(Onze
heures trente minutes)
Le
Président (M. St-Denis) :
Alors, à l'ordre, s'il
vous plaît! Ayant constaté le quorum,
je déclare la séance de la Commission
de la santé et des services sociaux
ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
s'assurer que la sonnerie de leurs appareils électroniques soit bien sur le
mode vibration.
Alors, la commission
est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations
particulières sur le projet de loi n° 157, Loi
constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant
le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La Secrétaire :
Oui, M. le Président. M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine) sera remplacé par
M. Plante (Maskinongé); Mme Hivon (Joliette) sera remplacée par
M. Leclair (Beauharnois); M. Turcotte (Saint-Jean) sera remplacé par
M. Bourcier (Saint-Jérôme); Mme Lavallée (Repentigny) sera remplacée
par M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs); et M. Paradis (Lévis) sera remplacé par
M. Jolin-Barrette (Borduas).
Auditions (suite)
Le Président
(M. St-Denis) : Alors, merci. Alors, ce matin, nous entendrons
les groupes suivants : l'Ordre des travailleurs sociaux et thérapeutes
conjugaux et familiaux du Québec et SecureKey et Levio.
Alors,
je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Ordre des travailleurs sociaux
et thérapeutes conjugaux et familiaux
du Québec. Et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, puis nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter et puis à commencer votre exposé. Merci.
Ordre
des travailleurs sociaux et des thérapeutes
conjugaux et familiaux du Québec (OTSTCFQ)
Mme Ouimette
(Guylaine) : Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, bonjour. En
tant que présidente de l'Ordre des
travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, qui
regroupe 13 600 professionnels du domaine de la santé mentale et des relations humaines, j'ai le plaisir
de vous présenter en substance nos commentaires, observations et recommandations en lien avec le projet de loi
n° 157. Je vous remercie de nous permettre de prendre la parole dans cet espace démocratique qu'est
l'échange autour d'un projet de loi aussi important pour la société
québécoise.
Avant de poursuivre,
permettez-moi de vous présenter M. Alain Hébert, travailleur social,
chargé d'affaires professionnelles à
l'ordre. M. Hébert possède une expérience qui s'échelonne sur plusieurs
années dans le domaine de la dépendance. Son apport sera des plus
éclairants et précieux pour nourrir vos réflexions.
Vous
le savez, nous le savons tous, les Québécois ne sont pas tous confortables avec
l'idée, dans moins d'un an, qu'il sera possible d'acheter du cannabis en
toute légalité dans un établissement de l'État comme on achète une bouteille de vin à la SAQ. La population est
inquiète, des parents se questionnent, et des enseignants souhaitent se
préparer pour faire face à cette nouveauté.
Cela dit, entendons-nous sur une chose, nous sommes placés devant le fait
accompli, puisqu'en juillet 2018 la
consommation de cannabis sera légale. Il s'agit simplement de bien s'outiller
en conséquence.
Une autre chose nous
semble éloquente, personne ne souhaite que la législation du cannabis fasse en
sorte que son usage gagne du terrain. D'ailleurs, à cet effet, nos experts se
font rassurants, puisque, selon eux et selon plusieurs autres experts en la
matière comme les chercheurs de l'institut québécois de santé publique, la
législation n'entraînera pas un accroissement majeur de la consommation, sauf
peut-être temporairement chez des personnes qui voudront expérimenter ce
produit.
La
bonne nouvelle, c'est que ces gens consommeront un produit contrôlé et
sécuritaire. Ils seront possiblement plus satisfaits de ne pas ou de ne plus encourager le crime organisé, puisque
le mandat de la Société québécoise du cannabis est d'élaborer une
stratégie de mise en marché concurrentielle en matière d'accès et de prix de
vente.
Donc,
le vrai défi consiste davantage, selon nous, à créer des conditions
d'encadrement et de gestion socialement responsable de la consommation du cannabis de même que de répondre aux
besoins de la population en termes de services sociaux appropriés,
notamment en ce qui a trait à la prévention, l'information et également, bien
sûr, l'intervention dans les cas de surconsommation.
Afin
de faire une gestion socialement responsable, il est primordial d'agir en amont
et de manière préventive plutôt que curative. Notamment, nous sommes d'avis qu'il est
urgent de créer des contenus d'information, d'éducation et de sensibilisation. Pour la population jeunesse, vous
aurez à être innovants dans les messages et les approches à favoriser.
Ces jeunes sont branchés non pas sur la télévision ou la radio, mais bien sur
les réseaux sociaux et les applications pour téléphones intelligents. Nous
croyons que la créativité devrait être au rendez-vous afin de les rejoindre.
En
tant que parlementaires, vous avez donc ce grand défi à relever afin de
tout mettre en oeuvre et de prendre les dispositions nécessaires, y
compris au niveau budgétaire, pour que l'agir suive le désir.
Évidemment,
personne n'est en mesure de prédire quels seront les impacts de la législation
du cannabis sur la santé mentale des
consommateurs. Toutefois, on doit s'attendre à ce qu'un meilleur contrôle
du produit permette de transmettre des
informations justes, simples pour éclairer le choix du
consommateur et, par le fait même, aider les gens à consommer de façon
avisée et responsable.
Parlons un peu des besoins de services sociaux
dans ce nouveau contexte. Dans une logique de réduction de méfaits, il faut nécessairement compter sur une
intensification des services préventifs de première ligne, de
réadaptation et de développement des communautés par des
actions intersectorielles et dans les milieux de vie des jeunes et des
adultes. Les principes sur lesquels se sont
construits les programmes de prévention au sujet de l'alcool et du tabac, par
exemple, pourraient vous servir de références. Il sera nécessaire de mettre en
place des programmes d'éducation, de détection et d'intervention précoce
adaptés aux réalités des jeunes, à proximité des jeunes.
En
collaboration avec les travailleurs sociaux dans divers milieux, incluant les
établissements d'enseignement primaire et secondaire, ces programmes de
sensibilisation doivent viser à développer des réflexes de consommation
réfléchie et avisée chez des jeunes qui débutent ou sont susceptibles de
consommer du cannabis. D'autres l'ont dit, l'approche
par la peur ne fonctionne pas pour développer la compétence de
responsabilisation. Les jeunes ont cependant besoin d'être informés et
soutenus pour faire des choix de consommation sécuritaire.
Dans la
plupart des cas, les CLSC demeurent la porte d'entrée pour obtenir ces services
ainsi que dans les écoles. L'accès de
proximité est la bonne voie. Or, vous le savez, le volet services sociaux
généraux a subi d'importantes coupes budgétaires
depuis des décennies et encore plus au cours des dernières années. À notre
avis, un réinvestissement massif sera donc nécessaire afin de répondre
aux attentes en prévention et en intervention auprès des personnes ayant
développé des problèmes de consommation.
Votre préoccupation en tant que législateurs, en
regard de la sécurité routière, est louable et découle vraiment d'une volonté
de gestion socialement responsable de la consommation du cannabis. Toutefois,
le fait de légaliser la consommation de cannabis, d'une part, et de privilégier
une politique de tolérance zéro, d'autre part, nous semble paradoxal et difficilement applicable. Par
exemple, la quantité de THC en présence dans l'organisme est influencée
par différents facteurs comme le mode de
consommation, la dose et la fréquence d'utilisation, et le THC demeure
détectable dans l'organisme plusieurs jours après usage, contrairement à
l'alcool.
À cet égard,
nous enjoignons le législateur à rechercher d'autres avenues de la
criminalisation dans une optique de
réduction des risques et d'être vigilant dans l'équilibre à conserver entre
présence du produit détectable dans la salive et le lien avec les capacités affaiblies pour la conduite automobile.
D'ailleurs, nous ne sommes pas les premiers à avoir soulevé cet enjeu.
Enfin, rappelons-nous que la législation et
précipitation ne font pas bon ménage. La préparation des acteurs sociaux et des
professionnels qui évolueront dans le contexte de légalisation du cannabis
devra s'intensifier afin que les services soient au rendez-vous dès l'été 2018,
au moment où la loi fédérale sera appliquée.
Je poursuis cette présentation en citant
quelques-unes des recommandations contenues dans notre mémoire. L'État doit s'engager formellement à verser une
part significative des recettes en provenance de la vente du cannabis au
Fonds de prévention et de recherche en matière de cannabis, pour réinvestir
en éducation, en prévention et en intervention auprès
des personnes pouvant développer des problèmes liés à la consommation.
En guise de conclusion, l'Ordre des travailleurs
sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec enjoint le législateur
à considérer l'humain avant tout, particulièrement lorsqu'il est nécessaire de
prendre en compte l'impact des déterminants
sociaux de la santé, qui, comme il a été, et largement, établi, occupe une
place incontournable sur l'échiquier. En ce sens, il faut évaluer
l'environnement et les conditions de vie de la personne, pouvant entraîner ou exacerber le stress, la désorganisation et qui
sont susceptibles de mener à la surconsommation d'alcool, de
médicaments, de cannabis ou de toute autre
substance psychoactive pour modifier le comportement, la conscience et l'humeur
d'une personne. Je vous remercie de nous avoir entendus.
• (11 h 40) •
Le
Président (M. St-Denis) :
Alors, je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant
débuter la période d'échange. Alors, Mme la ministre, la parole est à
vous.
Mme Charlebois : Merci, M.
le Président. Bonjour. Bonjour à mes collègues
du gouvernement et mes collègues des oppositions. Voilà, c'est notre dernière journée pleine;
demain, bien, on aura une demi-journée, vendredi. Mais c'est toujours
aussi intéressant que d'avoir des présentations.
D'abord, saluer Mme Ouimette et
M. Hébert, qui sont avec nous. Merci d'avoir pris le temps de réfléchir à
la question et de nous soumettre votre mémoire. C'est fort intéressant. J'ai beaucoup apprécié vos propos sur la prévention. Je
vais commencer avec ça parce que ça nous apparaît, depuis le début, important.
Tout le monde nous a parlé, tout au long des
consultations, tant le forum d'experts mais que les consultations que nous
avons tenues avec le public, de prévention, alors c'est pour nous un aspect
important. Vous avez souligné quelque chose
de fort important pour nos jeunes, les téléphones intelligents. Ça, ça va être
certainement quelque chose sur lequel...
c'est un sujet sur lequel on va devoir réfléchir parce que nos jeunes sont de
plus en plus là-dessus, puis c'est eux qu'on
veut protéger, en tout cas, donner la bonne information. Alors, il y aura
certainement une bonne réflexion de faite en matière de prévention
là-dessus.
Dites-moi, est-ce que
vous savez que, dans le projet de loi, il y a 25 millions d'inscrits dans
la loi pour les cinq prochaines années, de
garantis dans la loi? Vous savez aussi que si... Parce que, les premières
années, nous ne croyons pas que la Société québécoise du cannabis devrait dégager des sommes,
mais, si d'aventure ça arrivait plus vite que... plus rapidement que tard, est-ce que vous êtes au
courant que... Je pense que je suis fatiguée, j'ai de la misère à faire des
phrases comme du monde ce matin. On va
recommencer ça. Non, mais... puis je ne me suis pas couchée tard, c'est ça, le
pire!
Une voix :
...
Mme Charlebois :
Bien non, mais, hein, à 80 heures par semaine, 90 heures, à un moment
donné, ça arrive. Alors, je disais
donc que le minimum garanti de 25 millions pendant cinq ans... mais que,
si la Société québécoise du cannabis faisait
éventuellement des profits, on va dire le mot, il y avait des revenus dégagés
de la Société québécoise du cannabis, ce qu'on n'anticipe pas pour les
premières années parce qu'il y aura l'instauration de toutes les boutiques, le
site en ligne, etc., mais, si ça arrivait
plus vite que prévu, vous savez que les revenus qui vont y être dégagés vont
servir d'abord à payer la dette que
va avoir engendrée la Société québécoise du cannabis pour instaurer ses
boutiques, son site Internet, parce qu'on a toujours dit que c'est le
cannabis qui allait payer pour le cannabis et non les taxes et les impôts des
citoyens. Deuxième élément, il faut qu'elle
paie aussi ses frais d'opération depuis le jour un. Mais, quand tout ça va être
réglé, vous savez que plus de la
moitié de la somme excédentaire, après les paiements dont je viens de vous
faire mention, va s'ajouter aux 25 millions.
Vous savez aussi que
ce qu'on souhaite faire, c'est ramener les consommateurs d'un marché illicite
vers un marché licite. Mais on ne souhaite
pas, puis c'est indiqué dans la loi, qu'il y ait de promotion, d'escompte de
quantité puis de programme Inspire, respire
et soupire. Ça n'arrivera pas, ce n'est pas prévu dans le projet de loi, puis
je pense que mes collègues sont
d'accord avec moi, dans l'ensemble, que ça n'a pas de bon sens qu'on ferait de
la promotion pour vendre du cannabis.
Alors, est-ce que
vous considérez que le 25 millions plus les profits éventuels, plus de la
moitié des profits éventuels après avoir payé sa dette, ses opérations et tout
le kit, soit un bon point de départ? Parce que ça, c'est déjà inscrit dans la
loi. Est-ce que vous convenez que... Parce que c'est une première, je pense,
que quelqu'un écrive des montants dans une loi. Alors, est-ce que ça vous
satisfait, vous?
Le Président
(M. St-Denis) : Mme Ouimette.
Mme Ouimette
(Guylaine) : Oui. Merci. En fait, avant de passer la parole à
M. Hébert à ce sujet, je vous dirais que 25 millions pour rehausser rapidement, actuellement, l'accès,
de développer déjà des outils de prévention et d'information pour conscientiser les Québécois, d'assurer de
rehausser l'accès à des services sociaux à proximité, autant des jeunes
que pour les adultes, je ne suis pas
comptable, je ne suis pas en mesure d'évaluer. C'est un geste qui est quand
même reconnu, on sent vraiment de
votre part le besoin qu'il y ait un encadrement. Est-ce que c'est suffisant?
Moi, je ne suis pas en mesure de me prononcer sur ça, mais on reconnaît
le geste de le faire.
Surtout
que, bon, quand on parle du fonds de recherche et d'éventuellement que des
argents et les surplus vont aller à
cet endroit-là... Parce que, pour nous, la grande préoccupation également,
c'est que le gouvernement dépose un bilan formel qui va offrir un
portrait complet des impacts du projet de loi cinq ans après son entrée en
vigueur afin que des correctifs nécessaires
soient apportés le cas échéant. Ça, c'est la recommandation 10 que l'on
fait. M. Hébert, est-ce que vous avez quelque chose à dire sur ce
sujet?
M. Hébert (Alain) : Oui. Écoutez, c'est toujours difficile, dans des
chiffres précis, de mesurer la concordance entre les montants d'argent
investis et les besoins en termes de population. Mais, tu sais, rapidement, si
on réfléchit, on dit : 25 millions, cinq ans, 5 millions par
année, 16 grandes...
Mme Charlebois :
...millions par année pendant cinq ans.
M. Hébert (Alain) : ... — par année?, bon — 16 grandes régions du Québec, ça veut
dire 1 million point quelques par
grande région du Québec. Est-ce que c'est suffisant pour développer des
services préventifs intensifs, qui ont rétréci, là, il faut l'admettre quand même, comme peau de
chagrin dans les dernières années? C'est sans doute un bon point de
départ. Et je pense que de mentionner qu'il
puisse y avoir un montant d'argent qui y est associé, de prévoir ensuite que
des recettes supplémentaires puissent nourrir les programmes de
prévention, c'est certainement un apport et c'est à saluer.
Est-ce que c'est suffisant?
Quand on sait combien coûtent le développement de projets, la réalisation de
ces projets-là, surtout si on veut que les
projets ne soient pas seulement ponctuels, mais qu'ils deviennent des
programmes sociaux installés dans les
communautés, ça serait difficile pour nous de considérer que c'est suffisant
pour le moment, connaissant la réalité terrain aussi.
Mme Charlebois :
Je veux vous dire que ce n'est pas juste 25 millions, là. C'est ça que je
vous disais. C'est, une fois payés la dette et
les frais d'opération, il y aura l'excédent qui va aller en plus du
25 millions, d'une part. D'autre part,
pour ce qui est des budgets, moi, ça fait trois ans et presque et demie, là,
que je suis ministre déléguée aux Services sociaux, je pourrais vous dire
Réadaptation, Protection de la jeunesse, tout le kit, là...
M. Hébert
(Alain) : Et les autres aspects.
Mme Charlebois :
...les budgets n'ont pas rétréci. Au contraire, ils ont augmenté. Ça fait que
je vous invite à la prudence.
Troisième élément. Je prends en note
votre recommandation 10 parce que nous autres, on a prôné pour un
rapport de mise en oeuvre trois ans après — pas cinq ans, trois ans.
Parce qu'on s'est dit : Pour le premier rapport, pour la première révision, il faut que ça aille rapidement,
mais pas trop, il faut qu'on ait quand même un portrait de la situation.
Alors, je comprends que, normalement, c'est
cinq ans, mais j'entends votre recommandation. Mais on favorise le trois
ans pour être capables de réagir rapidement.
Puis
soyez assurés qu'on va se garder une certaine souplesse pour avoir des leviers
pour pouvoir agir rapidement, s'il y
avait des choses à revoir rapidement, sans attendre tout le processus
législatif. Je comprends que... j'ai des collègues qui me disent :
On peut revoir un projet de loi à tous les ans. Mais, vous savez, les
commissions parlementaires sont tellement occupées avec plusieurs projets de
loi, il vaut mieux, quand on fait une loi, prévoir déjà les échéanciers qui
sont plus raisonnables.
Alors,
j'ai le goût de vous demander : Dans les programmes de prévention que vous
souhaiteriez voir sur la table, outre les programmes de prévention qui
existent déjà, qu'est-ce que vous voudriez voir s'ajouter dans le cadre du
25 millions par année, là? Puis ce n'est pas nécessairement une
répartition par régions administratives, il y aura des programmes nationaux, il
y aura des programmes plus locaux, mais on va voir comment on va répartir ça.
Mais, si je pars du principe que vous
pensiez... c'était 25 millions pendant cinq ans, 5 millions par
année... Je pensais que vous alliez me
dire que 25 millions par année, ça allait être bon, mais, bon! Qu'est-ce
que vous voudriez voir dans un bon programme de prévention?
• (11 h 50) •
M. Hébert
(Alain) : Écoutez, c'est sûr que... puis on pourrait faire d'autres
types de calculs et se poser puis réfléchir
aussi à des questions de cohérence, là. On pourrait, par exemple... je ne sais
pas si vous avez eu l'occasion
de chiffrer, par exemple, les sommes investies en réadaptation, les sommes
investies en conséquences sociales dans la prévention
qu'on ne fait pas. Et je pense qu'on parlerait plutôt de centaines de
millions et non pas de 25 millions. Alors, ce qu'on vous dit, c'est : Oui, c'est un pas dans la bonne direction. Est-ce que
ça nous apparaît à première vue suffisant? Non.
La question qu'on
peut se poser... parce que, justement, vous nous posez la question sur les programmes
de prévention à développer, c'est qu'on a vraiment
intensifié une logique, dans les programmes de prévention, à construire des programmes
de prévention qui sont fondés sur une logique de réduction des méfaits et non
pas seulement de réduction ou d'abstention
de la consommation, comme c'est encore largement fait. Et même, on
voit, dans la politique de prévention santé, que les objectifs en lien avec la consommation d'alcool et de
drogue sont formulés en termes de diminution. Ils ne sont pas formulés en
termes de réduction des méfaits, à moins qu'il y ait quelque chose qui nous ai
échappé. Vous saurez nous le dire.
Donc,
dans ce sens-là, la logique de prévention, quand on la fait en
milieu de vie, auprès des jeunes, auprès des adultes, on doit partir du principe qu'on s'adresse à des gens qui n'ont
pas encore développé de problème avec les produits. Il faut changer le paradigme avec lequel on s'adresse à ce moment-là à la population, qui n'est pas la population qui vit nécessairement
les problèmes. Et, malgré l'évolution et des tentatives intéressantes en termes
de programmes, dans le passé, on ne pense pas, nous, en tout cas avec ce qu'on
connaît sur le terrain, qu'on est en mesure rapidement de développer des programmes de prévention
adéquats et suffisants. Et on pense que pour le faire, bien sûr,
ça prend une question... il y
a une question de financement, il y a une question de coordination, il y a une question
d'agencement avec les données de la
recherche, il y a une question de conception, il y a une question
de projet pilote, de monitorage, et tout. Et ça, c'est beaucoup
d'argent.
Et
par rapport à ce qu'il
y a... vous mentionniez tantôt,
les budgets au
niveau des services sociaux, en tout cas, ce n'est
pas ce que nous, on entend des travailleurs sociaux sur le terrain.
Mme Charlebois :
...les chiffres qui le prouvent. Ça fait que...
M. Hébert
(Alain) : C'est possible, mais, sur le terrain...
Mme Charlebois :
Et j'ai des études de crédits. Non, mais...
M. Hébert
(Alain) : ...ce que nous, on
voit, c'est des travailleurs sociaux qui ont de moins en moins l'occasion d'aller
en milieu de vie, en milieu scolaire, de travailler en concertation avec les organismes
de milieu, des travailleurs sociaux qui ont de
plus en plus des mandats pour
travailler en réadaptation et même en protection de la jeunesse. Et les services sociaux de première ligne, dans ce qui nous est rapporté, à tout le moins, je ne conteste pas vos chiffres, bien sûr, mais c'est une réalité différente.
Mme Charlebois :
En tout cas, vous viendrez à l'étude des crédits, on va pouvoir vous montrer...
M. Hébert
(Alain) : Je ne conteste pas ça. Je vous parle du terrain.
Mme Charlebois : Mais on va pouvoir... Oui, mais moi aussi, je
fais beaucoup de terrain, puis je sens que plus on s'approche de la campagne électorale, je vais
le dire comme ça, plus il y a des discours comme vous me donnez parce
qu'il y a des gens qui veulent positionner
des choses. Puis c'est louable, c'est normal, ça fait partie de la trajectoire.
Mais il ne faut pas prétendre qu'on baisse les services. Au contraire,
on les augmente.
M. Hébert
(Alain) : Oui. Ça fait quand même cinq ans qu'on tient ce discours, et
un petit peu plus, mais, bon, on clôt là-dessus...
Mme Charlebois :
Bien, écoutez, moi, ça fait trois ans que je suis ministre, puis je peux vous
dire que je fais le terrain, je ne me tiens
pas au 15e étage du ministère de la Santé, là. Puis je peux vous le
garantir qu'on ne fera pas un débat là-dessus ici, aujourd'hui, avec
vous, mais...
M. Hébert (Alain) : C'est très
bien.
Mme Charlebois :
...je peux vous garantir qu'on n'est pas en réduction de travailleurs sociaux,
on n'est pas... au contraire. Au
contraire, on cherche à en former plus, on cherche à en avoir plus sur le
terrain. Mais est-ce que les gens souhaitent en avoir plus? Je suis
capable d'entendre ça, de le comprendre. Mais de me dire que je les ai coupés,
ça ne se peut pas.
Ceci étant
dit, revenons à l'essence de la loi, du projet de loi. Qu'est-ce que vous
pensez de l'âge de 18 ans qu'on a mis
comme âge de possibilité de consommation, l'âge légal? Et je veux aussi vous
parler, avant que mon temps imparti se termine...
Le Président (M. St-Denis) :
...
Mme Charlebois :
... — trois minutes? — de la tolérance zéro. On ne peut pas la
mettre actuellement. On va plutôt travailler
avec ce qui se fait là, là, le... conduite avec les capacités affaiblies,
puisqu'on n'a pas les appareils de détection homologués. Ça fait que ça
n'arrivera pas demain matin. Il faut que Santé Canada nous dise qu'il y a des
appareils homologués pour signifier une
consommation récente. Parce que, vous l'avez dit, ça reste dans le sang, puis
il faut faire attention à comment...
Alors, tant que ça, on ne l'a pas puis que ce n'est pas approuvé par sécurité
publique au Québec, ça n'arrivera pas. Mais parlez-moi de l'âge et des
plantations à la maison.
Mme Ouimette (Guylaine) : En
fait, Mme la ministre, nous, on n'a pas fait de grandes études à savoir pour déterminer l'âge. Je sais qu'il y a plusieurs
personnes qui sont en commission parlementaire pour statuer sur l'âge.
Nous, on croit que, sans avoir d'appui, de
recherches ou de quoi que soit, que l'important actuellement, c'est de faire de
la prévention pour que les personnes
qui sont en âge encore... avec une croissance au niveau de leur développement
puissent faire des choix éclairés, sécuritaires et qu'ils comprennent
bien.
Parce que
pour les jeunes, de toute façon, ça se passe déjà, il ne faut pas se mettre la
tête dans le sable. C'est d'arriver avec
des programmes de prévention qui vont leur permettre de faire des choix
éclairés et aussi de soutenir les parents à soutenir leurs enfants.
Parce que, bon, on est encore dans une société où il y a beaucoup de pensée judéo-chrétienne,
qui dit : On va faire peur pour faire peur, puis ça va donner quelque
chose. Et ça ne donne absolument rien.
Donc, on
croit vraiment que les parents et les jeunes, ensemble, devront réfléchir et
faire de bons choix. Parce que nous,
comme on dit, la prévention, ce n'est pas juste pour... avec une visée des
problèmes. C'est qu'il y a beaucoup
gens qui n'en ont pas, de problèmes, qui
veulent consommer de façon sécuritaire. Donc, on vise beaucoup,
beaucoup l'approche de prévention qui permet à la société québécoise
de bien comprendre et puis de faire des choix éclairés et consciencieux.
On est d'accord avec l'approche d'avoir mis
une société québécoise, là, pour l'encadrement du cannabis. On trouve
que c'est des éléments de sécurité en termes
de points de vente, et tout ça, de s'assurer du niveau de THC. Donc, pour
nous, cet aspect-là est réconfortant. Donc, l'idée, c'est d'amener les gens à
faire des choix judicieux.
Mme Charlebois :
Merci. Je sais que mon collègue brûle d'envie de vous entendre parler des
projets pilotes. J'entends pour la
recherche, j'entends aussi pour des programmes de prévention, parce que c'est écrit dans la
loi, divers projets pilotes dont un
qui va s'adresser spécifiquement à la vente. Mais, il y aura
d'autres possibilités de projets pilotes. Et je sais que j'ai épeuré la députée de Repentigny, mais ce n'est pas pour
la vente, c'est plutôt pour justement parfaire nos services, comment on
peut faire mieux en ayant des projets pilotes, notamment, comme vous avez
mentionné, en prévention, tout ça.
Alors,
j'aimerais ça vous entendre me parler de la possibilité d'avoir des projets
pilotes, tant pour différents aspects, que
ce soit la production, que ce soit la prévention, des programmes de prévention, et que ce soit la vente. Comment
vous voyez ça, vous, avec un nombre limité... d'une autre façon de vendre du
cannabis?
Le Président (M. St-Denis) : En
15 secondes.
Mme Ouimette
(Guylaine) : En
15 secondes? Écoutez, au Québec, on a fait des projets pilotes qui ont été
très concluants, qui ont permis, ensuite de
ça, de faire des pas vers des avancées qu'on aurait probablement tentées à grande échelle et
qui n'auraient pas réussi. Donc, c'est sûr qu'en gestion de projet, faire des
îlots de projets pilotes... peuvent être intéressants pour éclairer
des décisions gouvernementales. Donc, on ne peut pas aller contre la vertu ou
contre des approches qui peuvent permettre d'avoir un éclairage plus rapidement
sur des personnes ou des groupes cibles.
Le Président (M. St-Denis) :
Alors, je vous remercie...
Mme Ouimette (Guylaine) : Donc,
on n'a pas réfléchi sur ça, donc...
Le
Président (M. St-Denis) : Je vous remercie, Mme Ouimette. Alors, je vais céder la
parole maintenant au député de Labelle. M. le député de Labelle,
vous disposez de 9 min 30 s.
M. Pagé : 9 min 30 s Merci. Bienvenue chez
vous, à l'Assemblée nationale. Vous avez dit tantôt : Législation
et précipitation ne font pas bon ménage.
Alors, je vous rappelle, hein, évidemment, qu'on nous a imposé cet agenda. Nous étions d'accord avec la deuxième opposition non seulement pour retarder d'un an, mais de regarder jusqu'à tant que nous soyons prêts, tout le monde, autant à Ottawa
qu'à Québec. Alors, on comprend qu'on est pas mal plus dans
un agenda électoral fédéral que dans un agenda de santé et de sécurité
publique. Alors, évidemment, nous le déplorons tous ici, évidemment.
Bien,
j'ai envie de prendre la balle au bond, parce qu'on a fait référence à
ces fameux projets pilotes sur lesquels on a une divergence d'opinions. En fait, c'est parce que,
dans les projets pilotes, on ne sait pas ce que ça peut vouloir
dire. Et tout le monde a applaudi le fait que ça soit une société d'État à but non lucratif et réinvestir en santé et en sécurité.
Sauf que, si des projets pilotes voient le jour avec le privé, vous connaissez justement
cette inquiétude que nous avons face au privé qui voudra faire des sous.
Alors,
c'est la raison pour laquelle nous disons : Déjà, l'installation de cette
nouvelle société d'État va prendre un certain temps afin de s'assurer de faire les choses correctement. Alors,
nous, ce que nous proposons, c'est tout
simplement de retirer cet article, et,
un jour, si on veut revenir dans trois ans, dans cinq ans et y aller
avec des projets pilotes, avec le privé,
on pourra peut-être le faire. L'association de santé publique préfère
trois ans. Certains nous ont dit : Le suspendre. Il est vrai qu'on ne siège pas à toutes les sessions,
ici, à la CSSS. Mais, pour un article de loi, on peut faire ça très rapidement à
chaque session parlementaire si on veut revenir.
Alors,
c'est la raison pour laquelle, nous, nous militons pour enlever l'article 55,
ces projets pilotes, parce
qu'il peut y avoir une notion de privé
là-dedans. Alors, on va développer quelque chose de parallèle qui est flou
parce que ce n'est pas clairement
défini. Alors, ma question serait la suivante : Est-ce qu'il serait
préférable de dire «projet pilote», mais dans un certain nombre
d'années, afin d'installer correctement la société d'État, ou bien tout
simplement le retirer à ce stade-ci, ou bien d'enlever toute notion de profit à
l'article 55?
• (12 heures) •
Mme Ouimette
(Guylaine) : Pour préciser ma pensée, quand on a parlé de projet
pilote tout à l'heure, je suis demeurée
vraiment dans mon rôle de travailleuse sociale et présidente de mon ordre, je
voyais des projets pilotes spécifiques par
rapport à des nouvelles approches en prévention, qui soient par téléphone
intelligent ou qui soient dans des programmes avec des cibles de populations bien précises. Quant au projet pilote
concernant de... faire un projet pilote auprès du privé, écoutez, on n'a pas fait de grande réflexion
là-dessus, mais c'est évident que nous reconnaissons préférablement que
ça soit la société d'État qui encadre
vraiment la vente du cannabis, parce que ça nous appartient, les Québécois
seront probablement rassurés que ça
soit fait par une société d'État. Donc, je vous dirais que sur ça, même si on
n'a pas fait de grande réflexion en partageant ce matin, c'était notre
positionnement. M. Hébert a peut-être quelque chose à ajouter.
M. Hébert
(Alain) : En fait, ce qui est en cause, c'est peut-être davantage la
nature des projets pilotes qui pourraient
être expérimentés, parce que, lorsqu'on
souhaite expérimenter des projets pilotes qui... dans lesquels il n'y a pas de notion... d'aspect lucratif, mais qu'on
veut expérimenter des méthodes d'intervention, et tout, on peut
difficilement être non favorables à ça.
M. Pagé :
O.K. La ministre tantôt aussi vous a questionnés sur le fait que nous
inscrivons dans la loi qu'il y aura 25 millions
par année sur cinq ans. J'ai dit trois ans hier, je m'en excuse, parce
qu'effectivement, c'est sur cinq ans, alors... pour rendre à César ce
qui est à César. Évidemment, on ne peut pas être contre la vertu, mais vous
avez très bien dit, si je divise par
17 régions administratives, c'est à peu près 1,6 million. Alors,
évidemment, c'est... Et, quand j'entends les besoins hier pour les
communautés autochtones, les Innus, là, tous les besoins qu'il y a partout, ça
devient difficile à évaluer si, 25 millions, on va aller très loin avec
cela, là. D'ailleurs, j'invite la ministre... s'ils ont mis un chiffre de
25 millions, c'est qu'il doit y avoir une ventilation à quelque part.
Qu'on nous dise qu'est-ce qu'on va faire avec le 25 millions, et ensuite on pourra évaluer. Moi, je veux bien qu'on
annonce un chiffre comme ça, mais si on ne sait pas ce qu'on va faire avec, c'est un peu difficile
d'évaluer si véritablement on va répondre à l'ensemble des besoins, qui, à
mon avis, risquent d'être beaucoup plus importants que 25 millions, d'une
part.
La
ministre nous dit également : La loi... quand il y aura des profits, on va
réinvestir des profits dans des projets de prévention. Ça aussi, je veux bien, mais il y a une chose qu'on ne dit
jamais, et je ne sais pas si vous l'aviez déjà remarqué, mais il y aura aussi des revenus de la TPS, parce
qu'il y aura de la TVQ et de la TPS. Et juste en revenus de TPS, si on
fait le même ratio qui nous a été abordé,
là, avec Ottawa, là, qui dit, avec son dollar de taxe d'accise, ça devrait
rapporter à peu près un milliard.
Alors, si je fais un ratio, ce que ça veut dire en TVQ, pour le gouvernement du
Québec, ça devrait probablement être
autour de 200 millions. Alors, les profits de la SQC, là, ça ne comprendra
pas le 200 millions d'argent neuf
qui va rentrer dans les coffres de l'État. Alors, vous voyez que, dans le fond,
là, le 25 millions, dont on ne sait pas ce qu'on va faire avec, à comparer avec l'ensemble des revenus de la SQC,
c'est une chose, mais de l'ensemble des revenus du gouvernement du
Québec.
Alors,
je tiens à dire cela parce qu'on nous dit : Oui, oui, on va faire beaucoup
de prévention, on va avoir 25 millions. Alors, moi, je veux vous amener sur votre point deux. Quand vous dites
que «le législateur introduit»... non, attendez un petit peu. À la troisième... troisième picot de
vos recommandations : «Que le législateur s'assure que les services
préventifs, psychosociaux, première ligne et
de réadaptation soient disponibles en quantités suffisantes.» Juste pour cela,
«quantités suffisantes», ça veut dire quoi, combien? Est-ce que vous avez
évalué, et quels seraient les coûts? Parce qu'on le voit manifestement, là, il va en avoir, de l'argent de
disponible pour faire des choses. Alors, moi, j'aimerais, là, qu'on nous
alimente pour qu'on mette suffisamment d'argent dans tout ce qu'il faut en
prévention.
Mme Ouimette
(Guylaine) : Malheureusement, on n'a pas fait ces calculs-là de façon
scientifique, donc, ce qu'on vous
partage aujourd'hui, notre souci à nous, c'est vraiment qu'il y ait des
réinvestissements importants qui soient faits au niveau de l'accès à des
services psychosociaux de proximité afin que la population qui... là, on n'est
plus dans le domaine de la prévention quand
on parle de ça, quand on est rendu à parler d'offre de service, c'est pour des
gens qui ont des problèmes
de consommation, des familles, des enfants, et tout ça. Donc, à ce niveau-là, on n'est plus dans le monde de la prévention, on est vraiment dans le monde de l'intervention. Donc, on veut
s'assurer qu'effectivement les argents soient au rendez-vous.
M. Pagé : Parlant d'argent au rendez-vous, nous, on a entendu... moi, j'ai fait la tournée avec la ministre
dans toutes les régions, sauf une. Alors,
sur les neuf journées de consultation, j'en ai fait huit, quand même.
Et on nous a dit un peu partout :
Oui, inscrivez aussi, dans la loi, que 100 % des profits devront être réinvestis en prévention, santé
publique, aussi une partie pour les
municipalités qui auront à appliquer les règlements. Ce n'est pas inscrit, dans
la loi, que 100 % des profits
devraient aller pour ce que je viens de dire, les saines habitudes de vie,
santé publique, prévention, et tout le reste. Est-ce que vous croyez
qu'on devrait l'inscrire clairement dans la loi?
M. Hébert
(Alain) : En fait, tantôt, je répondais à la question de Mme la
ministre, là, qui était directement... qui portait sur un chiffre.
Au-delà de ça, la question que, nous, on souhaite amener aussi, c'est qu'en
termes de politique publique, lorsqu'on regarde les questions de prévention ou
les questions de service, la question qu'on pose, c'est : Est-ce qu'on doit les associer nécessairement,
uniquement ou absolument à la question des profits qui proviendraient de
la vente du produit pour lequel on veut faire de la prévention? Ce n'est pas
nécessairement quelque chose qu'on fait par rapport
à l'alcool, ce n'est pas nécessairement quelque chose qu'on fait dans d'autres
domaines de champs sociaux pour lesquels on fait de la prévention.
Alors, nous,
on n'est pas nécessairement... on n'est pas dans une perspective limitative par
rapport à ça. Nous, ce qu'on annonce,
ou ce qu'on demande, ou ce qu'on souhaite, ou ce qu'on recommande — en fait, c'est un éclairage qu'on veut apporter à l'État — c'est que, si on veut être cohérent avec une
optique de légalisation du cannabis, et de faire en sorte d'être vraiment dans la réduction des méfaits puis
dans la protection, puis d'amener des services aux parents, de monter
des groupes avec eux, d'intervenir de façon de proximité, et tout, ça commande
des ressources financières.
Alors,
au-delà de ça, on n'a pas fait ce type de calcul précis, mais ce qu'on souhaite
et ce qu'on recommande, c'est qu'on
ajuste les montants ou les ressources financières nécessaires à ce qu'on
perçoit en termes de besoins de services...
Le Président (M. St-Denis) :
Alors, je vous remercie, M. Hébert. Merci, M. le député de Labelle. Je
cède maintenant la parole au député de Borduas. Vous disposez, M. le député, de
6 min 30 s.
M. Jolin-Barrette : Merci, M.
le Président. Mme Ouimette, M. Hébert, bonjour. Merci d'être présents
et de contribuer à nos travaux de la commission.
D'entrée de jeu, c'est bien qu'un ordre professionnel vienne en
commission parlementaire nous présenter le point de vue, parce qu'il faut
toujours rappeler qu'un ordre professionnel, sa mission première, c'est d'assurer la protection du public. Donc, je pense que
c'est important d'entendre le message que vous nous envoyez aujourd'hui.
D'entrée de
jeu, vous savez, le cannabis, la ministre nous le dit souvent, ça existe déjà,
ça existe dans nos écoles, ça existe un peu partout, il y a des gens qui
consomment déjà cette substance, qui est présentement illicite, il y en a eu, certaines campagnes de prévention, il y a du
travail, qui sont faits dans la société. Mais qu'est-ce qu'on n'a pas fait, à
ce jour, de correct, en matière de
prévention, de sensibilisation ou de réadaptation, qui nous amène, une fois que
ça va être légalisé, à devoir
investir encore davantage pour expliquer quels sont les risques associés à une
consommation, et où on peut s'améliorer à ce niveau-là, selon vous?
Mme Ouimette (Guylaine) : Je
vais laisser la parole à M. Hébert.
• (12 h 10) •
M. Hébert (Alain) : Bien, en
fait, je disais tantôt, c'est le développement de programmes de prévention qui prennent acte du fait que le produit sera légal et
qui seront davantage axés sur des stratégies non seulement d'information, mais de soutien, de guide pour aider les jeunes,
pour aider les adultes à développer des comportements responsables par
rapport à une substance qui deviendra légale. Et on devra parler, dans les programmes
de prévention... et avoir des orientations qui tiennent compte que le produit
est désormais légal, et d'être moins dans des programmes qui visent uniquement l'abstinence, qui visent uniquement de l'information associée au seul risque et qui ne reconnaissent pas, dans une logique de prévention, les motivations pour
lesquelles les gens consomment aussi le produit, qui sont des
motivations associées à la recherche du plaisir, associées à la recherche de
relations sociales, et tout.
Et on a un changement de paradigme qui est
amorcé dans certains programmes de prévention, mais on a à l'intensifier beaucoup, et ça, ça commande,
nous pensons, des investissements. On a développé, par exemple, un programme
qui pourrait être développé, en
termes de gestion responsable. On a
un programme qui s'appelle Alcochoix, qui aide des consommateurs d'alcool à risque à gérer leur
consommation d'alcool dans une perspective de réduction des méfaits ou
de prévention d'un mésusage. Il pourrait
être fait la même chose, par exemple, en lien avec le cannabis. Alors, ça, ça
demande que ces programmes-là soient montés
et structurés. Voilà, ce sont des exemples... des rencontres de parents, par exemple. Aider les parents, les
soutenir à voir comment ils pourraient aborder la question avec leurs jeunes.
Alors, ça, c'est... Comment ils pourraient transiger avec ce produit-là maintenant
qu'il sera légal? Alors, ça, c'est un autre exemple de programme qui pourrait
être développé et qui n'est pas développé actuellement comme tel.
M. Jolin-Barrette : O.K. Puis, quand vous dites : C'est important
de développer ce genre de programme là, c'est quoi, la vision que vous avez pour le développement de ces
programmes-là? Supposons, pour les
parents, est-ce qu'on envoie ça dans
les écoles avec les travailleurs sociaux qui sont dans les écoles? Est-ce que
ça se fait par le biais de la santé?
Services sociaux? Vous dites dans votre mémoire : Il faut former les
travailleurs sociaux notamment. Comment est-ce qu'on l'applique? Quel
type de programme vous voyez?
M. Hébert
(Alain) : Bien, en termes de modalités, écoutez, il y a déjà des
structures en place au niveau du réseau de la santé et des services sociaux, il y a des tables intersectorielles
avec les organismes communautaires. Il s'agit de faire le pendant et le lien avec les organismes de
recherche, de santé publique, avec les organismes qui travaillent en
développement des communautés. C'est de
rassembler, sur les territoires, les gens pour développer ces programmes-là et...
qui doivent être soutenus par la recherche et les données probantes.
Alors, ça peut se faire à un niveau régional, à un niveau local sur la base
d'orientations nationales, et coordonné de façon nationale.
Mme Ouimette
(Guylaine) : Et, si vous me permettez, j'ajouterais aussi que, quand
on parle de téléphones intelligents, quand
on parle d'applications mobiles, c'est une nouvelle façon de faire de la
prévention. Donc, c'est évident qu'à
cet égard-là on est dans du nouveau. Aujourd'hui, les jeunes veulent faire de
l'intervention sociale avec les travailleurs sociaux par textos. Écoutez, on est en train de regarder l'encadrement
de tout ça. C'est évident qu'on doit être créatifs et innovants. Et ce qu'on disait d'entrée de jeu ce
matin, c'est de vous inviter à la créativité pour rejoindre les gens de
façon moderne, en fait.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Tout à l'heure, vous disiez : Sur le terrain, on a senti que les
services avaient été diminués. Vous nous
invitez, dans votre mémoire, à ce que les soins de première ligne soient
maintenus, voire augmentés. Avec la légalisation du cannabis,
pensez-vous qu'on va se retrouver dans une situation où les besoins vont être
grandissants?
