(Onze
heures trente-cinq minutes)
Le Président
(M. Provençal)
: À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je vous souhaite la bienvenue, et je
demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
La
commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et
auditions publiques sur le projet de
loi n° 31, Loi modifiant principalement la Loi sur la
pharmacie afin de favoriser l'accès à certains services.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Arseneau
(Îles-de-la-Madeleine) est remplacé
par M. Gaudreault (Jonquière).
Auditions (suite)
Le Président (M. Provençal)
: Merci
beaucoup. Ce matin, nous entendrons
les groupes suivants : l'Association
professionnelle des pharmaciens salariés du Québec
et l'Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec.
Comme
la séance a commencé à 11 h 35, y a-t-il consentement pour
poursuivre nos travaux au-delà de l'heure prévue, c'est-à-dire jusqu'à
13 h 05? Consentement. Merci beaucoup.
M. Zanetti :
Au-delà de 13 heures, vous dites?
Le Président
(M. Provençal)
: 13 h 05,
un cinq minutes additionnel, compte tenu que les groupes sont là.
M. Zanetti :
Ah! O.K., cinq minutes. Oui, c'est bon. J'avais compris plus, désolé.
Le Président
(M. Provençal)
: Donc, j'ai votre
consentement?
M. Zanetti :
Oui.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci
beaucoup, M. le député de Jean-Lesage.
Je
souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite à vous présenter puis à commencer
votre exposé.
Une voix :
...
Le Président (M. Provençal)
: Pharmaciens salariés, excusez. Merci
beaucoup de m'avoir... j'ai passé une
feuille. À vous la parole.
Association professionnelle des
pharmaciens
salariés du Québec (APPSQ)
Mme Savoie (Karina) : D'accord. Alors, merci beaucoup, M. le Président. Mme la ministre, Mmes
et MM. les députés, je me présente, Karina Savoie, pharmacienne et
présidente de l'Association professionnelle des pharmaciens salariés
du Québec, l'APPSQ. Je suis accompagnée aujourd'hui par Mme Stéphanie
Roussin, pharmacienne et trésorière de l'association.
Nous tenons à remercier, aujourd'hui, la Commission de la santé et des services
sociaux pour leur invitation.
L'APPSQ
est un collectif de pharmaciens qui travaille avec coeur à soutenir ses membres
et à favoriser l'avancement de la
profession. Notre association représente des pharmaciens qui travaillent en
pharmacie communautaire, en GMF ou de
tout autre milieu mais qui ne sont pas propriétaires. Au 31 mars 2018, la
province de Québec comptait près de 9 500 pharmaciens. Plus de la moitié sont des pharmaciens salariés
qui pratiquent en milieu communautaire. Ainsi, les pharmaciens représentés
par l'APPSQ sont majoritaires dans la profession et sont aussi au centre de
l'action.
Dans le cadre de la
loi n° 90, le législateur a confié une responsabilité
importante au pharmacien, celle de la surveillance
de la pharmacothérapie. Cependant, on s'est rapidement rendu compte qu'on a
oublié de lui fournir certains outils pour
agir. On a fait un premier pas dans la bonne direction, le projet de loi n° 41, en 2015. Les pharmaciens ont démontré qu'ils étaient prêts pour le changement, prêts à appliquer les notions
qu'on leur avait enseignées à l'université. En effet, plus de 92 % des pharmaciens ont suivi la
formation réglementaire, et près de 800 000 actes ont été effectués durant
la dernière année. Maintenant, avec le projet de loi n° 31,
on va encore plus loin.
Mme Roussin
(Stéphanie) : D'entrée de jeu, l'APPSQ tient à exprimer son
enthousiasme face à ces nouvelles activités. Elles permettront au pharmacien d'exercer pleinement
son champ d'expertise, au grand bénéfice des patients. Nous sommes d'avis qu'il s'agit d'une avancée
importante pour la collaboration professionnelle et, ultimement, pour l'efficience du système de santé québécois.
L'APPSQ
appuie la démarche de la ministre quant à l'accessibilité élargie à la vaccination dans une optique de
santé publique. De par sa proximité et ses
heures d'ouverture étendues, les pharmacies communautaires sont des
lieux de choix pour la vaccination.
L'enquête québécoise sur des déterminants de la vaccination, en 2016,
a révélé que seulement 24 %
des malades chroniques de 18 à 65 ans se sont fait vacciner contre l'influenza
en 2015‑2016. Ce taux vaccinal est nettement
inférieur à la cible de 80 %. L'APPSQ est convaincue que le pharmacien est
donc un allié pour rejoindre cette clientèle à risque, que ce soit pour le vaccin
contre la grippe ou la pneumonie. Il s'agit là d'un rattrapage face aux
pharmaciens du reste du pays et même d'Amérique du Nord. Pour l'APPSQ,
cet acte s'effectue en toute complémentarité des autres professionnels offrant
déjà le service. C'est avec les efforts concertés que nous atteindrons les
objectifs fixés.
Le projet de
loi vient aussi corriger et assouplir la législation actuelle quant à la
possibilité de prolonger et d'ajuster une
ordonnance, peu importe le prescripteur, qu'il pratique ou non au Québec.
L'élimination de cet irritant fera une réelle différence au quotidien. Actuellement, les pharmaciens doivent rediriger
leurs patients vers leur GMF ou leur clinique externe pour prolonger des
ordonnances faites par une IPS. L'APPSQ est donc ravie de l'ajout de cette
disposition.
• (11 h 40) •
Par ailleurs,
l'APPSQ applaudit l'ajout de la mention «évaluer la condition physique et
mentale d'une personne dans le but
d'assurer l'usage approprié de médicaments». Cet ajout actualise la Loi sur la pharmacie
de façon à refléter les standards de pratique actuels et la démarche de
soins pharmaceutiques. Ceux-ci demandent aux pharmaciens de procéder à une collecte de renseignements relatifs à l'ordonnance
et à la situation, incluant les analyses de laboratoire et les mesures
cliniques en lien avec les problèmes
de santé du patient. En tout temps le pharmacien considère les besoins, les
préférences et les capacités du
patient, les données recueillies et le dossier patient. Il ne faut pas se leurrer, la surveillance de la
pharmacothérapie d'un patient ne se fait pas derrière un ordinateur, et
je peux ajouter que nous avons la formation pour le faire.
À ce titre,
l'élargissement du droit de prescrire et d'interpréter toute analyse
de laboratoire ou autre test va dans le même sens. Il était difficile de comprendre la raison pour laquelle le
pharmacien avait le droit de demander une hémoglobine glyquée
pour un patient diabétique mais était dans l'impossibilité de suivre le taux de
fer ou de ferritine de ce même patient pour
son anémie. Avec la loi n° 41, les pharmaciens se sont montrés prudents et
ont évité les duplications de tests. Aucun professionnel ne souhaite que son patient effectue inutilement un
examen, avec toutes les contraintes que cela comporte.
Soulignons
également la volonté du gouvernement de rendre possible l'ajustement de la
pharmacothérapie via des mécanismes comme la demande de consultation et la
pratique collaborative. Elles permettront aux pharmaciens d'être plus efficaces et autonomes dans un contexte où la
collaboration est étroite, comme par exemple en GMF. Cette disposition sera
utile notamment pour des exercices de révision de médicaments et de
déprescription.
L'APPSQ est
favorable à la prescription de médicaments de vente libre et à l'élargissement
des conditions mineures pour
lesquelles il peut prescrire un traitement. Rappelons que, dans plusieurs
provinces canadiennes, les pharmaciens sont autorisés depuis déjà plusieurs années à délivrer ce type d'ordonnance.
La prescription par le pharmacien permettra l'accès économique dans certaines
situations, lorsque ceux-ci sont couverts par la RAMQ, par exemple pour le
traitement des vers intestinaux chez
une famille nombreuse. De plus, les patients pourront recevoir leur traitement
tant en milieu de garde qu'en soins
de longue durée. Par ailleurs, pour l'APPSQ, la prescription de médicaments de
vente libre s'inscrit également dans une
démarche collaborative. Par exemple, les prescriptions des pharmaciens pourront
figurer au DSQ et aider les médecins à choisir un second traitement en
cas d'échec ou aider à circonscrire leurs diagnostics.
L'APPSQ applaudit l'élargissement du droit du
pharmacien de substituer un médicament par un autre sans se limiter à la même sous-classe thérapeutique.
Toutefois, l'APPSQ croit que le libellé devrait mieux refléter la réalité du terrain lors d'une rupture de stock. En situation
de rupture d'inventaire, il arrive fréquemment que l'accès au médicament
diffère d'un endroit à un autre. Ainsi, pour
permettre plus de flexibilité, nous suggérons de retirer la mention «complète»
du libellé et de remplacer celui-ci par «l'impossibilité de se procurer le
médicament chez deux grossistes reconnus». De
plus, l'APPSQ demande à ce que le pharmacien puisse substituer un médicament
par un autre dès l'annonce du retrait d'un médicament du marché
canadien. De cette façon, le pharmacien pourra mieux gérer ses inventaires et
assurer la continuité du traitement chez les patients les plus vulnérables.
Mme Savoie (Karina) : Toujours
concernant la substitution de médicaments, l'APPSQ demande d'ajouter un
troisième motif de substitution. Elle désire que les pharmaciens puissent
substituer un médicament pour des raisons de sécurité lorsque le délai dans
l'instauration peut porter préjudice à la santé du patient. En d'autres mots,
par cet ajout, l'APPSQ veut garantir
l'accessibilité à un traitement sécuritaire pour le patient lorsque le
prescripteur est injoignable et qu'il y a un risque pour sa santé de
retarder indûment le traitement. Par exemple, lors d'un refus pour motif
d'allergie à un antibiotique, le pharmacien
doit référer son patient pour une deuxième consultation s'il n'est pas en
mesure de rejoindre le prescripteur.
Cette situation est fréquente en pharmacie et entraîne des consultations
inutiles. Dans la dernière année, les pharmaciens québécois sont
intervenus chez près de 19 000 patients pour des motifs d'allergie
antérieure ou pour un motif d'interaction
médicamenteuse cliniquement significative. Le refus devient donc une situation
fâcheuse pour le patient, d'autant plus que le pharmacien connaît la
solution optimale.
En résumé, l'APPSQ suggère que le pharmacien
puisse substituer un médicament prescrit par un autre dans les trois circonstances suivantes : un, en
cas de rupture d'approvisionnement chez au moins deux grossistes reconnus à la
RAMQ ou à l'annonce du retrait du médicament
du marché; deux, en cas de problème relatif à son administration; et, trois,
pour des raisons de sécurité lorsque le délai dans l'instauration peut porter
préjudice à la santé du patient.
Bien
que l'APPSQ accueille favorablement toutes ces modifications, elle demeure
inquiète que ces avancées n'aient pas
l'effet escompté si la question de l'accès économique n'est pas abordée. Les
freins et les barrières doivent être retirés afin que les services pharmaceutiques soient réellement accessibles pour
la population et que l'État québécois en retire le maximum de bénéfices.
Par le passé, le gouvernement a choisi de rémunérer les actes des pharmaciens
via l'assurance médicaments et de leur demander une contribution. Ainsi, que
les patients refusent de payer par manque de ressources financières ou par conviction, il n'en demeure pas moins que ce
mécanisme administratif freine l'exécution de ces actes. Pour le patient, il
existe toujours une option sans frais : attendre, reconsulter ou envoyer
un fax. Aux yeux de l'APPSQ, c'est une perte de temps, une duplication
du travail et une mauvaise utilisation des ressources limitées.
De plus, lors
de la révision du mode de rémunération du pharmacien, il sera important de
réfléchir à la compensation adéquate
des actes professionnels pharmaceutiques en fonction de leur intensité et de
leur complexité. Nous réitérons des messages qui ont déjà été
mentionnés : Voulons-nous que la pharmacie la plus performante au Québec
soit celle qui émet le plus d'ordonnances ou
celle qui offre les meilleurs services pharmaceutiques? Le mode de rémunération
est un levier de bonnes pratiques
mais aussi un levier pour assurer l'accès à des services de qualité et
sécuritaires pour les patients. Bien
que les décisions financières du pharmacien propriétaire n'aient que peu d'impact sur l'indépendance professionnelle
du pharmacien salarié, elles ont un impact important
dans l'organisation du laboratoire. Robotisation, délégation,
formation des assistants techniques,
réorganisation, toutes ces stratégies déjà
entamées sont mises de l'avant afin de livrer les nobles responsabilités
confiées au pharmacien.
Sur cette
lancée, l'APPSQ tient également à remercier les différents intervenants pour
leurs efforts concertés dans les
derniers mois pour permettre la formation collégiale des techniciens en
pharmacie. Soyons clairs, les pharmaciens salariés veulent en faire plus pour les patients, mais ils
auront besoin des ressources adéquates pour y arriver. En ce sens, l'APPSQ
propose deux choses : pour les
activités cognitives des pharmaciens, qu'aucune contribution du patient ne soit
demandée et que la rémunération des
nouveaux services soit suffisante afin de soutenir leur implantation et de
garantir leur exécution.
En
conclusion, l'APPSQ réitère sa fierté face aux avancées pour les patients et la
profession de pharmacien décrites dans
le projet de loi n° 31. Par ailleurs, le bien-être des pharmaciens
étant au coeur de la mission de l'APPSQ, nous ne saurions rappeler à
quel point l'autonomie est un déterminant du bien-être au travail. Toutes ces
avancées permettront l'accès à des services
pharmaceutiques à la population dans près de 2 000 points de service,
et ce, sept jours sur sept. Quand le besoin se présentera pour le
patient, la situation se traduira par l'utilisation du bon professionnel au bon
moment.
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci, madame, pour votre... pour votre exposé, excusez-moi. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme
la ministre, la parole est à vous.
Mme McCann : Merci, M. le
Président. Alors, je vous salue, Mme Savoie et Mme Roussin. Merci pour
votre présentation. C'est intéressant de vous entendre, parce qu'on a entendu hier l'Association des pharmaciens propriétaires, mais
vous êtes... vous représentez aussi 4 000, vous avez dit,
4 000 membres pharmaciens salariés qui travaillent dans les équipes
des pharmacies, alors vous êtes un nombre considérable et très représentatif
aussi.
Moi, j'aimerais aller un petit peu plus loin. On
a discuté, hier, beaucoup de la collaboration entre médecins et pharmaciens, et
j'aimerais ça vous entendre là-dessus aussi. Vous avez parlé d'autonomie, tout
à fait, mais aussi d'interdisciplinarité. On
sait à quel point, dans notre réseau, c'est important, l'interdisciplinarité.
J'aimerais vous entendre. Comment ça
se passe, actuellement, avec cette collaboration pharmaciens-médecins,
mais aussi comment vous voyez que ça pourrait même aller plus loin avec
le projet de loi n° 31?
Mme Savoie
(Karina) : Bien, je pense
que, définitivement, la collaboration
entre les médecins et les pharmaciens, elle
est bonne. On a les mêmes objectifs, ceux des patients, ceux des lignes
directrices au niveau de la santé clinique des patients. Quand on fait un ajustement de dose, c'est certain que toutes
les informations vont se retrouver au DSQ, donc, à ce moment-là, le
prescripteur a toujours l'option de voir que ça a été ajusté.
Il faut aussi savoir qu'avec nos guides de
pratique on nous demande de communiquer avec les médecins toute intervention
qu'on a faite. Justement, dans des cas de santé chronique, ça va être important
de savoir qu'est-ce qu'on a prescrit aux
patients et qu'est-ce qu'on a modifié dans leur traitement. Donc, à ce
titre-là, je pense que la collaboration peut être bonne. Et ce qui arrive, c'est que les patients nécessitent des
changements de traitement entre deux visites médicales, et c'est là, je crois, que le pharmacien est un
atout, réellement, et que... On veut le faire en toute collégialité avec nos
collègues. On collabore avec les
médecins de façon fréquente. On a un mécanisme de communication qui est la
prescription. Alors, le médecin fait
une prescription pour le pharmacien, je ne verrais pas pourquoi les
pharmaciens, on ne pourrait pas faire de même pour communiquer comment
on fait nos actes professionnels.
Mme McCann :
Oui. Est-ce que vous trouvez que... Quand vous dites : On doit rejoindre
le médecin quand on fait un
changement, là, ou une intervention, je devrais dire, est-ce que ça fonctionne
assez bien en termes de rejoindre le médecin ou que le médecin vous
rejoigne aussi? Ça va des deux côtés.
• (11 h 50) •
Mme Savoie
(Karina) : Exactement. Je
crois que ça s'effectue bien, dans un contexte où ce n'est pas dans l'immédiat,
on est capable de communiquer efficacement
pour aviser l'autre professionnel qu'on a effectué un changement de thérapie.
Mais, quand on a besoin de le faire dans
l'immédiat... Quand on parlait du cas d'antibiotiques, quand on parle d'un cas
d'antibiotiques qui a une interaction, parce qu'il faut rappeler que le
pharmacien, c'est l'expert de l'évaluation de la pharmacothérapie, quand il y a une interaction importante avec un médicament
et qu'on est dans la chaîne de travail, on a un antibiotique, on a un
patient à traiter pour une pneumonie, là, c'est important, et qu'on essaie
d'appeler, et que le médecin,
malheureusement, a déjà quitté la clinique — puis certains médecins pratiquent à
plusieurs endroits, donc ils ne reviendront
pas à la clinique, peut-être, deux ou trois jours — ce n'est pas un délai acceptable pour le
patient, d'attendre de le traiter aussi longtemps. Donc, c'est pour ça
que nous, on demande, quand ça doit être immédiat... comme parfois la communication est difficile, on a chacun de notre côté un lot de patients à gérer, on
demande d'avoir un peu plus d'autonomie à ce niveau-là.
Mme McCann : Et vous avez mentionné le DSQ. Donc, vous pouvez
mettre de l'information dans le DSQ, mais, d'après ma compréhension de ce
que vous avez dit, il semblerait qu'il
y a des éléments que vous devez
transmettre de vive voix, là, au médecin, vous devez discuter avec le
médecin. Est-ce que j'ai bien compris?
Mme Savoie (Karina) : Oui, bien, par exemple, comme dans le
cas, en fait, d'un IPP pour une dyspepsie ou un reflux oesophagien, en fait, on peut prescrire l'IPP, en fait, pour le
patient. Donc, le patient... En fait, premièrement, ça
va
nous permettre d'assurer un suivi au
niveau de l'efficacité du traitement.
Dans le cas où le traitement ne fonctionne pas après le 14 jours, bien là, on va avoir un mécanisme, en fait, de
suivi, puis pour référer au médecin, à
ce moment-là. Et, par la prescription, en fait, le médecin va être
capable de savoir, au DSQ, quel traitement a déjà été essayé pour le
patient. Donc, on passe à la prochaine étape maintenant.
Mme McCann : D'accord. Et je voudrais vous demander... Parce que
vous représentez aussi des
pharmaciens, je pense, qui travaillent en établissement aussi? Non, pas
du tout? Juste au niveau des...
Mme Savoie
(Karina) : Non. En GMF, par contre, on a plusieurs de nos membres.
Mme McCann :
En GMF, vous les représentez. On va entendre, d'ailleurs, l'Association des
pharmaciens des établissements de santé du
Québec par la suite. Mais je voudrais vous demander... Parce qu'on entendait
hier certains groupes nous dire, là, en établissement, médecins, pharmaciens,
évidemment il y a la proximité. Il y a la proximité, mais parfois pas toujours, parce que nos établissements sont très
grands, alors il peut y avoir des distances là aussi. Vous, qu'est-ce que vous
suggérez pour un pharmacien salarié au sein
des pharmacies communautaires pour améliorer, justement, cette communication,
cette collaboration avec les médecins de famille et les autres?
Mme Savoie (Karina) : Je pense que le DSQ est un outil qu'on devrait
utiliser et on devrait le bonifier. Sans que ce soit un dossier commun,
que ça soit une plateforme sécurisée où est-ce qu'on puisse communiquer avec le
médecin.
Moi,
il y a de nombreux irritants que j'ai vécus, là, avec certains collègues
médecins qui me disaient : Oui, tu peux ajuster l'ordonnance de mon patient, mais je préfère que ça soit
quelqu'un d'autre dans ma clinique qui le fasse parce que c'est déjà porté à mon dossier patient. Ça fait
que d'avoir plusieurs plateformes, d'avoir des fax à gérer, d'avoir des fax à
devoir entrer dans un logiciel DME, ça devient complexe. Alors, si on avait
vraiment un outil qui permettrait d'avoir les diagnostics des patients... au niveau du pharmacien, c'est quelque chose
qui est essentiel à sa bonne évaluation du patient. Et qu'on puisse avoir un mécanisme de
communication via le DSQ, on pense que ça viendrait régler plusieurs irritants
et plusieurs problématiques, là, à ce niveau-là.
Mme McCann :
Donc, vous, vous dites, dans le fond, si je vous comprends bien, que, le DSQ,
là, on pourrait l'enrichir, là, hein, mais
vous voudriez utiliser cette plateforme, qui est accessible, évidemment, à tous
les professionnels, là, qui sont
identifiés, là... pourraient avoir accès au DSQ. Donc, pour vous, c'est une
plateforme qui est intéressante, que vous voudriez enrichir.
Mme Savoie (Karina) : Tout à fait. On la consulte régulièrement, à
l'heure actuelle, pour voir s'il n'y a pas des médicaments autres qui auraient été servis dans d'autres pharmacies ou
pour les résultats de laboratoire. C'est le principal outil qu'on
utilise, le DSQ.
Mme McCann :
Je voulais vous demander, sur un autre sujet, les... On parle, pour le
pharmacien, de faire l'évaluation physique et mentale du patient dans le
but, là, de faire les ajustements médicamenteux versus un diagnostic que pose le médecin de famille. Par exemple, plus nous
expliquer concrètement... Un patient, il a un diagnostic, il a été voir son
médecin de famille, vous êtes
impliqués par rapport à toute la thérapie médicamenteuse. Vous faites une
évaluation physique et mentale — vous pouvez donner un exemple concret, si
vous voulez — comment
ça s'imbrique, ça, avec le diagnostic du patient?
Mme Roussin
(Stéphanie) : Oui, bien, effectivement, on peut parler... Par exemple,
si, un patient, on fait une évaluation pour
prolonger sa médication dans l'attente de son rendez-vous, un patient qui
serait diabétique, par exemple, donc,
en fait, moi, je vais rencontrer le patient pour m'assurer de son adhésion au
traitement, poser des questions également, s'il ressent des effets indésirables par rapport à sa thérapie, mais je
peux également aussi prendre une glycémie, prendre une mesure de tension
artérielle si le patient est hypertendu, puis en fait je vais consulter,
également, aussi le DSQ pour voir les analyses de laboratoire. Donc, tout ça
s'inscrit dans une démarche, en fait, qui est globale. On considère le patient
dans sa globalité, mais relativement à notre
champ d'expérience, qui est les médicaments, mais on ne pourra pas faire
l'évaluation du patient qu'en regardant simplement son dossier, un
dossier informatique avec une liste de médicaments.
Mme Savoie
(Karina) : Si je peux donner
un exemple également pour l'évaluation de la santé
mentale du patient, lorsqu'on fait une surveillance d'un sevrage d'un
médicament comme une benzodiazépine, qui est utilisée pour l'insomnie et
l'anxiété, lorsqu'on fait la surveillance de ce
sevrage-là, on doit être en mesure de questionner le patient pour savoir est-ce qu'il est en train de décompenser de son
anxiété et savoir à quelle vitesse on
veut aller au niveau du sevrage. Donc, c'est
vraiment ces outils-là qui nous permettent de savoir comment va notre patient,
parce qu'en regardant le simple dossier je ne peux pas savoir qu'est-ce
qu'il ressent, le patient qui est devant moi, là.
