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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Thursday, December 7, 2017 - Vol. 44 N° 173

Special consultations and public hearings on Bill 157, An Act to constitute the Société québécoise du cannabis, to enact the Cannabis Regulation Act and to amend various highway safety-related provisions


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Auditions (suite)

Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec (OTSTCFQ)

SecureKey Technologies Inc. et Levio Conseils inc.

Société Makivik

Association des policiers provinciaux du Québec (APPQ)

Association des propriétaires du Québec (APQ)

Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)

Association québécoise des centres d'intervention en dépendance (AQCID)

Fédération des policiers et policières municipaux du Québec (FPMQ)

Intervenants

M. Yves St-Denis, président suppléant

Mme Lucie Charlebois

M. Sylvain Pagé

M. Simon Jolin-Barrette

M. Marc H. Plante

M. Marc Bourcier

M. Mathieu Lemay

Mme Martine Ouellet

*          Mme Guylaine Ouimette, OTSTCFQ

*          M. Alain Hébert, idem

*          M. Éric Lemieux, SecureKey Technologies Inc. et Levio Conseils inc.

*          M. Didier Serra, idem

*          M. Jobie Tukkiapik, Société Makivik

*          Mme Alicia Aragutak, idem

*          Mme Sarah Aloupa, idem

*          Mme Françoise Bouchard, idem

*          M. Pierre Veilleux, APPQ

*          M. Alain Rousseau, idem

*          Mme Annie Lapointe, APQ

*          M. Robert Soucy, idem

*          M. Martin A. Messier, idem

*          M. Serge Cadieux, FTQ

*          M. Denis Bolduc, idem

*          M. Pierre-Guy Sylvestre, idem

*          M. Vincent Marcoux, AQCID

*          M. Frédérick Fortier, idem

*          M. Mathieu Fontaine, idem

*          M. Robin Côté, FPMQ

*          M. Frédéric Nadeau, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures trente minutes)

Le Président (M. St-Denis) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir s'assurer que la sonnerie de leurs appareils électroniques soit bien sur le mode vibration.

Alors, la commission est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine) sera remplacé par M. Plante (Maskinongé); Mme Hivon (Joliette) sera remplacée par M. Leclair (Beauharnois); M. Turcotte (Saint-Jean) sera remplacé par M. Bourcier (Saint-Jérôme); Mme Lavallée (Repentigny) sera remplacée par M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs); et M. Paradis (Lévis) sera remplacé par M. Jolin-Barrette (Borduas).

Auditions (suite)

Le Président (M. St-Denis) : Alors, merci. Alors, ce matin, nous entendrons les groupes suivants : l'Ordre des travailleurs sociaux et thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec et SecureKey et Levio.

Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Ordre des travailleurs sociaux et thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec. Et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et puis à commencer votre exposé. Merci.

Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes
conjugaux et familiaux du Québec (OTSTCFQ)

Mme Ouimette (Guylaine) : Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, bonjour. En tant que présidente de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, qui regroupe 13 600 professionnels du domaine de la santé mentale et des relations humaines, j'ai le plaisir de vous présenter en substance nos commentaires, observations et recommandations en lien avec le projet de loi n° 157. Je vous remercie de nous permettre de prendre la parole dans cet espace démocratique qu'est l'échange autour d'un projet de loi aussi important pour la société québécoise.

Avant de poursuivre, permettez-moi de vous présenter M. Alain Hébert, travailleur social, chargé d'affaires professionnelles à l'ordre. M. Hébert possède une expérience qui s'échelonne sur plusieurs années dans le domaine de la dépendance. Son apport sera des plus éclairants et précieux pour nourrir vos réflexions.

Vous le savez, nous le savons tous, les Québécois ne sont pas tous confortables avec l'idée, dans moins d'un an, qu'il sera possible d'acheter du cannabis en toute légalité dans un établissement de l'État comme on achète une bouteille de vin à la SAQ. La population est inquiète, des parents se questionnent, et des enseignants souhaitent se préparer pour faire face à cette nouveauté. Cela dit, entendons-nous sur une chose, nous sommes placés devant le fait accompli, puisqu'en juillet 2018 la consommation de cannabis sera légale. Il s'agit simplement de bien s'outiller en conséquence.

Une autre chose nous semble éloquente, personne ne souhaite que la législation du cannabis fasse en sorte que son usage gagne du terrain. D'ailleurs, à cet effet, nos experts se font rassurants, puisque, selon eux et selon plusieurs autres experts en la matière comme les chercheurs de l'institut québécois de santé publique, la législation n'entraînera pas un accroissement majeur de la consommation, sauf peut-être temporairement chez des personnes qui voudront expérimenter ce produit.

La bonne nouvelle, c'est que ces gens consommeront un produit contrôlé et sécuritaire. Ils seront possiblement plus satisfaits de ne pas ou de ne plus encourager le crime organisé, puisque le mandat de la Société québécoise du cannabis est d'élaborer une stratégie de mise en marché concurrentielle en matière d'accès et de prix de vente.

Donc, le vrai défi consiste davantage, selon nous, à créer des conditions d'encadrement et de gestion socialement responsable de la consommation du cannabis de même que de répondre aux besoins de la population en termes de services sociaux appropriés, notamment en ce qui a trait à la prévention, l'information et également, bien sûr, l'intervention dans les cas de surconsommation.

Afin de faire une gestion socialement responsable, il est primordial d'agir en amont et de manière préventive plutôt que curative. Notamment, nous sommes d'avis qu'il est urgent de créer des contenus d'information, d'éducation et de sensibilisation. Pour la population jeunesse, vous aurez à être innovants dans les messages et les approches à favoriser. Ces jeunes sont branchés non pas sur la télévision ou la radio, mais bien sur les réseaux sociaux et les applications pour téléphones intelligents. Nous croyons que la créativité devrait être au rendez-vous afin de les rejoindre.

En tant que parlementaires, vous avez donc ce grand défi à relever afin de tout mettre en oeuvre et de prendre les dispositions nécessaires, y compris au niveau budgétaire, pour que l'agir suive le désir.

Évidemment, personne n'est en mesure de prédire quels seront les impacts de la législation du cannabis sur la santé mentale des consommateurs. Toutefois, on doit s'attendre à ce qu'un meilleur contrôle du produit permette de transmettre des informations justes, simples pour éclairer le choix du consommateur et, par le fait même, aider les gens à consommer de façon avisée et responsable.

Parlons un peu des besoins de services sociaux dans ce nouveau contexte. Dans une logique de réduction de méfaits, il faut nécessairement compter sur une intensification des services préventifs de première ligne, de réadaptation et de développement des communautés par des actions intersectorielles et dans les milieux de vie des jeunes et des adultes. Les principes sur lesquels se sont construits les programmes de prévention au sujet de l'alcool et du tabac, par exemple, pourraient vous servir de références. Il sera nécessaire de mettre en place des programmes d'éducation, de détection et d'intervention précoce adaptés aux réalités des jeunes, à proximité des jeunes.

En collaboration avec les travailleurs sociaux dans divers milieux, incluant les établissements d'enseignement primaire et secondaire, ces programmes de sensibilisation doivent viser à développer des réflexes de consommation réfléchie et avisée chez des jeunes qui débutent ou sont susceptibles de consommer du cannabis. D'autres l'ont dit, l'approche par la peur ne fonctionne pas pour développer la compétence de responsabilisation. Les jeunes ont cependant besoin d'être informés et soutenus pour faire des choix de consommation sécuritaire.

Dans la plupart des cas, les CLSC demeurent la porte d'entrée pour obtenir ces services ainsi que dans les écoles. L'accès de proximité est la bonne voie. Or, vous le savez, le volet services sociaux généraux a subi d'importantes coupes budgétaires depuis des décennies et encore plus au cours des dernières années. À notre avis, un réinvestissement massif sera donc nécessaire afin de répondre aux attentes en prévention et en intervention auprès des personnes ayant développé des problèmes de consommation.

Votre préoccupation en tant que législateurs, en regard de la sécurité routière, est louable et découle vraiment d'une volonté de gestion socialement responsable de la consommation du cannabis. Toutefois, le fait de légaliser la consommation de cannabis, d'une part, et de privilégier une politique de tolérance zéro, d'autre part, nous semble paradoxal et difficilement applicable. Par exemple, la quantité de THC en présence dans l'organisme est influencée par différents facteurs comme le mode de consommation, la dose et la fréquence d'utilisation, et le THC demeure détectable dans l'organisme plusieurs jours après usage, contrairement à l'alcool.

À cet égard, nous enjoignons le législateur à rechercher d'autres avenues de la criminalisation dans une optique de réduction des risques et d'être vigilant dans l'équilibre à conserver entre présence du produit détectable dans la salive et le lien avec les capacités affaiblies pour la conduite automobile. D'ailleurs, nous ne sommes pas les premiers à avoir soulevé cet enjeu.

Enfin, rappelons-nous que la législation et précipitation ne font pas bon ménage. La préparation des acteurs sociaux et des professionnels qui évolueront dans le contexte de légalisation du cannabis devra s'intensifier afin que les services soient au rendez-vous dès l'été 2018, au moment où la loi fédérale sera appliquée.

Je poursuis cette présentation en citant quelques-unes des recommandations contenues dans notre mémoire. L'État doit s'engager formellement à verser une part significative des recettes en provenance de la vente du cannabis au Fonds de prévention et de recherche en matière de cannabis, pour réinvestir en éducation, en prévention et en intervention auprès des personnes pouvant développer des problèmes liés à la consommation.

En guise de conclusion, l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec enjoint le législateur à considérer l'humain avant tout, particulièrement lorsqu'il est nécessaire de prendre en compte l'impact des déterminants sociaux de la santé, qui, comme il a été, et largement, établi, occupe une place incontournable sur l'échiquier. En ce sens, il faut évaluer l'environnement et les conditions de vie de la personne, pouvant entraîner ou exacerber le stress, la désorganisation et qui sont susceptibles de mener à la surconsommation d'alcool, de médicaments, de cannabis ou de toute autre substance psychoactive pour modifier le comportement, la conscience et l'humeur d'une personne. Je vous remercie de nous avoir entendus.

• (11 h 40) •

Le Président (M. St-Denis) : Alors, je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. Alors, Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Charlebois : Merci, M. le Président. Bonjour. Bonjour à mes collègues du gouvernement et mes collègues des oppositions. Voilà, c'est notre dernière journée pleine; demain, bien, on aura une demi-journée, vendredi. Mais c'est toujours aussi intéressant que d'avoir des présentations.

D'abord, saluer Mme Ouimette et M. Hébert, qui sont avec nous. Merci d'avoir pris le temps de réfléchir à la question et de nous soumettre votre mémoire. C'est fort intéressant. J'ai beaucoup apprécié vos propos sur la prévention. Je vais commencer avec ça parce que ça nous apparaît, depuis le début, important.

Tout le monde nous a parlé, tout au long des consultations, tant le forum d'experts mais que les consultations que nous avons tenues avec le public, de prévention, alors c'est pour nous un aspect important. Vous avez souligné quelque chose de fort important pour nos jeunes, les téléphones intelligents. Ça, ça va être certainement quelque chose sur lequel... c'est un sujet sur lequel on va devoir réfléchir parce que nos jeunes sont de plus en plus là-dessus, puis c'est eux qu'on veut protéger, en tout cas, donner la bonne information. Alors, il y aura certainement une bonne réflexion de faite en matière de prévention là-dessus.

Dites-moi, est-ce que vous savez que, dans le projet de loi, il y a 25 millions d'inscrits dans la loi pour les cinq prochaines années, de garantis dans la loi? Vous savez aussi que si... Parce que, les premières années, nous ne croyons pas que la Société québécoise du cannabis devrait dégager des sommes, mais, si d'aventure ça arrivait plus vite que... plus rapidement que tard, est-ce que vous êtes au courant que... Je pense que je suis fatiguée, j'ai de la misère à faire des phrases comme du monde ce matin. On va recommencer ça. Non, mais... puis je ne me suis pas couchée tard, c'est ça, le pire!

Une voix : ...

Mme Charlebois : Bien non, mais, hein, à 80 heures par semaine, 90 heures, à un moment donné, ça arrive. Alors, je disais donc que le minimum garanti de 25 millions pendant cinq ans... mais que, si la Société québécoise du cannabis faisait éventuellement des profits, on va dire le mot, il y avait des revenus dégagés de la Société québécoise du cannabis, ce qu'on n'anticipe pas pour les premières années parce qu'il y aura l'instauration de toutes les boutiques, le site en ligne, etc., mais, si ça arrivait plus vite que prévu, vous savez que les revenus qui vont y être dégagés vont servir d'abord à payer la dette que va avoir engendrée la Société québécoise du cannabis pour instaurer ses boutiques, son site Internet, parce qu'on a toujours dit que c'est le cannabis qui allait payer pour le cannabis et non les taxes et les impôts des citoyens. Deuxième élément, il faut qu'elle paie aussi ses frais d'opération depuis le jour un. Mais, quand tout ça va être réglé, vous savez que plus de la moitié de la somme excédentaire, après les paiements dont je viens de vous faire mention, va s'ajouter aux 25 millions.

Vous savez aussi que ce qu'on souhaite faire, c'est ramener les consommateurs d'un marché illicite vers un marché licite. Mais on ne souhaite pas, puis c'est indiqué dans la loi, qu'il y ait de promotion, d'escompte de quantité puis de programme Inspire, respire et soupire. Ça n'arrivera pas, ce n'est pas prévu dans le projet de loi, puis je pense que mes collègues sont d'accord avec moi, dans l'ensemble, que ça n'a pas de bon sens qu'on ferait de la promotion pour vendre du cannabis.

Alors, est-ce que vous considérez que le 25 millions plus les profits éventuels, plus de la moitié des profits éventuels après avoir payé sa dette, ses opérations et tout le kit, soit un bon point de départ? Parce que ça, c'est déjà inscrit dans la loi. Est-ce que vous convenez que... Parce que c'est une première, je pense, que quelqu'un écrive des montants dans une loi. Alors, est-ce que ça vous satisfait, vous?

Le Président (M. St-Denis) : Mme Ouimette.

Mme Ouimette (Guylaine) : Oui. Merci. En fait, avant de passer la parole à M. Hébert à ce sujet, je vous dirais que 25 millions pour rehausser rapidement, actuellement, l'accès, de développer déjà des outils de prévention et d'information pour conscientiser les Québécois, d'assurer de rehausser l'accès à des services sociaux à proximité, autant des jeunes que pour les adultes, je ne suis pas comptable, je ne suis pas en mesure d'évaluer. C'est un geste qui est quand même reconnu, on sent vraiment de votre part le besoin qu'il y ait un encadrement. Est-ce que c'est suffisant? Moi, je ne suis pas en mesure de me prononcer sur ça, mais on reconnaît le geste de le faire.

Surtout que, bon, quand on parle du fonds de recherche et d'éventuellement que des argents et les surplus vont aller à cet endroit-là... Parce que, pour nous, la grande préoccupation également, c'est que le gouvernement dépose un bilan formel qui va offrir un portrait complet des impacts du projet de loi cinq ans après son entrée en vigueur afin que des correctifs nécessaires soient apportés le cas échéant. Ça, c'est la recommandation 10 que l'on fait. M. Hébert, est-ce que vous avez quelque chose à dire sur ce sujet?

M. Hébert (Alain) : Oui. Écoutez, c'est toujours difficile, dans des chiffres précis, de mesurer la concordance entre les montants d'argent investis et les besoins en termes de population. Mais, tu sais, rapidement, si on réfléchit, on dit : 25 millions, cinq ans, 5 millions par année, 16 grandes...

Mme Charlebois : ...millions par année pendant cinq ans.

M. Hébert (Alain) : ... — par année?, bon — 16 grandes régions du Québec, ça veut dire 1 million point quelques par grande région du Québec. Est-ce que c'est suffisant pour développer des services préventifs intensifs, qui ont rétréci, là, il faut l'admettre quand même, comme peau de chagrin dans les dernières années? C'est sans doute un bon point de départ. Et je pense que de mentionner qu'il puisse y avoir un montant d'argent qui y est associé, de prévoir ensuite que des recettes supplémentaires puissent nourrir les programmes de prévention, c'est certainement un apport et c'est à saluer.

Est-ce que c'est suffisant? Quand on sait combien coûtent le développement de projets, la réalisation de ces projets-là, surtout si on veut que les projets ne soient pas seulement ponctuels, mais qu'ils deviennent des programmes sociaux installés dans les communautés, ça serait difficile pour nous de considérer que c'est suffisant pour le moment, connaissant la réalité terrain aussi.

Mme Charlebois : Je veux vous dire que ce n'est pas juste 25 millions, là. C'est ça que je vous disais. C'est, une fois payés la dette et les frais d'opération, il y aura l'excédent qui va aller en plus du 25 millions, d'une part. D'autre part, pour ce qui est des budgets, moi, ça fait trois ans et presque et demie, là, que je suis ministre déléguée aux Services sociaux, je pourrais vous dire Réadaptation, Protection de la jeunesse, tout le kit, là...

M. Hébert (Alain) : Et les autres aspects.

Mme Charlebois : ...les budgets n'ont pas rétréci. Au contraire, ils ont augmenté. Ça fait que je vous invite à la prudence.

Troisième élément. Je prends en note votre recommandation 10 parce que nous autres, on a prôné pour un rapport de mise en oeuvre trois ans après — pas cinq ans, trois ans. Parce qu'on s'est dit : Pour le premier rapport, pour la première révision, il faut que ça aille rapidement, mais pas trop, il faut qu'on ait quand même un portrait de la situation. Alors, je comprends que, normalement, c'est cinq ans, mais j'entends votre recommandation. Mais on favorise le trois ans pour être capables de réagir rapidement.

Puis soyez assurés qu'on va se garder une certaine souplesse pour avoir des leviers pour pouvoir agir rapidement, s'il y avait des choses à revoir rapidement, sans attendre tout le processus législatif. Je comprends que... j'ai des collègues qui me disent : On peut revoir un projet de loi à tous les ans. Mais, vous savez, les commissions parlementaires sont tellement occupées avec plusieurs projets de loi, il vaut mieux, quand on fait une loi, prévoir déjà les échéanciers qui sont plus raisonnables.

Alors, j'ai le goût de vous demander : Dans les programmes de prévention que vous souhaiteriez voir sur la table, outre les programmes de prévention qui existent déjà, qu'est-ce que vous voudriez voir s'ajouter dans le cadre du 25 millions par année, là? Puis ce n'est pas nécessairement une répartition par régions administratives, il y aura des programmes nationaux, il y aura des programmes plus locaux, mais on va voir comment on va répartir ça. Mais, si je pars du principe que vous pensiez... c'était 25 millions pendant cinq ans, 5 millions par année... Je pensais que vous alliez me dire que 25 millions par année, ça allait être bon, mais, bon! Qu'est-ce que vous voudriez voir dans un bon programme de prévention?

• (11 h 50) •

M. Hébert (Alain) : Écoutez, c'est sûr que... puis on pourrait faire d'autres types de calculs et se poser puis réfléchir aussi à des questions de cohérence, là. On pourrait, par exemple... je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de chiffrer, par exemple, les sommes investies en réadaptation, les sommes investies en conséquences sociales dans la prévention qu'on ne fait pas. Et je pense qu'on parlerait plutôt de centaines de millions et non pas de 25 millions. Alors, ce qu'on vous dit, c'est : Oui, c'est un pas dans la bonne direction. Est-ce que ça nous apparaît à première vue suffisant? Non.

La question qu'on peut se poser... parce que, justement, vous nous posez la question sur les programmes de prévention à développer, c'est qu'on a vraiment intensifié une logique, dans les programmes de prévention, à construire des programmes de prévention qui sont fondés sur une logique de réduction des méfaits et non pas seulement de réduction ou d'abstention de la consommation, comme c'est encore largement fait. Et même, on voit, dans la politique de prévention santé, que les objectifs en lien avec la consommation d'alcool et de drogue sont formulés en termes de diminution. Ils ne sont pas formulés en termes de réduction des méfaits, à moins qu'il y ait quelque chose qui nous ai échappé. Vous saurez nous le dire.

Donc, dans ce sens-là, la logique de prévention, quand on la fait en milieu de vie, auprès des jeunes, auprès des adultes, on doit partir du principe qu'on s'adresse à des gens qui n'ont pas encore développé de problème avec les produits. Il faut changer le paradigme avec lequel on s'adresse à ce moment-là à la population, qui n'est pas la population qui vit nécessairement les problèmes. Et, malgré l'évolution et des tentatives intéressantes en termes de programmes, dans le passé, on ne pense pas, nous, en tout cas avec ce qu'on connaît sur le terrain, qu'on est en mesure rapidement de développer des programmes de prévention adéquats et suffisants. Et on pense que pour le faire, bien sûr, ça prend une question... il y a une question de financement, il y a une question de coordination, il y a une question d'agencement avec les données de la recherche, il y a une question de conception, il y a une question de projet pilote, de monitorage, et tout. Et ça, c'est beaucoup d'argent.

Et par rapport à ce qu'il y a... vous mentionniez tantôt, les budgets au niveau des services sociaux, en tout cas, ce n'est pas ce que nous, on entend des travailleurs sociaux sur le terrain.

Mme Charlebois : ...les chiffres qui le prouvent. Ça fait que...

M. Hébert (Alain) : C'est possible, mais, sur le terrain...

Mme Charlebois : Et j'ai des études de crédits. Non, mais...

M. Hébert (Alain) : ...ce que nous, on voit, c'est des travailleurs sociaux qui ont de moins en moins l'occasion d'aller en milieu de vie, en milieu scolaire, de travailler en concertation avec les organismes de milieu, des travailleurs sociaux qui ont de plus en plus des mandats pour travailler en réadaptation et même en protection de la jeunesse. Et les services sociaux de première ligne, dans ce qui nous est rapporté, à tout le moins, je ne conteste pas vos chiffres, bien sûr, mais c'est une réalité différente.

Mme Charlebois : En tout cas, vous viendrez à l'étude des crédits, on va pouvoir vous montrer...

M. Hébert (Alain) : Je ne conteste pas ça. Je vous parle du terrain.

Mme Charlebois : Mais on va pouvoir... Oui, mais moi aussi, je fais beaucoup de terrain, puis je sens que plus on s'approche de la campagne électorale, je vais le dire comme ça, plus il y a des discours comme vous me donnez parce qu'il y a des gens qui veulent positionner des choses. Puis c'est louable, c'est normal, ça fait partie de la trajectoire. Mais il ne faut pas prétendre qu'on baisse les services. Au contraire, on les augmente.

M. Hébert (Alain) : Oui. Ça fait quand même cinq ans qu'on tient ce discours, et un petit peu plus, mais, bon, on clôt là-dessus...

Mme Charlebois : Bien, écoutez, moi, ça fait trois ans que je suis ministre, puis je peux vous dire que je fais le terrain, je ne me tiens pas au 15e étage du ministère de la Santé, là. Puis je peux vous le garantir qu'on ne fera pas un débat là-dessus ici, aujourd'hui, avec vous, mais...

M. Hébert (Alain) : C'est très bien.

Mme Charlebois : ...je peux vous garantir qu'on n'est pas en réduction de travailleurs sociaux, on n'est pas... au contraire. Au contraire, on cherche à en former plus, on cherche à en avoir plus sur le terrain. Mais est-ce que les gens souhaitent en avoir plus? Je suis capable d'entendre ça, de le comprendre. Mais de me dire que je les ai coupés, ça ne se peut pas.

Ceci étant dit, revenons à l'essence de la loi, du projet de loi. Qu'est-ce que vous pensez de l'âge de 18 ans qu'on a mis comme âge de possibilité de consommation, l'âge légal? Et je veux aussi vous parler, avant que mon temps imparti se termine...

Le Président (M. St-Denis) : ...

Mme Charlebois : ... — trois minutes? — de la tolérance zéro. On ne peut pas la mettre actuellement. On va plutôt travailler avec ce qui se fait là, là, le... conduite avec les capacités affaiblies, puisqu'on n'a pas les appareils de détection homologués. Ça fait que ça n'arrivera pas demain matin. Il faut que Santé Canada nous dise qu'il y a des appareils homologués pour signifier une consommation récente. Parce que, vous l'avez dit, ça reste dans le sang, puis il faut faire attention à comment... Alors, tant que ça, on ne l'a pas puis que ce n'est pas approuvé par sécurité publique au Québec, ça n'arrivera pas. Mais parlez-moi de l'âge et des plantations à la maison.

Mme Ouimette (Guylaine) : En fait, Mme la ministre, nous, on n'a pas fait de grandes études à savoir pour déterminer l'âge. Je sais qu'il y a plusieurs personnes qui sont en commission parlementaire pour statuer sur l'âge. Nous, on croit que, sans avoir d'appui, de recherches ou de quoi que soit, que l'important actuellement, c'est de faire de la prévention pour que les personnes qui sont en âge encore... avec une croissance au niveau de leur développement puissent faire des choix éclairés, sécuritaires et qu'ils comprennent bien.

Parce que pour les jeunes, de toute façon, ça se passe déjà, il ne faut pas se mettre la tête dans le sable. C'est d'arriver avec des programmes de prévention qui vont leur permettre de faire des choix éclairés et aussi de soutenir les parents à soutenir leurs enfants. Parce que, bon, on est encore dans une société où il y a beaucoup de pensée judéo-chrétienne, qui dit : On va faire peur pour faire peur, puis ça va donner quelque chose. Et ça ne donne absolument rien.

Donc, on croit vraiment que les parents et les jeunes, ensemble, devront réfléchir et faire de bons choix. Parce que nous, comme on dit, la prévention, ce n'est pas juste pour... avec une visée des problèmes. C'est qu'il y a beaucoup gens qui n'en ont pas, de problèmes, qui veulent consommer de façon sécuritaire. Donc, on vise beaucoup, beaucoup l'approche de prévention qui permet à la société québécoise de bien comprendre et puis de faire des choix éclairés et consciencieux. On est d'accord avec l'approche d'avoir mis une société québécoise, là, pour l'encadrement du cannabis. On trouve que c'est des éléments de sécurité en termes de points de vente, et tout ça, de s'assurer du niveau de THC. Donc, pour nous, cet aspect-là est réconfortant. Donc, l'idée, c'est d'amener les gens à faire des choix judicieux.

Mme Charlebois : Merci. Je sais que mon collègue brûle d'envie de vous entendre parler des projets pilotes. J'entends pour la recherche, j'entends aussi pour des programmes de prévention, parce que c'est écrit dans la loi, divers projets pilotes dont un qui va s'adresser spécifiquement à la vente. Mais, il y aura d'autres possibilités de projets pilotes. Et je sais que j'ai épeuré la députée de Repentigny, mais ce n'est pas pour la vente, c'est plutôt pour justement parfaire nos services, comment on peut faire mieux en ayant des projets pilotes, notamment, comme vous avez mentionné, en prévention, tout ça.

Alors, j'aimerais ça vous entendre me parler de la possibilité d'avoir des projets pilotes, tant pour différents aspects, que ce soit la production, que ce soit la prévention, des programmes de prévention, et que ce soit la vente. Comment vous voyez ça, vous, avec un nombre limité... d'une autre façon de vendre du cannabis?

Le Président (M. St-Denis) : En 15 secondes.

Mme Ouimette (Guylaine) : En 15 secondes? Écoutez, au Québec, on a fait des projets pilotes qui ont été très concluants, qui ont permis, ensuite de ça, de faire des pas vers des avancées qu'on aurait probablement tentées à grande échelle et qui n'auraient pas réussi. Donc, c'est sûr qu'en gestion de projet, faire des îlots de projets pilotes... peuvent être intéressants pour éclairer des décisions gouvernementales. Donc, on ne peut pas aller contre la vertu ou contre des approches qui peuvent permettre d'avoir un éclairage plus rapidement sur des personnes ou des groupes cibles.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, je vous remercie...

Mme Ouimette (Guylaine) : Donc, on n'a pas réfléchi sur ça, donc...

Le Président (M. St-Denis) : Je vous remercie, Mme Ouimette. Alors, je vais céder la parole maintenant au député de Labelle. M. le député de Labelle, vous disposez de 9 min 30 s.

M. Pagé : 9 min 30 s Merci. Bienvenue chez vous, à l'Assemblée nationale. Vous avez dit tantôt : Législation et précipitation ne font pas bon ménage. Alors, je vous rappelle, hein, évidemment, qu'on nous a imposé cet agenda. Nous étions d'accord avec la deuxième opposition non seulement pour retarder d'un an, mais de regarder jusqu'à tant que nous soyons prêts, tout le monde, autant à Ottawa qu'à Québec. Alors, on comprend qu'on est pas mal plus dans un agenda électoral fédéral que dans un agenda de santé et de sécurité publique. Alors, évidemment, nous le déplorons tous ici, évidemment.

Bien, j'ai envie de prendre la balle au bond, parce qu'on a fait référence à ces fameux projets pilotes sur lesquels on a une divergence d'opinions. En fait, c'est parce que, dans les projets pilotes, on ne sait pas ce que ça peut vouloir dire. Et tout le monde a applaudi le fait que ça soit une société d'État à but non lucratif et réinvestir en santé et en sécurité. Sauf que, si des projets pilotes voient le jour avec le privé, vous connaissez justement cette inquiétude que nous avons face au privé qui voudra faire des sous.

Alors, c'est la raison pour laquelle nous disons : Déjà, l'installation de cette nouvelle société d'État va prendre un certain temps afin de s'assurer de faire les choses correctement. Alors, nous, ce que nous proposons, c'est tout simplement de retirer cet article, et, un jour, si on veut revenir dans trois ans, dans cinq ans et y aller avec des projets pilotes, avec le privé, on pourra peut-être le faire. L'association de santé publique préfère trois ans. Certains nous ont dit : Le suspendre. Il est vrai qu'on ne siège pas à toutes les sessions, ici, à la CSSS. Mais, pour un article de loi, on peut faire ça très rapidement à chaque session parlementaire si on veut revenir.

Alors, c'est la raison pour laquelle, nous, nous militons pour enlever l'article 55, ces projets pilotes, parce qu'il peut y avoir une notion de privé là-dedans. Alors, on va développer quelque chose de parallèle qui est flou parce que ce n'est pas clairement défini. Alors, ma question serait la suivante : Est-ce qu'il serait préférable de dire «projet pilote», mais dans un certain nombre d'années, afin d'installer correctement la société d'État, ou bien tout simplement le retirer à ce stade-ci, ou bien d'enlever toute notion de profit à l'article 55?

• (12 heures) •

Mme Ouimette (Guylaine) : Pour préciser ma pensée, quand on a parlé de projet pilote tout à l'heure, je suis demeurée vraiment dans mon rôle de travailleuse sociale et présidente de mon ordre, je voyais des projets pilotes spécifiques par rapport à des nouvelles approches en prévention, qui soient par téléphone intelligent ou qui soient dans des programmes avec des cibles de populations bien précises. Quant au projet pilote concernant de... faire un projet pilote auprès du privé, écoutez, on n'a pas fait de grande réflexion là-dessus, mais c'est évident que nous reconnaissons préférablement que ça soit la société d'État qui encadre vraiment la vente du cannabis, parce que ça nous appartient, les Québécois seront probablement rassurés que ça soit fait par une société d'État. Donc, je vous dirais que sur ça, même si on n'a pas fait de grande réflexion en partageant ce matin, c'était notre positionnement. M. Hébert a peut-être quelque chose à ajouter.

M. Hébert (Alain) : En fait, ce qui est en cause, c'est peut-être davantage la nature des projets pilotes qui pourraient être expérimentés, parce que, lorsqu'on souhaite expérimenter des projets pilotes qui... dans lesquels il n'y a pas de notion... d'aspect lucratif, mais qu'on veut expérimenter des méthodes d'intervention, et tout, on peut difficilement être non favorables à ça.

M. Pagé : O.K. La ministre tantôt aussi vous a questionnés sur le fait que nous inscrivons dans la loi qu'il y aura 25 millions par année sur cinq ans. J'ai dit trois ans hier, je m'en excuse, parce qu'effectivement, c'est sur cinq ans, alors... pour rendre à César ce qui est à César. Évidemment, on ne peut pas être contre la vertu, mais vous avez très bien dit, si je divise par 17 régions administratives, c'est à peu près 1,6 million. Alors, évidemment, c'est... Et, quand j'entends les besoins hier pour les communautés autochtones, les Innus, là, tous les besoins qu'il y a partout, ça devient difficile à évaluer si, 25 millions, on va aller très loin avec cela, là. D'ailleurs, j'invite la ministre... s'ils ont mis un chiffre de 25 millions, c'est qu'il doit y avoir une ventilation à quelque part. Qu'on nous dise qu'est-ce qu'on va faire avec le 25 millions, et ensuite on pourra évaluer. Moi, je veux bien qu'on annonce un chiffre comme ça, mais si on ne sait pas ce qu'on va faire avec, c'est un peu difficile d'évaluer si véritablement on va répondre à l'ensemble des besoins, qui, à mon avis, risquent d'être beaucoup plus importants que 25 millions, d'une part.

La ministre nous dit également : La loi... quand il y aura des profits, on va réinvestir des profits dans des projets de prévention. Ça aussi, je veux bien, mais il y a une chose qu'on ne dit jamais, et je ne sais pas si vous l'aviez déjà remarqué, mais il y aura aussi des revenus de la TPS, parce qu'il y aura de la TVQ et de la TPS. Et juste en revenus de TPS, si on fait le même ratio qui nous a été abordé, là, avec Ottawa, là, qui dit, avec son dollar de taxe d'accise, ça devrait rapporter à peu près un milliard. Alors, si je fais un ratio, ce que ça veut dire en TVQ, pour le gouvernement du Québec, ça devrait probablement être autour de 200 millions. Alors, les profits de la SQC, là, ça ne comprendra pas le 200 millions d'argent neuf qui va rentrer dans les coffres de l'État. Alors, vous voyez que, dans le fond, là, le 25 millions, dont on ne sait pas ce qu'on va faire avec, à comparer avec l'ensemble des revenus de la SQC, c'est une chose, mais de l'ensemble des revenus du gouvernement du Québec.

Alors, je tiens à dire cela parce qu'on nous dit : Oui, oui, on va faire beaucoup de prévention, on va avoir 25 millions. Alors, moi, je veux vous amener sur votre point deux. Quand vous dites que «le législateur introduit»... non, attendez un petit peu. À la troisième... troisième picot de vos recommandations : «Que le législateur s'assure que les services préventifs, psychosociaux, première ligne et de réadaptation soient disponibles en quantités suffisantes.» Juste pour cela, «quantités suffisantes», ça veut dire quoi, combien? Est-ce que vous avez évalué, et quels seraient les coûts? Parce qu'on le voit manifestement, là, il va en avoir, de l'argent de disponible pour faire des choses. Alors, moi, j'aimerais, là, qu'on nous alimente pour qu'on mette suffisamment d'argent dans tout ce qu'il faut en prévention.

Mme Ouimette (Guylaine) : Malheureusement, on n'a pas fait ces calculs-là de façon scientifique, donc, ce qu'on vous partage aujourd'hui, notre souci à nous, c'est vraiment qu'il y ait des réinvestissements importants qui soient faits au niveau de l'accès à des services psychosociaux de proximité afin que la population qui... là, on n'est plus dans le domaine de la prévention quand on parle de ça, quand on est rendu à parler d'offre de service, c'est pour des gens qui ont des problèmes de consommation, des familles, des enfants, et tout ça. Donc, à ce niveau-là, on n'est plus dans le monde de la prévention, on est vraiment dans le monde de l'intervention. Donc, on veut s'assurer qu'effectivement les argents soient au rendez-vous.

M. Pagé : Parlant d'argent au rendez-vous, nous, on a entendu... moi, j'ai fait la tournée avec la ministre dans toutes les régions, sauf une. Alors, sur les neuf journées de consultation, j'en ai fait huit, quand même. Et on nous a dit un peu partout : Oui, inscrivez aussi, dans la loi, que 100 % des profits devront être réinvestis en prévention, santé publique, aussi une partie pour les municipalités qui auront à appliquer les règlements. Ce n'est pas inscrit, dans la loi, que 100 % des profits devraient aller pour ce que je viens de dire, les saines habitudes de vie, santé publique, prévention, et tout le reste. Est-ce que vous croyez qu'on devrait l'inscrire clairement dans la loi?

M. Hébert (Alain) : En fait, tantôt, je répondais à la question de Mme la ministre, là, qui était directement... qui portait sur un chiffre. Au-delà de ça, la question que, nous, on souhaite amener aussi, c'est qu'en termes de politique publique, lorsqu'on regarde les questions de prévention ou les questions de service, la question qu'on pose, c'est : Est-ce qu'on doit les associer nécessairement, uniquement ou absolument à la question des profits qui proviendraient de la vente du produit pour lequel on veut faire de la prévention? Ce n'est pas nécessairement quelque chose qu'on fait par rapport à l'alcool, ce n'est pas nécessairement quelque chose qu'on fait dans d'autres domaines de champs sociaux pour lesquels on fait de la prévention.

Alors, nous, on n'est pas nécessairement... on n'est pas dans une perspective limitative par rapport à ça. Nous, ce qu'on annonce, ou ce qu'on demande, ou ce qu'on souhaite, ou ce qu'on recommande — en fait, c'est un éclairage qu'on veut apporter à l'État — c'est que, si on veut être cohérent avec une optique de légalisation du cannabis, et de faire en sorte d'être vraiment dans la réduction des méfaits puis dans la protection, puis d'amener des services aux parents, de monter des groupes avec eux, d'intervenir de façon de proximité, et tout, ça commande des ressources financières.

Alors, au-delà de ça, on n'a pas fait ce type de calcul précis, mais ce qu'on souhaite et ce qu'on recommande, c'est qu'on ajuste les montants ou les ressources financières nécessaires à ce qu'on perçoit en termes de besoins de services...

Le Président (M. St-Denis) : Alors, je vous remercie, M. Hébert. Merci, M. le député de Labelle. Je cède maintenant la parole au député de Borduas. Vous disposez, M. le député, de 6 min 30 s.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Mme Ouimette, M. Hébert, bonjour. Merci d'être présents et de contribuer à nos travaux de la commission. D'entrée de jeu, c'est bien qu'un ordre professionnel vienne en commission parlementaire nous présenter le point de vue, parce qu'il faut toujours rappeler qu'un ordre professionnel, sa mission première, c'est d'assurer la protection du public. Donc, je pense que c'est important d'entendre le message que vous nous envoyez aujourd'hui.

D'entrée de jeu, vous savez, le cannabis, la ministre nous le dit souvent, ça existe déjà, ça existe dans nos écoles, ça existe un peu partout, il y a des gens qui consomment déjà cette substance, qui est présentement illicite, il y en a eu, certaines campagnes de prévention, il y a du travail, qui sont faits dans la société. Mais qu'est-ce qu'on n'a pas fait, à ce jour, de correct, en matière de prévention, de sensibilisation ou de réadaptation, qui nous amène, une fois que ça va être légalisé, à devoir investir encore davantage pour expliquer quels sont les risques associés à une consommation, et où on peut s'améliorer à ce niveau-là, selon vous?

Mme Ouimette (Guylaine) : Je vais laisser la parole à M. Hébert.

• (12 h 10) •

M. Hébert (Alain) : Bien, en fait, je disais tantôt, c'est le développement de programmes de prévention qui prennent acte du fait que le produit sera légal et qui seront davantage axés sur des stratégies non seulement d'information, mais de soutien, de guide pour aider les jeunes, pour aider les adultes à développer des comportements responsables par rapport à une substance qui deviendra légale. Et on devra parler, dans les programmes de prévention... et avoir des orientations qui tiennent compte que le produit est désormais légal, et d'être moins dans des programmes qui visent uniquement l'abstinence, qui visent uniquement de l'information associée au seul risque et qui ne reconnaissent pas, dans une logique de prévention, les motivations pour lesquelles les gens consomment aussi le produit, qui sont des motivations associées à la recherche du plaisir, associées à la recherche de relations sociales, et tout.

Et on a un changement de paradigme qui est amorcé dans certains programmes de prévention, mais on a à l'intensifier beaucoup, et ça, ça commande, nous pensons, des investissements. On a développé, par exemple, un programme qui pourrait être développé, en termes de gestion responsable. On a un programme qui s'appelle Alcochoix, qui aide des consommateurs d'alcool à risque à gérer leur consommation d'alcool dans une perspective de réduction des méfaits ou de prévention d'un mésusage. Il pourrait être fait la même chose, par exemple, en lien avec le cannabis. Alors, ça, ça demande que ces programmes-là soient montés et structurés. Voilà, ce sont des exemples... des rencontres de parents, par exemple. Aider les parents, les soutenir à voir comment ils pourraient aborder la question avec leurs jeunes. Alors, ça, c'est... Comment ils pourraient transiger avec ce produit-là maintenant qu'il sera légal? Alors, ça, c'est un autre exemple de programme qui pourrait être développé et qui n'est pas développé actuellement comme tel.

M. Jolin-Barrette : O.K. Puis, quand vous dites : C'est important de développer ce genre de programme là, c'est quoi, la vision que vous avez pour le développement de ces programmes-là? Supposons, pour les parents, est-ce qu'on envoie ça dans les écoles avec les travailleurs sociaux qui sont dans les écoles? Est-ce que ça se fait par le biais de la santé? Services sociaux? Vous dites dans votre mémoire : Il faut former les travailleurs sociaux notamment. Comment est-ce qu'on l'applique? Quel type de programme vous voyez?

M. Hébert (Alain) : Bien, en termes de modalités, écoutez, il y a déjà des structures en place au niveau du réseau de la santé et des services sociaux, il y a des tables intersectorielles avec les organismes communautaires. Il s'agit de faire le pendant et le lien avec les organismes de recherche, de santé publique, avec les organismes qui travaillent en développement des communautés. C'est de rassembler, sur les territoires, les gens pour développer ces programmes-là et... qui doivent être soutenus par la recherche et les données probantes. Alors, ça peut se faire à un niveau régional, à un niveau local sur la base d'orientations nationales, et coordonné de façon nationale.

