(Neuf heures trente-quatre minutes)
Le Président (M. Merlini) : À
l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, bonjour. Et j'en profite pour souhaiter une bonne année à tous les parlementaires et à tous les membres de la commission,
le secrétariat, le personnel de
soutien, nos pages, le personnel technique. Et je nous souhaite à tous une
année remplie de santé, pour faire plaisir à la ministre de la Santé et
des Services sociaux...
Une voix : ...
Le
Président (M. Merlini) : Et de sérénité. Nous aurons cette année
beaucoup de débats, beaucoup de sujets qui vont nous préoccuper en tant que députés, en tant que parlementaires de
cette législature, de cette Assemblée nationale, et mon souhait à tous
les députés ici présents et ceux qui sont dans l'autre commission, c'est que
nous puissions avoir des débats avec
civilité. Je crois que les enjeux sont importants, à l'aube de cette nouvelle
année, et je pense que ça nous donne matière à réfléchir et à agir en
fonction de bien représenter notre population, nos électeurs qui nous ont élus.
Nous avons un rendez-vous électoral cette
année, nous le savons tous. Alors, voilà pourquoi mon souhait est que
nous puissions faire notre travail et de le faire avec toute la civilité dont
les gens s'attendent de nous.
Ceci étant
dit, je vous rappelle que la séance de la Commission de la santé et des
services sociaux est maintenant ouverte. Je demande à toutes les
personnes présentes dans la salle du Conseil législatif de bien vouloir
éteindre toute sonnerie de tout appareil électronique.
La commission
est donc réunie aujourd'hui pour poursuivre les auditions publiques dans
le cadre des consultations particulières sur le projet de loi
n° 157, la Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la
Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière
de sécurité routière.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements ce
matin?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Vallières
(Richmond) sera remplacée par M. Giguère (Saint-Maurice) et
M. Paradis (Lévis) sera remplacé par M. Jolin-Barrette (Borduas).
Le Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup. Alors, ce matin, nous entendrons les groupes suivants : la
Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante, la Fédération des chambres de commerce du Québec, la
Fédération des cégeps et l'Association québécoise des pharmaciens
propriétaires.
Auditions (suite)
Alors, je
souhaite donc la bienvenue à la Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante. Mme Hébert, vous connaissez
nos us et coutumes en commission parlementaire. Vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, et ensuite nous aurons les échanges
avec les membres de la commission. Bienvenue à la CSSS. À vous la parole.
Fédération canadienne de
l'entreprise indépendante (FCEI)
Mme Hébert (Martine) : Merci
beaucoup, M. le Président. Distingués membres de la commission, Mme la ministre, je vous remercie de nous donner la
capacité, ce matin... l'opportunité, c'est-à-dire, ce matin, de vous
présenter un petit peu le point de vue des PME sur certaines dispositions du
projet de loi n° 157.
Comme vous le savez, à la FCEI, on représente
les petites et moyennes entreprises, qui sont la majorité des entreprises au
Québec. Et les entrepreneurs qu'on représente sont concernés par l'encadrement
de la législation du cannabis parce
qu'on sait que ça risque d'entraîner
des changements, là, dans certaines habitudes de consommation et de susciter des problématiques et des questions
aussi de gestion, là, au sein des entreprises. On estime donc qu'effectivement il
aurait été souhaitable de profiter du projet de loi n° 157 pour traiter de
ces enjeux.
Aussi, bien
qu'on soit tout à fait en accord, M. le Président, avec les objectifs de réduction des méfaits qui sont liés à l'intoxication au cannabis, on prend acte
de l'objectif cardinal autant, là, du projet de loi C-45 du gouvernement fédéral que du projet
de loi n° 157, qui est d'aiguiller le marché canadien et québécois du
cannabis vers l'économie légale. Je pense que c'est souhaitable pour tout
le monde.
Sur ce point,
je vous dirais qu'on a une préoccupation à
l'égard de l'orientation qui a été prise par le gouvernement dans le projet de loi
n° 157 au chapitre de la commercialisation au détail du cannabis. À sa face
même, l'approche du projet de loi
n° 157 de créer une structure
étatique monopolistique nous apparaît non compétitive par rapport au marché noir et, par
conséquent, pourrait s'avérer potentiellement
inefficace. En tout cas, on a des préoccupations, là, au niveau d'une efficacité
potentielle pour le combattre.
M.
le Président, je dois dire qu'on souligne toutefois avec satisfaction
l'harmonisation de plusieurs dispositions du projet de loi avec les règles sur le tabac. Je pense que le fait
qu'on ait procédé de cette façon-là amène plus de clarté et quand on sait... Plus les lois sont complexes,
hein, plus il y a des règles qui sont différentes aussi, plus c'est difficile
d'en assurer l'observance. Donc, je pense
que, de ce côté-là, on doit saluer les efforts, là, qui ont été faits aussi pour s'harmoniser le plus possible avec
les règles relatives au... qui existent et qui prévalent en matière de tabac.
M. le
Président, j'aimerais aborder un petit peu les règles du jeu sur le marché du
travail, parce qu'on sait...
puis, je me dis, on sait très bien,
là, que ce n'est pas parce qu'il y a un projet
de loi qui va légaliser le cannabis
demain matin que tout le monde va se mettre à être «stone» au travail puis à
fumer des joints pendant la pause, là, on s'entend tous là-dessus. Sauf que l'expérience dans
d'autres juridictions tend à démontrer que la fin de la prohibition de la
consommation du cannabis risque de rimer avec une augmentation de la
consommation... ou en tout cas chez une certaine classe de population, et ce n'est pas non plus sans susciter
des interrogations et avoir certains impacts sur les milieux de travail.
Il semble que... Et on sait que, bon, c'est
un enjeu, c'est un enjeu important, parce que l'intoxication au cannabis
augmente les risques de conséquences
négatives non seulement en matière de performance et de productivité, chez un
travailleur, mais aussi en matière de santé et de sécurité du travail.
Alors, dans un contexte comme ça, on ne doit pas
perdre de vue que l'économie du Québec, on le sait, je le répète souvent, c'est
une économie de PME, c'est une économie où près du trois quarts des entreprises
ont moins de 10 employés. Donc,
contrairement à la grande entreprise, par exemple, ces petites entreprises là
peuvent difficilement recourir à des
départements de ressources humaines structurés ou encore à des experts externes
lorsque vient le moment de
gérer des situations disciplinaires ou encore des risques associés à la santé
et la sécurité qui sont liés à des cas d'intoxication, là, au cannabis en milieu
de travail.
• (9 h 40) •
On est donc préoccupés à l'idée que le
gouvernement, dans le projet de loi n° 157, ne semble pas leur fournir
davantage d'outils, de clarté pour leur permettre, là, faciliter, dans le fond,
la gestion d'un enjeu aussi complexe, pour
les PME, que celui qui est lié, là, à la consommation du cannabis. On est préoccupés, donc, que les outils que les employeurs vont disposer, en tout cas ce qui nous
apparaît, là, vont demeurer à peu près ceux qui sont dans le statu quo
actuel, dans la législation actuelle, et
qui, on le sait, là, sont complexes, sont basés sur une jurisprudence qui n'est
pas simple... et qui n'est pas simple non plus pour l'employeur, là, à
appliquer dans le milieu de travail.
Alors, on aurait préféré que le projet de loi
vienne apporter plus de clarté à certains égards, surtout que, contrairement à l'alcool, par exemple, les signes
d'intoxication au cannabis ainsi que les modes d'administration de la substance, là, sont beaucoup plus subtils et
diversifiés. Je le mentionne souvent, c'est plus facile de détecter une
haleine d'alcool et de détecter la
consommation d'alcool que, quand on regarde dans la boîte à lunch d'un employé...
que de savoir si son muffin qu'il a dans sa boîte à lunch, il est au pot
ou il est aux bleuets, hein? La distinction est difficile à faire.
Alors, on
comprend aussi qu'il y a des défaillances au niveau du dépistage. C'est pour ça
qu'on se disait : Bien, ce serait peut-être intéressant que la loi
permette d'apporter plus de clarté sur la prohibition de la consommation de cannabis en milieu de travail mais aussi sur des
sanctions, et que la loi soit claire à cet égard-là, des sanctions, voire
même peut-être des amendes, lorsque les
travailleurs sont pris en situation de consommation, ne serait-ce que par pur
instrument de prévention, par exemple, et pour remettre aussi le fardeau non
pas uniquement sur l'employeur, qui, lui, va avoir à prouver puis à faire des démarches, puis avec les tests de dépistage
qu'on sait que ce n'est pas fiable, etc., et pour remettre le fardeau non pas uniquement sur l'employeur, mais
aussi faire en sorte que les individus vont recevoir un message clair
que la consommation, l'intoxication au cannabis, la consommation sous quelque
forme que ce soit au travail, bien, c'est interdit et c'est passible de
sanctions en vertu de la loi et d'amendes. Il faudrait mettre ces sanctions-là
et ces amendes-là pour que ce soit suffisamment dissuasif.
Donc, en ce
sens-là, ce sont des recommandations, là, qu'on formule. On formule aussi
différentes recommandations pour
aider les employeurs, si vous voulez, à mieux gérer les risques, et, en vertu
des législations actuelles, là, on propose notamment, par exemple, des ajustements dans la loi encadrant les normes
du travail relatives notamment aux motifs de congédiement, au droit de gérance, à la gestion disciplinaire, donc
adapter... profiter de l'occasion du projet de loi n° 157 pour apporter certaines modifications pour aider
les employeurs, au niveau de ces dispositions-là, là, à avoir davantage
de souplesse et à gérer aussi les conséquences qu'on connaît, dans ce cas-ci.
Comme on
disait aussi, comme je disais tantôt aussi, faire en sorte que les dispositions
du projet de loi n° 157 incluent
une mention expresse qui élargit et qui délimite clairement la marge de
manoeuvre discrétionnaire des employeurs en matière de dépistage de
l'intoxication au cannabis en milieu du travail. On ne veut pas que tous les
employeurs, demain matin, se mettent à administrer des prises de sang à tout le
monde, là, ce n'est pas... sur les lieux de travail, la question n'est pas là, mais je pense qu'il y a certains secteurs
d'activité où il y aurait peut-être lieu de faire des ententes avec
certaines organisations, là, pour faciliter le dépistage.
On aimerait
aussi que des modifications soient apportées au niveau, là, de la LSST pour que
ce soit clair qu'un employé qui est
intoxiqué et qui se blesse au travail, bien, il ne devrait pas avoir droit aux
prestations, là, qui sont versées en vertu de la Loi sur la santé et la
sécurité au travail.
Évidemment, on aurait
préféré, on l'a dit, que le gouvernement opte non pas pour un monopole d'État
au niveau de la distribution et de la vente
mais plutôt mise sur le secteur privé, quitte à faire encadrer le secteur privé
par la Régie des alcools, des courses et des
jeux, par exemple, qui est déjà habituée à traiter avec produits, là, de cette
nature-là, que ce soit en matière d'alcool,
ou en matière de loterie. On a été déçus de l'approche du gouvernement, déçus,
puis on est inquiets et préoccupés,
inquiets et préoccupés que ça ne permette pas, cette approche-là, de contrer le
marché illégal et qu'on ne soit pas suffisamment compétitifs pour,
justement, contrer le marché illégal. Et ceux qui vont en payer, probablement, le prix le plus, ça va être les plus
jeunes, notamment, parce que les pushers n'arrêteront pas d'aller dans
les cours d'école. Et,
les prix qu'ils vont offrir, comme le marché gouvernemental ne sera pas
suffisamment compétitif, bien, ils
vont pouvoir maintenir les prix bas. Alors, ce n'est pas souhaitable. Et on
aurait préféré nettement que le gouvernement adopte une approche, là, plus... une approche plus centrée sur le privé,
quitte à avoir un encadrement gouvernemental mais à travers une
organisation, par exemple, comme la régie.
Juste un petit mot,
en terminant, M. le Président, sur certaines règles commerciales à revoir, là.
On a vu qu'à l'article 43 on parle d'un
exploitant de commerce de cannabis et d'articles qu'il serait interdit de
vendre, là, qui affichent, par
exemple, des fleurs... des feuilles de cannabis ou des trucs comme ça. On
demande une petite précision à savoir c'est quoi, un commerce de cannabis, parce qu'il y en a déjà, des commerces de
cannabis. Ils ne vendent pas de cannabis, mais ils vendent toutes sortes
d'autres affaires, des tee-shirts, des casquettes avec des... Donc, on aimerait
qu'il y ait une précision, là, qui soit faite
dans la loi. Alors, on comprend que le législateur voulait dire «qui vendent du
cannabis», mais, pour nous, là, un
commerce de cannabis, ce n'est pas suffisamment précis, et ça risque de
s'étendre à tous les commerces qui
vendent actuellement, là, des objets, là, qui sont relatifs au cannabis. Alors,
on aimerait que ce soit précisé dans la loi.
Alors, je pense, M.
le Président, que ça fait le tour, là, des principales recommandations que nous
avions à présenter dans notre mémoire.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme Hébert, pour la
présentation de votre mémoire ici ce matin. Mme la ministre et députée de Soulanges, à vous la parole. Vous disposez
d'un bloc de 15 min 30 s pour vos échanges avec notre
invitée de ce matin.
Mme Charlebois :
Merci, M. le Président. D'abord, vous souhaiter bonne année, plein de santé,
j'ai le goût de vous dire à la blague
aussi : De bons services sociaux, parce que je suis la ministre
responsable de tout cela, mais... et à tous les membres de la commission, tant de notre gouvernement mais des
oppositions aussi. Je pense qu'on a une année importante devant nous et je souhaite plein de santé à tout
le monde, c'est l'ingrédient de base pour bien accomplir ce qu'on a à accomplir.
La
même chose pour notre invitée. Merci de vous être déplacée en cette journée de
janvier frisquette, on va dire ça
comme ça. Et merci de nous présenter le fruit de vos réflexions parce que,
comme je le disais un petit peu plus tôt aux journalistes, il nous reste
deux jours de consultation, alors, avant de cristalliser complètement les
dernières décisions, j'ai signifié clairement que nous allions finir d'écouter
les partenaires qui viennent nous déposer des mémoires en commission. Ensuite,
on aura des discussions, bien sûr, à l'interne, nous, les élus du gouvernement,
mais j'ai aussi l'intention d'avoir des
discussions avec nos collègues des oppositions, parce qu'on se doit de préparer
le meilleur projet de loi, qui va
ressembler le plus à ce que la majorité des Québécois nous ont demandé, quelque
chose qui va leur ressemble, parce
que, on le sait, c'est le gouvernement fédéral qui légalise, mais l'encadrement
relève davantage du gouvernement provincial,
et il faut s'assurer, dans ce sens-là, de bien répondre aux aspirations de...
qu'ont les Québécois. Alors, c'est là-dedans
que je poursuis mon travail, dans la même veine qu'on l'a commencé. Et je dis
encore que ce projet de loi là devra être
révisé rapidement, soit trois ans après son dépôt, parce que ce n'est pas un
nouveau phénomène, qu'est le cannabis, mais
la légalisation, comme telle, est un nouveau phénomène, et il m'apparaît
important qu'on puisse réviser ce nouveau projet de loi là, qui sera un projet de loi... qui sera une loi
éventuellement, mais le plus rapidement possible, parce que c'est sûr
qu'il y aura de l'évolution dans la société et il y aura des choses à revoir.
Maintenant, pour ce
qui est de votre mémoire, fort intéressant, j'ai pris note de certaines
questions. C'est sûr qu'il y a plein de
questions que je pourrais vous demander, mais, comme vous avez, le temps
imparti m'est limité. Mais mes collègues
des oppositions pourront compléter. Je vais aller dans le coeur du sujet. Vous
nous parlez des petites entreprises qui
n'ont pas de ressources humaines, qui devraient avoir davantage d'outils parce
qu'elles ne sont pas capables de se créer
les outils nécessaires pour bien encadrer ça. C'est quoi, les outils que vous
pensez qu'elles devraient avoir? Est-ce que nous devrions avoir... Parce que vous savez que, dans le Code du
travail, il y a là une possibilité d'établir des politiques claires à l'interne pour un entrepreneur, mais,
aussi, il y a aussi des obligations de la part de l'entrepreneur mais aussi
de l'employé. Je sais, comme vous dites...
Pour avoir été un petit entrepreneur, je sais très bien que, quand tu n'as pas
de ressources humaines, faire tout ça, c'est
un peu demander au nombre d'heures qui s'ajoutent tout le temps dans notre
tâche. Mais, dites-moi, est-ce qu'il y
aurait lieu de faire un document-cadre ou d'avoir quelque chose qui pourrait
faciliter la vie de ces petits
entrepreneurs là? Et quels seraient les outils précis, là, que vous voyez, qui
pourraient être mis à leur disposition pour les aider dans l'application
de ça?
• (9 h 50) •
Mme Hébert (Martine) : On voit que vous avez de l'expérience,
effectivement, Mme la ministre, de ce que c'est qu'une petite entreprise
parce que vous avez même donné des pistes. Effectivement, deux types d'outils,
je vous dirais. Le premier type, c'est ce
que vous venez de décrire, par exemple avoir des modèles de politique, parce
qu'on sait que ça prend une
politique, au sein des entreprises, là, pour la gestion de ce genre de
problématique là, donc avoir des outils qui informent les employeurs sur
leurs droits, leurs obligations et des outils destinés aussi aux employés,
hein, sur ce que l'entreprise... par exemple
des modèles types que les entreprises, par exemple, peuvent avoir. Des lettres
types aussi, parce que vous savez que c'est
bien beau d'avoir une politique, dans une entreprise, là, mais il faut que tu
l'appliques, ta politique, et souvent c'est là le défi, là. Il faut que tu
écrives... Bon, il faut que tu commences, un avis, deux avis, puis... Il faut les écrire, ces avis-là. Je ne
suis pas sûre, moi, que mon petit garagiste, là, tu sais, écrire l'avis, puis
avec tous les termes légaux, puis, bon,
etc., qu'est-ce que c'est, puis là, après ça, aussi, écrire l'autre avis, qui
dit : Bien là, si vous continuez,
etc., on va vous déférer un test de dépistage... Bon. Donc, donner de ce genre
d'outils là, là, pratico-pratiques.
Puis ça nous fera plaisir, Mme la ministre, à la FCEI, là, de travailler avec les autorités compétentes et nos
conseillers aux entreprises pour essayer, là, de bonifier et de collaborer, dans
le fond, à l'élaboration de ce type d'outil là.
Mais je vous dirais, Mme la ministre, que ça
prend aussi un autre type d'outil. Et le premier outil, c'est la législation.
Puis une loi claire, une loi claire, ferme, qui exprime, qui dit ce qu'elle a à
dire, c'est toujours aidant.
Malheureusement, on sait que
la consommation de substances sur le marché
du travail, à l'heure actuelle, est
balisée beaucoup par la jurisprudence, beaucoup
par certaines dispositions qui sont dans beaucoup d'autres lois. Nous,
ce qu'on pense, et là
c'est là où on va rejoindre aussi,
c'est un petit peu comme en matière de santé, il vaut toujours mieux
prévenir que guérir. Et ce qu'on pense, c'est que, si, dans la loi, les
dispositions de la loi sont claires, et sont fermes, et sont dissuasives pour
les employés, c'est-à-dire à l'effet que c'est marqué clairement dans la loi,
que c'est affiché haut et fort dans la loi
que la consommation, l'intoxication au cannabis est prohibée dans les milieux
de travail et que c'est passible de
sanctions, il y a un effet dissuasif à la base de la législation, de sanctions
et d'amendes, là... Puis je ne parle pas de petites sanctions, là, moi, j'irais avec des sanctions qui
sont importantes, parce que, vous le savez, Mme la ministre, lorsqu'on parle
de lieu de travail, on parle de la santé et
sécurité au travail, et on parle de la sécurité non seulement des travailleurs
qui consommeraient ces substances-là, mais de celle des autres aussi. Et, à
titre d'administratrice de la CNESST, on est concernés aussi, hein, par ces
questions-là.
Donc,
nous, on pense que, s'il y avait des dispositions dans la loi où c'était
clairement énoncé que c'est interdit et que toute personne qui contrevient à cette disposition-là est passible
des sanctions et des amendes suivantes, à ce moment-là, on a un effet
dissuasif à la base et qui est très clair pour les travailleurs. Et, à ce
moment-là, on répartit aussi le fardeau, non
seulement sur les employeurs, qui vont devoir... qu'on sait qu'ils doivent
prouver, dans le cadre d'un processus, là,
long et étoffé de gestion disciplinaire... mais on répartit aussi une certaine
responsabilité chez les travailleurs, parce que c'est une responsabilité
partagée, la santé et sécurité au travail. Et on pense que ça irait dans cette
philosophie-là et que ça pourrait cadrer et avoir un effet, là, dissuasif et
donc préventif dans les milieux de travail.
Le Président
(M. Merlini) : Mme la ministre.
Mme Charlebois :
Bien, comme vous le savez, notamment pour la sécurité routière, on n'a pas
encore les outils nécessaires pour
dépister la consommation de cannabis récente, donc on va devoir appliquer ce
qui existe déjà, avant de passer à
une interdiction totale. Et, je me dis, c'est un peu le même cas pour le milieu
de travail. Comment on va faire pour savoir si la consommation ne date
pas de la fin de semaine précédente plutôt que sur le lieu de travail si on n'a
pas les bons outils pour le faire?
Ceci
étant dit, parce qu'il y a des tests comportementaux, etc., vous l'avez dit,
c'est un peu subjectif. Puis, quand je vous
entends, j'entends un point de vue, mais, je suis portée à vous dire,
j'assoirais le syndicat à côté puis j'entendrais totalement l'inverse. Ça fait que, tu sais, j'essaie de trouver
l'équilibre là-dedans, parce que, là, à mon sens, on n'a pas encore les outils nécessaires pour permettre,
comme vous le dites, le dépistage, et, faire des sanctions sur du
subjectif, je suis mal à l'aise un petit peu. Qu'est-ce que vous en pensez?
Mme Hébert (Martine) : Bien, c'est parce que, Mme la ministre, de toute
façon, à l'heure actuelle, on est dans le subjectif aussi, là, hein?
Donc... Mais, dans certains cas... Par contre, il y a des cas qui sont assez
flagrants. Les employeurs, c'est sûr que
l'application de ces sanctions-là et l'application des amendes ne se ferait pas
comme ça, de façon instantanée, on
pèse sur le bouton, puis woups!, l'amende débarque, là, ce serait dans la même
philosophie, dans le même cadre que
ce que la jurisprudence actuelle prévoit, et les tribunaux interpréteraient
probablement, en fait, l'application de ces sanctions-là.
Sauf
que le fait que c'est enchâssé dans la loi, ça fait en sorte que ça a un effet
dissuasif. Si tu sais qu'en plus, comme
travailleur, là, tu peux recevoir une sanction, tu peux être accusé, et
recevoir une sanction, puis payer une amende, si jamais tu es prouvé...
Mais ça ne fait pas en sorte, parce qu'on va marquer ça dans la loi, qu'on va
changer les règles du jeu de tout ce qui se passe actuellement, là, je veux
dire, ça ne fonctionne pas comme ça, ce n'est pas instantané.
Et, de toute façon,
on est dans un système comme ça, à l'heure actuelle, où on est dans
l'ambiguïté. Et je suis d'accord avec vous, je pense qu'il faut continuer à
travailler sur les tests de dépistage, renforcer leur fiabilité, mais
l'application de ces sanctions-là se ferait exactement dans le même cadre
jurisprudentiel et légal que celui que nous avons
actuellement. Mais c'est l'effet dissuasif dans la loi. Quand tu es un
travailleur puis que tu reçois de ton employeur, là... la loi dit que, si tu es pris, bien, tu es passible d'une amende,
hein, si je prouve, là, que tu consommes sur le lieu de travail, bien, tu es passible d'une amende puis
des sanctions suivantes, ça a un
effet dissuasif et préventif. Je
pense que là où on s'entend bien, tout le monde, y compris les syndicats,
c'est sur la prévention.
Mme Charlebois : Vous avez raison. Mais, dites-moi, vous avez
l'air... puis je sens ça dans certains milieux, puis peut-être
que... puis je ne veux pas que vous pensiez que je n'ai pas de questionnement, là, ce n'est pas ça, mais vous avez l'air à penser que beaucoup de gens vont se mettre à consommer puis qu'il va
y en avoir plus qu'actuellement. Pour avoir été propriétaire d'une entreprise,
ça existe là, là, vous l'avez dit vous-même. Et je pense que les autres collègues
de ces gens-là... Puis, je pense, nos travailleurs québécois, dans l'ensemble — il y
a toujours des exceptions, j'en conviens — dans l'ensemble, sont assez responsables, je
pense. Vous avez peur que ça devienne plus fréquent, qu'il y ait plus de
personnes qui consomment? C'est ça que j'entends?
Mme Hébert
(Martine) : Oui. Puis ce qu'on a vu, Mme la ministre, c'est sûr qu'à
partir du moment où on légalise un produit,
ça devient... ça risque de créer une recrudescence de consommation. On l'a vu
d'ailleurs dans les études, notamment, qui ont été produites à la suite
de l'expérience, là, dans l'État américain du Colorado, où, cette étude-là, les conclusions tendent à démontrer que la fin de
la prohibition de la consommation, là, à des fins récréatives a rimé
avec une augmentation de la consommation au sein de la population,
particulièrement aussi chez les 25 ans et plus.
Mme Charlebois : ...sans
prévention, eux autres. Ce qu'on va faire, nous.
Mme Hébert
(Martine) : Je comprends,
mais je pense que ça a ses limites, là, les campagnes qu'on peut faire. Et, dans ce sens-là, c'est en se basant sur ces
études-là qu'on s'est dit que ça pouvait, justement... Et c'est logique de
penser que ça peut entraîner une recrudescence.
Moi, je
dis : Profitons... On a un projet de loi sur la table. Pourquoi est-ce
qu'on n'en profiterait pas, justement, pour
essayer de régler, dans ce projet de loi là, l'ensemble des questions relatives
au marché du travail, qui de toute façon même à l'heure actuelle sont un
petit peu floues et mériteraient d'être précisées?
Mme Charlebois :
J'ai une petite question puis je vais passer, si vous me le permettez, M. le
Président, la parole à mon collègue de Trois-Rivières.
Le Président (M. Merlini) :
Tout à fait.
Mme Charlebois :
Vous avez parlé de la société d'État. Vous croyez que ce serait préférable
qu'il n'y ait pas de limitation de
temps, concernant la durée d'un projet pilote. Vous nous dites de ne pas
limiter le nombre de points de vente au
détail pour un projet pilote. Et vous nous dites aussi, si j'ai bien compris,
que la mise en place d'un monopole d'État, ce n'est pas ce qu'il y a de
plus profitable pour faire en sorte que nous contrôlions nos prix.
J'ai le goût de vous dire que ce qu'on a entendu
en consultations à travers tout le Québec, c'est que les gens ne voulaient pas de profitabilité, ils ne
voulaient pas un marché où il y aurait de la profitabilité. Or, quand c'est un...
en tout cas, moi, quand j'étais en affaires,
j'essayais de faire de l'argent, là, autant que possible. C'est ce que les gens
nous ont demandé, de ne pas avoir... Puis ce
qu'ils ne veulent pas, c'est surtout qu'on mette en place les moyens pour
accroître la consommation de cannabis, justement.
Alors, le
marché privé, c'est leur but, justement, d'augmenter leurs ventes, c'est
pourquoi ils nous demandaient une société d'État. Que répondez-vous à
ça? Rapidement, parce que je veux laisser la parole à mon collègue de
Trois-Rivières.
Mme Hébert
(Martine) : Bien, moi, je
comprends que la population dise qu'ils ne souhaitent pas de
profitabilité, mais je pense que la
population est aussi très préoccupée par le fait que la profitabilité, en ce
moment, là, elle est dans le marché illégal puis elle est chez les
bandits. Ça fait que moi, je pense que les citoyens du Québec préféreraient que
la profitabilité soit balisée, par exemple,
dans le secteur privé, un peu comme on le fait dans le cas des loteries, hein,
parce que c'est toujours bien le secteur
privé qui vend les loteries, un peu comme on le fait pour ça ou dans le cas de
l'alcool, de certains alcools qui
sont vendus dans les épiceries, les dépanneurs. On est capables de baliser et
d'encadrer la vente de ces produits-là
et de faire bénéficier, justement, l'ensemble de la population du fruit de la
taxation et de... et ce, sans imposer des coûts à l'État. Parce que la structure étatique qu'on va créer, elle
comporte des coûts beaucoup plus importants pour les citoyens du Québec que si on avait laissé le
marché privé, comme je vous dis, avec un encadrement, on n'aurait pas
laissé ça, là, comme on vend des palettes de
chocolat, là, mais on aurait très bien pu penser à quelque chose à l'intérieur,
par exemple, de la Régie des alcools, des
courses et des jeux, qui a déjà l'expérience de traiter avec les détaillants du
Québec à ces égards-là. On aurait très bien
pu développer un modèle comme ça et qui aurait été, justement, davantage, en
tout cas à nos yeux, profitable à
tous égards pour les citoyens, tout en limitant les réseaux de profitabilité,
là, dans des limites qui sont déjà acceptables socialement et déjà
acceptées socialement dans d'autres domaines.
Le Président (M. Merlini) :
Merci, Mme Hébert. M. le député de Trois-Rivières, il vous reste deux
minutes.
M. Girard : Merci beaucoup,
Mme Hébert. Merci d'être là. Merci, M. le Président.
On parle des
conséquences. Je comprends très bien votre inquiétude face aux employeurs et
les conséquences, éventuellement,
s'il y a une consommation plus importante de cannabis au niveau des
travailleurs. Vous parliez, tout à l'heure, exemple, d'accidents de
travail, donc, les gens qui vont pouvoir retirer les assurances. Bien sûr, on a
des craintes en termes de productivité.
Donc,
j'aimerais vous entendre un petit peu plus. Quelles sont les craintes particulières
de vos membres? Et est-ce qu'il y a des secteurs en particulier qui ont
des craintes encore plus importantes, au niveau des membres de la FCEI?
• (10 heures) •
Mme Hébert
(Martine) : C'est sûr qu'il
y a secteurs qui sont névralgiques, parce que, le niveau de dangerosité,
hein, d'employés qui seraient intoxiqués, comme on pense à la construction, on
pense dans le domaine du transport, Mme la
ministre en a parlé tantôt, il y a certains secteurs comme ça, là, qui sont
encore plus importants et où le niveau de dangerosité, effectivement,
est assez dangereux, en fait. Donc, ce sont ces secteurs-là. Mais, les
travailleurs... pas les travailleurs mais
les employeurs, les petites et moyennes entreprises, qui se demandent :
Bon, que c'est que je vais pouvoir faire
comme employeur, j'ai-tu le droit de... là, qu'est-ce que je fais, si j'ai des
soupçons, ça va être quoi, les moyens, pour moi, que quelqu'un consomme, est-ce que... si je prends quelqu'un sur le
fait, à consommer, qu'est-ce que je peux faire, comme employeur?, etc., donc, les outiller. C'est dans ce sens-là où
l'excellente suggestion de la ministre... l'excellente question de la
ministre, avec sa suggestion dedans, de développer des outils-cadres comme ça
pour les entreprises va certainement aider. Moi, je pense...
Et je veux
bien insister sur le fait, que, si on avait aussi dans la loi des articles qui
mettent une responsabilité sur les travailleurs,
avec des sanctions, ça aurait un effet dissuasif important, et je pense que ça
permettrait... En tout cas, on aurait là une poignée assez claire pour
permettre, là, de prévenir encore davantage la consommation et l'intoxication
sur les lieux de travail.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup. Ça met un terme à ce
bloc d'échange avec le gouvernement. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. M. le député de
Labelle, à vous la parole. Vous disposez de 9 min 15 s.
M. Pagé :
Merci, M. le Président. Alors, salutations à vous. Bonne année. Bonne année
aussi à l'ensemble des collègues, Mme
la ministre, tous les gens qui nous entourent également, les gens qui assistent
aussi à nos débats depuis déjà un bon moment, et tout le personnel,
effectivement, parce qu'il y a des gens qui sont autour de nous qui sont extrêmement précieux. Alors, la santé avant tout.
Je pense que c'est ce qui est le plus important. Et je fais mien aussi
vos propos, M. le Président, d'entrée de
jeu, qui souhaitait que nous ayons cette année, compte tenu, effectivement, que
c'est une année d'élection, des débats quand
même sereins et productifs, effectivement, surtout dans un projet de loi
comme celui-là, qui est fort important pour la santé publique, pour notre
population au Québec.
Alors, bienvenue, Mme Hébert. Bonne année
également à vous et aux gens qui sont dans votre équipe.
Bon, d'entrée
de jeu, lorsque vous avez dit, en commençant, que vous doutiez de... Vous avez
parlé de l'inefficacité d'une société
d'État. J'imagine que, quand vous disiez ça, vous parliez en termes de
profitabilité. J'imagine que vous parliez de cela parce que moi aussi, j'ai eu une entreprise pendant 17 ans,
et, quand on a une entreprise, évidemment, on veut qu'elle soit rentable. Puis c'est un peu comme ça...
Je ne dis pas seulement de cette façon-là, mais c'est un peu de cette façon
dont on mesure l'efficacité d'une
entreprise, quand elle fait des profits à la fin de l'année. Mais ce n'est pas
ce que l'on veut avec le cannabis. Ce
n'est pas la volonté du gouvernement du Québec. En tout cas, ce n'est pas notre
volonté. Nous voulons une société d'État... Pour moi, le succès de la
société d'État, ce ne sera pas si elle fait beaucoup d'argent. Oui, on souhaite qu'elle fasse ses frais. Il faut dire
qu'au départ, avec la taxe d'accise, on récupère à peu près un
60 millions. Avec la TPS, on
devrait récupérer probablement plusieurs dizaines de millions aussi. Donc,
avant la profitabilité de l'entreprise, il y a déjà, probablement, une couple de 100 millions qui vont rentrer
dans les coffres de l'État, je pense qu'on peut mesurer cela sans trop se tromper. Maintenant, à l'égard
de la profitabilité de l'entreprise, on ne veut pas que ce soit comme la
Société des alcools, qui livre un dividende
de 1 point quelques milliards par année, qui nous envoie de la publicité à
toutes les fins de semaine pour en vendre
plus et encore plus. Ce n'est pas ce que l'on souhaite. Et c'est la raison pour
laquelle on se dote d'une société d'État. Et moi, je vais mesurer, je vais vous
dire, son efficacité si un jour on va dire : Les gens consomment moins, si les gens consomment d'une
façon plus responsable, si les gens, justement, ne vont pas au travail
en ayant consommé. C'est comme ça que je vais mesurer l'efficacité de la
société d'État.
Alors, j'ai
un petit peu de difficultés quand vous arrivez ici... Puis c'est votre droit.
C'est votre droit, puis vous défendez
votre fédération, et je le comprends. Mais il faut bien comprendre que
l'objectif de la loi, ce n'est pas... L'État ne voudra pas faire des
routes avec des profits générés par le cannabis. Ça, on s'est entendus
là-dessus et on l'a dit des deux côtés de la
Chambre. Et même nous, on souhaite que ça soit inscrit formellement dans la
loi, que, s'il y avait profits, qu'ils
doivent être réinvestis en santé publique, en prévention, pour lutter contre la
dépendance. Et, si un jour, justement, on réussit à fermer les centres de dépendance, au Québec, parce qu'il n'y a
plus de problème, je vais dire : Nous aurons été efficaces. Nous aurons fait toute la
sensibilisation nécessaire et l'information nécessaire. Alors, c'est pour ça
que j'ai un petit peu de difficultés avec votre propos initial qui parle
d'inefficacité de la société d'État.
Maintenant, ce que j'aimerais savoir... Parce
que nous, nous le disons depuis des mois, il faut dès le début de l'année 2018 commencer à faire de la
sensibilisation dans les écoles, dans
les milieux des entreprises. Est-ce
que, chez vous, il y a déjà des
liens qui sont faits soit avec le ministère ou... Peut-être les plus grosses entreprises ont déjà
commencé à le faire par eux-mêmes,
mais est-ce que le ministère a déjà commencé à vous envoyer de l'information ou partagé avec vous un
scénario ou un plan de match pour intervenir auprès des ressources humaines pour dire : Voici ce qui s'en vient, à partir de maintenant jusqu'au mois de
juillet prochain, afin de bien sensibiliser nos travailleurs?
Mme Hébert
(Martine) : D'abord, M. le
député, je vous remercie de votre question. Mais, quand vous citez le
fait que nous estimons qu'une société d'État ne serait pas un modèle efficace,
ce n'est pas nécessairement en termes de
profitabilité, mais c'est plutôt en termes de lutte au marché illicite. Et
c'est là le coeur du problème. Moi, je pense que... Et, dans ce sens-là, l'optique que vous apportez
vient, si vous voulez... est un peu en porte-à-faux avec cet esprit-là,
de dire qu'on veut une société d'État parce
qu'on ne veut pas de profitabilité. Mais ça veut dire, ça, qu'on va continuer
d'engraisser le marché illégal, parce que la
société d'État ne pourra pas rivaliser en matière de compétitivité. Puis ça,
c'est les lois du marché, là. Les
4 P du marketing, c'est clair, là, c'est de la stratégie de prix, de
produit, de place puis de promotion. On ne pourra jamais, jamais
rivaliser, avec une société d'État, avec des points de distribution extrêmement
limités, dans ces quatre domaines-là avec le marché illégal.
Donc, c'est
pour ça qu'on dit, nous, qu'on devrait passer par le privé, parce que ce serait
un système qui serait davantage
efficace pour contrer, en matière de compétitivité... pour compétitionner avec
le marché illégal. Là, on n'est pas
dans cette optique-là parce qu'on est dans une société d'État, où ça va être
extrêmement limité. Donc, ça va être beaucoup moins accessible. Les gens en région, là, ils ne feront pas des
kilomètres et des kilomètres pour aller acheter à la société d'État leur
cannabis parce qu'on va faire en sorte que la concurrence qu'on impose au
marché illégal n'aura pas de pression à la
hausse suffisante sur leurs prix pour ne plus qu'ils soient compétitifs. Alors,
ils vont continuer à aller livrer à domicile,
ils vont continuer à aller dans les cours d'école. Ils vont continuer, et ça,
parce que le système de distribution est... Comme je vous dis, les lois du marché... C'est ça, là, en économie c'est
ce qu'on apprend, dans les cours de marketing aussi, parce qu'au niveau, notamment, de l'accessibilité en matière de
points de vente, et de prix, et d'accessibilité aussi en matière de facilité à se procurer le produit dans
un endroit près de chez soi... va continuer à favoriser le marché
illégal. Alors, c'est dans ce sens-là quand on parle de profitabilité.
Sur votre
deuxième question, à savoir est-ce qu'on a déjà entamé des pourparlers avec le
ministère et commencé à travailler
sur ces questions-là, bien, je pense que la question de la ministre aujourd'hui
ouvrait la porte, là, au début de cette collaboration. En tout cas, je lui ai offert notre
collaboration. Puis je réitère, là, qu'on est tout à fait disposés à
travailler avec elle et avec d'autres organismes
aussi, comme la commission des normes, de l'équité salariale et de la santé et
sécurité du travail, sur laquelle je siège à
titre d'administratrice, par exemple, où on pourra faire cheminer, là, ces
dossiers-là pour qu'effectivement, comme vous le suggérez, tout à fait,
avec... C'est tout à fait opportun qu'on soit prêts lorsque la législation va entrer en vigueur. Sinon, à défaut,
ce qu'on vous demanderait peut-être aussi, c'est... Dans certains
aspects du projet de loi, si on pouvait
retarder l'entrée en vigueur de certaines dispositions pour justement aussi
donner le temps aux employeurs et aux organisations de développer ces
outils-là, je pense que ce serait apprécié aussi.
M. Pagé :
Bon, de toute façon, quant aux points de vente, le gouvernement a déjà... le
ministre des Finances a clairement
dit qu'il pourrait en avoir possiblement 150, 200, 250, selon, éventuellement,
là, l'évaluation qu'on en a faite. Donc,
je pense qu'il ne faut pas juger le projet de loi et le réseau de distribution,
le réseau de vente en fonction des 15 qui seront ouverts cet été.
Cela dit,
vous avez parlé de sanctions. Jusqu'où vous souhaiteriez que nous allions quand
vous parliez de sanctions pour des
gens qui auraient consommé, donc qui n'auraient pas toutes les aptitudes pour
pouvoir travailler correctement et de façon sécuritaire? Jusqu'où vous
souhaiteriez que nous allions dans le projet de loi?
• (10 h 10) •
Mme Hébert
(Martine) : Bien, écoutez,
je pense qu'on peut parler de sanctions, par exemple, relativement à des
suspensions sans solde parce que... Dans le cas où c'est prouvé, dans le cas où
on utilise les outils, là, qui sont à notre disposition
dans la législation pour prouver que ce soit le cas, de flagrant délit, ou
encore le cas de suspicion à travers les processus qui sont déjà inscrits, bien, à ce moment-là, on pourrait
parler, par exemple, de suspension sans solde et d'amende aussi. Moi, je pense qu'il faut aussi imposer une
amende parce que l'amende a aussi un aspect dissuasif qui est quand même
important, puis pas des amendes, là, de
200 $, 300 $, parce qu'il faut bien se dire qu'on parle de cas où, à
ce moment-là, on met en danger, dans
plusieurs secteurs... comme M. le député le signalait bien tantôt, des secteurs
où c'est très dangereux, on met en
danger la santé et la sécurité de nos collègues de travail, et ça peut avoir
des conséquences désastreuses. Donc, je pense qu'il faut...
Mais je pense
que je... Peut-être que je laisserais les juristes de l'État, là, vous faire
des propositions en ce sens-là. Nous les économistes, on a tendance à
rajouter beaucoup de zéros tout le temps.
M. Pagé :
Dans votre propos, vous présumez qu'il va y avoir une augmentation très
importante de consommateurs. C'est ce
que j'entends dans vos propos et c'est la raison pour laquelle je pense qu'il
faut commencer dès maintenant à faire toute la sensibilisation et
l'information, qui devrait commencer dans les prochaines semaines, à mon avis,
pas à partir du 1er juillet. Je sais que le temps est...
Mme Hébert (Martine) : Je ne
dis pas que les travailleurs...
Le Président (M. Merlini) :
Merci. Ça met un terme à cet échange avec l'opposition officielle. Nous allons
maintenant vers le deuxième groupe d'opposition. M. le député de Borduas, la
parole est à vous. Vous disposez de 6 min 15 s.
M. Jolin-Barrette : Merci, M.
le Président. Mme Hébert, bonjour. Merci de participer à nos travaux de la
commission.
D'entrée de
jeu, M. le Président, moi aussi, je veux souhaiter une bonne année à tous les
collègues ici, aux membres de
l'Assemblée nationale, au personnel de l'Assemblée nationale, à nos équipes
également, à l'équipe de la ministre, de l'opposition officielle ainsi qu'à nos précieux et précieuses
collaborateurs qui sont avec nous et qui nous accompagnent. Donc, 2018 sera certainement une grosse année. Et,
tout comme vous, je partage l'objectif qu'on puisse mener à terme des
projets comme celui-ci dans des délais qui sont raisonnables.
Alors, Mme Hébert, je vous entendais
parler. La discussion est intéressante. Si je reviens sur l'application, supposons, des amendes, est-ce que, dans votre
perspective que vous souhaitez que ce soit la CNESST qui impose ce genre
d'amende là par la Loi sur la santé et sécurité du travail ou que ce soit
l'employeur lui-même qui impose une amende à son employé qu'il prend,
supposons, en flagrant délit?
Mme Hébert
(Martine) : Bien, à ce
moment-là, ça passe par les structures juridiques actuelles parce que,
quand on parle d'un processus, il faut que l'employeur prouve... il y a une
plainte qui est déposée, par exemple, puis il faut que l'employeur prouve effectivement
qu'il y a eu consommation. Mais, à ce moment-là, si c'est prouvé, bien,
l'employé se voit imposer une amende, là, par l'instance.
Vous suggérez
la CNESST. Ça pourrait être la division des normes du travail de la CNESST, ça
pourrait être un autre... les tribunaux du travail, peu importe, là.
Mais l'employeur ne peut pas se faire justice lui-même, là.
M. Jolin-Barrette : C'est ça, c'est une des difficultés. Mais,
actuellement, supposons un employé qui met sa propre sécurité... en vertu de la Loi sur la santé et
sécurité du travail, qui met sa propre sécurité ou celle d'un autre
travailleur en péril, mais il est passible
d'une amende qui était autrefois appliquée par la CSST, là — je vais utiliser le terme «CSST» — mais ça demande une enquête, et souvent c'est lors d'une intervention
impromptue d'un inspecteur de la CSST. Moi, je me dis juste : Il faut trouver un mécanisme pour
vraiment sensibiliser les employés à savoir que, lorsque vous êtes sur le
milieu de travail, vous ne devez pas être
sous l'influence d'une substance comme le cannabis. Mais quels outils
juridiques, là, on pourrait utiliser, on pourrait incorporer dans le projet de loi
n° 157 ou dans la Loi sur les normes du travail pour faire en sorte
que ce soit très clair, au-delà des amendes?
Vous parlez de l'augmentation du dépistage. Comment est-ce qu'on fait
pour que ça respecte les chartes, aussi que
ça respecte la jurisprudence, mais qu'on envoie un message clair aussi?
Jusqu'où on va, supposons, en matière de dépistage?
Mme Hébert (Martine) : Je vous remercie de la considération que vous
semblez me porter, mais je ne suis pas juriste. Je vous dirais que, pour
nous, ce qui est clair, c'est qu'il faut profiter du projet de loi n° 157
pour justement aller clarifier, dans la législation
du travail, que ce soit au niveau des normes et au niveau de la LSST, certaines
choses comme... on l'a dit tantôt, par
exemple, que, si le travailleur, il se blesse puis que c'est prouvé qu'il s'est
blessé en raison de son intoxication, il ne devrait pas avoir droit aux
prestations de la santé et sécurité du travail, et ça devrait être clair dans la législation actuelle. Alors, nous, ce
qu'on propose, c'est que le projet de loi n° 157 apporte des amendements
à certaines lois actuelles pour permettre
ça, et qu'ils permettent d'édicter très clairement, que ce soit dans les normes
du travail, et/ou dans la LSST, et/ou en
lui-même, que la consommation de cannabis est interdite sur les lieux de
travail. En fait, plus que la
consommation, c'est l'intoxication au cannabis, parce que, si tu fumes ton
joint avant de partir de chez vous, le matin, ou tu manges ton muffin au pot avant d'arriver au bureau, on se comprend
que l'effet est le même, là, tu es quand même sous l'influence de la
substance quand tu arrives au travail. Donc, que ce soit clair dans la
réglementation et dans la législation, dans
les lois, pour que justement les employeurs puissent dire : Regarde, c'est
écrit dans la loi, voici, c'est écrit,
vous n'avez pas le droit, et voici les amendes et les sanctions auxquelles vous
vous exposez si vous consommez, parce que, c'est ça, c'est l'effet
dissuasif, dans le fond, de mesures comme ça qu'on cherche.
M. Jolin-Barrette : Mais actuellement quelqu'un qui se présente au
travail sous l'influence de l'alcool, est-ce que c'est déjà prévu pour l'employeur
qu'il puisse le tenir responsable et qu'il ne soit pas indemnisé par le régime
d'indemnisation public de la CSST si jamais il se blesse?
Mme Hébert (Martine) : De ce que j'en comprends, ce n'est pas si clair
que ce que vous dites, O.K.? Ça
dépend des circonstances, je crois. Mais,
comme je vous dis, encore une fois, là... C'est une question juridique assez
pointue, mais, de ce que j'en
comprends... Vous parlez d'alcool, là, parce
qu'on est dans une... L'alcool, ça,
on est dans une dynamique différente parce que
les tests de dépistage sont assez... tu sais, il y a des moyens, aussi,
assez faciles pour l'employeur de détecter.
Il y a l'haleine d'alcool. Déjà là, ça a une odeur, là. Il y a...
Donc, les tests de dépistage sont fiables. Donc, on n'est pas dans la même dynamique, là, que
l'intoxication au cannabis, comme on le sait. C'est pour ça qu'on dit : Il
faut que ce soit clair, que ce soit dans le projet de loi n° 157. Là, vous ferez les ajustements dans les autres
lois en conséquence, mais,
dans le projet de loi n° 157, qu'il
y a ça, il y a
des sanctions et il y a des amendes aussi qui sont associées à ce fait-là...
M. Jolin-Barrette :
Et puis vous voulez avoir la possibilité aussi de poursuivre au civil les
employés qui causeraient des dommages en raison de leur comportement sous
l'influence.
Mme Hébert (Martine) : Bien
sûr, bien sûr. Alors, nous, ce
qu'on dit, c'est : Saisissons l'occasion du projet
de loi n° 157 pour renforcer ce qui existe déjà, hein, parce que,
là, on rajoute une nouvelle substance. On n'est plus juste avec les substances qu'on avait auparavant,
on rajoute une nouvelle substance. On rajoute une nouvelle substance où on
est un petit peu dans le flou aussi. Alors, plus la loi est
claire, plus le législateur parle clairement et fermement, plus on a des chances
d'assurer l'observance.
M. Jolin-Barrette : O.K. Puis vous évoquez également dans votre mémoire
que, sur l'expérience du Colorado, supposons,
il y a une hausse de consommation du cannabis, et donc ça a des conséquences
sur le comportement au travail, supposons
au niveau du taux d'absentéisme. Il y
a un article aussi, là, qui est
paru, là, dernièrement, dans le
magazine Travail et santé, qui en faisait état, là, supposons, la
désocialisation, l'isolation du consommateur, la dépression majeure. Toutes des conséquences... Comment est-ce qu'on
fait pour donner des outils aux employeurs et aux employés à la fois
pour éviter ce genre de situation là?
Le Président
(M. Merlini) : Vous avez le mot de la fin, Mme Hébert.
Mme Hébert
(Martine) : Bien, écoutez, éviter ce genre de situation là, je dirais
que c'est un travail qu'on va devoir faire,
là, en partenariat avec le ministère, comme j'ai dit tantôt, peut-être
avec la CNESST aussi puis les organisations patronales comme nous, pour
outiller les employeurs. Puis évidemment c'est de toujours maintenir des lois
du travail aussi, pour les employeurs — on
s'en va avec une révision des normes du travail, je vais passer mon petit
message — qui sont
souples, hein, et qui n'imposent pas trop de coûts aux employeurs, pour qu'ils
puissent mettre en place des mesures de prévention et des mesures, là,
pour soutenir leurs travailleurs et assurer la prévention dans les milieux de
travail et la formation des employés.
Le Président
(M. Merlini) : Merci, Mme Martine Hébert, vice-présidente
principale et porte-parole de la Fédération canadienne de l'entreprise
indépendante, pour votre présence et votre contribution à nos travaux.
Je suspends donc les
travaux quelques instants. Et j'invite les représentants de la Fédération des
chambres de commerce du Québec à venir prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 18)
(Reprise à 10 h 21)
Le Président (M. Merlini) :
Alors, nous reprenons donc nos travaux. Nous avons le plaisir d'accueillir la Fédération des chambres de commerce du Québec. Je
vous invite, avant votre exposé, de bien vous présenter pour les
bienfaits de nos travaux. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour faire votre présentation, et ensuite nous aurons les échanges avec les
membres de la commission. Bienvenue à la CSSS. À vous la parole.
Fédération des chambres
de commerce du Québec (FCCQ)
M. Forget (Stéphane) : Alors,
bonjour, tout le monde. Stéphane Forget, président-directeur général de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Je
suis accompagné d'Alexandre Gagnon, directeur, Main-d'oeuvre et santé et
sécurité au travail, à la fédération.
Alors, tout
d'abord, à mon tour aussi de vous offrir nos meilleurs voeux pour la nouvelle
année, de bonheur et de santé. On sait que ce sera une année, pour vous,
assurément trépidante, alors donc on vous la souhaite heureuse.
Alors, bien,
merci beaucoup de nous accueillir aujourd'hui. Je rappelle brièvement pour tout
le monde le double rôle de la fédération, qui, à la fois, évidemment,
comme fédération, regroupe, fédère l'ensemble des chambres de commerce à
travers le Québec, mais aussi agit à titre de chambre provinciale, avec plus de
1 000 entreprises qui sont directement membres de la fédération, et
aussi comme association patronale. Je siège notamment à la CNESST pour représenter
aussi les employeurs.
Alors, la légalisation annoncée du cannabis par
le gouvernement fédéral par le projet de loi C-45 oblige les provinces, dont le Québec, à mettre en place un
système d'encadrement qui puisse permettre le maintien de la sécurité et
de la santé publique. Et sachez que nous
sympathisons avec vous, avec ce problème avec lequel vous vous trouvez cette
année. Cette légalisation amène plusieurs
enjeux, notamment la production, la distribution, la taxation, les impacts
sur les services de santé, également les
impacts possibles sur les milieux de travail. Nous avons choisi de nous
concentrer sur deux enjeux, les
impacts de la légalisation dans les milieux de travail et la sélection des
lieux des entreprises de production.
Il y a, de notre
point de vue, des enjeux législatifs découlant de la légalisation dans les
milieux de travail, et nous faisons,
dans notre mémoire, des recommandations en ce sens. Cependant, il nous apparaît
également important que certains messages politiques soient davantage
mis en évidence, et ce, afin d'éviter une banalisation de la consommation du
cannabis dans le cadre du travail.
Le
gouvernement a été clair concernant la sécurité routière. Malgré la difficulté
de l'appliquer, le présent projet de loi va au-delà du projet de
loi C-46 du fédéral et amène la notion de tolérance zéro quant à la
conduite après avoir consommé du cannabis. Le projet de loi prévoit également
qu'il sera interdit de consommer ou même d'avoir en sa possession du cannabis dans plusieurs lieux sensibles. Il précise
explicitement la proximité d'un établissement d'enseignement, de
garderies et de prisons. Les municipalités aussi s'inquiètent de comment cela
va s'appliquer sur leur territoire.
Considérant
les enjeux importants reliés à la consommation de drogue dans certains milieux
de travail et le risque de voir ce
problème accentué, nous souhaitons voir la même sensibilité pour les milieux de
travail dans le projet de loi que pour
la sécurité routière, le précédent existant déjà dans le milieu de la
construction et l'Ontario ayant déjà ajouté les milieux de travail dans
les lieux où il y aura, de facto, une interdiction de consommer. Il ne peut y
avoir un signal plus clair et convaincant sur l'importance que le législateur
accorde à la problématique de la consommation en milieu de travail qu'en le
prévoyant explicitement dans la loi.
Puisque les
enjeux ne concernent pas uniquement la santé et la sécurité au travail, mais
également la productivité dans nos entreprises, il est important que l'interdiction
englobe l'ensemble des milieux de travail et pas seulement les milieux à
risque. Sans cet ajout législatif, la charge reviendra exclusivement aux
employeurs de faire appliquer une politique de tolérance zéro en entreprise.
Considérant la complexité que cela peut apporter autant dans les industries considérées à risque que celles qui ne le sont
pas, ils seront également responsables de défendre la validité de leur
politique devant les différents tribunaux.
Vous devez avoir à l'esprit que la législation
entourant la santé et la sécurité au travail impose un fardeau très important
aux employeurs. Effectivement, ils sont responsables, quant à la Loi sur la
santé et sécurité au travail, à la Loi sur
les accidents du travail et les maladies professionnelles, mais également face
au Code criminel, de tous les accidents survenant dans le cadre de leurs
activités, et ont notamment l'obligation de s'assurer qu'aucun de leurs
employés ne met en danger la sécurité d'autrui, y compris suite à la
consommation d'alcool, de drogue ou de médicaments.
La
consommation de drogue, notamment du cannabis, est particulièrement
problématique pour les entreprises puisque les outils de détection ne
permettent pas aujourd'hui de déterminer facilement la quantité et le moment de
la consommation. Pour certains consommateurs
réguliers de cannabis, la consommation peut être détectée dans
l'organisme pendant plus de 30 jours. Si le produit est transformé en
aliment, l'employeur ne peut pas non plus se fier à l'odeur caractéristique
afin de détecter une consommation récente.
