(Onze heures trente-huit minutes)
Le
Président (M. Tanguay) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Et, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission
de la santé et des services sociaux
ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de
bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission
est réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 81, Loi
visant à réduire le coût de certains médicaments couverts par le régime général
d'assurance médicaments en permettant le recours à une procédure d'appel
d'offres.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le
Secrétaire : Oui, M.
le Président. M. Poëti (Marguerite-Bourgeoys) est remplacé par M. Bourgeois (Abitibi-Est); Mme Tremblay (Chauveau), remplacée
par Mme Nichols (Vaudreuil).
Auditions (suite)
Le
Président (M. Tanguay) : Merci. Alors, ce matin, nous recevons les
représentants de l'Association
québécoise des pharmaciens propriétaires. Alors, bienvenue à votre Assemblée
nationale.
M. Thiffault (Jean) : Merci.
Le
Président (M. Tanguay) : Vous disposez d'une période de
10 minutes de présentation et, par la suite, vous aurez l'occasion d'échanger avec les parlementaires. Nous vous
demandons, pour les fins d'enregistrement, de bien vouloir vous nommer, préciser vos
fonctions. Et, sans plus tarder, la parole est à vous.
Association québécoise des pharmaciens propriétaires
(AQPP)
M. Thiffault
(Jean) : Merci beaucoup. Merci, M.
le Président. M. le ministre de la Santé et des Services
sociaux, Mmes, MM. les députés, merci de nous accueillir aujourd'hui.
Permettez-moi de présenter les gens qui m'accompagnent. À ma gauche, M. Jean Bourcier, vice-président
exécutif et directeur général; à sa gauche, Mme Marie-Josée Crête,
directrice à la négociation et aux affaires juridiques à l'AQPP; à ma droite,
M. Daniel Larouche, économiste et consultant; et moi-même, Jean Thiffault,
président de l'AQPP.
Notre association représente les
2 048 pharmaciens propriétaires des 1 866 pharmacies du
Québec. Ces pharmaciens jouent un rôle d'intervenants de première ligne
indispensable dans l'écosystème de la santé auprès de la population québécoise. Les pharmaciens propriétaires sont
aussi des entrepreneurs qui contribuent à leur communauté dans toutes
les régions du Québec et qui génèrent d'importantes retombées économiques. Au
total, c'est plus de 41 000 emplois de qualité, soit plus que
ceux créés au Québec par RONA, Bombardier et Rio Tinto.
• (11 h 40) •
Le projet de loi n° 81 pose essentiellement deux questions. Premièrement, y a-t-il
des économies à réaliser en ce qui a trait au coût des médicaments au Québec?
Nous croyons que oui. Deuxièmement, est-ce que les appels d'offres sont les meilleurs
moyens pour parvenir à réduire ces coûts? Cette fois, nous croyons que la
réponse est non, puisque les risques dépassent
largement les bénéfices potentiels.
En d'autres mots, nous partageons l'objectif du gouvernement mais
croyons que le projet de loi n'est pas la meilleure façon d'y arriver.
Parlons
d'abord des questions directes que soulève le projet de loi. Il est à noter
qu'il est très vague et qu'il donne au ministre
des pouvoirs vastes et arbitraires quant aux modalités d'éventuels appels
d'offres. Je vais, tout de même, souligner certains risques associés à
l'exploration de toute procédure d'appel d'offres visant les fabricants de
médicaments. D'abord, les problèmes
d'approvisionnement. Il existe des risques réels de rupture de stock ou de
retards de livraison. Ensuite, à terme, un appel d'offres pourrait
affaiblir ou faire disparaître certains fabricants génériques ici même, au Québec. Troisièmement, les appels d'offres
pourraient diminuer l'intérêt des fabricants génériques de contester avec
vigueur la validité des brevets, ce qui
retarderait l'arrivée des génériques sur le marché canadien. Quatrièmement, un
fabricant en situation de monopole pourra diminuer la qualité de ses services à
la chaîne de distribution.
Donc,
finalement, sans réinvestissement dans les services pharmaceutiques d'au moins
une partie des économies réalisées,
c'est encore une fois le pharmacien et son patient qui écoperont. D'ailleurs,
les patients sont les grands oubliés de ce projet de loi. Ce sont eux
qui subiraient les impacts négatifs d'un changement de marque ou d'apparence de
leurs médicaments. De telles modifications
créent de l'insécurité et de la confusion pour les patients. Pour toutes ces
raisons, nous recommandons de surseoir à la
procédure d'appel d'offres au moins pour une période de trois ans. Ce report
permettra au gouvernement
de récolter les fruits de son adhésion à l'alliance et d'en mesurer l'ampleur.
Il permettra aussi la mise en place d'un nouveau mode de rémunération
pour le pharmacien, sur lequel un comité AQPP-MSSS travaille déjà.
Quant
aux appels d'offres visant les grossistes, il est impossible, selon nous, qu'un
seul grossiste puisse approvisionner
de façon sécuritaire et efficace l'ensemble des pharmacies du Québec,
particulièrement pour un nombre limité
de molécules. Nous recommandons donc de retirer l'article du projet de loi
portant sur les appels d'offres visant les grossistes.
Malgré
les immenses progrès réalisés depuis 2010, des études démontrent que les
Canadiens paient encore leurs médicaments
génériques plus cher que les citoyens de certains autres pays. Pour réduire les
prix, nous recommandons de miser sur
la tarification dégressive de concert avec l'alliance plutôt que par des appels
d'offres limités au Québec. Cette approche
donne des résultats tangibles ici et ailleurs dans le monde sans entraîner les
risques associés aux appels d'offres. Elle produit des économies
substantielles et durables tout en ayant l'aval des acteurs de l'industrie.
Cela
dit, si le gouvernement décide, tout de même, de procéder par appel d'offres,
je peux vous assurer une chose, aucun
d'entre nous ne déchirera sa chemise. Nous trouverions simplement que ce serait
dommage de négliger de meilleures avenues.
Par contre, peu importe la stratégie adoptée par le gouvernement, il y aura un
enjeu incontournable qui concerne le financement des services
pharmaceutiques.
Récemment,
tous les professionnels de la santé ont été invités à participer à l'effort
budgétaire du gouvernement. Au final,
seuls les pharmaciens ont accepté de verser au gouvernement à même leurs
honoraires 400 millions de dollars sur trois ans. Depuis septembre dernier seulement, nous avons versé près de
50 millions. Cette contribution majeure, nous l'avons fournie dans le cadre d'une entente signée avec le ministre de
la Santé. Une condition sine qua non était assortie à cette entente, soit le déplafonnement des
allocations professionnelles pour une durée limitée à trois ans. Or, cette
mesure d'atténuation n'est toujours pas en vigueur cinq mois après le début des
compressions et huit mois après la signature de l'entente.
Ce délai indu fait
mal à l'économie de la pharmacie communautaire et a des conséquences à la
grandeur du Québec sur les services pharmaceutiques
de première ligne, là où les allocations doivent obligatoirement être
réinvesties. En effet, comme le révèle un
sondage Léger que nous venons tout juste de rendre public, 30 % des
pharmacies, 30 %, ont été
contraintes de diminuer leurs heures d'ouverture, principalement les soirs et
les fins de semaine, les heures de moindre accès au système de santé,
53 % des pharmacies ont dû réduire le nombre d'heures de travail
hebdomadaire de leurs pharmaciens, 45 % des pharmacies ont réduit les
heures travaillées par les autres membres du personnel, notamment les assistants techniques et les infirmières. En
somme, M. le Président, c'est 934 postes à temps plein perdus en moins
de six mois. C'est aussi l'équivalent de 49
pharmacies de moins au Québec en termes d'heures de service. Du jamais-vu.
Du jamais-vu dans le domaine de la pharmacie au Québec et au Canada.
Permettez-moi
d'insister, le gouvernement n'a toujours pas honoré sa signature, et le
ministre nous présente aujourd'hui un projet de loi qui dénature
significativement l'esprit de notre entente, une entente approuvée par les
pharmaciens, en faisant disparaître une bonne partie des allocations
professionnelles. Soyons clairs, je le répète, les pharmaciens ne sont pas attachés à tout prix aux allocations
professionnelles. Bien au contraire, nous souhaitons d'abord être rémunérés adéquatement pour notre expertise
et nos services comme n'importe quel autre professionnel au Québec. Malheureusement, dans le modèle actuel, ces
allocations sont essentielles et vitales à la survie de nos entreprises.
Nous voulons un mode de rémunération
renouvelé, moderne et transparent. Nous souhaitons, du même coup, préserver
notre modèle entrepreneurial et renforcer
notre indépendance professionnelle. Le déplafonnement des allocations
professionnelles contribuera à la transparence que nous souhaitons. La totalité
des sommes versées aux pharmaciens continuera d'être colligée dans un registre administré par la RAMQ. Ainsi, le ministre de
la Santé sera le seul de ses collègues ministres de la Santé au pays à
connaître précisément l'ampleur des sommes disponibles.
Ce
projet de loi arrive donc à un moment où l'équilibre financier des pharmacies
est fragilisé. M. le Président, les pharmaciens
ont assez donné. C'est pourquoi, si le ministre décidait d'aller de l'avant
avec le projet de loi n° 81, il faudrait que le gouvernement s'engage à réinvestir des sommes suffisantes dans
les services pharmaceutiques pour compenser adéquatement toutes les
répercussions qui en découleraient.
En conclusion,
l'industrie de la pharmacie, elle est complexe, elle est même très complexe.
Lorsqu'une seule composante de l'écosystème est modifiée, inévitablement ce
sont, à chaque fois, les pharmaciens et leurs patients qui subissent les contrecoups parce qu'ils sont à la
fin de la chaîne. À chaque fois. Des situations complexes s'accommodent
très mal de solutions simplistes. Le projet de loi n° 81, dans sa
simplicité, génère des problématiques majeures. Nous invitons donc le législateur à la prudence dans son enthousiasme à
vouloir changer les choses trop rapidement. Prendre le temps d'écrire une nouvelle politique du
médicament serait probablement plus efficace et permettrait, en plus de
travailler sur les coûts, permettrait de regarder l'usage optimal des
médicaments, pas juste les coûts.
Je
vous remercie donc tous de votre écoute. Il nous fera maintenant plaisir de
répondre à vos questions. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, pour l'échange,
maintenant, qui débute, je cède la parole au ministre de la Santé.
M. Barrette :
Pour?
Le Président (M.
Tanguay) : Pour 25 minutes.
M.
Barrette : Merci, M. le Président. Alors, M. Thiffault, M. Bourcier,
Mme Crête et M. Larouche, bienvenue à cette consultation publique sur un
sujet que je dirais de grand intérêt public parce qu'évidemment, je pense que
vous l'avez reconnu vous-mêmes, l'intérêt public existe,
a plusieurs aspects. Peut-être que le premier de ces aspects-là, évidemment,
compte tenu du projet de loi n° 81, est un enjeu, un aspect d'ordre
économique, et je pense que vous l'avez
vous-même reconnu de diverses manières. En même temps, évidemment, je comprends
que ce soit un projet de loi qui ait
un impact, qui induise un choc dans votre univers. Ça, j'en conviens. Et j'en
conviens tout à fait, mais vous allez convenir aussi avec moi que notre
intérêt à nous, comme parlementaires et comme gouvernement, demeure l'intérêt
général du public tout, en même temps, préservant votre intérêt, vous faites
partie du public. Donc, ça devient une question d'équilibre.
Dans votre
préambule, vous avez fait référence à nos ententes qu'on a signées.
Permettez-moi quand même de vous rappeler
que ce que l'on a signé exigeait un parcours qui exigeait, par exemple, la
publication d'un règlement qui a été fait, l'analyse de ce qui a été dit. On est, c'est vrai, à une certaine
distance de la signature de l'entente, mais la procédure suit son cours, et, dans ce décours-là, pour le moment, je
peux comprendre que ça génère un certain nombre d'inconforts, mais notre
engagement demeure.
Maintenant,
toujours dans l'esprit de votre préambule, vous vous inscrivez je ne dirais pas
en droite ligne, mais en cohérence avec toutes les interventions qui ont
été faites précédemment, et je retiens un certain nombre d'éléments. Le premier, là, c'est que vous aussi... Et je dis
ça positivement, là, il n'y a pas eu un seul intervenant qui s'est
présenté devant nous qui a contesté le fait qu'il y avait des économies à aller
chercher. Il n'y en a pas un, c'est quand même extraordinaire. Cette commission-là
n'a pas eu le bénéfice de beaucoup de visibilité médiatique à date, mais j'ai
l'impression qu'à partir d'aujourd'hui il va peut-être en avoir un
peu plus, compte tenu de la prise de conscience de cet élément-là qui existe peut-être
plus à partir d'aujourd'hui ou avec le temps.
Vous êtes
cohérents avec tout le monde. Tout
le monde, peu importe sa situation
dans la chaîne du médicament. Puis je
le répète pour ceux qui nous suivent, la chaîne du médicament, c'est de la
matière première. La molécule, juste pour faire une image, là, hein, la molécule, ça arrive, c'est un produit, là,
c'est une poudre, là. Puis je ne veux pas minimiser, là, mais c'est un produit chimique, là. Il est
transformé, il est présenté en médicament, c'est le fabricant, puis là il y a une chaîne, et vous, vous êtes au bout de la chaîne, le bout ultime de la
chaîne étant le client, le patient. Mais, juste avant le patient, c'est vous. Puis je vais vous le dire tout de suite, là, je ne pense pas que ce soit vous qui soyez dans la plus
grande position de force. J'irais même jusqu'à
dire que c'est probablement vous
autres qui êtes le maillon, entre guillemets... mais même pas entre guillemets, qui a le moins de
pouvoir dans cette chaîne-là. Je pense que vous allez être d'accord avec
moi.
• (11 h 50) •
M. Thiffault (Jean) : ...ma demande
aujourd'hui d'accélérer les travaux sur la modification du mode de rémunération des pharmaciens pour qu'on puisse
discuter vraiment d'une rémunération basée sur les actes, et non pas en
partie basée sur l'achat de médicaments, pour lequel les enjeux sont complexes
et variables avec les années.
M. Barrette : Ça, c'est l'enjeu du
projet de loi, mais on s'entend sur un fait, je pense, vous aussi constatez
qu'il y a des économies à faire. Donc, il y a de la marge dans cette chaîne-là.
M. Thiffault (Jean) : Oui.
M.
Barrette : Et ce que je comprends de votre propos, c'est que la marge
n'est peut-être pas totalement chez vous, mais peut-être aussi... Mais
peut-être...
M. Thiffault (Jean) : Elle n'est pas
dans les pharmacies. Ça, c'est clair.
M. Barrette : Pardon?
M. Thiffault (Jean) : Elle n'est pas
dans les pharmacies, la marge, effectivement.
M.
Barrette : Ça, c'est une question d'appréciation, mais vous, vous nous
confirmez que, dans votre lecture de votre monde, il y a de la marge?
M. Thiffault (Jean) : Oui.
M.
Barrette : Des gens avant vous sont venus ici nous dire d'une façon
très transparente, avec une transparence qui m'a surpris d'ailleurs, que votre monde est un monde qui est une
chaîne. Je l'ai décrite tantôt. À la chaîne, il y a plusieurs éléments, et, à chaque moment de progression dans
la chaîne, quelqu'un fait un profit. Alors, évidemment, vous, vous êtes
au bout de la chaîne, votre profit est d'un autre ordre, probablement.
M. Thiffault (Jean) : Professionnel.
M. Barrette : Mais il y a un profit.
M. Thiffault (Jean) : Oui.
M. Barrette : Ça fait qu'à un moment
donné, là, si tout le monde s'entend pour dire qu'il y a de la marge, la
conséquence de ça, c'est que peut-être qu'il y a des profits qui sont au-delà
de ce qu'ils devraient être.
M. Thiffault (Jean) : Il y a des services qui sont rendus, mais je ne
suis pas en mesure d'apprécier quelle est la rémunération optimale pour chacune des étapes parce que, ça, on n'y a
pas accès, à cette information-là. Mais il y a de la marge, M. le
ministre.
M. Barrette :
Non, je comprends, mais votre lecture de votre univers est qu'il y a de la
marge?
M. Thiffault
(Jean) : Oui.
M.
Barrette : Bon. Maintenant, il y a différentes manières d'aller
chercher cette marge-là, là, et j'aimerais vous poser un certain nombre de questions sur les allocations
professionnelles. Bon, les allocations professionnelles, c'est un
montant qui est essentiellement une ristourne. C'est un nom élégant, mais, dans
les faits, c'est une ristourne.
M. Thiffault (Jean) : Oui. C'est un moyen à un fabricant générique de se différencier de son
compétiteur. Les compagnies
génériques vendent le même produit au même prix, un prix qui est réglementé par
le gouvernement. C'est une façon de se démarquer du compétiteur, comme
pour les médicaments originaux, un médicament contre un autre médicament. C'est différent, évidemment, mais il y
a des enjeux à ce niveau-là. Mais, pour les médicaments génériques,
c'est une façon, pour la compagnie générique, de fidéliser des marchés.
M.
Barrette : Mais on s'entend que c'est une ristourne qui est une
mécanique plafonnée, on le comprend, pour le moment, mais c'est quand
même une mécanique de ristourne au même titre que dans une épicerie ou un
dépanneur.
M. Thiffault (Jean) : La seule différence — puis je vais passer la parole à M.
Bourcier — c'est,
comme vous le savez, ces sommes-là sont encadrées, ce n'est pas des
sommes qui...
M. Barrette :
Vous avez raison, je le concède.
M. Thiffault
(Jean) : Oui, mais c'est effectivement... et ces sommes-là, M. le
ministre, vous ont permis de sous-financer le système public de santé au niveau
des honoraires des pharmaciens.
M.
Barrette : Bon, ça, c'est une opinion, mais je ne veux pas
nécessairement embarquer là-dedans. Moi, ce qui m'intéresse aujourd'hui, là, c'est qu'on comprenne tous la mécanique.
C'est une mécanique de ristournes.
Maintenant, vous, là, les pharmaciens propriétaires, il y a certaines choses
que notre régime légal vous permet, d'autres qui sont interdites, on se
comprend, puis vous respectez la loi.
M. Thiffault
(Jean) : Absolument.
M.
Barrette : Il n'y a
aucun doute là-dessus. Alors, dans la catégorie des ristournes, le gouvernement du Québec, à un moment donné, a plafonné les ristournes.
M. Thiffault
(Jean) : Oui, effectivement.
M. Barrette :
Je pense, de mémoire, c'était en...
M. Thiffault
(Jean) : 2007.
M. Barrette :
Non, je pense que c'est après le...
Une voix :
Le règlement a été adopté...
M. Barrette :
Oui, on les a plafonnées, mais on les a plafonnées à 15 % plus tard.
M. Thiffault
(Jean) : Oui, effectivement.
M.
Barrette : Ça, c'est en 2010, de mémoire. Alors, à ce moment-là, les
ristournes, ça vous a créé un manque à gagner.
M. Thiffault
(Jean) : Oui. À ce moment-là, les sommes qui étaient versées n'étaient
pas encadrées d'aucune façon. Je pense que
l'idée de les mettre de façon plus transparente était une bonne idée. L'idée du
plafond, par contre, je vous dirais,
a causé plusieurs problèmes pour les pharmaciens, et la perte des pharmaciens
après l'instauration du plafond n'a
jamais été compensée. Ailleurs, dans les autres juridictions, quand il y avait
des baisses de prix qui occasionnaient des pertes d'allocations professionnelles pour les patients, bien, ces
sommes-là étaient compensées soit en nouveaux services professionnels ou en ajustement d'honoraires. En
Ontario, le gouvernement a donné 150 millions de dollars aux pharmaciens
en diminuant les allocations et en
transférant le service professionnel. Ici, le gouvernement a mis l'argent dans
sa poche. La perte, elle était au
niveau des pharmaciens. Et les pharmaciens, ce qu'ils ont fait, c'est qu'ils ont
augmenté la marge du côté des régimes publics. C'est la seule façon de
garder la même rentabilité.
M.
Barrette : ...du régime privé.
M. Thiffault
(Jean) : Du régime privé, pardon, excusez-moi.
M. Barrette :
Alors, ce que vous nous dites, pour que ça soit clair, là, vous venez de nous
dire que, quand il y a eu ce plafonnement-là imposé par le gouvernement, vous,
la loi vous le permettant, vous vous êtes retournés vers les assurés privés et
vous vous êtes compensés.
M. Thiffault
(Jean) : Ce n'est pas tout à fait ça. Veux-tu y aller, Jean?
M. Barrette :
Mais l'effet est celui-là, là.
M. Thiffault
(Jean) : Oui.
M. Bourcier (Jean) : Peut-être juste un commentaire. Le manque à gagner suite au plafonnement
à 15 % a été de 225 millions pour les pharmaciens sur une
période de cinq ans.
M.
Barrette : Je peux comprendre, mais, dans les faits, là, ce qui
m'intéresse... Et puis, encore une fois, vous venez de le dire, là, vous-mêmes, simplement pour le
redire d'une façon claire, là, vous-mêmes, là, vous venez de nous dire
que vous vous êtes, à ce moment-là,
retournés vers les assurés privés pour compenser votre manque à gagner. C'est
légal, là, il n'y a rien qui vous empêchait ça, là.
M. Larouche (Daniel) : Non, mais écoutez, on n'est pas gênés. Je
voudrais juste que ce soit clair dans l'esprit des membres de la commission, à partir de 2007, il y
avait... Il y a toujours eu un léger écart stable entre les prix du privé
puis les prix du public depuis 1997, là,
jusqu'à 2007. À partir de 2007, on a vu cet écart-là croître, et jusqu'à
atteindre aujourd'hui... Aujourd'hui,
les prix du public sont à peu près 15 % inférieurs aux prix du privé. Je
ne parle pas des honoraires, là, je parle du prix vendant, le prix
total. Aujourd'hui, c'est là qu'on est, et essentiellement c'est parce que, de
fait, quand les allocations ont été
plafonnées, les pharmaciens se sont retrouvés avec, d'une part, des allocations
qui étaient diminuées sérieusement,
d'autre part, des honoraires payés par le public qui étaient non seulement très
rigides, mais qui, avec le temps, ont
été de plus en plus inférieurs à tout ce qui se paie dans tous les autres
régimes publics au Canada, et là on se retrouve ensuite avec la seule
soupape qui est disponible aux pharmaciens... Il n'y a pas eu de crise suite à
cette chose-là. Les services ont été
maintenus, les heures d'ouverture ont été maintenues. La seule soupape que les
pharmaciens ont eue, ça a été de modifier leur structure de prix dans le
secteur privé, et particulièrement dans le générique.
Alors,
on n'est pas gênés de ça. Ce qu'il est important de savoir, cependant, c'est
qu'au bout de tout cet exercice-là, tous payeurs confondus, l'ordonnance
québécoise est à peu près le même prix qu'elle l'est ailleurs au Canada. Les ordonnances, au Québec, tous payeurs confondus, ne
sont pas plus chères qu'ailleurs au Canada. Et c'est important de le savoir, et c'est important de s'en rappeler.
Alors, ce qui s'est produit sur cette période-là, sur les neuf ans depuis
2007, c'est tout simplement un
interfinancement croissant du public par le privé. Donc, les assurés du secteur
public sont financés en bonne partie par les assurés du secteur privé
par l'entremise de la pharmacie.
M.
Barrette : Alors, ça, il restera à établir ça. L'objet ici,
évidemment, n'est pas d'établir si le financement est à la bonne hauteur. Parce que, quand on dit
financement, là, on parle de chiffres d'affaires et de profits, et ainsi de
suite, là. Et ça, l'objet de notre conversation et de la commission
parlementaire n'est pas d'établir ça, quoique c'est lié, là, d'une certaine
manière.
• (12 heures) •
Une voix :
C'est un contexte.
M. Barrette :
Je comprends.
Une voix :
C'est un contexte essentiel à comprendre.
M.
Barrette : Mais ce que vous nous confirmez, là — et c'est votre mot — il y a eu un interfinancement. Donc, quand il y a eu un plafonnement du côté public, il
y a eu une facturation accrue du côté privé. Vous nous le dites d'une
façon, je pense, claire.
La
prochaine question que j'ai à vous poser et qui m'a beaucoup étonnée, parce que
je savais grosso modo, même si c'était tu, cette affaire-là, ce n'était
pas public, là, il n'y a personne qui arrivait à mettre le doigt là-dessus,
là... Votre ordre professionnel, lui, à
l'époque, là, qui voyait sans aucun doute ça, là — l'ordre ne pouvait pas ne pas voir ça,
l'ordre, c'est les pharmaciens en exercice — est-ce qu'il vous a avisé,
votre ordre, de ne pas faire ça?
M. Thiffault (Jean) : Il y a eu, de mémoire, des balises qui avaient été envoyées, que les
pharmaciens doivent interpréter, avec lesquelles ils doivent porter leur
jugement professionnel, et il y a eu des appels. Combien? Je vous dirais que ça
fait quelques années déjà, là.
M. Larouche
(Daniel) : La réponse courte, c'est non. La réponse, c'est non. La
réponse courte, c'est non, il n'y a pas...
Il y a eu de l'interfinancement, mais il n'a jamais été établi que les prix
chargés au privé étaient déraisonnables. Ça, c'est cas par cas. Personne ne peut
dire : Les pharmaciens, en général, chargent des prix déraisonnables.
Alors, il y a des cas par cas. Le
syndic de l'ordre a questionné et a fait des enquêtes chez certains
pharmaciens. Ça n'a rien donné jusqu'à présent,
il n'y a pas eu de conclusion à ça, il n'y a pas eu de procédures qui ont
suivi. Alors, l'ordre a fait diligence sur certains cas spécifiques par
le syndic, en fait, mais non, l'ordre n'a jamais dit qu'il y avait des
pratiques de prix qui étaient
déraisonnables, non déontologiques suite à l'interfinancement croissant. Alors,
on n'a jamais établi que les prix du public
devaient être des prix de référence, puis tout ce qui excédait ça était trop
cher. Alors, ça non plus, ce n'est pas établi, là.
M. Barrette :
Bon. Alors donc, moi, pour moi, ce qui m'intéresse dans cette question-là,
là — et
vous me répondez, je pense, très
clairement — c'est
que l'ordre, pour lui, là, il n'y avait pas de problème à ce qu'il y ait ce
que vous avez qualifié d'interfinancement. Moi, c'est juste ça, je ne vous
demande pas de juger de l'ordre, je...
M. Larouche
(Daniel) : ...de l'ordre, je ne peux pas...
M.
Barrette : Vous pouvez me le... Ma question, pour moi, parce que vous,
vous êtes... bien, peut-être pas vous, je ne sais pas si vous êtes
pharmacien...
M. Larouche
(Daniel) : Non.
M. Barrette :
Vous n'êtes pas...
M. Larouche
(Daniel) : Je n'ai pas ce privilège.
M.
Barrette : Les pharmaciens n'ont pas eu de commentaires de l'ordre à
l'effet... Ne faites pas ça parce que, moralement ou autrement, ça ne
devrait pas se faire.
M. Larouche (Daniel) : Il n'y a pas eu : Ne faites pas ça. La
tarification dans les pharmacies pour le privé, c'est 1866 décisions individuelles. Alors, personne n'a
jamais constaté qu'il y avait ni une stratégie collective, ni un
complot. Les pharmaciens gèrent leurs
pharmacies, prennent des décisions, décident de leurs tarifs, et puis, si
personne ne va voir l'ordre en
disant : Je pense que je me suis fait flouer... Bien, moi, je ne veux pas
parler pour l'ordre ni contre, mais ce que je sais, c'est que l'ordre n'est jamais intervenu sur une base collective.
Je connais des cas individuels où l'ordre est intervenu, mais, de façon
collective, je n'en ai pas.
