(Onze heures dix-neuf minutes)
Le
Président (M. Tanguay) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît!
Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux
ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien
vouloir éteindre la sonnerie de vos téléphones cellulaires.
Le mandat de
la commission est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 81,
Loi visant à réduire le coût de certains
médicaments couverts par le régime général d'assurance médicaments en
permettant le recours à une procédure d'appel d'offres.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Poëti
(Marguerite-Bourgeoys) est remplacé par M. Morin (Côte-du-Sud).
• (11 h 20) •
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup.
Remarques préliminaires
Nous allons
donc, sans plus tarder, débuter par les remarques préliminaires, et à cet
effet, pour une période maximale de 20 minutes, je cède la parole
au ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Gaétan Barrette
M.
Barrette : Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, évidemment, à
tous nos collègues parlementaires pour cette
étude détaillée du projet de loi n° 81, un projet de loi qui est d'abord
et avant tout dans l'intérêt du public québécois, qui paie très cher un régime d'assurance
médicaments et dont on a la responsabilité, évidemment, de s'assurer que les taxes et impôts
payés par les citoyens soient dépensés correctement.
Nous sommes
rendus à l'étape de l'étude détaillée du projet
de loi, un projet de loi très court, de trois articles, M. le
Président, dont deux articles principaux et un article plus technique sur
lequel il n'y a pas vraiment de débat à faire, à mon avis, deux articles, M. le Président, qui habilitent le
gouvernement, le ministre à faire des appels d'offres tant du côté de
l'achat de médicaments que dans la distribution du médicament. Pourquoi? Parce
qu'évidemment, je l'ai dit à plusieurs
reprises, je viens de le dire, je vais le répéter, nous payons trop cher nos
médicaments au Québec, c'est un fait qui
est reconnu partout, M. le Président, et ce coût-là qui existe, bien, il existe
parce qu'il y a des pratiques, sur le terrain, d'achat et de distribution, de relations commerciales entre les divers
intervenants entre la production du médicament et la livraison de ce médicament auprès des citoyens,
qui fait en sorte que le coût soit élevé. Alors, évidemment, il y a plusieurs
acteurs qui sont en cause et, comme il y a
plusieurs acteurs en cause, il y a donc lieu de s'adresser législativement à
tous ces acteurs-là d'une façon la plus efficace possible, dans le
bénéfice, évidemment, des citoyens.
Hier, M. le
Président, à l'adoption du principe, j'ai cité la députée de Taillon, qui est
la critique officielle au Parti québécois
en matière de santé, qui disait elle-même qu'il y avait, dans son estimé,
elle-même pharmacienne propriétaire — on s'en rappelle, la députée de
Taillon est pharmacienne propriétaire — qui reçoit des allocations
professionnelles, des ristournes dans le
cadre de cette mécanique-là... elle-même est bien au fait de cette mécanique-là
et elle disait qu'on pouvait par des
appels d'offres faire des économies substantielles, de l'ordre de centaines de
millions de dollars, M. le Président. Est-il
nécessaire de rappeler que la députée de Taillon a été présidente de l'Ordre
des pharmaciens dans le passé et qu'en tant
que présidente non seulement elle a constaté ça, mais je me souviens même
qu'elle a amené en discipline d'anciens présidents de l'association des
pharmaciens propriétaires du Québec? Mais, malgré tout, il semble que la
problématique ne se soit pas résolue.
Hier, M. le Président,
à l'adoption de principe, l'opposition officielle, la deuxième opposition et le
troisième groupe parlementaire sont
venus au micro nous dire clairement qu'ils étaient d'accord avec le fond, la
finalité du projet de loi n° 81, c'est-à-dire qu'il y avait une
problématique qu'il fallait régler et que les appels d'offres étaient une
solution qui était à envisager, M. le
Président. La deuxième opposition et le troisième groupe parlementaire se sont
exprimés sur la portée. Le troisième
groupe parlementaire a dit qu'on n'allait pas assez loin, la deuxième
opposition nous a évoqué le fait qu'il fallait
être prudents, ce avec quoi nous sommes tout à fait d'accord, mais l'opposition
officielle, M. le Président, a pris un tout autre angle, comme
d'habitude, et je le dis dans mes remarques préliminaires pour le bénéfice non
pas de nos collègues parlementaires sur
l'attitude que nous aurons de ce côté-ci pendant cette étude détaillée, mais
pour le public pour qu'il comprenne bien ce qui va se passer.
L'opposition
officielle, par la voix du député de Rosemont, nous a annoncé d'une façon non
équivoque... Parce que, on le sait,
au Parti québécois, là, tous les sujets, tous les sujets sont des sujets
gigognes, hein? Les poupées russes qu'on
connaît, il y en a une qui s'imbrique dans l'autre, qui s'imbrique dans
l'autre, qui s'imbrique dans l'autre. Ça, c'est la mécanique du député de Rosemont, et on la
connaît. Le député de Rosemont hier, à l'adoption de principe, nous a dit
que lui, là, il allait s'adresser aux médecins.
Comme d'habitude, au Parti québécois, on accuse un groupe dans la société.
Au Parti québécois, ce n'est pas l'idée qui
compte, c'est le véhicule, les véhicules, c'est de mettre en cause un groupe
de citoyens : ils sont responsables de
quelque chose. Le député de Rosemont nous expliquait que le problème, c'étaient
les médecins qui prescrivaient trop. Puis c'est vrai, c'est vrai qu'ici on
prescrit plus qu'ailleurs, mais le projet de loi, M. le Président, c'est un projet de loi qui vise à habiliter le ministre
de la Santé et des Services sociaux à faire des appels d'offres, ce n'est pas un projet de loi sur les
médecins. Il y a d'autres projets de loi. On en a assez parlé à date, des
médecins, inquiétez-vous pas, tout le
monde s'en rend compte au Québec, mais ce projet de loi n'est pas un projet de
loi qui vise à changer la pratique des médecins.
Le député de
Rosemont aussi a fait référence à la politique du médicament, et là son
intention est claire, et il l'a dit d'une
façon non équivoque, il a dit : La politique du médicament, c'est le
choix. Non, monsieur, on n'arrêtera pas, nous allons déposer des amendements. Alors, hier, on a eu un spectacle, M. le Président, d'un député
qui nous a annoncé que, dans cette
étude détaillée, on allait essayer de transformer un appel d'offres très simple
qui ne vise simplement, exclusivement qu'à
permettre au ministre de la Santé de faire des appels d'offres. Ce
n'est pas, M. le Président... il n'y a pas une ligne, il n'y a pas un
mot qui nous permettent d'évoquer, d'insinuer que ce projet de loi est un projet
de loi de politique du médicament. Il n'y en a pas.
Alors, M. le Président, le député de Rosemont, qui est actuellement dans une course à la chefferie, va peut-être vouloir transformer cette commission parlementaire en
plateau pour faire sa course à la chefferie. Nous n'allons pas embarquer, M. le Président, dans cette
direction-là. Et, non, je vous le dis, M.
le Président — vous allez être très sollicité dans cette étude détaillée — c'est
un projet de loi qui porte sur un seul sujet : des appels
d'offres en achat de médicaments et
en distribution de médicaments, et ce projet
de loi là n'est pas un projet de loi construit ni conçu pour être une nouvelle politique
du médicament, sujet qui est un sujet très intéressant, M. le Président. D'ailleurs, lors des consultations publiques, l'Ordre des pharmaciens est venu nous dire qu'il y avait
des choses à faire du côté de la politique du médicament et ils ont bien dit que ça,
c'était en dehors du projet de loi n° 81.
Alors, les
raisons pour lesquelles on est ici, M. le Président, ce sont ces raisons-là.
C'est un projet de loi qui vise à habiliter le ministre à faire des
appels d'offres, non pas à faire une politique du médicament, et vous
comprendrez évidemment mon éventuel silence
face à des amendements qui viendront à profusion dans une intention
peut-être... et je ne veux pas, M. le
Président, prêter des intentions, la conséquence serait évidemment de consommer
du temps. D'aucuns pourraient prendre
ça comme étant une façon de faire de l'obstruction ou encore, M. le Président,
une façon de se mousser dans une campagne à la chefferie. Nous
n'embarquerons pas là-dedans.
Un dernier
commentaire, M. le Président, un appel d'offres... c'est-à-dire, le projet de
loi, c'est un projet de loi qui permettrait au ministre de faire des
appels d'offres, mais des appels d'offres, ça se construit, M. le Président,
dans un appel d'offres. Des appels d'offres,
il s'en fait, M. le Président, dans tous les secteurs gouvernementaux, il s'en
fait aux Transports, il s'en fait
dans l'achat d'équipement, il s'en fait dans l'achat de services, et des appels
d'offres, ça n'est pas dans un projet
de loi, ça ne s'écrit pas dans un projet de loi. Et évidemment, là aussi, les
trois groupes parlementaires, M. le
Président, vont tenter de vouloir déposer des amendements qui feraient quelque
chose qui ne se fait pas, et là-dessus, M. le Président, je peux vous
annoncer, là aussi, d'entrée de jeu mon silence.
Alors, voilà
comment se feront les travaux. J'espère qu'ils se feront de façon sereine et
efficace mais qu'ils se feront sur
l'objet du projet de loi, qui, je le répète, M. le Président, en terminant...
projet de loi qui a deux articles opérant dans sa finalité — un appel d'offres sur l'achat de médicaments, un appel d'offres
sur la distribution — un
troisième article qui est purement
administratif, M. le Président. Je vais, à partir de maintenant, évidemment
laisser le public et les journalistes qui
nous écoutent juger de la façon de procéder, dans l'étude détaillée de ce
projet de loi, de la part de nos collègues des oppositions. Merci, M. le
Président.
• (11 h 30) •
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. J'invite maintenant le
porte-parole de l'opposition officielle en matière de services sociaux,
de protection de la jeunesse, de soins à domicile, de santé publique et de
prévention, le collègue de Rosemont, à faire ses remarques préliminaires pour
une période maximale de 20 minutes.
M. Jean-François Lisée
M. Lisée :
Merci, M. le Président. Je tiens à saluer le ministre, à saluer les collègues
parlementaires, le collègue de Lévis,
les membres de la commission, Mme la secrétaire et vous, M. le Président, et
faire quelques remarques préliminaires.
D'abord, je
suis très heureux d'être porte-parole pour les questions de santé publique, les
questions de médicaments pour
l'opposition officielle, le Parti québécois, et ceux qui ont suivi la
commission, que vous avez présidée avec beaucoup de compétence au cours
des derniers mois, savent que, quel que soit le projet proposé, j'ai toujours
défendu la bonne politique publique, la bonne politique publique.
Le ministre
de la Santé nous a fait perdre deux ou trois semaines l'automne dernier en
disant qu'il fallait absolument facturer les frais accessoires, et, avec
ma collègue de Taillon, avec l'appui de la Protectrice du citoyen, de beaucoup d'associations, nous avons tenté de le convaincre
que c'était de la mauvaise politique publique. Il a dit que ça ressemblait
à de l'obstruction, qu'on ne comprenait pas,
qu'on avait des mauvais arguments et il s'est rangé à notre opinion récemment, il s'est rangé à notre opinion.
Alors, nous
pensons apporter ici des arguments solides fondés sur des témoignages que nous
avons entendus, fondés sur des
impératifs de bonne politique publique pour les gens qui nous ont élus, les
gens qui nous ont envoyés ici pour faire ça. Alors, ceux qui ont vu des extraits de mes échanges avec le ministre
dans le passé vont se demander : Mais comment est-ce
que je pourrais en faire plus pour défendre mon point de vue maintenant que je
suis candidat au leadership? La réponse,
c'est : Non, j'en fais toujours autant pour défendre la bonne politique
publique, ni plus ni moins, et je m'engage à bien le faire.
