dans le
fond, d'avoir... Bien, c'est qu'on... ce que je comprends, mais ce que l'APQ comprend, c'est qu'en ce moment, bien, le
régime privé est en train de se développer et, en fait, fait 100 % des
fertilités. Puis, dans le fond, si on veut renverser à être sur cinq ans,
à être essentiellement dans le système public, il va falloir diriger les
patientes vers le système public puis développer le public en même temps.
M.
Carmant : O.K. Mais ce qu'on
propose, c'est vraiment un guichet géré par la RAMQ, qui va gérer toutes les
demandes qui seront remboursées par le public puis... Est-ce que
vous avez compris ça ou ce n'est pas clair dans le...
Mme
Janvier (Annie) : Bien, on
l'a compris, mais, dans le fond, qui va gérer les listes d'attente? Ils vont
tous arriver en même temps. Ce n'est pas la RAMQ... le secrétaire...
M. Carmant : Ça va être la RAMQ.
Mme
Janvier (Annie) : Là, il va
falloir qu'il y ait quelqu'un qui l'aide dans le public pour ça. Sinon, les
femmes vont aller dans le privé.
M. Carmant :
Non, mais ça va être comme les CRDS, en fait.
Mme
Janvier (Annie) : Bien, les
femmes vont se trouver assez rapidement une place dans le privé, s'ils n'en
ont pas une, surtout si...
M.
Carmant : Non, mais, si les dossiers ne sont pas analysés par la RAMQ,
ils ne seront pas remboursés. Donc, c'est incontournable, il faut que...
C'est clair?
Mme Janvier (Annie) : Oui. Ça fait
que, dans le fond, il faudrait qu'il y ait beaucoup de monde qui deale avec la
liste d'attente considérable qui va arriver.
M. Carmant : Surtout les premières
années, parce qu'on va avoir plus de personnes.
Mme Janvier (Annie) : C'est ça. Dans
tous les pays, ils ont fait ça. Dans le fond, ils ne sont pas capables... Il
faut savoir si on priorise... Est-ce qu'on priorise les femmes plus âgées, pour
que ça... parce que c'est leur dernière année, mais en sachant qu'on va avoir
un mauvais taux de réussite, ou on priorise les femmes les plus jeunes, ou on pige c'est qui, on en prend une jeune, une plus
vieille? Ça fait que, dans le fond, la gestion de la liste d'attente, dans tous
les pays qui ont remboursé, est très, très complexe.
M. Carmant : C'est ça. Mais nous,
justement, c'est pour ça, parce qu'actuellement on aurait la capacité de digérer tout
le monde avec l'offre qui est actuellement disponible. Une chose, vous avez mentionnée, qui était superimportante pour moi, aussi, c'est les
grossesses multiples. Et moi-même, j'ai été surpris par la recommandation, là, que, dans certains cas, on pouvait permettre deux embryons.
Mais ça, c'est une recommandation qui
nous a été faite par le comité d'experts, et vous siégez sur ce
comité-là. Donc, pouvez-vous me dire pourquoi ça a été accepté par le comité
d'experts?
Mme Janvier (Annie) : Dans le fond,
dans le comité d'experts, il y a énormément de monde de différents horizons, il n'y a pas juste des pédiatres. Quand
on demande l'avis de l'Association des pédiatres du Québec, ça fonctionnait
très bien, avant, en recommandant de transférer un embryon. Ce qu'on croit
comprendre dans la littérature, c'est que, pour certaines femmes, par exemple,
qui sont à leur dernier essai, qui ont deux embryons qui ne sont pas
vraiment de très bonne qualité, où on a à
peu près 5 % de possibilité de grossesse, selon l'évaluation de
l'obstétricien ou du fertologue... Et,
dans le fond, ce que je comprends de leur message, c'est que, dans ce temps-là,
bien, ils implanteraient les deux en sachant probablement que ça ne
fonctionnerait pas.
Mais, dans le fond, c'est pour ça que nous, on
recommande d'avoir une ligne directrice très, très claire du Collège des médecins, qui nous dit dans quel...
quand est-ce qu'on va pouvoir en implanter deux. Parce que les femmes...
si vous avez lu le mémoire, puis dans tous
les articles et dans tous les questionnaires des femmes infertiles, les couples
veulent des jumeaux, surtout dans le privé. Les couples qui paient veulent un
deux pour un. Pourquoi ils auraient deux grossesses
qui leur coûtent 6 000 $, 7 000 $, 8 000 $,
10 000 $ chaque, à la place d'en avoir une pour 10 000 $?
En plus, les centres de fertilité qui
sont des business préfèrent les jumeaux parce que ça les monte... ça fait
monter leur taux de réussite et, en plus, parce que les clients veulent
ça.
Ça fait qu'il y a un effet pervers, dans le
privé, quand les gens paient pour leur fertilité. On a beaucoup plus de
problèmes chez les enfants, surtout la prématurité. Donc, nous, on est très
inquiets de la libéralisation de transferts d'embryons, c'est certain.
M. Carmant : O.K. Puis une chose
aussi que j'avais demandée au président de l'APQ, c'est aussi de nous fournir,
possiblement, cinq critères systématiques, là, de qualité au niveau du
suivi des enfants. Ce que je comprends du mémoire, c'est que ces critères sont
déjà disponibles. Et, au niveau de la période néonatale, il n'y avait rien de
particulier, c'est vraiment des critères de grossesse et de suivi du
développement?
Mme Janvier (Annie) : Oui. Dans
le fond, dans MED-ECHO puis RED, on a déjà, bien, est-ce qu'ils sont
prématurés, est-ce qu'ils ont des malformations congénitales. Ça, ça va tout
être disponible. Quand c'est de la grande prématurité ou des bébés qui sont
admis, bien, on a le Canadian Neonatal Network qui mesure tout. Et ensuite,
bien, dans le fond, il y a Dominique Cousineau, Mai Luu puis Julie Gosselin qui
ont réfléchi à l'ABCdaire, avec le support programme
Agir tôt, puis, dans le fond, on se proposait de «linker» la data avec ça,
ça serait ce qui serait le moins coûteux puis le plus facile, en
numérisant le registre.
M. Carmant : O.K. Parfait. Dans
votre mémoire, le premier point que vous abordez, là, c'est l'aspect du réseau
public, là. J'aimerais ça revenir un petit peu là-dessus. Je pense que, si on
fait un lien entre la clinique du CHUL puis
la pandémie, là... Et, moi, la première chose que je voulais dire, c'est que ce
qui est important, un, on a l'offre de service qui est disponible déjà,
puis, deux, je ne sais pas si vous êtes au courant, mais on a des enjeux
majeurs, là, de couverture des services obstétricaux au Québec, là. Êtes-vous
au courant?
Mme
Janvier (Annie) : Oui, on risque d'avoir des problèmes encore plus
majeurs, si les femmes décident d'aller dans le privé puis qui ont des
jumeaux.
M. Carmant :
Mais pourquoi ils auraient plus de jumeaux, si les critères vont être les mêmes
dans le public que dans le... Dans toutes
les cliniques, il va y avoir les mêmes critères puis il va y avoir une
surveillance assez sévère de ces cliniques-là.
Mme Janvier (Annie) : Dans le fond,
dans le système public, nos buts ne sont jamais les mêmes que dans le système
privé, surtout quand on veut rentrer dans nos sous. Tous les... en ce moment,
les cliniques privées, la moitié ou plus des investisseurs ne sont pas au
Québec, ne sont pas médecins, ce qu'ils veulent faire, c'est rentrer dans leur argent. Ça fait que, dans le fond, leur but, ça ne
va pas juste d'être... d'attirer les femmes qui veulent un remboursement,
ça va être aussi d'attirer les femmes sans remboursement. Ça fait qu'il faut
être très, très, très vigilants quand on encourage le privé par rapport au
public, surtout en procréation médicalement assistée, parce que c'est démontré
dans toutes les évidences que ça mène à plus de jumeaux et à plus de tort pour
les femmes et les enfants.
Et la complexité, c'est que les femmes veulent
des jumeaux. Ça fait que c'est là que c'est différent d'ailleurs, en médecine.
Ailleurs en médecine, les gens veulent ce qui est le mieux pour eux, mais, à
partir du moment où ils sont en fertilité, la plupart des couples, que ça soit
remboursé ou pas, veulent des jumeaux.
• (11 h 30) •
M. Carmant : Mais actuellement, vous
le savez, même à Sainte-Justine ou au CUSM, le service est payant, là.
Mme Janvier (Annie) : Oui.
M. Carmant : C'est public, payant. Ça
fait qu'on va faire de la gratuité partout. C'est ça, le but du projet. Puis
moi, je pense... Bien, je ne sais pas, si vous nous dites que c'est plus
important de développer une nouvelle clinique, alors qu'on a toutes les
disponibilités possibles, actuellement, pour couvrir même dans la première
année versus s'assurer que nos salles d'accouchement soient couvertes de façon
adéquate à travers la province, là, je ne sais pas, là. Est-ce que vous avez
une opinion là-dessus?
Mme Janvier (Annie) : Dans le fond,
j'encouragerais de développer le public avant le privé. Je comprends que les
infrastructures sont très difficiles à développer, en ce moment, mais on
pourrait au moins les prévoir dans six mois, dans un an. Parce qu'on avait
quand même 70 % de tout ce qui se passait, quand même, dans le privé, dans
l'ancien programme, on avait des fellows qui étaient formés avec l'argent des
concitoyens dans les cliniques privées puis qui étaient recrutés dans les
cliniques privées, après, qui n'avaient pas nécessairement nos mêmes buts de
santé. On avait des innovations de recherche, dans le privé, qui étaient
faites, en fait, sans projet de recherche et qui étaient faites avec de
l'argent du CIHR, des fonds publics. Ça fait qu'il faut être très vigilants
quand on développe des technologies de pointe dans le privé avec des
investisseurs hors Québec. Il faut favoriser le système public.
M. Carmant : D'accord, il n'y aurait
absolument pas de... D'accord, mais le projet de loi ne prévoit aucun
développement dans le privé, là, je peux vous rassurer de ça aussi, là.
Puis, Laval
versus Sherbrooke... Moi, Sherbrooke aussi m'ont parlé qu'il y avait un
intérêt. Est-ce qu'il y avait une raison pourquoi vous prioriseriez le
programme de Laval?
Mme Janvier (Annie) : Bien, dans le
fond, parce que le gouvernement avait déjà priorisé le programme de Laval, qui
était débuté après une analyse des besoins et des femmes enceintes, ça fait que
moi, je me suis basée sur ce que le gouvernement avait analysé, où est-ce qu'il
planifiait puis où est-ce qu'il avait commencé à développer. Mais peut-être qu'il faudrait refaire cet
exercice-là avec le gouvernement puis voir si on arrive aux mêmes conclusions.
M. Carmant : D'accord. Je passerais
peut-être la parole à ma collègue.
Le Président (M. Provençal)
: La députée de Soulanges voudrait vous questionner.
Mme Picard : Merci, M. le Président.
Bonjour, Dre Janvier. Il y a 10 ans, moi, j'ai fait un don d'ovules
pour une amie puis je me rappelle que c'était... je veux dire, c'est intense,
là, le mot qui me vient, c'est «invasif». Pour être franche, j'ai des pertes de mémoire sur cette expérience-là. Puis,
quand j'ai vu, dans votre mémoire, que vous voulez encadrer la pratique
du don d'ovules, ça m'a interpellée, bien sûr, donc j'aimerais savoir si vous
pouvez l'élaborer et puis comment vous voyez cet encadrement-là.
Mme Janvier (Annie) : Dans le fond,
en ce moment, vous savez que le marchandage du corps humain est interdit au Canada, donc les dons d'ovules... Vous avez fait un très beau geste, je vous en
félicite. Les ovules en ce moment, 80 % des ovules utilisés
proviennent d'une banque, en fait, d'ovules et proviennent essentiellement des
États-Unis, où on n'a pas cette loi-là. Donc, on est contre le marchandage du
corps humain, mais on achète quand même le corps humain des Américaines qui donnent leurs ovules en échange d'argent. Ça
fait que la première chose, c'est qu'il faut se questionner sur cette
hypocrisie, en fait, nationale qu'on fait semblant qu'on ne veut pas le
marchander, mais qu'on le marchande pareil mais ça se passe ailleurs, le
marchandage.
La deuxième étape, bien, c'est celle dont vous
parlez, il y a des dons qui sont anonymes mais il y a des dons qui sont dirigés. Dans les dons dirigés, ce n'est
pas toutes les cliniques qui approchent les donneuses et les receveuses de
la même manière ou le
couple receveur. Il y en a qui font voir, par exemple, la donneuse par un
psychologue une fois, ensuite une deuxième fois, qui s'assurent qu'il n'y ait
pas de pression, et, dans un second lieu, le couple, et, dans un
quatrième, cinquième lieu, le couple avec la donneuse, avec une liste de
questions particulières sur les liens avec l'enfant, les fêtes des enfants,
l'éducation des enfants, quand est-ce qu'on va le dire à l'enfant, pas quand...
c'est ça, dans quelles circonstances, et le
rôle de la donneuse dans la famille. Il y a des cliniques où, ça, ça ne se
passe pas. Ça fait que, dans le fond,
d'encadrer ça, il ne faut surtout pas, par exemple, que la donneuse ait un
désir de grossesse important, puis,
dans le fond, qu'elle donne ses ovules, puis qu'ensuite elle ne sera plus
capable, elle-même, d'avoir des enfants. Ça fait qu'il y a certains critères
qui existent dans les bonnes pratiques et qui pourraient être homogénéisés à
travers le Québec.
Et, dans le fond, d'avoir des hôpitaux publics,
des hôpitaux privés... Les hôpitaux privés font un peu ce qu'ils veulent, en termes de consentement à leurs
patientes, et, si on avait tout le monde qui était dans le public, partout, on
pourrait avoir des formulaires de consentement puis des guides pratiques
homogènes pour être certain qu'il n'y ait pas de pression sur les donneuses
d'ovule qui comprennent dans quoi elles s'embarquent, qui savent que c'est
relativement douloureux puis que, bien, pour toute une vie, on est une maman
biologique, dans le fond.
Ça va, la
même chose, aussi pour les dons dirigés de sperme ou les dons dirigés
d'embryons ou tous ces dons dirigés là, où ça se fait vraiment de
manière très différente, d'une clinique à l'autre, où les formulaires de
consentement sont très différents, où, si on était tous dans le public, on
serait capable de dire : Bien, on va faire ça partout de la même manière
puis avoir les mêmes formulaires, parce que c'est quand même complexe, aussi, à
gérer de niveau médical, et au niveau psychologique, et au fonctionnement de la
famille.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, je vais céder la parole à la députée de Roberval.
Mme Guillemette : Parfait. Il nous
reste une minute, M. le Président? Deux minutes. Merci beaucoup, Dre Janvier, c'est très, très instructif, ce
qu'on entend ici ce matin. Moi, j'aimerais vous entendre sur l'âge maximum pour
les femmes pour la procréation. Donc, vous êtes d'accord avec le critère du
40 ans, 42 ans, là, donc j'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme Janvier (Annie) : Dans le fond,
je suis en faveur d'un âge maximal. Ce n'est pas nécessairement juste l'âge, c'est, en fait, le pourcentage de réussite.
Si on était capables de baser ça sur un pourcentage de réussite, ça serait
aussi bien, parce qu'il y a des femmes, par exemple, qui, à 39 ans, il ne
leur reste plus grand-chose, puis d'autres, à 42, où il leur reste
beaucoup. Ce qu'on sait, c'est qu'à 40 ans ça ne marche plus très bien, la
fertilisation in vitro, puis, dans le fond,
à chaque fois qu'on essaie, on fait du tort à cette femme-là, tu sais, en
exigeant une ovulation, et tout ça, et ça risque de ne pas fonctionner.
Il faut aussi se souvenir qu'on a une poche
d'argent, un budget, en fertilisation in vitro, puis, si on l'utilise là où ça ne marche pas, dans le fond, on va
l'utiliser aussi moins là où ça fonctionne. Ça fait que c'est pour ça que je
pense que le contrôle de qualité,
c'est essentiel. Il faut vraiment regarder notre programme, qu'est-ce qu'il
fait, puis regarder, à deux ans,
est-ce que l'âge maximal devrait être 39, est-ce qu'il devrait être 40 à la
place d'être 41. Puis, si on se rend compte qu'on dépense la moitié de
notre argent pour des cycles qui ne fonctionnent pas, bien, peut-être que l'âge
devrait être plus bas. Si on voit que c'est
80 % des cycles qui fonctionnent, bien, peut-être qu'ils devraient être
un an plus haut, dans le fond, parce qu'on utilise l'âge de la
femme comme proxy sur le taux de réussite.
Ça fait que, dans le fond, de mettre
41 ans, c'est basé sur un taux de réussite de 5 % à 10 %, et
peut-être qu'il pourrait être plus bas, cet âge-là. Peut-être qu'on se
dit : Si on rembourse le diagnostic préimplantatoire, c'est quand même cher, bien, on va réduire les femmes qui ont
juste 15 % de taux de réussite, parce qu'on va mettre notre argent là où
ça sert à quelque chose, où on va avoir un
bébé à la fin. Ça fait que d'où l'importance de la balise pour voir, bien,
combien qu'on a d'argent puis où est-ce qu'on veut le mettre. On veut le
mettre où ça fonctionne.
Mme Guillemette : Bien, merci
beaucoup.
Le
Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Merci,
M. le ministre. Maintenant, je vais céder la parole à la députée de Maurice-Richard. Madame, vous disposez de 11 minutes.
Mme
Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Bonjour, madame...
bonjour, Dre Janvier, merci beaucoup pour votre mémoire, effectivement, qui est
très exhaustif à différents égards, et pour les réponses que vous faites depuis
le début de l'échange qui a lieu.
C'est effectivement, comme l'a souligné notre collègue, très instructif, c'est
certainement le bon mot. J'ai de
nombreuses questions. Puis, au fur et à mesure que vous parlez, ça soulève
beaucoup de questions. Quand on
rentre dans les enjeux d'éthique, il est... c'est des roches qu'on soulève et
qui nous amènent d'autres questions.
Je continuerais peut-être, pour garder le focus
sur la question de la limite d'âge... Quand vous nous... quand vous dites qu'au lieu d'avoir une limite d'âge qui
serait fixée on devrait être... on devrait davantage prendre ces décisions-là
sur... je ne veux pas mal vous citer, ça
c'est très loin de mon expertise, mais sur un pourcentage de réussite, est-ce
que la question qui se pose, dans le
fond, c'est : Est-ce que l'âge devrait être déterminé par le projet de loi
ou par le médecin qui suit une patiente, dans le fond?
• (11 h 40) •
Mme Janvier
(Annie) : Dans le fond, l'idée de l'âge, c'est pour refléter le taux
de réussite, parce que c'est beaucoup plus simple que de dire : Bien,
c'est quoi, la réserve ovarienne, qu'est-ce qui se passe?, puis d'après ça justifier ça. On se rend
compte aussi, malheureusement, que, quand ça vient dans le compliqué, il y a
beaucoup de médecins qui peuvent aller contre les balises puis se
dire : Ah! bien, elle, elle a 43 ans, mais une belle réserve. On peut
toujours inventer ou justifier pourquoi on veut faire une fertilisation à une
femme, surtout quand on les voit, surtout dans leur état vulnérable de désir d'enfant, quand on est médecin, puis on essaie
d'avoir une réussite avec ce désir d'enfant-là. Ça fait que c'est sûr que, pour une femme, 1 %, bien, c'est 1 %, ce n'est pas zéro,
puis, pour un médecin en fertilité, 1 %, ce n'est pas 1 %...
ce n'est pas zéro.
Ça fait que, dans le
fond, je pense que c'est une bonne idée de mettre dans le projet de loi un âge.
Parce que c'est assez simple de regarder la carte de RAMQ puis d'appliquer des
règles, mais, même s'il y a un âge, mettons qu'il
y a une femme qui n'a pas d'utérus puis qu'elle arrive à 39 ans, ils ne
feront pas une fertilisation in vitro, ça fait que, tu sais, je veux
dire, malgré l'âge, le jugement médical va être important. Un homme, par
exemple, qui a une fibrose kystique, ne va
probablement pas être apte à concevoir de manière naturelle malgré son âge,
même s'il n'y a pas de limite d'âge chez les hommes. Ça fait que, dans
le fond, le jugement médical est aussi très important, parce que, malgré le
fait qu'on mette un âge, il y a des femmes de 35 ans qui sont en
ménopause, qui n'en ont plus, d'ovules, puis ils vont recommander un don
d'ovules, dans ce temps-là, puis pas une fertilisation in vitro standard.
Ça fait que l'âge,
oui, il est important, je pense que c'est un reflet de l'efficacité puis c'est
vraiment... je pense que c'est pour être
simple. Si on pouvait vraiment avoir une petite température, puis on met un
thermomètre, puis on voit si
l'efficacité est au-dessus de 15 %, on dit «let's go», puis moins... Mais
malheureusement ce n'est pas comme ça, la
fertilité puis le corps humain. L'âge est utilisé comme un proxy du taux de
réussite, dans le fond, pour que ça soit plus facile, moins complexe,
dans le système de santé.
Mme
Montpetit : Juste pour bien comprendre, parce que vous... bon, vous me
dites : Le jugement médical, évidemment,
est essentiel. Oui, je comprends qu'il est appliqué, dans le projet de loi,
pour des femmes qui ont, justement, moins de 41 ans, dans certaines
situations. Mais le jugement médical est exclu du projet de loi pour des femmes
qui ont plus de 41 ans. Et ce que j'entends de la réponse que vous nous
faites, c'est que le taux de réussite de certaines femmes qui ont, par exemple, 43 ou 42, 43, 44 ans pourrait être
supérieur à celui d'une femme de 41 ans ou 40 ans... et se
retrouvent exclues, donc, d'un cycle de gratuité?
Puis,
encore là, juste pour être certaine de bien comprendre... Parce que
vous faites référence, dans votre mémoire, puis vous l'avez fait aussi
dans votre allocution de départ, à l'importance de se préserver de conflits
d'intérêts, puis je veux juste voir comment
vous... si vous vous opposez, dans le fond, à la question du jugement médical
versus les conflits d'intérêts. Est-ce
que le fait de mettre un âge limite
n'est pas, pour vous, une façon de venir gérer ces conflits d'intérêts là ou c'est vraiment une question de taux de
réussite, justement? Parce qu'on se
trouve, de ce que je comprends que vous nous dites, à exclure quand même
certaines femmes qui pourraient avoir un bon taux de réussite, là.
Mme Janvier
(Annie) : Puis on va en inclure aussi, d'une autre manière, des femmes
de 39 ans qui ont des taux de réussite
qui sont peut-être moindres. Ça fait que ce n'est pas évident. Dans la nature,
il y a des femmes, à 45 ans, qui
ont des enfants relativement facilement, quand il y en a d'autres, à
30 ans, que ça ne fonctionne pas. Ça fait qu'en infertilité c'est aussi la
même chose, ça peut être une femme de 42 ans que c'est son mari qui a des
facteurs masculins. Je pense, c'est vraiment... tu sais, je vais redire ce que
j'ai dit, c'est pour que ça soit plus simple à appliquer.
Puis
c'est un peu la même chose partout en médecine. À qui on va offrir une greffe
de moelle dans les récidives de leucémie? On va avoir des critères précis puis
on peut se donner que, généralement, quand ça marche dans moins que
5 % de temps, on ne va pas faire une greffe de moelle ou on ne va pas
faire une greffe de foie. On a des critères, avec Transplant Québec, où il y a
probablement des receveurs qui sont éliminés en faveur d'autres donneurs parce
que le taux de réussite, il n'est pas assez bon.
Ça fait qu'il faut
mettre cette limite-là sinon, bien, on essaierait chez tout le monde. Parce que
1 sur 1 000, c'est quand même 1 sur
1 000, puis 1 sur 500, c'est quand même 1 sur 500. Mais c'est important de
se mettre des limites, en termes sociétaux, pour rentrer dans notre
argent, surtout quand on voit tous les cycles qui ont été faits chez des femmes
où ça n'a pas fonctionné dans l'ancien programme. C'est vraiment là où il y
avait un dépassement de coûts. Puis ce n'est
pas juste un dépassement de coûts, c'est que toutes ces femmes-là se font
injecter, sont à risque de syndrome d'hyperovulation. On les met quand
même... on les «subjecte» à des risques, là, en leur faisant ces techniques-là.
Ça fait que, dans le
fond, il faut mettre : Est-ce que c'est 5 % de taux de réussite,
est-ce que c'est 10 % de taux de
réussite ou 15 % de taux de réussite? Ça, ça dépend combien on a d'argent
puis combien on veut de naissances. Parce que, si on met notre programme
sur toutes celles qui ont plus, par exemple, que 20 % de taux de réussite,
on va avoir beaucoup plus de bébés puis probablement de bébés en santé, parce
que ça va être des femmes plus jeunes que si
on met la limite... Plus la limite est basse, plus on met de l'argent pour
avoir... tu sais, dans le fond, la limite est basse en termes d'âge plus on met
de l'argent pour avoir un bébé en santé chez ces femmes‑là. Plus la limite,
elle est haut en termes d'âge, bien,
plus notre argent va à des cycles qui ne fonctionnent pas. Ça fait que c'est un
peu la balance de combien on a d'argent dans notre poche puis où est-ce
qu'on veut le mettre.
Mme
Montpetit : Ce qui me préoccupe... Bien, encore là, là, je fais plus
appelle à la néonatologiste qu'à l'enjeu de
la contrainte financière, dans l'échange que j'ai avec vous. Je ne vous dis pas
que les ressources sont illimitées, loin
de là, mais c'est juste... je veux bien départir qu'est-ce qui fait, justement, que la contrainte d'âge... Parce
qu'encore là j'en reviens à votre mémoire, tu sais, vous... oui, vous
dites : Les ressources ne sont pas illimitées. Mais ce n'est pas l'enjeu,
à l'heure actuelle, qui m'intéresse dans l'échange que j'ai avec vous. Mais
vous dites : On doit dédier ça aux individus
qui ont des chances de réussite raisonnable. J'essaie juste de voir :
Est-ce qu'il y a une autre façon d'aborder que la question de la limite
d'âge?
Vous faites mention
aussi... Là, je vous la pose parce que je vois le temps qui file, mais vous
faites mention des impacts aussi de limiter
le remboursement à un seul cycle, où vous notez, justement, que plus les gens
ont des difficultés financières, plus ils avancent en âge aussi, plus ils sont
susceptibles de tolérer un risque accru pour leur santé. Ça pourrait les
amener, après un cycle, à aller vers des cliniques privées, où vous faites
mention de conflits d'intérêts auxquels vous
pourrez élaborer davantage, si vous avez le temps. Mais qu'est-ce qui, pour
vous, serait une situation, je vais
dire idéale, en termes de nombre de cycles? Je pense que vous connaissez,
encore là, les taux de réussite certainement beaucoup mieux que nous.
Mme Janvier (Annie) : Dans le fond,
le projet de loi n° 73 a une manière de rembourser qui est innovante, puis qui n'existe pas ailleurs, et qui n'existe
pas dans la littérature non plus. Ça fait que, dans le fond, un cycle,
d'habitude, est compté de : on commence la stimulation jusqu'au
transfert d'embryon. Un cycle, dans le projet de loi n° 73 — on
applaudit la définition d'«éthique» — c'est qu'on peut se servir de
tous les embryons. Ça fait que vous voyez qu'une femme, en moyenne, à 30 ans, elle va avoir quatre embryons de
fabriqués, puis mettons que c'est 50 % des embryons qui sont
transférés, fonctionnent, cette femme‑là devrait avoir deux enfants avec
un cycle.
Le problème,
c'est quand — mais
j'ai même demandé aux gens en fertilité — on n'est pas capables de réviser la
littérature pour savoir, avec l'âge de la femme, la moyenne des embryons qui
vont être faits de différentes qualités et transférés, ça mène à combien
d'enfants. On n'a aucune idée, parce que c'est vraiment une manière innovatrice
et vraiment une très bonne manière de définir ce que c'est, un cycle. Et c'est pour
ça que le contrôle de la qualité va devoir être flexible, puis de
l'ériger en loi.
Ça serait
beaucoup mieux de dire : On va regarder dans deux ans quels sont nos
buts. Nos buts, c'est que x pour cent d'argent aille vers des cycles qui
sont fructifiants puis d'avoir la naissance d'un bébé en santé, sans trop de
coûts pour le bébé et la femme. Et ça, ça nous permettrait d'ajuster ces
balises-là. Parce que peut-être qu'un cycle, c'est en masse. Mais, dans le
fond, dans la manière de décrire les cycles, dans les autres articles,
c'est-à-dire, on ponctionne jusqu'au
transfert d'embryons, une fois, une femme de 35 ans va avoir 50 % à
60 % de chances de réussite, mais on n'est pas là, parce que, dans
cette femme de 35 ans, on va pouvoir lui transférer les autres embryons.
Ça fait qu'on ne le sait pas encore, nous, la réussite et la fertilité des
couples, avec ce qui est proposé dans le projet de loi, parce que ça n'a jamais
été fait comme ça dans d'autres pays. Puis, à notre avis, c'est une très belle
manière de le faire, de dire : Bien, on va transférer tous les embryons,
un à un...
Le Président (M. Provençal)
: Dre Janvier...
Mme Janvier (Annie) : ...que la
femme fournit.
Le Président (M. Provençal)
: Je suis obligé de vous interrompre parce que le temps
d'échange avec la députée est terminé. Je cède maintenant la parole à la
députée de Sherbrooke. Vous disposez de 2 min 45 s.
Mme Labrie : Bonjour. Je vous
écoutais parler de la question des taux de réussite, le fait que l'âge est
utilisé comme un proxy pour parler, en fait, du taux de réussite, puis je me
demandais si on ne serait pas plus avisés de plutôt inscrire dans la loi le
taux de réussite. Vous me corrigerez si je me trompe. J'imagine que les
médecins sont en mesure d'évaluer le taux de réussite potentiel de chaque
patiente. Et est-ce que ce ne serait pas mieux de fixer le taux de réussite à
partir duquel c'est admissible dans la loi? Parce que j'imagine aussi que le
taux de réussite, en fonction de certains
critères comme l'âge, ça va évoluer dans le temps, là, en fonction d'évolution
des recherches, des pratiques. Est-ce que ça exposerait trop les
médecins aux pressions des parents... bien, des futurs parents, par exemple, si
ça reposait sur eux de déterminer le pourcentage de réussite de chaque
patiente?