Mme Ouimette (Guylaine) : Et, si vous me permettez, j'ajouterais aussi que, quand on parle de téléphones intelligents, quand on parle d'applications mobiles, c'est une nouvelle façon de faire de la prévention. Donc, c'est évident qu'à cet égard-là on est dans du nouveau. Aujourd'hui, les jeunes veulent faire de l'intervention sociale avec les travailleurs sociaux par textos. Écoutez, on est en train de regarder l'encadrement de tout ça. C'est évident qu'on doit être créatifs et innovants. Et ce qu'on disait d'entrée de jeu ce matin, c'est de vous inviter à la créativité pour rejoindre les gens de façon moderne, en fait.

M. Jolin-Barrette : O.K. Tout à l'heure, vous disiez : Sur le terrain, on a senti que les services avaient été diminués. Vous nous invitez, dans votre mémoire, à ce que les soins de première ligne soient maintenus, voire augmentés. Avec la légalisation du cannabis, pensez-vous qu'on va se retrouver dans une situation où les besoins vont être grandissants?

M. Hébert (Alain) : Bien, certains besoins spécifiques vont apparaître. On ne pense pas, nous, par contre, que la légalisation, là, va changer complètement le portrait de la situation. Pour nous, il y a un certain nombre d'avantages, on le disait, ils sont dans les finalités du projet de loi, en termes de rendre illicite quelque chose qui... c'est-à-dire de rendre licite ou légal ce qui appartient maintenant au monde illicite. Mais on ne prévoit pas nécessairement, si on peut dire, des catastrophes, des grands problèmes de surconsommation autrement que ceux qui sont déjà présents. Mais ce qu'on mentionne, c'est que déjà les services de prévention ont besoin d'être intensifiés, alors, à plus forte raison dans un contexte où il y a certains aspects nouveaux quand même qui arrivent avec la présence du cannabis légalisé.

M. Jolin-Barrette : O.K. Je voudrais vous demander : Au niveau de la quantité qui est autorisée — je ne l'ai pas vu dans votre mémoire, là — on prévoit 30 grammes par personne dans un lieu public, 150 grammes à la maison par personne, est-ce que vous avez une opinion par rapport à la quantité qui est donnée? Il y a des intervenants qui sont venus précédemment avant vous. Hier justement, ils disaient : Les gros consommateurs consomment généralement trois grammes par jour. Et là on propose d'avoir 30 grammes en public, puis stocker 150 grammes à la maison. Est-ce que vous avez une opinion là-dessus?

Le Président (M. St-Denis) : En 15 secondes.

Mme Ouimette (Guylaine) : En fait, on ne pourra pas répondre à ça, parce que ce n'est pas notre domaine. En fait, vous avez eu des experts ici, en commission, qui ont pu vous répondre. On n'a pas tablé sur cette question-là. Je vous remercie.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, Mme Ouimette, M. Hébert, je vous remercie de votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de venir s'installer et prendre place. Merci.

(Suspension à 12 h 15)

(Reprise à 12 h 18)

Le Président (M. St-Denis) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Donc, je souhaite la bienvenue aux représentants de SecureKey et Levio, MM. Serra et Lemieux. Alors, je vous rappelle que vous disposez d'une période de 10 minutes pour votre exposé, et puis nous procéderons à la période d'échanges avec les membres de la commission. Alors, je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé.

SecureKey Technologies Inc. et Levio Conseils inc.

M. Lemieux (Éric) : Merci. Alors, bonjour, Mme la ministre, MM. les députés. Nous sommes très heureux d'être ici ce midi pour présenter notre plateforme de gestion des ventes de cannabis. Alors, je me présente : je suis Éric Lemieux, associé directeur chez Levio. Levio est un important fournisseur québécois de solutions d'affaires et de technologie. On est partenaire et fournisseur entre autres du gouvernement du Québec et de grands joueurs du secteur financier. Levio a été fondé en 2012 et a son siège social à Québec en plus d'avoir un bureau à Montréal et Toronto. Et pour rappel, Mme la ministre, j'avais participé aux consultations publiques sur l'encadrement du cannabis. Nous étions présents à Trois-Rivières. M. Plante et M. Pagé étaient également présents, et on a également eu des consultations avec certains membres de la commission.

M. Serra (Didier) : Bonjour. Didier Serra, je suis vice-président exécutif des ventes et du marketing chez SecureKey. SecureKey est une entreprise canadienne qui se spécialise dans l'authentification et l'identité en ligne. L'entreprise a son siège social à Toronto et des bureaux à Montréal, San Francisco et Boston. D'ailleurs, certains d'entre vous ont peut-être récemment utilisé le service concierge de SecureKey pour accéder à votre profil Revenu Québec par l'entremise des identifiants bancaires.

• (12 h 20) •

M. Lemieux (Éric) : Donc, on est là pour vous parler d'un projet concret, pas d'un concept. Ce qu'on veut vous présenter, c'est une plateforme que nous mettons en place pour la distribution sécuritaire de produits réglementés, dont, entre autres, le cannabis. Et d'ailleurs, on voulait vous montrer une démonstration de la plateforme. Si vous voulez bien, il y a deux écrans que vous voyez, et je vais démarrer une présentation.

Alors, ce que vous voyez, juste pour bien comprendre, l'écran est divisé en deux, alors, à votre gauche, vous avez l'image d'un site Internet Web et à droite vous avez le portable de la personne. Évidemment, les deux pourraient être sur le portable, mais pour aujourd'hui, pour faciliter la compréhension, on va voir l'interaction entre ces deux applications-là. Alors, on peut imaginer évidemment que le site d'achat pourrait être un site semblable à celui qui sera mis en place par la Société québécoise du cannabis. Alors, je vais laisser mon collègue...

M. Serra (Didier) : ...présenter la vidéo. Donc, la première étape, c'est confirmer votre choix du panier. Une fois que vous avez confirmé ce que vous voulez acheter, vous serez donc identifié par l'entremise de l'application e-service de SecureKey. Donc, vous verrez là une authentification qui est basée à partir... entre mobile et Web. Tout pourrait s'effectuer sur le site Internet uniquement. Donc, l'utilisateur va utiliser son téléphone intelligent pour lancer l'application Verified.Me. Donc, je m'excuse, pour l'instant l'application est uniquement en anglais, la traduction française est en cours en ce moment. Donc, l'utilisateur lance l'application et va être amené à s'authentifier auprès de son institution financière de la façon dont il le fait aujourd'hui pour accéder à ses services en ligne. Donc, sur la démonstration, il va entrer ses identifiants, «login» et mot de passe. Cela pourrait utiliser aussi d'autres méthodes. À ce moment-là, il lance la caméra pour pouvoir scanner le code QR qui est présenté sur la plateforme d'achat, qui va alors lui présenter les informations d'identité qui sont nécessaires pour compléter son achat. Les informations d'identité sont fournies par sa banque, il a le moyen de revoir quelles sont ces informations et de confirmer qu'elles sont correctes. Une fois qu'il est d'accord avec les informations, il va donc consentir à ce que les informations soient partagées directement depuis sa banque vers la plateforme qui gère la distribution ou l'achat de cannabis. Vous allez voir, à cet instant-là, que, sur le téléphone intelligent, s'affichent les données qui sont transfermées conformément à ce qu'il a vérifié, ces mêmes données vont apparaître aussi sur la plateforme Web qui est à gauche.

M. Lemieux (Éric) : Alors, par la suite, la personne va continuer à utiliser l'application comme un site. Donc, on vient d'avoir, actuellement, une authentification forte, où la personne demeure, son âge, et là on tombe, après ça, dans la transaction où on peut faire le paiement, alors, que ce soit le paiement avec carte de crédit, avec PayPal ou avec service bancaire.

Mais ce qui est important, c'est qu'on conserve les données pour être en mesure de faire de la protection, de la prévention. Alors donc, vous allez voir apparaître un message de prévention qui va pouvoir apparaître, tout dépendamment, est-ce que c'est la première fois qu'on achète, la dixième fois, l'habitude... et qui va pouvoir être personnalisé aussi en fonction du profil de l'individu, aussi bien son lieu de résidence — ici, je donne un exemple — ou son âge.

M. Serra (Didier) : Un autre point important, c'est qu'on voulait aussi couvrir l'aspect livraison. Donc, de la même façon que l'utilisateur a dû s'authentifier et vérifier son identité avec son téléphone intelligent, il pourra faire la même façon au moment de la livraison pour confirmer au livreur ou au magasin que c'est bien la bonne personne.

M. Lemieux (Éric) : Un autre élément qui est important, c'est tout ce qui est perception des taxes. Et là, on entend parler de taxes, donc, que ça soit les taxes du côté TPS, TVQ, mais aussi les taxes spéciales reliées au cannabis... vont également pouvoir, si vous voulez... ou sont traitées à l'intérieur du système.

Donc, grosso modo, ce qui est important, c'est de dire : Il est important de construire sur des bases solides et modernes. Alors, on suit le dossier de très près et, depuis un moment, on entend les préoccupations du gouvernement, des partis de l'opposition officielle et des divers intervenants, puis on en est venu à se dire — puis j'irais même à dire des préoccupations personnelles, comme père de famille — on en est venu à se dire qu'on était capable de mettre en place une solution qui répondrait à des enjeux de santé publique, de sécurité publique et de perception de taxes.

Donc, dans un premier temps, au niveau de la santé publique, comme vous l'avez vu, la plateforme va permettre de diffuser des messages de prévention, des messages de prévention personnalisés tenant compte de l'individu, parce qu'on l'a authentifié d'une façon forte. Mais il va aussi permettre de collecter des statistiques afin d'être en mesure de voir et, je dirais, d'amener des actions gouvernementales pour mieux cibler la prévention. Par exemple, on serait capables de savoir que des jeunes de 18 à 21 ans résidant dans tel quartier achètent trois fois plus de cannabis que ceux qui résideraient dans un... qui résident dans un quartier voisin. Ainsi, on pourrait venir cibler des messages de prévention auprès de ces jeunes-là.

M. Serra (Didier) : En ce qui concerne la sécurité publique, on a pensé à notre solution d'identification forte pour l'achat et la livraison. Revenu Québec utilise déjà le Service Concierge pour authentifier les citoyens en toute sécurité, confidentialité et respect de leur vie privée. Avec notre nouvel écosystème Vérifiez-moi, on permet aussi au citoyen de vérifier son identité sans demander d'information inutile, telle que le numéro d'assurance sociale, par exemple. Et on obtient toujours le consentement du citoyen avant que ces données vérifiées soient transférées en temps réel depuis des sources fiables, comme les institutions financières — Desjardins, la Banque Nationale — ou les opérateurs de télécommunications, des bureaux de cote de crédit, ou même des organismes gouvernementaux.

M. Lemieux (Éric) : Donc, on serait aussi capable d'avoir des statistiques fiables pour épauler le gouvernement dans ses activités de sécurité publique, toujours en respectant l'anonymat et la loi de protection de l'information personnelle.

On traite aussi de la perception des taxes. Ce qu'il fait en arrière-plan, dans la plateforme, c'est qu'au moment où on passe l'achat de paiement il y a le traitement TPS-TVQ qui est envoyé directement au gouvernement, mais on traite aussi la perception des taxes liées au cannabis. Ce qui fait qu'on est capables de mettre en place une plateforme aussi sécuritaire, c'est grâce évidemment à notre partenaire et à notre feuille de route solide. Levio est déjà au ministère de la Justice, à Revenu Québec, à la Société de l'assurance automobile du Québec ainsi que dans les groupes financiers comme Desjardins, SSQ, groupe financier La Capitale.

M. Serra (Didier) : Et concernant SecureKey, le système Concierge est déjà en utilisation par Revenu Québec ainsi que l'Agence du revenu du Canada et d'autres provinces canadiennes, comme la Colombie-Britannique et l'Ontario. On est les seuls, au Canada, à avoir des ententes avec toutes les grandes institutions financières, incluant Desjardins, la Banque Nationale, RBC, BMO, pour nommer que celles-ci. Avec le nouvel écosystème Vérifiez-moi, comme vous l'avez vu sur la démonstration, nous mettons aussi en place des partenariats avec des compagnies de télécommunications et des agences de crédit.

Nous travaillons aussi sur l'intégration des agences gouvernementales pour la vérification de cartes de santé, permis de conduire, revenus perçus, etc., pour augmenter les capacités de l'écosystème numérique.

M. Lemieux (Éric) : Donc, en conclusion, Levio et SecureKey souhaitent montrer au gouvernement qu'il existe des technologies sécuritaires et fiables qui vont permettre de faire face aux défis de santé publique, de sécurité publique et de perception de taxes. Ce qu'on demande au gouvernement, c'est de considérer des plateformes innovantes et sécuritaires afin de partir sur des bonnes bases et des bases modernes. On comprend que les décisions vont se faire par des instances gouvernementales, et que vous allez décider comment se gérera la vente en ligne et la vente physique du cannabis. Mais notre souhait, c'est qu'il y ait une volonté de la part du gouvernement de consulter des gens de l'industrie pour pouvoir développer des choses innovantes, tout en se basant sur les standards reconnus de l'industrie. C'est une opportunité aussi pour le Québec de se démarquer des autres provinces et d'être un chef de file. Merci de votre attention.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, messieurs, je vous remercie de votre exposé. Nous allons débuter la période d'échange. Alors, Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Charlebois : Alors, merci, messieurs, d'être ici pour nous présenter votre produit. Je me rappelle de vous. Je ne me souvenais pas que c'était à Trois-Rivières. Mais, si je ne me trompe pas, vous aviez même donné en exemple votre adolescente, vous aviez fait le test de vous assurer qu'elle ne pouvait pas aller sur votre site, et tout le kit, ça se peut-u?

M. Lemieux (Éric) : Oui, vous avez une bonne mémoire. Simon, en passant.

Mme Charlebois : C'est bon. Alors, merci d'être là, de nous partager vos connaissances. Vous nous dites faire affaire avec plusieurs ministères, mais est-ce que c'est dans le même type de besoins? Parce que je vous entends parler de Revenu Québec, puis les autres, là, je ne m'en souviens plus, mais est-ce que c'est le même genre de besoin que les autres ministères vous ont fait?

M. Lemieux (Éric) : En fait, c'est différents types de besoin, mais, entre autres, on a aussi... on travaille au niveau de certains... ce qu'on appelle les accès sécurisés. Alors, donc, on a été au centre aussi d'éléments nouveaux, des éléments sécurisés.

M. Serra (Didier) : Et, en ce qui concerne, je dirai, l'écosystème de vérification de l'identité numérique, pouvoir vérifier son identité en ligne ou en personne est une problématique qui couvre tous les secteurs de l'industrie. Donc, le Service Concierge qui a démarré, il y a plusieurs années, est une première étape pour authentifier les consommateurs, qu'ils accèdent aux services de Revenu Québec ou qu'ils accèdent à des services de santé, la prochaine étape que nous travaillons ensemble, c'est qu'ils puissent aussi confirmer des données d'identité, tout en respectant leur vie privée.

Mme Charlebois : Vous l'avez mentionné, les niveaux de sécurité doivent être élevés parce que c'est quand même une drogue qu'on va vendre, hein? Le site Internet, vous savez qu'il va relever de la Société québécoise du cannabis, et évidemment tout le processus de paiement, etc., qui va s'y rattacher. La Société québécoise du cannabis relève de la... ça va être une filiale, en fait, de la Société des alcools du Québec, qui a déjà un site Internet. Est-ce que vous les avez déjà approchés... pour la Société des alcools du Québec?

• (12 h 30) •

M. Lemieux (Éric) : La réponse, c'est non. Je ne les ai pas approchés.

Mme Charlebois : O.K. Est-ce que vous avez eu des contacts avec d'autres provinces, ou d'autres pays, même, pour lesquels vous auriez été appelés à livrer le même type de service qu'on s'apprête à livrer?

M. Lemieux (Éric) : La réponse est oui. Nous rencontrons le gouvernement ontarien la semaine prochaine. Et j'ai rencontré aussi des gens de la Colombie-Britannique et du Nouveau-Brunswick.

Mme Charlebois : O.K. Dans notre cas, je comprends que vous n'avez pas nécessairement eu une réflexion sur l'ensemble du projet de loi, quant à sur comment on va livrer le service puis sur la sécurité qui entoure tout ça. Est-ce que je me trompe?

M. Lemieux (Éric) : Les réflexions, effectivement, ont été au niveau de dire comment les nouvelles technologies peuvent s'assurer d'être capables de faire de la prévention, de la sécurité puis d'avoir une gestion responsable de la vente.

M. Serra (Didier) : Et en ce qui concerne, je dirais, la vérification d'identité, on se base sur des services, et des développements, et des réflexions que SecureKey et ses partenaires ont démarrés, il y a déjà plusieurs années, soit sur des projets canadiens ou même des projets internationaux, et toutes les informations et le savoir-faire que l'on a collectés sur ce qui marchait et ne marchait pas nous a emmenés à développer cet écosystème numérique, Vérifiez-moi, qui se base, en fait, sur des principes fondamentaux : ne pas recréer de bases de données qui vont être, de toute façon, piratées, ne pas se baser uniquement sur une seule source pour vérifier et authentifier un utilisateur, mais plusieurs sources. Sur la démonstration que vous avez vue, un utilisateur doit d'abord être capable de s'authentifier auprès de son institution financière avec son téléphone mobile qui est connu par son institution financière, qui va vérifier des informations d'identité qui peuvent être, de même, corrélées avec d'autres fournisseurs gouvernementaux ou opérateurs téléphoniques.

Donc, le principe même de la sécurité, c'est... Des sources fiables qui sont déjà en relation avec l'utilisateur sont capables de fournir des données qu'ils ont vérifiées pour leur propre business. Quand je veux ouvrir un compte bancaire, je passe pas mal de tests, je dois fournir des informations d'identité. Donc, se baser sur des réglementations et des processus qu'ils utilisent déjà au service d'autres actions, en fait... et la multiplication des sources venant de sources fiables est la base même de la sécurité.

Mme Charlebois : Je ne vous cache pas que, dans notre optique, nous avions... La Société québécoise du cannabis est une filiale de la Société des alcools parce qu'on souhaitait utiliser leur expertise tant au niveau du développement des boutiques, des emplacements, etc., mais aussi pour leur site Internet. Est-ce que vous croyez que vous pouvez ajouter de la valeur à leur site Internet? Parce qu'ils vendent déjà sur Internet. Il y a déjà des paiements qui sont effectués, de la sécurité, j'imagine, parce qu'eux autres non plus ne peuvent pas vendre... Je n'ai jamais acheté sur Internet, ça fait que je suis mal placée pour vous parler de ce que la SAQ fait. Mais, bon, est-ce que... Vous avez dû l'examiner. Est-ce que vous allez avoir des compléments, vous allez être plus précis? Je ne sais pas comment vous le dire, mais est-ce qu'il y aura des données plus probantes avec votre site Internet qu'avec celui de la Société des alcools du Québec?

M. Lemieux (Éric) : En fait, si vous me permettez, il y a trois blocs.

Donc, le premier bloc, c'est l'authentification forte. Avec notre partenariat avec SecureKey, cette authentification forte là est beaucoup plus forte que ce qui se fait actuellement sur le site Web. Ça, c'est clair. Et donc il précise aussi la localisation, où la personne est, là, l'adresse, et également l'âge.

Le deuxième élément, c'est l'entrepôt de données. On l'a vu, la SAQ a lancé la carte Inspire pour être capable de connaître la personne. On l'a dit tantôt, je ne pense pas qu'on va avoir une carte Inspire pour connaître le profil des gens. Moi, je pense que la plateforme de vente doit tenir compte et maintenir ces données-là, mais de ne pas commencer à avoir une carte de fidélité. Donc, ça, c'est un autre élément qui m'apparaît être une différence importante. Le troisième élément, c'est le traitement des taxes... c'est la mise en place de l'entrepôt de données. Donc, l'entrepôt de données, ça veut dire... puis c'est un petit peu relié à ça, c'est l'ensemble des données pour être capable de faire de la prévention en ligne. Alors, ça, encore là, à ma connaissance, il n'y a pas de prévention en ligne faite et personnalisée non plus.

Et le troisième élément, c'est le traitement des taxes spéciales. TPS, TVQ, ça va, mais il y avait aussi certaines taxes qu'il faudra développer.

Donc, je dirais, les points, c'est certainement la sécurité forte, mais, je dirais, intégration... pas d'un Inspire, mais une connaissance d'individus pour avoir une meilleure interaction et prévention. Puis ce que je disais aussi, c'est que tant qu'à partir... partons avec les nouvelles technologies, de ce qui existe actuellement, qui n'était pas nécessairement là il y a cinq ans. Et on a vu des choses apparaître par la suite... Je ne sais pas si c'est clair, mais c'est un peu les éléments...

Mme Charlebois : Oui, oui, c'est plus clair. Dites-moi, est-ce que vous allez utiliser les empreintes digitales? Est-ce que ça va être possible? Pour la reconnaissance, moi, j'ouvre mon portable, puis c'est mon oeil qui capte... mon mot de passe, c'est l'oeil.

M. Serra (Didier) : Bien, en fait, quand vous utilisez votre portable avec votre empreinte digitale ou avec reconnaissance faciale, la reconnaissance est effectuée en local par votre téléphone, et cette reconnaissance permet à l'institution financière, dans notre cas, de confirmer que c'est la bonne personne qui a le téléphone. Donc, notre solution se base sur les méthodes et processus implémentés par les institutions financières pour authentifier les utilisateurs. Dans la démonstration, l'utilisateur a entré un mot de passe et identifiant, sa banque peut lui demander de montrer son visage ou de mettre son empreinte digitale. Donc, ça, première partie de la réponse, c'est : On se base sur ce qui est fait de mieux par les institutions financières pour authentifier les utilisateurs.

Par contre, ce que le service peut apporter en plus de ça, et on a des cas de figure qui nous sont demandés hors cannabis, c'est que, pour des transactions risquées, l'utilisateur peut être amené à prendre une photo de lui-même et que cette photo, par le service, soit envoyée auprès d'organismes gouvernementaux, par exemple, qui me donnent mon permis de conduire pour que ma photo soit vérifiée avec la photo qui est dans la base de données de celui qui a fourni le permis de conduire et de confirmer : Bien, c'est effectivement la bonne personne et ce n'est pas ma fille, qui connaît mon mot de passe sur mon téléphone, qui est en train de se faire passer pour moi. Donc, on a moyen, avec le service, de faire de la vérification en temps réel, que c'est la bonne personne, par rapport à une base de données gouvernementale.

Mme Charlebois : Je passerais la parole à mon collègue de Maskinongé. Mais avant je vous invite, quand la société sera créée, quand la loi sera adoptée, parce que, là, on est en projet de loi, puis il faut d'abord adopter la loi pour que la société soit créée, à communiquer avec eux pour soumettre vos services parce que ce n'est pas le gouvernement qui va décider, mais bien la Société québécoise du cannabis qui va décider de ses infrastructures. M. le Président.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, M. le député de Maskinongé.

M. Plante : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, rebonjour. Effectivement, on s'était croisés à Trois-Rivières lors des consultations.

J'ai bien aimé votre dernière intervention au niveau... parce qu'on sait, aujourd'hui, bon, notre vie nous suit un peu partout, et, demain matin... et je parlais un petit peu avec mon collègue en même temps, demain matin, la crainte est toujours de faire copier son identité ou voler son identité, qui permettrait qu'un autre Marc existe, soit... Puis je parlais de mon collègue qui est au Saguenay—Lac-Saint-Jean — moi, je suis en Mauricie — j'ai dit : Il faut s'assurer, surtout pour la société du cannabis, de ne pas avoir deux Marc, un en Mauricie et un au Saguenay, qui peuvent faire des achats en même temps, pour développer soit un sous-réseau... ou même à Saint-Jérôme. Ça serait assez paniquant. Donc là, vous venez répondre à la question et vous venez surtout de répondre et de venir dire que...

Vous savez que la volonté du projet de loi, c'est surtout d'encadrer puis aussi de rassurer la population, qui est fortement inquiète au niveau du cannabis, puis avec raison. J'aimerais juste que vous me réexpliquiez... Puis c'est bien important quand vous parlez de double identification — parce que Mme la ministre l'a bien fait, là... — soit avec notre empreinte digitale ou avec la reconnaissance faciale, mais comment on peut s'assurer ou comment vous pouvez assurer, la future société du cannabis du Québec, que vous n'aurez pas un enfant, ou un cousin, ou une ex-conjointe ou conjoint à quelque part qui a ton identification puis qui décide, un soir, de faire un party, faire une commande insensée sur le nom d'une autre personne? Je pense que c'est surtout ça, l'inquiétude, au niveau... Puis, peu importent les provinces où vous allez, je suis sûr que vous allez avoir la même question à chacune des provinces, au niveau de la sécurité puis vraiment une identité unique d'une personne.

• (12 h 40) •

M. Serra (Didier) : D'accord. Mais des très, très bonnes questions. Et, en fait, c'est le coeur de notre système d'identification digital, qu'il soit utilisé pour le cannabis ou pour d'autres choses. Pour pouvoir vérifier qu'une personne est la bonne personne, vous devez vous baser sur plusieurs facteurs. Les facteurs qui sont utilisés, c'est : qu'est-ce que je sais, qui je suis, qu'est-ce que j'ai avec moi. En fait, toute l'industrie financière et bancaire se base sur ce principe-là, la carte de crédit où j'ai une carte physique et mon «PIN code». C'est ce que j'ai et ce que je sais qui me permet de faire des transactions financières dans le monde entier.

Donc, notre service est basé sur les mêmes concepts. Ce que j'ai, c'est mon téléphone, et c'est celui que j'ai enregistré avec mon application et qui est connu par ma banque. Ce que je sais, c'est mon mot de passe pour me loguer à ma banque avec ce téléphone qui est enregistré auprès de ma banque. Ce que je suis, on ajoute de l'authentification biométrique soit en direct avec le téléphone soit auprès directement des bases de données. Donc, en combinant ces trois facteurs, vous êtes certain que la personne qui utilise le mobile pour s'identifier est la bonne personne. Pour pouvoir se faire passer pour moi, il faudrait avoir mon téléphone, connaître un secret que je suis censé le seul à connaître, avoir mon visage, si on fait une vérification temps réel à ce moment-là. Donc, ce n'est pas possible de pouvoir se faire passer pour moi pour la transaction. Et vous pouvez rajouter des facteurs d'authentification pendant la transaction si vous jugez qu'il y a un risque supplémentaire qui vient d'arriver.

Donc, la combinaison des facteurs et la combinaison de plusieurs fournisseurs qui sont capables de vérifier... Ma banque a dit que c'était moi. Mon opérateur télécom a dit que c'était moi et confirme que je suis actuellement à «Québec City», confirme que mon téléphone, je n'ai pas changé la carte SIM la semaine dernière en essayant de se faire passer pour quelqu'un d'autre et peut, sur la transaction, me demander de prendre une photo qui est vérifiée contre un organisme gouvernemental, boucle la boucle, en quelque sorte.

M. Plante : O.K. En complémentarité de question, j'aimerais qu'on revienne... Parce que vous parliez des messages de prévention, dans la présentation, tantôt. Donc, effectivement, il y aurait et il existerait un historique client. Donc, la personne aurait un fichier client qui dirait, bon, bien, vos habitudes de consommation, etc., qui pourrait permettre à la société du cannabis d'avoir un suivi serré, autrement dit. Et là vous parliez de messages personnalisés selon l'âge, selon le type de consommation, selon aussi l'endroit parce qu'on sait que, bon, ça peut être un message bilingue, mais français, anglais ou autre, selon la langue de correspondance d'un individu. J'aimerais beaucoup que vous me parliez de la personnalisation justement de ces messages-là parce que les gens avant vous nous ont parlé, nous ont exposé aussi qu'il fallait être de notre temps et de notre époque et aussi bien cibler les personnes. Que ça soit un adolescent, ou un jeune adulte comme moi, ou une personne d'expérience comme mon collègue, je pense que le message de prévention n'aura pas la même signification pour un des trois, là.

Le Président (M. St-Denis) : En 30 secondes.

M. Lemieux (Éric) : En 30 secondes? Il existe... On l'a dit, on peut avoir un message standard qui apparaîtrait. On dit ça. Après ça, on peut avoir un message qui va tenir compte justement de l'individu, et ça, c'est un autre élément. Mais il y a un troisième type de message, dans lequel on peut même inclure l'interaction avec l'individu dedans, donc : Bonjour, Éric, sais-tu que c'est la troisième fois que tu en achètes cette semaine, as-tu pensé de ces impacts-là? Donc, moi, ce que je disais, c'est qu'avec la mise en place du système il faut se rendre jusqu'à la troisième étape. La première, où c'est un message standard, tout ça, tu vas passer rapidement avec... puis, s'il apparaît tout le temps, tu vas passer rapidement... L'autre qui t'amène... L'autre chose... et aussi une intégration d'une vidéo, si vous voulez, qu'il y a là-dessus, alors, personnalisée. Alors, ce sont des technologies qui sont actuellement présentes, qui sont, entre autres, aussi utilisées... Bon, moi, je viens de l'industrie financière. Donc, ils sont aussi utilisés dans le cadre de l'industrie financière, dans laquelle on voit, par exemple, différents produits très personnalisés. La personne qui achète sa maison, alors là c'est la personne... Et on est capables d'amener des messages comme ça. Alors, le but, c'était ça, c'était d'avoir ces données-là pour être capables de cibler puis d'avoir pour le client...

Le Président (M. St-Denis) : Alors, merci, M. Lemieux.

M. Lemieux (Éric) : Vous m'excuserez, 30 secondes...

Le Président (M. St-Denis) : Il n'y a pas de problème. Merci, M. Lemieux. Alors, je cède maintenant la parole au député de Labelle.

M. Pagé : Merci, M. le Président. Je pense que c'est la première journée... Jeudi, la semaine dernière, lorsque nous avons commencé nos auditions en soirée, on a reçu le groupe Merrco. Merrco, par rapport à vous autres, c'est carrément un compétiteur? En fait, quelle est la différence entre Merrco et votre — je ne sais pas comment on appelle ça, là — distribution en ligne, là? Je ne sais pas comment appeler ça, là. Puis moi, je ne suis pas très haute technologie, là, alors vous me perdez assez rapidement, mais, bon, je suis quand même capable de saisir tout ce qui se passe là-dessus. Mais c'est quoi, la différence avec Merrco?

M. Lemieux (Éric) : Personnellement, moi, je ne connais pas Merrco. Donc, ils sont peut-être mieux placés aussi pour dire leur point. Moi, ce que j'ai compris, c'est que Merrco utilisait une photocopie ou une photo d'une pièce justificative. Donc, il m'apparaît, dans un premier temps, que c'est une authentification, davantage, je dirais, un processus manuel et physique qui a été ramené pour le faire virtuel. Mais je ne veux pas... Je veux être prudent puisque c'est... Peut-être que mon collègue va...

M. Serra (Didier) : Je peux peut-être m'avancer un petit peu plus. D'après ma compréhension, c'est avant tout une plateforme de paiement. Donc, une des parties que l'on a vues sur notre plateforme, comment gérer le paiement, c'est avant tout leur métier coeur d'après ce que j'ai pu comprendre. Toute la partie authentification que l'on apporte, venant de plusieurs sources fiables qui se corrèlent pour vérifier l'identité de l'individu tout en respectant la confidentialité, en respectant sa vie privée... Vous ne voulez pas que ma banque sache que je suis en train d'acheter du cannabis et vous ne voulez pas que la société du cannabis sache que ma banque est Desjardins, par exemple.

Donc, c'était un des aspects clés quand on a implémenté nos premiers services, c'est respecter cette confidentialité. Et la dernière chose que vous voulez voir, c'est avoir un fournisseur de services qui va demander des données confidentielles à l'utilisateur, comme son numéro d'assurance maladie, pour pouvoir l'authentifier contre des bases de données venant de bureaux de cotes de crédit comme Equifax et TransUnion. C'est ce qui est fait aujourd'hui, mais on voit très bien que ce modèle-là est cassé, ne marche pas. C'est plus difficile d'être la vraie personne en ligne que d'être une fausse personne en ligne. Aujourd'hui, quelqu'un qui a piraté mes données va se faire passer pour moi en ligne plus facilement que moi, je vais prouver qui je suis.

Donc, c'est pour ça qu'on a développé tous ces services, pour éviter justement que des utilisateurs fournissent des données qui ne sont pas nécessaires, envoient des copies de leur carte d'identité en ligne sous forme de photo et qui ne seront pas protégées correctement.

M. Lemieux (Éric) : Puis juste ajouter une chose. La réflexion ici, c'est une plateforme de gestion de vente et non pas une plateforme de vente en ligne, donc tout ce qui est prévention et accumulation de données. Moi, mon rêve, c'est qu'on soit en mesure d'avoir ces données-là depuis le début pour être en mesure d'être capables de bien axer sur la prévention à ce niveau-là, ce que je ne sais pas si les autres... pas porter de jugement.

M. Pagé : Bien, justement, là, quand vous parlez de prévention, de quelle façon l'acheteur va donner son O.K... Parce que vous dites : Bon, quand il arrive à tel endroit sur notre site, là, il apparaît des messages de prévention. Vous savez comme moi, quand on achète en ligne, là — ça ne m'arrive pas souvent, mais c'est arrivé à quelques occasions — souvent, tout ce qui est écrit en bas de la page, on coche «O.K.» assez rapidement puis, bon, on se dit : Bof! hein, il arrivera ce qu'il arrivera, là, alors. Mais jusqu'à quel point... Parce que nous, nous sommes très inquiets par rapport à la vente en ligne, très, très, très inquiets par rapport à la vente en ligne parce que surtout les jeunes, aujourd'hui, qui sont les plus gros consommateurs, sont énormément sur Internet. À partir du moment où nous ouvrons sur la vente en ligne, là, comment contrôler toute la prévention et la sensibilisation que l'on veut faire?

Alors, je veux bien entendre ça, là : Oups! quand il va arriver sur telle page, il va y avoir quelque chose qui va apparaître, mais cette information, qui va apparaître, de prévention, là, est-ce que ça disparaît au bout de quelques secondes ou il a juste à cocher très, très rapidement puis ça disparaît, tu sais? Parce qu'il n'a pas d'interaction, là, avec un conseiller — je ne dis pas un vendeur mais un conseiller — de la SQC qui va pouvoir prendre le temps de discuter, remettre le dépliant, lui dire : Fais attention, c'est la huitième fois que je te vois depuis deux semaines, fais attention. Comment cette prévention va s'articuler sans qu'il y ait... On zippe à la prochaine page pour acheter le plus vite possible?

M. Serra (Didier) : Mais peut-être, Éric, il faudrait juste donner un exemple. J'ai été un mauvais citoyen, une infraction quand je conduisais, et j'ai dû aller passer des tests en ligne pour réapprendre les choses que je devais faire correctement ou pas. Et, quand on suit ces tests en ligne sur la prévention routière, bien, on ne peut pas faire : «skip», «skip», «skip», je ne veux pas écouter ce qu'on a à m'annoncer. Donc, je pense que les technologies aujourd'hui permettent d'afficher des messages où ce n'est pas uniquement : Je fais oui et je ne l'écoute pas. Donc, des technologies existent.

• (12 h 50) •

M. Lemieux (Éric) : Pour moi, si je complète... J'ai parlé d'information personnalisée, donc, pour avoir plus d'impact. L'autre élément aussi que... Évidemment, on peut avoir un questionnaire ou des questions. L'intelligence sera aussi à développer avec des spécialistes de la prévention, des spécialistes comme ceux qui étaient les intervenants avant. Moi, ce que je dis, c'est que c'est important d'avoir une plateforme et les données pour être capable de faire ça. Maintenant, c'est infini, les possibilités qui vont pouvoir se faire en fonction des gens qui sont spécialistes là-dedans. Moi, ma spécialité, c'est de dire : Tant qu'à partir, on est bien mieux de savoir ce que le monde ont consommé vraiment, qu'ils l'aient acheté en ligne ou pas en ligne, qu'on soit capables d'avoir cette information-là dans le respect de la confidentialité. Puis n'oublions jamais, mon site, s'il y a juste moi qui est dedans, l'interaction, que c'est juste moi, je respecte la confidentialité, c'est juste moi. Mais on peut me dire tout ce qui est là, mais aussi d'avoir d'autres données à côté, qui, elles, vont être anonymes, mais qui vont aussi permettre d'identifier des gens puis des catégories. Je pense que je l'ai bien expliqué. Je ne veux pas répéter. Alors, dans le fond... Donc, je dirais qu'avec la mise en place d'une plateforme... C'est pour ça que j'insiste sur une plateforme moderne qui tient compte de ça. Ça permet d'ouvrir une infinité de solutions de prévention avec des experts pour savoir ce qui est le mieux.

M. Pagé : Bon, tout ça, j'entends ça. Il y a des aspects, quand même, relativement rassurants à travers cela. Mais ce qui m'inquiète toujours, c'est que, lors de l'étude des crédits ce printemps, j'ai amené un petit pot qui avait été commandé directement en Colombie-Britannique, pas par moi, mais des gens l'ont fait autour de moi. Ils ont commandé un petit pot de cannabis, et... Déjà. Ce n'est pas légal, et on peut acheter comme ça sans aucun problème. Est-ce que vous croyez qu'il est possible d'en arriver à contrecarrer cela, que soit que les Québécois ne puissent pas acheter autrement que par la SQC ou encore qu'il y ait une façon de procéder, qu'un distributeur hors Québec serait bloqué sans passer par votre site, là? Alors, est-ce que c'est possible de le faire? Est-ce qu'on peut contrôler ça d'une façon quelconque? Est-ce qu'aussitôt que le mot «cannabis» apparaît quelque part, non, tu ne peux pas y aller ou tu ne peux pas vendre? Est-ce que ça se fait? Essayez de me sécuriser, s'il vous plaît.

M. Lemieux (Éric) : Alors, écoutez, on avait eu un peu cet échange-là. C'est qu'au niveau des technologies, ce qu'on contrôle, c'est le site de la Société québécoise du cannabis. Elle va être en mesure de mettre les règles qu'elle veut, avec une identification forte, qui peut même aller jusqu'à la géolocalisation de la personne, où elle est, puis l'identification. On pourrait même limiter, même si elle avait une adresse, puis elle s'était authentifiée, puis elle était ailleurs, de dire : Non, on ne livre pas là ou on peut faire ça. Ça, c'est les éléments sous notre contrôle à nous ici.

Au moment où on passe une commande à l'extérieur du Québec, l'élément qui se fait, bien, les Facebook... les Chinois bloquent les accès, ils paient des Facebook... Mais là je pense que ce n'est pas la solution. Je pense que la solution, ça va être davantage que les provinces, entre elles, s'entendent pour dire qu'elles vendent uniquement dans leur territoire.

Donc, technologiquement, on peut faire bien des choses. Tout ce qui est sous le contrôle du Québec, ça peut se faire. Quand on tombe par rapport à un autre site qui serait un site tiers, à moins que Didier veuille ajouter quelque chose, je pense que c'est par entente entre les provinces que ça va pouvoir se respecter.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, en 10 secondes, M. le député de Labelle.

M. Pagé : À moins, comme nous le souhaitons, que le fédéral, dans sa loi constituante, fasse... pas disparaître, mais enlève le permis à un distributeur hors Québec qui vendrait à des Québécois, tout simplement.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, merci beaucoup. M. le député de Labelle. Merci. Alors, je cède maintenant la parole au député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Bonjour. Merci de votre présence en commission parlementaire.

D'entrée de jeu, pour votre site de transaction, on comprend que, dans le fond, la personne, elle est identifiée à cause de ses informations bancaires?

M. Serra (Didier) : Elle s'authentifie auprès de sa banque parce que la banque sait authentifier la personne. Sa banque a des informations personnelles qu'elle a vérifiées et qu'elle met à disposition de l'utilisateur pour que ses infos puissent être partagées directement depuis la banque vers la destination. Les identifiants bancaires ne sont pas transmis à la plateforme, ni à SecureKey, ni à personne. C'est juste un moyen qui est utilisé pour permettre... que c'est la bonne personne sur son téléphone.

M. Jolin-Barrette : ...qui fait la commande. Donc, on est assurés que la personne a l'âge requis pour passer la commande parce que ça a été contrevérifié avec l'information bancaire, la personne qui a un compte de banque, qui a un appareil mobile qui utilise un site Internet d'une institution financière reconnue au Canada.

M. Serra (Didier) : ...par la banque ou par la banque et d'autres organismes. La banque, c'est l'étape un. Mais, si vous souhaitez avoir une vérification encore plus forte, il y a la possibilité de demander que l'âge soit confirmé par deux sources différentes, que la banque confirme mon âge et qu'une institution gouvernementale confirme mon âge. Donc là, vous avez deux sources qui confirment la même information.

M. Jolin-Barrette : Tout à l'heure, vous parliez, dans le fond, qu'on pourrait avoir une foule de données sur le type de consommateur, la fréquence, tout ça. Les données peuvent être dénominalisées. Puis là vous disiez : Bien, écoutez, on pourrait même les géolocaliser, les gens. Il faudrait voir si ça s'arrime avec les lois sur la protection des renseignements personnels qu'on a aussi. Mais je vous dirais que le fait d'avoir des statistiques en matière de prévention, ça pourrait nous aider aussi pour ne pas banaliser la substance puis avoir des campagnes de prévention appropriées. Ce que je voulais vous demander, c'est... Dans le fond, votre outil technologique, il pourrait être utilisé aussi en magasin. Ce n'est pas nécessairement par la vente en ligne, mais un outil comme ça, pour recenser, pour valider, tout ça, ça peut être utilisé en personne directement en magasin.