Je suis déçu,
très déçu d'entendre le ministre avoir fait dans sa présentation un exercice de
fermeture d'esprit par rapport
à ce qu'il nous a dit au tout début de nos travaux et je le cite : Nous
savions que ce projet de loi était bref. Il avait tenté de nous le passer rapidement
en le déposant dans un projet de loi antérieur en fin de discussion, pensant que nous
n'y verrions que du feu, et vous aviez, M. le Président, après consultation avec vos juristes, bien vu que sa tentative était
irrecevable, et on vous en remercie, ce qui
fait que ces amendements d'hier sont devenus un projet de loi et qui ont
permis une consultation, une vraie consultation, pas un passage rapide sans débat, et ça, c'est
grâce à vous aussi, M. le Président, grâce
à votre vigilance. Et, au début de nos travaux, et je le cite, le ministre
disait : «La commission
parlementaire, j'ose
espérer[...], va nous permettre de faire une certaine lumière [...] de nous
donner des indications sur d'éventuels ajustements que nous pourrions apporter à notre projet de loi...» Ah! bien oui, des éventuels ajustements, c'est pour ça qu'on a entendu tous ces gens qui sont venus nous
dire qu'il y avait des ajustements à faire sur les deux articles opérationnels, sur un en particulier et qui sont
venus nous dire : Bien, il y a plein d'autres ajustements à faire, parce que,
les déterminants du coût prohibitif des médicaments au Québec, il y a un
outil qui peut être les appels d'offres, mais il
y a des tas d'autres outils qui
pourraient être mis en oeuvre immédiatement pour atteindre l'objectif visé par le
ministre et l'intitulé du projet de loi, c'est-à-dire faire en sorte que
le coût du médicament soit moindre.
Et j'ai
entendu le ministre poser des questions très sensées fondées sur le réel à tous les gens
qui sont venus nous parler, y compris
sur d'autres éléments que ceux qui sont dans le projet de loi, et donc on a pu
penser, je le vois aujourd'hui à tort, que le
ministre était à la recherche de plusieurs leviers pour le bien public. Et plusieurs
leviers lui ont été proposés par
l'Ordre des pharmaciens, par plusieurs groupes, également par un organisme solide, indépendant, précieux
qui s'appelle le bureau du
Commissaire à la santé. Le Commissaire à la santé, dans sa dernière prestation
publique en carrière et en carrière
de son institution, est venu proposer au ministre des éléments que
nous proposerons dans nos amendements. Et, vous
savez ce dont je parle, le ministre a aboli la fonction du Commissaire à la
santé. Il n'existe plus, il ne reviendra plus nous dire que le ministre
est sur le mauvais chemin, il ne pourra plus nous dire si le ministre erre. Il
a disparu comme l'association des directeurs
d'établissement, qui n'existe plus, comme l'association des
directeurs de centre jeunesse, qui n'existe plus parce que le ministre
les a abolies. Alors, ce qui reste, c'est l'opposition officielle, c'est la
deuxième opposition, c'est la troisième
opposition, et, dans ses remarques
préliminaires, le ministre a montré tout de suite une certaine impatience à
l'idée qu'on ait l'outrecuidance de proposer des amendements à son projet de loi parfait, finalement, il est parfait.
Au début de
nos consultations, il se montrait ouvert à des ajustements, il a invité
tous ces gens-là. Encore une fois, on a
mal présumé, M. le Président, que, s'il les invitait, c'était pour les
écouter, pour les entendre et pour améliorer son projet de loi. Mais on apprend
avec stupeur ce matin que, comme les deux semaines que nous avions perdues sur
les frais accessoires, bien, on a
perdu notre temps dans ces consultations, parce
que le ministre nous revient avec un projet de loi inchangé, inchangé. C'est quand même extraordinaire. Tu sais, c'est comme la politique de ce gouvernement en éducation,
là, les deux dernières années sont
disparues, rien de ce qui a été fait en deux ans n'est maintenant
appuyé par le ministre de
l'Éducation actuel. C'est deux ans qu'on a perdus puis qui ne reviendront plus jamais,
là, M. le Président. On les a perdues pour toujours,
ces deux années-là, là. C'est comme à la fin de la deuxième saison de Dallas,
quand Bobby se réveille dans la
douche et que toute l'année précédente avait été inventée dans sa tête, hein?
Vous vous souvenez de ça, oui. C'était inacceptable
de faire en sorte de faire disparaître un an de la vie de tous les
téléspectateurs qui avaient fait confiance au scénariste. Bien là, aujourd'hui, le scénariste nous dit : Bien, finalement,
avoir fait venir toutes ces associations, tous ces groupes, tous ces experts, j'ai perdu votre temps.
Soit c'est ça soit il dit : Vous n'avez rien dit d'intéressant, vous n'avez rien dit d'intelligent,
je savais tout avant, je vous ai fait la gentillesse de vous inviter puis de
vous écouter, mais je sais toujours tout aujourd'hui, puis il n'y a rien
qu'on va changer.
Alors, pour
citer le ministre dans une phrase très sage qu'il a prononcée tout à l'heure,
je vais laisser le public juger. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup.
Maintenant, pour ses remarques préliminaires, j'invite notre collègue de Lévis et porte-parole du deuxième
groupe d'opposition à faire ses remarques préliminaires pour une durée
maximale de 20 minutes.
M. François Paradis
M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le
Président. Salutations à tous les collègues, le ministre, les collègues de
l'opposition officielle, autres collègues. Elles seront brèves.
Il y a des
questions bien simples dans ce document-ci, et, systématiquement, la nature
économique et la valeur économique de ce dont on aura à discuter puis
son application, bien sûr, je pense qu'on est tous à peu près d'accord. Et j'écoutais les collègues dans leurs discours
concernant l'adoption de principe : Est-ce qu'on paie les médicaments trop
cher? Je pense qu'à cette question-là on
peut communément répondre oui. Est-ce qu'on peut faire mieux? Je pense qu'on
peut dire également oui. Est-ce que les
méthodes et les façons qui sont proposées peuvent mener à cela? Oui. Est-ce
qu'elles sont les meilleures? On en jugera à travers les amendements et
ceux que nous proposerons également.
Oui,
il est vrai cependant... et je dois dire qu'il est vrai qu'à travers tous ceux
qui sont venus ici nous rencontrer d'autres
éléments ont été mis en place. Dans le contexte même de ce projet de loi là, il
y a des choses sur lesquelles on devra
discuter, les craintes qui ont été exprimées sur des ruptures potentielles, sur
la façon dont se fera la distribution, sur la façon dont se concevront également ces
appels d'offres, et là est la base même, la fondation même de l'exercice,
et là-dessus aussi on aura à intervenir
également. Mais, globalement, tous ceux qui sont venus en commission
parlementaire, en auditions sont
venus nous dire qu'il y a moyen de faire quelque chose, ne serait-ce qu'au
chapitre économique de la chose, et,
en ce sens-là, à travers les très brefs articles du projet de loi, nous aurons
également à discuter, à se faire rassurer, à faire en sorte que les patients soient rassurés, que l'on puisse atteindre
l'objectif souhaité et on demandera également des précisions au ministre et on ira également de
quelques propositions qui feront l'objet de discussions qui seront
constructives, j'en suis sûr.
J'entends
le collègue qui dit que d'autres choses ont été dites — c'est un fait aussi, personne ici ne peut
dire ne pas les avoir entendues — des mesures qui permettraient également
d'agir sur cette méga-industrie des médicaments, notamment sur la problématique des prescriptions, sur le rôle du
pharmacien, sur le rôle du médecin, sur la consommation générale de
médicaments, sur la contribution clinique de ceux qui y travaillent. Bon,
écoutez, nous serons attentifs, évidemment,
à ce qui sera dit et aux discussions qui seront faites, mais je vous dirai, M.
le Président, que nous serons aussi extrêmement
actifs dans l'application même et dans la bonification des articles sur le plan
économique, permettant de faire en
sorte que collectivement on puisse globalement payer moins cher pour nos
médicaments au Québec et, a priori et
par conclusion, faire en sorte que ces économies-là puissent aussi servir à des
investissements extrêmement importants dans bien des sphères de services
auprès des citoyens, notamment, et j'en ai en tête, à travers le domaine de la
santé.
Bref,
je dis simplement que nous entamons cette étude article par article avec
énormément d'ouverture, avec des questionnements, avec en toile de fond,
évidemment, cette inquiétude et cette vision qu'ont les intervenants dans ce domaine-là d'avoir une politique plus globale mais
en comprenant fort bien également qu'il y a des notions économiques qui devront être réglées, que dans les faits le
but de l'exercice est de faire que les Québécois paient moins cher et soient
mieux servis, et c'est en ce sens-là que nous irons de certains amendements qui
seront présentés en cours de travaux, M. le Président. Merci.
• (11 h 40) •
Le Président (M.
Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, y a-t-il d'autres collègues qui
désireraient faire des remarques préliminaires? Je n'en vois pas, alors... Oui,
collègue de Mercier? Non? Merci beaucoup.
Étude détaillée
Alors,
s'il n'y a pas de motion préliminaire, nous allons immédiatement débuter
l'étude article par article, et j'invite donc le ministre à nous faire
la lecture de l'article premier.
M. Barrette :
Alors, M. le Président, donc, article 1, très simple :
1.
La Loi sur l'assurance maladie (chapitre A-29.01) est modifiée par l'insertion,
après l'article 60, des suivants :
«60.0.0.1.
Aux fins de l'inscription à la liste des médicaments, le ministre peut recourir
à une procédure d'appel d'offres afin de conclure avec un fabricant
reconnu un contrat établissant le prix et les conditions d'inscription d'un médicament ou d'une fourniture. Le médicament ou
la fourniture faisant l'objet d'un tel contrat est inscrit à la liste et tout
autre médicament ou toute autre fourniture visée par l'appel d'offres en est
exclu. Toutefois, le ministre peut, le cas échéant, inclure à la liste
le médicament d'origine, lequel est inscrit comme un médicament d'exception.
«60.0.0.2...»
Est-ce que je le lis,
tout l'article, au complet, là? Oui?
Le Président (M.
Tanguay) : Oui, oui.
M.
Barrette : D'accord. «Aux fins de l'approvisionnement des pharmaciens
propriétaires à l'égard d'un médicament
ou d'une fourniture faisant l'objet d'un contrat visé à l'article [60.0.1], le
ministre peut recourir à une procédure d'appel
d'offres afin de conclure avec un grossiste reconnu un contrat prévoyant les
conditions de cet approvisionnement et
la marge bénéficiaire. Un tel contrat accorde au grossiste, à l'égard de ce
médicament ou de cette fourniture, l'exclusivité de l'approvisionnement
des pharmaciens propriétaires, lesquels ne peuvent s'approvisionner qu'auprès
de lui.
«[60.0.3.]
Un appel d'offres visé aux articles 60.0.0.1 et 60.0.0.2 est effectué selon les
conditions et modalités que détermine le ministre par règlement.»
Alors,
M. le Président, compte tenu de mes commentaires introductifs, je pense que
tous les gens auront compris la nature de cet article.
Le Président (M.
Tanguay) : Merci beaucoup. Y a-t-il des interventions? Collègue de
Rosemont.