• (11 h 50) •
Mme Janvier (Annie) : Bien, le
premier facteur qu'ils vont utiliser, c'est l'âge de la mère, dans le fond, ça fait qu'ils vont prendre cet âge-là tout de suite
pour un taux de réussite. Et ensuite, tu ne sais pas, il n'y a pas vraiment
de manière très exacte, scientifiquement, comment le mesurer, ça fait que, oui,
il y a ouverture à conflit d'intérêts.
Par contre, quand j'ai mis... on a mis des
critères d'exclusion qui sont, eux, pas... qui ne sont pas tous réversibles,
dans le fond. L'obésité pourrait énormément diminuer le taux de fertilité, et,
si cette femme-là perdait du poids, ça
serait beaucoup mieux que de faire une fertilisation in vitro. Ça fait
qu'il y a d'autres, aussi, stratégies qu'on pourrait faire pour
augmenter le taux de réussite des femmes, de leur fertilité.
Mme Labrie : Donc, quand les
médecins évaluent le taux de réussite, c'est essentiellement l'âge. Ça serait
quoi, par exemple, les autres facteurs, là? Vous parlez du poids.
Mme Janvier (Annie) : Bien, il y a
la réserve ovarienne, il y a le poids, il y a vraiment beaucoup d'autres choses
qui sont utilisées. Ça fait que, s'il y a des facteurs qui sont réversibles,
bien, ils vont essayer de traiter ces facteurs réversibles là. Mais on comprend
qu'une femme en ce moment, à 40 ans, qui a une obésité, bien, elle va préférer la fertilisation in vitro
que d'essayer de perdre du poids, puis que ça ne fonctionne pas, puis elle n'a
plus accès à la fertilisation in vitro. Ça fait qu'il faut quand
même, nous aussi, être conséquents dans ce qui est réversible puis ce qui est
bienfaisant pour la femme, bien, de tomber, par exemple, avec une obésité
morbide, enceinte. Beaucoup plus de prématurité, beaucoup plus de césariennes,
césariennes compliquées, beaucoup plus de problèmes pour cette femme-là. Ce
serait beaucoup mieux qu'on encourage cette femme-là et qu'on l'encourage... je
ne parle pas juste de lui
donner une tape dans le dos, qu'on ait vraiment un programme médical qui la
prenne en charge de manière sérieuse pour l'aider dans sa perte de
poids...
Mme Labrie : Ou... juste en quelques
secondes...
Mme Janvier (Annie) : ...pour
qu'elle tombe enceinte naturel.
Mme Labrie : Donc, c'est mieux pour
vous de garder l'âge comme balise, plutôt qu'un pourcentage de réussite, dans
la loi?
Mme Janvier (Annie) : Oui, c'est beaucoup
plus simple, puis ça va amener à moins de conflits d'intérêts.
Mme Labrie : O.K. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Dre Janvier. Je
vais maintenant céder la parole au député des Îles-de-la-Madeleine, qui dispose
lui aussi de 2 min 45 s.
M. Arseneau : Merci, M. le Président.
Merci, Dre Janvier, pour ce mémoire. Évidemment, en deux minutes, je
vais devoir choisir un élément. Et j'aimerais vous entendre élaborer sur l'importance
du système public puis, en fait, peut-être nous dire, à l'heure actuelle, ce
qui cloche avec le modèle, où 70 % des activités sont dans les cliniques
privées, là. De façon synthétisée, quel est... quels sont les risques que l'on
court en préservant le système actuel?
Mme Janvier (Annie) : Bien, il y a
des risques d'accès, des risques énormes de conflit d'intérêts, des risques que
les pratiques ne soient absolument pas homogènes. Il y a une clinique qui
favorise les dons seulement de gamètes anonymes, l'autre renseigne les parents
sur ce que ça veut dire d'avoir un enfant de gamètes anonymes et l'autre
suggère d'avoir des gamètes non anonymes. Et on n'encourage pas non plus des
bonnes pratiques homogènes à travers la province, par exemple, en ayant des
consultations ou des... quand on fait le consentement éclairé, de manière
homogène, d'une clinique à l'autre. Ça fait qu'une femme a accès à des cliniques
qui vont offrir des soins différents, il y en a où on va payer la psychologue,
il y en a où on ne paiera pas la psychologue. Et il faut vraiment déterminer
les bonnes pratiques, qui devrait voir un psychologue, comment, les bonnes
pratiques cliniques puis les suivre de la même manière dans toutes les
cliniques.
M. Arseneau : D'accord, mais on
pourrait aussi choisir de baliser les pratiques des cliniques privées, plutôt
que de s'enligner vers des cliniques publiques?
Mme Janvier (Annie) : Avec des
formulaires de consentement publics utilisés dans le privé, bien, ça serait
surprenant que ça soit accepté par les cliniques privées, quand les patientes
paient pour leur fertilité. Si ça devient contraignant comme ça, dans le
public, ils vont aller à Plattsburgh pour se faire faire des jumeaux.
M. Arseneau : Et dans le cadre du projet
de loi actuel, de passer de 30 % à 70 %, est-ce que vous avez des
recommandations précises sur comment on peut le faire ou c'est simplement, là,
une orientation qu'il faudrait avoir? Quels sont les moyens qui sont à notre
disposition sur le plan législatif?
Mme Janvier (Annie) : Bien, les
moyens, c'est que les cliniques qui étaient publiques redeviennent publiques, que le CHUL ou le CHUS, selon ce que le
gouvernement décide, soient développés et qu'on ait un cap de cycles qui soient
faits, dans le privé, pour favoriser ces cycles-là dans le public, d'avoir des
fellows qui sont essentiellement dans le public et non dans le privé, d'avoir de la recherche qui est
essentiellement dans le public et non dans le privé. Tout ça, ça va attirer les
patients et les fellows.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Dre Janvier,
pour votre contribution à nos travaux. On s'excuse aussi pour tous les
problèmes techniques que nous avons eus, mais on a eu quand même un très bel
échange avec vous.
La commission suspend ses travaux jusqu'après
les affaires courantes. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 56)
(Reprise à 15 h 30)
Le Président (M. Provençal)
: À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission
de la santé et des services sociaux reprend
ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission est réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 73, Loi modifiant diverses dispositions en matière de procréation assistée.
Cet
après-midi, nous entendrons par visioconférence les organismes suivants :
l'Association Infertilité Québec, le Centre de la reproduction du Centre universitaire de santé McGill et le Centre de procréation assistée du Centre
hospitalier universitaire de Sainte-Justine.
Avant
de commencer officiellement, je tiens à remercier l'équipe technique d'avoir
solutionné la problématique
que nous avions ce matin. Je peux vous dire que les gens de la commission
l'apprécient grandement.
Je
souhaite donc la bienvenue aux représentants de l'Association Infertilité Québec.
Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après
quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission.
Je vous invite à vous présenter puis à commencer votre exposé. Je vous cède la
parole, mesdames.
Association Infertilité Québec
(ACIQ)
(Visioconférence)
Mme Braun
(Céline) : Merci. Céline Braun, présidente et porte-parole de l'association.
Je suis aujourd'hui accompagnée de Mme Justine Tremblay, trésorière...
Julie Tremblay, excusez-moi.
L'Association infertilité Québec a vu le jour le 19 mai... (panne de son)
...nos 15 années d'existence, 15 années de représentation
afin de faire reconnaître l'infertilité comme une maladie, telle que reconnue
par l'Organisation mondiale de la santé, 15 années à sensibiliser
la population à notre cause, 15 ans à essayer de briser les tabous de
l'infertilité, encore bien trop présents dans notre société actuelle.
(Panne de son) ...la
loi n° 20 a été sanctionnée, retirant la couverture
de la fécondation in vitro et remplacée par
un crédit d'impôt pour traitement de l'infertilité. Journée sombre pour les
personnes infertiles. Pour plusieurs, la fin de la couverture publique a
signifié la fin d'un projet familial, la fin de l'espoir d'un jour accueillir
un enfant et d'enfin devenir une famille. Certains patients se sont
retrouvés devant rien, après des années de long cheminement qui part de l'acceptation de sa condition d'infertile
jusqu'à la décision d'entreprendre des traitements de fertilité. Pourtant,
l'ancien programme québécois a eu des
retombées positives tant pour le Québec
que pour la santé des mères et des bébés, bien que fort mal balisé.
Le rapport sur la loi
sur les activités et de recherche en matière de procréation assistée, publié
en 2013 par le ministère de la Santé et des Services sociaux, ainsi que
l'étude du commissaire à la santé et services sociaux, publiée en 2014,
rapportent ces accomplissements concrets. Plus de 5 000 enfants sont
nés de l'ancien programme. Une réduction importante du nombre de nouveau-nés
issus de la grossesse multiple, en passant de 38,5 % à 17,2 % entre
2010 et 2013. Le Québec était passé d'un taux de 30 % de prématurés issus
de la PMA à 20 %, une baisse de 10 % en quatre ans. Les taux de grossesses multiples étaient passés de
27 % à 5 % à la suite d'une fécondation in vitro. Le Québec
était pris en exemple partout dans le monde.
Durant ces
cinq dernières années, nous avons pu constater une recrudescence des
séparations de couples qui se trouvaient
dans les couloirs de l'infertilité. La lourdeur des traitements ainsi que le
poids financier de ceux-ci ont eu de gros impacts sur les patients. Nous avons
également vu une très forte hausse de demandes de soutien psychologique,
augmentation du tourisme médical. Puis la pandémie s'est invitée dans nos vies.
Les personnes infertiles ont perdu espoir de retrouver une couverture.
C'est pourquoi nous
avons accueilli avec positivisme le projet de loi n° 73, le
11 novembre dernier, soit presque jour pour jour la date de la sanction de
la loi n° 20. Ce faisant, le Québec effectue un
retour à la normale. En effet, plusieurs
pays couvrent, depuis déjà des années, les traitements de fécondation
in vitro : la France, la Grande-Bretagne, l'Espagne, l'Israël, l'Argentine, pour ne donner
que quelques exemples. Plus récemment, l'Ontario et l'État de New York
ont eux aussi introduit la couverture de la FIV.
Les
patients infertiles de toutes ces régions du monde et du Québec partagent le
même sentiment. La couverture publique de la fécondation in vitro
est une reconnaissance de cette condition que vivent des jeunes adultes partout
à travers le monde. Cette couverture vient aussi briser des tabous bien tenaces
et donne la permission aux gens de parler de ce qu'ils vivent et des
difficultés de vivre avec l'infertilité. Nous espérons qu'un jour ce sujet
sensible pourra être discuté ouvertement et sans préjugés.
Le projet de loi n° 73 a pour but de rendre la procréation médicalement
assistée accessible, sécuritaire, éthique et pérenne. L'ACIQ souhaite vous proposer
quatre pistes de solution afin d'en assurer son acceptabilité sociale et
de permettre l'atteinte de l'un de ses objectifs fondamentaux : permettre
la réalisation de projets familiaux, à l'instar de plusieurs d'entre nous
réunis aujourd'hui.
Nos
quatre recommandations sont... la première étant de définir l'admissibilité
des patients en fonction d'une évaluation médicale et non d'une limite d'âge
systématique sur le critère de l'âge. Il est démontré que le taux de succès de
la procréation médicalement assistée est contingent à de nombreux facteurs
autres que l'âge, notamment les problèmes environnementaux liés à notre mode de
vie, l'exposition aux polluants, aux toxines présentes dans l'environnement. Un
autre exemple : dans le cas de patientes bénéficiant de dons d'ovocytes,
elles ont obtenu un taux de naissances vivantes comparable à une autre
patiente.
La deuxième recommandation
est de limiter à trois le nombre d'inséminations intra-utérines couvertes par
la Régie d'assurance maladie du Québec avant le passage en in vitro. Bien
que pas obligatoire pour toutes les patientes, il est démontré que, pour
certaines patientes, l'insémination intra-utérine ne débouchera sur aucune
naissance vivante. L'ACIQ est favorable à la centralisation des données qui
sera permise par la couverture publique de soins en fertilité, de la stimulation ovarienne à la fécondation in vitro,
qui permettra un suivi détaillé de la situation sur le territoire
québécois. Le taux de succès cumulatif après trois inséminations se situe
à 40 % et chute à 7 % après une quatrième insémination. De plus, le
nombre d'inséminations n'a aucun impact sur le taux de succès de la fécondation
in vitro.
(Panne de son) ...deux
cycles les services de procréation assistée requis à des fins de fécondation
in vitro qui sont considérés comme des services assurés. Cette
recommandation se base sur le principe que certains patients, en raison de leur
état de santé, ne sont pas réceptifs aux traitements d'insémination
intra-utérine. Considérant ces taux de succès probants selon les données
médicales, le coût émotionnel et physique, pour les patients, du processus
ainsi que les coûts associés au programme, il serait pertinent de permettre
l'accès à une couverture de la FIV plus grande. De plus, les économies
réalisées par une baisse du nombre d'inséminations intra-utérines pourraient
être investies dans ce cycle supplémentaire.
Notre dernière recommandation est d'augmenter
l'âge maximal autorisé pour les services de congélation et d'entreposage du sperme assurés à 30 ans.
Nous croyons que la limite d'âge fixée par le projet de loi n° 73 ne
correspond pas à la réalité sociale de la population québécoise. Selon
l'Institut de la statistique du Québec, la naissance du premier enfant survient
en moyenne lorsque la mère a 29,1 ans, et on rapporte une tendance à
reporter les naissances plus tard dans la vie.
Pour terminer, il ne faut jamais oublier que
l'infertilité n'est pas un choix de vie. Elle est subie par les personnes que
nous représentons et est vécue comme une incapacité. Personne ne débute sa vie
en espérant un jour passer par une clinique et des traitements de fertilité
pour avoir un jour l'énorme privilège de devenir parent. Mais il est rassurant
que, comme société, nous soutenions les personnes qui décident de s'engager...
la voie de la parentalité, car, ne l'oublions
pas, ces enfants, qu'ils soient nés d'une conception naturelle ou médicalement
assistée, sont notre avenir.
Je remercie les membres de la Commission de la
santé et des services sociaux pour leur attention.
• (15 h 40) •
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie, madame, pour votre exposé. Nous allons
maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre, à vous la parole,
16 min 30 s.
M. Carmant : Merci. Je m'en
souvenais. Bonjour, Mme Braun. Bonjour à votre collègue. Je vous salue.
Mme Braun (Céline) : Bonjour,
M. Carmant.
M. Carmant : Merci beaucoup
pour le mémoire que vous nous avez déposé. Je veux juste m'assurer avec vous
qu'on s'entend sur la définition qu'on utilise pour un cycle. C'est une
définition un peu nouvelle, là, que nos équipes ont mise de l'avant, puis
surtout c'est une définition qui permet à un couple infertile, en fait, d'avoir
une famille, là. On ne parle pas d'un seul bébé. Je veux juste être sûr qu'on
s'entend bien là-dessus.
Mme Braun (Céline) : Oui, oui,
on s'entend bien. On a bien compris le principe que c'est jusqu'au transfert du
dernier embryon, de la première ponction.
M. Carmant :
Parfait. Donc, on comprend également que, pour l'insémination artificielle,
disons qu'une famille, un couple a un bébé après une deuxième, il pourrait
avoir trois enfants de ces six inséminations. Est-ce que vous avez...
Mme Braun (Céline) : Bien, il
est... Actuellement, vous proposez six. Nous, on aimerait ça réduire à trois,
au vu du fait...
M. Carmant : Mais c'est...
Mme Braun
(Céline) : ...au vu
certainement du fait que le taux de réussite n'est pas probant après la
quatrième.
M. Carmant : O.K. Mais c'est là
qu'on ne se comprend pas. Un, nous, on dit que le médecin n'est pas obligé d'aller à six, là, ce n'est pas une obligation, c'est vraiment sur la base clinique.
Puis l'avantage de six, c'est que, si...
par exemple, quelqu'un peut avoir un enfant après
deux inséminations au couple, même le couple femme-femme, là, qui
pourrait avoir chacun un enfant, ça pourrait permettre ça.
Mme Braun (Céline) : Je comprends tout
à fait, mais ça permet, à quelque part, comme une certaine discrimination au niveau des gens qui passent directement en fécondation in vitro qui n'ont pas... qui n'auront zéro
résultat au niveau de la fécondation in vitro. C'est une question
d'équité de ce côté-là. Parce qu'on peut passer en processus d'insémination, on a un premier enfant, on se part
dans un autre processus d'insémination, on peut en passer trois, puis après partir en fécondation in vitro, et
former une famille nombreuse. Il n'y a pas de problème avec ça, dans le sens où
on a un accès très vaste à l'insémination.
M. Carmant : O.K. Donc, vous
voudriez qu'on concentre juste... Parce que le projet inclut toutes les formes
de procréation médicale assistée. Vous voudriez qu'on se concentre plus sur la
FIV, c'est ça que vous me dites?
Mme Braun
(Céline) : Justement,
justement. Parce qu'au niveau des résultats ils sont bien
plus probants qu'en insémination également.
M. Carmant : O.K. Mais c'est quand
même une... On se rend compte que la FIV, c'est quand même quelque chose de pas
facile, là.
Mme
Braun (Céline) : Non, on le sait. Je suis passée par là puis j'en ai
vécu une, donc... Non, je connais exactement la lourdeur de tous ces
traitements-là. Mais, quand on a l'espoir d'avoir, en tant que personne
infertile... Et, souvent, ce sont les personnes qui ont une infertilité
inexpliquée qui passent directement en fécondation in vitro. Et souvent le premier cycle est le dosage de la
médication pour préparer à la réussite. C'est arrivé très, très souvent dans
ce sens-là et c'est pour ça que nous
aimerions ouvrir la possibilité à un deuxième cycle, surtout pour ces
personnes-là.
M. Carmant :
D'accord. C'est sûr que, nous, il y a des enjeux financiers, là, si on va à un
deuxième cycle, parce que... Nous, ce qu'on s'est dit, c'est : on voulait
viser autour de 3 500, de façon récurrente, le cycle par année. Si l'on va
avec un deuxième cycle, ça nous obligerait peut-être à mettre une limite fixe,
plutôt que se baser sur des critères
cliniques qui ouvriraient la porte à plus d'individus. Est-ce que vous trouvez
qu'il n'y a pas une justice, là-dedans, en soi?
Mme Braun
(Céline) : On pourrait augmenter le nombre de fécondations
in vitro visées, sans problème, ça...
Pour moi, selon moi, économiquement, en réduisant les inséminations, on peut mettre cet argent qui n'a
pas été utilisé en insémination sur des cycles de la fécondation
in vitro.
M. Carmant :
O.K. On parle quand même de montants qui sont très différents, là.
Mme Braun
(Céline) : Oui, certain, mais, comme je vous dis, ce serait
certainement important pour les gens qui ont des... Ah! excusez-moi, je
bégaie...
(Interruption)
M. Carmant :
Prenez votre temps, il n'y a pas de problème.
Mme Braun
(Céline) : C'est important pour nous de pouvoir donner une deuxième
chance aux personnes qui n'ont pas cette possibilité de passer en insémination.
M.
Carmant : O.K. Puis vous comprenez aussi que quelqu'un qui a une
fécondation, une stimulation ovarienne, et qui a plusieurs embryons
pourrait avoir une famille de plusieurs enfants avec un seul cycle, comme on le
définit?
Mme Braun
(Céline) : Oui, tout à fait. Oui, tout à fait.
M. Carmant :
O.K. J'ai été surpris de vous entendre dire tantôt, là... de risque de
séparation qui est accru, là, chez ceux qui
ont... les couples infertiles, quand ils n'ont pas eu accès à la fécondation
in vitro. Quels sont, selon vous, les... le support, là, émotif et
psychologique qu'on devrait inclure dans le programme, là, pour
l'accompagnement des couples? On entendait
parfois que l'accompagnement est très variable d'une clinique à l'autre. Vous,
c'est quoi, votre expérience? Qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer
ça?
Mme Braun
(Céline) : Selon nous, on aurait toujours voulu que chaque couple
puisse bénéficier d'une consultation psychologique avec un professionnel de la
santé, ce qui va lui permettre de comprendre qu'est-ce que la fécondation
in vitro, est-ce que notre couple est suffisamment solide pour passer au
travers, est-ce que... Parce que ce n'est
pas juste madame qui rentre dans un traitement, c'est le couple. Et ça, c'est
quelque chose qui est méconnu, bien souvent. Et ce qu'on a constaté, au
fil des années, c'est que l'infertilité est sur madame, donc monsieur, bien, il
s'en fiche un peu : Non, c'est ton problème, regarde, moi, je ne me
présenterai pas puis... On a souvent vu ça et on le lit souvent encore. C'est
quelque chose, pour nous, qui est très important que le couple puisse être
solide et comprendre exactement, psychologiquement, ce que sera un traitement de
fécondation in vitro.
M. Carmant :
D'accord. Au niveau de la préservation de la fécondité, je suis un peu en
accord avec vous que 25 ans, ce n'est
peut-être plus la réalité d'aujourd'hui. Avez-vous des statistiques par rapport
à l'âge du diagnostic? Puis, vous savez, il y a toutes sortes de choses
un peu floues, là, dans la littérature, là, comme le...
Mme Braun (Céline) : Non, malheureusement, je n'ai pas trouvé de statistiques sur la préservation de la fertilité et
quand les personnes vont aller chercher leurs gamètes ou leur préservation. Ce
que nous, on s'est basés, c'est réellement sur l'âge de conception des enfants actuellement,
en 2020, 2019‑2020. Donc, c'est sur cette base-là qu'on s'est basés, en
disant : 25 ans, c'est jeune un peu. Et, en parlant avec les jeunes
autour de moi, je travaille avec des jeunes adolescents qui sont à l'Université
Laval, pour eux, ils ont 25 ans, 26 ans, mais ce n'est pas encore
dans leurs plans, là. Ils veulent terminer
leurs études tranquilles, ils veulent aller plus loin. C'est dans ce sens-là
qu'on vous fait notre proposition.
M. Carmant :
D'accord. M. le Président, je passerais la parole à la députée de Soulanges.
Le Président (M.
Provençal)
: Oui. Alors, Mme la députée de
Soulanges, je vous cède la parole.
Mme Picard :
Bonjour. Bonjour, mesdames. Merci d'être parmi nous aujourd'hui. Je voudrais
savoir quelles informations les couples infertiles ont besoin d'avoir pendant
le début de la couverture du programme. Selon vous, qu'est-ce qui devrait
être... comment on devrait faire la promotion aussi, là, de ce nouveau programme?
Mme Braun (Céline) : Pour nous,
il a été... On a vu le gâchis, le chaos qu'avait donné la transition de la fin
de la loi n° 20. Donc, on a vécu un grand manque d'information, on courait
après les questionnements : Ah oui! mais est-ce que ça, ça va être encore
couvert? Non, ça, ça ne l'est plus. Peut-être faire un mémo bien précis avec
tout ce qui va être couvert par le gouvernement et vraiment avec toute la couverture. Le crédit d'impôt, je sais qu'on n'en parle pas dans le projet de loi, mais ça,
c'est quelque chose qui va être aussi important d'être intégré dans le mémo.
• (15 h 50) •
Mme Picard : Parfait. On sait qu'il y a déjà...
il y a beaucoup de tabous, là, reliés à l'infertilité, et vous en
parlez. Quelle solution vous proposez pour défaire un peu les tabous
qu'il y a au sein de la population?
Mme Braun
(Céline) : En parler, mais
dans les cours d'éducation sexuelle, c'est très important. Ça commence tôt.
Les jeunes sont déjà au
secondaire, ils ne savent pas qu'une MST peut provoquer une infertilité. Il y a
plein de facteurs qui pourraient déjà
commencer en jeune âge. La sensibilisation, ça, pour moi, devrait déjà
commencer au secondaire afin que ça se propage dans la population.
Mme Picard : J'ai droit à une
dernière question, monsieur?
Le Président (M. Provençal)
: Oui, oui, pas de problème, vous avez du temps, oui.
Mme Picard : O.K. Parfait.
J'aimerais savoir, parce qu'il y a beaucoup de... Vous êtes la première, là,
qui vient vers nous, bien, je crois, qui a
subi tous les tests, là, et puis qui a passé par-dessus tout ce processus-là.
Pouvez-vous nous expliquer, là, la démarche complète, là? Bien, peut-être
pas rentrer dans les détails, là, mais dans le sens que...
Mme Braun (Céline) : Non, non.
Comment ça se passe?
Mme Picard : ...comment ça se passe
et puis s'il y a des petites idées d'amélioration de processus que vous pouvez
nous amener en... par le chemin du processus.
Mme Braun (Céline) : Donc, mon
couple à moi avons eu un premier enfant naturel, puis ensuite on s'est essayé
pendant deux ans. Après deux ans et demi, on s'est dit : Ça ne
marche pas, il y a quelque chose qui ne va pas. On a pris rendez-vous en clinique et on a commencé une batterie de
tests. Ça nous a pris à peu près six à
sept mois pour avoir tous les résultats de tests et partir dans un
premier processus.
Mais on est peut-être un cas rare d'avoir
attendu aussi longtemps. Ça a marché la première fois, mais ça ne marche plus, là. Pour d'autres, ils vont attendre
six mois, une année, et là ils commenceront d'aller consulter soit en
passant par la gynécologue, qui va
commencer de donner un certain taux d'hormones à madame afin de voir si c'est
ça qui bloque, puis ensuite ils seront redirigés auprès des cliniques de
fertilité.
Dans mon cas, on a commencé par l'insémination
intra-utérine, et, je l'avais déjà expliqué ultérieurement à un de vos collègues,
quand je suis arrivée pour mon insémination, j'étais prête pour ça, le médecin,
il est entré, il a dit : Qu'est-ce que
vous faites là aujourd'hui?, ça ne sert à rien, l'insémination, le taux de
spermatozoïdes viables de votre conjoint est insuffisant, vous passez en
fécondation in vitro. Moi, là, je venais de perdre à peu près tout un mois
de cycle et puis j'ai dû partir après en fécondation in vitro.
On a dû faire un mois de pause, et ça m'a pris
environ neuf mois avant de pouvoir avoir ma ponction entre le moment où
j'ai consulté et le moment où j'ai eu la ponction ovarienne. De là a découlé
une première naissance, mon fils Yoann. Et
puis, ensuite, j'ai eu un deuxième transfert, et, au dernier embryon qui me
restait de congelé — c'était
ça passe ou ça casse — j'ai eu ma fille, la petite dernière, mon
troisième enfant.
Ce n'est pas
tout le monde qui l'a aussi facile. Moi, j'avoue que, comme le problème n'était
pas de mon bord, était plus du bord de mon conjoint, je n'ai pas vécu
les hauts et les bas d'une fausse couche, je n'ai pas vécu l'aspect lourd
psychologique d'un embryon qui était implanté puis qu'on arrive avec une
coquille vide, pas de coeur qui bat, pas de
positif. Donc, j'ai été relativement chanceuse. Mais d'autres, comme Julie, qui
m'accompagne aujourd'hui, n'ont pas vécu la même chose que moi. Ils
l'ont eu beaucoup plus difficile.
Mme
Picard : O.K. Et, dites-moi, dans la mécanique de tout ça, l'embryon,
si vous ne l'utilisez pas, qu'est-ce qui... la clinique vous appelle,
vous sensibilise pour le... Comment ça se passe, le transfert?
Mme Braun
(Céline) : Bien, l'embryon,
une fois congelé, reste congelé. Puis après, vous payez à chaque année. Bien, quand le gouvernement payait, on avait tant
de temps puis on n'avait pas de pop-up qui nous disait : Allo! Tu as
encore quelque chose qui est congelé chez nous. Donc, ça peut rester là des
années, il n'y a personne qui s'inquiète de
ça. C'est pour ça qu'actuellement, au Québec, il y a un très grand nombre
d'embryons congelés dont les gens ne savent pas quoi faire.
Donc, je
pense qu'à quelque part ça serait très important aussi que, du côté des
cliniques, on dise : Bon, bien là, ça fait une année qu'il est
là, ton embryon, qu'est-ce que tu décides de faire? Parce qu'il y a tellement
d'options. On peut en
faire don à quelqu'un qui en a besoin, ce qui arrive souvent, nous en
faisons... Nous sommes des intermédiaires, dans ce cas-là. La personne nous écrit à l'association, on publie son
post, puis les gens se contactent entre eux. Donc, ça donne d'autres enfants issus de la procréation par
don d'embryon, don dirigé d'embryon. Sinon, bien, il y a la possibilité
de remettre l'embryon à la science ou simplement de le détruire.
M. Carmant :
Justement, à écouter votre histoire, j'ai pensé à... Tu sais, je sais que l'âge
n'est probablement pas le seul facteur dont
il faut tenir compte, mais, pour favoriser le flux de patients puis éviter les
délais dans les évaluations, nous, on
pensait que c'était la façon la plus simple et la plus juste de gérer, par un
point d'entrée central, la distribution des services. Je vois que vous
étiez hésitante par rapport à ça. Pouvez-vous me partager vos pensées
là-dessus?
Mme Braun
(Céline) : Par rapport?
M. Carmant :
À l'utilisation de l'âge.
Mme Braun
(Céline) : Bien, moi, je trouve que 42 ans, c'est jeune. Parce
qu'il y a quand même encore des femmes très en santé, et tout ça. Puis, pour le
règlement au niveau du sperme, je trouve que... 25 ans, pour le sperme, je
trouve que c'est très jeune, très jeune de pouvoir décider ce que je fais de ça
parce que... Il ne faut pas se précipiter dans la vie non plus, parce qu'on a
quelque chose de congelé, puis de dire : Bon, bien, c'est avec ma copine
du moment... De 25 ans à 30 ans,
on peut changer de personne, ça arrive très souvent. Et, pour moi, je trouve
que 30 ans, ça serait idéal.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole à la députée de Maurice-Richard. Vous disposez de 11 minutes.
Mme
Montpetit : Je vous remercie beaucoup. Bonjour, Mme Braun.
Bonjour à la personne qui vous accompagne également. Je sais que vous
avez une longue feuille de route et une bonne expertise dans le dossier qui
nous occupe aujourd'hui. Donc, c'est vraiment fort intéressant de
voir les recommandations que vous avez faites dans votre mémoire mais également les explications que
vous nous donnez.
Malgré qu'elles
soient limpides, je dois dire, il me reste quelques questions, précisions, en
fait. Mais je continuerais peut-être sur le... pas peut-être, en fait, je
continuerais sur l'échange que vous aviez avec le ministre sur la question de
l'âge, qui revient, oui, dans votre mémoire, mais qui revient dans plusieurs mémoires
qui nous ont été fournis aussi par les différents groupes qui viendront lors de
ces consultations.
