(Onze
heures trente-cinq minutes)
Le Président (M.
Provençal)
: À
l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de la santé et
des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle
de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques. Ça va?
La commission est
réunie afin de procéder à l'interpellation du député de Gouin à la ministre de
la Santé et des Services sociaux sur le sujet
suivant : La nécessité de mettre en place Pharma-Québec afin d'assurer aux Québécoises et aux Québécois la disponibilité des médicaments, des
vaccins et du matériel médical tout en réduisant les coûts d'approvisionnement.
Mme la
secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Lafrenière (Vachon)
est remplacé par M. Lévesque (Chapleau); Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) est remplacée par M. Lévesque (Chauveau); et
M. Zanetti (Jean-Lesage) est remplacé par M. Nadeau-Dubois (Gouin).
Le
Président (M. Provençal) : Merci, Mme la
secrétaire. Je comprends que l'interpellation suivra les modalités indiquées
dans l'entente du 13 mai 2020.
Nous
débutons par les déclarations d'ouverture. M. le député de Gouin, vous avez la
parole pour 10 minutes.
Exposé du sujet
M. Gabriel
Nadeau-Dubois
M.
Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. Bien, d'abord, je veux saluer,
bien sûr, la ministre, les députés qui sont
présents également, de l'opposition et du gouvernement, l'ensemble des équipes.
Bonjour à vous, M. le Président.
J'aimerais
commencer par dire qu'il y a une phrase que je déteste prononcer, et je déteste
vraiment dire ça, et c'est la phrase
suivante : On vous l'avait dit. C'est vraiment plate de devoir dire une
phrase comme celle-là, mais je n'ai pas le choix ce matin de commencer
ma discussion avec la ministre de la Santé en disant : On vous l'avait
dit.
J'ai
retrouvé, M. le Président, un site Internet qui a été mis en ligne par mon
ancien collègue Amir Khadir, qui était député de Mercier, qui en 2015
avait mis en ligne un site qui s'appelle lesmedicaments.ca,
site dans lequel Amir Khadir présentait le projet de Pharma-Québec.
Et en
parcourant ce site, qui est un peu daté quand même, il y a une phrase qui aura
attiré mon attention. J'aimerais la partager avec la ministre. Cette phrase,
donc, qui est écrite dans le cadre d'un paragraphe qui décrit Pharma-Québec,
dit ceci : Pharma-Québec «permettrait de contrer les risques de
cartels et de répondre aux pénuries. En cas de pandémie, la capacité de
produire massivement des vaccins nous ferait épargner des dizaines de
millions.» Je n'ai même pas fait exprès, M. le Président, je suis vraiment
tombé sur cette phrase-là en me préparant dans les derniers jours, et cette
phrase-là, à elle seule, fait la démonstration à quel point notre problème de
dépendance, notre problème de vulnérabilité en matière d'approvisionnement de
médicaments, de vaccins et de matériel médical, à quel point ce problème-là, il
ne date pas d'hier. Ce n'est pas un nouveau problème. Selon les dernières
statistiques qu'on a, le Québec produit seulement 27 % de ce dont il a
besoin en matière de produits pharmaceutiques et médicaux. Et donc,
mathématiques simples, on importe 73 % de ce dont on a besoin.
Le problème n'est pas
nouveau, donc, mais il a été révélé par la crise qu'on vit depuis les derniers
mois. Le contexte de pandémie a montré à quel point cette dépendance du Québec
à l'égard des marchés extérieurs puis des entreprises
étrangères sur le plan des médicaments, des vaccins et de l'équipement médical,
à quel point cette dépendance-là,
elle nous fait mal, à quel point elle nous rend fragiles. D'ailleurs, le
premier ministre a reconnu lui-même, il y a quelques semaines, que ce problème
de dépendance était problématique et qu'il fallait, au Québec, augmenter notre
autonomie médicale et pharmaceutique.
La bonne nouvelle,
c'est qu'il n'est pas trop tard. Il n'est pas trop tard, parce que les crises
sociales comme celle qu'on vit présentement, ça peut et ça doit être, selon
moi, des occasions d'apprendre, des occasions de grandir collectivement, bref,
des occasions de changer les choses. Le pire, ce qui serait vraiment le
scénario le plus triste, ce serait qu'on ait fait tous ces sacrifices, qu'il y
ait eu autant de victimes, que le Québec ait été autant blessé et qu'on
ressorte de cette crise-là sans avoir rien appris, qu'on ressorte de cette
crise-là avec les mêmes problèmes, avec les mêmes injustices. Il faut, c'est un
peu triste à dire, mais il faut profiter, d'un certain point de vue, de cette
crise pour voir comment on peut mieux faire.
Depuis les quelques jours... Depuis les derniers jours, d'ailleurs,
la crise se calme un peu. Elle n'est
pas terminée, j'en conviens, pas du tout, mais le déconfinement a commencé, ce
qui est le signe, certainement, que le temps des bilans peut aussi commencer, le
temps des débats aussi puis peut-être le temps des solutions.
Et
on est ici ce matin pour entendre la ministre
de la Santé sur une proposition,
sur une solution, celle de Québec
solidaire et qu'on appelle
Pharma-Québec. Pharma-Québec, c'est quoi? Bien, c'est le projet d'une société d'État, d'une société d'État dont le mandat serait... dont la mission serait
d'augmenter l'autosuffisance du Québec sur le plan des médicaments et du matériel médical. Cette mission se déploierait, je
dirais, en un triple mandat : un mandat d'achat, un mandat de
production et un mandat de recherche.
• (11 h 40) •
Un mandat d'achat d'abord. Pharma-Québec, c'est
ce qu'on propose, serait chargée d'obtenir, de négocier le prix des médicaments prioritaires pour traiter la
COVID-19, ça, c'est dans un premier temps, à court terme, centraliser également
les approvisionnements et le stockage des médicaments pour éviter les
pénuries. Mais, une fois la pandémie terminée, ce pôle d'achat public
donnerait au Québec un pouvoir, un rapport de force supplémentaire envers les
compagnies pharmaceutiques pour garantir les meilleurs prix possible aux Québécois
puis aux Québécoises.
Il y aurait également un mandat de production
chez Pharma-Québec, un mandat de planifier et d'organiser la production de
médicaments et de vaccins, bien sûr, tout d'abord, pour lutter contre la
COVID-19, mais, à long terme, pour permettre au Québec d'avoir ses propres
capacités de production de médicaments et de vaccins, pour être mieux protégé
contre la prochaine pandémie. Ce genre de modèle là existe d'ailleurs au Brésil
et en Suède.
Puis finalement un mandat de recherche. Bien,
d'abord à court terme, encore une fois, stimuler et coordonner la recherche d'un vaccin ou de traitements contre
la COVID-19, mais, à long terme, s'assurer que les inventions développées en laboratoire, qui sont financées
publiquement par le gouvernement, par l'État québécois, restent contrôlées
et brevetées par l'État québécois. Bien sûr, ça ne serait pas en vase clos. Ce
serait en partenariat avec les universités et même avec les entreprises
privées.
C'est un
résumé très bref de ce que c'est, Pharma-Québec. C'est une proposition, la
ministre le voit, qui, certes, est ambitieuse, je le reconnais, mais qui
est profondément pragmatique. Ce n'est pas une proposition farfelue, ce n'est
pas une proposition rêveuse, c'est une proposition pragmatique. Et notre avis,
c'est que c'est une nécessité. D'ailleurs, ça
existe en tout ou en partie dans plusieurs pays dans le monde. Il y a des
éléments qui existent en Nouvelle-Zélande,
d'autres, je le disais, au Brésil et en Suède. Et la vérité, c'est que le
Québec, lui, n'a jamais été aussi mûr qu'aujourd'hui pour réfléchir puis
débattre de cette proposition-là.
Le premier ministre, je le disais tantôt, a
reconnu que notre dépendance à l'étranger est plus problématique que jamais.
Les experts sont d'accord avec lui. André-Pierre Contandriopoulos qui est
professeur à l'École de santé publique de
l'Université de Montréal disait d'ailleurs en janvier que ce qui est une mine
d'or pour les grandes compagnies pharmaceutiques, c'est le désespoir.
Or, en ce moment, nous sommes dans une situation désespérée, où tous les pays
du monde, surtout les grandes puissances, vont se bousculer dans les prochains
mois pour obtenir les éventuels médicaments ou vaccins pour traiter, pour
lutter contre la COVID-19.
Rappelons-nous ce qui s'est passé quand il y a
eu, très brièvement, une quasi-pénurie de masques. Il a suffi que Donald Trump claque des doigts, et on est
pratiquement tombé ici en pénurie, pratiquement. Imaginons la bousculade,
voire la guerre commerciale sur le plan international quand un vaccin sera découvert.
Comment va se démarquer le Québec? Comment on
va se défendre contre les grandes entreprises, contre les grandes puissances
qui vont vouloir mettre les mains en
premier sur ces traitements-là? Comment on va se défendre face à des
entreprises pharmaceutiques qui, on le sait, vont profiter d'une demande
très forte pour vendre leurs produits aux plus offrants?
M. le
Président, moi, je suis préoccupé par cette situation-là. Je ne pense pas être
le seul. Et je le dis d'entrée de jeu,
je pense que mon introduction est
claire, je suis ici dans un esprit constructif. Je veux qu'on échange
sérieusement sur cette proposition-là.
Ce projet de Pharma-Québec, il doit être, selon nous, tout en haut de la liste
des priorités, la liste des priorités que
cette crise-là nous aura apprise. Parce que les crises sociales, les crises
sanitaires, les moments de grand bouleversement, ça a été historique
aussi des moments où les sociétés se sont dit : Il faut faire mieux pour
la suite des choses.
J'invite la
ministre, donc elle aussi, à être constructive. C'est un sujet qui est
d'actualité et qui est plus pertinent que jamais. Bien sûr, je juge
qu'il a toujours été pertinent, mais notre fragilité, notre vulnérabilité,
notre manque d'autonomie médicale ne nous a jamais éclaté en plein visage que
dans les derniers mois.
Et ma première question, donc, pour la ministre,
est très simple. Ne voit-elle pas à quel point le Québec est fragile sur le
plan de son approvisionnement en médicaments, notamment en vaccins et en
équipement médical? Ne voit-elle pas à quel point il faut poser des gestes
forts pour remédier à cette situation-là? Ne voit-elle pas à quel point l'État
a un rôle à jouer pour ça et qu'on ne peut pas simplement encourager, demander
à des entreprises privées de le faire à notre place, à quel point l'État du Québec
doit avoir un rôle de planification, de coordination pour augmenter notre autonomie médicale et pharmaceutique? Bref,
ne voit-elle pas à quel point une institution comme Pharma-Québec
serait utile et pertinente pour augmenter l'autonomie médicale du Québec?
Le Président (M. Provençal)
: Merci,
M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre de la Santé
et des Services sociaux pour une période de 10 minutes. Madame.
Réponse de la ministre
Mme Danielle McCann
Mme
McCann : Merci, M. le Président. Alors, j'en profite pour saluer le collègue député de Gouin, et
l'ensemble des députés du gouvernement et des oppositions qui sont avec nous aujourd'hui, et également des personnes du cabinet et du ministère de la Santé et
des Services sociaux.
Alors, aujourd'hui, M. le
Président, le député de Gouin nous invite à parler de son projet, Pharma-Québec.
On va le dire d'entrée de jeu, on a des réserves avec cette proposition, puis
on va en reparler, des différents volets, lors des différents échanges qu'on va
avoir au cours des prochaines deux heures, M. le Président. Alors, ça nous
donne aussi l'opportunité de parler de notre régime général d'assurance
médicaments, et, je pense, pour apprécier la proposition de notre collègue, il
est important de comprendre le fonctionnement de notre régime d'assurance
médicaments.
En juin 1996, l'Assemblée nationale a adopté la
Loi sur l'assurance médicaments, qui a institué le régime général d'assurance
médicaments, et celui-ci a pour objet d'assurer à l'ensemble de la population québécoise
un accès raisonnable, équitable aux médicaments requis par l'état de santé des
personnes. Avant la mise en oeuvre du régime général d'assurance médicaments,
il faut le rappeler, en 1997, un Québécois sur six ne bénéficiait d'aucune
couverture en matière d'assurance médicaments. Depuis la mise en place, chaque personne
établie au Québec de façon permanente doit être couverte en tout temps par un
régime d'assurance médicaments, et celui-ci se compose d'un régime public et de
plusieurs régimes privés auxquels les personnes peuvent avoir accès en raison
de l'emploi qu'elles occupent et/ou de l'exercice d'une profession.
Alors, le régime public couvre près de 44 %
de la population québécoise puis les régimes privés assurent la couverture de 56 % des Québécois.
Pour certaines clientèles jugées vulnérables
au plan économique, la gratuité complète des médicaments, ni prime ni
contribution à l'achat. Il s'agit des clientèles des programmes d'assistance
sociale, des personnes âgées de 65 ans ou plus qui reçoivent une
prestation de supplément de revenu garanti, qui représente au moins 94 %
de la prestation maximale, ainsi que les enfants des assurés du régime public, incluant
les étudiants à temps complet... pardon, à temps complet, âgés de 18 à
25 ans. Pour les autres personnes assurées, la prime annuelle peut varier entre zéro et 636 $. Le montant
est déterminé en fonction du revenu. Alors, à la pharmacie, la contribution
maximale va s'élever à un maximum de 93,08 $ par mois, mais, pour les
personnes de 65 ans et plus qui reçoivent un supplément de revenu garanti au
taux de 1 % à 93 %, le montant maximal, il est de 54,08 $.
• (11 h 50) •
Alors, le
Québec a une couverture généreuse des médicaments, ce qui permet aux cliniciens
d'avoir un éventail d'options
thérapeutiques pour répondre aux besoins de la population. Présentement, il y a
un peu plus de 3 000 dénominations communes sur la liste des
produits assurés. Ces produits sont inscrits à la liste par la ministre à la
suite de la réception d'un avis de l'Institut national d'excellence en santé et
en services sociaux.
Pour produire son avis, l'INESSS réalise une
évaluation très rigoureuse des médicaments. Dans un premier temps, l'INESSS
doit, en premier lieu, évaluer la valeur thérapeutique d'un médicament,
d'abord, donc, répondre à la question suivante : Est-ce que le médicament
est efficace? S'il considère que l'efficacité n'est pas démontrée à sa
satisfaction, il transmet un avis à la ministre à cet effet. En revanche, si la
valeur thérapeutique du médicament est démontrée, l'INESSS transmet sa recommandation
à la ministre après avoir évalué les aspects suivants : la justesse du
prix, le rapport entre le coût et l'efficacité du médicament, les conséquences
de l'inscription du médicament à la liste sur la santé de la population et sur
les autres composantes du système de la santé et des services sociaux.
Enfin,
l'opportunité de l'inscription du médicament à la liste, au regard de l'objet
du régime général d'assurance médicaments. La liste des médicaments
constituée par le ministre après avec reçu l'avis de l'INESSS s'applique autant dans le régime public géré par la RAMQ que
dans les régimes privés et s'il y a équité dans l'accès aux médicaments.