M.
Lisée : Oui, M. le Président. Je vais déposer un amendement et
ainsi je veux démontrer aux collègues et au ministre que notre objectif, c'est d'avoir un bon projet de loi. Si le
ministre est complètement fermé à toute amélioration, il peut dire non rapidement, et on passera à autre
chose, parce qu'on n'a pas de temps à perdre avec de la fermeture d'esprit,
mais je veux l'aviser tout de suite que nous
avons six amendements, nous en avons six — nous n'en avons pas 1 000, on n'en a pas 100, on en a six — et que, s'il veut démontrer de l'ouverture
d'esprit, il sache qu'à chacun de ces amendements on peut faire un vrai bon débat de fond. On est
prêts à discuter avec lui, à les modifier, à les bonifier comme on l'a fait
dans les projets de loi antérieurs. Et notre
objectif ici, ce n'est pas de passer trois semaines sur ce projet de loi de
trois articles. Ça peut se régler en quelques jours.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci. Alors, oui, donc je vous inviterai...
et je vais permettre les échanges, mais, avant de le lire, je suspendrai. Mais faisons cet échange. Et, avant que
vous le lisiez, je suspendrai, le temps de donner des copies de cet
amendement-là. M. le ministre.
M.
Barrette : Alors, M. le Président, puisque le député de Rosemont veut
travailler avec efficacité, pour une fois, pour une fois, parce que ça
n'a pas été le cas à aucun moment dans les projets de loi que nous avons
étudiés à cette Commission sur la santé et
les services sociaux... Pas une seule fois l'opposition officielle, et
particulièrement le député de Rosemont,
n'a accepté de déposer à l'avance ses amendements. Là, il nous dit quoi? Il
nous dit qu'il y en a six et il nous dit que, M. le Président, il
voudrait travailler avec efficacité et il recherche l'ouverture.
Ma réponse
est simple : L'efficacité viendrait évidemment par le dépôt en liasse de ces amendements.
Il y en a six. Ça ne doit pas être
compliqué, M. le Président, de les déposer tout de suite. Ça
simplifierait les débats. Alors, va-t-il le faire? Je lui demande avec
tous les égards possibles.
Deuxièmement, toujours le même commentaire, on l'a entendu, M. le Président, dans les remarques du député
de
Rosemont. Je vais faire, moi, une réplique à son
commentaire. Quand, là, moi, là, je vais faire une offre sur une maison,
O.K. — j'ai hâte de voir les amendements — ça n'inclut pas l'auto qui est dans le
garage ni les vêtements qui sont dans la garde-robe. Alors, quand je fais une offre d'achat sur une maison, c'est
une offre d'achat sur une maison, et ça n'inclut pas l'auto dans le
garage, ni les vêtements dans les garde-robes, ni la vaisselle dans les
tiroirs.
Alors, j'ai
hâte de voir, M. le Président, quelle va être la nature des amendements, les
six amendements, si le député de Rosemont, par respect ou par intention
d'avoir des travaux efficaces, nous les dépose en bloc.
Le Président (M. Tanguay) : Merci.
Alors, collègue de Rosemont. Et, pendant ce temps, votre amendement premier se
distribue. Mais sur l'échange, collègue de Rosemont.
M. Lisée : Bien sûr. Pour des
fins d'efficacité, je vais être très bref, parce que je ne veux pas perdre ni votre
temps ni le temps du ministre.
La tradition parlementaire ici, celle qui a été très
bien défendue par l'actuel leader parlementaire du gouvernement lorsqu'il
était dans l'opposition, c'est que les oppositions, qu'elles soient
libérales, péquistes, ou adéquistes, ou caquistes, ne déposent pas en liasse leurs amendements
au début de l'examen article par
article, et je vais être fidèle à
cette tradition parlementaire, qui n'est pas un manque de respect, à moins que
le ministre considère que son parti ait manqué de respect
au gouvernement précédent. Alors, si on peut passer, de façon efficace, à l'amendement,
je pourrais le lire.
Le Président (M. Tanguay) : Alors,
juste pour clore cet aspect du débat.
M.
Barrette : Pour clore là-dessus,
M. le Président. Ce n'est pas une question de tradition parlementaire, c'est un choix. Le député de Rosemont a le choix de les déposer
en liasse et il vient de nous dire qu'il vise l'efficacité.
C'est la
troisième fois, si j'ai bien compté, là, qu'il fait référence à la perte de
temps. Il sait évidemment très
bien, intellectuellement que les amendements,
s'ils étaient déposés en liasse, nous permettraient d'avoir une vue d'ensemble
sur sa pensée, là où il veut aller. Il
choisit — c'est un choix — il choisit de ne pas les déposer. Ce n'est
pas une question de tradition, c'est
une question de choix. Alors, c'est un jeu de chat et de la souris. Ça, c'est
la tradition parlementaire et ce
n'est pas un manque de respect. Alors, il n'y a aucun problème, M. le Président,
à ce que le député de Rosemont garde sa tradition, qui n'est pas quelque
chose qui est inscrit nulle part, c'est son choix.
Je rappelle au député de Rosemont que, sur le
plan purement intellectuel, le fait, évidemment, d'avoir les amendements à la case départ nous permettrait
évidemment, un, de voir une vue d'ensemble sur la direction que veut prendre
l'opposition et, à nous, évidemment, de faire des travaux avec les avocats, nos
équipes pour voir si on peut répondre rapidement
et apporter des ajustements, même avoir des conversations, M. le Président,
hors commission, hors d'ondes. C'est
ça, l'efficacité. Mais, évidemment, le député de Rosemont dit une chose, en
fait une autre, mais on est habitués. Ça,
ce n'est pas une tradition parlementaire, c'est une tradition péquiste et
particulièrement une tradition, une habitude du député de Rosemont, qui a l'habitude d'avoir un très beau discours,
mais à la fin il ne fait pas ce qu'il annonce, mais il l'enrobe toujours très bien. Je l'ai souvent
noté, d'ailleurs, et je l'en ai félicité et je l'en félicite encore, ses
capacités oratoires sont excellentes,
mais, de temps en temps, il faut quelqu'un en face pour lever le voile sur la nature réelle de ses
propos.
Le
Président (M. Tanguay) :
Chers collègues, si vous voulez, on va poursuivre l'échange, et je n'ai pas de
problème là-dessus, mais je vous invite à la prudence, de part et
d'autre, de ne pas se prêter d'intentions ou — c'est en vertu de l'article 35 de notre règlement — de tenir l'un envers l'autre des propos
blessants. Et, je réitère ce que je vous ai déjà dit, lorsque l'on qualifie le comportement d'un
collègue, bien, on s'avance sur un terrain très glissant. Alors, moi, je n'ai
pas de problème.
Nous sommes
sur les 20 minutes de l'article 1. Si vous le désirez, soit passez à votre
amendement ou moi, je vais permettre
l'échange. Comme vous le désirez.
M. Lisée : Alors donc, c'est mon choix, tout simplement. Et il y a un autre cinq minutes, là, qu'on a perdu pour
toujours, hein, avec les remarques du ministre. Alors, moi, je voudrais procéder à faire de la politique
publique pour le bien de nos électeurs et j'aimerais pouvoir lire l'amendement.
• (11 h 50) •
Le
Président (M. Tanguay) : Oui. Alors, il est distribué. Je vous invite
à le lire et par la suite à l'expliquer.
M.
Lisée : Alors, article
1 : Modifier l'article 1 du projet de loi par l'ajout, à
la fin du deuxième alinéa, des mots suivants :
«Le ministre peut recourir à une procédure d'appel d'offres
uniquement après qu'ait été obtenue une dérogation du Conseil du trésor
afin de permettre l'octroi du contrat à plus d'un fabricant.» Fin de citation.
Alors, je vous fais
mon commentaire. L'objectif est d'assurer que les impacts d'une éventuelle
rupture d'approvisionnement puissent être atténués. Sinon, il faudrait modifier
la Loi sur les contrats des organismes publics, chapitre C-65.1, et je crains
que notre amendement...
Une voix :
...
M.
Lisée : O.K. Et
je crains que, si nous n'adoptons pas notre amendement, en fait, il y aura
un problème légal avec la proposition du ministre. Donc, c'est un amendement pour permettre au ministre
de ne pas se faire avoir par la Loi sur les contrats des organismes publics et lui permettre... À chaque fois
qu'il veut faire un appel d'offres, puisque nous sommes d'accord avec ce principe, il devra, selon notre
lecture de l'état du droit québécois en ce moment, avoir une dérogation du
Conseil du trésor. Alors, aussi bien le mettre dans la loi.
Le Président (M.
Tanguay) : M. le ministre, sur l'amendement.
M.
Barrette : Alors, M. le Président, alors je note et je retiens avec joie que le député
de Rosemont vient de nous dire — et il l'avait dit hier — et il vient de répéter qu'il est d'accord
avec le levier qui est proposé ici, qui est celui de l'appel d'offres. Déjà là, d'avoir cette prise de
position là, ça montre que les parlementaires peuvent travailler dans l'intérêt
public. Alors, retenons que le député de
Rosemont vient de nous dire qu'il était d'accord avec le principe de notre
projet de loi, la finalité du projet de loi, ce qui est très bien, je
l'en remercie.
Maintenant,
M. le Président, bien que je souscrive évidemment aux fondements qu'il nous a exprimés
quant à la sécurité de l'approvisionnement, je vais simplement lui
indiquer que nous n'avons pas besoin légalement... et là je soumettrais au député de Rosemont, M. le
Président, que sa lecture de la loi actuelle est peut-être quelque peu, et je
le dis avec égard, imprécise. Alors,
la réalité, M. le Président, c'est que nous n'avons pas besoin d'avoir cette
dérogation-là, parce que la
dérogation serait nécessaire si nous faisions des appels d'offres dans un cadre
où nous étions les acheteurs.
Alors,
la loi sur les appels d'offres auxquels a fait référence le député de Rosemont,
c'est une loi qui vise la situation où
l'État, lui, est un acheteur. Or, ce projet de loi là n'est pas un projet de
loi où le gouvernement achète, mais vient fixer les prix, et, conséquemment, sur le plan légal, nous n'avons pas
simplement besoin d'avoir cette dérogation-là pour arriver à la finalité que vise le député de Rosemont. Pour
arriver à la finalité que vise le député de Rosemont, il faut simplement
faire en sorte que l'appel d'offres soit
construit d'une telle manière qu'on prenne cet élément-là en considération. Et
ça, c'est totalement sans égard à la
Loi sur les appels d'offres du gouvernement, de l'État lorsqu'il est
l'acheteur. Ici, on n'est pas
l'acheteur, on fait un appel d'offres pour aller fixer les prix et, dans
l'appel d'offres, on peut avoir toutes sortes de modalités qu'on n'écrira pas dans la loi, évidemment, qui vont pouvoir
prévoir éventuellement... prendre en considération, plutôt, la
problématique de la sécurité de l'approvisionnement.
Le Président (M.
Tanguay) : Collègue de Rosemont.
M.
Lisée : Oui. Je comprends la distinction que fait le ministre
entre l'État acheteur et l'État... disons, l'État policier...
M. Barrette :
...
M.
Lisée : ...enfin, l'État régulateur. Merci, M. le ministre. Je
comprends cette différence. Tout de même, il nous semble qu'il y a une vulnérabilité juridique. Le
sous-ministre Michel Fontaine avait d'ailleurs parlé en ce sens lors de l'étude du rapport du Vérificateur général sur
l'approvisionnement en médicaments des hôpitaux. Dans ce cas-là, c'était
l'État. Et il avait souligné l'importance de cette dérogation à chaque fois.