M. Hébert
(Alain) : Bien, certains besoins spécifiques vont apparaître. On ne pense
pas, nous, par contre, que la légalisation,
là, va changer complètement le portrait de la situation. Pour nous, il y a un
certain nombre d'avantages, on le disait, ils sont dans les finalités du
projet de loi, en termes de rendre illicite quelque chose qui... c'est-à-dire
de rendre licite ou légal ce qui appartient
maintenant au monde illicite. Mais on ne prévoit pas nécessairement, si on peut
dire, des catastrophes, des grands problèmes de surconsommation
autrement que ceux qui sont déjà présents. Mais ce qu'on mentionne, c'est que
déjà les services de prévention ont besoin d'être intensifiés, alors, à plus
forte raison dans un contexte où il y a certains aspects nouveaux quand même
qui arrivent avec la présence du cannabis légalisé.
M. Jolin-Barrette : O.K. Je voudrais vous demander : Au niveau
de la quantité qui est autorisée — je ne l'ai pas vu dans votre mémoire, là — on prévoit 30 grammes par personne dans
un lieu public, 150 grammes à la maison par personne, est-ce que
vous avez une opinion par rapport à la quantité qui est donnée? Il y a des
intervenants qui sont venus précédemment
avant vous. Hier justement, ils disaient : Les gros consommateurs
consomment généralement trois grammes par
jour. Et là on propose d'avoir 30 grammes en public, puis stocker
150 grammes à la maison. Est-ce que vous avez une opinion
là-dessus?
Le Président
(M. St-Denis) : En 15 secondes.
Mme Ouimette
(Guylaine) : En fait, on ne pourra pas répondre à ça, parce que ce
n'est pas notre domaine. En fait, vous avez eu des experts ici, en
commission, qui ont pu vous répondre. On n'a pas tablé sur cette question-là.
Je vous remercie.
Le
Président (M. St-Denis) : Alors, Mme Ouimette,
M. Hébert, je vous remercie de votre contribution aux travaux de la
commission.
Je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de venir
s'installer et prendre place. Merci.
(Suspension à
12 h 15)
(Reprise à 12 h 18)
Le
Président (M. St-Denis) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Donc, je souhaite la bienvenue aux
représentants de SecureKey et Levio,
MM. Serra et Lemieux. Alors, je vous rappelle que vous disposez d'une
période de 10 minutes pour votre
exposé, et puis nous procéderons à la période d'échanges avec les membres de la
commission. Alors, je vous invite donc à vous
présenter et à commencer votre exposé.
SecureKey
Technologies Inc. et Levio Conseils inc.
M. Lemieux (Éric) : Merci.
Alors, bonjour, Mme la ministre, MM. les députés. Nous sommes très heureux
d'être ici ce midi pour présenter notre plateforme de gestion des ventes de
cannabis. Alors, je me présente : je suis Éric Lemieux, associé directeur chez Levio. Levio
est un important fournisseur québécois de solutions d'affaires et de technologie. On est partenaire et fournisseur
entre autres du gouvernement du Québec et de grands joueurs du secteur financier. Levio a été fondé en 2012 et a son siège social à Québec en plus d'avoir un bureau à
Montréal et Toronto. Et pour rappel, Mme la ministre, j'avais participé
aux consultations publiques sur l'encadrement du cannabis. Nous étions présents à Trois-Rivières. M. Plante et
M. Pagé étaient également présents, et on a également eu des consultations
avec certains membres de la commission.
M. Serra (Didier) : Bonjour.
Didier Serra, je suis vice-président exécutif des ventes et du marketing chez
SecureKey. SecureKey est une entreprise canadienne qui se spécialise dans
l'authentification et l'identité en ligne. L'entreprise
a son siège social à Toronto et des bureaux à Montréal, San Francisco et
Boston. D'ailleurs, certains d'entre vous
ont peut-être récemment utilisé le service concierge de SecureKey pour accéder
à votre profil Revenu Québec par l'entremise des identifiants
bancaires.
• (12 h 20) •
M. Lemieux
(Éric) : Donc, on est là pour vous parler d'un projet concret, pas
d'un concept. Ce qu'on veut vous présenter,
c'est une plateforme que nous mettons en place pour la distribution sécuritaire
de produits réglementés, dont, entre autres, le cannabis. Et d'ailleurs,
on voulait vous montrer une démonstration de la plateforme. Si vous voulez
bien, il y a deux écrans que vous voyez, et je vais démarrer une présentation.
Alors, ce que
vous voyez, juste pour bien comprendre, l'écran est divisé en deux, alors, à
votre gauche, vous avez l'image d'un
site Internet Web et à droite vous avez le portable de la personne. Évidemment,
les deux pourraient être sur le portable,
mais pour aujourd'hui, pour faciliter la compréhension, on va voir
l'interaction entre ces deux applications-là. Alors, on peut imaginer évidemment
que le site d'achat pourrait être un site semblable à celui qui sera mis en
place par la Société québécoise du cannabis. Alors, je vais laisser mon
collègue...
M. Serra
(Didier) : ...présenter la
vidéo. Donc, la première étape, c'est confirmer votre choix du panier. Une
fois que vous avez confirmé ce que vous
voulez acheter, vous serez donc identifié par l'entremise de l'application e-service de SecureKey. Donc, vous verrez là une authentification
qui est basée à partir... entre mobile et Web. Tout pourrait s'effectuer
sur le site Internet uniquement. Donc, l'utilisateur va utiliser son téléphone
intelligent pour lancer l'application Verified.Me. Donc, je m'excuse, pour l'instant l'application
est uniquement en anglais, la traduction française est en cours en ce
moment. Donc, l'utilisateur lance
l'application et va être amené à s'authentifier auprès de son institution
financière de la façon dont il le
fait aujourd'hui pour accéder à ses services en ligne. Donc, sur la
démonstration, il va entrer ses identifiants, «login» et mot de passe.
Cela pourrait utiliser aussi d'autres méthodes. À ce moment-là, il lance la
caméra pour pouvoir scanner le code QR qui est présenté sur la plateforme
d'achat, qui va alors lui présenter les informations d'identité qui sont nécessaires pour compléter son achat. Les
informations d'identité sont fournies par sa banque, il a le moyen de revoir
quelles sont ces informations et de
confirmer qu'elles sont correctes. Une fois qu'il est d'accord avec les
informations, il va donc consentir à ce que les informations soient
partagées directement depuis sa banque vers la plateforme qui gère la distribution ou l'achat de cannabis. Vous allez
voir, à cet instant-là, que, sur le téléphone intelligent, s'affichent les
données qui sont transfermées conformément à ce qu'il a vérifié, ces mêmes
données vont apparaître aussi sur la plateforme Web qui est à gauche.
M. Lemieux
(Éric) : Alors, par la suite, la personne va continuer à utiliser
l'application comme un site. Donc, on vient
d'avoir, actuellement, une authentification forte, où la personne demeure, son
âge, et là on tombe, après ça, dans la transaction où on peut faire le
paiement, alors, que ce soit le paiement avec carte de crédit, avec PayPal ou
avec service bancaire.
Mais ce qui
est important, c'est qu'on conserve les données pour être en mesure de faire de
la protection, de la prévention.
Alors donc, vous allez voir apparaître un message de prévention qui va pouvoir
apparaître, tout dépendamment, est-ce que c'est la première fois qu'on
achète, la dixième fois, l'habitude... et qui va pouvoir être personnalisé
aussi en fonction du profil de l'individu, aussi bien son lieu de
résidence — ici,
je donne un exemple — ou
son âge.
M. Serra
(Didier) : Un autre point important, c'est qu'on voulait aussi couvrir
l'aspect livraison. Donc, de la même façon
que l'utilisateur a dû s'authentifier et vérifier son identité avec son
téléphone intelligent, il pourra faire la même façon au moment de la
livraison pour confirmer au livreur ou au magasin que c'est bien la bonne
personne.
M. Lemieux
(Éric) : Un autre élément qui est important, c'est tout ce qui est
perception des taxes. Et là, on entend parler
de taxes, donc, que ça soit les taxes du côté TPS, TVQ, mais aussi les taxes
spéciales reliées au cannabis... vont également pouvoir, si vous
voulez... ou sont traitées à l'intérieur du système.
Donc, grosso modo, ce qui est important, c'est
de dire : Il est important de construire sur des bases solides et modernes. Alors, on suit le dossier de très près
et, depuis un moment, on entend les préoccupations du gouvernement, des partis de l'opposition officielle et des divers
intervenants, puis on en est venu à se dire — puis j'irais même à dire des préoccupations personnelles, comme père de
famille — on en
est venu à se dire qu'on était capable de mettre en place une solution
qui répondrait à des enjeux de santé publique, de sécurité publique et de
perception de taxes.
Donc, dans un
premier temps, au niveau de la santé publique, comme vous l'avez vu, la
plateforme va permettre de diffuser
des messages de prévention, des messages de prévention personnalisés tenant
compte de l'individu, parce qu'on l'a authentifié
d'une façon forte. Mais il va aussi permettre de collecter des statistiques
afin d'être en mesure de voir et, je dirais,
d'amener des actions gouvernementales pour mieux cibler la prévention. Par
exemple, on serait capables de savoir que des jeunes de 18 à 21 ans résidant dans
tel quartier achètent trois fois plus de cannabis que ceux qui résideraient
dans un... qui résident dans un quartier
voisin. Ainsi, on pourrait venir cibler des messages de prévention auprès de
ces jeunes-là.
M. Serra (Didier) : En ce qui
concerne la sécurité publique, on a pensé à notre solution d'identification
forte pour l'achat et la livraison. Revenu
Québec utilise déjà le Service Concierge pour authentifier les citoyens en
toute sécurité, confidentialité et
respect de leur vie privée. Avec notre nouvel écosystème Vérifiez-moi, on
permet aussi au citoyen de vérifier son identité sans demander
d'information inutile, telle que le numéro d'assurance sociale, par exemple. Et
on obtient toujours le consentement du citoyen avant que ces données vérifiées
soient transférées en temps réel depuis des sources fiables, comme les
institutions financières — Desjardins,
la Banque Nationale — ou
les opérateurs de télécommunications, des bureaux de cote de crédit, ou même
des organismes gouvernementaux.
M. Lemieux
(Éric) : Donc, on serait aussi capable d'avoir des statistiques
fiables pour épauler le gouvernement dans
ses activités de sécurité publique, toujours en respectant l'anonymat et la loi
de protection de l'information personnelle.
On traite
aussi de la perception des taxes. Ce qu'il fait en arrière-plan, dans la
plateforme, c'est qu'au moment où on passe
l'achat de paiement il y a le traitement TPS-TVQ qui est envoyé directement au
gouvernement, mais on traite aussi la perception
des taxes liées au cannabis. Ce qui fait qu'on est capables de mettre en place
une plateforme aussi sécuritaire, c'est grâce évidemment à notre
partenaire et à notre feuille de route solide. Levio est déjà au ministère de
la Justice, à Revenu Québec, à la Société de l'assurance automobile du Québec
ainsi que dans les groupes financiers comme Desjardins, SSQ, groupe financier
La Capitale.
M. Serra
(Didier) : Et concernant SecureKey, le système Concierge est déjà en
utilisation par Revenu Québec ainsi
que l'Agence du revenu du Canada et d'autres provinces canadiennes, comme la
Colombie-Britannique et l'Ontario. On
est les seuls, au Canada, à avoir des ententes avec toutes les grandes
institutions financières, incluant Desjardins, la Banque Nationale, RBC, BMO, pour nommer que celles-ci.
Avec le nouvel écosystème Vérifiez-moi, comme vous l'avez vu sur la
démonstration, nous mettons aussi en place des partenariats avec des compagnies
de télécommunications et des agences de crédit.
Nous
travaillons aussi sur l'intégration des agences gouvernementales pour la vérification de cartes de santé, permis de conduire, revenus perçus, etc.,
pour augmenter les capacités de l'écosystème numérique.
M. Lemieux
(Éric) : Donc, en
conclusion, Levio et SecureKey souhaitent montrer au gouvernement qu'il existe des technologies sécuritaires et fiables qui vont permettre de faire face aux défis de
santé publique, de sécurité publique et de perception de taxes. Ce qu'on demande au gouvernement, c'est de considérer des plateformes innovantes et sécuritaires afin de partir sur des bonnes bases et des bases
modernes. On comprend que les décisions vont se faire par des instances gouvernementales,
et que vous allez décider comment se gérera la vente en ligne et la vente
physique du cannabis. Mais notre souhait,
c'est qu'il y ait une volonté de la part du gouvernement de consulter des gens de l'industrie pour pouvoir développer des
choses innovantes, tout en se basant sur les standards reconnus de l'industrie.
C'est une opportunité aussi pour le Québec de se démarquer des autres provinces
et d'être un chef de file. Merci de votre attention.
Le
Président (M. St-Denis) :
Alors, messieurs, je vous remercie de
votre exposé. Nous allons débuter la période d'échange. Alors, Mme la
ministre, la parole est à vous.
Mme Charlebois : Alors, merci, messieurs, d'être ici pour nous
présenter votre produit. Je me rappelle de vous. Je ne me souvenais pas que c'était à Trois-Rivières. Mais, si je ne me trompe pas, vous aviez même donné en exemple
votre adolescente, vous aviez fait le test
de vous assurer qu'elle ne pouvait pas aller sur votre site, et tout le kit, ça
se peut-u?
M. Lemieux (Éric) : Oui, vous
avez une bonne mémoire. Simon, en passant.
Mme Charlebois : C'est bon. Alors, merci d'être là, de nous
partager vos connaissances. Vous nous dites faire affaire avec plusieurs ministères,
mais est-ce que c'est dans le même
type de besoins? Parce que je vous entends parler de Revenu Québec, puis
les autres, là, je ne m'en souviens plus, mais est-ce que c'est le même genre
de besoin que les autres ministères vous ont fait?
M. Lemieux
(Éric) : En fait, c'est différents types de besoin, mais, entre
autres, on a aussi... on travaille au niveau de certains... ce qu'on
appelle les accès sécurisés. Alors, donc, on a été au centre aussi d'éléments
nouveaux, des éléments sécurisés.
M. Serra
(Didier) : Et, en ce qui concerne, je dirai, l'écosystème de
vérification de l'identité numérique, pouvoir vérifier son identité en
ligne ou en personne est une problématique qui couvre tous les secteurs de
l'industrie. Donc, le Service Concierge qui
a démarré, il y a plusieurs années, est une première étape pour authentifier
les consommateurs, qu'ils accèdent
aux services de Revenu Québec ou qu'ils accèdent à des services de santé, la
prochaine étape que nous travaillons ensemble, c'est qu'ils puissent
aussi confirmer des données d'identité, tout en respectant leur vie privée.
Mme Charlebois :
Vous l'avez mentionné, les niveaux de sécurité doivent être élevés parce que
c'est quand même une drogue qu'on va vendre, hein? Le site Internet,
vous savez qu'il va relever de la Société québécoise du cannabis, et évidemment tout le
processus de paiement, etc., qui va s'y rattacher. La Société québécoise du
cannabis relève de la... ça va être
une filiale, en fait, de la Société des alcools du Québec, qui a déjà un site
Internet. Est-ce que vous les avez déjà approchés... pour la Société des
alcools du Québec?
• (12 h 30) •
M. Lemieux (Éric) : La réponse,
c'est non. Je ne les ai pas approchés.
Mme Charlebois : O.K. Est-ce
que vous avez eu des contacts avec
d'autres provinces, ou d'autres pays, même, pour lesquels vous auriez
été appelés à livrer le même type de service qu'on s'apprête à livrer?
M. Lemieux
(Éric) : La réponse est oui.
Nous rencontrons le gouvernement ontarien la semaine prochaine. Et j'ai
rencontré aussi des gens de la Colombie-Britannique et du Nouveau-Brunswick.
Mme Charlebois :
O.K. Dans notre cas, je comprends que vous n'avez pas nécessairement eu une
réflexion sur l'ensemble du projet de loi, quant à sur comment on va livrer le
service puis sur la sécurité qui entoure tout ça. Est-ce que je me trompe?
M. Lemieux
(Éric) : Les réflexions, effectivement, ont été au niveau de dire
comment les nouvelles technologies peuvent
s'assurer d'être capables de faire de la prévention, de la sécurité puis
d'avoir une gestion responsable de la vente.
M. Serra
(Didier) : Et en ce qui
concerne, je dirais, la vérification d'identité, on se base sur des services,
et des développements, et des réflexions que SecureKey et ses
partenaires ont démarrés, il y a déjà plusieurs années, soit sur des projets canadiens ou même des projets
internationaux, et toutes les informations et le savoir-faire que l'on a collectés
sur ce qui marchait et ne marchait pas nous
a emmenés à développer cet écosystème numérique, Vérifiez-moi, qui se base,
en fait, sur des principes fondamentaux : ne pas recréer de bases de
données qui vont être, de toute façon, piratées, ne pas se baser uniquement sur une seule source pour
vérifier et authentifier un utilisateur, mais plusieurs sources. Sur la
démonstration que vous avez vue, un
utilisateur doit d'abord être capable de s'authentifier auprès de son
institution financière avec son téléphone mobile qui est connu par son
institution financière, qui va vérifier des informations d'identité qui peuvent
être, de même, corrélées avec d'autres fournisseurs gouvernementaux ou
opérateurs téléphoniques.
Donc, le principe même de la sécurité, c'est...
Des sources fiables qui sont déjà en relation avec l'utilisateur sont capables
de fournir des données qu'ils ont vérifiées pour leur propre business. Quand je
veux ouvrir un compte bancaire, je passe pas
mal de tests, je dois fournir des informations d'identité. Donc, se baser sur
des réglementations et des processus qu'ils utilisent déjà au service
d'autres actions, en fait... et la multiplication des sources venant de sources
fiables est la base même de la sécurité.
Mme Charlebois :
Je ne vous cache pas que, dans notre optique, nous avions... La Société
québécoise du cannabis est une
filiale de la Société des alcools parce qu'on souhaitait utiliser leur
expertise tant au niveau du développement des boutiques, des emplacements, etc., mais aussi pour leur site Internet.
Est-ce que vous croyez que vous pouvez ajouter de la valeur à leur site Internet? Parce qu'ils
vendent déjà sur Internet. Il y a déjà des paiements qui sont effectués, de la
sécurité, j'imagine, parce qu'eux autres non
plus ne peuvent pas vendre... Je n'ai jamais acheté sur Internet, ça fait que
je suis mal placée pour vous parler
de ce que la SAQ fait. Mais, bon, est-ce que... Vous avez dû l'examiner. Est-ce
que vous allez avoir des compléments,
vous allez être plus précis? Je ne sais pas comment vous le dire, mais est-ce
qu'il y aura des données plus probantes avec votre site Internet qu'avec
celui de la Société des alcools du Québec?
M. Lemieux (Éric) : En fait, si
vous me permettez, il y a trois blocs.
Donc, le
premier bloc, c'est l'authentification forte. Avec notre partenariat avec
SecureKey, cette authentification forte
là est beaucoup plus forte que ce qui se fait actuellement sur le site Web. Ça,
c'est clair. Et donc il précise aussi la localisation, où la personne
est, là, l'adresse, et également l'âge.
Le deuxième
élément, c'est l'entrepôt de données. On l'a vu, la SAQ a lancé la carte
Inspire pour être capable de connaître la personne. On l'a dit tantôt,
je ne pense pas qu'on va avoir une carte Inspire pour connaître le profil des gens. Moi, je pense que la plateforme de vente
doit tenir compte et maintenir ces données-là, mais de ne pas commencer
à avoir une carte de fidélité. Donc, ça,
c'est un autre élément qui m'apparaît être une différence importante. Le
troisième élément, c'est le traitement des
taxes... c'est la mise en place de l'entrepôt de données. Donc, l'entrepôt de
données, ça veut dire... puis c'est
un petit peu relié à ça, c'est l'ensemble des données pour être capable de
faire de la prévention en ligne. Alors, ça, encore là, à ma
connaissance, il n'y a pas de prévention en ligne faite et personnalisée non
plus.
Et le
troisième élément, c'est le traitement des taxes spéciales. TPS, TVQ, ça va,
mais il y avait aussi certaines taxes qu'il faudra développer.
Donc, je
dirais, les points, c'est certainement la sécurité forte, mais, je dirais,
intégration... pas d'un Inspire, mais une connaissance d'individus pour
avoir une meilleure interaction et prévention. Puis ce que je disais aussi,
c'est que tant qu'à partir... partons avec
les nouvelles technologies, de ce qui existe actuellement, qui n'était pas
nécessairement là il y a cinq ans. Et on a
vu des choses apparaître par la suite... Je ne sais pas si c'est clair, mais
c'est un peu les éléments...
Mme Charlebois :
Oui, oui, c'est plus clair. Dites-moi, est-ce que vous allez utiliser les
empreintes digitales? Est-ce que ça
va être possible? Pour la reconnaissance, moi, j'ouvre mon portable, puis c'est
mon oeil qui capte... mon mot de passe, c'est l'oeil.
M. Serra
(Didier) : Bien, en fait, quand vous utilisez votre portable avec
votre empreinte digitale ou avec reconnaissance faciale, la reconnaissance est
effectuée en local par votre téléphone, et cette reconnaissance permet à l'institution financière, dans notre cas, de
confirmer que c'est la bonne personne qui a le téléphone. Donc, notre
solution se base sur les méthodes et
processus implémentés par les institutions financières pour authentifier les
utilisateurs. Dans la démonstration,
l'utilisateur a entré un mot de passe et identifiant, sa banque peut lui
demander de montrer son visage ou de mettre
son empreinte digitale. Donc, ça, première partie de la réponse, c'est :
On se base sur ce qui est fait de mieux par les institutions financières
pour authentifier les utilisateurs.
Par contre,
ce que le service peut apporter en plus de ça, et on a des cas de figure qui
nous sont demandés hors cannabis,
c'est que, pour des transactions risquées, l'utilisateur peut être amené à
prendre une photo de lui-même et que cette photo, par le service, soit
envoyée auprès d'organismes gouvernementaux, par exemple, qui me donnent mon permis de conduire pour que ma photo soit vérifiée
avec la photo qui est dans la base de données de celui qui a fourni le permis de conduire et de confirmer : Bien,
c'est effectivement la bonne personne et ce n'est pas ma fille, qui connaît
mon mot de passe sur mon téléphone, qui est
en train de se faire passer pour moi. Donc, on a moyen, avec le service, de
faire de la vérification en temps réel, que c'est la bonne personne, par
rapport à une base de données gouvernementale.
Mme Charlebois :
Je passerais la parole à mon collègue de Maskinongé. Mais avant je vous invite,
quand la société sera créée, quand la loi
sera adoptée, parce que, là, on est en projet de loi, puis il faut d'abord
adopter la loi pour que la société
soit créée, à communiquer avec eux pour soumettre vos services parce que ce
n'est pas le gouvernement qui va décider, mais bien la Société
québécoise du cannabis qui va décider de ses infrastructures. M. le Président.
Le Président (M. St-Denis) :
Alors, M. le député de Maskinongé.
M. Plante : Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, rebonjour. Effectivement, on s'était croisés à Trois-Rivières lors des consultations.
J'ai bien
aimé votre dernière intervention au
niveau... parce qu'on sait, aujourd'hui, bon, notre vie nous suit un peu partout, et, demain matin... et
je parlais un petit peu avec mon collègue en même temps, demain matin, la
crainte est toujours de faire copier son
identité ou voler son identité, qui permettrait qu'un autre Marc existe,
soit... Puis je parlais de mon
collègue qui est au Saguenay—Lac-Saint-Jean — moi, je suis en Mauricie — j'ai dit : Il faut s'assurer, surtout
pour la société du cannabis, de ne pas avoir deux Marc, un en Mauricie et un au
Saguenay, qui peuvent faire des achats en même
temps, pour développer soit un sous-réseau... ou même à Saint-Jérôme. Ça serait
assez paniquant. Donc là, vous venez répondre à la question et vous
venez surtout de répondre et de venir dire que...
Vous savez
que la volonté du projet de loi, c'est surtout d'encadrer puis aussi de
rassurer la population, qui est fortement
inquiète au niveau du cannabis, puis avec raison. J'aimerais juste que vous me
réexpliquiez... Puis c'est bien important
quand vous parlez de double identification — parce que Mme la ministre l'a bien fait,
là... — soit
avec notre empreinte digitale ou avec
la reconnaissance faciale, mais comment on peut s'assurer ou comment vous pouvez
assurer, la future société du cannabis du
Québec, que vous n'aurez pas un enfant, ou un cousin, ou une ex-conjointe ou
conjoint à quelque part qui a ton
identification puis qui décide, un soir, de faire un party, faire une commande
insensée sur le nom d'une autre
personne? Je pense que c'est surtout ça, l'inquiétude, au niveau... Puis, peu
importent les provinces où vous allez, je suis sûr que vous allez avoir
la même question à chacune des provinces, au niveau de la sécurité puis
vraiment une identité unique d'une personne.
• (12 h 40) •
M. Serra
(Didier) : D'accord. Mais des très, très bonnes questions. Et, en fait, c'est le coeur de notre système d'identification
digital, qu'il soit utilisé pour le cannabis ou pour d'autres choses. Pour
pouvoir vérifier qu'une personne est la
bonne personne, vous devez vous baser sur plusieurs facteurs. Les
facteurs qui sont utilisés, c'est : qu'est-ce que je sais, qui je suis, qu'est-ce que j'ai avec moi. En fait,
toute l'industrie financière et bancaire se base sur ce
principe-là, la carte de crédit où j'ai une carte physique et mon «PIN
code». C'est ce que j'ai et ce que je sais qui me permet de faire des
transactions financières dans le monde entier.
Donc, notre service est basé sur les mêmes
concepts. Ce que j'ai, c'est mon téléphone, et c'est celui que j'ai enregistré avec mon application et qui est connu
par ma banque. Ce que je sais, c'est mon mot de passe pour me loguer à ma banque avec ce
téléphone qui est enregistré auprès de ma banque. Ce que je suis, on ajoute de
l'authentification biométrique soit en direct avec le téléphone soit auprès
directement des bases de données. Donc, en combinant ces trois facteurs, vous êtes certain que la personne
qui utilise le mobile pour s'identifier est la bonne personne. Pour
pouvoir se faire passer pour moi, il
faudrait avoir mon téléphone, connaître un secret que je suis censé le seul à
connaître, avoir mon visage, si on
fait une vérification temps réel à ce moment-là. Donc, ce n'est pas possible de
pouvoir se faire passer pour moi pour la transaction. Et vous pouvez
rajouter des facteurs d'authentification pendant la transaction si vous jugez
qu'il y a un risque supplémentaire qui vient d'arriver.
Donc, la
combinaison des facteurs et la combinaison de plusieurs fournisseurs qui sont
capables de vérifier... Ma banque a
dit que c'était moi. Mon opérateur télécom a dit que c'était moi et confirme
que je suis actuellement à «Québec City»,
confirme que mon téléphone, je n'ai pas changé la carte SIM la semaine dernière
en essayant de se faire passer pour quelqu'un d'autre et peut, sur la
transaction, me demander de prendre une photo qui est vérifiée contre un
organisme gouvernemental, boucle la boucle, en quelque sorte.
M. Plante :
O.K. En complémentarité de question, j'aimerais qu'on revienne... Parce que
vous parliez des messages de
prévention, dans la présentation, tantôt. Donc, effectivement, il y aurait et
il existerait un historique client. Donc, la personne aurait un fichier client qui dirait, bon,
bien, vos habitudes de consommation, etc., qui pourrait permettre à la
société du cannabis d'avoir un suivi serré,
autrement dit. Et là vous parliez de messages personnalisés selon l'âge, selon
le type de consommation, selon aussi
l'endroit parce qu'on sait que, bon, ça peut être un message bilingue, mais
français, anglais ou autre, selon la
langue de correspondance d'un individu. J'aimerais beaucoup que vous me parliez
de la personnalisation justement de
ces messages-là parce que les gens avant vous nous ont parlé, nous ont exposé
aussi qu'il fallait être de notre temps
et de notre époque et aussi bien cibler les personnes. Que ça soit un
adolescent, ou un jeune adulte comme moi, ou une personne d'expérience comme mon collègue, je pense que le message de
prévention n'aura pas la même signification pour un des trois, là.
Le Président
(M. St-Denis) : En 30 secondes.
M. Lemieux
(Éric) : En 30 secondes? Il existe... On l'a dit, on peut avoir
un message standard qui apparaîtrait. On dit ça. Après ça, on peut avoir
un message qui va tenir compte justement de l'individu, et ça, c'est un autre
élément. Mais il y a un troisième type de
message, dans lequel on peut même inclure l'interaction avec l'individu dedans,
donc : Bonjour, Éric, sais-tu que c'est
la troisième fois que tu en achètes cette semaine, as-tu pensé de ces
impacts-là? Donc, moi, ce que je
disais, c'est qu'avec la mise en place du système il faut se rendre jusqu'à la
troisième étape. La première, où c'est un
message standard, tout ça, tu vas passer rapidement avec... puis, s'il apparaît
tout le temps, tu vas passer rapidement... L'autre qui t'amène...
L'autre chose... et aussi une intégration d'une vidéo, si vous voulez, qu'il y
a là-dessus, alors, personnalisée. Alors, ce
sont des technologies qui sont actuellement présentes, qui sont, entre autres,
aussi utilisées... Bon, moi, je viens
de l'industrie financière. Donc, ils sont aussi utilisés dans le cadre de
l'industrie financière, dans laquelle on voit, par exemple, différents produits très personnalisés. La personne
qui achète sa maison, alors là c'est la personne... Et on est capables d'amener des messages comme ça.
Alors, le but, c'était ça, c'était d'avoir ces données-là pour être
capables de cibler puis d'avoir pour le client...
Le Président (M. St-Denis) :
Alors, merci, M. Lemieux.
M. Lemieux
(Éric) : Vous m'excuserez, 30 secondes...
Le
Président (M. St-Denis) : Il n'y a pas de problème. Merci,
M. Lemieux. Alors, je cède maintenant la parole au député de
Labelle.
M. Pagé :
Merci, M. le Président. Je pense que c'est la première journée... Jeudi, la
semaine dernière, lorsque nous avons commencé nos auditions en soirée,
on a reçu le groupe Merrco. Merrco, par rapport à vous autres, c'est carrément
un compétiteur? En fait, quelle est la différence entre Merrco et votre — je ne
sais pas comment on appelle ça, là — distribution en ligne, là? Je ne sais pas
comment appeler ça, là. Puis moi, je ne suis pas très haute technologie,
là, alors vous me perdez assez rapidement,
mais, bon, je suis quand même capable de saisir tout ce qui se passe là-dessus.
Mais c'est quoi, la différence avec Merrco?
M. Lemieux
(Éric) : Personnellement, moi,
je ne connais pas Merrco. Donc, ils sont peut-être mieux placés aussi
pour dire leur point. Moi, ce que j'ai compris, c'est que Merrco utilisait une
photocopie ou une photo d'une pièce justificative.
Donc, il m'apparaît, dans un premier temps, que c'est une authentification,
davantage, je dirais, un processus manuel et physique qui a été ramené
pour le faire virtuel. Mais je ne veux pas... Je veux être prudent puisque
c'est... Peut-être que mon collègue va...
M. Serra
(Didier) : Je peux peut-être m'avancer un petit peu plus. D'après ma compréhension, c'est avant
tout une plateforme de paiement. Donc, une
des parties que l'on a vues sur notre plateforme, comment gérer le paiement,
c'est avant tout leur métier coeur d'après ce que j'ai pu comprendre. Toute la
partie authentification que l'on apporte, venant de plusieurs sources fiables
qui se corrèlent pour vérifier l'identité de l'individu tout en respectant la
confidentialité, en respectant sa vie
privée... Vous ne voulez pas que ma banque sache que je suis en train d'acheter
du cannabis et vous ne voulez pas que la société du cannabis sache que
ma banque est Desjardins, par exemple.
Donc,
c'était un des aspects clés quand on a implémenté nos premiers services, c'est
respecter cette confidentialité. Et la dernière chose que vous voulez
voir, c'est avoir un fournisseur de services qui va demander des données confidentielles à l'utilisateur, comme son numéro
d'assurance maladie, pour pouvoir l'authentifier contre des bases de données venant de bureaux de cotes de crédit comme
Equifax et TransUnion. C'est ce qui est fait aujourd'hui, mais on
voit très bien que ce modèle-là est cassé,
ne marche pas. C'est plus difficile d'être la vraie personne en ligne que
d'être une fausse personne en ligne. Aujourd'hui, quelqu'un qui a piraté
mes données va se faire passer pour moi en ligne plus facilement que moi, je
vais prouver qui je suis.
Donc,
c'est pour ça qu'on a développé tous ces services, pour éviter justement
que des utilisateurs fournissent des données
qui ne sont pas nécessaires, envoient des copies de leur carte d'identité en
ligne sous forme de photo et qui ne seront pas protégées correctement.
M. Lemieux
(Éric) : Puis juste ajouter
une chose. La réflexion ici, c'est une plateforme de gestion de vente et
non pas une plateforme de vente en ligne, donc
tout ce qui est prévention et accumulation de données. Moi, mon rêve,
c'est qu'on soit en mesure d'avoir ces données-là depuis le début pour être en
mesure d'être capables de bien axer sur la prévention à ce niveau-là, ce que je
ne sais pas si les autres... pas porter de jugement.
M. Pagé : Bien, justement, là, quand vous parlez de prévention, de quelle
façon l'acheteur va donner son O.K... Parce
que vous dites : Bon, quand il
arrive à tel endroit sur notre site, là, il apparaît des messages de prévention.
Vous savez comme moi, quand on achète en
ligne, là — ça
ne m'arrive pas souvent, mais c'est arrivé à quelques occasions — souvent,
tout ce qui est écrit en bas de la page, on
coche «O.K.» assez rapidement puis, bon, on se dit : Bof! hein, il arrivera
ce qu'il arrivera, là, alors. Mais jusqu'à
quel point... Parce que nous, nous sommes très inquiets par rapport à la
vente en ligne, très, très, très inquiets par rapport à la vente en
ligne parce que surtout les jeunes, aujourd'hui, qui sont les plus gros consommateurs, sont énormément sur Internet. À
partir du moment où nous ouvrons sur la vente en ligne, là, comment
contrôler toute la prévention et la sensibilisation que l'on veut faire?
Alors,
je veux bien entendre ça, là : Oups! quand il va arriver sur telle page,
il va y avoir quelque chose qui va apparaître, mais cette information,
qui va apparaître, de prévention, là, est-ce que ça disparaît au bout de
quelques secondes ou il a juste à cocher
très, très rapidement puis ça disparaît, tu sais? Parce qu'il n'a pas
d'interaction, là, avec un conseiller — je ne dis pas un vendeur mais
un conseiller — de
la SQC qui va pouvoir prendre le temps de discuter, remettre le dépliant, lui
dire : Fais attention, c'est la huitième fois que je te vois depuis deux
semaines, fais attention. Comment cette
prévention va s'articuler sans qu'il y ait... On zippe à la prochaine page pour
acheter le plus vite possible?
M. Serra
(Didier) : Mais peut-être, Éric, il faudrait juste donner un exemple.
J'ai été un mauvais citoyen, une infraction quand je conduisais, et j'ai
dû aller passer des tests en ligne pour réapprendre les choses que je devais
faire correctement ou pas. Et, quand on suit
ces tests en ligne sur la prévention routière, bien, on ne peut pas
faire : «skip», «skip», «skip», je ne veux pas écouter ce qu'on a à
m'annoncer. Donc, je pense que les technologies aujourd'hui permettent d'afficher des messages où ce n'est pas
uniquement : Je fais oui et je ne l'écoute pas. Donc, des technologies
existent.
• (12 h 50) •
M. Lemieux
(Éric) : Pour moi, si je complète... J'ai parlé d'information
personnalisée, donc, pour avoir plus d'impact.
L'autre élément aussi que... Évidemment, on peut avoir un questionnaire ou des
questions. L'intelligence sera aussi
à développer avec des spécialistes de la prévention, des spécialistes comme
ceux qui étaient les intervenants avant. Moi, ce que je dis, c'est que c'est important d'avoir une plateforme et
les données pour être capable de faire ça. Maintenant, c'est infini, les
possibilités qui vont pouvoir se faire en fonction des gens qui sont
spécialistes là-dedans. Moi, ma spécialité,
c'est de dire : Tant qu'à partir, on est bien mieux de savoir ce que le
monde ont consommé vraiment, qu'ils l'aient
acheté en ligne ou pas en ligne,
qu'on soit capables d'avoir cette information-là dans le respect de la
confidentialité. Puis n'oublions jamais, mon
site, s'il y a juste moi qui est dedans, l'interaction, que
c'est juste moi, je respecte la confidentialité, c'est juste moi. Mais on peut me dire tout ce qui est là, mais aussi
d'avoir d'autres données à côté, qui, elles, vont être anonymes, mais
qui vont aussi permettre d'identifier des gens puis des catégories. Je pense
que je l'ai bien expliqué. Je ne veux pas
répéter. Alors, dans le fond... Donc, je dirais qu'avec la mise en place d'une
plateforme... C'est pour ça que j'insiste
sur une plateforme moderne qui tient compte de ça. Ça permet d'ouvrir une
infinité de solutions de prévention avec des experts pour savoir ce qui
est le mieux.
M. Pagé : Bon, tout ça, j'entends ça. Il y a
des aspects, quand même, relativement rassurants à travers cela. Mais ce qui m'inquiète toujours, c'est que, lors de
l'étude des crédits ce printemps, j'ai amené un petit pot qui avait été
commandé directement en Colombie-Britannique, pas par moi, mais des gens l'ont
fait autour de moi. Ils ont commandé un petit pot
de cannabis, et... Déjà. Ce n'est pas légal, et on peut acheter comme ça sans aucun problème.
Est-ce que vous croyez qu'il est possible d'en arriver à contrecarrer
cela, que soit que les Québécois ne puissent pas acheter autrement que par la SQC ou encore qu'il y ait une façon de
procéder, qu'un distributeur hors Québec serait bloqué sans passer par
votre site, là? Alors, est-ce que c'est possible de le faire? Est-ce qu'on peut
contrôler ça d'une façon quelconque? Est-ce qu'aussitôt
que le mot «cannabis» apparaît quelque part, non, tu ne peux pas y aller ou tu
ne peux pas vendre? Est-ce que ça se fait? Essayez de me sécuriser, s'il
vous plaît.
M. Lemieux
(Éric) : Alors, écoutez, on avait eu un peu cet échange-là. C'est
qu'au niveau des technologies, ce qu'on
contrôle, c'est le site de la Société québécoise du cannabis. Elle va être en mesure
de mettre les règles qu'elle veut, avec
une identification forte, qui peut même aller jusqu'à la géolocalisation de la
personne, où elle est, puis l'identification. On pourrait même limiter, même si elle avait une adresse, puis elle
s'était authentifiée, puis elle était ailleurs, de dire : Non, on
ne livre pas là ou on peut faire ça. Ça, c'est les éléments sous notre contrôle
à nous ici.
Au
moment où on passe une commande à l'extérieur du Québec, l'élément qui se fait,
bien, les Facebook... les Chinois bloquent les accès, ils paient des
Facebook... Mais là je pense que ce n'est pas la solution. Je pense que la
solution, ça va être davantage que les provinces, entre elles, s'entendent pour
dire qu'elles vendent uniquement dans leur territoire.
Donc,
technologiquement, on peut faire bien des choses. Tout ce qui est sous le
contrôle du Québec, ça peut se faire. Quand
on tombe par rapport à un autre site qui serait un site tiers, à moins que
Didier veuille ajouter quelque chose, je pense que c'est par entente
entre les provinces que ça va pouvoir se respecter.
Le Président
(M. St-Denis) : Alors, en 10 secondes, M. le député de
Labelle.
M. Pagé :
À moins, comme nous le souhaitons, que le fédéral, dans sa loi constituante,
fasse... pas disparaître, mais enlève le permis à un distributeur hors
Québec qui vendrait à des Québécois, tout simplement.
Le
Président (M. St-Denis) : Alors, merci beaucoup. M. le député de
Labelle. Merci. Alors, je cède maintenant la parole au député de Borduas.
M. Jolin-Barrette :
Merci, M. le Président. Bonjour. Merci de votre présence en commission
parlementaire.
D'entrée de
jeu, pour votre site de transaction, on comprend que, dans le fond, la
personne, elle est identifiée à cause de ses informations bancaires?
M. Serra
(Didier) : Elle s'authentifie auprès de sa banque parce que la banque
sait authentifier la personne. Sa banque
a des informations personnelles qu'elle a vérifiées et qu'elle met à
disposition de l'utilisateur pour que ses infos puissent être partagées directement depuis la banque vers la
destination. Les identifiants bancaires ne sont pas transmis à la
plateforme, ni à SecureKey, ni à personne. C'est juste un moyen qui est utilisé
pour permettre... que c'est la bonne personne sur son téléphone.
M. Jolin-Barrette : ...qui fait la commande. Donc, on est assurés que
la personne a l'âge requis pour passer la commande parce que ça a été contrevérifié avec l'information bancaire,
la personne qui a un compte de banque, qui a un appareil mobile qui
utilise un site Internet d'une institution financière reconnue au Canada.
M. Serra
(Didier) : ...par la banque ou par la banque et d'autres organismes.
La banque, c'est l'étape un. Mais, si vous souhaitez avoir une
vérification encore plus forte, il y a la possibilité de demander que l'âge
soit confirmé par deux sources différentes,
que la banque confirme mon âge et qu'une institution gouvernementale confirme mon âge. Donc là, vous avez deux sources qui
confirment la même information.
M. Jolin-Barrette : Tout à
l'heure, vous parliez, dans le fond, qu'on pourrait avoir une foule de données sur le type de consommateur, la fréquence, tout ça. Les
données peuvent être dénominalisées. Puis là vous disiez : Bien, écoutez,
on pourrait même les géolocaliser, les
gens. Il faudrait voir si ça s'arrime avec les lois sur la protection des
renseignements personnels qu'on a aussi.
Mais je vous dirais que le fait d'avoir des statistiques en matière de prévention, ça pourrait nous aider
aussi pour ne pas banaliser la substance puis avoir des campagnes de prévention
appropriées. Ce que je voulais vous demander,
c'est... Dans le fond, votre outil technologique, il pourrait
être utilisé aussi en magasin. Ce n'est pas nécessairement par la vente en ligne, mais un outil comme ça,
pour recenser, pour valider, tout ça, ça peut être utilisé en personne
directement en magasin.
M. Lemieux
(Éric) : Et je dirais même que, pour être pertinent et bien prévenir,
il faudrait qu'il soit utilisé autant en magasin qu'en ligne, donc d'avoir évidemment deux types d'interfaces, un
où la personne le fait lui-même, que ça soit sur l'exemple que je vous donnais
et qui était sur un ordinateur ou sur un portable, un téléphone cellulaire, mais il pourrait aussi y
avoir la version que le commis... Et je
pense que c'est important
parce que, sinon, le message de prévention, puis c'est ce
que je disais, ne sera pas bien fait. Alors, il faut absolument que ces
données-là soient bien cumulées. Ça fait que la réponse est oui.
M. Jolin-Barrette : O.K. Hier, il
y a des intervenants qui nous disaient : Il y a des programmes qui
existent, d'autoexclusion, supposons, avec les casinos, avec les salons de jeu
aussi. Avec une plateforme comme celle-là, c'est possible que la personne
s'autoexclue. C'est possible de bloquer les transactions?
M. Serra (Didier) : Je dirais
que, oui, l'entité qui est en charge de gérer quelles sont les personnes qui
sont exclues devient un fournisseur d'identifiants dans votre plateforme comme est la
banque ou l'opérateur télécom. Donc, une
des sources que vous pouvez demander lors de la vérification de l'identité
est : Est-ce que cette personne est sur une liste noire, en quelque
sorte? Et, si c'est le cas, la transaction sera arrêtée.