On constate que le processus d'inscription
des médicaments au Québec, il est très rigoureux. Il favorise l'inscription
de médicaments efficaces au meilleur prix possible. Aussi, en ce qui a trait au
prix des médicaments, il importe de souligner que le fabricant doit s'engager à
offrir le meilleur prix au régime québécois. Il s'agit d'une obligation réglementaire
que tous les fabricants doivent respecter. Dans le but d'améliorer la rapidité
d'accès à certains médicaments constituant une percée thérapeutique majeure ou
un potentiel d'économies substantielles, l'INESSS
peut amorcer l'évaluation d'un médicament ou d'une nouvelle indication d'un
médicament déjà commercialisé avant que Santé Canada ait rendu sa
décision. L'accélération de l'évaluation par l'INESSS vise à ce que les
résultats de ces recommandations coïncident le plus possible avec l'avis de
conformité de Santé Canada, en vue de favoriser un accès plus rapide à certains
médicaments.
Alors, tout ça, ça a pour objectif d'avoir accès
à un produit qui va permettre de réaliser des économies ou de donner accès à
une innovation majeure plus rapidement aux Québécoises et aux Québécois qui en
auraient besoin pour lutter contre leurs maladies. L'accès aux nouvelles
technologies pharmaceutiques demeure une priorité pour les personnes qui en ont besoin. Il est important de
souligner ceci parce que... pour soutenir la création de Pharma-Québec,
Québec solidaire prend l'exemple sur la Nouvelle-Zélande. Or, la
Nouvelle-Zélande a un organisme qui s'appelle PHARMAC
et qui joue un rôle semblable à celui proposé par Pharma-Québec. Or, la baisse
du prix des médicaments en Nouvelle-Zélande aurait eu des effets
secondaires non négligeables sur la santé de la population. Il y a eu une étude
qui s'est penchée sur les taux de décès à la suite d'un infarctus du myocarde,
de la durée moyenne de séjour après un incident cardiovasculaire et la vente de
médicaments pour les traitements cardiovasculaires au Canada, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Les conclusions
de cette étude tendent à démontrer qu'alors que la Nouvelle-Zélande
avait connu une baisse de ventes de médicaments pour les traitements
cardiovasculaires, le Canada et l'Australie, quant à eux, avaient une direction
contraire, une hausse des ventes de cette catégorie de médicaments. Les
résultats : au Canada et en Australie, les taux de mortalité ont diminué,
alors qu'en Nouvelle-Zélande ils sont restés stables. La durée moyenne de
séjour en hospitalisation a diminué au Canada et en Australie, alors qu'en
Nouvelle-Zélande elle a augmenté. Ça pourrait être circonstanciel, mais les
chercheurs du groupe de recherche CIRANO soulignent que ça donne à penser qu'il
y aurait un lien entre la baisse de dépense de médicaments pour traitements
cardiovasculaires et les résultats de santé.
L'accès à un éventail de
molécules pour répondre aux besoins de la population, c'est très utile pour
obtenir des résultats positifs dans le
domaine de la santé, mais il faut utiliser les médicaments de façon optimale.
L'usage optimal des médicaments, c'est un enjeu majeur, tant au niveau
financier qu'au niveau clinique, pour obtenir de meilleurs résultats sur la
santé de la population.
Il y a un chantier de pertinence clinique sur
l'usage optimal des médicaments auquel le ministère de la Santé et des Services
sociaux participe. Alors, son objectif, c'est d'identifier des classes de
médicaments dont l'usage est potentiellement inadéquat, de cibler des problèmes
spécifiques à corriger et de demander par la suite à l'INESSS d'élaborer des
recommandations pour la préparation d'un plan d'action. Alors, l'INESSS a déjà
publié, au cours des dernières années, pas moins de 70 publications
favorisant un usage optimal du médicament, et 11 autres projets sont en cours d'élaboration. Et, en plus de ce que fait
l'INESSS, il y a deux projets qui ont pris racine dans le but d'améliorer
l'usage des médicaments, en CHSLD notamment, le projet Optimisation des
pratiques des usages, des soins et des services antipsychotiques, OPUS-AP, et
le projet d'évaluation de la personnalisation des soins, le PEPS.
Alors, l'implantation de ces projets suivent
leurs cours actuellement, et nous sommes à l'étape, évidemment, des évaluations
de ces projets. On veut assurer la convergence entre les projets PEPS et le
projet OPUS-AP et implanter les meilleures pratiques dans l'ensemble des établissements
de santé. Alors, ce sont des projets importants parce qu'ils touchent nos aînés,
et ils sont faits dans l'Estrie et dans la Capitale-Nationale, et on aimerait évidemment
les étendre à travers le Québec.
Alors, en terminant, il est important de
rappeler que le régime général d'assurance médicaments, c'est un régime qui est en constante évolution.
Il doit s'adapter aux besoins de la population, à la réalité du secteur du médicament. En
effet, au milieu des années 1990 jusqu'à la fin de la première décennie
des années 2000, les secteurs du médicament étaient particulièrement
orientés vers les problèmes de santé courante tels que l'hypertension et les problèmes cardiovasculaires, pour qu'on en cite quelques-uns, là. Aujourd'hui, l'industrie pharmaceutique s'est tournée vers des
produits de niche, comme les médicaments dans le domaine de la cancérologie et
les maladies rares, des produits oraux solides, des pilules. Nous sommes
passés de plus en plus aux médicaments biologiques injectables, dont le prix
est très élevé... et est maintenant à l'arrivée des biosimilaires.
Alors, le régime général fait face à des
multiples défis, et, en revanche, quand on prend le temps d'analyser la situation,
Pharma-Québec ne semble pas être la solution, à notre avis. Merci, M. le
Président.
Argumentation
Le Président
(M. Provençal)
: Merci, Mme
la ministre. Nous allons maintenant
procéder au bloc d'interventions. Conformément à l'entente conclue, M. le
député de Gouin, vous avez la parole pour un maximum de sept minutes.
M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le
Président. J'ai fait une introduction sur le thème de l'autonomie médicale puis
de l'importance pour le Québec d'être le plus autonome possible sur le plan de
son approvisionnement en médicaments, notamment en vaccins et en matériel
médical.
La dissertation de la ministre était très
intéressante. C'est juste dommage qu'elle ne portait pas sur le sujet sur lequel
je l'ai invitée à discuter avec moi. Elle m'a parlé du régime d'assurance
médicaments. Je peux moi aussi parler de ça.
Je pourrais lui dire qu'au Québec le prix de détail des médicaments est
supérieur à la moyenne de l'OCDE et est supérieur également aux prix
dans le reste du Canada. Je pourrais lui dire qu'en 1998, les ménages puis les
employeurs au Québec, globalement, là, payaient 6 % plus cher les
médicaments, puis qu'en 2016, c'était rendu
41 % plus cher. Alors, les soi-disant réussites, là, du régime à deux
vitesses d'assurance médicaments au Québec, il faut grandement les
relativiser. C'est mieux que rien, mais c'est bien insuffisant.
Et ce dont nous aurions besoin au Québec, c'est
la proposition, notamment, de Québec solidaire, mais de plein de gens dans la
société civile, c'est d'un régime d'assurance médicaments public et universel,
parce que les médicaments, ça fait partie de la santé et ça devrait être assuré
de manière publique et universelle par tout le monde.
Je pourrais aussi lui parler du fait que les
frais d'administration chez les assureurs privés sont huit fois plus élevés,
huit fois plus élevés que ceux des assureurs publics.
Je pourrais moi aussi prendre mon sept minutes
et parler de cette question-là, mais j'ai envie de l'entendre sur le coeur de
notre proposition, qui est celle de se doter d'une société d'État, pas pour
tout contrôler, là, dans un bureau étatique, là, pour organiser, pour
planifier, pour jouer un rôle de leadership en matière de production, d'achats
puis de recherche de médicaments au Québec.
D'ailleurs, l'argument selon lequel... que
semble faire la ministre, l'argument entre le coût des médicaments et le taux
de mortalité, je ne suis pas certain de le comprendre puis surtout je ne suis
pas certain de comprendre en quoi ça invalide ou ça affaiblit de quelconque
manière la proposition qu'on fait à Québec solidaire, la proposition de
Pharma-Québec. Au contraire, Pharma-Québec, couplé à un meilleur régime
d'assurance pour les particuliers, donc un régime d'assurance public et
universel pour les médicaments, ça... un de ses rôles, un de ses mandats, à
Pharma-Québec, ce serait de mieux évaluer la performance des médicaments, de
conseiller les médecins, de s'assurer de la sécurité
de ces médicaments-là. Je ne vois juste pas en quoi ce que vient de nous
exposer la ministre a quoi que ce soit... En fait, je ne vois pas en
quoi ça affaiblit la proposition de Pharma-Québec et surtout je ne vois pas en
quoi ça répond aux arguments que je lui ai exposés en faveur du projet de
Pharma-Québec.
• (12 heures) •
Je vais me permettre de dire à la ministre que,
d'ailleurs, cette idée-là, cette idée d'augmenter notre capacité à produire des
médicaments et des vaccins ici, au Québec, on ne la tire pas de nulle part. Le Québec
a déjà produit davantage de ces vaccins, pour prendre cet exemple-là,
ici. Il y avait, jusqu'à pas très longtemps, l'Institut
Armand-Frappier qui produisait des vaccins. Si je ne me trompe pas,
c'est notamment l'Institut Armand-Frappier qui s'était lancé, à l'époque, dans
la production de vaccins contre la poliomyélite, contre la grippe, contre
d'autres maladies. L'Institut Armand-Frappier,
qui est un institut public, financé publiquement, jouait ce rôle. Et qu'est-ce
qui est arrivé? Qu'est-ce qu'on a fait? On a retiré la production de
vaccins du mandat de l'institut, qui se consacre aujourd'hui seulement à la
recherche et à l'enseignement.
Donc, l'idée
de Pharma-Québec, non seulement elle ne tombe pas du ciel, parce qu'elle existe à l'international, mais
on a déjà, au Québec, été davantage autonomes sur le plan des médicaments et des
vaccins. On a reculé. Il y a des gouvernements qui ont fait des choix politiques
qui nous ont rendus plus dépendants, plus vulnérables à l'égard des marchés
extérieurs, à l'égard des grandes entreprises pharmaceutiques. On s'est
affaiblis nous-mêmes. Ça a été des mauvais choix politiques, et le prix à
payer, on l'a vu durant la pandémie, il est élevé.
Donc, je ne demande pas à la ministre, puis Québec
solidaire... La proposition de Pharma-Québec n'est pas une demande de
réinventer la roue. Au contraire, c'est une demande de renouer à un esprit qui
existait au Québec à partir des années 60, un esprit où on se
disait : Il faut être maîtres chez nous et être maîtres chez nous, avant
tout, sur ce qui est essentiel pour les Québécois puis les Québécoises. Puis, s'il
y a bien une chose qui est essentielle, c'est les médicaments, les vaccins et
l'équipement médical.
Là,
comprenez-moi bien, je suis bien conscient qu'on ne pourra pas, pour toutes
sortes de raisons, notamment
l'approvisionnement en matières premières, on ne pourra pas être à 100 %
complètement autosuffisants. Bien sûr que
non. Personne de raisonnable ne prétend ça. Par contre, est-ce qu'on pourrait l'être davantage? Est-ce
qu'on pourrait l'être bien davantage? Tout à fait. Tout à fait.
Donc, moi,
j'espère, dans les minutes qu'il nous reste, entendre la ministre là-dessus.
C'est quoi, le plan de son gouvernement
pour augmenter l'autosuffisance du Québec en matière d'approvisionnement en
vaccins, en médicaments puis en équipement médical? À part faire venir
le plus gros avion au monde parce qu'on est à la veille d'être «short», là, ce
qu'il faut faire, certes, en situation de crise, c'est quoi, sa vision pour
structurellement augmenter notre autosuffisance, notre autonomie médicale? Je
n'ai rien entendu de la ministre sur cette question-là dans les premières
minutes d'intervention qu'elle a eues, rien du tout.
Je pense que c'est pertinent. Il n'y a
probablement pas 1 million de personnes qui nous écoutent comme quand la
ministre est allée à Tout le monde en parle, mais je pense quand même
que les quelques personnes qui nous écoutent ont le droit d'avoir un exposé de
la ministre sur ça, sa vision, la vision de son gouvernement sur qu'est-ce
qu'on fait, là, à partir d'aujourd'hui, pour augmenter notre autonomie
médicale.
Nous, on a une solution, ça s'appelle
Pharma-Québec. Si la ministre a des réserves, c'est son droit. Il faudrait au
moins qu'elle nous dise c'est quoi, elle, sa solution.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la
ministre.
Mme
McCann : Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, la
proposition de créer Pharma-Québec, ça nous... Il y a beaucoup de
questionnements quant à la faisabilité et aux bénéfices qu'on pourrait en tirer
comme Québécois et Québécoises.
Le marché du
médicament a connu beaucoup de bouleversements depuis le début des années 2000.
Auparavant, les fabricants de médicaments innovateurs misaient sur la
commercialisation de médicaments de masse qui visaient à traiter des problèmes
de santé courants. Alors, cette stratégie, elle a conduit à une certaine
saturation des principaux champs thérapeutiques comme l'hypertension
artérielle, le diabète, etc.
Dorénavant, les fabricants de médicaments
innovateurs se concentrent davantage sur des produits de niche, donc des médicaments, par exemple, pour le
traitement du cancer, et les produits biologiques. Ces nouveaux médicaments
constituent la principale source de croissance du coût des médicaments dans le
régime public. Une entité publique telle que
Pharma-Québec ne pourrait pas produire de tels médicaments onéreux puisqu'ils
sont protégés par des brevets.
Pour réduire le coût lié à l'inscription des
médicaments innovateurs, le recours à la négociation d'ententes d'inscription
prévoyant le versement de rabais par les fabricants, ça nous apparaît
constituer la voie à privilégier. De façon générale, le Québec adhère à la plupart
des ententes conclues par l'Alliance pancanadienne pharmaceutique. Le Québec
peut aussi mener ses propres négociations en l'absence d'entente ou de
négociation pancanadienne. La création d'un Pharma-Québec ne donnerait pas
d'avantage supplémentaire au chapitre de la négociation, tant pour les innovateurs que pour les génériques. Les
baisses de prix publiques et confidentielles obtenues, au cours des
dernières années, par la négociation sont substantielles. En 2018‑2019,
314,4 millions pour le volet du régime public d'assurance médicaments et
92,3 millions pour le volet des établissements de santé.
Le fait de rendre génériques de très nombreuses
molécules au cours des 10 dernières années, ça a permis au régime public
de réaliser des économies substantielles. Les médicaments génériques n'étant
pas couverts par les brevets, Pharma-Québec aurait le droit d'en produire, mais
un tel projet comporterait plusieurs risques et difficultés. La création d'une entreprise publique viendrait
nuire à la collaboration avec les fabricants de médicaments génériques
présents au Québec. La création d'une telle société d'État pourrait soulever
des difficultés à l'égard des traités commerciaux et aussi la production de
médicaments comporte d'importantes économies d'échelle. Une production limitée
au marché québécois ne permettrait pas d'atteindre le seuil de rentabilité. La
solution consisterait alors à exporter une portion importante de la production,
mais ça pourrait également soulever des difficultés au chapitre des accords
commerciaux internationaux dans la mesure où la production était subventionnée
d'une façon ou d'une autre. L'exemple souvent invoqué au sujet d'une production
de médicaments par un État est celui de la Suède. En réalité,
le gouvernement suédois fait produire une quantité très limitée de médicaments,
2 % à 3 % du marché, et ça concerne uniquement des produits qui ne
sont plus commercialisés en Suède.