Vous citez quelques
exemples à l'international qui soit ont fixé une limite d'âge plus tardive...
Là, vous faites référence, par exemple, aux Pays-Bas et à la Norvège qui ont
fixé un modèle, bon, de couverture publique mais en imposant une limite d'âge à 50 ans. Vous faites référence à
l'Allemagne, à l'Italie aussi, où, là, c'est vraiment le bilan médical
des patients qui est le seul critère, où il n'y a pas, donc, de critère d'âge.
Également... mais je ne les citerai pas, vous les connaissez, mais je voulais
que vous nous en parliez davantage.
Parce que la question
qui est au coeur de ces enjeux-là, justement, c'est d'opposer une limite, je ne
veux pas dire... je ne veux pas dire arbitraire, parce que ça ne serait
vraiment pas la bonne utilisation du mot, une limite d'âge, en fait, qui repose
sur certains critères. On l'a vu avec Dr Janvier ce matin, entre autres
sur toute les questions de la réserve
ovarienne, mais qui fait quand même abstraction aussi du jugement médical d'un
médecin qui pourrait convenir qu'une femme qui a un âge supérieur à celui qui
est encadré dans la loi pourrait avoir un bon succès aussi, également.
Donc, je voudrais
vous entendre davantage sur les exemples de ces pays-là, si vous êtes capable
d'élaborer davantage, mais je présume que oui, et sur ceux qui ont fixé... s'il
y a d'autres critères, par exemple le bilan médical, comment c'est déterminé, comment ça pourrait... En fait, c'est vraiment
pour nourrir notre réflexion pour quand on sera rendus à l'étude
détaillée du projet de loi.
• (16 heures) •
Mme Braun
(Céline) : Donc, pour nous, il y a une dizaine de pays qui,
actuellement, se basent uniquement sur l'évaluation médicale du médecin. C'est
dans ce sens-là que nous allons. Pour quelle raison? Qui de mieux qu'un médecin
peut confirmer qu'une personne est en santé pour enfanter? Donc, selon nous,
c'est important. Mettre un critère de 42 ans moins un jour, c'est comme
dire à la madame de 42 ans qui fait son footing tous les matins, qui est
super en «top shape» puis qui... zéro problème de cholestérol, ou tout ce...
(panne de son) ...une quarantaine, et lui dire :
Non, là, on a balisé ça, ce n'est pas grave, tu paies. Bien, si elle avait
41 ans, bien, elle a la même condition physique, elle a la même santé,
mais pour une année on vient lui enlever ce côté... Bien, personnellement, je trouve ça discriminatoire, tout simplement. C'est
discriminant de baliser ça à un âge bien précis.
D'ailleurs, on peut
voir qu'en Grèce, en Espagne l'âge limite est rendu à 50 ans. En
République tchèque, on est à 49 ans. Ce
sont tous des pays qui ont un fort taux de procréation médicalement assistée, puisqu'il
y a déjà du tourisme médical dans ces
pays-là. Donc, est-ce qu'on veut rapatrier nos Québécoises dans ces pays-là,
faire du tourisme médical, donner une
possibilité à engendrer des problèmes médicaux puis qu'on les
traite après ici, qu'elles perdent leurs enfants? Je trouve... C'est dans ce sens-là que nous, on
appuie le fait que la condition médicale doit être définie par un médecin.
Mme Montpetit : Merci beaucoup. Est-ce
que vous savez si, dans les pays auxquels vous faites référence justement...
est-ce qu'il y a plus de complications durant la grossesse? Est-ce qu'il y a
plus d'enfants prématurés? Parce que je
pense que c'est un peu la présomption, entre autres, qui est faite de limiter
l'âge et de s'assurer d'un taux de succès, mais de limiter aussi
d'autres complications. Est-ce que vous savez s'il y a des enjeux à ce
niveau-là?
Mme
Braun (Céline) : Quand on parle du tourisme médical, on parle aussi de
risques liés à l'implantation du nombre
d'embryons. J'ai eu connaissance, l'année passée, d'une Québécoise
qui est partie en République tchèque. Elle est arrivée là-bas, elle a eu
tous ses traitements, elle est rentrée avec ses embryons. Ils avaient pris
congé ici, ils pouvaient se le permettre. Quand elle est rentrée, elle avait
trois embryons d'implantés. La grossesse est partie, elle a commencé des
triplés, elle a été suivie. Deux des triplés sont décédés, et il lui reste une
petite fille. Donc, ça a été une grossesse à
risque qui a été traitée au Québec et non par les médecins suivant le dossier au
niveau de la République tchèque. Et c'est le genre de chose qu'on veut réellement
éviter en implantant une discrétion au médecin sur l'âge de la patiente.
Mme
Montpetit : Oui, que ça amène des comportements parallèles, si l'on ne
présente pas les solutions. Pour bien vous comprendre... Encore là, vous parlez
de discrimination par rapport à l'âge, mais dans les différents, dans le fond,
modèles qui existent à l'international, vous présentiez des modèles où l'âge
est beaucoup plus tardif, dans le fond, vous faisiez référence à 50 ans
pour quelques pays et d'autres où il n'y a pas d'âge du tout. Juste pour bien
vous comprendre, est-ce que, de votre point de vue, vous seriez... vous auriez
tendance à recommander, dans le projet de loi, qu'on s'en tienne uniquement au
jugement médical, sans aucune balise au niveau de l'âge ou qu'il y ait quand
même une balise, mais qu'elle soit supérieure, comme c'est fait dans d'autres
pays?
Mme Braun
(Céline) : Pour moi, j'irais avec le jugement médical, qui a déjà
prouvé bien des choses. Donc, on peut quand même laisser une liberté aux
médecins de pouvoir dire si la patiente est en santé ou non.
Mme
Montpetit : Vous avez bien dit «jugement médical», hein? Je
m'excuse... Oui? Parfait. Je vous remercie
beaucoup. Le son, des fois, ne rentre pas toujours bien. Je ne veux pas mal
vous citer par la suite. Merci beaucoup.
Dans vos
recommandations, aussi, vous avez recommandé d'augmenter l'âge maximal, dans le
fond, pour les services de congélation, d'entreposage du sperme jusqu'à
30 ans. À l'heure actuelle, c'est 25 ans. Puis je trouve que
l'argumentaire que vous faites au niveau de la réalité sociale de la population
du Québec... Je peux comprendre qu'à 25 ans, effectivement, un jeune homme
n'est peut-être pas encore dans ces réflexions-là aujourd'hui, en tout cas, pas
quand on voit que la moyenne, je pense
qu'elle est à 28 ou 29 ans, au niveau du Québec, pour un premier enfant.
Est-ce qu'encore là... est-ce qu'il y a des exemples à l'international
que vous souhaiteriez porter à notre attention ou juste commenter davantage sur
cet élément-là? Je trouvais ça intéressant.
Mme Braun
(Céline) : Je n'ai pas trouvé de statistiques internationales pour ce
point-là. Selon nous, c'était surtout que les jeunes hommes aujourd'hui, là,
ils ne pensent pas du tout à procréer à 25 ans, là. On peut demander à
beaucoup de monde, regardez autour de vous, posez des questions, vous verrez
qu'à 25 ans on a encore le goût de finir
ses études, d'essayer d'avoir une situation professionnelle afin de pouvoir
accueillir un enfant dans les meilleures conditions. Et ce qu'on voit
aussi beaucoup en infertilité, ce sont beaucoup de jeunes professionnels qui
passent par ces processus-là en infertilité. Donc, ils ont tous fini leurs
études, ils se sont installés dans la vie, puis ensuite on passe à l'étape
suivante qui est de fonder une famille.
Le Président (M.
Provençal)
: M. le député de Marquette.
M. Ciccone :
...et rapidement. Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, Mme Braun.
Moi, c'est sûr que, quand vous avez utilisé
le mot «discriminatoire», ça m'a un peu interpellé, parce que je suis persuadé
que le ministre, qui a un grand coeur, là, ne voudrait pas adopter un
projet de loi où il y a une forme de discrimination. Vous parlez de l'admissibilité des patientes au programme en
fonction d'une évaluation médicale. J'en suis, je comprends. Avez-vous
cependant... Mais avez-vous déterminé quand même une certaine limite
raisonnable, aussi, ou vous y allez seulement sur cette base-là d'admissibilité
en fonction d'une évaluation médicale?
Mme Braun
(Céline) : Moi, j'irais en fonction de l'évaluation médicale, parce
que je n'ai jamais entendu d'abus des médecins
dans le sens où on aurait dépassé l'âge d'une patiente au Québec.
C'est dans ce sens-là. Le jugement médical
au Québec est excellent. Ils ont aussi un outil, qui est
sorti en 2016, les lignes directrices du Collège des médecins qui les
guident également là-dedans. Et il est très important quand même
que, si on valide déjà la pratique de la procréation médicalement
assistée, on leur laisse un champ
libre de pouvoir décider si la patiente qui a 42 ou 43 ans peut bénéficier
de la procréation médicalement assistée.
M. Ciccone : Bien, merci de votre réponse. Je ne veux pas vous mettre dans
un coin, là, mais avez-vous un pourcentage de taux de réussite après l'âge de
42 ans, comme l'âge qui nous concerne ici dans le projet de loi?
Mme Braun
(Céline) : Bien, je vais voir. Juste un instant. Non, je n'ai pas ça malheureusement.
M. Ciccone :
Bien, merci beaucoup de votre témoignage. Puis surtout je pense qu'il faut vraiment
être à l'affût et prendre les bonnes
décisions, parce que c'est un projet
de loi qui est archihumain, et pour
certaines femmes ou ces couples, c'est la dernière chance d'avoir... de pouvoir
vivre la parentalité. Merci beaucoup de votre présence. Merci.
Le
Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Je
cède maintenant la parole à la députée de Sherbrooke pour
2 min 45 s. À vous.
Mme Labrie :
Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais ça vous demander : Est-ce que
ça répondrait à vos attentes qu'on laisse,
par exemple, une limite d'âge dans la loi jusqu'à laquelle ce serait d'emblée
admissible à un remboursement mais qu'on crée une possibilité, par
exemple, qu'au-delà de cet âge-là, sur recommandation médicale qui indique que
la personne a un taux de succès plus élevé que son âge, que ça puisse être
remboursable? Est-ce que ça répondrait à vos attentes? Ça créerait comme une
exception.
Mme Braun
(Céline) : Oui, ça serait une... Bien, justement, on pourrait créer
une exception, de dire que l'évaluation médicale a décidé que madame était
capable de pouvoir aller suivre un traitement. Oui, c'est tout à fait quelque
chose d'envisageable.
Mme Labrie :
J'aurais une autre question pour vous. Vous avez parlé des difficultés que peut
rencontrer un couple. Est-ce que, pour vous, ça devrait être inclus, dans le
projet de loi, d'offrir aussi du soutien psychologique aux couples qui entament
ces démarches-là?
Mme Braun
(Céline) : Oui, tout à fait. Ça devrait même être obligatoire, au
moins une séance avec un psychologue ou un psychiatre, peu importe, quelqu'un
qui va les guider, les informer et voir surtout si le couple est capable
d'endurer ça.
Mme Labrie :
Est-ce que vous avez des données sur les taux de séparation, par exemple, des
couples qui entament des démarches comme celles-là?
Mme Braun
(Céline) : Non. Nous, ce qu'on a eu beaucoup, ces cinq dernières
années, c'est qu'on est dans beaucoup de
médias sociaux, dans différents groupes de soutien, et il n'est pas rare de
voir : Mon conjoint s'est tanné, il s'en va, c'est juste mon projet de vie, ou : De toute façon, c'est
trop compliqué. Le problème financier, c'est reconnu. Là, on doit vendre la maison, alors on a décidé de
se séparer. C'est toutes des choses comme ça que l'on entend. Je vous dirais que, sur 10 couples, à peu près trois
se séparent, depuis cinq ans, qui n'endurent pas tous ces traitements de
fertilité.
Mme Labrie :
O.K. Je vous remercie.
Le Président (M.
Provençal)
: Ça va? Je vous remercie pour
votre contribution...
Une voix :
...
Le Président (M. Provençal)
: Il
n'est pas là. Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Je
suspends les travaux quelques instants afin que l'on puisse accueillir par
visioconférence le prochain groupe.
Je vous remercie
beaucoup, madame, pour l'ensemble des réponses que vous nous avez fournies.
Mme Braun
(Céline) : Merci de votre écoute.
Le Président (M.
Provençal)
: Bonne fin de journée.
(Suspension de la séance à
16 h 10)
(Reprise à 16 h 19)
Le Président
(M. Provençal)
: Alors, nous
reprenons nos travaux.
Je souhaite maintenant
la bienvenue aux représentants du Centre de la reproduction du Centre
universitaire de santé McGill. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission.
Je vous invite à vous présenter puis à débuter votre exposé. Je vous
cède la parole.
Centre de la reproduction du
CUSM
(Visioconférence)
Mme Sidorowicz (Ewa) : Oui. Alors, bon après-midi. Je me présente, je
suis Dre Ewa Sidorowicz, je suis la directrice des services professionnels au Centre
universitaire de santé McGill, et je suis accompagnée du Dr William
Buckett, qui va se présenter.
M. Buckett
(William) : Oui. Bon après-midi.
• (16 h 20) •
Mme Sidorowicz (Ewa) : Oui.
Dr Buckett est directeur du centre de reproduction, à notre hôpital, il
est le directeur de la division du service.
Alors, bon après-midi, le
Président, le ministre Carmant, bonjour, et aussi Mme et M. les députés. Alors,
d'abord, nous tenons à vous remercier de nous avoir invités à déposer un
mémoire sur le projet de loi n° 73. Et nous sommes heureux que le gouvernement
ait décidé de remplir cette promesse électorale. Nous sommes convaincus que ce
projet de loi représente un pas important vers l'amélioration de la santé
psychologique et physique et de la qualité de
vie de l'ensemble de la population du Québec. Nous décrirons le rôle de CHU en
général et celui de l'Université McGill, du CUSM et du Centre de la
reproduction du CUSM en particulier.
En guise d'introduction, l'Organisation mondiale
de la santé a déterminé, en 2020, que l'infertilité est un problème de santé publique.
L'infertilité et l'hypofertilité affectent une partie importante de la
population mondiale. L'OMS a calculé que plus de 10 % des femmes sont
touchées, des femmes qui sont restées dans une relation stable pendant au moins cinq ans, ont essayé en vain
d'obtenir une grossesse. Les résultats des estimations fondées sur une période
de deux ans indiquent une prévalence 2,5 fois plus élevée. On ne connaît
pas les chiffres des hommes.
Au Québec, au
moins un couple sur six se tourne vers un traitement contre l'infertilité. Le
fardeau de l'hypofertilité et de l'infertilité est important et
probablement sous-estimé.
L'infertilité est définie comme une maladie du
système reproducteur et donne lieu à une incapacité. Malgré le lourd fardeau qu'elle engendre, les couples et
les personnes qui souhaitent la réalisation et le maintien d'une grossesse
mais qui n'y parviennent pas ont des besoins qui restent souvent inassouvis et
subissent des effets non négligeables sur le
plan de la santé mentale. La gestion de l'infertilité comporte un vaste
éventail d'options d'évaluation et de traitement qui vont de simples
méthodes de sensibilisation à la fertilité aux médicaments oraux visant à
stimuler l'ovulation, par exemple, en cas d'infertilité anovulatoire, ou à la
chirurgie, par exemple, en cas d'endométriose, en passant par des technologies
de reproduction assistée plus avancées.
On peut également avoir recours à la FIV et aux
traitements associés pour adresser l'infertilité sévère, pour éviter des
maladies héréditaires chez les nouveau-nés, tenter de résoudre l'infertilité
imputable à l'homme, diminuer la
transmission des infections transmises sexuellement ou du VIH, faire face aux
conséquences de la maternité retardée et
aider les personnes qui doivent subir des thérapies contre le cancer
compromettant leur futur potentiel de reproduction.
Depuis 2010, le Québec assume les coûts liés à
l'évaluation et au traitement initial de l'infertilité, y compris la plupart des thérapies médicales et
chirurgicales pour les hommes et les femmes ainsi que l'insémination
intra-utérine. Toutefois, seules les personnes qui peuvent payer ont
accès à la FIV. Nous sommes convaincus que les mesures décrites dans le projet
de loi n° 73 accroissent l'accès aux traitements
contre l'infertilité pour les personnes les plus gravement affectées. De surcroît, il a été démontré que le fait
d'améliorer l'accès aux traitements de FIV aide à réduire l'âge auquel
les personnes se font traiter ainsi que la stigmatisation associée à
l'infertilité.
Maintenant,
pour parler du Centre de reproduction du CUSM. Le CUSM contribue à créer des
familles depuis l'établissement de sa clinique d'infertilité à l'Hôpital Royal
Victoria dans les années 1960. Il s'agissait de la première clinique en son genre au Canada, et elle a donné
naissance à certaines des premières publications scientifiques concernant
le traitement de l'infertilité. En 1996, le
Centre de la reproduction du CUSM a ouvert ses portes et est rapidement devenu
l'un des établissements d'infertilité chefs de file au Canada, grâce à
plusieurs premières nationales et internationales : première
naissance au monde suivant le transport aérien d'ovocytes et d'embryons, en
1998; première naissance en Amérique du Nord suivant la maturation d'ovocytes in vitro; premier
programme de diagnostic génétique préimplantatoire au Canada, en 1999, et première naissance, en 2000; première
naissance au Canada suivant l'implantation d'ovocytes congelés, en 2005; première
naissance en Amérique du Nord suivant la préservation de la fertilité grâce à
la MIV pour cause de cancer, en 2012; et premier réseau au Canada d'oncologie
pour la préservation de la fertilité, en 2017.
Depuis la
transition à un service autofinancé au sein du CUSM en 2015, le centre a
continué d'offrir une gamme complète et intégrée de services d'endocrinologie
de la reproduction et d'infertilité, notamment l'ensemble des technologies de
reproduction assistée, tout en maintenant ses activités universitaires et sa
réputation internationale. En 2020, le
centre du CUSM se distingue dans le domaine de la médecine de la reproduction
par ce qui suit : le volume d'activités cliniques; l'approche de
l'équipe multidisciplinaire, qui fait appel activement au personnel médical et
au personnel de disciplines connexes afin
d'offrir des soins complets et holistiques; l'excellence universitaire,
programme d'enseignement de spécialité et de sous-spécialité reconnu à
l'échelle nationale et internationale; et grande quantité de recherches de
grande qualité. Les services du réseau intégré de santé et de services sociaux
de McGill contribuent évidemment à supporter le programme.
Pour parler
de la mission clinique, notre équipe multidisciplinaire comprend plus de
60 personnes qui fournissent des
soins de qualité en faisant preuve de compassion dans un environnement
sécuritaire et professionnel, tout en étant à l'avant-garde des technologies et
des traitements en développement. Notre excellent rendement et notre position
de chef de file dans le domaine ont été reconnus par Agrément Canada au cours
de sa plus récente évaluation en 2019. Vous avez le document en annexe.
Nous formons
un centre d'excellence qui offre une gamme complète et intégrée de soins en
infertilité et endocrinologie de la reproduction, notamment par le biais
de services de préservation de la fertilité pour les patients atteints de néoplasie, hommes et femmes, de
chirurgie de la reproduction, de neuroendocrinologie, d'urologie, d'andrologie,
d'oncologie, de psychologie et de nutrition. Nous offrons en outre des traitements
pour les fausses couches à répétition, la
ménopause précoce et le syndrome des ovaires polykystiques. Notre taux de
grossesses multiples, pour tous les traitements, est de moins de 5 % et de
moins de 3 % pour la FIV en particulier. Nous avons des statistiques,
dans l'annexe 2 du document, qu'on vous a
envoyées, et je ne ferai pas tout le listing ici des différents éléments, vous
pourrez voir les statistiques.
Le taux de
grossesse clinique et le taux brut de natalité se sont continuellement classés
parmi les premiers 25 %
des cliniques canadiennes. Actuellement, le taux de grossesse clinique, en
2020, se compare très favorablement au taux national. Le
taux global de la grossesse par FIV est de 52 % pour tout le monde,
comparativement à la moyenne canadienne,
37 %. Le taux de grossesse clinique par transfert de blastocystes, à tout
âge, s'établirait à 72 %, comparativement
à la moyenne canadienne de 41 %. Et le taux de grossesse clinique par
transfert de blastocystes chez les femmes de moins de 35 ans est de
73 %, par rapport à la moyenne canadienne de 44 %. Compte tenu des
niveaux de dotation actuels, nous pouvons réaliser jusqu'à
2 300 cycles de FIV par année et nous possédons l'expérience, l'équipement
et l'espace nécessaires pour augmenter ce nombre au besoin.
Maintenant, pour vous parler de la mission
d'enseignement. L'enseignement, la formation et l'éducation font partie
intégrante de la mission du Centre de la reproduction du CUSM. Nous contribuons
largement à l'enseignement au sein de la Faculté de médecine de l'Université de
Montréal, notamment en dirigeant la composante... l'Université McGill — pardon — notamment
en dirigeant la composante sexualité et reproduction de l'enseignement
préclinique aux étudiants.
Nous sommes aussi impliqués dans l'enseignement
de dysfonctionnement du système reproducteur aux étudiants du programme clinique et l'enseignement de l'endocrinologie de
la reproduction et de l'infertilité aux résidents en obstétrique et
gynécologie. Cet enseignement aux futurs médecins contribue à améliorer la
santé sexuelle et la fonction reproductrice
de tous les Québécois. Notre équipe contribue également à l'établissement de
lignes directrices en matière d'infertilité et de procréation
médicalement assistée, tant... dans de nombreux domaines, notamment les
sciences infirmières, la psychologie, l'andrologie, et la gynécologie, et
l'endocrinologie de la reproduction.
Notre personnel conseille le gouvernement du
Québec et le gouvernement du Canada. Il rédige également des directives pour
des organismes nationaux et internationaux tels que le Collège des médecins du
Québec, la Société canadienne de fertilité et d'andrologie, la Société des
obstétriciens et gynécologues du Canada, le Collège royal des médecins et
chirurgiens du Canada, l'American Society of Reproductive Medicine et la
European Society for Human Reproduction and Embryology.
La médecine basée sur des données probantes est
au coeur de l'enseignement. L'équipe fait également partie de la Cochrane Collaboration et a rédigé plusieurs
analyses systémiques pour la Cochrane Database. Notre programme de
formation de sous-spécialité, bourse de recherche en endocrinologie de la
reproduction et fertilité, a été mis sur pied en 1976. C'était le premier au
Canada. Il reste le plus important au pays. Les médecins...
Le Président (M. Provençal)
: Docteure...
Mme Sidorowicz (Ewa) : Oui?
Le Président (M. Provençal)
: Excusez-moi, je suis obligé de vous interrompre parce que
votre temps est déjà écoulé. Alors, on va procéder maintenant avec la période
d'échange. Et la première personne, c'est le ministre, qui va faire un échange
avec vous. Alors, M. le ministre.
• (16 h 30) •
M. Carmant : Bonjour,
Dre Sidorowicz. Bonjour, Dr Buckett. Merci beaucoup de ce que vous
avez partagé avec nous. Et on voit clairement votre leadership sur le sujet.
Jusqu'à présent on a discuté avec beaucoup de
groupes de patients des limites, au niveau de l'âge, qu'on a placées, et plusieurs semblent nous
dire : Il faut se fier au sens clinique du médecin. Vous, qu'est-ce que vous pensez de l'âge limite de 42 ans qui a été décidé? Et
aussi j'aimerais ça entendre parler Dr Buckett, là, des conséquences sur
la maman, là, parce que personne ne parle de
ça, là, tellement, de la stimulation ovarienne et puis des grossesses chez les
femmes après l'âge de 40 ans.
M. Buckett (William) : Est-ce que je
peux répondre, Ewa?
Mme Sidorowicz (Ewa) : Oui.
M. Buckett (William) : O.K. Alors,
avec la limite d'âge de 42 ans, toujours, on a besoin d'avoir une balance
entre l'efficacité du programme et les coûts. Alors, comme vous savez bien, il
y a beaucoup de pays qui limitent le programme à 40, 41, 42 ou 43, alors je crois qu'avec un âge
limite pour les cycles couverts financés par le gouvernement, d'avoir une limite d'âge à 42, je crois que ce
n'était pas quelque chose de très mal si on compare avec les autres juridictions, les autres États,
les autres pays. Aussi, je crois fortement, si on met une limite comme ça, ça va
encourager la population
d'«accesser» ces traitements à un âge plus jeune et ça va peut-être
réduire l'âge. On trouve... et peut-être, quand
vous allez parler, aussi... vous avez déjà parlé avec l'AOGQ, une des inquiétudes avec les
mères... (panne de son) ...âgées que
c'est plus lourd pour le système de santé, avec plus de complications. Et, si on
peut encourager tout le monde à avoir les enfants plus jeune, ça va...
cette décision va aider ça, je crois.
M. Carmant : D'accord. Merci. Et
pouvez-vous me parler également de la préservation de la fertilité, là? Vous
semblez également avoir une grande expérience là-dessus. On a décidé de sortir tout
simplement du spectre du cancer mais aller vers d'autres maladies qui sont
associées avec une perte de fertilité comme le déficit immun. Pouvez-vous nous
en parler un petit peu, de votre expérience avec la préservation de la
fertilité et puis le programme qu'on met sur pied?
(Panne de son)
M. Carmant :
On vous a perdus. On ne vous entend pas.
Mme Sidorowicz (Ewa) : Ce que je
voulais dire, c'est que ça fait partie d'une de nos recommandations. Je n'ai malheureusement
pas eu le temps de les lire, il y en a six, dont celle-là, mais je vais laisser
Dr Buckett parler de l'expérience clinique.
M. Buckett (William) : Alors, certainement
qu'on trouve... écoutez, oui, c'est bien établi chez quelqu'un qui a besoin
d'avoir la... (panne de son) ...pour le cancer, on peut retirer les ovules, les
congeler, et on a des... plusieurs naissances après ça. Mais ce qu'on trouve un
peu injuste est qu'on a des patientes qui ont besoin, néanmoins, de prendre la...
(panne de son) ...ou qui ont un diagnostic du cancer, alors si
on peut les couvrir peut-être un petit peu plus...
M.
Carmant : D'accord,
merci. Donc, augmenter. On est d'accord avec l'augmentation des indications. Une chose qui m'a surpris dans
le projet, c'était que, dans certaines conditions, on laissait la possibilité d'implanter deux embryons. J'en ai parlé ce matin avec
l'Association des pédiatres, qui semblait dire que c'était peut-être plus au
niveau des obstétriciens gynécologues que ça se... d'où venait cette idée-là.
J'aimerais avoir votre avis là-dessus puis le... pourquoi, est-ce que vous
pensez que c'est une bonne idée ou pas.
M. Buckett (William) : D'ouvrir un
petit peu la possibilité de transférer deux embryons chez quelqu'un de moins de
37 ans?
M. Carmant : Exactement. C'est ce
qui est dans le projet.
M. Buckett (William) :
Personnellement, je crois, un des grands succès avec le programme québécois est
qu'on... (panne de son) ...que c'est limité à un embryon. Alors, je ne suis pas
convaincu qu'on... (panne de son). Si on a deux embryons qui n'ont pas une très
bonne qualité, est-ce qu'on transférerait ces deux embryons-là, mettons? Est-ce que ça va vraiment augmenter le taux de
réussite? Je ne suis pas sûr. O.K.? Oui, je comprends, si on va transférer
un et puis on va congeler l'autre... (panne de son) ...peut-être on a perdu une
possibilité, mais ce n'est pas... Alors, on a trouvé, depuis les derniers cinq
ans, où on a transféré juste un seul... (panne de son) ...chez tout le monde
moins de 37 ans, on n'a pas eu beaucoup de cas où on a cru : Oui, on
a besoin de transférer deux. Alors, peut-être de garder la situation qu'on a
couramment va un peu mieux.
M. Carmant : D'accord, merci. Et je
sais que le CUSM contribue beaucoup avec d'autres centres de niveau pour... au niveau des cliniques de fertilité.
Pouvez-vous me commenter un petit peu comment ça se passe entre les différents
centres puis comment faciliter le... Parce
que nous, on veut centraliser les demandes et s'assurer d'une certaine équité,
là, dans les services. Pouvez-vous
nous parler de vos relations avec les centres à l'extérieur de Montréal
puis comment ça se passe?
M. Buckett (William) : Alors,
ça fonctionne avec plus de télémédecine. Alors, souvent, les centres satellites
vont faire le... commencer le traitement. Initialement, ils vont faire la
stimulation, faire les échographies, ils vont envoyer par fax les... ou même
avec le système d'ERM, dossier électronique médical, le résultat de
l'échographie, et on peut les ...(panne de son ...et puis expliquer les
prochaines étapes. Alors, ça va réduire le besoin de venir montrer à Montréal, sauf que... (panne de son) ...bien sûr,
ils vont venir. Alors, on croit que c'est un petit peu plus de travail parce qu'il y a beaucoup d'appels
téléphoniques, etc., mais ça évite les... (panne de son) ...venir ici pour tout
le traitement.
M. Carmant : Et êtes-vous
satisfaits avec le système ou il y a des choses qu'on devrait améliorer?
M. Buckett (William) :
Toujours, on peut améliorer le système qu'on a. Peut-être, si on a une façon
de... peut-être plus vite, si on peut voir les images d'écographie, des choses
comme ça, peut-être, ça va être un petit peu plus
efficace. Parce que, quelquefois, on a les situations, on a... (panne de son)
...de cliniques satellites, mais ce n'est pas exactement le même si
on... (panne de son) ...si on le voit nous-mêmes.
M. Carmant : Parfait. M. le
Président, je passerais la parole à la députée de Roberval.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, maintenant, ça va être la députée de Roberval qui
va vous adresser quelques questions. Mme la députée.
Mme Guillemette : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci à vous d'être ici pour répondre à nos
questions. Moi, je voudrais en savoir plus
un peu sur la recommandation n° 4, donc, qui parle de santé mentale, l'infertilité
et les traitements connexes, vous dites, qui «sont liés à une
détérioration de la santé mentale à court et à moyen terme... à court et [...] long terme.» Donc : «La
couverture de la prestation des services de santé mentale spécifiquement
associés à l'infertilité et aux
traitements connexes réduirait l'impact sur la santé mentale...» Donc,
j'aimerais vous entendre un petit peu longuement là-dessus, s'il vous
plaît.
M. Buckett (William) : Ewa,
est-ce que je...
Mme Sidorowicz
(Ewa) : Oui, s'il te plaît...