Mme McCann :
Donc, j'en comprends, vous avez un diagnostic qui a été posé par le médecin de
famille, l'évaluation que vous
faites, c'est vraiment dans un cadre... c'est dans le cadre du diagnostic,
évidemment, vous faites une évaluation toujours en lien avec
l'ajustement des médicaments. Est-ce que ma compréhension est bonne?
Mme Roussin
(Stéphanie) : Pour assurer
l'efficacité du médicament, la tolérance également, l'adhésion. Donc,
c'est tous des champs qui sont relatifs, là, à l'évaluation de la
pharmacothérapie.
Mme Savoie
(Karina) : Et puis, quand on
pose nos questions, l'idée, aussi, c'est de valider si on a des drapeaux
rouges, que l'on appelle. Ces drapeaux
rouges là, pour le pharmacien, ça indique : Je dois référer absolument
mon patient vers un autre professionnel,
en l'occurrence le médecin ou l'IPS, pour avoir une évaluation
plus poussée, parce qu'on le sait, qu'on
n'est pas capable de faire le diagnostic, mais on a des drapeaux rouges qui
nous disent : Ce patient-là, le bon professionnel, ça va être
le médecin, pour le rencontrer.
Mme McCann : D'accord. Alors, c'est vraiment mutuel, hein, ces
références-là qui sont faites entre médecin de famille et pharmacien.
J'aurais une question
assez large, là, mais importante. De votre point de vue, là, le projet de loi n° 31, l'impact que ça aurait sur l'offre de services en première ligne, hein... Par exemple, les gens qu'on qualifie, au niveau de leur problématique... les conditions mineures qui vont, par exemple, en P4, P5, à l'urgence ambulatoire ou même qui vont au cabinet de
médecin mais qui pourraient avoir
l'offre de services en pharmacie, comment vous voyez, là, l'impact qu'il
pourrait y avoir sur l'accès pour les citoyens pour des conditions
mineures, évidemment?
Mme Savoie
(Karina) : C'est certain que
je ne peux pas vous quantifier l'impact aujourd'hui. Par contre, il
faut savoir que, dans plusieurs
autres provinces canadiennes, le principe de conditions mineures est beaucoup
plus élargi, en ayant d'autres conditions mineures. Quand on parle de,
bon, céphalées n'ayant pas de facteur de risque, quand on parle de traitement de mycose de la peau, quand on parle
de traitement d'oxyure, ce sont tous des traitements pour lesquels il existe des médicaments d'autosoins et pour
lesquels on peut recommander aux patients un usage. En pouvant les prescrire
puis que ce soit clair que le pharmacien
peut les aider pour ces conditions-là, le gouvernement serait en mesure
d'envoyer un message à ces
patients-là et de leur dire : Allez consulter le pharmacien pour être en
mesure de désengorger les urgences. J'ai l'impression que l'impact
serait quand même considérable.
Mme
McCann : Je comprends ce que
vous dites, mais, le début, là, vous dites : C'est plus large ailleurs qu'au
Québec, la définition des conditions mineures. Est-ce que je vous ai
bien compris?
Mme Savoie (Karina) : Bien,
avec la loi n° 41, on a inclus certaines conditions
mineures mais de façon très, très restrictive. Quand on regarde ailleurs dans
le Canada, par exemple la Saskatchewan, ils ont fait... l'Université de
Saskatchewan a fait des lignes directrices pour des consultations de conditions
mineures qui incluent, comme je vous disais,
tous ceux que j'ai inclus, mais aussi la dyspepsie, la constipation, un maximum
de conditions mineures. Il faut savoir qu'en
le prescrivant le pharmacien va faire un suivi et, lorsque ça ne va pas,
lorsqu'il y a un échec au traitement, il va le référer au médecin. Et ça, nous, on pense que, pour le médecin, ça peut
certainement l'aider à circonscrire son diagnostic.
Mme McCann : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard : Bonjour. Merci
beaucoup d'être présentes aujourd'hui. Je me pose la question par rapport à la vaccination, on a entendu beaucoup
de groupes aussi, mais j'aimerais avoir votre point de vue sur les effets,
les craintes, tout ce qui a rapport avec la vaccination, de votre côté.
• (12 heures) •
Mme Savoie
(Karina) : Nous, on est, bien sûr,
en faveur de la vaccination. Comme on disait, on veut être complémentaires
aux autres professionnels qui offrent déjà le service. On pense qu'on peut
aller chercher une niche de population
qui est différente. Les 18 à 65 ans, qui sont encore travailleurs, qui ont un horaire chargé, on pense que nous, on peut vraiment
avoir un impact bénéfique à ce niveau-là.
Au niveau de nos craintes, on voudrait que les
infirmières en pharmacie qui le font déjà puissent continuer à le faire, dans le but d'instaurer ça le plus rapidement possible, de ne pas détruire un mécanisme qui est déjà en place, puis que nous, on puisse venir en ajout. Dans certaines
pharmacies, ce n'est pas possible pour eux d'avoir une infirmière en pharmacie, et sinon, bien, c'est aussi à
l'extérieur des heures de service. Plusieurs pharmacies n'ont seulement qu'une journée où l'infirmière est présente, alors
l'ajout du pharmacien va être important dans ce contexte-là.
Il faut aussi
avoir accès aux vaccins. Pour plusieurs pharmacies, c'est difficile. Le pharmacien
salarié, là, quand on est dans la
chaîne de travail, puis que le pharmacien veut son vaccin, puis je ne suis pas
capable de le commander nulle part, c'est fâchant, c'est frustrant. Quand on a un
bras, on veut piquer. Souvent, c'est la définition qu'on donne. Alors, l'accès
aux vaccins va être vraiment important. Puis
on déjà des mécanismes qui fonctionnent très bien, avec des chaînes de froid
très contrôlées au niveau des grossistes.
Nous, on pense que ce serait l'avenue la plus simple, là, de faire la
distribution via les grossistes.
Il va falloir
aussi certaines ressources. C'est des nouveaux actes, donc, pour certaines
pharmacies, ça va nécessiter une réorganisation. On pense que ces
nouveaux actes là vont devoir être rémunérés, là, pour permettre et garantir
leur exécution.
Mme Picard :
Au niveau de la gestion de votre espace dans les pharmacies aussi, j'imagine
qu'il va falloir que vous vous adaptiez aussi à cette réalité-là.
Mme Savoie
(Karina) : La très grande
majorité des pharmacies, pour être... au niveau des standards de pratique,
là, respecter les standards de pratique,
doivent avoir un bureau de consultation fermé, alors, à mon sens, ce n'est pas
quelque chose qui va être très
difficile. On s'entend que de fermer la porte et de piquer, là, ce n'est pas
pire qu'entre deux paravents dans un gymnase à l'école, là.
Mme Roussin
(Stéphanie) : Puis on voit déjà
aussi... dans d'autres actes qu'on effectue déjà, comme par exemple la prescription pour une contraception orale d'urgence, on doit
s'assurer aussi d'avoir un bureau de consultation qui est fermé pour permettre, là, à la
patiente qui vient consulter de le faire en toute intimité.
Le Président (M. Provençal)
: 40 secondes.
Mme Picard :
Ah non! Bien, comment voyez-vous les changements, en fait, que la loi va
donner? Comment vous voyez la diffusion de la bonne nouvelle?
Le Président (M. Provençal)
: 30 secondes pour répondre.
Mme Savoie
(Karina) : Bien, c'est
certain qu'on veut le diffuser le plus que possible. Je pense que, s'il n'y a
pas de... s'il y a le moins de freins
et le moins de barrières, les pharmaciens vont embarquer les deux pieds dans
ces nouveaux actes, et il n'y a pas de doute que la population va être
au courant, là.
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci. L'opposition officielle procédera à la suite des échanges. Je cède la
parole au député de Pontiac.
M. Fortin : Merci. Merci, M. le Président. Bonjour à tout le
monde. Merci à vous d'être avec nous et de votre exposé.
Quelques
questions en lien avec ce que la ministre a amorcé, comme discussion. Le
Dossier santé Québec, je pense que
vous avez dit... et corrigez-moi si j'ai tort, mais je pense que vous avez dit
quelque chose qui ressemblait à : S'il y a un ajustement... et vous avez utilisé, par exemple,
l'exemple du sevrage pour un médicament pour l'insomnie, si le pharmacien
procède à un ajustement comme ça, le prescripteur
peut le voir. Est-ce qu'il le voit nécessairement? Est-ce qu'il y a une alerte? Est-ce qu'il y a quelque chose qui
l'informe du fait que le pharmacien a changé le dosage ou a modifié la
prescription?
Mme Savoie
(Karina) : Présentement, il
n'y a pas d'alerte. Par contre, les DME, qui sont les dossiers médicaux
électroniques, qui sont utilisés dans les cliniques sont tous interfacés avec
le DSQ. Par contre, en ce moment, le médecin doit aller cliquer, dans la section médicaments, «mettre à jour» afin
que tous les médicaments apparaissent. À mon sens, ça peut être une bonne pratique de le faire juste
pour faire un «reset», là, de la condition du patient que tu vois aujourd'hui.
Mais effectivement il n'y a pas d'alerte qui
lui dit de se faire. Par contre, je pense que, comme professionnel pharmacien,
si on a une raison de croire qu'il y a une inquiétude, que le médecin devrait
être mis au courant immédiatement, on va le faire puis on va prendre le
téléphone, là.
M. Fortin :
C'est parce que ce qu'on nous a dit hier, du côté des médecins, c'est que,
suite au projet de loi, il va y avoir un
énorme besoin de communication entre le médecin et le pharmacien. Et je pense
que tout le monde peut s'entendre sur cette nécessité-là, parce que, si,
par exemple, le médecin prescripteur initie une prescription qui est modifiée
par la suite par un pharmacien, si le
patient retourne voir son médecin plus tard, il faut que le médecin sache
exactement ce qui s'est passé.
Voyez-vous que ça, ça va se produire? Voyez-vous que ce mécanisme-là est
automatique ou naturel, en ce moment, ou s'il a besoin de faire quelque
chose de supplémentaire?
Mme Savoie
(Karina) : À mon sens, le
DSQ est suffisant. Puis je veux juste rappeler un exemple, là : les médecins
omnipraticiens travaillent en collaboration
avec les médecins spécialistes, les médecins spécialistes changent les
thérapies médicamenteuses, et les médecins ne reçoivent pas systématiquement le
rapport de suivi. Donc, ils sont capables de le faire, je ne verrais pas
pourquoi ils ne seraient pas capables de le faire avec les pharmaciens.
M. Fortin : O.K., je comprends ce que vous dites. Hier, les
médecins omnipraticiens nous ont dit... et, c'est de valeur, ils sont passés après les pharmaciens
propriétaires et l'Ordre des pharmaciens, mais ils nous ont essentiellement dit qu'il y avait un potentiel de conflit d'intérêts de la part
des pharmaciens parce qu'il y aurait la prescription, la vente et l'administration d'un même médicament. Bien, en fait, disons
que ce n'était pas clair, exactement, ce que les médecins voulaient, dans le sens où... est-ce qu'il y a un conflit d'intérêts chez les pharmaciens ou est-ce
que les médecins devraient avoir le
même droit? Est-ce que vous avez une perspective là-dedans? Est-ce que vous
voyez un conflit d'intérêts ou est-ce que vous croyez que les médecins
devraient avoir la même possibilité?
Mme Savoie (Karina) : Bien, comme la FMOQ disait hier, je pense que
notre code de déontologie nous protège et
que les pharmaciens, on est capables de gérer ça. C'est sûr que, nous,
l'ajustement ou le médicament qu'on va prescrire, ça va toujours
découler d'une prescription ou d'un diagnostic, c'est-à-dire que, si on fait
une substitution, c'est parce que le médecin
a donné une ordonnance puis que moi, j'ai trouvé un problème. On ne pourra pas
le faire hors de ça, hormis la
vaccination. Effectivement, il peut y avoir apparence de conflit d'intérêts,
mais comme, étant professionnels, notre code de déontologie protège... bien certainement, on ne peut pas garantir que
tout professionnel va le respecter, mais c'est dans toutes les
professions et puis c'est une minorité de pharmaciens ou de médecins.
M. Fortin :
Vous ne voyez pas d'enjeu à ce que les médecins aient la même possibilité?
Mme Savoie (Karina) : Je ne vois pas d'enjeu. On veut augmenter le taux
vaccinal, alors mettons-nous tous de ce côté.
M. Fortin : O.K. Vous avez fait mention de la substitution, hein, et, dans votre
mémoire, en page 9, vous parlez que
vous êtes en faveur de l'élargissement de la substitution, sans nécessairement
se limiter à la même sous-classe thérapeutique. Je veux juste
comprendre, l'ajustement que vous demandez permettrait quoi, pratico-pratique,
là, permettrait quoi.
Mme Savoie (Karina) : Bien, pratico-pratique, il y a eu une rupture,
récemment, sur de l'érythromycine, c'est un onguent ophtalmique pour l'oeil, dans le fond, qui est pour une
conjonctivite bactérienne, ça fait que c'était une situation qu'on devait gérer quand même rapidement, et il
n'existe pas d'alternative dans la même sous-classe thérapeutique. Dans les médicaments comme en hypertension, on a
certaines sous-classes qui sont bien définies. Avec la législation,
actuellement, on ne peut pas sortir de cette même sous-classe.
Je
vous donne un autre exemple : les crèmes de cortisone, dernièrement, ça a
été vraiment difficile. Et chacune des crèmes
est classée dans une catégorie, il y a des catégories de 1 à 6. À un certain
moment donné, on n'avait plus de crème de
la catégorie 5 qui existait, ça fait que, là, on devait contacter le
médecin pour dire : Écoutez, je ne peux pas le substituer moi-même
parce que, là, il n'y a plus de catégorie 5, mais je vous propose une
crème de la catégorie 6 ou de la catégorie 5 en fonction du patient
que j'avais devant moi. Donc, c'est ça que ça vient régler, ces
problématiques-là.
Puis,
dans un autre ordre d'idées, notre troisième point qu'on vient ajouter, c'est
vraiment l'exemple de l'interaction, que je discutais tout à l'heure, là. Quand
on a une interaction avec un antibiotique, et que, là, on ne peut pas le servir
pour la sécurité du patient, et qu'on n'est pas capable de rejoindre le
prescripteur, on laisse comme le patient seul là-dedans. Pour le pharmacien, ce n'est pas agréable de
refuser le service, et, pour le patient, bien, il doit reconsulter, c'est une
deuxième consultation, alors que le
premier médecin a fait son diagnostic. Le pharmacien connaît la solution parce
qu'il a fait son évaluation avec le patient, le patient retourne dans le
système faire une autre consultation et, ultimement, revient à la pharmacie, ça ne sera peut-être même pas le même
pharmacien, donc il doit repasser à travers l'évaluation d'ordonnance.
Ça fait qu'ici on voit clairement une perte de temps, là, puis une mauvaise
utilisation des ressources, à notre sens.
M. Fortin :
Mais le projet de loi actuel vient régler cet enjeu-là ou il manque encore,
selon la...
Mme Savoie
(Karina) : Il faudrait ajouter la troisième mention au niveau de la substitution
pour régler cet enjeu-là particulier.
M. Fortin :
O.K. Mais ce que vous dites est vrai, là, tu sais, nous-mêmes... moi-même, je
l'ai vécu à un moment donné, je pense, si je
ne me trompe pas, c'était la veille de Noël, la pharmacie fermait à
8 heures, on avait une prescription du médecin, le médecin n'était plus à la clinique, il était rendu à
l'hôpital, c'était presque impossible de le rejoindre. Donc, ça arrive, ces choses-là. Dans le fond, ce que
vous proposez là, c'est juste de simplifier ce mécanisme-là. Mais, s'il y a une
limitation dans le projet de loi, il doit y avoir une raison pour le
demander à la ministre pendant l'étude article par article. Mais est-ce que vous comprenez ce que peut être la raison
derrière le fait qu'on ne parle pas nécessairement de rupture
d'approvisionnement complète ou même de sous-classe, là?
Mme Savoie (Karina) : Bien, c'est ça, ça dépend de chacune des
questions, là. Au niveau de la sous-classe thérapeutique...
M. Fortin :
...questions, mais je vous les lance en même temps.
Mme Savoie (Karina) : C'est correct. Au niveau de la sous-classe
thérapeutique, moi, je ne verrais pas pourquoi le pharmacien ne serait pas capable de substituer dans une autre
sous-classe, on a clairement la formation pour le faire. Et, quand on contacte, là, les médecins, on offre la solution, là, ce n'est pas une
discussion, souvent, qui est bidirectionnelle, on va dire : Bien, considérant ça, ça, ça et ça, je vous suggère
telle alternative, et la réponse, c'est : O.K. Donc, à ce niveau-là, je ne vois pas de frein qui pourrait
être utilisé.
• (12 h 10) •
Mme Roussin
(Stéphanie) : Ça nous évite
aussi, également, des problèmes, tu sais, de rupture d'approvisionnement
à rebonds dans d'autres molécules. En fait, c'est comme, si je peux donner un
exemple, actuellement, on a des ruptures d'inventaire pour un médicament, la ranitidine,
là, qui... des possibles contaminants, là, potentiellement cancérigènes, donc,
en fait, là, on se retrouve en rupture
d'approvisionnement pour la famotidine. Notre seule alternative pour substituer
est un autre médicament, qui est la
famotidine. Par contre, si tous les pharmaciens au Québec vont substituer pour
la famotidine, on va se retrouver dans un mois avec le même problème. On va
avoir changé tous nos patients pour la famotidine, on va se retrouver
encore avec le même problème de rupture d'approvisionnement.
M. Fortin : Mais il y a quelque chose de particulier dans ce
que vous dites, parce qu'essentiellement, si le pharmacien peut
prescrire un médicament, il ne va pas prescrire quelque chose qui est en
rupture de stock. Vous avez une bonne idée
de ce que vous avez et de ce que vous êtes capables de prescrire. Le médecin,
lui, par exemple, semble souvent prescrire un médicament qui est en
rupture de stock, en rupture de stock ou même qui n'est plus distribué du tout.
Est-ce qu'il n'y a pas un mécanisme par
lequel le médecin sait ce qui est disponible et ce qui n'est même plus disponible
du tout sur le marché, là? On peut
parler de rupture de stock temporaire, ça, ça peut arriver que le médecin ne le
sache pas. Mais il n'y a absolument
aucun mécanisme quand le médecin, il dit : O.K., j'ai un tel patient, il a
telle condition, je vais lui prescrire tel médicament... il n'y a rien qui lui dit, là, dans son... si lui va dans
un... que ce soit dans son programme électronique, soit le DSQ ou
autres, là, qui pourrait lui dire : Il n'y en a plus, de ce médicament-là,
dans la région?
Mais c'est
une énorme perte de temps, ça, là, parce que ça veut dire que, pour le patient,
lui se retrouve en pharmacie, et là
on commence tout le processus que vous avez décrit, à savoir : On est-u
capable de le trouver? On est-u capable de retrouver le médecin ou il y a-tu autre chose qu'on peut prescrire? Mais
il n'y a pas une façon plus simple de le faire en partant pour qu'un
médecin ne prescrive pas quelque chose qui n'est plus disponible?
Mme Savoie
(Karina) : Bien,
effectivement, présentement, il n'y a rien dans leur logiciel informatique qui
peut les aiguiller à ce niveau-là.
Mais ça serait aussi difficile de le faire parce que les ruptures de stock...
Le matin, là, j'essaie de commander un pot de ranitidine, il y en a, le
lendemain matin, il n'y en a pas, le surlendemain, il y en a un mais en après-midi. Les stocks bougent tellement qu'il
faudrait vraiment un logiciel qui soit mis à jour à chaque minute avec tous
les distributeurs. C'est quelque chose qui pourrait se faire mais qui nécessite
beaucoup d'efforts, à mon avis.
M. Fortin : Ça arrive-tu souvent, par exemple, la situation
où... Parce que la situation que je vous ai décrite, la veille de Noël, là,
quand on a vu le pharmacien, le pharmacien nous a dit : Bien, voyons, ça
fait trois mois qu'il n'y a plus personne qui a ça au Québec, là. Ça, pour des choses comme ça, est-ce qu'il n'y a
pas un moyen, un mécanisme que vous voyez qui pourrait être d'informer les
médecins, de façon générale, que certains médicaments n'existent plus ou ne
sont plus disponibles?
Mme Savoie
(Karina) : Il y a des
infolettres qui sont envoyées par la RAMQ pour aviser d'une rupture
d'inventaire. Bon, c'est peut-être le mécanisme de communication par
fax, là, qui n'est peut-être pas idéal, on revient avec le fax...
M. Fortin :
...ça, Mme la ministre, bientôt.
Mme Savoie
(Karina) : Mais, oui, sauf
que de retenir toutes les molécules qui sont en rupture, c'est ça, c'est un
autre enjeu, là. Ça fait que, d'après moi, ça passe par l'informatisation de
ces données-là.
M. Fortin :
Très bien. Ça va pour moi, M. le Président.
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci beaucoup. La parole appartient au deuxième groupe de l'opposition. M. le
député de Jean-Lesage.
M. Zanetti :
Merci. Merci d'être avec nous pour pouvoir nous éclairer. Dans le projet de
loi, il y a quelque chose qui permet à un pharmacien, une pharmacienne
de modifier, disons, le médicament qui est donné si c'est équivalent puis qu'il
peut trouver quelque chose de moins cher, l'argument étant : vous
connaissez ça plus en profondeur que les médecins. Des fois, le médecin
prescrit la grosse marque qu'il connaît, elle est peut-être plus chère, le
patient pourrait peut-être avoir quelque chose de moins cher, donc ça vous
autorise à faire ça, si j'ai bien compris.
Est-ce qu'il
y a quelque chose dans le projet de loi, à votre connaissance, qui pourrait
empêcher un pharmacien, disons, propriétaire, là, qui n'aurait pas,
disons, une éthique irréprochable, là, de remplacer ça par un médicament qui va
lui faire faire plus de redevances, par
exemple? Un pharmacien propriétaire, ça ne concerne pas vraiment les gens que
vous représentez, mais...
Mme Savoie
(Karina) : Bien, pour faire
des substitutions ou des changements de dose ou de forme, il faut que ça soit
cliniquement nécessaire. Donc, tout est dans le «cliniquement», on ne peut pas
le faire pour le simple motif d'avantage monétaire. Je vous donne un exemple : il existe une goutte, en ce
moment, sur le marché, pour traiter l'otite externe, qui s'appelle le Ciprodex, qui est une goutte deux
dans un, ce n'est pas couvert, actuellement, par la RAMQ, là, et cette même
goutte existe en deux produits différents
qui, eux, sont remboursés. Alors, on n'a pas le droit de changer pour les deux
gouttes qui sont remboursées, même si
c'était à l'avantage du patient. Alors, on n'a clairement pas le droit de le
faire pour notre avantage... bien, pour l'avantage du pharmacien
propriétaire.
M. Zanetti :
Et, si je comprends bien, vous n'avez pas le droit de le faire non plus à
l'avantage du patient, selon le projet de loi actuel?
Mme Roussin
(Stéphanie) : Non.
M. Zanetti :
Ah oui? O.K.
Mme Roussin (Stéphanie) : Ça ne peut pas être pour des motifs économiques,
il faut que ce soit pour des motifs cliniques, effectivement, donc,
d'interaction... bien, pas d'interaction, mais en fait de...
Mme Savoie (Karina) : Le patient n'est pas capable d'avaler un
comprimé, on va le changer en liquide, ce genre de chose là.
Mme Roussin (Stéphanie) :
...ou de non-disponibilité du médicament.
M. Zanetti : Je
comprends. Trouveriez-vous intéressant qu'on mette un
amendement qui permettrait de faire des substitutions quand le motif,
c'est faire payer moins cher au patient ou à la RAMQ?
Mme Savoie (Karina) : À vue rapide comme ça, ça semble un objectif qui
est noble. Si c'est bien encadré puis que, tu sais, toutes les parties
prenantes sont d'accord, moi, je n'y verrais pas d'inconvénient dans ma
pratique actuelle.