M. Barrette : Par contre, corrigez-moi si je me trompe, parce
que ça s'adresse à vous, les pharmaciens propriétaires, sur la question de la transparence de la facture,
l'ordre a toujours pris une position. On va leur demander la question,
là, mais vous, là, vous n'avez jamais été en faveur, ni l'ordre, de la
transparence de la facture?
M. Thiffault (Jean) : Le problème de la... J'aimerais rajouter un dernier point. Si vous
parlez de l'écart privé et public,
sur le 20 %, quand les prix ont été plafonnés, ce plafonnement-là, M. le
ministre, est à l'origine du pourquoi vous avez de la difficulté à voir les sommes dans le système aujourd'hui. Si
on est ici aujourd'hui à essayer de chercher où se trouve la rentabilité dans la chaîne, c'est parce
qu'avec le plafonnement de 20 % vous avez mis un couvercle sur la
marmite. Tout ce qui est en haut du
20 %, les sommes, là, vous les avez rendues occultes. On a rajouté un
deuxième couvercle avec les marques
privées, on le voit encore moins, l'argent. Donc là, l'exercice aujourd'hui,
votre recherche pour essayer de trouver
où sont les sommes dans la chaîne, elles sont conséquentes à l'imposition du
plafond de 20 % puis, ensuite, de 15 %.
Pour
ce qui est de la transparence des prix, écoutez, c'est un faux débat selon moi,
la transparence des prix. Les assureurs sont venus vous en parler
dernièrement, cette question-là a été discutée à l'Ordre des pharmaciens dans
un rapport avec
M. Claude Montmarquette, qui s'est penché sur la question, sur la
transparence des prix. La question était : Est-ce que les factures devraient être ventilées, et tout ça? Et la
conclusion de M. Montmarquette, c'est que le seul prix qui compte, c'est le prix final, est-ce que ça va me coûter 20 $,
25 $ ou 30 $, c'est avec ça que le patient doit prendre sa
décision, puis c'est avec ça que le patient
magasine d'une pharmacie à l'autre le prix et le service — parce que ce n'est pas juste un prix,
un pharmacien, c'est un prix et un service, donc — et qu'il n'y aurait
aucun avantage à connaître le prix des composantes parce que ça causerait de la
confusion.
Et
de la confusion, il y en a en Ontario. On cite souvent l'Ontario comme étant un
exemple de clarté parce que les honoraires des pharmaciens sont affichés
sur le mur. Pharmacie A va afficher un honoraire de 0,99 $. Wow! La pharmacie B, un honoraire de 9,99 $. Ce que
les clients ne savent pas, c'est que le prix coûtant qui est utilisé, qui va
être additionné à l'honoraire, à ce prix-là,
le pharmacien rajoute une marge de profit de son choix qu'il ne divulgue pas.
Donc, au bout de la ligne, le pharmacien qui
va à la pharmacie avec un honoraire de 0,99 $ peut se retrouver à payer
plus cher parce que la marge de profit que le pharmacien s'est chargé,
elle était plus grande.
Là, on essaie de
faire croire à tout le monde, là, qu'une équation à deux chiffres, qui est un
prix vendant sur la facture, que le
pharmacien a l'obligation de dire au patient, auquel on soustrait un prix
coûtant du médicament qui est public...
Je peux taper Norvasc, 5 mg, je l'ai, le prix de la RAMQ. Ça, là, ça demande
des algorithmes très, très compliqués, là — les assureurs nous ont dit ça — pour connaître le profit du pharmacien. Ce
n'est pas le cas, une calculatrice de 0,99 $ peut faire le travail. Donc, la transparence, elle
est là. Les assureurs essaient de faire rentrer un carré dans un cercle.
Ils veulent organiser un système qui correspond à ce qui est fait à l'extérieur
du pays. Notre système, il est simple, il est compréhensible pour les patients,
et toutes les données sont publiques, connues. Donc, honnêtement, je trouve
qu'on a un système simple et que c'est un faux débat.
M.
Bourcier (Jean) : On
voudrait juste ajouter, on apprécierait aussi, de la part des assureurs privés,
la même transparence qu'ils demandent
aux pharmaciens. Ça serait intéressant. En tant que preneurs de régime, on
apprécierait, nous, le savoir. Et, à ce moment-ci, on trouve que les assureurs
privés démontrent une certaine arrogance à vouloir absolument connaître des choses qu'eux ne sont pas prêts à offrir à la
population québécoise. La croissance des primes, la profitabilité des
primes, la prime par secteur pour chacun des produits, pour chaque groupe de
produits, dentaires, invalidité, vie, autres thérapeutes, pharmaciens,
dentistes, etc., le regard qu'on pourrait poser sur la profitabilité de la croissance des primes sur chacun de ces... serait
intéressant. Ça serait intéressant que les assureurs privés, qui se
targuent de vouloir être transparents,
démontrent cette transparence-là au niveau de la facturation des preneurs de
régime. En tant que preneur de
régime, moi, j'apprécierais que les assureurs privés nous montrent également
cette transparence-là parce qu'au bout de la ligne eux aussi sont profitables,
eux aussi cherchent à maintenir leurs primes et leur rentabilité. C'est
important de constater... C'est parce qu'il y a des questions...
M. Barrette : Non, non, je
comprends, M. Bourcier. Je comprends bien, là.
M. Bourcier (Jean) : ...il y a des
questions qui ne se posent pas, il y a des questions qui devraient se poser.
M. Thiffault (Jean) : Et il faudrait
demander peut-être à d'autres professionnels aussi. Récemment, chez les optométristes, chez les dentistes... En clinique
de radiologie, examen de rayons x du genou, où est l'honoraire dans ça?
Vous comprenez que, si on fait l'exercice, faisons-le de façon globale.
M. Barrette : Bien, savez-vous quoi?
Je suis bien confortable avec ça.
M. Thiffault (Jean) : Parfait.
M.
Barrette : Maintenant, dans la relation qu'ont les pharmaciens
propriétaires franchisés avec leur franchiseur, l'année dernière on avait fait un sondage qui disait que le groupe
franchiseur, chaîne ou bannière, là... La question était posée, là, je vais la répéter, je l'ai posée à
plusieurs reprises : Est-ce que votre franchiseur, chaîne, bannière,
cherche à limiter ou orienter la sélection des médicaments génériques à
servir aux patients? La majorité des pharmaciens ont dit oui. C'est quoi, la
relation? Est-ce qu'il y a, dans la relation entre le franchisé et le
franchiseur, une relation de ce type-là?
M. Thiffault (Jean)T : Il y a une
relation qui est parfaite sur le plan des opérations.
M. Barrette : C'est-à-dire?
M.
Thiffault (Jean) : Ce sont
d'excellents opérateurs. Les services que nous recevons sont des bons
services, les chaînes et les bannières. La
relation, elle est tendue sur le plan financier. Elle est complexe sur le plan
financier, donc il faut... Les
services reçus sont des services de qualité. Le reste de la relation, sur le
plan financier, c'est complexe. Et c'est complexe parce que, depuis
l'arrivée du plafond, depuis l'arrivée des sommes dans le système, il y a eu un
très grand déséquilibre des rapports de
force, hein, entre les pharmaciens. L'argent était chez les pharmaciens avant
et, avec le plafond, il s'est retrouvé chez les tiers. Donc, cette
situation-là, de fait, a amené une situation de dépendance financière des pharmaciens. Et une dépendance financière, ça
fragilise l'indépendance professionnelle parce qu'on est obligés
d'accepter des contrats de plus en plus
contraignants, on est obligés de... C'est l'indépendance financière, c'est la
survie, c'est la... L'argent est ailleurs et...
• (12 h 10) •
M. Barrette :
Vous dites contraignants. Pouvez-vous nous expliquer, nous donner des exemples
de contraintes?
M.
Thiffault (Jean) : Bien, écoutez,
dans le document de Me Fernet,
Pharmacien, une profession sous influence, il y a plusieurs
exemples, sur l'achat des molécules, sur...
M.
Barrette : Je vais en prendre un, j'en ai un ici, dans ce
document-là : «Le franchisé
s'engage à : s'abstenir d'utiliser,
d'offrir, de promouvoir, d'annoncer, de fournir, de louer, de vendre ou de
rendre quelque produit [que ce soit], marchandise ou service qui n'a pas
été acquis conformément à la présente convention [et] dont l'utilisation et/ou
la vente au détail dans l'établissement n'a pas été autorisée par le
franchiseur.»
En français,
ça, ça a l'air que vous allez acheter de moi puis vous allez vendre de moi...
mais pas vous, là, mais par rapport au franchiseur.
M.
Thiffault (Jean) : Il y a
des obligations contractuelles qui sont bénéfiques pour les deux
parties. Je veux dire, si un
grossiste a un bon volume d'affaires, le service va être bon. Par contre, sur
d'autres points, dès qu'on touche le côté professionnel, il faut absolument
qu'il y ait un petit peu plus de... il
faut garantir l'indépendance
professionnelle parce que, si on fragilise la continuité de
l'indépendance professionnelle, c'est le droit de propriété qui est affecté. Il
faut...
M. Barrette :
Je comprends votre point puis je vais vous avouer que je suis pas mal en
faveur, là. Je vais vous donner un autre
exemple du document de Me Fernet : «Pendant toute la durée des engagements souscrits envers le
partenaire d'affaires résultant des présentes, je m'engage à
m'approvisionner : [...]de façon exclusive auprès de mon partenaire d'affaires; [...]de façon exclusive auprès de
tout distributeur, grossiste désigné de temps à autre par mon partenaire
d'affaires, renonçant ainsi au pouvoir d'achat direct auprès d'un fabricant.»
Il y a
des gens qui sont venus nous dire avant vous qu'il n'y avait aucune relation contraignante
entre le franchiseur et le franchisé. Là, vous semblez me confirmer qu'il
y en a une, contrainte. Et la question qui vient après : Cette contrainte-là est-elle dans un cadre de bénéfices
ou de pertes si on n'observe pas ce genre de règle chez le pharmacien propriétaire? Moi, je trouve que vous êtes le
bout de la chaîne alimentaire, puis vous avez des contraintes pas mal. Est-ce
que
vous nous confirmez que, oui, il y a des contraintes puis, oui, il y a
des bénéfices ou des pénalités financières si les règles ne sont pas
observées?
M. Thiffault (Jean) : Oui, il y a des pressions. Est-ce que les contraintes
sont toutes financières? Ça peut être des contraintes opérationnelles,
ça peut être des clauses excessives dans les contrats s'il y a un non-respect
de certaines clauses. Les modèles sont tous
différents, hein? On ne les a pas, on n'a pas en main tous les contrats de
toutes les chaînes et les bannières. Ce n'est pas notre rôle. On sait ce
qui existe, on en entend parler. Mais c'est ça, donc...
M. Bourcier (Jean) : Peut-être juste compléter. Je
fais un aparté, les ententes contractuelles entre les pharmaciens, les
franchisés et leurs chaînes sont complexes, c'est des ententes qui sont à plusieurs
volets. Le franchisé n'est pas le pharmacien.
Le franchisé est le propriétaire de la partie commerciale qui est au devant de
la pharmacie. Donc, les ententes contractuelles
que le pharmacien va signer comme propriétaire avec sa chaîne et sa bannière
sont de plusieurs ordres. Et ce qu'on appelle le franchisé, c'est la personne physique, morale,
propriétaire de la partie devant la pharmacie, du devant de la
pharmacie, et non pas la pharmacie comme telle.
Le
Président (M. Tanguay) :
Merci beaucoup. Nous poursuivons maintenant nos échanges avec notre collègue de
Rosemont pour 15 minutes.
M.
Lisée : Merci beaucoup, M. le Président. M. Thiffault,
M. Bourcier, Mme Crête, M. Larouche, j'ai plusieurs questions pour vous. On va commencer à parler...
Parce que c'est une journée importante, là, le ministre de la Santé a
fait une sortie, a dévoilé l'existence d'un
vaste scandale ce matin, d'une faute morale qui aurait été posée. Alors, on va
discuter de faute morale ensemble. Donc, il
y a cette question d'interfinancement entre les honoraires des pharmaciens pour
le régime public, régime privé. Depuis 1997, avez-vous dit, hein,
M. Larouche, depuis l'existence...
M. Larouche
(Daniel) : ...
M. Lisée :
Depuis 2007, mais...
M. Larouche
(Daniel) : Ah! depuis bien avant, il y avait un interfinancement.
M.
Lisée : Exactement. Donc, depuis bien avant qu'il y ait le
plafonnement par le ministre libéral de la Santé Yves Bolduc en 2010, il y a le fait que les pharmaciens
chargeaient en honoraires davantage au régime des assureurs privés que du public parfaitement légalement. Un ministre
libéral de la Santé, en 2010, a décidé de plafonner, donc, les
honoraires pour le secteur public, ce qui a
conduit, légalement, les pharmaciens à charger un peu davantage au secteur
privé. Est-ce que l'Ordre des pharmaciens aurait dû intervenir? C'est le
scandale dont le ministre a fait état ce matin pour essayer de salir la
réputation d'une membre de cette Assemblée.
Alors,
vous avez dit tout à l'heure que le syndic, donc, de l'Ordre des pharmaciens
avait fait des interventions de son propre chef pour voir s'il y avait
un problème, donc a agi. Mais, si un assureur privé ou un client considérait
que l'honoraire était exagéré, avait-il le droit de s'en plaindre au syndic?
M. Larouche (Daniel) :
Absolument.
M. Lisée :
Absolument?
M. Larouche
(Daniel) : Écoutez, il y a... D'abord, juste pour mettre un peu
d'histoire, tu sais, auparavant...
M. Lisée :
Non, mais je vais poser des questions précises, puis ensuite on passera à autre
chose.
M. Larouche
(Daniel) : Oui, d'accord. Je vous laisser aller.
M. Lisée :
Mais juste, donc, établir que vous savez que le syndic peut agir sur plainte et
que personne ne l'a empêché de le faire, et que le syndic a agi de lui-même
pour faire des vérifications.
M. Larouche
(Daniel) : Les deux sont vrais.
M. Lisée :
Les deux sont faits. Et en plus, M. Thiffault, vous avez de rapport
Montmarquette sur la question de la transparence. Qui a commandé le rapport?
M. Thiffault (Jean) : L'Ordre des
pharmaciens.
M. Lisée :
L'Ordre des pharmaciens lorsque c'était la députée de Taillon qui était
présidente de l'ordre?
Une voix : Effectivement.
M. Lisée : Donc, y
a-t-il quelqu'un qui a fait une faute
morale? Si le syndic faisait son travail en réponse à des plaintes et de sa propre initiative et que la
présidente de l'ordre commandait un rapport, est-ce que vous voyez un
scandale là-dedans de la part de l'ordre?
M.
Larouche (Daniel) : Non. Écoutez,
je l'ai dit tout à l'heure, les décisions de tarification dans le secteur
privé sont des décisions individuelles qui se sont contestées à l'occasion
individuellement, sur une base individuelle.
M. Lisée : Très bien.
M.
Larouche (Daniel) : Quant à
la pratique générale, l'ordre a fait diligence, a commandé un rapport. C'est
une démarche qui impliquait les payeurs
privés, les assureurs privés, l'AQPP, l'ordre, et l'ordre a commandé avec
l'appui des autres regroupements une étude au Dr Montmarquette.
M. Lisée : Voilà. Alors donc, l'ordre a fait tout ce qu'il
devait faire. Ce n'était pas de négocier des honoraires. Ça, c'est votre travail à vous. Ça fait que, là, on a
abordé ça. Alors, si quelqu'un avait le mauvais goût d'accuser l'ordre
de faute morale, il serait pas mal le champ.
Je pense qu'on s'entend là-dessus? Par
ailleurs, si quelqu'un considérait
que cet interfinancement était scandaleux, ils auraient eu le pouvoir de
faire... Disons, un ministre de la Santé, le ministre libéral de la Santé, Yves Bolduc, en 2010, 2011, 2012, s'il avait
considéré qu'il se passait quelque chose de scandaleux, aurait été
moralement conduit à intervenir. Est-ce qu'il l'a fait?
M.
Thiffault (Jean) : À
l'époque, on se rappelle que l'origine de ça, c'est la perte des allocations
professionnelles qui a poussé l'écart entre
le privé et le public. Et les pertes encourues par les pharmaciens, il y aurait
eu des promesses de compensation comme en Ontario, et on attend toujours
le chèque. Donc, il y a eu un non-réinvestissement qui nous a amenés à
l'augmentation des...
M. Lisée : D'accord. On a un nouveau ministre de la Santé depuis avril 2014, donc bientôt deux ans. Alors donc, il est responsable d'empêcher que des scandales et
des fautes morales soient commises sous sa gouverne. Est-ce que, de quelque façon que ce soit, il est intervenu auprès
de vous ou auprès de l'ordre pour dire que cet interfinancement était
scandaleux, moralement répréhensible et qu'il fallait intervenir pour que ça
s'arrête?
M. Thiffault (Jean) : Non.
M. Lisée : Non. O.K. Alors
là, on va parler d'une autre faute morale. Alors, en mai dernier, vous avez eu
des négociations avec le ministre
actuel de la Santé, qui vous a
dit : Vous devez rembourser à l'État 133 millions de dollars
par année. Vous avez dit : Si vous
faites ça, M. le ministre, vous allez pousser des pharmacies à la faillite,
vous allez réduire le nombre d'heures travaillées. Et, ce matin, vous
nous donnez un sondage scientifique de Léger auprès de 850 de vos 1 800
pharmaciens qui dit qu'en fait il y a près de 1 000 emplois de moins
depuis mai dernier au Québec à cause de l'action du ministre de la Santé — c'est
bien ça? — ...
Une voix : Oui.
M. Lisée : ...et que, dans la moitié des pharmacies du Québec,
il y a six heures d'ouverture de moins à cause de l'action du ministre de la Santé. C'est
bien ça? Le ministre de la Santé, dans les négociations avec vous, il
vous avait promis une compensation à l'époque, qu'est-ce que c'était?
M. Thiffault (Jean) : Vous voulez
dire pour...
M. Lisée : Pour compenser la
ponction de 133 millions, que devait-il faire?
M.
Thiffault (Jean) : C'était
le déplafonnement. C'était la seule condition qui a été acceptable pour les
pharmaciens propriétaires d'accepter
des coupures de leurs honoraires, c'est un déplafonnement complet. Et ce
déplafonnement-là...
M. Lisée : Déplafonnement complet des allocations professionnelles qui sont payées
par les compagnies génériques?
M. Thiffault (Jean) : Exactement,
pour nous aider à refaire le modèle d'affaires des pharmaciens et le mode de
rémunération des pharmaciens au bout de trois ans.
M. Lisée : D'accord. Quelle était la nature de son engagement? Il vous a
dit : Je vais vous couper en mai. C'est ça?
M. Thiffault (Jean) : Avril.
M. Lisée :
Puis je vais déplafonner quand les allocations?
M.
Thiffault (Jean) : Il n'y a
pas eu de date. Ce qu'on nous a dit, c'est qu'il y avait un processus
qui suivait son cours.
M. Lisée : Et est-ce qu'il vous a donné une idée de la
saison, ou de l'année, ou de la décennie pendant laquelle ce serait
fait?
M. Thiffault (Jean) : Ça s'en vient.
M. Lisée : Ça s'en vient.
M. Thiffault (Jean) : C'est ce
qu'on...
M. Lisée : Alors, est-ce que
ça a été fait en juin?
M. Thiffault (Jean) : De?
M. Lisée : De 2015.
M. Thiffault (Jean) : Non.
M. Lisée : Juillet?
M. Thiffault (Jean) : Non.
M. Lisée : Août?
M. Thiffault (Jean) : Non.
M. Lisée : Septembre?
M. Thiffault (Jean) : Non.
M. Lisée : Octobre?
M. Thiffault (Jean) : Non.
M. Lisée : Novembre?
M. Thiffault (Jean) : Non.
M. Lisée : Décembre?
M. Thiffault (Jean) : Non.
M. Lisée : Janvier 2016?
M. Thiffault (Jean) : Non.
M. Lisée : Février 2016?
M. Thiffault (Jean) : Non.
M. Lisée : Mars 2016?
M. Thiffault (Jean) : Non.
M. Lisée : Donc, pour l'instant, là, ce que vous nous dites,
c'est que le ministre de la Santé vous a promis d'agir avec diligence, sans date, en sachant que le processus
prend 90 jours normalement — c'est
un processus réglementaire — mais que, là, il y a plusieurs fois 90 jours qui sont passés, que des
pharmaciens mettent à la porte chaque semaine des personnes partout au
Québec, que les heures de pharmacie...
M. Thiffault (Jean) : Refinancent,
refinancent leur pharmacie.
• (12 h 20) •
M. Lisée : Et, si
ça continue comme ça en avril, mai, juin, juillet, août qui s'en viennent,
est-ce qu'il va y avoir plus de pertes d'emploi et moins d'heures
disponibles?
M. Thiffault
(Jean) : On ne peut pas prévoir l'avenir, mais ce que je sais, c'est
que chacun des trimestres de l'année, de par
les plafonds qui ont été négociés, sont plus coûteux, le deuxième plus que le
premier, le troisième plus que le deuxième, et ainsi de suite. Donc,
plus on avance, plus les coupures sont importantes en termes de dollars. Donc,
l'impact va être encore plus grand.
M.
Lisée : Et n'est-il pas vrai que, comme vos pharmaciens,
pensant que le ministre n'avait pas fait de faute morale en promettant
le déplafonnement, donc l'arrivée de fonds compensatoires, se sont dit :
Bien, c'est juste que ça prend du temps, et donc se sont endettés à hauteur de
60 millions de dollars auprès des banques maintenant en attendant le déplafonnement, et que, si le déplafonnement ne
vient pas, en fait, cet endettement-là, il va falloir qu'ils le
remboursent, et que, donc, n'ont fait que reporter la sévérité des réductions
d'emplois et des réductions d'heures d'ouverture?
M. Bourcier (Jean) : C'est évident que les emprunts additionnels que les pharmaciens ont dû
aller contracter, c'est des emprunts
ce que j'appelle le fonds de roulement, donc pour venir compenser un manque à
gagner au niveau de leur fonds de
roulement. Donc, ça veut dire que, quelque part, si la situation ne s'améliore
pas au cours des prochaines semaines
et mois, ces emprunts-là devraient, normalement, augmenter. C'est des emprunts
de fonds de roulement, c'est ce que
j'appelle pour payer l'épicerie. Et, subséquemment, les mesures logiques de
tout entrepreneur, de tout gestionnaire, c'est de dire : Est-ce que je peux encore couper du personnel?
Est-ce que je peux encore couper des dépenses à l'intérieur de mon
organisation pour pouvoir pallier à soit des emprunts additionnels, soit des
pertes additionnelles?
M.
Lisée : Dans une étude que vous aviez... Parce que le ministre
savait tout ça, là. Vous lui aviez dit que ça allait arriver, je lui avais dit que ça allait arriver.
On a posé des questions en Chambre, il y avait déjà des signes avant-coureurs,
des fermetures dans certaines régions. Et
vous aviez sorti une étude montrant que le quart, si ça devait être
permanent, le quart des pharmacies passeraient en bas de leur point de
rentabilité au Québec. Vous maintenez ça?
M. Bourcier (Jean) : Oui. Nous, on vous a rencontré, on a rencontré le cabinet du ministre
pour présenter notre étude économique
l'année passée qui indiquait clairement que 15 % des pharmacies
québécoises faisaient peu ou pas de profits,
pour ne pas dire pas de profits, et qu'un autre 10 % faisait très peu de
profits. Et on avait souligné à ce moment-là que les ponctions de 163 millions par année étaient pour fragiliser
de façon importante la pharmacie de détail au Québec, dont ce 25 %
là, effectivement.
M.
Lisée : Donc, le ministre libéral actuel de la Santé met à
risque la survie d'une pharmacie sur quatre au Québec?
M. Bourcier
(Jean) : Actuellement, c'est le cas.
M. Lisée :
Et, comme il vous avait promis dans la négociation au printemps dernier qu'il y
aurait, de façon normalement assez rapide,
donc les trois mois que ça prend pour un règlement... pourquoi est-ce qu'on ne
dirait pas que c'est une faute morale de la part du ministre de ne pas
avoir respecté son engagement envers vous?
M. Thiffault (Jean) : Vous me permettrez de ne pas la commenter, la... si c'est une faute ou
pas. Nous, ce qu'on voit, c'est la
situation chez les pharmaciens, situation d'insécurité. Surtout avec le projet
de loi n° 81, le déplafonnement, ça veut dire quoi pour le futur? C'est quoi, la valeur des médicaments
génériques? Comment ça va nous affecter? C'est quoi, la valeur des pharmacies? C'est quoi, la rentabilité
d'une pharmacie dans un an, deux ans, trois ans? Cette insécurité-là,
là, elle est assez difficile à vivre.
M.
Lisée : Alors, parlons-en. Alors, dans le projet de loi qui est
déposé, le ministre ne s'intéresse qu'aux appels d'offres, il ne s'intéresse à aucun autre moyen de réduire le prix des
médicaments. Et vous en avez proposé, des moyens. Puis, si j'ai le temps, je vais y revenir. Mais là
il dit : Finalement, cette idée de vous permettre d'utiliser un
déplafonnement des allocations
professionnelles des fabricants génériques pour vous refaire de la coupe que je
vous ai imposée, ce n'est peut-être pas une très bonne idée parce que je
voudrais la mettre dans mes poches, hein? Un autre mémoire a montré que c'était 200 millions de dollars par
année, à peu près, que ça voulait dire comme revenus pour les pharmaciens,
puis ces 200 millions là, je voudrais
les mettre dans la poche de l'État par les appels d'offres. Ah! je ne suis pas
contre, mais il vous a enlevé 133 millions, et là il vous propose
de vous enlever 200 millions de plus par année. Là, ce n'est pas une
pharmacie sur quatre qui va faire faillite, c'est beaucoup plus que ça.
Est-ce
que, dans vos discussions avec le ministre, il a déjà évoqué de quelque façon
que ce soit comment il va faire, s'il vous enlève ce 200 millions supplémentaire,
pour vous garder ouverts?
M. Thiffault
(Jean) : Non. C'est d'où l'intervention du discours aujourd'hui. Donc,
le ministre a la liberté de prendre les mesures pour baisser les prix des
médicaments, mais, ultimement, il y a toujours des impacts sur le pharmacien.
On demande à être compensés pour les pertes éventuelles.
M. Lisée : Moi,
personnellement, je vais vous dire, je suis un généraliste dans ce dossier-là,
il me semble que les pharmaciens devraient être rémunérés correctement pour
leur travail et qu'on devrait valoriser les actes cliniques que nous voulons qu'ils performent de plus en
plus, et que c'est ça qui doit être valorisé, et qu'on doit revoir
complètement la rémunération des pharmaciens pour cette question d'interfinancement,
cette question d'opacité, cette question de ristourne
qui devrait, d'après moi, être abolie, effectivement, revenir dans le prix du
médicament, mais en formulant une autre façon de rémunérer correctement
le pharmacien.
M.
Thiffault (Jean) : C'est notre
souhait le plus ultime. Il y a encore des nouvelles activités que les
pharmaciens pourraient faire qu'ils ne
peuvent pas faire en ce moment au Québec, la vaccination — partout en Amérique du Nord, les pharmaciens vaccinent, ici, ce n'est pas le
cas — la
consultation pharmaceutique. Les pharmaciens veulent être payés pour
faire de la pharmacie, pas pour acheter des médicaments.
M. Lisée :
Si on avait un projet de loi sérieux qui voulait réduire les coûts et aider les
patients au lieu de fermer une pharmacie
sur quatre, là, on mettrait le fait que les pharmaciens peuvent vacciner.