M. Buckett (William) : Alors, quand
la... (panne de son) ...2015, on a toujours eu des psychologues dans les
cliniques qui vont aider des couples... (panne de son) ...difficultés avec
l'infertilité, avec le traitement de l'infertilité. Et puis, quand le programme
a été réduit avant, on était incités de... si les patients ont besoin de ces
réunions, ces consultations psychologiques,
ils étaient obligés de les payer.
Alors, je crois, si... ou on croit, si on va ouvrir la FIV à tout le monde, aussi, on doit avoir la possibilité,
encore couverte par la RAMQ, d'avoir des consultations psychologiques.
Mme Guillemette : À même les
cliniques, des consultations gratuites?
• (16 h 40) •
M. Buckett (William) : Oui, exactement.
Mme Guillemette : Parfait. O.K. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée de Lotbinière-Frontenac
maintenant va vous adresser une ou deux questions.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Merci. Moi, je voulais savoir où est-ce que vous voyez la place du privé versus
le public pour offrir des services.
M. Buckett (William) : Ewa ou... O.K. C'est moi qui vais répondre. Alors, certainement,
il y avait peut-être une... des pensées, avant, quand tout était couvert et ça
coûtait trop, que peut-être il n'y a pas des balises, peut-être les
cliniques... Ce n'est pas nécessairement les cliniques privées qui ont fait des
mauvaises choses, mais il y avait une impression que peut-être ils ont vu beaucoup
de patients plus vite, etc. Alors, si on... (panne de son) ...ça va être peut-être
le... on peut mieux contrôler le nombre de cas, les coûts, etc. Et aussi, dans
une façon un petit peu plus... je veux dire, spécifiquement, que, si on a une
clinique privée, peut-être de... How do you say «the owners»,
the... who owns the clinic?
Mme
Sidorowicz (Ewa) : ...
M.
Buckett (William) :
Yes. Les propriétaires — excusez-moi — les propriétaires des cliniques qui viennent
des États-Unis ou à l'extérieur du Québec, tous les profits qui sont faits en
faisant ces traitements qui sont payés par la
RAMQ... (panne de son) ...Québec. Alors, si, en faisant les traitements...
(panne de son) ...il y a un petit peu d'argent qu'on a plus qu'on avait
vraiment besoin, ça va continuer de rester dans le système de santé public.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Est-ce qu'il reste encore du temps?
Le Président (M. Provençal)
: Oui. Une question, par la suite M. le ministre...
Mme
Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Bien, tout à l'heure, on a parlé à
différents groupes qui nous disaient que les couples ont souvent besoin
de soutien psychologique, on en a parlé aussi tout à l'heure. C'est quel type
de professionnels... moi, je n'ai jamais vécu ça, là, mais quel
type de professionnels ces couples-là ont besoin? Parce qu'on a parlé de
psychologues, de psychiatres, est-ce que... Puis est-ce que ça serait possible,
des travailleurs sociaux, aussi, selon les besoins?
M. Buckett (William) : Oui,
excusez-moi, j'ai oublié de dire ça, mais on a les psychologues, les
psychiatres et les travailleurs sociaux.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
O.K.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. M. le ministre.
M. Carmant : Oui, peut-être une
dernière question, Dr Buckett. On a eu une discussion sur le nombre d'inséminations artificielles, six, neuf, trois,
puis certains parlent que plus on les met haut, plus on augmente le nombre,
ça risque d'entraîner de l'acharnement, là,
au niveau de l'insémination. Que pensez-vous du chiffre qu'on a établi dans
le programme, de six inséminations avant d'aller à la FIV?
M. Buckett (William) : Bien, je
crois que c'est une bonne... Excusez-moi. Bien, c'est le bon compromis, alors, parce que, certainement, après les
premières trois inséminations, le taux de réussite tombe un petit peu, mais il
y a encore beaucoup de monde qui vont
tomber enceinte pour les prochains trois, alors, les inséminations... (panne de
son). Je crois, après six inséminations, la probabilité qu'on va
réussir, si on continue, est très, très, très basse, alors c'est beaucoup
d'argent pour rien.
M. Carmant : O.K. Et diminuer à
trois?
M.
Buckett (William) : Si on diminue à trois, peut-être, il y a quelques
situations où on peut éviter en allant pour FIV... (panne de son) ...avec les
traitements avec sperme de donneur, par exemple, par un historique... (panne de
son). Dans ce cas, vraiment, on peut continuer avec six.
M. Carmant :
Merci beaucoup.
Le Président (M.
Provençal)
: Ça va?
M. Carmant :
C'est tout pour moi.
Le Président (M.
Provençal)
: Pas d'autres questions?
M. Carmant :
Non, c'est bon pour moi. Est-ce qu'il y en a d'autres?
Le Président (M.
Provençal)
: Ça va.
M. Carmant :
Merci.
Le Président (M.
Provençal)
: Alors, merci, M. le ministre.
Alors, nous allons céder maintenant la parole à la députée de Maurice-Richard,
pour un échange avec nos représentants.
Mme
Montpetit : Merci, M. le Président. Je pensais que vous n'aviez pas
terminé. Merci, M. le Président. Dre
Sidorowicz et Dr Buckett, merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui, de
prendre le temps de nous instruire avec votre expertise et de répondre à
nos questions.
J'offrirais
peut-être juste la possibilité... j'entendais Dre Sidorowicz, tout à l'heure,
dire qu'elle n'avait pas complété la
présentation de ses recommandations, là. Je ne sais pas si, au fil des
réponses, elle les a toutes couvertes ou si elle désirait prendre quelques
instants pour compléter et nous présenter... je pense qu'il en restait deux
peut-être à présenter encore.
Mme Sidorowicz
(Ewa) : Oui, tout à fait. Bien, en fait, là, le document parle aussi
du volet recherche, mais peut-être que... pour sauter au niveau des
recommandations. Donc, on a parlé déjà de l'expansion au niveau d'autres
indications où les patients sont privés de fertilité par des traitements...
(panne de son) ...mais il y a aussi la question du diagnostic génétique
préimplantatoire qu'on propose, dans notre document, de faire financer dans le projet
de loi. Donc, la justification est expliquée
ici, je n'en ferai pas la lecture, mais nous pensons que, quand même,
en se fondant sur l'expérience, la nôtre, et avec les données de
Sainte-Justine, on peut s'imaginer, à
peu près, sur 120 cycles,
de devoir faire ces tests-là, et qu'on considère que ce n'est pas un grand prix
à payer en vue du bienfait important apporté
à de nombreux couples ayant... (panne de son). Donc, ça, je pense que c'est un
élément important à souligner.
Je
pense, aussi... le nombre de cycles couverts qui était comme première recommandation, alors la suggestion, justement,
de ne pas financer seulement un cycle, mais de considérer potentiellement un
deuxième ou peut-être même un troisième cycle dans le
financement qui sera proposé.
La
question de la santé psychologique a déjà été adressée, et je pense que c'est
important pour le suivi des patientes à beaucoup de niveaux, là, puis je
ne pense pas qu'on a besoin de revenir là-dessus.
La
question du privé versus le public, nous pensons qu'il y a... (panne de son) ...à jouer par les centres
hospitaliers qui donnent ce traitement-là. Présentement, c'est situé au
niveau des CHU. On pourrait s'imaginer d'autres hôpitaux impliqués aussi. Mais
il y a une question de contrôle, d'encadrement... (panne de son) ...auprès du
gouvernement, je pense, qui est important puis qui est offert via la plateforme
publique.
Et finalement, là où
on s'est peut-être un petit peu moins mouillés, mais où on trouve qu'il y a
quand même un élément important à aller regarder, c'est toute la question de la
réglementation du financement en ce qui a trait au don d'ovules ainsi que la situation des mères porteuses. On est très
sensibles à cette dynamique-là, il y a une expertise au CUSM dans cette... au niveau justement de cette
clientèle-là, qui est très importante, qui a quand même une certaine souffrance au niveau de la fertilité, et on pense
que cette question-là mérite d'être analysée et potentiellement amenée
dans le parapluie de la couverture.
Alors, c'était
peut-être ces éléments-là que j'aurais voulu rajouter tantôt, puis je m'excuse
d'avoir pris trop longtemps pour ma lecture.
Mme
Montpetit : Non, pas du tout, c'est un sujet... certainement un sujet
complexe, donc on vous restreint à 10 minutes
dans les échanges, donc on comprend très bien qu'avec la meilleure des
volontés, souvent, on n'a pas le temps de passer par-dessus. C'est pour
ça je vous offrais mon temps.
Mais
je reviendrais à la question, bien, du diagnostic du dépistage, je pense, vous
avez utilisé les deux mots, là, pour... préimplantatoire. Sans faire la
lecture exactement, est-ce que vous pourriez nous l'expliquer? Moi, je ne suis vraiment
pas une experte à votre niveau de ce domaine-là, puis je... comme vous avez peu
de recommandations, mais elles sont très précises, donc je comprends qu'elles
sont importantes aussi, si vous pouviez juste élaborer un petit peu sur
l'impact que ça aurait... la différence que ça ferait pour des couples et des
femmes.
Mme Sidorowicz
(Ewa) : Oui. Bien, écoutez, j'inviterais peut-être mon collègue, qui
est plus expert que moi dans le domaine, peut-être
de vous faire quelques précisions là-dessus, justement, au
niveau de cette vérification-là d'embryons... (panne de son) ...pour s'assurer qu'il n'y a
pas de maladie génétique. Mais Dr Buckett pourra certainement en dire plus.
M. Buckett
(William) : Quand on fait des traitements de DPI... (panne de son)
...on crée les embryons et on peut faire les tests chez... (panne de son).
Alors, si on a un couple qui... les deux sont des porteurs avec une maladie
sévère, peut-être qu'il y a possibilité, 50 %, 25 %, que leurs
enfants vont avoir une maladie sévère, et souvent on trouve ça après la
naissance du premier enfant. Et puis, après ça, ils ont le choix de ne pas
avoir d'autres enfants... encore en faisant les tests prénataux puis un
avortement, ou de peut-être utiliser le traitement avec un don de sperme, ou
quelque chose comme ça.
Alors, c'était
quelque chose très lourd pour ces couples, et, à cause du fait qu'ils ont déjà
un enfant... (panne de son) ...souvent ils n'ont pas beaucoup d'argent pour
payer pour un... FIV et puis le DPI aussi. Et on trouve que ça affecte beaucoup
de monde, mais... nombre de cycles qu'on va... familles, excusez-moi, et
beaucoup de monde dans ces familles, mais ça ne va pas coûter beaucoup d'argent
si on va faire peut-être un autre 100, 150 cas par année, et on...
vraiment réduire ce taux de maladies. Alors, je crois que c'était quelque chose
important à quoi faire.
• (16 h 50) •
Mme Montpetit :
Parfait. Je vous remercie, Dr Buckett. Je voudrais revenir aussi à la question
de l'âge, le ministre l'a abordée, là, effectivement, c'est un élément qui
revient dans les différents mémoires qui ont été portés à notre attention. J'entendais
votre réponse, Dr Buckett, puis qui est un excellent argument, de dire :
Effectivement, quand on maintient une limite d'âge, ça va amener un choix
peut-être de façon plus jeune. Ceci dit, la vie étant ce qu'elle est, parfois, on fait le choix au moment
où on rencontre la personne ou au moment où la vie nous le permet ou pas.
On
portait à notre attention, ce matin, dans un autre échange, que d'autres
sociétés ont fait le choix de soit amener la limite d'âge beaucoup plus tard,
donc autour de 50 ans, on faisait référence, entre autres, aux Pays-Bas,
la Norvège, et d'autres pays d'Europe aussi ont tout simplement éliminé la
question de la notion d'âge et sont allés sur, vraiment, le jugement médical.
J'aimerais ça vous entendre sur cet élément-là, est-ce que ces pays-là... Je ne
veux pas juger de leur décision, mais je pense que ça doit être basé, aussi,
sur une certaine littérature scientifique, sur des données probantes, là.
M.
Buckett (William) : Et,
quand ils ont fait la limite d'âge à peut-être vers 50, la plupart de ces
cas, après 43, va utiliser les ovules d'une... (panne de son). Et ce
n'était pas clair, par exemple, en Norvège, où ils vont trouver les ovules des donneurs. O.K.? Alors, oui, ils vont
dire que, oui, on va... (panne de son) ...mais ce n'était pas le vrai coût
parce qu'on va avoir les ovules qui viennent de quelqu'un plus jeune,
est-ce qu'ils viennent des banques... (panne de son).
Aux Pays-Bas, vous
m'avez dit que c'était aussi... c'est élevé, l'âge. Je crois que c'est encore
pour... un don d'ovules, alors c'était... Si, avec les traitements de FIV avec
leurs propres ovules, le grand plupart des juridictions vont arrêter après,
peut-être, maximum 45, quelque chose comme ça. Mais, comme j'ai dit avant,
c'est toujours une balance, on a besoin d'avoir un compromis aussi. Parce que,
si on fait des traitements chez quelqu'un à 45 ans, probablement, ça va
fonctionner, et ça va coûter vraiment plus parce qu'on a besoin de donner plus
de médicaments, un dosage vraiment plus élevé, etc. Alors, c'est pour ça que ça
va coûter plus pour moins de résultats.
Mme
Montpetit : Mais, outre les enjeux... Oui, je faisais référence aux
Pays-Bas, c'est ce qu'on nous notait, puis l'Allemagne, l'Italie, qui
n'auraient pas du tout de contrainte d'âge. Mais, outre les aspects financiers,
est-ce qu'il y a des conséquences au niveau
foetal, au niveau de la grossesse, au niveau de la mère, au niveau de l'enfant,
au niveau du nombre de prématurés, vraiment au niveau santé, est-ce que
vous êtes au courant si on observe des conséquences qui ne nous amèneraient pas
à prendre cette direction-là?
M. Buckett
(William) : Mais certainement, le plus âgé que quelqu'un est pendant
une grossesse, ça peut avoir plus de problèmes. Alors, si quelqu'un est
enceinte à l'âge de 47, 48, la probabilité d'avoir des complications pendant la grossesse peut... pour leur santé est
vraiment élevée, pour le diabète, pour la tension artérielle, pour les maladies
du coeur, pour les crises cardiaques, tout ça, c'était plus élevé. Est-ce qu'il
y a du monde qui sont capables de porter une grossesse... (panne de son)
...bien sûr, mais la probabilité d'avoir des complications, comme ça, est plus
élevée.
Le Président (M.
Provençal)
: Il reste une minute.
Mme
Montpetit : Bien, une
peut-être dernière question, juste pour compléter ça. Est-ce que, justement, le
risque de complication peut être
évalué... pourrait être évalué par un médecin, justement? Encore là, on essaie
de faire la part des choses entre le jugement médical et la contrainte d'âge
très fixe. Est-ce qu'il n'y a pas un avantage à ajouter une certaine
souplesse pour permettre à un médecin de faire cette évaluation-là?
M. Buckett
(William) : Mais certainement, si on va faire un traitement chez
quelqu'un plus âgé, de 45 ans... automatique, presque obligé d'avoir une
consultation avec un spécialiste pour déterminer les risques pour cette madame d'avoir un enfant et pour faire le plan des
suivis pendant la grossesse. Alors, ça, c'était fait déjà, et j'espère que
c'était fait partout.
Le
Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Nous en
sommes maintenant avec un échange avec la députée de Sherbrooke. À vous
la parole.
Mme Labrie : Merci, M. le Président.
Je veux revenir sur votre recommandation n° 4, là, sur les prestations de
traitement en santé mentale. Est-ce que vous avez des données, justement, sur
cet enjeu-là des problèmes de santé mentale auprès des couples qui subissent
des traitements, sur les taux de séparation, par exemple, sur l'impact de ces
enjeux-là sur le succès des traitements, par exemple?
M. Buckett (William) : Comme la
probabilité d'avoir de la dépression, de l'anxiété, des chiffres comme ça, oui.
Alors, au moins 50 % des couples qui souffrent de l'infertilité ont un
degré de dépression et de l'anxiété. Et ça augmente
souvent pendant les traitements, alors plus de journées qu'ils ont pris des
congés de travail, par exemple, les médicaments, les consultations, etc.
Alors, c'était quelque chose très lourd.
Mme
Labrie : Est-ce que vous
pensez que ça... est-ce que ça améliore aussi le succès des traitements, le
fait de soutenir les personnes pour réduire les signaux de dépression
puis d'anxiété?
M. Buckett (William) : Oui et non.
Quelquefois, oui, ça aide si le traitement a réussi. Mais même si... tombe enceinte, pendant la grossesse, on peut voir plus
de problèmes d'anxiété et on a un taux un petit peu plus élevé de... on dit «dépressions postnatales», alors de
dépressions après la naissance. Alors, cette population a besoin d'être suivie
un petit peu plus prudemment.
Mme
Labrie : En ce moment,
est-ce qu'elles ont accès à des services dans le réseau public par rapport à
ça, ou c'est impossible?
M. Buckett (William) : ...excusez-moi,
je n'ai pas entendu.
Mme
Labrie : Est-ce que les
couples et les patientes qui vivent, par exemple, une dépression ou des enjeux
de santé mentale en lien avec leurs traitements, est-ce qu'elles ont
accès, en ce moment, à des services dans le public ou elles doivent presque
toujours aller au privé?
M. Buckett (William) : Oui, mais
c'est plus dur. O.K.? Alors, quelquefois, on a besoin d'attendre sur la liste
d'un CLSC, etc. Et on croit, si on a une population qu'on peut cibler pour ces ressources
avant, et pendant, et après la grossesse, ça va être mieux.
Mme Labrie : Parfait. Je vous
remercie.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Je suspends
les travaux quelques instants afin que l'on puisse accueillir par visioconférence le prochain groupe. Merci beaucoup à vous deux.
(Suspension de la séance à 16 h 58)
(Reprise à 17 h 09)
Le
Président (M. Provençal)
: Nous reprenons nos
travaux. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du Centre
de procréation assistée du Centre hospitalier universitaire de Sainte-Justine.
Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi
nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à débuter
votre exposé. À vous la parole.
Centre de procréation assistée du Centre hospitalier universitaire
Sainte-Justine (CPA du CHU Sainte-Justine)
(Visioconférence)
M. Dahdouh
(Elias) : Donc, merci beaucoup.
Je m'appelle Elias Dahdouh, je suis directeur médical du Centre de
procréation assistée au CHU Sainte-Justine, et je suis le fondateur, et je suis
directeur médical depuis 2013, depuis l'inauguration du centre.
• (17 h 10) •
M.
Desrosiers (Pascal) : Pour
ma part, mon nom est Pascal Desrosiers, je suis le chef d'unité de soins ici,
au Centre de procréation assistée du CHU Sainte-Justine, et chef
embryologiste aussi.
M. Dahdouh (Elias) : Donc, M. le
Président, M. le ministre, Mmes et MM. les parlementaires, le CPA du CHU
Sainte-Justine, il vous remercie de lui donner l'opportunité de partager ses
réflexions sur le projet de loi n° 73 modifiant les diverses dispositions en matière de
procréation assistée, qui a été déposé le 11 novembre dernier par
le ministre délégué à la Santé,
M. Lionel Carmant. Ce projet de loi permet, entre autres, le retour de la
couverture publique des services de fécondation in vitro, qui ont été
abandonnés en 2015, et va rétablir ainsi l'accessibilité aux services
nécessaires à la réalisation du projet parental de nombreux Québécois.
Le projet sous sa forme actuelle, il propose les
balises suivantes : six cycles d'insémination intra-utérine; un cycle
de fécondation in vitro incluant deux stimulations ovariennes, un
prélèvement d'ovules et le transfert éventuel de
tous les embryons générés par ce cycle; une couverture pour la fécondation
in vitro pour les femmes âgées de 18 à 41 ans; une extension des indications médicales pour les
services de la préservation de la fertilité, incluant tout patient recevant
des traitements gonadotoxiques ou
chirurgicaux qui sont néfastes aux fonctions reproductives, la période
d'entreposage des gamètes, embryons
ou tissus est aussi bonifiée à 5 ans ou jusqu'à l'âge de 25 ans,
selon la dernière éventualité; par contre, les personnes ayant subi une
stérilisation volontaire sont exclues du présent programme.
Cependant, ce projet tel que présenté, il exclut
les indications pour le diagnostic génétique préimplantatoire, qu'on appelle
DPI, pour les couples porteurs de mutations génétiques sévères ou anomalies chromosomiques.
Ces indications devraient, à notre avis, être incluses dans le nouveau
programme. De plus, nous croyons que les six inséminations couvertes par
le nouveau programme ne devraient pas s'ajouter à celles qui ont été déjà
réalisées précédemment, et ceci, dans le but de favoriser le traitement le plus
efficace, étant la fécondation in vitro, et médicalement indiqué après
échec de plusieurs cycles antérieurs d'insémination, limitant ainsi les coûts
additionnels à des traitements qui sont peu efficaces.
Nous saluons les nouvelles balises proposées
qui vont permettre à la fois un programme public complet en procréation
assistée, couvrant les traitements les plus efficaces et sécuritaires aux
patients admissibles, et permettront une pérennisation du programme par
l'entremise d'un meilleur encadrement et un contrôle des coûts. Ces balises
sont, par ailleurs, en arrimage avec les dernières recommandations publiées
dans le rapport du commissaire Salois.
Nous remercions le ministre Carmant de permettre
aux médecins du réseau de l'infertilité, et notamment le CPA Sainte-Justine, de
remplir leur mission académique de recherche et d'expertise clinique pour le
bien-être des personnes prises avec l'infertilité et nécessitant la procréation
assistée pour accomplir leur projet parental.
Ayant reçu le mandat ministériel de développer
une offre de service complète en procréation assistée en 2010, le CHU
Sainte-Justine a rapidement mobilisé ses équipes à la production d'un plan
d'affaires afin de mettre en oeuvre tous les services de deuxième et troisième
ligne en collaboration avec les partenaires intra et inter-RUIS. Des ententes
de service ont été développées avec des partenaires réseau de régions du centre
et de l'est du Québec afin d'offrir une prise en charge la plus complète
possible sur une grande partie du territoire québécois.
Le programme
de préservation de la fertilité, particulièrement chez les jeunes femmes et
adolescentes atteintes de néoplasie,
est de plus en plus sollicité au CHU Sainte-Justine. Une approche
multidisciplinaire et une collaboration étroite avec le département
d'hémato-onco permet une prise en charge rapide et efficace. En plus, notre
projet de recherche sur la cryopréservation
du cortex ovarien par vitrification a déjà débuté dans notre centre depuis
février 2019. Ceci représente
une première avancée canadienne dans le domaine. Plusieurs jeunes filles
adolescentes ou prépubères nécessitant des traitements gonadotoxiques,
pour qui la congélation d'ovules ne serait pas une option possible, en ont déjà
bénéficié pour l'année 2019-2020.
Comme vous le savez, le CPA du CHU Sainte-Justine a eu comme mandat initial de développer
un programme provincial de diagnostic préimplantatoire pour les couples
qui sont porteurs de maladies monogéniques sévères ou remaniements
chromosomiques tels que les translocations, un programme qui n'a jamais, malheureusement,
pu démarrer à cause des contraintes budgétaires du ministère de la Santé et des
Services sociaux. Cependant, selon les travaux de notre comité local de DPI,
en 2014, on a estimé que 100 à 150 cycles, au maximum, pourraient
avoir besoin d'un diagnostic préimplantatoire par année. En fait, ce traitement
représente une alternative au diagnostic prénatal, qui est déjà offert au CHU
Sainte-Justine pour les couples qui ne désirent pas avoir recours à
l'interruption médicale de grossesse en cas de grossesse affectée. Le DPI
représenterait ainsi une prise en charge complète et adéquate pour la prévention des maladies génétiques ou chromosomiques en
question. Le CHU Sainte-Justine représente déjà le centre de référence en matière de diagnostic prénatal. Les coûts des analyses génétiques, qui sont faites
souvent par CGH ou par PCR, sont déjà couverts par le régime public de la RAMQ
en prénatal, suite à la biopsie choriale et l'amniocentèse et, à notre opinion,
devraient être couverts aussi pour la procédure du diagnostic préimplantatoire.
Il ne faut pas oublier que le DPI pourrait ainsi
amener des économies importantes pour le système public en réduisant les coûts liés à la prise en charge et
aux traitements chroniques pour ces pathologies génétiques assez sévères.
Il va amener aussi une économie importante en lien avec la diminution des coûts
liés aux interruptions médicales de grossesse et leurs complications
potentielles — pour
en nommer, la rétention placentaire et l'infection — qui vont nécessiter
deux à trois jours en moyenne d'hospitalisation supplémentaires.
Il est
important de noter que le CPA du CHU Sainte-Justine possède une mission
académique essentielle. En effet,
plusieurs résidents en obstétrique-gynéco, des fellows en EGRI, des experts de
l'UdeM ainsi que des étudiants internationaux en embryologie clinique ont déjà
bénéficié d'un enseignement et d'une exposition hors pair au sein de notre institution.
De plus, la recherche et le rayonnement font
partie intégrante de notre mandat. Ainsi, les médecins du CPA du CHU
Sainte-Justine, au CPA, sont auteurs de plusieurs publications qui ont eu un
impact important sur la pratique internationale
en procréation assistée, comme dans le domaine du diagnostic préimplantatoire
ou l'échec d'implantation. Nos
médecins ont été conférenciers invités à plusieurs fois par année dans
plusieurs congrès nationaux et internationaux.
Finalement,
depuis son inauguration en 2013, le CPA organise à tous les deux ans
un symposium international en procréation assistée. Plusieurs
conférenciers locaux, nationaux et internationaux, avec plus de
100 participants, font de cet événement un vrai
succès. En effet, un symposium aura lieu le 4 juin 2021 sur le thème Mise
à jour des traitements de procréation assistée, un sujet qui sera assez
intéressant pour tous les médecins spécialistes du Québec, avec le retour tant
attendu du programme public pour la couverture de la fécondation in vitro.
En conclusion, ce projet de loi permet le retour
de la couverture publique des services de fécondation in vitro et rétablira
ainsi l'accessibilité aux services complets, efficaces et sécuritaires qui sont
nécessaires à la réalisation du projet parental de nombreux Québécois.
Le CPA du CHU Sainte-Justine appuie le projet de
loi no° 73 et en salue les balises. Nous croyons, en effet, que ces
dernières vont permettre une pérennisation du programme par l'entremise d'un
meilleur encadrement et contrôle des coûts.
Le CPA du CHU Sainte-Justine fera tout le
nécessaire pour répondre à l'augmentation prévue de la demande en procréation assistée et continuera de renforcer,
en collaboration avec ses partenaires actuels et futurs, l'offre de service
dans le réseau public.
Nous invitons le ministère de la Santé et des
Services sociaux à considérer l'intégration des coûts liés au DPI chez les patients porteurs de mutations génétiques
ou anomalies chromosomiques dans son projet de loi n° 73, comme est le cas, d'ailleurs, pour la fécondation
in vitro et la préservation de fertilité dans un contexte médical. Il est
important de noter que les coûts associés au diagnostic préimplantatoire,
pour ces conditions génétiques particulières, sont déjà couverts par le régime
de la RAMQ.
Nous recommandons que la couverture publique
pour les six cycles d'insémination intra-utérine proposés ne puisse être
cumulative à celle déjà réalisée avant le programme actuel.
Finalement, nous sommes très ravis de pouvoir
contribuer au bien-être et à la santé des patients du Québec qui présentent des problèmes d'infertilité, de
génétique ou dont tout traitement gonadotoxique risque de compromettre leur
fertilité future. Nous souhaitons poursuivre notre mission, en collaboration
avec d'autres centres hospitaliers du réseau,
en continuant d'intégrer les soins, l'enseignement et la recherche dans toutes
les activités liées à la procréation assistée. Merci beaucoup.
• (17 h 20) •
Le
Président (M. Provençal)
: Merci. Alors, M. le
ministre, je comprends que vous avez cédé quelques minutes de votre
temps pour permettre la fin de la présentation. Alors, M. le ministre, je vous
cède la parole maintenant.
M. Carmant : Merci beaucoup.
Bonjour, Dr Dahdouh. Bonjour, M. Desrosiers, enchanté. Première question, c'est ce qui revient le plus souvent aujourd'hui,
c'est la question de l'âge. Il y a certains groupes de patients qui trouvent
que c'est, d'une certaine façon, discriminatoire de se baser sur l'âge pour
mettre une limite, bien qu'on leur a bien expliqué que... Il va falloir quand
même mettre un nombre limite, si on ne se base pas sur l'âge. Mais moi,
j'aimerais vous entendre parler de l'âge par rapport aux bénéfices versus les
risques, chez des patientes, d'avoir une grossesse, là, après l'âge de
42 ans, 43 ans, là.
M. Dahdouh (Elias) : En fait, il y a
deux volets ici, M. le ministre. Il y a un volet de couverture publique pour les coûts. Si on regarde tous les programmes
publics au monde, incluant les programmes les plus populaires en Europe, que ça soit en France, que ça soit en Belgique,
que ça soit en Angleterre, ils ont été obligés de mettre une limite d'âge,
et ceci, pour parler du rapport coût-efficacité.
Il y a une étude récente qu'un de nos collègues
à Montréal a publiée, en 2014, qui a regardé tous, en fait, les taux de
naissance vivante des cycles qui ont été particulièrement réalisés au Québec
entre l'année 2012 et 2014, puis c'était par groupe d'âge pour toutes les
patientes après 40 ans. Ils ont trouvé des taux de naissance vivante,
après l'âge de 41 ans, qui étaient
moins que 6 %. Après
43 ans, c'était moins que 1 %, après 43 ans, 1,8 %. Pour
arriver à un taux de 0 % pour à peu près... si ma mémoire est
bonne, on parlait de 150 à 200 cycles qui ont été réalisés après l'âge de
44 ans, pour zéro taux de naissance vivante.
À part les risques pour la grossesse, il ne faut
pas oublier les risques pour la stimulation ovarienne. Il y a plusieurs données
qui parlent d'une augmentation de risque potentielle et importante, de risque
de cancer de l'ovaire. C'est sûr, on parle de type borderline, qui est quand
même un type qui n'est pas très agressif, et ceci, après trois ou plus
stimulations ovariennes. Donc, moi, je considère qu'une stimulation ovarienne
qui ne donne pas l'objectif qui est un taux
de naissance vivante acceptable avec des risques augmentés, ça pourrait être
vraiment très dangereux pour la population.
Deuxième point, si on parle de risque de la
grossesse, peut-être la petite réflexion que je ferais, que c'est... On va
permettre quand même à des patientes de 41 ans, 43 ans d'avoir des
grossesses mais qui ne sont pas couvertes par
le régime public. C'est sûr, ces patientes-là doivent avoir une évaluation
importante avant de commencer un cycle de fécondation in vitro.