M. Zanetti :
Merci.
Le Président
(M. Provençal)
: La parole est au
troisième groupe d'opposition. M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault
(Jonquière) : Oui. Merci beaucoup pour votre présence. C'est
extrêmement intéressant, puis on vous sent très, très, très engagées
dans votre profession, c'est vraiment intéressant.
Vous
dites, à la page 19 de votre mémoire : «Voulons-nous que la pharmacie
la plus performante au Québec soit celle
qui émet le plus d'ordonnances ou celle qui offre les meilleurs services
pharmaceutiques?» Moi, ma position, c'est clair, c'est les meilleurs services pharmaceutiques, je sais que c'est
la même chose pour vous. Je veux juste être sûr de bien comprendre comment arriver à ce chemin-là. Parce
que, quand je regarde à la fin, sur la question de la rémunération, là, vous êtes... Bon, vous dites qu'il faudra
rémunérer les nouveaux services afin de soutenir leur implantation, mais
j'aimerais ça que vous soyez un petit peu plus précises, s'il vous
plaît.
Mme Savoie (Karina) : Bien, il y a deux portions au niveau de la
rémunération. Comme l'AQPP le mentionnait hier, tu sais, brasser l'enveloppe, là, puis de rémunérer les activités
cognitives, ça permet à nous, pharmaciens salariés, de s'assurer d'avoir
un plan d'effectifs qui est adéquat.
Présentement,
notre rendement est évalué à un nombre d'ordonnances à l'heure, ce qui ne fait
vraiment pas de sens parce qu'au
niveau de la complexité de ce qu'on doit faire, au niveau des consultations de
médicaments de vente libre, qui ne sont pas rémunérées en ce moment,
puis qu'on en fait 13 par jour par pharmacie, ça peut parfois prendre
10 minutes. Alors, si tu as, dans ton
heure, 10 nouvelles prescriptions puis six conseils, bien, tu as
l'impression d'être dans le jus. Mais, au
fond, le pharmacien propriétaire, lui, il va regarder les chiffres au niveau de
la rentabilité puis il va mettre son effectif en ce terme-là. Ça fait que l'importance de revoir le mode et d'encourager
les bonnes pratiques au niveau clinique, pour nous, c'est quelque chose d'important pour notre charge
de travail en laboratoire pour s'assurer que les indicateurs soient les bons.
La
deuxième chose, c'est au niveau des nouveaux services cliniques. On veut juste
éviter que le... parce que les pharmaciens faisaient plein de choses
offertes à leurs patients dans le cadre de l'honoraire que... les nouveaux
services comme la vaccination ne soient...
ne doivent pas être faits gratuitement par le pharmacien. Nous, on est
convaincus que c'est un service qui
doit être remboursé, payé au pharmacien pour son temps, parce que le pharmacien
qui va être en train de vacciner, bien, il n'est pas en train de faire la
distribution des médicaments, la vérification de la thérapie et autres
choses. Ça fait que c'est deux piliers, pour
nous, qui doivent aller ensemble dans le contexte de la revue du modèle de
rémunération.
M. Gaudreault
(Jonquière) : O.K. Au fond, on va revenir sur un système où on se
concentre sur la tâche professionnelle qui est la vôtre.
Vous
parlez de la vaccination. Si le projet de loi passe... bien, en tout cas, s'il
passe d'ici la fin de la session, est-ce que, rapidement, la vaccination peut
être mise en place ou ça va prendre une période de transition, autant sur le
plan des locaux, de la main-d'oeuvre, des quantités de vaccins?
Le Président
(M. Provençal)
: Une réponse rapide,
s'il vous plaît.
Mme Savoie (Karina) : Bien, j'ai l'impression que ça va prendre une
transition, surtout au niveau des vaccins, de l'accessibilité des vaccins, c'est le plus important. Parce qu'il y a
quand même 1 000 pharmaciens qui ont déjà commencé à se former, même si on ne sait pas l'issue de ce
projet de loi là, ça fait que je pense que les pharmaciens vont embarquer.
Donc, c'est vraiment au niveau de l'accès aux vaccins eux-mêmes qui, pour nous,
va être le plus grand frein, oui.
Le Président (M. Provençal)
: Je remercie Mme Savoie et Mme Roussin pour leur contribution
aux travaux de la commission.
Je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre
place. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 19)
(Reprise
à 12 h 20)
Le Président
(M. Provençal)
: Je souhaite maintenant
la bienvenue aux représentants de l'Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec. Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec
les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter puis à
commencer votre exposé. Merci.
Association des pharmaciens des
établissements
de santé du Québec (APES)
M. Paradis (François) : Alors, M.
le Président, Mme la ministre de la Santé et des Services
sociaux, Mmes et MM. les
parlementaires, mon nom est François Paradis, je suis président de
l'Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec. Je suis accompagné aujourd'hui de Mme Linda
Vaillant, qui est directrice générale de notre association.
L'APES
remercie la commission de l'occasion qui lui est offerte d'émettre ses
commentaires sur le projet de loi n° 31. D'emblée, nous saluons le dépôt de ce projet de loi, puisqu'il va
permettre d'élargir le champ d'exercice des pharmaciens, et ce, au bénéfice des citoyens du Québec,
c'est-à-dire nos patients. Et, dans les délibérations qu'on entend depuis hier,
il ne faut jamais oublier cet objectif-là : c'est pour les patients
qu'on fait cet exercice-là.
On
va insister aujourd'hui principalement sur deux de nos recommandations. La
première recommandation vise à introduire la possibilité pour les pharmaciens
d'initier, d'ajuster et de cesser des médicaments dans le cadre de pratiques
collaboratives. C'est quoi, les pratiques
collaboratives? Bien, ce n'est pas compliqué, c'est une entente entre des
médecins et des pharmaciens qui établissent les rôles de chacun dans la
prise en charge d'une clientèle spécifique. Alors, par exemple — puis là
je prends, évidemment, un exemple en établissement de santé — on pourrait déterminer que, dans une clinique d'oncologie, les médecins, les
hémato-oncologues et les pharmaciens déterminent que le pharmacien prendra en
charge, par exemple, les nausées associées à
la chimiothérapie ou la prise en charge de certains autres effets indésirables
reliés à la pharmacothérapie. Donc, on définit un cadre de travail, on
travaille en interdisciplinarité, c'est fluide, c'est simple. Par opposition, ce à quoi on est confrontés, actuellement, ce
n'est ni fluide ni simple, et j'ai nommé les ordonnances collectives.
Alors,
pour bien vous faire voir la distinction, je reprends mon exemple de
l'oncologie. Actuellement, on doit travailler avec des ordonnances collectives. Donc, les médecins et les pharmaciens,
pour chaque médicament ou pour chaque classe de médicament, doivent déterminer comment chacun de ceux-ci ou de ces
classes-là vont être utilisés, quelles vont être les méthodes d'ajustement, en fait tout prévoir à l'avance toutes les
modalités possibles, donc on se rend compte que, pour arriver au même
objectif, on pourrait avoir besoin de huit, 10, parfois plus d'ordonnances
collectives. Et une fois qu'on a déterminé
le contenu de ces ordonnances-là, là on s'embarque dans le processus
d'approbation des ordonnances collectives. Alors là, j'appellerais ça... dans le dédale administratif de nos
établissements, il faut que ce soit soumis aux départements médicaux. Ça
peut avoir à être soumis aussi pour approbation soit à la direction des soins
infirmiers ou au conseil des infirmières et infirmiers pour éventuellement en
arriver à une approbation finale par le conseil des médecins, dentistes et pharmaciens. Ce processus-là peut prendre de 12
à 18 mois, donc c'est très long. Et imaginez que, pendant ce temps-là, il
est possible que les recommandations de traitement aient changé, donc, si c'est
le cas, il faut recommencer.
Alors,
vous voyez que c'est quelque chose qui est très lourd, et c'est pourquoi nous,
on est convaincus qu'il faut plutôt
aller vers des pratiques collaboratives pour permettre, justement, d'initier,
ajuster et cesser des médicaments, parce que ça va être plus fluide, parce que ça va augmenter l'efficience dans
le système de santé, parce qu'autant pour les médecins que pour les
pharmaciens, il y aura moins de temps à consacrer à de la paperasse et de la
rédaction, donc plus de soins directs aux patients. Et enfin ça va
offrir plus de latitude aux pharmaciens pour atteindre les objectifs
pharmacothérapeutiques en fonction de leur expertise.
Deuxième
recommandation dont on veut faire état ce matin, ça concerne la substitution
des médicaments, et là je réfère à
une pratique qui a cours dans les établissements de santé depuis très
longtemps. En fait, dans les établissements de santé, on va sélectionner
une liste des médicaments qui seront utilisés pour nos patients, évidemment
dans le but de répondre à l'ensemble de leurs besoins. Mais, à l'intérieur
d'une même classe pharmacothérapeutique, on ne va pas nécessairement garder l'ensemble des molécules disponibles, donc le
comité de pharmacologie va faire une sélection, évidemment, pour tenir compte de toutes les possibilités qu'on
aura rencontrées. Mais, dans l'éventualité où un autre médicament serait
prescrit, à ce moment-là, le comité de
pharmacologie va émettre des règles de substitution automatique qui vont
permettre au pharmacien, d'emblée, dès qu'il voit arriver cette
ordonnance-là, de faire la substitution. Et tout ça est encadré par le conseil des médecins, dentistes et pharmaciens.
Ça, c'est une pratique qui a cours depuis très longtemps. Le hic, c'est
que cette pratique-là, actuellement, échappe à l'encadrement légal actuel.
Donc, on pense que le projet de loi n° 31 est une
excellente occasion pour régulariser les choses par rapport à cet élément.
Deux
mots sur l'évaluation physique et mentale d'une personne dans le but d'ajuster
ou de suivre la pharmacothérapie du
patient. En établissement de santé, ça fait partie de nos activités quasi
quotidiennes. On est auprès des patients, on travaille en interdisciplinarité,
et il faut absolument qu'on intègre ça dans le projet de loi parce que c'est un
élément essentiel du processus d'optimisation de l'usage des
médicaments. Alors, pour nous, c'est un facteur essentiel.
On
est convaincus que le contexte actuel est propice à l'implantation de ces
mesures-là en établissement de santé, et, pour vous en faire la
démonstration, je cède maintenant la parole à ma collègue, Mme Vaillant.
Mme Vaillant
(Linda) : Merci. Alors, je vais poursuivre pour vous présenter un
petit peu mieux, peut-être, le contexte
d'exercice des pharmaciens d'établissement, que possiblement vous connaissez
moins, étant donné que c'est un groupe qui représente 17 % de la
profession au Québec.
Quelques
éléments que je vais mettre de l'avant. D'abord, la formation universitaire.
Les pharmaciens d'établissement détiennent,
en très grande majorité, une formation de deuxième cycle en pharmacie, qui,
aujourd'hui, s'appelle une maîtrise en pharmacothérapie avancée. Alors,
c'est une formation de 16 mois consécutifs qui suit la formation de
premier cycle de quatre ans, là, qui
s'appelle le doctorat professionnel en pharmacie. Cette formation de
16 mois supplémentaires permet d'aller
chercher les compétences et les connaissances plus spécifiques aux besoins des
clientèles qui sont hospitalisées ou hébergées en établissement de
santé. Donc, ce ne sont pas nécessairement les mêmes médicaments, c'est un
circuit du médicament qui est distinct de
celui qu'on observe en pharmacie communautaire, donc ça requiert cette
formation de deuxième cycle si on veut avoir une pratique optimale en
établissement de santé.
Deuxième
élément, le pharmacien d'établissement a une pratique qui se décline selon cinq
axes : les soins pharmaceutiques, les services pharmaceutiques,
l'enseignement, la recherche, la gestion et les affaires professionnelles.
Les services
pharmaceutiques, c'est ce que tout le monde connaît de base. C'est ce que nous,
on appelle la distribution des médicaments. Donc, en établissement de santé, on
reçoit l'ordonnance, on valide, on prépare, on retourne le médicament à
l'unité de soins. Essentiellement, c'est le volet distribution. C'est, je vous
dirais, le minimum du minimum requis.
Quand on veut
arriver dans le crounch, le coeur de la rentabilité du pharmacien, il faut
l'amener à faire des soins pharmaceutiques. Là où son expertise est
vraiment pertinente, c'est dans le volet soins pharmaceutiques. Les soins, ça signifie tout ce qu'on vient de décrire,
c'est-à-dire ajuster la médication, revoir le profil médicamenteux, s'assurer
que c'est le bon médicament qui est
prescrit, est-ce qu'on devrait en cesser un, est-ce qu'on devrait en réduire un
autre, est-ce qu'on devrait en
ajouter un. Alors, c'est cette évaluation-là et ces décisions-là qui sont
prises par le pharmacien qui font partie, je dirais, de la plus-value de
son activité, c'est-à-dire vraiment le volet soins pharmaceutiques.
Le volet
gestion et affaires professionnelles, c'est un volet qui est vaste, qui peut
concerner la gestion des départements. Mais,
si je m'attarde plus aux affaires professionnelles, je vais vous parler de ce
qu'on vient de décrire, les ordonnances collectives. La rédaction et la
révision des ordonnances collectives et toute la lourdeur du processus qu'on
vient de vous exposer, ça fait partie de ce
volet des affaires professionnelles. On a besoin, nos patients ont besoin qu'on
offre davantage de soins directs aux
patients. Présentement, vous le savez possiblement, les pharmaciens
d'établissement sont en rareté de main-d'oeuvre.
Il faut s'assurer qu'on fait le maximum pour qu'ils soient davantage dans l'axe
des soins pharmaceutiques et un petit
peu moins dans la paperasse. Ça fait partie des recommandations qu'on fait
aujourd'hui, de se sortir du carcan des
ordonnances collectives, qui prennent beaucoup d'heures de gestion, pour les
ramener à des heures de soins directs aux patients.
Finalement,
un autre élément qui est important, c'est celui du CMDP. Les pharmaciens font
partie du conseil des médecins, dentistes et pharmaciens depuis 1983.
C'est un cadre qui est particulier, propre aux établissements de santé, qui permet d'assurer les compétences et la qualité
des actes qui sont posés par le pharmacien. Alors, c'est le même cadre rigoureux qui s'applique aux médecins, évidemment.
Et le pharmacien, une fois qu'il a obtenu un statut au sein du CMDP, il
est ensuite officiellement embauché par le conseil d'administration de
l'établissement. Il accepte donc d'office d'être soumis au processus disciplinaire, par exemple suite à une plainte, et
il accepte que son exercice soit encadré rigoureusement par une
évaluation de ses actes.
• (12 h 30) •
Finalement,
très rapidement, le pharmacien, aussi, en établissement a la chance, je dirais,
d'être dans un environnement où il a
accès à l'ensemble des données cliniques, l'ensemble du dossier patient. Il a
le patient, aussi, devant lui, il a l'équipe médicale, donc il est vraiment dans un environnement propice à prendre
les bonnes décisions. Alors, c'est ce qui nous amène aujourd'hui à vous proposer d'inclure la
possibilité pour les pharmaciens d'initier, d'ajuster et de cesser des
médicaments par un seul et même mécanisme qui passe par une voie
réglementaire mais qui va alléger le fardeau des pharmaciens d'établissement et, je vous dirais, par ricochet,
celui des médecins aussi, auxquels, nécessairement, le processus est associé. Je vous remercie. On est prêts à
recevoir vos questions.
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci pour votre exposé. Nous initions cette période d'échange avec Mme la ministre. La parole est à vous.
Mme McCann : Merci,
M. le Président. Alors, moi, je veux
vous saluer, M. Paradis, Mme Vaillant, très contente de vous revoir aussi, un exposé fort intéressant.
Et, bon, vous le savez, moi, j'ai travaillé dans le réseau pendant de
nombreuses années et j'ai côtoyé beaucoup
de pharmaciens et apprécié vraiment le rôle des pharmaciens dans les établissements de santé et de
services sociaux.
Sur les ordonnances collectives, oui, qui sont
un processus très long, pouvez-vous élaborer davantage sur la proposition que
vous nous faites?
M. Paradis
(François) : Oui, on peut,
évidemment, élaborer davantage, puis je pense que c'est d'y aller de façon...
peut-être, encore une fois, avec des
exemples, parce que, quand on parle de pratique collaborative, c'est simplement
d'établir, de définir les champs
d'action ou, je veux dire, les carrés de sable de chacun des professionnels.
Donc, à partir du moment où... je reviens à mon exemple en oncologie, bien, si
on s'entend que la prise en charge des nausées va être faite par le
pharmacien, bien, le pharmacien, à ce
moment-là, lui, bon, il a son expertise, il a les données probantes, il a les
recommandations et, à partir de ça, il est en mesure de déterminer... pour un
patient ou une patiente donnée, en fonction de ses autres pathologies, en fonction de l'état de ses reins, l'état de son
foie, ses mécanismes d'évaluation, en fonction des autres pathologies qui sont
présentes chez cette personne-là, va être en mesure de choisir le meilleur
médicament possible, le cas échéant de faire les ajustements nécessaires
dans les posologies pour finalement arriver à une thérapie qui va être la mieux
adaptée possible à la situation des
patients. Donc, c'est quelque chose qui est... Quand on dit que c'est plus
fluide, c'est qu'on n'a pas besoin d'avoir un algorithme qui va nous dire : Si c'est comme
ça, tu tournes à gauche, si c'est comme ça, tu tournes à droite. Il y a des recommandations, il y a des
règles de... des recommandations des sociétés savantes, et, à partir de là, le
pharmacien, lui, avec son expertise, est
capable de faire rapidement ses... ça lui permet de s'ajuster rapidement à
l'évolution du patient aussi.
Mme Vaillant
(Linda) : En fait, je me permets d'ajouter, je vais vous donner un
exemple. Ici, là, j'en ai une, physiquement,
là. Ça, c'est une ordonnance collective, une seule, ça a 28 pages. C'est
écrit par le pharmacien, ça concerne la
médication. C'est révisé par le médecin, évidemment, mais l'expertise, elle est
détenue par le pharmacien, il la rédige, l'ordonnance. Ça, c'est juste pour contrôler les nausées et vomissements
en onco, une seule ordonnance. Si je veux collaborer à autre chose, le
patient a des problèmes de mucosite, ça va me prendre une ordonnance collective
spécifique pour le rince-bouche de la
mucosite. Si je veux assister le patient pour un problème de douleur, ça va me
prendre une ordonnance collective
spécifique pour le problème de douleur. Et tout ce processus va prendre le 12 à
18 mois, qu'on vous a décrit par un bel organigramme en annexe, que
vous pourrez regarder, qui est magnifique. Ça, c'est le processus des
ordonnances collectives — vous ne le voyez pas bien, mais vous l'avez
en annexe du mémoire — excessivement lourd, très long, pour faire la même chose que ce qu'une entente de
pratique collaborative, que moi, j'appelle une feuille recto verso, là...
j'espère que je n'offense personne en
disant ça, surtout pas mes collègues de l'Ordre des pharmaciens, mais j'espère
qu'ultimement c'est quelque chose qui
ressemblerait à une feuille recto verso qui décrit un cadre de fonctionnement
dans lequel chacun se partage effectivement le travail selon des
exigences, avec certains paramètres. Je pense qu'on n'est pas en train de se dire qu'on veut partir en fous, on veut faire la
même chose dans un cadre plus léger, plus simple, le même type de pratique,
mais en donner plus, plus de soins, passer moins de temps à rédiger des
ordonnances.
Dernier
exemple que je vais vous donner, vous connaissez possiblement le projet en
CHSLD, PEPS, qui est ici, dans la
ville de Québec, qui permet de prendre en charge... d'assister, en fait, les
médecins en longue durée, puisqu'il y a un problème, hein, on n'a pas suffisamment de médecins en CHSLD. Alors,
les pharmaciens, en collaboration avec les infirmières, prennent en charge la médication des patients. Pour mettre
en place le projet PEPS, ça a pris au minimum l'ajout de 10 ordonnances collectives relativement
complexes, qu'ils ont réussi à procéder assez rapidement, vu l'intérêt pour le
projet. Mais normalement, si on veut déployer
un projet comme celui-là, il va falloir répliquer tout ce processus de mise
en place d'ordonnances collectives, alors
qu'on pourrait avoir simplement une entente de pratique collaborative comme
on le voit aux États-Unis et comme on le voit, au Canada, dans d'autres
provinces également.
M. Paradis
(François) : Et j'ajouterais, sur l'ajout de Mme Vaillant, le
fait qu'il y a une flexibilité, aussi, avec tout ça. Une entente de pratique
collaborative, ça doit s'adapter aux réalités locales. Donc, on peut très bien
décider de fonctionner d'une telle façon à Saguenay, pour prendre un exemple,
et d'une autre façon au CUSM, à Montréal. Donc, il faut s'adapter aux situations, il faut s'adapter à nos clientèles, et
c'est ce que ça permet de faire, plutôt que d'avoir un cadre rigide qui
doit tout prévoir à l'avance.
Mme McCann :
Est-ce que j'en comprends, à ce moment-là, qu'en fait vous auriez une
proposition, là, pour remplacer un
fonctionnement d'ordonnance collective avec les éléments, là... j'entendais
aussi Mme Vaillant, ce que vous disiez, des éléments de base, là,
dans un processus, c'est ce que vous dites aujourd'hui, pour camper vraiment
tout cet exercice-là? Pour vous, c'est
certainement quelque chose de possible. Vous parlez d'une entente dans le cadre
de la pratique collaborative. Est-ce
que cette discussion a eu lieu dans d'autres forums universitaires, le CMDP?
Est-ce que vous avez eu des occasions
de présenter votre proposition pour remplacer... c'est un peu... bon, pour
avoir une autre méthode que les ordonnances collectives?
Mme Vaillant (Linda) : Oui, je pense qu'on en a beaucoup discuté. Il y a
quand même pas mal de publications, aussi,
sur les pratiques collaboratives. C'est effectivement la proposition qu'on
fait. En fait, c'est qu'on doit vivre, actuellement, avec deux modalités. Il y a une modalité qui nous
permet d'ajuster des médicaments de manière autonome, là, en vertu de la loi, mais, quand on veut initier le médicament
nous-mêmes, là ça nous prend un cadre d'ordonnance collective. Alors, en établissement de santé, on joue avec les deux,
parce qu'on initie assez régulièrement. L'exemple... Initier, là, ça veut juste
dire le débuter, là. Vous avez de la chimiothérapie, je veux débuter
l'antinauséeux, mais il faut que je l'initie, mais ça me prend
l'ordonnance collective.
Alors,
on voit évoluer, dans d'autres milieux, dans d'autres provinces, cette pratique
collaborative qui permet d'avoir un cadre qui est non moins rigoureux, à
mon avis, mais qui donne un peu plus de flexibilité, puis qui ne freine pas l'innovation non plus, et qui permet d'utiliser
l'expertise des individus au maximum de leurs capacités, en l'occurrence les
pharmaciens d'établissement, là.
Mme McCann :
Moi, j'aurais encore au moins deux questions à vous poser, là, et je veux
vraiment vous entendre. D'abord, nous
dire juste quelques mots sur les secteurs où les pharmaciens en établissement
travaillent beaucoup dans nos établissements. C'est très large, c'est
très vaste, mais dites-nous quelques mots là-dessus, parce qu'il y a beaucoup
de départements. Vous avez parlé de l'oncologie, mais il y a bien d'autres
départements.
M. Paradis
(François) : Il y en a plusieurs, oui, puis...
Mme McCann :
Donnez-en une idée.
M. Paradis (François) : Bien, écoutez, ce qu'on essaie de faire, évidemment, c'est d'être
présents là où les patients ont besoin de nous, et il y a effectivement
plusieurs clientèles qui répondent à cette définition-là. C'est sûr que
l'oncologie, c'est comme quelque chose que... vous allez faire le tour du
Québec, puis à peu près à tous les endroits où il s'administre de la
chimiothérapie, bien, il y a des pharmaciens qui travaillent en collégialité
avec les médecins.
