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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Thursday, February 15, 2018 - Vol. 44 N° 179

Clause-by-clause consideration of Bill 157, An Act to constitute the Société québécoise du cannabis, to enact the Cannabis Regulation Act and to amend various highway safety-related provisions


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Table des matières

Étude détaillée (suite)

Document déposé

Intervenants

M. Richard Merlini, président

M. Pierre Michel Auger, président suppléant 

Mme Lucie Charlebois

M. Simon Jolin-Barrette 

M. Sylvain Pagé

Mme Lise Lavallée

M. Marc Bourcier

M. Yves St-Denis

M. Marc H. Plante

M. Serge Simard 

Mme Caroline Simard 

*          M. Gabriel Roy, ministère des Finances

*          M. Marc Grandisson, idem

*          M. Jean-François Lord, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures seize minutes)

Le Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare donc la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes dans la salle du Conseil législatif de bien vouloir éteindre toute sonnerie de tout appareil électronique.

La commission est réunie ce matin afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements ce matin?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Girard (Trois-Rivières) sera remplacé par M. Auger (Champlain); Mme Vallières (Richmond), par M. H. Plante (Maskinongé); M. Turcotte (Saint-Jean), par M. Bourcier (Saint-Jérôme); et M. Paradis (Lévis), par M. Jolin-Barrette (Borduas).

Étude détaillée (suite)

Le Président (M. Merlini) : Très bien, je vous remercie beaucoup. À l'ajournement de nos travaux... lors de l'ajournement de nos travaux, hier soir, nous étions rendus à l'étude de l'article 23.1, introduit par l'article 5 du projet de loi, et c'est l'article 23.1 tel qu'amendé, je dois vous le signaler. Est-ce que j'ai d'autres interventions? M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui, merci, M. le Président. Hier, on s'est laissés sur les explications de Me Roy, et je l'en remerciais, c'était très clair. Là, on crée la Société québécoise du cannabis, une compagnie à fonds social. Et ce qu'on a constaté au cours des derniers jours, c'est que la SAQ a émis des lettres d'intention, maintenant, avec six producteurs de cannabis dans le but de s'approvisionner. Je voudrais savoir... Là, on vient dire que c'est la SQC qui va s'en occuper. Là, la SAQ commence déjà à entreprendre des pourparlers avec les différentes compagnies en matière d'approvisionnement. On a demandé aussi que ça soit inscrit dans la loi que ça soit des producteurs québécois qui fournissent la SQC ou que la SQC fasse le choix d'encourager les producteurs québécois. Et, sur l'amendement d'hier, il y avait une intervention des collègues du gouvernement, qui disaient : Bien, écoutez, la SAQ, elle a le choix de choisir ses produits, notamment les produits québécois. Ce qu'on peut constater, c'est qu'à la Société des alcools du Québec la place qui est faite aux produits québécois, elle est minime. On a eu beaucoup de producteurs de vin, au cours des quatre dernières années, des producteurs aussi de boissons alcooliques avec le taux d'alcool... les distillateurs qui nous disaient : Bien, écoutez, on a de la difficulté à rentrer dans la SAQ, on a de la difficulté à ce que nos produits se retrouvent sur les tablettes. Exemple, les vins rosés, les producteurs québécois de vin rosé, c'est très difficile, parce que la SAQ a certaines exigences en termes de volume, en termes également de paiement, de retour sur le paiement qui est fait, les promotions qui peuvent être mises en place par les différentes compagnies en termes de retour.

Alors, le questionnement que j'ai en lien avec l'article 23.1, pour la ministre, et en lien avec ce qu'on apprend dans les journaux sur les avis d'intention de la SAQ, c'est : Est-ce que la SAQ est pleinement consciente de la place qui devra être faite aux producteurs québécois dans ce marché-là? Parce que, si on se fie actuellement à l'expérience du vin à la SAQ, on ne peut pas dire que la section Québec, pour les producteurs de vin locaux, les producteurs de vin québécois, une industrie qui est en émergence, bien, elle est très favorisée. C'est variable en fonction des SAQ, c'est variable en fonction du type de magasin, mais on ne peut pas dire qu'il y a un effort considérable qui est fait pour encourager nos producteurs locaux de vin, de spiritueux non plus.

Alors, ma question à la ministre va en ce sens-là, et, avant de lui déposer un amendement en lien avec ça, parce qu'on en a déjà faits, je veux savoir comment est-ce qu'elle entrevoit ça, déjà que la SAQ a signé des ententes, des lettres d'intention avec cinq producteurs sur six qui ne sont pas établis au Québec? Et quelle va être la part des producteurs québécois?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, d'une part, ce n'est pas des ententes, M. le Président, c'est des lettres d'intention, et tout ça, j'avais expliqué au député de Labelle hier, c'est pour nous assurer... ou c'est peut-être même la députée de Vachon, hier, je ne me souviens plus, là, en tout cas, ce n'est pas important, mais c'est pour assurer que nous serons prêts lors de la légalisation du cannabis, qui sera faite par le gouvernement fédéral, je vous le rappelle, nous, on est là pour faire l'encadrement, et, quand on aura fini de constituer la Société québécoise du cannabis, la Société québécoise du cannabis pourra faire ses propres achats.

Là, en attendant, il n'y a aucun achat, il n'y a aucune entente de signée, c'est des lettres d'intention, et vous avez pu constater que la compagnie qui a la lettre d'intention... ou la plus grande quantité pour être prévue, c'est une compagnie québécoise. Ceci étant dit, dès qu'on va implanter la Société québécoise du cannabis et, par conséquent, son réseau de vente, nous allons nous assurer effectivement qu'au fil du temps... C'est sûr qu'au jour 1 on n'aura peut-être pas que des produits québécois, parce qu'on n'en aura pas suffisamment, mais, au fil du temps, on va avoir très majoritairement, pour ne pas dire très, très majoritairement des produits québécois à la Société québécoise du cannabis.

Ça ne sera pas la Société des alcools qui va procéder aux achats, ça va être la Société québécoise du cannabis, mais là elle n'est pas formée encore, on fait un projet de loi pour la constituer.

 (11 h 20)

Le Président (M. Merlini) : Merci. M. le député.

M. Jolin-Barrette : J'entends bien la ministre. Je suis d'accord avec elle que, présentement, on est face devant rien, il faut constituer la nouvelle filiale. Je le dis de façon très transparente à la ministre, l'expérience acquise avec la SAQ par rapport à la place qui est faite aux producteurs de vin québécois, la place n'est pas très grande, O.K.? Ça, je pense que tout le monde autour de la table peut le constater. Allez dans les SAQ, il y a une petite section produits Québec, puis ce n'est pas très grand.

Est-ce que c'est ce genre de modèle là qu'on veut reproduire pour la Société québécoise du cannabis? Je ne le crois pas. Je viens d'entendre la ministre nous dire : Bien, écoutez, moi, je souhaite, comme ministre, qu'éventuellement l'approvisionnement du cannabis qui va être vendu dans les succursales du gouvernement, ce soit majoritairement du cannabis québécois.

Alors, je dis à la ministre : Pour s'assurer de cela, il faudrait l'inscrire dans la loi. Alors, je lui demande si... en fait, je lui demande sa collaboration pour savoir où on l'indique dans la loi. Parce qu'on peut le faire dès maintenant. Si elle nous dit : Il y a un endroit plus approprié à l'article désigné, on va attendre à ce moment-là. Mais moi, je pense qu'il faut que ça soit inscrit dans la loi d'indiquer clairement à la filiale et d'indiquer clairement à la SAQ que son approvisionnement doit favoriser les producteurs québécois. Alors, je tends la main à la ministre pour nous indiquer où ce serait approprié de le faire pour ne pas qu'on se retrouve dans une situation comme c'est le cas avec la SAQ, au niveau du parallèle avec l'alcool.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Au risque de me répéter, M. le Président, ce ne sera pas la SAQ qui va procéder aux achats de la Société québécoise du cannabis, ce sera la Société québécoise du cannabis, d'une part. D'autre part, on est à 23.1. Il n'est nullement question d'approvisionnement. On est en train de créer une compagnie à fonds social. On est en train de, justement, créer la filiale de la SAQ. Et la SQDC, bien, ça va être la personne morale, ou, en tout cas, je ne sais pas comment on le dit, là... la compagnie à fonds social qui sera responsable de faire ses achats. On n'est pas du tout, du tout, du tout dans ça en ce moment.

Deuxièmement, ce n'est pas... Je le répète, là, parce que vous me revenez toujours avec la Société des alcools, je vous entends, je le sais, qu'ils n'ont pas un grand répertoire de produits québécois, mais la Société québécoise du cannabis aura des directives qui vont lui être adressées. Et d'ailleurs, déjà, vous avez vu que, dans les lettres d'intention, le plus grand producteur est québécois. Ça fait que c'est certainement l'intention de donner ces directives-là à la Société québécoise du cannabis, mais il faut d'abord la créer pour qu'elle puisse procéder.

Le Président (M. Merlini) : M. le député.

M. Jolin-Barrette : J'entends bien la ministre et je comprends qu'elle entend mes propos également. Les directives, ce n'est pas suffisant. Il faut le mettre dans la loi. Alors, même s'il y a des directives qui sont données à la SAQ de favoriser les vignerons québécois, bien, ça ne se fait pas. Alors, je ne veux pas qu'on se retrouve dans la même situation pour le cannabis.

Alors, je le dis à la ministre, là, je suis conscient que, là, on crée la coquille, la structure, mais il va falloir trouver un moyen, au cours de l'étude du projet de loi n° 157, d'indiquer très clairement dans la loi quel sera le mandat de la Société québécoise du cannabis relativement aux producteurs québécois. Alors, je l'informe que je vais déposer un amendement dans les articles suivants, en lien avec cela, et je pense qu'on aurait tout intérêt à ce que ça ne fonctionne pas par directives parce que... D'autant plus que, si on ne l'inscrit pas dans la loi... La maison mère, c'est la SAQ, et il y a un conseil d'administration. Et le gouvernement va avoir des sièges d'observateur sur le conseil d'administration, puis le P.D.G. fera bien ce qu'il veut à la Société québécoise du cannabis. Alors, si c'est inscrit dans la loi, puis si c'est inscrit dans sa mission puis dans ses objectifs de favoriser les producteurs québécois, bien, ça va permettre très clairement à la Société québécoise du cannabis de se gouverner en conséquence.

Alors, je le dis à la ministre, là, pour ne pas que ça soit une surprise, je pense que c'est important de l'indiquer.

Le Président (M. Merlini) : Merci. Est-ce que j'ai d'autres interventions sur l'article 23.1 tel qu'amendé? M. le député de Labelle.

M. Pagé : Oui. C'est sûr qu'on est en périphérie, là, quand j'écoute mon collègue, mais je pense que c'est important, à ce stade-ci, de s'informer mutuellement de ce qui s'en vient plus tard dans le projet de loi et que nos intentions, que les intentions manifestées hier très clairement aussi avec la motion qui a été votée à l'Assemblée nationale se retrouvent à quelque part dans le projet de loi. Et je le dis avec, comment dirais-je, une certaine déception de moi-même, d'hier. Je vais vous expliquer pourquoi. C'est que, si c'était à refaire, je ne lâcherais pas le morceau sur l'article 3(16.1) qui définit la mission. Pourquoi je reviens là-dessus? Parce que je souhaite que, quand on nous dit : Oui, plus tard, on va pouvoir en tenir compte, bien, il va falloir que ça soit vrai, il va falloir que ça soit vrai.

Et pourquoi je vous dis que je suis déçu de moi-même de ne pas avoir insisté plus et d'avoir mis toutes nos énergies en commun pour qu'on puisse l'inscrire dans les missions? Je vais vous dire pourquoi. En fait, la mission de la SQDC, c'est quoi, M. le Président? C'est la vente du cannabis. C'est la vente du cannabis. C'est ça, sa mission. Mais vous avez vu de quelle façon on l'a inscrit dans le projet de loi. On a dit : «La société a pour mission d'assurer la vente du cannabis...» On aurait pu faire un trait, puis c'est fini, ses produits et ses dérivés. Mais pourquoi on a justement écrit par la suite : «Dans une perspective de santé publique afin d'intégrer les consommateurs au marché licite»? Donc, on a pris la peine de dire qu'on veut sortir du marché illicite et l'intégrer au marché licite, donc on a donné une couleur à la mission. «Et de les amener, sans favoriser la consommation de cannabis». Donc, on est allé beaucoup plus loin que la mission. On lui a donné une couleur. Pourquoi? Parce qu'on a peur au risque de l'impact que la vente de cannabis pourrait avoir sur la santé publique. Étant conscients de ces risques qui pourraient encourir sur la santé publique, on l'a inscrit dans la mission.

Mais le phénomène que l'on entend de plus en plus ces jours-ci, c'est celui des paradis fiscaux et c'est celui des entreprises qui sont financées, ou on peut douter qu'ils ont un financement... un drôle de financement, pour rester encore poli, ou un financement qui peut avoir des odeurs nauséabondes. Et nous sommes tellement alertés, ces derniers jours, par une foule de médias — parce qu'hier c'était La Presse, avant c'était le Le Journal de Montréal, il y a eu d'autres médias aussi qui sont sortis pour nous alerter — qu'il faut que nous en prenions conscience et que...

• (11 h 30) •

Moi, je vous dis, si c'était à refaire, ça ferait partie de la mission. Bon, il est trop tard, on l'a adopté. À moins que la ministre dise : Finalement, oui, c'est vrai, vous avez raison, c'est tellement important qu'on va l'inscrire dans la mission. On pourrait, avec un commun accord, aller le réécrire dans la mission à l'article 16.1 de l'article 3. Bon. Elle nous a dit hier : Bien, à 23.38, on va pouvoir écrire des choses qui ressemblent à ça. Parfait. J'ai même accepté de le retirer parce qu'il semble avoir des intentions. Mais, moi, ce que je souhaiterais entendre ce matin, c'est que... Les intentions, est-ce qu'elles vont être claires? Est-ce qu'on va nommer les choses? Parce que, juste pour que tout le monde soit bien conscient de ce que nous sommes en train de vivre, je veux juste prendre un court moment, mais c'est important... Puis j'aimerais que l'ensemble des collègues, la partie gouvernementale, qui auront à voter sur ces prochains articles, soient bien à l'écoute de ce qui se fait, de ce qui se trame présentement. Ce n'est pas rien, là, ce n'est pas rien, là. Puis je fais juste lire quelques titres de journaux, et il y a même, à la fin, là, juste un texte, celui qui est paru hier... J'en ai fait la copie pour tout le monde. Alors, ceux qui sont intéressés, là, vous pourrez prendre connaissance du texte.

Puis je ne veux même pas tomber dans la partie «les amis du parti», je ne suis pas là-dedans. Je ne suis pas là-dedans, M. le Président. Je suis dans la mission de sortir du marché illicite, de le rendre licite, mais de ne pas faire par la porte d'en arrière ce qu'on faisait par la porte d'en avant, là. Ce que je suis en train de dire, c'est que, finalement, bien, tous ces gens-là qui ont fait... une certaine quantité, qui ont fait de l'argent via le marché au noir sont maintenant dans des paradis fiscaux, puis on va accepter, finalement, que nos producteurs soient financés par les paradis fiscaux. C'est-u ça qu'on veut? La réponse, c'est non, c'est clair que c'est non. Je suis sûr que, tous les parlementaires ici, dans leur esprit, c'est clair que c'est non.

Alors, très, très rapidement, hein? Le 22 janvier, on nous alerte : «Au moins 165 millions de dollars en provenance [des] paradis fiscaux ont servi à financer 35 producteurs autorisés.» Alors, on autorise des producteurs qui sont financés — 35, là — avec les paradis fiscaux. La même journée : «De riches investisseurs anonymes de paradis fiscaux ont misé au moins 165 millions [...] des producteurs de pot autorisés au Canada», Les paradis fiscaux financent les firmes de pot canadiennes. Ça, c'est un autre article.

Le coup fumant des paradis fiscaux : «35 des 86 producteurs autorisés [au] Canada, soit 40 % d'entre eux, ont obtenu un financement extraterritorial...» Ça commence à en faire plusieurs.

Et la question la plus importante qui est soulevée, c'est la suivante, soulevée le 23 janvier, Pas de fumée sans pot — pour moi, c'est la question qui est au coeur : «Le scandale politico-financier de la prochaine décennie est-il en train de se déployer sous nos yeux?» C'est ça, la question. Est-ce que le scandale politico-financier de la décennie est en train de nous passer sous les yeux? Et nous avons un devoir, comme parlementaires, de voir tout ça et de se dire : Comment on peut contrer cela? Moi, c'est la question que je pose ce matin et pour laquelle je souhaite qu'on se donne les moyens de nous prévenir à cet égard-là. Sinon, on aura tous l'odieux de porter sur nos épaules une loi pour laquelle on savait qu'il y avait des choses qui se tramaient, mais on n'a pas été vigilants.

Les paradis fiscaux de cannabis inquiètent le Sénat, et là la question qui a été posée au Sénat : «"Oui ou non, allez-vous [...] assurer que nous connaîtrons qui se cache derrière ces capitaux qui proviennent des paradis fiscaux", a lancé mardi sous un tonnerre d'applaudissements le sénateur québécois Serge Joyal.» Alors, la question est posée au Sénat aussi, là. La question est posée aussi au Sénat, aussi, là. On n'est plus les seuls au Québec à se préoccuper. Puis il va plus loin en disant : «De l'avis du sénateur Joyal...» C'est important, là : «De l'avis du sénateur Joyal, cela démontre que le crime organisé — il pèse ses mots, là, "que le crime organisé" — peut passer par des stratagèmes comptables pour continuer de tirer les ficelles de l'industrie du pot légal.» C'est ça qu'on est en train de faire, M. le Président, là. Est-ce que c'est ce qu'on veut? Clairement, c'est sûr que c'est non. Je suis convaincu que, si on avait à prendre un vote là-dessus, c'est-u ce qu'on veut, tout le monde dirait : Non, ce n'est pas ça qu'on veut. Alors, comment, dans le projet de loi, on va se prémunir de cela?

Hier, à Ottawa, et ça, c'est un texte d'hier — j'achève, j'achève : Cannabis et paradis fiscaux: Trudeau face à un barrage de questions. Je n'aime pas quand c'est «Trudeau», parce qu'on devrait appeler «premier ministre», là, par respect, mais la question était la suivante, de l'opposition officielle : «Le premier ministre peut-il nous assurer que ces investissements ne proviennent pas d'entreprises mises en place par le crime organisé?» Il n'a jamais répondu à la question. C'est grave, c'est grave.

Et là ce qu'on apprend, un peu plus loin, et là on le sait depuis hier : «La société québécoise...» Puis là on veut que notre SQDC s'approvisionne de produits québécois, là, mais «la société québécoise Hydropothecary, qui vient de conclure une entente — bien là, je comprends que c'est plus, bon, une entente de principe, là — [de] 20 000 kilos de cannabis annuellement à la SAQ et sa future [filiale], a quant à elle reçu 15 millions du fonds d'investissement extraterritorial». C'est-u ça qu'on veut? Je pense que, clairement, la réponse, c'est non.

Alors, il y avait un autre texte, hier dans La Presse, où on parle de... Finalement, là, on était à 165 millions il y a deux semaines. Aujourd'hui, on apprend qu'on... On apprenait hier que, là, maintenant, c'est 277 millions, là. Puis là ça s'en va à une vitesse folle. Et un texte qui est très long, très élaboré, où on explique tout ça. Ce n'est pas un texte qui est sous le fond de trame de parti politique, de connivence. On n'est pas là-dedans, on n'est pas là-dedans. Alors, si les collègues en veulent une copie, là, j'en ai fait une copie pour chacun des collègues. Je pourrais même, avec votre permission, la déposer. Je ne sais pas si ça se fait. Oui? Avec votre permission.

Le Président (M. Merlini) : Oui, oui.

M. Pagé : Avec votre permission? Consentement? Oui.

Document déposé

Le Président (M. Merlini) : Vous pouvez déposer le document. Oui.

M. Pagé : Parfait. Alors, je vais déposer le document pour qu'effectivement ça puisse circuler.

Donc, nous sommes très préoccupés. Et j'espère que nous sommes bien entendus et j'espère que, dans le projet de loi, on va déjà nous indiquer... On a déjà déposé des amendements. La partie gouvernementale, je les remercie d'ailleurs de nous déposer à l'avance des amendements. Ça nous permet de mieux se préparer. C'est ce qu'on fait, là, chaque matin. Sauf que je n'ai pas encore vu les amendements qui vont dire très clairement qu'il n'y aura pas d'achat, de la part de la SQDC, d'entreprises qui se financent de cette façon, via les paradis fiscaux. Et ça, là, il va falloir qu'on se questionne. Il va falloir qu'on se questionne parce que, sinon, ça va vouloir dire que c'est acceptable et accepté. Mais ça, nous, on ne l'acceptera jamais.

Alors, c'était, je pense, le plaidoyer pour ce qui s'en vient que je souhaitais faire, puis, je pense, c'est important de le dire, pour donner une couleur à notre projet de loi, parce que c'est une grande préoccupation dans la population. Et il ne faudrait pas qu'on fasse par la porte d'en arrière ce que l'on ne veut pas faire par la porte d'en avant, ou bien l'inverse.

Alors, pour revenir, M. le Président, à l'article 23.1... Parce que, de toute façon, je pense que j'y étais quand même encore pas mal, là, parce que nous sommes dans la constitution de la SQDC, fonds social. D'ailleurs, je remercie, hier, mon collègue de Borduas, qui a posé d'excellentes questions, on en avait quelques-unes qui allaient dans le même genre, mais qui est allé beaucoup plus loin. D'ailleurs, la ministre puis un peu tout le monde reconnaissaient que son côté avocat ressortait bien et nous permettait d'aller plus loin dans ces questions. Je le remercie, il a posé des questions très pertinentes.

En fait, la question, n'ayant pas toutes les compétences en la matière, mais ayant devant nous des juristes qui peuvent nous informer, avec cette constitution d'une compagnie à fonds social, qu'elles sont les... Est-ce qu'il y a des limites particulières à ce genre de compagnie là? Est-ce que vous pouvez me dire : Bien, une compagnie à fonds social, je ne sais pas, moi, c'est le seul véhicule en fonction de ce qu'elle va opérer comme transactions, mais, s'il advenait, je ne sais pas, que l'entreprise vende à l'étranger, par exemple, bon : ah! il y a des limites à une compagnie à fonds social, elle ne pourrait pas faire ça? Je dis peut-être n'importe quoi, là, mais j'essaie de voir quelles seraient les limites. Est-ce que ça la limite d'une quelconque façon, ou bien, non, elle pourra faire tout ce qu'elle... Alors, je vois déjà que le juriste est prêt à répondre à la question. Alors, je vais lui laisser la parole.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, en fait, je voudrais mieux saisir la question du député de Labelle. Il veut savoir quoi exactement, là? C'est quant à ses pouvoirs? Là, je ne sais pas où vous voulez aller exactement, là.

M. Pagé : Bien, la personne qui est assise à côté de vous semblait être prête à répondre.

Mme Charlebois : Oui. Bien, moi, j'aimerais ça avoir plus de précision sur votre question, parce que peut-être que moi aussi, j'aurai des réponses, avant monsieur à côté de moi.

M. Pagé : O.K. Bien, j'ai donné un exemple. J'ai donné un exemple tout bête, là. Si la SQDC, par contre, décidait de vendre ses produits, parce qu'elle va acheter des productions, et ensuite aller vendre dans d'autres provinces canadiennes, aller vendre à l'étranger, par exemple — c'est un exemple — est-ce qu'elle pourrait le faire? C'est un exemple. Est-ce que... Allez-y.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : En fait, ce n'est pas ce qu'on souhaite, puis on ne veut pas que les autres provinces...

• (11 h 40) •

M. Pagé : Non, je ne parle pas du souhait.

Mme Charlebois : Non, mais... oui, je comprends que vous ne parlez pas de souhait, mais moi, je vous en parle. On ne souhaite pas non plus que les autres provinces viennent ici. C'est pour ça qu'il faut avoir une loi québécoise qui va justement faire en sorte que la loi fédérale ne s'applique pas, et que toutes les autres provinces viennent vendre leur matériel ici, puis qu'on enrichisse l'ensemble du territoire canadien plutôt que nos Québécois. Pour le reste de la question, je laisserai le juriste répondre.

Le Président (M. Merlini) : Est-ce que j'ai consentement pour permettre à Me Roy de répondre à la question?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Merlini) : Consentement. Merci beaucoup. Me Roy, encore une fois veuillez vous identifier, pour les bienfaits de l'enregistrement.

M. Roy(Gabriel) : Oui. Gabriel Roy, avocat au ministère des Finances.

Merci, M. le Président. En fait, la structure corporative, là, le fait d'être une compagnie à fonds social, c'est juste une structure corporative en soi, ça n'a rien à voir... Ses capacités ou ses incapacités vont dépendre du reste de l'encadrement que prévoit le projet de loi. Donc, son statut de compagnie à fonds social n'a pas de lien avec les limites qu'elle aura ou qu'elle n'aura pas, en fait, le reste de ce qui a été prévu.

M. Pagé : Elle pourrait donc, M. le Président — avec votre permission — elle pourrait donc, à même titre que, je ne sais pas, moi, là, l'entreprise Jean Coutu... L'entreprise Jean Coutu qui est une entreprise privée, qui décide d'aller acquérir à l'étranger d'autres entreprises, par exemple. Est-ce que ce genre d'entreprise là, que ce soit le souhait ou non, mais est-ce que légalement elle pourrait avoir ces pouvoirs-là, par exemple?

Le Président (M. Merlini) : Me Roy.

M. Roy (Gabriel) : Oui, légalement, la filiale doit agir dans les limites de la mission que l'Assemblée nationale va lui conférer, et sa mission consiste à vendre du cannabis au Québec. Par ailleurs, un article de la loi SAQ, de la Loi sur la Société des alcools du Québec, permet d'acquérir des participations en d'autres personnes morales sur autorisation du gouvernement, mais ce n'est pas... je ne vois pas de quelle façon ça pourrait rentrer dans sa mission. Donc, je veux dire, l'ensemble de ce qu'elle va pouvoir faire, c'est tributaire de sa mission et des restrictions qui sont applicables dans le reste du projet de loi.

M. Pagé : O.K. Disons un autre cas de figure, elle dit, dans sa mission : Moi, je veux mieux contrôler mon approvisionnement. Est-ce qu'elle pourrait faire l'acquisition de production... de producteur? Je veux m'assurer, là, j'ai assez de problèmes avec... ils sont presque tous mal financés, là, on va en avoir le coeur net, moi, je vais l'acheter, mon producteur, je vais assurer ma propre production.

M. Roy (Gabriel) : Le projet de loi prévoit que la filiale ne pourra constituer aucune filiale.

M. Pagé : O.K. C'est vrai que, oui, c'est inscrit plus loin que la filiale ne peut créer une filiale, mais est-ce qu'elle pourrait d'elle-même faire l'acquisition d'un producteur sans créer de filiale?

M. Roy (Gabriel) : Non, pas d'elle-même.

M. Pagé : Elle ne pourrait pas d'elle-même?

M. Roy (Gabriel) : Non, pas d'elle-même.

M. Pagé : O.K. Et on voit ça où?

M. Roy (Gabriel) : Ce n'est pas dans sa mission.

M. Pagé : Bien, c'est parce que, tu sais, quand on dit, justement : Sa mission, là, c'est d'assurer, bon, la qualité du produit, et tout le reste, là, mais, s'il arrivait, justement, qu'elle a un problème d'approvisionnement, et que les produits, souvent, ne sont pas de qualité, et qu'on veut que les producteurs montrent patte blanche, et que là ça fait un an que ça dure, là, puis on voit que ça n'a pas de bon sens, là, puis je dis : Bien, écoutez, là, je vais régler le problème, là, je vais l'acheter, le producteur, c'est nous-mêmes qui allons le financer, et on va être sûrs de la qualité du produit, alors est-ce que, oui ou non, cette chose-là pourrait arriver?

Alors, c'est pour ça, quand je parle de limite, là, il peut y avoir une foule de cas de figure, là, mais... Alors, quand on me dit : Il faut que ça corresponde à sa mission, il pourrait dire : Bien, écoutez, c'est ma mission. Ma mission, là, c'est quoi qu'elle dit, là, hein? On veut justement... Puis, justement, là, hein, la mission, je la rappelle : «La société a également pour mission d'assurer la vente de cannabis dans une perspective de santé et afin d'intégrer les consommateurs au marché licite.» Justement, je ne veux pas que mes producteurs soient des gens qui sont financés par le crime organisé. Alors, ça correspond aussi à sa mission, parce qu'on veut ramener ça tout à fait légal, et être bien financés, et de les maintenir, sans favoriser la consommation de cannabis. Bon.

Alors, je pense qu'il pourrait y avoir, éventuellement... À partir de la mission, il pourrait y avoir une volonté de la filiale de dire... Bien, c'est un cas parmi d'autres que je pourrais donner, mais j'essaie de comprendre jusqu'où ça peut aller, ce genre d'entreprise là.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

(Consultation)

Mme Charlebois : Ce qu'on souhaite faire avec le projet de loi n° 157, M. le Président, là, ce n'est pas de devenir des producteurs, ou acquérir des producteurs, ou faire tout ça, là. Ce qu'on souhaite faire avec le projet de loi n° 157, c'est constituer la Société québécoise du cannabis, et cette société-là a pour but de vendre le cannabis de façon à s'assurer de la santé des gens et ne pas développer un marché à outrance.

Je veux juste dire au député de Labelle, à l'article 23.2, là, s'il va une page plus loin, on le dit explicitement, là : un, acheter du cannabis; deux, exploiter les points de vente; trois, vendre du cannabis; quatre, mandater une personne. Ce n'est pas l'intention du gouvernement du Québec, là, de commencer à semer la graine, faire de la production, acheter des compagnies de... Non, on veut vendre du cannabis. La Société des alcools ne fabrique pas sa boisson, là, puis ce n'est pas là qu'on veut aller, parce qu'on ne veut pas... Ultimement, là, comme le tabac, moins il y en aura, mieux ce sera, mais là on veut ramener les gens du marché illicite. Alors, la volonté du législateur, c'est de vendre le cannabis à des gens qui actuellement l'achètent sur un marché qui n'est pas légal.

Mais on le spécifie au prochain article, ça fait que je nous invite à revenir à 23.1. Je comprends votre préoccupation, mais je pense qu'on pourra avoir des fournisseurs québécois qui seront autorisés et qui auront été vérifiés. Parce qu'il y a des instances qui font ça, là, de vérifier le financement des compagnies, et vous le savez, là, il y a Revenu Québec, il y a l'Autorité des marchés financiers, la GRC, il y a même des institutions internationales qui font ça, là. Ce n'est pas le mandat de la Société québécoise du cannabis de faire ça. Quand on est un gouvernement, on profite des autres instances qui nous amènent à vérifier des choses, puis c'est ce qu'on va faire, mais ce n'est pas le mandat de la... Moi, j'avais un réseau de distribution d'eau de source, là, ma job, ce n'était pas d'embouteiller, acheter les bouteilles, non, non, je la vendais, quand elle arrivait, toute faite. C'est un peu ça qui va arriver avec la Société québécoise du cannabis. Ce n'est pas de disperser... Je ne me suis pas mise à faire de la livraison, là, avec mes camions pour toutes sortes d'autres affaires, je n'ai pas dit : Je vais en acheter d'autres, camions, pour aller faire, tiens, la livraison de courrier en passant. Non, c'était ça, ma mission, vendre... j'avais un réseau de distribution d'eau de source, je me suis spécialisée là-dedans.

Alors là, ce que la Société québécoise du cannabis viendra faire, c'est ce qu'on avait à la mission : vendre du cannabis aux personnes qui sont déjà sur un marché illicite, sans en favoriser une consommation plus grande.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle, pour vous rappeler, il vous reste trois minutes à 23.1.

M. Pagé : O.K. J'en conviens, mais ce n'est pas écrit non plus que cela ne pourrait pas arriver. Parce qu'en fonction de sa mission dont on a décrit tantôt, elle pourrait se référer éventuellement à sa mission en disant : Bien, si je veux mieux contrôler la qualité... Mais c'est un cas de figure, c'est un exemple. Et allons plus loin, parce qu'effectivement, à 23.2, là — on l'a lu — est-ce qu'à quelque part c'est écrit justement «exploiter pour la vente de cannabis au détail»? Puis, en plus, 3°, «vendre du cannabis au moyen d'Internet», est-ce que c'est écrit quelque part «seulement au Québec»? Ce n'est pas écrit nulle part. Alors, avec la vente en ligne, ça voudrait dire que la SQDC pourrait vendre partout à travers le monde.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : M. le Président, est-ce que je peux demander au député de Labelle d'étudier les articles un à la fois, comme il me l'a demandé? C'est vous qui en a fait la demande hier. Là, on est sur 23.1, vous me parlez de 23.2. Moi, je vous ai juste dit...