Mais, je vous
dis, en gros, la question d'âge revient surtout au rapport coût-bénéfice pour
peu de taux de grossesse et avec des
risques qui sont augmentés à cause de la stimulation ovarienne. Je ne sais pas
si Pascal veut ajouter quelque chose.
M.
Desrosiers (Pascal) : Non, en ce qui me concerne, c'est
essentiellement... C'est sûr que, d'un côté médical, Dr Dahdouh
peut un petit peu plus en parler, mais c'est plus au niveau coût-bénéfice et
efficacité, là, passé... à tout le moins, passé 41 ans, là, 42 ans.
M. Dahdouh
(Elias) : Puis, M. le
ministre, il ne faut pas oublier qu'une stimulation ovarienne peut engendrer
des risques d'embolie pulmonaire, de
thrombophlébite. C'est sûr, ils sont minimes. Quand même, il y a aussi une
procédure chirurgicale
qui inclut un prélèvement d'ovule avec des risques qui peuvent être
l'infection, le saignement, qui ne sont pas négligeables, donc... Puis
tout traitement, médicalement, qui ne serait pas indiqué, c'est difficile de le
justifier du point de vue
médical et avec les risques qui sont pris pour faire ce traitement.
M. Carmant :
D'accord. Une des parties importantes, pour nous, ça va être de faire le suivi
du programme. Et on cherche des marqueurs d'efficacité ou de... qui vont mieux
nous orienter pour le futur. Au niveau obstétrique et gynécologique, quels seraient, selon vous, là, comme, les
cinq marqueurs qui seraient importants pour nous de suivre, évidemment
dans une base de données mais également au niveau statistique et réévaluation
du programme?
M. Dahdouh
(Elias) : Si on parle d'efficacité du cycle de fécondation
in vitro, c'est les taux de grossesse et les taux de naissance vivante. Si
on parle du point de vue obstétrical, il est très important de voir c'est quoi,
l'âge exceptionnel. Est-ce que c'est des prématurités? Ça, c'est un, donc,
l'âge exceptionnel. Deux, le poids de naissance. Parce qu'il y a quand même beaucoup
de données... en fait, quelques données qui disent que la procréation assistée
pourrait engendrer des poids de naissance qui sont plus petits et, entre autres,
de l'autre côté, des macrosomies avec la congélation des embryons. Donc, ça,
c'est important. Et en plus toutes les complications qui pourraient être
augmentées, aussi, avec le traitement de la procréation assistée, notamment la
prééclampsie, l'hypertension artérielle et les anomalies du placenta, notamment
le placenta praevia.
C'est essentiel de
continuer, déjà, dans la pratique qu'on fait, au Québec, de transférer un seul
embryon, parce que, si on imagine, il y a des risques qui sont légèrement
augmentés avec la procréation assistée, et en plus on ajoute une grossesse
gémellaire qui va tripler ou quadrupler le risque, donc, ça, ça va être une
complication très grave. Actuellement, ce
problème de grossesse multiple est très, très, très... Il est mis... Il est
déjà très bas, au Québec, parce que les derniers chiffres parlent d'un
taux de grossesse multiple qui est inférieur à 5 %. Puis je pourrais
vraiment saluer tous les efforts et tout le grand travail qui a été fait par
toutes les cliniques de PMA au Québec pour arriver à ce chiffre qui, de mon
avis, est le plus bas au monde entier.
M. Carmant :
D'accord avec vous. Puis d'ailleurs j'ai été surpris de voir qu'il y avait
quand même une petite fenêtre d'opportunité,
dans le projet, qui disait que, selon les lignes directrices, il y aurait
possibilité d'implanter deux embryons. Qu'est-ce que vous pensez de
ça? Pourquoi ça a été inséré dans le projet? Ça semble être l'avis des experts,
là. J'étais un peu surpris.
M. Dahdouh
(Elias) : Bien, en fait, idéalement, si on prend la majorité des
patients, il faut juste parler... Quand on fait un transfert, il faut
considérer plusieurs facteurs. Les deux facteurs les plus importants,
c'est l'âge de la patiente et le stade embryonnaire avec la qualité de
l'embryon dans lequel on va faire le transfert.
Je vous explique,
pour ne pas compliquer les choses. Un transfert au jour 5, au stade de blastocyste, quand l'embryon est rendu à 200,
300 cellules, c'est un embryon qui a un taux d'implantation très élevé. On
va favoriser, à ce moment-là, un transfert sélectif d'un seul embryon. Par
contre, pour des raisons multiples, il y a quand même 10 %, 20 % des
patients, des couples qui vont malheureusement ne jamais arriver à un stade de
blastocyste pour des raisons... qualité
d'ovule, même si elles sont jeunes, de raison de qualité du sperme, une
anomalie cellulaire au niveau
des paramètres du spermogramme, qui nous obligent souvent à faire des
transferts au jour 2, jour 3, donc... Quand je parle jour 2,
jour 3, c'est après le prélèvement d'ovule. À ce moment-là, même chez les
patients de 37 ans et moins, il serait
cliniquement et médicalement indiqué de transférer deux embryons et avec
un taux de grossesse multiple qui, selon toute la littérature, ne va pas
dépasser 2 % à 5 %, maximum.
Donc, on reste quand
même dans un taux de grossesse multiple très faible, avec des taux d'efficacité
qui pourraient être augmentés quand on transfère à un stade plus bas que le
stade de blastocystes. C'est là où l'indication de mettre les
deux embryons est très justifiée et très logique.
M.
Carmant : ...pas
d'inquiétude que tous les cliniciens vont suivre ces lignes directrices là?
Parce qu'on sait que ça a été, comme vous l'avez dit, un problème important,
là, les grossesses multiples, dans le passé.
M. Dahdouh
(Elias) : Si je regarde, même entre... durant le temps de la
couverture, entre 2010 et 2015, ces mesures
étaient... ces nombres que vous parlez, même... ils ont été même à deux,
trois embryons, puis, je pense, toutes les cliniques ont fait un effort colossal pour régler leur taux de
grossesse multiple. Et, malgré les transferts, chez quelques
patientes, de deux, trois embryons de façon sélective, si elles sont bien
choisies, selon les mêmes recommandations et
les lignes directrices du Collège des
médecins, je suis convaincu qu'on va
arriver à des taux de grossesse supérieurs avec des taux de grossesse
multiple très bas.
M.
Carmant : Un sujet complexe,
mais, comme vous l'abordez de front, je ne peux pas l'éviter, le diagnostic
préimplantatoire. Là, tout le monde nous dit : Maladie génétique sévère.
Mais qu'est-ce que c'est, une maladie génétique sévère, là, quand on a
deux parents qui sont en santé reproductive, là? Puis ce qui m'inquiète,
dans un projet de loi, c'est tous les risques de dérive. Alors, moi, je trouve
que c'est du dossier, plus, pour la RAMQ qu'un projet de loi, personnellement,
là. Mais c'est quoi, votre opinion là-dessus, là? C'est quoi, une maladie
génétique sévère chez deux parents sains au niveau reproductif?
• (17 h 30) •
M. Dahdouh (Elias) : Merci, M. le
ministre, pour cette question très intéressante et très complexe en même temps.
En fait, ici, localement, on a fait un comité, en 2014, comme je l'ai
écrit dans le mémoire, pour regarder les indications, pour vraiment, en fait, mettre la
définition de «maladie sévère». Puis, comme vous le dites, c'est subjectif,
mais cependant il faut... Nous on va vraiment limiter dans l'offre de service,
c'est ce qu'on propose, d'ailleurs, limiter dans l'offre de service ces
indications pour... les mêmes indications qu'on va avoir le diagnostic
prénatal. On ne veut pas extendre une indication.
Donc,
si les patients vont, dans tous les cas, avoir un diagnostic prénatal pour ces
indications sévères... Puis quand je dis «sévères», si je peux me permettre,
pour dire le risque de transmission minimum, 25 % à 50 % à
la progéniture, donc maladies autosomales récessives, maladies
autosomales dominantes, qui donnent 25 % à 50 %, où l'indication est
déjà établie pour le diagnostic prénatal. Donc, ces couples-là vont, dans tous
les cas, avoir un diagnostic prénatal. Si la grossesse est atteinte, ils vont
devoir subir une interruption médicale de grossesse. C'est là que je trouve et
on trouve... c'est-à-dire, l'indication du DPI pourrait être une option
alternative à ces couples en particulier qui ont déjà recours au diagnostic
prénatal.
Pour les indications,
si je parle dans la littérature... les indications les plus controversées dans
la littérature, où c'est dans la zone grise,
et je peux me permettre de les citer, c'est les mutations génétiques qui
prédisposent au cancer. Notamment, je vous cite la mutation de BRCA1,
BRCA2, qui est quand même une indication qui peut être une indication de DPI, mais qui peut être très
controversée. Parce qu'il y a des spécialistes, il y a des scientifiques qui
vont dire quand même qu'il y a... on
est déjà rendus en 2020, on a des bonnes méthodes de prévention, des
mammographies, des colonoscopies qui
peuvent, en fait, prévenir et même, donc, faire la détection des cancers à un
stade très précoce. Donc, l'indication, dans ces cas-là, pourrait être
vraiment très très controversée, et je suis tout à fait d'accord.
Nous,
on va limiter... on propose de limiter les indications pour le DPI chez les
patientes qui ont déjà un diagnostic prénatal
et, éventuellement, une interruption médicale de grossesse. Localement, ici, le
département d'obstétrique-gynéco, on
a présenté, l'année dernière, une étude avec les résidentes pour regarder les
complications qui sont issues des interruptions médicales de grossesse pour
toutes les grossesses qui sont affectées par des maladies génétiques ou
malformations congénitales. Juste le
taux de rétention placentaire était à 46 %. Donc, une femme sur deux qui
va avoir une grossesse affectée va
avoir une interruption médicale de grossesse, va avoir besoin d'une salle
d'opération pour aller faire, quand
même, une opération qui peut être morbide.
Il y a un risque d'infection, de saignement et, rarement, de perforation utérine,
avec ces interventions. Donc, je trouve, le
DPI a toutes... en fait, a toute la raison d'exister dans ces indications
précises.
Puis pour aller... tout
le monde me demande : Est-ce que vous pouvez nommer des maladies? Pour
vous dire, M. le ministre, il y a des milliers et des milliers de maladies.
Pour commencer... la liste va commencer, puis on ne va jamais capables de la
terminer. Je pense qu'il faut évaluer cas par cas. C'est ce qu'on a proposé,
avec le comité local qu'on a déjà fait, DPI, à Sainte-Justine. Il inclut,
d'ailleurs, une éthicienne dans le comité, une spécialiste de la médecine foeto-maternelle, un spécialiste de la
PMA, une psychologue et un hémato-oncologue, dans les cas où il y a
des maladies à prédisposition hématologique. Et chaque cas va être évalué principalement. Puis on a évalué le volume, en 2014‑2015, quand on était prêts à
démarrer le programme de DPI, entre 100 et 150 indications maximales de
maladie. Donc, c'est ça, ce que le volume anticipé... puis ça, c'est à la
longueur de toute la province du Québec.
M.
Carmant : Je vous remercie beaucoup. J'aimerais peut-être passer la parole à la députée
de Roberval pour une dernière question.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la
députée.
Mme Guillemette :
Merci. Merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui. Donc, je viens d'une
région, donc j'ai une préoccupation particulière pour la collaboration qu'il pourrait y avoir avec le CHU de
Sainte-Justine et les régions. Comment
on pourrait améliorer cette collaboration-là pour offrir un meilleur service, là, aux gens,
à nos gens chez nous?
M. Dahdouh
(Elias) : Je m'excuse, vous venez de quelle région, madame?
Mme
Guillemette : Saguenay—Lac-Saint-Jean.
M. Dahdouh (Elias) : En fait, on a une très bonne entente qui fonctionne très bien
avec l'Hôpital de Chicoutimi.
D'ailleurs, les médecins qui sont
spécialistes, là-bas, des obstétriciens-gynécologues, c'est sûr
qu'il n'y a pas de laboratoire de fécondation in vitro,
là-bas, mais ils sont déjà... ils font l'expertise d'offrir ce qu'on appelle
les traitements de deuxième ligne. Puis ils ont l'appellation de ce qu'on
appelle actuellement les centres 2B. Donc, ces patientes vont être stimulées,
toutes les échographies vont être là-bas. Puis au moment opportun, avec une
bonne collaboration soit avec nous soit avec
une autre clinique à Québec, donc, quand il va y avoir le temps de faire le
prélèvement d'ovules, ces patientes se déplacent à Montréal ou à Québec,
ils vont avoir le prélèvement d'ovules et, trois ou cinq jours après, ils vont
avoir le transfert d'embryon.
Pour dire, cette
collaboration fonctionne très bien. Les résultats... on a même regardé les
résultats, est-ce qu'il y a une différence dans les résultats quand on fait
le contrôle qualité à distance en collaboration avec ces spécialistes ou
c'est juste... il faut être tout dans un
centre tertiaire de procréation
assistée. On avait les mêmes résultats cliniques, donc des résultats,
très bons, on était très satisfait de cette collaboration. D'ailleurs, on fait
cette collaboration avec l'hôpital de Trois-Rivières et avec l'hôpital de...
c'est ça.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci beaucoup pour cette
réponse, très apprécié. Avant de poursuivre avec la députée de Maurice-Richard,
j'ai besoin de votre consentement pour que nous puissions déborder d'à peu près
cinq minutes notre temps. Merci. Consentement. Alors, Mme la députée de Maurice-Richard, je vous cède la parole.
Mme
Montpetit : Oui. Je vous remercie, M. le Président. Bonjour à vous
deux. Merci d'être là avec nous aujourd'hui pour répondre à nos vastes
questions sur... plus techniques, je dirais. Puis vous ne m'en voudrez pas, là,
sur... je ne sais pas si... Puis je pense qu'on l'a mentionné tout à l'heure,
nos enjeux techniques font qu'on n'entend pas
toujours, on entend à 99,9 %. Donc, je ne voudrais pas que vous m'en
vouliez si jamais vous avez déjà abordé cette question‑là, mais
99,9 %, c'est déjà superbien, donc on saisit presque la totalité. Mais je
voulais revenir à la question de l'âge,
parce que vous l'avez abordée, au départ, avec le ministre, puis c'est une
question que je n'ai pas nécessairement eu l'occasion de poser aux
autres groupes qui étaient des représentants, justement, davantage, de
patients.
Et
là je voulais faire référence à votre expertise dans ce dossier‑là. Est-ce
qu'il n'y aurait pas un avantage à élargir le programme, qui, à l'heure
actuelle, justement, se limite à 41 ans, mais à l'élargir, au moins, aux
femmes qui sont en cours de processus pour
le transfert d'embryon par exemple? On a vu l'Association des obstétriciens et
gynécologues qui demande un élargissement pour celles qui ont débuté ce
genre de démarche là. Je pense que les cliniques, également, spécialisées qui
viendront nous rencontrer aussi faisaient état du fait, bon, qu'ils pouvaient,
à la limite, expliquer le fait d'imposer une limite d'âge pour l'accès à du
financement sur un cycle de FIV mais qui soutenaient le fait qu'une fois que
l'embryon, dans le fond, est créé, il n'y avait pas de raison d'imposer un âge
limite à 42 ans pour le transfert des embryons congelés. Donc, j'aimerais
ça vous entendre sur ces questions‑là.
M. Dahdouh (Elias) : Merci pour votre question. Quand je mentionnais les chiffres, tout à
l'heure, pour les taux de grossesse, effectivement, comme vous le mentionnez,
ça reflète l'âge de l'ovule, donc l'âge du prélèvement de l'ovule.
Je m'explique. Si une
patiente a eu son prélèvement à l'âge de 38 ans puis elle a un embryon
congelé, elle a eu sa grossesse et elle
revient à l'âge de 42 ans pour faire un autre transfert d'embryons
congelés, donc je peux confirmer que les taux de grossesse peuvent être
celles d'une femme de 38 ans, avec les risques de trisomie 21 et les
risques d'anomalie chromosomique. Cependant, il ne faut pas oublier que les
seuls risques qui pourraient augmenter, malgré l'embryon qui est transféré ou
prélevé, qui vient d'un ovule plus jeune, c'est les risques obstétricaux qui peuvent
être prééclampsie, diabète, risque de césarienne augmenté. Entre 42 ans et
43 ans, il peut y avoir, vraiment, une zone grise, ou 44 ans. Ça dépend plus, je peux vous dire, des experts en
médecine foetomaternelle, s'ils peuvent permettre des grossesses après
l'âge de 42 ans.
Moi,
personnellement, je peux dire que, si une femme est en bonne santé, elle a plus
que 42 ans, si le programme... si elle a eu son prélèvement
d'ovules avant l'âge de 41 ans, elle a déjà un embryon, elle pourrait,
facilement, tout à fait, bénéficier d'un transfert d'embryons de façon
sécuritaire, même après l'âge de 42 ans. Je ne sais pas, est-ce que c'est
un peu clair, pour moi, ou...
• (17 h 40) •
Mme
Montpetit : Oui, c'est clair, mais j'ajouterais... je veux juste, par
curiosité, Dr Dahdouh... Vous, votre formation comme médecin, quelle est-elle?
On n'a pas eu l'occasion de... J'essayais de voir, dans le mémoire, je ne le
voyais pas.
M. Dahdouh
(Elias) : Oui, en fait, je suis obstétricien-gynécologue. Je maintiens
deux certificats de spécialité en
obstétrique-gynéco, en endocrinologie de la reproduction et de l'infertilité.
J'ai fait ma formation à Procrea en
2008-2009. J'ai suivi aussi une maîtrise en embryologie avancée et j'ai fait ma
thèse sur le diagnostic préimplantatoire. Et je suis directeur médical
et fondateur, depuis 2009, du Centre de procréation assistée au CHU de
Sainte-Justine.
Mme
Montpetit : OK. Donc, une connaissance bien pointue du sujet qui nous
occupe aujourd'hui. Merci. Je voulais juste
voir de quel côté du spectre, des fois, de la lunette, on analyse ce genre
d'enjeu. Oui, ça répond bien à ma question. Peut-être juste une
sous-question : Est-ce qu'il y aurait une limite d'âge supérieure auquel
vous le recommanderiez? Par contre, quand
vous dites : Une femme en forme... Pardon, excusez-moi. Est-ce que...
Encore là, je voyais... je pense que... Puis certains faisaient
référence à 42 à 45 ans, d'autres ne faisaient référence à aucune limite
d'âge. Est-ce que vous avez une lecture sur cette question-là?
M. Dahdouh
(Elias) : En fait, je vais aller aborder un peu le sujet des dons
d'ovules. Si on parle d'efficacité et taux de grossesse, une patiente pourrait
avoir toujours recours à un don d'ovules. Selon le guide du Collège des
médecins du Québec, qui est un guide, en fait, excellent qui a été élaboré par
un groupe de travail sur la procréation assistée — je salue ce travail,
qui était exceptionnel, et la présidente du comité, d'ailleurs — à
partir de l'âge de 45 ans, toute femme qui désire avoir une grossesse,
même par don d'ovules, elle doit avoir des tests préliminaires, préalables pour s'assurer de la sécurité de ce
transfert et la sécurité de grossesse. Ça inclut, minimum, une mammographie,
pour être sûr... parce qu'on sait très bien que le risque de cancer du sein
augmente avec l'âge, une évaluation médicale par son médecin de famille ou un
médecin interniste pour s'assurer de sa condition médicale qui peut être
favorable à la grossesse et aussi d'un électrocardiogramme pour être sûr
qu'elle n'a pas de problème cardiaque. Ça, c'est le minimum requis pour
accepter un don d'ovules de façon médicale après l'âge de 45 ans.
Donc, je peux vous
dire, la fenêtre, pour permettre un éventuel programme, pourrait être entre 42
et 45 ans. J'ai de la difficulté à dire qu'après 45 ans ça peut être
possible, surtout couvert. Parce que, médicalement, ça peut être toujours possible, vous savez, là, on
s'entend que, si la patiente est en bonne santé, puis, selon le guide du
Collège des médecins, elle a tous ses tests, puis elle est en bonne
santé, son risque est estimé très faible, donc elle peut avoir toujours son
transfert d'embryons congelés.
Mme Montpetit : C'est très
instructif de faire cette nuance-là, justement, dans les questionnements qu'on
a sur l'âge. M. le Président, j'aurais mon collègue qui aurait une question
également.
Le
Président (M. Provençal)
: Alors, M. le
député de Marquette, à vous la parole.
M. Ciccone :
Merci beaucoup. Soit dit en passant, très intéressant d'avoir une conversation
avec le ministre sur des aspects très, très scientifiques et médicaux, c'est
vraiment impressionnant de voir ça et d'entendre ça.
Moi, je veux vous
ramener sur, justement, vos conclusions. Au point 5, je veux vous entendre
là-dessus : «Nous recommandons que la couverture publique pour les six
inséminations intra-utérines proposée ne puisse être cumulative à celles déjà
réalisées avant le programme actuel.» Je veux savoir pourquoi vous avez mis ça
dans vos conclusions et si c'est sur une base médicale.
M. Dahdouh
(Elias) : Merci pour cette question. En fait, actuellement, comme vous
le savez, le régime public couvre jusqu'à
neuf inséminations. Puis, quand on parle de couverture de neuf inséminations,
ça ne veut pas dire : c'est neuf inséminations indiquées. Ça veut
dire, quelqu'un qui a des problèmes d'infertilité, les études ont montré
qu'après la quatrième insémination le taux de grossesse devient très bas, et,
en fait, ça peut être futile.
Par
contre, si vous dites : Pour telle patiente, ça pourrait être justifié
d'aller jusqu'à six ou neuf inséminations, le seul exemple, je peux vous
dire, c'est les femmes célibataires ou les couples femme-femme qui sont
ensemble, qui ont recours aux inséminations intra-utérines pour avoir leur
grossesse. Ces femmes-là, il ne faut pas oublier, elles ne sont pas infertiles,
donc la seule période d'infertilité pourrait être une exposition à des cycles
d'insémination après six fois.
Donc, pourquoi on a
dit : Six inséminations pour la même femme qui a déjà eu six ou neuf
inséminations dans l'ancien programme? Si le projet de loi est adopté comme
tel, elle va avoir l'opportunité de faire six autres inséminations. C'est sûr,
le médecin va avoir toujours une indication médicale. Mais, quand même,
j'aimerais bien que ce soit mis dans un projet de loi parce qu'après les échecs
antérieurs des inséminations six ou neuf, ajouter un autre six inséminations ce
serait futile, médicalement non indiqué, et ça peut engendrer des coûts.
Je vous donne un
exemple. Cette femme, probablement, aurait besoin d'un cycle de fécondation in
vitro. En enlevant six inséminations supplémentaires, le système public va
économiser entre 4 000 $ et 6 000 $, ça pourrait être le
coût d'un cycle de fécondation in vitro complet. Donc, pour le coût et
pour l'efficacité.
M. Ciccone :
...M. le Président. Merci beaucoup, docteur, pour votre explication. Merci.
Le Président (M.
Provençal)
: Il reste un petit peu de
temps. Ça va aller? Merci. Alors, je vais maintenant céder la parole à la
députée de Sherbrooke.
Mme Labrie :
Merci, M. le Président. J'attendais mon micro. On a rencontré quelques groupes
qui nous ont parlé de la pertinence
d'ajouter la couverture de suivi d'ordre psychologique pour les couples qui
entament des procédures comme celles-là. Ça ne fait pas partie de votre
mémoire, mais je voulais vous entendre quand même sur ce que vous pensez de
cette suggestion-là.
M. Dahdouh
(Elias) : Tout à fait, je l'appuie. Ça veut dire... C'était peut-être par
omission, mais on appuie parfaitement cette recommandation, c'est sûr. Je peux
vous dire, pas tous les couples vont avoir besoin d'une évaluation
psychologique. Pour des conditions particulières, c'est-à-dire des couples qui
ont vécu des échecs, qui ont difficulté à...
ça veut dire à faire... à suivre ces traitements de fertilité, le diagnostic
préimplantatoire, les préservations de fertilité, une évaluation
psychologique est fortement recommandée. Dans l'ancien programme, cette
évaluation était tout à fait couverte par le régime public, puis notre
recommandation... On estime qu'elle devrait être, pour des cas particuliers...
être couverte par le programme actuel du projet de loi n° 73,
tout à fait.
Mme Labrie :
...comme d'une évaluation avant les traitements. Qu'est-ce que vous pensez de
couvrir aussi du soutien pour les enjeux qui pourraient survenir pendant les
traitements, par exemple, dépression, anxiété?
M. Dahdouh (Elias) : Bien, en fait, l'évaluation, ça peut être avant, ou durant, ou après,
même, le traitement, selon l'indication clinique.
Mme Labrie :
Parfait. Bien, je vous remercie.
Le Président (M.
Provençal)
: Ça va, Mme la députée?
Mme Labrie :
Oui, ça va.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, nous allons terminer cet échange avec le député
des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau :
Oui. Bonjour. Merci pour votre présentation. J'ai deux minutes, je vais
aller directement au but. En fait, moi, ma préoccupation, c'est que le projet de loi cherche à rendre le programme
accessible, mais pas trop. En fait, on
sent une volonté de restreindre soit par l'âge ou par le nombre... par les
cycles. On parle de 3 000 à 3 500 interventions par
année, ce serait l'objectif.
Dans une clinique comme la
vôtre, l'interruption de la subvention du programme précédent, est-ce que ça a
eu un impact sur le nombre de personnes que vous avez pu accueillir? Et qu'est-ce
que vous entrevoyez, qu'est-ce que vous anticipez, une fois qu'on va rétablir
le programme, en termes de gestion de la demande?
M. Dahdouh (Elias) : En fait, je
vais laisser mon chef d'unité parler de ça, c'est lui qui gère...
M.
Desrosiers (Pascal) : C'est
une excellente question. En fait, historiquement parlant, le CHU
Sainte-Justine a démarré ses activités en 2013, puis on a eu à se faire
connaître, parce que ce n'était pas naturel d'offrir des services de procréation
assistée dans un...
M. Arseneau : Vous devez répondre en
une minute, monsieur. Je ne veux pas vous presser, mais je n'ai pas de temps.
• (17 h 50) •
M.
Desrosiers (Pascal) : Oui, tout à fait, excusez-moi. Je vais y aller
droit au but. Donc, avec le retrait, en 2015, du financement public, nos activités ont réellement chuté de trois à
quatre fois pour ce qui est des activités de fécondation in vitro. Ce
qu'on anticipe, selon ce qui est annoncé présentement dans le nouveau projet de
loi et par le ministre Carmant, c'est
probablement une reprise de nos activités de ...(panne de son) ...quatre fois
les activités que nous réalisons...
M. Arseneau : Malheureusement, on a
manqué vos chiffres.
M. Dahdouh (Elias) : Et je peux vous
dire, juste ajouter un point, que, quand le CPA du CHU Sainte-Justine a été
construit et bâti, donc, on prévoyait être capables d'absorber entre 800 et
1 000 cycles de fécondation in vitro par année avec nos
installations habituelles.
M. Arseneau : Ça va. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, je vous remercie beaucoup de votre contribution à
nos travaux, et la commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30. Merci
beaucoup de votre présence et merci d'avoir accepté.
M. Dahdouh (Elias) : Merci.
M. Desrosiers (Pascal) : Merci à
vous.
(Suspension de la séance à 17 h 51)
(Reprise à 19 h 33)
Le Président
(M. Provençal)
: Bonsoir à tous. La Commission de la santé et des services sociaux reprend ses travaux. Je demande à toutes les
personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission est réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 73, Loi modifiant diverses dispositions en matière de procréation assistée.
Ce soir, nous
entendrons par visioconférence les organismes suivants : la clinique
Fertilys et la Clinique OVO.
Compte tenu qu'on a débuté quelques minutes en
retard par rapport à notre horaire, je demande votre consentement pour qu'on
puisse dépasser le temps prévu. Merci.
Je souhaite la bienvenue aux représentants de la
clinique Fertilys. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je
vous invite à vous présenter puis à commencer votre exposé. Je vous cède maintenant
la parole.
Centre de procréation Fertilys
(Visioconférence)
M. Miron (Pierre) : Donc, bonjour.
Pierre Miron. Donc, merci, M. le Président. M. le ministre délégué, Mmes, MM. les députés, merci de me recevoir aujourd'hui pour témoigner devant vous à cette commission en compagnie de Me Bellavance, avec ses connaissances, qui m'a
aidé à produire ce mémoire que je dépose aujourd'hui devant vous.
J'aimerais tout d'abord féliciter et remercier
le ministre délégué, Dr Carmant, merci. Merci à M. Legault, notre premier
ministre, et son gouvernement de remplir enfin une promesse électorale qui va
permettre de couvrir un cycle de fécondation in vitro chez nos patients.
Donc, je me présente brièvement. Je suis
obstétricien-gynécologue, j'ai une spécialité en fertilité et obtenu ce
diplôme-là en 1986 à une formation en Australie, à Melbourne. J'ai l'honneur
d'avoir reçu le titre de fondateur du programme
canadien d'endocrinologie gynécologique de la reproduction et de l'infertilité
au collège royal du Canada. J'ai
fondé plusieurs programmes de fécondation in vitro au Québec,
autant en public qu'en privé : donc, d'abord, celui de l'Hôpital
Maisonneuve en 1987, suivi de Procrea à Montréal en 1990 et de Procréa Québec
en 1998. J'ai été le seul
médecin impliqué dès le début dans la fondation de l'Association de couples
infertiles au Québec, d'abord Déméter dans les années 80,
suivi, dans les années 90, de l'ACIQ, qui est devenu Association
Infertilité Québec.
À part tous les
enfants qui sont nés des centres que j'ai fondés au cours de ma carrière et qui
continuent de l'être à cause de cette
passion qui m'habite toujours, ma plus grande réussite professionnelle,
l'aboutissement d'une carrière sur plus de 35 ans d'expérience et
de vécu, des hauts et des bas, des barrières qui semblaient parfois
insurmontables, c'est sans aucun doute
d'avoir fondé Fertilys, en janvier 2014, à mon avis le plus beau modèle de
centre de procréation. Vous allez dire que je suis biaisé, mais je suis
fier de ce centre-là.
