(Dix
heures une minute)
Le Président (M.
Provençal)
: À
l'ordre, s'il vous plaît! Bienvenue à tous, et bon matin. Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services
sociaux ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les
personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques. Je vais commencer par donner l'exemple.
La commission est
réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 52, Loi visant à renforcer le
régime d'examen des plaintes du réseau de la santé et des services sociaux
notamment pour les usagers qui reçoivent des services des établissements
privés.
Mme la
secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Benjamin (Viau)
est remplacé par M. Rousselle (Vimont); Mme David (Marguerite-Bourgeoys), par Mme Sauvé
(Fabre); M. Zanetti (Jean-Lesage), par Mme Dorion (Taschereau);
M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), par M. LeBel (Rimouski).
Le Président (M.
Provençal)
: Merci, Mme la secrétaire.
Nous débuterons ce matin par les remarques préliminaires, puis nous entendrons
par la suite les organismes suivants : Le Conseil pour la protection des
malades et le Regroupement provincial des comités des usagers. La dernière
présentation se fera par visioconférence. C'est la première, hein? Donc, je
corrige, ce sera la première présentation qui sera faite par visioconférence.
Remarques préliminaires
J'invite maintenant
la ministre des Aînés et Proches aidants à faire ses remarques préliminaires.
Mme la ministre, vous disposez de six minutes. La parole est à vous.
Mme Marguerite Blais
Mme Blais
(Prévost) : Je dispose de...
Le Président (M.
Provençal)
: Six minutes, Mme la
ministre.
Mme Blais
(Prévost) : M. le Président, merci. Aujourd'hui s'amorcent les
consultations sur le projet de loi n° 52, qui vise à
renforcer le régime d'examen de plaintes du réseau de la santé et des services
sociaux notamment pour les usagers qui reçoivent des services des établissements
privés. En premier lieu, j'aimerais remercier les groupes que nous entendrons
pendant ces trois jours et remercier aussi les collègues députés de leur
contribution à l'amélioration des services.
Ce projet de loi vise
à accroître la protection offerte aux personnes en situation de vulnérabilité
ou qui vivent de la maltraitance, notamment les aînés, soutenir le respect des
droits des usagers, consolider leur confiance envers le régime d'examen des plaintes. Pour ce faire, nous traiterons principalement
de la partialité et neutralité des commissaires dans l'exercice de leurs
fonctions, de l'indépendance de ces derniers et du portrait des plaintes
déposées afin de pouvoir avoir un regard juste et équitable de tous les
établissements, qu'ils soient publics ou privés. Ce sont toutes des conditions
essentielles et concrètes pour améliorer la qualité des soins et des services
du réseau de la santé et des services sociaux.
Le projet de loi ne
vise pas l'ensemble du processus de traitement des plaintes. Cependant, je
tiens à vous rassurer qu'à la lecture des
mémoires j'ai colligé diverses demandes et recommandations concernant d'autres
mesures et orientations non prévues par le projet de loi. Toutes ces
recommandations ont été prises en note et feront l'objet d'une analyse par le
ministère. Ce projet de loi, c'est un premier pas vers l'amélioration du
processus de plainte. Nous sommes fermement engagés à changer les choses. D'une
action à l'autre, nous améliorons les services, trouvons des solutions pérennes.
La Loi sur les
services de santé et services sociaux prévoit un régime d'examen des plaintes
pour les usagers du réseau de la santé et des services sociaux s'appliquant
dans les établissements de santé et de services sociaux publics et privés. Le
régime, qui se veut accessible, permet à un usager qui s'estime lésé dans ses
droits d'exprimer son insatisfaction ou de déposer une plainte auprès d'un
commissaire local aux plaintes et à la qualité des services ou auprès d'un
médecin examinateur, et ce, en toute confidentialité et sans crainte de
représailles. Nommé par le conseil d'administration d'un établissement, le
commissaire est responsable envers lui du respect des droits des usagers et du traitement diligent de leurs plaintes. Il traite également
les signalements effectués dans le cadre de la politique de lutte contre la maltraitance adoptée en vertu de la loi qui vise à
lutter contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure
en situation de vulnérabilité. Dans le cas d'une plainte concernant un médecin,
un dentiste ou un pharmacien, ce rôle incombe à un médecin examinateur ainsi
nommé par le conseil d'administration.
Les plaintes
et les mesures correctives qui résultent du régime d'examen des plaintes
témoignent de sa pertinence et constituent un intrant important dans
l'amélioration de la qualité des services rendus par les établissements. Néanmoins, certaines situations préoccupantes
touchent le traitement des plaintes, ont été portées à mon attention, et
nous avons décidé d'agir au bénéfice des usagers. En effet, nous devons assurer
la neutralité, l'impartialité et l'indépendance du commissaire et du médecin
examinateur dans l'exercice de leurs fonctions. Nous souhaitons aussi donner
des leviers nécessaires aux CISSS et CIUSSS pour assurer une vigie dans le
contexte de la responsabilité populationnelle qu'ils assument. Nous voulons
avoir un portrait complet de l'examen des plaintes traitées dans le réseau de
la santé et des services du Québec.
Nous désirons, par ce projet de loi, nous
concentrer sur l'indépendance des commissaires pour le bénéfice des usagers et
une uniformisation des procédures afin de mieux répondre aux plaintes, mais
avoir un meilleur regard des rapports
déposés annuellement. Il prévoit, notamment, que le traitement des plaintes des
usagers qui reçoivent des services d'un établissement privé serait
confié au commissaire et au médecin examinateur du CISSS ou du CIUSSS à l'égard
de toute installation d'un tel établissement situé sur son territoire. Le
commissaire serait aussi responsable de traiter les signalements faits dans le
cadre de la politique de lutte contre la maltraitance dans un établissement
privé.
Dans ce
contexte, le projet de loi ajoute l'obligation des établissements privés
d'informer les usagers et de toute autre
personne qui visite l'établissement de leur droit de porter plainte. Ainsi, ils
devraient rendre disponible l'information relative à la procédure
d'examen des plaintes en affichant à la vue du public un document explicatif
sur la procédure de plainte et indiquer les coordonnées du commissaire. Le
projet de loi précise des critères d'indépendance pour sa nomination et pour
toute la durée du mandat des commissaires afin d'empêcher le conflit
d'intérêts. Le projet de loi prévoit qu'un
représentant du CISSS et du CIUSSS serait ajouté au comité de vigilance et de
la qualité des établissements privés. Ce comité est notamment
responsable d'effectuer le suivi des recommandations qui sont formulées par le
commissaire, le médecin examinateur et le Protecteur du citoyen à la suite du
traitement des plaintes.
Le projet de loi ajoute l'obligation des
établissements publics d'utiliser un actif informationnel en vue de gérer les
dossiers de plainte des usagers. Pour ne pas créer de confusion au niveau de la
qualité des services, le projet de loi prévoit aussi que le centre intégré de
santé et de services sociaux qui serait responsable du traitement des plaintes
d'un établissement privé devrait présenter les informations relatives à ces
plaintes de manière distincte dans les rapports relatifs à la procédure
d'examen des plaintes dont la production est exigée par la loi.
À ces mesures
prévues par le projet de loi s'ajoute en parallèle la création d'une fonction
de commissaire-conseil au ministère de la Santé et des Services sociaux.
Tout en respectant l'autonomie et l'indépendance des commissaires locaux, ce
commissaire-conseil va assurer le leadership afin de mobiliser les différents
acteurs du régime d'examen des plaintes. Son
rôle consistera à établir un réseau de communication entre le ministère de la
Santé, les commissaires et les médecins examinateurs, à s'assurer que
les mesures recommandées seront mises en place, à conseiller les commissaires, notamment sur les meilleures
pratiques à adopter et leur harmonisation, à recommander la mise en oeuvre
de solutions quant aux enjeux portés à sa connaissance en matière de plainte.
Je remercie
encore toutes les personnes qui participent à cette commission. Je souhaite des
échanges constructifs afin d'améliorer les services à tous les usagers
du réseau. Je vous remercie, M. le Président.
• (10 h 10) •
Le Président (M. Provençal)
: Merci, Mme la ministre. J'invite maintenant la
porte-parole de l'opposition officielle et députée de Fabre à nous faire part
de ses remarques préliminaires pour une durée de quatre minutes. La parole
est à vous.
Mme Monique Sauvé
Mme Sauvé : Merci beaucoup,
M. le Président. Je serai très brève. Dans un premier élan, je veux saluer
la ministre et son projet de loi, qui s'inscrit dans une intention louable. Ça
sera avec grand plaisir que nous serons dans un mode de collaboration à
vouloir, tel que notre rôle nous le suggère à chaque fois qu'on siège dans une commission
parlementaire, s'assurer qu'on évolue et qu'on contribue au projet de loi pour
en faire le meilleur projet de loi possible, alors c'est dans cet esprit où
nous travaillerons en collaboration. Je veux saluer les collègues de l'équipe gouvernementale,
mon cher collègue, bien sûr, de Vimont, les collègues de Rimouski et de Taschereau.
Alors donc, ce sera un travail constructif,
tous ensemble, parce
qu'il faut bien le dire, M. le Président, au coeur de tout ce débat et
ces discussions que nous aurons, ce sont les soins aux aînés qui nous préoccupent tous autour de cette
table.
Alors, le moment précieux qui est devant nous,
c'est d'entendre, d'être à l'écoute de tous les groupes qui ont bien sûr
analysé le projet de loi avec beaucoup d'attention, mais qui auront à exprimer
leurs préoccupations pour qu'on contribue tous ensemble véritablement. Mais
soyez assuré, M. le Président, que nous serons bien souvent les
porte-voix, les messagers de préoccupations que les groupes nous exprimeront.
Alors, voilà pour mon petit mot. Donc, je
laisserais... je vous redonnerais la parole, M. le Président. Merci pour
ce temps, et que le travail commence.
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci, Mme la députée. J'invite maintenant la porte-parole du deuxième groupe d'opposition et députée de Taschereau à
énoncer ses remarques préliminaires pour une durée d'une minute. La parole
est à vous.
Mme Catherine Dorion
Mme Dorion :
Merci, M. le Président. Bonjour à tous, je vous salue tous, et merci
d'être là et de vous pencher sur ce projet de loi, qui m'apparaît
important, et répondre à un réel besoin. C'est toujours intéressant de
comprendre ça et de lier ça à la réalité des gens qui souffrent, qui ont des
besoins, qui ne trouvent pas de réponse, souvent.
Donc, on est en mode
écoute avec tous les intervenants qui vont venir nous parler. C'est pour moi
quelque chose d'assez nouveau. Donc, même chose, on va se faire le porte-voix
de ce qu'on entend et des préoccupations légitimes qui émergent dans la
société, en espérant faire le meilleur projet de loi possible. Merci.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci beaucoup.
J'invite maintenant le porte-parole du troisième groupe d'opposition et député
de Rimouski à formuler ses remarques préliminaires pour une durée maximale
d'une minute. La parole est à vous.
M. Harold LeBel
M. LeBel :
Merci, M. le Président. Bonjour, tout le monde. On m'a dit qu'on allait
parler d'indépendance ici, aujourd'hui,
ça fait que ça m'a intéressé tout de suite, j'ai dit : Il fallait que je
vienne, il fallait que je vienne faire un tour.
Sérieusement,
sérieusement, j'avais participé au projet de loi sur la maltraitance et il y a
eu... il y avait un bon sentiment de travail. Tout le monde, ensemble, voulait
travailler, c'est la députée des Mille-Îles qui avait déposé le projet de loi,
et tous les partis politiques, on a bien travaillé ensemble, puis je pense que
ça va être la même chose aujourd'hui, je suis convaincu que ça va être la même
chose. Mais ça va nous servir aussi, cette commission-là, à évaluer aussi ce
que cette loi a pu faire, la loi sur la maltraitance, évaluer un peu
l'avancement, qu'est-ce que ça a pu faire puis peut-être faire des corrections
qu'il faut.
C'est sûr que, moi,
c'est un dossier qui me touche beaucoup, le dossier de la qualité de vie des
aînés, et je vais poser beaucoup de questions pour connaître un peu, dans
l'ensemble, la réalité. Moi, j'ai déposé un projet de loi, récemment, sur la
création d'un protecteur des aînés, je pense qu'on serait rendus là, mais ça va
me permettre, cette commission-là, de mieux
comprendre la situation et d'avancer là-dedans, ça fait que merci tout le
monde, puis bon travail.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci, M. le
député, pour ces remarques préliminaires.
Auditions
Nous allons
maintenant débuter les auditions. Comme spécifié, la première présentation se
fera en partie par visioconférence. Je souhaite maintenant la bienvenue aux
représentants du Conseil pour la protection des malades. Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé puis nous procéderons à la
période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous
présenter et à commencer votre exposé. Je vous cède la parole.
(Visioconférence)
Conseil pour la protection des
malades (CPM)
M. Brunet (Paul G.) : Merci, M. le Président, Mme la
ministre, messieurs dames les membres de l'Assemblée nationale. Paul
Brunet, du conseil.
Depuis 45 ans,
nous oeuvrons à la défense des droits des usagers du réseau de la santé. Je
suis accompagné, Mme Marielle Raymond, présidente du comité d'usagers de
Rivière-du-Loup, elle s'est déplacée ce matin en voiture toute seule, et aussi d'un autre collègue du
conseil d'administration, M. Daniel Pilote, qui est lui-même résident de
CHSLD. Lui, là, il vit les plaintes par en dedans, il va nous en parler dans
quelques instants. C'est pour ça que je l'ai invité, parce que, lui, il sait
pas mal comment ça se passe, et surtout comment il subit les délais trop longs,
le croyons-nous, du régime.
Le régime existe
depuis 2001, hein, on est dus pour faire un peu de ménage solide. Et la
ministre, je prends au bond son invitation parce qu'elle dit qu'elle est ouverte
à plus d'affaires qu'il y en a dans le projet de loi, et c'est évidemment à ça
qu'on invite le gouvernement à passer, faire un ménage et avancer dans ce
régime-là qui le mérite certainement.
Alors,
je survole quelques éléments. Les délais sont trop longs, 45 jours. On a
franchement l'impression qu'en plus de subir les affres d'une situation
qu'a vécue un résident une résidente ou un usager tout simplement, qu'en plus
il doit être puni par le délai trop long qu'on passe à analyser. Je dois dire,
à la décharge des commissaires, que, souvent, les rapports sont bien faits,
sont étoffés, mais, au bout du compte, là, quand ça fait 63 jours, là,
qu'on attend, bien souvent on accouche d'une souris. Alors, la qualité, la
profondeur, l'exhaustivité des rapports des commissaires sont parfois
impeccables, mais avec très peu de résultats pour le résident, très peu de
résultats pour l'usager.
Et c'est là-dessus
que je passe tout de suite la main... la parole à mon collègue et ami Daniel
Pilote, qui a déposé des plaintes. On les a déposées en annexe du présent
mémoire. Bonjour, Daniel.
M. Pilote
(Daniel) : Bonjour, tout le monde. Je suis bien content, en tout cas,
de pouvoir participer avec, c'est sûr, ma condition de handicap qui ne me
permet pas, là, de venir jusqu'à Québec facilement, et puis, grâce aux
visioconférences, bien, je suis bien content. Je vais... vu que je n'ai pas
l'habitude, là, de faire ça, on va commencer.
Mmes,
MM. du comité directeur de la commission, j'aimerais vous remercier pour
m'avoir permis de participer à la vidéoconférence pour le projet de la loi n° 52. Donc, je suis directeur administratif du CPM depuis
trois ans et usager au CHSLD du Centre d'hébergement Champagnat à
Saint-Jean-sur-Richelieu. J'ai une condition de handicap sévère causé par la
dystrophie musculaire Becker avec une perte d'autonomie depuis l'âge de neuf ans.
Mon expérience est assez variée, entre autres, avec le maintien à domicile,
relations avec mes proches aidants qu'entrepreneur et formation en services
financiers. Je crois que ma participation est importante pour le projet de la
loi n° 52 et j'ai constaté qu'il y a beaucoup de
difficultés avec le système de plainte dans le système de santé, et j'ai pris
des notes durant un an que je vais vous soumettre pour analyse. En fait, elles
ont été déposées dans le système de plainte et cela va vous donner une petite
idée, là, pour améliorer le temps pour résoudre et solutionner.
Je crois que les
plaintes avec le centre d'hébergement privé est une bonne idée parce qu'aucun
système de plainte n'existait auparavant avec
les centres intégrés de santé. Par contre, je crains un alourdissement du
système de plainte, que l'on doit améliorer. Imaginez-vous que,
présentement, une plainte est traitée au-delà de 45 jours, c'est vraiment trop
long pour le traitement, surtout que les conclusions de plaintes ne mentionnent
pas d'excuses à l'usager. Je pense que l'on doit exclure les commissaires aux
plaintes dans les centres intégrés de santé pour éviter le favoritisme et
complicité.
En conclusion, je
pense que nous devons inclure un système de plainte au centre d'hébergement
privé. Cependant, nous devons exclure les commissaires des centres intégrés
pour une indépendance, ceci pour éviter des conflits d'intérêts et diminuer les
ententes secrètes ou peut-être de l'aveuglement volontaire qui pourrait
subsister.
J'aimerais vous
remercier, chers membres du comité directeur de la commission.
• (10 h 20) •
M. Brunet (Paul
G.) : Je veux juste revenir très rapidement sur une plainte que Daniel
a faite en juin 2019, laquelle plainte
a été rejetée. Daniel s'est plaint qu'un matin, à 9 heures, l'administration a décidé de faire une rencontre de tous les préposés. À
9 heures le matin, en centre d'hébergement, là, c'est le moment critique
où on donne les soins d'hygiène, les soins de chevet. Eh bien, non, l'administration
a décidé, elle, qu'elle scrapait tout ça, qu'elle envoyait les bénéficiaires.
Il a fait une plainte, ça a été rejeté.
Ma
conclusion, c'est que la gestion l'a emporté sur la mission de l'hébergement.
Et ça, ça, je trouve ça scandaleux qu'encore
aujourd'hui les administrations continuent à prendre de telles décisions. Je
trouve ça difficilement acceptable.
Je ne veux pas aller
trop en détail, puisque le temps va nous manquer, mais je veux tout de même
attirer votre attention sur des affaires bien simples qui ne coûtent pas cher
qu'on a observées, nous autres, depuis toutes ces années. C'est-à-dire que
d'abord les commissaires devraient relever désormais du ministère de la Santé,
peut-être le commissaire-conseil au ministère. Parce que c'est trop proche,
j'ai trop vu d'apparence, peut-être pas dans les faits, mais d'apparence de
conflits d'intérêts entre la direction générale... Demander que les bureaux des
commissaires ne soient plus dans la section administration, direction générale.
Vous seriez surpris combien des usagers nous ont dit qu'ils n'osent pas aller
faire une plainte parce qu'il faut qu'ils passent devant le bureau du D.G.,
en 2019, là, pas en 1958! Il y a encore ces problèmes-là très simples. On
ne devrait pas partager nos systèmes de communication. Quand on appelle au
bureau du commissaire, ça ne devrait pas répondre : Direction générale,
bonjour! Comme le... comme le médecin
examinateur, dis-je, ces gens-là sont non seulement responsables de faire
fonctionner le système de plainte, mais ils sont aussi imputables. Et je
pense qu'ils mériteraient, ils gagneraient à sentir qu'ils sont plus imputables
que ce qu'on a vécu jusqu'à maintenant.
Aussi,
dans une disposition du projet de loi, vous proposez que l'établissement doit
informer l'usager qu'il peut porter une plainte, encore faut-il
s'assurer qu'on lui facilitera le moyen de la formuler, ladite plainte, surtout
quand l'usager est accablé de perte de mobilité importante.
Évidemment,
le principal but de notre présentation, c'est de raccourcir les délais qui, à
notre avis, éventuellement conduisent à l'injustice, hein? Les Anglais
disent : «Justice delayed, justice denied», c'est vraiment et souvent le
cas chez beaucoup d'usagers qui ont porté plainte et qui finissent par
s'adresser à nous.
Je ne veux pas finir
sans vous dire que désormais on devrait demander au commissaire d'user de plus
de son initiative, aller au-devant des usagers, pas attendre qu'ils appellent,
il y en a qui n'ont pas de mains pour appeler, que désormais les rapports
annuels des commissaires comprennent au moins 25 % de ses interventions
qu'il aurait faites ou qu'elle aurait faites de sa propre initiative. Aller
au-devant des usagers.
Je ne veux pas finir
sans donner la parole à ma collègue, Mme Raymond, qui a beaucoup plus
d'expérience que moi dans toutes sortes de choses.
Le Président (M.
Provençal)
: 30 secondes, madame,
mais vous pourrez déborder un petit peu.
Mme Raymond
(Marielle) : Bonjour, tout le
monde. Je salue tous les gens membres de l'Assemblée nationale qui sont
ici et qui font un travail formidable. Et vous êtes là pour être notre
porte-parole quand on n'en a pas.
Et je vais vous dire
une chose. Peut-être que, dû à mon âge, hein, j'ai 77 ans... et je
travaille encore à plein temps comme bénévole. Hier, j'étais à Rimouski, au
comité de gestion des risques du CISSS du Bas-Saint-Laurent, et, aujourd'hui,
je suis ici. Je me véhicule encore. Il y en a qui disent : Tu vas encore à
Québec puis à Montréal? Bien oui, je vais à
Boston, ce n'est pas l'âge qui m'arrête, mais c'est l'âge... Vous savez qu'un
vieux assis, ça voit beaucoup plus
loin qu'un jeune debout. Je ne veux pas insulter les jeunes qui sont ici, mais
c'est ça, c'est parce que c'est l'expérience.
Et je vis avec des
gens qui sont dans des résidences, parce que je fais des visites ministérielles
dans les résidences, là, les CHSLD, je vais dans des résidences intermédiaires,
je vais dans des résidences privées mettre mon nez pour
voir. Je ne vais pas pour me faire voir — comme disait un certain
directeur général de CISSS, à un moment donné, quand il se promenait, c'était
pour se faire voir — moi,
je vais pour voir qu'est-ce qu'il se passe vraiment. Et les commissaires aux
plaintes, je peux vous dire que je les verrais beaucoup plus avec une
autonomie, un peu comme la Protectrice du citoyen, pas parce qu'ils sont
mauvais, pas parce qu'ils ne font pas un bon travail, mais parce que,
justement, de passer devant le bureau... J'ai fait même déplacer un bureau de
commissaire aux plaintes, à un moment donné, dans un établissement parce qu'on
passait devant la direction générale, puis tout ça. Bien, qu'est-ce que c'est
que vous faites, hein?, vous encensez, à ce moment-là. Donc, c'est ça.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci
beaucoup, madame. Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant
commencer la période d'échange. Mme la ministre, je vous cède la parole.
Mme
Blais (Prévost) : Merci beaucoup, M. le Président. Je vais poser
une question et, après, laisser la parole à mes collègues. Et peut-être
remercier aussi le sous-ministre et les membres de l'équipe ministère de la
Santé et des Services sociaux qui nous ont aidés pour l'élaboration de ce projet
de loi.
Tout d'abord, je vous
ai bien entendus, M. Brunet, Mme Raymond, M. Pilote — très
heureuse, M. Pilote, que vous soyez là — je vous ai entendus
concernant le délai, c'est quelque chose... une question qu'on va poser aux
commissaires aux plaintes quand ils vont venir. J'entends très bien ce que vous
êtes en train de dire, M. Brunet, et on va
garder ça en mémoire, là. Si vous trouvez que, 45 jours, c'est trop long,
on peut peut-être trouver une voie de passage.
La question que
j'aimerais vous poser, c'est : Vous avez mentionné que vous aimeriez que
les commissaires aux plaintes relèvent du commissaire-conseil, pouvez-vous
élaborer un peu plus? C'est quoi, votre vision, par rapport à ça?
M. Brunet (Paul
G.) : Bien, ce que je sens, ce que j'entends, ce que j'ai vu, c'est
souvent qu'il s'établit une certaine familiarité entre le commissariat et la
direction générale pour toutes sortes de raisons qui ne sont pas nécessairement
mauvaises mais qui, à un moment donné, finissent par empêcher le commissaire de
faire un travail qui soit le plus indépendant possible. Je le sais qu'ils ne
peuvent pas être aussi indépendants qu'un juge, il y a une question de principe
d'inamovibilité et une question de rémunération. Alors, toutes ces questions-là
sont importantes, mais je crois que, si la personne qui est vraiment
responsable, qui est le boss des commissaires, était au ministère, on
risquerait d'avoir moins de chance de trouver cette proximité qui, parfois, à
la longue...
J'ai vu en Beauce un
commissaire écrire à un usager pour lui dire qu'après étude il ne pense pas que
sa plainte serait fondée et il met le directeur général en copie. Ça ne se fait pas, mais c'est une pratique. Alors, est-ce que c'est parce qu'ils sont trop
habitués ensemble? Ce que je sais, c'est que, si le patron ou la patronne était
au ministère, peut-être qu'on se garderait une petite gêne dans notre travail.
C'est une proposition.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la députée de
Soulanges.
Mme Picard :
Merci, M. le Président. J'aurais une question, je ne sais pas lequel de
vous trois voudrait bien y répondre. Si le projet de loi, comme tel, est adopté,
croyez-vous que les patients vont être un petit plus en confiance de faire une
plainte? Pensez-vous que ça va augmenter un petit peu le... pensez-vous qu'ils
vont être plus enclins à faire des plaintes, ils vont se sentir plus en
sécurité?
M. Brunet (Paul
G.) : C'est-à-dire qu'on vise beaucoup les établissements privés.
Nous, on vous propose de le mettre partout. Ce n'est pas normal que, quand tu
vas dans une clinique qui accepte l'assurance maladie, l'usager n'ait pas un
recours pour faire une plainte contre le professionnel ou la professionnelle
concernée. Nous, on voudrait que votre projet de loi aille... il s'applique
partout où la carte d'assurance maladie s'applique, pas juste à certains
endroits — d'ailleurs,
je sens qu'il y a une définition qui est peut-être défectueuse dans le projet
de loi — mais
on devrait couvrir partout où des gens reçoivent des soins payés par l'État,
avoir possibilité de porter plainte plutôt que d'être obligés d'aller au Collège
des médecins ou je ne sais trop à quel saint se vouer.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la
députée de Roberval.
Mme
Guillemette : Oui, merci, M. le Président. Vous avez parlé
d'exclure des CIUSSS et d'enlever du côté des administrations. Est-ce que vous
verriez les bureaux mêmes du commissaire à l'extérieur carrément des CISSS, des
CIUSSS?
M. Brunet (Paul
G.) : Tu sais, depuis 2001 que ça existe, là, le régime de
plainte, commençons par les sortir de là. Puis à la prochaine réforme, si ça ne
marche pas encore, on les sortira physiquement des lieux. Mais je sais qu'il y
a des places que le commissaire, la commissaire sont vraiment loin de
l'administration, et je pense que ça, on n'a pas besoin d'en dire plus, c'est
important. Et là où ça se fait, là où on a sorti le commissaire des lieux de
l'administration, de la direction, on sent qu'il y a une sérénité accrue dans
son travail.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la ministre.
• (10 h 30) •
Mme Blais (Prévost) : Vous
avez mentionné qu'il faudrait que la
question des plaintes soit dans tous les endroits où il y a des soins et
des services, mais, dans le projet de loi de la Santé et des Services sociaux,
effectivement, les résidences privées font partie... peuvent aussi porter
plainte aux commissaires aux plaintes.
Actuellement,
dans ce projet de loi, n° 52, ça vise 91 établissements privés et
privés conventionnés, entre autres 40 CHSLD privés et 54 CHSLD
privés conventionnés et quelques autres établissements, comme L'Hôpital
chinois, là, qui est un CHSLD, mais les commissaires aux plaintes ont aussi
cette capacité à pouvoir traiter des plaintes des résidences privées, là, où il
y a des soins et des services.