M. Lemieux
(Éric) : Et on a eu des réflexions à ce niveau-là, pour dire qu'il y a
deux niveaux. Ça veut dire que la personne, elle pourrait se faire un
profil dans lequel... Un petit peu comme quand tu te fais un profil d'exercice
ou de nourriture, tu es capable de suivre
ton profil. Alors, tu pourrais te faire un profil à l'intérieur de ça. Mais on
pense quand même que ça, c'est la
personne elle-même qui se contrôle. Mais, si jamais il y avait une liste ou un
élément externe, bien, cette information-là pourrait être fournie par le
tiers, comme M. Serra vient de dire.
M. Jolin-Barrette : O.K., parce
qu'il y a l'autoexclusion, tout ça, mais il y a aussi tout l'enjeu de la vente
en ligne. Nous, du côté de notre
formation politique, on n'est pas nécessairement favorables au niveau de la
vente en ligne parce qu'on considère
que ça diffuse, dans le fond, le produit et l'accessibilité. Puis il y a toute
la question d'accessibilité au marché
en question. On constate que le gouvernement a fait le choix de prévoir la vente
en ligne, mais il va devoir avoir un outil
qui va faire en sorte de s'assurer qu'on ne favorise pas nécessairement la
facilité et l'accessibilité à ce niveau-là.
Sur l'aspect
des taxes, avec une plateforme comme la vôtre, les taxes, elles sont prélevées
directement au niveau... Dès que la
transaction est passée, il y a une remise qui est dirigée directement vers le
fonds consolidé? Comment ça fonctionne?
M. Lemieux
(Éric) : Oui. En fait, au niveau de la conception qu'on avait
réfléchie à ce niveau-là, c'était avant de savoir que ça serait uniquement avec la société du cannabis du Québec.
Donc, la gestion des taxes, dans le cadre où on a plusieurs fournisseurs, devenait importante, et
c'est pour ça qu'on a intégré l'élément où la perception des taxes se
faisait directement à travers cette plateforme-là et non pas par chacun des
marchands. Puisque maintenant on a un seul marchand,
alors la pertinence est toujours là, mais c'est une société d'État qui la
prend. Alors donc, à ce moment-là, c'est moins créateur de valeur que ça
ne l'aurait été si vous aviez eu ou accepté d'avoir multiples vendeurs.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Je vous remercie grandement d'être venus en commission.
M. Lemieux
(Éric) : Ça me fait plaisir.
Le
Président (M. St-Denis) : Alors, M. Serra et
M. Lemieux, je vous remercie pour votre contribution aux travaux.
Je suspends les
travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 6)
Le Président
(M. St-Denis) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, ayant constaté
le quorum, je déclare la séance de la
Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les
personnes dans la salle de bien vouloir s'assurer que la sonnerie de
leurs appareils électroniques soit bien au mode vibration.
La
commission est réunie afin de procéder aux auditions publiques dans le cadre
des consultations particulières sur le projet de loi n° 157, Loi constituant
la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et
modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière. Cet
après-midi, nous entendrons la Société Makivik, l'Association des policiers
provinciaux du Québec, l'Association des propriétaires du Québec et la
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec.
Avant
d'aller plus loin, j'aurais besoin d'un consentement pour permettre au député
de Masson de participer à la rencontre de cet après-midi. Est-ce que
j'ai un consentement?
Des voix :
Consentement.
Le
Président (M. St-Denis) : Consentement. Alors, merci beaucoup.
Alors, bienvenue parmi nous, M. le député de Masson.
Alors,
je souhaite la bienvenue aux représentants de la Société Makivik et je vous
rappelle que vous disposerez exceptionnellement aujourd'hui, suite à une
entente avec le temps accordé à la ministre, là, d'une période n'excédant pas 15 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je
vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre exposé.
Société Makivik
M.
Tukkiapik (Jobie) : Thank you. Thank you for
giving us the opportunity to speak. I know there are some members of you that I've met before here. So,
we're glad to be here and, as you can see, we're a rather large group
that is here. So, I'll do the introduction,
even though the introduction was made that Makivik would be doing a
presentation here. We are composed of different organizations within the
Nunavik region.
So,
my name is Jobie Tukkiapik. I am the president of Makivik Corporation and I am
accompanied by Alicia Aragutak to my left, she is the president of the Qarjuit
Youth Council, Sarah Aloupa is a member of the executive of Kativik Ilisarniliriniq, formerly the Kativik
School Board, and we have Françoise Bouchard, Director of Public Health
for the Nunavik Regional Board of Health and Social Services. And also,
François Dorval is one of our legal counsels at Makivik. And, to my further left, there, we have Mary Kaye May, that's
with Kativik Ilisarniliriniq. And also, we have our photographer around
the table too, so be prepared to get your picture taken.
We have produced a brief to the
committee that we will try to summarize this afternoon. I know we have a limited amount of time. Each organization will present their
concerns, and then I will share the remarks concerning Bill 157.
I will start by introducing my
organization. Makivik Corporation is an ethnic body mandated to protect the rights, interests of the Nunavik community and manage the financial
compensation provided by the 1975 James Bay and Northern Québec Agreement and,
more recent, the offshore Nunavik Inuit Land Claims Agreement that came into
effect in 2008.
Makivik's objectives include to
relieve poverty, to promote the welfare advancement and the education of the Inuit and to foster,
promote, assist, protect and assist in preserving the Inuit way of life, values
and traditions, to develop, and to improve the Inuit communities and to
improve their means of action.
• (15 h 10) •
Nunavik
is the territory north of the 55th parallel, which covers more than 560,000
squared kilometers and that is one third of Québec. Nunavik is a homeland for
11,000 Inuit who live in the 14 communities. Inuit make up 91% of the total
population. Housing overcrowding has reached an alarming rate of 68% in our
region. 66% of the population is under the age of 30.
The bill under review is of importance for Nunavik, as it is
for Québec as a whole. We felt essential to be here today to present our
general support to the cautious approach proposed by Québec on the legalization of cannabis, but also to express the serious concerns we have with regards
to the legalization of cannabis and its potential impact on our population.
I
will ask Alicia Aragutak to present her organization and the youth
perspective. Alicia.
Mme Aragutak
(Alicia) : (S'exprime dans une langue autochtone). Like Jobie said,
I'm the president of the Qarjuit Youth Council. The
Qarjuit Youth Council that I lead is a non-for-profit ethnic organization which
represents the youth from Nunavik and Chisasibi between ages of 15 to 35. The Qarjuit Youth Council
is mandated to advocate, provide our youth
with opportunities and knowledge in order to improve their quality of life, to empower
themselves and to explore their full potential as
responsible citizens and leaders for future and today.
Of particular importance to this discussion today is the
fact that the Inuit population
is very young as compared to the rest of Québec. As
mentioned by Jobie, there are 4,667 youths, ages 15 to 35 years old, in
Nunavik, which represent 35%. We go up to
about 70% if we count the younger population. So, that's us in Nunavik and
Chisasibi.
Our youth face major challenges such as isolation, low education levels, bullying, high cost
of food, lack of housing, poor job
opportunities, lack of social activities, substance abuse and suicide. Nunavik has one of the highest
youth suicide rates in the world. The region
suicide rate has been rising since the 1990s and is now about 10 times the
Québec average. Alcohol consumption during teen pregnancies is at 44% higher,
resulting in many babies being born with FASD.
So we've held, a few weeks ago,
a survey to have an idea of what our youth feel today about cannabis. They suggested that programs should be created to steer
them in a positive life direction to minimize the chances of becoming
addicted to cannabis. The survey reveals that youth are in favor of
legalization, however education is needed.
Cannabis has a negative effect
on a user life, but youth don't know in which way. Access should be limited to under 18 years
old. Cannabis needs to be controlled, and youth use cannabis mainly to relax
and to forget about their problems
within the communities. So that's what the survey revealed. The youth I represent are more at risk than other ages groups with regards to use of cannabis, and its
academics, and its health implications. Thank you.
M.
Tukkiapik (Jobie) : Thank you, Alicia. I will ask Sarah Aloupa,
who recently became one of the executives of the school
board Kativik Ilisarnilirinq, to share her concerns about the concerns of the
school board.
Mme Aloupa (Sarah) : «Nakurmiik».
Merci. My name is Sarah Aloupa. Although Jobie
introduced me, I'm from Quaqtaq. My village starts with Q, like Québec. I was recently elected as a commissioner and, yesterday, I was elected as an executive member. So I'm pretty new.
The
Kativik Ilisarnilirinq,
previously named Kativik School Board, was created in 1975 under the James Bay and Northern Québec Agreement to
empower the Inuit to take control over their own education. The school board
exercises unique powers and jurisdiction for
the delivery of tailored educational services and programs geared towards the protection and development of the Inuit language, culture and way
of life.
Nunavik has the highest rate of
use of marijuana in Québec. Marijuana is the substance most often used in Nunavik besides alcohol. The rate of marijuana use
in Nunavik is about four times the Québec and Canadian averages and has risen substantially over time, from 36%, in 1992, to 60% in 2004, year of most recent data. Youth aged
15 to 19 have the highest rate of any age group at 78%. They are our students.
In
our region, cannabis is not seen as harmful. It's seen as a safe substance. It
is not uncommon to hear that cannabis use is preferable
and less dangerous than use of alcohol. Deconstructing this way of thinking and
addressing the issue of cannabis will
require an important investment
in communication and education, so our students and their parents are made aware and
understand the dangers associated with the use of cannabis. There are
self-reported regular users that are 12 to 13 years of age, while
older youth report starting to use cannabis as early as 11 years of age.
It is known that the use of
cannabis at a young age is detrimental to neurological development, learning
and mental health. Regular cannabis use has been linked to poor academic results
and to dropping out from school. Our region already copes with an alarming
dropout rate, and significant learning struggles are encountered by many of our
students.
As a school board, we are
preoccupied with the legalization of cannabis. «Nakurmiik». Thank you.
M. Tukkiapik
(Jobie) : (S'exprime dans une langue autochtone), Sarah. I'll go ask Françoise Bouchard now to speak
about health concerns and resources.
• (15 h 20) •
Mme
Bouchard (Françoise) : «Nakurmiik». The Nunavik Regional Board of Health
and Social Services is mainly mandated to organize the health and social services program in the
region's 14 villages. So the Department of Public Health is located
at the Regional Board of Health and Social Services. We have two health centers
with their own board of administration located in Puvirnituq and in Kuujjuaq,
one clinic in each village and no pharmacies outside the health centers. They are significant and probably aware
of health disparities between Nunavik and the rest of Québec. Nunavik, therefore, has very limited capacity at this time
for prevention and treatment, and I will outline some of those
challenges we have.
You heard some of the data from
the Qanuippitaa 2004 survey mentioned by Sarah. A new survey has been conducted
this year. We still do not have the results, and they will be hopefully
available in 2018. The mandate of surveillance
and monitoring that we have... we are very preoccupied with our capacity to
conduct those health surveys and maintain
those surveys in the future. They are costly because we need to reach the
14 communities and we do not have the
technology all the time to conduct these surveys in an appropriate manner. We
are planning currently to do a survey among our schools, for the first
time all our schools, in 2018 and with the collaboration of the Institute of
Health Statistics of Québec,
and we still don't have the complete financing of that survey secured.
However, the Qanuippitaa 2004
survey has provided some useful information that we are communicating. For
example, it indicates that cannabis use in the last 12 months is
associated, among our youth, with emotional distress among our people 15
and older. Also, as you know, the suicide rate is high in our regions, and
suicidal thoughts in the past
12 months, as well as live time rate of suicide attempts, are higher in
people who reported cannabis use in the last 12 months. This main fact reflects the
negative impacts of substance use on health and wellbeing of our individuals
and in their efforts to cope also with their distress through the use of drugs,
meaning that distress might pre-existing to the drug use.
We
know that the detrimental effects of cannabis, which alter mental functions,
are a serious concern for youth under 25 as their brain development is not
completed. The use of cannabis is associated with attention deficit, intelligence function and can therefore interfere with the capacity
for learning at school. It's also associated with depression in adolescents and young adults, anxiety, psychosis
and schizophrenia. Second hand smoking is of concern. So, considering
the alarming overcrowding situation that prevails in 68% of our households in
Nunavik, children and youth are at great risk of being exposed to cannabis
smoke.
The high rate of cannabis use
in Nunavik poses a significant challenge for prevention. Nunavik has little capacity to provide sustainable and culturally
adapted educational campaigns to inform the population, and especially
the youth, about the danger of cannabis.
Prevention interventions call for a multigenerational and community approach
to create an environment that does not
encourage its use. For example, we are currently developing a campaign to
reduce exposure of children to the harm effects of alcohol in the house
and drug use in the house. The development of such campaigns is taking close to two years right now because it's
very important that we do it right and taking the time, and the cost is
close to $200,000. And we still haven't finished planning, you know, the
dissemination of this campaign, the release of this campaign, in 14 communities
using Facebook, social media, radio messages, printed material. So these are
very challenging resource taking from us, so just a small campaign like this.
At
the moment, if we talk about, now, addiction services, we have some general
addiction services available within Nunavik health
centers. Evaluation, reference and follow up services are available in some
communities, but these resources are insufficient to answer specific and
present global needs in our population.
In terms of treatment...
Le
Président (M. St-Denis) : Merci beaucoup. Merci beaucoup, madame. On va vous permettre
peut-être, par les échanges, là, de compléter ce que vous vouliez nous
donner. On a dépassé le temps déjà.
Mme Charlebois :
...beaucoup de temps? Peut-être leur demander...
Le
Président (M. St-Denis) : Est-ce qu'il vous reste beaucoup de
temps encore? La ministre est peut-être prête à vous donner un peu de
temps pour terminer.
Mme Bouchard
(Françoise) : I will... going to ask Jobie to
go to the conclusions.
M. Tukkiapik (Jobie) :
If you can bear with me, it will take me about a minute, two minutes to read
the conclusion.
Le Président (M. St-Denis) :
C'est bon, allez-y.
M. Tukkiapik (Jobie) : O.K. Thank you. I will supply our
position concerning some specific sections of Bill 157.
We believe that the consultation of the
Société québécoise du cannabis could provide the control needed over the
quality, the consumption and the strength of
the cannabis that will be offered for sale. We support the prohibition for a
minor to possess cannabis and we
support the prohibition to cultivate cannabis for personal purposes. Similar to
alcohol, we believe that the availability of cannabis in Nunavik should
be limited and controlled as much as possible.
While
we support the objective to curtail the black market, at this point, we cannot
support the establishment of retail outlets in our region. We need to consult our communities. We
recommend that a working committee be created between our organization
and possibly others and the Government to fully explore the options and their
impact. With regards to the availability of
cannabis for purchase over the Internet, it raises some serious concerns, as we
do not know how the availability will
impact the level of consumption, the number of consumers, etc. There will need
to be a proper mechanism in place to insure that minors cannot purchase
cannabis online.
Concerning agreements that may
be entered into for the purpose of adapting the measure for the act to Native
realities, it raises more questions than comments for us. What kind of
adaptation is foreseen? How far could these agreements
go in terms of aboriginal or local regulations of cannabis? Could a community
enter into such an agreement to impose a complete prohibition over the
sale of cannabis?
We
support the creation of a cannabis prevention and research fund. We request
that a specific and fair portion of the fund be dedicated to Nunavik, so that Nunavik
specific cannabis harm prevention, activities and programs and the health activities and the programs can be
developed and implemented. The fund should not be allocated on a per
capita basis, since the needs of Nunavik are
huge, while our population is relatively small in numbers compared to other
regions. Specific research will need to be conducted in Nunavik to monitor the
impacts of the legalization of cannabis.
We support the establishment of
cannabis oversight committee responsible for advising
the Minister on any relative matter to
cannabis. We request that a representative of the health and social service
sector in Nunavik be appointed on the committee, considering the unique
specific situation of Nunavik.
In conclusion, despite our
different mandates and jurisdictions, our four organizations are unanimous with
regards to the serious concerns that the
legalization of cannabis brings for our people, our youth, our students and our
region. We appreciate the careful approach developed by Québec. However, we are not ready and do not
have the required resources to address the
risk, especially for our youth, who have high levels... We already have high
levels of addiction, substance abuse, suicide and mental health issues, and legalization of
cannabis will exacerbate this, and it's also coming too soon. We need additional resources to educate our population, implement prevention and awareness campaigns and to have proper regional
addiction treatment facilities. And all this needs to be done in a culturally
relevant manner, and we are seeking a commitment of financial and policy
support from the Government.
«Nakurmiik». Thanks for giving
me that additional time to finish my conclusion.
Le Président (M. St-Denis) : O.K.
Merci. Alors, merci. Je vous remercie pour vos exposés. Nous allons maintenant
débuter la période d'échange. Alors, Mme
la ministre, il ne vous reste que six
minutes pour votre échange.
Mme Charlebois :
Combien?
Le Président (M. St-Denis) :
Six minutes.
Mme Charlebois : O.K.
On va aller à l'essentiel, donc. D'abord, monsieur... on va éteindre ça parce
que je m'entends. Jobie Tuppiakik, comme ça qu'on le dit, Tuppiakik?
M. Tukkiapik (Jobie) : Tukkiapik.
Mme Charlebois : O.K., et vos invités, merci d'être là, de nous faire
part de vos commentaires, mais surtout de vos inquiétudes aussi. On peut comprendre qu'il y a des inquiétudes. La population
du Québec, dans son entièreté, est inquiète. À plus forte raison, avec tout ce que
vous nous avez dit, on peut comprendre votre inquiétude. Vous savez que
suite aux consultations que nous avons tenues avec les populations autochtones
en fin septembre dernier, avec mon collègue le ministre des Affaires autochtones,
nous avions convenu d'avoir à nouveau des discussions, parce qu'on a compris qu'il
y a la légalisation qui est faite par
le gouvernement fédéral, et là vous vouliez que nous ayons une
approche de prudence, effectivement, pour l'ensemble des communautés autochtones, mais chaque communauté autochtone semblait nous dire qu'il n'y avait pas le
même genre d'approche dans chacune des communautés.
Alors, on
vous a entendus et on a mis, à l'article 56 du projet
de loi, les commentaires suivants. Je ne vous lirai pas tout l'article parce
que c'est long, mais l'essence de l'article.
Nous avons indiqué à l'article 56 que «dans le but d'adapter aux réalités autochtones les mesures prévues
[dans] la présente loi, le gouvernement est autorisé à conclure une entente portant sur toute matière visée par ses
dispositions ou ses règlements avec une nation autochtone représentée par
l'ensemble des conseils de bande ou des
conseils des villages nordiques qui la constituent, avec la Société Makivik,
avec le Gouvernement de la nation crie, avec une communauté autochtone représentée par son conseil de bande ou par le
conseil du village nordique, avec un regroupement [des] communautés ainsi représentées ou, en l'absence [d'un
conseil], [...]tout autre regroupement autochtone. Cette entente peut également
porter sur l'adaptation aux réalités autochtones d'autres mesures gouvernementales
liées au cannabis qui ne sont pas prévues par une loi ou [par] un règlement[...].
Elle doit poursuivre les mêmes objectifs que ceux poursuivis [dans] la présente
loi.»
Or, la
présente loi a une approche de santé et de sécurité publique, et, dans cet
article, on vient dire qu'on peut convenir,
dans la mesure où on tient compte de la santé et de la sécurité publique, et
c'est ce que je vous ai entendu dire depuis
le début, qu'on va pouvoir faire une entente en tenant compte de cette
prémisse-là, mais on peut faire des ententes avec les communautés autochtones pour répondre aux aspirations de
chacune des communautés — mais «aspirations», ce
n'est pas le bon mot — pour répondre aux inquiétudes et répondre aux défis, aux enjeux
qu'auront les communautés autochtones.
Est-ce que ça vous satisfait que nous ayons
inclus cette disposition dans le projet de loi? Ça, c'est la première question, puis ça va aller assez vite pour
répondre parce que je me doute de ce que vous allez me dire. Mais je veux
vous entendre me parler davantage sur les
dispositions qui sont dans le projet de loi au niveau... Là, je comprends que
vous, la production personnelle, vous êtes satisfaits avec l'interdiction, mais
je vous entends parler de prohibition chez les jeunes. Nous autres, on a mis l'âge à 18 ans dans le projet de loi
n° 157. Comment vous voyez ça? Est-ce qu'on doit se donner un moyen de pouvoir parler avec ces
jeunes-là pour pouvoir justement entrer en communication puis expliquer
c'est quoi, une consommation dite
responsable, plutôt que de faire de la prohibition puis qu'on n'ait pas la
chance de parler à ces jeunes-là puis
qu'on échappe... Parce que, ce que vous me dites, c'est que c'est consommé
déjà, malheureusement, puis ce n'est
pas juste chez vous, là, hein, c'est dans l'ensemble du Québec, c'est de même,
mais il y a un problème plus criant chez vous parce que vous êtes des
communautés un petit peu plus isolées, pour ne pas dire vraiment plus isolées.
Alors, dites-moi comment vous voyez ça,
vous, l'âge, la culture personnelle puis l'article 56. Est-ce que ça vous
satisfait, l'article dont je vous ai fait lecture. Je vous ai donné
trois questions...
• (15 h 30) •
Le Président (M. St-Denis) : En
deux minutes.
Mme Charlebois :
C'est parce que je les pose toutes du même coup, sans ça... J'ai
donné mon temps.
M.
Tukkiapik (Jobie) : Too many say, so... We just had a discussion with
the four organizations that we had, and maybe Sarah can
help, and François also, in the answer, but the main part of it is with the
high rates that we have of alcohol abuse in our region, as well as cannabis
abuse, as well as having the region of the highest rates of actually detrimental effects for our society, example,
highest rates of suicide, and that... The legalization of cannabis, it's
really going to... for us, it's another
battlefront that... We're already overwhelmed with the present situation that
is there already. And as well in the comments that we had is that legalization of cannabis
to our people, our young people, will probably be viewed as something pretty cool. It's a new thing
that's going to come now. But the dangers of smoking marijuana and doing drugs also have to be... have a huge
emphasis with the government and our society that it's as bad as smoking,
it's as bad as drinking alcohol and abusing it. And that's where we have to
really work together also. The age that is there, it's also... We feel that if
it was older, it'd be actually better for us too.
Le
Président (M. St-Denis) : Merci beaucoup. Alors, maintenant je
vais céder la parole au député de Labelle pour une période de
9 min 30 s.
M. Pagé : Oui. My English is very
bad. Alors, je vais seulement faire
quelques mots en français pour permettre à mon collègue, le député de Saint-Jérôme, qui est un ancien professeur
d'anglais à l'école primaire, donc il pourra bien s'exprimer auprès de vous... Merci d'être ici, à
l'Assemblée nationale, tous les six. Votre délégation aussi forte est
vraiment, je pense... signifie toute l'importance que vous accordez à ce projet
de loi.
Je vais vous
avouer que j'ai de la difficulté à trouver les mots pour exprimer ce que je
veux vous dire, parce que je suis très touché, très touché par vos
témoignages. Quand vous parlez de haut taux de suicide, parmi les plus élevés
au monde, quand vous parlez d'un taux de
consommation qui est aussi élevé, quand vous parlez de décrochage scolaire,
quand vous parlez de tout ce que ça peut
vous jeter comme inquiétude dans votre communauté, je suis aussi, également,
très, très inquiet. Et le message que je
voudrais que vous reteniez aujourd'hui, c'est que nous entendons très bien vos
préoccupations. Et je les fais miennes, et je suis convaincu que la ministre,
c'est la même chose aussi. Je pense que l'ensemble des parlementaires vont
faire siennes vos grandes préoccupations, vos grandes inquiétudes.
Et au fur et
à mesure que nous allons travailler, article par article, pour bonifier la loi,
si vous avez des commentaires à nous faire, parce que vous allez suivre
ce travail de très près, si vous voulez intervenir, écrivez-nous. Dites-nous ce
que vous souhaiteriez pour qu'on puisse améliorer le projet de loi.
Alors, sur
ce, je vais laisser la parole à mon collègue, mais en vous posant une seule
question qui est la suivante : On sait
que la loi prévoit déjà un certain montant d'argent pour pouvoir faire de la
prévention, cette prévention qui va être énormément importante, je me demande même s'il devrait y avoir, dans la
loi, une enveloppe spécifique, notamment pour vos communautés; est-ce que vous le souhaitez, qu'il y ait une enveloppe
dédiée particulièrement pour vos territoires? Et, si oui, est-ce que vous avez déjà évalué quel
pourrait être le montant qui pourrait être dédié particulièrement pour
vos communautés. Parce qu'on parle de
25 millions sur cinq ans, mais ce que j'ai compris, c'est pour l'ensemble du Québec. Mais, face à la problématique
et à votre situation, est-ce que vous êtes capables de chiffrer vos besoins?
Le Président (M. St-Denis) :
Alors, M. le député, allez-y, ensuite, M. le député de Saint-Jérôme.
M. Bourcier : ...to answer the question before?
M. Tukkiapik (Jobie) : Go ahead. Go ahead, and then...
M.
Bourcier : OK. So, welcome to all of you. Mr. Tukkiapik, is that
right? Yes. I must point out before that it's a federal law, and, unfortunately, we have all the problems because of that federal
law, we must adapt and deal with it and we're deeply
concerned, as you are.
You told us about a survey that
you made in your community. And, in that survey, people talked about a program to guide them, education, that is importantly needed. Were you told that those programs...
but were you told that programs were going to be in
place in your community? So, that's my first question.
Secondly,
you talked about your schools. I'm a teacher, I used to be a teacher before.
So, at what age do you think prevention programs should be started in your schools? And what are your
needs in terms of personnel, experts? I have other questions.
Do I continue with... and you'll answer all of them after that? Yes?
M. Pagé : On peut les
laisser répondre.
M. Bourcier : Yes? OK, so I'll let you answer my first questions before.
Mme
Aragutak (Alicia) :
All right. Thank you for your question. Very
briefly, just to elaborate on the very, very quick survey we did online for the youth, because
it's... we're so remote, it was very hard to reach out to a lot of the
youth that we want, so we ought to get innovative, so we used an online survey.
So, the youth we're talking
about and the majority of the participants that submitted their survey, they
were nonusers. They were nonusers, they knew
the negative effects, they were in favour of it, but, you know, in the back
of their heads, they're thinking : OK, maybe there might be more money moved around or
prioritized within their households, because a lot of the times the black market is
favoured. So, that... I think I have a feeling it was because of that and
there was a lot of comments in regards to
that as well. And, in there, they were saying : Programs... We need to be
educated. We know it sounds bad to
smoke weed, but how does it really affect us? So, there is a lot of non
educated youth in the region that
really need... educated and to be exposed, you know, to talk about cannabis.
Right now, it's kind of like : Ugh! To talk about cannabis in the region? But we're stimulating that and we
need your help to really do that within our region. And I feel the younger it is to educate them on what
is negative about, I think it gives us more of a cushion and that, you
know, that effect for the future. I'll leave it at that, I think.
M. Tukkiapik (Jobie) : I'd like Françoise to respond to part of the question.
Mme Bouchard (Françoise) : OK. On terms of the envelope dedicated to the needs of Nunavik regarding drug use, I think we're all in
favour. I think, in
terms of giving you an
amount today, I would rather take the time to really
assess what the needs are and what feasibility is. I think we need to be
cognizant that, you know, we need to make the due thing on that, but I think we
welcome that there are specific funds dedicated to our region to address this
issue within the plan of the Government.
M. Tukkiapik (Jobie) : Just on one part also, it's at what
age should it start, and we afford different
organizations with our own board members
also, so, for sure, we need time to come back to you and say what the envelope
could be for this. But at what age
should it start? It should right start... the target group would be the
students as well as the parents here. And
we need to do a kind of communication blitz
about legalization of cannabis being here and now. We need to also independently work together to say : This can be very detrimental
to your health. Also they may think that, because it's legalized now, that
there is no health effect, but there is, and that's what our population doesn't
know.
• (15 h 40) •
Le Président
(M. St-Denis) : Il reste encore un peu moins de deux minutes.
M. Bourcier : OK. You told us before that, for a lot of your youth, cannabis is seen as a
safe substance. Do you think that, if a SQC retail
outlet is installed in your community... first, do you agree with that, a SQC
retail outlet in your community?
M.
Tukkiapik (Jobie) : What that is?
Une
voix : ...
M. Bourcier : No? SQC store? Is it important for you that this SQC store should be equipped
with prevention programs,
with people to educate, a kind of counselors to educate the young about the
dangers of using cannabis? Is that something that you would like, first
line services?
Mme
Bouchard (Françoise) : Your question is about putting the sales in line
with the prevention? Is that what you're saying?
M. Bourcier : Not in line, with the store installed
in your community. If it's so, what... I don't think you'd like that, if I read correctly, but, if it happens, would you like
this place, this store, to have people in it, counselors, to make prevention on
first line prevention?
Une
voix : Ou juste de la vente en ligne?
M.
Bourcier : Or just on line sales. What do you
want?
Le
Président (M. St-Denis) :
15 seconds.
M. Tukkiapik (Jobie) : OK. With that question, it's, for us... like I said, we are
four separate organizations, we need to come and talk about
it. And also, there's an adaptation that probably has to be done with our
culture. We said we're 91% Inuits
that have a predominant language of inuktituk and we know, I think, best
somehow to get the message out. So if it's an outlet coming from the
government, then it has to be done through us, in our view.
Le
Président (M. St-Denis) : Merci beaucoup. Merci. Maintenant, je
vais passer la parole au député de Masson pour une durée de
6 min 30 s.
M. Lemay :
Merci, M. le Président. Merci d'être ici, avec nous, aujourd'hui. Vous avez
mentionné tout à l'heure, dans votre
mémoire, que vous étiez favorables pour l'âge de 18 ans, mais... puis,
considérant que, dès l'âge de 11 ans, il y a des gens qui
commencent à consommer, et que c'est fréquent à l'âge de 12 et 13 ans
qu'on puisse consommer, donc, je peux
comprendre qu'en mettant un âge à 18 ans ça permettrait justement de mieux
encadrer... J'aimerais savoir : Est-ce que vous avez évalué la
possibilité de fixer cette limite-là à un âge de 21 ans ou si, pour vous,
l'âge de 18 ans, ça reste une balise qui est quand même acceptable,
considérant les réalités que vous vivez présentement?
Mme
Aragutak (Alicia) : So, the survey we
conducted, when we asked : OK, who should this be available for?, because it is going to happen, it is coming,
it is already in place, now, how do we deal with it? 18 years old was
the majority of how the participants
reacted. There was a lot of concerns and there is quite a bit education on the
response to that. The brain develops until
the age of 35... no, 25, I'm so sorry. I think it needs to be very strategic,
and we feel that 18 is kind of a median, although we know, as
organizations in the health sector, that there's still has an effect to that
age.
M.
Tukkiapik (Jobie) : But also we were told that it seems that the age
of 18 years old is what the government is going to
stick with, but we feel ourselves the older the age limit is, it is better for
us.
M. Lemay :
Maintenant, est-ce que vous avez réfléchi à certaines portions du territoire ou
de communautés pour lesquelles vous ne voudriez pas qu'on puisse avoir
accès au cannabis?
M. Tukkiapik (Jobie) : In a briefing that we had, it's what we agree, that it would not
necessarily be readily available like a
store in our region, that it would have to be received online, and that's the
kind of the priority that we have considering
the speed of this, the legalization coming around here, is that we need more
time to develop and how we want to have
it. Also, the other part of it is that the funding of 25 millions that was
mentioned also is for prevention, but it's also activities through the sales of cannabis. We
should really create programs for our youth to have a lot of activities
which we are unable to do due to the high
cost of living that is there. There are some activities, but, for sure, there
is more activities needed in our region. And that is one of the great
ways that we feel that will have prevention on the use of cannabis to our young
people.
Une voix : Go ahead.
Mme
Aragutak (Alicia) :
And I would just like to add that, you know, it is going to... it is already in
place. I have a little
cousin currently in the hospital. The marijuana he smoked, that was tainted. So, there is a lot of quality to be talked about as well within the youth in our region that are
already accessing it in an alarming rate of how much money that is being
consumed in the black market. It is very present. It is there. It is who
controls it and how.
M. Lemay : Vous l'avez mentionné dans votre élément de votre
dernière réponse, que vous n'êtes pas prêts. Vous avez besoin de plus de temps. Vous avez besoin de
plus de ressources. Tout à l'heure, on a posé la question concernant les fonds nécessaires. Est-ce que
vous avez un estimé d'un montant que vous devriez avoir accès pour justement
mettre en place les ressources dont vous avez besoin dans vos communautés pour
justement pouvoir faire face à cette nouvelle réalité? Est-ce que vous avez un
estimé du montant?
M. Tukkiapik (Jobie) : As I
mentioned earlier, we are not able to provide an estimate here. It is because we have different
fronts that are here, the health sector, they are going to have to come out
with their own estimates. Makivik representing the ethnic group, being
the ethnic organization, we have to come up with an amount also, as well as the
schoolboard that is here. So, for sure, we
can come back to you, as someone had mentioned earlier, that we can
provide additional comments or additional briefs as you go through this
consultation. We can get back to you at a fairly reasonable time.
M. Lemay : OK. Et, sur la question de... le temps nécessaire
supplémentaire, est-ce que vous avez à ce moment-là, vous, je comprends, vous n'avez pas un estimé en
dollars, mais est-ce que vous avez un estimé de temps
supplémentaire que vous auriez de besoin?
M. Tukkiapik (Jobie) : We can't be specific on a time such as this, it's a... For us, we
prepared very quickly because the way it
happened here also is that we were not necessarily on the list to be invited to
the briefing here, and I think that was an oversight on your part. And
now we had to prepare fairly quickly for this also. So, how much time do we
need? That is something that we are going to have to get back to you on also.
Le Président (M. St-Denis) : En
15 secondes.
Mme Aloupa (Sarah) : OK. On est
très différents chez nous. Alors, ça va prendre beaucoup de temps pour
expliquer. Aussi votre document a besoin d'être traduit. Parce qu'il y a
plusieurs unilingues chez nous. Merci.
Le
Président (M. St-Denis) :
Alors, je vous remercie. Merci pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Je suspends les travaux quelques instants afin
de permettre aux représentants du prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 49)
(Reprise à 15 h 53)
Le
Président (M. St-Denis) :
Alors, nous allons reprendre. Donc, je souhaite la bienvenue à l'Association des policiers provinciaux du Québec.
Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et
puis nous procéderons en la suite à la
période d'échange avec les membres de la commission. Alors, je vous invite à
vous présenter et à commencer votre exposé.
Association des policiers
provinciaux du Québec (APPQ)
M. Veilleux (Pierre) : Merci,
M. le Président. Je suis accompagné
de Dominic Ricard, vice-président aux griefs et à la formation, Jacques Painchaud, vice-président à la discipline
et à la déontologie, ainsi que Me Alain Rousseau, procureur conseiller de l'association. L'Association des policières et policiers provinciaux du Québec
tient à remercier la commission de l'opportunité qui lui est offerte de faire
valoir son point de vue sur le projet de loi n° 157.
Nos
préoccupations à l'égard de ce projet de loi se situent davantage au niveau des
interventions en matière de sécurité publique auxquelles nos membres sont appelés à
participer. À notre avis, que ce soit dans le cadre de l'adoption
des projets de loi C-45 et
C-46 au fédéral ou du projet de loi n° 157 à l'étude, ce nouvel
environnement juridique mettra en cause les questions des effectifs
nécessaires, des ressources matérielles et des formations requises afin
d'appliquer adéquatement les nouvelles
dispositions en matière de conduite de véhicules avec les facultés affaiblies par une drogue. Notre analyse, dans ces préoccupations, nous donne clairement à penser que non seulement la Sûreté du Québec, mais également l'ensemble des services policiers ne seront pas en mesure d'être prêts à rencontrer les
responsabilités qui sont les leurs,
dévolues par ces projets de loi, avec toute l'efficacité et l'efficience que
commandent ces nouvelles dispositions.
Aux fins de la
compréhension pour les gens de la commission, on a inclus dans notre mémoire
une mise en contexte pour que vous
compreniez bien les interventions, les étapes lorsqu'un policier doit
intervenir sur la route. Je vais vous faire fi de la lecture. On va
tomber effectivement dans l'analyse.
Problème
d'effectifs policiers. Depuis des années déjà, à la Sûreté du Québec, une
réduction d'effectifs lors de l'intégration de services policiers
municipaux débutait en 2002, puis suivie d'un gel d'embauche lors des mesures
d'austérité ont fait en sorte que les membres affectés à la patrouille
souffrent d'un manque flagrant d'effectifs dans plusieurs unités. Nous croyons que malgré toute la bonne volonté de la
Sûreté du Québec de remédier à la situation par une hausse graduelle des embauches afin de combler le
déficit, nul doute que ce redressement de situation ne pourra vraisemblablement se faire avant la fin de
l'année 2018, voire même au courant de l'année 2019, et ce, alors
qu'aucune augmentation réelle des effectifs ne semble même être envisagée pour
l'instant.
Entre-temps, plusieurs unités de patrouille
doivent assumer une surcharge de travail, en plus du temps supplémentaire
qu'occasionne ce manque d'effectifs. Ainsi,
dans le cadre du projet de loi qui nous occupe, les nouvelles dispositions
ne manqueront sûrement pas d'augmenter cette surcharge de travail dans
plusieurs unités, entre autres, puisque le taux d'occupation des policiers terrain augmentera à raison de 2 à
3 heures par événement lors duquel l'agent aura des motifs
raisonnables d'intervenir. L'absence de policiers sur le terrain, partis en
formation en tant qu'instructeurs ou agents évaluateurs,
sera, dans la plupart des cas, comblée par des membres, souvent en temps
supplémentaire. Il en est de même pour la formation, que ce soit comme
instructeur, agent multiplicateur ou agent utilisateur des appareils de
détection salivaire. Le projet de loi
fédéral C-46 prévoit un ajout à l'article 254 du Code criminel qu'un agent
de la paix qui a des motifs
raisonnables de croire qu'une personne ait conduit son véhicule avec les
facultés affaiblies par une drogue ou l'alcool peut en outre ordonner
que lui soient fournis des échantillons sanguins.
Compte
tenu de la surchauffe généralisée dans nos urgences, cette disposition nous
semble pour le moins un peu déconnectée
de la réalité de notre système de santé au Québec. Il n'est pas déraisonnable
de croire que le prélèvement d'échantillons de sang dans ces
circonstances ne fasse pas partie des priorités de nos hôpitaux et qu'en
conséquence les policiers seront appelés à attendre durant une période de temps
assez longue pour l'obtention de ces échantillons.
Nous
sommes d'avis que tous ces facteurs combinés augmenteront de beaucoup le degré
de difficulté avant qu'une véritable offensive structurée puisse être
mise en place pour le 1er juillet 2018, visant à contrer la conduite d'un véhicule automobile avec les facultés affaiblies
par les drogues. En effet, cette
surcharge des policiers sur le terrain, en plus de diminuer la présence policière sur le territoire, ne se fera pas
sans heurt, l'épuisement étant souvent la résultante de cette situation.
Ressources
matérielles. Il est important de rappeler ici qu'aucun appareil de détection
salivaire n'a encore été approuvé par le gouvernement fédéral. Tout au plus, une étude faite par le gouvernement fédéral, dont le rapport définitif a été déposé le 6 juin 2017, recommandait deux types d'appareils.
Selon nos informations, le coût de ces appareils se chiffrait entre 4 500 $ et 7 500 $, et les besoins, pour la sûreté uniquement,
seraient de l'ordre de 600 appareils. Nous croyons donc que le processus d'homologation de ces appareils,
leur achat et leur diffusion à travers la province, avec toute la
logistique de formation nécessaire à son déploiement, font en sorte qu'il est
utopique de penser à une mise en place pour le 1er juillet 2018.
Plus
préoccupantes encore sont les limites inhérentes à cet appareil. En effet, ces
appareils de détection salivaire ne mesurent
aucunement le taux de THC présent dans l'organisme d'un conducteur suspecté de
conduite avec les facultés affaiblies.
Ainsi, il peut uniquement révéler si le conducteur a consommé ou non de telles
substances depuis un délai qui peut
être de plusieurs heures, mais ne peut en aucun cas servir à établir que
celui-ci avait, au moment de l'interception par les agents, les facultés
affaiblies par une drogue.
C'est
pourquoi nous sommes étonnés par la teneur de l'article 40 du projet de
loi n° 157 prévoyant ce qui suit : «Un agent de la paix [peut
suspendre] sur-le-champ, au nom de la société, pour une période de
90 jours, le permis d'une personne qui conduit un véhicule routier ou qui
en a la garde ou le contrôle :
«2°
si l'analyse effectuée au moyen d'un matériel de détection des drogues
conformément aux dispositions de l'article 202.3
ou de celles du Code criminel révèle [...] présence de cannabis ou d'une autre
drogue dans son organisme.»
Avec
respect, il nous semble que ces dispositions du projet de loi devraient être
retirées ou suspendues jusqu'à ce qu'un
appareil de détection salivaire puisse fournir un véritable taux de THC pouvant
être arrimé avec ceux prévus aux nouvelles dispositions du Code
criminel. En effet, ces dispositions du projet de loi n° 157 nous semblent
davantage sanctionner le consommateur et pas
nécessairement le conducteur d'un véhicule automobile avec les facultés
affaiblies par une substance. Ainsi, les
risques d'injustice à l'égard de certains conducteurs n'ayant pas les facultés
affaiblies nous apparaissent trop importants.
• (16 heures) •
Formation
requise. L'agent évaluateur. Il
importe de souligner qu'à la Sûreté
du Québec seulement 31 membres sont formés à titre d'agents évaluateurs et que l'objectif
connu serait d'en avoir un par unité de patrouille, à savoir près de 121 à travers la
province. Cette formation administrée par l'École nationale de police du
Québec est d'une durée d'un mois, dont les coûts sont évalués
approximativement à 14 000 $ par agent.
Il est donc aisé de
constater que, malgré l'instauration des dispositions au Code criminel créant
la formation d'agents évaluateurs, en
juillet 2008, un certain retard est constaté dans le déploiement de cette
ressource à la Sûreté du Québec. Par
ailleurs, selon nos informations, il en est de même des autres services de
police au Québec. Nombreux sont les services
policiers qui n'ont pas formé suffisamment d'agents évaluateurs afin de
répondre à leurs besoins. En conséquence, ceux-ci font régulièrement appel au service d'assistance de la Sûreté du
Québec, augmentant d'autant la charge de travail de ces quelques
dizaines d'agents évaluateurs à la Sûreté du Québec.
Il
va de soi que, dans une perspective de l'introduction de la loi sur le cannabis
et d'une offensive plus structurée sur la
conduite avec des facultés affaiblies par les drogues, ce nombre insuffisant
d'agents évaluateurs risque fort de mettre en péril une mise en place
efficace et coordonnée.
Utilisation
d'appareils de détection salivaire. Comme mentionné précédemment, les
estimations quant aux besoins de la Sûreté
du Québec pour ce genre d'appareils se situent autour de 600. Il s'agit en fait
du même nombre que pour les appareils
d'alcootest ADA déployés depuis plusieurs années. Cependant, la mise en place
de ces appareils pour l'ensemble des services policiers engendre tout un
défi en matière de formation. Tout d'abord, l'ENPQ devra voir à former des instructeurs, puis des agents
multiplicateurs en mesure de transmettre la formation dans leurs localités
afin qu'ils puissent donner à leur tour une
formation aux utilisateurs de ces appareils sur la route. Selon nos
informations, toute cette logistique ne pourra être mise en place avant
l'automne 2018. Il est à noter, à titre de comparaison, qu'à la Sûreté du Québec le nombre d'utilisateurs formés pour
l'appareil ADA, pour l'alcool, se situe à près de 100 % des effectifs de
patrouille.