Est-ce qu'on mettrait aussi le fait que les pharmaciens peuvent et, même, doivent, comme en Ontario, rencontrer
leurs patients à tous les trois mois, ou six mois, ou selon un protocole
pour voir si leur médication est adéquate et, en plusieurs cas, la réduire?
M. Thiffault (Jean) : On investit
beaucoup, hein, en budget de médicaments, mais très peu pour s'assurer qu'on a l'usage optimal. Et c'est une des conclusions
du mémoire, là, je veux dire, je pense que ça serait important
d'investir dans l'usage optimal, dans le
travail interprofessionnel. On a des nouveaux prescripteurs. Les pharmaciens
prescrivent, les infirmières prescrivent maintenant. Il faut coordonner, ça
prend un coordonnateur de ce travail interprofessionnel là. Et un médicament
qui est mal utilisé, c'est un médicament qui est dépensé absolument pour rien,
c'est un...
M. Lisée : Combien on pourrait économiser, là? Pour chaque
dollar mis dans ce qu'on appelle le MedsCheck, combien est-ce qu'on
économiserait?
M.
Thiffault (Jean) : Je n'ai
pas l'information, malheureusement, mais, après un MedsCheck, habituellement,
il y a toujours deux ou trois médicaments qui sont cessés. Une modification
pourrait améliorer l'efficacité. Donc, si on additionne
le coût du médicament arrêté, le coût des problèmes sauvés dans le futur
et le meilleur traitement... Je
pense que les coûts sont importants, c'est rentable. C'est rentable.
M. Lisée : Alors, si on mettait dans ce projet de loi ci immédiatement la capacité pour les pharmaciens de
vacciner, la capacité pour les pharmaciens — ou même l'obligation — de faire le MedsCheck, on a la certitude
qu'en dedans de trois mois on ferait des économies sur le budget de la
santé général.
M. Thiffault (Jean) : Sur le budget,
effectivement. Je pense que oui.
M. Lisée : Il y a une autre
chose qui n'est pas dans le projet de loi qui aurait pu y être — ...que
le ministre ne prend pas de notes — c'est le fait que les génériques coûtent
moins cher que les innovateurs et que plus vite on inscrit un générique sur la liste des médicaments
disponibles, plus vite on fait une économie. Alors, en ce moment, à quel
rythme est-ce que le ministre de la Santé actuel les inscrit dans la liste des
médicaments disponibles?
M. Thiffault (Jean) : Chaque
parution de liste, c'est plus qu'en Ontario, où c'est quelques jours.
M. Lisée : En Ontario, c'est
quelques jours. Et, ici, c'est une fois par?
M. Thiffault (Jean) : Trois mois,
peut-être.
M. Lisée : Une fois par trois
mois. Donc...
M. Thiffault (Jean) : Non, il y en a
plus que ça, il y en a peut-être plus, il y en a cinq ou six, puis là, je vous
dirais, par coeur.
M. Lisée : Donc, on pourrait
immédiatement faire des économies substantielles en faisant comme l'Ontario
là-dessus?
M.
Thiffault (Jean) : Il y a
des mécanismes pour les médicaments qui sont très dispendieux ou dont le
volume est très grand qui permettent des économies, il y a des «fast track»,
mais, en général, c'est un peu plus long que ce qui se fait ailleurs.
Le Président (M. Tanguay) : Merci
beaucoup.
M. Lisée : Merci beaucoup.
Le
Président (M. Tanguay) :
Merci. Alors, nous cédons la parole maintenant au collègue de Lévis pour
10 minutes.
M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. M. Thiffault,
M. Bourcier, Mme Crête, M. Larouche, merci d'être là.
Retour
rapide sur un sondage que vous présentez aujourd'hui sur les impacts actuels
parce que vous comprendrez que le
sondage, c'est le portrait de l'état de la situation au moment où l'on se parle
en ce 9 mars avec des impacts majeurs. Vous nous parlez de pertes d'emploi, bien sûr, mais d'heures d'ouverture
hebdomadaires coupées depuis septembre en fonction de ce dont on a parlé, tout l'aspect financier de l'affaire. Et
vous ajouterez également que la moitié des pharmacies a réduit les heures de travail des pharmaciens,
53 %; les assistantes techniques, 47 %, dans les pharmacies, les
infirmières également. On a diminué les contributions à des organismes. En tout
cas, des impacts financiers actuels.
Advenant
que le projet de loi devienne loi et qu'on fonctionne en fonction de ce qui est
prévu dans le projet de loi, ces
impacts-là que l'on constate aujourd'hui, une analyse projective pour tenter de
vous dire... est-ce que ça risque d'être pire? On s'en va vers un scénario qui risque de rendre ces chiffres-là
caducs et vers une situation encore plus dramatique?
M. Bourcier (Jean) : Oui, je vous dirais que oui. Les tendances semblent l'indiquer, les
pharmacies qui ont des difficultés de fonds de roulement n'auront pas
moins de difficultés de fonds de roulement dans un mois, deux mois, trois mois
si la situation persiste. Absolument.
• (12 h 30) •
M. Paradis (Lévis) : Dans la mesure où le projet de loi prévoit des appels d'offres — comprenons le principe parce que des gens sont peut-être moins familiers
avec le processus de la ristourne ou des allocations professionnelles
également — les
gens devront comprendre que, s'il y a appel d'offres, sur les médicaments sur
la liste où il y aura appel d'offres, bien,
évidemment, vous dites à ce moment-là : On perd l'avantage des allocations
professionnelles, qui nous permettent aujourd'hui — puis
je le mets entre guillemets, mais c'est ce que vous dites un peu — de
survivre.
M. Thiffault (Jean) : ...qui font partie de notre rémunération, qui sont partie intégrante de
notre rémunération.
M. Paradis (Lévis) :
Et dont vous vous servez ensuite pour...
M. Thiffault
(Jean) : Donner des services.
M. Paradis
(Lévis) : ...donner des services, mais aussi qui peut s'appliquer sur
la masse salariale ou etc...
M. Thiffault
(Jean) : Exactement. Oui, c'est ça.
M. Paradis
(Lévis) : ...à bon escient dans... C'est votre fonds de roulement, ça
fait partie de vos revenus.
Et,
si les appels d'offres sont limités à peu de molécules, est-ce que les gens
doivent comprendre que le principe de l'allocation
déplafonnée, lorsqu'elle sera effective — ce qui n'est pas le cas, là, manifestement,
vous nous le dites — fait en sorte que les pharmaciens recevront
quand même, dans le meilleur des mondes, une allocation déplafonnée sur les
médicaments qui ne font pas partie de l'appel d'offres?
M. Thiffault
(Jean) : Oui, effectivement. Par contre, il faut savoir que les 10 ou
20 premières molécules représentent une
portion significative. Les molécules qui seront visées par les appels d'offres,
évidemment, sont celles sur lesquelles
il y a plus de volume. Donc, si on se retrouve juste avec les fonds de liste,
on n'ira pas loin avec ça, là, ce n'est pas...
M. Paradis
(Lévis) : Alors, précisons-le parce que c'est important.
M. Thiffault
(Jean) : Vous comprenez, c'est ça, là.
M. Paradis
(Lévis) : Quand bien même on aurait pris une molécule en disant :
Oui, mais, dans le fond, l'allocation
viendra sur les autres produits, considérant qu'il y en ait peu, si c'est sur
les plus fréquemment utilisés et sur un volume majeur, l'impact
financier sera quoi à ce moment-là? Ça revient...
M. Thiffault
(Jean) : Bien, on disait : Pour les 10... Bien, vas-y.
M. Bourcier (Jean) : Oui, on disait : Pour les 10... On a fait une analyse pour 2015,
les 10 molécules les plus fréquemment prescrites, si elles étaient
exemptes d'allocations professionnelles, il y aurait un manque à gagner de
36 millions pour les pharmaciens pour les 10 plus importantes molécules.
M. Paradis (Lévis) : Et votre analyse vous pousse à croire, évidemment, que ces molécules à
grand volume sont celles sur
lesquelles on voudrait, effectivement, aller chercher des économies, donc des
appels d'offres. Donc, le manque à gagner se chiffrerait à peu près à
ça.
M. Bourcier
(Jean) : La logique voudrait que.
M. Paradis (Lévis) : Je reviens encore au projet de loi parce que vous dites : Oui, il
y a cet aspect-là de survie de l'entreprise.
Puis vous le dites dans vos documents, vous le dites dans le sondage également,
vous dites en fin de sondage que le
pharmacien, bien, c'est un professionnel, mais c'est aussi un entrepreneur, et
vous avez cette vision-là qui est très importante...
M. Thiffault
(Jean) : Deux chapeaux. On a toujours deux chapeaux :
professionnel et entrepreneur.
M. Paradis
(Lévis) : ...qu'il a deux
chapeaux, ce qui ne rend pas nécessairement les choses faciles parce que
ce n'est pas toujours facilement compatible.
M. Thiffault (Jean) : Effectivement,
oui.
M. Paradis
(Lévis) : Vous direz dans
votre rapport qu'il y a d'autres dangers que ça. Et là je m'en vais en
page 12, notamment, où vous citez le
Commissaire à la santé et au bien-être dans un document de 2013, où vous
direz : Les appels d'offres, il
y a d'autres problèmes que ça. «Les appels d'offres comportent toutefois des
risques. Susciter une concurrence féroce peut faire décliner
l'industrie, mener à l'affaiblissement des concurrents à long terme et causer
possiblement la collusion entre les
fabricants.» Et là vous écrivez : «Encore plus important, les appels
d'offres peuvent dissuader les fabricants
de génériques de contester les brevets non valides, ce qui peut retarder
considérablement l'arrivée de génériques sur le marché et mener à des
prix beaucoup plus élevés...»
J'aimerais que vous nous expliquiez parce que,
lu comme ça, c'est inquiétant.
M.
Thiffault (Jean) : Bien, un
endroit où ce n'est pas invitant de faire des affaires, effectivement, les
compagnies ne se précipiteront pas. On va
parler beaucoup de Nouvelle-Zélande aujourd'hui, l'atorvastatine, l'équivalent
du Lipitor, qui est le médicament le
plus vendu dans le monde, est arrivé deux ans après en Nouvelle-Zélande.
Partout ailleurs dans le monde, le
médicament était disponible. Donc, pendant deux ans, les Néo-Zélandais n'ont
pas bénéficié des escomptes parce que ce n'était pas un territoire
invitant pour les compagnies génériques. Donc, il y a des impacts comme ça.
Il y a des fabricants locaux aussi, de plus petite
envergure, qui ne pourront pas, probablement, traverser cette période-là parce
qu'ils ne sont pas assez gros pour gagner les appels d'offres ou ils vont avoir
perdu leur marché complètement.
M. Paradis
(Lévis) : Je comprends cet
impact-là, cette logique-là que vous nous exposez, mais il y a un
impact, puis l'impact, il est au consommateur également, l'impact, il est sur
le patient.
M.
Thiffault (Jean) : Oui,
absolument. Bien, nous, ce qu'on dit, c'est qu'il y a moyen de préserver
l'impact sur le patient et d'avoir
des prix compétitifs, et c'est d'utiliser la tarification dégressive. La
tarification dégressive, c'est que plus le médicament a un gros volume, plus bas est son pourcentage par rapport au
prix de l'original, donc moins il est coûteux. Donc, un médicament comme l'atorvastatine serait assez bas par rapport à
un autre médicament qui est peu utilisé. Donc, plus il y a du volume, plus on met de compétition, plus le prix est bas,
mais tout le monde paie le même prix. Donc, il y a moins de danger de risque d'approvisionnement, il
y a moins de danger... Ça respecte toutes les structures, les
grossistes... Les économies sont là, sont régulières, sont pérennes. Et c'est
tellement le bon modèle que c'est ce que l'Alliance pancanadienne pharmaceutique
fait, et avec un effet très marquant au niveau des baisses de prix.
M. Paradis (Lévis) : Il y a un
impact au consommateur, il y a un impact financier, il y a un impact d'affaires
et un impact aussi pour le gouvernement, c'est un régime public. Il y a un
impact, tout est intimement lié.
M. Thiffault (Jean) : Oui. Oui,
absolument.
M. Paradis (Lévis) : C'est ce que
vous dites, c'est-à-dire que ça peut causer des torts.
M. Thiffault (Jean) : Bien, les
appels d'offres mal faits juste en Nouvelle-Zélande, en 2015 seulement, c'est
15 molécules qui ont été manquantes, et des molécules qui sont prises, si on
faisait l'équivalent au Québec, par à peu près 800 000 Québécois.
M. Larouche
(Daniel) : En fait, je
voudrais juste apporter une précision là-dessus. Depuis 15 mois, il y a 14 molécules qui ont connu des problèmes
d'approvisionnement en Nouvelle-Zélande, dont une qui est
l'atorvastatine justement, là, le Lipitor,
qui a été en pénurie carrée, là, ils en ont manqué. Juste le Lipitor, juste
l'atorvastatine, dans le régime public, là, je ne vous parle pas des
régimes privés, il y a 450 000 Québécois qui prennent ce
médicament-là. L'ensemble des 14 molécules, ça touche, de fait,
775 000 Québécois. Alors, des pénuries là-dedans, ce n'est pas des
pénuries qui touchent des consommateurs à la marge, là, ça touche en plein
coeur du régime.
J'ai un
article avec moi, en février, en Nouvelle-Zélande, ils ont des problèmes
d'approvisionnement avec 10 molécules
de front. Alors, ce n'est pas un problème inventé, là. Puis ce n'est pas un
problème non plus, là, la fin du monde, là, mais c'est beaucoup de sable
dans l'engrenage, et ça complique la vie de tout le monde, à commencer par le
patient.
M. Paradis (Lévis) : Dans un
modèle... Oui...
M.
Bourcier (Jean) : Non,
peut-être juste un commentaire pour informer les parlementaires. L'an dernier,
sans régime d'appels d'offres, les
pharmaciens propriétaires ont dû gérer une centaine de ruptures de stock dans
leurs pharmacies, et on le sait parce que c'est des circulaires qui nous
proviennent de la Régie de l'assurance maladie du Québec
qui nous informent d'une rupture de stock d'une molécule. Moi, je les vois
passer, là, il y en a à tous les deux jours, à peu près, qui passent. Puis là
ça n'a rien à voir avec des appels d'offres, là, de façon courante, là, il y a
de la rupture de stock déjà dans le système.
M. Paradis
(Lévis) : Alors, vu comme ça
puis à courte vue, on pourrait dire : Oui, mais vous le vivez déjà,
donc ça va changer quoi? Bon. Mais, dans
votre prétention, c'est de dire : Si on en a ce nombre-là maintenant,
pensons à ce qui peut arriver à la lumière de ce vous vivez puis nous
exprimez.
M. Bourcier (Jean) : Exactement.
Exactement.
M. Thiffault (Jean) : Effectivement,
c'est ça. Donc, le ministre décidera de la façon qu'il veut y aller, mais il y
a des risques, c'est clair, clair, clair.
M. Paradis
(Lévis) : L'Alliance
pharmaceutique pancanadienne, vous venez d'en parler également, vous
avez dit : Ça existe, là. Parce que,
tout à l'heure, vous dites : Ça, on a des problèmes financiers, là, mais,
au-delà de ça, on peut faire des
économies. Vous en convenez, il y a des économies à aller chercher dans le
créneau, puis dans le scénario, et dans l'organigramme. L'Alliance pancanadienne, hier, on en a aussi parlé, où
des gens disaient : Il y a moyen de faire plus, on pourrait être
plus agressifs. On arrive, là, à une renégociation, c'est très bientôt, et, à
ce chapitre-là, on peut faire du chemin qui donnerait les résultats escomptés.
Bon, parlez-moi de votre vision de ça.
M. Thiffault (Jean) : Bien,
l'Alliance pancanadienne, ce n'est pas... Premièrement, les compagnies qui sont
disponibles ici, elles travaillent au niveau
national et international. Donc, on ne peut pas avoir une solution efficace
si elle n'est pas nationale, ce n'est pas... Le Canada, c'est un pays, mais
c'est 10 acheteurs différents. Donc, ça prend une organisation centrale pour être sûr que les répercussions soient bien
comprises dans toutes les provinces. Il y a des clauses qui
restreignent, comme, par exemple, la clause du... voyons! privilégiée, là,
du...
Une voix : La nation
favorite.
M.
Thiffault (Jean) : ...«the
most favorite nation», où, s'il y a un prix qui baisse à quelque part au pays,
le Québec va avoir ce prix-là aussi.
Mais, si une compagnie veut faire un appel d'offres dans une province, sachant
que ça va lui causer des problèmes
dans les autres provinces, bien, elle ne donnera pas son prix le plus agressif,
elle va se garder une petite gêne parce
qu'elle sait qu'il va y avoir des impacts. Donc, il faut regarder ça au niveau
national, et l'agressivité du Dr Barrette à l'Alliance pancanadienne
serait probablement nettement plus efficace tout en faisant parler ensemble
tous les intervenants du milieu de la santé et du médicament.
Le
Président (M. Tanguay) :
Merci. C'est, malheureusement, tout le temps dont nous disposons. Alors,
nous remercions les représentants de l'Association québécoise des pharmaciens
propriétaires.
Compte tenu de l'heure, je suspends les travaux jusqu'à
15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 39)
(Reprise à 15 h 11)
Le
Président (M. Tanguay) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Je demande à toutes
les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de vos
téléphones cellulaires.
Et nous
allons donc poursuivre les consultations
particulières et auditions publiques
sur le projet de loi n° 81, Loi visant
à réduire le coût de certains médicaments couverts par le régime général
d'assurance médicaments en permettant le recours à une procédure d'appel
d'offres.
Je souhaite la bienvenue aux représentants de
l'Association canadienne du médicament générique, qui vont maintenant nous
adresser la parole. Vous disposez d'une période de 10 minutes. Pour les fins
d'enregistrement, s'il vous plaît, bien prendre soin de préciser vos noms, également
vos fonctions. Et voilà, alors la parole est à vous.
Association canadienne du médicament générique (ACMG)
M. Keon
(Jim) : Merci, M. le Président. Mon nom, c'est Jim Keon. Je suis le président de l'Association
canadienne du médicament générique.
M.
Robidoux (Michel) : Mon nom
est Michel Robidoux. Je suis président et directeur général de Sandoz
Canada.
M. Charron
(Daniel) : Mon nom est
Daniel Charron. Je suis directeur pour le Québec de l'Association
canadienne du médicament générique.
M. Goulet (Jean-Guy) : Bonjour. Mon
nom est Jean-Guy Goulet. Je suis président d'Actavis Canada.
M. Goodman
(David) : Mon nom est David Goodman. Je suis chef de la direction de
Pharmascience.
M. Keon
(Jim) : M. le ministre, M. le Président, Mmes et MM. les députés et membres de la commission,
avant tout, j'aimerais remercier la Commission de donner l'occasion à l'Association canadienne du médicament générique,
que je représente, de prendre la parole aujourd'hui. En plus de ceux qui sont assis à cette table avec moi, j'aimerais
également souligner la présence dans cette
salle de représentants d'autres membres de notre association et, surtout, de
Mylan Canada. Alors, nous sommes ici avec plusieurs compagnies aujourd'hui.
Aujourd'hui, j'inviterais Daniel Charron,
directeur Québec de l'ACMG, à poursuivre cette présentation, qui s'inspire largement du mémoire que nous avons fait
parvenir au secrétariat de la commission il y a quelques jours. Daniel.
M. Charron
(Daniel) : Merci, Jim. Notre association représente les plus
importants fabricants de médicaments génériques
auprès de tous les paliers de gouvernement, y compris auprès de l'Alliance
pancanadienne pharmaceutique, l'APP.
Au Québec seulement, notre industrie représente aujourd'hui plus de 4 000
emplois directs, auxquels s'ajoutent des
milliers d'emplois indirects que l'industrie supporte. Les principaux moteurs
de l'industrie au Québec sont assis à côté de moi : Pharmascience,
avec ses 1 500 employés à Montréal, et Sandoz, avec ses 900 employés sur
la Rive-Sud de Montréal, à Boucherville.
Nous comprenons l'objectif du ministre de faire
baisser les coûts en santé ou, à tout le moins, en contrôler la croissance, et les médicaments génériques, qui se
vendent quatre, cinq fois moins cher que les médicaments de marque, font leur part dans l'atteinte de cet objectif.
Après avoir accusé un retard important, le Québec a effectué un
rattrapage remarquable au cours des
dernières années. Aujourd'hui, plus de 70 % des ordonnances sont servies
avec des médicaments génériques, et,
pourtant, ils ne représentent que 22 % de la facture totale du médicament
au Québec, 1,3 milliard de dollars sur une facture totale qui
atteint plus de 6 milliards. Il va sans dire que nous sommes plus la
solution que le problème lorsqu'il est question de réduire la facture des
médicaments au Québec.
Depuis le
premier jour de cette consultation, le ministre lance la période d'échange avec
la même question : Est-ce qu'on paie le meilleur prix possible pour
nos médicaments au Québec? Chaque fois qu'on utilise un médicament de marque alors qu'un médicament générique est
disponible, on paie généralement quatre ou cinq fois trop cher. Donc, on
ne paie pas toujours le meilleur prix possible pour nos médicaments au Québec,
puisque nous payons des médicaments d'origine
plus cher alors que des médicaments génériques moins chers sont disponibles. Et
trop souvent, encore aujourd'hui,
malgré tous les efforts entrepris pour favoriser l'utilisation des médicaments
génériques, dont plusieurs mis en
place par vous-même, M. le ministre, on paie encore le médicament de marque
plutôt que le médicament générique. Je suis
sincèrement étonné que personne n'ait encore soulevé cela depuis le début des
travaux de la commission. Ne pas en parler,
c'est l'équivalent de laisser les fenêtres grandes ouvertes en plein hiver tout
en se plaignant que l'électricité coûte trop cher. C'est porter notre
attention sur le mauvais problème.
Ceci étant
dit et maintenant que j'ai ouvert la porte, est-ce qu'on paie les médicaments génériques plus cher au Québec qu'ailleurs?
Plus cher qu'au Canada? La réponse est non. C'est d'ailleurs le contraire. Le Québec
bénéficie toujours du meilleur prix au Canada, souvent même plus bas qu'ailleurs
au pays. Depuis le début des travaux de la commission, nous avons remarqué qu'une certaine confusion
subsiste encore à ce chapitre. Elle est due au fait de parler du prix des médicaments sans distinguer le prix de la
molécule et l'honoraire du pharmacien. Nous pourrons y revenir, si vous le souhaitez, durant la période de questions. Mais je le répète, le Québec paie
toujours le prix le plus bas au Canada pour ses médicaments génériques.
La grande
question maintenant : Est-ce que les médicaments génériques sont plus
chers au Canada qu'ailleurs dans le monde? Les prix des médicaments
génériques au Canada sont actuellement plus bas qu'ils ne l'ont jamais été et compétitifs vis-à-vis de ce qui se fait ailleurs,
et cela, malgré le fait que plusieurs facteurs font que ça coûte plus cher
de commercialiser un produit au Canada — c'est le cas du médicament
comme pour d'autres produits. Il y a tellement eu d'études sur le sujet, ça a généré beaucoup de confusion, et c'est
pourquoi les provinces canadiennes ont demandé au Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés,
une agence du gouvernement fédéral, de faire la lumière et, un peu, de mettre de l'ordre dans tout ça. Son rapport,
publié il y a quelques semaines à peine, en février 2016, confirme deux
choses importantes pour nos discussions d'aujourd'hui, et l'étude a été faite
avec des données datant de 2014.
La première
chose, c'est qu'en 2014 les prix de détail des médicaments génériques
d'ordonnance ont baissé plus rapidement
au Canada que partout ailleurs dans les marchés de référence. Également,
l'étude nous apprend qu'en 2014 le prix
des médicaments génériques restait supérieur d'environ 19 % au Canada par
rapport à ce qui se fait ailleurs dans le monde. Des progrès notés dans le rapport seraient encore plus
remarquables si l'étude avait été basée sur des données 2015 ou
d'aujourd'hui. Pourquoi? Parce qu'en 2015 les prix ont encore baissé et également
parce que — et
ça, je ne cacherai rien à personne — la devise canadienne s'est dépréciée
significativement depuis deux ans, et, dans une étude où on fait des
comparaisons internationales, la valeur de la devise est un facteur important.
Dans tous les cas, l'analyse démontre hors
de tout doute que les efforts réalisés dans le cadre de l'Alliance
pancanadienne pharmaceutique portent fruit.
Si on faisait l'étude aujourd'hui, compte tenu des deux éléments dont je vous
parlais, les baisses de prix en 2015 et la dépréciation du dollar canadien, je suis assez confiant que nous ne
serions pas loin de la parité avec le prix mondial du médicament
générique.
Ce qui m'amène à une
autre question, quelle est la meilleure façon d'obtenir des économies
potentielles additionnelles? Le projet de loi n° 81 ouvre la porte à des
achats par appel d'offres. C'est une piste qui peut sembler séduisante. À l'échelle d'un seul produit à un
moment précis dans le temps, toutes choses étant égales par ailleurs,
elle peut même avoir l'air efficace. Mais il
ne faut pas se laisser leurrer. Si, parfois, on peut obtenir un meilleur prix
par un appel d'offres, c'est parce
qu'on donne un monopole à un fournisseur et que c'est le gouvernement, les
professionnels de la
santé et les patients qui doivent assumer tous les risques qui viennent avec
ça. Je ne suis pas le premier à parler ici des risques associés aux appels d'offres, mais j'aimerais revenir sur
certains aspects qui sont détaillés dans notre mémoire.
Premièrement,
les appels d'offres menacent la stabilité des approvisionnements. Non seulement
plusieurs le disent devant cette
commission ou ailleurs, mais l'expérience le démontre. Aujourd'hui, en
Nouvelle-Zélande, le pays le plus souvent montré en exemple pour parler
des appels d'offres, il y a une pénurie d'atorvastatin, le générique du
Lipitor, le ou l'un des médicaments les plus
prescrits au Canada, offert par une panoplie de fournisseurs. On peine à
imaginer même qu'on puisse avoir une
pénurie ici, au Canada, et pourtant l'attribution d'un contrat par appel
d'offres à un fournisseur unique a
créé un monopole et incité les autres fabricants à se retirer du marché.
Résultat? Une rupture de stock isolée s'est transformée en des pénuries
récurrentes et difficiles à gérer depuis plusieurs mois.
Deuxièmement,
les appels d'offres dissuadent le lancement rapide de nouveaux médicaments
génériques. Avant d'investir en recherche et développement ou en
contestation d'un brevet, un fabricant a besoin d'un environnement stable, prévisible et cohérent. Là encore, la
Nouvelle-Zélande offre un exemple intéressant, puisque les versions
génériques y sont commercialisées souvent
beaucoup plus tard qu'au Canada : deux ans plus tard pour l'atorvastatin,
dont je viens de parler, et jusqu'à
quatre ans pour l'olanzapine et le venlafaxine. Ces retards forcent les
Néo-Zélandais à payer le prix très fort
pour plus longtemps pour le médicament de marque, vendu beaucoup,
beaucoup plus cher. Si on faisait le calcul, ce n'est pas gagnant pour la
Nouvelle-Zélande au final, sans parler du fait qu'il n'y a pas d'emplois
manufacturiers en pharmaceutique en Nouvelle-Zélande, pas d'investissement, pas
de recherche et développement, pas d'exportation et moins de produits
disponibles.
• (15 h 20) •
J'aimerais maintenant
tourner notre attention vers l'Alliance pancanadienne pharmaceutique, dont le
Québec est maintenant membre. L'objectif de l'Alliance pancanadienne
pharmaceutique est de maximiser les économies en obtenant le meilleur prix possible pour les médicaments tout en limitant
au minimum les impacts sur l'approvisionnement pour éviter notamment des
pénuries de médicaments. Dans le cadre d'une entente entre l'Alliance
pancanadienne pharmaceutique et l'ACMG
intervenue en 2013, nous avons mis en place des baisses de prix ciblées sur les
molécules les plus vendues. 18 molécules,
qui représentent presque le tiers du marché des médicaments génériques, sont
maintenant vendues à 18 % du prix du
médicament de marque. C'est 82 % de rabais par rapport aux médicaments de
marque. Dans cette même entente, nous
avons défini un cadre de prix régressif pour tous les médicaments génériques.