L'accès aux ingrédients actifs est aussi un
enjeu de taille dans la production de médicaments. Ce qu'on appelle les API,
Active Pharmaceutical Ingredients, sont généralement concentrés dans leur
production en Inde et en Chine. Sans cette
matière première, il n'est pas possible de produire des médicaments. Aussi, il
faudrait que le Québec se dote d'une capacité de production d'API.
Notons que la production d'API fait appel à l'industrie chimique et elle est
généralement assez polluante. Quant au mandat qui serait confié à Pharma-Québec
en matière de barème de remboursement d'inscription des médicaments, on voit mal
comment une société d'État pourrait prendre en charge une responsabilité qui
doit normalement échoir à un ministre responsable de l'utilisation des fonds
publics devant l'Assemblée nationale.
Quant à la
proposition de consacrer 5 % du budget de Pharma-Québec pour réaliser des
activités de recherche et de développement et pour mettre au point de
nouveaux médicaments, on peut s'interroger sur le réalisme de celles-ci. En
effet, les fabricants de médicaments innovateurs, le développement d'un
médicament pourrait requérir des investissements excédant 1 milliard de
dollars. La création de Pharma-Québec revient à l'avant-scène dans le contexte
des problèmes d'approvisionnement vécus au début de la pandémie de COVID-19.
Certains intervenants soutiennent qu'avec
Pharma-Québec la situation aurait été différente. On doit être très prudents
avec cette affirmation.
Premièrement, bien qu'il soit vrai que la
COVID-19 a créé une pression importante sur l'approvisionnement en médicaments nécessaires aux soins intensifs, on
doit souligner qu'il n'y a pas eu de rupture de service. Un seul
fournisseur ne peut que très difficilement répondre, à lui seul, à une telle
demande rapide, ce qui met en doute l'efficacité de faire appel à une
production concentrée dans les mains d'un éventuel Pharma-Québec pour faire
face à une pandémie. La sécurisation de l'accès aux médicaments critiques passe
sans doute, au Québec, par différentes mesures tout au long de la chaîne
d'approvisionnement, notamment en termes de meilleurs inventaires dans nos
hôpitaux et chez les grossistes. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Les cinq prochaines minutes appartiennent à la
députée de Roberval. À vous la parole.
• (12 h 10) •
Mme
Guillemette : Merci, M. le Président. Je tiens d'abord à saluer Mme la
ministre, ma collègue la ministre de la Santé et des Services sociaux et
la remercier pour tout le travail accompli durant les dernières semaines, les
derniers mois, ainsi qu'à toute son équipe. Passez le mot à votre cabinet et à
vos fonctionnaires, Mme la ministre. Je salue également mes collègues ici
présents, que je suis très contente de retrouver en personne, et les députés de
l'opposition. D'ailleurs, je tiens à remercier le député de Gouin qui nous
permet aujourd'hui de tenir une importante discussion
concernant le projet de sa formation politique, soit Pharma-Québec, un projet
visant à améliorer la disponibilité des médicaments, des vaccins et du
matériel médical au Québec.
Bien qu'attrayante et innovante, l'idée de
Pharma-Québec n'est pas nécessairement la plus optimale ni la mieux adaptée à la situation actuelle. Sur le site
Internet dédié au projet Pharma-Québec, on y expose que la population
québécoise consacre aux médicaments une part trois fois plus grande de ses
dépenses de santé qu'il y a 30 ans. C'est vrai, mais le portrait de la population
québécoise, en 30 ans, a beaucoup évolué.
Ce n'est pas un secret pour personne, la population
québécoise est vieillissante. Nous vivons plus longtemps. Le fait est qu'avec
le temps, c'est normal que des petits bobos apparaissent et c'est normal aussi
de vouloir les traiter, que cela soit avec des médicaments ou par des
traitements alternatifs. Contrairement à ce que voudraient nous faire croire les supporteurs du projet de
Pharma-Québec, la hausse des dépenses pour ce secteur de la santé n'est donc
pas uniquement liée au fait que les prix des
médicaments augmentent, mais également au fait qu'en tant que population, nous consommons de plus en plus
de médicaments. Certes, l'augmentation de la consommation des médicaments est vraiment
préoccupante. En ce sens, nous croyons que la prévention et la mise en place de
saines habitudes de vie ont également un rôle à jouer dans la réduction des
dépenses liées à l'achat des médicaments.
C'est d'ailleurs pour cela que notre
gouvernement a annoncé, en février dernier, des investissements de près de
6 millions de dollars pour réaliser des projets favorisant la pratique
d'activités physiques en milieu de travail, et ce, à travers toute la province. Une population plus active et qui
possède de meilleures habitudes de vie est indéniablement une population
plus en santé et c'est sur cela que nous allons miser. Tout le monde le sait,
le sport aide à maintenir une bonne santé mentale, cela aide à améliorer le
sommeil, et ça diminue également le stress. Les personnes qui font de
l'activité physique améliorent donc leur santé globale tout en augmentant leur
espérance de vie. C'est cela, diminuer les
risques de développement des maladies chroniques, comme le cancer, le diabète
de type 2 et les maladies du coeur.
En d'autres mots, cela signifie également moins
de prescriptions d'antidépresseurs, de somnifères ou de médicaments pour
diminuer la tension artérielle, donc une diminution des dépenses. Évidemment,
la mise en place de nouvelles habitudes de vie prend du temps. C'est d'ailleurs
pour cela que nous ne misons pas sur cette initiative seule afin de réduire les
dépenses dans ce secteur. En effet, dans les dernières années, le ministère de
la Santé et des Services sociaux a mis en place plusieurs initiatives afin de
réduire les coûts liés à l'achat de médicaments, dont l'établissement d'une
entente, d'inscription pour des médicaments innovateurs ainsi que
l'instauration d'une entente avec l'Association canadienne du médicament
générique.
Nous sommes également membres de l'alliance
canadienne pharmaceutique et le ministère de la Santé et des Services sociaux a mis en place un chantier sur
l'usage optimal des médicaments. Les sommes investies en médicaments
étaient considérables. Il est nécessaire qu'elles soient bien utilisées pour en
maximiser les bénéfices tout en minimisant les risques.
C'est dans ce contexte que s'inscrit le plan d'action pour les médicaments
utilisés en oncologie qui est présentement en développement.
Il vise deux mesures, soit l'optimisation des
doses en fonction des formats commercialisés et la possibilité de transférer
certaines molécules de la section d'exception des listes de médicaments vers la
section régulière afin de réaliser des gains d'efficience pour les cliniciens.
Ces transferts sont maintenant effectifs. Ma collègue vous a parlé également tout à l'heure du projet d'optimisation
des pratiques d'usage et des soins et des services. Lorsqu'il est inapproprié... des antipsychotiques chez des
personnes âgées résidant en CHSLD, des bénéfices importants sont attendus.
En outre, le
contexte actuel nous montre à quel point il est important de maximiser nos
ressources et de rendre plus efficient notre système de santé, et c'est
ce que nous comptons faire, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de
Pontiac pour un maximum de six minutes. À vous.
M.
Fortin : Merci, M. le Président.
J'en profite bien évidemment d'entrée de jeu pour vous saluer, M. le Président. Ça fait du bien de vous revoir à
votre siège et saluer tous les collègues qui sont ici également. Vous aussi, ça
fait plaisir de vous revoir à votre siège.
J'ai compris d'entrée de jeu de la réponse de la
ministre... en fait, même pas de la réponse, des remarques d'ouverture de la
ministre, qu'elle était contre la proposition du collègue de Gouin. C'est son
droit. Il n'y a pas de... Je n'ai pas d'enjeu à ce que la ministre prenne une
position d'entrée de jeu ou non. Je sais que le collègue de Gouin va tenter de
la convaincre au cours de la prochaine heure et demie. Peut-être qu'il
succédera, on verra.
Mais si la ministre est contre, si elle prend
d'entrée de jeu cette position-là, bien, il va falloir qu'elle nous dise c'est
quoi, son plan. Il va falloir qu'elle nous dise comment elle va arriver, parce
que les objectifs derrière ce que propose le député sont louables, quand même,
une plus grande autonomie, une assurance de la disponibilité que ce soit du
médicament, du vaccin, de l'équipement pour les Québécois. C'est difficile
d'être contre les objectifs derrière le projet du député, mais, si la façon d'y
arriver, ce n'est pas celle de la ministre, il va falloir qu'elle nous dise
comment elle veut y arriver. Et je n'ai pas entendu, des premières réponses de
la ministre, de solution à court, moyen ou
long terme pour éviter certaines des situations qui ont été mises de l'avant
par la crise qu'on vit actuellement, par la pandémie qu'on vit
actuellement.
Et il faut le dire, là, M. le Président, on a
été particulièrement vulnérables au cours de la crise ici, au Québec. La
ministre nous dit : Bien, il n'y a pas eu de rupture de médicaments. Oui,
O.K., on ne s'est pas rendus là, mais on est
passés proche en torvis, hein, M. le Président? On ne s'est pas rendus là parce
qu'il y a eu beaucoup moins d'hospitalisations
qu'on pensait. La ministre a libéré 7 000 lits d'hôpital. On ne s'est pas
rendus là. Il y a eu, quoi, au
maximum, 2 000 quelques hospitalisations en même temps, là, liées à la
COVID. Mais si on s'était rendus à 7 000, est-ce qu'on aurait
manqué de médicaments? Fort probablement. Si on est passés si proche, là, avec
2 500, 2 600 hospitalisations à la fois, qu'est-ce qui se serait
produit au moment où il y aurait eu 7 000 hospitalisations, comme le
prévoyait la ministre? C'était la prévision du ministère, sinon, on n'aurait
pas libéré 7 000 lits d'hôpital.
Le premier ministre... Et là je vois qu'il y a
des changements dans le projet de Pharma-Québec, quand même, au cours des
années, là. Je suis retourné voir le projet de loi qui avait été déposé par M.
Khadir à l'époque. On parlait des vaccins, on parlait des médicaments. On ne
parlait pas d'équipement tant que ça. Alors là, on rajoute le concept
d'équipement, ce qui est très bien. Mais encore là, le premier ministre nous
dit : On n'a pas manqué d'équipement durant la pandémie. Oui, on demandera
aux gens qui étaient sur le terrain. On demandera aux gens qui étaient dans nos
hôpitaux, qui étaient dans nos CHSLD, s'ils ont manqué ou pas d'équipement. Ils
vont peut-être vous dire : Ah non!
il y en avait encore au ministère, hein? Il y en avait à quelque part. Il n'y
en avait pas dans notre hôpital, il n'y en avait pas dans notre CHSLD
ou, s'il y en avait, il était interdit de l'utiliser, hein? Il était sous
verrou, puis on ne pouvait pas l'utiliser comme on voulait. On nous limitait à
un masque par jour, une blouse par jour. On peut jouer sur les mots, on peut
dire qu'on n'a pas manqué d'équipement, mais on comprend qu'on aurait pu. On
aurait pu et on a probablement... dans les faits, là, on a probablement manqué
d'équipement. On l'a juste rationné.
Alors, on a vu, au cours de la crise, des
situations absolument aberrantes. On a entendu des mots, de la part du premier
ministre, absolument aberrants, qu'on ne devrait pas entendre au Québec. Quand
on a entendu le premier ministre dire : On achète en cash de l'équipement.
On achète... O.K., on est rendus désespérés, là. Soit qu'on n'avait pas un
inventaire approprié, soit qu'on n'était pas capable de se le procurer au
Québec, au Canada, de façon normale. Soit
qu'il y a des gens qui essayaient de prendre avantage du système, et ça, c'est
arrivé, vous l'avez vu, M. le Président. À un moment donné, un
45 millions qu'on n'était pas certain si on était pour le récupérer, ce
45 millions là, qu'on a presque perdu.
Il y a des entrepreneurs au Québec qui ont voulu
bien faire, Louis Garneau en est un, hein, qui ont voulu bien faire, qui se sont dit : On va aider le
système de santé québécois parce qu'il manque d'équipement, parce qu'il manque de masques. On va aller... Moi, je vais
aller en acheter. Puis là il s'est rendu compte plus tard... bien, je n'aurais
peut-être pas dû faire ça parce que le système québécois ne veut pas de ce que
j'ai acheté. Donc, il s'est retrouvé avec une quantité astronomique
d'équipement médical. On a mis des gens dans des situations comme celle-là, des
gens qui ont voulu bien faire. On a mis des gens dans des situations comme
celle-là parce que soit le système était mal organisé dès le début, soit la
réponse n'a pas été assez rapide.
Quand on regarde la situation en Alberta versus
la situation au Québec, que le premier ministre de l'Alberta dise : Moi, je vais en envoyer, de
l'équipement médical au Québec... Et on sait que ça vient tout le temps avec
quelque chose, hein? On s'en doutait un peu.
On s'en doutait que... c'était bien gentil de sa part, mais qu'à un moment
donné il y aurait quelque chose qui viendrait avec, et
c'est bien normal. Le gouvernement a dit, à un moment donné : Bien, on est peut-être... on est peut-être, ce
n'était pas clair... on est peut-être contre le projet de pipeline. Le
gouvernement de l'Alberta a
dit : Oui, mais, minute, je vous ai envoyé des masques. Alors, on se place
dans une situation vulnérable, M. le Président. C'est là qu'est le
danger.
Alors, si la ministre est contre le projet de
loi ou le projet de Pharma-Québec, qui n'est pas encore un projet de loi, qui
pourrait peut-être le devenir, si le député le choisit... mais si elle est
contre, qu'est-ce qu'elle va faire pour s'assurer qu'on n'est plus dans une situation
comme celle-là? Qu'est-ce qu'elle va faire pour s'assurer qu'en août, qu'en septembre, qu'en octobre, que l'année
prochaine, au moment d'une deuxième vague on ne se retrouve pas dans une
situation où on manque d'équipement, on ne se retrouve pas dans une situation
où on manque de médicaments, on ne se
retrouve pas dans une situation où on n'a pas ce qu'on a besoin pour aider les
Québécois et les Québécoises?
• (12 h 20) •
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Je redonne la parole
à Mme la ministre pour une période de cinq minutes.
Mme McCann : Merci, M. le Président.
Alors, pour le député de Gouin, sa réforme du médicament passe par la création
de Pharma-Québec puis la mise en place d'un régime universel d'assurance
médicaments. On a des doutes sur la mise en place d'un régime universel. Depuis
l'instauration du régime général d'assurance médicaments, en janvier 1997, plusieurs
groupes ont réclamé la création d'un régime universel public d'assurance
médicaments. Ces revendications ont trouvé écho au niveau du gouvernement
fédéral, puisque, le 12 juin 2019, un rapport du comité spécial présidé par le Dr
Hoskins recommandait au gouvernement fédéral la création d'un régime national
d'assurance médicaments au Canada, alors que le Québec possède déjà son propre
régime depuis plusieurs années.
Le 12 juin 2019, le conseil consultatif sur la mise
en oeuvre du régime national d'assurance médicamentss a rendu public son
rapport final. Ses recommandations portent sur quatre champs d'action
principaux : la négociation d'ententes
intergouvernementales entre le gouvernement
fédéral, les provinces et les territoires
pour assurer le financement de ce
régime public, pour établir aussi ses modalités; la création d'une agence
canadienne du médicament; l'élaboration d'une liste pancanadienne des
médicaments assurés; le développement d'une stratégie pancanadienne pour les médicaments onéreux pour les maladies
rares. Les annonces du budget fédéral 2019 rejoignaient les recommandations du conseil consultatif. Aussi, la lettre de la nouvelle ministre fédérale de la Santé, Mme Patty Hajdu,
transmise aux provinces le 13 mars 2019, prévoit la poursuite de la mise
en oeuvre d'un régime universel public d'assurance
médicaments à l'échelle pancanadienne, ce qui comprend l'ouverture de l'agence
canadienne du médicament, la mise en place d'un formulaire national et
l'exécution d'une stratégie sur les médicaments pour les maladies rares afin
d'aider les familles canadiennes à économiser de l'argent sur les médicaments
coûteux.