Peut-être
aussi mentionner, parce que M. Pilote semblait inquiet, on va embaucher
aussi plus de commissaires aux plaintes et des commissaires aux plaintes
adjoints, là, pour être en mesure de pouvoir gérer mieux les plaintes, parce que sinon ce serait impossible, là. Si on
demande aux établissements privés de se délester de leurs commissaires
aux plaintes puis ne pas en engager d'autres, je pense qu'effectivement, on a
un problème.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée de Lotbinière-Frontenac avait demandé la
parole.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Bonjour. Moi, j'avais une question concernant... Bien, vous disiez que l'analyse
des dossiers était trop longue. Vous disiez que, par contre, la qualité des
rapports était appréciable mais les résultats étaient minimes. Est-ce que vous
pouvez nous parler de ça? Puis vous aviez... je pense que vous disiez aussi que
le pouvoir d'intervention des commissaires aux plaintes... ils n'utilisaient
pas assez leur pouvoir. Donc, j'aimerais ça que vous nous parliez de ça.
M. Brunet (Paul G.) : O.K. Alors, la
première chose, vous me dites que vous souhaitez entendre parler de
l'intervention. Oui, il y a des places où ils sont vraiment interventionnistes,
les commissaires, et on le voit puis ça se sent. Puis il y a d'autres places,
on ne les voit pas, on ne les voit pas assez, puis, si les gens veulent faire
une plainte, bien : Appelez-moi. Tu sais,
depuis que, maintenant, c'est le conseil d'administration qui les embauche,
bien, c'est une personne, souvent, avec certains délégués. Mais ils ne
circulent pas assez.
Moi,
j'aimerais ça que les commissaires aillent au-devant des usagers. Et c'est pour
ça qu'on dit qu'on aimerait imposer,
respectueusement, un certain pourcentage d'interventions, de l'initiative même.
J'ai osé dire ça à Saint-Michel, une
fois, dans une conférence, et la commissaire s'est levée, elle a dit :
Moi, je vais là tous les jours puis je vais partout. Alors, il faut
faire attention, il y en a qui le font, mais on sait que c'est une minorité des
nos commissaires, que l'on apprécie par ailleurs.
Le Président (M. Provençal)
: Ah oui! Allez-y, madame. Complémentaire.
Mme
Raymond (Marielle) : Bon,
concernant ces choses-là, là, moi, je vais vous donner un petit exemple. Il y a
quelques années, donc en 1994, il m'est
arrivé quelque chose, dans le Bas-Saint-Laurent, de très triste, à L'Isle-Verte,
où il y a des gens qui sont brûlés. Avant que cette chose-là arrive, il y avait
l'agence régionale. Ce n'était pas les CIUSSS,
c'était l'agence régionale qui visait... pour les commissaires. Il y avait un
commissaire aux plaintes régional qui, lui, avait le droit d'aller dans
des résidences privées et qui avait le droit aussi pour les ambulances, et
c'est lui qui réglait ça.
Moi, j'avais vu quelque chose, à cette
résidence-là, que je n'aimais pas, mais que je ne pouvais pas rien faire.
Qu'est-ce qu'on pouvait faire à ce moment-là? C'était de voir le commissaire
régional un petit peu en catimini puis dire :
Bien, moi, j'aimerais ça que vous alliez faire un petit tour. Grâce à M.
Delage, pas Cyrille mais l'autre M. Delage, qui était commissaire
aux plaintes régional et qui était allé faire un petit tour au mois de novembre
1993, il y a au moins une personne qui a été
sauvée du feu de L'Isle-Verte. Elle est décédée au CHSLD De Chaufailles l'année
passée, à Rivière-du-Loup, à l'âge de
103 ans. Et la famille m'a remerciée d'avoir sauvé leur mère, parce que,
quand le président régional était allé, il y a une personne qui frappait
dans une porte, puis on a demandé au monsieur : Mais qu'est-ce qui se passe? Pourquoi qu'elle frappe comme ça?
Parce qu'elle faisait un peu d'errance, on l'embarrait dans sa chambre.
Il dit : Vous n'avez pas le droit de faire ça. Et il dit : Vous avez
deux jours pour la sortir d'ici. Elle s'est en allée à un CHSLD chez nous, et
il l'a sauvée.
Voyez-vous,
l'indépendance... il avait un peu plus d'indépendance à ce moment-là, le
commissaire aux plaintes régional qui
était à Rimouski et qui a été capable de faire des choses comme ça. Donc, quand
je pense... L'indépendance, là, c'est un peu une petite chose comme ça.
C'est qu'aujourd'hui les commissaires aux plaintes qui sont là, c'est sûr
qu'ils ont... On ne mord pas la main qui te nourrit, hein, et ils ont un petit
peu une indépendance, et, quelquefois, bien, on ferme un peu les yeux parce
qu'on manque de places dans les établissements.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la ministre aimerait...
Mme Blais
(Prévost) : Oui, j'aimerais vous dire qu'entre autres la raison du
commissaire-conseil, même s'il ne fait
pas partie du projet de loi, c'est, entre autres, M. Brunet, pour
harmoniser les pratiques, mieux communiquer, parce que les commissaires
aux plaintes sont assez isolés d'une certaine façon, hein, ils sont seuls dans
les établissements. Donc, ça va permettre une meilleure harmonisation des
pratiques. Le commissaire aux plaintes peut très bien dire : Allez
au-devant et n'attendez pas. Donc, on peut améliorer ces pratiques-là. Et la
raison du projet de loi n° 52, c'est pour être en
mesure de donner aussi plus d'indépendance aux commissaires aux plaintes et
peut-être de trouver des voies de passage pour y parvenir.
Et
peut-être, en terminant, vous dire qu'il y a un total de
13 400 mesures correctives qui ont été émises en 2018‑2019. De celles-ci, 9 184 ont été
recommandées lors de la conclusion des dossiers de plaintes par les
commissaires aux plaintes et à la
qualité des services et 2 991 autres à la suite de leurs
interventions. Quant aux médecins examinateurs, c'est 725 mesures.
Donc, il y a quand même beaucoup de plaintes qui sont quand même réglées par
les commissaires aux plaintes, mais essayons le plus possible d'améliorer pour
faire en sorte qu'ils aient encore plus de liberté d'agir.
M. Brunet (Paul G.) :
Oui, mais peut-être aussi, grâce peut-être au commissaire-conseil, être moins
vite sur la demande d'extension de délai, tu sais, parce que, là, on parle de
45, mais souvent ça finit par 60, 63, là. Vous avez deux exemples où Daniel a fait une plainte, et le plus triste, c'est
que, dans la deuxième plainte, on lui demande encore un délai, alors que c'est la même plainte qu'un an
auparavant. Alors, ça ne fait pas sérieux, et, évidemment, c'est l'usager
qui paie pour pendant tout ce temps-là. Moi, je disais à la blague un
jour : Toutes les plaintes reliées aux menus puis aux repas, là, pendant
le délai durant lequel traîne l'étude, il faudrait que tous les administrateurs
de l'établissement mangent la même affaire qui est l'objet de la plainte. Peut-être
que ça se réglerait plus vite. Je ne sais pas.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la députée
d'Abitibi-Ouest.
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) : Merci, M. le Président. Excusez ma voix. Alors,
merci à vous trois. M. Brunet, vous
avez parlé, dans le projet de loi n° 52, qu'il y avait une
définition qui semblait problématique. J'aimerais que vous élaboriez,
s'il vous plaît.
M. Brunet (Paul
G.) : En fait, elle est trop restrictive, selon nous. C'est la
définition d'«établissement» où, nous — la ministre nous connaît
depuis un certain temps — on
pense qu'encore une fois, partout où quelqu'un reçoit des soins avec la carte
d'assurance maladie, il devrait y avoir un recours, une plainte, le droit de
faire une plainte. Dans une clinique privée où vous donnez votre carte
d'assurance maladie, si vous n'êtes pas content, «tough luck», il n'y en a pas, de recours. Ce n'est pas normal que
de l'argent, des deniers publics qui servent à vous soigner où que ce
soit au Québec ne puissent pas vous permettre de porter plainte contre le
professionnel ou contre l'établissement, pas normal.
Là, je les envoie aux petites créances. Ce n'est pas assez. Il faut pouvoir
porter plainte quand c'est de l'argent public qui sert à donner le soin,
où que vous soyez, où que vous vous trouviez au Québec.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci. Oui, Mme la députée.
Mme
Blais (Abitibi-Ouest) : J'aimerais, au niveau des statistiques, savoir
combien est-ce qu'il y a de plaintes par année.
M. Brunet (Paul G.) : Je ne le sais pas, je n'ai pas trouvé de rapport consolidé au
ministère. Il y en a par région, mais je n'ai pas trouvé de rapport
consolidé.
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) : Et quelles sont les plaintes les plus fréquentes?
• (10 h 40) •
M. Brunet (Paul G.) : Les plaintes les plus fréquentes, Daniel pourrait en témoigner, c'est
souvent le manque de soins ou la
baisse du niveau de soins, surtout depuis la réforme, moins la réforme que
l'objectif de déficit zéro. Oui, la pénurie a aggravé des affaires, mais
je trouve, des fois, que la pénurie a le dos large. J'ai parlé avec la
présidente de l'ordre des infirmières auxiliaires. Ils sont
15 000 membres. Elle me dit que 40 % des filles qui travaillent
comme infirmières auxiliaires sont obligées
d'avoir un deuxième emploi parce que le réseau ne leur donne pas assez
d'ouvrage. C'est 6 000 personnes, ça, madame, qui sont
disponibles maintenant. Ne me parlez pas de pénurie tant qu'on n'aura pas dit à
ces filles-là, ces 6 000 personnes-là : Entrez dans le réseau, on
va vous donner plus d'heures. Il y en a, du monde qui est prêt à travailler,
présentement. Parlez à la présidente de l'ordre des infirmières auxiliaires,
elle m'a dit ça il y a quelques semaines à
peine. Il y a des filles qui travaillent au St-Hubert. Je n'ai rien contre
St-Hubert Bar-B-Q, mais on a besoin de gens dans le réseau puis en CHSLD.
Il y a du monde de disponible, faisons-les travailler.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci.
Je cède maintenant la parole à la députée de... non, excusez, de Fabre.
Mme Sauvé :
De Fabre.
Le Président (M.
Provençal)
: 11 minutes.
Mme Sauvé :
Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, je veux saluer M. Brunet, je
veux saluer Mme Raymond, très
admirative de votre sagesse, madame, et je veux saluer le courage de
M. Pilote. Merci d'être avec nous aujourd'hui et de nous parler de
votre témoignage, qui est au coeur de ce projet de loi.
Il y a plusieurs
questions qui ont été amenées par la ministre et les collègues. Moi, il y a un
élément clé sur lequel j'aimerais vraiment
vous poser des questions, au-delà du projet de loi et de son intention. Vous
avez bien nommé tantôt, entre autres en lien avec une des vos
recommandations de votre mémoire, la recommandation n° 5, je pense... la
4, pardon, quand vous dites que «le bureau du commissaire et de son délégué ne
doit jamais être aménagé dans la même section
d'établissement que celle dans laquelle loge l'administration et la direction»,
ce que vous êtes en train de nommer quand vous nommez ça, c'est vraiment la
peur de dénoncer, hein, la peur de la démarche de la plainte pour l'aîné, la
famille aussi.
Alors,
je veux vraiment vous entendre là-dessus, au-delà de votre recommandation n° 4 puis l'intention du projet de loi. Est-ce qu'on va régler... est-ce
que c'est suffisant pour redonner confiance aux aînés, pour faire en sorte que leurs familles aussi vont vouloir dire : On y
va, on y va de l'avant? D'abord, parce qu'évidemment il y a eu cette réalité
préoccupante qu'on tente de régler, mais, dans l'esprit des gens, ça demeure
présent. Alors, ça, c'est très important. Puis aussi parce que, comme vous
l'avez si bien dit, souvent, on accouche d'une souris. On est en train, après
la plainte... D'ailleurs, M. Pilote, dans le détail de tout ce qu'il a vécu,
on voit bien que, le résultat de la plainte, c'est un rappel au personnel.
Alors, moi, je veux vous entendre là-dessus. Est-ce qu'on est en train de
véritablement régler la peur de dénoncer?
M. Brunet (Paul
G.) : Veux-tu parler, Daniel?
M. Pilote (Daniel) :
S'il vous plaît. Très important. Les personnes qui sont en perte d'autonomie,
qu'est-ce qui arrive, c'est qu'ils n'ont plus d'intérêt à se plaindre,
d'accord? Même s'ils subissent de la maltraitance, ils se disent : Bah! à
l'âge que je suis rendu ou, même, ils ne s'en aperçoivent pas. C'est ça, la
difficulté là-dedans, ils ne s'aperçoivent pas qu'ils sont en maltraitance. Et
ça, c'est grave, là.
Qu'est-ce qui arrive,
c'est que certains membres du personnel peuvent peut-être abuser de ça. De
toute façon, elle ne s'en apercevra pas. Ça fait que, donc, c'est des gestes
précipités, surtout ça, surtout des gestes rapides. Donc, c'est sûr que, quand tu fais des gestes
rapidement, bien, tu risques de faire de la maltraitance. Donc, là-dessus, le
problème, c'est qu'ils ne se plaignent pas, malgré la maltraitance.
M. Brunet (Paul
G.) : Je peux aussi ajouter aux propos de Daniel le fait que c'est
très difficile... on est devant la Cour supérieure, présentement, avec un
recours collectif pour le passé, et trouver un résident, une résidente de CHSLD
qui veut parler comme Daniel le fait... À ma mémoire, moi, moi, il y a Claude
Brunet qui l'a fait — il
a payé cher, hein? — en
1997, 1998... pardon, en 1988. Daniel ose parler. C'est très difficile. On
cherche des résidents, des gens qui
peuvent parler, malgré la lourdeur de leur handicap. C'est très difficile. Et
je salue encore avec admiration, là, ce que Daniel fait. Et je lui dis à
chaque fois que je lui parle : Si tu sens que tu te fais tasser ou...
comme mon frère Claude l'a senti avant qu'on le jette par terre et qu'il en
meure en... je ne me souviens plus, en 1988, en 1988, Claude est mort en
1988...
Une voix :
En 1998.
M. Brunet (Paul
G.) : Non, il est mort le 23 juin 1988. Peu importe. Alors,
c'est ça, comme vous le dites, là, cette sensation-là qu'on est aussi bien...
Et, de toute façon, comment voulez-vous vous plaindre de quelqu'un qui, malgré toute sa bonne volonté... J'étais
à Saint-Charles-Borromée récemment. Je sais que Mme la ministre y était aussi
il n'y a pas si longtemps. Quelqu'un qui est lourdement handicapé, qui ne peut
pas bouger, un préposé rentre, puis il lui dit, au préposé : Je ne veux
pas être lavé aujourd'hui. Le préposé lui dit : Laissez-moi faire mon
travail, puis il le lave quand même. Il ne peut pas bouger. On a fait une
plainte. Ça a pris des mois. Finalement, il a eu une suspension de quelques
jours.
C'est l'usager qui a
le droit de décider ce qui va lui arriver, et c'est très difficile pour des
gens qui ont besoin vital de ces soins-là de se plaindre. On a de la misère à
le comprendre, nous autres. Mais je commence, moi, après toutes ces années, à
comprendre la délicatesse de ce dont on parle et l'importance d'avoir des
commissaires qui vont au-devant des usagers. Ça va être une loi, un projet de
loi encore plus fort, si vous l'adoptez.
Le Président (M.
Provençal)
: Député de Vimont...
Mme Raymond
(Marielle) : Excusez-moi...
Le Président (M.
Provençal)
: Oui, madame.
Mme Raymond
(Marielle) : ...j'aurais voulu rajouter quelque chose. Vous savez, ce
n'est pas seulement les gens qui sont hébergés ou les gens qui reçoivent des
services dans les centres hospitaliers, mais ce sont souvent leurs parents qui
n'osent plus parler. C'est la loi de l'omerta parce qu'on a peur des
répercussions sur nos usagers. Ça, je vois ça encore régulièrement parce que
moi, au comité des usagers, on m'appelle. On m'appelle des Laurentides parce
qu'on veut déménager une personne à 50 kilomètres de chez elle pour être
hébergée puis qu'on n'a personne pour aller la visiter tout près, et, tu sais, des
choses comme ça, puis on n'ose pas. Et les comités de résidents qui sont dans
les CHSLD ont aussi cette difficulté-là à faire parler les gens. Ils ont peur
pour leurs personnes hébergées. Ça, c'est la loi de l'omerta qui arrive un peu
partout.
Puis je vais vous
dire une chose, je ne les blâme pas, j'ai fait ça vis-à-vis de ma propre mère,
à un moment donné, la loi de l'omerta, parce que
j'avais peur que ça se répercute contre ma mère. Et c'est pour ça que je suis
venue au comité des usagers il y a 15 ans, parce que je vivais le
regret. Par contre, quand ma mère a été décédée, j'ai mis le pied à terre puis j'ai fait des choses pour ça.
Mais, vous savez, hein, je comprends les familles, on a toujours
peur que nos parents soient maltraités par ricochet.
Le Président (M.
Provençal)
: M. le
député de Vimont.
M.
Rousselle : Merci, M. le Président. Écoutez, je voudrais me servir de votre expérience, que ça soit
M. Pilote, que ça soit
M. Brunet et vous, Mme Raymond. Justement, je m'en vais dans le même
sens, d'aller au-devant des usagers. Vous
parlez que c'est la loi de l'omerta, puis je peux comprendre qu'à un moment
donné tu ne veux pas que quelqu'un
de ta famille soit brimé dans ses droits, mais là je réfléchissais, à un moment
donné, je me disais : Ceux qui n'ont pas de
famille, ceux qui ont de la difficulté à communiquer, que ça soit une autre
langue, ou ceux qui sont tout simplement muets, ou... tout dépendant, il arrive quoi, à eux? Donc, je vois
vraiment, dans «aller au-devant des usagers», l'importance de ça.
J'aimerais ça vous entendre là-dessus.
M. Brunet
(Paul G.) : C'est tellement
important, ce que vous dites, parce
que des gens sont lourdement
handicapés, il y en a qui ne parlent pas, il y en a qui ne voient pas
et... Mais soyons un peu positifs, rappelons-nous qu'avec un bon rapport, et ça
fait partie d'une des formations qu'on donne, comment intervenir en CHSLD au
sein d'un comité, je pense que, quand on a des interlocuteurs en autorité sur
les unités, en général, avec les gens bien intentionnés, de bonne... on règle
les problèmes, pas besoin de faire une plainte. Et, grâce à beaucoup de gens,
beaucoup de femmes et d'hommes qui
travaillent sur les planchers, on règle des affaires simples, mineures, qui
peuvent se régler rapidement. Mais,
quand on est rendus à porter plainte, là, on a peur, la famille hésite, et
c'est là où le commissaire, la commissaire peuvent jouer un rôle déterminant, d'abord pour aérer tout ça, pour
rendre plus transparent ce qui se passe. Et c'est en allant sur les
unités qu'on sait qu'est-ce que ça sent, on entend ce qui se passe et on voit.
Et que tout le monde convienne... et c'est ce que je dis souvent aux membres
des comités, de convenir de votre patinoire sur les unités et dans les CHSLD si jamais on vous empêche d'y aller
tous azimuts, ils vous empêchent de jouer votre rôle. Le principal rôle
des comités, c'est de défendre les droits collectifs des usagers de
l'établissement. Si vous ne pouvez pas aller voir personne, c'est sûr que ces
gens-là, qui vous empêchent de le faire, contreviennent à la loi.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Mme la députée de Fabre, oui, il vous reste
1 min 30 s.
• (10 h 50) •
Mme Sauvé : Parfait. Merci, M. le
Président. Alors, je vais faire rapidement. J'aurais bien d'autres questions
mais, si je vous ai bien compris, dans votre demande n° 9
de s'assurer que, dans le rapport aux autorités, il y a au moins 25 % des
interventions qui sont issues des initiatives, dans le fond, avec cette
recommandation-là, c'est un peu comme un indicateur de performance de votre 8,
qui demande, justement, au commissaire d'aller sur les lieux. Est-ce que je me
trompe quand vous allez dans ce sens-là?
M. Brunet
(Paul G.) : Non, madame,
vous ne vous trompez pas. Je pense, j'ai mis un... j'ai posé un geste de plus
pour nous assurer que, formellement, dans les rapports annuels, on voit qu'il y
a eu des interventions, de l'initiative, et c'est tout à l'honneur des
commissaires, dont plusieurs le font, rappelons-le, mais ce n'est pas assez
nombreux pour les endroits que je visite. Alors, je pense que ça, oui, 8 et 9
vont ensemble pour que nos commissaires, leurs délégués aillent plus auprès des
usagers.
Mme Sauvé : Parfait, merci. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Taschereau.
Mme Dorion : J'ai combien de temps?
Le Président (M. Provençal)
: 2 min 45 s.
Mme Dorion : Merci. Merci,
M. Brunet, merci, Mme Raymond, merci, M. Pilote. Déjà, ça nous
fait voir de façon plus concrète un peu le monde dans lequel on a à se plonger.
Il y a eu des critiques aussi par rapport à
l'indépendance des commissaires aux plaintes dans le réseau public. Ça existe, il y a eu... bon, la question
d'indépendance se pose aussi là. Selon vous, qui connaissez bien ça de
l'intérieur, dans le mode de nomination de ces commissaires-là, donc,
ils vont être plus nombreux si le projet de loi va de l'avant, qu'est-ce qui
est important qu'il se passe ou qu'il ne se passe pas? Qu'est-ce qu'il est important
d'éviter ou qu'est-ce qu'il est important de favoriser dans ce mode de
nomination là des commissaires aux plaintes?
M. Brunet (Paul G.) : Bien, pour
avoir une idée sur comment on est indépendants, je suis juriste moi-même puis
je sais comment on nomme des juges, il faut éloigner le plus possible le lieu
ou la personne qui nomme du lieu où la personne va oeuvrer.
Évidemment,
tu sais, idéalement, on devrait dire : Le ministère devrait les nommer.
Mais les dernières quatre années, là, j'ai été terrifié, moi, par
les nominations centralisées, que là je n'ose plus dire ça. Tu sais, je veux
dire, on a scrapé littéralement le peu de ce qu'on voulait ou pouvait faire de
bien à cet égard. Alors, je me méfie des nominations
centralisées, on sait pourquoi, et j'abonde dans le sens où on aurait un
commissaire-conseil, au ministère,
qui jetterait un regard sur ces gens-là. Peut-être les
nommer localement, il y a des gars et des filles qui font de très belles jobs,
là. Mais on a besoin de renforcer.
Ça a parti en 2001, cette affaire-là, et je
pense qu'on a ce que ça prend aujourd'hui, au gouvernement et chez les ministres que j'ai rencontrés, pour dire : O.K., on
va poser un geste courageux — il faut le faire, hein? — poser un geste courageux, mais c'est
un régime de plaintes qui va valoir la peine de continuer à être encouragé.
Nous,
évidemment, dans un monde idéal, on vous a déjà dit qu'un vrai régime de
plaintes, c'est nous, au Conseil pour la protection des malades, qui
devrions le gérer, mais je sais que nos politiciens sont hésitants là-dessus
puis je le respecte, mais, en attendant, améliorons ce que l'on a.
Mme Dorion :
Il me reste combien de temps?
Le Président (M.
Provençal)
: 30 secondes.
Mme
Dorion : O.K. Et, concrètement, quelle forme ça pourrait prendre, que
les commissaires aillent au-devant des malades, aillent au-devant des
aînés pour prendre le pouls dans une situation où eux n'osent pas?
Concrètement, comment on peut faire ça?
M. Brunet (Paul
G.) : Bien, ils sortent de leurs bureaux puis ils se promènent dans
les installations, dans les établissements où ils ont juridiction, mettent
moins de posters «Appelez-moi». Allons-y. Et je sais qu'il y a des filles et des gars qui le font. Puis, savez-vous, là où
j'entends qu'ils le font, ça va mieux. Pourquoi? Parce que les intervenants
connaissent mieux la commissaire, le commissaire, ils savent de quel bois ces
gens-là se chauffent, quelle autorité ils et elles ont, et, finalement, il
s'instaure un climat de confiance, d'intervention où chacun a un rôle, et, tu
sais, ça crée une présence. Moi, je m'occupe des droits des usagers. Vous,
qu'est-ce que vous faites? Sans le dire, on prend notre place. Et, à chaque
fois que j'ai vu ça, évidemment, comme à Saint-Michel-des-Ha! Ha! où la
commissaire est extraordinaire, j'ai vu que ça faisait du bien aux usagers.
Le Président (M.
Provençal)
: Je cède maintenant la parole
au député de Rimouski pour 2 min 45 s.
M. LeBel :
Merci, M. le Président. Bonjour, tout le monde. Comme je n'ai pas beaucoup de
temps... Je ne veux pas jouer au chauvin Rimouskois, mais je suis très fier de
vous, madame, très fier.
Vous avez parlé deux,
trois fois du commissaire-conseil. La ministre aussi en a parlé. Vous trouvez
qu'il aurait un rôle important sur assurer l'indépendance, mais le
commissaire-conseil, il n'est pas dans le projet de loi. Est-ce que vous pensez
qu'on devrait l'intégrer puis préciser son rôle dans le projet de loi?
M. Brunet (Paul
G.) : Je pense, ça vaudrait la peine d'élaborer quelque chose
là-dessus. Remarquez que la plupart de nos recommandations non plus ne sont pas
dans le projet de loi. J'en ai profité, parce que je connais Mme Blais un
peu plus, tu sais, d'ouvrir un peu les horizons dans ce qui m'apparaît une
opportunité extraordinaire de revoir puis d'améliorer l'indépendance puis les moyens
d'action du ou de la commissaire. Et c'est pour ça que je dis : O.K,
ouvrons ça puis ayons quelqu'un au ministère qui regarde ça d'en haut puis qui
essaie d'uniformiser.
Savez-vous qu'il y a
des commissaires, dans le nord de la ville de Montréal, qui m'ont dit :
M. Brunet, nous, on ne défend pas les
malades, là, non, non, non, nous, notre rôle, c'est de vérifier si, après
analyse, le droit d'un usager a été compromis. Eh, Seigneur! je te dis
que c'est restrictif. C'est plus restrictif que ce que la loi prévoit en regard
de leur autorité, d'ailleurs.
M. LeBel :
Mais, comme le commissaire-conseil semble être important, il me semble qu'on
pourrait comme préciser son rôle dans le projet de loi, et ça pourrait aider à
l'indépendance.
M. Brunet (Paul
G.) : Oui, d'accord.
M. LeBel : Madame,
vous parliez d'omerta. L'omerta,
c'est autant, bon, dans le privé, on peut le deviner, mais c'est aussi
dans le public, l'omerta. Ça veut dire oui, ça?
Mme Raymond (Marielle) : Je veux vous dire une chose. La commissaire aux
plaintes... Moi, j'ai déjà visité, un
jour, une résidence intermédiaire avec une commissaire aux plaintes qu'on avait
à ce moment-là. Puis on est arrivées, là,
sans être invitées, là. On s'est dit, dans l'après-midi, que les gens avaient
un beau petit biscuit puis le jus Tropicana, etc., et c'était trop beau
pour être vrai, hein? Quand on est sorties, toutes les deux, on s'est
regardées, elle m'a dit : Qu'est-ce que vous en pensez? J'ai dit :
Vous? Trop beau pour être vrai. Bien, six mois après, on avait fait fermer la
résidence, parce que c'était juste un indice qu'il y avait quelque chose sous
roche qui... C'est de voir qu'est-ce qui se passe vraiment. Vous savez, il faut
avoir des yeux tout le tour de la tête quelquefois.
L'année passée, je
vais vous dire une chose, j'ai fait fermer une résidence à La Pocatière
que je n'aurais pas été adopter un petit chien là. Et j'ai été obligée de me
fâcher avec mon CISSS. Puis la commissaire aux plaintes allait, mais c'est
parce qu'il n'y avait pas de place pour les mettre, les gens, ils ne savaient
pas où les envoyer. Mais quand ça coule, là,
puis que, tu sais, les seaux sont à terre puis les choses ne sont pas bien
nettoyées... Puis, je vous dis, là, hein, bien, à un moment donné, bien, là, on a
eu peur que j'aille dans les journaux ou à la télévision, et on l'a fermée.