Mais il y a
d'autres clientèles qui font l'objet aussi de... je ne dirai pas de pratique
collaborative, parce que ça ne répond
pas à la définition, mais de travail en interdisciplinarité. Par exemple, en
néphrologie, les patients qui ont des problèmes rénaux ou qui sont en
hémodialyse, il y a des pharmaciens, dans les équipes, qui travaillent
conjointement avec les médecins et les
infirmières. On voit de plus en plus aussi, bon, évidemment, tout ce qui est de
l'antibiogouvernance, le suivi de l'antibiothérapie des patients, pour
s'assurer qu'on a une antibiothérapie qui va être ciblée, qui va éviter, de cette façon-là, de favoriser l'émergence de
bactéries résistantes. On a en santé mentale, où on a de plus en plus des
pratiques, aussi, où les pharmaciens
sont impliqués. En gériatrie, en CHSLD — écoutez, la liste est longue — en cardiologie, en centre spécialisé en greffe de moelle, vous avez des
pharmaciens qui sont présents dans les équipes. Donc, c'est certain que c'est
quelque chose qu'on va retrouver de façon
courante dans les établissements de santé, mais, encore une fois, ce qu'on
vise, dans tous les secteurs que je
vous ai nommés, c'est d'arriver à faire en sorte qu'on a moins de paperasserie
puis qu'on est capables d'avoir plus de latitude puis d'être plus
efficaces, efficients dans nos suivis.
Mme
McCann : J'aimerais aussi vous demander... parce qu'on a aussi des
pharmaciens, des associations, etc., qui viennent nous parler, là, du projet de loi n° 31. Vous avez des
liens, évidemment, avec les pharmaciens communautaires, dans les
pharmacies communautaires. Pouvez-vous nous en parler un peu? Parce que...
Puis, dans le cadre du projet de loi
n° 31, là, j'aimerais vous entendre, est-ce que le projet de loi
n° 31 va avoir un certain impact sur... même aider au niveau de la trajectoire, là, du patient entre,
par exemple, la communauté puis l'établissement de santé? Il y a beaucoup à
dire là-dessus, parce qu'il y a à faciliter cette trajectoire au niveau
du médicament, la prescription, entre la communauté et l'établissement et aussi l'établissement et la communauté. Pouvez-vous
nous en parler, dans le cadre du projet de loi n° 31 aussi,
peut-être dans un deuxième temps, mais de tous ces liens pour assurer la
continuité de services pour les patients?
• (12 h 40) •
Mme Vaillant (Linda) :
Définitivement, je dois admettre une lacune à l'égard de la continuité de soins
entre pharmaciens. Il faut absolument
qu'on améliore cet élément-là. Il y a toutes sortes de raisons pour ça. Je pense
que le projet de loi n° 31 peut favoriser la continuité de soins. Il y a du travail à faire, beaucoup,
à l'égard tant de la sortie des patients que de
l'entrée des patients.
Alors, si je
me place... On discute avec nos collègues de la pharmacie communautaire, mais on réfléchissait, nous,
à l'association, justement, au cours de
l'été, au fait qu'il va falloir qu'on travaille plus activement, dans le
contexte de ce projet de loi qui,
j'espère, va être adopté, à un parcours de soins du patient dans le contexte,
là, vraiment, de soins pharmaceutiques.
Donc, on se disait, entre nous : Il faut qu'on discute de ça avec nos
collègues de la pharmacie communautaire pour s'assurer qu'on arrive à
bien s'arrimer et que le patient ne tombe jamais entre deux chaises.
L'introduction des pharmaciens en GMF, à notre
avis, est un premier pas extrêmement intéressant d'avoir cette continuité. Ils amènent une forme de continuité,
les pharmaciens, quand même, en GMF, parce qu'on a une transition. C'est
des patients un peu plus complexes qui
peuvent, dans certains cas, passer de l'hôpital à la maison, au domicile, et
donc qui vont avoir un soin pharmaceutique qu'ils n'avaient pas
auparavant. Ça fait que c'est un élément qui est facilitant.
À l'égard du
projet de loi comme tel, je pense que, si on est en mesure de faire davantage à
la sortie des patients pour identifier
certains besoins, par exemple, et s'assurer de transmettre à nos collègues de
la pharmacie communautaire ces éléments-là... On peut penser à la
vaccination, par exemple. Donc, la vaccination, en établissement, nous, on ne
pense pas qu'on va vraiment vacciner. On
travaille avec des infirmières au quotidien, c'est très certainement les
infirmières qui vont vacciner, poser le geste comme tel. Par contre, on
va être en mesure d'identifier les besoins de vaccination. Les clientèles d'oncologie, pour y revenir, c'est des
patients qui, très souvent, ont besoin d'une couverture vaccinale pour les
risques de pneumonie, risques de grippe aussi. Alors, on sera en mesure, nous,
de les attraper puis de s'assurer que ce vaccin-là
va être administré au moment où le patient retourne à sa pharmacie, par
exemple. Mais il y a du travail à faire. C'est un élément, je pense, sur
lequel on doit travailler sur les prochaines années, cette question de
continuité des soins.
Il y a un
enjeu de main-d'oeuvre. Je ne vous cacherai pas qu'il y a une difficulté, en
établissement de santé, où, à la sortie,
on aimerait être capables d'assurer un meilleur suivi pour nos collègues de la
pharmacie privée, parce que, pour eux, c'est
difficile de recevoir une ordonnance... souvent, ils vont vous le dire le
vendredi après-midi, parce que c'est là que les patients sortent, ils
sont pris avec ça, ils essaient de rejoindre des gens, le médecin, le
pharmacien, c'est parfois difficile. Alors,
il y a quelque chose à améliorer et il y a probablement quelque chose à
améliorer dans le réseau de la santé, aussi, pour identifier des porteurs de dossier, si on veut, des leaders qui
pourraient assurer une continuité et peut-être aussi une forme d'enseignement auprès des pharmaciens de la
communauté dans certains champs plus spécialisés, mais ce sont des
choses à faire.
Mme McCann :
Est-ce qu'il y a des mécanismes que vous voyez qui pourraient être mis en place
pour améliorer, justement, cette
continuité, qui est tellement fondamentale pour le patient? Surtout que nos
patients, là, qui ont des maladies chroniques, des patients très âgés,
qui ont besoin de cette continuité... Avez-vous des suggestions de mécanismes?
M. Paradis
(François) : Bien, il y a
une entité qui existe déjà, qui est le Comité régional de services
pharmaceutiques, dont la fonction, le rôle est justement d'organiser les
services pharmaceutiques sur le territoire. Évidemment, dans les faits, c'est extrêmement compliqué parce que, quand on
parle des CISSS et des CIUSSS, par exemple, bien, je veux dire, sur un
territoire donné, déjà on regroupe un certain nombre d'installations, comme on
les appelle, et, sur le même territoire, il y a aussi un certain nombre de pharmacies
communautaires qui ont des propriétaires différents, qui font partie de chaînes
et bannières différentes. Donc, l'enjeu de
l'arrimage, il est énorme. Moi, je peux vous dire, là, je travaille au
Bas-Saint-Laurent puis je le vis, je
siège au CRSP, et c'est quelque chose qui est extrêmement difficile, autant
parce qu'il y a des enjeux de main-d'oeuvre, il y a des enjeux de
distance, donc c'est quelque chose qui est extrêmement difficile.
Est-ce
qu'il y a des choses? Bien, évidemment, on parle du DSQ. Je pense que tout ce
qu'on pourra faire dans le temps qui pourra améliorer la fluidité des
communications... Là, on entend le mot «fax» à qui mieux mieux depuis hier,
ici, mais tout ce qui permettra... Parce que
ce n'est pas seulement de dire : Voici la liste des médicaments que le
patient prenait à l'hôpital, là, puis
voici... c'est : Voici ce qui s'est passé, aussi, voici pourquoi on a
changé telle molécule, voici pourquoi on a ajusté telle molécule, et
tout ce cheminement d'information là actuel, il est difficile.
Mme McCann :
Mais ce cheminement d'information, est-ce que ça demande un outil comme le DSQ
ou ça demande autre chose?
Mme Vaillant
(Linda) : Ça demande autre chose, ça demande autre chose. La
problématique en établissement de santé, le
DSQ ne le règle pas. C'est beaucoup un outil spécifique pour ce que nous, on
appelle le bilan comparatif des médicaments. Alors, on est un petit peu
en retard, je vous dirais, là-dessus, n'ayant pas du tout d'outils
informatiques ou très peu, là. Quelques
établissements en disposent, mais véritablement très, très peu. Et n'ayant pas
cet outil-là, ça devient très
fastidieux. On fonctionne effectivement par fax, on refait une saisie dans
notre propre système, et là, si on est chanceux, le logiciel nous permet d'extraire un bilan et de l'imprimer, mais ce
n'est pas toujours le cas. Donc, il y a du travail, au niveau
informatique, à faire, très certainement, pour améliorer la fluidité à ce
niveau-là, clairement.
Le Président
(M. Provençal)
: Ça va aller? Je
passe la parole au député de Pontiac.
M. Fortin : Merci. Merci, M. le Président. Bonjour, M. Paradis, Mme Vaillant.
Merci d'être parmi nous aujourd'hui et de nous proposer certaines pistes de solution
pour améliorer, simplifier les choses pour les pharmaciens en établissement, entre autres.
Avant
d'aborder vos deux grandes recommandations, disons, là, vous y avez fait référence,
Mme Vaillant, l'enjeu de la pénurie de main-d'oeuvre, et je pense
que c'est connu, c'est connu de tout le monde, il manque de pharmaciens en établissement. Est-ce qu'un des effets collatéraux du projet de loi n° 31... et là je ne dis pas ça parce que je cherche
des bibittes, je dis ça parce que vous êtes là puis vous vivez un enjeu en ce
moment, mais est-ce qu'un des effets collatéraux ne pourrait pas être
d'augmenter la demande en pharmaciens, essentiellement? Parce que, quand on entend l'Ordre des
pharmaciens, la Fédération des pharmaciens, qui étaient ici hier et qui nous
parlaient, entre autres, de la nécessité de rémunération pour des actes nouveaux, des actes additionnels...
Donc, si on se dit : Les pharmaciens en établissement vont faire des actes additionnels, bien, probablement qu'on va avoir besoin de plus de pharmaciens... pas en établissement, mais en pharmacie
communautaire. Alors, rendu là, est-ce que la difficulté pour vous d'attirer
des nouveaux pharmaciens va être encore plus grande? Est-ce que ça pourrait
causer un enjeu de pénurie supplémentaire si des pharmaciens communautaires, disons,
là, ont besoin davantage de ressources?
Mme Vaillant (Linda) : À mon
avis, ce sont les besoins des
patients qui dictent le nombre de professionnels requis, là. Je ne pense pas que ce soient les
gestes posés qui vont entraîner une pénurie de main-d'oeuvre. Ce que je veux
dire, c'est qu'on a déjà une difficulté à suivre la croissance des besoins, la
pharmacothérapie évolue extrêmement rapidement.
On a fait, nous, un exercice, dans les
dernières deux années, pour... sachant qu'on n'est pas une main-d'oeuvre en quantité tellement importante,
on a fait un exercice pour assister les chefs des départements de pharmacie et
les pharmaciens à réviser leur propre
offre de soins, là, à l'intérieur des établissements et de se dire : Est-ce qu'on est vraiment
efficients? Est-ce qu'on est au meilleur endroit pour s'assurer qu'on donnait
les soins et services les plus requis, alors, vraiment là où le besoin
est le plus criant? Mais on sait qu'on ne
couvre pas l'ensemble des besoins. Qu'il y ait un projet de loi n° 31 ou non, là, on ne couvre pas l'ensemble
des besoins.
Alors,
aujourd'hui, ce qu'on espère, c'est avoir plus de fluidité
dans ce qu'on fait déjà pour peut-être en offrir un peu plus, donc la même chose, à plus de gens, pas plus de gestes. Alors, c'est
le même type de gestes encadrés différemment à plus de patients, donc prendre davantage de clientèle en charge. À l'heure actuelle, on va déterminer,
par exemple, que, sur une unité de médecine interne, il y a, je ne sais pas,
moi, 35 patients, on va identifier, en fonction de plusieurs paramètres,
les cinq, six, sept, huit patients qu'on va
suivre dans la journée. Les autres, on ne pourra pas nécessairement les voir.
On va traiter les ordonnances, mais
on ne pourra pas aller au chevet et s'assurer qu'on fait vraiment une
validation complète.
Alors,
ça, c'est un problème qui va toujours rester vrai. Le projet de loi, à notre
avis, est une opportunité de réduire la
lourdeur administrative puis de s'assurer que les gestes posés par les
professionnels qui sont déjà là sont vraiment le plus efficient possible
et directement axés sur les patients.
M. Fortin : O.K. La substitution, vous en avez parlé d'entrée de jeu, là. J'essaie
de comprendre, parce qu'essentiellement
vous avez parlé du mécanisme par lequel on se trouve à le faire et pour lequel
il y a un besoin de régulariser la
situation, parce que ça met vos professionnels
et d'autres également, là, en situation difficile, disons, en situation...
en contravention de certaines réglementations. Mais, pour le patient lui-même,
le fait que vous procédiez de la sorte, sans nécessairement avoir le droit de le faire, est-ce qu'il y a
un impact pour lui? Est-ce que c'est plus long pour lui? Est-ce qu'il peut avoir son médicament aussi rapidement?
Est-ce que vous pouvez me décrire, pour le patient, ce que ça veut dire,
ça, et non seulement pour les professionnels?
• (12 h 50) •
M. Paradis (François) : Bien, en fait, pour le patient, il n'y a pas
d'impact. Et je vous dirais que c'est le premier critère qu'on regarde quand on prend ce type de mesure là ou toute autre
mesure dans le réseau de la santé. Quand on fait des sélections de médicaments, quand on établit nos
listes de médicaments dans les établissements, là, ce qui est fondamental, au-delà du coût, là, du médicament, c'est de
s'assurer qu'on répond aux besoins des patients. Puis nous, les pharmaciens
en établissement de santé, là, c'est notre credo, ça, c'est clair au départ.
Dans
le cas de ce dont on parlait, la
substitution de médicaments, c'est pour ça que le comité de pharmacologie, ce
qu'il va faire, il va dire : O.K., par exemple... là, je ne veux pas rentrer dans les termes trop techniques, mais
j'ai une classe d'antibiotiques, qui s'appelle les céphalosporines, bon,
bien, cette classe-là, il y a la première génération, la deuxième génération, la troisième génération... bien, il y
en a quatre, maintenant, là, et les compagnies, elles... bien, les
compagnies vont vouloir avoir peut-être...
Moi, j'aimerais ça aller chercher un peu le marché de la première génération,
ça fait qu'on va avoir, pour chaque génération, trois, quatre
médicaments. Ça ne donne rien aux établissements de santé de garder trois, quatre médicaments de la même sous-classe
qui ont les mêmes effets. Peut-être qu'on va en choisir deux, parce que, dans
un cas, on peut le donner à tous les... aux patients qui ont des fonctions
rénales normales, puis, dans l'autre cas, il
va falloir ajuster la thérapie. Mais les choix sont faits, puis après ça, bien,
on dit : O.K., là on a la panoplie de ce qu'on a besoin pour traiter nos patients, s'il y a
une ordonnance qui vient pour x raisons, mais qui ne fait pas partie de la
liste, le pharmacien, d'emblée, lui,
de façon automatique, va pouvoir faire la substitution, il n'aura pas besoin de
rappeler le médecin. Donc, à quelque part, là, pour le patient, ça
permet d'assurer une réponse rapide en temps réel.
M. Fortin :
Mais, dans le fond, là, ce que vous nous dites, c'est que notre loi, notre
réglementation, la réglementation gouvernementale, là, n'est pas adaptée
à ce qui se passe en ce moment sur le terrain.
M. Paradis
(François) : Dans ce cas-là, c'est exact, oui.
M. Fortin :
Et ça, c'est notre travail, de corriger cette situation-là, là. Mais en même
temps est-ce qu'il y a des pharmaciens d'établissement qui refusent de procéder
comme ça parce que ça ne suit pas les lois et la réglementation en place, là, ou est-ce que c'est comme ça
partout, tout le temps, puis c'est la pratique courante? Mais je me demande
s'il n'y a pas des endroits où on se
dit : Non, on ne peut pas faire ça comme ça parce que la loi ne le permet
pas. Non? O.K.
M. Paradis (François) : Écoutez, à notre connaissance... Moi, en tout
cas, moi, dans mon expérience, puis on fait le tour du Québec aussi,
là...
Mme Vaillant
(Linda) : Ta longue expérience.
M. Paradis
(François) : Pardon?
Mme Vaillant
(Linda) : Longue expérience.
M. Paradis
(François) : Dans ma longue expérience, mais là on est hors d'ordre, M.
le Président.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Paradis (François) : Écoutez,
moi, je n'ai jamais vu ça. Puis en fait on peut déterminer, à un
endroit, qu'il y a une règle de substitution pour telle classe, puis
un autre établissement pourrait décider qu'il n'en fait pas, pour toutes
sortes d'autres raisons. Mais d'avoir
vu des pharmaciens dire : Non, non, moi je ne veux pas aller en prison,
là, comme je dis parfois, moi, je n'ai jamais vu ça.
Mme Vaillant (Linda) : Mais, attention, c'est encadré, là, il faut quand même
se dire, c'est encadré par le CMDP.
M. Paradis
(François) : C'est encadré, oui.
Mme Vaillant
(Linda) : Alors, ce n'est pas le pharmacien, ce jour-là, qui
décide : Ça va être, aujourd'hui, ces deux-là,
puis demain, les deux autres. Il y a vraiment des règles strictes qui sont encadrées, là. À
chaque fois qu'on ajoute un
médicament au formulaire — le
formulaire, c'est notre liste de médicaments, là — c'est
réfléchi, c'est encadré, c'est adopté. S'il y a une règle de
substitution, elle doit être approuvée aussi par le CMDP, là.
M. Fortin :
C'est bon. Ça va pour moi, M. le Président. Je pense que mon collègue a
peut-être quelques questions.
Le Président
(M. Provençal)
: Oui. M. le député de
Marquette.
M. Ciccone : Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux. Dans le projet de loi n° 31, à l'article 4 — ça fait
longtemps, depuis hier je veux poser la question, mais je vais me servir de
vous, justement : «1.1. Un pharmacien peut administrer un vaccin à un
patient âgé [de moins de 16 ans]», et, selon votre mémoire, je crois que
vous saluez, justement, cet
article-là. Cependant, vous demandez au gouvernement, à la page 15 de
votre mémoire, que ces mesures soient mises en place «dans un cadre souple, sans une multitude de contraintes
administratives». Quel genre de contraintes administratives craignez-vous?
Mme Vaillant
(Linda) : Le genre
ordonnances collectives, là, le genre qu'on vous a décrit, des situations où,
parfois, on peut se retrouver avec...
Là, on précise que la vaccination peut être donnée, là, à part pour les enfants
de moins de six ans, ça, ça va, mais
ce qu'on se dit, c'est qu'il faut que ça se fasse d'une manière assez souple.
Alors, il ne faudrait pas se retrouver avec,
par exemple, un protocole à rédiger de 32 pages qui explique quelle est la
situation pour laquelle le patient de huit ans peut le recevoir, et puis est-ce que tu as revalidé ci et ça. C'est
vraiment... je pense qu'on est un peu échaudés, peut-être, par les ordonnances collectives, c'est notre crainte.
Mais on ne voudrait pas se retrouver avec un guide qui, par la suite... Parce
que, nécessairement, il y aura des
règlements qui vont découler de certaines dispositions, là, ça fait qu'on veut
juste s'assurer qu'on ne se retrouve pas avec un guide qui est tellement
compliqué que ça devient inapplicable.
M. Ciccone :
O.K., bon, c'est clair. Merci beaucoup.
Mme Vaillant (Linda) : C'est
une crainte, là.
M. Paradis (François) : Pour ne
pas dire une phobie.
M. Ciccone :
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: C'est bon? Je cède la parole au député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci, M.
le Président. Merci beaucoup d'être parmi nous. J'entends bien votre préoccupation par rapport à la bureaucratie inutile qui entoure la question
des ordonnances collectives, ça doit certainement faire l'unanimité.
Est-ce que vous pensez qu'il y a une
modification possible à faire au p.l. n° 31 qui pourrait
répondre à vos préoccupations ou
est-ce que c'est davantage quelque chose qui devrait se modifier par règlement?
Est-ce que vous l'avez analysé dans cet angle-là de... J'essaie de voir
si on pourrait proposer un amendement qui irait dans le sens de vos
recommandations.
Mme Vaillant
(Linda) : Notre proposition,
essentiellement, c'est qu'il y a une des dispositions du projet de loi qui mentionne
que le pharmacien pourra initier, ajuster... je ne me souviens plus trop du
libellé, mais après consultation, après demande de consultation, là. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il ne faut pas
que ce soit après demande de consultation strictement. Ça, c'est une des possibilités, une des modalités
qui pourraient être mises de l'avant, mais il faut s'assurer aussi d'avoir un
cadre qui permette une proactivité. Donc, si
un patient a besoin d'un coanalgésique rapidement, il ne faut pas qu'on attende
que le médecin nous demande en consultation.
Il faut qu'on puisse, nous, dire : Ce patient-là a besoin d'être soulagé maintenant,
je veux agir maintenant, pas juste laisser une note puis attendre que le
médecin revienne, et tout ça.
Alors, notre proposition, essentiellement, c'est
d'avoir un libellé qui permette d'initier, d'ajuster, de cesser des médicaments. Par voie réglementaire, ça nous
convient, mais que ça soit par un véhicule ou par un autre, notre proposition
était un règlement qui découlerait de
la Loi médicale. Que ça vienne par un autre véhicule, honnêtement, c'est la... L'objectif
final, pour nous, c'est d'arriver à se
débarrasser le plus possible, là, en tout cas, dans les milieux où c'est
possible de le faire, des ordonnances collectives. Alors, ce qu'on propose,
c'est qu'il y ait un libellé clair qui permette d'initier, d'ajuster et de
cesser des médicaments.
M. Zanetti : Je comprends.
Donc, vous voulez vous défaire complètement du modèle d'ordonnance collective.
Mme Vaillant
(Linda) : Pour nous, ce
serait idéal de s'en défaire complètement. Mais évidemment il y a peut-être des
milieux où ce serait moins propice, je ne le sais pas, mais ajoutons au moins
la possibilité, dans notre coffre à outils, là, d'avoir des pratiques
collaboratives dans les milieux qui sont propices à le faire, justement.
M. Zanetti : Et donc il faudrait éliminer... J'ai-tu encore du
temps? Il faudrait éliminer toute consultation du médecin pour pouvoir
changer un médicament.
Mme Vaillant
(Linda) : Bien, je ne pense
pas qu'on doive nécessairement l'éliminer. C'est parce qu'il y a des contextes qui sont différents.
Il y a peut-être des milieux... Il faut penser que, là, la loi s'applique à
tous les milieux, là. Nous, on vous
parle pour notre milieu, en établissement de santé. Alors, est-ce que, dans
d'autres types de pratique, c'est bien
qu'on ait une demande de consultation? Probablement que oui. Mais, nous, ce
qu'on dit, c'est : Assurons-nous que, dans le volet établissement
de santé ou peut-être ailleurs aussi, ça ne soit pas strictement une demande de
consultation. Il peut y avoir demande de
consultation, mais il pourrait peut-être y avoir aussi des ententes de pratique
collaborative dans d'autres instances, dans d'autres milieux.
M. Paradis (François) : Et il
pourrait y avoir une clientèle pour laquelle il n'y a pas eu d'entente de
pratique collaborative, mais ce qui n'empêche pas un médecin qui voudrait avoir
l'opinion du pharmacien de le demander en consultation.