Maintenant, si le
ministre ne souhaite pas cet amendement, je n'en discuterai pas plus
longuement.
Une voix :
Merci. M. le ministre.
M.
Barrette : M. le Président, encore une fois, je le répète, là, je
souscris à l'importance de s'assurer que l'appel d'offres soit construit
d'une telle manière, rédigé d'une telle manière qu'on prenne en considération
la sécurité de l'approvisionnement, mais je
répète que la Loi sur les contrats des organismes publics, les achats, les
appels d'offres ne s'applique pas ici. Et ce n'est pas parce que je suis
contre l'amendement, c'est parce que cet amendement n'a pas de champ
d'application dans le cadre de la loi sur les achats des organismes publics,
tout simplement.
Le
Président (M. Tanguay) : Alors, collègues, y a-t-il d'autres
interventions sur l'amendement? S'il n'y a pas d'autre intervention, chers collègues, nous allons procéder au vote sur
ledit amendement. Alors, l'amendement est-il adopté?
Une voix :
...
M. Barrette : Rejeté.
Le
Président (M. Tanguay) : Rejeté. L'amendement est rejeté. Alors,
l'objet du débat redevient l'article 1 dans son ensemble. Y a-t-il
d'autres interventions? Peut-être par souci d'alternance, collègue de Mercier.
M. Khadir : Merci, M. le Président. J'aurai
moi-même un amendement à présenter à l'article 1 qui est... Je ne
sais pas si tout le monde l'a reçu.
Le Président (M. Tanguay) : ...on ne
l'a pas encore distribué. Il n'a pas été distribué.
Alors, je suspends une minute.
(Suspension de la séance à 11 h 56)
(Reprise à 11 h 58)
Le
Président (M. Tanguay) : Alors, nous sommes de retour, et pour la
présentation, la lecture et l'explication de son amendement je cède la
parole au collègue de Mercier.
M. Khadir : Merci, M. le Président. Les
collègues savent que nous sommes très en faveur de l'esprit de cette loi,
que nous avons voté en faveur de son
principe. Hier, je me suis exprimé pendant de longues minutes sur l'importance
d'être le plus complets possible, maintenant
qu'on y est, de s'assurer qu'on se donne les meilleurs moyens, donc de doter
la loi de toutes les possibilités et recours pour assurer de meilleurs prix.
Donc, mon amendement vise à renforcer les
capacités de la loi. Donc, à l'article 1, je voudrais modifier l'article 60.0.0.2 par l'insertion, à la suite du
paragraphe original de l'article, de la phrase suivante — donc, on ajouterait la phrase : «Les grossistes reconnus
coupables d'infractions liées aux gonflements frauduleux du prix des médicaments
commises au Canada ou d'infractions
semblables commises à l'étranger ou ayant plaidé coupables à un certain nombre
de ces infractions seront exclus du
processus d'appels d'offres pendant 10 ans, même en cas d'absolution
conditionnelle ou inconditionnelle.»
• (12 heures) •
Le Président (M. Tanguay) : Alors, s'il
n'y a pas d'autre explication, nous allons ouvrir le débat.
M. Khadir : ...que nous ne sommes pas au Québec les seuls à avoir un certain nombre de problèmes
avec le prix des médicaments. Cependant,
aux États-Unis, à cause du False Claims Act, le gouvernement américain, l'État fédéral possède
un recours très, très puissant et efficace pour, disons, s'assurer que
les médicaments sont offerts au meilleur prix, et il est avéré depuis de
nombreuses années, je l'ai mentionné à plusieurs reprises dans certaines
interventions, que l'industrie des médicaments est parmi les secteurs
industriels les plus souvent condamnés, incriminés dans des pratiques de fausse représentation, de fausse facturation.
Je vous donne un exemple : en 2011, sur 9 milliards d'amende
obtenus en cour contre l'ensemble des
secteurs d'activité économique, plus de la moitié concernaient le
secteur pharmaceutique, et, parmi les
entreprises ayant été incriminées dans toutes sortes de
pratiques de contrôle des coûts, de fausse facturation, de ristourne, toutes sortes de pratiques qui, aux États-Unis,
sont illégales, on a en cause les grossistes... pas seulement les fabricants, des grossistes.
Donc, notre amendement
cherche à doter le ministère de la capacité de prémunir le processus d'octroi
de contrats publics contre la
grande... je dirais, la grande expérience et la grande capacité de plusieurs de
ces grossistes-là à manipuler le
marché et à contrôler l'offre dans le marché à leur avantage. Ça, ça veut dire également
que, dans le fond, le problème qui existe souvent au Québec, au Canada comme aux États-Unis, c'est que, malgré
toutes les dispositions législatives
et les règlements, il y a une
pression dans le type, je dirais, de culture d'affaires qui existe au sein de
l'industrie pharmaceutique, qui cherche tout le temps à contourner les
processus, gonfler ses prix, maintenir des prix élevés. Et donc on envoie le
message.
Le
gouvernement actuel a parlé, à plusieurs reprises, de sa détermination
d'envoyer les bons messages, d'être très, très actif dans la lutte à la corruption, dans la lutte à tout ce qui
est contrôle des coûts par la collusion dans l'octroi des contrats publics. Or, la RAMQ achète... en fait,
paie, bon an, mal an, quelque chose alentour de 3 milliards de dollars en
médicaments. C'est un gros poste budgétaire
en termes d'octroi de contrats dans les négociations qui vont se faire alentour
des médicaments. Il est très important qu'on
envoie les bons messages. C'est un secteur qui intéresse beaucoup, beaucoup
de gens, et, malheureusement, bon, quand il
y a beaucoup d'argent en jeu, parfois ça pousse ces secteurs industriels là à
contourner les lois.
Donc, c'est
un message clair pour que le secteur pharmaceutique cesse de jouer avec le feu,
et nous prenne au sérieux, et comprenne notre détermination à obtenir
les meilleurs prix pour le public québécois.
Le Président (M. Tanguay) : M. le
ministre.
M.
Barrette : M. le Président, je comprends évidemment la finalité qui
est visée par notre collègue de Mercier. Bon, déjà en partant, là, puis là ce n'est pas un jugement sur la valeur
de l'amendement, c'est un jugement, là... ou un commentaire, plutôt, M. le Président, sur l'applicabilité de cet
article-là, parce que, là, on parle de poser un geste sur la base d'infractions «commises à l'étranger ou ayant
plaidé coupables à un certain nombre de ces infractions», et ainsi de suite, je dois dire, M. le Président, que je ne
suis pas sûr qu'on puisse appliquer ça. Avoir accès à l'information, ça pose
un certain nombre de
problèmes, là. Il faut avoir certaines informations, puis là on implique des
informations sur des actions, des décisions ou des gestes posés à
l'extérieur de notre juridiction. Alors, ça, ça pose un certain problème en
soi.
L'autre élément que ça pose comme problème — et on fait un débat, là, alors je suis bien
disposé à avoir cette discussion-là
pendant un certain temps, évidemment — l'autre problème, c'est que le député de
Rosemont, tout à l'heure, et, je suis
sûr, bientôt le député de Lévis et sans aucun doute le député de Mercier, va
invoquer la nécessité de s'assurer de
mettre en place des mesures ou faire des appels d'offres qui garantissent la
disponibilité. Bon. Qu'est-ce qu'on fait si, à un moment donné, il y a deux distributeurs, par exemple, au Québec
qui... Mettons qu'on prend un cas de
figure là, il y a deux grossistes au Québec, mettons, et que les
deux ont été coupables. Qu'est-ce que je fais, là? Ça veut dire qu'au bout il
n'y aura plus de distribution au Québec?
Je
comprends la finalité, là, je comprends l'impact, l'objectif qu'on vise ici,
évidemment. Comme le député de Mercier
l'a dit avec justesse, c'est clair, là, qu'à quelque part il y a quelqu'un, là,
qui met de l'argent dans ses poches, qui
ne devrait pas le faire. Il en met trop. Il n'y a pas de doute là-dessus, là,
il n'y a aucun doute. Le message qu'on envoie, là, c'est qu'actuellement, bien, il y a une correction à apporter. Je
n'ai entendu personne, là, spontanément venir me faire des propositions réelles sur un document, là, qui
étaient substantiellement significatives. Tout le monde se cherche un moyen de passer à côté de ça. C'est plate, là,
mais cette étude détaillée là, elle est là pour que ça arrive, cet appel
d'offres là, à moins que quelqu'un en
quelque part me montre qu'il y a d'autres solutions, mais d'autres solutions
dans le cadre d'appels d'offres, là, d'achats, là, pas de politique du
médicament, là. On parle ici d'achat de médicaments.
Alors,
ici, on a une proposition qui pourrait mettre notre réseau en péril, d'une
part. D'autre part, M. le Président, nous sommes en train de faire
quelques vérifications. Pendant que le député de Mercier nous faisait la lecture
de son amendement... Nous sommes en train
maintenant de faire quelques vérifications, si ce genre d'éléments là ne sont
pas déjà prévus, par exemple, à
l'Autorité des marchés financiers, et ainsi de suite, pour ne pas évidemment
entrer en conflit sur le plan législatif et réglementaire avec d'autres
dispositions.
Alors,
à cette étape-ci, je n'ai pas de commentaire supplémentaire à faire. Peut-être
que le député de Mercier pourrait nous
dire, lui, s'il ne voit pas aussi des risques et/ou difficultés quant à la
nécessité d'avoir accès à des informations qui ne sont pas sur notre
territoire, là.
Le
Président (M. Tanguay) : Alors, je vais permettre au collègue de
Mercier de poursuivre l'échange, et par la suite le collègue de Rosemont
voudra s'inscrire dans ce débat-là. Alors, collègue de Mercier.
M.
Khadir : Je signale à mes collègues qu'il s'agit des grossistes
et non des fabricants. Donc, même si on a affaire à deux grossistes qui contrôlent ce marché-là, il
n'y a rien qui empêche, pour un médicament donné, il n'y a rien qui empêche
le ministère de passer par-dessus la tête
des grossistes et de faire affaire directement avec les fabricants. Plusieurs
législations le font. Donc, je ne
pense pas que mettre, disons, à l'écart quelques grossistes ou deux grossistes
qui fournissent un même médicament sur le territoire québécois mette en
cause l'approvisionnement ou l'accessibilité du médicament.
Cependant,
on peut toujours introduire une modification à mon amendement qui serait un
sous-amendement qui pourrait le
rendre conditionnel, à moins, par exemple... Je donne un exemple, là. Je ne
veux pas l'introduire tout de suite, là. Par exemple, ça pourrait dire : On maintient ça, à moins que
l'exclusion mette en cause l'approvisionnement, la sécurité de
l'approvisionnement pour la population québécoise.
L'autre
élément que je voudrais mentionner, c'est que ça s'inspire, en fait, des
différentes dispositions qui existent actuellement à l'Autorité des
marchés financiers. Mais la période d'exclusion est un peu plus longue, celle
qu'on a introduite ici, mais ça peut se
négocier. Donc, je demande là la collaboration de la présidence pour
savoir : Si on a besoin de vérifications, est-ce qu'on peut
suspendre l'examen de mon amendement jusqu'à ce qu'on ait obtenu les, disons,
vérifications nécessaires, à savoir la compatibilité de mon amendement avec les
renseignements demandés?