C'est ça, là. Vous savez, la commissaire aux plaintes, elle était liée un peu
avec le CISSS, parce qu'il n'y avait pas de place pour envoyer les gens.
M. LeBel :
Là, j'aurais une question là, là.
Mme Raymond
(Marielle) : Bien, c'est ça, c'est ça, la loi de... c'est ça, d'être
sur place.
Le Président
(M. Provençal)
: Je remercie
Mme Raymond, MM. Brunet et Pilote pour leur contribution aux travaux
de la commission.
Je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre
place. Merci.
(Suspension de la séance à
10 h 58)
(Reprise à 11 h 02)
Le Président (M.
Provençal)
: Nous allons reprendre nos
travaux. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du regroupement
provincial du comité des usagers. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter puis à
initier votre exposé.
Regroupement provincial des
comités des usagers (RPCU)
M. Ménard (Claude) : M. le Président, Mme la
ministre, membres de la commission, mon nom est Claude Ménard. Je suis le
président du Regroupement provincial des comités des usagers et je suis
accompagné de la directrice générale, Mme Patricia Gagné.
Créé en 2004, le
Regroupement provincial des comités des usagers regroupe aujourd'hui la
majorité des comités des usagers et de résidents du Québec, ce qui en fait un
acteur incontournable dans la défense des droits des usagers auprès de la population et de partenaires, dont le ministère de la Santé et des Services sociaux. À deux reprises au cours des dernières années, son taux de
membership a été évalué par une firme d'experts certifiant, dans un premier
temps, son taux d'adhésion à 71 % et, dans un deuxième temps, à 86 %.
Régulièrement, le
RPCU entend les préoccupations des membres des comités des usagers et de
résidents, qui sont des acteurs de proximité, grâce aux activités récurrentes
et structurantes qu'il a mises en place. Ces dernières permettent d'entendre la voix des usagers et surtout celles de leurs
défendeurs. L'offre de services du RPCU comprend les formations dispensées partout au Québec, les consultations
périodiques, des échanges avec ses membres et un soutien quotidien dans
leur mandat ainsi que des congrès nationaux qui rassemblent, chaque année, plus
de 500 participants venant de toutes les régions du Québec.
Pour la rédaction de
ce mémoire, le regroupement a procédé à une consultation de ses membres par
voie électronique, en dépit du court délai imposé. Dans un deuxième temps, le
mémoire a été soumis aux membres du conseil
d'administration pour être bonifié et validé. Porter plainte est un geste
constructif qui assure le respect des droits, donc l'objectif fondamental
du régime d'examen des plaintes est l'amélioration continue de la qualité des
soins et des services du réseau de la santé et des services sociaux.
Nous considérons que
les principes suivants devraient guider les élus de l'Assemblée nationale du
Québec dans leurs réflexions, discussions et prises de décision, entre
autres : la neutralité du commissaire aux plaintes et à la qualité des
services, la crédibilité du régime d'examen des plaintes, la prise en
considération de la vulnérabilité des personnes vivant en CHSLD, sans égard au
statut public ou privé de l'établissement, et le risque de maltraitance dont
elles peuvent être victimes.
Depuis de nombreuses
années, l'indépendance du commissaire aux plaintes et à la qualité des services
est soulevée, et, de ce fait, son impartialité et sa neutralité. Nous entendons
régulièrement cette réflexion venant de nos comités. Nous ne remettons pas en
cause la qualité du travail professionnel et la sincérité et l'engagement des
commissaires, y compris ceux en CHSLD privés. Plusieurs ont d'ailleurs enrichi
nos congrès lors de leur présence comme congressistes,
conférenciers et animateurs d'ateliers de formation. Or, même s'il est qualifié
comme personne indépendante, le commissaire aux plaintes et à la qualité
des services est un employé de l'établissement. De ce fait, il est juge et
partie.
Le regroupement
souhaite que le régime d'examen des plaintes soit revu de façon à garantir aux
usagers une entière objectivité dans le traitement de leurs plaintes. Nous
proposons une neutralité balisée des commissaires aux plaintes et à la qualité
des services et que ceux-ci relèvent dorénavant d'une organisation indépendante
des CISSS ou des CIUSSS, cette organisation étant du ressort du ministère de la
Santé et des Services sociaux. Les commissaires ne seraient donc plus des employés d'un établissement qui dispensent des
services, mais des employés de l'État, lequel a l'obligation de garantir une neutralité absolue et une équité dans ses
relations avec tous les citoyens. Il devrait en être ainsi pour le médecin examinateur, qui devrait
également relever d'une organisation autre que le prestataire de services.
Mme Gagné (Patricia M.) : M. le
Président, Mme la ministre, bonjour. Alors, la défense des droits est ainsi à géométrie variable. Les comités des usagers et de
résidents ont pour fonctions légales, entre autres, de faire la promotion
de l'amélioration de la qualité des
services, ce qui correspond, en fait, à la finalité de l'objectif
du processus de plaintes, et d'accompagner un usager, à sa demande,
lorsque celui-ci entame une démarche en ce sens.
Alors,
dans le secteur public, ce qu'on voit, c'est qu'il y a des comités de résidents
dans chaque établissement de
soins de longue durée chapeautés par un comité d'usagers qui, eux, sont
chapeautés par des CUCI, des comités d'usagers
des centres intégrés, alors que, dans le secteur privé, donc, ils ne reçoivent
pas de subvention gouvernementale, et
la promotion et la défense de droits, elle est incertaine, elle est
approximative et souvent au bon vouloir de la direction des ces dits établissements.
Alors, ce qu'on
souhaite, c'est que les mécanismes de soutien soient les mêmes, c'est-à-dire
que la défense de droits soit équivalente, qu'un usager soit en établissement
privé, privé conventionné ou public, donc les mêmes droits, et que le ministère
de la Santé et des Services sociaux s'assure de la présence et du bon
fonctionnement de comités de résidents et de comités d'usagers, donc supervisés
par un comité d'usagers dans les CHSLD privés et privés non conventionnés.
Finalement,
alors, nos recommandations en synthèse, c'est que les commissaires aux
plaintes et à la qualité des services
ainsi que les médecins examinateurs relèvent dorénavant d'une institution
indépendante du prestataire de services qui a une reddition de compte
locale à faire, parce que ce qu'on craint, c'est la concentration, un peu, des
pouvoirs, alors que cette organisation-là ait des comptes à rendre au niveau
local, régional, que le ministère de la Santé et des Services sociaux s'assure
de la présence et du bon fonctionnement des comités des usagers et de résidents
dans tous les CHSLD, que le délai de
45 jours concernant le traitement d'une plainte soit respecté et que le
gouvernement mette sur pied une vaste
campagne d'information en vue de faire connaître le régime d'examen des
plaintes et son application.
Finalement,
M. le Président, je me permets de demander, au nom aussi des
comités des usagers, s'il vous plaît,
d'avoir davantage de temps la prochaine fois, lorsqu'il y a des consultations
des commissions parlementaires. Nous avons
été aussi consultés, récemment, en
ligne pour des politiques de soins de longue durée et proches aidants. Alors,
d'avoir plus de temps, ça nous permet de faire une meilleure consultation de
nos membres, ce qui, pour nous, est important, est primordial, en fait. Merci.
• (11 h 10) •
Le Président (M. Provençal)
: Très bien reçu. Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons
maintenant commencer la période d'échange. Alors, Mme la ministre, à
vous la parole.
Mme Blais
(Prévost) : Oui, je vous remercie pour votre présence. J'ai beaucoup d'admiration pour le regroupement des
comités des usagers, qui doit faire respecter les 12 droits des usagers,
vous avez un rôle important. Et d'ailleurs, avec
la nomination d'un commissaire-conseil, on va s'assurer qu'il y
aura un lien important entre les commissaires aux plaintes et les
comités des usagers. Ça m'apparaît tout à fait concordant.
Vous
mentionnez, M. Ménard, que vous aimeriez une plus grande indépendance des
commissaires aux plaintes. Qu'est-ce que vous faites avec le lien avec
les deux... l'ajout de deux critères qu'il y a dans le projet de loi, soit
qu'il n'y ait pas de lien familial avec le
P.D.G., le P.D.G.A., président-directeur
général, et pas de lien financier également?
Ce n'est pas suffisant pour vous? Vous
aimeriez vraiment que les commissaires relèvent, un peu comme le
mentionnait le comité de la protection des malades, du
commissaire-conseil?
M. Ménard (Claude) : Oui, oui, effectivement. Trop souvent,
on entend de la part des différents comités : On ne retrouve pas cette impartialité-là. On a beau
dire, ce n'est plus... Parce que, dans le passé, on a eu des commissaires
qui étaient le beau-frère, la belle-soeur, le cousin, la cousine ou même la
conjointe, là, d'un propriétaire. Ça, on ne voit plus ça aujourd'hui, mais les
gens requestionnent encore de nouveau cette impartialité-là. La grande majorité
des gens qui siègent à titre de commissaire, effectivement, le font de façon
indépendante, mais trop souvent ce sont des gens qui viennent également du
réseau. On a beau entendre : C'est important de connaître le réseau pour
être capable d'intervenir, mais, à un
certain moment donné, excusez l'expression, mais ce qu'on entend : Ils
sont trop collés, ils sont trop près de toute cette gestion, là, de la
mécanique. Alors, le fait de sortir complètement de l'organisation, bien, les
gens jugent que, un, on y retrouverait davantage cette indépendance.
Pour moi, c'est
nouveau d'entendre, là, ce que vous venez de proposer. Est-ce qu'on serait en
faveur d'une telle orientation? Dans toute éventualité, j'oserais amener une
suggestion, c'est que, un, dans l'éventualité où on met ce mécanisme en place,
bien, qu'on l'évalue après deux ans, et, de là, dire : Bien, est-ce qu'il
faut aller encore plus loin? Bien, de... Et c'est un petit peu là où, dans le
fond, il y aurait toute cette indépendance-là, là.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci. Mme la
députée de Soulanges.
Mme
Picard : Bonjour. Merci beaucoup pour votre présence. Mme Gagné, vous avez mentionné la promotion
de ce qui va changer, surtout avec le
nouveau projet de loi. Selon vous,
c'est quoi, la meilleure façon d'aller rejoindre la population? Comment
mieux passer le message? Puis comment les amener à faire plus de plaintes?
Mme Gagné (Patricia M.) : En fait, ce qu'on constate, c'est que
l'accessibilité du processus d'accompagnement des insatisfactions et de
la gestion des plaintes est méconnue encore, malgré les affichages, là, dans
les institutions. Alors... Et même que, cette année, le conseil
d'administration, il y a quelques semaines, nous a demandé de faire des
représentations auprès du ministère afin que la semaine des droits, tenue à
chaque automne, soit aussi publicisée par le
ministère, c'est-à-dire soit faite avec nous, le regroupement, parce que c'est
méconnu, parce qu'on a l'impression... Nous, on
est à l'intérieur, on pense que c'est acquis, que tout le monde est bien au
fait des processus, de ses droits, et tout ça, mais c'est vraiment loin d'être
cela.
Mme Picard :
À propos de l'obligation d'un signalement, est-ce que vous croyez que... Pour
les personnes qui ne sont pas capables de
s'exprimer ou qui n'ont pas de famille, j'aimerais vous entendre aussi à propos
de ça pour faire passer le message au niveau de la plainte, là.
Mme Gagné
(Patricia M.) : Au niveau de...
Mme Picard :
Bien, en fait, quelqu'un qui ne peut pas s'exprimer ou quelqu'un qui ne peut
pas... ou qui n'a pas de famille, l'employé, l'infirmière pourrait faire un
signalement. Est-ce que vous croyez que ça roule rondement dans le réseau, en
ce moment, à ce niveau-là?
Mme Gagné
(Patricia M.) : C'est une bonne question, en fait, puis c'est une
bonne préoccupation. Je n'ai pas vraiment de documentation à ce sujet-là, on
pourrait sonder nos membres, mais une chose est certaine, c'est qu'il doit y
avoir un processus pour que les personnes qui ne peuvent pas exprimer leurs
droits, faire valoir leurs droits, puissent le faire, tout à fait. Sous quelle forme?
M. Ménard
(Claude) : En complément d'information, on le sait qu'au niveau de la
maltraitance, si je suis un employé puis je vois un de mes confrères ou une
consoeur, là, qui pose un geste de maltraitance, je pense que la démarche de
dénonciation, elle est présente. Mais, en lien avec les droits des usagers, les
12 droits, de mettre cette pression-là au niveau du personnel, dans le
contexte actuel, où on se retrouve avec une pénurie de membres du personnel, je
pense que ça serait, là, un peu beaucoup demander, là, au niveau du personnel.
Et c'est là où le
rôle des gens qui siègent au sein des comités de résidents ou de comités des
usagers ont un rôle, là, primordial à jouer, d'être les yeux, les oreilles et
la voix de ces personnes-là qui ne sont plus en mesure, là, à cause d'une perte
d'autonomie majeure, ou etc., mais, en même temps, je pense que la présence,
là, du commissaire sur place, ce qu'on entend puis ce qu'on voit au niveau des
différents rapports, c'est que le commissaire est invité une fois par année,
dans l'installation, lors de l'assemblée générale annuelle du comité. Si je
veux faire valoir mon rôle puis que... un, qui est un des mandats des commissaires
aussi de faire la promotion des droits, je ne pense pas que c'est la présence
une fois par année dans l'installation qu'il est en mesure de jouer son plein
rôle, là.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la
députée de Roberval.
Mme
Guillemette : Merci, M. le Président. Merci de votre présence ici aujourd'hui,
c'est très éclairant pour nous. Vous parlez, dans votre document, de soutien
aux familles et aux proches aidants. J'aimerais vous entendre un petit peu plus
là-dessus.
Mme Gagné (Patricia M.) : En fait, pour nous, dans un processus d'amélioration continue et d'accompagnement au niveau des insatisfactions et de
gestion des plaintes, les proches jouent un rôle vraiment majeur et surtout en hébergement
de soins de longue durée. Alors, nous pensons, et nous l'avons écrit mais pas
dit ce matin, on a fait un résumé, là, qu'il
devrait y avoir des mesures, là, dans la politique nationale pour les
proches aidants afin de les outiller pour un meilleur accompagnement des
usagers.
Mme
Guillemette : ...exemple de mesures qui pourraient être prises pour
faciliter...
Mme Gagné (Patricia M.) : Bien, ça pourrait être, par exemple, soit des outils, de l'information, de la formation
et inclure l'accompagnement des comités d'usagers pour les proches aidants plus
spécifiquement, donc accroître le mandat du comité d'usagers, par exemple.
Mme
Guillemette : Merci.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la
ministre.
Mme Blais
(Prévost) : Oui, juste une question pour m'assurer que vous êtes tout
à fait d'accord, en accord avec le fait que, dorénavant, les commissaires aux
plaintes relèvent du public et non plus du privé. Je mentionnais, en ouverture,
qu'il y avait 91 établissements privés, donc des établissements qui
embauchent leur propre commissaire aux plaintes, mais, maintenant, les
commissaires aux plaintes relèveraient du public puis, selon le projet de loi,
des établissements, là, nommés par le
conseil d'administration. Donc, vous êtes en harmonie avec cette prise de
position là?
• (11 h 20) •
M. Ménard
(Claude) : Entièrement en accord avec, là, cette décision-là, en
n'oubliant pas qu'il faut que, un, le nombre
de commissaires, là, soit présent, soit augmenté aussi, là. Pourquoi? Parce
que, un, il y a, à certains endroits, des difficultés qui se vivent
actuellement, là. Un de nos comités des usagers, entre autres, le comité des
usagers du Centre-Ouest-de l'Île-de-Montréal, dans son rapport annuel,
démontrait que huit usagers sur 10, leur délai de réponse a
été au-delà de 45 jours. Alors, si on augmente la surcharge au niveau de
ce commissariat-là puis que les effectifs ne sont pas augmentés, comment on va
venir à bout d'en arriver à dire que, dans un délai raisonnable de
45 jours, on va être en mesure de répondre aux besoins puis aux attentes,
là?
Mme Blais (Prévost) :
Juste pour vous rassurer, M. Ménard et Mme Gagné, évidemment, il y
aura l'ajout de commissaires, parce que, sinon, ce serait impensable. Je veux
juste vous rassurer là-dessus.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la députée
d'Abitibi-Ouest.
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) : Mme Gagné, M. Ménard, merci beaucoup de la
présentation. Au niveau de vos comités, il
semble y avoir un grand questionnement : De quelle façon seront traitées
les plaintes formelles ou informelles? Alors, j'aimerais que vous
élaboriez sur ce questionnement-là.
M. Ménard (Claude) : Si j'ai bien compris, c'est : De quelle façon les plaintes sont
formulées auprès des comités?
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) : Oui.
M. Ménard
(Claude) : Alors, bien, un, les gens nous parviennent, là, soit
l'usager lui-même ou un faible pourcentage nous vient des proches.
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) : Souvent?
M. Ménard
(Claude) : Oui. Pourquoi? Je dis un faible pourcentage, parce que, un,
ce qu'on remarque de plus en plus dans le réseau public, c'est que les gens qui
arrivent en CHSLD sont là pour une courte période de temps comparativement
à 15 ans passés où les gens arrivaient en CHSLD avec leur voiture,
allaient passer six mois par année en Floride et revenaient tout bronzés,
puis là on fait un autre six mois, là, etc., mais ce n'est plus la réalité aujourd'hui.
Alors, ce qui fait que, un, le court temps de présence... Dans le fond, là, les
membres de famille ou les proches sont de moins en moins présents dû à ça.
Et l'autre facteur également,
c'est la distance. Pourquoi? Parce qu'aujourd'hui on veut que notre parent ou
notre enfant reçoive des soins de qualité. Alors, la place qui est disponible
est à 50 ou 80 kilomètres. Est-ce que, moi, j'ai les moyens? Est-ce que le transport en commun est là?
L'accessibilité pour, dans le fond, accompagner mon parent vers les
derniers jours, ce n'est pas nécessairement présent, là.
Alors, ce qui est
certain, c'est que les membres de comités de résidents ont un rôle, là, majeur
à jouer dans le sens de l'importance d'observer ce qui se vit puis ce qui se
passe à l'intérieur. On le sait qu'un comité de résidents ou un comité des
usagers ne peut pas déposer une plainte, mais d'amener l'usager ou le membre de
famille, bien, je pense que c'est son rôle majeur à jouer, là.
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) : Mais il semble, là, que le questionnement aussi,
c'est de la façon qu'elles vont être traitées, les plaintes, face aux comités.
Ils semblent inquiets de la façon que nous allons les traiter.
M. Ménard (Claude) : Bien, lorsqu'on parle que, un, le délai est plus de
45 jours, c'est cette préoccupation-là. Si on prend l'installation CHSLD, de
plus en plus, la moyenne des gens sont là pour une durée, là, entre six mois,
neuf mois. Alors, si je dépose une plainte aujourd'hui, et là le commissaire est surchargé, demande de prolonger le temps,
est-ce que je vais avoir ma réponse avant de quitter ce monde?
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) : Et ma dernière... O.K.
M. Ménard
(Claude) : Alors, toute la question de peur de représailles aussi
rentre en lieu, là.
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) : Parfait, merci.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la
ministre.
Mme
Blais (Prévost) : Oui, je
vous entends bien, M. Ménard, Mme Gagné. Moi aussi, je suis
préoccupée par les délais, et je
crois que c'est inacceptable et que nous allons devoir faire un effort pour
faire en sorte que les commissaires aux plaintes soient en mesure de
déposer les rapports le plus rapidement possible. Même 45 jours, ça peut
sembler long, là. Il y a peut-être des raisons pour lesquelles c'est plus long,
et on va poser la question aux commissaires aux plaintes quand ils vont venir.
Mais, avec le dossier informationnel, ça va permettre... ce sera une obligation.
Actuellement, il n'y a pas d'obligation de déposer les plaintes dans un dossier
informationnel, et ça va permettre d'avoir un éclairage sur l'ensemble
des plaintes, même si ces plaintes-là sont confidentielles, là,
confidentielles, il faut bien le dire. Mais on va pouvoir savoir si, dans tel, par
exemple, établissement, il y a beaucoup plus de plaintes, ça va nous permettre
d'avoir un regard différent, mais on va avoir un dossier, au moins. Il va y
avoir cette obligation, et ça, je trouve que c'est important.
M. Ménard
(Claude) : Excellent.
Le Président (M. Provençal)
: Ça va? Il reste une minute.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
...plaintes, quel genre de plaintes qui sont formulées? Est-ce que ce sont des
plaintes, souvent, d'atteinte psychologique, harcèlement ou physique?
M. Ménard
(Claude) : Ça se rapproche,
là, quand même, là, très,
très près de gestes qui sont posés...
Le geste qui est posé, est-ce que c'est un geste de maltraitance? Est-ce
que c'est un geste qui est posé parce que, un, on a tant de résidents ou de
résidentes à combler leurs besoins dans un délai très, très court? Je ne
voudrais pas mettre la responsabilité au niveau d'une pénurie de personnel, parce
que le personnel qui est là actuellement, je pense que, pour la grande majorité,
les gestes qui sont posés, c'est des gestes qui sont attentionnés et avec un
«caring» extraordinaire au niveau des résidents puis des résidentes, là, tu
sais, mais, des fois, ça peut être un geste parce que, un, on est précipité à
poser le geste, là, tu sais. C'est beaucoup plus, là, dans ce sens-là qu'on va
entendre, là, des préoccupations.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Je cède maintenant la
parole à la députée de Fabre.
Mme Sauvé : Merci, M. le
Président. Alors, M. Ménard, Mme Gagné, un plaisir de vous entendre.
Merci pour votre éclairage. Et on a bien entendu que vous aviez eu des délais
courts, donc on comprend bien, mais il n'en reste pas moins que votre mémoire,
il est d'une grande qualité. Merci pour vos recommandations.
On vient de parler, il y a eu une discussion
autour de la notion du délai, du délai prescrit, des 45 jours, ce qui
n'est pas nécessairement respecté, vous l'avez constaté. Moi, je trouve, je
vais vous dire très honnêtement, là, c'est fort intéressant d'entendre les
groupes et de vous entendre parce que vous avez eu toute cette analyse très
fine de l'ensemble d'un processus de démarche au-delà du projet de loi, puis ça
nous amène des éclairages additionnels. Le but, c'est : oui, bien sûr, il
y a le projet de loi devant nous, mais, on l'a dit d'entrée de jeu, on veut
bonifier. Puis de traiter de tous les aspects du processus de la démarche de
plainte, pour nous, là, ça fait en sorte qu'on se dit : Il y a peut-être
des éléments, effectivement, qui ne sont pas là puis qui pourront être ajoutés
au projet de loi. Donc, merci pour cet éclairage sur le délai, parce que ça
fait deux groupes, vous êtes le deuxième, puis il est clairement question de ce
délai non respecté. On l'a vu dans un témoignage précédemment, on était dans
les 63 jours. Alors, c'est des inquiétudes de plus. C'est une démarche qui
prend beaucoup de temps puis qui mérite d'être respectueuse du délai qui est
prescrit.
Moi, je vais vous parler de quelque chose qui
m'interpelle beaucoup, c'est le lien entre le comité des usagers résidents et le commissaire actuellement. Moi, pour moi, c'est très important de se dire
que l'aîné, sa famille développent un lien significatif avec des gens,
il faut être en confiance. Et, bien que votre rôle ne soit pas de déposer et de
faire la démarche de la plainte, l'aîné peut s'identifier à vous, vous parle de
la situation, et il y a ce lien de confiance là qui s'établit. Comment ça se passe, dans la transition, là, au niveau du lien
de confiance entre des aînés qui vous racontent leur histoire et leur
situation difficile, entre vous et le commissaire local qui est présentement en
place, par rapport à ce lien de confiance là?
• (11 h 30) •
M. Ménard
(Claude) : O.K., comme je
disais tantôt, un comité des usagers ou de résidents ne peut pas déposer
une plainte, mais il n'y a rien qui l'empêche de sensibiliser le commissaire.
Et je pense que la grande majorité du temps, c'est ce qui se fait, là. Il y a
un contact, là, quand même très, très direct, là, avec le commissaire. Dans
certains établissements, le local ou le bureau du comité des usagers est à côté
du bureau du commissaire, alors le lien est direct, là, tu sais.
Et je ne crois pas qu'un membre de comité ou un
comité de résidents ou des usagers s'empêcheraient de sensibiliser le commissaire
par rapport à une situation qui se vit actuellement, là. Notre rôle, effectivement,
c'est d'encourager l'usager, le résident, le proche, les membres de famille à
déposer la plainte, mais il n'y a rien qui nous empêche, là, de sensibiliser.
C'est fort possible qu'il y ait une famille qui
va venir faire une plainte concernant, là, tel geste qui a été posé ou telle
action qui n'a pas été posée. Alors déjà, le commissaire peut être en attente
de dire : Bien, c'est fort possible qu'au niveau de cette installation-là,
je vais recevoir une plainte.
Mme Sauvé : Je vous entends très
bien, puis ça me rassure. Avec votre réponse, vous me rassurez, mais, en même
temps, vous dites : On ne s'empêchera pas, ils ne s'empêcheront pas de le
faire. Est-ce qu'on pourrait aller plus loin et dire : On souhaiterait
qu'ils le fassent? Parce que, dans les faits, je reviens là-dessus, puis pour
avoir été une grande partie de ma vie en intervention, c'est sûr que ce lien
significatif là qui doit se transférer, il est essentiel pour la confiance de
l'aîné qui vit une situation difficile, alors, est-ce que vous ne souhaitez pas
qu'il y ait ce lien-là presque obligatoire de dire : On amène la famille,
via le comité d'usagers, de résidents, à rencontrer, à parler au commissaire? Est-ce
qu'il n'y a pas un lien vraiment souhaité, plus que ne pas s'empêcher de le
faire?
M. Ménard (Claude) : Je serais entièrement
d'accord avec cette façon de procéder, mais il faut tenir compte qu'un comité
de résidents, ce sont des bénévoles. Un comité de résidents, avec un budget de
1 000 $ par année, ne peut pas s'embaucher une personne-ressource
pour, dans le fond, jouer ce rôle-là, tu sais.
Par
rapport au comité des usagers, dans le gros établissement, au niveau de la
santé ou dans une mission de réadaptation, qui a un budget qui est complètement
différent, alors, eux peuvent s'embaucher une personne-ressource qui, dans le
fond, peut être présente, là, de façon beaucoup plus régulière ou journalière au
niveau de l'installation que demander à des bénévoles d'assurer une permanence
sept jours par semaine dans une installation CHSLD. Je pense que c'est beaucoup
demander au niveau des bénévoles.
Mme Sauvé :
Est-ce que j'ai encore du temps, M. le Président?
Le Président
(M. Provençal)
: Oui, il vous reste
5 min 30 s.
Mme Sauvé : Bien heureuse. Merci. Vous avez mis, dans vos recommandations, l'évaluation de l'impact de ce projet de loi. Et je trouve ça
très important parce que, malgré la bonne volonté de vouloir
réviser le processus, il y aura des mécanismes qui seront prévus qui
s'ajouteront à ce qui se fait déjà. Puis, au coeur du projet de loi, on
s'entend qu'il y a toute la notion de neutralité, il y a toute la question
d'uniformité aussi.
Ça
pourrait être quoi, les indicateurs de mesures? Qu'est-ce qui pourrait faire en sorte que vous dites : On a un
projet de loi qui est concluant, ça a donné un impact positif? Je voudrais vous
entendre là-dessus.
Mme Gagné (Patricia M.) : Bien, je pense que des statistiques sur la hausse
du nombre de plaintes en CHSLD privés, déjà, ça va être un bon
indicateur.