Donc, nous sommes
basés à Laval. Nous sommes seulement deux actionnaires, un médecin et un
biologiste de la reproduction. Depuis la fondation, je ne me verse aucun
salaire administratif ni dividende, nous réinvestissons constamment pour améliorer la qualité des soins chez nous. Donc, nos
valeurs sont inscrites sur un mur à la réception, donc :
l'excellence, la personnalisation, le respect, l'engagement, l'éthique et
l'innovation.
Donc, Fertilys, il faut que vous le sachiez,
Fertilys est aimé des patients. Il répond à un réel besoin, soit d'être à
échelle humaine, d'avoir de bons médecins et des employés empathiques et aussi
d'être à proximité des patients. Fertilys est le centre qui a subi la
plus forte croissance au Québec. Notre liste d'attente s'étale présentement
jusqu'en juin 2021.
Toute
ma carrière j'ai milité en faveur des couples infertiles et pour la couverture
publique de l'aide médicale à la
procréation. Ne cherchez pas, donc, d'autres raisons de ma présence
aujourd'hui, il n'y en a pas d'autres. Le mémoire que j'ai déposé ce matin est là pour vous guider humblement sur
la meilleure façon d'aider les couples infertiles québécois, d'éviter les erreurs et les pièges
passés et surtout d'assurer la pérennité du programme que le gouvernement
s'apprête à mettre sur pied.
La sagesse des années
m'indique aussi que, pour réussir ce programme, on doit être raisonnable et
tenir compte de l'état des finances publiques au Québec, tout particulièrement
de celui de notre réseau de santé qui souffre encore
plus sévèrement avec la pandémie. Je vous incite donc fortement à lire mon
mémoire et le résumé de la page 3, puisque je ne pourrai malheureusement,
en 10 minutes, vous faire part de tout ce qu'il contient.
Donc, voici donc
certains de mes commentaires et recommandations qui se fondent sur l'objectif
visé par le gouvernement, soit d'offrir des
services de procréation assurés à la population, de planifier l'offre de
services et les coûts, de favoriser la qualité, la sécurité et l'éthique
de ces soins.
D'abord,
en ce qui concerne l'offre de services à la population, mon premier conseil, en
fait, est une demande : Surtout, surtout, ne pas précipiter la mise en
place du programme. La mise sur pied du premier programme public a
nécessité plusieurs mois, et son démantèlement précipité, en 2015, a créé
beaucoup de confusion et de difficultés. Mes patients ainsi que notre centre
ont été particulièrement affectés par l'abolition du programme lors des mesures
transitoires qui se sont faites dans la précipitation. Je ne blâme pas ici les
fonctionnaires, ils ont suivi des directives.
Donc, couvrir un
cycle de FIV, oui, donc, ça serait un réel soulagement pour de nombreux
patients, j'en suis particulièrement heureux. Par équité, limiter la couverture
des transferts d'embryons congelés, toutefois, ça, j'ai un point particulier
là-dessus. En fait, par rapport à celles qui n'ont obtenu, par exemple, qu'un
seul embryon, sans grossesse, sans embryon
surnuméraire congelé, donc chez qui le cycle couvert de FIV est terminé, il
serait inéquitable de permettre à celles qui ont un enfant et qui ont
produit une quinzaine d'embryons congelés d'avoir toujours accès au programme
gratuitement pour leur deuxième, troisième enfant. Donc, le gouvernement doit
réfléchir, à mon avis, à une solution équitable de ce côté.
L'autre
aspect, réduire le nombre d'inséminations couvertes à quatre, c'est ce qu'on
recommande. Il est reconnu qu'au-delà de quatre, les taux de succès
plafonnent et ne répondent plus aux critères d'efficacité, même ceux établis
par le Commissaire à la santé dans son rapport.
Bien que cela ne
fasse pas partie du projet de loi, il m'apparaît essentiel de bonifier et
d'étendre le crédit d'impôt remboursable
pour les traitements d'infertilité et de le ramener à ce qu'il était avant
2015. J'ai été personnellement l'instigateur du crédit d'impôt en le
proposant, en 1999, à M. Bernard Landry, alors qu'il était ministre des
Finances. Il avait été créé sur un principe fondamental d'équité, il
faut le comprendre, ça, le parallèle que Bernard Landry faisait avec
l'adoption. Bonifier le crédit d'impôt servira de soupape également pour ceux
et celles qui, malheureusement, n'auront pas réussi à concevoir au
premier et seul essai de FIV couvert par l'État.
• (19 h 40) •
En
ce qui concerne l'objectif de favoriser la qualité, la sécurité et l'éthique
des soins de procréation, j'aimerais d'abord rassurer les membres sur
certains préjugés qui persistent sur les centres de procréation assistée dits
privés, puisque nous en sommes un. Les couples infertiles ne souhaitent pas
avoir des jumeaux, ils souhaitent avoir des enfants en bonne santé, comme nous
tous, de même que les CPA privés dont je parle, et j'en suis convaincu, au nom de tous mes collègues fertologues qui pratiquent
au Québec avec éthique et professionnalisme. Il est important d'insister
sur la grande qualité des services de procréation assistée dispensés
présentement au Québec. Dans son rapport global sur les soins de procréation
assistée, diffusé cette année, le Collège des médecins fait état d'un bilan
rassurant de la pratique puis de la médecine
reproductive au Québec, qui répond aux recommandations. Nos taux de grossesses
multiples sont faibles, et les complications sont peu fréquentes voire
rares.
Bien que n'ayant pas
eu l'opportunité de participer au comité d'experts, que j'avais moi-même
proposé, je souhaite ardemment que le ministre... le ministère puisse saisir...
va saisir l'opportunité de mettre en place une table de concertation entre le ministère et les directeurs des centres de
procréation assistée. Nous souhaitons tous la réussite du programme. Elle requiert l'apport essentiel et
la collaboration des CPA privés, où il est estimé, par le gouvernement
lui-même, que plus de 65 % à 70 % des FIV y seront réalisées.
Pour réussir, il y a également la nécessité de
fournir une main-d'oeuvre qualifiée aux centres privés. Il est ainsi
indispensable, à mon avis, de faciliter et permettre le recrutement de médecins
étrangers dans les CPA privés, ce qui n'est pas le cas
présentement. Pour planifier l'offre de service et les coûts, ne pas restreindre
le marché, la saine compétition ne peut qu'être bonne.
Ce matin, on vous
laissait entendre qu'il fallait massivement investir dans les CPA publics.
Certains ont la mémoire bien courte, mais sûrement pas le ministère. Je vous
réfère à la page 19 et 20 de mon mémoire. Le coût du projet de CPA de Québec était estimé à
35 millions de dollars, et ce projet fut heureusement arrêté à temps. Le
programme public de FIV du CHUM a requis un investissement de fonds
publics de 16 millions de dollars, en 2011, pour être finalement fermé en 2015. Le CPA de Sainte-Justine
a profité, en 2013, d'un investissement de 7,7 millions de dollars d'un
fonds public pour sa création. Or, ce centre réalise pourtant moins de cycles
de FIV que Fertilys qui, quant à lui, a requis un investissement privé de seulement 2,5 millions de
dollars, sans aucune aide gouvernementale. Contrairement aux centres publics, les fondateurs ont pris des
risques personnels et ont donc été imputables financièrement de la réussite
ou de l'échec du projet.
Si
vous portez attention au tableau de la page 19, vous noterez également
que de réaliser une FIV chez Fertilys coûte moins cher aux patients que
ce qui est offert dans les CPA publics, malgré une qualité de soins pour le
moins équivalente, sinon plus appréciée. Cherchez l'erreur.
Nous demandons donc
au ministre, dans le cadre d'un programme public de FIV, de nous donner les
moyens qui nous permettront, malgré l'augmentation des activités, de continuer
à offrir et à maintenir des soins de qualité. Finalement, nous ne répéterons jamais
suffisamment de ne pas précipiter la mise en application du programme avant que
tous les éléments requis à sa mise en place n'aient été finalisés. Il faut
s'asseoir avec les intervenants.
Donc, en conclusion,
je souhaite que le nouveau programme public de procréation du gouvernement
actuel soit un succès réel pour tous les Québécois. L'intérêt des couples
infertiles est l'unique but de mon intervention aujourd'hui. Nous espérons sincèrement que nos commentaires aideront le gouvernement à parfaire sa
réflexion sur ce nouveau programme de procréation et qu'ils
encourageront à favoriser une pleine collaboration avec les CPA privés et les
acteurs qui le composent.
Merci
enfin à ma société de m'avoir permis de devenir médecin. J'ai cette
chance de pratiquer dans un milieu rempli d'émotions, parfois de grandes
peines, mais souvent de grands bonheurs. Depuis près de 40 ans, je
continue d'être émerveillé à chaque jour par
la beauté et le mystère de la vie. Être un parent est un don exceptionnel que
l'on fait à notre société, il est donc juste d'aider nos couples
infertiles à fonder une famille.
En terminant, ce
mémoire, je le dédie à mon équipe, à mes collègues de travail, à celui qui a
cofondé Fertilys avec moi, à tous ceux et
celles qui, chez nous, s'investissent corps et âme, qui rencontrent au
quotidien autant le triomphe que la défaite, à mes héros discrets, à mes
employés qui pensent à leurs patients même le soir et qui font en sorte que Fertilys
conserve ses valeurs humaines et reste à la hauteur des attentes des patientes
qui nous consultent et qui nous font confiance. Voilà.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci
beaucoup, Dr Miron, pour cette présentation. Nous allons maintenant débuter
les échanges. Alors, je cède la parole à M. le ministre.
M. Carmant :
Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, Dr Miron, pour cette
touchante allocution, clairement un visionnaire dans le domaine. Je suis un peu
inquiet de vous entendre dire de faire attention à la mise en place du programme.
Hors le développement d'une trajectoire de soins claire, quels sont les enjeux
que vous voyez ou que vous semblez anticiper
avec la mise en place du programme? Parce
que, je veux dire, ce n'est pas
comme si on partait de zéro, là, donc qu'est-ce que vous voyez que peut-être
pourrait nous aider dans la planification?
M. Miron
(Pierre) : En fait, comme je vous mentionnais, c'est qu'il y ait une
table de concertation avec les gens qui sont impliqués, du milieu. Je pense que
ça serait important qu'avant que le programme soit mis en place, que les tarifs soient établis, qu'on
ait pris le temps de s'asseoir, d'en parler, comment va se faire le
fonctionnement du programme. Parce que le projet de loi, bien, je dois
le dire, Dr Carmant, je vois très bien la bonne foi. Je suis très heureux, en
passant, de tous les efforts que vous avez faits puis je trouve que vous pouvez
être fiers.
Donc, ce qu'on
souhaite, c'est que ça se fasse de façon harmonieuse, que ça ne soit pas
précipité, qu'on puisse s'asseoir... En
fait, les gens en fertilité ont tous envie de pouvoir participer à la réflexion
et de s'asseoir à une table de concertation pour regarder comment ça
peut être mis en place, comment va se faire, par exemple, l'orientation des
patients, comment... quel nombre de patients, quelle va être la limite, aussi,
offerte, comment... les problèmes qu'on a
vécus, aussi, dans le démantèlement du programme, qui nous a heurtés, je dois
vous avouer, qui a été très, très difficile pour les patients. Donc, on
aimerait ça que ça soit... que ça se fasse, que les gens soient préparés, que
la RAMQ soit prête, que le registre... qu'il y en ait un qui soit uniforme au
Québec, donc qu'on puisse y participer pour le monter.
Je
pense que tout le monde est de bonne foi pour réussir. On souhaite, là, la
réussite, tu sais. J'étais le premier à avoir beaucoup de tristesse de
voir abolir le programme, donc, pour s'être battus depuis tant d'années, donc...
M. Carmant :
D'accord, je suis... Merci, bien, ça, c'est clair que c'est des points
importants. Je suis heureux de vous entendre
dire, à propos du registre... Parce qu'on avait certaines inquiétudes, là,
plusieurs nous disaient que Fertilys ne
participe pas au registre canadien. Est-ce qu'il y avait des enjeux
particuliers? Parce que, nous, de notre côté, c'est sûr qu'on veut faire
un suivi québécois, non seulement prénatal, mais postnatal, là.
M. Miron (Pierre) :
Moi, j'en faisais un point d'honneur québécois, je vais vous dire. Je n'ai
jamais compris que notre gouvernement n'était pas capable de monter un
registre. Pour moi, c'est un point d'honneur de dire qu'on va avoir un registre, on fait... Nous, la
juridiction... Je suis conscient que la santé, c'est de juridiction
provinciale, donc je trouvais ça anormal qu'on
envoie des données dans un centre ailleurs du Québec qui utilise nos données,
alors que moi, je m'adresse à un ministère, tu sais, et à mon Collège des
médecins. Donc, j'ai toujours tenu ce point-là, donc je n'ai aucun problème de
participer au registre. En fait, c'est surtout cet élément-là qui me heurtait,
donc, je trouvais, que c'était de
juridiction provinciale et c'est la responsabilité de l'État, finalement, de
nous aider à entrer ces données-là, ce qui est exigeant, en passant,
très exigeant, là, de... On fournit les données au ministère, on fournit les
données au Collège des médecins, ce n'est
jamais le même moment durant l'année, donc c'est demandant, beaucoup plus
demandant que laissait entendre l'avis réglementaire, en passant, oui.
M. Carmant :
On va essayer d'informatiser tout ça pour vous, là.
M. Miron
(Pierre) : Très, très difficile d'avoir accès aux patients, seulement
pour l'issue des naissances, je dois vous avouer, on n'a pas de retour, on
appelle, on mobilise une personne plein temps et plus pour faire ça, parce que... sur le téléphone, puis c'est toujours un
élément qui est difficile. Donc, c'est sûr que, pour parler du registre,
j'aimerais ça que ça soit arrimé avec la RAMQ, avec les issues de
naissance, ça serait bien, je suis en faveur de ça, oui, oui.
M.
Carmant : Parfait, merci.
Puis je sais que vous trouvez nos critères d'inclusion peut-être... d'admissibilité
un peu conservateurs, mais, si on veut se limiter, là, à 3 000,
3 500 cycles par année, vous, qu'est-ce que vous verriez comme
critères d'admissibilité?
M. Miron
(Pierre) : Bien, honnêtement, j'ai vieilli, avec les années, j'ai
appris des choses, j'ai compris plus, peut-être. Quand j'étais plus jeune,
j'étais plus fringant, encore plus exigeant, je pense, pour la défense des
couples infertiles. Mais je vois bien aussi
que, du côté du système de santé public, il y a des grands drames,
actuellement, puis il y a des besoins
financiers importants. Donc, je crois que la mesure que vous avez prise, de
couvrir un cycle, est vraiment honorable,
je pense que c'est... La façon de donner une soupape aux couples, un petit peu,
c'est de... comme je mentionnais, d'élargir ou d'améliorer le crédit
d'impôt remboursable.
Pour les mesures
restrictives, un des points qu'on sortait dans le document, c'était à propos...
si une patiente québécoise est avec un conjoint qui n'est pas québécois, ça
peut créer des problèmes, donc, parce que sa demande... Je crois comprendre,
selon le projet de loi, que les deux doivent participer au régime d'assurance maladie.
Je trouve que c'est un problème. Je pense que,
du point de vue de ce qu'on vit cliniquement, sur le terrain, les couples
recomposés... c'est un réel problème, ça. Je trouve ça injuste,
profondément injuste, par exemple, qu'une... bien, qu'un couple qui est
reconstitué, une femme qui tombe en amour avec quelqu'un qui a eu des enfants,
qui a eu une vasectomie, qui, elle, n'a jamais eu d'enfants, soit pénalisé, et
vice-versa. Donc, une femme qui a eu une ligature et que son conjoint, lui, n'a jamais eu d'enfants, donc, ça, ça m'a
tout le temps... Dans les bureaux, je le vois, tu sais, à quel point c'est
difficile pour les couples qui tombent en amour. Puis on tombe en amour,
bien, on ne choisit pas toujours, tu sais, donc, je veux dire, ça se fait par amour. Donc, quelqu'un qui a eu une
vasectomie, il ne devrait pas pénaliser sa femme qui n'a jamais eu
d'enfant, donc elle devrait avoir accès au programme également.
Ça, c'est mon point
de vue, donc je trouve que... D'autant plus que le gouvernement paie toujours
pour les ligatures, les déligatures, les vasectomies, les vasovasostomies, donc
je crois que c'est deux poids, deux mesures, là, il faudrait être conséquent.
Je trouve que... cet élément-là, je pense que je peux comprendre, un couple qui
a déjà eu des enfants, qui décide d'avoir
une ligature, une vasectomie, qui reste ensemble, veut avoir d'autres enfants.
Mais, pour les couples recomposés, je trouve que c'est profondément
injuste. Bon...
• (19 h 50) •
M. Carmant :
D'accord. C'est sûr qu'on attend toujours les travaux de l'Institut de la pertinence,
là, mais... Au niveau des embryons, là, vous avez mentionné une injustice entre
ceux qui n'ont qu'un seul embryon suite à la stimulation versus ceux qui en ont
plusieurs. Mais il faut voir ça du côté peut-être un peu plus positif, où
certains auront la chance de fonder une
famille à l'intérieur d'un cycle de FIV... un plus grand nombre d'enfants, non?
Tu sais, il y en a qui ont un, il y en a qui ont trois enfants, là,
c'est la vie, ça, non?
M. Miron
(Pierre) : Oui, mais on ne choisit pas nécessairement d'avoir un
certain nombre d'ovules dans nos ovaires, même si on a 30 ans. Donc, il y
a des patientes qu'on voit qui ont des réserves ovariennes sévèrement
diminuées, ça ne veut pas dire qu'elles ont des mauvais ovules, c'est qu'il n'y
en ont pas beaucoup. Puis elles ont une chance, quand on a un seul embryon, de
devenir enceinte, mais, si ça ne fonctionne pas, elles se retrouvent avec rien.
Donc, je comprends celles qui ont plusieurs embryons congelés. Si elles ont un
enfant, je trouve ça équitable, par la suite, qu'elles aient à débourser pour
le transfert d'embryon congelé si... par équité.
Encore là, j'essaie
de trouver un équilibre entre ceux ou celles qui vont faire une fécondation
in vitro ou qui n'auront pas de transfert d'embryons congelés, elles vont
se retrouver devant rien. Puis je pense que c'est là que le crédit d'impôt
pourrait jouer un rôle de soupape, là, je trouve, puis de faire en sorte que, par
contre, celles qui ont eu un enfant déjà, bien, on... Bon, il va toujours y
avoir la possibilité d'avoir accès au transfert d'embryons congelés, de toute façon, sauf qu'ils vont peut-être devoir défrayer le frais. Mais ça, c'est mon point de vue, je trouve que c'est une question d'équité entre les patients.
D'avoir trois, quatre enfants couverts, quand il y en a une qui n'a pas eu
d'enfant ou qui a... donc je trouve ça un peu triste, honnêtement, oui.
M. Carmant : O.K. Puis vous êtes le
deuxième aujourd'hui qui a soulevé le point, dans son mémoire, de vente de
gamètes et puis la gestion des gamètes. Pouvez-vous m'expliquer un petit peu qu'est-ce
que vous voyez, là... qu'est-ce que vous voulez dire par ça?
M.
Miron (Pierre) : Bien, moi, j'ai toujours souhaité qu'au Québec on ait
notre propre banque de sperme, au moins, d'accord?
Je pense qu'Héma-Québec est
l'organisme fantastique pour faire ça. Puis d'en faire un programme qui
ne serait pas à but lucratif, donc, tu sais, une banque de gamètes, ça pourrait
être juste des gamètes. C'est sûr qu'une
banque d'ovules, c'est plus complexe, je dois vous avouer, mais Héma-Québec a
tout ce qu'il faut, avec la banque de
sang, avec tout ce qu'il supervise et les risques de transmission de maladies
infectieuses, etc. J'avais parlé, d'ailleurs, au président d'Héma-Québec, à un moment donné, puis c'était... il y
avait une certaine ouverture, à un moment donné, mais ça avait dû
arrêter plus haut, là.
Mais je trouve que,
présentement, le gouvernement va investir des sommes colossales pour payer des
échantillons de sperme qui vont venir de banques américaines, qui vont
transiter par l'Ontario, en passant, souvent, qui
font leur cote, alors que le Québec pourrait saisir l'opportunité, mettre
Héma-Québec en charge et dire : C'est parfait, on va avoir un programme public... (panne de son)
...une banque de sperme, je trouve. Parce que, dans le dernier programme,
vous avez supporté des couples homosexuels, également, femmes, les lesbiennes,
pour avoir accès. Donc, où vont être achetés
ces échantillons-là? C'est relativement... c'est très cher en fait. Vous savez,
il y a même une banque, pas plus tard que la semaine dernière, à
Toronto, qui a fait faillite, là.
Donc, je pense que le
Québec devrait être capable... Je trouve que... je suis fier des médecins qu'on
a, tu sais, on a des scientifiques
fantastiques au Québec, on peut être fiers de ce qu'il y a en santé, donc il y
a moyen, avec nos outils, d'être autonomes. Voilà.
M.
Carmant : Parfait. Puis on a parlé aussi d'un comité central d'éthique,
que vous semblez applaudir aussi. Qui devrait le composer? Quelle est
votre participation? Ou comment vous voyez que ça devrait s'organiser?
M. Miron
(Pierre) : Moi, ça me fait... (panne de son) ...en passant. J'ai
monté... le premier comité d'éthique, dans
le centre de procréation, je l'ai monté à Procrea. À l'époque, on avait pris
David Roy, qui était à l'Institut de recherches cliniques de Montréal,
qui est un bioéthicien célèbre. Alors, on avait monté un comité d'éthique, dont
la majorité des représentants étaient
indépendants d'institutions. Donc, là, ce qu'on vise, comme centre, je dirais,
bien ça, ça va faire du bien.
Moi, j'avais proposé,
déjà, au Collège des médecins qu'il y ait un comité d'éthique pour nous aider, parce
que,
surtout, là, les centres de procréation à l'extérieur des centres
hospitaliers, on n'a pas des ressources, on n'a pas des ressources, accès à des comités d'éthique, facilement,
de comité d'éthique à la recherche également. Donc, moi, j'aurais pensé... Il y a un,
semblerait-il, un comité d'éthique à la recherche, mais ça ne semble pas
fonctionner, selon mes collègues qui ont déjà soumis des projets, c'est très
compliqué.
Je pense, vous aviez
un comité qui développe une expertise en procréation, particulièrement, qu'on
puisse soumettre des projets. Parce que vous savez, la FIV, ce qui est
fantastique d'aller dans ce domaine-là, ce n'est pas seulement, bien, qu'on aide
des gens à avoir des enfants, mais c'est aussi que c'est fascinant, ce qui peut
être amélioré comme technologie et ce qui peut permettre... Toute ma carrière, j'ai eu des développements, des percées majeures que j'ai publiées ou que j'ai pu
connaître. Donc, il y en a d'autres à venir, à mon avis encore des majeures à
venir. Donc, si vous aidez des centres à
innover... Et ça n'a pas besoin d'être seulement des centres hospitalo-universitaires. Je pense
que les centres comme Fertilys, on travaille en collaboration, déjà, avec l'Institut
Armand-Frappier, avec le CHUM, avec... on a
des projets qu'on fait en collaboration, qu'on fait sur place, de façon autonome également,
de façon éthique, avec des comités éthiques qui ont approuvé.
Donc, c'est sûr que
ça faciliterait l'accès à des comités d'éthique, honnêtement, qui soient
gratuits, parce qu'on souhaiterait d'être aidés. Parce que nous, on investit
dans notre société à... J'ai une équipe de recherche et développement, je dois
vous avouer que chez nous, on travaille sur l'immunologie de la reproduction,
on développe des technologies qui pourraient
améliorer l'implantation d'embryons, donc augmenter les chances de succès. Le gouvernement
a intérêt à ce qu'on augmente les taux de succès, les taux de naissance en
fécondation in vitro, par exemple. Voilà.
M. Carmant :
Puis une autre chose aussi, c'est... quelle est votre collaboration avec les...
ou en avez-vous une, avec les centres hors
de la région métropolitaine, tu sais, comment... Parce que
nous, on va essayer de centraliser le flux de patients, là. Est-ce que
vous avez des références de l'extérieur? Comment ça se passe?
M. Miron
(Pierre) : Oui, bien, juste pour M. Arseneau, qui est présent,
juste lui annoncer qu'on peuple également les Îles-de-la-Madeleine. La semaine dernière, on a une patiente qui était
enceinte, des Îles-de-la-Madeleine.
Donc, on a des gens qui viennent de partout
à travers le Québec. C'est sûr qu'on
dessert principalement la région de Laval, Lanaudière,
Laurentides, mais on est situés à Laval, il y avait un besoin réel.
Ce qui me peine, je
dois vous avouer, c'est la tentative de certains centres de s'accaparer ces
références-là, plutôt que ça soit la normale. Par exemple, tu sais,
Trois-Rivières, les patients de Trois-Rivières, lorsqu'il y avait le programme
public, ils étaient... il y avait une directive d'orienter ça dans un centre
public. Nous, on est à Laval, près de la
440, en droit chemin, où il n'y a pas de trafic, donc je trouve ça un petit peu
aberrant que les gens de Chicoutimi s'en
aillent à un endroit, dans un centre public, ou que les gens de Chicoutimi
refusent, des fois, de faire des échographies à nos patientes parce
qu'ils ne font pas affaire avec un centre de procréation assistée public. Parce
qu'on utilise le terme «public», puis je trouve ça un petit aberrant parce que,
vous savez, ce sont tous des centres privés, comme vous le savez. Certains utilisent des installations publiques, sans payer
de loyer. Nous, on n'utilise pas d'installations publiques puis on paie
un gros loyer, je dois vous avouer.
Donc, c'est certain qu'on aimerait avoir cette
collaboration-là, d'où l'importance que je trouvais important d'être sur le comité d'experts, puis on a refusé
qu'on soit présent, malheureusement. Or, comment on peut connaître comment se vit la vraie vie, au quotidien, dans des centres
de procréation comme le nôtre, sans nous permettre de nous exprimer? Vous le permettez aujourd'hui, mais, au
ministère, ça a été difficile, naturellement, parce qu'on est perçus «privé»,
et le terme «privé»... alors que tout le monde l'est, tu sais, pour la
procréation, mais... Voilà.
M.
Carmant : Je dois conclure
que ça s'est bien passé avec les Îles-de-la-Madeleine. J'ai demandé à M. Arseneau, hein?
M. Miron
(Pierre) : Oui. Non, non,
effectivement, là... Dr Lajeunesse aux Îles-de-la-Madeleine... (panne de son) ...mais, il a été vraiment
gentil. Mais, on a des gens de partout, je peux vous avouer, la Gaspésie, de
Baie-Comeau, de... Vraiment, je vous
dis, on est aimés des patients parce qu'on a un centre qui est à échelle
humaine, tu sais? Je trouve que c'est la beauté.
J'avais proposé, dans les années 2000, au
ministère, de créer des centres d'excellence comme ceux-là, O.K.? Je voulais en
faire un exemple. J'avais dit à Gaétan Barrette : Regarde, là, je vais en
faire un. Moi, j'ai recommencé à faire de la
FIV, je dois vous avouer, parce que c'était couvert. Parce que j'ai vécu le
privé, je ne voulais pas revivre ce que j'ai vécu, dans ma carrière, les moments difficiles face au privé, des
fois. Mais je suis très heureux que ça m'ait permis de redémarrer dans
le domaine de la fertilité, et c'est là que je me réalise. Mes patients sont
heureux, mes employés sont heureux.
C'est
exigeant, on vit beaucoup d'émotions avec nos patients, donc je pense que, si
on avait cette aide-là, cette collaboration vraiment ouverte avec le
ministère, ça serait grandement apprécié. Je pense, tous les centres... je parle
pour tous les centres de procréation dits privés, entre guillemets.
M. Carmant : Parfait. M. le
Président, je passerais la parole à la députée de Soulanges.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée de Soulanges, 50 secondes.
Mme
Picard : Ah non! je voulais
juste... Bonjour! Je voulais juste savoir... Vous m'avez apporté un questionnement. Vous dites que l'achat de
spermatozoïdes, qui sont américains, coûte... c'est très dispendieux. Combien
peut payer une... combien, en moyenne, les gens paient pour des traitements FIV
ou juste insémination?
• (20 heures) •
Le Président (M. Provençal)
: 30 secondes pour répondre.
M. Miron (Pierre) : Pour FIV ou
insémination... (panne de son). Bien, ce que je peux vous dire, une FIV, chez
nous, c'est moins cher que dans les centres publics, en passant, donc, vraiment.
Ce qui est étonnant parce que... Mais on fait beaucoup d'efforts. Moi, je ne me
fais pas de salaire administratif, depuis le début, tu sais, tout est investi
pour que mes employés soient le plus possible heureux, qu'on ait des bons
équipements. On n'a vraiment rien à envier. Les banques de sperme, le
problème... Honnêtement, je vais vous avouer, je ne parle pas d'argent avec mes
patients, j'en ai fait comme un devoir. Je
dis à mes patients d'aller voir... on a quelqu'un qui s'occupe de référer les
patients...
Le Président (M. Provençal)
: Dr Miron, je suis obligé de vous interrompre, parce
que le temps est terminé, malheureusement.
Et je vais céder la parole à la députée de Maurice-Richard pour la suite des choses. Mme la députée.
Mme Montpetit : Je vous remercie, M.
le Président. Bonjour, Dr Miron. Bonjour... bonsoir, je devrais dire,
bonsoir, Me Bellavance. Merci de vous joindre à nous un peu tardivement,
ce soir, mais c'est toujours très apprécié d'avoir des expertises comme la vôtre
pour alimenter notre réflexion.
Je commencerais sur un des points que vous avez
relevés dans votre mémoire, mais vous y avez fait mention aussi, sur une... Je
ne veux pas mal vous citer, mais je pense que vous parlez d'injustice sur le
fait qu'une citoyenne québécoise en couple avec un non-Québécois ne serait pas
couverte par le programme. Puis vous faites bien de le soulever, là, je pense
qu'effectivement c'est certainement quelque chose auquel on doit s'attarder,
s'assurer qu'il y a une équité envers tous les citoyens, dans le fond, tous les
contribuables du Québec. Vous parlez que ça entraînerait des impacts négatifs.
Mais je veux juste, peut-être... juste ma
question... Dr Miron, je vous laisse répondre, si vous le souhaitez, mais
j'imagine aussi que Me Bellavance a peut-être quelque chose à nous dire,
je ne sais pas, s'il y a des enjeux juridiques, justement, par rapport au fait
qu'ils soient... qu'une Québécoise pourrait être exclue, là, dans ce contexte.
M. Miron (Pierre) : Je te laisse
parler, Sylvain.