L'employeur
est actuellement en droit de procéder à un test de dépistage s'il reconnaît des
signes objectivables évidents ou suite à un accident, soit souvent trop
tard. Il ne peut pas non plus procéder à des tests aléatoires afin de décourager une consommation de la part de ses
employés puisque les tribunaux sont venus à maintes reprises privilégier
le droit à la vie privée, enchâssé dans les
chartes. Reconnaissant les enjeux technologiques et juridiques d'un tel
dépistage, les policiers responsables
d'assurer la sécurité routière devront se rabattre sur une formation poussée
visant à détecter les signes
objectivables physiques de facultés affaiblies. Est-ce que tous les employeurs,
peu importe leur taille, devront suivre une formation intensive sur la détection des facultés affaiblies? Poser
la question, c'est un peu y répondre. Comment une telle intervention de la part d'un employeur qui
vivra une telle situation... pourra faire valoir la validité de ses
observations ayant
motivé un test de dépistage devant les tribunaux, alors que, contrairement à
l'alcool, il ne pourra faire valider de test en laboratoire puisque les prises de sang ne font pas la preuve d'une
consommation très récente ni de l'état des facultés affaiblies?
C'est
pourquoi nous vous faisons une recommandation dans le mémoire afin d'éviter de
créer un dédale juridique insupportable
pour les employeurs québécois, où ils ont toute la responsabilité, juridique,
financière et opérationnelle, sans pour autant avoir les moyens de
contrôle. Les employeurs sont prêts à continuer de faire leur part dans le
cadre de la prévention des dépendances et quant à leur obligation
d'accommodement, mais ils ne peuvent pas assumer l'ultime responsabilité légale
et financière suite à des incidents résultant d'une consommation récréative ou
à but médical mais non déclarée.
Nous pouvons aussi envisager que cette
légalisation aura un impact sur la productivité et l'absentéisme des travailleurs consommateurs. Dans les juridictions
où le cannabis fut légalisé, la consommation semble avoir augmenté. Nous pouvons prévoir une hausse au sein de la
population, par conséquent anticiper une baisse de la productivité, une hausse de l'absentéisme et un accroissement des
risques d'accident. Il faudra évaluer aussi les coûts pour les
assurances collectives.
Concernant la
production, l'enjeu de la production de cannabis se pose, et de façon
relativement pressante. Même si les
évaluations relatives aux volumes de production requis et aux revenus générés
demeurent imprécises, il est évident que le Québec et les autres provinces devront favoriser la mise en place de
capacité de production qui dépasse de beaucoup celle qui fut autorisée pour le cannabis à des fins médicales. Il serait
pour le moins ironique, et contre-indiqué sur le plan économique, de devoir importer le cannabis
consommé au Canada et au Québec. La production ne représente
probablement pas un nouvel eldorado, mais il
y a là un indiscutable potentiel de création d'entreprise au Québec. Il y a des
entrepreneurs responsables intéressés par cette industrie émergente.
Bref, la
légalisation du cannabis chose faite ouvre une nouvelle activité économique,
et, selon nous, cette activité devrait être accessible à une diversité
d'entrepreneurs, et ce, dans diverses régions.
Nous
constatons que plusieurs éléments de la réglementation sur le cannabis relèvent
de la compétence fédérale. Les
producteurs actuels détiennent un permis délivré par Santé Canada, mais nous
pouvons difficilement imaginer que le Québec
n'aura pas son mot à dire dans les choix des types d'entreprises qui seront
autorisées à produire du cannabis dans le respect des normes de
production et de sécurité édictées par la législation fédérale. Après tout, la
régie des marchés alimentaires et agricoles
du Québec délivrait les permis autorisant la production du tabac au Québec.
Nous demandons donc qu'aux fins de
l'article 19 du projet de loi le détenteur de permis de producteur octroyé
par le fédéral soit automatiquement autorisé par le gouvernement
provincial. Il est important qu'il n'y ait pas de redondance au niveau des
pouvoirs d'émission de permis et d'inspection entre les juridictions.
Enfin, et sans entrer ici dans tous les détails,
parce que le mémoire est clair à cet égard-là, vous devez vous préoccuper, en ce qui a trait aux employeurs, au
dépistage, outils de détection fiables, la pression sur les régimes
d'assurance en favorisant une parité entre
le cannabis récréatif et thérapeutique au niveau du prix, de la pression sur
les coûts de la CNESST, donc payé par les employeurs, et exclure
les réclamations pour les employés intoxiqués, et, enfin, être sensibles
à la responsabilité des employeurs en vertu des différentes lois, comme je vous
le mentionnais au début. Alors, je vous remercie.
• (10 h 30) •
Le
Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, M. Forget, pour la présentation de votre exposé. Nous allons
débuter immédiatement les échanges avec Mme la ministre et fière députée de
Soulanges. Mme la ministre, vous disposez de 15 minutes. À vous la parole.
Mme Charlebois :
Oh que oui! je suis fière députée de Soulanges, vous avez tout à fait raison.
Alors, bien,
je veux d'abord vous saluer, M. Forget et M. Gagnon. Merci d'être là
en cette journée frisquette, on va le
dire comme c'est, hein, de janvier. Mais c'est bon pour l'aération des poumons,
qu'ils disent. L'air est pur, à ce temps-ci, il n'y a pas beaucoup de
moustiques.
Bon, une fois
qu'on a établi ça, on a une base commune, tout le monde, je pense que personne
ne peut contredire mes faits. Alors, merci d'être venus nous présenter
vos points de vue. J'ai pris bonne note de tous vos commentaires.
Maintenant,
j'ai le goût d'entrer tout de suite sur l'augmentation de la consommation. Vous
nous faites référence la même chose que la fédération québécoise des
entreprises indépendantes... canadienne des entreprises indépendantes, puisque
vous nous parlez d'augmentation de consommation au Colorado, puis, à chaque
fois que j'entends ça, il y a quelque chose
qui me tique, et j'ai trouvé pourquoi ça me tique : parce que vous avez,
autant votre présentateur précédent que
vous... vous avez la même prémisse, l'augmentation de consommation — puis là je vous fais des commentaires,
puis ça ne veut pas dire que j'ai l'absolue vérité, hein, vous pourrez
commenter — mais
en même temps vous nous dites : Ça augmente,
au Colorado, mais nous, on souhaiterait que ce soit les entreprises qui fassent
la vente du cannabis, et non une société
d'État, ce serait plus facile, etc., moyennant un encadrement, puis, bon, il y
aurait une diversité d'entrepreneurs qui
seraient aptes à faire ça. J'entends ça, mais c'est exactement ça qu'ils ont,
au Colorado, des entrepreneurs privés qui, eux autres, misent sur la profitabilité, misent sur l'augmentation des
ventes, misent... font de la publicité, exactement dans le sens contraire que le Québec veut aller. Alors,
c'est là où... Tu sais, quand je vous disais que ça tiquait, là, dans ma tête
il y a une dichotomie, dans le sens où,
nous, sur quoi on axe, c'est justement la prévention. Ce n'est pas
nécessairement d'augmenter les ventes, ce n'est même pas ça du tout, c'est plus
d'encadrer la consommation de cannabis qui est déjà existante.
Il se peut
qu'on trouve du monde de plus, pas parce qu'ils ne sont pas en consommation,
parce qu'ils ne le disent pas en ce
moment. Mais, une fois que je vous ai dit ça, ce qu'on ne souhaite pas, c'est
en vendre plus à ce monde-là. Ce qu'on ne souhaite pas, c'est trouver des nouveaux
consommateurs. Ceux comme moi qui n'en consomment pas... Je ne me mettrai pas à consommer quand ça va être
légalisé, je vous le dis bien honnêtement, puis il y en a d'autres comme
moi. On ne souhaite pas non plus que, du monde comme moi... leur pousser ça
comme la Société des alcools fait en ce moment.
C'est un marché... Puis la Société québécoise du cannabis, elle va faire
exactement le contraire. Il n'y aura pas de promotion, il n'y aura pas de campagne Inspire, soupire, respire,
faites tous les temps, là, ça n'arrivera pas, ça, parce que ce qu'on ne veut pas, c'est augmenter la
consommation. Ce qu'on veut, c'est l'encadrer, la baliser, faire de la
prévention.
Alors, vous
comprenez qu'à chaque fois que j'entends que ça consomme plus au Colorado,
c'est sûr, ce n'est pas les mêmes règles. On se met-u d'accord là-dessus
pour partir?
Et, de deux,
quand on parle des entreprises indépendantes, vous n'avez pas parlé du projet
pilote, si je me souviens bien, comment vous voyez ça, etc. Je vous
laisse aller sur ce pan-là parce que j'ai d'autres questions, évidemment.
M. Forget (Stéphane) : Tout
d'abord, sans vous contredire, à aucun moment nous n'avons parlé, ni dans notre mémoire ni dans toutes les entrevues que
j'ai données à ce sujet-là, de la vente par le secteur privé du cannabis.
Ça n'a jamais été notre propos, du côté de la fédération.
Une voix : ...
M. Forget
(Stéphane) : Non, non, pas
du tout. On a parlé de la production, tantôt, mais pas du tout de la
vente, de la distribution. Pour nous, vous
avez fait un choix, et c'est un choix que l'on respecte. Donc, de notre point
de vue, ce n'est pas l'enjeu.
Il y a le
Colorado, vous l'avez mentionné. Il y a d'autres études qu'on mentionne dans le
mémoire, notamment des études
italiennes qu'on a utilisées, qui démontrent qu'il y a une augmentation de la
consommation dans les endroits où... Puis
il n'y en a pas encore énormément, là, il faut se le dire honnêtement. Je
reviens au Colorado puis aussi à l'État de Washington. Il y a certaines études qui démontrent qu'entre 2012 et
2013, au moment où ils l'ont légalisé, il y a eu une augmentation de 20 % des tests de dépistage
positifs dans le milieu du travail. Évidemment, eux, ils peuvent faire
des dépistages, là. L'État de Washington, on parle d'une augmentation de
23 % des tests de dépistage. Donc, on arrive, évidemment, avec les conclusions disponibles, à la conclusion qu'il y a
une possibilité qu'il y ait une augmentation de la consommation. Ça, c'est le premier élément. Et,
dans ce contexte-là, évidemment, ça aura une incidence sur le milieu du
travail.
Le deuxième,
notre préoccupation est quant à la banalisation de la consommation potentielle
compte tenu que ce sera devenu légal.
Et c'est ça qu'on veut s'assurer, qu'on passe des messages très forts pour que
les gens comprennent que c'est non
dans les milieux de travail. Ce n'est pas parce que c'est légal que vous avez
le droit, avant d'aller travailler le matin, de consommer. Il y a des
conséquences à cela.
Donc, on veut
qu'il y ait un message politique fort pour que tout le monde comprenne que ce
sera interdit sur les milieux de travail, que la loi le prévoit, et,
deuxièmement, qu'on va être en mesure aussi d'appuyer les employeurs, comme je le mentionnais, qui ont à ce jour toute
la responsabilité et peu de moyens de se défendre devant les tribunaux
pour, justement, justifier des accidents qui seraient survenus, des coûts, et
ainsi de suite.
Mme Charlebois :
Est-ce que vous savez si, dans le cas de l'alcool, il y a des dispositions
claires dans la loi pour des employés qui rentrent au travail intoxiqués
à l'alcool?
M. Gagnon (Alexandre) : En
fait, oui, évidemment, l'employeur peut avoir des politiques au niveau de la
tolérance zéro, des politiques...
Mme Charlebois : ...dans
la loi.
M. Gagnon (Alexandre) : Dans la
loi, non, pas spécifiquement.
Mme Charlebois :
Mais, des politiques claires, dans le Code du travail, l'employeur peut
toujours en définir, c'est ce que je comprends, et l'employé a des
obligations en regard de cette politique. Est-ce que je me trompe?
M. Gagnon
(Alexandre) : Vous avez
raison. Encore une fois, il y a des enjeux, oui, au niveau santé et
sécurité au travail, et encore, ce serait
très difficile, là, considérant les outils de détection et de dépistage
accessibles aux employeurs, pour vraiment les faire appliquer, de un, de
la même façon que la sécurité routière, vous l'avez déjà exprimé, mais il y a
également des enjeux de productivité, et actuellement les jurisprudences ne
permettent pas, aux endroits peu à risque, d'avoir des politiques de tolérance
zéro. Donc, c'est de là l'importance, dans le projet de loi, dans la loi qui va
être émise, qu'il y ait une interdiction complète dans les milieux de travail,
là, donc, autant de consommation que de possession.
Mme Charlebois :
Je comprends que vous êtes avocat, ou juriste, ou...
M. Gagnon (Alexandre) : Non.
M. Forget (Stéphane) :
Spécialiste en santé et sécurité au travail.
Mme Charlebois :
Ah! O.K. Parce que j'étais pour vous demander : Est-ce que vous savez si
ça contrevient aux chartes?
M. Gagnon
(Alexandre) : D'avoir une tolérance zéro? Bien, évidemment, là...
Mme Charlebois :
...pas seulement tolérance zéro, de faire en sorte que, dans le milieu de
travail, il y ait une disposition dans la loi mais aussi des sanctions, comme
l'a mentionné votre prédécesseur.
M. Gagnon
(Alexandre) : Bien, je... Oui, peut-être que...
M. Forget (Stéphane) : Bien, je vous dirais, en ce qui a trait au milieu
de travail, il y a l'Ontario déjà qui a décidé de l'appliquer dans la
loi qui entre en vigueur pour donner suite à C-45. Donc, je pense que, de ce
côté-là, on n'y voit pas d'enjeu.
Nous,
on est convaincus que le signal lancé dans la loi va démontrer hors de tout
doute que ce ne sera pas toléré sur les
milieux de travail, et ça, ça va permettre aux entreprises, par la suite,
d'avoir des politiques de tolérance zéro qui seront beaucoup plus efficaces. Ça va aussi lancer le
signal aux entreprises qu'elles auraient tout intérêt à avoir des
politiques de tolérance zéro, et ça va aussi
départager, là, ce qui est un milieu à risque de ce qui n'est pas un milieu à
risque, parce que, comme je le
mentionnais, il y a des enjeux démontrés dans différentes études sur la
productivité, sur l'absentéisme au travail et aussi les conséquences à
terme pour des employés qui auraient des séquelles de consommation. Et là on
embarque dans tous les frais assumés par les
régimes d'assurance collective, et qui, je le rappelle à vous tous, est payé en
grande partie par les employeurs mais aussi par les employés.
Alors
là, il y a tout cet élément-là aussi à considérer. Donc, c'est pour ça que,
pour nous, il est clair qu'on doit être en mesure de faire un peu à la
lumière de ce que l'Ontario a fait puis de dire : Ce sera non sur les
milieux de travail, de façon généralisée.
Mme Charlebois :
Considérez-vous que le taux d'absentéisme actuel au travail est dû à la
consommation de cannabis? Parce qu'il y en a des gens qui consomment
actuellement. C'est dans l'illégalité, on en convient, mais, que je sache, il y
en a beaucoup, même.
M. Gagnon
(Alexandre) : Bien, bon, évaluer, évidemment, là, le pourcentage de
consommation actuel des employés et à quel
point ça affecte le taux d'absentéisme, évidemment, on n'est peut-être pas les
intervenants les mieux placés pour
vous le dire, là, mais je crois qu'il y avait quand même des études, puis on
l'a dans notre mémoire, on pourrait vous
revenir avec plus de précision, qui disaient que les personnes qui ont des
dépendances au niveau de la consommation de cannabis avaient un taux d'absentéisme deux fois plus important que
ceux qui ne l'avaient pas. Donc, évidemment, ça peut avoir un impact sur
l'absentéisme et beaucoup également sur la productivité de ces employés-là dans
le cadre de leurs fonctions.
Mme Charlebois :
Mais j'ai même le goût de lui dire
que toutes les dépendances provoquent probablement des taux
d'absentéisme, que ce soit l'alcool et autres, le jeu ou n'importe quoi. Ce
n'est jamais... Ce n'est pas le fun pour l'employé à la base, là, ça fait que
c'est encore pas le fun aussi pour l'employeur.
• (10 h 40) •
M. Gagnon (Alexandre) : Évidemment. Mais ce qu'on... notre message, d'aujourd'hui, c'est également de dire... Il y a beaucoup d'obligations au
niveau de l'employeur, des responsabilités, donc, au niveau production, au
niveau juridique, au niveau de supporter ses
travailleurs, mais ils n'ont pas... on n'a pas nécessairement les outils pour
les assumer, ces obligations-là.
Donc, fournissez-nous les outils ou jouez au niveau de nos responsabilités, mais on ne peut pas garder à la fois aucun outil et à la fois
toutes les responsabilités. Donc, il faut avoir un échange à ce niveau-là.
Mme Charlebois : Quand vous me parlez d'outils, c'est-u des outils
comme j'ai mentionnés à votre prédécesseur qui font en sorte qu'il y a...
Parce que je pensais aux petits employeurs. J'en étais une, moi, là, avant, ils
n'ont pas de ressources humaines affectées à
ça, ça fait que c'est souvent l'entrepreneur lui-même qui doit faire ses
affaires, puis ça s'ajoute au nombre d'heures qu'il fait déjà, que la
personne fait déjà. Est-ce que vous croyez qu'on pourrait fournir des modèles
ou on pourrait venir en aide à ces personnes-là qui ont des petites
entreprises?
M. Forget (Stéphane) : Bien, la réponse, c'est oui. On va avoir tout un
exercice à faire, là, de sensibilisation, de formation pour les employeurs. Mais je pense qu'il faut aussi trouver le
moyen d'investir dans les moyens de détection, là, pour qu'on ait des
moyens plus efficaces. Je pense qu'il y aura un investissement à faire du côté
de la détection. Par la suite, il va y avoir
de la sensibilisation, de la formation évidente à faire auprès des employeurs
et, troisièmement, de leur donner des outils, possiblement
par la loi ou autres, qui leur permettra, là, d'intervenir auprès des employés,
le cas échéant. Je ne sais pas si j'ai oublié des éléments, Alexandre.
M. Gagnon
(Alexandre) : Non, ça ressemble beaucoup à ça. Puis le principal
outil, effectivement, ce serait d'inclure les milieux de travail comme un
endroit où il n'y a aucune consommation ou possession de cannabis.
Mme Charlebois : ...M.
le Président, juste pour informer nos
collègues qui sont ici, de la Fédération
des chambres de commerce, le gouvernement fédéral travaille activement,
en ce moment, en recherche et développement justement pour avoir un outil pour la route, qui pourra
peut-être s'apparenter à quelque chose qui pourrait être utilisé dans le
monde du travail. Mais, encore là, il faut examiner... de notre côté, on va
examiner, au niveau des chartes, qu'est-ce qui est possible d'être fait et pas
possible.
Je veux vous
questionner sur... Je pense que vous avez mentionné que vous êtes plus
favorables au 21 ans qu'au 18 ans. Est-ce que j'ai rêvé ça?
M. Forget (Stéphane) : Non. C'est ce que vous nous avions mentionné
lorsque nous étions passés en commission itinérante que vous aviez menée l'automne passé. On avait fait cette
réflexion-là avec nos membres suite, évidemment, à deux éléments... bien, un, aux études qui avaient
été rendues publiques par différents médecins, différentes associations
de médecins, et, deuxièmement, on avait considéré aussi l'enjeu sur les accidents du travail, où on
constate qu'il y a beaucoup d'accidents
du travail qui sont dans la cohorte d'employés qui sont plus jeunes, et on se
disait : Est-ce qu'il n'y a pas là une corrélation à faire entre le risque potentiel d'avoir davantage
d'accidents et le fait que ce soit beaucoup chez les plus jeunes qu'on voit apparaître
des accidents de travail? Donc, c'étaient les deux éléments que nous avions
mis.
Cela
étant dit, on n'en a pas reparlé aujourd'hui, considérant que vous aviez statué sur l'âge, on a
décidé de ne pas en reparler, mais c'était essentiellement la réflexion
que nous avions l'automne dernier.
Mme Charlebois : Mais vous avez vu que les directeurs de santé
publique ont clairement dit que 21 ans, c'était aléatoire
dans le sens où l'optimal, ce serait 25 ans et même jamais, là, de
consommation, mais ça ne change rien, 21 ans,
parce que le cerveau n'est pas plus fini d'être formé. Nous, on a mis
18 ans pour se donner la chance de, justement, parler avec ces
jeunes-là, parce que, vous l'avez dit, 44 % de l'ensemble des
consommateurs de cannabis viennent, proviennent d'entre 18 et 24 ans.
Mais
est-ce que vous avez des statistiques sur le nombre d'accidents? Vous me dites
que c'est dans cette strate d'âge là.
Est-ce que vous avez des statistiques précises? Je sais bien que vous n'aurez pas la
corrélation entre la consommation de cannabis et... mais, votre taux
d'accidents, est-ce que vous avez des informations là-dessus à nous fournir?
M. Gagnon (Alexandre) : En fait, au niveau de la CNESST, effectivement,
ils colligent les données, là, à savoir... on pourrait vous les fournir, mais, sans trop rentrer dans les détails,
là, je pourrais dire, je pense, que le taux d'incidence d'accidents est de 15 % supérieur, environ,
là, au niveau, tu sais, des jeunes de 18 à 25 ans, donc, par rapport... considérant que c'est des premiers emplois, et donc ils sont
plus exposés aux risques.
M. Forget (Stéphane) : D'ailleurs, à la CNESST, on fait des campagnes de
sensibilisation actuellement, justement,
auprès des jeunes pour qu'ils soient plus sensibilisés au fait qu'il y a des
risques, là, quand... On est souvent dans les premiers emplois, effectivement.
Mais c'est des données qu'on pourrait vous fournir. À la CNESST, c'est très
bien comptabilisé, là.
Mme Charlebois :
Oui, puis il va falloir analyser... Il reste-tu beaucoup de temps, M. le
Président?
Le Président
(M. Merlini) : Une quarantaine de secondes, Mme la ministre.
Mme Charlebois :
Oh! Bien, c'est ça. Mais il va falloir analyser le lien entre la consommation
et peut-être l'inexpérience due à un premier
emploi ou... je ne veux pas dire qu'ils sont... Tu sais, il y a quelque chose
là que les jeunes, des fois, ils ne saisissent pas toute l'ampleur de
leurs responsabilités.
M. Forget (Stéphane) : C'est ça. Absolument. Bien, disons que je
nous invite à être attentifs, dans les prochaines années, s'il y a une
corrélation à faire. Puis soyons vigilants, disons-le comme ça.
Mme Charlebois :
O.K. Merci beaucoup.
Le Président
(M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la ministre, pour ce bloc
d'échange avec nos invités. Maintenant, de l'opposition officielle, M. le
député de Labelle, vous disposez de neuf minutes. À vous la parole.
M. Pagé :
Merci, M. le Président. Alors, M. Forget, M. Gagnon, bienvenue. Bonne
année également.
Alors,
à votre mémoire, page 14, le point 3, vous dites : «Favoriser
une parité de prix entre le cannabis récréatif et le cannabis
thérapeutique afin d'éviter des pressions sur les régimes d'assurance
collective.» C'est intéressant que vous ameniez
ce genre de point de vue parce qu'effectivement c'est des choses, quand on...
peut-être sur lesquelles on n'a pas eu
le temps de réfléchir beaucoup. Mais j'aimerais que vous m'expliquiez comment
vous voyez la chose quand vous dites : Favoriser une parité des prix. Est-ce que le gouvernement du Québec
devrait carrément contrôler les prix, parce que même au niveau des médicaments les prix sont contrôlés,
et qui pourrait être, par exemple, à la SQC, parce qu'on veut
compétitionner le marché au noir, on a toujours dit qu'il fallait être
compétitifs? Si le prix, avec les taxes, sort à 7 $, ou 8 $, ou 9 $, peu importe, donc,
est-ce qu'automatiquement on devrait dicter que le cannabis à des fins
médicales, qui est fort différent,
devrait être exactement au même prix? Est-ce qu'on devrait le dicter de cette
façon-là et que ce soit la SQC qui
ait le contrôle, le gouvernement, d'une certaine façon, qui ait le contrôle sur
le prix, mais un prix égal pour des fins médicinales ou des fins
récréatives?
M. Forget
(Stéphane) : Je vous
explique le raisonnement derrière cela très brièvement, vous le trouverez à
la page 10 de notre mémoire.
Le recours au
cannabis prescrit à des fins thérapeutiques a explosé. On est passé de
8 000 consommateurs autorisés, en juin 2014, à quelque
200 000 utilisateurs deux ans plus tard, au Canada, alors c'est
gigantesque.
La
préoccupation des employeurs, évidemment, pour plusieurs, dans les régimes
d'assurance collective, on va payer
le cannabis à des fins thérapeutiques. Donc, si le prix n'est pas équivalent,
la préoccupation des employeurs, c'est qu'il y a un certain nombre
d'employés qui, plutôt que se procurer sur le marché public leur cannabis,
essaient de convaincre leur médecin de
l'utiliser, de l'obtenir à des fins thérapeutiques, donc de payer moins cher
et, de surcroît, de se le faire
rembourser par les assurances collectives de leur employeur. Alors, c'est là la
préoccupation des employeurs sur avoir un équilibre entre le prix à des
fins thérapeutiques et le prix à des fins commerciales.
M. Pagé :
Mais ça, j'ai bien compris cela. Mais, moi, ma question, c'est : Est-ce
que le gouvernement devrait carrément
le dicter, le prix, pour s'assurer que ce soit un prix qui soit égal, qui soit...
le cannabis à des fins médicinales, médicales
et qui est vendu dans les pharmacies ou en ligne? Est-ce que le gouvernement
devrait vraiment le dicter? C'est le prix de la SQC, donc c'est le prix
pour des fins médicales?
M. Gagnon
(Alexandre) : En fait,
actuellement, la question se pose plus ou moins, parce que le prix, au
niveau du thérapeutique, est beaucoup plus
élevé que ce qui est envisagé au niveau, là, récréatif. On vous demande, à
toutes fins pratiques, juste de
garder à l'oeil que, si jamais ce prix-là vient à descendre, par les capacités
de production supplémentaires qui
vont être fournies au Québec, au Canada... bien, de s'assurer, lorsque ce
prix-là va descendre, qu'on puisse réagir à ce moment-là. Donc, c'est plus une vigilance qu'on vous demande de garder,
plutôt que venir dicter, là, par le gouvernement, finalement, le prix du
thérapeutique, là.
M. Forget
(Stéphane) : Cela dit, nous
sommes évidemment très conscients qu'à des fins médicinales il y a un service professionnel qui accompagne la
distribution de ce type de médicament là. Alors donc, il y a ça évidemment
à tenir en considération. Mais, comme vient
de le dire mon collègue, évidemment, l'écart est très important à ce moment-ci.
Alors donc, on vous dit : Soyons vigilants par rapport à ça.
M. Pagé :
O.K. Merci. À la même page, page 14, vous dites au point 7 :
«Prévoir la possibilité pour un employeur de poursuivre en action civile un travailleur pour une faute commise à
son travail en raison de ses facultés affaiblies par la consommation de
cannabis.» Bon, présentement, là, expliquez-moi comment ça fonctionne et
quelles seraient les différences que vous
souhaiteriez clairement que nous apportions. Parce que présentement il y en a,
des gens qui vont au travail, parce que... qui ont consommé de l'alcool,
ils ont consommé de l'alcool, du cannabis ou autre façon. Alors, qu'est-ce
qu'on devrait modifier à la loi pour répondre à vos préoccupations?
• (10 h 50) •
M. Gagnon
(Alexandre) : En fait, il y
a une distinction facile à faire au niveau, là, des moyens que les
employeurs ont pour éviter ces accidents-là.
Actuellement, lorsqu'on parle d'alcool, on a les tests de dépistage pour le
qualifier, les employeurs ont les outils pour gérer ces situations-là.
Au niveau de la drogue, si quelqu'un passe un test de dépistage suite à un
accident ou même en prévention, lorsqu'on voit des signes objectivables, du
moment qu'on détecte un peu de cannabis dans son organisme, on va considérer
qu'il était sous l'effet du THC, donc du cannabis.
On ne sait pas à quel point, lorsque le cannabis
va être légal, si cette présomption-là va suivre. Donc, vous demandez à l'employeur, actuellement, d'avoir
toutes les responsabilités au niveau... Il y a un régime de «no fault»
au niveau des accidents de santé et sécurité
au travail, donc, que ce soit au niveau matériel, d'indemnisation, tout ça. Ce
régime de «no fault» là devrait être repensé
tant et aussi longtemps que les employeurs n'ont pas les pleins pouvoirs et les
pleins outils afin d'assumer leurs responsabilités. C'est un peu... dans
différentes recommandations qu'on essaie de venir revoir un peu les réflexions autour de ce régime de «no fault» là dans
les circonstances spécifiques au niveau du cannabis en raison de
l'absence d'outils des employeurs.
M. Pagé :
O.K., je comprends mieux, merci. À la page 15, vous faites six
recommandations qui sont en lien avec la production, et j'en suis
également, parce qu'effectivement il y a là aussi une grande préoccupation. Et,
bon, vous souhaitez en gros, à travers vos recommandations, qu'il n'y ait qu'un
seul palier de gouvernement, là, pour ne pas complexifier le tout.
Au
point 1, quand vous dites : «Le Québec ne devrait pas favoriser
l'émergence d'un monopole de production», c'est exactement ce que nous pensons également. Nous plaidons plutôt en
faveur d'une diversité de producteurs agréés.
Et un peu plus loin, au point 4, vous allez
un peu plus loin dans le même sens en disant : «Le gouvernement devrait favoriser l'émergence d'entreprises de
production de cannabis dans plusieurs régions du Québec plutôt que de
concentrer la production dans un nombre très restreint de régions
administratives.»
Et, je
dirais, voilà particulièrement une des raisons fondamentales pourquoi que nous
souhaitons que ce soit le MAPAQ qui puisse déterminer qui sera autorisé
à produire le cannabis pour des fins médicinales, d'ailleurs les gens, les producteurs en serre sont venus nous le dire,
l'UPA est venue nous le dire aussi, parce que nous pourrions avoir le
contrôle et se donner une politique, au Québec, justement, de production et
autoriser qui l'on veut, ça pourrait être, justement,
des producteurs plus petits, et qu'il y en ait un peu partout à travers le
Québec. Parce que, quand je les vois, dans
les Basses-Laurentides, transformer leurs serres de tomates en serres de
cannabis, où c'est déjà le plein emploi, vous comprendrez que j'aimerais
mieux les amener dans les Hautes-Laurentides, où j'ai 11 % de chômage
présentement, hein?
Bon. Alors, ne croyez-vous pas que, justement, ça devrait être le MAPAQ qui
devrait contrôler les autorisations pour les productions de cannabis,
particulièrement pour des fins récréatives?
M. Forget
(Stéphane) : Quelques éléments. Tout d'abord, on croit au libre
marché, et à ce sujet-là, donc, par rapport à ce que vous dites, on veut
justement éviter que c'est l'État qui décide dans quelle région et à quel
endroit vont se retrouver ces entreprises-là.
Deuxième chose, je
vous réfère à la troisième recommandation, on n'a évidemment aucune objection,
au contraire, à ce que des producteurs
agricoles diversifient leurs activités par la culture de la marijuana, mais on
pense aussi que les entreprises non
agricoles devraient aussi pouvoir être autorisées à le faire. Ce ne sont pas
toutes des entreprises agricoles.
Dans
ce contexte-là, je n'ai malheureusement pas de réponse à votre question. Mais
est-ce que le MAPAQ pourrait, si
c'était lui, le cas échéant, légiférer pour des entreprises qui sont dites non
agricoles aussi? Là, je n'ai malheureusement pas la réponse. Mais il faudrait faire cette réflexion-là, de notre
point de vue, compte tenu de notre recommandation 3.
M. Pagé :
Il reste combien de temps?
Le Président
(M. Merlini) : 30 secondes, M. le député.
M. Pagé :
30 secondes.
M. Forget
(Stéphane) : Désolé.
M. Pagé :
Non, c'est bon. O.K. Bien, je vais laisser, pour 30 secondes... Merci.
Merci bien.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Labelle,
pour ce bloc d'intervention. Nous allons maintenant du côté du deuxième groupe d'opposition. M. le député de
Borduas, vous avez six minutes pour votre bloc d'échange. À vous la
parole.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Merci
de participer aux travaux de la commission.
Je
vais poursuivre sur la discussion que vous aviez avec mon collègue de Labelle
parce qu'elle est intéressante. À la
page 13 de votre mémoire, vous dites : Écoutez, on a deux
juridictions, dans le fond, le fédéral et le provincial. Pour expliquer aux gens, actuellement, les permis de
production vont être octroyés par le gouvernement fédéral, comme c'est le cas actuellement pour le médicinal, et, pour le
récréatif, je sais que la ministre n'aime pas quand on utilise ce mot-là,
mais... utilisons «non médicinal», là on se
ramasse dans la situation où c'est encore le fédéral qui détermine, puis là,
au Québec, bien, la Société québécoise du cannabis va devoir s'approvisionner
auprès de ces producteurs autorisés là. Donc,
ce que je comprends, c'est que vous demandez une simplification, et ce serait
plus simple que ce soit le Québec qui octroie les permis de production
également.
M. Forget (Stéphane) : Ce qu'on constate, c'est toujours le phénomène...
puis ça risque d'être vrai dans le cas du cannabis comme dans d'autres secteurs, c'est d'éviter, pour les
entreprises qui vont se lancer dans cette aventure-là, un dédoublement,
qu'on ait une double inspection, double juridiction, double de tout.
Donc,
ce qu'on constate, c'est qu'on est dans une nouvelle économie, là, dans ce
cas-là, nouveau marché. Est-ce qu'on peut faire en sorte d'éviter les
erreurs du passé et d'éviter les dédoublements à tous les niveaux?
M. Jolin-Barrette : En complément là-dessus, peut-être, ma question,
c'est au niveau des producteurs locaux, parce que, vous savez,
actuellement, sur le médicinal, la majorité des producteurs se retrouvent en
Ontario, et on en a deux autorisés au Québec, deux ou trois. Alors, peut-être
que de confier ça au Québec par le biais d'une entente administrative... Ça se fait dans de nombreux domaines où c'est de
juridiction fédérale, mais c'est le provincial, par le biais d'une entente administrative, qui décide, dans le
fond, qui se fait transférer le champ de responsabilité, qui détermine
sur le territoire qui peut produire. Est-ce
que, pour vous, c'est une avenue qui est envisageable, une entente
administrative? Est-ce que ça vous
satisferait, notamment pour vos membres, pour créer des emplois dans les
différentes régions du Québec?
M. Gagnon (Alexandre) : Bien, évidemment, ça pourrait... On ne veut pas
s'embarquer dans une guerre constitutionnelle,
là, à ce niveau-là, mais, si vous êtes capables d'aller chercher une entente
administrative, ça pourrait être intéressant,
du moment que ça vient mettre un seul responsable et non pas deux et prendre en
considération le fait que les entreprises qui ont été chercher,
actuellement, leur permis, pour plusieurs, ça leur a pris trois, quatre ans
pour aller chercher leur attestation. Donc,
évidemment, il y aura une simplification des processus, si jamais ça s'en vient
dans une juridiction... au Québec par entente administrative, là.
M. Jolin-Barrette : Dans vos recommandations, vous dites :
Écoutez, celles qui sont déjà productrices de cannabis médicinal
devraient se diriger vers le marché du...
M. Forget
(Stéphane) : Devraient pouvoir le faire s'ils le veulent.
M. Jolin-Barrette : ...devraient pouvoir le faire. Mais vous ne
pensez pas que ça va créer une concentration, déjà un avantage
comparatif important pour les entreprises qui sont directement dans du
médicinal versus des petits producteurs qui voudraient démarrer leur entreprise
de production au Québec?
M. Forget
(Stéphane) : Bien là, il y a une question de temps. On a quelques mois
avant que ce soit autorisé légalement, et, dans quelques mois, on va commencer...
la société québécoise de la marijuana va commencer à se procurer ce produit-là.
Alors, vers quel marché elle va se tourner pour se procurer ce produit-là?
Donc, la réflexion
était aussi beaucoup autour de la capacité de permettre à des entreprises d'ici
de s'établir rapidement pour être en mesure de participer à ce marché légal là
qui va arriver dans quelques mois.
M. Jolin-Barrette : Je note également dans votre mémoire que vous
soulignez le fait que vous auriez préféré que ça entre en vigueur
seulement en 2019. Vous maintenez toujours cette position?
M. Forget (Stéphane) : Bien, oui, c'est une position qu'on a, depuis le
début, mentionnée, on continue d'y croire, mais... En fait, on continue de le mentionner. On y croit de moins en
moins, évidemment, là, comme vous tous, j'imagine.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Au niveau des lieux de consommation, vous dites, à la
recommandation 4, à la page 14 de
votre mémoire, que, comme l'Ontario, on devrait interdire spécifiquement la
consommation sur les lieux de travail. Donc, vous souhaitez qu'on
l'introduise directement dans le projet de loi n° 157?
M. Gagnon
(Alexandre) : Effectivement.
M. Jolin-Barrette : O.K. Est-ce que vous avez des recommandations
aussi... Je comprends que c'est sur les lieux de travail, mais, dans
l'espace public, est-ce que vous vous êtes penchés également là-dessus?
M. Forget (Stéphane) : Non, on ne s'est pas penchés là-dessus, si ce
n'est que les milieux de travail, c'est plus que des lieux clos. Alors donc, quand on parle de milieu de travail, il
faut penser à tout ce qui touche le cadre et les milieux du travail, là, donc autant... que ce soit dans
les véhicules que dans les entreprises comme telles. Donc, on s'est
concentrés sur les lieux de travail.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et cette étendue-là de milieu de travail,
est-ce que ça touche également la représentation? Lorsque vous avez un employé qui se retrouve en
représentation, est-ce que c'est dans le cadre de ses fonctions, en tout
temps, même s'il n'est pas sur directement sur les lieux physiques?
M. Gagnon (Alexandre) : Bien, considérant que la responsabilité de
l'employeur, c'est dans toutes les fonctions reliées à son poste, donc
ça peut être dans des situations assez diverses, évidemment il faudrait que ce
soit appliqué.
M. Jolin-Barrette : La fédération de l'entreprise indépendante, avant
vous, disait : On devrait mettre dans la loi des amendes, qui
devraient être imposées par, peut-être, la CNESST. Qu'est-ce que vous pensez de
cet aspect-là, d'avoir un aspect punitif à incorporer dans la loi?
M. Forget (Stéphane) : En ce qui a trait aux amendes, je vous avoue que
je n'ai pas analysé la proposition de la fédération. Si c'est une fois
que l'employé est condamné, à terme, que l'amende existe, peut-être, mais je ne
vois pas comment on pourrait arriver, avant
une condamnation, à ce qu'on ait des gens sur le terrain qui imposent des
amendes. De toute façon, il faudrait être
capable de le démontrer, ce qui n'est pas possible, là, facilement au moment où
on se parle.
Donc,
est-ce qu'à terme ça pourrait être une mesure dissuasive? Peut-être, mais
j'avoue, là, qu'il faut l'analyser davantage,
à tout le moins le considérer une fois que la condamnation serait imposée, le
cas échéant, à un employé, là, qui aurait consommé sur les lieux de
travail.
• (11 heures) •
M. Gagnon
(Alexandre) : Pour dissuader, là, évidemment, de donner des pouvoirs à
l'employeur de pouvoir plus facilement donner des mesures disciplinaires, le
cas échéant, donc, encore une fois, l'interdiction complète sur les lieux de travail. Et puis il y a d'autres
mesures qui pourraient venir dissuader, notamment, que dans le cadre
de la... on le met dans notre
mémoire, au niveau de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles,
de venir dicter que quelqu'un sous
influence de cannabis qui a un accident de travail, ça soit considéré de facto
comme étant une négligence grave et
volontaire, là, donc, au niveau de l'indemnisation, donc, évidemment,
ne serait pas indemnisé au niveau de
la LATMP, au niveau des accidents de
travail, donc. Évidemment, on croit que ça serait un outil très dissuasif,
là, au niveau de la prévention
dans les milieux de travail.
Le Président
(M. Merlini) : MM. Stéphane Forget et Alexandre Gagnon,
représentant la Fédération des chambres de
commerce du Québec, merci de votre présence ce matin et votre
contribution aux travaux de la commission.
Je suspends nos
travaux quelques instants. Et j'invite la Fédération des cégeps à venir prendre
place. Merci.
(Suspension de la séance à
11 h 1)
(Reprise à 11 h 6)
Le
Président (M. Merlini) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Nous
avons le plaisir d'accueillir la
Fédération des cégeps. Je vous invite donc à vous présenter. Vous êtes habitués
aux us et coutumes des commissions parlementaires. Vous disposez de
10 minutes, et nous procéderons ensuite avec les échanges avec les membres
de la commission. Bienvenue à la CSSS. La parole est à vous.
Fédération des cégeps
M. Tremblay (Bernard) : Merci.
Merci, M. le Président. Merci, Mme la ministre. Mmes, MM. les députés, bonjour. Alors, tout d'abord, je me
présente : Bernard Tremblay, je suis le président-directeur général de la
Fédération des cégeps. Je suis accompagné, à
ma droite, de M. Sylvain Lambert, qui est le président du Conseil des
directions générales de la fédération et également directeur général du
cégep Édouard-Montpetit. À sa droite, Mme Geneviève Reed, qui est animatrice du Réseau intercollégial des intervenants
psychosociaux, une communauté de pratique, donc, de la Fédération des
cégeps, et, à ma gauche, Me Marie-Christine Tremblay, donc, qui est avocate à
la fédération.
Nous sommes ici aujourd'hui pour représenter les
48 cégeps du Québec qui servent près de 175 000 jeunes à l'enseignement ordinaire et quelque
26 000 adultes à la formation continue. Nous vous remercions
évidemment de nous donner l'occasion
de nous prononcer sur ce projet de loi que nous accueillons favorablement en
raison surtout de l'approche prudente et équilibrée de l'encadrement du
cannabis qu'il propose.
Au début de l'automne 2017, nous avons
participé au processus de consultation mené par Mme la ministre, nous avons également participé aux consultations
effectuées par le Secrétariat à la jeunesse, en septembre dernier, et
donc c'est avec satisfaction que nous constatons que le projet de loi reprend
plusieurs des éléments que nous avions fait valoir dans le cadre de ces
consultations.
Avant d'aller plus loin, il nous apparaît important
de rappeler que les cégeps encadrent déjà le tabagisme et la consommation d'alcool à travers différentes
politiques. Plusieurs des éléments du projet de loi n° 157 pourront
donc être intégrés à ces politiques. Il faut souligner aussi que les étudiants du
collégial font partie du groupe d'âge, ceux des 18 à 24 ans, qui présente la plus grande proportion d'individus ayant fait
usage de cannabis au cours des 12 derniers mois. Plusieurs des mesures du projet de loi pourraient
par conséquent avoir une incidence importante sur les cégeps, et nous
nous permettons donc quelques commentaires au sujet du projet de loi.
Avant de vous
parler de manière plus pointue de certains articles du projet de loi, nous
voulons d'abord insister sur l'importance
de la sensibilisation et de la prévention dans un contexte de légalisation du
cannabis. Dans cette perspective, nous nous réjouissons de voir que le
projet de loi encadre la mise en marché des produits du cannabis de manière stricte, d'autant plus que le caractère nuisible
de la publicité et du marketing de ces substances est largement
documenté. Nous croyons que des messages,
des stratégies et des programmes d'information et de sensibilisation devront
rapidement être mis en oeuvre pour aider les jeunes à faire des choix éclairés
en matière de consommation de cannabis.
En fait, des activités d'information et de
prévention devraient être lancées, selon nous, dès maintenant, et le
gouvernement devrait s'assurer que les messages livrés soient cohérents,
crédibles et adaptés aux publics concernés. Les
intervenants psychosociaux du réseau collégial qui travaillent chaque jour
auprès des jeunes des cégeps estiment qu'il faut éviter les messages
moralisateurs et culpabilisants, sans pour autant banaliser la consommation du
cannabis. Des messages qui expliquent les impacts d'une telle consommation sur
la santé physique et psychologique des jeunes, qui valorisent le mieux-être
sans consommation et qui font la promotion des saines habitudes de vie seraient
porteurs, donc, de réussite.
La Fédération
des cégeps croit aussi que les thèmes et les messages qui seront utilisés
doivent s'appuyer notamment sur
l'expertise des acteurs en santé publique et sur celle des organisations
actives en matière de prévention et d'intervention en toxicomanie. Nous suggérons donc au
gouvernement de se concerter dès maintenant avec ses experts pour
élaborer les messages d'information et de prévention.
Par ailleurs,
nous avons toujours préconisé que 18 ans soit l'âge légal pour acheter du
cannabis, et c'est ce que le projet
de loi prévoit aussi. Cependant, nous croyons qu'il faut intensifier les
activités de prévention précoce auprès des jeunes, dès le début du
secondaire, pour réduire la prévalence de la consommation et retarder l'âge
d'initiation des jeunes à cet égard.
Si vous le
voulez bien, donc, nous allons maintenant passer aux commentaires plus
spécifiques qui concernent des articles précis du projet de loi, et je
vais inviter mon collègue, M. Lambert, à poursuivre la présentation.
• (11 h 10) •
M. Lambert
(Sylvain) : En lien avec la
section qui traite de la constitution de la Société québécoise du
cannabis, il faut d'abord souligner que nous
nous réjouissons de la décision de confier la vente au détail à une nouvelle
entité sous contrôle de l'État, qui assure la vente dans une perspective
de protection de la santé.
Cependant,
considérant l'article 23.2, nous nous questionnons sur la faisabilité de
la vente au moyen d'Internet dans le respect de l'esprit du projet de
loi en ce qui concerne plus particulièrement la capacité à vérifier que
l'acheteur soit majeur et à fournir de l'information pertinente.
Par
conséquent, nous recommandons que le règlement encadrant les conditions de
vente de cannabis au moyen d'Internet contienne des dispositions permettant
de valider l'identité et l'âge de l'acheteur et de respecter l'esprit de
prévention et de promotion de la santé véhiculé par le projet de loi.
L'article 23.36
du projet de loi, qui concerne le Fonds des revenus provenant de la vente du
cannabis, nous semble par ailleurs devoir être abrogé. Selon cet
article, les surplus accumulés par le fonds, une fois qu'il aura approvisionné le Fonds de prévention et
de recherche en matière de cannabis et financé des activités de prévention,
seraient virés au fonds général. De
notre point de vue, étant donné l'ampleur des besoins en matière de
sensibilisation, de prévention, de promotion de saines habitudes de vie
et de traitement aussi, la totalité des bénéfices issus de la vente du cannabis
devrait être consacrée aux mesures soutenues par le Fonds de prévention et de
recherche sur le cannabis.
En ce qui concerne les articles 4 à 8 du
chapitre II sur la possession de cannabis à des fins personnelles, nous avons constaté avec étonnement que le gouvernement
interdit la possession à un mineur, alors qu'il est possible pour les étudiants majeurs d'en posséder sur tous les sites
des établissements d'enseignement supérieur. Or, au cégep, près d'un
étudiant sur quatre est mineur. Donc, dans sa forme actuelle, le projet de loi
confierait donc à l'établissement la responsabilité
de vérifier l'âge d'un étudiant en possession de cannabis pour s'assurer qu'il
ne s'agit pas d'un mineur.
Le paragraphe 1° de l'article 7 interdit la
possession de cannabis sur tous les sites des établissements d'enseignement préscolaire, primaire ou
secondaire, mais il exclut l'enseignement supérieur. La fédération propose
donc que ce même paragraphe précise que la
possession de cannabis est interdite sur les terrains, dans les locaux et les
bâtiments de tous les établissements d'enseignement, en excluant les résidences
étudiantes des cégeps et des universités.
Dans la
perspective de réduire les méfaits et d'éduquer, nous recommandons aussi que le
comité de vigilance créé par le
projet de loi réfléchisse aux mécanismes à mettre en place afin de diriger le
jeune de 14 à 17 ans pris en flagrant délit de possession vers une
ressource d'aide.
En lien avec la restriction de l'usage du
cannabis dans certains lieux, abordée notamment aux articles 11, 13 et 15 du chapitre IV, il nous apparaît
nécessaire de favoriser une meilleure concordance avec la Loi concernant la
lutte contre le tabagisme. Nous proposons
par conséquent de modifier l'article 11, paragraphe 2°, qui traite des
locaux et des bâtiments, pour inclure
tous les établissements d'enseignement et non pas seulement les établissements
postsecondaires.
Dans le même
esprit, l'article 15, paragraphe 4°, qui concerne les terrains sur
lesquels sont situés les bâtiments, devrait aussi inclure tous les établissements
d'enseignement.
Les articles du projet qui viennent encadrer la
vente du cannabis devraient aussi faire l'objet d'ajustements, selon nous. C'est le cas de l'article 25 du
chapitre VI qui précise que le préposé à la vente de cannabis doit être
titulaire d'une attestation confirmant la réussite d'une formation. Comme nous
l'avions déjà souligné dans notre mémoire de septembre 2017, la vente doit être
centrée sur l'information et la santé des personnes. Nous suggérons donc que le
règlement encadrant la formation du préposé
précise les éléments nécessaires à son attestation en lien avec
l'information et la santé des personnes.
Toujours sur
la vente du cannabis, nous souhaiterions voir le législateur aller plus loin
que le propose actuellement l'article 28
qui précise que le gouvernement peut prévoir des normes relatives à
l'emplacement des points de vente. Nous croyons qu'il faut interdire que les points de vente soient situés à
proximité des établissements d'enseignement, et ce, de tous les réseaux de
l'éducation.
Nous nous
permettons de signaler au passage que l'article 55 du chapitre X, qui
traite de la mise en oeuvre du projet pilote
concernant la vente au détail du cannabis, risque d'ouvrir la porte à la
participation de l'entreprise privée à cet égard, ce que le projet de
loi ne favorise pas dans l'ensemble. Il faudrait donc retirer ce passage de
l'article 55, à notre avis.
Au sujet du
Fonds de prévention et de recherche en matière de cannabis, et plus
particulièrement des articles 51 à 54 et 88 du chapitre IX du projet avec la loi, il faut d'abord
souligner que nous accueillons avec satisfaction la création de ce fonds. Nous pensons cependant qu'un certain nombre
de questions demeurent. Par exemple, qui prendra les décisions concernant les programmes, les stratégies et les
mesures à financer? Comment le ministre va-t-il s'assurer de la
cohérence des messages de prévention? Est-ce que le comité de vigilance va
jouer le rôle du conseil d'administration du fonds?
Et, surtout, nous sommes préoccupés par le fait
que le projet de loi ne précise pas si des ressources seront accordées aux
cégeps pour mettre en place des mesures et des activités de prévention, de
dépistage et de soutien aux étudiants. Il
faut se rappeler que les cégeps sont appelés à jouer un rôle de premier plan
dans la mise en oeuvre de ces activités.
Nous croyons donc que la loi devra prévoir des ressources pour déployer les activités et les programmes
de fond dans les établissements de notre réseau.
Enfin, en ce qui concerne le comité de
vigilance, nous avions, lors des consultations de l'automne, proposé la création d'un comité consultatif réunissant des membres de différents
horizons, dont l'éducation. Le comité de vigilance proposé dans le projet de loi correspondrait à
notre définition d'un comité consultatif si ce n'était qu'il ne comprend
pas de représentant de l'éducation. Nous recommandons donc d'ajouter, à
l'article 59 du chapitre XII, la présence au sein du comité d'un
membre possédant une expérience en éducation.
Pour finir, étant donné que d'autres types de
cannabis pourraient rapidement émerger, nous suggérons que le comité de vigilance suive l'utilisation de ces
types de cannabis pour en prévoir les conséquences sur la santé des
jeunes et l'encadrement actuel. Voilà. Merci.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup à vous pour votre
présentation. Nous allons débuter immédiatement les échanges avec la
partie gouvernementale. Mme la ministre et députée de Soulanges, vous disposez
de 15 minutes. À vous la parole.
Mme Charlebois :
Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, vous saluer, M. Tremblay,
M. Lambert aussi, Me Marie-Christine
Tremblay et Mme Geneviève Reed. Merci d'être ici aujourd'hui pour venir
nous faire part de votre point de vue suite au dépôt du projet de loi.
Parce que, c'est ça, on s'était rencontrés lors des consultations, avant l'élaboration du projet de loi, mais là on se voit
dans le cadre d'un projet de loi déjà déposé. Ceci étant dit, je veux
que vous sachiez que votre présence est importante, tous les groupes qui
viendront, jusqu'à fin, les présences vont être importantes parce que ça va
nous aider à façonner la fin de ce que sera le projet de loi.
J'aborde cette année 2018 dans le
même esprit que j'ai travaillé en 2017, c'est-à-dire qu'au terme des
consultations c'est sûr que les députés, les
élus du gouvernement vont se concerter, vont se parler, vont échanger sur
comment on peut bonifier le projet de loi. Mais, de mon point de vue, il
est nécessaire aussi que je m'entretienne avec les députés de l'opposition, puisque c'est un projet de loi que
nous devrons faire inclusif le plus possible puis qui va refléter la
façon de penser de l'ensemble des Québécois.
Alors, moi, dans cet esprit-là, je considère qu'il est important que nous
travaillions tous ensemble pour parfaire le projet de loi.
Et
il est même mentionné dans le projet de loi, et j'espère que nous tiendrons la
route avec cet article-là, que le projet de loi devra être révisé dans
les trois premières années, la première fois, parce que, si on attend au terme
d'un cinq ans, ça va évoluer trop
rapidement. C'est un nouveau phénomène, qui est la légalisation, pas le
cannabis comme tel mais la
légalisation, alors il y aura sûrement des ajustements à apporter au terme des
trois ans. Un premier projet de loi dans
un sujet aussi important que celui-là, je pense qu'il va falloir tout de suite
être capables de se ressaisir, à la lumière des commentaires que nous aurons eus, oui, du comité de vigilance, mais
aussi... qui va faire des rapports annuellement, soit dit en passant, c'est ça, hein, c'est annuel, les rapports du
comité de vigilance, qui seront déposés au ministre de la Santé et qui seront rendus publics aussi, mais il y aura
aussi des choses qui seront faites par l'institut de santé publique, qui
nous permettront de s'ajuster en cours de
route, notamment par les clauses réglementaires, mais aussi au terme des trois
ans, parce que je pense que ça va être très important pour protéger notre
population.
Et, en terminant sur
ces propos-là, on garde toujours l'approche de prudence, de santé publique et
de sécurité publique, autour de ce
projet-là. Je suis contente que vous soyez là parce que, on se le dit, la
majorité des consommateurs de
cannabis ont entre 18 et 24 ans, et évidemment vous en avez beaucoup, de
ces jeunes-là, qui sont dans les établissements. Il y a 42 % ou
44 %, de mémoire, qui sont là, de l'ensemble des consommateurs, qui sont
dans cette strate d'âge là, donc il est bien important que nous ayons une
approche vraiment prudente et de précaution.
On a l'intention de
faire beaucoup de prévention. Je ne pense pas que vous l'avez attaqué, comme
tel, le 25 millions, mais vous en parlez, que, pour vous, c'est important,
la prévention et tous les guides qui vont aller dans ce sens-là.
Je
vous entends parler, puis là j'ai mal saisi parce que j'essayais de lire et de
vous écouter, tout faire à la fois. Je suis capable, normalement, parce
que je suis une femme. Non, c'est une blague! Mais... J'aime ça les titiller.
Avez-vous vu si ça pogne?
(Interruption)
Mme Charlebois :
Il y a quelqu'un qui sonne, là. Alors, vous aviez parlé de...
Le Président
(M. Merlini) : Attendez un instant, Mme la ministre.
Mme Charlebois :
C'est presque Noël. Il n'est pas capable de l'arrêter. Peut-être juste sortir
avec, là, ou...
Le Président
(M. Merlini) : Allez-y, Mme la ministre.
• (11 h 20) •
Mme Charlebois :
Alors, juste parler... Parce que vous avez mentionné au niveau de la
consommation des jeunes, mais je pense
que vous avez aussi mentionné la possession. D'une part, il y a
des jeunes qui sont en résidence. Alors, moi, j'entends ça, mais, je me
dis, pour se rendre à la résidence, il faut qu'ils fassent un parcours sur le
terrain. Alors, comment on va faire
appliquer l'interdiction de possession? Parce qu'ils ont le droit, en
résidence... C'est comme leur lieu... leur milieu de vie. Mais, au-delà
de tout ça, là, comment on va faire quand ils ont ça dans leur sac à dos ou
dans leurs poches de pantalon? Allez-vous intercepter tous les jeunes?
C'était
là où j'avais une réflexion, dire : Comment on va faire pour appliquer ça,
cette interdiction de possession? Parce que consommation, c'est évident,
hein, à part de se le mettre dans ton muffin, là, mais consommation fumée, là, c'est assez évident, ça sent, ça fait de la
boucane, etc. Mais, pour ceux qui l'ont dans leurs poches, comment on va
faire?