M. Lemieux (Éric) : Et je dirais même que, pour être pertinent et bien prévenir, il faudrait qu'il soit utilisé autant en magasin qu'en ligne, donc d'avoir évidemment deux types d'interfaces, un où la personne le fait lui-même, que ça soit sur l'exemple que je vous donnais et qui était sur un ordinateur ou sur un portable, un téléphone cellulaire, mais il pourrait aussi y avoir la version que le commis... Et je pense que c'est important parce que, sinon, le message de prévention, puis c'est ce que je disais, ne sera pas bien fait. Alors, il faut absolument que ces données-là soient bien cumulées. Ça fait que la réponse est oui.

M. Jolin-Barrette : O.K. Hier, il y a des intervenants qui nous disaient : Il y a des programmes qui existent, d'autoexclusion, supposons, avec les casinos, avec les salons de jeu aussi. Avec une plateforme comme celle-là, c'est possible que la personne s'autoexclue. C'est possible de bloquer les transactions?

M. Serra (Didier) : Je dirais que, oui, l'entité qui est en charge de gérer quelles sont les personnes qui sont exclues devient un fournisseur d'identifiants dans votre plateforme comme est la banque ou l'opérateur télécom. Donc, une des sources que vous pouvez demander lors de la vérification de l'identité est : Est-ce que cette personne est sur une liste noire, en quelque sorte? Et, si c'est le cas, la transaction sera arrêtée.

M. Lemieux (Éric) : Et on a eu des réflexions à ce niveau-là, pour dire qu'il y a deux niveaux. Ça veut dire que la personne, elle pourrait se faire un profil dans lequel... Un petit peu comme quand tu te fais un profil d'exercice ou de nourriture, tu es capable de suivre ton profil. Alors, tu pourrais te faire un profil à l'intérieur de ça. Mais on pense quand même que ça, c'est la personne elle-même qui se contrôle. Mais, si jamais il y avait une liste ou un élément externe, bien, cette information-là pourrait être fournie par le tiers, comme M. Serra vient de dire.

M. Jolin-Barrette : O.K., parce qu'il y a l'autoexclusion, tout ça, mais il y a aussi tout l'enjeu de la vente en ligne. Nous, du côté de notre formation politique, on n'est pas nécessairement favorables au niveau de la vente en ligne parce qu'on considère que ça diffuse, dans le fond, le produit et l'accessibilité. Puis il y a toute la question d'accessibilité au marché en question. On constate que le gouvernement a fait le choix de prévoir la vente en ligne, mais il va devoir avoir un outil qui va faire en sorte de s'assurer qu'on ne favorise pas nécessairement la facilité et l'accessibilité à ce niveau-là.

Sur l'aspect des taxes, avec une plateforme comme la vôtre, les taxes, elles sont prélevées directement au niveau... Dès que la transaction est passée, il y a une remise qui est dirigée directement vers le fonds consolidé? Comment ça fonctionne?

M. Lemieux (Éric) : Oui. En fait, au niveau de la conception qu'on avait réfléchie à ce niveau-là, c'était avant de savoir que ça serait uniquement avec la société du cannabis du Québec. Donc, la gestion des taxes, dans le cadre où on a plusieurs fournisseurs, devenait importante, et c'est pour ça qu'on a intégré l'élément où la perception des taxes se faisait directement à travers cette plateforme-là et non pas par chacun des marchands. Puisque maintenant on a un seul marchand, alors la pertinence est toujours là, mais c'est une société d'État qui la prend. Alors donc, à ce moment-là, c'est moins créateur de valeur que ça ne l'aurait été si vous aviez eu ou accepté d'avoir multiples vendeurs.

M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie grandement d'être venus en commission.

M. Lemieux (Éric) : Ça me fait plaisir.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, M. Serra et M. Lemieux, je vous remercie pour votre contribution aux travaux.

Je suspends les travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 6)

Le Président (M. St-Denis) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir s'assurer que la sonnerie de leurs appareils électroniques soit bien au mode vibration.

La commission est réunie afin de procéder aux auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière. Cet après-midi, nous entendrons la Société Makivik, l'Association des policiers provinciaux du Québec, l'Association des propriétaires du Québec et la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec.

Avant d'aller plus loin, j'aurais besoin d'un consentement pour permettre au député de Masson de participer à la rencontre de cet après-midi. Est-ce que j'ai un consentement?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. St-Denis) : Consentement. Alors, merci beaucoup. Alors, bienvenue parmi nous, M. le député de Masson.

Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de la Société Makivik et je vous rappelle que vous disposerez exceptionnellement aujourd'hui, suite à une entente avec le temps accordé à la ministre, là, d'une période n'excédant pas 15 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre exposé.

Société Makivik

M. Tukkiapik (Jobie) : Thank you. Thank you for giving us the opportunity to speak. I know there are some members of you that I've met before here. So, we're glad to be here and, as you can see, we're a rather large group that is here. So, I'll do the introduction, even though the introduction was made that Makivik would be doing a presentation here. We are composed of different organizations within the Nunavik region.

So, my name is Jobie Tukkiapik. I am the president of Makivik Corporation and I am accompanied by Alicia Aragutak to my left, she is the president of the Qarjuit Youth Council, Sarah Aloupa is a member of the executive of Kativik Ilisarniliriniq, formerly the Kativik School Board, and we have Françoise Bouchard, Director of Public Health for the Nunavik Regional Board of Health and Social Services. And also, François Dorval is one of our legal counsels at Makivik. And, to my further left, there, we have Mary Kaye May, that's with Kativik Ilisarniliriniq. And also, we have our photographer around the table too, so be prepared to get your picture taken.

We have produced a brief to the committee that we will try to summarize this afternoon. I know we have a limited amount of time. Each organization will present their concerns, and then I will share the remarks concerning Bill 157.

I will start by introducing my organization. Makivik Corporation is an ethnic body mandated to protect the rights, interests of the Nunavik community and manage the financial compensation provided by the 1975 James Bay and Northern Québec Agreement and, more recent, the offshore Nunavik Inuit Land Claims Agreement that came into effect in 2008.

Makivik's objectives include to relieve poverty, to promote the welfare advancement and the education of the Inuit and to foster, promote, assist, protect and assist in preserving the Inuit way of life, values and traditions, to develop, and to improve the Inuit communities and to improve their means of action.

• (15 h 10) •

Nunavik is the territory north of the 55th parallel, which covers more than 560,000 squared kilometers and that is one third of Québec. Nunavik is a homeland for 11,000 Inuit who live in the 14 communities. Inuit make up 91% of the total population. Housing overcrowding has reached an alarming rate of 68% in our region. 66% of the population is under the age of 30.

The bill under review is of importance for Nunavik, as it is for Québec as a whole. We felt essential to be here today to present our general support to the cautious approach proposed by Québec on the legalization of cannabis, but also to express the serious concerns we have with regards to the legalization of cannabis and its potential impact on our population.

I will ask Alicia Aragutak to present her organization and the youth perspective. Alicia.

Mme Aragutak (Alicia) : (S'exprime dans une langue autochtone). Like Jobie said, I'm the president of the Qarjuit Youth Council. The Qarjuit Youth Council that I lead is a non-for-profit ethnic organization which represents the youth from Nunavik and Chisasibi between ages of 15 to 35. The Qarjuit Youth Council is mandated to advocate, provide our youth with opportunities and knowledge in order to improve their quality of life, to empower themselves and to explore their full potential as responsible citizens and leaders for future and today.

Of particular importance to this discussion today is the fact that the Inuit population is very young as compared to the rest of Québec. As mentioned by Jobie, there are 4,667 youths, ages 15 to 35 years old, in Nunavik, which represent 35%. We go up to about 70% if we count the younger population. So, that's us in Nunavik and Chisasibi.

Our youth face major challenges such as isolation, low education levels, bullying, high cost of food, lack of housing, poor job opportunities, lack of social activities, substance abuse and suicide. Nunavik has one of the highest youth suicide rates in the world. The region suicide rate has been rising since the 1990s and is now about 10 times the Québec average. Alcohol consumption during teen pregnancies is at 44% higher, resulting in many babies being born with FASD.

So we've held, a few weeks ago, a survey to have an idea of what our youth feel today about cannabis. They suggested that programs should be created to steer them in a positive life direction to minimize the chances of becoming addicted to cannabis. The survey reveals that youth are in favor of legalization, however education is needed.

Cannabis has a negative effect on a user life, but youth don't know in which way. Access should be limited to under 18 years old. Cannabis needs to be controlled, and youth use cannabis mainly to relax and to forget about their problems within the communities. So that's what the survey revealed. The youth I represent are more at risk than other ages groups with regards to use of cannabis, and its academics, and its health implications. Thank you.

M. Tukkiapik (Jobie) : Thank you, Alicia. I will ask Sarah Aloupa, who recently became one of the executives of the school board Kativik Ilisarnilirinq, to share her concerns about the concerns of the school board.

Mme Aloupa (Sarah) : «Nakurmiik». Merci. My name is Sarah Aloupa. Although Jobie introduced me, I'm from Quaqtaq. My village starts with Q, like Québec. I was recently elected as a commissioner and, yesterday, I was elected as an executive member. So I'm pretty new.

The Kativik Ilisarnilirinq, previously named Kativik School Board, was created in 1975 under the James Bay and Northern Québec Agreement to empower the Inuit to take control over their own education. The school board exercises unique powers and jurisdiction for the delivery of tailored educational services and programs geared towards the protection and development of the Inuit language, culture and way of life.

Nunavik has the highest rate of use of marijuana in Québec. Marijuana is the substance most often used in Nunavik besides alcohol. The rate of marijuana use in Nunavik is about four times the Québec and Canadian averages and has risen substantially over time, from 36%, in 1992, to 60% in 2004, year of most recent data. Youth aged 15 to 19 have the highest rate of any age group at 78%. They are our students.

In our region, cannabis is not seen as harmful. It's seen as a safe substance. It is not uncommon to hear that cannabis use is preferable and less dangerous than use of alcohol. Deconstructing this way of thinking and addressing the issue of cannabis will require an important investment in communication and education, so our students and their parents are made aware and understand the dangers associated with the use of cannabis. There are self-reported regular users that are 12 to 13 years of age, while older youth report starting to use cannabis as early as 11 years of age.

It is known that the use of cannabis at a young age is detrimental to neurological development, learning and mental health. Regular cannabis use has been linked to poor academic results and to dropping out from school. Our region already copes with an alarming dropout rate, and significant learning struggles are encountered by many of our students.

As a school board, we are preoccupied with the legalization of cannabis. «Nakurmiik». Thank you.

M. Tukkiapik (Jobie) : (S'exprime dans une langue autochtone), Sarah. I'll go ask Françoise Bouchard now to speak about health concerns and resources.

• (15 h 20) •

Mme Bouchard (Françoise) : «Nakurmiik». The Nunavik Regional Board of Health and Social Services is mainly mandated to organize the health and social services program in the region's 14 villages. So the Department of Public Health is located at the Regional Board of Health and Social Services. We have two health centers with their own board of administration located in Puvirnituq and in Kuujjuaq, one clinic in each village and no pharmacies outside the health centers. They are significant and probably aware of health disparities between Nunavik and the rest of Québec. Nunavik, therefore, has very limited capacity at this time for prevention and treatment, and I will outline some of those challenges we have.

You heard some of the data from the Qanuippitaa 2004 survey mentioned by Sarah. A new survey has been conducted this year. We still do not have the results, and they will be hopefully available in 2018. The mandate of surveillance and monitoring that we have... we are very preoccupied with our capacity to conduct those health surveys and maintain those surveys in the future. They are costly because we need to reach the 14 communities and we do not have the technology all the time to conduct these surveys in an appropriate manner. We are planning currently to do a survey among our schools, for the first time all our schools, in 2018 and with the collaboration of the Institute of Health Statistics of Québec, and we still don't have the complete financing of that survey secured.

However, the Qanuippitaa 2004 survey has provided some useful information that we are communicating. For example, it indicates that cannabis use in the last 12 months is associated, among our youth, with emotional distress among our people 15 and older. Also, as you know, the suicide rate is high in our regions, and suicidal thoughts in the past 12 months, as well as live time rate of suicide attempts, are higher in people who reported cannabis use in the last 12 months. This main fact reflects the negative impacts of substance use on health and wellbeing of our individuals and in their efforts to cope also with their distress through the use of drugs, meaning that distress might pre-existing to the drug use.

We know that the detrimental effects of cannabis, which alter mental functions, are a serious concern for youth under 25 as their brain development is not completed. The use of cannabis is associated with attention deficit, intelligence function and can therefore interfere with the capacity for learning at school. It's also associated with depression in adolescents and young adults, anxiety, psychosis and schizophrenia. Second hand smoking is of concern. So, considering the alarming overcrowding situation that prevails in 68% of our households in Nunavik, children and youth are at great risk of being exposed to cannabis smoke.

The high rate of cannabis use in Nunavik poses a significant challenge for prevention. Nunavik has little capacity to provide sustainable and culturally adapted educational campaigns to inform the population, and especially the youth, about the danger of cannabis. Prevention interventions call for a multigenerational and community approach to create an environment that does not encourage its use. For example, we are currently developing a campaign to reduce exposure of children to the harm effects of alcohol in the house and drug use in the house. The development of such campaigns is taking close to two years right now because it's very important that we do it right and taking the time, and the cost is close to $200,000. And we still haven't finished planning, you know, the dissemination of this campaign, the release of this campaign, in 14 communities using Facebook, social media, radio messages, printed material. So these are very challenging resource taking from us, so just a small campaign like this.

At the moment, if we talk about, now, addiction services, we have some general addiction services available within Nunavik health centers. Evaluation, reference and follow up services are available in some communities, but these resources are insufficient to answer specific and present global needs in our population.

In terms of treatment...

Le Président (M. St-Denis) : Merci beaucoup. Merci beaucoup, madame. On va vous permettre peut-être, par les échanges, là, de compléter ce que vous vouliez nous donner. On a dépassé le temps déjà.

Mme Charlebois : ...beaucoup de temps? Peut-être leur demander...

Le Président (M. St-Denis) : Est-ce qu'il vous reste beaucoup de temps encore? La ministre est peut-être prête à vous donner un peu de temps pour terminer.

Mme Bouchard (Françoise) : I will... going to ask Jobie to go to the conclusions.

M. Tukkiapik (Jobie) : If you can bear with me, it will take me about a minute, two minutes to read the conclusion.

Le Président (M. St-Denis) : C'est bon, allez-y.

M. Tukkiapik (Jobie) : O.K. Thank you. I will supply our position concerning some specific sections of Bill 157. We believe that the consultation of the Société québécoise du cannabis could provide the control needed over the quality, the consumption and the strength of the cannabis that will be offered for sale. We support the prohibition for a minor to possess cannabis and we support the prohibition to cultivate cannabis for personal purposes. Similar to alcohol, we believe that the availability of cannabis in Nunavik should be limited and controlled as much as possible.

While we support the objective to curtail the black market, at this point, we cannot support the establishment of retail outlets in our region. We need to consult our communities. We recommend that a working committee be created between our organization and possibly others and the Government to fully explore the options and their impact. With regards to the availability of cannabis for purchase over the Internet, it raises some serious concerns, as we do not know how the availability will impact the level of consumption, the number of consumers, etc. There will need to be a proper mechanism in place to insure that minors cannot purchase cannabis online.

Concerning agreements that may be entered into for the purpose of adapting the measure for the act to Native realities, it raises more questions than comments for us. What kind of adaptation is foreseen? How far could these agreements go in terms of aboriginal or local regulations of cannabis? Could a community enter into such an agreement to impose a complete prohibition over the sale of cannabis?

We support the creation of a cannabis prevention and research fund. We request that a specific and fair portion of the fund be dedicated to Nunavik, so that Nunavik specific cannabis harm prevention, activities and programs and the health activities and the programs can be developed and implemented. The fund should not be allocated on a per capita basis, since the needs of Nunavik are huge, while our population is relatively small in numbers compared to other regions. Specific research will need to be conducted in Nunavik to monitor the impacts of the legalization of cannabis.

We support the establishment of cannabis oversight committee responsible for advising the Minister on any relative matter to cannabis. We request that a representative of the health and social service sector in Nunavik be appointed on the committee, considering the unique specific situation of Nunavik.

In conclusion, despite our different mandates and jurisdictions, our four organizations are unanimous with regards to the serious concerns that the legalization of cannabis brings for our people, our youth, our students and our region. We appreciate the careful approach developed by Québec. However, we are not ready and do not have the required resources to address the risk, especially for our youth, who have high levels... We already have high levels of addiction, substance abuse, suicide and mental health issues, and legalization of cannabis will exacerbate this, and it's also coming too soon. We need additional resources to educate our population, implement prevention and awareness campaigns and to have proper regional addiction treatment facilities. And all this needs to be done in a culturally relevant manner, and we are seeking a commitment of financial and policy support from the Government.

«Nakurmiik». Thanks for giving me that additional time to finish my conclusion.

Le Président (M. St-Denis) : O.K. Merci. Alors, merci. Je vous remercie pour vos exposés. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. Alors, Mme la ministre, il ne vous reste que six minutes pour votre échange.

Mme Charlebois : Combien?

Le Président (M. St-Denis) : Six minutes.

Mme Charlebois : O.K. On va aller à l'essentiel, donc. D'abord, monsieur... on va éteindre ça parce que je m'entends. Jobie Tuppiakik, comme ça qu'on le dit, Tuppiakik?

M. Tukkiapik (Jobie) : Tukkiapik.

Mme Charlebois : O.K., et vos invités, merci d'être là, de nous faire part de vos commentaires, mais surtout de vos inquiétudes aussi. On peut comprendre qu'il y a des inquiétudes. La population du Québec, dans son entièreté, est inquiète. À plus forte raison, avec tout ce que vous nous avez dit, on peut comprendre votre inquiétude. Vous savez que suite aux consultations que nous avons tenues avec les populations autochtones en fin septembre dernier, avec mon collègue le ministre des Affaires autochtones, nous avions convenu d'avoir à nouveau des discussions, parce qu'on a compris qu'il y a la légalisation qui est faite par le gouvernement fédéral, et là vous vouliez que nous ayons une approche de prudence, effectivement, pour l'ensemble des communautés autochtones, mais chaque communauté autochtone semblait nous dire qu'il n'y avait pas le même genre d'approche dans chacune des communautés.

Alors, on vous a entendus et on a mis, à l'article 56 du projet de loi, les commentaires suivants. Je ne vous lirai pas tout l'article parce que c'est long, mais l'essence de l'article. Nous avons indiqué à l'article 56 que «dans le but d'adapter aux réalités autochtones les mesures prévues [dans] la présente loi, le gouvernement est autorisé à conclure une entente portant sur toute matière visée par ses dispositions ou ses règlements avec une nation autochtone représentée par l'ensemble des conseils de bande ou des conseils des villages nordiques qui la constituent, avec la Société Makivik, avec le Gouvernement de la nation crie, avec une communauté autochtone représentée par son conseil de bande ou par le conseil du village nordique, avec un regroupement [des] communautés ainsi représentées ou, en l'absence [d'un conseil], [...]tout autre regroupement autochtone. Cette entente peut également porter sur l'adaptation aux réalités autochtones d'autres mesures gouvernementales liées au cannabis qui ne sont pas prévues par une loi ou [par] un règlement[...]. Elle doit poursuivre les mêmes objectifs que ceux poursuivis [dans] la présente loi.»

Or, la présente loi a une approche de santé et de sécurité publique, et, dans cet article, on vient dire qu'on peut convenir, dans la mesure où on tient compte de la santé et de la sécurité publique, et c'est ce que je vous ai entendu dire depuis le début, qu'on va pouvoir faire une entente en tenant compte de cette prémisse-là, mais on peut faire des ententes avec les communautés autochtones pour répondre aux aspirations de chacune des communautés — mais «aspirations», ce n'est pas le bon mot — pour répondre aux inquiétudes et répondre aux défis, aux enjeux qu'auront les communautés autochtones.

Est-ce que ça vous satisfait que nous ayons inclus cette disposition dans le projet de loi? Ça, c'est la première question, puis ça va aller assez vite pour répondre parce que je me doute de ce que vous allez me dire. Mais je veux vous entendre me parler davantage sur les dispositions qui sont dans le projet de loi au niveau... Là, je comprends que vous, la production personnelle, vous êtes satisfaits avec l'interdiction, mais je vous entends parler de prohibition chez les jeunes. Nous autres, on a mis l'âge à 18 ans dans le projet de loi n° 157. Comment vous voyez ça? Est-ce qu'on doit se donner un moyen de pouvoir parler avec ces jeunes-là pour pouvoir justement entrer en communication puis expliquer c'est quoi, une consommation dite responsable, plutôt que de faire de la prohibition puis qu'on n'ait pas la chance de parler à ces jeunes-là puis qu'on échappe... Parce que, ce que vous me dites, c'est que c'est consommé déjà, malheureusement, puis ce n'est pas juste chez vous, là, hein, c'est dans l'ensemble du Québec, c'est de même, mais il y a un problème plus criant chez vous parce que vous êtes des communautés un petit peu plus isolées, pour ne pas dire vraiment plus isolées. Alors, dites-moi comment vous voyez ça, vous, l'âge, la culture personnelle puis l'article 56. Est-ce que ça vous satisfait, l'article dont je vous ai fait lecture. Je vous ai donné trois questions...

• (15 h 30) •

Le Président (M. St-Denis) : En deux minutes.

Mme Charlebois : C'est parce que je les pose toutes du même coup, sans ça... J'ai donné mon temps.

M. Tukkiapik (Jobie) : Too many say, so... We just had a discussion with the four organizations that we had, and maybe Sarah can help, and François also, in the answer, but the main part of it is with the high rates that we have of alcohol abuse in our region, as well as cannabis abuse, as well as having the region of the highest rates of actually detrimental effects for our society, example, highest rates of suicide, and that... The legalization of cannabis, it's really going to... for us, it's another battlefront that... We're already overwhelmed with the present situation that is there already. And as well in the comments that we had is that legalization of cannabis to our people, our young people, will probably be viewed as something pretty cool. It's a new thing that's going to come now. But the dangers of smoking marijuana and doing drugs also have to be... have a huge emphasis with the government and our society that it's as bad as smoking, it's as bad as drinking alcohol and abusing it. And that's where we have to really work together also. The age that is there, it's also... We feel that if it was older, it'd be actually better for us too.

Le Président (M. St-Denis) : Merci beaucoup. Alors, maintenant je vais céder la parole au député de Labelle pour une période de 9 min 30 s.

M. Pagé : Oui. My English is very bad. Alors, je vais seulement faire quelques mots en français pour permettre à mon collègue, le député de Saint-Jérôme, qui est un ancien professeur d'anglais à l'école primaire, donc il pourra bien s'exprimer auprès de vous... Merci d'être ici, à l'Assemblée nationale, tous les six. Votre délégation aussi forte est vraiment, je pense... signifie toute l'importance que vous accordez à ce projet de loi.

Je vais vous avouer que j'ai de la difficulté à trouver les mots pour exprimer ce que je veux vous dire, parce que je suis très touché, très touché par vos témoignages. Quand vous parlez de haut taux de suicide, parmi les plus élevés au monde, quand vous parlez d'un taux de consommation qui est aussi élevé, quand vous parlez de décrochage scolaire, quand vous parlez de tout ce que ça peut vous jeter comme inquiétude dans votre communauté, je suis aussi, également, très, très inquiet. Et le message que je voudrais que vous reteniez aujourd'hui, c'est que nous entendons très bien vos préoccupations. Et je les fais miennes, et je suis convaincu que la ministre, c'est la même chose aussi. Je pense que l'ensemble des parlementaires vont faire siennes vos grandes préoccupations, vos grandes inquiétudes.

Et au fur et à mesure que nous allons travailler, article par article, pour bonifier la loi, si vous avez des commentaires à nous faire, parce que vous allez suivre ce travail de très près, si vous voulez intervenir, écrivez-nous. Dites-nous ce que vous souhaiteriez pour qu'on puisse améliorer le projet de loi.

Alors, sur ce, je vais laisser la parole à mon collègue, mais en vous posant une seule question qui est la suivante : On sait que la loi prévoit déjà un certain montant d'argent pour pouvoir faire de la prévention, cette prévention qui va être énormément importante, je me demande même s'il devrait y avoir, dans la loi, une enveloppe spécifique, notamment pour vos communautés; est-ce que vous le souhaitez, qu'il y ait une enveloppe dédiée particulièrement pour vos territoires? Et, si oui, est-ce que vous avez déjà évalué quel pourrait être le montant qui pourrait être dédié particulièrement pour vos communautés. Parce qu'on parle de 25 millions sur cinq ans, mais ce que j'ai compris, c'est pour l'ensemble du Québec. Mais, face à la problématique et à votre situation, est-ce que vous êtes capables de chiffrer vos besoins?

Le Président (M. St-Denis) : Alors, M. le député, allez-y, ensuite, M. le député de Saint-Jérôme.

M. Bourcier : ...to answer the question before?

M. Tukkiapik (Jobie) : Go ahead. Go ahead, and then...

M. Bourcier : OK. So, welcome to all of you. Mr. Tukkiapik, is that right? Yes. I must point out before that it's a federal law, and, unfortunately, we have all the problems because of that federal law, we must adapt and deal with it and we're deeply concerned, as you are.

You told us about a survey that you made in your community. And, in that survey, people talked about a program to guide them, education, that is importantly needed. Were you told that those programs... but were you told that programs were going to be in place in your community? So, that's my first question.

Secondly, you talked about your schools. I'm a teacher, I used to be a teacher before. So, at what age do you think prevention programs should be started in your schools? And what are your needs in terms of personnel, experts? I have other questions. Do I continue with... and you'll answer all of them after that? Yes?

M. Pagé : On peut les laisser répondre.

M. Bourcier : Yes? OK, so I'll let you answer my first questions before.

Mme Aragutak (Alicia) : All right. Thank you for your question. Very briefly, just to elaborate on the very, very quick survey we did online for the youth, because it's... we're so remote, it was very hard to reach out to a lot of the youth that we want, so we ought to get innovative, so we used an online survey.

So, the youth we're talking about and the majority of the participants that submitted their survey, they were nonusers. They were nonusers, they knew the negative effects, they were in favour of it, but, you know, in the back of their heads, they're thinking : OK, maybe there might be more money moved around or prioritized within their households, because a lot of the times the black market is favoured. So, that... I think I have a feeling it was because of that and there was a lot of comments in regards to that as well. And, in there, they were saying : Programs... We need to be educated. We know it sounds bad to smoke weed, but how does it really affect us? So, there is a lot of non educated youth in the region that really need... educated and to be exposed, you know, to talk about cannabis. Right now, it's kind of like : Ugh! To talk about cannabis in the region? But we're stimulating that and we need your help to really do that within our region. And I feel the younger it is to educate them on what is negative about, I think it gives us more of a cushion and that, you know, that effect for the future. I'll leave it at that, I think.

M. Tukkiapik (Jobie) : I'd like Françoise to respond to part of the question.

Mme Bouchard (Françoise) : OK. On terms of the envelope dedicated to the needs of Nunavik regarding drug use, I think we're all in favour. I think, in terms of giving you an amount today, I would rather take the time to really assess what the needs are and what feasibility is. I think we need to be cognizant that, you know, we need to make the due thing on that, but I think we welcome that there are specific funds dedicated to our region to address this issue within the plan of the Government.

M. Tukkiapik (Jobie) : Just on one part also, it's at what age should it start, and we afford different organizations with our own board members also, so, for sure, we need time to come back to you and say what the envelope could be for this. But at what age should it start? It should right start... the target group would be the students as well as the parents here. And we need to do a kind of communication blitz about legalization of cannabis being here and now. We need to also independently work together to say : This can be very detrimental to your health. Also they may think that, because it's legalized now, that there is no health effect, but there is, and that's what our population doesn't know.

• (15 h 40) •

Le Président (M. St-Denis) : Il reste encore un peu moins de deux minutes.

M. Bourcier : OK. You told us before that, for a lot of your youth, cannabis is seen as a safe substance. Do you think that, if a SQC retail outlet is installed in your community... first, do you agree with that, a SQC retail outlet in your community?

M. Tukkiapik (Jobie) : What that is?

Une voix : ...

M. Bourcier : No? SQC store? Is it important for you that this SQC store should be equipped with prevention programs, with people to educate, a kind of counselors to educate the young about the dangers of using cannabis? Is that something that you would like, first line services?

Mme Bouchard (Françoise) : Your question is about putting the sales in line with the prevention? Is that what you're saying?

M. Bourcier : Not in line, with the store installed in your community. If it's so, what... I don't think you'd like that, if I read correctly, but, if it happens, would you like this place, this store, to have people in it, counselors, to make prevention on first line prevention?

Une voix : Ou juste de la vente en ligne?

M. Bourcier : Or just on line sales. What do you want?

Le Président (M. St-Denis) : 15 seconds.

M. Tukkiapik (Jobie) : OK. With that question, it's, for us... like I said, we are four separate organizations, we need to come and talk about it. And also, there's an adaptation that probably has to be done with our culture. We said we're 91% Inuits that have a predominant language of inuktituk and we know, I think, best somehow to get the message out. So if it's an outlet coming from the government, then it has to be done through us, in our view.

Le Président (M. St-Denis) : Merci beaucoup. Merci. Maintenant, je vais passer la parole au député de Masson pour une durée de 6 min 30 s.

M. Lemay : Merci, M. le Président. Merci d'être ici, avec nous, aujourd'hui. Vous avez mentionné tout à l'heure, dans votre mémoire, que vous étiez favorables pour l'âge de 18 ans, mais... puis, considérant que, dès l'âge de 11 ans, il y a des gens qui commencent à consommer, et que c'est fréquent à l'âge de 12 et 13 ans qu'on puisse consommer, donc, je peux comprendre qu'en mettant un âge à 18 ans ça permettrait justement de mieux encadrer... J'aimerais savoir : Est-ce que vous avez évalué la possibilité de fixer cette limite-là à un âge de 21 ans ou si, pour vous, l'âge de 18 ans, ça reste une balise qui est quand même acceptable, considérant les réalités que vous vivez présentement?

Mme Aragutak (Alicia) : So, the survey we conducted, when we asked : OK, who should this be available for?, because it is going to happen, it is coming, it is already in place, now, how do we deal with it? 18 years old was the majority of how the participants reacted. There was a lot of concerns and there is quite a bit education on the response to that. The brain develops until the age of 35... no, 25, I'm so sorry. I think it needs to be very strategic, and we feel that 18 is kind of a median, although we know, as organizations in the health sector, that there's still has an effect to that age.

M. Tukkiapik (Jobie) : But also we were told that it seems that the age of 18 years old is what the government is going to stick with, but we feel ourselves the older the age limit is, it is better for us.

M. Lemay : Maintenant, est-ce que vous avez réfléchi à certaines portions du territoire ou de communautés pour lesquelles vous ne voudriez pas qu'on puisse avoir accès au cannabis?

M. Tukkiapik (Jobie) : In a briefing that we had, it's what we agree, that it would not necessarily be readily available like a store in our region, that it would have to be received online, and that's the kind of the priority that we have considering the speed of this, the legalization coming around here, is that we need more time to develop and how we want to have it. Also, the other part of it is that the funding of 25 millions that was mentioned also is for prevention, but it's also activities through the sales of cannabis. We should really create programs for our youth to have a lot of activities which we are unable to do due to the high cost of living that is there. There are some activities, but, for sure, there is more activities needed in our region. And that is one of the great ways that we feel that will have prevention on the use of cannabis to our young people.

Une voix : Go ahead.

Mme Aragutak (Alicia) : And I would just like to add that, you know, it is going to... it is already in place. I have a little cousin currently in the hospital. The marijuana he smoked, that was tainted. So, there is a lot of quality to be talked about as well within the youth in our region that are already accessing it in an alarming rate of how much money that is being consumed in the black market. It is very present. It is there. It is who controls it and how.

M. Lemay : Vous l'avez mentionné dans votre élément de votre dernière réponse, que vous n'êtes pas prêts. Vous avez besoin de plus de temps. Vous avez besoin de plus de ressources. Tout à l'heure, on a posé la question concernant les fonds nécessaires. Est-ce que vous avez un estimé d'un montant que vous devriez avoir accès pour justement mettre en place les ressources dont vous avez besoin dans vos communautés pour justement pouvoir faire face à cette nouvelle réalité? Est-ce que vous avez un estimé du montant?

M. Tukkiapik (Jobie) : As I mentioned earlier, we are not able to provide an estimate here. It is because we have different fronts that are here, the health sector, they are going to have to come out with their own estimates. Makivik representing the ethnic group, being the ethnic organization, we have to come up with an amount also, as well as the schoolboard that is here. So, for sure, we can come back to you, as someone had mentioned earlier, that we can provide additional comments or additional briefs as you go through this consultation. We can get back to you at a fairly reasonable time.

M. Lemay : OK. Et, sur la question de... le temps nécessaire supplémentaire, est-ce que vous avez à ce moment-là, vous, je comprends, vous n'avez pas un estimé en dollars, mais est-ce que vous avez un estimé de temps supplémentaire que vous auriez de besoin?

M. Tukkiapik (Jobie) : We can't be specific on a time such as this, it's a... For us, we prepared very quickly because the way it happened here also is that we were not necessarily on the list to be invited to the briefing here, and I think that was an oversight on your part. And now we had to prepare fairly quickly for this also. So, how much time do we need? That is something that we are going to have to get back to you on also.

Le Président (M. St-Denis) : En 15 secondes.

Mme Aloupa (Sarah) : OK. On est très différents chez nous. Alors, ça va prendre beaucoup de temps pour expliquer. Aussi votre document a besoin d'être traduit. Parce qu'il y a plusieurs unilingues chez nous. Merci.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, je vous remercie. Merci pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux représentants du prochain groupe de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 49)

(Reprise à 15 h 53)

Le Président (M. St-Denis) : Alors, nous allons reprendre. Donc, je souhaite la bienvenue à l'Association des policiers provinciaux du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et puis nous procéderons en la suite à la période d'échange avec les membres de la commission. Alors, je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé.

Association des policiers provinciaux du Québec (APPQ)

M. Veilleux (Pierre) : Merci, M. le Président. Je suis accompagné de Dominic Ricard, vice-président aux griefs et à la formation, Jacques Painchaud, vice-président à la discipline et à la déontologie, ainsi que Me Alain Rousseau, procureur conseiller de l'association. L'Association des policières et policiers provinciaux du Québec tient à remercier la commission de l'opportunité qui lui est offerte de faire valoir son point de vue sur le projet de loi n° 157.

Nos préoccupations à l'égard de ce projet de loi se situent davantage au niveau des interventions en matière de sécurité publique auxquelles nos membres sont appelés à participer. À notre avis, que ce soit dans le cadre de l'adoption des projets de loi C-45 et C-46 au fédéral ou du projet de loi n° 157 à l'étude, ce nouvel environnement juridique mettra en cause les questions des effectifs nécessaires, des ressources matérielles et des formations requises afin d'appliquer adéquatement les nouvelles dispositions en matière de conduite de véhicules avec les facultés affaiblies par une drogue. Notre analyse, dans ces préoccupations, nous donne clairement à penser que non seulement la Sûreté du Québec, mais également l'ensemble des services policiers ne seront pas en mesure d'être prêts à rencontrer les responsabilités qui sont les leurs, dévolues par ces projets de loi, avec toute l'efficacité et l'efficience que commandent ces nouvelles dispositions.

Aux fins de la compréhension pour les gens de la commission, on a inclus dans notre mémoire une mise en contexte pour que vous compreniez bien les interventions, les étapes lorsqu'un policier doit intervenir sur la route. Je vais vous faire fi de la lecture. On va tomber effectivement dans l'analyse.

Problème d'effectifs policiers. Depuis des années déjà, à la Sûreté du Québec, une réduction d'effectifs lors de l'intégration de services policiers municipaux débutait en 2002, puis suivie d'un gel d'embauche lors des mesures d'austérité ont fait en sorte que les membres affectés à la patrouille souffrent d'un manque flagrant d'effectifs dans plusieurs unités. Nous croyons que malgré toute la bonne volonté de la Sûreté du Québec de remédier à la situation par une hausse graduelle des embauches afin de combler le déficit, nul doute que ce redressement de situation ne pourra vraisemblablement se faire avant la fin de l'année 2018, voire même au courant de l'année 2019, et ce, alors qu'aucune augmentation réelle des effectifs ne semble même être envisagée pour l'instant.

Entre-temps, plusieurs unités de patrouille doivent assumer une surcharge de travail, en plus du temps supplémentaire qu'occasionne ce manque d'effectifs. Ainsi, dans le cadre du projet de loi qui nous occupe, les nouvelles dispositions ne manqueront sûrement pas d'augmenter cette surcharge de travail dans plusieurs unités, entre autres, puisque le taux d'occupation des policiers terrain augmentera à raison de 2 à 3 heures par événement lors duquel l'agent aura des motifs raisonnables d'intervenir. L'absence de policiers sur le terrain, partis en formation en tant qu'instructeurs ou agents évaluateurs, sera, dans la plupart des cas, comblée par des membres, souvent en temps supplémentaire. Il en est de même pour la formation, que ce soit comme instructeur, agent multiplicateur ou agent utilisateur des appareils de détection salivaire. Le projet de loi fédéral C-46 prévoit un ajout à l'article 254 du Code criminel qu'un agent de la paix qui a des motifs raisonnables de croire qu'une personne ait conduit son véhicule avec les facultés affaiblies par une drogue ou l'alcool peut en outre ordonner que lui soient fournis des échantillons sanguins.

Compte tenu de la surchauffe généralisée dans nos urgences, cette disposition nous semble pour le moins un peu déconnectée de la réalité de notre système de santé au Québec. Il n'est pas déraisonnable de croire que le prélèvement d'échantillons de sang dans ces circonstances ne fasse pas partie des priorités de nos hôpitaux et qu'en conséquence les policiers seront appelés à attendre durant une période de temps assez longue pour l'obtention de ces échantillons.

Nous sommes d'avis que tous ces facteurs combinés augmenteront de beaucoup le degré de difficulté avant qu'une véritable offensive structurée puisse être mise en place pour le 1er juillet 2018, visant à contrer la conduite d'un véhicule automobile avec les facultés affaiblies par les drogues. En effet, cette surcharge des policiers sur le terrain, en plus de diminuer la présence policière sur le territoire, ne se fera pas sans heurt, l'épuisement étant souvent la résultante de cette situation.

Ressources matérielles. Il est important de rappeler ici qu'aucun appareil de détection salivaire n'a encore été approuvé par le gouvernement fédéral. Tout au plus, une étude faite par le gouvernement fédéral, dont le rapport définitif a été déposé le 6 juin 2017, recommandait deux types d'appareils. Selon nos informations, le coût de ces appareils se chiffrait entre 4 500 $ et 7 500 $, et les besoins, pour la sûreté uniquement, seraient de l'ordre de 600 appareils. Nous croyons donc que le processus d'homologation de ces appareils, leur achat et leur diffusion à travers la province, avec toute la logistique de formation nécessaire à son déploiement, font en sorte qu'il est utopique de penser à une mise en place pour le 1er juillet 2018.

Plus préoccupantes encore sont les limites inhérentes à cet appareil. En effet, ces appareils de détection salivaire ne mesurent aucunement le taux de THC présent dans l'organisme d'un conducteur suspecté de conduite avec les facultés affaiblies. Ainsi, il peut uniquement révéler si le conducteur a consommé ou non de telles substances depuis un délai qui peut être de plusieurs heures, mais ne peut en aucun cas servir à établir que celui-ci avait, au moment de l'interception par les agents, les facultés affaiblies par une drogue.

C'est pourquoi nous sommes étonnés par la teneur de l'article 40 du projet de loi n° 157 prévoyant ce qui suit : «Un agent de la paix [peut suspendre] sur-le-champ, au nom de la société, pour une période de 90 jours, le permis d'une personne qui conduit un véhicule routier ou qui en a la garde ou le contrôle :

«2° si l'analyse effectuée au moyen d'un matériel de détection des drogues conformément aux dispositions de l'article 202.3 ou de celles du Code criminel révèle [...] présence de cannabis ou d'une autre drogue dans son organisme.»

Avec respect, il nous semble que ces dispositions du projet de loi devraient être retirées ou suspendues jusqu'à ce qu'un appareil de détection salivaire puisse fournir un véritable taux de THC pouvant être arrimé avec ceux prévus aux nouvelles dispositions du Code criminel. En effet, ces dispositions du projet de loi n° 157 nous semblent davantage sanctionner le consommateur et pas nécessairement le conducteur d'un véhicule automobile avec les facultés affaiblies par une substance. Ainsi, les risques d'injustice à l'égard de certains conducteurs n'ayant pas les facultés affaiblies nous apparaissent trop importants.

• (16 heures) •

Formation requise. L'agent évaluateur. Il importe de souligner qu'à la Sûreté du Québec seulement 31 membres sont formés à titre d'agents évaluateurs et que l'objectif connu serait d'en avoir un par unité de patrouille, à savoir près de 121 à travers la province. Cette formation administrée par l'École nationale de police du Québec est d'une durée d'un mois, dont les coûts sont évalués approximativement à 14 000 $ par agent.

Il est donc aisé de constater que, malgré l'instauration des dispositions au Code criminel créant la formation d'agents évaluateurs, en juillet 2008, un certain retard est constaté dans le déploiement de cette ressource à la Sûreté du Québec. Par ailleurs, selon nos informations, il en est de même des autres services de police au Québec. Nombreux sont les services policiers qui n'ont pas formé suffisamment d'agents évaluateurs afin de répondre à leurs besoins. En conséquence, ceux-ci font régulièrement appel au service d'assistance de la Sûreté du Québec, augmentant d'autant la charge de travail de ces quelques dizaines d'agents évaluateurs à la Sûreté du Québec.