M. Bellavance (Sylvain) : Ah! non, moi,
je ne le vois pas au point de vue juridique et je ne peux pas vous dire qu'on a
regardé des enjeux à ce point de vue là. Je crois que c'est plutôt... le point
de Dr Miron est plutôt de voir le programme comme une mesure sociale,
également, et, dans son expérience, il y a souvent des couples reconstitués ou
il y a souvent des couples qui sont formés ou qui sont en formation, disons, ou
dans une période où un n'est pas nécessairement avec l'autre, au Québec. Donc,
ces périodes de transition là peuvent causer des problèmes. À terme, c'est sûr
qu'une famille va se regrouper et va être ensemble, et on aura
deux résidents québécois ou, sinon, la personne aura quitté, mais ce n'est
pas toujours le cas au départ, que ce soit en raison de différentes choses.
Alors, c'est plus à ce niveau-là qu'au point de vue juridique.
M.
Miron (Pierre) : Oui, souvent, un point, tu sais, parce que c'est
évident qu'il y a des... Ce n'est pas tout le monde qui obtiennent la Régie de
l'assurance maladie en arrivant ou qui sont... On a beaucoup d'immigrants maintenant au Québec, donc il y a... Tu sais, on voyait souvent... ils veulent fonder une famille
assez tôt, donc. Je pense, Me Bellavance a bien soulevé les points,
donc.
Mme
Montpetit : Parfait. Donc, c'est ça, c'est vraiment d'un point de vue
social, là. C'est parce que vous notez des impacts négatifs, mais vous ne les
explicitez pas davantage dans le mémoire. Donc, je voulais juste être sûre
qu'on ait la bonne compréhension, dans le fond, de ce que vous portez à notre
attention, comme vous l'avez mentionné aussi comme un enjeu, une des recommandations
ou... un des enjeux que vous soulevez, là, par rapport au projet de loi, là.
M. Miron
(Pierre) : Bon, là, je vais juste me... au point que vous êtes, je
vais peut-être retrouver à la page...
M. Bellavance
(Sylvain) : En fait, le développement de ce point-là, comme étant déjà un
long mémoire, n'est peut-être pas complet, mais il se retrouve aussi pour des
notions éthiques. Et, une des choses qui inquiétaient Dr Miron ou qui peut
inquiéter d'autres, c'est de s'assurer que des gens ne fassent pas de déclarations,
finalement, parce qu'ils seraient dans une position qui leur empêcherait
de profiter du programme. Alors, on sait qu'une personne seule peut en profiter, mais voilà, je suis avec
un conjoint qui, peut-être, momentanément, est à
l'extérieur, donc est-ce que je vais devoir jouer la carte de
la personne seule? Ce sont des critères et des exigences, au niveau éthique,
qui, effectivement, peuvent occasionner certaines problématiques.
M. Miron
(Pierre) : Mais on en avait aussi beaucoup, de questionnements sur la
définition du projet de procréation assistée. Ça soulevait plusieurs questions.
À quel point la loi pourrait être améliorée, le projet de loi, pour clarifier cet aspect-là, tu sais? C'est quoi,
un projet de procréation assistée? On se posait toutes sortes de questions.
Une patiente qui a été traitée par
insémination avec succès a un enfant, par
exemple, à la suite
d'une troisième insémination.
Est-ce qu'elle va avoir accès gratuitement, pour un deuxième enfant, à
trois autres inséminations puis, s'il y a échec, à une fécondation
in vitro? Est-ce qu'une patiente qui a reçu initialement un service de FIV
avec son conjoint... aurait-elle accès, par la suite, aux
six inséminations non utilisées, bien que la FIV ait pu mener à une
naissance? Si une patiente a eu six cycles d'insémination avec un
ex-conjoint, donc, c'est quoi, le projet? Elle a eu un projet avec un
ex-conjoint, maintenant un nouveau projet avec un nouveau conjoint; est-ce que
c'est toujours le même projet? Est-ce que ça va lui permettre d'avoir accès à
des soins? Donc...
Mme
Montpetit : Vous devancez, Dr Miron, ma prochaine question et
vous y répondez, parce que c'est exactement là-dessus que je voulais voir...
j'allais, sur le point que vous souleviez, sur la définition, qui est ambiguë. Et c'est sûr que, de mon point de vue, ça soulève
quand même plusieurs questions de vous entendre, vous, comme expert, qui
allez, je ne sais pas si... utiliser le bon mot, mais certainement vous référer
à ce projet de loi là pour vous gouverner
dans votre travail professionnel, de soulever le fait qu'un projet de
procréation, qui est quand même central au projet de loi, n'est pas clair.
Donc, ça soulève quand même beaucoup de questionnements pour les équipes,
probablement, juridiques du ministre. Puis on pourra y revenir sur l'étude
détaillée, mais vous soulevez plusieurs questions très pertinentes, là.
M. Miron
(Pierre) : ...malheureusement, on survit par le paiement des services,
tu sais? Donc, tu sais, si on fait un traitement à un couple, puis que
nécessairement il ne se qualifie par la suite, puis que, là, la régie nous
revienne par la suite puis ils nous déduisent ce montant-là, bien, on a fait le
service, quand même, donc... Puis ça, ça a été un réel problème aussi, dans la
phase de transition, là, on a dû sortir nous-mêmes une centaine de dossiers
patients pour prouver à la RAMQ que, oui, on avait suivi les mesures de
transition adéquatement pour les patients. Donc les montants nous étaient
enlevés. Donc, on a vécu ça assez difficilement financièrement. Donc, on ne
veut pas revivre ça. On veut s'assurer que le programme, quand il va être
établi, ça va être clair, que le projet va être clair, qu'on peut... C'est peut-être
moi qui comprends mal, là, tu sais, je ne suis pas un avocat, je ne suis pas...
Mais on essaie de comprendre. Et, je pense, ça serait bien, si on a de la
difficulté à comprendre ce que c'est réellement, le projet de procréation
assistée... ça serait bien que ça soit clarifié, en tout cas.
Mme
Montpetit : Je pense qu'il est toujours important... et c'est à ça que
servent nos consultations et c'est la raison pour laquelle on reçoit des
experts qui vont utiliser le projet de loi. Donc, si ce n'est pas clair pour
vous, on clarifiera l'intention du législateur quand on sera à l'étude
détaillée. C'est certainement des questions, vous posez, qui sont légitimes. Si vous vous les posez, il y
en a d'autres qui se les poseront en temps et lieu. Donc, quand on fera l'étude
détaillée, je suis certaine que le ministre
aura des réponses, des clarifications, est-ce que c'est des enjeux
d'interprétation, effectivement. Mais le principe d'un projet de loi, à
la base, c'est qu'il faut qu'il soit clair et interprété aisément, que
l'intention du législateur soit facile à comprendre aussi pour les gens qui y
feront référence, là.
M. le Président,
j'aurais mon collègue de Marquette qui avait une question également. Je sais
que le temps va toujours très rapidement, là.
Le Président (M.
Provençal)
: Alors, M. le député de
Marquette, vous avez la parole.
M. Ciccone :
La parole? Merci beaucoup. Bonjour, Dr Miron. Bonjour, Me Bellavance.
Moi, je veux vous référer à la page 18 de votre mémoire, n° 1 :
Ne pas restreindre le marché. Je veux vous entendre un peu là-dessus parce que je lis le paragraphe puis j'ai de la
difficulté un peu à me situer dans ça. Vous dites que «nous sommes inquiets
de la discrétion conférée au ministre de
donner des permis en fonction des besoins d'une région.» Quand vous parlez de
besoins, est-ce que vous parlez, justement, des établissements...
La députée de Roberval parlait, un peu plus tôt,
avec le CHUM, le groupe qui vous a... qui était avant vous, parlait justement
d'une belle complicité avec l'Hôpital de Chicoutimi, alors que, bien, il n'y a
pas de clinique là-bas pour vraiment donner
le service clé en main, si je peux dire ainsi, là, aux gens qui veulent faire
affaire à ce service-là. Quand vous parlez des besoins, est-ce que vous
parlez, justement, du service qui est offert ou qui n'est pas offert?
• (20 h 10) •
M. Miron (Pierre) : Oui. Bien, je
pense, la compétition, c'est sain, d'accord? Personnellement, je pense que
c'est sain. Nous, quand on a démarré Fertilys puis que le programme a été
aboli, les gens disaient qu'on ne survivrait jamais, tu sais? Pourtant, on
offre un service qui est de super qualité, qui est aimé profondément des
patients. Je vais vous dire, si vous allez
sur Google, vous allez voir comment on est coté, on est bien coté, on prend
soin de nos patients.
Donc, quand
on posait... quand vous parlez de Chicoutimi, par exemple, je trouve ça aberrant que des
patients décident de venir nous voir, donc, et quand ils sont de chez Chicoutimi,
mais que là-bas les collègues ne peuvent pas faire d'écographie et de suivi, le
folliculogramme, qu'on appelle, ou les suivis échographiques, parce qu'on est
considérés comme un centre privé et non un centre public. Vous voyez, donc, ça
pénalise même les patients des régions qui décident de choisir librement un
centre.
Ça, pour moi, c'est un élément essentiel, je
pense, ça va avec la loi sur... pour ne pas me tromper, Me Bellavance, sur la santé, mais que les patients devraient avoir
le libre choix de choisir leur centre, O.K., de choisir leur médecin, en fait, je vais
vous dire. Je pense qu'on stimule... oui, on est un centre qui est aimé, qui
stimule la compétitivité des autres. Bien,
au Québec, ce n'est pas mauvais. Quand j'étais jeune,
j'avais peur de ça, la compétition, je dois vous avouer, tu sais, mais
plus maintenant. Je me dis : Chacun fait sa propre affaire, essaie de
faire de son mieux. Je pense que ça doit seulement être équitable dans
l'attribution des fonds.
Si, moi, à Fertilys, je veux pouvoir offrir un
bon service puis les patients veulent venir chez nous, bien, il faut que le gouvernement
m'aide, m'aide à payer de façon aussi équitable qu'il paie les centres publics.
Oui. Puis ça, ce n'est pas ce qui se passe présentement, tu sais? Puis c'est
anormal que des patients soient orientés, qu'un groupe décide d'orienter une
patiente à un tel endroit plutôt qu'un autre. Mais, quand les patientes veulent
être aidées puis elles viennent chez nous, elles n'ont pas cette aide‑là en
région, c'est...
M. Ciccone : O.K.
M. Miron, je ne veux pas vous couper, mais il me reste une minute. Je
veux vous... Au point n° 3, Éviter un processus trop lourd et coûteux
de vérification de l'admissibilité, vous voulez que ce soit plus facile. En
40 secondes, expliquez-moi qu'est-ce que vous voulez de plus facile? Parce
que c'est quand même une procédure qui est quand même assez délicate, là. Pourquoi
il faut la facilité?
M. Miron (Pierre) : Bien, on ne sait
pas ce qui va se produire, comment ça va être géré. C'est pour ça que je pense
qu'il faut s'asseoir avec le ministère, tu sais? Comment vont être orientées
les patientes? Comment... Est-ce qu'on va se faire dire, à un moment
donné : Il y a un certain nombre de... on est rendu au millième patient
puis on arrête, tu sais, ça devient privé? Tu sais, quels vont être les quotas
gérés par centre? Est-ce qu'il va y en avoir?
Je voudrais bien répondre adéquatement à votre
question, mais... Tu sais, on craint, par exemple : Est-ce qu'une patiente
qui veut commencer une FIV le mois prochain... est-ce que la Régie de
l'assurance maladie, quand j'appelle, va me répondre, tu sais? Est-ce qu'elle
va me répondre rapidement? Les inséminations, ça va être pareil, parce que, si on considère que ce mécanisme‑là va
être établi... Ça veut dire : Est-ce qu'à chaque mois je vais prendre
le téléphone...
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Dr Miron. Merci.
Je vais céder maintenant la parole, pour la suite des choses, à la députée de Sherbrooke.
Mme Labrie : Merci, M. le Président.
M. Miron, je vais vous challenger un peu sur la question du public, du
privé. On a entendu ce matin, par exemple, des médecins qui nous disaient qu'on
devrait inverser la proportion pour que ça
soit plutôt... qu'on tende à ce que ça soit 70 % des traitements qui soient faits au public. J'entends bien de
votre présentation que ce n'est pas votre position, que vous... Vous
nommez même qu'il y a des enjeux, là, de compétition déloyale, je vais dire ça
comme ça, vous me reprendrez si ce n'est pas les bons mots, là, entre les
centres qui seraient un peu semi-publics par rapport au vôtre. Ça ne serait pas
normal, si on veut financer ce service avec l'argent public, de le développer
dans le réseau public? Ça ne serait pas ça, le scénario idéal?
M. Miron
(Pierre) : Non, même je vais vous donner mon expérience. Moi, j'ai
fondé à Maisonneuve-Rosement en 1987. C'est le directeur général qui m'a
demandé de sortir le programme puis de fonder... À ce moment-là, j'ai
fondé Procrea. Donc, ces centres-là, ils
peuvent être autonomes. Mais je pense que le modèle qu'on a, nous, il est
petit. Donc, petit, bien, on peut
faire jusqu'à 800, 1 000 tentatives, probablement. Mais, tu sais, je
ne veux pas atteindre ça, honnêtement, parce que je me dis que ça ne
sera plus humain du point de vue de la qualité des soins, tu sais? Mais je
pense que c'est... les modèles de centres de
procréation, à mon avis, devraient être autonomes à l'extérieur des centres
hospitaliers, pour plusieurs raisons, là, mais, entre autres...
Mme Labrie :
...le service n'est pas couvert par le public. Je peux comprendre que ce soit
un service qui est offert au privé, mais,
dans la mesure où on veut le couvrir et qu'on veut le payer avec des fonds
publics, ce service-là, n'est-ce pas normal de dire : On va
l'offrir dans le réseau public, comme les autres soins de santé qui sont
couverts par la RAMQ?
M. Bellavance (Sylvain) : Bien, tous les
services qui sont donnés en cabinet privé, aujourd'hui, ce sont des services publics aussi. Le fait que le service
soit payé par la RAMQ ne signifie pas qu'il ne doit pas être donné dans un
cabinet privé et...
Mme Labrie : Pas du tout, mais
ces gens-là ne réclament pas davantage d'aide du gouvernement pour offrir des
services concurrents au privé par rapport au réseau public.
M. Bellavance (Sylvain) : Pas mal, oui.
M. Miron
(Pierre) : J'ai manqué votre point, je m'excuse. Ça, je ne l'ai pas
compris. Est-ce que vous pouvez répéter?
Mme Labrie : Bien, c'est-à-dire
qu'effectivement il y a des services qui sont offerts au public, qui sont aussi
offerts dans des cliniques privées, de toutes sortes d'autres services de
santé, là, on ne parle pas de procréation. Mais, à ma connaissance, ces
cliniques-là ne demandent pas du soutien gouvernemental pour offrir des
services qui sont en compétition avec des services publics. Là, je sous-entends
que, vous, c'est ce que vous voulez quand même, vous voulez être soutenus pour
l'offrir dans vos cliniques?
Le Président (M. Provençal)
: 20 secondes.
M. Miron (Pierre) : Bien, je
pense que les modèles comme celui qu'on a, c'est des modèles parfaits, par expérience, pour en avoir eu dans un centre
public... Vous savez, la pandémie a affecté plusieurs centres. Le premier centre
qui a fermé, en pandémie, c'est Sainte-Justine, alors que nous, on aurait pu
continuer nos activités tout en protégeant la population, parce qu'ils étaient
dans un hôpital. Je pense qu'il y a des avantages où l'administration est
autonome, également, que les décisions peuvent se prendre rapidement. Il y a
plein, plein d'avantages d'avoir un programme qui est autonome avec
l'administration, avec tout le personnel sur place. On n'a pas besoin du type
d'infrastructure...
Le Président (M. Provençal)
: Dr Miron, je dois vous interrompre puis je vous
remercie, parce que le temps est écoulé avec la députée de Sherbrooke. Alors,
je vais y aller maintenant avec le député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : ...petit
deux minutes. Bonsoir, Dr Miron et Me Bellavance. Je vais
continuer, mais très, très brièvement. C'est que j'essaie de réconcilier ce qu'on vient
d'entendre, comme discussion sur le public versus le privé, avec la déclaration
que vous avez faite tout à l'heure, en disant : On est tous des centres
privés, mais certains sont situés dans les
lieux... dans des hôpitaux. Est-ce
que vous pouvez m'éclairer là-dessus?
C'est privé, ou c'est public, ou c'est les deux?
M. Miron
(Pierre) : Non. Bien, quand
que le gouvernement va payer un cycle de FIV, le deuxième, troisième cycle, ça va demeurer
privé, il y a plein d'actes qui vont rester privés. Donc, les centres, qu'ils
soient situés dans des centres hospitaliers ou à l'extérieur, ils vont toujours
avoir cet aspect-là privé. Je crois... à moins que l'État, un jour, dise qu'on
couvre tous les FIV par le... Puis je pense que...
Vous savez, il y a peut-être 65... je crois
comprendre, là, puis Dr Carmant pourra me confirmer, mais 65 %,
70 % des cas vont être faits dans les centres hors hospitaliers. J'aime
plus le terme «hors hospitalier». Parce que moi, j'aurais bien aimé qu'on me paie... que je n'aie pas à m'exposer comme
risque, personnellement, de payer un centre qui serait public, mais hors
hospitalier, du modèle de Fertilys. Je pense, c'est le plus beau modèle, c'est
le plus fonctionnel. Il y a une dynamique interne qui est facile. On
connaît nos coûts. Quand vous demandez les coûts, dans Sainte-Justine, c'est dilué dans tout l'hôpital. Quand vous
demandez au CUSM, c'est la même chose. Donc... de ne pas connaître les coûts
réels d'une fécondation in vitro.
Mais, ceci dit, les patients aiment moins aller
à l'hôpital. Le patient infertile, c'est une maladie, mais il préfère se
retrouver dans des centres comme Fertilys, je pense, en tout cas, sincèrement,
parce que, bien, il ne se sent pas malade nécessairement, là, tu sais, entre
guillemets, il n'a pas de problème physique.
M. Arseneau : J'aimerais,
rapidement, parce qu'on a peu de temps... Mais merci pour la réponse. Je ne
sais pas si j'ai le temps pour une deuxième question. J'ai peut-être
une minute. Vous semblez préoccupé, là, par l'implantation du programme
puis vous avez mentionné tout à l'heure que vous aviez déjà des listes
d'attente. Est-ce que vous attendez... Bien,
d'une part, est-ce qu'on ne devrait pas accélérer la mise en place parce qu'il
y a des attentes? Et, d'autre part, comment on va gérer les listes
d'attente, s'il y a un programme qui est nouvellement offert?
M. Miron (Pierre) : Bien, vous
savez, nous, on est plafonnés, hein, les médecins dans les centres hors
hospitaliers, ce qui n'est pas le cas dans les hospitaliers universitaires, il
n'y a aucun plafond salarial, de revenu, devrais-je dire,
d'accord? Nous, on a ça, donc nous, on pourrait être limités rapidement de
pouvoir offrir ce service, dès qu'on atteint
ce plafonnement-là qui est assez limite. Ça, on retrouve ça uniquement dans les
centres hors hospitaliers, les
cabinets privés. Alors, ça, c'est une problématique, une réelle problématique.
Quelle va être notre décision? Est-ce
qu'on arrête de desservir la population parce qu'on ne peut plus l'offrir, on
ne peut plus avoir accès à la RAMQ? Est-ce que... Il y avait un autre
élément que je voulais vous dire là-dessus...
Le Président (M. Provençal)
: Malheureusement, le temps est écoulé, Dr Miron. Je
m'excuse, je dois faire mon rôle comme gestionnaire du temps.
M. Miron
(Pierre) : C'est correct...
Le Président (M.
Provençal)
: Je vous remercie,
Dr Miron et Me Bellavance, pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Je
suspends les travaux quelques
instants afin que l'on puisse accueillir par visioconférence le prochain
groupe. Je vous souhaite une excellente soirée à vous deux. Merci.
(Suspension de la séance à
20 h 18)
(Reprise à 20 h 22)
Le Président (M.
Provençal)
: Je souhaite maintenant la
bienvenue aux représentants de la Clinique OVO.
Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons
à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous
présenter puis à débuter votre exposé. Je vous cède maintenant la parole.
Clinique
OVO inc.
(Visioconférence)
M. Bissonnette
(François) :
Bonsoir, M. le Président. M. le ministre, et vous,
les... (panne de son) ...de venir échanger avec vous dans le but... (panne de
son) ...cette loi. Je suis le directeur médical de la Clinique OVO...
(Interruption)
Le Président (M.
Provençal)
: Vous pouvez continuer...
M. Bissonnette
(François) : Ça va?
Le Président (M.
Provençal)
: Oui. Le son est un petit peu
défaillant. Alors, je me demande si vous devez garder votre caméra... puis que
le son serait peut-être meilleur dans ce cas-là. On pourrait faire un petit
test, s'il vous plaît, puis je ne vous enlèverai pas le temps de votre exposé.
M. Bissonnette
(François) : O.K. Est-ce que ça va mieux comme ça?
Le Président (M.
Provençal)
: Oui, ça va mieux.
M.
Bissonnette (François) : O.K.
Alors, je suis le directeur de la Clinique OVO qui... (panne de son). Je vous
épargne aussi mon... (panne de son) ...mais laissez-moi vous mentionner que
nous sommes l'une des plus grosses cliniques de fertilité au Canada,
nous aidons les couples infertiles québécois depuis 17 ans et que nous
sommes reconnus au niveau national et international, autant pour... (panne de
son) ...de nos résultats que pour notre mission académique et de recherche.
Premièrement, nous
voulons souligner le courage du gouvernement d'aller de l'avant avec ce projet
de loi et de respecter sa promesse faite aux couples infertiles, malgré un
contexte économique...
Le Président (M.
Provençal)
: Dr Bissonnette, on va
suspendre quelques minutes juste pour faire un ajustement parce que ça devient
difficile pour les gens dans la salle de bien vous entendre.
Alors, je suspends
les travaux quelques minutes. Merci, puis je vous reviens rapidement.
(Suspension de la séance à
20 h 24)
(Reprise à 20 h 27)
Le Président (M.
Provençal)
: Alors, Dr Bissonnette,
je vais vous inviter à poursuivre votre présentation, s'il vous plaît.
M. Bissonnette (François) : Alors, premièrement, nous voulons souligner le courage du gouvernement d'aller de l'avant avec ce projet de loi et de respecter sa promesse faite aux couples infertiles, malgré un
contexte économique difficile. Merci au nom des couples infertiles du Québec,
qui pourront dorénavant compter sur un certain appui dans leurs démarches pour
réaliser leur projet parental, incluant le financement d'un cycle de
fécondation in vitro. Il s'agit d'une
étape importante pour s'assurer que tous les Québécois auront un accès juste et
égal à tous les soins gynécologiques et obstétricaux, y compris le
traitement de l'infertilité.
Bravo aussi pour la
mise en place d'un comité d'éthique clinique qui nous permettra d'avoir un
support pour répondre à la multitude des situations qui se posent... qui posent
une problématique sur le plan de l'éthique! Il fallait souvent avoir recours à
des spécialistes éthiciens externes, dans le passé. En tant que spécialistes
expérimentés dans un domaine complexe en évolution constante, nous vous offrons
toute notre aide à ce nouveau comité.
Nous sommes aussi en
accord avec les restrictions apportées pour exclure du programme les couples
qui ont eu une stérilisation volontaire. Il était difficile de justifier que
l'État paie pour des chirurgies de réanastomose après une ligature tubaire ou une vasectomie, pour les couples qui changent
d'idée, mais qu'il n'y ait aucun financement pour les femmes qui n'ont
pas de trompe fonctionnelle à cause de maladies.
Nous soulignons
positivement l'assouplissement des règles pour inclure d'autres conditions que
le cancer pour les services de procréation requis à des fins de préservation de
fertilité à des personnes assurées avant tout traitement gonadotoxique.
• (20 h 30) •
Dans l'objectif de
s'assurer de l'implantation rapide d'un programme structuré, équitable et
juste, nous tenons à attirer votre attention à certaines constatations ou
questionnements dans le but de bien guider nos patients et nos collègues. Nous réaffirmons notre support
envers l'objectif que le gouvernement s'est fixé d'assurer une pratique de
qualité sécuritaire, éthique et juste en matière de procréation assistée envers
notre société et nos patients.
Pour nous assurer de
la pérennité du programme, il est important que les fonds soient dédiés aux
traitements des couples infertiles, séparés, entre autres, des autres
enveloppes budgétaires. Il faut aussi distinguer les paiements des frais techniques qui seront versés aux centres
de PMA, des honoraires médicaux versés aux médecins, comme cela se
passe dans d'autres domaines de la médecine. Ceci évitera une surestimation des
revenus médicaux et des controverses qui peuvent en découler.
Nous recevons avec beaucoup
d'enthousiasme la mise en place d'un organisme responsable de vérifier
l'admissibilité des couples au programme, mais il faut que ce soit fait de
façon transparente et rapide. On peut facilement envisager la mise en place de
tels guichets pour vérifier l'éligibilité à la fécondation in vitro, mais
cet exercice peut devenir lourd et laborieux pour les six cycles
d'insémination. Il faut éviter une lourdeur administrative qui retarderait
l'accès au traitement, surtout que l'âge de la patiente infertile est le
facteur le plus important pour l'obtention d'une grossesse suite au traitement
de PMA.
Il faut, entre autres,
préciser les règles dans la période de transition. Un couple qui avait fait, par
exemple, neuf inséminations dans le programme, ne pourrait pas, ne devrait pas
pouvoir repartir à zéro et repartir avec des inséminations. On reconnaît
l'effort qui est fait pour corriger les injustices du passé qui permettaient
aux couples femme-femme de profiter chacune
de cycles couverts de fécondation
in vitro. Il faudrait trouver un
moyen pour que les deux noms du couple qui profite du traitement soient
enregistrés pour le cycle de fécondation
in vitro et les six
inséminations.
Avant de débuter ce programme,
il est impératif que tous les éléments opérationnels soient en place. Le financement, le fonctionnement, la réglementation, les règles d'application et les tarifs
devront être et avoir été négociés et acceptés par tous. On ne doit pas
précipiter l'annonce d'un début de programme avant d'être fin prêts et de
s'être assurés d'avoir toutes les structures nécessaires à son bon
fonctionnement.
Nous
comprenons les motifs pour imposer une limite d'âge à l'accès du financement d'un cycle de fécondation
in vitro, mais, une fois que l'embryon est créé, il n'y a pas de raison
d'imposer une limite d'âge à 42 ans pour le transfert d'embryons congelés. Pourquoi une femme de 40 ans et 11 mois n'aurait
que 12 mois pour faire son transfert, et celle de 35 ans, six
ans pour faire le sien? La limite d'âge généralement acceptée pour un transfert
d'embryons congelés, dans le cas d'un don
d'ovule, si la patiente est en bonne santé, est l'âge moyen de la ménopause,
soit 52,4 ans. On se questionne sur le fait que le don de sperme
sera financé pour six inséminations artificielles avec le sperme de donneur,
mais on oublie complètement le don d'ovules.
En conclusion, nous
sommes très heureux pour le support que le gouvernement s'apprête à offrir aux
couples infertiles dans le contexte. Et dans
le contexte des progrès technologiques
rapides que nous connaissons et l'amélioration constante des moyens dont
on dispose, il faut, par exemple, s'assurer de ne pas restreindre, pour ceux
qui acceptent d'en assumer les frais, l'accès à ces techniques novatrices.
Nous
tenons à remercier les représentants du gouvernement de nous avoir donné cette
opportunité de communiquer nos préoccupations et nous réitérons notre
ouverture à la collaboration et au partenariat en tant que spécialistes qui
fournissent les services en matière de procréation assistée au Québec. Nous
réaffirmons notre support pour l'objectif que le gouvernement s'est fixé de s'assurer
d'une pratique de qualité, juste, équitable et éthique à tous les Québécois.
Je m'aperçois que
j'ai, dans la confusion initiale du début, oublié de présenter ma
collaboratrice et collègue, Dre Coralie Beauchamp, qui est responsable du
don de gamètes ici, à OVO. Alors, merci encore une fois pour cette opportunité.
Le Président (M. Provençal)
: Bien, c'est moi qui vous remercie pour votre exposé. Nous allons
maintenant débuter les échanges avec M. le ministre. Alors, je vous cède la
parole, M. le ministre.
M. Carmant : Oui.
Bonjour... Bonsoir, M. Bissonnette... Dr Bissonnette,
Dre Beauchamp. Vous êtes le deuxième de suite, là, qui nous parle
de certaines craintes de démarrer de façon précipitée. Je dois vous dire qu'il
y a à tous les jours des familles qui m'écrivent pour me demander quand est-ce
qu'on va démarrer, et qui sont en attente depuis quelques années. Quelles sont
les craintes que vous voyez ou quelles sont les choses à éviter, en démarrage,
qui vous font craindre un dérapage initial?
M. Bissonnette
(François) : Comme je suis au Québec depuis le premier bébé
fécondation in vitro créé au Québec, j'ai eu l'expérience du passé, et un
des gros problèmes, dans le passé, c'était justement que le programme avait été
mis en place, et les structures, tant au niveau de la RAMQ qu'au niveau des
structures de support, n'avaient pas été finalisées. Et ça, ça crée un élément
de confusion pour les couples qui se retrouvent avec des conditions qui ne sont
pas claires, qui... Je sais que vous, Dr Carmant, je sais que vous faites
des gros, gros efforts pour clarifier l'éligibilité au programme, et tout ça.
Mais, moi, ce que je vous dis, c'est qu'on a l'occasion et l'opportunité de
faire un programme bien structuré, soyons sûrs que la structure, elle est bien
en place quand on va commencer.
M. Carmant :
Merci. Puis parlons de clarté, là. Je vois que, clairement, vous n'êtes pas le
premier à soulever le point, mais on nous a parlé beaucoup de ces fameuses six
inséminations, mais nous, on voyait ça d'un certain côté positif, où, si jamais
le clinicien n'en voyait pas l'obligation ou si jamais il y avait eu des essais
faits auparavant, ce n'était pas nécessaire de traverser ces six cycles-là,
tandis que pour d'autres qui pouvaient avoir des grossesses après une ou deux
inséminations, ça leur donnait la chance d'avoir plus d'un enfant. Donc,
clairement, vous, ça semblait, quand vous avez lu le projet, être un passage
obligatoire, si je comprends bien, selon vos commentaires?