En
conclusion, nous sommes d'avis que le manque d'effectifs à la Sûreté du Québec
sera certainement un obstacle à la
mise en place d'une offensive plus structurée afin de contrer la conduite des
véhicules automobiles avec les facultés affaiblies par une drogue dans
le contexte de la légalisation du cannabis comme prévu au projet de
loi C-45. En conséquence, il serait grandement
temps d'avoir au gouvernement une stratégie intégrée à court et à moyen terme
afin d'augmenter les effectifs de la Sûreté
du Québec, bien au-delà de combler l'écart du gel d'embauche occasionné par
les mesures d'austérité. Cette réflexion est essentielle afin que ce service
policier d'envergure nationale puisse être à la hauteur des attentes des
citoyens et des législateurs.
De
plus, toute la logistique entourant la sélection, l'homologation, l'achat
d'appareils de détection salivaire de même
que l'important dispositif devant être mis en place afin de fournir la
formation requise aux effectifs de patrouille nous laisse croire qu'il serait utopique de croire qu'à
compter du 1er juillet 2018 les services policiers, dont la Sûreté du
Québec, seront prêts à faire face à l'entrée en vigueur des dispositions
du projet de loi C-45 et C-46 de même que celles du projet de loi n° 157 à
l'étude.
En
terminant, l'association tient à vous remercier de l'attention que vous avez
portée au présent mémoire et espère avoir
apporté une contribution utile à vos travaux ainsi qu'à votre réflexion sur le
projet de loi n° 157. Merci beaucoup.
Le
Président (M. St-Denis) : Alors, merci, M. Veilleux, pour
votre exposé. Alors, nous allons maintenant débuter la période d'échange.
Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Charlebois :
Merci, M. le Président. D'abord, vous saluer, M. Veilleux,
M. Painchaud et M. Rousseau... Il me manque un nom. J'ai trois
noms puis vous êtes quatre.
Une voix :
M. Ricard.
Mme Charlebois :
M. Ricard. Merci pour votre présence et votre présentation. J'ai le goût
de vous demander, parce que je
connais plusieurs policiers, vous n'êtes pas chanceux, j'en ai plein dans mes
amis — je ne
sais pas si c'est une qualité que
j'ai ou si c'est un défaut... C'est une blague! J'ai plein de policiers qui me
disent qu'ils l'appliquent déjà, la conduite
avec facultés affaiblies. J'ai le goût de vous demander : Étant donné que
tout le monde nous dit qu'il y a déjà beaucoup
de cannabis consommé illégalement... D'ailleurs, vous connaissez mon comté,
sûrement, Soulanges. Pas besoin de
vous dire qu'il y en a un petit peu là-bas, pour les raisons que vous
connaissez, qu'on n'élaborera pas ici. Mais comment vous faites, à
l'heure actuelle, pour les conduites avec facultés affaiblies?
Parce
que vous comprenez... Puis vous nous dites : On ne peut pas faire
tolérance zéro tant et aussi longtemps qu'on
n'a pas l'appareil homologué. Je suis totalement d'accord avec vous depuis le
début des consultations. Parce que, je ne sais pas pourquoi, cette croyance-là est dans la population. Mais je le
répète à chaque... puis merci de me donner l'opportunité de vous le dire encore, parce qu'à un moment donné
ça va transpirer en quelque part, mais on ne mettra pas tolérance zéro tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas un
appareil homologué qui nous dit qu'il y a eu une consommation récente.
On n'ira pas avec le nombre de nanogrammes,
on va y aller en termes de consommation récente. Et ça, c'est bien
important de le spécifier pour la population. Puis on ne va pas arriver, du
jour au lendemain, non plus, quand on aura l'appareil homologué, dire :
Oh! ça commence ce matin. Non, on va prévenir la population de tout ça.
Quand est-ce que ce
sera? Je ne peux pas vous dire parce qu'en ce moment ils nous disent au fédéral
que ça devrait être bientôt, mais bon, je
n'ai pas les documents qui me prouvent ça. Alors, en attendant, on va continuer
avec la conduite avec les facultés affaiblies comme vous le faites déjà. Alors,
dites-moi, est-ce que vous considérez qu'en ce moment c'est dangereux que je sois sur la route parce qu'il y en a qui
conduisent déjà beaucoup avec les facultés affaiblies?
M. Veilleux (Pierre) : J'en conviens, qu'il doit certainement y avoir
plusieurs consommateurs, présentement, même si elle est illégale. Et ce
n'est pas au niveau juste du cannabis, on s'entend. Mais, nous, ce qu'on pense,
c'est que la légalisation va faire augmenter
la consommation. Ça, c'est clair. Jusqu'à quel point? Personne ne le sait pour
l'instant.
Présentement,
naturellement, si on arrête une personne puis on constate qu'il est en facultés
affaiblies, on va d'abord évaluer l'alcool. L'alcool est beaucoup plus
facile à évaluer. Généralement, une personne va avoir une haleine d'alcool. Et naturellement que, lorsqu'il s'est
enfermé dans un véhicule et que ça fait quelques minutes qu'il conduit,
quand il ouvre sa fenêtre, c'est assez évident. Ça fait que, donc, ça nous
donne déjà des soupçons pour au moins l'amener à l'appareil de détection, l'ADA, qui est un peu le pendant de ce vous
souhaitez, qui détecte une présence soit en haut de la limite ou soit en bas de la limite. Ou des fois il
va y avoir un signal vert qui dit : Il n'y a pas d'alcool. Et
généralement, quand je l'amène là, j'ai senti des odeurs d'alcool. Donc, c'est
plutôt rare.
Mme Charlebois :
...erratique aussi.
M. Veilleux (Pierre) : C'est
plutôt rare. Oui. Ça fait que, contrairement à une consommation... Et souvent, très souvent — et, je vous dirais, peut-être pas tout le
temps, là, ce n'est pas scientifique, ce que je vous dis, je vous donne
une expérience de patrouilleur de 17 ans — lorsqu'il y a eu consommation
de cannabis ou d'autres drogues, il y a également
par-dessus une consommation d'alcool. Donc, c'est sûr que le premier réflexe
pour le policier, étant donné qu'il
n'y a pas de tolérance zéro ou il n'y a pas de décriminalisation au niveau du
THC, si je sens l'alcool, je l'amène à l'alcool,
et là, si mon ADA de l'alcootest me dit : Il est au-dessus de la limite,
bien, moi, je l'amène puis je travaille au niveau de l'alcool, et là, je
le passe au niveau de l'appareil et je lui fais une cause de facultés
affaiblies par l'alcool.
S'il n'y a
pas d'alcool et que je m'aperçois que la personne en question, au niveau du
symptôme, est vraiment en facultés
affaiblies, donc là, je peux lui demander de se soumettre à des tests de
coordination. Bon, je ne rentrerai pas dans les détails. La plupart des agents de la Sûreté du Québec sont déjà formés à
peu près à 90 % pour pouvoir directement, lorsque j'arrête un
véhicule sur la route... de procéder à trois types de tests de coordination qui
fait en sorte... qui me donne naturellement
les motifs pour amener la personne à un agent évaluateur. Mais il faut que ça
soit évident en fait d'intoxication, il faut que ça soit quand même...
il faut qu'il échoue les tests.
À une tolérance zéro, ce qui pourrait arriver,
c'est qu'il pourrait avoir l'agent actif dans son sang mais être tellement faible au niveau du taux, et là on ne
rencontrerait peut-être pas la tolérance zéro, et il pourrait passer, en
fait, se qualifier sur les tests, et là je n'aurais plus de motif pour l'amener
devant l'agent évaluateur aller plus loin dans mon investigation. Donc, on risquerait possiblement, juste avec les tests,
d'en échapper. On parle des faibles taux, on parle vraiment des faibles
taux.
C'est sûr
que, si... et c'est mon voeu également, Mme la ministre, d'avoir un appareil
qui pourrait mesurer de façon contemporaine,
dire : Là, présentement, tu en as dans le sang, soit en haut ou en bas de
la limite, dépendant de l'appareil. Ça me
donnerait un avantage de l'amener directement à l'agent évaluateur. Même si mes
tests ne sont pas nécessairement concluants, j'aurais au moins
l'indication qu'il y a présentement présence de THC, exemple, dans son sang.
Mais
qu'est-ce qu'on fait présentement? On travaille surtout sur l'alcool parce que,
je vous dirais, trois fois sur quatre,
c'est accompagné d'alcool. Donc le premier symptôme ou le premier soupçon qu'on
a, c'est l'haleine d'alcool. Donc, on s'en va vers l'ADA. Et très
souvent, c'est concluant.
• (16 h 10) •
Mme
Charlebois : On m'a dit — puis je
vous répète ça parce que je l'ai appris sur le terrain — que souvent les gens qui consomment aussi du cannabis, un, ça sent
aussi, puis dites-moi si c'est vrai, puis, deux, on m'a même dit, dans
une émission de télévision, que les consommateurs de cannabis mangeaient
beaucoup de chips et de cochonneries. Ça a l'air
que c'est symptomatique dans les voitures des gens qui consomment. Je vous dis
ça, puis vous n'êtes pas obligé de me répondre parce que, regarde, je
n'ai pas de science qui m'indique ça, là, je vous donne l'information que j'ai
eue.
Je vous amène sur une autre piste. Je voudrais
que vous me parliez du projet de loi, sur l'âge. Est-ce que vous avez pris position là-dessus? Nous autres, on a
mis 18 ans comme âge. Est-ce que vous pensez que c'est raisonnable,
avec toutes les mesures de prévention, tout ça? Puis on sait que 42 % des
consommateurs de cannabis ont entre 18 et 22. Est-ce
que vous pensez qu'on doit se donner les moyens, avec la Société québécoise du
cannabis qu'on va constituer dans la loi...
qu'on se donne les moyens de leur parler, de leur donner de l'information, de
les instruire sur ce que c'est, une consommation responsable, et les
risques, là, accompagné d'autres produits? Est-ce que vous pensez qu'à
18 ans c'est raisonnable de penser que
c'est une bonne chose qu'on puisse échanger avec ces gens-là, plutôt que de les
laisser dans la prohibition et sur le marché criminel?
M. Veilleux
(Pierre) : Bien, d'un point
de vue sécurité publique, il y a une certaine logique. En fait, d'un
point de vue citoyen, il y a une certaine
logique, à partir du moment que l'âge pour pouvoir se procurer de la boisson,
de l'alcool, c'est 18 ans, il y
a une certaine logique là-dessus. Au niveau de la sécurité publique, je vous
dirais que c'est possiblement un peu
jeune parce que souvent c'est des jeunes conducteurs qui ont... puis ça ne fait
pas longtemps qu'ils ont... ils n'ont pas une grosse expérience de
conduite, et, si on leur donne... Déjà, c'est très restreint au niveau de la
boisson. Si on leur donne la possibilité, en plus, de se procurer du cannabis,
bien, on risque plus d'en voir à 18, 19 ans qui vont se faire attraper par
la police avec une consommation de cannabis. Et là je m'abstiendrai de parler
d'un point de vue santé, je pense que ça appartient aux médecins, mais il y a
des études, je pense, qui sont éloquentes sur tous les problèmes de psychiatrie
qui peuvent être occasionnés ou qui peuvent être déclenchés par la consommation
de cannabis. Et je parle pour les jeunes.
Mme Charlebois :
Avant 25 ans...
M. Veilleux (Pierre) : Avant
25 ans.
Mme Charlebois :
...c'est sûr qu'il y a des dommages potentiels.
M. Veilleux (Pierre) : Au
niveau de la schizophrénie, oui.
Mme Charlebois : Mais vous savez comme moi, puisque
vous êtes policiers, que la majorité des consommateurs sont plus jeunes. Mais moi, je me demande, puis là c'est une impression personnelle pour...
moi, j'ai 58 ans, là, je ne vous le cacherai pas, je suis mère et grand-mère, et je pense que les jeunes
sont plus sages que nous autres, honnêtement, qu'à ma génération, en ce
qui concerne l'alcool et le restant. Pour la majorité que je connais, en tout
cas, ils ont toujours un conducteur désigné.
Je ne dis pas qu'il n'y a pas des exceptions, je ne suis pas en train de dire
ça, mais je pense qu'ils sont beaucoup plus sages que nous autres, on
l'était au même âge. Je leur fais confiance.
Une voix : ...
Mme Charlebois : Oui. Bien, c'est ça. Alors, je veux aussi
vous amener sur la production personnelle parce que vous n'en avez pas
parlé dans votre mémoire. Sur la production personnelle, nous, on a mis zéro
plant pour chacune des résidences.
Que pensez-vous de ça? Pour vous, c'est-u une difficulté d'application qu'on mette de... nombre de plants, pas de
plant?
M. Veilleux
(Pierre) : Bien, écoutez, on
n'y a pas vraiment pensé, on n'a pas vraiment... on ne s'est pas
penchés là-dessus. Parce
que je ne pense pas... Ça va
dépendre un peu de la façon que la société, au niveau des lois et des règlements, va vouloir le traiter, le fait de ne pas posséder
ou de ne pas avoir le droit de produire du cannabis à la maison. Mais
c'est sûr que ça va être plus facile pour le
travail policier. Lorsqu'il va y avoir des perquisitions pour x raisons,
exactement comme aujourd'hui, de voir des plants de cannabis soit dans le
sous-sol ou peu importe la pièce, on va être plus en mesure de... En tout cas, on ne se posera pas de questions si on saisit ou non, ça va
être évident. Mais on n'a pas vraiment pensé à cet aspect-là. À partir du
moment que les gens qui ont 18 ans peuvent se procurer de façon légale,
dans des succursales, de la mari, pour nous,
ça ne changera pas la nature du travail sur la route. Je parle au niveau de la
conduite automobile. Je ne pense pas qu'il y ait une grosse différence là-dessus.
Mme
Charlebois : Je vais vous amener sur la possession, tant qu'à
y être, parce que je sais que vous avez tous un bon oeil, d'habitude en tout cas. Et êtes-vous en mesure
d'évaluer facilement, si je vous dis : 30 grammes de cannabis séché,
150 grammes à la maison? Parce
qu'il y a les équivalences en
cannabis frais, en cannabis huile, bon, puis ça, vous allez avoir les
quantités. Est-ce que pour un policier, savoir... 30 grammes, que le
consommateur vient d'aller faire son acquisition?
Puis, mettons, on y va au maximum, est-ce que c'est facile pour vous de savoir
que ça représente 30 grammes? Dans
le lieu de résidence, avoir une quantité maximale de 150 grammes, est-ce
que c'est facile pour vous de détecter ça? Moi, j'ai le goût de dire
oui, mais je vais vous laisser répondre. J'imagine que vous avez l'oeil fait à
ça.
M. Veilleux
(Pierre) : Bien, en fait,
mettez-vous dans la peau d'un policier qui n'a jamais travaillé avec des
limites de possession. Ça a toujours été
illégal. Ça fait qu'à partir qu'on voit un gramme ou une livre, il ne
se posait pas de question, il y avait une saisie, bon.
Mme Charlebois :
Même pour le cannabis thérapeutique?
M. Veilleux
(Pierre) : Bien, pour le
cannabis thérapeutique, ça ne fait pas tellement des années non plus que
ça roule, hein? Ça fait que je ne pense pas
qu'il y ait une culture qui s'est développée pour les policiers. Je parle des
policiers terrain. Il s'en va prendre l'information, c'est clair, ne serait-ce
que de l'information, qu'est-ce que ça ressemble, 30 grammes, qu'est-ce que ça peut représenter comme quantité,
30 grammes. Je suis persuadé qu'il y a des policiers qui ne feraient pas la différence entre une livre puis
30 grammes. Puis ce n'est pas parce qu'ils sont en manque de
connaissances, c'est une question
d'expérience. Mais naturellement, ça va prendre des guides pour savoir
qu'est-ce que ça peut représenter, tant
de grammes d'huile ou tant de grammes de cannabis. Ça, c'est clair. Et là la
différence entre un 30 grammes puis un 150 grammes, rendu à la maison, j'imagine qu'il va falloir, à un
moment donné, peut-être se traîner des petites balances puis de vérifier ça. Parce qu'à 150 grammes ou
155 grammes, quand tu es rendu avec un volume ou une quantité quand
même assez importante, à l'oeil, tu ne peux pas faire la différence.
Mme Charlebois :
Parce que c'est les mêmes quantités qu'on a... On a pris cette quantité-là
parce que c'est la quantité qui est prescrite pour le cannabis
thérapeutique dans la loi du gouvernement fédéral.
M. Veilleux (Pierre) : Je
comprends.
Mme Charlebois :
Je veux vous dire que nous autres aussi, ça nous apparaît serré dans le temps,
puis on a demandé... Moi, je me rappelle, au
début, j'ai demandé à l'ancienne ministre de la Santé un délai supplémentaire.
Les ministres des Finances l'ont demandé. Il
y a eu une motion qui a été déposée à l'Assemblée nationale, sur laquelle on
a tous voté dans le même sens. On dit : O.K., vous voulez faire votre loi,
mais mettez un report dans la mise en oeuvre. Mais,
jusqu'à date, en tout cas, ça ne fonctionne pas bien, bien. Alors, je veux
juste vous dire qu'on va faire tout notre maximum pour être prêts.
J'entends que vous avez besoin de
formation, les médecins en ont besoin. Je vais vous dire que ça va
engendrer beaucoup, beaucoup de préparation.
Il faut préparer notre campagne de prévention. Bref, on a beaucoup de travail
en avant de nous. Puis juste faire la
loi... Là on consulte encore en janvier, on va rentrer en février, il va
falloir ensuite aller en Chambre...
Le Président
(M. St-Denis) : ...
Mme Charlebois :
Ça termine? Bien, en tout cas, tout ça pour vous dire qu'on va avoir l'article
par article, puis il faut bouger vite
pour justement nous donner les outils pour vous donner les moyens puis faire
votre travail, vous, mais aussi le corps médical et l'ensemble des
intervenants. Alors, merci d'être venus.
M. Veilleux
(Pierre) : Si vous permettez. Ce n'est pas un reproche que je faisais,
hein?
Mme Charlebois :
Non. Mais je ne le prends pas comme ça.
M. Veilleux
(Pierre) : Je suis conscient que vous êtes aussi pressés que nous, là.
Mme Charlebois :
Oui, oui. Non, non, je ne l'ai pas pris comme ça.
M. Veilleux
(Pierre) : C'est au-delà de notre... Oui, on se comprend.
Le
Président (M. St-Denis) : Alors, merci, Mme la ministre. Je cède
maintenant la parole au député de Labelle pour une période de
8 min 45 s.
M. Pagé :
Merci, M. le Président. Alors, bienvenue chez vous, à l'Assemblée nationale.
Merci de venir nous allumer là-dessus. Je
vais vous avouer que je suis un peu sous le choc, quand je lis ça, là, quand je
lis que... parce qu'on le sait, là,
que la loi s'en vient, depuis deux ans et demi, et quand je lis qu'il y a un
manque d'effectifs, qu'il serait grandement temps d'avoir, au
gouvernement, une stratégie intégrée à court, moyen terme, un peu plus loin,
qu'il serait utopique de croire qu'à compter
du 1er juillet 2018 les services policiers, dont la Sûreté du Québec,
seront prêts à faire face à...
Comment
se fait-il, pourtant, ça fait longtemps qu'on le sait, que ça s'en vient, que
nous ne soyons pas plus prêts que cela en termes de formation? Je
comprends que les tests pour détecter de façon hors de tout doute ne sont pas
prêts, semble-t-il, même, je pense, un peu
partout dans le monde. Mais il y a quand même un minimum de formation que
vous pouvez recevoir, qui devait, j'imagine,
déjà être dans les cartons depuis un certain moment. Comment se fait-il
qu'il... Parce que, quand je lis votre
conclusion, là, c'est comme si on avait appris il y a un mois, là, que tout ça
allait arriver.
• (16 h 20) •
M. Veilleux
(Pierre) : Bien, en fait, vous n'êtes pas sans savoir, on le mentionne
dans notre mémoire, que le Code criminel
reconnaît ou a mis sur pied les agents évaluateurs depuis 2008. La Sûreté du
Québec a formé quelques agents
là-dessus, 30, 31. En fait, il y a deux choses. C'est une question à
développement, là.
M. Pagé : Puis, en même temps, pouvez-vous me dire combien
d'effectifs supplémentaires vous
évaluez pour l'ensemble du Québec? Êtes-vous capable de me dire ça, en
gros?
M. Veilleux (Pierre) : Bon, à cette question-là, je vais vous répondre
rapidement, on ne l'a pas vraiment évalué. En fait, c'est qu'on a des symptômes, énormément de temps supplémentaire,
des symptômes de fatigue de nos membres, et là c'est tout le principe qu'on rajoute une tâche supplémentaire, qui n'est
pas une mince tâche. Quand on parle d'évaluation de facultés affaiblies
avec les drogues, ce n'est pas mince, comme tâche. C'est une espèce de petite
révolution dans la conduite automobile, et
déjà, c'est très lourd, faire une facultés affaiblies avec alcool. Ça va le
devenir encore plus, au niveau temps-hommes, avec les drogues.
Bon,
pour ce qui est des agents évaluateurs, depuis 2008, la Sûreté a tenté de
former des gens. Il y a une capacité de l'École nationale de police qui est quand même limitée. Parce que cette
formation-là, ça apporte à avoir beaucoup de tests au niveau des agents, des tests réels. Donc, ça nous
prend des gens intoxiqués pour pouvoir faire nos tests dans un but de
formation, et ça, c'est difficile. Aux États-Unis, ils travaillent différemment
que nous, mais ça, c'est assez difficile.
Mais
il y a aussi... les deux dernières années, à la Sûreté du Québec, il y a eu
énormément de coupures. En fait, le gouvernement
a fait une année ou deux d'austérité. Puis c'est correct, ils l'ont fait, on a
vécu avec ça. Donc, ça a eu un effet sur
le ralentissement au niveau de l'embauche à la Sûreté du Québec. Il en est
sorti plus qu'il en est rentré, comme on dit. Et naturellement, il y a
eu un effet sur la formation. Et, sur la formation, quand on parle d'une
formation de 14 000 $ au niveau des agents évaluateurs, bien, il y a
eu aussi des répercussions à ce niveau-là.
Donc,
c'est un ensemble de facteurs qui expliqueraient un peu pourquoi qu'on n'est
pas plus prêts aujourd'hui au niveau de ce projet de loi.
M. Pagé :
Au niveau des appareils de détection salivaire, bon, vous en parlez dans votre
conclusion, pouvez-vous me dire
précisément de quelle façon ça devrait se faire, là? Est-ce que c'est un truc
qu'on pénètre dans la bouche pour aller prélever la salive? C'est comme ça, là? On a vu ça un peu dans certains
reportages, là. C'est vraiment comme ça que ça devrait se faire?
M. Veilleux
(Pierre) : Bien, ce qui
existe présentement, là, puis ce qui a été étudié par le gouvernement
fédéral, c'est un petit appareil qui va
analyser un échantillon de salive qui est prélevé avec un embout qu'on met de
la salive dessus. Et, naturellement,
l'appareil va donner une lecture à l'effet que tu as une substance dans ta
salive et non pas dans ton sang, dans
ta salive, qui peut être du THC, qui peut être un stimulant, qui peut être...
Il y a des familles de drogues. Et ça dit que tu en as consommé et
peut-être depuis plusieurs jours, donc tu l'as encore dans ta salive.
M. Pagé :
Oui, ça, c'est bon. Mais ce que je veux savoir, c'est que, pour faire le test,
on pénètre dans la bouche l'espèce de petit bâtonnet ou je ne sais trop,
là? C'est comme ça que ça se passe?
M. Veilleux
(Pierre) : Oui, c'est ça,
c'est un préleveur, qu'on appelle. Oui, effectivement, ça... et là je n'ai
jamais vu l'appareil, là, j'en ai juste entendu parler, ce qu'on me dit, c'est
que la personne, la personne interceptée doit aller chercher de la salive avec
ce préleveur.
M. Pagé : Bon, O.K. Là, moi,
j'ai un monsieur qui est retraité d'un milieu carcéral, a passé sa vie, plus
d'une trentaine d'années, dans un milieu
carcéral, puis je lui ai parlé la semaine dernière, et il me dit :
Sylvain, il dit, il va y avoir un
problème. Il dit moi, il dit, j'ai été agent dans un milieu carcéral... pendant
toute sa vie, est retraité depuis un certain nombre d'années, puis il me
dit : Légalement, on ne peut pas pénétrer dans aucun orifice humain sans
la permission de la personne, que ça soit la bouche, les oreilles, le nez ou
encore le rectum.
C'est
tellement vrai que, quand ils ont des doutes sur un prisonnier puis qu'ils font
une fouille à nu, ils observent, mais
ils n'ont pas le droit de pénétrer dans aucun orifice humain. Il me dit :
Même quand on a des doutes que quelqu'un a fait pénétrer dans son rectum ce qu'ils appellent un «zip gun», ils sont
obligés de le mettre dans une salle et attendre que la personne fasse ses besoins ou encore que la
personne accepte de passer une radiographie afin de voir si le «zip gun» est
là.
Alors, quand
vous me dites que le test, c'est de faire pénétrer un bâtonnet dans la bouche,
selon vous, est-ce que ça va être légal ou non? Parce que ce que l'agent du
milieu correctionnel me dit : À moins que la loi ait changé, il me
dit, aussitôt que quelqu'un va refuser, on ne pourra pas aller prélever le test
salivaire.
M. Veilleux
(Pierre) : Je comprends très
bien. Si vous permettez, M. le Président, je passerai la parole peut-être
à mon aviseur. Là, c'est une question très technique, de l'ordre de loi.
M. Rousseau
(Alain) : Au niveau de
l'embout buccal dans lequel on fait un prélèvement, il y a
tout lieu de penser que le débat
juridique va avoir lieu à un moment donné ou à un autre. Est-ce que
ça va passer le test de la charte, dans le sens où est-ce que ça se justifie, dans une société libre et
démocratique, une telle contravention à la Charte des droits et libertés? Ce sera aux tribunaux de le préciser au
moment opportun. Mais il y a tout lieu de penser que les moyens de
défense vont être utilisés. La question de
savoir, à partir d'un soupçon d'un policier qu'il y a consommation de drogue,
est-ce que ça se justifie au
sens de la charte, ce sera une question qui va sûrement faire l'objet de
débats.
M. Pagé : Quand on ne peut pas aller vérifier avec un
prisonnier qui a un casier judiciaire, j'imagine que quelqu'un qui se fait intercepter sur la rue, puis qui n'a
aucun casier, et qu'on lui demande de pénétrer dans la bouche, je pense
qu'on va avoir des problèmes importants, là.
M. Rousseau (Alain) : Dans
l'état actuel des choses, votre appréciation vaut tout à fait la mienne. Ça va
être l'avenir qui va nous le dire, sur le plan juridique, si ça va passer le
cap.
M. Pagé : Est-ce que
j'ai le temps pour une dernière question?
Le Président (M. St-Denis) : Il
reste 30 secondes.
M. Pagé : 30 secondes.
Tolérance zéro. Là, on a dit : Compte tenu de tout ce qu'on a énuméré
depuis tantôt, on ne pourra pas le faire
appliquer. Alors, ne serait-il pas mieux, je soulève la question, là, d'avoir
une tolérance à 0,02 ou 0,04 nanogramme — parce
que la loi fédérale, je pense, permet jusqu'à 0,04 ou 0,05 — pour
éviter justement que des gens se retrouvent
à perdre carrément leurs permis de conduire? Parce qu'éventuellement il va falloir la faire respecter d'une
façon ou d'une autre, alors quel est le meilleur scénario à ce moment-là?
M. Rousseau (Alain) : Dans le
fond, si vous le permettez, c'est...
Le Président (M. St-Denis) :
...
M. Rousseau (Alain) : Oui. Dans
notre mémoire, on prévoit déjà que cet appareil-là devrait respecter les paramètres du Code criminel en termes de THC, vert, jaune ou rouge, comme l'ADA pour
l'alcootest. Si c'est rouge, on sait
déjà qu'il est au-dessus de la limite. Mais on recommande la même chose pour
les appareils de détection salivaire. Il n'y en a pas ou il y en a trop.
Le
Président (M. St-Denis) : Merci. Je dois céder maintenant la
parole au député de Borduas pour une période de cinq minutes.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Veilleux,
M. Painchaud, Me Rousseau, M. Ricard, bonjour. Merci d'être
présents à la commission parlementaire. D'entrée de jeu, je veux faire un petit
aparté, ensuite on va revenir au cannabis.
Je veux vous demander votre opinion sur la nomination du directeur de la SQ à
titre de directeur du SPVM. Qu'est-ce que l'Association des policiers
provinciaux en pense?
M. Veilleux
(Pierre) : Bien, écoutez, ce
n'est pas nécessairement de notre ressort. C'est sûr qu'on aimerait
mieux le garder avec nous, mais, s'il peut
être utile ailleurs, bien... Puis le DGA qui va le remplacer, on le connaît
très bien, c'est une personne avec
qui on a des tractations au niveau de la table de négociation. Donc, je n'ai
pas de problème avec ça, moi.
M. Jolin-Barrette : Parfait. Merci. Sur le cannabis. J'aimerais qu'on
revienne à l'appareil de détection autorisé. Vous dites : Écoutez, on va voir si ça va passer le test des
tribunaux au niveau du caractère invasif. Actuellement, l'ADA pour l'alcool, c'est déjà dans la bouche des
individus, puis c'est déjà soufflé. Est-ce que ça a déjà été contesté à la
cour? Puis ça a été sauvegardé, j'imagine, parce qu'on l'utilise.
M. Veilleux
(Pierre) : Avec l'ADA, on
lui demande un échantillon d'haleine, donc il nous donne un échantillon
d'haleine. On pourrait faire le pendant peut-être avec la... Il y a quand même
un embout, il doit prendre l'embout, le mettre dans sa bouche et souffler
dedans.
M. Jolin-Barrette : Mais, s'il
refuse de le faire, qu'est-ce qui arrive?
M. Veilleux
(Pierre) : C'est un refus.
C'est un refus au sens du Code criminel. Parce que la loi prévoit le
refus. Ça peut être le refus de l'ADA, au
moment où il y a l'interception, mais ça peut être le refus au poste, aussi, au
niveau de l'appareil qui, lui, va
déterminer exactement le taux. Donc, aux deux places, il peut y avoir un refus,
ça existe. Puis on ne commencera pas à... on va respecter la décision,
mais il va y avoir une accusation de refus. Et il pourrait y avoir un refus également
de ne pas se soumettre au test de coordination.
M. Jolin-Barrette : Effectivement.
Donc, l'individu est passible d'une infraction criminelle à ce moment-là?
M. Veilleux (Pierre) : Tout à
fait.
M. Jolin-Barrette : Alors, dans tous les cas, il faut qu'il souffle
ou, sinon, il se retrouve devant les tribunaux.
M. Veilleux (Pierre) :
Lorsqu'on parle d'alcool, oui.
M. Jolin-Barrette : C'est ça. Donc, pour le cannabis, est-ce que
vous considérez que ça devrait être la même chose?
M. Veilleux (Pierre) : Ça
devrait.
• (16 h 30) •
M. Rousseau
(Alain) : J'étais lancé sur
une réponse tantôt, et ça va répondre à votre questionnement. Ce
qu'on recommande, c'est qu'on attende
d'avoir un appareil de détection qui va être similaire à celui de l'alcotest
sur la route.
Donc, à partir du moment où on a les mêmes paramètres d'intervention que pour l'alcool,
des paramètres qui ont fait leurs
preuves jusqu'à maintenant, on a tout avantage à avoir des appareils d'évaluation de présence de drogue qui vont s'apparenter à ce qui se fait au
niveau du THC au niveau criminel, là, entre deux nano et cinq nano. Donc, on a
tout avantage à ce qu'au niveau des drogues on se dote d'appareils de ce
type-là.
M. Jolin-Barrette : O.K. Tout à
l'heure, quand vous avez parlé des ressources
au niveau de la SQ, vous dites : Écoutez,
on est déjà en compression, on a déjà de
la difficulté, un manque de personnel. Dans votre mémoire,
vous dites : Pour analyser, lorsqu'on va faire une interception
avec quelqu'un qui serait avec des facultés affaiblies reliées à la conduite avec du cannabis, ça pourrait nous
rajouter deux, trois heures par intervention. Supposons que
l'intervention arrive le soir ou la nuit,
c'est des duos qui patrouillent. Là, à
ce moment-là, on va avoir deux
policiers dans ce dossier-là.
Je veux
savoir, en termes d'efficacité de
personnel... il va falloir dégager plus de monde, parce que... Je vous
donne un exemple, là. Moi, dans ma
circonscription, j'ai quatre villages où c'est la SQ qui est présente, mais il
n'y a qu'une seule auto de police pour les quatre villages. Alors,
durant ce temps-là, qu'est-ce qu'on fait?
M. Veilleux
(Pierre) : Bien, c'est ça,
le problème. C'est pour ça qu'on demande des effectifs supplémentaires, parce que déjà le fait de faire un travail et
d'intercepter une personne avec les facultés affaiblies par l'alcool, ça
prend en moyenne... on l'évalue, là, ça
prend entre deux et trois heures. Donc, je ne veux pas faire de mauvais jeu de
mots, mais tu es gelé pendant deux,
trois heures, deux policiers à travailler sur un événement. C'est correct, on
fait le travail. Il est fort à parier
qu'avec les interventions qui vont être axées sur la drogue, ça va être
minimalement, minimalement le même temps. Parce qu'un agent évaluateur, à partir du moment que je l'amène au
poste, ça lui prend environ 45 minutes pour faire son travail. C'est plus rapide lorsque je travaille au
niveau de l'alcool. Ça fait que c'est pour ça que je dis minimalement
entre deux et trois heures.
Ça fait qu'on
sent, on anticipe que ça va multiplier les interventions ou les interceptions
en matière de facultés affaiblies,
tout confondu, alcool et drogues. Donc, conséquemment, il y a une charge de
travail qui va être augmentée, mais durant le temps, puis je pense... Je ne veux
pas minimiser l'importance, mais durant ce temps-là, bien, il n'y a pas
de patrouilleur sur la route. Puis, si les
appels rentrent, de violence conjugale, de chicane, etc., on va les nommer,
bien, on manque de personnel à un
moment donné, là. Et je peux difficilement dire au gars : Excuse-moi,
reste là tranquille, je vais aller couvrir une violence conjugale, je
vais revenir. Ça ne marche pas, là.
M. Jolin-Barrette : ...poser
une autre question au niveau des lieux de consommation.
Le Président (M. St-Denis) :
Vous allez juste manquer de temps, M. le député de Borduas, pour votre autre
question. Alors, si ça ne vous dérange pas, on va arrêter ça là.
M. Jolin-Barrette : Bien, ça me
dérange un peu, M. le Président, mais...
Le Président (M. St-Denis) : Ça
vous dérange un peu?
M. Jolin-Barrette : Mais, sur
le temps de la présidence, peut-être juste se prononcer sur les lieux de consommation,
qu'est-ce que vous en pensez.
Le Président (M. St-Denis) :
Non. Mais c'est... Je suis désolé, on a terminé. On est déjà sur le retard.
Alors, je
vous remercie de votre contribution et je suspends les travaux pour quelques
instants afin de permettre au prochain groupe de s'installer. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 34)
(Reprise à 16 h 36)
Le Président (M. St-Denis) :
Alors, nous allons reprendre nos travaux, et je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association des propriétaires
du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour
votre exposé, puis nous procéderons à la
période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à
vous présenter et puis à commencer votre exposé.
Association des
propriétaires du Québec (APQ)
Mme Lapointe
(Annie) : Bonjour, M. le Président. Mme la ministre, Mmes et MM. les
députés, bonjour. Je me présente,
Annie Lapointe, directrice adjointe au Regroupement des propriétaires
d'habitations locatives. Donc, on est un regroupement qui défend les
propriétaires d'immeubles à revenus, principalement en Estrie et en Montérégie.
Je suis accompagnée de Me Robert Soucy, avocat
spécialisé en droit locatif, et je suis accompagnée de Martin Messier,
président de l'Association des propriétaires du Québec qui représente également
des propriétaires à l'échelle provinciale.
Donc, nous
nous sommes regroupés pour la présentation, comme les enjeux sont communs. Nous
sommes tous deux... on travaille à la
défense et à la promotion des droits et des intérêts des propriétaires et
gestionnaires d'immeubles, donc on
soutient la cause des propriétaires depuis plus de 35 ans. Donc, c'est
dans ce cadre-là qu'on est appelés de façon quotidienne à écouter, à
conseiller les propriétaires dans les situations difficiles qu'ils vivent tous
les jours.
Donc,
j'aimerais vous remercier de nous permettre de faire cette présentation-là
devant vous aujourd'hui, parce que c'est un sujet qui touche aussi les
propriétaires et qui suscite énormément de crainte de la part des
propriétaires, mais également des
locataires. Donc, on espère pouvoir vous inspirer dans vos réflexions, vous
faire part de notre réalité et vous orienter dans vos décisions. Donc,
je vais céder la parole à Me Soucy.
M. Soucy
(Robert) : Bonjour, M. le Président, Mme la ministre, les membres du
Parlement, les membres des partis d'opposition,
mesdames et messieurs. Tout d'abord, on devrait adresser des félicitations au
gouvernement, dans le projet de loi, qu'il y a une interdiction de la
culture à des fins personnelles. Nous, l'Association des propriétaires, nous
vous invitons à résister à toute demande des groupes de pression qui pourraient
exiger la culture à des fins personnelles.
Cependant, toutefois, il y a des préoccupations
au niveau de la consommation de... de fumer du cannabis à l'intérieur des logements. Aujourd'hui, le projet
de loi, il interdit de consommer, à peu près les mêmes restrictions que
la Loi concernant la lutte contre le tabagisme, mais cette loi-là n'interdit
pas la fumée de cannabis dans les immeubles à habitations multiples à
l'intérieur des logements.
Donc, nous,
nous recommandons le statu quo. Ça veut dire maintenir l'interdiction de la
culture de cannabis à des fins
personnelles. Cependant, pour des problèmes de jouissance des lieux, c'est pour
ça qu'on recommande aussi que la culture
du cannabis à des fins personnelles soit interdite, c'est que les odeurs, la
fumée secondaire entraînent beaucoup de problèmes au niveau de la
jouissance des lieux.
Le locateur,
dans la loi actuelle, le propriétaire est responsable du choix des locataires
dans les logements, donc il doit assurer la jouissance paisible des
lieux aux autres locataires de l'immeuble. Donc, le cannabis, c'est des odeurs
désagréables et volatiles, donc les gens sont... les autres locataires sont
dérangés par la fumée secondaire.
• (16 h 40) •
On
sait aussi que la fumée secondaire peut avoir un impact sur la santé des
locataires et que les excès peuvent entraîner
des poursuites des locataires contre les propriétaires, les locateurs, en
diminution de loyer. Même, on peut
aller plus loin, il y a
des locataires qui pourraient demander la résiliation du bail si on est
capables de démontrer que les odeurs sont persistantes et dérangent les
autres locataires. Cependant, face à une plainte des autres locataires qui
demanderaient l'expulsion d'un locataire
dérangeant qui fumerait du cannabis, il faut voir que, dans la loi, actuellement, les auditions à la Régie du
logement, même si une cause en résiliation de bail est considérée comme une
cause prioritaire, le délai d'attente minimum est de 15 à 16 mois
d'attente. Donc, le propriétaire devrait gérer cette situation durant plus
d'une année.
Et on doit aussi voir que les études
scientifiques, les experts, ils ont établi les effets similaires sur la santé respiratoire, ce que... On peut penser sans risque
de se tromper que les effets du cannabis sont plus nocifs que les effets
de la cigarette. On a vu qu'il y a certaines études qui parlent qu'il y a
quatre fois le contenu du monoxyde de carbone, puis trois à cinq fois plus de dépôt du goudron dans les poumons, et ainsi de
suite. Donc, il n'y a aucune étude précise qui peut mesurer à quelle distance la fumée secondaire est
néfaste. Donc, c'est pour ça que nous, l'association, on demanderait
qu'il soit maintenu l'interdiction de faire la culture personnelle dans les
logements.
Maintenant, dès l'entrée en vigueur, nous
autres, ce qu'on préconise, ce qu'on suggère, c'est qu'il y ait une disposition interdisant la consommation de cannabis à l'intérieur des logements. Advenant
que le gouvernement ne veuille pas accorder cette disposition-là, nous pourrions suggérer au gouvernement qu'il accorde la permission de fumer dans des logements, à condition que le propriétaire donne
son accord. Donc, on donnerait aux propriétaires le droit, la discrétion
d'accepter des fumeurs ou des non-fumeurs de cannabis.
Donc, ce
qu'on demanderait, c'est que, dès l'entrée en vigueur, si on permet au propriétaire d'avoir la
discrétion de refuser de fumer dans les
logements à l'intérieur, on demanderait qu'on donne aux propriétaires actuels,
dès l'entrée en vigueur de la loi, la
possibilité, donc prévoir une disposition qui permettrait aux propriétaires un
certain délai de grâce pour aviser
les locataires des baux existants qu'il va y avoir une interdiction de fumer
dans les logements. Pourquoi? Parce qu'actuellement dans la loi,
lorsqu'il se présente un nouveau locataire, tous les nouveaux locataires, on
peut limiter le droit de fumer. Ça, c'est
reconnu pour la cigarette, on pense également que ça va être reconnu pour la
fumée de cannabis. Cependant, les
baux déjà existants, la loi, à cause du maintien dans les lieux, ne nous permet
pas de modifier un bail en cours de
route. Il faut attendre la fin du bail et là, si on attend la fin du bail, il
faut respecter les règles du renouvellement d'un bail. Donc, imaginons qu'au 1er juillet il faudrait d'avance donner
un avis pour un bail d'un an, durée un an, de juillet à juin, avant le
31 mars, il faudrait donner un avis comme quoi qu'on interdit de fumer
dans les logements.
Ceci étant dit, lorsqu'on est obligés de suivre
les règles de modification des baux, le locataire pourrait refuser ladite
modification. À ce moment-là, on se retrouve devant le tribunal de la Régie du
logement qui devrait fixer la modification du bail. Ça veut dire se prononcer,
oui ou non, sur le droit de limiter la personne de fumer dans son logement. Et là on peut avoir des processus
judiciaires, c'est long, c'est onéreux, et il peut y avoir des difficultés,
parce que... Pour la cigarette, actuellement, il y a certains régisseurs qui
vont refuser la modification en cours de bail. Ils vont permettre qu'à la signature de bail on interdise de fumer, mais, si
quelqu'un fume, ils vont refuser la modification parce que souventefois le
locataire va plaider : Moi, là, si vous m'interdisez de fumer, c'est comme
si vous me condamniez à quitter mon
logement, c'est une condition substantielle de mon contrat. Et la Régie du logement, plusieurs fois, a décidé qu'ils refusaient la modification, parce
que la limite pour une modification de bail, c'est que, si la modification de
bail entraîne la résiliation du bail, le tribunal doit la refuser. C'est la jurisprudence
actuelle.