Pour le
Québec, le Pharmacare représente une tentative d'empiétement du gouvernement
fédéral dans le champ de compétences des provinces. Certaines fonctions
qui seraient attribuées à l'agence canadienne des médicaments sont déjà de la
responsabilité de l'Institut national d'excellence en santé et en services
sociaux. L'évaluation des médicaments et
l'usage optimal de ceux-ci en sont des exemples. D'autre part, la création
d'une liste de médicaments pancanadienne par un groupe d'experts se
substituerait aux pouvoirs de la ministre de la Santé et des Services sociaux de mettre à jour la liste des médicaments
du régime général d'assurance médicaments. On n'a aucune garantie que cette liste serait composée minimalement par
les mêmes médicaments que la liste québécoise. En d'autres termes, ça
pourrait signifier que moins de médicaments seraient couverts. Aussi,
l'Alliance pancanadienne pharmaceutique, dont
fait partie le Québec, est déjà responsable de la négociation commune du prix
des médicaments pour les gouvernements du Canada et les provinces. Nous
nous questionnons sur la valeur ajoutée d'une agence canadienne, dans la mesure
où l'Alliance pancanadienne pharmaceutique a déjà obtenu de bons résultats
depuis sa création et qu'elle constitue un
regroupement des provinces où la responsabilité qui leur incombe... les
responsabilités sont respectées.
Un tel régime devrait être régi par les
principes suivants : l'amélioration de l'accès par la réduction des coûts
pour les patients devrait être la priorité; le régime devrait reposer sur les
meilleures données probantes disponibles concernant les avantages potentiels,
les risques, les coûts et la fiabilité des approvisionnements; les provinces et
les territoires doivent conserver la responsabilité de la conception et de la prestation de leur
régime d'assurance médicaments; et
tout financement fédéral supplémentaire doit être stable, adéquat, souple et à
long terme, et tenir compte des pressions financières actuelles et
futures.
Notre
position demeure la même. On va faire valoir qu'on souhaite conserver notre
pleine maîtrise en matière d'évaluation
et d'inscription des médicaments à la liste des médicaments du régime général
d'assurance médicaments. Par conséquent, advenant la création d'un
Pharmacare pancanadien, on va exiger un retrait avec notre juste part de tout financement fédéral. Le régime québécois,
on doit le dire, n'est pas parfait, mais actuellement il est le plus
généreux au Canada et plus que celui qui est proposé par le fédéral. Alors, on
pourrait utiliser cette compensation pour bonifier notre régime d'assurance
médicaments, et effectivement pour le mieux-être des Québécois et des Québécoises, et nous allons évidemment poursuivre
nos discussions avec le fédéral là-dessus. Il en a été question avant la
pandémie. Évidemment, c'est un dossier qui est en suspens actuellement à cause,
évidemment, du fait qu'on doit vraiment
dépenser toutes nos énergies pour résoudre cette crise et pour voir au bien‑être
et aux soins des Québécoises et des Québécois, M. le Président.
Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, Mme la ministre. J'invite le
député de Chauveau à intervenir pour les cinq... excusez, députée de Roberval à
intervenir pour les cinq prochaines minutes.
Mme Guillemette :
Merci, M. le Président. M. le Président, je réalise une chose en écoutant mes
collègues qui s'expriment ici sur un projet comme Pharma-Québec : ce qui
paraît à première vue comme étant une excellente idée n'en est pas toujours
une. C'est quand on se met à analyser en profondeur un projet dans tout ce
qu'il comporte comme impacts qu'on peut en découvrir tous les effets pervers.
Ça me fait
penser au RUPAM, le régime universel public d'assurance
médicaments, qui est réclamé par plusieurs
groupes depuis le début des années 2000. Sur le coup, sans trop y
réfléchir, ce programme du fédéral, le Pharmacare, pourrait passer pour une
bonne idée. En effet, M. le Président, qui pourrait être contre l'idée
d'obtenir un meilleur prix pour les médicaments pour tous les Québécoises et
les Québécois? Qui aurait envie de s'opposer à un tel projet? Or, c'est quand
on s'arrête pour vraiment examiner tous les aspects de ce projet qu'on se rend
compte qu'il comporte de sérieux désavantages pour le Québec, et pour son économie,
et pour son autonomie.
Selon les tenants du régime universel public
d'assurance médicaments, on pourrait obtenir de meilleurs prix pour les médicaments en augmentant la taille du
marché par l'inclusion au public des clientèles de l'assurance privée.
Certains médias ont même rapporté des sommes aussi importantes que de 1 à
3 milliards de dollars en économies. Tentant, n'est-ce pas, M. le
Président? Je suis certaine que mes collègues des Finances et du Conseil des
trésors en seraient très heureux.
Mais ça,
c'est si on ne tient pas compte du fait que les rabais qui sont consentis au
régime public sont financés grâce au maintien du prix plus élevé des
régimes privés. Si on abolit cet interfinancement entre le public et le privé, on annule tout simplement cet avantage, et les
économies dont on rêvait deviennent finalement complètement
irréalisables.
Il y a toute une série d'autres raisons pour
lesquelles un programme comme Pharmacare est une fausse bonne idée, par exemple, le fait que les employeurs
contribuent au financement des régimes d'assurance privés, une contribution
qui libère des centaines de millions de dollars en ressources publiques.
De plus, les régimes privés sont assujettis à
une taxe de 9 % sur les primes et de 3 % sur les capitaux des
sociétés d'assurance. Comme les assurés du régime public ne paient aucune taxe,
la création d'un RUPAM priverait l'État de plusieurs autres centaines de
millions de dollars.
Encore une
autre raison, M. le Président? Bien, si on éliminait de la couverture privée la
portion médicaments, on assisterait à une augmentation significative des
coûts des autres types d'assurance collective, ce qui nuirait à la viabilité de
certains régimes. Résultat? Un transfert de coûts vers l'État, par exemple,
pour l'assurance invalidité.
Il y a encore d'autres raisons. La disparition
de l'assurance médicaments privée entraînerait un nivellement vers le bas de la
couverture puisque les régimes privés couvrent souvent un plus grand nombre de
médicaments que le public, et ce n'est pas ça qu'on veut.
De plus, n'oublions pas que l'industrie de
l'assurance de personnes constitue un secteur d'activité important au Québec,
qui représente au bas mot, en 2016, 31 000 emplois. M. le Président,
est-ce qu'on veut réellement causer la perte de milliers d'emplois dans le
secteur de l'assurance?
Je pourrais
continuer à donner d'autres raisons pour lesquelles un projet comme Pharmacare
n'est pas une bonne idée pour le Québec. Je ne vous ai pas parlé de la
question des honoraires aux pharmaciens ou de la gestion réelle des listes des médicaments couverts. Je ne
m'embarquerai pas non plus dans le fait que le RUPAM est en réalité une tentative
d'empiétement du fédéral dans le champ de compétence des provinces.
C'est bien
simple, selon les estimations du ministère de la Santé et des Services sociaux,
les impacts financiers du programme comme Pharmacare sur le Québec
seraient d'environ 5,5 milliards de dollars par année, simplement en
transfert de la couverture actuelle du privé vers le public.
Finalement,
ce que je cherche à démontrer ici, M. le Président, c'est qu'il faut faire attention. Tout ce qui paraît comme une
bonne idée au premier regard pourrait bien s'avérer la pire idée qui soit. Oui,
on veut régler un problème, mais on peut aussi en créer plein d'autres, et ce
n'est pas ce qu'on veut ici. Ce qu'on veut, c'est des solutions. Merci, M. le
Président.
• (12 h 30) •
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci, Mme la députée. M. le député de Gouin, à vous la parole pour les six prochaines
minutes.
M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le
Président. Je me dis... J'essaie de comprendre ce qui se passe. Je me dis peut-être
que la ministre et ses collègues essaient de me tendre un piège. Ils se sont
dit : Il nous parle de Pharma-Québec, on va lui répondre en lui parlant
d'autres choses puis là on va l'entraîner comme ça, subtilement, vers un autre
débat. Je ne tomberai pas dans ce piège, je vais rester sur le sujet de l'interpellation,
qui n'est pas le projet fédéral d'assurance universelle pancanadienne surnommé
Pharmacare. Ce n'est pas le sujet aujourd'hui.
Commentaire
par ailleurs, moi, que le Québec s'en retire, prenne l'argent pour créer son
propre régime public et universel,
j'en suis matin, midi, soir, M. le Président, à la fois en tant
qu'indépendantiste et que progressiste. Mais je m'arrête ici parce que ce n'est pas le sujet de notre discussion. J'ai
essayé de résumer les arguments que j'ai entendus de la part de la
ministre, les arguments qui, vraiment, s'objectent sur le fond à la proposition
de Pharma-Québec. J'ai cru en entendre trois. Je schématise, bien sûr.
Le premier, c'était, grosso modo, de nous dire
que ce n'était pas la job de l'État québécois de s'occuper de ces affaires-là,
les médicaments, parce que ce serait, grosso modo, bureaucratique, inefficace.
C'est un argument qui est valide dans la mesure où, en effet, l'inefficacité,
ça peut arriver au public comme au privé. Mais la question que j'ai envie de
poser en retour, c'est : Les entreprises pharmaceutiques, elles,
sont-elles efficaces? Est-ce que le modèle actuel,
il est efficace? Est-ce qu'actuellement les grandes entreprises pharmaceutiques
allouent les ressources de manière intelligente?
Et quand on regarde ce que font les compagnies pharmaceutiques, on se rend
compte que ce n'est pas le cas. On estime,
c'est des données d'il y a quelques années, mais qui sont encore valides, qu'à
peu près 45 % du budget moyen des grandes entreprises
pharmaceutiques s'en va où? En marketing. 45 %, M. le Président. D'autres
études démontrent qu'en moyenne les grandes entreprises pharmaceutiques
dépensent deux fois plus en marketing qu'en recherche.
Donc,
l'argument de l'inefficacité, il s'écroule à partir du moment où on constate
que les entreprises pharmaceutiques, elles-mêmes, sont loin d'être un
modèle efficace pour faire avancer la connaissance sur le plan des médicaments.
Ce sont, quand on regarde leur budget... et comme on dit souvent, hein, «money
talks», quand on regarde ce que disent les
budgets des entreprises pharmaceutiques, ce que ces budgets disent, c'est que
ce sont davantage des entreprises de marketing que des entreprises de
recherche. Alors, quand on nous dit : L'État ne sera pas efficace, l'État ne peut pas... n'est pas nécessairement
plus efficace. Mais une chose est sûre, le modèle actuel, il est complètement
inefficace. Il y a des sommes gargantuesques qui sont perdues en marketing au
lieu de s'en aller en recherche.
Le deuxième argument que j'ai cru entendre de la
ministre, c'est qu'on... et je la cite de mémoire, elle va me pardonner
l'imprécision. Elle a dit, je crois bien l'avoir entendu, que mettre sur pied
Pharma-Québec, ça allait nuire à la
collaboration avec les compagnies pharmaceutiques. Alors là, c'est intéressant,
parce que ce qu'on croit comprendre, donc, si j'interprète, c'est que,
si on fait ça, les grandes entreprises pharmaceutiques ne seront pas contentes
parce qu'on va leur enlever une part du
marché. Puis ils vont peut-être, je ne sais pas, nous charger plus cher ou, en
tout cas, n'être pas contentes envers nous. Puis on ne voudrait quand
même pas déplaire, jamais de la vie, M. le Président, à ces grandes entreprises
là.
Bien,
regardons ce qui se passe en Nouvelle-Zélande. Alors, est-ce que les
entreprises pharmaceutiques ont fait des
représailles? Elles se sont-tu fâchées? En fait, non. Elles sont restées dans
le marché néo-zélandais malgré qu'il y a un équivalent de Pharma-Québec là-bas. Et devinez quoi, M. le Président,
les Néo-Zélandais déboursent 63 % de moins en moyenne pour leurs
médicaments que les Canadiens. 63 % de moins. Alors, non seulement les
pharmaceutiques sont restées dans le marché néo-zélandais, mais ils ont été
obligés de baisser leurs prix pour ne pas être sortis par la concurrence du
public. Alors, M. le Président, vous le voyez, cet argument-là, lui aussi, il
ne fonctionne pas.
Le troisième argument que j'ai cru entendre,
c'est celui qui disait : Les matières premières, en ce moment, on n'a pas
l'approvisionnement nécessaire. On n'est pas capable de faire ces matières
premières, les composants actifs des médicaments, ici. Bon, d'abord, c'est
intéressant de constater qu'André Charette, qui est chercheur en chimie organique et pharmaceutique et directeur du
Département de chimie de l'Université de Montréal, a, dans une entrevue
récente, répondu à cet argument-là. Il avait peut-être deviné que la ministre
allait dire ça parce qu'il a dit oui... en fait,
parce que la question, c'était : Est-ce que votre technique permet de
contourner le problème de l'approvisionnement en matières premières? Il a dit : Oui, pour faire une analogie, moi,
je pars des deux-par-quatre pour fabriquer la maison; les entreprises de
génériques, pour la plupart, achètent des panneaux préfabriqués, et des
deux-par-quatre, il n'en manque pas, ce sont des matières qui sont faciles à
trouver en grande quantité. Monsieur est directeur du Département de chimie de
l'Université de Montréal. Il en connaît donc plus que moi et que la ministre
mis ensemble sur la fabrication des médicaments et il dit : C'est possible
au Québec. Alors, moi, je pense que c'est une expertise à laquelle on devrait
faire confiance.
En terminant,
la ministre nous a dit aussi : Oui, mais c'est polluant, ces affaires-là.
Est-ce que je dois comprendre que, quand c'est polluant, on devrait
délocaliser dans des pays du tiers-monde parce que là-bas ça passe mieux de
polluer? Ce n'est pas parce qu'une industrie est polluante qu'il faut la
délocaliser. Au contraire, c'est une raison de plus pour la garder au Québec
puis la réglementer pour qu'elle soit moins polluante plutôt que de la
délocaliser dans juridictions où il y a moins de réglementation
environnementale. On peut faire ces matières premières au Québec, pas toutes,
j'en conviens, mais plusieurs, et on peut le faire plus écologiquement que
d'autres juridictions. Bref, c'est une bonne idée de le faire ici, ce n'est pas
un obstacle.
En terminant, j'aimerais poser une question à la
ministre. Elle a dit que son gouvernement allait demander un droit de retrait,
si jamais le fédéral faisait une assurance médicaments publique, universelle,
mur à mur. Parfait, j'en suis en tant
qu'indépendantiste. Par contre, ma question : Qu'est-ce qui sera fait avec
les sommes que le fédéral va envoyer en échange : améliorer notre
régime ici ou financer les maternelles quatre ans?
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci, M. le député. Mme la ministre, je vous cède la parole pour les
cinq prochaines minutes.