M. Tremblay
(Bernard) : En fait, vous abordez deux aspects, effectivement, qui ont
fait l'objet de préoccupations de
notre part, le volet des résidences et le volet de la possession. Vous voyez,
nous, on l'a vu beaucoup plus par rapport au projet de loi actuel, par rapport à la possession, la difficulté de
contrôler à deux vitesses, c'est-à-dire les mineurs versus les majeurs. Alors, pour nous, il est plus facile
d'avoir une règle uniforme, puisque le quart de la population étudiante
collégiale est mineur, donc il est plus
facile d'avoir une règle à l'effet d'interdire la possession pour tous que de
devoir, justement, contrôler une
partie de la population étudiante et pas l'autre partie, alors donc d'où la
recommandation que l'on formule. Il
est sûr qu'un peu comme pour l'alcool ou d'autres produits interdits sur les
lieux des campus on n'a pas l'intention de faire une chasse aux
sorcières, mais, au moins, que la règle soit claire pour tous à l'effet que
c'est interdit, pour nous, c'est plus facile à gérer.
Pour
ce qui est du volet des résidences, on n'a pas été, donc, jusqu'à proposer
l'interdiction absolue de possession dans
les résidences, du simple fait qu'il y a toutes sortes de cas de figure quant
aux résidences des cégeps. Je peux vous donner l'exemple du cégep de La Pocatière, où les résidences sont
vraiment partie intégrante du cégep, et donc, sur le même étage, vous allez avoir des salles de classe et
vous allez avoir des chambres. Alors, évidemment, l'établissement aura
encore une capacité, au-delà de la loi,
d'encadrer, hein, par des politiques, comme on le mentionne dans notre mémoire,
d'encadrer dans ce cas-là, par exemple,
qu'il n'y ait pas même possession, puisqu'il y a une difficulté de contrôle.
Mais, dans d'autres cas de figure, on
va se retrouver avec des résidences qui sont des propriétés privées pour
lesquelles le cégep a une entente et qui sont vraiment à l'extérieur du
campus du cégep.
Alors,
c'est vraiment en considérant toutes ces situations-là — puis
là j'en nomme deux, mais il y en a bien d'autres — qu'on a souhaité qu'il
reste un espace pour permettre à l'établissement, donc, de juger du contexte et
de dire : Chez nous, même la possession
pourra être interdite, ce sera une règle qu'on se donnera, et, dans d'autres
cas, on n'a pas la capacité de contrôler parce que la résidence est à
l'extérieur et n'est pas notre propriété. Alors, vous voyez, on y va vraiment
avec une formule, quand même, qui tienne compte du contexte, là, des
48 cégeps.
Mme Charlebois :
Devrions-nous avoir la même politique pour les universités? Parce que, quand on
parle d'enseignement supérieur, ça fait aussi partie de.
M. Tremblay
(Bernard) : Oui. Pour moi, c'est difficile, évidemment, de parler au
nom de nos collègues des universités.
J'imagine que la situation des résidences universitaires doit, à certains
égards, ressembler à celle des résidences des collèges. Mais je vous dirais que je n'ai pas une connaissance,
évidemment, assez fine de la réalité des 19 établissements
universitaires pour émettre un commentaire là-dessus.
Mme Charlebois :
Que souhaitez-nous qu'il soit mis en place? Parce qu'on parle... je parle
beaucoup depuis le début de prévention, d'éducation parce que ça fait
partie de. Au-delà de ce qui va se vendre dans les boutiques, les travailleurs vont être formés, vont donner de
l'information, ils vont donner des feuillets, mais ils vont aussi parler
avec les gens. Mais, pour les étudiants du
collégial... Parce que moi, je pense... puis là vous me corrigerez si vous
pensez que je suis à côté de mes pompes, mais dites-moi... Moi, je pense
qu'on devrait commencer à la fin du primaire, du secondaire, au collégial et aussi dans les campus universitaires.
Mais que souhaitez-vous que nous fassions spécifiquement pour le
collégial en termes de prévention, en termes d'éducation, en termes de
promotion? Comment vous voyez ça?
M. Tremblay
(Bernard) : Je partage tout à fait votre avis quant à l'approche en
continuum, hein, il faut vraiment que
ce soit une approche qui débute bien avant le cégep, évidemment, et qui se
prolonge tout au long du parcours scolaire. C'est sûr qu'il y a un enjeu
de ressources, hein, d'avoir des ressources disponibles pour être capable de
faire des interventions dans les milieux et
donc sur les campus collégiaux. Je demanderais à ma collègue, Mme Reed,
qui est notre spécialiste, hein, comme je le disais, qui est
l'animatrice de notre réseau des intervenants psychosociaux, donc les psychologues, les travailleurs sociaux et les autres professionnels qui sont déjà dans les
cégeps, et qu'on a vraiment pu rencontrer, pour bien répondre à votre
question, là.
Mme Reed
(Geneviève) : En fait, Mme la ministre, si vous me permettez, on voit
ça en deux volets. Il y a un premier volet
qui est un volet d'information quant aux tenants et aboutissants de la loi.
C'est très important que tous, non seulement
les étudiants collégiaux, mais également la population en général, soient très
bien informés de ce que permet et de
ce que ne permet pas la loi. Donc, ça, c'est une première phase importante.
Pourquoi je vous dis ça? C'est que l'expérience qui a été... Notamment, au Colorado, c'est qu'ils se sont aperçus qu'il
y avait eu un manque à ce niveau-là, c'est-à-dire que le gouvernement de l'État avait peu fait la
promotion du projet de loi, des règles en vigueur auprès de la
population en général. Donc, ça, c'est une première forme d'information.
La deuxième forme,
évidemment, bien, c'est de la prévention, sensibilisation dans le milieu de vie
que sont les cégeps. Il y a plusieurs formes
que ça peut prendre. Nos intervenants ont souhaité, puis comme on le dit un peu
dans notre mémoire, bon, des messages qui
sont très cohérents, hein? Donc, il ne faut pas que ce soit des messages qui
soient uniquement pour les étudiants du collégial, mais qu'il y ait une
cohérence dans tous les messages de prévention. Ça, c'est très important. On parle beaucoup d'ateliers avec les étudiants,
je vous dirais qu'il y a beaucoup... c'est ça, d'ateliers d'échange avec les étudiants, des campagnes. Bien
entendu, l'utilisation des réseaux sociaux, on n'en sort pas, c'est
quand même un moyen très, très efficace pour rejoindre les jeunes.
Et
puis, si je peux me permettre, il y a une expérience assez intéressante qui se
fait actuellement dans un collège en Ontario
et qui a établi un programme, justement, d'éducation mais sur la consommation.
Quand on parle de réduction des méfaits auprès de la population qui
consomme, c'est aussi de savoir dans quels contextes les jeunes, ils
consomment, pourquoi, et de voir avec eux
quels sont les tenants et aboutissants de leur consommation pour voir s'il y a
des problèmes associés à ça et pour
faire le suivi, si c'est nécessaire. Donc, il y a ce type de programme là, qui
comprend des articles, je dirais,
promotionnels, avec des messages-chocs auprès des jeunes mais qui comprend
également de la formation pour les enseignants, les intervenants et tous
ceux qui sont en soutien dans les cégeps. Donc, ça pourrait aussi être une
forme d'intervention.
Mme Charlebois :
Bien, vous m'amenez sur une piste où je voulais déjà vous questionner.
Savez-vous, premièrement, juste avant que j'aille sur ma piste, le collège en
Ontario...
Mme Reed
(Geneviève) : C'est l'Algonquin College.
Mme Charlebois :
Algonquin?
Mme Reed
(Geneviève) : Donc, c'est le programme Umbrella, et c'est un programme
de réduction des méfaits liés à la
consommation d'alcool et de drogue. Et ça semble être quand même quelque chose
d'intéressant qui pourrait peut-être faire partie des choses à aller
voir.
Mme Charlebois :
On va certainement aller voir ça. Quand vous me parlez... J'allais justement
vous poser des questions sur la formation parce que vous avez déjà des
intervenants psychosociaux dans les collèges en général. Dites-moi, est-ce que vous... Parce que j'ai
appris, imaginez-vous donc, pendant les consultations que nous tenons,
mais j'en avais entendu parler un petit peu
dans les autres consultations, au préalable, avant la rédaction du projet de
loi, que le corps médical n'était pas... il n'avait pas une longue
formation sur les drogues, notamment sur le cannabis, notamment les médecins, les infirmières, etc., qu'il faudrait
faire ajuster le corpus. Mais est-ce que c'est le cas aussi pour les
intervenants psychosociaux? Est-ce que nous devrons faire une mise à jour,
donner davantage d'information? Est-ce que vous croyez qu'il y a là quelque chose à faire d'important en termes de
formation? Parce que je sais que vous avez une formation, là, je sais
que vous ne tombez pas du ciel, là. Mais, en termes vraiment de tout ce qui
touche les dépendances, particulièrement le cannabis, et aussi pour les profs,
est-ce que vous croyez... Les profs ont-u le temps de réagir à ça?
• (11 h 30) •
Mme Reed
(Geneviève) : Oh! ça, c'est une excellente question pour les
enseignants. Bien, je crois que c'est important,
en fait, que les enseignants soient aussi de la partie. Les enseignants font
partie d'un programme qu'on déploie actuellement
qui est sur la gestion de l'anxiété et de la dépression, le programme
Zenétudes, et les enseignants font partie de l'équation, donc, ils donnent le premier volet de sensibilisation. Donc,
je pense que c'est important que les enseignants aussi soient
accompagnés là-dedans.
M. Tremblay
(Bernard) : Et,
j'ajouterais, hein, on est tous conscients que l'objectif de la légalisation
n'est pas de faire la promotion du
cannabis mais plutôt d'être capable d'intervenir efficacement pour
sortir de la zone de tabou, hein, qu'on
a présentement du fait que la consommation, étant illégale,
bien, on n'ose pas trop en parler. Alors, c'est sûr que je pense qu'on
sous-estime peut-être un peu notre niveau de connaissance à tous et chacun,
hein, puis vous l'avez déjà mentionné par rapport aux consultations que vous
avez menées, les choses que vous avez apprises.
Alors
donc, je pense que ça
va être... ce sera très important
que l'ensemble des intervenants dans les collèges aient une information claire, nette sur les impacts réels de la
consommation et qu'on soit donc en mesure, effectivement, de leur permettre d'intervenir. Un enseignant ou
une enseignante interviendra d'une façon, un intervenant psychosocial aura une intervention plus poussée, autre, mais c'est
en ayant l'ensemble de ces interventions-là qu'on sera capable de
bien encadrer, de bien soutenir la population étudiante des collèges.
Le
Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, M. Tremblay. Ça met un terme à ce bloc
d'échange avec Mme la ministre.
Du côté de l'opposition officielle, maintenant, M. le
député de Labelle.
Vous avez neuf minutes. À vous la parole.
M. Pagé : Merci. Merci,
M. le Président. Bonjour à vous
quatre. Bienvenue à l'Assemblée
nationale. Bonne année, en
même temps!
Quand
vous dites : Les points de vente ne devraient pas être trop près des établissements, quelle est votre notion du «pas trop près»? 500 mètres,
800 mètres, un kilomètre? Je ne sais pas, j'essaie de voir, là, parce
qu'on va essayer de définir, de bien encadrer ça.
M.
Tremblay (Bernard) : On n'est pas allés dans ce degré de précision là,
en sachant en plus que la géographie, évidemment,
des campus collégiaux est très variable, là, d'un endroit à l'autre, alors...
mais, je vous dirais, on a tous en tête l'image de... Il ne faudrait pas, quand même, que ce soit en face du
collège, hein, donc qu'il y ait une certaine distance. Alors, écoutez, là, je pense que sûrement que
l'idée d'un rayon, d'un certain rayon ou, enfin, à tout le moins qu'il y
ait une indication claire, puisqu'on parlera
de magasins d'État, pour être sûrs que ces magasins-là ne se trouveront pas...
ou qu'il y aura une attente très claire à l'effet qu'ils ne soient pas à
proximité des collèges.
M. Pagé :
Je me suis permis d'aller aussi loin parce que votre mémoire va quand même
assez loin, est assez précis. Vous avez, de façon très pointue, ciblé
des articles très précis sur lesquels vous recommandez différentes choses. Et d'ailleurs vous parlez de l'article 55, on en
a parlé beaucoup l'année dernière, quand vous dites, à votre
recommandation 12 de la page 12,
que vous recommandez carrément que soit retiré l'article 55, pour les gens
qui nous écoutent, qui ouvre la porte
à des projets pilotes, donc, avec le privé. Ce n'est pas défini très
clairement, mais tout cela ouvre une porte que l'on souhaiterait fermer à tout le moins pour les
premières années. Je ne dis pas qu'un jour on pourra y arriver, mais à
tout le moins pour les premières années, d'autant plus qu'on se félicite de
créer une société d'État.
Alors, si on crée une
société d'État, pourquoi ouvrir la porte sur autre chose à ce moment-ci? Alors,
on aura l'occasion d'en débattre lors du
débat, des échanges que nous aurons, article par article. Cela dit,
pouvez-vous, justement, me faire part de vos appréhensions de cet
article 55?
M. Tremblay
(Bernard) : De façon générale, moi, je vous dirais, c'est vraiment le
principe de prudence, hein? Et donc,
encore une fois, en partant de l'idée qu'on légalise mais pas dans un contexte
où on veut faire la promotion du produit,
mais vraiment bien l'encadrer, bien s'assurer de sa qualité et bien
sensibiliser la population aux effets néfastes, cet article-là et
d'autres commentaires qu'on a formulés vont dans le sens de dire :
N'ouvrons effectivement pas la porte à la
tentation, je dirais, d'une marchandisation, hein, du cannabis et des profits
qui viennent avec cette vente-là mais gardons-le
dans un esprit où on veut simplement qu'il y ait une consommation très, très
prudente qui puisse être faite et qu'on puisse dissuader les gens qui en
consomment déjà de poursuivre leur consommation ou de l'augmenter.
M. Pagé : Et toujours, je pense, sous l'angle de cette prudence, de
prévention, vous faites quelques recommandations qui vont sous cet angle-là, la recommandation 10, entre autres, là,
qui dit de prévoir des ressources pour le déploiement dans les établissements collégiaux, des ressources
nécessaires pour faire de la prévention, pour faire de la recherche. Ça,
c'est votre 10e recommandation. La
cinquième, également, qui dit : «La Fédération des cégeps recommande que
le comité de vigilance réfléchisse à
un mécanisme à mettre en place afin de diriger les jeunes de 14 à 17 ans
pris en flagrant délit de possession vers des ressources d'aide.»
Donc,
vous nous parlez de ressources d'aide, vous nous parlez de prévoir les
ressources de déploiement. Donc, vous dites,
ça va prendre du monde, là, pour être sûr de faire cela correctement. À ce
moment-ci, est-ce que vous avez déjà évalué quels seront vos besoins? Est-ce
que déjà vous avez commencé à
embaucher du monde qui pourront être ces ressources nécessaires? Et est-ce que même via le gouvernement du Québec il y a déjà une aide, un support qui est apporté pour
que vous puissiez déployer le personnel nécessaire
pour, d'une part, faire la prévention d'ici la légalisation et, d'autre
part, par la suite, recevoir les gens qui auraient des besoins?
M. Lambert
(Sylvain) : Si je peux me permettre, moi, je suis dans un cégep, alors
on voit venir, en effet, cette loi-là et ce nouveau cadre réglementaire là en
se disant, bon : Quelles ressources on va avoir besoin?, mais c'est extrêmement
difficile d'évaluer parce qu'on ne l'a pas vécu encore. Donc, c'est pour ça
qu'on est peut-être, d'une façon plus
générale, sur la hauteur des ressources. Mais déjà nous, on prévoit
embaucher un travailleur social, c'est un minimum. Avoir quelqu'un aussi sur le terrain qui fait de l'observation,
qui s'assure, bon, évidemment, qu'on est capable de faire une certaine forme de prévention et d'intervention.
Mais on ne l'a pas chiffré, on ne peut... Moi, j'aurais de la difficulté
aujourd'hui à dire exactement le niveau de ressources que ça va prendre. Et
c'est un exercice auquel on se prêterait volontiers,
s'il faut le faire, mais déjà, dans les cégeps, concrètement, moi et mes
collègues, on commence à regarder, bon, ça s'en vient, il faut faire quelque
chose.
Puis,
je dirais, de toute façon, au-delà même de ce sujet-là, il y a... toute la
question de la consommation, de la santé
mentale, du milieu de vie nous préoccupe beaucoup en ce moment. Donc,
il y a comme un élément supplémentaire qui s'ajoute, ça fait que ça
s'inscrit, je dirais, dans un portrait plus large.
Donc, les ressources sont nécessaires. La hauteur,
on pourra se prêter à l'exercice. Ça pourrait être intéressant, là.
M. Tremblay
(Bernard) : Mais il faut simplement se rappeler, évidemment, qu'on a
vécu quand même des compressions de 155 millions dans les dernières
années, et donc que c'est des services qui ont été affectés par ces compressions-là. Et c'est clair que, face à une responsabilité nouvelle, et, comme on le disait, avec la diversité de notre clientèle, qui évidemment a des besoins qui augmentent de façon importante et pas
simplement par rapport, évidemment, à la
consommation du cannabis, mais par rapport à... on a parlé de l'anxiété qui
augmente de façon importante chez les jeunes, on parle des étudiants en
situation de handicap, alors c'est clair que, face à ce défi-là, on est
inquiets quant à notre capacité de réagir.
Et j'ajouterais...
Quand vous mentionnez, entre autres, notre volonté, d'être capable de mieux...
de faire de la recherche et d'être en mesure
de voir les impacts, c'est parce que c'est un phénomène qui est peu documenté,
hein? On sait que... Et on a pris,
entre autres, la position de suggérer au gouvernement de maintenir l'âge légal
à 18 ans. Pourquoi? Parce qu'on
se dit... certains disent : Oui, il y a un impact chez les jeunes au
niveau du développement du cerveau, mais du même souffle on sait que ce sont ces jeunes-là qui consomment. Mais donc
qu'on soit capables de bien documenter l'impact, dans les prochaines années, de l'introduction de la
légalisation, pour nous, ça nous semble essentiel. Et ces jeunes-là, ils
sont dans nos établissements. C'est pour ça qu'on parle de recherche, qu'on
parle d'intervention, qu'on parle d'être vraiment très proches du phénomène et
de son évolution dans les prochaines années. Mais c'est clair que ça passe par
des ressources.
M. Pagé :
Je comprends votre inquiétude, mais je vais vous partager la mienne aussi, là,
parce que, depuis deux ans et demi, on sait
que ça s'en vient, et puis le projet
de loi, au fédéral, a été déposé il y
a neuf mois, et nous savons déjà, donc, depuis plusieurs mois, là. Est-ce qu'il y a des échanges entre le ministère
de la Santé publique et le ministère
de l'Éducation pour dire : Aïe! ça s'en vient, là, alors il faut vraiment
qu'on évalue ces besoins-là?
Et
là on est à quelques mois, et M. Trudeau nous a dit dernièrement que
l'entrée en vigueur pourrait être devancée, alors c'est peut-être même
d'ici la fin de la session, qui va commencer la semaine prochaine. Alors, je
vous partage beaucoup d'inquiétude. Moi, j'aurais pensé, bien
honnêtement, là... puis je ne suis pas en mode reproche, mais je
constate qu'à ce moment-ci... Moi, j'avais
l'impression que déjà, à ce
moment-ci, dans les établissements scolaires, il y aurait déjà tout un plan d'intervention de
prévu, mis en place, du personnel, parce que c'est déjà annoncé depuis
plusieurs mois, voire des années, que ce projet de loi arriverait. Alors, je ne
sais pas si vous voulez réagir à ce commentaire, mais...
M. Tremblay
(Bernard) : Encore une fois,
je pense que M. Lambert l'a bien dit, tout le monde est conscient
que le phénomène approche, s'y prépare du
mieux possible, mais c'est avec les ressources qu'on a, hein, et donc il n'y a
pas de ressources additionnelles actuellement associées à ça, et donc c'est sûr
qu'on y va vraiment avec les moyens qu'on a à notre disposition.
• (11 h 40) •
M. Pagé :
Alors, espérons qu'on pourra se mettre en mode accéléré.
Je
veux vous féliciter sur l'article... la recommandation 3, qui dit que vous
souhaitez qu'on abroge l'article 23.36 qui dit que «les surplus accumulés par le fonds sont virés au fonds
général aux dates et dans la mesure que détermine le gouvernement». Nous, on va plus loin en
disant : On devrait inscrire dans la loi que 100 % des profits qui
pourraient être générés devraient être virés soit vers les municipalités
mais vers les centres de dépendance, en prévention, les saines habitudes de
vie, et tout le reste. Est-ce que vous souhaitez même qu'on aille jusqu'à
l'inscrire dans la loi... ou plutôt seulement enlever que, s'il y a des
surplus, ça pourrait être viré ailleurs?
Le Président
(M. Merlini) : Rapidement. Le mot de la fin.
M. Tremblay
(Bernard) : Oui. Oui, effectivement, notre proposition, c'est qu'on
parle, nous, des bénéfices, hein, que
ces bénéfices-là, donc, soient réservés vraiment à la prévention. Et, je vous
dirais, quand on parle de prévention, bien se rappeler que, dans les établissements collégiaux, on en fait, de la
prévention, et que ces ressources-là devraient aussi nous être
attribuées.
Le
Président (M. Merlini) : Merci pour ce bloc d'échange avec
l'opposition officielle. Nous allons maintenant vers le deuxième groupe
d'opposition. M. le député de Borduas, vous avez six minutes. À vous la parole.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Mesdames messieurs,
bonjour. Merci d'être aujourd'hui à l'Assemblée nationale.
J'aimerais
ça, d'entrée de jeu, savoir comment ça se passe actuellement sur le territoire
d'un établissement collégial si la
direction constate qu'il y a un étudiant avec du cannabis en sa possession,
pour sa consommation personnelle ou pour la vente. C'est quoi, le
processus, actuellement, qui arrive?
M. Lambert
(Sylvain) : Bien, comme
directeur, je peux répondre à ça. Je dirais que tous les établissements
ont un code de vie, hein, dans lequel... qui
réglemente un peu ce qui est permis et ce qui n'est pas permis de façon
générale, la possession ou... enfin, là, les
gens ne peuvent pas se promener avec un joint ou avec une bouteille de bière
dans les... et à ce moment-là on intervient. Et là, tout dépendant de la
gravité du geste, est-ce que la personne perturbe, et tout ça, ça peut aller de l'avertissement à la suspension,
enfin, là, il y a toute une gradation dans les mesures disciplinaires qui
peuvent être là. Et on doit déjà de le faire
avec l'alcool, on doit déjà le faire avec le tabac. On a des interventions qui
sont fréquentes.
Donc, pour
nous, il y a un agent de sécurité qui circule, il voit une situation qui est
perturbante ou qui contrevient à la
loi ou quoi que ce soit, il y a une intervention, et ça peut aller de on
appelle la police à : Bien là, regarde, tu t'en vas faire les
choses ailleurs. Tout dépendant si c'est un récidiviste. Donc, il y a vraiment
une gradation.
Mais c'est des choses pour lesquelles on est
quand même équipés et on est habitués d'agir. Ce n'est pas des situations qui
n'existent... Ce n'est pas parce qu'on légalise le cannabis aujourd'hui que des
situations complexes ou d'intervention n'existaient pas avant. Donc, c'est un
petit peu dans la continuité de ça.
M. Jolin-Barrette : Donc, vous
allez poursuivre avec les outils que vous avez développés, même s'il y a
légalisation.
Sur l'aspect
on ne peut pas en avoir sur le campus... Mais, dans les résidences, là, vous
souhaitez qu'on les exclue en raison
des particularités que vous nous avez expliquées. Dans certains cégeps, bon, la
résidence est située à même les locaux.
J'aurais envie de vous demander : Au niveau de la quantité... Parce
qu'actuellement, dans le projet de loi, on prévoit que c'est 30 grammes par personne, donc, dans
un espace public et 150 grammes par personne au domicile. Alors,
est-ce que vous trouvez que les quantités
sont appropriées ou il faudrait les réduire? Parce qu'on se retrouve dans une
situation où, supposons, vous avez vos résidences sur le terrain du cégep,
bien, vous allez retrouver 150 grammes... jusqu'à 150 grammes, donc
une plus grande disponibilité sur le territoire. Est-ce que ça vous inquiète ou...
M. Tremblay (Bernard) : Moi, je
vous répondrais, là-dessus, on va devoir composer avec trois niveaux d'encadrement, hein, effectivement l'encadrement
du gouvernement fédéral sur lequel on n'a pas de contrôle, bon, puis qui
devrait donc être fixé prochainement, un
encadrement donc, du gouvernement du... oui, de l'État québécois quant
au... sur le volet non pas de la légalisation, mais sur le volet plus des
éléments de santé publique, mais finalement il y a aussi un volet qui va
demeurer du ressort de l'établissement. Comme le disait mon collègue, un code
de vie existe, dans les collèges, il va
pouvoir comporter des règles. Alors, c'est sûr que, même s'il y avait, comment
dire, une autorisation, que ce soit par la loi fédérale, dans le Code
criminel ou dans la loi du Québec, quant à une certaine possession, en termes
de quantité, selon nous, il sera toujours possible à un établissement, comme on
le fait pour le tabac, comme on le fait pour
l'alcool... Même si l'alcool est autorisé dans notre société, nous, on peut
établir qu'il n'y en aura pas sur nos campus. Alors, on prend la même approche.
Donc, le
volet de la quantité permise ne nous a pas... ce n'est pas là-dessus qu'on
s'est concentrés dans notre analyse parce
qu'on part beaucoup plus du principe que ce n'est pas compatible de faire tes
études et de consommer de l'alcool et du cannabis, là, en même temps et
sur les lieux où on étudie. Alors, je vous répondrais comme ça, je pense.
M. Jolin-Barrette : O.K. Pour les jeunes de 14 à 17 ans, vous
dites : On devrait les aiguiller vers une ressource
d'accompagnement, d'aide. Est-ce que vous nous invitez à ne pas imposer de
sanction pénale lorsqu'un individu mineur est pris en possession?
M. Tremblay (Bernard) :
Écoutez, c'est une bonne question. C'est sûr que nous, on...
M. Jolin-Barrette : ...17 ans,
là, le quart de vos étudiants.
M. Tremblay
(Bernard) : Oui, c'est ça. C'est sûr que nous, on... À titre
d'éducateur, moi, je vous dirais, on n'est pas beaucoup dans le mode
sanction pénale, on est plus dans le mode... Si le jeune a des difficultés, si
on constate qu'il consomme, si on constate,
en plus, que, cette consommation-là, on la perçoit, ça veut dire qu'il se passe
quelque chose chez ce jeune-là, on pense qu'il faut qu'il
soit accompagné, qu'il doit être, évidemment, soutenu et qu'on doit donc le sensibiliser à l'impact de sa
consommation, beaucoup plus que de le sanctionner. D'autant plus qu'entre vous
et moi, pour un mineur, ça risque d'être le
parent, hein, qui va payer la peine. Alors, est-ce que c'est vraiment un moyen
efficace, je dirais, là, de sensibiliser ce jeune-là? Nous, on est beaucoup
plus dans une approche, évidemment, d'éducation, de sensibilisation puis de
prévention.
M. Jolin-Barrette : O.K. En lien avec le comité de vigilance, vous
souhaitez qu'on inscrive spécifiquement que des acteurs du monde de l'éducation soient présents sur le comité. Est-ce
que vous souhaitez que ce soit spécifiquement la Fédération des cégeps
ou éducation en général?
Le Président (M. Merlini) : En
30 secondes.
M. Tremblay
(Bernard) : On est très inclusif là-dessus. Moi, je pense que
l'important, c'est que ce soit des gens de l'éducation. Et je pense
qu'on ne voudrait pas avoir une approche, là, qui est sectaire.
M. Jolin-Barrette : Parfait. Je
vous remercie.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. Sylvain Lambert,
M. Bernard Tremblay, Me Marie-Christine Tremblay et
Mme Geneviève Reed, représentant la Fédération des cégeps. Merci de votre
présence et aussi de votre contribution à nos travaux.
Je suspends nos travaux quelques instants et
j'invite l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires à prendre
place. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 47)
(Reprise à 11 h 48)
Le Président (M. Merlini) :
Nous reprenons donc nos travaux. Et notre dernier groupe cet avant-midi est l'Association québécoise des pharmaciens
propriétaires. Vous êtes habitués à la Commission de la santé et des
services sociaux, vous connaissez nos habitudes. Alors, je vous invite à vous
présenter au début de votre exposé, vous avez 10 minutes, et ensuite nous
procédons aux échanges. Bienvenue encore une fois à la CSSS. À vous la parole.
Association québécoise
des pharmaciens propriétaires (AQPP)
M. Thiffault
(Jean) : Merci beaucoup. Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, merci
de nous permettre de nous exprimer aujourd'hui sur cette importante
question. Je me présente : Je suis Jean Thiffault, je suis le président de
l'AQPP. Je suis accompagné par M. Jean
Bourcier, qui est vice-président exécutif et directeur général de
l'association, et par Me Manon Brisebois, directrice adjointe aux affaires
externes et corporatives.
L'AQPP représente la totalité des
2 073 pharmaciens propriétaires des 1 890 pharmacies
localisées partout au Québec.
Sur toute la
question de la légalisation du cannabis, et plus particulièrement sur le projet
de loi n° 157, la position de
l'AQPP est très claire : il est essentiel de considérer la question de la
distribution du cannabis thérapeutique dans tout le processus de
législation du cannabis non thérapeutique. En ce sens, le projet de loi
n° 157 nous apparaît incomplet.
• (11 h 50) •
L'AQPP
considère qu'il revient au réseau des pharmacies communautaires du Québec de
procéder à la distribution du
cannabis thérapeutique, puisque les pharmaciens sont les mieux placés pour assurer
les services appropriés de gestion pharmacothérapeutique du cannabis et
contribuer ainsi de manière efficace à la protection du public. En effet, les
pharmaciens sont les professionnels du médicament et, à ce titre, ils sont en
mesure d'assurer la surveillance clinique que
nécessite l'usage du cannabis thérapeutique, d'évaluer l'efficacité de cette
médication, d'ajuster les dosages, de prévenir ou de limiter les effets indésirables pouvant résulter des interactions du cannabis thérapeutique avec d'autres
médicaments prescrits et/ou de suggérer d'autres formes de prise du cannabis
thérapeutique que l'inhalation.
Appuyée par l'Association des pharmaciens du Canada,
l'AQPP souhaite obtenir l'appui du gouvernement du Québec afin de faire des
représentations fortes et concertées auprès du gouvernement fédéral en ce sens.
L'AQPP considère donc que le projet de loi n° 157 doit prévoir des mesures
liées à la gestion et à la distribution du cannabis thérapeutique dans le cadre global
de la légalisation du cannabis non thérapeutique, sans quoi un préjudice
important serait posé aux patients
pour lesquels le cannabis constitue un traitement actuellement efficace pour
eux. Il est illusoire de croire que la légalisation du cannabis non
thérapeutique n'aura aucun impact sur l'accès à la substance pour les patients
qui en font usage.
L'AQPP rappelle que, pour diverses raisons,
notamment d'ordre de santé publique et de prévention, il est primordial de
maintenir un système de distribution distinct pour le cannabis thérapeutique,
comme le prévoit déjà le projet de loi C-45.
Toutefois, l'intégrité du réseau actuel de distribution qui utilise la voie
postale et qui fonctionne sans supervision
d'un professionnel de la santé ne pourra être assurée si nous n'envisageons pas
dès maintenant la distribution de
cannabis thérapeutique dans le contexte global de la légalisation et de son
utilisation à des fins autres que thérapeutiques.
Il
faut à tout prix — et c'est
important — il faut
à tout prix éviter que les patients utilisateurs de cannabis aillent s'approvisionner directement aux points de vente
du cannabis non thérapeutique et sortent de l'encadrement professionnel
dont ils bénéficient actuellement. L'AQPP est d'avis que le cannabis
thérapeutique, en raison de ses effets et de ses interactions possibles avec d'autres médicaments, doit impérativement
être distribué sous la supervision d'un professionnel de la santé. À cet égard, il ne fait aucun doute
pour l'AQPP que le pharmacien est le professionnel le mieux outillé pour
assurer une telle supervision. D'ailleurs, parmi toutes les juridictions dans
le monde qui dispensent du cannabis thérapeutique,
notons l'Italie, l'Allemagne, l'Australie, les Pays-Bas et plusieurs
autres, seuls le Canada et Porto Rico n'intègrent actuellement pas
les pharmaciens à leur processus de distribution.
L'AQPP croit
de plus que le cannabis thérapeutique, parce qu'il est prescrit par un
médecin, doit être considéré au même
titre que tout autre produit sous ordonnance, ce qui implique qu'il doit être
dispensé par un pharmacien, qui en assurera ensuite le suivi
thérapeutique et l'intégrera au dossier patient courant de l'utilisateur.
De plus, il
est utile de rappeler que le réseau des pharmaciens est un réseau rigoureusement
sécurisé tout au long de la chaîne
d'approvisionnement et totalement informatisé, permettant ainsi une sécurité et une
traçabilité loin d'être aussi optimales avec le système actuel de
distribution postale.
Par ailleurs,
l'AQPP tient à souligner que le projet
de loi n° 157, sous sa forme
actuelle, pourrait engendrer des situations problématiques aux points de vente de la société québécoise
du cannabis. Prenons, par exemple, un membre du personnel de la SQC qui, bien
que sans formation professionnelle, servirait un patient utilisateur de
cannabis qui lui présente l'ordonnance de
son médecin. L'employé devrait-il servir le patient conformément à l'ordonnance? Qu'est-ce qu'il va faire de la prescription?
Est-ce qu'il devrait constituer un registre? Peut-il être tenu responsable,
advenant un problème? Donc, il n'y a aucun article du projet de loi qui prévoit de telles
balises pour une situation ni ne l'empêche.
La distribution en pharmacie du cannabis
thérapeutique comporte de nombreux avantages, et un sondage réalisé par Léger du 22 au 27 décembre
dernier auprès d'un échantillon représentatif de 1 004 Québécois
confirme cette perception. Les trois quarts de la population, 75 %,
souhaitent que la vente de cannabis thérapeutique soit clairement encadrée par des réseaux structurés et crédibles
en quels ils peuvent avoir confiance. Près d'un Québécois sur deux
estime que le réseau des pharmacies communautaires constitue le meilleur
véhicule pour la vente de cannabis thérapeutique. Seulement 4 % des Québécois
estiment que le cannabis thérapeutique devrait être vendu en ligne avec la
livraison à domicile par la poste, comme maintenant, et seulement 3 % des
répondants estiment que la distribution de cannabis thérapeutique devrait être
confiée à des producteurs de cannabis.
La nécessité
de distribuer le cannabis thérapeutique par l'intermédiaire des pharmaciens
s'impose aussi en raison de l'importance
de la surveillance clinique que nécessite ce type de substance. Dans un premier temps, le pharmacien est le
professionnel le plus apte à assurer un
suivi thérapeutique rigoureux auprès des patients utilisant le cannabis. Ayant
accès au profil pharmacothérapeutique complet du patient à la pharmacie et à
travers le DSQ, le Dossier santé Québec, le pharmacien
peut non seulement assurer un suivi auprès du patient, mais peut aussi mieux le
conseiller dans le choix du type de
cannabis, de la forme sous laquelle il devrait être administré, et cela, selon
les consensus scientifiques en vigueur dans
la littérature, des consensus qui sont en constante évolution et qui le seront
encore plus dans les prochaines années. De plus, la distribution exclusive de cannabis thérapeutique en pharmacie
permettrait de connaître exactement combien de patients reçoivent du cannabis thérapeutique et pour quelles
indications, ce qui est absolument impossible avec le système aujourd'hui. Le pharmacien est aussi
avantageusement placé pour effectuer des suivis auprès des autres
professionnels de la santé qui sont impliqués, notamment les médecins prescripteurs,
compte tenu du fait que la communication entre les médecins et les pharmaciens
est évidemment déjà bien établie.
Dans un
deuxième temps, le cannabis, comme pour tout autre produit prescrit, présente
différentes caractéristiques avec
lesquelles seul un pharmacien est en mesure de composer, que l'on pense aux
interactions médicamenteuses, aux contre-indications
ou aux effets secondaires légers. Le pharmacien est outillé pour composer avec
toutes ces situations.
Dans un
troisième temps, les systèmes de surveillance des stupéfiants et des opiacés
déjà en place en pharmacie constituent le meilleur outil afin de
protéger les données confidentielles des patients et de permettre une
surveillance clinique des détournements, des
ordonnances multiples de plusieurs médecins, des surprescriptions, des doses
trop élevées et des abus et préjudices causés aux patients, ce qui n'est
pas le cas avec le système actuel.
Dans un quatrième temps, les pharmaciens ont la
légitimité professionnelle requise afin de contribuer à la cessation tabagique des patients qui fument le
cannabis en leur recommandant des méthodes de consommation alternatives et moins nocives pour la santé, puisque le
cannabis peut en effet être administré sous d'autres formes et dosages,
d'autres méthodes de consommation, comme les huiles de cannabis et les
vaporisateurs.
L'AQPP considère également que l'utilisation du
cannabis thérapeutique devrait non seulement être jumelée à un programme de prévention — c'est
très important — et de
sensibilisation, mais aussi à des projets de recherche et des essais
cliniques rigoureux. Il est primordial d'inciter les patients utilisant le
cannabis thérapeutique à participer à des projets de recherche qui permettront
de faire avancer la science sur ces sujets.
Considérant les éléments décrits précédemment,
l'AQPP recommande d'inclure la question de la distribution du cannabis thérapeutique dans le projet de loi
n° 157, de traiter le cannabis thérapeutique au même titre que tous les
autres produits d'ordonnance et, en conséquence, d'en assurer la distribution
exclusive aux patients à travers le réseau des pharmacies communautaires du Québec, de mettre un terme au mode actuel
de distribution du cannabis par voie postale et d'inclure l'AQPP au sein des partenaires des projets de recherche que le
gouvernement du Québec entend mener et/ou commanditer sur les bénéfices
thérapeutiques du cannabis.
En terminant,
la question de la distribution du cannabis thérapeutique comporte une
importante dimension reliée à la protection du public. Nous y sommes
sensibles. C'est pourquoi la ministre et le gouvernement du Québec peuvent compter sur l'appui complet de l'AQPP pour
convaincre le gouvernement fédéral que la distribution du cannabis thérapeutique par voie
postale n'est plus une solution appropriée dans le cadre de la légalisation du
cannabis à des fins non thérapeutiques. Merci beaucoup de votre
attention.
Le Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup pour la présentation de votre exposé. Nous allons débuter les
échanges immédiatement avec le gouvernement. Mme la ministre et députée de
Soulanges, vous disposez de 15 minutes. À vous la parole.
Mme Charlebois :
Merci, M. le Président. D'abord, saluer les gens qui sont ici,
M. Thiffault, M. Bourcier et Me Brisebois. Merci d'être parmi nous.
Je sais que vous avez aussi des gens qui vous accompagnent. Alors, merci d'être
venus nous présenter votre point de vue, c'est fort important.
J'ai le goût
d'aller dans le vif du sujet. Et j'ai écouté un peu Tout le monde en parle,
l'année dernière, puis je pense que
je vais commencer par la question qui tue. Eux autres, ils ne font pas ça de
même, mais moi, je commence tout de suite par la pire, comme ça, après ça, on est des amis. Vous comprenez? Bon,
alors la question qui tue : Pourquoi, si, depuis juin 2013, il y a
du cannabis thérapeutique, qui est légiféré par le gouvernement fédéral, qui
encadre la production, distribution et la vente du cannabis thérapeutique...
pourquoi l'intérêt maintenant pour le cannabis thérapeutique, alors que c'est
là depuis 2013? Ça fait cinq ans que c'est là.
• (12 heures) •
M. Thiffault (Jean) : Oui, en
fait, le système actuel est un système assez opaque, hein, c'est assez
difficile de connaître exactement le nombre
d'utilisateurs, la raison de l'utilisation aussi. Et évidemment le débat sur la
légalisation pour le cannabis non thérapeutique nous a amenés aussi à se
positionner et aussi à jeter un regard sur la littérature qui se fait, là, qui est disponible en ce moment sur
le cannabis. Et on n'est pas en train de réfléchir est-ce qu'on légalise
ou pas, le produit va être légalisé. Et, de
plus en plus, on voit, c'est exponentiel, le nombre de patients qui se font
prescrire le cannabis. Donc, si le corps
médical, la science y voit un avantage et qu'on va jusqu'à diagnostiquer un
besoin qui doit être répondu par le cannabis, bien, on n'a pas le choix
de l'encadrer jusqu'au bout, ce besoin-là.
Donc, notre
position a évolué aussi avec le débat de société mais aussi avec l'avancement
des connaissances sur le cannabis. Et
il a fallu se poser la question : Est-ce que c'est quelque chose sur
laquelle on doit se positionner? On a posé la question à nos membres
aussi parce que, vous le savez mieux que personne, c'est déjà un débat complexe
sur plusieurs niveaux, on s'est posé des
questions par rapport à notre vocation de pharmaciens, puis clairement le
message de nos membres, c'est que, oui, on a
un rôle à jouer sur ça, mais uniquement sur le volet thérapeutique. Et je pense
que plus la science va évoluer, plus
on va être capables de bien prescrire pour les bonnes indications, au bon
dosage, et plus l'expertise du pharmacien, jumelée avec le diagnostic du
médecin, va rendre l'utilisation optimale du cannabis.
Mais comme
tout le monde, hein, je veux dire, c'est une réflexion qui s'est faite sur une
longue période, et c'est un dossier tellement complexe que, voilà, ça a
pris quelques années, effectivement, peut-être.
M. Bourcier (Jean) : Peut-être
en complément de réponse, je vous dirais qu'il faut comprendre qu'on a des représentations qui se font depuis quelques
années auprès de l'Ordre des pharmaciens du Québec, on a des
représentations qui se font au travers de
l'Association des pharmaciens du Canada, la CPhA. Le cannabis est de
législation fédérale, ce qui... Ça
fait que nous, on a essayé, au travers de... On est membres de la CPhA, on est
membres du conseil d'administration de
la CPhA, donc, au travers de nos collègues d'Ottawa, qui sont assis à Ottawa,
on essaie de faire des pressions aussi au niveau du gouvernement
fédéral.
Donc, on a
travaillé à plusieurs niveaux. On a travaillé d'abord au niveau de nos membres,
à savoir qu'est-ce qu'ils veulent;
dans un deuxième temps, au niveau de l'Ordre des pharmaciens, voir est-ce qu'on
peut appareiller notre vision des choses avec la vision de l'Ordre des
pharmaciens — je
me tourne ici parce que j'ai vu M. Bolduc ici, dans la salle, le président de l'Ordre des pharmaciens du Québec; et
également on a essayé de travailler avec l'Association des pharmaciens
du Canada pour faire du lobbying auprès des instances fédérales.
M. Thiffault (Jean) : Et on
s'est dit : Maintenant, bon, c'est considéré comme un médicament, un outil
thérapeutique, mais normalement la même
logique prévaut que ce sur quoi on fait en ce moment. Puis, en regardant
le système actuel, la distribution postale,
on peut faire la comparaison. Est-ce qu'on accepterait, en 2018, qu'une
compagnie pharmaceutique vende directement à
un client? Je veux dire, il y a un conflit d'intérêts très grand. Il n'y a
rien, il n'y a personne entre les
deux. Donc, nous, ce qu'on dit, c'est que... Je pense que c'est bien de mettre
le même encadrement au cannabis parce qu'on a décidé... parce que la
science a démontré aussi qu'il y avait une utilité thérapeutique.
Mme Charlebois :
Vous avez raison concernant... il y a des questionnements à se faire sur la
vente en... qui est livrée par la poste. On
a l'intention, vous le savez, au gouvernement du Québec, d'avoir un site en
ligne qui va aussi effectuer le même
genre de service. Et ne pas faire ça, honnêtement, c'est faire fi de la
réalité, parce que même le député de Labelle
nous avait bien indiqué, lors des premières discussions que nous avons eues,
qu'on était capable de s'approvisionner pas nécessairement juste par ces sites-là, là, mais par des sites
illicites. Puis ce n'est pas parce que lui, il a consommé, là, ce n'est pas ça que je suis en train de dire, on
va rectifier ça, là. Non, mais il faut le clarifier. Mais ce que je veux
dire, c'est qu'il nous a démontré que c'était possible de.
Alors,
j'entends votre préoccupation et j'entends... Ce que je retiens, c'est que
c'est un phénomène qui est évolutif. Vous
l'avez même expérimenté. Alors, la légalisation, quand je dis que, dans trois
ans, il faut revoir la loi initiale, je ne suis pas à côté de la track,
là, c'est vraiment ça qu'il va falloir faire, parce que le cannabis, ce n'est
pas un nouveau phénomène, mais la légalisation va l'être.
Et je vous entends... Vous
avez vu que C-45 confirme déjà aussi ce qui était déjà au préalable stipulé
pour le cannabis thérapeutique. Alors, nous...
Il n'est pas inscrit dans le projet de loi n° 157. Puis je vais profiter
de l'occasion qui m'est donnée, parce que tantôt le député de Borduas a
mentionné... puis jusqu'à tout récemment vous aviez raison, M. le député de Borduas, il y avait deux
producteurs québécois, mais en date d'hier il y en a six, maintenant. Et on a
vérifié, moi, j'ai vérifié, même, auprès de
producteurs, et on m'a confié qu'au Québec on n'a pas beaucoup déposé de
demandes. C'est une des raisons pour laquelle on n'avait pas beaucoup de
permis.
Est-ce qu'il
y a lieu de continuer d'être vigilant? Oui. Oui, parce que je pense qu'au
Québec on a le droit d'avoir des producteurs québécois. Ceci étant dit,
on est rendus à six. Ce n'est pas suffisant, on en convient, mais on va
travailler là-dessus.
Bon, revenons
donc à l'essence de votre mémoire. J'en ai profité pour clarifier ça parce que
moi-même, je ne le savais pas. Je l'ai su pendant que vous parliez.
Concernant la voie postale, comme je vous dis,
j'entends votre préoccupation, mais il faut quand même être capable de comprendre que ça se fait déjà sur des
sites illicites. Puis j'entends votre préoccupation du médical versus tout l'ensemble des prescriptions qu'une personne peut
avoir. Est-ce que vous auriez un mécanisme à mettre en place?
Parce que, tu sais, même si on met des interdictions fortes aux travailleurs, dans les boutiques de cannabis, pour ne pas vendre de cannabis à quelqu'un qui a une
prescription, par exemple, bien, la personne aura juste à ne pas présenter
sa prescription, puis on ne pourra pas plus accuser le vendeur. Ça,
c'est une première affaire dont je voulais vous mentionner.
Mais l'autre
chose que je voulais vous mentionner, c'est que, pendant les consultations, tellement que je l'ai dit à haute voix, pendant les consultations préalables, avant l'élaboration du projet de loi, tout le monde me parlait que c'était difficile de... les médecins québécois
ne prescrivaient pas beaucoup, mais, quand je me promenais aux tables,
pendant les ateliers, tout le monde avait du cannabis thérapeutique. C'était fascinant de voir comment il y avait
très peu de prescriptions québécoises mais combien il y en avait de gens qui
consommaient sous prescription. Ça fait que, là, je l'ai même dit à haute
voix à la troisième consultation, j'ai dit : Là, il y a comme une
dichotomie. On n'est pas capable d'avoir des prescriptions, mais tout le monde
est sur le cannabis thérapeutique. Comment on fait ça?
J'ai fini par
le savoir puis, je ne sais pas, je veux juste voir si vous aviez été informés
de ça puis qu'est-ce que vous en pensez. Apparemment... Parce que,
de la façon que ça fonctionne avec le gouvernement
fédéral, il autorise les lieux
de production, et c'est le lieu de
production qui vend directement aux consommateurs, mais ça a l'air qu'il y aurait comme un genre de lobby, ou je ne sais pas trop comment le
dire, pour diriger d'éventuels consommateurs vers des prescripteurs qui,
eux autres, les amènent vers des producteurs.
Comment vous voyez ça, vous? Est-ce que le
gouvernement fédéral est au courant de ça, de la façon que ça fonctionne?
Est-ce que nous ne devrions pas exiger que la prescription d'un Québécois doit
être faite au Québec?
M. Thiffault
(Jean) : Bien oui, effectivement, parce qu'il pourrait y avoir des
prescriptions de complaisance. Et l'encadrement ne semble pas très
strict parce que, selon les chiffres qu'on a, il y aurait
400 000 utilisateurs de cannabis thérapeutique au Canada, seulement
130 000 via le système légal. Tous les autres, les
270 000 autres, approximativement, s'approvisionnent de façon grise,
illicite. Donc, on voit que l'encadrement, il n'est pas strict, et
effectivement on entend que c'est assez facile d'avoir une prescription sans
rencontrer de médecin.
Mais c'est
l'oeuf ou la poule. Je comprends le prescripteur puis je comprends aussi, même,
les pharmaciens, aussi. Le cannabis,
comme je vous le disais tout à l'heure, la science, elle n'est pas encore très
précise, là, sur les indications, elle s'améliore,
mais, pour qu'elle le soit, ça prend des projets de recherche. Mais, pour avoir
des projets de recherche, ça prend des patients inscrits dans des
protocoles stricts, puis le modèle actuel ne permet pas... plus difficilement,
en fait, de tels projets de recherche qui permettraient d'avoir des guides de
prescription, des encadrements cliniques, tout ça.
Nous, ce
qu'on dit, c'est qu'en pharmacie, un, on n'a pas à créer un réseau. Le réseau,
il est déjà en place, il est déjà sécuritaire,
avec une traçabilité puis un approvisionnement sécuritaire. Il y aurait un
filtrage des patients pour l'âge, pour les contre-indications, tout ça,
qui serait évidemment professionnel, et un enregistrement obligatoire à un
programme de recherche, donc, une étude
clinique. Donc, tout ça permettrait d'avoir plus de données qui faciliteraient,
un, d'identifier les patients qui
bénéficieraient le plus. Il y a peut-être des patients qui ont des
prescriptions de complaisance, qui ne devraient pas en avoir. Le fait que ça passe en pharmacie, je pense que ça assure
un certain filtrage, que des patients reçoivent
ça uniquement sur une prescription pour avoir un remboursement ou une...
Mme Charlebois :
Mais je pense qu'en ce moment... Le Collège des médecins, même, ne reconnaît
pas le traitement, comme tel, du cannabis.
Mais, comme vous dites, avec un projet de recherche bien établi, on pourrait
peut-être arriver à des conclusions qui permettront aux médecins...
M. Thiffault
(Jean) : De faciliter la tâche. Puis c'est vrai que c'est complexe,
parce que le médicament, on le sait,
il a une force... c'est facile, il y a des études cliniques. Avec le cannabis,
il n'y a pas de standardisation du produit, puis c'est encore un peu flou. Mais il y a assez de données pour dire que,
oui, il y a de l'efficacité pour le produit, mais ça reste à raffiner.
Puis la façon le plus rapidement d'avoir des résultats intéressants qui
aideraient tout le monde, toute la communauté médicale, pharmaceutique, ce
serait d'avoir des projets de recherche. Et, en pharmacie, c'est la façon la
plus simple, là, de...
• (12 h 10) •
M. Bourcier (Jean) : Peut-être
un commentaire additionnel, si vous me le permettez. Il y a une notion de traçabilité importante au travers de ça. Si on veut connaître l'utilisateur et les raisons de l'utilisation, il
faut garder une trace de l'achat, il faut garder une trace de la
motivation à l'utilisation.
La
technologie existe au travers de cartes. Exemple, la SAQ a une carte
fidélisation qui s'appelle la carte Inspire, qui permet de tracer la
consommation des différents vins qu'on achète à la SAQ. Le lien se fait
également avec le consommateur, donc,
l'individu qui achète. Déjà, sur des fins non thérapeutiques, on pouvait garder
une trace de l'acquéreur du produit. On jase, là, mais c'est faisable.
En pharmacie,
on va un cran plus loin. Non seulement on garde une trace de l'acheteur du
produit, du consommateur, mais on
peut avoir l'indication pour laquelle le consommateur prend le produit et
s'assurer en même temps que c'est compatible avec le reste de sa
médication et les indications précises pour lesquelles le patient s'est vu
remettre une prescription.
Et, en ce
sens-là, il y a un questionnement à avoir. C'est-à-dire que, l'individu qui
prend du cannabis pour des fins thérapeutiques,
ce serait surprenant qu'il initie lui-même sa thérapie. La plupart du temps,
elle va être initiée par le médecin, qui
lui dit : Tu es rendu là, les autres produits n'ont pas fonctionné, donc
maintenant il faut se tourner vers un produit autre. Et, à ce moment-là, le produit autre est en
relation avec une pathologie x, une problématique importante pour
laquelle le patient, fort probablement, consomme d'autres médicaments. Ça fait
que, là, on revient, a contrario, à dire : Si ce patient-là se positionne
ailleurs dans le système, comment il va faire pour s'assurer qu'on optimise
l'utilisation de ce traitement-là dans la
pathologie qui est ciblée? Et là on rentre tout dans la problématique de santé
publique, qui dit : Si le traitement
n'est pas optimal, bien, mais est-ce qu'il pourrait avoir des effets pervers et
que le patient se retrouve ailleurs dans le système et coûte plus cher
au système? Donc, il y a toute cette réflexion-là à faire.
M. Thiffault
(Jean) : Et ça pourrait être aussi... On parle beaucoup de la crise
des opiacés, mais il y a de plus en plus de recherche qui se fait sur
l'utilisation du cannabis en comédication avec les opiacés. Évidemment, si on
veut intervenir dans la crise des opiacés,
il faut faire intervenir et le médecin et le pharmacien, d'où l'importance de
garder les patients dans un réseau distinct du cannabis non thérapeutique.
Mme Charlebois :
Avez-vous déjà des incidents qui vous sont reportés, en ce moment, sur la
mixité de consommation de différents
produits? Parce que, même si ce n'est pas légal, les gens finissent par
dire, un jour : Bien, moi, j'ai
mélangé tel médicament, puis j'ai fumé un joint, puis... bon, etc. Avez-vous
des incidents qui vous permettent de dire : Bien, il y a des
problèmes en ce moment?
M. Thiffault
(Jean) : C'est anecdotique parce que
les gens sont effectivement assez gênés de le dire, mais là je pense
que tout le débat autour de la légalisation va faire que ça va
faire partie des questions standard, à l'ouverture du dossier, quant à la collecte d'information, le tabac, le cannabis. Et effectivement il y a un impact sur les contre-indications. Il y
a des produits qui augmentent l'effet du cannabis, aussi. Donc, le même joint
pourrait agir de façon plus forte chez certains
patients parce qu'ils consomment
certains médicaments. Donc, probablement que ce genre d'anecdotes là
vont être de plus en plus fréquentes quand les gens vont spontanément,
automatiquement dévoiler leur état de...
Les chiffres
nous ont surpris, hein, je veux dire, comme tout le monde aussi, hein, je
pense, sur la consommation de cannabis
actuelle. Donc, on sait qu'il y a beaucoup de nos clients qui en consomment qui
ne nous le disent pas. Donc là, cette discussion-là va être bénéfique.
Le Président
(M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Malheureusement, ça met un
terme à ce bloc d'échange avec nos
invités. Du côté de l'opposition officielle, maintenant, M. le député de
Labelle, vous avez neuf minutes pour votre bloc d'échange. À vous la
parole.
M. Pagé :
Merci, M. le Président. Effectivement, c'est des échanges qui sont très
intéressants et très importants. Et il
n'y a pas beaucoup de groupes qui viennent échanger sur ce volet qui est plus
médical. Effectivement, je pense que ça manque à nos échanges que nous
avons. Parce que c'est un volet, il faut le reconnaître un peu tout le monde,
là, où le projet de loi n° 157 est
assez absent. Et je pense qu'il faudra regarder de quelle façon on pourra mieux
encadrer ce volet-là, parce qu'effectivement vous nous apportez un point
de vue qui est très, très important.
Et comment
peut-on expliquer, justement, qu'au Québec, on nous avait dit ça lors des
consultations, il n'y avait que
3 % des prescriptions médicales de tout le Canada — pourtant, on forme 22,5 % de la
population canadienne — de tout le Canada, juste 3 % de prescriptions
médicales au Canada qui proviennent du Québec? Est-ce que c'est le
manque de formation des médecins? Je ne
dirais pas le manque de formation des pharmaciens, mais en même temps est-ce
que vos pharmaciens sont prêts aussi à faire face aux gens qui vont se
présenter avec des prescriptions?