Mme Sauvé :
Je voulais voir... (Interruption) ...pardon, je me suis étouffée. Je voulais
voir aussi avec vous le parcours, le parcours, donc, entre le comité de
résidents, d'usagers, le commissaire local. Ça, on en a parlé. On a parlé aussi
du 45 jours. Vous, est-ce que vous craignez vraiment qu'il va y avoir un
alourdissement? Parce que, là, on est en train de confier, dans le fond,
vraiment... puis vous n'êtes pas entré dans la question de la pénurie, je vous
ai bien entendu, mais il n'en reste pas moins que, dans la réalité, on va
confier à des commissaires locaux publics, du réseau public, donc, un mandat
additionnel, alors qu'il y a déjà des délais qui ne sont pas respectés. Je veux
revenir, là, sur la notion de crainte de l'alourdissement. Il ne faudrait
surtout pas que ça se prolonge.
Mme Gagné
(Patricia M.) : Bien, c'est sûr qu'il ne faudrait pas que ça se
prolonge. Mais, en tout cas, moi, je suis rassurée avec la réponse de la
ministre, là, qui a bon espoir que... en fait, qui fait en sorte que les délais
ne se rallongent pas, mais même se rétrécissent avec l'ajout de commissaires.
Mme Sauvé :
Ça va.
Le Président
(M. Provençal)
: Ça va?
Mme Sauvé :
Merci.
Le Président
(M. Provençal)
: Je vais maintenant
céder la parole à la députée de Taschereau.
Mme Dorion :
Merci, M. le Président. Je suis curieuse. Dans votre mémoire, vous dites :
Les commissaires seraient donc... Vous suggérez que les commissaires pourraient
ne plus être des employés d'un établissement qui dispense des services, mais des employés de l'État. Est-ce qu'un peu
comme les intervenants qui étaient là avant vous, dans l'idéal, ce
serait des personnes nommées par l'État, un peu comme le Protecteur du citoyen,
ou est-ce que là, ça ne serait pas nécessaire d'aller jusque là? C'est quoi
votre avis là-dessus?
Mme Gagné
(Patricia M.) : Oui. Bien, nous, en fait, justement, lorsqu'on
discutait des positions, là, du regroupement, on pensait à une organisation
comme le Curateur public, ce n'est pas dans son mandat, ou Protecteur du
citoyen, effectivement, donc aussi autonome et indépendante que ça.
Mme Dorion :
Ça serait le degré d'autonomie et d'indépendance idéal, là, qui serait...
Mme Gagné
(Patricia M.) : Oui.
Mme Dorion :
O.K.
Mme Gagné
(Patricia M.) : Oui.
Mme Dorion :
Et on parle beaucoup du fait du manque d'information ou d'à quel point
l'information, quant aux plaintes, ne se rend pas jusqu'aux bénéficiaires.
Est-ce que ça serait une bonne idée d'inclure, dans la description de tâches du
commissaire, de se rendre ponctuellement sur les lieux, de se rendre et de
parler, voire faire la tournée un peu des usagers de façon indépendante, là,
pour aller tâter le pouls un peu, étant donné que, pour beaucoup d'usagers,
juste l'idée de se plaindre est très loin dans leur esprit, malgré le fait
qu'ils vivent des abus parfois?
Mme Gagné (Patricia M.) : Bien, ça peut être intimidant, pour une personne
aînée, de voir arriver le commissaire aux plaintes. Je pense que donner
plus de moyens et de ressources aux comités de résidents en place, ça serait
déjà une bonne amélioration pour... Parce que ce sont eux qui ont une proximité
régulière avec les résidents, donc ils sont en mesure aussi de créer un lien de
confiance et de faire le lien avec le commissaire, comme on disait tout à
l'heure.
Mme Dorion :
O.K., merci beaucoup.
Mme Gagné
(Patricia M.) : Plaisir.
Le Président
(M. Provençal)
: Alors, je vais céder
la parole maintenant au député de Rimouski.
M. LeBel :
Merci, M. le Président. Bonjour. Je vais aller dans le même sens que ma
collègue, parce que, là, tantôt, je pense qu'il y avait... ce n'était pas très
clair, là. Dans votre mémoire, là, pourtant c'est bien dit : «Nous
proposons une neutralité balisée des commissaires aux plaintes et à la qualité
des services, et que ceux-ci relèvent dorénavant d'une organisation
indépendante des CISSS ou des CIUSSS, cette organisation étant du ressort du
ministère de la Santé et des Services sociaux.» Bref, vous voulez que ce soit
indépendant des CISSS, des CIUSSS et du ministère, indépendant complètement.
Pourquoi vous arrivez à cette conclusion-là? Est-ce que vous avez des exemples
qui nous dit que ça ne peut pas marcher quand un commissaire aux plaintes est
attaché aux CISSS ou aux CIUSSS ou au ministère?
M. Ménard
(Claude) : Pour ne pas faire de bris de confidentialité, je ne me
permettrai pas de présenter des situations, là, question d'identifier soit des
personnes ou des actions qui ont été posées. Mais, un, qu'une personne dépose
une plainte, le, la commissaire demande un délai, et, après 120 jours,
émet son rapport en disant : Aucune recommandation. Il y a une
insatisfaction de cette personne-là, s'en va en deuxième instance au niveau du
protecteur, et un an et demi après le 90 jours, on dit : Monsieur,
madame, vous aviez entièrement raison. Et on demande à l'établissement de
rétablir, là, telle, telle, telle chose.
Alors, c'est
quasiment deux ans, là. Alors, pour nous, c'est inconcevable, là, tu sais. Et
si on s'attarde plus en fonction du CHSLD, la plupart des gens qui arrivent en
CHSLD aujourd'hui, après deux ans, ils ne sont plus là, là.
M. LeBel :
O.K., mais, pour vous, c'est clair, les commissaires aux plaintes ne doivent
pas relever du ministère de la Santé et des Services sociaux.
M. Ménard (Claude) : C'est la recommandation qu'on émet. Dans toute
éventualité où cette recommandation-là n'est pas retenue, je pense que
la suggestion de la ministre est intéressante.
Mais
je vais en ajouter une, recommandation, que, dans un délai de deux ans, on
puisse évaluer le rôle de cette personne-là, et s'il y a place à
amélioration, au niveau du régime, bien, qu'on y aille, de l'avant.
M. LeBel :
Merci.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci. Je vous remercie
pour votre participation à nos travaux.
La commission suspend
ses travaux à après les affaires courantes, vers 15 h 30. Merci
beaucoup.
(Suspension de la séance à
11 h 40)
(Reprise à 15 h 37)
Le Président (M. Provençal)
: Bonjour, tout le monde. La Commission
de la santé et des services sociaux
reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de
bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 52, Loi
visant à renforcer le régime d'examen des
plaintes du réseau de la santé et des services sociaux notamment pour les
usagers qui reçoivent des services des établissements privés.
Cet
après-midi, nous entendrons les organismes
suivants : le Protecteur du
citoyen, la Fédération
interprofessionnelle de la santé du Québec et la Fédération des centres
d'assistance et d'accompagnement aux plaintes.
Comme la séance a
commencé à 15 h 37, j'ai besoin du consentement pour que nous
puissions poursuivre nos travaux jusqu'à
17 h 52 afin de pouvoir donner le temps requis aux groupes qui
viennent nous visiter. Consentement?
Des
voix : ...
• (15 h 40) •
Le Président (M. Provençal)
: Merci
beaucoup. Maintenant,
je souhaite la bienvenue au Protecteur
du citoyen. Je vous rappelle
que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à
la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à commencer
votre exposé. Je vous cède la parole.
Protecteur
du citoyen
Mme Rinfret (Marie) : Merci, M. le Président. Mme la
ministre responsable des Aînés et des Proches aidants, Mmes, MM. les
députés, membres de la commission, je me présente, Marie Rinfret, Protectrice
du citoyen. Je suis accompagnée cet après-midi, à ma droite, de M. Claude
Dussault, vice-protecteur aux Services aux citoyens et aux usagers, et de M. Nicolas Rousseau, coordonnateur des enquêtes du secteur Soutien
à l'autonomie des personnes âgées
à la Direction des enquêtes en santé et services sociaux.
Je remercie la Commission
de la santé et des services sociaux de nous avoir invités à participer aux consultations
sur le projet de loi n° 52. Je souhaite rappeler que le Protecteur du
citoyen intervient principalement en deuxième recours auprès des instances du réseau
de la santé et des services sociaux. Nous agissons habituellement à la suite des conclusions du commissaire aux
plaintes et à la qualité des services de l'établissement dans lequel
les usagers et les usagères ont obtenu les services qui font l'objet de
leur insatisfaction.
Nous pouvons aussi toujours
intervenir au premier niveau à la suite d'un signalement par un tiers ou de
notre propre initiative. C'est ainsi que nous veillons au respect des droits
des personnes dans le réseau de la santé et des services sociaux.
Le régime d'examen
des plaintes de ce réseau revêt une grande importance pour la population. En
effet, il constitue un moyen d'assurer le respect de leurs droits et d'obtenir
une amélioration constante de la qualité des soins et des services qui y sont
dispensés.
D'entrée de jeu, je
souscris entièrement aux objectifs du projet de loi n° 52, qui vise le
renforcement du régime d'examen des plaintes
du réseau de la santé et des services
sociaux. Je suis en effet
d'avis qu'il devrait favoriser l'indépendance des
commissaires aux plaintes et à la qualité des services et accroître la
protection des personnes aînées en situation de vulnérabilité.
Toutefois, je
souhaite vous faire part de certaines préoccupations relatives à des
dispositions particulières de ce projet de loi. J'aborderai aussi le rôle du commissaire-conseil, dont la création a été annoncée en
parallèle du dépôt du projet de loi n° 52.
Rappelons d'abord que
le projet de loi prévoit qu'en premier recours les plaintes et les signalements
des personnes hébergées dans les CHSDL privés seraient dorénavant examinés par
les commissaires aux plaintes et à la qualité
des services ou par les médecins examinateurs des centres intégrés de santé et de services sociaux et des centres
intégrés universitaires de santé et de services sociaux plutôt que par ceux des
établissements privés, comme c'est le cas actuellement.
Ce
sont 91 établissements privés qui sont visés par le projet de loi n° 52. À titre indicatif, entre le 1er avril 2019
et le 31 janvier 2020, soit sur une période de 10 mois, le Protecteur
du citoyen a traité 61 motifs de plaintes et de signalements concernant
des CHSLD privés. Cela représente environ 25 % du nombre total de motifs
de plaintes et de signalements traités dans
des milieux de type CHSLD. 36 % des plaintes ou signalements visant les
CHSLD privés étaient fondés.
À l'occasion de
signalements ou d'enquêtes de notre propre initiative, nous avons constaté que,
dans certains cas, les CHSLD privés n'ont même pas de commissaire, et ce,
malgré leur obligation légale d'en désigner un. Et, lorsqu'il y en a un, la
petite taille de certains de ces établissements peut donner à certaines
personnes une impression de trop grande proximité avec la direction.
Nous y avons aussi
constaté que des établissements privés ne prenaient que peu ou pas de mesures
pour informer les personnes qui y résident ou même leurs proches de la
possibilité de formuler une plainte. À cet égard, le projet de loi n° 52
prévoit une obligation pour les établissements privés d'informer les personnes
hébergées et leurs représentants légaux à propos du régime d'examen des plaintes.
Le Protecteur du citoyen s'en réjouit, mais je souligne qu'il sera
essentiel de bien faire connaître, à toutes les personnes concernées dans
chaque établissement privé, la possibilité de déposer une plainte au
commissaire aux plaintes et la qualité des services du centre intégré de santé
et de services sociaux ou du centre intégré universitaire de santé et de
services sociaux du territoire où est situé cet établissement, la procédure de
traitement de cette plainte, ainsi que la possibilité de s'adresser au Protecteur du citoyen si l'insatisfaction
demeure ou à défaut d'une réponse dans les 45 jours du dépôt de la
plainte.
Une disposition
transitoire, soit l'article 11 du projet de loi, prévoit que le délai
maximal de 45 jours inscrit dans la loi sur la santé et les services
sociaux pour le traitement des plaintes auprès du commissaire ou du médecin
examinateur du CISSS ou du CIUSSS qui a compétence recommencerait à courir à
compter de la date de l'entrée en vigueur de l'article 1 du projet de loi n° 52. Je rappelle que la loi sur la santé et les services
sociaux prévoit que le défaut du commissaire de communiquer ses conclusions
dans ce délai de 45 jours donne la possibilité d'un recours auprès du Protecteur
du citoyen.
Pour assurer une
transition harmonieuse et équitable du régime d'examen des plaintes, les
commissaires aux plaintes et à la qualité des services des CISSS ou des CIUSSS
qui auront compétence devront prendre les mesures nécessaires afin de répondre
aux personnes plaignantes le plus tôt possible à l'intérieur du nouveau délai
de 45 jours, compte tenu du temps déjà écoulé.
De plus, j'estime
essentiel que les commissaires aux plaintes et à la qualité des services des
CISSS et des CIUSSS informent par écrit les personnes touchées du transfert de
leur dossier, de ses effets, notamment sur le nouveau délai, et de leurs droits,
et ce, dès la réception de leur dossier. J'en fais une recommandation.
La présentation du projet
de loi n° 52 s'est également accompagnée d'une annonce visant la création
d'un poste de commissaire-conseil au sein du ministère de la Santé et des
Services sociaux. Le Protecteur du citoyen salue l'arrivée de ce nouvel
interlocuteur. Je souligne cependant la nécessité de respecter en tout temps
l'indépendance des commissaires aux plaintes et à la qualité des services.
Ma préoccupation à cet égard concerne le
fait qu'en relevant administrativement du ministère, le commissaire-conseil
pourrait être placé dans une situation délicate entre son devoir de loyauté et
le respect de l'indépendance des commissaires,
qui leur permet d'exercer leurs fonctions en toute impartialité. Il devra donc
faire preuve de doigté pour maintenir
cet équilibre afin que la création de cette fonction de commissaire-conseil
soit l'occasion de réaffirmer l'indépendance et de garantir l'autonomie
de fonction des commissaires aux plaintes et à la qualité des services dans le
traitement des plaintes.
En
somme, le Protecteur du citoyen souscrit aux objectifs poursuivis et accueille
favorablement le renforcement proposé du régime d'examen des plaintes.
Les constats et les préoccupations que je vous présente aujourd'hui visent à bonifier le projet de loi n° 52 afin
de renforcer ce régime ainsi que l'indépendance de la fonction de commissaire
aux plaintes et à la qualité des services.
Enfin,
un fort leadership du commissaire-conseil sera nécessaire et devra s'exercer
dans le respect de l'indépendance des commissaires aux plaintes et à la
qualité des services. Je vous remercie de votre attention.
Le Président (M.
Provençal)
: Je vous remercie pour votre
exposé. Nous débutons maintenant la période d'échange. Mme la ministre, je vous
cède la parole.
Mme Blais
(Prévost) : Merci beaucoup, M. le Président. J'aurai trois courtes
questions. Je vous remercie, Mme Rinfret, M. Dussault,
M. Rousseau, pour ce mémoire qui me réconforte beaucoup dans ce projet de
loi n° 52.
Mon collègue de
Rimouski a déposé un projet de loi récemment demandant un Protecteur du citoyen
pour... protecteur pour les aînés.
Croyez-vous que le Protecteur du
citoyen couvre justement la question
du protecteur des aînés?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez, bien sûr que le Protecteur
du citoyen a non seulement compétence
en ce qui concerne tous les services qui peuvent être offerts dans le
réseau de la santé et des services sociaux, mais également en ce qui concerne
les services publics offerts par les ministères et les organismes. Cette double
compétence, je vous dirais, nous permet donc
de régler des dossiers de plaintes qui pourraient nous venir de personnes
aînées, par exemple, visant tant Retraite Québec qu'un service offert
dans un CHSLD, par exemple. Donc, à cet égard-là, je considère qu'en raison de
la mission, des mandats qui nous sont confiés, tant en vertu de la Loi sur le Protecteur
du citoyen qu'en vertu de la Loi sur le Protecteur des usagers dans le réseau de
la santé et des services sociaux, nous sommes une institution tout à fait, je
vous dirais, adaptée ou justifiée pour faire en sorte que les droits des
personnes âgées, aînées, nos aînés, soient respectés, tant dans le réseau de la
santé et des services sociaux qu'à l'égard des ministères et des organismes
publics.
Mme Blais
(Prévost) : Mme le Protecteur du citoyen, vous saluez aussi l'arrivée
d'un commissaire-conseil, mais, en même temps, vous nous mettez en garde parce
que le commissaire-conseil serait au ministère de la Santé et des Services
sociaux. Avez-vous une idée où vous placeriez ce commissaire-conseil ou comment
il pourrait avoir un peu plus d'indépendance?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez, je mets en garde... Et l'objectif qui est visé... Parce que je
n'ai pas de solution comme telle
sinon que peut-être le placer dans l'organigramme du ministère, un peu comme le
Commissaire à la santé et au bien-être. Maintenant, au-delà de ça, ma
préoccupation est vraiment de faire en sorte qu'il n'y ait pas et qu'il n'y ait pas apparence également d'ingérence du
commissaire-conseil dans le traitement des plaintes. À cet égard-là, nous
avons pris connaissance de la description
d'emploi du commissaire-conseil qui était proposée, et, à ce titre-là, la prudence sera de mise
dans les interventions que pourra faire le commissaire-conseil à l'égard des
commissaires aux plaintes et à la qualité des services.
• (15 h 50) •
Mme Blais
(Prévost) : J'aimerais vous rassurer parce qu'on ne veut pas qu'il y
ait de conflit entre les deux. C'est surtout pour harmoniser les pratiques,
pour aider à la communication, pour faire en sorte que, partout sur le
territoire du Québec, dans les établissements, on puisse offrir la même qualité
de soins et de services par le biais des commissaires aux plaintes et à la
qualité des services.
Et en terminant, ce
matin, on a entendu des personnes qui disaient que ce serait mieux que les
commissaires aux plaintes et à la qualité
des services relèvent du ministère de
la Santé et des Services sociaux
plutôt que des CISSS et des CIUSSS, des établissements et des conseils
d'administration. Quel est votre point de vue là-dessus?
Mme Rinfret (Marie) : À cet égard-là, et ce n'est
pas la première fois que je vais énoncer cette position devant vous, les
parlementaires, les commissaires aux plaintes et à la qualité des services, en
étant désignés par le conseil d'administration des CISSS et des CIUSSS et en
relevant des conseils d'administration leur donne somme toute une indépendance par
rapport à l'administration, par rapport aux établissements qui sont sous la
responsabilité du CISSS ou du CIUSSS.
Je
vous dirais que l'ajout de l'article 30.1 également dans le projet
de loi n° 52, qui vient ajouter
des conditions, en fait, qui viennent
garantir l'absence de conflit d'intérêts du commissaire par rapport à l'établissement qui pourrait être sous sa compétence, nous
offre également des garanties qui nous permettent, ma foi, d'être rassurés
quant à l'indépendance des commissaires.
Par
ailleurs, je tiens à vous dire également qu'à titre de Protecteur du citoyen
nous sommes compétents pour recevoir toute plainte qui viserait un commissaire
aux plaintes et à la qualité des services, donc, nous en avons à l'occasion, et, à ce titre-là, on fait les
recommandations qui s'imposent pour corriger le préjudice, s'il y avait
préjudice, ou encore on opère une
médiation entre les parties pour s'assurer qu'effectivement non seulement y
a-t-il une indépendance de la part du commissaire aux plaintes et à la
qualité des services, mais que cette indépendance-là, elle est bien comprise de
la part de la partie plaignante.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci. Mme la députée de
Lotbinière-Frontenac, vous m'aviez signifié votre intention de poser des
questions.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Bonjour. J'aimerais ça que vous nous parliez
un petit peu plus de l'indépendance de la fonction de commissaire puis
favoriser de manière adéquate l'indépendance de la fonction du commissaire aux
plaintes. J'aimerais ça que vous élaboriez là-dessus.
Mme Rinfret
(Marie) : Écoutez, encore une fois, le fait que le commissaire aux
plaintes et à la qualité des services soit
nommé par le conseil d'administration, qu'il relève du conseil
d'administration, qu'on ait, dans le cadre du projet de loi n° 52, ajouté l'article 30.1 qui vient donner
les qualités nécessaires aux personnes pour agir comme commissaire aux
plaintes, ça nous donne, nous, les garanties suffisantes pour asseoir
l'indépendance de cette personne dans le traitement des plaintes, notamment des
CHSLD privés.
Il y a un élément
également qui permet à toute personne qui serait insatisfaite de la décision
rendue par le commissaire aux plaintes ou encore qui jugerait que le conseil
d'administration n'apporte pas... ou encore que l'établissement visé par les
recommandations du commissaire n'y accorde pas suffisamment d'intérêt pour
mettre en oeuvre ses recommandations :
toute personne peut nous transmettre leurs plaintes à cet égard-là, et,
d'entrée de jeu, le Protecteur du
citoyen non seulement... En fait, on a une compétence de regarder cette
plainte-là non pas avec l'enquête qui a pu être faite par le commissaire
aux plaintes, mais on ouvre un dossier qui nous est propre et on va recueillir
les faits, bien sûr, auprès du commissaire aux plaintes et à la qualité des
services qui a fait enquête, mais tout fait qui serait pertinent à poser
nous-mêmes notre jugement et à émettre les recommandations nécessaires, le cas
échéant.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci. Mme la ministre.
Mme Blais
(Prévost) : Oui. Mme le Protecteur du citoyen, je crois que, d'un
point de vue de perception, perceptuel, il y a des personnes qui sont inquiètes
parce que les P.D.G. des CISSS et des CIUSSS siègent au conseil
d'administration, et on demande à ce que le P.D.G. ou le P.D.G.A. soit à
l'extérieur du conseil d'administration. Pensez-vous que le commissaire aux
plaintes, lorsqu'il fait son exposé devant le conseil d'administration, devrait
demander au président-directeur général de
sortir de la salle pour que le commissaire aux plaintes se sente encore mieux,
plus à l'aise d'exprimer ce qu'il ressent, ce qu'il vit?
Mme Rinfret
(Marie) : Oui. Bien, ma réponse sera la même que celle de tout à
l'heure, le commissaire aux plaintes et à la qualité des services ne relève pas
du P.D.G., il relève du conseil d'administration.
Mme Blais
(Prévost) : ...
Mme Rinfret (Marie) : Oui. Il relève du conseil d'administration du CISSS ou du CIUSSS. Donc,
à cet égard-là, toute personne du
conseil d'administration qui pourrait se sentir en conflit d'intérêts par
rapport aux recommandations du commissaire aux plaintes et à la qualité
des services, bien, aura l'obligation de dénoncer soit ce conflit d'intérêts là
ou de sortir lors de la présentation. Mais le P.D.G. n'a pas d'autorité sur le
commissaire aux plaintes et à la qualité des services.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la députée
d'Abitibi-Ouest.
Mme
Blais (Abitibi-Ouest) : Merci, M. le Président. Mme Rinfret,
après lecture du p.l. n° 52, quelle serait la bonification à
apporter?
Mme Rinfret (Marie) : Écoutez, on en... il y en a une particulièrement, là, pour laquelle je
fais une recommandation et qui est de modifier la disposition
transitoire pour y ajouter une obligation pour les commissaires aux plaintes et
à la qualité des services d'informer par écrit les parties plaignantes de leurs
nouveaux droits pour bien leur expliquer la transition entre l'ancien régime et
le nouveau. Ça, c'est une mesure que nous proposons.
Maintenant, dans le
cadre du projet de loi, mes préoccupations sont de faire en sorte que soit
sauvegardée l'indépendance du commissaire
aux plaintes et à la qualité des services dans le traitement des plaintes. Et,
à ce titre-là, pourquoi cette indépendance, elle est si importante?
C'est pour garantir aux personnes qui vivent une insatisfaction, en l'espèce dans les CHSLD privés, d'avoir la
garantie que le traitement de leurs plaintes va être fait de manière impartiale.
Et donc, à ce titre-là, il faut que le commissaire aux plaintes ait les coudées
franches pour examiner leurs dossiers et l'examinent en toute impartialité.
Mme
Blais (Abitibi-Ouest) : Merci beaucoup.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci. Est-ce qu'il y a
d'autres interventions de la part... des questions? Oui, Mme la députée de
Lotbinière.
Mme
Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Vous parlez du commissaire-conseil,
qu'il exerce un fort leadership mais tout en respectant l'indépendance
des commissaires aux plaintes. Donc, j'aimerais que vous élaboriez là-dessus.
Mme Rinfret (Marie) : Vous savez, l'apparence de non-ingérence est aussi importante que la
non-ingérence, et, à ce titre-là, la position du commissaire-conseil à
l'égard des commissaires aux plaintes et à la qualité des services doit en être une de grande prudence pour ne pas
intervenir dans le traitement d'une plainte qui serait soumise à l'attention
d'un commissaire aux plaintes et à la qualité des services.
Alors, en ce sens-là,
on salue l'arrivée de ce commissaire-conseil parce qu'il peut apporter au
ministère, au réseau, des éléments systémiques d'amélioration dans le
traitement des plaintes, mais on ne veut pas, et ce, d'aucune façon, qu'il
puisse, d'une manière ou d'une autre, s'ingérer dans le traitement d'un dossier
soumis à un commissaire aux plaintes et à la qualité des services.
Mme
Blais (Prévost) : Une fois
de plus, Mme la protecteur, je veux vous rassurer, ça ne fera pas partie du
rôle du commissaire aux plaintes. Ce matin, on a entendu différentes
personnes nous dire que le délai de 45 jours, c'était trop long et que, même, parfois, ça dépassait
45 jours. On nous a proposé 15 jours. Vous avez beaucoup d'expérience,
est-ce que vous trouvez que 15 jours,
c'est trop court? Est-ce que vous trouvez que 45 jours, c'est un délai
raisonnable? J'aimerais vous entendre là-dessus.
• (16 heures) •
Mme Rinfret
(Marie) : Moi, j'ai envie de vous répondre là-dessus que le
45 jours, c'est un délai maximal. Dans la loi, c'est comme ça, et ça veut
donc dire qu'un dossier qui peut être traité à l'intérieur de cinq jours
devrait être traité dans un délai de cinq jours.
Vous
savez, quand on reçoit, chez nous... Je vous ai parlé de mon pouvoir d'enquête
de notre propre initiative. Quand on reçoit des signalements de la part
d'un tiers, par exemple, qui juge qu'une situation dans un CHSLD privé serait
préjudiciable par rapport aux usagers et aux usagères, nous en fait état, bien,
nous évaluons immédiatement, par le biais d'une préenquête, si nous devons
intervenir. Et, au cas où, effectivement, la situation est urgente, on y va
immédiatement et on règle le dossier le plus rapidement possible pour faire en
sorte que la situation préjudiciable soit corrigée. Il doit en être de même
pour les commissaires aux plaintes et à la qualité des services à qui on dépose
des plaintes. J'imagine qu'ils doivent établir un ordre de priorité et
conséquemment, à l'intérieur du délai qui ne peut dépasser 45 jours,
prioriser les dossiers et intervenir le plus rapidement possible lorsque c'est
nécessaire.
Maintenant,
j'ajouterai que, lorsque le délai de 45 jours est dépassé, on peut, nous,
déposer une plainte, ce qui arrive. Et, dès
lors, nous, avant d'ouvrir le dossier, on prend contact avec le commissaire aux
plaintes et à la qualité des services pour vérifier avec lui s'il est
sur le point de rendre sa décision. Auquel cas, on rappelle la personne qui a
porté la situation à notre attention, on lui explique qu'il devrait recevoir sa
décision dans les jours qui suivent et que, s'il ne l'a pas, bien, ma foi,
qu'il nous rappelle à nouveau, et là on va intervenir.