Mme McCann : Merci, M. le
Président. Alors, M. le Président, M. le député de Gouin nous présente le
projet de sa formation politique, là, toujours Pharma-Québec. Il y a les
motivations de sa formation politique qui militent en faveur de ce projet. Dans
ces motivations, il y a le contrôle des coûts des médicaments. Alors, on va
faire un petit état de situation. On partage d'ailleurs la préoccupation du
député de Gouin en ce qui concerne la croissance des coûts de médicaments, et je vais aborder cette question-là d'abord
pour le Régime général d'assurance médicaments puis ensuite dans les
établissements.
Le coût total du régime public est financé à la
hauteur de 56 % environ par le gouvernement et de 44 % par les
assurés du public. Alors, pour le régime public, de 1997 à 1998... pardon, de
1997‑1998 à 2018‑2019, le coût total a connu une croissance annuelle moyenne de
7 % passant de 1 664 000 000 $ à
4 862 000 000 $. Il faut quand même retrancher le rendement des ententes d'inscription puis d'autres
ajustements comptables. Donc, il y a un montant de 382 millions en
2017‑2018 et de 411 millions en 2018‑2019. Après la soustraction de cette
somme, le coût total, il est abaissé à 4 451 000 000 $. Le
financement gouvernemental provient des impôts, des taxes payées par l'ensemble
des contribuables, qu'ils soient assurés ou non par le
régime public. Puis il faut souligner aussi que le financement gouvernemental
sert à couvrir le coût de la gratuité des médicaments, parce qu'il y a un quart
des assurés du régime public qui bénéficient
de la gratuité complète des médicaments. Donc, il n'y a pas de contribution à
l'achat ni de prime.
Pour les
régimes privés, eux, ils ne bénéficient d'aucune subvention de l'État et
doivent s'autofinancer en totalité,
et leur taux de coassurance de même que le plafond annuel de contribution ne
peuvent pas excéder le maximum établi par le régime public. Le montant
de la prime, ça, c'est toutefois lié au libre marché. Il est établi en fonction
des caractéristiques du groupe d'assurés selon une logique actuarielle.
Dans les
établissements, de 2008‑2009 à 2018‑2019, le coût total des médicaments en
établissement, il est passé de 545 millions à 813 millions, ce
qui représente une croissance annuelle quand même importante. Toutefois, la croissance s'est concrétisée principalement dans
les deux dernières années. Alors, cette augmentation des coûts de médicaments
en établissement s'explique principalement par les médicaments contre le
cancer. Pour amoindrir l'impact global de cette croissance, il y a eu conclusion
d'entente d'inscription pour les médicaments utilisés dans les établissements permettant aux fabricants de verser
au ministère une ristourne sur les ventes qu'ils effectuent en
établissement. On a aussi soutenu les établissements. On a accordé un
40 millions aux établissements de santé pour soutenir les coûts des médicaments, 30 millions pour couvrir
l'arrivée des médicaments contre le cancer puis 10 millions pour
les autres médicaments.
On observe
aussi, depuis quelques années, une nouvelle vague de commercialisation des
produits innovateurs onéreux, dont le remboursement par l'État est
réclamé par les patients, les cliniciens et l'industrie pharmaceutique.
Plusieurs de ces produits sont constitués de biologique. Or, Pharma-Québec ne
pourrait pas être d'un grand secours parce qu'il s'agit de médicaments
innovateurs. Alors, je cite : «Pharma-Québec achèterait les médicaments
pour le régime public d'assurance médicaments en mettant les compagnies
pharmaceutiques en réelle concurrence», peut-on lire sur le site Web dédié à Pharma-Québec. Alors, lorsqu'il s'agit de
médicaments innovateurs, il n'y a pas nécessairement concurrence. Dans ce
contexte, le député de Gouin doit nous donner des explications.
Autre élément
à souligner, pour les médicaments en établissement, l'achat de ceux-ci se fait
par appel d'offres. Donc, on met en
concurrence les compagnies pharmaceutiques elles-mêmes. Donc, il n'y a pas de
valeur ajoutée à Pharma-Québec.
Pour réduire
les coûts, on pose plusieurs gestes. D'abord, entente d'inscription pour des
médicaments innovateurs, 411 millions;
entente avec l'Association canadienne du médicament générique, 304 millions;
participation à l'alliance canadienne pharmaceutique; mise en place d'un
chantier sur l'usage optimal du médicament. Ce sont toutes des mesures qui nous
font faire d'importantes économies, qui ont été possibles sans la création de
Pharma-Québec.
Alors, nous
avons ici, au Québec, un régime d'assurance médicaments qui fait l'envie de
beaucoup de provinces, qui fait l'envie de beaucoup de territoires.
C'est un régime équilibré, c'est un régime où il y a concurrence entre les compagnies pharmaceutiques, et nous pensons
vraiment que Pharma-Québec, dans ce sens, n'a pas une valeur ajoutée.
Merci, M. le Président.
• (12 h 40) •
Le
Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Mme la
ministre. C'est maintenant à notre collègue des Îles-de-la-Madeleine
d'avoir un cinq minutes pour intervenir. À vous.
M. Arseneau : Merci beaucoup, M. le
Président. Alors, à mon tour d'exprimer tout mon bonheur de vous retrouver en
présence pour discuter de la question des médicaments, question qui préoccupe
les citoyens. Et je vous avoue que, depuis le début de l'interpellation, je me
demande si les citoyens s'y retrouvent véritablement en nous écoutant parler de
différents dossiers qui semblent déconnectés les uns et des autres. On a parlé
de Pharma-Québec, on a parlé du programme assurance médicaments, on parle de
Pharmacare. On parle de pénuries qu'on a vécues de très près du point de vue,
là, du citoyen, dans les dernières semaines puis de l'anxiété aussi qu'ont pu
susciter, là, les informations qu'on obtenait sur la potentielle rupture de
stock, que ce soit en équipement de protection, que ce soit en médicaments. Je
pense qu'effectivement, comme l'a dit mon collègue de Pontiac, on est passés
très, très près du précipice.
Et s'il y a une chose, moi, que je pense qu'il
est important de constater aujourd'hui, c'est que le dossier, il est pertinent, et je remercie pour cette raison le
député de Gouin d'amener le sujet, mais il faudrait évidemment beaucoup
plus de temps, et peut-être un autre forum, pour en discuter véritablement et
trouver des solutions. Parce qu'on peut citer des études, on peut citer des
chercheurs, on peut citer des gens de l'industrie... Je pense qu'il faudrait se
donner beaucoup plus de temps pour
approfondir les raisons qui font qu'on est dans une situation aussi vulnérable,
et là-dessus je reconnais les arguments de mes prédécesseurs sur le fait
qu'on ne peut pas être compte le principe d'avoir une plus grande indépendance par rapport aux marchés internationaux et aux
chaînes d'approvisionnement dans un dossier aussi important que celui de
la santé et de la disponibilité des médicaments et du matériel de protection.
La
vulnérabilité, on en a parlé, elle est extrême et il est extrêmement important
aussi d'en saisir toute la portée, même si elle peut aussi se révéler
dans un grand nombre de secteurs, parce que les phénomènes sont à peu près les
mêmes depuis les 25 dernières années de mondialisation. On a vu une
concentration de la production plutôt dans les pays étrangers, où les frais
d'exploitation, les frais, en fait, de production étaient inférieurs puis souvent
les normes environnementales, largement inférieures à celles d'ici, et c'est
pour ça qu'on a imparti la production de toute une gamme de produits, y compris
les produits pharmaceutiques. Et on se retrouve dans une situation,
effectivement, qui est inquiétante et qui, je pense, mérite d'être approfondie.
Je
ne sais pas si la solution qui est amenée aujourd'hui par le député de Québec
solidaire est la solution parfaite, mais je trouve que le débat, lui,
est tout à fait pertinent, que ce soit effectivement pour ce qui est de
développer une plus
grande indépendance quant à la disponibilité de médicaments, mais également se tourner vers la question des inventaires,
la question de la production, la question de la recherche également.
Et
je pense, bon, peut-être que je suis... je n'ai pas l'ensemble du portrait,
qu'en matière de recherche on a quand même un pôle pharmacologique
intéressant au Québec et que la recherche et développement se fait quand même de façon assez intéressante, encore faut-il
savoir comment la production, elle, est organisée et les chaînes
d'approvisionnement également.
Moi, je constate qu'à
cet égard, si on avait pu être organisés de façon, disons, plus structurée, on
aurait pu éviter la situation de quasi-pénurie qu'on a connue. Et je m'interroge
aussi sur, je dirais, des rapports qui ont déjà été faits dans le passé, par
exemple sur l'équipement. Le rapport de l'INSPQ, en 2007, disait qu'en cas de
pandémie on devait recommander le port du masque. On avait, suite à ce
rapport-là, constitué des réserves, des réserves dont on n'a pas pris soin et
qui se sont avérées inutiles, parce que les masques, selon ce qu'on a pu
apprendre par les médias, étaient en partie périmés lorsqu'on a voulu se
tourner vers ces réserves-là. Puis je suis tout à fait d'accord avec la
situation qu'on déplore, où on a dû se tourner vers d'autres provinces pour
avoir de l'aide, alors qu'il y a un soupçon de
chantage ou de discussions politiques sous-jacentes à l'aide qui apparaît, à
première vue, généreuse, entre provinces. C'est une situation délicate, une situation de vulnérabilité qu'il faut
certainement approfondir. Et je pense que je manque de temps, hein,
c'est ça? Je vais aller avec des propositions tout à l'heure.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci, M. le député. Mme la
ministre, à vous la réplique.
Mme McCann :
Merci, M. le Président...
Le Président (M. Provençal)
: Excusez, non, excusez, c'est... j'étais un petit peu pressé, c'est...
excusez-moi. M. le député de Pontiac, c'est à vous de prendre la parole
pour les six prochaines minutes.
M. Fortin : Il n'y a pas de problème, M. le Président, il n'y a certainement pas de
faute. Le député des Îles-de-la-Madeleine
a raison, on a entendu pas mal de choses jusqu'à maintenant, et il y a une
chose qu'on a entendue, qui m'apparaît particulièrement aberrante. Le
député de Gouin y a fait référence, dans les différents arguments qu'a utilisés la ministre, là, il a raison, c'est ce
qu'il a entendu, la ministre a dit : On ne peut pas aller vers un projet
comme ça, ça nuirait à la collaboration avec nos partenaires privés.
Ça, M. le Président,
là, c'est comme dire : Je vais bâtir une clôture dans ma cour. Mais
pourquoi tu veux bâtir ta clôture dans ta cour? As-tu... peut-être que tu as un
chien, tu veux le garder dans ta cour. Non, ce n'est pas ça. Peut-être que ton
voisin, il n'a pas de stores, puis tu es tanné de voir dans sa maison. Non, ce
n'est pas ça non plus. La raison pour laquelle ils sont en train de bâtir une
clôture, M. le Président, c'est parce qu'ils veulent encourager le producteur de clôtures. C'est le pire argument au
monde, M. le Président. Il n'y en a pas de pire que ça. C'est de dire :
Je ne suis pas intéressé par un projet, uniquement parce que je suis intéressé
de travailler avec le privé. Bien, dans ce cas-là,
pas besoin de la Société des alcools du Québec, pas besoin de Loto-Québec, pas
besoin de toutes les autres sociétés d'État, M. le Président.
Si
la ministre veut réduire le coût des médicaments... et là je prends pour acquis,
là, elle est contre le projet de Québec solidaire, elle l'a dit, elle
n'a pas changé d'idée encore, peut-être qu'elle va s'y rendre, mais pas encore.
Si elle veut réduire le coût des médicaments, regardons ça objectivement, il y
a deux façons d'y arriver, M. le Président. On peut réduire le nombre de
médicaments qu'on prend au Québec ou on peut réduire le coût de chaque
médicament qu'on achète au Québec.
Réduire le nombre, ce
n'est pas impossible, M. le Président. Ça veut dire des soins de santé plus
humains, ça veut dire des soins de santé qui
sont plus appropriés, ça veut dire plus de temps pour chaque professionnel avec
chaque patient. D'ailleurs, M. le Président, quand on a testé les ratios
infirmières-patients, les ratios préposés-patients, ça a amené à quoi? Ça a
mené à une réduction du nombre de médicaments utilisés par les gens en CHSLD.
C'est un des résultats clairs des projets pilotes qui ont été testés en
CHSLD : réduction du nombre de médicaments. Ce serait une façon. La ministre pourrait accepter des ratios
comme ça, qui mèneraient à une réduction du nombre de médicaments, donc
à une meilleure qualité de vie pour les Québécois, mais aussi à une réduction
du coût des médicaments pour le Québec.
De
façon plus globale, si elle veut réduire le coût des médicaments... et j'étais
content de l'entendre saluer certaines des initiatives passées. Je ne
suis pas habitué, M. le Président, mais elle l'a fait un peu plus tôt.
D'ailleurs, toutes les solutions ou tout ce
qu'elle a nommé qui a été fait — elle prend part à des comités, elle fait partie des groupes,
etc. — c'est
des choses qui étaient là bien avant elle. C'est des choses qui étaient là bien
avant son arrivée, des choses qui ont été faites bien avant son arrivée.
• (12 h 50) •
Mais si elle veut
prendre une initiative, il y en a. Il y en a qui sont disponibles. Il y a des
choses qu'elle peut faire pour réduire le coût des médicaments. Elle a choisi
de ne pas les faire. Elle s'est prononcée sur certains jusqu'à maintenant, par
exemple.
Dans
la dernière année et demie, en fait au tout début de son mandat, elle a dit
qu'elle était en faveur des biosimilaires. Ça, elle en a parlé. On n'y
est pas arrivés encore. Depuis qu'elle en a parlé, il y a beaucoup d'autres provinces qui ont bougé sur la question. Il y a la Colombie-Britannique en 2019, il y a l'Alberta
en 2019, il y a l'Ontario également, des provinces qui
ont... l'Ontario, entre autres, là, mais qui ont une population qui,
eux aussi, prend de
l'âge, prend de plus en plus de médicaments, qui ont des coûts importants liés
à ça. Alors, ils ont regardé les différentes façons de faire, ils ont
trouvé que les biosimilaires, c'était une façon positive de le faire.
Il y a des restrictions. On ne peut pas le faire
n'importe comment. On ne peut pas le faire en coupant, du jour au lendemain, la
façon que... le médicament que quelqu'un prend, mais il y a une façon d'y
arriver, en permettant davantage de biosimilaires. Mais la ministre, jusqu'à maintenant,
elle a prononcé des paroles, mais elle n'est pas passée à l'action encore.
Alors, elle n'a ni réduit le nombre de médicaments qu'on prend au Québec ni
réduit le coût des médicaments au Québec.
En fait, M. le Président, on pourrait argumenter que, depuis son arrivée, le coût des médicaments
a probablement augmenté au Québec et, en fait, peut-être
même au cours des derniers mois. Et ça, j'entendais l'argument de la députée de Roberval tantôt,
la députée de Roberval qui nous dit : Bien, on est contre un national
Pharmacare, hein, une version un peu différente, là, mais de Pharma-Québec
au fédéral. On est contre un national Pharmacare, parce qu'en ce moment il
y a du public puis du privé puis il ne fait pas niveler vers le bas. Il ne faut
pas envoyer tout le monde dans le public parce que le privé est plus généreux.