Ça veut dire que le prix baisse
lorsque les conditions le permettent tout en protégeant l'approvisionnement des
médicaments offerts par un ou deux
fournisseurs seulement. L'ACMG est l'interlocuteur unique de l'industrie
du médicament générique auprès de l'Alliance pancanadienne
pharmaceutique depuis plusieurs années. Il nous fera plaisir de répondre aux questions
des membres de la commission sur comment les choses se passent de ce côté.
Si nous revenons à
notre objectif de départ, soit de réaliser des économies, notre mémoire
contient plusieurs propositions inspirées de ce qui se fait le mieux ailleurs au
Canada et dans le monde et qui n'ont aucun effet secondaire indésirable. Et je vous invite à lire à ce sujet
le rapport Compas Rx, du Conseil d'examen du prix des médicaments
brevetés, publié en mars de l'an dernier. Ce
rapport explique que le facteur qui exerce le plus d'influence sur le contrôle
des dépenses des régimes publics
d'assurance médicaments est une plus grande utilisation des médicaments
génériques. Pas les prix, notamment parce que le processus déjà mis en
place avec l'Alliance pancanadienne pharmaceutique fonctionne sans chambouler les
équilibres existants.
Pour
ces raisons, l'ACMG recommande au gouvernement de renoncer aux appels d'offres, comme le
propose le projet de loi n° 81 :
deuxièmement, de contribuer aux travaux de l'Alliance pancanadienne
pharmaceutique en s'y investissant et en travaillant de concert avec les
provinces et les territoires au développement et au succès de ses initiatives : et, enfin, d'implanter des
mesures et des incitatifs permettant une utilisation accrue des médicaments
génériques. On vous propose quelques suggestions à ce sujet-là à partir des
pages 18 de notre mémoire. Je vous remercie.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, maintenant, nous
allons débuter la période d'échange pour une période de 18 minutes.
Maintenant, je cède la parole au ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Barrette :
Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, M. Keon, M. Robidoux, M. Charron, M.
Goulet et M. Goodman. Merci d'avoir pris le
temps de venir nous faire part de vos opinions et de nous éclairer sur un
certain nombre de choses dans le
merveilleux monde du médicament générique. Parce qu'évidemment le projet de loi
que l'on étudie aujourd'hui, à propos
duquel vous venez nous entretenir traite, évidemment, d'appel d'offres de
médicaments génériques.
Je
constate que vous avez suivi avec une certaine assiduité nos travaux. Vous
m'avez cité abondamment, là, dans votre introduction, puis vous m'avez
cité exactement, là.
Une voix :
...
M.
Barrette : Vous n'êtes pas dans le club des mal cités, là, vous êtes
dans le club des bien cités. Et, bien, je vais commencer en disant... pas tout de suite en commençant à vous poser la
question que je pose à tout le monde parce que vous y avez déjà répondu. Vous avez déjà, vous aussi, fait allusion,
évoqué et, je dirais même, clairement dit qu'il y a des économies à aller chercher. Vous ne nous dites pas
qu'il n'y a pas de la marge, alors vous nous confirmez, vous aussi,
qu'il y a de la marge.
Quand
je fais le fil conducteur... Parce que ce qui est intéressant, là, je vous
dirais, dans des audiences publiques comme
celle-ci, c'est qu'au fil du temps on finit par pouvoir, évidemment, trianguler
les choses et voir le fil conducteur, le fil conducteur ici étant que — et vous le confirmez — il y a de la marge. Alors, il y a la
possibilité d'aller chercher des économies. Tant mieux pour l'État.
Comme
tout le monde, vous nous informez de votre appréciation des possibilités
d'aller chercher ces économies-là. Vous nous confirmez, comme les
autres... ou vous affirmez que le meilleur véhicule serait l'adhésion à
l'Alliance pancanadienne pharmaceutique.
Alors, ça, ça veut dire, évidemment, que, pour une deuxième fois puis d'une
deuxième manière, il y a un chemin pour aller chercher des économies. Bien, je
suis content d'apprendre ça.
Maintenant — et là je vais vous donner mon appréciation à
moi — à partir
du moment où tout le monde vient me dire
que c'est l'alliance pancanadienne qui est le meilleur chemin par opposition au
projet de loi, bien, je suis obligé de conclure que le projet de loi
devient, pour le milieu, une menace. Et, s'il est une menace, bien, ça se
qualifie, cette menace-là. La menace, ça
veut dire que ça vient perturber un certain équilibre, j'en conviens, là, puis
c'est une évidence. Mais ça vient aussi dire qu'il y a une marge.
Et là le débat qui s'ensuit est un débat de
dire : Bien, est-ce que c'est possible d'utiliser la procédure d'appel d'offres et de trouver le juste appel d'offres qui
va faire en sorte que tout le monde va y trouver son compte? Mais le
juste appel d'offres va manifestement aller
plus loin que le bénéfice potentiel de l'alliance canadienne. C'est ça, la
réalité. C'est ça que vous dites tous,
là. Je ne vous dis pas que vous avez dit ça, mais, quand on met bout à bout,
là, les interventions qui sont faites... Puis je vous remercie de venir,
mais force est de constater que la conclusion qui s'impose, c'est celle-là.
Alors, la question pour moi, là, la première
question que j'aimerais vous poser, là... En fait, j'en ai deux. La première — et je pense que vous y avez répondu :
Est-ce qu'on peut aller faire des économies supplémentaires par rapport
à aujourd'hui? Puis ça, je pense que vous allez me dire oui. Non?
M. Charron
(Daniel) : J'attendais votre deuxième question, là. C'est pour ça que
j'ai hésité avant de répondre.
M.
Barrette : La deuxième question, là, qui est le corollaire de la
première, j'ai souvent, souvent dit, là... En fait, je l'ai dit à chacune des interventions. Ça nous a
été confirmé par tout le monde, et il y en a qui l'ont dit d'une façon
explicite, le merveilleux monde du
médicament générique est un monde dans lequel il y a des étapes. Dans le
cheminement de la matière première,
la molécule, jusqu'au patient, il y a des intermédiaires, et les intermédiaires
font leur profit à chaque étape. Vous
êtes au début de la chaîne. Juste avant vous, là, il y a la matière première,
la molécule, le principe actif du médicament,
et il y en a certains d'entre vous qui en produisez, qui en fabriquez, même ça.
C'est à votre honneur, mais vous êtes au début.
La deuxième
question, elle est simple. Puis, d'ailleurs, je vous offre une opportunité, là,
je vous offre une opportunité. Vous,
là, quand vous regardez le reste de la chaîne, vous êtes au début de la chaîne,
que ce soit horizontal ou vertical,
là. Si vous regardez en haut, ou en bas, ou horizontalement, là, ce qu'il y a
devant vous dans la chaîne, est-ce qu'il
y a des conditions qui feraient en sorte que nous pourrions faire des économies
substantielles, c'est-à-dire par un meilleur
prix? Bien, vous l'avez dit, là, vous n'aimez pas ça, l'appel d'offres. O.K.
Mais vous, là, qui êtes là-dedans, puis vous regardez le reste de la chaîne,
vous n'êtes pas prisonniers de la chaîne, mais ça se peut que vous le soyez,
puis on y reviendra. Mais, quand vous
regardez le reste de la chaîne, là, c'est-u possible d'y trouver votre comte
s'il y avait des conditions de marché différentes, hein — vous
comprenez ce que je veux dire — et s'il y avait des éléments dans ces conditions de marché là, là, qui disparaissaient?
Ça serait-u possible d'imaginer un contexte de marché qui fasse en sorte
que vous y trouviez votre compte et que nous
y trouvions notre compte? En français, là, ou en anglais, là, je peux le
faire dans les deux langues, en avant de
vous autres, là, il y a des éléments qui ont un impact sur le prix à la hausse,
qu'est-ce que vous changeriez? Éclairez-nous, vous avez une opportunité.
• (15 h 30) •
M. Charron
(Daniel) : Je vais commencer avec la première question sur le prix,
puis peut-être que mes collègues voudront
venir m'aider pour répondre aux autres questions. Au niveau du prix, ce qu'il
est important de comprendre, c'est que le cadre qu'on a actuellement, il
a été négocié entre l'Association canadienne du médicament générique et les
ministères de la Santé des autres provinces au Canada. Le prix, là, il est
apparu dans le cadre de cette négociation-là avec
les experts, dans le fond, des différents ministères à travers le Canada, basé,
comme je le disais, sur des référents, des comparatifs de prix mondiaux
qui, aujourd'hui, sont produits par une agence du gouvernement fédéral, dont on
ne peut pas douter de la rigueur, là, au niveau de la comparaison, qui montrent
que le Canada, en termes de prix, est le pays qui, dans les dernières années, a
connu la plus forte décroissance de tous les pays comparés. Ça, c'est une chose
qui est importante pour nous de mentionner.
Vous dites
que les appels d'offres, c'est quelque chose qu'on n'aime pas, qu'on ne
souhaite pas, puis notre mémoire détaille les raisons pour lesquelles on
craint la mise en place d'appels d'offres. Il faut comprendre qu'on est dans
une industrie où, pour poursuivre nos investissements, poursuivre nos
investissements en recherche et en développement, en développement de nouveaux
produits génériques qui vont vous amener les économies plus tard — parce
que, s'il n'y avait pas de médicaments
génériques qui étaient lancés puis qui apparaissaient sur le marché, bien, on
continuerait à payer 100 % du prix d'un
médicament d'origine — pour faire ces investissements-là puis pour faire ce travail de
recherche et développement, ça nous prend une prévisibilité, et les appels
d'offres riment avec l'inverse de la prévisibilité parce qu'on ne connaît pas
le résultat. Donc, pour un fabricant, pour un développeur de produits, il est
difficile de...
M.
Barrette : Permettez-moi de vous interrompre. Je suis d'accord avec ce
que vous dites, je vais dans le sens de ce que vous me dites. Est-ce qu'il y a des conditions... Dans votre
lecture de ce qui est devant vous, là, je pèse mes mots puis je les choisis avec soin, vous êtes au début de la
chaîne, il y a un paquet d'affaires qui se passent après, je vais vous
en donner des exemples. Vous avez des contrats, vous avez des contrats avec les
grossistes, vous avez toutes sortes de conditions
pour avoir accès au marché, vous avez des contrats avec des bannières, vous
avez un paquet d'affaires, là. Vous voulez de la prévisibilité? Parfait.
Mettons que je vous en donne, de la prévisibilité, mettons que je vous en
donne, là, moi, il y en a une, prévisibilité qui est très
prévisible pour moi, je fais un appel d'offres, je vais faire baisser le prix. Est-ce que, vu de votre angle, il y a une
alternative, des conditions qui feraient en sorte que vous y trouveriez votre
compte, et nous y trouverions notre compte,
nous aussi? Parlez-nous de ce qu'il y a après. Parlez-nous de ce qui vous coûte
de plus pour être dans ce marché-là.
Dans les deux derniers jours, là, dans les
derniers jours, on a entendu toutes sortes de choses puis on a vu les gens dire une chose et leur contraire. On a vu des
gens qui ont dit : Non, non, non, il n'y a aucun lien, aucune
contrainte sur les pharmaciens. On a vu les pharmaciens venir nous dire qu'il y
en avait. On en a qui nous ont dit : Non, non, non, il n'y a pas d'avantages, il n'y a pas de
désavantages, non, non, non, il n'y a pas d'obligation. Il y en a d'autres qui
sont venus nous dire exactement le contraire. Moi, je le sais, là, j'aimerais
l'entendre d'une façon plus précise, on finit toujours par le savoir. Est-ce
qu'il y a des conditions qui feraient en sorte que vous y trouveriez votre
compte?
Regardez
bien, là, quand vous nous dites qu'on paie le prix le plus bas au Québec, on
paie le prix le plus bas connu parce qu'on ne connaît pas tous les prix
que vous négociez avec l'alliance canadienne. On ne les connaît pas tous, il y a toujours un prix à quelque part qui n'est pas
nécessairement connu. C'est vrai qu'on paie le prix le plus bas connu,
c'est vrai. Maintenant, quand vous négociez,
là, et que vous nous dites que c'est ici, au Québec, que les prix baissent le
plus vite, bien oui, mais ça, vous nous
confirmez qu'ils étaient trop hauts. Mais ça ne veut pas dire que parce qu'ils
baissent plus vite qu'ailleurs qu'ils sont rendus là où ils pourraient
être. Et j'insiste, je vous donne une opportunité, là. Vous êtes les
manufacturiers, vous savez ce qu'il y a devant, vous savez où sont les coûts,
donc vous êtes capables de voir... parce que
vous êtes à l'entrée, vous seriez capables de nous informer sur ce qu'il y a
comme obstacles en avant, hein, ce qu'il y a comme éléments qui
engendrent un coût.
Alors, si
vous aviez à me proposer une alternative, là, pourriez-vous me dire, là :
Bien, écoutez, c'est vrai que dans notre marché il y a ça, il y a ça, il
y a ça, si ce n'était pas là, notre prix serait plus bas?
M. Goulet
(Jean-Guy) : Je peux, un
peu, participer à cette conversation-là, dans le sens qu'au niveau des
prix... Parce qu'on mentionne les prix
beaucoup, et je tiens à positionner que... Et ça fait 25 ans que je participe
dans ce beau secteur qu'est
l'industrie des médicaments génériques, et, en ce qui a trait à déterminer les
prix de notre industrie, ça a toujours été l'État, les différents
payeurs publics qui ont déterminé les prix, et ça, depuis les 25 dernières
années. À un certain moment donné, nos prix de médicaments génériques,
l'Ontario sortait avec un prix, le prix était établi à 70 % du prix du médicament de marque. Le Québec s'est donné la
politique du prix le plus bas. Donc, tout au cours de ces politiques-là,
de ces périodes de temps, le Québec a bénéficié du prix le plus bas négocié
dans les autres provinces. Et, au niveau des prix, encore à ce jour, le prix de
25 % est un prix qui est négocié, le prix de 18 % est un prix qui est
négocié avec les payeurs publics.
Alors, comme société qui opère nationalement, on
a des organisations nationales, le Canada est peut-être une anomalie
constitutionnelle que je ne voudrais pas commenter là, mais c'est le seul
endroit où est-ce qu'on a les prix qui sont
déterminés par les différentes provinces, contrairement à différentes
juridictions dans le monde où est-ce qu'on fait affaire avec un payeur, un prix pour un pays donné. Alors, il y a une
complexité à opérer au Canada qui n'est pas simple. Comme industrie,
nous avons choisi de travailler avec l'alliance pancanadienne, avec les
différents payeurs publics pour nous permettre d'arriver à ça.
M.
Barrette : Je vais vous interrompre, si vous me le permettez, parce
que ça a été dit, ce que vous dites, puis je ne veux pas vous accuser de répétition, là. Je vais le répéter, je vais me
répéter, là... Parce que je ne l'ai pas dit souvent, ça, parce que vous êtes le premier groupe à qui je
peux dire ça, vous avez une opportunité. Alors, je vais l'illustrer de façon plus précise. L'Association québécoise
des pharmaciens propriétaires, ce matin, est venue nous dire qu'elle tenait au déplafonnement des allocations professionnelles. Vous allez probablement bientôt me dire que le déplafonnement des allocations
professionnelles vous cause un problème.
Moi, je vous
dis que, sur le terrain, il y a beaucoup de pharmaciens propriétaires qui viennent me voir
et me disent : Aïe! on est
rendus à 60 %, et vous acceptez... Peut-être pas vous personnellement, là, mais vous avez de vos membres qui acceptent. Bien là, c'est parce qu'à un moment donné, là, si d'un côté,
l'allocation professionnelle est libéralisée et qu'elle est acceptable dans un marché, là, c'est que,
donc, il y a de la marge. Par définition, c'est ça.
Implicitement, je devrais m'attendre,
moi, à ce que vous me disiez : Bien, s'il n'y avait pas toutes ces
affaires-là, là... et là les pharmaciens propriétaires reviendraient pour me dire : Oui, mais là il faut
nous protéger. Puis je les comprends,
il y a toutes sortes de manières
qu'on peut faire ça, là. Mais il n'en reste pas moins qu'il y a de la marge.
Alors, je vous donne encore une fois une opportunité, là. Vous êtes au début de la chaîne, il y en a plein
d'impacts de décisions contractuelles, marché, et ainsi de suite, là,
quelles seraient les conditions pour que vous y trouviez votre compte aussi, et
nous aussi?
Parlez-nous
de ce qu'il y a en avant. Tantôt, là, vous nous avez parlé, vous avez
dit : On ne paie pas toujours le générique,
on paie encore trop l'innovateur. Vous nous en parlez à un moment donné, là,
mais là, là, je vous donne l'opportunité
de nous parler de cet univers-là. Il y a des gens qui nous ont dit, là, je le
répète, là, je l'ai dit tantôt : Non, non, non, il n'y a pas d'impact, il n'y a pas d'obligation, il n'y a pas
de contrainte, on n'est pas obligés d'acheter chez nous, non, il n'y a pas d'avantage économique.
Puis là on va nous dire que, bien non, il n'y a pas d'avantage, mais
95 % des médicaments sont achetés chez nous, je suis aussi le grossiste,
et ainsi de suite. Vous faites face à un univers, parlez-nous-en. Vous avez une
opportunité, éclairez-nous. Il y a une opportunité extraordinaire que vous
avez, là.
M. Goulet
(Jean-Guy) : ...au niveau de la marge, je peux juste mentionner que
j'espère que chacun des contributeurs dans
la chaîne d'approvisionnement a de la marge, dans le sens qu'à partir du
prescripteur à aller jusqu'au pharmacien, au distributeur, au grossiste,
au fabricant de marque ou de génériques, je pense que la marge, elle est là, elle est essentielle dans
nos frais d'opération pour pouvoir réinvestir dans les différents services que
nous avons. Dans notre cas,
principalement en recherche et en développement. Pas de marge, dans notre
secteur, veut dire pas de recherche et développement, pas d'usines au
Québec. Vous avez deux fleurons ici, devant vous. Alors, c'est important,
l'élément de la marge.
C'est
pour ça que, nous, ce qu'on parle, c'est le prix. Le prix, encore une fois, on
négocie. Je peux vous dire que nous sommes actuellement... actuellement,
nous sommes en négociation — on
a débuté la semaine dernière — notre association,
avec l'alliance pancanadienne, et on regarde dans une négociation à regarder
les prix. On nous demande est-ce qu'on
peut faire un effort sur le prix à 18 %, avoir un prix plus bas que ça.
Nous sommes ouverts à discuter de ça, mais sans pour autant limiter l'accès au marché. Alors, quel va être ce prix après
négociation? Nous allons voir, on est au début des travaux. Nous
souhaiterions que le Québec soit présent au cours de ces discussions-là, ça
serait très intéressant de pouvoir échanger
avec vous pour ça, le gouvernement du Québec, à cette table-là. Et où vont être
les prix? Nous allons voir, c'est une
négociation. Nous avons des coûts, nous avons des produits spécialités, on
regarde certains endroits. Alors, nous, ce prix-là, c'est sur lequel nous voulons positionner. On a besoin
d'avoir un prix national, c'est important pour nous, pour réduire la
complexité du réseau de distribution.
M.
Barrette : Juste une question, puisque vous abordez ça sous cet
angle-là. Hier, le Groupe Jean Coutu est venu nous voir pour nous dire qu'eux autres, ils allaient littéralement en
appel d'offres avec vous autres, les manufacturiers. Comment ça
fonctionne?
M. Goulet
(Jean-Guy) : Je ne peux pas parler pour les intervenants qui sont ici au
niveau des prix, je peux seulement vous...
Ce que je peux vous dire, c'est que nous avons des négociations avec nos
partenaires. Je n'utiliserais pas le mot «appel d'offres», mais nous
avons des négociations, nous avons un panier de produits. Dans certains cas, on
regarde le coût des marchandises vendues.
Pas tous les produits sont équivalents et égaux au niveau des marques,
chaque compagnie... Je ne connais pas la
structure des coûts de toutes les compagnies, mais ce n'est pas des appels
d'offres, là, des négociations.
M.
Barrette : Deux courtes questions parce que le temps file, il me reste
45 secondes, malheureusement. Entre un appel d'offres et le
déplafonnement des allocations professionnelles, qu'est-ce que vous choisissez?
• (15 h 40) •
M. Charron
(Daniel) : Dans les deux cas, on parle d'imprévisibilité. Dans les
deux cas, ça remet en cause les investissements, notre capacité à investir ici.
Donc, c'est deux avenues... Puis vous connaissez notre position sur le déplafonnement des allocations professionnelles,
on a été très, très transparents là-dessus, on préférait le maintien
d'un encadrement parce qu'autrement on tombe
dans un monde d'incertitude, on tombe dans un monde d'imprévisibilité, puis l'imprévisibilité, pour des entreprises qui
investissent non seulement en recherche
et développement, mais en amélioration
des processus de qualité dans une industrie qui... non seulement au niveau canadien, mais dans le monde, les
exigences réglementaires sont de plus en plus élevées, on a besoin d'adopter
les meilleurs standards au niveau des processus de qualité. Bien, tout ça
nécessite une prévisibilité que ni le déplafonnement, ni les appels d'offres
pour fixer le prix des médicaments nous offrent.
Le Président (M.
Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, nous poursuivons les échanges avec
notre collègue de Rosemont pour une période de 11 min 30 s.
M. Lisée :
Bonjour. Bonjour à vous tous. Je vous remercie d'être là. Évidemment, il y a
cette question des allocations professionnelles qui nous intéresse beaucoup.
Parce que, pour le commun des Québécois, c'est un peu étrange, donc, vous êtes des fabricants de médicaments génériques et
vous offrez aux pharmaciens une réduction sur un certain nombre de vos produits en échange d'une meilleure part de
marché, une meilleure utilisation
afin de favoriser votre produit par rapport à celui du concurrent, qui
est pour l'essentiel le même, et donc ça crée un débat à l'intérieur de l'écosystème du médicament et des pharmaciens qui
fait que, bien, là, c'est plafonné, c'est déplafonné. Ca sert à quoi?
L'hypothèse... Évidemment, ce coût-là, il est à l'intérieur de votre prix, et
ça fait dire à beaucoup de gens, c'est qu'il y
a donc de la marge. Si vous donnez des ristournes de 10 %, de 15 %
aux pharmaciens, c'est que vous aviez 10 % à 15 % à donner,
n'est-ce pas?
M. Robidoux (Michel) : J'aimerais parler. Les ristournes actuelles au
Québec, les allocations professionnelles ont été aussi considérées dans
l'établissement des prix qu'on a fixés avec l'Alliance pancanadienne. On
réalise aussi — et
l'AQPP l'a très bien mentionné — que ces allocations-là viennent
subventionner un manque à payer des honoraires du pharmacien, qui n'ont pas été
ajustés depuis plusieurs années.
M. Lisée :
Absolument. Là-dessus, on se suit parfaitement.
M. Robidoux (Michel) : Alors, au moins, aujourd'hui, à 15 %, qui
est l'allocation maximale, au moins, moi, je suis fier d'avoir l'opportunité, avec les pharmaciens
du Québec, de discuter avec eux de la molécule qu'ils vont choisir dans
leur pharmacie sur des bases autres que des
ristournes, c'est-à-dire sur les bases de service, de disponibilité et
d'approvisionnement.
M.
Lisée : O.K. Alors donc, s'il n'y avait pas les ristournes, si
on disait : Écoutez, cette marge-là, on va la prendre dans le prix, on va réduire le prix et on va
régler correctement la rémunération des pharmaciens, parce que, comme
vous le dites, en ce
moment, c'est pour combler un manque qui a été créé et que le ministre vient
d'aggraver considérablement en enlevant 133 millions aux
pharmaciens par année... Et, ce matin, il a fait semblant qu'il ne savait même
pas si des pharmacies avaient fermé. Alors,
oui, il y a trois pharmacies qu'il a fermées ces derniers mois, une à Laval,
une à Gatineau et une autre. Je
pourrai lui donner les adresses tout à l'heure, il pourra aller devant les
vitrines vides des pharmacies qu'il a fermées.
Mais donc parlons de la question plus générale, si on arrivait à dire :
Bon, bien, vous n'avez plus les ristournes comme argument de mise en
marché, il vous en resterait, des arguments de mise en marché?
M. Goulet (Jean-Guy) : Tout à fait. Je pense, la différenciation entre
les différentes compagnies génériques, on parle du service, on parle de
niveaux de service en ce qui a trait à livrer les produits à temps. La qualité
des produits, évidemment, on est
réglementés, alors tous ces aspects-là sont communs, mais beaucoup de services,
services professionnels aussi, le
support qu'on fait en pharmacie. Donc, chaque compagnie a des stratégies par
rapport à ça pour se différencier. Donc, absolument.
M.
Lisée : Alors, la question qui est posée, c'est : Bien,
jusqu'où est-ce que ces ristournes, qui sont une indication qu'il y a de la marge, O.K., et ça sert à quelque
chose... Michel Morin, le 1er mars, disait à TVA Nouvelles
que, dans certains cas, il y a des
ristournes qui ont été proposées de 70 % à des pharmaciens, 70 % du
prix du médicament, y compris une compagnie québécoise. Alors, comment
est-ce qu'on peut rester assis ici et dire... Écoutez, si vous avez de la marge
pour offrir une réduction de 70 %, ça veut dire qu'on paie vraiment trop
cher nos médicaments?
M.
Charron (Daniel) : ...pas au courant de... j'ai lu les journaux comme
vous. Actuellement, ce qu'on sait, c'est que les allocations professionnelles sont plafonnées. Et il y a
peut-être des clients qui exigent des pourcentages plus élevés, mais actuellement, à ma connaissance, tout le
monde respecte les lois et les règlements. Donc, à partir de ce moment-là,
il n'y a aucune entente acceptée à des niveaux supérieurs à 15 %, là, dont
j'ai connaissance.
M. Lisée :
Si on attend un déplafonnement, et les gens commencent à se positionner sur le
déplafonnement, et donc ce sont des niveaux très élevés...
M. Robidoux (Michel) : Mais on
est ici pour parler des prix, et ce que le ministre Barrette
dit, c'est : Je paie trop cher mes médicaments au Québec. On a
l'alliance pancanadienne et l'étude PMPRB. Vous avez fait des signes tantôt à l'effet que, oui, ça a baissé beaucoup
parce qu'on devait être hauts. Il y a un écart en ce moment de 20 % qui reste avec la moyenne des autres pays
références.
Une voix :
...
M. Robidoux
(Michel) : Non, il y a...
M. Lisée :
M. Khadir aura son tour tout à l'heure, là.
M. Robidoux
(Michel) : Mais ce que je veux dire, c'est que les prix ont baissé.
Encore le 1er avril, il y aura quatre nouvelles molécules qui vont baisser
de prix. On n'a pas calculé ça, là, dans l'étude de PMPRB, et nous, on dit : Si le gouvernement du Québec veut
obtenir des meilleurs prix tout en gardant l'équilibre qu'on a en ce
moment... Et, pour moi, j'aimerais ça, dire
qu'être premier de classe, ce n'est pas être le meilleur en mathématiques, ce
n'est pas être le meilleur au niveau
du prix, être premier de classe, pour moi... Vous avez une industrie, Sandoz,
on opère dans 160 pays dans le
monde, on n'a pas 160 usines de fabrication dans le monde. Mais, au
Canada, on en a une à Boucherville avec 900 employés qui sont fiers
de fabriquer des médicaments génériques et un centre de développement.