Donc, je vous dirais,
ce qui est extrêmement important dans tout ça, c'est de gérer les attentes des
personnes qui déposent des plaintes, leur expliquer, leur dire où on en est
rendus dans un dossier. Nous, c'est comme ça qu'on procède quand les gens nous
soumettent un signalement ou une plainte, on leur indique le délai de
traitement, on les tient informés au fur et à mesure de nos enquêtes, et
généralement les gens sont satisfaits.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, Mme la ministre. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée
de Fabre.
Mme Sauvé :
Merci, M. le Président. Alors, bon après-midi. Merci à vous, Mme Rinfret,
M. Dussault, M. Rousseau, pour votre présentation et toute la
réflexion que vous avez faite. J'ai beaucoup apprécié, entre autres, parce
qu'évidemment le projet de loi, il est issu d'une préoccupation et d'un état de
situation, donc, quand vous nous nommez les 61 motifs de plaintes, la
réalité des CHSLD privés, tout ça. Alors, pour moi, ça constitue un peu les
éléments du portrait qui font en sorte qu'on est devant ce projet de loi.
Moi, la question que
je vais avoir, puis il y a eu beaucoup de questions précédentes qui ont permis
de clarifier certains de vos propos, mais
moi, je reste encore préoccupée, entre autres, par rapport à la notion de
transition, les mesures transitoires. À partir du moment où ce projet de
loi... Les règles auront changé, la gouvernance aura changé, on s'entend,
évidemment, puis j'en ai parlé ce matin, de ma préoccupation, à savoir :
Les gens auront-ils toujours peur de
dénoncer même si la loi existera? Je sais que vous avez nommé, dans votre
mémoire, des mesures transitoires. Vous avez nommé, entre autres, le
transfert du dossier, ça, c'est absolument important. Vous avez nommé aussi des
campagnes d'information. Mais est-ce que vous pensez que ça va être suffisant?
Parce qu'en même temps il va falloir évaluer le projet de loi, voir les
impacts. Et, si les comportements n'ont pas changé, au-delà des actions qui seront
dans cette loi, bien, finalement, on n'est pas plus avancés.
Alors,
moi, je trouve intéressant ce que vous proposez, mais la question que
j'aimerais vous poser : Est-ce qu'on ne peut pas aller plus loin,
alors qu'on a entendu, pas plus tard que ce matin, d'autres mesures, d'autres
suggestions? Est-ce qu'on ne devrait pas aller un petit peu plus loin dans les
mesures transitoires?
Mme
Rinfret (Marie) : Écoutez, pour moi, quand vous parlez d'un besoin
d'information, j'ai envie de vous dire que ça ne devrait pas être transitoire.
Un besoin d'information, l'information, ça doit être continu. On doit
constamment informer les personnes qui résident notamment dans les CHSLD privés
mais également leurs proches de leurs droits et également de la façon qu'ils
ont pour les exercer, ces droits-là, donc à savoir, d'entrée de jeu, de déposer
une plainte à un commissaire aux plaintes et à la qualité des services. Également,
on parle, si vous n'êtes pas satisfait de la décision du commissaire aux
plaintes et à la qualité des services... le recours au Protecteur du citoyen.
Un élément qu'il est
intéressant que vous sachiez, c'est que, présentement, dans la Loi sur les services
de santé et les services sociaux, dès le moment où un commissaire aux plaintes
et à la qualité des services rend une décision à une personne qui a déposé une
plainte, il doit l'informer du deuxième recours au Protecteur du citoyen. Donc,
à cet égard-là, l'information, elle est connue de la personne qui dépose une
plainte.
Malgré cela, vous
avez raison de faire état de crainte de représailles. Il faut donc agir en
amont également. Et, à ce titre-là, dans le projet de loi n° 52,
on prévoit, au comité de vigilance et à la qualité... je pense que...
Une voix :
...
Mme Rinfret (Marie) : ...et de la qualité, on ajoute une personne. En fait, il y aura
maintenant deux personnes d'un
établissement du réseau public qui vont siéger au comité de vigilance et de
qualité. Donc, ça, pour nous, c'est une plus-value parce que ça va permettre
aux personnes notamment des CISSS ou du CIUSSS d'agir de manière proactive
par rapport à des situations qui pourraient
être portées à l'attention du comité de vigilance — je vais l'appeler comme ça, tout
simplement, là — et
donc leur permettre d'intervenir d'une manière plus adéquate et donc de manière
plus proactive par rapport à des situations qui pourraient être portées à leur
attention, ce qu'ils n'ont pas nécessairement, actuellement.
Parce que ça, c'est
un des constats qu'on a également, dans ces CHSLD privés qui sont souvent des
petites installations, il n'y a pas nécessairement de comité de vigilance et de
qualité. Alors, nous, là-dessus, on souhaite qu'il y ait une mise en place de
ces comités lorsqu'ils n'existent pas et, lorsqu'ils existent, que leur
fonctionnement soit très, je dirais, efficient dans la mesure où c'est là un
endroit où on peut s'assurer, lorsque notamment il y a des ententes de services
entre les CHSLD privés et les CIUSSS, que les personnes qui y sont, qui y
résident obtiennent les soins dont elles ont besoin compte tenu de leur
situation.
Le Président (M.
Provençal)
: M. le député de Vimont.
M.
Rousselle : Merci. Merci, madame, merci, messieurs, d'être ici,
premièrement, puis merci de votre mémoire — que j'ai regardé — vraiment.
Écoutez, c'est la première fois que je vais être d'accord avec mon collègue de
Rimouski concernant l'indépendance, mais pour les commissaires. Écoutez, on
parlait tantôt avec le Conseil de la protection
des malades, qui disait : Allez au-devant des usagers. Vous le savez comme
moi, des personnes âgées, bien souvent,
qui n'ont pas de famille, donc sont comme démunies, et, bien souvent, les
personnes âgées, vous devez savoir, justement, sont comme intimidées
devant les procédures. Donc, est-ce que vous avez regardé ce côté-là?
Parce que c'est bien
beau mettre de l'indépendance, et tout, là, mais ces gens-là, qui ont besoin
d'assistance... Puis, des fois, vous le
dites, là, il n'y a même pas de commissaire assigné, justement, à certaines
résidences ou encore trop petites, et puis, bien souvent, ça
fonctionne... en tout cas, ils sont vraiment intimidés. Est-ce que vous avez
regardé ce côté-là?
• (16 h 10) •
Mme Rinfret (Marie) : D'abord, un, vous avez raison de souligner l'importance
d'intervenir en amont. Il y a,
au sein de ces installations, de ces établissements, des comités des usagers. Il
y a également les centres d'accompagnement et d'assistance aux plaintes qui viennent accompagner les personnes.
Donc, à l'intérieur de chaque établissement, de chaque installation, les
personnes qui ont besoin d'être informées de leurs droits peuvent se tourner
vers des regroupements de gens qui vont les supporter pour bien les diriger
soit pour un dépôt de plainte ou encore, puis là je pense aux comités des
usagers, les aider dans l'organisation de leur vie au sein de l'établissement
ou de l'installation.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci. Oui, trois minutes.
Mme Sauvé :
Merci, M. le Président. Je voulais poursuivre avec la notion d'indépendance, et
vous en parlez dans votre mémoire, à la page 3. Tantôt, vous en avez
parlé, l'indépendance des commissaires aux plaintes. Puis là j'ai un peu une
pensée opérationnelle, là. Comment est-ce que, dans les faits, on s'assure de l'indépendance?
Il y a une définition qui est prévue au projet de loi qui est, entre autres,
bon, l'absence de relation d'intérêt susceptible de nuire à sa neutralité, les
liens familiaux, les liens financiers, mais comment on s'assure de ça? Est-ce
que c'est dès le début du mandat, quand la nouvelle loi, si elle est adoptée...
Donc, est-ce que, déjà, on demande des déclarations d'intérêt dès le départ?
Est-ce qu'on a une définition un peu plus élargie pour s'assurer... Parce que
ce n'est pas très, très, très poussé comme définition.
Alors, est-ce qu'on
va un peu plus loin, au-delà des liens familiaux et des liens financiers, pour
assurer l'indépendance? Donc, est-ce qu'il y a une déclaration dès le départ
dans le mandat des commissaires aux plaintes ou bien c'est en cours de mandat,
au fil des décisions, où, là, le commissaire désigne s'il est en conflit
d'intérêts ou pas? Je voulais voir un peu, là, dans la procédure, l'opérationnalisation
de ça.
Mme
Rinfret (Marie) : Écoutez, d'abord, un, comme vous le soulignez, on
ajoute l'article 30.1, qui vient définir, là, les qualités nécessaires
puis surtout ce qui donnerait une non-indépendance, là. Et la loi, également,
la loi sur la santé et les services sociaux prévoit que le conseil
d'administration doit prendre les mesures pour préserver, en tout temps, l'indépendance
du commissaire, qui agit sous leur autorité, dans l'exercice de leurs
fonctions. Donc, sur le plan législatif, là, je vous dirais, il y a ces
mesures-là.
Maintenant, il faut
voir, dans les établissements, s'il y a un code d'éthique, de déontologie.
C'est le type de mesure qui pourrait
renforcer l'indépendance, le cas
échéant. En ce qui nous concerne, je vous dirais que, toute mesure qui viendrait appuyer l'indépendance des commissaires aux plaintes et à la qualité des services, on
est toujours favorables, là, à cela.
Le Président (M.
Provençal)
: Merci.
Une voix :
...
Le Président (M.
Provençal)
: 32 secondes, oui.
Mme Sauvé :
Un commentaire, simplement.
Le Président (M.
Provençal)
: Oui, allez-y.
Mme Sauvé :
Alors, je voulais juste vous dire que vous avez deviné ma pensée, parce que
je trouve ça intéressant, l'idée d'aller jusqu'à un code d'éthique,
alors, simplement. Merci. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à la députée de Taschereau.
Mme
Dorion : Merci, M. le Président. Je n'ai pas de question particulière pour nos
intervenants à ce moment-ci.
Si vous êtes d'accord, si tout le monde est d'accord, je laisserais peut-être
mon temps au député de Rimouski. Avec deux minutes, on n'a pas le temps souvent
d'aller en profondeur, donc ça lui permettrait de le faire.
Le Président (M. Provençal)
: Ça me prend le consentement. Merci. Alors, la parole
est au député de Rimouski.
M. LeBel :
On est encore un peu dans le temps de la Saint-Valentin, c'est important, ça.
Merci.
Bonjour.
Ce matin, des gens nous parlaient de l'omerta au niveau privé comme public.
Selon votre expérience, ça se traduit comment? Est-ce que vous croyez à
ça, qu'il y a un sentiment d'omerta dans nos institutions?
Mme Rinfret
(Marie) : Est-ce qu'il y a une crainte de représailles? Parce que
c'est ce que je décode quand on parle d'omerta. Je vous dirais que, chez nous,
on n'a pas ce sentiment-là. En fait, puis il faut être bien clair aussi, là,
quand les gens font appel au Protecteur du citoyen, ils savent que leur
plainte, leur demande ou leur signalement va
être traité de manière confidentielle. Et, à ce titre-là, donc, ils ne
craignent pas de nous faire état de la situation qu'ils vivraient ou qu'ils constateraient à
l'intérieur d'un CHSLD privé, par exemple. C'est certain que, si on a un
dossier particulier d'une personne, à ce moment-là, on va lui dire,
nécessairement, que... bien, on va dévoiler son nom parce qu'on a besoin de
travailler avec l'instance pour savoir... obtenir son dossier, par exemple,
etc. Mais, à ce titre-là, la personne sait aussi que, si, dans ce contexte-là,
elle est victime de représailles, et ça, on l'a fait rarement, mais on a dû le
faire, nous sommes intervenus auprès soit du ministère ou soit de l'instance
visée pour que cesse toute mesure de représailles, que ce soit à l'égard d'un
membre du personnel ou encore d'un usager ou d'une usagère.
M. LeBel :
Parce que moi, j'ai participé à l'adoption de la Loi visant à lutter contre la
maltraitance, là, il y a deux ans, là, mais, des fois, j'écoute, là, puis
j'écoutais les... j'ai l'impression qu'on a des choses où qu'on n'a pas avancé, là. On disait qu'il manquait
d'information, il fallait en donner, qu'il fallait concerter des groupes, des
comités d'action aux plaintes, des comités d'usagers, on disait ça il y
a deux ans. Qu'est-ce qui s'est passé? Est-ce qu'on a avancé ou il y a encore des choses à faire? Comment on arrive, encore
aujourd'hui, à se dire qu'il manque d'information?
Mme Rinfret
(Marie) : Écoutez, et puis c'est pour ça que je répondais sur la
question dans un contexte transitoire, moi, je vous dirais qu'il faut que ce
soit vraiment de manière continue, hein? Les gens, les résidents des centres
d'hébergement et de soins de longue durée, qu'ils soient publics ou privés,
sont là de passage. Il faut donc que les personnes qui y résident, dès le
moment de leur entrée, de leur arrivée, que...
Une voix :
...
Mme Rinfret (Marie) : Oui, c'est toujours à recommencer. Il ne faut pas se lasser de le
recommencer, de le dire à nouveau, de l'expliquer. Quand on se retrouve
en situation de penser devoir déposer une plainte, on se sent souvent victime ou, en tout cas, à tout le moins,
insatisfait du service qu'on a rendu. Et, à ce titre-là, il ne faut pas être
gêné de déposer une plainte.
M.
LeBel : Je comprends l'idée. Il y a un roulement, ça fait qu'il faut
toujours recommencer le travail de...
Mme Rinfret
(Marie) : Absolument, absolument.
M. LeBel :
Le commissaire aux plaintes, vous parlez de l'importance du
commissaire-conseil, qui va... mais le
commissaire-conseil ne se retrouve pas dans la loi, il n'est pas inscrit dans
la loi, son rôle n'est pas précisé. Est-ce que vous pensez qu'on devrait
travailler là-dessus avec la ministre, voir comment on pourrait préciser le
rôle du commissaire-conseil dans la loi pour aider les commissaires?
Mme
Rinfret (Marie) : Écoutez,
ça vous appartient. Ma réponse sera celle-ci. Pour nous, c'est un interlocuteur
privilégié pour le ministère puisque le régime d'examen des plaintes relève du
ministère de la Santé et des Services sociaux. Donc, d'avoir un tel
interlocuteur, ça ne peut qu'être un bénéfice pour le ministère.
Le Président (M. Provençal)
: 40 secondes.
M. LeBel : 40 secondes.
L'indépendance, il faut que je parle d'indépendance. Lors du projet de loi, là,
il y a deux ans, je parlais beaucoup de
la maltraitance organisationnelle. On avait de la misère, du côté
gouvernemental, à expliquer que ça... à avouer qu'il pouvait y avoir de
la maltraitance organisationnelle, mais c'est sûr qu'il y a de la maltraitance organisationnelle. Là, l'indépendance
du commissaire est importante, parce que, s'il manque de préposés puis
on ne donne pas les bons services, le commissaire, comment il fait pour
intervenir contre son propre ministère ou contre le CISSS? Et c'est là que je
trouve qu'il faut absolument trouver la façon de rendre le commissaire le plus
indépendant possible.
Ce qui me permet aussi de dire
qu'éventuellement... Moi, j'avais déposé un projet de loi pour créer un vrai
protecteur des citoyens complètement indépendant. Je sais que mon projet de loi
ne sera jamais appelé, mais, en même temps,
ce que je voulais, c'est créer une réflexion là-dessus. Il y a beaucoup
d'aînés, de plus en plus, dans mon coin de pays, une personne sur quatre
qui a 65 ans et plus. Ils sont dans des villages, isolés dans des
villages. Il faut trouver des façons pour permettre à ces gens-là, d'une façon
facile, d'atteindre, de rejoindre la personne qui va les aider, qui va défendre
leurs droits.
• (16 h 20) •
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le député.
M. LeBel : Je m'excuse de la
question qui finit comme ça.
Mme Rinfret (Marie) : Oui, la
réponse est en deux temps. D'abord, le deuxième bout. N'hésitez jamais à faire
la promotion du Protecteur du citoyen, parce que, dans l'hypothèse où je
n'aurais pas compétence, je vais toujours référer la personne au bon endroit, toujours,
en toute circonstance. Ça fait partie des devoirs inhérents d'un protecteur du
citoyen, d'un ombudsman parlementaire, ce que je suis, et mon institution est
très soucieuse de cela. Et on demande aux gens, s'ils n'ont pas obtenu la
réponse qu'ils voulaient, de nous rappeler, à ce moment-là, pour qu'on les
redirige à nouveau vers la bonne personne. Et, le cas échéant, on va intervenir
si jamais quelqu'un était vraiment dans une situation intolérable.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Mme Rinfret. Merci à vous tous pour
votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants afin
de permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 21)
(Reprise à 16 h 24)
Le
Président (M. Provençal)
: Nous écouterons
maintenant les représentants de la Fédération interprofessionnelle de la santé du
Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, puis nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et
à commencer votre exposé. Et je vous cède la parole.
Fédération interprofessionnelle de la santé
du Québec (FIQ)
Mme
Bédard (Nancy) : Alors,
bonjour, M. le Président, Mme la
ministre, MM., Mmes les députés. Alors, on va commencer par les remerciements. Merci vraiment pour cette invitation
à ces audiences qui portent sur la commission sur le projet de loi
n° 52. Alors, j'aimerais vous présenter les gens qui m'accompagnent :
Sonia Mancier, qui est la présidente de FIQ, secteur privé, et Suzanne Prévost,
qui est une conseillère syndicale au secteur sociopolitique de la fédération.
Donc, nous représentons les professionnels en
soins qui oeuvrent au sein des établissements publics et privés, et ce, sur la
vaste majorité du territoire du Québec. Nous avons, au sein de nos rangs, plus
de 1 800 professionnels en soins qui oeuvrent
dans les établissements privés du Québec. Donc, ce n'est pas un secret pour
personne, les actions que mène notre organisation sont motivées par le souci
d'offrir constamment des soins de qualité sécuritaires à la population du Québec
tout en revendiquant les conditions de travail puis les conditions d'exercice
pour que les professionnels en soins puissent y arriver, bien sûr.
Aujourd'hui, nous accueillons, M. le Président
et Mme la ministre, favorablement toutes les bonifications apportées au régime d'examen des plaintes
des usagers, car nous croyons que ces derniers et leurs proches sont en droit
d'exprimer leur mécontentement, leurs inquiétudes et leurs attentes qui sont
liés aux soins et aux services reçus dans notre réseau. Cependant, on va
souhaiter attirer votre attention et vous soumettre, bien sûr, quelques commentaires
qui sont relatifs à votre projet qui est à l'étude.
Donc, tout d'abord, on prend acte et on salue la ministre d'allouer de nouvelles sommes d'argent pour
embaucher, nécessairement, des commissaires de plus pour que ces derniers puissent vraiment
accomplir les nouvelles responsabilités qui leur seront confiées, mais cependant
nous restons quand même fortement préoccupés par la charge de travail des commissaires
locaux qui ne cesse d'augmenter au fil du temps. Un examen rapide des données
contenues au rapport annuel des dernières années démontre que la tâche des commissaires
s'alourdit constamment. Outre les plaintes des usagers ou de leurs représentants,
le nombre d'interventions par les commissaires est en hausse dans la très
grande majorité des établissements.
De plus,
depuis l'adoption de la loi sur la maltraitance, les commissaires sont aussi responsables de recevoir les plaintes et les
signalements qui découlent aussi de cette loi, et nous ne connaissons pas
encore toute l'ampleur réelle du travail à accomplir, notamment, par cette loi
parce que certains établissements n'ont même pas encore déployé de politique
concernant cet enjeu. Le journal La Presse rapportait, en
octobre dernier, que près de 866 dossiers de cette nature, liés à cette loi, ont été traités par les commissaires locaux. Donc, sans présumer de l'avenir, on peut facilement déduire que le nombre de plaintes et de signalements pourrait progresser.
Ce n'est pas ce qu'on souhaite, c'est pour ça qu'on a une recommandation 3,
qui est fort importante, dans notre dossier, notamment.
Nous demandons au législateur, dans notre
première recommandation, de s'engager, après avoir consulté les commissaires — ça, c'est important — à fournir suffisamment de ressources
financières, humaines et matérielles pour accomplir l'importante tâche
qui leur est confiée.
Donc, pour la
prochaine portion, je vais laisser la présidente de FIQ, secteur privé, Sonia
Mancier, vous parler de notre deuxième préoccupation.
Mme
Mancier (Sonia) : Bonjour.
Notre deuxième préoccupation est celle qui touche l'impartialité des commissaires.
En ce sens, nous saluons la volonté du législateur de vouloir renforcer le
régime par le dépôt du présent projet de loi. Parce qu'il relève directement du
conseil d'administration, le commissaire local occupe une place particulière au
sein de l'établissement. Cette absence de
lien hiérarchique avec la direction générale de l'établissement permet au
commissaire d'exercer sa fonction en toute impartialité.
Nous sommes toutefois interpellés par l'annonce
de la création d'un poste de commissaire-conseil au sein du ministère faite au
moment du dépôt du projet de loi. Dans un premier temps, nous convenons que la
création de ce poste peut démontrer
l'importance que l'on accorde au régime d'examen des plaintes, cependant, nous
nous questionnons au sujet de certaines responsabilités confiées au
commissaire-conseil.
Par exemple, ce nouveau commissaire-conseil aura
la responsabilité de faire une vigie systémique des mesures correctives recommandées par les commissaires locaux. Il pourra
aussi être appelé à soutenir les commissaires locaux dans le cas de situations complexes. Comment les membres des
comités de vigilance au sein des établissements vont-ils interagir avec
le commissaire-conseil dans le cadre de la vigie sur les mesures correctives à
implanter? Quel sera le lien hiérarchique entre le commissaire-conseil et les
commissaires locaux? Voilà autant de questions qui nous laissent perplexes
quant aux réelles motivations sous-jacentes à la création de ce poste.
Sans pour
autant s'inscrire en faux contre cette initiative du gouvernement, initiative
faite de façon concomitante avec le dépôt du projet de loi, nous voulons
tout de même vous souligner que certaines fonctions du commissaire-conseil ainsi que son intégration au sein du
ministère sont susceptibles de miner en partie l'indépendance et l'impartialité
des commissaires locaux. Conséquemment, nous
vous recommandons de maintenir cette indépendance et cette impartialité
des commissaires, car elles sont le gage de l'efficacité du régime d'examen des
plaintes.
• (16 h 30) •
Mme Bédard (Nancy) :
Finalement, on veut profiter de l'opportunité qui nous est offerte aujourd'hui,
bien sûr, pour vous mentionner aussi l'importance d'agir en amont. Alors, il
faut améliorer la qualité des soins, des services aux patients puis ainsi
contribuer à diminuer la charge des commissaires locaux. Alors, ça, ça doit
être l'objectif ultime, nécessairement.
Depuis quelques années, notre organisation
propose et expérimente les ratios sécuritaires professionnels en soins patient
dans les établissements de santé du réseau. Nous ne sommes pas les seuls à
vouloir promulguer cette solution, ça a été fait ailleurs dans le monde, ça a
généré des résultats probants, notamment sur la diminution efficace au niveau
des plaintes, et aussi, avec tout ce qui a été essayé ailleurs dans le monde, il
y a plus de 15 ans d'écrits scientifiques
qui est fait. Donc, ce n'est pas qu'une lubie syndicale, je vous l'assure,
cette lutte. Les ratios syndicaux... les ratios sécuritaires des soins
permettent d'attirer les professionnels en soins dans le réseau, de les retenir
en santé. Ils améliorent la qualité et la
sécurité des soins pour l'ensemble des patients en plus d'assurer une meilleure
efficacité du réseau.
Plus de
500 000 incidents, accidents ont été déclarés au cours de la dernière
année au sein des établissements de la
santé. Les plus fréquents, vous le savez, sont les chutes et les erreurs liées
à la médication, et ce, très générateur de plaintes
au niveau de nos commissaires. Nous croyons raisonnable que ce nombre ne
reflète même pas la vraie réalité, parce que, vous en avez parlé, on le sait,
la loi qui règne, la loi du silence, la loi de l'omerta génère aussi beaucoup
de retenue par rapport à ça. Alors, 500 000 incidents, accidents, ce
n'est probablement même pas la réalité. Donc,
ces situations déplorables causent des souffrances, des
souffrances aux patients, des souffrances à leurs proches en plus de
donner lieu à un volume important de plaintes ou de demandes d'intervention
auprès des commissaires aux plaintes.
Par
ailleurs, le Bureau du coroner a conclu, à la suite d'enquêtes liées à des événements tragiques, que diminuer le ratio de patients par infirmière aurait pour
effet d'augmenter la sécurité des soins, et particulièrement dans les CHSLD.
Le Bureau du coroner... La Protectrice du citoyen, dans son dernier rapport,
souligne l'intérêt de la solution à mettre en place au niveau des ratios.
Nous croyons qu'il
faut agir aussi à la source du problème, revoir la composition de l'équipe de
soins ainsi que le nombre de professionnels en soins qui s'occupent des
patients. L'implantation des ratios professionnels en soins patient va
permettre une augmentation de la capacité à réaliser l'ensemble des activités
professionnelles et une plus grande qualité
et sécurité des soins, et ce, pour le plus grand bénéfice de la population et
des patients. En somme, nous vous
recommandons de fixer par une loi des ratios professionnels en soins patient et
de les implanter au sein des établissements de santé sur l'ensemble du
territoire québécois.
Nous estimons que nos
propositions vont contribuer vraiment positivement à renforcer le régime
d'examen des plaintes des usagers en plus d'améliorer la qualité et la sécurité
des soins de nos patients. Merci beaucoup.
Le Président
(M. Provençal)
: Je vous remercie
pour votre exposé. Mme la ministre, à vous la parole.
Mme Blais
(Prévost) : Merci, M. le Président. Merci beaucoup, Mmes Bédard,
Mancier et Prévost.
Mme Bédard, vous
parlez souvent avec la ministre de la Santé et des Services sociaux concernant
les ratios, ça fait que je sais que vous avez une très bonne communication avec
elle. Mais, tout à l'heure, je crois que vous étiez présente quand le député de
Rimouski a parlé d'information. Et l'une des raisons de ce projet de loi n° 52, c'est particulièrement
pour les établissements privés, où vous mentionniez qu'il y a des
établissements qui n'ont pas encore de politique de maltraitance. Il y a
des établissements qui n'ont pas cette information. Depuis que la loi n° 115 est adoptée, il faut que tous les établissements soient
à jour et possèdent cette politique en maltraitance et obtiennent l'information
nécessaire, et c'est très, très, très important. Et c'est l'une des raisons
pour lesquelles on suggère, dans le projet
de loi n° 52, qu'il y ait l'obligation de déposer, dans un
dossier informationnel, toutes les plaintes. Évidemment qu'il y aura plus de plaintes parce qu'il y a des
plaintes qui n'ont pas été déposées dans le dossier. Alors, oui, il y
aura certainement plus de plaintes, mais c'est comme ça qu'on va être en
mesure, je crois, de faire des corrections avec le temps.
Vous parlez du
commissaire-conseil. Vous avez certaines inquiétudes par rapport au
commissaire-conseil, par rapport à l'ingérence qu'il pourrait y avoir avec le
comité de vigilance. Il n'aura aucun lien avec le comité de vigilance. Au contraire, il y a des établissements
privés, actuellement, qui n'ont pas de comité de vigilance. C'est la raison
pour laquelle, en quelque sorte, on va forcer le comité de vigilance puisqu'il
y aura des représentants des CISSS et des CIUSSS qui seront présents.
Le
commissaire-conseil, je crois, se veut plus comme... conseil pour harmoniser
les pratiques, pour faire en sorte que le commissaire aux plaintes et à la
qualité des services se sente moins seul, parce qu'ils se sentent très seuls.
Puis je veux vous rassurer, si jamais, si jamais les commissaires aux plaintes
et à la qualité ont trop de travail... Parce que je sais que, dans la loi
n° 115, ils n'ont pas été avisés, ils n'ont pas été consultés concernant
l'obligation de s'occuper des plaintes en matière de maltraitance. Donc, oui,
il y a eu une charge supplémentaire au niveau de leur travail, donc on va
devoir veiller là-dessus, c'est très important.