M. Thiffault
(Jean) : Je vous dirais, honnêtement, je pense qu'on est habitués à
gérer, bon, des interactions à différents
produits. Le cannabis, on ne connaît pas les grands concepts, mais il y a
encore beaucoup de formation que les pharmaciens vont devoir faire parce
que c'est... il va falloir l'approfondir. Je pense que ce ne sera pas un problème.
Il va falloir chercher l'information, faire un tri de l'information qui est
crédible de celle qui ne l'est pas.
Puis, je vais vous dire, sur le marché, c'est
assez difficile, hein, parce que souvent l'information vient des producteurs,
donc... Et il y a eu pendant longtemps une certaine prudence des ordres
professionnels, qui est tout à fait légitime.
C'est vraiment une question complexe, là. Et, encore là, on n'est pas en train
de décider est-ce qu'on le légalise ou pas.
Quelqu'un dit : On va légaliser le cannabis, et là ça place les ordres
professionnels devant des situations difficiles. Je pense que cette
réflexion-là s'est faite, à l'Ordre des pharmaciens, et je pense que demain ils
pourront vous en parler.
Mais le
pourquoi qu'il n'y a pas plus de prescriptions au Québec, c'est une excellente
question. Ça, je n'ai pas le... on
n'a pas le... Puis comme je vous dis, c'est un système qui est assez opaque,
hein, je veux dire, c'est assez difficile d'aller chercher de
l'information, les statistiques sont difficiles à obtenir et pas tout à fait
exactes aussi, je pense que c'est des approximations.
Mais je n'ai malheureusement pas de réponse à votre question, sinon peut-être
que les médecins québécois, même, dans la
crise des opiacés, prescrivent moins, alors ils sont peut-être un petit peu
plus prudents, et c'est un principe
de précaution qui est tout à fait légitime. Donc, peut-être qu'ils ont été un
petit peu plus prudents et que les systèmes d'obtention de prescriptions
étaient peut-être plus établis... de complaisance, qu'on pourrait dire, là, par
les producteurs, étaient peut-être plus établis dans les autres provinces
canadiennes qu'au Québec.
M. Bourcier
(Jean) : Peut-être en
complément d'information, on l'a mentionné tantôt, il y a peu de
producteurs québécois, les producteurs étant
dans d'autres provinces, nommément l'Ontario. On pourrait penser... ce ne
serait pas fou de penser que les producteurs faisaient plus de lobbying
dans des environnements qui étaient à proximité de leurs champs de production, on va appeler ça comme ça,
et que c'était plus facile, à ce moment-là, pour eux, qui étaient des producteurs hors Québec, d'aller voir des gens de
langue anglaise et de faire des approches différentes sur des marchés
qui étaient plus à proximité de leurs environnements, tiens, je vais dire ça
comme ça.
M. Pagé : O.K. Oui, ça
peut peut-être faire partie des raisons.
Moi, je vous
le dis tout de suite, nous, nous nous sommes positionnés à savoir que, pour des
fins médicales, ça devrait être
distribué, en fait, vendu dans les pharmacies, pour les compétences que l'on
connaît et pour tout ce que vous avez
énuméré tantôt aussi, là, hein, le conflit avec l'usage de d'autres
médicaments. C'est vous autres, les spécialistes de la santé. Donc, si
on parle de médicaments, ça devrait se vendre là.
D'ailleurs,
ça m'amène à une question : Est-ce que vous connaissez un autre médicament
qui est vendu comme ça, en ligne,
sans passer par une pharmacie? Est-ce que ça existe? Parce qu'à partir du
moment où on dit : Ça existe pour des fins médicales, c'est reconnu
par Santé Canada, donc, c'est un médicament, ça devrait être vendu chez vous.
Mais c'est vendu en ligne, là, comme ça, là. Effectivement, il y a déjà
quelqu'un à mon bureau qui en a fait venir de la Colombie-Britannique très
facilement, et alors...
M. Thiffault
(Jean) : Non, je n'en connais pas d'autres. Il y a peut-être un trou
au niveau de la réglementation sur le
statut, hein, est-ce que c'est vraiment un médicament ou est-ce que c'est... On
est encore là. Il n'y a pas de ce qu'on appelle un DIN, là, «drug identification number», il n'y a pas de
médicament, de numéro comme tel, donc il est un peu... il y a comme un
flou sur le statut. C'est peut-être ça qui fait qu'on a de la misère à le
mettre dans une case. Mais, peu importe,
c'est un produit prescrit, comme un médicament, et tout le même processus
devrait suivre, là, d'encadrement professionnel, selon nous, là.
• (12 h 20) •
M. Pagé :
O.K. Et vous dites très clairement aussi, là, j'aime bien votre premier picot
de la page 13, là : «Mettre un terme au mode actuel de distribution de cannabis thérapeutique par voie
postale.» Donc, on se rend chez vous, et donc c'est très, très clair. Alors, nous, c'est ce que nous souhaitons. Donc,
on mettrait fin à la vente en ligne, c'est ce que je comprends, pour des
fins médicales. C'est pour des fins médicales.
Nous sommes
allés plus loin en disant que nous voulons que, même pour des fins non médicales,
les gens puissent avoir un contact,
donc aller chercher... là, on ne parlera pas de prescription, mais le produit,
bon, dans les SQC. Mais, les SQC, il n'y en aura pas partout, alors ça
se complique un peu, parce qu'à un moment donné on ne peut pas imposer
quelqu'un à faire des 100 kilomètres pour aller chercher son produit.
Si on disait
que, pour des fins non médicales, la distribution pour la vente en ligne se
ferait chez vous, moyennant peut-être
un certain dédommagement, est-ce que, ça, vous pourriez l'envisager? Parce que
nous, on pense que, si les gens peuvent
acheter en ligne aisément pour des fins récréatives, non médicales, bien,
évidemment, on va perdre le contrôle, et il va peut-être y avoir un abus aussi, là. Alors, si la personne se déplaçait, allait dans une pharmacie, et, en même
temps, en profiter pour peut-être
poser quelques questions... Est-ce que vous avez discuté
de cela, lors de vos échanges, ou vous vous êtes limités seulement au
volet médical?
M. Thiffault
(Jean) : On s'est posé la
question, effectivement, sur le volet non thérapeutique, et
l'association et les membres aussi, en tournée régionale, ont signifié un
inconfort par rapport à la vente du cannabis non thérapeutique...
M. Pagé : ...importante là. La personne commande en ligne,
donc ce ne serait pas sur les tablettes là, hein? La personne commande
en ligne mais devrait aller le chercher chez vous, tu sais, ce serait bien
différent que le produit est sur les tablettes. Alors, il y a une nuance
importante ici, là, tu sais : commande à la SQC, parce qu'on veut que la commande se fasse à la SQC, avec un contrôle x, y,
mais, dans des petits villages un peu partout, là où il n'y aura pas de
comptoir de la SQC, alors, le point de distribution serait chez vous.
M. Thiffault
(Jean) : C'est sûr que l'avantage d'une pharmacie, on l'a dit tout à
l'heure, c'est la sécurité de son réseau, de sa traçabilité, du
producteur jusqu'au client. Par contre, je vois mal le pharmacien faire des
conseils sur du cannabis non thérapeutique.
J'avoue que cette réflexion-là ne s'est pas faite, là, sur l'utilisation du
pharmacien comme point de chute, peut-être, d'une livraison, c'est ce
que je comprends, là, comme tel.
M. Bourcier (Jean) : Non, la réflexion ne s'est pas faite. Il faudrait
se questionner à savoir aussi est-ce qu'on se sent en droit, à ce
moment-là, d'ouvrir le paquet, je vais le dire avec un sourire, là. Le contenu
du paquet ne sera pas nécessairement dévoilé
au pharmacien. Ça amènerait des problématiques qui susciteraient... qui
devraient amener une réflexion, au
besoin. L'idée du point de distribution, vous avez raison, les pharmacies, il y
en a partout au Québec, dans toutes les régions,
dans toutes les villes ou villages du Québec ou à peu près. Donc, c'est sûr que
c'est un point de rassemblement ou un point de contact, là, privilégié dans les
régions.
M. Thiffault
(Jean) : Les pharmaciens
puis les professionnels de la santé ont un rôle dans le non-thérapeutique
pour rappeler que ce n'est pas une substance inoffensive, là. Je pense que le gouvernement
se pose beaucoup de questions aussi sur ça.
Donc, on a un rôle sur la sensibilisation du consommateur occasionnel, sur les
contre-indications, sur les problématiques pour des gens qui auraient
des antécédents, des problèmes de santé mentale ou de... Donc, de ce côté-là,
oui.
Sur l'utilisation du
pharmacien dans la distribution, là-dessus, je dois dire que ça nécessiterait
un petit peu plus de réflexion, mais qu'à
première vue il n'y a pas une grande ouverture sur ça pour des raisons
déontologiques, des raisons de code d'éthique aussi. Mais, écoutez, on
pourrait y réfléchir.
M. Pagé :
Oui. En tout cas...
Le
Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup. Ça met un terme à ce bloc d'échange avec l'opposition officielle. Le temps passe vite,
effectivement. Mme la députée de...
Mme Lavallée :
Repentigny, Repentigny.
Le
Président (M. Merlini) :
Repentigny, oui, excusez-moi, j'ai eu un blanc de mémoire, avec la neige, là.
Vous disposez d'un bloc de six minutes avec votre bloc d'échange. À vous la
parole.
Mme Lavallée :
Bien, moi, je vais avoir juste une question puis, après, je laisse la parole à
mon collègue. À la page 9, vous parlez
que le nombre de médecins autorisés à prescrire le cannabis pourrait être
limité, et la pertinence d'exiger une
formation spécialisée pour les prescripteurs pourrait être envisagée.
J'aimerais ça que vous élaboriez là-dessus, surtout dans un contexte où on vit toujours le problème
d'accessibilité à un médecin versus ce que vous venez d'avancer.
M. Thiffault
(Jean) : Bien, il y a
un certain parallèle qui peut se faire avec la méthadone, qui est un autre
produit utilisé dans les cas de sevrage aux
opiacés, et il y a comme une certaine formation qui est attendue du
médecin avant qu'il puisse commencer
à prescrire ce produit-là. C'est un produit aussi avec un statut un peu
différent, là, d'un médicament standard.
Donc,
l'idée, ce n'est certainement pas de limiter l'accès, c'est plutôt de s'assurer
que les patients qui reçoivent des prescriptions...
qu'il y ait moins de pression pour des ordonnances de complaisance des
médecins, qu'il y ait une façon de filtrer,
de déterminer quel patient bénéficierait le plus du cannabis, d'avoir des
consensus de prescription. Mais le but, ce n'est certainement pas de limiter l'accès, c'est de mieux outiller peut-être
les médecins et les pharmaciens aussi à une prescription efficace et un suivi aussi optimal, là, du traitement.
C'est dans ce sens-là qu'on recommandait une certaine formation puis un
suivi, là, de...
Mme Lavallée :
À ce moment-là, on pourrait penser à une formation qui est générale, parce que
c'est toujours dans le contexte d'accessibilité à un médecin, qui est toujours
un peu complexe, et au rôle aussi de la corporation médicale, qui
devrait sensibiliser ses médecins, justement, au problème de prescription de
complaisance, ce qui se fait avec d'autres produits aussi.
M. Thiffault
(Jean) : Ils le font déjà. Je
ne veux pas parler en leur nom, mais je pense qu'ils sont assez
sensibles à ça, et ils veulent prévenir
aussi que les médecins soient... se fassent inonder de demandes, et le
pharmacien aussi, là, de demandes qui ne seraient peut-être pas
thérapeutiquement justifiées, là. C'est ça, la question.
Le Président
(M. Merlini) : M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Oui, merci, M. le Président. Madame
messieurs, bonjour, merci d'être présents aujourd'hui. Alors, vous souhaitez que, dans le fond, ça passe
par la pharmacie pour tout ce qui est médical. Alors, pour vous, est-ce que... Dans le fond, l'important,
c'est le suivi associé à la prescription pour le patient. Est-ce que vous
souhaitez que le patient se déplace en tout
temps à la pharmacie ou c'est lors... la première fois qu'il présente sa
prescription, et par la suite, bien, il peut faire ses renouvellements
en ligne, puis ça lui est livré à la maison?
M. Thiffault
(Jean) : La présence physique n'est pas nécessairement obligatoire.
C'est sûr que c'est idéal. On a beaucoup de clients en pharmacie pour qui on
livre les médicaments. Mais, peu importe si c'est livré ou pas, tout le même... Premièrement, le produit qui est
livré, on est sûrs à 100 % de son approvisionnement, puis de sa
traçabilité, puis de tous les contrôles, l'analyse du dossier. Et, si c'est un
nouveau traitement, s'il y a un suivi à faire, il y a toujours une
communication.
Maintenant,
avec les moyens de technologie, je pense qu'il y a moyen de communiquer, tu
sais, en visioconférence, par Skype
ou autres, donc la présence physique n'est pas toujours obligatoire, mais il
faut qu'il y ait un contact à quelque part, là, d'une façon.
Et, comme je vous dis, livraison ou pas, on est
assurés du processus, de la sécurité de l'approvisionnement et du suivi thérapeutique, même, si c'est... le
produit est livré. Mais, livré, il va falloir aussi une certaine chaîne de
signatures pour
s'assurer effectivement que, si on livre du cannabis au patient, bien, on ait
une preuve qu'il a bien été livré à la bonne personne, pour s'assurer
que les contrôles soient efficaces à ce moment-là.
M. Jolin-Barrette : Mais, dans
les faits, actuellement, là, pour tout autre médicament, là, un coup que la prescription, elle est à la pharmacie, moi,
j'appelle pour faire renouveler ma prescription, est-ce que je suis en
contact avec le pharmacien, dans le fond, pour le renouvellement? Comment ça
fonctionne?
M. Thiffault
(Jean) : Oui, il y a toujours un pharmacien qui va passer. Il n'y a
pas un médicament qui sort d'une pharmacie,
soit en personne ou par livraison, qui n'est pas passé dans les mains du
pharmacien pour l'analyse du dossier... en fait, pas le médicament mais
l'analyse du dossier. Et aussi, si c'est un nouveau traitement, il y aurait
toujours une communication, normalement, avec le pharmacien.
M. Jolin-Barrette : Mais, quand il ne s'agit pas d'un nouveau
traitement? J'ai été vous voir une fois et là je suis rendu à... mon stock est épuisé, de cannabis,
supposons, j'appelle à la pharmacie et je dis : Bien, je voudrais faire
mon renouvellement de prescription. Est-ce
qu'à ce moment-là le pharmacien est en contact avec la personne par
téléphone?
M. Thiffault (Jean) : Pas
nécessairement. Peut-être directement, mais il va faire le suivi du dossier, il
fait l'analyse du dossier, peut-être sans parler à la personne, mais au cours...
Dans les suivis, après un mois, deux mois, normalement,
il y aurait un suivi qui est fait par le pharmacien, là, pour s'assurer est-ce
que le médicament fonctionne, est-ce qu'il y a des effets secondaires.
Donc, au cours du traitement, il y a une communication entre le patient et le
pharmacien.
M. Bourcier
(Jean) : Puis, je vous
dirais, ça dépend de la complexité aussi de l'ensemble du profil, du
dossier patient. Si le dossier... Un dossier
patient plus complexe va amener une intervention plus régulière du pharmacien,
même lorsqu'il y a des renouvellements. Un dossier patient simple, donc avec peu
de médicaments ou peu d'interactions possibles entre les médicaments, là,
l'interaction se fait à moins courte échéance, les échéanciers sont plus longs.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et puis, j'imagine, il va falloir faire de
la sensibilisation pour dire aux gens : Bien, si vous avez une prescription, continuez de vous
approvisionner par le biais de votre prescription et n'allez pas, dans le
fond, dans les magasins de la SQC parce que vous pouvez avoir des
contre-indications.
M. Thiffault
(Jean) : Oui. Puis, comme je vous dis, les consensus scientifiques
évoluent. Donc, si on veut s'assurer que
le patient reçoive le bon produit et le bon dosage de THC, tous les... Avec
l'avancement des connaissances, il y aura peut-être aussi... Puis ça, ce
n'est pas de notre ressort, mais, au niveau de la taxation, est-ce que... Les
produits sous ordonnance ne sont pas taxés.
Est-ce que le cannabis sous forme thérapeutique le sera ou pas? Nous, si on
fait la même chaîne de réflexion
qu'avec un médicament de prescription habituel, il ne devrait pas y avoir de
taxation au niveau du cannabis thérapeutique. Mais ça, c'est hors de
notre contrôle.
M. Bourcier
(Jean) : Peut-être... Vous
voulez toujours vous assurer que le médicament prescrit, cannabis ou
autres, donne l'efficacité optimale, offre
l'efficacité optimale. Ça fait qu'à ce moment-là la seule façon de le savoir,
c'est d'être en contact avec son
patient et, au besoin, d'ajuster les doses. Parce qu'il n'y a rien de pire
qu'un médicament qu'on prend qui ne
règle pas sa problématique. J'abonde dans le même sens que vous. Ce serait
éminemment triste qu'un patient se fasse prescrire du cannabis, le cannabis ne fait pas son effet, et sa solution
à lui, c'est d'aller dans un centre de distribution de la Société
québécoise du cannabis et où, là, il n'y a aucun suivi de la part d'un patient,
et là la situation peut dégénérer. Donc, il y aurait effectivement une
éducation importante à faire auprès du patient.
Le Président (M. Merlini) : Me
Brisebois, M. Jean Bourcier, M. Jean Thiffault, représentant
l'Association québécoise des pharmaciens
propriétaires, merci de votre présence ce matin. Merci pour votre contribution
à nos travaux.
La commission suspend donc ses travaux jusqu'à
14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 30)
(Reprise à 14 h 2)
Le Président (M. Merlini) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Il est
14 h 1. Alors, cet après-midi,
nous avons... la commission, pardon, est... Je vais recommencer. Ayant
constaté le quorum, je déclare donc
notre séance de travail ouverte. Je demande à toutes les personnes, je dis bien
toutes les personnes dans le salon rouge de bien vouloir éteindre toute
sonnerie de tout appareil électronique pour le bon déroulement de nos travaux.
La commission
est réunie cet après-midi afin de procéder aux auditions publiques dans le
cadre des consultations particulières sur le projet
de loi n° 157, la Loi constituant la Société québécoise du cannabis,
édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions
en matière de sécurité routière.
Cet
après-midi, nous avons le plaisir d'entendre les groupes suivants : la
Fédération des comités de parents du Québec, la Fédération des commissions
scolaires du Québec, la Centrale des syndicats du Québec, la Confédération des syndicats nationaux, la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec et l'Assemblée des premières nations du
Québec et du Labrador.
Je
souhaite donc la bienvenue aux représentants de la Fédération des comités de
parents. Vous êtes habitués aux commissions
parlementaires, alors vous connaissez la routine. Vous disposez de
10 minutes pour présenter votre exposé. On vous invite évidemment à
vous présenter également aux membres de la commission. Bienvenue à la CSSS. La
parole est à vous.
Fédération
des comités de parents du Québec (FCPQ)
Mme Payne
(Corinne) : Bonjour, Mme la ministre, les députés et ainsi le
personnel. Je suis accompagnée aujourd'hui de Mme Lyne Deschamps,
conseillère cadre à la fédération, puis Me Jean-François Rioux, qui... aussi
conseiller à la Fédération des comités de parents du Québec.
La
FCPQ, ça fait plus que 40 ans qu'on existe. On représente toutes les commissions scolaires francophones puis deux commissions
scolaires anglophones, tous les parents du Québec, presque, pour les écoles
publiques secondaires et primaires. Puis annuellement on a à peu près 18 000 parents
actifs dans toutes nos instances scolaires, implication parentale. Je remercie
les parlementaires pour l'occasion de présenter nos préoccupations sur le
projet de loi n° 157.
Alors,
d'abord, il est important de dire que la légalisation du cannabis, prévue pour
l'été 2018, préoccupe les parents du Québec. Afin de bien saisir la
portée du projet de loi, la FCPQ a procédé à un examen attentif du texte en
ciblant essentiellement les dispositions qui
touchent les écoles et les mineurs. Les recommandations contenues dans notre
mémoire se basent sur une consultation faite
auprès des parents. Les délégués qui ont répondu représentent deux tiers des
comités de parents du Québec. Nous avons aussi effectué une revue de la
littérature, tenu compte des positions historiques de la fédération,
particulièrement tout ce qui touche les saines habitudes de vie.
Cette mise en
contexte maintenant terminée, je vous présente en rafale nos principes
recommandations.
Premièrement,
nous appuyons le fait que la vente et la distribution du cannabis soient
exclusivement prises en charge par
l'État. Toutefois, nous nous opposons à l'article 55, qui prévoit les
projets pilotes qui pourraient avoir
la porte à une distribution de vente privée. Nous croyons que la vente
et la distribution de cannabis doivent être uniquement encadrées par l'État
afin de conserver le plein contrôle.
Maintenant, nous vous
proposons une série de nouvelles recommandations ou des modifications à
certaines propositions du projet
de loi. Que l'âge légal de
consommation du cannabis soit fixé à 21 ans. Que les amendes
prévues pour les personnes
trouvées en possession de cannabis dans les lieux où cela est interdit, particulièrement les écoles, soient plus
sévères. Que l'obligation de participer à un programme d'éducation
et de prévention soit prévue comme alternative à une amende ou en complément de celle-ci pour un mineur trouvé en
possession de cannabis. Que
l'interdiction de fumer du cannabis s'applique à tous les lieux publics.
Que soit fixée à au moins un kilomètre la distance séparant un point de vente légal de cannabis d'une école primaire ou
secondaire ou même tous nos établissements éducatifs au Québec. Puis,
sur ce point-là, je veux souligner que, dans
le sondage qu'on a fait auprès des parents, c'est le point qui a été
100 %. Tous les parents sont
d'accord. Alors, d'autres, il y a des variances, mais, lui, c'était 100 %.
On a toujours un point rassembleur dans nos parents. Que toute forme de publicité faisant la promotion du
cannabis soit interdite. Que l'essentiel des revenus issus de la vente
de cannabis soit versé au fonds de prévention et la recherche sur le cannabis.
Que le projet de loi précise le pourcentage précis des sommes de fonds
consacrées à la prévention et l'intervention auprès des mineurs.
Puis
Mme Deschamps va juste complémenter avec un petit peu plus d'information.
Mme Deschamps
(Lyne) : Exactement, donc, pour quatre éléments particulièrement, on
voudrait que ce soit attribué pour diffuser
de l'information et sensibiliser les jeunes sur l'effet de la consommation des
drogues, pour intervenir auprès des jeunes vivant des difficultés liées
à la consommation des drogues, pour soutenir les organismes qui interviennent auprès des mineurs et auprès des
parents d'enfants aux prises avec des problèmes de consommation ou de
dépendance et finalement pour venir en aide aux parents d'enfants aux prises
avec des problèmes de consommation ou de dépendance.
Mme Payne
(Corinne) : En plus des recommandations générales que nous venons
d'énumérer, la FCPQ propose, des recommandations qui touchent le réseau
scolaire public directement, ces recommandations soient dédiées au ministre de l'Éducation. On en a deux principales.
Premièrement, que le ministre utilise les pouvoirs de
l'article 457.5 de la Loi d'instruction publique pour favoriser dans les écoles
des mesures pour réduire les impacts de la légalisation du cannabis en pensant des activités de formation et
de sensibilisation auprès du personnel, des élèves et des parents. Ces
activités devraient avoir lieu dans les premières années de la légalisation.
Deuxièmement, que soient transmises aux membres
des conseils d'établissements, plus particulièrement les parents, des
informations claires sur la légalisation du cannabis afin qu'ils
puissent prendre des décisions éclairées, le cas échéant.
En
conclusion, la FCPQ juge important de rappeler que les encadrements légaux, à
eux seuls, ne peuvent suffire à mettre
les jeunes à l'abri des risques liés à la légalisation du cannabis. Il faut
aussi préciser que, dans un contexte où la légalisation du cannabis semble devenir la norme dans plusieurs pays
occidentaux, la FCPQ considère qu'il est important de considérer tous
les impacts possibles de cet important changement social sur la santé et le
développement des jeunes. Donc, est-ce qu'on
peut apprendre, par les derniers 10, 20, 40 ans, par nos expériences
sur l'alcool, sur la cigarette, sur les ceintures de sécurité, sur les billets de loterie, sur les cellulaires
au volant, de mettre tout de suite, s'il vous plaît, en place les balises et les encadrements les plus stricts puis
les plus clairs pour éviter d'attendre plus tard et maximiser les
programmes d'éducation, formation et prévention dès maintenant?
Alors, merci. Nous sommes prêts à répondre à vos
questions.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme Payne et
Mme Deschamps, de la présentation de votre mémoire. Nous allons débuter
effectivement les échanges avec la partie gouvernementale. Mme la ministre,
députée de Soulanges, vous disposez de 15 minutes. À vous la parole.
• (14 h 10) •
Mme Charlebois :
D'abord, saluer Mme Payne,
Mme Deschamps et aussi M. Rioux, qui est avec vous... bien,
en fait, je devrais dire Me Rioux, c'est ça, et vous remercier de venir
nous présenter votre mémoire. Et je constate qu'il y a plusieurs points communs, dans le projet de loi, sur lesquels on est
en accord. Il y a certains points où on n'est pas en accord. C'est
ceux-là que je vais discuter avec vous si vous me le permettez.
Je
vais commencer par la fin de votre mémoire, quand vous dites : Ne
pourrions-nous pas retenir de ce qui s'est passé pour le tabac, l'alcool, etc.? Bien, justement, l'alcool, c'était
la prohibition. On a passé à tout autre chose, alors que le cannabis, on est déjà beaucoup plus restrictifs,
parce que le but visé par la société d'État n'est pas d'en faire la
promotion et d'avoir de plus en plus de clients, mais bien de servir les
clients qui existent déjà et de les informer adéquatement. Puis il y a un budget de prévention qui est déjà
prévu dans la loi et, si je ne m'abuse, c'est la première fois qu'un
montant s'inscrit dans une loi.
Non
seulement ça, il y a 25 millions qui va s'ajouter à ce qu'on fait déjà en
prévention, mais la moitié des surplus... Puis je dis bien «surplus» à escient, parce que fonder la société
d'État, déployer les boutiques, faire le site Internet, former le personnel, former les médecins, former les
infirmières, former l'ensemble de ceux que... les travailleurs sociaux qui
sont venus ici ce matin... Bon, bref, il y
en a plusieurs à former. Non seulement ça, mais il y aura aussi du personnel
d'encadrement sur la sécurité. Faire
de la prévention en sécurité routière puis dire : Aïe! la consommation
concomitante de boisson et de drogue, ce n'est peut-être pas l'idéal
pour conduire, etc., c'est aussi de la prévention, à mon sens.
Alors,
tout ça va s'imputer dans les coûts une fois qu'on a fini de rembourser notre
dette, parce que la dette va être là.
Ce n'est pas l'État qui va payer pour les boutiques, c'est le cannabis qui va
payer pour ça. Et, une fois qu'il y aura des surplus, 50 % va être
affecté, en plus du 25 millions, à la prévention.
Honnêtement, ce qu'on
ne souhaite pas faire, c'est d'avoir beaucoup, beaucoup de revenus, parce que
ça veut dire qu'on aura échappé un pan de ce
que nous avons à faire. Si les ventes augmentent, on aura un problème, je vous
le dis comme je le pense. Cependant, comme
je vous dis, on a déjà mis des balises en place pour faire de la prévention,
tout ça. Ça fait que, oui, on retient...
Mais, je veux vous dire, comme pour le tabac, ce n'est pas la prohibition qui a
fait que le taux a baissé. Au
contraire, ça l'est déjà, interdit, et on voit l'augmentation de la
consommation chez les 18-24 ans. Ça fait que moi, je pense qu'on a tout intérêt à faire de la
meilleure prévention, comme vous dites, de l'éducation, de la
sensibilisation.
Je
vais y aller tout de suite sur l'âge. On va commencer par ça. Vous nous
demandez que la consommation de cannabis
soit fixée à 21 ans quand on sait que les directeurs de santé publique
nous ont recommandé 25 ans ou 18 ans. On sait très bien que, dans le 100 % de
consommateurs, il y en a 42 % qui sont entre 18 et 24. Pourquoi 21? Parce
que ce n'est pas scientifiquement prouvé que 21 est bon. Pourquoi vous
choisissez 21?
Mme Payne
(Corinne) : Bien, premièrement, c'est ce que les parents ont choisi.
Je vais vous dire ça comme ça. Quand
tu fais un sondage, tu ne peux pas juste dire 18 ou rien, il faut mettre
quelque chose. Alors, on met des barèmes. Puis c'était vraiment, les
parents, qu'ils ont choisi, dans un sondage, 21 ans. Alors, ça, c'est la
première chose.
Deuxièmement,
on sait que peut-être, si on avait à revisiter aujourd'hui l'âge pour certaines
autres substances, peut-être on va
avoir choisi d'autres choses aussi. On ne le sait pas. Alors, on ne va pas
passer à côté de ça. Puis aussi on sait que le plus longtemps qu'on peut attendre avant que les enfants vont
commencer à consommer, le mieux que c'est. Alors, on peut trouver la
façon pour les encadrer.
Est-ce qu'il y a
d'autre chose à ajouter?
Mme Charlebois :
Non, mais, avant que vous continuiez... Parce que je veux vous amener un autre
argument. On nous a dit, en consultations...
Puis moi, je ne veux pas en ajouter, mais ma mère vient du monde de
l'enseignement, ça fait que je suis restée
proche de ce monde-là, soit dit en passant, et c'est plus facile, en ce moment,
de se procurer du cannabis que des cigarettes, à l'école. C'est illégal.
Ça fait que ne
pensez-vous pas que c'est un peu utopique de mettre un âge plus élevé, alors
qu'on sait qu'ils consomment déjà?
Mme Payne
(Corinne) : C'est de trouver le juste milieu. Puis je sais que
Mme Deschamps a quelque chose qu'elle veut ajouter.
Mme Deschamps (Lyne) : Oui, juste en complément, ce qui est intéressant
aussi... La perspective des parents, c'est
aussi de penser qu'il faut s'assurer que ce ne soit pas perçu comme une
banalisation que de rendre légal le cannabis. Donc, effectivement, ça aurait pu être 18, 21 ou
25 ans. C'est tout à fait exact. C'est ce que nous avions demandé. Par
ailleurs, un parent, quand il fait ce
choix-là, de dire, bon, ça serait quoi, la meilleure chose, pour lui, c'est
clair que l'élément pour éviter que
ce soit banalisé a pris de l'importance, d'où le 21 ans, puis, évidemment,
la croissance du cerveau, bon, etc.
Voilà un élément important pour éviter que la vente du cannabis soit prise
comme un élément de banalisation.
Mme Charlebois :
...c'est illégal.
Mme Deschamps
(Lyne) : Absolument, on sait tout ça.
Mme Charlebois :
Est-ce que vous considérez que c'est banalisé?
Mme Deschamps
(Lyne) : Pardon?
Mme Charlebois : Du fait que c'est illégal, en ce moment, est-ce que vous considérez que c'est un produit
banal, le cannabis?
Mme Deschamps
(Lyne) : Aujourd'hui, c'est illégal. Aujourd'hui, vous l'avez dit vous-même, Mme la ministre, on peut s'en procurer plus
facilement que la cigarette.
Mme Charlebois : ...un
produit plus banal?
Mme Deschamps (Lyne) : Donc,
c'est actuellement difficile à contrer. C'est un phénomène de société. La
question serait probablement plus : Est-ce que la société a banalisé le
cannabis et ses interventions?
Mme Charlebois :
Voilà.
Mme Deschamps (Lyne) : Voilà.
Mme Charlebois : Ça répond à ma question. Donc, ce n'est pas la
légalisation qui va rendre le produit banal, c'est comment on va le faire, c'est comment on va
l'encadrer, et là est importante la formation, la prévention, bon, etc., ce
n'est pas tant l'interdiction.
Et, j'ai le goût de vous dire, non seulement il
faut faire de l'éducation aux élèves, aux profs, aux travailleurs psychosociaux qu'il y a dans les écoles, mais il
faut le faire aux parents. Moi, j'ai eu un témoignage de quelqu'un
qui est travailleur social en réadaptation puis qui m'a dit trois
fois avoir contacté un parent pour le rencontrer, puis au mois de juin le parent a appelé le travailleur en psychoéducation pour lui dire : Bien là, ça presse, il consomme
mon stock. Hi! Je pense qu'on avait de l'ouvrage à faire avec le père
aussi, hein?
Alors, vu de
ce point de vue là... Puis il ne faut pas faire semblant que ça
n'existe pas. Ça existe, puis c'est illégal, puis ce n'est pas banal en ce
moment. Ce n'est pas la légalisation.
Moi, je pense que l'interdiction de posséder sur le site, ça, ça
va faire une différence. Ça, ça va
faire une différence. Et moi, je pense que ceux de 18 ans et plus, ils
vont consommer de toute façon sur le marché illicite. Puis savez-vous quoi?
Ceux qui travaillent à vendre le pot en
ce moment, l'état de santé de leurs consommateurs, ça leur passe à peu près
là, puis la qualité du produit, un autre étage au-dessus. Alors, moi, je
pense que j'aime mieux les voir, à
18 ans et plus, dans une boutique où on va pouvoir les renseigner, les
informer, etc., que de les voir sur le marché noir. Ça ne règle pas le
cas des écoles secondaires. Mais l'interdiction de possession et de consommation sur un site... Notamment,
ça peut être un enseignant qui, dans sa vie privée, décide de consommer. Il
n'aurait pas le droit de posséder sur le site? Ça va amener une méchante
différence. Ne pensez-vous pas que j'ai raison?
Mme Payne (Corinne) : Je suis d'accord.
Mme Charlebois : O.K. Bon, on continue. Vous avez aussi demandé à ce
que les adultes trouvés en possession de cannabis dans les lieux où ce
serait interdit, notamment l'école, aient une pénalité plus sévère. Comme quoi?
Mme Payne
(Corinne) : Bien, la
question de pénalité, bien, aussi, dedans, c'est la question de l'intervention
puis la prévention qui va avec, parce que,
rendu à 18 ans, là... On sait qu'entre 12 puis 17, dans nos écoles
secondaires, comme on a juste... vous
avez juste dit, beaucoup qui se passe. C'est là qu'il faut faire l'éducation. Puis l'amende, juste de mettre une amende, est-ce que c'est de mettre l'amende plus ou de mettre plus
d'interventions? Il faut trouver le juste milieu sur ça. Puis, pour les
amendes, il y a un point légal à ajouter aussi.
Mme Deschamps
(Lyne) : Bien, peut-être,
en complément, pourquoi ça devrait être plus sévère quand c'est
des lieux comme les lieux d'éducation, je pense qu'il ne faut jamais oublier que les lieux d'éducation, les gens qui y travaillent, les
adultes qui y sont sont des modèles, sont en autorité. Je pense que, pour ces
deux raisons-là, c'est suffisant de dire que la responsabilité de ces
adultes, qui sont des modèles et qui font de l'enseignement, doit être toujours
donner une image beaucoup plus respectueuse de nos lois. Donc, précisément,
votre question, là, c'est vraiment ces éléments-là, là, qui étaient mis de l'avant pour dire que, sur les
lieux comme les lieux des écoles ou des établissements, un adulte qui
est en possession devrait se voir attribuer une peine plus importante à
cause du rôle d'un modèle qu'il a.
Mme Charlebois : O.K.
Mais un enseignant... On a parlé d'un enseignant, mais ça peut être un
concierge, ça peut être à n'importe quel poste, la cuisinière, bon, etc.
Mme Payne (Corinne) : Tout le
personnel.
Mme Charlebois :
Est-ce que, dans vos peines plus sévères, vous le voyez en termes monétaires,
ou en termes de suspension, ou en
termes de recours à des maisons qui font du traitement de la dépendance?
Qu'est-ce que vous aviez pensé en
termes, tu sais, de méthodes ou d'amendes plus sévères? C'est-u des amendes
monétaires absolument ou une autre voie de passage?
• (14 h 20) •
Mme Payne
(Corinne) : Nous, les parents ont dit qu'ils veulent... plus sévère.
On va laisser à vous, puis au législateur,
puis les spécialistes dedans de décider c'est quoi qui est la meilleure
décision parce que ce n'est pas à nous de la proposer. On sait qu'il
faut que c'est assez sévère, que ça va... C'est comme, je vais... l'exemple du
téléphone au volant, O.K.? Maintenant que la
loi est passée, que ce n'est pas juste que tu vas avoir un ticket puis payer,
mais tu perds ton auto, peut-être
tu vas faire bien attention avant que tu vas texter en conduisant. Mais avant
c'était juste une question... Alors, c'est de trouver ce juste milieu
qui va éviter la mauvaise action, la mauvaise consommation.
Mme Charlebois :
Trouver le point d'équilibre, c'est ça que vous me soumettez.
Mme Payne
(Corinne) : Oui.
Mme Charlebois : Vous dites : «Que l'interdiction de fumer du
cannabis — puis
c'est bien spécifié "fumer", donc
d'autres produits vous dérangeraient moins — s'applique à tous les lieux publics.» J'ai eu une
discussion justement, pendant le
temps des fêtes, parce que beaucoup de gens m'en ont parlé, des lieux publics, mais
aussi des appartements locatifs, et
on m'a indiqué que, s'il y avait interdiction dans un... Je prends un jeune qui
s'en va en appartement. Mais là ça ne
touche pas à vos écoles nécessairement, mais ça touche les lieux publics, ce que je
vais vous amener. S'il y a une
interdiction dans le premier bail : Tu
n'as pas le droit de consommer ton cannabis dans l'édifice à logements, si on
met une interdiction dans tous les lieux
publics, bien là, ça amène toutes les municipalités à avoir la même réglementation. Est-ce que vous
ne croyez pas que nous devrions laisser une partie de l'autonomie aux
municipalités, ce pour quoi on travaille depuis plusieurs années? Les
élus municipaux sont capables de distinguer, sur leur territoire, où il
pourrait y avoir... Comme la boisson, finalement.
Mme Payne
(Corinne) : Bien, dans le fond, c'est encore le juste milieu parce
qu'on ne peut pas dire qu'on va légaliser
une substance, mais qu'il n'y a aucun endroit où tu peux le consommer. Il faut...
Alors, je pense, c'est là que les villes,
oui, il y a leur part de dire que peut-être ça, c'est le lieu qu'on peut
l'utiliser dans notre ville. Puis c'est chaque ville qui connaît leur
ville aussi, qui peut attribuer les endroits, les lieux qui sont propices.
Mme Charlebois :
Vous avez raison. Puis aussi, sur les points de vente, bien, il va falloir
consulter les schémas d'aménagement des municipalités, effectivement,
parce que... Vous me mettez une distance, mais, dans certaines municipalités, ça va s'appliquer, dans certaines
autres pas. Si je pense à Montréal, où c'est très condensé... Mais par
contre il y a des petites municipalités...
D'où je viens, entre autres, les écoles, il y a de l'espace, là, où les gens
peuvent aller installer leur... bien,
la Société québécoise du cannabis, parce que ce ne sera pas les gens,
pourra installer des points de vente. Mais je pense qu'encore là ça va être l'équilibre, mais le plus possible pas à
côté des écoles, je suis parfaitement d'accord avec vous. Mais comment trouver le moyen... On va travailler
là-dessus pour faire en sorte qu'on ait l'idéal pour protéger nos jeunes.
Mme Payne
(Corinne) : Exactement. C'est ça, la clé dans tout, qu'on peut éviter
que c'est dans la face de nos jeunes
tous les jours. On sait que... La malbouffe, c'est une chose, là, on ne peut
pas éviter que, la patate frite, ils vont l'installer en dedans d'un kilomètre, que les enfants peuvent aller
pendant l'heure de dîner. Mais est-ce qu'on peut éviter ça? Est-ce qu'on peut trouver un moyen pour l'éviter
le plus possible, et il y a toujours des exceptions, des exceptions,
mais mettre en place le plus possible des balises qui vont...
Mme Charlebois :
Je suis d'accord avec vous. Je veux vous rassurer sur la... Je vais vite parce
que je manque toujours de temps
depuis le matin, puis là j'essaie de me stimuler moi-même. Je regarde, vous me
parlez de... toute forme de publicité, promotion du cannabis sont
interdites. Je vous rassure, c'est déjà au projet de loi. Ce n'est pas le but
de l'exercice. Toutes les ventes de cannabis
vont être faites de façon à... Les informations qui seront sur les enveloppes,
sur les choses où il y aura des produits du
cannabis, ça va être des informations. Il n'y aura pas de publicité dehors. Il
n'y aura pas de publicité dans la boutique.
Puis on n'aura pas le droit de rentrer avec un mineur dans une boutique.
Ça, je voulais juste vous rassurer que ce n'est pas prévu dans le projet de
loi.
Je
veux aussi vous parler... Attendez-moi une seconde, là. Ah oui! «Que la vente
de cannabis à des fins...» Moi, je dis
toujours «non thérapeutiques» parce que je n'aime pas ça, l'autre mot, ça fait
banaliser... Honnêtement, là, le mot qui est écrit, bon, je ne vais même pas le répéter, vous voyez? C'est juste
parce que je ne veux pas que ce soit, justement, un produit banal. Je dis «non thérapeutique», puis ça, ça
m'appartient à moi, je veux dire, vous autres, vous pouvez utiliser le
terme que vous voulez. «...soit
exclusivement prise en charge par l'État.» J'entends ça. Vous avez émis une position,
je crois, sur les projets pilotes. Vous n'êtes pas en faveur de ça,
hein, c'est ça?
Mme Deschamps
(Lyne) : Non, on n'ouvre pas la porte.
Mme Charlebois :
Vous ne voulez pas qu'on ait de base de comparaison pour le futur ou quoi que
ce soit?
Mme Payne
(Corinne) : Non. Il faut avoir le plein contrôle, c'est ça qui est
très important. Surtout dans les premiers
trois ans, parce qu'on va réviser la loi dans trois ans. Surtout, dans ces
trois ans-là, contrôler, puis peut-être après on va voir. Mais, dans ces trois ans-là, qu'on implante quelque chose,
on sait que ça peut déraper facilement. Contrôler, faire le plein
contrôle par l'État.
Mme Charlebois :
Concernant la prévention, bien...
Le Président
(M. Merlini) : Mme la ministre?
Mme Charlebois :
Ah non!
Le
Président (M. Merlini) : Oui, malheureusement, je dois vous
interrompre. Votre temps est écoulé. Merci pour ce bloc d'échange, Mme la ministre. M. le député de Labelle, de
l'opposition officielle, vous disposez de neuf minutes. À vous la
parole.
M. Pagé :
Oui. Bien, en fait, je vais continuer sur la même phrase. Ce n'était pas mon
intention. Mais, concernant la prévention, bon, vous allez certainement
être d'accord avec moi qu'il faut agir le plus rapidement possible.
Est-ce que
vous avez déjà un son de cloche que... Est-ce que le ministère vous a déjà
dit : À partir de tel mois, telle semaine, il y a déjà un plan de
match qui est prévu pour arriver, dans les écoles, à commencer la
sensibilisation, la prévention? Est-ce que
vous êtes informés qu'il y a quelque chose qui s'en vient? Parce que moi, dans
mon livre à moi, là, je pensais que
dès janvier 2018 on arriverait à cela, là. Alors, est-ce que vous êtes informés
de cela? Parce que je ne l'ai pas entendu encore.
Mme Payne
(Corinne) : Moi, je n'ai pas de nouvelles non plus, pas entendu. Je
vais vous dire qu'on a juste... Les annonces ce matin, je pense, il y a
plein de choses qui se passent. Peut-être on va avoir d'autres annonces qui
s'en viennent dans le futur proche, mais
présentement il n'y a rien. C'est sûr qu'il existe déjà plusieurs programmes
dans nos écoles, avec des nouveaux
fonds puis des nouveaux engagements politiques, parce que, c'est ça, on va tous
prendre des engagements politiques
pour la prévention puis l'intervention que... Puis, le nouvel argent, on peut
en faire plus dans nos écoles plus
vite. Alors, c'est ça, la clé, avec l'adoption du projet de loi. Présentement,
des choses existent. Est-ce qu'il y a d'autre chose qui est ajouté en
partant de janvier 2018? Non, pas qu'on est au courant présentement.
M. Pagé :
Parce que vous écrivez, à la page 18, au point b, là : «Que soient
transmises aux membres des conseils d'établissement,
plus particulièrement les parents, des informations claires sur légalisation du
cannabis et les dispositions encadrant
celle-ci.» Alors, bon, évidemment, les dispositions sont à venir. Je comprends qu'il
y a certaines choses qu'on ne peut
pas vous transmettre parce qu'elles ne sont pas encore adoptées, ça, j'en
conviens, mais il y a déjà tout l'aspect de la prévention et de la
sensibilisation qui devrait déjà vous être transmis.
Mme Payne
(Corinne) : Qu'est-ce qui existe déjà est là. Mais qu'est-ce qui va
être ajouté avec l'adoption de la loi, on n'est pas au courant de ça. Il
faut adopter la loi avant.
Mme Deschamps
(Lyne) : Puis on comprend
que les recommandations qu'on fait du côté de la Loi de l'instruction publique particulièrement, on se base sur notre
vécu des dernières années, des 20, des 10 dernières années, quand,
par exemple, on a donné aux écoles des
outils pour l'intimidation, quand on a changé la Loi de l'instruction publique
pour permettre que de nouveaux outils soient
utilisés. Donc, on utilise le même schéma de pensée pour s'assurer
aujourd'hui... et ne pas attendre dans trois
ans, une fois le projet de loi dont on discute aujourd'hui... qu'il sera
adopté. On demande dès aujourd'hui :
S'il vous plaît, en même temps qu'adopter ce projet de loi, M. le ministre de
l'Éducation — parce
que c'est à lui qu'on s'adresse plus spécifiquement — bien,
il y a deux ou trois options extrêmement importantes que vous devez mettre en
place.
Donc, c'est
vraiment une demande qu'on fait, là, pour s'assurer qu'on ne traîne pas la
patte et que les outils qui sont
actuellement en place puissent être bonifiés ou qu'on en crée tout simplement.
Par exemple, donner des informations directement
aux parents des conseils d'établissements, je pense qu'on ne pourra pas passer
à côté, là. Ça va faire partie d'une
campagne d'information. Du moins, je le souhaite. J'invente, je parle à haute
voix de souhaits, mais je me dis que ça devrait contenir toutes ces
informations-là.
Mme Payne
(Corinne) : Entre autres, chaque conseil d'établissement a besoin
d'adopter à chaque année le code de conduite
pour chacune des écoles du Québec. Alors, il a besoin d'être informé, avant la
fin de cette année scolaire, si la loi est
adoptée, qu'est-ce qu'il faut ajuster, parce que, là, il faut ajuster chacun
des codes de conduite dans chacune des écoles du Québec pour l'année prochaine. C'est quoi, au niveau du cannabis,
dans chacune de nos écoles... Alors, c'est d'assurer que d'éviter de travailler en silo, si je peux
dire, d'assurer que, oui, on a des bonnes choses qui se passent pour
encadrer le cannabis. Mais aussi il faut que
ça, c'est transmis en éducation parce que c'est là qu'on rejoint nos jeunes
tous les jours puis, en plus de ça,
les parents tous les jours. Parce qu'on souhaite tous d'être en bonne santé au
début d'une nouvelle année, de ne pas...
Le système de santé est déjà assez lourd. Mais, dans le système de l'éducation,
tous les parents du Québec, ils sont là, il y a des enfants là tous les
jours. C'est qu'est-ce qu'ils vivent à tous les jours.
M. Pagé :
Merci. Vous débordez le cadre scolaire, et c'est très bien. Votre point e
de la page 17, que la vente de cannabis à des fins récréatives soit
exclusivement prise à la charge de l'État, alors est-ce que vous faites
carrément référence à l'article 55 qui
ouvre la porte à des projets pilotes qui pourraient aller vers le privé? Est-ce
que c'est vraiment à ça que vous faites référence?
• (14 h 30) •
Mme Payne
(Corinne) : Tout à fait. On ne veut pas d'autre... On ne veut pas de
ventes privées. On veut vraiment que le contrôle est fait par l'État.
M. Pagé :
O.K. Le point i : «Que l'essentiel des revenus issus de la vente de
cannabis soit versé à des fonds de prévention
et de recherche sur le cannabis.» Bon, que l'essentiel... Mais ensuite, au
point j, là, vous décrivez à plusieurs endroits puis là vous dites : On devrait même définir les
proportions, les pourcentages. Quand vous dites de »l'essentiel», est-ce que c'est... Parce que, nous, ce que l'on
souhaite, c'est qu'on inscrive dans la loi : 100 % des profits
devraient être investis en éducation,
sensibilisation, saines habitudes de vie, prévention, dépendance, les
municipalités aussi, et là vous ne les
nommez pas là-dedans. Quand vous dites «essentiel», est-ce que c'était parce
que vous n'aviez pas défini, mais est-ce que c'est 100 % des profits qui devraient aller vers tout cela, ce
que je viens de nommer? Et, si oui, est-ce que ça devrait être carrément
écrit dans la loi?
Mme Payne (Corinne) :
L'essentiel, ça veut dire le quasi-total. Alors, c'est sûr qu'il y a toujours
un petit pourcentage qui peut être utilisé pour d'autres fins, mais c'est le
quasi-total, puis je sais que tu as quelque chose à ajouter à ça,
Mme Deschamps.
Mme Deschamps
(Lyne) : En fait, ce qui
était important pour les parents, c'est de faire une distinction
entre la majorité, hein, parce que
c'était le mot qui est utilisé dans le projet
de loi, si je ne me trompe pas, et
l'essentiel. La majorité, habituellement, c'est 50 %
plus un, là, mettons, puis l'essentiel, le message est clair, c'est qu'on est
bien au-delà de 50 % plus un. Évidemment, l'essentiel, Mme la
présidente l'a dit, c'est vraiment la quasi-totalité, là. Pour nous, ça ne fait
pas de doute.
M. Pagé : Mais, vous
savez, lors des consultations, 19, 20 juin, avec les experts, on avait,
entre autres, des conférences qui nous
provenaient de la Californie, Colorado, je suis moins sûr, mais l'État de
Washington. Et, entre autres, l'État
de Washington nous ont dit : Ne faites pas l'erreur que nous avons
commise. Et eux, ils ne l'ont pas écrit dans la loi que 100 % des profits devaient aller à tout
cela, et aujourd'hui, bien, compte tenu que ça génère passablement
d'argent, bien, on récupère des sommes d'argent pour aller faire autre chose.
Et, quand je
lis le point k, où vous me dites, au point k : «Que, dans le
cadre de la politique gouvernementale de la prévention en santé, des actions ciblent dorénavant les écoles afin
d'agir sur les facteurs de risque reliés à la légalisation du cannabis», bon, il y a une politique fort
intéressante qui a été déposée le 23 octobre 2016. La ministre s'est
engagée à livrer le plan d'action à
l'intérieur d'un an. On a dépassé de quelques mois, j'imagine que ça s'en vient
sous peu. Cela dit, si on identifiait
100 % de ces sommes d'argent, ça pourrait aller justement vers votre
point k, où on dit : Ça prend un plan d'action, alors... et ça pourrait fournir des sommes d'argent vers son
plan d'action que l'on attend pour mettre en place cette politique de la
prévention des saines habitudes de vie.
Mme Payne (Corinne) :
Absolument. On vous laisse quand même un petit peu de travail à faire.
M. Pagé : Comment vous
dites ça?
Mme Payne
(Corinne) : Parce que vous avez à passer article par article cette
loi-là, alors il va rester quand même une
place pour un petit peu de raffinement. Alors, voilà, vous pouvez l'ajouter au
100 %; nous, on dit le quasi-total. Alors, on va vous laisser ce
plaisir-là quand vous ferez l'étude dans les semaines qui suivent.
Le Président (M. Merlini) :
45 secondes.
M. Pagé :
45 secondes. Alors, je vais y aller sur le point d. Quand vous
dites : «Que l'interdiction de fumer du cannabis s'applique dans tous les lieux publics», nous sommes là également,
sauf que, nous, notre proposition, c'est de permettre aux municipalités
de cibler un endroit qu'on pourrait quand même assez bien encadrer pour ne pas
être à l'intérieur, justement, du un kilomètre, par exemple, que vous... 800
mètres, ou peu importe. Alors, nous, on vous dit,
c'est déjà notre position qu'on a identifiée depuis le mois de septembre
dernier. Et moi, je salue d'ailleurs l'ouverture de la ministre à cet
égard-là et je pense que ça va aller dans le sens de ce que vous souhaitez
aussi.
Mme Payne
(Corinne) : Ça peut être un salon, ça peut être un endroit, ça peut
être... comme on a des parcs pour nos
chiens maintenant. Alors, chaque ville peut décider de l'endroit propice dans
sa ville pour assurer... on ne peut pas dire que c'est légal puis ne pas
avoir droit pour le consommer non plus.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup. Ça met un terme à ce
bloc d'échange avec l'opposition officielle. Mme la députée de
Repentigny, du deuxième groupe d'opposition, vous disposez de six minutes. À
vous la parole.
Mme Lavallée : Merci. Merci
d'être là. Je vais commencer puis je vais laisser mon collègue continuer.
Je trouvais
ça important de revenir sur l'âge légal de la consommation du cannabis, parce
que, bon, notre position et la
position du gouvernement actuellement, elle est divergente. Nous, on considère
que le fameux 21 ans fixé, c'est que le rôle du gouvernement, c'est de dire aux jeunes : Avant 21 ans,
on considère qu'il y a des dangers à cette consommation-là. Et, à ce moment-là, nous, on décrète que c'est
21 ans, parce que, si on tient compte de l'âge de consommation des jeunes
pour établir l'âge de la légalisation, il
faudrait la légaliser à partir de 13 ans, 14 ans. Parce qu'on
le sait, qu'avant 18 ans les consommateurs sont là, à 17 ans,
à 16 ans, à 15 ans. Donc, ce critère-là, de dire : Parce que les
jeunes consomment avant 21 ans, on va
établir à 18 ans, mais ils consomment beaucoup, beaucoup aussi avant
18 ans. Donc, c'est le signal que nous, en tant que législateurs responsables,
on envoie à la population. Puis à ce moment-là notre rôle, c'est de
faire de la sensibilisation auprès des jeunes pour expliquer pourquoi on
considère que le 21 ans doit être l'âge qui est établi.
Puis
d'ailleurs j'ai eu à côtoyer des jeunes autour de la trentaine, début de la
trentaine, autour de moi, et il n'y a
pas un de ces jeunes-là qui était en accord, même, un, de la légalisation puis,
deux, de légaliser ça à partir de 18 ans, là. Ça ne passait même pas. Donc, j'imagine que ces
gens-là reflètent une catégorie de jeunes qui font cette réflexion-là,
parce qu'ils sont capables de réfléchir puis
de dire : Mais ça n'a comme pas de bon sens, même s'ils en ont peut-être
déjà essayé. Ça, on en est conscients.
Donc,
je trouvais ça important de revenir sur la justification du fameux 21 ans,
parce que je pense que, comme parents,
ça nous interpelle, cette consommation-là. Même si on sait qu'ils en achètent
dans les milieux qui ne sont pas corrects
puis qu'on n'a pas le contrôle sur la qualité, notre rôle, c'est d'expliquer
pourquoi on considère qu'il ne faudrait pas qu'ils en prennent de toute
façon, de ce produit-là.
Donc, je vais laisser
aller mon collègue pour le reste.
M. Jolin-Barrette :
Bonjour. Je ne sais pas si vous avez des commentaires sur ce que ma collègue de
Repentigny...
Mme Payne
(Corinne) : Bien, je pense, on a déjà échangé un petit peu là-dessus,
mais il ne faut pas perdre de vue non plus
que, comme j'ai dit, c'est les parents qui ont répondu, puis nos enfants sont
nos enfants toute la vie, hein? Alors,
on veut... 18 ans, ils sont encore bien souvent assis sur les bancs des écoles,
si c'est... Même moi, je couvre l'école primaire puis secondaire, bien, ils sont assis dans des bancs des
écoles, bien souvent, jusqu'à 18, 19, 20. Alors, pour un parent,
18 ans, c'est jeune aussi.
Mais
ça va être à vous de décider l'âge final qui va être dans la loi. Puis, je
pense, tout ce qui est autour de l'âge que tu vas choisir, en bout de ligne, que c'est le plus important, dans
qu'est-ce qu'on va mettre en place, d'assurer, si on choisit le 18, ou
le 21, ou le 25, qu'on entoure tout ça avec les autres balises importantes.