M. Lisée :
...
M. Robidoux
(Michel) : J'aimerais juste revenir sur un autre point. Vous avez
la...
M.
Lisée : Non, je vais embrayer là-dessus parce que... Alors, la
conclusion que nous tirons tous du fait que les prix des produits génériques ont baissé
considérablement ces dernières années, passant de 80 % du prix de marque à
18 %, c'est qu'on s'est fait avoir dans
les grandes largeurs pendant de longues années. Ça, c'est la conclusion que
nous tirons. Et puis là on se pose la
question : Bien, est-ce qu'on se fait avoir encore? Il y a de la marge, on
les voit dans les ristournes. Jusqu'où
est-ce qu'on peut aller tout en gardant l'industrie viable? C'est sûr qu'il
faut que vous soyez viables. Et là on vient à ce que le président de l'association des manufacturiers a dit hier à
cette table, il dit : Écoutez, si vous faites des appels d'offres en mettant à égalité le producteur de
Boucherville puis celui des États-Unis, celui du Mexique, puis celui de
l'Inde, on va perdre tous les appels d'offres. Est-ce que vous confirmez ça?
M. Robidoux (Michel) : Ce que je peux vous dire, c'est que les appels
d'offres qui se font dans les autres pays forcent la mondialisation de la production, c'est clair. Parce qu'en ce
moment on a un écosystème que, je crois, qu'on doit protéger, où on a des fabricants locaux, on a un
des meilleurs systèmes de distribution de chaînes de médicaments au monde...
M. Lisée : ...la production,
est-ce que vous, Sandoz Boucherville, est-ce que vous gagnez des appels
d'offres qui sont faits par d'autres juridictions à l'extérieur du Québec?
M. Robidoux
(Michel) : Bien, moi, je participe aux appels d'offres qui existent au
Canada, particulièrement au niveau des hôpitaux, mais ce n'est pas un très bon
comparable parce qu'on parle... Moi, dans les appels d'offres que je participe au nom de Sandoz, ce sont des
médicaments spécialisés, des injectables, narcotiques, qu'on ne veut pas
importer d'Inde et... Donc, la proximité de la fabrication dans ce type de produits
là est très importante.
M. Lisée :
Donc, il y a un certain nombre de produits qui, par leur qualité de niche et la
nécessité de la proximité ou la chaîne de froid, ou quoi que ce soit, il
y a un avantage comparatif à être proche du marché qu'on dessert.
M. Robidoux (Michel) : Tout à fait,
dans le cas de produits très spécialisés. Dans le cas de molécules... les molécules les plus importantes pour rendre
potentiellement viable un système d'appels d'offres, c'est-à-dire de
prendre les 10, 15 plus gros médicaments, c'est sûr que ça va mondialiser
l'offre.
M. Lisée : Est-ce qu'ils sont
produits au Québec ou ils sont déjà produits ailleurs, ceux-là?
M.
Robidoux (Michel) : Il y en
a qui sont produits au Québec, il y en a qui sont produits ailleurs
dépendamment des compagnies.
M. Lisée : O.K. Parce que
moi, je comprends, on veut des emplois, on veut des bons emplois. On s'est
parlés tout à l'heure, vous nous
disiez : C'est 78 000 $ par année, en moyenne, les emplois dans
votre industrie. On veut les garder, ces
emplois-là. Mais là la question, c'est de savoir comment est-ce qu'on peut
avoir le meilleur prix pour le médicament tout en ayant chez nous une industrie robuste du générique, puis est-ce
qu'il n'y aura pas d'autres moyens que de payer trop cher pour le médicament, c'est-à-dire des programmes de soutien à
la recherche et au développement, des programmes de soutien à la formation de la main-d'oeuvre, ce qu'on fait, par
exemple, pour le vidéo, ce qu'on fait pour l'électronique sans... Vous nous dites : Payez-nous un peu
plus cher que ce que ça vaut, la pilule, pour qu'on puisse rester chez
vous. Est-ce qu'il n'y aurait pas un système où je vous paie ce que ça vaut, la
pilule, puis avoir des programmes de soutien économique qui font que vous
restiez chez nous?
• (15 h 50) •
M. Robidoux (Michel) : Tout à fait,
il y a deux systèmes. Il y en a un qui s'appelle l'étude de PMPRB, qui compare les prix des médicaments au Canada versus
les autres juridictions. Et ça, c'est indépendant, on va avoir... Tous les ans, je pense, cette étude-là est mise à jour,
et ça nous permet, justement, de mettre le Canada compétitif. Et le
deuxième moyen, c'est la négociation avec l'alliance pancanadienne. Il
y a quand même eu 1,5 milliard de dollars d'économies depuis cette
entente-là, et, à mon avis, là, et à ce que je sache, il n'y a pas d'industries manufacturières génériques qui ont quitté le pays ou quitté le Québec,
donc...
M. Lisée : Ce qui nous fait
penser qu'il y a encore un peu d'argent à aller chercher, mais je pense...
M. Robidoux (Michel) : Bien, c'est
une négociation qui fait en sorte que les payeurs trouvent leur compte, l'industrie
trouve son compte aussi si on veut garder une industrie locale.
M. Lisée : Alors, ce que vous nous dites aussi dans le mémoire — puis
ça, c'est très important — c'est
que le ministre ne fait pas son travail pour aller chercher des économies
qu'il pourrait aller chercher immédiatement. Ça fait bientôt deux ans qu'il est
là, là, et, selon vous, il a laissé sur la table 30 millions de dollars
par année en faisant en sorte de ne pas inscrire immédiatement sur la liste des
médicaments les médicaments génériques qui ont reçu leur autorisation de Santé
Canada. C'est bien ça?
M. Charron
(Daniel) : Et ça, c'est tout à fait incompréhensible. Comment, en
2015, en 2016, on n'est pas capable d'inscrire plus vite des médicaments
génériques? La situation s'améliore, mais à pas de tortue, et il n'y a pas un
autre endroit au Canada — les juridictions, en tout cas,
comparables — où la
mise à jour ne se... tu sais, se fait mensuellement, et même, dans certaines juridictions, ça se fait dans
quelques heures. Donc, ici, on est à sept, neuf mises à jour de la liste
par année. On a fait une étude, il y a un an, qui... Allez-y.
M. Lisée : Donc, on est d'accord
là-dessus. Donc, par sa lenteur ou son refus d'agir, il laisse sur la table 30 millions par année, 60 millions depuis deux
ans, et vous dites qu'il laisse aussi 40 millions de dollars par
année sur la table en n'appliquant pas le «ne pas substituer au régime
privé». Donc, ça fait 70 millions de dollars que le ministre libéral de la
Santé actuel laisse sur la table par son refus d'agir sur le prix de ces
médicaments.
M. Charron
(Daniel) : ...du «ne pas
substituer», je pense qu'au début de l'an dernier le ministre
a fait un pas dans la bonne direction en imposant pour la première fois
au Québec un encadrement, dans le fond, pour rattraper ce qui était la norme partout ailleurs
au niveau de l'encadrement de la pratique du «ne pas substituer». Là où on
pourrait faire un pas supplémentaire, c'est de pouvoir l'appliquer dans les régimes privés d'assurance
médicaments. Puis, quand on dit régimes
privés d'assurance médicaments, là, je veux le dire, ce n'est pas que des
employés, là, qui ne touchent pas
du tout l'État, c'est des policiers, des pompiers, des employés de l'État,
des employés des commissions
scolaires, des universités...
M. Lisée : Les députés de l'Assemblée
nationale sont dans un régime privé.
M.
Charron (Daniel) : ...les députés de l'Assemblée nationale.
M.
Lisée : Alors, vous
dites qu'il n'aurait qu'à agir, et il
y aurait 40 millions de dollars d'économies à aller chercher immédiatement.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant céder la parole à notre collègue
de Lévis pour une période de huit minutes.
M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. Messieurs, merci d'être là. Je vous salue tous.
Considérez que c'est fait comme individuellement.
Vous
parlez d'une augmentation de la fréquence des mises à jour de la liste des
médicaments. C'est ce que vous venez d'aborder avec le collègue député
de Rosemont. Ce n'est pas d'hier, là, que vous revenez sur ce thème-là. On le sait, et vous le dites, l'argent qui se perd.
Vous avez probablement déjà poussé votre argumentaire auprès du ministre
sur ce dossier-là en disant : C'est
parce que ça n'a pas de sens, c'est de l'argent à aller chercher, puis vous n'y
allez pas, là. Mais, manifestement, vous revenez avec ça aujourd'hui,
donc il n'y a rien qui s'est fait, ça n'a pas bougé. Comment expliquez-vous... Vous revenez à la maison, puis
vous devez vous dire : Bien là, ça n'a pas marché parce que...
Comment se fait-il, selon vous... Le
ministre est au courant, là, de ce que vous dites là. Quels sont les arguments
faisant en sorte qu'on ne puisse pas arriver à aller chercher ce que
vous nous dites être des économies potentielles immédiates?
M.
Charron (Daniel) : Quand vous dites : On revient à la maison...
on revient à la maison, puis on se dit : C'est surprenant de voir à quel point il nous questionne
sur le prix puis qu'il travaille fort à essayer de trouver des moyens de
réduire le prix, alors que, par ailleurs, il
ne les utilise pas quand ils sont sur le marché puis disponibles. Donc, c'est
toujours un peu, en tout cas, étrange pour nous, c'est une situation difficile.
Puis vous avez raison de dire que ça fait plusieurs années qu'on avance cette question-là, les arguments qu'on entend sont,
en général, difficiles à comprendre. Donc, c'est clair qu'il y a
certainement des éléments technologiques, mais...
M. Paradis (Lévis) : Je vous coupe parce qu'on est vers ça, mais ce n'est pas une discussion
que vous avez pour la première fois.
Vous dites : On arrive à la maison, puis on est étonnés. En même temps, on
dit : Les arguments ne sont pas clairs. C'est quoi, les arguments?
C'est quoi, les arguments qu'on vous sert?
M.
Charron (Daniel) : Des arguments techniques, essentiellement
techniques, de capacité à pouvoir produire une liste des médicaments mise à jour plus rapidement, des éléments
essentiellement techniques. On n'a pas, semble-t-il, les capacités. Or, quand on regarde ailleurs, là, pas
plus loin qu'en Ontario, au Nouveau-Brunswick, en Colombie-Britannique, en Alberta, là, pas des juridictions très, très
loin d'ici, partout, on est équipé pour le faire parce qu'on voit l'avantage,
on voit tout de suite l'avantage de pouvoir
avoir accès à un médicament qui coûte quatre ou cinq fois moins cher que
celui qu'on paie actuellement. Pourquoi
payer 1 $ quand on peut payer 0,25 $ alors que le médicament est
autorisé par Santé Canada, autorisé pour la commercialisation puis
disponible dans les autres provinces?
M. Paradis (Lévis) : Et il est codé comment? À la lumière de ce que vous me dites là, bon,
on n'a pas les ressources humaines? On n'a pas l'information pertinente?
On n'a pas...
M.
Charron (Daniel) : L'information, probablement qu'on l'a. Probablement
que c'est un ensemble de facteurs qui
touchent la capacité des ressources, incluant les ressources humaines,
peut-être. Mais il semble que c'est un élément qui est plus lié à des arguments, comme je le dis,
techniques, lié à la capacité de produire une mise à jour plus fréquente
de la liste des médicaments.
M. Paradis
(Lévis) : O.K. Le secret de la Caramilk, là, vous n'avez pas encore,
vous cherchez encore?
M. Charron
(Daniel) : Bien, on le cherche.
M. Paradis
(Lévis) : O.K. L'ensemble des gens qui viennent nous parler, puis qui
questionnent, puis qui proposent que l'alliance pancanadienne puisse continuer
à faire le travail nous disent tous : Il faut faire plus. Le ministre, à ce chapitre-là, on lui a même dit ce
matin, puis ça a dû lui faire plaisir... de dire : Il pourrait être le
capitaine de l'alliance pancanadienne, donc avoir plus de pouvoirs encore, puis
il pourrait leader tout ça.
Si
le ministre pousse fort à l'interne, est-ce qu'il peut vraiment... Très
honnêtement, à la lumière de la position du Québec dans sa
participation, la renégociation qui arrive en 2017, mars, avez-vous
l'impression que le ministre est capable de
faire en sorte que l'alliance soit plus agressive et qu'on puisse atteindre les
résultats souhaités pour arriver aux économies qu'on anticipe?
M. Charron (Daniel) : ...négociation
à l'Alliance pancanadienne pharmaceutique, puis le fruit de cette
négociation-là, du point de vue de
l'industrie, dans le cadre de l'entente actuelle, là, qui vient à échéance en
mars 2017, c'est le fruit d'un équilibre entre une meilleure
prévisibilité et stabilité pour nous et également le fait que le prix,
maintenant, soit fixé, si on veut, nationalement.
Comme Jean-Guy le disait, c'était difficile pour
une industrie comme la nôtre de devoir opérer avec 10 pays en un. Donc, en
échange de ces concessions au niveau de la prévisibilité, au niveau de
l'harmonisation des politiques de prix au niveau national, l'industrie a été prête à consentir à des
baisses de prix, notamment en visant les molécules pour lesquelles il y avait le plus d'économies à faire.
Dans le fond, une technique un peu Pareto, c'est-à-dire quelles sont les
molécules pour lesquelles il y a le plus de volume de ventes, pour lesquelles
réduire le prix, ça peut nous rapporter plus, puis...
M. Paradis (Lévis) : Des molécules à
volume, là.
M. Charron
(Daniel) : Et, par ailleurs, être prudent au niveau des molécules pour
lesquelles il y aurait un seul ou deux fournisseurs, où baisser trop le
prix pourrait mettre l'approvisionnement à risque. C'est un peu ça, l'équilibre
qu'il y a dans l'Alliance pancanadienne
pharmaceutique, et, pour nous, c'est très important. C'était un gain
important que l'industrie a fait au niveau de la fixation nationale du prix des
médicaments. C'est pour ça que, lorsqu'on regarde le projet de loi n° 81,
avec l'initiative proprement québécoise de fixation du prix, alors qu'on vient
de trouver un terrain d'entente avec l'ensemble
des provinces, et le Québec vient de se joindre officiellement depuis le mois
d'octobre de l'an dernier... c'est
pour ça qu'on est très préoccupés, puis on dit : Bien, ça remet en cause
un peu un équilibre que l'industrie avait réussi à atteindre en échange
de concessions au niveau des prix sur les médicaments à plus fort volume.
M. Paradis
(Lévis) : Je reviens sur la
notion d'appel d'offres, en Nouvelle-Zélande notamment. Vous en parlez,
puis vous arrivez en page 10 de votre mémoire, et là c'est assez bien
documenté, vous dites qu'il y a, malgré tout, là-bas — puis
quand bien même on présenterait ce modèle-là — il y a des ruptures de
médicaments, ça arrive. Vous l'avez dit tout à l'heure, ça arrive même... puis
c'est récent, là.
Il y a des
ruptures de médicaments aussi au Québec actuellement, puis il n'y a pas d'appel
d'offres. Alors, comment évaluer
l'impact d'un système d'appel d'offres sur les ruptures des médicaments? Parce
que, de toute façon, qu'il y en ait ou qu'il n'y en ait pas, c'est une
composante avec laquelle vous devez travailler, ça se produit. C'est quoi,
l'impact? Quel est l'impact de l'un par rapport à l'autre?
M. Robidoux (Michel) : Je pense
qu'on généralise en disant qu'il y a autant de ruptures de stock au Canada
qu'au Québec...
M. Paradis (Lévis) : Ah non! il n'y
en a pas autant qu'ailleurs, il y en a.
M.
Robidoux (Michel) : Oui, il
y en a, mais, en ce moment, il n'y a pas de ruptures, au niveau des
médicaments génériques, qui sont critiques,
comme on peut le constater avec le plus gros vendeur, le produit numéro un en
Nouvelle-Zélande. C'est sûr que le concept
d'un appel d'offres va favoriser un petit nombre de joueurs fabricants, et, à
ce moment-là, si un de ces
fabricants-là a un enjeu de qualité, de disponibilité de la matière première,
il va mettre à risque l'ensemble des clients parce qu'il est le seul
fournisseur. Je pense que ce n'est pas nécessaire d'obtenir des meilleurs prix
en faisant cette approche-là.
M. Paradis (Lévis) : Mais vous êtes
en train de me dire, donc, que, dans votre vision des choses, avec votre analyse, la problématique de la rupture ou des
ruptures en Nouvelle-Zélande, par rapport à ce qu'on peut vivre ici dans
un système qui est tout à fait différent, il y a cette variable-là, en fonction
des appels d'offres... est celle qui provoque le plus de dommages.
Une voix : ...parce qu'on
élimine des fournisseurs.
• (16 heures) •
M. Goulet
(Jean-Guy) : Je vous dirais
que le dénominateur commun, c'est le nombre limité de compétiteurs. Alors, dans un cadre où est-ce qu'il y a des produits plus spécifiques difficiles à produire, difficiles
d'accès de matière première, nombre
limité de joueurs, si un a un enjeu, évidemment, l'effet domino est plus facile et c'est plus
difficile à compenser ces parts de marché là. Si on est trois avec
33 %, un tombe, c'est plus difficile se retourner. Tandis que, si on est 10 qui vendent le même produit, alors plus
d'options de compétiteurs. Alors, l'enjeu de l'appel d'offres, notre
enjeu, c'est que ça va limiter le nombre de joueurs et, de ce fait, arrive à la
situation de rupture de stock.
Le Président (M. Tanguay) : Alors,
nous allons maintenant céder la parole à notre collègue de Mercier pour
3 min 30 s.
M. Khadir : Très bien. Bienvenue, messieurs. Vous connaissez, évidemment, les positions de Québec
solidaire sur le dossier des médicaments,
nous croyons qu'il y a d'importantes économies à aller chercher. Et
l'industrie du médicament, surtout
l'industrie du médicament breveté, qui a beaucoup abusé, disons, des
largesses des contribuables et des
autorités publiques depuis des années...
mais, malheureusement, les médicaments génériques ne reluisent pas non plus
par, disons, des pratiques qui respectent les capacités de payer des
citoyens.
Mais je ne
reviendrai pas sur ce grand tableau, je voudrais juste, d'abord, clarifier une
chose pour les ruptures d'approvisionnement
en certains médicaments. Vous avez parlé de l'atorvastatin, n'est-ce pas, en
Nouvelle-Zélande. Alors, je vois ici
la porte-parole de Pfizer, producteur d'atorvastatine en Nouvelle-Zélande... Mme Kaylee Park said the company has made alternatives
available, so patients will still be able to fill their atorvastatin
prescription. Là, il dit: The company said
in a statement that the shortage is due to unforeseen global supply
constraints, and that there are no safety concerns for patients. En plus, le fabricant fabrique aussi d'autres
produits qui peuvent parfaitement remplacer... et, immédiatement, ça a
été remplacé pour les 180 000 prescriptions d'atorvastatin qui se
trouvaient ne plus prendre de preneurs.
En
fait, en Nouvelle-Zélande, il y a moins de ruptures de stock aujourd'hui qu'il
y en avait avant l'introduction des
appels d'offres. En fait, en Nouvelle-Zélande, il y a moins de ruptures de
stock, d'approvisionnement qu'au Canada et en Amérique du Nord, où il n'y a pas d'appels d'offres. C'est ça, la
dure réalité. Donc, je pense, il faut reconnaître ça.
Et je pense que, pour
une meilleure compréhension et dans le but de vous offrir une certaine
protection que le ministre a cherché à
maintes reprises, en vous posant des questions, à vous offrir, d'offrir des
réponses soit mieux informées, soit
qui ne partent pas uniquement d'un refus de répondre parce que ça pourrait,
disons, dévoiler une partie des pratiques dolosives qui étaient
contraires à l'intérêt public dans le passé... Là, on veut corriger, on ne veut
blâmer personne. Il y a des pratiques
passées... Là, le ministre veut dire : À l'avenir, on va essayer de
trouver... Bon, alors, s'il y a des marges qui permettent des ristournes
de 70 %... Je rappelle à tous ceux qui nous écoutent et aux auditeurs, si
une compagnie pharmaceutique, aujourd'hui, ou un pharmacien offre des
ristournes à des médecins, ça s'appelle «pots de vin», c'est punissable par la déontologie médicale et c'est
emmenable à une accusation criminelle. Ça s'appelle «pot de vin»,
d'accord? Alors, quand on appelle ça «allocation professionnelle»,
malheureusement on a entouré ça de... Mais une ristourne est inacceptable,
surtout quand 70 % est possible, alors que la facture du Québec n'a cessé
d'augmenter au cours des dernières années.
Donc, je répète la
question que vous a posée le ministre parce que même 15 % d'économies dans
la facture des médicaments de prescription
au Québec, sur 7 milliards de ventes de prescriptions, c'est plus de
1 milliard d'économies, soit la
moitié pour la RAMQ, soit l'autre moitié pour ceux qui paient ça de leurs poches.
D'accord? Il y a plus de 1 milliard d'économies, même si on
économise 15 %. Je n'ose même pas penser au 30 % que font les
hôpitaux ou les 65 % de la Nouvelle-Zélande.
Alors,
je vous pose la question : C'est qui, les principaux joueurs? Est-ce que
c'est les grossistes? Est-ce que c'est les
bannières? Est-ce que c'est les pharmaciens propriétaires? Qui, en avant de
vous... Moi, je les nomme. Le ministre n'osait pas les nommer, je les
nomme. Qui sont responsables de ce gonflement de prix? Parce qu'il y a une part
aussi qui relève de vous, certainement.
Le Président (M.
Tanguay) : En 15 secondes.
M.
Charron (Daniel) : Sur le gonflement de prix, au niveau des
médicaments génériques, lorsqu'on regarde au cours des dernières années,
malgré une hausse de l'utilisation qui a été remarquable, là — on
parle de 50 % des ordonnances servies avec des médicaments génériques il y
a, à peu près, cinq ou six ans, puis aujourd'hui on est à 70 % — la facture québécoise du médicament
générique a été stable dans le temps, autour de 1,3 milliard de dollars.
C'était à peu près 1,3 milliard de dollars il y a trois ans. Donc, malgré
une hausse d'utilisation, parce qu'il y a eu des baisses de prix, la facture du
médicament générique a été stable dans le temps.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, nous vous remercions,
les représentants de l'Association canadienne du médicament générique.
Nous suspendons nos
travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 5)
(Reprise à 16 h 13)
Le
Président (M. Tanguay) :
Alors, nous recevons maintenant les représentantes, représentants de l'Ordre
des pharmaciens du Québec. Bienvenue à votre Assemblée nationale. Vous disposez
d'une période de présentation de 10 minutes.
Par la suite, vous aurez l'occasion d'échanger avec les parlementaires. S'il vous plaît, prenez soin, je vous le demande, pour les
fins de l'enregistrement, de bien préciser vos noms et vos fonctions. Et, sans
plus tarder, la parole est à vous.
Ordre
des pharmaciens du Québec (OPQ)
M. Bolduc (Bertrand) : Merci,
M. le Président, M. le ministre, messieurs dames les parlementaires. Mon nom est Bertrand Bolduc, je suis président de l'Ordre des pharmaciens. Je suis accompagné de
Mme Manon Lambert, directrice générale
et secrétaire de l'ordre, ainsi que de M. Martin Franco, administrateur de
l'ordre, membre du comité exécutif et pharmacien en milieu hospitalier.
D'abord, j'aimerais
rappeler à la population qui nous écoute que nous sommes en plein milieu de la
Semaine sur la sensibilisation à la pharmacie. Et nous avons des efforts
promotionnels en cours pour faire mieux connaître les nouvelles activités du
pharmacien, nous invitons les parlementaires ainsi que la population à visiter
notre site Web presentpourvous.ca pour en apprendre plus et même
participer à un concours, vous pouvez gagner des prix.
Alors,
sur ce, l'Ordre des pharmaciens aimerait remercier les parlementaires et les membres de la commission de l'occasion qui lui est
offerte de commenter le projet de loi n° 81 sur les procédures d'appel
d'offres pour réduire le coût des
médicaments. C'est en raison de sa connaissance du secteur pharmaceutique et de
son intérêt à prendre position sur des
dossiers à caractère sociétal que l'ordre formule ainsi des recommandations aux
membres de la commission. Ces recommandations auront trait à l'accès équitable et raisonnable,
la sécurité de l'approvisionnement en médicaments et surtout leur
utilisation optimale.
L'Ordre des
pharmaciens du Québec, je vous le rappelle, a pour mandat la protection du
public, le contrôle et l'encadrement de la
profession. Rappelons qu'en matière
de prix, d'étendue de couverture ou
d'honoraires professionnels l'ordre n'est pas une partie négociante.
Conséquemment, il ne nous appartient pas de déterminer les modalités de
remboursement des différents régimes ni les honoraires des pharmaciens. Comme
vous le savez très bien, ces modalités sont
négociées par l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires, que vous avez
rencontrée ce matin, et le gouvernement ou les assureurs privés par la voie d'ententes qui sont convenues entre
les parties ou encore décrétées par le gouvernement en vertu des dispositions
prévues à la Loi sur l'assurance médicaments du Québec.
Le
projet de loi n° 81 est simple et court. Peu de détails sont fournis,
mais, malgré toutes ses zones grises, notre organisation a choisi
d'utiliser cette tribune pour soumettre quelques conditions de succès si le
gouvernement désirait aller dans ce sens.
Nous croyons que ces conditions de succès devraient être impérativement prises
en compte au moment de la rédaction
des règlements. Si le gouvernement veut véritablement faire des économies et
que ce processus fonctionne, il devrait l'encadrer sérieusement. Il
s'agit là des conditions minimales requises.
Notre
première recommandation vise à exclure certaines classes de médicaments et
prévoir des alternatives pour des cas
spécifiques. Tous les gens sont différents. Par exemple, nous croyons qu'il
serait bien d'exclure les produits biologiques et les produits
biologiques ultérieurs du processus d'appel d'offres au moment où on se parle.
Il faudra prévoir des exceptions pour les patients qui souffrent d'allergies ou
d'intolérances afin qu'ils ne soient pas désavantagés par le processus. Également, les patients qui souffrent
de troubles mentaux sont parfois plus sensibles et devraient être
considérés spécialement.
Nous croyons qu'il
faudrait privilégier ou exiger, pour sécuriser l'approvisionnement de
médicaments, des médicaments, évidemment, à
fort volume et qui sont fabriqués par de très nombreux fabricants. Nous croyons
aussi qu'il serait sage d'envisager une double ou une triple adjudication
dans certains cas. Il faut aussi prévoir des fabricants qui utilisent des sources de matière première
différentes, puisque, dans le passé, nous avons vu qu'il y a des problèmes à
ce niveau. Et, évidemment, le gouvernement devrait exiger des garanties et prévoir
des pénalités et la capacité de payer ces pénalités pour les fabricants
choisis.
Pour
assurer la sécurité des médicaments pour les patients, le gouvernement devrait
exiger certains critères des fabricants. D'abord et évidemment,
satisfaire aux critères d'inspection de Santé Canada. Une autre recommandation,
c'est que le fabricant qui pourrait être
choisi devra disposer d'un personnel en information médicale, en
pharmacovigilance et qui peut servir les
clients québécois, donc les pharmaciens et les autres professionnels de la
santé, en français. Ce n'est pas toujours le cas pour certains
fabricants.
Il faudrait aussi
établir des conditions qui qualifieraient les fabricants aptes à soumissionner
qui tiendraient compte de l'historique du fabricant en matière de rappels de
produits, de ruptures d'approvisionnement et de rapports d'inspection non seulement de Santé Canada, mais
des autres agences de réglementation au niveau mondial, notamment la FDA
américaine, l'agence européenne et l'agence australienne.