Finalement, pour
terminer, pour ce qui est des juridictions à l'étranger, c'est tout un débat
maintenant dans l'ensemble des questionnements
qui sont devant nous, qui sont devant les autorités publiques, que ça soit au
Québec, au Canada ou dans d'autres
pays, sur les moyens d'éviter l'évasion fiscale ou les pratiques fiscales
frauduleuses. On est devant les mêmes
phénomènes. C'est-à-dire comment se doter de lois qui fassent en sorte que le
comportement d'une entreprise soit
tenu compte dans son ensemble? Parce que c'est la même question sur, par
exemple, les profits d'une entreprise quand les entreprises géantes
déclarent quelques milliers de dollars de profit.
Là,
l'exemple ne me vient pas immédiatement à l'esprit, mais je pense qu'il
s'agissait de Google ou d'Amazon qui,
de manière ridicule, en Grande-Bretagne, ne déclaraient que quelques dizaines
de milliers de dollars de profit, alors qu'ils font des centaines de millions, sinon des milliards de profit sur
un territoire aussi grand que la Grande-Bretagne. Pourquoi? Parce que
l'entreprise a réussi à compartimenter toutes ses activités et, dans des
opérations, réussit donc à éloigner du
regard public et de la possibilité de les imposer une partie de ses profits, et là on est justement
en train d'essayer de trouver les moyens d'éviter de se laisser
embobiner par ça.
Alors,
si les infractions, parce que les infractions dans le contrôle du prix des
médicaments peuvent très bien se produire aux États-Unis, mais directement
affecter...
• (12 h 10) •
Une voix :
...
M. Khadir :
Vous voulez que je termine?
Le Président (M.
Tanguay) : Non, non, non.
M. Khadir : Très bien. Elles peuvent directement affecter le marché québécois parce que c'est dans
la manière dont telle entreprise vend, par exemple, le brevet sur son
médicament et les prix qui sont payables à ce brevet-là au Delaware qui affecte le prix pratiqué ici, et, si
c'est condamné aux États-Unis, on dirait que, bien non, ça ne nous concerne
pas parce que c'est une infraction enregistrée aux États-Unis.
Moi,
je pense qu'il faut surmonter ça, il faut trouver les moyens et moi, je suis
sûr que le gouvernement dispose du
contentieux judiciaire, juridique pour l'aider... je m'excuse, le contentieux
juridique nécessaire pour l'aider à formuler quelque chose qui fasse en sorte que le message soit clair, qu'on ne
prendra plus jamais ces choses-là à la légère comme on l'a trop longtemps fait, et, quand une
entreprise se rend coupable de contournement des règles en vigueur aux
États-Unis, chez nos voisins ou en
Europe, bien, ils en seront tenus responsables ici à chaque fois que ça nous
concerne et affecte nos contrats.
Le Président (M.
Tanguay) : Merci. M. le ministre.
M. Barrette :
M. le Président, je l'ai dit et je vais le redire, je comprends très bien la
portée, la pensée du député de Rosemont et la portée de son article.
Je
suggère, si nos collègues sont d'accord, que nous prenions ça en délibéré. Je
comprends très bien là où on veut aller.
Pour moi, là, le principe qui est exprimé par l'amendement, je suis bien
confortable avec ça. On a une problématique, je l'ai dit dans les remarques introductives, M. le Président, on a un
enjeu à l'achat et on a un enjeu dans la distribution parce qu'il y a des liens commerciaux qui viennent
augmenter le prix du médicament de façon substantielle et, manifestement, l'industrie ne s'autorégule pas, et
nous, comme payeurs, en faisons les frais. Alors, si l'industrie ne peut
pas se réguler et nous l'a démontré, bien, peut-être qu'il faut avoir des
règles. Le projet de loi vise ça.
Et je comprends, le
député de Mercier veut avoir des garde-fous supplémentaires que je comprends.
Alors, je propose donc au député de Mercier,
si les collègues sont d'accord, de le prendre en délibéré pour, comme il l'a
dit, avoir une réflexion avec notre contentieux pour faire le lien entre
toutes les lois et règlements qui existent en cette matière.
Le
Président (M. Tanguay) : Juste avant de vérifier s'il y a consentement
pour suspendre l'étude de l'amendement du collègue de Mercier,
j'aimerais savoir si le collègue de Rosemont veut s'inscrire dans le débat.
Oui?
M.
Lisée : Oui. Simplement pour dire que nous appuyons
l'amendement déposé par le collègue de Mercier, nous sommes d'accord
pour la suspension aussi.
Simplement
indiquer que, dans le cadre de la loi n° 1 qui a été adoptée par notre
gouvernement pour faire en sorte que,
dans les appels d'offres gouvernementaux, y compris municipaux, les commissions
scolaires, etc., elles soient soumises à
une obligation d'obtention d'un certificat de bonne conduite de l'Autorité des
marchés financiers... et il était prévu qu'une entreprise étrangère qui faisait des appels d'offres, qui participait à
un appel d'offres au Québec devait aussi démontrer par les mêmes critères que ceux assujettis aux
entreprises québécoises qu'elle n'était pas associée à des personnes qui
avaient commis des infractions ou qu'elle n'avait pas elle-même commis des
infractions au Québec ou à l'étranger. Et donc cette démonstration
devait être faite.
Donc,
l'AMF est déjà en mesure de faire ces vérifications lorsqu'elles peuvent être
faites, et cette idée est déjà présente dans notre corps législatif
depuis l'adoption à l'unanimité de la loi n° 1 présentée par le Parti
québécois.
Le Président (M.
Tanguay) : Merci beaucoup. M. le ministre.
M.
Barrette : ...ou d'observer une convergence sur la date du référendum,
je comprends qu'il y a une convergence sur
notre projet de loi, alors je suis bien content de le constater. Alors, j'imagine
qu'il y aura consentement à prendre la chose en délibéré.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci. Alors, chers collègues, je comprends
qu'il y a... et je vous pose formellement la question : Y a-t-il
consentement pour suspendre le débat sur l'amendement du collègue de Mercier?
Des voix :
Consentement.
Le Président (M.
Tanguay) : Consentement. Alors, il y a le consentement.
Collègues, l'objet du
débat redevient donc l'article 1. Y a-t-il des interventions. Collègue de
Rosemont.
M. Lisée :
Oui. J'ai un amendement à proposer.
Le
Président (M. Tanguay) : Nous allons, si vous le désirez bien,
suspendre, le temps d'en faire des photocopies.
M. Lisée :
D'accord.
Le Président (M.
Tanguay) : Alors, nous suspendons nos travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
12 h 15)
(Reprise à 12 h 18)
Le
Président (M. Tanguay) :
Alors, à l'ordre, s'il
vous plaît! Pour la présentation de son amendement, je cède la parole au collègue
de Rosemont.
M. Lisée : M. le Président,
j'ai le plaisir de vous déposer un amendement qui se lit comme suit :
Article
1 : Modifier l'article 1 du
projet de loi par l'ajout, à la fin du deuxième alinéa, des mots
suivants : «Lorsque le ministre procède à un appel d'offres, il
doit octroyer le contrat à plus d'un fabricant.»
Le Président (M. Tanguay) :
Avez-vous des explications?
M. Lisée :
Oui, bien sûr. Bien, on a eu, dans la
période de consultation, un très grand nombre d'interventions disant
que, parmi les effets pervers de l'utilisation des appels d'offres, il y avait le fait que la disparition de plusieurs
fabricants pour un même
produit conduisait à une situation de monopole du fabricant restant et qu'à ce moment-là il pouvait à la fois augmenter
son prix, puisque tous les autres étaient disparus du marché, ou,
si de bonne ou de mauvaise foi il y
avait un problème d'approvisionnement chez ce fabricant, bien, il n'y
avait pas de solution de rechange.
Alors, notre objectif
est double : en s'assurant qu'il
y ait davantage qu'un fabricant dans
un appel d'offres, c'est de faire en sorte qu'il n'y ait pas de pénurie et que des économies à court terme ne soient pas complètement perdues par des prix plus élevés à moyen terme parce que le seul
fabricant restant pourrait dicter le prix à ce moment-là.
Le Président (M. Tanguay) : Merci. M.
le ministre.
• (12 h 20) •
M.
Barrette : Alors, M. le Président, comme je l'ai dit dans mes remarques introductives, là, ce projet de loi là, c'est un projet de loi qui vise à habiliter le ministre à faire des
appels d'offres, mais on ne peut pas mettre dans une loi les règles de l'appel d'offres, la construction, la rédaction de
l'appel d'offres. On ne peut pas faire ça, par définition, et ça ne se fait pas nulle part dans le corpus
législatif, M. le Président. Jamais dans une loi on ne va mettre : Voici,
l'appel d'offres doit prévoir telle
affaire. On va mettre des exclusions, on va mettre des affaires légales comme
le député de Mercier a évoqué tantôt, mais pas la mécanique de la
rédaction de l'appel d'offres.
Je vous donne
un exemple, M. le Président. Si, demain matin, là... Quelque chose de simple
que tout le monde qui nous écoute va
comprendre. Admettons, là, qu'aujourd'hui on soit rendu à un moment où a apparu il y a
10 ans l'aspirine, O.K.? L'aspirine, c'est une molécule hypersimple que tout le monde fabrique, et, si demain matin j'avais à faire un appel d'offres, je pourrais sans aucun problème
faire un appel d'offres avec un seul fournisseur, parce que
l'aspirine, c'est un médicament qui
est facile à faire, qui est fait par tout
le monde, et à peu près
tous les fabricants font de l'aspirine. C'est comme ça.
Alors, on ne peut pas à la fois faire un projet
de loi qui vise à permettre l'appel d'offres et mettre des règles d'appel
d'offres dans le projet de loi, sinon, M. le Président, si c'est ça, là, ce qui n'existe pas, encore une fois, dans aucune loi, sinon, ça veut
dire que, là, on va passer à une étude détaillée pour prévoir tous les types d'appel d'offres qui existent sur la planète,
là, dans la planète médicaments et mettre des règles. Ce n'est pas comme ça que
ça peut marcher, là. Ça, c'est juste
le gros bon sens. Je comprends, puis je me suis exprimé là-dessus, c'est clair que, quand on va rédiger un devis, hein, le document qu'on met sur la place publique pour que les
fournisseurs fassent une proposition, on doit prendre en considération ce genre
d'éléments là, je l'ai dit. Maintenant, ce n'est pas l'endroit où on doit
mettre ça.
Alors, une
loi, c'est fait pour permettre quelque
chose, et le quelque chose, lui, il a une variation potentiellement infinie d'applications, et cette infinité ne peut pas se mettre dans
une loi. C'est pour ça qu'il y a des règlements et, en
matière d'appels d'offres, c'est pour ça que chaque appel d'offres est
différent l'un de l'autre. C'est tout.
Alors, encore une fois, oui pour la finalité,
mais non pour le véhicule, tout simplement.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci. Collègue de Rosemont, et par la suite
on ira voir avec le collègue de Lévis. Collègue de Rosemont.
M. Lisée :
Le ministre nous parle de ce qu'il faut qui soit dans la loi, ce qu'il faut qui
soit dans les règlements et ce qu'il faut qui soit dans la rédaction de
l'appel d'offres, qui, dans certains cas, est confidentiel. Très bien, mais il va y avoir quelque chose dans les règlements, donc
il va y avoir des paramètres dans les règlements qui vont aller au-delà
de la loi. Donc, on admet d'emblée que ce n'est pas de la loi à l'appel
d'offres et qu'il n'y a rien entre les deux.