M. Jolin-Barrette : Alors, rebonjour. Vous nous avez joint un tableau
à la fin de votre mémoire, également, qui démontre
que le Québec, si on choisit l'âge de 18 ans, on va être les seuls au Canada
avec l'Alberta à fixer l'âge à
18 ans. La majorité des autres provinces canadiennes, c'est 19 ans.
C'est bien ça?
Mme Payne
(Corinne) : Oui, mais c'est comme ça pour l'alcool aussi, hein? Alors,
on ne va pas se cacher que, quand...
Moi, je ne suis pas une Québécoise de... native. Alors, quand on vient faire
des visites, des jeunes enfants, au Québec,
c'est vraiment le trip, parce qu'à 18 ans tu peux aller boire l'alcool
légalement. Alors, on ne va pas se le cacher, c'est la réalité qui se passe. Alors, la plupart des provinces,
j'imagine qu'elles ont adapté le cannabis avec l'alcool aussi.
M. Jolin-Barrette : O.K., mais, de l'opinion des parents, est-ce que
parce que, nous, notre âge légal, c'est 18 ans pour l'alcool on doit absolument se fonder sur le
choix qu'on a fait, il y a plusieurs années, de 18 ans pour le
cannabis? Parce qu'un des argumentaires
aussi, c'est ça, on nous dit : Bien, écoutez, par souci de cohérence,
aussi, l'alcool, c'est 18, voter,
c'est 18, ça fait que le pot, ça devrait être 18. C'est les arguments qu'on
entend. Nous, on a proposé 21 ans. Mais j'aimerais ça vous entendre
là-dessus.
Mme Payne
(Corinne) : Bien, il y a deux choses. C'est les effets sur le cerveau,
le cannabis, je pense, qui inquiètent les
parents. C'est pour ça qu'ils allaient vers le 21. Comme je dis, c'est nos
bébés, on ne va pas se le cacher, c'est nos bébés, puis on dit... Puis, deuxièmement, il faut... comme j'ai dit
au début, à un moment donné, peut-être, si on avait à faire le choix aujourd'hui pour l'alcool aussi, on
va avoir choisi d'autre chose. Je ne sais pas, mais peut-être c'est
rendu plus accepté par notre société parce
que ça fait 100 ans déjà que l'alcool est légal. Alors, peut-être c'est
juste comme... c'est plus accepté. Alors, le cannabis, c'est quand même
une bête pas connue, alors peut-être on a un petit peu plus peur, avec raison,
quand on regarde les études.
M. Jolin-Barrette :
Vous vouliez rajouter, je pense... Non?
Mme Deschamps
(Lyne) : C'est beau, c'est complet.
Le Président
(M. Merlini) : 30 secondes.
M. Jolin-Barrette : Oui. Sur la question de ne pas nécessairement
imposer une amende à un enfant qui est pris avec la possession, mais plutôt une mesure d'éducation, quelle forme ça
prendrait, selon vous? Qu'est-ce que ça prend si on ne met pas de...
• (14 h 40) •
Mme Payne
(Corinne) : Sur la forme d'intervention, éducation, on a énuméré
certaines idées, mais je sais qu'il y a
des spécialistes dedans. Je sais que la Fondation Jean-Lapointe a passé. Eux
autres, ils sont spécialisés dedans. C'est
sûr qu'ils peuvent vous aider vraiment, de mettre vraiment c'est quoi qu'on
doit faire, parce que, ces expertises-là, ce n'est pas moi qui ai ces expertises-là. Je ne suis
pas une travailleuse sociale, je n'ai pas ça. Alors, on peut vraiment
fier sur les experts pour nous guider dans ça.
Le
Président (M. Merlini) : Mme Corinne Payne, Mme Lyne
Beauchamp et Me Jean-François Rioux, représentant la Fédération des comités de
parents, merci de votre présence cet après-midi et votre contribution aux
travaux de la commission.
Je
suspends donc nos travaux quelques instants et j'invite la Fédération des commissions
scolaires du Québec à prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à
14 h 41)
(Reprise à 14 h 44)
Le
Président (M. Merlini) : Merci bien. Alors, nous reprenons donc
nos travaux. Nous avons le plaisir d'accueillir la Fédération des
commissions scolaires, qui est habituée aux travaux parlementaires. Alors, vous
connaissez les habitudes. Vous avez
10 minutes pour faire votre exposé, et nous vous demandons de vous
présenter ainsi que les gens qui vous accompagnent. La parole est à
vous. Bienvenue à la CSSS.
Fédération
des commissions scolaires du Québec (FCSQ)
M. Fortier
(Alain) : Merci beaucoup, M. le Président. Je suis Alain Fortier,
président de la Fédération des commissions
scolaires du Québec. Je suis accompagné de mon collègue... non, d'abord, de ma
collègue la vice-présidente de la
Fédération des commissions scolaires, Mme Louise Lortie, qui est également
présidente de la commission scolaire de Laval, Mme Chedlia Touil, qui est directrice générale adjointe à la
Fédération des commissions scolaires du Québec, donc, pour toutes les dimensions administratives, mon
collègue et membre du bureau de direction de la fédération, Alain
Grenier, qui est aussi président de la commission scolaire de la Côte-du-Sud. Et, pour ma part, je suis aussi président de la commission
scolaire des Découvreurs. D'accord?
Donc,
M. Merlini, président de la commission parlementaire, Mme Lucie
Charlebois, ministre déléguée Réadaptation,
Protection de la jeunesse, Santé publique et Saines habitudes de
vie, bonjour. Membres de la députation. Je tiens d'abord à vous remercier de nous accueillir et de nous permettre
de présenter quelques réflexions et recommandations tirées de notre
mémoire portant sur le projet de loi n° 157.
Bien
sûr, je suis accompagné... je vous les ai présentés, c'est parce que ça joue un
peu dans mon affaire, mais sinon vous
dire que mes collègues pourront aussi donner des exemples, lors de la période
de questions, de ce qui se fait déjà dans les commissions scolaires.
D'accord? Donc, c'est pour ça, là, que nous avons une délégation un peu plus
large.
Je
voulais aussi souligner la présence de Me Alain Guimont, qui est le secrétaire
général de la fédération. Donc, si jamais il y avait des questions
d'ordre légal, M. Guimont est là. Et nous sommes, bien sûr, accompagnés,
là, de Mme Caroline Lemieux, qui est la directrice des communications et
des affaires publiques, qui sont ici derrière.
Je
désire souligner également que notre présentation sera aussi appuyée de
quelques-unes des opinions provenant de
l'association des directeurs généraux du Québec, de l'Association des
directeurs généraux des commissions scolaires du Québec, donc ils nous ont donné quelques réflexions qu'on a incluses
dans notre mémoire, mais aussi de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec.
D'accord? Donc, on a essayé, là, d'élargir un peu la parole, là, qu'on
va prendre cet après-midi.
En
préambule, nous souhaitons dire que le projet de loi n° 157 répond assez
bien à la déclaration des partenaires de l'éducation, déclaration que vous trouverez en annexe de notre mémoire.
Cette déclaration a été reprise par l'ensemble des membres de l'association canadienne des conseils
scolaires puisqu'elle reflète également leur point de vue sur la
question qui nous intéresse aujourd'hui. C'est donc dire que partout au Canada
le milieu de l'éducation s'entend sur les points suivants : la distribution du cannabis doit être prise en charge
par l'État, les sommes engendrées par la vente du cannabis doivent être
dédiées à la prévention et aux saines habitudes de vie, la promotion du
cannabis doit être interdite, la consommation du cannabis doit être interdite
dans les lieux publics et les points de vente doivent se situer loin des
milieux d'enseignement. Donc, ça, c'est ce que la déclaration disait partout,
là, dans l'ensemble du Canada.
J'ajouterais
que la Fédération des commissions scolaires du Québec n'a pas voulu jouer aux
experts médicaux. D'autres groupes
s'en chargent bien. Nous faisons confiance à ces experts notamment du
développement humain ou des impacts
que peut avoir la consommation régulière du cannabis sur le développement des
personnes. Nous, on a pris une perspective éducative, bien sûr.
Et
je finirais ce préambule en soulignant que notre mémoire ne constitue pas un
appui à la légalisation du cannabis au
Canada et au Québec. Nous prenons acte de cette légalisation et nous tentons de
proposer des encadrements nécessaires à la promotion des saines
habitudes de vie et au travail quotidien des intervenants de l'ensemble des
commissions scolaires du Québec.
Je
le dirais d'entrée de jeu, la fédération se réjouit que les partenaires aient
été entendus et que le projet de loi n° 157 soit le reflet de cette
volonté partagée du monde de l'éducation, autant anglophone que francophone, de
faire la promotion des saines habitudes de
vie auprès de nos jeunes et moins jeunes. Bien sûr, nous aimerions attirer
l'attention de la commission parlementaire sur des éléments qui à nos yeux
représentent encore des enjeux importants.
À
propos de la prévention, comme je le disais d'entrée de jeu, nous saluons la
création d'une société d'État chargée de
la vente sans promotion du cannabis ainsi que la création d'un fonds de
prévention et de recherche. Cependant, nous souhaitons que ce fonds soit suffisamment financé pour appuyer un
maximum d'initiatives, d'actions de prévention et de recherche. Nous
sommes préoccupés par le fait que les surplus accumulés soient versés au fonds
général tout comme les surplus de la vente, d'ailleurs.
Et
nous souhaitons un encadrement rigoureux en ce sens ainsi qu'une transparence
optimale quant au fonds de prévention
illustrant aux yeux de la population la réelle volonté du gouvernement de
mettre l'emphase sur la prévention et, par effet, sur les bonnes
habitudes de vie.
Nous croyons
également que la prévention doit cibler le plus possible les jeunes. Selon les
experts, l'usage précoce et fréquent du cannabis augmente les risques de
déficience cognitive à court terme, augmente également les risques de mauvais
résultats scolaires ainsi que les symptômes et troubles psychotiques. Si la
volonté de la société québécoise est de
favoriser la réussite éducative de ses élèves, nous, et vous, bien sûr,
comprenons facilement l'importance de la prévention auprès de nos
jeunes.
• (14 h 50) •
Le fait, également,
de passer d'un contexte québécois et canadien d'illégalité à un contexte
permissif de consommation du cannabis
entraînera sans aucun doute une nécessité d'augmenter nos programmes...
d'ajustement, pardon, de nos
programmes de prévention et d'intervention déjà existants dans nos commissions
scolaires. D'ailleurs, mes collègues pourront
illustrer, là, ce qui se fait déjà dans les commissions scolaires. Et dans ce
sens, les commissions scolaires auront besoin d'appui financier pour
ajuster et déployer nos stratégies de prévention de proximité. Et l'importance
ici, c'est le mot proximité.
Nous invitons les
parlementaires de cette commission à faire confiance aux commissions scolaires
et à leurs équipes-écoles en leur donnant
les moyens d'agir localement auprès des jeunes dans ce nouveau contexte
québécois et canadien de consommation
légale du cannabis. D'ailleurs, l'Association des commissions scolaires
anglophones du Québec a mentionné
qu'elle souhaite que le gouvernement mette à la disposition des commissions
scolaires un programme et des ressources pour agir auprès des jeunes,
mais aussi auprès des responsables de nos jeunes et moins jeunes élèves en
milieu scolaire.
Quant
à la possession et l'usage du cannabis maintenant, la Fédération des
commissions scolaires du Québec, tout comme
l'ADIGECS, qui représente les directions générales et les commissions scolaires
anglophones d'ailleurs, croient que le
parallèle entre la cigarette et le cannabis est approprié lorsqu'il s'agit de
saines habitudes de vie, mais qu'il faut aussi faire un parallèle entre le cannabis et l'alcool lorsque
vient le temps de parler de consommation dans les lieux publics. S'il
est interdit de consommer de l'alcool dans les lieux publics, il devrait en
être ainsi pour le cannabis. Nous demandons que
la consommation du cannabis soit interdite dans tout lieu public extérieur.
Vous comprendrez assez facilement que ce qui entoure une école est souvent un espace public et on voit très mal
la consommation d'une petite bière dans le parc voisin d'une école. Il
en va de même, à l'heure de la récréation, pour le cannabis.
Les
points de vente, maintenant. Tout comme l'alcool, l'interdiction pour les
mineurs de consommer et de posséder du
cannabis nous semble très pertinente. La question des points de vente demeure
préoccupante. Du côté de l'ADIGECS, on
formule le souhait que le point de vente soit situé à 500 mètres d'une
école ou d'un lieu d'enseignement. La Fédération des commissions scolaires du Québec est bien d'accord avec l'idée que
les points de vente soient le plus loin possible des lieux d'enseignement. Mais compte tenu de la très
grande diversité des milieux, Val-d'Or, Montréal, Laval, Saint-Anselme, Matane, Pointe-des-Cascades, vous le voyez bien,
là, nous souhaitons plutôt que très rapidement le gouvernement s'assoie avec les commissions scolaires, les maisons
d'enseignement pour explorer l'impact de cette grande diversité des
lieux sur l'identification des points de
vente. Encore une fois, nous sommes d'avis que nous devons tout mettre en
oeuvre pour éloigner les points de vente le plus possible des
établissements scolaires. Et j'achève.
La
surveillance et l'application en milieu scolaire. Il nous apparaît important de
rappeler que dans une très grande proportion,
il y a une excellente collaboration entre les commissions scolaires, leurs
écoles et les corps policiers locaux. Le fait de passer d'un statut d'illégal à un statut légal risque de rendre
le cannabis plus acceptable socialement et entraîner certainement une importante mise à jour ou mise à
niveau de tous les intervenants mobilisés par ces enjeux, autant ceux du
milieu scolaire que des corps policiers.
Donc, le personnel des commissions scolaires fait un travail remarquable
d'éducation auprès des jeunes et il
faudrait être vigilant pour ne pas échapper l'angle accompagnement éducatif
d'un élève au profit d'une judiciarisation insensible au parcours de nos
adolescents.
Les amendes. La
fédération se réjouit de l'interdiction faite aux mineurs d'accéder et
d'acheter du cannabis. Elle est satisfaite
également de l'interdiction formulée aux employés de la société du cannabis du
Québec de permettre l'accès et la
vente aux mineurs. Nous déplorons le silence du projet de loi quant aux
conséquences que devrait subir un employé
qui enfreindrait la loi à ce niveau. Nous recommandons surtout une solide
formation des employés de la société.
Le
comité de vigilance, maintenant, pour terminer. La nouvelle réalité entourant la
légalisation du cannabis doit être
prise au sérieux, notamment sur l'impact qu'elle aura sur nos jeunes. Comme les
acteurs du réseau des commissions scolaires côtoient plus d'un million
de jeunes et moins jeunes élèves quotidiennement, nous sommes d'avis que la
Fédération des commissions scolaires du Québec devrait faire partie de ce
comité de vigilance qui aura tout intérêt à profiter des constats, des
pratiques et des difficultés vécues dans le réseau de l'éducation sur ce thème.
Alors, je vous remercie
de votre attention.
Le Président
(M. Merlini) : Merci, M. Fortier, pour la présentation de ce
mémoire. Nous allons débuter les échanges
avec la partie gouvernementale. Mme la députée de Soulanges, Mme la ministre,
vous disposez de 15 minutes. À vous la parole.
Mme Charlebois :
J'ai ri fort tantôt, M. le Président, parce que Pointe-des-Cascades, c'est chez
moi.
Une voix :
C'est vrai?
Mme Charlebois :
Oui. Ça a suscité chez moi un petit peu d'émoi parce que je suis tellement
fière de mon comté.
Une voix : Ce n'était pas
voulu.
Mme Charlebois : Puis une blague : Je ne pense
pas qu'ils ont d'école. C'est à Les Cèdres. Mon mari est originaire de Pointe-des-Cascades, c'est pour ça que
je trouvais ça si drôle. Oui, hein? Vous avez frappé dans le mille sans le
savoir.
D'abord,
vous saluer, M. Fortier, Mme Lortie, M. Grenier et... mon Dieu,
je ne veux pas maganer votre nom...
Une voix : Touil.
Mme Charlebois : ...Touil,
Mme Touil. Merci d'être là et de nous présenter vos recommandations, de
nous faire part de vos réflexions. C'est vraiment
intéressant. Je
comprends qu'on se rejoint sur beaucoup
de points, puis il y a encore des recommandations que vous nous
faites parce que vous pensez que notre projet de loi mérite des ajustements. Je vous
rassure tout de suite, on travaille
en collaboration tout le monde. Ce qu'on veut, c'est le meilleur projet de loi
possible. Je ne vous dis pas qu'on va être toujours d'accord, mais la majorité
du temps il faut l'être parce qu'on est ici pour représenter l'ensemble des
Québécois, et c'est ce qu'on a bien l'intention de faire, tous les
parlementaires, tant du gouvernement que des oppositions.
D'ailleurs,
je regarde vos recommandations. Fort intéressant. Vous nous parlez du surplus
du fonds de revenus de la vente du cannabis. C'est la première fois que
c'est présenté comme ça, là, surplus du fonds des revenus provenant du cannabis
et du fonds de prévention. Vous voulez qu'on encadre ça. C'est déjà encadré,
comme je l'ai dit au groupe précédent. Il y
a déjà 25 millions qui est investi en prévention. Que la Société
québécoise du cannabis fasse des sous ou pas les premières années, il y aura 25 millions d'investis en
prévention les cinq premières années. Mais, comme je le disais, tous les coûts inhérents au déploiement du réseau de
vente par les boutiques, par le réseau Internet, le 25 millions qu'on
va mettre dedans par année, tous les coûts
qui sont engendrés par la Société québécoise du cannabis vont devoir être
remboursés par les ventes de cannabis.
Alors, après qu'on aura remboursé tout cela, qu'on fait nos frais d'opération,
bien là, il y aura possibilité de voir des surplus. Je ne dis pas qu'il n'y en
aura jamais, mais je vous rassure tout de suite, parce que vous en parlez un
petit peu plus loin, puis on va tout de suite évacuer ça, il n'y aura pas de
publicité, de promotion, d'Inspire, respire, et soupire, comme il y a à la SAQ.
Ce n'est pas l'objectif.
Dans l'introduction du projet de loi, on parle
justement de protection de la santé publique et de la sécurité publique. Ce n'est pas la même mission que la SAQ.
La Société québécoise du cannabis n'aura pas la même mission, donc, de vendre plus, plus, plus puis toujours plus pour
faire des fonds. La mission de la Société québécoise du cannabis, c'est de ramener les gens qui sont sur un marché
illicite, donc illégal, vers un marché légal. C'est tout ce qu'on veut faire.
On ne veut pas développer ce marché-là pour faire des fonds pour le
gouvernement. On ne fera pas de notre économie au Québec une économie du
cannabis. Ça, je veux vous le dire tout de suite, je veux vous rassurer tout de
suite pour la promotion et pour les fonds.
Pour ce qui
est de la partie résiduelle, éventuellement, quand la société fera des profits,
quand elle aura payé, comme je vous
disais, ses opérations, ses dettes, etc., ce qui est prévu au projet de loi, je
dis bien ce qui est prévu au projet de loi en ce moment, c'est que la
moitié de ça aille justement en prévention, et tout ça, et l'autre moitié
était, dans ma tête, identifiée pour faire
des campagnes, justement, de sécurité routière, pas d'alcool, pas de cannabis,
pas... tu sais, bon. C'est de la prévention, en quelque sorte.
Bon, là, je
comprends qu'il y a des discussions autour de ça. Moi, dans mon livre à moi,
c'est aussi de la prévention même si
je fais affaire avec la sécurité routière. Mais on trouvera le moyen de
libeller ça pour que tout le monde soit à l'aise autour de la table, mais il faut... ce que je veux dire, c'est
que ça va servir autour de ça. Ça ne servira pas à payer des routes. Ça ne servira pas à faire des
infrastructures. Ce n'est pas ça le but de l'exercice, là. C'est vraiment de
s'occuper de notre population, mais on va
trouver comment on va le faire. Je suis déjà ouverte à ça, je le signifie déjà,
puis mes collègues du gouvernement étaient déjà là-dedans.
Mais c'est clair qu'il y a plus large que la
santé publique, il y a la sécurité publique. Ça fait aussi partie de la prévention. Si quelqu'un frappe un de mes enfants
avec ses quatre enfants dans l'auto, parce qu'il n'y a pas eu
d'éducation, parce qu'il n'y a pas eu de
prévention de faite puis parce que le jeune ne savait pas ce qu'il faisait,
bien, on aura manqué à notre devoir. Alors, dans ce sens-là, je pense
qu'on est capables que de s'entendre tout le monde là-dessus. Puis il y a
certainement d'autres éléments, mais ce n'est certainement pas pour renflouer
le... — voyons,
je vais le dire comme il faut — le fonds consolidé. Maintenant... Puis là
peut-être que, de la manière qu'il est libellé,
ça peut ne pas vous convenir, mais, je vous le dis, on va examiner ça,
les collègues du gouvernement mais aussi avec les oppositions.
• (15 heures) •
Concernant — je regarde toutes vos choses — la formation... Ah oui! Non, avant d'arriver
à la formation, vous nous parlez de consommation interdite dans les
lieux publics, mais c'est aussi en lieu avec le... Je vais vous amener là-dessus, parce que ce n'est pas deux éléments
pareils, mais ça touche la même instance, la vente, les points de vente
de cannabis pas près des établissements
scolaires. Moi, j'ai le goût de vous amener sur... Parce que tout le monde
compare ça avec l'alcool, c'est vrai, mais
l'alcool a été réglementé par les municipalités, pas par le gouvernement du
Québec. Les lieux publics, là, c'est
réglementé par les municipalités. Puis il n'y a pas de municipalité qui a les
mêmes prérogatives dans tout le Québec.
Alors, est-ce que vous considérez, vous... Êtes-vous à l'aise avec le fait
qu'on s'est créé des partenaires que sont les municipalités, qui ont un schéma d'aménagement, qui sont déjà en
discussion avec les commissions scolaires à plusieurs égards, je crois, est-ce que vous êtes à l'aise à
ce que les municipalités, les élus de chacune des municipalités, qui
sont très, très près
du terrain et de leur population tout comme vous, soient les personnes les
mieux outillées pour choisir les lieux publics
qui devront être interdits, outre le terrain de soccer, où il y a des enfants
c'est déjà interdit, la cour d'école, c'est déjà interdit, il y a plein de choses qui sont déjà interdites, mais, une
plage, il pourrait y avoir une section puis une autre section où c'est permis... Est-ce que vous êtes à l'aise à
ce que les municipalités aient des discussions avec vous puis qu'ils
décident ça dans leurs schémas
d'aménagement, qu'ils nous signifient où ils veulent qu'ils soient, les points
de vente, et où sera consommé le cannabis?
M. Fortier
(Alain) : La question, elle
est excellente, parce que, tu sais, si on prend un peu, tu sais, d'où on
vient, nous, un gouvernement de proximité, c'est bien sûr facilitant de pouvoir
travailler avec un autre gouvernement de proximité,
où on connaît notre réalité locale, notre population, nos sensibilités, nos
orientations politiques aussi. Donc, à cette
question, bien que ça ne fait pas partie de notre mémoire, j'aurais tendance à
vous répondre que oui. D'ailleurs, on se posait la question tout à l'heure : Est-ce que ce sont les municipalités
qui gèrent la permission ou non de consommer de l'alcool sur la place publique? La réponse, on l'a apprise tout
récemment, la réponse, c'est oui. Et, à mon sens, il n'y a pas beaucoup
de consommation d'alcool sur la place publique, partout au Québec. C'est pour
ça que j'aurais tendance à m'appuyer sur cette idée de gouvernement de
proximité pour être en phase avec sa population.
Mme Charlebois :
Bien, c'est un peu ce que je pense, puis on a adopté une loi pour leur donner
de l'autonomie dans leurs propres
municipalités. Puis, comme je vous le disais, il n'y a pas une municipalité qui
vit les mêmes réalités. Ce n'est pas
vrai qu'à Montréal puis à Pointe-des-Cascades il se vit la même chose. Ce n'est
pas vrai qu'à Coteau-du-Lac et à Québec il se vit la même chose. Là, je
vous donne tout le temps des municipalités de mon comté, c'est le fun, hein?
M. Fortier (Alain) : On peut
nommer Saint-Anselme.
Mme Charlebois :
Je peux continuer de même, j'en ai 15. Alors, je comprends que vous êtes...
Parce que ça touche un peu les sujets. Votre recommandation 6 parle
justement de discuter rapidement avec les partenaires pour la distance minimale à établir. Ça fait qu'avec...
Moi, je pense qu'avec les municipalités on est en plein dans le mille,
parce que les élus municipaux sont très près
de vous puis ils sont très près de leurs populations. Et, concernant la
consommation dans les lieux publics, bien,
encore là, tu sais, si le lieu public n'est pas loin de l'école, puis ils
décident, la municipalité, avec vous
de dire : Bien, ça n'a pas de bon sens, je pense qu'ils sont bien mieux
outillés que nous, à Québec, de faire une règle unilatérale, qui ne
s'appliquera pas partout également, là. En tout cas, moi, je pense.
Recommandation 7,
vous nous parlez de corps policiers, afin qu'ils aient la formation et les
ressources nécessaires pour faire respecter l'interdiction de possession
du cannabis et voir à intensifier la prévention dans les établissements scolaires. Est-ce que je comprends de vos propos
que c'est davantage eux qui font la prévention en ce qui concerne les drogues, et notamment le cannabis, ou si vous avez...
Parce qu'on a eu, si je ne m'abuse, le regroupement de parents, un peu
plus tôt, puis j'avais... non, ce n'est pas le regroupement de parents, c'est
une autre instance qui nous disait avoir des travailleurs
sociaux ou psychosociaux dans les écoles... ou, je pense, c'est dans les
collèges, je suis peut-être en train de me mélanger, qui nous disait
qu'il y avait des gens qui étaient qualifiés mais qui avaient besoin davantage
d'outils. Comment vous voyez ça, vous?
M. Fortier
(Alain) : Bien, en fait,
c'est à géométrie variable. Dépendamment si on est dans un grand centre
urbain, si on est en périphérie, si on est
en région, dépendamment de la ressource, ce qu'on essayait de dire, dans notre
mémoire, c'est que toutes les personnes qui sont en lien avec cette
problématique-là... il y aura certainement une mise à niveau, hein, de... compte tenu, là, de l'espèce
d'assouplissement, hein, du regard que la société québécoise a sur le cannabis.
Bien, il va falloir que tout le monde ajuste
son regard, sa manière d'aborder les jeunes. Tu sais, là, on va être aux prises
puis... on va être aux prises, enfin, c'est
une image, mais, tu sais, il y a
des familles qui vont fumer du cannabis dans leur maison, puis là, le jeune va partir à l'école. Donc, tu
sais, ce ne sera plus la même réalité au Québec. Donc, c'est pour ça
que nous, on a comme tendance à dire : Tissons notre partenariat
encore le plus étroitement possible. Formons davantage notre personnel, mais aussi raffermissons les
partenariats avec les différentes instances. Mais, des fois, c'est ce qu'on
appelle le policier éducateur, des fois,
c'est la personne qui est en charge de la vie étudiante qui a aussi cette
dimension-là, hein? Il y a toutes sortes de porteurs de ces dossiers-là dans
nos commissions scolaires. Mais il va falloir qu'on les forme encore.
Mme Charlebois : Je vous entends, puis j'entends que le corps
médical, tant les médecins que les infirmières, j'ai entendu plein de gens qui ont besoin de formation et de mise à
niveau parce que justement ça ne fait pas partie tant que ça des cursus scolaires en ce moment à travers
les études postsecondaires, etc. Mais je vous entends me parler de tout
ça, je retiens le mot «prévention», je retiens le mot «formation». Vos
enseignants doivent avoir une formation adéquate, vos directions, etc.
Quand vous me
dites que... Puis j'essaie de comprendre parce que, quand vous me dites
que les parents vont fumer, ça va
être un phénomène nouveau, le cannabis existe déjà, c'est la légalisation
qui va être nouvelle. Les gens fument déjà dans leurs maisons. Peut-être qu'ils fument déjà avant que le jeune parte
pour l'école. Sauf que savez-vous ce que je pense? C'est que tout ça, ces discussions-là que nous
avons en ce moment sur la légalisation qui est faite par le gouvernement
fédéral, dois-je le rappeler, fait en sorte qu'il y a beaucoup
de choses que nous constatons que nous devrions mettre à niveau, notamment la formation de notre personnel, la
formation des gens qui interviennent auprès des jeunes, mais aussi
auprès d'autres personnes dans la société.
Je pense que ça nous suscite beaucoup de réflexion. Est-ce que... Parce que,
la façon dont on parle, on dirait que
tout le monde a peur qu'il y ait une augmentation de la consommation comme, on a
dit ce matin, au Colorado,
mais le Colorado, il opère ça très différemment de ce que nous autres, on va
faire, là. En anglais, on appelle ça un «free world», là, c'est privé,
puis on fait de l'argent, puis, tu sais... alors qu'ici ce n'est pas ça, le but
recherché.
Puis,
concernant l'âge de consommation, tantôt, j'entendais des propos, puis je veux
juste ramener ça. Oui, il y en
a peut-être juste deux à 18, mais il y a l'Ontario qui est à 19 parce que l'âge
légal de consommer de l'alcool, c'est 19. Le Nouveau-Brunswick est à 19,
l'Alberta est à 18, il y a d'autres États que... je vais faire mettre à jour ma
liste, Terre-Neuve—Labrador à 19 et... voilà, il y a d'autres
provinces aussi, puis je faire mettre ma liste à jour, mais tout le monde tend, pour avoir discuté avec d'autres
ministres de la santé, vers l'âge légal de consommer de l'alcool. Alors,
je le dis juste, en tout respect, pour la fin des discussions.
Je prends note aussi que vous souhaitez que
notre personnel soit formé, dans les boutiques de la Société québécoise du cannabis. Je vous rassure :
Oui, ça va être le cas. Et, oui, en regard des articles 29 et 30, il est
interdit qu'un jeune pénètre dans une
société québécoise du cannabis. Ça veut dire que, si papa, maman veulent aller
acheter leur cannabis pour la fin de
semaine, bien, prévois-le avant que tu ailles chercher ton enfant, parce que tu
ne pourras pas le rentrer avec toi, là.
Deuxième élément, quelqu'un majeur qui va vendre à un mineur va avoir des
mesures répréhensives sévères, c'est déjà prévu. Mais, oui, on va former notre personnel mais non seulement pour
ça, pour donner de la formation et de l'information aux gens qui vont
aller acheter sur la teneur en THC.
Il me reste-tu encore du temps, M. le président?
Le Président (M. Merlini) : Une
minute, Mme la ministre.
Mme Charlebois :
Il me reste une minute. En tout cas, moi, je trouve que votre mémoire est très
constructif. Je retiens que vous êtes toujours en mode collaboration. Il
y aura peut-être d'autres questions qu'on aura à vous poser subséquemment. Mais je veux que vous gardiez en
tête que le projet de loi va être bonifié, c'est sûr, jusqu'à la
dernière journée, on va travailler, tous les parlementaires ensemble, et que,
dans trois ans, il va falloir faire vite parce que la légalisation, c'est nouveau, pas le cannabis mais la légalisation, ça
fait qu'il faudra réviser rapidement le projet de loi pour être
efficaces dans la suite des choses. Merci.
Le Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, Mme la ministre, pour ce bloc d'échange avec nos invités. Maintenant, je passe du côté de l'opposition
officielle. M. le député de Labelle, vous disposez de neuf minutes.
Après votre gorgée d'eau.
M. Pagé : Oui, parce
qu'effectivement je tousse.
Mme Charlebois :
Oh! Je suis allée un petit peu trop vite, je vous ai coupé ça.
M. Pagé : Non, ça va, ça
va.
Le Président (M. Merlini) :
Vous disposez de neuf minutes, M. le député de Labelle.
• (15 h 10) •
M. Pagé :
Oui. Merci, M. le Président. Bien, je remercie encore une fois la ministre
parce que j'entends encore une fois
dans ses propos qu'on évolue et elle accepte déjà, elle anticipe déjà des
amendements que l'on souhaitait proposer et je pense qu'elle va les faire siens. Alors, on va collaborer, on va
travailler ensemble. Alors, moi, je la salue encore puis je la remercie
encore parce que c'est dans cet esprit-là qu'on veut faire évoluer le projet de
loi.
Et je prends,
bon, l'exemple de votre recommandation 5, là : «La fédération recommande que
la consommation de cannabis soit
interdite dans les lieux publics.» Nous avions dit : Sauf qu'on pourrait
donner un pouvoir aux municipalités de désigner
certains endroits bien précis. J'ai compris ça, que vous étiez ouverts à cela,
à ce que les municipalités
puissent désigner des endroits, qu'on encadrerait bien quand même, là, parce
qu'il faudrait bien limiter...
M. Fortier (Alain) : En
collaboration, bien sûr. Tu sais... C'est ça.
M. Pagé : Bon, bien, voilà. En fait, avec votre mémoire,
puis que j'apprécie également, vous venez de me dire que, si c'est nous, le gouvernement, qui apporte l'amendement
à la loi qui irait dans ce sens-là, on inclurait... Moi, je souhaiterais
qu'on inclue et qu'on inscrive dans la loi : Après avoir consulté
différents partenaires, qu'on pourrait nommer, des gens de la sûreté municipale ou encore de la Sûreté du Québec, mais tout le
milieu scolaire devrait être aux premières loges des consultations. Alors, je pense qu'on pourrait l'inscrire également
dans l'amendement ou... qui seront apportés, là, pour modifier la loi. Alors, on pourra faire une courte
liste, au minimum, de gens ou d'organisations qui devraient être
consultées. Et ça, ça vous irait, là?
M. Fortier (Alain) : Oui. Si
vous permettez, on me souffle aussi qu'on est déjà en discussion, dans les municipalités, sur l'emplacement de la restauration rapide, par exemple, hein? Toutes les fois qu'il y a... tu sais, ils viennent nous voir : Qu'est-ce que vous en pensez?, ou
on fait minimalement nos représentations, ça ne marche pas tout le temps, là, mais minimalement. C'est un exemple de tentative de collaboration pour faire en sorte que l'environnement scolaire soit un environnement qui fait la promotion des saines habitudes de vie.
Donc, on pense, là, qu'on est capables de travailler avec les municipalités
pour voir un peu comment on déploie, là, ce microréseau — on
espère qu'il sera le plus petit possible — ce microréseau de points de
vente.
M. Pagé :
On jase, là. Vous représentez justement la Fédération des commissions scolaires
du Québec. Nous avons eu ici la fédération
des municipalités du Québec,
l'Union des municipalités du Québec,
les deux unions municipales sont venues. Est-ce que vous avez déjà eu
des échanges avec eux à ce sujet? Est-ce que vous avez commencé?
M. Fortier
(Alain) : Pas à ce sujet, pas à ce sujet.
M. Pagé : Pas à ce sujet-là. O.K. C'est bien. Un autre truc
pour lequel... Je pense que c'est la première fois que j'entends la ministre, de façon aussi
claire, nous dire que, finalement, nous pouvons être très rassurés sur l'article 23.36,
là, qui dit que «les surplus accumulés par
le fonds sont virés au fonds général aux dates et dans la mesure que détermine
le gouvernement». Et la ministre dit : On est ouverts à modifier cela afin de
rassurer la population que ce virement de fonds, là, ce ne sera pas pour aller construire des routes.
Alors, on va bien l'encadrer, c'est ce que j'entends, pour que ça reste
dans tout ce qui s'appelle saines habitudes de vies, prévention et tout cela.
C'est ce que j'entends. Alors, moi, j'applaudis, encore une fois, là. Je pense
qu'on fait des progrès forts intéressants.
Est-ce
que vous souhaitez — parce
que moi, je le souhaite — même
qu'on aille jusqu'à l'inscrire dans la loi, que 100 % des revenus devraient aller vers tout cela? Parce qu'à votre recommandation 1 vous disiez : La fédération recommande d'encadrer, limiter, bon, mais n'allait pas jusqu'à dire
100 % des surplus qui devraient aller... Évidemment, quand on parle de surplus, c'est une fois qu'on a
payé tout l'opérationnel, là, ça, on en convient, là. On ne veut pas...
Bon. Mais, une fois qu'il y a
des surplus, puis il pourrait y en avoir, puis il pourrait y en avoir de façon
fort importante, alors... Et tout cela va contribuer également à la
réussite éducative, là.
M. Fortier
(Alain) : Ce qui nous réjouit, c'est d'entendre que, peu importe ce
qui se passera, il y a toujours 25 millions
prévus pour la promotion... enfin, pas la promotion, mais la promotion des
saines habitudes, la prévention ou la promotion
des saines habitudes de vie. Donc, peu importe s'il y a profit ou déficit, ça,
ce sera... C'est ce que j'apprends sur place. Donc, je suis extrêmement
content de ça.
Et
quant aux surplus, nous, ce qu'on dit, dans notre mémoire,
c'est : Il ne faudrait pas que des initiatives locales souffrent d'un manque d'appui financier pour
pouvoir faire la promotion de proximité. Et moi, je suis parfaitement
d'accord avec votre idée que dire aux gens
qu'il faut se conduire sobrement, ça fait partie aussi de l'éducation
populaire incontournable. Puis des
campagnes nationales, c'est une bonne idée. Mais, si ce n'est pas appuyé de
démarches locales, de proximité auprès des jeunes, là il y aurait un
trou.
Donc,
à quelque part, je vais vous laisser décider entre vous si c'est 100 % des
fonds, mais l'idée en arrière, c'est : Il ne faudrait pas qu'on
souffre d'un manque de ressources pour appuyer nos démarches locales de
sensibilisation à ces questions-là.
M. Pagé :
Nous sommes exactement à la même place, il ne faut pas manquer de ressources.
Et à cet égard-là, bien, on peut
saluer le fait que 25 millions, c'est une belle volonté, en soi, mais sauf
que, quand on commence à fouiller, à gratter un peu, qu'est-ce qu'on peut faire avec 25 millions divisés par
17 régions administratives, déjà vous êtes rendus à peu près à 1,4 million divisé par l'ensemble des
organisations qui voudront faire de la prévention. Je vais vous dire que
ce n'est peut-être pas beaucoup de sous. Et, quand on a demandé aux gens de
ventiler un peu, c'est peut-être plus à la hauteur de 50, 75 millions. Éventuellement, on pourra regarder ce que ça
représente, le 25 millions, mais j'ai l'impression que nous aurons besoin de plus que cela. C'est un bon début,
on le salue, mais il faudra effectivement, comme vous avez dit tantôt,
s'assurer qu'on ne manque pas de fonds pour faire toute la prévention et la
sensibilisation.
M. Fortier (Alain) : Si vous permettez, Mme Touil pourrait nous
dire ce qui existe déjà, en termes de promotion des saines habitudes de vie, comme mesures de financement, hein? Ça fait
que ça va démontrer un peu le rapport avec ce 25 millions là.
M. Pagé :
O.K. Allez-y.
Mme Touil (Chedlia) : Oui, bonjour. Juste pour vous dire que nous, les
commissions scolaires, on a une seule mesure
qui finance les saines habitudes de vie et qui est incluse dans le financement,
dans les règles de fonctionnement des commissions
scolaires, et qui sert à beaucoup de choses, que certaines utilisent pour la
prévention, mais on juge que c'est insuffisant.
C'est à la hauteur... c'est une mesure de base, 30 000 $ par
commission scolaire. On s'entend qu'avec ça on ne peut même pas se payer
une ressource à temps plein. Ça fait que, dépendamment des régions, dépendamment
des besoins puis des localités, il y a des choses qui se font.
Ça fait qu'on est
vraiment en deçà avec le financement actuel dans nos règles budgétaires. C'est
pour ça que M. Fortier disait
tantôt : Les besoins sont là. Puis on veut que ce fonds-là, au-delà...
avec le 25 millions, mais, s'il y a d'autre argent, bien, qu'on peut s'en servir pour nos jeunes, pour la
prévention, pour la détection, pour ces interventions, comme je vous dis, qui se fait à vitesse... à géométrie
variable. Il y a des places où on a des ressources dédiées, il y a des places
où c'est en partie, parce qu'on n'a pas ça, mais effectivement les mesures
actuelles ne sont pas suffisantes, là, actuellement.
M. Fortier (Alain) : Donc, vous comprenez pourquoi je dis que
25 millions, là, pour nous, là, c'est comme... wow! Ça ne veut pas dire que ça va être suffisant,
mais, comparé à ce qui existe déjà, c'est comme une bouffée d'air, là, pour
nous.
M. Pagé :
Oui, je comprends bien. Bon, je sais qu'il me reste peu de temps. Vous avez
parlé des conséquences pour le
personnel, pour les employés. Jusqu'à maintenant, est-ce que vos services de
ressources humaines sont équipés pour faire face à cela, à faire face à ce qui s'en
vient, à donner toute l'information nécessaire à leur personnel pour
comment gérer cela pour eux éventuellement,
évidemment, avec les élèves aussi? Bon, puis, quand vous parlez de
conséquence, là, pouvez-vous nous expliquer
un petit peu ce que vous vouliez dire exactement? Et est-ce que vous êtes prêts
à faire face à cela? Est-ce que le ministère vous a envoyé tout ce qu'il
faut comme outils?
Une voix :
...
M. Fortier (Alain) : J'entends : En 30 secondes. En fait,
vous savez, dans le milieu scolaire, c'est tolérance zéro, hein, que ce soit pour les enfants, que ce soit
pour nos employés. Et donc cette perspective d'accompagnement de nos employés va demeurer toujours la même, ce sera
toujours tolérance zéro, même si, dans les faits, sur le plan social, on
légalise la marijuana pour des consommations récréatives. Donc, on accompagne
notre personnel.
Dans
notre mémoire, ce qu'on dit, c'est que les gens qui en font la vente, hein, on
dit : Eux autres, ils vont avoir besoin...
moi, j'entendais, tout à l'heure : Ils vont avoir besoin de formation pour
être capables de savoir c'est quoi, la règle, mais aussi d'être capables
d'accompagner les jeunes qui voudraient enfreindre. Donc, il y a... C'est là,
moi, je pense qu'il va falloir qu'on
travaille et aussi qu'on modifie probablement notre discours auprès de nos
jeunes et de nos employés par rapport à ce nouveau contexte qui passe
d'illégal à légal, mais on va ajuster notre discours pédagogique dans ce
sens-là puis on va être capable de le faire.
M. Pagé :
Ce n'est pas prêt, là...
Le
Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, M. Fortier. Ça met un terme à ce bloc
d'échange avec l'opposition officielle. Je me tourne maintenant vers le deuxième
groupe d'opposition. M. le député de Borduas, vous disposez de
six minutes. À vous la parole.
M. Jolin-Barrette : Merci,
M. le Président. Mesdames messieurs,
bonjour. Merci d'être présents aujourd'hui
à l'Assemblée nationale.
J'ai
envie de vous demander, dans une école secondaire, supposons, comment ça se
passe actuellement, par une direction
d'école, quand on soupçonne un élève d'avoir du cannabis? Actuellement, c'est quoi, l'intervention qui est
réalisée par la direction de l'école?
• (15 h 20) •
M. Fortier (Alain) : Bien, merci pour cette question. Puis, si je me
permets, là, je vais donner la parole à mon collègue M. Grenier, à la commission scolaire de la Côte-du-Sud,
parce qu'on a apporté un exemple, là, tu sais, de feu vert, feu jaune, feu rouge. En fait, je vais
laisser, là, M. Grenier, là, vous donner un exemple de
l'accompagnement qu'on fait de nos jeunes.
M. Grenier (Alain) : Oui. Donc, on a des écoles secondaires... Nous,
la Côte-du-Sud, c'est un territoire qui s'étend de Lévis jusqu'à Sainte-Anne... Saint-Jean-Port-Joli, jusqu'aux lignes
américaines. Donc, on a des petits villages, des petits milieux. On a un règlement-cadre qui est très
clair sur tous les psychotropes, toutes les substances, que ce soit
l'alcool, les drogues ou n'importe quoi, ça,
on l'a, très bien structuré, et c'est tout le personnel qui est sensibilisé à
l'observation des comportements des
jeunes. On a des grilles d'évaluation. Par exemple, un prof qui soupçonne un élève de consommer, bien, on lui propose un petit guide :
Note-le, note-le, n'interviens pas tout de suite, prends du temps, observe;
quand tu as observé, bien là, quand
tu es à peu près sûr, parle-lui. La première étape, c'est toujours de
l'éducatif, notre perspective, ce n'est jamais punitif en premier. La police, ça vient après, ça. Donc,
on a toujours une perspective éducative parce qu'on veut qu'ils nous fassent confiance. Sinon, si la règle, c'est
le coup de bâton tout de suite, ils ne viendront pas nous voir. Donc, on a ça.
Et puis on a
évidemment une première étape, quelqu'un qui consomme, on a une deuxième étape,
celui qui possède, ce n'est pas la même
chose, et celui qui possède pour vendre. On a ces trois étapes-là. Et on a pour
les mineurs, parce qu'on a des
enfants du primaire aussi, on a des 12 ans, hein, on a des adultes, des
ados jusqu'à 17 ans, 18 ans, on a des adultes en formation
professionnelle, aux centres d'éducation des adultes. Donc, on a tout ça. On a
1 million de personnes, là, qui... donc il faut s'occuper de tout ça.
Puis,
notre politique, on trouve qu'elle est... notre règlement, il est parfait. Il
ne bougera pas. Il peut être amélioré un peu, mais ce que ça nous oblige à faire, cette légalisation-là, c'est de
combattre la banalisation. Parce que, là, quand le jeune, il se faisait
prendre, on pouvait dire : Ah! c'est criminel, tu vas avoir un dossier.
Là, tu n'en auras plus de dossier, donc ce
n'est pas si grave, hein? C'est là, là, qu'il va falloir faire... C'est là que
c'est la sensibilité. Là, là-dessus, on a besoin de ressources pour le faire. Ce n'est pas une campagne nationale
seulement que ça nous prend, ça prend des gens là, dans le milieu, puis il n'y a pas beaucoup de milieux
qui ont ça. On a des policiers éducateurs, qui viennent de temps à
autre, et ça va toujours très bien, mais ils nous disent : On n'a pas le
temps. Et on a des travailleurs sociaux. Ça aussi, ils font deux, trois écoles,
tu sais. Donc, c'est les ressources humaines qui éduquent.
Oui, excusez?
M. Jolin-Barrette : ...cannabis, supposons que vous soupçonnez qui
est dans un casier, O.K., là vous dites, dans votre mémoire, que, pour l'application de l'article 7, maintenant,
ça va être les corps policiers qui vont venir intervenir sur les lieux. Actuellement, j'imagine, déjà, que
l'école, lorsqu'elle soupçonne, elle a des motifs de croire que,
supposons, il y a un élève qui est un pusher...
bien, j'imagine que vous faites une intervention au niveau de la case, par la
direction de l'école, puis par la suite vous
appelez la police. Comment ça fonctionne, actuellement? Et qu'est-ce que le
projet de loi va changer, si ça va changer quelque chose, puisque les
policiers maintenant vont être responsables de l'application?
M. Fortier
(Alain) : En fait, ce qu'on
essaie de dire, nous, c'est qu'il ne faudra pas jeter tout l'accompagnement
éducatif qu'on fait auprès des jeunes qui
pourraient faire une erreur, un mauvais jugement, au profit d'une
judiciarisation ou d'une intervention sans sensibilité à l'adolescence. C'est
ça qu'on dit.
M. Jolin-Barrette : Alors, je vais vous poser une sous-question :
Est-ce que le fait, sur le territoire d'un établissement scolaire, qu'actuellement ce soit confié aux corps de police... est-ce que
c'est approprié, cette méthode-là, ou vous
souhaiteriez que les directions d'école, si on fait le choix de ne pas aller
vers une sanction punitive, vers une sanction pénale mais vers une orientation, supposons, d'accompagnement vers un
programme d'explication de qu'est-ce que la consommation de drogue, tout
ça... est-ce que vous souhaiteriez avoir cette responsabilité-là plutôt qu'on l'attribue aux corps de police? Comment vous
voyez ça?
M. Fortier
(Alain) : Moi, je pense que,
oui, c'est une responsabilité complémentaire. C'est-à-dire qu'un jeune
qui commettrait une erreur, qui se
présenterait dans une drôle... ou qu'on trouve... tu sais, là, on est capables
d'accompagner, de travailler avec les
parents. Il y aurait récidive, par exemple, ou il vient un moment donné où, là, il faut peut-être demander la collaboration, tu
sais, des corps policiers.
Moi, je pense qu'il y a comme un jugement
professionnel de ce qu'on doit faire pour le bien du jeune, dépendamment de la famille, dépendamment de
l'écoute des parents, dépendamment de la collaboration. Est-ce qu'on a un policier éducateur dans
l'école? Est-ce qu'on n'en a pas? Donc, j'ai l'impression qu'il y a tellement,
tellement de situations qui vont demander un jugement professionnel de la part
de nos directions d'école qu'il est difficile pour nous de dire : Du
moment qu'il va se passer quelque chose, il faut appeler la police.
Nous, on
pense qu'on doit continuer notre travail d'éducation et d'accompagnement
jusqu'à une certaine limite où, là, comme on le fait déjà, d'ailleurs,
hein, on demande l'intervention des policiers quand on voit bien, là, qu'après
un accompagnement ou deux, ou peu importe, bien, on n'en vient pas à bout, ou
le jeune ne comprend pas, malgré la collaboration
des parents, des intervenants. Bien là, on va faire... Hein? Bon, puis
dépendant de la quantité, tu sais, si on ouvrait une case, puis pouf! bien là, il vient un moment donné où le
jugement professionnel dit : Woups! Police, hein? Bon, voilà.
Le Président (M. Merlini) : 30
secondes, M. le député.
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Allez-y.
M. Grenier
(Alain) : Chez nous, en tout
cas, ce qu'on a, c'est que, quand il
y a possession de substance,
c'est automatique, là, il y a
saisie immédiate, il y a appel à la police puis il y a
appel aux parents. C'est immédiatement, dès qu'il y a possession.
Consommation, c'est une autre paire de manches, tu sais, si on sait qu'il a
consommé sur l'heure du midi, c'est
une autre intervention. Mais, s'il possède des choses dans sa case, dans ses
poches, tout se met en branle. On avertit
immédiatement les parents, on intervient, on arrête ça. Il faut
arrêter d'agir si on veut que ça se passe autrement, là. Puis après ça
on fait l'éducation.
Le Président (M. Merlini) : Merci
beaucoup, ça met un terme à ce bloc d'échange avec le deuxième groupe d'opposition.
M. Alain Fortier et Mme Louise Lortie, Mme Chedlia Touil,
M. Alain Grenier, représentant la Fédération
des commissions scolaires, merci de votre présence et de votre contribution aux
travaux de la commission.
Je suspends
quelques instants et je demande à la Centrale des syndicats du Québec de venir
prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 26)
(Reprise à 15 h 28)
Le Président (M. Merlini) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Nous avons le plaisir d'accueillir maintenant la Centrale des
syndicats du Québec. Mme Chabot, vous connaissez les us et coutumes
des commissions parlementaires. Alors, vous avez 10 minutes pour faire
votre exposé et vous présenter et celui qui vous accompagne, et ensuite il y
aura les échanges avec les membres de la commission. Bienvenue à la CSSS. La
parole est à vous.
Centrale des syndicats du
Québec (CSQ)
Mme Chabot (Louise) : Merci, M.
le Président. Mme la ministre, Mmes, MM. les parlementaires de la commission,
bonjour. Oui, Louise Chabot, présidente de la Centrale des syndicats du Québec.
M'accompagne Jacques Tondreau, qui est directeur du Service à l'action professionnelle
et sociale à la CSQ.
Oui, je suis
une habituée, M. le Président. Je profite aussi de l'occasion pour souhaiter à tous une bonne
année, c'est encore le temps. Mais je vous avoue que je ne pensais pas un jour
être en commission parlementaire pour parler d'un mémoire sur le cannabis. Bon, cela dit, s'il y a un projet de loi devant
nous, c'est parce que... Bon, c'est
ça, j'attendais que
vous riiez. C'est long, mes blagues, de... Vous autres non plus, hein, personne
ne s'y attendait. Ça ne compte pas dans mon 10 minutes, ça?
Une voix : Non.
• (15 h 30) •
Mme Chabot
(Louise) : Merci. Bien,
d'abord, je vous remercie de nous accueillir aujourd'hui. Quand même, la CSQ, c'est 200 000 membres
à travers le Québec, dont majoritairement des membres dans le secteur de l'éducation
ou secteur scolaire et aussi dans le secteur
de l'enseignement supérieur. On représente aussi des membres de la santé, en
petite enfance. Donc, bien sûr que ça... il
y a une majeure partie de nos membres qui exercent au quotidien auprès des
jeunes et des populations plus vulnérables. Et, comme l'indique notre mémoire, la question de
la sensibilisation puis de l'éducation aux impacts du cannabis dans la vie des gens et dans les milieux de travail, c'est un aspect qui nous préoccupe
particulièrement.
Je vous le
dis tout de suite, nous n'avons pas abordé, dans notre mémoire, les éléments
touchant les changements au Code de
la sécurité routière. On est devant vous principalement pour, en tout cas, les
raisons qui nous interpellent plus directement. Je vais vous le dire
tout de suite, si vous avez des questions, je tenterai d'y répondre, mais ce ne
sera pas notre champ d'expertise.
D'abord, on
veut saluer la volonté du gouvernement de confier à une société d'État la vente
du cannabis dans une perspective de la protection la santé. La société
constitue pour nous une prise en charge responsable de la vente du cannabis, et en indiquant clairement, dans le
projet de loi, que la société ne visera pas à favoriser la consommation
du cannabis, on évite ainsi, croyons-nous, le glissement vers la promotion
d'une consommation responsable comme cela se fait pour l'alcool.
On salue également les règles qui entourent la
composition du conseil d'administration de la future société et celles du
comité de vigilance où des personnes seront nommées avec un profil de santé
publique, en toxicomanie et en intervention auprès des jeunes. Ça répond, à
notre avis, à l'importance qu'on accorde à la sensibilisation et à l'éducation aux impacts du cannabis. On est aussi
favorables à la création d'un fonds de prévention et de recherche en matière de cannabis alimenté par les revenus du
cannabis. Pour la hauteur, on pourra y revenir, mais ce qu'on a compris,
c'est à hauteur de 25 millions de
dollars par année sur cinq ans, et on va vous indiquer quand même quelques
préoccupations à ce sujet.
Sur la faible faillibilité, nous saluons le fait
le gouvernement ne souscrive pas une conception qui vise à une augmentation de l'utilisation des tests de
dépistage dans les milieux de travail. Ça, c'est pour les éléments qu'on
considère positifs dans le projet de loi,
mais, pour nous, il y a certains éléments qui mériteraient d'être revus ou
améliorés. C'est pour ça qu'on vous propose des modifications.
Sur la
société québécoise, les articles 55 et 87 du projet de loi permettent la
mise sur pied de projets pilotes pour la vente au détail du cannabis qui pourraient ne pas être soumis aux mêmes
règles que celles qui régissent les succursales de la nouvelle société. Pour nous, il nous semble qu'il y
a une contradiction entre les volontés qui sont prévues du projet de loi
puis l'ouverture à des points de vente pour
l'entreprise privée, ce qui irait à l'encontre de l'esprit même du projet de
loi. On comprend bien la pertinence
d'étudier, d'améliorer ou de définir des normes applicables, c'est à
l'article 55, en matière de cannabis, mais cela peut aider à mieux
définir les encadrements entourant le cannabis. Mais toutefois on croit plus
difficilement puis on voit plus difficilement cette pertinence dans la mise en
place des projets pilotes pour atteindre ces
objectifs. L'amélioration des normes peut très bien se faire par l'entremise de
l'expérience que vont vivre les nouvelles succursales de la société. Dans ce cadre, c'est la première
recommandation, on pense que vous devriez exclure du projet de loi les
projets pilotes prévus aux articles 55 et 87 et ainsi renoncer peut-être à
une pression du privé d'en faire un marché lucratif.
Le projet de
loi prévoit que, sous réserve des dispositions d'une convention collective, que
la société détermine par règlement
les normes et barèmes de rémunération, des avantages sociaux et des autres
conditions de travail des membres de son
personnel. Là, on se questionne pourquoi les travailleuses et les travailleurs
de la société, qui est une filiale de SAQ, ne pourraient pas bénéficier des mêmes paramètres des conventions
collectives qui sont déjà en vigueur. On aura nos collègues de la FTQ et nos collègues de la CSN qui vont
intervenir là-dessus. Pour nous, ça nous semble une évidence, d'où notre
deuxième recommandation que les avantages
sociaux puis les autres conditions de travail des membres du personnel
de la nouvelle société devraient être déterminés par les conventions
collectives des syndicats en place à la Société des alcools du Québec.