Il va de soi que, dans une perspective de l'introduction de la loi sur le cannabis et d'une offensive plus structurée sur la conduite avec des facultés affaiblies par les drogues, ce nombre insuffisant d'agents évaluateurs risque fort de mettre en péril une mise en place efficace et coordonnée.

Utilisation d'appareils de détection salivaire. Comme mentionné précédemment, les estimations quant aux besoins de la Sûreté du Québec pour ce genre d'appareils se situent autour de 600. Il s'agit en fait du même nombre que pour les appareils d'alcootest ADA déployés depuis plusieurs années. Cependant, la mise en place de ces appareils pour l'ensemble des services policiers engendre tout un défi en matière de formation. Tout d'abord, l'ENPQ devra voir à former des instructeurs, puis des agents multiplicateurs en mesure de transmettre la formation dans leurs localités afin qu'ils puissent donner à leur tour une formation aux utilisateurs de ces appareils sur la route. Selon nos informations, toute cette logistique ne pourra être mise en place avant l'automne 2018. Il est à noter, à titre de comparaison, qu'à la Sûreté du Québec le nombre d'utilisateurs formés pour l'appareil ADA, pour l'alcool, se situe à près de 100 % des effectifs de patrouille.

En conclusion, nous sommes d'avis que le manque d'effectifs à la Sûreté du Québec sera certainement un obstacle à la mise en place d'une offensive plus structurée afin de contrer la conduite des véhicules automobiles avec les facultés affaiblies par une drogue dans le contexte de la légalisation du cannabis comme prévu au projet de loi C-45. En conséquence, il serait grandement temps d'avoir au gouvernement une stratégie intégrée à court et à moyen terme afin d'augmenter les effectifs de la Sûreté du Québec, bien au-delà de combler l'écart du gel d'embauche occasionné par les mesures d'austérité. Cette réflexion est essentielle afin que ce service policier d'envergure nationale puisse être à la hauteur des attentes des citoyens et des législateurs.

De plus, toute la logistique entourant la sélection, l'homologation, l'achat d'appareils de détection salivaire de même que l'important dispositif devant être mis en place afin de fournir la formation requise aux effectifs de patrouille nous laisse croire qu'il serait utopique de croire qu'à compter du 1er juillet 2018 les services policiers, dont la Sûreté du Québec, seront prêts à faire face à l'entrée en vigueur des dispositions du projet de loi C-45 et C-46 de même que celles du projet de loi n° 157 à l'étude.

En terminant, l'association tient à vous remercier de l'attention que vous avez portée au présent mémoire et espère avoir apporté une contribution utile à vos travaux ainsi qu'à votre réflexion sur le projet de loi n° 157. Merci beaucoup.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, merci, M. Veilleux, pour votre exposé. Alors, nous allons maintenant débuter la période d'échange. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Charlebois : Merci, M. le Président. D'abord, vous saluer, M. Veilleux, M. Painchaud et M. Rousseau... Il me manque un nom. J'ai trois noms puis vous êtes quatre.

Une voix : M. Ricard.

Mme Charlebois : M. Ricard. Merci pour votre présence et votre présentation. J'ai le goût de vous demander, parce que je connais plusieurs policiers, vous n'êtes pas chanceux, j'en ai plein dans mes amis — je ne sais pas si c'est une qualité que j'ai ou si c'est un défaut... C'est une blague! J'ai plein de policiers qui me disent qu'ils l'appliquent déjà, la conduite avec facultés affaiblies. J'ai le goût de vous demander : Étant donné que tout le monde nous dit qu'il y a déjà beaucoup de cannabis consommé illégalement... D'ailleurs, vous connaissez mon comté, sûrement, Soulanges. Pas besoin de vous dire qu'il y en a un petit peu là-bas, pour les raisons que vous connaissez, qu'on n'élaborera pas ici. Mais comment vous faites, à l'heure actuelle, pour les conduites avec facultés affaiblies?

Parce que vous comprenez... Puis vous nous dites : On ne peut pas faire tolérance zéro tant et aussi longtemps qu'on n'a pas l'appareil homologué. Je suis totalement d'accord avec vous depuis le début des consultations. Parce que, je ne sais pas pourquoi, cette croyance-là est dans la population. Mais je le répète à chaque... puis merci de me donner l'opportunité de vous le dire encore, parce qu'à un moment donné ça va transpirer en quelque part, mais on ne mettra pas tolérance zéro tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas un appareil homologué qui nous dit qu'il y a eu une consommation récente. On n'ira pas avec le nombre de nanogrammes, on va y aller en termes de consommation récente. Et ça, c'est bien important de le spécifier pour la population. Puis on ne va pas arriver, du jour au lendemain, non plus, quand on aura l'appareil homologué, dire : Oh! ça commence ce matin. Non, on va prévenir la population de tout ça.

Quand est-ce que ce sera? Je ne peux pas vous dire parce qu'en ce moment ils nous disent au fédéral que ça devrait être bientôt, mais bon, je n'ai pas les documents qui me prouvent ça. Alors, en attendant, on va continuer avec la conduite avec les facultés affaiblies comme vous le faites déjà. Alors, dites-moi, est-ce que vous considérez qu'en ce moment c'est dangereux que je sois sur la route parce qu'il y en a qui conduisent déjà beaucoup avec les facultés affaiblies?

M. Veilleux (Pierre) : J'en conviens, qu'il doit certainement y avoir plusieurs consommateurs, présentement, même si elle est illégale. Et ce n'est pas au niveau juste du cannabis, on s'entend. Mais, nous, ce qu'on pense, c'est que la légalisation va faire augmenter la consommation. Ça, c'est clair. Jusqu'à quel point? Personne ne le sait pour l'instant.

Présentement, naturellement, si on arrête une personne puis on constate qu'il est en facultés affaiblies, on va d'abord évaluer l'alcool. L'alcool est beaucoup plus facile à évaluer. Généralement, une personne va avoir une haleine d'alcool. Et naturellement que, lorsqu'il s'est enfermé dans un véhicule et que ça fait quelques minutes qu'il conduit, quand il ouvre sa fenêtre, c'est assez évident. Ça fait que, donc, ça nous donne déjà des soupçons pour au moins l'amener à l'appareil de détection, l'ADA, qui est un peu le pendant de ce vous souhaitez, qui détecte une présence soit en haut de la limite ou soit en bas de la limite. Ou des fois il va y avoir un signal vert qui dit : Il n'y a pas d'alcool. Et généralement, quand je l'amène là, j'ai senti des odeurs d'alcool. Donc, c'est plutôt rare.

Mme Charlebois : ...erratique aussi.

M. Veilleux (Pierre) : C'est plutôt rare. Oui. Ça fait que, contrairement à une consommation... Et souvent, très souvent — et, je vous dirais, peut-être pas tout le temps, là, ce n'est pas scientifique, ce que je vous dis, je vous donne une expérience de patrouilleur de 17 ans — lorsqu'il y a eu consommation de cannabis ou d'autres drogues, il y a également par-dessus une consommation d'alcool. Donc, c'est sûr que le premier réflexe pour le policier, étant donné qu'il n'y a pas de tolérance zéro ou il n'y a pas de décriminalisation au niveau du THC, si je sens l'alcool, je l'amène à l'alcool, et là, si mon ADA de l'alcootest me dit : Il est au-dessus de la limite, bien, moi, je l'amène puis je travaille au niveau de l'alcool, et là, je le passe au niveau de l'appareil et je lui fais une cause de facultés affaiblies par l'alcool.

S'il n'y a pas d'alcool et que je m'aperçois que la personne en question, au niveau du symptôme, est vraiment en facultés affaiblies, donc là, je peux lui demander de se soumettre à des tests de coordination. Bon, je ne rentrerai pas dans les détails. La plupart des agents de la Sûreté du Québec sont déjà formés à peu près à 90 % pour pouvoir directement, lorsque j'arrête un véhicule sur la route... de procéder à trois types de tests de coordination qui fait en sorte... qui me donne naturellement les motifs pour amener la personne à un agent évaluateur. Mais il faut que ça soit évident en fait d'intoxication, il faut que ça soit quand même... il faut qu'il échoue les tests.

À une tolérance zéro, ce qui pourrait arriver, c'est qu'il pourrait avoir l'agent actif dans son sang mais être tellement faible au niveau du taux, et là on ne rencontrerait peut-être pas la tolérance zéro, et il pourrait passer, en fait, se qualifier sur les tests, et là je n'aurais plus de motif pour l'amener devant l'agent évaluateur aller plus loin dans mon investigation. Donc, on risquerait possiblement, juste avec les tests, d'en échapper. On parle des faibles taux, on parle vraiment des faibles taux.

C'est sûr que, si... et c'est mon voeu également, Mme la ministre, d'avoir un appareil qui pourrait mesurer de façon contemporaine, dire : Là, présentement, tu en as dans le sang, soit en haut ou en bas de la limite, dépendant de l'appareil. Ça me donnerait un avantage de l'amener directement à l'agent évaluateur. Même si mes tests ne sont pas nécessairement concluants, j'aurais au moins l'indication qu'il y a présentement présence de THC, exemple, dans son sang.

Mais qu'est-ce qu'on fait présentement? On travaille surtout sur l'alcool parce que, je vous dirais, trois fois sur quatre, c'est accompagné d'alcool. Donc le premier symptôme ou le premier soupçon qu'on a, c'est l'haleine d'alcool. Donc, on s'en va vers l'ADA. Et très souvent, c'est concluant.

• (16 h 10) •

Mme Charlebois : On m'a dit — puis je vous répète ça parce que je l'ai appris sur le terrain — que souvent les gens qui consomment aussi du cannabis, un, ça sent aussi, puis dites-moi si c'est vrai, puis, deux, on m'a même dit, dans une émission de télévision, que les consommateurs de cannabis mangeaient beaucoup de chips et de cochonneries. Ça a l'air que c'est symptomatique dans les voitures des gens qui consomment. Je vous dis ça, puis vous n'êtes pas obligé de me répondre parce que, regarde, je n'ai pas de science qui m'indique ça, là, je vous donne l'information que j'ai eue.

Je vous amène sur une autre piste. Je voudrais que vous me parliez du projet de loi, sur l'âge. Est-ce que vous avez pris position là-dessus? Nous autres, on a mis 18 ans comme âge. Est-ce que vous pensez que c'est raisonnable, avec toutes les mesures de prévention, tout ça? Puis on sait que 42 % des consommateurs de cannabis ont entre 18 et 22. Est-ce que vous pensez qu'on doit se donner les moyens, avec la Société québécoise du cannabis qu'on va constituer dans la loi... qu'on se donne les moyens de leur parler, de leur donner de l'information, de les instruire sur ce que c'est, une consommation responsable, et les risques, là, accompagné d'autres produits? Est-ce que vous pensez qu'à 18 ans c'est raisonnable de penser que c'est une bonne chose qu'on puisse échanger avec ces gens-là, plutôt que de les laisser dans la prohibition et sur le marché criminel?

M. Veilleux (Pierre) : Bien, d'un point de vue sécurité publique, il y a une certaine logique. En fait, d'un point de vue citoyen, il y a une certaine logique, à partir du moment que l'âge pour pouvoir se procurer de la boisson, de l'alcool, c'est 18 ans, il y a une certaine logique là-dessus. Au niveau de la sécurité publique, je vous dirais que c'est possiblement un peu jeune parce que souvent c'est des jeunes conducteurs qui ont... puis ça ne fait pas longtemps qu'ils ont... ils n'ont pas une grosse expérience de conduite, et, si on leur donne... Déjà, c'est très restreint au niveau de la boisson. Si on leur donne la possibilité, en plus, de se procurer du cannabis, bien, on risque plus d'en voir à 18, 19 ans qui vont se faire attraper par la police avec une consommation de cannabis. Et là je m'abstiendrai de parler d'un point de vue santé, je pense que ça appartient aux médecins, mais il y a des études, je pense, qui sont éloquentes sur tous les problèmes de psychiatrie qui peuvent être occasionnés ou qui peuvent être déclenchés par la consommation de cannabis. Et je parle pour les jeunes.

Mme Charlebois : Avant 25 ans...

M. Veilleux (Pierre) : Avant 25 ans.

Mme Charlebois : ...c'est sûr qu'il y a des dommages potentiels.

M. Veilleux (Pierre) : Au niveau de la schizophrénie, oui.

Mme Charlebois : Mais vous savez comme moi, puisque vous êtes policiers, que la majorité des consommateurs sont plus jeunes. Mais moi, je me demande, puis là c'est une impression personnelle pour... moi, j'ai 58 ans, là, je ne vous le cacherai pas, je suis mère et grand-mère, et je pense que les jeunes sont plus sages que nous autres, honnêtement, qu'à ma génération, en ce qui concerne l'alcool et le restant. Pour la majorité que je connais, en tout cas, ils ont toujours un conducteur désigné. Je ne dis pas qu'il n'y a pas des exceptions, je ne suis pas en train de dire ça, mais je pense qu'ils sont beaucoup plus sages que nous autres, on l'était au même âge. Je leur fais confiance.

Une voix : ...

Mme Charlebois : Oui. Bien, c'est ça. Alors, je veux aussi vous amener sur la production personnelle parce que vous n'en avez pas parlé dans votre mémoire. Sur la production personnelle, nous, on a mis zéro plant pour chacune des résidences. Que pensez-vous de ça? Pour vous, c'est-u une difficulté d'application qu'on mette de... nombre de plants, pas de plant?

M. Veilleux (Pierre) : Bien, écoutez, on n'y a pas vraiment pensé, on n'a pas vraiment... on ne s'est pas penchés là-dessus. Parce que je ne pense pas... Ça va dépendre un peu de la façon que la société, au niveau des lois et des règlements, va vouloir le traiter, le fait de ne pas posséder ou de ne pas avoir le droit de produire du cannabis à la maison. Mais c'est sûr que ça va être plus facile pour le travail policier. Lorsqu'il va y avoir des perquisitions pour x raisons, exactement comme aujourd'hui, de voir des plants de cannabis soit dans le sous-sol ou peu importe la pièce, on va être plus en mesure de... En tout cas, on ne se posera pas de questions si on saisit ou non, ça va être évident. Mais on n'a pas vraiment pensé à cet aspect-là. À partir du moment que les gens qui ont 18 ans peuvent se procurer de façon légale, dans des succursales, de la mari, pour nous, ça ne changera pas la nature du travail sur la route. Je parle au niveau de la conduite automobile. Je ne pense pas qu'il y ait une grosse différence là-dessus.

Mme Charlebois : Je vais vous amener sur la possession, tant qu'à y être, parce que je sais que vous avez tous un bon oeil, d'habitude en tout cas. Et êtes-vous en mesure d'évaluer facilement, si je vous dis : 30 grammes de cannabis séché, 150 grammes à la maison? Parce qu'il y a les équivalences en cannabis frais, en cannabis huile, bon, puis ça, vous allez avoir les quantités. Est-ce que pour un policier, savoir... 30 grammes, que le consommateur vient d'aller faire son acquisition? Puis, mettons, on y va au maximum, est-ce que c'est facile pour vous de savoir que ça représente 30 grammes? Dans le lieu de résidence, avoir une quantité maximale de 150 grammes, est-ce que c'est facile pour vous de détecter ça? Moi, j'ai le goût de dire oui, mais je vais vous laisser répondre. J'imagine que vous avez l'oeil fait à ça.

M. Veilleux (Pierre) : Bien, en fait, mettez-vous dans la peau d'un policier qui n'a jamais travaillé avec des limites de possession. Ça a toujours été illégal. Ça fait qu'à partir qu'on voit un gramme ou une livre, il ne se posait pas de question, il y avait une saisie, bon.

Mme Charlebois : Même pour le cannabis thérapeutique?

M. Veilleux (Pierre) : Bien, pour le cannabis thérapeutique, ça ne fait pas tellement des années non plus que ça roule, hein? Ça fait que je ne pense pas qu'il y ait une culture qui s'est développée pour les policiers. Je parle des policiers terrain. Il s'en va prendre l'information, c'est clair, ne serait-ce que de l'information, qu'est-ce que ça ressemble, 30 grammes, qu'est-ce que ça peut représenter comme quantité, 30 grammes. Je suis persuadé qu'il y a des policiers qui ne feraient pas la différence entre une livre puis 30 grammes. Puis ce n'est pas parce qu'ils sont en manque de connaissances, c'est une question d'expérience. Mais naturellement, ça va prendre des guides pour savoir qu'est-ce que ça peut représenter, tant de grammes d'huile ou tant de grammes de cannabis. Ça, c'est clair. Et là la différence entre un 30 grammes puis un 150 grammes, rendu à la maison, j'imagine qu'il va falloir, à un moment donné, peut-être se traîner des petites balances puis de vérifier ça. Parce qu'à 150 grammes ou 155 grammes, quand tu es rendu avec un volume ou une quantité quand même assez importante, à l'oeil, tu ne peux pas faire la différence.

Mme Charlebois : Parce que c'est les mêmes quantités qu'on a... On a pris cette quantité-là parce que c'est la quantité qui est prescrite pour le cannabis thérapeutique dans la loi du gouvernement fédéral.

M. Veilleux (Pierre) : Je comprends.

Mme Charlebois : Je veux vous dire que nous autres aussi, ça nous apparaît serré dans le temps, puis on a demandé... Moi, je me rappelle, au début, j'ai demandé à l'ancienne ministre de la Santé un délai supplémentaire. Les ministres des Finances l'ont demandé. Il y a eu une motion qui a été déposée à l'Assemblée nationale, sur laquelle on a tous voté dans le même sens. On dit : O.K., vous voulez faire votre loi, mais mettez un report dans la mise en oeuvre. Mais, jusqu'à date, en tout cas, ça ne fonctionne pas bien, bien. Alors, je veux juste vous dire qu'on va faire tout notre maximum pour être prêts.

J'entends que vous avez besoin de formation, les médecins en ont besoin. Je vais vous dire que ça va engendrer beaucoup, beaucoup de préparation. Il faut préparer notre campagne de prévention. Bref, on a beaucoup de travail en avant de nous. Puis juste faire la loi... Là on consulte encore en janvier, on va rentrer en février, il va falloir ensuite aller en Chambre...

Le Président (M. St-Denis) : ...

Mme Charlebois : Ça termine? Bien, en tout cas, tout ça pour vous dire qu'on va avoir l'article par article, puis il faut bouger vite pour justement nous donner les outils pour vous donner les moyens puis faire votre travail, vous, mais aussi le corps médical et l'ensemble des intervenants. Alors, merci d'être venus.

M. Veilleux (Pierre) : Si vous permettez. Ce n'est pas un reproche que je faisais, hein?

Mme Charlebois : Non. Mais je ne le prends pas comme ça.

M. Veilleux (Pierre) : Je suis conscient que vous êtes aussi pressés que nous, là.

Mme Charlebois : Oui, oui. Non, non, je ne l'ai pas pris comme ça.

M. Veilleux (Pierre) : C'est au-delà de notre... Oui, on se comprend.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de Labelle pour une période de 8 min 45 s.

M. Pagé : Merci, M. le Président. Alors, bienvenue chez vous, à l'Assemblée nationale. Merci de venir nous allumer là-dessus. Je vais vous avouer que je suis un peu sous le choc, quand je lis ça, là, quand je lis que... parce qu'on le sait, là, que la loi s'en vient, depuis deux ans et demi, et quand je lis qu'il y a un manque d'effectifs, qu'il serait grandement temps d'avoir, au gouvernement, une stratégie intégrée à court, moyen terme, un peu plus loin, qu'il serait utopique de croire qu'à compter du 1er juillet 2018 les services policiers, dont la Sûreté du Québec, seront prêts à faire face à...

Comment se fait-il, pourtant, ça fait longtemps qu'on le sait, que ça s'en vient, que nous ne soyons pas plus prêts que cela en termes de formation? Je comprends que les tests pour détecter de façon hors de tout doute ne sont pas prêts, semble-t-il, même, je pense, un peu partout dans le monde. Mais il y a quand même un minimum de formation que vous pouvez recevoir, qui devait, j'imagine, déjà être dans les cartons depuis un certain moment. Comment se fait-il qu'il... Parce que, quand je lis votre conclusion, là, c'est comme si on avait appris il y a un mois, là, que tout ça allait arriver.

• (16 h 20) •

M. Veilleux (Pierre) : Bien, en fait, vous n'êtes pas sans savoir, on le mentionne dans notre mémoire, que le Code criminel reconnaît ou a mis sur pied les agents évaluateurs depuis 2008. La Sûreté du Québec a formé quelques agents là-dessus, 30, 31. En fait, il y a deux choses. C'est une question à développement, là.

M. Pagé : Puis, en même temps, pouvez-vous me dire combien d'effectifs supplémentaires vous évaluez pour l'ensemble du Québec? Êtes-vous capable de me dire ça, en gros?

M. Veilleux (Pierre) : Bon, à cette question-là, je vais vous répondre rapidement, on ne l'a pas vraiment évalué. En fait, c'est qu'on a des symptômes, énormément de temps supplémentaire, des symptômes de fatigue de nos membres, et là c'est tout le principe qu'on rajoute une tâche supplémentaire, qui n'est pas une mince tâche. Quand on parle d'évaluation de facultés affaiblies avec les drogues, ce n'est pas mince, comme tâche. C'est une espèce de petite révolution dans la conduite automobile, et déjà, c'est très lourd, faire une facultés affaiblies avec alcool. Ça va le devenir encore plus, au niveau temps-hommes, avec les drogues.

Bon, pour ce qui est des agents évaluateurs, depuis 2008, la Sûreté a tenté de former des gens. Il y a une capacité de l'École nationale de police qui est quand même limitée. Parce que cette formation-là, ça apporte à avoir beaucoup de tests au niveau des agents, des tests réels. Donc, ça nous prend des gens intoxiqués pour pouvoir faire nos tests dans un but de formation, et ça, c'est difficile. Aux États-Unis, ils travaillent différemment que nous, mais ça, c'est assez difficile.

Mais il y a aussi... les deux dernières années, à la Sûreté du Québec, il y a eu énormément de coupures. En fait, le gouvernement a fait une année ou deux d'austérité. Puis c'est correct, ils l'ont fait, on a vécu avec ça. Donc, ça a eu un effet sur le ralentissement au niveau de l'embauche à la Sûreté du Québec. Il en est sorti plus qu'il en est rentré, comme on dit. Et naturellement, il y a eu un effet sur la formation. Et, sur la formation, quand on parle d'une formation de 14 000 $ au niveau des agents évaluateurs, bien, il y a eu aussi des répercussions à ce niveau-là.

Donc, c'est un ensemble de facteurs qui expliqueraient un peu pourquoi qu'on n'est pas plus prêts aujourd'hui au niveau de ce projet de loi.

M. Pagé : Au niveau des appareils de détection salivaire, bon, vous en parlez dans votre conclusion, pouvez-vous me dire précisément de quelle façon ça devrait se faire, là? Est-ce que c'est un truc qu'on pénètre dans la bouche pour aller prélever la salive? C'est comme ça, là? On a vu ça un peu dans certains reportages, là. C'est vraiment comme ça que ça devrait se faire?

M. Veilleux (Pierre) : Bien, ce qui existe présentement, là, puis ce qui a été étudié par le gouvernement fédéral, c'est un petit appareil qui va analyser un échantillon de salive qui est prélevé avec un embout qu'on met de la salive dessus. Et, naturellement, l'appareil va donner une lecture à l'effet que tu as une substance dans ta salive et non pas dans ton sang, dans ta salive, qui peut être du THC, qui peut être un stimulant, qui peut être... Il y a des familles de drogues. Et ça dit que tu en as consommé et peut-être depuis plusieurs jours, donc tu l'as encore dans ta salive.

M. Pagé : Oui, ça, c'est bon. Mais ce que je veux savoir, c'est que, pour faire le test, on pénètre dans la bouche l'espèce de petit bâtonnet ou je ne sais trop, là? C'est comme ça que ça se passe?

M. Veilleux (Pierre) : Oui, c'est ça, c'est un préleveur, qu'on appelle. Oui, effectivement, ça... et là je n'ai jamais vu l'appareil, là, j'en ai juste entendu parler, ce qu'on me dit, c'est que la personne, la personne interceptée doit aller chercher de la salive avec ce préleveur.

M. Pagé : Bon, O.K. Là, moi, j'ai un monsieur qui est retraité d'un milieu carcéral, a passé sa vie, plus d'une trentaine d'années, dans un milieu carcéral, puis je lui ai parlé la semaine dernière, et il me dit : Sylvain, il dit, il va y avoir un problème. Il dit moi, il dit, j'ai été agent dans un milieu carcéral... pendant toute sa vie, est retraité depuis un certain nombre d'années, puis il me dit : Légalement, on ne peut pas pénétrer dans aucun orifice humain sans la permission de la personne, que ça soit la bouche, les oreilles, le nez ou encore le rectum.

C'est tellement vrai que, quand ils ont des doutes sur un prisonnier puis qu'ils font une fouille à nu, ils observent, mais ils n'ont pas le droit de pénétrer dans aucun orifice humain. Il me dit : Même quand on a des doutes que quelqu'un a fait pénétrer dans son rectum ce qu'ils appellent un «zip gun», ils sont obligés de le mettre dans une salle et attendre que la personne fasse ses besoins ou encore que la personne accepte de passer une radiographie afin de voir si le «zip gun» est là.

Alors, quand vous me dites que le test, c'est de faire pénétrer un bâtonnet dans la bouche, selon vous, est-ce que ça va être légal ou non? Parce que ce que l'agent du milieu correctionnel me dit : À moins que la loi ait changé, il me dit, aussitôt que quelqu'un va refuser, on ne pourra pas aller prélever le test salivaire.

M. Veilleux (Pierre) : Je comprends très bien. Si vous permettez, M. le Président, je passerai la parole peut-être à mon aviseur. Là, c'est une question très technique, de l'ordre de loi.

M. Rousseau (Alain) : Au niveau de l'embout buccal dans lequel on fait un prélèvement, il y a tout lieu de penser que le débat juridique va avoir lieu à un moment donné ou à un autre. Est-ce que ça va passer le test de la charte, dans le sens où est-ce que ça se justifie, dans une société libre et démocratique, une telle contravention à la Charte des droits et libertés? Ce sera aux tribunaux de le préciser au moment opportun. Mais il y a tout lieu de penser que les moyens de défense vont être utilisés. La question de savoir, à partir d'un soupçon d'un policier qu'il y a consommation de drogue, est-ce que ça se justifie au sens de la charte, ce sera une question qui va sûrement faire l'objet de débats.

M. Pagé : Quand on ne peut pas aller vérifier avec un prisonnier qui a un casier judiciaire, j'imagine que quelqu'un qui se fait intercepter sur la rue, puis qui n'a aucun casier, et qu'on lui demande de pénétrer dans la bouche, je pense qu'on va avoir des problèmes importants, là.

M. Rousseau (Alain) : Dans l'état actuel des choses, votre appréciation vaut tout à fait la mienne. Ça va être l'avenir qui va nous le dire, sur le plan juridique, si ça va passer le cap.

M. Pagé : Est-ce que j'ai le temps pour une dernière question?

Le Président (M. St-Denis) : Il reste 30 secondes.

M. Pagé : 30 secondes. Tolérance zéro. Là, on a dit : Compte tenu de tout ce qu'on a énuméré depuis tantôt, on ne pourra pas le faire appliquer. Alors, ne serait-il pas mieux, je soulève la question, là, d'avoir une tolérance à 0,02 ou 0,04 nanogramme — parce que la loi fédérale, je pense, permet jusqu'à 0,04 ou 0,05 — pour éviter justement que des gens se retrouvent à perdre carrément leurs permis de conduire? Parce qu'éventuellement il va falloir la faire respecter d'une façon ou d'une autre, alors quel est le meilleur scénario à ce moment-là?

M. Rousseau (Alain) : Dans le fond, si vous le permettez, c'est...

Le Président (M. St-Denis) : ...

M. Rousseau (Alain) : Oui. Dans notre mémoire, on prévoit déjà que cet appareil-là devrait respecter les paramètres du Code criminel en termes de THC, vert, jaune ou rouge, comme l'ADA pour l'alcootest. Si c'est rouge, on sait déjà qu'il est au-dessus de la limite. Mais on recommande la même chose pour les appareils de détection salivaire. Il n'y en a pas ou il y en a trop.

Le Président (M. St-Denis) : Merci. Je dois céder maintenant la parole au député de Borduas pour une période de cinq minutes.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Veilleux, M. Painchaud, Me Rousseau, M. Ricard, bonjour. Merci d'être présents à la commission parlementaire. D'entrée de jeu, je veux faire un petit aparté, ensuite on va revenir au cannabis. Je veux vous demander votre opinion sur la nomination du directeur de la SQ à titre de directeur du SPVM. Qu'est-ce que l'Association des policiers provinciaux en pense?

M. Veilleux (Pierre) : Bien, écoutez, ce n'est pas nécessairement de notre ressort. C'est sûr qu'on aimerait mieux le garder avec nous, mais, s'il peut être utile ailleurs, bien... Puis le DGA qui va le remplacer, on le connaît très bien, c'est une personne avec qui on a des tractations au niveau de la table de négociation. Donc, je n'ai pas de problème avec ça, moi.

M. Jolin-Barrette : Parfait. Merci. Sur le cannabis. J'aimerais qu'on revienne à l'appareil de détection autorisé. Vous dites : Écoutez, on va voir si ça va passer le test des tribunaux au niveau du caractère invasif. Actuellement, l'ADA pour l'alcool, c'est déjà dans la bouche des individus, puis c'est déjà soufflé. Est-ce que ça a déjà été contesté à la cour? Puis ça a été sauvegardé, j'imagine, parce qu'on l'utilise.

M. Veilleux (Pierre) : Avec l'ADA, on lui demande un échantillon d'haleine, donc il nous donne un échantillon d'haleine. On pourrait faire le pendant peut-être avec la... Il y a quand même un embout, il doit prendre l'embout, le mettre dans sa bouche et souffler dedans.

M. Jolin-Barrette : Mais, s'il refuse de le faire, qu'est-ce qui arrive?

M. Veilleux (Pierre) : C'est un refus. C'est un refus au sens du Code criminel. Parce que la loi prévoit le refus. Ça peut être le refus de l'ADA, au moment où il y a l'interception, mais ça peut être le refus au poste, aussi, au niveau de l'appareil qui, lui, va déterminer exactement le taux. Donc, aux deux places, il peut y avoir un refus, ça existe. Puis on ne commencera pas à... on va respecter la décision, mais il va y avoir une accusation de refus. Et il pourrait y avoir un refus également de ne pas se soumettre au test de coordination.

M. Jolin-Barrette : Effectivement. Donc, l'individu est passible d'une infraction criminelle à ce moment-là?

M. Veilleux (Pierre) : Tout à fait.

M. Jolin-Barrette : Alors, dans tous les cas, il faut qu'il souffle ou, sinon, il se retrouve devant les tribunaux.

M. Veilleux (Pierre) : Lorsqu'on parle d'alcool, oui.

M. Jolin-Barrette : C'est ça. Donc, pour le cannabis, est-ce que vous considérez que ça devrait être la même chose?

M. Veilleux (Pierre) : Ça devrait.

• (16 h 30) •

M. Rousseau (Alain) : J'étais lancé sur une réponse tantôt, et ça va répondre à votre questionnement. Ce qu'on recommande, c'est qu'on attende d'avoir un appareil de détection qui va être similaire à celui de l'alcotest sur la route.

Donc, à partir du moment où on a les mêmes paramètres d'intervention que pour l'alcool, des paramètres qui ont fait leurs preuves jusqu'à maintenant, on a tout avantage à avoir des appareils d'évaluation de présence de drogue qui vont s'apparenter à ce qui se fait au niveau du THC au niveau criminel, là, entre deux nano et cinq nano. Donc, on a tout avantage à ce qu'au niveau des drogues on se dote d'appareils de ce type-là.

M. Jolin-Barrette : O.K. Tout à l'heure, quand vous avez parlé des ressources au niveau de la SQ, vous dites : Écoutez, on est déjà en compression, on a déjà de la difficulté, un manque de personnel. Dans votre mémoire, vous dites : Pour analyser, lorsqu'on va faire une interception avec quelqu'un qui serait avec des facultés affaiblies reliées à la conduite avec du cannabis, ça pourrait nous rajouter deux, trois heures par intervention. Supposons que l'intervention arrive le soir ou la nuit, c'est des duos qui patrouillent. Là, à ce moment-là, on va avoir deux policiers dans ce dossier-là.

Je veux savoir, en termes d'efficacité de personnel... il va falloir dégager plus de monde, parce que... Je vous donne un exemple, là. Moi, dans ma circonscription, j'ai quatre villages où c'est la SQ qui est présente, mais il n'y a qu'une seule auto de police pour les quatre villages. Alors, durant ce temps-là, qu'est-ce qu'on fait?

M. Veilleux (Pierre) : Bien, c'est ça, le problème. C'est pour ça qu'on demande des effectifs supplémentaires, parce que déjà le fait de faire un travail et d'intercepter une personne avec les facultés affaiblies par l'alcool, ça prend en moyenne... on l'évalue, là, ça prend entre deux et trois heures. Donc, je ne veux pas faire de mauvais jeu de mots, mais tu es gelé pendant deux, trois heures, deux policiers à travailler sur un événement. C'est correct, on fait le travail. Il est fort à parier qu'avec les interventions qui vont être axées sur la drogue, ça va être minimalement, minimalement le même temps. Parce qu'un agent évaluateur, à partir du moment que je l'amène au poste, ça lui prend environ 45 minutes pour faire son travail. C'est plus rapide lorsque je travaille au niveau de l'alcool. Ça fait que c'est pour ça que je dis minimalement entre deux et trois heures.

Ça fait qu'on sent, on anticipe que ça va multiplier les interventions ou les interceptions en matière de facultés affaiblies, tout confondu, alcool et drogues. Donc, conséquemment, il y a une charge de travail qui va être augmentée, mais durant le temps, puis je pense... Je ne veux pas minimiser l'importance, mais durant ce temps-là, bien, il n'y a pas de patrouilleur sur la route. Puis, si les appels rentrent, de violence conjugale, de chicane, etc., on va les nommer, bien, on manque de personnel à un moment donné, là. Et je peux difficilement dire au gars : Excuse-moi, reste là tranquille, je vais aller couvrir une violence conjugale, je vais revenir. Ça ne marche pas, là.

M. Jolin-Barrette : ...poser une autre question au niveau des lieux de consommation.

Le Président (M. St-Denis) : Vous allez juste manquer de temps, M. le député de Borduas, pour votre autre question. Alors, si ça ne vous dérange pas, on va arrêter ça là.

M. Jolin-Barrette : Bien, ça me dérange un peu, M. le Président, mais...

Le Président (M. St-Denis) : Ça vous dérange un peu?

M. Jolin-Barrette : Mais, sur le temps de la présidence, peut-être juste se prononcer sur les lieux de consommation, qu'est-ce que vous en pensez.

Le Président (M. St-Denis) : Non. Mais c'est... Je suis désolé, on a terminé. On est déjà sur le retard.

Alors, je vous remercie de votre contribution et je suspends les travaux pour quelques instants afin de permettre au prochain groupe de s'installer. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 34)

(Reprise à 16 h 36)

Le Président (M. St-Denis) : Alors, nous allons reprendre nos travaux, et je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association des propriétaires du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et puis à commencer votre exposé.

Association des propriétaires du Québec (APQ)

Mme Lapointe (Annie) : Bonjour, M. le Président. Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, bonjour. Je me présente, Annie Lapointe, directrice adjointe au Regroupement des propriétaires d'habitations locatives. Donc, on est un regroupement qui défend les propriétaires d'immeubles à revenus, principalement en Estrie et en Montérégie.

Je suis accompagnée de Me Robert Soucy, avocat spécialisé en droit locatif, et je suis accompagnée de Martin Messier, président de l'Association des propriétaires du Québec qui représente également des propriétaires à l'échelle provinciale.

Donc, nous nous sommes regroupés pour la présentation, comme les enjeux sont communs. Nous sommes tous deux... on travaille à la défense et à la promotion des droits et des intérêts des propriétaires et gestionnaires d'immeubles, donc on soutient la cause des propriétaires depuis plus de 35 ans. Donc, c'est dans ce cadre-là qu'on est appelés de façon quotidienne à écouter, à conseiller les propriétaires dans les situations difficiles qu'ils vivent tous les jours.

Donc, j'aimerais vous remercier de nous permettre de faire cette présentation-là devant vous aujourd'hui, parce que c'est un sujet qui touche aussi les propriétaires et qui suscite énormément de crainte de la part des propriétaires, mais également des locataires. Donc, on espère pouvoir vous inspirer dans vos réflexions, vous faire part de notre réalité et vous orienter dans vos décisions. Donc, je vais céder la parole à Me Soucy.

M. Soucy (Robert) : Bonjour, M. le Président, Mme la ministre, les membres du Parlement, les membres des partis d'opposition, mesdames et messieurs. Tout d'abord, on devrait adresser des félicitations au gouvernement, dans le projet de loi, qu'il y a une interdiction de la culture à des fins personnelles. Nous, l'Association des propriétaires, nous vous invitons à résister à toute demande des groupes de pression qui pourraient exiger la culture à des fins personnelles.

Cependant, toutefois, il y a des préoccupations au niveau de la consommation de... de fumer du cannabis à l'intérieur des logements. Aujourd'hui, le projet de loi, il interdit de consommer, à peu près les mêmes restrictions que la Loi concernant la lutte contre le tabagisme, mais cette loi-là n'interdit pas la fumée de cannabis dans les immeubles à habitations multiples à l'intérieur des logements.

Donc, nous, nous recommandons le statu quo. Ça veut dire maintenir l'interdiction de la culture de cannabis à des fins personnelles. Cependant, pour des problèmes de jouissance des lieux, c'est pour ça qu'on recommande aussi que la culture du cannabis à des fins personnelles soit interdite, c'est que les odeurs, la fumée secondaire entraînent beaucoup de problèmes au niveau de la jouissance des lieux.

Le locateur, dans la loi actuelle, le propriétaire est responsable du choix des locataires dans les logements, donc il doit assurer la jouissance paisible des lieux aux autres locataires de l'immeuble. Donc, le cannabis, c'est des odeurs désagréables et volatiles, donc les gens sont... les autres locataires sont dérangés par la fumée secondaire.

• (16 h 40) •

On sait aussi que la fumée secondaire peut avoir un impact sur la santé des locataires et que les excès peuvent entraîner des poursuites des locataires contre les propriétaires, les locateurs, en diminution de loyer. Même, on peut aller plus loin, il y a des locataires qui pourraient demander la résiliation du bail si on est capables de démontrer que les odeurs sont persistantes et dérangent les autres locataires. Cependant, face à une plainte des autres locataires qui demanderaient l'expulsion d'un locataire dérangeant qui fumerait du cannabis, il faut voir que, dans la loi, actuellement, les auditions à la Régie du logement, même si une cause en résiliation de bail est considérée comme une cause prioritaire, le délai d'attente minimum est de 15 à 16 mois d'attente. Donc, le propriétaire devrait gérer cette situation durant plus d'une année.

Et on doit aussi voir que les études scientifiques, les experts, ils ont établi les effets similaires sur la santé respiratoire, ce que... On peut penser sans risque de se tromper que les effets du cannabis sont plus nocifs que les effets de la cigarette. On a vu qu'il y a certaines études qui parlent qu'il y a quatre fois le contenu du monoxyde de carbone, puis trois à cinq fois plus de dépôt du goudron dans les poumons, et ainsi de suite. Donc, il n'y a aucune étude précise qui peut mesurer à quelle distance la fumée secondaire est néfaste. Donc, c'est pour ça que nous, l'association, on demanderait qu'il soit maintenu l'interdiction de faire la culture personnelle dans les logements.

Maintenant, dès l'entrée en vigueur, nous autres, ce qu'on préconise, ce qu'on suggère, c'est qu'il y ait une disposition interdisant la consommation de cannabis à l'intérieur des logements. Advenant que le gouvernement ne veuille pas accorder cette disposition-là, nous pourrions suggérer au gouvernement qu'il accorde la permission de fumer dans des logements, à condition que le propriétaire donne son accord. Donc, on donnerait aux propriétaires le droit, la discrétion d'accepter des fumeurs ou des non-fumeurs de cannabis.

Donc, ce qu'on demanderait, c'est que, dès l'entrée en vigueur, si on permet au propriétaire d'avoir la discrétion de refuser de fumer dans les logements à l'intérieur, on demanderait qu'on donne aux propriétaires actuels, dès l'entrée en vigueur de la loi, la possibilité, donc prévoir une disposition qui permettrait aux propriétaires un certain délai de grâce pour aviser les locataires des baux existants qu'il va y avoir une interdiction de fumer dans les logements. Pourquoi? Parce qu'actuellement dans la loi, lorsqu'il se présente un nouveau locataire, tous les nouveaux locataires, on peut limiter le droit de fumer. Ça, c'est reconnu pour la cigarette, on pense également que ça va être reconnu pour la fumée de cannabis. Cependant, les baux déjà existants, la loi, à cause du maintien dans les lieux, ne nous permet pas de modifier un bail en cours de route. Il faut attendre la fin du bail et là, si on attend la fin du bail, il faut respecter les règles du renouvellement d'un bail. Donc, imaginons qu'au 1er juillet il faudrait d'avance donner un avis pour un bail d'un an, durée un an, de juillet à juin, avant le 31 mars, il faudrait donner un avis comme quoi qu'on interdit de fumer dans les logements.