Donc, brièvement,
aussi pourquoi qu'on demande le maintien de l'interdiction de la culture personnelle
à l'intérieur des logements... On a parlé aussi des problèmes de
la fumée secondaire, des problèmes au
niveau de la gestion pour la
jouissance paisible, des locataires qui se plaignent, O.K.? Donc, il y aurait
des conséquences sur les assurances. Certaines
compagnies d'assurance, si le propriétaire est au courant qu'il y a
de la consommation, pourraient refuser, annuler la police d'assurance, et ça, c'est sans compter les dommages à
l'humidité, la moisissure lorsqu'il y a de la culture.
Le Président (M. St-Denis) : En
terminant.
M. Soucy
(Robert) : Oui. En
conclusion, là, advenant qu'il y ait une permission de culture personnelle, il
faudrait qu'à tout le moins il y ait
un encadrement. Mais là le problème de l'encadrement, c'est qu'il y a beaucoup de logements qu'il faudrait surveiller et, si on accorde aussi le nombre de plants,
la hauteur des plants, il faudra avoir des inspecteurs, puis comment
faire des inspections, en donnant un préavis. Nous, on demanderait qu'il n'y ait
pas de préavis, qu'on ait le droit de faire des inspections sans préavis parce
que les gens cachent la preuve à ce moment-là. Merci, monsieur.
Le
Président (M. St-Denis) :
Je vous remercie. Alors, je vous remercie pour votre exposé. Nous
allons débuter maintenant la période des échanges. Alors, Mme la
ministre, la parole est à vous.
Mme Charlebois :
Alors, merci, M. le Président. Mme Lapointe, Me Soucy et... Êtes-vous
tous des avocats, coudon, les trois?
Une voix : Notaires
Mme Charlebois :
Notaires. O.K. Alors, Mme Lapointe, M. Soucy, M. Messier — tiens, c'est plus simple — bonjour.
Merci d'être venus nous faire part de vos préoccupations. J'entends que vous
avez examiné un segment du projet de loi,
mais pas son entièreté. Vous n'êtes pas positionnés sur l'âge, sur plein de
sujets. Vous allez plus directement sur ce qui touche à vos membres,
n'est-ce pas?
M. Soucy
(Robert) : Exact.
Mme Charlebois :
Vous nous parlez de production personnelle puis vous nous félicitez parce que
ce n'est pas dans la loi. Il y a une
interdiction de production personnelle dans le projet de loi n° 157, mais
vous savez que la production, dans le
cadre de production thérapeutique, peut continuer. Ça n'a rien à voir avec le
projet de loi n° 157 en ce moment. Ça, si vous voulez le plaider, il faudra aller à une autre instance qu'est le
gouvernement fédéral parce que c'est eux qui encadrent ça. Je voulais
juste le porter à votre attention.
Concernant la
consommation... Mais avant, je vais aller sur la possession. Je vais faire le
lien, parce qu'on autorise, dans le projet
de loi, les citoyens à aller acheter 30 grammes par achat, posséder, à
chacune de leurs adresses, 150 grammes
de cannabis. Je n'ai pas entendu rien là-dessus, mais je vous entends me parler
de consommation. J'entends d'autre monde qui me disent : Bien,
coupez les lieux publics. Vous me dites : Coupez les lieux où résident les
gens.
Finalement,
ça va être légalisé pour consommer où? Va-tu falloir s'acheter des tours pour
consommer le cannabis? C'est le sens de ma question. Ça a l'air drôle,
hein?
• (16 h 50) •
M. Messier
(Martin A.) : Non, mais, en fait, c'est effectivement, Mme la
ministre, des questions qui nous ont été posées. On a échangé, en fait, avec des propriétaires qui sont
extrêmement nerveux de l'entrée en vigueur de la légalisation du cannabis en fait, qui voient, dans ça... et
c'est justement la différence. Donc, nos immeubles multilocatifs ne sont
pas adaptés à des odeurs, à une consommation
comme celle-là. On a souvent des logements qui sont très près les uns des
autres. Parfois, on a des immeubles plus
vieux, où les odeurs se propagent très facilement. D'autres fois, c'est des
immeubles neufs, avec des systèmes de
ventilation très modernes, mais qui justement, par des soucis d'économie,
récupèrent l'air, et, bon, on sent les odeurs de cuisson, on sent la
cigarette, et, quand il y a de la consommation de cannabis, c'est vraiment
préoccupant pour nos propriétaires, mais surtout pour leurs locataires, en
fait.
Mme
la ministre, j'insiste sur le fait que les locataires sont les premiers à nous
téléphoner. Dans les derniers jours, dernières
semaines, les gens qui communiquent avec nous, il y a effectivement beaucoup de
propriétaires, mais beaucoup de
locataires qui nous disent : Moi, je suis inquiet pour moi, pour ma
famille, mes parents, mes enfants en bas âge, à la fois pour l'odeur, ma
fille est asthmatique, on me parle des effets secondaires, qu'est-ce qui va
arriver avec ma famille.
Et
donc, pour nous, la consommation de cannabis dans un logement... et c'est pour
ça qu'en fait on vous demande d'en
faire une exclusion globale, mais, si le propriétaire veut le permettre dans
certains logements... parce que c'est possible qu'il y ait, je ne sais pas, une configuration des lieux. On pense à
certains duplex où il y a moins d'impact que dans un immeuble de plusieurs logements. Si j'ai deux
locataires qui s'entendent sur la consommation de cannabis, ça va peut-être
moins me déranger à court terme. Évidemment, ça dépend de ce qui arrive avec
les baux éventuellement.
Et,
dans un système où le propriétaire a discrétion, il y a également toute la
question des balcons qui nous a été également
exposée. Est-ce que certains balcons où je peux tendre la main à mon voisin,
c'est un bon endroit? D'autres configurations
où ça serait possible, mais la fumée de cigarette... et là on n'a peut-être pas
précisé, mais, pour nous, c'est vraiment
la fumée, et puis le gouvernement aura à décider sous quels autres types de
consommation ça sera possible. Mais que nos locataires consomment par
des produits qui ne produisent pas d'odeur ou de fumée secondaire, pour nous,
ça change la dynamique.
Donc,
ce qu'on vise à interdire, c'est la consommation qui est par voie de combustion
et qui propage de la fumée.
Mme Charlebois :
Je vous entends. Je vous entends parler de l'inquiétude de vos propriétaires de
logements, mais j'ai entendu les policiers, qui sont passés juste avant vous,
puis d'autres groupes qui sont passés, qui me disent qu'il y a comme un peu de
monde qui consomme du cannabis au Québec en ce moment.
Est-ce
que vos propriétaires se plaignent déjà, d'une part? D'autre part, si vous
aviez à choisir entre les lieux publics et l'appartement, vous feriez quoi comme recommandation à tous les
parlementaires qu'il y a ici? Parce qu'il va falloir...
M. Messier
(Martin A.) : Il va falloir trancher.
Mme Charlebois :
Tu sais, c'est beau de légaliser, mais il faut laisser un espace pour que les
gens puissent le consommer. Moi, ça
m'arrive, puis, écoute, je demeure en campagne... écoutez, j'allais dire. Je
demeure en campagne, puis ça arrive
que, quand je me baigne l'été, il y a quelques petites odeurs qui me passent
sous le nez, puis je sais très bien c'est quoi, là, je suis capable de reconnaître ça, puis c'est le voisin à
côté. Ça fait que... Est-ce que je lui dis : Tu ne peux pas fumer
dans ton appartement mais ne va pas fumer dehors et... On fait quoi, là?
M. Messier
(Martin A.) : Effectivement, Mme la ministre, il y a une différence
importante pour moi. Quand on est dans notre logement, c'est notre
maison, on y est captif, Mme la ministre. Nos enfants y dorment, je ne peux pas
les déplacer dans le parc pour qu'ils
puissent dormir, particulièrement l'hiver, alors que, comme vous, quand je
respire des odeurs qui me sont inconvenantes, je fais quelques pas de
plus et je m'en éloigne.
Mme la ministre, le
cannabis est effectivement légal aujourd'hui... pas légal, c'est-à-dire, est
effectivement... on dirait qu'il est légal
dans certaines de nos unités d'habitation. Mais c'est très différent pour le
propriétaire, et on en discutait avec
plusieurs propriétaires d'immeubles. Aujourd'hui, c'est illégal, et je suis en
mesure d'aller voir mon locataire, de
lui dire : Écoute, ta consommation nuit aux autres, c'est illégal. Si tu
ne veux pas que j'appelle les policiers ou que je fasse une demande à la Régie du logement ou la
combinaison des deux, il va falloir corriger ces habitudes-là parce que
tes voisins n'en peuvent plus.
Et,
Mme la ministre, du cannabis dans un logement... Des fois, la cigarette, c'est
plus difficile de savoir d'où ça vient,
mais du cannabis, ça ne prend pas un animal pisteur, là. Je peux savoir d'où ça
vient puis je peux vous dire que les voisins en ont ras le bol quand ça arrive, et
c'est ça, la différence, Mme la ministre. Aujourd'hui, c'est illégal, je
peux exercer une certaine pression sur mon locataire. Demain, il est probable
que sa réaction sera tout à fait différente.
Mme Charlebois :
Est-ce que ceux qui fument déjà du cannabis thérapeutique et qui le produisent
dans vos logements — parce que, s'ils ont une ordonnance, une
prescription puis qu'ils ont le droit d'en produire, il faut qu'ils le
consomment à quelque part — vous
tolérez ça en ce moment?
M. Messier
(Martin A.) : Il y a eu certains cas où il y a eu des abus, mais je
dois dire que c'est plutôt minime comme situation. Mais, dans les cas
d'abus, on intervient de la même façon avec le locataire, en lui exposant les inconvénients, mais on n'a pas eu énormément
d'inconvénients, Mme la ministre. Il est à prévoir que la légalisation
globale aura un impact tout à fait différent.
Mme Charlebois :
Dites-moi, quand vous avez parlé, ça m'a fait sursauter un peu, que des
compagnies d'assurance parlent d'annuler les
polices d'assurance en cas de consommation... Ça veut dire que je suis en
logement, je désire fumer mon joint, je ne peux pas parce que vous allez perdre
vos assurances? C'est-u ça que je comprends?
M. Messier
(Martin A.) : En fait, ce qu'on craint, Mme la ministre... puis
honnêtement, là, on craint que les conditions
d'assurance ou le retrait de l'assureur soit possible. C'est actuellement le
cas, Mme la ministre. Si je suis au courant
ou non, en fait, même, qu'il y a de la culture, non pas de la consommation mais
de la culture à l'intérieur de mon logement, la compagnie d'assurance
peut se retirer. Mais non, ce n'est pas une question de consommation, c'est une
question de culture à l'heure actuelle.
Évidemment, si c'est
légalisé, les compagnies d'assurance devront se réajuster. À quelles
conditions, à quels tarifs, à quels prix?
C'est un aspect qui demeure inquiétant, mais on n'a pas de données, à l'heure
actuelle, sur ce sujet-là.
Mme Charlebois :
O.K. Mais il n'y a pas de compagnie d'assurance qui, à ce moment-ci, menace de
se retirer pour consommation. Pour production, oui, mais pas pour
consommation.
M. Messier
(Martin A.) : Pas à ma connaissance, là. Pas à ma connaissance.
Mme Charlebois :
O.K. Je n'avais pas compris ce côté-là.
Est-ce
que ça vous tente quand même de me parler de... Vous savez qu'on va faire
beaucoup de prévention, qu'on l'inscrit
dans notre projet de loi. Vous savez que, bon, il y a plusieurs pans qu'on
vient de toucher. Mais parlez-moi donc de l'âge des consommateurs. Vous savez qu'il y a 42 % des
consommateurs de cannabis qui ont entre 18 et 22 ans. Est-ce que vous pensez qu'on a fixé l'âge d'une bonne
façon? C'est-à-dire que, tant qu'à aller voir sur le marché criminalisé,
qu'on aime les voir avec nous venir à la
Société québécoise du cannabis. Pensez-vous que c'est une bonne chose
qu'on les informe, qu'on les rejoigne, qu'on leur parle?
M. Messier
(Martin A.) : Ce sera plutôt une réflexion qui n'est pas directement
dans notre champ d'action, mais ça fait partie des...
Mme Charlebois :
Comme citoyen, là.
M. Messier
(Martin A.) : Comme citoyen, ça m'interpelle. Moi, j'ai plus de
difficulté avec la consommation. Les experts
qu'on a pu entendre dans les forums que vous avez mis sur pied ont été assez
précis sur la possibilité d'interaction entre le cannabis, la croissance, différents médicaments qui peuvent
être pris pour d'autres besoins, et ça nous inquiète. Ça inquiète les locataires. Et définitivement que, pour
ce qui est des logements, bien, plus je permets à cette clientèle-là,
donc à ce groupe d'âge là, plus j'ai
d'impact dans mes logements aussi, parce qu'il semble qu'il y ait une affinité,
je vous dirais, à...
Mme Charlebois :
Mais vous êtes conscient que, si on ne les a pas sur un marché légal, licite,
ils vont aller sur un marché illicite, puis vous êtes à risque quand
même, là.
M. Messier
(Martin A.) : Je suis peut-être trop vertueux, Mme la ministre, mais
je persiste à croire que, quand c'est illégal, les gens ne le feront pas
ou ils le feront moins, à tout le moins.
Mme Charlebois :
Ce n'est pas le cas en ce moment, là.
M. Messier
(Martin A.) : Bien, ils le font moins. Moi, je peux... Définitivement,
si on était ici aujourd'hui, sans soupçonner
une croissance de la consommation, pour nous, ça serait différent. Moi, j'ai la
nette impression que le fait que ça soit permis globalement va enlever
plusieurs freins à la consommation. On le verra, mais...
Mme Charlebois :
Quand vous me parlez d'interdire sur des baux déjà existants de revoir
systématiquement les baux, est-ce que vous considérez que ça ne va pas
contrevenir aux chartes?
M. Messier (Martin A.) : Non.
Écoutez, Mme la ministre, à ce sujet-là... puis d'ailleurs vos collègues de la
Saskatchewan nous ont fait plaisir en annonçant qu'ils avaient l'intention
d'interdire à la fois la consommation et la culture. Et donc, pour nous, cette possibilité-là
de restreindre, elle existe déjà d'ailleurs, hein? Dans nos baux, on
peut interdire...
Mme Charlebois :
Les nouveaux baux.
M. Messier
(Martin A.) : Les nouveaux baux, tout à fait. Et la raison pour
laquelle on ne peut pas l'interdire dans les anciens baux, c'est par les conditions de la Régie du logement,
l'application du droit au maintien dans les lieux, tout le mécanisme. Puis mon collègue Me Soucy a parlé
précédemment des baux qui se terminaient au 1er juillet, dans
lesquels, possiblement pour ceux-là, on peut envoyer un avis de modification au
bail. Mais on a tous les baux qui se terminent plus tard, là, le 1er août, le 1er septembre et ceux qui ont
une durée de plus de 12 mois, et les propriétaires, évidemment, qui
ne seront pas au fait, là, du fait que c'est
maintenant qu'il faut faire cette demande de modification là, avant que le
bail inclue une période de temps où le locataire a eu le droit de consommer.
Mme Charlebois :
Il reste-tu bien du temps?
Le Président (M. St-Denis) :
1 min 59 s.
Mme Charlebois :
Rappelez-moi combien de propriétaires de logements vous représentez.
M. Messier (Martin A.) :
16 000.
Mme Charlebois :
16 000 logements au Québec. C'est ça?
M. Messier (Martin A.) :
16 000 propriétaires de logement.
Mme Charlebois :
Des propriétaires de logement. Ça veut dire beaucoup de logements parce qu'il y
en a qui ont plusieurs...
M. Messier (Martin A.) : Tout à
fait. Oui.
Mme Charlebois :
Est-ce que vous avez fait faire un sondage à vos propriétaires de logement ou
si vous vous êtes positionné sans même les consulter?
M. Messier
(Martin A.) : Non. En fait, on a fait plus que ça, Mme la ministre. On
a fait un sondage et on a créé des comités...
j'étais pour dire des comités de dégustation, mais ce n'est pas ça, des comités
de consultation sur le cannabis. Et
il y a une inquiétude, je vous dirais, plus que réelle des propriétaires qui
craignent pour la valeur de leur parc immobilier, pour une dégradation de la qualité de vie de leurs
locataires, au tel point que, face à d'autres marchés, on ne serait pas
en mesure de livrer la marchandise. Et je
n'ai pas le chiffre exact, je pense que c'est 74,9 % de nos propriétaires
qui craignent suffisamment les effets
secondaires de la fumée de cannabis pour tenter de l'interdire dans leurs baux
dès maintenant, au 1er juillet, et de l'interdire à tout nouveau
locataire. Donc, plus du trois quarts de nos propriétaires qui ont une
inquiétude grave à ce sujet-là.
• (17 heures) •
Mme Charlebois :
Merci beaucoup d'être venus nous faire part de vos commentaires.
M. Messier (Martin A.) : Merci.
Le
Président (M. St-Denis) :
Alors, merci, Mme la ministre. Je
cède maintenant la parole au député de Labelle.
M. Pagé : Merci,
M. le Président. Bienvenue à l'Assemblée nationale, bienvenue chez vous. J'entends bien vos inquiétudes et je peux les partager parce que
j'ai déjà eu... j'ai déjà été propriétaire de
logements et... Bien, est-ce que
vous avez vérifié comment on a géré cela
ailleurs, comme au Colorado, comme en Californie, comme l'État
de Washington, où certains pays ont déjà légalisé? Est-ce que vous vous
êtes penchés à savoir comment on l'a géré? Je comprends qu'il y ait des inquiétudes, mais
je ne pense pas, bien humblement, que, le 1er juillet, ça va se
mettre à fumer partout, là, je ne pense pas que ça va être tout à fait
comme ça. Alors, en même temps qu'il est tout à fait légitime d'être inquiet, en
même temps, je pense qu'il
faut rationaliser un peu,
puis, peut-être en regardant comment ça s'est fait ailleurs, ça
pourrait nous sécuriser, non? Est-ce que vous avez regardé ça?
Mme Lapointe
(Annie) : Bien, en fait, aux
États-Unis, il y a certains États qui ont décriminalisé. Par contre,
c'est encore illégal, ce n'est pas une
substance qui est encore légale au
niveau des États-Unis
d'Amérique. Donc, ce qu'on nous expliquait, parce qu'on a parlé à des associations
de propriétaires là-bas, c'est que, comme il y a encore une certaine illégalité
qui plane au-dessus de ça, les gens ont encore une certaine réticence, donc ils
ont vu peu d'effets là-dessus.
Par contre,
bien, c'est sûr que nous, on vous suggère d'aller vers ce que le ministre
de la Justice de la Saskatchewan a avancé, donc de permettre aux propriétaires de refuser la consommation à l'intérieur des logements. Et encore une fois, c'est vraiment
juste la consommation par combustion ou qui engendre des inconvénients
pour les voisins. Parce que
tout autre consommation, nous, on n'est pas contre la consommation en soi, donc que ce soient des produits dérivés, des huiles, tant que ça n'a
pas d'impact pour les voisins.
M. Messier
(Martin A.) : Peut-être, un complément de réponse sur la différence
entre les États-Unis et le Québec : notre droit locatif est très
particulier, extrêmement puissant, ça va de l'interdiction de demander un dépôt
de garantie au maintien dans les lieux, ce qui est une différence importante
parce que, si j'ai un locataire dans un de ces États-là, américains, je peux lui dire : Ton bail se
termine, au revoir. Alors qu'ici, au Québec, c'est impossible. On dit souvent
que signer un bail de logement ça peut durer aussi longtemps sinon parfois plus
que le mariage.
M. Pagé :
J'imagine que vous n'avez aucun problème à ce que les gens puissent vaporiser.
On nous dit de plus en plus que la tendance mondiale, c'est d'aller
justement vers les produits qui sont plutôt vaporisés.
M. Messier
(Martin A.) : Aucune difficulté avec ça, en autant qu'on utilise les
appareils qui n'explosent pas, il n'y a pas de problème.
M. Pagé : Donc, c'est
vraiment au niveau des odeurs puis des inconvénients qui...
M. Messier (Martin A.) : Tout à
fait.
M. Pagé :
En fait, nous, nous avons dit, dès le départ, quand on a pris position à cet
égard-là, qu'on souhaitait, comme
dans le cas de la cigarette, vous permettre, le moment venu, lors d'un nouveau
bail, de pouvoir l'inscrire. Par contre, là, j'ai une petite question.
Quand on dit que c'est interdit dans un logement, est-ce que ça va jusque sur
le balcon?
M. Messier
(Martin A.) : Bien, en fait, normalement, c'est précisé. Et sur ça, je
pense que les propriétaires, comme pour
la fumée de cigarette, actuellement, vont pouvoir moduler en fonction de la
configuration des lieux. Parfois, les balcons sont tellement rapprochés ou exigus, puis au Québec, ce qu'on a comme
problématique, c'est que, si je laisse la porte-patio qui donne sur mon balcon
ouverte, je respire tout ce qui passe à côté, mais il y a des configurations
qui sont différentes, quelqu'un qui est sur un coin des immeubles, c'est
plus espacé, où ça pose beaucoup moins de difficultés, et je vous dirais donc,
en réponse à votre question, que ça varie selon les immeubles. On ne pourrait
pas faire de cas généraux.
M. Pagé :
Oui. Parce que, tu sais, on dit... il faut quand même que les puissent
consommer quelque part, on le sait, là,
alors, tu sais, quand tu ne peux plus dans ton logement... ou est-ce que nous
sommes capables de dire que... de trouver un endroit désigné, si vous dites : Dans un multilogements, c'est
interdit, ce sont des nouveaux logements, on le met sur tous les baux, il faut quand même que les gens puissent
trouver un espace. Est-ce que, si on disait dans la loi, à un endroit
désigné que vous pourriez trouver...
Évidemment, certains blocs appartements, je comprends que tout l'espace est
presque utilisé. Est-ce qu'on aurait
un compromis là, quand c'est possible de le faire? Je comprends : quand
c'est possible de le faire.
M. Messier
(Martin A.) : Il y aurait probablement une solution de commercialisation à faire des appartements «hotbox», là. Mais, dans la réalité, ça serait
compliqué. Il y a plusieurs immeubles, vous savez, on a un escalier, il y a un corridor,
mais il n'y a pas de grands espaces communs. Ça
serait difficile, là. Il y a peut-être certains propriétaires qui pourraient le faire. D'ailleurs,
quand on faisait référence au sondage précédemment, il y a
les trois quarts des propriétaires qui
sont inquiets, il y en a 25 %
qui semblent l'être moins ou pas assez pour faire cette modification-là. Il va
y avoir, dans le marché, comme pour
la cigarette, certains propriétaires qui, eux, de par la configuration,
l'isolation de ventilation de leurs immeubles, ne verront pas les mêmes
inconvénients.
M. Pagé : Bon, là, vous
m'amenez sur autre chose. Les nouvelles constructions, maintenant, les
nouvelles normes d'étanchéité, est-ce que ça
ne protège pas justement les gens qui veulent consommer? Est-ce qu'aujourd'hui
ce n'est pas tellement mieux ventilé et tellement plus étanche qu'on est
capable de dire : Dans les nouveaux logements, il n'y aura pas de
problème? Est-ce que c'est possible d'imaginer cela?
M. Messier
(Martin A.) : En fait, il y a
certains logements où effectivement ça peut poser moins d'inconvénients. Il y en
a d'autres, les plus récents puis les
plus performants au niveau énergétique, où ça va être l'inverse, en fait.
On va avoir des systèmes de ventilation en commun extrêmement
performants, mais pas très performants au niveau d'isoler les odeurs.
M. Pagé : Les plants à
la maison. Nous, on a quand même gardé une porte ouverte pour permettre, comme
le Nouveau-Brunswick, comme l'Ontario, qui vont permettre... et comme le prévoit la loi
fédérale, et là on est en train d'aller complètement à l'encontre de la
loi fédérale, parce qu'on peut restreindre, mais là... puis, d'ailleurs, plusieurs
juristes nous disent : Bien, ça ne
tiendra pas la route, le zéro plant, par
rapport à la loi fédérale, parce qu'on va complètement à l'inverse de ce que ça prévoit. Si on
disait : Des gens... Puis, si on encadrait bien la permission de pouvoir
faire pousser un plant de cannabis à
la maison, comme par exemple, on puisse faire pousser un plant de cannabis à la
maison, mais en étant totalement naturel... Vous avez parlé de moisissures tantôt,
vous avez parlé... Bon. J'imagine que c'est pour les gens qui exagèrent, là, qui s'organisent, là, tout un système. Mais un plant de cannabis... Je n'en ai
jamais fait pousser, là, mais j'imagine
qu'un plant de cannabis qui pousse de façon totalement naturelle, où en plus il
n'y a pas de lampe pour le faire pousser plus rapidement, si cette production
privée, bien encadrée, était, un peu de la façon que je viens d'expliquer,
là, totalement naturelle, est-ce que là vous
pensez que ça pourrait être acceptable? Parce qu'on éliminerait tous les
problèmes liés à la moisissure ou encore...
M. Messier
(Martin A.) : Bien, en fait, pour l'avoir vécu, pour certains
locataires qui ont cultivé quelques plants, on ne parle pas de centaines, on parlait de trois, quatre, cinq
plants... Mais ce qu'on m'explique, puis encore une fois je ne suis pas
un spécialiste sur ça, mais c'est que ça ne pousse pas très bien dans des
conditions naturelles, que ça pousse beaucoup
mieux avec beaucoup d'humidité, de la chaleur, et c'est là qu'il y a une
performance du plant, et on a vu vraiment des logements détruits avec aussi peu de plantes que ça. La moisissure a
affecté le gypse extérieur pour contaminer les matériaux derrière. Il a fallu tout démolir, non seulement au sous-sol,
où ça se trouvait, mais au rez-de-chaussée, où c'est monté. Pour nous, l'utilisation du... la
permission, en fait, de cultiver à l'intérieur, c'est tout simplement
catastrophique, à la fois la combinaison des
effets de culture adéquate dont je viens de faire mention, mais les
restrictions que nous impose la loi en
matière de visite. Je dois envoyer un avis de visite de 24 heures à mes
locataires, puis ensuite, je fais quoi? Si vous me dites qu'on va être
en mesure d'avoir un service d'inspecteurs, là, 1 800 mari, puis là
quelqu'un peut venir dans le logement, ouvrir la porte, saisir les plants...
mais sinon, pour nous, c'est catastrophique.
Le
Président (M. St-Denis) : Alors, je vous remercie pour votre
réponse, merci. Alors, je vais passer la parole maintenant au député de
Borduas.
M. Messier
(Martin A.) : Merci.
• (17 h 10) •
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Me Messier, Me Soucy, Me
Lapointe, bonjour. Merci de participer aux travaux de la commission.
Écoutez, nous, dès le mois de septembre, là, ma
formation politique a proposé, en fait, de permettre aux propriétaires de logements d'intervenir directement, à partir du
moment où ça sera légal, de mettre une clause dans le bail, comme une clause tabac, pour dire : Bien, c'est
interdit de fumer du cannabis à l'intérieur du logement. On a pris cette
approche-là à la fois pour les baux
locatifs, mais à la fois également pour les copropriétés. Donc, on propose une
intervention directe dans le droit
privé, dans le Code civil, pour faire en sorte que... Ce qu'on dit, c'est qu'à
la base c'est interdit, à moins que le propriétaire
du logement veuille le permettre dans son logement et, subsidiairement, dans le
cas de copropriétés, à moins que le syndicat de copropriétés, par voie
réglementaire, avec tous les copropriétaires, l'autorise.
Cette
position-là, elle est justifiée par le fait qu'à la fois les gens qui vivent en
logement, à la fois les gens qui vivent en copropriété ou qui louent des
condos se retrouvent à vivre en communauté et ça a des effets sur l'ensemble
des individus qui y vivent. Actuellement, le
projet de loi du gouvernement, de la ministre, prévoit que c'est uniquement
les aires communes où il est interdit de fumer de cannabis. Alors, je voudrais
peut-être vous entendre là-dessus et sur la position qu'on propose.
M. Messier
(Martin A.) : Bien, tout à fait d'accord. Et puis vous faites fort bien
de souligner la copropriété parce que
c'est également un enjeu important, là. Ce sont des habitations qui présentent
souvent des caractéristiques communes avec
les immeubles à logements. Et, on le sait, il y a plusieurs propriétaires, et
ça nous concerne directement aussi parce qu'il y a plusieurs
propriétaires de condo qui louent leurs unités d'habitation, et donc qui ont
une responsabilité, non seulement envers
leur locataire mais également envers le syndicat de copropriétés, et c'est
définitivement important, tout à fait,
que le syndicat de copropriétés, au même titre que le propriétaire de logement,
puisse interdire la fumée de cannabis.
M. Jolin-Barrette : Au niveau des couvertures d'assurance, tout à
l'heure vous en avez parlé. Actuellement, on est un peu dans le noir à
savoir est-ce que le fait de permettre la consommation de cannabis, ça va faire
augmenter les primes d'assurance. Vous nous
dites, c'est possible que ça le fasse. La répercussion pour les locateurs, si
jamais ils payent plus de primes
d'assurance responsabilité pour faire assurer leur parc immobilier, j'imagine
que les propriétaires vont faire des augmentations de loyer aux
locataires, aux différents locataires. Donc, c'est l'ensemble des locataires
qui vont devoir payer cette hausse-là parce que certains vont décider de
consommer du cannabis. Est-ce que je me trompe?
M. Messier
(Martin A.) : Non, vous avez
tout à fait raison, en fait. Comme, d'ailleurs, le marché de
l'assurance est souvent un marché de vases communicants, si le nombre de
réclamations, le risque augmentent, ça va affecter particulièrement les
immeubles où il y aura la possibilité de consommer, cultiver, mais également,
par effet de vases communicants, les autres
propriétaires. Et directement dans la méthode de fixation de loyer de la Régie du logement, les assurances, c'est
vraiment la différence nette entre le montant payé d'une année moins l'autre
qui est répercutée au pro rata des loyers.
M. Jolin-Barrette :
Au niveau de la production à domicile, nous, on a proposé que ce soit zéro
plant. J'ai confiance que l'application de
la loi québécoise va être présente, bien, va se faire, parce que, justement, le
fédéral laisse une marge aussi, et le
Québec a compétence dans cette juridiction-là. Mais je veux savoir :
Est-ce que vous avez évalué de façon...
les coûts que ça pourrait engendrer pour vos... pour les propriétaires de
logements si jamais il y a des travaux à faire en termes d'humidité, tout ça? Est-ce qu'il y a des études qui ont été
faites de votre part par rapport à la dégradation des logements s'il y a
de la culture à domicile de cannabis?
M. Messier (Martin A.) :
Bien, en fait, c'est plus que des études, c'est des cas précis, parce qu'on l'a
vécu dans des situations de culture illégale de cannabis, et ça peut
coûter 10 000 $, 15 000 $, refaire un appartement où il y a
eu de la moisissure. Il y a des stratégies
de décontamination, des tests microbiologiques qui doivent être faits. Ces
moisissures-là peuvent avoir des effets
importants sur la santé des occupants des lieux, et ça se propage, hein, ça se
promène, dans les conditions propices. Donc, c'est extrêmement
dispendieux.
M. Jolin-Barrette : Parmi les propriétaires de logements que vous
avez, c'est quoi, le profil type? Est-ce que c'est uniquement des grands propriétaires qui ont des
centaines, des milliers de logements, ou ça arrive que c'est des
propriétaires qui ont, supposons, un duplex, ils vivent au rez-de-chaussée ou
ils ont un triplex, puis c'est leur fonds de pension?
M. Messier
(Martin A.) : On a plusieurs membres, donc on reflète un petit peu
tous les aspects du marché, donc on les
a tous, et ils sont tous inquiets. Il y a des aspects, des fois, qui touchent
plus les grands propriétaires ou les petits, mais là ils sont tous
inquiets. Évidemment, les petits propriétaires, avec son fonds de pension où il
y a un huit ou deux huit logements, pour
lui, c'est catastrophique, là, la possibilité d'avoir à décontaminer, à refaire
des logements. Puis également le marché
locatif est en compétition, de plus en plus... nos taux de vacance élevés, on
est en compétition notamment avec la copropriété, les maisons neuves.
Nos locataires incommodés qui peuvent quitter aisément risquent de le faire,
donc c'est définitivement une préoccupation.
M. Jolin-Barrette : O.K. La dernière question que j'ai pour vous,
c'est relativement... au niveau de l'inspection. Vous avez dit tout à l'heure : On souhaiterait avoir une inspection
sans préavis. Là-dessus, il y a certaines difficultés parce qu'on ne peut pas pénétrer dans le logement d'un
individu. Comment vous voyez ce que vous avez amené relativement à
l'inspection sans préavis? Je suis curieux.
M. Messier
(Martin A.) : En fait, même, je vous dirais que l'inspection,
idéalement, compte tenu de la limite de nos capacités juridiques
d'agir, devrait carrément, là... ça devrait être un service d'inspection sans
préavis, mais pas nécessairement le propriétaire, donc la municipalité,
les forces de l'ordre. Parce que moi, j'ai beau constater qu'il y a un plant de cannabis puis que mon logement est en train de pourrir, j'en ai
pour un an et demi avant d'être entendu devant la Régie du logement.
M. Jolin-Barrette :
Je comprends. Mais, d'un autre côté, on ne peut pas pénétrer au domicile de
l'individu comme ça, non plus.
M. Messier
(Martin A.) : Les villes le
font. Elles font des inspections-surprises pour inspecter nos immeubles,
voir si c'est bien maintenu, plus souvent
que pour inspecter le locataire, mais ça arrive parfois. Mais, oui, ça se fait,
ils vont visiter, notamment pour valider l'état d'insalubrité des lieux,
ils vont le faire.
M. Jolin-Barrette :
Donc, ce que vous dites, c'est par le biais d'un inspecteur municipal qui est
accrédité.
M. Messier
(Martin A.) : Tout à fait.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Je vous remercie.
M. Messier
(Martin A.) : Merci.
Le
Président (M. St-Denis) :
Merci beaucoup. Alors, merci pour votre contribution aux travaux
de la commission.
Je
suspends les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de
se présenter et de prendre place.
(Suspension de la séance à
17 h 16)
(Reprise à 17 h 18)
Le
Président (M. St-Denis) :
Alors, nous allons reprendre. Je souhaite maintenant la bienvenue aux
représentants de la Fédération des
travailleurs et travailleuses du Québec. Et je vous rappelle que vous disposez
de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter et à commencer votre exposé.
Fédération
des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
M. Cadieux (Serge) : Merci,
M. le Président. Serge Cadieux, secrétaire général de la FTQ. Je suis accompagné de Mme Rima Chaaban, qui est du service d'éducation de la FTQ, à ma
droite, Denis Bolduc, qui est vice-président de la FTQ et président du SCFP-Québec, et Pierre-Guy Sylvestre, qui travaille au
service de la recherche du SCFP, affilié à la FTQ.
Donc,
on vous remercie de l'invitation que vous nous faites aujourd'hui. Vous le savez, la FTQ est une centrale syndicale qui représente 600 000 travailleurs
dans toutes les régions du Québec et dans tous les secteurs d'activité,
que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé.
Écoutez,
d'entrée de jeu, je vous dirais que la production et la distribution de
cannabis constituent des retombées économiques importantes pour le
Québec. Selon l'estimation de l'IRIS, l'Institut de recherche et d'informations
socioéconomiques, la législation du cannabis
via la SAQ générerait une valeur ajoutée de 867 millions de dollars et
la création de 982 emplois au Québec.
Il s'agit là de paramètres économiques pertinents à prendre en compte dans
l'analyse visant à favoriser les producteurs
locaux. Il revient donc au gouvernement du Québec de mettre en place les
conditions favorables afin que, dès l'entrée en vigueur de la loi, les
producteurs soient prêts et puissent prendre pleinement part à ce nouveau marché. Le gouvernement doit aussi
indiquer clairement aux entreprises qu'il sera en mesure de les accompagner — exemple, guide d'implantation du guichet
unique — et de
les soutenir financement — exemple, programme
d'aide à l'investissement — car des sommes substantielles devront être investies dans leur
installation afin de démarrer la production de cannabis et de leur
permettre de respecter toutes les règles de sécurité ainsi que les plus hautes
normes de qualité.
• (17 h 20) •
À titre
d'exemple, le gouvernement doit reconnaître le cannabis comme un produit
agricole comme les autres, et non
comme une drogue, afin de permettre aux producteurs agricoles de bénéficier de tous les programmes et
subventions mis en place par l'État dans le
domaine de l'agriculture. Et, vous allez voir, on a des recommandations, dans
notre mémoire, là, que je ne vous lirai pas, là, mais les
recommandations 1 et 2, à cet effet-là, des modifications à être apportées
au projet de loi.
En ce qui
concerne maintenant le modèle de distribution et de commerce, le
gouvernement... et dans le projet de loi, on dit que ça va être le
secteur public. Évidemment, on salue ça, là, on salue cette décision-là, mais
on propose des amendements à être apportés à
la loi, particulièrement aux articles 23.18 et 23.19. On le sait, la SAQ,
bon, existe déjà, a déjà un réseau de
distribution, des camions, des employés, etc., donc il nous apparaît qu'on
pourrait sauver un long contentieux devant les tribunaux, parce qu'il
existe déjà des conventions collectives, il existe déjà des employés syndiqués.
Honnêtement, si vous examinez l'état du
droit, au moment où on se parle, entre autres la décision de ville de Pointe-Claire,
de la Cour suprême, ce n'est pas compliqué,
le test va être de savoir qui est le véritable employeur. Est-ce que le
véritable employeur, c'est quelqu'un d'autre
que la SAQ? Quand on lève le voile corporatif, c'est clair, à notre point de
vue, que la SAQ est l'employeur, donc
on devrait... il y a déjà des employés, il y a déjà différents syndicats, donc
on peut sauver des coûts, on peut
sauver du temps. Donc, ce qu'on dit, c'est de modifier les articles 23.18
et 23.19 justement pour dire que les employés
vont être couverts par les conventions collectives existantes et biffer la
disposition qui interdit à un employé de travailler et pour le secteur
du cannabis et pour le secteur de vente d'alcool.
Maintenant, vous prévoyez aussi, dans le projet
de loi, de réaliser des... de donner au ministre des Finances la possibilité de faire un projet pilote. Bien,
écoutez, nous, on pense que c'était le bon chemin d'y aller par le secteur
public, donc ça vient un petit peu faire
indirectement ce que vous ne vouliez pas faire directement, en permettant au
ministre des Finances de faire un
projet pilote avec le secteur privé, qui pourrait distribuer, ouvrir des
kiosques puis vendre du cannabis. Donc,
on vient contourner... on vient passer par la porte d'en arrière ce qu'on a
voulu empêcher par la porte d'en avant. Donc, on pense qu'on devrait
modifier ça d'une façon importante.
Aussi, au
niveau de la prévention, vous savez, le milieu de travail, c'est important de
s'en soucier. Il existe déjà une Loi
sur la santé et sécurité au travail avec des outils de préventions prévus dans
la loi. Malheureusement, ces outils de prévention
là ne sont pas en vigueur pour tous les secteurs d'activité économique, donc on
pense que ce serait important de rendre
obligatoires les comités de santé et sécurité pour toutes les entreprises de
20 employés et plus, les représentants en prévention au programme de santé, programme de prévention, ça devrait
être la prise en charge par le milieu de travail, et on devrait aussi s'inspirer d'un réseau d'aide aux
employés. Nous, à la FTQ, on a un réseau de 3 000 délégués
sociaux qui viennent en aide aux confrères, consoeurs de travail qui ont des
problèmes de dépendance. Vous savez, dans le projet de loi, vous dites qu'on doit accorder une somme importante pour la
prévention. Donc, on peut, encore là, s'inspirer de ce qui existe dans la loi sur la santé, sécurité, aux
articles 104 et 105, où on donne 12 millions aux
associations patronales et syndicales
pour faire de la prévention en santé, sécurité. Donc, on devrait prévoir une
enveloppe pour donner au milieu de travail pour faire de la prévention.
Maintenant, je vais laisser mon collègue Denis,
de... vous adresser quelques mots aussi.
M. Bolduc
(Denis) : Oui, je voulais...
D'abord, bonjour, je voulais mettre l'accent un peu sur un autre point
qui nous interpelle, c'est la création d'une
nouvelle filiale complètement à part de la SAQ. Pour nous, il y a une solution
assez simple, c'est la mise sur pied d'un
département de la Société des alcools du Québec, qui aurait un autre nom et une
mission spécifique à la vente, à la
distribution du cannabis avec une approche santé publique, comme on le voit
dans le projet de loi, mais donc on s'interroge pourquoi le projet de
loi n'est pas rédigé de cette façon.
Il y a des économies d'échelle importantes à
faire, si on utilise la structure actuelle de la SAQ, on pense ici au transport, à la distribution, à l'entreposage,
la vente du cannabis. La SAQ a des installations importantes. La taille
des installations de la SAQ est colossale. On parle d'entrepôts de 1,2 million
de pieds carrés, des équipements roulants importants
en grande quantité également, environ 70 camions, 200 remorques, dont
70 tracteurs, 200 remorques. Il y a de l'espace disponible
actuellement à l'entrepôt de Québec. On pourrait faire des aménagements
spécifiques pour la particularité du produit du cannabis dans les locaux
actuels. Et évidemment, dans la structure actuelle de la SAQ, on éviterait des dédoublements administratifs, deux
structures administratives avec deux fois plus de cadres, deux fois plus
de... des camions supplémentaires, de l'équipement supplémentaire, des
bâtiments supplémentaires. Alors, il y a des économies d'échelle à faire qui
sont importantes à ce niveau-là.
M. Cadieux (Serge) :
On a complété. On est prêts à répondre à vos questions.
Le Président
(M. St-Denis) : Alors, je vous remercie pour votre exposé. Alors,
Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Charlebois :
Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, saluer les gens de la Fédération des
travailleurs et travailleuses du Québec;
M. Cadieux, Mme Chaaban, M. Bolduc, et M. Sylvestre, merci
d'être là et de nous faire part de votre point de vue.
Ma première question : Êtes-vous le
syndicat qui représente la majorité des employés de la SAQ?
M. Cadieux
(Serge) : Non, on en
représente; il y a nous et il y a la CSN aussi. Les employés... nous, on
représente tous les employés de l'entrepôt,
et la CSN représente les employés des succursales. Donc, on n'est pas
corporatistes, là, c'est vraiment de façon générale.
Mme Charlebois :
Non, non, mais je pose la question tout simplement parce que j'aurais pu avoir
la réponse ailleurs. Mais j'aimais mieux vous la demander à vous.
M. Cadieux (Serge) : Oui, oui,
oui, c'est parfait.
Mme Charlebois :
Et l'autre affaire, c'est... Je me demandais... Je comprends mal votre... je ne
l'ai pas compris du tout court, je
vais dire ça comme ça, là, quand vous nous dites : Vous ne profitez pas
des installations de la SAQ, vous ne profitez pas des infrastructures,
c'est justement ça qu'on fait, là. On a une filiale, ça va être la Société
québécoise du cannabis qui va peut-être
changer de nom, par ailleurs. Mais, ceci étant dit, cette société-là, celle
qu'on crée, va avoir une mission, un
but totalement différent de la SAQ, puis qui a des programmes Inspire. Nous
autres, on n'aura pas d'Inspire, soupire
et respire. Il n'y aura pas d'achat au bonus des quantités. Puis, le but, ce
n'est pas de faire la promotion du cannabis, c'est de ramener les gens qui sont sur un marché illicite vers un marché
licite, donc légal. Et ce qu'on veut faire, c'est justement profiter des
infrastructures de la SAQ et de leur expertise, notamment pour ce qui est de la
localisation de boutiques éventuellement, pour ce qui est effectivement de
toute la gestion du site en ligne, l'entreposage. Vous avez exactement mis la table là où on veut aller. Mais
je n'ai pas compris en quoi ça diffère parce que, ce qu'on a dit depuis
le début, puis ça, je pense qu'on a été clairs avec le ministre des Finances,
jamais il ne va y avoir du cannabis à côté des bouteilles de vin dans la même boutique. Ça va être des boutiques à
part. Mais ça va certainement... on ne va pas se priver de l'expertise qu'a la SAQ, là, ça serait
honnêtement passer à côté de quelque chose d'important, vous ne pensez
pas?