Au niveau de
la santé publique, on en a parlé plus haut en vous indiquant clairement que le
projet de loi... que la société ne visera pas à favoriser la
consommation du cannabis et qu'on évite un glissement vers la promotion d'une consommation responsable de cette substance. La
promotion de la consommation responsable, comme cela se fait pour l'alcool, n'est pas une mauvaise chose en soi. Une
telle initiative doit cependant s'accompagner d'autres initiatives qui visent à ne pas favoriser, voire à décourager, la
consommation du cannabis. Dans l'idéal, il serait souhaitable d'indiquer
clairement dans le projet de loi que la
société fera la promotion de la non-consommation. C'est le sens de notre troisième recommandation.
Il n'y a pas non plus d'indication dans le
projet de loi sur l'emplacement des points de vente du cannabis. Pour nous, il aurait été souhaitable dès
maintenant que le projet prévoie que ces points de vente ne se trouvent pas
près de tout lieu susceptible d'accueillir un
grand nombre de personnes mineures ou vulnérables. Vous aurez compris
qu'autour des établissements scolaires, les centres jeunesse, pour nous, ça
doit être à une distance raisonnable. Quatrième recommandation.
On l'a aussi
souligné en introduction, la création d'un fonds de prévention et de recherche,
financé à la hauteur de 25 milliards de dollars sur cinq ans, c'est
un pas dans la bonne direction, mais les objectifs du fonds devraient être précisés pour tenir
compte nommément de la sensibilisation puis de l'éducation à faire auprès des
jeunes en matière de consommation. 25 millions de dollars sur cinq
ans, c'est un bon départ, mais avec ces sommes, il faudra faire de la
prévention, de la recherche puis du traitement de dépendance. Je pense qu'il va
falloir faire des choix puis prioriser. Il y
a beaucoup d'objectifs, puis pour nous, une clé importante dans la question de
la consommation, c'est la sensibilisation et l'éducation auprès des plus
jeunes, qui doivent constituer une priorité. Donc, c'est la cinquième
recommandation, que ce fonds-là serve à de la sensibilisation puis à de
l'éducation à faire auprès des jeunes.
L'article 54
dit aussi que les surplus peuvent être accumulés au fonds général. Pour nous,
on pense que tous les surplus, à
100 %, devraient être utilisés pour des activités de sensibilisation et
d'éducation relativement aux conséquences néfastes du cannabis sur la
santé publique et dans la vie des gens. Dans ce sens-là, on demande que des
ressources professionnelles supplémentaires
dans les établissements d'enseignement devraient être prévues afin de
sensibiliser, puis d'accompagner,
puis de soutenir les jeunes qui pourraient rencontrer des problèmes avec la
consommation du cannabis. D'où notre
sixième recommandation, donc de mettre en place des programmes de prévention et
de sensibilisation, soutenir les centres jeunesse, les établissements
d'enseignement et les organismes communautaires et que les surplus soient
réinvestis à 100 % dans ces questions-là.
Sur la santé et sécurité du travail, outre
l'interdiction de fumer du cannabis sur les lieux de travail, le projet de loi demeure muet sur les mesures de prévention,
de sensibilisation puis d'accompagnement des travailleuses et des travailleurs. Pour nous, je pense que c'est une
très belle occasion de mettre en place, dans nos milieux de travail, ce
qu'on revendique depuis longtemps,
c'est-à-dire des mesures inscrites déjà à la Loi de la santé et sécurité du
travail, qui sont des comités liés à
la prévention dans tous nos secteurs, donc des représentants de la prévention,
des comités en santé et sécurité, des
programmes de prévention et des programmes de santé applicables pour tous les
établissements de plus de 20 personnes. C'est beaucoup plus gagnant
que des mesures coercitives.
En conclusion, bien, on pense que le
gouvernement fait un pas important avec ce projet de loi afin d'encadrer
adéquatement la production, la distribution, et la vente, et l'usage du
cannabis. Les quelques éléments du projet de loi
qui mériteraient d'être revus, vous aurez compris qu'on va miser beaucoup sur
la sensibilisation, l'éducation. Ça nous apparaît majeur. On sait que la
moyenne d'âge de consommation est près de 16 ans, donc il y a des jeunes
qu'il faut rejoindre. Et la légalisation ne
veut pas dire l'éducation et la sensibilisation à l'usage, quand même, d'un
stupéfiant ou d'un psychotrope. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme Chabot, pour la
présentation de votre exposé. Nous allons débuter les échanges avec la partie gouvernementale. Mme la députée de
Soulanges, Mme la ministre, vous disposez de 13 minutes. La parole
est à vous.
• (15 h 40) •
Mme Charlebois :
Merci, M. le Président. Merci, Mme Chabot et M. Tondreau, d'être là
et de nous présenter le point de vue de
la Centrale des syndicats du Québec. C'est fort enrichissant, je vais le dire
comme ça, parce qu'honnêtement, quand
j'ai commencé à le lire, j'ai dit : Ah! mon Dieu, on a plusieurs points de
convergence. Il y a encore des points où vous nous signifiez... sans
être un désaccord, mais en tout cas des choses à peaufiner et à regarder de
plus près.
Je vais y
aller tout de suite sur le 25 millions qui est déjà prévu au projet de
loi. Puis je prends la peine de le spécifier parce que, quand on dit 25 millions sur cinq ans, c'est
25 millions pendant cinq ans, mais 25 millions par année
pendant cinq ans. Et vous avez fait comme un
ordre, une séquence de priorisation, puis j'ai retenu ça, moi, parce que tantôt
il va falloir faire ça aussi. Et, pour le premier 25 millions, puis
dites-moi si j'ai bien retenu votre proposition, formation, formation du corps professoral, de tout ce qui est
le corps... de tous ceux qui vont travailler de près ou de loin avec le cannabis, que ce soit la formation de ceux qui seront dans les boutiques, mais aussi
médecins et infirmières, les profs, tous ceux qui vont avoir à agir notamment
avec les jeunes, entre autres, formation, prévention, les policiers aussi — j'ai
oublié les policiers — prévention
beaucoup, ensuite la recherche, puis, à la fin de tout, traitement des
dépendances. Est-ce que c'est l'ordre de la séquence que vous priorisez? Parce
que je sais que 25 millions, ce n'est pas infini.
Mme Chabot (Louise) : Bien,
j'avais l'air de faire un ordre... Quand j'ai formulé ou énuméré, je faisais
plus référence à votre article du projet de loi qui dit à quoi va servir les millions, oui, 25 millions par année durant cinq ans. Puis,
avec tout... en tout cas, avec les énoncés dans le projet de loi, soit qu'il y aura trop peu d'argent pour faire tout ce que vous voulez déjà faire ou soit qu'il va
falloir prioriser. Puis, pour nous, il va falloir ajouter ces éléments-là de
prévention et de sensibilisation, et, pour ça, on a dit que, s'il
y a à prioriser avec les sommes qui
seront dévolues, bien, il faudra
faire ces choix-là, qui nous apparaissent les plus probants.
Mme Charlebois :
Est-ce que... Puis vous n'avez peut-être pas eu la chance d'entendre ce que
j'ai dit précédemment. Parce que, de
la façon qu'est libellé l'article, ça porte à confusion, puis je l'ai mentionné
tantôt, là, je ne suis pas fermée,
là, à revoir le libellé parce que, quand on va... Je vais recommencer ça de la
base, là, je saute du coq à l'âne.
Quand on va
créer la Société québécoise du cannabis, il va falloir créer les points de
vente, il va falloir créer le site Internet.
Il va falloir investir le 25 millions par année pendant cinq ans. Ça va
créer une dette envers le gouvernement, puis, bon, à même les profits
qui seront faits, on va payer notre dette, puis ensuite ce sera des profits qui
pourront servir à augmenter le fonds de prévention. Mais, vous savez, le
25 millions, que la Société québécoise du cannabis fasse de l'argent ou pas, on va devoir l'investir, ça va
s'ajouter aux dettes. Mais, quand on fera éventuellement peut-être des
profits... Parce que ce qu'on vise, en fait,
comme l'a dit mon collègue de Labelle, on va mesurer l'efficacité de la Société
québécoise du cannabis pas par
l'augmentation des ventes mais bien plutôt par comment ils font ça, comment on
fait de la formation, comment on fait de l'information, comment on fait
l'ensemble du traitement de la dépendance, oui, mais plus de la sensibilisation, de la prévention auprès des jeunes. Alors,
s'il y avait des profits, une fois qu'on a réglé la dette, vous êtes d'accord avec moi que, bon, là, c'est écrit
que 50 % iraient directement en prévention. Nous autres, on pensait
en prévention santé publique, mais la
prévention, c'est large. Ça peut être la prévention en sécurité routière, ça
peut être la prévention parmi le
personnel, parmi l'encadrement dans le milieu de travail, etc. Vous en avez
nommés vous-mêmes. Vous êtes à l'aise à ce que nous puissions interagir
dans tous ces secteurs-là, j'imagine.
Donc, si on
trouve un libellé qui fait en sorte qu'on fait de la prévention, pas juste en
santé publique, mais qui sert l'ensemble de la population quand même,
autour de l'enjeu qu'est le cannabis, vous seriez à l'aise avec ça?
Mme Chabot (Louise) : Sous
réserve de voir le libellé, mais, pour nous, ça nous apparaît essentiel. Là, je
comprends, là, on va se retrouver, en
juillet l'année prochaine, à légaliser quand
même une substance. Puis on sait
que... Là, je vais devancer, mais, tu sais,
auprès des jeunes, là, puis dans nos écoles primaires, nos écoles secondaires,
puis tout ça, il ne faudra pas que la
légalisation veuille signifier sa banalisation, donc de la sensibilisation puis de la prévention, ça va être important. On ne peut pas...
Là, je comprends de votre séquence, c'est qu'on va mettre de l'argent puis on
va avoir une dette, puis c'est juste mais
qu'on ait des profits qu'on va agir là-dessus. Non, mais j'espère que ce n'est pas ça.
Mais, nous, ce qu'on essayait de vous dire, c'est qu'on ne pourra pas tellement
y aller en séquence puis se priver de campagnes de sensibilisation dans
l'immédiat et de prévention. Déjà, il se fait des choses, là, dans nos établissements
scolaires ou ailleurs. C'est pour ça qu'on vous dit... puis, en plus, le projet
de loi prévoit, si on a bien compris, que, s'il y a des profits...
Mme Charlebois :
C'est de ça que je parlais.
Mme Chabot
(Louise) : ...ça irait dans
le fonds général. Nous, ce qu'on vous dit : Utilisez 100 % des profits, et, s'il y a des
priorisations à faire, dans l'ordre, on irait plus sur les questions de
sensibilisation puis de prévention.
Mme Charlebois :
Bien, c'est sûr que le 25 millions, je vous rassure, là, il est dans les
axes de prévention, de sensibilisation,
etc. On est déjà là, là. Mais moi, je vous parlais pour les surplus. De la
façon qu'il est libellé, vous le dites, là, c'est écrit au fonds... mais, en fait, le fonds général, c'était
pour, justement, de la prévention de sécurité routière, c'est autant
pour vous, moi puis ma petite famille, mes enfants avec leurs petits, qui
peuvent écoper si on ne fait pas de la prévention,
mais c'en est, de la prévention, de la prévention au niveau du corps
professoral, etc. Moi, c'était au
niveau des surplus, c'est dans la rédaction
de l'article, parce
que de la façon qu'il est libellé, en
ce moment, ça laisse dire qu'on va construire
des routes avec la moitié du surplus, puis ce n'est pas ça qui est l'esprit qui
est véhiculé. Ça fait que c'est dans ce sens-là où je vous posais la question, si vous êtes à l'aise. Mais ce que je comprends,
c'est qu'on dit la même chose dans des mots différents. O.K.
Je voulais
aussi vous questionner... Attendez un peu, j'ai tout souligné. Les
éléments incontournables à intégrer à la formation des employés de la Société
québécoise du cannabis, vous pensez que ça devrait être quoi?
Mme Chabot (Louise) : La formation?
Mme Charlebois : Oui, pour les travailleurs qui seront dans les sociétés québécoises du cannabis. Vous pensez que les éléments incontournables sur lesquels on devrait les former, ça
devrait être quoi, à votre avis, les premiers éléments, là, ce qu'ils vont déjà se servir, entrer en
communication avec les gens... ou est-ce
que vous laissez ça aux spécialistes?
Je ne veux pas... Mon but, ce n'est pas de vous piéger, là.
Mme Chabot
(Louise) : Bien, sur la question
de... Bien, ce qu'on a voulu faire valoir aussi dans notre mémoire, c'est qu'il
y a déjà une expertise qui était
développée par certains travailleurs de la Société des alcools. Là, il y aura une nouvelle société où il y aura des nouveaux employés, et ce que je pense
qui est la principale recommandation en ce qui concerne les travailleurs de la nouvelle société, c'est ce qui est
devant vous. Donc, sur la question de la formation, à moins que Jacques,
tu aies autre chose à répondre, on n'avait pas développé de point de vue sur la
question.
Mme Charlebois :
Bien, c'est sûr que la formation des travailleurs de la Société québécoise du
cannabis, à mon sens, devrait être
différente que celle de ceux... Puis je ne dis pas qu'ils ne sont pas bien
formés, à la Société des alcools, là, ce
n'est pas le but de l'exercice, là, c'est juste que la mission de la société
d'État est tellement différente. Une fait des profits, puis l'autre, ce n'est pas ce qu'on souhaite,
ultimement. Ce qu'on souhaite, c'est encadrer la légalisation qui est faite
par le gouvernement fédéral. Alors, c'est
dans ce sens-là que je vous disais que les employés n'auront pas nécessairement
les mêmes attributs, devront donner de l'information aux clients qui vont se
présenter, leur signifier c'est quoi de la consommation
responsable, c'est quoi les produits, quels sont les effets de ces produits-là.
Bon, moi, je voyais ça comme ça, mais je ne sais pas si vous, vous êtes
d'accord avec mes propos ou si vous trouvez ça trop encadrant ou restrictif.
Mme Chabot
(Louise) : Bien, c'est sûr
qu'au niveau, bien, encadrant ou restrictif, on va avoir... on
a des attentes par rapport à la nouvelle société. Nous, on salue le fait
que, justement, on ait mis en place une société qui est sous l'égide de l'État,
donc qui est étatique. Puis le but de la société, ce n'est pas de faire des
profits, ce n'est pas de faire de la vente
au détail, c'est vraiment qu'on puisse contrôler en termes de qualité. Puis
même on dit qu'elle n'a pas à se prononcer, on va même plus loin, on dit
que même la société devrait même promouvoir la non-consommation, hein? Bon, ça fait que, pour nous, des questions
fondamentales, là, de formation des employés sur des questions
comme ça...
Mais c'est pour ça qu'on
saluait du même souffle les conseils qui vont être sur le... Vous dites, au
niveau des conseils d'administration ou du conseil, d'avoir du monde qui ont de
l'expertise sur ces questions-là. Ça nous apparaît majeur.
Mais, pour
moi, une fois que j'ai dit ça, il y a des questions de relations
du travail aussi. C'est parce qu'il y avait des questions légitimes, qu'on n'a pas mises dans notre mémoire, qui se posaient.
Il y a quand même l'expertise. On sait que ce ne se sera pas de même
nature, mais il y a quand même de l'expertise, au niveau de notre société
d'État, en termes de distribution, de transport, il y a toutes ces questions-là
aussi. On comprend qu'on s'en prive, là, qu'on fait quelque chose d'à part.
• (15 h 50) •
Mme Charlebois :
Bien, c'est pour ça que c'est une filiale de la SAQ, d'ailleurs, c'est parce
qu'on veut profiter de leur expertise déjà existante.
Une autre
question, sur les lieux de consommation et les lieux de vente autour des
établissements scolaires, on a eu
plusieurs personnes qui sont venues nous demander... nous faire des
recommandations sur le fait de faire attention de ne pas établir de
points de vente près des établissements scolaires, la même chose dans les lieux
publics, on a plusieurs commentaires. Il y
en a qui nous disent : Bien, laissez-nous un espace, parce que, si on ne
peut plus dans les logements, puis si
on ne peut pas dans l'espace public, s'il n'y a pas certains endroits où on a
le droit, on va faire quoi? On va retomber dans la prohibition?
Bon, moi,
j'ai une suggestion puis je veux vous entendre là-dessus. Qu'est-ce que vous
pensez si nous faisions appel aux
gouvernements de proximité, notamment pour le monde scolaire? Ce que je disais
à la Fédération des commissions scolaires
précédemment, c'est : Pourquoi nous ne prendrions pas les élus municipaux,
proches du terrain, avec la Fédération
des commissions... ou, en tout cas, du monde de l'éducation pour dire comment
on peut établir... Parce que chaque municipalité est différente, puis il y a
des lieux que c'est des grandes villes, il y en a d'autres que c'est des
petites municipalités. Bref, chaque réalité est différente. Est-ce que
nous ne devrions pas faire comme l'alcool et faire en sorte que chaque municipalité
légifère sur les lieux de consommation, un, et, deux, de voir... Parce que vous
savez que c'est déjà interdit sur les terrains scolaires, c'est déjà
interdit dans les parcs comme de soccer, etc., pour le tabac, ça fait
que ça va l'être aussi pour le cannabis, c'est bien évident. Mais les lieux de
consommation mais aussi ce que je vous parlais précédemment, là... Là, je l'ai
perdu. Ça a l'air intelligent, là.
Mme Chabot (Louise) : Les
points de vente?
Mme Charlebois :
Les points de vente, voilà, merci de me ramener.
Mme Chabot (Louise) : C'est
M. Tondreau, là, qui me l'a soufflé.
Mme Charlebois :
Alors, comment vous voyez ça, vous, si on suggère aux municipalités, gouvernement
de proximité, de travailler avec les gens de
proximité pour établir les périmètres où devraient être les lieux de point de
vente et les lieux de consommation?
M. Tondreau
(Jacques) : Nous, ce qu'on
dit, dans le mémoire, effectivement, c'est qu'il doit y avoir une distance
raisonnable des lieux où se trouvent des jeunes en majorité, notamment les
établissements d'enseignement et puis les centres
jeunesse. Donc, quelle est cette distance raisonnable là? Il y a
toutes sortes de chiffres qui ont circulé : 350 mètres au Colorado, un kilomètre... ça peut être un
kilomètre. Bon, je pense que ça, ça reste à déterminer. Et les personnes
les plus habilitées, effectivement, à déterminer ça, fort probablement que les villes vont être importantes là-dedans,
parce qu'elles ont des plans de zonage, elles connaissent leur
territoire, elles connaissent les sensibilités du milieu, donc
effectivement elles deviennent des
partenaires importants. Puis, bon, les collègues qui ont passé avant en ont
parlé aussi. Ils sont les partenaires importants,
les commissions scolaires sont des partenaires importants, et évidemment le
gouvernement, avec ses différents organismes, est un partenaire important.
Donc, je pense que tous ces gens-là doivent s'asseoir ensemble et trouver effectivement ce qui est une distance raisonnable
dans chacun des milieux. Parce que, vous l'avez dit, Montréal, ce n'est
pas une autre ville. Donc, chaque ville a ses particularités, et il faut en
tenir compte, effectivement.
Le Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, Mme la ministre, pour ce bloc d'échange. Le temps file, effectivement. Nous allons donc du côté de
l'opposition officielle. M. le député de Labelle, vous disposez de 8 m
15 s. À vous la parole.
M. Pagé :
Oui, merci, M. le Président. Bien, j'ai envie, encore une fois, de faire du
pouce sur ce que la ministre vient d'aborder, effectivement, avec... si
on permet aux municipalités de déterminer des endroits bien précis pour consommer. Avec ce qu'on a entendu tantôt, je
pense qu'on pourrait bonifier en disant : Après avoir consulté, bon,
les établissements scolaires, la sécurité
publique, bon, différents partenaires. En tout cas, ça me semble être la bonne
voie de passage. C'est ce qui semble se
dégager de plus en plus. Je pense que, ça, vous seriez à l'aise avec ça, là.
C'est ce que je comprends, là.
Mme Chabot (Louise) : Bien, écoutez,
de se donner du temps, là, pour consulter les principaux intéressés, parce que,
tu sais... comme centrale, comme conseil exécutif, les membres qui ont adopté
ce projet de loi là, je vais répondre à une autre partie de
la question, là, tu sais : Est-ce qu'on interdit ou on n'interdit pas dans
les lieux publics? Tu sais, tu entends : Est-ce qu'on va laisser consommer dans la rue? Parce que
la cigarette, oui, à neuf mètres des portes, il y a d'autres
endroits, tu sais. En même temps, on légalise, là. Ça fait que est-ce que ça va venir juste du domaine privé, dans
ta cour? Je pense qu'il faut être capable d'avoir...
Mais, en tout
cas, à l'écoute, de ce qui est entendu, je peux comprendre aussi les municipalités
qui disent... Puis il me semble que, sur ces questions-là, d'être à géométrie
variable, ça fait... Pourquoi que
dans un tel endroit c'est permis, puis
à l'autre... Ça fait que, si on se donnait le temps de bien faire les choses...
Surtout que j'imagine que, là, on met un projet de loi en place, avec une certaine réglementation. Je pense que
tout le monde aurait souhaité, on va se le dire ici... Parce que ça a été demandé. Si on avait pu
repousser la date, ça nous aurait donné ce temps-là. Probablement que
c'est une loi ou des règlements aussi qui vont être appelés à évoluer avec le
temps. Mais, tu sais, avant de lever toutes les interdictions, bien, prenons le
temps, oui, on trouve que c'est une bonne formule.
M. Pagé :
J'aime bien quand vous dites, au point 3, en passant, que la SQC, telle
que définie à l'article 3, devrait également encourager la
non-consommation de cannabis. C'est la première fois, en tout cas à ma
connaissance, que quelqu'un va aussi loin. On parle beaucoup de prévention et
de sensibilisation, mais de même parler de la non-consommation, je parle d'encourager la non-consommation, je trouve ça
très intéressant quand vous dites cela. Ça va dans le sens, je pense, de l'ensemble de votre
présentation qui favorise la création de cette société d'État. Et, dès votre
première recommandation vous dites :
L'article 55, on devrait
l'abolir. 55, 87 dépend de 55. Voulez-vous faire un petit peu de pouce
là-dessus puis nous expliquer pourquoi c'est votre première recommandation?
Mme Chabot
(Louise) : Bien, peut-être
que M. Tondreau pourra compléter, mais, pour nous, tu sais, ça nous
semblait totalement en contradiction
avec l'esprit du projet de loi. C'est comme dire : On met des projets
pilotes, donc on permet, finalement... à la fois on dit : On ne
veut pas que ce soit lucratif, hein, puis à la fois on va permettre, pour des fins lucratives, peut-être à certaines
entreprises d'avoir des points de vente, de le faire dans un but mercantile.
Pour nous, on ne voit pas du tout. Si
l'objectif de se dire on va se créer toutes sortes de modèles pour être en
mesure d'analyser puis de regarder
ça, nous, on pense que la société qui va être créée, si on veut faire des
analyses, sera en mesure de le faire à même
son expérience, qu'on n'a pas besoin de se mettre de la concurrence dans nos
cours. C'est ce qu'on ne souhaite pas, d'ailleurs. Ça fait que, pour
nous, les projets pilotes, c'est ça. À moins qu'on m'explique que c'est quelque
chose de plus vertueux.
M. Pagé : Et évidemment, par souci de cohérence, vous nous dites, entre
autres, quand vous parlez de prévention, de sensibilisation et d'éducation, votre recommandation 6, que, les
surplus... donc, 100 % réinvesti
dans la sensibilisation, l'éducation
en matière de consommation. Le fameux 100 %, vous le définissez un peu
plus loin, au point 7, en dessous, mais vous ne parlez pas des municipalités. Nous, nous pensons qu'il doit
aussi y avoir un pourcentage de ces sommes dans les surplus qui devrait
également aller aux municipalités, parce qu'elles auront beaucoup à assumer.
Oui, nous en sommes qu'il faut investir le plus
possible en prévention et en sensibilisation, mais seriez-vous d'accord à ce
qu'on ajoute aussi les municipalités dans ce 100 % de surplus qui devrait
être réinvesti, oui, aux saines habitudes de vie, en sensibilisation, en
prévention, contrer la dépendance, hein, les centres de dépendance,
souvent, nous disent : On manque de
fonds, alors... mais également vers les municipalités, comme c'est écrit dans
la loi constituante en Californie?
M. Tondreau
(Jacques) : Oui. Donc, comme on le disait tout à l'heure,
effectivement, le fonds va servir, entre autres... en tout cas, les
millions vont servir, entre autres à faire de la prévention, à faire de la
recherche et à faire du traitement de dépendances. Et, comme Mme la ministre
l'avait expliqué plus tôt en commission parlementaire, ces sommes-là vont servir aussi à faire de la
prévention auprès des jeunes de la fin du primaire, du secondaire, auprès
des adultes et en milieu de travail. Donc,
ça commence à faire beaucoup, beaucoup de choses, pour une somme qui est
quand même respectable, mais qui n'est probablement pas assez pour faire tout
ça.
Donc, ce
qu'on dit, nous, c'est qu'il faut prioriser absolument là-dedans, puis ça ne
dispose pas de la valeur des autres
choses, là, mais comme la sensibilisation et l'éducation, c'est un facteur
très, très important, surtout si on commence à le faire tôt, donc on dit investissons plutôt là-dedans s'il y a des
surplus. On pense que c'est là que l'essentiel doit aller, parce
qu'effectivement c'est un facteur primordial de pouvoir sensibiliser et éduquer
les jeunes aux conséquences de la consommation et de l'usage du cannabis.
• (16 heures) •
M. Pagé : Mais, bon...
Parce que, là, on parle des surplus, sauf qu'au-delà des surplus, mis à part
les surplus, il y aura aussi des rentrées de
taxes fort importantes qui vont rentrer, et ça, ça ne fait pas partie des
surplus de l'entreprise, de la SQC.
Juste l'évaluation du ministre des Finances quand il est revenu d'Ottawa, là,
des dernières négociations, on dit autour de 60, 65 millions qui
devraient revenir à l'État du Québec juste sur la taxe d'accise. Et là on ne
comprend pas la TVQ aussi, parce que, la
TPS, le fédéral va... oui, la TPS, le fédéral va la récupérer, mais la TVQ, la
taxe de vente du Québec, qui est deux fois plus élevée que celle du
fédéral, qui devrait probablement engendrer 150, 200 millions, probablement. Alors, je pense que le gouvernement
du Québec ne manquera pas de sous pour aller mettre des sous dans la
prévention, la sensibilisation et tout le reste, là. Alors, moi, je ne suis pas
trop inquiet, si nous avons la volonté, là, de faire tout ce qu'il faut à cet
égard-là.
Ce matin, les fédérations des chambres de
commerce et des entreprises indépendantes, oui, sont venues en commission, nous ont dit qu'au niveau des normes du travail on devrait déjà faire
des modifications, en fait, aller plus loin,
parce que la loi ne dit pas grand-chose à cet égard-là, et qu'on devrait aller jusqu'à proposer des
sanctions. J'aimerais que vous réagissiez à cela.
Parce que, sur votre point 8, vous élaborez un petit peu comment vous
voyez la santé et la sécurité au travail. Évidemment, ce matin, on est allés
beaucoup plus loin que cela.
Mme Chabot
(Louise) : J'espère bien
répondre à votre question. Juste brièvement, en conclusion peut-être de
votre dernier chapitre pour les
municipalités, je vous dirais, comme centrale syndicale, vous n'êtes pas sans
savoir qu'on est pour l'équité
fiscale, la justice fiscale. On a bien vu les provinces dire à Ottawa : On
aura à appliquer dans les provinces, c'est dans notre champ de
juridiction, nous, hein? J'imagine que les municipalités ont aussi la même
préoccupation. Ça fait qu'on va vous laisser
le soin, parlementaires, de décider de ce juste équilibre, mais je pense qu'on
doit en tenir compte.
Nous, dans
notre mémoire, sur la question, je dois vous avouer que je n'ai pas écouté la
chambre de commerce ni les
entreprises indépendantes, mais on est venus saluer le gouvernement de ne pas
avoir sombré, si j'ai bien compris votre question, dans ce que justement les employeurs tentent de faire, tenter
de judiciariser ou de pouvoir mettre des mesures de contrôle, d'avoir des mesures plus contraignantes
de contrôle en milieu de travail. Nous, on salue que ça n'aille pas plus
loin puis on dit que ça... Tu sais, déjà,
dans les milieux de travail, les questions de... Tu sais, bien avant qu'on se
parle de ça, là, toutes ces
questions-là de travailleuses ou de travailleurs aux prises avec des questions
de toxicomanie, et puis ça peut être l'alcool,
tu sais, il n'y a pas juste... Ce n'est pas parce qu'on légalise le cannabis,
là, que ça devient... qu'il faudrait avoir des mesures plus
contraignantes...
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme Chabot. Ça met
un terme avec l'opposition officielle, le bloc d'échange. Je dois maintenant aller du côté du deuxième groupe
d'opposition. M. le député de Borduas, vous disposez de
5 min 30 s. À vous la parole.
M. Jolin-Barrette : Merci, M.
le Président. Mme Chabot, M. Tondreau, bonjour.
On va
continuer dans le même sujet parce que j'avais sensiblement la même question
que le député de Labelle. Alors, les
associations patronales et les fédérations de chambres de commerce, ce matin,
ils ont dit : Écoutez, trois objectifs,
dans le fond, qu'on voudrait voir amendés dans la loi, la première étant au
niveau de la responsabilité civile, on voudrait qu'un employeur puisse poursuivre son commettant, l'employé qui
commettrait, dans le fond, une faute sous l'emprise... sous l'influence du cannabis. Deuxièmement, si
jamais il se blessait ou il blessait quelqu'un dans le cadre de son
travail et il était sous l'influence du cannabis,
on voudrait que cet individu-là ne puisse pas être indemnisé en vertu de la Loi
sur les accidents travail et les
maladies professionnelles. Et, troisièmement, ils voulaient, dans le fond,
faire en sorte que... Je veux me rappeler... En tout cas, globalement,
c'était de responsabiliser le travailleur. Ils disaient : Écoutez, il faut
que ce soit paritaire...
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : Oui, au niveau des amendes, ils voulaient que la
CNESST puisse attribuer une amende, comme un inspecteur de la CNESST qui vient sur les lieux de travail, constate
qu'il y a eu une... bien, une contravention à la loi, supposons, d'avoir été au travail sous influence,
et que le travailleur puisse recevoir une amende, là, de nature pénale.
Alors, je veux
juste voir comment vous voyez ça, parce que, le fait que ce soit légalisé, on
va se retrouver à devoir gérer
certaines situations. Il y a des situations humaines qui sont difficiles de
part et d'autre, des gens, vous l'avez dit, qui sont aux prises avec certaines problématiques, mais le message qu'on
doit envoyer aussi, c'est qu'au travail, bien, on ne doit pas consommer. Mais, à partir de ce
moment-là, est-ce que l'approche qui est proposée par les fédérations de
chambres de commerce, ce matin, ils sont
trop durs? Quelle est votre position là-dessus? Comment est-ce qu'on doit
arrimer tout ça? Parce que j'imagine
que les syndicats et les employeurs vont devoir travailler ensemble pour
trouver des solutions.
Mme Chabot
(Louise) : Bien, je vous
dirais que... pas surprise mais extrêmement déçue. Ça fait que, la
Centrale des syndicats du Québec, ce n'est
pas ce qu'elle prône dans son mémoire. Je pense qu'en tout cas on l'a toujours
démontré, dans plusieurs domaines, que les mesures punitives, coercitives, de
répression, ça porte beaucoup moins fruit que des mesures d'accompagnement, de sensibilisation puis de prévention. Puis
ça, ces questions-là ne devraient pas être obnubilées dans n'importe quel cas, puis c'est pour ça qu'on
dit : On ne nie pas qu'il peut y avoir certains problèmes, mais
agissons dans les milieux de travail. Est-ce
que les milieux de travail pourraient conditionner certains travailleuses ou
travailleurs à consommer? Est-ce qu'il y a
de la prévention à mettre en place? Bien, on a toutes les mesures qu'il faut,
justement, par la Loi de la santé et
sécurité du travail. Bien, utilisons
ces mesures-là. Qu'il y ait de l'accompagnement par les pairs. Déjà,
dans nos établissements, qu'ils soient scolaires, au niveau des travailleurs,
ou qu'ils soient de santé, ou qu'ils soient de l'entreprise privée, il y a déjà
des personnes qui accompagnent.
Ça fait que, s'il vous plaît, résistez à la
tentation de profiter de ce projet de loi là pour venir culpabiliser les travailleuses ou les travailleurs qui useraient de
ça ou venir surtout judiciariser ces relations-là. Là, on serait totalement
en désaccord.
M. Jolin-Barrette : O.K. Sur un autre aspect, sur la consommation dans les
lieux publics, vous aviez la discussion avec la ministre puis avec le collègue de Labelle
sur le fait qu'il fallait consulter les différents intervenants, bon, du milieu scolaire, du
milieu de la sécurité publique, tout ça. Partant de la prémisse où on est quand même
pressés dans le temps, la FQM est venue proposer que l'Assemblée
nationale propose un règlement-cadre pour l'interdiction, dans le fond, du
cannabis. Est-ce que vous seriez favorables à ça, qu'on développe un règlement-cadre
pour dire : Bien, dans les lieux publics,
c'est interdit, et de faire en sorte
pour que les débuts, bien, ce soit interdit et que, par la suite, suite à
l'expérience de la
légalisation, on puisse venir apporter des correctifs par la suite? Ou vous
souhaitez vraiment laisser une autonomie la plus complète possible puis que ce soit, bien, en fonction des différentes
régions, en fonction de chacune des municipalités? Parce que l'UMQ et la
FQM ne s'entendent pas là-dessus.
Mme Chabot
(Louise) : Bien, ce ne sera
pas nous qui va trancher sur cette question-là. Mais je vous dirais que,
tu sais, quand on le regarde, tu sais, de
notre point de vue, il y a des... C'est sûr que le point de vue que je viens
soutenir ici, c'est le point de vue
d'une organisation dans le cadre des intérêts où on l'a plus regardé... des
personnels qu'on représente puis surtout, particulièrement, du côté des
jeunes.
Maintenant,
dans les lieux publics, tu sais, déjà il y a du GBS. Si je regarde juste avec
la question du tabac, là, les parcs pour enfants, les arénas, il y a des
zones, tu vas dans des parcs, même, l'été, il y a toutes sortes de parcs, là, thématiques, c'est écrit clairement. Parce que
l'idée, c'est de protéger contre la fumée secondaire, ça fait que
j'imagine que, minimalement, là où le tabac
est interdit, on va continuer d'agir dans le même sens. Ça, ça nous apparaît un
minimum.
Maintenant,
est-ce qu'on interdit totalement dans tous les lieux publics, et que la seule
consommation devient à ta résidence
privée, là, il faut qu'elle soit privée, là? Là, il y a tout un débat, là, je
pense, qui mérite qu'on prenne le temps, là.
Le Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, M. le député de Borduas. Votre temps, malheureusement, est
écoulé pour ce bloc d'échange. Mme la députée de Vachon, vous disposez de
2 min 30 s pour vos échanges avec nos invités. À vous la parole.
Mme Ouellet : Oui. Bien, merci, M. le Président. Bienvenue,
Mme Chabot, M. Tondreau. Ça fait plaisir de vous rencontrer.
Et, avec le peu de temps que j'ai, je vais m'adresser surtout à une question,
qui est votre première recommandation,
donc, qu'il n'y ait pas de projet pilote parce que, vous dites, cela pourrait
aboutir à un modèle mixte public-privé de la vente au détail de cannabis et que
ça devrait être exclu.
En fait, je
vous dirais que vous avez raison de craindre ce côté-là, parce qu'on a une
entreprise privée, Aurora, qui est venue nous rencontrer en commission
parlementaire, et il semblerait qu'il y ait des discussions qui ne soient pas
nécessairement publiques, parce que, dans leur texte de la commission
parlementaire, ils nous ont dit qu'il y aurait 15 points publics, ça, je
pense que ça avait été annoncé, mais aussi cinq points de vente privés, et
qu'eux autres souhaitaient en avoir au moins
un. Donc, on voit que, déjà, avant même que ce soit commencé, 25 % des
points de vente seraient privés, selon ce qu'a écrit Aurora. Et
j'imagine qu'ils ne l'ont pas inventé, là. Je ne sais pas s'il y a déjà des
négociations en cours, avant même que le projet de loi soit adopté, mais ça
ressemble à ça.
Et donc moi, je voudrais vous entendre un petit
peu plus sur ça parce qu'effectivement, moi, ça m'inquiète beaucoup, parce qu'on nous a annoncé en grande
pompe, puis on était très... Moi, j'étais très contente de voir que
c'était une société publique, c'est ce que
j'avais demandé, puis on pense que c'est important. Mais, là, de voir des
projets pilotes, vous me passerez l'expression, mais ça me fait penser à
Uber, où par la porte d'en arrière ils font ce qui n'est pas permis de faire
par la porte d'en avant.
Le Président (M. Merlini) : En
une minute, Mme Chabot.
• (16 h 10) •
Mme Chabot
(Louise) : Bien, merci.
Bien, écoutez, la formule des projets pilotes, en soi, pour nous, est-ce
que c'est une voie... puis qui serait par règlement ou qui serait déjà... Puis
pour faire quoi exactement? C'est parce que, sous le couvert du projet de loi,
c'est pour dire : C'est parce qu'on veut étudier certaines questions.
Nous, on dit : On n'a pas besoin de ça.
Ça fait que, sans sombrer dans les intentions qui pourraient être
malveillantes, mais quand même, tu sais,
si, en même temps, à peu près tout le monde vient dire : Vous êtes dans la
bonne voie, là, que ce soit de responsabilité publique, comment on peut comprendre qu'on permettrait du même souffle à
l'entreprise privée... Bien, on comprend qu'ils sollicitent, on a vu, là. On peut être comme des loups, sur ces
questions-là, il y a énormément d'argent à faire, hein, sur...
Donc, pour
nous, ça nous semble totalement contraire. Puis je pense qu'il ne faut pas
aller dans ce sens-là puis que, si on
veut aller plus loin, si on veut étudier, je le disais, ce serait même très
dangereux de venir introduire ça. On va avoir un modèle à deux vitesses,
là, mais, tu sais, là on va avoir un modèle totalement privé avec un modèle
public. Puis, dans d'autres domaines, on ne trouve pas ça heureux. Ça fait que
commençons avec ce qui est voulu par le projet de loi, restons étatiques.
Le Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, Mme Louise Chabot et M. Jacques Tondreau,
représentant la Centrale des syndicats du Québec. Merci de votre présence et de
votre contribution aux travaux.
Je suspends donc les travaux quelques minutes et
j'invite la Confédération des syndicats nationaux à venir prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 11)
(Reprise à 16 h 22)
Le Président (M. Merlini) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons donc nos travaux après cette pause nécessaire.
Nous avons le plaisir maintenant
d'accueillir la Confédération des syndicats nationaux. Je vous rappelle
que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. On vous invite
évidemment à présenter les gens qui vous accompagnent.
Ensuite nous procéderons aux échanges avec les membres de la commission.
Bienvenue à la CSSS. La parole est à vous.
Confédération des
syndicats nationaux (CSN)
M. Létourneau
(Jacques) :
Bien, merci, M. le Président. Alors, Jacques
Létourneau, président de la Confédération des syndicats nationaux, la CSN. Je suis accompagné de Katia Lelièvre,
qui est vice-présidente du syndicat des employés de la SAQ, qui représente 5 500 membres qui
sont affiliés à la CSN, Sandrine Thériault, qui est présidente du syndicat
des professionnels de la SAQ, qui représente plus de 500 travailleuses et
travailleurs professionnels, et Jean Dalcé, qui travaille au Service de
recherche de la CSN et qui a notamment rédigé le mémoire que nous vous avons
déposé.
Alors, à
grands traits, bien sûr, parce qu'on a 10 minutes, là, pour faire le tour
de nos préoccupations liées au projet de
loi n° 157, d'abord, remercier évidemment Mme la ministre et le
gouvernement, là, de cette consultation et, je dois le dire d'entrée de
jeu, de cette ouverture de la part du gouvernement libéral de donner le mandat
à la Société des alcools du Québec
d'organiser la distribution du cannabis en créant la Société québécoise du
cannabis, dans la mesure où on était extrêmement
inquiet, comme organisation syndicale, depuis que le gouvernement libéral est
au pouvoir, sur les velléités de privatisation puis de déréglementation
du marché des alcools, alors que, dans les faits, on vient de confirmer non seulement le rôle et la place que la SAQ a joués
historiquement au Québec, dans la distribution de l'alcool, mais aussi
dans toute la dimension préventive et de son
impact sur la population. Parce qu'on parle quand même d'un produit qui
peut avoir des conséquences sur la santé des citoyens et des citoyennes.
Donc, dans l'histoire,
la Société des alcools du Québec a joué et joue encore un rôle fondamental. Et
on reconnaît du même souffle que
cette approche-là, en termes de santé publique et de responsabilité, comme
société québécoise, à l'endroit de
l'éventuelle distribution du cannabis auprès de la population, ça vient
confirmer effectivement l'importance puis
la nécessité de la prise en charge par l'État. Et non seulement de la prise en
charge de l'État, mais, comme je l'avais dit dans la commission itinérante, quand la ministre et
M. Coiteux sont venus à Montréal, on a une expertise, là, qui existe,
qui est reconnue, donc pourquoi ne pas en profiter, justement, pour assurer la
distribution du cannabis?
En même
temps, vous l'avez lu et vu à la lecture de notre mémoire, une fois qu'on a
salué cette décision-là du gouvernement,
on reste extrêmement préoccupés par des possibilités réelles de sous-traitance
et même de privatisation, j'y reviendrai un peu plus loin, là.
Mais disons
qu'on a été assez renversés, pour ne pas dire choqués par cette intention-là
d'interdire aux travailleuses puis
aux travailleurs qui travaillent à la Société
des alcools du Québec la possibilité
de travailler pour la Société
québécoise du cannabis. Comme organisation syndicale, c'est du
jamais-vu. On adresse la question au gouvernement :
Est-ce que, les employés de
Loto-Québec, on leur interdira de travailler à cet endroit? Je ne crois pas. Ce
n'est pas ce qu'on comprend. Est-ce
qu'on va interdire à des travailleurs puis des travailleuses du secteur privé
qui font de la vente au détail de postuler pour obtenir un emploi à la Société québécoise du cannabis? Je ne crois
pas. Puis ce serait contraire même aux lois du travail. Ce serait même, j'ajouterais, antisyndical de procéder de cette
façon-là. Et là, même si on reconnaît la contribution puis la place que
la Société des alcools du Québec joue dans la distribution de l'alcool, on
vient dire, par contre : Les employés,
non, ça, ça ne compte pas, alors qu'on prétend que la Société québécoise du
cannabis va avoir un rôle différent de la Société des alcools du Québec,
alors qu'on sait très bien que la Société des alcools du Québec a joué un rôle,
historiquement, dans la distribution, je
dirais, responsable d'un produit qui est encore qualifié et considéré aujourd'hui
de dangereux. Et on trouve qu'on est en
train un peu de banaliser l'impact de la distribution puis de la vente de
l'alcool au Québec, alors que celles du cannabis auraient une importance
beaucoup plus grande.
Donc, nous,
on dit : Il faut absolument retirer... en termes de droit du travail puis
en termes d'expertise puis de compétences,
on doit retirer du projet de loi cette dimension-là qui vise à interdire à des
travailleuses et travailleurs qui sont à l'emploi de la Société des
alcools du Québec de pouvoir obtenir un emploi à la Société québécoise du
cannabis. D'autant plus que, je le rappelle,
il y a 70 % des employés de la SAQ qui sont des employés qui travaillent à
temps partiel, qui ont souvent besoin
d'un deuxième emploi pour être capables d'avoir un revenu décent. Donc, nous,
on pense que cette discrimination-là, elle doit être totalement retirée.
L'autre
dimension sur laquelle on s'interroge, c'est toute la question de l'éventuelle
sous-traitance dans le transport, dans
l'entreposage. Encore une fois, il existe une expertise, à la Société des
alcools du Québec, des infrastructures, une expérience, qui pourraient
permettre justement d'utiliser cette expertise-là. Alors, on ne comprend pas
pourquoi le gouvernement ouvre toute grande
la porte à la possibilité de sous-traiter à d'autres catégories, ou à d'autres
entreprises, ou à d'autres emplois le transport, l'entreposage.
On a cette préoccupation-là au niveau aussi de
la certification initiale de la qualité du produit. Il existe des laboratoires. On représente des travailleurs
compétents à la SAQ. On sait que Santé Canada va devoir certifier, mais
on aimerait bien que les employés qui
travaillent déjà puis qui ont l'expertise puissent être mis à contribution. Et,
honnêtement, on est extrêmement préoccupés
par cette idée-là des projets pilotes dans la distribution, dans la mesure où
on est en train de nous dire :
L'État a une responsabilité et un rôle à jouer dans la distribution du
cannabis, et on va permettre des projets pilotes. Et comme d'autres
l'ont dit ici, en commission parlementaire, on sait très bien que les
entreprises privées qui pourraient
s'immiscer dans la distribution, elles, elles vont le faire uniquement pour des
raisons de profits. C'est ça, la raison
fondamentale d'une entreprise privée, qu'on soit au Québec, au Canada ou
ailleurs, alors que le rôle de l'État, ce n'est pas d'abord et avant tout de faire des profits, c'est de s'assurer que,
dans la distribution d'un produit, que ce soit de l'alcool ou du
cannabis, bien, on le fasse de façon responsable. Oui, bien sûr, les gens vont
payer pour acheter le produit...
Puis
d'ailleurs, on est favorables, justement, avec cette idée-là qu'on doit
utiliser les fonds qui vont... les profits qui vont être perçus avec la
vente de cannabis dans des programmes publics de prévention, que ce soit en
santé, services sociaux,
en éducation. Ou encore, tantôt, j'entendais des gens poser la question sur le
rôle des municipalités. On pense que
les profits liés à la vente du cannabis, ça doit servir à faire d'abord et
avant tout la prévention publique, alors qu'on sait très bien que le secteur privé n'est pas là du tout.
Si vous permettez à des Walmart puis des Couche-Tard, demain matin, ou des fournisseurs, des gens qui produisent, de
distribuer le produit, bien, ils vont le faire dans une perspective de
profits.
Donc, en terminant, oui, bien sûr, on salue
cette idée-là que la société d'État et que l'État doit assumer la
responsabilité de la distribution, mais en même temps on va inviter le gouvernement
à retirer les dimensions qui empêchent les travailleurs puis les travailleuses
qui sont à l'embauche de la SAQ de pouvoir postuler puis d'obtenir un emploi à
la Société québécoise du cannabis. Puis on va souhaiter aussi verrouiller
toutes les possibilités de sous-traitance, de privatisation puis de glissements
qui pourraient éventuellement amener le secteur privé à jouer un rôle dans la
distribution parce que, fondamentalement, l'esprit du projet de loi, ce n'est
pas ça qu'il vise. Donc, assurons-nous que par le truchement des règlements ou
par la porte d'en arrière on ne fera pas ce qu'on n'ose pas faire par la porte
d'en avant. Alors, voilà. Merci.
• (16 h 30) •
Le Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, M. Létourneau, pour la présentation de votre exposé. Nous
allons débuter les échanges avec la partie gouvernementale. Mme la ministre et députée
de Soulanges, vous disposez de 13 min 30 s. À vous la parole.
Mme Charlebois :
Merci. D'abord, saluer M. Létourneau, Mme Thériault, M. Joly et
M. Dalcé. Mais il y a deux dames, je n'en ai rien qu'une de sur ma
feuille.
M. Létourneau (Jacques) : C'est
Katia Lelièvre qui remplace Alexandre Joly.
Mme Charlebois : Voilà. Alors, merci d'être là et de nous
présenter votre mémoire. Mais j'apprécie la fin de votre présentation puisque vous concédez que le but de
ce projet de loi là, finalement, n'est pas si pire que ça, même si nous
sommes un gouvernement libéral. Ça a l'air à vous chatouiller les lèvres. Ça me
fait du bien de vous le dire.
Ceci étant
dit, je veux juste vous rappeler que, dans l'introduction de mon projet de loi... Parce que vos propos sont tellement, honnêtement, virulents que ça me tente de l'être aussi, puis ce n'est pas le sens
que j'ai normalement. Et je dois vous dire que la SAQ, c'est une entreprise
qui fait des profits. Ce n'est pas ce qui est souhaité avec la Société
québécoise du cannabis. La mission, qui est à l'article 3, vous allez le
voir à 16.1, c'est «d'assurer la vente du cannabis dans une perspective de protection de la santé, afin
d'intégrer les consommateurs au marché licite du cannabis et de les y
maintenir, sans favoriser la consommation de
cannabis». Or, oui, on va se servir
de l'expertise de la SAQ, c'est pour ça que c'est une succursale de la SAQ, la Société québécoise du
cannabis, mais ne prétendons pas que les buts et objectifs des deux
entreprises sont les mêmes.
Et savez-vous
pourquoi il y a cinq projets pilotes dans le projet de loi, cinq projets
pilotes, cinq lieux de vente possibles
autres que la Société québécoise du cannabis? Puis les projets pilotes, soit
dit en passant, tout le monde parle de ça, mais sans nécessairement
savoir qu'il peut y avoir des projets pilotes en recherche. Il peut y avoir des
projets pilotes en production. Il peut y
avoir des projets pilotes, soit dit en passant, en consommation, pour voir,
avec l'expertise de la recherche,
voir comment s'établit... le corps humain, comment il réagit, etc. Il y a
plusieurs projets pilotes possibles, mais tout le monde est
«striké» — et
je dis le mot québécois, là, «striké» — visé juste sur les cinq
points de vente, pas 5 000, cinq points de vente. Je commence à en avoir
mon truck, premièrement.
Deuxièmement,
je veux rectifier les propos de la députée de Vachon. En aucun temps ni mon
personnel, ni moi, ni le ministre des Finances, ni son personnel n'ont
eu des contacts avec Aurora. Je le dis publiquement parce que je veux que vous, cher public, sachiez que ce n'est
pas de la politique que je veux faire avec le projet de loi sur le
cannabis. Si la députée de Vachon veut venir
faire ça ici, alors que l'ensemble des parlementaires travaille positivement,
c'est son choix. Ça, c'est l'autre affaire qui me taraudait, que j'ai
besoin de vous dire, parce que ça établit des bases qui ne sont pas, honnêtement, les bases sur lesquelles on travaille
depuis le début ici, et je veux vous dire que ce n'est pas l'esprit de
la loi.
Maintenant,
cinq points de vente, vous savez que, dans les cinq points de vente... Est-ce
que vous êtes d'accord, outre la vente, pour qu'on ait d'autres projets
pilotes de recherche, de production ou de tout autre sujet que la vente?
Êtes-vous à l'aise avec ça?
M. Létourneau (Jacques) :
Veux-tu faire en faire un bout?
Mme Charlebois :
Parce que personne n'en parle, des autres projets pilotes. Tout le monde est
sur les cinq points de vente comme si c'était 5 000 points de
vente au Québec.
M. Létourneau
(Jacques) : Bien, sur la question des points de vente, là, je suis
parfaitement conscient qu'on n'annonce
pas demain matin que c'est du mur-à-mur. La seule chose qu'on dit, c'est qu'à
partir du moment où, dans le projet
de loi, cette dimension-là, elle existe, ça ouvre la porte, effectivement, à ce
qu'éventuellement ce soit par le privé que la distribution se fasse, c'est juste ça qu'on vous dit, alors qu'à
partir du moment où le gouvernement reconnaît que la Société des alcools du Québec, c'est un modèle sur
lequel on peut s'appuyer pour faire de la vente et de la distribution...
On pourra s'obstiner, là, sur la finalité de
la chose, là, mais, quand même, là, tu sais, la SAQ n'est pas juste là pour
faire des profits non plus, là. Non,
mais on vend quand même un produit qui a des conséquences majeures dans la
société québécoise encore
aujourd'hui, là. Puis on ferait peut-être le tour de la salle ici pour
constater que, dans chaque famille, il y a des gens qui ont des
problèmes avec la consommation d'alcool.
Donc, nous, la seule chose
qu'on dit, c'est qu'il ne faudrait pas non plus banaliser l'impact que l'alcool
a. D'ailleurs, les gens de la SAQ, Katia
pourrait en témoigner, il y a des formations qui sont données. On ne peut pas
vendre de l'alcool à quelqu'un qui en état
d'ébriété puis qui se met à virer le diable dans une succursale. Il y a une
approche qui est faite par les
salariés, puis il y a une formation, puis il y a une compétence qui est faite
là-dessus. Ça, c'est le premier élément.
Mme Charlebois : ...les
autres projets pilotes. Répondez-moi à ma question, les autres projets pilotes.
M. Létourneau
(Jacques) : Moi, j'ai... Sur la question de la recherche, tout ça, je
vais vous répéter ce que j'ai dit tantôt.
Il y a une expertise aussi, à la Société des alcools du Québec, sur le type de
produit puis la qualité du produit qui est vendu. Et honnêtement, là, sur le plan sociétal, je pense qu'on dispose,
en éducation puis en santé et services sociaux, au Québec, de tous les leviers pour être capables de
mesurer quel est l'impact sur les jeunes puis quel est l'impact sur les
adolescents puis les moins jeunes par rapport à la consommation d'alcool et de
cannabis. Il faudra voir puis juger en fonction des projets pilotes que vous
déposerez.
Mme Charlebois :
En fait, je vous dirai que les recherches faites sur les drogues et sur le
cannabis plus précisément sont assez
rares parce que, factuellement, savez-vous quoi, le crime organisé ne nous
donne pas leurs listes de clients pour savoir
c'est quoi, les conséquences qu'ils ont sur le système. Puis ils sont même
assez peu loquaces à dire c'est quoi, la qualité du produit, puis etc.
Maintenant,
revenons à la Société québécoise du cannabis. La formation pour les
travailleurs, êtes-vous d'accord pour
dire qu'elle doit être différente qu'à la Société des alcools, bien qu'on traite
de dépendance? Puisque nous ferons de la formation, de l'information, de l'éducation, les travailleurs qui seront
là n'auront pas la même mission qu'à la SAQ. Je ne dis pas qu'à la SAQ
ils ne sont pas fins, là. Ce n'est pas ça que je suis en train de dire. Je dis
juste qu'il y aura une formation différente. Êtes-vous d'accord avec moi
là-dessus?
M. Létourneau (Jacques) : Je
laisserais peut-être Katia répondre à ce volet-là.
Mme Lelièvre
(Katia) : Bien, effectivement, il va y avoir une formation différente,
mais, de ce qu'on en sait, cette formation-là
n'existe pas. Et actuellement personne au Québec n'a cette formation-là puisque
c'est tout nouveau, là, la légalisation qui s'en vient.
Comme vous le
dites, ce n'est pas le crime organisé, certainement, qui va nous donner la
formation. Par contre, je vous dirais
qu'il y a certains bouts qui vont demeurer les mêmes. Ces gens-là vont devoir
faire de la caisse enregistreuse, vont
devoir faire de l'éthique de vente, vont devoir s'assurer aussi de travailler
avec de la clientèle qui est difficile, et ça, les employés de la SAQ ont actuellement cette formation-là. Nous, ce
qu'on dit aussi, c'est... On trouve un peu incohérent le fait qu'on dise : La SAQ est là pour faire du
profit. C'est-à-dire, moi, quand je vais chez Couche-Tard, par exemple,
on me propose un Lotto 6/49 puis on me
demande si j'ai la carte CAA. Alors, est-ce que ces gens-là vont aussi être
exclus? Parce qu'eux autres aussi, ils sont
là pour une compagnie qui fait du profit. Est-ce que c'est la même chose au
IGA? La caissière me demande si j'ai une Air Miles. Est-ce que...
Mme Charlebois :
Excusez, M. le Président, là, on ne comparera pas des entreprises privées avec
des sociétés d'État. La SAQ, c'est
une société d'État qui est là pour faire des profits, pour amener au fonds
consolidé, alors que la société québécoise... Alors, ne mélangeons pas
les tomates et les oranges.