Ceci étant dit, lorsqu'on est obligés de suivre les règles de modification des baux, le locataire pourrait refuser ladite modification. À ce moment-là, on se retrouve devant le tribunal de la Régie du logement qui devrait fixer la modification du bail. Ça veut dire se prononcer, oui ou non, sur le droit de limiter la personne de fumer dans son logement. Et là on peut avoir des processus judiciaires, c'est long, c'est onéreux, et il peut y avoir des difficultés, parce que... Pour la cigarette, actuellement, il y a certains régisseurs qui vont refuser la modification en cours de bail. Ils vont permettre qu'à la signature de bail on interdise de fumer, mais, si quelqu'un fume, ils vont refuser la modification parce que souventefois le locataire va plaider : Moi, là, si vous m'interdisez de fumer, c'est comme si vous me condamniez à quitter mon logement, c'est une condition substantielle de mon contrat. Et la Régie du logement, plusieurs fois, a décidé qu'ils refusaient la modification, parce que la limite pour une modification de bail, c'est que, si la modification de bail entraîne la résiliation du bail, le tribunal doit la refuser. C'est la jurisprudence actuelle.

Donc, brièvement, aussi pourquoi qu'on demande le maintien de l'interdiction de la culture personnelle à l'intérieur des logements... On a parlé aussi des problèmes de la fumée secondaire, des problèmes au niveau de la gestion pour la jouissance paisible, des locataires qui se plaignent, O.K.? Donc, il y aurait des conséquences sur les assurances. Certaines compagnies d'assurance, si le propriétaire est au courant qu'il y a de la consommation, pourraient refuser, annuler la police d'assurance, et ça, c'est sans compter les dommages à l'humidité, la moisissure lorsqu'il y a de la culture.

Le Président (M. St-Denis) : En terminant.

M. Soucy (Robert) : Oui. En conclusion, là, advenant qu'il y ait une permission de culture personnelle, il faudrait qu'à tout le moins il y ait un encadrement. Mais là le problème de l'encadrement, c'est qu'il y a beaucoup de logements qu'il faudrait surveiller et, si on accorde aussi le nombre de plants, la hauteur des plants, il faudra avoir des inspecteurs, puis comment faire des inspections, en donnant un préavis. Nous, on demanderait qu'il n'y ait pas de préavis, qu'on ait le droit de faire des inspections sans préavis parce que les gens cachent la preuve à ce moment-là. Merci, monsieur.

Le Président (M. St-Denis) : Je vous remercie. Alors, je vous remercie pour votre exposé. Nous allons débuter maintenant la période des échanges. Alors, Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Charlebois : Alors, merci, M. le Président. Mme Lapointe, Me Soucy et... Êtes-vous tous des avocats, coudon, les trois?

Une voix : Notaires

Mme Charlebois : Notaires. O.K. Alors, Mme Lapointe, M. Soucy, M. Messier — tiens, c'est plus simple — bonjour. Merci d'être venus nous faire part de vos préoccupations. J'entends que vous avez examiné un segment du projet de loi, mais pas son entièreté. Vous n'êtes pas positionnés sur l'âge, sur plein de sujets. Vous allez plus directement sur ce qui touche à vos membres, n'est-ce pas?

M. Soucy (Robert) : Exact.

Mme Charlebois : Vous nous parlez de production personnelle puis vous nous félicitez parce que ce n'est pas dans la loi. Il y a une interdiction de production personnelle dans le projet de loi n° 157, mais vous savez que la production, dans le cadre de production thérapeutique, peut continuer. Ça n'a rien à voir avec le projet de loi n° 157 en ce moment. Ça, si vous voulez le plaider, il faudra aller à une autre instance qu'est le gouvernement fédéral parce que c'est eux qui encadrent ça. Je voulais juste le porter à votre attention.

Concernant la consommation... Mais avant, je vais aller sur la possession. Je vais faire le lien, parce qu'on autorise, dans le projet de loi, les citoyens à aller acheter 30 grammes par achat, posséder, à chacune de leurs adresses, 150 grammes de cannabis. Je n'ai pas entendu rien là-dessus, mais je vous entends me parler de consommation. J'entends d'autre monde qui me disent : Bien, coupez les lieux publics. Vous me dites : Coupez les lieux où résident les gens.

Finalement, ça va être légalisé pour consommer où? Va-tu falloir s'acheter des tours pour consommer le cannabis? C'est le sens de ma question. Ça a l'air drôle, hein?

• (16 h 50) •

M. Messier (Martin A.) : Non, mais, en fait, c'est effectivement, Mme la ministre, des questions qui nous ont été posées. On a échangé, en fait, avec des propriétaires qui sont extrêmement nerveux de l'entrée en vigueur de la légalisation du cannabis en fait, qui voient, dans ça... et c'est justement la différence. Donc, nos immeubles multilocatifs ne sont pas adaptés à des odeurs, à une consommation comme celle-là. On a souvent des logements qui sont très près les uns des autres. Parfois, on a des immeubles plus vieux, où les odeurs se propagent très facilement. D'autres fois, c'est des immeubles neufs, avec des systèmes de ventilation très modernes, mais qui justement, par des soucis d'économie, récupèrent l'air, et, bon, on sent les odeurs de cuisson, on sent la cigarette, et, quand il y a de la consommation de cannabis, c'est vraiment préoccupant pour nos propriétaires, mais surtout pour leurs locataires, en fait.

Mme la ministre, j'insiste sur le fait que les locataires sont les premiers à nous téléphoner. Dans les derniers jours, dernières semaines, les gens qui communiquent avec nous, il y a effectivement beaucoup de propriétaires, mais beaucoup de locataires qui nous disent : Moi, je suis inquiet pour moi, pour ma famille, mes parents, mes enfants en bas âge, à la fois pour l'odeur, ma fille est asthmatique, on me parle des effets secondaires, qu'est-ce qui va arriver avec ma famille.

Et donc, pour nous, la consommation de cannabis dans un logement... et c'est pour ça qu'en fait on vous demande d'en faire une exclusion globale, mais, si le propriétaire veut le permettre dans certains logements... parce que c'est possible qu'il y ait, je ne sais pas, une configuration des lieux. On pense à certains duplex où il y a moins d'impact que dans un immeuble de plusieurs logements. Si j'ai deux locataires qui s'entendent sur la consommation de cannabis, ça va peut-être moins me déranger à court terme. Évidemment, ça dépend de ce qui arrive avec les baux éventuellement.

Et, dans un système où le propriétaire a discrétion, il y a également toute la question des balcons qui nous a été également exposée. Est-ce que certains balcons où je peux tendre la main à mon voisin, c'est un bon endroit? D'autres configurations où ça serait possible, mais la fumée de cigarette... et là on n'a peut-être pas précisé, mais, pour nous, c'est vraiment la fumée, et puis le gouvernement aura à décider sous quels autres types de consommation ça sera possible. Mais que nos locataires consomment par des produits qui ne produisent pas d'odeur ou de fumée secondaire, pour nous, ça change la dynamique.

Donc, ce qu'on vise à interdire, c'est la consommation qui est par voie de combustion et qui propage de la fumée.

Mme Charlebois : Je vous entends. Je vous entends parler de l'inquiétude de vos propriétaires de logements, mais j'ai entendu les policiers, qui sont passés juste avant vous, puis d'autres groupes qui sont passés, qui me disent qu'il y a comme un peu de monde qui consomme du cannabis au Québec en ce moment.

Est-ce que vos propriétaires se plaignent déjà, d'une part? D'autre part, si vous aviez à choisir entre les lieux publics et l'appartement, vous feriez quoi comme recommandation à tous les parlementaires qu'il y a ici? Parce qu'il va falloir...

M. Messier (Martin A.) : Il va falloir trancher.

Mme Charlebois : Tu sais, c'est beau de légaliser, mais il faut laisser un espace pour que les gens puissent le consommer. Moi, ça m'arrive, puis, écoute, je demeure en campagne... écoutez, j'allais dire. Je demeure en campagne, puis ça arrive que, quand je me baigne l'été, il y a quelques petites odeurs qui me passent sous le nez, puis je sais très bien c'est quoi, là, je suis capable de reconnaître ça, puis c'est le voisin à côté. Ça fait que... Est-ce que je lui dis : Tu ne peux pas fumer dans ton appartement mais ne va pas fumer dehors et... On fait quoi, là?

M. Messier (Martin A.) : Effectivement, Mme la ministre, il y a une différence importante pour moi. Quand on est dans notre logement, c'est notre maison, on y est captif, Mme la ministre. Nos enfants y dorment, je ne peux pas les déplacer dans le parc pour qu'ils puissent dormir, particulièrement l'hiver, alors que, comme vous, quand je respire des odeurs qui me sont inconvenantes, je fais quelques pas de plus et je m'en éloigne.

Mme la ministre, le cannabis est effectivement légal aujourd'hui... pas légal, c'est-à-dire, est effectivement... on dirait qu'il est légal dans certaines de nos unités d'habitation. Mais c'est très différent pour le propriétaire, et on en discutait avec plusieurs propriétaires d'immeubles. Aujourd'hui, c'est illégal, et je suis en mesure d'aller voir mon locataire, de lui dire : Écoute, ta consommation nuit aux autres, c'est illégal. Si tu ne veux pas que j'appelle les policiers ou que je fasse une demande à la Régie du logement ou la combinaison des deux, il va falloir corriger ces habitudes-là parce que tes voisins n'en peuvent plus.

Et, Mme la ministre, du cannabis dans un logement... Des fois, la cigarette, c'est plus difficile de savoir d'où ça vient, mais du cannabis, ça ne prend pas un animal pisteur, là. Je peux savoir d'où ça vient puis je peux vous dire que les voisins en ont ras le bol quand ça arrive, et c'est ça, la différence, Mme la ministre. Aujourd'hui, c'est illégal, je peux exercer une certaine pression sur mon locataire. Demain, il est probable que sa réaction sera tout à fait différente.

Mme Charlebois : Est-ce que ceux qui fument déjà du cannabis thérapeutique et qui le produisent dans vos logements — parce que, s'ils ont une ordonnance, une prescription puis qu'ils ont le droit d'en produire, il faut qu'ils le consomment à quelque part — vous tolérez ça en ce moment?

M. Messier (Martin A.) : Il y a eu certains cas où il y a eu des abus, mais je dois dire que c'est plutôt minime comme situation. Mais, dans les cas d'abus, on intervient de la même façon avec le locataire, en lui exposant les inconvénients, mais on n'a pas eu énormément d'inconvénients, Mme la ministre. Il est à prévoir que la légalisation globale aura un impact tout à fait différent.

Mme Charlebois : Dites-moi, quand vous avez parlé, ça m'a fait sursauter un peu, que des compagnies d'assurance parlent d'annuler les polices d'assurance en cas de consommation... Ça veut dire que je suis en logement, je désire fumer mon joint, je ne peux pas parce que vous allez perdre vos assurances? C'est-u ça que je comprends?

M. Messier (Martin A.) : En fait, ce qu'on craint, Mme la ministre... puis honnêtement, là, on craint que les conditions d'assurance ou le retrait de l'assureur soit possible. C'est actuellement le cas, Mme la ministre. Si je suis au courant ou non, en fait, même, qu'il y a de la culture, non pas de la consommation mais de la culture à l'intérieur de mon logement, la compagnie d'assurance peut se retirer. Mais non, ce n'est pas une question de consommation, c'est une question de culture à l'heure actuelle.

Évidemment, si c'est légalisé, les compagnies d'assurance devront se réajuster. À quelles conditions, à quels tarifs, à quels prix? C'est un aspect qui demeure inquiétant, mais on n'a pas de données, à l'heure actuelle, sur ce sujet-là.

Mme Charlebois : O.K. Mais il n'y a pas de compagnie d'assurance qui, à ce moment-ci, menace de se retirer pour consommation. Pour production, oui, mais pas pour consommation.

M. Messier (Martin A.) : Pas à ma connaissance, là. Pas à ma connaissance.

Mme Charlebois : O.K. Je n'avais pas compris ce côté-là.

Est-ce que ça vous tente quand même de me parler de... Vous savez qu'on va faire beaucoup de prévention, qu'on l'inscrit dans notre projet de loi. Vous savez que, bon, il y a plusieurs pans qu'on vient de toucher. Mais parlez-moi donc de l'âge des consommateurs. Vous savez qu'il y a 42 % des consommateurs de cannabis qui ont entre 18 et 22 ans. Est-ce que vous pensez qu'on a fixé l'âge d'une bonne façon? C'est-à-dire que, tant qu'à aller voir sur le marché criminalisé, qu'on aime les voir avec nous venir à la Société québécoise du cannabis. Pensez-vous que c'est une bonne chose qu'on les informe, qu'on les rejoigne, qu'on leur parle?

M. Messier (Martin A.) : Ce sera plutôt une réflexion qui n'est pas directement dans notre champ d'action, mais ça fait partie des...

Mme Charlebois : Comme citoyen, là.

M. Messier (Martin A.) : Comme citoyen, ça m'interpelle. Moi, j'ai plus de difficulté avec la consommation. Les experts qu'on a pu entendre dans les forums que vous avez mis sur pied ont été assez précis sur la possibilité d'interaction entre le cannabis, la croissance, différents médicaments qui peuvent être pris pour d'autres besoins, et ça nous inquiète. Ça inquiète les locataires. Et définitivement que, pour ce qui est des logements, bien, plus je permets à cette clientèle-là, donc à ce groupe d'âge là, plus j'ai d'impact dans mes logements aussi, parce qu'il semble qu'il y ait une affinité, je vous dirais, à...

Mme Charlebois : Mais vous êtes conscient que, si on ne les a pas sur un marché légal, licite, ils vont aller sur un marché illicite, puis vous êtes à risque quand même, là.

M. Messier (Martin A.) : Je suis peut-être trop vertueux, Mme la ministre, mais je persiste à croire que, quand c'est illégal, les gens ne le feront pas ou ils le feront moins, à tout le moins.

Mme Charlebois : Ce n'est pas le cas en ce moment, là.

M. Messier (Martin A.) : Bien, ils le font moins. Moi, je peux... Définitivement, si on était ici aujourd'hui, sans soupçonner une croissance de la consommation, pour nous, ça serait différent. Moi, j'ai la nette impression que le fait que ça soit permis globalement va enlever plusieurs freins à la consommation. On le verra, mais...

Mme Charlebois : Quand vous me parlez d'interdire sur des baux déjà existants de revoir systématiquement les baux, est-ce que vous considérez que ça ne va pas contrevenir aux chartes?

M. Messier (Martin A.) : Non. Écoutez, Mme la ministre, à ce sujet-là... puis d'ailleurs vos collègues de la Saskatchewan nous ont fait plaisir en annonçant qu'ils avaient l'intention d'interdire à la fois la consommation et la culture. Et donc, pour nous, cette possibilité-là de restreindre, elle existe déjà d'ailleurs, hein? Dans nos baux, on peut interdire...

Mme Charlebois : Les nouveaux baux.

M. Messier (Martin A.) : Les nouveaux baux, tout à fait. Et la raison pour laquelle on ne peut pas l'interdire dans les anciens baux, c'est par les conditions de la Régie du logement, l'application du droit au maintien dans les lieux, tout le mécanisme. Puis mon collègue Me Soucy a parlé précédemment des baux qui se terminaient au 1er juillet, dans lesquels, possiblement pour ceux-là, on peut envoyer un avis de modification au bail. Mais on a tous les baux qui se terminent plus tard, là, le 1er août, le 1er septembre et ceux qui ont une durée de plus de 12 mois, et les propriétaires, évidemment, qui ne seront pas au fait, là, du fait que c'est maintenant qu'il faut faire cette demande de modification là, avant que le bail inclue une période de temps où le locataire a eu le droit de consommer.

Mme Charlebois : Il reste-tu bien du temps?

Le Président (M. St-Denis) : 1 min 59 s.

Mme Charlebois : Rappelez-moi combien de propriétaires de logements vous représentez.

M. Messier (Martin A.) : 16 000.

Mme Charlebois : 16 000 logements au Québec. C'est ça?

M. Messier (Martin A.) : 16 000 propriétaires de logement.

Mme Charlebois : Des propriétaires de logement. Ça veut dire beaucoup de logements parce qu'il y en a qui ont plusieurs...

M. Messier (Martin A.) : Tout à fait. Oui.

Mme Charlebois : Est-ce que vous avez fait faire un sondage à vos propriétaires de logement ou si vous vous êtes positionné sans même les consulter?

M. Messier (Martin A.) : Non. En fait, on a fait plus que ça, Mme la ministre. On a fait un sondage et on a créé des comités... j'étais pour dire des comités de dégustation, mais ce n'est pas ça, des comités de consultation sur le cannabis. Et il y a une inquiétude, je vous dirais, plus que réelle des propriétaires qui craignent pour la valeur de leur parc immobilier, pour une dégradation de la qualité de vie de leurs locataires, au tel point que, face à d'autres marchés, on ne serait pas en mesure de livrer la marchandise. Et je n'ai pas le chiffre exact, je pense que c'est 74,9 % de nos propriétaires qui craignent suffisamment les effets secondaires de la fumée de cannabis pour tenter de l'interdire dans leurs baux dès maintenant, au 1er juillet, et de l'interdire à tout nouveau locataire. Donc, plus du trois quarts de nos propriétaires qui ont une inquiétude grave à ce sujet-là.

• (17 heures) •

Mme Charlebois : Merci beaucoup d'être venus nous faire part de vos commentaires.

M. Messier (Martin A.) : Merci.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de Labelle.

M. Pagé : Merci, M. le Président. Bienvenue à l'Assemblée nationale, bienvenue chez vous. J'entends bien vos inquiétudes et je peux les partager parce que j'ai déjà eu... j'ai déjà été propriétaire de logements et... Bien, est-ce que vous avez vérifié comment on a géré cela ailleurs, comme au Colorado, comme en Californie, comme l'État de Washington, où certains pays ont déjà légalisé? Est-ce que vous vous êtes penchés à savoir comment on l'a géré? Je comprends qu'il y ait des inquiétudes, mais je ne pense pas, bien humblement, que, le 1er juillet, ça va se mettre à fumer partout, là, je ne pense pas que ça va être tout à fait comme ça. Alors, en même temps qu'il est tout à fait légitime d'être inquiet, en même temps, je pense qu'il faut rationaliser un peu, puis, peut-être en regardant comment ça s'est fait ailleurs, ça pourrait nous sécuriser, non? Est-ce que vous avez regardé ça?

Mme Lapointe (Annie) : Bien, en fait, aux États-Unis, il y a certains États qui ont décriminalisé. Par contre, c'est encore illégal, ce n'est pas une substance qui est encore légale au niveau des États-Unis d'Amérique. Donc, ce qu'on nous expliquait, parce qu'on a parlé à des associations de propriétaires là-bas, c'est que, comme il y a encore une certaine illégalité qui plane au-dessus de ça, les gens ont encore une certaine réticence, donc ils ont vu peu d'effets là-dessus.

Par contre, bien, c'est sûr que nous, on vous suggère d'aller vers ce que le ministre de la Justice de la Saskatchewan a avancé, donc de permettre aux propriétaires de refuser la consommation à l'intérieur des logements. Et encore une fois, c'est vraiment juste la consommation par combustion ou qui engendre des inconvénients pour les voisins. Parce que tout autre consommation, nous, on n'est pas contre la consommation en soi, donc que ce soient des produits dérivés, des huiles, tant que ça n'a pas d'impact pour les voisins.

M. Messier (Martin A.) : Peut-être, un complément de réponse sur la différence entre les États-Unis et le Québec : notre droit locatif est très particulier, extrêmement puissant, ça va de l'interdiction de demander un dépôt de garantie au maintien dans les lieux, ce qui est une différence importante parce que, si j'ai un locataire dans un de ces États-là, américains, je peux lui dire : Ton bail se termine, au revoir. Alors qu'ici, au Québec, c'est impossible. On dit souvent que signer un bail de logement ça peut durer aussi longtemps sinon parfois plus que le mariage.

M. Pagé : J'imagine que vous n'avez aucun problème à ce que les gens puissent vaporiser. On nous dit de plus en plus que la tendance mondiale, c'est d'aller justement vers les produits qui sont plutôt vaporisés.

M. Messier (Martin A.) : Aucune difficulté avec ça, en autant qu'on utilise les appareils qui n'explosent pas, il n'y a pas de problème.

M. Pagé : Donc, c'est vraiment au niveau des odeurs puis des inconvénients qui...

M. Messier (Martin A.) : Tout à fait.

M. Pagé : En fait, nous, nous avons dit, dès le départ, quand on a pris position à cet égard-là, qu'on souhaitait, comme dans le cas de la cigarette, vous permettre, le moment venu, lors d'un nouveau bail, de pouvoir l'inscrire. Par contre, là, j'ai une petite question. Quand on dit que c'est interdit dans un logement, est-ce que ça va jusque sur le balcon?

M. Messier (Martin A.) : Bien, en fait, normalement, c'est précisé. Et sur ça, je pense que les propriétaires, comme pour la fumée de cigarette, actuellement, vont pouvoir moduler en fonction de la configuration des lieux. Parfois, les balcons sont tellement rapprochés ou exigus, puis au Québec, ce qu'on a comme problématique, c'est que, si je laisse la porte-patio qui donne sur mon balcon ouverte, je respire tout ce qui passe à côté, mais il y a des configurations qui sont différentes, quelqu'un qui est sur un coin des immeubles, c'est plus espacé, où ça pose beaucoup moins de difficultés, et je vous dirais donc, en réponse à votre question, que ça varie selon les immeubles. On ne pourrait pas faire de cas généraux.

M. Pagé : Oui. Parce que, tu sais, on dit... il faut quand même que les puissent consommer quelque part, on le sait, là, alors, tu sais, quand tu ne peux plus dans ton logement... ou est-ce que nous sommes capables de dire que... de trouver un endroit désigné, si vous dites : Dans un multilogements, c'est interdit, ce sont des nouveaux logements, on le met sur tous les baux, il faut quand même que les gens puissent trouver un espace. Est-ce que, si on disait dans la loi, à un endroit désigné que vous pourriez trouver... Évidemment, certains blocs appartements, je comprends que tout l'espace est presque utilisé. Est-ce qu'on aurait un compromis là, quand c'est possible de le faire? Je comprends : quand c'est possible de le faire.

M. Messier (Martin A.) : Il y aurait probablement une solution de commercialisation à faire des appartements «hotbox», là. Mais, dans la réalité, ça serait compliqué. Il y a plusieurs immeubles, vous savez, on a un escalier, il y a un corridor, mais il n'y a pas de grands espaces communs. Ça serait difficile, là. Il y a peut-être certains propriétaires qui pourraient le faire. D'ailleurs, quand on faisait référence au sondage précédemment, il y a les trois quarts des propriétaires qui sont inquiets, il y en a 25 % qui semblent l'être moins ou pas assez pour faire cette modification-là. Il va y avoir, dans le marché, comme pour la cigarette, certains propriétaires qui, eux, de par la configuration, l'isolation de ventilation de leurs immeubles, ne verront pas les mêmes inconvénients.

M. Pagé : Bon, là, vous m'amenez sur autre chose. Les nouvelles constructions, maintenant, les nouvelles normes d'étanchéité, est-ce que ça ne protège pas justement les gens qui veulent consommer? Est-ce qu'aujourd'hui ce n'est pas tellement mieux ventilé et tellement plus étanche qu'on est capable de dire : Dans les nouveaux logements, il n'y aura pas de problème? Est-ce que c'est possible d'imaginer cela?

M. Messier (Martin A.) : En fait, il y a certains logements où effectivement ça peut poser moins d'inconvénients. Il y en a d'autres, les plus récents puis les plus performants au niveau énergétique, où ça va être l'inverse, en fait. On va avoir des systèmes de ventilation en commun extrêmement performants, mais pas très performants au niveau d'isoler les odeurs.

M. Pagé : Les plants à la maison. Nous, on a quand même gardé une porte ouverte pour permettre, comme le Nouveau-Brunswick, comme l'Ontario, qui vont permettre... et comme le prévoit la loi fédérale, et là on est en train d'aller complètement à l'encontre de la loi fédérale, parce qu'on peut restreindre, mais là... puis, d'ailleurs, plusieurs juristes nous disent : Bien, ça ne tiendra pas la route, le zéro plant, par rapport à la loi fédérale, parce qu'on va complètement à l'inverse de ce que ça prévoit. Si on disait : Des gens... Puis, si on encadrait bien la permission de pouvoir faire pousser un plant de cannabis à la maison, comme par exemple, on puisse faire pousser un plant de cannabis à la maison, mais en étant totalement naturel... Vous avez parlé de moisissures tantôt, vous avez parlé... Bon. J'imagine que c'est pour les gens qui exagèrent, là, qui s'organisent, là, tout un système. Mais un plant de cannabis... Je n'en ai jamais fait pousser, là, mais j'imagine qu'un plant de cannabis qui pousse de façon totalement naturelle, où en plus il n'y a pas de lampe pour le faire pousser plus rapidement, si cette production privée, bien encadrée, était, un peu de la façon que je viens d'expliquer, là, totalement naturelle, est-ce que là vous pensez que ça pourrait être acceptable? Parce qu'on éliminerait tous les problèmes liés à la moisissure ou encore...

M. Messier (Martin A.) : Bien, en fait, pour l'avoir vécu, pour certains locataires qui ont cultivé quelques plants, on ne parle pas de centaines, on parlait de trois, quatre, cinq plants... Mais ce qu'on m'explique, puis encore une fois je ne suis pas un spécialiste sur ça, mais c'est que ça ne pousse pas très bien dans des conditions naturelles, que ça pousse beaucoup mieux avec beaucoup d'humidité, de la chaleur, et c'est là qu'il y a une performance du plant, et on a vu vraiment des logements détruits avec aussi peu de plantes que ça. La moisissure a affecté le gypse extérieur pour contaminer les matériaux derrière. Il a fallu tout démolir, non seulement au sous-sol, où ça se trouvait, mais au rez-de-chaussée, où c'est monté. Pour nous, l'utilisation du... la permission, en fait, de cultiver à l'intérieur, c'est tout simplement catastrophique, à la fois la combinaison des effets de culture adéquate dont je viens de faire mention, mais les restrictions que nous impose la loi en matière de visite. Je dois envoyer un avis de visite de 24 heures à mes locataires, puis ensuite, je fais quoi? Si vous me dites qu'on va être en mesure d'avoir un service d'inspecteurs, là, 1 800 mari, puis là quelqu'un peut venir dans le logement, ouvrir la porte, saisir les plants... mais sinon, pour nous, c'est catastrophique.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, je vous remercie pour votre réponse, merci. Alors, je vais passer la parole maintenant au député de Borduas.

M. Messier (Martin A.) : Merci.

• (17 h 10) •

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Me Messier, Me Soucy, Me Lapointe, bonjour. Merci de participer aux travaux de la commission.

Écoutez, nous, dès le mois de septembre, là, ma formation politique a proposé, en fait, de permettre aux propriétaires de logements d'intervenir directement, à partir du moment où ça sera légal, de mettre une clause dans le bail, comme une clause tabac, pour dire : Bien, c'est interdit de fumer du cannabis à l'intérieur du logement. On a pris cette approche-là à la fois pour les baux locatifs, mais à la fois également pour les copropriétés. Donc, on propose une intervention directe dans le droit privé, dans le Code civil, pour faire en sorte que... Ce qu'on dit, c'est qu'à la base c'est interdit, à moins que le propriétaire du logement veuille le permettre dans son logement et, subsidiairement, dans le cas de copropriétés, à moins que le syndicat de copropriétés, par voie réglementaire, avec tous les copropriétaires, l'autorise.

Cette position-là, elle est justifiée par le fait qu'à la fois les gens qui vivent en logement, à la fois les gens qui vivent en copropriété ou qui louent des condos se retrouvent à vivre en communauté et ça a des effets sur l'ensemble des individus qui y vivent. Actuellement, le projet de loi du gouvernement, de la ministre, prévoit que c'est uniquement les aires communes où il est interdit de fumer de cannabis. Alors, je voudrais peut-être vous entendre là-dessus et sur la position qu'on propose.

M. Messier (Martin A.) : Bien, tout à fait d'accord. Et puis vous faites fort bien de souligner la copropriété parce que c'est également un enjeu important, là. Ce sont des habitations qui présentent souvent des caractéristiques communes avec les immeubles à logements. Et, on le sait, il y a plusieurs propriétaires, et ça nous concerne directement aussi parce qu'il y a plusieurs propriétaires de condo qui louent leurs unités d'habitation, et donc qui ont une responsabilité, non seulement envers leur locataire mais également envers le syndicat de copropriétés, et c'est définitivement important, tout à fait, que le syndicat de copropriétés, au même titre que le propriétaire de logement, puisse interdire la fumée de cannabis.

M. Jolin-Barrette : Au niveau des couvertures d'assurance, tout à l'heure vous en avez parlé. Actuellement, on est un peu dans le noir à savoir est-ce que le fait de permettre la consommation de cannabis, ça va faire augmenter les primes d'assurance. Vous nous dites, c'est possible que ça le fasse. La répercussion pour les locateurs, si jamais ils payent plus de primes d'assurance responsabilité pour faire assurer leur parc immobilier, j'imagine que les propriétaires vont faire des augmentations de loyer aux locataires, aux différents locataires. Donc, c'est l'ensemble des locataires qui vont devoir payer cette hausse-là parce que certains vont décider de consommer du cannabis. Est-ce que je me trompe?

M. Messier (Martin A.) : Non, vous avez tout à fait raison, en fait. Comme, d'ailleurs, le marché de l'assurance est souvent un marché de vases communicants, si le nombre de réclamations, le risque augmentent, ça va affecter particulièrement les immeubles où il y aura la possibilité de consommer, cultiver, mais également, par effet de vases communicants, les autres propriétaires. Et directement dans la méthode de fixation de loyer de la Régie du logement, les assurances, c'est vraiment la différence nette entre le montant payé d'une année moins l'autre qui est répercutée au pro rata des loyers.

M. Jolin-Barrette : Au niveau de la production à domicile, nous, on a proposé que ce soit zéro plant. J'ai confiance que l'application de la loi québécoise va être présente, bien, va se faire, parce que, justement, le fédéral laisse une marge aussi, et le Québec a compétence dans cette juridiction-là. Mais je veux savoir : Est-ce que vous avez évalué de façon... les coûts que ça pourrait engendrer pour vos... pour les propriétaires de logements si jamais il y a des travaux à faire en termes d'humidité, tout ça? Est-ce qu'il y a des études qui ont été faites de votre part par rapport à la dégradation des logements s'il y a de la culture à domicile de cannabis?

M. Messier (Martin A.) : Bien, en fait, c'est plus que des études, c'est des cas précis, parce qu'on l'a vécu dans des situations de culture illégale de cannabis, et ça peut coûter 10 000 $, 15 000 $, refaire un appartement où il y a eu de la moisissure. Il y a des stratégies de décontamination, des tests microbiologiques qui doivent être faits. Ces moisissures-là peuvent avoir des effets importants sur la santé des occupants des lieux, et ça se propage, hein, ça se promène, dans les conditions propices. Donc, c'est extrêmement dispendieux.

M. Jolin-Barrette : Parmi les propriétaires de logements que vous avez, c'est quoi, le profil type? Est-ce que c'est uniquement des grands propriétaires qui ont des centaines, des milliers de logements, ou ça arrive que c'est des propriétaires qui ont, supposons, un duplex, ils vivent au rez-de-chaussée ou ils ont un triplex, puis c'est leur fonds de pension?

M. Messier (Martin A.) : On a plusieurs membres, donc on reflète un petit peu tous les aspects du marché, donc on les a tous, et ils sont tous inquiets. Il y a des aspects, des fois, qui touchent plus les grands propriétaires ou les petits, mais là ils sont tous inquiets. Évidemment, les petits propriétaires, avec son fonds de pension où il y a un huit ou deux huit logements, pour lui, c'est catastrophique, là, la possibilité d'avoir à décontaminer, à refaire des logements. Puis également le marché locatif est en compétition, de plus en plus... nos taux de vacance élevés, on est en compétition notamment avec la copropriété, les maisons neuves. Nos locataires incommodés qui peuvent quitter aisément risquent de le faire, donc c'est définitivement une préoccupation.

M. Jolin-Barrette : O.K. La dernière question que j'ai pour vous, c'est relativement... au niveau de l'inspection. Vous avez dit tout à l'heure : On souhaiterait avoir une inspection sans préavis. Là-dessus, il y a certaines difficultés parce qu'on ne peut pas pénétrer dans le logement d'un individu. Comment vous voyez ce que vous avez amené relativement à l'inspection sans préavis? Je suis curieux.

M. Messier (Martin A.) : En fait, même, je vous dirais que l'inspection, idéalement, compte tenu de la limite de nos capacités juridiques d'agir, devrait carrément, là... ça devrait être un service d'inspection sans préavis, mais pas nécessairement le propriétaire, donc la municipalité, les forces de l'ordre. Parce que moi, j'ai beau constater qu'il y a un plant de cannabis puis que mon logement est en train de pourrir, j'en ai pour un an et demi avant d'être entendu devant la Régie du logement.

M. Jolin-Barrette : Je comprends. Mais, d'un autre côté, on ne peut pas pénétrer au domicile de l'individu comme ça, non plus.

M. Messier (Martin A.) : Les villes le font. Elles font des inspections-surprises pour inspecter nos immeubles, voir si c'est bien maintenu, plus souvent que pour inspecter le locataire, mais ça arrive parfois. Mais, oui, ça se fait, ils vont visiter, notamment pour valider l'état d'insalubrité des lieux, ils vont le faire.

M. Jolin-Barrette : Donc, ce que vous dites, c'est par le biais d'un inspecteur municipal qui est accrédité.

M. Messier (Martin A.) : Tout à fait.

M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie.

M. Messier (Martin A.) : Merci.

Le Président (M. St-Denis) : Merci beaucoup. Alors, merci pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de se présenter et de prendre place.

(Suspension de la séance à 17 h 16)

(Reprise à 17 h 18)

Le Président (M. St-Denis) : Alors, nous allons reprendre. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé.

Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)

M. Cadieux (Serge) : Merci, M. le Président. Serge Cadieux, secrétaire général de la FTQ. Je suis accompagné de Mme Rima Chaaban, qui est du service d'éducation de la FTQ, à ma droite, Denis Bolduc, qui est vice-président de la FTQ et président du SCFP-Québec, et Pierre-Guy Sylvestre, qui travaille au service de la recherche du SCFP, affilié à la FTQ.

Donc, on vous remercie de l'invitation que vous nous faites aujourd'hui. Vous le savez, la FTQ est une centrale syndicale qui représente 600 000 travailleurs dans toutes les régions du Québec et dans tous les secteurs d'activité, que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé.

Écoutez, d'entrée de jeu, je vous dirais que la production et la distribution de cannabis constituent des retombées économiques importantes pour le Québec. Selon l'estimation de l'IRIS, l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques, la législation du cannabis via la SAQ générerait une valeur ajoutée de 867 millions de dollars et la création de 982 emplois au Québec. Il s'agit là de paramètres économiques pertinents à prendre en compte dans l'analyse visant à favoriser les producteurs locaux. Il revient donc au gouvernement du Québec de mettre en place les conditions favorables afin que, dès l'entrée en vigueur de la loi, les producteurs soient prêts et puissent prendre pleinement part à ce nouveau marché. Le gouvernement doit aussi indiquer clairement aux entreprises qu'il sera en mesure de les accompagner — exemple, guide d'implantation du guichet unique — et de les soutenir financement — exemple, programme d'aide à l'investissement — car des sommes substantielles devront être investies dans leur installation afin de démarrer la production de cannabis et de leur permettre de respecter toutes les règles de sécurité ainsi que les plus hautes normes de qualité.

• (17 h 20) •

À titre d'exemple, le gouvernement doit reconnaître le cannabis comme un produit agricole comme les autres, et non comme une drogue, afin de permettre aux producteurs agricoles de bénéficier de tous les programmes et subventions mis en place par l'État dans le domaine de l'agriculture. Et, vous allez voir, on a des recommandations, dans notre mémoire, là, que je ne vous lirai pas, là, mais les recommandations 1 et 2, à cet effet-là, des modifications à être apportées au projet de loi.

En ce qui concerne maintenant le modèle de distribution et de commerce, le gouvernement... et dans le projet de loi, on dit que ça va être le secteur public. Évidemment, on salue ça, là, on salue cette décision-là, mais on propose des amendements à être apportés à la loi, particulièrement aux articles 23.18 et 23.19. On le sait, la SAQ, bon, existe déjà, a déjà un réseau de distribution, des camions, des employés, etc., donc il nous apparaît qu'on pourrait sauver un long contentieux devant les tribunaux, parce qu'il existe déjà des conventions collectives, il existe déjà des employés syndiqués. Honnêtement, si vous examinez l'état du droit, au moment où on se parle, entre autres la décision de ville de Pointe-Claire, de la Cour suprême, ce n'est pas compliqué, le test va être de savoir qui est le véritable employeur. Est-ce que le véritable employeur, c'est quelqu'un d'autre que la SAQ? Quand on lève le voile corporatif, c'est clair, à notre point de vue, que la SAQ est l'employeur, donc on devrait... il y a déjà des employés, il y a déjà différents syndicats, donc on peut sauver des coûts, on peut sauver du temps. Donc, ce qu'on dit, c'est de modifier les articles 23.18 et 23.19 justement pour dire que les employés vont être couverts par les conventions collectives existantes et biffer la disposition qui interdit à un employé de travailler et pour le secteur du cannabis et pour le secteur de vente d'alcool.

Maintenant, vous prévoyez aussi, dans le projet de loi, de réaliser des... de donner au ministre des Finances la possibilité de faire un projet pilote. Bien, écoutez, nous, on pense que c'était le bon chemin d'y aller par le secteur public, donc ça vient un petit peu faire indirectement ce que vous ne vouliez pas faire directement, en permettant au ministre des Finances de faire un projet pilote avec le secteur privé, qui pourrait distribuer, ouvrir des kiosques puis vendre du cannabis. Donc, on vient contourner... on vient passer par la porte d'en arrière ce qu'on a voulu empêcher par la porte d'en avant. Donc, on pense qu'on devrait modifier ça d'une façon importante.

Aussi, au niveau de la prévention, vous savez, le milieu de travail, c'est important de s'en soucier. Il existe déjà une Loi sur la santé et sécurité au travail avec des outils de préventions prévus dans la loi. Malheureusement, ces outils de prévention là ne sont pas en vigueur pour tous les secteurs d'activité économique, donc on pense que ce serait important de rendre obligatoires les comités de santé et sécurité pour toutes les entreprises de 20 employés et plus, les représentants en prévention au programme de santé, programme de prévention, ça devrait être la prise en charge par le milieu de travail, et on devrait aussi s'inspirer d'un réseau d'aide aux employés. Nous, à la FTQ, on a un réseau de 3 000 délégués sociaux qui viennent en aide aux confrères, consoeurs de travail qui ont des problèmes de dépendance. Vous savez, dans le projet de loi, vous dites qu'on doit accorder une somme importante pour la prévention. Donc, on peut, encore là, s'inspirer de ce qui existe dans la loi sur la santé, sécurité, aux articles 104 et 105, où on donne 12 millions aux associations patronales et syndicales pour faire de la prévention en santé, sécurité. Donc, on devrait prévoir une enveloppe pour donner au milieu de travail pour faire de la prévention.

Maintenant, je vais laisser mon collègue Denis, de... vous adresser quelques mots aussi.

M. Bolduc (Denis) : Oui, je voulais... D'abord, bonjour, je voulais mettre l'accent un peu sur un autre point qui nous interpelle, c'est la création d'une nouvelle filiale complètement à part de la SAQ. Pour nous, il y a une solution assez simple, c'est la mise sur pied d'un département de la Société des alcools du Québec, qui aurait un autre nom et une mission spécifique à la vente, à la distribution du cannabis avec une approche santé publique, comme on le voit dans le projet de loi, mais donc on s'interroge pourquoi le projet de loi n'est pas rédigé de cette façon.

Il y a des économies d'échelle importantes à faire, si on utilise la structure actuelle de la SAQ, on pense ici au transport, à la distribution, à l'entreposage, la vente du cannabis. La SAQ a des installations importantes. La taille des installations de la SAQ est colossale. On parle d'entrepôts de 1,2 million de pieds carrés, des équipements roulants importants en grande quantité également, environ 70 camions, 200 remorques, dont 70 tracteurs, 200 remorques. Il y a de l'espace disponible actuellement à l'entrepôt de Québec. On pourrait faire des aménagements spécifiques pour la particularité du produit du cannabis dans les locaux actuels. Et évidemment, dans la structure actuelle de la SAQ, on éviterait des dédoublements administratifs, deux structures administratives avec deux fois plus de cadres, deux fois plus de... des camions supplémentaires, de l'équipement supplémentaire, des bâtiments supplémentaires. Alors, il y a des économies d'échelle à faire qui sont importantes à ce niveau-là.

M. Cadieux (Serge) : On a complété. On est prêts à répondre à vos questions.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, je vous remercie pour votre exposé. Alors, Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Charlebois : Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, saluer les gens de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec; M. Cadieux, Mme Chaaban, M. Bolduc, et M. Sylvestre, merci d'être là et de nous faire part de votre point de vue.

Ma première question : Êtes-vous le syndicat qui représente la majorité des employés de la SAQ?

M. Cadieux (Serge) : Non, on en représente; il y a nous et il y a la CSN aussi. Les employés... nous, on représente tous les employés de l'entrepôt, et la CSN représente les employés des succursales. Donc, on n'est pas corporatistes, là, c'est vraiment de façon générale.

Mme Charlebois : Non, non, mais je pose la question tout simplement parce que j'aurais pu avoir la réponse ailleurs. Mais j'aimais mieux vous la demander à vous.