M. Cadieux
(Serge) : Absolument.
Regardez, je peux tenter d'apporter un éclairage à notre proposition.
Notre proposition, on ne vous dit pas que
vous n'utilisez pas les mêmes infrastructures, etc. Justement, compte tenu que
vous utilisez la SAQ et les mêmes infrastructures au lieu de prévoir, dans le
projet de loi, aux articles — attendez un petit peu — 23.18 et
23.19, que leurs conditions de travail vont être déterminées pas règlement,
etc. Ils vont être déterminés par des
conventions collectives parce que, dans les faits, c'est le même employeur. La
question, là, de droit, c'est se poser la question : Qui est le vrai... qui est le véritable employeur? Et
nous, ce qu'on vous soumet respectueusement, c'est qu'à la lecture de l'état du droit — et on vous invite à faire consulter la
décision ville de Pointe-Claire qui a été rendue par la Cour suprême, où une question similaire à celle-là
s'est posée : Qui est le véritable employeur? — vous allez voir, c'est celui qui a le
plus les attributs de l'employeur. À partir du moment où il utilise les
entrepôts de la SAQ, le site Web de la SAQ, qu'on utilise les camions de la
SAQ...
• (17 h 30) •
Mme Charlebois : Non, ça, je m'excuse, ça ne sera pas le site Web
de la SAQ, elle va avoir son propre site Web, qui va faire de la
prévention, qui ne fera pas de la promotion. On va se servir de leur expertise,
mais ce n'est pas... Honnêtement, la SAQ va
vendre ses services. C'est une filiale. C'est une compagnie indépendante, la Société québécoise du cannabis. C'est ça
qu'on veut. Parce qu'elle n'a vraiment pas la même mission. Puis, tu sais, ça
ne veut pas dire que les employés ne seront pas syndiqués, là, je ne suis pas
en train de mettre la table à rien. On part quelque chose de nouveau. La
légalisation, c'est un phénomène nouveau. Puis on ne veut pas recréer...
Moi, là, je me rappelle les consultations, là,
on a fait un forum d'experts, on a eu des consultations, les gens nous ont dit : On veut une société d'État à
but non lucratif dans laquelle cette société va avoir les mêmes attributs
que la SAQ sans les défauts de la SAQ. Je
vous le dis bien honnêtement comme ils me l'ont dit. Alors, on a retenu, puis
c'est... chacun a sa perception des défauts. Moi, j'ai retenu le non lucratif,
bien franchement, là. On a fait une société d'État qui aura une mission
différente puis qui va faire du travail de promotion, de sensibilisation, dont
les travailleurs qui seront là auraient une
formation très spécifique d'informer la population — est-ce que c'est votre première
consommation?, qu'est-ce que c'est, l'effet
recherché? — mais pas
d'en vendre plus, là. C'est de vraiment répondre à un besoin puis de
donner de l'information. Vous comprenez que la mission est totalement
différente de la SAQ, là.
M. Cadieux
(Serge) : Bien, moi, je
pense qu'on vend deux produits, deux produits différents, honnêtement,
puis il y a plein d'entreprises où les
employés ne font pas tous le même travail, mais qui sont couverts par la même
accréditation. Je vais vous donner un exemple. Un employé qui travaille dans
une institution financière, bien, il y a quelqu'un qui peut travailler au
guichet, puis un autre peut être un conseiller financier, un autre peut être un
planificateur, mais ces gens-là, si c'est
syndiqué, ils sont couverts par la même accréditation. La convention
collective... Bien, au gouvernement du Québec,
il y a des conventions collectives où il peut y avoir 300 catégories
d'emplois différents, mais pourtant, ces gens-là, ils ne font pas le
même travail, mais leur employeur est le même.
Ce
que l'on vous dit : À partir du moment où vous utilisez des
infrastructures — puis,
dans la loi, c'est clair, vous créez une filiale de la SAQ — nous,
on vous dit que l'employeur véritable, au sens du Code du travail, c'est la SAQ.
Vous pouvez bien lui donner un autre nom,
mais l'employeur véritable, au sens du Code du travail, c'est la SAQ. Ce
qu'on vous dit : Il y a deux façons de le régler, le problème. Soit qu'on
le fait comme dans d'autres façons, où on décide de fusionner, exemple quand il est arrivé dans le réseau de la santé ou
même dans le secteur de l'éducation, où on le prévoit déjà dans la loi,
ou vous laissez ça en blanc. Mais évidemment ça va nous amener devant le
Tribunal administratif du travail, puis le Tribunal administratif va trancher.
C'est clair que, même si vous laissez ça en blanc, c'est sûr que les employés
vont être syndiqués, à un moment donné, là, il y a des grandes chances qu'ils
le soient. Puis ce qu'on vous suggère,
c'est : On peut sauver beaucoup du temps, beaucoup de coûts parce qu'en
bout de ligne ça va nous amener là.
Mme Charlebois :
...une société d'État toute seule. Vous êtes quasiment en train de me suggérer
ça, là. Si je veux avoir l'objectif de ce que la population m'a
demandé...
M. Cadieux (Serge) : Non.
Mme Charlebois :
Bien, vous êtes en train de me dire que ça ne marche pas puis qu'on est
vraiment sous le régime de la SAQ...
M. Cadieux
(Serge) : Mme la ministre,
ce que je vous dis, je vous dis, là : Vous pouvez avoir des conseillers
qui travaillent dans un autre établissement, qui vont vendre du cannabis, qui
vont conseiller...
Mme Charlebois :
Attendez un peu là, j'essaie juste de vous suivre dans votre raisonnement. Vous
savez que, nous autres, la Société
québécoise du cannabis va être une filiale de la SAQ. On va profiter de leur
expérience, de leur expertise, tout
ça, parce que les Québécois ont déjà payé pour. Mais c'est quoi, votre préoccupation?
C'est-u d'avoir peur de ne pas les syndiquer? J'essaie de suivre. Parce
qu'on vous dit qu'on ne veut pas faire une vente à outrance, un marché lucratif
du cannabis, puis là vous me parlez comme si
c'est un... J'essaie de suivre le pourquoi que vous voulez absolument
que ça soit la SAQ toute seule. Que, finalement, il faudrait la Société des
alcools et du cannabis du Québec; c'est-u ça que vous me dites?
M. Cadieux (Serge) : Non. Votre
nom, on va vous laisser choisir le nom, on n'a pas d'intervention à faire
là-dessus. Ce qu'on vous dit...
Mme Charlebois :
Est-ce que vous voulez qu'on fusionne ça? C'est quoi? Je ne comprends pas.
Est-ce que vous avez peur pour la syndicalisation de vos employés?
J'essaie de suivre, là.
M. Cadieux
(Serge) : Non, ils vont être
syndiqués. Regardez, moi, ce que je vous dis, là, c'est que les
employés...
Mme Charlebois :
Oui, bien, c'est quoi?
M. Cadieux
(Serge) : Les employés vont
l'être, syndiqués. Les employés de la SAQ le sont; eux, probablement qu'ils vont l'être aussi. Ce que je vous dis,
c'est qu'à partir du moment où vous créez une filiale, en vertu du Code
du travail, la portée du certificat
d'accréditation, ce que je vous dis, là, c'est un accroissement de la SAQ avec
une filiale qui va vendre d'autres produits que du vin et des
spiritueux — c'est
ça que je vous dis — sur
un plan légal, là. C'est ça que je vous dis.
Puis je vous invite à faire regarder l'état du droit par les juristes que vous
avez au gouvernement du Québec. Vous en avez quelques-uns que je
connais. Donc, moi, je vous dis : Regardez ça. C'est ça qu'on vous
suggère, là.
Mme Charlebois :
Oui. Je comprends. O.K., là, parce que je ne comprenais pas où vous vouliez
aller. Mais là vous me dites
juste : C'est en termes du droit du travail, pour tout ce qui est les
conditions de syndicalisation. C'est correct, on l'a aplanie, la difficulté, je la comprends. Mais il
faut juste que vous compreniez que le but n'est vraiment pas le même, de
la Société québécoise du cannabis. C'est
écrit dans la mission. Ceci étant dit, on a fait chacun notre point, puis je
pense qu'on s'entend. On dit la même chose de façon différente en bout
de ligne.
Je vous amène
sur les projets pilotes. Je sais qu'il y a beaucoup de choses qui se disent,
mais j'ai l'article 55 devant moi,
je ne sais pas si vous avez le projet de loi avec vous — sûrement — on dit à l'article 55 : «Le
gouvernement peut, par décret, autoriser le ministre à mettre en oeuvre
un projet pilote relatif à toute matière visée par la présente loi ou un
règlement pris pour son application, dans le but d'étudier, [ou] d'améliorer
[...] de définir des normes applicables en ces matières.» Ça, ça parle de
plusieurs sortes de projets pilotes.
On a parlé ce
matin... je ne me souviens plus c'était qui, le groupe, mais on parlé de
programmes de prévention. On a parlé hier, avec l'UPA, des projets
pilotes possibles de production. Ça, là, le premier paragraphe parle de
plusieurs matières de projets pilotes. Ensuite, on dit : «Il peut
également autoriser le ministre des Finances à mettre en oeuvre un projet
pilote concernant la vente au détail...» Et, si je ne m'abuse, c'est à
l'article 78 — est-ce
que c'est ça? — où
on dit que c'est un maximum de cinq
boutiques de vente au détail, mais on ne spécifie pas «au privé», on n'a rien
spécifié. On parle d'un projet pilote.
Mais
honnêtement, à chaque fois que j'entends parler de ça... Puis je veux juste
vous le soumettre à vous aussi. Cinq
boutiques, là, est-ce que ça va revirer le Québec à l'envers, pour nous donner
la chance d'avoir une base comparative? Pourquoi qu'on a tant peur de ça pour qu'on... tu
sais? Si les gens nous disent : La SAQ n'est pas une société
performante, on souhaite une autre société
d'État qui aura des missions différentes, puis qui n'aura pas une mission
lucrative, puis ci, puis ça — ça, c'est la population qui nous dit
ça — bien,
pourquoi cinq boutiques menaceraient la Société québécoise du cannabis?
À chaque
fois, ça me sidère. Je me dis : Pourquoi ne peut-on pas se donner un outil
de mesure sur comment on peut faire
mieux, puis pas tant en termes de lucratif, en termes d'exécution? Je ne sais
pas. Comment on peut faire pour avoir cinq
succursales, que ça fasse... C'est l'article 87, en passant, où il y a
cinq succursales. C'est comme si je disais qu'on va en déployer
5 000, comprenez-vous?
M. Cadieux (Serge) : Je
comprends ce que vous dites. Mais ce qui est important, notre but à nous...
Nous, là, il y a une question là-dedans... il y a une question importante de
santé publique. À partir du moment où vous le prenez sous l'angle de la santé
publique et vous dites : On ne confierait pas ça au privé parce qu'il ne
faut pas que ce soit, bon... Il y a plein de
problèmes qui peuvent être occasionnés par le privé, dont, entre autres, faire
de l'argent à outrance. Mais moi, je
vous dis que nous, la position que l'on défend, c'est que ça ne devrait pas
être une société qui engrange des profits pour faire autre chose que de
la prévention parce qu'il y a un... Puis déjà, l'article 54, je veux dire,
les surplus qui s'en vont... ça, on n'est pas d'accord avec ça, honnêtement, ça
devrait tout être réinjecté dans la prévention.
Écoutez, là,
on s'en va sur un terrain, là, qui va demander des efforts considérables dans
les différents milieux de travail,
partout, sur la prévention. C'est insoupçonné, où est-ce qu'on va aller. Donc,
pour nous, il est important que tous les oeufs soient mis dans une coquille publique et que l'argent que le
gouvernement va amasser avec ça, qu'il ne construise pas des autoroutes,
qu'il le mette dans la prévention, partout. C'est ça, notre position.
Mme Charlebois :
Il y a 25 millions minimum qui s'ajoutent au 114 millions qui est
déjà dévolu au traitement des dépendances...
M. Cadieux (Serge) : Tant mieux
si on a 500 millions, Mme la ministre.
Mme Charlebois :
Non, mais je ne le dis pas pour vous, pour l'ensemble des collègues. Parce que
savez-vous quoi? Depuis le matin,
j'entends : On va avoir rien que 25 millions. Non, non, ça s'ajoute à
114 millions déjà existants dans le
traitement des dépendances et de la prévention, soit dit en passant. Il y aura
un 25 millions minimum. Mais, si on vend plus que... puis la Société québécoise du cannabis paie sa dette...
Parce que c'est le cannabis qui va payer pour le cannabis, ce n'est pas l'impôt des citoyens du Québec, là.
Quand elle aura payé sa dette, ses frais d'opération, tout ça, plus de
la moitié, plus de 50 % de ce qui
restera, s'il en reste, ira s'ajouter au 25 millions. Le 25 millions,
là, c'est un plancher de base qui s'ajoute déjà au 114 qui existe. Je
veux le dire publiquement.
S'il y a moyen de faire mieux... Mais, dans
l'autre partie, moi, je pense que... J'ai entendu des policiers, juste avant vous, là, qui me parlaient de formation de
policiers, qui me parlaient d'appareils à acheter. J'ai entendu plein
d'autres groupes qui me parlent de choses à faire. Je pense que ces sommes-là
pourraient, entre autres, servir à ça encore dans le monde du cannabis. Qu'en
pensez-vous?
• (17 h 40) •
M. Cadieux
(Serge) : J'en pense que ça
doit être... La FTQ en pense que ça doit être mis dans la prévention.
C'est là que ça doit être mis. Ça ne doit pas être mis pour faire des activités
autres, construire des infrastructures, des autoroutes, etc. C'est là qu'on en
est.
Mme Charlebois : Ça, je suis d'accord avec vous. Mais, à partir du
moment où ça se rattacherait à un fond... pas un fond, à des activités
qui sont liées au cannabis...
M. Cadieux
(Serge) : ...à des dépenses
reliées à la prévention contre les dépendances reliées au cannabis. Oui,
c'est là qu'on est, là. On est là.
Le
Président (M. St-Denis) :
Alors, je vous remercie. C'est tout le temps que nous avions, Mme la ministre. Merci de vos réponses. Je passe maintenant la parole au député
de Labelle pour une durée neuf minutes.
M. Pagé : Oui. Merci, M. le Président. Alors,
bienvenue chez vous, à l'Assemblée
nationale. Merci d'être ici.
Je pense que vous apportez un aspect important. Effectivement, vous nous avez
parlé des articles 23.18, 23.19. Et pour la
compréhension des gens qui nous écoutent, et c'est ma compréhension, là, ces
articles-là empêcheraient quelqu'un qui travaille déjà à la SAQ de
pouvoir travailler à la SQC. On comprend que c'est cela.
Je vais vous
avouer que moi, je me pose la question et j'ai hâte que nous ayons des échanges article par article pour comprendre, puis je ne veux pas le dire
méchamment, mais ce qui se cache derrière cela parce qu'honnêtement je ne le comprends pas. Parce
que les chiffres qui circulent, ce serait, je pense, autour de 70 %
du personnel de la SAQ qui serait déjà du personnel avec des horaires...
bien, en fait, des gens à temps partiel. C'est ce que je comprends. Je pense
que c'est ça, autour de 70 %?
M. Cadieux
(Serge) : ...le réseau des succursales, pour le réseau de l'entrepôt,
on a à peu près, nous, 200 employés à
statut précaire, mais 70 % des 4 500 employés du réseau des
succursales travaillent à temps partiel. Donc, moi, je pense qu'on doit favoriser le plus possible que les employés
soient capables d'occuper des postes à temps complet autant que faire se peut. Donc, on bénéficie déjà du
personnel qui travaille pour cet employeur-là. Si c'est une question de formation, c'est sûr, même dans une entreprise... Écoutez,
on forme les employés, dans une entreprise, qui ont fait la même
business... Parce que les procédés de l'opération changent d'année en année,
donc c'est juste normal de former les employés.
Mais, par cet article-là, on empêche que quelqu'un travaille à la SAQ puis
qu'il travaille dans la nouvelle société sur le cannabis.
M. Pagé :
Honnêtement, je ne comprends pas pourquoi. Je ne comprends pas. Est-ce que vous
avez votre explication? Parce qu'éventuellement il va falloir questionner là-dessus,
là.
M. Cadieux
(Serge) : On ne le dit pas, pourquoi. On ne comprend pas pourquoi il y
a cette disposition-là. Est-ce que c'est à
cause de la question de l'habileté sécuritaire? Honnêtement, ça n'a pas d'objet. Parce qu'on le voit, dans d'autres organisations
où il doit y avoir aussi un certificat d'habilité sécuritaire mais qu'ils
travaillent avec d'autres employés qui ne
nécessitent pas de l'avoir, puis ça ne cause pas de problème.
Je vais prendre l'exemple de la Commission de la construction du Québec, par exemple, où c'est le cas, puis les gens travaillent quand même
pour le même employeur.
M. Bolduc (Denis) : Si vous me permettez... L'article 23.19, qui dit qu'une personne ne peut pas
être à la fois employé de la société puis employé de la nouvelle
filiale, bien, c'est là qu'il y a un flou, là, concernant la mise en commun des équipements, des ressources. Si on ne
peut être... travailler pour les deux en
même temps, pour le transport,
on ne peut pas partager le camion, pour l'entreposage, la manipulation dans les
entrepôts, on ne peut pas partager, alors il y a un flou, là. Je ne sais pas...
Pour nous, en tout cas, on pense qu'il y a un problème là.
M. Pagé : Bon, quand on arrivera à l'article par article, on va poser ces questions-là.
Parce que, pour l'instant, moi, quand
j'ai vu ça, je ne comprends pas, je ne comprends pas ce qui se cache derrière
ces articles-là, quelle est véritablement la volonté gouvernementale. Je
ne la comprends pas. Parce que j'arrive aux mêmes conclusions que vous. Et,
quand j'entends que 70 % du personnel
est déjà à temps partiel, alors une bonne partie de ces temps partiels
pourraient combler leur temps pour
faire des semaines complètes. Et c'est déjà des professionnels, de toute façon,
des gens qui sont formés pour le
service à la clientèle. Mais je comprends qu'ils auraient une approche qui
devrait être différente et qu'ils devraient être formés en conséquence. Mais, cela dit, le nouveau personnel qui, de
toute façon, aura à travailler dans ces succursales de la SQC auront à
avoir la même formation qu'on pourrait donner à quelqu'un que...
Mais,
bon, je veux passer à autre chose parce que le temps file très rapidement. Vous
avez parlé de chiffres de 867 millions. Le 867 millions qui
emploierait 982 personnes, est-ce que c'est le chiffre d'affaires que vous
envisagez pour la SQC?
M. Cadieux
(Serge) : Non, c'est le chiffre de l'IRIS. C'est l'IRIS...
M. Pagé :
Qu'est-ce que c'est, le 867 millions?
M. Cadieux
(Serge) : C'est l'IRIS qui amenait ce chiffre-là.
M. Pagé :
O.K. Mais est-ce que c'est le chiffre d'affaires? Qu'est-ce que c'est?
M. Cadieux
(Serge) : Vas-y.
M. Sylvestre (Pierre-Guy) : Oui. Regardez, l'étude de l'IRIS, en fait, ils
ont utilisé un modèle très typique, là, d'input-output, ou entrées-sorties, de l'ISQ. Ils ont fait une
comparaison avec celui de StatCan. C'est ce qu'on appelle la valeur
ajoutée au PIB. Et vous avez là-dedans, par exemple, 982 emplois. Donc,
ça, c'est l'estimation de l'IRIS. Évidemment,
ça pourrait être beaucoup plus, là, selon si la production est faite au Québec.
Parce qu'on a présentement une production illicite. Ce n'est pas dans le
PIB. Ça, on laisse ça à l'Ontario. Malheureusement, ça ne va pas apparaître
dans le PIB. Donc, c'est un peu la conclusion, là de l'IRIS puis, bon, avec nos
compléments.
M. Pagé : Alors, probablement... J'imagine que vous concluez la même chose que
nous. Nous, nous demandons à ce
que... Mais j'ai même dit : Out, Santé Canada puis go, le MAPAQ. Pourquoi?
Pour qu'on puisse contrôler et autoriser nous-mêmes la production ici,
au Québec, et la déployer un peu partout sur le territoire québécois. Alors,
j'imagine que c'est ce que vous souhaitez également.
M. Cadieux (Serge) : On souhaite que ça soit produit ici et on
souhaite qu'on encourage les producteurs locaux. D'autant plus que, tu sais, faire pousser du cannabis en serre, on a un
avantage concurrentiel. L'électricité est moins chère qu'en Ontario puis en Colombie-Britannique. Il n'y
a rien qui empêche les producteurs du
Québec. Les producteurs, ils font pousser
des tomates, ils sont capables de faire pousser du cannabis. C'est juste
logique, là, qu'on fasse vivre d'abord les gens du Québec, plutôt que de faire vivre les gens de l'Ontario.
La Colombie-Britannique, eux, ils n'ont pas ce réflexe-là de faire vivre les gens du Québec
avant de faire vivre les gens de l'Ontario puis de la Colombie-Britannique, je peux
vous le dire.
M. Pagé : J'ai senti que vous avez la même inquiétude à
l'égard d'un réseau parallèle, petit,
hein? Parce que la ministre nous
dit : Il n'y aurait que cinq dans un premier projet pilote. Mais je tiens
quand même à rappeler à la ministre qu'il n'y en aurait que
15, succursales, dans la première année. Alors, c'est déjà le tiers, ça...
M. Cadieux
(Serge) : Oui, oui. Mais, vous savez, cinq Costco, là, comparativement
à 300 petits marchés, je veux dire...
M. Pagé :
Et honnêtement, plus j'entends la ministre, je suis de moins en moins rassuré
parce qu'on ne sait pas ce qu'il y a
derrière ces cinq éventuels projets pilotes. Et j'ai toujours dit :
Peut-être qu'un jour on pourrait être ouverts à cela, un jour, plus tard, mais installons comme il faut nos succursales
parce qu'elles sont à but non lucratif. C'est ce que les gens sont venus
nous dire partout.
Et le message a été bien entendu parce qu'on se
souviendra, là, les premières fois qu'il y a eu des réactions gouvernementales, c'est que jamais on ne va
vendre... le ministre des Finances, jamais le gouvernement du Québec ne
va vendre du pot, hein? Mais finalement
toutes les consultations que nous avons entendues nous ont amenés justement à
une société d'État à but non lucratif. Mais
ce n'est toujours pas écrit dans la loi, je n'ai toujours pas entendu la
ministre me dire qu'on écrirait très
clairement que 100 % des profits de la société d'État devraient être
réinvestis aux saines habitudes de vie,
à la prévention, à la santé publique, à la dépendance, aussi pour les
municipalités. Est-ce que vous pensez qu'on devrait l'inscrire très
clairement dans la loi?
M. Cadieux
(Serge) : Bien oui, parce
que c'est écrit le contraire dans la loi, à l'article 54, là. À
l'article 54, c'est prévu que les excédentaires vont aller dans le
fonds consolidé. Donc, on écrit le contraire dans la loi. Donc, ça prend une
modification législative pour le prévoir d'une façon spécifique que ça doit
aller uniquement sur la prévention.
M. Pagé : ...
Le Président (M. St-Denis) :
30 secondes.
M. Pagé :
30 secondes. Je sais que, pour les tests de dépistage en milieu de
travail, vous êtes très inquiets. Pouvez-vous m'en parler en quelques secondes?
M. Cadieux (Serge) : Bien,
écoutez, on est contents de l'approche qui a été pris par le gouvernement, honnêtement. Il n'y
a pas d'épouvantail à moineaux, hein?
Pas parce que ce n'était pas légal qu'il n'y a pas du monde qui n'arrivait
pas nécessairement sur les lieux de travail intoxiqué. Puis l'état
du droit est clair, si l'employeur a
des motifs raisonnables de croire que
l'employé n'est pas dans un état normal, il peut le faire évaluer. Donc, c'est
la même chose pour n'importe quelle substance, là...
Le Président (M. St-Denis) :
Merci beaucoup...
M. Cadieux (Serge) : ...il n'y
a pas de distinction à faire. Ça, vous avez une bonne approche.
Le
Président (M. St-Denis) :
Merci beaucoup. Alors, je cède maintenant la parole au député
de Borduas pour une période de
6 minutes.
• (17 h 50) •
M. Jolin-Barrette : Merci, M.
le Président. M. Cadieux,
Mme Chaaban, M. Bolduc, M. Sylvestre, bonjour. Merci d'être présents ici à la commission.
C'est intéressant, la discussion que vous avez. Juste revenir sur
certains éléments. Un endroit où je
vous suis, c'est au niveau d'interdire le cumul des emplois. Ça m'apparaît
particulier du fait que, supposons que vous avez un individu qui
travaille 20 heures par semaine à la SAQ, le fait de dire : Bien,
vous n'allez pas aller travailler pour une autre entité juridique distincte,
c'est particulier. C'est assez rare qu'on interdit le cumul des emplois, particulièrement
quand c'est à temps partiel. Alors, là-dessus, on va voir avec la ministre en
étude détaillée.
Tout à l'heure, vous nous avez cité la décision Pointe-Claire, c'est la décision de
1997 de la Cour suprême du Canada?
Une voix : ...
M. Jolin-Barrette : O.K. Dans le cadre de cette décision-là... c'était
dans le cadre d'une agence, une agence de placement, relation tripartie, puis il y a certains critères.
Vous, ce que vous nous dites, c'est... vous assimilez la décision
Pointe-Claire, si jamais on crée une filiale de la SAQ, à cet équivalent-là, en
disant : Bien, le véritable employeur, ça va être la SAQ.
M. Cadieux (Serge) : Oui, le véritable
employeur, c'est la SAQ.
M. Jolin-Barrette : Nonobstant le fait qu'il y aurait
un conseil d'administration distinct, il y aurait un
président directeur général, il y aurait des directions de division, nonobstant que
ce ne serait pas tous les équipements qui seraient partagés, nonobstant
le fait qu'il y aurait des lieux différents. Vous savez, là, dans le fond...
M. Cadieux (Serge) : Je vais
vous dire pourquoi. Je vais vous dire pourquoi...
M. Jolin-Barrette : ...la série de critères, ce que vous plaidez, on
peut le plaider de l'autre côté aussi. Ça fait que je veux juste
comprendre où vous logez.
M. Cadieux
(Serge) : Oui, oui, mais
regardez. Vous saisissez très bien le portrait. La décision ville de Pointe-Claire, c'est sûr qu'au coeur de ce litige-là
c'est la relation tripartite. Tu as un employeur, tu as une agence de
placement puis tu as un employé. Là, il se
pose la question, quand il arrive le temps de déterminer combien
qu'il a le droit de semaines de
vacances, puis c'est quoi, le salaire, c'est qui, son véritable employeur. C'est ça,
le litige qui a amené jusqu'à la Cour suprême. Et là la Cour suprême
vient nous dire : Bien, dans un cas comme celui-là, où ce n'est pas clair,
c'est qui, le véritable employeur... Et, dans ce cas-là, l'agence de placement a son
propre D.G., puis la ville de Pointe-Claire avait son propre D.G., son propre conseil municipal,
différent de l'agence de placement qui, elle, n'en avait pas — les exemples que vous me donnez. Mais
ça n'empêche pas le tribunal de dire...
Ce qu'il faut
regarder, ce que la Cour suprême nous dit, dans la ville de Pointe-Claire, il
faut regarder c'est qui, qui a le
plus d'attributs du véritable employeur. Si on utilise les camions de la SAQ,
on utilise les entrepôts de la SAQ, puis je ne sais pas encore quoi
qu'on va utiliser de la SAQ, il faut se la poser, la question : C'est qui,
le véritable employeur? Est-ce qu'on essaie,
par un voile corporatif, de créer un autre employeur artificiellement, quand
c'est... Puis là je parle au sens du
Code du travail, on s'entend, là. Il y a une distinction à faire au sens du
Code civil puis au sens du Code du travail, là, vous allez en convenir
avec moi, là.
M. Jolin-Barrette : ...mais, juste là-dessus aussi, c'est que... Je
comprends le point que vous faites, puis c'est légitime, en tant que syndicat, de le faire puis de le présenter comme
ça. Mais, si on suit votre raisonnement aussi, ça veut dire que, peu importe l'entité juridique
distincte, bien, ça pourrait toujours être assujetti. La décision de la Cour
suprême s'applique, mais ça voudrait dire,
entre autres, si c'était le désir de la ministre que ça ne s'applique pas, que
nécessairement il faudrait qu'elle crée une nouvelle société d'État
complètement distincte avec d'autres bâtiments, d'autres camions.
M. Cadieux (Serge) : Oui, c'est
clair, c'est clair.
M. Jolin-Barrette : Alors, ce que vous, vous dites, c'est qu'au bout
de la ligne, pour les contribuables québécois, ça va coûter plus cher parce qu'il va falloir acquérir les équipements,
il va falloir acquérir des camions, des infrastructures.
M. Cadieux (Serge) : Bien oui,
bien oui, absolument.
M. Jolin-Barrette : Ça fait que
vous, vous nous dites, dans le fond...
M. Cadieux (Serge) : Puis même
sur le plan des relations de travail, M. le député, là, au lieu de négocier
22 conventions collectives, ils vont en négocier moins. Il y a une
économie d'échelle. D'ailleurs, le législateur nous apprend, depuis les
20 dernières années... quand ils fusionnent les certificats
d'accréditation dans la santé puis dans l'éducation
en disant : Il y a une multiplication de certificats d'accréditation, on
doit les regrouper, bien là, vous faites le contraire, dans ce cas-là, vous faites le contraire de ce que vous
préconisez depuis les 20 dernières années. Donc, on dit : Suivez la méthode que vous avez faite dans les
20 dernières années. Vous voulez regrouper les certificats
d'accréditation; pourquoi vous ne le faites pas là?
M. Jolin-Barrette : O.K. Dans votre mémoire, vous dites :
Écoutez, on aurait dû créer un département distinct, à la SAQ, pour la Société québécoise du cannabis. Moi,
j'ai une problématique avec ça parce que l'objectif de la SAQ, sur le
fond, ce n'est pas le même que celui de la Société québécoise du cannabis.
Alors, d'où la nécessité d'avoir une entité juridique distincte. Je comprends
qu'en matière de droit du travail vous nous dites : Bien, écoutez, ça va
être plus simple, puis, de toute façon,
nous, on vous dit qu'on va les syndiquer, on va faire du maraudage pour
éventuellement obtenir une
accréditation syndicale puis on va considérer que c'est la même chose qu'un
emploi de la SAQ. Ça, le débat se fera, puis il y aura des demandes qui vont être remplies, puis tout ça. Mais,
sur l'aspect de la finalité, sur qu'est-ce
qu'on fait sur l'objectif... Parce que, vous savez, pour nous, là, pour
le deuxième groupe d'opposition, ce qui est important, c'est que les revenus
tirés de cette vente-là ne soient pas dirigés au fonds consolidé...
M. Cadieux (Serge) : C'est
clair.
M. Jolin-Barrette : ...mais
servent à la prévention, tout ça.
M. Cadieux (Serge) : Oui.
M. Jolin-Barrette : Alors,
juridiquement, il faut l'attacher aussi. Puis, dans le projet de loi, il y a
des petites lacunes, notamment, là-dessus. Ça fait que comment on fait ça?
M. Cadieux (Serge) : Bien, écoutez,
je vais vous donner un exemple.
Le Président (M. St-Denis) : En
20 secondes.
M. Cadieux (Serge) : Bien, je vais vous donner un exemple : les CIUSSS, leur regroupement, là, dans le réseau de la santé
puis des services sociaux. Quelqu'un qui travaille dans un centre jeunesse, à la DPJ
puis dans un hôpital, ils n'ont pas la même mission, pourtant ils sont regroupés actuellement dans les mêmes accréditations. Donc, la mission, là, elle peut être différente. Ce n'est
pas un obstacle, ça, en droit du travail. Donc, moi, je dis : C'est ça, le
chemin que le législateur a choisi. Il faut qu'il poursuive dans...
Le
Président (M. St-Denis) :
Merci beaucoup. Merci. Merci, M. le député Borduas.
Maintenant, je
cède la parole à la députée de Vachon pour une période de
2 min 30 s.
Mme Ouellet :
Merci, M. le Président. Bienvenue, M. Cadieux, M. Bolduc,
M. Sylvestre et Mme Chaaban. Bienvenue à l'Assemblée nationale.
Moi,
j'aimerais vous entendre sur deux points plus particulièrement. Du côté des
producteurs, j'ai vu que c'était vraiment... la première section, d'ailleurs,
que vous traitiez, en 1.2, pour dire que ça doit être considéré comme un produit agricole, ce qui, je crois, n'est pas actuellement prévu, là, par la loi... Donc, j'aimerais vous entendre sur ça et
sur le projet pilote.
Parce
qu'effectivement on a parlé beaucoup de projet pilote, et je partage vos
inquiétudes, cinq sur 15, c'est quand même...
ça fait... Cinq sur 15, ou c'est le tiers ou on rajoute le cinq à 15, ça fait
le quart, c'est quand même beaucoup. Et on ne dit pas qu'il n'y aura pas de vente par Internet. Donc, si, dans les
cinq, il y a des ventes par Internet, à ce moment-là, ça peut être une
très grande partie du marché, si on permet aux producteurs privés d'avoir une
succursale mais en plus de vendre par
Internet. Et donc ça peut venir cannibaliser complètement la société d'État et
ça peut même faire en sorte de ne pas
atteindre l'objectif. Parce qu'on sait que les entreprises privées n'ont qu'un
seul objectif, c'est maximiser le profit. Ils peuvent bien dire bien d'autres choses en marketing, mais leur seul
objectif, de leurs actionnaires, c'est maximiser le profit.
Donc, j'aimerais vous
entendre un peu plus sur l'article 55 parce que j'ai l'impression
qu'effectivement, actuellement, on n'a pas assez fait le tour de ça.
M. Cadieux (Serge) : Bien, votre premier élément, sur l'agriculture,
pourquoi ça... bon, le premier, pour s'assurer que ce soit de juridiction du Québec, là, pour ne pas qu'il y ait un
problème de juridiction entre Ottawa puis Québec, c'est clair. À partir du moment où c'est un produit
agricole, c'est de juridiction du Québec, et les producteurs auraient
accès aussi à des subventions. Il y a ça
aussi, là. Les agriculteurs au Québec ont droit à des subventions pour
développer des produits agricoles, donc ils y auraient droit aussi.
Pour
l'article 55, je pense qu'on l'a dit, l'article... On ne doit pas faire de
profits avec ça pour utiliser cet argent-là pour autre chose que... C'est un enjeu de santé publique, ça doit
demeurer un enjeu de santé publique. Puis trop fort ne casse pas. À partir du moment où on fait une brèche, ça
l'ouvre, ça l'ouvre, ça l'ouvre, puis, à un moment donné, on dit :
On n'aurait pas dû faire ça. Bien là, on a
l'occasion de le mettre très clairement qu'on ne donne pas l'occasion de le
faire.
Mme Ouellet :
Ça fait que je comprends de ça...
Le
Président (M. St-Denis) : Alors, ça va être... Je suis désolé, le
temps est terminé. Alors, je vous remercie pour votre contribution à nos
travaux.
Et la commission
suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30.
(Suspension de la séance à
17 h 59)
(Reprise à 19 h 33)
Le
Président (M. St-Denis) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance
de la Commission de la santé et des services
sociaux ouverte. Je demande à toutes
les personnes dans la salle de bien vouloir s'assurer que la sonnerie de
leurs appareils électroniques soit sur le mode vibration ou silence.
La
commission est réunie afin de procéder aux auditions
publiques dans le cadre des consultations
particulières sur le projet de loi n° 157, Loi constituant la Société
québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant
diverses dispositions en matière de sécurité routière.
Ce
soir, nous entendrons l'Association québécoise des centres d'intervention en dépendance et la fédération des policiers municipaux du
Québec.
Et,
avant d'aller plus loin, je solliciterais un consentement des membres pour
laisser la députée de Repentigny siéger ce soir, étant donné qu'elle avait
été... Donc, est-ce que j'ai un consentement? Ça va? Donc, je vous remercie.
Alors, je souhaite la
bienvenue aux représentants de l'Association québécoise des centres
d'intervention en dépendance. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à
commencer votre exposé.
Association
québécoise des centres d'intervention
en dépendance (AQCID)
M. Marcoux
(Vincent) : Merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes et MM. les
députés, merci de nous recevoir en commission parlementaire aujourd'hui pour le p.l. 157. Je me présente, Vincent
Marcoux. Je suis directeur général de l'Association québécoise des centres
d'intervention en dépendance. Aujourd'hui, pour moi, c'était important également de
me déplacer avec des experts terrain, des experts qui déjà font de la
prévention auprès de la population en général.
Donc,
je vous présente mon collègue ici, à ma droite, M. Frédérick Fortier, directeur général de Prévention des dépendances
L'Arc-en-ciel, dans le comté de Borduas,
et il est également président du comité prévention de l'Association québécoise des centres d'intervention en
dépendance. J'ai, à ma gauche, M. Mathieu Fontaine, directeur général
du Centre Domrémy Appalaches, circonscription Lotbinière-Appalaches,
également vice-président du conseil d'administration de l'AQCID. Je voudrais souligner aussi... Dans l'assistance, on a ma
collègue, notre membre du conseil d'administration, Mme Marie-Josée Dumas, directrice générale de
Liberté de choisir, du comté de Soulanges, qui est présente avec nous.
Donc, l'Association québécoise des centres
d'intervention en dépendance est une association nationale qui représente 100 organismes communautaires au
Québec qui interviennent en prévention, en réduction des méfaits et en
traitement. L'association a accueilli positivement le projet de loi
n° 157. D'ailleurs, on voulait saluer l'écoute du gouvernement actuel concernant, lors du forum des experts, la
consultation des citoyens. On voit que ça se ressent bien dans le projet de loi n° 157, entre autres par
l'âge de 18 ans, par la distribution de la Société québécoise du cannabis,
entre autres avec le comité de vigilance. Donc, c'est des aspects très
positifs. On l'apprécie.
Nos recommandations dans le mémoire vont aller
dans le sens de complémenter, d'être complémentaires, finalement, au projet de loi. Évidemment, on va proposer des retraits de
certains articles, mais tout ça dans le contexte de sécurité et de santé
publiques.
Vous avez déjà entendu, en commission
parlementaire, l'Institut universitaire en dépendances, des experts comme
M. Jean-Sébastien Fallu, Dr Didier Jutras-Aswad, de GRIP Montréal. Donc,
tous ces experts avaient des recommandations.
Évidemment, dans notre mémoire, plusieurs recommandations vont être semblables
à ces collègues-là.
C'est
pourquoi, pendant le prochain 10 minutes, on va se concentrer sur une des
recommandations qui n'est pas sortie
encore en commission parlementaire. Donc, on va se concentrer sur le fonds pour
la prévention et les centres de prévention
en dépendance. Par contre, lors de la période des questions, on pourra répondre
à l'ensemble des recommandations que nous avons inscrites.
Donc, je donne la parole à mon collègue,
M. Fortier.
M. Fortier
(Frédérick) : Merci. Bonsoir à tous et à toutes. Alors, l'annonce d'un
25 millions d'investissement, nonobstant les déficits de la société
d'État, et étant bonifié à 50 % des profits, signifie une belle avancée
pour le réseau de la dépendance. Rappelons
que ce fonds sera affecté au financement d'activités et de programmes de
surveillance, de la recherche, de soins
curatifs, d'activités et de programmes de prévention et de réduction des
méfaits, de la promotion de la santé, le tout en lien avec l'usage du
cannabis.
Au vu de
cette dernière énumération, le financement annoncé est, selon l'AQCID,
insuffisant. Dans une optique où la
santé et la sécurité de la population est au centre de l'encadrement du
cannabis au Québec, l'AQCID recommande un investissement de 100 %
des surplus, après remboursement des frais, de la Société québécoise du
cannabis, tout en assurant un minimum de
50 millions en cas de déficit. De par ce réinvestissement total, et en
officialisant ce dernier par écrit dans
la loi, le gouvernement se dote de moyens suffisants pour analyser, réduire et
traiter les méfaits de la consommation du cannabis.
Une des inquiétudes soulevées par l'AQCID
concerne principalement les critères d'attribution du Fonds de prévention et de recherche en matière de cannabis.
Tel que résultant des conclusions du forum des experts, l'AQCID croit
également que la prévention doit être priorisée. D'ailleurs, chaque dollar
investi sur la prévention permet d'épargner 10 $ en éventuels coûts de
santé et de criminalité. Toutefois, certains programmes de prévention qui ont
fait l'objet d'évaluation de leur efficacité
ont des impacts mitigés et parfois contradictoires. C'est pourquoi l'AQCID
recommande que le financement de la prévention soit ciblé vers les meilleures
pratiques reconnues par la recherche.
Dans le même
ordre d'idées, une bonne prévention ne peut être basée sur un modèle unique.
Selon les meilleures pratiques, il
est important de combiner plusieurs types d'interventions efficaces avec un
message cohérent afin de maximiser les
effets positifs de celles-ci. De plus, les interventions de proximité adaptées
aux particularités des milieux environnemental, social et culturel et
des spécificités individuelles — l'âge, l'historique — doivent
être priorisées.
Toujours
selon les meilleures pratiques, il est démontré qu'un travail collaboratif doit
être fait avec l'entourage de la
personne ciblée, c'est-à-dire l'école, les parents, les pairs, et que
l'établissement d'un lien de confiance avec cette même cible accroît l'efficacité des interventions.
Comme une éducation provinciale est déjà assurée via divers moyens
déployés par le gouvernement du Québec, entre autres les campagnes, la Semaine
de prévention des dépendances, l'AQCID recommande qu'en matière de financement
des activités et des programmes de prévention en lien avec l'usage du cannabis
ce soient les interventions locales qui soient priorisées.
Toutefois,
même si la dimension prioritaire soulevée par l'ensemble des concertations est
la prévention, il faut éviter de négliger le financement et
l'accessibilité aux services de réduction des méfaits et de traitement pour la population. L'AQCID rappelle d'ailleurs que
l'expertise en prévention, réduction des méfaits et traitement est déjà
très présente au Québec. Près d'une
cinquantaine de centres de prévention des dépendances sont présentement
répartis sur le territoire québécois.
De plus, les CPD existants comptent plusieurs années de pratique terrain déjà bien implantée
dans les municipalités et ont développé un lien privilégié avec la population
locale. L'AQCID recommande donc que les activités et programmes de
prévention déjà en place soient priorisés dans l'attribution des fonds. Il
s'agit d'une façon efficace de bonifier l'expertise existante.
• (19 h 40) •
M. Fontaine
(Mathieu) : Merci,
Frédérick. Comme Frédérick vous l'a mentionné préalablement, la
prévention nécessite quatre éléments de base
pour nous : premièrement, les bonnes pratiques, qu'elles soient utilisées;
l'expertise des acteurs qui travaillent au niveau de la dépendance; de connaître localement les enjeux et les particularités
des régions; et aussi d'avoir une cohérence régionale dans l'offre de
services.