Mais je ne
sais pas si vous avez vu ce qui s'est passé au cours des dernières semaines,
des derniers mois, M. le Président. Il y a bien du monde qui ont
perdu leur job. Je suis certain que vous en avez vus dans votre comté, c'est
pareil comme ailleurs, là, il y a bien du monde qui ont perdu leur job. Puis
quand on perd notre job, qu'est-ce qui arrive? On perd les avantages qui
viennent avec la job. Donc, on perd les avantages sociaux, hein, des avantages comme les régimes privés, entre autres. Donc, il y
a beaucoup moins de monde qui ont accès à un régime privé aujourd'hui qu'il y a deux mois. Donc, tous ces gens-là, s'ils
perdent ces avantages-là, ça veut dire que le coût augmente pour eux.
Ils tombent dans le régime public que veut éviter la députée de Roberval.
Alors, je
reviens à ma question initiale avec les 30 dernières secondes
qu'il me reste, là. Qu'est-ce que la ministre
a fait jusqu'à maintenant, jusqu'à aujourd'hui, là? Qu'est-ce qu'elle a fait
pour réduire le coût des médicaments au Québec? Dans tout ce qu'elle a nommé,
il y a beaucoup de choses qui viennent d'avant, il y a beaucoup de choses qui
pourraient être faites après, mais il n'y a rien qui a été fait jusqu'à
maintenant.
Alors, c'est
quoi, son plan? Qu'est-ce qu'elle va faire pour réduire le coût des médicaments
au Québec, si elle refuse le projet du collègue de Québec
solidaire?
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le député. Mme la ministre,
à vous.
Mme
McCann : Merci, M. le Président. Alors, évidemment, la question des
médicaments, on voit, là, par nos échanges, ça ne peut pas être étudié
en silo parce que ça fait partie de l'ensemble des enjeux des soins de santé. Alors, non seulement, quand on a l'accès aux
médicaments, on a des meilleurs résultats en santé, mais aussi ça
diminue le fardeau global pour le système de santé, ça réduit le nombre de
séjours à l'hôpital puis le recours même à des interventions chirurgicales plus
coûteuses. Il est donc important de trouver un équilibre entre des prix trop
élevés, qui gonflent les coûts des gouvernements, qui peuvent affecter
l'accessibilité aux médicaments et les coûts trop bas qui peuvent décourager
l'innovation et l'accès à de nouveaux médicaments, ce qui n'est pas
souhaitable.
Alors, on a,
au ministère, plusieurs mesures d'économie et de contrôle des prix des
médicaments qui ont été mises en place au cours des dernières années.
Alors, je vais vous en citer quelques-uns. D'abord, le Québec s'est doté de l'Institut national d'excellence en santé et en
services sociaux, l'INESSS, une institution qui est reconnue mondialement
et qui joue un rôle important pour éclairer et appuyer les décisions du
gouvernement en matière de remboursement du
médicament. Il faut savoir qu'au Québec, le fabricant d'un médicament remboursé
par le régime public d'assurance médicaments,
il doit préalablement se faire accréditer au niveau provincial avant de pouvoir
signer des ententes d'inscription avec la province.
Alors, c'est l'INESSS qui va procéder à une
évaluation de la valeur thérapeutique du produit. Alors, si cette valeur-là est
reconnue, l'INESSS va réaliser, dans son rapport, l'analyse du coût-efficacité,
de l'impact budgétaire, de la valeur ajoutée
du produit dans le groupe thérapeutique. Alors, le rôle de l'INESSS, ça
contribue à réaliser des choix économiques en matière de médicaments.
Le Québec
aussi a joint les rangs de l'Alliance pancanadienne pharmaceutique en 2015 et
participe à la majorité des négociations menées par cette alliance, et les travaux de cette alliance regroupent
toutes les provinces, les territoires qui
négocient le prix des médicaments. Ça a permis de réaliser des avancées importantes
au cours des dernières années, des
ententes d'inscription, des balises qui encadrent le prix des médicaments
génériques. Puis on peut dire que c'est beaucoup de négociations qui ont
eu lieu, là. Jusqu'en... au 29 février 2020, on parle de 350 négociations,
et ça a été fructueux, parce que ça a permis d'obtenir un coût qui respecte la
capacité de payer de l'État.
On a aussi
l'entente sur les médicaments génériques, effectivement, qui a été
conclue. Et, en juillet 2017, il y a
une entente quinquennale qui a été faite avec l'Association canadienne du
médicament générique, qui prévoyait des économies
annuelles de 304 millions de dollars par année, alors des baisses de prix
publics considérables, qui sont applicables
depuis le début d'avril 2018 et qui vont profiter aux assurés du régime public
et des régimes privés. Alors, c'est une autre mesure d'économie qui ne
nécessite pas la création de Pharma-Québec.
Il y a aussi les ententes d'inscription. On peut
conclure, la ministre peut conclure des ententes d'inscription avec des
fabricants de médicaments innovateurs, tant pour la liste des médicaments du
régime général que celle des établissements,
pour des médicaments couverts par le régime public d'assurance médicaments et
utilisés dans les établissements de santé. Ces ententes prévoient le
versement par le fabricant d'une ristourne de nature confidentielle. Alors, c'est des économies importantes de
314 millions en 2018‑2019 pour le régime d'assurance médicaments et 92 millions
pour le volet des établissements de santé.
Il
y a le resserrement également du «ne pas substituer», mais je vais passer,
parce que je n'aurai pas assez de temps. Il y
a l'accroissement du pouvoir de la RAMQ. Je vais vous parler brièvement de la
sous-utilisation des biosimilaires, effectivement. On a un exercice
actuellement au ministère pour vraiment améliorer l'utilisation des biosimilaires
au Québec, et il y a un taux de parts de marché au Canada de moins de
10 %, alors qu'il y a plusieurs pays de
l'OCDE qui dépassent 50 %. Alors, c'est une sous-utilisation qui est
préoccupante, et on travaille actuellement sur un plan d'action propre
au Québec pour rehausser l'utilisation des biosimilaires.
Le
Québec, c'est la seule juridiction en Amérique du Nord à offrir une couverture
universelle en médicaments pour sa
population, et ça, ça représente des avantages notables. Le maintien de ces
avantages passe par une saine gestion du régime pour en assurer la
pérennité, ça commande un contrôle de son taux de croissance pour le maintenir
à un rythme soutenable. Et je pense qu'on fait la démonstration que, pour
contrôler les coûts, il n'est pas nécessaire de créer Pharma-Québec. Merci, M.
le Président.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci beaucoup, Mme la
ministre. Nous allons poursuivre avec le député de Chauveau. À vous.
• (13 heures) •
M.
Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord,
c'est un plaisir de vous retrouver aujourd'hui,
avec les collègues, bien sûr, de la partie gouvernementale, des collègues de
l'opposition, d'avoir ce moment privilégié de débattre sur un sujet
tellement important, la santé.
Et
d'être à cette commission-là, ça me fait plaisir, M. le Président, considérant
ma formation en santé et services sociaux. Moi, je suis criminologue de
formation et j'ai passé une bonne partie de ma carrière dans le milieu
communautaire. Donc, c'est des sujets qui me préoccupent.
Je me permets
également de saluer Mme la ministre. J'ai eu la chance de vous le dire en
privé, mais plusieurs de mes concitoyens tiennent à vous saluer pour votre
leadership au sein de cette crise de la COVID que nous vivons actuellement. Ce
n'est pas évident, ce n'est pas facile. Et, comme whip adjoint, j'ai moins la
possibilité de participer à des commissions parlementaires, mais de retrouver
mes collègues que j'apprécie beaucoup, pouvoir débattre...
Et la santé
aujourd'hui... Ce qui est intéressant de l'interpellation aujourd'hui, c'est
qu'on débat d'un sujet qui est important. Justement, la COVID a exposé
clairement une certaine fragilité, oui. On l'a vu, les collègues l'ont dit, on est passés proche. On est passés proche de
tomber en rupture, en manque de matériel, en manque de médicaments. C'est vrai, on est passés proche d'une crise
mondiale partout, partout dans le monde. Il y a eu une demande importante,
élevée en produits, et nous avons tenu le coup malgré tout, avec beaucoup de
travail, avec beaucoup d'efforts, avec beaucoup d'énergie, avec des moyens
parfois pour arriver à combler ce matériel-là. Mais on a réussi à passer au travers, et on espère aussi poursuivre les efforts
pour passer réellement au travers. Mais, bien qu'on a été vulnérables,
on voit qu'on a quand même, au Québec, une certaine logistique, une certaine
production qui se fait au Québec et qui nous permet de s'aider nous-mêmes.
J'entends
là qu'on a 15 000 médicaments
différents qui sont produits au Québec, qui sont fabriqués par
200 entreprises différentes, 200 fabricants différents. Est-ce que
c'est parfait? Bien sûr que non, le premier ministre l'a affirmé haut et fort. Il faut augmenter, accroître son indépendance.
Je rejoins énormément ce que le député des Îles-de-la-Madeleine a dit tout
à l'heure, on doit accroître cette indépendance face au marché mondial.
Qui aurait pu prévoir
la COVID et prévoir quels sont les besoins réels? Tu sais, le fait de dire
qu'on a passé au travers de la pire crise depuis quoi, 1945, probablement, là,
pire crise mondiale depuis 1945, que malgré ça, on a réussi à résister à cette pénurie de matériel là et de médicaments,
bien, ça démontre que la rupture de stock... les soins n'ont jamais été affectés. Bien oui, on a eu chaud,
on peut s'entendre là-dessus, mais on peut maintenant tenter de trouver
des solutions.
Est-ce que
la solution, c'est Pharma-Québec? Bon, ça ne me surprend pas de Québec solidaire, et je connais... j'ai eu le privilège de siéger juste devant
Amir Khadir entre 2012 et 2014, il parlait déjà de cette proposition-là.
Je reconnais au député de Gouin la cohérence. Il poursuit l'effort de son
parti, qui est traditionnel, d'avoir cette solution mur à mur : C'est
l'État, c'est le gouvernement, c'est ça qu'on doit faire.
Je
suis un peu plus surpris de voir mon collègue de Pontiac aujourd'hui...
semble appuyer, en quelque part, cette
proposition-là, parce que je lui rappelle que la proposition de Pharma-Québec
avait été déposée pendant la 41e législature et que son gouvernement
ne l'a pas appelée. Donc, aujourd'hui, peut-être qu'ils ont changé leur fusil
d'épaule, c'est possible.
Ma perception entre
l'étatisation complète des médicaments, de la pharmacie, des... on a une partie
qui est déjà quand même publique, avec le régime universel d'assurance
médicaments, qui protège les Québécois qui, eux, ne travaillent plus, qui ont
accès à ça. Et entre complètement privé, comme certains endroits dans le monde,
ça prend un juste équilibre dans tout ça, un juste milieu.
J'ai l'impression
qu'on est capables de travailler avec nos partenaires, nos partenaires privés.
D'ailleurs, la députée de Roberval,
tout à l'heure, parlait qu'il y a 31 000 personnes qui
travaillent dans les compagnies d'assurances privées, notamment à Québec, beaucoup, beaucoup, beaucoup dans ma région. Il
y a beaucoup de gens qui travaillent dans ce secteur-là et c'est très
important, mais tout en maintenant un filet social public qui protège les plus
démunis. Ceux qui n'ont pas accès à un régime privé, bien, sont protégés par ce
régime public là.
Alors, c'est toujours
une question d'équilibre, M. le Président. Je pense que nous avons un modèle
qui peut être bonifié. Il y a des solutions.
On est capables d'améliorer notre indépendance, mais ça ne passe pas
nécessairement uniquement par le gouvernement.
Le
Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. La parole revient
maintenant à notre collègue des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci, M. le Président.
Je n'étais pas certain que mon tour viendrait aussi tôt, mais j'en suis très
heureux. Et c'est la dernière fois que j'aurai l'occasion d'intervenir dans le
cadre de l'interpellation, alors même si j'ai dit qu'on allait dans tous les...
un peu dans tous les sens et qu'on abordait beaucoup de sujets, je vais quand même en aborder quelques-uns parce que
je suis content d'entendre le gouvernement dire qu'il va rejeter la proposition du
fédéral sur Pharmacare, qu'on va affirmer que notre modèle, il vaut la peine
d'être défendu et qu'on va réclamer des
compensations. C'est réglé, bravo. On compte sur vous pour défendre l'autonomie
du Québec à cet égard et un régime qui est enviable
à travers le pays.
Je suis également très heureux aussi de voir que
la ministre reconnaît que l'avancée majeure dans le domaine du médicament et de
l'assurance médicaments a été réalisée sous un gouvernement du Parti québécois
et qu'encore aujourd'hui, on défend cette formule, une formule hybride, qui
fait une place à la fois au privé et au public et qui a permis d'améliorer de
façon sensible la couverture en matière de médicaments pour la population qui
n'avait pas de régime privé et qui n'avait
pas, bien souvent, accès aux ressources financières pour se payer les
médicaments. C'est un grand bond qu'on a réalisé il y a plus de
20 ans. Et que la formule puisse être améliorée, j'en conviens, mais,
quand même, je pense que c'est important
d'avoir des assises solides si on veut développer davantage les services aux
citoyens.
Et je crois encore qu'on peut approfondir la question,
qu'on peut l'étudier davantage, mais, pour terminer ma prise de parole, je
voudrais quand même revenir aux préoccupations des citoyens qui sont très immédiates.
Et je ne veux pas dire par là qu'un débat à moyen, long terme n'est pas
essentiel, il l'est, mais aujourd'hui, puisqu'on a quelques minutes pour le faire, je voudrais quand même
dire qu'en pleine situation de pandémie, oui, on peut se projeter dans
l'avenir, mais il faudra aussi gérer les problèmes qui sont présents chez les
gens.
Par exemple, concernant la hausse de prix indue
de certains médicaments dans le contexte de la pandémie qu'on vit aujourd'hui,
le cas d'un citoyen qui nous écrit et qui nous dit : J'aimerais savoir si
le gouvernement a prévu une compensation pour
l'augmentation des médicaments suite à la pénurie qui se fait sentir déjà chez
nous. Ma pharmacienne m'a prévenu ce matin qu'un des médicaments qui me
sont prescrits pour mon état de santé est en rupture
de stock et que le médicament de remplacement n'est pas couvert. Et donc il y
aura une augmentation de 47 %
des... de 47 $, pardon, pour moi. Il dit : Je ne m'attends pas
à un remboursement parce que je sais qu'il y a des gens qui sont peut-être plus
en besoin que moi, qui ont plus de difficultés financières, mais j'aimerais
quand même savoir si le gouvernement va envisager une compensation pour un
médicament de substitution qui ne serait pas couvert par l'assurance
médicaments.
Et là, évidemment, il faut comprendre que c'est
une situation qu'on vit et que les pharmaciens gèrent, qu'ils doivent donc
utiliser, dans certains cas, puisque le médicament n'est pas disponible, un
médicament de substitution. Mais il faudrait
s'assurer que ce problème-là qui est vécu par des gens, des citoyens qui n'ont
pas toujours les moyens au même moment où, comme le disait mon collègue
de Pontiac, on peut avoir perdu son emploi ou qu'on est dans une situation
financière précaire, faire face encore à une augmentation des coûts liés à
l'absence de médicament ou à une pénurie de médicaments...
Donc, je
pense qu'ici il y a un élément qui est très, très concret, et qui touche les
citoyens, et qui devrait, à mon point
de vue, être saisi par le gouvernement et trouver une solution de compensation
qui soit concrète et à court terme pour les gens qui sont touchés par
une situation comme celle-là.