Une voix : ...

Mme Charlebois : Non, mais, M. le député de Labelle...

M. Pagé : ...

Mme Charlebois : Non, mais, moi, ce n'était pas pour élaborer sur 23.2, c'était pour vous dire : Les sujets dont vous traitez sont aux articles subséquents.

• (11 h 50) •

Le Président (M. Merlini) : Dans cette idée où le projet de loi n° 157 fait du droit nouveau, évidemment, au fur et à mesure qu'on avance, il y a des questions qui se soulèvent tout à fait normalement, et c'est tout à fait normal que les députés veuillent prendre du temps pour soulever un point de vue, comme l'a fait le député de Borduas hier, avec un échange qui était plutôt à caractère légal mais qui a été fort utile. Et les questions que vous soulevez, en partant des articles, ce matin ajoutent à notre réflexion. Par contre, ce que la ministre dit, puis ce n'est pas... En même temps qu'on veut bien faire, il faut prendre le temps d'arriver à ces articles-là. Et, pour arriver à ces articles-là, à un moment donné, il faut commencer aussi à disposer des articles qui sont là.

Et je comprends le point que vous avez soulevé tantôt, quand vous dites : Si on ne fait pas ça comme il se doit, comme il faut, est-ce qu'on laisse passer des choses? Je vous rappelle que, si on adopte un article, peu importe l'article dans le projet de loi, par consentement des membres de la commission, on peut toujours revenir et réouvrir l'article si on désire apporter un changement suite à un éclaircissement qui viendrait plus tard. Alors, on ne ferait pas une erreur de dire : Est-ce que ça va pour 23.1? On peut passer à 23.2. Puis, si on veut revenir à 23.1 plus tard, on reviendra à 23.1, là. Avec le consentement des membres, ça peut se faire. C'est la même chose pour n'importe quel article. On pourrait revenir, réouvrir un article, puis dire : Bien, finalement, suite aux éclaircissements apportés par ou les juristes ou apportés par des informations que les oppositions apportent, on rouvre l'article et on adopte ce qui serait le mieux possible pour avoir le meilleur projet de loi possible, pour éviter ce que vous avez soulevé avec juste raison, ce que vous avez soulevé avec les articles que vous avez présentés ce matin.

Ça fait que j'entends ce que la ministre dit et j'entends ce que vous dites en même temps, mais, à un moment donné, il faut arriver à dire : O.K., est-ce qu'on arrive à un point où ça fait le tour de 23.1 et on va à 23.2? On peut revenir, là. Il n'y a pas de problème. Il n'y a pas de problème, mais, non plus, il ne faudrait pas... Je laisse aller la discussion parce qu'elle est très pertinente. Mais, à un moment donné, il ne faut pas trop s'éloigner de ce que l'article qui est à l'étude présentement... Et le député de Borduas l'a bien dit tantôt, là. On est à établir la coquille, là. Alors, allons là-dessus, et gardez vos questions... Et je le sais, qu'il va en avoir d'autres, parce qu'au fur et à mesure qu'on va lire, on va avancer, il va en avoir d'autres. J'en conviens très bien. Et la ministre le dit elle-même, elle est très disposée, elle vous l'a dit, et vous l'avez accepté en retirant votre proposition d'amendement hier, qu'elle était très disposée à en discuter à l'article approprié. Je pense que c'était 23.38 ou 23.36, là, dans ce coin-là... mais d'arriver à cette discussion-là à ce moment-là. Sinon, si on fait tout ça là... Oui, on peut faire le temps qui nous est imparti. On peut faire les 20 minutes nécessaires, sauf qu'on va avoir, entre guillemets, brûlé des bonnes questions qui viendraient plus tard, suite aux autres articles qu'on a étudiés.

Alors, voilà la réflexion que je vous offre. M. le député de Labelle.

M. Pagé : En fait, je vous rassure sur une chose, c'est que, les questions qu'on pose maintenant, on ne les posera pas plus tard. Alors, je pense que ça nous permet de mieux comprendre où nous sommes présentement et vers quoi on s'en va.

Et, quand la ministre, de très bonne foi, me répond en faisant référence à l'article suivant, c'est justement pour expliquer... et, quand elle fait référence à l'article 23.2, ça permet de mieux comprendre ce qui s'en vient, mais, quand sa référence ne répond pas à ma question... ou plutôt soulève une nouvelle question, c'est tout à fait normal que je reviens, parce que... Et là il ne faudrait pas qu'on me reproche de revenir... Bien non, mais c'est ça, parce qu'on me dit : Est-ce qu'on peut revenir à 23.1? Bien oui, mais c'est parce que, pour répondre à la question à 23.1, on a fait référence à 23.2, puis, dans la référence, quand on essaie d'expliquer pour répondre à la question, justement, ça ne répond pas et ça ne me rassure pas. Alors, c'est la raison pour laquelle je reviens.

Alors, bon, je sais que notre juriste a fait une certaine recherche. C'est ce que j'avais compris, parce que tantôt je lui demandais plus clairement, là, qu'ils répondent à la question. Peut-être que, là, il a une réponse à nous fournir.

Mme Charlebois : ...

M. Pagé : Pardon?

Mme Charlebois : ...

Le Président (M. Merlini) : Dans le micro, s'il vous plaît, Mme la ministre. Je vois que le micro n'est pas allumé.

Mme Charlebois : Je dis : Non, parce que les recherches sont faites d'un autre ordre et non pas sur la question que vous posez. Et je vous dis que la mission a déjà été constituée. On l'a dit à 23.1. Alors, ce n'est pas... les recherches qu'ils sont en train de faire, c'est d'un autre niveau pour prévenir ce qui s'en viendra à l'autre après.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre.

Mme Charlebois : Que vous m'avez signalé.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Labelle, il vous reste quelques instants. Sur 23.1.

M. Pagé : Non, c'est bon.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée de Repentigny, vous avez levé la main tantôt. Sur 23.1.

Mme Lavallée : Oui, 23.1. Puis, suite à l'intervention de mon collègue de Labelle... Parce que, oui, on prend beaucoup de temps à poser des questions, mais, à chaque pas qu'on fait, qu'on avance, puis à chaque fois qu'on adopte quelque chose, c'est toujours la crainte de ne pas être capable de revenir, parce que ça a un impact majeur. Puis ce n'est pas la première fois que la ministre dit qu'on veut ramener les clients dans le marché licite. Puis c'est ce qu'on veut. Une des inquiétudes que j'ai, avec tous les articles que notre collègue nous a montrés — puis je les ai lus déjà, là, on en prend connaissance — c'est de faire affaire avec des entreprises qui viennent du milieu illicite et qui sont en train de devenir licites. Et là j'ai bien lu que la SAQ commençait à signer des ententes avec des compagnies. Ma crainte, c'est qu'on ne fasse pas les vérifications nécessaires. On le sait, qu'il y a des compagnies qui ont du financement qui viennent effectivement... qu'on n'est pas capables d'identifier, et c'est ma crainte qu'on rende licites des gens qu'on ne veut pas avoir dans ce domaine-là.

Donc, je pense... Puis je suis certaine que l'ensemble des parlementaires, puis je suis certaine que Mme la ministre a cette même préoccupation-là, de dire : On sort nos jeunes de ce milieu illicite là, mais jamais il ne faudra encourager ces gens-là, qui peuvent, par des moyens détournés, s'en venir dans le milieu licite. Et il faut être très vigilant. Puis je ne sais pas si les juristes derrière vous ont cette préoccupation-là puis sont en train de réfléchir à ça. J'espère, parce que c'est ça qu'on ne veut pas et c'est vraiment ma crainte. Puis effectivement, quand je vois qu'il y a des fonds qui viennent de paradis fiscaux, qu'on n'est pas capables d'avoir le nom des actionnaires administrateurs, moi, ça m'inquiète énormément.

L'autre chose qui m'inquiète aussi, c'est... Au niveau de la mission, bon, je comprends qu'on ne peut pas... il y a des choses qu'on ne peut pas mettre. Mais on est au Québec, on doit avoir une fierté nationale, et il faut encourager notre monde. Puis ça aussi, c'est une autre des mes préoccupations. Puis je ne voudrais pas laisser ce choix-là entre les mains de gens qui vont gérer la SQDC. Je souhaiterais que nous décidions qu'est-ce qu'ils vont devoir faire puis quelle est la ligne qu'on veut leur donner. Donc, quand c'est inscrit dans la loi, on s'assure que ces gens-là, quand ils vont prendre des décisions... parce qu'on va leur donner de l'autonomie, mais qu'ils devront toujours avoir cette réflexion-là et ce souci-là de faire affaire avec des entreprises de chez nous, pour faire travailler notre monde, parce qu'on a besoin de ces jobs-là, on a besoin d'avoir ces impôts-là pour aussi aider les gens en besoin. Donc, il faut avoir de l'impôt qui se paie ici.

Donc, c'est mes deux grosses préoccupations. Puis c'est sûr que ça revient, ça revient à chaque article qu'on fait parce que c'est comme si on n'avait pas trop d'assurance, on avance, mais il y a toujours un malaise. Et j'ai ces deux malaises-là, c'est vraiment ces deux malaises-là, puis j'espère que les gens derrière qui sont les juristes et qui entendent notre message sont en train de réfléchir à comment on peut faire bien les choses dans le meilleur intérêt de la population du Québec. Et je suis assurée que tout le monde autour de la table, c'est ça. Ce n'est pas de la partisanerie, mais c'est des soucis de protection et c'est des soucis qu'on encourage notre monde ici.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la députée de Repentigny. M. le député de Borduas, j'ai vu, vous avez levé la main tantôt.

M. Jolin-Barrette : Oui. Je voulais savoir : Au niveau de la structure, là, comme quand il y a des lettres d'intention qui ont été faites par la SAQ, est-ce que les entreprises avec lesquelles la Société des alcools passe des contrats ou éventuellement la filiale sont assujetties au processus de vérification de l'AMF pour les contrats publics?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Toutes les compagnies qui font affaire avec des entreprises du gouvernement et le gouvernement sont assujetties à des vérifications. Vous êtes juriste, vous le savez. Revenu Québec a les spécialistes pour ça. Ce n'est pas la SQDC qui va faire ça, là, ce n'est pas son mandat. Mais elle n'aura pas ces spécialistes-là. Revenu Québec peut faire ça. L'Autorité des marchés financiers peut faire ça, la GRC, les institutions internationales. Les compagnies sont formées, de production, et approuvées par le fédéral. Toutes ces vérifications-là doivent être faites là-bas et ici par les instances appropriées.

• (12 heures) •

M. Jolin-Barrette : Je suis d'accord. Ce que je demande à la ministre, là, dans le fond... Quand une entreprise contracte avec le gouvernement, généralement il y a le processus qui passe par l'AMF, le certificat d'autorisation. Pour les sociétés d'État, comme la SAQ, quand elle fait affaire avec un fournisseur, ou comme la SQDC éventuellement va faire affaire avec des fournisseurs, c'est elle qui va contracter ultimement, est-ce que c'est validé par l'autorisation de l'AMF au niveau de la probité?

Parce que j'ai bien entendu aujourd'hui à la période des questions le ministre des Finances qui dit : Bien, il y a des organisations internationales qui sont là et qui vérifient le blanchiment d'argent, il y a des organisations canadiennes qui vérifient le blanchiment d'argent. Mais, de connaissance générale, là, puis la ministre lit les journaux comme moi, là, au niveau de la structure administrative des compagnies, là, qui sont dans le marché, bien, à tous les jours on voit qu'il y a plusieurs compagnies qui deviennent financées par des sociétés qui proviennent de sociétés offshores ou des paradis fiscaux. Je suis convaincu que la ministre, comme moi, elle ne souhaite pas que le capital associé à ça, ça soit du capital qui provienne des paradis fiscaux, puis avec tout le tralala. Ça, je pense qu'on est d'accord là-dessus.

Ma question, c'est... Il y a des normes, là, mais ça n'a pas empêché ces compagnies-là d'être incorporées en vertu des lois du Canada ou en vertu des lois du Québec puis de faire leur ronde de financement avec des capitaux qui proviennent de l'étranger, comme ça, de ces paradis fiscaux là. Oui...

Mme Charlebois : ...de compagnies très québécoises, d'ailleurs, qui investissent là-dedans, là, pour ne pas les nommer : Québecor, c'en est une. Si je ne me trompe pas, même Jean Coutu a investi là-dedans, là. Il faut faire attention à nos propos, là, ce n'est pas illégal, hein? Attention, là!

M. Jolin-Barrette : Mme la ministre, vous savez très bien ce que je suis en train de dire.

Mme Charlebois : Oui, je le sais.

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est ça. Mais vous savez très bien aussi que je ne critique pas le fait que... le fait de se partir une compagnie de cannabis, qui est désormais licite. C'est des compagnies qui vendaient du cannabis médicinal. L'apport en capitaux, c'est un véhicule corporatif qui est légal. La source du financement, elle est préoccupante, puis je sais que ça vous préoccupe aussi. Pour les compagnies québécoises qui investissent ou les compagnies canadiennes qui investissent, là, on peut faire la traçabilité de l'argent, il n'y a pas de problème, puis vous en conviendrez avec moi qu'il n'y a pas de problème.

Ma problématique est lorsque l'argent vient des paradis fiscaux pour financer ça, parce qu'on ne sait pas d'où l'argent vient, où l'argent arrive puis qui c'est qui a mis de l'argent là-dedans. La traçabilité de l'argent n'est pas là. Là, ce matin, à la période des questions, votre collègue le ministre des Finances nous a dit : Il y a des organismes internationaux, canadiens, québécois. J'en suis conscient. Ce qu'on constate, là, de connaissance générale, c'est qu'il semble qu'il y a certaines compagnies qui sont dans l'industrie du cannabis qui ont été financées avec ce type de capitaux. Ça soulève des problématiques, puis là-dessus vous êtes d'accord avec moi.

Moi, ma question, c'est : À partir du moment, là, à partir du moment où la SQDC, là...

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : ...à partir du moment où la SQDC va contracter avec des producteurs, est-ce que l'AMF va valider le financement de la compagnie ou non? Parce qu'exemple, pour donner des contrats actuellement entre le MTQ, le gouvernement du Québec, pour fournir, il faut qu'il passe à travers le filtre de l'AMF. C'est de même, là, depuis 2012, là. D'ailleurs, c'était une bonne mesure...

Une voix : ...du Parti québécois.

M. Jolin-Barrette : Appuyée, je crois, par la CAQ. Et donc, pour s'assurer que l'entité corporative qui fait affaire avec l'État ou une société d'État ait la probité requise pour le faire, moi, ce que je demande à la ministre, c'est : Est-ce qu'en vertu du projet de loi... Je sais que ce n'est pas indiqué, parce que je l'ai lu. Mais est-ce que ces contrats-là d'approvisionnement vont être soumis à cette autorisation de l'AMF là?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Non, ce n'est pas un automatisme, mais l'AMF pourrait le faire d'elle-même, le Revenu Québec, mais ils sont examinés par le gouvernement fédéral.

Puis faites attention quand vous me parlez de paradis fiscaux, là, il y a peut-être des gens assez proches de vous autres qui connaît des gens qui sont déjà des investisseurs dans des paradis fiscaux. Tout le monde sait ça. Mais là, dans la tête du public, là, il y a des choses qui se disent et qui ne sont pas claires. Moi, je ne suis pas en train de vanter ça, là. Ce que je dis, c'est que ça peut être étonnant de faire la liste des noms d'entreprises québécoises et de grands Québécois qui ont investi dans des paradis fiscaux, qui n'était pas illégal.

M. Jolin-Barrette : ...ça serait justifié...

Mme Charlebois : Non, mais je vous entends, là. Est-ce que c'est justifié, est-ce que c'est moral? Ce n'est pas le but de l'article 23.1 puis ce n'est pas le but du projet de loi sur la Société québécoise du cannabis. Ce qu'on est en train de faire, c'est d'instituer une compagnie qui va vendre du cannabis à notre population. Dites-vous une affaire, là, si on ne fait pas la Société québécoise du cannabis, là, bien, ça va se vendre directement, puis ça se fait déjà, là, pour le cannabis thérapeutique, et vous le savez.

M. Jolin-Barrette : M. le Président...

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Borduas, à vous la parole.

M. Jolin-Barrette : ...la ministre, là, le sait très bien, que je souhaite faire avancer son projet de loi. Mais à 23.1, quand on crée la structure juridique qui va donner des contrats d'approvisionnement, elle en est pleinement consciente, de dire : Est-ce qu'on veut que les compagnies avec qui la SQDC va faire affaire... Est-ce qu'on veut qu'elle fasse affaire avec des entreprises qui ont un financement corporatif propre? C'est exactement ça, la question.

On a décidé que, pour les contrats gouvernementaux, ça prenait l'autorisation de l'AMF, parce que c'est de l'argent public. La SQDC, ça va être de l'argent public, ça va être l'argent des Québécois. Ce que je lui demande aujourd'hui, c'est : Est-ce qu'on peut s'assurer que ça passe à travers ces autorisations-là? Puis, à ce jour, ce qu'on constate, là, c'est que les autorisations fédérales, là... Elle me dit : Le fédéral checke ça. Mais il ne checke pas ça tant que ça si on se retrouve avec des compagnies qui sont financées avec des paradis fiscaux. Puis le fait de placer son argent dans les paradis fiscaux pour ne pas avoir à payer ses gains imposables au Québec, je ne pense pas que c'est moral, puis, de l'évitement fiscal, même si c'est légal, je ne suis pas sûr qu'on doit le favoriser puis, comme parlementaire, je vais toujours le dénoncer.

Alors là, je dis à la ministre... C'est simple, là, ma question, c'est : Est-ce qu'on peut l'insérer dans le projet de loi, que les contrats d'approvisionnement de la SQDC soient assujettis au contrôle de l'AMF? Parce que, là, la ministre me dit : Bien, Revenu Québec puis l'AMF peuvent checker d'eux-mêmes. Oui, mais ils en ont bien, des affaires à checker, puis, si ce n'est pas une obligation, ça se peut qu'ils ne checkent pas. Ça fait que moi, je dis à la ministre : Comment est-ce qu'on peut attacher tout ça?

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Borduas, merci, votre temps est écoulé sur l'article 23.1. Si Mme la ministre voudrait donner une réponse?

Mme Charlebois : Bien, première des choses, là, ramenons-nous à la base, là, on va faire affaire avec des producteurs qui sont autorisés par le gouvernement fédéral. Alors, son plaidoyer pourra être fait là-bas, vous pourrez faire comme la transparlementaire qu'on a depuis quelques jours. Nous, on fait affaire avec des gens qui sont autorisés, qui ont été validés, qui ont été vérifiés par le gouvernement fédéral, ça, c'est la règle de base.

Deuxième élément, je veux revenir sur les propos de votre collègue à côté de vous, là, qui est inquiète depuis le début, quand on parle du cannabis, c'est comme si ça n'existait pas. Je vous entends vous inquiéter, je vous entends vous soucier des entreprises chez nous. Je vous dis et répète que ce sera très, très, très — on va en mettre un troisième — majoritairement des producteurs québécois. À ce jour, il n'y en a pas tant que ça. On va faire une période de transition, on commence. Le plus grand producteur d'une compagnie québécoise... de ce que je comprends, vous ne voulez pas que la Société québécoise du cannabis achète d'eux autres, donc on achètera de d'autres compagnies ontariennes, c'est ça que vous nous suggérez, alors...

M. Jolin-Barrette : ...

Mme Charlebois : Non, mais j'y vais...

M. Jolin-Barrette : ...question de règlement.

Mme Charlebois : Je n'ai pas prêté d'intentions, je...

Le Président (M. Merlini) : Excusez-moi, Mme la ministre. Mme la ministre, j'ai une question de règlement. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : La ministre prête des intentions à ma collègue, le discours de ma collègue était très clair, il n'y avait pas d'ambiguïté. La ministre, là, porte des propos à ma collègue qui sont totalement infondés et elle le sait. Alors, est-ce qu'on peut rester au-dessus de ça, là, M. le Président?

Le Président (M. Merlini) : Non, malheureusement, ce n'est pas un appel au règlement de cette façon-là. Mme la ministre, si vous voulez continuer.

• (12 h 10) •

Mme Charlebois : M. le Président, je n'ai prêté aucune intention à la députée de Repentigny, seulement, moi, je me fais dire des choses, il faut être capable de les entendre dans l'autre sens.

Alors, ce que je dis, c'est que les compagnies sont vérifiées par le gouvernement fédéral. Ils ont des activités dans des pays qui sont purement autorisés. Ce n'est pas à nous de vérifier ça. Le mandat de la Société québécoise du cannabis, ce n'est pas de faire de la vérification de compagnies, d'autorités, il y a d'autres instances pour faire tout ça. Et, quand le financement est légal, ils sont autorisés par le gouvernement du Canada. Nous, à partir de là, quand on a un producteur autorisé, on va favoriser d'abord les producteurs québécois, à moins que les oppositions nous disent : Non, prenez-les pas, parce que nous, on considère que. C'est-u plus clair, ça?

Je pense qu'ils me demandent de favoriser les compagnies québécoises, c'est ce qu'on va faire. Quand je dis qu'à ce jour-ci on n'a pas suffisamment de producteurs québécois, qu'on va en avoir d'autres, M. le Président, il y a trois ans avant la révision de la loi, on va s'activer. À mesure qu'on va implanter les bureaux de vente, le site Internet, augmenter la cadence, bien, M. le Président, on va favoriser les achats de produits québécois, mais quand on va avoir suffisamment de producteurs québécois. Ça va nous faire plaisir, c'est ce qu'on souhaite faire, M. le Président.

Pour l'instant, il y a des lettres d'intention, ce n'est pas des contrats, ce n'est pas des engagements, ce n'est pas des achats, il n'y a rien de tout ça qui est fait. Si on ne faisait pas ça, ils seraient les premiers à me dire : Vous ne vous préparez pas, on ne sera pas prêts, c'est bien effrayant, vous ne faites rien. Là, on fait quelque chose, ce n'est encore pas bon. Tu sais, à un moment donné, M. le Président, là, on prend nos responsabilités. On a demandé à la SAQ : Voulez-vous commencer à mettre en place ce que vous pouvez mettre en place, moyennant que vous allez respecter les intentions du législateur? Mais préparez-vous, de grâce! On ne leur a pas demandé de signer des contrats, ils ne peuvent pas le faire, mais ils ont des lettres d'intention pour dire : Nous autres, on va avoir une loi éventuellement, que les législateurs sont en train d'étudier, et, quand il sera le moment, bien, ils vont avoir déjà établi des contacts avec certaines personnes, entre autres, dans l'approvisionnement.

Alors, M. le Président, 23.1, là, c'est assez simple, là, on ne parle nullement de ce qu'on est en train de discuter. Je vais vous relire l'article pour le bénéfice de la population qui nous écoute :

«23.1. Est constituée la Société québécoise du cannabis, une compagnie à fonds social.

«La Société québécoise du cannabis est une filiale de la société — ça, c'est une filiale de la SAQ.

«Elle est désignée "la filiale" dans la présente section et peut également être désignée sous le sigle "SQC."» Puis on a voté un amendement qui va dire «SQDC.»

Et cet article-là avait pour but de constituer une compagnie à fonds social qui va s'appeler la Société québécoise du cannabis. Toutes les discussions qu'on entretient sont bonnes, mais ils vont être encore meilleurs quand on va arriver dans les articles qui les concernent.

Moi, ce que je demande... Puis je ne veux pas qu'on arrête la discussion, je ne suis pas là-dedans, M. le Président. Puis, s'il faut être assis jusqu'à la fin juin, ça va me faire un grand plaisir. Puis, si ce n'est pas adopté, je vais être désolée de dire aux Québécois que ça va être la loi fédérale qui va se mettre en vigueur quand ils auront légalisé. Mais je ne pense pas que, mes collègues des oppositions, c'est là qu'ils veulent aller, je ne pense pas. Puis je ne veux pas leur prêter d'intentions, mais ce que je dis, c'est que, là, on est à 23.1, finissons les discussions sur 23.1. Je comprends leurs inquiétudes, particulièrement celles de la députée de Repentigny, qui est inquiète depuis le début, d'ailleurs.

Alors, moi, ce que je dis, M. le Président : Votons sur 23.1. Ayons les discussions appropriées. Je ne dis pas que leur discussion n'est pas intéressante, elle n'est juste pas à la bonne place. Moi, je n'ai pas d'autre commentaire à émettre à ce moment-ci.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Labelle, il vous reste une minute.

M. Pagé : Bien, en fait, les raisons pour lesquelles on en discute ici, c'est qu'on est en train de justement créer la filiale pour ce qui s'en vient par après. On a tellement échangé en amont qu'on a déjà toute une série d'amendements que le gouvernement nous a proposés. Pourquoi? Parce qu'on a eu des échanges, on a entendu des gens, on a échangé entre nous, et le gouvernement s'est rendu compte : Woups! Il fallait le modifier puis le bonifier, le projet de loi. Bien, bravo!

Et ce que nous disons, c'est que, dans les amendements qui sont proposés, on n'est pas encore rassurés par rapport au financement des entreprises avec qui on va faire affaire. Et pourtant la loi n° 1, adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale en décembre 2012, là — vous avez voté pour ça — disait que, quand l'État fait affaire avec des entreprises privées pour donner des contrats, hein, elle doit être clean au maximum, et ça doit passer par l'AMF. Mais là, pour ça, pour justement acheter du pot, ça, ce ne sera pas grave, on va laisser... si c'est autorisé par le fédéral, on ne regardera pas comment ils sont financés. Alors, il me semble qu'il y a quelque chose de grave là-dedans, il faut qu'on remédie à cela plus tard dans le projet de loi.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Labelle. J'ai vu Mme la députée de Repentigny, avant que j'aille au député de Saint-Jérôme. Vous voulez prendre la parole, Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Bien, tout ce que je rajouterais, c'est que je ne suis pas la seule à être inquiète. Donc, quand on me cible comme étant celle qui est inquiète depuis le début, je pense que la preuve est que, depuis le début qu'on travaille, nous sommes tous inquiets, et je serais curieuse de voir, l'autre bord, s'il n'y a pas des gens qui se posent des questions actuellement. C'est tout.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la députée de Repentigny. M. le député de Saint-Jérôme.

Mme Charlebois : ...

Le Président (M. Merlini) : Non, non, du tout, du tout, Mme la ministre. M. le député de Saint-Jérôme.

M. Bourcier : Oui, M. le Président. Bien, écoutez, moi, j'appelle ça le malaise fédéral. C'est un malaise qui est créé par le gouvernement fédéral au départ, il nous met tous dans le trouble, je vais le redire souvent. Pour les gens qui nous écoutent, là, il faut leur rappeler que c'est une imposition de force, du gouvernement fédéral, du projet de loi C-45 sur le cannabis. On n'a pas le choix, là, il faut se débrouiller avec ça. Puis ce n'est pas payant socialement, culturellement. C'est la preuve que faire partie du Canada, c'est un paquet de problèmes, je vais le répéter.

Mais, en plus de s'attribuer la part des profits de 25 % à ne rien faire à Ottawa — c'est un peu comme la mafia, ils sont assis, ils ne font strictement rien — bien là, le Canada nous envoie 100 % des problèmes. C'est le malaise fédéral. Bien, le malaise fédéral, moi, je le partage avec la députée de Repentigny. Moi, je pense qu'à partir des faits évoqués à la base... Justin Trudeau, il a fait cette loi-là pour évacuer le crime organisé de la consommation, de la distribution du cannabis, ça créait plein de problèmes. Bien là, on les a, les problèmes, là. Mais on est inquiets, comme notre formation politique, comme les gens autour de la table, puis j'imagine que les gens en face de nous aussi sont inquiets, M. le Président, l'inquiétude que peut-être qu'une filiale de la SQC soit infiltrée par les mêmes gens du crime organisé qu'on a évacué au départ ou que Justin essaie d'évacuer. Il est dans le trouble actuellement, là, peut-être qu'il y en a... On parle des paradis fiscaux, évidemment, qui, peut-être, seraient évoqués comme certains investisseurs là-dedans, mais il ne faut pas que la population pense que la SQC s'approvisionne ou s'associe à ces mêmes producteurs liés directement ou indirectement au milieu illicite. C'est important, c'est notre travail ici. Il faut s'en assurer hors de tout doute. C'est pourquoi on est là.

Alors, Trudeau, il est dans le trouble, c'est certain. Mais je pense que si... comme Mme la ministre semblait nous dire tantôt que c'est canadien, puis, pour certaines choses, c'est hors de nos juridictions, ce qu'on peut comprendre, parce qu'il y a des choses qu'on ne contrôle pas dans cette loi-là, mais c'est une belle raison de ne pas faire partie du Canada.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Saint-Jérôme. Je vais faire écho aux propos du député de Labelle plus tôt. Pour le respect de nos fonctions parlementaires, le député de Labelle a fait référence au fait que le premier ministre du Canada a un titre et il a un nom, effectivement, et j'apprécierais qu'on désigne les autres parlementaires de la même façon qu'on utilise une désignation ici et de dire : Le premier ministre Trudeau ou le gouvernement Trudeau, lorsqu'on fait référence au gouvernement fédéral, si ce n'est que par respect des fonctions que nous occupons tous et que la population nous donne le privilège d'occuper. Mme la ministre.

Une voix : ...nouveau parlementaire.

Le Président (M. Merlini) : Oui! Oui oui. Ça va. Il n'y a pas de problème. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, je veux juste, en contrepartie, dire au député qu'actuellement c'est totalement le crime organisé qui fait le marché. Est-ce qu'il en est conscient? J'espère que oui. Est-ce qu'il préfère, comme il dit, qu'on ne vive pas le malaise libéral qui appelle... le malaise libéral, le malaise fédéral...

Des voix : ...

Mme Charlebois : Parce qu'il n'y a pas de malaise libéral, je suis fière d'être libérale, oui, oui.

Des voix : ...

Le Président (M. Merlini) : S'il vous plaît, on garde le décorum. On garde le décorum, s'il vous plaît.

Mme Charlebois : Non, non, je suis très, très fière d'être libérale et fière d'être fédéraliste, en passant.

Alors, est-ce qu'il préfère qu'on continue de se mettre la tête dans le sable, hein?

Des voix : ...

Mme Charlebois : Oui, c'est un beau lapsus pour vous autres, là, profitez-en, mais savez-vous quoi? Je suis très à l'aise d'être libérale, je le répète, et fière d'être libérale.

Des voix : ...

Le Président (M. Merlini) : Gardons le décorum, s'il vous plaît! Mme la ministre a la parole.

Mme Charlebois : Alors, est-ce qu'il préfère qu'on les laisse, en ce moment, le crime organisé, continuer, aux yeux de tout le monde, à vendre du cannabis de façon illégale? C'est-u ça que j'entends de son propos? Je comprends qu'il n'est pas à l'aise avec le gouvernement fédéral, sa formation politique est séparatiste. Mais là on est en train d'étudier un projet de loi qui vise à constituer la Société québécoise du cannabis. On n'est pas en train de faire un plaidoyer sur «faisons un troisième, quatrième, cinquième référendum». On est en train de parler de légalisation, oui, faite par le fédéral — d'ailleurs, on a des discussions avec eux — qui va nous donner les moyens d'appliquer cette légalisation-là. Il y a des choses à améliorer. On est en constante discussion, j'en conviens. Ils ont bonifié leur financement. Il y aura d'autres choses qu'on aura à améliorer avec eux, mais ce n'est certainement pas en faisant la chaise vide qu'on va finir par avancer et prendre notre part au Québec.

Alors, moi, ce que je souhaite, c'est qu'on vote 23.1, qu'on puisse continuer à étudier le projet de loi. J'entends toutes les inquiétudes de tout le monde et je comprends qu'il y a des gens qui ont des inquiétudes tout le temps, mais, bon, à un moment donné, ils vont finir par être sécures dans la vie, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?

Le Président (M. Merlini) : Est-ce que j'ai d'autres interventions? M. le député de Saint-Jérôme.

M. Bourcier : Oui, je vais être très bref. Mme la ministre, loin de moi de...

Le Président (M. Merlini) : Toujours sur 23.1, bien sûr.

M. Bourcier : Toujours. Ah! absolument, absolument! Bien, juste terminer en disant que loin de moi l'idée de ne rien faire. Au contraire, on est pognés pour le faire. Alors, tant qu'à le faire, on va le faire comme il faut et en manifestant nos inquiétudes mais aussi nos préoccupations à l'égard de la population, et c'est ça qui est important, c'est pour ça qu'on est là, c'est notre rôle de législateur de mener les citoyens avec des projets de loi qui sont intéressants et très bien faits.

Le Président (M. Auger) : Merci, M. le député. Donc, d'autres interventions sur 23.1? M. le député de Borduas, en vous souhaitant un beau bonjour. Ah! vous n'avez plus de temps, désolé, M. le député de Borduas. Donc, est-ce qu'il y aurait quelqu'un d'autre, par contre, sur notre 23.1? Plus personne n'a de temps? Oui, M. le député de Saint-Jérôme.