M. Bissonnette
(François) : Non, non. La problématique, encore une fois, avec
l'expérience antérieure, c'est que les gens arrivent avec : J'ai le droit
à mes six cycles, je veux les avoir. J'ai le droit à mon cycle de fécondation in vitro, je veux l'avoir. Et c'est là que ça pose
problème. Et les gens arrivent avec des attentes, et c'est pour ça qu'il faut
clarifier, dans l'intention du gouvernement, que ce n'est pas de donner tout
d'un coup six cycles et, tu sais...
On vit actuellement
avec neuf cycles, et je n'ai aucune évidence pour justifier neuf cycles. Et
c'est vrai qu'on dit : Après six cycles, vous n'avez pas d'intérêt à
continuer, mais les gens disent : On a le droit, on veut, il faut. Et puis
qu'est-ce que vous voulez qu'on leur réponde? C'est dans ce carcan-là qu'on...
Oui, je comprends qu'est-ce que vous voulez
qu'on leur réponde. Mais moi, je vous dis : Si le gouvernement... si on
peut préciser l'intention du programme, je pense que ça va aider, et
c'est ce que je souhaite actuellement.
M. Carmant :
D'accord, d'accord, bien entendu. On entend bien. Un autre point, ça aussi, on
l'a entendu, au niveau de l'âge pour le
transfert d'embryons, nous, on avait quand même des inquiétudes au niveau des
complications obstétricales puis de la grossesse. À partir de quel âge,
vous, vous lèveriez un drapeau rouge pour l'implantation des embryons?
M. Bissonnette
(François) : À tout âge, on fait une évaluation au niveau de l'état de
la femme. La grossesse, c'est très demandant
et pour une femme de 40 ans comme pour une femme, des fois, de
35 ans. Et donc, nous, pour une femme...
Dans notre programme de don d'ovules, par exemple, les femmes de 40 ans et
plus vont avoir une évaluation médicale
particulière pour, justement, ces choses-là. Peut-être que, Coralie, tu
pourrais rajouter quelque chose sur le don, mais c'est clair qu'on est
là et très sensibles à cette préoccupation au niveau de l'état de santé.
• (20 h 40) •
Mme Beauchamp
(Coralie) : Oui. En fait, pour faire suite à l'âge des femmes, en
fait, vous savez, il y a des femmes de
32 ans qui sont dans un très mauvais état de santé et qui ont beaucoup
plus de complications qu'une femme de 41 ans
qui est en très bonne forme. Mais, on se donne une obligation de les évaluer
pour s'assurer qu'elles sont en bonne santé puis aptes à avoir une
grossesse avec un risque minimal.
D'ailleurs, moi je
voulais vous apporter un commentaire, en fait, sur votre projet de loi, parce
que j'ai un intérêt particulier pour les dons de gamètes, et j'ai lu, en fait,
avec grand enthousiasme votre projet de loi qui reconnaît le besoin de don de
gamètes dans les problèmes de fertilité, entre autres, les dons de paillettes
de sperme. Toutefois, je n'ai pas pu lire,
dans votre projet de loi, la même offre pour le don d'ovules. Et, vous le
savez, en fertilité, il est évident
qu'on a besoin d'un spermatozoïde et d'un ovule pour créer un embryon. Et donc
le besoin du don d'ovules est là, et on aimerait, pour avoir un projet
équitable, qu'on se penche sur ce besoin de don d'ovules.
À tort, on croit que
le don d'ovules, c'est pour les femmes plus âgées, justement, de 42, 43, 44,
qui ont moins de chances de grossesse, et vous avez raison, mais le besoin du
don d'ovules est aussi important pour les femmes plus jeunes. Elles peuvent
avoir une ménopause précoce, une incidence ovarienne prématurée, et nous
aimerions voir cette même offre là pour le don d'ovules, comme pour le don de
sperme, vis-à-vis... dans le projet de loi.
M. Bissonnette
(François) : Et, j'aurais à vous suggérer, M. le ministre, de vous
pencher sur une solution juste, équitable et
moins coûteuse pour l'État au niveau de ces dons de gamètes, et c'est ce qu'on
appelle le don dirigé. Le don dirigé, c'est de plus en plus populaire
pour le sperme. C'est-à-dire que, là, les couples vont avoir identifié un donneur qui accepte de donner son sperme dans le
cadre de la banque, qui est reconnue maintenant par les... Santé Canada,
et qui va passer tous les tests, et qui va
donner son sperme. Ce don-là est moins dispendieux pour l'État que les pailles
de sperme qu'on achète aux banques étrangères.
D'un autre côté, on pourrait aussi offrir aux
couples qui ont besoin d'ovules, un don dirigé d'ovules. Si vous arrivez avec
une solution comme ça, où est-ce que vous dites : Le don dirigé, il est
couvert par le programme, autant pour les ovules que pour
le sperme, un cycle de fécondation in vitro avec un don dirigé d'ovules, six
inséminations avec le sperme d'un donneur
désigné, bien, je pense que là vous arrivez avec une solution équitable,
juste, moins coûteuse et définitivement qui répond aux demandes
auxquelles vous vous êtes engagés avec les moyens de l'État.
Alors, je vous
demande tout simplement de réfléchir à cette alternative qui, nécessairement,
va demander plus de travail pour les cliniques, mais qui me semble être une
solution qui est juste et équitable.
M. Carmant :
Et la gestion de cette banque-là, vous la verriez à quel niveau?
M. Bissonnette
(François) : Bien, ce n'est pas... c'est des gestions... En fait, les
gens qui sont habitués de gérer des banques, le don d'ovules et le don de
sperme, on a la gestion du don dirigé. Et donc cette structure-là, elle existe. C'est sûr que je ne vous cacherai pas que
c'est beaucoup d'ouvrage, mais, si on regarde, encore une fois, à utiliser
les deniers de l'État à bon escient, je pense qu'en utilisant ce don dirigé là
on répond à la demande et on ne crée pas de dichotomie entre les ovules et le
sperme. Et, en tout cas, je vous demanderais d'y réfléchir.
M. Carmant :
D'accord, le point est bien pris. Un autre enjeu qu'on a, c'est au niveau des
cliniques hors centre hospitalier, c'est la
collaboration avec les différentes régions. Pour vous, comment ça se passe,
votre expérience, et ce qu'il faudrait améliorer dans un programme où
tout le monde collabore ensemble?
M. Bissonnette
(François) : Bien, je vous dirais que ça a toujours été ma
préoccupation d'offrir justement à tout le Québec l'accès aux soins. Et vous
n'êtes peut-être pas sans ignorer que nous avons joint un consortium qui est
maintenant pancanadien et qui va nous permettre de servir le couple québécois
partout sur la géographie du Québec. Nous allons disposer à l'intérieur du
consortium du centre à Québec. Et nous avons un satellite, à Gatineau, que l'on
souhaite éventuellement développer pour
pouvoir avoir, là aussi, notre laboratoire pleinement fonctionnel de
fécondation in vitro.
Avec ces trois
postes-là et notre satellite sur la Rive-Sud, je crois qu'on est en mesure
d'offrir un service de qualité à tout le
Québec. Nous avons déjà des partenariats avec des cliniciens à Val-d'Or, à
Rimouski, qui fonctionnent très, très
bien, et surtout avec la télémédecine qui fonctionne vraiment à merveille. Puis on a vu un petit «glitch», ce
soir, mais normalement ça fonctionne très, très, très bien. Et ça nous
ouvre vraiment des nouveaux horizons qui nous permettent de vraiment visionner
un service entier pour toute la population québécoise.
M. Carmant :
Parfait. Un des points qui nous tiennent vraiment à coeur, c'est le comité
d'éthique clinique central. En voyez-vous également le besoin? Ça semble que
oui. Et comment devrait-il être organisé, selon vous?
M. Bissonnette
(François) : Absolument. Absolument. Bien, je pense que, tu sais, le
comité d'éthique, par définition, n'arrive
pas avec des réponses, oui ou non, mais il permet d'évoluer dans notre
réflexion et il nous permet de progresser,
de toujours profiter de la réflexion qu'on a faite pour
l'appliquer plus tard à d'autres problèmes. Et je vous dirais que ça
fait trop longtemps que je suis dans le domaine, je pense toujours que j'ai tout
vu, puis on n'arrête pas de me surprendre.
Et c'est définitif qu'on n'est pas qualifiés, en fait, on a besoin d'éthiciens
compétents pour vraiment
compléter cette réflexion.
Et c'était le souhait
que je faisais, quand on a établi, par exemple, le comité pour la recherche au
niveau québécois, je souhaitais que le comité puisse avoir une
division sur laquelle on pourrait, justement, adresser des questions de cliniques. Et là je reçois avec beaucoup, beaucoup, beaucoup d'intérêt, justement, votre initiative
d'avoir un comité d'éthique national auquel on va pouvoir se pencher et
qui va nous permettre de collaborer entre les cliniques dans la réflexion
d'éthique.
M.
Carmant : Super. Peut-être passer la parole au Dr Beauchamp.
J'aimerais peut-être que vous m'élaboriez un petit peu plus sur votre
banque de gamètes et pour me dire comment ça se passe puis comment c'est géré.
Mme
Beauchamp (Coralie) : En fait, c'est géré, donc, à l'interne, à
travers notre clinique. Depuis février 2020, Santé Canada a émis des lignes
directrices par rapport à régir les dons de sperme dirigés et les dons d'ovules
dirigés. Et comme disait Dr
Bissonnette, mon collègue, il y a certaines cliniques, au Québec, qui ne se
sont pas aventurées là-dedans parce que c'est assez lourd comme suivi et
structure. Il faut avoir beaucoup de personnel dédié à ça. On a cette
chance-là, à notre clinique, d'avoir
beaucoup de personnel et donc de pouvoir dédier une équipe aux dons dirigés
exclusivement.
Donc, si on
pouvait... les autres cliniques du Québec pouvaient avoir la marche à suivre et
pouvoir le mettre en branle, eux aussi, de
façon pratico-pratique, ça permettrait à chaque clinique d'être autonome dans
leur recrutement puis sélection de patients et d'offrir ce service-là dirigé
à leur couple. C'est-à-dire que, si on a un couple receveur qui vient et qui a
sa propre donneuse, on a maintenant une marche à suivre par Santé Canada. Et ça
pourrait, justement, faire partie de votre projet de loi de pouvoir offrir
aussi des ovules comme on offre les paillettes de sperme.
Ce serait important, par contre, de clarifier,
dans votre projet de loi, ce cycle offert, là, par la RAMQ, va compter sur le
cycle offert à qui... Actuellement, lorsqu'on lit votre projet de loi, on a une
impression que, finalement, c'est la donneuse qui va se voir imputer son
cycle de fécondation in vitro, si elle fait un don dirigé. Ce n'est pas clair, en fait, dans votre projet de loi, ou peut-être
que nous ne l'avons pas bien compris. Mais ce n'est pas clair, actuellement,
est-ce que c'est le couple receveur qui va être imputé de ce cycle-là ou la
donneuse d'ovules. Parce que, sinon, on pourrait voir un couple receveur
qui va avoir — bien,
en effet, vous voyez, je vous vois réagir — ...qui pourrait avoir une donneuse,
ça ne fonctionne pas, une deuxième donneuse et toujours sur le gouvernement.
Donc,
ça, c'est quelque chose quand même important à bien spécifier dans votre projet
de loi, parce que ce n'était pas clair pour nous, à la lecture.
M.
Carmant : Et, par ce système-là,
vous êtes capables d'offrir des services à quel pourcentage de votre clientèle,
par ce système dirigé là de don dirigé?
Mme Beauchamp
(Coralie) : Bien, écoutez, à notre clinique, on fait 900 cycles
de fécondation in vitro par année et on a
160 cycles de don d'ovules. Et, dans ces 160 cycles là, moitié-moitié
viennent de dons dirigés, donc à peu
près
80, 100 cycles de dons dirigés, et l'autre partie, c'est à travers des
banques d'ovules. Il faut savoir qu'il
y a à peu près, au Canada, 2 500 cycles de don d'ovule, donc
ce n'est pas un besoin.
• (20 h 50) •
M. Carmant :
D'accord. Et vous insistez sur... que la meilleure façon de gérer, ce serait
local. Une gestion centralisée serait peut-être trop compliquée?
Mme Beauchamp (Coralie) :
On croit qu'en effet il y aurait une complexité dans une gestion centralisée, pour ce qui est des protocoles, mais une fois que
les protocoles sont partagés et connus aux autres cliniques, bien, le service
pourrait être offert dans la plupart des
cliniques. Parce que nous avons établi tout ce protocole-là, et ça a pris beaucoup de temps, quand même, mais...
M.
Carmant : Parce que, vous
savez, nous, on a une inquiétude avec les professionnels en soins, au
niveau de l'obstétrique-gynécologie, là, à travers la nation, là, donc toujours
un petit peu inquiet d'un drain de professionnels. Donc, c'est pour ça que je me demandais si ce ne serait pas plus... quelque chose qui serait faisable, du moins, au départ, sur une base plutôt
centralisée, là. Vous mentionniez que vous aviez la chance d'avoir le personnel
pour ça.
Le Président
(M. Provençal)
:
Dre Beauchamp...
Mme Beauchamp
(Coralie) : Bien, en fait, une fois que le...
Le Président
(M. Provençal)
: Je m'excuse...
M. Carmant :
Ah! désolé, j'ai dépassé mon temps.
Le Président (M. Provençal)
: ...malheureusement, vous ne pourrez pas formuler la question.
On demandera au docteur... au ministre,
excusez-moi, de communiquer directement avec vous s'il
veut avoir la suite des événements. Maintenant, je cède la parole à la
députée de Maurice-Richard. À vous.
Mme Montpetit : Je vous
remercie, M. le Président. Bonjour... Bonsoir, Dr Bissonnette. Bonsoir, Dre Beauchamp.
Dre Beauchamp, si vous voulez faire une courte réponse à la question du ministre,
il n'y a pas de souci si vous souhaitez compléter, là.
Mme Beauchamp
(Coralie) : En fait, il est tout à fait faisable, pour une clinique de
fertilité, avec les ressources que les
cliniques de fertilité ont à l'intérieur de leurs cliniques, de mettre en place
ce protocole-là de don dirigé. Il a été bien établi par
Santé Canada, il faut juste l'instaurer, et, une fois instauré, il est
tout à fait faisable, pas besoin d'autre personnel.
Mme Montpetit :
Bon, il en manquait peu pour compléter la question. C'était dommage de se
priver de la suite. Merci beaucoup à vous
deux d'être là avec nous ce soir, toujours très instructif d'entendre des
experts du domaine. Quelques questions pour vous, mais vous avez déjà
répondu à beaucoup de questions dans les échanges qui ont été faits avec le
ministre délégué. Je commencerais par la question de l'âge, deux volets.
Vous faites
référence... Puis je vous pose la question, je la poserai à l'ensemble des
groupes qui viennent de toute façon, mais je pense que vous, vous avez une
expertise encore plus pointue sur ces questions-là. Vous mentionnez dans votre
mémoire que vous comprenez les motifs pour imposer une limite d'âge. Puis là je
veux juste bien comprendre. C'est sûr qu'il y a des motifs qui sont
certainement gouvernés, entre autres, par des contraintes financières, mais je
veux juste être sûre de bien comprendre. On l'a posée aussi à d'autres experts
qui sont venus aujourd'hui, il y a d'autres juridictions qui ont fait le choix
de limiter à un âge plus élevé que 41 ou 42 ans ou de ne pas mettre de
limite d'âge et de se référer au jugement professionnel du médecin, entre
autres évaluer la réserve ovarienne de la femme sur différents critères, là.
Puis là vous n'avez
pas élaboré, dans votre mémoire, sur cette question-là. Vous avez élaboré sur
le transfert des embryons, puis j'y reviendrai parce que j'avais encore une
question, même suite à votre échange, mais, sur cet aspect-là spécifiquement
j'aurais souhaité vous entendre.
M. Bissonnette
(François) : D'accord. Peut-être que je vais répondre, parce qu'on
a... Et on nous a demandé, dans le passé, de revoir à la baisse l'enveloppe
budgétaire pour un programme de fécondation in vitro. Et, dans notre analyse,
on a conclu — d'ailleurs,
on l'a publiée — que,
justement, en limitant l'âge, l'État, la société en avait plus pour son argent.
Par exemple, le coût d'un
enfant né de fécondation in vitro à 42 ans est équivalent à à peu près
trois enfants nés par fécondation in vitro à
35 ans. Donc, si l'État regarde l'efficience et les résultats, et il y a
un montant relativement limité, bien,
ce n'est pas mauvais de penser qu'il faut s'imposer une limite d'âge pour
l'accès à ces services, pour desservir une majorité de la population et
avoir... créer un plus grand nombre de familles.
Mme Montpetit : J'entends bien ma
réponse, mais, dans le fond, je m'adresse vraiment au médecin en vous. Est-ce qu'il y a des complications? Est-ce qu'il y
a des... ou est-ce qu'il y a des données probantes qui nous indiqueraient
que 41 ans, 42 ans doit encore être l'âge qu'on doit prioriser quand
on parle de santé de la femme et de santé du bébé,
dans le fond? Si on tient compte vraiment de ces deux variables-là, est-ce que
c'est... l'âge qui devrait être fixé est bien celui dans le projet de
loi ou on pourrait penser le reculer ou l'avancer... le reculer de quelques
années, là?
C'est cette
perspective-là. Je sais que vous en voyez tous les jours, depuis de nombreuses
années, donc je suis certaine que vous êtes capable de nous instruire
là-dessus, là.
M. Bissonnette (François) : Je pense
que, dans nos mains, une patiente de 45 ans peut avoir une grossesse bien
suivie avec des risques très raisonnables par rapport à sa santé. Et on ne la
laissera pas s'imposer des risques, justement, on est plus sévères, et il faut
rechercher des choses, au niveau de la santé, qu'on ne recherche pas chez la jeune de 20 ans. Mais dire que c'est
contre-indiqué d'offrir un traitement juste basé sur l'âge, non, mais c'est
peut-être que, si on a un amont... une enveloppe budgétaire restreinte,
peut-être qu'on devrait, un peu comme ce que j'ai compris du ministre,
réfléchir et investir là où on a un meilleur retour, en tant que société, sur
l'investissement.
Mme Montpetit : J'entends bien, je
comprends que, là, il y a comme... J'entends que votre recommandation comme
médecin, comme docteur, c'est qu'il n'y a pas de contrainte, dans la mesure où
le jugement du médecin s'applique. Il peut y avoir des femmes de 43, 44,
45 ans qui vont...
M. Bissonnette (François) : Voilà.
Mme Montpetit : Bon, voilà. Parfait.
C'est ce que je voulais savoir. Je voulais vraiment avoir votre opinion
médicale pour se retrouver à travers tout ça. En ce qui concerne le transfert
d'embryons, vous l'avez mentionné, vous n'êtes
pas le premier à y faire référence aujourd'hui, puis c'est assez intéressant, mais je
trouvais... Vous avez commencé en
nous disant : Pourquoi une femme de 41 ans aurait seulement
une année, dans le fond, pour transférer un embryon, par rapport à une femme de 35 ou 38 ans? Est-ce qu'au-delà de l'équité... est-ce que ça ne crée pas une certaine
pression aussi, encore là, d'un point de vue médical? Est-ce que vous suggérez,
dans le fond, de rehausser cet âge-là? Jusqu'à quel âge? Et qu'est-ce que vous
voyez comme contrainte que ça pourrait apporter de le fixer à 42 ans?
M. Bissonnette (François) :
Moi, encore une fois, c'est une question de justice. En pratico-pratique, on
sait très bien que la majorité des femmes
vont avoir leur transfert en dedans des 12 mois. Ce n'est pas ça qui est
le problème. Donc, je n'ai pas besoin d'une loi pour me le dire. Mais,
si la loi spécifie 12 mois parce que tu as 41 ans et 11 mois, je
m'excuse, mais, pour moi, ce n'est pas juste. Et c'est là que je voulais amener
la réflexion.
C'est-à-dire, une loi, pour moi, doit être juste
et équitable, et il ne doit pas y avoir de discrimination basée sur l'âge,
purement juste basée sur l'âge. Et autant j'ai une justification pour limiter
l'âge d'accès à la procréation assistée, autant je n'ai pas de justification
pour imposer un tel délai. Si vous voulez avoir un 12 mois, imposez-le à
tout le monde, ça, c'est correct, je n'ai pas de problème. Vous dites :
O.K., le programme va couvrir pour un transfert d'embryons en dedans de
12 mois. Parfait. C'est logique, c'est juste, c'est équitable, il n'y a
personne qui ne peut dire rien. Mais, quand vous ciblez la patiente qui est à
la limite d'âge et que vous lui dites : Bon, toi, toi, ça va être
12 mois, ça, j'ai un problème.
Mme Montpetit : Je vous
remercie. C'est très, très clair. M. le Président, combien il reste de temps?
Ça file toujours très vite, hein? Je vais laisser la parole à mon collègue de
Marquette. Alors, merci. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: M. le député, allez-y.
M. Ciccone :
Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour... Bien, bonsoir, Dre Beauchamp
et Dr Bissonnette. Rapidement, je vous
réfère à votre exposé, mémoire, la deuxième page : «On reconnaît l'effort
qui est fait pour corriger les injustices du passé qui permettaient aux
couples femme-femme de profiter, chacune, [des] cycles couverts» par la
fécondation in vitro. Je l'ai lu, relu et relu, je veux des
précisions : Qu'est-ce que vous voulez dire dans ça? Est-ce que vous êtes
pour, justement? Est-ce qu'un couple homosexuel de femmes puisse avoir...
recourir à la fécondation in vitro avec le projet de loi ci-contre?
• (21 heures) •
M. Bissonnette
(François) : Un couple
homosexuel femme, un couple hétérosexuel ou un couple homosexuel homme
devrait avoir le droit et l'accès au traitement de fécondation in vitro.
Ce qui était l'injustice, c'est que, dans un couple de lesbiennes, les deux
avaient le droit parce que le cycle était attaché à la femme. Là, dans le
projet de loi actuel, la correction, c'est que c'est maintenant le couple qui
se voit imputer le cycle de fécondation in vitro comme les
six inséminations. Et ça, bravo! Je trouve que c'est vraiment corriger une
injustice par rapport à ce que c'était dans le passé.
M. Ciccone : Bien, merci beaucoup. J'ai juste de la difficulté
avec le mot «injustice», là, parce qu'on parle de, quand même, une femme
qui veut avoir un enfant, là. Je comprends qu'à un moment donné il faut
peut-être tirer la barre, mais, en même
temps, moi, d'associer le mot «injustice» avec une femme qui veut avoir un
enfant, que ce soit un couple
homosexuel, moi, j'ai tendance à penser que peut-être on pourrait le faire de
façon individuelle. Mais, bon, j'ai votre... au moins j'ai compris ce
que vous voulez dire.
«Il
faudrait trouver un moyen pour que les deux noms du couple soient
enregistrés pour le cycle de fécondation
in vitro et les 6 inséminations.» Là, vous voulez dire quoi,
là-dessus? C'est la même chose.
M. Bissonnette
(François) : Encore une fois, moi, l'injustice, ce n'est pas au niveau
de la femme. Bien non, absolument pas, je n'ai rien... bien au contraire, on
supporte les femmes lesbiennes. Ce n'est pas ça. L'injustice, c'est au niveau du couple, O.K.? C'est qu'un couple
hétérosexuel il a droit à un cycle. Bien, le couple homosexuel devrait avoir
le droit à un cycle. C'est aussi simple que ça.
M. Ciccone :
O.K. Merci beaucoup. Je vais arrêter là-dessus. Merci beaucoup.
Le Président (M.
Provençal)
: Il reste 40 secondes. Ça
va?
M. Ciccone :
Oui, ça va, ça va.
Le Président (M.
Provençal)
: O.K. Merci beaucoup. Alors,
nous allons maintenant avec la députée de Sherbrooke pour la suite de
l'échange. Mme la députée.
Mme Labrie :
Merci, M. le Président. On a discuté beaucoup aujourd'hui avec les groupes de
la question de la limite d'âge, mais, en même temps, je n'ai pas la
connaissance de quel volume de demandes ça représente. Vous, vous recevez beaucoup de couples à chaque année.
Pouvez-vous me dire la proportion des couples ou des gens qui font des
démarches auprès de vous qui ont au-delà de 42 ans?
M. Bissonnette
(François) : Le tiers.
Mme Labrie :
Le tiers, hein? O.K, quand même. Puis... O.K., c'est plus que je pensais. Votre
suggestion, là, j'essaie de la comprendre. Dans le fond, vous voudriez qu'on
retire l'interdiction d'avoir... tu sais, de transplanter l'embryon après
42 ans, dans le fond, vous voudriez que ça soit permis de le transplanter
après 42 ans, jusqu'à l'âge de la
ménopause. Ça, ça serait un accommodement qui serait raisonnable, pour vous, ça
serait donc la seule manipulation qui serait permise?
M. Bissonnette
(François) : Non, je dis... Non, mon point, c'est que, si on est pour
imposer une règle, on la fait juste et
équitable pour tout le monde. À partir du moment où l'embryon est congelé,
bien, il n'y a plus de question d'âge.
Et donc, si on impose une... au niveau du transfert d'embryon congelé, bien, il
devrait être exactement identifié. On dit deux ans. On
dit : Tout ça, c'est deux ans pour tout le monde, la patiente de
35 ans comme patiente de 42 ans ou 41 ans.
Mme Labrie : Vous aimeriez mieux qu'on fixe une limite comme
ça, en termes de nombre de mois ou d'année après que l'embryon soit congelé,
que de le laisser lousse, disons, pour toutes les plus jeunes femmes puis de
permettre que ça dépasse 42 ans. Vous aimeriez mieux une limite qui
serait... Quelle limite, par exemple, vous proposez?
M. Bissonnette
(François) : Bien,
personnellement, personnellement, encore
une fois, peut-être
que j'interprète, j'ai une notion de
justice qui n'est pas la même que tout
le monde, mais, pour moi, c'est
discriminer sur la base de l'âge, sous aucune base scientifique qui le justifie.
Alors, c'est pour ça que, pour moi...
Mme Labrie : Mais donc ce serait... est-ce que
ce serait 12 mois, votre proposition pour remédier à ça? Est-ce que
vous préféreriez qu'on inclue dans la loi que c'est 12 mois, ou ce serait
24 mois, ou... Ce serait quoi, la durée idéale?
M. Bissonnette
(François) : Bien, si on veut inclure un délai pour des raisons, justement,
de ne pas maintenir une banque d'embryons qui vont être transférés puis qui
restent dans le congélateur, bien, c'est correct, je n'ai aucun problème avec ça. Mais fixons le délai, juste et
équitable, et le même pour tout le
monde. Alors, que ce soit
12 mois, 24 mois, je vis très, très, très bien avec ça, mais je ne
veux pas que... en tout cas, je ne souhaite pas que la femme plus âgée se
retrouve, elle, coincée dans un délai raccourci, alors qu'on laisse à la jeune
toute la marge de manoeuvre. Ça, je ne trouve pas ça correct.
Mme Labrie :
Je comprends. C'est juste, moi, je n'ai pas...
Le Président
(M. Provençal)
: Merci. Malheureusement,
votre temps est terminé. La parole appartient maintenant au député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau :
Merci beaucoup. Alors, bien, je vais continuer un petit peu sur le même thème, parce
que c'est quand même intéressant. Là, vous parlez de la question d'équité puis du délai, mais ce qu'on a entendu beaucoup
aujourd'hui, c'était sur le pourcentage de réussite
anticipé. Est-ce que vous y faites référence aussi? Parce que
vous parliez tout à l'heure du coût, puis la raison pour laquelle on
justifiait de fixer une limite d'âge, c'était parce que les chances que ça réussisse sont moindres.
M. Bissonnette
(François) : Bien, c'est là
qu'on parle du coût. Quand on parle de coût, c'est le coût par bébé,
donc les chances de réussite.
M. Arseneau : D'accord, c'est
ça. Mais vous, ce que vous dites... par exemple,
vous dites : jusqu'à 45 ans et même davantage, de... ça
peut réussir?
M. Bissonnette
(François) : Bien, une fois que l'embryon est congelé...
M. Arseneau : Ou ça devait être
accessible, mais les chances de réussite sont moindres... Pardon?
M. Bissonnette (François) :
Juste pour être simple, pour être clair, une fois que l'embryon est congelé,
là, la question de l'âge de la Mme, de la receveuse, n'est absolument plus...
M. Arseneau : Un facteur? D'accord.
M. Bissonnette (François) :
...tenue en compte. Ce n'est plus un facteur. Qu'elle ait 35 ans... Si
l'embryon était congelé à 40 ans, bien,
c'est la même chose, à 40 ans, que si on le transfère à 42 ans,
43 ans, 44 ans. Si la personne
est en bonne santé, il n'y a pas de différence.
M. Arseneau : D'accord. C'est pour ça que vous parliez tout à l'heure des risques potentiels pour
la femme, que vous devez mesurer avant le transfert d'embryons?
M. Bissonnette (François) : Oui,
voilà, voilà. Voilà.
M. Arseneau : Parfait. Pour ce qui
est... vous dites, essentiellement, le contraire d'une autre firme qui est passée tout à l'heure, quand il est question
d'exclure ou non les couples qui auraient, par exemple... dont un des conjoints
aurait subi une stérilisation médicale. Parce qu'eux faisaient référence au
fait que les couples peuvent se séparer et se reconstituer. Est-ce que ça, ce
n'est pas une problématique qui vous est soumise, parfois?
M. Bissonnette (François) : Encore
une fois, si on a des moyens illimités, c'est correct, mais, si on a des moyens
limités... On a vécu durant des années où la chirurgie de réanastomose était
couverte par l'assurance maladie du Québec
et la fécondation in vitro ne l'était pas. C'est quand même des arguments
qui ont convaincu un gouvernement antérieur
de financer, justement, la fécondation in vitro. Alors, encore une fois,
moi, c'est une question de justice, encore une fois, juste d'être justes
et équitables.
M. Arseneau : D'accord. Peut-être...
Non? Oui?
Une voix : ...
M. Arseneau : Non? C'est bon. Merci
beaucoup. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Je remercie les Drs Beauchamp et Bissonnette pour leur
contribution à nos travaux. Je tiens à remercier aussi les gens du soutien
technique, parce que vous avez fait un travail remarquable aujourd'hui pour
nous aider dans nos travaux.
La commission ajourne ses travaux jusqu'à
mercredi 9 novembre 2020, après les affaires courantes, où elle
poursuivra son mandat. Merci beaucoup, et bonne fin de soirée.
(Fin de la séance à 21 h 08)