M. Cadieux (Serge) : Oui, oui, oui, c'est parfait.

Mme Charlebois : Et l'autre affaire, c'est... Je me demandais... Je comprends mal votre... je ne l'ai pas compris du tout court, je vais dire ça comme ça, là, quand vous nous dites : Vous ne profitez pas des installations de la SAQ, vous ne profitez pas des infrastructures, c'est justement ça qu'on fait, là. On a une filiale, ça va être la Société québécoise du cannabis qui va peut-être changer de nom, par ailleurs. Mais, ceci étant dit, cette société-là, celle qu'on crée, va avoir une mission, un but totalement différent de la SAQ, puis qui a des programmes Inspire. Nous autres, on n'aura pas d'Inspire, soupire et respire. Il n'y aura pas d'achat au bonus des quantités. Puis, le but, ce n'est pas de faire la promotion du cannabis, c'est de ramener les gens qui sont sur un marché illicite vers un marché licite, donc légal. Et ce qu'on veut faire, c'est justement profiter des infrastructures de la SAQ et de leur expertise, notamment pour ce qui est de la localisation de boutiques éventuellement, pour ce qui est effectivement de toute la gestion du site en ligne, l'entreposage. Vous avez exactement mis la table là où on veut aller. Mais je n'ai pas compris en quoi ça diffère parce que, ce qu'on a dit depuis le début, puis ça, je pense qu'on a été clairs avec le ministre des Finances, jamais il ne va y avoir du cannabis à côté des bouteilles de vin dans la même boutique. Ça va être des boutiques à part. Mais ça va certainement... on ne va pas se priver de l'expertise qu'a la SAQ, là, ça serait honnêtement passer à côté de quelque chose d'important, vous ne pensez pas?

M. Cadieux (Serge) : Absolument. Regardez, je peux tenter d'apporter un éclairage à notre proposition. Notre proposition, on ne vous dit pas que vous n'utilisez pas les mêmes infrastructures, etc. Justement, compte tenu que vous utilisez la SAQ et les mêmes infrastructures au lieu de prévoir, dans le projet de loi, aux articles — attendez un petit peu — 23.18 et 23.19, que leurs conditions de travail vont être déterminées pas règlement, etc. Ils vont être déterminés par des conventions collectives parce que, dans les faits, c'est le même employeur. La question, là, de droit, c'est se poser la question : Qui est le vrai... qui est le véritable employeur? Et nous, ce qu'on vous soumet respectueusement, c'est qu'à la lecture de l'état du droit — et on vous invite à faire consulter la décision ville de Pointe-Claire qui a été rendue par la Cour suprême, où une question similaire à celle-là s'est posée : Qui est le véritable employeur? — vous allez voir, c'est celui qui a le plus les attributs de l'employeur. À partir du moment où il utilise les entrepôts de la SAQ, le site Web de la SAQ, qu'on utilise les camions de la SAQ...

• (17 h 30) •

Mme Charlebois : Non, ça, je m'excuse, ça ne sera pas le site Web de la SAQ, elle va avoir son propre site Web, qui va faire de la prévention, qui ne fera pas de la promotion. On va se servir de leur expertise, mais ce n'est pas... Honnêtement, la SAQ va vendre ses services. C'est une filiale. C'est une compagnie indépendante, la Société québécoise du cannabis. C'est ça qu'on veut. Parce qu'elle n'a vraiment pas la même mission. Puis, tu sais, ça ne veut pas dire que les employés ne seront pas syndiqués, là, je ne suis pas en train de mettre la table à rien. On part quelque chose de nouveau. La légalisation, c'est un phénomène nouveau. Puis on ne veut pas recréer...

Moi, là, je me rappelle les consultations, là, on a fait un forum d'experts, on a eu des consultations, les gens nous ont dit : On veut une société d'État à but non lucratif dans laquelle cette société va avoir les mêmes attributs que la SAQ sans les défauts de la SAQ. Je vous le dis bien honnêtement comme ils me l'ont dit. Alors, on a retenu, puis c'est... chacun a sa perception des défauts. Moi, j'ai retenu le non lucratif, bien franchement, là. On a fait une société d'État qui aura une mission différente puis qui va faire du travail de promotion, de sensibilisation, dont les travailleurs qui seront là auraient une formation très spécifique d'informer la population — est-ce que c'est votre première consommation?, qu'est-ce que c'est, l'effet recherché? — mais pas d'en vendre plus, là. C'est de vraiment répondre à un besoin puis de donner de l'information. Vous comprenez que la mission est totalement différente de la SAQ, là.

M. Cadieux (Serge) : Bien, moi, je pense qu'on vend deux produits, deux produits différents, honnêtement, puis il y a plein d'entreprises où les employés ne font pas tous le même travail, mais qui sont couverts par la même accréditation. Je vais vous donner un exemple. Un employé qui travaille dans une institution financière, bien, il y a quelqu'un qui peut travailler au guichet, puis un autre peut être un conseiller financier, un autre peut être un planificateur, mais ces gens-là, si c'est syndiqué, ils sont couverts par la même accréditation. La convention collective... Bien, au gouvernement du Québec, il y a des conventions collectives où il peut y avoir 300 catégories d'emplois différents, mais pourtant, ces gens-là, ils ne font pas le même travail, mais leur employeur est le même.

Ce que l'on vous dit : À partir du moment où vous utilisez des infrastructures — puis, dans la loi, c'est clair, vous créez une filiale de la SAQ — nous, on vous dit que l'employeur véritable, au sens du Code du travail, c'est la SAQ. Vous pouvez bien lui donner un autre nom, mais l'employeur véritable, au sens du Code du travail, c'est la SAQ. Ce qu'on vous dit : Il y a deux façons de le régler, le problème. Soit qu'on le fait comme dans d'autres façons, où on décide de fusionner, exemple quand il est arrivé dans le réseau de la santé ou même dans le secteur de l'éducation, où on le prévoit déjà dans la loi, ou vous laissez ça en blanc. Mais évidemment ça va nous amener devant le Tribunal administratif du travail, puis le Tribunal administratif va trancher. C'est clair que, même si vous laissez ça en blanc, c'est sûr que les employés vont être syndiqués, à un moment donné, là, il y a des grandes chances qu'ils le soient. Puis ce qu'on vous suggère, c'est : On peut sauver beaucoup du temps, beaucoup de coûts parce qu'en bout de ligne ça va nous amener là.

Mme Charlebois : ...une société d'État toute seule. Vous êtes quasiment en train de me suggérer ça, là. Si je veux avoir l'objectif de ce que la population m'a demandé...

M. Cadieux (Serge) : Non.

Mme Charlebois : Bien, vous êtes en train de me dire que ça ne marche pas puis qu'on est vraiment sous le régime de la SAQ...

M. Cadieux (Serge) : Mme la ministre, ce que je vous dis, je vous dis, là : Vous pouvez avoir des conseillers qui travaillent dans un autre établissement, qui vont vendre du cannabis, qui vont conseiller...

Mme Charlebois : Attendez un peu là, j'essaie juste de vous suivre dans votre raisonnement. Vous savez que, nous autres, la Société québécoise du cannabis va être une filiale de la SAQ. On va profiter de leur expérience, de leur expertise, tout ça, parce que les Québécois ont déjà payé pour. Mais c'est quoi, votre préoccupation? C'est-u d'avoir peur de ne pas les syndiquer? J'essaie de suivre. Parce qu'on vous dit qu'on ne veut pas faire une vente à outrance, un marché lucratif du cannabis, puis là vous me parlez comme si c'est un... J'essaie de suivre le pourquoi que vous voulez absolument que ça soit la SAQ toute seule. Que, finalement, il faudrait la Société des alcools et du cannabis du Québec; c'est-u ça que vous me dites?

M. Cadieux (Serge) : Non. Votre nom, on va vous laisser choisir le nom, on n'a pas d'intervention à faire là-dessus. Ce qu'on vous dit...

Mme Charlebois : Est-ce que vous voulez qu'on fusionne ça? C'est quoi? Je ne comprends pas. Est-ce que vous avez peur pour la syndicalisation de vos employés? J'essaie de suivre, là.

M. Cadieux (Serge) : Non, ils vont être syndiqués. Regardez, moi, ce que je vous dis, là, c'est que les employés...

Mme Charlebois : Oui, bien, c'est quoi?

M. Cadieux (Serge) : Les employés vont l'être, syndiqués. Les employés de la SAQ le sont; eux, probablement qu'ils vont l'être aussi. Ce que je vous dis, c'est qu'à partir du moment où vous créez une filiale, en vertu du Code du travail, la portée du certificat d'accréditation, ce que je vous dis, là, c'est un accroissement de la SAQ avec une filiale qui va vendre d'autres produits que du vin et des spiritueux — c'est ça que je vous dis — sur un plan légal, là. C'est ça que je vous dis. Puis je vous invite à faire regarder l'état du droit par les juristes que vous avez au gouvernement du Québec. Vous en avez quelques-uns que je connais. Donc, moi, je vous dis : Regardez ça. C'est ça qu'on vous suggère, là.

Mme Charlebois : Oui. Je comprends. O.K., là, parce que je ne comprenais pas où vous vouliez aller. Mais là vous me dites juste : C'est en termes du droit du travail, pour tout ce qui est les conditions de syndicalisation. C'est correct, on l'a aplanie, la difficulté, je la comprends. Mais il faut juste que vous compreniez que le but n'est vraiment pas le même, de la Société québécoise du cannabis. C'est écrit dans la mission. Ceci étant dit, on a fait chacun notre point, puis je pense qu'on s'entend. On dit la même chose de façon différente en bout de ligne.

Je vous amène sur les projets pilotes. Je sais qu'il y a beaucoup de choses qui se disent, mais j'ai l'article 55 devant moi, je ne sais pas si vous avez le projet de loi avec vous — sûrement — on dit à l'article 55 : «Le gouvernement peut, par décret, autoriser le ministre à mettre en oeuvre un projet pilote relatif à toute matière visée par la présente loi ou un règlement pris pour son application, dans le but d'étudier, [ou] d'améliorer [...] de définir des normes applicables en ces matières.» Ça, ça parle de plusieurs sortes de projets pilotes.

On a parlé ce matin... je ne me souviens plus c'était qui, le groupe, mais on parlé de programmes de prévention. On a parlé hier, avec l'UPA, des projets pilotes possibles de production. Ça, là, le premier paragraphe parle de plusieurs matières de projets pilotes. Ensuite, on dit : «Il peut également autoriser le ministre des Finances à mettre en oeuvre un projet pilote concernant la vente au détail...» Et, si je ne m'abuse, c'est à l'article 78 — est-ce que c'est ça? — où on dit que c'est un maximum de cinq boutiques de vente au détail, mais on ne spécifie pas «au privé», on n'a rien spécifié. On parle d'un projet pilote.

Mais honnêtement, à chaque fois que j'entends parler de ça... Puis je veux juste vous le soumettre à vous aussi. Cinq boutiques, là, est-ce que ça va revirer le Québec à l'envers, pour nous donner la chance d'avoir une base comparative? Pourquoi qu'on a tant peur de ça pour qu'on... tu sais? Si les gens nous disent : La SAQ n'est pas une société performante, on souhaite une autre société d'État qui aura des missions différentes, puis qui n'aura pas une mission lucrative, puis ci, puis ça — ça, c'est la population qui nous dit ça — bien, pourquoi cinq boutiques menaceraient la Société québécoise du cannabis?

À chaque fois, ça me sidère. Je me dis : Pourquoi ne peut-on pas se donner un outil de mesure sur comment on peut faire mieux, puis pas tant en termes de lucratif, en termes d'exécution? Je ne sais pas. Comment on peut faire pour avoir cinq succursales, que ça fasse... C'est l'article 87, en passant, où il y a cinq succursales. C'est comme si je disais qu'on va en déployer 5 000, comprenez-vous?

M. Cadieux (Serge) : Je comprends ce que vous dites. Mais ce qui est important, notre but à nous... Nous, là, il y a une question là-dedans... il y a une question importante de santé publique. À partir du moment où vous le prenez sous l'angle de la santé publique et vous dites : On ne confierait pas ça au privé parce qu'il ne faut pas que ce soit, bon... Il y a plein de problèmes qui peuvent être occasionnés par le privé, dont, entre autres, faire de l'argent à outrance. Mais moi, je vous dis que nous, la position que l'on défend, c'est que ça ne devrait pas être une société qui engrange des profits pour faire autre chose que de la prévention parce qu'il y a un... Puis déjà, l'article 54, je veux dire, les surplus qui s'en vont... ça, on n'est pas d'accord avec ça, honnêtement, ça devrait tout être réinjecté dans la prévention.

Écoutez, là, on s'en va sur un terrain, là, qui va demander des efforts considérables dans les différents milieux de travail, partout, sur la prévention. C'est insoupçonné, où est-ce qu'on va aller. Donc, pour nous, il est important que tous les oeufs soient mis dans une coquille publique et que l'argent que le gouvernement va amasser avec ça, qu'il ne construise pas des autoroutes, qu'il le mette dans la prévention, partout. C'est ça, notre position.

Mme Charlebois : Il y a 25 millions minimum qui s'ajoutent au 114 millions qui est déjà dévolu au traitement des dépendances...

M. Cadieux (Serge) : Tant mieux si on a 500 millions, Mme la ministre.

Mme Charlebois : Non, mais je ne le dis pas pour vous, pour l'ensemble des collègues. Parce que savez-vous quoi? Depuis le matin, j'entends : On va avoir rien que 25 millions. Non, non, ça s'ajoute à 114 millions déjà existants dans le traitement des dépendances et de la prévention, soit dit en passant. Il y aura un 25 millions minimum. Mais, si on vend plus que... puis la Société québécoise du cannabis paie sa dette... Parce que c'est le cannabis qui va payer pour le cannabis, ce n'est pas l'impôt des citoyens du Québec, là. Quand elle aura payé sa dette, ses frais d'opération, tout ça, plus de la moitié, plus de 50 % de ce qui restera, s'il en reste, ira s'ajouter au 25 millions. Le 25 millions, là, c'est un plancher de base qui s'ajoute déjà au 114 qui existe. Je veux le dire publiquement.

S'il y a moyen de faire mieux... Mais, dans l'autre partie, moi, je pense que... J'ai entendu des policiers, juste avant vous, là, qui me parlaient de formation de policiers, qui me parlaient d'appareils à acheter. J'ai entendu plein d'autres groupes qui me parlent de choses à faire. Je pense que ces sommes-là pourraient, entre autres, servir à ça encore dans le monde du cannabis. Qu'en pensez-vous?

• (17 h 40) •

M. Cadieux (Serge) : J'en pense que ça doit être... La FTQ en pense que ça doit être mis dans la prévention. C'est là que ça doit être mis. Ça ne doit pas être mis pour faire des activités autres, construire des infrastructures, des autoroutes, etc. C'est là qu'on en est.

Mme Charlebois : Ça, je suis d'accord avec vous. Mais, à partir du moment où ça se rattacherait à un fond... pas un fond, à des activités qui sont liées au cannabis...

M. Cadieux (Serge) : ...à des dépenses reliées à la prévention contre les dépendances reliées au cannabis. Oui, c'est là qu'on est, là. On est là.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, je vous remercie. C'est tout le temps que nous avions, Mme la ministre. Merci de vos réponses. Je passe maintenant la parole au député de Labelle pour une durée neuf minutes.

M. Pagé : Oui. Merci, M. le Président. Alors, bienvenue chez vous, à l'Assemblée nationale. Merci d'être ici. Je pense que vous apportez un aspect important. Effectivement, vous nous avez parlé des articles 23.18, 23.19. Et pour la compréhension des gens qui nous écoutent, et c'est ma compréhension, là, ces articles-là empêcheraient quelqu'un qui travaille déjà à la SAQ de pouvoir travailler à la SQC. On comprend que c'est cela.

Je vais vous avouer que moi, je me pose la question et j'ai hâte que nous ayons des échanges article par article pour comprendre, puis je ne veux pas le dire méchamment, mais ce qui se cache derrière cela parce qu'honnêtement je ne le comprends pas. Parce que les chiffres qui circulent, ce serait, je pense, autour de 70 % du personnel de la SAQ qui serait déjà du personnel avec des horaires... bien, en fait, des gens à temps partiel. C'est ce que je comprends. Je pense que c'est ça, autour de 70 %?

M. Cadieux (Serge) : ...le réseau des succursales, pour le réseau de l'entrepôt, on a à peu près, nous, 200 employés à statut précaire, mais 70 % des 4 500 employés du réseau des succursales travaillent à temps partiel. Donc, moi, je pense qu'on doit favoriser le plus possible que les employés soient capables d'occuper des postes à temps complet autant que faire se peut. Donc, on bénéficie déjà du personnel qui travaille pour cet employeur-là. Si c'est une question de formation, c'est sûr, même dans une entreprise... Écoutez, on forme les employés, dans une entreprise, qui ont fait la même business... Parce que les procédés de l'opération changent d'année en année, donc c'est juste normal de former les employés. Mais, par cet article-là, on empêche que quelqu'un travaille à la SAQ puis qu'il travaille dans la nouvelle société sur le cannabis.

M. Pagé : Honnêtement, je ne comprends pas pourquoi. Je ne comprends pas. Est-ce que vous avez votre explication? Parce qu'éventuellement il va falloir questionner là-dessus, là.

M. Cadieux (Serge) : On ne le dit pas, pourquoi. On ne comprend pas pourquoi il y a cette disposition-là. Est-ce que c'est à cause de la question de l'habileté sécuritaire? Honnêtement, ça n'a pas d'objet. Parce qu'on le voit, dans d'autres organisations où il doit y avoir aussi un certificat d'habilité sécuritaire mais qu'ils travaillent avec d'autres employés qui ne nécessitent pas de l'avoir, puis ça ne cause pas de problème. Je vais prendre l'exemple de la Commission de la construction du Québec, par exemple, où c'est le cas, puis les gens travaillent quand même pour le même employeur.

M. Bolduc (Denis) : Si vous me permettez... L'article 23.19, qui dit qu'une personne ne peut pas être à la fois employé de la société puis employé de la nouvelle filiale, bien, c'est là qu'il y a un flou, là, concernant la mise en commun des équipements, des ressources. Si on ne peut être... travailler pour les deux en même temps, pour le transport, on ne peut pas partager le camion, pour l'entreposage, la manipulation dans les entrepôts, on ne peut pas partager, alors il y a un flou, là. Je ne sais pas... Pour nous, en tout cas, on pense qu'il y a un problème là.

M. Pagé : Bon, quand on arrivera à l'article par article, on va poser ces questions-là. Parce que, pour l'instant, moi, quand j'ai vu ça, je ne comprends pas, je ne comprends pas ce qui se cache derrière ces articles-là, quelle est véritablement la volonté gouvernementale. Je ne la comprends pas. Parce que j'arrive aux mêmes conclusions que vous. Et, quand j'entends que 70 % du personnel est déjà à temps partiel, alors une bonne partie de ces temps partiels pourraient combler leur temps pour faire des semaines complètes. Et c'est déjà des professionnels, de toute façon, des gens qui sont formés pour le service à la clientèle. Mais je comprends qu'ils auraient une approche qui devrait être différente et qu'ils devraient être formés en conséquence. Mais, cela dit, le nouveau personnel qui, de toute façon, aura à travailler dans ces succursales de la SQC auront à avoir la même formation qu'on pourrait donner à quelqu'un que...

Mais, bon, je veux passer à autre chose parce que le temps file très rapidement. Vous avez parlé de chiffres de 867 millions. Le 867 millions qui emploierait 982 personnes, est-ce que c'est le chiffre d'affaires que vous envisagez pour la SQC?

M. Cadieux (Serge) : Non, c'est le chiffre de l'IRIS. C'est l'IRIS...

M. Pagé : Qu'est-ce que c'est, le 867 millions?

M. Cadieux (Serge) : C'est l'IRIS qui amenait ce chiffre-là.

M. Pagé : O.K. Mais est-ce que c'est le chiffre d'affaires? Qu'est-ce que c'est?

M. Cadieux (Serge) : Vas-y.

M. Sylvestre (Pierre-Guy) : Oui. Regardez, l'étude de l'IRIS, en fait, ils ont utilisé un modèle très typique, là, d'input-output, ou entrées-sorties, de l'ISQ. Ils ont fait une comparaison avec celui de StatCan. C'est ce qu'on appelle la valeur ajoutée au PIB. Et vous avez là-dedans, par exemple, 982 emplois. Donc, ça, c'est l'estimation de l'IRIS. Évidemment, ça pourrait être beaucoup plus, là, selon si la production est faite au Québec. Parce qu'on a présentement une production illicite. Ce n'est pas dans le PIB. Ça, on laisse ça à l'Ontario. Malheureusement, ça ne va pas apparaître dans le PIB. Donc, c'est un peu la conclusion, là de l'IRIS puis, bon, avec nos compléments.

M. Pagé : Alors, probablement... J'imagine que vous concluez la même chose que nous. Nous, nous demandons à ce que... Mais j'ai même dit : Out, Santé Canada puis go, le MAPAQ. Pourquoi? Pour qu'on puisse contrôler et autoriser nous-mêmes la production ici, au Québec, et la déployer un peu partout sur le territoire québécois. Alors, j'imagine que c'est ce que vous souhaitez également.

M. Cadieux (Serge) : On souhaite que ça soit produit ici et on souhaite qu'on encourage les producteurs locaux. D'autant plus que, tu sais, faire pousser du cannabis en serre, on a un avantage concurrentiel. L'électricité est moins chère qu'en Ontario puis en Colombie-Britannique. Il n'y a rien qui empêche les producteurs du Québec. Les producteurs, ils font pousser des tomates, ils sont capables de faire pousser du cannabis. C'est juste logique, là, qu'on fasse vivre d'abord les gens du Québec, plutôt que de faire vivre les gens de l'Ontario. La Colombie-Britannique, eux, ils n'ont pas ce réflexe-là de faire vivre les gens du Québec avant de faire vivre les gens de l'Ontario puis de la Colombie-Britannique, je peux vous le dire.

M. Pagé : J'ai senti que vous avez la même inquiétude à l'égard d'un réseau parallèle, petit, hein? Parce que la ministre nous dit : Il n'y aurait que cinq dans un premier projet pilote. Mais je tiens quand même à rappeler à la ministre qu'il n'y en aurait que 15, succursales, dans la première année. Alors, c'est déjà le tiers, ça...

M. Cadieux (Serge) : Oui, oui. Mais, vous savez, cinq Costco, là, comparativement à 300 petits marchés, je veux dire...

M. Pagé : Et honnêtement, plus j'entends la ministre, je suis de moins en moins rassuré parce qu'on ne sait pas ce qu'il y a derrière ces cinq éventuels projets pilotes. Et j'ai toujours dit : Peut-être qu'un jour on pourrait être ouverts à cela, un jour, plus tard, mais installons comme il faut nos succursales parce qu'elles sont à but non lucratif. C'est ce que les gens sont venus nous dire partout.

Et le message a été bien entendu parce qu'on se souviendra, là, les premières fois qu'il y a eu des réactions gouvernementales, c'est que jamais on ne va vendre... le ministre des Finances, jamais le gouvernement du Québec ne va vendre du pot, hein? Mais finalement toutes les consultations que nous avons entendues nous ont amenés justement à une société d'État à but non lucratif. Mais ce n'est toujours pas écrit dans la loi, je n'ai toujours pas entendu la ministre me dire qu'on écrirait très clairement que 100 % des profits de la société d'État devraient être réinvestis aux saines habitudes de vie, à la prévention, à la santé publique, à la dépendance, aussi pour les municipalités. Est-ce que vous pensez qu'on devrait l'inscrire très clairement dans la loi?

M. Cadieux (Serge) : Bien oui, parce que c'est écrit le contraire dans la loi, à l'article 54, là. À l'article 54, c'est prévu que les excédentaires vont aller dans le fonds consolidé. Donc, on écrit le contraire dans la loi. Donc, ça prend une modification législative pour le prévoir d'une façon spécifique que ça doit aller uniquement sur la prévention.

M. Pagé : ...

Le Président (M. St-Denis) : 30 secondes.

M. Pagé : 30 secondes. Je sais que, pour les tests de dépistage en milieu de travail, vous êtes très inquiets. Pouvez-vous m'en parler en quelques secondes?

M. Cadieux (Serge) : Bien, écoutez, on est contents de l'approche qui a été pris par le gouvernement, honnêtement. Il n'y a pas d'épouvantail à moineaux, hein? Pas parce que ce n'était pas légal qu'il n'y a pas du monde qui n'arrivait pas nécessairement sur les lieux de travail intoxiqué. Puis l'état du droit est clair, si l'employeur a des motifs raisonnables de croire que l'employé n'est pas dans un état normal, il peut le faire évaluer. Donc, c'est la même chose pour n'importe quelle substance, là...

Le Président (M. St-Denis) : Merci beaucoup...

M. Cadieux (Serge) : ...il n'y a pas de distinction à faire. Ça, vous avez une bonne approche.

Le Président (M. St-Denis) : Merci beaucoup. Alors, je cède maintenant la parole au député de Borduas pour une période de 6 minutes.

• (17 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Cadieux, Mme Chaaban, M. Bolduc, M. Sylvestre, bonjour. Merci d'être présents ici à la commission. C'est intéressant, la discussion que vous avez. Juste revenir sur certains éléments. Un endroit où je vous suis, c'est au niveau d'interdire le cumul des emplois. Ça m'apparaît particulier du fait que, supposons que vous avez un individu qui travaille 20 heures par semaine à la SAQ, le fait de dire : Bien, vous n'allez pas aller travailler pour une autre entité juridique distincte, c'est particulier. C'est assez rare qu'on interdit le cumul des emplois, particulièrement quand c'est à temps partiel. Alors, là-dessus, on va voir avec la ministre en étude détaillée.

Tout à l'heure, vous nous avez cité la décision Pointe-Claire, c'est la décision de 1997 de la Cour suprême du Canada?

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : O.K. Dans le cadre de cette décision-là... c'était dans le cadre d'une agence, une agence de placement, relation tripartie, puis il y a certains critères. Vous, ce que vous nous dites, c'est... vous assimilez la décision Pointe-Claire, si jamais on crée une filiale de la SAQ, à cet équivalent-là, en disant : Bien, le véritable employeur, ça va être la SAQ.

M. Cadieux (Serge) : Oui, le véritable employeur, c'est la SAQ.

M. Jolin-Barrette : Nonobstant le fait qu'il y aurait un conseil d'administration distinct, il y aurait un président directeur général, il y aurait des directions de division, nonobstant que ce ne serait pas tous les équipements qui seraient partagés, nonobstant le fait qu'il y aurait des lieux différents. Vous savez, là, dans le fond...

M. Cadieux (Serge) : Je vais vous dire pourquoi. Je vais vous dire pourquoi...

M. Jolin-Barrette : ...la série de critères, ce que vous plaidez, on peut le plaider de l'autre côté aussi. Ça fait que je veux juste comprendre où vous logez.

M. Cadieux (Serge) : Oui, oui, mais regardez. Vous saisissez très bien le portrait. La décision ville de Pointe-Claire, c'est sûr qu'au coeur de ce litige-là c'est la relation tripartite. Tu as un employeur, tu as une agence de placement puis tu as un employé. Là, il se pose la question, quand il arrive le temps de déterminer combien qu'il a le droit de semaines de vacances, puis c'est quoi, le salaire, c'est qui, son véritable employeur. C'est ça, le litige qui a amené jusqu'à la Cour suprême. Et là la Cour suprême vient nous dire : Bien, dans un cas comme celui-là, où ce n'est pas clair, c'est qui, le véritable employeur... Et, dans ce cas-là, l'agence de placement a son propre D.G., puis la ville de Pointe-Claire avait son propre D.G., son propre conseil municipal, différent de l'agence de placement qui, elle, n'en avait pas — les exemples que vous me donnez. Mais ça n'empêche pas le tribunal de dire...

Ce qu'il faut regarder, ce que la Cour suprême nous dit, dans la ville de Pointe-Claire, il faut regarder c'est qui, qui a le plus d'attributs du véritable employeur. Si on utilise les camions de la SAQ, on utilise les entrepôts de la SAQ, puis je ne sais pas encore quoi qu'on va utiliser de la SAQ, il faut se la poser, la question : C'est qui, le véritable employeur? Est-ce qu'on essaie, par un voile corporatif, de créer un autre employeur artificiellement, quand c'est... Puis là je parle au sens du Code du travail, on s'entend, là. Il y a une distinction à faire au sens du Code civil puis au sens du Code du travail, là, vous allez en convenir avec moi, là.

M. Jolin-Barrette : ...mais, juste là-dessus aussi, c'est que... Je comprends le point que vous faites, puis c'est légitime, en tant que syndicat, de le faire puis de le présenter comme ça. Mais, si on suit votre raisonnement aussi, ça veut dire que, peu importe l'entité juridique distincte, bien, ça pourrait toujours être assujetti. La décision de la Cour suprême s'applique, mais ça voudrait dire, entre autres, si c'était le désir de la ministre que ça ne s'applique pas, que nécessairement il faudrait qu'elle crée une nouvelle société d'État complètement distincte avec d'autres bâtiments, d'autres camions.

M. Cadieux (Serge) : Oui, c'est clair, c'est clair.

M. Jolin-Barrette : Alors, ce que vous, vous dites, c'est qu'au bout de la ligne, pour les contribuables québécois, ça va coûter plus cher parce qu'il va falloir acquérir les équipements, il va falloir acquérir des camions, des infrastructures.

M. Cadieux (Serge) : Bien oui, bien oui, absolument.

M. Jolin-Barrette : Ça fait que vous, vous nous dites, dans le fond...

M. Cadieux (Serge) : Puis même sur le plan des relations de travail, M. le député, là, au lieu de négocier 22 conventions collectives, ils vont en négocier moins. Il y a une économie d'échelle. D'ailleurs, le législateur nous apprend, depuis les 20 dernières années... quand ils fusionnent les certificats d'accréditation dans la santé puis dans l'éducation en disant : Il y a une multiplication de certificats d'accréditation, on doit les regrouper, bien là, vous faites le contraire, dans ce cas-là, vous faites le contraire de ce que vous préconisez depuis les 20 dernières années. Donc, on dit : Suivez la méthode que vous avez faite dans les 20 dernières années. Vous voulez regrouper les certificats d'accréditation; pourquoi vous ne le faites pas là?

M. Jolin-Barrette : O.K. Dans votre mémoire, vous dites : Écoutez, on aurait dû créer un département distinct, à la SAQ, pour la Société québécoise du cannabis. Moi, j'ai une problématique avec ça parce que l'objectif de la SAQ, sur le fond, ce n'est pas le même que celui de la Société québécoise du cannabis. Alors, d'où la nécessité d'avoir une entité juridique distincte. Je comprends qu'en matière de droit du travail vous nous dites : Bien, écoutez, ça va être plus simple, puis, de toute façon, nous, on vous dit qu'on va les syndiquer, on va faire du maraudage pour éventuellement obtenir une accréditation syndicale puis on va considérer que c'est la même chose qu'un emploi de la SAQ. Ça, le débat se fera, puis il y aura des demandes qui vont être remplies, puis tout ça. Mais, sur l'aspect de la finalité, sur qu'est-ce qu'on fait sur l'objectif... Parce que, vous savez, pour nous, là, pour le deuxième groupe d'opposition, ce qui est important, c'est que les revenus tirés de cette vente-là ne soient pas dirigés au fonds consolidé...

M. Cadieux (Serge) : C'est clair.

M. Jolin-Barrette : ...mais servent à la prévention, tout ça.

M. Cadieux (Serge) : Oui.

M. Jolin-Barrette : Alors, juridiquement, il faut l'attacher aussi. Puis, dans le projet de loi, il y a des petites lacunes, notamment, là-dessus. Ça fait que comment on fait ça?

M. Cadieux (Serge) : Bien, écoutez, je vais vous donner un exemple.

Le Président (M. St-Denis) : En 20 secondes.

M. Cadieux (Serge) : Bien, je vais vous donner un exemple : les CIUSSS, leur regroupement, là, dans le réseau de la santé puis des services sociaux. Quelqu'un qui travaille dans un centre jeunesse, à la DPJ puis dans un hôpital, ils n'ont pas la même mission, pourtant ils sont regroupés actuellement dans les mêmes accréditations. Donc, la mission, là, elle peut être différente. Ce n'est pas un obstacle, ça, en droit du travail. Donc, moi, je dis : C'est ça, le chemin que le législateur a choisi. Il faut qu'il poursuive dans...

Le Président (M. St-Denis) : Merci beaucoup. Merci. Merci, M. le député Borduas. Maintenant, je cède la parole à la députée de Vachon pour une période de 2 min 30 s.

Mme Ouellet : Merci, M. le Président. Bienvenue, M. Cadieux, M. Bolduc, M. Sylvestre et Mme Chaaban. Bienvenue à l'Assemblée nationale.

Moi, j'aimerais vous entendre sur deux points plus particulièrement. Du côté des producteurs, j'ai vu que c'était vraiment... la première section, d'ailleurs, que vous traitiez, en 1.2, pour dire que ça doit être considéré comme un produit agricole, ce qui, je crois, n'est pas actuellement prévu, là, par la loi... Donc, j'aimerais vous entendre sur ça et sur le projet pilote.

Parce qu'effectivement on a parlé beaucoup de projet pilote, et je partage vos inquiétudes, cinq sur 15, c'est quand même... ça fait... Cinq sur 15, ou c'est le tiers ou on rajoute le cinq à 15, ça fait le quart, c'est quand même beaucoup. Et on ne dit pas qu'il n'y aura pas de vente par Internet. Donc, si, dans les cinq, il y a des ventes par Internet, à ce moment-là, ça peut être une très grande partie du marché, si on permet aux producteurs privés d'avoir une succursale mais en plus de vendre par Internet. Et donc ça peut venir cannibaliser complètement la société d'État et ça peut même faire en sorte de ne pas atteindre l'objectif. Parce qu'on sait que les entreprises privées n'ont qu'un seul objectif, c'est maximiser le profit. Ils peuvent bien dire bien d'autres choses en marketing, mais leur seul objectif, de leurs actionnaires, c'est maximiser le profit.

Donc, j'aimerais vous entendre un peu plus sur l'article 55 parce que j'ai l'impression qu'effectivement, actuellement, on n'a pas assez fait le tour de ça.

M. Cadieux (Serge) : Bien, votre premier élément, sur l'agriculture, pourquoi ça... bon, le premier, pour s'assurer que ce soit de juridiction du Québec, là, pour ne pas qu'il y ait un problème de juridiction entre Ottawa puis Québec, c'est clair. À partir du moment où c'est un produit agricole, c'est de juridiction du Québec, et les producteurs auraient accès aussi à des subventions. Il y a ça aussi, là. Les agriculteurs au Québec ont droit à des subventions pour développer des produits agricoles, donc ils y auraient droit aussi.

Pour l'article 55, je pense qu'on l'a dit, l'article... On ne doit pas faire de profits avec ça pour utiliser cet argent-là pour autre chose que... C'est un enjeu de santé publique, ça doit demeurer un enjeu de santé publique. Puis trop fort ne casse pas. À partir du moment où on fait une brèche, ça l'ouvre, ça l'ouvre, ça l'ouvre, puis, à un moment donné, on dit : On n'aurait pas dû faire ça. Bien là, on a l'occasion de le mettre très clairement qu'on ne donne pas l'occasion de le faire.

Mme Ouellet : Ça fait que je comprends de ça...

Le Président (M. St-Denis) : Alors, ça va être... Je suis désolé, le temps est terminé. Alors, je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.

Et la commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise à 19 h 33)

Le Président (M. St-Denis) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir s'assurer que la sonnerie de leurs appareils électroniques soit sur le mode vibration ou silence.

La commission est réunie afin de procéder aux auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière.

Ce soir, nous entendrons l'Association québécoise des centres d'intervention en dépendance et la fédération des policiers municipaux du Québec.

Et, avant d'aller plus loin, je solliciterais un consentement des membres pour laisser la députée de Repentigny siéger ce soir, étant donné qu'elle avait été... Donc, est-ce que j'ai un consentement? Ça va? Donc, je vous remercie.

Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association québécoise des centres d'intervention en dépendance. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé.

Association québécoise des centres d'intervention
en dépendance (AQCID)

M. Marcoux (Vincent) : Merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, merci de nous recevoir en commission parlementaire aujourd'hui pour le p.l. 157. Je me présente, Vincent Marcoux. Je suis directeur général de l'Association québécoise des centres d'intervention en dépendance. Aujourd'hui, pour moi, c'était important également de me déplacer avec des experts terrain, des experts qui déjà font de la prévention auprès de la population en général.

Donc, je vous présente mon collègue ici, à ma droite, M. Frédérick Fortier, directeur général de Prévention des dépendances L'Arc-en-ciel, dans le comté de Borduas, et il est également président du comité prévention de l'Association québécoise des centres d'intervention en dépendance. J'ai, à ma gauche, M. Mathieu Fontaine, directeur général du Centre Domrémy Appalaches, circonscription Lotbinière-Appalaches, également vice-président du conseil d'administration de l'AQCID. Je voudrais souligner aussi... Dans l'assistance, on a ma collègue, notre membre du conseil d'administration, Mme Marie-Josée Dumas, directrice générale de Liberté de choisir, du comté de Soulanges, qui est présente avec nous.

Donc, l'Association québécoise des centres d'intervention en dépendance est une association nationale qui représente 100 organismes communautaires au Québec qui interviennent en prévention, en réduction des méfaits et en traitement. L'association a accueilli positivement le projet de loi n° 157. D'ailleurs, on voulait saluer l'écoute du gouvernement actuel concernant, lors du forum des experts, la consultation des citoyens. On voit que ça se ressent bien dans le projet de loi n° 157, entre autres par l'âge de 18 ans, par la distribution de la Société québécoise du cannabis, entre autres avec le comité de vigilance. Donc, c'est des aspects très positifs. On l'apprécie.

Nos recommandations dans le mémoire vont aller dans le sens de complémenter, d'être complémentaires, finalement, au projet de loi. Évidemment, on va proposer des retraits de certains articles, mais tout ça dans le contexte de sécurité et de santé publiques.

Vous avez déjà entendu, en commission parlementaire, l'Institut universitaire en dépendances, des experts comme M. Jean-Sébastien Fallu, Dr Didier Jutras-Aswad, de GRIP Montréal. Donc, tous ces experts avaient des recommandations. Évidemment, dans notre mémoire, plusieurs recommandations vont être semblables à ces collègues-là.

C'est pourquoi, pendant le prochain 10 minutes, on va se concentrer sur une des recommandations qui n'est pas sortie encore en commission parlementaire. Donc, on va se concentrer sur le fonds pour la prévention et les centres de prévention en dépendance. Par contre, lors de la période des questions, on pourra répondre à l'ensemble des recommandations que nous avons inscrites.

Donc, je donne la parole à mon collègue, M. Fortier.

M. Fortier (Frédérick) : Merci. Bonsoir à tous et à toutes. Alors, l'annonce d'un 25 millions d'investissement, nonobstant les déficits de la société d'État, et étant bonifié à 50 % des profits, signifie une belle avancée pour le réseau de la dépendance. Rappelons que ce fonds sera affecté au financement d'activités et de programmes de surveillance, de la recherche, de soins curatifs, d'activités et de programmes de prévention et de réduction des méfaits, de la promotion de la santé, le tout en lien avec l'usage du cannabis.

Au vu de cette dernière énumération, le financement annoncé est, selon l'AQCID, insuffisant. Dans une optique où la santé et la sécurité de la population est au centre de l'encadrement du cannabis au Québec, l'AQCID recommande un investissement de 100 % des surplus, après remboursement des frais, de la Société québécoise du cannabis, tout en assurant un minimum de 50 millions en cas de déficit. De par ce réinvestissement total, et en officialisant ce dernier par écrit dans la loi, le gouvernement se dote de moyens suffisants pour analyser, réduire et traiter les méfaits de la consommation du cannabis.

Une des inquiétudes soulevées par l'AQCID concerne principalement les critères d'attribution du Fonds de prévention et de recherche en matière de cannabis. Tel que résultant des conclusions du forum des experts, l'AQCID croit également que la prévention doit être priorisée. D'ailleurs, chaque dollar investi sur la prévention permet d'épargner 10 $ en éventuels coûts de santé et de criminalité. Toutefois, certains programmes de prévention qui ont fait l'objet d'évaluation de leur efficacité ont des impacts mitigés et parfois contradictoires. C'est pourquoi l'AQCID recommande que le financement de la prévention soit ciblé vers les meilleures pratiques reconnues par la recherche.

Dans le même ordre d'idées, une bonne prévention ne peut être basée sur un modèle unique. Selon les meilleures pratiques, il est important de combiner plusieurs types d'interventions efficaces avec un message cohérent afin de maximiser les effets positifs de celles-ci. De plus, les interventions de proximité adaptées aux particularités des milieux environnemental, social et culturel et des spécificités individuelles — l'âge, l'historique — doivent être priorisées.

Toujours selon les meilleures pratiques, il est démontré qu'un travail collaboratif doit être fait avec l'entourage de la personne ciblée, c'est-à-dire l'école, les parents, les pairs, et que l'établissement d'un lien de confiance avec cette même cible accroît l'efficacité des interventions. Comme une éducation provinciale est déjà assurée via divers moyens déployés par le gouvernement du Québec, entre autres les campagnes, la Semaine de prévention des dépendances, l'AQCID recommande qu'en matière de financement des activités et des programmes de prévention en lien avec l'usage du cannabis ce soient les interventions locales qui soient priorisées.

Toutefois, même si la dimension prioritaire soulevée par l'ensemble des concertations est la prévention, il faut éviter de négliger le financement et l'accessibilité aux services de réduction des méfaits et de traitement pour la population. L'AQCID rappelle d'ailleurs que l'expertise en prévention, réduction des méfaits et traitement est déjà très présente au Québec. Près d'une cinquantaine de centres de prévention des dépendances sont présentement répartis sur le territoire québécois. De plus, les CPD existants comptent plusieurs années de pratique terrain déjà bien implantée dans les municipalités et ont développé un lien privilégié avec la population locale. L'AQCID recommande donc que les activités et programmes de prévention déjà en place soient priorisés dans l'attribution des fonds. Il s'agit d'une façon efficace de bonifier l'expertise existante.