M. Bourcier : Mais je peux lui léguer, non?

Le Président (M. Auger) : Non.

M. Bourcier : Ah!

Le Président (M. Auger) : Non.

Une voix : ...s'il est nouveau.

M. Bourcier : Écoutez... Bien oui.

Le Président (M. Auger) : Oui, très nouveau.

M. Bourcier : On est en droit nouveau, hein? Alors, non, bien, j'ai terminé, moi.

Le Président (M. Auger) : Ça va?

M. Bourcier : Oui.

Le Président (M. Auger) : Pas d'interventions sur 23.1? 23.2. Mme la ministre.

Une voix : ...23.1?

Le Président (M. Auger) : On ne les adopte pas, qu'on me dit, là. Je viens d'arriver, mais on me dit qu'on n'adopte pas. À la fin complètement, donc on...

Mme Charlebois : Oui, mais on ne faisait pas...

Des voix : ...

Mme Charlebois : ...va se faire à la fin, là.

• (12 h 20) •

Le Président (M. Auger) : Excusez-moi. Ce qu'on me dit, c'est qu'à la toute fin nous allons adopter l'article 5 dans son entièreté. Là, pour l'instant, article par article. On discute de chacun des articles et, à la toute fin, on va adopter 5.

Donc là, la discussion sur 23.1 serait terminée. On irait avec l'article 23.2 introduit par l'article 5. Bien là, je me fie à ce qu'on me dit, là. Moi, j'arrive, là, en remplacement.

Une voix : ...

Le Président (M. Auger) : Ce n'est pas nécessaire d'adopter les articles introduits. Ce qui est important, c'est d'adopter l'article 5 du projet de loi, qui introduit la série des articles 23.1, etc. Ça va?

Mme Charlebois : Ça veut dire que ça fait longtemps qu'on aurait pu passer à 23.2.

Le Président (M. Auger) : Bien, oui.

Mme Charlebois : J'ai un malaise, moi, mais...

Le Président (M. Auger) : Bien, écoutez, là, moi, là, j'arrive. Vous allez comprendre que moi, j'arrive.

Mme Charlebois : Je ne sais pas vous autres, là...

Le Président (M. Auger) : Et on me dit que le déroulement était ainsi fait. Ça a été débuté comme ça.

Une voix : ...

Le Président (M. Auger) : C'est toujours un plaisir. Oui, M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Juste pour qu'on comprenne bien, là, on avait convenu à l'ouverture des travaux que, dans le fond, on avait 20 minutes par paragraphe, alinéa, tout ça. Et donc, à 23.1, on a 20 minutes, 23.2, 23.3...

Le Président (M. Auger) : Exactement. C'est en plein ça. Mais, pour l'adoption, c'est automatique, à 23.1, c'est à la toute fin. Lorsqu'on aura passé au travers de 23.1, 23.2, 23.3, on va adopter 5. Ça va?

M. Pagé : Oui, ça va. Mais il faut bien comprendre qu'à partir du moment où c'est de cette façon ça veut dire qu'en tout temps on peut revenir sur l'article 23.1, parce qu'il n'aura pas été adopté.

Le Président (M. Auger) : S'il reste du temps. S'il vous reste du temps.

M. Pagé : Oui, oui, oui.

Le Président (M. Auger) : Comme là, vous avez pris votre temps à 23.1, vous ne pourriez pas revenir à 23.1. Vous comprenez? Est-ce que c'est... Bien, c'est clair pour tout le monde? Moi, j'arrive, là. Je vous le dis.

M. Pagé : Oui, oui.

Le Président (M. Auger) : J'arrive. On a commencé comme ça. Moi, je poursuis.

M. Pagé : Oui, s'il reste du temps, j'en conviens. Justement, je veux revenir sur 23.1 et déposer un amendement, aussitôt que je dépose un amendement, tout le monde dispose de 20 minutes.

Le Président (M. Auger) : Il aurait fallu que vous le fassiez...

M. Pagé : Pardon?

Le Président (M. Auger) : ...avant que vous n'ayez plus de temps.

M. Pagé : ...qu'on peut déposer un amendement, c'est vrai. J'en conviens.

Le Président (M. Auger) : Oui. Avant qu'il ne vous reste plus de temps de votre 20 minutes pour chacun des articles.

M. Pagé : Oui. Mais mon collègue a du temps.

Le Président (M. Auger) : Votre collègue a encore du temps. Il pourrait éventuellement en déposer un.

Des voix : ...

Le Président (M. Auger) : Je peux suspendre une minute pour que tout le monde puisse prendre... Oui. Je vais suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 23)

(Reprise à 12 h 25)

Le Président (M. Auger) : ...nous allons reprendre nos travaux, Mme la ministre, avec l'article 23.2 introduit par l'article 5 du projet de loi. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, à 23.2, M. le Président :

«La filiale a pour objet de réaliser la mission de la société portant sur la vente du cannabis. À cette fin, elle peut notamment :

«1° acheter du cannabis produit à des fins commerciales par un producteur de cannabis qui possède les qualités et satisfait aux conditions déterminées par un règlement du gouvernement pris en application du premier alinéa de l'article 19 de la Loi encadrant le cannabis (et ici on indiquera l'année et le numéro de chapitre de la présente loi ainsi que le numéro de l'article de cette loi qui édicte la Loi encadrant le cannabis — ce qu'on n'a pas en ce moment);

«2° exploiter des points de vente de cannabis au détail;

«3° vendre du cannabis au moyen d'Internet; et

«4° mandater une personne pour entreposer et transporter le cannabis qu'elle vend.»

Alors, le premier alinéa de 23.2, M. le Président, de la Loi sur la Société des alcools du Québec prévoit que le but de la Société québécoise du cannabis est de réaliser la mission de la Société des alcools, qu'on a modifiée en début de projet de loi, portant sur la vente du cannabis. Il prévoit aussi les pouvoirs qui lui sont conférés à cette fin.

Alors, le deuxième alinéa de l'article 23.2 habilite le ministre des Finances à établir les paramètres en fonction desquels la Société québécoise du cannabis devra déterminer le prix de vente du cannabis.

M. Jolin-Barrette : M. le Président.

Le Président (M. Auger) : Oui, M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Un point, juste avant mon collègue. La ministre, lorsqu'elle a lu l'article, là, elle a lu jusqu'au paragraphe 4°. Dans le cahier, c'est ce que j'ai. Par contre, dans le projet de loi qui a été déposé à l'Assemblée nationale, il manque des éléments. Ça fait que ce qui est... Il ne faudrait pas se fier juste au cahier, il faudrait se fier au projet de loi qui a été déposé.

Mme Charlebois : On va suspendre deux secondes, pour qu'on puisse régulariser cette chose-là.

Le Président (M. Auger) : Je vais suspendre les travaux quelques instants... Woups! Juste un instant.

M. Jolin-Barrette : Au paragraphe 4°, la ministre a utilisé le terme «mandater», alors que, dans le projet de loi, c'est écrit «autoriser».

Le Président (M. Auger) : Nous allons faire les vérifications qui s'imposent après une courte pause. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 27)

(Reprise à 12 h 30)

Le Président (M. Auger) : Nous allons reprendre nos travaux, Mme la ministre, avec quelques clarifications, je crois, sur 23.2.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, effectivement, il y a une erreur dans mon cahier. Non seulement il manque un paragraphe, mais il y a un mot, comme le député de Borduas... qui a été changé. Alors, je reprends la lecture, si vous me le permettez, de 23.2.

Le Président (M. Auger) : Tel que visé au projet de loi?

Mme Charlebois : Exact.

Le Président (M. Auger) : Merci.

Mme Charlebois : Parce que c'est de même que c'est supposé d'être.

Une voix : ...

Mme Charlebois : Comment?

M. Pagé : ...juste aller lire à partir du quatrième alinéa.

Mme Charlebois : Bien, c'est parce que, le quatrième paragraphe, on va enlever «mandater», mais on va prendre «autoriser une personne à faire le transport, incluant la livraison, et l'entreposage du cannabis qu'elle vend, pour son propre compte.

«Le ministre peut établir les paramètres en fonction desquels la filiale doit déterminer le prix de vente du cannabis.»

Et c'est ce qui n'était pas écrit, d'ailleurs.

Le Président (M. Auger) : Interventions? M. le député de Labelle.

M. Pagé : Alors, je voudrais tout de suite déposer un amendement, M. le Président. Et je pense que vous...

Le Président (M. Auger) : ...faire la lecture.

M. Pagé : Oui, oui.

Le Président (M. Auger) : Et puis, par la suite...

M. Pagé : Je pense que vous nous avez vus venir avec les échanges que nous avons eus précédemment.

Alors : Modifier l'article 23.2 de la Loi sur la Société des alcools du Québec (chapitre S-13) inséré par l'article 5 du présent projet de loi par le remplacement, dans le premier paragraphe du premier alinéa, de «de cannabis» par — ça serait remplacé par, ouvrez les guillemets — «ou transformateur de cannabis ayant démontré que son financement ne provient pas de paradis fiscaux et».

Le Président (M. Auger) : Je suspends quelques instants pour en permettre la distribution.

M. Pagé : Parfait. Merci.

Mme Charlebois : ...

Le Président (M. Auger) : Bien là, j'ai reconnu... Bien, j'ai reconnu le député. Il l'a présenté, donc on va traiter de son amendement. Et par la suite vous arriverez avec votre amendement. Mais vous auriez pu quand vous avez fait la lecture me dire d'avance que vous aviez un amendement.

(Suspension de la séance à 12 h 32)

(Reprise à 12 h 34)

Le Président (M. Auger) : Nous reprenons nos travaux. M. le député de Labelle, concernant vos explications à votre amendement à l'article 23.2 introduit par l'article 5 du projet de loi.

M. Pagé : Oui. Merci, M. le Président. Mais effectivement la ministre avait aussi un amendement à proposer, qui est un amendement de forme. Moi, je n'aurais aucun problème à ce qu'on procède tout de suite pour l'adoption de cet amendement-là, qui peut être adopté tout de go, là, moi, je n'ai aucun problème avec ça. Avec le consentement de tout le monde, on... À moins qu'il y ait un grand débat là-dessus, mais je pense qu'il n'y aura pas de débat là-dessus.

Mme Charlebois : ...peut-être ensuite avoir besoin d'avoir ça, parce que vous êtes au premier article.

Le Président (M. Auger) : Donc là, ce que je comprends, c'est que...

Mme Charlebois : ...ça va toucher aussi la traduction.

M. Pagé : Ah! D'accord.

Mme Charlebois : Ça fait qu'on est peut-être...

M. Pagé : Alors, allons-y, dans ce cas-là, avec...

Mme Charlebois : Non, mais on est peut-être mieux d'adopter la traduction, puis, quand le vôtre va arriver, ça va s'intégrer, si on accepte ça.

Le Président (M. Auger) : Donc, je comprends qu'on va demander un consentement pour suspendre votre amendement.

Mme Charlebois : Bien, si tout le monde est d'accord, là, je ne veux pas...

Le Président (M. Auger) : Et on procéderait à l'étude de l'amendement de Mme la ministre.

M. Pagé : Oui, oui, d'accord.

Le Président (M. Auger) : M. le député de Borduas? Ça me prend un consentement pour suspendre l'étude de l'amendement présenté par le député de Labelle pour permettre à la ministre de présenter son amendement.

M. Jolin-Barrette : D'accord. D'accord.

M. Pagé : Et on reviendrait...

Le Président (M. Auger) : Et on reviendrait après avec l'amendement du député de Labelle. Il y a consentement. Mme la ministre, avec votre amendement.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, je m'excuse, j'aurais dû être plus rapide puis vous le dire avant, là, mais, bon, on va s'améliorer.

À l'article 5(23.2), de la Société des alcools du Québec, ici, c'est carrément : Modifier le texte anglais de l'article 23.2 de la Loi sur la Société des alcools du Québec, proposé par l'article 5 du projet de loi, par l'insertion, dans le paragraphe 1 — ce dont on va s'entretenir dans pas beaucoup de temps — et avant «producer», de «cannabis». Ça va être «cannabis producer», c'est tout.

Le Président (M. Auger) : Vous avez des copies à faire circuler aux collègues?

Mme Charlebois : Bien sûr.

Une voix : ...

Le Président (M. Auger) : Ah! Vous les aviez déjà?

Mme Charlebois : Tout le monde les a?

Le Président (M. Auger) : Tout le monde les a? Donc, est-ce qu'il y a des interventions sur l'amendement de la ministre? Il n'y a pas d'intervention? M. le député de Labelle.

M. Pagé : Oui. Bien, en fait, je veux juste bien comprendre, c'est juste que ça permet d'être plus clair dans la version anglaise, là? Moi qui n'est pas trop, trop bilingue, là, je m'en confesse.

Mme Charlebois : C'est de la concordance, c'est juste parce que ça va s'appeler un «cannabis producer» au lieu de «producer» tout seul, là.

M. Pagé : Parfait. O.K., ça va, ça va.

Le Président (M. Auger) : D'autres interventions sur l'amendement? S'il n'y en a pas, je vais le mettre aux voix. Est-ce que l'amendement de la ministre est adopté?

Une voix : ...

Le Président (M. Auger) : Les amendements, oui, sous-amendements, oui, mais pas l'article.

Une voix : ...

Le Président (M. Auger) : Oui, tout à fait. Est-ce que l'amendement de la ministre est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Auger) : Adopté. Donc, on revient à 23.2, tel qu'amendé, avec l'amendement du député de Labelle, avec vos explications.

M. Pagé : Oui. Puis, en étant toujours dans les bons échanges pour le meilleur fonctionnement possible, je veux juste porter à l'attention de la ministre qu'on nous avait dès le départ fourni une première série d'amendements. Un peu plus tard dans nos échanges, il y a eu une autre série d'amendements, et, quand j'ai voulu les mettre en ordre numérique, je me suis rendu compte qu'article 12, entre parenthèses 84.1, là je me retrouve avec deux versions différentes. Alors, peut-être juste... les gens autour de vous, si on pouvait éventuellement nous dire : Bien, écoutez, éliminez la première version, parce que ça va être vraiment la deuxième. Si c'est cela, pas de trouble, là, mais juste qu'on nous informe. Je pourrais peut-être leur montrer, là...

Le Président (M. Auger) : ...vérifier, là, la série d'amendements.

M. Pagé : Parce que, pour bien se préparer, c'est utile de savoir quelle version... ou est-ce que c'est un plus l'autre aussi. Peut-être que c'est les deux versions.

Le Président (M. Auger) : Tout à fait. Très bonne remarque. Il y aura des vérifications en ce sens, M. le député de Labelle. Donc, vos explications sur votre amendement.

• (12 h 40) •

M. Pagé : Alors, bon, donc, si je relis l'article, en fait le premier paragraphe de 23.2, où il est écrit : «Acheter du cannabis produit à des fins commerciales par un producteur de cannabis qui possède les qualités et satisfait aux conditions déterminées par [les règlements] du gouvernement pris en application [par le] premier alinéa de l'article 19 de la Loi encadrant le cannabis», bon, alors ce que ça fait de différent... Avec l'amendement que nous apportons aujourd'hui, l'article 1° se lirait comme suit : «Acheter du cannabis produit à des fins commerciales par un producteur ou transformateur — parce qu'on sait que ça va venir, ce volet-là — de cannabis ayant démontré que son financement ne provient pas de paradis fiscaux et qui possède les qualités et satisfait...» Donc, on revient à ce que je viens de lire il y a quelques secondes.

Alors, vous aurez compris que l'article, tel qu'il est... en fait, le paragraphe, tel qu'il est nommé présentement, ne parle que de qualités des producteurs. Qualités, je veux bien, là, mais quelles sont ces qualités? «Satisfait à des conditions déterminées par règlement du gouvernement», encore là, on ne connaît pas les conditions qui vont être déterminées par les règlements du gouvernement. Est-ce qu'elle pourrait éventuellement nous les déposer? Si on nous les dépose à l'avance et qu'on voit que, dans les règlements, justement, on fait état de cela, bien, ce sera autre chose, là, notre perception va être fort différente. Mais, avec tout le débat que nous avons présentement... Puis je ne veux pas recommencer tout ce que j'ai fait tantôt, je ne suis pas ici pour faire du temps inutile. Je l'ai dit tantôt, j'ai montré une série d'articles où je pense que, maintenant, il n'y a pas que des journalistes qui sont préoccupés. Les parlementaires sont préoccupés. Ils sont tellement préoccupés qu'hier on a voté une motion à l'Assemblée nationale, unanime, souhaitant que le financement des maisons de production... — «des maisons de production»! — que les producteurs ou transformateurs montrent patte blanche, donc socialement acceptables. Je pense que, dans la définition de socialement acceptable, là... C'est parce qu'on n'a peut-être pas osé dire «paradis fiscaux», là, pour ne pas faire peur à trop de monde, mais je pense que tout le monde est pas mal d'accord là-dessus. Alors, à partir du moment où on s'entend sur les grands principes que l'on souhaite établir pour guider cette société d'État, il me semble qu'on devrait le dire clairement.

Le reste des qualités qui... «Et qui vont satisfaire aux conditions déterminées par le gouvernement par voie de règlement», je pense qu'on est capables de se fier sur la bonne foi du gouvernement, des gens qui vous entourent, qu'ils vont bien écrire tout cela. Mais il m'apparaît que... Compte tenu qu'on ne l'a pas écrit dans la mission, même si c'est une grande préoccupation de l'ensemble des Québécois, il me semble qu'à ce moment-ci on devrait l'inscrire. On nous a dit : Bien, plus loin, on pourra aller l'inscrire un peu plus loin, là. Mais moi, je n'irais pas plus loin qu'à cet article 23.2, parce que, là, nous sommes dans l'achat de cannabis, hein? Parce que, là, je veux dire, la première ligne, là, de 23.1 dit : «La filiale a pour objet». C'est quoi, les objets? Qu'est-ce qu'elle... «De réaliser la mission de la société portant sur la vente du cannabis. À cette fin, elle peut, notamment». Elle peut notamment quoi? «Acheter du cannabis». Alors, quand elle va en acheter, là, est-ce qu'on veut qu'elle achète de producteurs qui sont financés via x, y, bon, fonds occultes. Puis tout le monde a parlé de l'opacité de ces fonds, de ce financement, et sur lesquels on peut avoir beaucoup de doutes. Alors, je pense qu'à ce moment-ci c'est le moment d'introduire cette notion. Ça ne serait peut-être pas inscrit dans la mission, parce qu'on l'a adoptée. Hier, on l'a dit. Parfait. J'ai retiré. On ne veut pas le mettre là. Mais je pense qu'à ce moment-ci, où on dit, premier paragraphe : «Acheter du cannabis», bien, c'est le temps de l'inscrire très clairement.

Le Président (M. Auger) : Merci, M. le député de Labelle. Mme la ministre, sur cet amendement.

Mme Charlebois : En fait, j'aimerais ça aussi entendre l'argumentaire du député de Borduas, parce que je vais pouvoir peut-être répondre aux deux à la fois.

Le Président (M. Auger) : Avec plaisir. M. le député de Borduas, sur l'amendement du député de Labelle.

M. Jolin-Barrette : Je veux entendre la ministre en premier.

Mme Charlebois : Bien, écoutez, on peut s'amuser comme ça, mais je vais quand même répondre de façon très brève. J'entends la bonne foi du député de Labelle, je comprends ses préoccupations, mais ce n'est pas le mandat de la Société québécoise du cannabis de s'assurer de faire les vérifications des compagnies pour lesquelles il fera affaire. Elles vont prendre des producteurs autorisés. C'est notre mandat, à la Société québécoise du cannabis, ça va être de prendre les producteurs autorisés. L'autorisation se donne par le gouvernement fédéral.

Le Président (M. Auger) : M. le député de...

Mme Charlebois : Et il y a des règles. Il y a des règles.

Le Président (M. Auger) : Oui. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Je veux juste, M. le Président, qu'on rembobine un petit peu, là. La ministre nous dit : La SQC va s'approvisionner auprès de producteurs autorisés par le fédéral. Actuellement, à ma connaissance, il n'y a aucun producteur autorisé à ce jour. Ceux qui sont autorisés, c'est des producteurs de cannabis médicinal. Ça fait que, dans...

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : En ce moment. Ça fait que, les avis d'intention qui ont été signés par la SAQ avec les six compagnies en question, bien, eux, ça ne veut pas dire qu'ils vont être autorisés. Je comprends que la ministre nous dit : Bien, on prévoit, là, pour être prêts le 1er juillet, ça fait qu'on les a spottés, puis c'est avec eux autres qu'on s'enligne, mais on ne sait pas s'ils vont avoir leurs certificats d'autorisation, leurs permis de production. O.K. Tout à l'heure, la ministre nous a dit : L'approvisionnement, les lettres d'intention que la SAQ, elle a signées, la plus grosse lettre d'intention qu'on a faite, qu'on a signée, c'est avec un producteur québécois, Hydropothicaire, ou Hydropothecary. Là, quand on regarde, cette compagnie-là est incorporée en vertu de la loi fédérale sur les sociétés par actions. C'est 167151 Canada inc. Bon, les administrateurs, c'est Sébastien St-Louis, Adam Miron. Puis eux, ils sont basés à Gatineau. Le premier actionnaire de cette compagnie-là, c'est 10074241 Canada inc., situé à Gatineau, O.K.? La compagnie qui possède cette compagnie-là par contre, c'est The Hydropothecary Corporation, 100 du 6000, King Street, Toronto, Ontario.

Alors, quand on nous dit qu'on s'approvisionne auprès d'un producteur québécois, bien, on comprend que la coquille est au Québec, l'adresse, tu sais, l'adresse qui est enregistrée au registre, au registre, mais par contre la véritable détention, elle se retrouve à être à Toronto. Donc, c'est une série de compagnies comme ça, une série de compagnies imbriquées une à travers l'autre, qui détient le capital d'une. Ça fait que, dans le fond, quand vous signez avec la compagnie, là, bien, oui, elle est à Gatineau, l'adresse physique de cette coquille juridique là est à Gatineau, mais, quand vous faites la suite, bien, ça transite notamment par Toronto.

Alors, mes propos de tout à l'heure, pour dire qu'on devrait favoriser les entreprises québécoises, favoriser les producteurs locaux, bien là, on a un bel exemple avec cette compagnie-là, suite à plusieurs compagnies qui se chevauchent, mais, dans le fond, une compagnie possède l'autre compagnie au niveau de l'actionnariat principal, et on se retrouve à faire le tour par Toronto. Alors, le sens de mon intervention tout à l'heure était de dire : Bien, il va falloir favoriser les producteurs québécois et là il va falloir se dire c'est quoi, nos critères pour les producteurs québécois. Est-ce que le seul critère qu'on a, c'est de dire : Bien, vous avez une place d'affaires ou une adresse, une boîte postale au Québec, donc on vous considère comme une compagnie québécoise, ou on va se dire : Bien, il faut véritablement que la détention du capital soit québécoise?

Le Président (M. Auger) : Mme la ministre...

M. Jolin-Barrette : Alors, on peut remonter la chaîne...

Le Président (M. Auger) : ...M. le député.

M. Jolin-Barrette : ...on peut remonter la chaîne jusqu'au bout complètement, mais une question qui se pose, c'est à savoir, la détention de ces holdings-là, ultimement, où ça aboutit. Alors, de dire qu'Hydropothicaire est uniquement détenue par les intérêts québécois, ça pose certaines problématiques. Je ne dis pas que la ministre a dit ça, je dis juste que, quand on nous présente ça comme étant une compagnie québécoise, bien là, je dis : Attention, il y a des bémols à apporter.

Puis je sais que la ministre veut favoriser l'économie locale, veut favoriser les producteurs québécois. Si on veut faire en sorte que, supposons, les agriculteurs du Québec, les producteurs de serre puissent produire, bien, il va falloir regarder ça très sérieusement aussi. Parce que, c'est sûr, c'est que c'est des compagnies... vous pouvez enregistrer une compagnie en vertu de la loi fédérale, vous pouvez faire affaire dans différentes provinces canadiennes, mais, si l'objectif ultime de la Société québécoise du cannabis, c'est vraiment d'encourager des producteurs locaux, locaux, bien, vous comprenez, M. le Président, là, qu'il va falloir faire la démarche juridique pour s'assurer que les retombées économiques demeurent au Québec puis ça fasse travailler le monde du Québec.

Le Président (M. Auger) : M. le député d'Argenteuil.

M. St-Denis : Bien, la fin de sa phrase vient un peu répondre à ma question, mais le questionnement que moi, j'ai principalement, c'est : Est-ce qu'on veut favoriser les entreprises qui embauchent les travailleurs québécois, qui donnent des jobs aux Québécois? Parce que ce ne serait pas la première entreprise qui a des holdings étrangers au Québec, c'est partout de même dans le Canada.

Donc, la question qu'on se pose : Est-ce que... Quand qu'on dit qu'on veut favoriser le Québec, les entreprises, c'est parce qu'on veut favoriser l'emploi...

Le Président (M. Auger) : Mme la ministre.

M. St-Denis : ...c'est parce qu'il y a une question entre les deux, une nuance importante entre les deux.

Le Président (M. Auger) : Oui. Mme la ministre.

• (12 h 50) •

Mme Charlebois : Écoutez, j'ai un article... M. le Président, le député d'Argenteuil vient de soulever un bon point, j'entends les propos du député de Borduas, qui soulève aussi un bon point. J'ai un article qui nous dit... daté du 21 mars 2017, vous me direz, c'est écrit : Du pot, Gatineau en bourse. «L'entreprise gatinoise Hydropothicaire, seule société au Québec à détenir — puis ça, c'est dans Le Droit, en passant — [une] licence de Santé Canada permettant de cultiver et vendre du cannabis à des fins thérapeutiques, a fait son entrée [en] bourse TSX mardi.

«La compagnie qui prend place sur le terrain de l'ancienne pépinière Botanix, dans le secteur Masson-Angers — qui est très au Québec, je pense — [affiche] ses parts à 1,82 $ à l'ouverture des marchés à Toronto, avant de clôturer à 1,55 $ — c'est clair que la bourse est à Toronto, je ne peux rien faire contre ça, là, c'est de même.

«Le président et directeur général d'Hydropothicaire, Sébastien St-Louis — je pense qu'il est Québécois — parle de cette entrée sur les marchés boursiers comme [une] page d'histoire qui est désormais écrite pour la jeune entreprise de 58 employés, qui possède un potentiel annuel de production de 3 600 kilogrammes de cannabis médical, une quantité représentant une valeur [une] vente de l'ordre de 30 millions de dollars.» Puis là il y a un sommaire, là, puis que je ne vous lirai pas : L'entreprise Hydropothicaire en bref.

«À peine une dizaine de producteurs de marijuana thérapeutique sur les 40 autorisés par Santé Canada sont listés en bourse...»

C'est sûr qu'à partir du moment où tu mets ton entreprise en bourse il vient des actionnaires d'un peu partout. Mais là on parle qu'Hydropothicaire augmente sa production, puis tout ça. Puis, je pense, si je me souviens bien même, à Gatineau, je ne sais pas si vous étiez là, je pense que c'est lui qui m'avait offert de l'huile de cannabis parce que j'avais un super de mal de dos, je m'en souviens comme si c'était hier, puis qu'il était assis en avant. Mais là, mes collègues qui étaient là, je ne sais pas s'ils s'en souviennent, là, en tout cas, j'étais restée comme bouche bée. J'avais dit : Non, je vais m'abstenir, finalement, de l'huile de cannabis.

Mais tout ça...

Une voix : ...

Mme Charlebois : Bien, je ne l'ai pas fait non plus. Parce que je n'ai pas ma prescription. Bon, voilà.

M. Jolin-Barrette : ...Mme la ministre, qu'on pouvait vous en offrir, à l'époque, volontairement.

Mme Charlebois : Non. Bien, je ne l'aurais pas accepté.

M. Jolin-Barrette : Non, non, mais je ne dis pas que vous, vous l'avez accepté, mais je pense que le fait d'en offrir, ce n'est pas permis.

Mme Charlebois : Bien, c'était peut-être à la blague. En tout cas, il faudra voir, tout était enregistré.

Le Président (M. Auger) : On va reprendre la...

Mme Charlebois : Oui, c'est ça.

Le Président (M. Auger) : ...la lecture de votre article.

Mme Charlebois : Il y a bien des gens qui se font offrir bien des choses, hein, sur cette planète, puis qui ne sont pas autorisées, mais, bon...

Alors, tout indique que les producteurs autorisés... M. St-Louis, en tout cas, il est très, bon, content, puis, comme je vous dis, il y a 58... Bon. À partir du moment où on se met à la bourse, c'est clair qu'il n'y a pas que des investisseurs québécois qui peuvent investir. Ceci étant dit, ce n'est pas, encore là... puis je comprends les inquiétudes et les points à ce sujet-là, mais ce n'est pas le travail de la Société québécoise du cannabis que de vérifier l'actionnariat, et de faire toutes ces choses-là, et en plus de faire en sorte... puis, tu sais : «...cannabis ayant démontré que son financement ne vient pas de», ce n'est pas à nous autres de faire ça, c'est les autorités dûment compétentes qui doivent faire ces vérifications-là. Et ce que la loi dit, c'est que, quand ils sont autorisés, nous, la société québécoise — bien, quand je dis «nous», c'est «nous, les Québécois», là — serons autorisés à acheter le cannabis des entreprises qui seront certifiées. Mais les... pas tout à fait exact, puis je comprends l'histoire d'une compagnie qui achète l'autre, puis qui achète l'autre, puis qui achète l'autre, parce que c'est un actionnaire qui a vu à la bourse... puis c'est comme ça que l'acquisition s'est faite, là. Mais, si on remonte à la base, c'est purement québécois, là. Mais que d'autres personnes investissent, qui viennent d'ailleurs, on va-tu empêcher le monde de tourner sur la planète Terre? Je ne pense pas.

Le Président (M. Auger) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, ce que je dis à la ministre, là, puis il va falloir le trouver ensemble, là : Comment est-ce qu'on fait pour s'assurer que les retombées économiques, les emplois, ça soit au Québec puis ça favorise les producteurs locaux? La SQC, là, elle va avoir un monopole, là, monopole de vente. Les gens, puis aux consultations auxquelles j'ai participé, là, ils nous ont dit, là : Mais, écoutez, on devrait favoriser les producteurs locaux, on devrait favoriser les producteurs artisanaux. On devrait faire en sorte que le cannabis qui est vendu, ça provienne des différentes régions du Québec. Puis là, je pense, la ministre est d'accord avec ça. Mais il faut trouver un moyen, dans la loi, pour le mettre, pour faire en sorte que ça va s'y retrouver.

Et, l'autre élément, M. le Président, il faut donner l'opportunité à tous les entrepreneurs du Québec, là, de partir sur un pied d'égalité à la ligne de départ. C'est les Olympiques, là, M. le Président, là, ça me fait penser au patinage de vitesse, là, quand ça part, il ne faut pas qu'il y ait de faux départ. Et actuellement, là, ce qu'on constate, là, c'est qu'on dirait qu'il y en a qui ont une petite longueur d'avance sur d'autres, puis c'est plate puis ça désavantage les producteurs québécois actuellement. C'est ce qu'on constate. Parce que vous avez présentement, là, des mégasociétés, là, puis la ministre y a fait référence, là, cotées en bourse, là, avec des capitaux, des millions et des millions, là, la déferlante des millions, là, qui viennent notamment des paradis fiscaux, on l'a vu dans les médias dernièrement. Puis on le voit, là, quotidiennement, à la Chambre des communes, il y a des questions qui sont posées au gouvernement fédéral à ce sujet-là, et on refuse de répondre. Et là nous, on est ici, à l'Assemblée nationale, et la ministre nous dit : Écoutez, ce n'est pas à nous à nous occuper de ça, il y a des autorités. Mais, l'autorité en question, là, elles sont constituées par le gouvernement, à la fois par le gouvernement fédéral et à la fois par le gouvernement du Québec. Alors, ça nous concerne très certainement.

Les autorités réglementaires, là, bien, ça relève du gouvernement, ultimement. Bien sûr, elles ont leurs indépendances, elles se gouvernent en fonction des lois qu'on a votées. Mais, à partir du moment où le problème, là... C'est gros comme un ballon de plage, là, ça s'en vient, là. Le cash, il vient de l'étranger, le cash, il vient des paradis fiscaux, le cash, on ne sait pas qui qui est derrière ça, ça intègre un marché qui va devenir légal. Les Québécois, ils se disent, là : Nous, là, parfait, le pot devient légal, il va être vendu dans des boutiques du gouvernement, il y a du monde qui vont le produire. Est-ce qu'on peut s'assurer que, les gens qui vont faire le commerce de la production du cannabis, bien, les retombées économiques, ça retombe en taxes, en impôt, puis ça serve à payer les services en matière de santé et de sécurité publique, de prévention, puis que ça ne serve pas à faire des profits puis à enrichir des gens dans des paradis fiscaux?