Moi, j'ajoute
une case en disant que, s'il y a des choses qui vont être dans les règlements,
donc immuables dans la formulation des appels d'offres, qui, eux, seront
plus détaillés et, en certains cas, confidentiels, bien, ça peut être vrai aussi en haut de la chaîne, c'est-à-dire dans
la loi. On peut décider, comme législateurs, évidemment de ne pas écrire
l'appel d'offres dans la loi. Ça serait absurde, mais on peut dire : Bien,
nous, en tant que législateurs, qui sommes soucieux
des bris d'approvisionnement, qui sommes soucieux de la constitution de
monopoles, nous décidons, puisque nous
décidons de donner au ministre le pouvoir de faire des appels d'offres... on
restreint son pouvoir en disant : Mais seulement lorsqu'il a plus de fabricants. Il n'y a rien qui nous empêche
de faire ça. Et on est très, très loin du règlement, c'est un principe général. Ensuite, le règlement
mettra ça en musique, et ensuite l'appel d'offres lui-même s'adaptera aux
circonstances.
La
tarification dégressive, qu'on nous a expliquée ici et qui est bien connue,
fait en sorte de faire une décision d'avoir
un appel d'offres qui assure le fait que plusieurs fabricants vont participer à
l'approvisionnement du médicament dont on a réussi à réduire le prix grâce au
processus d'appel d'offres. Mais, dans son principe même, il suppose la
survivance de plusieurs fabricants, ce qui est une garantie de
compétitivité dans l'appel d'offres suivant et de non-rupture d'approvisionnement. Le ministre utilise l'exemple
de l'aspirine, il dit : Je peux très bien le demander à un seul, parce que
c'est fabriqué par plusieurs autres. Donc, il y en a plein, de fabricants.
Bien, très bien, ça ne posera aucun problème à en avoir deux, il y en a
plein, il y en a plein.
Alors, moi,
je pense que c'est un principe de saine gestion que nous proposons ici, et il
n'y a aucune raison légale, technique
de ne pas inscrire dans la loi quelques paramètres. Et je tiens à rassurer le
ministre tout de suite que nous n'en avons
que quelques-uns, de ces paramètres, à lui proposer et qu'évidemment on serait
très intéressés. S'il a des indications à nous donner sur son intention réglementaire, ça nous aiderait aussi à
baliser le débat. Il l'avait fait la dernière fois lorsque nous avons discuté des GMF, nous avons discuté du
projet de loi n° 20. Il y a un moment où, après avoir insisté pendant
quelques jours, il s'était rendu à notre argument, et on l'en remercie. Il nous avait
déposé ses intentions réglementaires, qui
avaient beaucoup éclairé le débat. S'il veut le faire aussi, ce
serait bien, mais, quoi qu'il en soit, ce principe général, c'est dans
la loi qu'il va, à notre avis.
Le Président (M. Tanguay) : M. le
ministre.
M.
Barrette : Bien, M. le Président, je pense que le député de Rosemont vient de nous montrer clairement... ou bien vient de rater son
intervention, là, il vient de montrer clairement qu'il y a quelque chose qu'il n'a pas saisi dans
le principe de l'appel d'offres.
Alors, si je
mettais ça dans une loi, et je ne le mettrai pas, là, je vous le dis tout de suite, là, je ne le mettrai pas, il
devrait savoir — peut-être ne le sait-il pas, je vais l'informer — le principe, la force d'un appel d'offres, la force, c'est évidemment par l'appel d'offres, qui, lui,
prévoit la garantie d'un marché d'aller chercher le prix le plus bas possible. C'est ça, la force de l'appel d'offres. Et, par
définition, avoir un appel d'offres qui prévoit à la case départ trois fournisseurs,
bien, par définition, le marché n'étant pas
garanti, ne va pas générer le prix le plus bas. Et le député de
Rosemont nous a dit
à quel point pour lui c'était important de faire de la bonne législation. Il nous l'a
dit, il a dit : On est ici pour faire de la bonne législation. Or, en
matière de... qu'est la matière
traitée par la loi n° 81, c'est d'aller chercher le prix le plus bas.
Alors, le député de
Rosemont veut faire de la bonne législation, je comprends qu'il veut, lui aussi, aller chercher le prix le plus bas. Il nous a dit qu'il était d'accord avec les appels
d'offres. Là, il nous dit que ça serait bien de mettre dans la loi l'obligation d'avoir toujours
deux fournisseurs. Donc, par définition, on ne va pas chercher le prix le plus
bas. Et, dans la circonstance où on
sait, là, que le marché est inondé de plusieurs fabricants, bien, la loi
rendrait illégale la possibilité d'aller
chercher le prix le plus bas par un seul fournisseur. Alors, est-ce que je dois
comprendre que le Parti québécois
veut s'enlever le moyen d'aller chercher le
prix le plus bas, les économies les plus grandes pour investir ailleurs
en santé? Jamais un gouvernement de Québec solidaire ou de la CAQ ne
ferait ça. Alors, on voit ici que ou bien le député de Rosemont n'a pas saisi
la force de la mécanique d'un appel d'offres ou bien c'est autre chose, mais je
pense qu'avec l'explication que j'ai donnée
le député de Rosemont voit à sa face même que l'argumentaire qu'il
vient de tenir n'est pas le choix à faire pour un bon législateur.
Le
Président (M. Tanguay) : Le
débat va se poursuivre, mais je vais permettre au collègue de Lévis de
s'inscrire dans le débat. Collègue de Lévis.
M. Paradis
(Lévis) : Merci, M. le Président. À cette étape-ci, j'émets des réserves, elles
sont notamment, entre
autres... et je comprends le sens sur la volonté de préserver des marchés, la
volonté d'éviter des ruptures. Ça, c'est très patient, c'est très
citoyen, c'est très utilisateur, et ça a été mentionné à quelques reprises.
J'émets des
réserves parce qu'il y a une notion extrêmement économique à ce projet de loi là. Le but de l'exercice,
c'est de faire en sorte qu'on sauve de
l'argent. Ce n'est pas compliqué. Puis on sait qu'on paie trop puis qu'il y a
moyen de faire autrement. Je le
disais en préambule. Je comprends le principe de l'appel d'offres. En tout cas, ce que j'en comprends, c'est
qu'à partir du moment où tu en as un qui soumet le prix le plus bas et ramasse
le marché, c'est là qu'on est en mesure, par le biais même de l'appel
d'offres, d'aller chercher le coût
moindre. D'en avoir automatiquement deux ou davantage fait en sorte qu'on
va se priver d'économies. Et c'est la base même de l'appel d'offres. C'est là où j'émets des réserves. Je comprends moins bien cette
notion économique là, parce qu'on devra prendre le prix le plus bas, le
deuxième obligatoirement, faire la moyenne
des deux pour aller chercher moins que ce qu'on aurait pu aller chercher. Moi,
dans ma tête à moi, l'aspect de l'appel d'offres est celui-là. Donc, des réserves à ce niveau-là. Je pense qu'on
se prive d'économies substantielles à ce chapitre-là.
Cependant,
je comprends aussi le principe de la rupture potentielle et de
la crainte que certains peuvent émettre de voir, par exemple, un seul
fabricant, pour mille et une raisons, arriver dans un processus ou en rupture,
en défaut d'approvisionnement. En ce
sens-là, je pense qu'on peut pallier à cette problématique-là, et on l'a dit,
dans la forme et la façon dont sera
monté bien sûr l'appel d'offres, mais en initiant et faisant en sorte qu'on
puisse créer un comité d'experts, et j'y
reviendrai, sur la mise en place puis la détermination de l'appel d'offres en question, un comité d'experts, j'y reviendrai, je le
proposerai, pour faire en sorte... et
ça a été suggéré par notamment l'Ordre des pharmaciens, de faire en sorte qu'on
puisse éviter les écueils en fonction d'un appel d'offres bien monté.
Alors, je
pense qu'il y a moyen de faire autrement sans se priver d'économies
potentielles intéressantes, et c'est le
but même de l'exercice et du projet de loi sur lequel on discute présentement.
La notion du «doit», dans un contexte comme celui-là, honnêtement, me
semble ne pas mener au résultat que l'on escompte.
• (12 h 30) •
Le Président (M.
Tanguay) : M. le ministre.
M.
Barrette : Bien, encore une fois, M. le Président, là, je vais être très bref, tous les commentaires qu'on veut entendre, là, ils
sont du côté de l'application de la loi. La rédaction de l'appel d'offres, la rédaction du devis, c'est tout là. Ce n'est pas dans la loi,
là, ça, là.
On est tous d'accord
sur la prudence qu'on doit afficher... ou exercer, plutôt,
dans la rédaction de l'appel d'offres,
du devis, on est tous d'accord
avec ça, mais ça, ça sera à ce
moment-là. Là, ici, on débat de la
loi qui permet de faire ça et on ne
peut pas mettre dans la loi... Je
pense que tout le monde convient de ça, là. C'est illusoire de penser qu'on puisse mettre dans un appel d'offres tous les cas de
figure. Et là c'est comme si on essayait de mettre tous les cas de figure.
C'est illusoire et ce n'est pas comme ça que les lois sont faites, là.
Une voix : ...de Rosemont.
M. Lisée : Oui. Il
y a une version simpliste des choses
puis il y a une version réaliste des choses. Pourquoi est-ce que Toyota est devenu le premier vendeur de voitures
aux États-Unis? Il avait de bonnes voitures au moment où les géants américains
s'étaient assoupis sur le domaine de l'innovation,
mais Toyota se rendait compte que sa
capacité de compétitionner était
fondée sur sa chaîne d'approvisionnement et qu'il fallait toujours qu'il y ait plus qu'un fournisseur pour chaque appel d'offres. Ça, c'est la méthode Toyota : il faut toujours
qu'il y ait plus d'un fournisseur pour chaque appel d'offres. Et il est arrivé qu'il achète
un peu plus cher pour être sûr qu'il
y en ait plusieurs.
Et donc ça lui assurait, sur la vie de l'entreprise,
qu'il y avait constamment de la compétition
pour le plus bas prix possible, pour chacun des éléments constitutifs de sa
voiture, et il savait que juste un appel d'offres net, fret, sec, ça avait des
effets pervers.
Bien, ici, c'est la même chose, et c'est
pourquoi il y a le principe qui a été expliqué pendant la commission parlementaire — peut-être que le ministre était occupé à autre chose pendant que c'était
expliqué — c'est
la tarification dégressive. Alors, on dit : Faites des appels d'offres, essayez de nous donner le plus bas prix possible. Alors là, tout le monde se chicane pour avoir le plus bas prix possible.
Mais sachez que, si vous avez le plus bas prix possible, on vous donnera 60 %
du marché, 60 % à vous, puis on répartira le 40 % qui reste auprès
des deux ou trois autres soumissionnaires qui avaient soumissionné plus cher que vous. Mais, s'ils veulent entrer
dans le marché au plus bas prix possible qu'on a obtenu, ils pourront garder cette part de marché. Donc, ça assure ce que
le collègue de Lévis veut, le plus bas prix possible, en lui offrant 60 % de la part de marché et
ça fait en sorte de garder sur le marché plusieurs fabricants, puisqu'ils ont
la minorité du marché. Ça permet
aussi de faire en sorte que, si le premier fournisseur qui nous a donné le plus
bas prix qu'on applique à tout le
monde est en rupture de stock, bien, on s'est assurés qu'il y ait deux autres
fabricants qui soient toujours en
train de produire et produire pour nous. Et donc on peut augmenter sa production,
leur production pour pallier à des pénuries.