Ma
question, hein, j'ai fait un long préambule, puis je veux laisser mes collègues...
Parlez-moi un peu plus du commissaire-conseil. Est-ce que vous
l'accueillez favorablement, finalement? S'il a cette indépendance, est-ce que
vous l'accueillez favorablement?
Mme Bédard
(Nancy) : Bien, la zone de difficulté qu'on avait, considérant
que ça ne fait pas partie du projet de loi, c'était nécessairement de ne pas
trop savoir l'objectif, avec tout l'ensemble de ses rôles, qu'est-ce qu'il
allait jouer... qu'est-ce qu'on allait lui donner comme fonction. Donc, c'était
difficile pour nous de se dire : Est-ce qu'on est favorable ou non à ça?
Ce
qu'on comprend, c'est que, vous, comme ministre, vous avez des besoins.
Notamment, si ce commissaire-conseil
là peut répondre et faire en sorte que vous ayez une lecture plus juste de ce
qui se passe, c'est une chose, mais, effectivement, il ne faut pas que
ça ait l'air d'une centralisation. Il ne faut pas que ça ait l'air... que le
comité de vigilance de nos établissements sente qu'il y a une confusion dans
les rôles. Alors, ça, je pense que tous les acteurs l'ont dit aujourd'hui,
l'impartialité, il faut s'assurer que tout ce qui se passe au niveau local, on
ait le plus possible d'objectivité. Alors, ce commissaire-conseil là, on doit
s'assurer de bien comprendre son rôle et ne pas avoir de confusion pour ne pas
non plus que... et autant le conseil d'administration, le comité de vigilance,
le commissaire local sentent qu'il y a quelqu'un au-dessus de lui qui pourrait
venir influencer ou apporter des éléments.
Donc,
c'est tout autant de questions qui nous permettaient difficilement d'apprécier
ce nouveau rôle là. Donc, c'est difficile pour moi aujourd'hui de venir
totalement vous dire le positif de ça, comment on le voit, parce qu'il nous
manquait énormément d'informations. Puis on aurait apprécié, potentiellement,
qu'il soit dans le projet de loi.
Mme Blais (Prévost) : ...le député
de Rimouski qui pose la question
très souvent par rapport à ça. Mme Bédard, en terminant, le
commissaire-conseil n'est pas un commissaire à la ministre. C'est vraiment un
commissaire-conseil pour les commissaires aux plaintes afin de mieux
communiquer, puisque les commissaires aux plaintes et à la qualité se sentent
souvent seuls dans leur établissement à cause de leur rôle et à cause de leur
distance aussi. C'est pour harmoniser les pratiques, mieux communiquer, mieux
faire en sorte qu'ils soient davantage outillés. Mais vous avez raison de le
préciser, et nous allons en tenir compte. Je vous remercie.
Le Président
(M. Provençal)
: Mme
la députée de Roberval.
Mme Guillemette :
Merci, M. le Président. Merci beaucoup d'être ici, ça nous donne un bon point
de vue.
Vous parliez de votre
inquiétude sur la charge de travail des commissaires locaux. Est-ce que le fait
d'avoir des commissaires-conseils pourrait les soutenir... En se sentant mieux
soutenus, en ayant des pratiques standardisées, comme le disait la ministre, est-ce
que ça pourrait faire en sorte de diminuer la charge de travail des
commissaires?
Mme Bédard (Nancy) : Deux éléments. J'imagine que ce que la ministre
vient de nous donner comme information, ça émane d'une demande des
commissaires. Ça fait que si les commissaires locaux se sont sentis seuls puis
qu'ils ont dit : On aimerait ça avoir quelqu'un, puis que ça émane d'une
demande des commissaires, j'imagine que ça
pourrait potentiellement les aider, mais est-ce que c'est ce qu'on
veut? Est-ce que ça prend quelqu'un du ministère? Puis il faut toujours penser que le
diable est dans les détails, hein? Un commissaire-conseil qui vient du ministère,
s'il y a des orientations, des éléments, c'est toujours difficile, là, pour
savoir comment ça fonctionne, des orientations.
Parfois les gens osent, n'osent pas. L'indépendance va faire en sorte que, si
on pense que nos commissaires sont en fardeau, c'est la solution que le
commissaire-conseil va venir les aider dans les dossiers, comment il va faire
les... comment ils vont travailler ensemble. Je ne pense pas que ce soit une
des solutions nécessairement. Donc, je suis comme plus d'avis qu'il faut voir
avec les commissaires locaux leurs besoins pour y arriver.
Ce qu'on constate,
c'est... on parlait des délais de 45 jours, il y a quand même beaucoup de
plaintes qui dépassent le 45 jours. Donc, c'est un des indicateurs qu'on
peut potentiellement dire qu'ils sont en fardeau de tâche, effectivement. Donc,
moi, je me fie sur la ministre et les gens pour qu'eux viennent nous dire
qu'est-ce que ça prend pour les aider pour arriver dans le délai de
45 jours. Ce qui doit se traiter de façon plus rapide doit être traité de
façon plus rapide, mais il ne doit certainement pas y avoir de dépassement.
Donc, je suis d'avis que c'est eux qui devraient être en mesure de venir nous
le dire.
Et
je ne porterai pas cette parole-là pour dire que c'est le commissaire qu'on
parle ici, là, qui pourrait venir du ministère, qui va venir travailler les dossiers dans un
CISSS ou dans un CIUSSS donné, là. Pour moi, ça m'apparaîtrait assez
particulier comme fonction.
• (16 h 40) •
Le Président
(M. Provençal)
: Mme
la ministre.
Mme Blais
(Prévost) : J'aimerais juste rectifier une chose, qui n'a rien à voir
avec vous, mais ce ne sont pas les commissaires aux plaintes et à la qualité
des services qui ont mentionné qu'ils avaient besoin d'un commissaire-conseil, là. Ça vient du fait qu'il faut
harmoniser les pratiques. Et, si on fait en sorte qu'il y a
un dossier informationnel, ça prend plus de communication. Et
c'est vrai, quand vous représentez des infirmières, des infirmiers, il y en a
plusieurs dans un établissement, mais, dans un établissement, il n'y a pas
plusieurs commissaires aux plaintes, donc c'est beaucoup plus difficile. Et à
cause de leur indépendance et à cause des plaintes que ces personnes traitent,
c'est beaucoup plus difficile, les interactions. On ne peut pas commencer à
dire à tout le monde qu'est-ce qui se passe par rapport aux plaintes, c'est
confidentiel. Alors, c'est beaucoup plus dans cet ordre-là de pouvoir les
accompagner pour harmoniser, pour mieux communiquer, pour faire progresser les
pratiques qu'un commissaire-conseil serait nommé. Je voulais seulement
rectifier.
Le Président
(M. Provençal)
: Mme la députée de
Soulanges.
Mme Picard :
Moi, je me pose la question : Comment, vous, les infirmières, pouvez
promouvoir les changements du projet de loi? Comment, sur le terrain,
vous pouvez en parler aux patients? Comment qu'on pourrait faire le lien?
Mme Bédard
(Nancy) : Ça, c'est une excellente question, et c'est
extrêmement difficile, parce que je vais vous donner un seul exemple et c'est
la loi de l'omerta. J'ai entendu tantôt, j'ai participé un 15, 20 minutes,
là, il y a des préoccupations par rapport à ça. Puis moi, j'ai des professionnels
en soins qui échangent avec les patients à tous les jours sur certaines
difficultés, des constats que les patients viennent dire. Et souvent les
professionnels en soins, leur réflexe, c'est
de se dire : Bien, tu sais, si vous avez une plainte à formuler, je peux
vous aider, je peux vous donner le document, je vais apporter le
pamphlet. Et je peux vous dire que plusieurs professionnels, quand qu'ils font
cette démarche-là, ils se font taper sur les doigts d'avoir fait ça. On a des
exemples, et c'est extrêmement difficile.
Donc, votre question est pertinente. Si, dans le
projet de loi, vous pouvez réussir à écrire quelque chose pour protéger les
gens qui veulent promouvoir comment on fait des... c'est quoi, le chemin pour
aller faire des plaintes, je vais être
extrêmement intéressée à le regarder. Mais malheureusement, actuellement,
l'état du réseau ne permet pas aux professionnels en soins, en tout cas,
de faire la promotion, parce que tout est regardé, puis la ligne est mince
entre tu déclares une situation, tu as parlé au patient,
tu l'as comme presque... pas soutenu, mais, tu sais, tu as peut-être dit :
Bien oui, vous devriez peut-être faire une plainte là-dessus ou non. Parce que,
tu sais, les patients nous parlent puis ils
veulent savoir aussi ce qu'on en pense. Ce n'est pas si évident que ça. On est
des confidents pour eux, ils se fient sur nous. Et je peux vous dire une
chose, on est regardés, puis c'est extrêmement difficile.
Alors, moi, je veux bien vous dire comment on
pourrait faire la promotion, mais j'ai envie de vous dire : Protégez-nous, Seigneur! Parce que je peux vous
dire une chose, c'est extrêmement difficile, dans le réseau, actuellement,
d'échanger à ce niveau-là sur tout, tout. À tous les jours, les
professionnelles en soins souhaitent être à la défense des droits et des
intérêts des patients et à tous les jours, quand elles font autre chose qu'une
tâche réellement où on les confie, elles se font taper sur les doigts. Et, vous
le savez, c'est à toutes les semaines qu'on entend, dans les médias, qu'est-ce qu'on a fait, qu'une professionnelle en
soins qui a osé dénoncer une situation. Pourquoi? Pour que son patient
puisse être bien soigné.
Alors,
malheureusement, je suis obligée de vous dire que ce n'est pas aujourd'hui que
je vais vous dire comment je vais faire la promotion. Mais je vais vous
demander de m'aider pour qu'on puisse faire cette promotion-là puis qu'on soit
vraiment protégés pour la faire.
Mme Picard : Est-ce qu'il me
reste du temps?
Le Président (M. Provençal)
: Oui, oui.
Mme Picard : J'aurais une autre question par rapport, un petit
peu, à ça : Est-ce qu'on pourrait, supposons, dans un établissement
hospitalier... (panne de son) ...admission du patient en chambre, en
hospitalisation? Concrètement, est-ce que ça pourrait se faire pour les
infirmières lors des admissions?
Mme Bédard
(Nancy) : Moi, je pense que
oui. Toute politique, tout élément qui renforcera ça, qui permettra, à ce
moment-là, de le faire, et c'est surtout de garder ce temps-là pour être
capable de bien accueillir le patient. Mais il va falloir que ça vienne... et
soutenu par des politiques qui, malheureusement, ne devraient pas... On ne
devrait pas avoir besoin de ça pour être dédouané de faire ça. Mais,
aujourd'hui, je suis obligée de vous dire que, si ça fait partie du protocole
puis si on l'ajoute... Mais, encore là, il va falloir qu'on travaille quand
même pour être très à l'aise à ce qu'une portion de l'admission que la professionnelle
en soins fait avec le patient puisse être dédiée à ça puis qu'on lui laisse...
qu'on lui fasse confiance de ce que ça veut dire. Actuellement, c'est
difficile.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la ministre.
Mme Blais (Prévost) : ...très,
très, très préoccupée par ce que vous venez de dire, Mme Bédard, par
rapport au fait que... Protégez-nous, Seigneur! C'est ça que vous avez dit.
Aidez-nous à nous protéger. Vous savez, il y a la loi n° 115,
où ça a été un petit peu difficile d'obtenir le signalement obligatoire. Et,
avec ce signalement obligatoire, vient le
fait qu'on doit protéger aussi l'employé, que l'employé ne peut pas perdre son
travail s'il signale, s'il dénonce. Et pourtant ce que vous êtes en
train de dire, c'est que vous vous faites taper sur les doigts. Malgré cette
loi-là, vous vous faites taper sur les doigts. Qu'est-ce qu'on va faire de
plus?
Mme Bédard (Nancy) :
Encore pire qu'avant la loi. Encore pire qu'avant la loi. Moi, je peux vous
dire qu'aujourd'hui la loyauté, le conflit de loyauté et l'exigence de loyauté
des directions envers eux et l'établissement plus
qu'envers notre patient... Nous avons un code de déontologie. À tous les jours,
on nous demande de ne pas suivre notre code de déontologie. À tous les
jours, mes membres, que je représente, s'ils ont voulu divulguer, même si on
fait toutes les choses correctement au départ, là, il y a toutes les politiques,
comment on fait les éléments... À un moment donné, il y a des limites quand ces
gens-là ne sont pas entendus pour protéger leurs patients, ce qu'on leur dit toujours,
c'est : Vous avez manqué de loyauté envers l'établissement. Alors, c'est
la loyauté envers les cadres, la loyauté envers l'établissement plus qu'envers
le patient, et nos professionnels en soins sont en conflit de loyauté continuellement. Et vous avez raison... et, pour
moi, cette loi-là, elle a été là, mais, aujourd'hui, pour plein de
raisons, la situation est encore pire qu'elle l'est par rapport à cette
loi-là et à ce que mes professionnels en soins vivent.
Mme Blais (Prévost) :
Mme Bédard, aidez-moi maintenant à vous aider.
Mme Bédard (Nancy) :
Oui.
Mme Blais (Prévost) : Qu'est-ce
qu'on devrait faire?
Mme Bédard (Nancy) :
Bien, j'aurais aimé... Depuis un an, j'ai demandé le plus souvent possible que l'ensemble
des établissements m'avisent sur tous les cas qui sont portés à l'attention des
syndicats locaux pour que j'aie tous les dossiers sur mon bureau et que je sois
en mesure soit d'en faire part à la ministre, soit d'être capable de faire des
sorties média pour dénoncer ça et demander de rétroagir sur les sanctions
faites. Et je fais le maximum que je peux faire. J'ai écrit, dans un
établissement, dernièrement, dans le temps des fêtes, en mettant... l'Estrie,
je vais le dire, pour ne pas le nommer, en mettant la ministre en copie. Je ne
sais pas, là. Je dénonce. Je suis dans les médias. Je mets la ministre en
copie.
Il faut travailler en
amont avec les dirigeants puis leur dire que les professionnelles en soins,
elles ont... elles sont à la défense des droits et des intérêts des patients.
Et, quand elles dénoncent, quand elles disent ce qu'elles ont besoin, qu'est-ce qu'elles n'ont pas pour soigner
adéquatement leurs patients, on doit les écouter, on doit faire en sorte...
Et ça, c'est les dirigeants, ça fait partie de leurs obligations, leurs
devoirs, bien plus que nous ici, c'est l'obligation et le devoir, selon la
LSSSS, de nos directrices de soins infirmiers, de nos dirigeants. Alors, je
pense qu'il faut leur rappeler leurs obligations, leurs devoirs et l'écoute
qu'elles doivent avoir auprès des professionnelles en soins. Au lieu de leur
taper sur les doigts, elles doivent les féliciter quand elles montent aux
barricades pour s'assurer qu'on donne les moyens de bien soigner les patients.
Mais on n'est pas là actuellement.
Moi, je rêve
du jour où on va voir les professionnelles en soins, qui, outre leur rôle
d'aller prendre une pression, viennent dire qu'est-ce que les patients
ont de besoin pour être bien soignés, pour diminuer les plaintes, pour qu'on ne manque pas de soins, pour donner les soins selon
les standards, selon les normes. C'est ce qu'on tente de faire. C'est
ça, l'«advocacy», c'est ce qu'on travaille actuellement. Mais les professionnelles
en soins, malheureusement, on dirait que ce n'est pas bien reçu, ça ne fait pas
comme... ils ne veulent pas nous voir dans ce rôle-là.
Alors, je
pense qu'à la base il faut rappeler aux établissements tout le rôle des
professionnelles en soins, qu'ils devraient prendre ça, à la base, comme
étant tous les éléments pour travailler ce qu'il y a à travailler pour être
capable de donner les soins.
Mme Blais
(Prévost) : En 2009, quand j'ai déposé un plan d'action pour combattre
la maltraitance envers les aînés, on disait qu'il n'y en avait pas, de
maltraitance envers les aînés, c'était envers les femmes, les enfants. Quand
j'ai parlé de maltraitance dans les établissements, on a dit : Ça n'existe
pas, les établissements ne maltraitent pas. Puis
aujourd'hui on est rendus à parler de commissaire aux plaintes. On est
rendus... Écoutez, on a beaucoup de travail à faire. Je vous remercie,
Mme Bédard.
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci, Mme la ministre. Je vais maintenant céder la parole à la députée de
Fabre.
• (16 h 50) •
Mme Sauvé : Merci beaucoup, M. le Président. Mme Bédard,
Mme Mancier, Mme Prévost, merci pour votre cri du coeur, parce
qu'il faut dire les choses et se rappeler qu'on est tous là pour les soins aux
patients et aux aînés, alors merci pour ce cri du coeur.
Moi, je veux
vous amener sur... J'ai deux grandes questions à vous poser. Vous avez parlé,
dans votre mémoire, vous l'avez exprimé tantôt, l'alourdissement que ça
peut représenter pour les commissaires locaux d'avoir à agrandir le territoire, évidemment, en incluant les établissements
privés. Vous vous préoccupez de ça. Vous demandez, dans les recommandations,
votre recommandation 1 de votre mémoire, plus de ressources financières,
de ressources humaines.
Il faut se
rappeler que, quand on a parlé, depuis ce matin, du délai du 45 jours, qui
n'est pas toujours respecté, c'est autant au niveau public que privé.
Alors, quand on prend acte de ça, on est en train de se dire que, même au
niveau public, on n'y arrive pas nécessairement. Et là on est en train
d'ajouter, malgré la vertu du projet de loi, des tâches, des mandats
importants. Alors, je vous rejoins beaucoup dans la préoccupation que vous avez
par rapport à l'alourdissement et l'historique que vous en faites.
Je vois que, dans cette recommandation-là, vous
nommez aussi que, pour connaître les besoins d'ajout de personnes, les besoins financiers, vous souhaitez que soient consultés
les commissaires. Comment ça pourrait se faire, cette consultation-là?
Qui la ferait, finalement, toujours dans un souci d'être près des besoins, mais
dans le respect de la neutralité? Alors, comment ça se ferait cette consultation?
Mme Bédard (Nancy) :
Bien, à mon avis, la ministre qui présente ce projet de loi, si elle veut être
en mesure de mettre l'ensemble des éléments qui sont... Bien, c'est sûr que ça
serait intéressant qu'elle entende, certainement, les commissaires. Mais, tu
sais, ce n'est comme pas à moi de décider, nécessairement, qui sont les acteurs
les mieux placés pour entendre ces commissaires-là. Mais ma préoccupation,
c'est que les meilleures personnes pour venir dire leurs réels besoins au
niveau des ressources financières, matérielles, avec ce qu'on leur a donné dans
les dernières années, la tâche, ajouter les privés maintenant... C'est eux qui
vont venir mettre l'ensemble des éléments pour que la ministre ou le
législateur soit en mesure de mieux, finalement, cerner le réel besoin sur l'augmentation,
notamment, là, des commissaires.
Mme Sauvé : Merci beaucoup. Autre préoccupation que j'ai,
puis vous l'avez bien exprimée, bien que puisse être intéressante la
notion de l'ajout du commissaire-conseil, vous vous questionnez, parce que,
dans le projet de loi, ce n'est pas vraiment mentionné, le rôle, le mandat.
Moi, je vais vous dire, là, vous avez utilisé des mots qui me rejoignent quand
vous parlez de confusion de rôles, là, parce qu'entre le comité de vigilance
puis le commissaire-conseil, qui n'est pas vraiment défini dans le projet de
loi... Là, tantôt, on a entendu la ministre dire que les deux ne se parlent pas
vraiment, parce que le comité... le commissaire-conseil va y aller dans la
vigie systématique. Mais, en même temps, l'autre fait la vigilance. Moi,
franchement, je m'y perds un peu. Je veux voir avec vous, si vous aviez, vous, à définir un rôle distinct, une valeur
ajoutée en mettant en place ce commissaire-conseil, ça serait quoi, le mandat
précis qui pourrait être en vrai soutien aux commissaires locaux, et tout ça?
Mme Bédard
(Nancy) : Bien, je vais
rester un peu sur la même ligne que j'étais. Je pense que les commissaires
locaux, là... Tu sais, moi, je ne les ai pas consultés. Donc, si les
commissaires locaux, il y a une valeur ajoutée pour eux
d'avoir un commissaire-conseil, bien, c'est à eux, un peu, de définir leurs
besoins et la valeur ajoutée qu'il pourrait y
avoir, tout en étant très conscients qu'ils doivent avoir les coudées franches
constamment, et que ce commissaire-conseil-là
ne doit aucunement, dans son rôle, miner cet espace-là qu'ils ont besoin, de
toute leur impartialité, l'objectivité. Si c'est pour du soutien, de
l'harmonisation, de les aider, et ça répond à leurs besoins, alors ce commissaire-là devrait avoir ce rôle-là. Donc,
je n'ai pas autre chose à dire que c'est eux, finalement, qui devraient
définir le besoin. Et puis la ministre me le disait tout à l'heure, ce n'est
pas pour elle, ce n'est pas dans ce but-là, ce n'est pas... c'est vraiment en
soutien. Alors, c'est à eux de définir ça, mais toujours dans la réelle
impartialité et, dans son rôle, bien, de ne pas avoir de confusion.
Le comité de
vigilance, tu as un conseil d'administration, tu as une commissaire. Alors,
cette personne-là, ça doit extrêmement important qu'on sache... Et, après ça,
tu as... bien, on a la Protectrice du citoyen. Je veux dire, à un moment donné,
il faut s'assurer que l'ensemble des acteurs qu'on met à la disposition d'un
processus ait leur valeur ajoutée puis leur rôle bien à eux. Alors, c'est
surtout ça, l'intervention qu'on voulait faire par rapport à ce poste-là ou ce
nouveau rôle là qu'on voit apparaître.
Mme Sauvé :
Combien de temps me reste-t-il?
Le Président
(M. Provençal)
: Six minutes.
Mme Sauvé : Six minutes. Merci, M. le Président. Il y a un élément qui n'a pas été
souligné, mais j'aimerais ça vous entendre puis que vous ameniez votre
réflexion là-dessus. On connaît la réalité, préoccupante, évidemment, les
commissaires locaux qui sont là ou qui n'existent pas, le manque
d'accompagnement des résidents, dans les CHSLD privés, l'imperfection de la
situation, et tout ça, alors, qui a amené le projet de loi n° 52. Est-ce
que vous pensez que ce qui est proposé, là, la solution qui est amenée par la
ministre avec le projet de loi n° 52... Moi, je me préoccupe... Bien
qu'imparfait, le modèle actuel, on est en train de mettre peut-être un peu de
côté la proximité de la réalité des besoins. Je pense à des CHSLD privés qui
font leur travail, qui font bien leur travail et qui sont accompagnateurs des
aînés et des résidents vers des démarches de plaintes. Est-ce qu'on n'est pas
en train de perdre, en même temps, avec le projet de loi, un petit peu de
proximité par rapport aux besoins des résidents des CHSLD privés?
Mme Bédard (Nancy) : Ça va me faire plaisir de laisser la présidente
du secteur privé vous répondre à ce sujet-là.
Mme Mancier
(Sonia) : Moi, je pense que vous avez soulevé quelque chose qui était
très important, tout à l'heure, c'est les rôles des personnes, parce que ce que
je peux vous dire, pour me promener dans une quarantaine de CHSLD privés puis
privés conventionnés, bien, les privés, c'est de voir le fait que les gens ne
connaissent pas les moyens qui sont à leur disposition pour dénoncer telle ou
telle situation. Ça, c'est compliqué. Quand vous voyez des familles qui
s'adressent à la première personne qu'ils trouvent, que ce soit une
professionnelle en soins, que ce soit quelqu'un du comité des résidents, parce
qu'on ne sait pas à qui s'adresser, ça pose vraiment problème. Et là vous le
dites, alors, ce sont souvent des petits établissements. Et, dans ces petits
établissements là, tout le monde se connaît, donc
tout le monde se parle très, très facilement, ce qui est bien aussi, mais, à un
moment donné, il faut que chacun ait son rôle.
Et, si vous me
permettez, je voudrais reprendre ce que vous demandiez tout à l'heure,
Mme Blais, concernant la promotion. Moi il y a quelque chose qui me choque
régulièrement dans les CHSLD, c'est de voir la semaine de promotion des droits
des aînés.
Une voix :
...
Mme Mancier
(Sonia) : C'est quelque chose — des usagers, pardon — c'est
quelque chose qu'on ne voit pratiquement pas
ou, quand on voit une affiche, elle est dans un ascenseur. Alors, si vous
n'avez pas la chance d'avoir quelqu'un au deuxième étage, vous ne le
voyez pas. Je trouve ça difficile. Les gens ne savent pas à qui s'adresser. Par
contre, on a vu des situations où, quand vous avez accès à la commissaire
locale ou qu'elle intervient dans des enquêtes et qu'elle a la possibilité de
discuter avec le monde du plancher pour mener à bien son enquête, ça peut
donner parfois des résultats surprenants.
Donc, cette
proximité-là, oui, quelque part, elle est importante aussi, parce
qu'aujourd'hui Mme Bédard vous l'a dit : Les professionnels sont sous
la loi de l'omerta. Et, oui, il y en a. Il y en a, ça n'arrête pas. Et ce qui
me gêne encore plus, c'est de voir que certains établissements font signer des
codes d'éthique, où, effectivement, il est fait état de cette loyauté qu'on
doit avoir vis-à-vis de l'établissement. Donc, on vous rappelle indirectement
qu'il y a des choses qu'on ne doit pas dire puis qu'on est tout le temps liés à
la confidentialité, mais on a quand même des choses qu'on peut dire. Mais les familles elles-mêmes, les familles qui ne
déclarent pas les plaintes non plus et qui vont juste le dire à la
professionnelle en soins parce qu'ils ont peur de ne plus avoir de services,
ça, c'est la réalité du plancher.
Vous
savez, je disais, il y a toujours trois sortes de familles, enfin, un peu, pour
moi. Je vais essayer d'imager...
d'imaginer ça un petit peu de la façon suivante : Vous avez des familles
qui voient aller les professionnels toute la journée, courir, puis ils
savent très bien que les soins ne sont pas donnés, que les soins sont
superficiels, parce que, comme vous l'a dit Mme Bédard, tout à l'heure,
les ratios, c'est une aberration. On fonctionne sur des ratios de Philippe Voyer, aujourd'hui. De mémoire, c'est de 2013. La
réalité est complètement à côté de ce qu'il faudrait aujourd'hui comme ratio pour travailler
correctement et donner l'ensemble des soins. La clientèle possède, en général,
on va dire, une dizaine de pathologies. Et quand on voit des cas complexes
comme ça, on s'entend que ça demande du monde pour gérer tout ça. Donc, il est
clair que même si la personne donne tout ce qu'elle peut donner dans une
journée, c'est clair qu'il y a des soins qui ne seront pas donnés. Ça, c'est
quelque chose de régulier. Ce n'est pas pour rien que les CHSLD font la une des
journaux continuellement. C'est vendeur, ce genre de choses.
Donc, la proximité,
oui, ça, c'est clair, il faut qu'elle soit... qu'il y ait quelque chose où les
gens puissent se retrouver, sachent où aller, à quelle porte il faut frapper
quand on a besoin de dénoncer quelque chose. Je vous dis, c'est une aberration
de voir que les gens, que ce soit l'usager lui-même, ne savent pas à qui
s'adresser.
Donc,
la promotion, oui, je suis d'accord. Mais je pense qu'elle devrait relever du
ministère, mais ça, c'est mon avis.
Mais il faudrait imposer aux employeurs qu'il y ait une meilleure promotion
aussi. C'est une semaine importante, ça.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Alors, je vais maintenant céder... Il reste, excusez,
25 secondes.
• (17 heures) •
Mme Sauvé :
Bien, écoutez, je veux simplement remercier, parce que j'ai pris note, ici, des
éléments que vous avez amenés, puis de nous parler du terrain comme vous le
faites, c'est très important pour cette commission. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Alors, je vais céder maintenant la parole à Mme la députée de Taschereau.