Donc, c'est un peu... Je réfère... L'exemple du coffre à outils, c'est d'avoir la panoplie des
outils que... nécessaires.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. On termine avec le député de Jonquière.
M. Gaudreault
(Jonquière) : Oui, merci. Je
regarde votre tableau... bien, pas le vôtre, là, mais le graphique sur l'élaboration des ordonnances collectives, j'ai
l'impression de voir un jeu de Tetris, là. Puis en plus, s'il faut que...
chaque ligne,
il faut envoyer un fax pour que ça marche, là, c'est sûr qu'on n'est pas
sortis, là, de l'auberge. Alors, c'est vraiment
fascinant. On rit, mais ce n'est pas drôle.
Moi, je
voudrais savoir c'est quoi, l'enjeu de la main-d'oeuvre chez les
pharmaciens d'établissement. Est-ce
qu'il y a aussi des risques de pénurie? Ça, c'est ma
première question, puis, je vous le dis tout de suite, je vais en
avoir une autre.
M. Paradis
(François) : Bien,
rapidement, parce que, je pense, on est limités dans le temps, mais,
oui, il y a un enjeu de pénurie, d'où, à plus forte raison,
la nécessité qu'on puisse tout faire pour se consacrer le plus possible aux
soins pharmaceutiques. Mme Vaillant l'a dit, les besoins
augmentent.
Mais en même
temps, il faut voir aussi, nous, on essaie d'intéresser les jeunes pharmaciens,
les étudiants à la pratique en établissement de santé. Le fait de pouvoir faire davantage
de soins pharmaceutiques, ça peut représenter un attrait pour eux, parce qu'ils sont formés pour faire ça. Ça fait que, moi, l'exemple
que je donne parfois, c'est : si on va dans certaines régions plus
éloignées du Québec, où un pharmacien qui va aller travailler dans un établissement de santé va essentiellement faire la majorité de son travail à
la distribution, les services de base, ce n'est pas quelque chose qui va l'intéresser vraiment, en tout cas, dans la
plupart des cas. Alors, si on est en mesure de mettre en place davantage
de soins pharmaceutiques, à ce moment-là, on a des chances d'intéresser
les jeunes à aller pratiquer à ces endroits-là.
M. Gaudreault
(Jonquière) : Oui. Puis je
comprends qu'en contexte de pénurie de main-d'oeuvre c'est les soins qui sont les premiers à souffrir parce que vous vous concentrez
sur le service de base, là, le minimum. Donc, est-ce que je comprends bien que votre proposition, au fond,
d'initier des thérapies, de mettre de côté un peu plus, là, les ordonnances
collectives, initier davantage
des thérapies, se concentrer sur les soins, en termes d'efficacité, ça va aussi
aider, justement, à compenser cette pénurie de main-d'oeuvre parce que vous allez être plus efficaces, vous allez être
capables d'en faire plus pour le bien des patients au lieu de remplir
une espèce de Tetris comme ça?
M. Paradis
(François) : Oui, c'est exactement
le cas. Puis c'est un peu contradictoire, quand vous dites... puis vous
le dites bien, de... en situation de pénurie, finalement, ce sont les activités
à valeur ajoutée qu'on est obligés de couper. Alors,
c'est ça qui est un peu aberrant, malheureusement. Mais
effectivement tout ce qu'on peut faire... puis ça, c'est un exemple, si on est capables d'aller réduire le
temps consacré aux activités de gestion, d'affaires pharmaceutiques... affaires
professionnelles et les réorienter vers les soins pharmaceutiques, bien, on
aide nos patients. C'est toujours ça, l'objectif.
• (13 heures) •
Mme Vaillant
(Linda) : On estime, à
l'heure actuelle, que, selon les milieux, parce que ça varie, là, la situation
de main-d'oeuvre n'est pas la même partout puis les établissements ne
sont pas les mêmes, là, tout à fait avec les mêmes missions, mais on estime que les pharmaciens passent de 20 % à 45 % de leurs heures travaillées en
soins pharmaceutiques. Alors, vous
voyez que c'est nettement insuffisant, là. La littérature nous dit qu'on
devrait tendre vers 80 % du temps en soins pharmaceutiques. Alors,
il y a un réel enjeu, là.
M. Gaudreault (Jonquière) : C'est
terminé?
Le Président (M. Provençal)
: Oui.
M. Gaudreault (Jonquière) :
Bon.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. Paradis, Mme Vaillant, pour votre
contribution à nos travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 01)
(Reprise à 15 heures)
Le
Président (M. Provençal)
: À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la santé et des services sociaux reprend ses
travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous poursuivons les consultations particulières
et auditions publiques sur le projet de loi n° 31, Loi modifiant
principalement la Loi sur la pharmacie afin de favoriser l'accès à certains
services.
Cet après-midi,
nous entendrons les organismes suivants : le Collège des médecins du
Québec et l'Association des bannières et des chaînes de pharmacies du
Québec.
Je souhaite
la bienvenue aux représentants du Collège
des médecins du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je
vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé. Merci.
Collège des médecins du Québec (CMQ)
M. Gaudreault (Mauril) : Bonjour, M.
le Président. Je suis Mauril
Gaudreault, président du Collège des médecins du Québec. Ça me fait plaisir d'être ici. Je suis
accompagné, à ma droite, par le Dr Richard Rouleau, qui est administrateur
au conseil d'administration du collège et qui préside le comité conjoint
entre le Collège des médecins du Québec et l'Ordre des pharmaciens du Québec, et de Me Linda
Bélanger, directrice adjointe à la Direction des services juridiques du
collège, qui suit depuis près de deux décennies l'évolution des lois et règlements
professionnels.
M. le Président, Mme
la ministre, Mmes et MM. les parlementaires, le Collège des médecins du Québec
vous remercie de lui permettre de vous
présenter ses réflexions concernant le projet
de loi n° 31, la Loi modifiant principalement la Loi sur la pharmacie afin de favoriser l'accès
à certains services. Depuis mon élection à la présidence du Collège des
médecins du Québec il y a maintenant près d'un an, trois grands objectifs
guident mes actions : se rapprocher du public, dont nous devons assurer la
protection, assurer la responsabilité sociale des médecins, intensifier la collaboration
interprofessionnelle afin d'améliorer l'accès à des soins de santé de qualité
dans le respect des compétences de chaque intervenant.
En
ce qui concerne le projet de loi
n° 31, qui fait l'objet de vos
travaux aujourd'hui, je désire d'abord affirmer que le Collège
des médecins du Québec est d'accord avec l'objectif poursuivi par le projet de
loi et que nous soutenons le gouvernement dans cette démarche visant à élargir les
activités réservées aux pharmaciens pour mieux desservir la population. Pour nous, ce projet de loi s'inscrit parfaitement dans la
continuité du projet de loi n° 41, entré en vigueur le 20 juin 2015, et qui amorçait cette nouvelle et magnifique collaboration entre les pharmaciens et les médecins. Depuis cette date, nous sommes à même de constater que ces nouvelles
activités se déroulent sans problème majeur, comme le comité conjoint de
surveillance mis en place à ce moment l'a constaté, et cela nous rassure
quant à la pertinence d'aller de l'avant avec le projet de loi
actuellement à l'étude.
Je
résumerais notre mémoire en trois points importants. Premièrement, la nécessité
de permettre aux pharmaciens d'évaluer
la condition physique et mentale d'une personne dans le but d'assurer l'usage
approprié de médicaments, ce n'est pas
une prérogative sans limites, elle a un but bien précis : l'usage
approprié des médicaments dans le champ d'exercice des pharmaciens. Comment, autrement, par exemple,
permettre aux pharmaciens de vacciner s'il ne peut évaluer la condition du patient avant de vacciner et de l'évaluer si
celui-ci subit des effets secondaires nécessitant une intervention immédiate?
Il en va de même de tout médicament. Comment
pourrait-il ajuster la thérapie médicamenteuse s'il n'est pas autorisé à faire
l'évaluation de la symptomatologie du
patient dans ce contexte? On comprend, évidemment, que de tels ajustements
doivent se faire obligatoirement en collaboration avec le médecin
traitant.
Deuxièmement, pour
que l'ajustement de la thérapie médicamenteuse ou la modification d'une
ordonnance prévues aux alinéas 5° et 7°
de l'article 17 de la Loi sur la pharmacie se traduisent en bénéfices pour
le patient et ne présentent pas de
risques, cinq conditions gagnantes, à notre avis, doivent être réunies : la modification d'une ordonnance
médicamenteuse doit se faire dans le cadre d'une collaboration étroite
entre les professionnels impliqués dans le suivi du patient, les professionnels doivent s'assurer de ne pas créer une
insécurité chez le patient devant des recommandations contradictoires,
les objectifs thérapeutiques doivent être connus, et les
professionnels doivent utiliser les mêmes normes pour l'ajustement, le pharmacien doit disposer de l'ensemble des informations nécessaires à l'ajustement de la thérapie et, finalement, une communication
efficace doit s'établir entre les professionnels qui collaborent au suivi afin
que la responsabilité de chacun soit établie. Actuellement, les deux ordres, à savoir le collège et l'Ordre des pharmaciens,
collaborent à l'élaboration d'une réglementation et de guides de
pratiques qui, je pense, permettront de réunir ces conditions gagnantes.
Troisièmement, si le pharmacien doit pouvoir ajuster la thérapie médicamenteuse, il
doit aussi pouvoir prescrire des
analyses de laboratoire ou d'autres tests, disposition prévue à l'alinéa
10° de l'article 17. Ceci implique, évidemment, de pouvoir interpréter les résultats en conséquence. Le succès
de l'orientation proposée par le projet de loi repose sur un prérequis essentiel, cependant : la bonne communication entre les professionnels. Je pense qu'on n'en
discutera, on ne le dira et on n'appuiera jamais assez là-dessus.
Comme vous le constaterez, les deux ordres professionnels, à savoir les médecins et les pharmaciens, font
la promotion d'une collaboration interprofessionnelle du XXIe siècle, amorcée avec le projet de loi n° 90 en 2003. Malheureusement, je dois vous
dire que les outils mis à la disposition des professionnels, actuellement, datent, eux, du XXe siècle. Il s'agit, vous l'aurez tous compris, du fameux télécopieur. Il
est maintenant de la responsabilité du gouvernement de mettre à niveau les outils de communication interprofessionnelle pour
que les objectifs d'efficacité et de sécurité pour les patients puissent être
atteints.
En conclusion, le Collège des médecins du
Québec est favorable au projet de loi n° 31 comme une continuité logique du projet
de loi n° 41, entré en vigueur en 2015. Ce projet de
loi ne pourra cependant atteindre ses objectifs que si la communication interprofessionnelle et les outils
pour la favoriser sont rehaussés pour faciliter un véritable partenariat entre
médecins et pharmaciens. Je vous remercie de nous avoir permis de partager nos commentaires avec vous, et il nous
fera plaisir de répondre à vos questions.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, docteur, pour votre exposé. Nous allons débuter la période
d'échange avec Mme la ministre. Je vous cède la parole, Mme la ministre.
Mme McCann :
Merci, M. le Président. Alors, je vous salue, Dr Gaudreault. C'est un
plaisir de vous revoir aujourd'hui et, vraiment, de saluer le travail que vous faites, actuellement, dont vous avez parlé dans votre présentation. Je veux aussi saluer
Dr Rouleau et Me Bélanger, là, qui sont avec vous.
Évidemment,
ça va être intéressant de vous entendre davantage sur ce que vous amenez aujourd'hui, Dr Gaudreault, qui est
fondamental dans ce qu'on veut faire, de la réforme d'accès qu'on veut faire,
qui demande un travail interprofessionnel plus accentué. Et on a eu des présentations, des échanges avec d'autres
groupes, ce matin et aussi hier, et il
y a quelques points qui ont été soulevés, sur lesquels j'aimerais vous
entendre, justement pour favoriser cette pratique interprofessionnelle. Et une des clés, vous en avez parlé, c'est le travail
conjoint, très rapproché que vous faites, actuellement, avec l'Ordre des
pharmaciens, notamment pour vous entendre
sur des guides de pratiques, donc un cadre qui vient vraiment accompagner, hein,
les professionnels sur le terrain.
Donc,
évidemment, j'aimerais vous entendre davantage sur votre vision sur ce qui se
passe, actuellement, au niveau du
travail de collaboration qui se fait entre pharmaciens et médecins, mais aussi
comment le projet de loi n° 31 va nous amener plus loin. Et je vais vous poser une sous-question là-dessus, parce que,
ce matin, on nous a parlé des ordonnances collectives, et moi, je voulais vous demander : Vous,
est-ce que vous avez une vision là-dessus? Parce que les ordonnances
collectives, ça fait aussi longtemps que ça existe, cette façon de faire. Est-ce que vous, vous avez une
vision, là-dessus, qui... Bon, on parle
de pratiques collaboratives qui feraient en sorte que, ce processus qui est quand même
lourd, hein, qui a été élaboré il y a longtemps, on puisse le remplacer
par un processus qui soit dans les règles de l'art mais qui soit allégé.
• (15 h 10) •
M. Gaudreault
(Mauril) : Je vais
simplement donner un début de réponse, mais, pour parler plus de ce sujet-là,
je vais demander à Me Bélanger de compléter. Mais, moi, ce que je vais
vous dire, c'est la vision que j'ai de cela, O.K., par rapport à la collaboration
interprofessionnelle. Comme vous savez, je suis en pleine année de
consultations avec divers citoyens, divers acteurs, divers professionnels, divers
médecins par rapport à me rapprocher... à rapprocher le collège du public, par
rapport à la perception que les gens ont du collège, et, à chaque fois que je
rencontre des gens, on parle de collaboration
interprofessionnelle, et j'ai comme l'impression que, selon la personne qui
parle, il y a une définition différente de
la collaboration interprofessionnelle. Donc, ce que je vais
souhaiter, avec les ordres avec lesquels nous travaillons, particulièrement
de la santé, va être vraiment de s'entendre sur ce qu'est... comment on voit,
comment on considère, comment on voit la
vision que nous avons, en 2019 et par la suite, de la collaboration interprofessionnelle. Parce que, vous m'avez compris, je l'ai dit souvent, la seule façon, à mon avis, à
partir de maintenant, d'améliorer les soins des services à notre population, c'est en collaborant ensemble,
médecins et tous les autres professionnels de la santé, pour atteindre cet
objectif-là.
Mais, pour ce
qui est des ordonnances collectives mais aussi de ce qui se passe au comité
conjoint, les deux personnes qui sont avec moi font partie intégrante du comité
conjoint entre l'ordre et le Collège des médecins, et je vais leur demander
de compléter.
Mme Bélanger
(Linda) : Bien, en fait,
c'est certain que l'ordonnance collective, c'est un outil. Je pense que le
projet de loi n° 31 permet d'aller plus loin
parce qu'il permet au pharmacien et au médecin de travailler en collaboration sans avoir à élaborer cette ordonnance collective
là, en travaillant avec des cibles qui vont être connues. Le projet prévoit
également qu'il y aura des règlements qui pourront prévoir les modalités de communication. Et ce qu'on travaille, présentement, avec l'Ordre des pharmaciens, c'est
qu'on peut aller avec un partenariat entre le médecin et le pharmacien pour
permettre d'ajuster, justement, la thérapie médicamenteuse sans qu'il y ait
besoin d'élaborer l'ensemble de ce que vous
avez déjà vu, là, qui peut être parfois long et fastidieux comme processus.
Dr Rouleau pourrait vous donner des exemples, là, concrets,
cliniquement, qu'est-ce qu'on peut faire pour aller plus loin.
M. Rouleau
(Richard) : Bien, les
ordonnances collectives remplissent quand
même un outil intéressant pour des
pathologies simples, par exemple une infection urinaire avec une condition très
précise, qui nous aide là-dedans. Le nouveau
projet de loi va beaucoup plus loin que ça. C'est un projet passionnant
puis c'est un projet auquel on croit, au Collège des médecins. Il y a vraiment trois niveaux de
partenariat, là, trois cercles concentriques dans lesquels le pharmacien va
pouvoir jouer son rôle. Tout d'abord, prescription immédiate sur-le-champ. Par
exemple, pour une erreur manifeste de dosage,
Richard Rouleau s'est trompé sur la dose, il a pesé... il s'est trompé dans son
calcul, le pharmacien peut changer la dose
immédiatement, en avisant gentiment le médecin par la suite. Ça, ça existe déjà
dans 41 puis ça va continuer à exister.
Ce qui est
intéressant, par la suite, c'est les offres de partenariat qu'on peut avoir
ensemble. Ils ont un cercle plus grand.
Une prescription pour une maladie chronique, quelque chose qui va s'étendre
dans le temps, un problème de glande thyroïde,
un problème de diabète, un problème d'hypertension, le médecin, dans son
cabinet, pourra prescrire une médication et, soit par une demande auprès du pharmacien ou le pharmacien qui
renverra une offre de service, on pourra s'entendre, un et l'autre, sur des modalités... sur
l'ajustement du dosage, qui va s'en occuper, et le pharmacien pourra, de façon
autonome, ajuster la médication pour
la tension artérielle ou le problème de glande thyroïde du patient pour
atteindre des cibles. Ça existait
dans le projet de loi précédent, mais les limitations faisaient en sorte
que c'était très peu utilisé. Là, en mettant le projet de loi de cette
façon-là, ça va vraiment élargir la situation.
Et puis
l'autre grand projet de coopération, c'est dans les milieux où il y a un
contact étroit entre le médecin et le pharmacien dans une équipe
traitante. Les pharmaciens, hier, ont parlé de l'exemple de l'hémato-oncologie,
mais on peut penser à la dialyse, on peut
penser aux soins intensifs. C'est tous des endroits où les gens se côtoient régulièrement, et, sans passer par une ordonnance collective extrêmement contraignante, on
s'entend sur l'ajustement d'une
certaine partie de la thérapie : Vous vous occupez, M. le
pharmacien, de l'équilibre des médications pour la nausée, les effets
secondaires de la chimiothérapie, puis on
s'entend là-dessus, le pharmacien agit de façon complètement autonome, et le
médecin s'occupe d'autres
problématiques. C'est un exemple dans lequel je vois vraiment où un plus un
font trois pour le patient, parce que le résultat global, là, devrait
être encore plus avantageux que deux personnes qui pratiquent en silo.
Mme McCann :
Merci. Puis, justement, j'ai posé la question, on a posé la question à
plusieurs intervenants, groupes qui
sont venus nous voir, c'est une question fondamentale, là. Vous, votre
vision... le projet de loi n° 31, ce que vous êtes... que vous travaillez en pratique collaborative,
actuellement, comment vous voyez l'impact au niveau de la première ligne,
les conditions mineures, ce qu'on appelle les
conditions mineures? Peut-être, vous avez d'autres terminologies, là, Dr Gaudreault, mais pour nous expliquer votre
vision à vous, là. Ce qu'on est en train de faire, ce que vous êtes en train
de faire avec le projet de loi n° 31, comment ça va avoir un impact sur les services de première ligne aux
patients, aux citoyens? On sait, tout
le monde, qu'il y a trop de gens, encore, qui vont à l'urgence ambulatoire.
Malheureusement, l'offre de services, il y a des difficultés, là, au niveau de la
première ligne. Il y a des gens qui attendent, sur un guichet d'accès, d'avoir
accès à un médecin de famille.
Comment vous voyez que ce projet de loi... il ne va pas tout résoudre,
évidemment, mais va avoir un impact sur les services de première ligne?
M. Gaudreault
(Mauril) : Là encore, je
vais donner la parole, peut-être, à mes collègues, mais, moi, ma petite idée
là-dessus, c'est un accès plus rapide par
rapport au patient qui ressent peut-être un désagrément depuis qu'il prend tel
ou tel médicament, qu'il n'ait pas besoin d'attendre le prochain
rendez-vous avec son médecin pour aller en parler avec un professionnel, qui,
en principe, connaît les médicaments mieux que le médecin qui les a prescrits,
hein? C'est ça, les compétences de chacun, à
mon avis. Et donc il pourra en parler au pharmacien, qui pourra soit
recommuniquer avec le médecin
traitant, soit procéder déjà à un ajustement de la médication. Ça fait que,
pour moi, j'y vois là un accès amélioré, certainement, pour le patient par rapport à cela et également pouvoir
partager le ressenti de tel ou tel symptôme avec le professionnel de la
médication qu'est le pharmacien au lieu d'attendre son prochain rendez-vous ou
d'en demander un avec son médecin traitant
pour partager cela. À mon avis, il y a là une amélioration importante des soins
de première ligne. Je ne sais pas si vous voulez compléter, là, mais...
M. Rouleau
(Richard) : Bien, très
rapidement, il y a... bon, la pratique collaborative va évidemment sauver du
temps au médecin. Dans les conditions qui ne
nécessitent pas un diagnostic, il y a plusieurs choses. La prophylaxie de la
diarrhée du voyageur, c'est quelque chose
qui demande du temps, faire des prescriptions, ça fait que c'est sûr que ça
libère du temps. Évidemment que ce
n'est pas notre dossier, mais évidemment que la possibilité... Est-ce que le
patient aura à payer pour la
prescription pour la diarrhée du voyageur ou pas? C'est un petit pépin
concernant le choix de quel professionnel le patient va choisir. Mais, au-delà de ça, dans les conditions
mineures, puis tout ça, dans les règlements, vous allez voir qu'il y a réellement des situations où on va
pouvoir vraiment aider la population puis, dans certains cas, même possiblement
sauver des vies.
Mme McCann :
Merci. On a eu la présentation de la Fédération des médecins omnipraticiens
hier, et la recommandation qui nous a
été faite dans le mémoire, d'ailleurs, puis le président nous a expliqué sa
vision là-dessus, était non pas de parler de l'évaluation physique ou mentale
d'un patient mais plutôt de l'évaluation sommaire physique et mentale du
patient. Vous ne faites pas cette recommandation-là, au niveau du
Collège des médecins. Pouvez-vous nous éclairer là-dessus?
• (15 h 20) •
M. Gaudreault
(Mauril) : Je vais apprécier
qu'ils m'expliquent ce qu'ils veulent dire, parce que je ne sais pas trop ce qu'ils veulent dire par rapport à cela,
honnêtement, là. Mais, je l'ai dit d'entrée de jeu tout à l'heure, nous, on est
d'accord avec ça, ce terme-là, d'évaluation.
Et, je vous le rappelle, là, ce n'est pas une prérogative sans limites, elle a
un but bien précis, ça concerne l'usage approprié des médicaments dans
leur champ d'exercice, les pharmaciens. Je n'ai pas besoin d'appeler ça sommaire, moi. Le pharmacien, c'est un
professionnel, comme nous, et, comme
tout professionnel, moi, je
n'ai pas à juger de sa compétence. Il est compétent, il respecte un code et va
agir selon le champ de pratique qu'il a. Je n'ai pas, moi, comme
médecin, à douter de cela. Donc, pour moi, il s'agit d'une évaluation, tout à
fait, de la condition physique et mentale
dans le cadre de son champ de pratique, qui est l'usage approprié des
médicaments. Je ne sais pas si ça répond, là, mais je ne pourrais pas
vous définir ce qu'il voulait dire par sommaire.
Mme McCann : Oui, mais je voulais vous entendre là-dessus, là,
parce que ça a quand même été un point qu'on a discuté quelques
minutes, là, pour bien comprendre. Puis je pense que la distinction, au fil des
échanges qu'on a avec différents groupes,
entre l'évaluation physique, et ce qui est dit dans le projet de loi, et un diagnostic, c'est deux choses différentes.
M. Gaudreault
(Mauril) : Je ne pense pas
qu'on parle de ça. Je pense qu'on ne parle pas d'une évaluation
comme celle que le médecin ou que l'infirmière praticienne spécialisée va faire. On parle d'une évaluation
qui est conforme au champ de pratique de ce professionnel qu'est le
pharmacien.