Notre
recommandation suivante vise à confier la gestion des appels d'offres à un
comité d'experts au sein duquel nous
recommandons que siègent des pharmaciens de pratique communautaire — et, si les pharmaciens propriétaires
sont considérés en conflit d'intérêts, il y a beaucoup de pharmaciens salariés
qui pourraient, très certainement, apporter leur
expertise — et qui
devrait aussi inclure les pharmaciens du secteur hospitalier, qui ont
développé, comme on le sait, une expertise très pointue au niveau des
appels d'offres, et de la gestion des ruptures, et de la prévention des
ruptures en particulier.
Une
autre recommandation est de prévoir des périodes de transition entre l'annonce
des soumissionnaires retenus et l'entrée
en vigueur ou l'octroi de contrats pour limiter le gaspillage de médicaments.
Alors, évidemment, les médicaments sont coûteux, il faut éviter le
gaspillage.
En ce qui concerne
l'appel d'offres de grossistes, nous privilégions une renégociation avec les
grossistes afin d'édicter des conditions
réglementaires strictes afin d'assurer un accès équitable à la population, à
tous les patients au Québec en médicaments.
Enfin, notre dernière
recommandation et, je crois, la plus importante, nous recommandons de regarder
un peu plus large et de revoir la politique
du médicament, qui a un peu vieilli, et de mettre en place des mesures qui
orienteraient la pratique des pharmaciens
vers une prise en charge plus complète de la thérapie médicamenteuse plutôt que
vers la seule fonction de distribution des médicaments.
Pour
l'Ordre des pharmaciens, le meilleur prix des médicaments, c'est simple, c'est
le plus bas prix qui va assurer un
accès sécuritaire et continu aux médicaments pour toute la population du Québec.
Ça va nous faire plaisir de répondre à vos questions.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Et maintenant, pour une
période de 18 minutes, je cède la parole au ministre de la Santé et
des Services sociaux.
M. Barrette :
18, vous avez dit, M. le Président?
Le Président (M.
Tanguay) : 18 minutes.
• (16 h 20) •
M. Barrette :
Merci, M. le Président. Alors, bonjour à vous tous et toutes, M. Bolduc et vos
collègues. Bien, d'abord, merci d'être venus aujourd'hui, là. Donc, je peux comprendre que le contexte soit particulier pour
vous, et rassurez-vous, là, ici, on
est ici pour entendre votre opinion, votre vision de votre univers, on va dire,
on va appeler ça comme ça. Je l'ai
appelé ce matin — vous étiez là tantôt — le merveilleux monde du médicament
générique, mais c'est comme le merveilleux monde des affaires, là, il y
a des hauts, il y a des bas.
Alors, évidemment, l'objet ici, c'est le projet
de loi n° 81, dont la finalité est d'aller déterminer — et je
suis d'accord avec vous — le prix le plus bas dans un environnement
d'accès le plus sécuritaire possible. Je suis parfaitement d'accord avec ce que vous venez de dire. L'un
n'oppose pas l'autre, par exemple, j'imagine qu'on s'entend là-dessus.
Alors, je
vais vous poser la question que je pose à tout le monde : Est-ce qu'on
paie les médicaments, à votre avis, trop cher au Québec? Génériques,
j'entends.
M. Bolduc (Bertrand) : Un
médicament, c'est toujours trop cher parce que c'est un bien essentiel pour les
patients. Donc, est-ce qu'on paie trop cher par rapport aux autres provinces? Les autres intervenants se sont prononcés là-dessus. Nous, ce qui est important, c'est d'assurer la
sécurité d'approvisionnement pour les patients. Nous vivons à toutes les semaines et nous vivons, au moment où on se parle, des ruptures d'approvisionnement de certains médicaments.
Je vous donne un exemple très simple, présentement les pharmaciens du Québec se battent pour obtenir du divalproex. Le divalproex, ça sert pour l'épilepsie. Alors, vous
imaginez que présentement, au
moment où on se parle, on a des gens
qui vont en pharmacie, qui disent : Je
viens chercher la prescription pour mon garçon, pour ma fille qui est
épileptique, et les pharmaciens
doivent se battre entre eux, essayer d'obtenir de certains fabricants du
médicament parce qu'il y en a un qui a eu des problèmes, et tous les autres ont inévitablement des
ruptures suite au premier qui eu des problèmes de matière première.
Donc, c'est
très important pour nous d'assurer la sécurité. Oui, le prix le
plus bas, absolument, mais en toute sécurité pour les patients.
On est passés encore récemment proche d'une rupture d'un médicament que vous
connaissez tous très bien, le Ventolin, les petites pompes pour l'asthme. Qu'est-ce qu'on va faire si on manque de Ventolin? On va avoir des très grands problèmes.
Donc, il faut assurer un prix raisonnable afin qu'il y ait plusieurs fabricants
qui continuent de commercialiser différentes versions de ce produit-là, qui est
essentiel pour la population.
Est-ce que
j'ai besoin de vous donner l'exemple d'Allerject? Le rappel d'Allerject cet
automne, si on n'avait pas eu l'agilité
de l'autre fabricant pour combler le volume de produits... Et on a même,
souvent, même recommandé à certains patients de garder
des produits expirés pour éviter des réactions allergiques. Alors, il faut
s'assurer d'un certain nombre de fabricants, d'un certain nombre de produits
disponibles, la qualité des produits pour toute la population.
M.
Barrette : Je vous
interromps, je suis d'accord avec vous. Puis vous conviendrez avec moi qu'un appel d'offres, ça se construit en fonction
de ces paramètres-là, et on s'entend là-dessus.
Je reviens
sur un point de votre mémoire sur lequel je voudrais peut-être
que vous élaboriez un peu, là, parce
que le temps compte. Vous dites dans votre
mémoire, au point 2, et je prends
cette ligne-là à escient, là... Quand on parle de la Nouvelle-Zélande, à chaque fois qu'on mentionne
Nouvelle-Zélande, ce qui fait plaisir à notre collègue de Mercier, et je
peux le comprendre, mais ça attire automatiquement des critiques de tout le
monde en disant : Oui, mais la Nouvelle-Zélande,
c'est ci, la Nouvelle-Zélande, c'est ça, ça ne se transpose pas. Mais, dans
votre mémoire, vous parlez des Pays-Bas et l'Allemagne. Ce n'est pas
exactement... Quand on invoque, là, qu'en Nouvelle-Zélande il n'y a pas
d'industrie pharmaceutique, moi, je peux vous dire une affaire, là, en
Allemagne, là, il y a une industrie pharmaceutique. Et, en Allemagne, on fait
des appels d'offres, et vous le dites vous-mêmes dans le mémoire. Les Pays-Bas,
c'est un pays ultra-industriel dans tout,
là, c'est l'un des pays les plus industrieux de la planète, du moins en Europe,
là, c'est le cousin de l'Allemagne,
et il y a une industrie, là, qui existe, là, qui est significative, comme en
Allemagne, et ils sont en appel d'offres.
Alors, moi,
je comprends que votre appréciation de ce qui se passe ailleurs, c'est que le
principe de l'appel d'offres ne nuit pas, là, ce n'est pas une nuisance
dans l'absolu. Pouvez-vous élaborer un petit peu là-dessus?
Mme
Lambert (Manon) : Bien, en
fait, comme on dit dans le mémoire, le choix de l'outil pour contrôler le
prix du médicament appartient au ministre. Et ce qu'on dit, nous, c'est que, si
le ministre veut aller en appel d'offres, écoutez,
on n'a pas d'objection. Ce qu'on met, par contre — et je pense qu'on s'entend, finalement — ce qu'on dit, c'est : Il y a dans l'appel d'offres des critères à
respecter. Nos collègues hospitaliers — j'ai personnellement eu une pratique hospitalière — Martin pourra compléter, mais ont vécu
toutes sortes, je dirais, de péripéties avec les appels d'offres, ont vécu des succès, mais ont vécu, notamment avec la
crise Sandoz, un certain nombre de problèmes, et ils ont beaucoup appris. Et donc ce que l'ordre dit, c'est : Le ministre
choisit les moyens, nous, comme organisme qui protégeons le public, ce
qu'on veut s'assurer, c'est que les appels d'offres vont être construits de
telle façon que les paramètres visant à protéger
le public, la sécurité de l'approvisionnement, visant à s'assurer aussi que
certains patients ne soient pas pénalisés au détriment de d'autres
soient mis en place. En fait, c'est tout ce qu'on dit dans le mémoire.
M.
Barrette : Mais vous n'êtes
pas contre les appels d'offres par définition, puis, votre expérience, je
conclus qu'elle est à l'effet que ça peut se faire.
M. Bolduc (Bertrand) : Absolument.
M.
Barrette : Très bien.
Dans la catégorie de la protection du public — parce
que vous l'abordez à cette
étape-ci, alors je vais l'aborder, moi
aussi, je prends votre balle au bond — quand
on fait référence au document de Me Fernet, dans le document que vous connaissez, évidemment, très bien, je l'ai cité ce matin, je vais relire la phrase,
là : «S'abstenir d'utiliser, d'offrir, de promouvoir, d'annoncer, de fournir, de louer,
de vendre ou de rendre quelque produit, marchandise ou service qui n'a pas été acquis conformément à
la présente convention et dont l'utilisation et/ou la vente au détail
dans l'établissement n'a pas été
autorisée par le franchiseur», là, ici, Me Fernet fait référence au fait que le
franchiseur impose des contraintes au
franchisé, qui est le pharmacien propriétaire, qui est votre membre. N'y a-t-il
pas là un problème? Parce que, sous l'angle de la protection
du public, un observateur externe pourrait conclure que le choix offert au
patient devrait être le plus vaste possible.
Et, à sa face même, selon Me Fernet, les conditions contractuelles entre le
franchiseur et le franchisé amènent
une limitation, ce qui semble être reflété par la réponse à la question
que vous avez posée dans votre sondage :
Est-ce que les bannières, franchises et compagnies imposent
une restriction au choix du médicament pour le patient?
Mme Lambert
(Manon) : Bien, dans les faits...
M. Barrette :
La question que je vous pose, là, ça existe, ça?
Mme Lambert (Manon) : Bon, dans les faits, deux choses. Peut-être qu'en préface, quand
vous dites : Il faut avoir le plus vaste choix possible, je mettrais
juste la réserve qu'un pharmacien ne tiendra pas six ou sept compagnies
de médicaments génériques, il va le faire, le choix.
Le
problème qu'on voit comme ordre professionnel, puis je
suis contente que vous posiez la question parce
que ça nous donne l'occasion de vous
indiquer... Et je pense que vous l'aviez vous-même mentionné en entrevue,
M. le ministre, comment l'Ordre des pharmaciens fait bien son
travail, dans le sens où, oui, on est inquiets en matière d'indépendance professionnelle
et, oui, on agit quand il y a des problèmes. La preuve, c'est le dossier
Proxim-McKesson, qui est d'une notoriété publique maintenant, où, dans
le cadre de programmes de conformité, là... Pour le bénéfice des gens, un programme de conformité, c'est que le pharmacien
s'engageait à acheter certains médicaments en contrepartie d'avantages,
et l'ordre a agi...
M.
Barrette : Arrêtons là si vous me le permettez. Donc, il y a eu et il
y a peut-être encore — mais j'aimerais que vous
nous le confirmiez — une
mécanique dans la chaîne de progression du médicament qui permet des avantages
et/ou des désavantages selon l'observance de telle ou telle condition
contractuelle, et là je suis obligé de conclure que ça a un impact à la hausse
sur le prix.
Mme Lambert
(Manon) : Bon, au niveau de la mécanique comme telle, je pense que, M.
le ministre, les parlementaires, vous
connaissez le fonctionnement d'un ordre professionnel, alors c'est le syndic
qui a réalisé les enquêtes, c'est le
syndic qui a réalisé la conciliation. Donc, ce qu'on sait, c'est ce qui a été
rendu public par le syndic, effectivement, c'est que les pharmaciens s'engageaient à acheter des médicaments en
contrepartie d'avantages. C'est essentiellement ça, pécuniaires. Donc,
pécuniaires ou, je dirais, en rabais sur des produits de santé sur le devant de
la pharmacie. C'était essentiellement le mécanisme qui était utilisé à cette
époque-là. Donc, dans ce contexte-là...
M.
Barrette : Et, conséquemment, corrigez-moi, s'il n'y avait pas ça, il
y avait un désavantage pécuniaire. Alors, à partir du moment où on parle de circulation d'argent, il faut qu'il y
ait une marge qui existe pour permettre de donner un avantage à
quelqu'un. Donc, il y a un impact à la hausse sur le prix.
• (16 h 30) •
Mme Lambert (Manon) : En fait, M. le ministre, je pense que vous essayez de nous faire dire
ce qu'on vous a déjà dit,
c'est-à-dire qu'on pense qu'effectivement il y a de la place pour avoir un
meilleur prix au Québec. Non seulement un
meilleur prix, mais je vous réfère à la page 13 de notre mémoire, non
seulement un meilleur prix, mais une meilleure utilisation. Meilleure
utilisation, si vous regardez à la page 13, vous avez là le graphique des
facteurs contribuant à la croissance des dépenses du RPAM. Et ce qu'on remarque, le plus
gros facteur de croissance est le nombre d'ordonnances par assuré. Donc,
ce qui fait en sorte qu'on augmente le prix des médicaments, c'est qu'on
prescrit beaucoup plus de médicaments par personne.
M. Barrette :
Là, je vous arrête ici — puis
ce n'est pas parce que je veux vous interrompre, c'est juste une question d'utilisation du temps — je
suis d'accord avec vous. C'est la raison pour laquelle on a
mandaté l'INESSS pour faire un
chantier, là, sur la pertinence. Vous avez raison, on est sur la même page là-dessus,
sauf que, dans l'univers des économies potentielles, ce sont deux
éléments parallèles. Vous avez raison, il y a des économies à aller faire là.
Je suis 110 % — comme
dans l'émission — d'accord
avec vous. Mais, en même temps, je suis tout aussi 110 % de l'autre
bord, il y a des économies l'autre bord. Là,
aujourd'hui, ce qui nous intéresse, c'est ce bord-là, le bord de la
mécanique financière de contrats.
Et
là, moi, j'aimerais ça... Vous êtes, pour deux d'entre vous, je crois, vous êtes des pharmaciens en pratique aussi, là. Alors, moi, ce qui m'intéresse, c'est que vous
nous éclairiez sur toute la mécanique, là. On nous a dit tantôt, aujourd'hui
même, là, on nous a dit, là, que les pharmaciens propriétaires — puis
c'est écrit dans certains documents, là — que, quand arrive le temps
d'avoir à choisir entre un et l'autre un fabricant de génériques, bien là il
faut choisir. Bien, s'il faut choisir, ça se
peut qu'en quelque part il y ait un incitatif ou un désincitatif financier,
pécuniaire qui, lui, provient d'une marge,
ne peut pas venir d'ailleurs. Ça existe, ça, et là vous êtes l'ordre. Ne
trouvez-vous pas que la liberté professionnelle, l'autonomie professionnelle du pharmacien est impactée par des
circonstances commerciales entre, à la limite, le fabricant, le
grossiste, le franchiseur?
M. Bolduc
(Bertrand) : La réponse à ça, c'est : Pas nécessairement.
L'indépendance professionnelle du pharmacien s'exerce à chaque patient qui se
présente à la pharmacie : Est-ce que je suis en mesure de fournir à ce
patient-là le produit qui lui convient le mieux et le service qui lui
convient...
M.
Barrette : Ce que vous
dites, si vous le dites, M. Bolduc, c'est que l'intégration verticale n'a aucun
impact sur le prix.
M. Bolduc (Bertrand) : Non. Non, ce
n'est pas ça que je dis.
M. Barrette : Donc, vous me dites
que l'intégration verticale a un impact?
M. Bolduc
(Bertrand) : Peut avoir un
impact. Et l'intégration verticale ou les intermédiaires, c'est comme...
Vous avez fait une analogie sur les voitures, là, la semaine dernière. On va
prendre la même chose, il y a des fabricants de voitures, il y a des concessionnaires qui font la vente de la
voiture et le service puis, entre les deux, il y a des livreurs de
voitures. Et, présentement, les gens qui vendent les voitures et qui en font
l'entretien, bien, on veut qu'ils vendent la meilleure voiture au meilleur prix
et, évidemment, on veut qu'ils l'entretiennent de la façon la plus sécuritaire parce
qu'on ne veut pas qu'elle fasse d'accidents.
M. Barrette : ...M. Bolduc, je vais
vous dire que l'analogie que j'ai faite était sur l'essence.
M. Bolduc (Bertrand) : Sur
l'essence.
M.
Barrette : Et, si vous voulez que je la continue, je vais la continuer ou la répéter. Entre le baril
de pétrole qui est puisé dans un quelconque sol dans l'univers et le
prix à la pompe, il y a une multitude d'intermédiaires, et chacun prend sa «cut», et la mécanique de la gestion du
prix à la pompe est telle que beaucoup de critiques sont construisables.
M. Bolduc
(Bertrand) : Bien, alors, ce
qui est important, ce serait que les pharmaciens soient incités à vendre
des voitures hybrides ou des voitures
électriques et de les entretenir de
la façon la plus efficace possible
pour qu'on n'ait pas à changer les voitures, mais qu'elles soient sur la
route le plus longtemps possible et qu'on ne fasse pas d'accidents. Ce qu'on veut que les pharmaciens fassent, c'est
coacher les gens pour qu'ils profitent au maximum de leurs médicaments
en toute sécurité.
Présentement, on a un système où les pharmaciens sont rémunérés pour dispenser
des médicaments, non pas en enlever
ou optimiser leur utilisation. C'est ce qu'on cherche à faire. C'est vers ça
qu'on oriente la pratique et c'est vers ça qu'on aimerait que le mode de
rémunération suive. Mais, présentement, on a des intermédiaires qui, évidemment,
aimeraient bien que, cette semaine, on vende des voitures bleues parce qu'ils
en ont beaucoup, des bleues, en stock. Ce
n'est peut-être pas une voiture bleue que ça prend, c'est peut-être
une voiture d'une autre couleur. Ce qu'on veut que les pharmaciens fassent, c'est qu'ils travaillent
constamment et uniquement pour leurs patients. C'est ça,
être indépendant professionnel. Je pense que, malgré les intermédiaires,
c'est ce qu'ils font à tous les jours à chaque patient.
Maintenant, s'il y a une influence quelconque
qui génère un avantage pécuniaire ou un désavantage qui forcerait ou qui changerait ce choix-là et qu'il y a
une plainte, nous agissons, nous avons agi et nous agirons. Ça,
c'est clair. Ceci étant dit, est-ce qu'il y a des gens qui ont ces actions-là
et qui essaient d'influencer les pharmaciens? Bien sûr, et il y en aura
toujours.
M. Barrette : Est-ce que
l'intégration verticale inquiète l'ordre?
Mme Lambert (Manon) : La réponse se
trouve au niveau des relations contractuelles dans le cadre de cette
intégration verticale là. L'idée, l'idée, ce qu'on veut comme ordre
professionnel, là, le laboratoire, ça appartient au pharmacien. O.K.? Comme mon
collègue l'a dit, comme M. le président l'a dit, je veux rassurer la population...
M. Barrette : ...aujourd'hui, là,
dans l'état des choses d'aujourd'hui, aujourd'hui, là, je ne vous demande pas l'idéal, vous me répondez par l'idéal.
Aujourd'hui, dans la pratique, est-ce
que l'intégration verticale inquiète
l'Ordre des pharmaciens du Québec?
Mme Lambert (Manon) : En fait, non
seulement l'intégration verticale, dans certains cas... Encore une fois, parce qu'on
va de là jusqu'à là, non
seulement, dans certains cas, l'intégration
verticale nous inquiète, mais on a agi. Encore une fois, le dossier
McKesson, le dossier Proxim, c'était un bon exemple où on a trouvé, entre vous
et moi, que les tiers — en
fait, les grossistes, dans ce cas-là, la chaîne, la bannière — rentraient
dans le labo, et, nous, ce qu'on dit, là, le labo, c'est le royaume du
pharmacien.
M. Barrette : On comprend.
Mme Lambert (Manon) : Et ça, c'est
une question de confiance.
M. Barrette : La problématique
est-elle résolue, à votre avis?
M. Bolduc
(Bertrand) : Bien, il y a deux façons de la résoudre.
M. Barrette : Donc, elle n'est pas
résolue.
M. Bolduc (Bertrand) : Bien,
d'améliorer la résolution lorsqu'il y a des problèmes. La première...
M. Barrette : Donc, ce n'est pas
parfait.
M. Bolduc (Bertrand) : Nous, on est
l'Ordre des pharmaciens, on n'est pas l'ordre des grossistes ni l'ordre des
fabricants. En Europe, les ordres de pharmaciens, ils gèrent la pratique du
pharmacien au niveau des grossistes et des fabricants. Il y a des pharmaciens
responsables, et l'ordre peut aller les enquêter et les punir. Si vous
souhaitez... l'ordre des grossistes et des fabricants en obligeant des
pharmaciens sur place, ça va nous faire plaisir.
L'autre façon, vous avez le pouvoir, M. le
ministre, à travers l'engagement du fabricant et l'engagement du grossiste, dans le cadre de la Loi sur l'assurance maladie, de régir et de réglementer ces intervenants-là. Alors, vous
pouvez aussi agir à ce niveau-là.
M. Barrette : ...de l'ordre, était-il justifié et nécessaire
de limiter en 2010... de plafonner les allocations professionnelles? Et
pourquoi?
M. Bolduc (Bertrand) : Pour nous, M.
le ministre, dans un monde idéal, tout le monde paie moins cher ses médicaments,
il n'y en a pas, d'allocations professionnelles. Il y a des honoraires justes
et équitables pour un service professionnel...
M. Barrette : Mais je vous pose une question.
M. Bolduc (Bertrand) : ...qui mène à
l'utilisation optimale du médicament. Présentement et pour les trois prochaines années, suite à votre entente avec
l'AQPP, on va s'accommoder des allocations professionnelles, mais il
faut revoir ce mode...
M.
Barrette : Était-il, en 2010, justifié — et pourquoi? — de plafonner les allocations
professionnelles à 15 %?
M. Bolduc (Bertrand) : Ça, ça a été
le choix du gouvernement. Nous, on n'a rien eu à voir.
M. Barrette : Et donc vous étiez
contre?
M. Bolduc (Bertrand) : On n'était ni
pour, ni contre.
M. Barrette : Et donc, aujourd'hui,
vous êtes pour le déplafonnement?
M. Bolduc (Bertrand) : On est contre
les allocations professionnelles totalement.
M. Barrette : Vous êtes pour le
déplafonnement?
M. Bolduc
(Bertrand) : Nous, ce qu'on
veut, c'est que les pharmaciens soient rémunérés pour le service, et non
pour délivrer une quantité ou un nombre de médicaments.
M.
Barrette : Vous êtes pour, à l'ordre professionnel, la relation avec
le grossiste et le fabricant ou le fabricant de vous donner le maximum
d'allocations professionnelles.
Mme
Lambert (Manon) : Ce n'est
pas ce qu'on dit. Ce n'est pas ce qu'on dit. Et d'ailleurs vous avez eu une
lettre...
Le Président (M. Tanguay) : En
quelques secondes. En quelques secondes.
Mme
Lambert (Manon) : Oui. Vous
avez eu une lettre où on vous a très bien exposé notre position, c'est-à-dire
que l'ordre, dans un monde idéal, il n'y
aurait pas du tout d'allocations professionnelles. Ce n'est pas la question du
plafond ou pas de plafond, là, c'est zéro,
«niet», comme dans «Ouellette», aucune allocation professionnelle — je ne sais pas si ma position peut
être plus claire que ça — parce
qu'on veut que le...
Le
Président (M. Tanguay) : Merci. Je veux maintenant céder la parole à
notre collègue — on a
déjà dépassé le temps alloué — de Rosemont pour la poursuite
des échanges, pour 10 min 30 s.
• (16 h 40) •
M. Lisée :
Merci, M. le Président. C'est un petit peu surréaliste, ce qui est en train de
se passer, parce qu'on a le ministre libéral de la Santé devant nous, on
a les représentants de l'Ordre des pharmaciens du Québec — et je
tiens à vous saluer, M. le président,
Bertrand Bolduc, M. Martin Franco, Mme Manon Lambert, directrice générale — ce matin, le
ministre a décidé de faire une charge, une sortie, une accusation extrêmement
grave à l'endroit de l'ordre et de sa présidente précédente en votre absence et
en l'absence de la personne. Et, maintenant qu'il est devant vous, il ne dit rien. Il y a des mots, M. le Président, pour
décrire la situation de quelqu'un qui porte des accusations sans être en
présence de la personne qu'il accuse et,
devant la personne, se tait. Il y a des mots pour ça, je ne les prononcerai pas
parce qu'ils sont sur la liste des mots non parlementaires.
Mais, puisque
vous êtes là et que votre ordre a été attaqué ce matin, je vais vous donner
l'occasion de répondre. Et je vais
citer ce que le ministre a dit. Je ne peux pas nommer la personne parce que les
règles parlementaires me l'interdisent, mais je vais remplacer, à chaque fois qu'il utilise son nom, par
l'ex-présidente de l'Ordre des pharmaciens. Alors, il a dit que l'ordre
avait présidé à un scandale, à une faute morale, à une manoeuvre, à un
«scheme».
«Son mandat
[à la présidence de l'ordre,] aux dernières nouvelles était de protéger
l'intérêt public. Est-ce
qu'elle s'est levée à cette époque pour
informer la population qu'elle allait être surfacturée parce que
ses membres, incorporés en passant,
allaient se revirer de bord sans le dire au public et charger les assureurs
privés, dont les primes ont augmenté?
«[La
présidente de l'ordre] a été partie et a approuvé par omission un scheme pour
aller chercher de l'argent dans une partie du public[...]. Moi,
j'appelle ça les ristournes [de la présidente de l'ordre]. Elle s'est servie
dans le pot aux bonbons. [...]Je pose la question
de la moralité du geste de la part d'une personne qui se présente constamment
comme étant la détentrice de la vertu. Là, vous avez le vrai visage de [la
présidente de l'ordre].» Je cite toujours le ministre : «[La présidente de l'ordre, l'ex,] est assise
confortablement à l'Assemblée
nationale, payée par les impôts
des Québécois, et elle est incorporée, fait de l'argent avec sa pharmacie
et, quand elle était présidente de l'ordre, elle n'a pas dit un mot et
elle n'en dit toujours pas, de mot aujourd'hui. Sa situation est
"intenable"...»
Est-ce que l'ordre a été coupable de tout ce
dont l'accuse le ministre de la Santé?
Mme
Lambert (Manon) : Je ne
commenterai évidemment pas un désaccord ou des débats entre parlementaires.
Ce que je peux dire comme ordre
professionnel... et l'Ordre des pharmaciens du Québec est un des ordres qui
n'a jamais hésité à mettre tous les moyens pour protéger le public. On
est un des deux ordres qui, en 140 ans d'histoire, sommes montés jusqu'à la Cour suprême dans le dossier des
rabais et ristournes pour faire la vérité, obtenir la vérité et
sanctionner les membres qui avaient contrevenu à leurs obligations professionnelles.
Alors, dans
le contexte des prix, les assureurs sont venus dire de façon un peu, peut-être,
simpliste qu'il existait un écart de
17 % entre les deux systèmes. Ce
qu'il faut comprendre, c'est qu'un ordre professionnel, on est là pour
défendre les patients patient par patient. Or, la réalité, c'est que tous les
patients au Québec n'ont pas 17 % d'écart entre ce qu'ils paieraient au public et ce qu'ils paient au privé.