Mme Dorion :
Merci, M. le Président. Mme Bédard, dans votre exposé, vous avez fait un
lien entre les ratios et la possible, probable augmentation des plaintes dans
les prochaines années en disant : Si les ratios ne s'améliorent pas, ça ne
risque pas de s'améliorer non plus du côté des plaintes. Donc, ce qu'on cherche
à faire, puis c'est très bien, c'est de favoriser, de rendre ça plus simple,
plus facile, plus connu, le processus de plaintes pour les usagers. Mais moi,
j'aimerais ça savoir, en contrepartie, parce que, si on ne touche pas à ça, on
va se retrouver avec un problème où les soignants vont être squeezés un peu
entre deux mondes, c'est quoi... Qu'en est-il, en ce moment, du traitement des
plaintes du personnel soignant dans les CHSLD privés?
Mme Mancier (Sonia) : Je vais vous
demander de reformuler, là, juste la dernière partie.
Mme Dorion : On parle souvent de
plaintes d'usagers, et c'est ce qu'on essaie de... on travaille là-dessus, mais
les plaintes... si le personnel soignant doit se plaindre de quelque chose dans
la gestion, dans la direction, dans la façon
dont le travail se fait ou lui est imposé, dans un CHSLD privé, comment ça se
passe? Et c'est quoi, la situation, bonne santé, mauvaise santé,
comment... tu sais, de ce processus-là?
Mme Mancier (Sonia) : Je vous dirais
que c'est compliqué parce que les plaintes... On a l'impression que les gens
sont toujours bâillonnés, déjà, à la base, et qu'on ne peut pas déposer une
plainte. Et moi, je vais vous dire, ça va être cru ce que je vais vous dire là,
mais quand une professionnelle en soins dépose une plainte, c'est marrant,
hein, mais, parallèlement, on a souvent la... on voit souvent ça, on va vous
monter un dossier sur vos compétences professionnelles, quelque part, pour vous
faire taire.
Il y a des choses qu'il faut dénoncer. Et, comme
on le disait, on a des obligations déontologiques, on doit dénoncer. La loi sur
la maltraitance fait qu'on doit dénoncer aussi. Et on devrait pouvoir le faire
tout le temps, sans se poser de question : Est-ce que je fais bien, est-ce
que je ne fais pas bien? C'est une obligation déontologique de le faire, c'est humain de le faire, on ne peut pas
constater une situation et ne pas la dénoncer, mais, je vous dis, c'est très
fermé, c'est très, très compliqué. On le voit dans les plaintes qui touchent
nos membres.
Et puis je
pourrais vous parler d'un exemple très rapide auquel j'ai assisté au mois d'août
dernier. Une plainte est déposée par une famille, la famille demande une
sanction exemplaire contre la professionnelle en soins. L'employeur contacte le
syndicat pour dire : La personne va être congédiée et va être dénoncée à
l'ordre. Parce que ça aussi, c'est une chose très facile qu'on fait, on dénonce
à l'ordre. Bien, je vous dirais que, cette journée-là, quand on est arrivés en
version de faits, j'étais très contente d'avoir la commissaire aux plaintes qui
était là pour entendre ce qui se disait, parce qu'on a été obligés de faire la
démonstration, enfin, le syndicat à dû faire la démonstration de toutes les
tâches qu'avait la professionnelle en soins, qui est déjà... parce que cette
professionnelle en soins s'était déjà plainte qu'il y avait des situations
inadmissibles. Vous savez, quand vous avez 40 patients à qui vous devez
distribuer des pilules, le soir, et que vous avez une infirmière qui est
responsable de 220 patients, c'est inadmissible, c'est inadmissible.
Aujourd'hui, là, puis c'est un secret pour
personne, là, j'ai hâte d'entendre les autres associations en parler, d'ailleurs, une infirmière pour 150 patients,
est-ce qu'on trouve ça normal? Dans une chaîne de production, on ne
ferait jamais ça.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, madame. Je suis obligé de vous
interrompre. Alors, je vais céder la parole au député de Rimouski.
M.
LeBel : Bonjour. Moi, je
n'en reviens pas, là, quand vous dites que les gens ne connaissent pas à qui
d'adresser. Tu sais, on a tout parlé de ça il y a deux ans sur le projet
de loi... Ça, je tombe en bas de ma chaise.
L'autre élément, ce qu'on
parlait il y a deux ans, c'est la maltraitance organisationnelle. Puis ça,
personne ne voulait le reconnaître. Ça fait
que, quand, ils disaient, une infirmière ou un préposé pouvait voir quelqu'un
de la famille voler un aîné, ça, il faut que tu dénonces. Mais j'ai
l'impression que les législateurs, à l'époque, on avait juste ça en tête, mais
on n'avait pas en tête que quelqu'un pourrait dénoncer le manque de personnel
puis le manque de ratio, mais, tu sais, c'est ça qui fait qu'aujourd'hui ça
pète, tu sais, ça ne marche pas.
Puis là on
vous demande, à vous autres... on vous met de la pression puis on vous
dit : Vous vous devez la loyauté. Puis vous êtes déchirés par ça,
puis il y a des... Et vous ne pensez pas que les commissaires aux plaintes vont
avoir la même pression de loyauté?
Mme
Bédard (Nancy) : Bien, c'est
ce qu'on veut s'assurer qu'il n'arrive pas. Puis il faut absolument que le législateur, que la ministre soit
intransigeante à ce niveau-là. Dans tous les éléments du projet de loi, on doit
s'assurer de sécuriser l'ensemble des commissaires aux plaintes pour
s'assurer que jamais elles ne vivent ça.
Est-ce qu'elles vivent le conflit de loyauté à
certains égards? Bien, moi, je... Il y a certains établissements qui sont
beaucoup plus durs que d'autres, justement, sur ce qu'ils ont comme effet sur
nos professionnels en soins quand ils parlent. Donc, je peux peut-être prétendre
qu'ils sont de même pour tout l'ensemble des gens qui oeuvrent dans leur établissement.
Alors, peut-être qu'on devrait lever, de temps en temps, des drapeaux, si on
voit que, dans un établissement, il y a certaines difficultés ou il y a beaucoup
moins de plaintes, ou comment le traitement des plaintes... Il faudrait peut-être
regarder si ce n'est pas harmonisé, certains éléments puis des drapeaux, pour
se dire : Qu'est-ce qu'il se passe dans cet établissement-là? Mais,
certainement, la question est tout à fait pertinente à ça. Mais, en plus, la
commissaire, elle devrait même avoir le temps de pouvoir se promener dans les
centres d'activité. Et c'est surtout ça,
l'affaire. C'est que, là, elle est tellement juste sur les plaintes, mais, dans
son rôle, elle devrait être en mesure d'aller voir ce qui se passe et
d'émettre des recommandations, et ce rôle-là n'est à peu près pas fait, ce qui
est dommage. Alors, c'est un peu pour ça
qu'on se disait : Peut-être, effectivement, pour arriver à ce que vous
disiez, on devrait faire en sorte que, dans un volet qu'elle a à faire,
la commissaire, elle puisse même le faire en toute liberté. Mais ça, j'ai hâte
de voir ça.
M. LeBel : Mais il faut qu'il y ait
une équipe avec, qu'il y ait du monde.
Le Président
(M. Provençal)
: M. le député, je vais être obligé de vous
interrompre. Merci. Alors, je remercie les représentantes de la Fédération
interprofessionnelle de la santé du Québec pour leur contribution aux travaux
de la commission.
Je suspends
les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre
place, et je vais vous demander de reprendre place rapidement, s'il vous
plaît.
(Suspension de la séance à 17 h 07)
(Reprise à 17 h 10)
Le
Président (M. Provençal)
: Nous reprenons
nos travaux. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants
de la Fédération des centres d'assistance et d'accompagnement aux
plaintes. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission. Je vous invite à vous présenter et à débuter votre exposé.
Fédération des centres d'assistance et d'accompagnement
aux plaintes (FCAAP)
Mme Fortin (Manon) : Bonjour. Mon
nom est Manon Fortin. Je suis directrice générale de la Fédération des centres d'assistance, d'accompagnement aux
plaintes, et ça nous fait plaisir d'être ici aujourd'hui. Pour les besoins
de la cause, je suis accompagnée de Mme Nathalie Dubois, à ma droite, qui est
directrice générale adjointe de la fédération, et de M. Ian Renaud-Lauzé,
directeur général du centre d'assistance, d'accompagnement aux plaintes de la Capitale-Nationale.
Donc, merci pour votre accueil. Pour nous, c'est
un moment privilégié pour pouvoir, dans le fond, intervenir en regard du régime
d'examen des plaintes, sur les propositions du projet de loi, mais également
sur... On profite de l'occasion pour examiner de plus près le régime d'examen
des plaintes et attirer votre attention sur certains éléments qui, à notre avis,
mériteraient une bonification.
Donc, dans un premier temps, on vous a remis des
pochettes. Les centres d'assistance, d'accompagnement aux plaintes ont pour
mandat, de la part de la ministre, d'accompagner et d'assister les usagers du
réseau de la santé et des services sociaux, en vertu de l'article 76.6 et
76.7. Leur existence... Depuis plus de 25 ans, ils oeuvrent dans chacune
des régions du Québec. Ce sont des organismes communautaires. Et, au cours de
la dernière année, plus de 10 000 demandes de service... On est le
secret le mieux gardé, mais, par contre, les usagers nous trouvent, donc c'est une bonne nouvelle. On travaille particulièrement
en collaboration avec les commissaires aux plaintes, les professionnels
de la santé, qui sont notre source de référence principale. Donc, les
professionnels de la santé viennent voir les CAAP et réfèrent les usagers.
Donc, c'est une nouvelle, je pense, qui est importante à vous donner.
Donc,
au niveau de notre mémoire, différentes recommandations. Je vais commencer dès
à présent, étant donné que nous avons
seulement 10 minutes. Nous accueillons favorablement, bien sûr, le projet
de loi qui est déposé. D'ailleurs, au niveau de l'indépendance du
commissaire aux plaintes, au niveau des CHSLD privés, c'est quelque chose que
nous avions noté dans le cadre d'un mémoire déposé, je crois, dans le cadre du
projet de loi n° 115. Donc, c'est
certain que la question de l'indépendance du commissaire est importante afin
d'être en mesure d'avoir les coudées
franches pour émettre des recommandations et des conclusions. Donc, le fait que
le commissaire aux plaintes, dans les CHSLD privés, relève directement
de la direction générale était problématique.
Donc, de plus, nous,
nous souhaitons aller un peu plus loin au niveau de l'indépendance du
commissaire. On dit : Oui, effectivement, il y a des mesures, des éléments
que vous mettez en place dans le projet de loi au niveau de l'indépendance liée à la personne du commissaire,
et nous, on dit : Au niveau de l'établissement comme tel, le conseil
d'administration, particulièrement depuis la réforme de 2015 où le
président-directeur général, qui assure aussi la direction de l'établissement,
doit être en mesure, là, de... siège au sein du conseil d'administration en
ayant droit de vote, donc, et le commissaire
aux plaintes relève du conseil d'administration, donc, on dit : Il doit y
avoir des mesures qui soient mises en
place pour garantir cette indépendance-là, mais du côté de l'établissement.
Donc, ça, c'est bien important.
Pour
le prochain point, qui touche plus l'aspect de la maltraitance, je vais donner
la parole à mon ami Ian Renaud-Lauzé.
M. Renaud-Lauzé
(Ian) : Oui. Bonjour. Merci de nous recevoir. Pour ce qui est de la
maltraitance, depuis l'introduction du projet de loi visant à lutter contre la
maltraitance, ce qu'on peut constater, c'est qu'on a donné un double chapeau au commissariat aux plaintes, et
c'est sûr que ça donne une nouvelle voix, un nouveau sujet à aborder.
Cependant, on est devant une situation où on a des gens avec un double chapeau,
un chapeau régime examen des plaintes et un chapeau maltraitance, ce qui fait
qu'une fois rendu sur le terrain, des fois, là, on a de la confusion un peu
sur : Quand on s'adresse au commissariat aux plaintes? On s'adresse au
commissariat aux plaintes à quel sujet et de quelle façon?
Donc, on a vraiment
nos deux recours qui sont superposés, parce qu'il y a des éléments de
maltraitance qui ne pourront pas être traités par le commissariat,
nécessairement. Quand c'est une histoire d'une famille qui exploite une
personne âgée, ça doit sortir du commissariat. On s'entend que ce n'est pas la
personne la plus appropriée pour le faire. Mais, à d'autres occasions, quand on
parle, justement, de maltraitance organisationnelle, notamment, on a vraiment une confusion entre le régime d'examen
des plaintes, je dirais, et la lutte à la maltraitance. Peut-être que cette
superposition-là est nécessaire et même souhaitable, cependant, dans les
processus, ça mérite d'être clarifié. C'est ce qu'on constate beaucoup à ce
niveau-là.
D'un autre côté, étant
donné que la question de la maltraitance est traitée à même le régime d'examen
des plaintes, il y a la question du recours au Protecteur du citoyen. Est-ce
que le Protecteur du citoyen est prêt à accueillir des plaintes où la nature
est la maltraitance? Puis ça, c'est comme, on pourrait dire, une page blanche
dans la loi, actuellement, qui mène, justement, à de la confusion, alors que, normalement,
toute plainte dans le régime d'examen des plaintes devrait pouvoir être soumise
en deuxième instance au Protecteur du citoyen. Ça, c'est une des choses qui
nous préoccupe.
Mme Fortin (Manon) : Oui. De plus, ce qu'on se rend compte, c'est qu'au niveau
de la maltraitance, souvent,
la maltraitance, ça prend la forme d'un droit. Donc, je pense qu'une des
volontés du projet de loi n° 115 c'était de... puis Marie Beaulieu, de la
chaire de recherche, l'amenait beaucoup, c'était de rendre visible cette
maltraitance-là, au Québec, pour qu'on
puisse, justement, «agir sur». Et là, ce qu'on constate, c'est que, souvent,
cette maltraitance-là prend la forme
d'un droit lésé et va se transformer comme ça dans la consignation des données
au niveau des commissaires aux plaintes. C'est ce qu'on constate.
La difficulté aussi
de nommer la maltraitance organisationnelle, donc de mettre une étiquette sur
quelqu'un qui maltraite un patient, je vous
dirais que c'est quelque chose de difficile au sein de l'établissement, ça.
Donc, c'était pour compléter ce que
M. Renaud-Lauzé disait. Je vais transmettre la parole à Mme Dubois,
qui abordera l'aspect des plaintes médicales plus particulièrement.
Mme Dubois
(Nathalie) : Merci. Donc, si l'indépendance des commissaires aux
plaintes et à la qualité des services n'est pas toujours optimale, celle des
médecins examinateurs nous préoccupe également. En effet, une étude avait été
réalisée en 2016 auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux qui
révélait que 60 % des médecins examinateurs
exerçaient une autre fonction au sein même de l'établissement. Alors, le fait
d'avoir comme ça un double emploi au sein d'un seul établissement, selon
nous, nuit à la crédibilité du régime d'examen des plaintes, parce que ça
freine bon nombre d'usagers qui souhaiteraient porter plainte. Il nous semble
dès lors indispensable de mieux garantir l'indépendance des médecins
examinateurs.
D'un
autre côté, on est aussi conscients qu'il y a un problème au niveau du
recrutement des médecins examinateurs. C'est quelque chose que les CAAP
constatent sur le terrain. Et, ça aussi, ça entache la crédibilité du régime,
parce que cette pénurie entraîne des délais importants au niveau de l'examen
des plaintes. Dans l'un des CAAP, on a vu des
plaintes qui allaient jusqu'à trois ans d'attente, alors que le délai de
traitement, normalement, est de 45 jours. On invite donc le
gouvernement à travailler de concert avec, notamment, l'ACMPD et le Collège des
médecins afin de régler le problème de recrutement affectant le volet du régime
d'examen des plaintes.
Enfin,
on aimerait attirer votre attention sur les plaintes qui touchent les médecins
qui exercent dans les établissements privés, tels que les groupes de médecine
familiale ou les GMF-U, supercliniques également. Celles-ci ne peuvent pas être
traitées par les médecins examinateurs parce que c'est en dehors du cadre du régime
d'examen des plaintes. Et ça, ça prive les usagers du fait de faire valoir
leurs droits. Nous aimerions que ce type de plaintes puisse être englobé dans
le régime d'examen des plaintes, comme c'est déjà le cas pour certaines autres
structures dites privées comme les résidences privées pour aînés ou même les
organismes communautaires.
Mme Fortin
(Manon) : Donc, en ce qui concerne, je vous dirais... Je pense qu'il y
a une réelle possibilité d'interpeller le Collège des médecins et l'Association des conseils médecins, dentistes et pharmaciens pour
le recrutement, par exemple, de médecins retraités. Je pense qu'ils ont un intérêt, d'après les
discussions que j'ai eues avec eux, pour, justement, contribuer à amener
une solution au régime d'examen des plaintes, qui est une démarche beaucoup
moins lourde que celle au niveau de l'ordre professionnel.
Donc,
le point suivant que j'aimerais aborder avec vous touche particulièrement la table des acteurs du régime d'examen des plaintes et particulièrement
les acteurs du régime d'examen des plaintes qui concourent à l'assistance et à l'accompagnement, donc qui sont les
commissaires aux plaintes, les comités d'usagers et les centres d'assistance,
d'accompagnement aux plaintes. On croit qu'il y aurait matière à aller plus
loin afin de préciser le rôle de chacun, parce
que, même si on dit qu'ils font tous
de l'assistance et de l'accompagnement, le travail qui est fait par chacun
diffère d'une façon importante.
Il y a également
la promotion du régime d'examen des plaintes. Tout à l'heure, Mme Bédard
parlait et on entendait parler que, pour entreprendre une démarche de
plainte, c'est vraiment difficile, donc, parce que les gens ne sont pas
informés. Je vous dirais que ce n'est pas quelque chose qui est facile à
promouvoir. Le milieu ne favorise pas ça. Je vais laisser la parole à Ian
là-dessus.
Le Président (M.
Provençal)
: 20 secondes.
• (17 h 20) •
M. Renaud-Lauzé
(Ian) : Oui. Bien, c'est tout simplement... Pour faire très simple, on
parle du volume de plaintes, présentement, que les commissariats ont de la
misère à arriver. Imaginez quand ils ont la responsabilité, en plus, de
s'assurer d'informer la population et les usagers de leurs droits. C'est la même
chose en termes de lutte à la maltraitance. Ce qu'on constate, présentement,
sur le terrain, c'est que, dans la législation, c'est très clair, il y a un
devoir d'informer, de faire la promotion. Est-ce que ça se fait? Je vous laisse
sur cette question-là.
Le Président (M.
Provençal)
: Nous allons donc maintenant
poursuivre nos échanges avec Mme la ministre.
Mme Blais
(Prévost) : Je n'ai pas compris la question. Je n'ai pas compris votre
question à la fin, là, mais merci, M. Renaud-Lauzé, Mme Dubois et
Mme Fortin. C'est intéressant, ce que vous dites. Puis j'aimerais peut-être,
d'entrée de jeu, faire une rectification, un rectificatif. Oui, les
commissaires aux plaintes et à la qualité des services ont obtenu, je dirais,
une responsabilité supplémentaire quand, dans la loi n° 115,
on leur a imposé de prendre les plaintes concernant la maltraitance. Il n'y a
pas eu de sommes additionnelles pour accompagner les commissaires aux plaintes.
Ça, ça date de 2018. Je veux vous rassurer. Nous allons augmenter le nombre de
commissaires adjoints pour permettre,
justement, aux commissaires aux plaintes de pouvoir faire leur travail, parce que
ce n'est pas vrai qu'on va enlever
les commissaires aux plaintes dans les CHSLD privés, privés conventionnés, et
donner toute la responsabilité aux
commissaires aux plaintes et à la qualité des services sans ajouter des
effectifs, parce que sinon ce serait impossible.
Moi, je crois que
c'est possible de faire les deux, parce qu'une plainte, c'est une plainte. Et,
dans les cas de maltraitance, c'est très
subtil, la maltraitance, hein, c'est aussi la négligence, c'est aussi
l'alimentation quand ça arrive froid, quand ce n'est pas donné, c'est
très... tout ça, ça fait partie, je crois, d'un tout, il y a un deuxième recours,
et vous l'avez mentionné, Mme Dubois, c'est le Protecteur du citoyen.
Juste pour les CHSLD privés, le Protecteur du citoyen a quand même réglé
61 cas. Il y a 40 CHSLD privés et il y a 54 CHSLD privés
conventionnés. Il en a réglé 61 en un an. Donc, ça, c'est au-delà des
commissaires aux plaintes.
Ma question est la
suivante : Maintenant, comment voyez-vous votre rôle à l'intérieur, je
dirais, de... pas nécessairement de ce
projet de loi, mais là où vous pourriez travailler en harmonie avec les commissaires
aux plaintes, avec le centre
d'accompagnement aux plaintes et aussi avec le commissaire-conseil? Quand vous
parliez d'information... C'est aussi
le rôle du commissaire-conseil de faire en sorte d'informer dans les
établissements, de faire en sorte qu'on puisse connaître davantage le
commissaire aux plaintes, mais votre rôle à vous?
Mme Fortin (Manon) : Bien, dans le fond, notre rôle à nous, c'est vraiment d'aider l'usager
dans sa démarche, parce que, des
fois, c'est compliqué. Donc, les gens qui sollicitent notre aide au niveau des
différents centres d'assistance d'accompagnement
aux plaintes, où on a des conseillers qui sont des professionnels en relations
d'aide, là, qui accompagnent les gens, donc, on prend le temps de
vraiment rédiger leur lettre de plainte, les accompagner tout au long du
recours, que ce soit lors de la rencontre avec le commissaire aux plaintes, le
cas échéant, ou, en deuxième instance, avec le Protecteur du citoyen.
Mme Blais
(Prévost) : Donc, vous travaillez main dans la main...
Mme Fortin (Manon) : Absolument, oui, oui, on travaille avec les
acteurs du régime. Au niveau des comités d'usagers, même chose. Leur
travail est différent parce qu'ils sont plus au niveau bénévole, comme tel, mais
il reste qu'on a un bon partenariat qui s'est établi, surtout avec la table des
acteurs du régime d'examen des plaintes.
Au niveau du
commissaire-conseil, je vous dirais que nous, on voit vraiment son rôle pour...
Nous, on est au niveau national, comme Fédération des CAAP, et on est en mesure
d'observer, parce qu'on représente les centres d'assistance du Québec, que le rôle du commissaire-conseil va être
vraiment important. Je parlais avec Mme Charland, la responsable du regroupement des commissaires,
et je sais que c'est un besoin qu'ils ont, d'avoir un vis-à-vis national
qui prenne en charge certaines choses. Déjà,
eux autres sont bien occupés. Je regardais, juste pour préparer le mémoire
qu'ils vont venir présenter, bien, eux autres, là, pendant ce temps-là, ils ne
traitent pas de plaintes, hein? Donc, il y a de plus en plus nécessité pour les
commissaires d'avoir une normalisation de la pratique, d'avoir quantité
d'actions qui doivent être posées au niveau d'une animation, je dirais, de la
table des commissaires.
Donc, c'est un rôle
qui, à mon avis, est vraiment important et qui aurait même dû être mis en place
avant, avant. C'est un besoin que moi, je
constate, puis que les commissaires ont nommé à plusieurs reprises, parce que je suis en contact direct avec eux très
fréquemment.
Mme Blais
(Prévost) : On vient de nous dire, certains groupes nous ont
dit : Les commissaires aux plaintes devraient aller au-devant... Mais est-ce
que c'est réellement le rôle du commissaire aux plaintes d'aller au-devant ou
de recevoir la plainte?
Mme Fortin
(Manon) : Oui, Mme la ministre, parce qu'au niveau de la loi santé et
services sociaux, la loi prévoit que le rôle
de promotion du régime d'examen des plaintes et des droits des usagers
appartient au commissaire aux
plaintes. C'est spécifiquement mentionné à l'article 33 de la loi santé et
services sociaux. Donc, oui, ça fait partie de son rôle. Moi, je pense
qu'on doit mettre de l'avant une campagne nationale de sensibilisation sur les
droits en santé et sur le régime d'examen des plaintes qui appartiendrait au
ministère.
Et
on doit aussi donner les moyens, en termes de ressources financières, aux
commissaires pour faire leur travail de promotion du régime d'examen des
plaintes et de droits des usagers, parce qu'en ce moment... Nous, quand on
faisait... Moi, j'étais directrice générale du CAAP—Capitale-Nationale, et, quand je
faisais un travail de promotion en
collaboration avec les commissaires aux plaintes, c'est les CAAP qui payaient,
qui sont des organismes communautaires, parce que les commissaires
n'avaient pas une cent. Non, ça, ça n'a pas de bon sens. Si on veut faire la
promotion puis que ça ne soit pas juste lettre morte, on doit s'assurer de
donner les moyens pour pouvoir le réaliser, les moyens en termes de ressources
humaines, mais les moyens, aussi, en termes de ressources financières.
Mme Blais
(Prévost) : J'ai 75 questions à vous poser, mais je vais laisser
mes collègues...
Le Président (M.
Provençal)
: Qui prend la suite? La députée
de Soulanges.
Mme
Picard : Merci. Bonjour.
Vous avez parlé du recrutement des médecins examinateurs qui devrait se faire
plutôt à l'extérieur de l'établissement. Donc, vous suggérez, si je comprends
bien, que ce soit vraiment un médecin qui soit au niveau du ministère ou
bien... Où vous le voyez, votre médecin examinateur, exactement?
Mme Fortin
(Manon) : C'est-à-dire que, dans les faits, en ce moment, le médecin
examinateur est nommé au sein de
l'établissement. Mais la problématique, c'est le recrutement, c'est-à-dire
qu'il n'y a personne qui veut faire cette job-là, parce que,
contrairement aux autres, je dirais, médecins qui ont vu leur revenu augmenter,
les médecins examinateurs, eux autres, ils ont vu leur revenu diminuer. Donc,
il n'y a plus personne qui veut faire cette job-là. Donc, ça a de l'air bizarre
à dire, mais il y aurait peut-être une révision de la rémunération qui serait
nécessaire à ce niveau-là pour s'assurer d'avoir du monde qui veulent faire le
travail.
Puis, aussi, étant
donné qu'il n'y a personne qui se porte volontaire puis qui désire le faire,
bien, je sais que le ministère a fait un travail de recrutement pour être en
mesure de recruter des médecins. Ça a porté fruit, mais pas suffisamment, donc il y a un besoin de se doter de
moyens. Puis, moi, je me dis... pour avoir parlé avec M. Gaudreault,
du Collège des médecins, puis également
M. Arata, de l'association du CMDP, conseils médecins, dentistes et
pharmaciens, je leur ai dit : Je pense que vous avez avantage à ce
que le régime d'examen des plaintes fonctionne, hein? On s'entend qu'eux autres
ils aiment bien mieux que ça passe dans le régime d'examen des plaintes que ça
débarque au collège. Je me suis dit, ils ont un intérêt, alors peut-être qu'on
pourrait travailler ensemble pour que ça ne dérape pas, parce que, j'ai dit, en
ce moment, là, il y a vraiment du plomb dans l'aile au niveau du volet plaintes
médicales puis il y a une difficulté au niveau du ministère d'agir là-dessus,
parce qu'on dirait que les docteurs, c'est comme Dieu le Père. Donc, moi, je
pense que, si on veut que ça fonctionne, il faut faire quelque chose. Puis,
moi, je pense qu'il y a une résonance. Quand on leur dit : Ça vous
tente-tu que ça débarque au collège? Non, ça ne leur tente pas.
Bien là, moi, je fais
ce travail-là, de contact avec eux, mais je pense que le ministère pourrait
faire une bien meilleure job, parce que,
moi... On est des organismes communautaires, là. Ils nous aiment bien, là, on
va aller les voir, parce qu'ils sont
en train de travailler l'assistance et l'accompagnement, là, qu'ils veulent...