Je pense que là-dessus, là, la population québécoise, là, elle est très claire, là, puis moi, je m'attends du gouvernement du Québec, là, que, dans le cadre du projet de loi n° 157, on fasse l'exercice de faire en sorte de dire : Comment est-ce qu'on fait, là, pour s'assurer que le financement est adéquat? Mais comment est-ce qu'on fait aussi pour s'assurer que cette économie-là du Québec, qui va être en expansion, bien, elle profite aux différentes régions du Québec, elle profite aux producteurs locaux?

Et c'est sûr que les compagnies sont cotées en bourse. Il n'y a rien qui empêche ça, tout ça. Mais il faut qu'à la ligne de départ, là, quand ça va commencer le 1er juillet, là, si vous, là, dans Soulanges, là, vous voulez vous partir une business de production de cannabis, là, en termes de producteur de serre, là, bien, vous ne soyez pas désavantagé puis que la SQC, là, elle puisse dire : Bien, écoutez, vous n'aviez pas fait de cannabis médical avant, là, puis vous n'étiez pas dans ce marché-là, mais maintenant vous voulez intégrer le marché, vous avez la même opportunité de faire affaire avec la SQC, puis, «by the way», nous, comme État, on choisit de faire en sorte de mettre les producteurs québécois sur le même pied d'égalité que les multinationales, les grandes corporations qui ont déjà un pied, et qui ont investi massivement à l'avance pour répondre au-delà du besoin du cannabis médical, et qui ont fait des rondes de financement, et que par ailleurs le financement provient de l'étranger.

Donc, ça revient aux propos que je disais sur la probité, l'AMF, les contrats avec l'État. Je pense qu'il y a une discussion à avoir là-dessus.

Le Président (M. Auger) : M. le député de Maskinongé.

M. Plante : Oui, M. le Président. Juste une question de clarification, parce que le député de Borduas, il dit beaucoup de choses, puis il en a dit beaucoup. Mais il faut faire attention, parce qu'au début de son intervention on parlait vraiment de l'actionnariat puis on parlait de vérifier c'était qui, les actionnaires. La ministre vous a répondu clairement là-dessus, je crois. Après ça, vous parlez de retombées de production, bien... Parce que ça peut être deux choses, hein? Vous savez, la production peut être faite chez vous, dans votre comté, dans Borduas, puis avoir quand même les mêmes problèmes d'actionnariat que vous relevez. La même chose, le même système, puis il faut... que vous tentez de dénoncer...

Une voix : ...

M. Plante : Bon. Et, quand vous parlez de longueur d'avance, mais il faut faire attention, parce qu'aujourd'hui, présentement, le cannabis de façon légale, il n'est pas légal. Donc, les compagnies qui, présentement, produisent du cannabis, c'est les compagnies qui produisent du cannabis thérapeutique, qui répondent aux normes de Santé Canada et qui ont été autorisées par Santé Canada. Et je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de visiter une usine ou une production, mais moi, je vais vous avouer que c'est plus sécuritaire... moi, j'ai une usine qui s'est construite, qui a obtenu un permis, mais c'est plus sécuritaire qu'une prison, là, selon les normes de Santé Canada. Il ne faut pas l'oublier.

Mais je comprends bien ce que vous voulez dire, M. le député de Borduas, ce qui est important, c'est que vous avez trois questions dans votre question. Et ce que vous demandez à la ministre...

Une voix :...

M. Plante : Oui, je suis d'accord, vous voulez trois réponses, mais ce qui est important, pour ne pas confondre les gens qui nous écoutent, de vraiment faire la distinction des trois choses, je pense, M. le député. Alors, c'était mon intervention.

Le Président (M. Auger) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, le collègue de Maskinongé est un homme brillant, il a pu décortiquer mes trois questions. Alors, je pense que ça ne pose pas problème. Et c'est une discussion globale qu'on doit avoir parce que tout est imbriqué l'un dans l'autre. Alors, il faut trouver une façon de le faire pour faire en sorte que les retombées vont être au Québec. Puis je suis persuadé qu'un gouvernement libéral souhaite créer de l'emploi. Alors, c'est peut-être une bonne façon.

Le Président (M. Auger) : Un dernier 30 secondes, Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, juste pour dire qu'effectivement on est un gouvernement qui non seulement s'occupe d'emploi, mais qui s'occupe d'avoir les employés suffisants pour le faire. Puis j'ai le goût de lui dire, en terminant, que, sur les six lettres d'intention, trois des compagnies qui ont eu des lettres d'intention produisent au Québec. Donc, ça représente 74 % de la prévision des ventes de production au Québec.

Le Président (M. Auger) : Merci. Car, compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures. Donc, bon dîner à tout le monde. Merci.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 4)

Le Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend donc ses travaux.

Je vous rappelle que le mandat de notre commission est de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière.

Je demande encore une fois à toutes les personnes présentes dans la salle du Conseil législatif de bien vouloir éteindre toute sonnerie de tout appareil électronique.

Lors de la suspension de nos travaux, plus tôt, nous étions rendus à l'étude de l'amendement à l'article 23.2 proposé par M. le député de Labelle. Est-ce que j'ai des interventions? M. le député de Saint-Jérôme.

M. Bourcier : Alors, bon après midi, tout le monde, M. le Président. Je suis relativement nouveau dans ce genre de discussion là, parce que je n'ai jamais été au départ d'un projet de loi d'une société nouvelle comme on s'apprête à le faire. Mais, comme je vous le manifestais ce matin, j'ai une certaine inquiétude. Et puis on parlait d'avoir une société québécoise du cannabis qui était limpide. On veut tous ça. On veut être même à l'abri des gens qui gravitent autour de certains paradis fiscaux. Je mentionnais ce matin que le gouvernement fédéral, par l'entremise du premier ministre du Canada, a des intentions justement à ce sujet-là, même si les intentions aussi étaient autres que celles-ci, sauf que d'avoir des intentions d'enlever du crime organisé la consommation et évidemment... pas l'usage, mais le fait d'avoir la responsabilité de définir qu'est-ce qu'était peut-être une loi sur le cannabis justement pour enlever ça, donc, du crime organisé. Alors, nous, si on se dit que le gouvernement fédéral décide de plusieurs aspects de la loi qu'on est en train de faire puis qu'on n'est pas capables de rien faire, selon moi, peut-être d'aller plus loin qu'on devrait être, juste au cas où le fédéral nous empêcherait de le faire, ou même, à un moment donné, être en conflit avec ce qui est comme loi au gouvernement fédéral, ça serait peut-être une bonne chose.

Je mentionnais ce matin à la blague, mais qui est une réalité aussi, que Mme la députée de Repentigny était inquiète, on a un malaise. Alors, ce malaise-là, c'est quand même un bon malaise et c'est une bonne chose, parce qu'on veut tous bien faire les choses. Mais l'amendement qu'on propose, justement, où on dit que le «transformateur de cannabis ayant démontré que son financement ne provient pas de paradis fiscaux», prend toute son importance. Si on va plus loin que le fédéral, si on va plus loin que le projet de loi C-45, qu'est-ce qu'on pourrait se faire reprocher? D'être plus blancs que blancs? Pourquoi pas? Alors, moi, je considère que... D'y aller un petit peu plus loin, d'être plus prudents, de prendre notre temps, de bien se dire les choses, de travailler ensemble et d'aller au maximum de ce qu'on peut faire, puis, comme je vous disais tout à l'heure, même au péril d'entrer en conflit avec ce que le fédéral n'a pas présenté comme recommandations, alors, moi, je trouverais que ça serait une bonne chose, ce serait un bel exemple à démontrer.

D'ailleurs, je tiens à vous dire que j'ai été dans une mission au Nouveau-Brunswick, et puis j'ai été, d'ailleurs, avec des parlementaires, justement discuter de la question du cannabis au Nouveau-Brunswick, et ces gens-là manifestaient le même malaise que nous, les mêmes inquiétudes par rapport au projet de loi fédéral. Et eux, pour vous dire que géographiquement ils sont quand même différemment configurés que le Québec, bien, ils avaient des limites d'âge qui étaient différentes. Alors qu'on parlait, exemple, qu'aux États limitrophes américains ils étaient à 21 ans pour la consommation de cannabis, eux, ils sont à 19 ans, et le Québec est à 18. Alors, eux aussi étaient inquiets. Ils avaient déjà commencé à tenir des consultations et ils manifestaient le même malaise par rapport à la loi fédérale. Et, l'implication d'établir des paramètres provinciaux pour le Nouveau-Brunswick et d'entrer en conflit avec le fédéral, ils disaient la même chose que nous, par contre à la différence que nous, ici, on parle de financement ne provenant pas de paradis fiscaux. On est rendus un peu plus loin qu'eux, ils l'étaient lors de mon passage avec la délégation québécoise, qui était formée des gens, d'ailleurs, du Parti libéral et de la Coalition avenir Québec, qui étaient avec nous.

Quant aux gens de l'Ontario qui nous ont visités la semaine dernière — Mme la députée de Repentigny était avec nous — eux aussi manifestaient de l'inquiétude par rapport aux implications de cette loi fédérale là. On était au début justement de la discussion où, à Ottawa, il avait été question de personnes qui avaient fait des investissements et qui avaient profité de certains paradis fiscaux. Alors, eux aussi, ils étaient inquiets.

Alors, je nous invite à beaucoup, beaucoup de prudence, même, je dirais, à beaucoup plus de prudence, en termes de règlements, d'aller beaucoup plus loin que le fédéral pourrait le faire. Et d'ailleurs il y a beaucoup de trous dans la loi fédérale, et, comme je vous l'ai dit, il nous donne 100 % des problèmes avec une cote de 25 %. Je pense que, dans le cas qui nous intéresse ici, il faudrait aller un petit peu plus loin et être d'une extrême prudence, d'une extrême vigilance concernant justement cet amendement-là, que je vous demande bien humblement d'adopter et d'insérer dans le projet de loi.

• (15 h 10) •

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Saint-Jérôme. Est-ce que j'ai d'autres interventions à la proposition d'amendement? Mme la ministre, avez-vous un commentaire à ajouter?

Mme Charlebois : Bien, j'ai déjà dit ce que j'avais à dire au sujet du rôle de la SQDC. J'entends que le député de Labelle veut que je le remette dans le micro. Il y a des instances appropriées pour faire la validité de tout cela. J'ai beau le dire et le redire, c'est Revenu Québec, l'Autorité des marchés financiers, il y a des instances appropriées pour parler de tout ce qui concerne le financement des entreprises. Je veux aussi lui dire qu'il y a un groupe de travail fédéral-provincial, M. le Président, qui traite de la transparence des entreprises pour l'identification des propriétaires réels. Mais je rappelle que ce n'est pas le rôle de la Société québécoise du cannabis. Je n'ai pas d'autre commentaire à ce moment-ci.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Merci, M. le Président. Je vais vous dire, je suis vraiment sous le choc d'entendre que la ministre me dit, nous dit — nous dit à tout le monde, quand la ministre parle, c'est le gouvernement qui parle — que le gouvernement nous dise : Ce n'est pas notre rôle de vérifier, finalement, de qui on va s'approvisionner; ce n'est pas notre rôle de vérifier si les entreprises qui vont vendre à la SQC sont des entreprises clean, sont des entreprises qui paient leurs impôts au Québec, des entreprises qui ne cachent pas des gens qui n'ont pas intérêt à ce que nous sachions qu'ils sont actionnaires dans ces entreprises-là. Je trouve ça grave, je trouve ça très grave, parce que c'est au moment où, depuis quelques années au Québec, on réfléchit à comment mettre fin à ces paradis fiscaux.

On y a tellement réfléchi qu'il y a eu la Commission des finances publiques qui a travaillé pendant à peu près une année et demie, si ma mémoire est bonne, qui a travaillé très, très longtemps sur, justement, le problème des paradis fiscaux. Ils ont déposé en mars 2017 un rapport, que j'ai imprimé, là, un rapport de 60 quelques pages... je l'ai fait recto verso, pour être le plus écologique possible, mais c'est quand même un rapport qui est important et qui vient nous dire... On va aller directement aux conclusions. Avant d'aller aux conclusions, le ministère des Finances a déposé un mémoire à la commission, et le ministère des Finances disait quoi? Je vais juste vous faire part de sa conclusion, quelques lignes de la conclusion, parce que le rapport du ministère des Finances, c'est encore plus volumineux, c'était 80 quelques pages. Mais, seulement au niveau des conclusions, le ministère des Finances dit — alors, c'est pas mal le gouvernement du Québec qui parle quand c'est le ministère des Finances, là : «Les paradis fiscaux offrent des possibilités juridiques utilisées dans les [stratèges] d'évitement fiscal. Les paradis fiscaux constituent également un abri pour les bénéfices retirés de l'évasion fiscale. [...]On sait [...] que la réduction [de] pertes fiscales subies par le gouvernement passe en partie par la lutte efficace contre les paradis fiscaux.»

Il me semble que c'est assez clair, là, on veut lutter de façon efficace. Et là, aujourd'hui, nous écrivons une loi nouvelle, avec une nouvelle entreprise, où on pourrait lui dire : Ne faites pas affaire avec ces entreprises-là. Nous sommes au jour 1, là, au jour 0, là, on pourrait envoyer le message très clair qui irait dans le sens de la volonté souhaitée par le ministère des Finances.

Un peu plus loin dans sa conclusion, il dit : «...le ministère des Finances est continuellement à l'oeuvre pour limiter les pertes fiscales et faire en sorte que l'État reçoive les revenus qui lui sont dus.» Et là on n'est même pas dans qui est derrière, qui sont ces individus qui sont derrière les paradis fiscaux, qui n'ont pas envie qu'on sache qu'ils sont derrière ces paradis fiscaux, hein? Si on connaissait l'identité de tous ces gens... Probablement qu'il y en a quelques-uns, là-dedans, qui ont fait leur argent de façon illicite, puis notre mission, là, c'est de ramener ça licite. Alors, je pense que c'est assez clair, le message qui est envoyé de la part du... dans les conclusions du ministère des Finances à l'endroit de la commission qui a étudié la question.

Et, quand je vais à la conclusion du rapport de la Commission des finances publiques, mars 2017 — ça ne fait même pas un an, là — le phénomène des recours aux paradis fiscaux, je vais juste vous lire le premier... un des premiers, parce qu'il y a à peu près sept, huit picots, là. Je vais juste vous lire le premier picot, là, qui dit... Bon. Les principales mesures québécoises de lutte contre l'évitement fiscal. Vous allez comprendre qu'on est beaucoup plus pour les individus, mais, quand même, ça vous donne une idée, M. le Président. Le premier picot, il dit : «L'instauration d'un mécanisme de divulgation obligatoire pour une opération qui procure un avantage fiscal de 25 000 $ ou plus au contribuable ou qui a une incidence de 100 000 $ ou plus sur son revenu.» Juste pour du 25 000 $, là, qui n'est pas... qui est quand même beaucoup, mais, pour un individu, déjà, dans son rapport, la commission dit : Aïe! il faut divulguer, là. Et là nous sommes en train de donner des contrats à des entreprises qui vont jouer dans les centaines de millions de dollars et on ne voudrait pas savoir qui les finance?

Et ce qui est intéressant, c'est que, quand on a déposé le rapport, quand on a déposé le rapport, dans les jours qui ont suivi, le 14 avril 2016, il y a eu une motion votée à l'unanimité à l'Assemblée nationale. Alors, vous avez tous, chers collègues... Vous faites partie de la présente législature. Vous étiez tous élus députés le 14 avril 2016. Peut-être que certains étaient absents, mais je présume que vous étiez d'accord parce que ça a été unanime. Et la motion disait trois choses, résolution de l'Assemblée nationale du Québec :

«Que l'Assemblée nationale condamne — condamne — [la pratique liée] aux paradis fiscaux, qui [prive] l'État québécois de sommes considérables et [violant] les principes de l'équité fiscale.» C'est-u assez clair, ça, M. le Président? L'Assemblée nationale condamne, condamne la pratique liée aux paradis fiscaux. Et là, nous, là, l'État québécois s'apprête à donner des contrats à des entreprises qui font affaire avec les paradis fiscaux. C'est correct. C'est correct, ça ne nous dérange pas. Est-ce que vous avez un problème, M. le Président? Moi, j'en ai tout un. Moi, j'en ai tout un.

Le deuxième élément de la motion, votée toujours à l'unanimité, vous avez voté pour, tout le monde ici a voté pour ça, là : «Que l'Assemblée nationale rappelle que tous les contribuables doivent payer leur juste part d'impôt.» Hein, c'est ce qu'on souhaite, je suis sûr que tout le monde souhaite ça. Et le troisième picot, bien, évidemment, c'est de demander au gouvernement fédéral de collaborer avec le gouvernement du Québec. Bon, ça, c'est une autre chose, là. On demande plus la collaboration. «Copie conforme de la motion adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale, 14 avril 2016.»

Alors, ma question est simple, à la ministre : Comment a-t-elle pu voter, être d'accord avec une motion qui condamne la pratique liée aux paradis fiscaux et qu'aujourd'hui elle nous dit : Bien, la société d'État qu'on va créer, là, elle va faire affaire avec des entreprises qui font affaire avec des paradis fiscaux, puis ça ne nous dérange pas?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

• (15 h 20) •

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, je pense que... Je comprends que des légumes, ça va tout dans le même chaudron, mais on mélange les carottes, les patates, les tomates, tout le kit, là. Le gouvernement a ça à coeur, là. Il a tellement ça à coeur, on a tellement pris ça au sérieux que le ministre des Finances, il a répondu le 1er novembre au rapport de la commission dont il nous fait mention. Et je veux juste vous dire que les membres de la commission l'ont étudié pas plus tard que la semaine dernière, comme par hasard. Puis là-dessus il y a des membres du gouvernement, que je sache. Alors, si on ne prenait pas ça au sérieux, on n'aurait certainement pas fait partie de cette commission-là.

La seule chose, c'est qu'on mélange tout, là. Il y a des instances pour ça, et ce n'est pas à la Société québécoise du cannabis de faire le travail de Revenu Québec, de l'Autorité des marchés financiers, du ministère des Finances, de la GRC, des instances internationales. La Société québécoise du cannabis n'a pas pour mission d'examiner la situation des entreprises partout. Il y a des instances qui vont faire ça. J'invite mon collègue à aller travailler avec le ministre des Finances, il va sûrement voir qu'il y a du travail qui se fait. C'est le député de Montmorency qui veille au grain pour le gouvernement du Québec, et croyez-moi qu'il voit aux affaires. Mais il est d'accord tout comme moi, le député de Montmorency, que ce n'est pas à la Société québécoise du cannabis de faire ça, là. C'est d'envoyer ça dans les instances appropriées.

La Société québécoise du cannabis va acheter du cannabis de compagnies qui ont eu le permis du gouvernement fédéral. Et, si d'aventure il y a d'autres instances qui viennent dire : Non, pas cette compagnie-là, bien, ça sera rayé de la liste, mais il faut qu'il réponde à certains critères. Alors, ce n'est pas à la Société québécoise du cannabis de se doter de structures pour examiner le cadre des entreprises qui ont du cannabis puis qui ont des investisseurs qui viennent... Non, ce n'est pas... Nous, à partir du moment... La Société québécoise du cannabis — puis, quand je dis «nous», c'est «nous les Québécois», là — aura indication que c'est un fournisseur qui est accrédité, qui a un permis, mais la Société québécoise du cannabis ne va pas faire une enquête fiscale. Elle va acheter le cannabis.

Et je vous ai lu des articles ce matin, là, mon collègue de Maskinongé m'a montré des articles, là, plusieurs entreprises... Il y a plus de 75 % — si je ne me trompe pas, M. le député de Maskinongé, là — des entreprises qui produisent au Québec. Il y en a juste une, là, elle a 58 employés en date de mars 2016, je pense. Ça fait que c'est rendu au-delà de ça, là. À un moment donné, là, c'est des Québécois qui travaillent.

Je comprends les propos, mais on n'est pas à la bonne place. Ce n'est pas la bonne instance. Puis j'invite le député à aller voir le ministre des Finances puis de régler ça aux instances appropriées.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Saint-Jérôme, je voulais aller avant à Mme la députée de Repentigny. Allez-y, Mme la députée.

Mme Lavallée : Bien, moi aussi, j'accroche sur ce que la ministre a dit tout à l'heure, quand elle a parlé que ce n'était pas notre rôle. Moi, quand j'ai été élue en 2014, j'ai considéré que mon rôle...

Le Président (M. Merlini) : ...Mme la ministre.

Mme Charlebois : ...parce que je n'ai pas dit que ce n'était pas notre rôle. J'ai dit que ce n'était pas le rôle de la SQDC.

Le Président (M. Merlini) : Effectivement, vous l'avez bien dit.

Mme Lavallée : Bon, excusez, la SQDC.

Le Président (M. Merlini) : La Société québécoise du cannabis.

Mme Lavallée : Je vais corriger. Il n'y a pas de problème.

Le Président (M. Merlini) : Pas de trouble. Allez-y.

Mme Lavallée : Je considère que, lorsque j'ai été élue, en 2014, je suis devenue le mandataire des gens qui m'ont élue. L'ensemble des parlementaires sont des mandataires de la population. Donc, la population a des attentes envers le travail qu'on fait. Et, lorsqu'on dit que ce n'est pas le rôle de la Société québécoise du cannabis, c'est notre rôle de faire la loi la plus parfaite. C'est du droit nouveau. On a à gérer le dossier du cannabis, et la loi doit prévoir le plus de détails possible pour encadrer le mieux possible. Donc, c'est notre rôle d'avoir des exigences envers l'organisme qui va vendre du cannabis. Donc, pour moi, cela, c'est ce qui guide à chaque fois ma réflexion lorsque je parle ici, en cette Chambre, ou n'importe où ailleurs, c'est les gens derrière moi. Je pense que c'est à nous d'établir qu'est-ce qui va être le moteur de cette société-là et quels seront les critères sur lesquels elle devra prendre les décisions.

Actuellement, au gouvernement... au fédéral, ils sont embourbés dans les problèmes face aux entreprises, actuellement, qui ont des permis. Ils sont embourbés. Je n'ai pas envie, moi, ici, qu'on s'embourbe en n'ayant pas de vigilance face aux entreprises avec qui on va faire affaire. Et je pense que c'est notre devoir d'établir nos règles, qui nous ressemblent ici, au Québec, puis de dire : C'est comme ça qu'on le veut, et voici, c'est une obligation que l'AMF... pas qui décide peut-être ou... non, mais que ce soit une obligation que toutes les entreprises avec lesquelles la société du cannabis va faire affaire passent par ça. On a le droit, comme législateurs, comme gouvernement, d'établir ces règles-là. C'est notre couleur. Et peut-être que les autres provinces vont copier notre couleur, parce qu'on aura fait les choses de façon rigoureuse. Donc, pour moi, je pense que c'est notre rôle et c'est notre responsabilité vis-à-vis les gens qui ont des attentes élevées et qui nous écoutent.

Et je pense que, dans l'état actuel de l'actualité, les gens ont des attentes très élevées. Donc, je pense que c'est notre rôle de dire, de diriger, d'établir les règles de cette société-là. Et il faut le faire. Et j'espère que les juristes vont faire des adaptations puis qu'ils entendent l'importance de ce qu'on demande. Et, si on nous entend, ça va aller vite, l'étude du projet de loi. Parce que, là, on rediscute toujours des mêmes affaires parce qu'on banalise des choses. Et moi, j'ai l'intention d'être cohérente jusqu'à la fin. Puis mon but, ce n'est pas de retarder, c'est qu'on entende notre message, notre message et le message de la population. Parce que, moi, dans mon comté, les gens n'en voulaient pas, de cette légalisation-là. Et les gens dans mon comté ne sont même pas d'accord à ce qu'on légalise à partir de 18 ans. Donc, moi, je représente la population, et non pas les entreprises qui vont venir vendre du cannabis chez nous. C'est ce que je voulais dire.

Le Président (M. Merlini) : Question de règlement. Excusez-moi, Mme la députée.

Mme Lavallée : J'ai terminé de toute façon.

Le Président (M. Merlini) : O.K. Merci, Mme la députée de Repentigny. M. le député de Maskinongé, sur une question de règlement.

M. Plante : Merci beaucoup, M. le Président. En tout respect pour ma collègue de Repentigny, là, il faudrait faire un petit peu attention aux propos. Et je comprends qu'elle voulait valider et passer son message. Elle le fait habituellement avec un grand respect, M. le Président. Par contre, quand elle dit qu'elle n'est pas là pour représenter les entreprises, ça sous-entend comme si on était là pour représenter les entreprises et ça sous-entend qu'on n'écouterait pas la population de nos comtés, et bien au contraire, M. le Président. Et je crois qu'avec le sérieux du dossier on doit tous, chacun et chacune, faire le maximum justement pour ne pas faire de politique sur ce dossier-là. Parce que ce n'est pas nous qui l'a légalisé, mais c'est bien le gouvernement fédéral, et vous l'avez bien dit tantôt. Et mon collègue de Saint-Jérôme en a fait un exposé tout à fait enflammé cet avant-midi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : M. le député, il n'y avait pas de question de règlement, parce que les propos n'étaient pas... Il n'y avait pas de prêt d'intentions dans les propos de Mme la députée de Repentigny. Elle faisait l'illustration  de représenter sa population versus représenter des intérêts de compagnies productrices. Il n'y avait pas de prêt d'intentions qui vous était donné là-dedans.

Une voix : ...

Le Président (M. Merlini) : Je vous en prie. Merci, M. le député de Maskinongé. M. le député de Saint-Jérôme.

Une voix : ...

Le Président (M. Merlini) : Oh! Excusez. Oui, Mme la ministre, absolument, en réponse à Mme la députée de Repentigny.

Mme Charlebois : Oui. Parce que je n'aime pas qu'on dise qu'on banalise les choses. Au contraire, je le répète, c'est loin de banaliser les choses quand je dis qu'il y a eu une commission. Le député de Labelle en a fait état, du rapport qui a été fait. Ça a été examiné même la semaine dernière. Ce n'est pas ça, là. Puis ce n'est pas juste la SQDC, là, qui doit s'approvisionner ou faire affaire avec des compagnies qui sont... C'est que ce n'est pas la bonne instance. Si on règle un cas par cas, par cas, ça ne va pas avancer. S'il y a une députée qui travaille pour sa population, et ce, depuis 2003, Mme la députée de Repentigny, c'est moi, ici. Je vous invite à aller faire la visite de mon comté. D'ailleurs, votre chef se tient là. Il va vous le dire. Il va vous le dire parce qu'il y a beaucoup de gens qui lui disent déjà. Je peux vous dire, là, il rencontre du monde, là, puis il s'aperçoit que je fais mon travail. Alors, ne dites pas que je banalise les choses et que le gouvernement banalise les choses, parce que le...

Mme Lavallée : ...

Le Président (M. Merlini) : Oui, effectivement. Effectivement, Mme la députée de Repentigny, je le reconnais, là. Mme la ministre, il faudrait faire attention aux propos, de ne pas prêter l'intention ou de...

Mme Charlebois : Mais elle l'a dit, qu'on banalisait les choses.

Le Président (M. Merlini) : Non, non. Non, non, non. Pas du tout. Ce n'était pas dans ce contexte-là qu'elle a mentionné le mot «banaliser». Alors, s'il vous plaît, ne pas lui donner cette intention-là, où il n'y avait pas dans son propos, là, une intention de dire que le gouvernement banalisait quoi que ce soit, là, par rapport à ça, là.

Mme Charlebois : Dans quel contexte qu'elle a étudié... elle a utilisé le mot «banaliser», M. le Président?

Le Président (M. Merlini) : Non, non. Il faut d'abord revenir à l'amendement qui est proposé ici. Moi, je n'ai pas retenu d'intentions dans l'utilisation du mot «banaliser». Comme j'ai déjà dit ici, je vais le répéter encore une fois, à un moment donné, oui, il y a des mots qui peuvent donner une interprétation différente aux propos que l'on dit. Sauf qu'on ne peut pas commencer à bannir tous les mots du dictionnaire, là. À un moment donné, il faut que je laisse... pas laisser passer des choses pour les laisser passer, mais permettre l'expression d'une idée comme elle est, comme elle est présentée, sans prêt d'intentions. Alors, je ne l'avais pas dicté à ce moment-là, mais...

Mme Charlebois : ...le verbatim, M. le Président. Ça me ferait plaisir de voir dans quel contexte ça a été formulé. Mais moi, j'ai bien entendu...

• (15 h 30) •

Le Président (M. Merlini) : Alors, continuez. Continuez, Mme la ministre, là, vous êtes...

Mme Charlebois : J'ai bien entendu qu'il y avait de la banalisation des choses.

Alors, c'est vrai que la population a des attentes. Et j'en suis très consciente. Mais ce que je veux dire aussi, c'est que la population a des attentes à ce qu'on fasse notre travail correctement dans les instances appropriées. Et l'instance appropriée, c'est là où Revenu Québec est, où l'Autorité des marchés financiers est, la GRC, les instances internationales. Bref, le ministère des Finances est le mieux placé pour gérer l'ensemble de l'oeuvre, pas à la petite journée, à chacune des entreprises, il faut voir ça dans l'ensemble de l'oeuvre.

Alors, moi, je pense qu'on fait notre travail, mon collègue de Montmorency veille au grain sur ce dossier-là. Et je vous garantis que, si on ne prenait pas ça au sérieux, il n'y aurait certainement pas eu une réponse du ministre des Finances au rapport de la commission, puis il n'y aurait certainement pas eu des études qui ont été faites la semaine dernière. Moi, je veux bien, là, qu'on dise qu'on ne veut pas, puis que, là, il faut, puis... Il faut se ramener à la mission de la Société québécoise du cannabis, M. le Président, je le rappelle. Et ce que la population s'attend, c'est qu'on fasse les choses aux bons endroits pour les bonnes raisons. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Est-ce que j'ai d'autres interventions? Oui, M. le député de Saint-Jérôme. Effectivement, vous avez la main levée.

M. Bourcier : Oui. Mme la ministre, je veux vraiment témoigner que vous ne banalisez pas vos efforts, et je sais que, durant tout l'été, vous avez fait la tournée de plusieurs endroits pour écouter les doléances des citoyens en compagnie de mon collègue de Labelle, et c'est des efforts que je tiens à souligner. C'est important, là, vous avez travaillé très fort.

Je reviens justement aux visites que j'ai faites au Nouveau-Brunswick, et on a reçu des gens de l'Ontario, et je reviens sur leurs inquiétudes, et, oui, ces gens-là sont inquiets. On les a écoutés, on a partagé avec eux leurs inquiétudes. Je leur disais d'ailleurs qu'au Québec vous étiez en tournée, Mme la ministre, avec mon collègue à travers plusieurs villes du Québec. Vous avez fait pas mal le tour du Québec, là, vous vous êtes promenée pas mal. Je pense qu'on n'a pas à banaliser vos efforts, au contraire, et ceux du gouvernement par ricochet.

Je vous mentionnais que les gens du Nouveau-Brunswick, oui, ils étaient inquiets, pareils comme nous. Ils étaient au point justement où on parlait des producteurs, quand on les a quittés, ils en étaient à ce point-là de leur discussion, et je sentais dans leurs propos et dans les discussions libres qu'on avait qu'ils étaient un petit peu, je dirais, inquiets des sources ou des producteurs qui auraient pu leur fournir. Ils se fiaient beaucoup sur le fédéral, entre autres.

Quant à ceux de l'Ontario qu'on a vus la semaine dernière, leur difficulté puis leur problème à eux, ils étaient de la même nature, et eux, encore différent peut-être d'une réalité québécoise, parce que j'entendais... Tantôt, Mme la députée de Repentigny disait qu'on était pour mettre notre propre couleur dans ce projet-là. Bien, eux, leur couleur, là, c'est qu'ils ont des magasins illégaux partout à Toronto et que... Leur gros problème, en plus des fournisseurs et de vérifier les sources, c'est de fermer, ultimement, ces magasins-là, ils appellent ça des «cannabis retail store», ils en ont une centaine. C'est de les fermer, ultimement, et de les remplacer par leur propre SQDC, donc, je sais qu'ils ont une appellation différente. Donc, c'était leur principale difficulté, et ils étaient inquiets de ça aussi.

Je vous ferai part également qu'il y a plusieurs villes au Québec qui se créent des commissions spéciales pour aider le gouvernement à appliquer la loi puis peut-être apporter, eux, leur propre couleur à travers les différentes villes, leur différenciation ou peut-être leur manière d'appliquer le règlement, plusieurs villes, dont celle de Saint-Jérôme qui a une commission sur le cannabis aussi afin de vérifier l'application de la loi sur le gouvernement.