Ce matin même dans Le Soleil, un patient qui était assuré au privé s'est plaint qu'en transférant au public son prix
augmentait et il a, d'un même souffle, dit : Bon, bien, le pharmacien s'en
met plein les poches, alors qu'au public le prix du médicament est fixé par le gouvernement,
et les honoraires également sont fixés par
le gouvernement. Alors, la réalité, c'est que, lorsqu'on est un
patient, bien, il est possible que, dans certains cas, ça coûte plus
cher au public et, dans certains cas, il est possible que ça coûte plus cher au
privé et...
M. Lisée : Je pose la question au président de
l'ordre. Le ministre de la Santé, ce
matin, a déclaré que la présidente précédente
de l'ordre avait manqué à son devoir à ce moment-là, n'avait pas agi, avait mal
agi, elle s'était mise la main dans le pot de bonbons. Est-ce que vous
allez rester là et dire que vous n'avez rien à dire là-dessus?
M. Bolduc
(Bertrand) : Bien, comme je
vous ai dit d'entrée de jeu, l'ordre ne négocie pas. Aucun ordre professionnel ne négocie les honoraires de ses
membres, aucun, que ce soient les architectes, les ingénieurs, les psychologues,
les optométristes. L'ordre ne négocie pas, ni avec le public ni avec le privé,
ne négociait pas avant moi ou avant l'ex-présidente de l'ordre, ne négociera
pas après moi non plus. Ce n'est pas notre job de négocier les honoraires.
M. Lisée : Donc, ces
accusations sont non fondées.
M. Bolduc
(Bertrand) : Bien, ce n'est
pas nous qui avons négocié. S'il y a un changement dans la
réglementation qui fait en sorte qu'il y a
des mouvements au niveau des honoraires des pharmaciens... Comme disait Mme
Lambert juste avant moi, souvent, au
public, c'est plus cher. Présentement, toutes les jeunes femmes qui prennent un
anovulant au Québec paient
probablement moins cher au privé qu'au public. Alors, il y a une catégorie de
produits qui sont comme ça, d'autres produits... C'est deux systèmes
complètement différents.
M. Lisée : Je comprends.
Alors, si cette situation qui a été créée par la décision d'un ministre libéral
de la Santé, Yves Bolduc, de plafonner les
honoraires pour les pharmaciens dans leurs factures pour le système public a
généré une augmentation des honoraires pour
le privé, donc c'est le ministre libéral de la Santé de l'époque qui aurait pu
agir pour empêcher des dérives. Mais, s'il y
a eu des dérives, est-ce que les personnes pouvaient se référer au syndic de
l'ordre?
M. Bolduc (Bertrand) : Absolument.
M. Lisée : Tout à fait.
M. Bolduc (Bertrand) : Tout patient
peut porter plainte au syndic en tout temps sur une question de prix, de service, une question de négligence,
d'erreur, peu importe. Et les enquêtes ont lieu, et, s'il y a
lieu de déposer une plainte contre un membre, ça sera fait, évidemment.
M. Lisée : Et n'est-il pas vrai que, sous la présidence de
l'ancienne présidente de l'ordre, en fait, les syndics ont, de leur
propre initiative, fait quelques vérifications pour voir s'il y avait dérive?
M. Bolduc
(Bertrand) : Le syndic de l'ordre est toujours indépendant. Peu
importe qui occupe le siège de la présidence
ou de la direction générale, c'est un département complètement indépendant.
C'est comme un procureur de la couronne qui est complètement indépendant
du ministère de la Justice, c'est la même chose chez nous.
M.
Lisée : Donc, c'est dire n'importe quoi que d'affirmer que la
présidence de l'ordre n'a pas agi, alors que le syndic est indépendant et fait son travail. N'est-il pas vrai aussi que
la présidente de l'ordre a spécifiquement commandé une étude à un spécialiste en question de prix des
médicaments, M. Montmarquette, parce qu'elle voulait savoir s'il y avait
des recommandations à faire pour bonifier le système?
M. Bolduc
(Bertrand) : Tout à fait. Bien, le conseil d'administration de l'ordre
a commandé ce rapport-là à M. Montmarquette , qui est un économiste bien connu, pour comprendre est-ce qu'il y a des choses qu'on
pourrait mettre en place pour mieux
éclairer les patients face au coût des médicaments. Parce que, comme vous le
savez probablement, les régimes sont
compliqués, il y a des milliers de régimes d'assurance privés. Et le régime public n'est pas plus simple non plus à
expliquer aux gens, alors on s'est demandé la question : Est-ce qu'on peut
faire mieux au niveau de l'explication? Ce
qu'on a comme conclusion du rapport Montmarquette, qu'on a rendu public, c'est
simple, c'est que c'est compliqué. Les
gens, ce qu'ils veulent savoir, c'est combien ça me coûte. Quand on va chez le
dentiste, on ne veut pas savoir comment ça coûte pour le fluor, pour la surface interne, externe, etc., ce qu'on
veut savoir, c'est combien ça va me coûter pour faire réparer ma dent. C'est la même chose à la pharmacie, ils veulent
savoir le prix. Et, avec le prix du médicament, ils peuvent magasiner si
ça leur plaît. La plupart des patients — et c'est ce qu'on
souhaite — choisissent
un pharmacien, une équipe de pharmaciens, obtiennent un service et sont
généralement heureux. S'ils ont une plainte à faire, ils peuvent toujours la
faire au syndic.
M.
Lisée : Donc, si je vous comprends bien, une situation nouvelle
a été créée en 2010 parce qu'un ministre libéral de la Santé a fait un
plafonnement. L'ordre a fonctionné normalement. Le syndic a fonctionné
normalement, il a fait d'ailleurs... il a
été proactif pour voir s'il y a des vérifications, et le conseil
d'administration et la présidente de l'ordre ont demandé un rapport pour
voir s'il y avait des bonifications à faire. Est-ce que vous voyez là-dedans
une justification pour que le ministre actuel de la Santé parle de scandale, de
faute morale ou de main dans l'assiette aux bonbons?
M. Bolduc
(Bertrand) : Je vais laisser les parlementaires poursuivre le débat
entre eux à ce niveau-là.
M.
Lisée : Bien, moi, j'en vois, je trouve que c'est un scandale
et une faute morale que le ministre de la Santé actuel fasse de telles
accusations.
On
va parler des solutions que vous avancez parce que ce que vous dites, c'est que
vous lancez un appel pressant au ministre
pour qu'il arrête un petit peu, là, de s'occuper à temps plein des médecins
spécialistes, puis de leurs primes, et de leurs frais accessoires, et tout ça, et qu'il passe quelques heures pour
donner plus de pouvoirs aux pharmaciens, pour qu'ils puissent revoir la médication, et que, selon vos
calculs, il y a un niveau considérable, de 4 % à 10 % des
hospitalisations qui sont relatives aux événements indésirables de médicaments
qui sont mal prescrits ou de combinaisons qui sont mal prescrites. Et vous
faites un calcul, aux États-Unis, ça pose des coûts de 29 milliards de
dollars. J'ai fait une règle de trois, au
Québec, ça fait 700 millions de dollars par année qu'on pourrait
économiser si on faisait un juste équilibrage des médicaments. C'est
exact?
M. Bolduc
(Bertrand) : Le pharmacien, ça doit devenir un coach du médicament.
Lorsqu'on vous envoie au gymnase pour faire de l'exercice, si votre coach était
payé en fonction du nombre d'exercices que vous avez à faire, probablement que vous vous feriez mal, et
peut-être que vous n'obtiendriez pas les résultats que vous voulez au
niveau de la performance, vous ne gagneriez peut-être pas la course. Si vous
avez un coach qui est rémunéré en fonction de vos résultats, de vos performances, vous allez sûrement obtenir des
résultats parce qu'il est engagé avec vous dans votre désir de performance, et peut-être donc pas plus
d'exercices, mais mieux d'exercices. C'est ce qu'on veut pour les
pharmaciens, des meilleurs accès aux services.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant
poursuivre avec notre collègue de Lévis pour sept minutes.
• (16 h 50) •
M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. M. Bolduc, Mme Lambert,
M. Franco, je reviens également sur le projet de loi n° 81 et la vision que vous en avez, là. Je reviens
sur le fait que, comme ordre — et vous l'avez dit à maintes
reprises — votre
préoccupation, c'est, évidemment, les patients, leur sécurité, leur mieux-être.
Et vous dites en page 9 de votre
mémoire : Parmi les conditions gagnantes, s'il y a processus d'appel
d'offres, qu'on devrait confier
la gestion de ces appels-là à un groupe d'experts. Et là vous êtes assez
clairs, hein, vous recommandez que le ministre constitue un comité au sein duquel siégeraient des pharmaciens spécifiquement.
Puis, quand on regarde l'analyse d'impact réglementaire, ce n'est quand
même pas une notion qui est élaborée à travers ça, cet élément-là, majeur pour
vous. Pourquoi l'est-il? J'aimerais ça que vous nous donniez davantage
d'information sur l'importance
de cette recommandation-là.
M.
Franco (Martin) : En fait, M. le Président, les gens autour de la
table ici vont reconnaître l'expertise du pharmacien. Si on parle d'appel
d'offres du médicament, la spécialité du pharmacien, c'est le médicament. De
faire des appels d'offres et de ne pas
recourir à l'expertise du pharmacien, ça serait se priver d'un grand privilège
d'un point de vue populationnel.
Si
on regarde ça d'une autre façon en se disant : Qu'est-ce qui se fait
actuellement?, si on regarde un organisme comme l'INESSS, à l'INESSS on réussit à faire une évaluation
thérapeutique de chacun des médicaments qui est ajouté ou non à la
liste, et, autour de la table, il y a un paquet de spécialistes, dont plusieurs
pharmaciens d'établissement, plusieurs pharmaciens qui oeuvrent au sein même de
l'INESSS et qui font en sorte qu'on produit, finalement, une évaluation juste et équitable de chacun des
médicaments. Si on l'utilise à l'INESSS, on juge que c'est pertinent dans
la logique de l'effectuer lorsqu'on fait des appels d'offres entourant le
médicament pour l'ensemble du Québec.
Si
je regarde comme pharmacien d'établissement, on fait des appels d'offres, ça
fonctionne relativement bien. On a
mis en place des mécanismes pour assurer l'indépendance professionnelle des
gens autour de la table, mais on a recours au spécialiste du médicament,
qui est le pharmacien ici, pour s'assurer de ne pas créer des dommages
collatéraux d'une décision qui pourrait être
prise seulement sur l'attribution d'un appel d'offres à un seul fabricant, par
exemple, puis d'avoir à gérer une
crise de rupture d'inventaire à rebond qui ferait en sorte, par exemple, qu'on
pourrait avoir des retards dans les salles
d'opération de certains établissements de santé ou de ne pas être en mesure de
greffer un patient qui a besoin de sa greffe
de moelle osseuse parce que je me ramasse avec plus de médicaments puis que,
là, je suis obligé de choisir entre un ou
l'autre. C'est insoutenable. Ça fait qu'il y a des mécanismes qui sont mis en
place pour atténuer cet impact-là. Donc, selon nous, on voit pourquoi
l'ordre préconise cette approche.
M. Paradis (Lévis) : Je comprends à travers ce que vous me dites que le gouvernement, dans
votre vision des choses puis dans le
meilleur des mondes, n'a pas nécessairement l'expertise... en tout cas, ne doit
pas être seul à juger de ce que l'on devra...
M. Franco (Martin) : Les soins de santé, c'est un travail d'équipe, hein? Et, dans
l'évaluation de ce genre de technologie
là, le médicament, ça fait aussi partie de ça au même titre que d'autres types
de défibrillateurs ou d'autres types
de fourniture. Donc, de recourir à l'expertise en s'assurant un mécanisme
d'indépendance professionnelle fait en sorte
qu'on réussit, à coup sûr, à profiter puis à faire profiter les gens à la
maison de ce bénéfice-là et de cet investissement social qu'on a fait là en mettant en main les
pharmaciens, qui ont une éducation au niveau de la gestion du
médicament, au profit de la population.
Mme Lambert (Manon) : En fait, ce que j'ajouterais, c'est que j'ai beaucoup de respect pour
l'équipe de pharmaciens du ministère de la Santé, là. Dominic est là,
j'ai beaucoup de respect. Mais Dominic, comme moi, on n'est pas des praticiens, on n'a pas les deux pieds sur le terrain. Et
ceux qui sont le mieux en mesure d'évaluer les impacts et les effets pervers potentiels de problèmes qui
seraient reliés à un appel d'offres, c'est les gens comme Martin, c'est
des gens qui ont les deux pieds sur le terrain des vaches et qui sont capables
de dire : Oups! Là, on va avoir un problème.
M. Paradis (Lévis) : Je me permets d'avancer un petit peu. Parce que, tout ça, il y aura un
cadre réglementaire, évidemment, sur
l'appel d'offres, il y aura des conditions, évidemment, qui seront élaborées,
qui seront posées. Vous dites : Le
pharmacien doit être partie prenante aussi de la mise en place de cette
formulation-là. Plusieurs nous ont dit : Il y a des effets, il y a
des effets potentiels ou il y a des risques, en tout cas, et il ne faut pas se
fermer les yeux là-dessus.
Et
des gens ont dit : Ça va aller jusqu'à éventuellement la couleur d'un
comprimé, sa forme, sa texture, le fait qu'on doive, à un moment donné, obliger... Parce que moins — et vous en parliez — d'indépendance professionnelle,
d'aller chercher le médicament qu'on veut
parce qu'on devra travailler avec un, ou deux, ou trois, vous dites, et, dans
le meilleur des mondes, double ou
triple adjudication... Est-ce qu'effectivement il y a une problématique majeure qui vous inquiète là-dessus, sur la
forme que pourrait prendre le produit, sur le fait qu'il y en ait moins et la
dépendance également du pharmacien ou son indépendance vis-à-vis le produit à
donner?
M. Bolduc (Bertrand) : Bien, ce n'est pas tant un problème d'indépendance.
Il y a des problèmes techniques qu'il
va falloir gérer, puis, en utilisant des experts, on peut... Il y a aussi des
effets... Et ça, les pharmaciens salariés vous en ont parlé, je pense,
puis qu'ils sont bien à même de vous les expliquer.
L'autre
chose, c'est qu'il peut y avoir des effets collatéraux imprévus. Si moi, je
suis une compagnie générique, puis je
perds du volume sur mes gros vendeurs, et que j'ai certains produits que je
suis tout seul à vendre, bien, ça se peut que je sois tenté d'augmenter le prix de... Et là ce qu'on va avoir,
c'est des patients qui sont avantagés par l'appel d'offres et d'autres qui sont désavantagés. Et c'est arrivé
dans le passé que certains fabricants uniques de certains produits
refusent de les vendre au Québec
ou même refusent de les lister au formulaire. Pourquoi? Parce qu'on n'acceptait pas leurs hausses de prix. Donc, il est à prévoir qu'il y ait des
impacts collatéraux sur ce genre de produits là, et nous, on veut éviter ça
parce qu'on veut protéger tout le monde, on
veut que tout le monde en profite, mais que certains ne soient pas
désavantagés. La personne qui va être
désavantagée, pour elle, pourquoi elle paierait plus cher son médicament parce
qu'on est allés en appel d'offres sur les gros vendeurs? Il faut faire
très attention.
Mme Lambert (Manon) : Je vais vous donner juste un exemple d'un problème technique qu'on a
vécu à l'ordre. À un moment donné, on
a eu une demande d'enquête de la part d'une maman dont le jeune enfant a été
hospitalisé parce qu'il y avait eu une confusion entre de la méthadone,
qui est un stupéfiant puissant, et du méthylphenidate, qui est du Ritalin.
Alors, c'est deux pots, deux comprimés blancs, 10 mg, l'assistante... Et
c'était la même compagnie, puis l'étiquetage était très
confondant, et on a... Ce qu'on a fait, c'est qu'on a fait une recommandation à
la compagnie de changer son étiquetage parce que ça a amené un jeune enfant à
l'hôpital.
Le Président (M.
Tanguay) : Oui. Alors, nous poursuivons avec le collègue de Mercier
pour 3 min 30 s.
M. Khadir :
Oui. D'abord, Mme Lambert, M. Franco, M. Bolduc, bienvenue. Les préoccupations
que vous exprimez sont légitimes. Je
rappelle que vous êtes en train de parler d'événements qui se passent ici alors
même qu'il n'y a pas ce genre
d'appels d'offres, c'est des choses qui arrivent. Si vous avez ces
préoccupations-là, qui sont légitimes, je vous invite, juste après vous,
il y a l'ex-P.D.G. de Pharmac, en Nouvelle-Zélande, qui a oeuvré au sein de
Pharmac depuis cinq ans, et c'est des
questions que nous allons lui poser et que vous allez lui entendre, qui vont
être sans doute adressées. Pour les
besoins de la cause, moi, ce que j'en connais, ni la Nouvelle-Zélande, ni
l'Allemagne, qui a un autre système d'appel d'offres, où la croissance
des prix a été de 3 %, à comparer à 10 %, à 11 % au Québec au
cours des dernières années... enfin, des 15 dernières années...
Donc, je pense que, si on se fie sur l'expérience
à l'étranger, le système d'appel d'offres peut prévoir des mécanismes
pour parer à tous ces problèmes-là, comme ça a été le cas en Nouvelle-Zélande.
Et tous les indicateurs de morbidité,
d'effets secondaires, d'événements, disons, malheureux, comme vous l'avez
mentionné, n'ont pas été plus importants
en Nouvelle-Zélande qu'ailleurs, il y a des études qui ont été faites. Si on ne
le savait pas il y a 10 ou 12 ans, aujourd'hui,
on le sait, 20 ans plus tard, il n'y a pas eu d'impacts à ce niveau-là. Alors,
je vous invite à rester à l'écoute à ce niveau-là.
Maintenant,
pour la prise en charge, vous avez dit... Et je suis vraiment content, et je
pense que le ministre et tous les parlementaires
doivent être à l'écoute, l'Ordre des pharmaciens, ça a été dit ici une fois
encore, est opposé aux allocations professionnelles.
L'Ordre des pharmaciens est plutôt en faveur d'honoraires justes et équitables
et dans un système d'appel d'offres.
Bien que le ministre a dit : C'est deux aspects différents pour aller
chercher des diminutions de coûts, mais, si on fait quelque chose qui a un impact, par ailleurs, sur
d'autres aspects, dont la rémunération des pharmaciens, il faut les prévoir
d'avance.
Est-ce
que vous auriez une idée précise quel devrait être l'ajustement au niveau
réglementaire immédiatement applicable,
si on part en système d'appel d'offres, pour mettre fin au système
d'allocations professionnelles, qu'habituellement on appelle ristournes
et qui seraient passibles d'accusations criminelles si c'était associé à des
contraintes dans le choix des médicaments?
• (17 heures) •
M. Bolduc (Bertrand) : D'un point de vue réglementaire, il y a certaines
choses qui pourraient être nécessaires. Si on veut que les pharmaciens, comme partout au Canada, vaccinent, on a
besoin d'un petit changement réglementaire qui n'est pas très compliqué.
Mais on n'a pas besoin de changements réglementaires ou législatifs pour
demander aux pharmaciens de faire des nouvelles activités. Maintenant, on a la
loi no 41, mais il y a plein d'autres trucs qu'on peut faire, on
peut travailler en collaboration interprofessionnelle avec les médecins, les
infirmières.
Vous avez vu un
article, peut-être, d'André Picard dans le Globe and Mail avant-hier qui
disait qu'on peut, ensemble, les pharmaciens — pas tout seuls, mais avec l'équipe médicale — déprescrire des médicaments, enlever
des médicaments. Il est prouvé qu'un
médicament qui s'implique en hypertension... à chaque fois qu'un pharmacien
s'implique dans le suivi, on a besoin de
moins de médicaments, on sauve des coûts en médicaments. Pourquoi? Simplement
parce qu'il y a un suivi étroit. Coaching égale résultats. En hypertension, en diabète,
en cholestérol, c'est prouvé.
M. Khadir :
Aujourd'hui, sur le plan des honoraires, ce n'est pas reconnu par le ministère?
M. Bolduc
(Bertrand) : Il n'y a pas d'honoraires pour faire des suivis. Il y a
des honoraires pour faire des ajustements maintenant, mais c'est tout.
M. Khadir :
Est-ce qu'ailleurs au Canada il y en a?
Le Président (M.
Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, nous vous remercions, représentantes,
représentants de l'Ordre des pharmaciens du Québec.
Nous suspendons
quelques instants.
(Suspension de la séance à
17 h 1)
(Reprise à 17 h 9)
Le Président (M.
Tanguay) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons poursuivre
nos travaux. Nous accueillons maintenant M. Matthew Brougham. So,
you're very, very welcome here at the National Assembly of Québec. You will have a period of 10 minutes for
your presentation, and then you'll have an open discussion with the
members of the National Assembly. So, without any further ado, we're ready to
hear you. Thank you.
M. Matthew
Brougham
M. Brougham (Matthew) : Bon après-midi, mesdames et messieurs. Avant de commencer,
je regrette de ne pouvoir vous livrer ma présentation entièrement en français.
Si seulement je le pouvais, c'est une si belle langue. Je vous prie de m'en
excuser, mais je vais quand même tenter quelques phrases.
Mon
nom est Matthew Brougham. Je m'adresse à vous aujourd'hui, car, avant de
déménager au Canada, j'ai été P.D.G.
de Pharmac, the Pharmaceutical Management Agency, une agence responsable de la
gestion des médicaments remboursables
en Nouvelle-Zélande. J'étais économiste à Pharmac, instauré par un gouvernement
conservateur, quand le système
d'appel d'offres a été mis en oeuvre pour l'approvisionnement des médicaments
couverts par le régime public d'assurance. J'ai supervisé quatre de ces
appels d'offres durant mes cinq années à titre de P.D.G. Et, maintenant, permettez-moi
de continuer en anglais.
• (17 h 10) •
Today,
I will speak briefly about New Zealand's experience with tendering for the
supply of off-patent pharmaceuticals.
But, before I do, I'm going to give you a slightly broader understanding of
Pharmac, its role, its success, how
it operates, and what I believe to have been its key elements to its success.
Given it's often held up as a model to consider copying, I think that,
in this very emotionally charged policy area, it's very important to be aware
of what Pharmac is and is not.
In
New Zealand, Pharmac is referred to as a crown entity. It's established at
arm's length from the Minister of Health. It is governed by a board appointed by the
Minister of Health. All decisions made by Pharmac are made by the board or its delegate, who is mostly the CEO. The
Minister of Health can, under circumstances, veto the decisions, and it
can... and he will ... and instruct other decisions be made. It's a power that
has been exercised only twice in over 20 years of its operation.
Pharmac
is responsible for managing the publicly funded pharmaceutical formulary, what
we refer to in North America
more commonly as a drug plan or, in the case of New Zealand, a national drug
plan. It's got many other roles these days, but originally that was its
role, and I'm going to focus on talking about that.
It
is required in law to provide the best health possible for New Zealanders
within the funding made available. This simply stated objective is, I believe, one of
its keys to its success. The statement makes clear that the budget for
drugs is finite and that choices will have to be made between competing
options. It becomes clear to a Pharmac manager that spending more for a drug than absolutely necessary to secure its supply
has a significant opportunity cost, and this is the loss and health
gains possible from the drugs that consequently cannot be purchased.
Combined
with this simple, clear, internally non-conflicting objective and its
decision-making being at arm's length from the Government, Pharmac has cultivated a
culture of respect for the budget. Pharmac's staff treat the drug budget
as binding and consider it is its duty, while buying as much health as possible
with each dollar, is to never exceed the budget.
It believes that to do so would be a gross dereliction of its civil duty as
this would take the choice of allocating public sector resources away
from those whose role rightfully belongs to, the elected servants of New
Zealanders.
These
three features — an arm's length relationship with the
Ministers, a simple, clear and non conflicting objective, a culture of complete respect for the
budget — are, I believe, the key reasons for
Pharmac's success. And to put this succinctly, what has been its success? Well, for more than two
decades now, it has held average annual growth rates and expenditures at
around 3 %, and this at a time when virtually all other drug plans around
the world have been near a double digit
annual growth rate. This control over expenditures has come primarily as a
result of negotiating low prices, not by
restricting access to prescriptions or in particular access to new
pharmaceuticals. So, how does it manage to negotiate low prices? For
off-patent pharmaceuticals, tendering has been a key, and I'm going to talk
about that soon.
For
on-patent pharmaceuticals, where, quite frankly, that's where the bulk of your
expenditure is in a drug plan, Pharmac uses a number of different instruments to encourage price
competition that probably head to things like expenditure caps, rebate
deals, requests for proposals, commercial bundling arrangements. All of these
contracting instruments should really be thought of as the results of good
negotiating rather than the tools or the means for good negotiating. Pharmac's ability to negotiate good deals really boils down
to two things: a fixed budget... Basically, what this means, is that not
every new drug can be funded, and therefore the price a
supplier offers, even for an unpatented pharmaceutical,
really matters in determining whether or not it's going to be funded. And the
second feature is that when Pharmac
says no, that means no. And I can only say no means no because it is left to
market decisions almost completely without
interference from the political process. Insure the structure and culture of
the organisation matters because all of it is axed to maximize competitive tension in the
marketplace. Without this tension, the best deals are not possible.
Supporters
of pharmaceutical sector will argue that using Pharmac-like model to manage
public drug plans will hurt the industry. I want to make it clear that the impact of
Pharmac-like purchasing on the pharmaceutical industry depends primarily
on the budget set for the
manager to manage with him. It's true that, when the budget
is set tight, fewer products at lower prices
will be purchased than when the budget is set loose. In both instances,
however, it strikes me that the
taxpayer is best served by a manager that makes sure that whatever amount of
money is available, it buys the most health
possible. Thus, it is my view a Pharmac-like approach to purchasing drugs can
work as well in a society that wants to support producers as in one that wants to reduce public expenditure on
pharmaceuticals. So, to summarize to this point, Pharmac is not an institutional form built solely for the purpose of
screwing down drug process, it is a form one can use if one is
interested in getting the most health you can from every dollar spent on drugs.
So,
to tendering, in New-Zealand, the primary objective set Pharmac when it began
its tendering process was to reduce the cost of provision of off-patent pharmaceuticals, subject to
meeting its other objectives essentially of maintaining or improving the
health of New-Zealanders. I'm going to give you a little bit more context
because it helps explain why it chose the particular instrument it did.
First, New-Zealand generic market at
the time was characterized by many small suppliers, each supplying products in any one market at
relatively low volumes and high prices, what we refer as low volume, high price
strategy. Second, to a get market
share in such a crowded marketplace, suppliers would find ways to effectively
pay pharmacists or distributors to fill
a script with their brand of the generic pharmaceutical. This is a process
known in the sector as bonusing. I'm sure it has a name here in Québec as well. At the time,
therefore, the off-patent market in New-Zealand could be described as very price competitive. The only problem with it
was that the pharmacists were benefiting from the price competition, not
the payers. In this context, New-Zealand
chose to implement tenders for the right of sole subsidized supply of an off-patent
pharmaceutical or even just the presentation
of a pharmaceutical. The term of supply was set at three years. The
tender was operated as a closed, written tender, and any supplier in the world
could compete in that process.
Sole supply was chosen primarily to be
able to offer market exclusivity to the winner with expected benefits of moving each supplier and each
market to higher volumes and best lower prices. In addition, exclusivity was
expected to remove the need for the suppliers to offer bonuses to
pharmacists, thus ensuring that the payer benefited from price competition, and not the distributor. Choosing a
tender term was and remains a delicate task. It is set not to long so as
to try and maintain healthy competition for each product at each subsequent
tender round, and not too short so as to help reduce
the transaction costs of any subsequent transition for one brand to another.
And those transitions can actually be quite expensive and difficult to
manage for suppliers, so important to try and reduce those costs as much as
possible.
A close tender was chosen to ensure
healthy competition continued into the future. Open competition really can be expected to favor incumbents and encourage low prices to the
detriment of the health of the market in the long term.