• (19 h 40) •

M. Fontaine (Mathieu) : Merci, Frédérick. Comme Frédérick vous l'a mentionné préalablement, la prévention nécessite quatre éléments de base pour nous : premièrement, les bonnes pratiques, qu'elles soient utilisées; l'expertise des acteurs qui travaillent au niveau de la dépendance; de connaître localement les enjeux et les particularités des régions; et aussi d'avoir une cohérence régionale dans l'offre de services.

Actuellement, ce que l'AQCID constate, c'est qu'il y a une grande disparité en termes d'offre de services, qui peut être due en lien avec un manque de financement, des priorités régionales, au niveau du réseau de santé, qui peuvent être différentes. Toutefois, dans le but de maximiser ces impacts positifs en lien avec la prévention, il est essentiel pour la population d'avoir, de région en région, des services semblables et, bien sûr, un discours cohérent à l'ensemble des acteurs du milieu, que ce soit au niveau du travail, de l'école, etc. Afin de desservir la population efficacement et selon les meilleures pratiques, l'AQCID recommande que soient inscrits les centres de prévention en dépendance dans le projet de loi n° 157 ainsi que dans les règlements qui suivront.

Qu'est-ce que la définition d'un centre de prévention en dépendance? C'est une organisation ayant le mandat d'assurer la prévention et la promotion des saines habitudes de vie en lien avec la dépendance : drogue, alcool, médicaments, jeu, cyberdépendance, etc. Le mandat est rempli en s'assurant d'utiliser les meilleures pratiques et de rendre compte des divergences locales et des besoins, qui peuvent être différents, d'un territoire et des cibles à atteindre. Se positionnant comme un expert global en prévention de la dépendance, les centres de prévention assurent un discours cohérent entre les différents intervenants du milieu.

Les différents services pouvant être offerts : prévention et sensibilisation de la communauté, que ça soit au niveau des établissements scolaires, milieux de travail, résidences pour aînés; promotion des saines habitudes de vie; formation et ateliers des intervenants, que ce soit au niveau scolaire, que ce soit au niveau des employés, employeurs, que ce soit au niveau des parents, des retraités, 50 ans et plus, les différents partenaires qu'on peut retrouver dans le milieu; ateliers de sensibilisation dans les milieux scolaires; sensibilisation par le biais de conférences, de kiosques; détection dès l'évaluation et intervention précoce; formation des professionnels, à la rigueur, les futurs employés de la société; et, bien sûr, sans oublier l'aide et le soutien au développement de politiques en lien avec le cannabis, que ce soit, encore là, pour le milieu de travail, les municipalités, les écoles, les résidences pour aînés, etc.

Pour nous, l'accessibilité demeure un enjeu important, même capital. C'est pour cette raison que les CPD devraient recevoir un financement à 100 % du Fonds de prévention et de recherche en matière de cannabis, et ceci permettrait d'avoir un service entièrement gratuit.

Pour nous, pour s'assurer d'une efficacité et d'une qualité de service, deux enjeux reviennent, c'est-à-dire l'évaluation... Pour nous, le secteur de la recherche, que ce soit par le biais de l'institut universitaire en dépendance ou le RISQ, pour ne nommer que ceux-là, détient l'expertise concernant l'analyse et la validation des meilleures pratiques. Il est donc logique que ce dernier soit en charge d'évaluer la qualité et l'efficacité des programmes des CPD, le tout financé encore une fois par le Fonds de prévention et de recherche en matière de cannabis.

Au niveau de la coordination, afin de s'assurer d'une vision d'ensemble de ce qui est souhaitable de promouvoir comme approche éducative en matière de prévention et de réduction de la dépendance, l'AQCID consent que la coordination des CPD et l'évaluation des programmes devraient être effectuées par le gouvernement. L'uniformisation de ces services sera ainsi rendue possible tout en gardant la spécificité des régions et des particularités des pratiques des CPD déjà existants. Merci.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, merci, M. Fontaine. Alors, je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. Alors, Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Charlebois : Merci, M. le Président. Je comprends que vous nous dites que vous vous appuyez sur les conclusions de d'autres qui vous ont précédés, mais j'aurais quand même aimé vous entendre...

Premièrement, je vais vous saluer. Je m'excuse. Je suis un peu fatiguée rendue à cette heure-là. J'oublie les affaires de base, là. Je vais commencer par vous saluer, M. Marcoux, M. Fontaine et M. Fortier, puis vous remercier d'être là pour venir nous parler de votre mémoire puis de nous faire partager vos points de vue.

Comme je le disais, j'aurais aimé ça quand même vous entendre sur certains éléments parce que vous êtes des intervenants de premier plan, même si vous me dites qu'il y a d'autres intervenants sur lesquels vous vous êtes appuyés. Parlez-moi de l'âge. Où vous vous situez là-dedans, vous autres?

M. Marcoux (Vincent) : On se base sur l'âge de 18 ans pour la consommation.

Mme Charlebois : Parce qu'on considère que ce sont des adultes qui sont aptes à voter?

M. Marcoux (Vincent) : Effectivement. Puis, en termes de société, on a dit qu'à 18 ans c'étaient des gens qui étaient capables de prendre une décision éclairée puis qui avaient l'éducation nécessaire pour prendre cette décision-là, tout à fait.

Mme Charlebois : O.K. Puis je vais aller dans votre mémoire après, je vous le promets. Est-ce que vous avez réfléchi aux lieux de consommation? C'est-à-dire que cet après-midi on a eu l'association des propriétaires de logements, qui nous disent : Nous, on ne veut pas de cannabis dans les logements. On a des gens qui nous disent : On ne veut pas de cannabis dans les lieux publics. Puis il y a déjà «tabac plus». Votre vision à vous, c'est quoi? Tu sais, parce qu'une fois légalisé... Qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, là, ça va être légalisé au plus tard le 1er juillet par le gouvernement fédéral. Nous, on est là pour encadrer. Une fois qu'on aura eu, dans les boutiques, des travailleurs formés qui vont nous instruire sur ce que c'est, le produit, puis, bon, on aura des bons programmes de prévention, imaginez que tout est optimal autour de ce que je vous parle, ne croyez-vous pas qu'il faut qu'on laisse un espace aux gens qui veulent avoir une consommation responsable?

M. Marcoux (Vincent) : Tout à fait. Pour nous, on se base qu'on... Ça devrait se baser sur la même réglementation que le tabac... et de ne pas augmenter non plus pour ce qui est du cannabis. Donc, ça serait strictement... pour le tabac, comme... D'interdire dans les universités, résidences, collègues, nous, on n'est pas pour ça. Je pense qu'on devrait seulement se baser sur le règlement avec le tabac. Nous, on se dit... Puis là il faut faire attention, hein? Il ne faut pas penser qu'après le 1er juillet ça va fumer du cannabis partout, n'importe comment, là. Il ne faut pas exagérer la situation. C'est sûr qu'il faut une éducation de population, puis justement les centres de prévention en dépendance font partie de cette éducation-là à l'ensemble de la population. Donc, à ce moment-là, évidemment, il faut avoir des endroits où est-ce que les gens vont pouvoir consommer. Puis, dans les blocs-appartements, dans les logements, oui, ils ont l'opportunité, dans leur bail, de dire : Bien, nous, on ne veut pas de consommation de cannabis. Mais est-ce que c'est obligé d'être un règlement pour l'ensemble au complet? Je ne crois pas. Je pense que c'est un pouvoir discrétionnaire de tous et chacun, comme la cigarette également.

Mme Charlebois : Outre l'application de tabac, puis j'appelle ça «tabac plus», là, est-ce que vous croyez, vous, que, dans certains lieux publics... Exemple, à la plage, je suis dans un coin reculé de la plage. Il n'y a pas d'enfant autour de moi. Si la municipalité voulait passer un règlement, elle pourrait le faire. Mais, nous, est-ce qu'on doit contrôler ces environnements-là puis empêcher les gens, déjà, dans notre loi... ou si on laisse ça au municipal, de contrôler leur environnement, puisqu'ils le connaissent mieux que nous autres, ici, à Québec?

M. Marcoux (Vincent) : Pour le tabac, présentement, la réglementation, est-ce que les gens peuvent fumer la cigarette sur les plages?

Mme Charlebois : À moins que la municipalité en ait décidé autrement.

M. Marcoux (Vincent) : Bon, moi aussi, également, j'autoriserais les municipalités à prendre leurs propres décisions. Mais, encore là, voyez-vous, la proposition des centres de prévention en dépendance, c'est justement d'aider, d'éduquer les municipalités, donc, pour faire une politique qui va sur le sens du monde et qui... Dans la capacité d'être appliquée adéquatement puis à l'écoute de la population, c'est important qu'il y ait un expert qui puisse les accompagner dans leur réflexion et de ne pas arriver avec des politiques cannées pour chacune, parce que la région de Montréal ne sera pas la même... comme la région de Rimouski ou même un petit village comme Portneuf. Ce ne sera pas la même décision d'encadrement qui va être faite. Donc, à ce moment-là, l'idée d'avoir des experts qui puissent accompagner les municipalités est encore mieux pour être capable de justement... est-ce qu'à plage du coin on peut autoriser ça? C'est à vérifier à ce moment-là.

Mme Charlebois : Dans un coin restreint.

M. Marcoux (Vincent) : Exact.

Mme Charlebois : En tout cas, moi, je... Tu sais, il y a déjà les cours d'école, les terrains de jeux, parcs pour enfants, les terrains de soccer, etc. Moi, je pense qu'il faut laisser une certaine limite, une liberté aux gens. Mais, ceci étant dit, tu sais, je comprendrais qu'une municipalité veuille encadrer davantage selon les besoins de son milieu. C'est parce que, si on fait une loi au provincial qui est trop restrictive, on n'a pas le portrait exact de chacune des municipalités. Ça fait que c'est là où moi, je laisserais une capacité aux municipalités d'être plus sévères dans certains cas et de laisser des libertés dans d'autres.

M. Fortier (Frédérick) : Si vous permettez? Moi, je passe mon temps à rencontrer des élèves puis la population pour faire de la sensibilisation. Pour moi, ça donne encore plus de valeur à notre travail. Quand je vais au cinéparc avec mes enfants, ça sent le pot des fois, puis là, bien, ma fille commence à avoir l'âge de me poser des questions intéressantes. Il faut que je choisisse l'information que je lui donne. Mais, après ça, ça donne encore plus d'espace puis de valeur au travail de la prévention puis de la sensibilisation. Je pense que les gens qui fument du cannabis ne sont pas des déficients intellectuels. Il va falloir faire de l'éducation sur le vivre-ensemble. Moi, quand je rencontre les élèves puis je leur dis : Est-ce que vous pensez que c'est intelligent de fumer près d'une garderie? Bien non, c'est con. Bon, bien, je pense qu'il va y avoir des endroits où... avec tes amis, avec les gens avec qui tu le fais. Je pense que ça donne encore plus de valeur sur... Et il faut se doter de pouvoirs pour rencontrer les gens et passer un message qui est intelligent aussi.

Mme Charlebois : Puis ce que je disais à des policiers cet après-midi... Je pense que les nouvelles générations de jeunes, quant à moi, sont plus sages que ma génération l'a été. Conduire en état d'ébriété, on en voit bien moins que dans mon temps, je vais être franche avec vous. C'est la même chose pour la consommation du tabac. Il y avait beaucoup plus de jeunes, à l'époque où moi, j'étais au secondaire, qui fumaient que maintenant.

M. Fortier (Frédérick) : Dans ma région, il y a beaucoup moins de policiers sociocommunautaires qu'il y en avait avant aussi. Je pense que c'est une réflexion à avoir aussi. Ce sont des policiers qui viennent expliquer c'est quoi, le travail d'un policier, puis dans un contexte beaucoup plus accessible pour les jeunes puis pour les gens qui sont dans des endroits plus marginalisés.

• (19 h 50) •

Mme Charlebois : C'est un des axes de prévention, dans le fond, qui ne paraît peut-être pas nécessairement préventif, mais il est là quand même.

On va retourner à la prévention parce que votre mémoire s'articule principalement là-dessus. Quand on parle de prévention... En tout cas, moi, de la façon que je le vois, outre la prévention qui devrait être faite, selon moi, à partir des écoles, la fin de l'école primaire, secondaire puis plus tard... puis les parents aussi, je pense que nous devrions aussi bien former nos travailleurs qui seront à la boutique pour sensibiliser, quand les gens viennent acheter, donner la bonne information : Êtes-vous un premier consommateur, quels sont les effets recherchés, laissez-moi vous expliquer les risques, etc., prenez-vous d'autres médicaments? En tout cas, bon, bref... Mais il ne faut pas non plus que ça devienne, à mon sens, presque répressif, là. Il faut quand même qu'on informe, mais pas qu'on fasse peur, qu'on soit agressants, parce que je pense que les gens vont vouloir continuer à aller au marché noir, puis les gens sur le marché noir sont très peu soucieux de la santé de leurs consommateurs puis encore moins de leurs produits.

Alors, vous nous dites ici : «...recommande [...] un financement de la prévention soit ciblé sur les meilleures pratiques reconnues par la recherche», pouvez-vous me donner des exemples de ce que vous considérez des meilleurs exemples reconnus par la recherche?

M. Marcoux (Vincent) : En fait, je vous dirais que les meilleures pratiques, il y a plusieurs... C'est des grands principes, en fait. Donc, le principe, c'est : quand tu vas rencontrer un jeune dans l'école, faire des ateliers, bien, il faut que tu rencontres les parents également, il faut que tu rencontres les intervenants, les professeurs pour que tout le monde ait le même discours puis que tout le monde entende de la même façon... parce que, quand le jeune revient à la maison, bien, il faut que les parents sachent comment intervenir à ce moment-là. Donc, ça, c'est un grand principe qui doit être pris à disposition.

L'autre principe : l'intensité de la prévention qui doit être faite. Selon les bonnes pratiques, normalement, le jeune devrait avoir 20 heures de prévention en six semaines en milieu scolaire par année scolaire, là, qu'on parle. Donc, ça, ça fait partie des meilleures pratiques, des obligations.

Les autres points, à ce moment-ci... Exemple, il faut parler d'estime de soi, de confiance en soi. Donc, vous savez qu'on pourrait même ne pas parler de drogue, pendant tout le secondaire et même le primaire, avec les jeunes, en prévention des dépendances, seulement de parler... comment dire non à quand tu ne veux pas faire quelque chose.

Ça fait que c'est tous des principes comme ça que les meilleures pratiques doivent tenir compte.

Je vous donne un exemple de pratique qui ne doit plus se faire. Je veux dire, à titre d'exemple, un ancien toxicomane qui vient présenter son bagage de vie, bien, ça, ça ne doit plus se faire dans le milieu scolaire parce que qu'est-ce que ça lance comme message? Ça lance que j'ai fait la rumba pendant 20 ans, puis je m'en suis sorti, je travaille, ça fait que tu peux consommer, «buddy». Ça fait que ce n'est pas ça qu'on veut entendre comme message.

Donc, c'est pour ça que les meilleures pratiques doivent être établies, pour s'assurer justement que ça ne devienne pas le contraire, que ça donne le goût aux jeunes d'aller consommer, mais plutôt d'éduquer l'enfant à prendre la bonne décision.

M. Fontaine (Mathieu) : De plus, on peut retrouver la complémentarité avec tous les autres services, l'importance de travailler ensemble, en concertation, dans le même sens, d'avoir des objectifs communs, l'intervention globale, de prendre en ligne de compte l'ensemble du portrait du jeune, son environnement, sa famille, ses loisirs, son milieu scolaire, ainsi de suite, et aussi d'avoir un personnel formé qui suit le jeune tout le long de son parcours scolaire. On parle d'une personne ou d'une ressource qui peut accompagner le jeune, mais qui ne change pas en cours de route, qu'on ne retrouve pas quelqu'un de particulier en secondaire I, un autre en secondaire II, un autre en secondaire III, qu'il y ait quand même une fluidité à travers les interventions qu'on fait.

M. Marcoux (Vincent) : Et je voudrais même rajouter que cette personne-là, en même temps qu'elle fait des ateliers, qu'elle fait des rencontres... Ils sont vigilants, ils font de l'intervention, de la détection précoce. Ils vont jaser avec les jeunes, les aider, les accompagner pour aller plus loin justement.

Mme Charlebois : Justement, il y a quelqu'un qui est venu hier, qui nous parlait, si ma mémoire est bonne, du DEP, du dépistage d'épisodes psychotiques, quelque chose du genre, puis, honnêtement, je l'ai retenu parce que je me suis dit que ça devrait même faire partie du bagage des travailleurs en boutique, quand ils jasent avec le client, pour qu'ils soient capables de... S'il a besoin d'aide, le client, puis qu'on sent déjà qu'il y a des signes, ça devrait être déjà quelqu'un qui pourrait référer vers une ressource qui pourrait aider cette personne-là.

Et, pour les jeunes, comme vous l'avez dit, faire les bons choix, c'est une chose, mais gérer ses émotions en est une autre, à mon sens. Puis peut-être que je me trompe, vous me corrigerez si je me trompe, mais je pense que la consommation qui devient une dépendance, ce n'est pas... Le problème, ce n'est pas la drogue comme... Il y a quelque chose à la base. Il y a un mal d'être qui fait qu'on gèle nos émotions. En tout cas, moi, je pense que c'est ça, mais je ne suis pas une spécialiste. Je vous laisse ça à vous autres.

Je veux vous amener sur le fonds de prévention. Vous nous suggérez un montant de 50 millions — c'est ça que j'ai compris — plutôt que 25 millions. Mais, je vous rassure, il y a déjà — bien, vous le savez, là, je ne vous apprends pas ça — 114 millions qui est investi en traitement de dépendance, en prévention. On ajouterait un minimum de 25 millions par année pendant cinq ans. Et, si, d'aventure, il y avait des recettes qui excèdent... Bon, l'emprunt que la Société québécoise du cannabis contracte à faire ses boutiques, à payer ses frais d'opération et ce 25 millions-là, mettons qu'il en reste encore, bien, il y a plus de 50 % qui vont encore s'ajouter au fonds de prévention. Est-ce que vous entrevoyez ça d'un bon oeil, ou bien si vous tenez mordicus à votre 50 millions fixe, ou bien 25 millions qui pourraient être croissants, qui s'ajoutent à ce qui est déjà là, là? Ce n'est pas 25 millions tout court, là, c'est 114 plus 25. Ça, c'est le minimum.

M. Marcoux (Vincent) : En fait, nous, ce qu'on juge, c'est qu'avec le travail qui est à faire, les visées, les objectifs qu'on a à faire, rapidement, même dès janvier, pour se mettre au travail, c'est un minimum de 50 millions qui est nécessaire pour coordonner, tout mettre ça en place, comme les centres de prévention en dépendance, exemple. Donc, pour couvrir ça, c'est majeur. Pour ce qui est du 100 %...

Mme Charlebois : Le 50 millions irait seulement pour les centres de prévention que vous êtes?

M. Marcoux (Vincent) : Pour l'ensemble des objectifs. Mais évidemment je vous dirais qu'il va en manquer. C'est pour ça qu'on conseille qu'il y ait un 100 % des fonds, en tout cas, du moins, pour les premières années, qui seraient nécessaires pour...

Mme Charlebois : ...déficit, on fait quoi?

M. Marcoux (Vincent) : Vous ajustez à 50 millions en minimum, nécessairement, et il faudra avoir une visée de priorisée. Mais le 100 % va être nécessaire justement parce qu'une fois qu'il va y avoir du profit il faut s'assurer que l'ensemble des services en dépendance soient bien couverts, autant la prévention, le traitement universel. Vous savez que, oui, on a l'accès pour les gens sur l'aide sociale, mais les autres personnes doivent payer pour le traitement, l'accessibilité en réduction des méfaits. Donc, une fois que l'ensemble du secteur, pour la population, en fait, de la prévention, du traitement de la réduction des méfaits, va être couvert, bien là, on pourra dire : Bravo! On a fait l'ensemble de notre travail. Et après on pourra retourner à la loi puis dire : Enfin, on va faire des routes vertes, des routes du cannabis financées par le cannabis. Mais, en attendant... C'est mon exemple pour dire que, si vous utilisez l'argent pour autre chose que la prévention, le traitement, c'est qu'on va avoir fait le tour de la situation et que l'ensemble de la recherche en dépendance va être financée également. Donc, on a quand même beaucoup de sphères qu'il faut qu'elles soient financées pour bien outiller et protéger la population.

Mme Charlebois : Vous avez raison qu'il y a beaucoup de sphères. Il y a notamment la Sécurité publique qui va avoir besoin d'appareils. Ils vont avoir besoin de formation. Les médecins ont besoin de formation. Ils sont venus nous le dire eux autres même, que la formation... Les étudiants en médecine nous ont dit que le cursus ne touchait pas adéquatement tout ce qui était les drogues. Alors, vous avez raison de dire que c'est un élément important.

Je vais juste vous dire que l'article 55 dont vous nous demandez le retrait parle de projets pilotes pas seulement pour la vente, mais bien pour différents aspects, que ce soit du côté de la culture, que ce soit du côté de la prévention, pour avoir un projet pilote, etc., et vous rappeler que, concernant le projet pilote sur la vente, c'est un maximum de cinq boutiques autres qui nous donneraient une base comparative. Il ne faut pas penser que c'est 500 000 boutiques. C'est cinq comparé à peut-être 150 à la fin de trois ans. Je pense qu'on est capables de faire l'analyse puis de voir, dans trois ans, avec une analyse objective : Bon, bien, regarde, il y a peut-être des choses à améliorer à la Société québécoise du cannabis, peut-être pas.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, merci, Mme la ministre. Alors, je vais céder la parole maintenant au député de Labelle pour une période de 9 min 30 s.

• (20 heures) •

M. Pagé : Bien, voulez-vous réagir... parce que je n'étais pas ici au début de votre présentation, puis justement l'article 55, nous, nous inquiète beaucoup parce qu'on ne voit pas l'utilité, à ce moment-ci... parce que c'est déjà un gros défi de mettre en place la SQC, alors... Et on sait que, par un projet pilote, il est fort probable que ce soient des employés, dans ces centres de... dans ces points de vente, qui ne seront peut-être pas syndiqués, qui n'auront peut-être pas les mêmes conditions... donc qui pourraient être des entreprises, effectivement, peut-être plus rentables ou qui coûteraient un peu moins cher, parce qu'elles n'auront pas les mêmes contraintes financières, entre autres.

Alors, pourquoi s'enfarger tout de suite avec un projet pilote qui ferait en sorte que là on se retrouverait avec un réseau parallèle, à ce moment-ci? Moi, je veux vous entendre là-dessus, là.

M. Marcoux (Vincent) : Bien, nous, on est toujours pour le retrait de l'article 55. Je crois vraiment qu'il faut apprendre à focuser, focuser sur la Société québécoise du cannabis pour, en premier lieu, bien adapter, parce que c'est nouveau, c'est historique. Il va falloir s'adapter aussi... La SQC devra s'adapter, dans les prochaines années, autant en formation, également, aux employés, comment intervenir avec nos gens qui vont être en plein milieu, qui vont venir puis qui vont avoir peut-être des problèmes de consommation également. Donc, on a vraiment beaucoup d'adaptation à faire, comment qu'on va vendre le cannabis, les produits qui vont arriver.

Donc, je pense que c'est important de focuser sur une chose, et par la suite... c'est marqué dans la loi, de toute façon, qu'on va réviser, hein, qu'on va revoir qu'est-ce qui se passe avec la SQC après certaines années. Donc, attendons, attendons cette structure-là, qu'elle soit bien établie avant d'ouvrir un projet pilote.

M. Pagé : Je partage totalement votre façon de voir les choses. D'ailleurs, bon, on a parlé du 25 millions, vous parlez... dont je souhaiterais toujours, je le répète, là... si c'était possible d'avoir la ventilation du 25 millions pour savoir comment on a évalué le 25 millions. Vous, vous arrivez à quelque chose comme 50. À force d'entendre plein de groupes qui nous disent : Bien, dans tel secteur d'activité, ça prendrait des sous, dans un autre secteur d'activité... Alors, on commence à se demander quel est le véritable montant. Vous avez avancé 50 millions. Est-ce que vous avez une ventilation pour être capable de nous dire : Bien, avec 50 millions, on serait capable de faire ça, ça, ça? Avez-vous ça entre les mains? Parce que là, de la partie gouvernementale, là, présentement, le 25 millions, on n'a aucune espèce d'idée, ce qu'on va faire avec ça.

M. Marcoux (Vincent) : Non, on n'a pas de ventilation, présentement, de faite. Puis je vous dirais même que 50 millions, c'est une base pour commencer, parce que je vous dirais que la prévention au Québec... Vous savez que ce n'est pas l'ensemble des milieux scolaires, actuellement, qui ont de l'intervention en prévention. On entend les municipalités qui ont besoin d'accompagnement. On entend les travailleurs qui ont besoin... Donc, évidemment, c'est une base pour être capable de fournir à la demande et répondre aux gens en général. Donc, évidemment, ça va prendre beaucoup d'argent pour faire ça. Il faut rappeler, hein, qu'un dollar en prévention, on en économise 10.

Donc, ce qu'il faut faire, c'est vraiment financer rapidement, de façon majeure, pour s'assurer, une fois par la suite, que les acquis restent là et ne pas se réveiller dans cinq ans : Mon Dieu! la santé physique, la santé mentale de notre population est mal, suite à la légalisation du cannabis, il faudrait faire de la prévention. Bien, on est mieux... Mettons le paquet tout de suite. Et même, je vous dis, ça va coûter plus que 50 millions, c'est certain.

M. Pagé : Parce que, même avant de réinvestir ce nouveau 25 millions, qui est écrit dans la loi, sur cinq ans... Bon, ça, ce serait de l'argent neuf. Lorsque la ministre nous dit : Il y a toujours déjà 114 millions qui est déjà disponible, mais c'est 114 millions qui était déjà là pour les besoins qui étaient déjà là et pour lesquels moi, j'ai entendu souvent qu'il manquait de l'argent. Alors, avec le 25 millions, on risque de combler tout simplement un manque à gagner qui était déjà identifié.

Cela dit, j'aimerais que vous me disiez, là, très clairement, là, est-ce qu'on devrait, justement, inscrire très clairement dans la loi que 100 % des profits doivent continuer à aller... des profits, là, je dis bien des profits, là, hein, doivent aller, justement, pour la cause de la dépendance, la santé publique, pour les saines habitudes de vie, les municipalités aussi qui auront besoin... Est-ce qu'on doit l'écrire clairement?

Parce que ce qu'on oublie de dire parfois, là, c'est que la taxe d'accise, qui devrait ramener au Québec, quelque part... probablement comme une centaine de millions au Québec, là... Si on parle de tiers-tiers-tiers, c'est à peu près 75 millions pour le gouvernement du Québec, parce que le gouvernement fédéral nous a parlé de 1 milliard. 225 millions; 75, municipalités; 75, Québec. Juste la TVQ, qui ne fera pas partie des profits de la SQC, il y aura probablement quelque chose comme autour de 200 millions là-dedans, là. Donc, le gouvernement du Québec va probablement récolter, au bas mot, 250, peut-être 300, peut-être même 350 millions de taxe d'accise et de TVQ.

Alors, moi, je me dis : Si la SQC fait des profits, oui, qu'elle paie son investissement, mais qu'elle s'assure de retourner tous ses profits vers la cause de la dépendance des saines habitudes de vie et la santé publique. Alors, c'est pour ça que moi, j'insiste et je le répète souvent : Il faut l'inscrire dans la loi. Est-ce que c'est ce que vous souhaitez?

M. Marcoux (Vincent) : Oui, tout à fait. C'est même inscrit dans notre mémoire.

M. Pagé : En fait, c'est ce que l'État de Washington nous avait dit, lors de la... Vous étiez là, je pense, les 19, 20 juin. Inscrivez-le dans la loi, là, parce que nous, on ne l'a pas fait puis aujourd'hui on le regrette.

M. Marcoux (Vincent) : Tout à fait. Inscrivons-le dans la loi.

M. Pagé : Vous parlez, à la page 6, bon, la combinaison d'expertises efficaces et renforcées, vous dites de reconnaître le réseau de recherche en dépendance. Alors là, vous parlez de recherche. Si vous parlez de recherche, est-ce que vous parlez de recherche avec des chaires de recherche? Parce qu'il y a des universités qui sont venues nous dire, lors de la tournée : Nous, nous sommes prêts à faire de la recherche. Il y a des gens aussi qui nous ont dit : Il devrait y avoir un observatoire. Nous, ce qu'on dit : Bien, qu'il y ait un observatoire, à partir du jour un et pour la suite des choses, pour qu'on puisse ensuite prendre des bonnes décisions sur des données probantes en collaboration avec les chaires de recherche.

Comment vous voyez cela? Est-ce que ça vous semble être un bon scénario, observatoire en collaboration avec des chaires de recherche, et est-ce qu'on devrait l'inscrire dans la loi, tout comme on a inscrit le comité de vigilance, par exemple?

M. Marcoux (Vincent) : Oui, tout à fait. L'observatoire de recherche est une très bonne idée. D'ailleurs, je crois qu'on devrait interpeler l'Institut universitaire en dépendances, d'ailleurs, pour le faire. Je sais qu'on a parlé également de l'Institut national de santé publique du Québec, mais je pense que l'Institut universitaire en dépendances a une bonne expertise. Et vous savez qu'il y a le regroupement d'intervention substances psychoactives, Québec, qui est un regroupement de chercheurs qui réunit plusieurs chercheurs en dépendance qui ont un intérêt sur la dépendance, disons, qui sont des spécialistes, donc c'est des gens qu'il faut interpeler absolument dans des types de travail comme ça.

M. Pagé : J'ai combien de temps?

Le Président (M. St-Denis) : Il reste deux minutes exactement.

M. Pagé : Deux minutes? Bon, vous êtes des gens mêlés directement avec ceux et celles qui sont aux prises avec la problématique. Alors, moi, je me serais attendu dès le départ... la première fois que j'ai lu ce que vous disiez, moi, je pensais que vous seriez des pro-21 ans parce que vous vivez avec le problème, là, au quotidien. Alors, vous les voyez, les jeunes qui sont aux prises avec la problématique.

Alors, je voudrais comprendre votre raisonnement qui vous amène à dire : Bien non, 18 ans au lieu de 21 ans quand justement certains spécialistes, parce que ce n'est pas tous les spécialistes de la santé, vont dire 21 ans. Pourquoi, vous qui vivez au quotidien avec la problématique des gens qui sont aux prises, pourquoi que vous dites : Bien non, 18 au lieu de 21?

Le Président (M. St-Denis) : En une minute.

M. Marcoux (Vincent) : Vous savez... bien, vous avez entendu, à plusieurs reprises, la logique qu'on voit... les plus grands consommateurs, c'est entre 16 et 25 ans et même entre 16 et 21 ans. À ce moment-là, de 18 à 21 ans, il y a plusieurs grands consommateurs de cannabis, et on est mieux de s'assurer que les gens qui consomment du cannabis consomment du cannabis qui est surveillé par Santé Canada pour ces affaires-là et, en plus, qui ont une intervention avec la SQC en même temps. Il y a une prévention qui est faite, il va y avoir une formation qui va être établie à ce moment-là.

Puis rappelons, hein, qu'on a décidé qu'à 18 ans on avait l'âge de la majorité pour décider de se marier ou de prendre des bonnes décisions. On a déjà un permis de conduire à ce moment-là de la vie, on peut consommer de l'alcool. Donc, à ce moment-là, il faut s'assurer... il faut se dire : Bien, je pense qu'on a éduqué nos enfants, on leur a donné toute l'information nécessaire pour prendre une décision éclairée, et maintenant il faut faire confiance à cette prise de décision là. Puis on l'a fait en tant que société. On a dit que c'était 18 ans pour l'ensemble des décisions qu'il y avait à prendre. Donc, on croit nécessairement qu'une personne peut prendre une décision éclairée.

Puis il faut se rappeler que la dépendance, ça ne saute pas non plus sur les gens, hein? La dépendance, c'est la pointe de l'iceberg. C'est tous les problèmes intérieurs, émotifs et tout ça. Et des gens... Dans le fond, la dépendance, c'est seulement un état de fait. Mais, à ce moment-là, c'est quoi qu'il faut aller travailler? C'est les émotions, les comportements, tout ce qu'on a vécu à l'intérieur.

Donc, ce n'est pas du jour au lendemain que la légalisation du cannabis va apporter 500 000 dépendants supplémentaires. Ce n'est pas ça, la réalité.

M. Pagé : Merci.

Le Président (M. St-Denis) : Merci beaucoup. Merci, M. le député de Labelle. Je passe maintenant la parole au député de Borduas pour une période 6 min 30 s.

• (20 h 10) •

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Fontaine, M. Marcoux, M. Fortier, bonjour... bien, bonsoir, en fait. Merci d'être présents, de contribuer à nos travaux. Si vous le voulez bien, on va poursuivre sur le même sujet, au niveau de l'âge. Est-ce que le fait de consommer du cannabis, ça peut avoir des conséquences sur la santé physique des jeunes entre 18 et 21 ans, supposons?

M. Marcoux (Vincent) : Bien oui, tout à fait, comme l'alcool, comme tous les produits que les jeunes ont accès, ils peuvent avoir des problèmes physiques pour n'importe quel produit, en fait. Même être au volant peut être un danger majeur pour un jeune de 18 ans. Donc, oui.

M. Jolin-Barrette : Mais est-ce que c'est un justificatif de dire : Bien, parce que, supposons, le droit de vote est à 18 ans puis qu'on a décidé que le droit de vote, c'était à 18 ans, à ce moment-là, les risques associés à la consommation du cannabis... Je suis d'accord avec vous qu'il faut faire de la prévention, mais le fait de dire : Bien, c'est à 18 ans, on néglige en quelque sorte les aspects des maladies qui peuvent être déclenchées de façon plus précoce, tout ça. C'est parce qu'on essaie de réconcilier tout ça ici, parce qu'entre 18 et 21 ans, oui, il y a des consommateurs, mais il y a des consommateurs avant ça aussi.

Alors, qu'est-ce qu'on fait avec les jeunes de 15 ans, de 14 ans, de 13 ans? Qu'est-ce qu'on fait avec ceux-là aussi? Parce qu'eux aussi, là, si la substance qu'ils vont consommer, là, ça va être la substance... On ne sait pas d'où elle va venir ou peut-être qu'elle va venir des magasins de la SQC aussi. Mais qu'est-ce qu'on fait avec ça?

M. Fortier (Frédérick) : Je vais me permettre de répondre. En fait, vous parliez de la Polybel hier ou dans une autre rencontre. Moi, je vais continuer de faire mon travail à cette école-là puis comme aux autres écoles en faisant la promotion de... Quand on parle de réduction des méfaits, je pense qu'on n'a pas beaucoup parlé que, dans la réduction des méfaits, il y a l'abstinence aussi.

Mon message sera toujours le même : Si tu décides de le faire, assure-toi de te mettre dans le meilleur contexte pour que ça réponde à tes besoins. Ça veut dire dans un lieu sécuritaire, avec des personnes de confiance puis de connaître idéalement ce que tu consommes. Je peux leur dire : Ne fais pas ça, ce n'est pas bon. Ça va être long, 75 minutes dans une école, si je fais juste passer mon temps à dire ça, parce que tout le monde le dit dans la vie.

Notre message en prévention, en réduction des méfaits, c'est : Si tu le fais, fais-le moins pour que ça goûte bon. On s'entend que ça ne sera pas le discours que j'aurai en sixième année ou en secondaire I. C'est un discours qu'on va adapter. Dans les meilleures pratiques, on adapte le vocabulaire aussi. On va continuer de faire de la sensibilisation, parce que les gens vont continuer de consommer quand même. Donc, notre message, essentiellement, dans le travail en prévention, ça ne changera pas grand-chose, sinon que de donner encore plus de valeur à : Fais attention à ce que tu consommes parce qu'il y a des enjeux. C'est quelque chose qu'on fait déjà de toute façon.

M. Jolin-Barrette : Mais le fait d'y avoir accès légalement à l'âge de 18 ans, ce n'est pas un message de société aussi qu'on envoie pour dire qu'on banalise la substance, pour dire : Il n'y a pas de danger associé à ça? Parce que ça aussi, là, il y a beaucoup de gens, des intervenants qui sont venus nous dire aussi, cet aspect-là, notamment des intervenants du monde médical qui nous ont dit : Écoutez, si on la met à 18, c'est un des effets aussi qu'on peut dire... Parce qu'il y en a, des jeunes qui disent aussi : Bien, moi, je n'en prends pas parce que c'est illégal. Il y a ce frein-là aussi.

M. Marcoux (Vincent) : Si je vous ramène l'aspect contraire, qu'on dit qu'on met la consommation de cannabis à 21 ans puis que le jeune dit : Aïe! le cannabis, c'est dangereux, je vais me mettre sur l'alcool à fond, est-ce que ça va être mieux? Est-ce que ça va être positif à ce moment-là?

Il faut se rappeler que même nos jeunes peuvent consommer de l'alcool à 15, 16 ans, puis on a une éducation à faire avec ces jeunes-là. Ma fille a 17 ans actuellement, là, elle s'en va sur ses 18 ans, elle vient d'avoir son permis de conduire, et là je me dis : O.K., elle a eu un bon cours, je l'ai bien éduquée, elle va être capable de prendre les bonnes décisions. Je pense qu'on en est rendus là, c'est-à-dire qu'on a dit à notre société que nos jeunes étaient capables de prendre des bonnes décisions éclairées, qu'ils ont eu l'ensemble des décisions, et maintenant c'est à nous à dire : Je l'ai bien éduquée, elle a eu des bons cours, les professeurs lui ont bien appris, et maintenant je dois lui laisser prendre ses décisions de façon éclairée. Ce n'est pas facile, ce n'est pas simple, mais je crois qu'il faut le faire.

M. Jolin-Barrette : Puis je vous donne un exemple. Cette semaine, le Manitoba a annoncé son plan. L'alcool, au Manitoba, c'est 18 ans. Par contre, ils ont dit : Le cannabis, ça va être à 19 ans, parce que notamment il y a des conséquences associées à la consommation de cannabis. Qu'est-ce que vous pensez de ce scénario-là, de repousser l'âge légal, peut-être pas à 21 ans, mais de repousser un peu plus tard, tardivement? Parce qu'il y a une différence. Même chose aux États-Unis, c'est 21 ans, supposons, pour l'alcool, c'est 18 ans pour voter. Il y a certains États en Amérique du Nord qui le font. Qu'est-ce que vous pensez de cette possibilité-là?

M. Marcoux (Vincent) : Écoutez, là, vous me dites de repousser l'âge de majorité à 21 ans pour l'ensemble des aspects.

M. Jolin-Barrette : Non, non, pour le cannabis. Supposons, au Manitoba, c'est 18 ans, l'âge pour consommer de l'alcool, mais ils ont décidé sciemment de fixer ça à 19 ans. Ils sont venus mettre une distinction entre l'âge légal de majorité, supposons, puis l'âge pour consommer du cannabis.

M. Marcoux (Vincent) : Bon, ça fait qu'il y a une différence avec l'alcool.

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Marcoux (Vincent) : Moi, je crois qu'il doit y avoir pas de différence entre l'alcool et le cannabis, clairement, parce que ça en met une plus grave que l'autre, puis on reconnaît, puis il faut le reconnaître que l'alcool est une drogue dangereuse ou sinon plus que le cannabis. Donc, à ce moment-là, je ne pense pas qu'on doit en mettre un plus que l'autre.

M. Fontaine (Mathieu) : On est d'accord avec ça, au niveau de la cohérence, pour nous, c'est important que ça soit cohérent à l'ensemble des produits psychotropes.

Pour revenir aussi sur l'aspect de banalité avec l'âge de 18 ans, présentement, quand on se promène dans les polyvalentes, si on prend, par exemple, les polyvalentes, c'est plus facile pour un jeune de trouver un gramme de cannabis que d'aller s'acheter de la bière, parce que présentement c'est accessible, c'est connu, c'est... Il y a même des tests qui ont été faits. C'est beaucoup plus rapide pour un jeune, c'est beaucoup moins compliqué. Est-ce que c'est impossible pour un jeune d'aller acheter de l'alcool? Non. C'est plus complexe. Il doit demander à un adulte, tout ça, il doit faire le guet sur le bord d'un dépanneur, attendre. Présentement, acheter un gramme de cannabis, tu n'as pas besoin de demander la carte à personne, tu peux aller directement voir le vendeur. Tous les jeunes en connaissent déjà. Ça fait que pour nous, présentement, il est déjà beaucoup banalisé, le produit.

Le Président (M. St-Denis) : Je vous remercie. Merci, M. le député de Borduas. Alors, je vous remercie aussi pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je vais suspendre les travaux quelques instants pour permettre à l'autre groupe de s'installer.

(Suspension de la séance à 20 h 16)

(Reprise à 20 h 18)

Le Président (M. St-Denis) : Alors, on va continuer. On va continuer nos travaux. Alors, nous recevons la Fédération des policiers municipaux du Québec. Alors, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre...

Des voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : Un instant, s'il vous plaît!

Une voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : M. le député de Borduas!

Des voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : M. le député de Borduas!

Des voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : M. le député de Borduas, s'il vous plaît!

Une voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : M. le député de Borduas, à l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : Je vous demande du respect également à la présidence. Je vous rappelle à l'ordre immédiatement, et on va débuter les travaux. Merci.

Une voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : Monsieur... Non, monsieur, je ne vous donne pas la parole. Je ne vous donne pas la parole. Je vous demande...

Une voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : Je vous rappelle à l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix :...

Le Président (M. St-Denis) : Je vous rappelle à l'ordre! Vous cessez immédiatement, c'est tout.

Une voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : Alors, on va continuer. Je...