Ce qui me permet de conclure en disant également
que le débat qu'on a me fait aussi penser à celui qu'on a tenu un peu plus tôt sur la... plus tôt,
c'est-à-dire avant la période de pandémie, sur toute la question des frais de
franchise et de coassurance imposés aux patients. On en a discuté dans
le cadre du projet de loi n° 31 et on a vu qu'il y avait un dilemme
lorsque les patients pouvaient obtenir, par exemple, des services et des
médicaments ou encore des vaccins, par exemple. Parce que, là, on parle,
éventuellement, il y aura un vaccin qu'on espère qu'effectivement il sera
disponible ici comme partout ailleurs dans le monde lorsqu'il aura été mis au
point, mais qu'on s'assure qu'on puisse avoir une façon de l'administrer et en
milieu hospitalier et dans les pharmacies et que ce soit totalement gratuit pour éviter qu'on fasse, encore une fois,
face à une situation où les gens doivent choisir entre le secteur
hospitalier et la pharmacie et viennent encore encombrer les services. Et donc
c'est une question d'accessibilité, de prix également, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, M. le député. Mme la ministre, je vous
invite à poursuivre.
• (13 h 10) •
Mme
McCann : Bien, merci, M. le Président. Puis c'est une coïncidence
heureuse parce que, justement, je voulais parler, à cette étape-ci, dans
le cadre de la discussion qu'on a aujourd'hui sur Pharma-Québec, de tout ce
qu'on peut faire dans le milieu de la pharmacie pour l'accès à des services de
santé. On croit qu'évidemment c'est un élément
majeur, là, puis d'ailleurs mon collègue des Îles-de-la-Madeleine parle avec
raison de tout le rôle qui se fait par les pharmacies communautaires,
là, du Québec dans le cadre même de la pandémie.
Mais je
rappelle aussi que le projet de loi n° 31, hein, accorde plus d'autonomie
professionnelle aux pharmaciens du Québec. Et la volonté de tous,
c'était d'améliorer l'accès aux soins de première ligne, désengorger les
urgences et les cliniques médicales. C'est un
accès élargi, un meilleur support pour l'utilisation efficace et sécuritaire
des médicaments. Puis je rappelle aussi qu'il y a 1 900 pharmacies
au Québec et que la pharmacie, on se l'est dit souvent quand on a étudié le projet de loi n° 31, c'est pour plusieurs,
dans certaines localités, le seul point de services de santé de
proximité.
Alors, le projet de loi n°
31, ça a représenté l'occasion de bonifier les outils professionnels à leur
disposition pour être en mesure d'offrir à leurs patients des soins
pharmaceutiques de qualité, à la hauteur de leurs compétences acquises au cours d'une longue formation
universitaire. Alors, ça permet aux pharmaciens de faire des gains d'efficience importants dans leur exercice
au quotidien et ça va avoir des répercussions positives sur l'ensemble de notre
système de santé. Ça va amener un accès rapide et efficient à des soins
pharmaceutiques de haute qualité.
Alors, je vais parler de certaines activités qui
sont proposées par le projet de loi n° 31, mais je ne
passerai pas à travers toutes les activités, le temps ne me le permet pas, mais
je vais en citer quelques-unes. D'abord, et ça, c'est très important, le projet
de loi n° 31 permet aux pharmaciens de prescrire et
d'administrer des vaccins. Dieu sait que, dans le contexte actuel, c'est
fondamental. Le Québec, c'était le seul endroit au Canada où le pharmacien
n'était pas en mesure d'offrir le service. Alors, quand on ajoute les
pharmaciens à l'effort de vaccination, effectivement, dans le contexte actuel
encore plus, ça va constituer une opportunité réelle de rehausser cette
accessibilité et d'atteindre des couvertures, notamment au niveau de la saison
de l'influenza, et, si jamais on a... quand nous aurons — je ne
devrais pas dire «si jamais» — quand nous aurons un vaccin, je l'espère,
qui va nous protéger contre la COVID-19. Alors, la proximité au quotidien du
pharmacien avec les patients atteints de maladies chroniques, ça le positionne beaucoup
et très bien pour rejoindre les gens qui ont des maladies chroniques en termes
de besoins de vaccination.
Alors, il est
maintenant permis aux pharmaciens de prescrire,
d'administrer aussi des médicaments — ça, c'est un autre volet — des
médicaments en situation d'urgence afin de répondre aux réactions allergiques
sévères ou dans d'autres situations comme une crise d'asthme ou une
intoxication à des opioïdes par l'usage du naloxone.
Aussi, afin de favoriser la mise en oeuvre de
collaborations plus efficientes entre médecins et pharmaciens dans nos milieux de soins, la prescription de tout
médicament par les pharmaciens à la suite d'une demande de consultation
dans le cadre d'une pratique avancée en partenariat est permise. Par ailleurs,
en CHSLD, des besoins de santé simples pouvant être réglés par l'utilisation de
médicaments en vente libre, ce n'était pas permis, pour prendre en charge
rapidement, faute d'accès à un prescripteur, ce qui pouvait nuire inutilement
aux patients, à leur confort. Alors, le
projet de loi n° 31 permet désormais que le pharmacien prescrive
tous les médicaments disponibles en vente libre, et ça, c'est heureux,
encore une fois, dans le contexte... encore plus dans le contexte actuel.
Alors, afin
de prendre en compte l'étendue très vaste des besoins de surveillance de
thérapies médicamenteuses, d'outiller adéquatement les pharmaciens pour
accomplir ces tâches, il est permis également aux pharmaciens de faire la
prescription élargie d'analyses de laboratoire et d'autres tests.
J'ai aussi fait
adopter un amendement qui permettrait au gouvernement de prévoir la gratuité de
la vaccination et de certains services
pharmaceutiques. Donc, on a ouvert officiellement le chemin à une couverture
universelle gratuite comme le réclament plusieurs groupes.
Le projet de loi n° 31
va favoriser l'efficience, la qualité interdisciplinaire entre le pharmacien,
le médecin et l'infirmière, permet d'élever l'exercice de la pharmacie au
niveau de ceux des juridictions les plus avancées à travers le monde. C'est un
objet de fierté pour la profession, mais surtout il permet concrètement
d'outiller les pharmaciens afin qu'ils puissent, plus qu'avant, voir à
l'accessibilité aux soins pour les patients à la hauteur de leur compétence.
Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Provençal)
: Merci, Mme la ministre.
J'invite maintenant le député de Pontiac pour sa dernière intervention.
M. Fortin :
Merci, M. le Président. Bien, vous l'avez dit, c'est ma dernière intervention,
alors j'aimerais peut-être juste qu'on
remette les choses en... qu'on prenne un pas de recul, là, qu'on remette les
choses en perspective un peu, là. Si on a la discussion aujourd'hui, à
l'initiative du député de Gouin et de son collègue de Jean-Lesage, c'est parce qu'il y a des Québécois qui,
aujourd'hui, là, encore, paient trop pour leurs médicaments. Il y a des
Québécois qui, avec des régimes avec
différents niveaux de générosité, là, paient trop, sont incapables de payer
certains médicaments. Ces médicaments-là, ce sont des médicaments
essentiels pour eux, des médicaments qui améliorent leur qualité de vie, dont ils ont besoin, en certains cas, pour
vivre, dont ils ont besoin pour vivre en santé, dont ils ont besoin pour vivre
avec une santé relative, dans certains cas.
Mais celle qui
peut améliorer les choses pour ces gens-là, en ce moment, aujourd'hui, avec des
actions précises, c'est la ministre de la Santé, et la ministre de la
Santé, jusqu'à maintenant, je l'ai entendue répondre à une question. Peut-être
que vous avez entendu autre chose, M. le Président. Moi, j'ai entendu une
réponse jusqu'à maintenant, puis elle est venue avant même les questions, et la
réponse c'était non, non au projet de Pharma-Québec du collègue.
Alors, M. le Président, moi, je vais rapidement... je n'ai pas besoin des 3 min 30 s
qu'il reste. Je vais poser quatre questions à la ministre, quatre
questions. Elle peut répondre à une seule de ces questions, si elle veut, elle
peut répondre à deux, trois, quatre, ça va me faire grand plaisir d'entendre
ses réponses. Mais, si elle répond à juste une de ces questions-là, je vais
être agréablement surpris, M. le Président.
La première, et elle ne vit pas dans la théorie,
cette question-là, elle vit dans le réel, parce que la ministre dit ou le gouvernement dit qu'ils sont contre le National Pharmacare
fédéral, alors, quand le gouvernement
fédéral va aller de l'avant
avec son projet, qu'est-ce qu'ils vont faire avec l'argent du droit de retrait québécois?
La question a été posée tantôt, on n'a pas eu de réponse.
Deuxième question : Est-ce que, oui ou non,
à très court terme, ils vont aller de l'avant avec les biosimilaires, avec l'augmentation des biosimilaires au Québec? Je
n'ai pas entendu de réponse. À très court terme, là, dans les prochains
mois, est-ce qu'on va aller de l'avant avec cette solution-là qui fait en sorte
que ça va coûter moins cher aux Québécois?
Puisque
la ministre... Troisième question. Puisque la ministre apprécie l'entente qui a
été signée par le précédent gouvernement,
hein, puisqu'elle chiffre les économies à 1,5 milliard... Elle parle de
300 millions par année, mais 300 millions par année, c'est
1,5 milliard. Cette entente-là, on est rendu à peu près à moitié chemin.
Ça a été signé en 2017, on est en 2020. Est-ce qu'elle va renouveler l'entente
telle quelle?
Dernière question, M. le Président. Demain
matin, qu'est-ce que la ministre va faire pour s'assurer qu'on soit prêts pour
une deuxième vague, qu'on n'ait pas à recevoir de l'équipement de l'Alberta
encore pour une deuxième vague, qu'on n'ait pas des gens, là, qui soient
obligés d'aller chercher dans leur garage, dans leur cabanon pour trouver des
masques pour envoyer ça au système de santé, comme on a vu dans une première
vague? Comment on va faire pour s'assurer qu'on serait en mesure de traiter
tous les patients du Québec qui se présentent à l'hôpital parce qu'ils ont des
symptômes de la COVID et parce qu'ils ont besoin d'être hospitalisés? Qu'est-ce
que la ministre va faire demain matin pour
s'assurer... C'est ça, la question : Qu'est-ce que la ministre
va faire demain matin pour s'assurer qu'il n'y en aura pas, de rupture
de stock, que tous nos professionnels vont pouvoir être protégés, que tous nos patients vont pouvoir avoir les médicaments
dont ils ont besoin pour faire face à une deuxième vague de la COVID?
Quatre questions. Je m'attends à une réponse.
C'est tout, M. le Président.
Conclusions
Le
Président (M. Provençal)
: Merci, M. le député. Nous en sommes maintenant aux dernières interventions. Mme la
ministre, vous avez la parole pour 10 minutes.
Mme Danielle McCann
Mme McCann : Excusez-moi, M. le
Président. Je n'avais pas réalisé que j'étais la suivante.
Alors, M. le Président, le député de Gouin nous a interpelés sur la nécessité de mettre en
place Pharma-Québec afin d'assurer aux Québécoises et aux Québécois
la disponibilité des médicaments, des vaccins et du matériel
médical tout en réduisant les coûts d'approvisionnement.
Alors, on va débuter avec la disponibilité des
médicaments puis les risques de rupture d'approvisionnements de médicaments. C'est un problème important. En
revanche, le ministère est constamment en action dans ce domaine.
Par exemple, on a un comité des partenaires sur les problèmes d'approvisionnement en médicaments qui est composé des
représentants du Collège des médecins, de l'Ordre des
pharmaciens du Québec, des regroupements d'approvisionnement et des tables régionales des chefs de
département de pharmacie. Au besoin, les entreprises responsables des ruptures
problématiques pour le réseau peuvent être conviées au comité pour fournir des
explications.
On note aussi la présence continue du ministère
au Comité interprovincial sur les ruptures de médicaments. Selon les besoins
exprimés par les partenaires, le ministère procède à différentes interventions
auprès des fabricants, aussi auprès de Santé Canada pour trouver des solutions
aux problèmes émergents. Les établissements de santé font également
une gestion proactive des inventaires des médicaments. Lorsqu'une
situation est jugée suffisamment
sévère, le ministère documente, notamment
avec le concours des délégations du Québec à l'étranger et Santé Canada, la possibilité d'avoir recours à
des produits alternatifs non commercialisés au Canada.
• (13 h 20) •
Dans le contexte de la pandémie, le ministère a
pris des mesures supplémentaires, M. le Président. Dès le début de l'urgence sanitaire, le ministère
a mis en place un comité réunissant les membres de l'Ordre des pharmaciens,
des associations de pharmaciens. Ce comité inclut aussi les représentants de l'association
des distributeurs grossistes en pharmacie.
Ainsi, les problématiques d'approvisionnement, tant au niveau communautaire qu'au niveau
hospitalier, sont rapidement saisies par le comité et des solutions
trouvées de façon concertée, ce qui inclut l'application de mesures
d'optimisation de l'usage des médicaments, ce qui est fondamental. À cet effet,
l'INESSS a été sollicitée notamment pour
élaborer des recommandations sur l'usage des produits nécessaires aux soins
intensifs, parce qu'évidemment on a eu à utiliser de façon beaucoup
plus... on a augmenté l'utilisation de certains produits comme les produits
de... les médicaments de sédation. L'INESSS a aussi identifié les différentes
alternatives thérapeutiques aux produits généralement utilisés. Ces
recommandations ont été diffusées aux professionnels de la santé.
Le ministère
a aussi mis en place un comité avec les groupes d'approvisionnement et les
chefs de département de pharmacie qui y sont associés de près. Il a
ainsi été établi une gestion provinciale des inventaires en médicaments dans
les établissements de santé, ce qui n'était pas le cas auparavant, avant la
pandémie, où on faisait la gestion dans chaque établissement. Au cours des
dernières semaines de pandémie, des stocks de médicaments des établissements
moins touchés par la COVID-19 ont été réalloués vers les établissements les
plus touchés, particulièrement dans la région
de Montréal. Il y a certes des enjeux en matière de rupture
d'approvisionnement. Cependant, parmi les principales causes, on
constate qu'il y a l'accès à la matière première, et Pharma-Québec ne va pas
échapper à ce problème.
En ce qui a trait au vaccin, je souligne que
plus d'une dizaine de vaccins sont maintenant à l'étape des essais sur des humains. Il reste cependant beaucoup de
chemin à parcourir avant d'avoir un vaccin approuvé et efficace. Rappelons qu'en 2009, lors de la pandémie de
grippe A (H1N1), malgré le fait qu'il y avait une demande partout dans
le monde pour le vaccin, le Québec a eu suffisamment de doses pour les
personnes qui souhaitaient se faire vacciner.
Dans le sujet de son interpellation, le député
de Gouin mentionne le matériel médical. À cet effet, j'aimerais rappeler que notre collègue ministre de l'Économie
et de l'Innovation est à pied d'oeuvre pour soutenir les entreprises
québécoises dans le domaine de la fabrication de matériel médical. On peut
penser à des blouses jetables, des blouses lavables, des masques médicaux, des
visières, du gel hydroalcoolique, des gants, des écouvillons et des ventilateurs.
Le Québec est en action afin de soutenir les entreprises
d'ici qui souhaitent produire du matériel médical. Pas besoin de créer
Pharma-Québec pour y arriver, M. le Président.
Concernant
les coûts, je crois que la démonstration est éloquente en ce qui a trait à
notre capacité de contrôler les coûts.