Ceci étant dit, je reviens avec les cinq points
de vente pour le cannabis, les projets pilotes. Savez-vous pourquoi on les a
mis dans le projet de loi? Je vais vous le dire pourquoi, parce que les
collègues qui étaient là aux consultations
ont entendu la même chose que moi certainement. Il y a des gens, dans la
population, pour ne pas dire une grande
partie... Parce que, moi, savez-vous quoi? Je demeure à côté de l'Ontario.
Connaissez-vous ça, la LCBO? Sûrement. Bon.
Alors, je peux vous dire qu'il y a des gens, moi, qui me rapportent... Moi, je
n'y vais pas, à la LCBO, parce que je suis Québécoise puis j'achète mes produits au Québec, mais il y en a, dans
mon comté, qui vont à la LCBO puis qui me disent que le vin est pas mal moins cher. Je leur laisse ça. Ce n'est pas ma
prérogative. Puis moi, je me dis, si j'ai une chance de l'acheter au
Québec, j'achète mes affaires au Québec, même si c'est un peu plus cher. Ça,
c'est mon choix à moi. Mais il y a des citoyens qui me disent ça.
Ceci étant
dit, ils me disaient aussi... Puis je ne sais pas si vous entendez ça dans
l'ensemble de la population, mais il y
a beaucoup de gens qui nous parlent des sociétés d'État... Puis tout le monde a
peur d'en parler, mais moi, je vais le dire dans le micro. Il y a beaucoup de gens qui nous parlent des sociétés
d'État et qui nous disent qu'il y a des coûts faramineux dans les sociétés d'État et que parfois elles sont
non productives. Je ne dis pas que c'est le cas de la SAQ, je ne dis pas
que c'est le cas de d'autres sociétés d'État,
mais c'est là où je vous dis que peut-être les cinq points de vente émanent,
parce que la population nous les a demandés
dans les projets pilotes. Je l'ai entendu de mes oreilles, ce n'est pas sorti
d'un chapeau. Est-ce que c'est la panacée? On va en discuter, on va
tomber à l'article par article. Mais il ne faut pas...
En tout cas,
je vous ai entendu parler du projet de loi, il y a juste la dernière phrase qui
était positive, là, parce qu'au début
c'était comme si on avait l'intention de revirer le monde à l'envers. Je veux
juste vous ramener au fait que... Puis, tu sais, peut-être que, si on travaillait ensemble, au lieu d'être
vindicatif d'un sens comme dans l'autre, je pense que ce serait plus
profitable dans l'intérêt des Québécois. Je vous laisse parler. Parce que moi,
je parle, mais je vous laisse parler.
• (16 h 40) •
M. Létourneau
(Jacques) : Bon, bien, oui, oui, Katia veut ajouter... Mais, écoutez,
j'ai déjà vu des commissions parlementaires
où on était en opposition pas mal plus carrée que là-dessus. Je rappelle que,
sur le fond, nous, on considère qu'effectivement
l'approche qui s'inspire de la Société des alcools du Québec est la bonne. Cela
dit, on s'inquiète de trois éléments. Vous nous avez entendus. La question de
l'expertise...
D'ailleurs,
vous parlez de l'Ontario. En Ontario, les pare-feux ne sont pas aussi forts que
dans votre projet de loi, hein, pas
impossible, pour quelqu'un de la LCBO, d'aller postuler sur un emploi de la
société d'État qui va avoir le mandat de
la distribution. Bien, c'est ce que vous nous dites : Tu ne peux pas
travailler à la SAQ, tu ne peux pas travailler à la Société québécoise
du cannabis.
Une voix :
...
M. Létourneau
(Jacques) : Non, non, mais...
Bien, on peut juste se rappeler que 70 %
des emplois, à la SAQ, c'est des
employés qui travaillent entre 10 heures puis 15 heures par semaine.
Ça fait qu'on dit juste que cette disposition-là, elle n'est pas juste un irritant, c'est comme si on
disait à une infirmière : Tu ne peux pas aller enseigner au cégep en
techniques infirmières.
Une voix :
...
M. Létourneau
(Jacques) : Pardon?
Mme Charlebois : ...la disposition dans le projet de loi qui interdit à un employé de la SAQ
d'aller à la SQC?
M. Létourneau
(Jacques) : Bien oui, c'est l'article 5, oui : «Une personne
ne peut être à la fois membre du personnel de la [SAQ] et de celui de la
filiale.» Il me semble, c'est assez clair. On l'a-tu mal lu? Peut-être que vous
allez nous rassurer.
Une voix :
...
M. Létourneau
(Jacques) : 23.19.
Mme Charlebois :
«La filiale ne peut embaucher ou conserver à son emploi une personne qui a été
déclarée coupable...»
Le Président
(M. Merlini) : Ça, c'est 23.20. L'autre avant.
Mme Charlebois : Oui, ça, c'est d'autre chose. Bien, il va falloir
clarifier ça parce que les personnes vont pouvoir postuler. Ce ne
sera pas un automatisme. C'est plus ça, l'histoire, là. Postuler sur un emploi,
là, c'est postuler, puis il n'y aura pas
plus de chances, parce qu'ils sont à la SAQ, de travailler à la SQC, puis ils
vont devoir avoir la formation. C'est
ça, l'idée. Mais là, de la manière que c'est formulé, je comprends qu'il va
falloir des précisions. Puis, depuis le début, je dis qu'on est là pour bonifier le projet de loi. C'est pour ça que je suis rouge de même, parce qu'honnêtement je ne comprenais pas
où vous alliez.
M. Létourneau
(Jacques) : Bien là, choquez-vous pas, choquez-vous pas!
Mme Charlebois :
Bien, moi aussi, moi aussi... Mais j'aime ça clarifier mes affaires au fur et à
mesure.
M. Létourneau
(Jacques) : Il y a la question du transport, aussi, puis la question
de... la question du transport, l'entreposage, des employés...
Mme Charlebois :
On parle du point de production à aller au point d'entreposage?
M. Létourneau
(Jacques) : Tout à fait. Et l'entreposage.
Mme Charlebois :
O.K. Puis ça aussi, vous avez vu ça dans la loi, que l'entreposage ne peut pas
être fait à la SAQ?
M. Létourneau
(Jacques) : Ce n'est pas ça qu'on dit, sauf que la possibilité est
ouverte sur des voies alternatives. Oui, c'est ça.
Mme Charlebois :
...pas stipulé là-dedans. C'est ça?
M. Létourneau
(Jacques) : Oui, tout à fait.
Mme Charlebois :
O.K., je vous entends là-dessus. Dites-moi, est-ce que vous vous êtes arrêtés à
d'autres sujets tels que les lieux de consommation, et tout?
M. Létourneau
(Jacques) : Non, on ne s'est
pas penchés sur les lieux de consommation. On a bien vu qu'il y a des municipalités, dont une au
nord de Montréal, là, qui a pris les devants sur cette question-là.
Moi, je pense qu'effectivement
c'est un débat qui
doit se faire, là, exactement au même titre qu'on le fait avec la consommation
de l'alcool. Mais ce n'est pas une question sur laquelle on est
intervenus.
Mme Charlebois :
Quels éléments, à votre avis, seraient incontournables à intégrer dans la formation
des travailleurs, outre ceux de la caisse
enregistreuse et du principe de vente? Parce
que le principe de vente n'est pas
Inspire et tout le kit, là, on n'aura pas ça
à la Société québécoise du cannabis. Mais que verriez... Qu'est-ce que vous... En tout cas, que voyez-vous que nous
pourrions mettre dans la formation?
Le Président (M. Merlini) : En
45 secondes, s'il vous plaît.
Mme Lelièvre
(Katia) : Bien, en fait, je
pense qu'on pourrait mettre dans la formation l'effet des produits. On pourrait discuter
avec la personne du niveau de THC, etc.
Mais je
voudrais vous dire que, pour la carte Inspire, par contre, c'est tout
nouveau, hein, puis ça a été accepté par le gouvernement dans le but de
répondre aux demandes du ministère
des Finances. Le mandat de la SAQ est
donné par le gouvernement, comme le mandat de la SQC va être donné par le gouvernement, avec une mission différente, j'en conviens, mais le mandat de la
SAQ a évolué avec le temps.
Si vous me permettez, la Commission des
liqueurs, à sa création, en 1921, avait comme rôle de gérer et de contrôler le commerce des vins et spiritueux. On
en est rendus à : La SAQ a pour mandat de faire le commerce des
boissons alcooliques sur le territoire
québécois. Ce mandat-là a évolué parce que
les parlementaires l'ont fait évoluer. Si on dit à la SAQ : Vous allez faire de la prévention dans
ces lieux-là, la SAQ va faire de la prévention dans ces lieux-là. La SAQ
se conforme aux demandes qui lui sont faites par son principal actionnaire et
son mandataire, qui est le gouvernement.
Donc, c'est un peu, à mon avis, de compliquer
les choses que de dire : On va faire une filiale complètement différente, parce qu'on a simplement à dire : On va donner un mandat différent à
une partie de la SAQ. Et d'utiliser les mêmes ressources, que ce soit
pour les entrepôts, que ce soit pour les gens qui sont des professionnels au
niveau des laboratoires, de la formation, et
tout ça, que, dans les succursales... ce serait beaucoup plus simple. Et, pour
la mise en oeuvre qui doit être faite
pour le 1er juillet, à mon avis, ce serait beaucoup plus facile pour le
gouvernement de ne pas avoir ça de façon chaotique puis de ne pas avoir
plein de nouveaux employés, une nouvelle structure à mettre en place, et de
prendre ce qui...
Le
Président (M. Merlini) :
Mme Lelièvre, je dois mettre un terme à cet échange avec le gouvernement, le temps est écoulé. Je dois
aller, maintenant, du côté de l'opposition officielle. M. le député de Labelle, vous disposez de 8 min 15 s. À vous
la parole.
M. Pagé : Oui, merci, M.
le Président. Alors, bienvenue en commission. Bonne année!
Alors, bien,
en fait, moi, je vous rassure, parce que, bon, c'est vrai que vous arrivez avec
votre mémoire, vous défendez votre
position, mais les échanges qu'on a eus avec la FTQ, le 7 décembre
dernier, tournaient autour des mêmes questions fort légitimes, et ils
ont exposé effectivement le 70 % du personnel qui n'était pas du personnel
à temps complet. Et, à la fin, la conclusion
était justement qu'il fallait amender l'article 23.19 de la page 9,
et c'était... En tout cas, on
pourra peut-être retourner aux galées afin de se référer très correctement,
mais ce que nous avions noté, ce que nous avons en mémoire, c'est qu'il y avait
beaucoup d'ouverture à amender cet article de loi pour ne pas empêcher une personne
de pouvoir postuler à la SQC.
Alors, là-dessus,
moi, c'était ma compréhension. Alors, c'est pour ça, même, quand j'ai vu votre
mémoire, je suis resté un peu surpris, parce que je me suis dit :
Bien, mon Dou! si vous aviez parlé à vos collègues de la FTQ, ils vous auraient
probablement dit : Non, nous, on a été rassurés par la ministre.
Alors, je
tiens à vous dire que ce qui s'est dit le 7 décembre va dans le sens de
modifier l'article 23.19. Alors, je ne sais pas si vous aviez eu
des échos de ces échanges-là.
M. Létourneau (Jacques) : Non,
mais c'est qu'on a fait le mémoire en fonction du projet de loi, là, bon.
M. Pagé : Oui, puis c'est tout à fait légitime de le
rappeler, oui, parce que c'est bien 70 % du personnel qui... Et,
vous dites, qui fait en moyenne 10, 15 heures seulement par...
Mme Lelièvre (Katia) : Oui.
M. Pagé : Oui. Alors, raison de plus, d'autant plus que
c'est du personnel déjà habitué à faire affaire avec le public,
donc des gens qui ont déjà des connaissances...
Alors, non, je pense que, là-dessus, on trouvera
certainement une façon de s'entendre. En tout cas, jusqu'à maintenant, la collaboration
est là, alors donc je n'ai pas de doute quant à la suite des choses.
Vous
souhaitez effectivement, tout comme nous, que ce soit une société
d'État. Nous, nous allons plus loin, jusqu'à dire que cette filiale de
la société d'État devrait plutôt relever de la ministre de la Santé publique plutôt
que du ministre de la Finance, parce que, comme vous avez bien présenté, lors
de la création de la Commission des liqueurs il y a 97 ans, je pense, la
volonté était fort différente.
Alors, ce que nous
disons, ce que nous souhaitons, comme plusieurs, d'ailleurs, lors de la tournée
à travers le Québec, étaient venus dire : ça
devrait être le ministre de la Santé qui devrait diriger cette filiale ou
cette nouvelle société. Pourquoi? Pour ne pas avoir justement d'obligation de rendement et de notion de profit. Nous allions
plus loin en disant que ça devrait
être la ministre de la Santé publique et non le ministre
de la Santé parce que c'est directement elle, de
toute façon, qui pilote le projet de loi. Alors, vous n'avez pas fait état de
cela. Quelle est votre position par rapport à cela? Si on amendait pour que la
filiale relève de la ministre de la Santé publique, est-ce que vous seriez
d'accord avec cela?
M. Létourneau (Jacques) : C'est ce qu'on avait dit dans le cadre de la consultation, de la tournée des régions, là.
M. Pagé :
C'est parce que, là, je ne l'ai pas lu, cette fois-ci.
M. Létourneau
(Jacques) : Non, effectivement. Mais, dans la première consultation...
M. Pagé :
Oui, à Montréal.
M. Létourneau
(Jacques) : ...oui, absolument, on avait souligné l'importance
du lien avec la santé publique, oui.
M. Pagé :
O.K. Nous proposions également que le conseil d'administration... qu'on
identifie immédiatement un peu les
compétences recherchées pour le conseil d'administration, les compétences très
en lien avec la santé publique, avec la sécurité publique, les gens du
milieu de l'éducation, du milieu de la dépendance, du communautaire, ces genres
de compétences là autour de la table, tout
en ayant évidemment des compétences au niveau de l'administration. Mais je
pense qu'il est possible d'aller chercher ce
genre de compétences là et que ce soit nommé dans la loi pour ne pas justement
avoir des gens qui aient trop la notion de
rentabilité, bon, et qu'ils répondent bien à la volonté... Quand la ministre
nous dit, de façon fort légitime...
La mission, là, lisez l'article 3, là, la mission est claire, on veut que
ce soit la prévention, on ne veut pas de
notion de profit. Alors, pour être cohérents, nous, nous disons : La
composition du conseil d'administration devrait être ce que j'énumérais
tantôt. Est-ce que vous pensez qu'on devrait aller jusque-là et le nommer dans
le projet de loi?
• (16 h 50) •
M. Létourneau
(Jacques) : Oui, oui, tout à fait. Mais nous, on est au même diapason sur la question de la santé publique et de la prévention,
là. Évidemment, la responsabilité... à partir du moment où l'État a la
responsabilité de la distribution, il faut
s'assurer effectivement que cette distribution-là n'a pas d'impact négatif, en
tout cas pas trop, hein, sur la population. Et, dans ce sens-là, c'est
sûr que la composition du conseil d'administration, la première fois où on a
été entendus là-dessus, allait dans le sens
d'une composition qui est, disons, plus à la saveur de la santé collective ou
de la responsabilité collective et sociale plutôt que celle du profit.
Ça, c'est clair, là, absolument.
M. Pagé :
Tout à fait, et c'est ce qui nous amène effectivement... quand on discute,
souvent, du fameux article 55, qui ouvre la porte à des projets
pilotes. En fait, probablement que, quand on va arriver article par article et qu'on
pourra définir ce que sont ces projets
pilotes là, peut-être que, là, on va enlever de l'inquiétude que nous avons
pour rien. Si on s'inquiète pour
rien, tant mieux, tant mieux, j'en serai fort heureux. Mais des projets pilotes
pour de la recherche ou autre chose,
ce n'est pas, jusqu'à maintenant, ce qui nous inquiétait, évidemment les
projets pilotes liés plutôt à la vente, quand personne ne va vouloir
partir une entreprise sans vouloir faire de profits. Et c'est ce qu'on ne veut
pas faire en créant la Société québécoise du cannabis.
Alors,
nous aussi, nous plaidons, oui, à l'incohérence, je dois le dire comme je le
pense, d'autant plus que, si on se donnait
du temps, si on se disait : Bien, dans cinq ans, on pourra peut-être
regarder ça, ça pourrait être autre chose. On aura au moins eu le temps de le mettre en place. Mais
là, d'arriver avec deux comparables, ça va être extrêmement difficile,
et assez facile de dire : Bien,
finalement, regardez, elles sont peut-être plus... ça coûte peut-être moins cher,
le faire au privé. Donc, nous partageons cette même inquiétude.
Mais là vous avez
amené toutefois un autre point qui est celui du transport, de l'entreposage qui
pourraient peut-être être au privé. Là, vous
l'avez pris où, celui-là? Parce que, ça, je ne l'avais pas véritablement
entendu, parce que, ma compréhension,
à partir du moment où on dit que c'est une filiale de la SAQ, je voyais très
bien utiliser les mêmes camions de
transport, je voyais très bien utiliser les mêmes entrepôts, donc le même personnel
qui travaille à l'intérieur. Alors là, vous m'avez amené sur un terrain
qui, effectivement, là, m'interpelle beaucoup.
Le Président
(M. Merlini) : Deux minutes.
M. Létourneau
(Jacques) : Oui. Jean, vas-y. Deux minutes.
M. Béket Dalcé
(Jean) : Oui. Donc, rapidement, c'est l'article 23.2 du projet de
loi qui dit : «...autoriser une personne
à faire le transport, incluant la livraison, et l'entreposage du cannabis
qu'elle vend, pour son compte.» Donc, pour nous, c'est comme une ouverture à la sous-traitance, donc permettre à la
SQC de sous-traiter avec d'autres entreprises pour réaliser ces
activités-là. Donc, nous, on demande à ce que cet article-là soit, en fait,
exclu du projet de loi.
Le Président
(M. Merlini) : 20 secondes, M. le député.
M. Pagé :
O.K., oui. Bien, en fait... Bien, je vous remercie, effectivement, parce
qu'évidemment, tu sais, on lit rapidement
puis on ne voit pas toutes les subtilités. Et, quand on dit qu'on souhaitait
avoir plusieurs groupes pour venir nous
allumer sur plein de choses que l'on pourrait avoir manquées, bien, je pense
que vous venez de nous allumer sur quelque chose qui est fort
intéressant. Je vous remercie beaucoup.
Le Président
(M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Labelle, pour ce
bloc d'échange avec nos invités. Je me tourne maintenant vers le député
de Borduas de la deuxième opposition. Vous disposez de 5 min 30 s. À
vous la parole.
M. Jolin-Barrette :
Mesdames messieurs, bonjour. Merci d'être présents aujourd'hui.
Je voudrais savoir,
dans un premier temps, est-ce que c'est la CSN qui a l'accréditation syndicale
pour les employés de la SAQ, qui détient...
M. Létourneau
(Jacques) : Oui. On représente les 5 500 employés des
magasins de distribution généraux et les professionnels, comme je l'ai dit dans l'introduction, là, qui sont plus
de 500, qui travaillent notamment dans les laboratoires.
M. Jolin-Barrette : De ceux-là, dans le fond, vous disiez tout à
l'heure : 70 % environ de ces employés-là, c'est des gens qui
travaillent entre 10 et 12 heures par semaine, globalement.
M. Létourneau
(Jacques) : Absolument.
M. Jolin-Barrette :
Qu'est-ce qui explique que ces employés-là soient à temps partiel, uniquement à
10, 12 heures par semaine?
M. Létourneau
(Jacques) : Katia, vas-y.
Mme Lelièvre
(Katia) : Bien, en fait, c'est surtout dû à la façon dont fonctionne
la SAQ. Et, étant donné que c'est un commerce de détail, bien, les
heures d'achalandage ne sont pas nécessairement les mêmes.
De
plus, on va se le dire, la SAQ crée le moins possible de postes réguliers.
Donc, on a un plancher d'emploi prévu par
la convention collective, et ce plancher-là est toujours... devient un plafond,
en fait. Donc, c'est souvent des gens qui vont venir combler des besoins. Mais, avec le temps, on est passés à
70 % des gens de succursale, là, qui sont précaires puis qui
doivent avoir souvent deux emplois pour être en mesure de survivre.
M. Jolin-Barrette : O.K. Est-ce que vous avez un estimé du ratio
d'étudiants, supposons, que vous avez ou des gens qui sont aux études,
qui occupent des fonctions à la SAQ? Parce que, par expérience, j'ai... En
fait, c'est connu, là, il y a beaucoup de
temps-partiels à la SAQ, notamment des gens qui sont chez les étudiants. Est-ce
que vous avez cet estimé-là?
Mme Lelièvre
(Katia) : Bien, je n'ai pas le ratio, mais je peux vous dire qu'on a
des gens qui étudient, qui viennent travailler
à la SAQ puis qui ne partent plus après. Donc, on en a beaucoup qui sont
diplômés puis qui restent avec le temps, mais je n'ai pas le ratio. Mais je peux vous dire que, dans la région de
Montréal et de Québec, c'est plus élevé qu'en région, où, souvent, c'est des mères de famille, des pères
de famille qui se tournent vers la SAQ pour tenter d'avoir un emploi.
M. Jolin-Barrette : O.K. Ça veut dire ils font une journée, une
journée et demie par semaine, environ. Est-ce que ça arrive qu'ils ont
des chiffres coupés selon les heures, l'achalandage? Oui?
Mme Lelièvre
(Katia) : Oui, tout à fait. Ça peut aller jusqu'à trois chiffres
coupés, pour un total de 10 heures de travail.
M. Jolin-Barrette : O.K. Au niveau de l'implantation des points de
vente de la Société québécoise du cannabis, le gouvernement a annoncé une quinzaine de points de vente pour débuter.
Comment vous voyez ça pour la suite? Parce que, bon, il y a plusieurs intervenants qui sont venus dire : Bien,
écoutez, à 15 points de vente, on ne réussit pas à rejoindre le client. Nous, notre position, c'était de limiter
ça le plus possible à 15 points de vente, et de ne pas favoriser la vente
en ligne non plus parce qu'il ne faut pas
banaliser, mais c'est aussi la question d'accessibilité. Ce n'est pas un droit
absolu non plus, d'avoir accès au cannabis, de notre point de vue. Mais
je veux vous entendre sur le réseau de distribution. Comment vous voyez ça?
M. Létourneau
(Jacques) : Bien, c'est clair qu'au départ on faisait la démarcation
entre la SAQ puis la filiale. Ça,
là-dessus, on a été clairs dès le départ, de ne pas vendre le cannabis dans le
même lieu physique que l'alcool, puis le projet de loi va dans ce sens-là. En même temps, il faudrait bien
mesurer ce que ça veut dire, 15 points de vente. Ça veut dire les grands centres. Donc, la question de
l'accessibilité dans les centres plutôt moyens va se poser. Moi, je vois,
honnêtement, difficilement comment on ne peut pas aller vers une forme
de développement éventuel parce que tout va se mesurer en fonction de la
demande puis de la façon dont va s'organiser la distribution sur le territoire.
Qu'on commence avec 15 points de vente, est-ce que c'est raisonnable? Je
ne suis pas un expert. Je ne peux pas le dire. C'est là où on avait
l'inquiétude sur les projets pilotes. Bon, Mme la ministre veut nous rassurer
en nous disant : L'objectif, ce n'est pas d'envoyer, soit dans le privé ou encore ces fameuses filiales de la SAQ,
des dépanneurs, là, qui vendent... qui sont comme une extension de... Bon, alors il faudra voir
comment tout ça évolue, mais c'est sûr que 15 points de vente au départ,
c'est quand même assez limité, là.
M. Jolin-Barrette : Je voudrais vous poser la question sur les heures
d'ouverture. À la SAQ, souvent, il y a des heures d'ouverture prolongées en fonction de certaines succursales. Pour
la Société québécoise du cannabis, comment vous envisagez ça?
Mme Lelièvre
(Katia) : Bien, en fait, on n'a pas nécessairement réfléchi à ça déjà,
là. Mais par contre je pense... puis
je vais parler en mon nom parce qu'on n'en a pas parlé dans le mémoire, mais
moi, je pense qu'on doit analyser les besoins
puis s'assurer qu'on réussit à contrecarrer le marché noir aussi. Je comprends
qu'on ne veut pas nécessairement donner
une trop grande accessibilité. Mais, s'il n'y a pas d'accessibilité du tout, le
problème qu'il va y avoir, c'est que la situation va être la même que ce qu'elle est aujourd'hui, c'est-à-dire
que le marché noir va continuer à faire de la livraison à domicile parce que c'est ça qui se passe, là, au
niveau de l'accessibilité, actuellement. Donc, je pense qu'on doit
analyser la meilleure... pour arriver au
meilleur équilibre possible entre la prévention puis s'assurer qu'on est en
mesure de restreindre puis de limiter le plus possible les dommages,
mais aussi qu'on est en mesure d'éliminer le marché noir.
D'ailleurs,
c'est ce qui a été fait, vous allez trouver que j'y reviens tout le temps, mais
avec la SAQ, à l'époque, parce que
c'était le marché noir qui contrôlait l'ensemble de ça. Et maintenant c'est
marginal, là, je veux dire, il n'y a pas beaucoup de gens qui font le commerce de l'alcool, parce que la SAQ a
bien fait son travail. Bien, écoutez, peut-être que vous en connaissez, mais moi, je connais peu de
gens, à part dans certaines exceptions, qui font le commerce de
l'alcool, là, de façon illégale, là.
Le Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, Mme Lelièvre et M. le député de Borduas. Ça met un terme à
cet échange avec la deuxième opposition. Mme la députée Vachon, vous disposez
de 2 min 30 s pour votre échange. À vous la parole.
Mme Ouellet : Oui. Bien,
bienvenue, M. Létourneau, et les gens qui vous accompagnent, de la CSN.
Moi, je
voudrais peut-être juste rappeler à la ministre, je pense que vous l'avez fait,
mais la mission de la SAQ, donc :
«La SAQ est une société d'État dont le mandat est de faire le commerce des
boissons alcooliques en offrant une grande variété de produits de
qualité», et sur tout le territoire du Québec.
Une voix : ...
• (17 heures) •
Mme Ouellet : Non, c'est juste
ça, il n'y a pas d'autre chose. Donc, peut-être que votre gouvernement lui a donné comme mandat de maximiser les profits puis
de faire des profits, mais ce n'est pas ça, la mission de base. Et j'espère qu'il n'y aura pas de
glissement de terrain dans ce sens-là avec la société de cannabis, je pense
que ce serait extrêmement important. Mais vraiment, dans la mission, je
pense que c'est important de le rappeler, parce que, quand vous dites : La mission, c'est de faire des profits, puis c'est
pour ça que les employés ne peuvent pas être aux mêmes
places puis ne peuvent pas faire la même formation, je pense qu'effectivement,
dans la mission de base, ce n'est pas la mission.
Et juste pour lui rappeler aussi, en réponse aux
attaques qu'elle m'a faites, ce n'est pas moi qui l'ai dit, que les cinq points
de vente puis les discussions... c'est
Aurora qui l'a dit ici, en commission parlementaire. Il y a des galées. Donc, c'est Aurora qui a dit qu'eux autres, ils s'attendaient, des discussions
qu'il y avait eu, qu'il
y ait cinq points de vente. C'est le maximum qui sont
prévus par les projets pilotes. Et je veux juste rappeler que le cinq points de
vente, c'est 25 %, parce qu'il y en a juste 15 de prévus. Ça fait que ça
en fait 20, ça fait que c'est 25 %.
Et ce n'est pas juste les cinq points de vente,
parce que, ce qu'on ne sait pas dans ça, c'est tout ce qui est le commerce en ligne et le commerce électronique. Et
donc, qu'est-ce qui sera possible, à travers le commerce en ligne, et ça, il n'y a comme pas de limite de territoire.
Donc, moi, je pense que c'est pour ça que, ce qu'on entend actuellement
de la CSN, il y a une préoccupation qui est
importante, et ce n'est pas la première fois qu'on l'entend. Donc, moi, je vous
comprends.
Et la deuxième intervention, c'est sur la
sous-traitance. D'ailleurs, comme mon collègue, je pense que c'est important
que vous nous ayez, là, pointé l'élément de sous-traitance. Peut-être nous
mentionner un peu plus, dans le projet de
loi, les aspects problématiques, parce qu'il l'a peut-être à deux places, là,
dans le 23 point quelque chose et dans l'article 20. Ça fait que peut-être nous clarifier pour que,
lorsqu'on va arriver à l'article par article... Bien, je pense que même
la ministre, là, était surprise d'apprendre cet élément-là. Donc, pouvoir mieux
nous spécifier.
Le Président (M. Merlini) : En
30 secondes.
M. Létourneau (Jacques) : Parfait.
Merci. Jean, veux-tu... y a-tu des trucs à ajouter là-dessus?
M. Béket
Dalcé (Jean) : Bien, je pense
que nous l'avions clairement dit. Donc, il ne faut pas essayer
d'atteindre des objectifs
indirects par l'ouverture aux projets
pilotes. Cinq sur 20, ça fait beaucoup.
C'est 25 % effectivement.
Donc, il faut s'assurer de ne pas envoyer ce
message-là à la population. L'objectif, d'abord, c'est un objectif de santé et
de sécurité publique, et non
l'inverse. Donc, donner la chance au privé d'effectuer des projets pilotes,
pour nous, ça n'a pas de sens, donc
c'est chercher l'évidence. L'évidence, c'est que l'entreprise privée est là
pour réaliser des profits, alors que ce n'est pas l'objectif qui est
visé dans le cas de la commercialisation... dans le cas de la légalisation de
la commercialisation du cannabis. Puis il faut éviter aussi à ce que l'État
sous-traite, en fait. Donc, dans le discours politique, on dit que c'est une
société publique, alors que, dans les faits, on se donne la possibilité de tout
sous-traiter. Moi, je pense qu'il faut éviter... que le gouvernement évite
d'aller dans cette direction-là. On sait qu'il y avait une forte tension au
sein même du gouvernement...
Le
Président (M. Merlini) : M. Dalcé, je dois interrompre.
Malheureusement, le temps est écoulé avec l'échange avec la députée de
Vachon.
M. Jacques Létourneau, M. Jean Dalcé,
Mme Sandrine Thériault et Mme Katia Lelièvre, représentant la
Confédération des syndicats nationaux, merci de votre présence et merci de
votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends quelques instants et j'invite la
Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec à prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 3)
(Reprise à 17 h 6)
Le
Président (M. Merlini) :
Nous reprenons donc nos travaux. Nous avons le plaisir d'accueillir la
Fédération interprofessionnelle de la santé
du Québec. Vous disposez de 10 minutes pour faire
votre exposé, je vous invite à présenter les gens qui vous accompagnent,
et ensuite nous procéderons aux échanges avec les membres de la commission.
Bienvenue à la CSSS. À vous la parole.
Fédération
interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ)
Mme Bédard
(Nancy) : Merci, M. le Président. Mme la ministre, MM., Mmes les
députés. Alors, je me présente : Nancy
Bédard, je suis la présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé
du Québec. Je suis accompagnée de Catherine
Gervais, à ma droite, qui est économiste à la santé à la fédération, et Shirley
Dorismond, qui est vice-présidente à la
fédération. Donc, on est ici, bien sûr, aujourd'hui, pour vous transmettre les
préoccupations de nos 75 000 professionnels en soins et
proposer quelques pistes de bonification pour le projet de loi n° 157.
Donc, le
gouvernement fédéral s'apprête à légaliser, hein, la drogue la plus consommée
au Québec, comportant une substance
qui est psychoactive, dont l'usage peut avoir des effets néfastes sur la santé,
et plus particulièrement chez les jeunes. Donc, en ce sens, la FIQ
souhaite que le gouvernement du Québec se donne les moyens, un, d'investir dès maintenant
pour appuyer les équipes sur le terrain en santé publique et aussi dans les
hôpitaux, nos CLSC, les écoles et les centres
de désintoxication; deux, d'appuyer aussi les intervenants avec les bons outils
en développant des formations qui vont
mettre à profit l'expertise des professionnels en soins; et troisièmement,
d'envoyer le message que le cannabis, dans toutes ses formes, peut avoir
des effets néfastes sur la santé.
Cependant,
d'entrée de jeu, je ne peux pas passer sous silence la surcharge actuelle de
travail et la détresse des professionnels en soins qui accentuent nos
appréhensions quant à notre capacité réelle à faire face à l'impact de la légalisation du cannabis dans les prochains mois.
Vous le savez très bien, nos membres, actuellement, sont à bout de souffle. Trop d'heures travaillées en ligne, manque de
postes à temps complet, manque de personnel pour répondre aux besoins
des patients. Ce sont les défis quotidiens
auxquels font face, actuellement, l'ensemble des professionnels en soins sur le
terrain.
Dans ce contexte, il n'est pas surprenant que plusieurs
de nos membres demeurent sceptiques par rapport à l'échéancier de mise en oeuvre rapide, pour elles, je dirais même,
improvisé, et imposé par le gouvernement fédéral. Vous le savez très bien, qu'elles sont aux premières
loges, souvent, pour observer les effets soit positifs ou négatifs des
décisions gouvernementales en santé sur la
population. S'il y a lieu, ce sont elles qu'elles auront à accueillir peut-être
plus d'accidentés de la route, qui
vont devoir aussi accompagner les jeunes et les parents, qui vont devoir
rapidement faire des activités de sensibilisation, et j'en passe.
Donc, pour
nous, il est urgent qu'on investisse dès maintenant au moins 25 millions
de dollars sur le terrain en prévention,
plus particulièrement auprès des jeunes. On ne parle pas seulement de campagnes
de publicité, ici, mais bien d'activités qui sont ciblées pour rejoindre
les jeunes et leurs proches où ils se trouvent, en tenant compte aussi des particularités des régions et des communautés.
C'est très important. Tout ne doit pas être formaté, décidé systématiquement
dans un bureau, qui fait en sorte qu'on va
mettre des éléments en place, de cet ordre-là, qu'ils seront les mêmes
partout au Québec. Et, comme ces actions
n'obtiendront pas des résultats du jour au lendemain, on le sait, c'est
pourquoi, aussi, on suggère d'assurer la récurrence de ces
investissements.
• (17 h 10) •
Au niveau du Fonds de prévention et de recherche
en matière de cannabis, on fait état des soins curatifs, mais pas des services psychosociaux. On croit qu'il est
nécessaire de les inclure, nommément pour répondre adéquatement aux besoins des jeunes et des équipes sur le terrain.
Nos membres, bien sûr, connaissent déjà assez bien, hein, les effets
négatifs de la consommation du cannabis.
Certaines d'entre elles ont même développé une expertise pointue en la matière.
Elles travaillent déjà souvent en santé
mentale, en pédopsychiatrie, dans la rue, auprès de la population vulnérable et
dans les urgences pour recevoir, entre autres, les cas de psychose.
Donc, pour nous, il serait inconcevable de ne pas utiliser à son maximum leur expertise. Bien qu'elles se
sentent en confiance, les professionnelles en soins reconnaissent la
nécessité de développer des outils, dans le cadre du nouveau contexte, pour
appuyer leur travail.
La
légalisation du cannabis va nécessiter des ajustements dans le milieu de la
santé, mais aussi de l'éducation, de la sécurité civile et de la justice. Ça demande une compréhension commune
des objectifs de la démarche de la légalisation, et, pour nous, c'est par la formation qu'on va y
arriver. La FIQ souhaite une formation solide, autant théorique que
terrain, qui met à profit l'expertise des professionnelles en soins, et dont le
développement sera confié à la santé publique. En conséquence, on propose aussi
que le comité de vigilance réserve un siège à une professionnelle en soins.
Finalement, on a une
inquiétude en ce qui concerne l'évolution du marché du cannabis. Vous le savez,
il y a beaucoup de produits dérivés du cannabis, puis on peut les consommer
aussi sous toutes formes. Donc, juste pour en nommer
un peu, là, on passe des jujubes, à l'huile, aux produits de boulangerie. Ces
produits pourraient être particulièrement attrayants pour nos jeunes. Donc, le projet de loi, le chapitre IV
expressément, interdit effectivement de fumer le cannabis, mais non de le consommer. Donc, est-ce que ça veut
dire qu'on pourrait consommer des jujubes au cannabis dans une salle d'urgence, par exemple, en questionnement? On
pense qu'une partie de ces questions, oui, relève peut-être du fédéral,
mais, pour nous, le message doit être très,
très clair : C'est la consommation du cannabis sous toutes ses formes qui
doit être interdite dans certains endroits, et qui sont aussi néfastes
pour la santé, ça doit être clair comme message.
Des questions comme celles-ci, à six mois de
l'entrée en vigueur de la loi, il en reste encore plusieurs à traiter. Il y a beaucoup, beaucoup à faire. On
doit se donner les moyens de protéger adéquatement notre population et
aussi nos jeunes. Les intervenants sur le
plancher, sur le terrain doivent pouvoir jouer pleinement leur rôle d'ici
quelques mois. C'est le geste responsable à poser maintenant et pour
l'avenir. Merci.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme Bédard, pour la
présentation de ce mémoire. Nous allons débuter immédiatement les
échanges avec Mme la ministre et députée de Soulanges. Vous disposez de
13 min 30 s. À vous la parole.
Mme Charlebois :
Merci, M. le Président. Alors, merci, Mme Bédard, madame — mon
Dieu, Seigneur, excusez-moi! — Dorimond... On dit-u Dorimond ou
Dorismond?
Mme Dorismond (Shirley) :
Dorismond.
Mme Charlebois :
O.K., excusez-moi. Et Mme Gervais, d'être là. C'est fort important d'entendre
votre point de vue aussi. Et je vois
que vous... Bien que vous nous fassiez des remarques, vous adoptez une attitude
positive en ce sens de bonifier le projet de loi, et j'apprécie ça
beaucoup.
Je vais aller
dans certains sujets plus précis tout de suite au début, parce que j'ai peur de
les échapper, à la fin, et on pourra
parler des autres sujets par la suite. Il y a des choses qui ont retenu
vraiment mon attention. Puis je ne veux pas minimiser le travail des gens à la FIQ, là, ce n'est pas ça du tout, du
tout, du tout. Quand on parle de modifier l'article 88 en changeant
25 millions par 50 millions, d'où ça vient, le 50 millions? Sur
quelle base vous avez mis ça, ce chiffre-là?
Mme Bédard
(Nancy) : Bien, c'est-à-dire
qu'on évalue que... de s'assurer d'avoir les sommes adéquates pour
pouvoir bien faire le rôle en prévention. Puis en ajoutant, pour nous, tout le
volet psychosocial, on voulait s'assurer qu'il
y ait les sommes suffisantes pour être capable de faire le travail dans ce volet-là qui n'était pas nécessairement
inclus, en tout cas, qui n'était pas nommé. Donc, juste le volet
psychosocial peut doubler, nécessairement, pour les premières années certainement,
là, d'application, ce montant.
Mme Charlebois :
Quand on parle du réseau de la santé,
c'est sûr, on parle des services
sociaux. Je suis la ministre
responsable des services sociaux, honnêtement, j'ai plein de titres, mais, dans
le fond, c'est services sociaux sans les aînés,
là. Puis même les aînés ont des services sociaux. Ça fait que tout le monde a des services sociaux dans sa vie un jour ou l'autre. Alors, je veux juste vous rassurer dans ce sens-là, oui, c'est dans le grand réseau, mais santé et services sociaux. Alors, les services psychosociaux, à mon avis,
ils sont inclus là-dedans, puis, oui... Tu sais, quand je parle de formation
d'appoint pour les médecins, les infirmières, bien, il y a
aussi les travailleurs psychosociaux, effectivement, les policiers. Je ne peux pas tous les nommer à chaque
fois, mais ce que je constate, c'est que, dans les cursus de formation, il
y a
clairement un manque, et je pense qu'on va devoir, un,
ajuster les cursus pour ceux... les cohortes qui s'en viennent, mais il va falloir faire une formation
d'appoint pour les gens qui sont déjà en poste. Est-ce que vous êtes d'accord avec ça?
Mme Bédard
(Nancy) : Absolument.
Par contre, ce que je pourrais rajouter... Vous me rassurez,
et c'est bien. Cependant,
dans le domaine de la santé, et pour avoir été plus particulièrement proche des terrains il n'y a pas si longtemps que ça, ce qui n'est pas nommé, souvent, laisse place, dans l'application ou les sommes reçues par les établissements, à dire que ce n'est pas nommé, ce n'est pas inclus, donc
on prend une somme d'argent puis on peut avoir l'intention de
l'investir différemment. Alors, pour nous, le fait de nommer, c'est plus une
expérience peut-être sur d'autres volets. Quand les choses ne sont pas nommées, parfois on se dit : Bien, ça fait sens
puis ça devrait être inclus. Mais honnêtement, dans le domaine de la santé, particulièrement quand il y a
des enveloppes budgétaires qui arrivent, ce qui n'est pas nommé est
très, très difficile à faire reconnaître par
la suite. Alors, c'est juste pour faciliter le travail. Si c'est nommé, alors
il n'y aura pas là de difficulté d'interprétation
sur les demandes qu'on pourrait faire ou l'évaluation de besoins par les
professionnels en soins afin d'être capable de développer des programmes,
sensibiliser. Quand ils vont déposer des demandes aux gestionnaires,
potentiellement, ce serait plus facile si c'était nommé.
Mme Charlebois :
En prévention et sensibilisation, pas nécessairement en traitement.
Mme Bédard
(Nancy) : Absolument.
Exactement. Parce qu'actuellement on est énormément dans le curatif,
parce que c'est illégal, et, quand on
travaille, on va recevoir quelqu'un qui est en psychose à l'urgence, mais on va
être très dans le curatif et tout le restant, bon, on va les référer à
des organismes, à des suivis, mais ce n'est pas nécessairement les
professionnels en soins de la santé qui vont travailler sur la prévention, la
sensibilisation, il n'y a pas vraiment... sur lesquels ces volets-là ont été mis de l'avant
actuellement. Alors, c'est en ce sens-là que, pour nous, certains volets,
c'est important de les nommer.
Mme Charlebois :
Merci de me le souligner. Puis je veux juste que vous sachiez que... Vous savez
qu'il y a une table mensuelle où les
P.D.G. d'établissement à travers tout le Québec siègent avec le ministre de la
Santé et la ministre déléguée des
Services sociaux, et nos sous-ministres sont là aussi, et je peux vous assurer
que maintenant beaucoup de choses
sont budgétées avec une cible et un sujet particulier. Et je suis... À savoir,
c'est beau de faire l'annonce, mais je veux
savoir si l'argent a été investi là où on avait dit qu'on le ferait. Alors,
merci de me le rappeler, puis je vais certainement porter une attention
à ce que vous venez de me dire.
Maintenant, sur les produits, quand vous me
parliez tantôt, vous avez dit, bon, il y a plusieurs choses qui sont dites au niveau de la consommation fumée, là, mais
les produits dérivés, en ce moment, ce n'est pas légal par le fédéral, puis nous autres, on s'est gardé un pouvoir
réglementaire. Ce ne le sera pas plus au Québec, mais on s'est gardé un
pouvoir réglementaire pour voir, dans la suite des choses... Mais on n'ira pas...
tu sais, on y va de prudence, là, avec le projet de loi qu'on a. Tout ce qui est permis, en ce moment, c'est le cannabis
séché, l'huile de cannabis, le cannabis frais et sous forme de concentré puis, évidemment, les
accessoires pour consommer ces choses-là, mais il n'y a pas de produit
dérivé, en ce moment. Puis, avant d'y
arriver il va falloir faire beaucoup de recherche et de... j'allais dire de
consultations, parce qu'on n'est pas rendus là, je pense, à ce
moment-ci.
Maintenant,
je vous ai entendue parler de votre personnel, puis ça m'a interpelée beaucoup
quand vous dites... Puis vous nous dites : Passez de
25 millions à 50 millions, puis vous nous dites que votre personnel a
besoin de ressources supplémentaires. Est-ce
que vous prévoyez que la consommation va augmenter à ce point ou si ce n'est
pas plus parce qu'on fait des constats en ce moment qu'on aurait
peut-être dû faire avant, même si ce n'était pas légal? Comprenez-vous ce que
je veux dire?
• (17 h 20) •
Mme Bédard
(Nancy) : Je pense que les
deux réponses sont bonnes, c'est-à-dire que, oui, les professionnels en soins pensent qu'il va y avoir effectivement... il
pourrait y avoir potentiellement une augmentation de la consommation. Puis souvent... On va se donner un exemple. On va
se dire que probablement qu'ici on a tous... tu sais, l'alcool est
légal, et on en a tous chez nous. Il y en a qui ont des belles grosses caves à
vin, il y en a qui en ont des plus petites, il y en a qui en gardent une par semaine. Et c'est sûr que l'augmentation de la consommation potentielle n'est peut-être pas pour
demain, mais, dans nos générations futures,
comme l'alcool est parti, on faisait un peu l'analogie tout à l'heure, où on va être dans 15,
20 ans avec les autres générations et l'accessibilité?
Les
produits dérivés, vous dites : On n'est pas là aujourd'hui. Cependant, ils
existent déjà. Alors, ça va être la cohabitation
de la légalisation de certains produits versus tous les produits dérivés qui
existent. Alors, on ne s'en occupe pas tout
de suite, mais on va nécessairement rapidement, j'imagine, avoir à s'en
occuper, parce que, là, on va augmenter le glissement, si on veut, ou
l'incompréhension.
C'est
sûr que, si, au niveau de la commercialisation, vous réussissez — en
tout cas, je vous ai entendus tout à l'heure aussi — à bien garder le fait
qu'on ne s'en va pas vers des entreprises, là, à profit, j'ai lu quand même que
la commercialisation, selon certains experts, peut porter plus à une augmentation,
si on veut, que la légalisation en soi. Cependant,
l'analogie de l'alcool, c'est : À
un moment donné, quand quelque chose est légal, c'est plus facile d'en avoir chez soi. Peut-être pour ceux qui n'en prennent pas, puis qui n'en
consomment pas, et qui vont vivre la transition, ce n'est pas ça qui va nous faire qu'on va commencer à
fumer ici. Cependant, dans 10 ans, bon, l'alcool, aux termes de
l'alcool, 10 ans plus tard, on en a à peu près
tous à la maison. Alors, où va être le cannabis? C'est en ce sens-là que les
professionnels en soins disent : Bien,
de cinq à 10 ans, on a beaucoup, beaucoup de boulot à faire pour potentiellement
que ce produit-là ne devienne pas une armoire banale dans la maison, parce
qu'elle peut avoir des effets très, très néfastes aussi, chez les jeunes
particulièrement.
Donc, c'est en ce sens-là que les
professionnels en soins se disent : Il pourrait y avoir une augmentation,
quand quelque chose devient légal. L'angle du fait qu'on veut
légaliser, c'est pour réduire les méfaits. Ce n'est certainement pas pour réduire la consommation, que j'ai compris.
Alors, si on peut réduire les méfaits puis gagner ce pari-là, c'est là-dessus
qu'on a travaillé notre mémoire, avec cet angle-là. On n'est pas nécessairement
à penser qu'il n'y aura pas plus de consommateurs,
au contraire, pour nous. En tout cas, les professionnels en soins, ce qu'ils pensent,
c'est, oui... Et, ceux qui consomment,
bien, on va en connaître plus aussi. Alors là, on ne le sait pas, comment il y
a de monde qui consomment, parce que c'est illégal. Alors, demain matin,
qu'est-ce que ça va devenir...
Mme Charlebois :
...déjà, mais vous ne savez pas ce qui...
Mme Bédard (Nancy) : Oui, c'est ceux qu'on voit, puis plus ceux qu'on
ne voit pas, parce que ceux qu'on ne voit pas qui ont besoin d'aide, ça peut prendre du temps avant qu'ils
viennent. Les jeunes ne vont pas cogner au bureau de l'infirmière
scolaire. Mais là, si ça devient légal, il va-tu y en avoir 10 de plus parce
que, là, ils vont se sentir... Il peut y
avoir, là, vraiment un nombre qui vont avoir besoin ou qui vont
vouloir avoir des renseignements, se sensibiliser, venir dire qu'ils ont besoin d'aide parce que c'est légal. Donc,
ceux qu'on voit, c'est ceux qui sont vraiment pris avec des problèmes, qui arrivent avec
des problèmes de santé comme des psychoses, de la
schizophrénie... ou un jour ils se disent : On en a assez.
Cependant...
Mme Charlebois :
Oui, d'où l'importance de la prévention, de l'éducation et tout ça dès la fin
du primaire et j'allais vous dire aussi que contrairement à d'autres États où
ils veulent en faire une profitabilité, nous, ce n'est pas le cas au Québec, puis ce
qu'on dit, c'est qu'il n'y aura pas de promotion de tout ça. Bon, vous avez
raison, on ne peut pas prévoir dans
20, 25 ans, mais ce que je veux vous dire, c'est qu'à tous les ans le
comité de vigilance va déposer un rapport qui va être rendu public par le ministre de la Santé. Il y aura aussi
des mandats qui pourront être donnés par le directeur national de santé
publique à l'Institut national d'excellence en santé et/ou l'Institut de santé
publique pour faire l'analyse des banques de
données qu'on aura, parce que là, enfin, on va avoir du concret pour faire des
analyses. Mais la loi, telle qu'elle
est rédigée en ce moment... le projet de loi, en fait, parce que ce n'est pas
une loi encore, là, il n'est pas adopté, le projet de loi, tel qu'il est rédigé en ce moment, stipule que dans trois
ans il faudra revoir, puis ensuite aux cinq ans, un peu comme on a fait avec le tabac. Mais, dans trois
ans, si les parlementaires décident de raccourcir les délais... Parce
que le cannabis, en soi, ce n'est pas
nouveau, là, sauf que le processus de légalisation, c'est nouveau, là. La
légalisation faite par le gouvernement
fédéral, nous autres, on l'encadre. Ça fait qu'il va falloir s'ajuster à
travers tout ça. Et, si les parlementaires, dans trois ans, décident que
ça prendra un autre trois ans avant de réviser, bien, on va voir.
Mais moi, je fais confiance au temps
puis je ne pense pas que les gens, on est dans un momentum d'augmenter les dépendances. On est plus dans une perspective
de santé publique au Québec, maintenant, comparativement à il y a 20 ans, dans plusieurs domaines, pas juste
les drogues, là, la consommation d'alcool, nos habitudes de vie. Moi, en
tout cas, je me rappelle de mon adolescence
puis de mon père qui me disait : Ne fume pas, ce n'est pas bon, mais le
cendrier était bien plein à côté de lui, tu sais. Aujourd'hui, on nous explique
pourquoi ce n'est pas bon de fumer, combien qu'il
y a de produits toxiques. Nos jeunes... Des fois, je... J'ai huit
petits-enfants, j'en parle souvent, de mes huit petits-enfants, c'est mes huit petits amours. Mais ma
plus vieille, qui a six ans, elle, elle n'a jamais vu personne fumer,
dans la famille, elle ne comprend pas de quoi on parle quand on parle de ça
puis, tu sais, elle n'a pas d'environnement autour d'elle... C'est sûr qu'elle
va finir par en voir, mais, comparativement à moi quand j'étais petite, c'est
bien différent.
Alors,
je pense que la perspective change. Est-ce qu'elle peut changer encore dans
20 ans? Je vous le concède, mais
je fais confiance au processus parlementaire pour revoir puis garder ça serré,
qu'on puisse protéger la santé de notre population, parce que, vous
l'avez dit, ce n'est juste dans le curatif qu'on peut régler les affaires,
c'est en amont.
Je
n'ai toujours pas d'explication, plus, sur le 25 millions de plus, là.
Vous m'avez dit, oui, parce qu'on pense d'avoir besoin de plus de personnel, mais il n'y a pas de chiffres.
Comprenez-vous ce que je veux dire? Vous ne m'avez pas chiffré exactement en quoi... Parce que, du fait
qu'on sait qu'on voit déjà les gens, est-ce que ça va augmenter tant que ça, quand ce n'est pas le but? Tout ce qu'on veut,
c'est ramener les gens du marché illicite vers un marché légal ou
licite. Si ça n'augmente pas, pourquoi, tu sais... Parce que le 25 millions...
c'est que la Société québécoise du cannabis fasse des profits ou qu'elle n'en fasse pas, elle va devoir l'investir dans la
prévention, et ça va s'ajouter à ce qui se fait déjà. Mais, au-delà de tout ça, si profits il y avait, ça va augmenter l'assiette qui va
permettre de faire plus de prévention. Alors, je vous laisse répondre,
là, parce que j'en ai dit beaucoup.
Le Président
(M. Merlini) : Très, très, très rapidement.
Mme Bédard
(Nancy) : Je vais laisser Catherine, pour le 50 millions,
peut-être préciser certains éléments. Cependant,
ce que je veux porter à votre attention... Parce que, quand je parle au nom des
professionnels en soins, j'ai quand
même des professionnels en soins en santé publique aussi, et, dans les
dernières années, elles se sont vu quand même amputer, là, certains éléments de leur budget, en tout cas, et leur
pointe de tarte, leur assiette est un petit peu plus difficile à travailler qu'avant. Donc, il y a de la
réorganisation qui se fait actuellement, et, en tout cas, leur compréhension,
ou dans leur travail à tous les jours, elles n'ont pas la même latitude qu'elles
avaient avant. Donc, effectivement, en
même temps que vous dites :
Depuis plusieurs années, on est beaucoup plus dans une
approche de santé publique, je suis tout
à fait d'accord avec vous, cependant certains signaux, avec certaines
optimisations budgétaires dans les dernières années, le projet de loi
n° 20, beaucoup de... la réforme a changé des éléments qui font
questionner, paradoxalement, d'un autre côté...
Le
Président (M. Merlini) : Malheureusement, Mme Bédard, je
dois vous dire que le temps est écoulé pour cet échange avec le gouvernement. Nous avons d'autres parlementaires qui ont
sûrement aussi leurs questions qu'ils aimeraient partager avec vous. M. le député de Labelle, de l'opposition officielle,
vous avez 8 min 15 s pour votre bloc d'échange. À vous la
parole.
M. Pagé :
Merci, M. le Président. Encore une fois, moi, je suis inquiet quand je vous
entends, parce que vous dites : On
a besoin de moyens, on a besoin de personnel, on a besoin de tout cela, et
j'entends que ce n'est pas en vigueur, ce n'est pas commencé. Est-ce qu'il y a un processus d'embauche qui est
commencé pour le personnel que vous pourriez avoir besoin? Est-ce qu'on vous a déjà communiqué un peu
les dépliants, la stratégie de prévention? Parce que tout le monde dit : Il faut, il faut, il faut, mais à quel
moment on va être prêt à déployer cette stratégie et que le personnel va être
embauché? Êtes-vous en mesure de nous
répondre cela? Parce que plus j'entends des gens venir discuter avec nous,
plus je suis inquiet, parce que je me dis...
Je souhaite que ce ne soit pas à partir de l'automne prochain où on va vraiment
déployer tout cela. On a beau
annoncer qu'il va y avoir des millions de dollars, mais il faut que l'argent
soit débloqué maintenant, avec un scénario très concret puis un plan de
match immédiat. Est-ce que vous l'avez vu, ça, ce plan de match là?
• (17 h 30) •
Mme Bédard (Nancy) : Non, il
n'y a pas de plan de match, en tout cas, qui est venu à nos oreilles ni aux
professionnels en soins, actuellement, sur l'ajout ou le regard que les
gestionnaires doivent poser sur le besoin soit en nombre de professionnels en
soins, l'équipe, matériel, ressources. Non. La réponse, c'est non. Notamment,
quand on demande que le 25 millions
soit dès maintenant investi, bien, c'est aussi pour regarder les besoins, donc,
en ressources mais aussi en
prévention, pour répondre à l'ensemble des éléments qu'on a soulevés tout à
l'heure. Et c'est tellement vrai, par-dessus ça, c'est qu'actuellement le réseau, vous le savez, vous nous avez
entendus, et là on est plus du côté du ministre Barette,
mais on a des difficultés, là, à travailler pour rehausser les postes dans un
contexte où on n'ajoute pas nécessairement au réseau de nouveaux éléments.
Alors, c'est pour ça. Tout à l'heure, je disais : Le contexte est déjà extrêmement difficile, donc on ajoute actuellement un nouveau contexte où on a besoin de ressources.
Alors, ça n'a pas été porté à notre
attention ni au niveau des professionnels en soins, donc l'inquiétude est d'autant plus
élevée, là, par rapport aux délais pour nos professionnels en soins.