Une voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : Je préside, et je vous rappelle à l'ordre, et ça s'arrête là!

Une voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : Je vais suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 20 h 20)

(Reprise à 20 h 21)

Le Président (M. St-Denis) : Alors, nous allons reprendre. Alors, messieurs, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et puis nous débuterons la période d'échange tout de suite après. Je vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre exposé.

Fédération des policiers et policières
municipaux du Québec (FPMQ)

M. Côté (Robin) : M. le Président, je suis Robin Côté, le président de la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec. Je suis accompagné de Me Frédéric Nadeau.

Écoutez, je vous remercie, la fédération vous remercie, remercie la Commission de la santé et des services sociaux de lui donner l'opportunité d'exprimer son opinion à l'égard du projet de loi n° 157. Les membres de la fédération ont la mission de prévenir et réprimer les infractions criminelles et pénales reliées aux stupéfiants. Dans le cadre de cette mission, ils sont en contact de manière pratiquement quotidienne avec les méfaits associés à ces substances et les nombreux enjeux sociaux qu'ils posent. Ils sont donc des acteurs de premier plan dans les changements qui sont proposés, tant par les lois adoptées par le Parlement fédéral que par le projet de loi n° 157.

Peu importe leur taille, les services de police municipaux ont l'obligation de mettre en place des programmes de prévention, comme l'exige la réglementation concernant les niveaux de services de police qui doivent être dispensés à la population. La réalisation de cette obligation se traduit par la mise en place d'une section composée d'un ou plusieurs policiers sociocommunautaires dont la fonction principale est d'effectuer des activités de prévention et de maintenir un lien entre le service de police et les divers organismes sociaux oeuvrant sur le territoire qu'il dessert.

Ces policiers sociocommunautaires oeuvrant auprès des personnes mineures en milieu scolaire ou autre, auprès des personnes âgées et des organismes de soutien aux personnes défavorisées... À ce titre, ils sont au fait des diverses problématiques reliées à la consommation de stupéfiants. La modification de la législation va nécessiter, de la part des policiers municipaux, un travail certain d'éducation et d'information pour que la population soit au fait des nouvelles limites, obligations et infractions créées par ces modifications.

Malheureusement, les services de police municipaux font déjà face à d'importants défis sur le plan du financement et des ressources. Les attentes envers les services de police sont de plus en plus élevées et le travail de policier est observé et critiqué comme jamais auparavant. Trop souvent, les membres de la FPMQ travaillent dans un contexte où les effectifs sont au minimum et les ressources sont insuffisantes. Il est donc impératif que les changements proposés dans le projet de loi n° 157 soient accompagnés de ressources permettant aux policiers municipaux sur le terrain de remplir leur mission adéquatement.

Ainsi, la fédération propose qu'une partie du fonds des revenus provenant de la vente de cannabis soit spécifiquement versée à l'usage des services de police municipaux afin d'améliorer et d'augmenter les programmes de prévention menés par leurs policiers.

La Loi encadrant le cannabisva créer plusieurs nouvelles infractions pénales reliées au cannabis. Il est spécifiquement prévu, à l'article 66 du projet de loi n° 157, que seul un membre d'un corps de police peut surveiller l'application des articles 4 à 7, donc ceux qui traitent de la possession, du chapitre III qui traite de la culture à des fins personnelles, et de l'article 21 qui traite de la vente. Cet article précise aussi que le membre d'un corps de police peut également surveiller l'application de l'article 8, au niveau de la conservation du cannabis, et du chapitre IV, au niveau des restrictions à l'usage. Qu'en est-il des autres infractions prévues dans la loi ? Il faudrait définir le rôle que les policiers municipaux sont appelés à jouer pour les autres infractions.

En ce qui concerne la possession, il est à prévoir des difficultés d'application en ce qui concerne la quantité de 150 grammes mentionnée à l'article 6. Comment le policier va-t-il déterminer la quantité et surtout que fera-t-il si la quantité est moindre que prévu? Le cannabis saisi cesserait alors d'être une pièce à conviction d'une infraction. Le policier devrait-il alors retracer le propriétaire et lui remettre le cannabis saisi? La façon de procéder dans de telles situations devrait être précisée.

Ainsi, le rôle des policiers et les attentes de l'État devraient être plus détaillés, particulièrement en ce qui concerne les infractions qui ne sont pas énumérées à l'article 66 du projet de loi n° 157.

Pour ce qui est des modifications ou des dispositions législatives concernant le cannabis, tant au niveau fédéral qu'au niveau provincial... confèrent un rôle important aux agents évaluateurs. Le policier qui a été formé pour être agent évaluateur a la capacité d'administrer une série de tests et de faire certaines observations dont la combinaison des résultats permet de constater qu'un individu a pris un ou des stupéfiants et même d'identifier la catégorie de stupéfiants en cause. Ce test prend près d'une heure à administrer et requiert la rédaction d'un rapport. L'administration de ce type de test permet également au policier évaluateur de requérir le prélèvement de substances corporelles pour corroborer les résultats.

Le projet de loi n° 157 prévoit notamment l'utilisation de l'évaluation de l'agent évaluateur pour qu'un agent de la paix puisse, premièrement, suspendre sur-le-champ, pour 90 jours, le permis de quiconque conduit ou a la garde d'un véhicule alors que l'agent évaluateur a des motifs raisonnables de croire que cette personne a les capacités affaiblies par le cannabis et, deuxièmement, saisir sur-le-champ, pour 90 jours, le véhicule de quiconque conduit ou a la garde d'un véhicule alors que l'agent évaluateur... cette personne a les capacités affaiblies par le cannabis.

Vu l'importance nouvelle accordée à cette fonction et compte tenu du temps requis pour effectuer cette tâche pour chaque individu interpelé, la fédération considère que les effectifs policiers formés actuellement au Québec pour être agent évaluateur sont nettement insuffisants pour satisfaire à la demande. Seulement 95 policiers environ possèdent cette formation pour l'ensemble de la province. Ils ne suffisent pas à la tâche à l'heure actuelle. Qu'en sera-t-il lorsque la population adulte pourra se procurer du cannabis en toute légalité?

Il faut aussi considérer que, pour les quelque 95 policiers mentionnés au paragraphe précédent, ce sont des policiers formés. Cela ne veut pas dire pour autant qu'il y en ait 95 qui exécutent les tâches actuellement. En effet, certains policiers peuvent avoir été formés mais avoir accédé à d'autres fonctions depuis, ce qui fait en sorte qu'ils n'exécutent plus ce type de test. Qu'il suffise de penser au policier promu sergent ou sergent-détective. L'administration de ce type de test ne relève alors plus de ses fonctions normales, et il devient donc utopique de penser qu'il pourrait effectuer ce type d'évaluation sur une base régulière.

Il est donc urgent de former de nouveaux agents évaluateurs pour que la loi soit respectée et qu'un effet dissuasif réel soit créé auprès des contrevenants potentiels. Cet effet dissuasif n'est pas à négliger considérant les statistiques émanant de l'état du Colorado, aux États-Unis, qui... depuis la légalisation du cannabis en 2012, les décès sur les routes associés à la marijuana ont augmenté de 48 %. Le pourcentage des décès sur la route reliés à cette drogue a doublé en 10 ans, passant de 10 % à 20 %. Il est donc important que les consommateurs de cannabis réalisent qu'ils ne pourront conduire en toute impunité avec les capacités affaiblies par le cannabis. Il en va de la sécurité de tous les usagers de la route.

Par ailleurs, les appareils de détection ne sont pas encore suffisamment accessibles pour pallier le manque d'agents évaluateurs. Et encore, ce type d'appareil peut être utile pour vérifier la présence de cannabis dans l'organisme, mais il ne peut attester de l'affaiblissement des capacités de la personne interpelée.

Il reste énormément de travail à effectuer sur le plan de l'organisation policière pour que les policiers municipaux soient en mesure de s'acquitter de leurs devoirs et obligations lorsque les changements législatifs concernant le cannabis entreront en vigueur. Il est primordial que des ressources suffisantes soient allouées et que les policiers reçoivent la formation et les outils appropriés pour ce faire.

La fédération demeure entièrement disponible pour participer à tout exercice de consultation sur ce sujet, et nous vous remercions de votre attention.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, merci. Donc, je vous remercie pour votre exposé. Maintenant, nous allons débuter la période des échanges. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Charlebois : Alors, M. Côté, M. Nadeau, merci d'être ici et de nous faire part de vos préoccupations. Je vous ai entendus parler de prévention en début de présentation. Ça a retenu mon attention, des policiers qui font de la prévention sur le terrain. C'est un angle qu'on n'avait pas nécessairement entendu. On a entendu plus parler de comment il fallait intercepter ces gens-là, tout ça.

Dites-moi, vous savez qu'on a 25 millions minimum — ça, c'est le minimum par année, pendant cinq ans — qui s'ajoutent déjà aux 113 millions de prévention globale, traitement de dépendances, recherche, qui va être là. Et, si d'aventure, après que la Société québécoise du cannabis a payé sa dette, a payé ses frais d'opération, a justement payé ces 25 millions qu'elle aura déboursés, qu'il reste de l'argent, vous savez que 50 % de cet argent-là qui est au fonds des revenus... plus de 50 % va encore s'ajouter au fonds de prévention, mais il y a une partie qui pourrait être ajoutée, justement, à la sécurité publique.

C'est exactement à ça que je pensais, parce qu'on a beaucoup... notamment, je pense à Montréal, je suis allée, à un moment donné, rencontrer un policier communautaire sur le terrain, qui travaillait avec un travailleur social pour justement suivre le parcours de certaines personnes itinérantes et s'assurer qu'ils étaient en bonne situation, puis qu'ils n'étaient pas morts de froid, puis, bon, s'assurer de leur parcours, puis de les aider, puis de les amener peut-être vers d'autres choses.

Est-ce que vous pensez que justement la partie qu'il restera, au fond, des revenus pourrait servir à cette avenue-là?

• (20 h 30) •

M. Côté (Robin) : Bien oui, c'est exactement ce qu'on pense. Puis effectivement, sans vous parler de l'aspect sociocommunautaire ou des policiers sociocommunautaires pour la ville de Montréal... Je peux vous en parler un peu, pour les autres services de police au Québec, excluant, bien entendu, la Sûreté du Québec. Et, dans les différentes municipalités, la réalité n'est pas la même dépendamment évidemment de la taille du service de police. Donc, il y a des plus petits services qui ont un plus grand besoin de financement justement pour cibler les écoles sur leur territoire puis être en mesure de répondre aux attentes, je pense, entre autres, des commissions scolaires. À certains endroits, il y a des écoles et des commissions scolaires qui vont financer une partie du salaire ou du travail du policier pour que, justement, ils puissent avoir une ressource. Des fois, c'est une journée par semaine, des fois, c'est deux journées par semaine. Mais je pense que ça peut débuter de là. Puis, s'il y avait une présence plus importante, je pense que ça serait bon parce que c'est là que ça commence, à l'école primaire, à l'école secondaire, c'est important, en fait, d'informer et de mobiliser, d'éduquer les jeunes aux dangers et aux effets du cannabis pour que justement, lorsqu'ils atteignent l'âge de 18 ans, ils soient en mesure de se faire une meilleure idée. Et je pense qu'on a un rôle important à jouer à ce niveau-là.

Mme Charlebois : Je vais vous poser une question puis je ne sais pas si vous allez avoir la réponse ce soir parce que je suis sûre que vous n'avez pas avec vous vos statistiques. En temps normal, là, pas un soir de Noël, ou un soir de la Saint-Jean, ou la semaine précédant les fêtes, mais en temps normal, là, dans un sept jours, environ combien d'arrestations vous pouvez faire par jour? Dans les petites municipalités dont vous me faites mention, là, combien vous pouvez faire d'arrestations pour conduite avec facultés affaiblies? C'est difficile à dire, hein?

M. Côté (Robin) : C'est difficile à dire. Je n'en ai pas la moindre idée. Dépendamment, comme je vous le dis, encore là, de la taille du service, et probablement que certains services vont axer plus leurs interventions par rapport à ça... Souvent, on va s'entendre que, si c'est une soirée qui est plus mouvementée en termes de, je ne le sais pas, violence conjugale, ou etc., bien, il va y avoir moins d'attention qui va être portée... Malheureusement, des fois, il faut prioriser les appels. Et c'est très rare qu'il va y avoir des policiers strictement affectés, sauf s'il y a des barrages pour l'alcool au volant, on s'entend, là, à la surveillance de la conduite avec capacités affaiblies. Ça fait que c'est une statistique qui est difficile à évaluer.

Mme Charlebois : Vous me parlez de la tolérance zéro qui va être difficile à appliquer. Je ne sais pas si j'ai bien compris. Dites-moi, est-ce que vous seriez d'accord, quand on aura les appareils homologués par Santé Canada et accrédités par sécurité publique Québec, d'appliquer la tolérance zéro avec un appareil qui nous indique une consommation récente? Parce qu'on sait que le THC peut rester dans le sang sept jours, même plus, et, par conséquent, dans la salive. Est-ce que vous, vous seriez en accord qu'on applique tolérance zéro à partir du moment où on a les bons appareils homologués?

M. Côté (Robin) : Bien, la clé du succès, elle est là. Oui, on serait d'accord. Mais il faut effectivement avoir un appareil qui va passer le test des tribunaux puis, comme vous le dites, qui va détecter une consommation récente. Est-ce que l'appareil va être calibré avec un certain taux qui va avoir été prévu par réglementation, ou par la loi, ou autres? Je n'en ai aucune idée. Mais effectivement, si vous nous donnez les bons outils pour travailler, on n'aura aucun problème à appliquer la tolérance zéro.

Mme Charlebois : Pendant que vous appliquez conduite avec facultés affaiblies, est-ce qu'il vous arrive de rencontrer des gens qui ont des capacités affaiblies en raison de la drogue en ce moment?

M. Côté (Robin) : Bien oui, c'est certain que ça peut arriver. Et, je l'ai déjà dit, souvent, ça va être accompagné d'une consommation d'alcool. Si ça ne l'est pas, bien, effectivement les patrouilleurs sont en mesure, eux, de faire les épreuves de coordination du mouvement en bordure de route. Et ils vont être capables, au préalable, déjà, d'évaluer si, effectivement, le conducteur pourrait possiblement avoir consommé n'importe quelle substance, là, on s'entend. Mais où on pense que ça va bloquer, c'est justement à cause du manque d'agents évaluateurs. Bien, une fois que le conducteur est conduit au poste de police, s'il n'y a pas d'agent évaluateur disponible pour compléter la série de tests, bien, c'est là qu'on va avoir un problème.

Mme Charlebois : C'est la boucle qui manque afin... À la fin, ça prend l'agent évaluateur justement pour conclure le dossier. Sinon, c'est comme un dossier qui s'échappe, là. C'est ça que vous me dites?

M. Côté (Robin) : Bien, on va avoir fait notre bout de travail dans le sens où on va avoir retiré le conducteur de la route, là. Je veux dire, on s'entend, sauf que, si, au bout de la ligne, on veut que le dossier soit complété puis que ça soit traduit devant les tribunaux, bien, on a un problème s'il n'y a pas l'agent évaluateur.

Aurais-tu quelque chose à rajouter, Frédéric?

M. Nadeau (Frédéric) : Non, ça va.

Mme Charlebois : Est-ce que vous voyez... Parce que, là, je sais qu'il y a encore 34 ou 36 agents évaluateurs qui vont sortir, au mois de mars, je pense, de formation. Comment voyez-vous qu'on peut accélérer cette formation-là?

M. Côté (Robin) : Ça passe nécessairement par le financement de la formation effectivement, parce que ça coûte quand même assez cher, former un agent évaluateur, puis le processus est quand même assez long. Et actuellement je sais que l'école nationale, ils sont à pleine capacité. Il faut qu'ils soient capables d'en sortir 36 d'ici... Vous me parlez du mois de mars. Moi, j'avais plutôt en tête d'ici au mois de juillet. Donc, si on se rend à 130 ou à 140 agents évaluateurs d'ici le 1er juillet, c'est clairement insuffisant parce qu'on parle encore... pour l'ensemble du Québec, là. Donc, il y a 15 000 policiers au Québec. Il y aurait 140 évaluateurs de formés. Donc, on n'est même pas à 1 % de l'effectif policier de formé comme agents évaluateurs.

Mme Charlebois : Vous considérez que la situation va changer en termes de consommation, parce que, là, ce que je comprends, c'est qu'il en manquerait, actuellement, des agents évaluateurs, même avant la légalisation, là. Est-ce que je comprends bien?

M. Côté (Robin) : Je vais parler juste des services de police qui sont membres de la fédération, là. Je l'ai déjà dit, on en a cinq, services de police qui n'ont aucun agent évaluateur. On en a 15 qui n'en ont qu'un seul. Présentement, je trouve que c'est inconcevable. Actuellement, c'est inconcevable qu'il y ait un service de police qui n'ait aucun agent évaluateur. Et j'ai entendu, cet après-midi ou en fin de journée, les gens du Nunavik qui sont venus vous parler. Je ne ferai pas de cachette à personne ici que nos corps de police autochtones... Nous, on représente trois corps de police autochtones : la réserve de Mashteuiatsh, dans Roberval, on représente Nunavik puis on représente aussi les Cris de la Baie James. Et, dans ces régions-là, il n'y en a aucun, agent évaluateur. Puis je ne suis pas sûr que la Sûreté du Québec en ont autour de ça non plus. Ils vont faire quoi, eux autres? Je n'en ai aucune idée.

Mme Charlebois : ...vous pensez de prendre du monde qui sont capables de donner la formation puis les amener là-bas plutôt que de prendre du monde de là-bas, les amener quand les cohortes sont prêtes? Il faut-u être absolument à Nicolet pour avoir cette formation-là?

M. Côté (Robin) : L'école nationale pourrait vous répondre. Moi, je pense que, possiblement, le bout où est-ce qu'on parle de formation théorique, il n'y aurait probablement pas de problème à le faire là-bas. Où il y aurait certainement un problème, c'est quand on arrive à la dernière partie de la formation et que c'est une formation qui est pratique, qu'il y a des tests qui faut qu'ils soient faits sur des sujets intoxiqués et qu'il y a des tests aussi qui sont faits sur des, dans le cas de l'école nationale, comédiens qui sont formés pour agir comme s'ils étaient intoxiqués. C'est là qu'on aurait un problème. Et c'est cette dernière partie là actuellement qui cause aussi un problème parce que ça retarde dans tout le processus au niveau des agents évaluateurs.

Mme Charlebois : Combien vous estimez que ça en prendrait de plus?

M. Côté (Robin) : Oui, vas-y.

M. Nadeau (Frédéric) : Oui. En fait, les difficultés qu'on a, au fait qu'il y ait juste un agent évaluateur, par exemple, par corps de police, bien, c'est facile à comprendre. En fait, la plupart des corps de police municipaux au Québec fonctionnent avec, en fait, un nombre de quatre ou cinq équipes de patrouilleurs qui travaillent en rotation, jour, soir, nuit ou jour et nuit. Alors, évidemment, s'il y a un seul agent évaluateur de formé, on peut penser qu'il y a trois ou quatre équipes qui n'en ont pas. Donc, à chaque fois que l'équipe ou l'agent évaluateur est là, est au travail, ça va bien, là. Si on a à avoir besoin de ses services, on l'appelle. Mais, si c'est les quatre autres équipes qui sont en devoir, bien, on l'appelle en temps supplémentaire, si on est capables de le rejoindre, ou on s'en passe, là. Alors, c'est pour ça que, quand vous parlez du nombre d'agents évaluateurs, dans un monde idéal, ça en prendrait au moins un par équipe dans les corps de police. Donc là, on parle d'augmenter substantiellement le nombre qui existe actuellement.

Mme Charlebois : Ça, c'est le monde idéal. Puis le monde qui serait un petit peu plus réel... Parce que la consommation, honnêtement, puis peut-être que je me trompe, ne devrait pas tant augmenter que ça parce que ce que je constate, puis je vous partage ça, c'est qu'il y a bien des gens qui consomment actuellement, mais qui ne le disent pas, qu'on va voir surgir. Mais, en fait, ils sont, dans les faits, déjà là, là, sauf qu'ils consomment du monde non légal. Alors, vous, voyez-vous une augmentation potentielle de consommateurs arriver? Voyez-vous ça?

• (20 h 40) •

M. Côté (Robin) : Le début de ma réponse, ça va être celle-là. Je ne sais pas, à l'époque où l'alcool a été légalisé, ça a donné quoi sur les routes, puis, au moment où a voulu interdire la conduite, ça a donné quoi non plus, sauf que je sais que, si on se base sur l'expérience vécue ailleurs, dans d'autres pays, dans les États américains, on regarde les statistiques... Je n'ai jamais voulu dire puis je ne veux pas dire non plus que ça va être la même chose au Québec. J'espère que non. Mais ailleurs les statistiques en termes d'accidents et de conduite avec les capacités affaiblies par le cannabis ou autres drogues ont augmenté. Bon, pourquoi? Je ne le sais pas. Est-ce que ça va être la même chose chez nous? J'espère que non. Mais, si ça l'est, ce que je vous dis, c'est qu'il faut être prêt à y faire face puis qu'actuellement on n'est pas prêts à y faire face.

Mme Charlebois : Je ne sais pas, il ne doit pas rester tant de temps que ça, hein, M. le Président?

Le Président (M. St-Denis) : 3 min 30 s.

Mme Charlebois : Ce qu'on m'a dit, puis là ce sera à analyser, en consultation puis au forum d'experts, c'est que là où c'est arrivé, c'est qu'il n'y avait pas beaucoup... Ils nous ont avertis, là, ça prendrait des bons programmes de prévention, des bons programmes de sensibilisation. Il faut que les gens soient vraiment au courant des risques associés, un, à de la consommation, alcool et cannabis, deux, de c'est quoi, le danger de conduire en état de consommation récente... et de faire beaucoup, beaucoup, beaucoup d'éducation, beaucoup de sensibilisation. Vous, vous pensez quoi? Puis comment vous voyez ça? Comment on peut rejoindre la majorité des gens qui vont conduire? C'est quoi, l'outil le mieux pour sensibiliser ces personnes-là? Est-ce que c'est le travailleur à la boutique? Est-ce que c'est par Internet? Est-ce que c'est... Je ne le sais pas.

M. Côté (Robin) : Bien, je pense que c'est un mélange d'un petit peu de tout ça. J'ai parlé des écoles tantôt. Certainement, les messages publicitaires, certainement, les employés dans les différentes boutiques, comme vous avez mentionné, et certainement aussi des... Ça pourrait passer par les cours de conduite, entre autres, pour être sensibilisés pendant qu'ils ont les cours de conduite. Tout est bon. Tout est bon, je pense, en matière de prévention, pour avertir les jeunes qu'il y a un danger d'associé à ça. Puis c'est certain que ça ne changera pas du jour au lendemain, ça va se faire progressivement. On est conscients de ça. Changer un mode de vie, changer des habitudes de vie, ça prend du temps, mais je pense que c'est important, puis il faut que ça se fasse comme il faut en partant.

Mme Charlebois : En termes de prévention, qu'est-ce que vous pensez si on... Il y en a qui m'ont dit que ce n'était plus de la prévention, c'était de la répression, la production personnelle à zéro.

M. Côté (Robin) : Bien, ça, lorsqu'il y avait eu les audiences publiques, on avait fait part de notre préoccupation au niveau des plants de cannabis dans les maisons. Et on est très contents que vous ayez prévu qu'il n'y en aurait pas parce qu'on a toujours dit que ce serait un drainage massif, comment je pourrais dire, des effectifs policiers juste pour surveiller qui en a quatre, qui n'en a pas quatre, quelle longueur qu'ils ont puis... Ça aurait été quelque chose d'assez épouvantable. Ça fait que je pense que c'est une bonne affaire. Ça reste qu'il y a peut-être, quand même, des gens, comme ils font actuellement, qui vont continuer à nous appeler pour dire : Mon voisin, il a un plant sur son balcon. Mais, je veux dire, ça va être moins compliqué que ça soit permis d'en faire pousser dans les maisons. Ça, c'est clair.

Mme Charlebois : Merci.

Le Président (M. St-Denis) : C'est bon? Alors, je vous remercie. Je vais maintenant céder la parole au député de Labelle pour une période de 9 min 15 s.

M. Pagé : Merci, M. le Président. Alors là, ce que j'ai bien compris, c'est qu'on est devant un fait accompli, là. Il va manquer de policiers, selon vous, à temps, à moins qu'on débloque des sommes pour accélérer le processus de formation. Est-ce que c'est bien ça? Parce que ce que j'ai cru comprendre, c'est que, là, c'est juste que l'argent n'est pas au rendez-vous pour former les évaluateurs, les policiers. C'est bien ça que vous nous avez dit, là?

M. Côté (Robin) : C'est presque ça. C'est-à-dire que, oui, les services de police, je ne pense pas qu'ils aient des budgets illimités en termes de formation. Puis, pour une formation d'agent évaluateur, c'est quand même assez dispendieux, ça a été démontré. Mais le problème, ce n'est pas juste au niveau des budgets des services de police. Il y a une partie aussi du budget, une partie de l'argent qu'il faut qu'elle aille à l'école nationale pour qu'ils puissent en former plus. Mais actuellement ils sont à pleine capacité. Puis je ne les blâme pas, ils font de leur mieux, mais ils ne sont pas capables d'en former plus que 36 d'ici le 1er juillet. Donc, ce bout-là, je ne sais pas comment ça peut débloquer, à part... Puis la seule chose que je peux voir, c'est du financement, plus de financement à l'école nationale, puis ouvrir des classes, puis amener des formateurs. Il faut en former plus, mais ça passe tout par l'école nationale.

M. Pagé : Oui. Mais donc, s'il y avait des sommes d'argent supplémentaires, on pourrait en former plus et plus vite. C'est ça?

M. Côté (Robin) : Bien, effectivement, je pense que ça pourrait aider.

M. Pagé : Bon, alors... Comment?

Une voix : ...

M. Pagé : On peut les mettre là et il faut les mettre à plusieurs endroits. Une question que je vais vous poser, et je suis convaincu que, compte tenu que vous êtes essentiellement dans les municipalités, hein, vous êtes la fédération des policiers municipaux... Il y a, je pense, c'est quoi, 26, 29 corps de police municipaux au Québec?

M. Côté (Robin) : 31. 32 avec Montréal.

M. Pagé : 32 avec Montréal? O.K.

M. Côté (Robin) : Puis on est peut-être rendus à 33 avec Mercier.

M. Pagé : Vous devez être en contact beaucoup avec les travailleurs de rue. Est-ce que je me trompe? Certainement beaucoup.

M. Côté (Robin) : Si vous parlez de la fédération comme telle, à la fédération, non. Les policiers municipaux, oui, certaines municipalités font affaire avec des travailleurs de rue, effectivement.

M. Pagé : Puis c'est une question, je pense, qu'on n'a jamais abordée. Mais, de façon instinctive, j'ai l'impression que les travailleurs de rue pourraient jouer certainement un rôle assez important, parce que les travailleurs de rue, de par leur définition, la plupart, c'est des travailleurs sociaux, et ils sont très présents sur le terrain... et qui peuvent faire de la prévention beaucoup, beaucoup. Est-ce que vous croyez que ces gens-là pourraient jouer un rôle fort utile, dans toute cette prévention que l'on souhaite faire, et évidemment, bien, en avoir plus sur le terrain? Parce que moi, je pense à une de mes municipalités, là. Ils n'avaient pas le financement pour en avoir un. Donc, ils se sont associés avec d'autres municipalités autour. On a fait un pot pour réussir à en avoir un qui se promène dans plusieurs municipalités. Mais plusieurs élus craignent évidemment à ce qu'il y en ait trop, de gens qui consomment dans leur municipalité... et qui me disent : Un travailleur de rue, ça pourrait être utile chez nous. Comment vous voyez ça?

M. Côté (Robin) : Bien, oui, je vois ça d'un bon oeil, effectivement, parce que, dans différents centres-villes de différentes municipalités, il y en a, comme vous le dites, déjà, des travailleurs de rue qui sont là. Malheureusement, ils ne peuvent pas toujours être là à plein temps. Vous l'avez dit aussi, ils ont toujours un problème, les regroupements de travailleurs de rue, à se financer, mais ils font un travail exceptionnel avec les moyens qu'ils ont pour l'instant. Heureusement, les jeunes sont près de ces gens-là et ils se sentent écoutés par ces gens-là. Puis je pense qu'ils font un bout de travail que la police ne peut pas nécessairement faire. Mais il y a quand même un contact qui se fait entre ces gens-là puis les sociocommunautaires, comme je vous parlais tantôt.

M. Pagé : ...en fait, là.

M. Côté (Robin) : Bien oui, il faut arrimer un peu le travail qui se fait, puis ça ne donne rien de le dédoubler. Puis eux font leur bout, on fait notre bout, puis, avec ça, je pense que ça peut donner une formule gagnante.

M. Pagé : O.K. Intéressant, très intéressant. Tolérance zéro, moi, je veux bien. Par contre, vous savez comme moi que... Bon, on dit : Avant longtemps, on va peut-être avoir un moyen pour détecter le niveau de THC. Mais vous savez comme moi, puis on l'a entendu souvent dans la tournée, que le niveau de THC peut être détecté, mais ça peut faire des jours, même, dans certains cas, des semaines, que la personne n'a pas consommé. Alors, je pense que, quand vous parlez des gens qui sont formés, vous le dites, c'est des évaluateurs, hein? Vous les avez appelés comme ça parce que c'est des gens qui vont être capables d'évaluer la capacité de conduire. À notre humble avis, ce qu'il faut évaluer, c'est cette capacité de conduire beaucoup plus que le niveau de THC parce que, pour quelqu'un qui a déjà consommé, moi, ce qu'on me dit... Puis j'ai déjà, il y a une trentaine d'années, essayé ça. Le lendemain, j'avais une capacité de conduire... j'avais peut-être encore des traces de THC.

Alors, ne serions-nous pas mieux de prévoir un minimum, parce que la loi fédérale prévoit qu'on peut aller, je pense, jusqu'à quatre ou cinq nanogrammes, pour ne pas que des gens soient détectés avec deux nanogrammes, mais que ça fait une semaine qu'ils n'ont pas consommé et qu'ils sont parfaitement aptes à pouvoir conduire? Comment vous voyez ça?

• (20 h 50) •

M. Nadeau (Frédéric) : Oui. Bien, en fait, effectivement, toute la question du degré de THC est au coeur des préoccupations des policiers aussi, là. Et on n'est pas biologistes, on ne peut pas vous conseiller là-dessus, sur le nombre de degrés, et tout ça. Moi, ce que j'ai vu, évidemment, bien de l'extérieur, c'est que c'est très difficile de faire une adéquation entre le degré de THC et les capacités, là, ou l'affaiblissement des capacités. Par contre, c'est là où on met l'emphase, sur l'agent évaluateur, parce que l'agent évaluateur, c'est son rôle de faire ça, d'évaluer les capacités des gens, que les capacités soient affaiblies en raison du cannabis ou de toute autre drogue, là. Donc, ça ratisse plus large qu'un appareil qui ne mesurerait que le THC parce qu'il y a évidemment toutes les autres drogues.

Et la façon dont ça fonctionne avec les agents évaluateurs puis les autres policiers, c'est qu'on va commencer par vérifier l'alcool parce que c'est plus simple puis c'est plus facile. La problématique, puis les gens qui risquent de passer entre les mailles du filet, si j'ose prendre cette expression-là, c'est que, s'ils n'ont pas consommé d'alcool, mais qu'ils ont quand même les capacités affaiblies, comme a dit Robin tantôt, bien là c'est de monter le dossier, là. Et, tantôt, quand on parlait de prévention, bien, il y a l'aspect dissuasif aussi, hein? On peut parler de publicité. On peut parler aussi de sanctions plus sévères. Mais, si sur le terrain, il n'y a pas de policiers qui sont capables de monter les dossiers, bien, on ne peut plus se poser des questions sur la présence d'un effet dissuasif, là, à ce moment-là.

M. Pagé : Mais, tu sais, vous comprenez très bien le dilemme dans lequel nous nous trouvons, là. Normalement, quand on fait une loi, il faut être capable de la faire appliquer. Et là on nous dit : On va faire une loi tolérance zéro, mais on n'est pas capables de la faire appliquer. Alors, c'est la raison pour laquelle, de plus en plus, je réfléchis et je nous questionne, à savoir : Si on n'est pas capables de la faire appliquer, ne sommes-nous pas mieux d'aller à quelque part entre le zéro et ce que le fédéral nous suggère d'aller, comme certaines provinces ont fait, entre autres, pour avoir cette petite marge? Parce que, bon, j'imagine que, si on vous détecte un ou deux nanogrammes, mais que justement ça fait une semaine, bien, probablement aussi que ça permettrait de protéger ce citoyen qui risque de se retrouver avec une suspension de permis de conduire, et, si c'est une récidive, bien, avec tous les effets. J'essaie de trouver la solution parce qu'on est vraiment dans un vide à quelque part. Et je crains que la tolérance zéro, même si on est d'accord avec le principe... parce que c'est un message qu'on veut envoyer, mais je crains qu'il soit non applicable, et qu'on se retrouve avec des cas où il y a des gens qui vont avoir des suspensions de permis de conduire quand, pourtant, ils avaient toute la capacité de conduire. Alors, je vais vous dire... Probablement, comme moi, vous n'aurez pas la réponse mais... Oui?

M. Côté (Robin) : Actuellement, c'est un risque. Vous avez raison. On a évalué la même chose que vous. Dans un monde idéal, oui, la tolérance zéro, il faudrait qu'elle soit appliquée. Puis, oui, il faudrait qu'on ait les appareils en conséquence de... Mais, pour l'instant, puis je pense que Mme la ministre l'a dit, la tolérance zéro, actuellement, ne peut pas être appliquée parce qu'on n'a pas les outils nécessaires. Et, quand on les aura, bien, tant mieux, on l'appliquera avec plaisir. Mais, en attendant, on est un peu comme vous, on est dans le vide.

M. Pagé : Il y a mon collègue qui avait...

Le Président (M. St-Denis) : On n'a plus de temps, malheureusement.

M. Pagé : Ah! Désolé.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, je vais maintenant...

Une voix : ...

Le Président (M. St-Denis) : Pardon? C'était 9 min 15 s. Alors, je vais passer la parole au député de Borduas pour une période de 6 min 15 s.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Côté, Me Nadeau, bonjour. Bien, bonsoir. Merci d'être présents aux travaux de la commission.

Sur les lieux publics actuellement, le projet de loi prévoit que, dans les endroits publics, on va pouvoir consommer dans les parcs, tout ça. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Côté (Robin) : Bien, je pense que c'est une bonne idée. La subtilité que j'avais comprise là-dedans, et sans l'avoir analysée en profondeur, c'est que, dans les parcs où il y a présence d'enfants, puis vous me corrigerez si je me trompe, puis je pense que ça, c'est une excellente idée... Maintenant, comment, au niveau du travail policier, on va être en mesure de vraiment contrôler... Est-ce qu'il va y avoir des zones spécifiques qui vont être prévues pour dire : Bon, bien, dans tel coin, les gens vont avoir eu le droit d'en consommer, puis, ailleurs, non? Parce qu'actuellement, on sait très bien que, dans les parcs, il s'en consomme déjà, du cannabis. Pendant les différents festivals, pour faire les services d'ordre, et tout ça, de l'odeur de cannabis, là, il y en a quand même régulièrement, là. Donc, comment, sur le terrain et en pratique, ça va se contrôler? Bien, pour l'instant...

M. Jolin-Barrette : Je vais poser ma question à l'inverse. Actuellement, pour l'alcool, souvent, il y a des règlements municipaux qui interdisent la consommation d'alcool sur la voie publique ou dans les parcs. Est-ce que, pour l'application du travail policier, ça serait plus simple d'avoir une réglementation provinciale qui interdirait ça ou... à moins... la FQM nous a proposé de développer un règlement-cadre pour la majorité des municipalités, ou, troisième option, l'UMQ est venue nous voir puis a dit : Bien, écoutez, nous, laissez-nous développer notre réglementation dans nos parcs puis sur la voie publique. Alors, pour l'application du travail policier, qu'est-ce qui est plus simple pour les policiers et les patrouilleurs en fonction?

M. Côté (Robin) : Je ne pense pas qu'il y ait plus de difficultés à appliquer une loi provinciale qu'une loi municipale ou un règlement municipal. La façon d'appliquer, théoriquement, devrait être la même. L'objectif recherché, c'est de faire cesser l'infraction, c'est toujours ça. J'imagine que ce dont vous me parlez... C'est parce que, si les municipalités incluent ça dans leurs règlements municipaux, au bout de la ligne, ça se finirait par possiblement l'émission d'une contravention. Donc, si c'est ça qui est choisi, ça sera ça. Ce n'est pas quelque chose qui est compliqué à appliquer pour un policier, un règlement municipal. Donc, un ou l'autre, on va appliquer le règlement comme il va être fait.

M. Jolin-Barrette : Sur la question du 150 grammes à la maison, là, vous dites, à la page 5 de votre mémoire : C'est difficile et il peut y avoir des difficultés d'application. Qu'est-ce que vous voulez dire par là?

M. Côté (Robin) : Bien, premièrement, difficultés d'application, dans le sens où on l'a écrit... C'est que moi, je présume que vous en avez plus que 150 grammes, je saisis votre cannabis parce que vous en avez plus que 150 grammes, j'amène ça au poste de police, je fais la pesée, puis il y en a 130. Là, je fais quoi? Je le garde? Je vous le retourne parce que vous aviez le droit de l'avoir? Il y a un manque de précision à ce niveau-là. Puis on fait bien des farces avec ça, l'APPQ l'a répété aujourd'hui, moi, je l'ai dit dans les mois précédents, est-ce qu'on serait mieux finalement de se traîner une balance dans notre véhicule de patrouille puis on va le peser sur place, comme ça, on va en avoir le coeur net? Mais, je veux dire, le contexte ne se présente pas toujours favorablement. Si je rentre en quelque part où... parce qu'il y a une plainte de bruit, la chicane, excusez l'expression, est pognée puis il y a un sac de pot dans le milieu de la table, bien... Vous comprenez que ça se passe tout en même temps, là. Ça fait que de quelle façon ça va être appliqué? Est-ce qu'on va avoir à le retourner, comme je vous dis, ce qu'on va avoir saisi, parce que, là, ça ne devient plus une pièce à conviction, c'est légal, ça fait qu'il faut que je le retourne au propriétaire?

M. Jolin-Barrette : Mais nous, là, pour nous outiller... Je comprends la difficulté, puis d'avoir une balance... Mais vous nous invitez à quoi mettre dans le projet de loi? Parce que, là, actuellement, le fédéral disait 30 grammes, 150 à la maison. Le gouvernement provincial a proposé la même chose. Mais il y a quand même des difficultés d'application. Est-ce que vous avez une piste de solution pour nous au niveau de la réglementation? Tantôt, il y a des gens qui nous disaient : Bien, écoutez, on ne peut pas nécessairement faire la distinction, à l'oeil, sur la quantité. Est-ce qu'on devrait restreindre cette quantité-là pour avoir une plus petite quantité? Je cherche des pistes de solution.

M. Côté (Robin) : Bien, je vous avoue que nous autres aussi, on en cherche, là, actuellement. Puis je réfléchis tout haut. Puis, si ça a été prévu, je n'en suis pas certain. Quand l'achat de cannabis va se faire, est-ce qu'il va y avoir une espèce de certificat qui va être remis à celui qui va avoir acheté le cannabis pour dire : Ça vient de tel magasin, j'ai eu telle quantité, puis ça m'a coûté tant? Est-ce que ça va être un certificat qui va devenir un genre de preuve que le contenu du sachet a été acheté légalement, un? Puis, deux, la quantité qu'il y a dedans, c'est ce qui est écrit sur le papier? Je ne le sais pas comment ça va fonctionner. Est-ce qu'il y a un mécanisme de ce type-là qui pourrait être mis en place? Je n'en ai pas la moindre idée. Puis c'est pour ça que je vous dis que ça a vraiment besoin d'être clarifié, tout ce bout-là, là.

M. Jolin-Barrette : Au niveau des agents évaluateurs, là, il y en a seulement 95. Ça, ça veut dire que parfois il y en a qui sont en congé quand les policiers font une arrestation. Pour la cour, est-ce que c'est difficile, dans le fond, en termes de disponibilité? Parce que, j'imagine, l'agent évaluateur doit se rendre à la cour, quand il y a un procès, témoigner. Là, à ce moment-là, il n'y en a pas d'autres au service de police, là.

M. Côté (Robin) : Bien, ça, c'est certain, que, si l'agent évaluateur est à la cour, ça laisse le service à découvert. Par contre, la cour, c'est normalement le jour. C'est sûr, je ne suis pas en train de vous dire que des conduites avec capacités affaiblies, il n'y en a pas le jour. Il y en a à toutes les heures de la journée. Mais il y a plus de probabilités que ça arrive le soir ou la nuit. Mais, même là...

Le Président (M. St-Denis) : 10 secondes.

M. Jolin-Barrette : ...pas assez d'agents évaluateurs, puis qu'il n'est pas disponible, est-ce qu'on risque de ne pas pouvoir poursuivre l'individu qui a commis une infraction?

M. Côté (Robin) : Bien, c'est ce qu'on a dit tout à l'heure. Ça laisse ce bout-là dans le vide puis que ça fait en sorte qu'on ne peut pas compléter le dossier puis porter des accusations parce qu'on n'a pas la ressource qu'on a besoin d'avoir.

Le Président (M. St-Denis) : Alors, je vous remercie. Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.

 Et la commission ajourne ses travaux au vendredi 8 décembre, après les affaires courantes, où elle poursuivra son mandat.

Bonne soirée, tout le monde.

(Fin de la séance à 20 h 59)

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