Mais il ne faudrait pas que la population du Québec pense que la SQDC s'approvisionne ou s'associe à des personnes et/ou à des producteurs liés directement ou indirectement au milieu illicite. C'est ça qu'on essaie de sortir de l'histoire ce matin. C'est ça qu'on fait. C'est ça que mon collègue de Labelle fait. C'est ça que les gens de la deuxième opposition font aussi et c'est ça que le parti au pouvoir, le gouvernement tente de faire aussi. On en est très conscients, on apprécie ça. Ce qu'on vous demande, Mme la ministre, M. le Président, c'est de s'assurer hors de tout doute que l'approvisionnement est libre de toute personne ayant eu lien direct ou indirect avec le monde illicite. C'est notre inquiétude. C'est l'inquiétude de tous les Québécois. On parle d'une perception dans la population. Il faut vraiment avoir l'air plus blanc que blanc. C'est notre responsabilité en tant que législateurs.

Et moi, je crois que c'est le travail de la SQDC de remplir les failles du projet de loi C-45 du gouvernement fédéral, qu'on ne veut pas mais qu'on est obligés de subir. Et je reviendrai toujours là-dessus : le gouvernement fédéral nous impose, et le Québec, il est à genoux, il est obligé d'accepter. Quand bien même, par contre, que je dirais qu'on pourrait peut-être resserrer nos critères, même aller à l'encontre du gouvernement fédéral pour qu'il y ait possiblement des poursuites... On doit aller plus loin que qu'est-ce que le gouvernement fédéral nous permet de faire, c'est ça qui fait la force du Québec. On est plus que distincts, on est une nation différente des autres, il faut montrer notre différence en étant meilleur que le gouvernement fédéral. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Saint-Jérôme. Est-ce que j'ai d'autres interventions à l'amendement proposé par le député de Labelle? M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bien, je remercie mon collègue. Je veux juste faire un peu de pouce sur ce qu'il disait par rapport au gouvernement fédéral. Vous savez que la réputation, présentement, du gouvernement fédéral, c'est d'être une passoire par rapport aux paradis fiscaux, hein? De plus en plus, c'est ce que tout le monde conclut, là, et le gouvernement, présentement, au fédéral, a subi énormément de critiques à cet égard-là, hein? On a juste à ouvrir les journaux ou encore à aller sur les médias sociaux, presque à tous les jours, maintenant, le gouvernement du premier ministre Justin Trudeau est interpelé à cet égard-là. Et, quand la ministre nous dit : Bien, on s'en remet justement au gouvernement fédéral, qui les autorise, ce n'est pas sécurisant, là, ce n'est pas sécurisant.

Et puis la ministre nous dit : Bien, ce n'est pas le rôle de la SQDC. Mais ça pourrait être son rôle, celui de s'assurer que les entreprises qui vont approvisionner les Québécois, ce soient des entreprises qui sont transparentes, des entreprises qui paient leurs impôts au Québec, au Canada, c'est ça que tout le monde veut, là. Le député de Maskinongé nous a dit tantôt : On est à l'écoute de nos concitoyens. Alors, je nous lance un petit défi, tout le monde, là, tout le monde ici, là, en fin de semaine, faites un petit sondage, demandez à vos concitoyens : Est-ce que la SQDC devrait s'approvisionner exclusivement d'entreprise qui ne fait pas affaire dans les paradis fiscaux, dont tous les actionnaires sont transparents et ne font pas partie des paradis fiscaux? Alors, quand vous allez demander à vos concitoyens, là, s'ils sont d'accord avec ça, là, je pense que le score va être très, très, très élevé. Et pourtant ce qu'on est en train de légaliser, c'est de former une entreprise qui, nous savons sciemment, fait affaire avec des producteurs qui sont financés via des paradis fiscaux. Ce que l'on ne souhaite pas.

Alors, moi, à moins que la ministre ou à moins que les légistes me confirment que, non, ce n'est pas possible, on ne peut pas donner le mandat à la SQC de faire affaire avec des entreprises qui ne font pas affaire avec d'autres qui sont financées dans des paradis fiscaux... Si légalement on ne peut pas l'écrire, parfait, je vais retirer ça tout de suite, je vais dire : Bien, on ne peut pas le faire. Mais je pose la question, la question est très simple : Est-ce que c'est légal? Est-ce que nous pouvons écrire dans la loi ce que nous avons déposé comme amendement, qui dit que la filiale a, entre autres, pour mandat à cette fin, notamment, «acheter du cannabis produit à des fins commerciales par un producteur ou transformateur de cannabis ayant démontré que son financement ne provient pas de paradis fiscaux»? La question est simple : Est-ce qu'on a le droit de mettre ça dans la loi? Je veux juste savoir si on a le droit de mettre ça dans la loi. Est-ce qu'on peut me répondre là-dessus?

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Mme la ministre.

• (15 h 40) •

Mme Charlebois : M. le Président, ça, ça me fait penser à des sondages d'une certaine compagnie, tu sais. Demandez-lui s'il préfère un gâteau au chocolat versus un gâteau au chocolat, il va vous répondre «un gâteau au chocolat», c'est sûr, le citoyen.

À votre question, c'est sûr que tous les citoyens vont dire : On veut qu'ils achètent exempt du... mais c'est vrai pour toutes les sociétés d'État. Vous demanderez une deuxième question à vos citoyens : Est-ce que ça vous tente de payer 12 fois le prix dans toutes les sociétés d'État au lieu de demander au ministère des Finances de faire ce mandat-là de le gérer à travers ses instances, au lieu de mettre des instances dans chacune de ses sociétés d'État? Je vous invite, M. le député, allez sur Internet, vous allez trouver ça, ici, Paradis fiscaux: Plan d'action pour assurer l'équité fiscale. Ça, ça vient du gouvernement du Québec, plan économique, et c'est fait par Finances Québec et Revenu Québec. C'est assez intéressant à lire, puis je vais le lire en fin de semaine, parce que c'est un sujet qui m'intéresse. Mais je sais pertinemment qu'on n'est pas dans la bonne instance puis qu'on ne peut pas mettre des structures partout. On en a, des structures qui peuvent faire le travail, et on a ici un plan qu'on a déposé. Alors, je vous invite à le consulter.

Mais je répète, je considère que ce n'est pas à la Société québécoise du cannabis de faire ce travail-là. Ce n'est pas une question juridique, c'est une question politique. Mais, quand vous poserez vos questions à vos citoyens, posez les deux questions que je vous ai demandées. Plus on va multiplier les instances pour faire le même travail, au lieu de les concentrer dans une instance, on a Revenu Québec, on a l'AMF, l'Autorité des marchés financiers... Allez lire ça, c'est intéressant, ça, là. On a déjà un plan, vous le savez, il y a une commission qui siège là-dessus, ils ont siégé pas plus tard que la semaine passée.

Alors, moi, je n'ai pas d'autres propos à vous dire que c'est faux que de prétendre qu'on n'est pas intéressés par la chose. Ce que je vous dis, c'est que, là, on est en train de bâtir la société du cannabis, il y a la Société des alcools, il y a plein d'autres sociétés d'État qui font de l'approvisionnement de toutes sortes de choses, qui peuvent avoir à faire avec toutes sortes d'instances. Alors, moi, je dis : Faisons le travail aux bons endroits, puis ici ce n'est manifestement pas le bon endroit.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la ministre. M. le député de Labelle, il vous reste trois minutes.

M. Pagé : Oui. Sauf que la réponse suite à cela, ça a été : On va créer une petite unité pour regarder tout ça. En gros, là, la réponse, là, du volume qu'elle nous a présenté, là, c'est ça : On va créer une petite unité. Parfait, qu'on crée des unités pour réfléchir à tout ça pour l'ensemble de la problématique. Mais là, aujourd'hui, on crée une nouvelle société d'État, nous sommes au jour 1. Et, les Québécois, ce qu'ils nous demandent et ce que l'ensemble de la population demande, c'est : Est-ce qu'on peut s'approvisionner auprès d'entreprise qui montre patte blanche, qui paie ses impôts au Québec, d'une part, et au Canada, qui est transparente, pour qu'on sache qui est derrière ces entreprises-là? On peut dès le jour 1 le faire.

Est-ce que c'est si compliqué que ça de demander à un producteur avec qui on va faire affaire : On voudrait savoir par qui vous êtes financés? C'est si compliqué que ça? Est-ce que c'est si compliqué que ça?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Toutes ces vérifications-là sont faites par le gouvernement fédéral, je l'ai expliqué depuis le matin, mais le mot «fédéral», ça leur buzze dans les oreilles. Et je sais que nous faisons des vérifications, et nous avons un plan d'action pour assurer l'équité fiscale, et nous travaillons là-dessus. Ce n'est pas si compliqué que ça, il faut le faire à la bonne place, point.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Pagé : On a l'occasion de créer une bonne place si, dès le jour 1, on dit... Il n'y a aucun contrat qui est donné encore, on n'a pas encore commencé, là. Si, dès le jour 1, on dit : Montrez-nous qui sont vos actionnaires, et, si vous avez des actionnaires chez vous, on pourrait peut-être mettre une limite, 5 %, 10 %, parce que, bon, hein... mais, si ce n'est pas 90 % de vos actionnaires, à la limite, moi, je préférerais que ce soit 100 % de vos actionnaires, qui sont... qui montrent vraiment patte blanche, ils ne sont pas dans les paradis fiscaux, bien, on ne fera pas affaire avec vous autres. On peut très bien le faire, on peut très bien le faire.

Est-ce que peut-être que, justement, certaines entreprises ne pourront pas nous fournir le 1er juillet, le 1er juillet prochain? Bien, si c'est ça, ce sera ça. Puis ce que ça aura aussi comme impact, c'est que tous les petits producteurs québécois, là, qui souhaiteraient... Le député de Borduas en a parlé assez longuement, puis ça, c'est un autre aspect qu'il va falloir aborder. Si justement on évite d'avoir des mégaproducteurs... Parce que qui va vers les producteurs... vers le financement dans les paradis fiscaux? C'est les mégaentreprises qui vont faire une grosse compétition aux petits producteurs qu'on souhaiterait voir un peu partout à travers le Québec. Et, nos petits producteurs, là, l'UPA, là, et la fédération... l'association des 900 producteurs de serre au Québec, là, quand ils sont venus nous dire : Nous, là, on veut produire au Québec, est-ce qu'ils ont les moyens aussi faciles d'aller se financer dans les paradis fiscaux? Si ce sont des petites entreprises, on va les connaître, les propriétaires, ça va être des propriétaires québécois, ça va être des producteurs québécois, puis on va savoir non seulement qu'ils produisent au Québec, d'une part, mais, d'autre part, qu'ils vont payer leurs impôts au Québec.

Alors, on a tout intérêt à l'inclure. Parce que, là, ce que j'ai compris, là... Parce que je n'ai pas eu la réponse claire, mais, dans la réponse, là, il fallait quand même conclure que, oui, c'est possible de l'écrire dans la loi. Il n'y a personne, de l'autre côté, qui va me dire que ce n'est pas possible, dans la loi, de ne pas inscrire qu'on veut que les producteurs montrent patte blanche et qu'ils ne fassent pas affaire avec des paradis fiscaux. Donc, si c'est possible de le dire, compte tenu qu'on est au jour 1, allons-y tout de suite.

Alors, je ne peux pas comprendre, M. le Président, que le gouvernement aille à l'encontre de toutes ces motions qu'on a votées à l'unanimité, qui disaient justement, hier, qu'on veut exclure le financement qui est socialement... on veut du financement qui est socialement acceptable. Alors, ce qu'on est en train de me dire : Bien, le financement des paradis fiscaux, bien, finalement, c'est socialement acceptable. C'est ça, la conclusion.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Labelle. Est-ce que j'ai d'autres interventions à l'amendement proposé à l'article 23.2? Je n'en vois pas. Je vais donc mettre l'amendement du député de Labelle aux voix.

Une voix : Un vote par appel nominal.

Le Président (M. Merlini) : Le vote par appel nominal est demandé. Pour, contre ou abstention, Mme la secrétaire.

La Secrétaire : Oui. M. Pagé (Labelle)? M. Pagé (Labelle)?

M. Pagé : Pour.

La Secrétaire : Mme Charlebois (Soulanges)?

Mme Charlebois : Contre.

La Secrétaire : M. H. Plante (Maskinongé)?

M. Plante : Contre.

La Secrétaire : M. Dubuc (Simard)? M. Simard (Dubuc), pardon.

M. Simard : Contre.

La Secrétaire : M. St-Denis (Argenteuil)?

M. St-Denis : Contre.

La Secrétaire : Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?

Mme Simard : Contre.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : M. Merlini (La Prairie)?

Le Président (M. Merlini) : Abstention. Alors, l'amendement proposé à l'article 23.2 est donc rejeté. Nous revenons donc à l'article 23.2 tel qu'amendé. Est-ce que j'ai des interventions? M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. J'aimerais faire une proposition d'amendement pour l'article 23.2.

Le Président (M. Merlini) : Alors, allez-y pour la lecture.

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors : Modifier l'article 23.2 de la Loi sur la Société des alcools du Québec, proposé par l'article 5 du projet de loi, par l'insertion, après le premier paragraphe du premier alinéa suivant... pardon, du premier alinéa, la section suivante :

«La filiale doit s'approvisionner majoritairement auprès de producteurs québécois. Les producteurs doivent avoir obtenu l'autorisation de l'Autorité des marchés financiers.»

Alors, le texte, tel qu'amendé, se lirait ainsi :

«23.2. La filiale a pour objet de réaliser la mission de la société portant sur la vente du cannabis. À cette fin, elle peut notamment :

«1° acheter du cannabis produit à des fins commerciales par un producteur de cannabis qui possède les qualités et satisfait aux conditions déterminées par un règlement du gouvernement pris en application du premier alinéa de l'article 19 de la Loi encadrant le cannabis (indiquer ici l'année et le numéro de chapitre de la présente loi ainsi que le numéro de l'article de cette loi qui édicte la Loi encadrant le cannabis);

«La filiale doit s'approvisionner majoritairement auprès de producteurs québécois. Les producteurs doivent avoir obtenu l'autorisation de l'Autorité des marchés financiers.»

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup. Nous allons faire les copies et la distribution pour que les membres puissent en prendre connaissance.

Je suspends donc les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 48)

(Reprise à 15 h 54)

Le Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons donc nos travaux après la distribution de la proposition d'amendement. Nous pouvons continuer. Alors, j'invite maintenant M. le député de Borduas à nous expliquer sa proposition d'amendement à l'article 23.2. À vous la parole.

M. Jolin-Barrette : Donc, dans la proposition d'amendement, M. le Président, il y a deux volets. Le premier volet, c'est au niveau de l'approvisionnement. Et j'ai repris les termes, là, que la ministre employait tout à l'heure, à savoir qu'il faut faire en sorte que la majorité de l'approvisionnement se fasse auprès de producteurs québécois, puis ça, je pense que ça va dans le sens de sa volonté, le fait que la SQDC favorise l'économie locale, favorise l'économie régionale, et de permettre aux gens qui veulent entrer dans ce marché-là au Québec, bien, qu'ils puissent le faire, mais surtout d'envoyer un signal clair à la Société québécoise du cannabis qu'elle doit s'approvisionner principalement, majoritairement auprès de producteurs qui offrent des emplois au Québec, qui participent à l'économie québécoise. Alors, ça, c'est le premier volet de l'amendement et ça permet de s'assurer d'avoir des retombées économiques au Québec.

Je propose à la ministre de l'inscrire dans la loi parce que je considère que les directives ne sont pas suffisantes, la preuve étant que la Société des alcools du Québec, avec le peu de place qu'elle fait aux producteurs québécois de vins, de spiritueux... bien, on constate que les directives, ce n'est pas suffisant.

Là, on a un nouveau modèle, on a une nouvelle organisation qui est créée, la Société québécoise du cannabis. C'est le temps de mettre ça directement dans la loi pour dire : Bien, pour cette filiale-là, voici ce à quoi on s'attend de vous, voici la directive de l'Assemblée nationale, voici la directive de la population.

Le second volet...

Le Président (M. Merlini) : ...M. le député.

M. Jolin-Barrette : Oui? O.K. Le second volet concerne l'autorisation de l'Autorité des marchés financiers, parce que la SQDC, dans le fond, va s'approvisionner auprès de producteurs. Nous, ce qu'on propose, c'est la même chose qu'il y avait au niveau de la probité. Et ça peut rejoindre, dans le fond, les contrats gouvernementaux. On l'a vu, que... Lorsqu'on a modifié la loi, en 2012, ça faisait en sorte que, si vous vouliez contracter avec l'État, bien, vous deviez avoir l'autorisation de l'AMF pour pouvoir contracter avec l'État. Il s'agit d'un privilège de faire affaire avec l'État.

Alors, ce qu'on propose, c'est de l'étendre à la filiale pour faire en sorte que, si vous souhaitez faire commerce du cannabis, vous êtes producteur, bien, vous devez obtenir votre autorisation, pour s'assurer qu'à la fois les actionnaires, à la fois les administrateurs de l'entreprise qui vont faire de l'argent avec la vente de cannabis, qui entrent dans un marché public avec l'État, bien, leur probité soit assurée. Si c'est bon pour les routes, M. le Président, ça devrait être bon également pour le cannabis.

Alors, ce sont les deux volets à l'amendement que j'ai déposé, et je crois que le mettre à l'article 23.2, ça permet vraiment de bien camper dès le départ, là, ce à quoi on s'attend de la SQDC.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Borduas, pour vos explications. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Je vais vous demander une suspension, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Alors, j'accorde donc... Je suspends donc les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 57)

(Reprise à 16 h 7)

Le Président (M. Merlini) : Nous reprenons donc nos travaux après une brève suspension qui nous a permis de discuter certaines choses hors micro. Mme la ministre, vous aviez la parole.

Mme Charlebois : Bien, effectivement, M. le Président, on a discuté certaines choses hors micro, mais, concernant l'amendement du député de Borduas, je suis allée m'enquérir d'information. Et, si vous me le permettez, M. le Président... Parce que, dans ça, il y a des raisons pourquoi... En tout cas, je vais laisser, si vous me le permettez, M. Grandisson, Marc Grandisson, sous-ministre aux Finances, expliquer les raisons pour lesquelles notre article est écrit comme il l'est et pour lequel le député de Borduas nous fait une proposition qu'on ne pourra pas accepter, mais vous allez comprendre pourquoi, et c'est très... Ça s'explique, sauf que je vous dis d'entrée de jeu qu'il y a une partie qu'on peut éventuellement vous proposer pour assouplir les choses concernant l'approvisionnement. Mais on va attendre l'explication puis on parlera du restant après. Ça vous va?

Le Président (M. Merlini) : Est-ce que j'ai le consentement pour permettre à M. Grandisson d'adresser la commission? Le consentement est donné. Alors, s'il vous plaît, vous identifier pour les fins d'enregistrement, et de donner les informations évoquées par la ministre...

M. Grandisson (Marc) : Merci beaucoup. Donc, Marc Grandisson, sous-ministre adjoint au ministère des Finances du Québec.

Donc, oui, pour ce qui est de la première partie de la proposition, de s'approvisionner majoritairement auprès de producteurs québécois, l'enjeu, c'est... Tout le projet de loi a été fait de manière à s'assurer de prendre la part de marché du crime organisé et du marché illégal du cannabis. Donc, il faut s'assurer d'avoir un prix compétitif. Ce qu'on pense, c'est que, si on... Il y a deux choses avec l'approvisionnement en majorité, c'est qu'il faut s'assurer que ce soit toujours fait en conformité avec les accords commerciaux qu'on a avec le reste du Canada. Et l'autre chose, c'est que, si jamais... Parce qu'il n'y a pas beaucoup de producteurs, même au Canada, et il peut y avoir des problèmes d'approvisionnement. Et ce qui peut faire en sorte que, pour que la société suive cette directive-là, il faudrait qu'elle achète peut-être plus cher que le prix du marché général au Canada, ce qui viendrait rendre le produit moins compétitif contre le marché noir au Québec. Donc, déjà, il va y avoir des défis, pour la nouvelle société, de compétitionner contre un système qui est complètement illégal, et qui ne paie pas bien ses employés, puis qui ne paie pas d'impôt. Le plus qu'on ajoute de contraintes à la société pour l'approvisionnement, le plus qu'il y a des chances que ça fasse monter le prix et qu'on soit moins compétitifs par rapport au marché noir. Donc, c'est ça qui avait orienté la discussion là-dessus.

Pour l'Autorité des marchés financiers, là aussi, c'est le même enjeu, c'est que c'est un système... Comme Mme la ministre disait, il y a un système de permis au niveau fédéral que tous les joueurs, au niveau du canadien, qui sont des producteurs vont être sur le même pied d'égalité. Donc, si notre société dit : Bon, moi, j'ajoute une contrainte, c'est qu'il faut que vous obteniez une autorisation de l'AMF pour faire affaire avec moi, dans un marché où il y a peut-être pénurie potentielle, ça va peut-être faire baisser le nombre de producteurs... de fournisseurs potentiels, qui aura aussi un impact sur le prix.

Ce qu'on voit, par exemple, c'est que le fédéral est en consultation en ce moment sur leur réglementation pour les producteurs. Ils ont fait des propositions qui ont été critiquées, et on ne sait pas encore qu'est-ce qu'ils vont avoir comme finale pour... que la réglementation va s'appliquer à l'ensemble des producteurs au Canada. Une fois que ces réglementations-là, fédérales, vont être connues, il va y avoir des réglementations québécoises qui vont être mises en place, et, si le Québec juge, à ce moment-là, que les réglementations fédérales ne sont pas suffisantes, et qu'on a besoin de plus de contraintes sur les producteurs, et qu'on peut se le permettre dans un contexte de compétition dans le marché, le règlement québécois va pouvoir exiger aussi des choses. Est-ce que c'est l'autorisation de l'AMF ou d'autres contraintes qui vont pouvoir être mises si on juge que les réglementations fédérales ne sont pas suffisantes pour assurer l'intégrité du marché? Donc, ce serait ça, l'explication.

• (16 h 10) •

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. Grandisson. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Avant de faire mes commentaires, je ne sais pas si la ministre veut nous dire qu'est-ce qu'elle a l'intention de nous proposer. Parce que je peux faire mes commentaires, mais, dans le fond, ce que je vous dis, c'est : Peut-être que vous devez présenter la globalité de votre proposition pour qu'on puisse en discuter, puis ensuite je ferai mes commentaires. Parce que, si ce que vous présentez, ça nous satisfait...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, je ne sais pas si ça va vous satisfaire, mais je peux vous le présenter, puis, si ça ne satisfait pas, on statuera sur votre amendement puis ensuite on pourra traiter du mien. Comme vous le souhaitez.

M. Jolin-Barrette : Bien, je pense qu'on devrait traiter de tout ensemble.

Mme Charlebois : O.K. Alors, moi, ce que j'allais vous proposer, aux collègues de l'opposition, c'était de modifier 23.2 — pour nous permettre... bon, je vais le lire au complet, là — de la Loi sur la Société des alcools, proposé par l'article 5 du projet de loi, par l'insertion, après le premier alinéa, de l'alinéa suivant :

«L'achat de cannabis visé au paragraphe 1° du premier alinéa peut être effectué prioritairement aux producteurs situés sur le territoire québécois, dans la mesure permise par les accords commerciaux intergouvernementaux et internationaux conclus par le Québec ou auxquels il s'est déclaré lié en application de la Loi sur le ministère des Relations internationales.»

Alors, on vient...

Une voix : ...

Mme Charlebois : ...une erreur sur l'amendement, bon, ça va bien.

Une voix :...

Mme Charlebois : Bon, je vais relire, on recommence, vous allez en avoir une copie. Oui, on zippe ce qu'on a pris, on rattrape, on recommence. Oui, c'est ça.

Modifier l'article 23.2 sur la Société des alcools du Québec, proposé par l'article 5 du projet de loi, par l'insertion, après le premier alinéa, de l'alinéa suivant :

«L'achat de cannabis par la filiale peut être effectué prioritairement auprès des producteurs situés sur le territoire du Québec, dans la mesure permise par les accords commerciaux intergouvernementaux et internationaux conclus par le Québec [et] auxquels il s'est déclaré lié en application de la Loi sur le ministère des Relations internationales (chapitre M-25.1.1).»

Bref, on vient signifier qu'on va, on le dit, là, effectuer «prioritairement». Mais «peut être», ça nous donne la latitude de ne pas contrevenir aux accords commerciaux mais, en même temps, de pouvoir envoyer le message que c'est ce que nous souhaitons.

Mais, pour la partie de l'Autorité des marchés financiers, ça, je n'ai pas de proposition d'amendement à vous proposer. Le texte que j'avais à vous proposer, c'est cela. Alors, voilà. Mais on peut... Il faudrait le distribuer, M. le Président, hein?

Le Président (M. Merlini) : On ne peut pas le distribuer pour l'instant, nous sommes à l'étude de la proposition d'amendement du député de Borduas, pour lui permettre une réflexion sur son propre amendement. M. le député de Borduas, vous aviez des commentaires?

M. Jolin-Barrette : M. le Président, peut-être que la ministre peut nous transmettre une copie d'un éventuel amendement. De consentement, on peut le faire. Puis c'est un texte de travail.

Le Président (M. Merlini) : Oui, ça, on peut faire ça, effectivement.

M. Jolin-Barrette : On ne pourra pas en disposer, mais ça va être une base de travail.

Le Président (M. Merlini) : C'est ça, effectivement. Effectivement, on va procéder à ça. L'autre façon de procéder, ce serait de suspendre l'étude de votre proposition d'amendement pour faire une discussion sur le document de travail qui vous est passé, et ensuite on disposerait de votre amendement, et on ferait, à ce moment-là, ce que la discussion nous dira de faire.

M. Jolin-Barrette : Oui, je consens à suspendre notre amendement, à le suspendre.

Le Président (M. Merlini) : Non, à suspendre l'étude de l'amendement. Alors, si les membres le souhaitent, à la lecture... Souhaitez-vous une suspension des travaux, une brève suspension pour permettre une discussion?

M. Jolin-Barrette : ...qu'on peut faire la discussion au micro.

Le Président (M. Merlini) : O.K. Alors donc, est-ce que j'ai le consentement pour suspendre l'étude de la proposition d'amendement du député de Borduas?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Merlini) : Le consentement est donné. Nous pouvons donc poursuivre une discussion sur le document de travail qui a été distribué. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Dans un premier temps, j'apprécie l'ouverture de la ministre, je l'en remercie. Je pense que c'est en se parlant comme ça qu'on peut faire avancer les choses. Il y a plusieurs éléments qui touchaient l'amendement que j'ai déposé en lien avec celui que vous déposez. Les trois choses, c'est, dans le fond : l'approvisionnement, la probité des organisations, des producteurs qui font affaire avec l'État, avec l'État québécois, avec la Société québécoise du cannabis, avec la SAQ, troisième élément, c'est les paradis fiscaux. Dans mon amendement, je ne traite pas des paradis fiscaux, je traite de l'approvisionnement et de la probité des producteurs.

Là, vous nous dites, dans le fond : On ne peut pas, en vertu... Mais je vais reprendre juste ce que M. le sous-ministre Grandisson nous disait. Le ministère a une problématique de compétitivité. Il dit, dans le fond... Vous dites : Si on favorise uniquement des producteurs québécois, on risque d'être en pénurie sur le marché puis on va être décalés par rapport au prix que le marché noir le vend. Donc, l'argument économique milite en faveur de dire : Bien, on ne veut pas l'indiquer clairement dans le texte, que c'est majoritairement des producteurs québécois. Dans la proposition législative... dans la proposition d'amendement dans le texte de travail qu'on a de la ministre, elle nous dit, bon : On pourrait indiquer que ça doit se faire prioritairement.

Mme Charlebois : ...effectué prioritairement, oui.

M. Jolin-Barrette : Oui. Bon. Là-dessus, je suis assez d'accord. J'ai un problème, par exemple, dans votre libellé, avec le «peut», ça devrait être «doit». Parce que le «peut», là, le «peut», c'est «peut», ça vous donne une possibilité. Le «doit», c'est un «doit», c'est cette obligation-là. Ça, Mme la ministre, je vous le dis, c'est majeur. Votre amendement, il faut que ça soit un «doit», «doit être effectué prioritairement auprès de producteurs situés sur le territoire du Québec». Parce que le «peut», c'est un énoncé de bonnes intentions. Alors, la SQC puis la SAQ ne se sentiront aucunement liées par ça, ils vont dire : Bien, oui, je pourrais le faire, mais je décide de ne pas le faire pour toutes les contraintes économiques, d'où l'argumentaire des Finances.

L'autre élément, on est dans un marché québécois où le monopole de vente est québécois. Il y a l'aspect du crime organisé. À long terme, on vise à l'éradiquer. Honnêtement, demain matin, moi, j'aimerais ça qu'à partir du moment où on met en place les magasins de la SQC, tout le marché illicite aille vers le marché licite. C'est ce que je souhaite. Est-ce que ça va arriver demain matin? Je ne le pense pas. C'est pour ça qu'il va falloir mettre des ressources en sécurité publique afin de pogner ceux qui ne respectent pas la Loi encadrant le cannabis, et on a déjà certaines difficultés présentement, parce que c'est illicite, puis on ne réussit pas à faire le travail pour empêcher les producteurs de drogue.

Sur l'AMF. L'AMF, les autres producteurs des autres provinces canadiennes, je comprends qu'ils ne sont pas soumis à ça. Par contre, à partir du moment où vous êtes dans le marché québécois, ça va être la même règle pour tout le monde. Alors, l'argument de dire : Bien, l'autorisation, elle est fédérale, puis, si vous voulez en vendre au Québec, bien, ça les désavantagerait, bien, je vous dirais, ça, ça ne marche pas vraiment, parce que, si, dès qu'il faut que tu vendes du pot au Québec, ça te prend l'autorisation de l'AMF, tout le monde va passer à travers le même goulot. Alors, ça, c'est pour la question de l'AMF.

Pour la question de l'amendement de la ministre, c'est une avancée, mais il y a une problématique avec le «peut» et le «doit». Alors, je ne sais pas qu'est-ce que la ministre en pense, là. C'est une avancée majeure, je vous dirais. Elle fait preuve d'ouverture. On est contents de cela. Mais, pour envoyer un message clair à la filiale puis à la SAQ, il faut que ça soit un «doit».

• (16 h 20) •

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Simplement pour informer les collègues que la discussion que nous avons présentement est prise dans l'enveloppe globale du 23.2 tel qu'amendé. Mais ça n'enlève pas le temps qu'il vous restera sur l'article lorsqu'on reviendra à votre proposition d'amendement. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Je n'ai rien compris de ce que vous avez dit. On est sur le 23.2 tel qu'amendé? Ça veut dire le dernier amendement du député de Borduas?

Le Président (M. Merlini) : Oui. Le temps que nous utilisons... Le temps que nous utilisons n'est pas sur sa proposition d'amendement mais est bien sur l'ensemble de 23.2 tel qu'amendé.

Mme Charlebois : ...qu'il va y avoir, après ça, l'amendement puis après ça mon amendement?

Le Président (M. Merlini) : Alors, nous reviendrons... C'est ça.

Mme Charlebois : Aïe! O.K.

Le Président (M. Merlini) : Et, si on dispose de son amendement et vous en faites une proposition d'amendement formelle, là il y aura du temps, évidemment, de plus pour votre proposition d'amendement.

Mme Charlebois : De toute façon, je pense qu'on ne travaille pas en fonction du temps. On travaille pour faire un bon projet de loi.

Le Président (M. Merlini) : ...mais je dois vous informer quand même.

Mme Charlebois : Oui. Non, c'est correct. C'est correct. En tout cas, c'est ce que les députés de l'opposition nous disent depuis le début.

Pour répondre au député de Borduas, on peut avoir des règles et, bon, dire à l'AMF, etc. Puis on peut garder le marché noir à 100 %. Parce que les consommateurs québécois vont dire : Pourquoi je vais payer x prix plus cher quand je peux l'avoir beaucoup moins cher sur le marché noir? La légalisation est faite pour contrer ça. Ça fait que donnons-nous les outils pour arriver à pouvoir ramener les gens sur le marché licite. Ça, c'est mon opinion. Voilà pour l'AMF.

Et on vous a dit, dans ce qui... Ce qui va arriver aussi, pour complémenter mon argumentaire, c'est que, M. le sous-ministre vous l'a dit, ça va baisser le nombre de fournisseurs potentiels. Puis, de toute façon, on verra les règlements que le fédéral va avoir faits, puis, une fois le règlement fédéral adopté, nous, on pourra par règlement arriver avec nos propres conditions. Mais on aura une base commune à travers le Canada, et qui va respecter nos accords de commerce.

(Consultation)

M. Jolin-Barrette : M. le Président...

Le Président (M. Merlini) : Un instant. Mme la ministre...

Mme Charlebois : Non, non, c'était juste... Oui.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre avait la parole. Est-ce que vous aviez terminé?

Mme Charlebois : Non, non. Bien, c'est correct, là, il veut me parler.

M. Jolin-Barrette : Sur la question de l'AMF, M. le Président, là, tous les joueurs du marché licite, s'ils ont à passer par là, il n'y a pas vraiment de problématique. Parce que votre marché noir, là, il existe déjà. Ultimement, on veut l'éradiquer. Mais, si vous ne voulez pas que les gens qui opèrent dans le marché illicite se retrouvent à opérer dans le marché licite, bien, il y a un check-up à faire. Si c'est bon pour l'asphalte, si c'est bon pour la garnotte, ça devrait être bon pour le pot aussi. Tu sais, ce n'est pas une contrainte supplémentaire.