Actuellement, ce que l'AQCID constate, c'est qu'il y a une grande disparité
en termes d'offre de services,
qui peut être due en lien avec un manque de
financement, des priorités régionales, au niveau du réseau de santé, qui
peuvent être différentes. Toutefois, dans le but de maximiser ces impacts
positifs en lien avec la prévention, il est essentiel pour la population d'avoir, de région en région, des
services semblables et, bien sûr, un discours cohérent à l'ensemble des
acteurs du milieu, que ce soit au niveau du travail, de l'école, etc. Afin de
desservir la population efficacement et selon les meilleures pratiques, l'AQCID recommande que soient inscrits les centres
de prévention en dépendance dans le projet de loi n° 157 ainsi que
dans les règlements qui suivront.
Qu'est-ce que la définition d'un centre de
prévention en dépendance? C'est une organisation ayant le mandat d'assurer la prévention et la promotion des saines
habitudes de vie en lien avec la dépendance : drogue, alcool,
médicaments, jeu, cyberdépendance, etc. Le mandat est rempli en s'assurant
d'utiliser les meilleures pratiques et de rendre
compte des divergences locales et des besoins, qui peuvent être différents,
d'un territoire et des cibles à atteindre. Se positionnant comme un
expert global en prévention de la dépendance, les centres de prévention
assurent un discours cohérent entre les différents intervenants du milieu.
Les
différents services pouvant être offerts : prévention et sensibilisation
de la communauté, que ça soit au niveau des établissements scolaires, milieux de travail, résidences pour aînés;
promotion des saines habitudes de vie; formation et ateliers des
intervenants, que ce soit au niveau scolaire, que ce soit au niveau des
employés, employeurs, que ce soit au niveau
des parents, des retraités, 50 ans et plus, les différents partenaires
qu'on peut retrouver dans le milieu; ateliers de sensibilisation dans les milieux scolaires; sensibilisation par le biais
de conférences, de kiosques; détection dès l'évaluation et intervention
précoce; formation des professionnels, à la rigueur, les futurs employés de la
société; et, bien sûr, sans oublier l'aide
et le soutien au développement de politiques en lien avec le cannabis, que ce
soit, encore là, pour le milieu de travail, les municipalités, les
écoles, les résidences pour aînés, etc.
Pour nous, l'accessibilité demeure un enjeu
important, même capital. C'est pour cette raison que les CPD devraient recevoir
un financement à 100 % du Fonds de prévention et de recherche en matière
de cannabis, et ceci permettrait d'avoir un service entièrement gratuit.
Pour nous, pour s'assurer d'une efficacité et
d'une qualité de service, deux enjeux reviennent, c'est-à-dire l'évaluation... Pour nous, le secteur de la
recherche, que ce soit par le biais de l'institut universitaire en dépendance
ou le RISQ, pour ne nommer que ceux-là,
détient l'expertise concernant l'analyse et la validation des meilleures
pratiques. Il est donc logique que ce
dernier soit en charge d'évaluer la qualité et l'efficacité des programmes des
CPD, le tout financé encore une fois par le Fonds de prévention et de
recherche en matière de cannabis.
Au niveau de
la coordination, afin de s'assurer d'une vision d'ensemble de ce qui est
souhaitable de promouvoir comme approche éducative en matière de
prévention et de réduction de la dépendance, l'AQCID consent que la coordination des CPD et l'évaluation des
programmes devraient être effectuées par le gouvernement.
L'uniformisation de ces services sera ainsi rendue possible tout en gardant la
spécificité des régions et des particularités des pratiques des CPD déjà
existants. Merci.
Le
Président (M. St-Denis) : Alors, merci, M. Fontaine. Alors,
je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la
période d'échange. Alors, Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Charlebois :
Merci, M. le Président. Je comprends que vous nous dites que vous vous appuyez
sur les conclusions de d'autres qui vous ont précédés, mais j'aurais quand même
aimé vous entendre...
Premièrement, je vais vous saluer. Je m'excuse.
Je suis un peu fatiguée rendue à cette heure-là. J'oublie les affaires de base, là. Je vais commencer par vous
saluer, M. Marcoux, M. Fontaine et M. Fortier, puis vous
remercier d'être là pour venir nous parler de votre mémoire puis de nous
faire partager vos points de vue.
Comme je le
disais, j'aurais aimé ça quand même vous entendre sur certains éléments parce
que vous êtes des intervenants de
premier plan, même si vous me dites qu'il y a d'autres intervenants sur
lesquels vous vous êtes appuyés. Parlez-moi de l'âge. Où vous vous
situez là-dedans, vous autres?
M. Marcoux (Vincent) : On se
base sur l'âge de 18 ans pour la consommation.
Mme Charlebois :
Parce qu'on considère que ce sont des adultes qui sont aptes à voter?
M. Marcoux
(Vincent) : Effectivement. Puis, en termes de société, on a dit qu'à 18 ans c'étaient des gens
qui étaient capables de prendre une décision
éclairée puis qui avaient l'éducation nécessaire pour prendre cette décision-là, tout à
fait.
Mme Charlebois : O.K. Puis je
vais aller dans votre mémoire après, je vous le promets. Est-ce que vous
avez réfléchi aux lieux de consommation?
C'est-à-dire que cet après-midi on a eu l'association des propriétaires de
logements, qui nous disent : Nous, on
ne veut pas de cannabis dans les logements. On a des gens qui nous
disent : On ne veut pas de cannabis
dans les lieux publics. Puis il y a déjà «tabac plus». Votre vision à vous,
c'est quoi? Tu sais, parce qu'une fois légalisé...
Qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, là, ça va être légalisé au plus
tard le 1er juillet par le gouvernement fédéral. Nous, on est là pour encadrer. Une fois qu'on aura eu, dans les
boutiques, des travailleurs formés qui vont nous instruire sur ce que c'est, le produit, puis, bon, on aura des bons
programmes de prévention, imaginez que tout est optimal autour de ce que
je vous parle, ne croyez-vous pas qu'il faut qu'on laisse un espace aux gens
qui veulent avoir une consommation responsable?
M. Marcoux
(Vincent) : Tout à fait. Pour nous, on se base qu'on... Ça devrait se
baser sur la même réglementation que
le tabac... et de ne pas augmenter non plus pour ce qui est du cannabis. Donc,
ça serait strictement... pour le tabac, comme... D'interdire dans les
universités, résidences, collègues, nous, on n'est pas pour ça. Je pense qu'on
devrait seulement se baser sur le règlement avec le tabac. Nous, on se dit...
Puis là il faut faire attention, hein? Il ne faut pas penser qu'après le 1er juillet ça va fumer du cannabis partout,
n'importe comment, là. Il ne faut pas exagérer la situation. C'est sûr qu'il faut une éducation de population,
puis justement les centres de prévention en dépendance font partie de cette éducation-là à l'ensemble de la population.
Donc, à ce moment-là, évidemment, il faut avoir des endroits où est-ce
que les gens vont pouvoir consommer. Puis,
dans les blocs-appartements, dans les logements, oui, ils ont l'opportunité,
dans leur bail, de dire : Bien, nous,
on ne veut pas de consommation de cannabis. Mais est-ce que c'est obligé d'être
un règlement pour l'ensemble au
complet? Je ne crois pas. Je pense que c'est un pouvoir discrétionnaire de tous
et chacun, comme la cigarette également.
Mme Charlebois :
Outre l'application de tabac, puis j'appelle ça «tabac plus», là, est-ce que
vous croyez, vous, que, dans certains lieux publics... Exemple, à la
plage, je suis dans un coin reculé de la plage. Il n'y a pas d'enfant autour de moi. Si la municipalité voulait passer
un règlement, elle pourrait le faire. Mais, nous, est-ce qu'on doit
contrôler ces environnements-là puis empêcher les gens, déjà, dans notre loi...
ou si on laisse ça au municipal, de contrôler leur environnement, puisqu'ils le
connaissent mieux que nous autres, ici, à Québec?
M. Marcoux
(Vincent) : Pour le tabac, présentement, la réglementation, est-ce que
les gens peuvent fumer la cigarette sur les plages?
Mme Charlebois :
À moins que la municipalité en ait décidé autrement.
M. Marcoux (Vincent) : Bon, moi
aussi, également, j'autoriserais les municipalités à prendre leurs propres décisions. Mais, encore là, voyez-vous, la
proposition des centres de prévention en dépendance, c'est justement
d'aider, d'éduquer les municipalités, donc,
pour faire une politique qui va sur le sens du monde et qui... Dans la capacité
d'être appliquée adéquatement puis à
l'écoute de la population, c'est important qu'il y ait un expert qui puisse les
accompagner dans leur réflexion et de ne pas
arriver avec des politiques cannées pour chacune, parce que la région de
Montréal ne sera pas la même... comme
la région de Rimouski ou même un petit village comme Portneuf. Ce ne sera pas
la même décision d'encadrement qui va
être faite. Donc, à ce moment-là, l'idée d'avoir des experts qui puissent
accompagner les municipalités est encore mieux pour être capable de
justement... est-ce qu'à plage du coin on peut autoriser ça? C'est à vérifier à
ce moment-là.
Mme Charlebois :
Dans un coin restreint.
M. Marcoux (Vincent) : Exact.
Mme Charlebois :
En tout cas, moi, je... Tu sais, il y a déjà les cours d'école, les terrains de
jeux, parcs pour enfants, les terrains de
soccer, etc. Moi, je pense qu'il faut laisser une certaine limite, une liberté
aux gens. Mais, ceci étant dit, tu
sais, je comprendrais qu'une municipalité veuille encadrer davantage selon les
besoins de son milieu. C'est parce que, si on fait une loi au provincial qui est trop restrictive, on n'a pas le
portrait exact de chacune des municipalités. Ça fait que c'est là où moi,
je laisserais une capacité aux municipalités d'être plus sévères dans certains
cas et de laisser des libertés dans d'autres.
M. Fortier
(Frédérick) : Si vous permettez? Moi, je passe mon temps à rencontrer
des élèves puis la population pour
faire de la sensibilisation. Pour moi, ça donne encore plus de valeur à notre
travail. Quand je vais au cinéparc avec mes enfants, ça sent le pot des fois, puis là, bien, ma fille commence à
avoir l'âge de me poser des questions intéressantes. Il faut que je choisisse l'information que je lui donne.
Mais, après ça, ça donne encore plus d'espace puis de valeur au travail
de la prévention puis de la sensibilisation.
Je pense que les gens qui fument du cannabis ne sont pas des déficients
intellectuels. Il va falloir faire de
l'éducation sur le vivre-ensemble. Moi, quand je rencontre les élèves puis je
leur dis : Est-ce que vous pensez
que c'est intelligent de fumer près d'une garderie? Bien non, c'est con. Bon,
bien, je pense qu'il va y avoir des endroits
où... avec tes amis, avec les gens avec qui tu le fais. Je pense que ça donne encore plus de valeur
sur... Et il faut se doter de pouvoirs pour rencontrer les gens et
passer un message qui est intelligent aussi.
Mme Charlebois : Puis ce que je disais à des policiers cet
après-midi... Je pense que les nouvelles générations de jeunes, quant
à moi, sont plus sages que ma
génération l'a été. Conduire en état d'ébriété, on en voit bien moins que
dans mon temps, je vais être franche avec
vous. C'est la même chose pour la consommation du tabac. Il y avait
beaucoup plus de jeunes, à
l'époque où moi, j'étais au secondaire, qui fumaient que maintenant.
M. Fortier
(Frédérick) : Dans ma
région, il y a beaucoup moins de policiers sociocommunautaires qu'il y
en avait avant aussi. Je pense que c'est une
réflexion à avoir aussi. Ce sont des policiers qui viennent expliquer c'est
quoi, le travail d'un policier, puis dans un contexte beaucoup plus
accessible pour les jeunes puis pour les gens qui sont dans des endroits plus
marginalisés.
• (19 h 50) •
Mme Charlebois :
C'est un des axes de prévention, dans le fond, qui ne paraît peut-être pas nécessairement
préventif, mais il est là quand même.
On va
retourner à la prévention parce que votre mémoire s'articule principalement là-dessus. Quand on parle de prévention...
En tout cas, moi, de la façon que je le vois, outre la
prévention qui devrait être faite, selon moi, à partir des écoles, la fin de l'école primaire, secondaire
puis plus tard... puis les parents aussi, je pense que nous devrions aussi
bien former nos travailleurs qui seront à la boutique pour sensibiliser, quand
les gens viennent acheter, donner la bonne information : Êtes-vous un premier
consommateur, quels sont les effets recherchés, laissez-moi vous expliquer les risques, etc., prenez-vous d'autres médicaments? En tout cas, bon, bref... Mais il ne faut pas non plus que ça devienne, à mon sens, presque répressif, là. Il faut quand même
qu'on informe, mais pas qu'on fasse peur, qu'on soit agressants, parce
que je pense que les gens vont vouloir continuer à aller au marché noir, puis
les gens sur le marché noir sont très peu soucieux de la santé de leurs
consommateurs puis encore moins de leurs produits.
Alors, vous nous dites ici : «...recommande
[...] un financement de la prévention soit ciblé sur les meilleures pratiques reconnues par la recherche», pouvez-vous
me donner des exemples de ce que vous considérez des meilleurs exemples
reconnus par la recherche?
M. Marcoux
(Vincent) : En fait, je vous
dirais que les meilleures pratiques, il
y a plusieurs... C'est des
grands principes, en fait. Donc, le
principe, c'est : quand tu vas rencontrer un jeune dans l'école, faire des
ateliers, bien, il faut que tu
rencontres les parents également, il faut que tu rencontres les intervenants, les professeurs pour que tout
le monde ait le même discours puis
que tout le monde entende de la même façon... parce que, quand le
jeune revient à la maison, bien, il faut que les parents sachent comment
intervenir à ce moment-là. Donc, ça, c'est un grand principe qui doit être pris
à disposition.
L'autre principe : l'intensité de la
prévention qui doit être faite. Selon les bonnes pratiques, normalement, le jeune devrait avoir 20 heures de prévention
en six semaines en milieu scolaire par année scolaire, là, qu'on parle.
Donc, ça, ça fait partie des meilleures pratiques, des obligations.
Les autres
points, à ce moment-ci... Exemple, il faut parler d'estime de soi, de confiance en
soi. Donc, vous savez qu'on pourrait même ne pas parler de drogue,
pendant tout le secondaire et même le primaire, avec les jeunes, en prévention
des dépendances, seulement de parler... comment dire non à quand tu ne veux pas
faire quelque chose.
Ça fait que c'est tous des principes comme ça
que les meilleures pratiques doivent tenir compte.
Je vous donne un exemple de pratique qui ne doit
plus se faire. Je veux dire, à titre d'exemple, un ancien toxicomane qui vient
présenter son bagage de vie, bien, ça, ça ne doit plus se faire dans le milieu
scolaire parce que qu'est-ce que ça lance
comme message? Ça lance que j'ai fait la rumba pendant 20 ans, puis je
m'en suis sorti, je travaille, ça fait que tu peux consommer, «buddy».
Ça fait que ce n'est pas ça qu'on veut entendre comme message.
Donc, c'est
pour ça que les meilleures pratiques doivent être établies, pour s'assurer justement
que ça ne devienne pas le contraire, que ça donne le goût aux jeunes
d'aller consommer, mais plutôt d'éduquer l'enfant à prendre la bonne décision.
M. Fontaine
(Mathieu) : De plus, on peut
retrouver la complémentarité avec tous les autres services, l'importance
de travailler ensemble, en concertation, dans le même sens, d'avoir des
objectifs communs, l'intervention globale, de prendre
en ligne de compte l'ensemble du portrait du jeune, son environnement, sa
famille, ses loisirs, son milieu scolaire, ainsi de suite, et aussi d'avoir un personnel formé qui suit le jeune
tout le long de son parcours scolaire. On parle d'une personne ou d'une ressource qui peut accompagner
le jeune, mais qui ne change pas en cours de route, qu'on ne retrouve pas quelqu'un de particulier en secondaire I, un
autre en secondaire II, un autre en secondaire III, qu'il y ait quand même
une fluidité à travers les interventions qu'on fait.
M. Marcoux (Vincent) : Et je
voudrais même rajouter que cette personne-là, en même temps qu'elle fait des ateliers, qu'elle fait des rencontres... Ils sont
vigilants, ils font de l'intervention, de la détection précoce. Ils vont jaser
avec les jeunes, les aider, les accompagner pour aller plus loin justement.
Mme Charlebois : Justement, il y a quelqu'un qui est venu hier, qui nous
parlait, si ma mémoire est bonne, du DEP, du dépistage d'épisodes
psychotiques, quelque chose du genre, puis, honnêtement, je l'ai retenu
parce que je me suis dit que ça
devrait même faire partie du bagage des travailleurs en boutique, quand ils
jasent avec le client, pour qu'ils soient capables de... S'il a besoin
d'aide, le client, puis qu'on sent déjà qu'il y a des signes, ça devrait être déjà
quelqu'un qui pourrait référer vers une ressource qui pourrait aider cette
personne-là.
Et, pour les
jeunes, comme vous l'avez dit, faire les bons choix, c'est une chose, mais
gérer ses émotions en est une autre,
à mon sens. Puis peut-être que je me trompe, vous me corrigerez si je me
trompe, mais je pense que la consommation qui devient une dépendance, ce n'est pas... Le problème, ce n'est pas la
drogue comme... Il y a quelque chose à la base. Il y a un mal d'être qui
fait qu'on gèle nos émotions. En tout cas, moi, je pense que c'est ça, mais je
ne suis pas une spécialiste. Je vous laisse ça à vous autres.
Je veux vous
amener sur le fonds de prévention. Vous nous suggérez un montant de
50 millions — c'est
ça que j'ai compris — plutôt
que 25 millions. Mais, je vous rassure, il y a déjà — bien,
vous le savez, là, je ne vous apprends pas ça — 114
millions qui est investi en traitement de dépendance, en prévention. On
ajouterait un minimum de 25 millions par année pendant cinq ans. Et, si,
d'aventure, il y avait des recettes qui excèdent... Bon, l'emprunt que la Société québécoise du cannabis contracte à faire ses boutiques, à payer ses
frais d'opération et ce 25 millions-là, mettons qu'il en reste encore, bien, il y a plus de
50 % qui vont encore s'ajouter au fonds de prévention. Est-ce que vous
entrevoyez ça d'un bon
oeil, ou bien si vous tenez mordicus à votre 50 millions fixe, ou bien
25 millions qui pourraient être croissants, qui s'ajoutent à ce qui
est déjà là, là? Ce n'est pas 25 millions tout court, là, c'est
114 plus 25. Ça, c'est le minimum.
M. Marcoux
(Vincent) : En fait, nous,
ce qu'on juge, c'est qu'avec le travail qui est à faire, les visées, les
objectifs qu'on a à faire, rapidement, même dès janvier, pour se mettre au
travail, c'est un minimum de 50 millions qui est nécessaire pour coordonner,
tout mettre ça en place, comme les centres de prévention en dépendance,
exemple. Donc, pour couvrir ça, c'est majeur. Pour ce qui est du
100 %...
Mme Charlebois :
Le 50 millions irait seulement pour les centres de prévention que vous
êtes?
M. Marcoux
(Vincent) : Pour l'ensemble
des objectifs. Mais évidemment je vous dirais qu'il va en manquer. C'est
pour ça qu'on conseille qu'il y ait un 100 % des fonds, en tout cas, du
moins, pour les premières années, qui seraient nécessaires pour...
Mme Charlebois :
...déficit, on fait quoi?
M. Marcoux
(Vincent) : Vous ajustez à
50 millions en minimum, nécessairement, et il
faudra avoir une visée de
priorisée. Mais le 100 % va être nécessaire justement parce qu'une fois
qu'il va y avoir du profit il faut s'assurer que l'ensemble des services en dépendance soient bien couverts,
autant la prévention, le traitement universel. Vous savez que, oui, on a l'accès pour les gens sur l'aide
sociale, mais les autres personnes doivent payer pour le traitement,
l'accessibilité en réduction des méfaits. Donc, une fois que l'ensemble du
secteur, pour la population, en fait, de la prévention, du traitement de la
réduction des méfaits, va être couvert, bien là, on pourra dire : Bravo! On
a fait l'ensemble de notre travail. Et après
on pourra retourner à la loi puis dire : Enfin, on va faire des routes
vertes, des routes du cannabis financées par le cannabis. Mais, en attendant... C'est mon exemple pour dire que,
si vous utilisez l'argent pour autre chose que la prévention, le traitement, c'est qu'on va avoir
fait le tour de la situation et que l'ensemble de la recherche
en dépendance va être financée également.
Donc, on a quand même beaucoup de sphères qu'il faut qu'elles soient financées
pour bien outiller et protéger la population.
Mme Charlebois : Vous avez raison qu'il y a beaucoup
de sphères. Il y a notamment la Sécurité publique qui va avoir besoin d'appareils. Ils vont avoir besoin de
formation. Les médecins ont besoin de formation. Ils sont venus nous le
dire eux autres même, que la formation... Les étudiants en médecine nous ont
dit que le cursus ne touchait pas adéquatement tout ce qui était les drogues.
Alors, vous avez raison de dire que c'est un élément important.
Je vais juste
vous dire que l'article 55 dont vous nous demandez le retrait parle de projets pilotes pas seulement pour la vente,
mais bien pour différents aspects, que ce soit du côté de la culture, que ce
soit du côté de la prévention, pour avoir
un projet pilote, etc., et vous rappeler que, concernant le projet pilote sur la vente, c'est un maximum de cinq boutiques autres qui nous donneraient une base comparative.
Il ne faut pas penser que c'est 500 000 boutiques. C'est cinq
comparé à peut-être 150 à la fin de trois ans. Je pense qu'on est
capables de faire l'analyse puis de voir, dans trois ans, avec une
analyse objective : Bon, bien, regarde,
il y a peut-être des choses à améliorer à la Société québécoise du cannabis, peut-être
pas.
Le
Président (M. St-Denis) :
Alors, merci, Mme la ministre. Alors, je vais céder la parole maintenant
au député de Labelle pour une période de 9 min 30 s.
• (20 heures) •
M. Pagé : Bien, voulez-vous réagir... parce que je n'étais
pas ici au début de votre présentation, puis justement l'article 55,
nous, nous inquiète beaucoup parce qu'on ne voit pas l'utilité, à ce
moment-ci... parce que c'est déjà un gros
défi de mettre en place la SQC, alors...
Et on sait que, par un projet pilote, il est fort probable que ce soient des
employés, dans ces centres de... dans
ces points de vente, qui ne seront peut-être pas syndiqués, qui n'auront
peut-être pas les mêmes conditions... donc qui pourraient être des
entreprises, effectivement, peut-être plus rentables ou qui coûteraient un peu
moins cher, parce qu'elles n'auront pas les mêmes contraintes financières,
entre autres.
Alors,
pourquoi s'enfarger tout de suite avec un projet pilote qui ferait en sorte que
là on se retrouverait avec un réseau parallèle, à ce moment-ci? Moi, je
veux vous entendre là-dessus, là.
M. Marcoux (Vincent) : Bien,
nous, on est toujours pour le retrait de l'article 55. Je crois vraiment qu'il
faut apprendre à focuser, focuser sur la Société québécoise du cannabis pour,
en premier lieu, bien adapter, parce que c'est
nouveau, c'est historique. Il va falloir s'adapter aussi... La SQC devra
s'adapter, dans les prochaines années, autant en formation, également, aux employés, comment intervenir avec nos gens qui
vont être en plein milieu, qui vont venir puis qui vont avoir peut-être
des problèmes de consommation également. Donc, on a vraiment beaucoup
d'adaptation à faire, comment qu'on va vendre le cannabis, les produits qui
vont arriver.
Donc, je
pense que c'est important de focuser sur une chose, et par la suite... c'est
marqué dans la loi, de toute façon,
qu'on va réviser, hein, qu'on va revoir qu'est-ce qui se passe avec la SQC
après certaines années. Donc, attendons, attendons cette structure-là,
qu'elle soit bien établie avant d'ouvrir un projet pilote.
M. Pagé :
Je partage totalement votre façon de voir les choses. D'ailleurs, bon, on a
parlé du 25 millions, vous parlez...
dont je souhaiterais toujours, je le répète, là... si c'était possible d'avoir
la ventilation du 25 millions pour savoir comment on a évalué le 25 millions. Vous, vous arrivez à quelque
chose comme 50. À force d'entendre plein de groupes qui
nous disent : Bien, dans tel secteur d'activité, ça prendrait des sous,
dans un autre secteur d'activité... Alors, on commence
à se demander quel est le véritable montant. Vous avez avancé 50 millions.
Est-ce que vous avez une ventilation pour
être capable de nous dire : Bien, avec 50 millions, on serait capable
de faire ça, ça, ça? Avez-vous ça entre les mains? Parce que là, de la
partie gouvernementale, là, présentement, le 25 millions, on n'a aucune
espèce d'idée, ce qu'on va faire avec ça.
M. Marcoux
(Vincent) : Non, on n'a pas de ventilation, présentement, de faite.
Puis je vous dirais même que 50 millions,
c'est une base pour commencer, parce que je vous dirais que la prévention au
Québec... Vous savez que ce n'est pas
l'ensemble des milieux scolaires, actuellement, qui ont de l'intervention en
prévention. On entend les municipalités qui ont besoin d'accompagnement. On entend les travailleurs qui ont besoin...
Donc, évidemment, c'est une base pour être capable de fournir à la demande et répondre aux gens en général. Donc,
évidemment, ça va prendre beaucoup d'argent pour faire ça. Il faut
rappeler, hein, qu'un dollar en prévention, on en économise 10.
Donc,
ce qu'il faut faire, c'est vraiment financer rapidement, de façon majeure, pour
s'assurer, une fois par la suite, que les acquis restent là et ne pas se
réveiller dans cinq ans : Mon Dieu! la santé physique, la santé mentale de
notre population est mal, suite à la
légalisation du cannabis, il faudrait faire de la prévention. Bien, on est
mieux... Mettons le paquet tout de suite. Et même, je vous dis, ça va
coûter plus que 50 millions, c'est certain.
M. Pagé :
Parce que, même avant de réinvestir ce nouveau 25 millions, qui est écrit
dans la loi, sur cinq ans... Bon, ça, ce serait de l'argent neuf.
Lorsque la ministre nous dit : Il y a toujours déjà 114 millions qui
est déjà disponible, mais c'est
114 millions qui était déjà là pour les besoins qui étaient déjà là et pour
lesquels moi, j'ai entendu souvent qu'il manquait de l'argent. Alors,
avec le 25 millions, on risque de combler tout simplement un manque à
gagner qui était déjà identifié.
Cela dit, j'aimerais
que vous me disiez, là, très clairement, là, est-ce qu'on devrait, justement,
inscrire très clairement dans la loi que
100 % des profits doivent continuer à aller... des profits, là, je dis
bien des profits, là, hein, doivent aller, justement, pour la cause de la dépendance, la santé publique,
pour les saines habitudes de vie, les municipalités aussi qui auront
besoin... Est-ce qu'on doit l'écrire clairement?
Parce
que ce qu'on oublie de dire parfois, là, c'est que la taxe d'accise, qui
devrait ramener au Québec, quelque part... probablement comme une
centaine de millions au Québec, là... Si on parle de tiers-tiers-tiers, c'est à
peu près 75 millions pour le
gouvernement du Québec, parce que le gouvernement fédéral nous a parlé de
1 milliard. 225 millions; 75, municipalités; 75, Québec. Juste
la TVQ, qui ne fera pas partie des profits de la SQC, il y aura probablement quelque chose comme autour de 200 millions
là-dedans, là. Donc, le gouvernement du Québec va probablement récolter,
au bas mot, 250, peut-être 300, peut-être même 350 millions de taxe
d'accise et de TVQ.
Alors,
moi, je me dis : Si la SQC fait des profits, oui, qu'elle paie son
investissement, mais qu'elle s'assure
de retourner tous ses profits vers la cause de la dépendance des saines
habitudes de vie et la santé publique. Alors, c'est pour ça que moi, j'insiste
et je le répète souvent : Il faut l'inscrire dans la loi. Est-ce que c'est
ce que vous souhaitez?
M. Marcoux
(Vincent) : Oui, tout à fait. C'est même inscrit dans notre mémoire.
M. Pagé : En fait, c'est ce que l'État
de Washington nous avait dit, lors de la... Vous étiez là, je pense,
les 19, 20 juin. Inscrivez-le dans la loi, là, parce que nous, on ne l'a
pas fait puis aujourd'hui on le regrette.
M. Marcoux
(Vincent) : Tout à fait. Inscrivons-le dans la loi.
M. Pagé :
Vous parlez, à la page 6, bon, la combinaison d'expertises efficaces et
renforcées, vous dites de reconnaître le
réseau de recherche en dépendance. Alors là, vous parlez de recherche. Si vous
parlez de recherche, est-ce que vous
parlez de recherche avec des chaires de recherche? Parce qu'il y a des universités qui sont venues
nous dire, lors de la tournée : Nous, nous sommes prêts à faire de
la recherche. Il y a des gens aussi qui nous ont dit : Il devrait y avoir
un observatoire. Nous, ce qu'on dit :
Bien, qu'il y ait un observatoire, à partir du jour un et pour la suite des
choses, pour qu'on puisse ensuite
prendre des bonnes décisions sur des données probantes en collaboration avec
les chaires de recherche.
Comment
vous voyez cela? Est-ce que ça vous semble être un bon scénario, observatoire
en collaboration avec des chaires de
recherche, et est-ce qu'on devrait l'inscrire dans la loi, tout comme on a
inscrit le comité de vigilance, par exemple?
M. Marcoux
(Vincent) : Oui, tout à fait. L'observatoire de recherche est une très
bonne idée. D'ailleurs, je crois qu'on
devrait interpeler l'Institut universitaire en dépendances, d'ailleurs, pour le
faire. Je sais qu'on a parlé également de l'Institut national de santé
publique du Québec, mais je pense que l'Institut universitaire en dépendances a
une bonne expertise. Et vous savez qu'il y a
le regroupement d'intervention substances psychoactives, Québec,
qui est un regroupement de chercheurs
qui réunit plusieurs chercheurs en dépendance qui ont un intérêt sur la
dépendance, disons, qui sont des spécialistes, donc c'est des gens qu'il
faut interpeler absolument dans des types de travail comme ça.
M. Pagé :
J'ai combien de temps?
Le Président
(M. St-Denis) : Il reste deux minutes exactement.
M. Pagé :
Deux minutes? Bon, vous êtes des gens mêlés directement avec ceux et celles qui
sont aux prises avec la problématique. Alors, moi, je me serais attendu dès le
départ... la première fois que j'ai lu ce que vous disiez, moi, je pensais que vous seriez des pro-21 ans
parce que vous vivez avec le problème, là, au quotidien. Alors, vous les
voyez, les jeunes qui sont aux prises avec la problématique.
Alors,
je voudrais comprendre votre raisonnement qui vous amène à dire : Bien non,
18 ans au lieu de 21 ans quand justement certains spécialistes, parce
que ce n'est pas tous les spécialistes de la santé, vont dire 21 ans. Pourquoi,
vous qui vivez au quotidien avec la problématique des gens qui sont aux prises,
pourquoi que vous dites : Bien non, 18 au lieu de 21?
Le Président
(M. St-Denis) : En une minute.
M. Marcoux
(Vincent) : Vous savez... bien, vous avez entendu, à plusieurs
reprises, la logique qu'on voit... les plus
grands consommateurs, c'est entre 16 et 25 ans et même entre 16 et
21 ans. À ce moment-là, de 18 à 21 ans, il y a plusieurs
grands consommateurs de cannabis, et on est mieux de s'assurer que les gens qui
consomment du cannabis consomment du
cannabis qui est surveillé par Santé Canada pour ces affaires-là et, en plus,
qui ont une intervention avec la SQC
en même temps. Il y a une prévention qui est faite, il va y avoir une formation
qui va être établie à ce moment-là.
Puis rappelons, hein,
qu'on a décidé qu'à 18 ans on avait l'âge de la majorité pour décider de
se marier ou de prendre des bonnes
décisions. On a déjà un permis de conduire à ce moment-là de la vie, on peut
consommer de l'alcool. Donc, à ce moment-là, il faut s'assurer... il
faut se dire : Bien, je pense qu'on a éduqué nos enfants, on leur a donné
toute l'information nécessaire pour prendre une décision éclairée, et
maintenant il faut faire confiance à cette prise de décision là. Puis on l'a fait en tant que société. On a dit que c'était
18 ans pour l'ensemble des décisions qu'il y avait à prendre. Donc,
on croit nécessairement qu'une personne peut prendre une décision éclairée.
Puis
il faut se rappeler que la dépendance, ça ne saute pas non plus sur les gens,
hein? La dépendance, c'est la pointe
de l'iceberg. C'est tous les problèmes intérieurs, émotifs et tout ça. Et des
gens... Dans le fond, la dépendance, c'est seulement un état de fait. Mais, à ce moment-là, c'est quoi qu'il faut
aller travailler? C'est les émotions, les comportements, tout ce qu'on a
vécu à l'intérieur.
Donc, ce n'est pas du
jour au lendemain que la légalisation du cannabis va apporter 500 000
dépendants supplémentaires. Ce n'est pas ça, la réalité.
M. Pagé :
Merci.
Le
Président (M. St-Denis) : Merci beaucoup. Merci, M. le député de
Labelle. Je passe maintenant la parole au député de Borduas pour une
période 6 min 30 s.
• (20 h 10) •
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Fontaine,
M. Marcoux, M. Fortier, bonjour... bien, bonsoir, en fait. Merci d'être présents, de contribuer à nos
travaux. Si vous le voulez bien, on va poursuivre sur le même sujet, au
niveau de l'âge. Est-ce que le fait de consommer du cannabis, ça peut avoir des
conséquences sur la santé physique des jeunes entre 18 et 21 ans, supposons?
M. Marcoux
(Vincent) : Bien oui, tout à fait, comme l'alcool, comme tous les produits que les jeunes ont
accès, ils peuvent avoir des problèmes physiques pour n'importe quel produit,
en fait. Même être au volant peut être un danger majeur pour un jeune de
18 ans. Donc, oui.
M. Jolin-Barrette :
Mais est-ce que c'est un justificatif de dire : Bien, parce que,
supposons, le droit de vote est à 18 ans
puis qu'on a décidé que le droit de
vote, c'était à 18 ans, à ce moment-là, les risques associés à la consommation du cannabis... Je suis d'accord avec vous qu'il faut faire de la prévention, mais
le fait de dire : Bien, c'est à 18 ans, on néglige en quelque sorte les aspects des maladies qui peuvent être
déclenchées de façon plus précoce, tout ça. C'est parce qu'on essaie de réconcilier tout ça ici, parce qu'entre 18 et 21 ans, oui, il y a des
consommateurs, mais il y a des consommateurs avant ça aussi.
Alors,
qu'est-ce qu'on fait avec les jeunes de 15 ans, de 14 ans, de 13 ans? Qu'est-ce
qu'on fait avec ceux-là aussi? Parce qu'eux aussi, là, si la substance
qu'ils vont consommer, là, ça va être la substance... On ne sait pas d'où elle
va venir ou peut-être qu'elle va venir des magasins de la SQC aussi. Mais qu'est-ce
qu'on fait avec ça?
M. Fortier
(Frédérick) : Je vais me
permettre de répondre. En fait, vous parliez de la Polybel hier ou dans
une autre rencontre. Moi, je vais continuer de faire mon travail à cette
école-là puis comme aux autres écoles en faisant la promotion de... Quand on parle de réduction des méfaits, je pense qu'on
n'a pas beaucoup parlé que, dans la réduction des méfaits, il
y a l'abstinence aussi.
Mon
message sera toujours le même : Si tu décides de le faire,
assure-toi de te mettre dans le meilleur contexte pour que ça réponde à
tes besoins. Ça veut dire dans un lieu sécuritaire, avec des personnes de
confiance puis de connaître idéalement ce
que tu consommes. Je peux leur dire : Ne fais pas ça, ce n'est pas bon. Ça va
être long, 75 minutes dans une école, si je fais juste passer mon
temps à dire ça, parce que tout le monde le dit dans la vie.
Notre
message en prévention, en réduction des méfaits, c'est : Si tu le fais,
fais-le moins pour que ça goûte bon. On s'entend que ça ne sera pas le discours que j'aurai en sixième année ou
en secondaire I. C'est un discours qu'on va adapter. Dans les meilleures pratiques, on adapte le
vocabulaire aussi. On va continuer de faire de la sensibilisation, parce que les gens vont continuer de consommer quand même.
Donc, notre message, essentiellement, dans le travail en prévention, ça ne
changera pas grand-chose, sinon que de donner encore plus de valeur à :
Fais attention à ce que tu consommes parce qu'il y a des enjeux. C'est quelque
chose qu'on fait déjà de toute façon.
M. Jolin-Barrette : Mais le fait d'y avoir accès légalement à l'âge
de 18 ans, ce n'est pas un message de société aussi qu'on envoie pour dire qu'on banalise la
substance, pour dire : Il n'y a pas de danger associé à ça? Parce que
ça aussi, là, il y a beaucoup de
gens, des intervenants qui sont venus nous dire aussi, cet aspect-là, notamment
des intervenants du monde médical qui
nous ont dit : Écoutez, si on la met à 18, c'est un des effets aussi qu'on
peut dire... Parce qu'il y en a, des jeunes qui disent aussi : Bien, moi, je n'en
prends pas parce que c'est illégal. Il y a ce frein-là aussi.
M.
Marcoux (Vincent) : Si je
vous ramène l'aspect contraire, qu'on dit qu'on met la consommation de
cannabis à 21 ans puis que le jeune
dit : Aïe! le cannabis, c'est dangereux, je vais me mettre sur l'alcool à
fond, est-ce que ça va
être mieux? Est-ce que ça va être positif à ce moment-là?
Il
faut se rappeler que même nos jeunes peuvent consommer de l'alcool à 15,
16 ans, puis on a une éducation
à faire avec ces jeunes-là. Ma fille a
17 ans actuellement, là, elle s'en va sur ses 18 ans, elle vient
d'avoir son permis de conduire, et là
je me dis : O.K., elle a eu un bon cours, je l'ai bien éduquée,
elle va être capable de prendre les bonnes décisions. Je pense qu'on en
est rendus là, c'est-à-dire qu'on a dit à notre société que nos jeunes étaient
capables de prendre des bonnes décisions
éclairées, qu'ils ont eu l'ensemble des décisions, et maintenant
c'est à nous à dire : Je l'ai bien éduquée, elle a eu des bons
cours, les professeurs lui ont bien appris, et maintenant je dois lui laisser
prendre ses décisions de façon éclairée. Ce n'est pas facile, ce n'est pas
simple, mais je crois qu'il faut le faire.
M. Jolin-Barrette : Puis je vous donne un exemple. Cette semaine, le
Manitoba a annoncé son plan. L'alcool, au Manitoba, c'est 18 ans. Par
contre, ils ont dit : Le
cannabis, ça va être à 19 ans, parce que notamment
il y a des conséquences associées à
la consommation de cannabis. Qu'est-ce
que vous pensez de ce scénario-là, de
repousser l'âge légal, peut-être pas
à 21 ans, mais de repousser un peu
plus tard, tardivement? Parce qu'il y a une différence. Même chose aux États-Unis, c'est 21 ans, supposons, pour l'alcool, c'est 18 ans
pour voter. Il y a certains États en Amérique du Nord qui le font. Qu'est-ce
que vous pensez de cette possibilité-là?
M. Marcoux
(Vincent) : Écoutez, là, vous me dites de repousser l'âge de majorité
à 21 ans pour l'ensemble des aspects.
M. Jolin-Barrette : Non, non, pour le cannabis. Supposons, au
Manitoba, c'est 18 ans, l'âge pour consommer de l'alcool, mais ils ont
décidé sciemment de fixer ça à 19 ans. Ils sont venus mettre une distinction
entre l'âge légal de majorité, supposons, puis l'âge pour consommer du
cannabis.
M. Marcoux
(Vincent) : Bon, ça fait qu'il y a une différence avec l'alcool.
M. Jolin-Barrette :
Oui.
M. Marcoux
(Vincent) : Moi, je crois
qu'il doit y avoir pas de différence entre l'alcool et le cannabis, clairement,
parce que ça en met une plus grave que l'autre, puis on reconnaît, puis il faut
le reconnaître que l'alcool est une
drogue dangereuse ou sinon plus que le
cannabis. Donc, à ce moment-là, je ne pense pas qu'on doit en mettre un plus
que l'autre.
M. Fontaine (Mathieu) : On est d'accord avec ça, au niveau de la
cohérence, pour nous, c'est important que ça soit cohérent à l'ensemble
des produits psychotropes.
Pour revenir aussi
sur l'aspect de banalité avec l'âge de 18 ans, présentement, quand on se
promène dans les polyvalentes, si on prend,
par exemple, les polyvalentes, c'est plus facile pour un jeune de trouver un
gramme de cannabis que d'aller
s'acheter de la bière, parce que présentement c'est accessible, c'est connu,
c'est... Il y a même des tests qui ont été
faits. C'est beaucoup plus rapide pour un jeune, c'est beaucoup moins
compliqué. Est-ce que c'est impossible pour un jeune d'aller acheter de
l'alcool? Non. C'est plus complexe. Il doit demander à un adulte, tout ça, il
doit faire le guet sur le bord d'un dépanneur, attendre. Présentement, acheter
un gramme de cannabis, tu n'as pas besoin de demander la carte à personne, tu peux aller directement voir le vendeur. Tous les
jeunes en connaissent déjà. Ça fait que pour nous, présentement, il est
déjà beaucoup banalisé, le produit.
Le
Président (M. St-Denis) : Je vous remercie. Merci, M. le député
de Borduas. Alors, je vous remercie aussi pour votre contribution aux
travaux de la commission.
Je vais suspendre les
travaux quelques instants pour permettre à l'autre groupe de s'installer.
(Suspension de la séance à
20 h 16)
(Reprise à 20 h 18)
Le Président
(M. St-Denis) : Alors, on va continuer. On va continuer nos
travaux. Alors, nous recevons la Fédération
des policiers municipaux du Québec. Alors, je vous rappelle que vous disposez
de 10 minutes pour votre...
Des voix :
...
Le Président (M. St-Denis) : Un
instant, s'il vous plaît!
Une voix :
...
Le Président (M. St-Denis) : M.
le député de Borduas!
Des voix : ...
Le Président (M. St-Denis) : M.
le député de Borduas!
Des voix : ...
Le Président (M. St-Denis) : M.
le député de Borduas, s'il vous plaît!
Une voix : ...
Le Président (M. St-Denis) : M.
le député de Borduas, à l'ordre, s'il vous plaît!
Des voix : ...
Le Président (M. St-Denis) : À
l'ordre, s'il vous plaît!
Une voix : ...
Le
Président (M. St-Denis) : Je vous demande du respect également à
la présidence. Je vous rappelle à l'ordre immédiatement, et on va
débuter les travaux. Merci.
Une voix : ...
Le
Président (M. St-Denis) : Monsieur... Non, monsieur, je ne vous
donne pas la parole. Je ne vous donne pas la parole. Je vous demande...
Une voix : ...
Le Président (M. St-Denis) : Je
vous rappelle à l'ordre, s'il vous plaît!
Une voix :...
Le Président (M. St-Denis) : Je
vous rappelle à l'ordre! Vous cessez immédiatement, c'est tout.
Une voix : ...
Le Président (M. St-Denis) :
Alors, on va continuer. Je...
Une voix : ...