Alors, est-ce que
c'est une idée complètement extraterrestre? Bien, on en retrouve l'ombre dans
un document que le ministre de la Santé et des Services sociaux a publié avant le début de ces consultations, c'est-à-dire l'Analyse d'impact réglementaire sur le projet de loi à l'étude, et on y lit : «La nécessité de
réduire les risques de rupture d'approvisionnement
en maintenant sur le marché plus d'un fournisseur.» C'est son ministère
qui écrit ça, là, parle de la nécessité de réduire les risques de rupture d'approvisionnement en maintenant sur le marché plus d'un fournisseur. Et il dit à
la page 8 : «Le recours à des appels d'offres accroît le risque de rupture d'approvisionnement dans certaines circonstances. Selon le cas,
il est préférable de retenir plus d'un fournisseur.»
Bien, c'est
ce que je veux mettre dans le projet
de loi, ce que ses experts ont écrit
dans son document d'analyse réglementaire. Alors, je
comprends mal qu'il refuse l'avis de ses propres experts.
Le Président (M. Tanguay) : M. le
ministre.
M.
Barrette : M. le Président, évidemment, le
député de Rosemont
fait une interprétation, comme toujours il me prête
des intentions. Je ne refuse pas ça, au contraire. Je l'ai dit et je le redis,
puis, s'il le faut, je vais le redire 40 fois, là, ou 60 fois, ou 100 fois. Bien évidemment,
M. le Président, on doit prendre ça en considération lors de la
rédaction d'un appel d'offres, c'est clair, il n'y a pas de doute.
Ce que je
dis, et je vais le répéter, c'est qu'il peut y avoir des circonstances où cette
problématique-là n'existe pas, et ce
serait évidemment se paralyser soi-même, rater des occasions de
meilleures économies si on inscrivait ça dans le projet de loi comme étant une
sine qua non. Une loi, c'est une loi. La loi, si elle dit ça, elle dit :
Voici, la loi, c'est une loi qui permet de faire des appels d'offres
qui, eux, doivent être rédigés en fonction de la situation constatée lors de l'appel d'offres. Si un médicament est actuellement
produit par 40 fournisseurs sur le territoire québécois — il n'y en a pas 40, fournisseurs, je prends un exemple qui n'existe pas — bien, il n'y a pas de problème à la case
départ. S'il advenait, évidemment,
qu'il y a un seul fournisseur, bien là, l'appel d'offres va être assez
difficile, c'est une négociation un à un. Alors, on n'a pas besoin de mettre une contrainte de ce niveau-là dans
un texte de loi. La loi vise à faire en sorte qu'on puisse faire le devis, l'appel d'offres, le devis
étant écrit en fonction de la situation du sujet considéré, le sujet étant la
multitude de médicaments qui font partie de l'appel d'offres. C'est simple,
cette affaire-là, M. le Président.
Le député de
Rosemont, là, il a commencé son intervention en disant : Il ne faut pas
être simpliste. Bien, il est simpliste dans sa proposition, il est
simpliste. Ah! approvisionnement, sécurité, on en met deux. Pourquoi pas trois,
pourquoi pas quatre? Alors, il est
simpliste, il réduit tout à ce concept-là, alors que le concept, c'est d'abord
d'avoir une loi qui le permet et
ensuite de comprendre que, et il le dit lui-même, il y a plusieurs manières
d'aller chercher le meilleur prix :
le prix dégressif; l'appel d'offres à un, deux, trois fournisseurs; des encans
inversés. Il y a toutes sortes de mécaniques, là. Maintenant, la mécanique, elle est parfois
plus appropriée à un sujet, le médicament étant une vaste étendue de sujets,
qu'à d'autres. Alors, on ne peut pas mettre
dans la loi tous les cas de figure, c'est pour ça qu'on fait une loi qui est un
concept et qu'après il y a l'application de la loi.
Alors,
contrairement à ce que dit le député de Rosemont, M. le Président, un
règlement, ça ne va pas au-delà de la loi. Ça, c'est les mots qu'il a
dits : «Le règlement va aller au-delà de la loi.» Bien non, le règlement,
lui, va permettre l'application de la loi.
Il n'y a pas de règlements qui vont au-delà de la loi. La loi, c'est la loi, et
le règlement applique la loi. Mais on
voit l'utilisation des mots, c'est la qualité du député de Rosemont de pouvoir
arriver puis construire un discours
mais qui, malheureusement, souvent ne tient pas la route. C'est un peu comme le
concept de l'indépendance, ça se
fait, là, sans aucun problème à la population, mais non, il y a des problèmes,
ce n'est pas simple de même. C'est joli, mais ce n'est pas simple de même.
C'est la problématique du discours du député de Rosemont, il est comme
ça. Il fait des phrases élégantes qui ont
l'air de faire du sens. Malheureusement, souvent, pas toujours, mais souvent,
ça n'en fait pas — c'est
un très mauvais français, d'ailleurs — ça n'en a pas, de sens.
Et actuellement la loi, elle est faite pour ça,
elle permet les appels d'offres. Tout le reste, et depuis le début, M. le Président, on est dans l'application de la
loi, on n'est pas sur le sujet, mais je le laisse aller puis je n'invoque
aucune règle, là, à date, mais, à un moment donné, on va arrêter de
parler, là, puis on va laisser les éditoriaux se faire.
Le Président (M. Tanguay) : Collègue
de Rosemont.
• (12 h 40) •
M. Lisée :
Oui. Je suis content d'apprendre le ministre dire qu'il ne veut pas invoquer
aucune règle, si j'étais hors sujet,
alors qu'il vient de parler d'indépendance. Bon, d'accord. Il y a encore cinq
minutes qu'on ne reverra plus jamais, là, qu'on vient de passer à parler
d'autre chose que le projet de loi.
Donc, moi, je
veux revenir sur le projet de loi. Un règlement, ça va au-delà de la loi pour
préciser l'objectif du législateur et
du pouvoir exécutif, c'est tout ce que ça veut dire, ça va au-delà, c'est plus
précis. C'est plus précis, ça va au-delà.
Au-delà des indications données par la loi, il y a un règlement qui donne des
indications supplémentaires qui sont cohérentes
avec ce que la loi a indiqué et va encore plus au-delà : l'appel d'offres,
qui, lui, est très détaillé quant à l'intention de l'administrateur.
Le ministre a
dit : Oui, mais pourquoi il en veut deux?, ça pourrait être trois. Bien,
écoutez, l'amendement, c'est : «Lorsque
le ministre procède à un appel d'offres, il doit octroyer le contrat à plus d'un...» «Plus d'un», ça, oui, ça peut
être deux, mais ça peut être trois. On l'a rédigé comme ça. Alors, ça ne peut
pas être un.
Alors,
j'attends toujours un exemple, tu sais. Je suis prêt à être
convaincu que le ministre... de dire : Écoutez, règle générale, il doit octroyer le contrat à plus d'un
fabricant. J'accepterais ce sous-amendement du ministre s'il le formulait, s'il me donnait un seul exemple de l'inapplicabilité en tout temps d'avoir plus
d'un fabricant. La seule chose qu'il m'a dite jusqu'à maintenant, c'est : L'aspirine, tout le monde le fait, et, dans un autre cas fictif, il y en a 40 qui le font. Bien,
s'il y en a 40 qui le font, on peut demander le plus bas prix possible, donner
à cette personne 60 % du marché et à deux autres fabricants 40 % du
marché au prix le plus bas obtenu. Alors, je ne vois rien dans les exemples
qu'il m'a donnés jusqu'à maintenant qui
empêcherait l'application de cette règle générale que ses experts suggèrent
d'appliquer dans sa propre étude
d'analyse d'impact réglementaire pour exactement les raisons que j'invoque et
qui ont été invoquées par plusieurs
experts et ordres qui sont venus nous voir : Faites attention, un appel
d'offres à un seul fabricant, ça provoque des effets pervers mauvais pour la santé, des pénuries et mauvais pour
la bourse du gouvernement, la création de monopoles.
Alors,
j'attends un exemple d'inapplicabilité de cette règle générale. Et qu'il ne me
dise pas : Bien, il y en a plein qui
le font. Mais, s'il y a plein qui le font, on fera un appel d'offres, on
appliquera le plus bas prix aux trois fabricants.
Le Président (M. Tanguay) : M. le
ministre.
M.
Barrette : M. le Président, vous savez, moi, je suis une personne
généreuse dans mes commentaires et dans mes actions, alors je ne vais
pas lui en donner un, je vais lui en donner trois, hein, ce n'est pas
compliqué. Alors, sont inscrits à la liste
des médicaments, des molécules extrêmement courantes — il y en a même qu'on trouve dans le
sol — le
calcium, la vitamine D et
l'acétaminophène — l'acétaminophène,
là, le Tylenol, O.K., sans faire de promotion. Alors, voilà trois exemples, pas un, trois pour lesquels
il y a des milliers de fabricants sur la planète — trois — milliers. Alors, pourquoi moi, là, comme gouvernement, là, je
m'empêcherais de faire un appel d'offres pour un seul fabricant quand je
sais qu'il y a exactement, M. le Président, 0,000 chance d'avoir une rupture
d'approvisionnement?
Le député de
Rosemont cherchait juste un exemple. Pour le convaincre que son argument ne
tenait pas la route, je viens de lui
en donner trois. Bien là, j'imagine qu'il va revenir pour m'en demander 60,
parce qu'il vient de perdre son argument.
Le Président (M. Tanguay) : Un
rappel au règlement. Collègue de Rosemont.
M. Lisée :
Bien, très clairement, le ministre vient de me prêter une intention en essayant
de dire que j'allais lui poser une question.
Le Président (M. Tanguay) : Alors,
veuillez continuer, M. le ministre.
M.
Barrette : Alors, M. le Président, je comprends. Alors, je vais
répéter : 0,000 périodique — ça, ça va jusqu'à l'infini — chance d'avoir une rupture
d'approvisionnement pour trois. Il en voulait un, je lui en ai donné
trois : calcium, Tylenol, vitamine D. Alors là, le député de Rosemont, par fierté
oratoire, voudrait quand même que son amendement soit là. Bien là,
n'est-ce pas là un exemple de perte de temps?
Le Président (M. Tanguay) : Collègue
de Rosemont.
M. Lisée :
Écoutez, si je voulais perdre du temps, je dirais quelque chose comme «0»,
virgule, un certain nombre de zéros
et je le répéterais une deuxième fois. Ça, ce serait une façon de perdre du
temps. Mais, les trois exemples qu'il m'a
donnés, je le remercie de me les avoir donnés, mais je ne vois pas comment ils
contredisent mon principe et le principe qui lui est suggéré par ses
experts.
Je vais
prendre une ressource encore plus disponible : des bouteilles d'eau. Si on
décidait que le gouvernement va en
appel d'offres pour toutes les bouteilles d'eau qu'il achète, puis je pense
qu'il ne devrait jamais acheter des bouteilles d'eau puis qu'on devrait se débarrasser même du principe des bouteilles
d'eau, là, mais, s'il décidait de faire ça, bien là, faire des bouteilles d'eau... Je veux dire, il y a
plein de monde qui font des bouteilles d'eau, il y en a plein partout, alors
pourquoi demander plus qu'un fabricant?