Dans le fond, l'État, là, c'est un privilège de contracter avec l'État. Si on ne le met pas, là, avec l'AMF, cette autorisation-là, là, ça fait en sorte de dire : Bien, on ne vérifiera pas la probité des actionnaires. Je comprends que le fédéral, là, va peut-être adopter certaines approches, mais à date ils ont l'air pas mal lousse au niveau du financement de ces organisations-là. Alors, si vous avez quelqu'un qui est reconnu, qui a été condamné pour des activités criminelles de gangstérisme, ou je ne sais pas trop quoi, puis que, théoriquement, il ne devrait pas contracter avec le gouvernement du Québec en vertu des lois qu'on a adoptées, bien, il...

Mme Charlebois : ...gangstérisme, là.

Une voix : ...

Mme Charlebois : Bien là!

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre, le point, je pense qu'il était pour faire une illustration, là.

M. Jolin-Barrette : Oui. Le point, Mme la ministre, que je veux vous amener, là, c'est que, quand le MTQ, il contracte avec un soumissionnaire, là... Actuellement, il faut qu'il obtienne l'autorisation de contracter avec l'État. Là, vous êtes avec un produit que vous vendez. Vous êtes un producteur, O.K.? On sait qu'il semble y avoir du recyclage d'argent, que ça vient de sources de financement... on ne le sait pas trop, O.K.? Vous conviendrez avec moi qu'actuellement les sources de financement des sociétés, il y a un flou assez important qui est là. On le voit à tous les jours, là, dans les médias. Moi, ce que je vous dis, c'est que vous souhaitez que votre société d'État, elle s'approvisionne auprès d'entreprises qui ont une probité. Exemple... Actuellement, là, c'est un nouveau marché qui démarre. Il y a des opportunités pour plein de gens qui sont là. Puis on souhaite que l'État fasse affaire avec des entreprises dont le financement va être approprié. Alors, moi, ce que je vous dis... Vous me dites, vous n'avez pas de levier sur les paradis dans le cadre de votre ministère actuellement. Soit. Si on assujettit ça à l'autorisation de l'AMF, comme il y a pour les autres contrats gouvernementaux, je pense que ça donnerait la possibilité de dire : Bien, écoutez, les producteurs sont autorisés à faire affaire avec l'État, puis ça va encourager la probité, puis s'assurer que les fournisseurs qui veulent vendre à SQDC, qui a le monopole de vente au Québec, bien, ils soient conformes puis aient la probité requise.

Alors, je suis d'accord avec la ministre qu'on doit respecter les accords internationaux. On doit avoir un prix qui est compétitif également. Mais il n'y a rien qui empêche, sur l'aspect AMF, d'avoir cette autorisation-là, et tous les joueurs québécois auraient à obtenir leur autorisation.

Le Président (M. Merlini) : M. Grandisson. Mme la ministre, vous dites que M. Grandisson va répondre?

Une voix : ...

Le Président (M. Merlini) : M. Grandisson, à vous la parole.

M. Grandisson (Marc) : Oui, du côté de... Vous avez raison que, dans un marché où... Puis ma compréhension aussi, c'est que les marchés... les contrats d'approvisionnement, il n'y a aucune firme qui est assujettie à l'AMF, pour le gouvernement, là, les contrats... Vous avez des contrats de service, d'autres contrats, mais des contrats de biens pour la revente ou pour... ça, ma compréhension, il faudrait... c'est qu'il n'y en a pas comme ça.

Là, ici, ce qu'on nous a dit aux consultations, c'est qu'il fallait garder la flexibilité, il fallait... bon. C'est un nouveau marché, et vous avez raison que, si les gens décident de faire affaire avec le Québec, ils vont savoir que c'est ça, les règles, et que tous seraient assujettis aux mêmes règles au Québec. L'enjeu ici, c'est qu'il y a un nombre encore limité de producteurs au Canada et il suffirait que la moitié décide que, bon, pour l'instant, je ne vais pas là, au Québec, vu qu'il faudrait que je fasse des étapes, puis ça prend plusieurs semaines avec l'AMF, je vais me concentrer dans le reste du pays, et ça ferait réduire la compétition pour les appels d'offres de la société, donc monter le prix.

Donc, c'est pour ça qu'on disait : Tant qu'on ne sait pas qu'est-ce que le fédéral va faire dans sa réglementation finale, pour savoir que tout le monde est sur le même pied puis si... Si le Québec est satisfait des règles que le fédéral va mettre, c'est parfait. Sinon, par règlement, on pourrait agir, si on voit qu'on ne met pas en danger l'autre objectif, qui est de prendre le marché au marché illicite. Ce serait ma réponse.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. Grandisson. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Bon, vous êtes soucieux des prix du marché, je le suis aussi. Est-ce qu'on ne peut pas, à ce moment-là, mettre une disposition qui fait en sorte que... Parce que, dans le fond, on ne viendra pas se rasseoir tout de suite, tout de suite pour faire le projet de loi n° 157 de nouveau. Un coup qu'il va être adopté, on va vivre avec les règles. Puis vous allez avoir des habilitations réglementaires, mais il ne sera pas rappelé en commission de sitôt... ou un projet de loi modificateur de ça.

Alors, pourquoi on n'inclut pas une disposition qui permettrait de prendre effet au bout, je ne sais pas, d'une année ou deux années suite à l'entrée en vigueur de la loi fédérale, pour faire en sorte que le processus d'autorisation à l'AMF va rentrer en place dans les mois, années... un peu comme ça avait été fait avec le projet de loi n° 1. Ça, ça avait été fait. Bon, vous aviez ciblé les contrats à hauteur de, supposons, 1 million, puis ensuite c'est descendu graduellement, parce que l'AMF, le temps qu'elle se retourne pour pouvoir absorber tout ça... Ça, ça pourrait être une possibilité qu'on pourrait envisager, pour dire, dans le fond : Bien, ultimement, on souhaite que toutes les entreprises qui vont contracter avec la SQDC, celles-ci vont avoir la probité requise.

Là, vous nous dites : Écoutez, nous, là, on veut tuer le marché noir. Je suis d'accord avec vous. On veut avoir assez de producteurs pour pouvoir être capables de s'approvisionner, d'avoir un prix compétitif. Mais, ultimement, là, on est en transition et on voudrait que tous les joueurs qui vont fournir la SQDC aient la probité requise. Alors, c'est une suggestion que je vous fais, là. Ça pourrait être une sorte de mesure transitoire.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

• (16 h 30) •

Mme Charlebois : Je vous entends pour la mesure transitoire, mais rappelons-nous que la première révision sera au bout de trois ans. C'est la première mesure transitoire que j'ai fait mettre dans le projet de loi n° 157. Ce n'était pas là au début. Je vous le dis, là, quand il y avait rédaction, j'ai dit : Non, je veux que ce soit revu rapidement, parce qu'il y a des ajustements qui vont être nécessaires, parce que, même si on fait la meilleure loi, tout le monde ensemble, là, je vous le dis, ça va évoluer. Il y a des choses qu'on va percevoir puis il va falloir... Puis peut-être que, peut-être même après deux ans, les parlementaires vont décider de dire : On n'attendra pas le trois ans, on va réviser tout de suite, parce qu'il se sera passé telle chose.

Mais ce que je veux vous dire, c'est : Donnons-nous la chance de faire en sorte que c'est une loi puis que l'approvisionnement des Québécois par les Québécois puisse fonctionner, et, les contraintes, on pourra les mettre par pouvoir réglementaire, comme le disait le sous-ministre, si on s'aperçoit que le gouvernement fédéral n'arrive pas. Mais il ne faut pas qu'on ait plus d'embûches. Parce que, là, ceux avec qui on combat, là, ultimement, ce n'est pas avec le fédéral, c'est avec le marché noir. Puis eux autres, là, ils ont déjà commencé à vouloir nous rentrer dedans. Puis ce que vous nous avez envoyé, là, ce n'est pas de bon augure. Ça veut dire qu'il faut se préparer, parce qu'on va être en campagne électorale quand ils vont nous mettre ça dans les jambes, là. C'est pire encore.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Mais ce qu'il faut éviter, là, c'est le recyclage des activités criminelles vers le marché licite. Et, moi, ma crainte, là, c'est que, si on ne le met pas dans la loi tout de suite, là, supposons, cette autorisation-là, pour dire aux compagnies : Si vous voulez rentrer dans le marché, là, peut-être pas pour le 1er juillet, là, mais peut-être pour le 1er octobre, tout ça, là, le temps de s'ajuster, le temps de dire à tout le monde : Partez sur la même ligne, là, puis voici quelles seront vos obligations, bien, on risque d'en échapper, puis on risque d'avoir des situations où il y a du recyclage de produits de criminalité qui vont se retrouver...

Mme Charlebois : ...vous dites que les entreprises que vous faites mention ont du financement illégal?

M. Jolin-Barrette : Ce n'est pas ce que je dis.

Mme Charlebois : Non, mais je le demande parce que, nous, ce qu'on considère, là, c'est que c'est du financement légal que ces compagnies font là, peut-être que, pour votre moral, ce n'est pas bon, puis le mien non plus, mais c'est un financement légal. Là, en ce moment, on est pris avec ça. Je vous entends. Puis on pourra mettre les contraintes, mais moi, je reviens à la base, là, pourquoi on fait tout ça?

M. Jolin-Barrette : Mais là-dessus, M. le Président, là, je veux juste avoir un point de précision : Est-ce que la ministre nous dit que, les compagnies qui sont financées à partir de paradis fiscaux, c'est l'utilisation légale de financement?

Mme Charlebois : Ce que je dis... pardon?

Une voix : ...

Mme Charlebois : ...les producteurs sont approuvés par le fédéral, puis ce que je dis, c'est que moi, à partir du moment où on me dit que les compagnies ont un financement légal et que le fédéral approuve, je n'ai pas de raison de me questionner, là. Mais savez-vous quoi? Si vous voulez faire un questionnement plus tard, on pourra le faire, on pourra réouvrir, on pourra réglementer. Mais pourquoi on va se mettre des contraintes pour faire que les Québécois restent sur le marché noir plutôt que d'acheter leurs produits de Hydropothecary, là, qui produit au Québec, Aurora, qui produit au Québec, à Pointe-Claire? Puis je peux vous en nommer un groupe, là, 78 % des producteurs produisent au Québec en ce moment, là. Vous le savez, là.

J'entends votre argument, mais est-ce qu'on va se priver... on va augmenter le prix de vente d'une façon telle qu'on va être complètement déconnectés du marché? Ce n'est pas ça qu'on souhaite. Je ne pense pas que... ce n'est pas ça qu'on souhaite personne ici, ni vous, ni moi, ni le député de Labelle, ni qui que ce soit. Moi, ce que je souhaite, c'est qu'on puisse avoir la souplesse tout au long du projet de loi. Ce qu'on veut, c'est ramener les gens du marché illégal qui consomment, qui achètent des criminels sur la rue, là... Je ne vous parle pas des compagnies, de leur financement. Moi, je connais du monde qui, en ce moment, achète de gens du crime organisé, qui se soucient très peu de l'état de santé de leurs consommateurs. Est-ce qu'on va maintenir ça parce qu'on va être trop cher, ou si on veut se donner une chance d'être compétitifs? Mais, encore là, on parle, bon, d'approvisionnement majoritairement chez nos producteurs québécois, etc., mais donnons-nous la chance d'être concurrentiels, de ne pas manquer d'approvisionnement. C'est tout ce que je peux vous dire de plus, là.

M. Jolin-Barrette : M. le Président...

15359 M. Jolin-Barrette : ...

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Borduas, juste avant que vous continuiez la discussion... loin de moi d'interrompre la discussion, mais il vous reste neuf minutes pour l'article 23.2.

M. Jolin-Barrette : D'accord. Alors, j'entends bien les arguments de la ministre. Je suis d'accord avec elle qu'on doit avoir de la compétition. Par contre, il faut qu'elle soit consciente qu'il s'agit d'un nouveau marché. Alors, il faut être conscient que ceux qui vont contracter avec l'État devraient avoir la probité requise. Il ne s'agit pas de faire en sorte d'empêcher le développement. C'est au contraire de dire : Vous voulez contracter avec l'État, vous devriez avoir la probité requise. C'est pour ça que je vous propose, si elle n'est pas prête à le mettre maintenant pour cette autorisation-là de l'AMF, de le mettre éventuellement, qui rentre en vigueur après x temps, dans la loi, mais pour que tout le monde au départ sache ce à quoi ils sont assujettis.

Mme Charlebois : ...être faite à la révision de la loi. Trois ans, ce n'est pas long, premièrement. Puis, si vous désirez, les parlementaires vont toujours pouvoir... puis peu importe qui sera le gouvernement, vont toujours pouvoir rappeler le projet de loi et faire les modifications. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Jolin-Barrette : Bien, moi, je pense que, lorsqu'on étudie un projet de loi et qu'on est dedans présentement, on est mieux de le faire, parce que ma...

Mme Charlebois : Il ne faut pas s'attacher les mains.

Le Président (M. Merlini) : Il ne faut pas interrompre. C'est M. le député de Borduas qui a la parole.

M. Jolin-Barrette : Ce n'est pas ce que je vous dis. Je ne vous dis pas de nous attacher. Je dis de prévoir, de faire de la prévisibilité. Et ça ne fait pas aussi longtemps que la ministre que je suis ici, mais je peux vous dire une chose : j'ai appris que, quand on a un projet de loi qui est ouvert, il faut penser tout de suite, à l'avance à ce qu'on devrait mettre, quitte à mettre des dispositions qui rentreront en vigueur un petit peu plus tard. C'est mon opinion. La ministre, présentement, semble ne pas la partager pour des questions commerciales.

Cela étant dit, j'aimerais entendre la ministre sur la proposition qu'elle nous a faite, au niveau de modifier son «peut» par le «doit», parce que, si c'est un «peut», ce n'est pas liant, si c'est un «doit», c'est une directive du législateur vers la SAQ, vers la SQDC.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, on revient toujours à la prémisse de base de baisser le nombre de fournisseurs potentiels. Moi, je pense qu'en indiquant : «Peut être effectué prioritairement auprès des producteurs québécois»... «Situés sur le territoire du Québec» plutôt — excusez-moi — toujours dans la mesure permise par les accords internationaux et intergouvernementaux... Il faut tenir compte de ça, là, on a signé des accords, d'une part, puis, d'autre part, il faut qu'on soit toujours concurrentiels. Je reviens toujours au prix. Il ne faut pas se donner la chance de baisser le nombre de fournisseurs. Puis, le marché, dans deux ans, ni vous ni moi n'est capable de le prévoir. Alors, ajustons-nous en temps opportun.

C'est difficile à ce moment-ci... Je reviens encore avec votre proposition d'AMF, puis ça va être la même chose avec le «doit», là. Si on se circonscrit à «doit», qu'on manque de cannabis, on va être encore pris avec le marché noir.

M. Jolin-Barrette : M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : M. le député.

M. Jolin-Barrette : Là-dessus, là, sur le libellé de la ministre, là, on va l'illustrer, là. «L'achat de cannabis par la filiale — supposons qu'on met "doit" — doit être effectué prioritairement auprès des producteurs situés sur le territoire du Québec....» Ça, là, ça veut dire que la SQDC, là, elle regarde le marché, elle dit : À prix égal, je vais acheter québécois. C'est ça, la première priorité. Moi, comme gestionnaire, là, comme P.D.G. de la SQDC, là, si j'ai un «doit», là, c'est : je regarde, là, qu'est-ce qui est prioritaire, c'est sur le territoire québécois. Si ça m'est matériellement impossible de le faire, à ce moment-là j'irai en Ontario ou j'irai dans les autres provinces canadiennes. Mais mon obligation comme P.D.G., dans un premier temps, c'est d'aller vers le marché québécois. À l'impossible, nul n'est tenu.

Par contre, si on prend votre «peut», je me replace dans les culottes du P.D.G., je suis assis dans mon bureau, je regarde ça, je dis : Bien, je pourrais prioritairement aller au marché québécois, mais je n'ai pas envie. Je n'ai pas envie pour x, y raisons. Je ne ferai pas l'effort d'aller sur le marché québécois. Ça ne me dérange pas. Pour une question peut-être de différence de rentabilité, ou mon «cost» va être moins élevé, pour «peut». Il y a une différence fondamentale là-dessus. Et le «peut», le «doit», ça laisse quand même la latitude avec le «doit», au P.D.G., de dire : Je vais y aller en premier au Québec. Si le marché n'est pas compétitif ou on ne m'offre pas ce à quoi la mission pour laquelle j'ai été engagé répond, dans le fond, si je ne suis pas capable de fournir mes boutiques, là, si je ne suis pas capable de fournir le marché, à ce moment-là j'irai ailleurs. Mais ton obligation, l'obligation avec le «doit», elle est présente.

Alors, moi, je pense que l'amendement de la ministre, c'est une avancée, mais ce serait une avancée avec le «doit», pas avec le «peut», parce que ce n'est pas assez liant.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Je souhaiterais que M. le sous-ministre Grandisson puisse répondre au député de Borduas sur ce «peut» et «doit».

Le Président (M. Merlini) : Allez-y, M. Grandisson, à vous la parole.

M. Grandisson (Marc) : Oui. Ça va être une question d'interprétation et de voir justement... Si les fournisseurs québécois savent que le ministre... que le P.D.G. ou que la société doit prioritairement, et vous l'avez dit vous-même, pourquoi est-ce que la société d'État ne favoriserait pas ces... les raisons que vous avez invoquées, c'est une question de coût. Bien, c'est justement ce qu'on veut éviter, que l'obligation, là, lui rende l'obligation... le prioritaire fasse en sorte que le prix d'achat, à la fin, des produits québécois ait un «premium» dessus. Et donc chaque contrainte qu'on met sur la société de ce côté-là a un potentiel de faire augmenter le prix puis de rendre le produit moins concurrentiel sur le marché.

M. Jolin-Barrette : Mais à l'inverse...

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Borduas, il vous reste cinq minutes. Juste un petit rappel.

• (16 h 40) •

M. Jolin-Barrette : Oui. À l'inverse, le contre-argument à ça, c'est de dire aussi à toutes les business qui veulent faire affaire avec le Québec : Il va falloir que vous vous établissiez au Québec si vous voulez avoir accès à un marché de 8 millions de personnes, à un marché de plusieurs kilos de marijuana à en vendre par année, aussi. Ça fait que l'argument que vous me soulevez, à l'inverse aussi, ça peut être un incitatif à venir s'établir au Québec.

Le Président (M. Merlini) : M. le sous-ministre.

M. Grandisson (Marc) : Encore une fois, c'est un marché, comme vous dites, qui est nouveau, en fait, qui est tellement nouveau qu'il est inconnu, là. Donc, peut-être que vous avez raison, que c'est que les gens vont... ça va tellement être avantageux de fournir le Québec que ça va avoir un incitatif. Mais peut-être aussi que ça va être juste qu'un certain nombre vont le faire puis que ça va faire augmenter le prix. Les deux sont possibles. Donc, c'est trop tôt pour le dire, je pense.

M. Jolin-Barrette : Mais, dans tous les cas, ce qu'on sait actuellement, c'est qu'autant la position du ministère des Finances que la mienne... c'est qu'on ignore les conséquences de nos positions. Et ce que je sais, par contre, c'est que, s'il y a une obligation, dans un premier temps, de regarder ce qui se fait sur le marché québécois, ça risque de favoriser l'entrepreneuriat, puis les retombées économiques au Québec, et les jobs au Québec — ça, vous ne pouvez pas le nier — s'il y a une obligation pour le P.D.G. de vérifier qu'est-ce qui est disponible sur le marché québécois en premier.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Ça peut être ça. Mais ça peut être des prix plus élevés, puis on va favoriser le marché criminel. Ça dépend comment on voit ça. Il y a deux points de vue.

M. Jolin-Barrette : Bien...

Mme Charlebois : Non, mais il y a deux points de vue possibles. Est-ce qu'on veut prendre cette chance-là? Moi, non.

M. Jolin-Barrette : Bien, ce n'est pas blanc...

Le Président (M. Merlini) : M. le député.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, ce n'est pas blanc, ce n'est pas noir. Je comprends, là, ce que la ministre me dit et je comprends ce que M. Grandisson me dit également. Mais il y a une chose qui est sûre, c'est que le «peut», là, c'est un énoncé de bonnes intentions. Le «doit», ça dit, dans le fond : Bien, vous devez le faire, vous devez le regarder. Prioritairement, dans un premier temps, vous allez regarder ce qu'il y a dans votre cour en premier, mais ça ne vous empêche pas d'aller à l'extérieur non plus. Vous n'avez pas d'obligation d'acheter obligatoirement, là.

Mme Charlebois : Non, mais nos fonctionnaires ne sont pas tous tarés à temps plein, là, puis ils ne vont pas... Honnêtement, je ne connais pas beaucoup de gestionnaires de société d'État qui ne veulent pas favoriser le marché québécois, je n'en connais pas bien, bien, sincèrement, dans l'ensemble de l'appareil de l'État, là. Puis je connais plein de fonctionnaires maintenant, là, depuis que je suis ministre, là, puis il n'y a personne qui va me faire dire que ce monde-là, ils sont au détriment des Québécois. Ça, c'est une chose.

L'autre affaire... Puis je comprends votre point de vue, là. Je ne veux pas de... Mon but, ce n'est pas de dénigrer, mais je vous expose le mien, puis je suis une femme passionnée. L'autre chose, c'est qu'on va-tu se donner la chance de... Ce qu'on veut, là, ce n'est pas de faire de l'économie du Québec un marché de cannabis, là, puis qu'on veut... Ce n'est pas ça, là. Ramenons-nous à la base. C'est qu'on veut que le produit qui va être légalisé puisse être vendu à des gens qui sont déjà sur le marché illicite pour qu'on puisse leur vendre sur un marché licite. Mais, pour ça, il faut être compétitif avec le marché illicite, et vous savez, vous avez aussi vu dans les journaux comme moi, que le marché illicite baisse ses prix en ce moment, là. Moi, je l'ai lu dans les journaux. Je n'en achète pas, je ne peux pas vous confirmer ce que je vous dis, mais j'ai entendu ça, là, que ça baisse, puis ça baisse, puis ça baisse.

Alors, si on restreint notre capacité d'être concurrentiels et de ramener nos gens du marché illicite... On va en produire, mais pour les anges, parce que, c'est bien dommage, ils ne l'achèteront pas de nous autres, ils vont l'acheter de producteurs illégaux pour payer le moins cher possible. Parce que les consommateurs de drogue, là, c'est des personnes qui sont en situation de dépendance. Moi, ce que je veux, c'est les ramener vers un marché licite, avoir la chance de leur parler. Je ne veux pas en vendre plus, puis plus, puis plus, puis produire plus, puis plus, puis avoir plein de jobs plus, puis plus. Ce n'est pas ça, l'économie du Québec, qu'on veut faire avec. Puis je suis sûre que ce n'est pas ça que la CAQ veut non plus. J'espère. J'espère que vous ne prendrez pas le pot pour faire l'économie du Québec, ça serait désastreux. Mais je suis sûre que ce n'est pas ça que vous voulez faire, je suis convaincue.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de... Oui, Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, moi, ce que je propose au député de Borduas, parce que, manifestement, sur le «peut» et le «doit», on n'y arrivera pas, je vais le laisser écouler son temps, mais, M. le Président, je lui propose de faire son amendement puis de nous amener au vote, qu'il le mette avec «doit», qu'il prenne mon amendement, qu'il fasse un troisième sous-amendement. On va le voter, mais on n'arrivera pas à s'entendre sur celle-là. Ça, c'est sûr. Mais ce n'est pas parce que je ne veux pas favoriser le marché québécois, là. On le dit : «Peut être effectué prioritairement auprès des producteurs situés sur le territoire du Québec». Si vous tenez mordicus à votre «doit», on va le voter, puis vous direz que vous avez eu le vote sur le «doit». Vous, vous avez voté pour, nous autres, on a voté contre.

Mais je vous le dis, je ne serai pas capable d'aller plus loin que ce que je vais là, en regard des accords puis en regard de... pour l'objectif poursuivi par la Société québécoise du cannabis.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Borduas, il vous reste un peu moins de quatre minutes sur le 23.2 dans son ensemble. Alors, nous sommes sur une discussion sur un document de travail. On a suspendu votre proposition d'amendement. Je ne voudrais pas nécessairement que vous écouliez tout votre temps sur 23.2, parce qu'à la fin des propositions d'amendement il faut revenir à 23.2 tel qu'amendé. Alors, j'aimerais quand même qu'il vous reste un peu de temps, à moins que vous vouliez utiliser votre temps pour poursuivre la discussion, ça, ça vous appartient, mais moi, je veux simplement vous informer de cette situation-là.

M. Jolin-Barrette : Mais, M. le Président, je pense que la ministre manque une belle opportunité de démontrer clairement qu'elle veut favoriser le marché local, et le «doit» n'est pas si liant que cela et ça rejoint les mêmes objectifs.

Deuxièmement, lorsqu'elle dit qu'on souhaite toujours favoriser la production locale, on a eu des exemples très concrets, la Société des alcools du Québec n'est pas le meilleur exemple pour faire de la place aux produits québécois, et elle le sait très bien, on a eu cette discussion un peu plus tôt, aujourd'hui. Alors, la société mère dans laquelle vous incorporez la SQDC, elle-même ne fait pas beaucoup de place aux produits québécois, je pense que c'est source de réflexion.

Alors, je ne déposerai pas un autre amendement simplement pour que vous votiez contre, je vous invite à la réflexion par rapport à votre amendement.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Est-ce que j'ai d'autres intervenants dans la discussion autour du document de travail? M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bien, je salue l'effort de la ministre pour le premier volet, mais je suis tout à fait du même avis que mon collègue de la deuxième opposition, à savoir que le «peut», ça ne va pas très loin, avec le «peut». Tandis que le «doit» force. Mais, en disant «loi»... En disant le mot «doit», on pourrait ajouter plus loin dans l'amendement : «L'achat de cannabis par la filiale doit être effectué prioritairement auprès de producteurs situés sur le territoire du Québec en autant que ceux-ci soient compétitifs», ou quelque chose comme ça, si c'est ça qui les préoccupe. En ajoutant cela, par contre, le P.D.G. aurait l'obligation d'acheter prioritairement québécois et d'aller voir ce qui se fait sur le territoire québécois. Alors, il y a peut-être possibilité de trouver le compromis, mais au moins qui forcerait le P.D.G. à dire : Prioritairement, je dois regarder ce qui se fait ici, au Québec, et d'acheter québécois si c'est compétitif. Alors, je veux bien vivre avec ça.

Puis d'autant plus qu'honnêtement, là, j'aimerais, moi, que, si ça existe, le ministère des Finances... Est-ce qu'ils ont des études quelque part qui pourraient nous faire la démonstration que... On va-tu être compétitifs, on ne sera pas compétitifs? Ils ont regardé ça, ils n'ont pas regardé ça? Parce qu'on présume que, pour avoir une meilleure compétition, il faudra aller sur le marché peut-être hors Québec. Peut-être que, dans les premiers mois ou dans la première année, ça pourrait arriver, parce qu'on n'aura peut-être pas tous les producteurs ici, au Québec. Ça se peut, ça. Mais le projet de loi n'est pas écrit pour les premiers six mois. Un projet de loi est écrit pour le plus longtemps possible, puis on va l'adapter au fur et à mesure. Bon. Puis, si nécessaire, dans un an, dans deux ans, dans trois ans, on révisera.

Mais, cela dit, moi, je pense qu'on pourrait aller un peu plus loin que ce qui est proposé. Puis d'autant plus que, je l'ai déjà dit, mais je le répète, là, les coûts de main-d'oeuvre au Québec, à comparer avec les provinces voisines, souvent il est égal ou moindre. Et le coût énergétique, il est moindre au Québec. Il est moindre qu'en Ontario. Il est moindre qu'au Nouveau-Brunswick. Il est moindre que n'importe où en Amérique du Nord. On passe le temps à le dire et à se vanter, se targuer qu'au Québec on a les tarifs hydroélectriques les moins chers en Amérique. Et l'intrant, dans le coût de production, qui est particulièrement majeur, le plus important, c'est celui du coût énergétique. Donc, à partir du moment où on a un coût de main-d'oeuvre qui est comparable et avantageux, mais qu'on a un coût énergétique qui est moins cher qu'ailleurs, je pense que, si au ministère des Finances, là, on fait une petite étude avec comment ça va se... comment on va se comporter au Québec par rapport à ce qu'il y a autour, dans les provinces voisines, je pense que ça va être assez évident qu'on va probablement être moins cher que les autres. Moi, là, je gagerais un petit deux là-dessus, là, mais peut-être plus qu'un deux piastres en plus. Alors, je ne vois pas pourquoi on est si inquiets que cela quand déjà on peut présumer qu'on pourrait être très, très compétitifs.

Mais là on n'a toujours pas... On a suspendu un amendement pour discuter d'un autre projet d'amendement qui n'a toujours pas été déposé. Moi, j'inviterais, à ce moment-ci... Là, je vais écouter vos directives, M. le Président. Est-ce qu'on doit reprendre à la suspension de l'amendement ou, d'un commun accord, on peut dire : Bien, déposons l'amendement de la ministre, qu'elle nous propose, et il y aura probablement un sous-amendement de notre part ou de la part de la deuxième opposition pour remplacer le «peut» par «doit», puis on en débattra? Mais je pense qu'à ce moment-ci on devrait débattre d'un amendement qui pourrait être proposé, mais, bon, je salue qu'il y a un effort dans la bonne direction, mais je trouve qu'on n'est pas encore rendus à destination, par contre.

• (16 h 50) •

Le Président (M. Merlini) : Nous pouvons, M. le député de Labelle, reprendre l'étude de la proposition d'amendement qui est suspendue. On peut reprendre la proposition d'amendement suspendue à la fin de l'étude de l'article 5 au complet, donc après les 45 articles qu'on a à voir, ou on peut le faire tout de suite. Et effectivement, Mme la ministre, comme la proposition du député de Borduas est suspendue, Mme la ministre pourrait déposer ce document de travail comme étant un amendement formel, et là nous pourrions commencer à débattre formellement de la proposition d'amendement. M. le député d'Argenteuil, vous voudriez intervenir.

M. St-Denis : Oui, bien, j'écoute le débat là-dessus puis tantôt j'ai fait une intervention sur qu'est-ce qu'on souhaite exactement quand on veut protéger les producteurs du Québec. C'est-u la création d'emplois? C'est-u les producteurs comme tels, peu importe d'où ce qu'ils viennent ou qu'ils ne viennent pas? Moi, je nous invite à la prudence. Le fait qu'on s'attarde tellement sur... Le fait qu'on veuille juste acheter ici, ne risquons-nous pas de nous fermer des portes pour que, justement, nos producteurs, avec des travailleurs d'ici, puissent vendre à l'extérieur du Québec aussi? Parce que les autres provinces, si on travaille trop fort là-dessus, les autres provinces vont peut-être faire comme nous. Parce qu'étant donné les arguments que vous avez donnés tantôt, nos coûts énergétiques, la main-d'oeuvre, etc., bien, c'est ça. Ça fait que, tu sais, il y a du danger aussi, là, à ce qu'on ne puisse pas vendre à l'extérieur puis faire travailler nos gens chez nous.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Dubuc.

M. Simard : Merci. J'écoute le député de Labelle puis je suis un petit peu... Je me pose des questions. Le député de Labelle nous dit : Regardez, on a des coûts d'électricité qui sont vraiment moindres qu'ailleurs. On a des travailleurs qui ont une expertise puis qui ne coûtent pas nécessairement... ils coûtent moins cher qu'ailleurs. Mais sauf qu'ils sont tellement médiocres qu'on va leur donner un article qui va les aider...

Une voix : ...

M. Simard : Mais ce que je comprends, c'est ce que ça sous-tend, M. le Président. Je suis en train de dire que, M. le Président, ça prend un article pour s'assurer que... Les Québécois ne seront pas compétitifs. Donc, on va leur donner un article pour s'assurer qu'on va acheter d'eux autres, alors que les Québécois sont plus fiers que ça, M. le Président. Ils sont capables de produire. Ils sont capables de s'assurer que, quand ils vont faire un produit, ils n'auront pas besoin d'aide du gouvernement pour s'assurer d'aller ailleurs, M. le Président. Moi, j'ai plus confiance aux Québécois qu'eux autres, de l'autre côté, M. le Président. C'est ce que je comprends par rapport à ce qu'ils offrent comme solution, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Dubuc. M. le député de Labelle. Ensuite...

M. Pagé : ...demander de retirer ses paroles, quand il laisse entendre que je dis que les travailleurs québécois sont médiocres. Non. Je n'ai jamais, jamais avancé ce...

Le Président (M. Merlini) : Non, effectivement, vous n'avez pas dit ça. Mais, dans l'illustration...