Le Président (M. St-Denis) : Je
préside, et je vous rappelle à l'ordre, et ça s'arrête là!
Une voix : ...
Le Président (M. St-Denis) : Je
vais suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 20 h 20)
(Reprise à 20 h 21)
Le
Président (M. St-Denis) :
Alors, nous allons reprendre. Alors, messieurs, je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé, et puis nous débuterons la période
d'échange tout de suite après. Je vous invite donc à vous présenter puis à
commencer votre exposé.
Fédération des policiers
et policières
municipaux du Québec (FPMQ)
M. Côté
(Robin) : M. le Président,
je suis Robin Côté, le président de la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec.
Je suis accompagné de Me Frédéric Nadeau.
Écoutez,
je vous remercie, la fédération vous remercie, remercie la Commission
de la santé et des services
sociaux de lui donner l'opportunité
d'exprimer son opinion à l'égard du projet de loi n° 157. Les membres de
la fédération ont la mission de prévenir et réprimer les infractions
criminelles et pénales reliées aux stupéfiants. Dans le cadre de cette mission, ils sont en contact de manière
pratiquement quotidienne avec les méfaits associés à ces substances et les
nombreux enjeux sociaux qu'ils posent. Ils sont donc des acteurs de premier
plan dans les changements qui sont proposés, tant par les lois adoptées par le
Parlement fédéral que par le projet de loi n° 157.
Peu importe
leur taille, les services de police municipaux ont l'obligation de mettre en
place des programmes de prévention,
comme l'exige la réglementation concernant les niveaux de services de police
qui doivent être dispensés à la population.
La réalisation de cette obligation se traduit par la mise en place d'une
section composée d'un ou plusieurs policiers
sociocommunautaires dont la fonction principale est d'effectuer des activités
de prévention et de maintenir un lien entre le service de police et les
divers organismes sociaux oeuvrant sur le territoire qu'il dessert.
Ces policiers
sociocommunautaires oeuvrant auprès des personnes mineures en milieu scolaire
ou autre, auprès des personnes âgées et des organismes de soutien aux
personnes défavorisées... À ce titre, ils sont au fait des diverses
problématiques reliées à la consommation de stupéfiants. La modification de la
législation va nécessiter, de la part des
policiers municipaux, un travail certain d'éducation et d'information pour que
la population soit au fait des nouvelles limites, obligations et
infractions créées par ces modifications.
Malheureusement,
les services de police municipaux font déjà face à d'importants défis sur le
plan du financement et des
ressources. Les attentes envers les services de police sont de plus en plus
élevées et le travail de policier est observé et critiqué comme jamais auparavant. Trop souvent, les membres de la FPMQ
travaillent dans un contexte où les effectifs sont au minimum et les
ressources sont insuffisantes. Il est donc impératif que les changements
proposés dans le projet de loi n° 157
soient accompagnés de ressources permettant aux policiers municipaux sur le
terrain de remplir leur mission adéquatement.
Ainsi, la
fédération propose qu'une partie du fonds des revenus provenant de la vente de
cannabis soit spécifiquement versée à
l'usage des services de police municipaux afin d'améliorer et d'augmenter les
programmes de prévention menés par leurs policiers.
La Loi encadrant le cannabisva
créer plusieurs nouvelles infractions pénales reliées au cannabis. Il est
spécifiquement prévu, à l'article 66 du projet de loi n° 157, que seul un
membre d'un corps de police peut surveiller l'application
des articles 4 à 7, donc ceux qui traitent de la possession, du chapitre III
qui traite de la culture à des fins personnelles, et de l'article 21 qui
traite de la vente. Cet article précise aussi que le membre d'un corps de
police peut également surveiller
l'application de l'article 8, au
niveau de la conservation du
cannabis, et du chapitre IV, au
niveau des restrictions à l'usage. Qu'en
est-il des autres infractions prévues dans la loi ? Il faudrait définir le rôle
que les policiers municipaux sont appelés à jouer pour les autres
infractions.
En ce qui concerne la possession, il est à
prévoir des difficultés d'application en ce qui concerne la quantité de 150 grammes mentionnée à l'article 6.
Comment le policier va-t-il déterminer la quantité et surtout que fera-t-il si
la quantité est moindre que prévu? Le
cannabis saisi cesserait alors d'être une pièce à conviction d'une infraction.
Le policier devrait-il alors retracer le propriétaire et lui remettre le
cannabis saisi? La façon de procéder dans de telles situations devrait être
précisée.
Ainsi, le
rôle des policiers et les attentes de l'État devraient être plus détaillés,
particulièrement en ce qui concerne les infractions qui ne sont pas
énumérées à l'article 66 du projet de loi n° 157.
Pour ce qui
est des modifications ou des dispositions législatives concernant le cannabis, tant au niveau
fédéral qu'au niveau provincial... confèrent
un rôle important aux agents évaluateurs. Le policier qui a été formé pour être
agent évaluateur a la capacité d'administrer
une série de tests et de faire certaines observations dont la combinaison des
résultats permet de constater qu'un individu
a pris un ou des stupéfiants et même d'identifier la catégorie de stupéfiants
en cause. Ce test prend près d'une
heure à administrer et requiert la rédaction d'un rapport. L'administration de
ce type de test permet également au policier évaluateur de requérir le
prélèvement de substances corporelles pour corroborer les résultats.
Le projet de
loi n° 157 prévoit notamment l'utilisation de l'évaluation de l'agent
évaluateur pour qu'un agent de la paix puisse, premièrement, suspendre
sur-le-champ, pour 90 jours, le permis de quiconque conduit ou a la garde
d'un véhicule alors que l'agent évaluateur a
des motifs raisonnables de croire que cette personne a les capacités affaiblies
par le cannabis et, deuxièmement, saisir sur-le-champ, pour 90 jours, le
véhicule de quiconque conduit ou a la garde d'un véhicule alors que l'agent
évaluateur... cette personne a les capacités affaiblies par le cannabis.
Vu l'importance nouvelle accordée à cette
fonction et compte tenu du temps requis pour effectuer cette tâche pour chaque individu interpelé, la fédération
considère que les effectifs policiers formés actuellement au Québec pour
être agent évaluateur sont nettement
insuffisants pour satisfaire à la demande. Seulement 95 policiers environ
possèdent cette formation pour l'ensemble de la province. Ils ne
suffisent pas à la tâche à l'heure actuelle. Qu'en sera-t-il lorsque la
population adulte pourra se procurer du cannabis en toute légalité?
Il faut aussi considérer que, pour les quelque
95 policiers mentionnés au paragraphe précédent, ce sont des policiers formés. Cela ne veut pas dire pour
autant qu'il y en ait 95 qui exécutent les tâches actuellement. En effet,
certains policiers peuvent avoir été formés
mais avoir accédé à d'autres fonctions depuis, ce qui fait en sorte qu'ils
n'exécutent plus ce type de test. Qu'il
suffise de penser au policier promu sergent ou sergent-détective.
L'administration de ce type de test ne relève alors plus de ses
fonctions normales, et il devient donc utopique de penser qu'il pourrait
effectuer ce type d'évaluation sur une base régulière.
Il est donc
urgent de former de nouveaux agents évaluateurs pour que la loi soit respectée
et qu'un effet dissuasif réel soit créé auprès des contrevenants
potentiels. Cet effet dissuasif n'est pas à négliger considérant les
statistiques émanant de l'état du Colorado,
aux États-Unis, qui... depuis la légalisation du cannabis en 2012, les décès
sur les routes associés
à la marijuana ont augmenté de 48 %. Le pourcentage des décès sur la route
reliés à cette drogue a doublé en 10 ans, passant de 10 % à
20 %. Il est donc important que les consommateurs de cannabis réalisent
qu'ils ne pourront conduire en toute impunité avec les capacités affaiblies par
le cannabis. Il en va de la sécurité de tous les usagers de la route.
Par ailleurs,
les appareils de détection ne sont pas encore suffisamment accessibles pour
pallier le manque d'agents évaluateurs.
Et encore, ce type d'appareil peut être utile pour vérifier la présence de
cannabis dans l'organisme, mais il ne peut attester de l'affaiblissement
des capacités de la personne interpelée.
Il reste énormément de travail à effectuer sur le
plan de l'organisation policière pour que les policiers municipaux soient en mesure de s'acquitter de leurs devoirs
et obligations lorsque les changements législatifs concernant le
cannabis entreront en vigueur. Il est primordial que des ressources suffisantes
soient allouées et que les policiers reçoivent la formation et les outils
appropriés pour ce faire.
La fédération
demeure entièrement disponible pour participer à tout exercice de consultation
sur ce sujet, et nous vous remercions de votre attention.
Le
Président (M. St-Denis) : Alors, merci. Donc, je vous remercie
pour votre exposé. Maintenant, nous allons débuter la période des
échanges. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Charlebois :
Alors, M. Côté, M. Nadeau, merci d'être ici et de nous faire part de
vos préoccupations. Je vous ai entendus parler de prévention en début de
présentation. Ça a retenu mon attention, des policiers qui font de la prévention sur le terrain. C'est un angle qu'on
n'avait pas nécessairement entendu. On a entendu plus parler de comment
il fallait intercepter ces gens-là, tout ça.
Dites-moi,
vous savez qu'on a 25 millions minimum — ça,
c'est le minimum par année, pendant cinq ans — qui
s'ajoutent déjà aux 113 millions de prévention globale, traitement de
dépendances, recherche, qui va être là. Et, si d'aventure, après que la Société québécoise du cannabis a payé sa dette,
a payé ses frais d'opération, a justement payé ces 25 millions qu'elle aura déboursés, qu'il reste de l'argent,
vous savez que 50 % de cet argent-là qui est au fonds des revenus... plus de 50 % va encore s'ajouter
au fonds de prévention, mais il y a une partie qui pourrait être ajoutée,
justement, à la sécurité publique.
C'est
exactement à ça que je pensais, parce qu'on a beaucoup... notamment, je pense à
Montréal, je suis allée, à un moment donné, rencontrer un policier
communautaire sur le terrain, qui travaillait avec un travailleur social pour justement suivre le parcours de certaines
personnes itinérantes et s'assurer qu'ils étaient en bonne situation, puis
qu'ils n'étaient pas morts de froid, puis, bon, s'assurer de leur parcours,
puis de les aider, puis de les amener peut-être vers d'autres choses.
Est-ce que
vous pensez que justement la partie
qu'il restera, au fond, des revenus pourrait servir à cette avenue-là?
• (20 h 30) •
M. Côté
(Robin) : Bien oui, c'est exactement ce qu'on pense. Puis
effectivement, sans vous parler de l'aspect sociocommunautaire ou des policiers sociocommunautaires pour la ville de
Montréal... Je peux vous en parler un peu, pour les autres services de police au Québec, excluant, bien entendu, la
Sûreté du Québec. Et, dans les différentes municipalités, la réalité
n'est pas la même dépendamment évidemment de la taille du service de police.
Donc, il y a des plus petits services qui
ont un plus grand besoin de financement justement pour cibler les écoles sur
leur territoire puis être en mesure de
répondre aux attentes, je pense, entre autres, des commissions scolaires. À
certains endroits, il y a des écoles et des commissions scolaires qui
vont financer une partie du salaire ou du travail du policier pour que,
justement, ils puissent avoir une ressource.
Des fois, c'est une journée par semaine, des fois, c'est deux journées par
semaine. Mais je pense que ça peut
débuter de là. Puis, s'il y avait une présence plus importante, je pense que ça
serait bon parce que c'est là que ça
commence, à l'école primaire, à l'école secondaire, c'est important, en fait,
d'informer et de mobiliser, d'éduquer les jeunes aux dangers et aux
effets du cannabis pour que justement, lorsqu'ils atteignent l'âge de
18 ans, ils soient en mesure de se faire une meilleure idée. Et je pense
qu'on a un rôle important à jouer à ce niveau-là.
Mme Charlebois :
Je vais vous poser une question puis je ne sais pas si vous allez avoir la
réponse ce soir parce que je suis
sûre que vous n'avez pas avec vous vos statistiques. En temps normal, là, pas
un soir de Noël, ou un soir de la Saint-Jean,
ou la semaine précédant les fêtes, mais en temps normal, là, dans un sept
jours, environ combien d'arrestations vous
pouvez faire par jour? Dans les petites municipalités dont vous me faites
mention, là, combien vous pouvez faire d'arrestations pour conduite avec
facultés affaiblies? C'est difficile à dire, hein?
M. Côté (Robin) : C'est
difficile à dire. Je n'en ai pas la moindre idée. Dépendamment, comme je vous
le dis, encore là, de la taille du service,
et probablement que certains services vont axer plus leurs interventions par
rapport à ça... Souvent, on va s'entendre
que, si c'est une soirée qui est plus mouvementée en termes de, je ne le sais
pas, violence conjugale, ou etc.,
bien, il va y avoir moins d'attention qui va être portée... Malheureusement,
des fois, il faut prioriser les appels.
Et c'est très rare qu'il va y avoir des policiers strictement affectés, sauf
s'il y a des barrages pour l'alcool au volant, on s'entend, là, à la
surveillance de la conduite avec capacités affaiblies. Ça fait que c'est une
statistique qui est difficile à évaluer.
Mme Charlebois :
Vous me parlez de la tolérance zéro qui va être difficile à appliquer. Je ne
sais pas si j'ai bien compris. Dites-moi,
est-ce que vous seriez d'accord, quand on aura les appareils homologués par
Santé Canada et accrédités par
sécurité publique Québec, d'appliquer la tolérance zéro avec un appareil qui
nous indique une consommation récente? Parce qu'on sait que le THC peut rester
dans le sang sept jours, même plus, et, par conséquent, dans la salive.
Est-ce que vous, vous seriez en accord qu'on applique tolérance zéro à partir
du moment où on a les bons appareils homologués?
M. Côté
(Robin) : Bien, la clé du succès, elle est là. Oui, on serait
d'accord. Mais il faut effectivement avoir un appareil qui va passer le test des tribunaux puis, comme vous le dites, qui va détecter une consommation récente. Est-ce
que l'appareil va être calibré avec un certain taux qui va avoir été prévu par
réglementation, ou par la loi, ou autres? Je n'en ai aucune idée. Mais effectivement, si vous nous
donnez les bons outils pour travailler, on n'aura aucun problème à
appliquer la tolérance zéro.
Mme Charlebois :
Pendant que vous appliquez conduite avec facultés affaiblies, est-ce qu'il vous
arrive de rencontrer des gens qui ont des capacités affaiblies en raison de la
drogue en ce moment?
M. Côté
(Robin) : Bien oui, c'est certain que ça peut arriver. Et, je l'ai
déjà dit, souvent, ça va être accompagné d'une consommation d'alcool. Si ça ne l'est pas, bien, effectivement les
patrouilleurs sont en mesure, eux, de faire les épreuves de coordination du mouvement en bordure de route. Et ils vont
être capables, au préalable, déjà, d'évaluer si, effectivement, le conducteur pourrait possiblement avoir consommé
n'importe quelle substance, là, on s'entend. Mais où on pense que ça va bloquer, c'est justement à cause
du manque d'agents évaluateurs. Bien, une fois que le conducteur est
conduit au poste de police, s'il n'y a pas d'agent évaluateur disponible pour
compléter la série de tests, bien, c'est là qu'on va avoir un problème.
Mme Charlebois :
C'est la boucle qui manque afin... À la fin, ça prend l'agent évaluateur
justement pour conclure le dossier. Sinon, c'est comme un dossier qui
s'échappe, là. C'est ça que vous me dites?
M. Côté
(Robin) : Bien, on va avoir fait notre bout de travail dans le sens où
on va avoir retiré le conducteur de la route,
là. Je veux dire, on s'entend, sauf que, si, au bout de la ligne, on veut que
le dossier soit complété puis que ça soit traduit devant les tribunaux,
bien, on a un problème s'il n'y a pas l'agent évaluateur.
Aurais-tu quelque chose à rajouter, Frédéric?
M. Nadeau (Frédéric) : Non, ça
va.
Mme Charlebois :
Est-ce que vous voyez... Parce que, là, je sais qu'il y a encore 34 ou 36
agents évaluateurs qui vont sortir, au mois de mars, je pense, de
formation. Comment voyez-vous qu'on peut accélérer cette formation-là?
M. Côté
(Robin) : Ça passe nécessairement par le financement de la formation
effectivement, parce que ça coûte quand
même assez cher, former un agent évaluateur, puis le processus est quand même
assez long. Et actuellement je sais que
l'école nationale, ils sont à pleine capacité. Il faut qu'ils soient capables
d'en sortir 36 d'ici... Vous me parlez du mois de mars. Moi, j'avais plutôt en tête d'ici au mois de juillet. Donc, si
on se rend à 130 ou à 140 agents évaluateurs d'ici le 1er juillet, c'est clairement insuffisant parce
qu'on parle encore... pour l'ensemble du Québec, là. Donc, il y a 15 000
policiers au Québec. Il y aurait 140
évaluateurs de formés. Donc, on n'est même pas à 1 % de l'effectif
policier de formé comme agents évaluateurs.
Mme Charlebois :
Vous considérez que la situation va changer en termes de consommation, parce
que, là, ce que je comprends, c'est
qu'il en manquerait, actuellement, des agents évaluateurs, même avant la
légalisation, là. Est-ce que je comprends bien?
M. Côté
(Robin) : Je vais parler juste des services de police qui sont membres
de la fédération, là. Je l'ai déjà dit, on en a cinq, services de police qui n'ont aucun agent évaluateur. On en
a 15 qui n'en ont qu'un seul. Présentement, je trouve que c'est
inconcevable. Actuellement, c'est inconcevable qu'il y ait un service de police
qui n'ait aucun agent évaluateur. Et j'ai
entendu, cet après-midi ou en fin de journée, les gens du Nunavik qui sont
venus vous parler. Je ne ferai pas de
cachette à personne ici que nos corps de police autochtones... Nous, on
représente trois corps de police autochtones : la réserve de Mashteuiatsh, dans Roberval, on
représente Nunavik puis on représente aussi les Cris de la Baie James.
Et, dans ces régions-là, il n'y en a aucun,
agent évaluateur. Puis je ne suis pas sûr que la Sûreté du Québec en ont
autour de ça non plus. Ils vont faire quoi, eux autres? Je n'en ai aucune idée.
Mme Charlebois :
...vous pensez de prendre du monde qui sont capables de donner la formation
puis les amener là-bas plutôt que de prendre du monde de là-bas, les
amener quand les cohortes sont prêtes? Il faut-u être absolument à Nicolet pour
avoir cette formation-là?
M. Côté
(Robin) : L'école nationale pourrait vous répondre. Moi, je pense que,
possiblement, le bout où est-ce qu'on
parle de formation théorique, il n'y aurait probablement pas de problème à le
faire là-bas. Où il y aurait certainement un problème, c'est quand on
arrive à la dernière partie de la formation et que c'est une formation qui est
pratique, qu'il y a des tests qui faut
qu'ils soient faits sur des sujets intoxiqués et qu'il y a des tests aussi qui
sont faits sur des, dans le cas de l'école nationale, comédiens qui sont
formés pour agir comme s'ils étaient intoxiqués. C'est là qu'on aurait un problème. Et c'est
cette dernière partie là actuellement qui cause aussi un problème parce que ça
retarde dans tout le processus au niveau des agents évaluateurs.
Mme Charlebois :
Combien vous estimez que ça en prendrait de plus?
M. Côté
(Robin) : Oui, vas-y.
M. Nadeau
(Frédéric) : Oui. En fait, les difficultés qu'on a, au fait qu'il y
ait juste un agent évaluateur, par exemple,
par corps de police, bien, c'est facile à comprendre. En fait, la plupart des
corps de police municipaux au Québec fonctionnent
avec, en fait, un nombre de quatre ou cinq équipes de patrouilleurs qui
travaillent en rotation, jour, soir, nuit ou jour et nuit. Alors, évidemment, s'il y a un seul agent évaluateur de
formé, on peut penser qu'il y a trois ou quatre équipes qui n'en ont pas. Donc, à chaque fois que l'équipe
ou l'agent évaluateur est là, est au travail, ça va bien, là. Si on a à
avoir besoin de ses services, on l'appelle.
Mais, si c'est les quatre autres équipes qui sont en devoir, bien, on l'appelle
en temps supplémentaire, si on est capables de le rejoindre, ou on s'en
passe, là. Alors, c'est pour ça que, quand vous parlez du nombre d'agents évaluateurs, dans un monde idéal,
ça en prendrait au moins un par équipe dans les corps de police. Donc
là, on parle d'augmenter substantiellement le nombre qui existe actuellement.
Mme Charlebois :
Ça, c'est le monde idéal. Puis le monde qui serait un petit peu plus réel...
Parce que la consommation, honnêtement, puis
peut-être que je me trompe, ne devrait pas tant augmenter que ça parce que ce
que je constate, puis je vous partage
ça, c'est qu'il y a bien des gens qui consomment actuellement, mais qui ne le
disent pas, qu'on va voir surgir.
Mais, en fait, ils sont, dans les faits, déjà là, là, sauf qu'ils consomment du
monde non légal. Alors, vous, voyez-vous une augmentation potentielle de
consommateurs arriver? Voyez-vous ça?
• (20 h 40) •
M. Côté
(Robin) : Le début de ma réponse, ça va être celle-là. Je ne sais pas,
à l'époque où l'alcool a été légalisé, ça
a donné quoi sur les routes, puis, au moment où a voulu interdire la conduite,
ça a donné quoi non plus, sauf que je sais que, si on se base sur l'expérience vécue ailleurs, dans d'autres pays,
dans les États américains, on regarde les statistiques... Je n'ai jamais voulu dire puis je ne veux pas dire
non plus que ça va être la même chose au Québec. J'espère que non. Mais ailleurs les statistiques en termes d'accidents et de conduite avec les
capacités affaiblies par le cannabis ou autres drogues ont augmenté. Bon, pourquoi? Je ne le sais pas. Est-ce que ça va
être la même chose chez nous? J'espère que non. Mais, si ça l'est, ce
que je vous dis, c'est qu'il faut être prêt à y faire face puis qu'actuellement
on n'est pas prêts à y faire face.
Mme Charlebois :
Je ne sais pas, il ne doit pas rester tant de temps que ça, hein, M. le
Président?
Le Président
(M. St-Denis) : 3 min 30 s.
Mme Charlebois : Ce qu'on m'a dit, puis là ce sera à analyser, en consultation puis au forum d'experts,
c'est que là où c'est arrivé, c'est qu'il n'y avait pas beaucoup... Ils nous
ont avertis, là, ça prendrait des bons programmes de prévention, des bons programmes de sensibilisation. Il faut que les gens
soient vraiment au courant des risques associés, un, à de la consommation, alcool et cannabis, deux, de c'est quoi, le
danger de conduire en état de consommation récente... et de faire
beaucoup, beaucoup, beaucoup d'éducation, beaucoup de sensibilisation. Vous,
vous pensez quoi? Puis comment vous voyez ça? Comment on peut rejoindre la
majorité des gens qui vont conduire? C'est quoi, l'outil le mieux pour
sensibiliser ces personnes-là? Est-ce que c'est le travailleur à la boutique?
Est-ce que c'est par Internet? Est-ce que c'est... Je ne le sais pas.
M. Côté
(Robin) : Bien, je pense que c'est un mélange d'un petit peu de tout
ça. J'ai parlé des écoles tantôt. Certainement,
les messages publicitaires, certainement, les employés dans les différentes
boutiques, comme vous avez mentionné,
et certainement aussi des... Ça pourrait passer par les cours de conduite,
entre autres, pour être sensibilisés pendant
qu'ils ont les cours de conduite. Tout est bon. Tout est bon, je pense, en
matière de prévention, pour avertir les jeunes qu'il y a un danger d'associé à ça. Puis c'est certain que ça ne
changera pas du jour au lendemain, ça va se faire progressivement. On est
conscients de ça. Changer un mode de vie, changer des habitudes de vie, ça
prend du temps, mais je pense que c'est important, puis il faut que ça se fasse
comme il faut en partant.
Mme Charlebois :
En termes de prévention, qu'est-ce que vous pensez si on... Il y en a qui m'ont
dit que ce n'était plus de la prévention, c'était de la répression, la
production personnelle à zéro.
M. Côté
(Robin) : Bien, ça, lorsqu'il y avait eu les audiences publiques, on
avait fait part de notre préoccupation au
niveau des plants de cannabis dans les maisons. Et on est très contents que
vous ayez prévu qu'il n'y en aurait pas parce qu'on a toujours dit que ce serait un drainage massif, comment je
pourrais dire, des effectifs policiers juste pour surveiller qui en a quatre, qui n'en a pas quatre, quelle
longueur qu'ils ont puis... Ça aurait été quelque chose d'assez
épouvantable. Ça fait que je pense que c'est une bonne affaire. Ça reste qu'il
y a peut-être, quand même, des gens, comme ils font actuellement, qui vont continuer à nous appeler pour dire : Mon
voisin, il a un plant sur son balcon. Mais, je veux dire, ça va être
moins compliqué que ça soit permis d'en faire pousser dans les maisons. Ça,
c'est clair.
Mme Charlebois :
Merci.
Le
Président (M. St-Denis) : C'est bon? Alors, je vous remercie. Je
vais maintenant céder la parole au député de Labelle pour une période de
9 min 15 s.
M. Pagé :
Merci, M. le Président. Alors là, ce que j'ai bien compris, c'est qu'on est
devant un fait accompli, là. Il va manquer de policiers, selon vous, à
temps, à moins qu'on débloque des sommes pour accélérer le processus de formation. Est-ce que c'est bien ça? Parce que ce
que j'ai cru comprendre, c'est que, là, c'est juste que l'argent n'est
pas au rendez-vous pour former les évaluateurs, les policiers. C'est bien ça
que vous nous avez dit, là?
M. Côté
(Robin) : C'est presque ça. C'est-à-dire que, oui, les services de
police, je ne pense pas qu'ils aient des budgets illimités en termes de
formation. Puis, pour une formation d'agent évaluateur, c'est quand même assez dispendieux, ça a été démontré. Mais le problème,
ce n'est pas juste au niveau des budgets des services de police. Il y a
une partie aussi du budget, une partie de l'argent qu'il faut qu'elle aille à
l'école nationale pour qu'ils puissent en former plus. Mais actuellement ils
sont à pleine capacité. Puis je ne les blâme pas, ils font de leur mieux, mais
ils ne sont pas capables d'en former plus
que 36 d'ici le 1er juillet. Donc, ce bout-là, je ne sais pas comment ça peut
débloquer, à part... Puis la seule
chose que je peux voir, c'est du financement, plus de financement à l'école
nationale, puis ouvrir des classes, puis amener des formateurs. Il faut
en former plus, mais ça passe tout par l'école nationale.
M. Pagé :
Oui. Mais donc, s'il y avait des sommes d'argent supplémentaires, on pourrait
en former plus et plus vite. C'est ça?
M. Côté (Robin) : Bien,
effectivement, je pense que ça pourrait aider.
M. Pagé : Bon, alors...
Comment?
Une voix : ...
M. Pagé :
On peut les mettre là et il faut les mettre à plusieurs endroits. Une question
que je vais vous poser, et je suis convaincu que, compte tenu que vous
êtes essentiellement dans les municipalités, hein, vous êtes la fédération des
policiers municipaux... Il y a, je pense, c'est quoi, 26, 29 corps de police
municipaux au Québec?
M. Côté (Robin) : 31. 32 avec
Montréal.
M. Pagé : 32 avec
Montréal? O.K.
M. Côté (Robin) : Puis on est
peut-être rendus à 33 avec Mercier.
M. Pagé :
Vous devez être en contact beaucoup avec les travailleurs de rue. Est-ce que je
me trompe? Certainement beaucoup.
M. Côté
(Robin) : Si vous parlez de la fédération comme telle, à la
fédération, non. Les policiers municipaux, oui, certaines municipalités
font affaire avec des travailleurs de rue, effectivement.
M. Pagé :
Puis c'est une question, je pense, qu'on n'a jamais abordée. Mais, de façon
instinctive, j'ai l'impression que
les travailleurs de rue pourraient jouer certainement un rôle assez important,
parce que les travailleurs de rue, de par leur définition, la plupart,
c'est des travailleurs sociaux, et ils sont très présents sur le terrain... et
qui peuvent faire de la prévention beaucoup,
beaucoup. Est-ce que vous croyez que ces gens-là pourraient jouer un rôle fort
utile, dans toute cette prévention
que l'on souhaite faire, et évidemment, bien, en avoir plus sur le terrain?
Parce que moi, je pense à une de mes municipalités,
là. Ils n'avaient pas le financement pour en avoir un. Donc, ils se sont
associés avec d'autres municipalités autour. On a fait un pot pour réussir
à en avoir un qui se promène dans plusieurs municipalités. Mais plusieurs élus
craignent évidemment à ce qu'il y en ait trop, de gens qui consomment dans leur
municipalité... et qui me disent : Un travailleur de rue, ça pourrait être
utile chez nous. Comment vous voyez ça?
M. Côté
(Robin) : Bien, oui, je vois
ça d'un bon oeil, effectivement, parce
que, dans différents centres-villes
de différentes municipalités, il y en a, comme vous le dites, déjà, des travailleurs
de rue qui sont là. Malheureusement, ils ne
peuvent pas toujours être là à
plein temps. Vous l'avez dit aussi,
ils ont toujours un problème, les regroupements de travailleurs de rue,
à se financer, mais ils font un travail exceptionnel avec les moyens qu'ils ont
pour l'instant. Heureusement, les jeunes sont près de ces gens-là et ils se sentent écoutés par ces gens-là. Puis je pense qu'ils font
un bout de travail que la police ne peut pas nécessairement faire. Mais il y a
quand même un contact qui se fait entre ces gens-là puis les sociocommunautaires,
comme je vous parlais tantôt.
M. Pagé : ...en fait,
là.
M. Côté
(Robin) : Bien oui, il faut arrimer un peu le travail qui se fait,
puis ça ne donne rien de le dédoubler. Puis eux font leur bout, on fait
notre bout, puis, avec ça, je pense que ça peut donner une formule gagnante.
M. Pagé : O.K.
Intéressant, très intéressant. Tolérance zéro, moi, je veux bien. Par contre,
vous savez comme moi que... Bon, on dit :
Avant longtemps, on va peut-être avoir un moyen pour détecter le niveau de THC.
Mais vous savez comme moi, puis on
l'a entendu souvent dans la tournée, que le niveau de THC peut être détecté,
mais ça peut faire des jours, même,
dans certains cas, des semaines, que la personne n'a pas consommé. Alors, je
pense que, quand vous parlez des gens
qui sont formés, vous le dites, c'est des évaluateurs, hein? Vous les avez
appelés comme ça parce que c'est des gens qui vont être capables d'évaluer la capacité de conduire. À notre humble
avis, ce qu'il faut évaluer, c'est cette capacité de conduire beaucoup plus que le niveau de THC parce
que, pour quelqu'un qui a déjà consommé, moi, ce qu'on me dit... Puis
j'ai déjà, il y a une trentaine d'années, essayé ça. Le lendemain, j'avais une
capacité de conduire... j'avais peut-être encore des traces de THC.
Alors, ne
serions-nous pas mieux de prévoir un minimum, parce que la loi fédérale prévoit
qu'on peut aller, je pense, jusqu'à quatre
ou cinq nanogrammes, pour ne pas que des gens soient détectés avec deux
nanogrammes, mais que ça fait une semaine qu'ils n'ont pas consommé et
qu'ils sont parfaitement aptes à pouvoir conduire? Comment vous voyez ça?
• (20 h 50) •
M. Nadeau
(Frédéric) : Oui. Bien, en fait, effectivement, toute la question du
degré de THC est au coeur des préoccupations
des policiers aussi, là. Et on n'est pas biologistes, on ne peut pas vous
conseiller là-dessus, sur le nombre de degrés,
et tout ça. Moi, ce que j'ai vu, évidemment, bien de l'extérieur, c'est que
c'est très difficile de faire une adéquation entre le degré de THC et les capacités, là, ou l'affaiblissement des
capacités. Par contre, c'est là où on met l'emphase, sur l'agent
évaluateur, parce que l'agent évaluateur, c'est son rôle de faire ça, d'évaluer
les capacités des gens, que les capacités
soient affaiblies en raison du cannabis ou de toute autre drogue, là. Donc, ça
ratisse plus large qu'un appareil qui ne mesurerait que le THC parce
qu'il y a évidemment toutes les autres drogues.
Et
la façon dont ça fonctionne avec les agents évaluateurs puis les autres
policiers, c'est qu'on va commencer par vérifier l'alcool parce que c'est plus simple puis c'est plus facile. La
problématique, puis les gens qui risquent de passer entre les mailles du filet, si j'ose prendre cette
expression-là, c'est que, s'ils n'ont pas consommé d'alcool, mais qu'ils
ont quand même les capacités affaiblies,
comme a dit Robin tantôt, bien là c'est de monter le dossier, là. Et, tantôt,
quand on parlait de prévention, bien, il y a l'aspect dissuasif aussi, hein? On
peut parler de publicité. On peut parler aussi de sanctions plus sévères. Mais, si sur le terrain, il n'y a pas de
policiers qui sont capables de monter les dossiers, bien, on ne peut
plus se poser des questions sur la présence d'un effet dissuasif, là, à ce
moment-là.
M. Pagé : Mais, tu sais, vous comprenez très bien le
dilemme dans lequel nous nous trouvons, là. Normalement, quand on fait une loi, il faut
être capable de la faire appliquer. Et là on nous dit : On va faire une
loi tolérance zéro, mais on n'est pas
capables de la faire appliquer. Alors, c'est la raison pour laquelle, de plus
en plus, je réfléchis et je nous questionne, à savoir : Si on n'est pas capables de la faire appliquer, ne
sommes-nous pas mieux d'aller à quelque part entre le zéro et ce que le fédéral nous suggère d'aller, comme
certaines provinces ont fait, entre
autres, pour avoir cette petite
marge? Parce que, bon, j'imagine que, si on vous détecte un ou deux
nanogrammes, mais que justement ça fait une semaine, bien, probablement aussi que ça permettrait de protéger ce citoyen qui risque de se
retrouver avec une suspension de permis de conduire, et, si c'est une récidive, bien, avec tous les effets.
J'essaie de trouver la solution parce qu'on est vraiment dans un vide à
quelque part. Et je crains que la tolérance zéro, même si on est d'accord avec
le principe... parce que c'est un message qu'on veut envoyer, mais je crains qu'il soit non applicable, et qu'on
se retrouve avec des cas où il y a des gens qui vont avoir des suspensions de permis de conduire quand,
pourtant, ils avaient toute la capacité de conduire. Alors, je vais vous
dire... Probablement, comme moi, vous n'aurez pas la réponse mais... Oui?
M. Côté
(Robin) : Actuellement, c'est un risque. Vous avez raison. On a évalué la même chose que vous.
Dans un monde idéal, oui, la tolérance zéro, il faudrait qu'elle soit
appliquée. Puis, oui, il faudrait qu'on ait les appareils en conséquence de... Mais, pour l'instant, puis je
pense que Mme la ministre l'a dit, la tolérance zéro, actuellement, ne peut pas être appliquée
parce qu'on n'a pas les outils nécessaires. Et, quand on les aura, bien, tant
mieux, on l'appliquera avec plaisir. Mais, en attendant, on est un peu
comme vous, on est dans le vide.
M. Pagé :
Il y a mon collègue qui avait...
Le Président
(M. St-Denis) : On n'a plus de temps, malheureusement.
M. Pagé :
Ah! Désolé.
Le Président
(M. St-Denis) : Alors, je vais maintenant...
Une voix :
...
Le
Président (M. St-Denis) :
Pardon? C'était 9 min 15 s. Alors, je vais passer la parole au député de Borduas pour une période de
6 min 15 s.
M. Jolin-Barrette : Merci,
M. le Président. M. Côté, Me
Nadeau, bonjour. Bien, bonsoir. Merci d'être présents aux travaux de la commission.
Sur les lieux
publics actuellement, le projet
de loi prévoit que, dans les endroits
publics, on va pouvoir consommer dans les parcs, tout ça. Qu'est-ce que
vous en pensez?
M. Côté (Robin) : Bien, je pense que c'est une bonne idée. La
subtilité que j'avais comprise là-dedans, et sans l'avoir
analysée en profondeur, c'est que, dans les parcs où il y a présence d'enfants,
puis vous me corrigerez si je me trompe,
puis je pense que ça, c'est une excellente idée... Maintenant,
comment, au niveau du travail policier, on va être en mesure de vraiment
contrôler... Est-ce qu'il va y avoir des zones spécifiques qui vont être
prévues pour dire : Bon, bien, dans tel
coin, les gens vont avoir eu le droit d'en consommer, puis, ailleurs,
non? Parce qu'actuellement, on sait très bien que, dans les parcs, il s'en consomme déjà, du
cannabis. Pendant les différents festivals, pour faire les services
d'ordre, et tout ça, de l'odeur de cannabis, là, il y en a quand même
régulièrement, là. Donc, comment, sur le terrain et en pratique, ça va se
contrôler? Bien, pour l'instant...
M. Jolin-Barrette :
Je vais poser ma question à l'inverse. Actuellement, pour l'alcool, souvent, il
y a des règlements municipaux qui interdisent la consommation d'alcool sur la
voie publique ou dans les parcs. Est-ce que, pour
l'application du travail policier, ça serait plus simple
d'avoir une réglementation provinciale qui interdirait ça ou...
à moins... la FQM nous a proposé de
développer un règlement-cadre pour la majorité des municipalités, ou, troisième option, l'UMQ est
venue nous voir puis a dit : Bien, écoutez, nous, laissez-nous
développer notre réglementation dans nos parcs puis sur la voie publique. Alors, pour l'application du travail
policier, qu'est-ce qui est plus simple pour les policiers et les
patrouilleurs en fonction?
M. Côté
(Robin) : Je ne pense pas qu'il y ait plus de difficultés à appliquer
une loi provinciale qu'une loi municipale ou un règlement municipal.
La façon d'appliquer, théoriquement, devrait être la même. L'objectif
recherché, c'est de faire cesser l'infraction, c'est toujours ça. J'imagine que
ce dont vous me parlez... C'est parce que, si les municipalités incluent ça dans leurs règlements municipaux, au bout de
la ligne, ça se finirait par possiblement l'émission d'une contravention. Donc, si c'est ça qui est
choisi, ça sera ça. Ce n'est pas quelque chose qui est compliqué à
appliquer pour un policier, un règlement municipal. Donc, un ou l'autre, on va
appliquer le règlement comme il va être fait.
M. Jolin-Barrette : Sur la question du 150 grammes à la maison, là, vous dites, à la
page 5 de votre mémoire : C'est difficile et il peut y avoir des
difficultés d'application. Qu'est-ce que vous voulez dire par là?
M. Côté
(Robin) : Bien,
premièrement, difficultés d'application, dans le sens où on l'a écrit... C'est
que moi, je présume que vous en avez
plus que 150 grammes, je saisis votre cannabis parce que vous en avez plus
que 150 grammes, j'amène ça au poste
de police, je fais la pesée, puis il y en a 130. Là, je fais quoi? Je le garde?
Je vous le retourne parce que vous
aviez le droit de l'avoir? Il y a un manque de précision à ce niveau-là. Puis on fait bien des farces avec ça, l'APPQ
l'a répété aujourd'hui, moi, je l'ai dit dans les mois précédents, est-ce qu'on
serait mieux finalement de se traîner une balance
dans notre véhicule de patrouille puis on va le peser sur place, comme ça, on
va en avoir le coeur net? Mais, je veux dire, le contexte ne se présente pas toujours favorablement. Si je
rentre en quelque part où... parce
qu'il y a une plainte de bruit, la chicane, excusez l'expression, est
pognée puis il y a un sac de pot dans le milieu de la table, bien... Vous
comprenez que ça se passe tout en même
temps, là. Ça fait que de quelle façon ça va être appliqué? Est-ce qu'on va avoir à le retourner, comme
je vous dis, ce qu'on va avoir saisi, parce
que, là, ça ne devient plus une pièce
à conviction, c'est légal, ça fait qu'il faut que je le retourne au
propriétaire?
M. Jolin-Barrette : Mais nous, là, pour nous outiller... Je comprends
la difficulté, puis d'avoir une balance... Mais vous nous invitez à quoi mettre dans le projet de loi? Parce que, là, actuellement, le fédéral disait 30 grammes, 150 à la maison. Le gouvernement
provincial a proposé la même chose. Mais il y a quand même des difficultés
d'application. Est-ce que vous avez une piste de solution pour nous au niveau
de la réglementation? Tantôt, il y a des gens qui nous disaient : Bien, écoutez, on ne peut pas nécessairement
faire la distinction, à l'oeil, sur la quantité. Est-ce qu'on devrait restreindre cette quantité-là pour avoir une
plus petite quantité? Je cherche des pistes de solution.
M. Côté
(Robin) : Bien, je vous
avoue que nous autres aussi, on en cherche, là, actuellement. Puis je
réfléchis tout haut. Puis, si ça a été prévu, je n'en suis pas certain.
Quand l'achat de cannabis va se faire, est-ce qu'il va y avoir une
espèce de certificat qui va être remis à celui qui va avoir acheté le cannabis
pour dire : Ça vient de tel magasin, j'ai eu telle quantité, puis ça m'a coûté tant? Est-ce que ça va être un certificat
qui va devenir un genre de preuve que le contenu du sachet a été acheté légalement, un? Puis, deux, la
quantité qu'il y a dedans, c'est ce qui est écrit sur le papier? Je ne
le sais pas comment ça va fonctionner. Est-ce qu'il y a un mécanisme de ce
type-là qui pourrait être mis en place? Je n'en ai pas la moindre idée. Puis
c'est pour ça que je vous dis que ça a vraiment besoin d'être clarifié, tout ce
bout-là, là.
M. Jolin-Barrette :
Au niveau des agents évaluateurs, là, il y en a seulement 95. Ça, ça veut dire
que parfois il y en a qui sont en congé
quand les policiers font une arrestation. Pour la cour, est-ce que c'est
difficile, dans le fond, en termes de
disponibilité? Parce que, j'imagine, l'agent évaluateur doit se rendre à la
cour, quand il y a un procès, témoigner. Là, à ce moment-là, il n'y en a
pas d'autres au service de police, là.
M.
Côté (Robin) : Bien, ça, c'est certain, que, si l'agent évaluateur est
à la cour, ça laisse le service à découvert. Par contre, la cour, c'est normalement le jour. C'est sûr, je ne suis
pas en train de vous dire que des conduites avec capacités affaiblies, il n'y en a pas le jour. Il y en a à
toutes les heures de la journée. Mais il y a plus de probabilités que ça
arrive le soir ou la nuit. Mais, même là...
Le Président (M. St-Denis) : 10
secondes.
M. Jolin-Barrette : ...pas assez d'agents évaluateurs, puis qu'il
n'est pas disponible, est-ce qu'on risque de ne pas pouvoir poursuivre
l'individu qui a commis une infraction?
M. Côté
(Robin) : Bien, c'est ce qu'on a dit tout à l'heure. Ça laisse ce
bout-là dans le vide puis que ça fait en sorte qu'on ne peut pas compléter le dossier puis porter des accusations parce
qu'on n'a pas la ressource qu'on a besoin d'avoir.
Le
Président (M. St-Denis) : Alors, je vous remercie. Je vous
remercie pour votre contribution à nos travaux.
Et la
commission ajourne ses travaux au vendredi 8 décembre, après les affaires
courantes, où elle poursuivra son mandat.
Bonne soirée, tout le monde.
(Fin de la séance à 20 h 59)