Similarly, allowing new entrants to compete
was expected to ensure healthy price competition both in the long and
the short runs. Another way, it's ensuring that the incumbents could not
collude with distributors in the short run and that the accretion of incumbents
was minimized in the long run.
• (17 h 20) •
To say that the tendering program in
New Zealand has been a great success is like saying that the New Zealand All Blacks are a pretty
good rugby team. And that joke might actually go down like a lead balloon here,
New Zealand has a great rugby team. In its early days, it resulted in
price reductions for some products that were simply unimaginable. You had 90% price reductions on products that we
thought were mature products. I don't propose to put a whole polydata in
front of you here. You will see various articles around the world that examine the prices that
are obtained in various markets, and New Zealand does well in the off-patent
pharmaceutical market. But you will always find a jurisdiction that will
do better for a particular drug, it's just, you know, there are ups and downs
throughout the prices.
But what I... tell you about the
success of the program. It's created savings every year since its operation. Last year, it looked at creating
savings of $38 million in a marketplace of $800 million. This is the mature
part of the market, so those numbers are not as huge as you might expect
them. But essentially, for the next three years, every year, it's going to
deliver another $30 million in savings.
It began in 1997 with the tender of
one product, and, four years later, the annual tender round each year, and to this day, includes hundreds
of line items. Tendering is being extended across the country. It includes many
items beyond pharmaceuticals, both medical devices and blood products.
And, up until a couple of years ago, when the tender was just for pharmaceuticals, including all of
hospital pharmaceuticals, the program was run by one full-time employee.
At peak times, you would involve other people such that I would estimate, in
total, the program, perhaps, used three to four full-time employees over the
course of an entire year.
So there are many criticisms of
sole-supply tendering. I have to say most amounted to fear mongering and never eventuated. For example,
supplies would leave the market, and thus, in the long run, costs would
increase. I've just told you that it
continues to produce savings year on year. Pharmacists would grow broke,
leading to a reduction in access to patients. Neither of those happened.
I want to talk to you about two criticisms
that are... and are very important to manage. Sole-supply was criticized as inherently
insecure. Supply outages were predicted to increase and have greater
consequence. I can tell you that, in my experience, the opposite
resulted, strict supply provisions and now standard clause in every contract,
with the cost of failing to meet these
falling solely on the supplier. Changes are being made over the years to try
and ensure that you receive early a
notification of supply troubles. But over the years, where stock outages have
become unavoidable, the other change that
has resulted, that is, you know, an improvement as a consequence of the system,
is that the medicines regulator, exactly like the one here in Canada, has become quite adept at quickly enabling the supply of safe
alternatives. I just read the 2015 annual report, and
again the experience that I'm seeing from the statements in that report, that
New Zealand stock outages are among the fewest in the world, particularly in
the developed markets.
Finally, it's been argued that
sole-supply creates a health cost to some patients who cannot tolerate the chosen brand in a sole-supply
situation. When these claims have been made, they've been examined carefully,
but with considerable skepticism. I
once experienced such a complaint when the brand was, in fact, the exact same
product made on the exact same line with the only change being the label
on it and the box that it came in. So, we went from one brand to a new brand, there was exactly the same pharmaceutical,
and yet we got, received complaints that patients couldn't tolerate
this. So, a degree of skepticism is
warranted. You need to understand that, to gain regulatory approval of an
off-patent pharmaceutical, you have to show scientifically that it is
the same as the originator, where «same» is defined in terms of blood levels of the active substance achieved
within the body at the same rate of uptake and removal. This is
actually a pretty high bar to meet.
However, there can be exceptions.
People may react differently to the excipient used in the different products. And so, when there is
no alternative chemical for treating the same condition, then it has become
necessary to allow alternatives to be supplied in addition to the
winning brand, and the tender agreements allow for this. And when it's becoming
established that a significant proportion of
patients have required these alternative brands of the same substance that
has been allowed to for an ultimately... it's transitioned from a sole supply
tender to a multiproduct tender.
So, I am going to conclude. Sole
supply tendering in New Zealand has been vital to maintain an affordability of its national drug plan. While
the criticism at its introduction was harsh and loud, most fears did not materialize,
and those that did manifest have been inherently manageable.
I want to finish by stressing two points. Providing the
flexibility to use appropriate instruments to achieve the Government's
objective was key to enabling Pharmac managers and its board of directors to be
successful. I think it's important to maintain flexibility in policy
prescription. In my view, the question to focus on when considering legislation
like Bill 81 is what is the opportunity cost of paying more than you need to
for off-patent pharmaceuticals. In New Zealand's case, it was always the
ability to fund an innovative pharmaceutical, and thus, the health gains lost
as a consequence.
Le
Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup, M. Brougham. Et maintenant, pour une période de 11 minutes, je cède
la parole à M. le ministre, qui va débuter les échanges.
M.
Barrette : Well, Mr. Brougham, I will address
you in English. It is going to be easier for you, and I can understand you correctly. So, even if you have a
strong accent, believe me, we have a strong accent in French to. So, we
are comfortable together into that. It's not broadcast in French, so that's OK.
Well,
welcome to Québec. I don't know
if it's the first time for you being here. Is it your first?
M.
Brougham (Matthew) : I came in Québec City once before. Beautiful! Beautiful city!
M.
Barrette : Beautiful city. It's quite interesting for us for you being
here, and address you in that matter. In
Québec, we have a long and significant experience into tendering, and group
purchasing outside medication. This is most probably the first time that we are engaging in that direction, and
during those hearings, that took place during the past two weeks, we've heard a lot of criticism of your
model and the likes across the world. And one of the main criticism
comes from the fact that, in other people's eyes, it is suggested... And you've
addressed that, but I would like you to go into greater details, it is suggested many times that, in your model, often,
if not frequently, there are breaks in the chain of supply, and the quality of the medication is, let's say,
fluctuating. There is no... or there might be a problem with stability.
Not stability of the medication itself, but
of the quality level over time. What's your experience in that matter in terms
of having stability, in terms of
quality, product quality over time and availability? You're probably saying
that, in your model in New Zealand,
you may have better prices, and nobody disagreed with that, in the past two
weeks, everybody agreed on that, I would say, but they are always saying
that beware because their model is a dangerous model.
• (17 h 30) •
M.
Brougham (Matthew) : Yes, I am fundamentally
surprised by that sort of statement, primarily because, as I mentioned and to this day, you will see in Pharmac's annual report
and annual reviews statements along the lines that out-of-stock situations in New Zealand are relatively few, right, so they're
aren't that many of them. When I was last in the chair as the CEO, I think we had four
out-of-stocks in one year. Right? You're having dozens of out-of-stocks here
in North America. So, the actual availability, I don't believe that's an issue.
Now, the whole quality issue is again
something that we have tended to address repeatedly in New Zealand with respect to the population
of New Zealand, but pointing out that these drugs have to meet FDA standards.
We're not bringing in drugs that don't meet regulatory approvals that
are considered standard approvals around the world. Now, I know that there are sometimes criticism of those... and
the criticism of some manufacturers managing to meet those standards when, in fact, their products don't meet those
standards. But quite frankly, you know, that's a separate issue that will
fix any supply chain in the world, not specifically New
Zealand.
M.
Barrette : From your experience, this is not a
significant issue for your population?
M.
Brougham (Matthew) : No issue at all.
M. Barrette : OK. It's often said that your
tendering process or your buying process will inevitably reduce the number of drugs made
available to the public. Is that a reality or not? Because you said yourself
that you will say yes or no when no, it's no, and isn't there some form
of limitation of access to certain drugs? No brand names, but generics.
M. Brougham (Matthew) : Yes. It's impossible to deny that when
you restrict the budget, when you reduce the budget available for pharmaceuticals, that
you end up with reduced choice of pharmaceuticals to patients. So, there are fewer drugs funded in New Zealand, fewer new pharmaceuticals
funded in New Zealand than there are in some other jurisdictions. But that's a tradeoff that has to be made, you know. You
want some degree of affordability around your drug plan in order to be able to supply other services
in the healthcare system.
Right? So you make some of
these tradeoffs. But again,
just to refer to the most recent data, I saw just this afternoon, looking at
cancer drugs and comparing New Zealand with Australia, there was an
overlap of... you know, 90 % of the drugs were the same. There was a
difference where Australia funded, I think,
22 drugs that New Zealand didn't, and New Zealand funded 13 drugs that
Australia didn't. You know, the
conclusion of that analysis was the difference in outcomes for patients was
negligible as a consequence of those differences
in access to pharmaceuticals. I mean, I'm not going to argue that somehow
mysteriously you can reduce prices, you can reduce the drug budget, and have access to every drug that's
available to humankind.
M. Barrette : But would it be fair to say that, at
the end of the day, you might have a number of suppliers that are in a smaller number, but in terms of classes, categories,
you have the same as everybody else?
M. Brougham (Matthew) : Well, I would... So I would say OK,
some drugs are not available. I would say virtually all
the suppliers are present in New Zealand, the same suppliers you see here. And
actual fact, the prediction around tendering by the industry was that the
number of suppliers would diminish over time, and their argument was that would mean that in the longer term you wouldn't
have the level competition that you'd expect, and so therefore prices would start to go up again. That never eventuated,
and, in fact, we have more off-patent supplies and pharmaceuticals in New Zealand today than you did prior to tender, far more.
M.
Barrette : Time is really running too fast, and I want to address as
many subjects as possible. When you go to tender, you said — and
that was quite interesting to me because we have done that in other fields, and
before I have done that personally — you went from going to a small number,
even one molecule, a drug at a time, now are you saying that you've moved to a
much greater number of drugs to be tendered at the same time. What's your
largest number? A bracket. I'm not looking at the specifics, I want just a
bracket.
M. Brougham (Matthew) : How many pharmaceuticals?
M. Barrette : Yes.
M. Brougham (Matthew) : Well, it numbers in the hundreds, right? So, the way the tender
operates in New Zealand, it's by presentation.
So, you tender absolutely every presentation that you want. So, the chemical,
the presentation, the strength, the...
yes, the way it comes, whether its IV, or capsules, or tablets, you tender off
everyone of those things separately. So, you end up with a...
M. Barrette : ...to tender for hundreds of pharmaceuticals at the same time?
M. Brougham (Matthew) : Yes. So, for example...
M. Barrette : And your cycle is always a three-year span?
M.
Brougham (Matthew) : Yes. So there's an annual tender, and the tender is... The bid is, if
it's accepted, you... the
supply period is for three years. So, essentially, there's a rolling tender
every year. It's set up so that those three-year periods roll through time. So, if you like, a third of the schedule or
the plan is tendered one year, then the other third the next, and the
other third the final year, and then it's repeated.
M. Barrette : Are there specific pharmaceuticals for which you didn't go to
tender? And why?
M.
Brougham (Matthew) : Generally speaking, it's the other way around. You tend to list
everything in the tender, but you don't necessarily get a bid for everything, right? And there are
some pharmaceuticals that remain in supply that...
M. Barrette : ...no bidders.
M.
Brougham (Matthew) : Essentially, but they might be an incumbent who is continued. You know, there's just not the competition.
M. Barrette : I have just over a minute left. One of the issues, I would say,
that we are facing in this province — and I understand, and I want you to give us an
insight from your part — one of the issues that we're facing is that we have what is
called a manufacturing industry here, and they are saying, many people are
saying that, in New Zealand, you
don't have any, and that's the reason why you're having the possibility or no obstacles to go to
tender. Is it really the case?
M.
Brougham (Matthew) : Well, New Zealand, when it went to tender, I think, had three... what
you would call three off-patent manufacturers in the
country, one of which was truly a manufacturer who'd manufacture from raw ingredients, the other two, essentially, were rate
packaging, if you like, from... externally. They all remain in the
sector. I think it's a reasonable point to
make that the context is a little different and that, as a group of elected
representatives, you may...
M. Barrette : 10
seconds. Did they survive?
M. Brougham (Matthew) : Say that again.
M. Barrette : Did
they survive, those three companies?
M. Brougham (Matthew) : In various forms, yes. In effect, the main one, that was actually a
manufacturer from raw ingredients, they've
essentially prospered, and not because they were being effective in the New Zealand
tender, but they've actually been a very effective supplier
internationally. They've really focused their attention
internationally.
Le
Président (M. Tanguay) : Thank you very much.
We will be now continuing our conversation with our colleague from Rosemont for a period of time of 10 min
30 s.
M. Lisée : Merci,
M. le Président. M. Brougham, thank you very much for
being here. I hope you'll understand my accent as well.
So
there are a few particularities in your model. For instance, you say: One of
the keys is that there's a cap, there's a set budget that cannot... you cannot excede that
budget, and that the growth of this budget has been of about 3% a year, whereas elsewhere it was more like double digits.
That means that, in fact, it creates tension, as you say, in the
tendering process because people know that you won't go beyond this budget, but
does it mean that the number of different molecules available to patients is
lower than elsewhere?
M.
Brougham (Matthew) : Yes, I think that's a fair observation, that if you restrict the budget
to some extent, you are able to purchase fewer active
molecules, fewer new active molecules. I don't think anybody would dispute
that.
M. Lisée : So, what is the impact on the health of the people?
• (17 h 40) •
M.
Brougham (Matthew) : That's an interesting question and one
that's extremely difficult to answer with any scientific validity. But I have to assure you the
sky has not fallen in on New Zealander's health. That's all looked after
and received... Like I said, in the case of
cancer, care that it is virtually indistinguishable from care in Australia, you
know, in terms... in the New Zealand context, one of the most relevant
comparatives
M.
Lisée : A
number of drugs available in Australia are not available in New Zealand because
they don't fit in the budget, and still the health
outcome is the same?
M.
Brougham (Matthew) : Very similar, yes. That's because, if you look at new pharmaceuticals,
the benefits are often
quite small, particularly compared with the alternatives that they might be
replacing. To get gains in health from new pharmaceuticals is actually a
difficult task.
M. Lisée : You were saying that, in New Zealand, there
was only one real manufacturer. So, basically, the concern to have more than one supplier for each drug, for you, it's the
world supply that caters for that, so you don't need to have a couple of suppliers in New Zealand. But has
it happened that suppliers becoming... would tend higher and higher
every year because nobody else would come in the market?
M.
Brougham (Matthew) : Look, I don't know the answer absolutely, specifically to that
question, but my sense of it would be that that has not
happened. And the reason that doesn't happen is because new entrants can come
into the market place. So, you have
supplies, you have generic supplies in New Zealand that do very well because
they are very... to the situation. So, you have some that are bigger than others, but you have a huge
range, array of supplies of off-patent pharmaceuticals.
M.
Lisée :
Well, you are in Oceania, near Asia, and people say: Well, listen, if we open
to tenders from health everywhere, we're going to have drugs from India and from China, and
quality control will be lacking, and we're going to have trouble with
quality. Have you had that?
M. Brougham (Matthew) : No. I mean, there are some issues with some supplies in India. I
don't think you are going to... You know,
India itself even acknowledges that it has some issues with some suppliers. But
there are a lot of very solid, good supplies that come from India, and,
in fact, there are a lot of branded manufacturers in Europe and North America who use Chinese and Indian
facilities for manufacturing. So, you know, you might say you have a
North American product here, but you have to look very carefully at whether, in
fact, it hasn't been manufactured in India.
M. Lisée : How long is your patent-protection period?
M. Brougham (Matthew) : Slightly shorter than elsewhere.
M. Lisée : Which is?
M. Brougham (Matthew) : I think you have 20 years here, I think, it's 15.
M.
Lisée :
No, here, it's about 10 years. We used to have 15, now we have 10. How long is
it in New Zealand?
M. Brougham (Matthew) : 15, I believe.
M. Lisée : 15.
M. Brougham (Matthew) : Yes.
M. Lisée : Some people said that, given the sole-supplier
system, one of the ways for generic drugs to enter the market earlier is for generic manufacturers suing
on the patent and successfully getting the right to go generic earlier
than would have been the case. And they
would only do that if they have a good expectation of being the manufacturer of
the generic version and if they feel that
their chance of being the sole supplier is less, they will sue less, and so the
generic version will come later, and then you'll lose money. What do you say to
that?
M.
Brougham (Matthew) : It's a very important point. The generic manufacturers do,
if you like, ensure that the patent laws are not busted to some extend. And, in North America, you have a tradition of
doing that and being done fairly well. In New Zealand, we didn't have a
particularly strong tradition of that happening, and so there have been cases
where New Zealand, including Pharmac, has
tried to take on that role on essentially help generic pharmaceutical companies
make sure that patents are not being
extended illegally. So, there is the ability to do it that way, you don't have
to rely solely on the generic manufacturer to do that. But, for sure, it
tends to be an issue. You do need to take account of that.
There are other tools that are used to essentially counter that, if you like, and that has been in New Zealand something that we call the Alternative Commercial
Proposal. So, at the point of which you may issue a tender, you issue a document that says: Here is what we're
thinking about doing in terms of tendering. At the time that you're getting feed back on that document, you can also receive Alternative Commercial Proposals to essentially prevent the drug from
being issued in the tender. This is a means by which the competition in the
marketplace can be enhanced before the patent expires. And a lot of...
manufacturers have taken advantage of that approach.
M. Lisée : You say that you used to have, as we do, bonuses being given to
pharmacists from generic manufacturers. And
of course, the tender process just took that away since... And here it's there,
it's 15 %
capped, as we speak, and the pharmacists say: Well,
it's part of our bread and butter. If you take it away, you have to replace it
by something else. You took it away. Did you replace it?
M.
Brougham (Matthew) : Not immediately, and so that, you know, that would definitely hit in
the pocket, no doubt
about that. But over time there have been various mechanisms put in place to
essentially make the revenue streams more predictable and less subject
to fluctuations that are caused by those sorts of events. Well, so, their fees
were initially a percentage of the price of the pharmaceutical that they were
essentially distributing or dispensing, and that subsequently moved from being a percentage to being more of a fixed fee.
So, there are... you know, and sure, essentially, if you do make a bunch of savings by virtue of the...
you know, the revenue streams that they are receiving currently, then
you do have to give consideration to what...
you know how that's compensated for. So, some of the savings you get
through the tendering process, you might
want to reinvest in that way. That is certainly what happened in New Zealand to
some extent.
M.
Lisée : We're talking about tender for manufacturing. Do you
tender for distribution as well or is distribution out
of the tender process?
M.
Brougham (Matthew) : No, distribution has been left out of the tendering process to date.
It's being flirted with occasionally, particularly at
retail pharmacy level, but it's never been proceeded with.
M. Lisée :
What is the impediment?
M. Brougham (Matthew) : Well, it's political, essentially. Pharmacists are well organized
and have good relationships with politicians. And politicians have been
unwilling to go there and to essentially reduce, you know, reduce the number of
essentially pharmacists that exist in the country.
M. Lisée :
Here, the argument is logistics. Listen, we have, say, three distributors that
cater to each 400 pharmacists. If we
would, in turn, get the tender, we would have to hire trucks to go from 400 to
1 200, and then back to 400. It's just not doable. Is that not a
good argument?
M. Brougham (Matthew) : It's a reasonable argument, and I'm not going to dispute that, but
one of the questions, I think, all societies
ask themselves about this sort of distribution model is: Are we oversupplied
with pharmacists and with
dispensaries, essentially? Now, you know... So, there's a point to which you
might want to address that question as well,
but, you know, it's... I'm not saying these things are easy to address by any
means, they have multiple repercussions, and, you know, there are
people's livelihoods affected that have to be...
M. Lisée : ...recommend
to go in one sweep tender both manufacturing and distribution.
M.
Brougham (Matthew) : Well, there are always pros and cons to taking any kind of action like that.
So, I mean, you may find that the benefits of that
outweigh the costs.
M. Lisée :
Merci.
Le
Président (M. Tanguay) : Thank you very much. We will now continue
with our colleague from Lévis for seven minutes.
M.
Paradis (Lévis) : Merci, M.
le Président. Merci, M. Brougham. La Nouvelle-Zélande est un marché
différent de celui du Québec, vous l'avez
dit. Combien y a-t-il chez vous, pour information, de pharmacies avec
lesquelles vous... Sur le territoire, ici, on parle de 1 800 pharmacies
communautaires, quel est le marché de la pharmacie en Nouvelle-Zélande? Combien d'établissements y a-t-il?
• (17 h 50) •
M. Brougham (Matthew) : When I left the country four and a half years ago, there were about
a thousand pharmacies for 4,5 million
people. I think that's roughly similar. And again, when you look at Ontario and
you look at British Columbia, I think you see similar sorts of ratios of
pharmacies to people.
M. Paradis
(Lévis) : Vous avez expliqué
les différences, vous avez adressé les problématiques dont on a parlé concernant les principales critiques adressées au
modèle néo-zélandais. La rupture de médicaments, vous l'avez abordée, conséquences pour la santé des patients. Le
contexte de la Nouvelle-Zélande et le contexte du Québec, en raison de
son territoire, sa configuration, la
présence d'un marché important, la présence d'une industrie, ici,
manufacturière également font aussi
une différence. Il est évident que, donc, c'est un contexte différent ici par
rapport à chez vous. Néanmoins, vous nous
dites que, selon vous, le principe de l'appel d'offres est possible, il est
applicable, il peut donner de bons résultats. Quelles précautions
devrait-on prendre par rapport à votre modèle si un modèle d'appel d'offres
devait être mis en place au Québec?
M. Brougham (Matthew) : Well, personally, I don't think
there's an issue for off-patent pharmaceuticals. I
think you've got a sector that could cope
with tendering in that area. And, sure, there will be some reductions in revenues,
there will be some consequences in terms of profitability, but I believe that,
ultimately, that will lead to the exit, and that they may even lead to their
strength internationally, so...
But, if you think in terms of a
Pharmac-like approach more broadly across Québec more than just a tendering approach, then you know, clearly, because you have
an innovative pharmaceutical sector here as well that you want to...
that you, even in the past, wanted to
support, you've got a decision to make, you have to have some idea in your mind
about how much you want to support that
versus how much additional benefits you want to get out of your drug plan. So,
I mean, you will know, as well as I
do, that these things are always trade-offs. There's no exactly right way to go
versus the other, and ultimately, you have to find the balance that
works for Québec.
M. Paradis
(Lévis) : J'aborderai une
autre question, une autre critique qui a été émise aujourd'hui même par
les manufacturiers, qui disent que l'expérience
de chez vous, l'expérience néo-zélandaise — et ça a été quelque peu abordé par
les collègues — a
provoqué une problématique, c'est-à-dire que beaucoup de médicaments y ont été
commercialisés beaucoup plus tard. Et là on
parle, pour certains médicaments, de deux ans, de quatre ans plus tard en
raison du principe d'appel d'offres. Est-ce que vous confirmez ceci?
Est-ce que ça se vit encore?
M. Brougham (Matthew) : I wouldn't say that it's because of
the tendering process. So then, I don't believe the tendering process around off-patent
pharmaceuticals has that impact. If anything, it does the opposite, it releases
funds that can be reinvested. So, actually,
you know, comparing one situation with another — tendering,
without tendering — you actually have the ability to more quickly fund new
pharmaceuticals as they come through the door.
I
think what we are talking about is more generally the limitation on the budget
that is set for Pharmac that, if that is not... You know, that has grown at a relatively
slow rate. So, it does actually mean that one has to be more careful on
what is and isn't funded, and so there can
be delays in access to newer medicines because of that. In addition, there is
potentially a likelihood that access will be
granted to a smaller subset of the patient population that's likely to benefit.
So, access may be even more
restricted than, say, in a country with a much greater rate of growth in the
budget. Having said all of that, you know,
it's not clear-cut that simply the growth rate in the budget will allow you to
buy more because unless you've been very
careful with what you pay, you might actually end up paying so much more that
you end up being able to buy less, even though your budget is growing at
a bigger rate, a faster rate.
M. Paradis (Lévis) : Merci, M.
Brougham.
Le
Président (M. Tanguay) : Thank you very
much. Now, we will
continue with our colleague from Mercier for a period of
3 min 30 s.
M. Khadir : So, really welcome, Mr.
Brougham. I'll try to ask my questions in English, you won't need that. Actually, you might know, as we have met before,
that the experience of New Zealand was determinant in the choice by our party to formulate a proposal since more than 10
years now. I was at your place in March 2006 to propose to the actual Prime Minister to go along this tendering process because an
observator of the industry in Québec wrote about
the New Zealand experience in a book that really had a
great impact in the beginning of 2000s about the situation of the
pharmaceutical industry. I'm really glad to hear that, after 20 years of
experience, a lot of the genuine criticisms or worries that were raised by people involved were managed or just didn't
materialize. But you also stressed that part of the success is explained by the fact that Pharmac was
at an arm's length from the legislative branch, from the Government, and
I understand that there are also provisions in the law entouring Pharmac
concerning lobbyism.
Could
you give me some explanations about lobbyism? And, second, I want to stress
again the fact... or explain us what do you do with the
distributors because it was not clear.
M. Brougham (Matthew) : So, essentially, during the tender process, once
a bid is being lodged in, lobbying is not permitted, so you are not allowed to come and
talk to Pharmac about anything that you put in your bid. That would
actually mean that your bid would have to be withdrawn, so it is just simply
not possible to talk about it once it is in the
process. And, more generally... well, not so much provisions, but there is
uprighting procedures that essentially try and avoid lobbying when
proposals are on the table in front of various committees and boards, etc.
In
terms of distribution, so Pharmac is essentially contracting for the supply
from manufacturers and suppliers of pharmaceuticals.
Those manufacturers and suppliers can chose to distribute the products via any
distribution route they want. They can use
the wholesale retail distribution network that is... You know, various
companies have set up in the country
or, indeed, they could set up their own distribution network if they really
wanted to. So, those two things are considered completely separate.
M.
Khadir : Is there any danger if, at the same
time, the government here, in Québec, puts tendering process to suppliers, but also
a tendering process to distributors? Is there any danger you foresee? Is it
preferable to retain your structure, model or you envisage that there could be
a tendering to distributors?
M.
Brougham (Matthew) : I would see the two prices as separate and different, right? So, they
are not something that
you would necessarily want to draw together at exactly the same time. Indeed, I
do not think you could even construct an
instrument that would, say, do both of them at the same time. I would see them
as pretty much separate approaches to dealing with various issues.
I
have not examined the consequences in enough detail to really be able to
express an opinion as whether or not that is... whether it is risky to do them roughly at
the same time. I don't know what potential unforeseen consequences there
might be, so I find it hard to really give advice on that.
• (18 heures) •
M.
Khadir : You said that the access to the drugs
that are reimbursable by the New Zealand drug plan has been impacted, has been reduced,
controlled, but does this mean that somebody who is not under the government plan... Because not everybody is ensured by the
government in New Zealand. Am I right? Is everybody ensured in New Zealand by
the same drug plan?
M. Brougham (Matthew) : Everyone, every New Zealander who is an eligible New Zealander is
covered by the Pharmac plan.
M. Khadir : OK. So, the drug plan is universal.
M. Brougham (Matthew) : Yes.
M. Khadir : It's not just a part of the population.
M. Brougham (Matthew) : Correct.
M.
Khadir :
OK. I see. So, that limits...
So the actual number of drugs that are on the New Zealand drug plan are the exact drugs that
are available? In other words, somebody cannot pay a drug by its pocket that is
not on the formulary?
M. Brougham (Matthew) : They can. They're allowed to privately pitch... Prescribers in
New Zealand can prescribe anything they like, whether it's on the plan or
not.
M. Khadir : ...on the formulary?
M. Brougham (Matthew) : Yes, correct.
M. Khadir : OK.
Le
Président (M. Tanguay) : Thank you very much. So, thank you very much, Mr. Brougham, for your presence
here today at the Quebec
National Assembly.
Compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses
travaux jusqu'à demain, après les affaires courantes. Merci.
(Fin de la séance à 18 h 1)