Mme McCann : Je voulais vous demander également,
justement, au
niveau, là, du projet de loi, on parle bien que le pharmacien pourra «prescrire et interpréter non seulement des
analyses de laboratoire mais tout autre test, aux fins du suivi de la thérapie médicamenteuse». La question
que je vous poserais : Est-ce qu'il pourrait y avoir un risque de
dédoublement de tests qui sont faits, par exemple, par le médecin de
famille puis qui vont être faits par le pharmacien? Dans votre vision, là, du projet de loi, est-ce qu'il y a un risque de
dédoublement ou de surprescription de tests, là, dans le cadre de ce
projet de loi?
M. Gaudreault
(Mauril) : Je reviens
là-dessus, ça va marcher uniquement si la communication est bonne. Si la
communication est bonne, si ce monde-là se
parle... Ce n'est quand même pas compliqué, de se parler. On a toutes sortes
de moyens de communication en 2019, puis on
dirait que c'est moins facile qu'avant de se parler. Mais cela, c'est une idée
personnelle, excusez-moi, je n'aurais pas dû
dire ça. Mais ça va marcher si on communique comme il faut, si le médecin et le
pharmacien se parlent. Et je pense que notre défi, là, à tous, là, il est là,
de faire en sorte que les communications soient faciles. Et, à ce moment-là, je n'ai pas de doute à l'effet qu'il n'y en
aura pas, de surprescription et de dédoublement, mais c'est sûr qu'il
faut communiquer, par exemple.
Mme McCann :
Il faut communiquer, c'est un point majeur que vous faites, aujourd'hui. Qu'est-ce
qui va inciter davantage... Puis on
parle aussi de moyens technologiques, j'ai bien compris ce que vous avez dit
tout à l'heure, à peu près tout le monde en a parlé aussi, et je comprends très bien, d'éliminer le
télécopieur. Mais, à part les moyens technologiques, qu'est-ce qui va
inciter pharmaciens, médecins à communiquer le mieux possible?
M. Gaudreault
(Mauril) : Bien, qu'est-ce qui va inciter? À mon avis, c'est le
bien du patient qui va inciter à communiquer
le mieux possible. On fait ça pour eux autres, là, on fait ça pour le patient,
la patiente, tu sais, c'est... Mais je pense qu'il faut s'entendre sur cet
objectif commun de travailler pour le patient qui est devant nous.
Et
la façon avec laquelle on va communiquer, ce n'est pas moi qui vais vous le
dire, là, mais c'est plus, ensemble, d'imaginer ou de mettre en pratique des
moyens technologiques qui existent déjà, mais surtout, surtout, surtout, de
toujours avoir en tête que le patient, il
est suivi notamment par deux professionnels que sont le pharmacien et le
médecin et qu'on doit poursuivre le même objectif. C'est pour ça que je
disais... «Les objectifs thérapeutiques doivent être connus et les professionnels doivent utiliser les mêmes normes
pour l'ajustement», ça, c'est bien important, quand on dit ça, dans notre
mémoire, par rapport à cela. Et ça, ce n'est pas moi qui le dis, là, c'est les
membres du comité conjoint qui ont travaillé là-dessus. Mais évidemment il faut
s'entendre sur les termes et les façons de les définir.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, Mme la ministre. Je cède la parole au député de Pontiac, qui est
le porte-parole de l'opposition officielle. À vous la parole.
M. Fortin :
Merci. Merci, M. le Président. Bonjour, Dr Gaudreault, Mme Bélanger
et Dr Rouleau. Juste pour revenir sur
des propos qui, peut-être... les propos de la FMOQ pour lesquels vous avez
peut-être besoin de clarification, là. Je
les ai devant moi puis je vais vous demander juste... Parce qu'il y a vraiment
deux avis très différents, dans vos mémoires, par rapport à la capacité ou les compétences du pharmacien. Si je lis votre mémoire, je lis : «Le Collège [des médecins] est d'avis que le pharmacien possède les compétences
requises pour évaluer la condition physique et mentale d'une personne
dans le but d'ajuster la thérapie médicamenteuse...» Donc, vous ne voyez pas de
problème, puis c'est ce que vous nous avez répété.
Quand
je regarde le mémoire de la FMOQ, on nous dit : «Bien entendu, la
fédération trouve tout à fait normal qu'un pharmacien puisse questionner sommairement un patient afin de s'assurer
qu'il fera un usage approprié des médicaments qui lui ont été prescrits. C'est d'ailleurs ce que les pharmaciens ont
essentiellement pour objectif. Les pharmaciens, de leur propre aveu,
n'ont pas la formation requise pour réaliser pleinement un examen physique ou
mental.»
De
votre côté, de ce que vous connaissez de la formation des pharmaciens, est-ce
qu'ils ont ces compétences-là, ces expertises-là, ce que la FMOQ ne
semble pas reconnaître?
M. Gaudreault (Mauril) : Moi, je pense qu'ils ont cette compétence-là,
dans le sens d'évaluer au sujet de l'usage approprié du médicament. Et, je le redis, il ne s'agit pas, pour nous,
d'une évaluation qui consiste à porter un diagnostic comme le médecin peut le
faire ou l'infirmière praticienne spécialisée peut le faire... pourra le faire.
Mais, à mon avis, il s'agit de toujours,
toujours... Le patient, il prend un, deux, trois, quatre, cinq, six
médicaments, et c'est d'évaluer ça par rapport à la condition physique et mentale du patient en
question, par rapport à son usage approprié. Je ne sais pas, moi, a-t-il,
exemple... ce qui me vient rapidement
en tête, là, est-ce qu'il a un doute, le pharmacien, sur l'aspect des facultés
cognitives du patient pour utiliser
ces cinq ou six médicaments? Moi, je pense que, ça, il peut... il a la
capacité, il a la compétence pour évaluer cela, à ce moment-là.
Bien
là, à nouveau, je dis qu'il ne s'agit pas de porter un diagnostic. Je pense que
c'est ça qui est un peu... On va utiliser
ça comme il faut, les termes, là. C'est ça qui tourmente la FMOQ, par rapport à
la possibilité d'ouvrir la porte au pharmacien pour qu'il puisse
éventuellement poser des diagnostics. Ce n'est pas de ça qu'on parle.
M. Fortin : Je pense que vous avez raison. Je vais changer de sujet. Plus tôt
aujourd'hui, on a entendu, et ça fait quelques
fois qu'on l'entend, là, ce qui se passe quand un médecin prescrit un
médicament qui est en rupture de stock ou qui n'est plus disponible depuis un certain temps. Essentiellement, le
patient va se présenter à son pharmacien et il va dire : Bien, j'aimerais trouver un... ou j'aimerais
changer ça. Pas toujours possible, il va falloir tenter de retracer le médecin
en question pour voir s'il peut changer sa prescription.
Il
y a beaucoup de choses que le projet de loi n° 31
vient régler de tout ça, mais est-ce qu'il n'y a pas, à la base, selon vous, là, parce que... Vous qui êtes médecin, qui
avez pratiqué pendant de nombreuses années, est-ce qu'il n'y a pas un moyen où on pourrait informer les médecins de ce qui
est disponible et ce qui n'est pas disponible, là? Des médecins qui
prescrivent encore des médicaments qui n'existent plus sur le marché depuis des
mois, je trouve ça particulier, et ça cause,
pour le patient, toutes sortes d'enjeux. Ça va causer, pour le pharmacien, du
travail additionnel. Ça va probablement causer, pour le médecin, du
travail additionnel aussi. Alors, est-ce qu'il n'y a pas un moyen plus simple,
à la base, pour que le médecin, ou sa
clinique, ou son GMF, ou l'hôpital sache qu'est-ce qui est disponible sur le
marché à un moment donné?
M. Gaudreault (Mauril) : Bien, là encore, on parle des communications
entre les deux professionnels, mais on parle
aussi de formation continue. Donc, on a des exigences de développement
professionnel continu, maintenant, au collège par rapport à cela, et
tout cela dans but d'assurer une médecine de qualité pour notre population.
M. Fortin :
Est-ce qu'elles sont suffisantes, vos exigences de formation continue?
M. Gaudreault
(Mauril) : Bien, à notre avis, oui, là, mais, ça, on pourra
toujours en discourir.
M. Fortin : Mais, au niveau des produits comme tels, au niveau des médicaments, des
prescriptions, qu'est-ce que vous avez comme exigences particulières
pour savoir ce qui est encore disponible et ce qui n'est plus disponible?
M. Gaudreault
(Mauril) : Bien, je ne pourrais pas m'étendre là-dessus, mais
simplement vous dire que, si la communication
entre les deux professionnels est bonne, le médecin qui semble avoir peut-être
quelque chose à rattraper par rapport à cela, bien, pourra se le faire dire par le
pharmacien en question. C'est là la beauté du partenariat.
M. Fortin : Non, je comprends, dans les échanges un à un, un
pharmacien, un médecin, je comprends votre point de vue. J'essayais de voir s'il n'y avait pas un mécanisme en amont qui
pouvait être plus simple pour tout le
monde, mais je comprends que
ça...
M. Gaudreault
(Mauril) : Bien, ça aussi,
ce partenariat-là pourra faire ressortir, peut-être, des besoins de
formation plus grands par rapport à la communauté médicale, je ne sais pas, là, là. Je ne pense pas de
dire n'importe quoi, là, mais on n'a pas évalué cela, nécessairement.
• (15 h 30) •
M. Fortin : O.K. M. le Président, je sais mon collègue a quelques questions
pour le Dr Gaudreault, alors juste un dernier point que je veux faire en
terminant, et je tiens à vous le dire à caméra fonctionnelle, là, je dois
souligner l'ouverture que vous avez depuis votre arrivée au Collège des
médecins, là. La collaboration à laquelle vous avez fait référence, elle est évidente, on le sent de votre
part. On le sent, que vous voulez collaborer avec l'ensemble des professionnels,
que le médecin veut être un partenaire dans la réussite du système de santé, et
je vous en félicite, Dr Gaudreault.
M. Gaudreault
(Mauril) : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: M. le député de Marquette.
M. Ciccone : Merci beaucoup, M. le Président. Dr Gaudreault,
Dr Rouleau, Me Bélanger, bonjour.
Hier, on a
parlé, justement, à la Fédération des médecins omnipraticiens du
Québec, et ils soulevaient un élément, et
je vais les citer, là : «Pourquoi les pharmaciens peuvent-ils à la fois
prescrire, vendre et administrer des médicaments sans que la question du
conflit d'intérêts n'intervienne?»
Si on se
réfère à la Loi sur l'assurance maladie, à l'article 22, je vais
vous lire un passage : «Aucun paiement ne peut être réclamé ou reçu d'une
personne assurée, directement ou indirectement, pour des frais engagés aux fins
de la dispensation de services
assurés par un professionnel de la santé soumis à l'application d'une entente
ou par un professionnel désengagé.» Ça, ça vous empêche de, justement,
prescrire, vendre et administrer, est-ce que je me trompe?
M. Gaudreault
(Mauril) : Là, on parle de déontologie, hein? Mon experte...
M. Ciccone : Oui, bien, c'est ça, mais c'est parce
qu'on faisait la référence à l'effet qu'ils trouvaient ça dommage que... les omnipraticiens, ils trouvaient ça
dommage que les pharmaciens puissent maintenant le faire avec le projet de loi
n° 31 et qu'eux, les médecins,
ne peuvent pas le faire. Mais moi, je veux vous entendre là-dessus. Qu'est-ce
que vous en pensez, justement, d'être capables de prescrire,
d'administrer ou de vendre un produit?
M. Gaudreault
(Mauril) : Veux-tu dire un mot?
Mme Bélanger (Linda) : En fait,
il y a une nuance à apporter. En termes de déontologie, ce n'est pas interdit, en vertu du code de... Là, je comprends que vous
parlez de la Loi sur l'assurance
maladie. Le code de déontologie n'interdit pas aux médecins de vendre et de prescrire lorsqu'il administre lui-même
le médicament ou l'appareil, si c'est pour installer un appareil, donc
il peut le vendre aussi.
Par contre,
ce dont vous parlez, c'est plus ce qu'on parlait, là, les frais accessoires.
Donc, dans ce cas-ci, effectivement, si c'est couvert par le régime, le
médecin ne peut pas recevoir des honoraires pour... il ne peut pas réclamer des
frais accessoires. Par contre,
si c'est des vaccins qui ne sont pas couverts par le régime, il pourrait les
facturer et les administrer parce que le code de déontologie ne l'empêche pas de
facturer un produit qu'il administre lui-même si ce n'est pas empêché
par la Loi sur l'assurance maladie.
M. Ciccone : Parce
que ce qu'on semblait dire hier, des
omnipraticiens, c'est que, un, quand il
y a un vaccin à administrer, là, on
va prendre le patient, on va dire : Bien, va acheter le produit à la
pharmacie et vous devez revenir par la suite pour vous faire
administrer, justement, ce vaccin-là. C'est ce qu'on semblait dire hier, des
omnipraticiens.
Mme Bélanger (Linda) : Oui, il
y a un enjeu, aussi, de conservation de ces vaccins-là.
M. Ciccone :
C'est ça.
Mme Bélanger
(Linda) : La chaîne de
froid, aussi, qui peut encourir des frais si c'est un médecin qui doit
conserver, dans un frigo, plusieurs
vaccins, puis les administrer au moment où les patients les demanderaient. Et c'est sûr
qu'ils ne pourraient pas réclamer des frais pour couvrir ces...
M. Ciccone : Mais trouvez-vous qu'avec la loi n° 31, justement, les pharmaciens ont une plus grande latitude que
vous, les médecins, n'avez pas au niveau de l'administration des vaccins?
M. Gaudreault (Mauril) : Bien, honnêtement...
je ne sais pas si je vais répondre à
votre question, mais honnêtement,
je veux dire, j'aime mieux voir les médecins
pratiquer la médecine que de donner des vaccins. Ça, c'est clair, hein, on
s'entend là-dessus, tu sais. Puis le temps de donner des vaccins
pris... je ne dis pas que le pharmacien, nécessairement, a plus de temps
pour ça, là, mais je pense que... moi, je
suis là pour le Collège des médecins, j'aime mieux voir des médecins pratiquer la
médecine que de donner des vaccins. Mais je ne sais pas si ça répond à votre question,
mais c'est ça.
M. Ciccone :
C'est bien. Merci beaucoup. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Je vais céder la parole au député du deuxième groupe d'opposition,
alors le député de Jean-Lesage va vous questionner.
M. Zanetti : Merci, M.
le Président. Merci beaucoup pour votre présence. Dans votre rapport, la deuxième recommandation vise à retirer le mot
«interpréter» à la phrase «prescrire des analyses de laboratoire et d'autres
tests, aux fins du suivi de la thérapie
médicamenteuse». Donc, au lieu de «prescrire et interpréter», c'est «prescrire»
seulement. Est-ce que vous
pouvez nous expliquer pourquoi?
Mme Bélanger (Linda) : En fait, dans toutes les autres lois professionnelles,
lorsqu'un professionnel est autorisé à prescrire, on n'est jamais venu préciser qu'il y avait
droit d'interpréter parce que c'est inclus, en termes de responsabilité professionnelle.
Si un professionnel a la formation pour prescrire, ça veut dire
qu'il a également la formation pour comprendre le résultat qu'il va recevoir. Autrement, il
pourrait prescrire et ne pas savoir quoi faire avec les résultats, et ça, ce ne
serait pas acceptable, d'un point de vue de responsabilité professionnelle.
M. Zanetti : Donc, c'est essentiellement une modification que vous suggérez pour l'élégance de la formulation.
Mme Bélanger (Linda) : La cohérence des lois, puisque les autres lois
n'ont pas cette précision-là et que, tous les autres professionnels qui prescrivent, on considère... et, depuis
le projet de loi n° 90, on a toujours interprété qu'ils pouvaient également
interpréter les ordonnances, le résultat, là, de ce qu'ils avaient prescrit.
M. Zanetti :
Et est-ce qu'il y a, selon vous, des risques clairs à laisser ce mot-là dans la
formulation actuelle?
Mme Bélanger
(Linda) : Ça pourrait entraîner une confusion quant à la portée de l'activité
pour tous les autres professionnels qui ne peuvent que prescrire et qui n'ont pas
le mot «interpréter». Est-ce que ça voudrait dire qu'eux, ils ne peuvent
pas interpréter?
M. Zanetti : Parfait. Merci. Je vous remercie. S'il me
reste du temps, je peux peut-être le donner au collègue de Jonquière.
Le Président (M. Provençal)
: On ne peut pas, il faut toujours avoir le consentement. Mais je suis quand même souple, oui. Alors, M. le député de Jonquière.
M. Gaudreault
(Jonquière) : Merci. Je suis
bien fier que le président du Collège des médecins soit un Gaudreault du
Saguenay...
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Gaudreault
(Jonquière) : ...mais je
vous avertis, il n'y a pas de conflit
d'intérêts, on n'est pas parents. On
a déjà cherché un peu, peut-être,
les...
Une voix :
...
M. Gaudreault
(Jonquière) : Chauvinisme du Saguenay bien connu.
Je
voudrais savoir ce que vous pensez d'une déclaration de la FMOQ, hier, qui est
venue nous dire qu'il pouvait avoir des
risques de conflit d'intérêts chez les pharmaciens entre la vente de vaccins et
la vaccination, donc s'ils ont l'autorisation de vacciner, mais en même
temps ils vendent des médicaments.
Alors, qu'est-ce que vous dites ou qu'est-ce que vous répondez là-dessus?
M. Rouleau
(Richard) : Merci, M. le Président. L'exemple qui m'est venu en tête,
c'est ce que je dis à mes étudiants en
médecine quand je les rencontre : 3 % des gens qui viennent nous rencontrer sont potentiellement des
fraudeurs, mais on ne peut pas
empêcher de faire de la bonne médecine aux 97 % autres. Ça fait que je
vois ça un peu de la même façon. Il y
a un risque, je fais confiance en l'Ordre des pharmaciens pour prendre en
charge ce problème-là, mais on ne peut pas priver 97 %, 99 % de la population d'une bonne loi, d'une
possibilité de donner un vaccin qui sauve les vies à la population en
général.
M. Gaudreault
(Jonquière) : Parfait. Maintenant, depuis le début de votre
présentation, vous nous dites à plusieurs reprises : Ça passe par les communications, ça nous prend des
bonnes communications, il faut qu'on communique entre médecins et pharmaciens. D'accord, moi, je suis
favorable à cela, mais comment, plus concrètement, là? Et est-ce qu'on devrait amener des modifications même dans le
projet de loi pour préciser ça? Et, si le projet de loi est adopté à la fin de
la session parlementaire ou au printemps, du jour au lendemain, là,
comment... Ce n'est pas par l'effet de l'adoption d'un projet de loi, pouf! tout le monde va se mettre à communiquer
parfaitement, là, donc qu'est-ce que ça prend de plus, là, pour mieux
communiquer?
M. Gaudreault
(Mauril) : Bien, peut-être
au niveau de tout ce qui... peut-être au niveau de la réglementation, ça
peut être plus précisé et non pas
nécessairement au niveau de la loi, peut-être. Mais évidemment c'est plus
facile à dire qu'à faire, hein, de
mieux communiquer, puis c'est là notre défi, tous ensemble, par rapport à faire
en sorte qu'on communique mieux, au
niveau des deux professionnels dont on parle, là, mais on pourrait parler de
tous les professionnels, hein, vous savez.
Donc, moi, oui, c'est sûr que c'est un défi sur lequel nous allons, tous
ensemble, travailler, mais bien le définir dans une réglementation, bien, peut-être, au niveau des travaux, les deux
ordres, ils pourront se pencher plus là-dessus, mais...
Mme Bélanger (Linda) : En fait,
on est déjà en travail avec l'Ordre des pharmaciens pour... parce que les activités que vous avez dans le projet de loi sont
à la condition qu'il y ait un règlement qui définit les conditions et modalités
d'exercice de ces activités-là. Donc, on est
déjà en train de travailler à l'élaboration de ces règlements-là. Il y en a
déjà qui existent entre les deux
ordres, on est en train de les bonifier, de les modifier en concordance avec ce
qui est travaillé ici. Donc, on va
déjà être prêts, au moment où la loi va être sanctionnée, à mettre en place des
nouvelles dispositions réglementaires qui vont prévoir dans quel cadre
ces échanges-là vont se faire.
Également, il
y aura des guides d'exercice qu'on travaille aussi en collaboration puis qu'on
pourra diffuser à nos membres sur nos
sites Web pour les informer de comment ça peut atterrir concrètement, là, dans
les cabinets puis dans les officines des pharmaciens.
M. Gaudreault (Jonquière) : Il
me reste du temps?
Le
Président (M. Provençal)
: Le
temps est écoulé, déjà. Je remercie les Drs Gaudreault, Rouleau et
Me Bélanger pour leur contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants afin
de permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 40)
(Reprise à
15 h 42)
Le
Président (M. Provençal)
: Je
souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association des bannières et des
chaînes de pharmacies du Québec. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à
commencer votre exposé.
Association des bannières et des chaînes de
pharmacies du Québec (ABCPQ)
M. Mousseau (Hugues) : M. le
Président, Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, merci beaucoup de nous accueillir ici dans le cadre de ces consultations
visant l'accès à des services de santé de qualité. Mon nom est Hugues Mousseau,
je suis directeur général de l'Association
des bannières et de chaînes de pharmacies du Québec. M'accompagne aujourd'hui Denis Roy, président de notre association
et pharmacien.
Notre association réunit les chaînes et
bannières Accès pharma chez Walmart, Brunet, Familiprix, Jean Coutu, Pharmaprix, Proxim et Uniprix. Elle a pour mission
première de permettre aux pharmaciens communautaires
de jouer un rôle clinique
incontournable pour la santé de la population. En ce sens, le projet de loi
s'inscrit pleinement dans la lignée de nos ambitions et de notre vision,
et nous le saluons.
Sur une base
individuelle, le rôle des chaînes et bannières est d'abord et avant tout de
soutenir les équipes pharmacie au
niveau de toutes les activités ne requérant pas le jugement professionnel des
pharmaciens. Nous visons l'efficience des processus pour que le
pharmacien consacre son expertise à l'usage approprié des médicaments.
Certains députés et représentants du MSSS qui
sont ici aujourd'hui se souviendront du projet de loi n° 41,
adopté en 2011 et implanté en 2015. Malgré
les avancées, cette initiative s'est avérée connaître un succès de déploiement
mitigé, notamment en raison de sa portée
limitée, du fardeau administratif trop contraignant de même qu'à cause des
barrières financières imposées par la
franchise/coassurance, dont on a parlé, et un facteur, évidemment, toujours
d'actualité, qui doit être éliminé.
À titre
d'exemple de ce qu'engendre cette barrière, moins de 1 % des personnes
atteintes d'hypertension artérielle bénéficient
de l'expertise d'un pharmacien pour prendre en charge l'ajustement de leur dose
de médicament comme c'est permis depuis 2015. Il s'agit là d'un pourcentage
inquiétant, considérant que moins d'une personne hypertendue sur deux a un contrôle de sa pression lui permettant
d'éviter des complications comme l'infarctus ou l'AVC. Pourtant, en plus des
vies sauvées et des gains de santé, la
littérature canadienne, fondée sur des données probantes, montre une économie
nette de plus
de 3,6 milliards de dollars sur 30 ans si ces services étaient
adoptés massivement ici même, au Québec. Ces calculs ont été réalisés par un groupe de chercheurs
universitaires et validés par le Conference Board du Canada en considérant dans
ses calculs un honoraire octroyé aux pharmaciens du Québec qui est le double de
celui accordé ici.
M. Roy
(Denis M.) : Continuons
d'ailleurs à parler du patient, qui est au coeur même de ce projet de loi.
Permettez-nous de vous décrire une situation
clinique bien réelle qui illustre des
cas qui surviennent trop fréquemment en pharmacie. M. Tremblay se présente à la pharmacie pour un conseil.