Donc, ils nous ont interpellés en ce
sens-là, mais il demeure qu'il y a un travail à faire à ce niveau-là, puis je
pense qu'ils ont des sensibilités. Donc, peut-être qu'ils pourraient
nous fournir des médecins retraités.
Mme
Blais (Prévost) : J'ai une question, puis, après ça, je passe la
parole, peut-être une dernière question. Le
Protecteur du citoyen, tout à l'heure, je lui ai demandé : Est-ce que le
fait que les commissaires aux plaintes relèvent du conseil d'administration, et on sait que c'est dans un établissement
puis le P.D.G... est-ce que ça vous dérange? Elle dit : Non, les commissaires aux plaintes ne
relèvent pas des présidents-directeurs généraux des CISSS et des CIUSSS.
Est-ce que ça, ça vous conforte?
Mme Fortin
(Manon) : Bien, nous, ce qu'on a observé, en tout cas, quand on a
scruté la loi, on a vu que le P.D.G. de
l'établissement, il siège au conseil d'administration puis il a le droit de
vote, puis c'est le conseil d'administration qui engage les
commissaires. Donc, on s'est dit : Oui, il y a peut-être une petite
affaire, là, qu'on a besoin de ficeler pour s'assurer de bien, bien baliser
l'indépendance du commissaire, là.
• (17 h 30) •
Mme
Blais (Prévost) : ...lui demander de se retirer quand le commissaire
aux plaintes vient au conseil d'administration?
Mme Fortin
(Manon) : Bien, je ne le sais pas. Puis, en tout cas, chaque conseil
d'administration pourrait se pencher sur, justement, des moyens à mettre en
place à cet effet-là.
J'aimerais revenir
sur... Parce que, tantôt, on était en arrière puis on entendait : Au
niveau du comité de vigilance, il y a-tu un danger, commissaire-conseil? Non,
pas du tout, ce n'est pas du tout dans la même cour, là. Il faut s'entendre,
les commissaires aux plaintes, au niveau du régional ou du local, ils sont sur
le plancher des vaches puis ils travaillent avec les comités de vigilance. Le
commissaire-conseil est au niveau du palier national puis il travaille avec les
commissaires mais il ne s'en va pas dans le traitement des plaintes. Donc, vraiment,
il n'y a pas de crainte à y avoir, c'est deux choses complètement différentes,
ça.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la députée de Roberval.
Mme
Guillemette : Merci,
M. le Président, merci. Votre première recommandation, vous parlez de se
doter de moyens concrets pour garantir l'indépendance. De quels moyens,
outre la présence dans des lieux non administratifs, outre ça, quels moyens
concrets on pourrait mettre en place dans ce projet de loi là pour...
Mme Fortin
(Manon) : Bien, je pense que les conseils d'administration pourraient
se pencher sur l'analyse de ce défi-là, je dirais, donc, pour, justement,
mettre en place des mesures en ce sens-là. Je sens que mon ami Ian a quelque
chose à dire.
M. Renaud-Lauzé
(Ian) : À ce sujet-là, c'est juste... La chose qu'il faut
conscientiser, le commissaire aux plaintes,
c'est quand même quelqu'un qui va avoir une collaboration intensive avec les
différentes directions d'un CISSS ou d'un CIUSSS. Cette personne-là,
justement, par son rôle, quand même, qui est un rôle critique dans le réseau,
il faut lui garantir que, dans son rapport avec les différents intervenants de
l'établissement, il ait toutes les marges de manoeuvre pour faire son travail.
Généralement, il y a des commissaires qui réussissent très bien à définir leur
cour, leur carré de sable, mais est-ce que c'est uniformisé partout au Québec?
Est-ce que le carré de sable est le même pour chaque commissaire au Québec?
Là-dessus, on a pu voir des variations qui méritent, justement, de s'assurer
que l'indépendance, du point de vue du rapport à l'établissement, soit aussi
garantie, pas seulement qu'il n'y ait pas de conflit d'intérêts par rapport à
la personne elle-même et son portefeuille d'actions.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard :
Excusez-moi, j'aimerais savoir, au niveau de vos relations avec les usagers,
avec les patients, c'est quoi, le plus grand enjeu que vous avez quand vous
faites vos relations avec eux? La langue? Je parle... Est-ce qu'il y a une
barrière qui est principale, là, que vous...
Mme Fortin
(Manon) : Je vais te laisser répondre là-dessus.
M. Renaud-Lauzé (Ian) : Si je viens par rapport à la clientèle
particulière qui est liée au projet de loi actuel — puis
ça pourrait être la même chose pour les résidences privées pour aînés — la
principale composante, le premier, le principal enjeu, c'est la peur, c'est les
craintes, qu'elles soient fondées ou pas. Là-dessus, je ne veux pas... Des
fois, c'est juste une crainte de représailles qui n'est peut-être même pas
actualisée, qui n'est pas réelle, sauf que
cette crainte-là est présente. Donc, lorsqu'on est devant une vraie situation,
cette crainte-là est encore présente, donc c'est réussir à...
(Interruption) ...excusez-moi, détricoter ces craintes-là pour pouvoir
permettre à la personne de faire sa démarche.
Puis on a un enjeu,
justement, quand on est dans la zone grise, où ce n'est plus une question... la
personne est apte, elle n'est pas sous tutelle, elle n'est pas sous curatelle,
mais elle est vulnérable. Puis justement c'est une zone grise, justement, qui
demande, des fois, justement, qu'est-ce qu'on fait collectivement pour
s'assurer que les droits de ces personnes qui
sont vulnérables sont respectés. Puis on a encore un enjeu là à comprendre
c'est quoi, la vulnérabilité, puis c'est quoi, les facteurs de
protection qu'on donne aux personnes. Puis, les CAAP, c'est ce qu'on essaie de
faire, justement, c'est de développer... Des fois, je dis à mon équipe :
Comment qu'on fait pour mettre de la ouate autour des
personnes pour mieux les accompagner, puis qu'elles se sentent bien dans leurs
démarches? Mais on a vraiment un gros défi de dépasser les craintes de base.
Le Président (M.
Provençal)
: Mme la ministre.
Mme Blais (Prévost) :
Oui. Il faut bien comprendre aussi que, dans nos établissements, actuellement,
qu'ils soient privés, privés conventionnés, publics, 80 % des personnes
hébergées ont des troubles neurocognitifs majeurs, donc il y a beaucoup de
plaintes qui proviennent des familles et pas nécessairement des personnes.
Écoutez, je visite des CHSLD régulièrement,
je vois cette incapacité de pouvoir se plaindre, donc il faut que les familles
soient présentes et que les familles
puissent aussi porter plainte. Donc, c'est ce que vous voyez, également, à
travers le travail que vous faites?
Mme Fortin (Manon) : Oui,
absolument, beaucoup, quand on parle des aînés en CHSLD, absolument, ce sont souvent
les familles, les représentants légaux qui vont faire la démarche vers nos...
(Interruption)
Le Président (M. Provençal)
: On va devoir suspendre. Vous allez m'excuser, madame, on
est appelés au salon bleu. Mais, avant de quitter pour le salon bleu, je vais
avoir besoin de votre consentement pour déborder du temps qu'on avait déjà
prévu pour pouvoir permettre de terminer avec ce groupe. Consentement? Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 35)
(Reprise à 17 h 59)
La
Présidente (Mme Guillemette) :
Bonjour, tout le monde. Nous reprenons nos travaux. Donc, il nous reste
1 min 50 s à la partie gouvernementale. Avez-vous encore des
questions?
Mme Blais
(Prévost) : Écoutez,
là, vous me prenez de court, hein? Je vais laisser Mme Blais, l'autre
Mme Blais, poser la question.
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) : Lorsqu'il
y a une plainte portée par un bénéficiaire, au moment de la plainte — et
puis le bénéficiaire va se sentir menacé — qu'est-ce que vous faites à
ce moment-là? Est-ce qu'il y a des recours? Est-ce qu'il y a une protection?
Parce qu'il y a souvent de l'intimidation, hein, suite à une plainte, alors
quelles sont les procédures ou la façon de faire?
• (18 heures) •
Mme Fortin
(Manon) : La loi prévoit,
dans le fond, que le commissaire, dans le cas de représailles, doit intervenir
sur-le-champ. Donc, c'est sûr qu'à partir du moment où il y a quelqu'un qui est
présent qui regarde la situation, ça dérange un petit peu, hein, donc ça se
replace, je dirais, les choses qui ne sont pas nécessairement correctes.
Par contre, des fois, les représailles se font
de façon insidieuse. Donc, il arrive, particulièrement en milieu d'hébergement,
où, là, la personne est captive pour ses soins et ses besoins, des besoins qui
sont vraiment essentiels, donc, là, ça devient... c'est vraiment délicat, là,
tu sais.
Donc, c'est
pour ça que je vous dirais que le rôle des centres d'assistance est important parce que,
ça, ça permet de rétablir l'équilibre des forces. C'est ce qu'on
observe, là. Donc, quand on est présents... parce qu'on est quand même
assez soft, nous, on ne navigue pas dans la défense de droits, on est vraiment
dans l'assistance et l'accompagnement
et on initie des moyens pour donner, je dirais, le pouvoir à la personne de
pouvoir agir sur sa situation, quand c'est possible, ou son représentant. Donc,
je pense que ça, ça peut faire une différence. Mais il reste qu'il y aura
toujours cette situation-là, où la personne
en hébergement, elle est plus vulnérable aux représailles, donc, puis on devra
toujours avoir une vigilance à cet effet-là, toujours.
La
Présidente (Mme Guillemette) : Merci beaucoup. Je donnerais maintenant la parole à la députée de Fabre.
Mme Sauvé : Merci, Mme la
Présidente. Alors, merci à vous, Mme Fortin, Mme Dubois,
Ian Renaud-Lauzé. Merci à vous, à vous
trois, pour votre présentation. Désolée de cette interruption, mais nous avions
un devoir à effectuer.
Alors donc, écoutez, moi, je veux revenir...
parce que vous avez commencé à parler un peu du terrain, je crois beaucoup à la
forme d'accompagnement que vous offrez via, bien sûr, votre mission, votre
mandat d'organisme communautaire, et vous avez commencé à, bien sûr, dire que,
quand vous rencontrez les aînés, les résidents ou leur famille, c'est beaucoup
la réalité, la peur des représailles qui est un peu à l'avant-plan.
J'aimerais ça
vous entendre vraiment, là, quand vous parlez à vos membres dans toutes les
régions du Québec où il y a les CAAP, j'aimerais ça vous entendre
vraiment sur d'autres réalités. Est-ce qu'il y a, par exemple, des besoins d'information? Parce qu'on l'a bien nommé
depuis ce matin que parfois les rôles sont... il y a de la confusion, les rôles ne sont pas clairs. Alors, quels sont
les autres besoins exprimés par les familles, les aînés, les résidents auprès
de vos intervenants des CAAP?
Mme Fortin
(Manon) : Une chose qui est sûre, j'aimerais revenir sur le fait... Il
ne faut pas penser, là, qu'à chaque plainte il y a un risque de représailles.
Ce serait faux de dire ça. O.K.? Donc, au niveau... Je vous dirais que les CAAP
vont donner aussi beaucoup de séances d'information. À vrai dire, le rôle de
promotion du régime en ce moment, là, c'est les centres d'assistance qui le font
par des actions, des séances d'information auprès des organismes communautaires, auprès des groupes d'aînés,
particulièrement en ce moment, là, aussi dans les résidences privées pour
aînés. Donc, il y a un travail qui se fait au niveau des séances d'information.
Et peut-être que je laisserais Ian compléter par
rapport à la question sur... plus au niveau de l'intervention. Pourriez-vous
répéter, pour les besoins de M. Lauzé, la question?
Mme Sauvé : Certainement. Moi,
je veux en savoir un peu plus sur les réalités terrain qui sont nommées par les
résidents, les aînés qui vont vers les intervenants des CAAP, qui sont vos
membres.
M. Renaud-Lauzé (Ian) : Bien,
premièrement, il peut y avoir aussi les proches, hein, on en parlait tantôt, il
y a souvent des représentants. C'est sûr que ça va être la qualité des services
souvent, les rapports humains, le sentiment de se faire traiter comme un
numéro, beaucoup, là, on s'entend, tu sais, justement, la distribution des
médicaments, ces différents éléments là qui sont faits sous pression,
rapidement, puis qu'on doit... le plus vite possible, et qui met souvent des
risques d'erreur. Donc, c'est sûr que ces situations-là qui ont déjà été
relatées vont revenir chez nous.
L'autre côté, je vous dirais, surtout quand on
parle du secteur privé qui est à même le réseau, là, je parle des résidences
privées pour aînés, les établissements, il y a aussi une relation d'affaires.
Cette relation d'affaires là, je vous
dirais, elle est assez brusque pour des gens qui sont vulnérables. Exemple, en
résidence privée pour aînés, quand c'est le temps de signer un bail, il
y a beaucoup de résidences, comment ça fonctionne, c'est qu'on fait la tournée
des portes, puis : Signez votre renouvellement là. Dans la loi sur... dans
le Code civil, c'est très clair, généralement, les gens doivent avoir un mois environ pour réfléchir : Est-ce que
cette hausse de loyer, ces changements-là à mes services, ils sont-tu
corrects ou pas? On ne donne pas ce temps-là. On ne s'assure pas que l'aîné est
accompagné d'un proche pour bien comprendre les modifications qui ont été
faites au contrat qui le lie à la résidence. Ça, c'est des exemples, justement,
là, de situations qu'on peut avoir sur le terrain.
Mme Sauvé : Est-ce que,
justement, quand vous avez des besoins qui sont exprimés comme ça, vous faites
des liens de partenariat avec... je pense, par exemple, aux ACEF, par rapport
aux questions financières? Est-ce qu'il y a d'autres liens de partenariat que
vous élaborez en lien avec les besoins qui sont exprimés sur le terrain?
M. Renaud-Lauzé (Ian) : Bien, en
fait, on a un mandat aussi, au niveau des résidences, pour les baux en résidence privée pour aînés.
On a ce mandat-là. Mais c'est clair qu'on essaie justement d'améliorer notre collaboration avec le CIUSSS. Au-delà du...
(Interruption) ...excusez-moi, du commissaire aux plaintes, c'est aussi les
autres intervenants au niveau du CIUSSS qui vont agir à même les résidences,
parce qu'eux aussi, c'est des gens qui sont témoins de situations. Même si
c'est à l'extérieur du CIUSSS comme tel, exemple, ou du CISSS, un intervenant
du maintien à domicile va se présenter dans
les résidences privées pour aînés. Donc, ces gens-là aussi doivent faire partie
de la solution, puis que l'information soit
transmise, entre autres, dans un processus d'assistance, d'accompagnement,
quand il y a une situation qui est inadmissible.
Mme Sauvé : Je pense que vous avez
un rôle clé à travers tout le parcours, le cheminement de la démarche de la
plainte, parce que vous êtes effectivement dans un mode d'intervention, ce qui
peut vous distinguer par rapport aux autres acteurs. Moi, j'ai été, d'abord,
très positivement surprise de voir le nombre d'accompagnements que vous faites.
10 000, là, c'est vraiment... c'est très éloquent.
Mme Fortin
(Manon) : Ce sont des
demandes de services. Donc, à
l'intérieur de ça, il y a
les accompagnements, il y a également les demandes d'information et les demandes
de soutien-conseil. Donc, il y a trois types de services, c'est important
de le spécifier.
Mme
Sauvé : O.K.,
oui, merci pour la précision. J'ai été surprise, d'un autre côté,
d'apprendre que la majorité de
vos références, ça vient des professionnels de la santé.
Mme Fortin (Manon) : Et des commissaires
aux plaintes.
Mme Sauvé : Et des commissaires aux
plaintes.
Mme Fortin (Manon) : Numéro un, commissaires
aux plaintes...
Mme Sauvé : O.K., d'accord.
Mme Fortin (Manon) : ...et
professionnels de la santé, c'est les deuxièmes.
Mme Sauvé : O.K., c'est les
deuxièmes.
Mme
Fortin (Manon) : Oui.
Mme Sauvé :
Vous avez, dans votre mémoire, à la recommandation 9, malgré les bons
liens qui se tissent, et tout ça, vous souhaitez qu'il y ait une meilleure
coordination par rapport à tous les acteurs du régime d'examen des plaintes.
Alors, est-ce que vous pouvez qualifier vraiment des solutions qui
permettraient concrètement de bonifier, parce qu'il y a un manque
d'information, parce que ce n'est pas aussi fluide que vous le souhaiteriez,
mais qu'est-ce qui, concrètement, pourrait améliorer cette coordination entre
les différents acteurs?
Mme Fortin
(Manon) : Bien, je vous dirais, premièrement, il faut savoir qu'il y a
une étude comparée du régime d'examen des plaintes entre le Québec et la
France, qui vient tout juste de sortir, en novembre 2019, qui nous a... qui va
dans le même sens de ce qu'on amène, donc la nécessité de préciser le rôle des
intervenants qui ont, je dirais, comme fonction d'assister et d'accompagner. Le
Protecteur du citoyen disait : Le commissaire aux plaintes, il a un rôle d'assister, pour assister et
accompagner. Mais, dans le fond, selon leur analyse, c'est 10 % des
commissaires, c'est 10 % du
travail des commissaires d'assister et d'accompagner, puis ils n'ont pas le
temps, ils n'ont pas le temps, ça va vite.
Nous,
notre rôle est vraiment concentré à ce niveau-là, et ce sont des
professionnels. L'assistance et l'accompagnement
des comités d'usagers, individuels, c'est plus des bénévoles. Donc, il y a le
défi de la connaissance au niveau des droits, au niveau de l'assistance,
au niveau de... donc, qui n'est pas la même. Donc, chacun a comme... Moi, je me dis : Bien, c'est sûr que les
centres d'assistance, c'est leur tasse de thé, bien, pourquoi qu'on ne
s'entendrait pas pour comment on va fonctionner ensemble? Quand ça
devient trop complexe, là, puis c'est un comité d'usagers, pitche-le donc au CAAP, hein? Le CAAP, lui, c'est
sa tasse de thé. Quand le commissaire, ça devient trop complexe... Par exemple, quand j'étais au CAAP—Capitale-Nationale, je ne sais pas si c'est encore
comme ça, toutes les plaintes médicales étaient transférées au CAAP,
systématiquement.
Donc,
il y a comme des façons de faire qui pourraient être établies pour que chacun
se sente bien. Parce que, moi, je sais qu'il y a des bénévoles de comités
d'usagers qui ne se sentent pas à l'aise dans des plaintes complexes, puis
assister, accompagner, pour eux, ça consiste en : Je vais aller mener
l'usager au commissaire, mais on dit qu'on l'assiste, on l'accompagne. Tandis
que, nous autres, l'assistance, l'accompagnement, beaucoup plus complexe que
ça, là.
Donc,
je me dis, c'est comme un fourre-tout, le mot «assistance et accompagnement».
Peut-être qu'on aurait avantage
à définir un peu plus les rôles pour, par la suite, en faire la promotion auprès
des usagers. Parce que, là, en ce moment, vous rentrez dans un établissement,
là... Je suis rentrée dans un centre hospitalier dernièrement, je cherchais les
pancartes, moi, aucune pancarte Régime d'examen des plaintes, aucun dépliant.
Où est-ce qu'ils sont? Il y a une difficulté importante d'atterrir sur le
plancher des vaches pour informer les gens que ça existe, ça. Ça, c'est
vraiment essentiel.
Puis ça fait
longtemps qu'on en parle avec la Direction de l'éthique et de la qualité, avec
qui on... c'est notre interlocuteur. Puis je pense qu'il y a une volonté, mais,
en même temps, il faut débloquer des fonds pour faire ça. Et puis je pense
qu'on a peur aussi que, si on met trop d'affiches, trop de dépliants, que tout
le monde aille se plaindre. Bien, peut-être qu'il faut dépasser ça. Puis les
gens, je veux dire, leur objectif, ce n'est pas nécessairement ça.
Puis
il ne faut pas oublier que le régime d'examen des plaintes, sa vocation
première, ce n'est pas l'amélioration de la qualité des services. On l'entend
beaucoup dire, ça. Ce sont le respect des droits des usagers. Les législateurs,
à l'origine, c'est ça qu'ils voulaient. Ça doit garantir le respect des droits
des usagers et, par ricochet, l'amélioration de la qualité des services. Donc,
il y a vraiment un travail de promotion important à faire.
• (18 h 10) •
Mme Sauvé :
Est-ce qu'il me reste du temps?
Le Président (M.
Provençal)
: Il vous reste
1 min 30 s.
Mme Sauvé :
Ah mon Dieu! Je vais essayer de faire ça rapidement. Écoutez, vous parlez...
puis c'est tellement important, l'information, la confusion des rôles.
Moi, j'aimerais ça, là, pour les gens qui nous écoutent, vraiment, que vous
nous expliquiez, là, le parcours type de quelqu'un qui s'adresse à vous, que ça
vienne, la référence, d'un professionnel de la santé ou d'un commissaire,
comment ça se passe, dans les étapes, pour nous expliquer un petit peu la
complexité du parcours, mais, dans la réalité, ça ressemble à quoi au
quotidien.
Mme Fortin (Manon) : Bien, je pourrais peut-être transmettre la parole à Ian, mais je vais
commencer. D'abord, dans un premier temps, il faut savoir que les
centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes, leur majeure, là, c'est
les centres hospitaliers et la direction de la protection de la jeunesse. Donc,
ça, particulièrement, là, il y a un gros
volume qui vient à ce niveau-là. Il y a aussi... On est beaucoup identifiés aux
aînés. Oui, il y a beaucoup d'aînés qui sollicitent notre aide, mais il
reste que notre majeure, elle est à ce niveau-là. Mais dans les centres
hospitaliers, on voit beaucoup d'aînés, hein? Souvent, les maladies chroniques,
tout ça, souvent, ils sont bien là.
Donc,
je pense que Ian est bien placé pour expliquer le parcours d'un usager. Je
pourrais le faire, mais j'aime bien...
M. Renaud-Lauzé
(Ian) : Eh, mon Dieu! Aïe! Un méchant défi.
Mme Fortin
(Manon) : «Let's go».
M. Renaud-Lauzé (Ian) :
Grossièrement, c'est que nous, on accueille la personne puis on écoute c'est
quoi, son histoire. Puis l'idée, c'est de mettre en valeur son histoire, puis
ne pas que la personne ait le tracas administratif de la démarche de plainte.
Les conseillers prennent en charge le côté... le tracas administratif pour
faire cheminer finalement l'histoire de la personne, justement, pour simplifier
au maximum le poids de la démarche qu'a à faire la personne, juste ramener son
histoire. Est-ce que c'est assez simple et court? Ça ressemble pas mal à ce
qu'on va faire. Mais on va la suivre à toutes les étapes de sa démarche,
justement, pour retirer ce fardeau administratif là.
Le Président (M. Provençal)
: Merci.
Mme Fortin
(Manon) : Que ce soit préciser l'objet de sa plainte, que ce soit
l'accompagner, la préparer pour la rencontre, souvent, expliquer les
conclusions. C'est très... C'est difficile à comprendre. Donc, il y a ça aussi.
Donc, il y a différentes choses, mais qui sont très, très concrètes, là.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, madame. Alors, je vais céder la parole au député de
Rimouski.
M. LeBel :
Merci, M. le Président. Bonjour.
Mme Fortin
(Manon) : Bonjour.
M. LeBel :
Tantôt, vous avez dit que vous aviez de la difficulté pour attirer des médecins
examinateurs, que c'était compliqué. On pourrait leur proposer de dealer la
prime à l'oxygène. Pour eux autres, ça pourrait être pas pire, pour en amener
quelques-uns.
Il y a deux, trois
ans, là, quand j'ai... je ne me rappelle pas, c'est peut-être deux ans, là, la
loi n° 115, là, on disait, au début, qu'il y avait au
moins 12 à 15 portes d'entrée pour... puis qu'il fallait corriger ça puis
essayer d'en ramener au moins une ou deux, gros max, pour que le monde soient
démêlés. Aujourd'hui, là, comment... Si vous aviez à évaluer ça sur une échelle
de 10, un, on n'a rien amélioré, puis, 10, on a amélioré des choses?
Mme Fortin (Manon) : O.K. Je ne suis pas sûre que ce système de pointage là permet
d'apporter les nuances nécessaires, mais disons que... je dirais que... je
mettrais peut-être une cote de trois, quatre sur 10 en ce moment, ce qu'on a
amélioré...
M. LeBel :
Ah oui?
Mme Fortin
(Manon) : ...dans le sens qu'on a commencé à nommer ça. On sent qu'il
y a un inconfort sur le terrain. On ne sait pas trop comment nommer ça, ce
n'est pas toujours évident. Ça passe souvent dans la trappe du régime d'examen
des plaintes, droits des usagers. Ce n'est pas évident, là, bon, et puis...
Mais je pense qu'il y a une volonté d'essayer de mettre en place des choses.
Mais je pense que la mentalité collective évolue, évolue. Donc, c'est un peu
ça.
M. LeBel :
...
M. Renaud-Lauzé
(Ian) : Je pourrais...
Mme Fortin
(Manon) : Oui, peut-être, tu veux compléter?
M.
LeBel : Bien, peut-être, rapidement, avant, tu sais, sur
l'indépendance des commissaires, vous proposez d'avoir des enveloppes dédiées,
que ça leur permettrait de travailler dans leur... L'enveloppe serait
déterminée par qui?
Mme Fortin
(Manon) : Bien, je pense que le ministère pourra déterminer
l'enveloppe.
M. LeBel :
Ce ne serait pas par les CISSS...
Mme Fortin (Manon) : Bien, c'est sûr que ça doit être probablement à même le budget des
centres intégrés. En ce moment, c'est comme ça, là. Je pense que c'est des
technicalités qui pourraient être définies plus par le ministère.
M. LeBel :
O.K. Puis une dernière question rapidement, je n'ai pas beaucoup de temps, ça
fait que j'y vais en rafale. Quand vous accompagnez des gens pour des plaintes,
comment on peut prendre en considération les différences des personnes? On
n'accompagne pas une femme ou un homme de la même façon. Et moi, j'ai rencontré
des gens des communautés LGBTQ qui trouvent ça bien difficile, que, des fois,
ils ont passé leur vie à sortir du placard,
puis ça a été compliqué, puis là ils rentrent en résidence, ça recommence, ils
ont... Comment vous... Comment on ajuste nos interventions?
Mme Fortin (Manon) : Bien, nous, on est très sensibles à ça, parce
qu'on a des collaborations qui sont établies avec la Fondation
Émergence, notamment, qui est directement liée aux gens qui... les personnes
LGBT. Donc, nous, c'est vraiment... Ce sont
des... Nos gens, nos conseillers, ce sont des travailleurs sociaux, des conseillers en orientation. Donc, ils ont un positionnement intérieur d'accompagnement, déjà, en partant, donc le jugement, ce n'est pas quelque chose qui fait partie, je dirais,
de notre bagage.
En
plus, vous savez, nous, on accompagne beaucoup, beaucoup de parents au niveau de la direction de la protection de la jeunesse, on vient d'ailleurs de déposer un mémoire, là,
et on fait ressortir des choses. Puis vous savez, dans ces cas-là, souvent, on
voit toutes sortes de situations qui sont très, très difficiles. Donc, s'il y a
eu un jugement à s'exercer, peut-être qu'on l'aurait fait là. Non, pas du tout, ça ne
fait pas partie de notre ADN, comme organisation. Donc, cet accompagnement-là
inconditionnel, en toutes circonstances... on est comme du bon pain, finalement.
M. LeBel : Merci beaucoup.
Le
Président (M. Provençal)
: Je remercie les membres de
la Fédération des centres d'assistance et d'accompagnement
aux plaintes pour leur contribution à nos travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
19 h 30, où elle accomplira un autre mandat. Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 18 h 16)