M. Pagé : Non, pas du tout...

Le Président (M. Merlini) : Non, non.

M. Pagé : Et il n'y a rien qui laissait entendre cela non plus, là.

Le Président (M. Merlini) : L'illustration qu'il donnait, ce n'était pas...

M. Pagé : Je pense qu'il est mieux de continuer à dormir, là.

Le Président (M. Merlini) : Non, non, ce n'était pas un prêt d'intentions à votre côté ou de dire que vous aviez dit ou sous-entendu quelque chose de cette nature-là. Je me répète encore une fois, il faut utiliser des termes appropriés, mais on a des exemples à illustrer. On peut penser que c'est un prêt d'intentions ou qu'on pense que l'autre personne aurait dit ceci, mais ce n'est pas le cas. Alors, M. le député de Dubuc a illustré son point, mais effectivement vous n'avez pas ça, O.K.?

Une voix : ...

Le Président (M. Merlini) : Non, non, non. Ça, c'est l'interprétation du député de Dubuc, mais ce n'était pas un prêt d'intentions de le dire comme lui l'a pensé. Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Je ne ferai pas une longue intervention, mais, honnêtement, depuis tout à l'heure qu'on a des échanges sur le même article qui est proposé par le gouvernement... la ministre, et je ne comprends pas pourquoi le «doit» est si difficile à mettre et pourquoi d'avoir l'approbation de l'AMF, c'est si compliqué. Avoir une approbation de l'AMF, je ne vois pas c'est quoi, le rapport avec le coût du produit. C'est une question de sécurité. C'est une question de s'assurer que le milieu illicite ne devienne... ne rentre pas dans un milieu licite. Ce n'est pas chinois. Il me semble que mon collègue a bien présenté son dossier. Et il me semble que, comme prudence, comme gouvernement... De toute façon, le but, ce n'est pas de faire des... augmenter le nombre de consommateurs, surtout pas, hein, il faut retenir ce critère-là, mais c'est de s'assurer qu'on fasse les choses correctement.

Donc, honnêtement, je trouve qu'on s'obstine sur des choses qui... Je ne comprends pas. Je ne comprends pas pourquoi le «doit» est si compliqué à mettre et pourquoi d'exiger des entreprises qu'ils aient l'approbation de l'AMF, ça soit si compliqué que ça. Qu'on mette un délai comme mon collègue l'a dit. Mais, honnêtement, je ne comprends pas. Mais je vais m'arrêter là.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la députée de Repentigny. Mme la ministre, avez-vous l'intention de déposer le document de travail comme un amendement, une proposition d'amendement à 23.2?

Mme Charlebois : Oui.

Le Président (M. Merlini) : Très bien. Alors là, nous avons le choix, comme j'ai indiqué tantôt. Nous pouvons reprendre l'étude de la proposition d'amendement qui a été suspendue, là, du député de Borduas. Nous pouvons laisser la ministre déposer sa proposition d'amendement, et en faire le débat, et reprendre la proposition d'amendement du député de Borduas à la fin de l'article 5, donc après les 45 articles. Le choix vous appartient. Et on pourrait reprendre l'étude de la proposition du député de Borduas, et ensuite la ministre pourrait déposer son amendement, tout simplement.

Mme Charlebois : Oui, mais il vient de me le demander, j'ai dit oui.

Le Président (M. Merlini) : Oui, Mme la ministre a l'intention de le déposer, ça ne veut pas dire qu'il est déposé. Je dois...

Mme Charlebois : Là, on va voter le sien... Je ne sais pas là.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Borduas, voulez-vous reprendre — je vous le demande à vous — votre proposition d'amendement qui avait été suspendue plus tôt pour en disposer, et ensuite la ministre va déposer sa proposition d'amendement?

M. Jolin-Barrette : Je pense qu'il serait approprié de le faire, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Alors, est-ce que j'ai le consentement pour reprendre l'étude de la proposition d'amendement du député de Borduas? J'ai le consentement. Nous revenons donc à la proposition du député de Borduas à l'amendement à l'article 23.2. M. le député de Borduas, avez-vous de quoi à ajouter par rapport à votre proposition d'amendement?

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. J'apprécie l'ouverture de la ministre par rapport à son amendement qu'elle soumettra un peu plus tard. Par contre, il y a des lacunes dans cet amendement-là, au niveau du «peut». Ça devrait être un «doit», une certaine obligation. Je suis pleinement conscient de la nécessité et de l'importance de lutter contre le marché noir et de mettre en échec le crime organisé, qui vend actuellement cette substance, et on souhaite éradiquer complètement le crime organisé du marché. On souhaite les sortir du marché, complètement, finalement. Et, pour ce faire, il va falloir travailler en concertation. Il va falloir que la SQDC, oui, soit compétitive, elle a un mandat de ne pas faire la promotion non plus, on a un mandat aussi de faire en sorte de faire de la prévention pour dire aux gens : Si vous consommez du cannabis, il y a des conséquences sur votre santé. Il y a des conséquences, puis, comme gouvernement, au ministère de la Santé, au ministère des Saines habitudes de vie, c'est la job du gouvernement, c'est la job de l'État québécois de dire : Voyez-vous, il y a des risques. Pareil comme, depuis des années, Mme la ministre le fait bien, ses prédécesseurs l'ont fait aussi, avec le tabac. C'est une lutte perpétuelle, il faut continuer à tous les matins à se dire : Voici les conséquences si vous consommez du tabac, mais ça sera : Voici les conséquences à consommer du cannabis. Ça, on s'entend là-dessus. O.K.

Moi, ce que je dis à la ministre avec mon amendement, c'est deux choses. Il faut favoriser la production locale, les producteurs de serre, les agriculteurs sur le territoire québécois, il faut que les retombées soient au Québec. Tout à l'heure, elle a dit : Ce n'est pas un plan de développement économique, le cannabis. Effectivement, je suis d'accord avec elle, ce n'est pas un plan de développement économique. Par contre, s'il y a un nouveau marché qui s'ouvre, un produit qui devient licite, puis on le vend, puis les Québécois vont s'en acheter, puis qu'il y a des retombées économiques là-dessus, c'est bien mieux que ça reste au Québec que ça s'en aille dans les autres provinces canadiennes ou à l'étranger. Là-dessus, on est d'accord aussi.

• (17 heures) •

C'est le moyen pour y arriver. Je vous dis, j'apprécie l'ouverture de la ministre avec sa proposition d'amendement. Par contre, je trouve que c'est timide. C'est timide dans le sens où... On est d'accord pour respecter les accords internationaux sur lesquels on s'est liés, les accords interprovinciaux en matière de commerce. Je suis 100 % d'accord avec elle, je suis pour le respect de la règle de droit. Par contre, il faut trouver un moyen de dire aux administrateurs qui vont être dans cette nouvelle filiale là, cette nouvelle société là, de dire : Écoutez, là, ce n'est pas juste des voeux pieux qu'on vous indique, là, à l'Assemblée nationale. Comme gouvernement, là, ce n'est pas juste un énoncé de bonnes intentions. Et avec le «peut» c'est ce que ça devient.

Et, lorsqu'on revient au «doit», là, la ministre le sait très bien, avec le libellé qu'elle a, si elle met le «doit», ça laisse quand même la latitude pour être compétitif, ça laisse quand même la latitude au P.D.G. de faire les choix appropriés. Mais par contre il va avoir une obligation de regarder, dans un premier temps, comme gestionnaire averti, il va avoir une obligation de regarder ce qui se fait dans le marché. Et il y a plusieurs projets de loi, souvent, quand on est en commission parlementaire, où ça soulève des questions, le «peut» et le «doit». Je sais qu'on nous soumet toujours... la première proposition, c'est le «peut». À chaque fois qu'on veut quelque chose, là, dans le projet de loi, c'est le «peut». Puis là il faut se battre, il faut se battre puis il faut se battre pour avoir le «doit», puis, dans le fond, on réussit à l'avoir. Je pense que, dans cette circonstance-ci, c'est un élément important sur lequel on devrait réfléchir et qu'il vaut la peine d'obtenir.

Alors, mon amendement, il vient dire un peu la même chose d'une façon différente, de dire qu'on doit s'approvisionner majoritairement auprès des producteurs québécois et qu'ils doivent avoir l'autorisation de l'AMF. Bon. Sur l'AMF, j'ai déjà exposé ma pensée, moi, je pense que ça prendrait la même probité pour tout le monde parce que tout le monde va être dans le même marché licite. On aurait pu mettre une clause de temps pour que ça rentre en vigueur. J'offre des possibilités, j'offre des solutions à la ministre, là. Je lui offre un éventail d'opportunités, là, je cherche juste à lui offrir l'opportunité de bonifier le projet de loi.

Alors, pour ce qui est des producteurs québécois, idéalement j'aurais aimé mieux mon amendement. Je comprends qu'elle va voter contre, mais je suis prêt à faire un bout de chemin sur son amendement à elle de façon à favoriser les régions du Québec.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Borduas. Commentaires, Mme la ministre?

Mme Charlebois : Oui. M. le Président, j'ai entendu tantôt le député de Labelle, juste pour informer le député de Borduas, qui disait : C'est sûr que les producteurs québécois vont vendre les produits moins chers parce qu'on a des tarifs d'électricité moins chers, etc.

Une voix : ...

Mme Charlebois : Non, j'ai dit «le député de Labelle», pas «le député de Borduas». Alors, je répète les propos du député de Labelle au député de Borduas. Alors, si tel est le cas, ça va être facile même si on met «peut».

Je veux aussi vous dire qu'il y a deux aspects au «doit», là. Puis je comprends que la députée de Repentigny, là, ne comprend pas, mais moi, je ne comprends pas qu'elle ne comprend pas que je veux sortir le monde d'un marché illicite. Ça fait qu'on peut ne pas se comprendre toute la journée, là, puis on peut avoir beaucoup de coeur toutes les deux. Puis, s'il y a quelqu'un qui a à coeur les gens qui ont des dépendances, là, regardez-moi, là, je suis la personne qui veut aider tout ce monde-là sur la planète, qu'il n'y a personne ici, là, qui peut prétendre... Moi, je ne suis pas meilleure qu'un autre, puis personne n'est meilleur que les autres, on veut tous aider nos concitoyens.

Moi, ce que je peux vous dire, c'est qu'en termes juridiques on m'indique qu'on se prépare à une bataille. Parce qu'il va y avoir des litiges. Quand on met le «doit», il va y avoir des gens qui vont dire : Bien, moi, j'avais les mêmes propriétés que l'autre, le même produit... Là, on va commencer à s'obstiner juridiquement plutôt que de faire notre travail de vente du cannabis. Et, d'autre part, on m'indique que ce qui est... L'argument de masse, à mon sens, ce qui est le plus important... Il y a un avocat, ici, du ministère de la Justice qui nous indique que, si on met le «doit», on vient de contrevenir à tous nos accords qu'on a signés au Québec. Alors, c'est pour ça que je ne peux pas voter le «doit», je n'irai pas là-dessus, je vais garder le «peut», mais «effectuer prioritairement»...

Et, comme le député de Labelle le disait, c'est sûr que les Québécois vont faire mieux, j'ai confiance, en raison de tout ce qu'ils ont comme opportunités, j'ai confiance en eux. Alors, moi, je peux mettre le «peut» puis je vais vivre avec parce que je le sais, qu'ils auront des tarifs électriques moins chers, parce que je le sais, qu'ils vont faire de leur mieux, je ne suis pas inquiète pour les Québécois.

Je veux juste vous dire que, pour le restant, concernant l'AMF, j'ai déjà fait mon argumentaire, je vous ai fait parler avec le sous-ministre. On ne veut pas dénaturer les accords, mais on ne veut pas non plus ne pas se donner la possibilité d'être compétitifs et de réduire le marché à ce point tel... Éventuellement, là, vous remarquerez, au bout de trois ans, là, moi, je suis convaincue qu'on ne parlera pas bien, bien des producteurs ailleurs qu'au Québec, je suis convaincue de ça, je suis certaine de ça. Alors, avec mon amendement, on va se donner le privilège de tout faire ça, tout en respectant nos accords intergouvernementaux et internationaux.

Je comprends votre intention, je l'entends, mais il y a le marché illicite, le marché criminel qui, comme le disait le député de Saint-Jean, vend en ce moment à ces gens-là. Moi, ce que je souhaite, c'est qu'on puisse, nous, leur vendre, leur vendre un produit de qualité, qui n'aura pas de champignon, qui n'aura pas de pesticide, qui n'aura pas d'herbicide, qui n'aura pas ci, qui n'aura pas ça, à un prix qui sera compétitif avec ceux qui vendent puis qui ne se soucient pas de l'état de santé de leurs consommateurs en ce moment.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre.

Mme Charlebois : Fin de mon argumentation.

Le Président (M. Merlini) : Est-ce que j'ai d'autres interventions sur la proposition d'amendement du député de Borduas? M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Respectueusement, je suis en désaccord avec la ministre relativement à sa proposition d'amendement. Moi, je pense que, si on modifie avec le «doit», ça laisse une très grande latitude, dans le respect des accords interprovinciaux et internationaux. Ça ne vous dit pas que vous devez uniquement choisir, c'est que vous devez regarder dans votre cour et c'est un message pour la SQDC de dire : Votre conduite, elle se fait de cette façon-là. Parce que, si on prend l'exemple de la SAQ, qu'est-ce qui arrive à la SAQ? Est-ce qu'il en rentre beaucoup, des vins québécois? Est-ce qu'ils font une grande place aux vins québécois? Bien, c'est un produit qui est consommé par les Québécois, puis la SAQ, elle, elle décide de s'approvisionner, elle fait des ententes avec des vignerons, avec des compagnies qui vendent du vin, puis elle regarde, elle regarde c'est quoi, sa marge de profit. Elle regarde...

Mme Charlebois : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, mais, la SAQ, vous en avez fait une vache à lait.

Mme Charlebois : Hé! Hé! Tous les gouvernements dans le temps, un instant, là.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je m'amende, je m'amende.

Mme Charlebois : Vos parents ont même voté pour ça!

M. Jolin-Barrette : Tous les gouvernements successifs en ont fait une vache à lait et ont dénaturé la mission de la SAQ, puis maintenant on se sert du vin pour équilibrer nos finances publiques. C'est ça, la réalité, il faut que ça soit le plus profitable possible.

Alors, moi, ce que je dis à la ministre, c'est que, pour favoriser les retombées économiques au Québec, il y aurait lieu de dire... d'envoyer un message au plus haut dirigeant de la Société québécoise du cannabis : Regarde le marché québécois, si tu peux t'approvisionner sur le marché québécois, vas-y donc en premier. Parce que lui, quand il va lire son «peut», là, il va se dire : Bien, oui, oui, je pourrais le faire. Ça finit là.

Alors, on a eu le débat, M. le Président, on pourrait en parler longtemps encore...

Le Président (M. Merlini) : Sur votre amendement, oui.

M. Jolin-Barrette : Sur mon amendement. D'ailleurs, je pense que c'est un amendement qui était modéré et qui venait assurer la probité du marché, aussi, et assurer aussi que tous les acteurs puissent partir, au coup de fusil, en même temps sur la ligne de départ et aient la possibilité, tous, de gagner la médaille d'or. On peut le dire comme ça. Alors, ce sera mes commentaires, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Borduas. Est-ce que j'ai d'autres interventions sur la proposition d'amendement du député de Borduas? M. le député de Labelle.

• (17 h 10) •

M. Pagé : Oui. Alors, on va voter pour, quand même, l'amendement du député de Borduas parce qu'effectivement, que «la filiale doit s'approvisionner majoritairement auprès de producteurs québécois», il me semble que ça fait partie de la volonté que nous avons exprimée unanimement hier matin à la motion qu'on a votée à 110-0 : «Que l'Assemblée nationale réclame [que] la Société québécoise du cannabis [...] fasse en sorte de s'approvisionner majoritairement auprès de producteurs québécois...» C'est du mot à mot de la motion que nous avons proposée, que j'ai proposée hier à l'Assemblée nationale, et le gouvernement a voté pour, tout le monde a voté pour. Alors, on reprend à peu près du mot à mot. Alors, comment peut-on voter quelque chose... ou, à moins, on l'a voté en se disant : Bien, ce n'est pas grave, on vote ça, mais on ne l'appliquera pas. Aujourd'hui, on dit : Bien, il faut appliquer ce que nous avons voté, et ça va dans ce sens-là.

Il y a évidemment le deuxième volet, qui dit que les producteurs doivent obtenir l'autorisation de l'Autorité des marchés financiers. On ne peut pas être contre ça parce que ce volet-là va justement dans le sens de la loi n° 1 que nous avons adoptée lorsque nous étions au gouvernement, en décembre 2012, parce qu'il y avait tellement de collusion puis de corruption qu'on voulait rendre les contrats donnés par l'État beaucoup plus transparents et être sûrs qu'on donnait des contrats à des entreprises qui montraient patte blanche. Alors, d'ajouter cela au projet de loi... D'ailleurs, cette loi, la loi n° 1, je pense qu'elle avait été votée à l'unanimité également. Alors, ce qu'on a là, là, c'est toutes des choses qu'on a votées à l'unanimité, soit par motion ou qui font référence à une autre loi.

Et là ça fait abstraction de ce que l'on souhaitait tantôt, là, par rapport aux paradis fiscaux. Parce que, là, on n'est pas là-dedans, là. Parce que tu pourrais répondre à... tu pourrais avoir ton autorisation de l'Autorité des marchés financiers mais avoir quand même ton entreprise qui est financée en partie par les paradis fiscaux. Alors, ça, ce volet-là, on reviendra ultérieurement d'une autre façon.

Alors, j'ai de la difficulté à voir pourquoi on pourrait être contre cela. Bien sûr, la ministre nous avait proposé un autre projet d'amendement. Je veux juste faire aussi un commentaire à cet égard-là. Parce que, quand la ministre nous dit : Bien, on a peur avec le «doit», par rapport au «peut», en lien avec les accords internationaux ou interprovinciaux, ou je ne sais trop, mais, justement, sa proposition d'amendement qu'elle pourrait proposer, elle dit justement que l'achat de cannabis de la filiale «doit — ou "peut" — être effectué prioritairement auprès de producteurs situés sur le territoire québécois,» et là ce qui suit est important, ce n'est pas là pour rien, «dans la mesure permise par les accords commerciaux intergouvernementaux et internationaux concluent par le Québec», O.K.? Bon. Alors, même le «doit» devrait être en fonction des accords. Il est où, le problème? Là, on cherche un problème où est-ce qu'il n'y en a pas, là.

Alors, c'est sûr qu'on va disposer, dans un premier temps, de l'accord d'amendement de mon collègue de Borduas, mais éventuellement, si on souhaite scinder, bien, soit scinder ou bien rejeter, et que la ministre revienne avec son amendement, bien, on sera d'accord, dans la mesure où on pourra remplacer effectivement le «peut» par le «doit».

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Labelle. Ne voyant pas d'autre... Oui, Mme la ministre. Je vous en prie.

Mme Charlebois : M. le Président, juste pour que le député de Labelle ne pense pas que je fais de l'entêtement intensif sur le «peut» puis le «doit», là, moi, je ne suis pas avocate, mais j'ai du monde compétent qui m'accompagnent, qui ont des diplômes et qui travaillent là-dedans à temps plein. Je ne sais pas c'est quoi, votre formation, moi, je ne l'ai pas. Ça fait que je vais lui demander de s'identifier, si vous me le permettez, et qu'il explique pourquoi ça contrevient aux accords intergouvernementaux et internationaux.

Le Président (M. Merlini) : Mais, comme votre projet d'amendement n'est pas encore une proposition d'amendement, je vais peut-être demander de retenir son intervention pour qu'on puisse disposer de la proposition d'amendement du député de Borduas.

Alors, j'étais sur le point de dire : Ne voyant pas d'autre intervention... M. le député de Borduas, vous voulez intervenir encore une fois? Sur votre proposition d'amendement.

M. Jolin-Barrette : Je vais vous demander un vote par appel nominal.

Le Président (M. Merlini) : Le vote par appel nominal est donc demandé. Pour la proposition, pour, contre ou abstention. Mme la secrétaire.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Mme Charlebois (Soulanges)?

Mme Charlebois : Contre.

La Secrétaire : M. H. Plante (Maskinongé)?

M. Plante : Contre.

La Secrétaire : M. Simard (Dubuc)?

M. Simard : Contre.

La Secrétaire : M. St-Denis (Argenteuil)?

M. St-Denis : Contre.

La Secrétaire : Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?

Mme Simard : Contre.

La Secrétaire : M. Pagé (Labelle)?

M. Pagé : Pour.

La Secrétaire : M. Bourcier (Saint-Jérôme)?

M. Bourcier : Pour.

La Secrétaire : M. Merlini (La Prairie)?

Le Président (M. Merlini) : Abstention. Alors, la proposition d'amendement de M. le député de Borduas est donc rejetée. Nous revenons donc à l'article 23.2 tel qu'amendé. Mme la ministre, vous avez maintenant un amendement à nous proposer.

Mme Charlebois : Oui. En fait, tout le monde l'a dans les mains.

Le Président (M. Merlini) : Oui. Je vais vous demander d'en faire...

Mme Charlebois : On peut dire que je la dépose officiellement.

Le Président (M. Merlini) : Je vais vous demander, pour ce faire, d'en faire la lecture, et nous procéderons immédiatement au débat, puisque tout le monde en a pris connaissance.

Mme Charlebois : O.K. M. le Président, je vous propose de modifier l'article 23.2 de la Loi sur la Société des alcools du Québec, proposé par l'article 5 du projet de loi, par l'insertion, après le premier alinéa, de l'alinéa suivant :

«L'achat de cannabis par la filiale peut être effectué prioritairement auprès de producteurs situés sur le territoire du Québec, dans la mesure permise par les accords commerciaux intergouvernementaux et internationaux conclus par le Québec ou auxquels il s'est déclaré lié en application de la Loi sur le ministère des Relations internationales (chapitre M-25.1.1).»

Le Président (M. Merlini) : À ce stade-ci, l'intervention de votre légiste serait donc appropriée. Est-ce que j'ai le consentement pour permettre à maître de donner les explications sur la proposition d'amendement?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Merlini) : Le consentement est donné. Alors, s'il vous plaît, vous identifier pour les bienfaits de l'enregistrement. À vous la parole.

M. Lord (Jean-François) : Bonjour. Alors, Jean-François Lord, avocat au ministère de la Justice, à la Direction des affaires juridiques, ministère des Finances, ministère de l'Économie, Science et Innovation.

Alors, simplement pour indiquer, par rapport à la référence aux accords, les accords de commerce, évidemment, comme vous le savez, on fait affaire avec un produit qui sera licite prochainement, et qui ne l'est pas encore, donc qui n'est pas, au jour où on se parle, encore couvert par les accords internationaux. Cela dit, évidemment, une fois que la légalisation sera faite, si elle se fait, la situation sera vraisemblablement différente, tant au plan international qu'au plan canadien. Pour ce qui est du plan international, évidemment, comme c'est le gouvernement fédéral qui gère et contrôle les douanes, ça sera donc le fédéral qui verra à voir de quelle façon on contrôlera ou on régira les importations et exportations de ce produit-là. Le Québec, évidemment donc, donnera... à la suite, là, peut-être ajustera certaines mesures au besoin, mais, sur le plan canadien, on a l'Accord de libre-échange canadien qui est entré en vigueur le 1er juillet dernier, donc qui est encore tout frais et qui a spécifiquement prévu... donc c'est l'article 1206 de l'Accord de libre-échange canadien, prévoit qu'à l'heure actuelle, évidemment, l'accord ne s'applique pas au cannabis, mais, lorsque le cannabis sera, à des fins récréatives, légalisé, il y aura des négociations qui vont se tenir pour déterminer de quelle façon chaque partie en régira le commerce.

Bien qu'on ne puisse pas présumer et, surtout de ma propre perspective, je ne puisse pas présumer de ce que le gouvernement du Québec choisira de faire ou de ne pas faire, compte tenu de la philosophie de la trame de fond de cet accord-là, qui est évidemment d'avoir des échanges les plus fluides et libres entre les différentes provinces canadiennes sur le plan commercial, les entraves à la libre circulation du cannabis comme produit commercialisable seront donc réduites au minimum, autant que possible. Donc, ce sera des exceptions qui seront encadrées et contrôlées.

Donc, dans une perspective où on doit s'attendre à ce qu'il y ait une fluidité dans le mouvement des produits entre le Québec et les autres provinces, le choix du mot «peut», à notre avis, fait un peu plus de sens, dans la mesure où on pourra aller utiliser les marges de manoeuvre qu'on se serait préservées pour prioritairement essayer d'aller concentrer les approvisionnements au Québec. Mais évidemment, si on y va avec un «doit», nécessairement on est plus rapidement et plus directement en conflit avec la philosophie de base des accords de commerce, parce qu'à ce moment-là on oblige une concentration ou un achat, au lieu de simplement laisser la faculté. Donc, on arriverait plus directement, à court ou moyen terme, en conflit avec nos engagements. Donc, le choix du «peut», dans la perspective des accords, s'explique de cette façon-là.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Me Lord. Est-ce que j'ai des interventions sur la proposition d'amendement de Mme la ministre? M. le député de Labelle.

M. Pagé : Oui. Bon. Alors, j'ai noté ce que vous avez dit, très, très rapidement. Vous dites : «Fait un peu plus de sens». Alors, vous n'avez pas dit que le «doit» ne fait aucun sens. Je dois donc en conclure que le «doit»... En tout cas, vous n'avez pas dit que c'était impossible de le mettre. Alors, ça, donc, il est possible de le mettre. C'est ce que je dois conclure.

Et là vous parlez d'obligation. Même si on met le «doit», il n'y a pas d'obligation. En ce sens... L'obligation avec le «doit», c'est d'aller voir, d'aller regarder si on est capable prioritairement d'acheter au Québec. C'est ça que ça dit, là, hein? «L'achat de cannabis par la filiale doit — si j'utilise le mot "doit" — être effectué prioritairement auprès d'acheteurs situés sur le territoire du Québec dans la mesure permise par les accords commerciaux», internationaux, bon, intergouvernemental...

Alors, le «doit», là, je ne vois pas le problème. Là, vous allez essayer de... Moi, je vous demande d'essayer de me convaincre, là. Qu'est-ce que ça enlève aux accords commerciaux intergouvernementaux et internationaux? Parce que c'est seulement... On donne, dans le fond, un mandat au P.D.G., là : quand tu te lèves le matin, là, tu dois regarder si tu as un prix compétitif au Québec. Là, tu as l'obligation de regarder ça, là. C'est ça qu'on lui dit, là. Avec le «peut», c'est : regarde si ça te tente, il n'y a pas d'obligation. Il a l'obligation de regarder, mais en même temps l'article lui dit : Une fois que tu as regardé, tu ne peux pas aller contre les accords internationaux ou intergouvernementaux, ou tous les accords contenus, parce que l'article le dit aussi. Alors, il est où, le problème avec le «doit»?

• (17 h 20) •

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Je vais laisser...

Le Président (M. Merlini) : Me Lord, allez-y.

M. Lord (Jean-François) : Si vous me permettez de revenir sur votre première intervention, sur le fait que j'avais dit : «Il fait un peu plus de sens», évidemment, n'y voyez pas là nécessairement, là, de tentative de diriger les débats d'une façon ou d'une autre. C'était par déférence envers les parlementaires, sur les choix qui seront faits au sein de cette commission.

Sur la question plus à proprement parler des accords, je vais simplement vous lire deux lignes, en fait, d'un des principes fondamentaux qu'on retrouve dans l'Accord de libre-échange canadien, où on dit : «Chaque partie accorde aux produits de toute autre partie un traitement non moins favorable que le meilleur traitement qu'elle accorde à ses propres produits similaires...»

Alors, dans l'hypothèse où on prend un producteur québécois, et, bon, je suis dans une hypothèse d'un producteur ontarien, si le P.D.G. de la SQDC a l'obligation par un «doit» de prioritairement aller faire ses achats auprès du producteur québécois, ça crée un traitement plus favorable aux producteurs québécois, au détriment du producteur ontarien, et donc on tombe tout de suite dans une violation de l'accord. Comme je vous ai dit, je prends la peine de vous spécifier qu'au jour où on se parle, évidemment le cannabis n'est pas un produit qui est visé par l'Accord de libre-échange canadien, mais, compte tenu des négociations auxquelles on s'est engagés, à partir du moment où il sera légalisé, s'il l'est, on va nécessairement arriver très vite à ce problème-là.

Donc, à ce moment-là, le «peut» fait en sorte qu'on va aller chercher... évidemment, parce que les choses ne sont jamais complètement blanches ou noires, dans le sens où il peut y avoir différents programmes, ou différentes mesures, ou différentes façons de faire, et on laisse une discrétion un peu plus grande, évidemment, pour aller... puis là, bon, je ne veux pas présumer nécessairement de ce que la SQDC fera, mais on est un petit peu plus respectueux à la fois de l'esprit de l'accord et des préoccupations qu'on a face aux achats de la SQDC.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bien, clairement, ça ne change rien à ce qu'on disait tantôt, là, parce que, si le P.D.G. de la SQDC se rend compte que le prix est plus cher en Ontario, alors il va respecter les ententes et il va acheter le produit québécois, et évidemment, à l'inverse, en fonction des accords.

Alors, le «doit», là, ne touche pas à cela. Le «doit», là, c'est juste pour s'assurer, on veut s'assurer que le P.D.G. va regarder s'il est capable d'aller chercher son produit au Québec, pour ne pas qu'il se réveille un matin puis : Oh! je n'ai pas regardé ce qui se faisait au Québec, puis j'avais une offre, j'avais un spécial qui venait de l'Ontario, puis j'ai sauté dessus, puis je l'ai acheté. Non, avec le «doit», là, avant de sauter sur le spécial qu'il vient d'avoir en Ontario, il va aller vérifier ce qui se fait au Québec, est-ce que je suis capable d'avoir le même prix? C'est ça, l'obligation, là. C'est ça que dit le «doit». Le «doit» ne vient pas à l'encontre des accords intergouvernementaux ou internationaux. Il fait juste en sorte que le P.D.G., là, avant de prendre des décisions, là, il s'assure d'avoir vérifié s'il y a quelque chose de compétitif au Québec, ce qu'il, normalement, de toute façon, devrait faire, hein? On s'entend-u là-dessus? Mais de l'écrire dans la loi, bien, ça le force un petit peu plus à le faire. C'est juste ça.

Alors, je voudrais bien être convaincu, là, mais, avec tout le respect, là, je ne suis vraiment pas convaincu qu'on ne peut pas mettre ça ou que ça va à l'encontre des accords.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Je pense que monsieur...

Le Président (M. Merlini) : Me Lord.

Mme Charlebois : Me Lord a déjà fait un exposé. Avez-vous d'autres arguments à ajouter?

M. Lord (Jean-François) : Pas comme tel, sinon simplement peut-être de terminer en disant que je n'en étais pas nécessairement tant sur la décision du président à un jour donné, dans son achat précis, mais sur la disposition législative. En fait, ce que l'amendement vise, l'inclusion du «doit», à mon avis, nous amène en violation plus rapidement de l'obligation d'accorder un traitement non discriminatoire que si on utilise le «peut».

Le Président (M. Merlini) : Merci, Me Lord. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Vous auriez tout à fait raison si on n'écrivait pas «dans la mesure permise par les accords». Si on arrêtait... si l'amendement proposé par la ministre disait : «L'achat de cannabis [...] filiale doit être effectué prioritairement auprès de producteurs situés sur le territoire du Québec», si on arrêtait ça là, c'est clair qu'on pourrait être en infraction avec les accords. Mais non. Ce n'est pas pour rien qu'on écrit : «, dans la mesure permise — donc "qu'on doit", c'est dans la permission — par les accords commerciaux» internationaux conclus par le Québec. Bon.

Alors, c'est pour ça que je ne comprends pas pourquoi qu'on tient tant au «peut» à partir du moment où on a inscrit cela... Il y a une virgule, là, qui explique, là, dans quelle mesure cela doit se faire. Alors, je ne suis pas convaincu.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Me Lord. Un commentaire?

M. Lord (Jean-François) : Je vous accorde le point, effectivement, sur le fait qu'en ayant mis cette précision-là dans l'amendement, évidemment, on s'assure que, dans tous les cas, on sera dans le respect des accords. Et là-dessus je terminerais en ajoutant que c'est justement dans la perspective de donner une portée réelle à la disposition qu'on souhaite, en fin de compte... qu'à notre avis c'est le «peut» qui devrait demeurer, parce que le «doit», l'inclusion d'un «doit» ferait en sorte qu'avec la fin de la phrase la disposition ne trouverait jamais application, en fin de compte. Le fait d'obliger la SQDC à prioritairement réaliser ses achats au Québec, si on le rend obligatoire d'une façon plus coercitive, comme les accords ne vont pas dans le sens de permettre ça, c'est donc dire qu'on ne sera jamais vraiment capables d'appliquer ça. Alors qu'avec le «peut» on va chercher la marge de manoeuvre qu'on pourrait avoir avec les accords, de le faire lorsque ce sera possible. Donc, c'est là où on essaie de donner la plus large portée possible à la disposition.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Me Lord. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Bonjour, Me Lord. Merci pour vos explications. Donc, ce que je comprends de vos explications, c'est de dire : Bien, si on met le «peut»... mais, si dans l'accord, supposons, interprovincial... Parlons d'interprovincial, ne parlons pas d'international. Si dans l'accord c'est négocié qu'on peut regarder sur notre territoire national dans un premier temps, bon, national, je veux dire provincial...