Il est inquiet, il se plaint d'avoir trop de médicaments. Il prend actuellement cinq médicaments chaque jour, alors qu'il n'en
prenait aucun il y a quelques mois à peine. Tout a commencé avec une prescription pour diminuer son
cholestérol. Il s'est ensuite plaint de douleurs musculaires, ce pour quoi
un anti-inflammatoire lui a été prescrit. Quelques semaines plus tard, un
antihypertenseur a été prescrit, car sa pression artérielle était élevée. Puis ses jambes ont enflé, et un diurétique a
été ajouté. Dernièrement, un supplément de potassium a été prescrit, car il était en carence. Le coût
de ces médicaments, qui sont assumés par la RAMQ ou par un payeur privé,
est d'environ 900 $ par année.
Avec l'adoption du projet de loi n° 31,
le pharmacien de M. Tremblay pourra effectuer une évaluation et
intervenir, mais seulement avec l'aval du médecin. Au terme de l'évaluation de
l'état physique et mental du patient, le pharmacien
réalisera être en présence d'une cascade médicamenteuse : des médicaments
ont été prescrits pour pallier aux effets secondaires d'autres
médicaments. En modifiant le traitement du cholestérol à la base, les douleurs
musculaires disparaîtront, et les autres
médicaments pris par le patient, représentant environ 700 $ de dépenses annuelles, pourraient être
cessés par déprescription. Toutefois, dans
le cas décrit précédemment, le patient pourrait refuser de payer quelques
dollars de franchise et de
coassurance pour l'activité du pharmacien. Il continuera alors à prendre trop
de médicaments, aux frais du payeur.
M. Mousseau
(Hugues) : Au sujet de la
vaccination, nous souhaitons manifester notre appui entier au fait de confier
ces actes au pharmacien. Comme vous le
savez, comme évoqué hier, notamment, le Québec accuse un retard majeur par rapport aux cibles qu'il s'est lui-même fixées et aux
cibles de l'Organisation mondiale de
la santé, notamment — et
c'est important — chez
les personnes les plus à risque. De par leur capacité complémentaire aux
infirmières à vacciner en pharmacie sans que
les patients aient nécessairement à prendre rendez-vous, nous croyons que
les pharmaciens sont en mesure de
mieux couvrir les personnes souffrant de maladies chroniques. Ces dernières
apprécieront se faire vacciner en allant
chercher leurs médicaments en pharmacie. Contrairement aux campagnes de
vaccination de masse, qui attirent les personnes
retraitées de moins de 75 ans en bonne santé, la vaccination en pharmacie cible
les personnes les plus à risque.
À l'échelle
des chaînes et des bannières, on a calculé qu'environ 70% des infirmières
qui ont vacciné l'année dernière ont
eu accès aux vaccins gratuits de la Santé publique. Plusieurs
d'entre elles se sont rendues aux dépôts de vaccins avec leurs boîtes à lunch et des packs de glace pour
aller les chercher. L'autre 30 % n'a même pas eu de lunch de vaccins à
rapporter. Nonobstant l'adoption du projet
de loi, il faut impliquer dès maintenant
les grossistes, qui ont une expertise en chaîne de froid et qui livrent
chaque jour aux pharmacies communautaires du Québec, si on est sérieux par
rapport à notre volonté d'accroître les taux de couverture vaccinale à
l'échelle du Québec.
L'ABCPQ
soumet aussi à la commission une proposition d'amendement à l'article 4,
alinéa 1.1 du projet de loi pour
permettre la vaccination par les pharmaciens dès l'âge de deux ans au lieu de
six ans. Il n'est ici aucunement question de se substituer aux programmes de
vaccination scolaire, déjà efficaces, mais plutôt de permettre, au besoin, à
des pharmaciens de vacciner tous les
membres d'une même famille, dans le contexte d'un voyage, par exemple, ou
encore d'avoir l'agilité de pallier
rapidement à un besoin ponctuel visant une campagne vaccinale importante, comme
ce fut la cas en 2009 lors de la crise H1N1. Ce sont des situations
exceptionnelles, mais qui ne sont tout de même pas à négliger.
• (15 h 50) •
M. Roy
(Denis M.) : Comprenons que
la vaccination est une mesure limitant les éclosions d'influenza, mais elle
ne les élimine pas complètement. Elle offre une protection limitée, généralement située entre
40 % et 60 %, contre l'influenza, mais il est possible que, pour différentes raisons, le taux de protection
du vaccin soit inférieur à ce qu'on aurait espéré. C'est pourquoi nous proposons d'inclure un autre amendement
réglementaire dans la loi qui permettrait au pharmacien
d'évaluer et de prescrire notamment
du Tamiflu chez les personnes à risque d'hospitalisation. En ne
procédant pas de cette façon, nous risquons de ne pas atténuer la crise
des urgences dès janvier cette année.
Par ailleurs, nous souhaitons aborder
l'article 4, alinéa 10 du projet de loi, prévoyant la prescription
d'un médicament en vente libre par le
pharmacien ainsi qu'une demande d'ajout à la loi qui permettrait aux
pharmaciens de faire des prélèvements de strep-test sans rendez-vous en
pharmacie.
Parlons
maintenant de la jeune Ophélie, quatre ans, qui se lève un matin avec un gros
mal de gorge et des frissons. Papa décide de passer à la pharmacie. Dès
8 heures le matin, il consulte Karine, sa pharmacienne. Karine demande
à Ophélie si elle tousse, et elle prend sa
température. Avec les réponses obtenues, Karine sait qu'un strep-test est maintenant
indiqué, mais l'infirmière
travaillant au sein de sa pharmacie n'est présente que deux jours par semaine
et ne sera pas là avant lundi prochain.
Avec l'amendement proposé, Karine pourra procéder au prélèvement et faire le strep-test
sur-le-champ. Si le test s'avère
positif, et suite à un amendement de règlement négocié entre le Collège des médecins et l'Ordre des pharmaciens, Karine pourra prescrire l'antibiotique requis et
de l'ibuprofène, un médicament de
vente libre, pour les premières 48 heures, moment pendant lequel la fièvre pourra persister. Si le test s'avère
négatif, Karine proposera une culture de la gorge d'Ophélie et prescrira
seulement de l'ibuprofène en attendant le résultat.
Dans les deux
cas, papa ira reconduire Ophélie chez mamie et ne perdra pas sa journée de
travail. Demain, il est possible
qu'Ophélie puisse aller à la garderie, qui ne refusera pas de lui donner de
l'ibuprofène, un médicament de vente libre, car il aura été prescrit par Karine. Finalement,
Karine fera des suivis téléphoniques concernant le résultat de la culture de
gorge et pour s'assurer de la résolution des symptômes dans les trois, quatre
jours. Les parents d'Ophélie seront ravis d'avoir évité une longue
attente à la clinique, et une place aura été libérée pour un autre patient chez
le médecin.
Permettez-nous de conclure notre intervention en
précisant une chose : pour que les cas décrits précédemment deviennent une
réalité, le gouvernement doit investir les moyens nécessaires à la mise en
oeuvre des actes prévus. Les bénéfices
obtenus seront autant thérapeutiques, financiers qu'en satisfaction de la population. En ce sens, nous tenons à témoigner du soutien sans réserve de l'ABCPQ à
l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires dans ses négociations.
Mmes et MM.
les députés, les chaînes et les bannières sont disposées à jouer un rôle de
soutien aux pharmaciens propriétaires
et à leurs équipes pour la mise en oeuvre des actes du projet de loi
n° 31. Il est urgent d'adopter ce projet de loi et d'octroyer les moyens financiers nécessaires pour
réduire l'impact de la grippe sur les urgences, qui survient à chaque début
d'année. Les Québécois de toutes les régions
ne peuvent être privés de la commodité de se faire vacciner en pharmacie par
une infirmière ou une pharmacienne approvisionnée en comptant sur les
grossistes en médicaments.
Merci
beaucoup de votre écoute et de votre intérêt. M. le Président, nous sommes
maintenant disposés à répondre aux questions des membres de la
commission. Je vous remercie.
Le
Président (M. Provençal)
: Je
vous remercie pour votre exposé. Commençons maintenant la période d'échange
avec Mme la ministre.
Mme McCann :
Merci, M. le Président. Je vous salue, M. Roy, et M. Mousseau. Alors,
merci pour votre présentation. On a
eu hier l'association des pharmaciens propriétaires, l'AQPP, qui nous a fait
aussi une présentation fort intéressante.
Peut-être,
j'aimerais que vous nous parliez, juste quelques minutes, de votre rôle, en
lien, évidemment, avec les pharmacies,
par rapport à l'association des pharmaciens propriétaires, peut-être nous
parler un peu de votre rôle, de votre mission.
M. Mousseau (Hugues) : Tout à
fait. Alors, l'association des chaînes et bannières de pharmacie existe depuis une trentaine d'années, en soutien aux pharmaciens
propriétaires et à leurs équipes. Alors, les pharmaciens propriétaires
ont l'occasion d'adopter un modèle d'affaires qui leur convient, de faire
l'embauche de pharmaciens salariés au besoin, d'équipes techniques en pharmacie.
Alors, les chaînes et bannières ont pour mandat d'accompagner les pharmaciens propriétaires dans les activités qui ne requièrent
pas le jugement professionnel — ça peut être les ressources humaines, par
exemple — et d'autres services qui sont connexes.
Donc, c'est essentiellement le rôle de chacun des membres, et l'association
est là en appui à tous les membres sur une base individuelle pour les
accompagner dans ce processus-là.
Si je prends l'exemple de la loi, en fait, n° 41, qui a été adoptée il y a quelques années, l'ABCPQ a
développé des outils cliniques qui sont rendus disponibles, ce qu'on appelle
les algorithmes, qui sont rendus disponibles sur un site, Loi 41.com, où les
pharmaciens peuvent appliquer les modalités, les nouveaux services, les actes
qui sont prévus au chapitre de la loi
n° 41, et on a l'ambition et l'objectif
de faire la même démarche pour ce qui est de l'entrée en vigueur de la
loi n° 31, si elle est adoptée par le législateur.
Mme McCann : Justement, sur ce point-là, est-ce que vous avez, dans
votre rôle, le volet communication avec la population? Est-ce que
vous travaillez avec l'AQPP, avec les pharmaciens communautaires pour diffuser
à la population... Par exemple, la loi n° 41 et le projet
de loi n° 31, s'il est adopté,
auriez-vous un rôle pour organiser une communication à la population?
M. Roy
(Denis M.) : Tout à fait, ça fait partie d'un des rôles. Les pharmaciens n'ont pas fait nécessairement
de cours de marketing, et c'est une
des fonctions que les chaînes à bannières font, évidemment, pour soutenir les
professionnels de la santé qui sont
les pharmaciens. Donc, vous avez probablement
entendu, dans les dernières années, des campagnes faites par «les pharmaciens
propriétaires affiliés à», qui étaient approuvées par les pharmaciens
propriétaires de chaque chaîne et bannière mais qui étaient faites par
des professionnels et qui visaient justement à communiquer des messages de
santé publique comme celui d'aller se faire
vacciner. C'est une fonction importante en santé publique, et on croit que la
pharmacie est vraiment très bien positionnée pour jouer un rôle accru,
étant donné que tout le monde y va très régulièrement.
Mme McCann :
Est-ce que vous avez déjà réfléchi à comment communiquer, par exemple, les
éléments du projet de loi n° 31? Par exemple, quand la... si la loi est adoptée, est-ce que vous...
Parce que ce n'est pas toujours simple, hein, pour le citoyen de
savoir : Est-ce que je vais à la pharmacie? Est-ce que je vais voir le
médecin? Est-ce que j'appelle Info-Santé?
Est-ce que vous avez déjà des pistes là-dessus, à savoir, si la loi... le
projet de loi, pardon, est adopté, parce que vous avez peut-être aussi une
expérience au niveau de la loi n° 41, comment vous pouvez... comment on peut
communiquer à la population?
M. Roy
(Denis M.) : C'est un peu
pour ça qu'on salue le projet de loi n° 31, il est beaucoup
plus clair au niveau de
l'organisation des services. Je vais vous donner un exemple. La loi n° 41 permettait à une personne de se faire prescrire un médicament
pour un feu sauvage, O.K.? Pourquoi aller voir un médecin pour un feu sauvage?
Malheureusement, dans le règlement qui a été
adopté, pour qu'un pharmacien puisse prescrire un médicament pour un feu
sauvage, le patient doit avoir eu une
prescription il y a moins de quatre ans. Si la prescription a eu lieu il y a
cinq ans, ou six ans, ou sept ans, ce
n'est pas possible. Donc, pour nous, quand il y a des limites comme ça, c'est
difficile de dire : Vous avez un feu sauvage, venez
voir votre pharmacien, parce que l'expérience client va être très décevante
parce que, un, il faut avoir une prescription et, deux, il faut qu'elle
soit moins de quatre ans.
Donc,
on espère qu'avec l'évaluation de la condition physique et mentale reliée à
l'usage approprié des médicaments qui
se retrouve dans la loi l'adoption d'un règlement avec moins de conditions va
permettre une communication plus claire au patient et à la population
québécoise pour un bon usage. Ça a beaucoup limité notre capacité de faire de
la publicité, ces choses-là. Vous avez vu,
probablement, des choses sur les campagnes voyages, où il n'y a pas ce
besoin-là d'avoir une prescription en
santé voyage, le Collège des médecins en a parlé tantôt. Là-dessus, il y a de
quoi qui peut être fait. Mais, sur la
plupart des choses de la loi n° 41, il y avait des petites conditions, il y avait
des petits astérisques à mettre dans le bas. Puis, en communications, ce
n'est jamais bon, quand il y a 18 «disclaimers», comme on dit en chinois.
M. Mousseau (Hugues) : Si vous me permettez d'ajouter, puis ça va
peut-être un peu au-delà du projet de loi n° 31,
mais par rapport à ce que les chaînes et
bannières peuvent faire pour diffuser les messages, entre autres de santé
publique, à la population, on met régulièrement à disposition les
téléviseurs qui sont dans les officines, dans les pharmacies et l'affichage en
pharmacie à disposition de campagnes de la Santé publique, entre autres par
rapport à la vigilance liée aux opioïdes.
Donc, on travaille avec le ministère pour s'assurer de la diffusion la plus
large possible de ces campagnes-là, incluant
sur les applications mobiles que chacune des chaînes et bannières rend
disponibles à leurs patients, etc. Il y a 1 million de Québécois qui fréquentent l'officine par
semaine au Québec, 3 à 4 millions, si on inclut la partie commerciale
adjacente. Donc, il y a une
possibilité, une capacité de rejoindre beaucoup de Québécois, puis on travaille
en partenariat en ce sens-là avec le ministère, assurément.
Mme McCann :
Merci. M. le Président, je vais donner la parole à d'autres députés.
Le Président
(M. Provençal)
: Députée de
Soulanges.
• (16 heures) •
Mme Picard :
Oui. Bonjour. Je m'interrogeais, vous en avez parlé rapidement il y a quelques
minutes, à propos de l'algorithme.
Vous mentionnez avoir un nouvel algorithme d'aide, particulièrement à propos
des opioïdes. J'aimerais savoir, est-ce
que vous pouvez m'en dire davantage sur ce programme que vous avez créé? Et
puis croyez-vous qu'un tel programme pourrait être créé afin d'aider les
pharmaciens dans l'évaluation des patients, tel que stipulé à
l'article 1.1°?
M. Roy (Denis
M.) : Il y a deux choses, au niveau des opioïdes : il y a les
patients naïfs, qui n'ont jamais eu d'ordonnance,
et il y a les patients qui en utilisent déjà de façon chronique. Pour la
première situation, c'est là que l'ABCPQ a pu proposer une démarche aux pharmaciens. Je l'ai
mentionné tantôt, le jugement professionnel, on laisse ça aux pharmaciens. Nous, il y a des pharmaciens qui
travaillent dans les organisations qui peuvent proposer une démarche. On
travaille avec des experts contenu, et on a
bâti une démarche pour quand il y a une nouvelle ordonnance d'opioïdes, pour quelqu'un
qui n'en a jamais pris, on s'assure de... bon, par exemple, s'assurer qu'il
n'y a pas de falsification, limiter les quantités qui vont être servies pour un premier service. Et on aimerait
bien pouvoir, aussi, réduire la dose, mais le gouvernement fédéral, là-dessus, ne nous aide pas beaucoup avec
ses lois, mais ça, c'est une autre paire de manches.
Pour
ce qui est du deuxième cas d'espèce, les patients qui prennent déjà des
opioïdes, on a parlé des prescriptions tantôt,
et ça pourrait s'appliquer dans cette optique-là et surtout dans l'optimisation
du traitement de la douleur. Avant de donner
des opioïdes, normalement, il faudrait maximiser tout ce qui est fait avec
les autres médicaments. Et actuellement
le fait que le pharmacien n'a aucun mode de
financement de ses activités professionnelles pour faire ces activités-là, il
est très difficile pour lui de
s'asseoir avec un patient pendant 10, 15 minutes dans le bureau, puis de
vérifier toute sa thérapie médicamenteuse, puis lui suggérer des modifications.
Avec la loi n° 31, la demande de consultation pourra
venir du médecin, et on espère qu'un jour il
y aura un mode de rémunération, qui a besoin d'être modifié, pour permettre au
pharmacien de vraiment
aider les personnes qui, peut-être
malencontreusement, ont commencé à prendre des opioïdes et qui peuvent être bien traitées avec
d'autres choses.
Le Président
(M. Provençal)
: Oui, député de Chapleau.
M. Lévesque
(Chapleau) : Merci. Donc,
hier après-midi, on a reçu... on a entendu, dans le fond, la Fédération des médecins omnipraticiens, qui
ont évoqué, là, certaines réserves, notamment en lien, là, avec... au niveau de
l'évaluation des patients. Ils ont comparé
l'intention du projet de loi n° 31 avec un possible conflit d'intérêts, donc, ils
nous ont fait cette présentation-là,
l'idée de pouvoir, donc, administrer... pouvoir vendre, donc, les médicaments.
Qu'est-ce que vous en pensez, de cela?
M. Roy (Denis M.) : Je vais commencer par l'évaluation, en focussant
sur l'évaluation mentale, parce qu'on n'en a peut-être pas parlé autant que
l'évaluation physique, qui est quand
même assez claire. Pour nous, c'est
essentiel, l'évaluation, comme ce
l'est pour le Collège des médecins. Avant d'agir, il faut évaluer et il faut
évaluer une personne, pas un médicament. Et, principalement en santé mentale, on a des personnes qui sont
fragilisées qui commencent un médicament et, peut-être, sont très
hésitantes à commencer un médicament. Il y a des questionnaires validés qui
existent et qui ont même été vérifiés par
l'INESSS, là, l'Institut national
d'excellence en santé et services sociaux, qui est le PHQ-9, en anglais, ou, je pense, le QSP-9, en français, qui permet d'évaluer le niveau... l'état
dépressif de quelqu'un. Donc, si un pharmacien évalue, à la base, quel est le niveau... le score, on peut
dire, de ce questionnaire-là — et ça se fait même en application mobile, en
passant — le score d'une personne, et le score montre
qu'il y a une dépression, bien, déjà là, la validation de l'ordonnance
est beaucoup plus facile. Mais ça, ça appartient plus au médecin parce que
c'est du diagnostic.
Nous,
ce qui nous intéresse, c'est la deuxième chose, c'est la question de :
après trois semaines, après un mois, est-ce que le score monte? Si le score ne
monte pas, il faut intervenir pour augmenter la dose ou changer le médicament,
sinon le patient peut se suicider.
Là, je ne fais pas des farces. C'est grave, la dépression. Et il y a même des
cas de rapportés dans la littérature québécoise où des pharmaciens, en
utilisant ça, ont réussi à éviter des suicides.
Le Président (M. Provençal)
: M. le député de Rousseau.
M. Thouin : Il reste combien de temps?
Le Président (M. Provençal)
: Il vous reste cinq minutes.
M.
Thouin : Ah oui? Bon, merveilleux. Bien, je serai rapide, de toute
façon. À la lecture de votre mémoire, vous désirez vous inscrire comme facilitateur de changement et, comme nous,
là, vous prônez pour une meilleure interstratification des professions. Mais qui dit changement, dit
temps. Advenant une éventuelle adoption du projet de loi n° 31
par l'Assemblée nationale, combien de
temps devrait être alloué à vos membres afin de vous ajuster à ces nouvelles
dispositions législatives? On parle
de jours, on parle de semaines, on parle de mois? Comment ça marche? Parce que
c'est nouveau, tu sais, il va y avoir des changements, donc...
M. Roy
(Denis M.) : Bien, écoutez,
le changement peut survenir n'importe quand, et nous, on a une grande capacité
d'adaptation. C'est certain que les actes ne
prendront pas... Comme on l'a vu avec la loi n° 41,
ce n'est pas la première journée que ça se fait et c'est assez rapidement.
Pour ce qui est de la vaccination, on est très heureux de comprendre qu'il y a
environ 1 000 pharmaciens — puis on l'a documenté, récemment, avec un sondage, et ça augmente à tous les
jours — qui ont
déjà la formation requise ou qui va
être requise, si éventuellement le projet de loi est adopté, pour pouvoir
vacciner. Donc, ça, ça pourrait se faire assez rapidement. L'obstacle,
c'est vraiment l'approvisionnement en vaccins, et ça, on a beaucoup
d'inquiétudes face à ça.
Le Président (M. Provençal)
: Oui, M. le député de Dubuc.
M. Tremblay : Une petite
question, si vous permettez, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Oui.
M. Tremblay : Dites-moi, on parle d'évaluation, puis on peut
comprendre, par rapport à ce qu'on a entendu hier aussi, que, bon, il y a diagnostic, évaluation,
évaluation sommaire, il y a des conséquences. On a des formations qui sont
reconnues pour la Croix-Rouge, entre autres, ou des premiers secours, ça sauve
des vies. Si on pousse encore plus loin dans
le contexte, au niveau des pharmaciens, il y a des formations quand même assez
poussées. Est-ce qu'en effet le Québec devrait faire de l'anxiété par
rapport au fait de faire reconnaître ce type d'interventions là?
M. Roy
(Denis M.) : Vraiment pas.
Au contraire, les Québécois devraient se réjouir d'avoir plus grand accès. Et,
dans la formation pour administrer... Actuellement, ce qui est permis, c'est
pouvoir enseigner à un patient comment s'autoadministrer
un médicament. C'est ça, la formation. Mais c'est la même chose, c'est la même
formation qui va être nécessaire pour
vacciner, on en présume. Et, si c'est le cas et si c'est la volonté des
parlementaires et de la réglementation à
convenir entre l'Ordre des pharmaciens et le Collège des médecins, bien, en
plus de ça, il y a une formation RCR qui est incluse et il y a d'autres
formations aussi, comme le Registre de vaccination, qui va permettre d'éviter,
justement, les cas de fraude. Si
jamais, comme on disait tantôt, là, un pharmacien a vacciné, bien, il va
falloir qu'il le rentre dans le Registre de vaccination, puis il va y avoir un contrôle des intrants et des
extrants au niveau des vaccins qui rentrent en pharmacie puis ceux qu'il donne, ça fait que ça va être assez
facile à contrôler pour l'Ordre des pharmaciens, là. Moi, je n'ai pas
d'inquiétude là-dessus, les systèmes sont là.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la ministre.
Mme McCann :
Je veux revenir, monsieur, sur ce que vous avez introduit dans votre mémoire
par rapport à la vaccination des petits entre deux et six ans. Vous le
savez probablement, nous avons, au niveau, là, du réseau de la santé et des
services sociaux, en CLSC, un programme vaccinal très costaud, un calendrier
pour nos petits, hein, de la naissance
jusqu'à six ans, même au-delà. Mais évidemment il y a des suivis complets qui
se font, puis la vaccination se fait dans le cadre de ces suivis. Votre
proposition à vous, pouvez-vous nous l'expliquer davantage?