M. Pagé : Bien, moi, je vais vous demander quelque chose, puis quelque chose que je vais demander aussi à la ministre,
là, parce que de plus en plus, bon,
on nous parle de 25 millions, de 50 millions, certains peut-être même
plus, mais là il va falloir qu'on voie clair
dans tout ça, là. Et moi, j'aimerais, lorsque ce sera possible, de ventiler
votre 50 millions pour qu'on
voie clair dans tout ça. Et j'en fais aussi la demande à la ministre, là, à la
partie... au gouvernement puis aux gens
qui l'entourent, parce que, quand on annonce 25 millions, j'imagine qu'on
ne l'a pas fait sur un coin de table, à peu près, comme ça. Est-ce qu'on peut le ventiler pour qu'on puisse
comprendre ce qu'il y a, qu'est-ce qu'on va faire avec le
25 millions, pour qu'on comprenne?
Bien, si on
en a assez, je ne dirai plus un mot puis je vais féliciter. Mais, si on se rend
compte que, finalement, on en a
besoin d'un peu plus, bien, on essaiera de s'ajuster. Puis c'est bien de
l'inscrire dans la loi, là, mais il faut savoir on va faire quoi avec ça, là. Tu sais, quand je
divise par 17 régions administratives, ça fait à peu près 1,4,
1,5 million par région administrative, là, on ne fait pas
grand-chose quand on fait la nomenclature de tous les besoins que nous avons.
Alors, c'est
pour ça que moi, je le demande, là, vraiment, là, par votre présence
aujourd'hui, à vous, si vous pouvez nous
ventiler, mais également à la partie gouvernementale, s'ils peuvent nous
informer pour qu'on comprenne bien ce qu'on va faire avec tout ça et
qu'on puisse voir si effectivement on est capables de répondre aux besoins.
Je vous amène
à la page 11, la recommandation 6 : «De considérer l'ensemble
des façons dont le cannabis peut être consommé. Puis là vous mettez
entre parenthèses «fumé». Ça, c'est assez clair. «Vaporisé», bien, évidemment,
c'est à partir de l'huile, mais là on
comprend qu'on va moins déranger. «Mangé», «appliqué topiquement», donc ça,
c'est avec une crème, c'est ce que je comprends.
Bon, là, la
loi fédérale a été amendée, C-45, moi, c'est ce qu'on me dit, a été amendée et
prévoit que les produits... l'huile
va être légalisée en même temps que le cannabis qui est consommé, brûlé, et que
la loi C-45 a été aussi amendée pour
prévoir que les produits dérivés vont l'être dans l'année suivante. Alors là,
on comprend que tout ça n'arrive pas nécessairement en même temps.
Vous faites
des recommandations là-dessus. Moi, je comprends qu'il va falloir vraiment
qu'on légifère en fonction de cela
aussi, et là je ne le vois pas beaucoup, là, ou à peu près dans le projet de
loi n° 157. Vous nous l'amenez de façon un peu plus claire. Mais
pouvez-vous m'en dire un peu plus sur vos attentes par rapport à cela?
Mme Bédard (Nancy) : Je vais
laisser Catherine, en premier lieu, vous expliquer un peu...
M. Pagé : Si on avait à
présenter des articles, des amendements, là, pour répondre à votre
préoccupation, là.
Mme Bédard (Nancy) : Oui. Il y
avait le 25 à 50 millions. Je vais laisser Catherine aussi, si vous voulez...
M. Pagé :
Bien, oui, sur le 50 millions, ça, vous pouvez me répondre juste, oui ou
non, si vous êtes capables de me le ventiler, et quand vous allez
pouvoir nous le faire, là.
Mme Gervais (Catherine) : Oui,
bonjour. Moi, c'est Catherine Gervais.
Alors, oui,
le 25 à 50 millions, ce qu'on a fait, c'est qu'on a fait un examen
des centres d'activité, des programmes-services qui étaient en lien avec plus les services psychosociaux, parce que,
bien que la ministre déléguée nous a mentionné, tout à l'heure, que, bon, c'était dans l'esprit de la loi de les inclure, dans le projet de loi c'est vraiment écrit que les fonds de prévention et de
recherche doivent être liés aux soins curatifs. Alors, on trouvait que c'était
assez restrictif comme définition. Alors, on s'est dit : Dans l'optique où on
inclut les services psychosociaux, maintenant... on a fait l'examen des programmes-services. 50 millions, là, on était à un petit peu plus que
1 %, là, de l'ensemble des dépenses actuelles de certains programmes-services, puis c'est à peu près
environ 50 $ par utilisateur actuel, là, si on fait une règle de trois
par rapport à ça. Alors, on trouvait que ce n'était vraiment pas un luxe, là, lorsque
nos professionnels nous mentionnent les besoins sur le
terrain.
Mme Bédard
(Nancy) : Puis, finalement,
en lien avec votre question sur la recommandation, les professionnels en soins sont préoccupés par tous les produits
dérivés. Et, dans les produits dérivés, c'est encore plus difficile de
pouvoir connaître la dose de THC, tout l'effet, le nombre d'heures quand on a
mangé un produit de boulangerie, qu'est-ce qu'on met dedans.
Donc, l'ensemble des produits dérivés comportent
aussi des effets néfastes, et, pour nous, bien, il faudrait qu'il y ait un message très, très clair. Donc, on
souhaite vraiment que l'usage de l'ensemble de ces produits, oui, dans
certains milieux, soit déjà restreint et qu'on ait des signaux clairs à cet
effet-là.
M. Pagé : Oui. Bien, en fait, oui, je comprends bien votre
message d'autant plus qu'effectivement ça va être légal beaucoup plus
rapidement que prévu.
À la
page 2, l'interdiction de fumer du cannabis dans les mêmes lieux que ceux
où l'usage du tabac est interdit, est-ce que vous allez jusqu'à dire
aussi où l'alcool est interdit?
Mme Bédard
(Nancy) : On l'a travaillé surtout en termes de...
M. Pagé :
Parce qu'on n'a pas le droit de consommer de l'alcool en marchant sur la rue,
là?
Mme Bédard (Nancy) : On est allés surtout en lien avec le tabac, là,
ça, c'est sûr, là, c'est plus comme ça que nous, on l'avait regardé, mais bien sûr que tous les lieux publics, pour
nous, notamment l'alcool, pourraient être aussi un élément
important à regarder et à restreindre.
Le
Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, M. le
député de Labelle, pour ce bloc
d'échange avec nos invités. Maintenant, je me tourne vers le deuxième groupe d'opposition, M. le
député de Borduas, vous disposez de
5 min 15 s. À vous la parole.
M. Jolin-Barrette :
Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames. Merci d'être présentes aujourd'hui.
Alors,
à votre recommandation 3b, vous souhaitez qu'on fasse passer «de cinq à
10 ans le nombre d'années où le ministre des Finances comblera la
différence entre les revenus de la taxation des produits du cannabis et un
seuil de 50 millions». Donc, je
comprends que vous, vous dites : Bien, si on est déficitaire, il faut
faire en sorte que le ministre des Finances
mette de l'argent dans cette société par... c'est une société en participation,
à fonds social. Donc, vous voulez que l'État québécois injecte de
l'argent au-delà du cinq ans?
Mme Bédard (Nancy) : Oui, parce que, pour nous, en santé publique, là,
pour avoir de réels changements, puis être
capables de faire les analyses, puis regarder les stratégies, ça prend un délai
beaucoup plus que cinq ans. Alors, si on veut vraiment travailler au niveau de la prévention, si on veut vraiment
s'assurer qu'on va avoir les moyens de le faire, et de mettre des leviers en place, et de s'assurer que
ce sera les bonnes stratégies, ça prend au moins 10 ans, pour être
capable de s'assurer de pouvoir bien livrer et de faire à ce mandat-là. Alors,
ça explique pourquoi qu'on demande que ce soit 10 ans, là. Des fois, pour des changements ou pour s'assurer des
changements, on parle presque d'une génération, mais notamment en santé
publique c'est extrêmement important, 10 ans.
M. Jolin-Barrette : ...de cette filiale de la société d'État là ne
sera pas là au bout de cinq ans. Dans le fond, vous ne pensez pas qu'on va arriver «even» dans les
dépenses et les revenus au niveau des coûts d'exploitation, tout ça, au bout de
cinq ans.
Mme Bédard (Nancy) : Je le prendrais sur un autre volet. On veut juste
s'en assurer. Alors, s'il y a un message clair, et si le message de la prévention est clair et qu'on veut mettre
les outils pour arriver à ce que la légalisation atteigne les objectifs,
pourquoi on l'a légalisé, on doit être sérieux et s'assurer que, pour un
10 ans, on met les choses en place pour pouvoir y arriver.
Alors,
c'est pour s'en assurer. Alors, ce n'est pas, a contrario, de dire : On
pense que... Mais, si ça arrivait, on veut que le levier soit là pour
être sûrs d'atteindre l'objectif.
M. Jolin-Barrette :
Et puis là, dans la filiale de la Société des alcools, la SQC, vous proposez
que ce soit la Santé publique qui s'occupe
de former les employés. De quelle façon vous voyez ça? Dans le fond, pour chaque succursale, qu'il y ait une unité de santé publique
qui arrive puis qui fasse la formation?
Mme Bédard (Nancy) : Dans le processus, ce n'est pas nécessairement
chaque succursale ait son volet de santé publique, mais la Santé publique, surtout, c'est parce qu'elle, elle a un regard qui est vraiment
plus large. Donc, il faut s'assurer
qu'au niveau de... on répond à chaque communauté, chaque région, chaque
élément, mais la Santé publique, dans la formation même de la prévention de la santé, c'est certainement
l'endroit où elles ont la meilleure expertise pour le faire aussi.
Alors,
ce qu'on veut, c'est de s'assurer qu'on ne part pas des chaînes de marketing,
si on veut, ou que tout d'un coup il
n'arrive pas des gens qui commencent à se partir des compagnies de formation,
parce que, quand on ouvre sur ces éléments-là,
hein, ça arrive vite qu'on peut avoir, là, des intérêts à faire du marketing à
ce lieu-là. Donc, la Santé publique, dans sa mission même, elle va faire
les choses comme il se doit.
M. Jolin-Barrette : Vous voulez aussi avoir un siège réservé sur le
comité de vigilance. Est-ce que c'est vraiment un siège professionnel en
soins ou c'est un siège du domaine de la santé?
• (17 h 40) •
Mme Bédard (Nancy) : Un siège professionnel en soins, oui. C'est elles
qui sont aux premières loges, elles sont vraiment, vraiment à plusieurs endroits, où elles connaissent les
besoins de la population, ça fait partie de leurs compétences et de leur
expertise. Alors, c'est vraiment un siège de professionnel en soins qu'on
demande.
M. Jolin-Barrette : O.K. Sur la question du rapport, vous voulez
qu'on revienne devant la Commission de la santé et services sociaux en
audition pour qu'on puisse... prenne acte du rapport. Donc, pourquoi la
nécessité?
Mme Bédard (Nancy) : Bien, c'est-à-dire que c'est une mesure de
transparence puis de reddition de comptes avec la population qu'on souhaite avoir. C'est quand même beaucoup
d'argent d'investi. De légaliser le cannabis, c'est quand même une
mesure qui est quand même importante. Et, par exemple, ça pourrait se faire en
le déposant à la Commission de la santé et des services sociaux, là. Mais c'est
vraiment par une mesure de transparence.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et puis, au niveau de l'expérience que vous
avez, là, directement pour les professionnels en soins qui reçoivent les
gens qui sont en situation de détresse à l'hôpital, supposons, comment est-ce
qu'on... On a beaucoup parlé de prévention,
d'accompagnement des gens, d'investir, mais concrètement, là, comment est-ce
qu'on fait pour envoyer un message à la société pour ne pas banaliser le
cannabis?
Mme Bédard
(Nancy) : Là-dessus, je
laisserais Mme Dorismond répondre parce que c'est vraiment une
infirmière qui a travaillé au niveau communautaire.
Mme Dorismond
(Shirley) : En fait, il y a
deux choses. Il faut vraiment... L'important, c'est qu'au niveau
régional, chaque territoire, il y a une
clientèle qui est différente. Ça fait qu'en premier lieu je vous dirais que...
Vous avez parlé d'hôpitaux; moi, je
vous parle de santé communautaire. En CLSC, ce ne sera pas la même clientèle
qui va aller à l'hôpital, alors il y
a une approche qui est différente. Ça fait que c'est là où la formation doit
être nécessaire. L'approche ne peut pas être la même envers une clientèle marginale ou vulnérable ou à
l'hôpital, où est-ce que, là, à l'urgence, il y a une psychose qui
arrive. L'intervention ne sera pas la même.
Le Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, Mme Dorismond, pour cette réponse à la question du député
de Borduas, qui met un terme à son échange, son temps d'échange. Mme la députée
de Vachon, vous disposez de 2 min 15 s. À vous la parole.
Mme Ouellet : Merci, M. le
Président. Bienvenue aux membres de la FIQ en commission parlementaire.
Donc, moi, je
vais aller directement, là, avec l'introduction. La page 1, le troisième
picot, vous dites : «Troisièmement, la FIQ enjoigne le gouvernement à ne pas succomber à la tentation de confier,
en totalité ou en partie, la commercialisation des produits du cannabis
à des intérêts privés. La logique de profit n'est tout simplement pas
compatible avec une approche de santé publique.» Et donc je pense que vous
rejoignez ce qu'on a beaucoup entendu dans les sondages, où les gens ont
demandé d'avoir une société d'État. Et, je pense, ce n'était pas la première
idée, mais finalement le gouvernement, là, a acquiescé à la société d'État.
Plusieurs de vos prédécesseurs s'inquiétaient
des portes ouvertes par les projets pilotes, où il pourrait y avoir des succursales qui soient confiées au privé,
jusqu'à 25 %, là, donc cinq sur 20. Donc, ce que je comprends de ce que
vous dites, c'est en tout ou en partie, donc pas du tout de place pour le
privé, là, pour la vente de cannabis. C'est bien ce que je comprends?
Mme Bédard
(Nancy) : Absolument,
absolument. Et je pourrais vous dire que des projets pilotes qui
seraient plus d'ordre... en prévention ou
avec des professionnels en soins pour analyser au niveau de la recherche, ça
peut être quand même, là, très
bénéfique, là, dans un cursus, là, de professionnels en soins qui veulent
regarder comment développer encore mieux la prévention. Mais, pour nous,
il n'y a pas de place au privé là-dedans.
Mme Ouellet : Mais moi, j'ai l'impression qu'il n'y a rien qui
interdit de faire de la recherche dans le projet de loi. Ça n'a pas nécessairement besoin de projet pilote.
Les projets pilotes, c'est pour ce qui n'est pas permis par la loi, de
le faire par projet pilote. Donc, à ce
moment-là, faire des projets de recherche, c'est toujours possible de le faire,
puis on n'a pas nécessairement de besoin de projet pilote, là, pour la
question de la prévention.
Et je me demandais, on l'a un petit peu
abordé plus tôt et quand j'ai déposé le mémoire, lors de la conférence, actuellement la société de
cannabis relève du ministère des Finances. Et, même si la Société des alcools
du Québec actuelle et Loto-Québec n'ont
aucune mission de profit, aucune notion de profit dans leur mission, il y a
même des fois des perceptions que le profit
devrait être... est dans leur mission, mais ce n'est pas le cas. Est-ce qu'on
ne devrait pas, pour s'assurer qu'il
n'y ait aucun glissement, faire en sorte que la société de cannabis ne relève
non pas du ministère des Finances,
qui souvent essaie de boucler ses budgets puis aller chercher plus de revenus...
relève plutôt du ministère des Finances,
vous qui travaillez déjà... de la Santé, je veux dire, vous qui travaillez
déjà avec le ministère de la Santé, justement pour s'assurer qu'il n'essaie pas, à travers des mandats directs ou
indirects de revenus à aller chercher puis à déposer en dividendes, de faire en sorte que le profit
devienne un élément important, indirect de leur mission, même si ça ne l'est
pas?
Le Président (M. Merlini) :
Malheureusement, nous n'avons plus de temps dans ce bloc d'échange. Mmes Nancy Bédard, Shirley Dorismond et
Catherine Gervais, représentant la
Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, merci de votre
présence, merci de votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends donc quelques instants et je demande
à l'Assemblée des premières nations du Québec et du Labrador de prendre place.
Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 45)
(Reprise à 17 h 49)
Le
Président (M. Merlini) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Nous
allons donc reprendre nos travaux. Je dois demander le consentement des membres de la commission pour
permettre au député de Masson de remplacer la députée de Repentigny.
Est-ce que j'ai votre consentement? Consentement. Très bien. Merci.
Nous accueillons donc
également à la table M. le ministre responsable des Affaires autochtones et
député de Jacques-Cartier. Bienvenue à la Commission de la santé et des
services sociaux.
Et nous avons en fin de journée
aujourd'hui — le
meilleur est toujours à la fin — l'Assemblée des premières nations du Québec et du Labrador. M. Picard,
vous êtes un habitué des commissions parlementaires, vous connaissez
notre procédure. Vous avez 10 minutes
pour faire votre exposé, je vous invite à présenter toutes les personnes qui
vous accompagnent. Nous procéderons
ensuite aux échanges avec les membres de la commission. Bienvenue à la
Commission de la santé et des services sociaux. À vous la parole.
Assemblée des premières
nations du
Québec et du Labrador (APNQL)
M. Picard
(Ghislain) : Merci beaucoup. M. le Président, membres de la
commission, M. Kelley, Mme Charlebois. Écoutez, ce que nous avons l'intention de présenter aujourd'hui est un
complément d'une première discussion que nous avons eue le 29 septembre dernier, 2017, sur la question, dans la
foulée d'un débat qui est très large, comme on sait, au niveau pancanadien, avec ces préoccupations qui
sont aussi très larges et très diverses. Et je suis accompagné aujourd'hui
du chef Rick O'Bomsawin, qui est chef des
Abénaquis de la première nation d'Odanak, qui est aussi porte-parole, porteur du dossier fiscal au nom de ses collègues chefs
des autres nations au Québec et Labrador. Jean-Claude Therrien Pinette
qui nous accompagne aujourd'hui, qui est au service comme chef des opérations
pour l'Assemblée des premières nations Québec
et Labrador, du côté de la Commission
de la santé et des services sociaux,
qui est un des premiers répondants sur le dossier du cannabis, direction
générale Marjolaine Sioui, mais celui en charge également du dossier des
services sociaux, qui est M. Richard
Gray. Donc, c'est ça, on voudrait vous remercier d'abord de nous accorder ce
temps aujourd'hui pour parler d'un
dossier qui est hautement préoccupant pour les Premières Nations. Donc, nos
remerciements de nous recevoir aujourd'hui.
• (17 h 50) •
Donc, comme
je le disais plus tôt, nos commentaires aujourd'hui, qu'on va essayer
de rendre quand même assez succincts, ils sont complémentaires à des
commentaires déjà partagés avec Mme Charlebois et
M. Kelley en septembre dernier,
au même titre que d'autres commentaires qui ont été formulés par d'autres membres
d'autres nations, notamment la nation
inuite. Et on insiste évidemment beaucoup, et on en parle d'ailleurs dans le mémoire
qui vous a été déposé, sur les spécificités
du côté des Premières Nations, la diversité des communautés, des préoccupations soulevées par les Premières Nations et les Inuits, mais en même
temps on ne peut pas non plus garder sous silence toute la question économique,
parce que c'est évidemment
une question qui est aussi soulevée par beaucoup de groupes à travers
le pays, incluant des groupes au
niveau des Premières Nations. On pourrait difficilement aborder cette
question-là sans référer également
au droit à l'autodétermination, qui est un
droit reconnu par la Déclaration de l'ONU sur les droits des peuples
autochtones. Difficile, également,
de garder sous silence la situation socioéconomique des communautés. Je pense que la
plupart d'entre vous savez de quoi on
parle. On devra inévitablement parler du manque de ressources aussi, qui sont
une autre réalité avec laquelle nous avons à composer. La sécurité
publique, un autre domaine qui est extrêmement préoccupant chez nous. Je pense
qu'on a déjà fait valoir nos préoccupations à ce niveau-là également.
En même temps, bien, on accueille, évidemment, les efforts consentis par le gouvernement pour essayer de prendre en considération cette réalité-là à
travers le projet de loi n° 157, notamment en référant à l'article 56,
qui permet des accords avec des communautés, des nations, des regroupements de
communautés.
Et je pense
qu'il est important sans doute aussi... Et c'est là-dessus
davantage qu'on veut profiter des 10 minutes que nous avons, là, pour essayer d'insister sur
les recommandations. Je pense qu'on doit insister beaucoup
sur le cadre juridique, le cadre politique
qui nous est, encore une fois, particulier. Le cadre juridique et politique
actuel génère des conflits de
compétences pour les Premières Nations, si on regarde la question
fédérale et la question provinciale, dans notre cas.
Lorsque le gouvernement du Québec élabore une loi de portée générale, il doit être
conscient des effets que cette loi pourrait
avoir sur les Premières Nations et prendre en compte leur diversité
socioculturelle, le régime juridique particulier qui s'applique et leur droit à l'autonomie. Et là-dessus,
d'ailleurs, on s'est permis d'élaborer une recommandation à cet effet-là, et je prends
la peine d'en faire la lecture : «Que le gouvernement
du Québec reconnaisse l'impact important que peuvent avoir ces lois d'application générale sur les conditions de vie des Premières
Nations, peu importe leur lieu de résidence. En conséquence, le gouvernement du Québec, en collaboration avec les Premières Nations,
doit mettre au point des mécanismes permanents de consultation les
impliquant lors de l'élaboration de lois, de règlements, de politiques et de
plans d'action qui les concerne.»
Et à cet
effet-là je me permets de faire une parenthèse, parce que ce n'est pas la première fois, là, qu'on vient à cette... non seulement à cette commission-ci,
mais devant le gouvernement pour essayer de faire valoir, je dirais,
l'incontournable obligation de la part du gouvernement du Québec, quel qu'il
soit, de devoir consulter les Premières Nations sur toutes les questions qui
pourraient avoir un impact au niveau des communautés que nous représentons.
Dans le domaine santé et services sociaux,
éducation, un autre secteur qui est extrêmement préoccupant en marge du projet de loi n° 157 et la loi
fédérale sur le cannabis, les facteurs historiques reconnus comme étant à la
source de certaines problématiques sociales
vécues, notamment les politiques gouvernementales d'assimilation à la culture,
aux langues et au patrimoine des Premières
Nations, les pensionnats indiens, le racisme systémique, la pauvreté et autres,
les ressources humaines, matérielles et
financières insuffisantes pour réduire de façon considérable les écarts qui
persistent entre l'état de santé des
Premières Nations et celui des populations québécoise et canadienne. Une
stratégie de prévention doit être
mise au point pour et par les Premières Nations visant à sensibiliser, à
éduquer, à informer et à réduire les méfaits du cannabis chez les jeunes et les familles. Le
mémoire fait état, là, quand même de statistiques assez préoccupantes en
matière de consommation. Le gouvernement québécois et ses établissements de
santé et de services sociaux doivent collaborer
étroitement avec les Premières Nations et les inclure dans l'élaboration, la
mise en oeuvre, l'évaluation et la mise
à jour des plans d'action locaux de santé publique, y compris toutes les
mesures à propos de la légalisation du cannabis.
En matière de
sécurité publique et routière, les services policiers dans les communautés sont
considérés comme un simple programme
dont le contrat doit être renouvelé de façon récurrente et crée de
l'incertitude dans les communautés. On
se doit de référer ici à l'annonce du gouvernement fédéral qui date de la
semaine dernière. Le ministre Goodale a en effet annoncé un financement supplémentaire de 291 millions de
dollars sur cinq ans à compter de 2018‑2019, devant mener un financement récurrent. Pour nous, il est
tout à fait clair et logique que le gouvernement du Québec a également à
faire sa part dans le domaine, donc on a les mêmes attentes de la part du
gouvernement du Québec.
Les services
offerts en communauté doivent minimalement être comparables à ceux qui sont
offerts à l'extérieur des
communautés, toujours en matière policière, et disposer d'équipements à la fine
pointe de la technologie, de formation adéquate
et adaptée aux besoins du milieu, par exemple formation d'évaluateurs pour les
facultés affaiblies par le cannabis, inspection,
saisie et enquêtes liées au cannabis, ateliers de sensibilisation offerts aux
écoles et à la population; prévoir et assurer
la formation des policiers appelés à intervenir auprès des Premières Nations
ainsi que dans les communautés qui ne disposent pas de services
policiers — et
ça, il y en a quand même quelques-unes à travers les régions. Ce type de
formation devra être mis au point en collaboration avec les Premières Nations.
Une autre
recommandation sur ce chapitre : «Que le gouvernement du Québec se joigne
au gouvernement fédéral et augmente le financement des services
policiers des Premières Nations pour qu'ils aient accès aux ressources et aux équipements requis, y compris de l'équipement à la
fine pointe de la technologie et de la formation adaptée aux besoins du milieu, par exemple prévention, inspection,
saisie, enquête. Le financement octroyé doit être permanent et minimalement
comparable au financement octroyé à tout autre corps policier au Québec.»
Une autre
recommandation : «Que le gouvernement du Québec offre une formation
adaptée aux policiers québécois appelés
à intervenir auprès des Premières Nations, dans les communautés ou à
l'extérieur de celles-ci afin de les sensibiliser davantage aux différents contextes culturels des
Premières Nations.» Et on s'entend ici qu'on parle des communautés qui
ne sont pas desservies par un corps policier autochtone.
On examine de
très près... on est préoccupés par une possible hausse du taux d'incarcération,
déjà plus élevé que la moyenne chez
les Premières Nations. Il y a aussi une importance que les programmes de
justice réparatrice et d'éducation soient favorisés, encourager la
réadaptation et contribuer à réduire la surreprésentation dans le système
judiciaire. Là-dessus, une autre
recommandation : «Que le gouvernement du Québec collabore avec les
Premières Nations à la mise en
oeuvre de mesures orientées sur la justice réparatrice
pour éviter la judiciarisation excessive de certains comportements qui
ne présentent aucun risque sérieux pour la sécurité publique.»
• (18 heures) •
L'autre
domaine qui nous préoccupait, c'est évidemment toute la question liée à la production, la distribution et
la vente du cannabis. La légalisation du
cannabis entraînera la création d'une nouvelle industrie avec un fort
potentiel. La production, la
distribution et la vente offriront des occasions d'affaires. Même si
les opinions envers cette nouvelle industrie sont extrêmement
diversifiées chez les Premières Nations au Canada et au Québec, certaines
communautés ont déjà manifesté leur intérêt et amorcé des démarches en ce sens.
Une précision
devra toutefois être apportée à l'article 56 concernant les ententes qui pourraient
être conclues avec, et je cite ici, «tout autre regroupement autochtone».
Cet énoncé laisse place à l'interprétation et pourrait avoir des conséquences
sur la gouvernance locale et collective des Premières Nations.
Une autre
recommandation qui est aussi contenue dans le mémoire qui vous a été
déposé : «Que le gouvernement du
Québec modifie l'article 56 afin de préciser ce qu'il entend par
"tout regroupement autochtone". La loi devra aussi préciser
les nations autochtones visées par cet article. Par l'absence de ces
précisions, le gouvernement du Québec ne peut autoriser à conclure une entente
avec tout regroupement autochtone sans l'aval des gouvernements locaux des
Premières Nations et des Inuits.»
Une autre recommandation que je me permets
d'ajouter ici : «Que, lors de la négociation et de la conclusion d'ententes, le gouvernement du Québec applique et
respecte les principes du droit à l'autonomie gouvernementale des
Premières Nations dans tous les aspects couverts par le projet de loi.»
Sur le comité de vigilance — on
n'est pas très loin de la fin — sur le comité de vigilance, les domaines
de surveillance sur l'état de santé des
populations québécoises ne permettent pas au Québec d'effectuer une veille sur
l'état de santé des Premières Nations autres
que celles issues des communautés conventionnées. Et là-dessus... — non, je suis rendu à l'autre page, excusez — le Québec devra fournir les ressources
nécessaires afin que les Premières Nations puissent recueillir les données et les informations
requises. La légalisation du cannabis aura des répercussions sur les
Premières Nations à la lumière des défis socioéconomiques particuliers auxquels
ils sont confrontés.
Une autre
recommandation qui touche ce secteur-là : «Que le gouvernement du Québec
finance la création, la mise en
oeuvre et les travaux d'un sous-comité de vigilance formé de spécialistes issus
des Premières Nations et des Inuits, et que le ministre nomme un ou deux représentants désignés par leur leadership
afin de siéger au Comité de vigilance en matière de cannabis — qui
est déjà prévu par 157.»
Sur la question du financement...
Le Président (M. Merlini) : Il
faudrait conclure, M. Picard.
M. Picard (Ghislain) :
J'arrive. Quelques lignes, M. le Président, si je peux me permettre.
Le
Président (M. Merlini) : Je vous en prie.
M. Picard
(Ghislain) : Sur la question
du financement, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont
fait savoir que les recettes fiscales issues du commerce du cannabis serviront
à combattre ses effets négatifs. Il est important pour nous de vous rappeler que... le partage des
recettes avec les gouvernements locaux des Premières Nations afin qu'ils
puissent lutter efficacement contre les effets associés à la légalisation du
cannabis.
Il
faudrait que l'enveloppe puisse également considérer les Premières Nations et trouver une façon de déterminer un niveau de financement qui soit fondé sur le principe d'équité
substantive établi dans la décision rendue par le Tribunal canadien des droits de la personne. Selon ce
principe, le niveau de financement attribué aux Premières Nations doit
non seulement atteindre un niveau minimalement comparable à celui attribué aux
autres institutions ou fournisseurs de services, mais il doit aussi répondre à
leurs besoins spécifiques.
Donc, on a une autre recommandation
sur ce point-là, qui touche le financement : «Que le gouvernement du Québec
verse une part équitable et récurrente du Fonds de prévention et de recherche
en matière de cannabis dans un fonds dédié
aux Premières Nations et géré par les Premières Nations afin de
financer des activités de surveillance, de recherche, de soins curatifs, de prévention et de sensibilisation relativement aux méfaits du cannabis et autres dépendances, et
autres.»
Dernière recommandation :
«Que le terme "Native", dans la version anglaise de la loi, soit
remplacé par "Aboriginal".» Pour être conforme avec le langage non seulement
juridique, mais aussi constitutionnel.
Le Président
(M. Merlini) : Merci beaucoup, M. Picard, pour la
présentation de ce mémoire.
M. Picard
(Ghislain) : Merci.
Le Président
(M. Merlini) : Mme la ministre, il vous reste 8 min 15 s.
À vous la parole.
Mme Charlebois :
Eh boy! On va faire vite. M. Picard, merci d'être là, M. O'Bomsawin — bon,
je l'ai dit correct, c'est bon — Mme Sioui,
M. Gray et M. Therrien Pinette, merci d'être là et d'avoir accepté de
venir nous rencontrer par cette journée froide. Mais je sais que ce
n'est pas ça qui vous arrête quand vous avez des idées à partager.
J'ai
le goût de vous dire qu'on a fait une consultation spécifique pour les populations autochtones, comme le milieu municipal et autres, et c'est parce
que nous avons considéré qu'il y avait justement des spécificités qui
touchaient les Premières Nations qui méritaient que nous ayons une consultation
spécifique. Et ce que j'ai retenu lors de cette consultation, avant la
rédaction du projet de loi, évidemment, parce que c'était ça que nous avons
fait, c'est que les communautés ne souhaitaient pas voir l'application identique d'une communauté à l'autre. Vous étiez là, puis je pense
qu'on a senti ça. Il y en a qui étaient en accord avec notre projet de loi.
D'autres disaient : Non, nous autres, on a des réserves, on voudrait plus restrictifs. D'autres... En tout cas.
Bon, alors, moi, j'ai entendu ça. C'est pour ça qu'on a mis dans la loi qu'il y aurait une possibilité d'ententes spécifiques avec les communautés. Je comprends que,
dans l'ensemble, ça vous convient, cet article-là, n'est-ce pas?
M. Picard
(Ghislain) : Bien, en fait,
tout dépend du niveau de consultation quant au libellé de l'article.
Et je pense qu'il ne nous appartient pas,
à nous seuls, de déterminer si le libellé convient ou non. Et je suppose que
tout dépendra des approches qui seront effectuées soit à partir... je
veux dire, entre le gouvernement du Québec et certaines nations ou communautés.
Est-ce que c'est assez? On a exprimé quelques commentaires qui sont quand même
assez neutres, là, au niveau de certaines terminologies, je pense, qui méritent
d'être considérées. «Native» par rapport à «Aboriginal», c'est un exemple. Il y a peut-être
d'autres aspects aussi, dans l'article 56, là, qui mériteront peut-être
un peu plus de précision, notamment sur la question
des regroupements. Qu'est-ce qu'on entend par «regroupement»?
Pour
nous, c'est très clair que, lorsqu'on regarde nos populations, nos communautés,
nos nations, indépendamment de la
diversité, il y a seulement une entité qui peut, en quelque sorte, prétendre à une juridiction, c'est les conseils de bande, au
niveau local, ou les municipalités inuites, sans vouloir parler en leur nom. Et
je pense que, les ententes, si, par exemple, elles devaient impliquer des regroupements, bien, ça passe assurément, selon nous, là, par une autorisation en bonne et due forme par les
entités qui peuvent... qui prétendent à une juridiction envers leur population.
Mme Charlebois :
Quand vous dites «les entités», c'est les communautés elles-mêmes?
M. Picard
(Ghislain) : Les conseils de bande... ou, en fait, pour nous, c'est
les gouvernements locaux.
• (18 h 10) •
Mme Charlebois : O.K. Bien, à
ce niveau-là, je vais certainement me référer à toute la sagesse et l'expérience de mon collègue le ministre des Affaires autochtones, qui, lui, a beaucoup
de connaissances par
rapport à vos communautés. Alors, on va faire la consultation en bonne et due forme puis spécifier ce qu'on aura à spécifier, puis on
vous reparlera pour nous assurer que ça correspond à l'ensemble.
Dites-moi, vous nous
avez parlé de manque de ressources en sécurité publique à plusieurs niveaux. On
parle à l'ensemble de la population, puis tout le monde nous dit : Bien,
vous avez parlé de la formation des policiers aussi. On réalise qu'il y a plusieurs
personnes qui, dans leur cursus, dans leur formation, auraient besoin de mise à
jour et, dans les nouveaux diplômés, qu'on
revoie l'ensemble du cursus, parce
qu'il n'y a pas beaucoup
de formation en ce qui concerne
le cannabis et autres drogues. Est-ce
que, chez vous, vous pensez que c'est
aussi le cas ou c'est davantage
le cas? Comment vous voyez ça, toute la
formation qui entoure? Parce qu'il y a des services qui sont donnés dans vos communautés.
Alors, dites-moi comment vous voyez ça, vous, au niveau de la formation
d'appoint.
M. Picard
(Ghislain) : Bien, je peux peut-être
y aller d'un exemple très précis, parce
que vous en parlez, là, sur la question
des services policiers dans nos communautés. Je pourrais peut-être demander à
Mme Sioui de compléter sur... fondé sur des statistiques au sein de
nos communautés qui sont extrêmement préoccupantes, là, par rapport à la consommation comme telle et au fait aussi qu'on a
des programmes qui tombent toujours à court du besoin, programmes de prévention. Par exemple, je dis toujours qu'on
fait beaucoup plus d'intervention que de prévention, alors que ça
devrait être le contraire, chez nous, et il y a des raisons pour ça.
Sur la
question des services policiers, on a
toujours insisté sur le besoin qu'on puisse avoir des
services policiers qui soient
minimalement comparables avec ce qui existe ailleurs, alors que c'est loin
d'être le cas. On est dépendants d'un programme national qui, jusqu'à l'annonce de la semaine dernière du ministre
Goodale, était un programme, je veux dire, qui avait une date de début
puis une date de fin, sans vraiment connaître l'avenir. Et, à mon sens, il n'y
a aucun corps policier à l'échelle du pays,
qui est devant ces conditions-là, je veux dire, c'est des programmes
qui sont permanents, qui sont récurrents et qui sont financés à la
hauteur du besoin, alors que ce n'est pas le cas chez nous.
Bon, on
constate que le fédéral a maintenant posé un geste qui, à notre sens, va dans la bonne
direction. On parle de presque
tripler le budget actuel, ce qui est déjà, je
pense, un bon signe, même s'il y a
encore des manquements au
niveau des infrastructures, parce
qu'il y a très clairement,
là, des stations de police qui sont un peu beaucoup désuètes dans
certaines communautés. Donc, il y aura cette partie-là aussi.
Mais, ceci
étant dit, c'est que ça affecte le service comme tel. On ne peut pas parler
d'un service essentiel, on ne peut
pas parler d'un service qui est à la hauteur du besoin, au niveau des communautés. Et ça, je pense qu'on pourrait avoir une dizaine de
policiers à la table aujourd'hui puis je pense que tout le monde aurait le même
témoignage.
Et c'est vrai
aussi pour d'autres secteurs, parce
qu'on juge qu'en termes de notions de santé publique, je veux dire, on
fait face aux mêmes défis, au niveau de nos communautés, et on devrait avoir
accès aux mêmes services.
Je ne sais pas si Marjolaine...
Mme Sioui
(Marjolaine) : Bien,
peut-être, ce que je peux ajouter — bonsoir — au niveau des formations, c'est que présentement, quand on parle des statistiques
qu'on a, au niveau des communautés, c'est sûr qu'on a un taux de plus de
deux fois au niveau de la consommation du cannabis, le cannabis étant la drogue
la plus consommée au sein des communautés, surtout pour une clientèle aussi qui
commence aussi jeune, avec une moyenne de 12 à 35 ans. Donc, vous pouvez
comprendre que c'est préoccupant.
On veut se
mettre en mode plus... parce que présentement, avec des difficultés qui peuvent
être rencontrées, on est beaucoup en
mode, souvent, de réaction, donc on veut vraiment faire la transition vers un
mode d'être en prévention. On sait
aussi les effets que ça peut avoir sur la santé des jeunes, au niveau de leur
développement et tout, jusqu'à l'âge de 21 ans, 22 ans. Donc,
il y a tout un mode à faire dans ce sens-là.
C'est sûr
que, les ressources qui sont existantes au sein des communautés, présentement,
on a des financements qui sont reçus
de la part du fédéral pour des travailleurs, qu'on appelle, au niveau de la
lutte à la dépendance et à l'alcool, mais ces ressources-là souvent sont insuffisantes parce que, même si leur
mandat est d'axer principalement sur la prévention, ils sont beaucoup
aussi au niveau d'assister pour, justement, aider les gens, au niveau des
intervenants, aussi.
Donc, les
formations qu'on préconise présentement, que ce soit au niveau de la sécurité
publique, des policiers qui doivent
intervenir auprès des jeunes ou auprès des familles, la même chose au niveau...
que ce soit en services sociaux, en santé
ou peu importe, on a déjà amorcé, même si les moyens ne sont pas encore
présents. Présentement, on y va avec ce qu'on a comme moyens. Mais on ne
veut pas attendre non plus au mois de juillet, que ce soit légalisé. On doit
s'activer dans ce sens-là. On doit aussi pouvoir développer une stratégie de
prévention pour travailler au sein des communautés, et ce travail-là se fait
avec les intervenants des communautés.
Il y a aussi
toute une mobilisation, sensibilisation communautaire qui doit être faite,
beaucoup, aussi, d'inconnues. Des fois, les gens, on n'est pas
nécessairement bien au courant des effets, ou peu importe, donc il y a beaucoup
de sensibilisation qui doit se faire.
Donc, il y a
un certain travail qui est amorcé. On va mettre sur pied, là, dans les semaines
qui suivent, un comité justement
formé de Premières Nations dans différents domaines, que ce soit l'éducation,
la santé publique, la santé et les services
sociaux et tout, et on va amorcer pour se bâtir un plan à l'intérieur de ça
avec les intervenants des communautés.
Le
Président (M. Merlini) : Merci, Mme Sioui. Ça met un terme
avec le bloc d'échange avec le gouvernement. M. le député de Labelle, de
l'opposition officielle, vous disposez de 8 min 15 s. À vous la
parole.
M. Pagé :
Merci, M. le Président. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Toujours un plaisir
de vous voir ici. Merci d'être avec nous, merci de votre mémoire.
Bon, on lit,
dans le début du mémoire, que... Bon, on parle de 43 communautés. Sur les
43 communautés, bon, qui pourront
se servir de l'article 56 afin de conclure des ententes, avez-vous un peu
une idée du portrait jusqu'à maintenant? Il pourrait y en avoir combien sur les 43 qui vont souhaiter créer des
ententes? Est-ce que c'est la majorité, quelques-unes des communautés? Quel serait le portrait à ce moment-ci?
M. Picard (Ghislain) : En fait,
là, c'est 43 moins deux, parce qu'il y a deux communautés qui appartiennent à la juridiction de Terre-Neuve—Labrador. Donc, sur 41 communautés, il y a
également, je dirais, deux réalités, une où il y a des communautés
conventionnées, hein, du côté inuits, cris et naskapis, et on a les autres
communautés.
Écoutez,
on n'a pas fait toute la vérification nécessaire, je ne peux pas vous donner,
vous avancer un chiffre précis, mais,
au moment où on se parle... Et je pense qu'on est tous un peu poussés dans le
dos par un calendrier qu'on ne contrôle pas, et c'est vrai aussi... sans vouloir parler en
votre nom, c'est vrai pour vos travaux aussi, je pense, le temps nous
file entre les doigts. Ça, ça a été, je pense, formulé en fonction de
commentaires préliminaires qui ont été exprimés le 29 septembre dernier auprès de Mme Charlebois et de
M. Kelley. À cette étape-là, on n'était même pas rendus à l'ébauche
d'un projet de loi comme celui que nous
avons aujourd'hui. Est-ce que la consultation a été poussée, autant du côté
du gouvernement du Québec envers nos communautés que de nous envers les
communautés? On ne peut pas prétendre ça. On est en train de faire du
rattrapage.
C'est une longue
réponse à votre question, et tout ça pour dire que c'est difficile de vous
donner un chiffre aujourd'hui. Est-ce que
tout le monde va d'abord accepter le fait que, par exemple, il puisse y avoir
une entente directement avec le
gouvernement du Québec par rapport au cannabis? Ça, c'est une question qui
demeure grande ouverte. Il y a des communautés,
peut-être que vous le savez, peut-être que vous ne le savez pas, qui ont déjà
signifié publiquement que ce sera tolérance
zéro au niveau de leur territoire. Donc, il y a également cette réalité-là.
Donc, dans ces cas-ci, là, on ne parle même pas du projet de loi, et on
parle encore moins de son article 56.
Il
y a des communautés qui ont manifesté leur volonté de se doter de leur propre
cadre réglementaire au niveau local.
Est-ce que ça va être en fonction ou en marge de 56? Je n'ai pas de réponse ou
de précision à apporter de ce côté-là.
Donc, le défi, là, à
cette heure-ci, là, demeure entier. Et je pense que la seule chose qu'on sache,
c'est que le fédéral va continuer à pousser
pour le 1er juillet, et on va, tout le monde, vous incluant sans doute,
continuer à être en mode réaction.
M. Pagé :
En fait, sans vouloir vous reprendre, mais les propos de Justin Trudeau,
c'est que ça peut même être avant le
1er juillet, hein, et on peut s'attendre à ce que ce soit plus tôt, pour
ne pas que la fête du Canada devienne la fête du cannabis. Alors, on
peut facilement s'attendre à ce que ce soit un peu plus tôt. Oui?
M. Picard
(Ghislain) : Ce que je peux peut-être me permettre d'ajouter
là-dessus, c'est que je pense que, depuis déjà plusieurs mois, on entend
plusieurs voix s'élever par rapport à un calendrier qui semble être contrôlé
par une personne, et ça inclut également nos
groupes. Je veux dire, même s'il y a des volontés et des intérêts, je pense
qu'il faut l'avouer, au niveau économique, pour beaucoup de groupes,
incluant les Premières Nations, à travers le pays, il n'en demeure pas moins que le calendrier, là, je veux
dire, c'est sans doute la seule chose qu'on ne contrôle pas, le
1er juillet étant demain, là. Et, en
marge de tout ça, bien, on a eu une assemblée spéciale en décembre dernier où a
été votée une résolution, qui a été
adoptée par une majorité de chefs à travers le pays, qui demande formellement
le report de l'application de la loi fédérale. Mais on sait ce que le
gouvernement fédéral en dit.
• (18 h 20) •
M. Pagé :
Indépendamment... Bon, le projet de loi n° 157 va être adopté quelque part
ce printemps. Est-ce que ce sera en mars, ou avril, ou mai? Je n'ai
aucune idée. Je pense que, dans l'ensemble, on va s'entendre assez bien, puis il n'y a pas personne qui va faire de filibuster
pour qu'on retarde l'adoption du projet de loi, on n'a aucunement
l'intention de cela. Je pense qu'il va
falloir s'ajuster, et on va le faire, tout le monde; tout le monde va mettre de
l'eau dans son vin. Mais,
indépendamment que le projet de loi soit adopté ou non, l'article 56 va
probablement être un peu modifié en fonction des commentaires qui ont été
reçus, je pense qu'il n'y aura pas d'objection là-dessus. Mais, même si cela
n'est pas encore adopté, vous voyez
déjà les intentions gouvernementales. Est-ce qu'il y a déjà des négociations
qui sont entreprises avec le gouvernement
du Québec? Parce qu'indépendamment que l'article 56 et que la loi
n° 157 soient adoptés, on peut déjà commencer à discuter et à essayer de voir de quelle façon on peut
s'entendre en fonction de cette loi qui va être adoptée sous peu, parce que je ne souhaiterais pas que les
négociations commencent après l'adoption de la loi et que nous ayons
perdu deux ou trois mois, pour qu'on puisse
procéder. Même si vous avez demandé formellement à Justin Trudeau de
retarder l'adoption de son projet de loi, je
ne sais pas s'il va vous écouter. Tant mieux s'il vous écoute, on aurait tous
envie de cela.
Alors, moi, je vous
invite... Parce que je ne sais pas si c'est commencé. Est-ce que c'est
commencé, les négociations? Sinon, je le
souhaite formellement, que vous puissiez vous asseoir avec le gouvernement du
Québec dans les meilleurs délais possible, afin de convenir des ententes
dans les meilleurs délais possible.
M. Picard
(Ghislain) : Bien, peut-être, si vous me le permettez, en complément,
c'est qu'on est ici aujourd'hui pas pour, je veux dire, aborder toute la
question de mécanisme d'engagement avec le gouvernement du Québec en marge de n° 157 mais beaucoup plus pour insister
sur le fait que la réalité du 1er juillet 2018, là, c'est une réalité pour
tout le monde. Et, sans vouloir juger
des nations, qui ont toute la légitimité voulue, pour des raisons qui sont
connues, de dire : Bien, chez
nous, là, ça va être tolérance zéro, il y a une réalité avec laquelle nous
avons à composer. Et notre intérêt à nous, c'est d'aller chercher les meilleures assurances possible pour qu'on
puisse, je veux dire, se donner les moyens nécessaires pour essayer d'amoindrir les impacts qu'on sait
aussi négatifs par rapport au cannabis au sein de nos communautés. Et
ça, c'est un aspect extrêmement important, dont on parle peu, malheureusement.
Le Président
(M. Merlini) : Rapidement, M. le député.
M. Pagé :
Je sais que je n'ai pas beaucoup de temps. Nous proposons qu'il y ait un
amendement pour que 100 % des profits
soient retournés pour, bon, la santé publique, et tout le reste, mais
également, les municipalités. Nous souhaitons également qu'il soit
inscrit dans le projet de loi n° 157 qu'une partie de ces profits-là aille
aussi vers les communautés autochtones, parce que, vos besoins, il y aura un
signe de dollar qui sera à côté. Alors, je pense qu'il faudra s'assurer que les profits générés par le cannabis puissent aller
aussi pour répondre aux besoins de vos communautés.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Labelle.
Ça met un terme à votre bloc d'échange. M. le député de Masson, vous
disposez de 5 min 15 s. À vous la parole.
M. Lemay :
Merci, M. le Président. Merci d'être avec nous aujourd'hui ici. On va passer
tout de suite au vif du sujet. Je voudrais passer à votre recommandation
n° 7, qui concerne, entre autres, le comité de vigilance, là. Et vous mentionnez, à la page 5 de votre mémoire,
qu'on n'a pas de données puis on n'a pas les informations nécessaires
pour prendre position en ce qui a trait avec les Premières Nations, et puis on
voudrait... vous demandez que Québec puisse fournir des ressources nécessaires.
Donc, avez-vous idée de grandeur, tu sais, c'est quoi, les outils que vous avez
de besoin? Ça, ce serait la première sous-question.
Puis, la
deuxième question, en lien avec le comité de vigilance qu'on va... à la
page 6 de votre mémoire, vous parlez que vous voulez mettre sur pied un sous-comité formé de spécialistes
puis qu'ensuite un ou deux membres pourraient s'en aller dans le comité
de vigilance. Si on peut avoir plus de détails sur ce sous-comité, entre
autres.
M. Picard
(Ghislain) : Peut-être que je vais laisser le soin à Mme Sioui de
répondre à cette question-là, mais je voudrais
quand même saisir l'opportunité pour parler... peut-être ajouter ou compléter
vos commentaires précédents par rapport aux profits générés par
l'industrie. Et je pense ici que... Je reviens au principe d'équité par rapport
à la santé publique et je pense au fait
qu'on est tous devant la même réalité, avec les mêmes impacts potentiels,
incluant également nos communautés.
Et, à cet effet-là, ce qu'on déplore, c'est que, bon, il y a des discussions
depuis des mois par rapport aux profits
qui pourraient être générés puis ce qui revient aux provinces, ce qui revient
aux municipalités, bon, on a encore entendu
les municipalités hier, je crois, et, bon, on est où dans tout ça, là? Et ça,
c'est une question, à mon sens, importante, qui mérite d'être sur la place publique également, parce que, je veux
dire, on va faire face aux mêmes défis au sein de nos communautés, de façon encore plus prononcée,
d'ailleurs. Et je pense que c'est une
discussion qui mérite d'être faite.
Marjolaine.
Mme Sioui
(Marjolaine) : Donc, au niveau
du comité de vigilance, ce qui était proposé, bien, c'est, bien sûr, un comité qui pourrait être formé de personnes des Premières Nations et inuites pour se pencher sur le sujet. Donc,
quand on regarde le mandat du comité de vigilance, bien, ce qu'on voudrait,
c'est qu'il soit adapté avec un sous-comité pour justement traiter des questions
d'une façon particulière, selon les réalités aussi du milieu. Et, par la suite,
bien, une fois que ce comité-là
serait en oeuvre, il y aurait une ou deux personnes qui pourraient être
désignées pour siéger sur le comité qui est élargi, là, prévu par la
loi.
Pourquoi?
Bien, c'est parce que présentement on a une crainte que, justement,
ces réalités-là, en ayant seulement une
personne de désignée au niveau des Premières
Nations dans un comité plus large, on
se perd un petit peu dans tout ce qui est traité pour... on perd un peu les particularités de vue. Donc,
avec un sous-comité, bien, c'est qu'on peut justement faire le point, regarder, justement,
tous les éléments qui sont plus spécifiques, que ce soit en termes de surveillance, en
termes de sécurité publique, qui sont des systèmes
bien différents au sein des communautés, et par la suite, bien, on vient
se greffer à l'intérieur pour pouvoir dresser un portrait plus réaliste.
C'est sûr,
avec les chiffres que je vous ai partagés tout à l'heure, il y a
une préoccupation de voir aussi est-ce que la mise en oeuvre
ou la légalisation du cannabis va amener une plus grande consommation. Est-ce
que ça amène aussi vers d'autres drogues?
Donc, cette
surveillance-là, présentement, on la fait avec les moyens qu'on a, mais le système
de surveillance, au niveau du Québec, on n'a pas les communautés non conventionnées à
l'intérieur de ça. Donc, ce qui est fait présentement, c'est une surveillance avec des données qu'on a,
qu'on recueille aussi par des enquêtes populationnelles que nous menons en tant que Premières Nations, mais il est
très difficile présentement d'avoir accès aux données qui concernent les
Premières Nations lorsqu'on fait des demandes. Donc, c'est un peu dans une
perspective d'avoir ces discussions-là peut-être davantage pour définir un peu
plus qu'est-ce qu'on peut faire en termes de surveillance, en termes aussi de
comité de vigilance puis d'avoir aussi un monitoring, si on veut, pour, justement,
l'état de santé de nos populations.
M. Lemay :
Très bien. Maintenant,
allons à la recommandation 6. Je sais qu'on a déjà
parlé de justice réparatrice, mais
j'aimerais quand même... Et j'aimerais apporter un élément, faire une
comparaison. Dans le projet de loi, on parle que... la possibilité d'avoir
une amende de 100 $ aux mineurs en possession de cannabis. Dans une
optique de justice réparatrice, je ne sais
pas si vous voulez nous donner un petit peu votre point de vue de ce côté-là,
si on met ces deux affirmations-là ensemble.
Le Président (M. Merlini) : En
30 secondes, s'il vous plaît.
M. Gray
(Richard) : Si je comprends
bien votre question... Et je vais essayer de... je vais donner une
réponse en anglais.
Presently, we're working with
Justice Québec on promoting restorative justice in First Nations Communities. We know that there are fines that are now going to
be attributed to people who do... who break the law, and receive fines
instead of criminal charges. We see that, obviously, as an improvement.
When
we're talking about restorative justice, we're talking about it in a larger
sense. I think one of the important elements as well,
when we're talking about restorative justice, is the fact that, if we're decriminalizing
cannabis use, obviously, we're talking about
removing stigmas as well that are associated in society today with people who
use cannabis. It's a big preoccupation on our part. People today who use cannabis are
considered criminals. So, obviously, when we're talking about reducing
crime in First Nations communities, when we're talking about an instrument to
do that, we're looking at restorative justice. In that sense, global, we
want to promote more of that in First Nations communities.
How
First Nations police will react to the new law? Obviously, that is based on the
recommendations we promoted earlier, our policing going to get the appropriate training, etc., work
with community resources such as restorative justice, to make sure that the people who break the law or
people who are encountering cannabis use get the appropriate services
they need as well at the same time. And I think restorative justice committees
can do that.
Le
Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup. Ça met un terme à ce bloc d'échange. Mme la députée de Vachon, vous avez deux minutes. À vous la parole.
• (18 h 30) •
Mme Ouellet : Merci, M. le
Président. Bienvenue. M. Picard, Mme Sioui, M. O'Bomsawin et
MM. Gray et Therrien Pinette. Donc, bienvenue à l'Assemblée nationale.
Moi,
j'aurais, avec le peu de temps que j'ai, une question concernant les
doubles juridictions que vous avez à votre page 2, où vous dites qu'il faut s'assurer
que le projet de loi ne soit pas incompatible avec la Loi sur les
Indiens et la Loi sur la gestion
financière des premières nations. Je
voulais savoir, à une première lecture et à votre connaissance, est-ce
qu'il y a actuellement des incompatibilités que vous avez déjà pointées, qui
pourraient survenir, là, suite à la double juridiction?
M. Picard
(Ghislain) : Bien, écoutez,
ça, c'est un constat préliminaire que nous avons fait qui est aussi
fondé sur le principe que, je veux dire, les
Premières Nations... dans le cas des Inuits, les Inuits pourront très
certainement parler en leur propre
nom, mais, dans le cas des Premières Nations, on ne peut pas regarder les
Premières Nations de la même façon qu'on
regarde les municipalités. Il y a la Loi sur les Indiens, effectivement, il y a
certaines autres lois aussi qui viennent renforcer l'idée que la question de l'applicabilité générale d'un projet
de loi ou d'une loi peut être questionnable ici. Et je pense que
l'article 56, en quelque sorte, y fait référence. Et c'est sans doute une
façon de faire en sorte... Parce que l'article 56,
je ne me souviens pas du libellé précis, mais parle que les ententes qui
découleront de l'article 56, finalement, pourront avoir préséance sur les dispositions générales de la loi. Et
donc je pense que ça vient confirmer finalement cette capacité-là pour
nos propres gouvernements, finalement, de pouvoir avancer des notions ou des
principes qui leur sont plus particuliers.
Le
Président (M. Merlini) : M. Ghislain Picard, M. Richard
O'Bomsawin, Mme Marjolaine Sioui, M. Richard Gray et M. Jean-Claude Therrien Pinette,
représentant l'Assemblée des premières nations du Québec et du Labrador,
merci de votre présence ce soir, merci de votre contribution aux travaux de la
commission.
Alors, je
rappelle donc que la commission ajourne ses travaux jusqu'au mercredi 17 janvier,
à 9 h 30, où nous poursuivrons notre mandat. Bonne fin de
soirée.
(Fin de la séance à 18 h 32)