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Québécois, merci.

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : C'est parce que, vous me permettrez, je pense à Antoine Robitaille qui, dans sa chronique du midi, proscrit le mot «province», j'ai pensé à cela. Bonjour, M. Robitaille.

Alors, si, dans l'accord interprovincial, c'est permis, dans le fond, de favoriser... de regarder dans un premier temps les producteurs québécois en matière de cannabis, il n'y aura pas de problème parce que ça va avoir été négocié. C'est ce que je comprends?

Mme Charlebois : M. le Président, est-ce qu'on peut laisser Me Lord répondre?

Le Président (M. Merlini) : Oui, tout à fait. Me Lord.

M. Lord (Jean-François) : Dans l'hypothèse que vous formulez, oui.

M. Jolin-Barrette : O.K. Si c'est un «doit», vous nous dites, à moins que ça ait été négocié... en fait, si ça a été négocié, ça va être correct aussi.

M. Lord (Jean-François) : Vous m'amenez à m'avancer sur un terrain un petit peu difficile. Cela dit, juste... bon, ayant vécu quand même les longs mois de négociations pour arriver à ça, je peux vous dire qu'avec l'ensemble de nos collègues des autres provinces canadiennes, puis c'est un commentaire plus personnel, là, je serais surpris, disons, qu'on arrive à un résultat où l'amendement avec le «doit» se reflète dans une possibilité qu'on fasse ça une fois qu'on aura négocié ça, le commerce du cannabis.

• (17 h 30) •

M. Jolin-Barrette : O.K. Je peux vous dire que je sais tout le travail et les heures que ça demande de négocier un accord interprovincial comme ça, ou pour vos collègues qui ont négocié l'accord de mobilité de la main-d'oeuvre avec le gouvernement français, ça demande des années et des années de travail, et on sait toute l'ardeur que vous mettez dans ce travail-là, et c'est un travail de moine qui demande beaucoup de discussions, j'en suis tout à fait conscient.

Mais, si on revient, c'est fort possible que le gouvernement du Québec pourrait adopter la position suivante : il pourrait arriver à la table des négociations et dire : Bien, écoutez, moi, le cannabis, je veux que ça soit exclu de l'accord parce que je considère que la production doit être locale. Ça pourrait être une clause d'exclusion de l'accord interprovincial. Parce qu'actuellement il n'est pas dedans, parce que c'est illicite, mais le gouvernement du Québec pourrait arriver avec comme position de négociation : le pot, ça ne fait pas partie de l'accord interprovincial. Ça, ça pourrait être une clause qui serait négociée par le gouvernement du Québec.

M. Lord (Jean-François) : C'est une possibilité.

M. Jolin-Barrette : C'est une possibilité. Je comprends que vous nous dites que la tendance générale dans les accords interprovinciaux, elle n'est pas là, on vise à avoir tout dans le package, tout est inclus, mais parfois ça arrive qu'il y a des exclusions.

M. Lord (Jean-François) : Effectivement, ça arrive.

M. Jolin-Barrette : Et juridiquement vous nous dites que c'est possible que le gouvernement du Québec ait la position suivante : nous, gouvernement du Québec, on ne veut pas que le cannabis soit inclus. Nous, on ne veut pas que le cannabis soit inclus, on veut en faire une clause d'exception et que ce ne soit pas régi par l'accord.

M. Lord (Jean-François) : Je n'ai aucune connaissance d'une position gouvernementale à cet effet-là pour l'instant, là.

M. Jolin-Barrette : C'est ça, mais, ce que je veux dire, c'est une possibilité juridique, ça pourrait être la position juridique du gouvernement du Québec et ça serait défendable.

M. Lord (Jean-François) : Ça pourrait être une position de départ, ça pourrait être tenté, effectivement, avec les autres provinces.

M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, de ce que je comprends, c'est qu'il n'en tient qu'au gouvernement du Québec de dire : Bien, pour moi, le pot, c'est différent, et que je ne l'inclue pas dans l'accord de négociation. Mais je vais vous poser une autre question : Se pourrait-il que les autres provinces canadiennes puissent arriver avec une demande d'exclusion pour le cannabis?

M. Lord (Jean-François) : C'est une hypothèse dans l'ordre des possibilités, mais c'est un peu difficile pour moi, parce que, là, vous m'amenez à extrapoler sur...

M. Jolin-Barrette : Mais c'est une hypothèse...

M. Lord (Jean-François) : ...la position des autres provinces, que je ne connais pas non plus à cet égard-là. Mais, si on y va dans l'abstrait et la théorie, on peut penser que, oui, ça pourrait être une possibilité.

M. Jolin-Barrette : O.K. Tout ce que je veux faire ressortir, M. le Président, c'est qu'actuellement le cannabis n'est pas régi, ce n'est pas un produit qui est régi par ces accords-là, et ça revient au gouvernement du Québec de l'inclure ou de ne pas l'inclure dans sa position de négociation. Alors, le gouvernement du Québec pourrait très bien indiquer son «doit», actuellement, ça ne contrevient pas à l'accord interprovincial, actuellement, et ça pourrait ne pas contrevenir, ça va être en fonction de ce qui va être négocié.

Alors, si jamais le gouvernement du Québec voulait, dans le fond, que ça devienne une partie du marché commun, à ce moment-là il pourrait réamender la loi. Mais je pense qu'actuellement, si la ministre décide de dire : Non, on va favoriser nos producteurs locaux, c'est possible de le faire, actuellement. Moi, c'est ce que j'entends des explications.

Alors, quand la ministre nous dit : C'est impossible à faire, puis on va contrevenir aux accords, il y a des nuances à apporter.

Mme Charlebois : M. le Président, on est rendus aux accords...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : ...le député de Borduas me demande de renégocier les accords, de faire une exception du cannabis. Écoutez, moi, je pense que ça peut être très simple. Puis, si on est tant confiants que ça au marché québécois, M. le Président... On est certains qu'ils ont des avantages à produire de façon... avec des produits de qualité, avec des tarifs compétitifs. Je ne comprends pas, là, je ne comprends pas. Puis c'est ce qu'on souhaite.

De toute façon, vous m'avez proposé tantôt une mesure transitoire. La transition, là, c'est que, dans trois ans, au maximum, on révise la loi. Ça, c'est le maximum qui peut arriver, mais, dans un an, cette loi-là peut être revue, une fois la mise en application... Alors, pourquoi, en partant, se mettre des bâtons dans les roues? Pourquoi faire en sorte qu'on peut baisser le nombre de fournisseurs potentiels? Pourquoi on va se mettre dans un défi, là... Prenons donc le temps de mettre ça en vigueur, puis, si, dans un an, on s'aperçoit que la société d'État ne veut pas acheter du marché québécois, M. le Président, elle sera rouverte, la loi. Donnons-nous le pouvoir réglementaire de le faire. On peut faire ça aussi.

Mais je ne comprends pas pourquoi il faut aller aussi loin que de commencer à vouloir renégocier l'accord, d'en faire un cas d'exception. Tu sais, on fait l'hypothèse que les autres provinces peuvent dire : On va en faire une exception. Aïe! On est rendus loin. On est rendus à prétendre que peut-être les autres provinces... Revenons donc à la base, tu sais? Parce que moi, je peux présumer de bien des affaires, là, puis je peux présumer après ça... Aïe! On peut présumer de d'autres pays puis on peut... Là, là, revenons à la base. Qu'est-ce qu'on veut faire avec la Société québécoise du cannabis? Prendre les gens qui sont sur un marché illicite, qui consomment du cannabis de vendeurs qui ont peu de scrupules pour leur clientèle, qui se foutent de leur état de santé... Qu'est-ce que ce qu'on veut faire, c'est les ramener vers le marché licite en se donnant les moyens d'y arriver.

Alors, tout ce qu'on dit, c'est que, un, on ne va pas se mettre à recommencer à négocier les accords de libre-échange canadiens, intergouvernementaux. Là, on n'est pas là, là. On est dans... Mettons en place une structure qui va faire en sorte qu'on va pouvoir ramener les gens vers un marché légal en leur donnant de l'information, en faisant de la prévention. Je comprends, là, qu'il y a de l'inquiétude puis qu'il y a... Mais faisons confiance à nos producteurs québécois. Moi, je leur fais confiance. Moi, je pense, là, que le «peut» peut très bien faire l'affaire, parce qu'on dit : «L'achat de cannabis par la filiale peut être effectué prioritairement auprès de producteurs situés sur le territoire du Québec dans la mesure permise par...» On le dit, le mot «prioritairement», il doit avoir une signification, le mot «prioritairement», là. Puis je ne peux pas croire qu'un P.D.G. va faire exprès pour aller acheter ailleurs. Mais il y a une chose, par exemple, on va savoir que, si on n'a pas assez... Parce que, quand tu mets le «doit» puis il n'y a pas la quantité suffisante au Québec, un, tu viens de restreindre ton marché. Oui. Oui.

Alors, moi, je tiens à mon amendement. Je comprends que les collègues ne veulent pas, mais je pense qu'on a... Là, je ne peux plus voir de voie de passage, M. le Président. Je n'en vois plus. J'ai essayé de mon mieux. J'ai deux personnes qui sont venues expliquer notre point de vue. Là, je ne peux pas aller plus loin.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Mais là, M. le Président, là, on rame tous... là, on essaie de ramer dans la même direction. Mais là, la ministre, quand elle me dit : C'est hypothétique, tatati ta, ta, ta, ce n'est pas dans l'accord actuellement. Ça ne l'est pas. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Ça ne l'est pas. On nous a confirmé que ça ne l'est pas. Alors, moi, ce que je dis à la ministre : J'ai confiance dans les producteurs québécois. J'ai confiance dans l'entrepreneuriat québécois. Ça, il n'y a aucun problème. Moi, ce que je vous dis, là, pourquoi on veut le mettre dans la loi, c'est pour dire à la SQDC : Ayez cette sensibilité-là. Ayez cette sensibilité-là. Quand vous prenez votre décision en matière d'approvisionnement, ayez cette sensibilité. Ayez cette sensibilité de favoriser, de regarder ce qui se fait au Québec. C'est tout simplement ça.

Et il a plusieurs objectifs, le P.D.G., là. Il y a son prix, il y a la compétitivité, il y a l'élimination du marché noir, il y a la qualité de la substance. Il y a de s'assurer que les consommateurs du marché illicite vont vers le marché licite. Il me semble que ce n'est pas compliqué, là. Je le dis à la ministre, là, je suis d'accord en partie avec elle. Outre ce que je lui dis actuellement, c'est : La position du gouvernement du Québec, quelle est-elle? On peut dire, dans le fond : Bien, on est régis par les accords. Oui, je suis d'accord avec elle. Mais encore faut-il que la substance soit régie par l'accord. C'est sûr qu'on est dans un monde qui vise à favoriser le libre-échange, mais il y a des exceptions pour plein de choses, plein de choses.

Mme Charlebois : M. le Président...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : ...permettez-moi de vous lire quelque chose que mon juriste vient de me présenter. À l'article 1206, aliéna 2 — c'est de même qu'on dit ça? — «les parties engagent des négociations sur l'application du présent accord aux mesures  concernant le cannabis utilisé à des fins non médicales dès que la législation fédérale sur le cannabis utilisé à des fins non médicales aura reçu la sanction royale.»

Un, c'est donc dire que ça va faire parti. Parce que les provinces n'auraient pas négocié ça puis ils n'auraient pas rentré ça dans l'accord si qu'ils n'avaient pas une intention de.

Deuxième élément qu'on vient de me rappeler, puis c'est tellement vrai : les lettres d'intention qu'a signées la SAQ font en sorte que 74 % de la production vient du Québec, dans l'ensemble des lettres d'intention. Si ça, là, ça ne peut pas les convaincre, M. le Président, je ne sais plus qu'est-ce qui va les convaincre.

M. Jolin-Barrette : M. le Président...

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Deux éléments pour répondre à la ministre. Elle nous faire lecture de 1206, aliéna 2, je crois, si j'ai bien compris.

Mme Charlebois : Oui. De l'accord de commerce.

• (17 h 40) •

M. Jolin-Barrette : Et, dans le libellé de ce qui est écrit, ça dit : Les partis s'engagent à négocier au niveau du cannabis non médicinal une fois qu'il sera légalisé. C'est ça qui est écrit, en gros, là, je paraphrase, là : les partis s'engagent à négocier... Non, mais, quand qu'on négocie comme on fait, nous, ici, là, autour de la table, bien, il y a deux points de vue, puis là votre position, elle est dictée en fonction de votre volonté. Alors, si c'est la volonté du gouvernement du Québec de favoriser les producteurs québécois dans ce domaine-là, parce qu'il peut y avoir une série d'exceptions, si c'est ça, le souhait du gouvernement du Québec, à ce moment-là il va dire à son partenaire des autres provinces canadiennes, il va dire : Écoute, moi, là, j'aimerais ça que ça soit rédigé de cette façon-là dans l'accord, dans l'accord interprovincial de commence. Le gouvernement du Québec a toute la latitude pour le faire. Alors, la ministre sait très bien, là, ce que je dis, là. Ça dépend de la position d'où on part.

Pour le deuxième élément, c'est des lettres d'intention, ça ne veut pas dire que c'est eux autres qui vont avoir le contrat. Puis là c'est pour là, là. Alors, M. le Président, j'ai fait la démonstration à la ministre aussi, tout à l'heure, du lieu d'établissement d'affaires et du holding qu'il  possède aussi. Alors, la ministre sait très bien ce que je veux dire.

Alors, je pense, là, qu'on pourrait avoir... On pourrait fermer l'article, là, avec son amendement, je pense que ça serait une belle victoire pour elle, de mettre le «doit», puis ça pourrait nous faire... permettre de progresser le projet de loi, puis d'arriver mardi, là, sur de nouvelles bases, puis de dire : Bien, on continue à étudier le projet de loi, mais on aura envoyé un message clair qu'on souhaite que les producteurs québécois puissent développer leur expertise dans le domaine.

Mme Charlebois : M. le Président...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Ici, j'ai un livre, là, qui s'appelle L'Accord de libre-échange canadien, hein, «Accord de libre-échange canadien», puis je peux le lire en anglais aussi, mais, bon, ça, je ne pense pas que ça va ajouter à la valeur. Quand on met un article dans un accord de libre-échange, je comprends que c'est un engagement, mais j'ai rarement vu un engagement dans un article, dans un alinéa quand on n'a pas l'intention de le faire. Si les provinces l'ont mis là, M. le Président, c'est parce qu'ils ont l'intention... Ils savent qu'il n'était pas légal, le cannabis, ils savent qu'ils veulent le mettre dans l'accord, alors ils s'engagent à le mettre dedans. Bon, ça, c'est le premier élément. Sinon, ils ne l'auraient pas mis dedans, tout simplement, ils auraient passé par-dessus.

Deuxième élément. Je comprends que c'est des lettres d'intention, M. le Président, puis que ce n'est pas des contrats. Je lui donne ça. Mais, quand on signe une lettre d'intention, c'est parce qu'on est intéressé d'acheter du cannabis québécois, là. S'il n'y avait pas eu une intention, ça ne règle pas... Il ne peut pas en faire un, contrat, en ce moment, la Société québécoise du cannabis n'est pas faite. C'est ça qu'on est en train de bâtir. Alors, tu sais, il y a des lettres d'intention. Je vous dis que la production est de 74 % au Québec. Il n'y a rien que je peux faire pour vous convaincre que...

Alors, moi, je vous dis que j'ai confiance aux Québécois, puis je suis convaincue que, le fait qu'on dise que «l'achat de cannabis par la filiale peut être effectué prioritairement auprès de producteurs sur le territoire du Québec», ils sont déjà en marche pour faire ça, puisqu'ils ont déjà signé 74 % des lettres d'intention à du monde qui produisent au Québec. Ça fait qu'ils ne sont pas dans «on va aller ailleurs», là. Puis ce n'est même pas la société québécoise encore, on ne l'a pas créée. Quand elle va être créée, là, ne soyez pas inquiets qu'il va y avoir un reflet de tout ça. Tu sais, il y a toujours la possibilité de voir le verre d'eau, là... si je mets de l'eau, il peut être à moitié plein ou à moitié vide. Je comprends qu'on est en train de légiférer, mais il ne faut pas non plus avoir peur d'avoir peur. Vous l'avez, le verre, vous. Alors, je n'ai pas d'autre commentaire, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, moi, ce qu'on m'a appris, là : quand on fait de la législation, là, il faut être le plus précis possible, puis, si on veut quelque chose, bien, on l'écrit. On l'écrit parce que, parfois, entre le moment où le projet de loi est adopté ici puis son interprétation puis de la façon dont il est exécuté, c'est deux choses. Puis ça s'adonne que souvent il faut modifier les lois parce que ce n'était pas l'interprétation donnée. D'ailleurs, d'ailleurs, c'est déjà même arrivé que le gouvernement libéral adopte un projet de loi, lorsqu'il y a un dossier devant les tribunaux, pour dire : C'est ça, mon interprétation, puis c'est ça que je voulais dire avec ma disposition. Une intervention dans le pouvoir judiciaire. Mais ça arrive de temps en temps.

Alors, ce que je dis à la ministre, c'est qu'actuellement, dans son libellé de texte avec l'accord, c'est que les parties ont convenu d'en parler puis d'en négocier, ça ne dit pas que ça va être inclus. Alors, la ministre le sait très bien, là, elle a la possibilité de mettre un «doit», et elle pourra se gouverner en conséquence, et le gouvernement du Québec pourra se gouverner en conséquence lors des futures négociations. Ce n'est pas liant, actuellement. Ils se sont engagés à négocier, ils se sont engagés à se parler, à voir qu'est-ce qu'ils allaient faire avec ça. Si la législation nationale est adoptée, ça va être la position du gouvernement du Québec, ou si jamais, dans le cadre des négociations, ils arrivent avec d'autres provinces... comme ça, ils vont déjà avoir une base de discussion sur «nous, on pense qu'il faut aller dans ce sens-là».

Alors, deux choix. Soit le gouvernement du Québec dit : Moi, je suis à la remorque des autres provinces là-dessus puis je vais attendre de voir ce qu'il y a dans l'accord, ou : Je légifère sur une question de société de cannabis, de retombées économiques, ici, à l'Assemblée nationale, dans le cadre du projet de loi n° 157, puis je fais un choix, et je décide que je vais favoriser l'entrepreneuriat québécois. C'est un choix.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Est-ce que j'ai d'autres interventions sur la proposition d'amendement de Mme la ministre? M. le député de Saint-Jérôme.

M. Bourcier : ...très bref, M. le Président. C'est le temps de s'assurer, avec les fameuses modifications avec le mot «doit», d'une souveraineté, de favoriser le Québec. Alors, il n'y en a pas, d'accord de signé, alors la voie est libre, on se donne les moyens pour modifier dans les meilleurs intérêts du Québec. J'ai entendu le député de Borduas nous parler de ça, mon collègue en a parlé, alors je suis d'accord avec l'amendement. Donnons-nous les moyens, c'est le temps, là. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Saint-Jérôme. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bien, en fait, le député de Borduas le mentionnait tantôt, là, le législateur ne parle jamais pour rien dire, et, compte tenu que, présentement, en tout respect, je trouve que l'amendement, finalement, ne voudrait pas dire grand-chose, parce qu'avec le «peut» il n'y a même pas d'obligation d'aller voir s'il y a une priorité québécoise, donc, pour qu'on puisse disposer très clairement de nos intentions à tous et à toutes, je vais proposer un sous-amendement, qui va se lire comme suit : Modifier l'amendement proposé par le remplacement de «peut» par «doit».

Alors, je dépose le sous-amendement, et on peut en disposer tout de suite, si vous voulez, mais...

Le Président (M. Merlini) : Très bien. On va faire des copies et le distribuer aux membres de la commission, Mme la secrétaire. Alors, M. le député de Labelle, pour vos explications sur le sous-amendement.

M. Pagé : Bien, écoutez, en tout respect, en tout respect, je pense que, la proposition d'amendement, au final, je ne serai pas contre ça parce que c'est de la vertu, là, mais il n'y a pas d'obligation, il n'y a pas d'obligation là-dedans. Parce que, là, ça pourrait être «peut» sur plein d'autres choses, «peut bien gérer le personnel», «peut avoir des beaux locaux», «peut», mais pas d'obligation. Alors, si on veut que le législateur parle et que ça puisse vouloir dire quelque chose pour vrai, il nous apparaît important de modifier le «peut» par «doit», tout en respectant, comme c'est indiqué et très bien dit par l'amendement proposé par la ministre, «dans la mesure permise par les accords commerciaux intergouvernementaux et internationaux».

Alors, dans le fond, il n'y en a pas, de problème, mais, au moins, ça donne une obligation au P.D.G., puis de se lever le matin puis dire : J'ai l'obligation de regarder si mon produit québécois est compétitif. Donc, s'il est compétitif, je vais acheter le produit québécois. Alors, pour que cet amendement puisse vouloir dire ce que l'on souhaite, c'est la raison pour laquelle je propose le sous-amendement de remplacer le «peut» par «doit».

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Labelle. Mme la ministre, souhaitez-vous intervenir?

Mme Charlebois : Non, moi, j'ai déjà fait bien des plaidoyers pour expliquer la différence entre «peut» et «doit». Je comprends que le député de Labelle n'aime pas mon amendement, c'est le même texte, il insiste pour mettre le mot «doit». Alors, je vais les laisser plaider pour leur «doit». Je n'y crois pas. Je dis encore une fois que, dans l'accord de commerce de libre-échange, le texte dit très, très, très bien : «Les parties engagent des négociations sur l'application du présent accord — donc, c'est en application — aux mesures concernant le cannabis utilisé à des fins non médicales — ça fait que ce n'est pas parce qu'ils n'ont pas l'intention d'en parler — dès que la législation fédérale sur le cannabis à des fins non médicales aura reçu la sanction royale.»

Alors, moi, je ne prendrai pas la chance de mettre en péril un accord de commerce intergouvernemental, d'une part. D'autre part, je considère que nous en avons discuté abondamment. Mais, s'ils veulent en discuter encore, je suis prête à les entendre. Je n'ai pas entendu de nouveaux arguments de la part du député de Labelle, sauf tous ceux que j'ai entendus depuis 20, 40, 50 minutes, on va dire 50 minutes à peu près. Alors, moi, je suis convaincue que, les producteurs québécois, on peut leur faire confiance, on peut faire confiance aussi à la société d'État. Ramenons-nous au but de pourquoi on crée une société d'État.

Et vous dire que, si c'est ce qu'on cherche à faire, de fermer une partie du marché pour nuire au prix, moi, ce n'est pas ce qui me tente, M. le Président. Puis je le dis en tout respect, là, en ce moment, ce qu'on veut, c'est ramener des gens du marché illicite vers le marché licite, et il faut qu'on ait les capacités de le faire, parce que, si on n'est pas compétitifs, ils vont rester sur le marché noir, M. le Président, nos clients, et savez-vous quoi? Le marché criminel se soucie tellement peu de l'état de santé de ses clients. Je ne comprends pas qu'on s'obstine sur un «peut» et un «doit». Mais, s'ils veulent faire un débat d'une heure, 20 minutes chaque, je n'ai pas de problème, M. le Président, on va les écouter.

• (17 h 50) •

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bien, justement, quand elle dit : On veut être compétitifs, le «doit» va justement forcer le P.D.G. à s'assurer qu'il va aller chercher le meilleur prix. Il va être obligé parce que ça va être écrit dans la loi, là : Tu dois aller vérifier si tu as un meilleur prix au Québec. Mais, si effectivement il n'y a pas un meilleur prix, il n'y aura pas d'obligation d'aller acheter québécois. Donc, cette prétention que le «doit» ne donnera pas la chance d'aller chercher le meilleur prix n'existe pas. Ce n'est pas vrai.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Maskinongé, sur une question de règlement.

M. Plante : Oui, M. le Président, parce que, selon notre règlement, on ne peut déposer un amendement ou un sous-amendement qui est identique ou qui s'inspire fortement d'un amendement qui a déjà été rejeté par la commission. Et, si je me rappelle bien, à l'article... mon Dieu, je vais vous lire ça, j'ai lu mon règlement hier, toute la nuit. Alors, 244/22, donc, il faudrait que l'amendement du député de Labelle... ou le sous-amendement apporte des faits nouveaux, à la seule différence qu'on a déjà refusé et rejeté un amendement, précédemment, qui parlait du «doit» très clairement, et, si on regarde à l'article 244/22, on ne doit pas être identique ni en substance ni... et, si on va au 244/28, il disent : «Ne peut être...»

Une voix : ...

Le Président (M. Merlini) : ...finir son appel au règlement, là.

M. Plante : Ils disent : «Peut...» Bon. Il ne doit pas être en tout point identique à un autre amendement qui a été étudié sur un autre article ou même dans le même article quand il a été par la suite refusé. Alors, j'aimerais juste ça, M. le Président, parce que... Puisque le «doit» a déjà été souvent parlé, tout l'après-midi, je veux juste... question comme ça, là. Ce n'est pas parce que je veux retarder.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Maskinongé, sur votre question de règlement. Le sous-amendement porte sur l'amendement qui a été déposé par la ministre et ne fait pas référence à un autre amendement qui était déjà présenté dans un autre article, même si le libellé est semblable avec un «peut» et un «doit», est identique ou semblable. Parce que la nature de ce sous-amendement-là vient sur l'amendement qui a été déposé par Mme la ministre. Donc, je dois rejeter votre appel au règlement, et nous allons poursuivre sur la proposition de sous-amendement de M. le député de Labelle. Vous avez la parole, veuillez continuer.

M. Pagé : Bien, je félicite quand même le député de Maskinongé pour son bel effort, mais, quand il passe la nuit à lire ses règlements, je comprends peut-être que le jour il est un peu fatigué, et là... Non, non, très amicalement, très amicalement. Puis, effectivement, si de toute façon je déposais quelque chose qui est non conforme à nos règlements, il aurait... je respecterais tout à fait l'appel au règlement dont il pourrait faire mention.

Bon. Je reviens, là, parce que j'étais dans un élan, j'ai été coupé. Donc, la ministre nous dit : Il ne faut pas brimer nos accords. Il faut aller chercher le meilleur prix. Bien, on ne brimera pas les accords avec le «doit». Alors, là-dessus, je pense qu'il n'y a personne qui est convaincu de cela. Et je pense que le fait d'ajouter le «doit» va justement forcer le P.D.G. à aller faire une contre-vérification au Québec, et, dans certains cas, cette contre-vérification-là peut juste nous amener à des meilleurs prix.

Parce qu'elle nous dit : Si on veut passer du marché illicite au marché licite, il faut s'assurer qu'on soit compétitifs, qu'on ait les meilleurs prix. Nous sommes d'accord avec ça. Tout le monde ici est d'accord avec ça. Il y a même, justement... Le paragraphe manquant, là, dans les notes, là, faisait justement référence à cela. Alors, bon, on n'a pas de trouble avec ça. Mais le «doit» va justement dans le sens de ce qu'elle souhaite : s'assurer qu'on aille chercher les meilleurs prix. Alors, je veux bien entendre des arguments pour essayer de me convaincre qu'il faut rester au «peut» par rapport au «doit», mais, quand les arguments vont plutôt militer pour un argument inverse, alors j'ai de la difficulté, là.

Le Président (M. Merlini) : Est-ce que j'ai d'autres interventions sur la proposition de sous-amendement? M. le député d'Argenteuil.

M. St-Denis : Mais je comprends mal, parce que c'est comme incohérent un peu, le discours du député de Labelle, parce qu'il dit : Il faut obligatoirement qu'il achète chez nous, il doit checker les prix chez nous obligatoirement, mais dans le but d'aller chercher un meilleur prix. Moi, je pense que, si tu checkes un peu partout, tu as plus de chances d'aller chercher un meilleur prix.

Écoutez, on dit, je vous entends souvent répéter les mêmes choses du côté de l'opposition, je vais me permettre de répéter moi aussi la même chose que j'ai dite tantôt : Si on ferme les frontières aux achats ailleurs, bien, ça veut dire que les autres provinces pourraient emboîter le pas et faire pareil, et vous nuisez aux emplois chez nous, qui vont être créés avec le cannabis. Je vois des réactions de l'opposition, de votre adjoint, monsieur, là. Tantôt, là, hier, vous avez fait des réflexions au sujet de la ministre qui a fait ces yeux-là. Mais là je vous demanderais de calmer votre adjoint aussi quand j'affirme ces choses-là. Puis je pense que ce n'est pas correct de sa part puis ce n'est pas correct de votre part de réagir comme ça. Vous fermez les frontières au Québec et vous fermez la chance de créer plus d'emplois chez nous.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député d'Argenteuil. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bien, très respectueusement, avec mon collègue des Laurentides, je l'invite à aller revoir les verbatim et d'essayer de voir à quel endroit que l'on avance ou on prétend vouloir faire fermer les frontières avec... Il n'y a aucun endroit où on a parlé de cela. Alors, je ne vois pas... C'est pour ça que peut-être il y a eu une réaction, parce que ses propos n'allaient pas dans le sens de ce qu'on a dit, alors on était comme surpris. Et c'est pour ça qu'il y avait un étonnement par rapport à ses propos, parce que ce n'est pas ça qu'on dit, ce n'est pas ça qu'on a prétendu.

Alors, j'ai fait le plaidoyer sur le «doit» par rapport au «peut», alors je pense que ça fait assez longtemps qu'on en parle. Je ne sais pas si le député de Borduas voulait ajouter.

Le Président (M. Merlini) : Est-ce que j'ai d'autres interventions sur la proposition de sous-amendement de M. le député de Labelle? M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Bien, je pense, M. le Président, que ça serait raisonnable d'adopter le sous-amendement du député de Labelle. Ça clorait la discussion. On l'a vu, ça respecte l'accord. Il n'y a rien qui va à l'encontre de l'accord. C'est convenu qu'il va y avoir des discussions. Alors, moi, je dis à la ministre : C'est un signal fort qu'elle pourrait envoyer. Alors, je l'invite à appuyer le sous-amendement du député de Labelle.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Est-ce que j'ai d'autres interventions sur le sous-amendement de M. le député de Labelle? Je n'en vois pas. M. le député de Labelle.

M. Pagé : C'est parce que je comprends que, comment dirais-je... je comprends que la ministre discute avec les gens qui la conseillent à côté d'elle, et c'est tout à fait normal et c'est ce qu'il faut faire. Mais en même temps, comme gouvernement et comme ministre, on a aussi la possibilité d'aller un peu plus loin et de donner une couleur, puis donner une directive, et de dire : Voici jusqu'où je veux aller, indépendamment de ce que peut-être ça pourrait causer.

Et moi, j'ai eu la chance, dans le petit 18 mois où nous avons été au gouvernement, d'être sur le Comité de législation, il se réunit à tous les mardis soir précédant le Conseil des ministres du lendemain, et j'ai assisté assez souvent à des rencontres où nos conseillers juridiques venaient nous dire : Oh! attention, M. le ministre, là, si vous allez jusque-là, il pourrait peut-être arriver telle, telle chose. Mais j'ai vu des ministres accepter d'autres propositions, mais j'ai vu aussi d'autres ministres dire : Non, je suis prêt à aller jusque-là parce que j'ai telle conviction. Et c'est justement par conviction qu'on souhaiterait que la ministre accepte un peu plus des propositions que nous faisons, soit de la part de la deuxième opposition, ou des propositions que nous faisons.

Présentement, ce que j'entends, bien, il faut qu'on adopte la loi, puis, dans un an, ou deux, ou trois, bien, on va la modifier au besoin. Mais c'est au jour 1 que nous souhaitons avoir la meilleure loi possible. Et le jour 1, il est devant nous, là. Alors, prenons le temps de le faire comme il faut. Et je demande bien amicalement à la ministre... Jusqu'à maintenant, là, elle a montré beaucoup d'ouverture. Entre le départ d'avril 2017 à aujourd'hui, elle a montré beaucoup d'ouverture. Et on a entendu les mêmes choses ensemble, et je vais vous dire qu'en grande partie ce qui est déposé, ça correspond à ce qu'on avait entendu. Mais on pense qu'il faut aller un petit peu plus loin, parce qu'on a aussi entendu des choses qui ne sont pas dans le projet de loi. Alors, je comprends qu'à l'heure où nous en sommes...

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup. Merci beaucoup, M. le député de Labelle.

Et, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die. Bonne soirée à tous.

(Fin de la séance à 18 heures)

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