M. Roy
(Denis M.) : Bien, pour
nous, il n'est pas question de toucher à ce système-là, qui est très bon et qui
est très performant, et on le trouve
très, très bien. On n'aurait pas la capacité de le faire, de toute façon. Je
pense qu'il faut se concentrer sur les cas. Mais je vais vous donner un
cas de figure, dans ce fameux calendrier vaccinal là, celui contre l'hépatite, il est en quatrième année du primaire,
O.K., et il peut y avoir une famille qui décide de s'en aller en voyage, et un
enfant de quatre ans n'a pas encore fait sa quatrième année, donc il n'a pas eu
le vaccin dans le calendrier scolaire, et en plus il est en bas de six ans, donc le pharmacien ne pourra pas le
vacciner. Ça fait que, pour nous, c'est des cas de figure comme ça. On ne croit pas que ça doit aller dans
la loi ou dans un règlement. Pour nous, un guide de pratiques avec... entre
les deux ordres qui dirait : Les pharmaciens n'ont
pas à viser cette clientèle-là et que c'est exceptionnel qu'ils doivent pouvoir le faire, je pense que, pour vacciner
toute une famille, ça peut être utile, là, parce que le pharmacien va
dire : O.K., Ophélie, je ne peux pas la vacciner, mais, Maxime, je
peux le vacciner parce qu'il a l'âge. C'est tout.
Mme McCann : Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, madame. Nous poursuivons nos échanges avec le
député de Pontiac.
• (16 h 10) •
M. Fortin : Je vous remercie, M. le Président. Merci,
M. Roy, M. Mousseau, merci d'être parmi nous aujourd'hui. Il y a quelque chose que vous avez dit en réponse
à l'un des députés du gouvernement, je ne me souviens plus quel, je m'en
excuse, collègues, mais vous avez dit :
On est inquiets pour le nombre de vaccins disponibles cette année, et là je
comprends que vous faites référence
au vaccin de la grippe, là, de cet automne, là. En présumant que le projet de
loi est adopté rapidement, que le
nombre de pharmaciens formés pour faire la chose... que les installations sont
adéquates, etc., qu'est-ce qui... Et vous
n'êtes pas le premier groupe à le dire, c'est pour ça que je vous pose la
question, là. Qu'est-ce qui vous fait dire qu'on n'aura pas assez de vaccins? Et qu'est-ce qu'on peut faire pour régler
la situation? Qu'est-ce que soit la ministre ou quelqu'un d'autre peut
et doit faire pour régler la situation?
M. Roy (Denis M.) : Bien, la
première chose, c'est le système de distribution des vaccins, O.K.? Ce n'est
pas nouveau, qu'il se donne des vaccins en
pharmacie. L'année dernière, il s'en est donné près de 200 000 par des
infirmières en pharmacie.
M. Fortin :
Et les gens payaient pour ce service-là?
M. Roy
(Denis M.) : Parfois, les
vaccins étaient fournis par la Santé publique, et c'est de ces vaccins-là que
je parle, O.K.? Donc, les vaccins de la Santé publique, les infirmières
les reçoivent par les dépôts de vaccination de la Santé publique. Et Hugues a parlé de la boîte à lunch, malheureusement,
c'est comme ça que ça se fait. Donc, au niveau de chaîne de froid, on est à l'ère du télécopieur,
O.K., pour faire une mauvaise blague. Donc, nous, on croit que cet
approvisionnement-là devrait se faire par les grossistes, et d'arrêter
aussi de dire : Telle pharmacie, on ne vous en envoie pas, de vaccins de la Santé publique. Hugues a mentionné que
70 %, seulement, des pharmacies qui vaccinaient l'année dernière
grâce à leurs infirmières avaient accès à cette réserve-là. Il y en a 30 %
qui n'y ont pas accès, et c'est ça...
M. Fortin : ...pourquoi?
M. Roy
(Denis M.) : Eux, ils
doivent facturer des vaccins qu'ils ont achetés eux-mêmes, privés. Donc, ils
facturent non seulement le produit vaccinal, mais également le frais
d'injection.
M. Fortin : Mais, attendez-moi une seconde, là, vous êtes en
train de me dire qu'en ce moment, là, ou l'an dernier, disons, là, le vaccin, je me pointais à ma
pharmacie de quartier, si je voulais le vaccin de la grippe, il fallait que je
paie parce que la Santé publique n'avait pas envoyé de vaccins à cette
pharmacie-là, mais, dans une autre pharmacie à deux coins de rue, je ne
payais pas pour le même service parce que la Santé publique avait envoyé des
vaccins à cette pharmacie-là?
M. Roy
(Denis M.) : Oui, et,
essentiellement, il n'y a pas d'homogénéité dans la façon dont c'est appliqué.
Donc, chaque autorité de santé
publique régionale, par région sociosanitaire, a la latitude de décider si, oui
ou non, les vaccins seront rendus disponibles aux infirmières qui
vaccinent en pharmacie.
M. Fortin :
Mais le patient, lui, payait en conséquence de la décision d'où envoyer les
vaccins...
M. Roy (Denis M.) : Il a la
possibilité, évidemment, de se faire vacciner en établissement, dans le réseau.
M. Fortin :
Mais, de toute évidence, s'il y a 70 % du monde... s'il y a 30 % des
vaccins qui étaient donnés en pharmacie, là, qui n'étaient pas envoyés par la
Santé publique, il y a du monde qui payait, là, il y a du monde...
M. Roy
(Denis M.) : Dans 30 %
des pharmacies, ils n'avaient pas accès aux vaccins de la Santé publique. C'est
ce qu'on...
M. Fortin : Oui, O.K. Ça ne veut pas dire qu'ils offraient le
vaccin. Il y a des pharmacies qui n'offraient pas de vaccin du tout,
c'est ça?
M. Roy (Denis M.) : Il y a les
deux cas de figure.
M. Fortin :
Mais il y en a d'autres qui chargeaient au patient, là, j'imagine.
M. Roy
(Denis M.) : Bien, il y a
une nuance importante. Là, on parle des personnes qui sont éligibles au
programme d'immunisation de l'influenza, là.
M. Fortin :
Oui, oui, je comprends, je comprends.
M. Roy
(Denis M.) : Ce n'est pas
tout le monde, là. Les personnes en bonne santé, qui n'ont pas de maladie, puis
qui sont jeunes...
M. Fortin :
Même si je ne suis pas éligible, si je veux l'avoir, je vais payer pareil.
M. Roy
(Denis M.) : Ça, c'est tout
le monde. Ça, c'est la même chose partout. Ça, c'est dans le moment, mais je
pense qu'il y a une volonté de regarder ça, et c'est ça qu'on applaudit, sauf
qu'on n'a pas encore vu le résultat de ces négociations-là, et, écoutez, la
campagne, elle commence le 1er novembre.
M. Fortin : O.K. Mais, je reviens à ma question initiale,
qu'est-ce qui vous fait dire qu'on va manquer de vaccins?
M. Mousseau (Hugues) : On a, à
l'ABCPQ, lancé, il y a environ une semaine de ça, un recensement à l'échelle de toutes les pharmacies communautaires du Québec,
les 1 900 pharmacies et plus, et, à ce jour, on peut vous dire qu'il y a
un niveau d'intérêt et d'enthousiasme, parmi
les pharmaciens propriétaires, qui est assez important, qui est d'ailleurs
surprenant, compte tenu du fait qu'il
n'y a pas encore de négociations terminées entre l'AQPP, et le gouvernement, et
la RAMQ, et le ministère. Donc, on
est heureux de voir qu'il y a un intérêt en ce sens-là. Les infirmières — il y en a à peu près 700 qui étaient en
pharmacie l'an dernier — vont être de retour cette année pour vacciner. Et à ça on ajoute
les pharmaciens, parce que
l'objectif, c'est d'accroître la couverture vaccinale dans l'ensemble. Donc, on
a sondé sur le nombre de vaccins qu'ils
anticipaient être en mesure de donner, et puis on a la crainte, en fonction des
discussions préliminaires qu'on a eues avec la Santé publique, qu'il n'y
en ait pas suffisamment qui soient disponibles, et c'est le message qu'on
véhiculait tout à l'heure.
M. Fortin :
Je vous comprends. Qu'est-ce qui arrive dans le scénario où le projet de loi
est adopté, pas demain, mais la semaine
prochaine, disons, là, situation hypothétique qui n'arrivera probablement pas,
mais le projet de loi est adopté la semaine prochaine... Là, on sait
qu'il y a des pharmaciens qui sont formés pour offrir le vaccin. Vous me
dites : La négociation n'est pas
terminée. Qu'est-ce qui arrive si la négociation n'est pas terminée? Est-ce que
les pharmaciens vont commencer à donner le vaccin quand même?
M. Mousseau (Hugues) : Les
pharmaciens, non, mais les infirmières, oui.
M. Fortin : Oui, je comprends, mais les pharmaciens ne le
feront pas tant que la négociation n'est pas terminée, parce qu'il n'y a
pas de compensation de...
M. Mousseau (Hugues) : S'il n'y
a pas d'enveloppe budgétaire pour le faire, ça va être un enjeu.
M. Fortin :
O.K. Vous ne le ferez pas gratis, c'est ça que vous dites, là. O.K.
M. Mousseau
(Hugues) : C'est les
pharmaciens propriétaires qu'il faut poser la question, mais, au niveau des
chaînes et bannières, je pense que...
M. Fortin :
O.K., j'ai compris.
M. Mousseau (Hugues) : C'est
bon.
M. Roy (Denis M.) : C'est
difficile de payer un deuxième pharmacien pour...
M. Fortin : Dans les plus brefs délais, n'est-ce pas? C'est
ça. Dans les plus brefs, on va tenter de conclure pour que tout le monde
puisse avoir le vaccin cette année. Je comprends, je comprends.
Strep-test,
vous y avez fait référence dans votre mémoire, je comprends exactement où vous
vous en allez. Mais vous nous dites,
dans le mémoire, là, qu'il y a cinq
autres provinces qui permettent aux pharmaciens, essentiellement, de procéder ainsi puis qu'il y a des résultats
probants sur les effets thérapeutiques, économiques puis la
satisfaction du client. Les
avez-vous, ces résultats-là? Peut-être que vous pouvez déposer quelque chose à la commission, si vous les avez, mais j'aimerais juste...
peut-être, vous êtes capables de nous le dire, là, rapidement... je vois les références,
mais vous êtes capables de peut-être nous l'expliquer rapidement, ce que ça a
amené comme résultats positifs.
M. Roy
(Denis M.) : C'est
intéressant que vous le mentionniez, parce qu'hier je lisais une publication du
pays de Galles où le ministre de la
Santé annonçait le résultat d'un projet pilote qui mentionnait qu'il y avait
seulement une personne sur cinq qui
profitait de ce corridor de services là qui commençait en pharmacie qui
recevait un antibiotique. Donc, on réussit à réduire la quantité d'antibiotiques donnés avec ce service-là, et
c'est les résultats qui émanent, actuellement. Donc, au niveau
thérapeutique, c'est extrêmement intéressant.
Et il y a de
la littérature qui émane des autres provinces, au niveau d'une étude
pharmacoéconomique, où, par cas, il
se sauve entre 15 $ et 20 $, dépendamment de la capacité du
pharmacien d'initier l'antibiotique ou non. Parce que, dans certaines provinces, comme en Alberta, le pharmacien peut
faire le strep-test, peut donner l'antibiotique. Dans d'autres provinces, comme en Colombie-Britannique, le
pharmacien peut faire le strep-test, mais il faut retourner le patient chez
le médecin pour l'antibiotique, et ça, c'est moins efficace.
M. Fortin :
Pour la prescription de l'antibiotique.
M. Roy (Denis M.) : Pour avoir
la prescription de l'antibiotique.
M. Fortin : Donc, en Colombie-Britannique, le pharmacien fait
le test, détermine que la personne a effectivement, là, le strep,
renvoie le patient en cabinet, puis après ça il revient pour sa prescription.
Ça donne quoi?
M. Roy (Denis M.) : Ça donne
une organisation du travail qui n'est pas optimale.
M. Fortin : Vous, vous aimeriez que, de A à Z, là, ces trois
étapes-là, disons, là, le test, la prescription, le médicament, soient
disponibles en pharmacie.
M. Roy
(Denis M.) : Ça va être
possible dans la plupart des cas. Il y a certains critères que le pharmacien ne
pourra pas évaluer. Par exemple, s'il
y a de la toux, ça fait un point de moins, c'est moins possible que ça soit un
strep, et, à ce moment-là, il
faudrait faire vérifier s'il y a adénopathie. Et ça, c'est des choses que les
pharmaciens dans la communauté ne
feront pas parce que c'est un examen physique diagnostique, et à ce moment-là
il faudra l'envoyer au médecin. Mais ça, le collège et l'ordre en
discuteront.
M. Fortin :
Mais, selon vous, là, on peut changer le projet de loi pour vous permettre de
faire ça.
M. Roy (Denis
M.) : Absolument.
M. Fortin :
O.K. Merci. Je pense que mon collègue a une question. Merci.
M. Ciccone :
Oui. Merci beaucoup. Bonjour, M. Roy. Bonjour, M. Mousseau. Je suis
content de vous revoir. Justement, on
parlait des évaluations physiques. Dans le projet de loi, l'article 2,
alinéa 1.1°, ça fait référence à l'évaluation de la condition physique et mentale d'une
personne. Pouvez-vous nous dire, concrètement, de quelle manière les
pharmaciens qui font une évaluation
mentale peuvent aider leurs patients? Parce que, quand on parle d'une
évaluation mentale, là, c'est quand même poussé, là. Les pharmaciens
sont équipés pour faire ce genre d'évaluation là, oui?
M. Roy (Denis M.) : Absolument. Écoutez, moi, j'ai gradué il y a 35 ans puis
je le faisais. Juste pour savoir si une personne âgée est capable d'utiliser un pilulier, par exemple, ou s'il
doit utiliser un pilulier pour prendre sa médication — vous savez, quand les médicaments sont placés «matin, midi, soir,
coucher» — il y a
des règles de paiement de la régie qui demandent de faire une évaluation mentale pour voir si la personne a les fonctions
cognitives pour être capable d'utiliser un pilulier. Quand c'est fait dans le cadre de l'usage
approprié des médicaments, il n'y a pas d'enjeu avec la formation des
pharmaciens, même celle des vieux
comme moi. Il y a des choses de base comme ça qui se font. Puis aujourd'hui,
avec les questionnaires, comme je mentionnais tantôt, le GAD-7 pour
l'anxiété, le PHQ-9 pour la dépression, c'est des autoévaluations que le patient fait et qu'il remplit. Et il y a beaucoup
de recherches qui montrent que ça, ça permet aux personnes de retourner au
travail plus vite parce qu'ils prennent leurs médicaments quand ils sont
nécessaires, ils n'en prennent pas quand c'est nécessaire, mais ils prennent les bons à la bonne dose et, au lieu de
passer un an en congé de maladie, après neuf mois ils peuvent revenir au travail. Puis il y a des
projets de recherche, là, qui vont débuter bientôt, qui vont tenter de montrer
ça davantage.
M. Ciccone : Vous avez énormément d'expérience. Avez-vous déjà
eu des occasions où vous avez dit, justement : L'évaluation
mentale, c'est trop loin, je dois référer, ou vous vous donnez un certain...
une limite, justement, pour ces évaluations-là, quand on parle de médicaments,
bien entendu, là?
• (16 h 20) •
M. Roy (Denis M.) : Bien, tout
pharmacien a l'obligation de référer quand il ne se sent pas dans sa zone de confort, O.K., ça, c'est une obligation
déontologique. Les médecins ont ça, tous les professionnels de la santé ont ça.
C'est certain que ça peut arriver.
Moi, je peux vous parler personnellement, mais d'autres pharmaciens vont vous
dire : Moi, je serais à l'aise
dans cette situation-là. Puis les situations où c'est plus complexe, on parle
de psychose, là, dans ce cas-là,
même
si le diagnostic a été fait, si le patient ne va pas bien, bien, probablement qu'on va référer au médecin, c'est un exemple assez probant. Mais, pour ce qui est de la
dépression, il est clair que, si un patient se met à décompenser et qu'il y a
un risque de suicide, on a besoin
d'aide, on a besoin de travailler avec les autorités, avec le prescripteur du
patient. Puis la littérature a montré
que juste ces évaluations-là semi-quantitatives qui sont faites avec le
PHQ-9 permettent de détecter ces enjeux-là et sauvent des vies, comme
l'a dit tantôt Dr Rouleau.
M. Ciccone : Merci beaucoup. Merci. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Le député de Jean-Lesage va poursuivre les
échanges.
M. Zanetti : Merci. Merci d'être avec nous. Je voudrais savoir...
Dans votre mémoire, à la page 17, vous parlez, là, d'«introduire un instrument dans le corps humain
dans et au-delà du pharynx, notamment
pour effectuer le prélèvement requis pour un strep-test». Est-ce que, quand
vous dites «notamment», vous voulez dire qu'il y a d'autres tests qui
pourraient être effectués, ou c'est vraiment particulier pour ce
test-là?
M. Roy
(Denis M.) : L'Ordre des
pharmaciens a parlé de la pharmacogénomique, ça, je crois... je ne suis pas un
avocat, là, mais je crois que c'est même possible aujourd'hui, parce que c'est des
tests dans la salive, O.K.? Donc, pour détecter si un patient va bien réagir à un médicament, on peut vouloir vérifier
s'il a les enzymes nécessaires pour l'éliminer. Donc, ça, c'est un test dans la bouche. On ne sait pas ce
que l'avenir va un jour nous amener, et je pense que c'est pour ça qu'on l'a
écrit de cette façon-là. Pour l'instant, le test qui est vraiment
d'intérêt est le strep-test.
M. Zanetti :
Parfait. Et aussi, évidemment, l'application, l'élargissement du rôle des
pharmaciens et pharmaciennes va
entraîner une hausse de la tâche, ça va entraîner, probablement, pour certains
d'entre eux, une augmentation d'embauche ou un besoin d'embauche, peut-être, dans certains cas. Vous, est-ce que
c'est quelque chose qui vous concerne, ou c'est complètement dans la cour, disons, des pharmaciens propriétaires, ou
est-ce que vous allez être impliqués dans ces choix-là?
M. Mousseau
(Hugues) : Bien, je pense
qu'on est un facilitateur, si on revient à notre mandat puis à nos objectifs.
Mais je vous dirais qu'il y a aussi une notion de cascade, c'est-à-dire qu'en
libérant le médecin pour faire des tâches de diagnostic puis s'occuper des cas P1, P2, P3, comme on le mentionnait
aussi hier, bien, on libère le médecin. Ensuite, le pharmacien, bien, il a des équipes de soutien pour
ce qui ne requiert pas le jugement professionnel, peut déléguer à des
techniciens. Puis d'ailleurs il y a une démarche qui est en cours, sur laquelle
on a travaillé en soutien à l'ordre puis à d'autres acteurs de notre secteur, pour créer un nouveau
programme de formation collégiale pour les ATP, pour les techniciens en
pharmacie, et c'est une démarche qui est en cours entre le ministère de la
Santé et le ministère de l'Éducation, qui répond à un besoin criant qu'il y a au niveau des
pharmacies communautaires, puis c'est une décision puis une démarche qu'on
salue, parce que c'est un besoin important qu'il y a dans nos
pharmacies.
Donc, il y a cette notion-là de pouvoir faire
une cascade et s'organiser. Il y aura de l'embauche, effectivement, en ce sens-là, c'est sûr et certain, puis les
chaînes et bannières seront là en appui aux équipes pharmacie pour générer les
efficiences et puis dégager de la productivité en pharmacie, effectivement.
M. Zanetti : Est-ce qu'il me
reste du temps? Non? O.K.
M. Roy
(Denis M.) : Puis on peut
saluer, rapidement, les discussions qui ont lieu avec le ministère de l'Éducation, actuellement, pour ce
programme-là au collégial, qui ont débuté dernièrement. Ça fait depuis 2011 que
l'Association des bannières et chaînes de pharmacies du Québec travaille
à ce programme-là, qui semble vouloir décoller, finalement.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Nous concluons nos échanges avec le député de
Jonquière.
M. Gaudreault
(Jonquière) : Oui, merci. Bienvenue. Je vais être prudent dans ce que
je dis parce qu'il y a une enquête du
syndic de l'Ordre des pharmaciens et, éventuellement, de la Commission d'accès
à l'information, peut-être, sur un
événement qui est apparu dans l'actualité sur, peut-être, du vol de données à
partir de pharmacies qui sont dans des bannières,
j'imagine, qui sont membres chez vous. Est-ce que le projet de loi n° 31
ne peut pas amener, chez les citoyens et les citoyennes, un doute
supplémentaire? Parce que, là, si on y va... pas juste pour acheter des
médicaments, mais pour recevoir un vaccin, prendre des examens, quant au
respect des données confidentielles, des données médicales des citoyens, des patients, alors, quelles garanties
pouvez-vous donner là-dessus dans votre réseau? Et est-ce qu'il y a des choses
qu'on pourrait faire, nous-mêmes, dans le
projet de loi qui est présentement à l'étude, pour mettre des barrières
supplémentaires afin de fournir ces garanties aux patients?
M. Mousseau
(Hugues) : Je vais commencer
puis... Bien, d'entrée de jeu, d'abord, sur l'enquête, je dois vous dire que la question
de la confidentialité de l'information des patients, des dossiers des patients, il y a
zéro tolérance, à notre avis, puis je
veux être très, très clair là-dessus. Par ailleurs, je pense que
c'est important de mentionner que les chaînes et bannières ne sont pas visées par les enquêtes
du syndic, ce sont vraiment les pharmaciens propriétaires qui le sont, sur
une base individuelle. Puis évidemment, bon, comme l'enquête est en
cours, on ne peut pas commenter davantage.
Par contre, puis je veux insister aussi
là-dessus, l'AQPP travaille depuis des années à faire évoluer le mode de rémunération des pharmaciens pour le distancier des produits puis abolir les
allocations professionnelles, ce qui est un des éléments du dossier. Et
donc l'abolition... l'adoption, pardon, du projet de loi n° 31 va contribuer à ce changement-là en favorisant une logique de service, d'actes, de nouveaux actes par le
pharmacien. Donc, sur le projet de
loi n° 31
spécifiquement, comme vous le mentionnez, il n'y a pas plus d'informations sensibles qui vont être dans les dossiers des patients, donc la population
puis les patients n'auraient pas raison de s'inquiéter davantage
ou d'en être préoccupés davantage, aucunement. On ne voit pas qu'il y ait un
lien de cause à effet entre les deux, à ce stade-ci.
M. Gaudreault
(Jonquière) : Autrement dit, il n'y aura pas plus d'informations que ce qu'il y a déjà, au
fond, d'une certaine manière.
M. Roy (Denis M.) : Il n'y aura
pas plus d'informations sensibles.
M. Gaudreault
(Jonquière) : Mais ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas agir
constamment pour préserver la confidentialité
des données, là, mais il n'y aura pas d'informations supplémentaires,
selon ce que vous voyez, dans le projet
de loi n° 31.
M. Roy
(Denis M.) : On parle de
vaccination, on parle de médicaments de vente libre, on parle de consultation. Donc, ce qui est vraiment sensible, c'est les médicaments que quelqu'un
prend, parce que ça, ça laisse entrevoir des maladies ou des diagnostics et des
symptômes. Donc, c'est ça qui est sensible, c'est déjà là.
31 n'en ajoute pas, de ce qui est vraiment
sensible, à mon avis.
M. Gaudreault (Jonquière) : O.K.
Est-ce qu'il me reste du temps?
Le Président (M. Provençal)
: Malheureusement, non.
Des voix : Ha, ha, ha!
Le Président (M. Provençal)
: Je remercie les représentants de l'Association des
bannières et des chaînes de pharmacies du Québec pour leur contribution à nos
travaux.
La commission ajourne ses travaux jusqu'au mardi
8 octobre, à 10 heures. Merci.
(Fin de la séance à 16 h 27)