Bien, d'abord, l'appel d'offres va nous donner le plus bas prix possible, et
puis la compagnie A qui fait des bouteilles d'eau, qui a obtenu le contrat
puis qui a 60 % du marché, s'il y a un incendie dans sa
manufacture, pas assez d'eau pour éteindre l'incendie — tout
se peut — bien,
on saura immédiatement qu'il y a deux autres
entreprises qui sont déjà dans notre système et qui pourront nous
approvisionner, parce que c'est vrai que des produits très généralement
disponibles, bien, ils sont quand
même fabriqués, mis dans des circuits
de distribution et livrés. Et ils en
fabriquent et ils en livrent à peu
près autant que la demande. Alors, si
tout à coup il y a une rupture d'approvisionnement chez un... bien là, les autres, je veux dire, ils
n'ont pas prévu d'augmenter l'offre, et, si nous, on ne l'achète pas, bien, ils
se sont déplacés à l'extérieur de notre marché, et ce n'est pas simple
de les ramener.
Alors, c'est
une mesure de prudence qui s'applique dans tous les cas et qui s'applique dans
les cas proposés par le ministre, mais, s'il veut me proposer un sous-amendement qui dit «sauf exception justifiée par le ministre» dans un mécanisme qu'il pourrait nous proposer, je serai d'accord.
Moi, je veux qu'on avance. Mais, de refuser que cette règle générale soit dans le projet de loi, je pense que
c'est imprudent, c'est une marque d'imprudence, et ce sera ma dernière
intervention là-dessus, M. le Président.
Le Président (M. Tanguay) : M. le
ministre.
M.
Barrette : Bien, moi, j'ai
dit ce que j'avais à dire, je ne vais pas le répéter. On est dans le champ réglementaire, M. le Président, j'ai dit clairement qu'il fallait prendre ces
éléments-là en considération dans le règlement,
la rédaction du devis, et ça n'est pas du champ du projet de loi comme
tel.
Le Président (M. Tanguay) : Collègue
de Lévis.
M. Paradis
(Lévis) : Je vais déposer un
autre amendement après la finalité de cette discussion, M. le Président.
Le
Président (M. Tanguay) :
Alors, sur l'amendement du collègue de Rosemont, y
a-t-il d'autres interventions? Collègue de Rosemont.
M. Lisée : ...par appel nominal,
s'il vous plaît.
Le
Président (M. Tanguay) :
Oui. Alors, constatant qu'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons
procéder au vote par appel nominal, la question étant : L'amendement du collègue
de Rosemont est-il adopté? Mme la secrétaire.
La Secrétaire : Oui. M. Lisée
(Rosemont)?
M. Lisée : Favorable.
La Secrétaire : M. Paradis
(Lévis)?
M. Paradis (Lévis) : Rejeté.
La Secrétaire : M. Barrette
(La Pinière)?
M. Barrette : Contre.
La Secrétaire : Mme Tremblay
(Chauveau)?
Mme Tremblay : Contre.
La Secrétaire : Mme Montpetit
(Crémazie)?
Mme Montpetit : Contre.
La
Secrétaire : Mme Busque... M. Busque, pardon, (Beauce-Sud)?
M. Busque :
Contre.
La Secrétaire :
M. Tanguay (LaFontaine)?
Le Président (M.
Tanguay) : Abstention.
La Secrétaire :
L'amendement est rejeté.
Le
Président (M. Tanguay) : Alors, l'amendement est rejeté. Chers collègues, l'objet du débat redevient l'article
1, et je crois que, collègue de Lévis, vous voulez prendre la parole.
M. Paradis
(Lévis) : Oui, M. le Président, pour déposer un amendement.
Le Président (M.
Tanguay) : Oui. Alors, peut-être, nous allons suspendre nos travaux quelques
instants.
(Suspension de la séance à
12 h 47)
(Reprise à 12 h 52)
Le
Président (M. Tanguay) : Alors, pour la présentation de votre
amendement, collègue de Lévis, la parole est à vous.
M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. En fait, c'est assez simple, et vous me
donnerez votre avis, je peux le lire
tel que demandé. En fait, vous aurez compris qu'il aurait pu être écrit
différemment, en demandant de retirer, à toutes fins utiles, l'article
60.0.0.2 et de faire que le 60.0.0.3 devienne le 60.0.0.2.
On comprendra qu'il y
a un article, là, qui a été supprimé, celui qui fait état d'appels d'offres
concernant les grossistes, concernant les
conditions d'approvisionnement et les marges nécessaires. Est-ce que de le dire
comme ça, c'est assez compréhensible ou si vous préférez que le lise?
Le Président (M.
Tanguay) : Je pense que...
M. Paradis
(Lévis) : Tout le monde comprend, là?
Le Président (M.
Tanguay) : Oui, oui.
M. Paradis (Lévis) : Bon, ce n'est pas bien, bien compliqué. M. le Président, s'il y a
un élément qui a été, en tout cas,
soumis à maintes reprises, une inquiétude qui a été relevée à maintes reprises,
c'est ce dossier-là, cette problématique d'appel d'offres pour les
grossistes au chapitre, notamment, de la distribution.
On
a entendu les gens qui sont venus présenter leur point de vue nous expliquer
que leur modèle d'affaires, à toutes fins
utiles, compte tenu de ce qui existe déjà en termes de rémunération dans ce
dossier-là, et par le biais des appels d'offres, s'écroule. Et, au-delà de ça, et encore davantage, on nous a dit :
Logistiquement, ce n'est pas faisable. Il y a des gens qui nous ont dit : Si on fait ça, il faut qu'on
repense notre logistique, qu'on repense nos flottes, qu'on oublie la
possibilité de le faire, ce n'est pas
applicable. Certains ont même dit : Bien, on ne pourra pas participer à un
appel d'offres, il n'y en aura pas,
ça ne se fait pas, ça brise le processus. Puis déjà le modèle d'affaires est
assez serré. Et je comprends qu'il y a assurément,
dans ce vaste monde là, des sommes à récupérer puis de l'argent qui transite.
Mais, au-delà de ça, on est venu ici nous expliquer la problématique
concernant l'appel d'offres au niveau de la distribution, au niveau des
grossistes.
Ce que propose le
ministre, ça ne se fait pas nulle part. Des appels d'offres pour les
grossistes, il n'y en a pas. En fait, ce
n'est pas vrai, je rectifie, ça se fait à une place, c'est en Australie. Mais,
en Australie, ça se fait de façon très différente,
le mode de rémunération n'est pas semblable, puis le modèle ne s'applique pas à
ce qui pourrait se faire ici, à moins
que le ministre me dise le contraire. Mais, en ce sens-là, au chapitre de
l'approvisionnement du Québec, compte tenu
du territoire, compte tenu des problématiques, compte tenu de la logistique et
de cette inquiétude manifestée par ceux-là mêmes qui seront appelés à participer à l'appel d'offres, bien, il me
semble qu'il y a une crainte légitime. Oui, d'accord pour sauver sur le coût du médicament, mais j'ai la nette impression qu'au
chapitre des grossistes on embarque dans quelque chose qui risque, là, de provoquer des problématiques
d'approvisionnement sérieuses et qu'au surplus, bien, diront les
principaux intéressés... remet en question un modèle d'affaires qui déjà a été
longuement exposé.
Alors,
l'amendement est simple, M. le Président, c'est de
conserver, évidemment, pour les médicaments — la
cause est bonne, on en a parlé — de
faire en sorte qu'on puisse avancer là-dessus mais qu'on retire ce qui, à ses
yeux mêmes, de l'avis de ceux qui ont à faire le travail, est absolument
inapplicable.
Le Président (M.
Tanguay) : Merci beaucoup. M. le ministre.
M.
Barrette : M. le Président, avec tout le respect que j'ai pour le député de Lévis, là, je
vais simplement dire ceci : Il
n'y a pas un seul groupe commercial qui est venu en commission parlementaire nous dire qu'il trouvait que c'était l'idée du siècle, tant du côté des producteurs que
des distributeurs. Ils nous ont tous dit, tous dit qu'il y avait
de la marge. Tout le monde.
Alors, la proposition du député de Lévis, l'amendement qui est déposé, elle pose un problème. C'est
comme si le député
de Lévis prenait fait et cause pour les grossistes. Je ne pense pas que ce soit
ça et je ne prête pas d'intentions au député
de Lévis, mais l'effet est celui-là, là. Puis, je vais le dire différemment,
là, c'est comme si on prenait la position des grossistes pour du cash, du cash au sens de : Aïe! Oui, ils
nous disent que ça ne se fait pas, c'est impossible, donc c'est
impossible. Bien non, je n'y crois pas. Il dit lui-même qu'il y a des pays où
ça se fait.
Tout comme pour le débat précédent que l'on a
eu, là aussi il y a des façons de faire les choses. Il m'a donné deux exemples. Je pourrais prendre l'exemple du
député de Mercier, qui, lui, nous dit : Passons par-dessus les grossistes
puis faisons-le. On pourrait prendre cet
exemple-là. Il y a des gens qui ont déjà évoqué ça. On pourrait
séparer le territoire, hein, ça a été mentionné, ce genre de chose là.
Mais là on tombe dans l'application de la loi, encore une fois, on est encore
dans l'application de la loi. Alors là, par rapport au débat précédent qu'on a
eu, on va vraiment plus loin, là, on vient d'abandonner
la possibilité d'aller chercher une économie
alors qu'on sait très bien, là, et tout
le monde l'a dit, là, sans le chiffrer, là, en commission parlementaire... là
aussi, il y a de l'argent à aller chercher, hein? Les
grossistes, là, ils sont... hein,
combien de fois, là, qu'on a entendu... puis combien d'articles qu'il y a
eu récemment sur les grossistes qui achetaient des pharmacies, les liens surprenants entre des pharmaciens que d'aucuns
ont suggéré que c'étaient peut-être des prête-noms, là, mais le bailleur de fonds, c'est un grossiste? Il y a quelque chose là, là, c'est clair. La commission parlementaire, là, je pense qu'on est tous d'accord ici,
les parlementaires de toutes les formations, qu'il y a quelque chose là.
Alors, de
proposer d'abolir cet élément-là du projet
de loi, c'est évidemment
d'abdiquer. Et je sais que le député
de Lévis, M. le Président, et sa
formation politique ne sont pas dans ce mode-là, et conséquemment,
là, sans entrer dans le détail, je ne peux pas accepter cela.
Le Président (M. Tanguay) : Collègue
de Lévis, pour quelque 30 secondes.
M. Paradis
(Lévis) : M. le Président, en fait, il faut que le ministre comprenne et que les gens comprennent qu'on
ne prend pas fait et cause pour les grossistes, on prend fait et cause pour le
patient. Le risque qui a été mentionné, de découverture
à travers la province, la difficulté d'appliquer à un seul grossiste la distribution
telle que proposée, l'outil que
propose le ministre, dans ma tête — puis il me l'expliquera à la reprise d'une séance — n'est, dans ma tête, pas le bon. Pourquoi
le ministre ne renégocie pas les compensations?
On le sait,
il y a des frais fixes de 6,5 % depuis 2012 décidés par le gouvernement,
il y a de l'argent puis il y a de la
marge. Alors, pourquoi risquer, sur le plan logistique, une distribution par le
biais d'un outil comme celui-ci, alors que le gouvernement pourrait renégocier les compensations, parce que c'est
lui qui les fixe également pour aller chercher l'argent qui est
manifestement, et ça a été dit, probablement et amplement disponible?
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup, cher collègue.
Compte tenu de l'heure, la commission ajourne
ses travaux sine die. Merci.
(Fin de la séance à 13 heures)