Notons les 304 millions liés à l'entente avec l'Association canadienne du
médicament générique, les 314 millions découlant des ententes
d'inscription pour les médicaments vendus en pharmacie, les 92,3 millions
pour le volet des médicaments de la liste des établissements de santé. À ces
montants s'ajoutent les autres mesures telles que la participation à l'Alliance
pancanadienne pharmaceutique. En somme, nous sommes en mesure d'infléchir la croissance
des coûts des médicaments.
Toutefois, il
y a un secteur sur lequel Pharma-Québec ne peut pas avoir d'emprise, celui du
coût des médicaments innovateurs. Comme on l'a souligné plus tôt,
l'industrie développe des nouveaux médicaments dans des secteurs de niche tels
que la cancérologie et les maladies rares. Or, les prix sont très élevés. On
négocie déjà des prix à la baisse pour ces
médicaments. Alors, la question à laquelle le député de Gouin doit répondre est
la suivante : Comment ferait-il
pour réduire le coût de ces médicaments? C'est des médicaments qui sont des
innovateurs, donc qui sont protégés par des brevets, donc pas question
de les fabriquer à la place de l'industrie.
Ensuite, on a
soulevé les faiblesses du projet de Pharma-Québec. D'abord, il y a l'ensemble
des services pharmaceutiques, incluant le rôle des pharmaciens, dans
l'usage optimal des médicaments. Depuis quelques années, le gouvernement du
Québec a, en collaboration avec les ordres professionnels concernés, le
gouvernement a accru le pouvoir d'intervention des pharmaciens. Plus récemment,
on peut souligner l'adoption du projet de loi n° 31 dont on a parlé plus
tôt. On a également parlé des programmes OPUS et PEPS dans les CHSLD.
Dans le cas d'OPUS, le projet vise à améliorer
la qualité et l'expérience de soins pour les résidents, les familles et le
personnel soignant, vise aussi à renforcer l'application des stratégies de
l'approche de base, rehausser le recours aux
interventions non pharmacologiques démontrées efficaces pour la prise en charge
des symptômes comportementaux et
psychologiques de la démence en CHSLD, élargir la portée du projet en vue d'un
usage judicieux d'autres médicaments.
Dans le cas de
PEPS, ce projet vise à réduire l'utilisation
des principes actifs, tout en solutionnant la problématique de la pénurie
des médecins en CHSLD par l'optimisation des rôles des professionnels,
particulièrement celui du
pharmacien, de l'infirmière et des médecins.
L'autre faiblesse de Pharma-Québec, c'est la question
des médicaments disponibles. Sur le site Web dédié à Pharma-Québec, on peut
lire : «Présentement, au Québec, on rembourse plusieurs médicaments qui
ont le même effet à des prix différents, plutôt
que de conserver le moins cher.» Ce qu'on comprend, c'est que, dans une telle situation, on ne conserverait qu'un seul
médicament, le moins cher. J'aimerais soulever l'enjeu clinique derrière cette
approche. Par exemple, il y a plusieurs médicaments, par exemple, pour lutter
contre l'hypertension, les inhibiteurs. Les personnes peuvent réagir
différemment à un produit, et heureusement, au Québec, notre liste a plusieurs
options. Alors, c'est un avantage du contexte
actuel, et évidemment je pense que les patients l'apprécient beaucoup
et ne voudraient pas qu'il y ait un changement là-dessus, particulièrement
pour des gens qui ont des maladies chroniques, entre autres, là. Alors, qu'est-ce
qu'on fait s'il n'y a qu'un seul médicament puis pas d'autres options pour un
patient qui a des effets secondaires qui vont l'empêcher d'utiliser ce produit?
C'est sûr
qu'à la lumière, là, de ce qu'on a apporté aujourd'hui, on voit que la proposition de Québec solidaire,
ça comporte quand même plusieurs risques dont il faut prendre la mesure. Alors,
en terminant, moi, je veux quand même saluer le fait que le député de Gouin, il tente de
proposer, mon collègue, des solutions. Même si le député
et des collègues de l'opposition
soulèvent des enjeux réels, la solution de Pharma-Québec,
à mon avis, à notre avis, n'est pas... et son traitement proposé, là, évidemment,
ce que Pharma-Québec propose, à notre avis, ce n'est pas la bonne solution. Et,
encore une fois, je pense qu'au Québec on a trouvé un régime et une façon de
faire, que j'ai bien décrite aujourd'hui, qui est un avantage, qui représente un avantage
pour les Québécois et les Québécoises. J'ai bien exprimé, même, notre position par
rapport à l'hypothèse qui est faite par le gouvernement fédéral, et je pense
qu'on a fait le tour de la question sur les différents volets qui ont été
proposés par le collègue député de Gouin, de Québec solidaire, et qu'on a mis
en lumière le fait qu'il y a énormément de faiblesses à Pharma-Québec, que,
pour nous, ce n'est pas la solution. Merci, M. le Président.
• (13 h 30) •
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Mme la ministre. Je cède maintenant la
parole au député de Gouin pour conclure cette interpellation. Vous disposez de
10 minutes, M. le député.
M. Gabriel Nadeau-Dubois
M. Nadeau-Dubois : M. le Président,
je suis content parce qu'on commence à avoir un débat. Dommage que ça arrive au
dernier bloc, mais, pour la première fois, j'ai eu l'impression que la ministre
était exactement sur le sujet de l'interpellation d'aujourd'hui et répondait avec
des arguments valides et des objections valides à la proposition de Québec
solidaire. Valide ne veut pas dire que je suis d'accord, mais valide veut dire
que j'ai l'impression, au moins, qu'on est sur le sujet puis qu'on parle de la
même affaire. Allons-y étape par étape.
Premièrement,
la ministre a répondu à notre argument sur la disponibilité des vaccins en
faisant une comparaison. Elle a comparé la crise actuelle avec la crise
de la grippe pandémique H1N1 en disant : À l'époque, on a été corrects sans
Pharma-Québec, et donc, son argument, encore une fois, cette fois-ci, on
va être corrects sans Pharma-Québec.
M. le Président, ça
fait des mois que la Santé publique fait des pieds et des mains pour dire aux
Québécois : Arrêtez de comparer la
COVID à une grippe, ce n'est pas la même affaire. Je trouve ça surprenant que
la ministre, elle, fasse ce type de comparaison.
Le H1N1 avait fait 18 500 morts au total. Au moment où je regarde les
statistiques, la COVID en a fait 357 000 à travers le monde. Ça ne me
semble pas être des crises sanitaires de même envergure. La COVID-19 est
beaucoup plus mortelle, 10 fois plus mortelle que la grippe H1N1. C'est un
virus beaucoup plus contagieux, qui fait beaucoup plus de victimes et donc...
D'ailleurs, les mesures de confinement pour le H1N1, je ne sais pas si le
député de Pontiac s'en rappelle, moi non plus. C'est deux crises sanitaires qui
n'ont aucune... qui ne peuvent aucunement être comparées. Alors donc, la demande
en vaccins va être incomparable cette fois-ci avec lors de la crise du H1N1. La
situation, le rapport de force du Québec pour obtenir le vaccin ne sera aucunement
le même.
Troisièmement,
troisième problème avec cette comparaison de la ministre, c'est que le virus...
pardon, le vaccin contre la grippe pandémique H1N1, on l'avait déjà, et il
était fabriqué ici. Ce n'est pas le cas du vaccin contre la COVID-19, premièrement,
qui n'existe pas encore, et deuxièmement pour lequel on n'a aucune certitude
qu'il sera fabriqué ici.
Alors,
c'est la deuxième fois que la ministre utilise cette comparaison. Elle l'avait utilisée
en commission parlementaire
avec mon collègue de Jean-Lesage. Cette comparaison, elle ne tient pas la
route, et ça m'inquiète que ce soit ça, la
réflexion de la ministre, de dire : On s'est débrouillés, il y a
quelques années, avec le H1N1, ça devrait être correct cette fois-ci.
C'est deux crises sanitaires d'ampleur radicalement différente.
L'autre argument que
la ministre a utilisé pour critiquer la proposition solidaire, c'est de
dire : Il n'y a pas de concurrence sur
les médicaments qu'on appelle les médicaments innovateurs et donc il n'y aura
pas d'économie. Encore une fois, argument valide, mais examinons cet
argument un petit peu plus près, là.
D'abord, le problème
avec cet argument-là, c'est qu'on n'a jamais dit à Québec solidaire que la
totalité des médicaments... qu'on ferait des
économies sur la totalité des médicaments. On n'est pas obligé de faire des
économies sur chacun des médicaments pour globalement faire des
économies. Nous, ce qu'on dit, c'est que globalement on va faire des économies,
mais il y a en effet certains médicaments brevetés où peut-être on ne fera pas
d'économies.
Deuxième
problème avec l'argument, c'est qu'il est plus ou moins vérifié dans les faits.
Il y a parfois de la concurrence entre
des médicaments brevetés qui répondent à un même diagnostic. Ça arrive dans le
monde de la pharmaceutique.
Et troisièmement il
faut même questionner c'est quoi, un médicament innovateur. Je ne sais pas si
la ministre sait c'est quoi, la proportion des médicaments innovateurs qui
proviennent de recherche et développement financés par des fonds publics. La proportion, c'est 80 %. 80 % des
médicaments considérés innovateurs par les grandes entreprises pharmaceutiques
découlent de découvertes préalables financées par des fonds publics.
C'est ça, le modèle
d'affaires des grandes pharmaceutiques. C'est faire financer en amont la
recherche par le public, faire prendre les risques, bref, par le public et, en
bout de course, breveter les médicaments, privatiser les profits. C'est le modèle que la ministre souhaite
maintenir et que la CAQ souhaite maintenir. Nous, à Québec solidaire,
c'est le modèle qu'on souhaite changer parce qu'on trouve que ce n'est pas
normal de socialiser les risques puis de privatiser les profits.
Ce que je retiens de
notre discussion d'aujourd'hui, c'est que la ministre est en accord, elle est à
l'aise avec ce modèle. Pharma-Québec
viendrait changer la situation, notamment en s'assurant que, quand la recherche
est financée publiquement, bien, les
brevets soient publics puis les bénéfices soient publics. La ministre ne trouve
pas cette solution intéressante. Ça lui appartient. Mais je pense...
Mais bref, moi, c'est ça que je retiens, le modèle des grandes entreprises
pharmaceutiques, qui escroquent des États entiers en faisant financer de la
recherche par le public puis en privatisant les profits, la ministre défend ce
modèle. Nous, on le critique puis on veut le changer.
En
terminant, je veux parler de pénurie et d'autosuffisance médicale au Québec
parce que c'est comme ça que j'ai commencé notre discussion
d'aujourd'hui. J'aimerais parler du cas de Sanofi, un grand groupe
pharmaceutique français qui a annoncé, le 13 mai dernier, que ce seraient
les Américains, le gouvernement américain qui aurait la priorité sur les commandes d'un éventuel vaccin pour la COVID-19. Sanofi
fait partie des grandes firmes pharmaceutiques qui sont dans la course
pour développer le vaccin. Finalement, l'entreprise a reculé. Une chance. Beaucoup
de pays ont poussé un soupir de soulagement.
Mais
ce genre de décision de la part d'une entreprise pharmaceutique devrait nous
inquiéter et devrait inquiéter la ministre de la Santé, de savoir que
certains grands groupes pharmaceutiques se préparent déjà ou, en tout cas, envisagent la possibilité de réserver leur
découverte à certains pays et, disons-le, dans le monde dans lequel on vit, aux
pays les plus puissants, à ceux qui ont les
poches les plus profondes. En mars dernier, d'ailleurs, le président américain,
M. Trump, avait déjà tenté de faire signer à un laboratoire pharmaceutique
allemand une clause d'exclusivité sur un possible vaccin en échange de quelques
dizaines de millions de dollars.
Rien
de ça ne s'est avéré, va me dire la ministre, et c'est vrai, mais ça devrait
être un avertissement. Ça devrait allumer une énorme lumière orange pour
se dire : Il y a des gens qui vont essayer de s'approprier ces
innovations-là. Et nous, comment on va se défendre? On ne va pas à la guerre
avec un sling-shot. Il faut avoir quelque chose pour se défendre au Québec.
Notre proposition, c'est que Pharma-Québec soit cet outil qui nous permet de se
démarquer. Ça n'intéresse pas la ministre, c'est son choix. C'est juste dommage
qu'elle ne nous ait pas proposé d'alternative.
En terminant, je veux
lui lire une citation de M. Hervé Chneiweiss qui est
neurobiologiste et qui est président du
comité d'éthique de l'Institut national de la santé et de la recherche
médicale. Dans un article récent, ce professeur, ce neurobiologiste disait : «Il est clair que les grands
laboratoires pharmaceutiques s'activent en coulisses pour garder la main
sur la recherche en vue de vendre son propre traitement contre la COVID et
maximiser ses profits. Pour les laboratoires
pharmaceutiques, il va de soi que l'objectif, c'est de vendre un produit et, comme toute société
commerciale, d'en tirer un bénéfice.»
Ça, c'est la logique du système économique dans lequel on
vit, et, quand cette logique-là est appliquée aux médicaments ou à des vaccins
dont la disponibilité peut causer... peut faire la différence entre la vie et
la mort de millions de personnes, on a un
problème. Quand cette logique-là du capitalisme sauvage est appliquée à une
innovation aussi essentielle pour la
vie qu'un vaccin, c'est un problème, et la ministre ne semble pas réaliser que
c'est un problème. Elle nous dit : On fait de la concertation, on
fait des tables, on est en action. C'est bien correct, mais ça contourne le
problème fondamental, et j'ai bien peur que cette légèreté de la ministre nous
coûte cher au Québec. J'ai peur de ça.
La
question avec laquelle, M. le Président, j'ai ouvert cette interpellation
aujourd'hui, c'était : Quel est le plan du
gouvernement de la Coalition avenir Québec pour augmenter notre autonomie
médicale et pharmaceutique? J'ai exposé notre solution, Pharma-Québec.
C'est une solution qui a ses vertus, qui a probablement aussi ses limites. Ce
qui est plus inquiétant pour moi, ce n'est pas que la ministre ait exposé des
arguments pour critiquer ma position, je m'y attendais. Mais je m'attendais
aussi à ce qu'il y ait un plan clair, ambitieux, concret de la part du gouvernement
pour non pas nous rendre 100 % autonomes sur tous les médicaments dans six
mois, bien sûr que non, mais au moins augmenter notre autonomie médicale. Je
n'ai rien entendu de convaincant, M. le Président, là-dessus, et moi, c'est la
leçon que je retiens de notre échange aujourd'hui. C'est une leçon que je
trouve inquiétante.
On aura
l'occasion de reparler de Pharma-Québec d'ici le 12 juin, qui sera la fin
de nos travaux parlementaires. Je ne renoncerai pas à tenter de
convaincre la ministre puis son gouvernement de réaliser à quel point on est
dans un engrenage actuellement qui pourrait nous faire mal dans les prochains
mois, notamment parce qu'on sait qu'une deuxième vague de la COVID-19 pourrait
se produire et a même malheureusement, tragiquement, de bonnes chances de se
produire.
Je remercie la ministre. Je remercie tout le
monde qui était là aujourd'hui.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, M. le député. Permettez-moi de vous
souligner que c'était un plaisir aujourd'hui
de vous revoir et c'est toujours un privilège de vous côtoyer. Je vous remercie
pour votre collaboration.
La commission, ayant accompli son mandat,
ajourne ses travaux sine die. Bonne fin de journée à tous et bon retour dans
vos comtés.
(Fin de la séance à 13 h 39)